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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Friday, October 31, 1986 - Vol. 29 N° 29

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation: L'état des négociations entre le gouvernement et les employés des secteurs public et parapublic


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Lemieux): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission du budget et de l'administration commence ses travaux. Nous sommes réunis ce matin afin de procéder au mandat suivant: l'interpellation du député d'Abitibi-Ouest au ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor sur le sujet suivant: l'état des négociations entre le gouvernement et les employés des secteurs public et parapublic.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Filion (Taillon) remplace Mme Blackburn (Chicoutimi) et M. Jolivet (Laviolette) remplace M. Dufour (Jonquière).

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le secrétaire. M. le député de Saint-Louis.

M. Chagnon: Je demanderais le consentement de cette commission afin d'accepter le remplacement de M. Polak...

Le Président (M. Lemieux): Pardon, pas le remplacement, la participation.

M. Chagnon:... la participation de la députée de L'Acadie à nos travaux.

Le Président (M. Lemieux): Selon l'article 132 des règles de procédure.

M. Chagnon: Selon l'article 132 de notre règlement.

Le Président (M. Lemieux): Est-ce qu'il y a consentement, M. le député d'Abitibi-Ouest?

M. Gendron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci. Permettez-moi, à l'intention des participants, de vous rappeler brièvement les règles qui régissent l'interpellation. Le débat dure au plus deux heures, soit jusqu'à midi. La discussion est divisée en trois étapes. Un premier débat de vingt minutes commence par l'intervention du député qui a donné l'avis d'interpellation, soit le député d'Abitibi-Ouest. Il intervient pendant dix minutes. - Le ministre interpellé, soit le président du Conseil du trésor et ministre délégué à l'Administration, intervient ensuite pendant dix minutes.

Un deuxième débat, d'une durée maximale de 80 minutes, s'engage ensuite où chaque intervenant peut s'exprimer durant cinq minutes. Il y a alternance dans les interventions selon la séquence suivante: un député de l'Opposition, le ministre, un député ministériel et ainsi de suite selon la même séquence. Si un membre utilise moins de cinq minutes, le temps non utilisé est perdu et la parole est donnée à l'intervenant qui suit, selon la séquence que je vous ai mentionnée.

Un dernier débat a lieu 20 minutes avant la fin de la séance. Le ministre a alors droit à un dernier temps de parole de dix minutes et le député d'Abitibi-Ouest aura ensuite droit à une réplique de dix minutes.

M. le député d'Abitibi-Ouest, vous avez la parole.

Exposé du sujet M. François Gendron

M. Gendron: Merci, M. le Président. Rapidement, je pense qu'il faut "contexter" cette interpellation que je veux faire ce matin. II faut, d'abord, mentionner que les négociations sont en cours depuis l'automne 1985 et plus formellement depuis le 19 février. À ce moment-là, le président du Conseil du trésor, responsable des négociations, dans une déclaration officielle, rendait publics les offres patronales, les objectifs entourant cette négociation et également certains principes qu'il avait évoqués sur lesquels je reviendrai tantôt.

Au tout début de la reprise de la session, le 21 octobre dernier, le président du Conseil du trésor a voulu faire le point concernant les négociations dans une déclaration ministérielle qui, en tout cas en ce qui me concerne, était fort peu significative, fort peu parlante puisqu'il rappelait les objectifs de février 1986, mais n'indiquait pas tellement de nouvelles voies de solution, si ce n'est que les négociations commenceraient bientôt, même si cela faisait presque une année que, normalement, elles auraient dû être commencées.

Ce n'est pas dans une réplique de cinq minutes qu'on est en mesure de faire le point à la suite d'une déclaration ministérielle. Donc, je pense qu'aujourd'hui

puisque c'est un débat majeur - les négociations, c'est un débat important, c'est une question qui touche au-delà de 300 000 travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic - cela mérite d'être approfondi. La formule qui est nôtre pour approfondir cette chose, même si elle a ses inconvénients, c'est celle qu'on appelle l'interpellation.

Dans les offres déposées le 19 février le président du Conseil du trésor soulevait deux éléments majeurs. Ce que j'ai à vous offrir, disait-il, cela devrait être zéro, d'après la lecture que le gouvernement faisait de la conjoncture financière, mais je vous offre 3, 5 % pensant que c'est suffisant, compte tenu de la tendance qu'on peut observer sur la progression des salaires qui seront versés sur l'année 1986. C'est une chose que je conteste et on essaiera d'établir qu'effectivement ce n'est pas la tendance. C'est vraiment quelque chose qu'on est en mesure d'établir sur la base de résultats des deux premiers trimestres, que ce n'est pas de 3, 5 % qu'il faudrait parler, mais de quelque chose aux alentours de 4, 3 % à 4, 5 % et j'y reviendrai.

Également, le président du Conseil du trésor annonçait une récupération importante de 100 000 000 $; de même, disait-il, on veut poursuivre certains objectifs d'améliorer la productivité et également viser à l'alignement du secteur privé et du secteur public. Il a également parlé des effets de ces offres sur l'économie générale du marché du travail et sur la qualité des services publics. J'ai dit à quelques reprises qu'en ce qui concerne les principes de la comparabilité entre le secteur privé et le secteur public nous en étions. Cependant, je l'ai déjà dit, à vouloir toujours poursuivre l'objectif d'atteindre son chien, on finit par le rattraper. Actuellement, je pense que cela fait au moins deux ou trois négociations que l'objectif de la comparabilité est dans la politique salariale du gouvernement quel qu'il soit et, en conséquence, pour plusieurs corps d'emplois -j'en ferai la preuve tantôt - non seulement on l'a atteint, mais actuellement il y a plusieurs corps d'emplois du secteur public qui sont en carence, qui sont en défaut, qui sont moins bien rémunérés que le secteur privé. Donc, si le président du Conseil du trésor est sérieux et qu'il prétend que c'est l'un des objectifs de la négociation qu'il veut poursuivre, la comparabilité, il devrait tenir compte que ces 100 corps d'emplois puissent effectivement avoir une rémunération qui vienne s'ajuster à la hausse, bien sûr, puisqu'ils sont rémunérés moins bien que dans plusieurs emplois du secteur privé.

Il est également important de parler du déroulement des négociations. Je précise tout de suite les quatre objectifs que je vise ce matin par cette interpellation. C'est, d'abord, d'essayer de faire la preuve que, contraire- ment à ce que le président du Conseil du trésor a toujours affirmé, il y a eu vraiment du laxisme dans le déroulement de ces négociations. Ce n'est pas exact que les négociations se sont déroulées promptement. Il y a eu vraiment négligence parce que ce n'est que tout récemment que, sur les questions majeures et importantes, enfin le président du Conseil du trésor aurait dégagé quelques mandats, quoique, pour les vraies questions majeures, les ouvertures exprimées par M. Bourassa et reprises par M. Gobeil à la suite du caucus ministériel partisan, normal, de Trois-Rivières, laissaient croire qu'on sentirait vraiment aux tables des ouvertures importantes sur la non-récupération et sur tout le volet salarial. En conséquence, l'information que j'ai, c'est que, véritablement, il n'y a pas eu de traduction significative, aux tables de négociations, de ces nouveaux mandats que le président du Conseil du trésor devait dégager. Ce n'est pas pour rien qu'il y a eu un avertissement de la FTQ de débrayage de 24 heures; c'est parce qu'ils n'ont pas vu de traduction aux tables. S'ils avaient été capables d'observer qu'entre le discours et l'application aux tables il y avait vraiment une correspondance, on n'aurait probablement pas eu à subir ces journées de grève.

Le président du Conseil du trésor citait - d'ailleurs, d'une façon un peu tronquée -un extrait qu'il avait pris dans un dossier du Bureau de recherche sur la rémunération du Québec, à savoir que ta rémunération croîtrait entre 3, 5 % et 4, 5 %. Je serai en mesure d'établir à l'aide de documents du ministère du Travail du Québec, que les résultats préliminaires du deuxième trimestre - non pas sur des observations, mais sur ce qu'on appelle des résultats - de 1986 indiquent que le taux de salaire négocié lors du renouvellement des conventions collectives progresse à un rythme supérieur à 4 % pour toute la durée de leur application. Les hausses prévues sont d'environ 4, 2 % par année, la première année, et ainsi de suite. J'aurai l'occasion de revenir là-dessus.

(10 h 15)

Un autre objectif que j'ai est de démontrer que possiblement le président du Conseil du trésor est coincé avec ses compressions non livrées, est coincé avec sa tarification qui n'a par marché. D'ailleurs, il a dit lui-même que les objectifs qu'il poursuivait en termes de récupération dans la caisse n'ont pas donné un montant aussi significatif qu'il l'avait prévu. En conséquence, il voudrait encore une fois faire payer par les travailleurs et travailleuses du secteur public l'incapacité administrative, encore là, de concilier ce qu'il a dit lors du dépôt des crédits budgétaires et la réalité observée à ce jour, puisque j'ai l'information que, dans certains ministères - après lui avoir posé la question sur ces compressions

dites diverses, diffuses ou confuses, qu'il appelait rationalisation administrative - la livraison de ces compressions n'a pas été faite. Il y a encore trois semaines, certains ministères n'avaient absolument rien livré des compressions prévues par le président du Conseil du trésor. C'est quelque chose qu'on va devoir approfondir.

L'objectif que je vise par cette interpellation, c'est de savoir: Est-ce que le président du Conseil du trésor ne convient pas qu'une politique salariale qui se tient debout doit tenir compte qu'il y a certains groupes qui sont vraiment en situation de rattrapage? Je pense en particulier aux infirmières et aux procureurs de la couronne. Mon collègue, le député de Taillon, abordera un peu cette question. Le président du Conseil du trésor n'a pas véritablement pris une position officielle quant à ces groupes. J'aimerais l'entendre aussi.

J'aimerais également que le président du Conseil du trésor indique, ce matin, à quel moment il pense qu'il sera en mesure véritablement de concrétiser les ouvertures publiques qu'il a lancées aux tables de négociations. S'il a comme objectif d'arriver à un règlement négocié, il va falloir qu'il y ait des choses importantes qui soient dégagées comme mandat aux tables de négociations. Il ne s'agit pas de vouloir faire la négociation ici ce matin parce que je sais comment cela se passe, contrairement à ce qu'il a dit. On ne peut pas, dans une séance comme celle-ci, se substituer aux quelque 110 ou 115 tables de négociations qui existent et commencer à faire toutes sortes de dépôts.

Au niveau des principes, M. le président du Conseil du trésor, au niveau de ce qui a été énoncé, entre autres, sur la comparabilité entre les secteurs privé et public, je veux vous entendre dire si, oui ou non, vous êtes conscient que vous avez un document sur les emplois repères. Vous avez une enquête sur la rémunération des emplois repères au Québec. Vous avez cela au ministère, vous avez le droit de la lire, de la regarder. D'une façon très claire, il est mentionné qu'il y a environ une centaine de corps d'emplois qui sont en carence dans le secteur public par rapport au privé. Je veux savoir aujourd'hui si, oui ou non, vous allez en tenir compte. Est-ce que, oui ou non, vous allez tenir compte de la situation du Québec pour ce qui est de la rémunération? Comme je l'ai dit tantôt, la croissance des taux de salaires négociés au Québec, premier et deuxième trimestres 1986, ce n'est pas 3, 5 %, c'est 4, 3 %. Cela, c'est pour les deux premiers trimestres.

J'aimerais également vous entendre parce que - je conclus là-dessus - il y a eu une certaine confusion, à un moment donné, entre votre supposée capacité de payer et la nécessité de maintenir le pouvoir d'achat des travailleurs des secteurs public et parapublic. Nous, on a carrément exprimé notre position. On pense que ces gens ont fait un effort sans précédent en 1982, mais, dans la présente négociation, il faut au moins leur garantir le maintien du pouvoir d'achat. J'aimerais cela, en réplique, vous entendre sur ces principales questions avant d'en approfondir d'autres morceau par morceau.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. le président du Conseil du Trésor.

Réponse du ministre M. Paul Gobeil

M. Gobeil: M. le Président, je pense que le député d'Abitibi-Ouest a fait un très bel exposé de la façon dont il voit les choses dans les négociations actuellement. Il oublie quand même certaines choses et il a dit certaines choses qui, à mon point de vue, déforment un petit peu la vérité.

Les négociations dans les secteurs public et parapublic se poursuivent depuis quelques mois, contrairement à ce qu'il a mentionné. Je ne me souviens pas d'avoir mentionné que les négociations commençaient le 21 octobre. C'est tout à fait faux. Il y a eu des négociations, effectivement, depuis le mois de septembre 1985 pour ce qui touche le normatif. Il y a eu des négociations plus intensives à partir de mars 1986 à la suite du dépôt de nos offres le 19 février. Évidemment, en discussion et en négociation, on ne peut pas rechercher toujours la même intensité. Il est normal que, pendant certaines périodes, ces négociations soient plus intensives et elles le sont actuellement plus que jamais.

Lors d'une déclaration ministérielle, le 21 octobre dernier, j'ai présenté un rapport sur l'état du dossier. J'ose croire que le député d'Abitibi-Ouest a lu ce rapport. C'est sûrement mentionné que nous considérons toujours comme importantes les conditions de travail des employés des secteurs public et parapublic et les enjeux pécuniaires qui y sont rattachés parce que ce sont des sujets d'intérêt public. La discussion que nous aurons ce matin et le débat qui s'amorce doivent respecter les balises connues dans ce domaine.

