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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Wednesday, March 28, 2012 - Vol. 42 N° 29

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 56, Loi visant à lutter contre l’intimidation et la violence à l’école


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures onze minutes)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 56, Loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Pagé (Labelle) est remplacé par Mme Richard (Marguerite-D'Youville).

Le Président (M. Marsan): Merci. Ce matin, nous recevons le Groupe régional d'intervention sociale et l'Association des cadres scolaires du Québec.

Auditions (suite)

Alors, il nous fait plaisir de vous accueillir. Et je vais demander à Mme Marie Houzeau, qui est la directrice générale du GRIS, de bien vouloir nous présenter les gens qui vous accompagnent, et vous aurez par la suite une période de 15 minutes pour nous faire votre présentation.

Groupe de recherche et d'intervention sociale de Montréal
(GRIS-Montréal) et Groupe régional d'intervention
sociale de Québec (GRIS-Québec)

Mme Houzeau (Marie): Parfait.

Le Président (M. Marsan): Bienvenue.

Mme Houzeau (Marie): Merci, M. le Président. Alors, je vais les laisser se présenter eux-mêmes.

Mme Angers (Karine): Bonjour. Karine Angers, du GRIS-Mauricie--Centre-du-Québec, agente de bureau et d'intervention.

M. Senneville (Richard): Richard Senneville, président du GRIS-Mauricie--Centre-du-Québec.

M. Chouinard (Vincent): Vincent Chouinard, travailleur social. Je suis secrétaire du conseil d'administration du GRIS-Québec.

M. Tardif (André): Bonjour. André Tardif, directeur général du GRIS-Québec.

Mme Couture (Marie-Ève): Bonjour. Marie-Ève Couture, coordonnatrice au GRIS Chaudière-Appalaches.

Mme Houzeau (Marie): Et donc moi, je suis du GRIS-Montréal. Et nous avons aussi une antenne en Gaspésie, alors c'est pour vous dire que nous couvrons quand même un territoire assez large de la province.

Alors, avant d'aller plus loin, évidemment, je tenais à remercier la commission de nous donner la possibilité de nous exprimer sur ce projet de loi. Les GRIS du Québec sont sur le terrain scolaire depuis plus de 18 ans maintenant, et la lutte à l'intimidation, c'est notre pain quotidien. Nous nous réjouissons que le gouvernement décide de légiférer sur ce phénomène particulièrement complexe, et je remercie aussi Mme la ministre d'avoir pris le temps, dans ses remarques préliminaires, de soulever le travail accompli par les organismes communautaires en général et ceux qui luttent contre l'homophobie en particulier. Je vous remercie aussi d'avoir pris le temps de relever que l'intimidation et l'homophobie sont intimement liées. Nous apprécions beaucoup cette reconnaissance, et ça nous donne aussi l'espoir sur l'attention qui sera accordée aux points que nous allons soulever aujourd'hui.

Nous allons donc attirer votre attention sur quelques points du projet de loi qui nous paraissent poser question quand on les observe avec le filtre de la lutte à l'homophobie et celui du bien-être de tous les jeunes qui peuvent en être victimes, quelle que soit leur orientation sexuelle, d'ailleurs, et j'insiste sur ce point-là. L'homophobie, ça touche tout le monde et ce n'est que finalement très peu en lien avec l'orientation sexuelle avérée des jeunes qui en sont victimes.

Dans un premier temps, on va prendre, si vous permettez, quelques instants pour vous parler de la nature de notre travail, pour que vous sachiez exactement ce que font les GRIS du Québec. M. Tardif.

M. Tardif (André): Alors, voilà. Vous avez sûrement pu constater, lors de la présentation, qu'il existe quatre GRIS au Québec qui sont sur le terrain depuis maintenant plus de 18 ans, donc GRIS-Montréal, GRIS-Centre-du-Québec--Mauricie, GRIS Chaudière-Appalaches, GRIS-Québec. Selon les régions, nos actions vont se diversifier jusqu'à un certain point, dans ce sens où, en région, on va tenter d'offrir des services complémentaires, et, dans les centres comme Montréal, bien, le GRIS peut se concentrer davantage sur ce que nous faisons depuis longtemps, c'est-à-dire de la démystification de l'homosexualité et de la bisexualité, particulièrement en milieu scolaire.

Pour vous donner une idée des chiffres pour ce qui touche l'intervention en milieu scolaire, les GRIS réunis, dans l'année financière dernière, grâce à 246 bénévoles spécialement formés par les GRIS pour intervenir devant les classes, donc, on a réalisé 1 648 interventions à travers le Québec pour environ... un peu plus de 41 000 étudiants qui ont eu la chance de poser leurs questions à ces bénévoles, qui sont là pour, comme je le mentionnais, démystifier, faire tomber les mythes, les préjugés. C'est essentiellement ce que les GRIS du Québec ensemble, on réalise à travers tout le territoire québécois.

Je redonne la parole à, cette fois-ci, Vincent Chouinard.

M. Chouinard (Vincent): Avant d'y aller de nos recommandations, j'aimerais juste peut-être revoir un peu les définitions de ce qu'est l'homophobie et peut-être un mot moins connu, l'hétérosexisme, car c'est très important aussi dans cette histoire-là, et puis de voir comment ça s'incarne dans les écoles. J'ai moi-même fait mon mémoire de recherche à l'Université Laval sur la prévention de l'homophobie et l'hétérosexisme en milieu scolaire, tout frais, là, c'est 2011 que j'ai déposé mon mémoire. Donc, bon, l'homophobie, bon, vous le savez, c'est la discrimination envers, comme Marie disait, les personnes non hétérosexuelles, je vais le dire comme ça, mais aussi les personnes qui ne correspondent pas aux stéréotypes des genres, donc à la masculinité et à la féminité traditionnelles. Dans ce sens-là, les recherches sont assez claires. La recherche de Chamberland, que vous avez sûrement entendu parler, là, en 2010, là, montrait que l'école est encore un milieu très homophobe, il y avait beaucoup d'insultes. C'est surtout verbal, mais ça peut aller jusqu'à physique, là, de se faire pousser dans les cases, des choses comme ça. Ça touche surtout, en pourcentage, les jeunes gais, lesbiennes et bisexuels, mais, en nombres absolus, comme il y a quand même des hétérosexuels qui se font traiter, entre guillemets, de fifs et de tapettes, et tout ça, bien, en nombres absolus, il y a autant, sinon plus d'hétérosexuels qui sont victimes d'homophobie. Donc, c'est pour ça qu'on dit que ça touche tout le monde et qu'il faut s'y attarder, bien sûr.

Par rapport à l'hétérosexisme, ça, c'est peut-être moins connu, mais c'est aussi important. C'est, dans le fond, l'espèce de présomption que tout est hétérosexuel autour de soi et que la normativité, ce qui est normal, c'est l'hétérosexualité. À l'école québécoise, comment ça se traduit, bien il y a des chercheurs qui se sont intéressés à voir le curriculum scolaire, est-ce qu'on parle d'homosexualité dans le curriculum scolaire. Il y a deux recherches qui ont été faites, une pré-renouveau pédagogique et l'autre après le renouveau pédagogique, et, dans les deux cas, la conclusion des chercheurs, c'est que les curriculums sont très hétérosexistes. Parce que, dans le fond, donc, on étudiait carrément, là, les manuels scolaires, donc on allait vérifier dans les manuels scolaires au Québec, O.K., qui sont distribués dans les classes est-ce qu'on parle d'homosexualité. Dans au moins la moitié des cas, on n'en parle même pas, alors qu'on devrait en parler, alors qu'on parle de l'hétérosexualité, et, quand on en parle, dans la majorité des cas, c'est accolé à un contexte négatif, donc on parle homosexualité et VIH, homosexualité et prostitution, homosexualité et suicide. Et aussi, prérenouveau, quand il y avait les cours de religion, là, on disait que Dieu n'aimait pas l'homosexualité, qu'il ne fallait pas... les catholiques ne sont pas homosexuels ou ne devraient pas l'être. Alors, les chercheurs... Et après le renouveau pédagogique c'est la même chose, donc encore on ne parle pas d'homosexualité dans la majorité des cas, et, lorsqu'on en fait, c'est de façon soit très historique... Le chercheur découvrait, là, que souvent on parlait d'homosexualité avec l'holocauste, donc on rappelait que, comme les juifs, les homosexuels avaient été gazés, tout ça. Mais donc c'est très loin du quotidien des jeunes, là, finalement. Donc, voilà.

