To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on the Budget and Administration

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on the Budget and Administration

Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Monday, June 9, 1986 - Vol. 29 N° 20

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 68 - Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives


Journal des débats

 

(Quinze heures trente-six minutes)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux relativement à l'étude du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives. M. le greffier, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Filion (Taillon) remplace Mme Blackburn (Chicoutimi). M. Desbiens (Dubuc) remplace M. Dufour (Jonquière) et M. Chevrette (Joliette) remplace M. Gendron (Abitibi-Ouest).

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire. Est-ce qu'il y a des remarques? Est-ce qu'il y a des interventions?

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord excuser mon collègue de Lévis qui avait la parole au moment où vous avez dû ajourner sine die conformément à l'ordre de la Chambre vendredi dernier. M. le député de Lévis est le critique concernant le projet de loi sur la raffinerie de sucre dont le débat commence à l'instant même à l'Assemblée nationale. Il ne pourra donc pas être des nôtres. Vous pourrez reconnaître le député de Taillon à sa place.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Joliette. M. le député de Taillon.

Remarques préliminaires (suite) M. Claude Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir au début de l'étude détaillée du projet de loi 68. Comme on le sait, ce projet de loi pourvoit a la constitution et à l'organisation du ministère des Approvisionnements et Services qui, on le sait, est dirigé par M. le ministre, le député de Hull. Ce projet de loi prévoit notamment que le ministre des Approvisionnements et Services aura le mandat d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques concernant l'acquisition et la fourniture de biens et de services pour l'ensemble des ministères et des organismes publics que désignera le gouvernement. Le ministre veillera de plus à l'application de ces politiques, en coordonnera l'exécution et pourra, à ces fins, prendre des règlements.

Tout de suite, je pense, M. le Président, qu'il nous faut noter que les pouvoirs du ministre et du ministère seront passablement larges, très étendus. Le ministre des Approvisionnements et Services aura également pour fonction d'établir, en collaboration avec les ministères et les organismes publics désignés, les besoins immobiliers de ces ministères et organismes, de s'assurer que les mesures propres à satisfaire ses besoins soient prises. Il verra aussi à obtenir des ministères et organismes l'inventaire des biens et services dont ils disposent, bien sûr. Ce projet de loi modifie en outre la Loi sur le Service des achats du gouvernement de manière que, désormais, ce service soit intégré au ministère des Approvisionnements et Services et on comprend qu'il s'agit ici de Rosalie.

Or, M. le Président, on sait déjà que ce ministère réunira donc la Direction générale des achats, la SIG, la Société immobilière du Québec, la RIO, soit la Régie des installations olympiques et la Loi sur la Régie des installations olympiques ainsi que la protection civile. Il est important d'abord de noter en ce qui concerne l'autonomie de ces organismes quels seront les effets de ce projet de loi sur leur autonomie qui, avant que l'on procède à les regrouper ainsi, fonctionnaient, fonctionnaient bien, ma foi. Je pense bien qu'on n'a pas, du moins à ma modeste connaissance, de raison de penser que ces organismes pouvaient fonctionner d'une façon anormale ou déréglée. Il est également important de noter que l'on regroupe des organismes qui n'ont pas beaucoup de liens entre eux. Je pense en particulier au Bureau de la protection civile du Québec qui relevait avant du ministère de la Justice. Quand j'ai étudié la structure du ministère de la Justice, j'ai été surpris de voir que le Bureau de la protection civile du Québec n'y était pas. Il venait donc d'être mis sous la gouverne du ministre délégué aux Approvisionnements et Services. J'ai été surpris. On sait que le Bureau de la protection civile du Québec a pour mandat, comme le mot le dit, d'assurer la protection civile au Québec dans les cas de sinistres, de désastres. Il a aussi un rôle de prévention qui est important. On n'a qu'à lire les journaux pour constater les effets, par

exemple, des accidents nucléaires - je n'en souhaite pas pour le Québec - les effets énormes et à plusieurs volets, qui touchent plusieurs secteurs de l'activité gouvernementale. Si un cataclysme d'une nature semblable devait s'abattre - ne nous le souhaitons pas - sur le Québec, il faut à ce moment-là avoir ouverture sur tout et probablement sur tous les ministères ou une bonne partie des ministères, sur tous les organismes. Alors, pourquoi avoir regroupé le Bureau de la protection civile sous la coulpe, si l'on veut - si on me passe l'expression -du ministère des Approvisionnements et Services? On peut se poser la question d'autant plus que le ministère de la Justice de qui relevait autrefois le Bureau de la protection civile, je pense, de par sa nature, de par son degré de collaboration très étroite avec la plupart des ministères était probablement le plus habilité à traiter les cas qui pouvaient relever de la protection civile, c'est-à-dire les cas d'urgence qui demandent dans beaucoup de cas des interventions policières ou des interventions de contrôle et de surveillance, des fouilles. Est-ce que le ministre délégué est la meilleure personne, en deux mots, pour répondre d'un genre de situation qui pourrait découler des sinistres ou des cataclysmes?

Je voudrais ajouter, M. le Président, qu'il ne s'agit pas toujours d'un sinistre affectant une collectivité. Le Bureau de la protection civile traite aussi les cas individuels, les cas d'assistance individuelle à certains individus. Donc, ma première interrogation porte sur le niveau d'autonomie de ces structures et sur le pouquoi de ce regroupement-là. On pourrait, à la rigueur, comprendre que la Société immobilière du Québec et la Régie des installations olympiques peuvent avoir, comme organismes, certaines affinités entre elles. Mais en ce qui concerne le Bureau de la protection civile, on peut se poser des questions.

Il en va de même pour la Direction générale des achats, d'ailleurs, par rapport à la SIQ et à la RIO. C'est un regroupement un peu bâtard, je pense, que ces quatre organismes-là dans un même tout.

Ma deuxième interrogation, M. le Président, porte sur la Direction générale des achats. Longtemps, au Québec comme ailleurs, faire de la politique était considéré par une bonne partie de la population comme une activité plutôt suspecte. Même encore aujourd'hui, M. le Président, je pense que vous le savez, on rencontre certaines classes de citoyens à qui on dit: On est députés, on fait de la politique et qui nous regardent comme si on était des bêtes curieuses qui octroyaient des contrats et recevaient des pots-de-vin dans les toilettes. Encore une fois, je m'adresse à vous, M. le Président, parce que vous êtes le président de la commission.

Une voix: Penses-tu qu'il ne ferait pas cela?

M. Filion: J'en suis tout à fait convaincu, d'ailleurs, ma remarque ne s'adresse de façon spécifique à aucun membre de cette commission autour...

Le Président (M. Lemieux): J'ai bien compris le sens de votre intervention, M. le député.

M. Filion: ...de cette table et à aucun membre de l'Assemblée nationale, parce qu'il faut les prouver, ces choses-là. Mais, encore, il faut quand même se parler franchement; avant d'avoir l'âge qu'on a, on était plus jeunes aussi et on le sait. Qu'avez-vous pensé la première fois que vous avez rencontré un homme politique? Vous avez dit: Ah! mon Dieu, regarde donc cela, les contrats, il joue avec cela, etc.

Donc, faire de la politique a toujours été, pour une certaine catégorie de citoyens et de citoyennes, une activité un peu bizarre. Heureusement au Québec on a fait un grand bout de chemin, un très grand bout de chemin en ce qui concerne la crédibilité des hommes politiques et partant, la crédibilité des octrois gouvernementaux pour les contrats, que ce soit des achats de biens, que ce soit des achats de services. On a fait, en particulier sous la gouverne du Parti québécois - je pense que n'importe qui, peu importe son parti politique, s'il veut être honnête, le reconnaîtra - un bout de chemin assez impressionnant qui a permis de distinguer l'octroi des contrats de services, des achats gouvernementaux, des contrats de biens et de services et de distinguer cela de la partisanerie politique. (15 h 45)

On ne saurait trop insister sur l'importance d'avoir des règles claires et objectives qui entourent l'ensemble de l'octroi de contrats qui impliquent, dans beaucoup de cas, des sommes assez importantes. On le sait, le gouvernement du Québec - je ne sais si cela a été mentionné à cette commission - est quand même un des grands acheteurs de biens et de services au Québec. Pour la région ici, celle de Québec, j'ai une statistique fraîche à la mémoire. 40 % à 50 % des activités, dans la capitale nationale, - et on me corrigera - sont générées directement ou indirectement par l'activité gouvernementale. Évidemment, on ne parle que d'une région. Si on s'adressait à l'ensemble du Québec, on retrouverait un pourcentage qui serait passablement élevé. Mais, de là à conclure qu'il faut absolument continuer le travail qui a été fait par le gouvernement du Parti québécois pour assurer la transparence des transactions gouvernementales avec ses fournisseurs, il n'y a qu'un pas que je franchis.

Malheureusement, à la suite de certaines déclarations du ministre, à la suite de la question soulevée en Chambre par mon collègue, le député de Joliette et leader de l'Opposition, et à la suite de la lecture du projet de loi, je dois vous dire bien franchement, M. le Président, qu'on est inquiet, pas juste au Parti québécois, mais pour nous tous qui devons retourner dans nos comtés et répondre à nos électeurs de la probité des gestes posés par le gouvernement. Les gens ne font pas de distinction, M. le Président. C'est toute notre institution politique qui écopera d'un manque de rigueur du ministre à ce chapitre. Ce sont nos institutions politiques dans ce qu'elles ont de plus précieux: leur crédibilité, c'est-à-dire la capacité pour les citoyens de croire en nous quand nous leur adressons la parole.

Ce critère, si l'on veut, de moralité publique est d'autant plus important que je dois me souvenir de la période où le député de Saint-Laurent était député de Mercier et premier ministre. Je n'étais pas en politique active à ce moment-là, mais, comme tout le monde, je lisais les journaux et je m'intéressais à la vie publique. Je n'étais pas maire d'une municipalité comme l'était à ce moment-là le député de Hull. Il était maire d'une municipalité et je ne l'étais pas, mais on suivait. J'étais jeune professionnel, je sortais de l'université et je suivais beaucoup ce dossier. On n'a qu'à se rappeler les scandales qui ont éclaboussé le Parti libéral entre 1970 et 1976. Encore une fois, c'est non seulement le Parti libéral qui a été éclaboussé, mais toute l'institution politique. Quant au bout de chemin qui a été fait entre 1976 et 1985, je me demande si on ne retourne pas un petit peu en arrière.

Je parlais tantôt de l'intervention du ministre concernant tout le dossier de l'octroi du contrat à la firme Pominville, de l'étude... On ne sait pas trop, ce contrat... Cela a pris du temps pour savoir quel était son mandat. Mais les gens qui lisent les journaux et qui nous écoutent sont sensibles à ces questions. Si la firme qui a le mandat d'étudier le fichier gouvernemental Rosalie est elle-même colorée, politiquement parlant...

M. Parent (Bertrand): M. le Président, question de règlement, je m'excuse...

Le Président (M. Lemieux): Oui, sur la question de règlement.

M. Parent (Bertrand): II y a une deuxième réunion à l'intérieur de cette commission. Je trouve fort intéressant ce que le député de Taillon dit actuellement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît! Mme la députée de Matane, M. le député de Lafontaine, pourriez-vous, s'il vous plaît, pour le bénéfice des membres de cette commission, regagner vos sièges? S'il s'avérait que vous ayez des discussions à faire en caucus, pourriez-vous vous retirer à l'extérieur de cette salle pour les faire, s'il vous plaît?

M. le député de...

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Sur une question de... Je voulais simplement dire au député de Taillon que j'étais très attentif à ses propos.

Le Président (M. Lemieux): Je pense que le député de Bertrand ne visait pas le député de Hull et il faisait état relativement au petit caucus qu'il y avait au bout de cette salle, M. le député de Hull. J'en suis bien conscient.

M. le député de Lafontaine, est-ce qu'il s'agit d'une question de règlement?

M. Gobé: Non.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

M. Gobé: Le député de Hull a fait la mise au point.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon, vous pouvez continuer, s'il vous plattî

M. Filions Je vous remercie, M. le Président. Je remercie mon collègue de Bertrand. Vous savez ici, en commission parlementaire, si on est assis autour de la table, c'est pour écouter nos collègues. Ce n'est pas comme à la télévision. Si le député de Lafontaine est à la télévision et que je ne veux pas l'écouter, je vais changer de poste.

M. Gobé: M. le Président, question de règlement.

M. Filion: Ici...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, sur une question de règlement, l'article du règlement, s'il vous plaît!

M. Gobé: Celui qui met un membre en cause, M. le Président. J'aimerais faire savoir...

Le Président (M. Lemieux): Celui qui met un membre en cause, oui.

M. Gobé: ...au député de Taillon...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de...

M. Gobé: D'abord, je ne parlais pas en caucu9 avec mon collègue là-bas, j'écoutais. Et deuxièmement, s'il veut nous parler d'émissions de télévision...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, ce n'est pas une question de règlement.

M. Gobé: ...ce sont eux qui font les comiques généralement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Ce n'est pas une question de règlement, M. le député de Lafontaine.

M. le député de Taillon, s'il vous plaît, vous pouvez continuer.

M. Filion: Je voudrais dire ceci à ce sujet-là, M. le Président. On dit souvent en justice: Il est important que justice non seulement nous soit rendue, mais il est important qu'elle paraisse avoir été rendue. Ce n'est pas moi qui l'ai dit. Cela a été dit, non pour la première fois, mais à une époque plus importante, par le juge en chef de la Cour supérieure du Québec. Cela a été repris par la suite. Je pense que, lorsqu'on parle d'achats et d'octroi de contrats, il est important non seulement que toutes ces opérations soient faites par le gouvernement d'une façon équitable, mais également que ces opérations paraissent avoir été faites équitablement et objectivement. Il en va d'un prix cher: c'est, je l'ai dit tantôt, notre crédibilité.

Je vaudrais également, M. le Président, dire un mot sur l'article 7 du projet de loi et vous me donnerez la permission de le lire: "Le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et de services pour les ministères et pour les organismes publics désignés par le gouvernement. "Il veille à l'application de ces politiques, en coordonne l'exécution et peut, à ces fins, prendre des règlements. "Ces règlements sont soumis à l'approbation du gouvernement et entrent en vigueur le quinzième jour qui suit celui de leur publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qu'indiquent ces règlements." Donc, il n'y a pas de prépublication du projet de règlements, sauf erreur. Je ne sais pas si cela a été noté par mes collègues et membres de la commission, mais je pense qu'il aurait été intéressant que des règlements, qui touchent au coeur même de l'exécution des politiques découlant du pouvoir du ministre, soient soumis à une prépublication, à un mécanisme de prépublication obligatoire des règlements.

Maintenant, je ne sais pas si le ministre a consulté le projet de loi 12 qui sera adopté bientôt par l'Assemblée nationale, et qui s'intitule: Loi sur les règlements, touchant particulièrement la loi sur les règlements. Je m'interroge, M. le Président, sur la compatibilité entre l'article 7 du projet de loi 68 que nous allons étudier de façon détaillée et le projet de loi 12 qui est aussi étudié à une autre commission, la commission des institutions.

L'article 7, M. le Président, m'apparaît essentiel, fondamental. Définissant des fonctions et des pouvoirs du ministre, cet article mentionne que le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et de services pour les ministères et organismes publics. Il n'y a rien de neuf, quand même, M. le Président, là-dedans. Le ministre qui est actuellement responsable de l'application de la Loi sur le Service des achats du gouvernement peut élaborer et proposer de telles politiques. Le même article 7 établit que le ministre, dans l'exécution de ce mandat, peut faire des règlements. On ne retrouve aucune norme quant aux matières que pourront concerner ces règlements. Quel est le champ d'application du pouvoir de réglementation du gouvernement concernant les projets de règlement qui seront soumis par le ministre? On se retrouve devant une disposition qui détermine les pouvoirs d'un ministre de faire des politiques, mais de façon non spécifiquement définie. Pour appliquer ces politiques, il dispose d'un pouvoir réglementaire illimité. Il aurait été bon qu'on restreigne, qu'on définisse au moins un peu le champ d'application du pouvoir du ministre plutôt que de dire: II peut réglementer pour donner suite à ses politiques.

En matière d'octroi de contrats gouvernementaux, de fourniture de biens et services, cela m'apparaît d'autant plus déplacé de confier au ministre et au gouvernement... Comme le disait mon collègue, le député de Joliette et leader de l'Opposition, c'est un véritable chèque en blanc. Ce n'est pas un chèque en blanc pour définir les règlements sur les pesticides - on aimerait qu'il vienne, d'ailleurs, celui-là -mais c'est un chèque en blanc qui concerne une des activités les plus fondamentales du gouvernement, qui représente, uniquement dans la région de Québec, 40 % de l'activité économique d'une région. On confierait une page en blanc, avec un pouvoir réglementaire sans limite, au ministre. C'est drôlement inquiétant, téméraire même - je pense que le mot n'est pa3 trop fort - mais il est pour le moins imprudent de défaire ce qui a été fait dans la dernière décennie ou uniquement de donner l'impression qu'on pourrait défaire ce

qui a été fait dans la dernière décennie. Cet article 7, M. le Président, j'en suis convaincu, retiendra l'attention des membres de l'Opposition à la commission parlementaire qui étudiera ce projet de loi. Je suis convaincu que, de notre côté, M. le Président, nous allons lutter vigoureusement pour limiter ce qui est carrément beaucoup trop large.

En conclusion, M. le Président, puisque vous m'indiquez qu'il me reste quelques minutes...

Le Président (M. Lemieux]: Non.

M. Filion: Non?

Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé? Il vous reste une minute, M. le député de Taillon.

M. Filion: C'est cela, alors donc...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse. On ne m'avait pas avisé qu'il vous restait une minute.

M. Filion: J'avais vu dans vos yeux une attitude qui me laissait croire que mon temps était terminé.

En conclusion, M. le Président, notre position est la suivante: nous acceptons et nous accepterons, dans l'étude de ce projet de loi, toute amélioration qui sera centrée sur le renforcement du critère d'objectivité, d'intégrité et de moralité publique dans l'octroi des contrats gouvernementaux. M. le Président, je vois quelques sourires. Pourtant, on traite ici d'une des matières les plus fondamentales et si le Québec... La crédibilité des institutions politiques va bien au-delà des partis politiques et est bien au-delà aussi d'un moment de l'histoire. On n'est pas seulement en juin 1986. Quand on parle de crédibilité des institutions politiques, c'est ce qu'on va léguer aux autres générations de parlementaires qui vont nous suivre.

Quant à moi, pour conclure, comme je le disais au début de mon intervention, je suis fier de représenter les électeurs et les électrices de ma région, comme, j'en suis sûr, les gens de l'autre côté et, sans aucun doute, les gens... Cette représentation que l'on doit faire au meilleur de notre connaissance, de notre jugement et de nos habiletés, à mon sens, vaut la peine d'être faite dans la mesure où l'activité politique essentielle est moralement à toute épreuve. À mon avis, le projet de loi 58... (16 heures)

M. Parent (Bertrand): 68.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon.

M. Filion: ...- au plutôt 68, comme l'a signalé le député de Bertrand et le président - ne nous donne pas cette garantie. Je suis convaincu que le député de Hull a déjà été marqué un peu par ce qui a été dit en Chambre dans un autre dossier; il va être sensible à cet argument pour faire en sorte que l'avenir politique du Québec soit un peu plus rose que ce qu'on a connu entre 1970 et 1976. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député de Taillon, vous avez terminé. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Oubuc, s'il vous plaît!

M. Desbiens: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc, vous avez vingt minutes.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci. La loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, dont le ministre délégué propose l'adoption, pourvoit à la constitution et l'organisation du ministère. Je lis les notes explicatives, puisque très souvent, c'est là qu'on retrouve de façon explicite les principes de base qui guident un gouvernement lorsque qu'il présente une loi. J'ai beaucoup de difficulté à retrouver les motifs profonds qui ont amené ou qui amènent ce gouvernement à créer ou à recréer, d'une certaine façon, parce qu'il y a déjà eu un ministère des Travaux publics qui portait une autre appellation, un ministère qui pourvoyait aux fins visées par le présent projet de loi. On a de la difficulté à retrouver les principes profonds qui guident le gouvernement sur les fins et les buts qu'il vÎ3e exactement. J'imagine que, dans le détail de l'étude du projet de loi, le ministre aura encore l'occasion de nous apporter des éclaircissements supplémentaires, mais - et cela a déjà été souligné par mes collègues - je ne peux pas passer sous silence au moins deux aspects particuliers qu'on retrouve et qui, quant à moi, ont toujours retenu mon attention d'une façon particulière. On est comme député, en gros en tout cas... La population nous donne comme mandat d'adopter des lois et de contrôler aussi les dépenses gouvernementales.

Quand on dit "loi", on sait que c'est ce qu'on appelle la législation déléguée, et mon collègue l'a souligné, tantôt, concernant la réglementation à l'article 7, je crois, du projet de loi, le nouveau ministre s'accorde des pouvoirs extrêmement larges concernant la réglementation. C'est presque illimité, c'est presque un mandat en blanc comme a dit mon collègue de Taillon tantôt, un chèque en blanc qu'il se donne. Je commence

à croire, M. le Président, qu'il s'agit non pas seulement d'un cas isolé que le nouveau ministre délégué soumet ici à notre attention, mais cela commence à devenir une marque de commerce, je pense, du gouvernement. J'ai participé aux séances de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, la semaine dernière, et j'ai pu constater dans un des projets de loi qu'il y avait une réglementation très volumineuse et une énumération de sept domaines en particulier où le ministre se donne des pouvoirs de réglementation et un huitième au cas où il en aurait oublié, qui donne un autre pouvoir de réglementation sur tout le reste. Dans le huitième alinéa, le ministre de l'Agriculture se donne tous les pouvoirs sur tous les autres sujets qu'il aurait pu oublier, autrement dit, dans son projet de loi. Ce sont des chèques en blanc et, ici, c'est un peu ce qui se répète. C'est pour cela que j'ai dit que cela semble devenir une des marques de commerce de ce gouvernement et ce n'est pas ce qu'il laissait entendre lorsqu'il a été élu. Le premier ministre a même créé un nouveau ministère où il a nommé un ministre délégué à la Déréglementation et où on nous annonçait que, finalement, l'objectif de ce ministère était d'étudier et de diminuer une réglementation qui est de plus en plus importante en quantité et aussi qui va toucher les citoyens de plus en plus dans les détails de leur fonctionnement comme citoyens. Particulièrement, on sait les discours avec lesquels j'étais, d'ailleurs, d'accord en grande partie lorsque les députés de l'Opposition de l'époque, dont le ministre actuel, nous faisaient des remarques et des reproches concernant la réglementation toujours plus envahissante du gouvernement.

Je pense que c'est avec raison, et c'est le ministre à la Déréglementation qui le mentionnait dans son discours l'autre jour -et j'avais fait la vérification moi-même -c'est 11 000 pages de règlements de toutes sortes qui existent au gouvernement du Québec.

Que cette réglementation qui découle de nos lois soit nécessaire, cela va. Mais, quand on laisse aux ministres, au gouvernement, la responsabilité, le soin et le mandat, finalement, le chèque en blanc - pour reprendre l'expression - de faire de la réglementation "at large" comme cela semble le cas dans le présent projet de loi, évidemment, je ne comprends plus la logique de ce gouvernement. Comment, d'une part, il peut créer un ministère pour déréglementer et, d'autre part, nous présenter dans ses quelques projets de loi - parce qu'il n'y en a pas beaucoup actuellement - mais les quelques projets de loi qu'on a à étudier une réglementation et un pouvoir de réglementation, surtout, un pouvoir qui enlève ainsi aux élus de discuter, de prévoir parce que cela restera toujours que c'est la fonction du député, du législateur, de voter les lois. Cela veut dire aussi voter les lois è la législation déléguée, et on le fait en votant comme cela des articles qui donnent tout pouvoir è un ministre de décider et d'inclure dans sa réglementation des pouvoirs supplémentaires qu'on lui accorde ainsi par l'octroi comme cela d'une possibilité de réglementation.

Bien sûr, on dira que cette réglementation est présentée et doit être soumise à une procédure publique de présentation dans la revue où on passe la réglementation, la Gazette officielle et chaque citoyen, à partir de là, peut toujours et les députés, au premier titre évidemment, peuvent vérifier cette réglementation. Ils peuvent toujours à partir de cette présentation officielle et du délai qui est accordé avant que le règlement entre en vigueur, ils pourraient toujours faire des interventions, mais, quand on connaît le fonctionnement des appareils gouvernementaux... On sait que la Gazette officielle n'est pas la lecture de chevet de chaque Québécois et de chaque Québécoise. Je ne crois pas que ce soit le type de revue qui ait la plus grande audience auprès de la population, et cela veut dire que, finalement, de façon pratique, bien que légalement toutes les procédures aient été suivies, sans doute, dans la pratique de la vie des citoyens et des citoyennes, il reste que cette réglementation, sauf dans quelques cas particuliers, devient tout simplement la présentation et l'adoption finale d'un règlement passé au nez de la plupart des citoyens. Ils le reconnaissent lorsqu'ils sont aux prises avec une mesure ou l'effet d'un règlement qui les touche de façon particulière et personnelle. C'est là que chacun se rend compte que, finalement, ce règlement découlant de telle ou telle loi ne répond pas, ou dans certains cas brime même sa liberté. Si, au moins, tous les députés avaient l'occasion ou la possibilité à l'Assemblée nationale de se prononcer et d'étudier avec le ministre les grandes lignes de ces règlements, la base de cette réglementation! C'est nous, les députés, qui avons directement les réactions dans notre bureau de comté. C'est à partir de cela et des contacts constants avec les citoyens et citoyennes qu'on peut d'une façon très efficace et très positive apporter un avis utile sinon nécessaire à un ministre pour lui permettre de voter une loi suivie d'une réglementation qui est nécessaire dans la plupart des cas, mais que cette réglementation corresponde vraiment à la réalité vécue et quotidienne des citoyens et citoyennes du Québec.

L'objectif d'une loi, finalement, est de servir la population. Si c'était soumis au crible des élus du peuple directement, contrairement à cette pratique qui semble

vouloir s'accentuer, contrairement à l'image qu'on veut en donner en créant un ministère de déréglementation, au vécu quotidien des députés dans leur bureau, lors de rencontres auprès des citoyens et des citoyennes, je pense qu'on adopterait à ce moment-là des lois et des règlements beaucoup plus efficaces, ce qui est le but recherché par le gouvernement. Ce serait une façon, je dirais même que cela serait un avantage pour un gouvernement, puisque cela lui permettrait, justement, de garder et de maintenir ce contact constant et essentiel avec les citoyens et les citoyennes. Je n'irai pas plus loin pour l'instant sur cet aspect, mais c'est extrêmement important. Lorsque nous nous engagerons dans l'étude article par article, nous aurons sûrement l'occasion d'y revenir. L'article qui me semble le plus contraire à la raison d'être même de l'Assemblée nationale, l'article 9, je ne sais pas si je le comprends mal, mais c'est quasiment...

Le Président (M. Lemieux): Sur une question de règlement, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, dans les notes préliminaires, est-ce qu'on peut parler des articles? Le député de Dubuc traite, semble-t-il, de l'article 9. Est-ce qu'on ne devrait pas attendre d'être rendu à l'article 9 pour en discuter?

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, sur la question de règlement. Je pense qu'on peut faire des allusions sans aller dans le détail, pour les motifs suivants. On peut, bien sûr, dans un discours de portée générale, comme quoi on prend position par rapport au projet de loi, évoquer les grands points, les principaux points, les identifier au besoin, parce qu'on ne va pas spécifiquement dans le libellé de l'article. À mon sens, c'est recevable à l'intérieur de nos discussions.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Hull, cela avait effectivement été une de mes préoccupations avant que vous posiez cette question. J'en ai discuté avec M. le secrétaire lorsque le député de Taillon a abordé tout à l'heure l'article 7 du projet de loi 68. Je tiens d'ailleurs à vous faire remarquer que, même dans le règlement, au sujet des remarques préliminaires comme telles, c'est dû à la tradition, il n'y a aucun article qui permette en soi les remarques préliminaires. Sur ce, je dois vous dire qu'il est permis, M. le député de Hull, d'y faire référence et d'aller, d'une certaine façon, au général et revenir à des points un peu plus particuliers du projet de loi à l'étude lors des remarques préliminaires. Je ne dirais pas qu'on a à aborder une étude spécifique comme telle de chacun des articles, mais on peut en faire état et on peut à l'occasion faire quelques remarques. Relativement à l'article 7, tout à l'heure, on a fait des remarques sur la réglementation comme telle. Elles étaient, à mon avis, faites à bon droit et permises. (16 h 15)

Vous pouvez donc continuer, M. le député de Dubuc. À moins que vous... Cela va. M. le député de Dubuc, c'était à votre tour.

M. Desbiens: Je vous remercie, M. le Président. En effet, il m'a semblé être très pertinent. Je n'aurais peut-être pas dû mentionner le numéro de l'article comme tel mais cela portait sur le principe que sous-tend ce projet de loi, qui est illustré entre autres à cet article qui traite évidemment du sort de l'Assemblée nationale. Cela me paraît encore plus important que la réglementation, à moins que je ne comprenne pas bien où le ministre veut en venir avec cette partie ou il m'apparaît, à la lecture, que l'Assemblée nationale serait soumise à un ministre du gouvernement. Si c'est vraiment cela - le ministre aura sans doute l'occasion de m1 éclairer davantage - c'est le monde à l'envers. Je ne comprends plus rien. Je veux dire que fait-on ici, finalement, comme députés, si l'Assemblée nationale...

Dans mon esprit, et je pense que c'est aussi la signification de notre système démocratique, c'est l'Assemblée des élus du peuple et ce sont les députés qui sont les premiers maîtres. C'est le peuple du Québec qui siège à l'Assemblée nationale par ses 122 députés élus et c'est lui qui est au sommet de toute la pyramide. C'est l'Assemblée nationale qui est au-dessus de tout et au-dessus du gouvernement, bien sûr. C'est elle qui décide ce que le peuple veut; c'est le peuple, l'Assemblée nationale. Tout le reste doit lui être soumis et je comprendrais que... En tout cas, à la lecture - le ministre pourra nous informer davantage - que l'Assemblée nationale ait des comptes à rendre au ministère des Approvisionnements et Services, je ne le comprends pas. Au contraire, pour la vice-première ministre, selon une de ses premières remarques faisant partie du message inaugural, il s'agissait justement de donner aux membres de l'Assemblée nationale et à l'Assemblée nationale... D'ailleurs, ils n'ont pas à nous le donner, cela appartient déjà aux députés, c'est l'Assemblée nationale... En tout cas, je veux dire qu'on manifestait quand même dans le message inaugural la volonté du gouvernement, semble-t-il, d'accorder plus de pouvoirs, plus de possibilité d'action, à l'ensemble des députés, comparitivement, j'imagine, à des situations antérieures. J'ai lu des remarques du whip du gouvernement dès

le mois de décembre aussi, je crois, où il indiquait que la députation, les députés de son parti seraient très actifs pour surveiller et travailler à la législation, et ainsi de suite.

J'ai même entendu le ministre du Revenu, à titre de leader gouvernemental à l'Assemblée nationale, parler dans le même sens. Je trouvais cela bizarre dans sa bouche après l'avoir vu faire adopter une mesure illégale avant le consentement de l'Assemblée, mais il a tout de même exprimé cette volonté lui aussi. Quand on regarde la législation et la façon de fonctionner, on se rend compte finalement que cela semblerait se diriger tout à fait à l'inverse et faire fi de plus en plus des élus eux-mêmes qui sont l'ensemble de l'Assemblée nationale.