Le député d'Abitibi-Ouest a mentionné, et je suis très heureux de l'entendre, qu'on n'est pas ici pour négocier. Il connaît très bien ma position là-dessus. Il sait bien que je n'ai pas l'intention de négocier en cette Chambre les conditions salariales de nos employés des secteurs public et parapublic. Tant mieux si l'Opposition est d'accord avec moi là-dessus! Cependant, je rappellerai au député d'Abitibi-Ouest qu'il a déjà formulé des propositions salariales. Il a déjà eu la

chance de faire cela lorsque son gouvernement était au pouvoir et lorsqu'il était membre du Conseil des ministres. Et il veut encore continuer cela aujourd'hui. Si cela peut aider, je n'ai pas d'objection, mais je lui demanderais de ne pas nuire. Je ne suis pas sûr que ses interventions ne nuisent pas au déroulement et à la bonne marche du dossier de la négociation.

Nous essaierons de faire porter le débat ce matin sur le travail qui a été effectué jusqu'à maintenant et non pas sur les compromis possibles aux tables de négociations, parce que, dans le cadre d'une négociation, il y a des compromis, il doit y en avoir d'un côté comme de l'autre. Les porte-parole, tant patronaux que syndicaux, sont aux tables pour les faire, ces compromis.

M. le Président, permettez-moi, quand même, de rappeler un peu la conjoncture générale qu'on ne saurait oublier tout au long des négociations et plus précisément au moment où on se parle. Les présentes négociations avec les 300 000 employés des secteurs public et parapublic s'inscrivent dans un contexte budgétaire difficile. On l'a dit et on l'a redit. Évidemment, l'Opposition va le contester; c'est son droit, mais je pense que la population, elle, le sait. Si l'Opposition choisit d'être contre la population, c'est son choix; je n'y peux rien. Il faut faire des choix, des choix relatifs à un certain nombre de mesures qui visent à améliorer la productivité des secteurs public et parapublic, et le député d'Abitibi-Ouest l'a mentionné.

La situation du Québec nous force à nous en tenir à un niveau de rémunération qui soit compatible entre le secteur privé et le secteur public. On peut toujours, comme le député d'Abitibi-Ouest, prétendre qu'il y a des différences. Il y en a des différences et il y en aura probablement toujours. Pour nous, ce qui est important, c'est que l'ensemble soit correspondant, coordonnant, et qu'à l'intérieur de certaines classes d'emplois il n'y ait pas une trop grande différence. Nous avons l'intention de nous en tenir à une comparaison, à une comparabilité avec le secteur privé.

Il ne faut pas, non plus, perdre de vue que la rémunération des employés des secteurs public et parapublic ne comprend pas seulement le salaire directement versé. Elle comprend plusieurs autres éléments, je le rappelle. Il faut accepter, il faut voir qu'il y a chez nos employés, chez la majorité de nos employés des secteurs public et parapublic, des avantages enviables: par exemple, les régimes de retraite qui sont probablement supérieurs à beaucoup de régimes de retraite de l'entreprise privée; les congés de maladie; les programmes de formation; les vacances, et plus que tout, probablement, ce qu'on ne retrouve pas ou très peu - je pense que je dois continuer à employer le mot "pas" - dans l'entreprise privée, la sécurité d'emploi. Ce sont aussi ce3 principes qui, le 19 février dernier, ont guidé le gouvernement et ses partenaires patronaux lorsqu'ils ont fait connaître les offres aux employés des secteurs public et parapublic concernant le renouvellement des conventions collectives à partir du 31 décembre.

Nous étions animés et nous sommes toujours animés du désir ferme de centrer tous nos efforts sur la définition à la signature d'un véritable contrat de travail. Nous sommes aussi soucieux d'établir et de continuer à maintenir que nous devons négocier dans le cadre de la Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, connue comme étant la loi 37, tout en acceptant que la capacité de l'État de payer actuellement est limitée et que nous devons en tenir compte.

Au fil des mois, on a mentionné, et les mandats ont été dégagés en conséquence, divers réaménagements à la suite de nos offres du 19 février dernier. Les récupérations incorporées à nos offres du 19 février dernier auraient permis au gouvernement d'économiser un montant estimé à environ 100 000 000 $ annuellement. J'ai dit il y a quelques mois que nous étions prêts à discuter avec les représentants syndicaux de la possibilité d'abandonner une partie de ces récupérations en vue d'en venir à des conventions signées. Le député d'Abitibi-Ouest vient de mentionner que j'ai fait mention d'une récupération de 100 000 000 $. C'est faux. J'ai mentionné qu'il y avait une possibilité qu'à l'intérieur du montant de 100 000 000 $ nous puissions abandonner une partie de cette récupération.

Nous estimons, par contre, que nos offres d'augmenter les échelles salariales en 1986 de 3, 5 % sont encore et toujours fondées et nous n'avons pas l'intention de les modifier parce que nous croyons toujours que cette augmentation de 3, 5 % se situe à l'intérieur des tendances observées pour 1986. D'autant plus qu'il ne faut jamais oublier qu'on doit ajouter à cette augmentation sur les échelles un montant estimé globalement à 1, 2 % pour le coût des avancements d'échelon, ce qui fait que le coût total pour l'État est de 4, 7 %.

J'ai mentionné aussi qu'en 1987-1988, tout en souhaitant bénéficier du mécanisme prévu par la loi 37 qui permet de négocier annuellement les salaires afin d'éviter de faire référence à des prévisions trop aléatoires, le gouvernement était prêt à recevoir des propositions des centrales syndicales mais subséquemment à une acceptation de toutes les conditions pour 1986. Si on pouvait s'entendre sur 1986, nous étions prêts à recevoir des propositions pour

1987 et possiblement 1988 et permettre, à ce moment, de satisfaire les demandes syndicales. On sait que les grandes centrales syndicales - elles l'ont exprimé publiquement - tiennent à cette ouverture. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député d'Abitibi-Ouest, dans le cadre du débat, pour une durée de cinq minutes.

Argumentation M. François Gendron

M. Gendron: Je suis obligé de noter que cela ne répond pas à mes attentes et aux questions que j'avais formulées à la fin. Je comprends que ce sont quand même les dix premières minutes, ici, pour le président du Conseil du trésor; donc, il fallait qu'il rappelle sa position. J'espère que, dans les minutes qui suivront, il me donnera l'occasion d'avoir un peu plus de nourriture à me mettre sous la dent, en termes de réponses aux questions posées. Je vais rappeler certaines questions précises si on veut que le débat puisse faire progresser non pas les négociations ici dans la matinée, mais au moins les principes sur lesquels il y aurait peut-être lieu de revoir votre orientation. (10 h 30)

Je veux dire deux mots. D'abord, quand j'ai prétendu que les négociations n'avançaient pas, ce n'est pas à partir d'une perception théorique. C'est parce qu'il se passe des choses claires. Il me demande à quelle place j'ai pris cela, que les négociations débutaient véritablement. D'abord, dans sa déclaration ministérielle. Écoutez, je suis habitué à lire de tels papiers. À la page 5, le président du Conseil du trésor dit: Bon, c'est dans cette perspective que j'ai demandé aux porte-parole gouvernementaux et à nos partenaires patronaux de commencer les négociations. Un instant! Lui, dans son texte, il a parlé d'intensifier la cadence des négociations. C'est cela qui est écrit dans le texte du président du Conseil du trésor. Quand on fait une déclaration ministérielle pour dire: Là, il faut que cela marche, c'est ce que cela veut dire. Intensifier les négociations, cela signifie concrètement, pour quelqu'un qui a l'expérience des négociations, qu'à partir du moment où cela fait...

Je vais le prouver avec un autre élément. Si j'avais tort, comment se fait-il, M. le président du Conseil du trésor - j'aimerais cela vous entendre là-dessus - que vous ayez des rapports de médiation qui ne disent absolument rien? Je ne peux pas blâmer les médiateurs. Les médiateurs ont fait leur "job". Mais que voulez-vous "médiatiser" quand il ne s'est rien passé aux tables de négociations? C'est tellement vrai ce que j'affirme qu'il y a un rapport de médiation qui dit quelque chose, c'est le rapport de médiation de M. Désilets. On pourrait le citer longuement, mais on n'a pas le temps de tout faire. Lui est significatif, lui est parlant, parce qu'on a commencé à parler des vraies choses en ce qui regarde la CECS, la Commission des enseignants des commissions scolaires, sur les problèmes réels qui avaient été vécus à la suite des décrets.

En conséquence, que le président du Conseil du trésor me dise aujourd'hui: Non, cela a négocié rondement, il faut situer cela dans son contexte. Ce n'est pas mot qui donnais les réponses aux questions que je posais. C'est le président du Conseil du trésor. En mai et juin, il me disait: Pas de problème, tout se déroule bien, M. Gendron. Et le 21 octobre, à la reprise de la session, il dit: Les négociations vont s'intensifier. Moi, je regarde les papiers, je ne regarde pas les déclarations du président du Conseil du trésor et je lis les rapports de médiation. Toujours pour des questions de temps, je ne peux pas, ce matin, prendre beaucoup de temps et vous en lire plusieurs. Mais j'aimerais cela lire juste une phrase d'un rapport de médiation que j'ai fait venir. Cela se termine à peu près toujours de la même façon, les rapports de médiation.

J'en cite un pour prouver ce qu'on avance. Conclusion: "En vertu de ce qui précède, le présent médiateur en vient à la conclusion que la médiation n'a pas eu véritablement lieu, compte tenu du fait que les parties ont prolongé la négociation directe au-delà du délai prévu par le médiateur pour remettre son rapport. Conséquemment, je me trouve dans l'impossibilité de soumettre quelque recommandation que ce soit. "

Comment voulez-vous, M. le Président, qu'un processus de médiation qui est censé avoir comme objectif de rapprocher les parties fonctionne si 95 % des rapports de médiation finissent par cette même phrase: Je ne suis pas en mesure de vous dire quelque chose parce que véritablement sur les enjeux majeurs il n'y a pas eu de négociation. Il ne s'agit pas de ne pas tenir compte de la situation budgétaire que vous prétendez difficile. J'en tiens compte et j'en suis conscient. Mais on n'est pas en crise économique, M. le président du Conseil du trésor; on est dans une situation budgétaire difficile selon votre gestion, selon vos choix budgétaires et, en conséquence, vous allez devoir dire à la population que c'est vous qui avez décidé de maintenir les 3, 5 % parce que vous croyez que c'est le maximum que vous pouvez offrir. Vous allez dire cela, mais vous ne direz pas cela parce que ce sont les tendances. Vous ne direz pas cela parce que les négociations ont progressé, parce que cela n'est pas exact.

Une centrale syndicale - je pourrais en citer d'autres - récemment disait: Écoutez, si on est sorti dernièrement, c'est pour donner un signal.

Oui, je sais qu'il me reste 30 secondes. Je cite juste un paragraphe: "Tant à la table commune de la CEQ qu'aux différentes tables sectorielles, malgré les nombreux conflits syndicaux, seuls de maigres progrès ont été enregistrés. " Ce n'est pas moi qui parle. Ce n'est pas une déclaration du mois d'août, c'est le 30 octobre, hier, qu'on disait: Sur les enjeux majeurs - là on les nommait tous, je n'ai pas le temps de les nommer -cela ne bouge pas. Il ne se passe pas vraiment quelque chose.

Vous voulez un règlement négocié? Il va falloir que cela change. Alors, j'aimerais avoir quelques réponses. Comment expliquez-vous que les rapports de médiation soient si peu parlants? J'aimerais que vous m'expliquiez cela, M. le président du Conseil du trésor.

Le Président (M. Lemieux): M. le président du Conseil du trésor.

M. Paul Gobeil

M. Gobeil: J'ose croire que le député d'Abitibi-Ouest ne s'attend pas à ce stade-ci que les déclarations syndicales soient favorables au gouvernement. C'est tout à fait normal dans un processus de négociation.

Il a mentionné les rapports de médiation. Il est vrai que certains rapports de médiation laissent croire que la médiation survenait un petit peu trop vite. Mais il reste que, dans le processus, elle a quand même - nous y croyons fortement - permis un déblocage de négociations à certaines tables. Dans ce cadre-là, j'aimerais peut-être un peu rappeler quel est ce processus de négociation dans les secteurs public et parapublic parce que ce processus est sûrement très bien connu du député d'Abitibi-Ouest, mais il est probablement mal connu de la population.

Je voudrais quand même rappeler que, le 19 juin 1985, le gouvernement précédent a adopté la loi 37, Loi sur le régime de négociation des conventions collectives dans les secteurs public et parapublic, qui remplaçait, en fait, la loi 55, Loi sur l'organisation des parties patronale et syndicale aux fins des négociations collectives dans les secteurs de l'éducation, des affaires sociales et des organismes gouvernementaux, une loi de 1978. Cette même loi remplaçait la loi 95 sanctionnée en décembre 1974. Par rapport à ces deux lois, la loi 37 a établi une décentralisation du processus de négociation en impliquant, les gestionnaires du réseau de la santé et des services sociaux à discuter de sujets spécifiques correspondant aux diverses catégories d'établissements et en introduisant un palier de négociation et d'arrangements locaux ou régionaux dont les matières sont prévues à la loi ou convenues entre les parties.

