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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Friday, April 6, 1984 - Vol. 27 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Communications


Journal des débats

 

(Dix heures douze minutes)

Le Président (M. French): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente de la culture entreprend l'étude des crédits du ministère des Communications. À la suite d'une entente établie hier soir, nous nous réunissons aujourd'hui afin de faire les commentaires préliminaires de part et d'autre, mais nous ne procéderons pas aujourd'hui à l'étude des éléments des programmes des crédits du ministère des Communications.

Je dois d'abord faire état des présences: M. Leblanc (Montmagny-L'Islet) remplace M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue) et il est présent; M. Brouillet (Chauveau) est présent; M. Champagne (Mille-Îles) est présent; M. Dauphin (Marquette) est absent; M. Doyon (Louis-Hébert) est présent; M. French (Westmount) est présent; M. Dussault (Châteauguay) remplace M. Gauthier (Roberval), mais il n'est pas avec nous; M. Hains (Saint-Henri) est présent; Mme Lachapelle (Dorion) est présente; M. Proulx (Saint-Jean) est présent. Il y a quorum.

M. le ministre, je ne vous inviterai pas aujourd'hui à présenter vos fonctionnaires. On va faire cela au fur et à mesure que les programmes seront étudiés en détail. Est-ce que cela vous convient?

M. Bertrand: Très bien.

Exposés préliminaires

Le Président (M. French): M. le ministre.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Madame et messieurs les membres de la commission permanente de la culture, j'ai le plaisir de vous présenter, pour une quatrième année consécutive, les crédits du ministère des Communications à la suite d'une des années les plus riches de l'histoire de ce ministère, marquée principalement par la tenue, en octobre dernier, du Sommet socio-économique sur les communications.

La tenue du sommet représente, en effet, un tournant extrêmement important pour le ministère des Communications du Québec qui depuis sa naissance, en 1969, jusqu'à il y a deux ou trois ans environ avait affiché des orientations davantage axées sur le socioculturel que sur l'économique.

Sans renier notre passé et brûler sur l'autel de la haute technologie les préoccupations qui ont motivé tous les ministres des Communications depuis quinze ans, je dois vous avouer que nous avons dû ajuster notre mission aux impératifs des années quatre-vingt. C'est ainsi que, dans le sillage de la stratégie de développement du virage technologique amorcé par le gouvernement du Québec il y a deux ans, le ministère des Communications a réussi assez rapidement à modifier ses habitudes et à réorienter son action.

Je voudrais donc aujourd'hui, M. le Président, vous parler de trois sujets: le résultat des travaux du sommet des communications et la stratégie de développement qui en découle; l'information gouvernementale et les autres services du ministère et, enfin, les organismes dont je suis le ministre responsable.

D'abord, les paramètres budgétaires. Le budget global du ministère des Communications en 1984-1985 est de 198 532 000 $. De ce budget, il faut extraire les sommes concernant Radio-Québec, la Commission d'accès à l'information gouvernementale et la Régie des services publics. Le montant propre au ministère est donc de 138 864 500 $. L'an dernier, le budget initial était de 100 757 500 $, sans compter les sommes consacrées au service du courrier et des messageries et les sommes obtenues en crédits additionnels. Il s'agit d'une augmentation, en 1984-1985, de 38 107 500 $.

J'aimerais attirer votre attention sur le montant additionnel d'un peu plus de 13 000 000 $ qui sera mis à la disposition du ministère en 1984-1985 pour accompagner et susciter de nouveaux développements. Ce montant a été obtenu essentiellement par des crédits additionnels. Il s'agit d'une situation des plus avantageuses pour mon ministère, si l'on considère qu'il a dû écoper de compressions au montant de 2 669 200 $.

Je voudrais vous rappeler, au départ, les conclusions du travail magistral accompli lors du sommet des communications tenu à l'automne 1983 et dont le ministère a été l'instigateur et le coordonnateur avec le Secrétariat permanent des conférences socio-économiques. Ce sommet - et j'en parlerai avec beaucoup d'enthousiasme - a été un

très grand succès et je me permets de dégager les grandes lignes de cet événement unique au Québec et dans l'ensemble canadien.

En février 1982, le Conseil des ministres autorisait le ministre des Communications à tenir un sommet à l'automne 1983 et à l'organiser en collaboration avec le Secrétariat permanent des conférences socio-économiques. Cette autorisation tenait compte du fait que l'ONU venait de décréter 1983 l'année mondiale des communications et que le ministère des Communications entreprenait des travaux majeurs pour la révision de ses politiques.

Ces travaux amenèrent la publication, en avril 1983, d'un document de travail: Le Québec et les communications: un futur simple? Ce document servit à encadrer les discussions autour des deux tables de concertation, en avril et mai 1983, qui ont précédé la tenue du sommet d'octobre.

Cette activité s'est déroulée suivant une approche totalement ouverte à la participation active et à la concertation de tous les partenaires québécois des secteurs de la radio, de la télévision, de la presse écrite, de la publicité, des relations publiques, de la câblodistribution, des télécommunications et des nouveaux services informatiques et télématiques.

Le ministère des Communications du Québec voulait réaffirmer avec plus de vigueur sa présence dans ces dossiers et souligner sa volonté d'accorder priorité au développement économique axé sur les nouvelles technologies de la communication.

Le sommet a réuni 75 organismes participants, dont 6 ministères, qui ont discuté environ 225 propositions d'action à partir desquelles se sont dégagés 69 consensus et engagements. Les idées maîtresses de ces consensus vont dans 6 directions que j'ai précisées à la fin du sommet, soit: premièrement, une préoccupation croissante pour l'exportation, que ce soit dans les domaines de l'audiovisuel, du logiciel ou du génie-conseil; deuxièmement, une priorité accrue pour le créneau que représente le logiciel, grâce à des initiatives telles le Marché international du logiciel, une logithèque, la recherche et le développement de même que l'exportation dans ce domaine et la mise sur pied d'une commission du logiciel; troisièmement, un effort spécial dans le secteur des services informatiques par un accroissement du faire-faire dans le privé, un programme d'aide à l'informatisation des entreprises, une redéfinition des politiques et des programmes d'aide financière; quatrièmement, un accroissement de la recherche et du développement en communication par l'établissement d'un fonds de recherche spécifique au secteur, par un encouragement aux initiatives privées et par l'établissement d'un programme de bourses d'excellence; cinquièmement, une prise en compte des impacts sociaux résultant des nouvelles technologies; sixièmement, une concertation accrue entre les partenaires impliqués dans le développement des communications au Québec, notamment par l'établissement d'un forum permanent d'échanges.

Dès décembre 1983, à la suite du sommet, nous nous sommes résolument attaqués à la tâche de traduire concrètement ces six idées maîtresses, soit sur le plan budgétaire, soit sur le plan de l'action et de la concertation avec nos partenaires. Voici le sommaire des actions identifiées et leur traduction budgétaire.

Premièrement, l'exportation. Nous avons développé au Québec, au cours des dernières années, une expertise en matière de câblodistribution qui fait l'envie de beaucoup de pays. En étroite relation avec le ministère du Commerce extérieur, nous cherchons à exporter à la fois nos contenus audiovisuels et nos capacités techniques. C'est ainsi que des missions techniques ont eu lieu en Belgique, en Angleterre, en Allemagne et en France - pays, d'ailleurs, avec lequel nous avons signé une entente-cadre pour le marché de la câblodistribution. C'est ainsi, par exemple, que 7 firmes québécoises seront présentes, en mai prochain, au salon Eurocast, le plus grand salon européen dans le domaine de la câblodistribution. Par nos multiples programmes tels que la Société de développement industriel, la Société de développement des industries de la culture et des communications, la Société du film du Québec, le ministère des Communications du Québec, etc., nous allons aider financièrement les entreprises à percer sur les marchés extérieurs.

Deuxièmement, le logiciel. Dans le secteur du logiciel, je pense d'abord au Marché international du logiciel qui se tiendra à Montréal au printemps 1985. Cette entreprise rassemble actuellement une petite équipe qui travaille très fort à faire de notre métropole le lieu où les plus importants producteurs et distributeurs de logiciels se rencontreront pour échanger, négocier, discuter tout ce qui touche à ce secteur névralgique de l'industrie informatique. L'industrie québécoise profitera de l'événement. Elle aura l'occasion de se frotter aux marchés internationaux, de mieux connaître leurs caractéristiques et leurs possibilités. Le Marché international du logiciel permettra aussi de mieux faire connaître la jeune expertise québécoise en ce domaine. Je crois que cet événement représente un véritable tremplin pour les entreprises de chez nous. Un montant de 500 000 $ y est prévu, cette année, au budget du ministère des Communications du Québec. Ce montant s'étend sur deux autres années budgétaires pour la somme globale de

1 500 000 $.

De plus, en collaboration avec le ministère du Commerce extérieur, le ministère des Communications analyse actuellement les différentes formes que pourrait prendre une agence de commercialisation des logiciels, dont l'objectif sera de canaliser les efforts et les ressources des entreprises québécoises désireuses de faire affaires sur les marchés extérieurs.

Toujours, dans le secteur du logiciel et dans le sillage des volontés exprimées au sommet, le ministère des Communications est à mettre sur pied, en collaboration avec l'Université du Québec à Montréal où elle sera située, une logithèque, véritable bibliothèque du logiciel pour microordinateurs. Cette logithèque pourra offrir de la documentation et des sessions de formation et éditer un bulletin périodique. Un tel centre pourra permettre aux utilisateurs de mieux choisir les produits répondant à leurs besoins. Il servira aussi de vitrine aux producteurs et aux distributeurs de logiciels.

D'autres initiatives, tels l'accent mis sur la recherche appliquée dans le domaine du logiciel, l'informatisation des entreprises de communication et la politique de faire-faire en informatique auront aussi des retombées intéressantes pour le secteur. Ces initiatives auront un effet positif, mais il faut aller plus loin. C'est pourquoi le ministère a formé, en collaboration avec les représentants de l'industrie, une commission du logiciel qui contribuera à élaborer une stratégie cohérente d'intervention et qui pourra servir également de locomotive à certains projets. Il ne faut pas oublier, en outre, que nous travaillons en complémentarité avec la Société de développement des industries de la culture et des communications qui a aussi fait du logiciel une de ses priorités pour 1984-1985.

Troisièmement, l'informatique et la bureautique. Au sujet de l'informatique et de la bureautique, de nombreuses actions ont été entreprises.

