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Version finale

33rd Legislature, 1st Session
(December 16, 1985 au March 8, 1988)

Wednesday, May 20, 1987 - Vol. 29 N° 52

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Étude de la politique budgétaire du gouvernement dans le cadre du débat sur le discours sur le budget


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Lemieux): La commission du budget et de l'administration reprend ses travaux afin de poursuivre le débat sur le discours sur le budget. La dernière fois, M. le député de Lafontaine avait terminé son intervention, la parole est maintenant à l'Opposition. M. le député de ! Bertrand.

Investissements et emplois

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais, ce matin, aborder quelques volets qui ont été à peine effleurés à ce jour et sur lesquels j'aimerais avoir un peu d'explications de la part du ministre concernant son discours sur le budget. Cela regarde particulièrement les investissements ici au Québec et la croissance de l'emploi. On sait qu'au cours des deux années antérieures, M. le ministre, plus de 80 000 emplois avaient été créés au cours des années 1984 et 1985. On sait que l'année dernière, il s'est créé 60 900 nouveaux emplois et selon toute perspective, même dans une conjoncture économique très favorable, comme vous l'avez dit hier, on devra se limiter à quelque 60 000 nouveaux emplois aussi, cette année.

Alors, j'aimerais savoir, d'une part, qu'est-ce qui fait qu'en ayant des conjonctures on ne peut plus favorables actuellement on se retrouve avec une croissance de l'emploi inférieure à ce qu'on a connu au cours des années 1984 et 1985? N'est-ce pas là un signe qu'il manque, peut-être, dans le discours, certaines mesures incitatives? C'est vrai que, d'un côté, on crée des emplois, mais les résultats nets, c'est qu'on en perd aussi. Il ne s'est pas passé une semaine depuis janvier 1987, par exemple, où il n'y a pas eu des annonces de fermeture d'usine, que ce soit dans les secteurs de l'est ou de l'ouest de Montréal. Encore, la semaine dernière, J. P. Coats annonçait des fermetures. On a un ministre de l'Industrie et du Commerce qui semble ne voir rien de grave là-dedans sauf que lorsque je regarde les résultats nets au niveau de la création de l'emploi, je me dis qu'il devrait y avoir des mesures incitatives ou il aurait dû y avoir des mesures incitatives à l'intérieur du discours sur le budget concernant la question de création d'emplois.

M. Levesque: Alors, M. le Président, voici une vision assez pessimiste des choses. Ce qui me frappe, c'est une vision qui n'est pas fondée sur la réalité. Je prierais le député de Bertrand de noter les facteurs suivants: Premièrement, lorsque le député parle de certaines années où on a eu un certain nombre d'emplois, il devrait faire attention au genre d'emplois dont il s'agit. Les emplois qui ont suivi immédiatement la période de récession ont été des emplois de récupération. On n'a pas vu la création d'emplois, mais on a vu la récupération d'emplois. Deuxièmement, lorsque l'on regarde sur une période donnée, la moyenne des emplois récupérés ou créés, si vous voulez, pour la période de 1977 à 1985 qui coïncide avec la période au pouvoir du Parti québécois, la moyenne des emplois créés ou récupérés a été de 39 000 annuellement. Si l'on prend la période de 1981 à 1985 qui coïncide avec le dernier mandat du gouvernement du PQ, la moyenne annuelle de création ou de récupération a été de 22 000 emplois.

Or, M. le Président, je pense qu'on peut regarder avec beaucoup de satisfaction les emplois créés depuis 1986. L'an dernier, on sait qu'il y a eu 62 000 emplois de créés. À l'heure actuelle, pour 1987, dans les quatre premiers mois, la moyenne de création d'emplois est de 76 000. Il faut tenir compte aussi d'un autre facteur, c'est la qualité de l'emploi, c'est-à-dire les emplois à temps plein. Là, si on regarde la moyenne de 1977 à 1985 le temps plein, sur 39 000 de moyenne, était de 15 000. De 1981 à 1985, la moyenne était de moins 1000 dans les temps pleins. Alors que dans le cas actuel pour 1987, 103 000 emplois nouveaux en avril dont 101 000 à temps plein. Pour la cumulation, pour les quatre premiers mois, 76 000 dont 85 000 - c'est curieux à dire -à temps plein, parce qu'il y en a qui ont été convertis de temps partiel à temps plein. Si l'on prend les chiffres désaisonnalisés pour le mois d'avril 1987, ce sont les dernières statistiques par rapport à avril 1986, on avait 2 858 000 emplois. En avril 1987, 100 000 de plU3, soit 2 958 000. On ne s'en tient pas à un mois. Je pense que c'est pour cela que j'ai donné des moyennes de 1977 à 1985, de 1981 à 1985. Quant à nous, je donne des moyennes pour l'année 1986 à 62 000 nouveaux emplois, tel que relevé dans les statistiques, et 76 000 de moyenne depuis

le début de l'année, soit depuis le 1er janvier 1987 jusqu'au 30 avril 1987 par rapport aux quatre mois correspondants en 1986. Je crois que ce sont des chiffres basés sur la réalité des choses. Qu'il y ait de temps à autre quelques fermetures d'usine, cela peut arriver, cela va arriver chaque année. Depuis que je suis ici, cela fait 31 ans et il y en a à tous les ans. Qu'est-ce que vous voulez, y en a. C'est dommage. Sauf qu'il faut qu'il y ait, par contre, création positive d'emplois, qu'il y ait, autrement dit, plus d'ouvertures, d'agrandissement et d'embauche qu'il n'y a de ces fermetures, c'est entendu. C'est pourquoi nous arrivons au chiffre net de 100 000 emplois entre avril 1986 et avril 1987, et 76 000, on prend la moyenne du début de l'année 1986 au 30 avril 1986. Si on regarde ce qui se passe cette année, du 1er janvier au 30 avril, on s'aperçoit que la moyenne de la création d'emplois est de 76 000 par rapport à l'an dernier pour la même période. Ce qui est frappant, c'est que ce sont pratiquement tous des emplois à temps plein. Il y en a même plus à temps plein dans la moyenne des quatre mois, -cela dépasse les 100 % - justement parce que les emplois à temps partiel sont devenus des emplois à temps plein. C'est la situation au moment où l'on se parle. Je ne suis pas capable de vous dire ce qui va se passer dans les huit prochains mois, sauf que nos prévisions sont assez prudentes d'après ce que je peux voir, parce qu'elles sont de l'ordre de 65 000 emplois de moyenne annuelle en 1987, alors que jusqu'à maintenant, on s'aperçoit que ces prévisions, si la tendance continue, ont été très modérées.

M. Parent (Bertrand): M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand); Quant aux explications que donne le ministre pour l'année en cours, on verra à la fin de l'année. Je l'espère pour lui, parce que ce n'est pas parce qu'on est dans l'Opposition qu'on doit se retrouver pour diret On souhaite qu'il n'y en ait pas beaucoup; moi, je souhaite qu'il y en ait beaucoup. Si on regarde la dernière année, 1986, sur laquelle on avait les données complètes pour douze mois que ce soit de la récupération des emplois, c'est un peu normal parce que la crise de 1981 et 1982 était une crise économique qui a touché le Québec de façon importante et non seulement le Québec, mais aussi l'Ontario et le reste du Canada ont été gravement touchés par cela. Qu'il y ait eu des pertes d'emplois, qu'il y en ait même eu qui aient pu être sauvegardés quelquefois, c'était miraculeux. Toutes comparaisons faites des deux dernières années, 1984 et 1985, on doit quand même admettre qu'il y a eu environ 20 000 emplois de moins de créés l'année dernière.

Quant à l'aspect des fermetures d'usine, et des pertes d'emplois que cela occasionne je dis seulement au ministre des Finances qu'on ne retrouve pas de mesures incitatives à l'intérieur du dernier discours sur le budget qui feraient en sorte que l'on puisse qarder des entreprises ici, au Québec, des entreprises qui quittent pour l'Ontario, que ce soit J. P. Coats que je mentionnais tantôt, Coleco, Electrolux, pour ne citer que quelques-unes, des fermetures d'usine, non pas parce que les entreprises sont en difficulté financière... On me disait justement, hier, que la compagnie J. P. Coats qui est à Montréal depuis 100 ans est débordée de travail actuellement et quitte pour l'Ontario, peut-être pour des raisons dites administratives, mais on sait l'implication ou l'incitation, devrais-je dire, que peut avoir un gouvernement.

Le Président (M. Lemieux): S'il vous plaît, M. le député de Sainte-Anne?

M. Parent (Bertrand): On sait l'implication et l'incitation que peut avoir le gouvernement à l'intérieur des mesures, que ce soient des mesures dites fiscales ou autres; il faut être capable de garder les compagnies d'abord chez nous. On sait que c'est assez difficile d'attirer des investissements et que des mesures concrètes peuvent être prises pour faire en sorte que l'on puisse inciter les entreprises qui sont déjà chez nous à rester chez nous. Je le mentionne de façon positive, de façon que l'on puisse retrouver dans un prochain discours sur le budget, que ce soit cette année ou l'année prochaine, des mesures qui pourraient être imaginatives quant à la façon d'inciter les entreprises qui ont déjà investi au cours des 10, 20, 30 dernières années, surtout, M. le ministre, si le traité du libre-échange se signe quelque part à l'automne 1987 et est entériné par le Congrès américain en janvier 1988, surtout dans ce cadre-là.

Je peux vous dire qu'il risque d'y avoir un désinvestissement particulièrement des entreprises américaines qui décideront, parce qu'il n'y a plus de barrière, de rapatrier certaines de leurs usines aux États-Unis. Je pense qu'il e3t du devoir du gouvernement, étant donné que cette année 1987-1988 est l'année qui va chevaucher, où se prendront plusieurs décisions pour la libéralisation des échanqes, que des mesures soient prises par le ministre des Finances et le Conseil des ministres, pour qu'on s'assure qu'il n'y a pas de désinvestissement massif à la suite de l'opération qui est en train de se faire actuellement qui est un traité de libre-

échange avec les États-Unis, parce que des entreprises manufacturières actuellement au Québec où, en nombre, il y a environ 5 % à 7 % des entreprises manufacturières qui sont propriété américaine, sauf que 25 % de la main-d'oeuvre manufacturière totale du Québec travaille dans des usines qui appartiennent à des Américains...

Il faudrait seulement être assuré que, si on n'a pas pris de mesures dans cedit budget qui était, à mon avis, important, que l'on puisse prendre des prochaines mesures à l'intérieur d'un prochain budget, afin d'éviter que cela ne se produise et que l'on soit en réaction au lieu d'être en action, parce que, effectivement, plusieurs investisseurs, et particulièrement des investisseurs américains, iront vers un désinvestissement par rapport au Québec, parce que les avantages qu'ils ont retrouvés, M. le ministre, à investir au Québec il y a quelques années, c'était particulièrement pour contourner des barrières tarifaires et pour avoir leur pied-à-terre ici. Ils ne les retrouveront plus, dis-je, et dans cet esprit, on devrait retrouver des mesures de ce côté. J'aimerais bien que ce soit pris en considération.

Toujours concernant ces questions d'investissement...

M. Levesque: Je pourrais peut-être réagir là-dessus?

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

Libre-échange

M. Levesque: M. le Président, le député de Bertrand a abordé un sujet fort important, celui du libre-échange, et on peut évidemment avoir divers points de vue qui peuvent être avancés sur les avantages et les inconvénients du libre-échange; mais je crois que, lorsqu'on écoute un peu les réactions dans le milieu des affaires en particulier, on s'aperçoit qu'il y a une nette tendance vers la libéralisation des échanges. Ce qui amène, à mon sens, une attitude positive de la part de nos entreprises québécoises, c'est le fait que ces entreprises auront accès à un plus vaste marché. C'est ce qui est intéressant pour nos entreprises.

Si on veut aider ces entreprises à acquérir ce marché fort intéressant chez nos voisins du Sud, il faut que nos entreprises soient compétitives. Il faut donc faire en sorte que le climat soit de nature à favoriser ces entreprises: le climat économique, le climat financier, le climat budgétaire, le climat social. Je crois que notre budget du 30 avril 1987 veut justement ajouter pour que ces conditions favorisent ce genre de climat. C'est pourquoi an retrouve dans le budget, par exemple, cet apport additionnel dans le domaine de la recherche et du développement.

C'est une façon très concrète de donner un souffle nouveau à nos petites et moyennes entreprises en particulier, afin qu'elles soient de plus en plus capables de faire face à la concurrence, d'être compétitives. C'est pour cela que nous avons apporté ces mesures, et ce ne sont pas des mesures timides, ce sont des mesures qui touchent les entreprises, les universités, les chercheurs, les investisseurs. Rien n'a été mis de côté et les sommes additionnelles enqaqées dans ces programmes sont de l'ordre, pour les entreprises seulement, de 102 000 000 $ sur une base annuelle et d'à peu près 40 000 000 $ à 50 000 000 $ du côté des universités. C'est donc seulement en considérant cet article du budget qu'on voit qu'il y a cette volonté bien claire chez nous de faire en sorte que nous améliorions ce climat et ces conditions pour que notre entreprise québécoise puisse se sentir à l'aise dans un marché qui s'annonce beaucoup plus vaste. J'ajouterai que plusieurs mesures du budget actuel, et même du budget de l'an dernier, étaient de nature à favoriser la capitalisation des entreprises, par exemple, à favoriser la fiscalité des entreprises.

On sait que dans le domaine de l'impôt sur le revenu des corporations, nous avons maintenu notre compétitivité, de sorte que nos entreprises, quant à l'impôt sur le revenu des corporations, sont dans une situation plus favorable au Québec que dans le reste du pays. Nous avons, de plus, donné des encouragements fort importants aux entreprises naissantes pour les trois premières années de leur mise en oeuvre, alors que nous leur avons donné un important conqé fiscal, si vous voulez. Autrement dit, ces deux budgets, soit du 1er mai 1986 et du 30 avril 1987, ont ajouté des conditions qui sont de nature à favoriser l'entreprise et, par le fait même, à favoriser la création d'emplois. Qu'il y ait des secteurs où il faut être très vigilant dans les négociations du libre-échange, cela va de soi. Je ne peux que souscrire à l'intérêt que portent les membres de l'Assemblée nationale et le député de Bertrand en particulier, à la question du libre-échange, je n'ai pas d'objection à le souligner, parce que justement on ne peut pas avoir une vue d'ensemble du sujet sans reqarder les divers secteurs de l'économie et comment ils pourraient être affectés positivement ou négativement et ensuite faire le bilan pour voir les avantages globaux que nous avons, tout en essayant de protéger les secteurs les plus faibles.