Cette décentralisation n'est pas sans effet sur le nombre de personnes impliquées dans les négociations. Près de 485 personnes actuellement s'activent chez les parties patronales et syndicales et cela, sans compter d'autres fonctionnaires des deux grands réseaux et de la fonction publique. Ces personnes s'activent principalement aux quelque 90 tables de négociations. Du côté patronal, par exemple, mentionnons qu'il y a 45 porte-parole, 100 professionnels ou des cadres de milieu et près de 45 personnes affectées à des travaux de soutien pour un total d'environ 185 personnes. Du côté syndical, c'est 300 personnes qui sont libérées de leur milieu de travail et qui sont impliquées dans le processus. Permettez-moi de rappeler que le gouvernement assume le traitement de toutes ces personnes, y compris les personnes du milieu syndical. À ce jour, nous estimons le coût total des négociations à 22 000 000 $. Ce coût s'accroît à raison de 1 400 000 $ par mois et ce sont des coûts financiers importants qui s'ajoutent aux efforts de plusieurs personnes, lesquels efforts pourraient être consacrés à d'autres travaux, surtout lorsqu'on sait que cela fait seize mois qu'on est en négociation.

M. le Président, ces quelques données illustrent bien l'envergure de l'opération. Elles illustrent bien que des efforts sont faits pour nous permettre d'arriver à une conclusion le plus rapidement possible et de signer une centaine de conventions collectives directement des secteurs public et parapublic, desquelles découleront éventuellement environ 45 conventions dans les sociétés d'État.

La ronde de 1982-1983 a coûté, quant à elle - permettez-moi de le rappeler 11 000 000 $, mais pour six mois de négociation, parce qu'on sait ce qui est arrivé et ce que le gouvernement antérieur a choisi de faire en 1982.

Les efforts sont faits, les individus sont là aux tables, les mandats sont là aux tables. Il faut continuer et laisser continuer le processus de négociation de la façon dont il a été entrepris. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais, d'abord, remercier les collègues de la commission de me permettre d'intervenir dans ce débat compte tenu des

responsabilités que j'assume dans un secteur particulièrement névralgique, celui de la santé et des services sociaux. J'entendais tout à l'heure le député d'Abitibi-Ouest dire, avec raison d'ailleurs, qu'il s'agit d'un débat majeur. Les négociations dans les secteurs public et parapublic sont, en fait, l'occasion d'un débat majeur compte tenu des répercussions économiques considérables que ce débat entraîne et des répercussions également sur le plan politique et peut-être encore davantage sur le plan social. Sur le plan économique, évidemment, la négociation aboutit toujours, et c'est normal d'ailleurs, sur des dépenses supplémentaires pour l'État qui correspondent au niveau de salaire ou d'augmentation de salaire ou d'autres avantages qui sont le résultat de cette négociation.

Sur le plan politique, souvent, à l'occasion des négociations, différentes façons de voir les choses peuvent s'affronter, mais c'est peut-être davantage sur le plan social que les répercussions sont grandes. Il s'agit de 300 000 travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic qui oeuvrent tous dans des secteurs très importants, mais, comme je le disais tout à l'heure, c'est certainement davantage sensible et névralgique dans celui de la santé et des services sociaux.

C'est donc vous dire, M. le Président, qu'à notre arrivée au gouvernement du Québec c'est avec beaucoup de sérieux que nous nous sommes mis à la tâche pour que cette ronde de négociations s'avère, peut-être pour une fois, une expérience un peu plus positive pour l'ensemble de la population qui, avec appréhension et avec raison, surveille toujours le déroulement de ces négociations compte tenu des répercussions qu'une négociation difficile peut entraîner pour elle.

En ce qui a trait au secteur de la santé et des services sociaux, je voudrais, évidemment très brièvement compte tenu du temps que j'ai, vous dire ce qui s'est passé dans le cas de la Fédération des affaires sociales, de la FTQ - la Fédération des travailleurs du Québec - et des syndicats d'infirmiers et d'infirmières du Québec. Dans le cas de la Fédération des affaires sociales, jusqu'à la fin de mai 1986, il faut reconnaître que l'essentiel des débats avait surtout porté sur la négociation de protocoles de partage des matières entre les niveaux sectoriels et sous-sectoriels. Le 27 juin, le syndicat demandait l'intervention d'un médiateur. Le rapport du médiateur indiquait - là-dessus, je pense qu'il ne sert à rien de le nier - que la médiation n'avait pas donné les résultats escomptés et que, peut-être, on n'était pas assez avancé dans la négociation pour que la médiation puisse porter tous ses fruits. Le 23 septembre, la négociation reprenait. Le 9 octobre, la CSN présentait à la table sectorielle un nouveau dépôt portant sur les changements technologiques, la formation et les congés à temps partiel.

En réponse et afin d'accélérer le rythme des négociations, parce que c'est le désir du gouvernement et c'est aussi le désir des syndicats de pouvoir régler avant Noël, la partie patronale a effectué, à son tour, un nouveau dépôt dont je reprends seulement quelques éléments: l'introduction de dispositions concernant les changements technologiques, des sommes pour la formation... On me dit qu'il ne me reste que 30 secondes. M. le Président, je vais continuer en disant que, à ce moment-ci, dans le cas de la Fédération des affaires sociales, le 23 octobre, les parties ont convenu d'entreprendre un sprint et de négocier sept jours par semaine avec des équipes réduites.

Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre. M. le député d'Abitibi...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, voulez-vous me laisser continuer seulement une seconde?

Le Président (M. Lemieux): Oui, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, j'aurai peut-être cinq minutes plus tard et, à ce moment-là, je ferai le point en ce qui a trait à la FTQ et aux syndicats d'infirmiers et d'infirmières du Québec.

Le Président (M. Lemieux): Effectivement, vous allez avoir, tout à l'heure, cinq autres minutes. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendran: Très rapidement. Je suis heureux de voir la ministre des Affaires sociales. Une chance qu'elle est là! On serait probablement moins inquiet si la négociation était moins longtemps entre les mains du président du Conseil du trésor. On le dit vraiment. Mon collègue reviendra sur la déclaration du ministre de l'Éducation. Quand on veut négocier dans le secteur public comme dans le secteur privé, par définition, on va faire face à des problèmes parce que ce n'est pas pareil. Il me semble que les autres laissent voir un peu qu'ils comprennent cela. Mme la députée de L'Acadie, ministre de la Santé et des Services sociaux, et le ministre de l'Éducation - mon collègue va revenir - ont l'air de comprendre que le secteur public, ce n'est pas la même chose que le secteur privé. Le président du Conseil du trésor ne comprend pas cela.

Trois choses rapides, parce que je note encore qu'il n'a absolument rien dit sur les

questions auxquelles j'aimerais qu'il réponde; il est censé être le coordonnateur des négociations. (10 h 45)

Pour ce qui est de Mme Lavoie-Roux, une phrase: C'est exact que, enfin, il y a une semaine, on a dégagé un mandat plus significatif à la FAS, la Fédération des affaires sociales, sur les vrais problèmes: changements technologiques, non-remplacement, temps partiel. C'est exact. Par rapport au chapeau des négociations, ce n'est pas exact aux autres tables.

Le président du Conseil du trésor me dit: Est-ce que vous vous attendez, M. Gendron, que les centrales me félicitent? Non, je ne suis pas fou, sauf qu'elles l'ont fait. C'est pour dire comme parfois on peut être curieux. Les centrales syndicales sont satisfaites des propos de Gobeil. Si vous voulez que cela dure, il faudrait que cela change. Elles ont dit cela quand? Elles ont dit cela quand vous vous êtes ouvert la trappe en disant: Là, cela va paraître, les changements. Là, je vais avoir enfin des offres significatives sur la non-récupération. Elles se rendent compte qu'il n'y a pas cette traduction de la parole aux actes, sauf un petit bout aux affaires sociales récemment; mais aux autres tables, les questions majeures sont restées en suspens.

Je reviens sur deux choses, parce que dans cinq minutes, M. le président du Conseil du trésor, c'est difficiles M. le président du Conseil du trésor, j'insiste, pourriez-vous m'expliquer un peu comment il se fait que, si la négociation fonctionne rondement les rapports de médiation ne disent rien? Sans blâmer les médiateurs, eux ils ont fait leur travail; ils ont essayé de concilier les parties sur ce qui était censé s'être passé, mais comme il ne s'est rien passé, ils n'ont rien à dire, sauf le rapport du médiateur Désilets concernant la CECS. J'aimerais vous entendre dire quelques mots là-dessus.

Deuxième chose. Mon collègue va revenir, mais je me dois de vous poser une question. J'aimerais que vous définissiez un peu plus votre objectif d'améliorer la productivité. Est-ce que, pour vous, améliorer la productivité, c'est, toujours dans votre notion économique, compte tenu que votre passé est davantage là... Jamais je ne vais déblatérer contre votre passé, il est heureux dans le domaine privé, mais je vous dis qu'il s'annonce mal dans le domaine public, par exemple. Là, vous êtes ministre responsable des négociations et président du Conseil du trésor. On aimerait que le passage se fasse et que cela ne prenne pas une autre année avant que vous compreniez que vous n'êtes plus chez Provigo.

En conséquence - revenons à la notion de productivité dans le secteur public -pensez-vous, M. le président du Conseil du trésor, que vous allez améliorer la productivité en ne faisant jamais de remplacements, en multipliant la disparition des temps complets par l'instauration de temps partiels, en rechargeant davantage les heures de travail parce que vous ne remplacez pas les absences, vous ne remplacez pas sur des quarts de travail le nombre véritable de personnes qui sont requises? Pensez-vous que vous allez augmenter ainsi la productivité dans le secteur des affaires sociales en particulier, dans le secteur du soutien scolaire?

C'est un objectif, M. le président du Conseil du trésor. Convenez-vous qu'améliorer la productivité ne veut pas dire uniquement équilibrer les colonnes et offrir des services au moindre coût possible dans les secteurs public et parapublic? Comprenez-vous cela? La productivité dans les secteurs public et parapublic, cela veut aussi dire de temps en temps la qualité des services. Cela veut dire de l'amélioration des soins aux usagers pour des travailleurs et des travailleuses qui pensent avoir des conditions de travail qui tiennent compte d'une espèce de bien-être, d'une espèce de satisfaction du devoir accompli.

Je vous donne un exemple: si j'occupais une fonction et qu'à chaque fois que je suis malade et que je ne peux pas la remplir, je ne suis pas remplacé et personne ne la fait, je vais me poser des questions sur l'utilité de mon travail. Ce n'est pas très compliqué. C'est un peu cela que les syndiqués ressentent. Ils ressentent, à un moment donné, que dans certaines situations, compte tenu du resserrement... On peut toujours revenir sur ce qu'on a fait, mais ce n'est pas cela, le problème. Le problème, c'est qu'effectivement ils ont fait des sacrifices comme ce n'est pas possible. Est-ce qu'on va toujours en exiger uniquement d'eux?

Nous pensons que les conditions économiques ne sont pas celles de 1982. Cela vous permettrait de tenir compte de certains facteurs dont il ne me semble pas, M. le président du Conseil du trésor, que dans cette négociation vous teniez compte.

Le Président (M. Després): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du trésor, la parole est à vous.

M. Paul Gobeil

M. Gobeil: M. le Président, je comprends un peu, parce qu'il vient de nous l'expliquer, quel était le but du député d'Abitibi-Ouest en demandant cette interpellation. Si j'ai bien compris, il veut en faire une attaque personnelle contre le président du Conseil du trésor. C'est son choix. Vous remarquerez que la ministre de la Santé et des Services sociaux est ici avec moi ce matin. Mon collègue, le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur,

devait y être aussi, mais, malheureusement, à la dernière minute, ses obligations ne le lui ont pas permis.

Une chose est quand même bien claire dans mon esprit et elle devrait être très claire dans l'esprit des membres de l'Opposition: les ministres sectoriaux, en l'occurrence la ministre de la Santé et des Services sociaux et le ministre de l'Éducation, sont encore les grands responsables de leur réseau respectif, en ce qui touche les négociations, alors que le président du Conseil du trésor est responsable du secteur de la fonction publique. De plus, en vertu des lois qui nous gouvernent, le président du Conseil du trésor chapeaute la coordination de toutes les négociations dans les secteurs public et parapublic. Par contre, ce n'est pas le rôle du président du Conseil du trésor de s'immiscer dans les généralités, si je peux m'exprimer ainsi, des négociations de chacun des réseaux. J'ai toutes les félicitations à faire à mes collègues. Ils font très bien leur travail. Il y a, entre nous, une compréhension et une harmonie totale. Je voudrais que ce soit bien clair.

À entendre le député d'Abitibi-Ouest tout à l'heure, je me retrouvais avec une charge de travail énorme. II m'a quasiment nommé directeur général de chacune de nos institutions, que ce soit dans le domaine de l'éducation ou dans le domaine de la santé, en parlant, entre autres, de la productivité. Évidemment, il s'agit de la productivité à partir de l'établissement de grands principes, mais je pense que ces principes sont déjà là. Donc, à partir de l'établissement de ces principes, la productivité revient, dans ce qui s'appelle l'application, à chacun des responsables de nos établissements. Je suis convaincu que nos gestionnaires, à quelque niveau qu'ils soient, ont la compétence et la volonté de bien faire en tenant compte des contraintes dans lesquelles ils ou elles évoluent.