C'est pour cela que je soulève ce point. On en discutera de façon plus stricte, j'imagine, lorsque nous serons rendus à l'article en question. Cela m'apparaît excessivement... Imaginez le président de l'Assemblée nationale ou l'Assemblée nationale qui a des comptes à rendre à un ministre du gouvernement! C'est presque incroyable. C'est pour cela que je me dis que le ministre a sûrement une explication à nous donner, parce que c'est proprement incroyable. Une personne comme, semble-t-il, le Président général des élections aurait également des comptes à rendre è ce ministère. J'ai bien hâte d'entendre le ministre là-dessus pour éclairer ma lanterne, comme on dit, parce que je n'ose pas croire que ce soit vraiment la volonté du gouvernement ni du ministre qu'une telle situation, un tel reniement de l'Assemblée nationale et du pouvoir de l'Assemblée nationale, presque une mise sous tutelle, sur certains aspects, bien sûr, des pouvoirs souverains de l'Assemblée nationale.

Ce sont ces deux principes qui me semblent attaqués, entre autres, qui ne sont pas clairs, à tout le moins, dans ce projet de loi et qui retiennent beaucoup mon attention. Le Directeur général des élections, évidemment, peut être placé dans une situation qui serait assez bizarre, ayant à obtenir d'un ministre du gouvernement des autorisations pour agir, au point de vue administratif, Est-ce qu'on ne peut pas craindre qu'à un moment donné, il ait, d'une façon ou d'une autre, à l'approche d'une élection, par exemple... On pourrait bien imaginer que le Directeur général des élections puisse se retrouver dans une situation... On sait toute la liberté dont ce type de fonctionnaire doit être en mesure de jouir par rapport aux élus et surtout par rapport à un gouvernement, afin de pouvoir, en toute liberté...

M. Gobé: S'il vous plaît, je pense que le député charrie un peu quand il mêle le Directeur général des élections...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, s'il vous plaît! Est-ce qu'il s'agit d'une question de règlement? M. le député de Dubuc.

M. Gobé: ...aux affaires du ministère des Approvisionnements et Services, Rappelez-le à l'ordre. Il est rendu sur la démocratie des élections alors qu'on étudie l'article 7 du projet de loi créant le ministère Approvisionnements et Services, franchement si vous dormez... vous ne l'entendez pas parler?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, s'il vous plaît! M. le député de Dubuc, il reste environ une minute à votre temps de parole. Pouvez-vous conclure, M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Je sais que je n'ai pas besoin de vous donner de directives. Ce n'est à aucun député de vous en donner, pas plus le député de Lafontaine qu'un autre.

M. Gobé: M. le député de Dubuc, je faisais un commentaire.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, s'il vous plaît! M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Je pense qu'il n'a pas écouté le jugement que vous avez rendu tantôt, lorsque vous avez déterminé... c'est la coutume, il y a toujours des remarques préliminaires, cela aide, cela favorise d'ailleurs... Ces choses-là étant discutées dans les remarques préliminaires cela favorise et cela accélère, parfois, la plupart du temps cela accélère les discussions par la suite. En indiquant tout de suite au départ au ministre quelles sont nos principales préoccupations, il est en mesure ensuite, plus rapidement, de fournir aux membres de la commission, les éclaircissements qu'il juge nécessaires.

Pour revenir et pour conclure mon intervention, je maintiens qu'il y a une préoccupation importante - il doit être le seul parmi tous les membres de l'Assemblée nationale - c'est de s'assurer que la pérennité de cette Assemblée soit maintenue. Ce projet de loi, dans le sens au moins des deux points que j'ai soulevés, m'apparatt pour le moins obscur et j'ai hâte de pouvoir, à l'étude article par article, entendre le ministre là-dessus. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Dubuc. Est-ce qu'il y a d'autres remarques préliminaires? Il n'y a pas d'autres remarques préliminaires. M. le député de Joliette?

M. Chevrette: Je sais que mon temps, au niveau des remarques préliminaires, avant que vous ne me rappeliez à l'ordre, a été pris.

Une voix: Et excédé.

M. Chevrette: En vertu de l'article 242, je crois avoir pris mes vingt minutes. Cependant, avant que ne débute véritablement l'étude article par article en commission, il y a des dispositions de notre règlement qui nous permettent d'entendre des gens ici. Je voudrais, en vertu de l'article 170, faire la motion suivante.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement et 244. Oui, M. le député de Joliette.

Motion proposant de procéder à des consultations particulières

M. Chevrette: Je voudrais tout d'abord proposer que cette commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières, en entendant tout d'abord le Syndicat canadien de la fonction publique.

Le Président (M. Lemieux): ...en avoir une copie écrite?

M. Chevrette: Le Syndicat canadien de la fonction publique. C'est le nouveau syndicat...

M. Bélisle: J'avais mal entendu. Cela n'a rien à voir avec la compréhension de la motion. C'est la bonne audition de vos paroles.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, vous avez droit de faire une pareille motion en vertu de l'article 244, paragraphe 2, consultations particulières, et de l'article 170. Avant qu'on ait à discuter de cette motion, je vais juger de sa recevabilité.

M. le député de Joliette, j'aimerais faire une petite remarque relativement à la recevabilité comme telle de la motion. Cette motion ne m'est pas présentée en vertu de l'article 170. Quand vous regardez l'article 170, il définit ce que constitue comme telle une consultation particulière. Je pense qu'il y aurait lieu de la présenter en vertu de l'article 244, paragraphe 2, qui dit...

Une voix: L'article 244?

Le Président (M. Lemieux): Oui. "Avant d'entreprendre l'étude détaillée, la commission peut décider de tenir..." J'ai souligné cela.

M. Chevrette: Mais mon assise légale est l'article 170.

Le Président (M. Lemieux): "...des consultatibns..."

M. Chevrette: Vous avez remarqué que je ne stipule pas, dans ma proposition, l'article 170.

Le Président (M. Lemieux): Non, effectivement.

M. Chevrette: Je me suis servi du pouvoir de l'article 170...

Le Président (M. Lemieux): Oui.

M. Chevrette: ...pour vous présenter cette motion qui elle, bien sûr, est en fonction de l'article 244, à savoir que c'est une étude préalable...

Le Président (M. Lemieux): D'accord.

M. Chevrette: C'est le paragraphe 2, je suppose: "Avant d'entreprendre l'étude détaillée, la commission peut décider de tenir des consultations particulières dans le cadre de son mandat".

Le Président (M. Lemieux): Cette motion est recevable.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais...

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: ...expliciter la raison de cette motion. Il est important, lorsqu'on modifie des structures, qu'on consulte les personnels touchés. On l'a vu par le passé, autant par la loi qui a institué la Société immobilière du Québec que par d'autres modifications, par exemple, par la Société des établissements de plein air du Québec, on a toujours pris la peine - personnellement, j'ai été impliqué dans l'une de ces lois au moment où je préparais la Loi sur la Société des établissements de plein air du Québec -de consulter d'abord les structures représentatives de ces personnels et on a pris la peine de faire des tournées régionales pour parler aux gens impliqués dans ces futures structures afin d'enlever toute ambiguïté, de leur expliquer le processus et de négocier au besoin des structures et des modalités de transfert...

Le Président (M. Lemieux): Si vous me le permettez, M. le député, je ne veux pas vous enlever votre temps, mais c'est afin que les groupes parlementaires puissent le savoir: Vous avez un droit de parole de 30

minutes sur cette motion. Je vois des gens qui me regardent et je veux qu'ils le sachent, en vertu de l'article 209, paragraphe 2. Vous pouvez continuer. Je m'excuse.

M. Filion: ...

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. député de Taillon.

M. Filion: C'est uniquement une question de directive, M. le Président. Est-ce que je dois comprendre que, par la suite, les autres membres de cette commission auront un droit de parole de dix minutes?

Le Président (M. Lemieux): L'auteur d'une motion et, en ce qui concerne les autres membres, ils auraient un droit de parole de dix minutes pour motion de forme, effectivement, en vertu de l'article 209, premier paragraphe.

M. Filion: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je disais donc que beaucoup de structures ont été modifiées au cours des années qui ont fait l'objet, bien sûr, de démarches. Prenons d'abord ces démarches par étapes. Je pense qu'une des premières démarches à poser lorsqu'on s'en va toucher à des structures juridiques, c'est de rencontrer les représentants de ce monde qui, à mon avis, ont le droit de savoir et de connaître les tenants et aboutissants, le pourquoi des modifications de structures, ce qui advient de leurs membres, quelles conditions de travail cela affecte ou n'affecte pas, quelles conditions de fonctionnement, ce que cela change comme décor.

J'ai cru percevoir qu'aucun dirigeant n'avait été consulté. Tout au moins, nous n'en avons pas entendu parler jusqu'à maintenant. A ma grande surprise, j'ai personnellement fait faire un appel téléphonique par l'un de mes attachés politiques au président représentant ces employés, qui nous a dit - et il a été clair, du moins quant à mon attaché politique -qu'il n'avait jamais été consulté de quelque manière que ce soit et qu'il ne connaissait pas la portée juridique actuelle de l'article 27 du projet de loi qui est à l'étude à l'Assemblée nationale. (16 h 30)

Donc, M. le Président, la première démarche qui me serait apparue essentielle, c'eût été de la part du ministère, pas nécessairement du ministre, mais de ses hauts fonctionnaires, une démarche d'abord de convocation pour discuter, dialoguer, étudier les implications juridiques pour éviter que ce personnel se trouve un peu avec des points d'interrogation au moment où le législateur a è statuer dans une fin de session, bien sûr, sur des structures qui, à prime abord, ont peut-être l'air aucunement dangereuses pour le personnel et qui peuvent être tout simplement même rassurantes en disant: La Loi sur la fonction publique s'applique. Mais il y a des gens qui ont eu des choix à faire. Je prends la SIQ, par exemple. À la Société immobilière du Québec, il y a des gens qui ont dû faire un choix: ou Ils demeuraient dans la fonction publique en vertu de la Loi sur la fonction publique ou ils se soustrayaient à la Loi sur la fonction publique pour avoir un syndicat autonome avec des conventions collectives complètement divergentes. La permanence d'emploi ne relève plus de la Loi sur la fonction publique mais bien de clauses de conventions collectives dûment et légalement négociées et ce, conformément au Code du travail. Il en est de même pour SEPAQ, Société des établissements de plein air du Québec, où on a dû négocier par la suite. Il y a des individus qui ont eu à exercer des choix. Il y avait tant de temps même pour choisir si l'individu demeurait dans la fonction publique ou s'il préférait un transfert. Il avait même négocié, à ce moment-là, lors de la création de ces nouvelles structures, une possibilité à l'intérieur d'un délai de X mois, 18 ou 24 mois, de faire un bout dans la nouvelle structure, mais de pouvoir recourir, de faire un retour possible dans la fonction publique, là où il y a une permanence en vertu d'une loi et non pas d'un contrat collectif de travail.

Donc, quelle ne fut pas ma surprise, M. le Président, d'entendre qu'il n'y a pas eu de consultation, qu'il n'y a pas eu de discussion, qu'il n'y a eu aucun échange au moment où on se parle avec les représentants des salariés qui seront éventuellement impliqués. Tant mieux s'il y a plus ou moins, pas ou très peu de dangers. Mais il m'apparaît que des questions se posent et qu'on aurait dû, je pense, les rencontrer et leur donner l'occasion de donner leur point de vue, de manifester leurs attentes vis-à-vis de ces structures. Il me semble que lorsqu'on gouverne en toute transparence, comme l'a si bien dit Mme la vice-première ministre dans son discours inaugurai du 15 décembre, je pense, au moins, il faut permettre aux gens de s'exprimer. Il faut leur donner l'occasion d'exprimer leur inquiétude pour qu'on puisse voir si c'est fondé, si cela ne l'est pas, si les revendications qu'ils peuvent faire ont un certain sens. Est-ce qu'il n'y a pas lieu de leur dire: Est-ce que l'article 27 vous satisfait? Que le ministre même dise quelles

sont les orientations possibles vis-à-vis de ces travailleurs.

Je me sers de l'article 27 non pas spécifiquement comme article qu'on aura à étudier ultérieurement, mais je m'en sers pour étayer la justification de la convocation du Syndicat canadien de la fonction publique. Je m'en sers dans le sens suivant: L'article 27 dit que c'est le gouvernement qui décide qui revient ou pas au ministère. Je pense que c'est un argument - vous reconnaîtrez que j'ai le droit de l'utiliser, je ne voudrais pas enfreindre le règlement - dont je me sers pour l'article 27 précisément, qui donne un pouvoir complètement discrétionnaire au ministre. Discrétionnaire au point que la convention collective pourrait dire que les gens seraient transférés par ancienneté et que l'article légal, de droit, viendrait créer une assise légale donnant droit au ministre de transférer indépendamment de3 conventions collectives, à moins qu'on me prouve le contraire sur le plan juridique. L'article 27 est tellement clair. Il donne au ministre un pouvoir tout à fait illimité d'assignation. Il dit à un individu: Tu es là et tu t'en vas là. Cela pourrait faire fi de toutes les conventions collectives existantes dans les unités actuelles selon les juridictions actuelles. Cette loi viendrait, à toutes fins utiles, annihiler complètement des conventions collectives ou des décrets tenant lieu de conventions collectives qui avaient délimité des modes de transfert, des procédures de transfert.

La seule garantie qu'ils ont, c'est que d'où ils partent, ils seraient protégés par la Loi sur la fonction publique. Mais transfèrent-ils avec eux l'ancienneté? La Loi sur la fonction publique ne le prévoit pas, ce sont les règlements qui accompagnent la Loi sur la fonction publique qui explicitent davantage les conditions de travail. Ce sont des règlements, parce que dans la fonction publique ce sont des règlements qui définissent les avantages, qui définissent les conditions de travail dans bien des cas, qui définissent les modalités de mutation, les modalités de transfert, les modalités de réaffectation ou de démotion ou de promotion. Il n'y a absolument rien de cela comme assise légale vis-à-vis les salariés. Tout ce que le ministre dit dans l'article 27, c'est que la loi jouera.

La loi jouera, mais l'individu voudrait peut-être savoir si les avantages qu'il avait sont transférés avec lui, s'il y a des modalités de temps pour choisir. S'il peut refuser, que lui arrive-t-il? Ce n'est pas tout le monde qui est transféré, si j'ai bien compris l'article 27 et les arguments du ministre à la deuxième lecture. Cela peut être un seul petit groupe aux fins de la structure - cadre du ministère, mais pas nécessairement le transfert des individus qui accomplissent des tâches. Cela peut être cela. C'est autant d'informations qui, à ce stade, à mon sens, sans charriage, mériteraient d'être grattées, mériteraient d'être expliquées, mériteraient d'être transmises aux représentants des salariés pour leur dire quels sont les objectifs qui sous-tendent cela, pour leur permettre de sécuriser le personnel, de sécuriser les personnels qui, entre vous et moi, sont en pleine convention collective, en plus, dans un contexte où il y a une autre négociation qui n'a pas à voir avec cela, mais qui pour eux peut être d'un double effet. Au moment où leurs dirigeants sont à négocier dans le cadre de la ronde triennale qu'on connaît malheureusement depuis des années de négociations collectives, ils se retrouvent avec une double épée de Damoclès au-dessus de la tête. Est-ce que c'est une convention collective négociée par les fonctionnaires du Québec ou une convention collective en bonne et due forme négociée par mon syndicat qui est le Syndicat canadien de la fonction publique que j'aurai quand le ministre aura fait voter sa loi?

Il m'apparaît important de convoquer au plus vite les dirigeants. Je serais prêt à faire une entente avec le ministre, qu'on s'asseye, qu'on dise: À vingt heures ce soir ou à dix heures ou à onze heures demain, nous allons nous réserver une heure et demie en commission parlementaire, à l'intérieur des travaux de cette commission, pour entendre le Syndicat canadien de la fonction publique. Il me semble que ce serait un geste vis-à-vis ces salariés qui, je pense, n'ont pas été mis dans le coup pour des raisons que j'ignore, mais qui mériteraient de l'être. Je suis convaincu qu'on y gagne à mettre dans le coup les employés, les salariés. Soit dit en passant, je ne parle pas pour toutes ces structures, mais pour la RIO, c'est clair encore que cela demeure une structure et je ne la mets pas dans le décor. Je pense aux employés de la SIQ qui ont été touchés, et cela ne fait pas des années, je pense entre autres aux employés de la protection civile qui relevaient toujours du ministère de la Justice et, maintenant, ils ont un nouveau ministre. Ce sera un autre personnage, même si depuis des années cela a été le ministre de la Justice. Je ne ferai pas la distinction entre le ministre de la Justice actuel et le futur ministre des Approvisionnements et Services. Je pourrai me permettre quelques blagues en dehors, mais pas enregistrées ici.

M. le Président, je pense qu'il y aurait lieu de sécuriser ces gens. Je suis convaincu que le ministre, je l'espère en tout cas, pourrait se faire un plaisir de dire à ces gens que nous convoquerions: Voici comment cela va fonctionner. Les interrogations que vous avez ne sont pas fondées, à cause de tel article ou tel article. Tel article n'a pas pour effet de modifier ou de changer telles

conditions de travail. Ce sont des choses qui se disent. Au moment où nous nous parlons, je vous répète que le contexte n'a pas permis à ces employés dûment accrédités en vertu d'une autre législation québécoise qui est le Code du travail de savoir si c'est le Syndicat canadien de la fonction publique qui les représente par rapport au projet de loi ou le syndicat de M. Harguindeguy qui, lui, est surtout administré en fonction de la Loi sur la fonction publique. Au Québec, on a diverses assises légales en relations du travail: on a la Loi sur la fonction publique; on a le Code du travail et on a la loi pour le secteur de la construction qui est une autre loi. On a trois assises juridiques pour asseoir les syndicats québécois. Il me semble que le ministre pourrait agréer cette proposition que l'on fait et les recevoir en bonne et due forme, les entendre, écouter leurs inquiétudes. Peut-être déjà, est-ce 50, 60 % de leurs inquiétudes qui pourraient disparaître. Peut-être. Peut-être que cela permettrait aux membres de la commission de mieux comprendre la portée de certains articles si on le leur expliquait en pleine transparence, comme le souhaitait Mme la vice-première ministre le 15 décembre dernier.

Il me semble que ce serait là une occasion rêvée de démontrer que nous n'avons pas une politique d'affrontement, mais, au contraire, une politique de dialogue, de concertation et non de confrontation. On ne les place pas devant un état de fait, on les fait cheminer en même temps que nous, on les associe au processus même de l'application éventuelle d'une loi et tout le monde sait où il va, pourquoi on y va, comment on y va et quelles sont les conséquences des gestes qui seront posés sur le plan juridique.

C'est un peu cela l'objectif de la proposition spécifique d'entendre, dans un premier temps, bien sûr, les représentants du monde syndical. Je suis persuadé, en plus de cela, que dans la conjoncture actuelle où les employés, règle générale, de tout le secteur public et parapublic... On sait qu'après 287 séances de négociation dans les secteurs public et parapublic, il n'y a aucun progrès de quelque nature que ce soit aux tables de négociation, d'où l'importance de ces gens-là. S'ils ont déjà un problème dans le cadre des négociations régulières et qu'ils savent déjà que pointe à l'horizon un décret, tout au moins sur les 3,5 %, puisque c'est 3,5 %, de l'aveu même des ministériels, lorsqu'ils ont adopté en deuxième lecture le projet de loi 10... C'était précisément pour geler dans le béton les 3,5 % d'augmentation et que cela ne serait pas plus. Donc, c'est le prélude d'un décret spécifique là-dessus. Au moins, on pourrait préciser à ce stade-ci, M. le Président, et dire que ce n'est pas de la même nature, et qu'on puisse discuter ensemble, entre parlementaires de l'ensemble des droits, mais en présence des représentants syndicaux, quels sont les droits mis en cause et quelle est la procédure, si jamais des droits étaient éventuellement mis en cause, quelle est la procédure qui permettrait à ces représentants d'avoir droit au chapitre et d'instituer une signature de protocole éventuellement, comment on pourrait négocier tel protocole, comment on pourrait s'entendre pour établir un mécanisme de consultation conduisant à la signature d'un protocole, garantissant les droits et privilèges obtenus, comme on l'a fait, je le répète, lorsqu'on a créé la Société immobilière du Québec et lorsqu'on a créé la Société des établissements de plein air.

Je pense que tous les ministres impliqués, que ce soit le ministre Marcoux, à l'époque, ou moi-même, avec la Société des établissements de plein air, on avait pris la précaution d'avoir de longues discussions au départ avec les représentants des salariés. Cela ne veut pas dire qu'on était d'accord, mais ces représentants ne pouvaient pas nous reprocher d'avoir agi sans les prévenir, de ne pas leur avoir dit où on allait, de ne pas leur avoir dit quelles étaient les conséquences, les motifs qui nous poussaient à faire cela, mais on leur a dit quels étaient les droits des salariés et on a démontré une très large ouverture d'esprit pour la signature des protocoles. On a assigné des temps avec eux pour pouvoir revenir... On a même amendé des lois. Je me souviens qu'en commission parlementaire, en étudiant le projet de loi article par article, on a réussi à introduire des amendements qui, précisément, donnaient suite à la demande des représentants syndicaux et qui donnaient satisfaction à certaines revendications.

Je ne dis pas qu'on peux présumer, à ce moment-là, qu'on donnera tout. Non, ce n'est pas cela. À ce stade-ci, l'objectif, c'est d'abord de les entendre. Si on ne les entend pas, ce sera certainement très difficile de savoir exactement quelles sont les interrogations. L'objectif, c'est de connaître leur point de vue, c'est de dire: Est-ce que l'article 27 les satisfait tel qu'il est? Ont-ils des revendications précises? Aimeraient-ils voir apporter tel amendement? Si oui, à quel endroit aimeraient-ils voir apporter tel amendement plutôt que tel autre? M. le Président, cette proposition offrirait cette chance, je pense, d'une façon claire aux salariés qui sont représentés légalement, je le répète, en vertu du Code du travail. (16 h 45)

M. le Président, advenant que ces consultations... Le ministre peut bien me dire que cela a été fait un peu informellement, mais, si cela avait été fait informellement, on n'aurait pas eu les appels qu'on a eus et on n'aurait pas été obligés de faire les appels téléphoniques qu'on a faits pour voir

jusqu'où ces gens ignoraient l'esprit de la loi. Cela a été clair la semaine dernière. Cela ne remonte pas loin, les appels téléphoniques qu'on a faits, c'est la semaine dernière. Il me semble donc, à ce moment-ci, que le ministre n'y perd pas. Le ministre ne perd rien en clarifiant une chose. Si on les entend, on aura la satisfaction. Tant mieux si cela éclaire les parlementaires. Si cela rassure ces travailleurs ou leurs dirigeants, tant mieux! On a tout intérêt, je crois, comme appareil d'Etat, comme législateur ou comme ministre, à faire en sorte que notre personnel oeuvre en toute quiétude, que notre personnel sache que ce que l'on fait n'a pas pour effet de brimer son droit d'association, d'abord. Parce que, fondamentalement, on pourrait être porté à croire que quelqu'un qui lit froidement l'article 27 - et je m'en ressers à dessein comme argumentation - pourrait être porté à croire que cela remet en cause le droit même d'association.

On sait qu'en disant que c'est la Loi sur la fonction publique, ils sont obligés en vertu de cette loi d'avoir leur syndicat comme tel. On pourrait gratter, théoriquement, et dire que cela même remet en cause leur droit d'association. Le droit d'association est fondamental dans une société. Je pense que c'est reconnu. Le Canada a adhéré, à l'échelon mondial, au droit inaliénable d'association syndicale, à l'Organisation internationale du travail. Je ne crois pas que cela soit l'esprit, mais lisons l'article 27 tel qu'il est et on se rendra compte que c'est assez impératif. Je me souviens de l'avoir lu en Chambre et quelqu'un m'a dit que je l'interprétais. Bien sûr qu'on peut l'interpréter. Mais si je me permets de l'interpréter, c'est parce qu'il porte à interprétation. S'il ne portait pas à interprétation, soyez sans crainte, il n'y aurait pas deux avocats, un de chaque bord, qui se chicanent dans les procès. Soyons sûrs de cela. Le projet de loi dit ceci: "Deviennent membres du personnel du ministère des Approvisionnements et Services: 1° les membres du personnel du Service des achats du gouvernement; 2 les membres du personnel de la Société immobilière du Québec que désigne le gouvernement." Je répète: que désigne le gouvernement.

Donc, c'est seulement ceux que le gouvernement va désigner qui deviennent membres du ministère...

M. Rocheleau: Question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Hull, sur une question de règlement.

M. Rocheleau: M. le Président, j'ai l'impression - corrigez-moi si je me trompe -que nous sommes à traiter plus particulière- ment de l'article 27 du projet de loi 68. Que je sache, nous n'avons pas commencé encore l'article 1 du présent projet de loi. Effectivement, le député de Joliette et leader de l'Opposition, traite du fond de l'article 27 actuellement.

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement, M. le député de Taillon.

M. Filions Sur la question de règlement, M. le Président, j'ai écouté attentivement les propos du député de Joliette et leader de l'Opposition, depuis le début. La motion qu'il a présentée vise à faire en sorte que l'on procède à une consultation particulière d'un groupe désigné qui est le Syndicat canadien de la fonction publique, qui est concerné par le projet de loi que le ministre a déposé, une des raisons étant que l'article 27 peut affecter les droits et privilèges de ses membres. En ce sens, je pense que les propos du député de Joliette et leader de l'Opposition se rattachent d'une façon tout à fait cohérente à la motion que nous sommes en train de débattre et que vous avez déjà jugée recevable.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, sur la question de règlement.

M. Chevrette: Sur la question de règlement, j'ai pris la peine de vous prévenir, avant même de le faire - et j'aimerais que vous en teniez compte au moment où vous aurez à trancher - que je me resservais à nouveau de l'article 27 pour plaider précisément de la pertinence de convoquer. Si je ne l'avais pas fait, je me . serais peut-être attendu de votre part que vous me disiez, sans attendre d'ailleurs une question de règlement - je vous sais d'une rapidité tout à fait surprenante, vous avez le don d'intervenir tout de suite. C'est pour cela que je prends beaucoup de précautions avec vous en vous disant que j'utilisais à nouveau l'article 27 pour plaider de la pertinence de ma proposition qui est de faire venir les gens. J'aimerais, avant de continuer mes propos, entendre votre plaidoyer final à savoir si je suis à l'intérieur du règlement ou pas.

Le Président (M. Lemieux): L'article 211 dit: "Tout discours doit porter sur le sujet en discussion." C'est la règle de la pertinence et elle doit être interprétée d'une façon extrêmement large. En ce qui concerne tout particulièrement, le présent cas, nous avons à appliquer l'article 211, eu égard à la motion, M. le ministre, qui est devant moi et eu égard au mandat d'une façon très générale. Eu égard au fait que je dois considérer l'article 211 relativement à la

motion qui est devant moi, soit "que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières", en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique, il est permis au député de Joliette de faire référence, M. le ministre, M. le député de Hull, à certains articles du projet de loi 68. Je dois vous avouer, M. le député de Hull, que j'ai une oreille attentive, non seulement aux propos du député de Joliette, mais aux propos aussi du groupe ministériel et que j'interviendrai de facto, si je considère qu'il y a effectivement une violation du règlement. Vous pouvez continuer, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, je disais donc qu'il est extrêmement important d'accepter cette proposition, spontanément de la part du ministre, immédiatement après que j'aurai terminé mon exposé, parce que je reviens délibérément à l'article 27 comme étant une des poignées de mon argumentation, qui est la suivante: Si un petit groupe de personnes est transféré de la Société immobilière du Québec au ministère des Approvisionnements et Services, c'est quel groupe, basé sur quels critères, et pour quelles raisons, quels motifs? Tout cela est de l'inconnu, au moment où on se parle. Cette loi confère un pouvoir discrétionnaire très large, au gouvernement, parce que c'est "que désigne le gouvernement", et je suppose que, quand on dit "désigne le gouvernement", c'est soit par arrêté en conseil, soit par une autre procédure qu'on aura identifiée, mais, à mon sens, ce serait par arrêté en conseil. Si cela devait être par arrêté en conseil, est-ce que la personne apprendrait qu'elle passe d'une structure à une autre par arrêté en conseil, sans négociation préalable, sans établir de modalités? Est-ce que ce seront les modalités de la loi de la fonction publique ou les modalités particulières de la convention collective qui la régit?

Voilà autant de questions. Cela peut sembler, bien sûr, aux yeux de certains parlementaires, quelque chose d'exagéré de notre part. Mais combien de fois ai-je entendu les syndicats, à combien de reprises ai-je entendu les syndicats, quand on a créé la Loi sur la Société immobilière du Québec? Les syndicats voulaient absolument en connaître les tenants et aboutissants avant que les législateurs l'adoptent en troisième lecture, en cette Chambre. Quelle était au moins la démarche logique, la démarche correcte visant à protéger l'ensemble de leurs droits? Cela a été la même chose quand on a rencontré les représentants des salariés quand il s'est agi de la création de la Société des établissements de plein air. Ils savaient d'avance qu'en l'étudiant article par article, on arriverait avec tel amendement pour bien garantir que leurs droits soient vraiment reconnus dans la nouvelle loi que nous faisions.

Au moment où on se parle, rien. On ne sait rien. On ne sait pas où on va. On n'a même pas consulté les représentants des salariés, à moins qu'ils aient donné une fausse information à un de mes attachés politiques, mais il n'y a pas eu de consultation particulière, et cela m'apparaît important à ce stade-ci de nos travaux, qu'au lieu d'avoir des réactions a posteriori, on fasse donc accompagner le changement de loi, purement et simplement, on les tienne au courant des implications. On aura moins de problèmes. Cela créera moins de soubresauts. On pourrait même négocier peut-être avec eux certaines modalités de transfert tout à fait humaines, tout à fait correctes sur le plan des relations du travail. En relations du travail, on sait très bien que trop souvent, on a ignoré cela, malheureusement au Québec, les relations du travail, ce sont des relations humaines à leur base.

S'il y avait des relations correctes entre employeurs et employés, si on se parlait, on éviterait bien souvent des affrontements. Combien d'exemples on peut avoir. J'ai négocié pendant dix-sept ans. J'en sais quelque chose. Quand on parlait avec un employeur parlable et qu'on s'entendait, c'est regrettable, mais on évitait des griefs. On évitait des grèves. On évitait des problèmes. Et je suis convaincu que les relations du travail ayant comme base primordiale d'abord des relations humaines... L'État, durant la période électorale, disait qu'il traiterait avec ses employés d'une façon humaine, d'une façon correcte. C'est le temps de le prouver à ce stade-ci. Ce serait le temps de montrer une grande magnanimité et dire: Oui, à telle heure demain, on va accepter de recevoir les représentants des salariés, on va arriver avec des consentements pour l'heure qui accommoderaient le ministre, qui accommoderaient la majorité des membres de la commission. On pourrait dire: On va s'entendre même sur un temps limite de l'interrogatoire, s'il le faut.

Je suis ouvert à toutes sortes de consentements qui auraient pour effet de rendre les relations du travail avec nos employés les plus humaines possible, les plus ouvertes possible. Tant mieux si, en bout de course, tout le monde est satisfait. On tournera la page là-dessus et on dira: Voilà un groupe qui ne fera pas de problème, parce qu'il saura qu'il a tout compris l'ensemble des données que l'on retrouve dans cette loi qui aura peut-être même permis au ministre devant les salariés de baliser un peu ce pouvoir discrétionnaire. Quand on lit à l'article 27, je m'en ressers pour bien expliciter comment cela peut être large, cela peut porter à ambiguïté et cela

peut permettre a du monde de se questionner énormément. "Les membres du personnel de la Société immobilière du Québec que désigne le gouvernement." Ce n'est pas tout le monde, cela est clair parce qu'on n'aurait pas écrit "que désigne le gouvernement" si cela avait été tout le monde. On aurait dit: sont membres du ministère des Approvisionnements et Services, le personnel de la SIQ, point. Les membres que désigne le gouvernement, cela veut donc dire qu'il y aura une discrétion. Ce n'est sans doute pas tout le monde. Cela peut être les cadres supérieurs. Cela peut ne pas affecter du tout les salariés dits syndiqués, mais tel que stipulé, il n'y a rien qui peut dire autre chose que je peux interpréter même. Cela peut être n'importe qui n'importe quand, à part cela. Il n'y a pas de date. Ce sont des membres que désigne le gouvernement et le gouvernement peut désigner par décret ou peut échelonner le transfert sur six mois. Il n'y a rien qui stipule le contraire. On peut l'échelonner sur un an. À mon sens, c'est le genre d'article de portée générale qui, tant qu'on ne l'a pas cerné, tant qu'on ne l'a pas balisé, risque purement et simplement de servir à toutes sortes d'interprétations.

