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(Onze heures trente minutes)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration commence ses travaux.
Nous sommes réunis ce matin afin de procéder à
l'étude détaillée de trois projets de loi: le projet de
loi 80, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de
contrer le détournement de la taxe par des intermédiaires; le
projet de loi 81, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants
afin de contrer le détournement de la taxe par des
intermédiaires, et le projet de loi 79, Loi modifiant la Loi sur le
ministère du Revenu afin de contrer le détournement, par des
intermédiaires, de taxes perçues ou d'impôts déduits
à la source.
Selon l'avis du leader du gouvernement, nous procéderons dans
l'ordre suivant: d'abord, le projet de loi 80, Loi modifiant la Loi concernant
l'impôt sur le tabac afin de contrer le détournement de la taxe
par des intermédiaires; suivront le projet de loi 81 et le projet de loi
79. Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a un
remplacement pour cette séance. M. Desbiens (Dubuc) remplace M. Dufour
(Jonquière). C'est tout.
Projet de loi 80
Le Président (M. Lemieux): Merci. Nous procéderons
d'abord à l'étude du projet de loi 80. J'appelle le projet de loi
80, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de contrer
le détournement de la taxe par des intermédiaires. M. le
ministre, est-ce que vous avez des remarques préliminaires?
M. Gratton: Non, M. le Président, étant
donné qu'on a procédé à l'étude et à
l'adoption du principe à l'unanimité hier soir, je ne pense pas
avoir d'autres remarques d'ordre préliminaire. On tâchera,
à l'étude article par article, de répandre aux questions
des membres de la commission et à expliquer les dispositions qui
apparaissent dans le projet de loi 80.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre. Est-ce
que d'autres membres de cette commission ont des remarques
préliminaires?
M. Desbiens: M. le Président, je crois que nous
discuterons plutôt de certaines questions que nous nous sommes
posées hier, lors du débat auquel fait référence le
ministre, à l'Assemblée nationale, concernant certains points
précis du projet de loi 80. J'imagine que le ministre, en cours de
discussion, sera en mesure de répondre aux interrogations de
l'Opposition. Je pense qu'on pourrait procéder immédiatement
à l'étude du projet de loi article par article.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Dubuc. Considérant qu'aucun des membres de cette
commission n'a de remarques préliminaires, j'appelle l'article 1 du
projet de loi 80. M. le ministre du Revenu.
Interprétation
M. Gratton: M. le Président, la modification
proposée au paragraphe 11 de l'article 2 est une modification technique
qui a pour effet de retrancher de la définition du mot "vente" les mots
"le transport, le troc et aussi un cadeau fait par un vendeur". Cette
modification est correlative à l'article 9.1 de la loi, lequel
prévoit que le tabac consommé par une personne aux frais d'une
autre est imposable. Par ailleurs, le transport de tabac ne peut constituer une
vente et la loi n'a jamais été appliquée ainsi. Donc, on
clarifie la définition du mot "vente", M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: L'article 1 n'a pas... C'est un remplacement,
finalement, du 11 de l'article de la loi.
M. Gratton: À l'origine, le paragraphe 11 de l'article 2
définissait le mot "vente" aux seules fins de la loi: "vente" signifie
le contrat ordinaire de vente et comprend l'échange, le transport, le
troc et aussi un cadeau fait par un vendeur. On remplace cet article pour que
le mot "vente" soit défini seulement ainsi: "signifie le contrat
ordinaire de vente et comprend l'échange".
M. Desbiens: J'aurais espéré quand
même que... Il retranche une partie. Cela va pour l'article 1.
Adopté. Mais il y a une chose sur laquelle j'aurais espéré
que le ministre nous donne plus de précisions, à moins que mon
collègue n'ait des questions sur l'article 1.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Rapidement, M. le ministre. Le projet de
loi cherche à éviter, à l'avenir, les
détournements. Est-ce que cette modification de terme au 11° sera
suffisamment claire, lorsqu'on explicite "vente" et "échange", pour
couvrir tous les angles par rapport au détournement actuel?
M. Gratton: Effectivement, dans le cas du tabac, il s'agit de
grossistes qui vendent à des détaillants. Donc, un contrat de
vente tel que défini, un contrat ordinaire de vente, va couvrir tous les
aspects des transactions qui peuvent être faites. Tout ce qu'on veut,
c'est faire en sorte que ce qui est taxable puisse être taxé et
imposé. La définition telle quelle couvrira cela sans pour autant
que le transport du tabac soit considéré comme faisant partie de
la vente.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela va, M. le
député de Bertrand?
M. Parent (Bertrand): Oui.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 1...
Est-ce qu'il y a d'autres membres qui désirent intervenir? Est-ce que
l'article 1 est adopté?
M. Gratton: L'article 1 est adopté, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): L'article 1 est
adopté.
M. Desbiens: J'aimerais...
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 2 du projet
de loi 80.
Certificat d'enregistrement
M. Desbiens: M. le Président, avant que le ministre
n'intervienne, j'aurais peut-être pensé ou espéré
que le ministre, sans avoir de remarques préliminaires, nous
réponde immédiatement. Si j'ai bien compris son intervention,
hier soir, c'est bien pour contrecarrer un développement de la
contrebande des tabacs aux frontières, c'est avant tout pour cela que ce
projet de loi est devant nous.
M. Gratton: Effectivement, c'est pour faire échec à
ceux qui, maintenant et depuis un bon bout de temps que le prix des cigarettes
et du tabac en général est beaucoup plus élevé au
Québec qu'ailleurs... Il se trouve des gens qui retrouvent un avantage
pécuniaire à se procurer des cigarettes à
l'extérieur du Québec ou même à l'intérieur
du Québec sans que la taxe ne soit remise au ministère du Revenu.
En d'autres termes, un grossiste ou un vendeur, quel qu'il soit - je le disais
hier, on en connaît, on connatt même certaines personnes qui en
font une pratique courante - va vendre à des détaillants du tabac
à un prix équivalant au prix incluant la taxe, mais ne fait pas
la remise au ministère de cette taxe. La notion - c'est là qu'on
retrouve l'essentiel du projet de loi 80, è l'article 2 -c'est qu'on
exige maintenant que le vendeur et la personne qui livrent du tabac au
Québec soient titulaires d'un certificat d'enregistrement. On verra
tantôt qu'on créera l'obligation pour le vendeur au détail
de s'assurer, lorsqu'il achète le tabac d'un grossiste ou d'un
distributeur quelconque, que ce grossiste ou ce distributeur soit
détenteur d'un certificat du ministère, sans quoi il pourra
être passible de se voir exiger te montant de la taxe que le grossiste
aurait normalement dû verser au ministère.
M. Desbiens: Hier soir, le ministre disait - là,
justement, il vient de le dire -que ces gens sont connus et que...
M. Gratton: II y a des gens qu'on connatt.
M. Desbiens: C'est du service cela. La majeure partie de ce qui
est inclus au projet de loi 80 existait déjà dans la
réglementation, ce qui n'était pas suffisant pour faire... Pas
cette partie...
M. Gratton: Non, pas cette partie-là. La partie où
le vendeur au détail devient passible... D'abord, on lui crée
l'obligation de s'assurer que la taxe a été payée par le
biais d'une vérification auprès du grossiste si ce dernier est
détenteur d'un certificat. On n'avait aucune façon d'exiger d'un
vendeur au détail le paiement de la taxe. On va pouvoir maintenant le
faire avec le projet de loi en lui permettant toutefois de vérifier,
avant de compléter son achat, qu'il achète d'un grossiste ou d'un
distributeur qui est certifié par le ministère.
M. Desbiens: Est-ce que ce projet de loi et les trois autres
qu'on va étudier et qui arrivent à ce moment-ci correspondent
è une augmentation de cette contrebande?
M. Gratton: Oui. L'augmentation de la contrebande est survenue au
moment où l'augmentation du prix a fait que la différence de prix
entre le tabac qu'on
achète au Québec et celui d'ailleurs a augmenté. Je
l'ai dit hier soir: Le projet de loi en question, outre le fait que les trois
projets de loi étaient réunis dans un seul, était
déjà prêt au moment de notre arrivée au
ministère. Tant pour le carburant que pour le tabac, cette
différence de prix existait et on a vu à plusieurs reprises des
gens faire la vente illégale du tabac, notamment par exemple dans la
région de l'Outaouais où on connaît effectivement les gens
qui font ce commerce illégal.
M. Desbiens: Au moment du budget, le ministre des Finances a fait
la prévision des entrées de taxe sur le tabac, le nouveau
ministre des Finances et chaque ministre des Finances chaque année, bien
sûr. Est-ce que les prévisions qui ont été faites...
Il y en avait eu par l'équipe de fonctionnaires du ministère des
Finances à l'automne, en septembre, en octobre; on en a
déjà parlé abondamment. Est-ce que ces prévisions
s'avèrent exactes? Est-ce qu'il y a une augmentation des rentrées
actuellement à la suite de l'augmentation de février ou est-ce
qu'il y a eu de nouvelles études récentes de
prévision?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre, avant de
répondre j'aimerais faire simplement une petite mise au point. M. le
député de Dubuc, je remarque que M. le député de
Jonquière est ici. Or, vous aviez fait état, je crois, au tout
début de cette séance, que vous remplaciez le
député de Jonquière. Alors, j'imagine que vous remplacez
le député de Lévis...
M. Desbiens: J'attendais que le député de
Jonquière intervienne pour le faire.
Le Président (M. Lemieux): ...afin que vous puissiez
intervenir selon les règles de l'art et selon les règles de
procédure surtout, M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: C'est que M. le député de
Jonquière avait une autre commission. Il avait dit tantôt qu'il
n'était pas encore fixé sur la commission à laquelle il
devait aller, alors on va...
Le Président (M. Lemieux): Vous remplacez le
député de Lévis?
M. Desbiens: M. le député de Lévis est aussi
pris dans une autre commission, alors on peut le remplacer. Je sais que cela va
faire beaucoup de peine au ministre de voir que le député de
Lévis ne pourra pas l'entretenir de ses sujets
préférés.
Le Président (M. Lemieux): Remarquez, M. le
député de Dubuc, que vous pouvez quand même faire partie de
cette commission en vertu de l'article 132, mais vous ne pourriez avoir le
droit de faire des motions ni de voter. Mais est-ce qu'il y a consentement?
M. Gratton: Consentement.
Le Président (M. Lemieux): Alors, il y a consentement.
Vous pouvez continuer, M. le député de Dubuc.
M. Desbiens; Ma question était posée.
M. Gratton: Malheureusement, moi, je n'ai pas les données
en main. C'est au ministre des Finances qu'il faudrait peut-être poser la
question puisque les prévisions des entrées ou les
prévisions budgétaires qu'il avait pu faire sont siennes et la
constatation des effets, par exemple, de l'augmentation du prix du tabac ou de
la taxe sur le tabac de février est quand même assez
récente. Je doute fort qu'on dispose au ministère de chiffres en
ce sens. Donc, je ne suis malheureusement pas en mesure de répondre
è la question de façon très précise, sauf pour dire
qu'une asymétrie sommaire, qui me semble minimale puisqu'elle
découle des cas qu'on a pu identifier, nous porte à croire que le
manque à gagner que vise à contrer le projet de loi 80 est
d'environ 5 000 000 $ annuellement.
M. Desbiens: Pas plus que cela.
M. Gratton: C'est le minimum, comme je le dis. Évidemment,
avec une loi qui a plus de dents, ce qui sera le cas, avec de meilleurs moyens
de responsabiliser les vendeurs au détail, peut-être qu'on
découvrira que c'est beaucoup plus que ça. Au moment où on
se parle, l'évaluation est d'environ 5 000 000 $.
M. Desbiens: Je pense que vous voyez où je veux en venir,
ce n'est pas une cachette: on a haussé certaines taxes et, quand des
taxes finissent par être très élevées, le rendement
peut en devenir régressif. En même temps, on sait que la taxe sur
le tabac a peut-être incité un certain nombre de citoyens et de
citoyennes à diminuer ou à cesser de fumer, mais cela peut aussi
avoir changé les habitudes d'achat dans certains cas et cela peut
inciter... Quand il y a un bénéfice à faire quelque part,
il se trouve toujours quelqu'un pour essayer d'en profiter et cela peut inciter
certains individus à s'adonner au commerce illicite du tabac. C'est pour
cela que le taux de la taxe étant ce qu'il est maintenant sur le tabac,
sur les cigarettes... C'est 1,88 $ le paquet, c'est cela? (11 h 45)
M. Gratton: Je ne le sais pas, je ne fume pas.
M. Desbiens: Cela peut donc avoir eu pour effet d'augmenter de
façon importante la contrebande. La question que je me posais è
ce moment-là, c'est si cela rapporte peu ou presque pas plus que cela ne
rapportait avec 0,30 $ de moins le paquet, qu'est-ce que cela donne
d'augmenter? Au lieu d'adopter une loi qui ait plus de dents, ne serait-il pas
mieux de diminuer le taux de la taxe pour décourager la contrebande?
M. Gratton: M. le Président, je conviens avec le
député de Dubuc - je l'ai dit tantôt d'ailleurs -
qu'effectivement le phénomène de la fraude et des ventes
illégales découle d'un bénéfice que peuvent
réaliser certaines personnes et, en l'occurrence, on peut
réaliser un bénéfice quand les circonstances sont telles
qu'on paie plus cher à cause des taxes. Ici, au Québec, c'est le
cas du carburant et du tabac.
Quand le député se pose la question, à savoir si
c'est plus avantageux pour le Trésor public d'augmenter les taxes et de
voir ce phénomène s'accrottre ou de ne pas augmenter les taxes,
c'est une question à laquelle le ministre des Finances doit apporter des
réponses à chaque discours sur le budget qu'il prononcée.
À titre de ministre du Revenu, le député de Dubuc en
conviendra, il ne m'appartient pas de faire les politiques fiscales. Il
m'appartient simplement d'agir en fonction des politiques que le ministre des
Finances établit et de percevoir les taxes qu'il édicte. Dans la
mesure où les politiques fiscales veulent qu'une certaine taxe soit
payée, par exemple, sur le tabac -c'est ce qui nous préoccupe -
et dans la mesure où je sais, à titre de ministre de Revenu,
qu'il y a de l'évasion fiscale qui se fait, ce n'est pas seulement pour
récupérer le manque à gagner du gouvernement qu'il nous
accorde la responsabilité d'intervenir, c'est aussi par
équité pour ceux qui exploitent une industrie de façon
légale. C'est pour se rendre en grande partie à des demandes des
distributeurs de tabac, des grossistes que nous proposons l'adoption du projet
de loi 80 de façon que ceux qui font affaires dans la
légalité ne souffrent pas une concurrence déloyale de la
part de ceux qui pratiquent de façon frauduleuse.
M. Desbiens: II était déjà visible, il me
semble, dans les prévisions qui ont été faites en
septembre, que les revenus générés par la taxe sur le
tabac ne seraient pas aussi importants que l'augmentation de la taxe aurait pu
le laisser croire. On a ajouté encore là-dessus - je ne sais pas
combien cela représentait au mois de février - 0,23 $ de
supplément. Il me semble que c'étaient des faits connus. Je
comprends que ce n'est pas le ministre du Revenu qui a à décider
de ces choses, il doit appliquer les décisions du ministre des Finances,
mais il reste un fait, c'est que - j'en suis convaincu - les ministres des
Finances et du Revenu se parlent sans doute, même si les
événements ont pu parfois nous laisser croire le contraire. Je
trouve que c'est quand même une loi très sévère dans
laquelle le ministre s'accorde beaucoup de pouvoirs, pouvoirs qui sont sans
doute nécessaires dans les circonstances, mais, s'il y avait un moyen
différent, évitant de faire la police, pour s'assurer de revenus
nécessaires à l'État, il me semble qu'un gouvernement
devrait choisir les moyens les moins policiers et s'efforcer de trouver
d'autres sources de financement, quand on se rend compte qu'une taxe devient
tellement élevée qu'elle ne rapportera finalement pas plus
à un niveau plus élevé qu'elle ne rapporte au point
où elle en est.
M. Gratton: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: ...cette hypothèse qu'évoque le
député de Dubuc, on n'est pas en mesure d'en apprécier le
fondement au moment où on se parle. Je l'ai dit, je n'ai pas les
chiffres en main. De toute façon, il ne m'appartient pas de prendre les
décisions à ce sujet-là. Si, effectivement, on constatait
finalement que les hausses de taxes rapportent moins qu'elles ne pourraient
rapporter si elles étaient moins élevées, c'est au
ministre des Finances d'en juger.
Ce que je sais, par contre, c'est que, le 5 février, j'ai
dû, à titre de ministre du Revenu, signer un arrêté
ministériel pour augmenter le prix du paquet de cigarettes de 0,23 $ et
cela, je n'aurai plus à le faire, car, dans le dernier discours sur le
budget, le ministre des Finances a mis fin à cette taxe ad valorem.
Donc, ce sont par des décisions annoncées par le ministre des
Finances qu'on connaîtra les fluctuations et l'évolution des taxes
ou des impôts sur le tabac. Au moment où on se parle, il ne s'agit
pa3 de justifier ou même d'évaluer le bien-fondé des
mesures, tant celles du gouvernement actuel que celles du gouvernement
antérieur. On a une situation de fait. La taxe de 60 % rapporte un
certain montant de revenus au gouvernement et, dans la mesure où ceux
qui agissent légalement en font la remise au ministère, il se
trouve lésé parce qu'il y a d'autres intervenants qui n'agissent
pas légalement. Le but du projet de loi est de sévir contre ceux
qui agissent illégalement, point à la ligne.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand
a demandé la parole. M. le député de Bertrand. Vous avez
terminé, M. le député de Dubuc?
M. Desbiens: Oui, pour l'instant.
Le Président (M. Lemieux): Pour l'instant. M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Essentiellement, M. le ministre, le projet
de loi 80 vise à mettre fin au détournement des fonds publics qui
se fait actuellement concernant les taxes sur le tabac.
Par rapport à ce qui existe au moment où on se parle,
c'est-à-dire les "illégaux", ceux qui vendent... Entre autres on
en a vu, à l'intérieur du Québec, qui se vantaient de
pouvoir agir de cette façon.
Vous introduisez, dans l'article 2 qu'on est à étudier
actuellement, l'obligation que le titulaire vendeur, si je comprends bien, ait
son certificat d'enregistrement qui va être délivré. De
quelle façon, actuellement, cela fonctionne-t-il par rapport à la
nouvelle introduction? Le certificat existait, mais il y en avait qui
n'allaient pas le chercher. Dans ce que vous introduisez comme contrôle,
j'aimerais connaître la différence qui va faire que les
"illégaux" ne passeront pas à côté. Comment ceux qui
veulent se jouer de la loi ne passeront-ils pas à côté?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Ce qui se produit présentement, c'est que des
gens ne sont pas détenteurs d'un certificat ou d'aucun permis du
ministère. Cela peut être des individus, mais les individus, c'est
moins grave. C'est là où c'est érigé en
système et on connaît des systèmes de ce genre-là.
Des gens qui n'ont aucune certification auprès du ministère
vendent à des détaillants, des dépanneurs, des
restaurateurs oui des tabagistes, peu importe, partout où on peut.
Comme le vendeur au détail n'a aucune obligation de s'assurer que
le tabac qu'il achète... Ce n'est pas le vendeur au détail qui
fait la remise de la taxe, c'est le grossiste ou celui de qui il
l'achète. Comme il n'a aucune obligation à l'égard de
celui de qui il l'achète, évidemment, le grossiste qui vend
à ce détaillant à un prix équivalent à celui
qui inclurait la taxe, mais qui n'en fait pas remise au ministère du
Revenu, se trouve à commettre un acte illégal.
Ce que l'on crée, c'est l'obligation pour le vendeur au
détail de s'assurer, dorénavant, que le tabac qu'il achète
provient d'un détenteur de certificat du ministère du Revenu.
Lui-même sera détenteur d'un certificat du ministère du
Revenu.
M. Parent (Bertrand): Donc, si je comprends bien, M. le ministre,
si je suis acheteur, distributeur de tabac, je dois m'assurer que celui qui va
venir me le vendre détienne lui-même son certificat dûment
autorisé par le ministère du Revenu, ce qui n'existe pas
actuellement comme tel, car l'acheteur n'est pas obligé de produire son
permis au vendeur, d'aucune façon.
M. Gratton: Dorénavant, avec le système qu'on veut
instaurer, un vendeur au détail, s'il devait acheter d'un grossiste qui
n'est pas certifié auprès du ministère, saura
automatiquement qu'il ne doit pas lui verser le montant de la taxe, sans quoi
il se verra dans l'obligation éventuelle de devoir la remettre
lui-même.
M. Parent (Bertrand): Lorsque vous mentionnez qu'il y aura des
exceptions, "...à moins qu'il n'ait conclu une entente avec le ministre
en vertu de l'article 17", est-ce qu'on pourrait nous expliquer quels sont ces
cas d'exclusion et en vertu de quoi certains seront épargnés en
vertu de l'article 17?
M. Gratton: En fait, ce qu'on dit c'est qu'aucun vendeur ne peut
acheter ni se faire livrer du tabac au Québec d'une personne qui n'est
pas titulaire du certificat. Quand on parle du vendeur, c'est le vendeur au
détail. C'est le dépanneur, c'est le tabagiste.
M. Parent (Bertrand): Je comprends, M. le ministre. Je voudrais
juste avoir l'explication des dernières lignes de 3.1. On dit
"...à moins qu'il n'ait conclu une entente avec le ministre, en vertu de
l'article 17". Quels sont ces cas qui pourront être dispensés?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Grattant II pourrait s'agir d'un détaillant qui
préférerait, pour des raisons que j'ignore, s'approvisionner
auprès d'un vendeur qui n'aurait pas ce certificat du ministère.
Quelqu'un de l'Ontario, par exemple. À ce moment-là,
lui-même, ce vendeur au détail, devrait avoir une entente avec le
ministère pour faire la remise de la taxe au ministère. En
d'autres termes, au lieu que la taxe soit payée au moment de l'achat
chez le grossiste, elle ne serait payée qu'au moment de la vente chez le
consommateur.
Le Président (M. Lemieux): Vous allez m'excuser, M. le
ministre et M. le député de Dubuc. Nous allons suspendre deux
minutes pour des considérations d'ordre parlementaire, s'il vous
plaît!
(Suspension de la séance à 11 h 58)
(Reprise à 12 h 2)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre,
s'il vous plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux
à l'article 2 du projet de loi 80. La parole était au
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): J'avais posé la question et
j'attendais la réponse concernant l'article 17. Je voulais avoir le
détail de l'article 17 qui permettait essentiellement de conclure une
entente avec le ministre pour l'exempter de ce certificat.
M. Gratton: C'est-à-dire qu'il ne s'agit pas d'exempter du
certificat. On dit au nouvel article 17 que:" Le ministre peut, afin de
faciliter la perception et la remise de l'impôt établi par la
présente loi ou de prévenir le paiement en double de cet
impôt à l'égard du même tabac, conclure avec toute
personne titulaire d'un certificat d'enregistrement les ententes écrites
qu'il juge utiles." Donc, on peut signer cette entente avec un vendeur au
détail comme avec un grossiste. C'est dans le but de permettre au
vendeur au détail de s'approvisionner ailleurs qu'au Québec ou
d'un nouveau distributeur, par exemple, qui pourrait être situé en
Ontario ou ailleurs, mais en nous assurant éventuellement que la taxe va
être perçue et remise au ministère.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Bertrand?
M. le député de Jonquière, vous avez demandé
la parole?
M. Dufour: Oui. Je regarde l'article 3. "Personne ne peut vendre
ou délivrer du tabac au Québec..." Personne ne peut vendre, je
comprends facilement ce que cela veut dire. C'est un vendeur. Celui qui le
livre?
M. Gratton: Ce n'est pas dans ce sens-là qu'il faut lire
l'article.
M. Dufour: Oui, mais en fait, quand je regarde comment c'est
libellé, c'est ce que ça dit. Je suis obligé de m'attacher
au texte et je rattache cela avec l'article 13. "Personne ne peut vendre ou
délivrer du tabac..." Cela veut dire quelqu'un qui sert
d'intermédiaire. L'intermédiaire peut être le camionneur
comme quelqu'un qui a une auto, quelqu'un qui fait la livraison.
M. Gratton: Je m'excuse. Non. Justement, quand on dit la
délivrance d'un bien, il ne s'agit pas de la livraison. Il faut entendre
par délivrance... Je n'ai pas mon dictionnaire mais la définition
du mot "délivrer" n'est pas la même que celle de livrer.
M. Dufour: M. le ministre, si je regarde l'article 13.3:
"...arrêter pour examen un véhicule..." Donc, le véhicule
fait partie de la transaction jusqu'à un certain point. En tout cas, les
honorables avocats n'auraient pas besoin de tribunaux s'ils étaient tous
comme cela. Je regarde les textes de loi. Le propre des avocats est de fouiller
dans les mots. Non, non, je ne suis pas un avocat. Dieu m'en
préserve!
M. Bélisle: Malheureusement, ce sont des mots
nécessaires.
M. Dufoun Je regarde...
Une voix: C'était interdit au début de la
colonie.
M. Gratton: Si je comprends bien, le député de
Jonquière s'interroge sur la portée du mot "délivrer".
C'est pour faire en sorte de couvrir la situation suivante: un vendeur au
détail s'approvisionne chez un distributeur de l'Ontario. Donc, il y a
acte de vente entre les deux. Mais la délivrance de cet acte de vente se
fait seulement au moment où le produit est livré au
Québec. Ce n'est pas la livraison comme telle qui fait l'objet de...
M. Dufours Oui, mais c'est là que j'essaie de lier l'article
à l'article 13.3 où un agent de la Sûreté du
Québec ou une personne autorisée peut arrêter pour examen
un véhicule lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire que du tabac
destiné à la vente pour consommation s'y trouve. Donc, la
personne prend un contrat. Vous avez un grossiste qui décide de vendre
au Québec. Je ne sais pas si l'acheteur doit s'assurer s'il a un
certificat ou non, je ne sais pas si la loi va aussi loin que ça. La
personne donne un contrat de livraison à un camionneur. Le camionneur ne
sait pas ce qu'il transporte. On lui dit: II y a de la marchandise, il faut que
tu la délivres à tel endroit.
M. Gratton: Non, il faut qu'il "livre" cela.
M. Dufoun "Livre", bon d'accord. Mais en livrant, il va finir par
"délivrer". Mais entre-temps, au moment de la livraison, si l'agent de
la Sûreté ou votre percepteur voit des choses et qu'il dit: Ce
camion, je pense qu'il y a du tabac dedans et je pense aussi qu'il n'est pas
assuré. Il n'a pas ses certificats. Celui qui fait la livraison va
être pénalisé et il va pouvoir être
arrêté.
M. Gratton: Le camionneur dont vous parlez, disons qu'il est
arrêté et on fait la preuve qu'il transporte du tabac
illégalement. Mais lui-même n'a pas enfreint la loi en
transportant...
M. Dufoun II est arrêté par exemple.
M. Gratton: II est arrêté simplement en fonction de
la cargaison. Mais lui-même fait du transport, il ne fait pas de la
délivrance. Il ne délivre pas l'acheteur de ses obligations et
c'est seulement au moment où on connaîtra le récipiendaire
de la cargaison qu'on pourra mettre en accusation. Quand on parle de la
délivrance, dans le dictionnaire, ici, on dit "accouchement". Mais ce
n'est pas de cela qu'il s'agit. "Action de délivrer", c'est la
libération. En d'autres mots, quand on fait une vente, on libère
et l'acheteur et le vendeur de leurs obligations au moment où la vente
est consommée, c'est-à-dire où il y a
délivrance.
M. Dufour: Si, M. le ministre, on continue toujours avec le
même article 3.1, on parle de délivrance, mais il est
écrit: "Aucun vendeur ne peut acheter ni se faire livrer du tabac au
Québec d'une personne qui n'est pas titulaire..." Donc "livrer" et
"délivrer". Je comprends que vous regardez surtout l'esprit de la loi.
Moi, je regarde ce qui est écrit surtout et je m'arrête juste aux
mots et de la façon dont ils sont écrits. Je ne suis pas
sûr s'il n'y a pas quelque chose là-dedans qui fait que ce n'est
pas aussi clair si quelqu'un avait à l'interpréter en se basant
juste sur l'écriture de la loi.
M. Gratton: Regardez, dans l'article 3, on parle du grossiste de
l'extérieur du Québec: "Personne ne peut vendre au
délivrer du tabac au Québec". C'est celui qui vend, le
distributeur, celui qui veut vendre à un vendeur au détail. Dans
l'article 3.1, on parle de l'acheteur, celui qui va acheter de la
première personne. Lui ne peut acheter ni se faire livrer du tabac d'une
personne qui n'est pas titulaire. La personne qui n'est pas titulaire, c'est la
personne qu'on retrouve à l'article 3 qui ne peut vendre ou
délivrer du tabac à moins d'être titulaire d'un certificat.
Je pense que c'est très clair, au point de vue interprétation. Un
juge n'aurait aucun problème à trancher. Dans un premier temps,
on ne peut pas vendre du tabac, un distributeur ou une personne ne peut pas
vendre du tabac au Québec sans avoir un certificat du ministère.
D'autre part, une personne ne peut pas acheter du tabac d'une de ces personnes
qui n'a pas l'autorisation du ministère d'en vendre. Ce sont les deux
extrêmes de l'acte de vente, de la délivrance de la vente. Elles
sont responsables conjointement devant la loi.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Jonquière?
M. Dufour: Oui.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Rapidement, sans s'étendre trop, ce
que mon collègue dit, je pense, peut porter à
ambiguïté. Il me semble qu'on devrait apporter
l'éclaircissement suivant. Lorsqu'on dit, à l'article 3.1 "se
faire livrer", ce qu'on entend par là - ce que vous nous dites, M. le
ministre, est plein de sens - c'est de se faire livrer par un fournisseur.
Essentiellement, c'est: "se faire livrer" avec le terme "fournisseur" qu'on a
en tête. C'est le fournisseur, le livreur, dans le sens où vous le
mentionnez là, qui doit posséder le permis. Mais, si on le prend
au sens strict du mot, ce n'est pas le livreur au sens de celui qui fait la
livraison. La compagnie de transport ou le livreur en tant que tel ne doit pas
détenir...
M. Gratton: Non.
M. Parent (Bertrand): ...au sens strict du mot, un certificat,
mais c'est bel et bien le fournisseur.
M. Gratton: Non.
M. Parent (Bertrand): Je me demande, afin d'éviter toute
ambiguïté, si on ne devrait pas davantage dire: livraison du
fournisseur. Essentiellement, c'est ce qu'on vise et non pas, comme le
mentionnait mon collègue, celui qui fera la livraison ou qui sera le
commissionnaire ou le livreur au plein sens du mot.
M. Gratton: Non.
M. Parent (Bertrand): Je ne sais pas si...
M. Gratton: Le transporteur, le livreur...
M. Parent (Bertrand): N'a rien à voir avec cela.
M. Gratton: ...celui qui livre n'a rien à voir
là-dedans. Il n'a pas besoin d'être certifié, sauf
peut-être auprès du ministère des Transports en ce qui
touche les transporteurs publics. Mais celui qui vend du tabac, qui veut en
vendre au Québec, qui veut faire de la vente au Québec, doit
posséder un certificat du ministère du Revenu. Celui qui veut
acheter du tabac ne peut ni en acheter ni s'en faire livrer, s'en faire
transporter chez lui, s'il l'achète d'une personne qui n'a pas une
autorisation ou un certificat du ministère. Le transporteur entre les
deux n'a aucune obligation vis-à-vis du ministère du Revenu en
regard du projet de loi qu'on étudie présentement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): J'apporte ceci, M. le ministre, seulement
pour fins d'éclaircissement. Si c'est clair comme cela, s'il n'y a pas
d'ambiguïté possible, cela me va; mais, je pensais que, là,
il pouvait y avoir ambiguïté en le lisant de cette
façon.
M. Gratton: Le terme...
M. Parent (Bertrand): Si on nous assure qu'il n'y en a pas...
M. Gratton: On m'assure que non parce que, effectivement, quand
on parle du mot "délivrer", 11 ne faut pas le confondre avec "livrer".
C'est le terme qu'on emploie dans le Code civil pour la consommation d'un acte
de vente.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand, avez-vous terminé?
M. Parent (Bertrand): Cela va.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
vous avez demandé la parole.
M. Desbiens: Je serai bref. C'est lié à la
même phrase, quand on parle de "se faire livrer" au Québec d'une
personne... Je pense qu'il faut entendre ici, par le mot "personne", une
personne physique ou personne morale ou....
M. Gratton: Cela peut être les deux. Cela peut être
un individu, mais cela peut être aussi une compagnie.
M. Desbiens: C'est comme cela, c'est le sens de la loi en ce qui
concerne le mot "personne".
M. Gratton: Cela est courant dans toutes les lois.
M. Desbiens: Oui. Maintenant, on dit plus loin: "qui n'est pas
titulaire d'un certificat d'enregistrement émis en vertu de la
présente loi et en vigueur à ce moment, à moins qu'il
n'ait conclu une entente avec le ministre en vertu de l'article 17". Quelles
peuvent être ces ententes?
M. Gratton: C'est l'entente selon laquelle on reconnaît,
comme mandataire du ministère, telle ou telle personne et qui exige que,
lorsqu'il perçoit un montant qui équivaut à la taxe il le
remette au ministère du Revenu. C'est l'entente qu'on a. On a
déjà des ententes avec nos mandataires. Présentement, tous
les grossistes, ceux qui agissent légalement, ont des ententes avec le
ministère. Sans aller dans les détails de ce qu'est une vente
directe ou indirecte, présentement, ce sont les grossistes qui
perçoivent la taxe sur le tabac et non pas les vendeurs au
détail. Le vendeur au détail vend un paquet de cigarettes, par
exemple, à un prix qui inclut la taxe. C'est quand il l'achète du
grossiste qu'il paie un montant incluant la taxe. C'est le grossiste qui est le
mandataire. Que je sache, il n'y a pas de vendeur au détail qui soit
mandataire du ministère. Ce sont les grossistes seulement qui le sont,
qui vendent du tabac aux vendeurs au détail à un prix incluant la
taxe et qui doivent, obligatoirement, la remettre au ministère. Ceux que
l'on veut pincer avec le projet de loi 80, ce sont ceux qui n'ont pas d'entente
avec le ministère, qui vendent au même prix que les autres, mais
qui gardent la taxe et ne la remettent pas au ministère. (12 h 15)
M. Desbiens: Si je comprends bien, donc, cela pourrait se
produire qu'un vendeur au détail, un tabagiste... Est-ce que le "il"
c'est le vendeur dans "il n'ait conclu une entente"? Il pourrait y avoir une
entente de signée entre le vendeur au détail et le ministre pour
que ce soit, dans son cas, lui qui paie la taxe au... C'est cela?