J'ai rappelé que, comme président du Conseil du trésor, j'étais principalement responsable de la négociation dans la fonction publique. Permettez-moi de vous dire quelques mots sur la négociation dans la fonction publique directement. Nous touchons environ 53 QOO personnes. Le cadre légal de la négociation se retrouve aussi dans deux lois, la loi 37, dont on a fait mention un peu plus tôt, et la loi 51 sur la fonction publique. En ce qui touche la fonction publique, les demandes ont été reçues entre juin et décembre 1985. Là comme ailleurs, la partie patronale a fait des offres le 19 juillet 1986. Depuis le début des négociations, il y a eu de nombreuses rencontres, selon les groupes impliqués. Par exemple, avec le SFPQ, nous avons eu 35 rencontres; avec le SPGQ, 45 rencontres; avec le SPEQ, 28 et avec l'Union des agents en institutions pénales, 30. En référence au mandat de négociation, le Conseil du trésor a demandé au ministre du Travail, à la mi-juillet, de nommer des médiateurs en vue d'accélérer le règlement des différends qui opposaient les parties. Ces négociateurs ont été nommés dans la majorité des dossiers. La médiation s'est terminée entre la mi-septembre et le 8 octobre, et nous croyons qu'elle a permis d'accélérer les négociations aussi dans le secteur privé.

Ce bref tour d'horizon veut vous faire voir que, dans la fonction publique comme dans les réseaux de l'éducation et de la santé, nous donnons toute l'importance qu'elles méritent aux négociations. Nous continuons à y attacher de l'importance et à négocier intensivement des conditions de travail acceptables pour les deux parties. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Després): Merci, M. le président du Conseil du trésor.

La parole est maintenant au député de Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, comme l'a souligné précédemment le président du Conseil du trésor, je tiens à excuser le député d'Argenteuil qui, pour des obligations familiales, a dû retourner à Montréal aujourd'hui.

Je vous entretiendrai sur l'état de la situation concernant les négociations dans le secteur de l'éducation. Le député d'Abitibi-Ouest, à tort, disait tout à l'heure que le déroulement des négociations s'était fait dans un laxisme qui ne s'était pas vu précédemment, avant le 21 octobre. On est bien obligé de constater que la réalité est tout le contraire des propos, peut-être même de la pensée du député d'Abitibi-Ouest. Regardons spécifiquement, dans le cas de l'éducation, comment cela s'est passé depuis le dépôt des offres patronales, c'est-à-dire le 19 février 1986.

D'abord, le personnel enseignant, les enseignants et enseignantes du Québec. Depuis le 19 février 1986 et le début de la période de médiation, soit le 20 août 1986, il y a eu 45 séances de négociation, 167 heures de négociation, et cette négociation a permis de régler 15 articles sur une possibilité de 60. Durant toute cette période, une entente est intervenue au mois de juin dernier avec la CEQ sur le partage des matières. D'autre part, depuis juillet, les parties se sont entendues pour faire en sorte que M. Raymond Désilets devienne médiateur et préside un conseil de médiation auquel les parties se sont livrées depuis le début de septembre.

Puisque le citait M. le député d'Abitibi-Ouest, que disait le rapport de médiation et que disait le médiateur? Eh bien, concernant

la tâche d'un enseignant, le régime des congés de maladie, le quantum des prestations d'assurance-salaire, le traitement d'un enseignant en disponibilité et les mesures de résorption, le médiateur y indique que les recommandations contenues audit rapport constituent un tout indivisible et qu'elles ne peuvent être amendées. Nous croyons que les parties doivent donc le considérer globalement et l'accepter ou le refuser dans son ensemble dans une perspective de règlement.

Voilà pour le personnel enseignant, un peu rapidement, M. le Président, puisque cinq minutes ne nous permettent pas d'approfondir chacune des clauses de ce sujet, malheureusement. Je répète que, chez le personnel enseignant, nous avons eu 45 séances de négociation et 167 heures de négociation.

Parlons maintenant d'un autre type de personnel dans le secteur de l'éducation: les professionnels non enseignants, les PNE, comme disent les gens du milieu. Depuis le dépôt des offres patronales, il y a eu 43 séances de négociation, 235 heures de négociation; 29 articles sur 67 ont été réglés. Concernant le personnel de soutien qui relève de la CSN, les membres qui sont syndiqués à la CSN, depuis le 19 février, il y a eu 36 séances de négociation et 164 heures de négociation pour régler 37 articles sur 55, soit plus de la moitié de la convention collective. Concernant le personnel de soutien qui adhère à la CEQ, il y a eu 47 séances de négociation depuis le 19 février et 216 heures de négociation pour régler 34 des 60 articles de la convention collective.

 la FEMSQ, un autre syndicat dont sont membres des adhérents du personnel de soutien, 37 séances de négociation, 155 heures de négociation et 28 articles sur 59 ont été réglés. À la FTQ, depuis le dépôt des offres, 116 heures de négociation. Au SCFP, 38 séances de négociation, 136 heures de négociation; 25 articles sur 62 ont été paraphés.

M. le Président, nous sommes bien obligés de constater que le député d'Abitibi-Ouest avait tort de présumer qu'il y avait eu du laxisme dans le déroulement des négociations. Même qu'à la fin d'avril, au moment de l'étude des crédits du Conseil du trésor, si l'Opposition ne s'était pas retirée, elle aurait appris, comme les journalistes à l'époque - M. Samson, du Soleil, l'a rapporté qu'il y avait eu plus d'heures de négociation dans cette ronde-ci que dans toute la ronde précédente 1982-1983; au mois d'avril, soit un mois après le dépôt des offres patronales. Peut-on s'indigner, comme semble le faire le député d'Abitibi-Ouest...

Le Président (M. Lemieux): Votre droit de parole est terminé.

M. Chagnon: Je tiens à vous remercier, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Saint-Louis.

M. le député de Taillon.

M. Claude Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. Vous savez, cela fait à peu près une vingtaine d'années que l'État, dit-on, négocie avec ses sujets. On se souviendra du débat à l'époque, et le président du Conseil du trésor est en train de changer les choses. Il est en train de rendre cela facile, négocier avec les employés et je m'explique, M. le Président. (11 heures)

D'une part, le président du Conseil du trésor a déposé une offre jamais vue, une offre minimale maximale, plancher-plafond, et, comme l'a bien démontré mon collègue d'Abitibi-Ouest, on peut s'imaginer quelle sorte de marge de manoeuvre cela donne, quelle sorte d'espace aérien existe entre le plancher et le plafond, alors qu'ils se ressemblent tous les deux.

Évidemment, ce sont les employés du secteur public qui sont aplatis entre ce plancher et ce plafond. Alors, négocier a toujours voulu dire pour moi et pour l'Opposition, en particulier lorsqu'elle tenait les rênes de l'État, être en mesure de développer une situation où l'on pouvait faire des compromis. Mais le président du Conseil du trésor a innové en déposant cette offre.

Deuxièmement, il a aussi innové dans les matières ou dans les sujets qui relèvent du rattrapage. Auparavant, tous les présidents du Conseil du trésor avant lui et tous les gouvernements avant le sien reconnaissaient que certaines catégories d'employés avaient besoin de rattrapage. Le président du Conseil du trésor dits Pour moi, c'est 3, 5 %, plancher-plafond, et à tout le monde, en faisant fi des catégories d'employés qui, en toute justice, ont besoin d'un rattrapage. Je pense en particulier eux infirmières et aux procureurs de la couronne. Il y en a d'autres cependant et je ne voudrais pas que la liste que j'en fais soit considérée comme exhaustive. En ce sens, il est maintenant devenu facile de négocier avec ses sujets, grâce aux nouvelles techniques importées du secteur privé qui consistent, finalement, à ne rien négocier.

Ma première question au président du Conseil du trésor: Comment le président du Conseil du trésor concilie-t-il ses offres aux procureurs de la couronne avec les recommandations claires et précises du comité Rouleau, dont le mandat était précisément - et je cite la page 1 du rapport du comité Rouleau - de se pencher sur l'analyse de la rémunération et des avantages sociaux versés aux substituts du Procureur général,

qu'on appelle communément procureurs de la couronne?

Pour l'information du président du Conseil du trésor... Je pense qu'il serait bon qu'il m'écoute parce qu'il n'est probablement pas au courant qu'en Ontario - je pense que c'est une mesure de référence qui est très populaire dans ce gouvernement - une entente vient d'intervenir entre le gouvernement ontarien et les procureurs de la couronne là-bas, de sorte qu'une augmentation d'environ 10 % a été accordée aux procureurs de la couronne, ce qui fait que la différence entre les procureurs de la couronne du Québec et ceux de l'Ontario est maintenant d'environ 50 %. On appelle cela une injustice, M. le Président. Et, pour un président du Conseil du trésor responsable des négociations qui voudrait prendre et assumer ses responsabilités, il convient également qu'il dépose des offres qui redressent des situations injustes, sinon cela serait trop facile.

Dans ce cas-ci, je pense que je n'ai pas besoin d'insister sur les nombreux appuis qu'ont reçus les procureurs de la couronne à propos de leurs revendications salariales. Contrairement à ce que disait le président du Conseil du trésor il y a deux minutes, si le ministre de la Justice est responsable de son secteur, comment expliquer que le président du Conseil du trésor, solidaire du ministre de la Justice, ne concrétise pas l'appui clair, explicite, donné par le ministre de la Justice? Tous les intervenants ont reconnu le bien-fondé du rattrapage pour les infirmières et les procureurs de la couronne. En ce sens, je voudrais que le président du Conseil du trésor, sans nous chanter de chanson, nous dise pourquoi et comment il est en mesure de maintenir une position qui relève de l'injustice pure et simple et qui fait fi de la position exprimée par ceux qu'il qualifie de grands responsables, c'est-à-dire les ministres sectoriels.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Taillon. Vous avez respecté à la seconde près le temps qui vous était alloué. M. le président du Conseil du trésor.

M. Paul Gobeil

M. Gobeil: M. le Président, le député de Taillon a visé juste. Cela n'arrive pas souvent que le fasse l'Opposition, mais il vient de le faire. Il nous a parlé de l'injustice. Ce qu'il a oublié de dire, c'est que l'injustice a été créée par son gouvernement, l'ancien gouvernement. L'histoire des procureurs de la couronne, n'allez pas penser que c'est hier matin que cela s'est découvert, ou le mois passé, ou il y a trois semaines. Cela fait dix ans. Que je sache, en 1976, c'est le gouvernement du Parti québécois qui a été élu. Pourquoi n'avez-vous pas réglé le problème si vous pensez qu'il est aussi grave que cela? Effectivement, il est peut-être grave. On va revenir un peu là-dessus.

Le député de Taillon dit qu'on aplatit les employés entre le plancher et le plafond de 3, 5 %. Il a peut-être raison, mais c'est moins pire que le knock-out de 1982. Il faut admettre cela, je pense bien. Je pense bien que tous ceux qui nous écoutent, qui sont directement concernés vont comprendre la justesse de ces propos. C'est vrai qu'il n'y en a pas de marge de manoeuvre mais on a eu le courage de le dire, par exemple. On a dit que notre offre de 3, 5 % n'était pas nécessairement acceptée et acceptable, selon certains critères, mais que cela nous semblait raisonnable dans tes circonstances, compte tenu de la capacité de l'État. Si les 23 députés de l'Opposition ne sont pas en mesure de le comprendre, je suis convaincu qu'un très fort pourcentage des 300 000 syndiqués de la fonction publique et parapublique qui sont directement concernés sont en mesure de le comprendre. Je suis à peu près convaincu de cela.

Vous mentionnez l'Ontario? C'est vrai qu'il y a des différences dans la rémunération de nos cadres par rapport à l'Ontario. Ce n'était pas le gouvernement libéral qui était au pouvoir depuis dix ans. C'était à vous autres de réactiver l'économie de façon à permettre de payer comme le fait l'Ontario. C'est vrai qu'on paie des salaires plus bas au Québec qu'en Ontario, mais ne venez pas nous le reprocher à nous. On essaie, à la suite de l'élection du 2 décembre dernier, soit depuis onze mois, de corriger des situations. Vous avez eu neuf ans pour les corriger et vous ne l'avez pas fait. S'il vous plaît de me dire: On n'avait pas le choix, écoutez, c'est votre administration. Je ne veux pas juger votre administration, mais seulement rappeler des faits.

Les procureurs de l'Ontario sont mieux payés que les procureurs du Québec? C'est vrai. Les infirmières de l'Ontario sont plus payées que les infirmières du Québec? C'est vrai. On pourrait en énumérer plusieurs. Vous n'avez pas su dans votre administration, ou pu, leur donner une rémunération équivalente. Par contre, le Québec c'est le Québec et l'Ontario, c'est l'Ontario.

Le député a parlé de deux classes d'emploi. Il a répété ce qu'on a dit, finalement: Oui, nous étions très sensibles et plus sensibles à la situation' des infirmiers et des infirmières et à celle des substituts du Procureur général. Nous sommes en discussion, par le biais des tables de négociations, avec ces deux corps d'emploi, comme avec les autres, et il y a des propositions qui tiennent compte d'ajustements qui pourraient être différents, pas sur les échelles salariales qui, là comme ailleurs,

pour 1986, prévoient une augmentation de 3, 5 %. Là comme ailleurs, dans d'autres conditions, il y a des choses qui se discutent et qui se négocient. Cela se fait aux tables de négociations.

Je voudrais aussi dire une chose au député de Taillon. Le ministre de la Justice, Procureur général, et le président du Conseil du trésor s'entendent sur les offres et les négociations actuelles avec les substituts du Procureur général, les procureurs de la couronne. Qu'il se le tienne pour dit, qu'il aille interroger s'il le veut le ministre de la Justice et qu'il aille interroger aussi les procureurs de la couronne, il va voir qu'il n'y a pas de désaccord entre le ministre de la Justice et le président du Conseil du trésor, sur ce sujet.