Et puis il y a certaines perceptions, là, les enseignants aussi peuvent... Grenier, là, relevait que 34 % des intervenants scolaires qu'il a questionnés disaient faire des blagues de tapette dans l'école. Donc, c'est quand même un chiffre peut-être un petit peu étonnant, là, mais voilà.

Donc, voilà, c'est ce que j'avais à vous dire un petit peu pour rappeler. Là, on va passer aux recommandations avec Marie.

**(11 h 20)**

Mme Houzeau (Marie): Merci, Vincent. Donc, on revient au projet de loi. Il y a beaucoup de propositions, au sein de ce projet de loi, qui vont dans la bonne direction: la nécessité d'adopter un plan, l'obligation de tout le monde du personnel de collaborer à sa mise en oeuvre, l'évaluation des résultats, l'appui aux initiatives des regroupements d'élèves. Nous apprécions aussi le fait qu'il y a manifestement une volonté d'aborder la question dans son ensemble et de façon systémique, bien qu'une plus grande place pourrait être accordée aux organismes communautaires -- vous ne serez pas étonnés que je vous fasse cette remarque.

Par contre, quelques articles soulèvent notre inquiétude, d'abord et avant tout la définition. Je pense que chaque groupe qui s'est présenté ici vous en a parlé et que tous ceux qui se présenteront encore vous en parleront encore sous toutes sortes d'angles, mais nous tenons vraiment à attirer l'attention de la commission sur la nécessité de préciser cette définition en s'inspirant de la Charte des droits et libertés du Québec. Inclure l'orientation sexuelle dans la définition assurera qu'elle sera prise en compte par tous les établissements scolaires et qu'aucune place ne sera laissée à l'interprétation. Je sais que vous avez la préoccupation de ne rien oublier, mais nous travaillons au Québec avec la charte depuis 35 ans, et l'article 10 semble répondre parfaitement à l'immense majorité des situations, pour ne pas dire à la totalité d'entres elles. En fait, quand on l'a modifiée, c'était pour inclure l'orientation sexuelle. L'Ontario a d'ailleurs opté pour ce genre de définition plus explicite également.

De plus, préciser cette définition aura d'autres effets positifs. Par exemple, l'article 18.1 précise que l'élève est tenu de participer aux activités de l'école qu'il fréquente concernant le civisme et la lutte à l'intimidation; les activités du GRIS et d'autres de lutte à l'homophobie entrent parfaitement dans ce cadre de prévention universel. Or, certains élèvent refusent d'y assister en invoquant un principe de liberté de religion ou de contradiction avec leurs valeurs. Si la définition comprend l'orientation sexuelle, cela ne sera plus possible.

Troisième bénéfice obtenu en précisant la définition: puisqu'un document sera transmis aux parents, il serait dommage de passer à côté de cette occasion de rejoindre un public difficile d'accès. On sait l'importance que revêt l'acceptation du milieu familial quand on parle de découverte de son homosexualité ou de sa bisexualité. Inclure l'orientation sexuelle est aussi une occasion de sensibiliser les familles et de faire passer un message d'ouverture à la diversité sexuelle.

D'autre part, si nous nous réjouissons que tous les membres du personnel doivent collaborer à la mise en oeuvre d'un plan de lutte contre l'intimidation, nous nous inquiétons que les recherches démontrent sans équivoque que les adultes craignent souvent d'être étiquetés, à leur tour victimes d'homophobie s'ils interviennent. Beaucoup, comme le disait Vincent, racontent même des histoires de tapette.

Outre les malaises, il existe une méconnaissance des réalités homosexuelles dans le milieu scolaire. Le cursus initial de formation collégiale et universitaire des futurs enseignants et des professionnels du domaine de l'éducation ne comprend aucun cours sur la diversité sexuelle, le personnel de l'école n'est pas préparé à intervenir. Plusieurs enseignants et intervenants ont de la difficulté à contrer les commentaires et les comportements homophobes, ils détectent difficilement les situations de stress que peuvent vivre les jeunes concernés par l'intimidation homophobe. Il va donc être extrêmement important d'assurer le formation des enseignants et des professionnels.

Tout ça pour vous dire que le projet de loi est assez orienté sur qu'est-ce qu'on fait quand il y a de l'intimidation, mais il faudra aussi beaucoup réfléchir en amont et voir tout ce qu'on peut faire en prévention et en formation, et ça, j'y reviendrai aussi à d'autres moments plus tard dans cette présentation.

Un autre point absolument fondamental -- et, M. le Président, si un seul article du projet de loi devait changer, ce serait sans aucun doute celui-ci -- c'est l'obligation faite au directeur de contacter les parents de l'agresseur et de la victime en cas d'intimidation. Nous désirons ici lever un vrai drapeau rouge. Le cas de l'intimidation à caractère homophobe est très particulier, et le fait de prévenir les parents peut mettre en péril la sécurité du jeune victime d'intimidation. Les recherches et l'expérience du terrain montrent que les jeunes se font parfois éjecter du milieu familial à cause de leur homosexualité ou de leur bisexualité, encore une fois avérée ou présumée. Donc, les directions d'école devront agir avec discernement avant d'informer un milieu familial, parce que ça pourrait augmenter la détresse du jeune et son isolement. On recommande également que les directeurs ou les intervenants discutent en premier lieu avec l'élève victime pour élaborer la marche à suivre vis-à-vis du milieu familial.

En ce qui concerne l'équipe constituée pour lutter contre l'intimidation et la personne qui va la coordonner, nous voulons encore une fois insister sur la nécessité de leur offrir une formation appropriée, comme par exemple la formation Pour une nouvelle vision de l'homosexualité, qui est encadrée par l'Institut national de santé publique et qui s'est dotée d'une adaptation qui cible le milieu scolaire. Il faudra vraiment que ces gens soient en mesure d'identifier l'intimidation homophobe et de la contrer, et, pour ça, ils auront besoin d'être formés.

Aussi, on espère que la personne chargée de coordonner cette équipe sera vraiment vue comme une coordonnatrice et non pas comme la responsable. L'expérience nous a démontré que, quand une personne est responsable, ça permet à tout le reste de l'équipe-école de se décharger de cette responsabilité, et ça, c'est vraiment quelque chose qu'il faudra éviter pour que la responsabilité de la lutte à l'intimidation repose sur les épaules de tous et soit une responsabilité partagée.

Le Président (M. Marsan): Il vous reste deux minutes.

Mme Houzeau (Marie): Parfait. Je reviens sur la nécessité de formation aussi par rapport aux corps de police. Si la situation s'est améliorée dans les dernières années, il y a encore des préjugés envers les personnes LGBT gravés dans la mentalité de certains membres des services de police. Ça peut entraîner, lors de leurs interventions, des nouvelles situations à caractère homophobe et augmenter la détresse des jeunes.

Même chose pour le transport scolaire. On insiste sur le fait que les transporteurs scolaires doivent être formés, mais qui va déterminer ce qu'est une formation adaptée? Nous recommandons que le MELS décrive de façon précise le curriculum de formation devant être suivi et que ces formations soient obligatoires.

Finalement, l'article 20 qui parle de la prérogative du ou de la ministre de prescrire des activités et des contenus pour les services éducatifs, nous insistons sur la nécessité d'intégrer des contenus qui favorisent la compréhension de la diversité de l'expression de genre, parce que c'est bien là que repose l'homophobie. Nous insistons aussi sur le fait que des cours d'éducation sexuelle soient offerts de façon adaptée, bien sûr, dès le primaire et de manière graduelle jusqu'au premier cycle du secondaire. Et finalement cet article parle aussi des mesures d'exemption, des conditions d'exemption à ces curriculums. Nous recommandons qu'elles soient déterminées avec une plus grande prudence pour éviter, encore une fois, que des élèves puissent se soustraire à des enseignements qui reflètent les valeurs de la société québécoise sous toutes sortes de prétextes.

Finalement, nous nous étonnons de l'absence complète des témoins dans ce projet de loi. Les recherches sur les mécanismes de l'intimidation démontrent sans équivoque le rôle clé que peuvent jouer les témoins dans l'arrêt de la spirale de la violence et de l'intimidation, il serait donc plus que pertinent de les associer à la démarche et de les associer à de la formation et à de la sensibilisation. C'est particulièrement important dans le cas des intimidations à caractère homophobe, parce que les jeunes, même s'ils ne sont pas eux-mêmes homophobes, craignent d'agir de peur de devenir eux-mêmes la cible d'insultes. Et je vous laisserais sur une citation d'un jeune de 14 ans qui nous disait, à la suite d'une rencontre avec les GRIS: «Oui, une fois, tout le monde bousculait la personne. D'autres poussaient des cris du genre: Ta gueule, le fif! Puis, juste un gai et moi [nous] sommes restés à l'écart. Je sais que j'aurais dû intervenir, mais, sinon, ils auraient pensé que j'étais gai, alors je suis parti.» Et ceci résume exactement la difficulté et la particularité de l'intimidation à caractère homophobe au sein des écoles du Québec. Je vous remercie.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie, Mme Houzeau. Nous allons débuter immédiatement cette période d'échange, et je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. Mme la ministre.