Donc, ma motion a un aspect additionnel. C'est pour éviter précisément une multitude d'interprétations. Quand on consigne dans un texte légal un article de portée générale du genre, il faut au moins que les procès-verbaux de nos commissions parlementaires soient un peu la base de l'esprit d'une loi. Quand on dit que c'est la lettre qui s'applique, bien souvent, c'est grâce a l'explicitation de cette même lettre qu'on a réussi à avoir des jugements de cour par la suite qui s'inscrivaient au moins dans l'esprit d'une loi. Vous allez me dire: Le juge a toujours è trancher sur la lettre. Je sais cela, mais quand on lui donne le contexte, qu'on dépose une argumentation écrite et qu'on lui montre l'esprit dans lequel c'est fait, cela peut aussi permettre des jugements nuancés au lieu d'avoir des jugements purement et simplement de lettre.

J'offre au ministre à ce moment-là l'opportunité non seulement de sécuriser les employés, non seulement d'agir en toute transparence avec eux, de dialoguer avec eux mais aussi probablement de clarifier et de baliser ces articles de portée générale qui offrent des pouvoirs discrétionnaires, à mon avis, tout à fait disproportionnés par rapport au droit d'association même des salariés, par rapport au droit de connaître dans quelle galère on veut les embarquer, de connaître si eux, cela les exclut ou pas de cette éventuelle création de structures.

Voilà autant d'opportunités, je pense, qui font en sorte que le ministre devrait accepter cette consultation particulière qui, à mon avis, ne lui enlève rien, pas du tout, et qui, au contraire, va peut-être démontrer, permettre au ministre plus précisément de faire comprendre à ses salariés qu'il a le goût d'agir purement et simplement avec transparence, d'agir correctement, en toute déférence vis-à-vis les syndicats, qu'il reconnaît leur bien-fondé, qu'il reconnaît leur droit d'association, qu'il reconnaît qu'ils ont des conditions durement négociées, qu'ils ont des acquis qui ne peuvent pas être remis en question. C'est un peu cela qu'on demande au ministre à ce stade-ci.

J'ose espérer, puisque je dois conclure, que le ministre acceptera cette proposition qui se veut, je pense bien, une saine collaboration, non seulement entre les parlementaires, mais aussi entre les gens qui oeuvrent d'une façon dévouée, correcte pour l'État québécois. (17 heures)

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.

M. Rocheleau: S'il y a d'autres commentaires de la part de mes collègues de l'Opposition, je souhaiterais les entendre et, par la suite, je commenterai.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci. Dans le cadre de cette motion présentée par mon collègue, le député de Joliette et leader de l'Opposition, non seulement je suis d'accord, étant donné les propos très pertinents du député de Joliette quant à l'importance de faire comparaître le Syndicat canadien de la fonction publique, communément appelé le SCFP, mais j'aimerais présenter, parce que je pense que ce n'est pa3 complet, un amendement, si mon collègue de Joliette est aussi d'accord.

Motion d'amendement

J'aimerais présenter une motion d'amendement qui pourrait se lire comme suit: La motion pour consultation particulière est amendée en ajoutant à la fin de cette motion les termes "le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec", puisque je pense que le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec est aussi très en cause par rapport au dossier qui nous concerne et par rapport aux gens et aux employés qui sont impliqués. Je vous propose cette motion d'amendement et j'aimerais savoir, d'une part, si elle est recevable. Si oui, j'aimerais vous entretenir quelques minutes.

Le Président (M. Lemieux): La motion du député de Joliette était la suivante: Que la commission, avant d'entreprendre l'étude

détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique. La motion présentée par le député de Joliette, amendée par le député de Bertrand se lirait comme suit: Que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique ainsi que le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. C'est exact, M. le député de Bertrand?

M. Parent (Bertrand): C'est exact.

M. Chevrette: M. le Président, c'est une demande de directive que j'ai à vous faire.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Joliette»

M. Chevrette: Je voudrais vous demander si le fait d'avoir un sous-amendement à ce stade-ci nous oblige à parler exclusivement sur le sous-amendement.

Le Président (M. Lemieux): Sur l'amendement, effectivement.

M. Chevrette; Donc, le droit de parole est sur l'amendement. D'accord.

Le Président (M. Lemieux): L'amendement est recevable. Il n'y a pas de doute. Pour moi, l'amendement est recevabie.

Une voix: C'est important le monde qui travaille.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, l'amendement est recevabie, mais... Je m'excuse. M. le député de Chauveau, s'il vous plaît! S'il vous plaît! parce que cela me demande quand même une certaine période de réflexion. Vous me comprendrez. M. le député de Bertrand, l'amendement est recevabie et maintenant vous avez la parole sur l'amendement présenté.

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie. Si je demande d'ajouter à l'amendement de mon collègue qui a plaidé il y a quelques minutes sur la pertinence et l'importance de faire comparaître ici un groupe et si je demande que le groupe du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec soit aussi dans les groupes qui pourront comparaître ou qui devront comparaître devant cette commission, c'est parce que plusieurs de ces employés qui seront touchés par la réorganisation font partie du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Dans ce sens, je pense que le ministre n'aura aucune espèce d'objection. On pourra même accélérer l'étude du projet de loi article par article une fois qu'on aura cet accord de la part du ministre et de l'équipe ministérielle.

Avant de commencer l'étude article par article, il nous faut être capables d'entendre les gens qui vont être touchés essentiellement par l'article 27, plus particulièrement concernant le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Mon collègue, le député de Joliette, a soulevé plusieurs points qui militaient en faveur de faire comparaître le syndicat de la fonction publique. Plusieurs de ces points - je n'ai pas l'intention de les répéter, de les reprendre - font effectivement partie de l'argumentation qui fait en sorte que je demande qu'on puisse ajouter cela. En définitive, on a un peu l'impression que ce qui est en train de se faire actuellement -je pense que tous les membres de cette commission doivent en être pleinement conscients - c'est que le gouvernement - il en est plus ou moins conscient - par son projet de loi actuel, est en train de s'arroger le droit d'obliger des gens, qui, pour la plupart, ont délibérément choisi de quitter la fonction publique, è réintégrer cette fois-ci la fonction publique par un simple décret du gouvernement, et c'est inacceptable. Nous, on le pense. Dans notre travail d'Opposition, c'est important qu'on puisse sensibiliser le ministre et les gens de cette commission au fait qu'on voudrait entendre le son de cloche, on voudrait s'assurer qu'autant le Syndicat canadien de la fonction publique que le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec aient la chance de venir s'exprimer ici en commission; qu'ils aient la chance de venir dire de quelle façon cela va affecter les membres du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Si on n'a pas ce son de cloche, si on n'a pas les arguments, je pense que cela risque de rester nébuleux. Tout cela en fonction....

M. Gobé: M. le Président, une directive, s'il vous plaît!

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député.

M. Gobé: Pouvez-vous demander aux députés de l'Opposition de s'asseoir et de laisser parler le député de Bertrand qui dit des choses fort intéressantes d'ailleurs.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, j'aimerais quand même attirer votre attention sur l'article 36 du règlement, je crois, qui dit qu'aucun député

ne peut interrompre celui qui a la parole, sauf pour faire un rappel au règlement, signaler le défaut de quorum ou attirer l'attention sur une violation de droit ou de privilège. J'aimerais vous faire remarquer que la nature des interventions était très minime. Je suis en mesure de constater que si les parlementaires ne sont pas en mesure de comprendre les propos très pertinents du député de Bertrand, je vais faire un rappel à l'ordre, M. le député de Lafontaine, comme je l'ai fait tout à l'heure sur une remarque même du député de Bertrand.

M. Gobé: M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Je vous ferai remarquer que la position que nous occupons dans ce coin n'a peut-être pas la même acoustique que vous avez à votre place.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, j'aimerais attirer votre attention sur l'article 41, paragraphe 2, du règlement, s'il vous plaîtî

Vous pouvez continuer, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je vais continuer...

Une voix: Relaxez.

M. Parent (Bertrand): ...en espérant que mon collègue d'en face va continuer à m'écouter puisqu'il trouvait cela fort intéressant.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, s'il vous plaît!

M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Ce que je mentionnais avant cette brève interruption, c'est qu'il était important pour les gens de cette commission, pour les membres de l'Opposition en particulier qui, actuellement, se posent beaucoup de questions concernant le projet de loi et particulièrement l'article 27, deuxième alinéa, au sujet de la grande ouverture qui s'y trouve - ce que j'appelle un trou béant -et qui risque de placer des individus dans une position qui fera en sorte qu'ils se verront dirigés à droite et à gauche, qu'ils se verront obligés de faire partie de telle ou telle accréditation syndicale... On ne le peut pas, à mon avis, M. le Président, par un projet de loi, dans un article aussi large tel qu'il est rédigé actuellement, à moins que le ministre ne consente, au cours des prochaines heures ou des prochaines minutes, à annoncer à cette commission qu'il a l'intention de changer fondamentalement l'article 27, ce qui n'a pas semblé, à prime abord, être l'une des choses qu'il allait nous annoncer.

Mais, tel qu'il est rédigé, actuellement j'ai à faire cette motion d'amendement pour demander la consultation. Je pense qu'il est important que le ministre et les membres de la commission aient vraiment l'occasion de questionner les gens des différents syndicats impliqués et plus particulièrement en ce qui me concerne, à la suite de cet amendement, du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Ces gens-là, d'une part, ont des choses à nous dire. Peut-être que le ministre et les membres de la commission, à la suite de cette audition, de cette comparution tout à fait normale, surtout dans les circonstances, se féliciteront et seront très heureux d'avoir eu la précaution d'inviter ces gens, de les interroger et de les contre-interroger, particulièrement pour comprendre ce qui se passera avec ces employés.

Dans ce projet de loi 68 qui nous est présenté, toutes ces modifications quant à la structure, c'est un point, M. le Président, mais, lorsqu'on touche au personnel, lorsqu'on touche à des individus, je pense qu'on ne peut pas se permettre de les caser è droite et à gauche strictement par un article de loi qui va faire qu'on donnera beaucoup de latitude au ministre, qui va faire que, à l'intérieur de ce ministère, on aura le droit de faire des choses qui, essentiellement, ne se font pas à l'intérieur d'autres ministères.

J'attire votre attention, car cette comparution devant la commission du syndicat des professionnels et aussi, comme l'a demandé mon collègue de Joliette et leader de l'Opposition, celle du Syndicat canadien de la fonction publique permettront d'éviter que des abus se produisent et que le ministre se retrouve, dans six mois ou dans un an d'ici, dans une situation qui sera non seulement déplorable, mais aussi conflictuelle, car il aura été donné, dans l'approbation du projet de loi, à l'article 27, des pouvoirs et il aura été donné au ministre, finalement, des outils qu'il aura tout lieu de vouloir utiliser et qui placeront le gouvernement, tous ces individus et tout le personnel concerné dans une situation pour le moins confuse qui risque de brimer leur liberté d'action.

Adhérer au syndicat de professionnels délibérément, c'est une chose. Adhérer au syndicat de la fonction publique, c'est une autre chose. Mais, étant donné que l'article 27 prévoit que le gouvernement décidera qui il désigne, en d'autres mots, il pourra dire à tel ou tel individu qu'il peut changer d'employeur et venir travailler comme cela, en passant de la SIQ au gouvernement, à l'intérieur de la nouvelle structure. La Société immobilière du Québec est une société dite autonome, une société qui a sa propre structure. Le fait - de là toute

l'implication de changer une structure aussi importante - de vouloir intégrer des individus à l'intérieur de cette nouvelle structure, on ne peut pas carrément dire à ces gens: Écoutez, vous êtes maintenant régis par la loi 68. Voua êtes régis par l'article 27 et, dorénavant, vous faites partie de telle ou telle accréditation syndicale ou: Dorénavant, vous n'avez pas le choix, vous passez de tel état à tel état.

Je pense que ce n'est sûrement pas l'intention du ministre d'agir de cette façon. On a beau croire à la bonne foi du ministre, aujourd'hui c'est lui et un autre jour ce sera un autre, sauf que le ministère sera régi par une loi et qui que ce soit qui décidera de l'appliquer pourra le faire dans le plein sens du mot. (17 h 15)

M. le Président, je vous dirai qu'il y a eu des manifestations importantes de la part de ces gens du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec qui ont manifesté leur désir d'être entendus par le ministre, parce que d'après ce que j'ai compris jusqu'à maintenant, les choses se sont passées quand même relativement rapidement et il n'y a pas eu de consultation formelle à l'intérieur de la consultation que le ministre a pu tenir. Je pense qu'il va de soi que le ministre accepte la comparution du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec afin qu'ils puissent dire eux-mêmes ce qu'ils ont le goût de dire et que de là, on pourra juger si on doit ou non amender.

Je pense qu'il va de soi qu'on donne la chance au coureur et que nous, en tant qu'Opposition, on ait la chance de, disons, répondre à nos appétits qui sont ceux de dire que nous pensons que cela va trop loin d'y aller directement sans consultation au préalable et donner la chance à ces gens...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

Une voix: II n'a pas le droit à une demi-heure.

M. Chevrette: II n'a pas droit à une demi-heure sur une motion de fond? Il n'a pas droit à une demi-heure le proposeur, l'auteur de la motion? L'auteur de la motion d'amendement...

Le Président (M. Lemieux): L'article 209, paragraphe 2, motion de forme. Je m'excuse, M. le député de Bertrand, effectivement, vous avez droit à 30 minutes.

M. le député de Joliette a raison, vous pouvez continuer.

M. Filion: Pendant que nous y sommes, M. le Président, est-ce que vous me permettez une question de directive à ce stade-ci?

Le Président (M. Lemieux): Une question de directive.

M. Filion: Le proposeur de la motion d'amendement, le député de Bertrand, a 30 minutes tel que vous venez de l'établir. Est-ce que je dois comprendre que désirant intervenir sur cette question...

Le Président (M. Lemieux): Vous avez dix minutes.

M. Filion: ...les autres membres de la commission ont dix minutes.

Le Président (M. Lemieux): Dix minutes, effectivement. Et nous allons devoir avant de revenir à l'adoption de la motion principale voter sur l'amendement.

M. Filion: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): C'est comme la théorie des ensembles, M. le député de Taillon, théorie que vous avez dû étudier lorsque vous avez fait vos maths, sans doute.

M. le député de Bertrand, vous pouvez continuer.

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le Président. Je trouvais un peu curieux que vous me rappeliez qu'il me restait une minute...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je trouvais que mon temps...

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, vous avez 30 minutes en vertu de l'article 209, paragraphe 2.

M. Parent (Bertrand): Je trouvais que mon temps avait passé... Pardonnez...

Une voix: Errare humanum est.

M. Parent (Bertrand): Amen.

M. le Président, ce que je mentionnais, c'est l'importance pour le ministre d'accepter et de permettre à ces groupes de venir témoigner ici. Il n'y a aucune disposition à l'intérieur de l'article 27 ou de quelque autre article que ce soit concernant nos préoccupations qui prévoit les modalités du transfert de ces employés qui - soit dit en passant, ne l'oublions pas - ont des accréditations syndicales des différentes parties de la fonction publique. Ces employés sont actuellement en négociation. Je pense qu'il est possible que les conventions collectives à venir leur accordent des conditions de travail différentes de celles de

la fonction publique. C'est important, parce que la conjoncture qui prévaut actuellement fait en sorte que les gens sont en négociation, ces gens-là sont en train de revendiquer des choses, ils pourront - peut-être pas à l'échelle salariale, mais à l'échelle des avantages marginaux, des différents avantages sociaux - être placés dans une situation où ils auront un recul important par rapport à la situation qu'ils ont actuellement ou qu'ils sont sur le point d'obtenir dans cette négocation. Au moment où toute cette négociation se mène de front, on va arriver au cours des prochaines semaines, parce que tout compte fait, lorsque la loi sera adoptée, le ministre aura le pouvoir d'exercer l'article 27 et de dire aux gens qui font partie de telle ou telle accréditation, qui font partie de la Société immobilière du Québec, la SIQ, de s'intégrer ou de ne pas s'intégrer à l'intérieur de son ministère à cause de cette nouvelle structure.

Je pense que c'est quelque chose de difficile à accepter. Je crois que c'est totalement discrétionnaire de permettre au ministre, que ce soit le ministre des Approvisionnements et Services ou autre, mais dans ce cas il s'agit du ministre des Approvisionnements et Services, de pouvoir agir comme cela. Plus que ça, cette consultation va permettre d'éviter d'aller trop loin dans le • cas où il y aurait remembrement ou restructuration de d'autres ministères semblables et de ne pas créer de précédents.

À part cela, M. le Président, à l'intérieur des pouvoirs qui vont être déférés ou accordés au ministre par l'article 27, c'est qu'il se retrouve avec de grands pouvoirs et aussi qu'on crée des précédents. Ces précédents pourraient venir nuire actuellement à la lutte, si on peut appeler cela ainsi, la lutte syndicat-patronat. Lorsqu'il y a négociation, on sait que cela ne prend pas grand-chose pour mettre le feu aux poudres, on sait que cela ne prend pas grand-chose pour faire des histoires ou des tempêtes dans des verres d'eau. Le fait que ces gens ne soient pas consultés de façon formelle, n'aient pas la chance de se faire entendre par toutes les parties en cause, par les deux côtés de la Chambre, donc autant ceux formant le gouvernement que ceux formant l'Opposition, risque certainement d'être un handicap dans une partie des négociations et risque de faire achopper peut-être, de quelque façon que ce soit, un certain secteur des négociations.

Je pense que le ministre ne peut pas se permettre - si j'ai bien compris son collègue du Conseil du trésor qui est aux prises avec toutes ces négociations - de se faire dire: Écoute! Actuellement, on a envenimé le conflit, on a envenimé le dossier parce que voici, il y a un autre groupe, soit du SCFP ou en l'occurrence du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec, qui se voit particulièrement lésé dans tout ce dossier, dossier qui va décider dorénavant de l'accréditation des gens qui vont venir siéger ou qui vont aller travailler dis-je, au nouveau ministère des Approvisonnements et qui travaillent à la SIQ, la Société immobilière du Québec, ou qui n'y travaillent pas actuellement. On va se ramasser avec une situation conflictuelle. Je pense que, sans vouloir charrier, sans vouloir faire peur de quelque façon que ce soit, le ministre doit être pleinement conscient qu'il risque de se retrouver dans cette position s'il ne prend pas un minimum de précautions. Ce qu'on lui demande, ce n'est pas unilatéralement qu'on change tous ces articles, mais qu'on ait la chance, dans un premier temps, d'écouter de quelle façon ces gens revendiquent leurs droits et, peut-être par la même occasion, permettre de trouver une formule quelconque. Cette formule quelconque, je ne la connais pas actuellement, mais ce que je sais, c'est que, lorsqu'on touche à des individus et è des droits qu'ils ont, particulièrement dans le secteur public où les gens aiment beaucoup protéger ce qu'ils ont comme acquis par rapport à leurs avantages, leur statut, il est important qu'on donne la chance à ces gens de s'exprimer.

Je terminerai ce bref exposé, M. le Président, en vous disant que la précaution demandée par l'Opposition, par mon collègue, député de Joliette et leader de l'Opposition, de faire comparaître le SCFP et mon amendement que je présente en demandant la comparution aussi du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec sont un minimum pour que cette commission ait la satisfaction d'un travail bien fait et pour qu'on les ait entendus dans les plus courts délais possibles. J'imagine que ce sont des gens qui peuvent être convoqués à quelques heures d'avis, puisqu'ils sont certainement au courant qu'on est en train d'étudier, quelque part, en deuxième lecture, en commission parlementaire, un projet de loi qui va les toucher. Déjà, ils nous en ont informés, puisque certaines rencontres ont eu lieu de façon informelle. D'un autre côté, ils pourraient rapidement comparaître devant cette commission pour ne pas retarder les travaux. Je suis conscient qu'on est en période intensive, en fin de session, et conscient que le ministre ne pourrait pas partir en vacances sans avoir son projet de loi, auquel il tient sûrement, puisque c'est ce projet de loi qui va lui permettre d'agir à l'intérieur de son ministère. On pourrait rapidement demander à ces gens de comparaître. Lorsque ce sera fait, lorsque les groupes intéressés, que ce soit le Syndicat canadien de la fonction publique, le syndicat de professionnels, auront eu la chance de s'exprimer, on aura la chance,

nous-mêmes, de nous faire une idée quant à la façon dont on devra amender» ou corriger, ou changer complètement l'article 27 pour éviter qu'on ne se ramasse dans quelque situation pénible par la suite ou qu'on ait l'impression, nous, de ne pas avoir fait notre travail.

Je demande au ministre qu'il veuille bien recevoir cet amendement et cette motion d'amendement comme telle, en plus de celle de mon collègue, pour permettre à ces deux groupes de venir ici en commission nous dire exactement ce qu'ils ont à nous dire et, nous, de les questionner là-dessus.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion d'amendement à la motion principale présentée par le député de Joliette? M. le député de Taillon, vous avez dix minutes.

M. Filions Uniquement pour corriger votre dernière phrase, la motion d'amendement...

Le Président (M. Lemieux): C'est à vous, M. le député de Taillon.

M. Filions Pour corriger votre dernière phrase, M. le Président, la motion d'amendement a été présentée par le député de Bertrand.

Le Président (M. Lemieux): Par le député de Bertrand, c'est-à-dire le Syndicat canadien de la fonction publique, ça, c'est la motion principale. La motion d'amendement, c'est: "ainsi que le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec", qui a été présentée par le député de Bertrand.

M. Filions C'est cela, juste pour qu'il n'y ait pas de confusion au niveau de mon temps de parole sur la motion principale.

Le Président (M. Lemieux): Non, cela va, pas de problèmes.

M. Filions Je voudrais intervenir, donc, je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Le droit de parole sur la motion principale est gelé, M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filions Je vous remercie, mais je constate que ce n'est pas le cas pour nous quand même.

Je voudrais intervenir à ce stade-ci pour concourir à la motion d'amendement présentée par le député de Bertrand concernant la nécessité de ces consultations particulières qui s'amorcent, espérons-le, avec différents intervenants qui, dans ce cas- ci, pourraient être affectées par l'article 27 du projet de loi déposé par le député de Hull, ministre délégué aux Services et Approvisionnements. Encore une fois, je pense qu'au niveau du principe général je suis convaincu que le député de Hull et ministre ne résistera pas, si l'on veut, à semblable ouverture d'action et de décision avec transparence. On a remarqué que le gouvernement libéral qui a été élu le 2 décembre dernier semble avoir la fâcheuse tendance à éviter de consulter, d'entendre les associations, les groupes, les organismes, les regroupements de syndicats, comme c'est le cas ici.

Dans le cas qui nous occupe, je suis convaincu que le ministre résistera à cette tendance et accueillera avec ouverture d'esprit cette chance d'entendre les gens intéressés. C'est beau d'adopter des lois, c'est beau, comme dans ce cas-ci, de regrouper différents organismes, mais le travail qui est fait, le travail qui doit être fait quotidiennement par les gens des ressources humaines et, dans ce cas-ci, on peut le mentionner, par les professionnels, je pense que c'est important. Voilà un groupe valeureux de travailleurs que sont les professionnels du gouvernement du Québec. On a tendance à les oublier. Ce sont eux qui, quotidiennement, effectuent le travail, font en sorte que le mandat des organismes concernés en l'espèce, celui de la Société immobilière du Québec en particulier, que les mandats soient menés à bon terme. Ce n'est pas toujours au niveau de l'autorité d'un ministère que le travail s'effectue. Les autorités donnent les lignes générales, mais, dans ce cas-ci, les professionnels, puisqu'on parle d'eux, apportent leur expérience, leur expertise, leur éclairage à la bonne marche quotidienne des travaux de l'entreprise à laquelle ils appartiennent. (17 h 30)

Encore une fois, je pense que les besoins de consultation des professionnels s'imposent dans ce cas-ci, d'autant plus que le mandat de la Société immobilière du Québec est un mandat tout récent accordé è la suite d'une réorganisation administrative de l'ancien gouvernement du Parti québécois. Dans ce cas-ci, l'article 27 - le député de Joliette l'a souligné plus tôt - risque d'affecter grandement les droits de ces personnes. C'est combien plus facile, M. le ministre, de prévenir plutôt que d'avoir à guérir. Combien de conflits de travail auraient pu être évités s'il y avait eu consultation et si on avait pris la peine de s'asseoir et d'écouter les gens et, dans certains cas, de faire disparaître leurs craintes. Peut-être le ministre nous dira-t-il: Non, il n'y a pas matière à s'inquiéter, mais, dans ce cas-ci, je vous dis qu'on a reçu des appels et, en tant que critique des relations du travail, je dois vous aviser que j'ai été

informé qu'une partie importante de la main-d'oeuvre que vous vous apprêtez à affecter directement est préoccupée, est inquiète des conséquences passibles de l'article 27.

Dans ce sens, je pense, cette consultation peut se faire facilement. Ce n'est pas une affaire compliquée. Il faudrait envoyer un avis de trois ou quatre jours, de six ou sept jours. Dans le cas du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec, on pourrait facilement rejoindre ces gens-là et je suis convaincu que la consultation pourrait être menée rondement à votre commission, M. le Président, qui a la réputation de fonctionner rondement. On a tendance à croire que consulter des gens, c'est quelque chose de long. Mais non! On l'a fait à plusieurs autres occasions dans d'autres commissions et, dans ce cas-ci, cette consultation pourrait se faire aujourd'hui même, en soirée ou demain matin ou un peu plus tard cette semaine.

M. le Président, je m'excuse mais je n'ai pas saisi les..,

M. Poulin: Une heure plus tard, comme dans les Maritimes.

M. Filion: Pardon?

M. Poulin: J'ai dit: Une heure plus tard, comme dans les Maritimes.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Chauveau, si la règle de la pertinence doit s'appliquer, elle s'applique actuellement dans votre cas. M. le député de Taillon, vous pouvez continuer, s'il vous plaît.

M. Filion: Non, je pense qu'une consultation particulière avec les employés qui sont concernés par un projet de loi ne me semble pas beaucoup être matière à blague quand on sait que, dans certains cas, cela peut affecter l'ancienneté, la promotion, les traitements, les salaires et cela va sûrement affecter le contenu de leur travail, de l'administration et du travail quotidien de ces gens.

Je ne sais pas si le député d'un comté dont j'ignore le nom...

Le Président (M. Lemieux): Le député de Chauveau, M. le député de...

M. Filîon: ...le député de Chauveau qui doit sûrement avoir dans son comté des professionnels du gouvernement du Québec... Je ne sais pas si ces gens-là seraient heureux d'entendre ses blagues sur la motion d'amendement présentée par le député de Bertrand, mais, dans notre cas, M. le Président, nous concourrons donc à la motion d'amendement présentée par mon collègue et nous souhaitons que non seulement les membres du Syndicat canadien de la fonction publique - ce n'est pas parce que le mot "canadien" est là, d'ailleurs, qu'il n'y a pas des Québécois là-dedans contrairement, je pense, à ce que certains députés autour de la table ont cru, de l'autre côté. Dans ce cas-ci, le mot "Québec" y apparaît; alors, je suis convaincu qu'il n'y aura aucun doute dans leur esprit qu'il s'agit bel et bien de professionnels à l'emploi des corporations mentionnées à l'article 27 du projet de loi qui est devant nous.

M. le Président, un peu de consultation... Dans ce cas-ci, on connaît le sort réservé aux régions par ce gouvernement, mais un peu de consultation avec les employés, avec le personnel, les professionnels, les simples employés, aussi, ne peut sûrement pas nuire à nos travaux, car je suis convaincu que le ministre a à coeur de faire en sorte que son projet de loi, s'il devient loi, soit acceptable par ceux qui sont directement touchés. Et pour qu'une loi soit socialement acceptable et socialement acceptée, il est bon, il est excellent, et même nécessaire dans certains cas, de consulter ceux qui vivent avec les effets d'une loi, ceux qui ont à vivre la réalité des lois. Nous, on brasse les mots ici, on adopte de beaux articles, et quand on a fini, on passe à autre chose. Mais les gens qui sont touchés ont à vivre avec les réalités, les conséquences, les effets des projets de loi. En matière de relations du travail, en particulier, il y a eu énormément de problèmes qui sont nés de lois qui n'étaient pas suffisamment claires. Il y a eu énormément de problèmes, et, dans ce cas-ci, on a la chance de pouvoir éviter, de pouvoir prévenir ces problèmes-là.

Or, M. le Président, je suis convaincu que le ministre partage cette préoccupation. Il me fait signe de la tête qu'effectivement, il va probablement se rendre à nos arguments...

Une voix: Sinon, on peut lui en donner d'autres.

M. Filîon: M. le Président, c'est donc avec plaisir que j'énonce immédiatement que j'approuverai la motion d'amendement du député de Bertrand. Et, en concluant, pour ceux qui semblent trouver cela drôle de consulter les gens, je leur rappellerai qu'un gouvernement, par des lois autoritaires, sans consultation ne va jamais bien loin, et que l'actuel député de Saint-Laurent a oublié des leçons, mais je pense qu'il va s'en souvenir vite...

Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le député de Taillon, s'il vous plaît.

M. Filion: En terminant donc, parce

qu'il y en a qui n'étaient pas là entre 1970 et 1976, l'actuel député de Saint-Laurent a déjà eu sa leçon alors je voudrais éviter que cela se répète.

Le Président (M. Lemieux): Alors, M. le député de Taillon je vous remercie. Alors M. le député de Joliette vous aviez demandé la parole, et après la parole est au député de Dubuc.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Je suis heureux de concourir à l'amendement de mon collègue de Bertrand. Effectivement, les professionnels du gouvernement forment un autre groupe qui aurait pu être consulté, d'autant plus que c'est souvent dans ce groupe même que se brasse énormément d'idées, à qui on passe des commandes précises, à qui on demande de réfléchir, d'en arriver à présenter des hypothèses de solutions aux problèmes rencontrés, et il m'apparaît donc, après avoir consulté les représentants du Syndicat canadien de la fonction publique, qu'on ajoute également dans cette séance d'information ou d'échanges avec les salariés intéressés, qu'on ajoute ces professionnels du gouvernement, le Syndicat de professionnels du gouvernement, je trouve cela heureux, M. le Président. C'est que les professionnels du gouvernement sont souvent appelés à jouer des rôles importants auprès des cadres supérieurs, des directeurs, des directeurs de services, des directeurs généraux ou encore des sous-ministres adjoints, des sous-ministres même.

Les professionnels, je pense, ont un rôle encore plus important à jouer directement auprès de l'appareil supérieur sur le plan administratif, puisqu'ils ont à préparer, à rédiger souvent les textes, rédiger les plaidoiries, rédiger tous les contrats, les protocoles, et on ne leur offre même pas l'occasion de négocier un protocole de transfert, de discuter même sur l'opportunité d'avoir ou pas un protocole de transfert. Cela m'apparaît tout à fait inconcevable» Je suis surpris que le ministre ne nous arrête pas de ce côté-ci pour nous dire: Écoutez-donc, an va les rencontrer, écoutez-donc, j'accepte de les rencontrer, il s'agirait qu'on se rencontre, le critique et moi-même, pour qu'on puisse définir le moment et qu'on s'entende avec le leader du gouvernement pour dire: Mercredi, après la période de questions, nous entendrons successivement les professionnels du gouvernement et, par la suite, les représentants du Syndicat canadien de la fonction publique. Si le ministre était prêt à faire cela, nous pourrions lui assurer de notre côté, immédiatement, qu'on demanderait au président de la commission d'en faire rapport au leader pour qu'on puisse... On cesserait immédiatement nos propositions, en reconnaissant d'emblée que le ministre a su se rendre à une proposition qui a pour objectif fondamental d'établir des relations harmonieuses entre les personnels touchés ou éventuellement touchés par rapport à l'objectif de la législation.