D'abord, l'accroissement du faire-faire dans le secteur privé. En 1983-1984, les ministères et organismes publics assujettis à la Loi sur l'administration financière ont dépensé 172 617 000 $ pour leurs activités informatiques et onze organismes gouvernementaux ont dépensé 197 792 200 $.

La part de l'entreprise privée comme source d'approvisionnement des services informatiques gouvernementaux est relativement stable depuis 1976-1977, variant de 4,3% à 8,3%, et représentait 14 274 100 $ en 1983-1984. Elle était de 9,9% pour les organismes gouvernementaux, soit 19 590 200 $ pour la même année. Nous croyons que, d'ici à quelques années, cette part de l'entreprise privée devrait s'accroître pour atteindre un pourcentage de l'ordre de 15% à 20%, ce qui est l'ordre des pourcentages des gouvernements ontarien (20%), canadien (18%) et américain (22%).

À titre d'exemple, nous envisageons, dès cette année, de conclure des ententes avec l'entreprise privée visant la création d'un centre serveur québécois et la privatisation d'Informatech pour un montant de l'ordre de 2 250 000 $.

Deuxièmement, l'informatisation des entreprises. L'une des dimensions importantes signalées lors du sommet est l'informatisation des entreprises de communication. Plus d'une dizaine de ces entreprises nous ont déjà soumis des projets pour analyse. Il s'agit d'un geste important de rationalisation des activités de ces entreprises. Un montant de 500 000 $ est prévu dans ce domaine.

Troisièmement, la bureautique au sein du gouvernement. En septembre 1983, le Conseil des ministres a confié au ministère des Communications du Québec la responsabilité de promouvoir et de coordonner le démarrage et l'implantation de projets pilotes bureautiques à l'intérieur des ministères et organismes gouvernementaux. À cette fin, des crédits de l'ordre de 2 500 000 $ lui ont été accordés sur trois ans. Il s'agit d'une somme de 1 000 000 $ pour 1984-1985.

Dès décembre 1983, le ministère des Communications du Québec lançait le dossier et recevait, le 21 janvier 1984, 16 projets soumis par 10 ministères et un organisme. Les critères servant de base à l'analyse sont les suivants: l'impact sur la qualité des services au public, l'impact gouvernemental, l'impact sur l'industrie québécoise, le niveau d'intégration et l'originalité. Les 7 projets retenus font maintenant l'objet d'analyses en profondeur pour exécution en 1984-1985. Ces projets engendreront ultérieurement des dépenses importantes en équipement.

Quatrièmement, la bureautique à Communication-Québec. De façon à rendre des services encore plus fonctionnels aux citoyens du Québec en matière de renseignements et d'information, nous avons l'intention cette année de moderniser les services des bureaux de Communication-Québec sur le territoire québécois. Une somme d'environ 1 065 000 $ sera consacrée dès cette année à cette activité et le coût total du projet s'élèvera à près de 2 000 000 $ sur deux ans.

Cinquièmement, un centre de recherche en bureautique. Dans la foulée du plan de relance il a été annoncé par le premier ministre la création de six centres de recherche, dont l'un en bureautique. En étroite collaboration avec le ministère de la Science et de la Technologie, le ministère des Communications du Québec assume la coprésidence et le secrétariat du comité d'organisation de ce centre.

Sixièmement, centres des congrès de

Montréal et de Québec. À la suite d'une entente avec le ministère des Communications du Canada, nous sommes à implanter au Centre des congrès de Montréal un système de signalisation dynamique dont le coût global est de 3 700 000 $. Les investissements du ministère dans ce projet sont de 500 000 $. En 1984-1985, un montant de 200 000 $ est prévu à notre budget pour l'exécution de ce projet. De même, nous prévoyons réaliser, avec les partenaires du sommet de la région de Québec, un projet à peu près semblable à celui de Montréal pour le Centre des congrès de Québec. Un montant de l'ordre de 150 000 $ est retenu pour ce projet en complémentarité avec des montants provenant d'autres organismes gouvernementaux, dont l'Office de planification et de développement du Québec, pour un investissement global de 300 000 $.

Dans le dossier de la recherche et du développement, plus spécifiquement dans le domaine de la recherche appliquée en communication, les participants au sommet ont été unanimes à demander un accroissement des ressources financières du gouvernement du Québec en matière de recherche et de développement. On sait que la part des industries de communication à l'économie représentait en 1980: près de 2 500 000 000 $ en revenus d'exploitation, soit 3,7% de la production intérieure brute; plus de 44 000 emplois, soit 1,65% des emplois du Québec; plus de 1 000 000 000 $ en salaires, soit l'équivalent de 2,5% de la masse salariale totale du Québec. De plus, il est bien connu que ce secteur a des effets d'entraînement importants tant sur le plan des achats de matériel que sur celui de la conception et de la production des contenus. (10 h 30)

Nous avons donc retenu un montant de 2 000 000 $ pour 1984-1985 à des fins de recherche appliquée en communication, ce montant étant complémentaire à ceux qui pourraient être utilisés par l'intermédiaire de multiples programmes gouvernementaux, que ce soit à la Société de développement industriel, à la Société de développement des industries de la culture et des communications, au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, au ministère de la Science et de la Technologie ou à d'autres ministères et organismes gouvernementaux. Cette aide financière sera donc disponible en recherche appliquée dans le domaine des télécommunications, de la câblodistribution et de l'informatique.

À l'occasion de la présentation du plan de relance par le premier ministre, il a aussi été indiqué que sera créé un centre de recherche appliquée en télématique. Le ministère des Communications du Québec participera activement à la création de ce centre. Il en assumera la coprésidence avec le ministère de la Science et de la Technologie et aussi le secrétariat. Il s'agit là d'un dossier très important pour les besoins présents et futurs de la société québécoise.

L'un des thèmes retenus au sommet a été celui des impacts sociaux découlant des nouvelles technologies. Le sujet est à ce point important que le gouvernement a tenu à constituer une conférence spéciale sur l'électronique et l'informatique. Quatre commissions traiteront de ces sujets dont, plus particulièrement, la commission 3 qui analysera les thèmes des impacts sociaux des nouvelles technologies. Le ministère des Communications sera donc très présent au sein de ces instances pour examiner l'ensemble des problèmes reliés aux industries de communication de l'informatique et de la bureautique.

Quant à la création d'un forum permanent des communications, nous sommes en voie de le constituer. On prévoit même que, dans le courant du mois de mai, une première séance de travail pourra se tenir. Il s'agit d'un organisme regroupant entre 15 et 20 représentants d'entreprises et d'organismes reliés aux communications. Les objectifs poursuivis seront les suivants: réunir les principaux intervenants du secteur des communications afin qu'ils s'entendent sur les moyens à prendre en vue d'une concertation accrue, tant entre les partenaires eux-mêmes qu'entre l'État et ses partenaires; conseiller les ministères sur les grandes orientations à donner au développement des communications; formuler des avis; promouvoir des relations fructueuses entre le ministère des Communications, les utilisateurs et les producteurs de biens et services de communication.

Par ailleurs, le ministère des Communications a décidé de poursuivre le développement des médias communautaires qui jouent un rôle éminemment original et essentiel au Québec. Notre aide passera donc de 2 000 000 $ à 2 250 000 $. Cette augmentation de 12% sera répartie à parts égales entre les journaux, les radios et les télévisions communautaires. Voilà donc beaucoup de travail accompli et plusieurs projets en perspective.

Ces nouveaux crédits, accordés au développement des industries de communication, indiquent qu'au ministère des Communications nous avons compris un certain nombre de messages à la suite des échanges fructueux que nous avons eus au cours de cette vaste entreprise de concertation qu'a été le sommet.

Ces messages nous ont indiqué de façon claire qu'une politique nationale des communications doit être absolument axée sur l'action, privilégiant une approche sur le terrain beaucoup plus qu'une approche théorique qui risquerait de couler dans le

béton des principes qui peuvent se révéler trop imperméables au changement. Ainsi, par exemple, il était à peine question, il y a un an, de ce que nous appelons les services spécialisés diffusés sur le câble ou de la deuxième chaîne de télévision privée francophone. Or, ces dossiers sont devenus tout à fait d'actualité et font partie de cette réalité mouvante qu'il serait périlleux de vouloir trop encadrer.

La politique québécoise des communications sera donc beaucoup plus un plan d'action qui épousera les réalités du terrain plutôt qu'une politique nationale, au sens traditionnel du terme, qui, même bien fignolée, a tendance à effleurer les cimes de la raison raisonnante au détriment parfois du pays réel. Les projets concrets reliés aux consensus exprimés lors du sommet, pour lesquels nous avons obtenu de nouveaux crédits, forment le noyau du plan d'action du ministère.

Passons maintenant, si vous le voulez bien, au second mandat du ministère qui porte sur l'information gouvernementale. Le ministère a poursuivi cette année ses activités pour favoriser l'implantation de la loi d'accès à l'information dans les ministères et organismes gouvernementaux ainsi que dans l'ensemble des autres organismes touchés, que ce soient les municipalités, les commissions scolaires, les hôpitaux ou tout autre organisme de type public. Un programme de création d'emplois temporaires a permis à 333 Québécois et Québécoises de trouver un emploi en gestion documentaire dans ces organismes. Je vous rappelle que c'est le 1er juillet prochain qu'entreront en vigueur les principaux articles de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Dans le but d'améliorer l'information gouvernementale, le ministère a procédé à l'ouverture de deux nouveaux bureaux de Communication-Québec, à Granby et à Saint-Hyacinthe, et d'un comptoir d'accueil à l'édifice G, sur la colline parlementaire, ce qui porte à 24 le nombre de comptoirs et bureaux sur le territoire québécois. Le ministère a de nouveau produit cette année, en versions française et anglaise, un Guide du citoyen et il a produit pour la première fois, en français, un guide plus spécialisé à l'intention des jeunes de 15 ans à 25 ans. Par ailleurs, des ententes ont été conclues entre l'Éditeur officiel et des libraires privés, à Chicoutimi et à Trois-Rivières, dans le cadre d'une nouvelle formule de concession en région.

Dans la foulée de cet effort qui vise à améliorer la qualité de l'information gouvernementale transmise aux citoyens, le Conseil des ministres a récemment autorisé le secrétariat du Comité ministériel permanent des communications à former trois nouvelles tables de concertation au cours de l'année financière 1984-1985. Ces tables regrouperont les efforts de communication d'un certain nombre de ministères autour des thèmes de l'essor économique et de la création d'emplois particulièrement reliés à la jeunesse et à la promotion des produits québécois.