M. Gratton: Ce qu'on veut prévoir là, c'est le cas
d'un vendeur au détail qui, pour des raisons qui lui appartiennent, veut
acheter du tabac d'une personne qui n'est pas certifiée par le
ministère. Donc, il y a une des deux choses. On dit: Vous achetez du
tabac d'une personne qui a un certificat du ministère, sinon vous devez
vous-même avoir un certificat du ministère. Tout ce qu'on veut,
c'est que la taxe soit payée au ministère.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, vous aviez demandé la parole et, après, M. le
député de Sainte-Anne.
M. Dufour: Je pense qu'il faut assez souvent relier les articles
l'un à l'autre surtout quand on se réfère à
l'article 17. Je pense que c'est vraiment rattaché. L'article 3.1 dit:
"Aucun vendeur ne peut acheter ni se faire livrer du tabac au Québec
d'une personne qui n'est pas titulaire d'un certificat d'enregistrement
émis en vertu de la présente loi et en vigueur à ce
moment, à moins qu'il n'ait conclu une entente avec le ministre en vertu
de l'article 17." Si on va à l'article 17: "Le ministre peut, afin de
faciliter la perception et la remise de l'impôt établi par la
présente loi ou de prévenir le paiement en double de cet
impôt à l'égard du même tabac, conclure avec toute
personne titulaire d'un certificat d'enregistrement les ententes écrites
qu'il juge utiles." Autrement dit, l'article 17 dit que si le ministre veut
conclure une entente, il faut que la personne soit titulaire d'un
certificat d'enregistrement. À l'article 3.1, on dit: II n'est
pas titulaire d'un certificat d'enregistrement. Là, je ne comprends pas.
D'un côté, vous dites: Faites une entente avec quelqu'un qui n'est
pas titulaire d'un certificat à l'article 3 et à l'article 17, on
dit que le ministre peut conclure une entente, mais avec quelqu'un qui a
justement un certificat d'enregistrement.
M. Gratton: Si, par exemple, vous avez un détaillant, un
tabagiste qui veut, parce que cela lui coûte moins cher d'acheter son
tabac en Ontario que de l'acheter des distributeurs québécois,
acheter d'un distributeur de l'Ontario, le distributeur de l'Ontario n'est pas
autorisé par le ministre, n'a pas d'entente avec le ministère du
Revenu du Québec; normalement, il fait affaires seulement en Ontario.
Alors, ce qu'on dit, c'est que le tabagiste qui veut faire affaires avec lui
peut le faire à condition que lui-même ait une entente en vertu de
l'article 17 avec le ministère du Revenu. Tout le monde a le certificat,
tout le monde qui vend du tabac doit l'avoir. Mais dans le cas de l'entente qui
est prévue à l'article 17, c'est l'entente qui fait d'une
personne, que ce soit un vendeur au détail ou un grossiste, un
mandataire du ministère du Revenu. C'est cela. Le vendeur au
détail à qui on exige, dans l'article 2, d'être
détenteur d'un certificat n'est pas nécessairement mandataire. Il
est mandataire seulement s'il signe une entente en vertu de l'article 17 avec
le ministère. C'est à son choix. C'est le choix qu'il a de
vouloir être mandataire et d'acheter du tabac de quelqu'un qui ne l'est
pas.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela va, M. le
député de Jonquière? Oui.
M. Dufour: Autrement dit, si je comprends bien, pour quelqu'un
qui est au
Québec et qui voudrait acheter du tabac de quelqu'un de
l'extérieur, il faut que la personne de l'extérieur qui vend ait
un certificat.
M. Gratton: C'est-à-dire que...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Non. Il faut qu'un des deux ait un certificat ou ait
une entente en vertu de l'article 17.
M. Dufour: D'accord. S'il n'a pas de certificat, comment
réglez-vous le problème? C'est la personne qui a le certificat
qui prend la responsabilité des deux côtés?
M. Gratton: Oui. Quand on dit à l'article 2 qu'aucun
vendeur ne peut acheter, effectivement ce qu'on dît, c'est que vous
n'avez pas le droit d'acheter du tabac d'une personne qui n'a pas son
certificat, qui n'a pas une entente, qui n'est pas mandataire du
ministère à moins de l'être vous-même en vertu de
l'article 17.
M. Desbiens: L'acheteur devient responsable.
M. Gratton: C'est cela. L'acheteur est responsable seulement
quand il achète de quelqu'un qui n'est pas responsable, mais seulement
aussi quand il a une entente avec le ministère en vertu de l'article
17.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Jonquière. M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Oui. Pour moi ce n'est pas trop clair non plus
vraiment, la manière dont c'était formulé. Les mots
"où délivrer du tabac", à l'article 3, est-ce que vous
allez couvrir la situation où l'acheteur québécois
achète en Ontario? Il va en Ontario, à Cornwall, où il
achète des cigarettes. Les mots "où délivrer du tabac",
cela va couvrir la situation où la livraison du tabac aura lieu dans la
province de Québec?
M. Gratton: Non, délivrer ne veut pas dire livrer, ce sont
deux mots complètement différents. La délivrance d'une
chose, c'est la libération de cette chose. Et quand on parle de tabac,
ce qu'on dit c'est que la personne, un grossiste, ne peut vendre ou faire acte
de vente ou délivrer une vente -pas dans le sens de livraison, livrer,
mais délivrer - donc libérer l'acheteur à qui il vend le
tabac, a moins d'être titulaire d'un certificat.
M. Polak: Mais donnez-moi un exemple de "où
délivrer". Sur le plan concret, qu'est-ce qui arrive?
Le Président (M. Lemieux): Un instant, M. le
député de Sainte-Anne. Bonjour, Mme la députée de
Chicoutimi.
M. Gratton: Je vous donne un exemple concret: prenez un grossiste
situé au Québec qui veut vendre à un détaillant au
Québec, mais qui passe par un intermédiaire en Ontario. Il vend
à l'intermédiaire de l'Ontario pour que celui-ci fasse la
livraison du produit à l'acheteur au Québec. À ce
moment-là, la vente a été faite du distributeur du
Québec à celui de l'Ontario, mais la délivrance de la
vente s'est faite à l'acheteur du Québec.
M. Polak: Oui, d'accord.
M. Gratton: Ce qu'on veut éviter, en
faisant des ventes à l'extérieur du Québec, que la
délivrance de ces ventes ne soit assujettie aux mêmes conditions
de taxe que les autres.
Le Président (M. Lemieux): Cela va, M. le
député de Sainte-Anne? Est-ce que M. le député de
Bertrand...
M. Parent (Bertrand): Le reportage qu'il y a eu il y a quelques
mois concernant certains vendeurs... Je pense que c'étaient des tribus
indiennes qui, aux frontières du Québec, vendaient des cigarettes
à pleins camions en se sauvant de la taxe. Ces gens se disaient dans un
statut particulier. De quelle façon cela va-t-il être couvert? Et
est-ce que nous allons être capables de les prendre. Je ne sais pas si
vous savez à quel groupe je fais allusion, mais il y avait effectivement
eu un reportage là-dessus et ces gens n'étaient pas
détenteurs, ils n'avaient pas l'intention d'être détenteurs
d'un permis du ministère, si j'ai bien compris.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: II y a un problème particulier dans le cas des
Indiens parce qu'on sait que la loi des Indiens, telle qu'elle a toujours
été interprétée, fait en sorte qu'ils peuvent se
faire rembourser la taxe à titre individuel. Les vendeurs de tabac sur
les réserves indiennes se font rembourser par le ministère le
montant de la taxe, théoriquement seulement pour les ventes qui sont
faites à des autochtones, à des Indiens, sauf qu'il semble que de
plus en plus d'Indiens fument de plus en plus. Effectivement, quand on compare
les chiffres, on s'aperçoit qu'il faudrait qu'ils fument pas mal plus
qu'une personne ne peut fumer dans une semaine pour justifier les
réclamations que font les vendeurs au détail au ministère
pour les remboursements de la taxe.
Ce projet de loi ne touche pas ces gens-là. Il ne s'applique pas
à cela en particulier. Sauf que, dorénavant, les vendeurs au
détail sur les réserves indiennes seront obligés, eux
aussi, de détenir le certificat dont il est question à l'article
2. Donc, si ceux-ci vont s'approvisionner à l'extérieur du
Québec, ils devront obligatoirement signer une entente en vertu de
l'article 17 pour pouvoir acheter de ces gens-là, sans quoi ils agiront
illégalement. Le projet de loi ne touche en rien le remboursement de la
taxe en vertu de la loi sur les Indiens, sauf que les détaillants - et
même s'il y avait des grossistes autochtones - sont assujettis aux
mêmes lois que tous les autres. Du risque de contrecarrer certaines
habitudes sur certaines réserves, parce que, maintenant, aucun
détaillant n'a l'obligation de détenir un certificat quelconque.
La seule obligation qu'ils ont est de respecter la loi qui veut que, quand ils
vendent à un Indien, ils peuvent ne pas réclamer la taxe de
l'individu et, donc, s'ils ont déjà payé la taxe au
grossiste, la réclamer du ministère. S'ils ont acheté d'un
distributeur, en vertu de la loi 80, cela deviendra illégal.
M. Parent (Bertrand): Donc, on pourra au moins contrôler
dorénavant cette partie-là où ils devront
s'approvisionner, parce qu'il y a quand même des sommes, j'imagine,
importantes, qui...
M. Gratton: À titre d'exemple, on n'en fait pas une grosse
publicité, je ne parle pas de la réserve indienne, mais je parle
d'une saisie à laquelle les services du ministère ont
procédé dernièrement. Il s'agissait d'une cargaison
où le manque à gagner du gouvernement était d'environ 300
000 $. C'est pourquoi je disais tantôt que, quand on parle de 5 000 000
$, c'est un minimum. Si, de plus en plus, il y a une certaine tolérance,
pour ne pas dire plus, le phénomène va évidemment aller
s'amplifiant et c'est le but du projet de loi 80.
M. Parent (Bertrand): Toujours dans la même idée et
concernant le même cas, on va voir l'article suivant, mais est-ce qu'il
n'y aurait pas lieu, justement, d'introduire une procédure où il
y aurait la formule du cautionnement dans ce cas des autochtones? Je ne sais
pas. C'est une question que je me pose, comme on l'impose dans le cas de ceux
qui sont non-résidents. Vous allez avoir de la difficulté
à contrôler la partie du débit des ventes internes entre
eux et des ventes externes. Je suis pleinement conscient de cela, sauf
qu'à cause du marché et de l'ampleur que cela a pris je me
demande s'il n'y aurait pas lieu d'aller vers des formules qui soient plus
restrictives et qui puissent comprendre, par exemple, des cautionnements pour
certains groupes, ce qui, forcément, les rendraient beaucoup plus
responsables. C'est une question que je pose au ministre.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Quand on parle des tractations qu'on peut avoir avec
les autorités des bandes indiennes... Par exemple, on sait
qu'aujourd'hui, c'est jour de recensement national au Canada. Je voyais au
bulletin de nouvelles hier soir que, sur la réserve de Kahnawake, la
tribu des Mohawks a décidé qu'elle ne remplirait aucune des
formalités nécessaires. Ils ne se considèrent pas comme
des Canadiens, donc, ils ne se considèrent pas comme étant
assujettis aux lois du Canada. Quand on part de cette prémisse,
évidemment, on aura beau adopter
toutes sortes de lois ou de règlements, c'est seulement dans la
mesure où on réussit à faire accepter le bien-fondé
de ces lois et règlements qu'on parvient à les faire appliquer.
Je compte beaucoup plus sur la compréhension des gens, des autochtones
du milieu qui ne sont pas sans réaliser que les ventes de tabac, telles
qu'elles ont été mises au jour récemment à
Kahnawake, créent des problèmes sociaux extrêmement graves
au sein de la bande indienne de l'endroit. Je ne suis pas sûr que l'on ne
pourra pas compter sur la collaboration des autorités de la bande pour
mettre un frein aux pratiques qui, il faut bien le savoir, profitent seulement
à certains individus et non à l'ensemble de la communauté
indienne. (12 h 30)
Je compte beaucoup plus sur des mesures d'incitation et de persuasion
pour en arriver à nos fins que sur des lois et règlements qui,
à toutes fins utiles, seraient complètement inapplicables de
toute façon.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé. M. le
député de Bertrand?
Mme la députée de Chicoutimi, vous aviez demandé la
parole?
Mme Blackburn: Oui. En fait, c'était juste une question
d'éclaircissement. Vous estimez à 5 000 000 $ les montants
d'argent ainsi perdus pour le Québec. Avez-vous évalué le
coût des mesures que vous êtes en train de mettre en place pour
contrôler?
M. Gratton: II n'y a aucun coût afférent. Les
services d'enquêtes spéciales existent déjà. Ils
font d'ailleurs un travail qui, malheureusement, ne donne pas toujours de bons
résultats parce que la loi n'est pas assez serrée. C'est ce qu'on
veut leur donner, un peu plus d'efficacité.
Une des choses qui nous arrivent souvent, c'est qu'on saisit du tabac et
on est obligé de le remettre, faute d'une capacité de faire la
preuve, ce que nous donnera maintenant le projet de loi 80 beaucoup plus
facilement.
Le Président (M. Lemieux): Cela va, Mme la
députée de Chicoutimi? Y a-t-ii d'autres interventions sur
l'article 2?
L'article 2 est-il adopté?
M. Desbiens: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 2 est adopté.
J'appelle l'article 3 du projet de loi 80.
M. le ministre du Revenu, j'ai appelé l'article 3 du projet de
loi 80. La parole est à vous, M. le ministre.
M. Gratton: II s'agit de fixer le montant... la
nécessité pour une personne qui n'a ni résidence ni place
d'affaires au Québec... Quand on fait affaires avec quelqu'un qui a sa
résidence ou qui a des biens au Québec, évidemment, on a
toujours un recours contre ces biens-là, tandis que quand Il s'agit
d'une personne qui n'a aucun bien, aucun avoir au Québec,
évidemment si elle devait éventuellement être prise en
défaut, on n'a aucun recours contre elle. Cela existe dans la loi sur
les carburants, cela existe dans toutes les lois analogues ailleurs au
Canada.
M. Desbiens: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
je m'excuse, mais M. le député de Bertrand a levé la main
une fraction de seconde avant vous. À moins que le député
de Bertrand ne vous cède la parole...
M. Desbiens: II n'y a pas de problème.
M. Parent (Bertrand): Essentiellement, je voulais juste savoir de
la part du ministre quels étaient les critères de son
ministère pour fixer le montant. Le montant doit varier selon les types.
Sur quels critères s'est-il basé pour établir le montant
du cautionnement?
M. Gratton: II est proportionnel au montant du chiffre
d'affaires. S'il s'agit d'une petite entreprise, le montant est relativement
minime. S'il s'agit d'une multinationale, évidemment, c'est
différent. C'est le chiffre d'affaires.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Le ministre fixe-t-il le montant du cautionnement
à partir d'un règlement? C'est arbitraire, c'est entre les mains
du ministre.
M. Gratton: C'est discrétionnaire. Évidemment, cela
peut varier avec les années. Il faut qu'il y ait des ajustements. C'est
comme dans n'importe quoi. Il s'agit effectivement pour le ministère -
quand on parle du ministre, on parle du ministère, évidemment,
avec tous ses services - de faire les évaluations qui s'imposent pour
trouver... C'est un peu, par exemple, comme le taux d'intérêt sur
les remboursements des rapports d'impôts. C'est le ministre qui
décide de façon discrétionnaire ce qu'il sera. Ce n'est
pas fixé dans la loi parce que, autrement, il faudrait chaque fois qu'on
a une modification à apporter au montant, soit à cause de
l'inflation, soit à cause de l'inefficacité des montants
fixés, qu'on revienne devant l'Assemblée nationale. Je pense bien
que personne ne souhaiterait cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: II reste que c'est discrétionnaire, M. le
ministre, cela peut devenir arbitraire, par définition. Le ministre
peut-il au moins nous indiquer s'il y a déjà au sein du
ministère un ordre de grandeur qui a été prévu dans
ces montants-là?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Comme critère très
général, on se servirait de six mois de remise de taxe
perçue. En d'autres termes, s'il y a 100 000 $ de taxe perçue par
une entreprise, au cours d'une année, le montant serait d'environ 50 000
$, la moitié.
M. Desbiens: Mais il n'y a pas de plafond ou de plancher
prévu.
M. Gratton: Non. Comme c'est en proportion du chiffre d'affaires,
évidemment...
M. Desbiens: C'est un pourcentage qui va varier,
nécessairement. Selon le chiffre d'affaires...
M. Gratton: Mais non.
M. Desbiens: C'est à pourcentage fixe, selon le chiffre
d'affaires.
M. Gratton: Comme c'est six mois, la taxe perçue sur un
an, c'est 50 %.
M. Desbiens: D'accord, mais est-ce que c'est 25 %, 50 %?
M. Gratton: 50 %.
M. Desbiens: 50 %. Ce serait 50 %?
M. Gratton: Oui, six mois, c'est la moitié d'un an»
C'est dans ce sens-là que je dis que ce serait 50 % de la taxe à
percevoir.
M. Desbiens: Si le chiffre d'affaires est de 1 000 000 $ en six
mois, vous allez chercher...
M. Gratton: Non, le chiffre d'affaires... Cela représente
quel pourcentage de la taxe? C'est six mois de cette taxe qui serait...
M. Desbien: 37 % ou 40 %.
M. Gratton: C'est 60 %, en ce moment.
M. Desbiens: II y en a une qui existe présentement?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Gratton: Le taux de la taxe est fixé à 60 %,
présentement.
M. Desbiens: Le taux de la taxe, d'accord.
M. Gratton: On sait combien, pour faire un chiffre d'affaires de
100 000 $ dans le tabac, il y a de grosses chances qu'il y ait 60 % de ce
montant-là qui représente de la taxe.
M. Desbiens: Cela ne me dit pas... Il y a 60 % de ce
montant-là qui représente de la taxe, mais cela n'indique pas
l'ordre de grandeur du cautionnement que le ministre va fixer. Est-ce que c'est
50 % de la taxe, est-ce que c'est 25 %, est-ce que c'est 100 %.
Le Président: M. le ministre du Revenu..
M. Gratton: Six mois de la perception de la taxe.
M. Desbiens: 100 %, donc, de six mois.
M. Gratton: Oui, donc, 50 % de douze mois.
M. Desbiens: Cela va.
Le Président (M. Lemieux): Cela va, M. le
député de Dubuc? Mme la députée de
Chicoutimi et, après, M. te député de
Jonquière a demandé la parole.
Mme Blackburn: Deux questions. La première: On dit que le
ministre "peut exiger". Est-ce à dire que ce n'est pas
général? Qu'il y a des règles d'exception? À quel
moment interviennent ces règles d'exception?
Deuxième question: Je n'ai pas très bien compris la
réponse que vous avez faite au député de Dubuc. Je me
demande si, comme dans l'exemple que vous citez, 60 000 $ de taxe due sur six
mois au gouvernement, le cautionnement est établi sur 60 000 $. Sur quel
pourcentage de 60 000 $?
M. Gratton: Non. Le montant du cautionnement est le montant de la
taxe perçue sur six mois.
Mme Blackburn: Vous exigeriez...
M. Gratton: C'est 100 % des taxes normalement perçues.
Mme Blackburn: Vous exigeriez une caution de 60 000 $ de tout
vendeur qui
n'aurait pas de résidence ici. "...celui qui n'a ni
résidence ni place d'affaires au Québec...".
M. Gratton: Oui. En d'autres termes, on veut se protéger
pour au moins une période de six mois.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Vous me permettrez
de m'interroger: Est-ce que ce n'est pas excessif? C'est, à toutes fins
utiles, refuser qu'ils s'installent, à moins d'avoir une
résidence ici.
M. Gratton: Pas du tout. Il ne s'agit pas d'exiger un
cautionnement en argent comptant.
Mme Blackburn: Non, je le sais, mais c'est en valeurs.
M. Gratton: Des polices d'assurances... Il y a des compagnies qui
se spécialisent dans les cautionnements. Règle
générale, cela représente, en coûts, un pourcentage
très minime du montant d'argent impliqué. Par exemple, un
entrepreneur en construction qui fait une soumission pour un contrat de 10 000
000 $ doit normalement fournir un cautionnement de 10 %, ce qui
représente 1 000 000 $, mais tout le monde sait qu'on n'exige pas qu'il
débourse 1 000 000 $ comptant. Cela peut peut-être lui
coûter 20 000 $ pour obtenir le cautionnement d'une compagnie
d'assurances.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Comment doit-on interpréter le "peut
exiger"?
M. Gratton: Ce n'est pas obligatoire. Le ministre n'a pas
l'obligation de le faire, par exemple, s'il s'agit d'une compagnie dont la
réputation le permet. Cela s'appliquerait plutôt à un tout
petit... Cela ne s'appliquerait probablement pas à grand monde, mais
s'il y avait un tout petit entrepreneur dans le domaine qui, dans une condition
particulière, faisait la preuve que l'exigence du cautionnement pouvait
être... Le ministre a la discrétion de ne pas l'exiger. De
façon générale, ils sont tous assujettis au
cautionnement.
Le Président (M. Lemieux): Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, Mme la
députée de Chicoutimi.
M. le député de Jonquière, vous avez demandé
la parole avant le député de Dubuc.
M. Dufour: Oui. Il y avait peut-être la partie "...peut
exiger comme condition d'enregistrement". Je pensais que la question allait
être vidée et j'étais prêt à éliminer
mon droit de parole, mais, d'un autre côté, je pense que, lorsque
le ministre donne son explication, je ne trouve pas sa réponse
satisfaisante, selon laquelle il pourrait, de temps à temps, dire
à quelqu'un: Vous ne payez pas d'enregistrement parce que vous
êtes trop petit ou vous avez des difficultés financières.
Je pense que cette loi, en tout cas...
M. Gratton: On parle du cautionnement, pas du certificat.
Le Président (M. Lemieux): Article 3, M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: D'accord. Mais "condition, de l'enregistrement", il
faut considérer cela. Le ministre peut exiger, comme condition de
l'enregistrement, un cautionnement dont il fixe le montant. Donc, cela
remplace.
M. Gratton: Non, non, non.
M. Dufour: Jusqu'à un certain point.
M. Gratton: Ce que cela veut dire, c'est que le ministre peut
délivrer, pas livrer, délivrer le certificat en question sans
exiger de cautionnement. C'est tout ce que cela veut dire. Cela
nécessite encore, en vertu de l'article 2, que la personne en question
ait le certificat.
M. Oufoun Oui, mais...
M. Gratton: Tout ce qu'on dit, c'est que le ministre pourrait, de
façon discrétionnaire, accorder le certificat sans qu'il y ait
cautionnement.
M. Dufour: Normalement, les règles du marché
étant ce qu'elles sont, c'est difficile de laisser dans les mains d'une
personne, quelque que soit sa compétence, le droit d'exercer ou non les
pouvoirs. À ce moment-là, on pourrait toujours taxer quelqu'un de
faire du favoritisme ou non. Mais il me semble que c'est clair. À moins
que le législateur ne veuille parler pour ne rien dire.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu, eu
égard aux réflexions du député de
Jonquière.
M. Gratton: Je ne vois réellement pas de problème.
Quand on dit que le ministre peut exercer sa discrétion, c'est courant.
Le
ministre n'est pas simplement... On nous reproche toujours d'être
sur le pilote automatique, du côté de l'Opposition. Il faut quand
même qu'on fasse en sorte que les lois n'inscrivent pas des dispositions
telles qu'on soit obligé de modifier les lois chaque fois qu'une
situation fluctue. Quand on parle, à l'article 5.1, de celui qui n'a ni
résidence, ni place d'affaires au Québec, on peut imaginer qu'il
n'ait ni résidence ni place d'affaires mais qu'il pourrait y avoir des
biens qui donneraient satisfaction au ministre, pour que les sommes d'argent en
question puissent être récupérées autrement que par
l'exigence d'un cautionnement. C'est la latitude qu'on veut donner au ministre.
Il n'est pas question de voir des choses épouvantables
là-dedans.
Le Président CM. Lemieux): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Je trouve que le ministre s'aventure sur un terrain
glissant en disant que c'est automatique ailleurs. Mais, en tout cas, si c'est
automatique, c'est peut-être la justice aussi jusqu'à un certain
point. Je prétends qu'au point de vue de la loi ou de l'administration
publique la loi de la justice, c'est encore celle sur laquelle on doit fonder
nos jugements et nos raisonnements. C'est à partir de cela qu'on est
certain que l'ensemble de la population reçoit le même traitement,
les' mêmes égards. Si on regarde cette loi, si le ministre peut
exiger comme condition d'enregistrement de celui qui n'a ni résidence,
ni place d'affaires... Je comprends les explications du ministre. Mais,
à ce moment-là, il exige. On ne dit pas qu'il peut. Lorsqu'on dit
"peut", cela veut dire que c'est un pouvoir qu'il peut exercer ou non. Si vous
me dites: II peut exiger un cautionnement dont il fixe le montant et la
façon de satisfaire à ce cautionnement. Là, je comprends
que le ministre veuille bien me donner des explications en disant qu'il peut
avoir des biens dans la province qui fassent que cela puisse satisfaire aux
demandes. Mais, en disant que le ministre peut exiger comme condition...
Ce qui m'inquiète c'est qu'à un certain moment... Et si
c'était écrit dans la loi que quelqu'un qui est en
difficulté réelle peut faire ceci ou cela, je ne me poserais pas
de question. Mais, comme c'est à la discrétion du ministre et
qu'il n'est dit nulle part de quelle façon il peut exercer son droit de
regard ou son droit de cautionnement, à mon point de vue, cet article
semble manquer d'une certaine rigueur par rapport au but visé. (12 h
45)
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Je n'ai rien à ajouter, M. le
Président.
Le Préaident (M. Lemieux): Vous n'avez rien à ajouter.
Alors, Mme la députée de Chicoutimi, vous aviez demandé la
parole?
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. À la suite des
explications que nous...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, Mme la
députée de Chicoutimi. M. le député de Dubuc
était avant vous.
Mme Blackburn: Bien.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
je m'excuse.
M. Desbiens: Donc, à l'article 5.1 de l'article 3, le
ministre, dans ce petit article de deux lignes et demie de texte, se donne deux
pouvoirs discrétionnaires. Le premier, c'est de pouvoir accepter qu'un
certificat soit délivré sans cautionnement; deuxièmement,
c'est le montant du cautionnement. Cela m'apparaît beaucoup de pouvoirs
discrétionnaires entre les mains du ministre. Est-ce qu'on ne pourrait
pas - c'est ma suggestion au ministre - au moins faire disparaître le
cautionnement dont il fixe le montant? Il le connaît, le ministre nous a
dit quel cautionnement il voulait exiger; alors, pourquoi ne pas l'indiquer
dans la loi immédiatement?
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: J'ai dit, M. le Président, qu'on ne le fixait
pas dans la loi pour ne pas devoir amender la loi à chaque fois que les
circonstances exigeraient qu'on le modifie. Je ne sais pas ce que craint
l'Opposition, mais je ne peux pas donner d'autres explications que cela.
M. Desbiens: Mais, quelles sont...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: ...les conditions qui feraient que ce montant soit
modifié? La formule que le ministre utilise "représentant six
mois de vente", cela me paraît une formule objective et équitable
pour n'importe quel détenteur de certificat.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Quelle est la question?
M. Desbiens: Si le ministre ne veut pas le faire lui-même,
M. le Président, je proposerais l'amendement suivant: À l'article
3, paragraphe 5.1, remplacer les mots "dont il fixe le montant" par les mots
"égal au
montant de la taxe à payer représentant une période
de six mois".
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous me fournir
l'amendement, M. le député de Dubuc?
M. Gratton: Sur la recevabilité, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le ministre du
Revenu.
M. Gratton: Je vous pose la question.
Le Président (M. Lemieux): Permettez-moi, M. le ministre
du Revenu, de faire lecture de l'amendement avant que nous ayons à nous
prononcer sur la recevabilité. L'amendement se lirait comme suit: Le
ministre peut exiger comme condition de l'enregistrement de celui qui n'a ni
résidence ni place d'affaires au Québec un cautionnement - au
lieu des mots "dont il fixe le montant" - égal au montant de la taxe
à payer représentant une période de six mois.
Sur la recevabilité, M. le ministre.
M. Gratton: M. le Président, je me pose simplement la
question. Est-ce que l'amendement ne vient pas en contradiction avec l'article
du règlement que je cherche toujours?
Le Président (M. Lemieux): L'article 192, je crois, M. le
ministre.
M. Gratton: L'article 192.
Le Président (M. Lemieux): Le deuxième paragraphe,
M. le ministre.
M. Gratton: Qui veut que seul un ministre puisse
"présenter une motion qui vise l'engagement de fonds publics,
l'imposition d'une charge aux contribuables, la remise d'une dette envers
l'État, l'aliénation de biens appartenant à
l'État".
Le Président (M. Lemieux): C'est votre argumentation sur
la question de règlement...
M. Gratton: Oui.
Le Président (M. Lemieux): ...sur la recevabilité?
M. le député de Dubuc, sur la recevabilité de
l'amendement.
M. Desbiens: Justement, je crois que, dans le cas présent,
l'amendement que je propose n'affecte en aucune façon
l'équilibre...
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous m'éclairer,
M. le député de Dubuc, sur ce en quoi l'amendement proposé
n'imposerait effectivement aucune charge aux contribuables?
M. Desbiens; Justement, on dit que cela doit... Il ne s'agit pas
ici d'un impôt, mais il s'agit d'un cautionnement. II n'y a donc pas de
revenus qui sont en cause pour le ministre des Finances ou le gouvernement.
Cela n'affecte d'aucune façon l'équilibre budgétaire du
gouvernement. Ce n'est pas un déboursé que le citoyen doit
faire.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre. Mme la
députée de Chicoutimi, vous avez des commentaires à faire
sur la question de règlement?
Mme Blackburn: Oui, sur la recevabilité.
Le Président (M. Lemieux): Sur la recevabilité.
Mme Blackburn: Les remarques, les considérations du
député de Dubuc me semblent justes. Il ne s'agit pas d'argent au
sens d'une perception d'impôt ou d'une taxe. Il s'agit tout simplement
d'un cautionnement et d'une garantie, donc d'une assurance. Il me semble
qu'à ce titre l'amendement est recevable.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Sainte-Anne, s'il vous plaît, sur la recevabilité de
l'amendement.
M. Polak: Sur la recevabilité, M. le Président.
Est-ce que le député pourrait m'expliquer de quelle
manière le montant est fixé parce que le cautionnement, c'est un
montant qui est fixé d'avance. On dit: déposer un montant de 10
000 $ pour que telle ou telle chose... De la manière dont le texte se
lit, comment faites-vou3 le calcul du montant?
M. Desbiens: M. le Président, évidemment, je suis
bien prêt à répondre, mais sur le fond il m'apparaît
que...
M. Polak: Ce n'est pas sur le fond.
Le Président (M. Lemieux): Sur la question de...
M. Polak: Si l'amendement n'a aucun sens, il faut
l'expliquer.
M. Desbiens: Je suis bien prêt à l'expliquer.
M. Polak: Cela va prendre juste une minute.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc...
M. Desbiens: Il faudrait la relire.
Le Président (M. Lemieux): ...une dernière
intervention...
M. Desbiens: Je pense qu'il faudrait décider de la
recevabilité d'abord.
Le Président (M. Lemieux): ...sur la question de la
recevabilité. Une dernière intervention, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Cela va. Je n'ai plus d'intervention, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Vous n'avez plus
d'intervention?
Je suspends pour environ une ou deux minutes relativement à la
décision que j'aurai à prendre sur la recevabilité de
l'amendement.
(Suspension de la séance à 12 h 52)
(Reprise à 12 h 57)
Le Président (M. Lemieux): Relativement à la
recevabilité de l'amendement proposé par le député
de Dubuc, effectivement, il est permis, en commission parlementaire, de
proposer des amendements. Il y a une question à se poser quand
même: Quelle doit être la finalité, quel doit être
l'objet d'un amendement qui est proposé? L'objet d'un amendement est de
rendre beaucoup plus compréhensible et plus acceptable le texte de loi.
Le texte de loi visé ici est l'article 5.1: "Le ministre peut exiger
comme condition de l'enregistrement de celui qui n'a ni résidence ni
place d'affaires au Québec un cautionnement dont il fixe le
montant."
La question en discussion, c'est le pouvoir discrétionnaire qui
est accordé en vertu de l'article 5.1 au ministre. Il ne faut pas, lors
d'un amendement, aller à l'encontre du sujet en question. Ce que nous
demande le député de Dubuc, c'est de faire, d'une certaine
façon, indirectement, ce que défend ce texte de loi,
c'est-à-dire d'accorder au ministre un pouvoir discrétionnaire,
d'avoir à fixer ce cautionnement. En insérant cet amendement,
nous fixons nous-mêmes, dans un texte de loi, le cautionnement
visé. En ce sens-là, c'est aller à l'encontre de l'esprit
de la fin de l'article 5.1 du projet de loi.
Effectivement, subsidiairement, on pourrait dire comme l'ancien
règlement à l'article 64: L'imposition d'une charge additionnelle
sur les revenus ou sur les contribuables, c'est un amendement qui n'est
recevable que de la part du ministre. Subsidiairement, ces propos pourraient
être invoqués è l'encontre de l'amendement qui est
suggéré par le député de Dubuc. Mais sur le fond
proprement dit, principalement, je le Juge irrecevable parce que cela va
à l'encontre du principe de l'article 5.1 et non parce que, pour le
moment, cela impose une charge additionnelle. Je le retiens, mais que
subsidiairement. Alors, je juge l'amendement irrecevable.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 3 du projet de loi
80? Mme ta députée... Je m'excuse, M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: C'est moi qui avais la parole?