**(11 h 30)**

Mme Beauchamp: Bonjour. Salutations à mes collègues membres de cette commission, ça me fait plaisir de vous retrouver, et bienvenue aux représentants des GRIS à l'échelle des différentes régions du Québec. Je veux vous remercier de votre contribution.

Peut-être commencer avec un premier commentaire: Votre mémoire est important, il comprend plusieurs éclairages nécessaires à apporter au débat pour la lutte contre l'intimidation à l'école, mais je veux juste prendre le temps de vous dire qu'à mon sens il y a plusieurs de vos commentaires ou de vos contributions qui ne s'inscrivent peut-être pas nommément dans ce qui doit apparaître dans un texte de loi mais qui s'inscrivent et qui donnent l'éclairage important de ce qui doit être compris dans l'ensemble d'une stratégie gouvernementale de lutte contre l'intimidation. Comme vous le savez, le gouvernement a déjà adopté une politique de lutte contre l'homophobie, un plan d'action qui comprend des éléments reliant le secteur de l'éducation nommément à cette stratégie, et je pense que, lors de l'annonce de l'ensemble de la stratégie gouvernementale, en présence du premier ministre, le premier ministre lui-même a fait le lien entre la question de la lutte à l'homophobie -- lui qui avait participé au lancement du plan d'action quelques mois auparavant -- et cette question de l'intimidation à l'école.

Je fais ces commentaires parce qu'à mon sens plusieurs de vos éléments, lorsque vous parlez de prévention, lorsque vous parlez de formation et différents autres éléments, relèvent plus d'éléments qui doivent être compris dans une stratégie globale, et je veux juste vous rappeler... Et c'est Réjean Parent, le président de la CSQ, qui, lors de sa comparution, la semaine dernière, rappelait aussi, je dirais, un peu inlassablement que le projet de loi doit être vu comme un élément faisant partie d'une stratégie complète qui ne comprend pas juste une législation, on ne veut pas essayer de prétendre qu'un texte de loi, qu'une loi vient couvrir et répondre à tous les enjeux de l'intimidation à l'école, et qu'il est important donc de dire que ça doit comprendre d'autres éléments. Et, comme vous le savez, les autres éléments comprennent, par exemple, des notions de mobilisation de la société québécoise, le fait que nous proposons la signature d'une déclaration de lutte contre l'intimidation -- si vous pouvez encourager vos réseaux, vos gens, il faut qu'on s'engage derrière cette mobilisation -- le fait également que, par exemple, dans cette stratégie, il y a des éléments reliés au fait qu'il y aura des séances dans les écoles sur le civisme. Ce sont tous des éléments qui peuvent contribuer à ce qu'on soit capables de répondre à beaucoup de vos souhaits, beaucoup de vos demandes, de vos requêtes qui concernent plus, à mon sens, plusieurs éléments qui sont de l'ordre de la culture à amener dans nos écoles, la culture organisationnelle, et de l'ordre de la mobilisation des acteurs.

Ça fait que je voulais dire que je reçois plusieurs de vos commentaires avec beaucoup de respect, beaucoup d'attention, mais en me disant: Ce n'est peut-être pas tout à fait dans le cadre d'une loi qui porte sur l'intimidation qu'on doit tenter de les intégrer, à mon sens. Mais vos signaux sont extrêmement importants.

Je veux d'emblée aborder la question que vous-mêmes, vous avez décrite comme étant l'article sur lequel vous insistez le plus pour que des changements soient faits. On a eu l'occasion hier soir d'échanger également avec le porte-parole, le fondateur de la Fondation Émergence sur cet élément, c'est le fait que, dans la loi, on prévoit qu'un directeur d'école doit communiquer aux parents lorsqu'il a dû intervenir dans une question d'intimidation, et vous nous amenez cet éclairage-là qui dit: Nous, on pense qu'il ne faut pas l'imposer. Hier, on avait le débat. Vous comprenez par ailleurs que je pense vraiment que c'est un apport extrêmement important à cette commission mais qu'en même temps, à la fin, la question est: Est-ce que, parce que je suis parent de quelqu'un qui soit se découvre ou se déclare homosexuel... est-ce que, parce que je suis un parent d'homosexuel, je serai le seul parent au Québec à ne pas savoir que mon enfant est victime d'intimidation? Il y a ce revers de la médaille.

Et je veux vous entendre un peu plus. Vous nous envoyez un signal qui est extrêmement important, extrêmement important et que je veux vraiment écouter avec beaucoup de soin, mais je voudrais vous entendre un peu plus sur comment on finit ça, là. Vous nous dites: N'imposez pas qu'on avertisse les parents en tout temps, mais en même temps est-ce que vraiment je suis en train de dire à des parents: Parce que votre enfant est homosexuel, vous serez peut-être parmi les seuls parents à ne pas être avisés que votre enfant est victime d'intimidation à l'école?

Mme Houzeau (Marie): Si vous me permettez, un petit mot d'abord sur votre mot d'introduction. Je comprends bien la mobilisation, je comprends bien que la loi est une chose et qu'il y a d'autres mesures, mais, dans le cas de l'homophobie, encore une fois, ce qui n'est pas nommé n'existe pas. L'homosexualité, la bisexualité, le lesbianisme sont des minorités invisibles. Si ne nous prenons pas la peine de nommer les choses dans les textes de loi, ils ne seront simplement pas pris en compte.

Mme la ministre soulève le fait que le premier ministre lui-même a fait le lien. Je n'ai aucun doute sur le fait que vous-mêmes ici, tout le monde dans cette salle fassent le lien parce que vous êtes sensibilisés. Le problème, c'est que la loi est là aussi pour les gens qui ne font pas le lien, qui ne font pas le lien parce qu'ils ne le voient pas ou qui ne font pas le lien parce qu'ils ne veulent pas le voir.

Il s'est dit à d'autres moments dans cette commission que la loi était là aussi pour les écoles, un certain pourcentage, un pourcentage assez important, entre 30 % et 50 %, si j'ai bien compris, des écoles qui n'ont rien fait suite au plan d'action ou pas fait grand-chose, pas encore mis grand, comment dire, actions en place. Ces écoles-là, il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles elles n'ont pas agi, mais on peut penser aussi que certaines n'ont pas agi parce qu'elles ne voient pas la nécessité d'agir. Si vous saviez le nombre de fois que nous nous faisons dire, dans les milieux scolaires: Ici, on n'en parle pas, d'homosexualité; moi, je n'ai pas d'élève gai. On se le fait dire à Montréal. On se le fait dire en région, où, en général, on ajoute: Je n'en ai pas parce qu'ils sont tous à Montréal.

Il y a donc, pour certaines personnes, une volonté de ne pas agir sur cette question-là. Or, la mobilisation, la volonté, elle vient des gens qui sont sensibilisés. La loi sera là pour obliger ceux qui ne le sont pas ou ceux qui ne veulent pas agir à le faire.

Pour revenir à la question des parents, Marie-Ève, tu voulais dire quelque chose, vas-y.

Mme Couture (Marie-Ève): Moi, ce que je tiendrais...

Le Président (M. Marsan): Mme Couture.

Mme Couture (Marie-Ève): Merci beaucoup, M. le Président. Donc, ce que je tiendrais à souligner: au niveau du projet de loi, il est parlé de sanctions, mais, si on parle de sanctions, qu'est-ce qui pourrait être inclus dans le projet de loi pour promouvoir les actions que les écoles pourraient mettre en place? Qu'on prenne, par exemple, le prix de la Fondation Simple Plan qui est mis en place par les différents GRIS, donc, c'est très mobilisateur, ça a un autre regard. Donc, si on veut la collaboration des établissements scolaires, nous, ce qu'on voit, c'est davantage de travailler avec eux qu'un peu leur taper sur la tête, entre guillemets.