Pour ce faire, le secrétariat du Comité ministériel permanent des communications s'est vu allouer une somme de 5 000 000 $ qui n'apparaît pas, pour l'instant, aux crédits du ministère, mais qui y sera inscrite au moment de l'examen des crédits supplémentaires, l'automne prochain.

Dans le domaine des services apportés aux ministères et organismes gouvernementaux, il m'apparaît que le point saillant de l'année 1983-1984 demeure l'arrivée au ministère des Communications du service du courrier et des messageries ainsi que celui de la réparation des machines de bureau, à la suite de l'adoption d'une loi abolissant le ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement.

L'arrivée de ces deux nouveaux services élargit la gamme des services offerts à l'appareil gouvernemental par le ministère des Communications. Cette nouvelle responsabilité implique un transfert chez nous de 189 employés et des crédits de 22 762 000 $. Je vous souligne que, bon an mal an, le service du courrier et des messageries manipule environ 2 500 000 enveloppes et colis de toutes sortes destinés aux 175 organismes gouvernementaux et remet environ 35 000 000 d'unités de courrier à la Société canadienne des postes pour acheminement. Quant au service de réparation des machines de bureau, il effectue en moyenne, annuellement, environ 25 000 réparations è toute la "quincaillerie" de bureau du gouvernement du Québec.

Dans le secteur de l'informatique, l'année 1983-1984 a été marquée, comme l'année précédente, par une croissance rapide de la demande de traitement informatique qui a exigé, en plus de l'augmentation de la puissance de l'ordinateur principal du ministère des Communications, l'implantation d'un second ordinateur de grande puissance au coût de 2 600 000 $.

Dans le secteur des télécommunications, j'aimerais vous souligner que le ministère a réalisé des études sur le changement des centrex téléphoniques à Québec et à Montréal. Le projet d'implantation d'un nouveau système, le Centrex III, actuellement sur la table des analystes du Conseil du trésor, amènera une modification en profondeur du service téléphonique gouvernemental intercentres.

D'autre part, le ministère a poursuivi son plan de développement de l'infrastructure intégrée de radio-mobile devant accommoder tous les réseaux gouvernementaux sur le

territoire et favoriser une meilleure coordination des interventions lors des mesures d'urgence. Une somme de 1 940 000 $ sera consacrée aux étapes de consolidation et d'extension de l'infrastructure des sites de communication. Ce montant inclut les études d'intégration du réseau de la Sûreté du Québec.

Par ailleurs, le service des impressions en régie s'est modifié de façon importante au cours de l'année. L'atelier central de Montréal a été fermé le 1er juin 1983 et a fait place à cinq centres de reprographie localisés dans des édifices du centre-ville occupés par des ministères et organismes. L'atelier central de Québec a, pour sa part, réduit considérablement ses activités et n'assure que des travaux spécialisés ou de plus long tirage représentant environ 30% de la production totale. Le réseau d'ateliers est passé de 11 à 21 centres de reprographie en cours d'année, comme suite à un effort de rationalisation par lequel plusieurs ministères ou organismes ont abandonné leur centre, réduit le nombre de gros photocopieurs ou confié la gestion de leur centre au ministère des Communications. L'effort de modernisation des équipements s'est poursuivi et la norme de recevabilité des travaux a été réduite de 400 000 à 200 000 impressions par travail.

D'autre part, à titre de ministre des Communications, j'ai aussi à répondre des programmes relatifs à la Régie des services publics, à Radio-Québec et à la Commission d'accès à l'information gouvernementale.

À la fois tribunal administratif, organisme de surveillance, de contrôle, de réglementation et de consultation, la Régie des services publics a continué, en 1983-1984, d'exercer sa compétence en matière de téléphonie. Des 78 ordonnances émises par la régie depuis le 1er avril 1983, 70 touchaient ce secteur. Mais ce qui a marqué particulièrement les activités courantes de la régie, cela a été la mise en place des modalités d'application de l'interconnexion, conformément au décret adopté le 8 avril 1982 par le Conseil des ministres. À cet égard, 21 des 70 ordonnances en téléphonie portaient sur cette question.

Depuis octobre 1983, la Régie des services publics a un nouveau président en la personne de l'honorable juge Jean-Marc Tremblay. En décembre 1983 est aussi entré en fonction le nouveau président-directeur général de Radio-Québec, M. Jacques Girard.

Radio-Québec connaît, depuis sa création, une progression constante de son auditoire. Ainsi, celui-ci a fait en 1983-1984 un bond prodigieux de pas moins de 29%, pour passer de 1 833 000 à 2 362 000 téléspectateurs. Cette progression constante a été rendue possible notamment par une meilleure réception de Radio-Québec en région. Depuis l'automne dernier, la région de la Gaspésie ainsi qu'une partie des Îles-de-la-Madeleine et du Nord du Nouveau-Brunswick, où l'on retrouve la moitié des Acadiens de cette province, captent les ondes de Radio-Québec. Par l'implantation de quatre antennes en Gaspésie, Radio-Québec rejoint maintenant 92% de la population québécoise. Ce n'est qu'en janvier 1985 que Radio-Québec diffusera par satellite et elle rejoindra, à ce moment, 96% de la population.

Quant à la production régionale, elle a connu une progression assez lente compte tenu des restrictions budgétaires des dernières années. Certaines régions ont réussi tout de même à produire une trentaine d'heures, l'an dernier. Pour l'exercice financier 1984-1985, sur la base d'une année budgétaire gouvernementale, Radio-Québec pourra compter sur des crédits additionnels de 400 000 $ pour sa programmation régionale.

Les conventions collectives des deux syndicats de la maison, le Syndicat des employés en radio-télédiffusion de Radio-Québec et le Syndicat général des employés de Radio-Québec, sont expirées depuis le 30 juin 1983 et les négociations entre les parties sont toujours en cours.

Enfin, Radio-Québec entend poursuivre, durant le nouvel exercice financier, un processus de réflexion qui l'amènera à mieux se placer dans la configuration de plus en plus changeante des médias électroniques au Québec.

Quant à la Commission d'accès à l'information, elle a mis en place, cette année, un second plan d'organisation administrative supérieure. Pour la réalisation de son mandat, la commission a mis sur pied les structures suivantes: une direction de l'analyse et de l'évaluation pour voir à la gestion des fichiers de renseignements personnels, un secrétariat, un service juridique et un centre de documentation. (10 h 45)

La commission a également procédé à une enquête auprès d'organismes gouvernementaux afin de prendre connaissance des modes actuels d'accès à l'information. Elle a également été appelée à établir une politique sur les transferts de renseignements personnels.

Enfin, la Commission d'accès à l'information gouvernementale collabore avec le ministère des Communications afin de mettre au point les outils nécessaires à l'implantation de la loi. Eu égard au calendrier d'implantation de la loi, la commission s'est fixée comme premier objectif d'être en mesure de répondre promptement aux demandes des citoyens.

Avant de terminer, M. le Président, je voudrais souligner le rôle actif qu'a joué le ministère dans la coordination et l'organisation des activités de l'année

mondiale des communications sur notre territoire. La mise sur pied d'un programme d'aide spécial de 500 000 $ a suscité la tenue d'un grand nombre de manifestations et a favorisé la participation de milliers de Québécois. Il ne fait aucun doute que le rôle joué par le ministère a permis que l'année mondiale des communications connaisse au Québec une popularité qui n'a pas eu son égal ailleurs au Canada, et vous pouvez en parler à celui qui était commissaire de l'année mondiale des communications pour le gouvernement fédéral.

En somme, le bilan de l'année mondiale des communications ainsi que celui de l'année financière 1983-1984 qui la recoupe en bonne partie sont très positifs. Plus de Québécois et de Québécoises sont maintenant sensibilisés à l'importance économique des communications. Nous disposons au ministère, à la suite du sommet, d'un plan d'action qui colle aux besoins de développement des industries de communication. Les 13 000 000 $ additionnels à notre budget vont nous permettre de favoriser l'atteinte de nos objectifs en ce domaine. Il ne fait aucun doute à mes yeux que le ministère des Communications livre la marchandise attendue.

Le développement des industries de communication figurera encore donc en tête de nos priorités pour l'année 1984-1985. Le maintien de services de qualité à l'appareil gouvernemental dans le cadre d'une rationalisation maximale des ressources demeurera aussi à l'ordre du jour. À cette fin, je vous mentionne, entre autres, qu'une nouvelle politique en matière de services audiovisuels sera présentée. Nous viserons enfin, pour la prochaine année, à diminuer les coûts des services fournis par le ministère.

Avant de terminer, j'aimerais remercier tous les employés du ministère grâce aux efforts de qui il nous a été possible d'atteindre nos objectifs. Je ne saurais trop remercier tous ces collaborateurs et toutes ces collaboratrices dont j'apprécie énormément le professionnalisme et l'efficacité.

Je termine ici les observations générales que je voulais vous livrer. Je vous ai indiqué les grandes orientations et les projets du ministère des Communications. J'aurais voulu, bien sûr, aborder beaucoup d'autres questions, mais je préfère que nous passions, dans les meilleurs délais, à la discussion. J'insiste, M. le Président, pour vous exprimer toute notre disponibilité en vue de répondre de façon transparente à toutes les questions que l'on voudra bien nous poser.

M. le Président, madame et messieurs les membres de la commission de la culture, je vous remercie.

Le Président (M. French): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. Pour entamer l'étude des crédits du ministère des Communications qui atteindront, pour l'année 1984-1985, quelque 200 000 000 $ il est important avant tout de comprendre la philosophie générale qui guide les travaux, la mission, les objectifs et les moyens dont dispose le ministre des Communications.

Récemment, un journaliste d'un quotidien de Montréal résumait, à mon avis, le travail effectué par le ministre au cours de la dernière année financière. Dans une série d'articles dont tout le monde a pu prendre connaissance, il décrivait les moyens qu'a adoptés le gouvernement pour - et je cite le titre des articles - "Agir à toutes les sauces" et "Pour remonter la côte, le gouvernement Lévesque met le paquet sur l'information".

Voilà à quoi s'adonne le ministre des Communications, sans doute bien conscient de l'échéance électorale qui risque de monopoliser les énergies et les sommes d'argent à la disposition du gouvernement en vue de coordonner et de bien orchestrer la vaste campagne de publicité qui sera absolument nécessaire au gouvernement s'il veut avoir la moindre chance de "sauver" les meubles.