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Dubuc, vous avez toujours la parole après l'amendement que vous avez
suggéré.
M. Desbiens: Vous comprenez que l'objectif que l'on poursuit,
c'est surtout d'enlever le plus possible de pouvoirs discrétionnaires
des mains des ministres. Nous faisons bien confiance au ministre actuel, mais
on ne sait jamais quel ministre pourrait prendre sa place ensuite et on ne sait
jamais ce qui pourrait se passer. C'est lui qui fixe le montant.
M. Béliale: On remplace cela par quoi? M. Desbiens: Un
montant déterminé.
M. Bélisle: Cela varie d'une situation à
l'autre.
M. Desbiens: Selon sa propre proposition, je trouvais que
c'était très objectif comme solution.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, j'aimerais vous renvoyer à l'article 41 du règlement, au
deuxième paragraphe. Lorsque le président rend une
décision, vous n'êtes pas sans savoir qu'elle ne peut être
discutée.
M. Bélisle: Sur la question de...
Le Président (M. Lemieux): Question de
règlement?
M. Bélisle: Non, ce n'est pas une question de
règlement, c'est une question de directive. Est-ce qu'on suspend
à 13 heures?
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Mille-Iles, vous avez effectivement raison.
Les travaux de cette commission étant très
intéressants de la part des deux groupes parlementaires, j'ai
complètement oublié, M. le député de
Mille-Îles, de regarder l'heure et, en conséquence, je suspends
les travaux jusqu'à 15 heures.
La commission reprendra ses travaux à 15 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux
pour l'étude du projet de loi 80, Loi modifiant la Loi concernant
l'impôt sur le tabac afin de contrer le détournement de la taxe
par des intermédiaires. Nous en étions à l'article 3 du
projet de loi 80 et la parole était au député de Dubuc. M.
le député de Dubuc.
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Évidemment, de
ce côté-ci, on considère qu'il y a beaucoup de pouvoirs
discrétionnaires dans la loi. Il y a deux pouvoirs
discrétionnaires mentionnés à l'article 3, paragraphe 5.1.
J'avais examiné la possibilité de faire un second amendement qui
pourrait dire non pas que le ministre peut exiger, mais qu'il exige comme
condition de l'enregistrement. Sauf que je crois que, d'après
l'explication que vous avez donnée sur la non-recevabilité de la
première proposition, on se retrouverait au même point.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le
député de Dubuc, vous avez entièrement raison.
M. Desbiens: Donc, quant à nous, ce serait terminé,
à moins que mes collègues n'aient d'autres questions sur
l'article 3.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Sur ce
point, je voudrais seulement savoir s'il est normal - en tant que nouveau
parlementaire, n'étant peut-être pas habitué à la
façon dont on peut l'écrire - pour le ministre d'avoir ce genre
de pouvoir discrétionnaire, dans ce cas-là. Est-ce que ce sont
les us et coutumes que le ministre peut exiger ou si...
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Séguin: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Montmorency, je m'excuse. Est-ce que, de consentement, vous permettez que M.
le député de Montmorency intervienne, eu égard au temps de
parole du ministre? Vous le permettez? Cela va. Alors, de consentement, M. le
député de
Montmorency...
M. Parent (Bertrand): II va se mettre dans la peau du
ministre.
Le Président (M. Lemieux): Non, mais eu égard
à l'intervention de cinq minutes que doit faire le ministre, je dois
avoir votre consentement pour que le député de Montmorency agisse
ainsi. Cela va, M. le député de Montmorency, vous pouvez
intervenir.
M. Séguin: Merci, M. le Président. On comprendra
que l'extinction de voix du ministre du Revenu permettra peut-être que je
puisse apporter quelques éclaircissements sur des réponses pour
lesquelles vous voulez avoir des compléments d'information. À
l'article 3, à la question du cautionnement, oui, ce sont
déjà des moyens qui existent ailleurs. Je dois vous indiquer
à l'heure actuelle - juste pour vous donner un exemple de ce qui existe
- que, de par la Loi sur les impôts ou la Loi sur le ministère du
Revenu, c'est un contribuable qui fait opposition, qui va à l'encontre
d'une cotisation, la loi permet qu'il soit exempté de payer, même
s'il conteste, à la condition qu'il dépose des garanties
suffisantes pour protéger la dette tant qu'une décision finale
n'est pas prise. Quant à la discrétion d'évaluer la
garantie que devra fournir le contribuable à l'encontre d'une cotisation
qu'il conteste, c'est à la discrétion, bien sûr, du
ministre de s'assurer qu'il ne met pas en péril inutilement la
créance du ministère vis-à-vis d'un contribuable qui
contesterait et, dans trois mois, six mois, un an, à la suite de
conclusions au dossier, qui ne serait plus en mesure de payer.
Habituellement, dans les droits où l'on demande un cautionnement,
c'est discrétionnaire parce que c'est le ministre qui décide s'il
croit que, s'il n'y avait pas cautionnement ou garantie - parce que le
cautionnement est une forme de garantie - il y aurait risque
qu'éventuellement ce qui est dû au ministère ne puisse pas
être perçu. On l'indique ici à l'article 3 du projet de
loi, c'est dans le cas de ceux qui n'ont pas de place d'affaires au
Québec ni de résidence, et on comprendra que la
"contraignabilité" des lois, pour des gens qui n'ont pas de place
d'affaires au Québec ou de résidence, fait qu'il est prudent que
le ministre s'assure qu'ils sont suffisamment garants de leurs obligations pour
le faire. Dans ces cas, le ministre décidera, à chaque cas, si la
personne a des garanties suffisantes ou pourra exiger un cautionnement en
argent, déposé d'avance pour s'assurer tout simplement que les
obligations seront respectées. Je ne sais si...
Le Président (M. Lemieux): M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Peut-être un dernier commentaire, M.
le Président. Le propos du député de Montmorency, je suis
en accord avec cette précaution à prendre. La seule chose qu'on
redoutait, c'est qu'il y ait deux poids deux mesures dans ce sens: dans le cas
où quelqu'un est plus connu, où l'entreprise est plus grande, on
ne l'exige pas; dans le cas d'une petite entreprise qui deviendrait fournisseur
ou quoi que ce soit on l'exige. Où se fait la démarcation? C'est
beaucoup plus sur le principe que le ministre ou le ministère peut
intervenir en jugeant qu'on n'est pas obligé. Tout cela dans le but
d'éviter tout favoritisme par rapport à une entreprise qui, tout
en étant petite, pourrait par cette procédure effectivement ne
pas être soumise ou obligée par le ministre, s'il en décide
ainsi, de déposer le cautionnement. Cela devient, jusqu'à un
certain point, une question de bon jugement, j'en conviens. Ce sont
sûrement peut-être des cas d'exception. Sauf qu'on ne veut pas se
ramasser dans une situation où on retrouve deux petites entreprises
impliquées et, dans un cas où il y en a une qui est
dispensée, cela devient discriminatoire. C'était dans cet esprit
beaucoup plus.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Bertrand. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur
l'article 3 du projet de loi 80?
M. Parent (Bertrand): Est-ce que vous avez des commentaires par
rapport à cela?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Effectivement, dans la pratique des choses, il
peut arriver que des entreprises se fassent demander un cautionnement et qu'une
autre entreprise en soit exemptée, mais c'est au ministre, dan3 sa
discrétion, d'utiliser son jugement. Si son jugement est mauvais, il
aura peut-être à en répondre autrement; mais je pense qu'en
pratique, étant donné que le cautionnement tient compte de
l'ampleur des taxes qu'est susceptible de payer l'entreprise... Si l'entreprise
est petite, le montant de la taxe à laquelle est sujette peut être
modeste; donc, le cautionnement ne pourra qu'être modeste. Je pense que
tout est conséquent à l'ampleur qu'on veut donner a la situation.
Si l'entreprise commence, elle n'aura que très peu - du moins c'est
prévisible - de taxes à payer; donc, le cautionnement sera
très peu aussi. Si l'entreprise a des affaires extrêmement
importantes, le cautionnement peut être important. Vous allez le
remarquer, je pense vous êtes d'accord sur le principe de fond, il s'agit
que les montants qui sont dus au Trésor public soient dûment
perçus; le cautionnement est seulement dans un but de garantie, de sorte
que l'argent déposé ne soit pas utilisé par le
ministère. C'est un dépôt en garantie qui,
éventuellement, pourra retourner à l'entreprise, si jamais il se
produit un événement qui justifie le ministre à utiliser
le dépôt en cautionnement. Ce n'est pas un coût
imposé è une entreprise, c'est une assurance équivalant,
si vous voulez, en d'autres mots, à une espèce de police
d'assurance de solvabilité que doit fournir l'entreprise. (15 h 15)
Remarquez, à ce sujet, que le cautionnement peut prendre la forme
d'autre chose que nécessairement de l'argent en monnaie. Cela peut
être des biens jugés suffisants, de sorte qu'on
préfère laisser au ministre la discrétion de le fixer,
selon son jugement sur la solvabilité et la "contraignabilité"
que va respecter l'entreprise sur le paiement qu'elle doit faire de sa taxe.
Maintenant, s'il y avait un mauvais jugement, des abus, les entreprises
pourront, si elles se sentent lésées, exercer certains recours.
Le ministre n'est pas au-dessus de tout reproche dans l'exercice de son
jugement. La Loi sur les impôts contient une multitude de mesures
discrétionnaires où le ministre ou le sous-ministre, dans bien
des cas, ont à exercer un jugement, une discrétion, à
savoir s'ils adoptent ou non telle mesure. Le système judiciaire, comme
le Parlement, peut être à l'occasion une protection naturelle
contre ce genre d'abus, si jamais il y avait abus. Mais, dans l'exigence d'un
cautionnement, cela me semble quand même très peu extraordinaire
à l'heure actuelle que de demander des cautionnements à des
entreprises qui ne font pas affaires au Québec. Je vous ferai remarquer
que, dans la pratique des affaires, il y a beaucoup d'entreprises qui, faisant
affaires au Québec sans y avoir de siège social, etc., doivent
déposer un cautionnement chez les contracteurs avec qui ils font
affaires simplement pour assurer de leur crédibilité
financière, etc. Je pense qu'il faut quand même y voir ici une
mesure de protection pour l'État, étant donné que, dans le
passé, on a vécu l'expérience contraire, alors que des
entreprises, parce qu'elles ne se sentaient pas contraignables, n'ayant pas
d'affaires au Québec, ne payaient pas tes taxes qu'autrement elles
auraient dû payer. Je pense que c'est au moins un moyen de s'assurer
qu'une partie des taxes qu'elles doivent payer est assurée par des biens
ou des montants suffisants.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: L'article 3, finalement, va servir dans des cas
exceptionnels, surtout et
avant tout pour des personnes qui ont leur place d'affaires à
l'extérieur du Québec, qui n'ont ni résidence ni place
d'affaires au Québec; pas surtout, mais exclusivement pour ceux qui sont
de l'extérieur du Québec. Donc, cela va être limité
en nombre quand même.
M. Séguin: Très limité.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires sur l'article 3? Oui, M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: II y a un point sur lequel je voudrais une
information. De quelle façon les membres de l'Opposition peuvent-ils
s'informer pour savoir si ces procédures sont bien suivies? Si c'est
à la discrétion du ministre et s'il n'y a aucun moyen de
contrôle... Je veux bien faire confiance à tout le monde, mais
est-ce qu'il y a moyen de savoir si la "job" est faite ou pas faite?
M. Séguin: Pour savoir si le ministre...
M. Dufour: C'est cela. S'il me vient une idée, par
exemple, et que j'aimerais bien savoir quels sont les gens qui donnent des
cautionnements pour faire affaires au Québec, si je veux savoir si cet
article est appliqué, si je veux savoir si le jugement du ministre est
bien correct et s'il n'y a pas de discrimination, est-ce qu'il y a
possibilité pour nous de savoir ce qui se passe?
M. Séguin: C'est évident que les entreprises qui se
sentiront lésées pourront porter plainte ou pourront s'opposer
à la demande de cautionnement qui leur est faite et, à ce
moment-là, elles pourront exercer des recours contre le ministre pour
refus de maintenir l'enregistrement parce qu'il n'y aurait pas de
cautionnement.
En ce qui concerne les membres de l'Opposition, vous pouvez toujours
poser des questions au ministre, mais on ne peut pas imaginer toutes les
situations qui permettraient à chaque cas d'identifier le recours
approprié. Je l'ai mentionné, la Loi sur les impôts, la Loi
sur le ministère du Revenu, les tribunaux, le Parlement sont des forums
où les droits peuvent s'exercer. Tout ce qu'on fait ici, c'est exiger
d'une entreprise, parce qu'on dit bien: "peut exiger un cautionnement". Dans
certains cas, le ministre pourra décider que l'entreprise
présente suffisamment de solvabilité et de garanties pour
être exemptée du cautionnement. C'est dans le cas des entreprises
où le ministre doute qu'elles ne puissent honorer leurs obligations que
le ministre pourra demander un cautionnement.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il d'autres interventions
sur l'article 3? Il n'y a pas d'autres interventions sur l'article 3. L'article
3 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 3 est adopté.
J'appelle l'article 4 du projet de loi 80.
Impôt
Perception par le vendeur
M. Séguin: L'article
4...
Le Président (M. Lemieux): L'article 4, M. le
député de Montmorency.
M. Séguin: M. le Président, l'article 4 vise
à modifier l'article 11 de la loi en précisant que le vendeur au
détail est mandataire pour percevoir l'impôt sur le tabac, mais
qu'il n'est pas tenu de rendre compte ni de remettre au ministre l'impôt
perçu sur le tabac vendu s'il a déjà versé un
montant égal à cet impôt à un agent-percepteur
titulaire du certificat. On veut évidemment éviter ici la double
responsabilité de paiement. Si, d'une part, le vendeur est responsable
comme mandataire du paiement de la taxe et que, d'autre part, il l'a
déjà payée à l'agent-percepteur, l'on ne voudra se
retrouver dans la situation où il doit la payer à deux endroits
différents: une fois au ministre et une autre à
l'agent-percepteur. Donc, on précise, ici, que la remise de la taxe par
le vendeur à l'agent-percepteur consomme l'obligation qu'il a ou, en
fait, libère, si vous voulez, le vendeur de l'obligation de paiement de
la taxe parce qu'il l'a déjà fait.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il des questions sur
l'article 4? M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Au troisième alinéa, on dit que le
vendeur au détail n'est pas tenu, cependant, de rendre compte au
ministre, à moins que celui-ci ne l'exige. Cela veut dire que le
ministre peut exiger, finalement, la double taxation ou... Quelle est
exactement la signification?
M. Séguin: C'est le rapport, ici, qui est visé. On
dit: ..."il n'est pas tenu de rendre compte au ministre, à moins que le
ministre ne l'exige". Dans les cas où le ministre n'aurait pas, par
exemple, toute l'information sur la transaction, à ce moment-là,
étant donné que le vendeur - ne l'oubliez pas - est toujours
mandataire pour percevoir la taxe, il est toujours responsable de devoir rendre
compte, si on le lui demande.
M. Desbiens: Ce n'est pas juste le
rapport. Il est écrit: "...ni de lui remettre l'impôt
perçu".
M. Séguin: À moins que le ministre ne
l'exige...
M. Desbiens: Dans quelles circonstances? Est-ce qu'on peut avoir
un exemple...
M. Séguin: ...mais ne l'exige seulement pour le rapport.
Si...
M. Desbiens: ...de circonstances où le ministre pourra
l'exiger?
M. Séguin: Exiger quoi?
M. Desbiens: De lui remettre l'impôt?
M. Séguin: Non. Il est exempté de remettre
l'impôt. Si on reprend la phrase, je vais la reprendre si vous voulez:
"...n'est pas tenu de rendre compte au ministre..."
M. Desbiens: Cela va, excusez-moi.
M. Séguin: "...à moins que celui-ci ne
l'exige..."
M. Desbiens: Allons au quatrième alinéa.
M. Séguin: L'autre obligation est de remettre
l'impôt. Cela est complètement exempté lorsqu'il l'a remis
à l'agent-percepteur.
M. Desbiens: Au quatrième alinéa -c'est là,
surtout, que je voulais en venir - il est question des trop-perçus.
Est-ce que le ministre ou l'adjoint peut nous expliquer ce qu'est ce
phénomène des trop-perçus?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: C'est dans le cas où la taxe qui est
remise ou la taxe qui aurait dû être remise n'est pas celle qui a
été effectivement perçue. Donc, l'obligation qui est, si
vous voulez, sur la tête du vendeur, c'est que le plein paiement de la
taxe qui va être perçue soit fait, de sorte que, s'il y avait une
différence - par exemple, lorsqu'il y a des variations de taux et que la
taxe a été mal perçue - le ministre peut exiger que la
différence lui soit payée.
M. Desbiens: C'est juste dans ce cas-là, finalement, que
cela peut se produire, dans le cas du tabac, c'est lorsqu'il y a des
changements de taux?
M. Séguin: Effectivement, ou qu'il y a des erreurs, par
exemple...
M. Desbiens: Parce que c'est fixe?
M. Séguin: ...commises par le vendeur ou
l'agent-percepteur. Cela peut arriver sur le décompte ou sur la
comptabilisation de la taxe. Il peut y avoir des erreurs. À ce
moment-là, comme on le dit ici, le ministre pourra exiger la
différence du vendeur par rapport à ce que l'agent-percepteur
aura mis effectivement.
M. Desbiens: Cela évite qu'il ait la tentation de se
tromper.
M. Séguin: On l'espère.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président.
Dans le cas du deuxième paragraphe, dans la loi actuelle,
à l'article 11, essentiellement, c'est un libellé
différent, mais le contenu est le même, c'est-à-dire que
c'est la remise prévue dans les quinze jours du mois suivant. Est-ce
qu'il y a des changements sur le fond ou si c'est strictement sur la forme, la
façon dont on fait le libellé? Actuellement, ce qui est dit,
c'est que le vendeur doit agir comme mandataire du ministre, tenir et rendre
compte des sommes d'argent perçues et les lui transmettre dans les
quinze jours suivant immédiatement le mois de calendrier durant lequel
toute vente s'est effectuée. Là, on ne parle plus de mois de
calendrier. On parle du quinzième jour de chaque mois. Est-ce qu'il y a
une modification sur le fond ou si c'est strictement sur la forme? J'essaie de
voir et je ne vois pas de modification sur le fond.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Non, M. le député de Bertrand.
Votre question ne soulève pas de différence appréciable
entre les deux libellés des paragraphes sauf que l'on indique plus
clairement, dans le projet de loi actuel, à la troisième ligne,
la taxe qu'il aurait dû percevoir. On dit que le vendeur au détail
doit, au plus tard le quinzième jour de chaque mois, rendre compte au
ministre en la forme prescrite de l'impôt qu'il a perçu ou qu'il
aurait dû percevoir. Effectivement, il peut arriver des fois où il
ne l'a pas perçu. On précise qu'il est reponsable aussi de celui
qu'il n'a pas perçu dans l'exercice. Fondamentalement, cela ne change
pas le sens des deux paragraphes, si on compare l'ancienne loi avec ta
nouvelle.
Si vous remarquez, dans l'ancienne loi, il est dit qu'il doit "rendre
compte des montants ainsi perçus." Mais qu'arrive-t-il de ce qu'il n'a
pas perçu et qu'il aurait dû
percevoir. Là, on précise afin de ne pas être dans
une situation où quelqu'un se libérerait de son engagement en
disant simplement qu'il ne l'a pas perçu. Donc, il n'est pas astreint
à en rendre compte. Vous comprenez avec moi que cela serait une
situation un peu inconcevable.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Techniquement, la question du
quinzième jour ou du quinzième jour de calendrier, seulement dans
l'opération, si ces jours arrivent des jours fériés, le
quinze du mois, par exemple. Je voudrais seulement, dans l'application, savoir
quelle tolérance on accorde pour la remise du quinzième jour.
Cela cause souvent des problèmes, surtout les fins de semaine.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: En pratique, il y a une tolérance de
plusieurs jours sur la façon de compter le quinzième jour.
Remarquez que c'est le quinzième jour qui suit le mois durant lequel la
vente s'est faite.
M. Parent (Bertrand): Le quinze du mois suivant, oui.
M. Séguin: Les gens ont adopté en pratique, de
façon générale, que c'est à peu près le
quinze du mois suivant que la taxe se remet. C'est à peu près ce
que les gens comprennent de la situation.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-Il d'autres commentaires
sur l'article 4 du projet de loi 80?
L'article 4 du projet de loi 80 est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 4 du projet de loi 80
est adopté.
J'appelle l'article S du projet de loi 80. M. le député de
Montmorency.
Identification du tabac
M. Séguin: M. le Président, l'article 5 vise
à ajouter un nouvel alinéa à l'article 13 de la loi
actuelle, pour se lire 13.1, en mentionnant que "tout tabac destiné
à la vente pour consommation au Québec et qui s'y trouve doit
être identifié par les personnes, de la manière et aux
conditions prescrites par règlement".
Ici, ce qu'on vise, c'est de rendre dans le texte législatif ce
qui était déjà contenu dans le règlement. Le
pouvoir d'identifier le tabac par règlement était prévu
à l'article 19.3,c, de la loi, qui est abrogé par le
présent projet de loi. (15 h 30)
D'autre part, le règlement actuel ne prévoit pas qui doit
procéder à l'identification, ce qui est une faiblesse que
l'article veut corriger. L'identification du tabac est un moyen dont s'est
doté le Québec pour limiter la contrebande dans ce domaine.
Évidemment, le marquage, si on peut appeler ainsi le fait de marquer le
tabac, existait à l'article 4 du règlement, qui se lisait
à peu près comme suit: "Aux fins du paragraphe c du paragraphe 3
de l'article 19, tout tabac destiné à la vente pour consommation
au Québec et qui s'y trouve doit porter une marque spéciale
d'identification". On ne mentionnait pas qui devait le faire. La modification
propose simplement de dire ici que dans le règlement on proposera qui
doit faire le marquage, quelle personne est autorisée à apposer
une identification, parce qu'on peut croire que si la personne qui met
l'identification n'est pas autorisée on ne contourne pas la contrebande.
Donc, il est important que la personne qui appose la marque sur le tabac soit
dûment autorisée à le faire et que le marquage se fasse
sous contrôle. Autrement, cela ne sert à rien.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, je présume que nous allons - parce que j'ai appelé
l'article 5 du projet de loi - appeler chacun des articles. Est-ce que c'est de
cette façon-là que vou3 vouliez procéder?
M. Desbiens: Oui. Je vous ferai remarquer, quand même...
C'est aussi bien d'y aller comme cela, hein?
Le Président (M. Lemieux): J'appellerai l'article 5,
article 13.1.
M. Desbiens: On votera globalement sur l'article 5 quand
même à la fin, c'est ça?
Le Président (M. Lemieux): Oui.
M. Desbiens: Parce que c'est complètement nouveau dans la
loi. Tous les paragraphes de l'article 5...
Le Président (M. Lemieux): Vous avez les cinq articles qui
suivent qui sont modifiés par l'article 5.
M. Desbiens: Tout ce qui apparaît à l'article 5, en
fait, vient remplacer, comme l'a souligné le député de
Montmorency, l'alinéa c du paragraphe 3 de l'article 19, c'est cela?
Sauf que ce qu'il a mentionné comme étant nouveau, cela
apparaissait déjè dans le règlement, si j'ai bien compris,
c'est cela?
À l'article 15.1, je n'ai rien. Cela irait, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 5, article
13.2. Je m'excuse, M. le député de Dubuc. J'ai compris tout
à l'heure qu'on adopterait, dans l'ensemble, l'article 5.
M. Desbiens: C'est cela.
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 5, article
13.2.
M. Séguin: M. le Président, l'article 13.2 vise a
permettre la vente ou la livraison hors du Québec de tabac
identifié pour la consommation au Québec, pour autant qu'une
autorisation ait été obtenue. Une telle autorisation n'est pas
nécessaire s'il s'agit de tabac prescrit par règlement, tels les
petites marques de cigarettes et les paquets de tabac coupé. Cette
permission déjà prévue au règlement actuel est
accordée puisque la contrebande est peu probable dans les produits
marginaux. La personne qui contreviendra aux dispositions du premier
alinéa, 13.1, devra payer une pénalité qui sera
égale au montant de l'impôt sur le tabac qui aurait
été payable si le tabac avait été vendu pour
consommation au Québec.
Ici, comme le libelle l'article 13.2, on vise le cas de tabac vendu
à l'extérieur du Québec où on veut astreindre cette
vente-là à l'obtention préalable du même certificat
qu'on vise pour la vente faite au Québec, étant donné que
le tabac provient de la même personne qui en fait la vente.
Le Président (M. Lemieux): Cela va, M. le
député de Dubuc?
M. Desbiens: C'est pour éviter que du tabac
identifié... Le tabac identifié ne peut pas être vendu
à un acheteur de l'Ontario, par exemple, et Il pourra être vendu
là une fois identifié. Qu'est-ce qui se passe pour du tabac qui
est produit au Québec et qui est vendu en Ontario? Il n'est pas
identifié, celui-là?
M. Séguin: C'est un peu l'exception qui est
mentionnée. C'est le tabac prescrit par règlement et qui vise des
petites marques de cigarettes ou des paquets de tabac coupé, de
production artisanale, parce que ce sont de petites quantités et que ces
productions-là sont connues du ministère.
M. Desbiens: Comment un fabricant de tabac ou de cigarettes qui
fabrique au Québec peut-il vendre des quantités importantes de
son produit en Ontario sans identification. Ou est-ce qu'il est automatiquement
identifié dès qu'il est produit?
M. Séguin: Ce ne sont pas des marques comme telles.
M. Desbiens: Cet article ne touche pas du tout le tabac qui est
produit en grande quantité, en aucune façon.
M. Séguin: En aucune façon. M. Desbiens:
Bon.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Desbiens: C'est donc le sens qu'on doit donner quand on lit
"...si ce tabac est prescrit par règlement". C'est cette série de
mots au premier alinéa de l'article 13.2.
Le Président (M. Lemieux): Les derniers mots du paragraphe
13.2 de l'article 5. M. le député de Montmorency.
M. Séguin: Pour répondre à votre question:
on me dit qu'il y a tellement peu de ce genre d'entreprises au Québec
qu'on peut les compter, qu'elles sont identifiées par le
ministère et qu'il y a une politique d'entente à leur sujet. On
connaît leur production et on contrôle les ventes de cette
façon» Ceci règle le problème en partant. Comme ce
sont de petites productions artisanales, on ne voulait pas les embêter
avec tout le système actuel.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez
terminé, M. le député de Dubuc?
M. Desbiens: Oui. Je reviendrai.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Au
deuxième alinéa de l'article 13.2, la façon dont je
comprends la description qu'on y fait, c'est que toute personne qui
délivre ou fait en sorte que soit livré hors du Québec
doit payer au ministre une pénalité qui est égale au
montant de l'impôt qui aurait dû être payable si cela avait
été vendu au Québec. Cela veut donc dire que si la
personne est contrainte à payer elle paie ce qu'elle aurait dû
payer. Je ne vois pas la pénalité là-dedans. Est-ce exact?
On dit essentiellement qu'elle aurait dû ou devrait payer
l'équivalent que si c'était vendu au Québec.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: C'est cela.
M. Parent (Bertrand): Mais la clause de
pénalité...
M. Séguin: Supplémentaire.
M. Parent (Bertrand): ...supplémentaire n'intervient pas
à cet article. On la retrouve plus loin. Est-ce exact?
M. Séguin: C'est exact.
M. Parent (Bertrand): Ce n'est pas à cet
article-là. Cet article dit tout simplement qu'elle doit payer au moins
ce qui aurait dû être payé en compensation ici au
Québec.
M. Séguin: C'est cela. On appelle cela une
pénalité, mais on aurait pu dire l'équivalent de la taxe
qui aurait dû être payée. Mais c'est une
pénalité comme telle étant donné que nous sommes
ici en transit.
M. Parent (Bertrand): Ce n'est pas une infraction. Ce n'est pas
la dimension pénalité-infraction qu'on retrouve plus loin
à l'article 14?
M. Séguin: Non.
M. Parent (Bertrand): D'accord. Je comprenais que c'était
une pénalité, mais cela n'en était pas une, en fait.
M. Séguin: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Avez-vous terminé, M. le
député de Bertrand? M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: À l'article 13.2, au premier alinéa,
on dit que "toute personne qui désire vendre, délivrer ou faire
en sorte que soit livré... doit en demander l'autorisation au ministre
sauf si la personne à qui ce tabac est vendu ou livré - donc sauf
l'importateur - est partie à une entente conclue avec le ministre." Dans
quelles circonstances un importateur peut-il conclure une entente avec le
ministre?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Voici, pour expliquer le
phénomène, c'est que vous avez plusieurs producteurs qui font
affaires au Québec et en même temps en Ontario. Si on n'avait pas
précisé la modalité, certains producteurs qui seraient
assujettis à la nouvelle réglementation en ce qui concerne le
tabac qu'ils écoulent au Québec pourraient ne pas être
assujettis à la même réglementation pour le tabac qu'ils
vendent, par exemple, en Ontario. Parce que ces producteurs, dans la plupart
des cas, sont déjà sous entente avec le ministère, ils
peuvent être exemptés d'être astreints aux nouvelles mesures
étant donné qu'ils sont déjà sous entente, donc
déjà sous le contrôle et la supervision du ministère
dans l'ensemble de leurs opérations. Ceci est exact pour l'ensemble des
producteurs de tabac qui, comme vous le savez, sont des maisons importantes,
des sociétés importantes avec lesquelles le ministère a
des ententes depuis de nombreuses années.
M. le ministre du Revenu vous a expliqué ce matin que le fardeau
de percevoir la taxe n'appartient pas, en pratique, nécessairement, au
détaillant, que par des mesures ou des ententes vieilles d'à peu
près 25 ou 30 ans c'est le grossiste qui comptabilise et remet la taxe
à la place du détaillant, ce qui est fort pratique, surtout dans
le cas du carburant où les litres sont vendus en quantité
phénoménale. Vous pouvez imaginer le nombre de rapports, au 15 de
chaque mois, qui serait expédié. Pour vous donner quelques
chiffres, il y aurait environ 5300 détaillants de carburant au
Québec et, dans le tabac, plus de 20 000. Imaginez toute la
comptabilisation de toutes leurs ventes. Alors que là, en termes de
grossistes, les ententes pour le carburant regroupent environ 15, 16 ou 20
grossistes au maximum et, dans le tabac, une centaine. Vous voyez tout de suite
qu'en faisant des ententes avec les grossistes, c'est beaucoup plus simple et
le contrôle est aussi bon, sinon meilleur, étant donné que
la vente des grossistes aux détaillants est enregistrée de toute
façon et qu'on est en mesure d'en apprécier les montants et
l'application de la taxe.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 5, paragraphe 13.2? Non. J'appelle l'article 13.3
de la section III.1, Vérifications, inspections et saisies, de l'article
5 du projet de loi 80.
M. le député de Montmorency.
Vérifications, inspections et saisies
M. Séguin: Oui, M. le Président. L'article 13.3 qui
introduit un alinéa nouveau est d'ordre technique. Il a pour but de
mettre dans le texte de loi même ce qui était déjà
contenu, en partie, à l'article 9 du règlement qui existe
déjà, relativement à l'examen sans mandat d'un
véhicule; à la différence qu'un tel examen ne sera pas
possible dorénavant entre 22 heures et 7 heures, à la condition
que les véhicules soient immobilisés pour la nuit. Cette
modification nous apparaît nécessaire parce que,
dorénavant, le pouvoir de déterminer le motif et les
critères permettant de procéder à une immobilisation sera
sous le contrôle du législateur et non pas du règlement qui
est plutôt sous l'exercice du ministre de qui relève l'application
du règlement. Afin de compléter simplement l'information, il
semblerait utile pour les membres qui n'ont peut-être pas devant eux
l'article 9 du
règlement actuel, d'en faire une courte lecture. C'est
très court.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Montmorency.
M. Séguin: Pour se situer par rapport à l'ajout qui
est suggéré, on dit, à l'article 9 du règlement
actuel qui est en application: "Un agent de la Sûreté du
Québec, ou toute autre personne autorisée à ces fins par
le ministre du Revenu, peut sans mandat: arrêter pour examen tout
véhicule lorsqu'il a des raisons de croire que ce véhicule
transporte du tabac destiné à la vente pour consommation ou
utilisation au Québec et qui ne porte pas la marque spéciale
d'identification prescrite par les articles 5 et 6." Donc, je
répète que le nouvel article 13.3 limite cette inspection lorsque
le véhicule est immobilisé pour la nuit. En ce sens,
l'immobilisation ou l'inspection ne peut se faire entre 22 heures et 7 heures
le matin. (15 h 45)
Deuxièmement, cette mesure maintenant intégrée
à la loi nous semble plus appropriée, en étant sous le
contrôle direct du législateur et non pas en faisant partie d'un
règlement accessoire à la loi.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Montmorency? Y a-t-il des interventions?
M. le député de Dubuc, sur le paragraphe 13.3 de l'article
5 du projet de loi 80. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, ai-je bien compris
qu'à l'article 9 du règlement que vient de nous lire le
député de Montmorency on parle d'un agent de la
Sûreté du Québec?
M. Séguin: C'est exact; ou toute autre personne
autorisée.
M. Desbiens: C'est écrit aussi: toute autre
personne...?
M. Séguin: Oui. Si vous voulez, je peux...
M. Desbiens: Non, cela va.
M. Séguin: Un agent de la Sûreté du
Québec ou toute autre personne autorisée à ces fins par le
ministre du Revenu.
M. Desbiens: Je n'avais pas saisi cette partie-là. Qui est
cette personnne-là, habituellement? Un fonctionnaire ou quoi?
M. Séguin: Ce sont des enquêteurs du
ministère.
M. Desbiens: Des enquêteurs du ministère?
M. Séguin: Oui.
M. Desbiens: Maintenant, il y a une chose qui m'apparaît
importante à la deuxième ligne du paragraphe 13.3, au premier
paragraphe: "sans mandat". On sait que, là, on touche... J'en ai
parlé hier soir lors de mon intervention. II y a là, je pense,
une relation avec la Charte des droits et libertés de la personne et le
ministre de la Justice, depuis deux ans, travaille à la révision
complète de toutes les lois afin de retracer et d'éliminer de nos
lois cette partie ou cette autorisation qui permet d'agir sans mandat. Je ne
comprends pas qu'on ne profite pas justement du fait que l'on vote une loi
nouvelle pour l'éliminer immédiatement. L'arrestation sans mandat
contrevient à la charte des droits.