Je pense qu'il faut que ce soit établi clairement une fois pour toutes. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. En ce qui a trait à la FTQ, il y a eu aussi des propositions patronales, et les parties ont convenu d'une accélération de la négociation ainsi que d'un fonctionnement en comité restreint. Je dois dire, par contre, que le début de cette phase, intensive a été retardée de quelques jours à cause de la modification de la représentation syndicale. Mais il reste que les gens sont, de part et d'autre, décidés à accélérer le processus de négociation.

Je voudrais également parler des infirmières, puisqu'il s'agit d'un groupe au sujet duquel le gouvernement a toujours dit: Écoutez, nous reconnaissons que la situation des infirmières, si on les compare par exemple à l'Ontario, est une situation moins favorisée. Je reprends les propos du président du Conseil du trésor qui dit qu'à cet égard, même s'il est exact que pour l'année 1986 nous devons respecter les 3, 5 %, nous examinons la possibilité de modifier la structure salariale des infirmiers et des infirmières en réduisant, par exemple, d'un échelon l'échelle salariale des infirmiers et des infirmières. Nous leur proposons également que leur situation soit étudiée par l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération qui, justement, nous permettrait de faire éventuellement les ajustements, peut-être pas dans le sens d'une parité complète avec l'Ontario, mais au moins en ayant comme objectif de rapprocher éventuellement leurs conditions de celles des infirmiers et infirmières de l'Ontario.

En ce qui a trait au temps partiel dont le député d'Abitibi-Ouest a parlé tout à l'heure, je voudrais y revenir parce que c'est une question importante, particulièrement dans le réseau de la santé et des services sociaux. Je voudrais rappeler que la partie patronale a déposé aux différents syndicats un certain nombre de propositions dont l'objectif est justement de faire en sorte que les titulaires de poste à temps partiel aient le plus d'occasions possible d'augmenter leur prestation de travail et, par conséquent, d'augmenter la stabilité de leur emploi.

Je voudrais ajouter également, M. le Président, qu'en ce qui a trait aux travailleurs à temps partiel des propositions ont été déposées touchant l'assurance-vie et l'assurance-salaire, qui permettraient également d'améliorer leurs conditions. Il y a un bon nombre de travailleurs à temps partiel; même s'il y a une bonne partie de ces gens qui souhaitent travailler à temps partiel, il y en a d'autres - il faut le reconnaître - qui souhaiteraient travailler à temps plein ou d'une façon plus substantielle et qui ne peuvent le faire aujourd'hui. Nous essayons, dans les propositions que nous avons déposées, de corriger ces anomalies qui durent depuis un grand nombre d'années. Nous n'avons pas la prétention, M. le Président - et je pense que dans nos discussions avec les syndicats ils le reconnaissent - que cela ne puisse être corrigé strictement au cours de cette négociation, mais nous posons les jalons pour atténuer la situation difficile dans laquelle un grand nombre d'entre eux se trouvent et éventuellement les mettre dans une situation qui soit vraiment une situation de travailleurs ou de travailleuses ayant une sécurité de revenu convenable.

M. le Président, je voudrais ajouter que, dans le cas des infirmiers et des infirmières, nous avons négocié d'une façon intensive aux mois de mai et juin derniers; nous espérions, de part et d'autre, un règlement. Nous n'y sommes pas arrivés, mais on négocie encore présentement. On sent chez les infirmiers et les infirmières une volonté de pouvoir régler rapidement. C'est aussi notre désir, et c'est dans ce sens que nous multiplions les efforts, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. D'abord, j'aimerais demander au président du Conseil du trésor d'éviter de me baragouiner ce qu'il a donné à mon collègue de Taillon. I! faudrait qu'il s'aperçoive qu'ils sont au pouvoir depuis le 2 décembre dernier et qu'ils arrêtent de mettre la faute sur le gouvernement antérieur. Ils ont des responsabilités et des décisions à prendre,

qu'ils les prennent! (11 h 15)

Deuxièmement, c'est le fait de voir ici Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, alors que celui qui est le responsable... Le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de la Science, malgré ce que son collègue, le député de Saint-Louis a dit, je pense qu'une façon de se retirer d'un dossier, lorsqu'on a tenu de tels propos la veille, ce sont des raisons personnelles... Le député de Saint-Louis aurait peut-être aimé être ministre de l'Éducation mais malheureusement ce n'est pas lui ou peut-être heureusement ce n'est pas lui. Ce que nous avons devant nous c'est: Ryan dénonce le concept de l'État-entreprise. Je pense que c'est important et il y a peut-être des questions qui devraient être posées au président du Conseil du trésor. Quand on regarde ce qui a été livré comme message aux directeurs des cégeps réunis en colloque à Québec, cela représente des actions qui font en sorte que le ministre de l'Éducation et aussi ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science se rebiffe un peu. On dit même dans le texte que Mme la députée de L'Acadie, ministre de la Santé et des Services sociaux, est de la même mentalité, mais la présence de la ministre ce matin indique peut-être qu'elle est plus sous la férule du président du Conseil du trésor que le député d'Argenteuil qui essaie de se défendre et de défendre certains principes de base. Le ministre dit - on le dit dans le texte - que depuis le 2 décembre il a pris des positions diamétralement opposées à la ligne politique défendue par les hommes d'affaires élus sous la bannière libérale à l'Assemblée nationale. On dit qu'en plusieurs occasions, surtout en ce qui concerne la négociation dans le secteur public, le message de M. Ryan était clairement adressé au président du Conseil du trésor, M. Paul Gobeil, dont le patronyme est associé au rapport sur la réduction du rôle de l'État. Le ministre a dit en plus: Je m'inscris en faux contre cette légende que l'on voudrait instituer et suivant laquelle les vertus d'efficacité seraient propres et exclusives au secteur privé, et il ne faudrait pas - comme il le dit - mettre la hache dans l'État moderne que nous nous sommes donné. En terminant, il a dit: Est-ce pour satisfaire des iconoclastes? M. Ryan a noté qu'il est très difficile, sinon impossible, de négocier les conditions de travail dans le secteur public de la même façon que dans le secteur privé.

C'est un message qui est clair et c'est un message qui nous indique - comme le disait le député d'Abitibi-Ouest - qu'un des secteurs qui a le mieux résisté à l'ensemble de la médiation c'est justement le secteur de l'enseignement primaire et secondaire. Effectivement, s'il y a eu de la médiation, c'est parce que lors des négociations antérieures à la médiation on n'était pas arrivé à un règlement global; la négociation s'était soldée par une impasse. Donc, s'il y a eu médiation et s'il y a un rapport comme cela c'est parce qu'effectivement il y a des gens qui ont essayé de montrer que peut-être la médiation était un des moyens d'amener les parties à s'entendre, sauf qu'on indique dans le rapport du médiateur, à la page 5: Une autre dimension importante, c'est bien que le climat à la table a été serein. Les membres du conseil de médiation ont perçu un certain scepticisme de la part des membres des comités de négociation quant aux résultats de la médiation sans compter que des déclarations publiques n'ont pas facilité la crédibilité du processus de médiation. Là on fait référence directement aux déclarations qui ont eu lieu à un certain moment au début d'octobre et en particulier au caucus de Trois-Rivières. Sans compter aussi qu'à la suite de ce rapport de médiation le ministre de l'Éducation s'est rendu à son caucus des membres du Parti libéral et il a essayé de faire - ce qu'on appelle dans le langage - le "forcing" nécessaire pour forcer la main du président du Conseil du trésor et que jusqu'à maintenant les résultats ne sont pas probants. Le député de Saint-Louis était membre de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Président, oui, mais il était membre quand même, président! Regardez la façon dont je le vois. il avait eu de la difficulté à faire accepter la proposition Gendron, de l'époque. Le ministre de l'Éducation avait été d'accord sur la base de la proposition Gendron, de l'époque. Est-ce que le président du Conseil du trésor serait prêt, aujourd'hui, à accepter comme base de négociation le rapport Gendron? C'est une question bien importante.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Laviolette. M. le président du Conseil du trésor.

M. Paul Gobeil

M. Gobeil: Merci, M. le Président. Si M. le député de Laviolette lit les journaux demain matin il va avoir - peut-être - la chance de voir comme titre: Gobeil dénonce le concept de l'État entreprise. Je suis entièrement d'accord avec les propos de mon collègue, le ministre de l'Éducation. Effectivement, c'est très clair aujourd'hui que l'État dans lequel nous sommes ici au Québec doit être un État-catalyseur et non plus un État-providence ou un État-entrepreneur. On doit rendre les conditions propices de façon que l'activité économique évolue assez pour continuer à payer pour nos acquis sociaux et à les développer en quantité et en qualité. C'est très clair. 11 n'y a aucune mésentente entre mon collègue et

moi.

D'ailleurs, M. Ryan, le ministre actuel de l'Enseignement supérieur et de la Science, vient de l'entreprise privée. N'a-t-il pas, pendant 20 ans et plus, été le directeur général d'une entreprise qui s'appelle Le Devoir et n'a-t-il pas réussi financièrement? Tout le monde connaît la situation financière du Devoir au moment où il a quitté: excellente!

Tout cela, la longue expérience de mon collègue dans le secteur privé et le succès qu'il y a connu, démontre qu'il n'y a pas d'opposition automatique entre le développement d'une pensée et d'une conscience sociale et le succès dans la gestion d'une entreprise.

Les négociations collectives dans les secteurs public et parapublic actuels ont leur régie propre, leurs caractéristiques particulières, leur histoire, leur tradition, et j'en conviens aisément. Nos préoccupations visant à les mener dans le respect de nos moyens financiers ne nous font pas perdre de vue cependant qu'aujourd'hui le monde du travail, lorsqu'il est moderne et évolué, s'articule autour de certaines valeurs. Permettez-moi de vous en mentionner quelques-unes. Une communauté de travail participante, ouverte et démocratique, la mobilisation des ressources humaines et le partage avec chacun des objectifs de l'entreprise, de l'établissement et de l'institution, l'aménagement flexible du travail et de son organisation ou la souplesse et l'ouverture dans des relations humaines et des conditions salariales qui offrent non seulement un revenu juste et raisonnable, mais des avantages sociaux complémentaires et, quand c'est possible, dans le cas des réseaux public et parapublic, une sécurité d'emploi. À cela s'ajoutent des caractéristiques de l'organisation du travail qui, tout en étant d'un ordre plus économique, n'en sont pas moins importantes. La productivité, le souci des services à des coûts comparables à d'autres donneurs de services de même nature, l'imputabilité la plus large possible de tous les membres d'une organisation. Les offres que nous avons déposées ces derniers mois offrent largement la possibilité d'établir de telles règles du jeu entre le gouvernement, les diverses parties patronales des réseaux et les employés des secteurs public et parapublic.

M. le Président, tout au long de la démarche de négociation avec nos employés, ceux des réseaux de l'éducation ou de la santé, un objectif prioritaire nous guide: fournir aux Québécois et aux Québécoises des services publics de qualité, le faire dans le respect des moyens financiers dont nous disposons, inscrire la démarche de négociation dans le cadre plus large des responsabilités du gouvernement, lesquelles passent par l'obligation de respecter et de maintenir en équilibre l'ensemble de la gestion de l'État.

M. le Président, nous nous efforçons, comme membres de ce gouvernement, de gouverner et d'administrer en fonction de nos moyens pour le bien-être de tous les Québécois et de toutes les Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député de Saint-Louis.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon; M. le Président, personne ne pourra rester insensible aux propos du député de Laviolette. D'abord, je pense que le député de Laviolette prend ses désirs pour des réalités, d'une part, et, d'autre part, fait quelques fantasmes sur ses désirs. Je suis obligé de relever certains propos qu'il a tenus tout a l'heure. Je réitère et je répète à l'intention du député de Laviolette que le ministre de l'Éducation n'a pas pu ce matin participer aux travaux pour des raisons d'obligations familiales qui sont extrêmement importantes et pour lesquelles M. le député de Laviolette en sait probablement plus qu'il n'en savait tout à l'heure.

Deuxièmement, il n'y a qu'un ministre de l'Éducation au Québec et il est excellent, n'en déplaise au député de Laviolette. Le député de Saint-Louis ne cherche pas à prendre la place de qui que ce soit ici. Troisièmement, je tiens... Et c'est un peu malheureux que le député de Laviolette l'ait souligné, j'ai fait exprès pour ne pas le soulever tout à l'heure parce qu'il s'est agi d'une période extrêmement dure pour l'ancien ministre de l'Éducation qui est aujourd'hui notre collègue d'Abitibi-Ouest.

C'est à cette période que, en avril 1985, au moment où j'étais président général de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, à la suite d'une exploration qui avait été tenue avec la CEQ, nous étions arrivés à une entente. Je tiens à souligner à l'intention du député de Laviolette qu'après une réunion de tous les présidents et directeurs généraux du Québec les présidents, les directeurs généraux et, évidemment, la fédération que je représentais à l'époque s'étaient dits d'accord avec le rapport de notre exploration qui avait été faite préalablement conjointement avec le ministère de l'Éducation. Malheureusement pour notre collègue, le député d'Abitibi-Ouest, à l'époque le cabinet n'avait pas accepté cette conclusion qui aurait fait en sorte qu'aujourd'hui les négociations auraient été beaucoup plus faciles si le cabinet avait donné son appui au ministre de l'époque, le député d'Abitibi-Ouest.