Je pourrais, en terminant, dire que lorsqu'on regarde l'économie, la façon dont nos entreprises se comportent... Le député de Bertrand soulignait tout à l'heure ou laissait entendre qu'il y avait certaines difficultés chez certaines industries qu'il a nommées. Évidemment, on peut faire cela chaque

année, parce qu'il y en a toujours, partout. II y en a qui quittent l'Ontario pour venir au Québec. C'est entendu. 11 y en a d'autres qui lancent ici des entreprises tout à fait nouvelles et dynamiques au Québec. Peut-être, un des facteurs que, je crois, il faut regarder, c'est ce qui se passe pour les entreprises ici. Est-ce qu'elles ont des problèmes qui font qu'elles doivent fermer ou doivent déclarer faillite? Ce matin, justement, sous la signature de Claude Piché dans la section économique du journal La Presse, sous le titre: Les faillites en régression, on voit: "Ce recul est attribuable aux bonnes performances du Québec, de l'Ontario et de la Colombie britannique. " J'aime bien voir le Québec là. "Ce recul essentiellement attribuable à la bonne performance des trois principales provinces canadiennes, Ontario, Québec et Colombie britannique etc., est quelque peu assombri par le triste comportement des autres provinces... " Et je lis dans les paragraphes suivants, on parle de la bonne performance de l'Ontario et lorsqu'on arrive au Québec on dit: "Le Québec tire également son épingle du jeu avec un succès relatif, affichant des pertes de 147 000 000 $, toujours pour les quatre premiers mois de l'année, en baisse de 3 % à 4 % par rapport à l'an dernier. Avec 27 % de la population canadienne, le Québec accuse 23 % des pertes. Ces chiffres viennent confirmer la tendance observée depuis quelques mois: le Québec a, hors de tout doute, perdu le douteux honneur du championnat des faillites qu'il détenait depuis plusieurs années. " (10 h 30)

Ce sont des choses qu'il faut mettre au dossier. Il y a le pour et le contre. Ce n'est jamais tout blanc, ce n'est jamais tout noir. Lorsque l'économie se porte relativement bien, lorsque nous avons de tels résultats du côté des faillites où nous perdons un championnat dont nous n'aimions pas avoir à nous vanter, je pense qu'il y a là des éléments qu'il vaut la peine de souligner.

Comme le disait le député de Bertrand tout à l'heure, je. pense que comme Québécois, quel que soit le côté de la table où l'on est assis, on doit se réjouir de ce qui va bien et faire en sorte de corriger ce qui va moins bien.

Le Président (M. Lemieux); Vous avez terminé, M. le ministre des Finances?

M. Levesque: Vous m'avez fait signe. Vous m'avez donné un signal...

Le Président (M. Lemieux): II vous restait environ 30 secondes.

M. Levesque:... non équivoque. J'arrête. Le Président (M. Lemieux): Cela va. Je vous remercie, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je pense que les propos que l'on tient actuellement sont tout à fait justes quant à la situation qui prévaut au. Québec, c'est-à-dire que généralement cela va bien. La question qu'il faut se poser, c'est: Est-ce que cela va bien parce qu'il y a eu des mesures prises au cours de la dernière année qui donnent ces résultats? Est-ce que c'est cela en partie? Je vous réponds à cela qu'il y a des mesures qui ont été prises dans le bon sens, sauf qu'il y a une conjoncture favorable. Je pense que le ministre le reconnaît.

Ce qui m'inquiète, ce sont les années 1987, 19B8, 1989 à venir et je trouve que les mesures qui sont prises dans certains domaines sont très timides. On a parlé beaucoup de recherche et de développement. J'ai dit, et je le répète, que c'étaient des mesures qui allaient dans le bon sens. Cependant, il ne faudrait pas non plus laisser entendre que, tout d'un coup, l'aide à la recherche et au développement au chapitre des PME, des entreprises et des universités, c'est quelque chose de nouveau. Ce sont des sommes additionnelles qui sont ajoutées, mais qui sont quand même - et c'est pour cela qu'hier je demandais des chiffres - très minimes. C'est un geste dans le bon sens et il faut savoir le reconnaître, sauf qu'ils sont très minimes par rapport au besoin, au recul. Le député de Lafontaine hier citait les chiffres de 1983-1984, du 1, 1 % du PIB que nous avons investi au Québec dans la recherche et le développement. Mais on a tellement de recul de ce côté qu'on a du terrain à reprendre. C'est pour cela qu'il faut que les mesures soient plus mordantes et que des gestes plus importants soient mis de ce côté si on veut être capable de garder le rythme de croisière qui est en train de se prendre; sinon, on ne le retrouvera pas.

Vous mentionniez tantôt les questions des impôts dans les entreprises où on demeure concurrentiel. Je dirai, M. le ministre: oui, on demeure concurrentiel parce qu'au cours des six, sept, huit et dix dernières années, des mesures ont fait en sorte qu'on est resté très concurrentiel. Ce que vous avez fait l'année passée par le budget, je dois le souligner, c'est que vous avez augmenté le taux des impôts de 3 % à 3, 22 % pour les petites entreprises. Cela a été une augmentation qui permet encore aujourd'hui de dire que sur une base comparative, oui, nous sommes encore les meilleurs, mais vous avez apporté des augmentations de ce côté. Donc, c'est un geste qui, même s'il ne semble pas énorme, de 3 % à 3, 22 %, est quand même significatif lorsqu'on traduit cela en cents et piastres et qui fait des entrées de fonds additionnels au gouvernement.

Quant au congé fiscal, vous avez apporté des mesures l'année dernière, le 1er mai 1986, pour les trois premières années. Je vous dirais: oui, certainement, c'est une mesure qui était dans le bon sens, et je l'avais dit dans la critique, mais attention: il faut regarder les faits. C'est un peu comme si on disait aujourd'hui, sur le plan familial, qu'on va donner une déduction importante d'impôt pour le cinquième et le sixième enfant. Je vous ramène cela au niveau d'une entreprise. La plupart des PME qui démarrent, au cours des deux premières années, ne font pas de profits. Que celles qui prévoyaient en faire ou qui ont des créneaux importants sachent déjà qu'elles ne seront pas imposées, qu'elles seront exemptes d'impôt, cela peut être encourageant. Mais la plupart des PME - il y a des statistiques à cet égard, je ne les ai pas sous la main -durant les deux premières années - on en conviendra - ne font pas de profits. Sur papier, c'est beau, sauf que, dans les faits, on sait que ce n'est pas très stimulant lorsque les gens regardent ce que cela donne exactement.

On a parlé du libre-échange. Le ministre a bien traduit l'attitude que je ressens actuellement de la part du gouvernement et de la plupart des ministres que j'ai entendus sur le sujet. C'est un peu l'attitude de dire: Bon, l'entreprise voit cela d'un bon oeil, cela va bien et tout le monde veut le libre-échange. Je pense qu'il y a un bémol important. Si les sondages, si les entreprises et si la population en général semblent ouverts au libre-échange, c'est parce que, malheureusement, on ne connaît pas tous Ies impacts éventuels et les dangers que l'on court. C'est mon rôle de sensibiliser, non seulement le ministre des Finances, à ce stade-ci, mais aussi le ministre du Commerce extérieur, le premier ministre et toute l'Assemblée nationale sur l'importance du libre-échange et sur les dangers de ses impacts.

Pour ne prendre qu'un exemple, la fameuse politique d'achat que nous avons chez nous pour favoriser d'abord et avant tout nos entreprises québécoises dans des contrats - on peut parler des contrats directement reliés à Hydro-Québec, aux travaux de la Baie James, etc., - c'est drôlement important, puisque, seulement les contrats d'Hydro-Québec touchent quelque 7500 à 8000 PME québécoises. Le jour où l'on signera un traité sur le libre-échange, on devra prendre soin de protéger cet aspect, ce sur quoi les Américains sont très forts et se réservent des droits au chapitre du protectionnisme. D'ailleurs, actuellement, il y a quelque chose comme 300 lois sur les mesures protectionnistes devant le Congrès américain; tout ce qui touche la défense nationale aux États-Unis est protégé. Nous n'avons pas ces assurances, et c'est beaucoup de préoccupations. On devra être très vigilants par rapport à cela.

Quant aux mesures qui devraient être prises dans des prévisions budgétaires, qui sont de la responsabilité du ministre des Finances et qu'il nous imcombe d'étudier aujourd'hui parce qu'on ne les retrouve pas là-dedans - et je vous dis qu'il faudrait les y retrouver le plus rapidement possible - ce sont toutes les mesures qui entourent les questions des investissements étranqers et les mesures incitatives à avoir par rapport au désinvestissement des entreprises américaines. À mon avis, c'est une préoccupation au plus haut point parce que, pas plus tard que d'ici à deux ans - vingt-quatre mois - s'il y a signature d'un traité sur le libre-échange, on va se retrouver dans une situation où on va se demander comment il se fait qu'on a des pertes d'emplois ici.

C'est bien sûr qu'il y a, chaque année, des fermetures d'usine. Sauf qu'il ne faut pas tenir pour acquis que c'est normal. Vous parlez de climat, et vous dites que tout cela joue. Je veux bien, mais les entreprises américaines, ontariennes ou celles qui sont hors du contrôle québécois savent très bien qu'après avoir, pendant trois, cinq, dix ans, bénéficié d'aide, de subventions de la part de la SDI, du ministère de l'Industrie et du Commerce ou de quelque ministère que ce soit, donc avec l'argent des taxes des Québécois, elles peuvent monter des entreprises, elles peuvent faire de la recherche et du développement, elles peuvent développer ces créneaux. On n'a qu'à penser au laboratoire de recherche Ayers qui a quitté; on n'a qu'à penser à d'autres entreprises. Je pense aussi à la compagnie Deutsch Diesel qui était venue s'installer à Saint-Laurent pour faire de la recherche et du développement et son plan de moteur diesel à Boucherville particulièrement. Aujourd'hui, à toutes fins utiles, elle quitte parce qu'elle n'a pas eu de contrats de l'armée américaine. Il est important qu'on s'assure, si on a aidé des entreprises au cours des années, si on a investi de l'argent là-dedans, qu'elles ne décident pas tout à coup de plier bagages. Elles savent très bien que le gouvernement et, en particulier, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui est responsable de ces dossiers, dit: Écoutez, on ne peut rien faire, on ne peut pas intervenir. Je trouve qu'il y a une certaine nonchalance; je le dis comme je le pense. Ce ne sera pas long qu'une espèce de climat va se créer: vous quittez le Québec, vous partez avec vos valises et cela finit là. Je vous dis que cela ne fonctionne pas ainsi dans d'autres pays parce qu'il y a des mesures très précises. On ne les retrouve pas là-dedans.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, voulez-vous conclure?

Est-ce que vous avez terminé?

M. Parent (Bertrand): J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. M. le ministre de9 Finances.

M. Levesque: Je crois que les propos du député de Bertrand sont simplement de nature à vouloir mettre en garde contre certaines situations qui pourraient se développer. II y a beaucoup d'hypothèses dans les remarques du député de Bertrand. Tout ce que j'espère, c'est que les hypothèses les moins favorables ne se réalisent pas. Je suis sûr que lui-même est du même avis.

Cependant, je prends note de ses inquiétudes. Cela ne peut faire autre chose que de nous rendre encore plus vigilants vis-à-vis de certaines situations. Dans l'ensemble, je crois qu'il est d'accord avec nous sur le fait que, pour le moment, la situation économique est favorable. Nous enregistrons des progrès notables. Son inquiétude pour les années à venir, nous la partageons jusqu'à un certain point. On n'est pas là assis sur une situation où on dit: Tout va toujours aller bien dans le meilleur des mondes. Même du temps des pharaons, il y avait les sept vaches maigres et les sept vaches grasses. Il ne faut pas penser qu'au XXe et au XXIe siècle, on sera à l'abri de toute situation économique moins favorable.

Ce que je dis, c'est que, dans les prévisions immédiates ou, disons, triennales, on croit encore que nous allons pouvoir vivre une croissance économique intéressante. Il est vrai que la libéralisation des échanges, si elle survient à un certain moment, cause certaines perturbations qu'il faut analyser toujours ayant à l'esprit les meilleurs intérêts du Québec, étant donné que c'est là notre mandat. Le mandat que nous avons reçu chacun d'entre nous, c'est de défendre les intérêts du Québec dans le domaine économique, dans le domaine social. Et il n'y a aucun doute que toutes les appréhensions qu'on formule, même si elles ne se réalisent pas, doivent attirer notre attention et faire en sorte que les personnes politiques, les fonctionnaires dans l'administration, tout le monde doit être conscient de certains dangers qui peuvent nous guetter le long de la route. Il ne faut pas conduire les yeux fermés. Je pense qu'il faut conduire avec les phares allumés. Tout ce qui peut contribuer à stimuler nos cellules énergétiques doit être reçu, non pas avec négativisme, mais plutôt avec le sens que chacun apporte sa contribution tel qu'il le voit.

M. Parent (Bertrand): En terminant sur ce...

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Je peux... C'est rapide... M. le ministre est d'accord.

M. Levesque: Je n'ai pas d'objection. M. Gobé:... avoir une conclusion rapide.

M. Parent (Bertrand): En conclusion, je...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci. En conclusion, je dirais juste que, quand on se regarde, on peut peut-être se trouver bon, sauf qu'il faut se comparer un peu et voir, si à l'intérieur du même contexte et de la même conjoncture économique, on "performe" bien. Quand on se compare, selon la comparaison habituelle, avec nos voisins de l'Ontario, on s'aperçoit qu'au cours de la même année, 1986, les investissements se sont accrus de 18, 4 % en Ontario pendant que la croissance des investissements au Québec était de 6, 6 %.

Je dis juste au ministre des Finances que nous avons eu, au cours de la dernière année, trois fois moins d'investissements. Le taux de croissance des investissements était trois fois moins au Québec qu'en Ontario. Je pense que cela fait partie de ce que j'appelle du relatif, c'est-à-dire que, oui, cela semble avoir bien été quand on se compare par rapport aux années antérieures et dire que cela va bien, sauf que, si on reqarde ce qui s'est passé ailleurs pendant la même période à cause de cette conjoncture comparable, on s'aperçoit que les investissements en Ontario ont été trois fois plus élevés qu'ici. (10 h 45)

Après, j'aimerais aborder la question des modifications au sujet des régimes de retraite, les différentes méthodes actuarielles. Avant de passer à ce sujet, j'aimerais peut-être avoir d'autres commentaires de la part du ministre.

M. Levesque: M. le Président...

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Levesque:... lorsqu'on parle des investissements, il faudrait peut-être voir les prévisions, les perspectives d'investissement de Statistique Canada. Pour 1987, on semble pas mal optimiste pour le Québec, et j'en suis fort heureux. J'espère que cela va se réaliser, par exemple, dans le domaine de la fabrication, qui intéresse d'une façon

particulière le député de Bertrand comme critique de l'Opposition dans ce domaine. On prévoit pour l'Ontario une croissance de 2. 1 % en 1987 alors que cette augmentation au Québec serait de 6 % et serait plutôt de 10 % si on ne tenait pas compte du secteur de l'aluminerie qui vient de terminer ses gros investissements. Dans les services d'utilité publique, on prévoit une croissance de 9, 1 % en Ontario et 17, 5 % au Québec. Dans les services, plutôt les commerces et les finances, on prévoit 7, 8 % en Ontario et 11, 3 % au Québec. Si on regarde le secteur non résidentiel privé, ce qui intéresse encore le critique de l'Opposition, on s'aperçoit que dans l'ensemble du secteur non résidentiel privé et public, on s'attend à une augmentation de 5, 9 % en Ontario, 4, 4 % dans l'ensemble du Canada et 7, 6 % au Québec. Ce sont des chiffres évidemment encourageants. Ce ne sont pas des réalités, ce sont des perspectives d'investissement. Que voulez-vous? Tout ce que je peux souhaiter, c'est que cela se réalise et que cela se réalise même un peu mieux. Tant mieux si cela va mieux. Je ne pense pas que l'on puisse dire qu'on n'est pas dans une situation favorable, encourageante. Il y a place pour l'amélioration, sûrement.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand, vous avez déjà dépassé...