M. Séguin: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin; ...je veux simplement faire valoir une nuance; il ne
s'agit pas ici de l'arrestation du contribuable ou de l'individu. Il s'agit
simplement de permettre à une personne autorisée ou à un
agent de la paix ou, plutôt, à un agent de la Sûreté
du Québec, sans mandat - je vous expliquerai après pourquoi le
"sans mandat" et je pense qu'on le comprendra assez facilement -simplement
d'immobiliser un véhicule. Donc, lorsqu'on parle d'arrêter, on ne
parle pas d'arrêter un individu, on parle d'arrêter un
véhicule. Il y a quand même une nuance importante. Que je sache,
la charte canadienne des droits et libertés ou la charte
québécoise ne s'appliquent pas aux droits d'un véhicule si
ce véhicule est immobilisé. Ce qu'on vise ici, c'est
essentiellement à permettre à un fonctionnaire ou à un
agent de la Sûreté du Québec, dans le cadre de ses
fonctions, s'il a des motifs sérieux et raisonnables de croire qu'une
infraction est commise, d'intercepter un véhicule pour l'inspecter,
simplement. Ce genre de pouvoir existe ailleurs et ce genre de pouvoir existe
également déjà dans la Loi sur les impôts et dans la
Loi sur le ministère du Revenu pour permettre à un fonctionnaire,
lorsqu'il croit qu'à l'étude d'un dossier ou que dans des
rapports avec certains contribuables, une infraction a été
commise, de prendre connaissance d'information ou même d'aller
jusqu'à pénétrer dans un lieu qui appartient au
contribuable pour se saisir de documents, etc.
Je comprends que ces situations peuvent donner lieu, à
l'occasion, à certains reproches de la part des contribuables ou encore
à des abus. Cependant, le droit ici
est donné "sans mandat", tout simplement parce que ce genre
d'infraction se constate en pratique de visu. On peut imaginer un agent de la
Sûreté du Québec stationné sur l'autoroute, un
camion transportant, semble-t-il, différentes marchandises passe et tout
agent de la paix, tout agent de la Sûreté du Québec - cela
conformément à l'application générale du Code
criminel ou d'autres lois -lorsqu'il a un motif sérieux de croire qu'une
infraction peut être commise, peut intercepter un véhicule,
à tout le moins, pour l'inspecter. Comment imaginer qu'on imposerait un
mandat préalable à un agent de la paix ou à un policier
qui a des doutes sur la qualité de la marchandise que transporte un
camion, pour d'abord s'adresser au juge et revenir 48 heures après sur
l'autoroute rechercher le camion? Je pense que cela est impossible.
Ce qui est suggéré ici, c'est simplement de permettre
à ces agents, dans le cadre de leur devoir, d'immobiliser un
véhicule, de l'inspecter pour savoir si, effectivement, il transporte du
tabac ou du carburant - on le verra dans l'autre projet de loi qui est au
même effet. Si, effectivement, il constate une infraction ou que ses
doutes persistent, on voit qu'après il y a quand même d'autres
obligations à suivre qui seront de s'adresser à un juge, s'il
veut effectuer une saisie. Là, on peut croire que le juge, s'il accorde
la saisie, l'a fait après un examen qu'on peut penser sérieux
afin de protéger les droits de la personne.
Ici, tout ce qu'il s'agit de consentir, c'est que ce qui existait
déjà avant l'article 9, qui était de permettre, sans
mandat, d'arrêter le véhicule pour l'examiner, on le reconduit
tout simplement. En pratique, c'est la seule façon qu'a un agent, dans
son devoir, pour intercepter un véhicule qui transporte des marchandises
jugées suspectes à l'application de la loi actuelle.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, vous pouvez continuer.
M. Desbiens: II reste une chose qui n'apparaît pas, sauf
erreur, dans le règlement 9 que nous citait tantôt le
député de Montmorency. "En tout Heu" et il nous parle d'un
arrêt sur une autoroute. Je comprends bien la logique de sa
réponse, mais, en tout lieu, cela veut dire qu'il va entrer sur une
propriété privée où il y a un camion qui est
stationné et qu'il a le droit de l'inspecter sans mandat. Est-ce que
cela ne contrevient pas aussi à la charte, le respect de la
propriété qui est inclus dans la charte?
M. Séguin: Je m'excuse, M. le député. J'ai
reçu une nouvelle qui m'a un peu...
M. Desbiens: Réjoui?
M. Séguin: ...qui m'a fait plaisir. Ma petite fille devait
être opérée demain et elle ne sera pas
opérée. Cela m'a distrait un peu.
M. Desbiens: Bravo!
Le Président (M. Lemieux): Ce sont des choses qui
arrivent. Je pense que M. le député de Dubuc comprend très
bien cela.
M. Desbiens: J'en suis heureux pour le député.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez entendu, M. le
député de Dubuc, les gens applaudissaient largement tout à
l'heure.
M. Desbiens: Ils applaudissent de l'autre côté.
M. Séguin: Je suis content. M. Desbiens: Oui, je le
crois.
Le Président (M. Lemieux): Ce sont les petites choses de
la vie, M. le député de Montmorency. M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Je vais répéter ma question. Toujours
dans le même paragraphe, on dit "sans mandat". Donc, je comprends que,
sur une autoroute, s'il y a un camion, il est logique que l'agent n'ait pas de
mandat pour l'arrêter, mais, quand il s'agit d'un véhicule qui est
déjà stationné... On dit "en tout lieu". Donc, il peut
être stationné dans la cour du propriétaire du
véhicule pour la nuit et l'agent a le droit, là encore, d'aller
sans mandat perquisitionner dans le camion? Cela me semble contrevenir à
cette partie de la charte des droits de la personne qui traite du respect de la
propriété privée.
M. Séguin: Remarquez que, lorsque le véhicule est
immobilisé pour la nuit hors d'un lieu public et que toute
activité reliée à son usage a cessé, par exemple,
si le véhicule est simplement stationné, on dit qu'on ne peut
sans mandat effectuer l'immobilisation. Ce qui est prévu au premier
alinéa, c'est entre 22 heures et 7 heures. Cela donne quand
même... C'est parce que, là, on est sûr que c'est en dehors
des heures de commerce.
M. Desbiens: Non, mais...
M. Séguin: Donc, à partir de 22 heures, il ne peut
pas pénétrer...
M. Desbiens: Mais, entre 7 heures et 22 heures, l'agent peut
aller aussi, sans permis, en tout lieu? En tout temps, sauf durant ces
heures-là?
M. Séguin: II peut effectivement le
faire, mais, comme je l'ai indiqué, comme le véhicule est
déjà immobilisé, donc, il n'a pas à l'immobiliser,
il peut simplement inspecter ou regarder si le véhicule... Remarquez que
c'est seulement s'il a des motifs sérieux. L'agent ou le fonctionnaire,
dans l'exercice de ce droit, comme vous le savez, peut encourir une
responsabilité si, par après, il s'avère qu'il a
abusé de son droit. C'est comme pour tout policier, agent de la paix ou
fonctionnaire qui, dans le cadre de son travail, outrepasse son mandat: il est
sujet à des réprimandes, il est sujet à des dommages et
intérêts, responsabilité, etc. Le contribuable, les
tribunaux, qui sont les meilleurs juges et les meilleurs gardiens de
l'application de la loi pourront intervenir pour faire cesser
l'opération jugée abusive et, s'il y avait saisie, faire cesser
la saisie et faire annuler la saisie s'il y avait lieu.
On est toujours dans un domaine où, quand même, ce genre de
mesure se fait avec circonspection. Comme la mesure existe maintenant dans le
règlement et qu'il n'y a pas, dans le passé, eu beaucoup de cas
-peut-être même aucun cas rapporté à tout le moins
à ma connaissance ni à la connaissance des gens ici - il ne
semble pas avoir eu dans le passé de nombreux cas qui auraient
révélé un abus de l'article 9 du règlement, lequel
est reproduit ici. Donc, on peut espérer et on peut croire
raisonnablement qu'il n'y aura pas d'abus et que, s'il y en avait - rien n'est
parfait - autant le ministre, autant les tribunaux, autant le Parlement
pourront intervenir. Et certainement que les tribunaux sont là, il ne
faut jamais l'oublier; ils sont les premiers gardiens de la loi et le
contribuable pourra faire intervenir les tribunaux.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Je constate... Oui.
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous compléter
votre réponse, M. le député de Montmorency?
M. Séguin: On me donne un exemple qui est
intéressant juste pour illustrer et peut-être pour vraiment
convaincre les membres de l'Opposition du bien-fondé de l'idée.
Une personne qui, par exemple, transporterait de la marchandise non conforme
à la loi... Pardon?
M. Dufour: Une personne ou un véhicule.
M. Parent (Bertrand): Une personne qui transporte dans un
véhicule des marchandises jugées suspectes ou non conformes
à la loi, qui serait prise, par exemple, en filature ou qui se sentirait
observée, pourrait simplement - en fait, c'était la pratique
qu'il y avait jusqu'à maintenant - rentrer dans un lieu privé.
Autrement dit, si elle quittait l'autoroute et entrait dans une
propriété privée, le policier qui avait suivi le camion ou
le véhicule, entrait sur la propriété privée,
était sujet è, contestation, réprimande ou même
poursuite du propriétaire pour intrusion, etc. Là, il y avait
tout un quiproquo juridique à savoir si le policier dans la poursuite
d'une infraction peut, vous savez, se rendre jusqu'au véhicule et
même jusqu'à l'arrestation. De sorte qu'on veut simplement
permettre ici que l'agent de la paix de la Sûreté du Québec
ou le fonctionnaire puisse à tout le moins se rendre jusqu'au
véhicule et l'inspecter. Je ne crois pas qu'immobiliser un
véhicule pour l'inspecter puisse porter préjudice à un
citoyen qu'il ne cacherait pas dans son véhicule des produits non
conformes à la loi.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: C'est parce que, tantôt, je croyais que
c'était une inscription nouvelle. Le député de Montmorency
n'avait pas dans sa lecture mentionné "en tout lieu". Je vois dans le
règlement que c'était déjà là.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, y a-t-il d'autres interventions sur le paragraphe 13.3? M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Oui. Merci. Dans le cas pratique, pour
faire suite aux explications que le député de Montmorency vient
de donner, si un véhicule en provenance des États-Unis se
retrouve au Québec après avoir passé la frontière,
qu'il n'est pas nécessairement détenteur d'un certificat
d'enregistrement avec sa marchandise et qu'il s'en vient ici pour vendre au
Québec, dans la pratique, cela voudrait dire à la limite que nos
agents de la Sûreté du Québec ou toute autre personne
pourraient immobiliser, confisquer et saisir cette marchandise qui arrive dans
une période, si on veut, de transition. Ceci obligerait, dans les faits,
tout transporteur de marchandise, avant de quitter les États-Unis avant
de franchir les douanes et d'entrer au Québec, d'avoir un certificat,
sinon vous pourriez être en position de l'arrêter
immédiatement sur n'importe quelle autoroute. (16 heures)
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Je voudrais juste souligner qu'il y a quand
même deux volets à l'article 13.3. Le premier, c'est immobiliser
et inspecter un véhicule. Je pense qu'on en
convient. Le deuxième aspect, c'est que celui qui procède
à l'examen, un agent de la Sûreté du Québec ou une
personne autorisée par le ministre, s'il a des motifs raisonnables de
croire que le tabac trouvé est effectivement destiné à la
vente, donc qu'il faut qu'il y ait... Si vous me permettez un jeu
d'associations, c'est un peu le même test que font les policiers
lorsqu'ils sont à la recherche de drogue, en matière criminelle,
à savoir s'il y a une quantité de drogue suffisante pour croire
qu'il y a trafic ou si c'est simplement un cas de possession illégale
d'une drogue.
Le Président (M. Lemieux): Un lien de causalité. M.
le député de Montmorency.
M. Séguin: Effectivement, M. le Président, vous
avez le mot juste.
Donc, la personne qui a des motifs va quand même s'assurer qu'il y
a matière à commerce ou que la quantité justifie de penser
que c'est pour en faire le commerce. C'est pour éviter qu'on
arrête quelqu'un qui aurait quatre cartons de cigarettes. Remarquez que
même cette quantité, dans certains cas et selon les circonstances,
peut amener l'examinateur à penser qu'il y a infraction. On ne peut pas
quantifier à l'avance, mais il doit avoir des motifs sérieux,
qu'il devra expliquer éventuellement, de croire qu'il y a vente et que
les autres conditions de la loi ne sont pas respectées,
c'est-à-dire que ni l'agent percepteur ni le vendeur n'ont le certificat
et que, par exemple, la marchandise, le tabac, n'est pas dûment
marqué, tel qu'on l'a vu antérieurement. À ce
moment-là, il peut ordonner l'immobilisation jusqu'à autorisation
du ministre ou jusqu'à ce qu'un juge ait statué sur la demande
visée à l'article 13.4, que le ministre doit introduire avec
diligence raisonnable et que la saisie ait été effectuée
le cas échéant. On verra à l'article 13.4.
S'il n'y a pas d'autre question, M. le Président, on pourrait
d'ailleurs passer immédiatement à l'article 13.4
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
questions? M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Peut-être une dernière
question sur l'article 13.3. Vous mentionnez l'exception: "Toutefois, lorsque
le véhicule est immobilisé pour la nuit hors d'un lieu public et
que toute activité reliée à son usage a cessé, une
personne visée au premier alinéa ne peut, sans mandat, entre 22
heures et 7 heures, effectuer un tel examen." C'est donc dire que vous ne
voulez pas qu'en période où le véhicule est
stationné pour la nuit il puisse être inspecté de quelque
façon que ce soit. Pourquoi, à ce moment-là, dit-on
"stationné pour la nuit hors d'un lieu public"? Le camion qui est dans
un lieu public, dans le parc de stationnement d'un centre commercial pour la
nuit deviendrait inspectable?
M. Séguin: C'est-à-dire qu'un agent de la
Sûreté du Québec ou une personne autorisée n'est pas
empêchée de pénétrer dans un lieu public comme
n'importe qui, pensons au parc de stationnement d'un centre commercial, par
exemple. C'est seulement dans un lieu privé que l'examinateur, l'agent
ou le fonctionnaire pourrait enfreindre le droit du propriétaire de
sorte que, si c'est fait entre 22 heures et 7 heures, cela lui prend un mandat.
En dehors de ces heures et à la condition que ce soit dans un lieu
public, il n'a pas besoin de mandat. Je ne sais pas si cela répond
à votre question.
M. Parent (Bertrand): Je comprends l'idée...
M. Séguin: Juste une rectification. Les parcs de
stationnement ou les espaces qui sont la propriété, par
exemple... Je disais que le parc de stationnement d'un centre commercial est un
lieu public; ce n'est pas exact. Au contraire, c'est un lieu privé. Le
lieu public serait les routes, les voies de passage publiques qui appartiennent
habituellement aux municipalités, je présume. Les centres
commerciaux sont considérés comme privés, les motels, etc.
La cour de stationnement et les voies d'accès sont habituellement la
propriété, évidemment, du propriétaire, et c'est
privé à ce titre-là.
M. Dufour: II n'a pas le droit quand il s'en vient là.
M. Séguin: C'est cela. Mais il n'en demeure pas moins que,
si le véhicule est dans un lieu non public, entre 22 heures et 7 heures,
cela prend un mandat.
M. Parent (Bertrand): Je comprends ce que vous voulez dire. Sauf
que le type qui s'installe près d'un motel sur le bord de la route avec
son chargement, son camion, il n'a pas de place parce que c'est un petit
stationnement et il laisse son véhicule en bordure de la route. Lui, il
peut se faire fouiller. Je pense que ce qui est recherché par la loi, ce
que je comprends de cet esprit-là, c'est que, sans s'enfarger dans les
fleurs du tapis, essentiellement, j'imagine, entre 22 heures et 7 heures, on ne
veut pas littéralement aller assaillir les gens.
M. Séguin: Non.
M. Parent (Bertrand): Mais il arrive des cas où le
camionneur avec son chargement ne peut entrer dans un stationnement de motel,
parce qu'il n'y a pas suffisamment
d'espace. Il laisse son véhicule en bordure de la route. Il n'est
pas conscient de la loi et il se fait littéralement...
M. Séguin: Pour éviter peut-être certains
événements nocturnes qu'on a vus dans une certaine
municipalité où les inspections de nuit peuvent avoir des
rebondissements sérieux, surtout quand une porte sépare
l'inspecteur de ceux qui sont à l'intérieur et qu'avant de
frapper on perce la porte de projectiles... On peut imaginer que, la nuit, une
inspection peut soulever... Surtout que la personne se trouvant dans un lieu
privé peut croire qu'il y a intrusion et qu'elle est en légitime
défense, etc. Je pense qu'on peut imaginer des scénarios
compliqués.
M. Parent (Bertrand): Je comprends. Mais ne seriez-vous pas
d'accord pour que, tout simplement, on enlève les mots "un
véhicule immobilisé pour la nuit" et les mots "hors d'un lieu
public", parce qu'il arrivera des cas où le véhicule sera dans un
lieu public et on y aura accès à ce moment-là?
M. Séguin: Si c'est en dehors d'un lieu privé?
M. Parent (Bertrand): Oui.
M. Séguin: Si c'est une voie publique?
M. Parent (Bertrand): Oui.
M. Séguin: Effectivement. Par exemple, un camion est
stationné le long d'un autoroute où le conducteur prend quelques
heures de sommeil.
M. Parent (Bertrand): C'est cela.
M. Séguin: Remarquez qu'actuellement n'imparte quel
policier de la route peut effectivement arrêter un conducteur pour un
contrôle et lui poser des questions. Donc, on n'ajoute pas vraiment... Et
remarquez, ici, que c'est toujours pour inspection. Le droit de l'inspecter n'a
pas pour lui de conséquence d'aucune sorte. Comme le véhicule est
déjà immobilisé dans la situation dont on parle, il n'y a
même pas une intervention pour l'immobiliser. C'est simplement un
policier ou un fonctionnaire des enquêtes spéciales du
ministère qui va s'approcher du véhicule pour l'inspecter et pour
vérifier s'il lui semble, avec motifs sérieux et raisonnables,
qu'une infraction a été commise. S'il conclut que oui et que son
doute persiste, là, il pourra procéder à l'autre
étape qui est la saisie du produit en question.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Pour conclure, M. le député,
vous conviendrez qu'il pourrait se trouver des cas où le véhicule
est immobilisé pour la nuit sur une voie publique et où le
conducteur dudit véhicule ne pourra nécessairement pas être
à l'intérieur du véhicule. Il peut être dans un
motel à quelques pas de là, et le chargement pourra être
inspecté. On devra trouver... C'est une situation assez spéciale,
mais qui pourrait se produire et, du fait qu'il n'ait pas mis son
véhicule dans un lieu privé, il est sujet à... Dans le cas
que vous mentionniez, tout véhicule peut être inspecté
à n'importe quel moment par la Sûreté du Québec, je
comprends, mais on peut penser à des cas où il y a des
chargements avec des individus qui ne sont pas à l'intérieur. Ils
sont partis se coucher pour la nuit.
M. Séguin: Remarquez que règle
générale, un véhicule n'a jamais le droit de stationner le
long d'une voie publique, certainement pas pour un arrêt
prolongé.
M. Dufour: Dans certaines municipalités.
M. Séguin: Dans certaines municipalités, cela se
peut, le long d'une route, dans une ville, par exemple. À ce
moment-là, ce qu'on cherche, nous, c'est de permettre à un agent
de la paix ou un fonctionnaire autorisé, lorsqu'il a des motifs... Il
faut toujours voir qu'il y a quand même deux balises pour s'assurer qu'il
n'y ait pas d'abus. Il doit avoir un motif sérieux, il en répond,
comme en répond le ministère et le ministre vis-à-vis du
contribuable qui prétendrait avoir été abusivement
traîté ou considéré, etc. Deuxièmement, les
tribunaux, dans ce genre de droit, ont toujours droit de regard et peuvent
intervenir. Dans certains cas, ils peuvent adjuger des dommages et
intérêts sur des poursuites au civil, si le plaignant maintient et
démontre qu'il a malencontreusement fait l'objet d'une erreur ou qu'on
l'a immobilisé inutilement et que cela lui a porté
préjudice, lésé, etc. Dans l'exercice des
différents droits de la fonction judiciaire ou quasi judiciaire ou
ministérielle ou quoi que ce soit, on n'est pas à l'abri de
certains problèmes de cette nature, mais je pense que les balises sont
là. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Chauveau.
M. Poulin: À l'article 13.3, troisième paragraphe,
cinquième ligne, j'aimerais qu'on m'explique le sens de la phrase:
"...il peut ordonner que le véhicule soit immobilisé
jusqu'à autorisation au contraire du ministre..."
Le Président (M. Lemieux): Article 13.3, troisième
paragraphe, "il peut ordonner que le véhicule soit immobilisé
jusqu'à autorisation au contraire du ministre"; est-ce que vous faites
référence à l'expression "au contraire du ministre"?
M. Poulin: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Législativement, M. le
député de Montmorency, est-ce...
M. Séguin: L'expression "il peut ordonner que le
véhicule soit immobilisé jusqu'à autorisation au
contraire", c'est-à-dire jusqu'à ce qu'on en décide
autrement.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Séguin: Oui, jusqu'à ce qu'on en
décide...
M. Desbiens: On ne pourrait pas dire seulement "autorisation
contraire au ministre".
M. Séguin: On dit "autorisation au contraire du ministre"
parce que l'expression "au contraire", selon les linguistes, est un
français plus acceptable que "autorisation contraire"; apparemment, il
faut dire "autorisation au contraire".
M. Dufour: C'est clair.
Le Président (M. Lemieux): Merci, monsieur...
M. Gratton: ...il ne faut pas s'imaginer que la façon dont
on parle...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Je voudrais revenir sur ce que le député
de Bertrand disait concernant la visite d'un véhicule qui est
stationné hors d'un lieu public entre 22 heures et 7 heures du matin.
S'il est hors d'un lieu public, tel qu'est libellé l'article, cela
voudrait dire que, durant ce temps, cela ne donne pas le pouvoir à
l'agent de demeurer sur la propriété privée pour faire la
surveillance. Il n'a pas le droit d'être là. Ce qui voudrait dire
qu'il pourrait y avoir un transfert de marchandise dans un autre
véhicule à l'insus de l'inspecteur ou du percepteur.
M. Séguin: Je vous donne l'exemple suivant: Si un camion
rentrait dans le garage d'une propriété privée pour la
nuit, c'est le cas où il pourrait être difficile effectivement
pour quelqu'un qui n'a peut-être pas de motif suffisant pour
procéder immédiatement à une saisie ou à une action
plus coercitive de simplement rentrer sur les lieux. S'il ne découvre
pas effectivement l'infraction et qu'il n'y a pas mandat, il va être
sujet à reproche. Dans le cas dont on parle, s'il a des motifs
sérieux, il obtiendra un mandat d'urgence qui, comme vous le savez, peut
s'obtenir en quelques heures de nuit. Il s'agit, vous savez, d'être
raisonnable. Évidemment, si l'agent ou le fonctionnaire est très
convaincu qu'il y a infraction parce qu'il a fait une filature et qu'il sait
effectivement que le camion est là, il va procéder avec un mandat
et il sera d'ailleurs escorté habituellement par des agents de la
Sûreté du Québec qui, eux, dans leur mandat de policier,
peuvent éventuellement peut-être faire appel à la Loi sur
les poursuites sommaires ou à d'autres lois pour expliquer leur
intervention, ayant constaté l'infraction. (16 h 15)
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela répond
à votre question, M. le député de Dubuc?
M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Il y aurait peut-être un autre point et il me
semble que cela soit contraire à ce que l'article dit tout au long.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le
député.
M. Dufour: On dit: Le pouvoir de l'agent de la
Sûreté ou d'une personne autorisée peut permettre
d'arrêter un véhicule. Donc, cela suppose au départ qu'il y
a une personne, quelqu'un à l'intérieur du véhicule.
Lorsque le véhicule est stationné dans un lieu public et que
l'agent peut s'autoriser à faire l'inspection, il n'y a aucun endroit
où c'est écrit qu'il doit y avoir une personne dans le
véhicule. Ceci veut dire que, lorsque le véhicule est
immobilisé pour la nuit dans un lieu public - au lieu de dehors, parce
qu'il faut faire l'interprétation - une personne visée au premier
alinéa, l'agent de la Sûreté ou un individu qui est
autorisé par le ministre, pourrait aller visiter le camion. Il n'y a
personne dedans. Il pourrait aller le visiter. Ce serait presque une
infraction. Cela peut se faire. Je pense que c'est ce que mon collègue
de Bertrand essayait de soulever tout à l'heure. Pourquoi, lorsqu'un
véhicule est stationné, avez-vous le droit, sans mandat, de le
visiter? C'est exactement la conclusion à laquelle j'en viens, à
la lecture de cet article-là: si le véhicule est
immobilisé pour la nuit dans un lieu public, même si son usage a
cessé, une personne...
Le Président (M. Lemieux): Je pense au paragraphe 2 de
l'article 13.3.
M. Dufour: ...visée au premier alinéa
pourrait, entre 22 heures et 7 heures, même s'il n'y a personne
dedans, le visiter.
M. Séguin: M. le Président, c'est une question de
jugement de la part de la personne responsable, soit un policier ou un
fonctionnaire. Il y a une question de jugement. La loi ne peut pas
prévoir tous les cas et ordonner toutes les situations a un
enquêteur pour savoir s'il doit ou non aller vérifier. On essaie
d'indiquer des circonstances qui protègent au moins la vie privée
des gens de sorte que, quand c'est stationné dans un lieu privé
entre 22 heures et 7 heures, cela prend un mandat. Au moins, cela
préserve ce qui nous semble être un minimum. Pour le reste, j'ai
indiqué qu'il y avait deux barrières: la première, c'est
le motif raisonnable. Cela veut dire que le fonctionnaire qui n'aurait pas de
motif raisonnable qui arrive, voit un camion immobilisé depuis une
demi-heure sur une rue et décide de fracasser une vitre pour inspecter
l'intérieur, si le propriétaire arrive, on peut imaginer
l'altercation qui va suivre. Le fonctionnaire en question devra s'expliquer et
même, peut-être, devra répondre de ses gestes comme tout
fonctionnaire, comme tout policier, etc.
On ne peut évidemment pas, d'un autre côté,
l'empêcher de le faire; autrement, on ne pourra pas contrecarrer la
contrebande. Tous les policiers ont, dans l'exercice de leurs fonctions,
certains pouvoirs qu'ils doivent utiliser avec le plus d'intelligence et le
plus d'efficacité possible. Je pense qu'en disant que lorsque c'est
stationné dans un lieu public et que la personne a des motifs
sérieux... Quels sont ces motifs sérieux? C'est peut-être
de constatée que le véhicule est là depuis trois jours, un
peu abandonné, que le véhicule a été
rapporté comme laissé stationné, sur le pare-brise se sont
accumulés des billets de stationnement et on se demande... Si la
personne constate que c'est un camion de livraison qui est susceptible de
porter des marchandises... Il faut qu'il ait des motifs sérieux de
relier ce véhicule-là, ne l'oubliez pas, au commerce du tabac.
Donc, il doit démontrer qu'il a suffisamment d'éléments
pour lui permettre de conclure qu'il a un motif raisonnable d'intervenir. S'il
ne l'a pas, il devra en répondre, comme le plaigant pourra, à ce
moment-là, s'il se croit victime d'une malencontreuse intervention,
abusive, ou quoi que ce soit, s'adresser aux tribunaux et, comme je l'ai
indiqué préalablement, pourra aussi s'adresser aux tribunaux
civils en réclamation de dommages et intérêts s'il croit
avoir été lésé.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article, pardon sur le paragraphe 13.3, section III.1 de
l'article 5 du projet de loi 80. Il n'y pas d'autres...
M. Desbiens: 13.4, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): ...interventions? J'appelle
l'article 13.4 de la section III.l de l'article 5 du projet de loi
80.
M. le député de Montmorency.
M. Séguin: L'article 13.4 a pour but de confirmer dans la
loi ce qui existe déjà, en partie, aux articles 9 et 10 du
règlement actuel. À la différence que toute saisie ou
perquisition devra, dorénavant, s'effectuer avec un mandat. Cela est
nouveau. C'est donc plus coercitif. C'est donc plus limitatif dans l'exercice
de la discrétion que ce que le règlement actuel, jusqu'à
maintenant, prévoyait.
Si vous me permettez, pour ceux qui n'ont pas devant eux copie des
articles 9 et 10, je pense qu'il serait utile...
Le Président (M. Lemieux): D'en faire lecture?
M. Séguin: ...que je les lise parce que c'est de cela
qu'on va parler.
Le Président (M. Lemieux): Vous pouvez faire lecture des
articles 9 et 10 du règlement, M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: L'article 9 dit: "Un agent de la
Sûreté du Québec ou toute autre personne autorisée
à ces fins par le ministre du Revenu peut, sans mandat: a) faire des
recherches et des examens dans tout lieu lorsqu'il a raison de croire que du
tabac destiné à la vente pour consommation ou utilisation au
Québec s'y trouve et ne porte pas la marque spéciale
d'identification prescrite par les articles 5 et 6."
L'article 10 dits "Un agent de la Sûreté du Québec
ou toute autre personne autorisée à ces fins par le ministre du
Revenu peut, sans mandat, saisir" - je dis bien saisir -"tout tabac
destiné à la vente pour consommation ou utilisation au
Québec qui ne porte pas la marque spéciale d'identification
prescrite par les articles 5 et 6, ainsi que tout véhicule en
transportant et tout distributeur automatique en contenant. Tout bien ainsi
saisi demeure sous la garde de la personne désignée à
cette fin par le ministre du Revenu jusqu'à ce qu'un tribunal
compétent en ait prononcé la confiscation à la suite d'une
poursuite sommaire suivant la Loi sur les poursuites sommaires" devant la Cour
provinciale, sessions de la paix, "intentée, au nom du ministre du
Revenu, où en ait ordonné la remise à son
propriétaire."
Comme on le voit, à la lecture du nouvel article 13.4 que je ne
lirai pas, on constate qu'il faut, dans le cas ici, procéder avec
l'autorisation d'un juge des sessions de la paix qui est accordée sur
demande ex
parte, c'est-à-dire en l'absence de l'autre partie contre qui on
demande la saisie. Autrement dit, c'est l'officier ou le policier qui seul, en
séance avec le juge...
Le Président (M. Lemieux): Sur dénonciation?
M. Séguin: ...sur dénonciation, demande la saisie,
"...d'une dénonciation faite sous serment par une personne qui a des
motifs raisonnables de croire qu'il y a en un lieu au Québec du tabac
destiné à la vente..." Remarquez ici que le tabac doit être
destiné à la vente pour consommation au Québec et que les
personnes n'ont pas le certificat. On dit que le ministre peut autoriser par
écrit tout fonctionnaire du ministère du Revenu ou toute autre
personne ainsi que tout agent de la paix à s'introduire dans ce lieu
pour y rechercher et saisir ce tabac ainsi que tout véhicule ou
distributeur automatique qui en contient. Donc, un fonctionnaire ou une
personne autorisée désignée par le ministre peut
procéder à la saisie mais après avoir obtenu
l'autorisation d'un juge des sessions. Ce qui me semble placer ce geste sous
l'égide du contrôle d'un tribunal, ce qui protège, à
tout le moins, les droits des personnes qui peuvent être sujettes
à la saisie.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de
Montmorency. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Merci, M. le Président. En tout cas, c'est
formulé différemment si cela existait déjà dans
l'article 10. Tout de même, dans l'article 13.4, premier alinéa,
huitième ligne, il est dit que le ministre peut autoriser, par
écrit, tout fonctionnaire du ministère du Revenu ou toute autre
personne qu'il désigne. Qui sont ces fonctionnaires? N'importe quel
fonctionnaire de son ministère ou...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Ce sont habituellement les fonctionnaires des
enquêtes spéciales. Cela peut être aussi certaines personnes
du domaine quasi judiciaire, par exemple, des huissiers qui peuvent être
mandatés pour procéder à la saisie. On sait que les
huissiers sont habilités et deuxièmement, ils sont souvent
organisés pour prévoir la garde des biens saisis. Donc, on pourra
éventuellement faire affaires avec des huissiers.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: M. le Président, si le texte de l'article
indique de façon explicite: tout fonctionnaire ou toute autre personne
qu'il désigne, je comprends que c'est n'importe quel fonctionnaire -
là, il faut comprendre qu'il s'agit pour ces personnes d'entrer dans un
lieu ou une bâtisse où il y a de la contrebande, s'introduire dans
ce lieu pour rechercher ou saisir du tabac, donc sur la ligue de jeu, dans un
nid de contrebandiers - n'imparte quelle personne qu'on pourrait envoyer
là. Cela veut-il dire que n'importe qui pourrait être
envoyé là, peut-on l'y obliger?
M. Gratton: Le ministre peut autoriser, la personne ne peut y
être obligée.
M. Séguin: Je rappelle que l'article 13.4 dit bien:
après avoir obtenu l'autorisation d'un juge des sessions de la paix. Ce
n'est quand même pas une décision du ministre qui est prise sans
autre contrôle ou approbation et, dans la demande qui est faite au juge
pour procéder à la saisie, les moyens d'effectuer la saisie sont
indiqués, le nom du fonctionnaire qui procédera à la
saisie, etc., selon la décision du ministre en question.
M. Desbiens: Mais ce peuvent être des opérations
dangereuses même, dans certains cas.
M. Séguin: Les personnes qui sont appelées à
procéder peuvent se faire aider d'un agent de la paix et la
définition d'agent de la paix vise d'abord et avant tout les policiers.
Donc, il peut arriver qu'effectivement, dans certains cas, il soit prudent pour
les fonctionnaires de se faire accompagner par des membres des forces
policières. Ceux qui ont suivi les séries
télévisées avec Elliot Ness comprendront qu'effectivement,
à l'occasion, il est plus prudent d'être accompagné.
M. Desbiens: II reste que c'est quand même surprenant un
peu, M. le Président. Dans le cas présent, selon le
député de Montmorency, le texte est clair. Il y a justement une
autorisation d'abord d'un juge des sessions; il y a eu un minimum de temps pour
préparer l'introduction et la saisie s'il y a lieu et pour faire appel.