Ceci étant dit, je ne l'aurais pas soulevé parce que je sais comment cela a

été difficile à l'époque pour le député d'Abitibi-Ouest, et c'était vrai que ce n'était pas facile parce qu'il croyait à cette entente et nous y croyions aussi. Chacune des parties devait y mettre du sien, mais nous avions un problème extrêmement urgent à régler et ce dossier aurait certainement pu faire en sorte d'améliorer la qualité de l'enseignement public à partir du moment où il aurait été accepté.

Il y a quelque chose de curieux dans les négociations, M. le Président, et M. le député de Laviolette et M. le député d'Abitibi-Ouest en ont déjà une large expérience, particulièremement dans leur milieu respectif, mais souvenons-nous des deux dernières négociations. En 1979-1980, le gouvernement a littéralement donné sa chemise au cours des négociations. Le ministre des Finances et député de L'Assomption, dans le bilan des négociations dans le budget du 25 mars 1960, disait déjà: Enfin, les enseignants ont reçu un allégement de tâche comportant l'addition d'environ 1600 enseignants dans le système. C'est à mon sens - et c'est le ministre de l'époque, M. Parizeau, qui parle - la seule incongruité du règlement. Si on avait su au moment où ces offres ont été formulées ce que l'on sait maintenant sur le coût réel de l'enseignement primaire et secondaire - j'aurai l'occasion de revenir longuement sur cette question un peu plus tard - une telle offre n'eût jamais été faite.

Cela, c'est le résultat de 1979-1980. Un peu plus tôt, l'ancien ministre des Finances, M. Parizeau, se pète les bretelles en disant: On a réussi à faire en sorte d'amener à un niveau comparable à l'indice des prix à la consommation les hausses salariales pour 1979 à 1982. On est obligé de constater que dans la vérité ce sont 2 % de plus que l'indice des prix à la consommation qui ont été versés aux employés de l'État. Après avoir donné sa chemise en 1979, le gouvernement, en catastrophe, a été obligé de réagir en 1982-1983, soutirant 20 % des salaires de ses employés.

Ces espèces de négociation en dents de scie, une fois on paie et l'autre fois on retire, c'est exactement le contraire qu'a voulu faire le gouvernement actuel en étant beaucoup plus responsable dans ses offres patronales. Fort heureusement, le gouvernement actuel a aussi acquis le respect de ses employés parce qu'il a su garder un contact avec ses employés et conserver ce respect de ses employés, lequel respect a été complètement perdu par le gouvernement précédent à la suite de sa catastrophe budgétaire de 1982-1983. Merci beaucoup.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Saint-Louis. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Je me permettrai, M. le Président, encore là de manifester mon regret que le président du Conseil du trésor n'ait pas l'air de prendre au sérieux ses responsabilités ministérielles. Contrairement à une espèce d'accusation gratuite qu'il lançait que ce matin ce qui m'intéresse, c'est un règlement de comptes contre le passé du président du Conseil du trésor, je ne veux rien savoir, ce n'est pas cela du tout. J'ai hâte qu'il soit en politique. Je l'ai dit tantôt, il est censé être président du Conseil du trésor, ministre responsable. Il n'est plus où il était: je voudrais juste qu'il commence à "performer" là où il est. (11 h 30)

Très sérieusement, M. le président du Conseil du trésor, je n'en reviens pas de ce que vous nous faites accroire ce matin à propos des déclarations sérieuses mais à conséquences, très importantes d'un collègue comme le député d'Argenteuil, où d'une façon claire, manifeste il sort des rangs ministériels en disant: Ça va faire! Pourquoi est-il obligé de dire ça, M. le président du Conseil du trésor? Vous pouvez bien vous amuser, vous pouvez bien faire semblant que ce qu'on verra dans les journaux demain c'est que le président du Conseil du trésor est complètement d'accord avec le député d'Argenteuil, il y a des gens qui savent lire entre les lignes. Ils se rendront compte que toutes vos déclarations des six derniers mois vont complètement à l'encontre, sont diamétralement - j'espère que vous savez ce que ça veut dire - opposées à la ligne politique défendue par les hommes d'affaires élus sous la bannière libérale, le gros club privé du Parti libéral et vous en êtes de cette théorie-là, vous en êtes d'une façon essentielle.

Vous avez deux discours. Vous continuez à pratiquer la politique du double langage. Le double langage, cela semble être la priorité de ce gouvernement. La preuve? C'est quand vous êtes allé voir vos "chums" à Montréal récemment. Le président du Conseil du trésor, M. Gobeil, a réitéré devant le Canadian Club sa volonté de réduire la croissance des dépenses du gouvernement, notamment dans le réseau de l'éducation. Le signal que le ministre de l'Éducation vous a donné hier veut dire: C'est assez! Pour ce qui est du concept d'un État-entreprise, ce que n'est pas du tout l'État du Québec, il y a peut-être là des choses qui se défendraient. Mais il vous met en garde. Écoutez cela, M. le président du Conseil du trésor: Impossible - dit-il - de négocier les conditions de travail dans le secteur public de la même façon que dans le secteur privé. Pourtant, si c'était quelqu'un, comme vous l'affirmiez tantôt, qui a autant d'expérience que vous dans le privé... Il faut

vraiment vouloir s'amuser que de faire accroire que c'est parce que le Devoir... Je sais bien que c'est une entreprise privée, mais l'expérience publique de M. Ryan, député d'Argenteuil, ministre de l'Éducation, ne croyez-vous pas qu'elle est beaucoup plus dans le secteur des affaires publiques? Ses éditoriaux, est-ce que c'étaient des éditoriaux de fond sur la façon dont Provigo s'acquittait de ses responsabilités? Je n'ai jamais entendu ça. L'essentiel des points de vue du député d'Argenteuil a toujours été exprimé sur les grandes questions d'une société mais toujours lié aux responsabilités de l'État, l'État fédéral pour lui de temps en temps et l'État québécois de temps en temps. C'est dans ce sens-là qu'il s'exprime aujourd'hui.

Nous faisons un débat sur les négociations et on vous dit, M. le président du Conseil du trésor, qu'il aurait été important de prendre au sérieux l'avertissement qu'il vous sert en disant: Voulez-vous rentrer un peu plus dans vos responsabilités comme président du Conseil du trésor, responsable de la négociation? Cela veut dire changer d'attitude et de comportement. C'est cela le signal. Cela veut dire une plus grande ouverture. Vous me disiez tantôt: Nous sommes francs, nous avons le courage de dire telle et telle chose. Je reviendrai lors de mes cinq minutes tout à l'heure pour exprimer le contraire.

Je pense, M. le président du Conseil du trésor, qu'il est urgent que vous cessiez ce double langage et que vous passiez de la parole aux actes par des mandats définis, expressifs, sur des conditions qui touchent les syndiqués du Québec. Je vous donne un exemple. J'ai une note ici de M. Harguindeguy, du syndicat des fonctionnaires. C'est une exemple. Quand il dit, le 2 octobre... Non, mais un instant! J'aimerais que vous y répondiez. Je n'ai eu aucune réponse sur des questions de négociation que j'ai soulevées ici. Quand il vous dit le 2 octobre: On ne fera pas la table.... Ètes-vous capable de me répondre? Voici ce qu'il dit: Pour envisager un règlement négocié, M. le président du Conseil du trésor, il faudra que toute la question des mises en disponibilité des fonctionnaires, toute la question des employés occasionnels, toute la question des politiques d'égalité en emploi, les changements technologiques et techniques ainsi que l'octroi des sous-contrats... Où en est-on rendu spécifiquement dans ce cas-là en termes d'orientations? Je ne parle pas de dépôt, mais en termes d'orientations. Pourrait-il me dire, au 2 octobre, qu'il a la conviction qu'il est impossible d'envisager un règlement négocié s'il n'y a pas quelque chose sur ces questions-là? Je conclus. S'il me dit cela le 2 octobre, c'est pour dire, M. le président du Conseil du trésor, que cela fait quand même huit ou neuf mois qu'on parle beaucoup. Je n'ai jamais nié qu'il y ait eu 54 séances, vous m'avez rappelé cela tantôt, 67 séances - on le sait - pour parler de la température et départager les matières entre le local et le national.

Je conclus mais j'aimerais que vous me répondiez là-dessus.

Le Président (M. Lemieux); Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du trésor.

M. Paul Gobeil

M. Gobeil: M. le Président, j'aimerais que le député d'Abitibi-Ouest me retrouve une déclaration par laquelle j'aurais dit que les négociations des conditions dans le secteur public, cela se faisait de la même façon que dans le secteur privé. Qu'il me la trouve. Je n'ai jamais dit cela parce que je ne l'ai jamais pensé. Je suis entièrement d'accord avec mon collègue, le ministre de l'Éducation, quand il dit qu'il est impossible de négocier les conditions de travail dans le secteur public de la même façon que dans le secteur privé. Je suis entièrement d'accord avec cela et je n'ai jamais dit le contraire. Je ne me suis jamais prononcé sur ce sujet. Aujourd'hui, ce matin, je me prononce et je vous dis, à vous de l'Opposition, que je suis d'accord avec cela. C'est clair? On peut bien interpréter comme on veut. Double langage, ce dont m'accuse le député d'Abitibi-Ouest. Il faudrait voir quel langage il a tenu lorsqu'il était au gouvernement et quel langage il tient aujourd'hui.

Il est temps que le président du Conseil du trésor commence à "performer". Je ne pense pas que j'aie de leçon à recevoir d'un membre de l'ancien gouvernement, même pas du député d'Abitibi-Ouest, et je ne veux pas l'attaquer personnellement compte tenu, comme l'a mentionné mon collègue, le député de Saint-Louis, qu'au printemps 1985, alors qu'il était ministre de l'Éducation, il avait quand même une bonne proposition. Malheureusement, il n'a pas eu l'appui de ses collègues. On ne reviendra pas là-dessus.

Performance, qu'est-ce que cela signfifie? Je ne suis pas ici pour "performer". Je ne suis pas ici pour ma gloire personnelle. Je suis ici pour faire un travail en tant que membre de ce gouvernement, un travail avec l'équipe gouvernementale parce que, M. le député d'Abitibi-Ouest, il y a une équipe gouvernementale ici, maintenant, au pouvoir. Il y a un gouvernement qui se tient debout et un gouvernement qui prend ses responsabilités. Il y a un gouvernement qui ne laisse pas de chicane interne. II n'y a pas de chicane interne dans notre gouvernement, M. le député d'Abitibi-Ouest. On est d'accord avec les propositions qui sont faites. On a l'accord du caucus des

députés concernant ces propositions dan9 le cadre des négociations salariales avec les employés des secteurs public et parapublic. Nous faisons le maximum dans les circonstances. Ce maximum se situe, pour ce qui touche les échelles salariales, à 3, 5 %. C'est mieux qu'un moins que l'ancien gouvernement a donné et peut-être qu'il a été obligé de donner ce moins en 1982. Je ne veux surtout pas commenter cela.

Aujourd'hui, la situation de 1986 est telle que notre capacité financière nous permet, en serrant les coins et en grattant les fonds de tiroir, de donner à nos employés des secteurs public et parapublic une augmentation des échelles salariales de 3, 5 % et d'améliorer d'autres conditions de travail, le tout à la suite de discussions à des tables de négociations. Il y en a des discussions. Le député d'Abitibi-Ouest veut nous faire croire que cela ne discute pas aux tables. C'est faux. Cela discute aux tables et on avance dans les règlements de points en litige. Les négociations sont faites pour cela. Les négociations aux tables sont faites pour régler ces points-là et ils se règlent. Je demande simplement au député d'Abitibi-Ouest de laisser faire l'équipe actuellement en place. Il n'est plus au pouvoir. Comme critique de l'Opposition, qu'il pose des questions, c'est son droit, mais je ne lui reconnais pas le droit de venir négocier en lieu et place du gouvernement et des partenaires patronaux du gouvernement. Il y a des tables pour ce faire. Il y a des personnes nommées pour ce faire et qu'on laisse chacun faire son travail comme il doit le faire en vertu des directives globales qui sont données et qui sont surveillées permettez-moi l'expression - par les députés sectoriels incluant aussi, pour ce qui touche la coordination, le président du Conseil du trésor. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député de Limoilou.

M. Michel Després

M. Després: Merci, M. le Président. Nous sommes réunis ici ce matin pour discuter de l'état des négociations entre le gouvernement et les secteurs public et parapublic. Effectivement, c'est un débat majeur parce que cela concerne 300 000 salariés de l'État, 300 000 salariés regroupés sous différents syndicats: 125 000 à la CSN, 108 000 à la CEQ et 45 000 à la FTQ. Voici un débat que je suis de près, en tant que député de la région de Québec, parce qu'on retrouve, juste dans la région de Québec, 25 000 fonctionnaires.

Je suis un peu surpris de voir, ce matin, le débat amorcé par l'Opposition parce que je pense qu'elle est très mal placée. Je ne sais pas si ces gens se sont posé la question à savoir pourquoi ils n'avaient pas de député dans la région de Québec, en tout cas sur la rive nord. Ils ont réussi à en sauver un sur la rive sud, Je peux vous dire que les travailleurs des secteurs public et parapublic ont été énormément touchés en 1982, tellement touchés qu'on a assisté à des relations de travail très difficiles; on a vu des gens qui ont été déchirés, des gens qui se sont complètement retournés contre cet ancien gouvernement. Je peux vous dire qu'à la suite des négociations qui se passent présentement, pour avoir rencontré plusieurs travailleurs du milieu de l'éducation, du milieu de la santé, les gens préfèrent sûrement 3, 5 % à une coupure de 20 %.