M. Levesque: M. le Président, si l'on regarde la croissance - je l'avais ici hier, je pense que j'ai donné ces chiffres - que l'on retrouve dans tous les pays industrialisés, dans les prévisions pour 1987, le Québec arrive bon premier lorsqu'on le compare avec l'ensemble du Canada et lorsqu'on le compare avec les quatre pays les plus industrialisés de la Communauté économique européenne. Là, encore nos prévisions sont très favorables et encourageantes. J'irai même plus loin. Hier, il y a eu une publication du Conference Board qui indiquait que, malgré que nos prévisions de croissance économique étaient de 2, 7 % pour 1987, le Conference Board nous met à, je pense, 3. 2 %. C'est bien cela. Un instant, je parlais de mémoire. Je vais vous... C'est exact. Lorsqu'on regarde comment les perspectives économiques au Québec sont faites par différentes maisons - nous, nous avons prévu une croissance de 2, 7 %, le budget est basé sur cette perspective, cette prévision - on s'aperçoit que chacun y va de son chiffre. La Banque Royale prévoit pour le Québec, 3 % de croissance, la Banque Nationale, 3 %. Hydro-Québec prévoit 2, 8 %, la Caisse de dépôt et placement prévoit 2, 8 %. Les dernières prévisions du Conference Board qui ont été publiées hier prévoient une augmentation, une croissance pour le Québec de 3, 2 %. Nons étions assez prudents, on est le plus bas de tous ceux qui ont fait des prévisions soit la Banque Royale, la Banque Nationale, Hydro-Québec, le Conference Board, le Mouvement Desjardins qui donnait, au mois de mars, 2, 7 % comme nous, la Caisse de dépôt et placement, 2, 8 %. La moyenne des autres, c'est 2, 9 %. Notre prévision sur laquelle est basée notre budget parle d'une croissance de 2, 7 %. Je pense que nos prévisions sont, du moins si on les compare aux autres, relativement modérées.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand, votre droit de parole a excédé de sept minutes, mais il semble que le député de Lafontaine ait cédé son droit de parole et qu'il n'y ait pas d'intervention ministérielle. Alors vous allez... Oui, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Je pourrais peut-être intervenir rapidement.

Le Président (M. Lemieux): Rapidement, M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Tout d'abord, c'est avec satisfaction que je vois M. le député de Bertrand en face de nous ce matin, à la suite du départ, hier soir, un peu rapide du député de Lévis. Je vois que le débat s'en est rehaussé d'autant. Je trouve cela beaucoup plus agréable à cette commission.

Le député de Bertrand, à juste titre d'ailleurs, mentionnait que des entreprises s'établissent au Québec, reçoivent des avantages fiscaux ou autres avantages et, par la suite, s'en vont. Il mentionnait, entre autres, Ayerst Deutsch, une compagnie allemande que tout le monde connaît bien. Il y en a eu beaucoup d'autres au Québec depuis une dizaine d'années, on a eu le Ciba-Geigy, Sandoz, Domtar, Sun Life, on pourrait en nommer comme cela une centaine, d'après ce que je sais.

Lorsqu'on sait que ces entreprises sont établies en Ontario, on comprend aisément que l'investissement et la progression en Ontario aient été supérieurs par rapport au Québec. On comprend que la base et que le ferment de l'industrie soient plus forts et que le tissu soit beaucoup plus installé et permanent en Ontario. Il ne faut pas s'étonner, c'est évident, d'avoir maintenant des entreprises qui, ayant quitté le Québec, ont pris de l'envergure, ont pris de l'expansion et continuent à le faire en Ontario. Elles ont pris l'habitude de s'y établir dans les années où on semblait ici ne pas trop tenir compte de l'intérêt d'avoir des emplois et d'avoir ce qenre d'entreprise. Je n'en ferai pas une polémique. C'était seulement parce que c'est facile de dire: Bon, on compare ce qui se produit maintenant, mais on ne regarde pas pourquoi cela se produit

et on ne regarde pas non plus, on oublie, on fait une espèce d'amnistie nationale. On dit: Elles sont toutes parties, ce sont des pas bons ou alors: Nous, cela ne va pas fort, et eux, cela va encore mieux. Alors que, bien souvent, la cause de leur départ résidait dans les politiques fiscales et autres, les politiques du travail, les politiques sociales qui prévalaient dans les années où les collègues du député de Bertrand - même s'il n'était pas là - assumaient le pouvoir et la responsabilité, entre autres, de gérer les finances de l'État québécois, donc d'y insuffler les principales lignes directrices.

M. le ministre, vous disiez hier, et à juste titre, que c'était un budget qui, jusqu'à un certain point, était une incitation au travail, une incitation pour les gens à travailler. Vous disiez que c'était peut-être là un des moyens de redonner cette croissance au Québec que nous cherchons absolument, non seulement pour compenser nos revenus fiscaux que le gouvernement fédéral commence à couper, on parle de 2 000 000 000 $ de manque à gagner dans les prochaines années, mais aussi pour redonner à notre économie sa dynamique qu'elle n'aurait jamais dû perdre, celle qu'elle avait avant.

Il y a quelque chose dans ce budget, et je me permettrais de... Je ne veux pas refaire votre budget, mais je ne vois pas... Il y a des entreprises qui ne viennent pas s'établir au Québec, trouvant notre main-d'oeuvre non compétitive, non motivée, trouvant aussi des difficultés à conserver une main-d'oeuvre plus de quelques mois dans le même emploi parce que c'est généralement une main-d'oeuvre de bas salaire et de qualification très ordinaire.

Je n'ai pas vu, peut-être que je n'ai pas compris, quelque chose en ce sens-là et peut-être que c'est dans la réforme de la fiscalité que vous nous préparez que cela va s'en venir, mais j'aimerais vous le mentionner, au cas. Vous mentionniez hier que, des fois, vous mettiez des mesures dans votre budget, afin que le gouvernement fédéral pense à s'harmoniser avec nous. J'ai trouvé cela, très pertinent, de très bonne gestion et de très bonne prévision dans l'avenir.

Quelqu'un qui gagne au Québec un salaire minimum se retrouve à environ 10 000 $, M. le ministre, de salaire par année. N'y aurait-il pas moyen, par des mesures fiscales, afin d'encourager ces gens-là à continuer à travailler, d'avoir le contraire d'un remboursement, d'un paiement d'impôt au gouvernement? Des gens qui recevraient moins d'un montant qui serait déterminé en tenant compte du seuil de la pauvreté ou quelque chose comme cela, de 12 000 $, 13 000 $, 14 000 $, 15 000 $, n'ayant pas gagné ce montant-là par leur travail et ayant travaillé un certain temps dans l'année, en général 50 semaines, ne pourraient-ils pas recevoir un montant compensatoire à titre négatif sur son manque à gagner? N'y aurait-il pas là des avenues?

Peut-être que cela répondrait un peu au député de Bertrand qui dit que les entreprises s'en vont, parce que je crois que ce n'est pas forcément à cause des mesures fiscales sur l'entreprise que toujours les entreprises vont partir, mais peut-être à cause du climat de travail, à cause de la main-d'oeuvre, à cause de la productivité. Je crois qu'il y aurait peut-être là moyen d'encourager la productivité et la stabilité des gens qui, qagnant plus ou recevant plus d'arqent, à cause des mesures fiscales qui les favoriseraient, continueraient ou ne seraient pas enclins à quitter leur emploi en disant: Cela ne me donne rien de travailler. Je ne gagne pas plus qu'avec l'aide sociale ou l'assurance-chômage. Donc, je ferai mon temps et je quitterai. Ce qui amène à nos entreprises des coûts énormes de recrutement, des coûts de productivité et de formation du personnel. Je sais que je refais peut-être votre budget, alors, M. le ministre...

M. Levesque: Alors...

Le Président (M- Lemieux): M, le ministre des Finances.

Incitation au travail

M. Levesques M. le Président, le député de Lafontaine touche là quelque chose qui a justement inspiré notre budget dans une de ses parties les plus dynamiques. Nous avons voulu justement encouraqé et incité au travail par les mesures que nous avons mises de l'avant. Il est vrai que nous avons mis de l'avant des mesures fiscales importantes. Nous savons que, dans certaines industries, il y a des qens payés au salaire minimum et nous savons, par contre, que, si ces personnes ont charge de famille, c'est assez difficile pour elles de faire face aux obligations que l'on connaît de nos jours. Et c'est pourquoi nous avons fait une distinction nette entre les personnes responsables, qui ont des charges de famille, qui ont des enfants. Autrement dit, une industrie va payer le salaire minimum dans certains cas, et cela peut être en concurrence avec d'autres industries du même genre dans d'autres provinces ou dans d'autres États. Peut-être que ce salaire peut encore être accepté par un célibataire, un couple sans enfant. Peut-être qu'il y en a plus d'un qui travaille, etc., dans la famille. Mais lorsque vous avez le cas d'un père de famille dont la femme est au foyer et élève deux, trois ou quatre enfants, à ce moment-là, un salaire minimum ne peut pas suffire à permettre à cette famille de pouvoir faire

face à ses obligations. (11 heures)

Autrement dit, le salaire minimum n'est pas un salaire familial. Or, ce que nous faisons dans ce budget, c'est justement tenir compte de cela. Il y a plusieurs objectifs qui sont atteints ou qui seront atteints, je l'espère bien, avec ces mesures. Premièrement, l'incitation au travail pour ceux qui sont bénéficiaires de l'aide sociale, parce que nous apportons cette exemption fiscale, cette abolition de l'impôt sur le revenu qui passe d'un revenu pour une famille type de 13 000 $ à plus de 20 000 $ avant qu'ils soient appelés à payer de l'impôt; deuxièmement, pour ces personnes à faibles revenus, ces familles pourront avoir, justement comme le député de Lafontaine le mentionnait, un chèque mensuel pour combler cette différence pour les besoins. Je suis sûr que cela aura comme effet, d'une part, l'incitation au travail, d'autre part, le soutien à la famille et, troisièmement, une amélioration du climat social en même temps qu'une amélioration de la productivité à l'intérieur de l'usine.

Tous ces objectifs devraient, à mon sens, être favorisés par les dispositions que l'on retrouve dans le budget. Je suis heureux que le député de Lafontaine me permette ainsi de brosser ce tableau pour expliciter davantage dans le sens des objectifs que nous voulons atteindre avec cette partie importante du budget.

M. Gobé: Est-ce qu'il me reste un peu de temps, M. le Président?

Le Président (M. Després): Oui, il vous reste, M. le député de Lafontaine, quatre minutes exactement. Donc, la parole est à vous.

M. Gobé: Je vous remercie, M. le ministre. Je vois que la philosophie qui a prévalu dans ce budget, la justice sociale dont vous parliez, la justice fiscale en particulier n'est pas seulement quelque chose de philosophique ou de technique, mais que vraiment vous avez vu à répondre à des préoccupations non seulement directes des particuliers, des contribuables, mais aussi à l'impact que cela peut avoir et que cela devrait avoir sur le moyen et le long terme qui est la création d'emplois, le redressement économique et la création d'une main-d'oeuvre et d'une classe de travailleurs peut-être plus stable grâce aux revenus et la fiscalité que vous allez leur donner que nous avons connus.

Je crois que c'est un tournant que nous avons avec ce budget. Qu'on se souvienne dans les années passées, je crois que nous avons tous vu que la préoccupation des gouvernants de l'époque n'était pas forcément d'envoyer les gens travailler mais plutôt de leur assurer un certain revenu quitte à les laisser à la maison à ne rien faire. C'est comme cela qu'on a pu voir, entre autres, les gens, le nombre de familles, les individus vivant de prestations d'aide sociale passer, il y a une dizaine d'années, de 250 000 à pas loin de 700 000. C'est là toute une différence de philosophie qu'il faut saluer, je crois, car les entreprises et les investisseurs qui sont à l'extérieur du Québec et qui nous regardent... Tout le monde sait que les gens qui investissent magasinent, reqardent. Ils n'arrivent pas au Québec juste pour nos beaux yeux, ils regardent la situation fiscale, la situation financière, la paix sociale, la qualité des travailleurs et aussi ils regardent la volonté de l'état à maintenir une certaine harmonie dans la société et aussi une compétitivité.

Je crois qu'il faut saluer cela parce que c'est peut-être là que réside l'avenir de nos enfants et l'avenir aussi de toutes les futures générations. Je pense que c'est un premier pas. Je suis certain, M. le ministre, ou j'espère que dans les prochains budgets -parce que je crois qu'il y en aura de nombreux autres - vous serez encore là pour les présenter vous-même et que nous continuerons dans cette direction. Car l'urgence, actuellement, au Québec c'est vrai que nous pouvons discuter, comme je le disais hier au député de Bertrand, de l'épicerie, du budget, nous pourrons discuter des technicités et des conventions comptables, c'est bien vrai, mais cela n'apporte rien, ce que les gens veulent, ce pourquoi nous sommes élus, c'est pour apporter à la population et à ceux qui en ont besoin ce que nous pouvons faire: des emplois pour ceux qui veulent et qui doivent travailler et aussi des impôts et des taxes raisonnables et justes pour la population qui, elle, travaille très fort. M. le ministre, on me dit que mon temps est terminé pour cette intervention. Je n'ai pas de question, c'était juste une remarque que je tenais à faire à la suite de votre explication.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances, à la suite des interrogations du député de Lafontaine.

M. Levesque: Oui, je pense que le député de Lafontaine a abordé un sujet fort important lorsqu'il a mentionné justement ces facteurs qui sont présents au budget et qui favorisent l'incitation au travail, l'aide, le soutien à la famille et en même temps un climat social amélioré. Il a évoqué également la productivité, l'importance de la main-d'oeuvre dans notre système économique. 11 n'y aucun doute que nous devons nous féliciter de la qualité de la main-d'oeuvre québécoise. Nous devons dire que les efforts qui ont été fournis depuis déjà une couple de décennies ont fait en sorte que le système

d'éducation, le système de formation professionnelle, tout ce qui a été mis de l'avant au cours de ces années a sûrement favorisé une main-d'oeuvre encore plus compétente. Noua ne sommes plus à l'époque du "cheap labor" des années quarante et cinquante. Nous sommes passés à une période où nous pouvons faire des comparaisons n'Importe où et n'importe quand, avec n'importe quelle autre société quant à la qualité de notre main-d'oeuvre. Je pense qu'on ne s'enorgueillira pas de cela à cause du présent budget, je pense que cela serait déplacé. Il faut rendre hommage à tous nos prédécesseurs qui ont travaillé dans ce sens pour faire en sorte que cette main-d'oeuvre soit aussi qualifiée que celle que nous reconnaissons et que nous connaissons au Québec. Je crois que ces politiques que nous mettons maintenant de l'avant, que ce soient des politiques familiales, des politiques d'incitation au travail, des politiques de recherche et de développement, tout ce que nous retrouvons dans ce budget, également dans les politiques des divers ministères du gouvernement, tout cela devrait tendre à consolider la situation des travailleurs et des travailleuses au Québec, tout en améliorant le climat économique et le climat social. Nous n'oublions pas que nous avons connu, au cours de ces derniers mois un climat réellement favorable aux investissements, un climat social qui était de nature également à favoriser la confiance dans le Québec, dans ses institutions, dans sa population et particulièrement dans sa population ouvrière.

Cela dit, espérons que nous pourrons continuer dans ce sens à apporter de nouvelles politiques pour compléter ce que nous avons déjà.