Mais comme ça, à peu près à n'importe qui,
finalement. Alors, est-ce une opération qui a eu un minimum de temps
pour être préparée, puisqu'on a eu le temps d'aller devant
un juge des sessions?
M. Séguin: Remarquez que le ministre, lorsqu'il a à
prendre une décision dans ce sens, a intérêt à ce
que la saisie qu'il veut pratiquer se fasse dans le meilleur ordre possible et
avec le plus d'efficacité possible. Il est difficile d'imaginer qu'une
personne désirerait qu'une saisie se termine par une hécatombe ou
par un fiasco. De sorte qu'il est à présumer que le ministre et
les
fonctionnaires concernés prendront les décisions et les
mesures qui leur sembleront appropriées, à leur jugement et
compte tenu des circonstances. Vous comprendrez aussi qu'ils ne peuvent pas,
à chaque fois qu'il procèdent à une saisie, arriver avec
une escouade de 200 policiers pour intercepter chaque camion sur
différentes propriétés. C'est une question de bon jugement
et de faire une étude la plus approfondie possible. On n'est pas en
matière où ce type de procédure ou de mesures s'effectue
en grande quantité è tous les jours. Lorsque ce genre de dossier
commande une action particulière, il fait l'objet de plusieurs
interventions de différents fonctionnaires, etc. et de plusieurs
considérations pour être vraiment sûr qu'effectivement il y
a lieu de procéder. N'oubliez pas que ceux qui prennent les
décisions sont sujets à des réprimandes ou à des
poursuites, s'il fallait que l'intervention s'avère abusive, inutile ou
porte préjudice à ceux qui ont subi la saisie, ils peuvent
être assurés que le ministre, le premier, avant de procéder
ou les principaux fonctionnaires intéressés au dossier vont
s'assurer que, vraiment, cette action est commandée par le fait que la
situation n'offre pas d'autre choix. (16 h 30)
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Dubuc, il y a M. le député de Champlain.
Est-ce que cela répond à votre interrogation, M. le
député de Champlain?
M. Brouillette: Très bien.
Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le
député de Dubuc, suivi de M. le député de Chauveau
qui a demandé la parole. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Une dernière question. Tout simplement,
est-ce qu'un fonctionnaire comme cela, n'importe quel fonctionnaire peut
être requis d'agir ou toute personne... Est-ce qu'ils ont le droit de
refuser, est-ce que c'est dans les conventions collectives?
M. Séguin: Effectivement, un fonctionnaire qui croirait
qu'il y a danger pour lui pourrait toujours, bien sûr, indiquer le danger
et suggérer une autre voie, une autre façon. On dit simplement en
théorie... Remarquez qu'on est au niveau de la rédaction d'un
paragraphe et non pas d'analyser si, dans l'année, le ministre a
effectivement fait encourir à ses fonctionnaires des risques inutiles.
Il s'agit de savoir si, en théorie, le ministre peut permettre à
des fonctionnaires, à des personnes autorisées d'effectuer la
saisie.
Dans la pratique, M. le Président, en terminant...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: ...la division au ministère qui,
habituellement, fait office d'exécutant dans ce genre de travail, ce
sont les officiers des enquêtes spéciales qui sont habituellement
habiles et efficaces dans ce genre de travail. À l'occasion, ce peuvent
être d'autres personnes, suivant les circonstances. Il appartient au
ministre de désigner la personne qu'il croit la plus apte et la mieux
placée pour effectuer la saisie. Le ministre, de toute façon,
répond de sa décision au moins au Parlement.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Montmorency. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: C'est simplement pour ajouter une remarque. Je ne
voudrais pas que les fonctionnaires servent de chair à canon pour le
ministre.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député? M. le député de Chauveau, suivi de M. le
député de Bertrand. M. le député de Chauveau.
M. Paulin; Ce serait juste pour des statistiques. A-t-on une moyenne des
cas qu'on règle par année et est-ce qu'il y a eu des cas à
régler depuis le 2 décembre?
M. Séguin: On m'indique qu'il y aurait au grand maximum
entre 30 et 40 cas par année.
M. Poulin: II est sûr que c'est peut-être plus
difficile pour vous de répondre, mais la façon de les traiter
c'est qu'en principe on fait des interventions avec la Sûreté ou,
la plupart du temps, c'est réglé par les fonctionnaires?
M. Séguin: À l'occasion, les fonctionnaires ou les
personnes autorisées sont accompagnées de policiers, de membres
de la Sûreté du Québec ou d'autres corps, d'autres forces
policières. Cela peut arriver. C'est une question de jugement et
d'appréciation de la situation.
M. Poulin: Dans les 30 è 40 cas qu'on a par année,
est-ce que la Sûreté ou les corps policiers sont là
souvent?
M. Séguin: Disons que c'est beaucoup moins que plus. Il y
a peu de cas, finalement, qui requièrent l'intervention policière
pour accompagner les personnes autorisées.
M. Poulin: L'exemple qu'on voit le plus souvent dans ces
cas-là, est-ce que c'est la saisie de machines à cigarettes ou si
c'est le
trafic pur?
M. Séguin: On pense surtout à des véhicules
qui transportent de la marchandise et ce sont habituellement des
véhicules quand même assez imposants, assez importants du genre
camions, etc.
M. Poulin: Si on regarde les trois ou quatre derniers mois, on
n'a rien vu de spectaculaire dans les cas de saisies de cigarettes
jusqu'à ce jour? C'est pour cela que je me demandais s'il y avait
plusieurs cas ou non.
M. Séguin: Remarquez que le ministère ne publie pas
nécessairement toutes les saisies et vous comprendrez que ceux qui font
l'objet d'une saisie ne sont pas les premiers à avertir les journalistes
qu'ils ont fait l'objet d'une saisie.
M. Poulin: Non, mais, en principe...
M. Séguin: Donc, dans bien des cas, ce n'est pas
nécessairement publié, soit parce qu'une poursuite peut en
découler et qu'on ne veut pas nuire à la bonne marche d'un
procès éventuel, soit pour d'autres considérations. Ce
n'est pas systématiquement publié.
M. Poulin: Est-ce que tous ces cas-là sont amenés
en cour, si je me fie aux amendes...
M. Séguin: II y a quelques cas. Habituellement, quand le
ministère procède à des saisies, la tendance est de voir
ces cas-là portés devant les tribunaux ou de voir des poursuites
recommandées au ministère de la Justice. Cela est
fréquent.
M. Poulin: Merci.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Chauveau. M. le député de Bertrand, vous
avez demandé la parole relativement au paragraphe 13.4 de l'article 5 du
projet de loi 80.
M. Parent (Bertrand): Le député de Montmorency a
indiqué au début la référence aux articles 9 et
10...
Le Président (M. Lemieux): ...les articles 9 et 10 du
règlement.
M. Parent (Bertrand): C'est donc dire que l'article 13.4 vient
remplacer les articles 9 et 10 du règlement. Donc,
insérées dans la loi, ces parties 9 et 10 du règlement...
Ce n'est pas dit clairement que c'est en remplacement de cela. Habituellement,
on y fait référence.
M. Séguin: Pas nécessairement parce que, lorsqu'un
règlement est remplacé par une loi - on parle en pure
méthode de législation - on n'est pas obligé d'indiquer,
quand on procède par amendement à la loi, que cela abroge un
règlement. Le règlement est subsidiaire à une loi; donc,
il suffit de mentionner que l'on amende la loi actuelle, mais on n'est pas
obligé d'indiquer que l'on abroge tel règlement. Ce qu'on fait
ici, c'est que, dans le fond, on ne remplace pas vraiment en bloc les articles
9 et 10. L'article 9, on l'a vu antérieurement, est plutôt repris
à l'article 13.3 et ce qui était à l'article 10, la
question de saisir sans mandat, c'est maintenant quand même plus
sécurisant pour l'ensemble des citoyens si on parle en termes de
protection ou de droits de la personne puisque, maintenant, à l'article
13.4, on prévoit expressément que cette étape est sujette
à l'approbation préalable d'un juge des sessions, ce qui met sous
le contrôle judiciaire l'étape de la saisie ou de la
pénétration proprement dite à l'intérieur d'un
véhicule, pour examen, aux fins de saisir.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Montmorency. Est-ce que vous êtes...
M. Dufour: Cela répond...
Le Président (M. Lemieux): Cela va? Alors, M. le
député de Jonquière, avez-vous une autre intervention?
M. Dufour: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Je vous ai vu lever la main.
Oui, M. le député de Jonquière, s'il vous plaît!
M. Dufour: Je l'avais levée, mais je pensais que vous
l'aviez vue. C'est bien sûr que vous pouvez toujours me dire que cela
découle d'un règlement, qu'il y avait un règlement qui
nous permettait telle chose. On fait la loi en fonction du règlement et
on s'appuie là-dessus. J'ai bien l'impression que, quand on
décide d'écrire une loi, il y a un but recherché. C'est
certainement pour se donner plus de possibilités ou plus de
crédibilité par rapport aux lois. À mon avis, c'est une
loi où le ministre s'arroge un pouvoir discrétionnaire assez
grand. En fait, quand on regarde le but visé, c'est pour aller chercher
de l'argent. 11 y a des endroits où les problèmes sont plus
grands, dans d'autres ministères, et où il n'y a pas autant de
pouvoirs que là. On ne peut pas arrêter à vue tout le monde
pour n'importe quoi, n'importe comment. Cette loi permet d'agir ainsi. Cela va
plus loin. Même avec l'autorisation du juge des sessions de la paix, on
dit: Le ministre va écrire son texte pour
dire qu'il autorise telle personne ou telle autre personne et cette
personne va aller chercher d'autre monde. Je pense qu'à ce
moment-là cela va trop loin. Je pense que c'est un abus. Cela veut dire
que Jos Bleau qui est dans le chemin peut dire - c'est cela que cela dit - Tu
viens m'aider, on va s'introduire dans le lieu et on va aller chercher... C'est
cela que cela dit. Bien voyons! À moins que le législateur ne
veuille rien dire.
À lire le projet de loi, c'est ce qui est dit: "...toute autre
personne qu'il désigne, ainsi que tout agent de la paix que ce
fonctionnaire ou cette personne appelle à son aide..." L'agent de la
paix, ce fonctionnaire ou cette personne, cela veut dire qu'il peut appeler
à peu près n'importe qui pour se rendre sur les lieux. Vous allez
me dire: C'est sûr qu'il a un bon jugement. S'il avait tant de jugement
que cela, jamais personne ne se tirerait dessus. Jamais personne ne se tuerait.
Vous avez fait allusion, tantôt, au fait qu'il y en a qui
perçaient les portes. Il y a d'autres raisons, il y a d'autres endroits
où il s'en fait, des choses. J'ai peur des gens qui accordent une
confiance illimitée à tout le monde ou à peu près
en disant: II a un bon raisonnement, il a un bon jugement. Cela ne
s'achète pas, cela ne se vend pas dans les cannes, le jugement. Il y en
a qui en ont un peu moins que d'autres. Il me semble que, dans une loi comme
celle-là, si on prend la peine de l'écrire, même si cela se
base sur un règlement...
Une voix: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): Nous allons laisser M. le
député de Jonquière terminer.
M. Dufour: ...on pourrait peut-être aller chercher, dans un
point donné... Limitez un peu les personnes qui peuvent faire des
interventions. Si vous me dites que ce seront des agents de la paix, alors,
cela me rassure un peu parce que ces gens-là, de par leur métier,
ont cette façon là... En même temps, je pense que la
personne qui va faire la saisie a déjà un doute raisonnable et a
déjà fait un paquet de démarches qui ne laisseraient pas
autant de marge de manoeuvre que cela. Supposons que la personne refuse,
qu'est-ce qui arrive? L'agent de la paix dit: J'ai demandé à
telle personne de venir m'aider et elle n'est pas venue. Savez-vous qu'on
pourrait faire encore une belle cause avec cette affaire-là. Ce n'est
pas tout le monde qui est prêt à agir de cette
façon-là. Je ne pense pas que la santé et la vie des gens
soient en cause parce qu'il y a peut-être du tabac qui va se vendre sans
permission quelque part.
M. Séguin: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: ...je voudrais quand même faire quelques
commentaires. Ce n'est pas une personne qui peut être
arrêtée, je le répète, ce n'est qu'un
véhicule. Alors, il ne faudrait quand même pas s'inquiéter
de l'article 13.4, puisqu'il ne permet que d'immobiliser un véhicule et
de saisir du matériel, un produit, en l'occurrence...
M. Dufour: M. le Président...
M. Séguin: ...du tabac.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le...
M. Dufour: ...je voudrais invoquer le règlement.
Le Président (M. Lemieux): ...député de
Jonquière, je sais ce que vous voulez dire.
M. Dufour: Ce n'est pas juste le véhicule, parce que c'est
"...ou distributeur automatique". Cela pourrait être aussi dans un lieu
public. Cet article va plus loin que cela.
M. Séguin: Mais, un distributeur automatique, ce n'est pas
une personne.
M. Dufour: "...s'introduire dans ce lieu pour y rechercher et
saisir ce tabac ainsi que..." C'est une deuxième cause et, en même
temps... Il y a trois choses là-dedans.
M. Séguin: Toutes les interventions pour lesquelles on
veut donner l'autorisation à une personne - en fait, c'est l'article
13.4 - ne visent ultimement qu'à se saisir de matériel, qui est
du tabac qu'on croît illégalement en transit.
Dans la loi actuelle que nous étudions, nous n'avons rien
assujettissant une personne physique, un citoyen ou une citoyenne du
Québec, à quelque mesure que ce soit. Il n'y a aucune arrestation
de la personne, il n'y a pas de mandat contre la personne, il n'y a aucune
mesure judiciaire ou quasi judiciaire contre la personne. Nous ne parlons ici,
M. le Président, que de véhicules et de tabac. Et la seule fin
ultime de l'article 13.4... À moins que le député qui
vient de faire l'intervention ne m'explique qu'il n'a pas confiance à un
juge des sessions comme juge et arbitre ultime de l'autorisation que veut
donner le ministre à une personne, mais je crois qu'il faut, au
contraire, faire confiance. Contrairement à ce qui existait avant,
dorénavant, le ministre du Revenu, s'il a des motifs sérieux et
raisonnables de croire que du tabac se trouve illégalement dans un
véhicule donné, peut permettre à une personne de son choix
- donc, il autorise une
personne par délégation - d'effectuer la saisie, mais
toujours sous réserve de l'approbation préliminaire,
préalable, d'un juge des sessions. Je rappelle au député
que le pouvoir judiciaire a été institué, existe et
existera toujours pour, effectivement, être le juge ultime, l'arbitre et
le protecteur de l'application de la justice.
S'il arrivait qu'un citoyen ou qu'une citoyenne se sente
lésé parce qu'un juge des sessions a préliminairement
autorisé la saisie, il faut croire que le juge, dans sa sagesse, dans
son autorité et dans son devoir, à la suite du dossier qui lui a
été soumis à la demande du ministre du Revenu, a convenu
lui aussi qu'il devait autoriser la saisie parce qu'il avait des motifs
sérieux de croire qu'il y avait matière à saisie.
Alors, de quoi se plaindrait-on? On se plaindrait que le ministre n'ait
pas de jugement, qu'un juge des sessions manquerait... Il me semble qu'on
accorde...
M. Dufour: En tout cas...
M. Séguin: ...suffisamment de protection pour croire qu'il
n'y aura pas de problème dans l'application, à moins que je ne
comprenne mal. J'inviterais le député, s'il y a un point obscur,
à préciser là où il voit que l'application de
l'article 13.4 apparaît inacceptable.
M. le Président, je ne comprends pas là où
l'article 13.4...
Le Président (M. Brouillette): Y a-t-il d'autres
intervenants?
M. Séguin: Je demanderais... M. Dufour: Je vais essayer...
M. Séguin: ...au député de Jonquière...
Le Président (M. Brouillette): M. le député
de Jonquière.
M. Séguin: ...de préciser son point de vue.
M. Dufour: ...d'être plus explicite. Je comprends qu'il y a
un doute raisonnable et qu'il y a quelqu'un qui va aller demander
l'autorisation à un juge de paix, ce qui va lui être
accordé. Il y a un motif raisonnable de douter qu'il y a du tabac
quelque part, mais ce n'est pas juste à un endroit. Je veux rappeler au
ministre ou au député de Montmorency que le tabac peut être
dans un véhicule, dans un distributeur automatique ou dans un lieu.
Donc, il y a trois possibilités, cela couvre l'ensemble du sujet. (16 h
45)
S'il y a un doute, le ministre va donner l'autorisation à son
employé ou à quelqu'un du ministère ou à une autre
personne qu'il désigne. Cela ne me dérange pas trop
jusque-là. Le juge de paix n'ira pas plus loin que cela dans sa
recherche. Ce n'est pas à lui de décider comment va s'effectuer
la saisie. Il décide que oui, il a le droit de saisir, oui, il a le
droit d'aller dans cette bâtisse-là. Ce que je reproche, où
je dis que la loi va trop loin, c'est qu'à ce moment-là la
personne qui est désignée peut s'adjoindre du monde autre que des
agents de la paix, donc, elle peut aller chercher n'importe qui pour aller
faire cette saisie. Je me dis que si cette démarche est sérieuse
et extraordinaire -parce qu'elle n'existe pas dans toutes les lois, cette
démarche - si cette démarche est correcte, elle devrait, à
ce moment-là, prévoir ne pas aller aussi loin que cela, ne pas
aller chercher toute la paroisse pour faire la saisie. Elle pourrait dire oui
à la saisie, mais avec les policiers.
M. Séguin: Je veux juste interrompre...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: ...le député de Jonquière
non pas pour reprendre un point, mais pour préciser tout de suite, et
cela va peut-être répondre à la question. On dit bien que
le ministre peut autoriser par écrit tout fonctionnaire du
ministère du Revenu ou toute autre personne qu'il désigne, de
sorte que dans sa demande au juge pour faire autoriser la poursuite il devra
indiquer le nom de ceux qui vont intervenir. C'est donc faux de penser qu'une
fois l'autorisation donnée les personnes qui vont se présenter
pour effectuer la saisie pourront, à la dernière minute, appeler
d'autres personnes qui ne seraient pas autorisées sur les lieux. Les
intervenants sur la saisie, ce qu'on appellerait les saisissants, doivent
être désignés et la demande a été
examinée par un juge de la Cour des sessions de la paix, ce qui me
semble amplement suffisant. C'est quand même un tribunal, c'est quand
même un juge qui a à accorder ou non une saisie et dans ces
matières, M. le Président, nous ne sommes pas extravagants, ni
exceptionnels, ni pires que tout ce qui se fait ailleurs en termes de saisies.
Je rappelle que c'est une mesure quasi judiciaire, et même judiciaire, et
c'est sous le contrôle du pouvoir judiciaire, lequel est un juge des
sessions de la paix qui autorise ou non une saisie. Le juge doit
vérifier s'il y a motif raisonnable de croire qu'il y a une infraction.
Tous les éléments que nous avons étudiés
jusqu'à maintenant, qui permettent l'immobilisation du véhicule,
constatation de tabac illégal, etc., et nécessité de
procéder à la saisie seront déposés au juge qui
verra à les examiner et à convenir si, oui ou non, il permet la
saisie.
Le Président (M. Lemieux): Vous voulez, si je comprends
bien, M. le député de Montmorency, lorsqu'une demande sera
faîte d'émettre un mandat à la suite d'une
dénonciation, que les noms soient indiqués?
M. Séguin: Bien sûr.
Le Président (M. Lemieux): Ce seraient des personnes
connues et non pas, comme a tendance à le croire M. le
député de Jonquière.
M. le député de Jonquière, vous pouvez reprendre
vos interrogations.
M. Dufour: 3e fais juste remarquer au député de
Montmorency que, dans des cas comme cela, je serais surpris que tous les noms
soient inscrits complètement. Ils seront peut-être ajoutés
après l'action, mais avant cela me dérange un peu parce que, dans
un lieu, c'est difficile à prévoir. J'imagine que vous devez
savoir... Dans mes fonctions, j'ai déjà vu comment cela se fait.
Les policiers en mettent en masse, nous, on en met moins... C'est
compliqué sur un moyen temps. En ce qui me concerne, cela devrait se
limiter à un certain nombre de personnes qui pourraient être
désignées. Que cela soit un fonctionnaire du ministère,
que ce soient des agents de la paix, cela ne me dérange pas trop, mais
pas tout le monde là-dedans. Il faut, à mon sens, que
l'intervention vienne des gens habilités à le faire.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: M. le Président, je ne peux que
répéter l'assurance que je donnais au député de
Jonquière en ce sens que l'article 13.4 ne permet pas à toute
personne qui n'a pas été désignée par le ministre
ou autorisée par le juge dans la demande qui est faite par le ministre
au juge à se porter volontaire, à la dernière minute, lors
d'une saisie. Les saisies sont des gestes très étudiés.
Elles font appel - je l'ai dit - en pratique, à des fonctionnaires de la
division des enquêtes spéciales du ministère
accompagnés à l'occasion d'agents policiers. Il est excessivement
rare - je crois qu'il n'y a aucun cas, de mémoire, en tout cas au moment
où on se parle - qu'une saisie soit effectuée par des voisins ou
des personnes qui, passant sur les lieux... Si elles le font, c'est
peut-être de leur propre initiative.
Il faut comprendre, M. le Président, qu'une saisie n'est pas, en
soi, un geste spectaculaire. Il y a quand même une démarche
relativement moderne dans la saisie. Cela ne se fait pas, comme je l'ai dit,
avec éclat. Si le véhicule est dans un lieu privé, dans un
garage, on va simplement demander au propriétaire de bien vouloir ouvrir
la porte et on entrera. Cela ne peut concerner que quelques personnes. Les cas
où on peut anticiper des mouvements de foule et des réactions
violentes et même armées sont excessivement rares dans les annales
du ministère, pour les trente dernières années. Il faut
penser que la question du tabac dont on discute fait l'objet de
considérations depuis plus d'une trentaine d'années. Dans toute
l'histoire de l'application du règlement venant de l'article 10 qui le
permettait sans mandat, il y a très peu de cas qui ont donné lieu
à des situations regrettables. Donc, en ajoutant à l'article 13.4
une autre barrière à des discrétions parfois un peu
malencontreuses, on ne peut qu'espérer et croire qu'à l'avenir il
y aura encore moins de cas que tout ce que l'histoire des trente
dernières années a pu donner. Je le répète, s'il
arrivait que ces mesures soient mal appliquées, les citoyens et les
citoyennes impliqués dans les saisies ont - c'est prévu par la
charte des droits et libertés, par les tribunaux et par, dans certains
cas, le Code civil - un ensemble de moyens à leur disposition pour s'en
plaindre.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Montmorency. J'aimerais peut-être souligner au
député de Jonquière qui le sait fort bien, si l'on se
réfère au droit civil, que la saisie demeure un recours
extraordinaire. C'est évident qu'on est peut-être dans une
matière différente actuellement, mais, avant d'émettre un
mandat proprement dit, le juge s'Interroge sur le bien-fondé d'une
dénonciation. Je voulais simplement souligner cela au
député de Jonquière.
M. Dufour: Vous admettrez avec moi que c'est fait par une
personne assermentée qui a des motifs raisonnables de croire qu'il y a
lieu de le faire.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le
député de Jonquière, mais il y a toujours une marge...
M. Dufour: Cela fait toujours appel au jugement.
M. Séguin: Avec l'autorisation d'un juge.
Le Président (M. Lemieux): Avec l'autorisation d'un
juge.
M. Dufour: Le juge aussi, il faut qu'il pèse son
jugement.
Le Président (M. Lemieux): Habituellement, les juges ont
beaucoup de jugement, M. le député de Jonquière. Est-ce
qu'il y a d'autres questions au sujet de l'article 13.4? M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Le député de Montmorency a dit qu'il y
a très peu de cas. Cela vient progressivement. Bien que commencé
depuis une trentaine d'années, mais Il y en a sans doute plus... Ou bien
on prévoit ou bien il y a une recrudescence ou une -augmentation de cas
prévisibles, à ce moment-ci, puisque le ministre se donne la
peine d'introduire une loi nouvelle, en tout cas de modifier une loi qui lui
donne encore plus de dents et qui donne au ministre surtout encore plus de
pouvoirs.
Une deuxième observation sur ce qu'il indiquait tout à
l'heure, lorsqu'il disait que ce n'est ni pire ni mieux qu'ailleurs: j'aimerais
que ce soit mieux qu'ailleurs. C'est un peu dans ce sens qu'on fait des
interventions. Les pouvoirs du ministre, on en voit toute une série
à l'article 5 qu'on étudie présentement. Au
deuxième alinéa de l'article 13.4, on dit encore: "Sous
réserve d'une mainlevée donnée par le ministre, le bien
saisi demeure sous la garde d'une personne qu'il désigne à cette
fin." Pourquoi ne pas laisser... N'est-ce pas non plus une pratique normale que
ce soit sous la garde de la cour, par exemple, non?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Non, il n'est pas d'usage de laisser à
la cour la garde d'un bien saisi. On peut imaginer ce que cela peut...
D'ailleurs, depuis de nombreuses années, les tribunaux
préfèrent que ce soit une personne désignée. Bien
sûr! Cela peut être des stocks importants. Il y a des frais de
conservation pour le tabac: réfrigérer, garder au frais,
l'humidité, etc. On peut mal imaginer... Même les bureaux des
agents de la paix sont apparemment mal équipés pour stocker les
choses saisies. Cela peut être laissé simplement à la garde
d'une personne qui a physiquement tout ce qui est nécessaire pour
assurer l'intégrité du bien gardé. Habituellement, la
période est relativement courte, étant donné que le tabac
est périssable.
Votre autre commentaire, M. le député de Dubuc,
était que vous espéreriez que la loi soit meilleure qu'ailleurs
si on peut l'améliorer. Cela répond à votre
première question, à savoir: Pourquoi est-ce qu'on adopte ces
mesures? Est-ce que c'est parce qu'on craignait une recrudescence de fraudes et
que nous étions inquiets? Cela n'a aucun rapport avec ce genre de
constatation qui n'a pas été faite, mais qui pourrait
apparaître dans l'avenir, on ne le sait pas. C'est beaucoup plus par
souci, après avoir constaté qu'il y avait, depuis plusieurs
années, des personnes dans le commerce du tabac qui ne payaient pas la
taxe; cela est un fait. Si on ne l'avait pas constaté, il ne serait
peut-être pas nécessaire aujourd'hui, d'adopter ce projet de
loi.
Par ailleurs, l'article 13.4, c'est par souci d'avoir...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Montmorency. Par respect pour le député
de Montmorency, messieurs, s'il vous plaît! M. le député de
Montmorency, vous pouvez continuer.
M. Séguin: Je vais terminer rapidement là-dessus,
M. le Président, pour mentionner que c'est par souci de
l'évolution, au cours des dernières années, des
décisions des tribunaux et du développement et par souci des
citoyens et citoyennes vis-à-vis des droits de la personne qu'on a voulu
mettre sous le jugement ou l'appréciation d'un juge des sessions de la
paix l'exercice du mandat de procéder à la saisie. Cela me semble
être une protection additionnelle. Cela me semble correspondre au souci
exprimé hier par le député de Dubuc dans son intervention
à l'Assemblée nationale; je l'ai écouté
attentivement vers 2Q h 30, 21 heures ou 22 heures. Il se disait
fondamentalement désireux que les droits de la personne soient les mieux
protégés possible. Je pense que l'article 13.4 donne raison
à cette inquiétude du député de Dubuc, que je
partage d'ailleurs. Je suis relativement satisfait de voir que, maintenant,
dans le règlement, qui ne prévoyait pas cet examen par un juge,
la saisie devra être sanctionnée par un juge de la cour des
sessions. Je vous remercie.
Le Président (M. Lemieux): C'est-à-dire
autorisée, M. le député de Montmorency.
M. Séguin: Autorisée par un juge de la cour des
sessions.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie. Est-ce qu'il
y a d'autres interventions sur le paragraphe 13.4 de l'article 5? MM. les
députés de Dubuc et de Bertrand, est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Il n'y a pas d'autres interventions. J'appelle le paragraphe
13.5 de la section III.1 de l'article 5 du projet de loi 80.
M. Séguin: Le paragraphe 13.5...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, s'il vous plaît!
M. Séguin: ...M. le Président, vise essentiellement
à permettre, compte tenu de la nature périssable du tabac, que la
période de garde ne puisse pas s'étendre trop longuement et ainsi
porter préjudice...
M. Parent (Bertrand): M. le Président, on a de la
misère à s'entendre.
Le Président (M. Lemieux): M. le
député de Bertrand, vous avez raison. Effectivement, on a
un peu de difficulté à s'entendre. Je m'excuse, M. le
député de Lafontaine, M. le député de Sainte-Anne,
si vous vouiez tenir un mini-caucus restreint, je vous autorise à
quitter la salle mais, par respect pour le député de Montmorency
et pour les députés de l'Opposition, j'aimerais que vous soyez un
peu plus silencieux. M. le député de Montmorency, vous pouvez
continuer.
M. Séguin: Alors, rapidement, M. le Président. Le
paragraphe 13.5 vise simplement, compte tenu de la nature périssable du
tabac, à s'assurer que la période de garde, qu'on a
discuté au paragraphe 13.4, ne se prolonge pas au-delà d'un temps
qui ferait que le tabac serait dans un état où il n'a plus aucun
intérêt commercial, plus aucune valeur. Dans
l'éventualité où le tabac devra être retourné
au propriétaire, a la suite de la saisie, qu'il ne retrouve pas un bien
dénaturé, sans aucune valeur. À ce moment-là, le
ministre pourra demander l'autorisation de faire procéder à la
vente du bien périssable, comme cela existe en vertu d'autres mesures,
d'autres lois lorsqu'il y a des saisies de biens périssables. Dans
l'intérêt du propriétaire, on essaie de procéder
à une vente dans les meilleures conditions possible pour ne pas que le
produit disparaisse tout simplement. (17 heures)
Le Président (M. Lemieux): C'est même une
règle de droit civil, M. le député de Montmorency.
M. Séguin: Effectivement, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
s'il vous plaît! Il me semble que vous avez demandé la parole.
M. Desbiens; La seule question que je poserai là-dessus est en
continuité avec les remarques qu'on a faites sur le grand nombre de
pouvoirs. Dans le cas présent, je reviens à ma dernière
question concernant l'article 13.4.
Tout à l'heure, le député de Montmorency disait
qu'un juge n'est pas équipé d'entrepôts pour mettre le
tabac, mais cela ne prend pas un grand entrepôt pour les sommes d'argent:
le profit de la vente. Est-ce que, là encore, il n'y aurait pas lieu
plutôt de faire conserver le tout par la cour au lieu d'une personne
désignée par le ministre?
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Dubuc?
M. le député de Montmorency, s'il vous plaît!
M. Séguin: Je m'excuse, M. le Président, je pense
avoir mal saisi le sens de la question.
M. Desbiens: Pourquoi ne pas laisser cela à la cour au
lieu d'une personne désignée par le ministre, selon l'article
13.4, deuxième alinéa?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Desbiens: Vous m'avez donné comme réponse que
pour conserver une certaine quantité de tabac ou d'autres produits, cela
demande beaucoup - la cour n'est pas intéressée - d'espace, entre
autres. Mais, dans le cas de l'argent, cela ne demande pas tellement d'espace.
Il est question du produit de la vente. Pourquoi ne pas laisser le tout
à la garde de la cour plutôt qu'à une personne
désignée par le ministre?
Le Président (M. Lemieux): Plutôt qu'à une
personne désignée par le ministre. C'est le sens de la question
du député de Dubuc.
M. le député de Montmorency.
M. Séguin: Je vous ferai observer, M. le Président,
que dans l'exécution de l'article 13.5 le tribunal, une fois qu'il a
été -excusez le calembour - saisi de la saisie, peut toujours se
faire rendre compte par les personnes désignées de ce qui est
advenu du bien de sa vente s'il y a lieu et des sommes d'argent. De sorte que
c'est toujours un peu sous l'autorité du tribunal qui a consenti
à la saisie et même, éventuellement, à la vente du
bien. Il y a tout de même une assurance que la personne
désignée ne quitte pas avec le fruit de la vente au
détriment du propriétaire.
M. Desbiens: Pour compléter ma question, il n'est pas
question de la taxe qui serait due possiblement sur ces tabacs. Est-ce que le
ministre ne se rembourse pas à même le produit de la vente,
immédiatement?
M. Séguin: Savoir si, sur la vente du tabac faite par la
personne désignée, on doit prélever la taxe de 9 %? C'est
le sens de votre question?
M. Desbiens: La taxe de 60 %. La taxe possiblement due. S'il y a
une saisie, c'est parce que la taxe n'a pas été payée.
Elle est présumée ne pas avoir été
payée.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency concernant la question du député de Dubuc.
M. Séguin: La vente du tabac qui est faite en
exécution d'une saisie n'est pas une
vente au sens de la loi. Donc, la taxe de vente ne s'applique pas
è ce genre de bien. Si, après jugement - on le verra à
l'article 15 - il y avait vente en exécution d'un jugement, à ce
moment-là, la vente peut être associée à une vente
au sens de l'application de la taxe de vente et la taxe comptabilisée et
remise.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il d'autres interventions
sur le paragraphe 13.5 de l'article 5?
Est-ce que l'article 5 est adopté?
M. Desbiens: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté.
M. le député de Dubuc et M. le député de
Bertrand, est-ce que l'article 5 est adopté?
M. Parent (Bertrand): Un instant, s'il voue le permettez, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Bertrand.
Je m'excuse, M. le député de Montmorency, mais je n'avais
pas entendu...
M. Séguin: Oui, oui.
Le Président (M. Lemieux): ...mais le groupe parlementaire
de l'Opposition m'a signifié que c'était adopté.
M. le député de Saint-Louis, je pense qu'il n'y a pas
d'exagération à ce que les membres du groupe de l'Opposition se
consultent environ 30 secondes eu égard au travail qui a
été fait autour de cette table au courant de la
journée.
M. Chagnon: Aucun problème.
M. Desbiens: L'article 5 est adopté?
Le Président (M. Lemieux): L'article 5, contenant les
paragraphes 13.1, 13.2, 13.3, 13.4 et 13.5, est adopté. J'appelle
l'article 6 du projet de loi 80. M. le député de Montmorency.