Et, au niveau de l'exclusion, j'ai certains exemples -- je vais être quand même assez concise -- au niveau d'une jeune qui fait appel à notre organisme parce qu'elle est victime d'homophobie en milieu scolaire, elle est lesbienne, ses parents la soutiennent là-dedans, sont au courant qu'elle vit de l'homophobie, et la direction de l'école, ce qu'ils décident de faire, c'est de la mettre dans un coin reculé au niveau des casiers, donc à un endroit où est-ce qu'ils circulent moins, pour essayer de l'éloigner des intimidateurs. Et présentement, quand je l'ai rencontrée, ils étaient rendus à envisager la solution de changer d'école.

Comment outiller les directions? On s'entend qu'on déplace le problème. On ne règle pas le problème d'homophobie, on fait juste déplacer la personne qui en est victime. C'est qui qui en vit les conséquences? C'est la jeune elle-même. Donc, comment faire, au niveau du projet de loi, pour éviter des situations comme ça? Si la formation n'est pas obligatoire au niveau de la loi, s'il n'y a pas d'outil concret amené et prévu, nommé explicitement dans la loi, moi, j'ai peur qu'on échappe ces gens-là.

Et les jeunes connaissent leurs parents. Il y a des organismes qui viennent en aide justement, comme je regarde au niveau ADOberge, dans Chaudière-Appalaches, qui héberge souvent des jeunes qui ont dévoilé leur orientation sexuelle à leurs parents et qui ont justement été éjectés de leurs familles, et, avant qu'ils soient réintégrés, il y a un travail qui doit être fait. Donc, comment encouragez-vous des situations comme ça?

Mme Beauchamp: Si vous permettez, je sais qu'on n'a pas complété toute la réponse à ma première question, mais néanmoins ça m'amène quand même à vouloir échanger, là, sur deux aspects de votre intervention, peut-être la première. Quand vous dites: Pas de sanction, il faut plutôt y aller de façon positive, je prends juste le temps de vous dire ceci: Dans le projet de loi, il y a une obligation pour le directeur d'une école d'appuyer des comités étudiants qui proposent des actions de lutte contre l'intimidation. D'ailleurs, ça va assez loin, ça, il y en a qui ont dit: Est-ce que ça va trop loin? Mais je prends juste le temps de vous le dire, la notion de: Il faut mobiliser, dans une école, puis il faut appuyer, là... je n'aime pas le terme anglais, mais l'«empowerment», là, outiller les jeunes à ce qu'eux autres mêmes sachent qu'ils ont du pouvoir, qu'ils ont du pouvoir d'intervenir, qu'il y a des actions qui se mènent, de ce type-là, dans les écoles. La loi dit: Un directeur d'école doit appuyer des comités d'étudiants qui proposeraient de telles actions. Ça fait que je prends juste le temps de vous donner cet éclairage-là qui est important.

Le deuxième éclairage: Quand vous donnez l'exemple de la jeune fille que vous venez de donner, qu'est-ce que vient changer la loi? La loi change quelque chose à l'histoire que vous me racontez. La loi, elle dit: S'il y a une personne dans une école qui est témoin d'un geste d'intimidation ou qu'un geste d'intimidation est porté à sa connaissance, il y a maintenant une obligation d'intervention. Il faut que cette personne-là avise le directeur de l'école et il faut que le directeur de l'école rencontre la personne, il faut qu'il avise les parents. Il faut qu'il y ait aussi contact, qu'on avise les parents de l'élève intimidateur. Il faut que le directeur de l'école obtienne l'engagement de l'élève intimidateur et de ses parents que le geste de ne sera pas répété, etc.

Ça fait que ce que je veux dire, c'est que, moi, l'histoire que vous racontez, c'est exactement le genre de situation où je me dis: Il faut que ça cesse que la victime d'intimidation soit le problème et que c'est cette personne-là qu'on essaie des fois même de changer d'école. On nous l'a trop souvent racontée, cette histoire-là. Et là l'idée, c'est: La personne victime d'intimidation, elle n'est pas le problème, elle est une victime et elle demande à ce que ça déclenche une notion de responsabilisation de toute une école qui dit: Ça, c'est inacceptable, et j'interviens.

Donc, quand vous... je voulais juste amener cet éclairage, parce qu'il me semble que... J'espère que le projet de loi est clair sur le fait que c'est 100 % obligation d'intervention lorsqu'on rapporte un geste d'intimidation de la... C'est exactement ce que prescrit la loi. C'est pour ça qu'on introduit la loi.

**(11 h 40)**

Donc, je voulais juste amener ce commentaire pour voir si on se comprend bien. Je pourrais vous citer les différents articles de loi qui obligent à un régime d'intervention et que la... et notamment encadrement et intervention par rapport aux élèves intimidateurs. Ça, c'est extrêmement important pour moi de le confirmer et de le réaffirmer. Et, si vous avez des commentaires à me faire pour qu'on renforce encore ces éléments-là, je vais les recevoir avec bonheur, mais l'idée ici, c'est que ça suffit, là, que la victime d'intimidation soit vue comme le problème. Ce n'est pas cette personne-là, le problème, puis il faut le dire haut et fort, puis il faut encadrer ça comme il faut dans un texte de loi.

Mme Houzeau (Marie): J'entends bien ces précisions, et effectivement elles sont assez claires dans le projet de loi.

Pour revenir avec ce que vous disiez par rapport aux parents, justement, en fait c'est là qu'est la question. La victime, vous le dites, ce qu'elle veut, c'est que ça cesse, c'est qu'il y ait un arrêt d'agir, c'est qu'il y ait un processus qui soit mis en branle pour que sa victimisation cesse et qu'elle puisse être dans un environnement sain et sécuritaire, favorable à son apprentissage. Si on prévient les parents de cette victime-là, non seulement on n'a aucune garantie que ces parents-là sont des alliés dans l'arrêt d'agir en milieu scolaire, mais en plus il se peut très bien qu'en plus d'être une victime en milieu scolaire elle devienne aussi une victime en milieu familial, et ça, vraiment, ça peut devenir extrêmement lourd. Des jeunes nous disent très souvent: Quand je rentre à la maison -- et, en plus, avec la cyberintimidation, on sait que c'est de moins en moins vrai -- quand je rentre à la maison, c'est le seul endroit où je peux commencer à respirer. S'il rentre à la maison avec la crainte que les insultes, que la violence psychologique qu'il vit de façon quotidienne à l'école soient transportées à la maison, où est-ce que ce jeune va aller, qu'est-ce qu'il va faire? Et, je vous dirais, la question n'est pas de savoir... n'est pas de dire à un parent: Vous ne saurez pas que votre élève est victime d'intimidation parce qu'il est gai. La question est de savoir si c'est plutôt: Vous ne saurez pas que votre élève est victime d'intimidation parce que vous êtes homophobes ou parce qu'il pense que vous êtes homophobes, et peut-être à tort, mais cet enfant-là, il est probablement... il peut, pas tous, il peut être terrorisé à l'idée que son père sache qu'à l'école il se fait traiter de fif ou de tapette.

La seule chose que nous demandons, en fait, c'est que cette obligation soit retirée. Nous ne disons pas qu'il ne faut pas prévenir les parents. On voudrait retirer le caractère obligatoire de ce fait-là et qu'il y ait par contre un incitatif, à tout le moins, à discuter avec le jeune, de voir: Qu'est-ce que toi, tu veux? Comment tu te sens là-dedans? Comment tu perçois ton milieu familial? Quel genre de réaction tu anticipes de la part de tes parents? Est-ce que ça va t'aider ou est-ce que ça va te nuire? Et, si la réponse est: Ça va me nuire, il faudra peut-être y penser à deux fois avant d'appeler.

M. Tardif (André): Si vous permettez, j'aimerais ajouter que... même appuyer ce que dit Marie sur le fait que c'est fondamental, en fait. Les parents, on travaille actuellement avec un jeune -- c'est un exemple du terrain -- dont les parents sont homophobes les deux. C'est un jeune qui, par contre, ne vit pas d'homophobie en milieu scolaire mais a quand même travaillé avec une intervenante de son milieu, qui travaille avec nous pour essayer de déterminer comment on pourrait améliorer sa condition. Si ce jeune-là vivait actuellement l'homophobie en milieu scolaire, si... Parce qu'il nous a écrit sur le premier courriel, quand il est entré en communication avec nous, en disant: Si mon père le sait, il va me tuer, me mettre à la porte, enfin, il avait différentes façons de le nommer, et je veux terminer là-dessus en disant que la seule personne qui peut déterminer le moment opportun pour faire son «coming out», c'est la personne elle-même. On ne doit pas provoquer, on ne doit pas avoir des actions qui vont faire en sorte... et même pour les adultes, soit dit en passant. On appelle ça faire du «outing». On ne doit pas provoquer le «coming out» de quelqu'un, ça pourrait être dramatique dans le cas de jeunes qui ont la crainte, la peur profonde de vivre cette homophobie-là en milieu scolaire. Voilà.