Je profiterai de cette occasion, M. le Président, simplement pour répondre à une remarque du député de Bertrand tout à l'heure à laquelle je n'avais pas répondu. Ce sont des chiffres qui vont l'intéresser. Lorsqu'il était question du congé fiscal pour les nouvelles entreprises, le député de Bertrand a laissé entendre, à moins que j'aie mal compris, que cela ne coûtait pas cher, parce que dans le fond personne ne s'en servait que les gens ne faisaient pas de profit pendant les deux premières années. Tout de même c'est peut-être une conclusion à laquelle il est arrivé d'une façon un peu précipitée. On sait que cette année, cela va coûter au trésor public 20 000 000 $ et, en 1988-1989, cela risque d'aller plutôt vers les 30 000 000 $. Il y a certainement quelqu'un qui en profite quelque part. Je voulais simplement le souligner. Il n'y a pas seulement la question du profit des corporations où il y a un congé fiscal. Il faut se rappeler que la taxe sur le capital également fait l'objet d'un congé fiscal. Ce sont ces deux impôts qui font l'objet d'un congé fiscal. Il y a là un manque à gagner pour l'État. Même si c'était plus, je m'en réjouirais. Cela voudrait dire simplement qu'il y a plus de nouvelles sociétés qui sont à la ligne de départ et qui sont là pour, encore une fois, créer de nouveaux emplois.

Voilà, M. le Président, les remarques que je me permettais de faire à la suite de celles du député de Lafontaine et, en dernier Heu, du député de Bertrand.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Oui, merci, M. le Président. Il reste moins de deux heures, et il y a encore plusieurs sujets que j'aimerais couvrir. Alors, je vai3 essayer d'être le plus bref possible pour qu'on ait le temps, à l'intérieur de notre enveloppe, d'essayer de couvrir tous les aspects. D'abord, à la question que j'ai posée tantôt au ministre des Finances et à la remarque que je faisais concernant les investissements au Québec, au cours de l'année 1986 qui étaient de 6, 6 % par rapport à 18, 4 % en Ontario, donc, trois fois plus au cours de la dernière année, le ministre, comme il est dans ses habitudes, fut très habile en levant le voile sur les prévisions 1987, mais mes commentaires et mes points concernaient les résultats de la dernière année. Or, c'est bien sûr que la réponse est dans le futur, c'est-à-dire: Regardez-nous aller, cela va bien aller! Ce que je dis là-dessus, c'est que j'espère que les prévisions annoncées pour 1987-1988, et les suivantes, se réaliseront. Et je serai fort heureux si cela se réalise. Sauf que, comme je l'ai mentionné tantôt, particulièrement au chapitre de certains secteurs, et le ministre a souligné le secteur, par exemple, des services qui risque d'être en forte croissance au Québec par rapport peut-être à l'ensemble du Canada, je porte une attention particulière toujours rattachée à la question du libre-échange et vous dire à quel point cela devient important. Le secteur des services et particulièrement l'embranchement des institutions financières risquent d'être fort affectés par un traité de libre-échange et risque d'amener une concurrence inégale par rapport aux institutions financières américaines si le traité se signe sans qu'on n'ait pris certaines protections. Pas plus tard qu'hier, à l'Assemblée nationale, à la période de questions, le ministre du Commerce extérieur n'était pas rassurant là-dessus en disant que même la position américaine n'est pas connue à quelque trois ou quatre mois d'un échéancier. Je vous dis: Oui, bravo aux prévisions, mais il y a des principes qui sont en train de changer et des énoncés qui sont en train de changer.

Incidence de la nouvelle méthode

d'évaluation actuarielle des

régimes de retraite

J'avais d'autres commentaires concernant le député de Lafontaine. Il n'est pas là. Je les ferai tantôt. Et je vais poser immédiatement des questions très précises. J'espère que le ministre pourra y répondre pour éclairer un peu ma lanterne. Il s'agit de l'annexe C, M, le ministre, sur la question des régimes de retraite. À la suite des recommandations de l'ICCA, on a décidé de changer la comptabilité en ce qui a trait aux régimes de retraite. Hier, on a bien cerné le changement en ce qui concerne les modifications qui étaient apportées sur les façons de faire les écritures et la façon de comptabiliser. Hier, on a touché l'aspect, par exemple, des sociétés d'État, des revenus, tout cela et la question des entrées en ce qui a trait aux privatisations: sauf que, la question des régimes de retraite, on ne lui a pas touchée. J'aimerais savoir, de la part du ministre, quel impact a la nouvelle méthode d'évaluation actuarielle, cette nouvelle méthode de comptabiliser qui a été recommandée par l'ICCA, a-t-elle dans le budqet sur l'ensemble des dépenses? Dans l'annexe C - parce que je veux être bien sûr que je comprends bien - à la page 11, il semble y avoir l'incidence de la nouvelle façon de fonctionner. Je voudrais être bien sûr que j'ai les mêmes chiffres. Je voudrais me faire confirmer par le ministre l'incidence de cette nouvelle méthode. (11 h 15)

Deuxièmement - pendant que j'y suis -toujours concernant cette nouvelle façon de comptabiliser et de voir l'approche de la nouvelle évaluation actuarielle préconisée par l'ICCA pour les régimes de retraite, on mentionne aussi, en plus d'un impact sur le budget ou sur les opérations budgétaires -plus particulièrement à la page 10 - une réduction de 1 800 000 000 $ du déficit actuariel net. C'est une partie qui n'affecte pas les opérations budgétaires, j'en conviens. Mais, effectivement, à la page 10, on mentionne: "II importe de noter que l'utilisation, dans le cadre de la comptabilisation des engagements, de la méthode d'évaluation actuarielle préconisée par l'ICCA aura pour effet de réduire de quelque 1 800 000 000 $ le déficit actuariel net de l'ensemble des régimes qui est à la charge du gouvernement. "

J'aimerais avoir une "brève explication et les incidences sur le budget par rapport à cette nouvelle façon de comptabiliser. Quelle est l'incidence nette sur les opérations budgétaires et s'il s'aqit du tableau de la page 11? À mon avis, ces nouvelles façons de comptabiliser sont fort importantes quoi qu'en disait le député de Lafontaine hier, que c'était de la comptabilité d'épicerie. Je reqrette, mais je pense qu'il est complètement dans les patates lorsqu'il dit cela. Lorsqu'on change des règles comptables et qu'on veut travailler sur des bases comparatives, on ne compare plus des pommes avec des pommes, on compare des pommes avec des oranges. Si on a chanqé les règles du jeu, je pense qu'il faut rétablir... C'est-à-dire que la façon dont on le présente est bonne, sauf qu'il nous faut connaître sur une base comparative les chiffres réels. Il me semble important que le ministre nous donne des explications là-dessus.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, comme il s'agît de certaines données techniques, il serait peut-être bon qu'on ait une explication préliminaire de M. Rhéaume.

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous vous identifier, s'il vous plaît? C'est sur le temps de parole de M. le ministre.

M. Rhéaume (Alain): Alain Rhéaume, pour le ministre des Finances.

Pour répondre à la question du député de Bertrand, je dois dire qu'au tableau de la page 11, premièrement, si on veut préciser l'incidence de la nouvelle méthode d'évaluation, ce sont les données de la première ligne de ce tableau en ce qui concerne les dépenses qui montrent que l'utilisation de la nouvelle méthode d'évaluation actuarielle recommandée, autant par l'Institut canadien des comptables agréés que par les organismes régulateurs aux États-Unis en cette matière, a pour effet de réduire les montants à inscrire aux dépenses de 110 000 000 $, 123 000 000 $ et 135 000 000 $ respectivement sur les exercices financiers 1987-1988, 1988-1989 et 1989-1990.

Cette même méthode d'évaluation, quand on l'applique à l'ensemble des engaqements du gouvernement au titre des régimes de retraite, a aussi pour effet de réduire le passif total, c'est-à-dire les engagements totaux à l'égard des fonds de retraite gagnés par les employés jusqu'à la date de l'évaluation actuarielle la plus récente, de 1 800 000 000 $, tel qu'indiqué dans la note, à la page 10 de l'annexe C du discours sur le budget.

Jusqu'à l'année 1986-1987, la méthode d'évaluation actuarielle qui a été utilisée était une méthode appelée de nivellement des cotisations. C'est-à-dire que c'est une méthode qui permet de fixer dans le temps une proportion toujours constante du salaire de l'employé comme coût du régime de retraite pour l'employeur. On garde toujours la même proportion. Ces méthodes sont généralement utilisées pour établir ou pour constituer une caisse en vue du paiement futur des pensions. C'est-à-dire que cela

permet à l'employeur de mettre toujours une proportion fixe du salaire de ses employés dans une caisse pour être en mesure, éventuellement, de payer des prestations qui découleront des bénéfices gagnés par les employés.

Cependant, cette méthode qui est tout à fait appropriée pour le provisionnement, pour la constitution d'une caisse, n'est pas celle qui est recommandée ni par l'institut des actuaires ni par les organismes régulateurs en comptabilité au Canada et aux États-Unis pour faire la comptabilisation des opérations des régimes de retraite.

L'Institut canadien des comptables agréés a lancé, au mois d'avril 1986, je pense, une nouvelle norme sur la comptabilisation des régimes de retraite qui s'applique au secteur privé. Aux États-Unis, on a publié, au cours de l'été aussi, une nouvelle norme, c'est la norme 87 du Financial Accounting Standards Board qui porte sur la comptabilisation des coûts et des engagements au titre des régimes de retraite. Ces deux nouveaux ensembles de règles prévoient que, pour comptabiliser les opérations des régimes de retraite, on doit utiliser une méthode particulière d'évaluation qui s'appelle la méthode de répartition des prestations au prorata des années de service.

L'institut des actuaires recommande aussi l'utilisation de cette méthode, quand vient le temps de comptabiliser les opérations, en disant que si, par exemple, on veut faire une caisse, peut-être qu'une méthode de nivellement des cotisations est plus appropriée et qu'on peut faire des paiements à une caisse ou faire des déductions à la source sur la paie des employés pour leur part du coût des régimes de retraite sur la base d'une méthode de nivellement des cotisations. Mais, quand vient le temps de comptabiliser les coûts et les engagements aux livres de l'employeur, on doit utiliser une méthode de prime unique, comme cela s'appelle, une méthode de répartition des prestations, parce que cette méthode permet de mieux apparier les prestations gagnées avec les services rendus, c'est-à-dire que les coûts qui découlent de la méthode de répartition des prestations ne sont pas affectés par les salaires futurs que gagnera un employé et tiennent parfaitement compte de l'âge de la personne ou de l'âge moyen de la population au moment où les services sont rendus.

Une prime nivelée, selon l'ancienne méthode, "a pour effet de garder un coût toujours fixe à imputer aux dépenses peu importe l'âge des participants et peu importe aussi le niveau de salaires qu'ils gagnent, alors que dans le cas de la méthode qui est recommandée maintenant par les instituts de comptables au Canada et aux États-Unis, cela donne un coût à inscrire pour les services rendus qui sont plus élevés si vos employés gagnent plus cher et sont plus âgés, et qui sont moins élevés si votre population participante a un salaire moins élevé et qu'elle est plus jeune.

Dans le cas qui nous occupe, la population participante des employés et des autres bénéficiaires de réqimes de retraite qui sont à la charge du gouvernement, soit les magistrats et les membres de l'Assemblée nationale, par exemple, l'âge moyen de ces gens fait en sorte que le coût à incrire, donc la dépense à inscrire, l'enqagement qui en découle au passif, basé sur la nouvelle méthode, est inférieur à celui que donne la méthode de prime nivelée.

S'il arrivait que l'âge moyen de la population couverte s'élève dans le temps, il y a, à un moment donné, un point de retournement où la méthode recommandée par les instituts de comptables pourrait donner un coût plus élevé que la méthode de nivellement des cotisations qu'on a utilisée jusqu'ici.

Le Président (M. Lemieux): Vous avez une question, M. le député de Bertrand?

M. Parent (Bertrand): L'effet net de ce que vous me donnez, sur le plan des opérations budgétaires de cette nouvelle méthode, c'est un effet net de baisse des dépenses budgétaires de 110 000 000 $. Est-ce que je comprends bien?

M. Rhéaume: Pour 1987-1988, si on prend seulement la modification de la méthode d'évaluation utilisée, c'est cela.

M. Parent (Bertrand): Ces 110 000 000 $ sont incorporés, si on prend toujours les prévisions de dépenses budgétaires de 1987-1988 qui sont de 30 080 000 000 $.

M. Rhéaume: Oui.

M. Parent (Bertrand): Se retrouvent, à l'intérieur de ces 30 080 000 000 $, les dépenses budgétaires de 100 000 000 $ incorporés là-dedans et qui représentent une baisse grâce à la nouvelle méthode d'évaluation actuarielle.

M. Rhéaume: C'est exact. Il y a les autres éléments qui s'ajoutent là qui font qu'au total, les modifications apportées aux réqimes de retraite se soldent par une baisse des dépenses 1987-1988 de 7 000 000 $. La méthode donne 110 000 000 $ de réductions des dépenses et les autres éléments de modification qui sont apportés donnent 103 000 000 $ de dépenses additionnelles, au total. Il y a une baisse nette des dépenses de 7 000 000 $ avec les changements comptables.

M. Parent (Bertrand); D'accord. C'est l'interprétation du cahier de la page 11.

M. Rhéaume: Exactement.

Sociétés de placement dans l'entreprise québécoise

M. Parent (Bertrand): Alors, cela m'éclaire de ce côté. Je vous remercie. Si le ministre des Finances me le permet, j'aurai trois autres questions qui touchent votre énoncé du discours sur le budget, à la page 15. Les SPEQ et les nouvelles modifications apportées concernant le fonds de solidarité des travailleurs du Québec; d'abord, les SPEQ...

Le Président (M. Lemieux): À quelle page, M. le député de Bertrand?

M. Parent (Bertrand):... à la page 15 de votre discours, M. le ministre.

Le Président (M. Lemieux): D'accord, à la page 15 du discours.

M. Parent (Bertrand):... vous mentionnez: "D'autres modifications ont trait aux Sociétés de placement dans l'entreprise québécoise", les SPEQ, qui ont été mis sur pied il y a déjà quelques années.

Le Président (M. Lemieux): Le troisième paragraphe.

M. Parent (Bertrand):... au troisième paragraphe.

Le Président (M. Lemieux):... au troisième paragraphe, M. le ministre des Finances.

M. Parent (Bertrand): "Elles visent à faciliter les placements dans l'entreprise en démarrage et à prévenir les abus de la part de certains actionnaires. "

Par rapport aux mesures qui étaient déjà connues avec les SPEQ, qu'est-ce qu'il y a de nouveau comme mesures qui seraient incitatives au sujet des SPEQ.

M. Levesque: M. Beaulieu, justement, qui a travaillé dans ce secteur, pourrait peut-être nous donner le côté technique qui vous intéresse.

Le Président (M. Lemieux): Voulez-vous vous identifier, M. Beaulieu, sur le temps de parole du ministre des Finances. M. Beaulieu.

M. Beaulieu (Jean-Charles): Jean-Charles Beaulieu. À l'égard des SPEQ, les nouvelles SPEQ vont pouvoir se qualifier même si elles n'ont pas le nombre d'employés requis. C'est l'adaptation des règles pour les entreprises en démarraqe. Une SPEQ devait se conformer aux règles au moment où elle s'enregistrait, c'est à la page 22.