Infractions et peines
M. Séguin: L'article 6, M. le Président, introduit
des pénalités, des amendes lorsqu'il y a infraction et les
articles 14 et 15 de la loi actuelle sont remplacés pour
dorénavant faire, en cas d'infraction, un assujettissement à
l'amende d'au moins 200 $ et d'au plus 5000 $ pour les personnes qui
contreviennent à l'article 3 ou qui négligent ou omettent de se
conformer aux signaux d'arrêt installés par une personne
visée à l'article 13.3 ou d'obéir aux signaux ou ordres
d'une telle personne ou contreviennent autrement à cet article. Pour le
bénéfice des membres de la commission, M. le Président, il
est bon de mentionner que l'amende antérieurement était de 10 $
à 200 $ pour une première offense et de 1000 $ à 5000 $
pour la seconde alors qu'ici nous parlons d'un minimum de 200 $ et d'un maximum
de 5000 $.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le
député de Montmorency?
M. Séguin: J'ai terminé. S'il y a des
questions...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, s'il vous plaît!
M. Desbiens: À l'article 14a on dit "qui contrevient
à l'article 3..." On avait convenu tantôt que l'article 3 porte
sur l'importation, donc sur celui qui n'a ni résidence ni place
d'affaires au Québec. Comment le ministre peut-il se faire payer son
amende? Cela prend des ententes intergouvernementales ou internationales,
interprovinciales. Comment peut-il...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: C'est l'article 3 de la loi et non pas du
projet de loi.
M. Desbiens: De la loi.
M. Séguin: C'est le fameux article qui dit qu'une personne
ne peut vendre ou délivrer du tabac au Québec, etc.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Montmorency.
M. Séguin: On amoindrit considérablement les cas
d'emprisonnement. Connaissant l'intérêt du député de
Dubuc pour les droits de la personne, qu'il a mentionnés dans son
allocution, je pense que cela mérite d'être souligné parce
que c'est une mesure qui, contrairement à l'article 14 de la loi
actuelle, restreint quelque peu les hypothèses d'emprisonnement.
Étant donné que les emprisonnements ne sont certainement pas
automatiques, il devra y avoir poursuite et condamnation et ce sera un juge qui
décidera des cas où il y a emprisonnement ou non. Ce n'est pas
non plus une infraction statutaire qui peut prescrire qu'il y a emprisonnement.
C'est là une nuance importante, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement. M. le
député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): En principe je suis d'accord avec...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le
député de Lafontaine. Madame, s'il vous plaît!
M. Parent (Bertrand): En principe, je suis d'accord avec les
modifications qui apportent plus de mordant si on veut éviter les
infractions, parce que 10 $, je pense que ce n'était pas tellement
impressionnant, avec un maximum de 200 $, sauf qu'il serait peut-être
intéressant qu'à la deuxième ou à la
troisième offense du même contrevenant on puisse y aller plus
fort. Dans certains cas, le risque n'en vaut pas la chandelle et on sera
prêt à payer même des amendes élevées. Je me
demande, tant qu'à faire des modifications, s'il aurait
été possible ou s'il a été pensé qu'on
puisse mettre, après une troisième infraction de la part du
même contrevenant, plus que des sanctions financières.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Oui, le député de Bertrand a
raison de se poser la question parce qu'on peut faire face à beaucoup de
récidives. Par contre, il faut penser tout de suite qu'il existe
présentement d'autres lois et d'autres interventions judiciaires
possibles qui découlent soit du Code pénal, du Code criminel ou
de la Loi sur le ministère du Revenu pour évasion fiscale et de
la Loi sur les impôts - jusqu'à un certain point - dont certaines
infractions, pénalités s'appliquent en cas de taxe de vente non
perçue, etc.
Donc, cela est une première mesure, si vous voulez,
"désincitative", mais qui n'est pas la seule. II faut comprendre que
toutes les autres poursuites ou condamnations possibles devant un tribunal
existent et le ministre pourra recommander au ministère de la Justice,
dans certains cas, ou même à ceux qui ont procédé
à la saisie, qui ont été présents à
l'infraction. Le policier, par exemple, de la Sûreté du
Québec peut à ce moment-là faire appel au Code
pénal, s'il constate fraude, et intenter des chefs d'accusation ou des
dénonciations en alléguant d'autres dispositions, d'autres lois.
Ce n'est pas restrictif aux mesures qui sont énoncées ici.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
questions, M. le député de Bertrand ou M. le député
de Dubuc?
Est-ce que l'article 6 est adopté?
M. Séguin: Adapté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 6 est
adopté.
J'appelle l'article 7 du projet de loi 80. M. le député de
Montmorency.
Dispositions générales
M. Séguin: M. le Président, l'article 7 a pour
effet de modifier l'article 17 de la loi et a pour effet de remplacer le mot
"convention" par le mot "entente" qui est le terme utilisé dans les
contrats actuels. Cela est aussi une modification de concordance avec ce que
prévoit l'article 2 du présent projet de loi. On remplace le mot
"vendeur" par les mots "personne titulaire d'un certificat
d'enregistrement".
Pour la compréhension des membres, l'ancien article 17 de la loi
prévoyait que le ministre pouvait faire des conventions avec un vendeur
pour la perception de l'impôt. C'est le mot "convention" qu'on emploie.
On trouve tout simplement plus approprié...
Une voix: Plus moderne.
M. Séguin: ...d'utiliser le mot "entente", le mot
"convention" étant une mauvaise traduction de mot anglais
"convention".
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 7 du projet de loi 80? M. le député
de Dubuc?
M. Desbiens: L'article 17.2, M. le Président?
Le Président CM. Lemieux): Oui, M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Je ne sais pas si je perçois bien, si je
comprends bien le texte. À l'alinéa 1, il est dit: "Tout
agent-percepteur titulaire d'un certificat d'enregistrement doit percevoir
comme mandataire du ministre un montant égal à l'impôt
établi..." Dans le deuxième alinéa, on dit: "Cette
obligation ne s'applique pas à l'égard du tabac vendu ou
livré par un agent-percepteur s'il en est exempté aux termes de
l'entente qu'il a conclue avec le ministre en vertu de l'article 17." Il doit
percevoir et cela ne s'applique pas. Il me semble y avoir une
contradiction.
M. Séguin: Le but de l'entente dont il est question ici
est essentiellement de ne pas assujettir à ces dispositions le
contractant à l'entente avec le ministère, parce que l'entente a
pour but de rendre plus faciles la comptabilisation et les rapports entre,
habituellement, le grossiste qui signe l'entente et/ou, dans certains cas, cela
peut être l'agent-percepteur et le ministère. C'est évident
que l'entente va prévoir des modalitéâ qui rendent inutiles
ou superflues les dispositions de la présente loi. (17 h 15)
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 7 du projet de loi 80? Oui, M. le
député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Le paragraphe 17.2, au dernier, qui
détermine si c'est "payable comptant, à terme, par versements ou
de toute autre manière"?
M. Séguin: C'est le ministre et le contractant avec le
ministre. Ils essaient de s'entendre sur des modalités acceptables,
parce que s'ils ne s'entendent pas il n'y a pas d'entente. Là, la loi va
s'appliquer. Donc, quand le ministre est satisfait, à savoir que la
personne va se soumettre à des modalités équivalentes
à tout le moins aux dispositions de la loi, on va signer l'entente.
Sinon, on ne signe pas d'entente et les dispositions de la loi vont
s'appliquer, l'agent-percepteur devra avoir son certificat, percevoir la taxe,
la remettre le 15 de chaque mois, etc. Par exemple, des modalités
d'entente négociées, ce pourrait être qu'au lieu de la
remettre le 15 de chaque mois, ce pourrait être à tous les
trimestres, ou de présenter une comptabilité par informatique
plutôt que des rapports mensuels, selon le formulaire du
ministère. Toutes ces choses sont en discussion et elles peuvent,
à l'occasion, être entendues pour agréer, pour rendre plus
faciles les relations entre un grossiste, qui a une multitude de transactions -
parce qu'il faut comprendre ici que cela se fait relativement... Vous savez
combien se vend un paquet de cigarettes ou un carton de cigarettes, du
carburant, etc. La difficulté dans ces sujets qu'on discute ici, c'est
que chaque vente est relativement modeste, mais à un nombre
répété quotidiennement, un nombre important, faramineux,
de sorte qu'il faut penser à des modalités plus faciles que,
nécessairement, de rapporter dans le mois chaque litre vendu, sujet
à la taxe, ou chaque paquet de cigarettes, etc. Donc, on essaie de
travailler avec les grossistes sur des plus gros volumes pour rendre la
comptabilisation, pour le contribuable et pour le ministère, d'autant
plus facile.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Au paragraphe 13.3, deuxième alinéa,
vous exigez un rapport même si aucune vente n'a été faite
durant le mois. Quelle est l'utilité de ce rapport en blanc?
Le Président (M. Lemieux): Le paragraphe 17.3, paragraphe
deux.
M. Desbiens: Alinéa.
Le Président (M. Lemieux): Deuxième alinéa,
vous avez raison, M. le député de Dubuc.
M. Séguin: Oui, cela est usuel.
M. Desbiens: C'est usuel? Mais est-ce qu'il y a une
utilité? Est-ce pour ne pas perdre la main?
M. Séguin: C'est une question de contrôle,
d'assurance. Vous savez qu'il n'y a rien de plus malencontreux pour un
système de contrôle d'avoir quelquefois des entrées et
quelquefois de ne pas en avoir. Surtout de la façon dont les
systèmes informatiques d'aujourd'hui sont bâtis, ils sont
habitués à un...
M. Desbiens: Rythme.
M. Séguin: ...mode de fonctionnement; si des fois il y a
des entrées et d'autres fois il n'y en a pas, cela peut soulever une
confusion, une ambiguïté dans le processus de traitement des
données. C'est simplement pour rendre le système plus
cohérent. On aime mieux avoir un rapport qui ne dit rien que d'avoir une
absence de rapport où, là, on ne sait pas si c'est parce qu'il y
a eu erreur ou quoi.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 7 est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 7, incluant les
paragraphes 17.1, 17.2, 17.3 et 17.4, est adopté. J'appelle l'article 8
du projet de loi 8Q. M. le député de Montmorency.
M. Séguin: L'article 8 est de concordance, effectivement,
M. le député de Saint-Louis, avec les modifications
apportées par les articles 5 et 7 du projet de loi, en ce qu'elles
transfèrent dans le texte de loi les dispositions relatives aux
perquisitions et aux saisies et à l'identification du tabac. Cette
modification a pour but d'abroger les pouvoirs de réglementation du
gouvernement relatifs à la perception de l'impôt au moyen de
timbres ou d'autres marques et à la signature d'arrangements avec les
manufacturiers ou vendeurs en gros. Ces pouvoirs sont désuets, la loi
prévoyant déjà des dispositions relatives à la
perception de l'impôt et à la signature d'ententes avec les
personnes détentrices de certificats d'enregistrement.
M. le Président, on veut simplement abolir cette exigence
d'apposer des timbres, par exemple, sur les paquets de cigarettes; tout le
monde connaît les petits timbres pour sceller le carton du paquet de
cigarettes. Ce n'est plus une mesure de contrôle sur laquelle on va se
fier pour voir si ce produit a été contrôlé ou
non.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Montmorency, Est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article 8 du projet de loi 80? L'article 8 du projet de loi 80 est-il
adopté? Adopté.
J'appelle l'article 9 du projet de loi 80. M. le...
Une voix: De la concordance.
Le Président (M. Lemieux): C'est de la concordance.
M. Séguin: De la pure concordance.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 9 du
projet de loi 80 est adopté? Adopté. L'article 9 du projet de loi
80 est adopté. J'appelle l'article 10 du projet de loi 80. M. le
député de Montmorency.
M. Séguin: La date d'entrée en vigueur sera
celle...
M. Parent (Bertrand): ...à l'adoption de la loi.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 10...
M. Séguin: On veut nous-mêmes éventuellement
fixer la date de la mise en vigueur pour qu'au préalable on ait eu le
temps d'aviser les principaux intéressés de la mécanique
impliquée.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 10 du
projet de loi 80 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 10 du projet de loi
80 est adopté. Est-ce que le titre du projet de loi 80, Loi modifiant la
Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de contrer le
détournement de la taxe par des intermédiaires, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'ensemble du projet
de loi 80, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin de
contrer le détournement de la taxe par des intermédiaires, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. Le titre et
l'ensemble du texte de loi du projet de loi 80 sont adoptés. Nous allons
maintenant passer, selon l'avis du leader, au projet de loi 81, Loi modifiant
la Loi concernant la taxe sur les carburants...
M. Desbiens: Ai-je bien compris, le projet de loi 80 est
adopté, M. le Président?
Le Président (M. Lemieux): Oui, monsieur.
M. Séguin: À moins que...
M. Gratton: Est-ce qu'on ne pourrait pas fumer un cigare?
M. Séguin: J'aimerais suggérer, étant
donné que ce sont deux lois semblables...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
Une voix: Si cela peut aider votre voix.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency...
M. Séguin: S'il y avait des points particuliers...
Le Président (M. Lemieux): ...permettez-moi d'appeler
préalablement...
M. Séguin: Excusez-moi, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): ...la loi proprement dite.
Conformément à un ordre du leader de la Chambre, j'appelle le
projet de loi 81, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants
afin de contrer le détournement de la taxe par des
intermédiaires. M. le député de Montmorency.
Projet de loi 81
M. Séguin: Puis-je me permettre, M. le Président,
de proposer, à moins que les membres de l'Opposition ne veuillent poser
des questions particulières, étant donné que c'est une loi
semblable à celle que nous venons de voir, soit la loi 80 sur le tabac,
que l'on exprime le vote globalement pour l'adoption de la loi, sous la
réserve que les membres de l'Opposition aimeraient tout de suite
s'attarder sur quelques points pour demander des éclaircissements...
Le Président (M. Lemieux): Vous comprendrez, M. le
député de Montmorency, que je dois m'en tenir au
règlement, à l'article 244. On doit faire une étude
détaillée du projet de loi. On ne peut pas adopter ainsi
l'ensemble. On devra adopter article par article l'ensemble du projet de loi.
Cela va?
M. Desbiens: C'est ce que j'avais l'intention de vous demander,
M. le Président.
Le Président CM. Lemieux): Oui, eu égard au
règlement. Alors, M. le ministre du Revenu, est-ce que cela va?
M. Gratton: Cela va.
Obligations des vendeurs et usagers
Le Président (M. Lemieux): Cela va? Est-ce qu'il y a des
remarques préliminaires relativement au projet de loi 81? Aucune
remarque préliminaire relativement au projet de loi 81. J'appelle
l'article 1 du projet de loi 81. Est-ce que l'article 1 du projet de loi 81 est
adopté?
M. Chagnon: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. L'article 1 du
projet de loi 81 est adopté. J'appelle l'article 2 du projet de loi 81.
Est-ce que l'article 2 du projet de loi 81 est adopté?
M. Desbiens: J'ai une question, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Dans l'ancien texte à l'article 17 de
l'article 2, on parlait de 48 heures et là on dit
"immédiatement". Quel est l'avantage ou la nécessité de ce
changement, de cette modification?
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela va, M. le
député de Dubuc? M. le député de Montmorency, en
réponse à la question du député de Dubuc.
M. Séguin: Dans le fond, tout simplement, quand on dit
"doit en faire immédiatement rapport", c'est pour indiquer que la
personne ne doit pas tarder à le faire, mais il n'y a pas de
délai. Il s'agira de juger, dans les circonstances, si la personne a
fait diligence. Mais "immédiatement" ou "dans les 48 heures", cela a un
peu le même sens, mais c'est plus précis de dire "en faire
immédiatement" dans le sens que c'est quand même un ordre à
la personne de faire rapport.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Montmorency. M. le député de Dubuc,
est-ce que l'article 2 du projet de loi 81 est adopté?
M. Desbiens: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. L'article 2 du
projet de loi 81 est adopté. J'appelle l'article 3 du projet de loi 81.
Est-ce que l'article 3 du projet de loi 81 est adopté? M. le
député de Bertrand.
Certificat d'enregistrement et permis
M. Parent (Bertrand): Concernant le deuxième paragraphe
qui fait référence à l'article 23, pour quelles raisons
utilise-t-on le terme "livrer" dans ce cas-là et non pas
"délivrer", après les explications qu'on a eues dans l'autre?
Dans le cas des cigarettes, on nous avait fait la différence entre
livraison et "délivraison". Dans ce cas-ci, c'est en tout point
semblable, sauf qu'on parle de livrer du carburant. Si je comprends bien,
là, on vise vraiment la livraison.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: On veut contrôler même la livraison
du carburant. On ne doit pas transiter sur le territoire de la province de
Québec du carburant. C'est pour cela que le mot "livrer" est vraiment
employé dans son sens le plus littéral de livraison, transport,
transit. Vous avez raison, M. le député.
M. Parent (Bertrand): Donc, on fait une différence. Ce
n'est pas en tout point égal à la cigarette.
M. Séguin: On veut effectivement être beaucoup plus
coercitif sur le transport du carburant.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, vous avez une question relativement à l'article 3?
M. Desbiens: Est-ce que cela signifie, M. le Président,
que, quand on va parler de la personne, le camionneur va être aussi en
cause? Dans la question du tabac tantôt, on disait que le
propriétaire n'avait pas d'importance, le chauffeur.
M. Séguin: Évidemment, dans toutes ces
questions-là, comme celle même qui a été
discutée dans la question du tabac où on se posait la même
question, ce n'est pas tellement l'agent du vendeur, du grossiste ou du
propriétaire qu'on vise. Vous savez que, dans les opérations
commerciales, quand on parle de livraison, il peut y avoir plusieurs agents qui
travaillent pour quelqu'un et qui font de la livraison. Ce ne sont pas
ceux-là qui commettent nécessairement l'infraction. Ils peuvent
être complices, l'agent peut être complice. La loi dit: "Personne
ne peut vendre ou livrer...", il faut sous-entendre "ou faire livrer par
d'autres", un agent, une compagnie qui transige avec le vendeur pour livrer la
marchandise, le carburant.
Donc, ici, si vous posez la question, à savoir si, quand on parle
de livrer, cela peut dans certains cas frapper le livreur d'un camion, le
propriétaire d'un camion qui a simplement pris un contrat, c'est
à voir. Est-
ce qu'il savait qu'il transitait un produit illégal, dans lequel
cas il peut être complice. S'il ne le savait pas, il agissait comme agent
et, dans l'exécution de son contrat comme agent, en vertu du Code civil
- et M. le Président qui est avocat pourra confirmer ce principe -
habituellement, l'agent, dans l'exercice de ses fonctions, quand il a agi dans
le contexte de son contrat avec son mandat, n'est pas personnellement
responsable. C'est une question de bon sens, mais il peut arriver... On ne veut
pas exclure non plus le propriétaire du service de livraison parce qu'il
peut, des fois, être de connivence ou être parfaitement au courant
qu'il transite, dans le cas de l'article 23, du carburant illégalement.
Il n'y a pas de raison qu'il ne soit pas frappé, lui aussi, de
pénalités éventuellement ou de certaines sanctions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Malgré toutes les qualités juridiques
que je reconnais au président, je ne voudrais pas que vous le preniez
à témoin comme cela.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Dubuc. Vous faites d'ailleurs un excellent travail et
je n'ai pas besoin d'être pris à témoin, M. le
député de
Dubuc.
M. Desbiens: Deuxièmement, ma question porte surtout,
donc... Le livreur d'huile è chauffage dans les résidences,
devra-t-il être titulaire d'un certificat d'enregistrement?
M. Séguin: La définition de carburant, au sens de
l'application ici, ne prévoit pas l'huile à chauffage.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 3 du
projet de loi 81 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 3 du projet de loi 81
est adopté. J'appelle l'article 4 du projet de loi 81. Est-ce que
l'article 4 du projet de loi 81 est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand.
M. Parent (Bertrand): J'ai une question qui regarde l'article 4
et aussi d'autres articles. Dans le cas des cigarettes, on a le timbrage, si on
veut, le marquage qui se faisait. Dans le cas de l'essence, quelle est la
façon d'identifier?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: II n'y a certainement pas d'étiquettes,
en tout cas.
M. Parent (Bertrand): Dans ce cas-là, il n'y en a pa3. (17
h 30)
M. Séguin: II n'y a pas de marquage. II n'y a pas
d'addition de produits chimiques ou de marqueur chimique ajouté au
carburant. Cela existait, je pense, pour certains carburants comme le
diésel ou certaines huiles à chauffage qu'on colorait, mais pas
pour le carburant ordinaire.
M. Parent (Bertrand): C'est ce que je croyais, dans ce
cas-là, tors d'une arrestation, d'une vérification. Cela prend
absolument, de la part du transporteur, un certificat en bonne et due forme
pour savoir parce que c'est un peu différent du cas des cigarettes ou du
tabac, où on peut difficilement identifier s'il est en période de
transit légal ou illégal. Sur quoi peut-on s'appuyer pour
appliquer ces procédures de vérification et savoir si, entre
autres, le transporteur -qui n'est pas nécessairement le
propriétaire de la cargaison - est en droit actuellement de
procéder et si on peut l'arrêter? S'il est dans la
légalité ou l'illégalité.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Le seul mécanisme de contrôle,
c'est par la comptabilisation des transactions entre le premier fournisseur
-soit le producteur, le raffineur ou, dans certains cas, l'importateur - et les
documents qui font état du transit qui est livré à un
autre. II faut penser que, dans les matières commerciales, cela ne se
fait pas gratuitement, ces transactions, et c'est par cela qu'on peut se rendre
compte du nombre de litres ou de la quantité vendue. C'est par cela
qu'on peut comptabiliser une taxe qui est due. Mais il n'existe pas de
marquage, étant donné que le transport du carburant se fait en
vrac. Ce n'est pas en bouteille. Nous n'avons pas encore les bouteilles de
carburant super dans nos épiceries. Mais cela se fait en vrac et cela
peut être par camion-citerne. Enfin, on peut imaginer tous les
contenants. Il n'y a pas vraiment de facilité de contrôle sur la
quantité qui transite autrement que par la comptabilisation des
transactions.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc.
M. le député de Bertrand, si vous n'aviez pas terminé, je
m'exeu3e.
M. Parent (Bertrand): Conscient de cette importante
différence par rapport au
projet de loi 80 qui touchait un autre aspect, celui du tabac, dans ce
cas-ci, il est beaucoup plus difficile - comme vous l'avez mentionné -
de contrôler, particulièrement sur la route, par les agents - ou
autres. On verra à d'autres éléments. Est-ce qu'il y a,
quelque part, quelque chose de prévu dans votre loi... Il existe, depuis
quelques années, tout un réseau de fraudes dans la livraison des
carburants et le fait que les camions-citernes - puisque cette marchandise est
livrée par camion-citerne - ne sont pas nécessairement et
automatiquement scellés, ils amènent - en ce qui concerne ce
transport, ces livraisons - toutes sortes de fraudes par rapport aux
quantités livrées chez un client, etc.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: On a raison de soulever la différence
entre le carburant et le tabac, et, pour expliquer comment on peut penser qu'on
a un contrôle tout aussi efficace, c'est que, dans le cas du tabac, ce
n'est pas tellement le transport qui est contrôlé, c'est le
produit lui-même, alors qu'ici, c'est le transport qui est
contrôlé. Au Québec, on ne peut pas transporter de
carburant dans un véhicule qui n'est pas autorisé à cet
effet à cause des dangers d'explosion, etc. - et qui n'est pas aussi
dûment enregistré. De la sorte, on connaît le nombre de
véhicules en opération. On connaît leur capacité de
réservoir, etc. On connaît leurs allées et venues,
l'endroit où ils prennent le carburant et l'endroit où il est
livré. Cela est enregistré, de sorte que -comme je l'ai dit au
début - c'est par la comptabilisation des transactions, des transits
qu'on arrive à contrôler, c'est-à-dire où cela
arrive, où cela va, etc.
On me dit que, dans l'ensemble, les contrôles avec le temps se
sont perfectionnés et, aujourd'hui, c'est assez efficace.
Évidemment, il y en a qui ont réussi à passer à
travers. Puisque que nous sommes à discuter d'un projet de loi, le
projet de loi 81, qui veut resserrer ces mesures, c'est qu'il y en a qui ont
trouvé des trucs pour échapper au contrôle, et on pense
qu'avec cela on a un peu plus le moyen de les contraindre.
Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le
député de Montmorency. M. le député de Bertrand,
avez-vous terminé votre intervention?
M. Parent (Bertrand): Cela va.
Le Président (M. Lemieux): Avant, M. le
député de Dubuc, vous allez me permettre, même si vous avez
levé la main avant le député de Saint-Louis, tout en
respectant le principe de l'alternance, de lui céder la parole. M. le
député de Saint-Louis.
M. Chagnon: Très brièvement, M. le
Président, je répondrais à la question du
député de Bertrand qui se demandait et qui demandait au
député de Montmorency comment faire des vérifications
relativement aux produits pétroliers. Les détaillants et les
compagnies de produits pétroliers font le calcul, peut-être pas
sur une base quotidienne, mais je pense sur une base hebdomadaire, des niveaux
de l'essence contenue dans les réservoirs des détaillants. Ces
vérifications peuvent permettre au ministère du Revenu comme
à n'importe quel autre ministère, Énergie et Ressources,
de savoir exactement combien il y a de livraisons qui ont été
faites au cours d'une semaine donnée ou un mois donné dans
l'année, et aussi, comme le suggérait le député de
Bertrand, le fait que les camions transporteurs d'essence, camions-citernes
devraient être ou sont scellés. Effectivement, ils sont
scellés, particulièrement depuis - le député de
Bertrand s'en souviendra - qu'il y a eu des vagues de vol d'essence chez les
détaillants eux-mêmes. Dans la circonscription du
député, cela s'était déjà passé il y
a deux, trois ans, au moment ou il y avait eu des hausses du prix de l'essence.
Il se faisait des vols chez les détaillants, des vols de nuit chez les
détaillants pour transborder l'essence dans des camions-citernes qui
partaient. Avec la possibilité de pouvoir surveiller, d'une part, ce
qu'il y a dans les réservoirs des détaillants et,
deuxièmement, en contrôlant les scellés sur les
camions-citernes, je pense que toute possibilité de fraude est à
peu près éteinte.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez
terminé, M. le député de Saint-Louis? Mme la
députée de Vachon, est-ce que vous avez des commentaires? M. le
député de Bertrand, est-ce que vous avez terminé? M. le
député de Dubuc? Est-ce que l'article 4 du projet de loi 81 est
adopté.
M. Desbiens: Adopté.
Vérifications, inspections et saisies
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 5 du projet
de loi 81. M. le député de Montmorency relativement à
l'article 5 du projet de loi 81.
M. Séguin: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 5 du
projet de loi 81 est adopté.
M. Séguin: L'article 5.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 5 du
projet de loi 81 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président CM. Lemieux): L'article 5 du projet de loi
est adopté. J'appelle l'article 6 du projet de loi 81.
M. Séguin: Je voulais vous donner d'autres renseignements
mais...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 6 du
projet de loi 81 est adopté?
M. Desbiens: Ce pouvoir existait déjà, mais
c'était prévu à d'autres fins que celles prévues
ici, mais il n'y avait aucune référence, je pense, au lieu ou au
temps. C'est un pouvoir qui existe déjà dans le règlement,
mais sans référence de lieu ou de temps si je...
Le Président (M. Lemieux): Votre question, M. le
député de Dubuc, s'il vous plaît!
M. Desbiens: Ce n'est qu'une inscription à la loi
de...
Le Président (M. Lemieux}: Est-ce que cela existait, M. le
député de Montmorency?
M. Séguin: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Oui. Le ministre aimerait
ajouter un complément de réponse.
M. Gratton: Sauf pour ce que je mentionnais hier, soit que dans
l'ancien règlement on trouvait la disposition qui permettait de
procéder à l'arrestation d'un véhicule qui contiendrait du
mazout coloré. Comme cela n'a jamais été applicable, que
ce n'était pas vérifiable, on l'a fait sauter; donc, cela n'est
plus inclus.
M. Desbiens: ...en ce qui concerne le lieu, "en tout temps et en
tout lieu", cela n'existait pas dans le règlement.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que c'est exact, M. le
député de Montmorency?
M. Séguin: Cela existait. Une voix; Dans l'article
40?
M. Séguin: C'est-à-dire qu'on pouvait saisir sans
mandat un véhicule automobile dans lequel cet agent ou cette personne a
des raisons "de croire que". Si vous regardez les premières lignes de
l'article 40: peut saisir sans mandat.
M. Desbiens: Là, on ajoute: en tout lieu et en tout
temps.
M. Séguin: Dans le fond, cela dit la même chose.
M. Desbiens: C'était quand même appliqué en
tout lieu et en tout temps. C'est cela que je comprends. Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 6 du
projet de loi 81 est adopté? Adopté. L'article 6 du projet de loi
81 est adopté. J'appelle l'article 7 du projet de loi 81.
Infractions Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. Est-ce que
l'article 7? Je vois le sourire du député de Bertrand. M. le
député de Bertrand, est-ce que vous avez une intervention
relativement à l'article 7?
M. Parent (Bertrand): Le député de Saint-Louis est
très rapide.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Je veux juste lui mentionner que le mot
qu'on cherchait tantôt, c'était réellement "scellé".
Il se retrouve à l'article.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 7.... Oui,
M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): J'aurais une autre question. Est-ce qu'en
fonction de la valeur des cargaisons et des risques qu'il pourrait y avoir,
peut-être beaucoup plus facilement, pour ce qui concerne le contournement
de la taxe sur l'essence, est-ce que les infractions, du fait qu'on
émette les mêmes, sont justifiées? On les augmente de 10 $
à 200 $ au maximum et de 200 $ à 5000 $? Mais, toutes
comparaisons faites avec le tabac, est-ce que c'est justifié de les
ramener au même échelon en termes de pénalités?
Le Président (M. Paulin): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Remarquez que c'est déjà le
double, à toutes fins utiles, de ce qui existait. C'est
proportionnellement correspondant, cela équivalait. Un camion-citerne de
carburant peut représenter approximativement la même
quantité, pour la même grosseur de camion, à peu
près la même valeur de marchandise. Puisqu'il y a d'autres
mesures, d'autres lois qui peuvent s'appliquer, selon la gravité du cas,
déjà de passer du simple au double, cela nous semble assez
contraignant.
Le Président (M. Poulin): M. le député de
Bertrand.
M. Desbiens: II n'y a pas de modifications pour ce qui est des
amendes. Ce sont les mêmes amendes qui existaient déjà dans
le règlement, c'est-à-dire dans la loi sur les carburants, aux
articles 42 et 43.
Une voix: Elles ne sont pas augmentées?
M. Desbiens: Non, elles ne sont pas augmentées. Elles sont
de 20Q $ à 5000 $ et de 2000 $ à 10 000 $.
M. Séguin: Oui, vous avez raison, M. le
député de Dubuc. Dans le cas du carburant, c'est cela; c'est un
minimum de 200 $ et au plus 5000 $.
M. Chagnon: La concordance se fait des cigarettes à
l'essence.
Le Président (M. Poulin): S'il vous plaît, M. le
député.
M. Chagnon: Pardon, M. le Président? Le
Président (M. Poulin): La parole...
M. Chagnon: J'ajoutais un complément d'information.
Le Président (M. Poulin): Merci.
M. Desbiens: Un autre adjoint, l'adjoint de l'adjoint! Alors,
cela va.
Le Président (M. Poulin): Est-ce que le
député de Bertrand... M. le député de Bertrand.
Une voix: Est-ce qu'il y a une réponse?
M. Parent (Bertrand): Je trouve cela un peu curieux qu'on donne
plus de mordant à la loi comme on l'a fait pour le tabac - je pense que
c'était cohérent dans le cas des cigarettes - et que, dans ce
cas-ci, on ne modifie pas les pénalités tout en modifiant les
resserrements de contrôle, en appliquant presque essentiellement, comme
on nous l'a dit, en tous points le contrôle sur le tabac au
contrôle sur l'essence; sauf que, pour ce qui est des infractions, on ne
les modifie pas. Je veux juste savoir pourquoi on garde les mêmes
pénalités?
Le Président (M. Poulin): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: On indique, M. le député de
Bertrand, qu'on semble juger que c'est amplement suffisant dans le cas du
carburant vu l'expérience en ce domaine. Pour ce qui est des
pénalités statutaires imposées par la loi, cela semble
amplement suffisant. En pratique, si le cas commandait une action plus
coercitive, plus spéciale, habituellement, d'autres lois vont imposer
des amendes, des pénalités ou des poursuites plus
sévères. Comme on l'a dit ici, c'est une pénalité
statutaire, tout simplement prévue à la loi. Mais il y en a
beaucoup d'autres. On semble croire que, dans le cas particulier du carburant,
c'est très suffisant de conserver ces quanta. (17 h 45)
M. Parent (Bertrand): Merci. J'ai une autre question à
l'article 42b, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Puisqu'on considère comme une
infraction le fait d'altérer des scellés, cela veut donc dire que
les scellés sont obligatoires et qu'on retrouve cela quelque part
ailleurs.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Les scellés sont prévus à
l'article 36 de la loi qui est le cas particulier du mazout coloré.
L'article 36 dit: "Le ministre peut obliger les raffineurs, importateurs et
vendeurs en gros à installer à leurs frais des compteurs
automatiques ou autres appareils approuvés par lui et il peut se servir
des renseignements fournis par ces compteurs ou appareils pour établir
les quantités de carburant raffinées, acquises, livrées ou
vendues. Le ministre peut aussi, pour les mêmes fins, exiger qu'il soit
fait usage de tous autres moyens ou de toutes autres méthodes qu'il juge
à propos. Le ministre peut également faire apposer des
scellés sur tout compteur automatique ou appareil visé au premier
alinéa, tout système d'injonction mécanique muni d'un
dispositif d'arrêt automatique et tout système de distribution, de
livraison, de chargement", etc.
M. Parent (Bertrand): Ce n'est pas obligatoire; le ministre
peut...
M. Séguin: Non, le ministre peut... Ce sont surtout des
scellés apposés sur des compteurs automatiques, etc., pour ne pas
que les compteurs soient modifiés ou dérangés. L'article
36 demeure intact; on n'y touche pas.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article... Vous
avez un complément de réponse, M. le député de
Montmorency? Cela va. Est-ce que l'article 7 est adopté? M. le
député de Chauveau.