Mme Houzeau (Marie): On a d'ailleurs récemment, pas plus tard que l'année passée, vu un suicide aux États-Unis pour cette exacte raison d'un jeune qui s'est fait «outer» et qui n'a pas supporté la pression, je dirais.

Mme Beauchamp: Je vous remercie et je pense que vous nous apportez un éclairage vraiment important. J'appelle ça, moi, la vraie vie. Vous savez, des fois on est plein de bonnes intentions, comme législateurs, mais vous venez de nous apporter un éclairage qui est vraiment important et dont je prends bonne note. Nous verrons comment nous pourrons le traiter à l'intérieur de l'étude article par article, mais je prends bonne note de vos commentaires.

Dans votre mémoire, à la fin, et vous avez pris le temps de le dire également dans vos propos, vous vous dites surpris, là, de voir que, selon vous, la loi ne nomme pas assez ou ne fait pas place, je vais dire ça comme ça, référence à la notion des témoins, puis je veux vous entendre un petit peu plus là-dessus. Premièrement... Peut-être deux choses. La première -- deux réactions que j'ai, puis je vais vous laisser ensuite compléter -- c'est de dire... Ça me surprenait un peu, parce que quand même, comme je l'expliquais tantôt, la loi, par un de ses articles, dit qu'un plan d'action contre l'intimidation à l'école doit comprendre, doit identifier les actions qui doivent être prises lorsqu'un acte d'intimidation ou de violence est constaté par un élève, un enseignant, un membre du personnel ou par quelque autre personne. Donc, vous avez ici un article qui dit: Lorsque je suis témoin d'un acte d'intimidation, ça doit déclencher des actions, et, pour moi, donc, je vous dis juste que, pour moi, la loi qu'on propose fait place aux témoins, dit: Si je suis témoin... D'ailleurs, on l'a souvent dit même en slogan, on doit arrêter d'être des témoins silencieux puis on peut devenir des héros ordinaires, parce que vous avez raison de dire que toute la recherche nous montre que, quand j'interviens, le comportement cesse dans la majorité des cas. Donc, selon moi, la loi dit justement: Si je suis témoin, j'interviens. Selon moi, ça dit ça.

Puis l'autre chose, c'était justement aussi de faire le lien avec le fait que la notion que les témoins réalisent qu'il faut arrêter d'être témoins silencieux puis de devenir des héros ordinaires, c'est exactement le thème de la campagne publicitaire qu'on a aussi mise en place dans cette logique de mobilisation de la société québécoise. Donc, c'est peut-être un exemple que je voulais vous donner dans mes premières remarques, quand je vous disais: Il y a des éléments qui appartiennent peut-être plus à des notions d'information, de sensibilisation, de prévention qui n'ont peut-être pas... qu'il est difficile d'intégrer dans un texte de loi mais qu'on reconnaît.

Donc, quand je vous donne ces deux éclairages, à savoir que, comme gouvernement, on a nommé l'importance de dire aux témoins silencieux: Arrêtez d'être des témoins silencieux, vous pouvez être des héros ordinaires, puis qu'on l'a fait nommément dans une campagne d'information, et le fait que la loi dit: Si vous êtes témoins d'un geste d'intimidation, vous devez agir, est-ce que je vous donne un éclairage suffisant ou vous dites: Il y a d'autres éléments qui doivent être inscrits dans cette loi?

Le Président (M. Marsan): Il reste très peu de temps, j'aimerais ça recevoir vos commentaires. Mme Houzeau.

Mme Houzeau (Marie): Oui. Bien, d'après nous, il y a d'autres choses, en fait, parce que, oui, c'est sûr que la loi nomme les témoins, mais elle les nomme comme un tremplin vers l'arrêt d'agir, encore une fois. Donc, le témoin a l'obligation de dénoncer puis c'est tout, on ne parle plus du témoin.

Or, le témoin, par exemple, on sait qu'il peut lui-même être profondément choqué ou en souffrance par rapport à ce qu'il a vu ou ce qu'il a vécu, et moi, je ne vois pas qu'on en prenne soin. En tout cas, peut-être je me trompe ou j'interprète mal, mais je ne vois rien à ce propos-là.

Et l'autre point aussi, c'est que c'est sûr que c'est une excellente chose de dire aux témoins: Ne soyez plus des témoins silencieux, dénoncez, agissez, mais il faut les outiller, il faut leur donner les moyens de faire ça, il faut voir comment on peut les aider à se sentir légitimes dans cette façon de réagir. Le cas que je vous ai lu à la fin de la présentation, ce jeune-là, il veut, il a envie de le dénoncer, il a envie d'agir, mais il n'est pas outillé.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie bien. Nous poursuivons cette période d'échange, et je vais donner la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire, M. le député de Jonquière.

**(11 h 50)**

M. Gaudreault: Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup d'être ici. Et c'est avec bonheur que je constate... Vous êtes quand même représentatifs de plusieurs régions différentes du Québec. Alors, je connais la qualité de votre travail et je vous encourage à poursuivre, à vous multiplier, je dirais, à travers les autres régions du Québec, dans les régions comme la mienne qui ont déjà eu des initiatives avec le GRIS, mais malheureusement c'est tombé avec le temps, par manque de bénévoles et tout. Alors, je vous encourage à poursuivre votre travail et de vous multiplier dans les régions où il n'y a pas de groupe comme le vôtre en ce moment.

Je vous remercie également de votre présentation et de vos commentaires, qui sont extrêmement éclairants, parce qu'on a comme deux volets dans le travail qu'on fait ici depuis jeudi, je dirais, il y a un volet où on est beaucoup plus sur l'application des choses, l'application de la loi, et il y a un volet où on est plus sur la réflexion et les motifs, les causes de l'intimidation, et vous êtes bien positionnés pour nous éclairer sur les causes, mais vous êtes aussi bien positionnés, je pense, considérant les interventions que vous faites dans les écoles, sur l'application comme telle dans les milieux scolaires. Alors, vos informations, vos témoignages sont très, très riches pour la commission qui étudie le projet de loi n° 56.

Avant d'aborder la question de la définition, de la formation, etc., peut-être juste faire un petit lien sur la question de l'information qu'on doit ou non donner aux parents à partir du moment où leur fils ou leur fille peut être victime d'intimidation basée sur, entre autres, l'homophobie. C'est une question très délicate qui pose tout un dilemme, vous avez eu un bon échange avec la ministre là-dessus. Hier, on a eu l'occasion d'en parler également, hier soir, et moi, je suis très, très, très sensible, évidemment, au fait qu'il faut respecter le jeune dans ce qu'il est, être à son écoute quant aux craintes qu'il perçoit, qu'elles soient fondées ou non, mais à tout le moins que le jeune perçoit quant à la réception d'une telle situation par ses parents. Mais vous avez raison, ce n'est pas au directeur d'école d'aviser ses parents qu'il est peut-être gai, je veux dire, ça n'a pas de bon sens, ou qu'il ne l'est pas mais qu'il est victime d'intimidation sur ce motif-là.

Alors, je vous écoutais tout à l'heure, en échange avec la ministre, puis je me disais -- puis là je réfléchis tout haut: Est-ce qu'on pourrait amener, par exemple, une notion d'adulte significatif pour le jeune qui pourrait être un guide pour ce jeune-là, pour lui permettre éventuellement après de faire un contact avec ses parents? Parce que je pense qu'à terme il faut que les parents soient dans le coup, mais ce n'est pas au directeur d'école de prendre le téléphone pour dire: Votre fils ou votre fille est victime d'intimidation sur la base de l'homophobie, on pense qu'il est gai, je veux dire, ça n'a pas de bon sens. Mais le jeune a probablement dans son milieu, il risque d'avoir peut-être même dans son école... Ça peut être un oncle, ça peut être une tante, ça peut être un grand frère, une grande soeur qui est un adulte significatif pour lui et qui pourrait... mais s'assurer, autrement dit, que le jeune ne tombe pas entre deux chaises puis que le fait, donc, qu'il est victime d'intimidation sur la base de l'homophobie ne fasse pas en sorte qu'il soit laissé à lui seul et quand même chercher à progresser vers une information à l'égard de ses parents via peut-être un soutien d'un adulte significatif.