M. Levesque: À l'annexe A, page 22.

M. Beaulieu: Pour être admissible le placement d'une SPEQ doit se soumettre à certains critères. La SPEQ devait s'y soumettre au moment du placement admissible, alors que maintenant elle va pouvoir correspondre à ces critères quatre mois après. Si la corporation admissible, par exemple, doit oeuvrer dans un secteur manufacturier - supposons que c'est une nouvelle corporation et qu'elle n'a pas commencé ses opérations au moment du placement admissible de la SPEQ - elle va pouvoir ne correspondre à ces exigences que quatre mois après que la SPEQ aura fait son placement admissible pour lui permettre d'entreprendre ses activités d'entreprise manufacturière. L'arrêt qui prévalait auparavant faisait en sorte qu'une corporation nouvellement créée et qui voulait lancer son entreprise manufacturière ne pouvait pas bénéficier du placement de la SPEQ, à ce moment, parce qu'elle n'avait pas les fonds de la SPEQ ou d'autres fonds des actionnaires. Donc, elle devait attendre et acquérir des fonds temporaires. Alors, pour assouplir les règles, tout simplement ce qui est avancé maintenant, c'est qu'elle devra se soumettre à toutes ces rèqles seulement quatre mois après le placement admissible.

Fonds de solidarité des travailleurs du Québec

M. Parent (Bertrand): Cela va. L'autre question porte sur le Fonds de solidarité des travailleurs. Vous y apportez de nouvelles mesures. Si je comprends bien, c'est ce qu'on retrouve à la page 23.

M. Beaulieu: En ce qui concerne le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, en vertu de la loi constitutive, il peut racheter des actions dans certaines circonstances particulières, soit au décès de l'actionnaire ou, soit le cas où l'actionnaire atteint l'âge de 65 ans. En vertu des nouvelles règles, après discussion avec le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec, le fonds pourra également racheter les actions lorsqu'une personne deviendra invalide, lorsque l'actionnaire deviendra invalide au sens de la Loi sur la Réqie des rentes du Québec.

Deuxièmement, afin de s'assurer que l'argent accumulé par le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec soit du capital permanent lorsque le fonds achètera des actions de gré à gré de ses actionnaires pour d'autres raisons; par exemple, parce qu'un

particulier a des besoins - sa maison a été incendiée et Il voudrait que le fonds rachète ses actions - à ce moment-là, si le fonds décide de racheter ses actions dans des conditions autres que celles prévues dans la loi concernant le fonds de solidarité, il devra rembourser au ministère du Revenu le montant du crédit d'impôt accordé, soit 20 % de la valeur de l'action. (11 h 30)

M. Levesque: Autrement dit, c'est pour éviter qu'il y ait... Il pourrait y avoir théoriquement des abus. Il est normal qu'il y ait certaines règles parce que, autrement, quelqu'un pourrait simplement acquérir certaines actions...

Une voix: Effectivement, par exemple... M. Levesqueî... et, ensuite...

M. Parent (Bertrand):... bénéficier du crédit d'impôt...

Une voix: Oui.

M. Levesques C'est cela. Je pense que tout le monde est de bonne foi. Le fonds de solidarité, avec qui nous avons discuté de ces questions, est pleinement conscient du danger qu'on essaie d'éviter. Nous avons fait l'expérience depuis un an avec le fonds de solidarité et nous n'avons pas noté quelque abus que ce soit.

Une voix: Non.

M. Parent (Bertrand): D'accord, cela répond à mes questions, je voudrais seulement souligner au ministre que je suis heureux de voir qu'il y a des mesures, certains assouplissements au sujet du fonds de solidarité. Cependant, il y avait eu, de mémoire - je n'étais pas là - beaucoup de critiques et peu d'empressement quant à la mise sur pied du fonds lorsqu'elle a été faite par votre formation politique. Je pense que le fonds de solidarité, à moins que je ne me trompe, est devenu un outil fort intéressant de développement et que le ministre des Finances s'en préoccupe et même qu'il apporte des correctifs, je trouve cela bien. Je pense qu'il n'y avait pas eu tellement d'emballement et d'empressement de la part de la formation politique.

M. Levesqueî Peut-être que le député de Bertrand a été mal renseigné parce que je me rappelle fort bien avoir rencontré M. Louis Laberge à ce moment-là avec quelques-uns de mes collègues et nous avions considéré ce projet avec beaucoup d'attention. Peut-être que nous avons pris le temps nécessaire pour le regarder, cela est normal. Je pense que, dans l'intérêt des citoyens et du Québec, il faut prendre le temps nécessaire pour reqarder un projet, mais une fois qu'il a été étudié et mis de l'avant, je ne pense pas que l'on puisse qualifier l'attitude de l'Opposition du temps, comme vient de le faire le député de Bertrand.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand, vous pouvez continuer.

M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. Je voudrais aborder la question des transferts fédéraux puisque c'est un point drôlement important qui, selon le ministre et selon ses exposés, vient...

Le Président (M. Lemieux): Excusez-moi, à quelle page, monsieur... ?

M. Parent (Bertrand): On va vous donner cela.

M. Levesque: Évidemment, il y a toute l'annexe F qui traite du domaine de la santé et de l'éducation postsecondaire, mais il y a évidemment tout l'ensemble des transferts également.

M. Parent (Bertrand): J'en étais à l'annexe B, à la page 6.

Le Président (M. Lemieux): Annexe B, page 6.

Transferts fédéraux

M. Parent (Bertrand): C'est cela. De façon générale, sur la question des transferts fédéraux, le ministre des Finances, l'année passée, dans son discours était, je dirais, un peu plus bavard, c'est-à-dire qu'il était, en tout début de mandat, très empressé, pour ne pas dire autrement, de montrer qu'il aurait beaucoup de succès quant à la juste part des transferts qu'il pourrait aller chercher.

Je lis ou je prends connaissance, cette année, de ses commentaires sur les transferts et ils sont plus réservés et plus timides. J'aimerais les porter à son attention et aussi avoir les commentaires du ministre qui semble déjà avoir abdiqué devant cet état de fait ou cet état de situation parce que les transferts fédéraux, à toutes fins utiles, si on les regarde par rapport à la croissance annuelle moyenne, vont être inférieurs. Donc, il y aura, si on veut, des pertes de ce côté-là. Sur une base d'exercice, les transferts fédéraux recommenceront à croître à compter de cette année, après avoir connu une stagnation presque complète pendant Ie3 quatre années précédentes. Toutefois, selon les prévisions, le rythme de cette croissance devrait être inférieur à celui de l'inflation. La valeur réelle - cela est important - des

transferts fédéraux continuera donc à diminuer. Ainsi, 1987-1988 jusqu'à 1989-1990, la croissance annuelle des transferts fédéraux devrait être de 3, 6 %. Plus loin, on nous mentionne que le manque à gagner s'élèvera de façon importante et que le Québec va perdre quelque chose comme 850 000 000 $, si ma mémoire est bonne, pour la seule année de 1989-1990.

Je pose la question au ministre des Finances sur l'état de fait devant lequel on se retrouve quant aux transferts fédéraux d'où il est revenu l'année passée un peu bredouille face aux demandes qu'il avait faites et, si ma mémoire est bonne, à un seul chapitre c'était pour 66 000 000 $, et qui continue à être tenu en échec, à toutes fins utiles, quant à l'augmentation des transferts fédéraux.

J'aimerais que le ministre des Finances nous dise un peu le pourquoi de ce changement de langage de l'année passée dans son discours sur le budget du 1er mai. Je me souviens très bien de ses paroles quand il disait que maintenant il allait y voir, que la période du précédent gouvernement, des mauvaises relations était terminée, qu'il verrait à rétablir les faits et qu'on irait chercher, non seulement notre juste part, mais certainement un accroissement. On s'aperçoit qu'il n'y a pas d'accroissement réel.

J'aimerais que le ministre des Finances nous dise le pourquoi de ses propos modérés de cette année sûrement plus sages et plus réels.

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, je suis heureux que le député de Bertrand aborde ce sujet qui, comme on le sait fort bien, a une incidence importante sur nos équilibres financiers. En effet, les transferts fédéraux constituaient, il n'y a pas si longtemps, près de 30 % du budget et, aujourd'hui, on tend à connaître une baisse de cette proportion.

Ces chiffres-là, je crois qu'on les retrouve dans le discours sur le budget lui-même et, si on me le permet, je vais tâcher de les retrouver. Je tiens simplement à dire au député de Bertrand que je n'ai pas changé de discours. Peut-être qu'il y trouve une différence de nuance, mais quant à moi, je n'ai pas l'intention de laisser tomber nos revendications à ce sujet. Je parlais tout à l'heure de près de 30 %: en 1983-1984, les transferts étaient de l'ordre de 28, 9 % et cette part qui occupe les transferts fédéraux dans les revenus budgétaires du gouvernement maintenant devrait chuter en 1989-1990 à 21, 9 %. On s'aperçoit de cette diminution quant aux transferts fédéraux dans leur ensemble et par rapport à l'ensemble du revenu du Québec.

Je voudrais mentionner, pour la bonne compréhension des choses, que dans les transferts fédéraux il y a plusieurs volets. Il y a le volet que l'on appelle le FPE -financement des programmes établis - qui touche la santé et l'éducation supérieure.

Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir au mois de décembre 1985, toutes les décisions étaient prises. Le chef de l'Opposition, le député d'Anjou, était alors premier ministre et il s'était rendu à une conférence des premiers ministres à Halifax à la fin de novembre, juste trois ou quatre jours avant les élections, pour en arriver à la conclusion qu'il n'y avait rien à faire. Et, le soir même de mon assermentation comme ministre de3 Finances, je me suis rendu à Toronto pour apprendre que, malgré les protestations, le gouvernement fédéral avait unilatéralement fait son lit et que, dans le domaine de la santé et de l'éducation supérieure, on allait changer la formule et on allait voir à une diminution des coûts pour le gouvernement fédéral. Cela indiquait, par rapport à la formule antérieure, que le Québec serait pénalisé d'environ 2 000 000 000 $ et que l'ensemble des provinces serait pénalisé de 8 000 000 000 $. Nous étions devant un fait accompli. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons, justement dans le budget de l'an dernier, fait état de cette situation inacceptable étant donné surtout que, dans ces domaines - prenons le domaine de la santé, par exemple - il y a une augmentation des coûts, augmentation qui s'explique très facilement par le vieillissement de la population, d'une part, et par les nouvelles technologies médicales qui sont devenues nécessaires. Il est clair, alors que nous faisons face à des coûts additionnels, qu'on n'était pas prêt à accepter ce que nous proposait unilatéralement le gouvernement fédérai, qu'il a lui-même transcrit dans la législation qu'on a appelé la loi C-96 qui a été adoptée. Et nous sommes devant ce fait accompli.

Je me suis retourné immédiatement et j'ai dit au qouvernement fédéral - mais là c'était fait, je ne pouvais pas le défaire - au moins, tâchez de vous reprendre dans les accords fiscaux relativement au deuxième volet. Tout à l'heure j'ai parlé du premier volet, le financement des programmes établis. Il y a un deuxième volet qui s'appelle la péréquation. Alors, la péréquation, contrairement au FPE qui s'adresse à toutes les provinces, s'adresse aux provinces avec une capacité fiscale moindre. Le Québec fait partie de ce groupe de provinces qui a accès aux paiements de péréquation. Et, de fait, le Québec reçoit à peu près 52 % des paiements de péréquation versés par le qouvernement fédéral à l'ensemble des provinces bénéficiaires. Pour nous, c'était important. On a dit: Dans ce cas-là, si on ne peut pas changer la loi

C-96, au moins pour les provinces qui sont le plus durement affectées, autrement dit, celles qui ont une capacité fiscale moindre, tâchez de compenser en augmentant les paiements de péréquation. C'est là que nous avons fait une lutte qui a apporté les résultats que l'on connaît. Une bonification, mais une bonification insuffisante, bien insuffisante.

Cependant, à travers ces négociations et ce périple, il s'est produit un aspect positif que, en toute justice, je dois souligner. C'est qu'à la suite des derniers chiffres du recensement de la population, on a découvert - que ce soit vrai ou non, je ne le sais pas - mais les chiffres qui ont été donnés par le gouvernement fédéral dans le domaine du recensement de la population ont fait que le Québec avait en 1986 moins de population que celle qui était escomptée. De sorte qu'on réclamait du Québec un remboursement de transferts fédéraux basés sur la population, et cela pour 1985-1986 et 1986-1987, pour le passé, autrement dit, qui nous coûterait 150 000 000 $. Nous avons eu des rencontres avec les fonctionnaires et j'ai eu des rencontres avec le ministre fédéral des Finances, et, finalement, nous avons - et je le dis en toute justice - gagné notre point, et le gouvernement fédéral et le ministre des Finances, M. Wilson, ont décidé d'accepter de renoncer à ce remboursement. Donc, il y a eu là, pour nous, un gain de 150 000 000 $ qui a été fort apprécié dans les circonstances actuelles. (11 h 45)

Maintenant, j'ai dit à ce moment-là que je reconnaissais que c'était un pas dans la bonne direction, mais que cela ne changeait pas le contentieux que j'avais avec le gouvernement fédéral, relativement à ces volets qui s'appellent FPE, financement des programmes établis en matière de santé et de l'éducation supérieure et, deuxièmement, paiements de péréquation, les accords fiscaux pour les cinq prochaines années. J'ai demandé de nouveau au gouvernement fédéral qu'au moment de la réforme fiscale, on revoie toute cette question des transferts fédéraux pour faire en sorte que le gouvernement fédéral assume ses responsabilités surtout vis-à-vis des coûts de la santé et de l'éducation supérieure. À cette fin, on ne peut pas dire que le budget est silencieux. Vous voyez, par exemple, que nous y faisons référence clairement dans le discours sur le budget, mais que nous avons pris la peine de fabriquer une annexe, qui s'appelle l'annexe F, exactement sur ces questions où l'on parle de la santé, de l'éducation postsecondaire, de l'évolution des dépenses et de leur financement. Cela se termine par un addenda de désengagement du gouvernement fédéral.

Si on lit cette annexe, on s'aperçoit que je n'ai pas du tout changé de discours et que j'ai l'intention de continuer à réclamer pour le Québec. Le gouvernement du Québec a l'intention de continuer de réclamer, comme le font d'ailleurs plusieurs provinces -on n'est pas seuls là-dedans - qui ont, elles aussi, des problèmes du côté de la santé et de l'éducation supérieure. Les coûts augmentent ici et ailleurs aussi. Le ministre des Finances du gouvernement fédéral, je le comprends, a un déficit qui est aussi très considérable. Je sympathise avec lui, à ce point de vue-là, mais je ne veux pas qu'il transfère son déficit chez nous, nous en avons assez. Je lui ai dit à maintes reprises. Si c'étaient tes transferts fédéraux qui avaient aggravé la situation du gouvernement fédéral, si c'était là le point qui faisait en sorte que le déficit était rendu presque incontrôlable, je comprendrais peut-être que c'est là qu'il doive apporter certains ajustements. Mais lorsqu'on reqarde les tableaux -je ne les ai pas ici - sur les transferts fédéraux, on s'aperçoit qu'il y a une ligne presque droite, ce n'est pas là qu'est le problème; c'est une ligne horizontale où il n'y a pas d'augmentation substantielle. Lorsque l'on regarde les autres dépenses fédérales, là on s'aperçoit qu'il y a certains secteurs où la croissance des dépenses est beaucoup plus forte.