Pour revenir à l'étude des crédits, il nous faut, en tout premier lieu, définir la mission originale du ministère des Communications. J'y vois d'abord un travail de rétroaction en matière d'information, auquel le ministre devrait accorder une importance primordiale et une attention beaucoup plus objective qu'il ne le fait actuellement. En effet, le ministre des Communications devrait pouvoir concevoir un plan d'organisation et de diffusion en se conformant aux règles élémentaires et objectives d'honnêteté intellectuelle vis-à-vis de la population, mission en vertu de laquelle il lui incombe d'informer objectivement la population d'une manière efficace, d'une manière peu coûteuse sur les services que lui offre le gouvernement par le biais de tous ses ministères. Au lieu de cela, le ministre des Communications concentre ses énergies et les ressources dont il dispose à coordonner des campagnes de publicité sur les réalisations plus ou moins réelles du gouvernement du Québec, dépassant de loin les véritables besoins de la population.

Ces besoins, M. le Président, peuvent être d'ordre économique, social ou culturel. Cette population, à laquelle le ministre a le devoir de rendre des comptes, doit se familiariser avec les différents moyens qui sont mis à sa disposition, par le biais du

ministère des Communications, pour valoriser ses talents, exécuter ses projets et mettre en oeuvre ses idées aussi bien dans un milieu local, communautaire qu'au niveau régional.

Le ministère des Communications a aussi une deuxième mission qui devrait consister à assumer un rôle de soutien à l'égard des différents médias se retrouvant sur le territoire québécois. Cette mission ne doit pas se contenter de faire adopter des crédits d'environ 56 800 000 $ pour la Société de radio-télévision du Québec. Loin de nier la pertinence d'étendre la régionalisation de Radio-Québec sur l'ensemble du territoire québécois, vous conviendrez avec moi que le soutien aux médias d'information doit être axé sur une aide accrue pour que se développent au maximum tant les médias privés que publics extérieurs à la télévision de l'État.

Parlant de Radio-Québec, j'aimerais insister pour dire que, jusqu'à maintenant, le processus de régionalisation, bien que valable en soi, coûte de plus en plus cher à l'État pour produire ses propres émissions, alors que les coûts seraient moindres si on se contentait de négocier l'achat de bonnes émissions. Je ne veux pas dire non plus que le gouvernement devrait empêcher Radio-Québec de produire ses propres émissions mais je dis, au nom de mon parti, que le gouvernement doit axer ses efforts en vue de les produire dans une perspective de haute productivité par rapport aux coûts réels engendrés aux fins de la production. D'ailleurs, le ministre avait lui-même reconnu ses lacunes au niveau de la productivité, l'an dernier, lors de l'étude des crédits. Il a été le premier à reconnaître que le coût, pour chaque heure de production à Radio-Québec, dépassait ce qui se faisait ailleurs. Par voie de comparaison, il avait même cité des chiffres; nous pourrons nous y référer plus tard.

Nous disons également que, si le gouvernement veut faire profiter une société d'État comme Radio-Québec de manière à maximiser ses retombées sur la population québécoise, il est essentiel que Radio-Québec cesse de demeurer en circuit fermé. En d'autres termes, pourquoi le gouvernement ne développerait-il pas un programme visant à aider systématiquement les jeunes réalisateurs, les jeunes comédiens, les jeunes scénaristes, les jeunes écrivains de manière à mettre au service de tous les auditeurs québécois les talents et les idées de ce qu'il est convenu d'appeler la relève? Il me semble qu'une telle politique serait aussi valable, sinon plus, que les quelques emplois à temps partiel offerts sporadiquement par le gouvernement, en plus d'ouvrir des perspectives fort intéressantes et prometteuses et aussi, possiblement, plus permanentes pour ces jeunes à qui on réserve beaucoup de place dans le secteur privé justement pour assurer la relève. Voilà un exemple concret de complémentarité sur laquelle le gouvernement du Québec pourrait développer ses programmes d'aide et de soutien à l'égard des jeunes, tout en mettant en valeur le rôle et la vocation de Radio-Québec.

De même pourrions-nous profiter de cette étude des crédits, M. le Président, pour demander au ministre ce qu'il advient des principes mis de l'avant en matière de communication dans son livre blanc. Nous avons eu droit à un long exposé sur des intentions, sur des choses qui sont sur le métier. Nous aurons l'occasion de demander des précisions au ministre pour savoir quels sont les résultats pratiques de ces expériences. On se rappellera que le ministre visait à promouvoir le développement des technologies au Québec, par le biais de différents moyens. Le livre blanc traitait également de ce besoin essentiel d'harmoniser les gestes et les actions de l'État avec ceux et celles de l'entreprise privée. Nous aurons l'occasion de revenir sur les réalisations concrètes qui sont issues du livre blanc et nous aurons l'occasion de déplorer l'imprécision ainsi que l'aspect vague de certains engagements.

Par exemple, au chapitre de la promotion du développement des techniques au Québec, les actions annoncées par le ministre sont-elles suffisantes? Quels moyens a-t-il mis de l'avant pour respecter sa volonté d'harmoniser le travail entre l'État et le secteur privé? Se contente-t-il de remettre au secteur privé ce qui devient embarrassant et gênant pour le gouvernement? Il faudra aussi que le ministre nous dise quelles sont les véritables sommes mises à la disposition des différents intervenants dans le livre blanc. Pourquoi -j'ai l'intention de le lui demander maintenir une certaine confusion - c'est simplement un exemple - dans le domaine de l'aide à la recherche appliquée pour ce qui concerne le rôle du ministère qui reste vague et imprécis?

Nous avons cru comprendre que le gouvernement n'avait pas, dans certains cas, les moyens financiers d'appliquer des principes mis de l'avant lors du sommet et dans le livre blanc. Le ministre peut-il nous affirmer le contraire? Qu'est-ce qu'il a l'intention de faire pour répondre aux attentes qui ont alors été créées? L'heure des réalisations concrètes a sonné en 1984-1985 et l'échéance est proche où on devra faire un bilan. M. le ministre, vous êtes au ministère des Communications depuis quatre ans; il est normal - cela nous a paru plus long que trois ans - qu'on demande des comptes après un certain nombre d'années.

Je ne puis passer outre le fait que le gouvernement semble s'embarquer dans une voie de solitude qui risque d'être fort

coûteuse pour les contribuables québécois. Je ne prendrai comme seul exemple, M. le Président, que l'organisation du dernier sommet portant sur les communications. En effet, le gouvernement du Québec n'avait pas semblé juger opportun d'établir une véritable collaboration avec le gouvernement canadien. Certes, le Québec possède une juridiction certaine qui lui est propre et qui est incontestable pour ce qui concerne les communications, ce que reconnaît volontiers le Parti libéral du Québec actuellement comme par le passé, alors que nous formions le gouvernement. Force nous est de constater que l'attitude du ministre, et du gouvernement en général, est une attitude conflictuelle qui se situe dans le cadre plus général des débats et des travaux constitutionnels avec le gouvernement fédéral. Notre formation politique a toujours voulu évité que les querelles constitutionnelles nuisent au développement des communications à l'intérieur du Québec. Cela demeure notre politique.

Tout en tenant compte des juridictions qui lui appartiennent du point de vue constitutionnel, le gouvernement du Québec a historiquement tenu compte de celles appartenant au gouvernement canadien - ce sont là des faits - de manière que les travaux respectifs des deux ordres de gouvernement ne se dédoublent pas et ne se contredisent pas. Nous estimons que, dans l'esprit de cette philosophie, le gouvernement du Québec doit s'efforcer d'harmoniser les politiques fédérales-provinciales en matière de communication et qu'il lui revient de faire profiter tous les Québécois de toute l'expertise émanant du gouvernement d'Ottawa.

Une telle mission m'apparaît d'autant plus essentielle que les principes mis de l'avant dans le livre blanc du ministère québécois des Communications seraient susceptibles d'être mis en application d'une façon beaucoup plus rapide et efficace, ainsi que moins coûteuse, en regard du fameux défi technologique qui s'adresse à tous les agents de ce secteur d'activité au Québec.

Quand un ministre en est rendu à faire jouer les structures de son ministère par le biais d'affrontements entre hauts fonctionnaires pour savoir quelle vedette pourrait mener à bien une mission strictement politique pour des fins électorales, c'est-à-dire celle de remonter la cote de popularité du gouvernement, tel que je le citais tout à l'heure, on est en droit de se poser de nombreuses questions: par exemple, où se place, parmi ses priorités, l'intérêt du bien public? Est-ce que le choix que le gouvernement est en train de faire, pour ce qui concerne les communications, laisse pour compte la population à desservir? (11 heures)

On a très souvent l'impression, M. le Président, que ce gouvernement est plus soucieux de servir ses propres intérêts en répondant à des objectifs teintés d'une certaine forme de nationalisme dépassé, voué à une indépendance du Québec qu'il sait avoir été rejetée par une majorité très claire de Québécois un certain mois de mai 1980. Si le gouvernement veut mettre en pratique ce nationalisme dépassé, nous ne lui en tiendrons pas rigueur compte tenu de son idéologie dans la mesure, cependant, où il aidera le développement du Québec dans le sens de l'excellence et où il ne fera pas payer à la population les tentatives de sa part de faire passer son message politique de mille et une façons. Il s'agit là d'une façon de faire qui ne cadre pas avec un ministère des Communications qui se veut au service de toute la population du Québec. Je suis convaincu qu'un examen de la situation amènera le ministre à conclure que, dans ce domaine, il faut faire preuve de la plus extrême prudence et ne donner prise à aucun soupçon, parce qu'il est facile de poser des gestes qui vont être interprétés comme servant avant tout les intérêts partisans du gouvernement, ce qui serait extrêmement regrettable.

Nous estimons également que la mission gouvernementale en matière de communication doit, à un moment donné, prendre un temps d'arrêt. Elle doit plus exactement s'arrêter à partir du moment où se transforme le véritable sens de l'information et qu'il se confond avec celui de la propagande gouvernementale. Je le répète, on n'insistera jamais assez sur ce danger toujours présent, auquel il est facile de succomber. Je veux dès maintenant, en tant que nouveau porte-parole de l'Opposition, informer le ministre que je serai d'une vigilance extrême à ce sujet et que je verrai à surveiller de très près la façon dont sont dépensés les fonds publics. D'aucune façon, je n'accepterai que la population puisse être bernée par des campagnes publicitaires au moyen de messages qui, si on les analyse comme il faut, sont des messages de propagande politique.