Les négociations se déroulent selon des règles du jeu normales en vertu desquelles on peut s'attendre que les deux parties fassent un rapprochement pour permettre un règlement qui sera un compromis acceptable entre les travailleurs et le gouvernement et ce, même à l'intérieur des contraintes budgétaires, parce qu'il ne faut pas oublier ces fameuses contraintes budgétaires.

Les présentes négociations avec ces 300 000 employés des secteur public et parapublic s'inscrivent dans un contexte qui n'est pas tellement facile. Il faudrait se rappeler que l'ancien gouvernement avait justifié sa propre politique de récupération salariale en 1982 en invoquant le piteux état des finances publiques qu'il avait lui-même créé, quant à moi, depuis 1976. On a tellement paniqué devant cette situation financière qu'on a coupé vite et de façon très radicale sur le dos des travailleurs des secteurs public et parapublic.

Par contre, cela n'a pas empêché l'ancien gouvernement de dépenser, juste en publicité, et, je dirais, pour rapetisser la tâche des travailleurs dans les secteurs public et parapublic, 743 000 $, sur un coût de 1 163 000 $, en publicité, pour essayer de convaincre qu'au fond les gens dans les secteurs public et parapublic n'étaient pas si mal traités que cela: 743 000 $.

En tant que gouvernement, nous estimons que ces offres salariales de 3, 5 % en 1986 sont encore tout à fait fondées et nous n'avons pas l'intention de les modifier. Cette augmentation de 3, 5 % se situe encore à l'intérieur des tendances observées. Il me reste 30 secondes, M. le Président. Ce qui est important de retenir, c'est que le gouvernement est de bonne foi et on arrivera sûrement à une entente entre les deux parties.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Limoilou. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Rapidement, 30 secondes pour reprendre au moins les faussetés qui viennent d'être exprimées en partie par le député de Limoilou. Il n'y a jamais eu de coupures de 20 % en 1982. On peut bien répéter cela. C'est tellement facile, cela fait tellement image, 20 % pour trois mois, cela fait 4, 5 % de réduction en 1982. Jamais il y a eu une coupure de 20 % comme on le véhicule. C'est sûr que j'aime mieux 3, 5 % que 20 %, mais c'est faux. Il n'y a jamais eu 20 %. Il le sait très bien, mais on aime cela, donner des fausses images. (11 h 45)

Deuxièmement, nous, on a invoqué le piteux état des finances publiques? On n'a jamais parlé de cela en 1982. On invoquait la réalité. Écoutez, j'ai les chiffres ici. Il devait être au monde en 1982. On a évoqué une affaire, même s'il y en a qui sont jeunes, ils devaient être au monde en 1982. On a évoqué le produit national brut. Jamais le produit national brut n'a été à - 5 %. On n'est pas pour vivre dans le passé. Â l'entendre, je suis à la veille de lui dire: Est-ce que vous avez hâte d'être au pouvoir, les petits amis?

Une voix: Bien oui.

M. Gendron: Avez-vous hâte d'être au pouvoir? Pensez-vous que cela va venir bientôt? Nous, on pensait que cela s'était passé le 2 décembre dernier. On a payé pour. On l'a eue, notre leçon, et on n'a rien à reprocher pour ce qui a été fait sur le fond. Quand on dit qu'on a mis cela sur le dos des travailleurs et des travailleuses, on avait tous un frère, une soeur qui n'avait plus de "job" nulle part en 1982 parce que ça tombait partout à cause d'un taux d'intérêt de fou. Les travailleurs des secteurs public et parapublic étaient mieux protégés. On leur a demandé des sacrifices très grands. Je le sais. C'est exact. Énormes. Je l'ai dit 25 fois. Pour cela, est-ce qu'on va constamment demander des sacrifices à la même clientèle? Nous, on dit non.

Quand le président du Conseil du trésor dit à M. Gendron: Voulez-vous vous mêler de vos affaires, votre rôle, c'est de poser des questions... S'il connaissait un peu plus le régime parlementaire, il aurait au moins un peu plus de respect pour le système parlementaire et il conviendrait qu'un exécutif, un gouvernement, de temps en temps, cela a des comptes à rendre à l'Assemblée nationale. Or, je suis dans le cadre d'une structure qui est prévue pour permettre à des parlementaires de faire leur "job". Moi, j'ai la conviction que je prends mes responsabilités, ce matin, même si le président du Conseil du trésor va continuer à dire: Laissez-nous cela. Cela va bien. Ce sont ses affaires, mais ce n'est pas ce que je lis, y compris par ses collègues. Quand bien même il essaierait de me faire croire, ce matin, qu'il n'y a aucun point de désaccord avec ses collègues, je ne suis pas venu au monde en politique hier. Moi, il me semble que cela fait dix ans que je suis en politique. C'est dix ans réellement. Je me suis adapté à la situation politique.

Avoir le culot de faire croire qu'il est complètement d'accord avec ses collègues, il va falloir qu'il commence à discuter avec eux autres. Le premier collègue qu'il va avoir à convaincre, c'est son collègue de l'Éducation quand il nous fait croire qu'il est d'accord que négocier les conditions de travail du secteur public, c'est complètement différent du secteur privé. Je ne veux pas qu'il me dise, ce matin, qu'il est d'accord. Je veux qu'il pose les gestes qui prouveraient qu'il a compris cela. Je veux que vous posiez les gestes comme président du Conseil du trésor et aller faire la preuve que vous avez compris cela, M. le président du Conseil du trésor. Pas nous affirmer cela.

Je reviens, parce que cela m'apparaît fondamental, sur quelque chose qui nous regarde ce matin et sur lequel je n'ai pas eu de réponse encore. Dans une déclaration que vous avez faite, M. le président du Conseil du trésor, vous avez affirmé que selon un relevé les principales enquêtes sur les prévisions salariales effectuées surtout dans le secteur privé - cela venait de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération. Pour que la citation ne soit pas trop longue, vous avez dit ceci: "En 1986, les structures salariales augmenteront de 3 % à 4, 5 % au Québec. " Et vous vous êtes arrêté là. Mais je continue, parce que, si vous n'aviez pas tronqué la citation, voici ce que cela dit: "Les salaires augmenteront de 4, 5 % à 5, 5 % au Québec et de 4, 5 % à 6 % au Canada en 1986. " En conséquence, le 19 février, lors du dépôt, quand vous avez affirmé ce que je viens de lire, M. le président du Conseil du trésor, au même moment vous saviez que vous ne donniez pas, contrairement à ce que vous avez dit, l'heure juste. L'heure juste était que, dans le même document de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, il était mentionné que les salaires - il me reste 30 secondes - augmenteront de 4, 5 % à 5, 5 % au Québec. Donc, faire croire qu'une augmentation de 3, 5 % à ce moment-ci tient compte de la réalité objective de ce qui se passe dans le secteur de la rémunération, ce n'est pas exact. Je veux que vous le disiez parce que c'est ça, l'information, actuellement. Que vous disiez: On ne veut pas offrir plus de 3, 5 %, ce sont vos affaires. Mais il ne faut pas faire croire que c'est ce qui se paie dans le privé et que ce sont les tendances. C'est faux. Les tendances, ce n'est pas 3, 5 %, c'est n'importe quoi entre

4, 5 % et 5, 5 % pour l'augmentation de salaire. J'aimerais vous entendre là-dessus plutôt que me faire dire que je n'ai pas à vous questionner, que cela ne me regarde pas ou: Laissez-nous ça entre les mains, ça va bien aller.

Le Président (M. Lemieux): M. le député d'Abitibi-Ouest, je vous remercie.

M. le président du Conseil du trésor, en vertu des règles de procédure qui concernent l'interpellation, vous allez maintenant exercer votre droit de parole pour une durée de dix minutes. Ensuite, M. le député d'Abitibi-Ouest aura un droit de réplique de dix minutes et le débat sera clos.

M. le président du Conseil du trésor.

Conclusions M. Paul Gobeil

M. Gobeil: Merci, M. le Président. Loin de moi de vouloir brimer le droit de parole du député d'Abitibi-Ouest. Dans le cadre du processus parlementaire, il peut poser toutes les questions et demander toutes les réponses qu'il veut. On est ici d'ailleurs ce matin en interpellation pour discuter de l'état des négociations dans les secteurs public et parapublic. Il ne m'a pas entendu dire que je ne voulais pas venir. Il ne m'a pas entendu lui reprocher non plus d'avoir demandé cette interpellation, au contraire. Quand je lui ai dit de nous laisser faire, c'était dans le cadre de discussions privées ou de discussions avec la presse. C'est bien connu, cela a paru sous de grands titres dans les journaux. Je comprends que le député d'Abitibi-Ouest est moins habitué de voir son nom dans les journaux maintenant qu'il est dans l'Opposition. J'espère qu'il ne recherche pas cela. De toute façon, il sait comme moi... Il vient de dire: En 1982, on a été forcé de tenir compte de la situation économique et de faire ce qu'on a fait. Disons qu'on ne reviendra pas là-dessus. Mais je lui dit, aujourd'hui, en 1986, que nous sommes aussi forcés par la capacité de payer de l'État de limiter nos offres à 3, 5 %. Je ne vois pas pourquoi le député d'Abitibi-Ouest, dans sa grande sagesse, nous suggère 5 %. Nous lui disons que l'État n'a pas la capacité, en 1986, de payer 5 % d'augmentation sur les échelles.

En deuxième lieu, nous croyons aussi que cette augmentation des échelles salariales de 3, 5 % respecte les tendances du marché actuel, peu importent les chiffres que peut invoquer le député d'Abitibi-Ouest. Une source très sûre, à notre point de vue, c'est celle de Statistique Canada. S'il prend la peine de lire ces statistiques, il verra qu'au premier trimestre l'augmentation moyenne a été de 3, 5 %, au deuxième trimestre de 3, 7 % et il semble que la tendance de 1986 sera autour de 3, 7 %. À la fin de l'année, cela pourrait être 3, 5 % ou 3, 65 % ou 3, 75 %. Je le lui concède. C'est une tendance et cela nous semble raisonnable.

Le député d'Abitibi-Ouest prend Ies chiffres qui font son affaire, les plus hauts possible évidemment; ce n'est pas lui qui paie. Nous avons à administrer les finances gouvernementales. Nous avons à répartir les impôts et les taxes que nous percevons et nous essayons de le faire le mieux possible.

M. le Président, je voudrais profiter de cette dernière intervention pour remercier mes collègues de la commission et particulièrement ma collègue, Mme la députée de L'Acadie et ministre de la Santé et des Services sociaux. Tout le monde sait qu'elle est titulaire d'un ministère qui l'occupe grandement et j'apprécie sa présence ici ce matin. Je veux aussi remercier M. Ryan. Comme je l'ai mentionné au début, M. Ryan devait être ici, mais des circonstances incontrôlables ont fait qu'il n'a pu être ici et je le déplore, mais je comprends la situation.

Ce matin, nous avons discuté d'un sujet sérieux et dont les enjeux n'en sont pas moins sérieux. Les négociations collectives dans les secteurs public et parapublic sont une vaste opération dont j'ai eu l'occasion de rappeler, au cours des discussions, non seulement l'ampleur et le coût financier, mais aussi les exigences de mobilisation, les intelligences et les compétences d'un très grand nombre de personnes. Nous ne saurions donc traiter ce sujet à la légère.

J'ai eu aussi l'occasion, au cours des discussions, de souligner l'importance de respecter les règles du jeu de la négociation collective et d'éviter de déplacer le débat inutilement. Je veux simplement rappeler au député d'Abitibi-Ouest que, contrairement à plusieurs membres de l'Opposition et à lui-même, j'ai effectivement une expérience de négociation dans le secteur public et, au cours des onze derniers mois, j'ai au moins appris des choses pour ce qui concerne les négociations dans le secteur public. Je n'insisterai jamais trop, M. le Président, pour rappeler que les négociations collectives ont leur propre rythme, leurs propres règles du jeu, leurs propres exigences. Tout cela est bien connu des parlementaires, tout cela est bien connu du député d'Abitibi-Ouest. Chacun d'entre nous doit être très soucieux d'éviter d'exploiter à des fins autres que l'intérêt public les échanges entourant les négociations collectives. À plusieurs occasions depuis les derniers mois, j'ai eu la chance de faire le point sur la situation financière difficile dans laquelle nous vivons et sur les voies de solution que nous préconisons pour en sortir.

Permettez-moi de redire la très étroite marge dont nous disposons dans la démarche des négociations collectives avec les 300 000

employés des secteurs public et parapublic. Nous désirons régler par des conventions collectives signées, nous l'avons dit et nous le répétons. Nous considérons toujours qu'au cours des dernières semaines, principalement, d'importants progrès ont été faits et qu'une ouverture très certaine s'est manifestée aux tables de négociations. Nous sommes toujours convaincus que le processus normal de la négociation est la meilleure voie pour arriver à des ententes acceptables de part et d'autre. Il est très évident qu'on ne saurait donner tout ce qui est demandé ou tout ce qui est souhaité. C'est pour cela qu'il devra y avoir des compromis de la part des deux parties.

En tant que premier responsable ou coordinateur de l'opération des négociations collectives dans les secteurs public et parapublic, mon rôle est de m'assurer que nous utilisons tous les moyens normaux pour mener à bonne fin cette opération dans un contexte budgétaire difficile, je le rappelle; nous nous devons d'être prudents mais nous nous devons aussi d'exercer une certaine rigueur. Les échanges que nous avons aujourd'hui, espérons-le, contribueront à renforcer notre intention de régler le plus rapidement possible ces conventions collectives.