En tout cas, je lance ça comme ça dans la mêlée, je ne sais pas comment vous pouvez réagir à première vue. Ensuite, on pourra élaborer sur d'autres sujets.

Mme Houzeau (Marie): Bien, écoutez, je pense qu'effectivement ce serait déjà un progrès, certainement, parce qu'il aurait effectivement voix au chapitre, et ça, je pense que c'est très important. Ça ne sera peut-être, par contre, pas toujours simple non plus à réaliser même avec cette idée-là, parce que ce que la recherche nous dit... Quand on parle aux jeunes de façon générale, là, peu importe leur orientation sexuelle, on leur demande: O.K., si tu vis une difficulté, si tu vis une problématique, à qui est-ce que tu en parlerais?, et les jeunes, en général, ce qu'ils nous disent dans les recherches, c'est: Bien, j'en parlerais à mes amis, à ma famille, à un intervenant scolaire -- tout ça, c'est dans l'ordre des pourcentages -- et, pour ceux qui croient, à leur paroisse, et, si on demande aux jeunes gais, lesbiennes, bisexuels ou en questionnement: Quels sont les milieux au sein desquels tu crains le plus de dévoiler ton orientation sexuelle?, ils nous disent, exactement dans le même ordre: Mes amis, ma famille, l'école et, pour ceux qui croient, la paroisse. Donc, ces jeunes-là, parfois, encore une fois, pas toujours, parfois sont très isolés et ils n'ont parfois eux-mêmes aucune idée de qui serait cet adulte significatif ou ce lien qui pourrait mener tranquillement vers un dialogue avec leurs parents.

Et je ne voudrais pas ouvrir une boîte de Pandore non plus ici, mais là on parle de jeunes en général. Ajoutons à ça... Peut-être, là, c'est peut-être plus la réalité de Montréal, mais ajoutons à ça les questions de communauté culturelle, par exemple, ou de certaines familles plus religieuses pour qui l'homosexualité, je vous dirais, c'est, dépendamment du choix, de l'incarnation de Satan ou... enfin, bon, au choix. Comment est-ce que cet adulte-là, comment est-ce que ces parents-là vont pouvoir faire face à cette idée que leur jeune soit gai, lesbienne ou bisexuel?

Donc, oui, peut-être -- mes collègues, je ne sais pas si vous voulez vous exprimer par rapport à ça -- c'est mieux déjà, c'est mieux, mais c'est difficile encore.

Le Président (M. Marsan): Mme Couture.

Mme Couture (Marie-Ève): C'est mieux. J'aurais envie de parler des fois de risque de double homophobie, de doublement victimisé, justement, dans le cas de certaines familles où est-ce qu'ils peuvent avoir certaines croyances qui rejettent l'homosexualité. Et, non, ce n'est pas juste à Montréal, j'ai eu un exemple assez concret dernièrement. Donc, cette réalité-là, elle est partout.

C'est de voir autant l'exemple qu'un adulte, un parent, sa réaction peut avoir face à un «coming out» d'une amie de son enfant. Là, je donne un exemple concret. Il y a une fille qui m'a dit: Bien, moi, dès que ma cousine, elle l'a dit, puis que ça s'est su ouvertement dans ma famille qu'elle était bisexuelle, ma mère n'a plus voulu que j'aille coucher chez cette cousine-là. Et elle arrive, elle dit: J'avais une très belle relation, et ça me manque et ça me blesse, j'aurais préféré jamais que ma mère ne soit au courant. Donc, imaginez, cette jeune-là, si elle se pose des questions. Comment... Quel adulte significatif qu'elle va pouvoir aller voir? Ça va être qui pour elle?

Donc, justement, l'isolement, dans tout ça, on voit que l'homophobie, ça touche aussi les amis des personnes qui sont victimes, qui ne savent pas trop comment faire et qui ne savent parfois que trop bien comment que leur entourage immédiat pourrait réagir.

M. Tardif (André): Je peux peut-être ajouter très brièvement une notion qui est celle de l'homophobie intégrée, c'est-à-dire que les jeunes eux-mêmes et même les adultes, on peut avoir soi-même, comme lesbienne, bisexuel ou gai, une vision très négative qui nous a été inculquée, finalement, pour diverses raisons. Marie nommait... ça peut être la religion, mais soi-même, on peut avoir une image très noire, défaitiste de son orientation sexuelle, et ça aussi, il faut en tenir compte. Ça peut davantage compliquer cette recherche-là soit d'une personne significative ou d'une porte de sortie, je vais appeler ça comme ça. Ça fait partie, dans la recherche d'une solution, de quelque chose qui est complexe aussi et dont on doit tenir compte absolument.

Le Président (M. Marsan): M. le député de Jonquière.

**(12 heures)**

M. Gaudreault: Oui, merci. Alors, on voit que ce n'est pas simple, hein, toute cette question-là, mais en tout cas moi, je suis très, très préoccupé par le fait qu'il ne faut pas que le jeune tombe entre deux chaises, un, et, deux, à terme, peu importe la situation, il faut que les parents soient mis dans le coup éventuellement. Mais je comprends qu'il y a un processus d'éducation qui doit se faire à travers ça. En tout cas, ce sera à nous de poursuivre la réflexion là-dessus. Bon.

Alors, je voulais revenir sur la question de la définition. Vous proposez, dans votre mémoire, de faire un peu de copier-coller, si on veut, avec les motifs de discrimination au sens de la Charte des droits et libertés. Bon, je ne les ai pas devant moi, là, mais je pense qu'il y en a 11, là: la race, la grosseur, l'orientation sexuelle évidemment, l'origine sociale... En tout cas, peu importe, il y en a 11. Bon, à la limite, est-ce qu'on est... C'est sûr que c'est une définition qui est bien connue au Québec, et moi, j'ai tendance, comme législateur, à essayer de piger, je dirais, dans ce qui est déjà établi ailleurs dans d'autres lois pour qu'il y ait un genre de continuum dans notre corpus législatif au Québec, mais, dans le cas qui nous intéresse, de l'intimidation, est-ce que ça ne pourrait pas être trop limitatif quant à ça? Par exemple, est-ce que la réalité des transgenres, des transsexuels, qui touche davantage la question de l'identité sexuelle que l'orientation sexuelle, ne serait pas touchée? Est-ce qu'on n'est pas mieux d'y aller avec une définition un peu plus large qui permettrait, à ce moment-là, de s'adapter dans le temps aux différents types d'intimidation?

Puis hier les gens qu'on a entendus ici nous parlaient également de l'intimidation passive, donc qui est plus reliée au fait qu'un jeune peut être, par exemple, isolé, et c'est juste qu'il est ignoré, mais c'est une forme d'intimidation aussi.

Donc, il faut, je pense, couvrir tous les angles de l'intimidation, et ma crainte, c'est que bizarrement, si on fait du copier-coller avec la définition de la... les motifs de la discrimination en vertu de la charte, on soit trop limitatifs.

Mme Houzeau (Marie): D'abord, dans le mémoire que nous avons déposé, on inclut l'identité sexuelle. Donc, pour ce qui est de la question des transgenres et des transsexuels, ce serait couvert. On inclut aussi l'expression de genre.

Donc, nous, ce qu'on recommande, c'est de s'inspirer de l'article 10 de la charte et non pas de le copier-coller. Donc, on se permet, et c'est peut-être très ambitieux de notre part, mais de bonifier la charte en y ajoutant quelques compléments, et, avec ces compléments-là, j'ai vraiment peine à imaginer quelque chose qui ne rentre pas dans cette définition-là.

Je comprends ce que vous me dites avec la question de l'intimidation passive et puis moi aussi, je réfléchis tout haut et je m'interroge. Est-ce que, là, on ne mélange pas raison et forme? Donc, est-ce que l'intimidation passive...

Donc, le fait d'ignorer quelqu'un, O.K., si j'ai bien compris ce dont vous parlez, c'est plus une façon de faire l'intimidation, mais cette personne qui est ignorée, bon, c'est ça, on l'ignore plutôt que de lui envoyer des textos à longueur de journée -- là, ce serait de la cyberintimidation. Là, on l'ignore, mais il y a une raison quelque part qui fait que cette personne-là, elle est ignorée, que c'est sur elle que, malheureusement, l'intimidation passive est tombée. Et la définition, en fait, quant à moi, elle gagnerait à préciser les motifs de façon spécifique et par contre, de façon assez générale, de laisser une ouverture à différentes formes, parce que, là, je pense qu'il peut y avoir une évolution. Effectivement, la cyberintimidation n'était pas du tout d'actualité il y a 20 ans, et qui sait ce qui sera d'actualité, ce que les jeunes inventeront dans les 20 prochaines années sur la façon de faire souffrir leurs condisciples? Ils sont très, très créatifs à ce niveau-là, on leur fait confiance. Donc, effectivement, là, je pense qu'il y a une possibilité d'évolution et que d'avoir quelque chose d'assez large, ce serait intéressant.