Il me semble que le ministre n'a pas d'intérêt à vouloir faire cela sans dire à qui que ce soit ce qui va se produire. Je ne vois pas quel intérêt aurait le ministre à créer de l'incertitude tant auprès des professionnels qu'auprès des salariés. C'est peut-être un peu pour cela que je trouve correcte l'idée, nommément de mon collègue de Bertrand, d'ajouter le groupe des professionnels, puisqu'ils sont aussi syndiqués en fonction de lois du Québec, ils ont aussi des représentants, ils font aussi valoir leurs revendications, ils ont aussi des processus de mutation, d'affectation, des droits acquis, des clauses de transferts de droits, transferts de privilèges et l'accumulation de certaines données. Ils ont tout cela.

Ils auraient aussi peut-être intérêt à nous dire comment ils voient cela. Je me souviens, il y a environ un an ou un an et demi, les cadres supérieurs du gouvernement se sont formés en association, c'est-à-dire qu'il sont formés depuis plus longtemps que cela, mais ils revendiquaient de la part de l'État en général une plus grande association des cadres supérieurs du gouvernement au processus d'établissement de législations, de programmes, de projets, puisque les cadres sont nécessairement le prolongement de l'autorité gouvernementale ou de l'État en tant que tel. A mon point de vue, nos professionnels auraient avantage à être associés à ce processus législatif.

Je ne comprends pas d'ailleurs pourquoi le ministre -nous laisse absolument plaider sur le fond. Il me semble que, spontanément, un ministre ouvert qui veut aller dans la lignée du discours inaugural du 15 décembre à l'effet de gouverner avec transparence, pourrait dire spontanément: J'accorderai deux ou trois heures de discussions à deux groupes, ou une heure et demie par groupe. Je vous avoue... Soyez sans crainte, de ce côté-ci, nous allons être très compréhensifs face à toute démarche qui permettrait spontanément d'entendre des gens impliqués.

Je suis convaincu que le ministre ne trouvera pas en nous de la mesquinerie pour dire: Ce n'est pas pour un quart d'heure qu'on ne s'entendra pas. Voyons, qu'il se détrompe! Le ministre pourrait très bien, à ce stade-ci, m'indiquer, en tant que critique, un tant soit peu une volonté d'ouverture.

Une voix: Par les yeux.

M. Chevrette: Je lui ferais une proposition pour limiter dans le temps, s'il le faut. On n'est pas là pour l'empêcher de faire sa job. On est là par exemple... Il y a des gens

qui sont frustrés, qui sont fâchés du fait qu'on ne les ait pas associés. Au contraire, on est en train de les aider. Le ministre devrait comprendre cela.

Si on associait des groupes à un processus, je suis persuadé que le ministre y gagnerait. Il y gagnerait en crédibilité d'abord, j'en suis persuadé. Les professionnels du gouvernement diraient: Ce ministre est ouvert. Il nous a consultés. Il ne veut pas nous bousculer; il ne veut pas changer nos structures. Il n'a pas l'idée d'amoindrir nos droits éventuels sans nous en parler. Ce serait un geste de magnanimité et le ministre, je pense, en serait le premier gagnant. Il serait le premier à en retirer des bénéfices. Il ne serait même pas nécessaire qu'il remercie l'Opposition de lui avoir fait cette ouverture. On comprendrait qu'il l'a fait parce qu'il en est convaincu et non pas parce qu'il en a été forcé par une proposition, ici à l'Assemblée nationale.

Je sais que, bientôt, on devra ajourner nos travaux. Il aura deux heures entre dix-huit heures et vingt heures - j'espère que le ministre va réfléchir énormément à la proposition qu'on lui fait - pour permettre à ses conseillers - j'en vois quelques-uns qui viennent de temps à autre avec des petits papiers - de venir lui dire: On trouve, M. le ministre, que l'Opposition est constructive. Cela prend une ouverture d'esprit qui vous permettrait comme ministre de vous montrer complètement ouvert a des droits qui peuvent être mis en cause, à des groupes dont les droits peuvent être mis en cause. Il n'y a pas de honte à les entendre. Au contraire, il y a une fierté à vouloir dialoguer avec eux, à les rassurer au besoin, à expliciter des points. Cela se fait couramment. Un gouvernement de transparence qui, depuis le 15 mai, à chaque dépôt de projet de loi - je lui demanderais de se le rappeler... À chaque dépôt de projet de loi on a posé la question: Mais avez-vous l'intention de consulter? Mais non! Cela a été des non systématiques. On a gagné un oui. Il y a eu une révocation pour convoquer les gens de la commission scolaire du Nouveau-Québec, la semaine dernière. (17 h 45)

Une voix: Les artistes?

M. Chevrette: Les artistes, oui, mais ce n'est pas au regard d'un projet de loi spécifique. Quand ce sont des droits qu'on vient consigner dans un projet de loi qui change immédiatement la nature des droits ou qui, potentiellement, peut les changer, en tout cas, il n'y a pas de consultation. Tout cela m'apparaît un manque de transparence énorme. Surtout là où cela touche le droit d'association ou la reconnaissance des droits acquis par association. Cela m'apparaît sérieux, le fait que ce ne soit pas discuté, qu'on n'ait pas cru bon de consulter formellement, ouvertement, officiellement, comme le permet le règlement de l'Assemblée nationale. On peut le faire en tout temps comme commission parlementaire. Le leader aurait très bien pu - si nous nous étions entendus à l'avance - permettre des consultations préalables à l'étude article par article.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, il vous reste une minute.

M. Chevrette: Mais quand on nous dit... Il me reste une minute?

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Quand on nous oblige par la réglementation à véritablement obtenir ces consultations de force, à les arracher par voie de procédure parlementaire ou réglementaire, M. le Président, je ne trouve pas que c'est là une très grande transparence. Je ne trouve pas que c'est là faire preuve d'une très grande ouverture d'esprit. Je suis même surpris que le député de Hull n'accepte pas de consacrer quatre heures, par exemple, à des discussions ouvertes avec les représentants des salariés, les professionnels du gouvernement. On pourrait s'asseoir et comme parlementaires se partager une période de questions et de clarification afin de permettre à vos procureurs de donner leur sens à certains articles, de définir quelles sont les balises de l'article 7, de définir clairement ce que veut dire l'article 27 à ces gens parce qu'ils pourraient être impliqués, de leur dire jusqu'où peut aller le pouvoir discrétionnaire du ministre. Ce sont autant de questions que les salariés ont le droit de poser et ils ont le droit de savoir, eux qui, pour un bon nombre, ont été transférés depuis quelques années à cause des sociétés d'État et du mouvement de recul qu'on fait maintenant. Il serait impartant sur le plan strict des bonnes relations du travail, je crois, de faire en sorte qu'on leur offre cette possibilité.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Joliette.

M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: M. le Président, avant mon intervention, je veux m'assurer que...

Le Président (M. Lemieux): C'est dix minutes, M. le député de Dubuc, en vertu de l'article 209...

M. Desbiens: Dix minutes. Mais cela c'est sur la motion d'amendement. C'est cela?

Le Président (M. Lemieux): C'est sur la

motion d'amendement du député de Bertrand...

M. Desbiens: J'aurai droit à...

Le Président (M. Lemieux): ...relativement à la motion principale du député de Joliette.

M. Desbiens: J'aurais le droit de revenir sur la motion principale pour dix autres minutes?

Le Président (M. Lemieux): Non, non. M. le député de Dubuc, nous devons débattre préalablement de la motion d'amendement. Nous reviendrons effectivement par la suite, lorsque la mise aux voix aura été faite relativement à la motion d'amendement, sur la motion principale présentée par le député de Joliette et j'ai fait état tout à l'heure que le temps était gelé relativement à la motion principale.

Vous pouvez continuer.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Je vous remercie, M. le Président. Il me fait plaisir de participer, d'appuyer la motion de mon collègue, le député de Bertrand, et de le féliciter. Je vois le député de Sainte-Anne qui serait heureux de pouvoir féliciter mon collègue, le député de Bertrand, s'il était à ma place, d'avoir saisi l'importance de cette motion d'ajouter le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Je pense qu'il fait là la preuve de son expérience administrative. On sait que M. le député de Bertrand a été maire pendant plusieurs années, donc, il a eu...

M. Parent (Bertrand): Tout comme le ministre.

M. Desbiens: ...tout comme le ministre... C'est pour cela que je pense que le ministre - finalement - va accepter notre proposition. Il a donc eu beaucoup è traiter avec les syndicats. Je pense que la proposition d'amendement de mon collègue de Bertrand manifeste cette expérience qu'il a acquise comme administrateur public et aussi comme homme d'affaires. Il sait l'importance d'avoir des relations très transparentes et ouvertes avec les travailleurs qui ont è vivre de façon très précise...

Une voix: ...et les travailleuses.

M. Desbiens: ...et les travailleuses également qui ont à vivre... Je vous l'avais dit, M. le Président, que le député de Sainte-Anne avait envie de nous appuyer.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Desbiens: Pour assurer donc des relations du travail harmonieuses... L'objectif, cela a déjà été soulevé par mes collègues. J'espère que les arguments que j'ajouterai ici finiront par convaincre le ministre que c'est important pour lui et pour la bonne administration du ministère qu'il entend mettre sur pied pour assurer le Service des achats du gouvernement. Évidemment, ce n'est pas nous qui avons décidé de présenter ce projet de loi. Le gouvernement précédent croyait qu'il y avait des formules différentes peut-être plus efficaces. Ce gouvernement décide, c'est son droit, que cela prend une structure différente pour s'occuper de tous les services des achats et approvisionnements du gouvernement. Dans son esprit, c'est sans doute que ce sera mieux, qu'il y aura une meilleure transparence, un meilleur contrôle, j'imagine. Les principes de ce projet de loi, comme j'ai eu l'occasion de le mentionner déjà, ne nous ont pas été rendus très apparents, mais c'est un mandat, c'est le choix du gouvernement actuel de procéder de la façon qu'il nous indique par la création de ce ministère.

Une fois que le gouvernement a décidé d'aller dans ce sens par la présentation d'un projet de loi, il reste aux députés des deux côtés de la Chambre, et particulièrement de l'Opposition je crois, c'est plus facile, semble-t-il, donc d'intervenir pour essayer de faire ressortir les points qui pourraient accrocher et finalement, au fond, nuire à l'action que le gouvernement lui-même veut entreprendre. Je pense que ce sont les personnes elles-mêmes, hommes ou femmes, qui auront à exercer et à travailler dans ce ministère qui vont être les premiers touchés par ces transferts et évidemment ceux de la SIQ, je les ai à l'esprit. La complexité des conventions collectives aujourd'hui, le ministre en est conscient, peut-être que lui-même ou ses fonctionnaires qui ont préparé ce projet de loi n'ont peut-être pas vu que par certaines façons prévues par le projet de loi il pourrait y avoir des problèmes futurs quant aux relations du travail avec ces professionnels du gouvernement du Québec. Si on pouvait, pendant quelques minutes au moins, les écouter, ils pourraient probablement permettre d'apporter au ministre l'éclairage sur des points qu'eux auront décelés, parce que, étant appelés à vivre ce qui va se passer, ces personnes ont regardé le projet de loi et ont à l'esprit les difficultés qu'elles pourraient rencontrer en tant que travailleurs professionnels à l'intérieur du prochain ministère des Approvisionnements. C'est important et le ministre des Approvisionnements en est sûrement conscient. Il a un exemple sous les yeux, il en a été question à la période de questions,

cet après-midi, concernant le Manoir Richelieu. On voit ce que cela peut donner de se lancer dans des opérations comme dans le cas présent, mais c'était la vente du Manoir Richelieu, sans s'assurer auparavant qu'il y ait au moins une relation établie entre les syndiqués et les nouveaux propriétaires. Dans le cas présent évidemment, c'est le Syndicat canadien de la fonction publique et le Syndicat de professionnels du gouvernement d'une façon plus particulière dans la motion d'amendement. Il est donc important, et le ministre en est sans doute conscient pour que son ministère fonctionne. Je suis convaincu qu'il a à coeur que ce soit le meilleur ministère et pour s'assurer que ce soit ainsi, je ne doute pas qu'il soit conscient de la nécessité de relations bien établies, bien suivies avec ses futurs professionnels, ses futurs fonctionnaires. La meilleure façon pour y arriver, je pense que c'est sans doute, avant de tout figer, de tout fixer cela dans une loi, qu'au moins on entende ces gens-là nous dire et nous mettre en garde, peut-être, sur certains aspects qui pourraient, à l'avenir, empêcher que son ministère atteigne la plus grande efficacité possible. Tout cela est aussi relié; on parle souvent de productivité. C'est un terme qui a été très à la mode et qui doit aussi être une réalité. Pour s'assurer que son ministère, que tous ceux et celles qui auront à travailler en collaboration avec lui pour que son ministère puisse fournir aux Québécois et aux Québécoises qui font appel aux services de ce ministère-là, puissent donner un rendement maximum, je pense qu'au départ, il est absolument important que le ministre puisse connaître la pensée exacte et certains aspects qui auraient pu être oubliés par ceux et celles qui ont préparé le projet de loi et qui lui permettraient, une fois que le projet de loi sera voté, accepté par l'Assemblée nationale, donc, en toute tranquillité d'esprit de pouvoir travailler à la mise en place du chef-d'oeuvre qu'il entend nous produire. Cela permettrait ainsi aux citoyens et citoyennes du Québec qui seront touchés par ce projet de loi d'être en mesure de profiter pleinement des services que le ministre, de toute évidence, veut donner ainsi à la collectivité québécoise. Je lance ce dernier appel au ministre de profiter de l'offre, de l'ouverture qu'on lui fait d'aller consulter, comme cela, les travailleurs et travailleuses impliqués, afin d'éviter qu'il ne se retrouve un peu - même si ce n'est pas au gouvernement, c'est un exemple quand même relié, ce que je mentionnais tantôt, celui du Manoir Richelieu - avec des conflits avant même que son ministère ait pu commencer à travailler aux fins exactes pour lesquelles il est mis sur pied.

Vu la période qu'il nous reste, comme le mentionnait tantôt mon collègue, critique de l'Opposition, le député de Joliette, j'espère par ces derniers arguments avoir convaincu le ministre. Peut-être qu'à la période du souper, il pourra communiquer avec les responsables du syndicat de professionnels et qu'on pourra les recevoir peut-être même dès ce soir, si cela fait l'affaire du ministre. Cela accélérerait les choses. Cela nous permettrait de pouvoir plus rapidement passer à...

Le Président (M. Lemieux): Trente secondes, s'il vous plaît.

M. Desbiens: ...d'autres choses, à d'autres articles du projet de loi. C'est ce que je recommande au ministre et j'espère que le souper va lui apporter un temps de réflexion...

Le Président (M. Lemieux): Dix secondes.

M. Desbiens: ...qui lui permettra d'accepter notre proposition. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Nous suspendons pour reprendre les travaux à 20 heures.

M. Polak: On a un caucus qui débute à 18 h 15. Vraiment là, je voudrais demander si, par consentement, on pourrait obtenir qu'on recommence à 20 h 15. Si vous voulez qu'on commence à temps, n'y a-t-il moyen qu'on commence à 20 h 15, afin que tout le monde puisse prendre un sandwich. Il faut vivre aussi.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Chevrette: On pourrait aller à 20 h 30 s'il le faut pour le motif suivant: Cela fait plusieurs fois que cette commission siège et que le ministre et moi-même sommes les deux seules personnes ici. Ceci sans vouloir redire. Le ministre peut en témoigner et vous de même. Si on dit jusqu'à 20 h 30, on commence à 20 h 30 par contre. Ne nous faites pas "niaiser" quinze minutes pour rien!

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement pour 20 h 30?

Des voix: 20 h 30.

Le Président (M. Lemieux): II y a consentement pour 20 h 30. La commission du budget et de l'administration suspend ses travaux jusqu'à 20 h 30, pour l'étude du projet de loi 68.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 36)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames, messieurs, la commission du budget et de l'administration reprend ses travaux pour l'étude du projet de loi 68.

M. Chevrette: C'est quasiment une indécence, M. le Président.

M. Filion: Un, deux, trois, quatre, cinq, six.

M. Chevrette: M. le Président, je crois que vous devez reconnaître qu'il y a un vote à prendre à ce stade-ci, puisque, si j'ai bien compris, tout le monde s'est exprimé de notre côté. À moins qu'il n'y en ait du côté du gouvernement qui veuillent s'exprimer.

Le Président (M. Lemieux): Sur la motion d'amendement, M. le ministre?

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: M. le Président, je pourrais sûrement prendre quelques minutes, pour le bénéfice de mes collègues de l'Opposition, d'autant plus qu'on a présenté une motion qui a été suivie d'un amendement où on m'a demandé à plusieurs reprises d'avoir la gentillesse, l'amabilité de tenir une commission parlementaire qui permettrait au Syndicat canadien de la fonction publique de se faire entendre. Je suis très sensible aux demandes de l'Opposition, d'autant plus sensible que j'ai écouté, avec toute l'attention que cela commandait, les interventions qu'on a faites de part et d'autre. Par contre, j'ai dû me rendre à l'évidence que le temps qu'a pris l'Opposition cet après-midi pour discourir de cette motion aurait sûrement pu être consacré à faire des consultations. Nous sommes d'autant plus sensibles que nous avons reçu, au cours des derniers jours, certaines demandes de la part d'organismes qui nous ont sensibilisés et je remarque que l'Opposition a été aussi sensibilisée sur les mêmes points.

Nous aurons sûrement l'occasion, quand le temps viendra, quand nous étudierons l'article 27, entre autres, qui a été l'objet de la discussion cet après-midi, de traiter de cet article. 27.2 qui parle des "membres du personnel de la Société immobilière du Québec que désigne le gouvernement". Advenant le cas où le gouvernement désignerait certains employés, il y a un élément sur lequel je veux déjà rassurer ces employés. Dans l'éventualité où il y a certains acquis que l'on ne retrouverait pas dans la fonction publique actuelle, nous prendrons les mesures nécessaires afin que les acquis soient respectés pour ne pas brimer ces travailleurs ou travailleuses qui sont déjà à l'emploi de la Société immobilière du Québec et qui pourraient, dans certains cas, avoir des avantages. Je dis dans certains cas avoir des avantages, je n'en ai pas fait l'analyse complète actuellement, mais je veux les rassurer et je veux assurer â l'Opposition que les commentaires qu'elle a fait ne tombent pas dans l'oreille d'un sourd. En temps opportun, nous apporterons, s'il y a Heu, les correctifs nécessaires pour assurer à ces travailleurs et travailleuses que leurs droits et leurs privilèges ne seront pas brimés si le gouvernement décidait d'affecter certains d'entre eux au ministère des Approvisionnements et Services.

D'autre part, j'ai trouvé un peu curieux les propos tenus par les membres de l'Opposition. Un peu moins curieux en ce qui concerne les nouveaux membres de cette Assemblée nationale, mais un peu plus curieux en ce qui concerne les membres de l'Assemblée nationale de l'ex-gouvernement ou du gouvernement précédent qui, au cours des dernières années, auraient sûrement pu, è l'occasion, consulter les travailleurs et les travailleuses de la fonction publique, entre autres. Je me souviens qu'en 1982, quand on a imposé à la fonction publique près de 85 000 pages de décrets, on a dû discourir pendant plusieurs heures afin de tenter d'obliger le gouvernement à parler à ses employés. Malheureusement, le gouvernement du temps avait cru bon d'imposer à sa fonction publique des décrets.

Sans revenir sur un sujet qui est traité plus souvent qu'autrement depuis les dernières semaines, on se souviendra de la fameuse loi 37 qui avait imposé une fusion forcée entre les villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Simplement, du point de vue d'une certaine réflexion, si le même gouvernement, dans le temps, avait jugé opportun de consulter les gens par les moyens du bord, c'est-à-dire par un référendum, on aurait pu éviter toutes les contraintes que nous avons vécues par la suite.

Je considère que l'Opposition est peut-être mal placée pour nous faire des recommandations de la sorte. Par contre, on a pu découvrir par nous-mêmes que l'article 27... Afin d'éviter que ces employés ne puissent se sentir brimés et de les rassurer en ce qui concerne les acquis, nous nous engageons, d'ici l'étude de cet article, à en faire l'analyse. Ceci nous permettra, s'il y a lieu, d'apporter des recommandations qui pourraient se retrouver à l'intérieur du projet de loi sous forme d'amendements à l'article même.

En terminant, je voudrais demander à l'Opposition non pas de se hâter car elle a le privilège et le droit de poser toutes les questions pertinentes concernant le projet de loi 68. Personnellement, je suis disposé à écouter chacun des points qui seront

soulevés; je vous avoue qu'il y a certains points que je trouve intéressants parce que cela fait une bonne discussion. Par contre, je vous dis que vous ne me laissez pas grand temps pour réagir et pour vous répondre parce que vous vous remplacez mutuellement. Alors, on ne peut pas embarquer dans la discussion, mais sans pour autant ne pas vous trouver intéressants sur certains points. Je suis prêt à vous écouter comme cela. Je pense que c'est intéressant. Cela nous permet de faire le trajet, aller sinon retour. Si on est disposés à prendre le vote sur l'amendement à la motion, je me plie volontiers à la présidence.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, question de règlement.

M. Chevrette: Je veux bien que le ministre ait les arguments qu'il voudra; mais, quand il vient dire qu'on ne lui donne pas de chance et que le temps qu'on a pris aurait pu servir à des consultations, je m'excuse, mais il n'y a rien qui empêche un membre de l'Opposition, par alternance, en fonction de nos règlements, de demander la parole quand vient son tour et d'accepter spontanément une proposition. Je peux vous garantir qu'à ce moment-là cet argument ne tiendrait pas. Si le ministre avait, immédiatement après ma proposition, dit: On prend ce temps-là immédiatement pour l'entendre, on aurait dit "oui" spontanément. Que le ministre se serve de cet argument pour dire qu'on a pris le temps de la consultation, c'est bien parce qu'il ne nous a pas dit dès la première minute qu'il était prêt à consulter.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, cela va. Ce n'est pas une question de règlement, c'est plutôt une remarque. M. le député de Joliette, vous savez cela tout aussi bien que moi. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Sur une question de règlement...

Le Président (M. Lemieux): Quel article du règlement, M. le député de Bertrand?

M. Parent (Bertrand): L'article qui dit que le ministre peut intervenir après chacune de nos interventions. C'est juste pour rappeler...

Le Président (M. Lemieux): C'est l'article 246. Lors de l'étude détaillée, le ministre a cinq minutes pour intervenir après chaque intervention. Nous ne sommes pas à l'étude détaillée du projet de loi; nous en sommes encore sur le débat si je comprends bien de la motion qui a été présentée par vous-même, M. le député de Bertrand. Nous n'en sommes pas sur la motion principale, mais sur l'amendement à la motion principale.

M. Chevrette: M. le Président, on est maître de toute notre procédure. (20 h 45)

Le Président (M. Lemieux): Oui, en vertu de l'article 155.

M. Chevrette: J'annonce que je donnerai mon consentement au ministre à chaque intervention pour un droit de réplique.

M. Rocheleau: M. le Président, et selon les discussions qui seront tenues, si je peux apporter à cette commission certains commentaires, si je le juge opportun, il me fera plaisir de le faire. Je remercie l'Opposition pour son ouverture.

M. Parent (Bertrand): M. le Président, mon intervention était en ce sens-là pour qu'on trouve un moyen. On a posé beaucoup de questions avec nos amendements. On peut aller loin comme cela, sauf que, si le ministre a l'intention d'intervenir, il serait intéressant qu'il nous face signe.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, j'aimerais vous faire remarquer relativement à l'article 155 que toute commission peut, du consentement unanime de ses membres, déroger aux règles relatives au temps de parole, mais pas à l'ensemble des règles de procédure. D'accord, on s'entend.

M. Chevrette: M. le Président, on ne vous demandera pas de faire quelque chose d'illégal ici. Voyons, scandale!

M. Polak: Passons au vote.

Le Président (M. Lemieux): Non, M. le député de Joliette. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion d'amendement présentée par le député de Bertrand?

M. Bélisle: Le sous-amendement, M. le Président ou l'amendement?

Le Président (M. Lemieux): C'est sur l'amendement comme tel qui a été présenté à la motion principale. La motion principale a été présentée par le député de Joliette.

M. Polak: C'est clair.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il n'y a pas d'autres interventions. Alors, nous allons procéder à la mise aux voix de l'amendement avant de revenir à la motion principale.

M. Chevrette: Je vous demande un vote par appel nominal.

Le Président (M. Lemieux): Vous me permettez de lire l'amendement?

M. Chevrette: Oui, mais je vous demande un vote par appel nominal après.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le député de Joliette. "Que la commission avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique".

L'amendement présenté par le député de Bertrand se lit comme suit: "Ainsi que le Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec".

Vote par appel nominal. M. le greffier, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: M. Bélisle (Mille-Îles)? M. Bélisle: Contre.

Le Secrétaire: M. Brouillette (Champlain)?

Une voix: Malade!

Le Secrétaire: M. Chagnon (Saint-Louis)?

Une voix: Malade!

Le Secrétaire: M. Després (Limoilou)?

M. Després: Contre.

Le Secrétaire: M. Gobé (Lafontaine)?

M. Gobé: Contre.

Le Secrétaire: Mme Hovington (Matane)?

Mme Hovington: Contre.

Le Secrétaire: M. Lemieux (Vanier)?

Le Président (M. Lemieux): Abstention.

Le Secrétaire: M. Polak (Sainte-Anne)?

M. Polak: Contre.

Le Secrétaire: M. Poulin (Chauveau)?

M. Poulin: Contre.

Le Secrétaire: M. Séguin (Montmorency)?

M. Séguin: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Rocheleau (Hull)?

M. Rocheleau: Contre.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?

M. Chevrette: II est en haut.

Une voix: II est malade.

Le Secrétaire: M. Parent (Bertrand)?

M. Parent (Bertrand): Pour.

Le Secrétaire: M. Filion (Taillon)?

M. Filion: pour.

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Chevrette (Joliette)?

M. Chevrette: Pour.

Le Président (M. Lemieux): Les résultats relativement à l'amendement présenté par le député de Bertrand à la motion principale du député de Joliette sont les suivants: contre: 9; pour: 4; abstentions: 1. L'amendement à la motion principale du député de Joliette est donc rejeté. M. le député de Taillon.

M. Filion: À ce moment-ci, M. le Président, je voudrais donc intervenir sur la motion principale.

Le Président (M. Lemieux): Sur la motion principale du député de Joliette.

M. Filion: Je dois comprendre que mon temps de parole est de dix minutes.

Le Président (M. Lemieux): Votre temps de parole est de dix minutes et, en vertu de l'article 209, premier paragraphe, vous devez vous exprimer en une seule fois sur la motion principale.

M. Filion: Je pensais que vous étiez pour dire en une seule phrase.

Sur la motion principale, M. le Président, je voudrais dire ceci. D'abord, j'ai pris bonne note des propos du ministre tantôt qui nous a dit: Écoutez, l'article 27 soulève des problèmes, nous en sommes conscients. Nous avons pris, quant à nous, une excellente note de ce qu'il a dit, de son engagement, je pense qu'on peut l'appeler ainsi. Nous allons faire en sorte que les droits et privilèges des travailleurs affectés par une réorganisation administrative qui est consacrée dans le projet de loi 27 ne soient pas affectés par cette fusion, cette réorganisation et, donc, que ces droits et privilèges soient protégés.

À ce moment-ci, j'ai le goût de faire la remarque suivante au ministre. La meilleure façon de s'assurer de la protection des droits accumulés, dans certains cas, au fil des ans - parce qu'on peut parler de certains droits acquis quand on parle de certains cas individuels, mais quand même des droits collectifs ou individuels, des privilèges collectifs ou individuels des travailleurs affectés par l'article 27 du projet de loi 68 - c'est bel et bien d'entendre ces gens-là pour voir si leur analyse de la situation et des conséquences juridiques est la même que celle de ses conseillers, autant ceux de son cabinet et, je l'espère, ceux de son ministère. J'espère que, sur une question aussi importante que celle-là, le ministre est entouré de toute part, si l'on veut.

J'ai eu l'occasion de le mentionner cet après-midi des conflits de travail importants sont nés, au Québec, à cause d'un point-virgule dans un article de loi ou à cause d'une mauvaise rédaction d'un article de loi ou d'un règlement. Dans ce cas-ci, quand on lit l'article 27 - je ne veux pas utiliser le peu de temps que vous me laissez pour le relire, car je suis convaincu que le ministre le connaît bien - sur le plan juridique, la formulation employée risque effectivement d'aller plus loin que ce qu'on appelle, entre guillemets, "l'intention du législateur". Même si vous fournissez, ce soir, les engagements que vous avez exprimés tantôt, avec - je n'en doute pas - la plus sincère bonne foi, il demeure que ce qui compte une fois que le projet de loi est adopté, c'est le texte de loi. À part cela, il ne nous appartient plus, pas plus qu'il va vous appartenir ou qu'il va appartenir aux membres de l'Assemblée nationale. Il appartiendra aux tribunaux de l'interpréter ou aux arbitres de conventions collectives, dans certains cas. En quelque sorte, une fois le projet de loi adopté, le texte va nous échapper. Il va échapper au ministre et à l'Assemblée nationale, une fois l'adoption du projet de loi.

Dans ce sens, je pense qu'on ne prendra jamais suffisamment de précautions ou de moyens de prévention, on ne sera jamais suffisamment prudents au point où l'on doive écarter une mesure comme celle que nous suggérons, à savoir d'entendre en commission parlementaire les représentants du Syndicat canadien de la fonction publique puisque, en l'espèce, on traite d'eux. Ils ont l'expertise. Ils connaissent bien leurs conditions de travail. Ils connaissent bien les textes qui les gouvernent, qui les régissent. Mieux que nous.

En particulier, quand on pense aux permanents syndicaux du Syndicat canadien de la fonction publique, c'est un syndicat qui a une longue tradition, d'ailleurs, de syndicalisme intelligent, pratique et pragmatique. Les permanents syndicaux à l'intérieur de ce syndicat, les représentants de ce syndicat ne pourraient que venir enrichir cette préoccupation dont vous parliez tantôt quand vous disiez que vous vouliez être sûr qu'il n'y ait pas de dommages. Je pense que, si on pousse un peu plus loin l'ouverture d'esprit dont le ministre parlait tantôt, on arrive à la conclusion qu'on va prendre le temps suffisant pour entendre ces gens en commission parlementaire. Comme le mentionnait si bien le leader de l'Opposition, le député de Joliette: Ce n'est pas une affaire complexe. Cela peut s'organiser rapidement.

Encore une fois, on oublie souvent les gens qui sont impliqués dans un jeu de blocs. Tantôt, vous faisiez allusion à la théorie des ensembles; quant à moi, je fais souvent allusion au jeu de blocs. Le gouvernement libéral se livre, depuis six mois, à des jeux de blocs. On fusionne le Comité de la protection de la jeunesse avec la Commission des droits de la personne. On fusionne la Société immobilière du Québec...

M. Potak: La pertinence!

M. Filion: ...avec le Service des achats du gouvernement et avec la Régie des installations olympiques. M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, en vertu de l'article 36 du règlement, si vous voulez interrompre un des parlementaires, voulez-vous soulever une question de règlement, s'il vous plaît! M. le député de Taillon, vous pouvez continuer. J'ai compris, M. le député de Sainte-Anne, votre intervention. M. le député de Taillon, s'il vous plaît.

M. Filions M. le Président, c'est curieux, je n'ai pas entendu le député de Sainte-Anne intervenir.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon, s'il vous plaît!

M. Filion; Quand le ministre...

Le Président (M. Lemieux): Vous risquez de susciter des débats, M. le député de Taillon.