M. le Président, nous devons aussi reconnaître l'importance de négocier dans un climat de confiance et de respect mutuels. Les nombreuses tâches auxquelles nous avons à faire face sont trop conditionnées par la qualité des rapports que nous entretenons avec notre personnel pour que nous négligions quoi que ce soit dans la poursuite de nos objectifs. Dans cet esprit, nous continuerons à négocier d'une façon logique et raisonnable. Nous ne nous permettrons pas de matraquer froidement les employés des secteurs public et parapublic.

Les employés des secteurs public et parapublic ont connu des rondes difficiles en 1982. Aujourd'hui, en 1986, nous ne voulons pas détériorer l'image de perception que se font les Québécois et les Québécoises des services de l'État. Ma première préoccupation et celle de mes collègues et de notre gouvernement, c'est la qualité des services que nous offrons à la population. Au moment où nous nous rencontrons, ce matin, nos employés se trouvent auprès des élèves, auprès des malades, des personnes âgées. Ils fournissent des services sur notre territoire. Ils informent et soutiennent la population québécoise. Nous voulons que cela continue. Ce n'est pas en dénigrant l'une ou l'autre des parties que nous accélérerons le règlement des négociations.

C'est' dans le respect que nous entendons conclure une entente avec nos employés. Nous sommes confiants de la compréhension de nos employés des secteurs public et parapublic de façon à en venir à un règlement à très court terme. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le président du Conseil du trésor. M. le député d'Abitibi-Ouest, vous exercez votre droit de réplique pour une durée de dix minutes. M. le député d'Abitibi-Ouest. (12 heures)

M. François Gendron

M. Gendron: C'est la conclusion de cette interpellation qui, comme je l'ai mentionné, se devait d'avoir lieu. Contrairement à ce qu'on peut prétendre, on a une responsabilité, nous, de l'Opposition et on devait s'en acquitter pour parler d'un sujet important. Le sujet est majeur, il doit prendre une place importante dans la population du Québec. D'abord, pour respecter les travailleurs et les travailleuses de ces secteurs. Eux autres souhaitent qu'on puisse, comme parlementaires, prendre quelques heures de notre temps, de temps à autre, pour se préoccuper de leurs conditions de travail. C'est fondamental dans une société qui veut progresser, qui veut développer et offrir peut-être une qualité de services meilleure. Je reviendrai dans quelques secondes là-dessus.

Je suis obligé de constater qu'on est quand même dans un cadre parlementaire. Ce qui s'est passé ici, premièrement, c'est que le président du Conseil du trésor m'a confirmé, ce matin, ce que je prétendais, soit que les négociations ont piétiné. Deux raisons pour lesquelles je peux conclure comme cela: il n'a pas été capable de dire un mot sur les rapports de médiation. Il n'a rien à me dire là-dessus. Comment se fait-il que tous les rapports de médiation n'ont rien à dire? Je lui ai demandé pourquoi à trois reprises. N'est-ce pas là la preuve qu'il n'y a pas eu véritablement de débat sur les questions fondamentales? Pas un mot là-dessus. Il ne peut pas m'en parler.

Deuxièmement, au moment où on se parle, le 1er novembre, je pense.

Une voix: Le 31 octobre.

M. Gendron: En tout cas, le 31 octobre. Hier, j'avais encore l'expression de certaines centrales à savoir que, sur les enjeux majeurs... Il essaie de me faire accroire que j'aurais dit que ces gens ne se sont pas parlé. Je n'ai jamais prétendu cela. Au contraire, s'il y a eu une négociation où les gens se sont parlé, pour pas beaucoup de signification, cependant... Et ce n'est pas contre les gens. Quand il n'y a pas de matière à négocier, on parle. Ils ont parlé beaucoup, c'est évident. Il y a des négociations qui sont commencées depuis l'automne 1985, imaginez en termes de dépôt, en tout cas. En conséquence, je pense

que je peux conclure qu'il n'y a pas de véritable progrès sur les questions fondamentales, sauf le rapport du médiateur Désilets qui, lui, est significatif, parlant.

Le président du Conseil du trésor avait le beau rôle en disant: Écoutez, oui, M. Gendron a fait un effort pour l'hypothèse de règlement concernant l'éducation. Pensez-vous qu'il n'aurait pas été plus sérieux ce matin s'il avait dit: Au moins, nous, on l'a mis dans nos dépôts initiaux? Comment voulez-vous que j'aie confiance en ces gens? Ils m'ont flatté le dos, les reins et ainsi de suite quand j'ai déposé cette offre comme critique et, aujourd'hui, ils ont la responsabilité de l'État du Québec. Ce sont eux qui dirigent. Pour signifier qu'ils sont sérieux, ils auraient pu partir de l'hypothèse Gendron dans le dépôt des offres. Elle était fondamentale, elle était requise et c'est juste parce que j'ai été mal compris par mes collègues qu'ils se donnent l'excuse, disent-ils, pour ne pas la mettre dans le dépôt initial. Cela n'a pas de sens.

Deuxième point, M. le Président; je suis obligé de conclure; ce n'est pas la fin, mais je suis obligé de faire cette conclusion: Lorsque je cite l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération, organisme créé spécifiquement pour s'occuper de ce3 questions, et que le président du Conseil du trésor prétend encore que c'est dans les nuages, dans ma sagesse de parlementaire que j'aurais découvert les 5 % alors que cela n'a rien à voir, tous les chiffres le prouvent. Il m'a parlé encore dans sa réplique de tendance. Il dit: On va être capable d'observer, à la fin de 1986, que les tendances se situent beaucoup plus aux environs de 3, 5 % d'augmentation alors que moi, ce matin, je ne lui ai pas parlé de tendances. Je lui ai parlé de résultats de compilation dans des dossiers qu'il a.

Dans la revue "Le marché du travail", de son ministère ou d'un des ministères du gouvernement, qui paraît tous les mois - je répète qu'il a le droit de lire cela, c'est accessible - on dit ceci et je le cite une dernière fois en conclusion: "Les résultats -pas les estimations, pas les tendances -préliminaires du deuxième trimestre de 1986 indiquent que les taux de salaire négociés seront autour de 4, 2 %. " Pas "seront" mais "ont été", parce que c'est un résultat de compilation pour les deux premiers trimestres. Je cite la phrase de l'institut de recherche et de rémunération: "Les salaires augmenteront entre 4, 5 % et 5, 5 % au Québec et entre 4, 5 % et 6 % au Canada en 1986. " Information que le président du Conseil du trésor avait, a toujours et pour laquelle il faisait la citation tronquée que je viens de rappeler dans son document du 19 février 1986.

Troisième conclusion que je suis obligé de faire, M. le Président: aucun mot sur son objectif de comparabilité entre les secteurs privé et public. Je lui ai dit: C'est vous, M. le président du Conseil du trésor qui, le 19 février, avez dit: Je poursuis un objectif de comparabilité entre les secteurs privé et public. Je lui dis qu'il y a au-dessus de 100 corps d'emploi du secteur public qui ont une rémunération inférieure au secteur privé. Je lui dis: Qu'est-ce que vous allez faire avec ça? Est-ce que vous allez en tenir compte dans votre politique salariale? Est-ce que vous allez en tenir compte dans votre offre de 3, 5 %? Aucune réponse, il n'a rien à me dire sur l'objectif de la comparabilité entre les secteurs privé et public. En conséquence, je serais inquiet si j'écoutais ça aujourd'hui. Si j'étais travailleur ou travailleuse du secteur public et que j'entendais ça aujourd'hui... Sa belle finale! Il m'a joué du violon pendant les cinq dernières minutes en disant: Oui, on veut une entente négociée parce que ces gens-là travaillent aujourd'hui. Ils sont dans leur institution soit de santé ou d'éducation. Comme si je ne le savais pas. C'est tout à fait exact que ce monde-là travaille, heureusement.

En conséquence, je pense qu'ils ne s'attendent pas nécessairement qu'on leur joue du violon à l'Assemblée nationale mais qu'on leur dépose des offres concrètes aux tables par exemple, parce que c'est là que ça doit se passer.

Quatrième constatation, j'ai appris ce matin... Un des éléments sur lesquels je suis obligé de conclure parce qu'il me reste peu de temps pour le faire, contrairement à ce qu'affirme M. le président du Conseil du trésor, il y a vraiment une dissension fondamentale entre ces gens-là dans leur discours et il y en a une tout aussi prononcée dans l'actualisation de la parole aux actes. Quand le ministre de l'Éducation sent le besoin de sortir aujourd'hui pour dire: Enough is enough!, c'est assez, c'est un discours qu'il devrait comprendre. La meilleure façon de nous faire comprendre qu'il est d'accord, ce n'est pas de nous dire qu'il sait la différence entre le privé et le public dans les négociations, c'est de le démontrer: il est responsable des négociations. Qu'il le démontre aux tables de négociations. Je dirai: M. Gobeil a compris qu'il n'est plus chez Provigo. Il est rendu à l'État du Québec comme ministre responsable.

Je veux faire valoir un autre point. Pensez-vous, M. le président du Conseil du trésor, que cela a du sens de parler pendant deux heures et demie des négociations et de ne pas dire un mot sur la nécessité d'avoir une politique de rattrapage dans une politique de rémunération, une politique salariale qui ne tient pas compte de la nécessité, pour certains corps d'emploi, d'effectuer du rattrapage qui s'agrandit? On aura beau essayer de vivre dans le passé,

mais nous, on doit vivre dans le présent. Il y a actuellement des corps d'emploi qui sont dans une situation de rattrapage et vous devez en tenir compte.

Enfin, pour les deux ou trois minutes qu'il me reste, parce qu'an me l'indique quand il reste 30 secondes, je voudrais conclure sur ce que j'ai lancé. Cela a été très clair pour nous, comme Opposition, et le président du Conseil du trésor a le culot de dire que j'ai lancé le chiffre de 5 % dan3 ma grande sagesse parce que ce n'est pas moi qui paie. Non, non! Quand j'ai parlé des 5 %, ce n'est pas dans la sagesse de Gendron ou du député d'Abitibi-Ouest - j'ai le droit de parler de moi comme cela - c'est dans la sagesse...

Des voix: Ha! Ha! Ha!

Le Président (M. Lemieux): Ce n'est pas contraire à l'article 35 du règlement.

M. Gendron: C'est cela, ce n'est pas contraire à l'article 37 du règlement.

Le Président (M. Lemieux): L'article 35.

M. Gendron: C'est dans la sagesse, M. le président du Conseil du trésor, du marché. C'est dans la sagesse du marché. C'est dans la sagesse de l'IPC, l'indice des prix à la consommation. C'est dans la sagesse du maintien du pouvoir d'achat pour ces gens-là. C'est dans la sagesse de la logique, de ce qui s'observe, pas des tendances, de ce qui s'observe, de ce qui est payé actuellement. Si l'inflation est autour de 4, 6 % à la fin de l'année 1986, on devrait, au minimum, consacrer le principe du maintien du pouvoir d'achat pour ces gens-là précisément parce que vous disiez tantôt que vous vouliez le respecter, précisément parce que vous prétendez que la qualité des services est importante, précisément parce que vous avez également le culot de prétendre que vous allez arriver à un règlement négocié et que vous le souhaitez ardemment, mais en disant: Nous, on souhaite ardemment un règlement négocié, mais on ne bougera pas. C'est ce que j'ai entendu ce matin. D'abord, on veut un règlement négocié; oui, on va y arriver, mais je vous avise qu'on ne bougera pas. Eh bien, moi, je vais être obligé de vous souhaiter bonne chance, mais d'avoir de sérieux doutes sur ce qui se passe.

Le 5 mars, pensez-vous que le ministre des Finances ne savait pas que l'IPC serait supérieur à 3 %? C'est pour cela que vous avez expliqué vos offres de 3, 5 %. Vous avez essayé, d'une façon artificielle, d'imaginer un chiffre qui n'existe nulle part et vous avez dit: Écoutez, si le ministre des Finances prévoit un taux d'inflation de 3 % pour l'année 1986, il est légitime d'offrir une augmentation de 3, 5 %. Mais pensez-vous que nous croyons que vous ne saviez pas que ce n'était pas cela? Tous les chiffres, partout, pouvaient indiquer que le taux d'inflation serait autour de 4, 5 % à 4, 7 %. En conséquence, je pense que si vous aviez été franc, comme vous l'avez mentionné, vous auriez dit aux travailleurs: Non, on ne veut même pas vous offrir le pouvoir d'achat; on pense qu'on n'est pas capable.

Je répète, en conclusion, qu'il ne faut pas oublier que 1986 n'est pas le contexte économique de 1982 et qu'on ne peut pas se vanter à la fois que l'économie va bien, qu'il y a moins de chômage, que le produit national brut est en croissance et demander encore un effort extraordinaire de ces gens-là.

En conclusion, M. le président du Conseil du trésor, je souhaite un règlement négocié, mais je vous dis très sérieusement, que si vous voulez un règlement négocié, de grâce, posez quelques gestes concrets aux tables de négociations qui permettraient à ces gens de comprendre, sans qu'ils soient obligés de faire des grèves pour vous démontrer qu'il faut qu'il y ait un changement d'attitude entre le discours et des offres concrètes sur les enjeux majeurs aux tables de négociations. Merci.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le président du Conseil du trésor, MM. les députés ministériels et de l'Opposition, je vous remercie de votre participation ainsi que celle des fonctionnaires qui se sont déplacés pour vous accompagner, M. le président du Conseil du trésor. La commission du budget et de l'administration ayant rempli son mandat, nous ajournons sine die.

(Fin de la séance à 12 h 11)

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