Dans les circonstances, on dit: Je comprends que vous devez ajuster la situation, faire en sorte de réduire vos dépenses pour réduire votre déficit, je comprends très bien cela. Comme Canadien, je ne peux pas faire autrement que de souscrire à l'assainissement des finances publiques au qouvernement fédéral comme nous nous y attaquons au Québec, mais lorsqu'on s'y attaque, on ne devrait pas le faire là où ce n'est pas la cause du déficit. Autrement dit, ce ne sont pas les transferts aux provinces qui font justement que le déficit du gouvernement fédéral a subi une hausse aussi inquiétante. Et je dis, si vous avez à couper, coupez ailleurs, mais ne coupez pas surtout dans des domaines aussi névralgiques et importants pour la population que le domaine de la santé, le domaine de l'éducation postsecondaire.

Que l'on sonqe, par exemple, que c'est le gouvernement fédéral des années 1959-1960 qui a entrepris toute cette question de l'assurance-hospitalisation avec des provinces qui s'étaient embarquées, si vous voulez, et qui ont embarqué les autres aussi. Lorsqu'on parlait de coûts partagés, on parlait de 50-50 et, de la même façon, quand on est arrivé dans les années 1969-1970 avec l'assurance-maladie, c'était le qouvernement fédéral qui, encore là, parlait d'un partage. Mais avec le temps, on s'aperçoit qu'il voudrait se désengager un peu et c'est choisir le bien mauvais moment alors que les coûts augmentent. C'est pour cela que je tiens ce langage-là; c'est pour cela que nous avons

apporté dan3 le budget l'annexe F qui donne justement toute la problématique et j'espère que j'aurai l'appui de l'Opposition pour continuer cette lutte, pour essayer d'avoir un meilleur traitement de la part du gouvernement fédéral.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances.

M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Merci, M. le Président. Effectivement, le discours...

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, votre temps de parole est terminé. M. le député de Lafontaine, est-ce que vous voulez intervenir ou si vous laissez le temps de parole à M...

M. Gobé: Je peux intervenir.

M. Levesque: Une couple de minutes, peut-être?

Le Président (M. Lemieux): Une couple de minutes pour que M. le député de Bertrand puisse terminer. Cela va? Alors, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Je suis tout seul. Je n'ai pas commencé à parler, M. le Président, et vous me dites que je n'ai plus de temps.

Le Président (M. Lemieux): Non. C'est sur votre temps de parole de dix minutes qui est discontinu et non continu et nous l'avons compilé. Alors on m'informe chaque fois et j'ai essayé d'être le plus large possible parce que cela atteint quinze, seize minutes et je demande toujours l'autorisation. Mais il n'y a pas de problème, il y a consentement. Je dois le souligner, M. le député de Bertrand. Je pense que vous en êtes bien conscient.

M. Parent (Bertrand): Je reçois cela comme une faveur de votre part. Je vous remercie.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Bertrand, vous pouvez continuer.

M. Parent (Bertrand): Je me sens obligé de remercier tout le monde, mais...

Le Président (M. Lemieux): Non, non. M. le député de Bertrand, malheureusement, je suis...

M. Poulin: Dans votre cas, il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Lemieux):... limité par un règlement et je dois le faire observer.

Alors c'est à vous la parole, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): L'exposé du ministre des Finances au cours des dernières minutes était très touchant. C'était un discours très touchant. On va prendre les galées, puis on va les envoyer dans l'autre commission qui se tient sur le lac Meech, parce que cela va peut-être ébranler certaines personnes que le ministre des Finances connaît bien. Quant à tout ce désengagement du gouvernement fédéral, je n'ouvrirai pas ici un débat constitutionnel, sauf que je vous dis: Oui, nous vous appuyons dans cette revendication parce que voilà longtemps que l'on dit qu'on est en train de s'en faire passer une petite vite et là-dessus on est d'accord. On a peut-être trouvé, en fin du discours sur le budget des points d'accord. C'est très grave ce désengagement du gouvernement fédéral et vous y apportez justement des explications, parce que vous vous devez, en tant que gouvernement et aussi en tant que responsable des Finances du Québec, de dénoncer cette attitude-là. Je la déplore. Elle se situe sur le plan administratif d'abord, mais elle a aussi des impacts sur le plan politique.

Quand vous dites: Cela n'a aucun sens que les coûts dans les secteurs de l'enseignement supérieur et de la santé qui sont croissants continuent à augmenter pendant que le gouvernement fédéral, lui, veut se retirer, je pense que c'est un impact particulièrement important, à ce stade-ci, que vous puissiez revendiquer et obtenir définitivement notre juste part. Si on n'obtient pas notre juste part en termes d'argent, au moins j'espère qu'on obtiendra, M. le ministre, notre juste part en termes de pouvoir, puisque si on veut se désengager, on devra laisser aller avec cela les pouvoirs qui sont dedans.

Ma question concernant tout cela, c'est que, cette année, c'est l'année des renouvellements des ententes et quand le ministre des Finances fait ses prévisions budgétaires en ce qui concerne les transferts à l'annexe B-6, il est très prudent et même, je dirais, peu optimiste. Comment a-t-il fait pour établir ces chiffres-là pour son plan triennal de dépenses ou plutôt de revenus au niveau des transferts s'il n'a pas d'indice particulier au moment où l'on se parle, c'est-à-dire au moment où ceci a été préparé il y a quelques semaines, quant au renouvellement? Sur quoi le ministre a-t-il pu se baser pour faire ces prévisions? Au moment où l'on discute de renouvellement, est-ce qu'on a des indices particuliers?

Renouvellement des ententes sur les transferts

Quel est l'échéancier que le ministre a

concernant le renouvellement des ententes sur les transferts, puisque vous avez parlé des nouvelles mesures de politiques fiscales pour le gouvernement fédéral, et où en est-on exactement? Parce que c'est important. Cela me préoccupe, comme je l'ai mentionné précédemment, parce que, pour les trois prochaines années, on va avoir encore une perte de pouvoirs, une perte nette, puisque les transferts fédéraux, en moyenne, vont être de 3, 6 % pour les trois prochaines années pendant que l'Indice des prix à la consommation vont être de 3, 9 %.

Donc, non seulement on va faire des gains, mais on va faire des pertes de ce côté-là. Alors, sur quoi le ministre s'est-il appuyé pour faire ces prévisions qu'on retrouve à l'annexe 8, à la page 6, des transferts fiscaux pour les trois prochaines années et quel est l'échéancier pour le renouvellement de ces ententes?

Le Président (M. Chagnon): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Ah! bonjour, M. le Président!

Le Président (M. Chagnon): Cela va bien?

M. Levesque: Cela va bien, oui.

Le Président (M. Chagnon): On est en rotation.

M. Levesque: M. le Président, nous retrouvons de fait, à l'annexe B, l'évolution des revenus de transferts fédéraux pour les années passées et une projection pour les années à venir. Le député de Bertrand aimerait savoir comment nous avons pu arriver à établir la situation pour les années à venir.

Je vais lui dire que, pour le moment, bien que j'aie fait appel au gouvernement fédéral de profiter de la réforme fiscale pour apporter une bonification aux transferts fédéraux, surtout dans le domaine de la santé, encore une fois, et de l'éducation supérieure, bien que j'aie fait un tel appel, il n'en reste pas moins que nous devons baser no3 prévisions sur la réalité d'aujourd'hui.

Et la réalité d'aujourd'hui, c'est la loi C-96 dans le domaine du financement des programmes établis dans le domaine de la santé et de l'éducation postsecondaire. Ce projet de loi est devenu la loi qui a été adoptée. Et que voulez-vous? c'est une réalité, ça.

Deuxièmement, dans l'autre volet qui s'appelle les paiements de péréquation, les accords fiscaux sont maintenant traduits dans une législation. Je pense que c'est le projet de loi C-12 qui, lui aussi, a été adopté par la Chambre des communes, il y a très peu de temps, et qui est devenu la loi du pays.

Alors, et dans le domaine des transferts fédéraux pour le financement des programmes établis et dans celui des transferts fédéraux relatifs à la péréquation pour les années à venir, dans les deux cas, les règles du jeu sont inscrites dans la législation fédérale.

C'est donc que je dois... À ce moment-ci, je n'ai pas le choix. Il faut que mes prévisions soient basées sur la réalité constitutionnelle, légale, qui est devant moi. Cela ne m'empêche pas de continuer de réclamer, si l'on veut, une amélioration de la situation. Mais, pour le moment, en toute objectivité, je n'ai pas le choix. Je dois m'en tenir aux conditions qui sont celles d'aujourd'hui.

Le Président (M. Chagnon): M. le député de Bertrand.

M, Parent (Bertrand): Oui, merci, M. le Président. Si je comprends bien, vous avez fait ces prévisions à la lueur du peu d'information que vous aviez et à la lueur de ce qui semble vouloir s'amorcer au cours de la prochaine année...

M. Levesque: Je m'excuse, M. le Président. Peut-être qu'on s'est mal compris. Ces prévisions sont basées, non pas à la lueur, mais à la lumière de ce qui existe aujourd'hui dans la législation fédérale. Ces paiements de transferts, bien qu'ils soient précédés d'une période de consultation, si l'on veut, ces transferts fédéraux sont décidés unilatéralement par le gouverrnement fédéral. (12 heures)

Lorsque le qouvernement fédéral arrive à ses conclusions, après consultation ou "négociation" - entre guillemets - il arrive à prendre la décision et à la traduire en loi. Une fois que nous avons eu cette loi, malgré que nous ayons protesté tout au long de la route la loi C-96 ayant trait au financement des programmes établis en matière de santé et d'éducation postsecondaire, cela est devenu loi. C'est une loi qui est là pour X temps, pour cinq ans. Dans l'autre volet de la péréquation, les accords fiscaux, qui sont là également pour cinq ans, sont traduits dans une autre loi fédérale, laquelle vient d'être adoptée à la Chambre des communes il y a très peu de temps.

Dans les circonstances, je suis obligé, quand je fais mes prévisions, de tenir compte de cela. Le gouvernement fédéral, dans sa loi adoptée à la Chambre des communes, dit: Nous allons donner X montant d'argent cette année, X montant l'an prochain à telle et telle province et c'est sur telle base que nous allons payer. Maintenant, je suis obliqé de tenir compte de cela dans mes prévisions. Cela ne m'empêche pas de continuer de faire

pression sur le gouvernement fédéral pour qu'il apporte des amendements à cette situation afin de la bonifier, quant à nous. Mais, je ne peux pas faire des prévisions officielles sur les désirs que j'entretiens d'une amélioration de la situation. Je pense que c'est clair. Tous les chiffres qui sont ici dans ce budget sont basés sur la réalité législative et constitutionnelle d'aujourd'hui. Espérons que cela changera dans le bon sens. Mais, je n'ai pas de garantie que cela va changer. Je suis donc obligé de faire des prévisions avec les données officielles qui sont à ma disposition.

Le Président (M. Chagnon): M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Le projet de loi C-96 est en vigueur depuis avril 1986, voilà un an. Cependant, le projet de loi C-12, je crois qu'il est en vigueur depuis avril 1984.

M. Levesque: Non, non, il vient d'être renouvelé le 1er avril...

M. Parent (Bertrand): II vient d'être renouvelé.

M. Levesque:... 1987.

M. Paient (Bertrand): Parce qu'on dit que le projet de loi a été adopté le 12 avril 1984. C'est ce que vous mentionnez à la page 25, au dernier paragraphe. C'est pour cela que je confondais parce que le projet de loi C-12, effectivement...

M. Levesque: Ah boni II y avait deux projets de loi C-12. C'est de là que la confusion peut venir.

M. Parent (Bertrand): D'accord.

M. Levesque: On me dit qu'en 1984, il y avait eu un autre projet de loi C-12.

M. Parent (Bertrand): II y a eu un projet de loi C-12, en 1984, qui a modifié profondément et qui a fait l'effet de plafond, si j'ai bien compris...

M. Levesque: C'est cela.

M. Parent (Bertrand):... du 6-5. Cela est toujours en vigueur. Cela apporte, j'imagine, des pertes de ce côté. Mais là, on parle d'un nouveau C-12...

M. Levesque: Tout cela était en cours de route, disons, entre 1982 et 1986. Il y a eu des changements en cours de route, mais le tout a été remplacé par le projet de loi C-96 en 1986.

M. Parent (Bertrand): Donc, la dernière...

M. Levesque: II y avait eu, à ce moment-là, par l'ancien gouvernement fédéral, certaines modifications qui étaient encore là pour plafonner les contributions. Si ma mémoire est fidèle, est-ce qu'il n'y a pas eu une période transitoire qui avait été prévue? C'est exact, il y a eu ces changements en cours de route. Mais, finalement, on est arrivé avec un projet de loi entièrement nouveau, le C-96, qui non seulement maintenait les plafonds, mais changeait le taux de croissance qui aurait donné à peu près 2 000 000 000 $ de plus au Québec, selon l'ancienne formule, que ce qui est contenu dans le C-96.

M. Parent (Bertrand): Jusqu'en 1991, comme on le retrouve au tableau de la paqe 26.

M. Levesque: C'est cela.

M. Parent (Bertrand): J'en conviens et on s'entend, je pense, là-dessus, sur la question des effets du C-96. Cependant, on me dit - j'aimerais le voir confirmer - qu'il y aurait d'autres projets de loi au niveau fédéral sur la table et que ce serait à partir de cela que l'on pourrait être capable de négocier, sinon vous êtes en train de me dire que tout ce qui est là, c'est, non seulement à la lumière des lois existantes et de la loi C-96, mais qu'il n'y aura pas d'autres négociations, donc qu'il n'y a pas d'espoir d'aller faire d'autres récupérations, ou s'il y aura en cours d'année, d'après les informations que j'ai, d'autres possibilités puisqu'il y a d'autres lois que le gouverne-ment fédéral doit déposer là-dessus?

Le Président (M. Chagnon): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Toutes les lois concernant ces deux volets, soit le volet de la péréquation et le volet du financement des programmes établis, sont adoptées maintenant. Et, à moins qu'il y ait une réouverture, si vous voulez, c'est cela, c'est terminé. On l'a fait au niveau fédéral, j'espère qu'à la faveur de la réforme fiscale, on pourra juger à propos de revenir sur certaines décisions qui sont incorporées dans la législation actuelle. Mais la législation actuelle est adoptée jusqu'en 1991-1992.

Le Président (M. Chagnon): Vous avez une réaction, M. le député de Bertrand?

Éventualité d'un ticket modérateur

M. Parent (Bertrand): Oui, à ce sujet, j'aurais une question qui m'intrigue un peu, sur les propos du ministre dans l'annexe F,

particulièrement page 24, qui laissent sous-entendre, à mon avis, des choses, mais au lieu de Ies sous-entendre, }'aime mieux vous poser la question directement. Â la page 24, là où vous mentionnez les éléments du nouvel équilibre et vous dites à deuxièmement, à la fin du paragraphe: "autrement, il pourrait s'avérer très difficile, voire impossible de préserver les droits à l'enseignement supérieur et à la santé auxquels les Québécois sont tous très attachés. " Troisièmement, pour mieux satisfaire les besoins dans les deux autres domaines, on pourrait donner suite à la commission Rochon. Ce que je comprends des points 2 et 3, c'est que le ministre laisse sous-entendre par cela qu'il n'aura pas d'autre choix dans un prochain budget, je crois comprendre là-dedans une ouverture pour préparer la question du ticket modérateur, c'est-à-dire que pour être capable, comme vous le dites en plein milieu du paragraphe 2 à la page 24, "dans ce contexte, et compte tenu du désengagement fédéral, il est à se demander s'il ne faudra pas établir un lien raisonnable entre les contributions au financement de ces services publics et le bénéfice que les citoyens en retirent".