M. Filion: Les débats sont déjà suscités

par l'intervention du député de Sainte-Anne. Donc, je faisais allusion à ces jeux de blocs auquel se livre le gouvernement libéral depuis six mois dans plusieurs secteurs, mais, dans ces jeux de blocs, on oublie le monde, le personnel et ceux qui vivent quotidiennement les situations.

Encore une fois, aujourd'hui, le ministre dit: C'est dangereux, puis ce n'est pas clair et on va y faire attention. Mais le meilleur moyen, si on veut être près de ce monde, c'est de l'entendre. Audi alteram partem, c'est un principe de justice. Alors, quand on adopte une loi, on rend nécessairement une grande justice, parce que cela devient une loi. À ce moment-là, on ne devrait pas avoir peur d'entendre les parties. Or, systématiquement, M. le Président, le gouvernement du Parti libéral depuis six mois, refuse d'entendre des gens qui sont impliqués comme s'il avait peur du monde. 3e ne crois pas que le ministre ait peur de rencontrer le Syndicat canadien de la fonction publique. Après tout, cela n'est pas une bombe à retardement. 11 y a peut-être moyen de s'entendre à partir du moment où la volonté ministérielle est clairement exprimée, mais au moins qu'on l'écoute, que les membres de cette commission aient la chance de l'écouter. On a fait allusion tantôt aux conversations que peut-être votre personnel a eues avec ces gens-là, que le député de Joliette a eues avec ces gens-là et que moi aussi j'ai eues avec une personne d'un des groupes mentionnés par votre projet de loi, qui étaient inquiets sur le plan des relations du travail. Mais ceux qui décident, ce n'est pas vous et moi. Ce n'est pas à l'exécutif, c'est au législatif qu'on demande d'adopter une loi.

Les membres de cette commission à qui on vient de déférer une projet de loi ne sont pas là uniquement pour jouer des rôles, je l'espère de votre côté, et approuver automatiquement tout ce qui est issu de l'exécutif. Je suis convaincu que tous les membres de la commission partagent notre préoccupation dans ce sens-là et aimeraient entendre les gens pour que l'on puisse avoir leur point de vue, leurs lumières.

Vous m'indiquez qu'il reste une minute, M. le Président, et, à ce moment-ci, encore une fois - juste pour terminer là-dessus avant de présenter une motion d'amendement à la motion pour consultation particulière qui a déjà été faite - ce n'est pas une affaire qui est longue et le ministre devrait acquiescer à notre demande.

Motion d'amendement proposant d'entendre aussi le Directeur général des élections

M. Claude Filion

À ce moment-ci, j'aimerais déposer la motion d'amendement suivante. La motion pour consultation particulière serait amendée en ajoutant à la fin les termes suivants: "ainsi que le Directeur général des élections." Je vais avoir la chance d'expliquer pourquoi au député de Lafontaine. Si vous jugez ma motion recevable...

Le Président (M. Lemieux): Oui, justement, parce que le Directeur général des élections...

M. Bélisle: Quel est le libellé de la motion, M. le Président?

Le Président (M. Lemieux): Un instant, s'il vous plaît!

M. Filion: Si vous voulez m'entendre, cela me fera plaisir.

Le Président (M. Lemieux): J'aimerais vous entendre sur la recevabilité de la motion.

M. Filion: M. le Président, je veux attirer votre attention sur l'article 9 du projet de loi 68 que je lis avec vous.

Le Président (M. Lemieux): Cela va.

M. Filion: "Pour l'application de la présente loi - je vous réfère particulièrement aux articles 7 et 8 pour en connaître l'impact - sont assimilés à des organismes publics: le lieutenant-gouverneur, l'Assemblée nationale, un organisme dont celle-ci nomme les membres et une personne qu'elle désigne pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle dirige." Le Directeur général des élections est une personne nommée par l'Assemblée nationale pour exercer les fonctions que l'on connaît et le Directeur général des élections est affecté directement par le projet de loi 68. Uniquement sur la recevabilité. (21 heures)

Le Président CM. Lemieux): M. le député de Mille-Îles, sur la motion de recevabilité, non pas sur le fond.

M. Bélisle: M. le Président, je vais attendre pour prendre mon droit de parole sur le fond. Je vous laisse décider.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Mille-Îles.

M. Polak: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, sur la recevabilité?

M. Polak: ...sur la recevabilité.

Le Président (M. Lemieux): Sur la recevabilité, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, je soutiens que ce sous-amendement est totalement irrecevable. Je pense que ce serait intéressant si les électeurs de Taillon et d'autres comtés de l'Opposition lisaient un peu ce qui a été dit depuis cet après-midi. Cet amendement est seulement fait dans le but de retarder les travaux normaux de cette commission. Nous n'avons même pas encore étudié l'article 1 du projet de loi. Si vous recevez cette motion, vous jouez le jeu d'une...

M. Filion: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon, sur une question de règlement parce que j'ai déjà à juger de la recevabilité d'une motion. Effectivement, je pourrais interrompre le député...

M. Chevrette: Ce n'est pas sur la question de règlement. Est-ce que vous pouvez permettre de plaider sur les intentions de celui qui propose? C'est ce que fait le député de Sainte-Anne.

Le Président (M. Lemieux): J'allais rendre une décision à cet effet. Il me semble clair, et c'est indiqué dans un texte que j'ai devant moi, qu'une motion d'amendement qui est présentée, on ne peut pas la juger irrecevable sur des prétentions ou des suppositions. C'est clair pour moi. Mais peut-être que le député de Sainte-Anne a autre chose à ajouter.

M. Polak: M. le Président, j'ai dit et je répète qu'accepter une telle motion, ce serait jouer le jeu de l'Opposition qui fait de l'obstruction continuelle. Je voulais faire cette remarque parce que je voudrais que ce soit bien enregistré et que tout le monde sache que, depuis qu'on a commencé ces travaux, c'est du non-sens pur, ils sont ici pour occuper le temps. S'ils veulent prendre du temps, pourquoi on ne suspendrait pas nos débats jusqu'à 23 heures? On va vous donner encore deux heures. Je vais faire quelques appels téléphoniques, étudier un peu des affaires plus intéressantes et peut-être que tout le monde pourrait en bénéficier. Si vous cherchez cela, on peut vous l'accorder, il n'y a pas de problème, j'en suis certain, parce que, jusqu'à maintenant, ce que vous avez dit, pour ceux qui nous ont élus, c'est une déception totale.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, cela va sur votre question de règlement. J'aimerais simplement ajouter ceci: Les raisons pour lesquelles une motion d'amendement est présentée n'ont pas è être prises en considération pour juger de sa recevabilité. Je pense que Beauchesne est très clair sur cet aspect. Maintenant, l'amendement est jugé recevable.

M. Filion: Je vous remercie, M. le Président.

M. Chevrette: Une demande d'information avant ou de directive. Est-ce que le député proposeur de l'amendement doit prendre immédiatement ses trente minutes ou s'il peut laisser d'autres collègues parler dix minutes et, par la suite, prendre ses trente minutes?

M. Filion: Dix minutes sur la...

M. Chevrette: C'est trente minutes pour celui qui propose l'amendement.

Le Président (M. Lemieux): Si je lis, M. le député de Joliette, l'article 209, l'auteur de la motion aurait à prendre la parole pour trente minutes immédiatement. Ceci est en vertu de l'article 209, paragraphe 2.

M. Filion: M. le Président, pour le bénéfice de l'ensemble des membres de cette commission, je voudrais expliquer l'importance et les conséquences du projet de loi pour le Directeur général des élections.

D'abord, je pense qu'il faut voir l'article 9 dans l'ensemble du projet de loi. Plus particulièrement, en ce qui concerne l'article 7, on l'a vu, le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et de services pour les ministères. Il peut adopter les règlements qu'il veut pour donner effet à ces politiques.

À l'article 8, on a les fonctions et pouvoirs du ministre. J'attire votre attention sur les paragraphes suivants: 1° en ce qui concerne les besoins immobiliers des ministères et organismes: 2° en ce qui concerne l'inventaire; 3° cela est très important, "prendre les mesures nécessaires pour l'obtention du meilleur rapport qualité/coût lors de l'acquisition ou de la fourniture de biens et de services;" 4° effectuer ou faire effectuer des recherches; "5 s'acquitter des autres devoirs que lui assigne le gouvernement."

Par exemple, retenons le paragraphe 3 de l'article 8 pour les fins de ma démonstration. À l'article 9, on assimile à des organismes publics une certaine catégorie de personnes dont le lieutenant-gouverneur dont l'autonomie, je pense, n'a pas besoin d'être rappelée, l'Assemblée nationale elle-même - l'Assemblée nationale plus le lieutenant-gouverneur égalent le pouvoir législatif qui doit être indépendant du pouvoir exécutif - et, également, un

organisme dont l'Assemblée nationale nomme les membres et une personne qu'elle désigne. J'en énumère quelques-uns, de mémoire: les membres de la Commission des droits de la personne, le Bureau du Directeur général des élections dont il est question principalement dans ma motion, le Bureau du Protecteur du citoyen - sauf erreur, ce dernier est nommé par l'Assemblée nationale - et le jurisconsulte de l'Assemblée nationale et non pas du gouvernement. Alors, il s'agit d'organismes ou de personnes dont, par définition, les fonctions exigent la plus stricte neutralité, la plus stricte indépendance, la plus stricte autonomie. On n'a pas besoin de réfléchir longtemps. Prenons le cas de ce qui est contenu dans ma motion d'amendement. Si on parle, par exemple, du Directeur général des élections, je pense bien que je n'ai pas besoin d'argumenter longtemps pour que l'on comprenne rapidement autour de cette table que celui-ci doit être parfaitement indépendant.

Or, ce que vient faire le projet de loi 68 présenté par le ministre, il vient faire dépendre ces gens du ministre des Approvisionnements et de son futur ministère qui va être créé lors de l'adoption du projet de loi, pour l'obtention des biens et des services dont Ils pourraient avoir besoin dans l'exécution de leurs fonctions. Je pense que cela clôt la démonstration peut-être un peu théorique de mon point de vue, mais je vais donner un exemple concret. Supposons, M. le Président, qu'on est à quelque deux mois des élections ou même que les brefs ont été émis, que le Directeur général des élections se retrouve dans une situation où il a besoin, comme il en a eu besoin au cours des dernières élections, d'un ensemble d'avis juridiques. En l'espèce, l'exemple que j'ai à l'esprit de la dernière campagne électorale, c'était toute la question du débat des chefs, vous vous en souviendrez. Est-ce que c'était conforme ou non à la Loi électorale et à l'ensemble des lois qui sont sous la juridiction du Directeur général des élections? Or, si le projet de loi était adopté tel quel, cela aurait comme conséquence de faire en sorte que le Directeur général des élections dépendrait du pouvoir exécutif pour aller chercher les biens, dans ce cas-ci, les avis, plutôt un service professionnel dont il aurait besoin dans l'exécution de sa tâche. On peut en supposer une infinité d'autres. Par exemple, le Directeur général des élections peut avoir besoin non pas d'avis juridiques, mais de faire imprimer une série supplémentaire de bulletins de vote pour toutes les circonscriptions électorales parce que, en ce qui concerne l'impression principale, il y a eu des problèmes. À ce moment-là, il serait obligé de s'adresser au ministre qui représente le pouvoir exécutif pour mener à bien son mandat électoral, ses fonctions électorales.

Il n'y a aucun doute dans mon esprit, M. le Président - je ne sais pas si j'ai convaincu le député de Hull et ministre -que le Directeur général des élections est directement concerné par ce projet de loi qui peut affecter ses fonctions. À partir de ce moment, il reste à se poser la question suivante: Est-ce que, M. le ministre, vous devez accepter cette suggestion, ainsi que les membres du côté ministériel, que nous entendions en commission parlementaire, ici, à l'occasion de l'étude de ce projet de loi, le Directeur général des élections pour qu'il vienne nous apporter son opinion, son avis?

Encore une fois, le Directeur général des élections, c'est un personnage qui doit être bardé contre toute influence. Il doit être protégé contre toute tentative ou même semblant de tentative par l'exécutif de venir jouer dans ses plates-bandes. Les tentations peuvent être grandes, M. le Président, de se servir, par exemple, d'une demande de contrat qu'on laisse traîner un petit peu. C'est par le Directeur générai des élections, il a besoin de quelque chose, on peut le laisser traîner un petit peu. On peut lui serrer la vis sur certaines choses. On peut se servir des règlements qui, on le sait, sont sans limite pour arriver à lui compliquer un petit peu l'existence.

Généralement, d'ailleurs, le Directeur général des élections doit fonctionner à moult reprises dans des situations d'urgence, dans des situations où il n'a pas le temps de consulter Pierre, Jean, Jacques ou de consulter le troisième sous-chef du ministère. Il doit prendre ses décisions rapidement pour le bien-être de notre démocratie parce que c'est à cela qu'il est affecté directement. Il est chargé de faire en sorte que nos règles démocratiques jouent pleinement et jouent librement, sans intervention de l'exécutif.

Or, par les combinaisons des articles 7, 8, et 9, je pense avoir démontré aux membres de cette commission qu'il existe un danger réel d'empiétement sur le travail et les fonctions du Directeur général des élections. À ce moment-là, une convocation en commission parlementaire peut se faire rapidement, encore une fois. Le Directeur général des élections - je le sais, on l'a reçu à plusieurs reprises à la commission des institutions - est un homme qui comprend que, dans certains cas, il doit donner son opinion à des commissions parlementaires. Il vient à plusieurs reprises au cours de l'année. Je suis convaincu qu'il se ferait un devoir d'accepter notre invitation, l'invitation des membres de cette commission pour nous faire part des conséquences, quant à lui, de l'adoption de l'article 9 qui ne serait pas modifié.

C'est bien sûr, M. le Président, que ma motion d'amendement sous-tend un peu une opinion. Mais je pense que cela serait anti-

réglementaire pour moi que d'aborder cela ailleurs que dans ma motion principale. Une opinion que le ministre devine: pourquoi assujettir des organismes dont l'Assemblée nationale a jugé l'importance tellement grande qu'on les a mis dans une classe à part? Pourquoi aller, par le biais du projet de loi 58, assujettir ces gens-là à une loi et à une réglementation inconnue pour le moment? C'est une réglementation dont la seule chose connue est: il n'y a pas de limite; de A à Z, on va réglementer. (21 h 15)

M. le Président, dans le cas qui nous préoccupe, le Directeur général des élections doit toujours être au-dessus des mêlées. Son devoir d'impartialité, son devoir de se situer au-dessus des mêlées en fait un interlocuteur de premier choix pour les membres de cette commission. Il faudrait qu'il vienne lui-même nous exposer... Parce que les cas que je donnais tantôt sont des exemples issus de mon imagination, mais je pense qu'ils coïncident avec la réalité. Peut-être qu'il en a d'autres, le Directeur général des élections. Peut-être qu'il y a d'autres parties du projet de loi qui lui causeraient des embêtements susceptibles de faire dévier son mandat principal.

Je prenais, par exemple, tantôt, le paragraphe 3 de l'article 8. Quand le ministre et son futur ministère prendront, par règlement, "les mesures nécessaires pour l'obtention d'un meilleur rapport qualité/coût lors de l'acquisition ou de la fourniture de biens ou de services", cela veut-il dire que, pour imprimer, par exemple, les bulletins de vote, le ministère - c'est clair, s'il n'y a pas d'amendement, en tout cas - va pouvoir imposer au Directeur général des élections des imprimeries alors qu'on sait que l'impression de documents électoraux, des bulletins de vote, c'est une matière qui ne doit pas laisser prise même à un soupçon de partialité? Je pense que, tels que rédigés, ces articles-là viennent resserrer l'étau sur les activités du Directeur général des élections. Ils viennent, en quelque sorte, lui rendre même l'exécution de son mandat périlleuse ou impossible.

Encore une fois, le but de ma motion est de faire en sorte qu'il puisse être entendu avec ses conseillers, avec son équipe. Je pense qu'il a deux directeurs généraux adjoints; sauf erreur, il y a le directeur général et deux adjoints. Il y a le financement également qui est impliqué là-dedans. Ces gens-là pourraient venir apporter leur éclairage aux membres de la commission; pas seulement au ministre. Le ministre pourra me dire: Écoutez, je vais les appeler. Il pourra même me dire: Je les ai appelés. Mais cela me surprendrait beaucoup qu'il y ait eu consultation préalable. S'il n'y a pas eu de consultation préalable, je pense que c'est le temps, avant qu'il soit trop tard, de consulter le Directeur général des élections.

J'ai mentionné tantôt que dans la même situation se retrouvent le Protecteur du citoyen, les commissaires de la Commission des droits de la personne, le jurisconsulte du gouvernement. Je suis convaincu qu'il en existe d'autres, mais mon expérience modeste à cette Assemblée nationale me fait limiter à ces quatre individus ou organismes le nombre de nominations qui sont faites directement par l'Assemblée nationale. Je suis convaincu que le député de Hull, qui a une expérience beaucoup plus grande que la mienne en semblable matière, pourra allonger cette liste de personnages qui jouent des rôles fondamentaux.

Pourquoi sont-ils nommés par l'Assemblée nationale? Cela vaut la peine de se poser la question. Pourquoi ces gens-là sont-ils nommés par l'Assemblée nationale, plutôt que par le Conseil exécutif? Pourquoi la nomination du Directeur général des élections doit-elle être ratifiée par les deux tiers, si ce n'est pour assurer la parfaite indépendance, la totale indépendance? Encore une fois, ce que je disais cet après-midi s'applique. Non seulement doivent-ils être indépendants, mais cela doit paraître également qu'ils le sont. On a toute la population qui nous regarde en temps d'élections. Combien y avait-il de caméras et de micros braqués sur le Directeur général des élections pendant la dernière élection lorsqu'il y avait un problème sur le débat des chefs? S'il avait fallu, à ce moment-là, que le Directeur général des élections dise: Ecoutez, j'ai un règlement ici du ministère des Approvisionnements et Services qui m'empêche de requérir les avis juridiques dont j'ai besoin, alors qu'en période d'élections l'échéancier électoral ne souffre pas de règlements, ne souffre pas de délais, le calendrier électoral doit être appliqué rigoureusement et intégralement.

Là, on va venir lui mettre des bâtons dans les roues, parce que, M. le Président, je veux que vous le sachiez, le Directeur général des élections n'a pas cette contrainte actuellement. Je défie n'importe qui autour de cette table de mettre en cause son administration ou l'achat de biens et de services par le Directeur général des élections. Je défie n'importe qui autour de cette table de mettre en cause la parfaite impartialité du Directeur général des élections et de son équipe.

Mais alors pourquoi venir l'impliquer malgré lui dans un projet de loi qui vient affecter son soutien administratif et même, dans certains cas, son soutien carrément physique, son soutien professionnel, etc? Je suis convaincu que le député de Hull et ministre titulaire de ce futur ministère des Approvisionnements et Services concourra à

notre demande de faire entendre le Directeur général des élections. Si ce n'est pas physiquement possible, on pourrait peut-être lui lancer l'invitation et le Directeur général des élections nous répondra. Il peut nous envoyer une note. On en prendra connaissance à ce moment-là. C'est nous, les législateurs, qui devons finalement nous lever en Chambre lors d'un vote et voter sur le contenu de ce projet de loi. Je suis convaincu que ce vote sera, d'ailleurs, fait sans aucun esprit de partisanerie en ce qui a trait au Directeur général des élections.

Sûrement que les députés ministériels peuvent comprendre notre préoccupation à cet égard. En ce sens, je propose donc la motion d'amendement que vous avez lue tantôt et que je voudrais répéter: "Que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant...

Le Président (M. Lemieux): ...le Syndicat canadien de la fonction publique, ainsi que le Directeur...

M. Filions ...le Syndicat canadien de la fonction publique, ainsi que le Directeur général des élections du Québec". C'est cela. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): C'est un sous-amendement à l'amendement.

M. Chevrette: Non, c'est un amendement à l'amendement.

Le Président (M. Lemieux): C'est un amendement à l'amendement.

M. Filions C'est cela.

M. Chevrette: Parce que l'autre amendement a été battu tantôt. C'est cela?

Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi, M. le député de Taillon, relativement à la motion d'amendement, vous y ajoutez "du Québec".

M. Filions Oui.

Le Président (M. Lemieux): Vous rectifiez l'amendement qui avait été proposé en y ajoutant "du Québec". Cela va.

M. Filion: Mais j'avais écrit "du Québec", M. le Président.

M. Chevrette: C'est parce que je ne lui avais pas donné le bon papier.

Le Président (M. Lemieux): Les mots "du Québec" n'étaient pas écrits.

M. Filion: Je les avais sur le document: "Le Directeur général des élections du Québec."

Le Président (M. Lemieux): Cela va. Je vous remercie. Est-ce qu'il y a d'autres personnes qui veulent intervenir sur la motion d'amendement? M. le ministre?

M. Bélisle: M. le Président, je voudrais attendre encore un peu.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je concours à cet amendement, bien sûr, puisqu'on parle beaucoup de l'indépendance des institutions. On a voulu que le Directeur général des élections ait cette indépendance. C'est précisément pourquoi on a soumis sa nomination au vote de l'Assemblée nationale. Il n'appartient pas à un ministre de nommer le Directeur général des élections. Il est nommé à la suite d'un vote des deux tiers des membres de l'Assemblée nationale. On insiste énormément là-dessus. On procède toujours, on s'en souviendra, au cours des fins de session, à ce genre de nominations importantes. Son salaire est même défini par l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale. On assujettirait son administration à un ministre sectoriel? Cela me paraît tout à fait aberrant.

Son indépendance, le député de Taillon l'a très bien fait ressortir. En temps d'élections, il a besoin de se retourner très rapidement pour loger des commandes ici et là. Suivre une procédure stricte qui lui serait imposée par un ministre l'empêcherait d'avoir cette indépendance totale vis-à-vis de l'exécutif.

On a voulu que le Directeur général des élections relève du législatif et non pas du pouvoir exécutif. Cela m'apparaît drôlement important qu'à ce stade-ci on comprenne que ce n'est pas la tutelle du ministre que l'on ne veut pas voir là, mais bien plutôt entendre le directeur général nous dire lui-même ici en cette commission: Voici les motifs qui me poussent à exiger ou à demander cette liberté totale d'action, à cause du type de travail que j'ai à accomplir non pas pour l'ensemble d'un ministère ou d'un gouvernement, mais pour l'ensemble de la législation québécoise. À mon ' sens, l'article 9 va très loin de ce côté-là et permet véritablement une mainmise qui pourrait avoir des répercussions extrêmement grandes et extrêmement graves. Au moment où il y a dissolution des Chambres, par exemple, cette dépendance administrative

qu'on laisserait planer dans les textes juridiques, à mon avis, serait peut-être même extrêmement néfaste pour tout notre système politique québécois.

Peut-être que le ministre a peur qu'en assoyant le Directeur général des élections au bout de la table on abuse du temps. Peut-être craint-il qu'on passe des heures et des heures et qu'on dévie sur le financement des partis politiques ou sur autre chose. Nous pourrions nous en tenir exclusivement à l'aspect suivant, au degré d'autorité et d'autonomie dont il a besoin pour assurer pleinement ses fonctions en toute indépendance vis-à-vis du pouvoir exécutif et d'un ministère sectoriel, en particulier, bien sûr. Il faut qu'il conserve toutes ses coudées les plus franches possible vis-à-vis de l'Assemblée nationale. C'est devant le Parlement que le Directeur général des élections doit répondre. C'est le Parlement qui procède à sa nomination, je le répète. C'est lui qui a fixé sa rémunération et Dieu sait que c'est assez odieux pour ces personnes qu'on va chercher bien souvent à cause... On sait très bien, il n'y a pas de cachette, qu'il y a toujours une entente entre les deux chefs de parti. Le premier ministre du Québec appelle son vis-à-vis, le chef de l'Opposition, et lui dit: Nous proposerions un tel comme président d'élections. L'acceptez-vous, oui ou non? On sait que cela a toujours été de même, tout comme la présidence de l'Assemblée nationale. C'est par entente entre les partis et on exige même le vote des deux tiers du Parlement, surtout lorsqu'on avait plusieurs partis à l'intérieur de l'Assemblée nationale. On s'est arrangé pour que ce soit véritablement un consensus majoritaire pour ne pas dire unanime, mais on n'a jamais vu jusqu'à maintenant de vote majoritaire. Cela a toujours été des votes unanimes. On lui confie, bien sûr, des responsabilités qui ne touchent pas seulement un secteur d'activité, mais il a entre les mains toute la notion de probité qui entoure cette question de l'élection du gouvernement de l'ensemble des Québécois.

C'est pourquoi je trouve extrêmement curieux que, spontanément, si on ne veut pas le recevoir, on ne dise pas: On est convaincu et on arrivera avec un amendement pour soustraire le Directeur général des élections à la loi. Si tel était le cas, je dirais au ministre immédiatement: Nous retirons notre amendement. Si tel n'est pas le cas, nous allons au moins solliciter sa présence ici pour qu'il puisse nous expliquer l'importance de n'être assujetti à aucune directive administrative pour lui permettre précisément d'agir sans aucune contrainte de quelque autre fonctionnaire que ce soit.

M. le Président, il faut relier cela à l'article 7. C'est bien beau de parler de l'article 9 qui est la base de l'argumentation du député de Taillon, mais, si on relie cela à la largeur du mandat que peut avoir le ministre dans l'article 7, on peut avoir une procédure telle en vertu de règlements que le Directeur général des élections soit complètement paralysé. (21 h 30)

Le ministre peut... J'ai remarqué qu'on a une nouvelle expression sur le plan de la législation maintenant qui est "prendre des règlements". J'ai déjà vu d'autres termes que "prendre des règlements", mais, depuis un certain temps, je remarque que cela a l'air d'être une expression consacrée au niveau de la législation: "prendre des règlements". On aura beau en prendre; surtout quand il n'y a pas de balises, on peut réglementer sur à peu près tout! Cela devient un danger extrême, des barrières extraordinaires, et, quand on parle d'instituer possiblement des barrières pour des organismes que le Parlement tout entier veut autonomes et indépendants de l'exécutif, je ne comprends pas qu'on n'accepte pas cette argumentation. Je trouve, personnellement, extrêmement dangereux ce qu'on en est en train de faire sur le plan de l'indépendance même, de la liberté d'action d'organismes pour lesquels le Parlement en entier, et cela à l'unanimité des partis politiques, autant libéral que péquiste, a voulu cette indépendance totale, cette liberté d'action totale, sans aucune entrave de l'exécutif, mais plutôt avec une dépendance du législatif. Par ce projet de loi, on est sur le point d'enlever ce pouvoir qu'avait le Directeur général des élections. Cette liberté totale, cette indépendance de l'exécutif, on est à la remettre en question. Je pense que c'est nocif. Comme législateurs - parce que nous, les députés, on n'est pas là comme exécutants, on est des législateurs - est-ce qu'on veut remettre en question l'indépendance du Directeur général des élections, oui ou non? C'est la question qu'il faut se poser. Si c'est non, on doit lui permettre de venir l'exprimer pour qu'on puisse corriger adéquatement le projet de loi. Ne serait-ce que pour un court laps de temps, je pense qu'il vaudrait la peine de le faire.

Sous-amendement

Je propose donc, en sous-amendement, qu'on ajoute à la fin de la motion d'amendement: "pour une durée d'une heure, après entente entre les deux leaders quant au moment de la convocation."

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous me l'écrire, M. le député?

M. Chevrette: Oui, elle est écrite.

Le Président (M. Lemieux): "...pour une durée d'une heure, après entente..." Le sous-

amendement relativement à la proposition d'amendement de la motion principale pour consultation particulière est recevable, parce que le sous-amendement ne va pas, comme tel, à l'encontre du principe du projet de loi et a un lien direct avec l'amendement que l'on veut sous-amender. À cet effet-là, j'aimerais vous citer un texte de Beauchesne qui dit que: "L'objet d'un sous-amendement étant de modifier un amendement, il ne devrait pas élargir la portée de l'amendement, mais se rapporter à des questions non visées par celui-ci; si l'intention est de soulever des questions étrangères à l'amendement, le député devrait attendre qu'on ait statué sur l'amendement pour en prononcer un nouveau." Dans le cas présent, ici, on cherche à préciser le fond de l'amendement et la proposition est, à mon avis, recevable, parce qu'on cherche à éclaircir davantage l'amendement qui a été proposé.

Le sous-amendement est recevable. M. le député de Joliette, sur le sous-amendement, en vertu de l'article 209, paragraphe 2, vous avez trente minutes.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je n'ai pas l'intention de prendre trente minutes, mais je veux quand même, pendant quelques minutes, plaider sur l'importance du geste que je viens de poser.

On semble oublier l'importance de l'indépendance du Directeur générai des élections au Québec. Bien sûr que, de prime abord, en lisant l'article 9, on peut ne pas avoir peur et dire: Le ministre n'a pas de problème, ce n'est pas cela qu'il vise. Je suis convaincu qu'il aurait probablement raison de dire que ce n'est pas ce qu'il vise. Donc, ce n'est pas une question d'atteinte à la crédibilité de l'homme qui rédige la loi, ce n'est pas cela.

Je veux bien m'expliquer. On sait très bien qu'on commence par réglementer et qu'il n'y a même pas de prépublication des règlements dans la Gazette officielle permettant de les expliciter... Ce n'est pas encore voté, n'en déplaise à l'avocat-conseil. Ce n'est pas encore voté. On ne peut jamais présumer qu'une loi est adoptée tant qu'elle ne l'est pas. C'est un autre principe de droit qui est assez vieux, en passant.

À partir de là, on est obligé d'étudier les lois en fonction du cadre légal qui nous est imparti. Au moment où on se parle, il n'y a absolument rien qui me dit qu'on pourra s'exprimer d'une façon officielle. Qu'on pourra, nous, comme parlementaires, regarder les projets de règlement. Qu'on pourra les amender au besoin au cas où il y en aurait un qui entraverait la liberté d'action d'un directeur d'élections. C'est drôlement important pour les parlementaires. Est-ce qu'on change de cap ou si le Parle- ment veut conserver cette liberté et cette autonomie d'action du Directeur général des élections?

Je suis persuadé que c'est beaucoup plus sérieux que cela ne semble l'être. Plusieurs pensent que ce sont des motions dilatoires. Ce n'est pas dilatoire quand il y a des principes fondamentaux en cause, des principes qui peuvent remettre en question des vieux principes que le Parlement a pris du temps à adopter, en passant. Le Parlement a pris beaucoup de temps à évoluer là-dessus. Vous vous en rendrez compte parce qu'il y a d'autres motions qui vont venir pour défendre des principes bien concrets, bien précis et qui s'inscrivent dans le sens de l'évolution normale du Parlement, qui veut faire en sorte que le législatif prenne de plus en plus sa place dans le Parlement actuel.

M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, vous êtes...

M. Chevrette: Non, je veux démontrer que cela va se lier à autre chose. Je les préviens. Je trouve cela correct. Si je ne les prévenais pas, ce ne serait pas correct.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, s'il vous plaît! Vous savez, la frontière est très mince entre la motion d'amendement et la motion de sous-amendement. Je vois par l'expression de votre visage que vous comprenez très bien ce que je veux dire. Essayez, s'il vous plaît, dans la mesure du possible...

M. Chevrette: Je vous avoue que mon impression ne paraît pas au Journal des débats.

Le Président (M. Lemieux): J'en conviens, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: N'eussent été vos paroles, personne ne s'en serait rendu compte. Merci.

Le Président (M. Lemieux): J'en conviens, M. le député de Joliette. S'il vous plaît, essayez de vous en tenir au sous-amendement.

M. Chevrette: Cela dit, une heure avec le Directeur général des élections, pour analyser les dangers d'un tel article dans la conjoncture actuelle - il faut toujours se placer dans la conjoncture du droit actuel -une heure pour lui faire donner des exemples, lui poser des questions, à savoir qu'arrive-t-il si - parce qu'il peut nous répondre sur des situations concrètes - ce n'est pas gros dans la vie d'un parlementaire pour nous assurer que notre loi, sur laquelle

on aura à voter, autant ici qu'en haut en troisième lecture, n'entravera en rien son autonomie d'action, sa liberté d'action.