Le second principe de travail objectif en matière de communication devrait être axé autour de trois éléments bien précis: au plan technologique, de manière à harmoniser le travail de l'État et celui du secteur privé en prenant bien conscience du talent développé par le Québec en cette matière; au plan du soutien aux médias tant privés que publics, soutien qui doit dépasser le seul souci d'animer des batailles fédérales-provinciales comme la câblodistribution; au plan international, par le développement de méthodes de recherche, d'expertise et d'échanges d'information sur les véritables questions de l'heure, de façon que le Québec demeure au fait des moindres créations et concepts nouvellement issus du domaine aussi

complexe et passionnant que sont les communications.

C'est dans ce contexte que notre formation politique a suggéré et soumis aux membres de l'Assemblée nationale un projet de loi portant sur les sondages et la publicité gouvernementale et visant à assurer une honnêteté intellectuelle certaine et vérifiable ainsi qu'une transparence de tous les moments vis-à-vis de toute la population du Québec.

On se souviendra en effet que l'Opposition, par la voie de son porte-parole, lors du projet de loi 191, souhaitait un premier cadre réglementaire pour les sondages et la publicité gouvernementale. De cette façon, nous estimons toujours qu'un tel avant-projet de loi concernant les résultats des sondages à même l'argent des contribuables a encore sa place et devrait être adopté. Ce document stipulait également que pour chaque sondage des renseignements sur les objectifs, la date, le coût et l'échantillon, ainsi que le nom de la firme utilisée, devraient être inclus dans un recueil de sondages annuellement déposé devant l'Assemblée nationale.

Quant à la publicité gouvernementale, elle serait interdite à moins qu'elle n'ait pour objet: d'informer la population relativement aux conditions et modalités d'un programme gouvernemental, si ce dernier requiert une communication directe entre le citoyen et un agent d'un organisme gouvernemental; d'informer la population relativement aux nouvelles dispositions législatives ou réglementaires adoptées par le Parlement ou le gouvernement, lorsque ces nouvelles dispositions peuvent exiger un changement de comportement de la part des citoyens; d'informer la population quant à une enquête publique dûment constituée en vertu de la loi; de faire la promotion de l'industrie touristique au Québec; de faire la promotion de l'achat de services ou de produits manufacturés au Québec; de communiquer avec les employés de l'État ou un groupe de ceux-ci; de renseigner la population afin de mieux assurer la santé et la sécurité physique de la population; d'influencer le comportement des citoyens dans le domaine de la consommation et, finalement, de faire la promotion de l'accès à l'égalité des groupes de citoyens défavorisés par rapport aux autres.

Il va sans dire que cette publicité serait interdite en termes d'outils de négociation des conventions collectives avec les employés du secteur public. Selon nous, il reviendrait au seul Directeur général des élections de faire de la publicité durant une période électorale ou référendaire.

En somme, un tel projet de loi nous paraissait essentiel parce que le gouvernement péquiste a démontré qu'il ne peut résister à la tentation d'utiliser l'appareil de l'État et le Trésor public pour manipuler des clientèles cibles bien identifiées, afin de faire avancer ses intérêts partisans. Ce projet de loi vise donc à exercer le contrôle nécessaire pour protéger l'opinion publique. C'est là un des rôles du ministère des Communications.

Des directives aussi rigoureuses s'imposent à la seule lecture des orientations pour la prochaine année, au chapitre de l'information et des publications gouvernementales, telles qu'elles apparaissent au programme 2 de vos crédits où il est dit qu'en matière de rétroinformation Communication-Québec assiste les ministères dans leurs activités de rétroinformation et de consultation assurant, notamment, la cueillette des données sur les besoins des citoyens.

Cette pratique n'est pas nécessairement condamnable dans la mesure où elle s'inscrit dans un souci d'améliorer la qualité des services offerts aux citoyens, mais j'aimerais bien savoir du ministre combien de plaintes et de problèmes ont été résolus en 1983-1984, demandes qui, ultérieurement, auraient été réglées par des interventions faites à divers paliers de la machine gouvernementale qui, semble-t-il, aurait apporté des améliorations dans les services suivants, où les plaintes se concentrent très souvent. Je vais tout simplement donner quelques exemples: la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec, le ministère du Revenu, la Régie du logement ainsi que certains autres secteurs d'activité qui, trop souvent, sont sources d'embarras pour les citoyens.

Le même projet de loi nous paraissait aussi essentiel compte tenu de l'orientation du ministère des Communications dont le travail consiste comme par hasard, dans le cadre d'un plan 1981-1985, à améliorer l'information gouvernementale et à soi-disant humaniser l'appareil gouvernemental et l'efficacité de ses services. Je demande donc au ministre: Qu'en est-il, à un an de la fin de ce plan 1981-1985, des plaintes et injustices commises à l'endroit des citoyens à cause des tracasseries réglementaires et administratives de problèmes qui sont aussi factuels et quotidiens que dans les cas que j'ai cités très brièvement tout à l'heure?

Conséquemment, nous tenterons de savoir, au cours de l'étude de chacun des programmes et des éléments de programme du ministère des Communications, de quelle manière le ministre entend rapprocher l'appareil gouvernemental autrement que par la publicité et les sondages teintés de partisanerie qui ne donnent aucun résultat positif et jettent du discrédit sur son ministère. Le ministre a une responsabilité personnelle de voir à protéger la réputation du ministère qu'il dirige maintenant depuis trois ans. Sans doute le ministre saura-t-il

nous expliquer certaines contradictions concernant l'accessibilité des citoyens aux services des différents ministères, comme nous en retrouvons dans le programme 2 concernant l'information et les publications gouvernementales où il est dit que "c'est sous le signe d'une rationalisation encore plus poussée que la Direction de l'édition développera ses activités en y ajoutant des volets additionnels."

En effet, parmi les orientations pour l'année 1984-1985, il est clairement indiqué que "le service des publications continuera la rédaction et la production des guides en ajoutant un guide sur la justice, un autre pour le troisième âge et un autre pour les femmes. Ces guides seront vendus et remplaceront diverses publications partielles destinées à la distribution gratuite." Est-ce de cette façon que le ministère des Communications entend mettre en pratique sa politique d'accessibilité à l'information?

Il est paradoxal que la clientèle à laquelle sont destinées ces publications en soit une qui, justement, manque de moyens financiers pour les acheter. Justement - et c'est là le cercle vicieux - elle n'a pas les moyens de les acheter parce qu'elle ne connaît pas toutes les ressources auxquelles elle devrait avoir accès. On n'en sortira pas, M. le ministre, si on tente de leur faire payer, pour les aider, ce qu'ils n'ont pas les moyens de payer.

Nous estimons enfin - et je le dis au nom de ma formation politique - que ce présent gouvernement doit être surveillé de très près jusqu'à la prochaine élection générale du Québec. Dans le cadre du présent contexte de l'étude des crédits, il ne sert à rien de tenter d'examiner à la loupe les 70 campagnes entreprises ou poursuivies au cours de la présente année, ni les 73 avis préalables, ni les 100 agences présélectionnées et les 14 agences sélectionnées et, enfin, un montant versé en placements-médias de l'ordre de 10 323 700 $. Tant que nous n'aurons pas les outils nécessaires pour nous assurer que tous ces contrats, que toutes ces ententes, que toutes ces campagnes sont faites à l'intérieur et dans le cadre bien précis de règles connues et acceptées, nous ne pourrons pas faire une critique véritable de ce qui se passe, sauf que nous attirons l'attention du ministre sur le danger qu'il y a de procéder d'une manière qui peut donner l'impression que l'arbitraire a plus que sa place.

Il semble qu'il faille attendre que des règles plus précises ou rigoureuses soient acceptées par l'Assemblée nationale pour procéder à un examen de ce dont je parlais. Je suis porté à croire que ce n'est pas sous la gouverne de ce gouvernement, de cette administration qu'une telle preuve de transparence nous sera offerte sous forme législative. Tout au plus mettrons-nous l'accent sur les abus qui risquent de se produire en fonction des orientations 1984-1985 décrites dans les huit programmes du ministère des Communications. Nous tenterons de forcer le gouvernement à faire preuve de plus de transparence, de nous dire comment il entend améliorer les services offerts aux citoyens et nous prouver qu'une espèce de structure, comme le ministre délégué aux Relations avec les citoyens, constitue, à toutes fins utiles, une structure qui n'aura plus sa raison d'être lorsque le ministre des Communications aura véritablement accompli son travail de façon adéquate, lorsque le système de la rétroaction aura joué d'une façon efficace et, finalement, lorsque la population aura l'assurance qu'elle est servie d'une façon honnête et non-partisane.

En conclusion, je me permets d'attirer l'attention du ministre plus particulièrement sur l'application de la loi sur l'accès à l'information. On sait quel travail il a accompli avec le président de la commission par rapport à cette loi et je ne peux faire autrement, M. le ministre, que de m'inquiéter du genre de directives émises par le ministère des Affaires intergouvernementales, signées de la main de la sous-ministre, Mme Leduc, qui faisait état de la loi en disant: "Nous pouvons nous attendre que ce texte - le texte de la loi - nous posera des problèmes tout à fait caractéristiques au niveau de son implication, compte tenu de la nature particulière du travail réalisé au sein du ministère." Mme Leduc a procédé à la création d'un comité spécial visant à s'assurer qu'on donne à la commission ce dont elle a besoin, mais pas plus. (11 h 15)

M. le Président, je pourrai y revenir lors de l'étude des crédits. Nous aurons d'ailleurs l'occasion d'en discuter à une autre occasion, quand la Commission d'accès à l'information gouvernementale comparaîtra devant la commission de l'Assemblée nationale, mais je voudrais savoir du ministre s'il est au courant de cette pratique, de cette directive. Sinon, est-ce qu'il peut s'en informer? Est-ce qu'il pourrait nous dire ce qu'il en pense et ne croit-il pas qu'elle est de nature à contrer les effets recherchés par la loi sur l'accès à l'information? J'aimerais également savoir si d'autres ministères que celui des Affaires intergouvernementales ont agi de la même façon. Quel geste le ministre entend-il poser ou est-ce qu'il en a déjà posé pour éviter que ce soit un jeu de cache-cache entre les ministères et la Commission d'accès à l'information.

Il est facile, M. le Président, de répondre aux exigences de la lettre d'une loi - le ministre le reconnaîtra - et de déjouer l'esprit de la loi. Ayant été un de ses

auteurs et s'étant vaillamment battu pour que cette loi soit adoptée, le ministre n'acceptera pas - j'en suis convaincu - qu'on fasse de telles entourloupettes qui viseraient à donner l'impression aux ministères que c'est le jeu du chat et de la souris où, finalement, le gagnant est celui qui en donne le moins.