M. Poulin: Juste une question: À l'article 7, 42d, est-ce
qu'on pourrait m'expliquer? On parle de se conformer aux signaux d'arrêt
installés. Est-ce que ce sont les postes de contrôle?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, s'il vous plaît! Oui, cela va, M. le député de
Chauveau.
M. Chagnon: Adapté, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Non, je m'excuse, M. le
député de Saint-Louis, M. le député de Chauveau a
posé une question. M. le député de Montmorency, s'il vous
plaît!
M. Séguin: Est-ce que le député de Chauveau
pourrait...
Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous reprendre votre
question, M. le député de Chauveau?
M. Poulin: À l'article 7, 42d, on dit: "néglige ou
omet de se conformer aux signaux d'arrêt installés par une
personne visée aux articles 39 et 40." On ne les a pas...
M. Séguin: Les inspecteurs doivent avoir des panneaux
quelconques ou des signaux pour contrôler les véhicules qui
transportent du carburant, lesquels, comme je l'ai indiqué, M. le
Président, doivent être enregistrés, identifiés,
etc. Alors, l'inspecteur, le long de la route, fait un signal d'arrêt
pour le véhicule. Si le véhicule ne s'arrête pas...
M. Pauline Cela peut être fait à tout moment?
M. Ségutn: Oui.
M. Poulin: C'est ce que je voulais savoir. Je pensais que
c'étaient des contrôles de balance.
M. Séguin: Ce sont des véhicules jaunes.
Le Président (M. Lemieux): Cette question est très
pertinente, M. le député de Chauveau. Vous avez d'autres
questions?
M. Poulin: Non, j'ai terminé.
Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé?
Est-ce que l'article 7 du projet de loi 81 est adopté?
M. Desbiens: L'article 40, M. le Président, de toute
façon, a été modifié par l'article 6, n'est-ce
pas?
Le Président (M. Lemieux): Oui, effectivement. Nous sommes
à l'article 7 du projet de loi, M. le député de Dubuc.
Est-ce que l'article 7 du projet de loi 81 est adopté?
M. Desbiens: Oui, adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. L'article 7 du
projet de loi 81 est adopté. J'appelle l'article 8 du projet de loi 81.
M. le député de Montmorency.
M. Ségutn: L'article 48 est modifié. La
modification, M. le Président, n'a pour but que de remplacer la
référence à l'article 40 par une référence
è l'article 40.1, è la suite des changements apportés.
Cette modification est corrélative à l'insertion du nouvel
article 40.1 et à la modification apportée à l'article
40.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article...
M. Desbiens: II n'a plus de rapport, si je comprends...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: ...avec le mazout coloré, c'est cela?
M. Séguin: C'est cela.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 8
est...
M. Desbiens: Non, j'ai une autre question.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
oui.
M. Desbiens: On a remplacé aussi, à l'article 8,
48, deuxième alinéa, "véhicule" par "bien saisi", "vente
du bien". Est-ce qu'il y a possibilité que ce soit autre chose qu'un
véhicule? C'était le mot "véhicule" qui était
utilisé. Là, on parle de "bien saisi".
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Cela peut aussi être le carburant.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Maintenant, cela inclut le carburant. Ce qui
n'était pas le cas auparavant...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Desbiens: ...ou bien on l'appliquait sans en avoir
l'autorisation? Autrefois, la loi parlait seulement du véhicule.
M. Séguin: On dit que si le tribunal condamne pour avoir
mis ou utilisé du mazout coloré dans un véhicule,
contrairement à la présente loi, il doit prononcer la
confiscation de tout véhicule saisi et retenu en vertu de l'article 40
jusqu'au paiement de l'amende.
M. Desbiens: Maintenant, au lieu de "véhicule" on utilise
le mot "bien", "le bien saisi", dans la nouvelle loi que vous proposez?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Maintenant les dispositions, M. le
Président, sont plus larges et ne visent pas nécessairement les
mêmes infractions que celles qui étaient prévues à
l'article 48 dont, entre autres, du mazout coloré. On vise beaucoup plus
le fait d'avoir transporté au Québec, sans le certificat, sans
l'autorisation, le carburant.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: On saisit et le véhicule et le carburant, les
deux, l'ensemble du bien?
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 8 est
adopté? L'article 8 du projet de loi 81 est adopté. J'appelle
l'article 9 du projet de loi 81.
M. le député de Montmorency.
M. Séguin: L'article 9 introduit une modification à
l'article 50, M. le Président, et n'a pour but que de remplacer la
référence aux paragraphes b, c et d de l'article 42 par une
référence aux articles 42 et 43, étant donné les
modifications apportées à ces deux articles.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a des
interventions relativement à l'article 9 du projet de loi 81?
Est-ce que l'article 9 est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): C'est adopté. J'appelle
l'article 10 du projet de loi 81.
M. le député de Montmorency.
Dispositions particulières
M. Séguin: On introduit une nouvelle définition
d'agent-percepteur: considérer comme agent-percepteur toute personne
autre qu'un vendeur au détail qui vend ou livre du carburant au
Québec. Ses obligations, à titre de mandataire du ministre, sont
prévues aux nouveaux articles 51.1 et suivants du projet de loi.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a des
interventions relativement à l'article 10 du projet de loi 81?
M. le député de Bertrand.
M. Parent (Bertrand): Juste sur l'expression "fait en sorte que
soit livré du carburant"; cela me semble très large. Une personne
qui vend, c'est clair; une personne qui livre, c'est clair; mais une personne
qui fait en sorte que soit livré du carburant au Québec, cela me
semble plus difficile.
M. Séguin: II y a toutes sortes d'intermédiaires ou
toutes sortes de stratagèmes, même des intermédiaires
commerciaux par lesquels on fait transiter le carburant, etc. C'est une
façon de dire: qui vend ou livre directement ou indirectement. C'est un
peu cela qu'on essaie de dire en disant: qui livre ou fait en sorte, par
quelque moyen que ce soit, donc, contourné ou indirect, que soit
livré, effectivement, illicitement du carburant. Donc, il se rend
passible de...
M. Parent (Bertrand): Je comprends l'idée, mais dans
l'application, pour vous autres, où va se situer le rôle de
l'agent-percepteur? Dans le cas d'une vente indirecte, comme vous dites, par
des intermédiaires, si l'agent-percepteur est au début de la
chaîne, s'il y a deux ou trois intervenants à partir du livreur et
s'il y a une personne que vous considérez comme agent-percepteur et
différents intermédiaires, comment ceci pourra-t-il être
contrôlé?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: M. le député de Bertrand, c'est
celui qui, fondamentalement, fait la vente.
M. Parent (Bertrand): Donc, en principe, c'est le dernier?
M. Séguin: Non, cela peut être le premier. Comme je
disais, il peut utiliser une série d'intermédiaires pour faire
apparaître... Sur certaines factures, peut-être, ou certains
contrats, cela n'apparaît pas, mais il a fait transiter le carburant par
d'autres qui se sont engagés à le revendre au même prix
à d'autres, à d'autres, à d'autres... alors, il fait une
échelle ou une pyramide de transactions. Fondamentalement, on peut
repérer dans ces transactions-là que celui qui vend, c'est celui
aux premières
logea de la transaction, qui a fait transiter le carburant par un canal
de transactions pour en arriver à l'acheteur. Habituellement, on
identifie, on réussit à identifier d'où vient la vente, de
qui provient fondamentalement la vente et c'est lui qui est
l'agent-percepteur.
Remarquez, par interprétation a contrario, il pourrait être
dangereux pour des intermédiaires d'accepter de jouer ce rôle
d'intermédiaire parce qu'ils pourraient être vus comme des
agents-percepteurs. Donc, a contrario, on a un effet bénéfique
dans la définition de l'article 50.1. L'utilisation des
intermédiaires qu'on a remarquée jusqu'à présent,
c'est-à-dire faire transiter le carburant par une multitude de
pseudoacheteurs, revendeurs, etc., c'est que s'ils acceptent de prendre
commande et de livrer simplement pour accommoder dans une transaction comme
celle-là, ils risquent, eux aussi, de se faire apposer la
définition d'agent-percepteur, de se faire demander un certificat, etc.
Donc, ils vont probablement refuser ou réagir. Là, on va
peut-être contrecarrer ces pyramides de transactions ou ces
pseudo-transactions pour camoufler d'où vient effectivement le carburant
et où il va exactement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Bertrand, cela va.
M. le député de Sainte-Anne, vous avez demandé la
parole.
M. Polak: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Dubuc.
M. Polak: C'est marqué "toute personne, à
l'exclusion d'un vendeur au détail". Donc, on prend la peine d'exclure
le vendeur au détail. Cela semble ouvrir la porte à une
interprétation très large de "toute personne qui fait en sorte
que soit livré". Théoriquement, le gars qui vient avec un camion
pour décharger l'huile est donc un agent-percepteur. Ce n'est
certainement pas votre intention.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, relativement à la question du député de
Sainte-Anne.
M. Séguin: On vise, M. le Président, les livraisons
qui sont faites entre le vendeur qui, habituellement, est le fournisseur,
grossiste ou vendeur dans le vrai sens du mot et non pas le
détaillant... le carburant qui est vendu par ce fournisseur au
détaillant. C'est là qu'on veut obliger le grossiste, qui va
apparaître comme un agent-percepteur, à percevoir la taxe et non
pas le détaillant qui, en pratique, dans le commerce au détail du
carburant, ne perçoit pas comme telle la taxe.
Le Président (M. Lemieux): Avez-vous terminé, M. le
député de Sainte-Anne?
M. Polak: J'ai terminé, mais je ne suis pas très
heureux du texte, sur le plan juridique, "fait en sorte que soit livré".
C'est un peu... En tout cas, je trouve cela bizarre, la manière de le
rédiger.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, avez-vous des commentaires à ajouter?
M. Séguin: Je prends bonne note...
Le Président (M. Lemieux): Des commentaires du
député de Sainte-Anne.
M. Séguin: ...des commentaires et on peut peut-être
y réfléchir.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Ce qui fait que le livreur des camions Esso, Shell
ou je ne sais quoi, il devient un agent-percepteur.
M. Séguin: C'est cela.
M. Desbiens: Tous les chauffeurs de camion vont donc devoir avoir
un certificat d'enregistrement.
Une voix: C'est de la lourdeur administrative.
M. Séguin: Les chauffeurs de camion ne sont pas dans la
définition d'agent-percepteur.
M. Desbiens: "Aux fins de la présente loi est un
agent-percepteur tout importateur, tout raffineur et toute personne, à
l'exclusion d'un vendeur au détail..." Alors, tout raffineur et toute
personne qui vend, livre ou fait en sorte. Le livreur, c'est le chauffeur du
camion.
M. Séguin: Le mot "personne" s'entend de celui qui,
juridiquement, procède à la vente ou à la livraison, mais
ce n'est pas nécessairement physiquement le chauffeur de camion. Le
chauffeur de camion, c'est un employé ou un agent du mandant et c'est le
mandant qu'on veut assujettir et non pas le mandant et tous ses employés
individuellement, etc. C'est comme dans toute loi. Lorsqu'on dit qu'un
contribuable doit faire telle chose, on ne vise pas par cela...
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Montmorency, d'avoir à couper votre
réponse, mais la
commission du budget et de l'administration, eu égard à un
ordre de la Chambre, doit suspendre ses travaux et les reprendre à 20
heures, ce soir, à l'article 10 du projet de loi 81.
Nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures, ce soir, pour
reprendre l'étude du projet de loi 81.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 10)
Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux pour
l'étude du projet de loi 81, à l'article 10 de ce projet de loi,
et la parole était au député de Dubuc.
M. Desbiens: J'en étais à la question du
livreur.»
Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: ...à l'article 50.1. Je me demandais si le
livreur, c'était le chauffeur du camion. C'est ambigu. Le chauffeur du
camion, celui qui livre l'essence dans les postes d'essence, est-ce qu'il doit
être possesseur d'un certificat d'enregistrement et est-ce qu'il devient
agent-percepteur?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency?
M. Séguin: On a déjà répondu
indirectement, mais pour compléter la réponse, je veux simplement
indiquer que la personne qui vend, livre ou fait en sorte que soit
livré, doit détenir un certificat, parce qu'elle est
définie comme agent-percepteur à la question de savoir si le mot
"livre" signifie que, physiquement, la personne qui fait la livraison,
camionneur ou employé quelconque, est celle qui doit détenir un
certificat ou être astreinte aux règles, la réponse est non
parce que l'agent-percepteur, c'est la personne qui est d'abord et avant tout
importateur, raffineur ou qui fait la livraison, non pas dans le sens purement
physique du terme, mais qui est responsable d'une transaction par laquelle il y
a livraison de la marchandise.
J'ai fait remarquer que certains articles de loi peuvent à
l'occasion assujettir des employés ou des personnes mandatées par
une autre qui fait livrer, mais il faut comprendre dans l'application de la loi
que le mot "livre", c'est dans le sens de "vend, livre ou fait en sorte que
soit livré du carburant" et qu'on doit détenir un certificat.
Cela vise d'abord et avant tout ceux qui sont responsables des transactions,
ceux de qui provient la transaction, et non pas tous leurs employés,
commettants, personnes déléguées ou agents qui, dans le
cadre de leur travail, peuvent à l'occasion manipuler le carburant.
Donc, il faut comprendre ici que le mot "personne", le vendeur, c'est celui qui
fait la livraison dans le sens qu'il en est responsable comme transaction.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: J'ignore si cela existe, comme dans le cas de
l'huile à chauffage où il y a des artisans qui font la livraison,
qui achètent d'une compagnie et deviennent vendeurs. Je ne sais pas si
cela existe dans le cas du pétrole, de l'essence.
M. Séguin: Mais l'huile à chauffage n'est pas
visée ici.
M. Desbiens: Non, mais j'essaie de voir si cela existe aussi dans
le cas des camionneurs qui livrent de l'essence, s'il y a ce genre d'entente
avec les compagnies. Ils achètent de la compagnie et, ensuite, c'est
à eux de venir...
M. Séguin: Jusqu'à tout récemment, l'huile
à chauffage n'était pas taxée.
M. Desbiens: Non, mais c'est uniquement pour voir s'il existe
dans le domaine de la livraison de l'essence le même type de camionneurs,
d'artisans, ni plus ni moins, qui achètent de l'essence de la compagnie
et qui vont la revendre dans les stations. J'imagine que, dans les grandes
compagnies comme Esso, Gulf, etc., on n'a peut-être pas ce genre de
chose, mais il y a des postes d'essence indépendants où...
M. Séguin: II faut faire attention. À la
deuxième...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: ...ligne, on exclut le vendeur au
détail. Alors, il faut se reporter ici au fait, qu'on est...
M. Desbiens: Mais celui qui va vendre au vendeur au
détail, le camionneur qui achète... Je me demande d'abord si cela
existe, je ne le sais pas.
M. Gratton: II est automatiquement grossiste.
M. Desbiens: II devient grossiste à ce
moment-là.
M. Gratton: Oui. Il est grossiste il doit se...
M. Desbiens: Et si ce n'est qu'un livreur qui travaille pour une
compagnie, à ce moment-là, il n'a pas besoin d'avoir de
certificat.
M. Séguin: Non.
M. Desbiens: II n'est pas assujetti. Donc, il ne devient pas
agent-percepteur. Cela va.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 10? Est-ce que l'article 10 est adopté?
M. Desbiens: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. J'appelle
l'article 11 du projet de loi 81. M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: M. le Président, on vise à
remplacer le mot "personne" par les mots "personne titulaire d'un certificat
d'enregistrement", juste pour rendre la définition plus
complète.
Le Président (M. Lemieux): Y a-t-il des interventions sur
l'article 11 du projet de loi 81?
M. Desbiens: L'article 11, paragraphe 51?
Le Président (M. Lemieux): L'article 11, paragraphe 51? M.
le député de Dubuc?
M. Desbiens: Cela va.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. Est-ce que
l'article 11 est adopté?
M. Desbiens: L'article 51.1, mais l'article 11 est plus long que
cela.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Dubuc. L'article 11, paragraphe 51.1.
M. Séguin: M. le Président...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Les paragraphes 51.1 et 51.2 sont tout à
fait similaires aux dispositions que nous avons adoptées, cet
après-midi, dans le projet 80. Ce sont exactement les mêmes
dispositions.
M. Desbiens: Je constate, M. le Président, que c'est
exactement ou presque le mot-à-mot du projet de loi 80. L'article
11...
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 11 dans
l'ensemble est adopté? M. le député de Dubuc, vous pouvez
prendre le temps de... Est-ce que l'article 11 est adopté dans son
ensemble?
M. Desbiens: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Y compris les paragraphes 51,
51.1 51.2 et 51.3. L'article 11 est adopté. J'appelle l'article 12 du
projet de loi 81.
M. Desbiens: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 12 du projet de loi
81 est adopté? Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi 81,
Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants afin de contrer le
détournement de la taxe par des intermédiaires, est
adopté?
M. Desbiens: Adopté. M. Séguin: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'ensemble du projet
de loi 81, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants afin de
contrer le détournement de la taxe par des intermédiaires, est
adopté?
M. Desbiens: Adopté. M. Séguin; Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Le projet de loi 81 est
adopté. Nous allons maintenant passer au projet de loi 79, Loi modifiant
la Loi sur le ministère du Revenu afin de contrer le
détournement, par des intermédiaires, de taxes perçues ou
d'impôts déduits à la source. J'appelle l'article 1 du
projet de loi 79. Est-ce qu'il y a une déclaration d'ouverture, M. le
député de Montmorency?
Projet de loi 79 M. Séguin: Non.
Le Président (M. Lemieux): J'appelle l'article 1 du projet
de loi 79. M. le député de Montmorency.
Responsabilité des administrateurs du paiment des sommes dues
M. Séguin: Je vous ferai remarquer, M. le
Président, qu'il y a simplement trois articles à cette loi. Le
premier vise à modifier l'article 24 de la Loi sur le ministère
du Revenu pour introduire 24.0.1 et
24.D.2 dans le but essentiellement de rendre les administrateurs
personnellement responsables du paiement d'impôt que leur corporation
n'acquitte pas dans les situations décrites, c'est-à-dire lors de
la fermeture, la liquidation ou même en cas de faillite de la
corporation. Ceci permettra, dans plusieurs cas, le paiement des montants dus
par les administrateurs eux-mêmes, sous réserve que les
administrateurs puissent être libérés de leurs
responsabilités même si la Loi sur les compagnies du Québec
leur impute une certaine responsabilité également.
L'administrateur pourra être libéré de cette
responsabilité, en ayant eu un comportement de bonne foi comme bon
administrateur, lorsque l'événement a été connu ou
l'infraction a été connue et, aussi il pourra être
libéré si deux ans se sont écoulés depuis que
l'événement s'est produit et qu'il n'est plus administrateur de
la corporation; c'est une espèce de prescription. Voilà,
essentiellement, M. le Président, les articles modifés par
l'article 1 du projet de loi.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a des
commentaires relativement à l'article 1 du projet de loi 79? M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Ce que je comprends, c'est d'abord que le ministre
du Revenu du Québec se fait créancier garanti dans le cas d'une
faillite. Il devient créancier garanti, c'est ce que j'ai compris
à la lecture du projet de loi.
M. Séguin: Je m'excuse, M. le député de Dubuc, ce
n'est pas tout à fait le sens qu'il faut comprendre. La corporation,
dans le cas où elle fait faillite et qu'elle a perçu des montants
à la source et ne les a pas remis, à ce moment, les
administrateurs, à l'endroit du ministère du Revenu, ont la
responsabilité personnelle d'acquitter ces montants. Donc, on ne vise
absolument pas à s'immiscer dans la mise en faillite ou la faillite
volontaire de la corporation et son rapport avec le syndic. Si la corporation
est en instance de faillite, c'est une chose. La responsabilité de
certains administrateurs relativement à l'infraction commise en est une
autre. Il n'y a aucune relation entre les deux, ne serait-ce que par
l'application de la loi qui impute une responsabilité aux
administrateurs, les administrateurs devenant ainsi des tiers garants, si vous
voulez, ou qui doivent acquitter une dette de la corporation dont ils
étaient les administrateurs.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Mais c'est bien indiqué: "...solidairement
débiteurs avec celle-ci...", avec la corporation, des montants qui sont
dûs dans le cas... Si elle n'est pas en faillite, évidemment,
c'est une chose. Mais au paragraphe b, si la corporation est faillie, l'argent
qui est dû au ministre du Revenu, que le ministre du Revenu s'autorise
à récupérer auprès des administrateurs
eux-mêmes, ne vient en aucun cas diminuer ou altérer la valeur qui
peut rester après la faillite.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: II n'y a aucune relation, M. le
député de Dubuc, entre la réclamation que le
ministère du Revenu va imposer aux administrateurs et le fait que la
corporation soit en faillite, puisque la réclamation du ministère
n'est pas faite à la corporation ou au syndic à faire valoir dans
la masse en faillite, mais plutôt contre d'autres personnes auxquelles on
le réclame, simplement parce qu'elles ont été
administrateurs ou impliquées dans la corporation. Je souligne que cette
mesure nous vient d'une modification à la loi sur l'impôt
fédérale du 12 novembre 1981, qui a adopté essentiellement
cette mesure et qui nous inspire quelques années plus tard, parce qu'on
constate que c'est un excellent moyen d'éviter de perdre ce qui est
dû à l'État, simplement parce qu'une corporation,
lorsqu'elle doit trop d'argent, trouve que la seule façon de s'en
sortir, c'est d'être liquidée ou disparaître sans que l'on
puisse, d'aucune façon très souvent, réclamer des
administrateurs qui, eux, peuvent avoir les moyens financiers de payer.
Il nous semble tout à fait normal que des administrateurs, dans
une corporation, assument la responsabilité. D'autant plus qu'ils ont
connu...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, vous avez terminé?
M. Séguin: J'ai terminé, M. le
Président.
Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le
député de Montmorency. M. le député de Dubuc, s'il
vous plaît!
M. Desbiens: En dehors d'une faillite, disons que tel n'est pas
mon point... Mais quand il s'agit d'une faillite, il reste néanmoins,
malgré l'éclaircissement, parce que les propos du
député de Montmorency jettent un éclairage
différent sur ce que je pensais, que c'est un nouveau principe
établi par le ministre du Revenu, soit celui de s'approprier, en cas de
faillite, de revenus en les faisant devenir solidairement responsables de la
corporation. C'est nouveau ça? En quoi?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: La responsabilité, dans le cas qui nous
occupe ici, est effectivement nouvelle.
M. Desbiens: Je comprends qu'il n'appartient peut-être pas
au ministre du Revenu de faire adopter une telle loi, mais il reste qu'il y a
d'autres cas de faillite et qu'il y a d'autres créanciers qui existent.
Ce qui me préoccupe, bien sûr, avant toute chose, c'est l'individu
qui travaille pour cette compagnie, le salarié qui perd des semaines de
salaire dans certains cas. Lui, il n'a pas la possibilité, parce qu'il
n'est pas au gouvernement, il n'est pas ministre du Revenu, de se faire justice
et de pouvoir retirer... Je pense que c'est encore plus important que le
ministre du Revenu, malgré que je sois d'accord sur le fait que cela
englobe toute la question de l'équité fiscale. C'est bien
sûr.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Ce à quoi fait allusion le
député de Dubuc est ce qu'on appelle l'ordre de collocation en
cas de faillite.
M. Desbiens: L'ordre des priorités dans la loi sur les
faillites.
M. Séguin: L'ordre de collocation s'applique entre les
différents créanciers dans la faillite. Le ministère du
Revenu n'est pas créancier dans la faillite. Il ne produit pas une
réclamation contre la masse. Il ne produit pas de demande au syndic.
Tout ce qu'on dit, c'est un peu, pour illustrer par un exemple, comme si le
député de Dubuc était associé avec le
député de Jonquière et qu'un d'entre eux faisait faillite,
mais que les deux avaient signé des engagements solidaires et conjoints.
Si un d'entre eux fait faillite, bien sûr, d'autres créanciers
peuvent choisir de réclamer de celui qui est solvable. La faillite de
l'un n'entache nullement le droit des autres vis-à-vis d'une autre
personne.
Ici, le cas présent est très clair. La compagnie fait
faillite. Alors, il n'y a aucune réclamation, aucun lien de droit qui
s'exerce dans ce contexte entre le ministère du Revenu et la faillite,
absolument pas. Tout ce qu'on dit, c'est que les administrateurs sont
conjointement et personnellement responsables des dettes prévues
à l'article 24 redevables au ministère du Revenu,
c'est-à-dire des montants retenus a la source et non reversés au
ministère du Revenu. Tout ce qu'on dit, c'est que les administrateurs
seront personnellement responsables dans le cas, entre autres, où la
compagnie fait faillite.
La compagnie à des actifs et des passifs. Le passif excède
habituellement l'actif lorsqu'on fait faillite. Des créanciers peuvent
faire valoir des réclamations contre le syndic, mais ce n'est pas le cas
ici. Le ministère du Revenu ne s'occupe absolument pas de cet
événement. Il ne fait que dire aux administrateurs: Votre
compagnie fait défaut de payer, soit parce qu'elle refuse de payer, soit
parce qu'elle est en liquidation, en fermeture, en faillite ou tout
événement qui fait qu'elle n'exécute pas ses obligations.
Vous êtes garants de la compagnie et vous êtes conjoints et
solidaires, donc, vous devez payer à la place d'une autre personne qui
ne peut le faire pour différentes raisons, dont la faillite.
Il n'y a aucune intervention sur le plan de la faillite. Je pense que
cela me semble assez clair sur ce point. Donc, on ne peut pas maintenir qu'il y
aurait une intervention quelconque sur le plan de l'exercice du droit de la
corporation et l'exercice du droit d'autres créanciers à faire
valoir leur ordre de collocation dans la faillite, puisqu'on n'intervient
absolument pas.
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
député de Montmorency. M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: Vous n'intervenez pas! Vous intervenez, puisque vous
allez chercher l'argent qui vous est dû et...
M. Séguin: Ce n'est pas le même contribuable, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Non, je comprends, parce que vous le rendez par ce
projet loi solidairement débiteur. Mais pourquoi le gouvernement... Ce
que je réprouve là-dedans, c'est que le gouvernement passe par
son ministre du Revenu pour se donner les moyens d'aller chercher ce qui lui
est dû, soit de la corporation, d'un individu ou d'un administrateur de
cette corporation qui est en faillite et il ne pense pas à le faire pour
ceux qui sont à salaire et qui perdent leur salaire. Je trouve cela bien
plus grave.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: M. le député de Dubuc, ceux qui
transigent avec une corporation peuvent et ont toute la liberté d'exiger
des administrateurs des cautions, des garants ou des endossements personnels,
comme les banques, d'autres institutions et comme d'autres intervenants le font
et comme des salariés peuvent le faire. Nous, le ministère, on
dit, lorsqu'on fait affaires avec des corporations: On va rendre les
administrateurs personnellement responsables du paiement de certains montants
qu'ils nous
doivent, ce qui ne préjudicie en rien à la corporation. Ce
n'est pas le même contribuable.
D'un côté, vous avez la compagnie qui est une entité
corporative distincte et, de l'autre, les administrateurs qui sont d'autres
contribuables, d'autres citoyens. Eux ne font qu'endosser les engagements d'une
autre personne. Que cette autre personne fasse faillite n'entache en rien les
droits d'autres personnes à les faire valoir contre ces autres
personnes. Tout ce qu'on dit, c'est que les administrateurs qui sont membres
d'une corporation, membres du conseil d'administration il y a deux cas
d'exception, tout de même, pour tenir compte d'un certain
allègement - sont simplement présumés responsables du
paiement de certaines taxes dues par la corporation au ministère du
Revenu.
M. Desbiens: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Je comprends les explications du
député de Montmorency, mais cela ne change rien à la
situation du travailleur, parce que ce que le ministre du Revenu fait, c'est
qu'il trouve le moyen d'aller récupérer ces sommes qui lui sont
dues par la corporation, en les faisant payer aux administrateurs de cette
corporation. C'est ce que fait le ministre du Revenu, si je comprends bien.
C'est comme cela que j'ai compris le projet de loi. Je crois que c'est
cela.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
pouvez-vous répéter votre ' question au député de
Montmorency?
M. Séguin: Que?
M. Desbiens: Que le ministre du Revenu prend ou se donne les
moyens d'aller chercher les montants qui lui sont dus par la corporation en
rendant les administrateurs -toujours en cas de faillite - solidairement
débiteurs.
M. Séguin: Pas juste en cas de faillite. Dans tous les
cas.
M. Desbiens: Dans tous les autres cas, mais, moi...
M. Séguin: Le cas d'une faillite...
M. Desbiens: ...ce qui m'intéresse, c'est le cas d'une
faillite à cause des autres créanciers et particulièrement
le travailleur à salaire.
M. Séguin: ...ne fait que confirmer l'incapacité de
la compagnie à payer, c'est évident.
(20 h 30)
M. Desbiens: Dans la Loi sur la faillite, dans le plan de
répartition, il y a un article, l'article 107 h. Dans la loi de
l'impôt sur le revenu, c'est prévu qu'en cas de faillite il y aura
un remboursement...
M. Séguin: Absolument.
M. Desbiens: ...au ministère du Revenu.
M. Séguin: Vous avez absolument raison, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: À l'article 107 h, cela vient en h, alors que
les salaires des gens, cela vient en d.
M. Séguin: Si vous lisez attentivement la Loi sur la
faillite, vous allez vous rendre compte que ce tableau de collocation s'adresse
à ceux qui veulent réclamer contre la faillite, faire une
réclamation. Or, quelle est la réclamation, ici, que fait le
ministère du Revenu contre la faillite? Zéro, il n'y en a pas.
Donc, c'est quoi l'argument que vous avancez?
M. Desbiens: Cela va être beau!
M. Séguin: Non, non, il n'y en a pas.
M. Desbiens: Vous ne me comprenez pas. Je m'exprime mal...
M. Séguin: Je m'excuse, M. le député, je
comprends très bien, très bien le point. Cela fait trois fois
qu'on répète.
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens; Je sais que cela n'est pas au gouvernement du Québec
à modifier la Loi sur la faillite. Vous n'y touchez pas, mais vous vous
donnez le droit comme ministre du Revenu d'aller chercher ce qui devait vous
revenir comme montant dû au ministère du Revenu.
M. Séguin: On ne va pas le chercher de la corporation, on
va le chercher d'une autre personne qui, elle, n'est pas en faillite.
M. Desbiens: Si la loi n'était pas changée, vous
devriez aller le chercher de la corporation.
M. Séguin: Bien sûr.
M. Desbiens: Pourquoi ne donnez-vous pas aux salariés le
même avantage?
Le Président (M. Lemieux): M. le
député de Montmorency.
M. Séguin: Je vais vous poser une question. Dans le cas
où une banque faisant affaires avec une corporation a demandé aux
administrateurs de l'endosser et que la corporation fait faillite, est-ce que
la banque peut appeler sa garantie contre les administrateurs, ayant
constaté que la compagnie a fait faillite, oui ou non?
M. Desbiens: Si elle l'a fait garantir, bien sûr.
M. Séguin: Bon, c'est exactement la même chose que
nous avons ici. Vous avez très bien répondu à la question.
Effectivement, le ministère du Revenu, ce qu'il dit aux administrateurs,
c'est: Vous allez garantir votre corporation, et votre corporation si elle fait
faillite - dans ce cas qui nous intéresse - on va laisser fonctionner
exactement comme le prévoit la loi l'exercice de la mise en faillite. La
compagnie fera faillite, elle appellera ses créanciers, ses
débiteurs, etc. Le ministère du Revenu ne s'y présentera
même pas. Il n'y aura aucune réclamation. Tout ce qu'on dit,
c'est: Vous, les administrateurs, vou3 êtes endosseurs de votre
corporation, vous êtes solidairement et conjointement responsables et
vous devez acquitter les taxes personnellement. C'est tout ce qu'on dit.
M. Desbiens: C'est ça.
M. Séguin: C'est exactement comme dans l'autre situation
où vous avez des tiers qui cautionnent une entité qui fait
faillite. L'entité qui fait faillite, on n'y touche pas, on n'y va
même pas, on n'intervient même pas. On ne présentera
même pas de demande de réclamation de sorte que l'ordre de
collocation prévu à la Loi sur la faillite s'appliquera sans
tenir compte de celui du ministère du Revenu parce qu'on sera absent, ou
on le présentera, comme le permet la Loi sur la faillite, comme simple
créancier, etc. Cela ne nous empêchera pas d'avoir cet autre droit
supplémentaire contre d'autres personnes qui ne sont pas la corporation,
mais d'autres administrateurs. Ces administrateurs sont d'autres contribuables,
ce ne sont pas les mêmes, de sorte qu'il n'y a absolument aucune liaison
ou aucun lien entre la faillite de la corporation, d'une part, et la relation
qui va s'établir à ce moment-là entre le ministère
du Revenu et les administrateurs.
M. Desbiens: Autrement dit, toute corporation à l'avenir
devient aux yeux du ministre du Revenu un...
M. Séguin: ...ses administrateurs.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre, je m'excuse, M.
le député de Dubuc a la parole. M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Il vient signer, qu'il le veuille ou pas. Par la loi
il est obligé de devenir caution de sa corporation vis-à-vis du
ministre du Revenu.
M. Séguin: C'est seulement en ce qui concerne
l'application de l'article 24.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: Si on se comprend bien, il ne s'agit pas des montants
qui sont dus au ministère du Revenu pour l'impôt des corporations,
il s'agit d'argent volé. La compagnie a déduit des montants
à la source ou a perçu des taxes de vente qui ne lui
appartenaient pas. Elle n'en a pas fait remise au ministère du Revenu,
elle a volé le ministère du Revenu.
M. Desbiens: Elle a volé le travailleur
nécessairement.
M. Gratton: Un instant! D'abord, on n'est pas dans une
situation... On pourrait dire là aussi qu'on connaît des gens qui
font une profession des faillites frauduleuses mais, règle
générale, ce ne sont pas les entreprises où le nombre
d'employés est le plus important.
Une voix: Spécialistes du droit fiscal.
M. Gratton: Règle générale, il n'y a
même pas d'employés. Mais, des perceptions de taxe de vente, par
exemple, qui ne sont pas remises au ministère, tout ce que l'on fait
avec le projet de loi, c'est se donner le pouvoir d'aller chercher cet argent
chez les actionnaires, mais seulement s'ils sont effectivement responsables de
la chose.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc, est-ce que cela va?