Ce n'est pas gros une heure dans la vie d'un parlementaire pour écouter un directeur d'élections et, au besoin, lui poser des questions pour nous assurer, comme législateurs, qu'on ne commet pas de fautes graves, qu'on ne veut pas faire marche arrière par rapport à ce qui a été entrepris il y a quelques années afin que certaines structures soient placées au-dessus des partis politiques et au-dessus même du pouvoir exécutif.

Je suis persuadé que, sans le vouloir, adopter cet article tel quel, sans entendre le Directeur général des élections, sans se poser des questions d'une façon sérieuse, c'est risquer de nous ramasser dans des situations déplorables où on aura fait reculer littéralement l'indépendance absolue qu'il nous faut donner à ces formes de structures qu'on a dépolitisées d'une certaine façon, que l'on a voulu voir échapper à la partisanerie politique.

Cela dit, je suis convaincu que ce n'est pas l'objectif. Donc, si ce n'est pas l'objectif, pourquoi ne pas chercher immédiatement un moyen concret de s'assurer que l'objectif de neutralité soit sauvegardé, de s'en assurer immédiatement, sans attendre d'être placé a posteriori devant des situations de fait qui obligeront des parlementaires à revenir s'asseoir pendant des heures et des heures pour parler des amendements à une loi?

C'est au moment où l'on légifère qu'on doit penser aux éventualités. C'est là la clairvoyance d'un législateur. Ce n'est pas de ridiculiser un amendement qui vient de l'Opposition. Ici, on est tous égaux, quel que soit le côté de la Chambre. Comme législateurs, on doit avoir cette clairvoyance et on doit chercher, quand on croit à des objectifs, à les rendre correctement dans nos textes de loi.

Si on n'accepte pas de se pencher d'une façon sérieuse, d'écouter les mises en garde que pourrait nous faire un des dirigeants, par exemple, d'une structure qui se veut apolitique, c'est parce qu'on ne croit pas aux principes de neutralité et de liberté d'action et d'indépendance totale vis-à-vis du pouvoir exécutif. C'est ce que vise cette demande pressante d'écouter le Directeur général des élections nous dire à quel type de situations il a à faire face dans une année ou dans deux, à l'intérieur de quatre ans.

À quelle sorte de situations? Je prends un exemple concret pour asseoir mes dires. Dernièrement, le Directeur général des élections voulait surseoir à la parution publique des résumés de dépenses électorales sous prétexte qu'il faisait une économie. Mais c'est textuel dans nos lois. Il aurait fallu amender la loi pour le soustraire à cette obligation. Cette obligation de transparence et de publication, il est obligé de s'y soumettre en vertu de la loi, précisément pour que ceux qui ont un intérêt public puissent savoir si le député Untel a dépensé 31 000 $, 32 000 $ ou 30 000 $ et peut-être faire une contre-preuve. Cela a été fait dans le sens d'assurer le plus grand intérêt public et la plus grande probité publique, s'il y avait des choses qui sautaient aux yeux dans les résumés pour permettre à un individu d'intervenir. C'est cela, avoir des balises permettant au peuple, en général, d'avoir des poignées pour s'accrocher et être capable d'assurer cette probité publique dans les dépenses dites électorales. C'est un seul exemple que je donne. Mais si on avait amendé la loi et, tout de suite, de consentement, si les législateurs avaient dit: Bon, on enlève cela, si le citoyen avait voulu se prévaloir d'un droit, qu'aurait-il fait?

Je pense qu'il y a des lois qui ne sont pas faites exclusivement pour les parlementaires, pour se faire plaisir. Les lois, je m'excuse, mais c'est fait pour tout le monde. Les gens, c'est l'indépendance de certaines structures qu'ils recherchent et non pas le plaisir de s'attribuer la tutelle d'une politique d'achat pour le Directeur général des élections.

Comme je sais que ce n'est pas le désir du ministre, il me semble que, sur ce point précis, il devrait nous permettre d'entendre pendant quelques minutes, pendant une heure à peine, le Directeur général des élections nous donner les dangers. Cela m'apparaîtrait sérieux; cela m'apparaîtrait quelque chose de correct de la part de parlementaires qui désirent véritablement ne pas changer les objectifs fondamentaux qui existent là-dessus.

Au contraire, pourquoi ne pas laisser l'administration, à sa guise, faire des ententes entre le Directeur des achats et le Service des achats du gouvernement quand la chose est possible? Sur le plan administratif, des ententes du genre, cela se fait. Mais si on sent le besoin de le mettre dans une loi, ce n'est pas la même chose. Le ministre parlait, par exemple, lors de l'étude des crédits, d'inciter les municipalités, d'inciter d'autres structures gouvernementales, les CRSSS, à se servir du système d'achat central. Il disait cela de certaines structures qui tirent complètement tout du gouvernement en termes de financement. Il voulait ne se servir que du moyen incitatif pour des structures qui ont beaucoup moins d'autonomie que ne devrait en avoir le Directeur général des élections. Mais c'est le contraire qui se produit dans les faits. Celui qui a besoin d'autonomie est assujetti par la loi et, pour celui qui aurait besoin de resserrement, ce sera l'incitation. (21 h 45)

M. le ministre, il me semble qu'il y a

quelque chose qui ne va pas et, là-dessus, je vous avoue très honnêtement que j'aimerais vous entendre et à l'intérieur de ma demi-heure, s'il le faut, afin qu'il y ait un certain dialogue sur ce sujet, Au-delà de toute procédure parlementaire qu'on peut avoir, le principe fondamental qui est en cause m1 apparaît sérieux et je crois qu'on pourrait se permettre une discussion franche et honnête sur cela.

Le Président (M. Després): M. le député de Bertrand.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. À la suite des propos de mon collègue, le député de Joliette, étant donné qu'il y avait consensus du côté de l'Opposition, je ne sais pas si le ministre est prêt à intervenir ou, du moins, à donner un son de cloche quant aux propos de mes collègues de Taillon et de Joliette, à savoir si le ministre et les gens de cette commission sont prêts à demander au Directeur général des élections de comparaître. Je comprends difficilement, je vous l'avouerai, que, depuis 16 heures cet après-midi, nous soyons là à essayer de convaincre le ministre pendant de longues minutes et voire des heures de faire comparaître d'abord certains syndicats et, au cours des dernières minutes, de faire comparaître le Directeur général des élections. Dans le cas du Syndicat de professionnels du gouvernement, il y a eu un rejet, mais quant à la proposition de mon collègue, le député de Joliette et à son amendement, je crois qu'il est drôlement important que le ministre puisse nous dire ce qu'il en pense - il a manifesté tantôt un certain intérêt à pouvoir donner son idée -afin que, du côté de l'Opposition, on ne soit pas là à plaider pendant de longues minutes et pendant des heures pour convaincre le ministre qui semblait tout disposé à donner suite aux différentes demandes en revenant après souper. Comme l'expliquait si bien mon collègue, le député de Joliette, ce n'est pas notre but de retarder quoi que ce soit. Si j'ai à plaider durant 10 minutes, 20 minutes, 30 minutes et ainsi de suite pour les différents collègues, je crois que c'est du temps qu'on pourrait consacrer pour faire comparaître ces gens parce que cela me semble drôlement important.

Le fait que l'amendement tel qu'il a été présenté par mon collègue de Joliette soit en ce sens que le Directeur général des élections puisse comparaître devant cette commission pour une durée d'une heure seulement, cela donne au moins l'assurance qu'on n'a pas l'intention d'étirer la discussion et d'étirer beaucoup plus longuement les débats. Cela me semble important surtout en fonction du fait que le Directeur général des élections se doit de garder, à mon avis, toute sa latitude, toute sa liberté d'expression et toute sa marge de manoeuvre. On sait à quel point ce bonhomme dans certaines périodes de l'année ou dans les prochaines années pourrait se retrouver dans des situations très délicates. Le ministre a sûrement été très sensibilisé par les différents propos de mes collègues par rapport à cela, entre autres, le député de Taillon et le député de Joliette, afin qu'il puisse donner suite à cette demande. Les différents membres de cette commission...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, dans votre droit de parole, vous avez à vous exprimer sur le sous-amendement et non pas sur la motion d'amendement.

M. Parent (Bertrand): Si je ne m'abuse...

Le Président (M. Lemieux): J'aurai à appeler tout à l'heure le sous-amendement. C'est une ligne frontière qui est mince, mais, s'il vous plaît, M. le député, essayez!

M. Parent (Bertrand): ...le sous-amendement de mon collègue, le député de Joliette, était en ce sens qu'on demande au Directeur général des élections de comparaître pour une durée d'une heure.

Le Président (M. Lemieux): C'est cela, pour une durée d'une heure après entente entre les leaders.

M. Parent (Bertrand): Ce que je plaide actuellement, c'est l'importance du fait qu'on veuille circonscrire cette comparution à une heure seulement. Vous conviendrez...

Le Président (M. Lemieux): C'est ce que vous plaidiez un peu avant, M. le député de Bertrand. Vous pouvez continuer, cela va. Là, vous êtes vraiment dans le mille, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je vous concède, M. le Président, que c'est mince.

Le Président (M. Lemieux): C'est mince, effectivement.

M. Parent (Bertrand): Sauf que, si le ministre comprenait les propos que je lui adresse, je crois qu'on pourrait arriver beaucoup plus rapidement à une entente quant à cette comparution, si minime soit-elle, car une période d'une heure, M. le Président, donnerait l'occasion au Directeur général des élections de s'exprimer, parce qu'on retrouve actuellement un dangereux précédent qui pourrait se créer. On aura la version de l'autre côté sur les prétentions

que nous avons en tant qu'Opposition quant à cet article 9. On aura l'occasion de regarder cela beaucoup plus en détail. On pourra échanger durant une heure.

J'aimerais que le ministre nous dise ce qu'il en pense au cours des prochaines minutes et avant que d'autres de mes collègues qui le souhaitent interviennent sur le sujet, qu'il puisse nous fournir une certaine indication à savoir si les différents propos que nous avons tenus et les dangers sur lesquels nous avons fait la lumière tantôt seraient suffisants pour lui permettre d'accepter, dans le cadre de cette commission, la présence du Directeur général des élections.

Je vous dirai, en terminant, que je peux comprendre qu'on ne veuille pas entendre, M. le Président, tous les représentants des syndicats. Je peux comprendre qu'on ait peur d'allonger la période de temps mise à notre disposition vu qu'on est en fin de session, mais je pense que tout le temps qu'on perd - parce que c'est du temps perdu si on ne réussit pas à convaincre le ministre - est du temps qu'on pourrait consacrer pour les entendre. Si, il y a une heure, le ministre y avait consenti, déjà nous en serions sûrement à discuter certains des articles et à approuver le fameux projet de loi.

Il me semble important, je le répète, en fonction de tout ce que cela peut toucher quant à la liberté d'action et d'expression, qu'une période soit mise à la disposition des différents membres de la commission, y compris des députés ministériels qui n'avaient peut-être pas vu aussi loin les implications et les problèmes que cet article pouvait causer. Je pense que, si le ministre donne son feu vert, on pourra passer à autre chose. Car il me semble important qu'on passe à autre chose, à moins qu'on ne veuille, durant de longues heures, tenter de discuter à propos des personnes que l'on fait intervenir devant cette commission.

Je pense que la démonstration a été faite en long et en large, M. le Président. Une courte comparution du Directeur général des élections ne ferait de mal à personne, montrerait la bonne volonté du ministre et pourrait finalement satisfaire non seulement les gens de l'Opposition, mais aussi toutes les parties en cause, en l'occurrence le Directeur général des élections qui, qu'on le veuille ou non, risque de se retrouver avec un carcan. Si, lors de cette commission, on a l'occasion de l'entendre s'exprimer, il nous donnera son point de vue quant à cette présentation et à cette façon dont il devra vivre en vertu de l'article 9 du projet de loi 68.

Je suis persuadé, comme nous l'avons vu précédemment quant à la comparution des différents syndicats, qu'ils n'auront pas d'autres occasions de le faire que devant cette tribune. Le Directeur général des élections pourrait avoir la possibilité de s'exprimer et, comme Opposition, on souhaite avoir l'occasion de tirer cette affaire au clair une fois pour toutes. Sinon, lorsqu'on abordera les articles, demain ou après-demain, peu importe, on aura de longs débats sur l'article 9 qui pourrait être clos rapidement. Ou, peut-être, à la suite de cette comparution, le ministre proposera lui-même des amendements. II se rendra compte lui-même qu'il est peut-être beaucoup plus prudent de changer et ses conseillers pourront le mettre en garde contre cela. Ils pourront le conseiller et apporter des amendements que nous pourrons ensuite approuver. Tout cela se ferait dans un cadre où on éviterait d'avoir deux heures de discussion pour une heure de comparution. Je pense que le ministre est suffisamment ouvert d'esprit, transparent... Du moins, j'ai hâte qu'il nous donne une bonne preuve de cela. J'aimerais qu'il puisse nous dire ce qu'il pense, lui, de cette comparution puisqu'on n'a encore rien entendu de la part du ministre concernant la comparution du Directeur général des élections. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. M. le député de Dubuc, vous avez la parole relativement au sous-amendement à la motion d'amendement présentée par le député de Taillon, à la suite de la motion principale du député de Joliette.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Je suis bien heureux que le député de Joliette ait présenté ce sous-amendement. J'écoutais tantôt mes collègues présenter leur argumentation pour essayer de démontrer au ministre et à l'ensemble des membres de la commission ici présents l'importance qu'il y avait de rencontrer, de recevoir, d'interroger ou d'entendre les remarques que le Directeur général des élections du Québec pourrait faire en ce qui a trait à l'article 9 de ce projet de loi, qui, d'une certaine façon, l'obligera à faire appel au titulaire du futur ministère des Approvisionnements et Services.

Pendant que mes collègues présentaient leur argumentation, j'observais le ministre. Dans sa physionomie, il me semblait lire une certaine réticence à accepter l'amendement de mon collègue de Taillon. C'est pourquoi je disais que j'étais heureux que mon collègue, le député de Joliette et leader de l'Opposition, présente ce sous-amendement. Je me disais que le ministre a peut-être peur, en faisant venir le Directeur général des élections sans imposer une limite de temps, que l'Opposition n'en profite pour s'éterniser, bien que cela ne soit pas, je peux vous

l'affirmer, notre intention. Quand j'ai entendu mon collègue proposer de limiter la comparution à une heure, comme il le fait par son sous-amendement, j'ai repris espoir que le ministre pourrait sans doute accepter une proposition de cet ordre.

Le deuxième argument que je veux évoquer montre vraiment, de la part des membres de ce côté-ci de l'Assemblée, la bonne foi dans le sens qu'il n'est pas de notre intention de faire défiler ici des gens pour le simple plaisir de faire perdre le temps des membres de notre commission, surtout de faire perdre le temps d'une personne de l'importance du Directeur général des élections du Québec. La deuxième partie du sous-amendement qui est présenté par mon collègue de Joliette vient mettre une balise supplémentaire qui devrait rassurer le ministre, je crois, quant à nos intentions puisqu'il propose, justement, que cela se fasse après une entente entre les deux leaders, celui du gouvernement et celui de l'Opposition.

Vous savez, M. le Président, comme le ministre, d'ailleurs, qui a beaucoup d'expérience, que la façon, sinon la seule, du moins la plus rapide ou la plus pratique ou la plus efficace de gagner du temps dans les discussions qui se font entre les membres des partis politiques, c'est souvent d'avoir recours de part et d'autre aux bons offices de no3 deux leaders, tant celui du gouvernement que celui de l'Opposition, car, grâce à eux deux seulement, la discussion peut être réduite et se concrétiser plus facilement et plus rapidement. En inscrivant dans son sous-amendement que cela se décidera après une entente entre les deux leaders, je pense que cela devrait rassurer suffisamment le ministre.

Des voix: Vote! Vote! Une voix: On a un vote.

Le Président (M. Lemieux): Nous allons suspendre. C'est en vertu de l'article 44. On reprend immédiatement après le vote.

(Suspension de la séance è 22 h 1)

(Reprise à 22 h 16)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux relativement à l'étude du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives. La parole est au député de Dubuc relativement au sous-amendement présenté par le député de Joliette. M. le député de Dubuc, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Question de règlement. Pourriez-vous demander au député de Dubuc de répéter la dernière phrase? Il y a eu un vote et j'ai manqué cette partie et je ne voudrais rien manquer de so'n discours vraiment intéressant.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, vous conviendrez que ce n'est pas une question de règlement. M. le député de Dubuc, vous avez la parole,

M. Polak: Répondez donc pour le "fun".

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît.

Une voix: Est-ce qu'il se le rappelle?

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de Sainte-Anne. M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Le député de Sainte-Anne, avec toute l'expérience qu'il a, devrait savoir qu'il y a un Journal des débats è l'Assemblée nationale. S'il ne le sait pas encore, il doit le recevoir à son bureau. Il pourra relire avec profit mon argumentation.

M. Filion: M. le Président, question de règlement. Il faudrait respecter le droit de parole que vous avez accordé tantôt au député.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, M. le député de Taillon, en vertu des articles 36 et 39, j'aimerais que le député de Dubuc puisse s'exprimer te plus librement possible afin que chacun des parlementaires des deux groupes puisse l'écouter attentivement. M. le député de Dubuc, vous avez la parole.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. J'essayais de démontrer au ministre ce que le sous-amendement présenté par mon collègue de Joliette permettait. Je pense -c'était ce que je voulais illustrer - que, de ce côté-ci de l'assemblée, on entendait rassurer le ministre sur nos demandes de comparution. Elles ne se veulent pas une façon d'étirer le temps, mais de le réduire au maximum. La proposition du député de Joliette vise exactement cela en limitant l'amendement du député de Taillon à une durée d'une heure seulement. Je pense qu'en une heure le Directeur général des élections aurait suffisamment de temps. Cela donnerait aussi suffisamment de temps aux membres de la commission, probablement à ceux de l'Opposition, car il semble que, du côté

gouvernemental, on est plutôt muet. Donc, en une heure, on aurait suffisamment de temps pour que le Directeur général des élections puisse nous indiquer les dangers que cela peut représenter pour sa fonction particulièrement - pas pour lui, mais pour sa fonction - dans un système démocratique, ce projet de loi 68 sur la création du ministère des Approvisionnements et Services, d'une part.

Et toujours avec le même esprit d'accélérer au maximum le débat là-dessus, le député de Joliette proposait qu'il y ait une entente entre les leaders. C'est là-dessus qu'on a été dérangé par la cloche et que mon confrère n'a pu entendre la suite. Une entente entre les leaders - j'essayais de l'illustrer et le ministre, avec l'expérience qu'il a, le sait - c'est la façon la plus rapide de s'entendre, entre les deux partis, sur des discussions ou sur des actions à mener qui demandent l'assentiment des deux partis. Alors, cette entente entre les deux leaders permettrait donc de régler plus facilement et plus rapidement la situation et de diminuer ainsi au maximum le temps, si le ministre a l'impression que l'Opposition cherche à retarder indûment l'adoption de son projet de loi.

C'étaient mes deux arguments. C'est ce que l'on retrouve dans le projet d'amendement soumis par le député de Joliette. J'espère que cela rassure le ministre sur nos intentions, parce que tel est avant tout l'objectif de la motion de mon collègue. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez terminé, M. le député de Dubuc. Y a-t-il d'autres interventions sur le sous-amendement présenté par le député de Joliette?

M. Filion: M. le Président, le sous-amendement...

Le Président (M. Lemieux): Vous êtes le seul effectivement, M. le député de Taillon, qui n'ayez pas pris la parole.

M. Claude Filion

M. Filion: ...présenté par le député de Joliette vient préciser la motion d'amendement que nous avions nous-mêmes déposée. Il est fait de bonne foi et est de bonne guerre pour préciser un peu la teneur de l'amendement que je suggérais aux membres de cette commission. Peut-être, certains auraient-ils pu croire de mon intervention que j'aurais voulu que l'on accueille le Directeur général des élections pendant une journée ou pendant un laps de temps indéterminé. Heureusement, grâce à l'apport de cette motion de sous-amendement du député de Joliette, on peut comprendre que tel n'était pas mon but. Or, cela n'enlève rien à l'importance que l'on doit accorder à l'autonomie, à l'impartialité du Directeur général des élections non seulement dans ses moyens, mais aussi dans l'exercice final de son mandat.

M. le Président, le Directeur général des élections, comme je l'ai mentionné, est habitué à venir témoigner en commission. Je suis convaincu qu'en une heure on pourrait amplement faire le tour de la question avec lui. Je suis également convaincu que le Directeur général des élections va probablement reprendre une partie de nos propos, à savoir qu'il voit mal comment l'exécutif, par son pouvoir de réglementation, dans ce projet de loi, viendrait l'empêcher d'exercer son rôle, notamment dans certains cas, c'est bon de le rappeler, dans des circonstances difficiles comme lorsque les décrets d'élection sont émis.

M. le Président, en ce sens-là, je suis heureux de concourir au sous-amendement du député de Joliette, mais je ne voudrais quand même pas que ce soit perçu de l'autre côté comme une limite à la pleine expression de l'argumentation que je faisais valoir tantôt. Le Directeur général des élections, c'est plus qu'une personne, c'est une institution qui oeuvre au coeur même de ce que l'on a de plus valable, c'est-à-dire notre système démocratique. Que l'on regarde un peu ailleurs ce qui se passe! En plus de cela, j'oserais même ajouter ceci à la suite des commentaires qui n'ont pas été enregistrés, mais que l'on a quand même perçus. Je le dis indépendamment de la personne même du Directeur général des élections, peu importe qui c'est, qui serait nommé aux deux tiers de l'Assemblée nationale, ce personnage une fois élu doit être imbu d'une seule mission et il doit pouvoir l'exercer d'une façon totalement libre et totalement volontaire et non pas avoir dans les pattes les règlements de l'exécutif qui viendraient l'empêcher de combler les besoins qui pourraient survenir en cours de mandat et surtout en cours d'élections.

En ce sens-là, M. le Président, je serais vraiment malheureux que mon intervention sur le sous-amendement proposé par le député de Joliette et leader de l'Opposition soit interprétée comme une limite à l'importance de la question. Dans ce sens-là, on pourrait éviter bien des débats si le ministre maintenant nous disait: Finalement, après avoir réfléchi, vous avez raison. Peut-être que cela ne prendra pas une heure, peut-être que cela ne prendra qu'une demi-heure. Si le Directeur général des élections dit au législateur: Cela n'a pas d'allure ce que vous êtes en train de faire là, on aura compris. Si...

M. Rocheleau: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement, M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Rocheleau: En somme, M. le Président, c'est une directive en même temps parce que le député de Taillon, si j'ai bien compris, demandait le Directeur général des élections pour une période d'une heure. Est-ce qu'il est en train d'amender l'amendement? Est-ce un sous-amendement? Est-ce qu'il y avait une période de temps définie?

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement, M. le député?

M. Chevrette: Ou la demande de directive.

Le Président (M. Lemieux): Ou la demande de directive.

M. Chevrette: Je pense que ce n'est pas une question de règlement parce que le député de Taillon est purement et simplement en train de démontrer au ministre jusqu'à quel point on peut être ouvert. Si le ministre disait une demi-heure, nous nous empresserions de faire la proposition d'une demi-heure. S'il nous dit qu'il veut l'entendre un quart d'heure, nous allons lui faire immédiatement un amendement d'un quart d'heure. Nous voulons au moins que le ministre soit sensibilisé aux propos que pourrait avoir le Directeur général des élections.

À ce compte, M. le Président, je pense que, si le ministre nous le faisait savoir immédiatement, nous éviterions peut-être des amendements et des sous-amendements effectivement.

M. Filion: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Sur la question de règlement, M. le député de Taiilon.

M. Filions Juste pour anticiper un peu. Si le député de Hull, le ministre délégué aux Services et Approvisionnements, désire pouvoir concourir à nos efforts de saine législation pour qu'on réduise d'une heure à une demi-heure le temps d'audition, je voudrais simplement lui dire, pour accélérer nos travaux, que, s'il dépose un amendement semblable, il nous fera plaisir d'y concourir.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taiilon, vous pouvez poursuivre votre intervention sur le sous-amendement présenté par le député de Joliette.

M. Filion: Donc, avant d'être inter- rompu, M. le Président, j'étais en train de souligner que l'important ici, c'est la matière et c'est ce qui nous intéresse, c'est le fond du sujet. Quant aux modalités, ce que veulent dire les propositions qu'on dépose, c'est qu'on est prêt à collaborer. Ce n'est pas dans des buts autres que de bonifier le projet de loi que vous présentez. Ces amendements, même s'ils devaient être rejetés, n'auraient-ils eu comme effet que de vous sensibiliser davantage aux conséquences peut-être, dans certains cas, imprévues... On ne peut pas tout prévoir, c'est impossible. Même les meilleurs légistes au monde ne prévoient pas tout. Même celui qui a fabriqué la bombe atomique n'a pas prévu l'utilisation qu'on pouvait en faire. Je ne dis pas que votre projet de loi est une bombe atomique, mais c'est peut-être une petite bombe à retardement, par exemple, pour le Directeur général des élections, pour la Commission des droits de la personne, pour le jurisconsulte, pour ('ombudsman, pour toutes les personnes qui sont nommées par l'Assemblée nationale. C'est peut-être une façon de défaire indirectement ce qui a été fait à l'Assemblée nationale directement, c'est-à-dire de consacrer l'indépendance de certaines institutions nécessaires, fondamentales et essentielles dans notre société.

Que ce soit une demi-heure, comme semblait le suggérer le ministre, ou une heure, l'important, c'est d'aller au fond des choses - le temps est précieux - et d'agir quand c'est le temps. C'est ce qu'on appelle en langage de médecine, le temps chirurgical majeur pour entendre le Directeur général des élections. Je pense qu'en une heure on a le temps de voir le problème.

Si vous pensez qu'il n'y a pas de problème, il nous le dira. S'il y en a un, on ['écoutera, on l'évaluera et, quand on aura fini de l'entendre, on pourra voter sur l'ensemble du projet de loi dans une optique éclairée, dans une optique plus totale. Je n'ai pas vu - si vous avez des exemples à nous donner, faites-le - ailleurs d'exemples où l'exécutif essaie de s'immiscer dans les travaux de ces organes vitaux de nos intitutions démocratiques. Je n'en ai pas vu. Je ne sais pas si vous en avez vu; moi, je n'en ai pas vu. (22 h 30)

Peut-être qu'on dit: Ce n'est pas notre but. Ce n'est pas cela que vous visez, j'en suis convaincu, M. le ministre. Cela a simplement cela pour effet. C'est cela qu'il faut regarder, les effets concrets. Encore une fois, lorsqu'une loi est adoptée, elle ne nous appartient plus, M. le Président. Une fois que la loi est adoptée, elle appartient aux tribunaux, point. J'ai des exemples à l'esprit concernant le sort des députés et le fonds de retraite des députés, où, une fois adoptée, la loi a des

conséquences. Là, on la regarde et on dit: Oui, mais ce n'est pas ce qu'on voulait. Mais, c'est cela qui arrivé, quand même, concrètement.

Je pense qu'on pourrait convoquer rapidement le Directeur général des élections et, encore une fois - on nous a signalé tantôt qu'il était en voyage ou possiblement à l'extérieur du Québec - je suis convaincu que son équipe et lui pourraient nous préparer rapidement un document qui pourrait être déposé à cette commission. Je sais qu'il y en a du côté ministériel qui suggèrent qu'on se déplace. Je pense que cela coûterait un peu cher.

Une voix: II est à Vancouver.

M. Filion: II est à Vancouver. D'ailleurs, j'ai posé la question au ministre tantôt sous forme interrogative douce: Est-ce qu'il y a eu une communication avec le Directeur général des élections avant le dépôt du projet de loi pour connaître son opinion sur les effets de ce projet de loi et avec les autres organismes touchés par l'article 9 du projet de loi? Ici, encore une fois, on parle du lieutenant-gouverneur et de l'Assemblée nationale. Le pouvoir législatif sera soumis au pouvoir de réglementation qui n'est aucunement défini, mais on parle d'un organisme "dont celle-ci nomme les membres et une personne qu'elle désigne." C'est vague à souhait.

Tantôt, j'avais commencé l'énumération des personnes et organismes, outre le Directeur général des élections, qui pourraient être affectés par ce projet de loi. Cette énumération n'est probablement pas exhaustive, M. le Président. Je pense que les remarques que j'adresse en ce qui a trait à la motion qui est devant vous s'appliquent également à d'autres organismes. Mais, comme le temps imparti, avec la motion de sous-amendement présentée, est limité à une heure, cela ne pose pas de problème. En ce sens, il me fera plaisir de voter pour la motion de sous-amendement à la motion d'amendement que j'ai présentée.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Taillon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion de sous-amendement?

M. Chevrette: M. le Président, afin de permettre...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: ...à tous les parlementaires de voir jusqu'à quel point on est en faveur de l'indépendance du Directeur général des élections, je demanderais le vote nominal.

Le Président (M. Lemieux): Un vote nominal, M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bélisle (Mille-îles)?

M. Bélisle: Contre.

Le Secrétaire: M. Brouillette (Champlain)?

Des voix: II est malade.

Le Secrétaire: M. Chagnon (Saint-Louis)?

Des voix: II est malade.

Le Secrétaire: M. Després (Limoilou)?

M. Després: Contre.

Le Secrétaire: M. Gobé (Lafontaine)?

M. Gobé: Contre.

Le Secrétaire: Mme Hovington (Matane)?

Une voix: Absente.

Le Secrétaire: M. Lemieux (Vanier)?

Le Président (M. Lemieux): Abstention.

Le Secrétaire: M. Polak (Sainte-Anne)?

M. Polak: Contre.

Le Secrétaire: M. Poulin (Chauveau)?

M. Poulin: Contre.

Le Secrétaire: M. Séguin (Montmorency)?

M. Séguin: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Rocheleau (Hull)?

M. Rocheleau: Contre.

Le Secrétaire: M. Garon (Lévis), absent. M. Parent (Bertrand)?

M. Parent (Bertrand): Pour.

Le Secrétaire: M. Filion (Taillon)?

M. Filion: Pour.

Le Secrétaire: M. Desbiens (Dubuc)?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Chevrette (Joliette)?

M. Chevrette: Pour, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Relativement à la mise aux voix du sous-amendement du député de Joliette, le résultat est le suivant: pour: 4, contre: 8, abstentions: 1. Le sous-amendement du député de Joliette est donc rejeté.

Une voix: Peut-être pourriez-vous lire le sous-amendement?

Le Président (M. Lemieux): Maintenant.

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Question de règlement, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, en vertu de l'article 36, nos règlements disent que, lorsqu'un député veut intervenir, il doit demander la parole au président, vous le savez. Je voudrais aussi me prévaloir des articles 66 à 69 inclusivement pour vous dire que nous n'avons pas à être taxés de quoi que ce soit quand on intervient sur un projet de loi, d'autant plus lorsque c'est pour discuter de l'indépendance d'une structure qui doit être au-dessus de tout soupçon de partisanerie et non dépendante de l'exécutif. Je pense que le député de Sainte-Anne devrait s'abstenir de tout commentaire sur nos agissements.

Le Président (M. Lemieux): Je dois vous faire part, M. le député de Joliette, que je n'ai pas entendu...

M. Chevrette: C'est pour cela que je me suis prévalu du règlement pour vous permettre d'expliciter ce que moi, j'avais entendu.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse...

M. Polak: Je n'ai rien entendu, non plus.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Chevrette: Mais vous ne me surprenez pas, par exemple.