Ce sont là, M. le Président, les remarques préliminaires que je voulais faire ce matin. Nous procéderons ultérieurement à l'étude des programmes, selon les dates qui restent à déterminer. Nous savons que, dès mardi soir, c'est Radio-Québec et nous reprendrons la discussion en détail à ce moment-là, en tout cas concernant Radio-Québec.

Le Président (M. French): Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres commentaires préliminaires? M. le député de Mille-Îles.

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne (Mille-Îles): M. le Président, bien sûr, l'exposé du ministre englobe un vaste champ qui s'incorpore très bien aux deux autres ministères chapeautés par la commission de la culture, à savoir les Communautés culturelles et l'Immigration, avec, comme axe, la langue française, la loi 101 et ce qui s'ensuit, ainsi que les Affaires culturelles. On s'aperçoit, depuis le début de la semaine, qu'il y a toujours interdépendance entre ces ministères.

Hier, on s'inquiétait, entre autres, de l'application d'une loi qui fait du français la langue officielle et qui fait en sorte qu'on se donne des règlements pour la protéger et la promouvoir mais s'il y a, j'allais dire, une interférence provenant de l'extérieur, soit par les télécommunications, soit par les satellites, soit par la câblodistribution, on se dit: C'est bien beau, une loi locale qui fait qu'on se protège; d'autre part, on nous parachute, par le moyen des techniques modernes, une autre culture, soit, mais encore faut-il protéger sa propre culture. C'est pour cela qu'il est intéressant de voir comment le ministère des Communications s'incorpore à cet aspect culturel et linguistique qui est très important pour nous.

On l'a vu dans le passé. On a vu un ministre libéral, M. Jean-Paul L'Allier, défendre avec énormément d'ardeur cet élément qui est propre à nous, la culture québécoise, la langue française. On a vu les luttes qu'il a été obligé d'entreprendre avec le gouvernement fédéral au sujet des télécommunications. C'est de tradition. Les trois gouvernements qui se sont succédé ont toujours eu et auront toujours actuellement, on va dans la même veine - le souci de la protection de notre langue et de notre culture. Or, on peut s'inquiéter à juste titre, lorsqu'on sélectionne les canaux de la télévision - personnellement, j'ai un câblosélecteur de 33 canaux à la maison - du fait que les trois quarts soient anglophones.

La population est à 84% francophone; c'est pour cela qu'il faut faire attention. Il faut être vigilant pour faire le juste partage d'une barrière de protection pour qu'on puisse faire la promotion de notre culture et de notre langue aussi bien à la radio qu'à la télévision ou en téléphonie. Je pense que le ministre est bien inspiré, actuellement, par ce qui s'est fait dans le passé.

Une autre chose que je voudrais aborder, c'est l'information. Je pense qu'un gouvernement responsable doit faire en sorte que ses lois, ses services, ses programmes soient connus de la population. La population doit connaître les services auxquels elle a droit, les programmes auxquels elle a droit, que ce soit dans les ministères, dans les régies d'État, dans les sociétés d'État. Je pense que le Québécois a le droit de savoir quels sont ses droits au point de vue de la Régie de l'assurance-automobile, au point de vue de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, au point de vue de la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec, de la Société des alcools ou de la Régie des loteries et courses du Québec. Je pense que tous les Québécois ont droit à de l'information et le ministère des Communications a le devoir de faire en sorte que tous les Québécois puissent connaître ces programmes, ces services. On doit aller dans ce sens et je pense qu'on va dans le bon sens.

On a eu le programme de Corvée-habitation. On a un nouveau programme, Corvée-rénovation qu'on appelle aussi le programme Equerre. Je ne vois pas pourquoi le ministère ne fait pas connaître ce programme. Je donne l'exemple du programme Equerre pour que les Québécois qui veulent en bénéficier puissent le faire, créer de l'emploi et rénover leur maison, parce qu'ils y ont droit. Je ne vois pas pourquoi le ministère ne donnerait pas de l'information quant aux trois prochains volets qui s'adresseront aux bénéficiaires de l'aide sociale: le recyclage dans l'industrie, le retour au travail et les travaux communautaires. Je pense que le ministère et le gouvernement ont la mission de donner toutes ces informations parce que le citoyen, le Québécois a droit aussi à cette information, a droit de connaître les services, les lois et les programmes.

Je voudrais réagir aussi au sujet de l'exportation de notre culture. La production québécoise est exportée à 40%; on s'aperçoit que, dans le domaine de la culture, on fait l'exportation de disques, on fait l'exportation de livres, on fait l'exportation de logiciels, on fait l'exportation aussi de notre culture, de certains produits du ministère des Communications. Je pense qu'on doit continuer

dans ce sens. On a une société, la SODICC, qui a été conçue pour produire et exporter de la culture québécoise et on doit renforcer davantage cette société. Le ministère des Communications va collaborer aussi à cela. J'étais content de l'entendre parce que le ministère des Communications travaille en étroite collaboration avec le ministère de la Science et de la Technologie et aussi avec les Affaires culturelles. On a parlé d'informatique, on a parlé de bureautique et je pense que le ministère des Communications s'en va dans la très bonne direction.

Un dernier commentaire. On a parlé de télévision communautaire; je suis content d'apprendre que le budget est augmenté de 12% cette année. À Laval, on a une télévision communautaire très dynamique, entre autres, qui a sept ans d'existence. Il y a deux semaines, un contrat d'entente a été signé avec Vidéotron pour faire en sorte que Vidéotron donne des services techniques à la télévision communautaire de Laval pour que celle-ci puisse diffuser dix heures de programmation locale par semaine d'ici un an. On s'aperçoit que la communauté se prend en main. Elle a sept ans d'expérience et déjà, au point de vue professionnel, elle peut fournir un travail beaucoup plus rigoureux, beaucoup plus dynamique, beaucoup plus objectif, beaucoup plus positif. On lui fait confiance et je m'en réjouis au nom des citoyens de Laval. J'en remercie également le ministre.

Durant l'étude des crédits, M. le ministre, on aura sûrement d'autres questions à poser et, à ce moment-là, on posera des questions spécifiques sur Radio-Québec.

Le Président (M. French): Mme la députée de Dorion.

Mme Huguette Lachapelle

Mme Lachapelle: M. le Président, j'aimerais d'abord vous rassurer: je serai très brève. Contrairement à mon collègue de Louis-Hébert, cependant, je serai peut-être un peu plus positive.

M. le ministre, je suis tout à fait d'accord avec les crédits alloués au ministère des Communications, d'autant plus que ces sommes permettront, en cette annnée internationale des communications, en cette année de relance, la création de plusieurs emplois. Elles sensibiliseront aussi la population à la nécessité des communications et souligneront l'apport économique et social joué par toute forme de communication.

Je me réjouis que le Québec ait un réseau d'information télévisée tel Radio-Québec. Que le budget soit augmenté, je dis bravo, parce que plus de gens en région pourront capter Radio-Québec. Je souhaite ardemment que, très prochainement, nous ayons les moyens financiers nous permettant d'avoir, en plus des émissions éducatives et d'information générale - qui sont d'ailleurs très appréciées - notre téléjournal, pour informer quotidiennement les Québécois et les Québécoises, et que ces derniers reçoivent des informations intelligentes et objectives.

Le Président (M. French): Très bien. M. le ministre, je vous rappelle que, techniquement, je ne crois pas qu'il y ait un droit de réplique de part et d'autre après les remarques préliminaires. Voulez-vous faire quelques commentaires? Si oui, je serai dans l'obligation de donner aux autres la possibilité de faire de même. M. le ministre.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: D'accord, M. le Président. Je pense que c'est une coutume établie que le ministre qui présente ses crédits puisse donner un certain nombre de réponses, forcément préliminaires, puisque, comme l'ont indiqué le député de Louis-Hébert, le député de Mille-Îles et la députée de Dorion, il y aura lieu de poursuivre l'analyse des crédits avec des questions plus spécifiques. Cependant, il y a un certain nombre de remarques qui ont été faites et que je voudrais relever immédiatement pour faire avancer nos débats ultérieurement.

Je suis, quant à moi, très heureux que le député de Louis-Hébert ait retenu la formule slogan qui a fait la manchette des journaux au cours des dernières semaines où on dépeignait le ministère des Communications, ou le ministre des Communications, comme un intervenant qui voulait agir à toutes les sauces et mettre le paquet sur l'information. Je me dis: Pourquoi pas? Si c'est effectivement la façon de percevoir le rôle que je joue au ministère des Communications, je veux agir, c'est le moins qu'on puisse dire. À toutes les sauces? Bah! au maximum possible. Mais il faut faire des choix.

Vous aurez remarqué, dans ma présentation, qu'il y a des secteurs qui sont moins touchés que d'autres, puisqu'il faut arrêter un certain nombre de priorités. Ce sont ces priorités que j'ai tenté de vous présenter. Quant à mettre le paquet sur l'information, vous m'en voyez ravi. Effectivement, je crois que c'est un devoir d'État de s'assurer que le ministère des Communications et la Direction des communications de tous les ministères et organismes gouvernementaux mettent le paquet sur l'information. Encore faut-il se poser des questions sur la façon de mettre le paquet sur l'information, sur la qualité de l'information transmise et sur l'accessibilité à cette information puisque, finalement, ce sont les citoyens et les citoyennes du Québec qui ont, à la base, un droit à l'information.

Nous sommes là pour répondre à ce droit du public à l'information. (11 h 30)

Vous avez fait état de la rétroaction en information. Au cours des prochaines rencontres, M. le député de Louis-Hébert, je pourrai faire état de l'existence d'un service de la rétroinformation au ministère des Communications, et qui nous permet d'accumuler des renseignements qui nous sont transmis par la population et qui nous aident par la suite, dans certains cas, à corriger un certain nombre de problèmes qui peuvent exister dans les ministères et organismes gouvernementaux.

Vous avez, de part et d'autre, du côté ministériel et du côté de l'Opposition, fait état de vos préoccupations quant au développement de Radio-Québec. Je me réjouis de constater que personne ne met en cause - bien sûr, cela va de soi - l'existence de Radio-Québec et sa vocation régionale, mais nous aurons l'occasion, mardi soir prochain, de recevoir de la part du président-directeur général de Radio-Québec plus d'information quant à ce qui s'est fait, quant à ce qui se fait et quant à ce qui se fera au cours des prochaines années. Je crois que cette rencontre sera particulièrement productive.