Par contre, sur les motifs, je dirais que la nature humaine, elle, est assez stable depuis plusieurs millénaires et que les motifs, dans le fond, qui provoquent ou qui créent de l'intimidation en milieu scolaire sont de toute façon aussi le reflet de notre société en général, c'est-à-dire que ce qui est plus ou moins accepté dans le monde des adultes ou plus ou moins remis en question, eh bien, c'est ça qui crée de l'intimidation, ce sont les motifs qui créent de l'intimidation en milieu scolaire. Je vous donne des exemples. On parle évidemment de l'orientation sexuelle. Oui, on est dans un pays où on est très, très, très chanceux, mais, quand même, l'égalité sociale pour les personnes LGBT, ce n'est pas acquis. Vous parliez du poids tout à l'heure; on sait à quel point sont stigmatisés les gens en surpoids même au sein des adultes. On parle de la race, la même chose, le racisme est présent chez les adultes encore. L'école, c'est une microsociété, hein, alors on n'a qu'à se regarder nous-mêmes. Regardons-nous le nombril en tant qu'adultes et on va savoir ce qui va provoquer de l'intimidation en milieu scolaire.

Et je terminerais en disant que j'insiste sur le fait que, pour les minorités invisibles comme l'orientation sexuelle, l'identité sexuelle, ce qui n'est pas nommé n'existe pas, et les gens qui ne voudront pas agir sur cette forme d'intimidation pourront simplement dire: Ce n'est pas écrit. Ce n'est pas ça, de l'intimidation. L'intimidation, c'est seulement quand tu es gros, tu es petit, que tu as des lunettes, que tu as un appareil dentaire, etc. Ce n'est pas écrit «orientation sexuelle», puis, de toute façon, chez nous il n'y en a pas, ils sont tous à Montréal. Je reviens avec ça, mais c'est ça qu'on entend, d'où l'importance de le nommer dans cette loi.

M. Gaudreault: Oui. Je veux vous entendre davantage sur la formation des intervenants, profs, directeurs d'école, professionnels, chauffeurs d'autobus, même, vous l'avez mentionné. Comment on peut bonifier leur formation, comment on doit agir? Qu'est-ce qu'ils doivent avoir de plus?

Mme Houzeau (Marie): C'est sûr que, dans l'idéal -- mais là je sais que Mme la ministre va me dire que ça ne peut pas faire partie du projet de loi, puis je le conçois très, très bien -- dans l'idéal, il faudrait changer les cursus au cégep et à l'université pour que ces enseignants et ces intervenants scolaires aient une formation adaptée et appropriée pendant leur formation professionnelle. Mais ça, ça fait partie d'un autre volet, j'en suis bien consciente.

Pour ce qui est du projet de loi, je pense qu'il serait intéressant que le gouvernement regarde ce qui se fait déjà en son sein, il y a déjà des programmes qui sont offerts par différents ministères qui sont des formations de courte durée. On faisait allusion, dans le mémoire, à la formation qui s'appelle Pour une nouvelle vision de l'homosexualité, qui dépend du ministère de la Santé, de l'Institut national de santé publique, qui est une formation offerte un jour sur la vision de l'homosexualité puis un deuxième jour sur comment adapter les interventions aux jeunes qui peuvent vivre des difficultés liées à leur orientation sexuelle ou leur identité de genre, et je pense qu'il serait intéressant de... j'allais dire «exiger» -- pourquoi pas? -- d'exiger que les gens qui seront en tout cas concernés de façon spécifique par le projet de loi -- je pense encore une fois, par exemple, à la coordonnatrice de l'équipe ou au coordonnateur de l'équipe et aux membres de cette équipe-école -- aient l'obligation de suivre une formation telle que celle-là. C'est deux jours, ça se fait encore bien, et je crois qu'on progresse avec ce type de formation. En tout cas, c'est ce que les intervenants nous disent une fois qu'ils l'ont reçue.

Le Président (M. Marsan): Mme la députée de Marguerite-D'Youville.

Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, M. le Président. Merci, mesdames messieurs, de votre éclairage sur cette question-là, mais en même temps j'ai l'impression qu'on ne voit pas de solution, dans le sens où il y a un projet de loi qui met un certain nombre de choses, vous faites des mises en garde à partir de l'expertise que vous avez développée... Je pense particulièrement au questionnement ou à l'intervention auprès des parents. Ça nous préoccupe énormément parce que, quand on est en milieu scolaire, notre lieu habituel de référence, ce sont les parents. Je comprends très bien toutes les mises en garde que vous faites. En même temps, on avance la question d'un adulte significatif pour le jeune, et, encore là, vous nous faites des mises en garde -- à bon droit, je les comprends très bien.

Mais comment vous verriez, vous, une intervention efficace du milieu scolaire, qui a une obligation, de par une loi qui est très bien reçue, de mettre fin à l'intimidation ou d'enrayer le plus possible l'intimidation à l'école? Et on sait que particulièrement les jeunes qui sont homosexuels, ou qu'on appréhende qu'ils pourraient l'être, ou dont la situation n'est pas connue mais qu'il y a quand même des gestes qui sont posés à leur égard... Comment on peut intervenir pour faire en sorte que... Parce qu'on prévoit des ententes avec la police, on prévoit des ententes possiblement avec les services sociaux. Vous êtes là, vous, comme ressource auprès des écoles. Comment vous le voyez? Comment vous la voyez, la trajectoire, pour un élève sur lequel on s'interroge tellement depuis qu'on entend... depuis qu'on est en auditions sur ce projet de loi?

Une voix: Bien, tout le monde peut y aller, là.

Le Président (M. Marsan): Mme Couture.

Mme Couture (Marie-Ève): Merci. Je pense que le jeune, il sait c'est vers qui qu'il pourrait aller le plus facilement, justement. S'il a le goût... Bon, si, pour x raison, il sent que ses parents... il ne se voit pas, lui, annoncer ou quoi que ce soit et qu'il passe par un adulte, exemple, significatif, moi, ce que j'aime bien proposer, c'est de pouvoir utiliser les ressources qui sont à l'intérieur de l'école, exemple au niveau de l'équipe-école ou des intervenants en place, pour qu'il soit en mesure de... exemple dans le cas où est-ce que ça fait beaucoup de temps que ça traîne et que l'école se dit: Bon, bien, tant qu'à être obligé d'en parler... bien d'offrir un service de médiation, à la limite, vraiment à l'extrême, dans le cas... Parce que, là, de ce que je comprends, vous voulez absolument que le parent, au terme de tout ça, soit au courant que son enfant soit victime d'homophobie. Bien, ce serait important...

Une voix: ...intimidation.

Mme Couture (Marie-Ève): D'intimidation. C'est d'autant plus important de s'assurer que le parent ne se revirera pas de bord: Bien, je t'avais dit de ne pas t'habiller comme ça. Tu sais, il faut éviter ça, et le meilleur moyen, c'est d'éduquer le parent.

Donc, c'est de s'assurer... S'il y a des interventions qui sont faites dans ce sens-là, moi, ce qui m'apparaît peut-être bien, ce serait de rencontrer le jeune et le parent ensemble pour pouvoir en parler mais rencontrer le parent avant pour ne pas qu'il se revire vers son enfant: Bien là, est-ce que tu l'es ou tu ne l'es pas? Donc, il ne faut pas qu'il y ait ce genre de confrontation là. Il faudrait trouver un moyen pour s'assurer que ça ne continue pas à la maison, ce questionnement-là, parce que c'est beau, des fois il y en a qui sont polis en avant de tierces personnes puis qui n'iront pas... mais en fait le projet de loi devrait prévoir ça. Puis je pense que le jeune le connaît bien. Donc, s'il y aurait un adulte significatif qui pourrait préparer le terrain aux parents, ça pourrait, dans certains cas, être utile.

Mais c'est vraiment outiller cas par cas. Il y a certains jeunes qui n'y verront pas de problème. Il y en a d'autres pour qui ça va être: Aïe! Nous autres, dans certaines... on pratique telle religion, ça ne passera pas.

**(12 h 10)**

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie beaucoup, ceci termine cette période d'échange. Je voudrais vous remercier, Mme Houzeau, Mme Couture, M. Chouinard, M. Tardif, M. Senneville et Mme Angers, et je vous remercie de nous avoir donné le point de vue du Groupe régional d'intervention sociale, le GRIS.