Je vois là-dedans un énoncé très clair d'une politique où l'on viendrait très rapidement, dans le domaine de la santé, comme dans le domaine de l'éducation, avec une tarification et avec des tickets modérateurs, parce que vous semblez être dans une impasse que vous nous expliquez très bien. Et vous nous dites aussi qu'il n'y a rien qu'on peut faire d'ici 1991, à cause des contraintes de la loi C-96. Si la solution pour vous, et cela semble être ce que vous nous indiquez là-dessus, c'est la question du ticket modérateur et d'apporter une contribution de la part de l'utilisateur, pour être capable de contraindre le désengagement du gouvernement fédéral, est-ce que c'est bien cela ce que cela veut dire? Est-ce que c'est vers cela qu'on s'oriente?

Le Président (M. Chagnon): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: C'est M. le député de Bertrand qui parle du ticket modérateur. Vous ne trouvez rien là-dedans, dans ce...

M. Parent (Bertrand): Je vous demande une explication de vos propos, M. le ministre.

M. Levesque: II va falloir que la population soit bien conscientisée sur ce lien qui existe, c'est ce que je dis, et que des mesures appropriées puissent être envisagées. Maintenant, ces mesures ne sont pas explicitées ici, mais on ne pourra pas continuer indéfiniment à avoir des coûts qui augmentent d'un côté et des revenus qui baissent de l'autre. Il y a une équation qui ne se fait plus. Je n'ai pas abordé les moyens de faire face à cela, mais j'ai dit que la population devra regarder de près ce qui se passe et que, nous, les législateurs, nous aurons également à réfléchir là-dessus. Est-ce que c'est la solution qu'envisage le député de Bertrand ou une autre solution, mai3 chose certaine, c'est qu'il y a une équation qui doit être envisagée à un moment donné. Je crois que si on veut maintenir la même qualité de services ou augmenter même la qualité de services, si on veut faire face au défi que constituent les nouvelles technologies médicales, si on veut accepter qu'il y ait un vieillissement de la population et que dorénavant les coûts puissent augmenter, si on accepte tout cela, on va arriver à une équation déficiente s'il n'y a pas d'autres moyens envisagés pour faire face à la situation. C'est ce que je dis.

On peut imaginer divers moyens de faire face à cela, mais je laisserai au ministre responsable et, en même temps, au gouvernement dans son ensemble le soin de m'éclairer à ce sujet. Ce que j'ai voulu également faire, c'est de sensibiliser la population sur la nécessité d'arriver à se rendre compte de cette équation qui va être assez déficiente bientôt.

Si le gouvernement fédéral demeurait à peu près dans la même proportion que jusqu'à maintenant, je ne tiendrais pas le même langage. Peut-être que je tiendrais un peu le même lanqage parce que, que le gouvernement fédéral continue à accepter sa part plutôt qu'à la diminuer comme il fait présentement, il n'en resterait pas moins qu'il y aurait des augmentations de coûts. À ce moment, face aux augmentations de coûts, il est normal qu'on se pose des questions quant à cette équation qui doit être maintenue entre les revenus et les dépenses. Il n'y a pas de miracle là-dedans, sauf qu'à un moment donné il va falloir qu'on prenne des décisions» Lesquelles? Je ne le sais pas, au moment où je vous parle.

M. Parent (Bertrand): J'admets qu'on comprend la même chose et qu'on dit la même chose dans le sens qu'il y a des mesures qui devront, un jour ou l'autre, arriver. Je vous dis que cela pourrait prendre cette forme. Je ne dis pas que c'est souhaitable. Je ne dis pas que je suis d'accord. Je vous dis que je comprends dans cette ouverture que vous faites, quand vous dites: II y a un problème et la solution réside quelque part là-dedans, Là-dedans, cela va être d'amener les consommateurs et les citoyens à payer une partie de ces services. Je voulais être bien sûr que je comprenais la même chose. Â partir des explications que vous me donnez, M. le ministre, je comprends très bien qu'on parle

de la même chose face aux problèmes qui existent.

M. Levesque: Si on me permet d'ajouter simplement ceci: On va continuer à sensibiliser le gouvernement fédéral, avec nos homologues des autres provinces, sur cette situation. On ne donne pas cette annexe simplement pour ajouter au volume du budget. On veut sensibiliser nos vis-à-vis au fédéral sur cette situation et sensibiliser la population aussi, parce que la population peut avoir une influence assez directe, si elle le désire, sur les décisions qui se prennent à un autre niveau de gouvernement.

Finalement, j'attirerais l'attention de la commission sur le paragraphe 4 à la page 24. Le député a parlé des paragraphes 2 et 3. J'attirerais son attention, pour compléter la discussion, sur le paragraphe 4 qui dit qu'enfin, il est nécessaire que les contraintes qui pèsent sur le financement de la santé et de l'éducation supérieure soient mises en lumière d'une façon systématique. C'est pourquoi le gouvernement envisage de procéder à la présentation périodique d'un rapport spécial sur le financement des dépenses de santé et d'éducation postsecondaire. Cette présentation identifierait: l'enveloppe globale des dépenses de santé et d'éducation postsecondaire; les diverses sources de revenus spécifiquement assignés au financement de cette enveloppe: contribution d'employeurs - cela en est un -transferts financiers du gouvernement fédéral; revenus de tarification et autres sources de revenus; et la contribution résiduelle du gouvernement du Québec à même son fonds consolidé.

Ainsi, la population du Québec et les divers intervenants pourront mieux visualiser l'évolution des coûts des services de santé et d'enseignement postsecondaire dont ils bénéficient, suivre les effets du désengagement financier du gouvernement fédéral s'il se poursuit - j'espère que non, j'espère qu'au contraire on va prendre une tendance inverse - et comprendre la nature des mesures qui devraient être prises pour combler l'écart entre les deux. On revient à l'équation et on revient à l'information du public, l'information de l'Assemblée nationale et l'information du gouvernement fédéral qui, à mon sens, doit ajuster son tir. Mais, encore là, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, les prévisions que nous avons au budget ne tiennent pas compte d'un changement d'attitude de la part du gouvernement fédéral, mais bien plutôt de la réalité législative actuelle. (12 h 15)

M. Parent (Bertrand): Devant les propos et les informations additionnels sur le budget que le ministre nous donne ce matin et devant le désengagement du gouvernement fédéral, est-ce que le ministre des Finances ne convient pas que le "timing" - entre guillemets - actuel et son rôle important en tant que ministre de3 Finances... C'est peut-être la personne la plus sensibilisée de l'ensemble des ministres sur, je dirais, l'étroitesse d'ouverture d'esprit du gouvernement fédéral face à tout ce problème de transferts fédéraux, de péréquation et de tout cela, particulièrement en ce qui regarde les deux secteurs dont il fait mention, l'enseignement supérieur et la santé. Face à cette contrainte, le ministre s'aperçoit qu'à chaque année, il y a perte de revenus. Son rôle est important pour préciser tout le poids que devrait prendre cette dimension en rapport avec l'entente qui est en train de se négocier, je parle de l'entente du lac Meech. Je pense que le ministre des Finances est le plus sensibilisé et la personne qui a essuyé, depuis qu'il est en place, des échecs face aux demandes faites au gouvernement fédéral. On pourrait apporter, avec toutes les pressions qu'il pourrait y exercer et son poids, cette dimension afin que l'on puisse, pendant qu'on est en train de négocier quelque chose... Parce que c'est au moment où on essaie, avec le fédéral, de trouver des terrains d'entente... Et, pour reprendre ses propos de tout à l'heure; Nous ne sommes pas la seule province. Vous parlez d'une perte de 2 000 000 000 $ pour le Québec jusqu'en 1991 avec l'impact du C-96, mais de 8 000 000 000 $ pour l'ensemble des provinces. Je pense qu'il doit certainement trouver des appuis pour faire des pressions dans ce sens.

Ce que je veux dire, c'est que le ministre des Finances, s'il ne veut pas se ramasser, lors de son prochain discours sur le budget et ses prochains énoncés, dans une situation où non seulement il n'y aurait plus de place à bouger les coudes mais où il serait complètement coincé...

Le Président (M. Lemieux): En conclusion, M. le député de Bertrand.

M. Parent (Bertrand): Est-ce qu'on peut, à ce stade-ci, compter sur l'intervention et le poids du ministre des Finances quant à ce qui se négocie dans l'entente du lac Meech?

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Alors, je peux dire immédiatement au député de Bertrand que nous sommes consultés de très près dans cette négociation concernant l'entente du lac Meech. Le ministère des Finances est présent justement, surtout dans cet aspect qu'est le pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral.

On ne peut pas s'attendre, cependant -je pense bien que le député de Bertrand est d'accord - que tout le contentieux fédéral-provincial pourrait être réglé à la faveur

d'une entente constitutionnelle. Mais, comme je le disais en Chambre hier, à une question posée par le chef de l'Opposition, je crois que l'entente du lac Meech apporte une amélioration considérable à ce qui existait dans le passé. J'espère, laissant de côté pour le moment cet aspect que vient de soulever le député de Bertrand, que le travail que nous faisons présentement, particulièrement ce que nous avons fait au cours des derniers mois et que nous continuerons de faire dans l'avenir et à la faveur de la réforme fiscale, comme je l'ai suggéré, que le gouvernement fédéral puisse ne pas dire: Bon, l'affaire est bâclée. C'est ce qui est dangereux quand on sait que les projets de loi sont devenus lois maintenant, et dans le domaine de la santé et de l'enseignement supérieur et dans le domaine de la péréquation et cela pour les années à venir, jusqu'en 1991-1992.

Évidemment, la voie facile pour le gouvernement fédéral est de dire: On verra cela plus tard, c'est passé. C'est justement cet esprit que je ne vaudrais pas qui soit mis de l'avant, mais au contraire, une considération particulière, étant donné les faits que nous apportons. Ce n'est pas simplement pour le plaisir de dire: Nous apportons des faits qui devraient être analysés et qui, je suis convaincu, le seront parce que nous avons eu immédiatement du gouvernement fédéral une demande pour tous les détails du budget. Ils veulent faire une analyse complète de cela. Donc, il y a au moins une chose, c'est qu'ils manifestent le désir d'être aussi bien informés et rapidement informés du contenu de ce budget. Ce qui nous amène au moins à croire qu'on ne pourra pas plaider ignorance, au contraire. Ces gens veulent être renseignés sur tous les détails de ce budget. Nous avons fait en sorte qu'ils le soient. D'ailleurs, sans vouloir ébruiter de secrets, je pense qu'ils ont été assez impressionnés par la teneur de ce budget, sans vouloir dire si c'est favorablement ou non, mais enfin, cela a l'air qu'ils aient trouvé qu'il y avait de la matière à réflexion., J'espère qu'ils ne s'en tiendront pas seulement aux premières pages mais qu'ils se rendront à l'annexe F. C'est justement...

M. Parent (Bertrand):... suggérer au ministre d'inverser.

M. Levesque: Pardon?

M. Parent (Bertrand): Je pourrais peut-être suggérer au ministre d'inverser et de mettre l'annexe F au tout début avec une note.

M. Levesquei On me dit justement qu'ils l'ont identifiée rapidement parce que c'est l'annexe F qu'ils ont demandée en priorité. Alors, j'espère que l'annexe F aura pour...

M. Parent (Bertrand): Une déformation de politiciens, on commence toujours par lire la fin pour voir les conclusions.

M. Levesque: Peut-être que c'est cela.

M. Parent (Bertrand): Est-ce que je peux encore parler?

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Lafontaine.

M. Gobé: Quelques minutes?

Le Président (M. Lemieux): Quelques minutes.

M. Gobé: Merci, M. le Président. Je voulais moi aussi parler des perspectives triennales. Je vois que mon collègue a déjà abordé grandement le sujet. Cela va peut-être aller plus vite. Juste avant de commencer, j'écoutais mon collègue de Bertrand suggérer au ministre d'être très attentif à l'accord du lac Meech qui est en train de se discuter à la salle de commission en haut, parce que cela pouvait avoir certainement des répercussions importantes sur certains programmes actuellement financés par le gouvernement fédéral. J'aimerais lui dire quand même qu'il y a un programme très important, l'enseiqnement postsecondaire et supérieur, sur lequel le gouvernement fédéral a une influence très forte. Pourtant, son parti a demandé à ce que le ministre de l'Éducation ne puisse pas siéger à la commission parlementaire qui étudie actuellement tous ces accords. Je trouve que dans le langage il semble y avoir encore deux voix: d'un côté, on voudrait qu'on attache une importance particulière à ce qui va se négocier au lac Meech, à ce qui se passe en haut, à la commission parlementaire, et, de l'autre côté, on refuse au ministre de l'Enseignement supérieur de siéger à cette commission. Je pense qu'on erre dans ce parti, on ne sait pas trop si vraiment on veut défendre les intérêts du Québec ou si on veut faire de la partisanerie.

Cela dit, M. le ministre, j'ai vu en lisant votre budget que vous annonciez un déficit inférieur à 2 000 000 000 $ avec des besoins financiers nets inférieurs à 1 000 000 000 $ pour l'année 1989-1990. On parle de 930 000 000 $. Quand on sait que ce niveau sera certainement le niveau le plus bas depuis 1975-1976, si je me souviens bien et si mes informations sont exactes, on se rend compte de tout le chemin qui sera parcouru ou qui aura été parcouru rendu à cette époque. C'est à la paqe 8.

M. Levesque: Page 9.

Effets de la diminution du déficit

M. Gobé: À la page 9, pardon. Si on regarde un peu plus haut, on se rend compte qu'en 1984-1985, il y avait un déficit de 3 795 000 000 $, cette année nous sommes à 2 400 000 000 $ et on se dirige vers 1 985 000 000 $. Il est vrai, comme le député de Bertrand le faisait ressortir, qu'il peut y avoir une influence en termes de péréquation et de paiements de transferts au niveau fédéral. C'est possible, bien que je me fie à vous, M. le ministre, pour croire que ces choses ne se produiront pas au détriment du Québec. J'aimerais que vous m'expliquiez, M. le ministre, cette baisse non seulement du déficit mais des besoins financiers du Québec dans la vie des citoyens de tous les jours. Un budget, c'est fait pour la population, pour les gens. Quand on en parle entre nous, qu'on s'échange des chiffres, les fonctionnaires nous conseillent très bien, ils nous expliquent cela. Mais on dit à la population: On baisse le déficit, on baisse les besoins financiers du Québec. On nous dit: Oui, mais cela ne met pas de beurre dans ma poche, cela ne me donne rien. Pourriez-vous peut-être m'expliquer...

M. Levesque: Oui, oui.

M. Gobé:... pour que je puisse leur dire, moi aussi. D'abord pourquoi baisser le déficit? Pourquoi on ne baisse pas les impôts à la place? Et, après cela, pourquoi les besoins financiers du Québec baissent eux aussi? Est-ce nécessaire de faire cela ou...

Le Président (M. Lemieux): M. le ministre des Finances.