Je voudrais signaler au passage que nous aurons probablement l'occasion, lors de cette rencontre avec les dirigeants de Radio-Québec, de faire état de ce nouvel environnement au niveau des médias électroniques, de cette nouvelle configuration qui va amener Radio-Québec à préciser davantage son mandat étant donné l'arrivée des canaux spécialisés, étant donné aussi l'arrivée prochaine - qu'on souhaite au niveau du gouvernement fédéral - d'une deuxième chaîne privée. Je voudrais simplement qu'on constate qu'en ce moment il y a, à Ottawa, des sommes disponibles, 35 000 000 $, pour certains producteurs, mais les télévisions éducatives du Canada ne peuvent pas, dans le contexte actuel, avoir accès à ces 35 000 000 $. Or, l'Association des télévisions éducatives du Canada a fait des représentations auprès du gouvernement fédéral pour que les télévisions éducatives, dont Radio-Québec, puissent avoir accès à ces fonds relativement importants.

Le député de Louis-Hébert a fait largement état de ce qu'il a qualifié d'une collaboration douteuse avec le gouvernement canadien, lors du sommet. Dois-je lui indiquer que nous avons invité les représentants de l'Office national du film, du gouvernement fédéral, de la Société de développement de l'industrie du cinéma et de Radio Canada à participer non seulement aux tables de concertation qui ont précédé la tenue du sommet - ils étaient effectivement présents - mais aussi au sommet. Nous avons accepté qu'ils participent au sommet sur les communications. Ce sont ces organismes qui, librement, volontairement et consciemment, ont décidé de ne pas y participer.

Je dois même dire - cela peut vous surprendre, M. le député de Louis-Hébert -qu'à l'occasion du dîner d'État qui a été offert à l'ensemble des partenaires du sommet sur les communications, le mercredi soir, j'ai invité personnellement le sous-ministre adjoint aux Communications du gouvernement fédéral, M. Gourd, à prendre la parole devant les partenaires que nous avions réunis pour ce sommet socio-économique sur les communications. Il a pris la parole pour indiquer qu'il se réjouissait de la tenue de ce sommet et qu'il en escomptait des résultats très positifs.

Il n'y a donc pas d'attitude conflictuelle avec le gouvernement fédéral. Il n'y a tellement pas d'attitude conflictuelle avec le gouvernement fédéral que vous aurez remarqué que, dans tout mon texte, en aucun moment je n'ai traité du problème de la juridiction en matière de communications. Or, s'il est un dossier qui a fait consensus historiquement au sein de cette Assemblée nationale, c'est bien celui de la revendication de la juridiction en matière de communications, que ce soit sous le gouvernement de l'Union Nationale ou sous le gouvernement du Parti libéral. Je crois d'ailleurs me rappeler que vous étiez fonctionnaire au ministère des Communications, M. le député de Louis-Hébert, et même directeur de l'administration au ministère des Communications, si ma mémoire est bonne. Je crois que c'était autour de 1970-1971; c'est un fleuron à votre boutonnière. Vous vous rappelez, à l'époque, les revendications du gouvernement libéral en matière de souveraineté culturelle. Quel était le canal privilégié pour ce slogan de la souveraineté culturelle? C'était le ministère des Communications et les politiques mises de l'avant par un de mes prédécesseurs, M. Jean-Paul L'Allier.

Donc, l'attitude traditionnelle des gouvernements du Québec, c'est de faire en sorte que nous soyons maîtres d'oeuvre du développement des communications sur notre territoire. Pourquoi n'ai-je pas parlé de nos relations avec le gouvernement fédéral? C'est parce que ces relations, bien que nous les souhaitions, ne donnent pas de résultat. Vous avez vécu la douloureuse expérience de la câblodistribution sous le gouvernement libéral en 1975-1976; nous, en 1976-1977, jusqu'à la décision de la Cour suprême, on s'est fait littéralement enlever des mains une juridiction qui nous apparaissait importante pour le développement culturel et économique du Québec.

Regardez ce qui s'est passé dans le dossier de la télévision payante: plusieurs conférences fédérales-provinciales, plusieurs conférences interprovinciales, un front

commun des dix provinces canadiennes, pour une fois, maintenu jusqu'à la fin, disant au gouvernement fédéral que la télévision payante est une juridiction qui nous appartient. Il est arrivé ce que vous savez. Le gouvernement fédéral, par l'entremise du CRTC, a imposé sa politique de la télévision payante avec les échecs que nous avons connus. N'eût été - c'est l'approche que j'avais décidé d'adopter, je me rappelle même que c'était à la suggestion du président de la commission de la culture -l'attitude que nous avons adoptée, une attitude terrain, pour reprendre une expression que j'ai utilisée tantôt dans ma présentation, n'eût été l'intervention de la Société de développement des industries de la culture et des communications; n'eût été le regroupement des deux canaux français de télévision payante sur lequel j'ai fait de nombreuses déclarations et qui, finalement, a abouti, nous n'aurions pas actuellement une industrie de la télévision payante qui soit viable et qui assure des retombées économiques importantes pour nos artisans dans le secteur culturel.

Regardez l'attitude du gouvernement fédéral dans le dossier des canaux spécialisés. On vient de prendre la décision, au CRTC, de donner des permis à deux entreprises qui vont diffuser une programmation anglophone sur des canaux spécialisés. On vient d'ouvrir la porte en même temps à l'introduction, au Canada et au Québec, de cinq canaux spécialisés américains, comme volonté de permettre aux Québécois et aux Québécoises francophones de profiter de l'arrivée des canaux spécialisés. Dois-je indiquer que, comme geste pour favoriser, au contraire, notre assimilation, on ne fait pas mieux.

Quant à la deuxième chaîne privée francophone, c'était probablement "le bonbon" - entre guillemets - qu'on voulait présenter en dernier recours, une décision éminemment politique pour nous faire avaler la décision des sept canaux spécialisés de langue anglaise. Je reviendrai là-dessus la semaine prochaine. Nous avons déjà pris connaissance de la réaction de M. Jacques Dumais dans le Soleil d'hier. Nous avons pris connaissance de la réaction de Mme Lise Bissonnette dans le Devoir de ce matin. Je crois qu'il y a là matière à discussion. Ce sera intéressant au cours des prochaines semaines.

J'ai, quant à moi, l'intention de donner ma réaction quoique, vous le savez, je n'ai pas juridiction en matière de télévision. Dans le contexte des décisions prises par le CRTC et le gouvernement fédéral, je devrai probablement adopter une attitude terrain du type de celle que me suggérait le président de la commission de la culture. Ce qui m'a choqué dans le dossier de la deuxième chaîne, c'est que les fonctionnaires fédéraux s'étaient engagés - quand on parle justement de relations avec le gouvernement fédéral -à ce que nous obtenions, quatre jours avant l'annonce faite par M. Fox, copie du rapport du CEGIR sur l'éventuelle deuxième chaîne privée francophone. Or, cela n'a pas été respecté.

Le Président (M. French): M. le ministre, pour vous permettre de compléter sur tous les sujets dont vous voulez partager l'opinion avec nous, il vous reste cinq minutes.

M. Bertrand: Très bien. Je vais donc tenter de résumer le tout. Je crois qu'on n'a pas respecté la parole donnée. Vous dites que vous n'êtes pas pour l'indépendance. Je le savais, M. le député de Louis-Hébert. Moi, je suis pour la souveraineté. Je pense que par la souveraineté, nous parviendrons véritablement à contrôler l'ensemble des moyens, des outils ou des instruments assurant le développement des communications au Québec.

Cependant, vous êtes un partisan de M. Bourassa et M. Bourassa a déclaré, depuis le début des années soixante-dix, qu'il croyait à la souveraineté culturelle. Il a même indiqué tout récemment qu'il était prêt, en retour de pouvoirs culturels accrus, à céder au gouvernement fédéral des pouvoirs en matière économique. Je trouve que le Parti libéral a une drôle de philosophie. On déjeune dans le social; on dîne dans le culturel; on soupe dans l'économique. Quant à moi, on s'endort dans l'absurde, parce que ce n'est pas cela; il y a un lien très étroit entre la culture et l'économie et on ne peut pas penser au développement du Québec sans relier très intimement les secteurs social, culturel et économique. Pour bien y parvenir, il faut avoir en main des instruments politiques. Quant à nous, seule la souveraineté peut nous donner ces instruments politiques.

Quant au projet de loi du président de la commission de la culture auquel vous avez longuement fait allusion, M. le député de Louis-Hébert, laissez-moi vous dire que sous le couvert d'une très bonne intention, qui est à l'image de la bonne foi et de la bonne volonté du député de Westmount, il m'apparaît y avoir derrière ce projet de loi tellement de candeur et de naïveté que je n'ose croire que le député de Louis-Hébert puisse un instant s'imaginer que l'adoption d'un tel projet de loi empêcherait ce qu'il qualifie d'excès de partisanerie.

J'en veux comme exemple - et je reprends une des propositions qu'il a faites et qu'on retrouve dans votre projet de loi -à l'article 14, où vous dites: Un organisme gouvernemental ne peut produire ni faire produire une annonce publicitaire à moins que cette annonce n'ait pour objet: 8e, d'influencer le comportement des citoyens

dans le domaine de la consommation; 5e, de faire la promotion de l'achat de services et de produits manufacturés au Québec; 7e, de renseigner la population afin de mieux assurer sa santé ou sa sécurité physique. (11 h 45)

Prenons les points 7 et 8: Santé et sécurité; influencer le comportement des citoyens dans le domaine de la consommation. Un beau dossier! La surconsommation d'alcool, voilà un dossier où le gouvernement, par une campagne de publicité, pourrait influencer le comportement des citoyens, protéger leur santé, leur sécurité physique.

Encore là, le député de Louis-Hébert, qui s'imagine qu'on ne ferait pas de partisanerie avec ce genre de dossier, à mon avis, ne se rappelle pas un certain nombre de campagnes. Par exemple, sur la consommation d'alcool, on peut très bien faire une campagne à la québécoise pour dire: "La modération a bien meilleur goût". J'avoue qu'il n'y a là absolument rien de partisan, mais on peut très bien faire une même campagne sur l'alcool à la manière fédérale, à Ottawa, campagne qui, au moment du référendum, si ma mémoire est bonne, sur le même thème, avait un slogan qui se lisait comme suit: "Non, merci!" Comme quoi, M. le député de Louis-Hébert, au-delà de la bonne foi, de la bonne volonté, il y a parfois une certaine candeur, une certaine naïveté dont nous avons besoin en politique, faut-il le dire?