Reprise du débat sur la motion d'amendement

Le Président (M. Lemieux): Nous revenons à la motion principale qui avait été présentée par le député de TailIon et qui était la suivante: "La motion pour consultation particulière est amendée en ajoutant, è la fin de cette motion, les termes suivants: "ainsi que le Directeur général des élections du Québec"." Nous sommes à la motion d'amendement et, sur la motion d'amendement principale, le député de Dubuc et le député de Bertrand, je crois, n'avaient pas utilisé leur droit de parole. Est-ce exact, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président, c'est exact.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc, vous avez demandé la parole?

M. (Hubert Desbiens

M. Desbiens: Oui, M. le Président. Indépendamment de la façon dont décident de se comporter les députés du gouvernement, on est face à un projet de loi dont une des parties - c'est l'objet même d'une proposition d'amendement de mon collègue de Taillon - touche directement ce que j'appellerais presque le gardien de notre système démocratique, c'est-à-dire le Directeur général des élections du Québec et cela inclut aussi, évidemment, ceux et celles qui ont, par exemple, è surveiller l'application de la politique et des lois de l'Assemblée nationale sur le financement des partis politiques, deux catégories de fonctions très importantes pour une bonne application de la démocratie au Québec. Cela étant dit, évidemment, sans croire ou vouloir d'aucune façon imaginer que le ministre, par son projet de loi, essaie ou a comme objectif de porter atteinte aux pouvoirs du Directeur général des élections, il peut très bien se faire que, quand on vote un projet de loi -mon collègue de Taillon l'a bien explicité tantôt - certaines parties, certaines formes ou certaines phrases même portent è confusion et peuvent avoir des conséquences malheureuses.

D'ailleurs, la meilleure preuve qu'on en a, c'est qu'on est, justement, appelé régulièrement, comme législateurs, à modifier des lois qui ont déjà été votées ici. Si toutes les lois étaient parfaites, il y en aurait eu seulement une, j'imagine, au début et on serait encore à vivre de cette loi. Mais on est appelé régulièrement à voter des lois qui modifient des lois déjà existantes pour corriger soit des abus ou tout simplement des erreurs d'application ou d'interprétation qui en ont été données.

Ce qu'on veut dans une loi qui touche à une fonction de l'importance de celle du Directeur général des élections, c'est, autant que faire se peut et avant même que la loi elle-même soit votée, pouvoir la corriger si

le Directeur général des élections nous soumettait une argumentation pour indiquer au ministre et à tous les députés de cette commission que certains articles ou certaines façons dont l'article est exprimé peuvent porter à confusion.

Le Président (M. Polak): II vous reste sept minutes, M. le député.

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Je ne doute pas que vous serez le gardien fidèle de mes sept minutes.

M. Chevrette: Un instant! Je voudrais savoir, M. le Président, pourquoi vous venez de faire cette remarque.

Le Président (M. Polak): Parce que je voudrais, M. le député de Joliette, que le député prenne tout son temps. Il a un long discours à faire et il lui reste sept minutes.

M. Chevrette: Non, M. le Président. Je m'excuse.

Le Président (M. Polak): Ce n'est pas à vous d'interpréter mes paroles, s'il vous plaît!

M. Chevrette: M. le Président, je demande la suspension des travaux et je vous explique pourquoi. Je veux avoir une consultation de 30 secondes avec le ministre. Est-ce que vous me permettez 30 secondes?

Le Président (M. Polak): Oui, absolument. Il n'y a pas de problème. Nous suspendons les travaux pour 30 secondes.

(Suspension de la séance à 22 h 41)

(Reprise à 22 h 42)

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: Je disais donc, M. le Président, que cela fait maintenant tout près de dix ans que je siège ici même et je ne serais pas même en mesure de dire combien de projets de loi ont dû être votés pour modifier ou corriger des lois déjà existantes. La plupart de nos projets de loi, d'ailleurs, sont des corrections. Dans le cas présent, évidemment, il s'agit de créer un nouveau ministère. Mais il y a un nombre considérable de projets de loi, donc, qui sont présentés ici pour étude et qui viennent corriger d'autres projets de loi.

L'esprit qui avait été manifesté, je pense, par la vice-première ministre dans son message inaugural en décembre dernier, c'était, comme on nous le disait - je ne répéterai, évidemment, pas nécessairement le mot à mot, mais l'intention du gouvernement exprimée par la vice-première ministre - de faire moins de législation, pour résumer, mais de la faire mieux. La façon de la mieux faire, je crois, est de se donner, aux diverses étapes de l'étude des projets de loi, tous les moyens suffisants ou que nous permet l'Assemblée nationale ou notre règlement pour s'assurer que chacun des membres des commissions, chacun des députés qui sont appelés à étudier et à voter les projets de loi, puisse obtenir toutes les informations suffisantes pour voter en toute conscience et avec le plus d'éclaircissements possible ces articles de loi, ces projets de loi. D'où l'importance plus grande encore quand il s'agit, comme ici, M. le Président, d'un article d'un projet de loi qui risque d'interférer sur une des fonctions les plus fondamentales au point de vue de notre système démocratique, celle de la Direction générale des élections, ce qui inclut, évidemment, aussi le financement des partis politiques.

Il est bien certain que je souscris à la proposition d'amendement de mon collègue, le député de Taillon, qui demande, comme le ministre n'a pas voulu accepter que ce soit pour une durée limitée, au moins d'inviter le Directeur général des élections du Québec à venir ici pour nous exprimer son opinion sur ce projet de loi. Cela m'apparaît nécessaire et je souscris à cet amendement. Je vous remercie.

Le Président (M. Lemieux): Avez-vous terminé, M. le député de Dubuc? M. le député de Bertrand, vous avez la parole sur la motion d'amendement présentée par le député de Joliette. Pardon, par M. Filion. Excusez-moi, par le député de Taillon. J'ai deux feuilles et...

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): II s'agit, en effet, de la motion qui spécifie de demander au Directeur général des élections de comparaître devant cette commission. J'en ai dit quelques mots tantôt. On ne voudrait pas être redondants, on ne voudrait pas être insistants, mais, devant l'attitude du ministre face à nos propos, je dirais que c'est quelque peu décourageant et démobilisant, parce que j'ai un peu l'impression que, de ce côté-ci, on prêche dans le vide. On essaie de convaincre les députés ministériels du bien-fondé, parce que j'ai l'impression, M. le Président, qu'il y a des députés qui n'ont pas suivi, du côté ministériel, l'essence même, le bien-fondé de la comparution devant cette commission du Directeur général des élections.

Mais, dans l'article 9, on dit essentiellement: "Pour l'application de la présente loi, sont assimilés à des organismes

publics", en plus du lieutenant-gouverneur et de l'Assemblée nationale, "une personne qu'elle désigne pour exercer une fonction en relevant, avec le personnel qu'elle dirige". Lorsqu'on parle du Directeur général des élections, cela devient quelque chose de très important, de voir comment le Directeur général des élections, à l'intérieur de cet article 9 du projet de loi 68, va se sentir pour manoeuvrer à l'intérieur de ses différentes fonctions.

Comme l'a si bien exprimé le député de Joliette précédemment, la question fondamentale qu'il faut se poser - je la repose en mes termes aux membres de cette commission et au ministre qui suit avec beaucoup d'attention les propos de cette commission, et je l'apprécie - Est-ce qu'on veut essentiellement changer quoi que ce soit dans la liberté d'action, dans la liberté d'expression, dans la marge de manoeuvre, dans l'indépendance que doit avoir, entre autres, le Directeur général des élections?

Je pense qu'autant les députés de ce côté, les députés de l'Opposition, et les députés ministériels seront d'accord de façon unanime, M. le Président, a acquiescer à ce bien-fondé qu'il faut, à tout prix, que le Directeur général des élections garde toute sa marge de manoeuvre. Du fait que cette personne se voit un peu chapeautée sous l'égide de ce ministère et sous l'égide de cet article, en particulier, je pense qu'il est important que les membres de la commission - tous les membres - aient la chance de poser quelques questions, pour savoir, dans des cas très précis, ce qui se passerait ou ce qui va se passer. Parce que cela a l'air de rien, on adopte un article comme celui-là, trois ou quatre lignes. On n'a pas l'impression qu'on cause beaucoup de dommages jusqu'au moment où on risque de se retrouver, et ce sera le ministre tuteur, parrain de la loi, qui va se retrouver avec le problème sur les bras. Nous, simples députés dans l'Opposition, on ne pourra que blâmer le gouvernement pour avoir finalement placé dans cette situation le Directeur général des élections, mais il sera trop tard.

Ce que je voudrais, avant que quelques-uns de ces articles - particulièrement l'article 9 auquel on fait référence - soient coulés dans le béton à tout jamais par des adoptions lorsqu'on passera à travers le projet de loi 68, c'est entendre la personne dont il est particulièrement question ici, qu'elle puisse venir s'exprimer devant cette commission.

Si on ne le fait pas, M. le Président, on risque, a mon avis, de manquer beaucoup d'éclairage. Je pense que le ministre est le premier à se priver de lumière, d'éclairage à la suite de la discussion, de l'échange qui pourrait avoir lieu lors de cette comparution.

Je pense même qu'on s'aventure dans un dangereux précédent qui ferait en sorte que le ministre, avec une loi - je l'ai dit au tout début - comme celle-ci qui lui donne énormément de pouvoirs, vienne très particulièrement dans le cas du Directeur général des élections, le brimer ou le placer dans des situations qui pourraient, à certains moments... Peut-être que cela n'arrivera pas, sauf qu'il faut prévoir. On aura beau discuter entre nous, on aura beau poser des questions et le ministre aura beau s'entretenir avec ses conseillers, mais c'est trop important -on sait la tâche qu'a à assumer le Directeur général des élections - pour qu'on puisse se priver de ses commentaires et de ses réflexions face à cela. Si, à la suite de cette brève comparution devant la commission, le ministre et nous-mêmes nous rendons à l'évidence que, non, vraiment, il n'y a pas de danger et que vraiment nous nous retrouvons dans une position confortable de part et d'autre, je peux vous assurer que je serai le premier à dire: Bon, voilà! Je suis satisfait.

Nous avons l'air peut-être un peu curieux dans l'Opposition parfois parce que nous sommes là à scruter. Certains pourront dire que nous cherchons des poux où il n'y en a pas. Je vous dis qu'on ne prend jamais assez de précautions. L'insistance que nous apportons pour faire comparaître le Directeur général des élections, c'est une insistance justifiée en raison du principe qu'elle sous-tend et parce que la seule façon d'avoir l'éclairage qui nous manque, c'est par la comparution du Directeur général des élections. Je ne vois pas et je ne comprends pas pourquoi le ministre ne veut pas donner suite à nos demandes qui sont, à mon avis, très légitimes parce que lui-même se place dans une position très délicate. M. le Président, il ne s'agit pas pour nous de l'Opposition, veuillez me croire, de vouloir marquer des points en disant: Nous l'avons fait comparaître. Je dis que, si le ministre peut se rendre à l'évidence que le point que nous lui avons soulevé est un point suffisamment important, je crois qu'il va en sortir lui-même grandi. Il pourra dire que c'est pour le bien du ministère, son bien personnel en tant que personne qui aura à administrer cette loi et ce ministère, mais particulièrement le Directeur général des élections ne se retrouvera pas dans une position dite délicate.

Parce qu'il pourra être placé dans une position délicate, comme l'ont si bien mentionné le député de Joliette et aussi mon collègue, le député de Taillon, dans des cas très précis, d'ailleurs. Il y a eu ce soir une mise en situation qui a été faite au tout début des interventions. Mon collègue, le député de Taillon, a apporté trois ou quatre situations très pertinentes, d'ailleurs, dans lesquelles le Directeur général des élections pourrait se retrouver, dans une période dite préélectorale ou électorale, face au ministère

et face aux pouvoirs qu'a le ministre par l'article 9 de son projet de loi 68, dans une situation qu'on pourrait dire pour le moins délicate. Les députés ministériels seront les premiers à dire: Bien, c'est quelque chose qu'on n'avait pas vu. C'est une précaution qu'on n'avait pas prise. S'il n'y a rien, je vous dirai tant mieux, M. le Président, nous allons passer è d'autres éléments si on s'en convainc. Pour moi, la seule façon de s'en convaincre, c'est effectivement qu'on puisse entendre et poser des questions au Directeur général des élections. J'espère, pour une dernière fois, que le ministre va acquiescer...

Le Président (M. Lemieux): II vous reste environ 30 secondes, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): ...à cette demande dont on veut bien lui faire part et qu'il va permettre cette comparution, si brève soit-elle, devant les membres de cette commission. Je vous remercie.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement présenté par le député de Taillon? M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît, sur l'amendement.

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, simplement quelques minutes pour exprimer mon opinion. Qu'il s'agisse de cette motion, comme, d'ailleurs, de toutes les motions présentées jusqu'à maintenant, c'est de la pure obstruction et je me demande vraiment si la population paie...

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

M. Polak: Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, il y a une question de règlement soulevée par le député de Joliette. En vertu de l'article 39 du règlement, allez-y, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: À ce moment-ci, la motion, à ce que je sache, est de convoquer le directeur des élections et non pas de juger des propos qui ont été tenus par l'Opposition.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Joliette?

M. Chevrette: Oui, je pense que c'est assez clair.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Joliette. M. le député de Sainte-Anne, je voudrais simplement vous faire remarquer qu'effectivement vous avez un droit de parole sur l'amendement qui a été proposé par le député de Taillon à la suite de la motion principale présentée par le député de Joliette, à savoir d'avoir à entendre le Directeur général des élections. J'aimerais aussi vous mentionner, M. le député de Sainte-Anne, que les raisons pour lesquelles une motion d'amendement est présentée n'ont pas à être prises en considération.

M. Polak: M. le Président, je n'ai pas à recevoir de leçon...

Le Président (M. Lemieux): Oui?

M. Polak: ...certainement, de la part du député de Joliette.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

M. Polak: D'aucune manière, et je parle sur cette motion comme j'ai le droit de parler là-dessus.

Le Président (M. Lemieux): Question de règlement, M. le député de Sainte-Anne. M. le député de Joliette sur la question de règlement, s'il vous plaît.

M. Chevrette: Je n'ai pas soulevé de question de règlement pour donner une leçon au député de Sainte-Anne. C'est purement et simplement pour faire appliquer des règles de procédure dans cette Assemblée. Je vous prierais de faire respecter vraiment le règlement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, M. le député de Joliette est en droit, effectivement, de soulever une question de règlement. Vous avez votre droit de parole, en vertu de l'article 209, relativement à l'amendement présenté par le député de Taillon. M. le député de Sainte-Anne, voulez-vous, s'il vous plaît...

M. Polak: M. le Président, il y a tellement d'amendements.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Sainte-Anne?

M. Polak: Pourriez-vous me relire...

Le Président (M. Lemieux): Oui, je vais vous le relire.

M. Polak: Parce que le député de Joliette, la manière dont il est assis, pendant dans sa chaise, avec les deux pattes en l'air,

cela m'énerve un peu. Pourriez-vous me relire le texte de cet amendement?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, je vous en prie, un peu de décorum, s'il vous plaît!

M. Polak: Oui, s'il vous plaît, dites donc au député de Joliette qu'il doit s'asseoir avec décorum sur sa chaise.

Le Président (M. Lemieux): Vous savez, M. le député de Sainte-Anne, qu'en vertu de...

M. Polak: Bon, là, il est assis normalement.

Le Président (M. Lemieux): ...l'article 32, troisième paragraphe, les députés doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui et au bon fonctionnement de l'Assemblée, et cela s'applique ici, en commission.

La motion principale, pour le bénéfice du député de Sainte-Anne, se lisait comme suit: "Que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique". L'amendement présenté par le député de Taillon y ajoutait ceci: "ainsi que le Directeur général des élections du Québec". Vous avez votre droit de parole sur l'amendement présenté par le député de Taillon, en vertu de l'article 209 des règles de procédure, et, à ce que je sache, aucun membre des deux groupes parlementaires n'a essayé, d'aucune façon que ce soit, de faire de l'obstruction à cet effet. M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Polak; Pour ceux qui, peut-être, auront le malheur de relire ce qui a été dit par les députés de l'Opposition jusqu'à maintenant sur cette motion concernant...

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Question de règlement, M. le député de Joliette.

M. Polak: ...le Directeur général des élections... Est-ce que le député de Joliette a encore quelque chose à dire, M. le Président?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que je peux me permettre, une fois pour toutes, de vous demander de faire observer le règlement?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, le député de Sainte-Anne, dans les quelques mots qu'il a ajoutés, environ une dizaine de mots...

M. Chevrette: Désobéissant formellement en partant.

Le Président (M. Lemieux): Une dizaine de mots. Permettez-moi, M. le député de Joliette, de continuer à entendre le député de Sainte-Anne et, s'il advenait que le député de Sainte-Anne aille à rencontre de son droit de parole relativement à la motion d'amendement qui est présentée par le député de Taillon, je vais le lui faire savoir. M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Pourriez-vous encore une fois demander au député de Joliette... Il fait encore la même chose au point de vue de son comportement; regardez donc comment il est assis sur sa chaise.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, je vous en prie, s'il vous plaît! M. le député de Sainte-Anne, chacun a une façon de s'asseoir dans un fauteuil. M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Polak: Ce n'est pas s'asseoir du tout; c'est pendre, dormir dans un fauteuil.

M. Chevrette: Aïe, il y a des limites là!

Le Président (M. Lemieux): À cette heure-ci, M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît! Vous avez la parole sur l'amendement du député de Taillon.

M. Polak: À cette heure-ci, à 23 heures, en ce qui concerne l'amendement pour demander la présence du Directeur général des élections... Je viens de dire...

Le Président (M. Lemieux): Écoutez, M. le député de Sainte-Anne, vous avez la parole. S'il vous plaît, je ne veux pas faire de rappel à l'ordre, M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: Mais avez-vous vu ce que le député de Joliette a fait. Ce n'est pas possible. Encore une fois il m'interrompt, il fait des gestes, il crie.

M. Gobé: II a raison, M. le Président. M. Polak: II a quelque chose.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, s'il vous plaît!

M. Polak: Tout le monde est... On peut le voir de ce côté-là.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, écoutez!

M. Polak: Comme je disais...

M. Parent (Bertrand): M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand! Écoutez, s'il vous plaît! Je vais suspendre une minute. Je suspends une minute.

(Suspension de la séance à 23 h 1)

(Reprise à 23 h 2)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous reprenons les travaux relativement à l'étude du projet de loi 68. M. le député de Sainte-Anne, sur l'amendement proposé par le député de Taillon.

M. Polak: Merci, M. le Président. En ce qui concerne l'amendement afin d'appeler le directeur général devant cette commission pour témoigner, comme je l'avais dit tout à l'heure avant que je sois rudement interrompu par le député de Joliette, il n'y a aucune raison d'appeler le directeur général ici devant nous et l'Opposition le sait très bien. Cette motion, M. le Président, est exactement la même motion qui est présentée ce soir devant toutes les autres commissions. Ce n'est même pas intelligent de demander au directeur général de venir témoigner devant nous parce qu'on se répète simplement: devant n'importe quelle commission, on invite quelqu'un à venir témoigner. Je pensais que l'Opposition était au moins un peu plus intelligente que cela.

M. le Président, je voulais simplement faire le point et dire qu'il n'est aucunement nécessaire d'avoir le directeur général à cette commission et que je voudrais que ce soit enregistré au cas où il y en aurait qui diraient, à un moment donné: Où sommes-nous? Ils vont le savoir. Nous sommes devant l'Assemblée nationale, devant la commission du budget et de l'administration et l'Opposition est en train de se comporter comme des enfants vraiment enfantins et puérils - cela veut dire quelque chose - y inclus le député de Joliette.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne!

M. Polak: C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Sainte-Anne. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion?

M. Rocneleau: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau; ...si vous me le permettez, après avoir entendu les arguments de mes collègues de l'Opposition, je voudrais assurer mes collègues que, lorsque nous étudierons article par article le projet de loi 68, on pourra s'arrêter et examiner ensemble l'article 9 qui semble comporter des problèmes particuliers pour l'Opposition. Je tiens quand même a souligner, M. le Président, que, de toute façon, le Directeur général des élections est à l'extérieur du Québec. Sûrement que l'Assemblée nationale est en mesure de disposer de ce projet de loi normalement et de faire l'examen de chacun des articles que comporte ce même projet de loi. Si nous avions l'opportunité d'amorcer l'étude article par article, nous serions en mesure de pouvoir analyser ces mêmes articles, M. le Président et, à l'occasion, d'avoir une discussion de fond et sûrement d'apporter quelque chose à cette commission. Même, il se pourrait, M. le Président, que nous apportions...

M. Polak: Excusez-moi, M. le Président. Le député de Joliette me dérange beaucoup. Il est encore en train... La porte ouverte...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Polak: Je ne pourrai pas suivre les paroles du ministre.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne...

M. Polak: II se promène, la porte est ouverte.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je m'excuse, sur une question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Je peux sortir quand je veux de cette Chambre, M. le Président, et c'est mon privilège. Je m'excuse, on peut bien niaiser...

M. Polak: Mais fermez la porte.

M. Chevrette: ...mais on ne supportera pas cela toute la veillée, M. le Président. Je pense que vous avez tous les outils pour faire respecter le règlement. Demandez au député et à la formation politique...

M. Polak: Fermez la porte.

M. Chevrette: Je n'ai pas fini ma question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Chevrette: S'il le faut, M. le Président, je vais faire appel à la formation politique libérale ou gouvernementale pour faire respecter nos droits et ils comprennent exactement ce que je veux dire. Je ne voudrais pas aller plus loin dans mes propos jusqu'à maintenant, mais là, je commence...

Le Président (M. Lemieux): Et moi... M. Chevrette: ...à en avoir assez.

Le Président (M. Lemieux): ...pour chacun des groupes parlementaires, je vais me permettre de citer l'article 42. Je n'hésiterai pas à l'appliquer si tel doit être le cas. Il dit ceci: "Le président peut retirer la parole à un député pour le reste de la séance si celui-ci ne se soumet pas à deux rappels à l'ordre consécutifs. "Si le député ne respecte pas l'interdiction prononcée contre lui, le président l'avertit une dernière fois. S'il ne se soumet toujours pas, le président peut ordonner son exclusion de l'Assemblée pour le reste de la séance."

Je n'hésiterai pas à employer, pour quiconque des deux groupes parlementaires, l'article 42. M. le ministre, vous aviez la parole.

M. PolaK: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, j'ai rendu une décision. Respectez l'article 41, deuxième paragraphe, s'il vous plaît!

M. Polak: J'aimerais seulement répondre, M. le Président, que...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, nous ne sommes pas...

M. Polak: Je pense, pour rétablir les faits, que la porte...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, il ne s'agit pas d'engager une polémique devant cette commission. Il s'agit de procéder, selon le mandat donné par l'Assemblée, è l'étude détaillée du projet de loi 68. Nous avons une motion du député de Joliette pour consultation particulière. Nous avons aussi un amendement du député de... Un instant.

Des voix: De Taillon.

Le Président (M. Lemieux): ...Taillon. Alors, la parole est au ministre relativement à l'amendement du député de Taillon.

M. Rocheleau: J'avais conclu, M. le Président. Je suis prêt, quand l'Opposition le souhaitera, à analyser le projet de loi article par article.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement proposé par le député de Taillon à la motion principale du député de Chevrette... de Joliette? Je m'excuse, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Demande de...

Le Président (M. Lemieux): Demande de directive, M» le député?

M. Parent (Bertrand): ...directive. Est-ce que vous permettriez, à la suite des propos du ministre, que je lui pose très brièvement une question ou deux, si c'est possible, particulièrement sur le fait que la personne à qui on demande de se présenter ici soit à l'extérieur du Québec actuellement? Est-ce que je pourrais poser rapidement une ou deux questions?

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que c'est une question suivant... "Tout député peut demander la permission de poser une question au député qui vient de terminer une intervention. La question et la réponse doivent être brèves." Mais je crois que cela ne s'applique qu'en Chambre. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Chevrette: On est devant une demande...

Le Président (M. Lemieux): II y a consentement, M. le ministre?

M. Chevrette: Cela prend l'autorisation de celui qui veut...

Le Président (M. Lemieux): Est-ce que

vous acceptez que le député de Bertrand vous pose une question?

M. Rocheleau: Au loisir du député de Bertrand, oui.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Le ministre nous a répondu bien calmement qu'il n'avait, à toutes fins utiles, pas d'objection è faire comparaître le Directeur général des élections comme on le demandait, sauf qu'il est à l'extérieur du Québec, d'après ce que j'ai compris. Est-ce qu'il y aurait lieu d'avoir ses adjoints, comme c'est mentionné ici? Ou est-ce que le ministre, par ses propos, voulait dire qu'il n'est pas plus d'accord que cela de le faire comparaître? Je vaudrais seulement qu'il puisse clarifier ses propos*

M. Rocheleau: De toute évidence, M. le Président, dans ce que j'ai mentionné, je n'ai pas dit que j'acceptais que le Directeur général des élections soit invité à participer è cette commission. J'ai mentionné que le Directeur général des élections est à l'extérieur du Québec actuellement, qu'il est dans l'impossibilité de venir, de toute façon, et que nous aurions la possibilité, lors de l'étude du projet de loi article par article, de nous arrêter à l'article 9 pour examiner l'ensemble de la situation et aussi apporter certains correctifs, s'il y a lieu, bien entendu, M. le Président.

M. Parent (Bertrand): Cela me va.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion d'amendement du député de Taillon? Il n'y a pas d'autres interventions. Alors, je dois procéder à la mise aux voix de l'amendement du député de Taillon avant de poursuivre sur la motion principale du député de Joliette. M. le secrétaire, s'il vous plaît!

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Bélisle?

M. Bélisle: Contre.

Le Secrétaire: M. Brouillette est malade. M. Chagnon?

Des voix: Malade.

Le Secrétaire: M. Després?

M. Després: Contre.

Le Secrétaire: M. Gobé?

M. Gobé: Contre.

Le Secrétaire: Mme Hovington? M. Lemieux?

Le Président (M. Lemieux): Abstention.

Le Secrétaire: M. Polak?

M. Polak: Contre.

Le Secrétaire: M. Poulin?

M. Poulin: Contre.

Le Secrétaire: M. Séguin?

M. Séguin: Contre.

Le Secrétaire: M. Dubois?

M. Dubois: Contre.

Le Secrétaire: M. Rocheleau?

M. Rocheleau: Contre.

Le Secrétaire: M. Garon, absent. M. Parent?

M. Parent (Bertrand): Pour.

Le Secrétaire: M. Filion?

M. Filion: Pour.

Le Secrétaire: M. Desbiens?

M. Desbiens: Pour.

Le Secrétaire: M. Chevrette?

M. Chevrette: Pour.

Le Président (M. Lemieux): Relativement à la mise aux voix de l'amendement soumis par le député de Taiilon, le résultat est le suivant: pour: 4, abstentions: 1, contre: 8. L'amendement du député de Taiilon relativement à la motion principale du député de Joliette est donc rejeté. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion principale du député de Joliette? M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: J'ai droit à dix minutes complètes, M. le Président, est-ce bien cela?

Le Président (M. Lemieux): Oui, M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: J'espère, M. le Président, que je n'aurai pas à utiliser tout ce temps, mais il reste quand même que la motion principale d'amendement pour consultation particulière qui visait à faire entendre les représentants du Syndicat canadien de la fonction publique, soumise par mon collègue

député de Joliette, m'apparaît toujours revêtir la même importance. Le ministre a certainement, j'en suis convaincu, l'intention, puisqu'il va travailler complètement dans du neuf si on peut dire, de mettre sur pied un ministère complètement nouveau. Je ne doute pas que ses intentions soient d'en faire sans doute un ministère modèle. Il a eu des avis de ses fonctionnaires et des responsables de la législation pour préparer et nous présenter ce projet de loi 68. Je ne doute pas, non plus, que ceux et celles qui ont procédé à l'élaboration et à l'écriture de ce projet de loi y aient mis beaucoup d'efforts pour soumettre à leur ministre un projet de loi qui lui permettra, dans les mois et les années à venir, d'exercer son autorité sur son ministère, puis de le faire fonctionner de la meilleure façon possible, selon les objectifs que le gouvernement lui-même a à l'esprit.

Or - c'est, justement, de cela qu'on semble douter de l'autre côté - notre intention ici est, bien sûr, puisque c'est la décision gouvernementale, de nous assurer que, par son projet de loi, son ministère ait toutes les possibilités futures de se développer et de fournir les services qu'il en espère. C'est un point important. Le ministre aura à vivre avec plusieurs fonctionnaires en provenance de divers organismes et ces fonctionnaires, évidemment, pour protéger leurs intérêts, font partie de syndicats. Il est très important, pour l'avenir des relations que le ministre aura avec ces gens, qu'il y ait dès le départ une relation bien établie qui assure le ministre, en même temps que les travailleurs et travailleuses en question, que les objectifs et la façon de fonctionner de ce ministère permettront a tout le monde de travailler dans les meilleures conditions possible et ainsi, sûrement selon l'un des objectifs du ministre, d'assurer la meilleure productivité possible, si on peut parler de productivité ici, à son personnel. (23 h 15)

C'est pourquoi il m'apparaît important de revenir sur cette motion principale du député de Joliette pour tenter, encore une fois, de convaincre le ministre et nos collègues du gouvernement qui siègent à cette commission, s'ils ne veulent pas rencontrer tous les syndicats, ou moins qu'on puisse recevoir un son de cloche d'un d'entre eux, soit le Syndicat canadien de la fonction publique, afin de nous éclairer sur les différentes modalités, par exemple, de transferts des pouvoirs qui peuvent se produire, qui vont devoir se produire nécessairement, peut-être également sur certains éléments qui ont pu échapper, malgré toutes les précautions que le ministre et ses fonctionnaires et tous ceux qui ont participé à la préparation de cette loi ont pu y mettre, à leur attention et qui pourront ensuite créer des ennuis ou des problèmes au ministre dans le fonctionnement de son ministère.

Je rappelle l'exemple que je donnais au ministre plus tôt aujourd'hui. On a eu un exemple assez frappant des difficultés que peuvent entraîner des actions ou des gestes posés par le gouvernement ou par un ministre en particulier avec le Manoir Richelieu. On sait tout ce que cela entraîne comme difficultés au ministre du Tourisme pour avoir procédé peut-être sans consultation assez complète avec le syndicat qui représentait les 350 travailleurs du Manoir Richelieu.

C'est avec ces raisons è l'esprit que nous aimerions, que nous voudrions, que nous croyons qu'il serait utile pour tous les membres de la commission et pour le ministre de pouvoir entendre au moins un des syndicats en cause, ce qui pourrait apporter un éclairage aux différents membres de la commission, qui auront tantôt à décider, à étudier avant de voter un par un les articles que contient ce projet de loi.

Il reste que toutes ces raisons et toute cette argumentation qui ont été présentées par mon collègue, le député de Joliette, et mes autres collègues de l'Opposition, le député de Taillon, le député de Bertrand, concernant la consultation particulière du Syndicat canadien de la fonction publique, sont en soi excellentes, mais, M. le Président, je l'avais soulevé dans mon intervention préliminaire. J'avais attiré l'attention de façon toute particulière sur...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Dubuc, j'aimerais vous faire remarquer qu'il vous reste deux minutes.

M. Desbiens: Merci. J'avais attiré l'attention des membres de la commission, dans ma première intervention sur les remarques préliminaires, sur les deux aspects qui m'apparaissaient très importants, soit sur la réglementation et aussi, justement, sur ce fameux article 9 concernant l'Assemblée nationale et les différents organismes ou fonctions qui sont reliés à l'Assemblée nationale.

Comme le ministre n'accepte pas d'entendre, évidemment, le Directeur général des élections parce qu'entre autres, dit-il, il n'est même pas au Canada - je ne sais pas si c'est au Canada même ou dans la province, mais il est absent et à l'extérieur - je pense et j'en ferai motion...

Le Président (M. Lemieux): Vous faites motion, M. le député de Dubuc, afin que...