M. Gobé: C'est une bonne politique?

M. Levesque: M. le Président, je vais d'abord relever les propos du député de Lafontaine à savoir que l'Opposition nous parle de l'importance du domaine de l'éducation et même de l'importance de faire en sorte que l'entente du lac Meeeh et ses suites puissent favoriser une meilleure participation du gouvernement fédéral au financement de l'enseignement supérieur. Du même souffle, comme le mentionnait le député de Lafontaine, on refuse au ministre responsable de ce secteur, de participer à la commission qui se penche justement sur l'accord du lac Meech. C'est là évidemment une contradiction et peut-être que le député de Bertrand va amener cela à son caucus pour discussion ultérieure.

Cela dit, je reviens à la question du député de Lafontaine sur l'importance de la diminution du déficit et des besoins financiers nets du gouvernement. Si l'on veut réellement pouvoir répondre aux besoins de la population, si l'on veut permettre que cette réponse puisse se renouveler d'année en année et si l'on veut éviter de laisser un héritage de stagnation et d'immobilisme à ceux qui viendront après nous, il est important de cesser, premièrement, d'emprunter comme cela s'est fait depuis quelques années pour payer l'épicerie, comme on dit, pour payer les dépenses courantes. Deuxièmement, il faut continuer dans ce sens-là pour faire en sorte que le ratio diminue entre justement l'endettement du Québec et son produit intérieur brut. Cela, pour dégager avec le temps des marges de manoeuvre qui feront en sorte qu'on n'aura pas à payer continuellement des intérêts plutôt que de payer du développement à la population et que l'on puisse éventuellement songer, parce qu'on veut demeurer compétitif, à diminuer les impôts. Tout cela peut se faire lorsqu'on aura assaini la situation financière, lorsqu'on aura continué à faire baisser et le déficit et les besoins financiers nets du gouvernement. C'est cela que nous faisons. Nous avons réduit le déficit de 500 000 000 $, près de 600 000 000 $ de 1985-1986 à 1986-1987; cette année, nous réduisons de 500 000 000 $ supplémentaires en vertu des mêmes conventions comptables et nous prévoyons réduire le déficit de 500 000 000 $ additionnels pour le ramener à 2 400 000 000 $ pour que, en 1989-1990 pour qu'il se retrouve sous la barre des 2 000 000 000 $.

M. le Président, on peut dire que nous travaillons dans la bonne direction. Nous voulons assainir ces finances publiques pour nous permettre ensuite de continuer à baisser les impôts pour nous rendre plus compétitifs particulièrement dans le contexte de libre-échange dont on parle. Il va falloir que nous soyons de plus en plus compétitifs, que nous ayons une fiscalité compétitive et que, en même temps, nous soyons dans une position de pouvoir, au lieu de consacrer notre arqent à payer les intérêts, en prendre une partie pour payer du développement et répondre aux aspirations légitimes de la population.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand.

M. Gobé: Je n'ai pas terminé, M. le Président. Je crois qu'il me reste quelques minutes.

M. Levesque: Je ne sais pas... On essaie de terminer... (12 h 30)

Le Président (M. Lemieux): Une minute, s'il vous plaît! M. le député de Bertrand, vous avez la parole.

Taxes sur les carburants M. Parent (Bertrand): Oui, une question

et, ensuite, les commentaires pour conclure cette étude du discours sur le budqet. Ma question touche particulièrement les déclarations récentes du ministre de l'Énergie et aussi du ministre des Finances concernant les mesures à prendre avec les pétrolières, étant donné qu'il nous échappe plusieurs millions de dollars quant à la taxe sur les carburants.

Cela aura des impacts si le ministre et le gouvernement décident d'agir. J'aimerais savoir exactement, dans le cadre de cette discussion, puisque ça aura des impacts possibles sur le budget, l'attitude du ministre des Finances face à ce dossier et quelles mesures il entend prendre. Par la suite, si M. le Président me le permet, j'essayerai de conclure très rapidement avec trois points.

M. Levesque: Disons que dans la nouvelle qui a paru dans La Presse, jeudi dernier, il y avait deux aspects qui étaient abordés. Il y avait l'aspect qui touchait la différence qui existe entre Montréal et Toronto, d'une part. Et il y avait aussi un autre aspect. C'est de celui-là que je veux traiter. C'est ce qui arrive dans les régions périphériques où on a aboli la surtaxe sur l'essence et où, progressivement, les pétrolières semblent avoir profité de cette diminution de la taxe accordée à ces consommateurs.

Lorsque j'ai lu la nouvelle et dès la première question qu'on m'a posée à ce sujet, j'ai dit tout simplement que c'était inacceptable. J'avais d'ailleurs demandé à mon collègue, le ministre de l'Énergie, de faire enquête sur certains rapports que nous recevions. Ces rapports nous parvenaient surtout de la Côte-Nord.

Je n'avais pas reçu de plainte à ce sujet dans mon secteur de la Gaspésie, mais il nous était parvenu des rapports voulant que, sur la Côte-Nord, il y avait de ces abus. Finalement, il semblait que cette situation-là pouvait devenir un peu épidémique et que ce serait dans toutes les régions périphériques que cela se traduirait.

C'est pourquoi j'ai demandé qu'une telle enquête se fasse. C'est une fuite de ce rapport, je pense, qui a fait la nouvelle de jeudi dernier dans La Presse de Montréal. Mon collègue, le ministre de l'Énergie, a immédiatement réagi, et, justement, il a dit qu'il allait d'abord donner une dernière chance aux pétrolières de respecter les décisions prises par le gouvernement et faire en sorte que les avantages que l'on a voulu donner se rendent à destination et ne soient pas interceptés par quiconque entre nous et le consommateur visé, et que, si ça ne marchait pas, il envisagerait d'autres mesures.

On sait qu'en Nouvelle-Écosse, par exemple, il y a un office ou une régie qui contrôle le prix de détail de l'essence. Le ministre fédéral a confirmé cette juridiction lorsqu'il a dit: Les provinces ont pleine juridiction pour faire en sorte d'imposer certains prix. Mais avant de ce faire -d'ailleurs il y a eu des éditorialistes depuis qui ont dit qu'il ne faudrait peut-être pas passer immédiatement à cette mesure assez sévère - des pétrolières pourraient ou devraient, avec leurs agents, faire en sorte de s'assurer qu'il n'y ait aucun accroc et que l'ensemble des bénéfices aillent aux consommateurs qui en sont les destinataires.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le ministre des Finances. M. le député de Bertrand, pour les remarques finales.

Remarques finales M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Oui, les remarques finales. J'aimerais attirer l'attention du ministre des Finances puisqu'il est très important qu'il puisse lui-même agir à court terme sur trois dossiers qui vont voir leur dénouement au cours des prochaines semaines.

Le ministre des Finances non seulement pourrait en prendre bonne note, mais certainement faire une intervention de tout son poids. Le premier dossier, très rapidement, c'est le dossier de l'Agence spatiale canadienne. On sait que la décision doit être prise dans quelques semaines. Elle a été retardée à deux reprises. Tous les propos du ministre contenus dans le discours sur le budget concernant l'aide à l'entreprise, concernant t'aide à la recherche et au développement... Quand je parle de poser des gestes concrets pour être capable de garder et d'attirer des entreprises au niveau technologique, le projet de l'Agence spatiale au Québec et particulièrement dans la région de Montréal, étant donné que la masse critique se retrouve à cet endroit-là, se doit absolument de venir à Montréal. Je pense qu'il n'est pas encore trop tard pour être capable de faire les pressions nécessaires*

Je dis que le ministre des Finances, s'il veut être cohérent par rapport au discours sur le budget, de même que les collègues du parti ministériel, doit - ils ont mon appui là-dessus, puisque je l'ai dit en Chambre et je le répète - faire vraiment toutes les pressions nécessaires pour avoir cette Agence spatiale canadienne, puisque c'est exactement dans la foulée de ce dont nous a entretenu longuement le ministre ce matin et que cela fait partie de son discours sur le budget. Voilà un exemple concret où l'Agence spatiale canadienne ne doit pas échapper au Québec et particulièrement à la région de Montréal. Ce n'est pas juste une décision politique, c'est une décision qui est tout à fait justifiée sur le plan économique.

On doit mettre nos énerqies... On défend ensemble des dossiers - l'Opposition n'est pas là juste pour critiquer, mais pour appuyer et revendiquer dans le même sens que le gouvernement le fait. J'incite ce matin le ministre des Finances à mettre tout son poids, de même que ses collègues et les membres des commissions, pour obtenir cette Agence spatiale canadienne, décision, échéancier au plus tard dans quatre semaines parce qu'on nous dit que la deuxième ou troisième semaine de juin la décision sera prise à Ottawa,

Deuxièmement, le dossier du libre-échange. Je l'ai mentionné précédemment, je dis seulement que le dossier du libre-échange est important. L'échéancier, c'est octobre 1987, donc dans quatre mois, mais tout sera conclu entre le Canada et les États-Unis et soumis au Congrès américain. Donc, le dossier du libre-échange va, à toutes fins utiles, se négocier ou se compléter quant aux mesures transitoires, quant au contenu, quant aux réserves, quant aux exclusions, et je pense particulièrement à deux secteurs où on a demandé qu'ils soient exclus, le secteur de l'agriculture et le secteur de la culture, pour des raisons que l'on connaît. Je pense particulièrement au secteur des services dont le ministre nous a aussi entretenus ce matin où il y a beaucoup de réserves de ce côté-là. Alors, il faudrait absolument que le Conseil des ministres, que le comité de développement sur les priorités économiques, soit pleinement conscient.

Je réitère ce matin devant la commission, puisque c'est directement relié aux mesures, à la bonne marche des finances publiques et à l'impact que l'on aura, que toutes les prévisions, si belles soient-elles pour 1987-1988 et les années suivantes, ne soient que des prévisions et advenant que l'on signe ou que l'on soit pris dans un traité de libre-échange où on n'a pas respecté certains critères, ces prévisions tomberont parce qu'on aura changé les règles du jeu et c'est en train de se passer actuellement. J'ai demandé, je le réitère, qu'on obtienne l'appui du ministre des Finances et des autres collègues qui sont ici présents, pour la tenue, au moins, d'une commission parlementaire de toute urgence là-dessus, non pas pour faire un débat politique, mais pour pouvoir donner l'occasion à des gens de s'exprimer parce que beaucoup de gens ne se sont pas exprimés sur ledit sujet.

Le dernier point, et je conclus là-dessus, c'est toute l'annexe F qui touche le gouvernement fédéral, qui touche le désengagement du gouvernement fédéral, c'est aussi un échéancier de quelques semaines, voire de quelques jours possiblement, de la question de l'entente du lac Meech. Je trouve, par les propos de ce matin tenus par le ministre des Finances, cette attitude peut être beaucoup trop confiante quant à cette entente du lac Meech. II est bien sûr que ce n'est pas autour de cette table qu'on va régler cela. Il y a une autre commission qui s'occupe de le faire. Mais je peux vous dire une chose, il n'y a rien de clair, rien de défini quant à tout cet aspect du pouvoir de dépenser. Voilà une occasion que nous avons, avec les négociations de l'entente du lac Meech, de pouvoir revendiquer, M. le ministre, des choses qui sont notre juste part. Les revendications que vous faites - auxquelles vous avez accordé toute une annexe - je pense, seront crues, seront crédibles si vous posez des gestes. Or, voilà une occasion où l'on peut en poser. Dans le texte qui est soumis - qui est le canevas de travail actuellement - on sait fort bien qu'on va se retrouver dans une situation où, si on ne met pas les dents qui vont avec cela, et si on ne prend pas des précautions dans une telle situation, l'entente du lac Meech sera catastrophique et les prévisions du ministre pour les prochaines années seront sûrement plus sombres que celles que l'on connaît actuellement.

Je conclus: l'agence spatiale, le libre-échange et le lac Meech pourront avoir des suites positives ou négatives compte tenu de la tournure de ces trois dossiers qui sont vitaux pour l'avenir du Québec. Je tiens à remercier le ministre pour avoir répondu le plus ouvertement et le plus positivement possible. J'ai tenté dans la démarche que j'ai faite, dans le travail de critique qui parfois n'est pas facile quand on veut être un critique constructif, de soulever non seulement des points que je trouvais faibles mais aussi d'apporter des sugqestions que le ministre pourra noter. Je vous remercie M. le Président.

Le Président (M. Lemieux): Merci, M. le député de Bertrand. M. le ministre des Finances.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: M. le Président, je crois que mes collègues l'ont mentionné tout à l'heure, le genre de discussion que nous avons eue ce matin est beaucoup plus intéressante et productive que celles que nous avons déjà connues. Je veux simplement dire au député de Bertrand que nous apprécions sa contribution. J'apprécie également la contribution des autres membres de cette commission qui ont participé à cette discussion et je voudrais rassurer le député de Bertrand quant aux trois sujets qu'il me laisse un peu comme... faire mes devoirs...

M. Polak: Comme un testament politique.

M. Levesque: Non, pas un testament,

c'est une demande qu'il fait pour attirer l'attention du ministère des Finances sur trois sujets.

Le Président (M. Lemieux): M. le député de Sainte-Anne, s'il vous plaît. M. le ministre des Finances en conclusion.

M. Levesque: II a attiré l'attention du ministère des Finances sur trois sujets qu'il considère d'une importance majeure et je pense qu'il a raison d'attirer notre attention encore une fois sur l'agence spatiale qui a fait l'objet de discussions entre le député de Bertrand et d'autres de mes collègues qui s'intéressent plus particulièrement à cela dans le domaine économique, entre autres, le ministre du Commerce extérieur et du Développement technologique, le ministre de l'Industrie et du Commerce sans oublier le premier ministre qui s'est beaucoup intéressé à cette question. Il est sûr qu'on peut compter sur mon intérêt soutenu pour cette question. Quant aux deux autres sujets abordés par le député, il est clair que cela fait partie également de nos préoccupations.

Quant à l'entente du lac Meech, il est entendu qu'elle fait l'objet d'un débat beaucoup plus considérable ailleurs, dans une autre salie de cet édifice. Je suis convaincu que les meilleurs cerveaux se retrouvent là dans le domaine constitutionnel pour s'assurer de la défense des intérêts du Québec. Il est sûr que tout cela entre dans le cadre de nos préoccupations.

L'autre sujet, c'était le libre-échange. Encore là, il y a de nos collègues qui sont intéressés au plus haut point, mais l'ensemble du gouvernement également. Les discussions qui se font régulièrement à la période de questions ou ailleurs, entre le député de Bertrand en particulier et des membres du gouvernement, sont de nature également à indiquer l'intérêt de chacun pour que le Québec s'en sorte avec des avantages considérables et que, s'il y a des inconvénients, ils soient réduits le plus possible. J'imagine qu'il sera difficile d'arriver seulement avec des gains. Ce serait peut-être la situation idéale. Il y a peut-être quelques inconvénients qui vont s'ajouter le long de la route, mais il faudrait faire en sorte de les amenuiser, de les diminuer le plus possible et faire en sorte que, s'il y a un accord éventuel, il soit le plus avantageux possible pour notre société québécoise.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie, M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Et je vous remercie vous, M. le Président, de la façon admirable avec laquelle vous avez présidé nos travaux, et j'inclus évidemment ceux qui, à l'occasion, ont pris votre fauteuil pour quelques instants. Mais je sais que vous êtes toujours au poste, et je tiens à vous féliciter de la patience que vous manifestez et de la compétence dont vous faites preuve dans l'exercice de vos fonctions.

Le Président (M. Lemieux): Je vous remercie M. le ministre des Finances. Je remercie les membres de cette commission pour leur participation active et constructive. La commission ayant accompli son mandat d'un débat de 10 heures sur le discours sur le budget, nous ajournons nos travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 48)

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