Je sais que le député de Westmount, à ce point de vue, est un homme qui veut contribuer à l'amélioration des choses. Quant à moi, je dois dire que, même si je souscris dans l'ensemble aux objectifs visés par son projet de loi 191, je pense qu'il serait en pratique non seulement inapplicable mais, plus que cela, il n'atteindrait pas les objectifs qu'il veut viser. Cela me paraîtrait, évidemment, infiniment regrettable.

Le Président (M. French): M. le ministre, votre temps est écoulé.

M. Bertrand: M. le Président, je termine là mes premiers propos relativement à quelques commentaires sur les remarques qui ont été faites par quelques-uns des membres de la commission de la culture. Je vous réitère que je me tiens à votre entière disposition. C'est un sujet fort intéressant que celui des communications. J'espère que nous nous reverrons dans un avenir rapproché.

Le Président (M. French): M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon M. Doyon: Merci, M. le Président. Je ne m'attendais pas que le ministre des Communications m'encense et me donne raison sur les critiques que j'avais formulées à son égard et à l'égard du ministère qu'il dirige. Qu'il se gourme, comme on le dit dans le milieu d'où je viens - c'est un bon terme beauceron - en disant qu'il se mêle à toutes les sauces, j'en suis bien aise. Cela montre que, jusqu'à un certain point - je n'irai pas par quatre chemins - il est devenu un danger public. Il est temps qu'on s'en aperçoive. Quelqu'un qui est prêt à prendre tous les moyens pour "agir" au degré où il place son action, c'est totalement inacceptable. Les Québécois ne sont pas...

M. Bertrand: Quelqu'un a déjà été considéré comme un danger public et, pourtant, il a fait de grandes choses pour son pays.

M. Doyon: ...dupes de cette façon de faire. On a vu autre chose que des messages subliminaux dans notre vie collective. Ce n'est pas avec l'emploi de termes qui peuvent, inconsciemment ou d'une façon subliminale, rappeler certaines actions du gouvernement, certains objectifs du gouvernement qu'on va leurrer la population québécoise.

Que le ministre se dise prêt à continuer de cette façon, c'est, à proprement parler, totalement inquiétant. Ce que je pensais pouvoir obtenir du ministre, c'étaient des assurances et peut-être un minime mea culpa, une reconnaissance qu'il était sur la glace mince, qu'il était sur la corde raide et que, finalement, il prenait des risques inutiles en se jouant de la population du Québec dans la formation de son opinion par des campagnes de publicité de toute nature.

Le ministre sait très bien que, quand on fait des campagnes à pleines pages dans les journaux, où, finalement, on n'a rien d'autre à dire que "c'est reparti", c'est idiot! C'est innocent! Cela n'a pas sa raison d'être! C'est de nature incantatoire purement et simplement. Ce n'est pas en disant ou en écrivant un certain nombre de fois "c'est reparti au Québec" que pour autant c'est reparti. Il n'y a que les sorciers qui appellent la pluie de cette façon.

M. le mini3tre, si vous entendez faire de la sorcellerie avec l'opinion publique québécoise, vous ne m'aurez pas comme partenaire et vous n'aurez pas non plus la population du Québec. C'est autre chose de poser des gestes de façon que la population puisse porter un jugement sur le fait qu'il y a eu un nouveau départ au Québec, après l'arrêt absolument désastreux qu'on a connu à cause de votre gouvernement. Que la population se rende compte de cela elle-même, d'accord, mais qu'on tente de l'endoctriner, qu'on tente de lui faire accroire, en le lui mettant sous les yeux à

plusieurs reprises, que c'est reparti parce qu'on lui dit que c'est reparti, ce n'est pas honnête, ne n'est pas correct parce qu'on demande à la population de s'identifier à une expression d'opinion.

La population peut s'en rendre compte, M. le ministre, si vous avez fait quelque chose pour faire repartir ce que vous aviez arrêté; vous n'avez pas besoin de lui dire que c'est reparti. Ce n'est pas ce qu'on vous demande comme ministre des Communications; ce qu'on vous demande, c'est beaucoup plus de la nature de ce que disait le député de Mille-Îles, c'est de permettre aux gens qui ont besoin de la Régie de l'assurance-maladie, qui ont besoin des organismes publics de savoir quels sont leurs droits, quels sont les moyens pour y avoir recours, etc. Tout le monde est d'accord avec cela, cela ne pose pas de problème.

Ce qui est difficile à accepter, ce sont les campagnes publicitaires qui sont de nature à tromper la population, à la duper et où, finalement, il reste toujours un arrière-goût. Cet arrière-goût, je n'accepte pas plus qu'il vienne du gouvernement du Québec que d'un autre gouvernement. L'honnêteté dans l'utilisation des fonds publics pour fins de publicité gouvernementale doit avoir les mêmes normes rigoureuses, quel que soit le niveau, provincial ou fédéral. Les normes doivent être aussi rigoureuses et pour une raison très simple: quand on puise dans les fonds publics, on peut possiblement réussir à vendre à peu près n'importe quoi quand on a accès à tous les moyens modernes des communications. La panoplie est immense, vous êtes entourés d'experts que vous payez un bon montant; il y a plein de gens qui peuvent vendre des "frigidaires" aux Esquimaux. Il n'y a pas de problème, quand on a les moyens.

Là où vous auriez du mérite, M. le ministre, ce serait au moment où vous mettriez un holà à la manipulation, à l'utilisation outrageante des fonds publics pour atteindre des buts semblables, à la formation de comités parallèles, de comités de contrôle, de comités de la nature du comité ministériel permanent des communications qui a un rôle général de supervision, qui doit s'organiser pour que tout aille dans la même philosophie de parti, pour qu'on soit bien sûr que tout le monde marche au même pas, au même rythme et dans la même direction qui, quant à moi, mène au précipice.

Vous voulez vous assurer de cela, M. le ministre, et vous ne faites même pas confiance à vos directeurs des communications dans les divers ministères qui ont été choisis et qui sont des professionnels sans avoir une vision politique aussi poussée que la vôtre de ce que devrait être le Québec dans l'avenir. Dans les circonstances, vous avez formé un conseil des directeurs et des directrices des communications, vous avez formé un comité ministériel permanent des communications, vous voulez imbriquer tout cela ensemble. Pourquoi? Pour vous assurer que le message gouvernemental soit uniforme et qu'à la manière du supplice de la goutte chinoise on réussisse à rentrer dans la tête de la population ce qu'elle a refusé et ce qu'elle continue de refuser. M. le ministre, ce n'est pas très encourageant de vous voir récidiver et de nous annoncer que vos efforts vont continuer dans le même sens d'une façon encore plus vigoureuse, d'une façon plus saccadée, d'une façon encore plus concertée. C'est extrêmement inquiétant.

Vous faites grand état des empiétements, des difficultés avec le gouvernement fédéral. Comme vous en avez fait mention tout à l'heure, je suis assez bien placé pour connaître un peu ce qui peut s'être passé à ce sujet à un moment donné de notre histoire, en 1970, 1971 et 1972. Je dois vous dire, M. le Président, tout en regrettant ces choses-là, tout en les déplorant et en réaffirmant l'intention du Parti libéral du Québec de faire passer les intérêts du Québec en premier lieu, que ni vous ni personne de votre gouvernement n'est en situation de faire valoir honorablement et valablement les véritables intérêts du Québec. On ne peut pas annoncer à sa femme qu'on va la divorcer à la première occasion - on ne peut pas lui annoncer cela quotidiennement - et en même temps discuter avec elle de la façon dont on va administrer notre budget commun, notre compte de banque conjoint. Cela ne fonctionne pas. Il faut choisir: si on divorce, on divorce, mais il ne faut pas espérer qu'on va s'entendre facilement sur un compte de banque conjoint.

C'est cette quadrature du cercle que vous êtes en train de tenter de réaliser. C'est du donquichottisme. C'est de tenter de faire croire à la population qu'il y a moyen qu'une chose soit noire et blanche en même temps, qu'on peut être uni et séparé en même temps. C'est ce discours confus que vous faites. C'est ce discours confus qui est refusé par la population. C'est ce discours confus qui ne vous permet pas d'avoir avec le fédéral des amorces de discussion menant à des avenues d'entente, parce qu'en fin de compte, si ces ententes sont de nature à établir que le fédéralisme canadien permet précisément ces aménagements, vous venez de perdre des munitions, vous venez de renoncer à utiliser des munitions qui vous sont absolument nécessaires pour atteindre votre but. Vous sachant intelligent ainsi que les gens qui vous entourent, vous ne ferez pas ces choses-là. Les gens qui sont de l'autre côté de la clôture vous voient venir aussi. Même si, de bonne foi, vous tentiez l'impossible, cette quadrature du cercle, il ne faut pas reprocher à l'autre partie, qui a

aussi son mot à dire, de s'imaginer à tort ou à raison que vous êtes en train de lui faire une entourloupette. Alors, tout cela mis ensemble, cela vous met dans une situation absolument insupportable qui n'est pas de nature à nous amener des résultats favorables à des arrangements permettant que la population en ait pour son compte.

Nous pourrions en parler très longuement, M. le Président, mais je pense que nous avons pris suffisamment de temps pour les remarques préliminaires. Nous aurons l'occasion de poursuivre lors de l'étude des programmes et des éléments de programme, mais je voulais tout simplement dire ces quelques mots en espérant que, sur les choses pratiques, les choses nécessaires, les choses établies comme étant des services réels à la population, nous en viendrons, M. le ministre, vous et moi ainsi que tous les gens de la commission, très rapidement à des ententes pour que, dans le meilleur des mondes, on puisse s'organiser pour que la population ait les services pour lesquels elle paie.

Le Président (M. French): Merci, M. le député. Le président serait lui aussi très tenté d'intervenir, mais je me suis fait brasser la cage. Le député de Mille-Îles également. Je veux bien me retenir et j'espère qu'il va partager ce choix avec moi la semaine prochaine, justement. Donc, on se voit, si l'Assemblée nationale le veut bien, à 20 heures, mardi soir. D'ici là, la commission de la culture ajourne ses travaux sine die. Je demanderais qu'on garde les microphones ouverts, mais qu'on cesse l'enregistrement puisqu'on aura une brève séance de travail ici pour la commission. Messieurs et mesdames les fonctionnaires, je vous remercie.

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