Motion d'amendement proposant d'entendre aussi le président de l'Assemblée nationale

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Je ferai motion, M. le Président, en amendement à la motion

principale, pour demander au président de l'Assemblée nationale de venir, peut-être, participer à nos travaux pour nous apporter un certain éclairage. La motion se lirait comme suit, M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Pouvez-vous m'en fournir une copie écrite, M. le député de Dubuc?

M. Desbiens: Oui, si c'est cela qui est le mieux.

M. Poulin: Ils font perdre le temps...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Chauveau, s'il vous plaît!

La motion présentée par le député de Dubuc à la motion principale du député de Joliette se lirait comme suit: Que la commission, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives, procède à des consultations particulières en entendant le Syndicat canadien de la fonction publique, ainsi que le président de l'Assemblée nationale.

La motion d'amendement du député de Oubuc est recevable. M. le député de Oubuc, vous êtes l'auteur de la motion et vous avez, en vertu de l'article 209, paragraphe 2, une période de 30 minutes pour pouvoir vous exprimer sur la motion.

M. Gobé: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): S'agit-il d'une question de règlement, M. le député de Lafontaine?

M. Gobé: Oui, M. le Président. Sinon, est-ce que...

Le Président (M. Lemieux): Sur quel article, M. le député de Lafontaine, s'il vous plaît?

M. Gobé: Une directive, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Une directive en vertu de quel article, M. le député de Lafontaine?

M. Gobé: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): Allez-y, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: ...sur le discours que le député de Oubuc vient de terminer, est-ce qu'il accepterait que je lui pose une question?

M. Chevrette: En vertu de l'article 213, on verra après. Il faut toujours bien, M. le Président, sur la question de règlement, qu'un individu ait fait son discours avant qu'on l'interroge sur son discours.

M. Gobé: Sur ce qu'il vient de dire maintenant, précédemment.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, j'aimerais, s'il vous plaît, vous faire état de l'article 213 qui est à l'effet suivant...

M. Gobé: Non, mais ce n'est pas une question piège, c'est une demande d'information.

Le Président (M. Lemieux): Si vous voulez poser une question au député de Oubuc, il faudra qu'il ait terminé son intervention. Ce n'est pas le cas pour le moment. M. le député de Oubuc, vous avez la parole sur la motion d'amendement que vous avez présentée et que j'ai jugée recevable. Vous avez 30 minutes, en vertu de l'article 209, paragraphe 2, des règles de procédure.

M. le député de Dubuc.

M. Desbiens: M. le Président, j'ai compris, je pense, que le député de Lafontaine voulait me poser une question sur mon intervention...

M. Gobé: Précédente.

M. Desbiens: ...précédente, mais la motion a été faite entre-temps.

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, mais entre les deux... S'il vous plaît, M. le député de Joliette. Entre les deux, M. le député de Lafontaine, vous auriez dû vous exprimer avant que la motion...

M. Gobé: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine, vous m'avez demandé la parole après que la motion du député de Dubuc eut été présentée et jugée recevable.

M. Gobé: Mais il ne s'est passé que 15 secondes entre les deux.

Le Président (M. Lemieux): Oui, mais cela a été suffisant pour que la motion soit jugée acceptée et lue, M. le député de Lafontaine.

M. le député de Oubuc, vous avez la parole.

M. Desbiens: Je vous remercie, M. le Président. Il nous faut répéter, évidemment,

certaines argumentations dans le cas de ce projet de loi et toujours avec le même esprit, d'essayer de faire voir au ministre qu'il nous semble, comme je l'avais exprimé dans mon discours préliminaire, que l'article 9 comporte certains dangers face à la pérennité de l'Assemblée nationale. Je veux dire que l'Assemblée nationale est au-dessus de tout, elle passe avant tout. C'est l'Assemblée du peuple québécois, par ses élus.

Et, si on examine bien les articles, il faut pour cela, je pense, reprendre les fonctions et pouvoirs du ministre dans l'article 7. "Le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition..." Dans le deuxième paragraphe, il est dit: "Il veille à l'application de ces politiques, en coordonne l'exécution et peut, à ces fins, prendre des règlements." Je m'étonne un peu du terme, soit dit en passant, "prendre des règlements". Ces règlements que le ministre aura le pouvoir de prendre, si j'utilise l'expression même du texte, ils ne sont pas exprimés, ne sont pas balisés, ne sont pas déterminés dans la loi elle-même. À l'article 8, "Les fonctions et pouvoirs du ministre consistent particulièrement à: 1° établir avec les ministères, organismes... 2° obtenir des ministères et organismes désignés par le gouvernement l'inventaire des biens... 3° prendre les mesures nécessaires pour obtenir le meilleur rapport qualité/coût lors de l'acquisition... 5° s'acquitter des autres devoirs que lui assigne le gouvernement."

L'article 9 de la présente loi nous dit: Pour l'application de la présente loi, les règlements, qu'il va avoir le pouvoir de préparer et de déterminer, d'écrire et de mettre en vigueur, selon l'article 7, vont s'adresser aussi au lieutenant-gouverneur et à l'Assemblée nationale. Encore une fois, ce n'est pas le ministre que l'on met en cause, mais il m'apparaît que ces pouvoirs qu'il va se donner par règlement pourront avoir des conséquences, indirectes peut-être, mais des conséquences quand même, sur le déroulement, le fonctionnement ou les décisions même, parfois, peut-être, de l'Assemblée nationale. Il faut bien nous assurer qu'il y ait un éclairage complet de la part du président de l'Assemblée nationale, parce que là, écoutez, si le gouvernement ou, si le ministre se donne maintenant le pouvoir d'obliger... Sans mauvaise volonté sans doute, mais par la force des choses, par le fonctionnement de sa réglementation de son ministère, il peut être amené à prendre des décisions qui, d'une certaine façon, indirectement sans doute, peuvent quand même venir brimer la souveraineté même de l'Assemblée nationale, ce qui serait, évidemment, incroyable à proprement parler. C'est pour cela qu'il est important que le président de l'Assemblée nationale puisse se présenter devant nous.

Je pense que le président de l'Assemblée nationale, en tant que personne, de par sa formation, mais aussi, je pense, grâce à son personnel et à la connaissance qu'il a surtout des pouvoirs de l'Assemblée nationale, serait sans doute en mesure, ici, soit de lui-même, soit en réponse aux questions que les membres de la commission pourraient lui poser, de nous faire voir et de faire voir au ministre et aux députés quelles pourraient être les embûches que peut représenter un article comme l'article 9. Si, comme je l'espère, bien sûr, le président était en mesure, par sa comparution et par ses représentations, de nous indiquer que le projet de loi ne peut d'aucune façon entacher les pouvoirs de l'Assemblée nationale, tant mieux. Je pense que cela rassurerait tout le monde, les députés et les ministres, mais aussi la population en général. La population élit avant tout, et c'est là que sont concentrés les pouvoirs, l'Assemblée nationale. La souveraineté de l'Assemblée nationale ne peut être en aucune façon mise en cause. Il est donc absolument important que les membres de la commission, avant de voter le projet de loi, soient en mesure de s'assurer que le président de l'Assemblée nationale - l'Assemblée nationale par son président - indique aux membres de cette commission qu'il n'y a pas, dans l'article 9, par exemple, d'atteinte à la souveraineté de l'Assemblée nationale. Si, par ailleurs, le président, par l'étude qu'il a sans doute faite de ce projet de loi, s'est rendu compte qu'il y aurait des interventions ou qu'il y aurait peut-être des modifications è apporter audit article 9 pour assurer toujours cette protection des droits souverains de l'Assemblée, je pense que le ministre sera à ce moment-là sans doute heureux lui aussi de l'apprendre et de pouvoir, immédiatement, apporter les correctifs qu'il jugera à propos. (23 h 30)

Encore une fois, évidemment, nous sommes ici pour voter les lois. Nous essayons, chacun au meilleur de sa connaissance, d'y apporter toute notre contribution. Mais, pour cela, je pense qu'il est nécessaire que des renseignements supplémentaires nous parviennent des personnes ou des groupes directement touchés par ce projet de loi. Je crois que c'est la meilleure façon de s'assurer que ces projets de loi contiennent le moins d'erreurs possible, soient les meilleurs possible et répondent de la meilleure façon aux objectifs que se fixent à la fois le gouvernement et l'ensemble des législateurs, les députés.

Je pense qu'il faut voir cet amendement que je propose ici dans cette optique et j'espère que le ministre acceptera, dans le cas de l'Assemblée nationale évidemment, l'instance suprême, si on peut dire, qu'on reçoive ici, qu'on écoute et qu'on

questionne le président de l'Assemblée nationale.

Je ne veux pas allonger indûment le temps de la commission, mais j'aimerais, M. le Président, que le minière - peut-être peut-il le faire immédiatement dans le cas du président de l'Assemblée nationale -réponde affirmativement à la demande ou à la suggestion que je lui fais via cette motion et permette ainsi à tous et à chacun d'avoir les renseignements suffisants pour qu'on puisse finalement se mettre à l'étude de ce projet article par article, une fois pour toutes. Depuis cet après-midi qu'on discute en commission parlementaire pour essayer d'obtenir des assurances suffisantes pour nous mettre en chemin et étudier ce projet de loi article par article, une fois pour toutes.

Je sais que le ministre est intéressé et qu'il veut, avant toute chose, s'assurer que son projet de loi soit voté le plus tôt possible pour pouvoir accomplir sa tâche de ministre. Le plus vite on aura entendu et obtenu les renseignements qu'on désire, le plus vite le ministre pourra aussi obtenir l'approbation pour son projet de loi et se mettre à l'ouvrage. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Dubuc. M. le député de Joliette, M. le député de Taillon, a demandé la parole avant vous, alors M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Ah! moi non plus.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez demandé la parole il y a environ une quinzaine de minutes, M. le député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de concourir à cet amendement, car, si un sujet est clair, c'est bien celui des pouvoirs du président de l'Assemblée nationale et de l'Assemblée nationale elle-même, car le président incarne l'Assemblée nationale.

L'indépendance de la Législature par rapport au pouvoir exécutif a tellement évolué depuis sept ou huit ans, qu'on en est présentement rendu à l'indépendance totale face au budget même de l'Assemblée nationale. Vous savez pertinemment que l'étude des crédits de l'Assemblée nationale ne se fait pas par l'une des commissions, mais plutôt par la commission de l'Assemblée nationale elle-même en plénière. Les crédits mêmes de l'Assemblée nationale échappent au ministre des Finances et échappent au Conseil du trésor. C'est l'Assemblée nationale comme telle qui décide de son budget, indépendamment du pouvoir exécutif.

Je pense que c'est l'Opposition, à l'époque, qui avait concouru précisément à rendre l'Assemblée nationale tout à fait indépendante du pouvoir exécutif. D'où l'importance de cette motion, M. le Président, car, à mon avis, elle viendrait possiblement assujettir une des dimensions dévolues aux pouvoirs exclusifs qui existent présentement à l'Assemblée nationale. Le président de l'Assemblée nationale ne relève plus d'aucun ministre sectoriel depuis quelques années. Il ne relève même plus du Conseil des ministres. Il relève de l'Assemblée nationale même. Comment pourrait-on décemment avoir assisté à une évolution vers l'indépendance de l'Assemblée nationale vis-à-vis du pouvoir exécutif et accepter, dans une législation... M. le Président, il faut regarder la loi, à l'article 9, qui dit: Pour l'application de la présente loi, sont assimilés à des organismes publics: le lieutenant-gouverneur en conseil, l'Assemblée nationale, etc.

Donc, M. le Président, on vient d'assujettir, par l'article 9, l'Assemblée nationale à d'éventuels règlements dont on ne connaît pas la teneur, dont les balises sont plus ou moins bien définies ou, en tout cas, d'une largeur épouvantable. On le verra lorsqu'on l'étudiera article par article. Mais qu'on prenne l'article 7 temporairement pour les fins de l'argumentation pour montrer jusqu'à quel point l'indépendance de l'Assemblée nationale peut être menacée. Il est dit en toutes lettres, à l'article 7 que: "Le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et de services". Il est clair que la loi donne donc au ministre des Approvisionnements et Services le pouvoir d'édicter des politiques qui ne sont pas sanctionnées par l'Assemblée nationale, par le gouvernement. Cela est écrit en toutes lettres: "des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture" et: "propose au gouvernement". Le ministre a donc le pouvoir de proposer au gouvernement. C'est donc le gouvernement qui, implicitement ou explicitement, va sanctionner les mesures que le ministre va lui suggérer. Il n'est pas dit que le ministre suggère à l'Assemblée nationale des politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et services. Si vous lisez bien l'article 7, c'est que le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives.

M. le Président, quand on relit les articles 7 et 9 à ce stade-ci, comment ne pas conclure que l'indépendance de l'Assemblée nationale n'est pas mise en cause quand on sait que le budget même de l'Assemblée nationale ne relève ni du ministre des Finances, ni d'un ministre sectoriel ou du Conseil du trésor, ni, bien sûr, d'un ministre des Approvisionnements et

Services? C'est l'indépendance totale de l'institution dite Assemblée nationale. Je vous avoue qu'on n'a pas d'autre choix, si le ministre maintient qu'il faut assujettir l'Assemblée nationale à cette loi, que de conclure que le ministre et le gouvernement, parce que le projet de loi n'est pas proposé par le ministre uniquement... Pour qu'un projet de loi soit déposé à l'Assemblée nationale, il faut qu'il ait été endossé par le Conseil des ministres avant de venir à l'Assemblée nationale.

Est-ce que c'est donc l'intention du ministre et de son gouvernement, c'est-à-dire du Conseil des ministres, d'empiéter sur l'indépendance de l'Assemblée nationale, de diminuer l'indépendance de l'Assemblée nationale? Encore là, est-ce que le ministre ne croit pas qu'il pourrait offrir à l'Assemblée nationale qui a un bureau autonome, qui a sa commission de l'Assemblée nationale formée des leaders et de tous les présidents de commission... Vous savez très bien comment cela fonctionne. Le Bureau de l'Assemblée nationale a des pouvoirs explicites maintenant. À ce moment-là, pourquoi le ministre n'offrirait-il pas la possibilité, comme il l'a annoncé à l'étude des crédits, je le répète, même pour l'Assemblée nationale, de mettre à la disposition de l'Assemblée nationale des mécanismes qui peuvent être avantageux pour l'Assemblée nationale dans l'administration de son budget? Mais de là à contraindre, à assujettir par législation, cela m'apparaît nettement non conforme à toute l'évolution qu'on a connue vers un statut de plus en plus indépendant de l'Assemblée nationale.

Je suis persuadé, M. le Président, qu'assujettir l'Assemblée nationale à une politique du gouvernement qui devient, par essence, partisan... C'est l'Assemblée nationale, le législateur qui édicte les lois, mais qui administre, qui est redevable devant l'Assemblée nationale? Le pouvoir exécutif est redevable devant l'Assemblée nationale. À mon avis, le principe, en tout cas, de liberté totale, d'autonomie entière et d'indépendance recherché depuis plusieurs années par l'ensemble des législateurs, des parlementaires qui ont concouru, je le rappelle, unanimement à l'atteinte... Ce n'est pas pour rien qu'on a étudié longuement la séparation des pouvoirs. On l'a étudiée longtemps. Je me souviens des briques qui ont été préparées par certains parlementaires qui s'interrogeaient sur le pouvoir exécutif, autant du côté gouvernemental que de l'Opposition, à l'époque. C'étaient les deux groupes de parlementaires, mais considérés tous sur un même pied; par exemple, le législateur disait: On ne peut pas continuer "hébétement" à faire en sorte que les parlementaires du pouvoir ne soient là que pour dire exactement la même chose que le pouvoir exécutif. On doit avoir des occasions, comme parlementaires, de s'exprimer en toute quiétude, et d'avoir... On a même songé, à l'époque - malheureusement on ne l'a pas acheminé jusque-là - à définir les votes et considérer que de la solidarité ministérielle, c'était peut-être sur des budgets, sur des grandes politiques, mais sur des sujets donnés, sur des politiques précises, qu'on ne soit pas considéré comme lié par des formations politiques et que ce soit véritablement en fonction de ce qu'un individu pense. Nous tous, qui que nous soyons, avons une responsabilité. Pour la population, dès qu'il y en a un qui ne vote pas comme son parti, il est considéré comme un mouton noir. On a accrédité dans l'esprit de la population que de ne pas voter comme un groupe unanime, c'est quelque chose de pas correct. Mais si on avait défini concrètement, dans nos lois, que le budget constitue un vote, nécessairement, quand quelqu'un ne voterait pas pour son parti sur un budget, je pense bien que ce serait assez grave et assez majeur et la population considérerait qu'il n'a pas confiance en sa propre formation politique. Sur des sujets aussi diversifiés que - je vous en nomme quelques-uns - la peine de mort, par exemple, il se peut que notre formation politique ait un programme, mais comme individu, qu'on ait des idées bien personnelles sur des sujets aussi controversés. Je pense aussi à l'avortement qui suscite une discussion où on se ramasse toujours à 50/50 dans la population. Quand on regarde tout cela, je ne suis pas certain qu'on ne devrait pas - et c'est cela qu'on discutait dans l'évolution du parlementarisme - faire en sorte de distinguer les pouvoirs de l'exécutif par rapport au législatif. Cet amendement, j'en ai la conviction, touche carrément l'indépendance de l'Assemblée nationale...

Le Président (M. Lemieux): Je m'excuse, M. le député de Joliette. S'il vous plaît, M. le député de Chauveau et M. le député de Limoilou.

M. le député de Joliette, vous pouvez continuer.

M. Chevrette: Donc, j'en ai la conviction, cet amendement affecte carrément l'indépendance, l'autonomie, la liberté d'action de l'Assemblée nationale qui se veut de plus en plus autonome. Je pense que c'est un mouvement irréversible dans les annales parlementaires. On ne poursuivra pas en en enlevant aux parlementaires, c'est faux. À plus forte raison, messieurs du pouvoir, à quatre-vingt-dix-neuf, je peux vous dire que c'est encore bien pire qu'un gouvernement à soixante-cinq ou soixante, et ça, vous en savez quelque chose. Si on veut vraiment s'exprimer sur un paquet de sujets, des sujets de fond qui peuvent comporter des nuances, vous seriez les premiers heureux de

ne pas passer pour être dissidents devant votre formation politique. Si c'était clair dans la population...

Le Président (M. Lemieux): II vous reste vingt secondes, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Ce sont des gens qui peuvent s'exprimer d'une façon individuelle et autonome vis-à-vis de nos propres électeurs, parce qu'il y a des mentalités de comté, des mentalités de région qui peuvent être divergentes au sein même de nos formations politiques. Cela arrive. Il va falloir l'admettre, un jour ou l'autre.

En conclusion, même si, de toute évidence, vous rejetterez notre amendement, je vous dis tout de suite, vous devriez carrément nous appuyer, parce qu'on ira, lors de l'étude article par article, vers des amendements concrets là-dessus. Il va falloir absolument qu'on se rentre dans la tête, si on ne veut pas entendre les gens...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Joliette, je m'excuse. Vous avez terminé, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Donnez-moi deux secondes.

Le Président (M. Lemieux): Je vous donne cinq secondes, M. le député de Joliette.

M. Poulin: Cinq secondes, bonsoir!

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Chauveau, s'il vous plaît! Cela va, allez-y.

M. Chevrette: Non, cela va.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon, vous aviez demandé la parole.

M. Claude Filion

M. Filion: Je vous remercie, M. le Président. Voyez-vous, je suis un peu plus optimiste que mon collègue, le député de Joliette. Je pense que le député de Hull et ministre tuteur du futur ministère des Approvisionnements et Services se montrera probablement plus ouvert à cette motion d'amendement qu'il ne l'a été dans les cas précédents pour la bien simple raison que, dans ce cas-ci, on sait que le président de l'Assemblée nationale n'est pas en voyage. Il n'est pas en voyage, on l'a tous vu aujourd'hui. Il va être là demain. Cela veut dire que cela lui prendrait quelques minutes de son temp3 pour venir ici, en commission.

Et probablement qu'à ce moment-là, le président de l'Assemblée nationale, par déférence probablement pour les membres de la commission, ne nous tiendrait pas un discours qui ferait l'historique de la réforme parlementaire. C'est pourtant de cela qu'il s'agit ici, aujourd'hui. La séparation des pouvoirs, c'est un beau principe écrit dans tous les livres de droit et qu'on enseigne en droit constitutionnel dans toutes les bonnes universités du Québec et même dans les mauvaises. Ce principe-là, pour valoir, pour être autre chose qu'une série de mots, il faut qu'il puisse s'appuyer sur des moyens. L'un de ces moyens qu'on s'est donnés, dans cette société, c'est l'indépendance et l'autonomie des pouvoirs. C'est le meilleur moyen d'assurer leur séparation: Donnons à chacun les pouvoirs qu'il lui faut pour fonctionnerl (23 h 45)

Dans ce cas-ci, concernant le pouvoir législatif représenté dans nos institutions par l'addition du lieutenant-gouverneur mentionné à l'article 9 et de l'Assemblée nationale, ces deux institutions mises ensemble représentent en résumé la totalité du pouvoir législatif. Par son projet de loi 68, le député de Mull, ministre délégué aux Services et Approvisionnements se donne ou donne au gouvernement, à l'Exécutif, un pouvoir de réglementation sur la fourniture de contrats, sur les biens et sur les services; ce qui va faire que l'Exécutif aura la main haute sur le fonctionnement et sur les moyens de l'Assemblée nationale. Vraiment, M. le Président, c'est aussi simple que cela. Cela n'existe pas!

Comme l'a bien démontré mon collègue, le député de Joliette et comme l'a très bien souligné également le député de Dubuc, ce projet de loi vient complètement à l'encontre de la réforme parlementaire. À ce titre, on pourrait même le qualifier de contre-réforme, s'il était un peu plus vaste. On va peut-être nous dire: Ce sont juste de petites choses: Écoutez! Ce sont juste les moyens, les biens, les services et qui on va engager. Par exemple, quand le président va décider de faire des travaux dans son enceinte, il ira se faire assujettir par le règlement du ministre. C'est cela qu'elle dit, cette loi. Il faut quand même appeler un chat, un chat et appeler une loi, une loi et un règlement, un règlement; c'est ce que cela veut dire.

Tout ce qu'on demande à ce stade-ci... Je me rends compte, M. le Président, que je suis peut-être en train de plaider un peu sur le fond, mais c'est pour saisir les membres de cette commission de l'importance, au moins, de consulter le président de l'Assemblée nationale pour savoir: Est-il d'accord avec cela, le président de l'Assemblée nationale? Est-ce qu'il voit une objection à se soumettre à un éventuel pouvoir de réglementation ou s'il est tout à

fait d'accord et qu'il considère que, pour sauvegarder l'institution dont il est le symbole, il ne voit pas trop de problèmes? Il nous le dira, c'est tout.

Je ne sais pas, encore une fois, s'il y a eu consultation avec le président de l'Assemblée nationale; je ne le sais pas. Chose certaine, ce serait excellent qu'il soit ici. Ce n'est pas une affaire compliquée. Le président de l'Assemblée nationale pourra prendre quinze minutes de son temps pour venir nous le dire bien simplement ou, encore, que le ministre dépose un document nous le disant. Comment les législateurs, les parlementaires peuvent-ils vraiment exercer leur rôle si on n'a pas cette donnée du problème, si on n'a pas entendu l'expression du président de l'Assemblée nationale? Ce n'est pas quelque chose de compliqué. Qu'il nous le dise - j'ai dix minutes pour parler -qu'il m'interrompe pour me dire: Écoutez, je l'ai vu, je lui ai parlé, il n'y a pas de problème; ou bien: Je l'ai vu et il y voit un problème. Qu'il me le dise! Comment, comme parlementaires, avec le mandat que nous a confié la population, peut-on jouer valablement notre rôle si on n'a pas cette donnée? Peut-être que vous l'avez, du côté ministériel, mais nous, on ne l'a pas, cette donnée. Je ne sais pas, peut-être qu'en caucus on vous a informés que, dans le fond, ce n'était pas grave d'aller chercher tous les organismes et... Est-ce qu'on vous a dit que cela allait chercher aussi le pouvoir législatif, non pas dans une de ses bricoles, mais qu'on va assujettir le pouvoir législatif, dans sa globalité, à un pouvoir de réglementation qui n'est pas défini?

Je me dis, M. le Président, vraiment, qu'on n'a pas le droit, comme parlementaires, de laisser gruger la réforme parlementaire tranquillement, petit à petit, par des projets de loi qui vont nous arriver... On va en voir d'autres, pendant quatre ans, des projets de loi semblables; ce n'est pas le seul. C'est que certaines personnes semblent, en tout cas dans certains cas, déposer des lois un peu autoritaires. J'aime bien cela: laisser vivre les gens. Le président de l'Assemblée nationale qui a reçu, d'ailleurs, pas plus tard que la semaine dernière, la confiance ou, si on veut...

M. Polak: ...

M. Filion:L'expression d'une nouvelle confiance de la part de l'Opposition, mais qui au-delà des personnalités représente une institution.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît!

M. Polak: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): C'est suffisant pour moi, M. le député de Sainte-Anne.

M. Filion: Au delà de son identité, que ce soit le député de Montmorency, que ce soit le député de Taschereau, que ce soit le député de Saint-Jean, que ce soit n'importe quel député qui soit président de l'Assemblée nationale, c'est lui qui garde, si on veut, le sceau de la protection de l'autonomie, de l'indépendance du pouvoir législatif. Ce n'est pas la seule loi, ceux qui siègent à la commission des institutions l'auront vu également qu'on a un autre projet de loi où on tente de faire la même chose, aller chercher des pouvoirs qui relèvent actuellement de l'Assemblée nationale et tenter de les assujettir, de les mettre à la remorque du pouvoir exécutif. Dans le cas présent, c'est clair à l'article 7: "Le ministre élabore et propose au gouvernement des politiques relatives à l'acquisition et la fourniture de biens et services pour les ministères et organismes publics désignés..." Là on voit que l'article 9, qui précise le premier paragraphe de l'article 7, nous dit bel et bien que ces personnes et ces organismes font partie des organismes qui peuvent être réglementés. Au paragraphe 2, article 7, on nous dit que: le ministre veille à l'application de ses politiques, en coordonne l'exécution et peut, à ces fins, prendre des règlements, pas juste prendre des règlements, il en coordonne l'exécution en plus. 11 va coordonner l'exécution de la fourniture des biens et services par le président de l'Assemblée nationale. Je vous dis, M. le Président, que, pour le moins, il y a probablement un manque de réflexion quelque part quand on a introduit ces données à l'intérieur du projet de loi et que notre demande est simple, que le président de l'Asssemblée nationale vienne se faire entendre encore une fois pour qu'on reçoive au moins l'information pertinente sur cette donnée fondamentale. Qu'on ne vienne pas nous dire cette fois-ci qu'il est en voyage, on l'a vu, de nos yeux vu.

Le Président (M. Lemieux): II vous reste environ une minute, M. le député de Taiilon.

M. Filion: À ce moment-là, je pense qu'il n'y a pas de meilleure preuve que cela, et, quant au président de l'Assemblée nationale, en plus de cela, je connais son intérêt pour ces questions. Je suis drôlement préoccupé, intensément préoccupé par les conséquences de ce projet de loi sur l'institution qu'il représente. M. le député de Hull, M. le ministre, chers collègues, membres de cette commission, je vous invite à concourir à l'amendement présenté par le député de Dubuc, pour faire en sorte que nous passions quelques minutes de notre

temps à écouter, à débattre avec le président de l'Assemblée nationale ces questions qui, quand même, ne sont pas des bricoles.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Taillon, vous avez terminé. Pouvez conclure en dix secondes, s'il vous plaît! Vous avez terminé, M. le député de Taillon.

M. Filions Vous l'avez dit, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci. M. le député de Bertrand, vous avez la parole relativement à l'amendement du député de Dubuc.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Je vous remercie, M. le Président. Il se fait tard après de longs débats. Comme dernier intervenant ce soir de la part de l'Opposition, je demande au ministre, et je ne peux pas croire que le ministre va refuser de faire comparaître le président de l'Assemblée nationale, parce que, d'abord, il est en place, et je pense que les autres raisons qui ont été évoquées pour les demandes antérieures de la part de l'Opposition - je pense au Directeur général des élections - étaient sûrement de bonnes raisons, sauf, je l'ai mentionné plus tôt en soirée, qu'il y avait d'autres personnes impliquées à l'article 9, et je visais particulièrement l'Assemblée nationale, son président. Comme l'a mentionné mon collègue, le député de Taiilon, je pense que c'est important. Je pense que c'est assez grave si l'on considère que l'article 7 et l'article 9 vont pouvoir donner au ministre des pouvoirs d'intervention concernant certains approvisionnements, certaines fournitures et certains biens qui regardent la présidence de l'Assemblée nationale et je pense qu'on ne peut pas carrément, au nom de l'autonomie et au nom de la complète indépendance que doit avoir le président de l'Assemblée nationale dans le cadre de ses fonctions et de ses opérations...

La preuve est que s'il y a quelqu'un qui doit être nommé, choisi et faire l'objet d'une entente préalable entre les deux partis afin que l'ensemble de ceux qui siègent à l'Assemblée nationale soient d'accord pour que cette personne agisse en toute liberté et que cette personne soit sous le couvert de la neutralité, je pense que c'est le président de l'Assemblée nationale.

En ce sens, je pense qu'il serait important que le président de l'Assemblée nationale vienne nous dire un peu comment il se sent. S'il ne peut pas venir, pour quelque raison que ce soit, j'aimerais savoir du ministre si les questions que je lui adresse... Tout d'abord, est-ce qu'il a, au moins pour notre assurance, son assurance et celle des membres de cette commission, des avis juridiques à savoir si, par une loi avec ce qu'on pourrait appeler les bras aussi longs, les dents aussi longues, des articles permettent justement l'intervention d'un ministre auprès de personnes comme le Directeur général des élections et dans le cas qui nous concerne, le président de l'Assemblée nationale.

J'aimerais que le ministre puisse avoir des avis juridiques pour savoir s'il peut avoir ces pouvoirs-là. Cela nous donnerait, au moins, un côté de la médaille.

C'est drôlement important qu'un ministre soit conscient de cela. On sait comment les projets de loi sont préparés. Les projets de loi sont préparés essentiellement par les hauts fonctionnaires. Ils sont préparés par des gens qui votent les choses d'une certaine façon, mais l'élu, le ministre titulaire d'une loi, lorsqu'il doit vivre avec cette loi, parfois, se retrouve dans des situations qui risquent d'être pénibles, des situations qui risquent d'être dangereuses. Dans ce cas-ci particulièrement, la 3eule façon d'avoir l'heure juste, à mon avis, c'est fort simple, puisqu'on est dans l'enceinte du Parlement et que tous les jours et à toute heure du jour, on peut avoir accès facilement par une simple demande, j'imagine, du ministre de comparaître et d'éclaircir ce point et avoir son avis, avoir son idée quant à cela. On aura, comme on dit, l'âme tranquille du côté de l'Opposition et je serais peut-être surpris de voir la réaction du président de l'Assemblée nationale devant cette commission. Je serais peut-être surpris de voir l'intérêt qu'auraient les membres de cette commission y compris les députés ministériels à lui poser des questions parce que, au départ, on prend les choses parfois un peu à la légère. On pense que c'est un peu farfelu...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, il vous reste une minute avant que j'ajourne, conformément à l'ordre de la Chambre.

M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): On se rendrait compte... Il va me rester du temps, M. le Président, je pense que je vais pouvoir le garder pour demain.

Je termine en ne voulant pas abuser, peut-être que dans la minute qui reste le ministre va consentir. Je vous dirai, en toute sincérité, sans faire un plaidoyer plus longtemps là-dessus, que le ministre va se rendre à cette demande parce qu'elle est fort importante pour garder ce que j'appelle les droits et les libertés que l'Assemblée nationale possède.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le député de Bertrand.

J'ajourne sine die l'étude du projet de loi 68, Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services et modifiant diverses dispositions législatives.

(Fin de la séance à 23 h 55)

Document(s) related to the sitting