M. Desbiens: Je comprends les raisons et je suis d'accord avec le
principe, à savoir qu'ils doivent payer au ministère du Revenu ce
qu'ils doivent, sauf que ce qui choque ma conscience sociale, c'est que le
travailleur è salaire n'est pas capable de se donner ce droit. Le
ministre du Revenu adopte une loi et il se donne le droit d'aller chercher son
argent.
M. Gratton: L'employé e9t créancier de la
compagnie. S'il y a faillite, les salaires è payer demeurent à
payer, ils font partie des dettes de la compagnie, lesquelles doivent
être acquittées partiellement au moment de la liquidation.
Là, on parle d'argent qui
n'appartient pas à la compagnie. De toute façon, est-ce
qu'on connaît beaucoup d'employés qui travaillent une très
longue période de temps sans être payés?
M. Desbiens: Je ne le sais pas, mais j'en ai vu à mon
bureau. On sait que ce qui choque le plus un travailleur qui a perdu une partie
de son salaire à cause de la faillite d'une entreprise, c'est de voir
l'administrateur continuer à se promener en Cadillac sous son nez.
M. Gratton: Est-ce que le député me suggère
que le ministère du Revenu devrait garantir le paiement des salaires
à même les montants qui lui ont été
volés?
M. Desbiens: Ce que j'ai dit au début et ce que je
continue de maintenir, c'est que - non, je sais que ce n'est pas au ministre du
Revenu, je l'ai dit tantôt, à adopter une loi comme
celle-là, je le crois en tout cas -le gouvernement devrait, s'il pense
à se faire rembourser, penser aussi aux travailleurs à salaire,
lesquels perdent des montants. Ces montants sont importants pour eux.
M. Gratton: On me fait remarquer que la Loi sur la faillite,
c'est du ressort du gouvernement fédéral.
M. Desbiens: On savait ce que serait la réponse.
M. Gratton: Entre nous, on étudie un projet de loi. Je
comprends les appréhensions, les désirs et les appels à la
conscience sociale du député de Dubuc, mais il me semble que les
discussions qu'on a ici ne sont pas tout à fait pertinentes.
Une voix: Les salaires sont aussi une créance
privilégiée.
Le Président (M. Lemieux): M. le député.
M. Desbiens: Mais avant l'impôt sur le revenu,
justement.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Avant le ministère du Revenu.
M. Gratton: Non, non, ce n'est pas l'impôt sur le
revenu.
M. Desbiens: Avant le ministère.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: M. le Président, il faut dire que, pour
le cas des employés...
Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le
député de Montmorency! M. le député de Dubuc...
M. Séguin: ...la créance.,.
Le Président (M. Lemieux): ...vous aviez la parole, est-ce
que vous avez terminé?
M. Desbiens: Très bien.
M. Séguin: ...pour leurs salaires courus et dus par une
corporation employeur qui fait faillite est privilégiée...
Le Président (M. Lemieux): En vertu de la Loi sur la
faillite.
M. Séguin: ...et ils sont parmi les premiers à
être payés.
Le Président (M. Lemieux): Ah oui, effectivement!
M. Séguin: Et la créance du ministère du
Revenu, qui n'est pas celle dont on discute mais que pourrait faire valoir le
ministère, vient après. Donc, dans l'ordre de priorités
que le syndic devra considérer, même si le point que
soulève le député de Dubuc n'est pas celui dont on parle,
il faut quand même dire que la réclamation du salaire
impayé par une corporation qui fait faillite demeure l'une des
premières sur la table.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, vous vouliez prendre la parole. Je peux revenir avec le
député de Dubuc?
M. Desbiens: Ce ne sera pas long. Le Président (M.
Lemieux): Oui. M. Desbiens: Est-ce que...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Encore une question que je pose: Qu'est-ce qui
empêcherait un tribunal... C'est marqué "solidairement" et non pas
"personnellement responsables". Pardon?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc,
vous pouvez poser votre question.
M. Desbiens: On ira devant un juge, j'imagine, pour l'application
de la loi, à un moment donné, pour déterminer que
"solidairement responsables" implique qu'il y
a une partie... Le juge pourra dire "solidairement responsables", donc,
il y aura une partie qui sera payée par la corporation et une partie par
les administrateurs. Non?
M. Séguin: Non. Lorsqu'une obligation est conjointe et
solidaire, c'est au créancier de l'obligation, c'est-à-dire le
ministère du Revenu, qui exerce son droit contre ceux qui sont
liés conjointement et solidairement, contre tous ou contre quelques-uns;
cela est le choix et la priorité du créancier.
Une voixs Ou contre tous.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: C'est un principe de droit bien ancré
chez nous depuis de nombreuses années, de sorte que c'est au
créancier qui poursuit ou qui réclame à exercer son ordre
personnel contre l'ensemble des personnes conjointes et solidaires. Les mots
"conjoint et solidaire" le disent. Un pour tous, tous pour un.
Le Président (M. Lemieux): D'ailleurs, M. le
député de Dubuc, si vous vous référez à
notre Code civil, vous allez voir qu'aux articles sur les obligations dans des
contrats, les articles 1020 et suivants, vous allez retrouver les obligations
conjointes et solidaires.
M. Desbiens: En écrivant ça comme ça
"solidairement débiteurs", la corporation n'est pas visée. Ce
sont uniquement les administrateurs qui deviennent visés par le
projet.
M. Séguin: La corporation est la première
débitrice vis-à-vis du Revenu, parce que c'est elle qui doit
payer, mais elle vient en faillite.
M. Dufour: C'est solidaire.
M. Séguin: Toujours.
M. Dufour: II dit non. C'est oui.
M. Séguin: Le garant est toujours solidaire avec celui qui
donne la garantie.
Le Président (M. Lemieux): Ce que voulait dire le
député de Montmorency, c'est qu'on ne se tournera sûrement
pas vers la corporation, puisqu'elle a fait faillite. On va se tourner vers les
administrateurs, M. le député de Jonquière.
M. Séguin: Oui, mais, M. le Président, il faut
faire attention.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Montmorency.
M. Séguin: L'article de loi ne vise pas que le cas de la
faillite. Il y a d'autres cas où la compagnie peut refuser de payer ou
ne pas effectuer le paiement, sans qu'elle en soit nécessairement
incapable, au vrai sens du mot. Le cas de la faillite évidemment,
concrétise son incapacité puisqu'elle a fait cession de ses
biens. Dans d'autres cas, ce n'est pas clair. La solidarité va jouer et,
s'il s'avérait possible que la corporation paie après, bien, elle
paiera.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: ...personnellement débiteur de ce
montant.
M. Séguin: L'expression juridique qui est retenue n'est
pas le mot "personnel", mais les mots "conjoint et solidaire".
M. Desbiens: "Conjoint et solidaire".
M. Séguin: C'est l'expression retenue au Code civil et
l'expression commune pour indiquer une obligation à titre d'endosseur,
par exemple, pour qu'il y ait un engagement conjoint et solidaire. C'est
l'expression juridique du Code civil.
Le Président (M. Lemieux): D'ailleurs, pour
compléter la réponse du député de Montmorency, dans
le Code civil, vous retrouvez l'article 1103 qui dit: "De la solidarité
de la part des débiteurs. Il y a solidarité de la part des
débiteurs lorsqu'ils sont obligés à une même chose,
de manière que chacun d'eux puisse être séparément
contraint à l'exécution de l'obligation entière, et que
l'exécution par l'un libère les autres envers le
créancier." Évidemment, si un des débiteurs solidaires
avait à payer cette créance-là, il conserve son recours
contre les autres débiteurs. Je m'excuse, tout à l'heure j'ai
mentionné l'article 1022; il s'agissait effectivement des obligations,
mais relativement au débiteur, c'est 1103 du Code civil.
M. Desbiens: Cela ne règle pas mon problème de
conscience, mais cela répond à ma question.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière, est-ce que cela a éclairé l'ensemble de
vos...
M. Dufour: J'aurais voulu, M. le Président, poser une
question pratique pour essayer de me démêler là-dedans.
Supposons que ce sont un commerçant de meubles, donc une corporation.
Cette corporation vend à terme, tant par mois. Elle fait faillite ou
elle fait autre chose, mais pour les besoins de la cause disons qu'elle
fait faillite. Il y a 300 000 $ de comptes à recevoir ou 500 000 $. Il y
a une taxe qui aurait été à percevoir et qui n'est pas
perçue. Comment allez-vous régler ce cas? La taxe est
censée être perçue, parce qu'il y a eu vente, mais comme
c'est une vente à tempérament, elle n'est pas
nécessairement payée au complet au départ. Comment
allez-vous régler un tel cas?
M. Séguin: Vous soulevez le cas de la vente à
tempérament...
M. Dufour: Qui est permise, je suppose?
M. Séguin: Oui et, M. le Président, sans qu'il
faille ici étudier les articles de la loi de la taxe de vente pour
savoir si une vente à tempérament est assujettie ou non, il faut
dire tout de suite que la vente à tempérament est assujettie et
que le paiement de la taxe doit se faire immédiatement, même si
des modalités de paiement font que c'est à tempérament
dans l'avenir. Donc, le problème demeure que, si la taxe est exigible,
si la corporation fait faillite, le même principe dont on a
discuté va s'appliquer et qu'il y a solidarité et obligation
conjointes des administrateurs qui peuvent être appelés
personnellement à payer ce que leur corporation ne paie pas. (20 h
45)
Évidemment, si vous soulevez un cas où la taxe ne serait
pas exigible, soit à cause de modalités de contrat ou de
transaction, le ministère n'a pas à produire de
réclamation ni contre la compagnie et encore bien moins contre les
administrateurs. Il faut s'entendre qu'on parle ici d'une taxe qui est devenue
dûment exigible. D'ailleurs, on parle de taxe, mais c'est plutôt
des montants retenus à la source, des taxes de vente ou d'autres formes
d'impôt retenues à la source, qui n'ont pas été
reversés par la corporation dans l'exercice de sa fonction de mandataire
dans l'application de la taxe de vente. Donc, la corporation a perçu
normalement une taxe et on ne l'a pas reversée au ministère.
C'est là qu'on dit: Les administrateurs qui sont au fait de cela et qui
ont permis que leur corporation - excusez l'expression - se finance à
même les montants retenus à la source mais non repayés,
encourent une responsabilité quant au remboursement de ces montants. Je
vous indique d'ailleurs qu'au sens de la Loi sur le ministère du Revenu,
la compagnie et les administrateurs, dans certains cas, encourent une
responsabilité vis-à-vis de la Loi sur les poursuites sommaires
parce que, comme le ministre du Revenu l'a mentionné tantôt,
garder et ne pas repayer cet argent-là, cela constitue une infraction
punissable sur déclaration sommaire de culpabilité et, même
dans certains cas, le Code criminel peut s'appliquer puisque cela peut
constituer du vol, de la fraude, etc.
Alors, nous ne sommes pas en matière ici où on intervient
pour contrecarrer une réclamation d'employés vis-à-vis
d'une compagnie. Cela ne change strictement rien dans les salaires qui
pourraient être dus par la corporation aux employés. D'ailleurs,
c'est dans l'application de la Loi sur la faillite. Il pourra peut-être
apparaître une modification è la Loi sur la faillite,
éventuellement, pour mieux protéger la réclamation des
salariés, mais ici nous sommes sur une autre matière.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Le cas d'une corporation qui serait enregistrée
à la Bourse, par exemple, qui ne comprend pas d'individus comme tels,
mats un ensemble d'actionnaires, comment pourriez-vous le traiter?
M. Séguin: Toute compagnie doit au moins avoir des
administrateurs pour fonctionner ou une personne morale, à moins que le
député de Jonquière ne puisse me donner des exemples de
corporations morales qui n'ont pas d'administrateurs et qui fonctionnent: mais,
dans l'ensemble, a tout le moins, la Loi sur les compagnies n'exige pas qu'il y
ait nécessairement beaucoup d'actionnaires, mais cela prend au moins un
administrateur pour faire fonctionner une compagnie.
Le Président (M. Lemieux): D'ailleurs, maintenant vous
avez ce qu'on appelle...
M. Séguin: Vous en conviendrez.
Le Président (M. Lemieux): ...les "one-man
corporation".
M. Dufour: C'est cela.
Le Président (M. Lemieux): Excusez l'expression anglaise.
M. le député...
M. Dufour: C'est nouveau, c'est récent.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Dufour: Ah non!
Le Président (M. Lemieux): Non. M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: J'ai entendu tantôt les propos du
député de Montmorency. Il a semblé établir une
distinction dans les réclamations que le ministre du Revenu va pouvoir
faire à l'aide de ce projet de loi, dans les cas de faillite. Il
semblait dire que
le ministère du Revenu, dans les cas de faillite, va rester un
des créanciers qui devra réclamer grâce à sa
position. Cela veut dire que le projet de loi vise autre chose, donc, d'autres
montants d'argent qui sont dus au ministère?
M. Béguin: C'est que le ministère du Revenu peut
avoir d'autres réclamations contre la corporation, par exemple, pour
l'impôt sur le revenu. Donc, il conservera ses droits normaux comme
créancier en cas de faillite comme n'Importe quel créancier peut
le faire contre un failli en vertu de la loi fédérale sur les
faillites. 11 produira une réclamation et suivra le processus normal
pour faire valoir son droit. Ici, l'article 24 ne vise que les montants retenus
à la source par la corporation, mais non reversés. Retenus sur le
salaire, mais non l'impôt de la corporation, c'est là la
distinction que je faisais.
M. Desbiens: Oui, de la corporation. D'accord.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Desbiens: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: II y a l'article 24.0.2...
Le Président (M. Lemieux): II y a l'article 24.Q.2 de
l'article 1.
Prescription libératoire à l'avantage des
administrateurs
M. Desbiens: C'est ce qu'on appelle un renversement de la
preuve.
M. Séguin: Non, pas exactement. M. Desbiens: Non?
M. Séguin: C'est de permettre à l'administrateur
d'être libéré de son obligation, s'il s'est
écoulé deux ans qui suit la date à laquelle un
administrateur a été pour la dernière fois administrateur
de la corporation et qu'il n'y a pas eu de réclamation par le
ministère du Revenu. C'est donc ce qu'on appelle une prescription
libératoire è l'avantage de l'administrateur. Autrement dit, il
s'écoule deux ans et s'il n'y a pas eu de réclamation, il est
libéré.
M. Desbiens: L'article 24.0.2 dit que l'article
précédent "ne s'applique pas à un administrateur qui a agi
avec un degré de soin, de diligence et d'habileté raisonnable
dans les circonstances". Qui détermine qu'il a agi de cette
façon?
M. Séguin: C'est la notion habituelle du bon
administrateur que retiennent les lois sur les compagnies dans la plupart des
pays dans le monde, qui implique toujours une responsabilité sur le dos
d'un administrateur. C'est dans toutes les lois, dans la Loi
fédérale sur les compagnies ou dans la loi
québécoise, etc., même en Ontario.
On dit qu'un administrateur doit se comporter en bon père de
famille, en bon administrateur, etc., de sorte que s'il a agi avec diligence,
bonne foi ou s'il a, par exemple, exercé une dissidence sur une conduite
de la compagnie afin de passer outre à l'infraction il ne lui sera pas
tenu rigueur de l'infraction. Mais c'est une question d'appréciation de
fait.
M. Desbiens: Mais qui détermine cela? Qui doit en faire la
preuve?
M. Séguin: C'est le ministre qui applique
l'appréciation. Remarquez que l'on sous-estime le processus. Quand il y
aura avis de cotisation, si c'est l'administrateur qui s'est vu appelé
en garantie ou comme conjoint solidaire sur le paiement, il pourra exercer ses
droits d'opposition, de contestation et aller même en Cour provinciale et
contester soit sa responsabilité, soit les montants
réclamés ou d'autres dispositions de la loi.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency, est-ce que cela veut dire que si un administrateur fraude la
corporation l'ensemble des autres administrateurs, s'ils ont agi avec bonne foi
et diligence, serait évidemment... Enfin, l'article 24.0.1 n'aurait pas
d'application. C'est alors le critère de l'homme raisonnable.
M. Séguin: C'est exact.
M. Desbiens: Mais, justement, le ministre du Revenu, lui, va
cotiser les administrateurs des dettes qui lui sont dues.
M. Séguin: II y a une présomption...
M. Desbiens: Ceux qui ont agi avec un degré de soin, de
diligence et d'habileté raisonnable, autrement dit, s'il y en a
seulement un dans le groupe qui a fraudé, comment tous les autres, qui
vont devoir se défendre aussi, vont-ils démontrer qu'ils ont agi
avec un degré de soin, de diligence et d'habileté raisonnable? Il
leur appartiendra de faire la preuve de leur présomption. N'est-ce pas
ce qu'on appelle un renversement de la preuve?
M. Séguin: C'est cela. Écoutez, là, vous
présumez d'une façon de fonctionner du ministre, en
pratique. Nous sommes ici au niveau un peu théorique d'une conception
légale. Dans la pratique des choses, le ministre ne va habituellement
émettre un avis de cotisation dans l'application de la
responsabilité des administrateurs qu'après vérification
de leur responsabilité. Étant donné que, comme on le dit
à l'article 24.0.2, le premier alinéa ne s'applique pas à
l'administrateur qui a agi avec un degré de soin, de diligence et
d'habileté raisonnable... Remarquez que c'est plutôt large au
profit de l'administrateur. L'expression "habileté raisonnable", dans
les circonstances, est une exemption totale au profit de l'administrateur. Cela
veut dire que l'administrateur n'a qu'à démontrer que, lorsque
l'infraction a été connue, il a agi, lui, avec une
habileté raisonnable dans les circonstances comme administrateur et
qu'on ne doit pas le tenir responsable. Après cela, si le
ministère est convaincu que des administrateurs ne
bénéficient pas de cette présomption, il va cotiser. Comme
je le disais tantôt, les administrateurs pourront, à ce
moment-là, exercer tous leurs droits de contestation vis-à-vis de
leur cotisation.
M. Desbiens: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Le député de Montmorency vient de dire
que c'est l'administrateur qui devra faire la preuve qu'il est innocent. Ce
n'est pas le ministère du Revenu qui devra prouver qu'il est
coupable.
M. Séguin: Ce n'est pas nécessairement de savoir
qui est coupable et qui est innocent. Vous avez déjà un indice,
lorsqu'une corporation qui a prélevé des montants à la
source ne les a pas reversés pendant, plusieurs mois, plusieurs
années, il y a déjà un indice que les administrateurs...
Remarquez qu'on est toujours dans le contexte d'une infraction à cet
article, mais cela est également un crime à l'égard
d'autres lois parce que c'est quelqu'un qui a prélevé de l'argent
qui ne lui appartient pas et qui ne l'a pas remis comme mandataire. Donc, il y
a déjà un indice, vous en conviendrez avec moi, que les
administrateurs qui sont conscients de cela, puisque ce sont eux qui font
l'administration de la compagnie, ce sont eux qui ont reçu les
chèques, qui ont physiquement fait la retenue des impôts à
la source, des taxes à i la source et qui ne les ont pas remis...
Comment voudriez-vous, d'un côté, condamner cette pratique d'une
corporation qui perçoit de l'argent chez les employés et ne le
remet pas au ministère et, en même temps, croire que les
administrateurs n'en sont nullement responsables? Il y a une présomption
- un peu, tout de même - que les administrateurs devraient expliquer
pourquoi ils ne sont pas responsables du fait que leur corporation, par leurs
gestes, n'a pas commis l'infraction. Je le dis: Ils sont passibles de
poursuites à d'autres égards en vertu d'autres lois pour la
même chose. Tout ce qu'on fait ici, c'est simplement de dire: Pour nous,
la taxe, c'est un manque à gagner. C'est le public qui y a droit. Vous
l'avez perçue de la poche des travailleurs; c'est leur impôt sur
le revenu que vous n'avez pas remis, vous vous êtes financés avec
cela. Je peux vous dire que le cas est assez fréquent. Ce n'est pas
inhabituel. Pour régler le problème, il faut, d'une part,
l'exiger de la corporation, bien sûr, et faire toutes les pressions
possibles. Or, en même temps, les administrateurs qui sont souvent
derrière la façade corporative, qui ont souvent des revenus
personnels amplement suffisants - pas toujours, mais cela arrive -et qui,
simplement parce que c'est la corporation, s'en lavent les mains, devront
dorénavant faire face à une responsabilité. On leur donne
l'occasion de démontrer qu'ils ont agi avec diligence. Nous ne savons
pas s'ils ont agi avec diligence car nous sommes déjà devant une
corporation qui est fautive, alors on est inquiet. Ce sera aux administrateurs
à démontrer que, dans telle circonstance - on pourra en convenir
avec eux - ils ne sont peut-être pas responsables personnellement et ils
seront absous.
M. Desbiens: M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Seulement une remarque, M. le
député de Dubuc. Ce qui serait aberrant, puisque dans un premier
temps on prenait de facto la responsabilité conjointe et solidaire, ce
serait le contraire: que l'article 24.0.1 s'applique à des
administrateurs de bonne foi. Je pense que c'est cela que le législateur
a voulu éviter, en leur permettant de prouver leur bonne foi et leur
diligence afin de se dégager de cette responsabilité solidaire
prévue à l'article 24.0.1.
M. le député de Dubuc, vous avez la parole.
M. Desbiens: Ce n'est pas encore tout à fait clair dans
mon esprit. Le député de Montmorency a d'ailleurs dit qu'ils sont
encore passibles quand même d'autres poursuites. Est-ce que cela peut
aller jusqu'au Code criminel en cas de fraude? Est-ce que cela relève du
Code criminel?
M. Séguin: Ce sera...
M. Desbiens: Mais s'ils sont...
M. Séguin: ...à d'autres instances d'en
décider.
M. Desbiens: ...poursuivis, justement, sous l'autorité du
Code criminel, ils seront considérés comme innocents, non?
M. Séguin: Ce sont d'autres lois, d'autres instances.
M. Desbiens: Au départ ils vont être
considérés comme coupables par le ministère du Revenu et
innocents s'ils sont poursuivis par d'autres instances au Code criminel, pour
la même offense?
Le Président (M. Lemieux): Ce sont deux infractions de
nature différente. M. le député de Montmorency est en
mesure de répondre.
M. Séguin: M. le Président, on peut peut-être
conclure là-dessus parce qu'on n'a pas trop à entendre des
explications. Je le répète: À savoir si la compagnie doit
payer la taxe ou non, c'est quand même relativement un peu
mathématique. Cela se constate. Il y a eu des transactions. Ils auraient
dû remettre les montants d'impôt ou de taxe perçus à
la source. Ils ne l'ont pas fait. On cotise et les administrateurs ont toujours
le loisir de s'opposer à la cotisation et de se défendre. Je
pense que leurs droits sont amplement protégés dans la mesure que
l'on suggère ici comme modification. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: II y aurait un point que je voudrais soulever, ce
n'est pas pour des mesures dilatoires, dans le but d'avoir de l'information.
Quand vous dites qu'après l'expiration». Si cela avait
été correct...
M. Séguin: On n'a jamais pensé cela. (21
heures)
M. Dufoun La question a été posée, je ne la pose
pas.
Une voix: ...sur une question de fond.
M. Dufour: Cela va. "Après l'expiration de deux ans qui
suivent la date à laquelle celui-ci cesse pour la dernière fois
d'être administrateur de la corporation", je pense comprendre, mais de la
manière dont c'est écrit, je ne peux pas comprendre cela de cette
façon. Quelqu'un démissionne, il n'est plus administrateur de la
compagnie. À partir du moment où il démissionne, deux ans
après, est-ce qu'il peut être tenu... Je ne pense pas que c'est ce
que cela veut dire, mais, d'après ce qui est écrit, il peut
être tenu à partir de la date où il a
démissionné et deux ans après. M. Séguin: Oui.
M. Dufour: II n'est plus administrateur, il n'a plus accès
aux livres, il a laissé.
M. Séguin: Un instant!
M. Dufour: Jusqu'au moment où il a
démissionné, je comprendrais qu'il pouvait être responsable
de ce qui se passait, mais maintenant il n'est plus là, quels sont ses
droits?
M. Séguin: Le ministère peut lui réclamer
dans les deux ans qui suivent la dernière fois où il était
administrateur, mais poursuivre pour une réclamation basée sur un
montant de taxe qui était dû par la corporation alors qu'il
était administrateur...
Le Président (M. Lemieux): Antérieurement.
M. Séguin: ...et non pas... M. Dufour: Plus à
partir...
M. Séguin: ...pour un montant de taxe exigible
après qu'il fut devenu pour la dernière fois administrateur.
M. Dufoun C'est vraiment cela. Quelqu'un démissionne,...
M. Séguin: II était en charge.
M. Dufour: ...il était engagé jusqu'au moment
où il démissionne.
M. Séguin: C'est cela. Autrement dit, il était
administrateur quand l'infraction a été commise.
M. Dufoun Pour que le ministère garde ses droits, il a deux ans
pour revenir contre lui.
M. Gratton: C'est cela.
M. Dufoun Si, dans une compagnie, il y avait un trésorier, qui
n'est pas nécessairement un administrateur, qui falsifiait des livres.
L'administrateur peut être un bon père de famille au point de vue
de la compagnie, mais, comme il n'a pas un bilan - un bilan, c'est chaque
année, il n'y a pas de bilan tous les mois, c'est clair - le
trésorier a fraudé, il n'a pas envoyé ses comptes, etc.
Quelle est la position du ministère d'après la loi?
M. Gratton: Cela ne s'applique pas à un
administrateur...
M. Dufour: Cela ne s'appliquerait pas.
M. Gratton: ...qui a agi avec un degré de soin, de
diligence...
Le Président (M. Lemieux): Bonne foi et diligence, et
ainsi de suite. Est-ce que l'article 1 est adopté?
M. Desbiens: Non, M. le Président.
Le Président (M. Lemieux): Non? M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: L'article 24.0.2, au minimum, le ministre s'assure
tous azimuts de pouvoir mettre la main sur le magot. Il attaque tout le monde,
tous les administrateurs de la compagnie, il les rend tous responsables et,
après, ceux qui ne sont pas coupables dans la "gang", faites la
preuve.
M. Séguin: C'est votre interprétation.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.
M. Gratton: On dit le contraire. À l'article 24.0.2, on
limite les.»
M. Desbiens: C'est ce que le député de Montmorency
m'a dit tantôt. C'est sûr qu'ils ne sont pas coupables, mais vous
avez dit que cet article permettait à ceux qui ne sont pas coupables de
pouvoir faire la preuve de leur non-culpabilité.
M. Séguin: On ne peut pas parler de culpabilité, on
n'est pas matière pénale.
M. Desbiens: Ne commencez pas cela, je ne suis pas un avocat.
M. Séguin: Malheureusement, j'en suis un.
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: M. le député, à l'article
24.0.1, on édicte quelles sont les choses qu'on peut reprocher à
quelqu'un et comment on peut pincer l'administrateur en question. A l'article
24.0.2, on dit que cela ne peut pas s'appliquer à celui, premier
alinéa, qui montre qu'il était de bonne foi et,
deuxièmement, après deux ans. Donc, il faut établir que
l'article 24.0.2 ne s'applique pas avant d'avoir recours à l'article
24.0.1. Effectivement, on ne peut pas concevoir que le ministère du
Revenu prenne une procédure en vertu de l'article 24.0.1 pour se faire
débouter par le juge qui dirait: Lisez donc votre loi, vous avez
l'article 24.0.2 et cela ne s'applique pas à ce monsieur.
L'enquête, au lieu de... C'est exactement l'inverse de ce que le
député de Dubuc disait. Il ne s'agit pas de présumer de la
culpabilité au départ. Au contraire, on examine la chose et on
conclut que la personne en question ne répond pas à l'article
24.0.2 et on prend des procédures en vertu de l'article 24.0.1.
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Supposons qu'il y ait sept administrateurs dans une
corporation visée, vous envoyez un avis de cotisation à chacun.
Non?
M. Gratton: Non. On va trouver le coupable...
M. Desbiens: Vous allez commencer par trouver celui ou ceux
qui...
M. Gratton: On va trouver à qui s'applique l'article
24.0.1 et on va cotiser celui-là ou ceux-là.
M. Desbiens: Vous comprenez que, si je me fais avocat, c'est pour
essayer d'éviter que des gens, qui ont agi de bonne foi comme
administrateurs, ne soient pénalisés par cette mesure.
Le Président. (M. Lemieux): Vous vous faites l'avocat du
diable, M. le député de Dubuc.
M. Desbiens: C'est mon rôle.
Le Président (M. Lemieux): Vous faites bien cela, M. le
député de Dubuc.
M. Desbiens: Mon collègue a... M. Gratton: On n'a
pas soupé...
Le Président (M. Lemieux): Continuez, M. le
député de Dubuc.
M. Gratton: ...ma réservation, c'est pour 21 heures, M. le
député...
M. Desbiens: Oui, M. le ministre, je vous l'ai dit, mais je ne
vous ai pas dit quelle journée c'était.
M. Gratton: Votre leader, par exemple, m'a dit autre chose.
M. Desbiens: Je ne l'ai pas vu! Une dernière question, je
pense...
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: ...et elle a été soulevée par
mon collègue de Jonquière. À propos de
la période de deux ans de celui qui cesse pour la dernière
fois d'être administrateur ou de quelqu'un qui aurait été
d'une corporation qui existe depuis 20 ans. Donc, Il aurait été
administrateur pendant deux ou trois ans, les premières années de
la compagnie - cela arrive - et il s'en va dans une autre compagnie; il laisse
la compagnie et il revient. Quand la faute est trouvée par le
ministère du Revenu, est-ce qu'il devient aussi responsable si cela
s'est produit dans les années où il n'était pas là
ou dans les premières années où il était
là?
Le Président (M. Lemieux): M. le député de
Montmorency.
M. Séguin: Simplement pour préciser que
l'administrateur est responsable d'une infraction commise pendant qu'il
était administrateur. Mais l'infraction...
M. Desbiens: Pendant.
M. Séguin: ...qui est commise lorsqu'il n'est plus
administrateur. Par exemple, il a donné sa démission, il quitte
la compagnie et, six mois après...
M» Desbiens: ...deux ans.
M. Séguin: ...une infraction se produit, le
ministère du Revenu a vu cela, il ne peut pas être relié
à cela, il a déjà quitté, il n'est pas là.
C'est l'administrateur qui était là. Là, le
ministère a deux ans, même si, après, il n'est plus
administrateur. Ce qui est important, c'est de se situer au moment où
l'infraction a été commise, à savoir qui était
administrateur,. Le ministère a deux ans à partir du moment
où ils ne sont plus administrateurs pour réclamer contre eux,
s'il y a lieu.
M. Desbiens: Je sais que le ministère du Revenu a le bras
long, comme on dit, et il découvre... Une dette d'impôt, cela ne
s'éteint pas, pour autant que je sache, ou à peu près
pas.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que cela se prescrit, M.
le ministre?
M. Desbiens: Une redevance à l'impôt?
M. Gratton: II y en a pour plusieurs centaines de millions de
dollars qui s'éteignent.
M. Desbiens: Oui, parce que le gouvernement est obligé de
prendre la décision de les éteindre.
M. Gratton: Bien oui.
M. Desbiens: II faut que ce soit radié; mais, selon la loi
telle qu'elle est, ce n'est pas prescrit.
M. Séguin: Une dette non cotisée est
imprescriptible.
M. Desbiens: Imprescriptible, c'est cela. Alors, le ministre du
Revenu peut revenir sur dix ou quinze ans, une dette qui serait
découverte au bout de ce temps-là. Cet administrateur, qui est
parti de la compagnie depuis cinq ans, s'il était là au moment
où cela s'est produit...
M. Séguin: On se limite à deux ans. M. Desbiens:
À deux ans, d'accord.
Le Président (M. Lemieux): Effectivement. Est-ce que cela
va, M. le député de Dubuc? Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Desbiens: Adopté.
M. Séguin: On a devancé votre...
Le Président (M. Lemieux): L'article 1 est adopté.
J'appelle l'article 2 du projet de loi 79.
M. Desbiens: Oui.
Le Président (M. Lemieux): Est-ce que l'article 2 est
adopté?
M. Dufour: Quand vous dites: "Le présent article
s'applique à l'égard d'un montant perçu, déduit ou
retenu après le", c'est après la date de la sanction du projet de
loi?
M. Gratton: Oui. M. Dufour: D'accord.
Le Président (M. Lemieux): L'article 2 est-il
adapté?
Une voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Adopté. L'article 2 est
adopté. J'appelle l'article 3 du projet de loi 79. Est-ce que l'article
3 du projet de loi 79 est adopté?
M. Séguin: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): L'article 3 du projet de loi 79
est adopté. Est-ce que le titre du projet de loi 79, Loi modifiant la
Loi sur le ministère du Revenu afin de contrer le détournement,
par des intermédiaires, de taxes perçues ou d'impôts
déduits à la source, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Le titre du projet de loi 79
est adopté. Est-ce que l'ensemble du projet de loi 79 est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux): Le projet de loi 79, Loi
modifiant la Loi sur le ministère du Revenu afin de contrer le
détournement, par des intermédiaires, de taxes perçues ou
d'impôts déduits a la source, est adopté.
Des voix: Adopté.
Le Président (M. Lemieux}: La commission...
M. Gratton: M. le Président.»
Le Président (M. Lemieux): M. le ministre du Revenu.
M. Gratton: ...est-ce qu'on me permettrait? Je voudrais remercier
tous les membres de la commission pour leur participation, de façon
particulière, le député de Montmorency qui a
été non seulement d'un éclairage extraordinaire pour nous
tous, mais il a également contribué à me redonner la voix,
ce qui me permettra, demain, de vaquer à mes occupations à
l'Assemblée nationale.
M. Dufour: Vous lui devez des remerciements pour cela!
Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député de Dubuc, vous avez quelques
commentaires?
M. Desbiens: C'est cela. Je l'avais dit, M. le Président,
que c'était un truc pour ne pas nous répondre
personnellement!
Le Président (M. Lemieux): Alors, je remercie les deux
groupes...
M. Desbiens: On va souhaiter un bon repos au ministre.
Le Président (M. Lemieux): ...ainsi que les fonctionnaires
qui ont accompagné le ministre pour leur collaboration. La commission
ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 21 h 10)