Et j'inviterais maintenant les représentants de l'Association des cadres scolaires du Québec à venir se présenter à notre table. Et nous allons suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 11)

 

(Reprise à 12 h 13)

Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux, et il nous fait plaisir d'accueillir les représentants de l'Association des cadres scolaires du Québec et Mme Lucie Demers, qui en est la présidente. Mme Demers, je vais vous demander de nous présenter les gens qui vous accompagnent et de nous faire votre présentation, pour un maximum de 15 minutes. Merci.

Association des cadres scolaires du Québec (ACSQ)

Mme Demers (Lucie): Merci beaucoup. Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, membres de la commission, l'Association des cadres scolaires du Québec est heureuse d'avoir été invitée à vous faire part du point de vue de ses membres sur le projet de loi n° 56 visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école et vous remercie de nous accorder le privilège de participer à cette commission parlementaire. Je suis accompagnée aujourd'hui de deux collègues: Mario Vachon, à ma droite, qui est vice-président et directeur d'un centre d'éducation des adultes à la commission scolaire des Affluents, et, à ma gauche, M. André Barrette, qui est directeur du Service de secrétariat général et des communications à la commission scolaire des Trois-Lacs. Pour ma part, je suis fière d'être ici à titre de présidente de l'ACSQ. Et je tiens à préciser que je suis également directrice du Service des technologies à la commission scolaire Marie-Victorin.

Alors, l'Association des cadres scolaires a vu le jour en 1972 et regroupe plus de 2 200 membres, cadres, gestionnaires, qui oeuvrent au sein des commissions scolaires francophones et anglophones du Québec. Elle constitue le plus grand regroupement d'expertise en gestion scolaire au Québec.

Grâce à la diversité de l'expertise des cadres qui la compose, l'ACSQ joue un rôle essentiel de soutien et d'encadrement auprès des intervenants des établissements. Cet aspect est d'ailleurs mis en lumière dans le mémoire que nous avons déposé. C'est donc en leur nom que je me permets de vous transmettre leurs préoccupations au regard du projet de loi n° 56.

Notre mémoire présente les motifs qui amènent l'association devant la commission. Il décrit certaines des préoccupations majeures de nos membres gestionnaires qui oeuvrent dans différents services des commissions scolaires et montre aussi l'engagement dont a fait preuve l'ACSQ depuis de nombreuses années pour lutter contre la violence, tant dans les autobus que dans les établissements scolaires. Nous souhaitons sensibiliser les membres de la présente commission que l'ACSQ, en partenariat avec un grand nombre d'acteurs du milieu scolaire, a déjà agi pour contrer la violence et l'intimidation. De plus, nous croyons utile de partager notre préoccupation sur l'importance d'évaluer la capacité d'action des établissements scolaires relativement aux obligations de ce projet de loi.

Nous tenons à vous informer que l'ACSQ, comme ses partenaires du réseau de l'éducation, accueille favorablement le projet de loi et souscrit entièrement à l'intention du législateur de lutter contre l'intimidation et la violence à l'école. À cet effet, les cadres des commissions scolaires sont déjà très impliqués dans l'atteinte du but 4 de la ministre qui exige que chacune des écoles offre un milieu sain et sécuritaire pour l'ensemble des élèves et des employés. Aussi, à leur façon et selon leurs champs d'expertise, nos cadres sont donc concernés par les intentions et les dispositions du projet de loi. Leurs services sont recherchés par les établissements, et il est facile de présumer que leur expertise le sera encore davantage avec l'entrée en vigueur du projet de loi. Déjà, leurs expériences et apprentissages, fortement mis à contribution, permettent de faire ressortir quelques évidences.

Les gens aux prises avec des problèmes de violence et d'intimidation en milieu scolaire ont souvent besoin d'écoute, de soutien, d'accompagnement. Des interventions spécifiques différenciées sont possibles tant auprès des victimes que des auteurs de gestes de violence et d'intimidation. Dans la mesure du possible, on a avantage à aller chercher la contribution des parents à la résolution des problèmes.

On peut agir de façon préventive par la formation continue du personnel, notamment les enseignants et les directions. Toujours à titre préventif, il faut aussi penser à la formation des futurs enseignants et enseignantes et modifier les programmes universitaires à cet effet.

La question de la violence et de l'intimidation ne devrait pas être gérée indépendamment de ce qui est déjà en place dans le réseau, et nous pensons aux conventions de partenariat, plans stratégiques, conventions de gestion et réussite ainsi que les projets éducatifs des écoles.

Finalement, ce qu'on peut retenir, c'est qu'en matière de violence et d'intimidation des interventions en soutien au personnel des établissements effectuées par des personnes avisées et crédibles sont et seront toujours utiles, sinon nécessaires. C'est donc à titre d'acteurs sensibilisés au problème de la violence et de l'intimidation en milieu scolaire que les membres de l'ACSQ souhaitent vous livrer leurs recommandations sur le projet de loi.

Tel que déjà énoncé, nous sommes d'avis que la situation justifie l'intervention du législateur. Toutefois, les réalités diffèrent selon les milieux, et il serait souhaitable de ne pas créer de nouvelles contraintes inutilement, notamment de nature bureaucratique. Conséquemment, notre première recommandation, c'est que l'ACSQ est d'avis que le projet de loi devrait tenir compte de la diversité des situations dans les milieux afin de ne pas provoquer un nivellement vers le bas pour certains ni créer des défis irréalistes pour d'autres.

À la lecture du projet de loi, nous avons constaté l'absence de définition pour les mots «violence» et «intimidation», lesquels sont parfois utilisés à titre de synonymes, ce qui n'est pas le cas. D'ailleurs, le ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport a déjà, pour sa part, défini dans son plan d'action le mot «violence», alors que l'intimidation était définie dans l'outil de référence publié par le ministère. Aussi, nous recommandons que les termes «violence» et «intimidation» devraient être définis en conformité avec les définitions qu'en donne le Plan d'action pour prévenir et traiter la violence à l'école de 2008-2011 du MELS et ses outils de référence. Selon ces documents, l'intimidation a un caractère répétitif et s'étend sur une certaine période. Ce sont des traits qui la distinguent de la violence ordinaire.

Une autre préoccupation est soulevée, relative à la délimitation de la responsabilité du milieu scolaire en lien avec les lieux et les temps. L'article 23 du projet de loi prévoit la cyberintimidation et l'utilisation des médias sociaux. On doit préciser que la plupart des cas connus de cyberintimidation ne se passent pas nécessairement à l'école ni même durant le temps scolaire. Il est impossible de penser que l'école et la commission scolaire soient responsables de ce qui peut se produire entre les élèves en soirée, durant les fins de semaine, durant la période de vacances.

Toutefois, nous sommes d'avis que, dès que le milieu scolaire est informé d'une menace dans son environnement, les services administratifs sont sollicités pour aider à désamorcer la situation, informer et guider les principaux intéressés. Toutefois, les intervenants scolaires à eux seuls ne pourront pas endosser toute la responsabilité des risques liés aux médias sociaux. Un encadrement de la part du gouvernement serait certainement souhaitable.

**(12 h 20)**

Dans le même ordre d'idées, l'article 19 du projet de loi porte sur les cas de violence et d'intimidation dans les autobus scolaires. Nous sommes d'avis qu'une formation additionnelle est souhaitable pour les conducteurs. Toutefois, il ne faut pas oublier que la responsabilité première du conducteur est de conduire le véhicule de façon sécuritaire. Ici aussi, on fait face une fois de plus à une limite de responsabilité.

D'une autre façon, nous sommes préoccupés par l'absence de distinction faite pour les élèves marcheurs. À partir de quelle distance de marche de l'école la responsabilité revient-elle aux parents? Donc, c'est dans cet esprit que l'ACSQ est d'avis que les dimensions temps et espace du champ d'application du projet de loi devraient être précisées plus finement.

L'ACSQ se questionne également sur la place relative de la lutte à la violence et à l'intimidation dans l'ensemble du texte de la Loi sur l'instruction publique. En effet, les ajouts apportés par le projet de loi changent l'image de notre système éducatif en lui donnant à la rigueur une image répressive. On se questionne si l'emphase mise sur la violence et l'intimidation n'est pas disproportionnée au regard de la responsabilité première des établissements scolaires, la mission éducative.

Aussi, l'article 11 du projet de loi apporte une nouvelle dimension au rôle du directeur d'école, qui ne devrait pas le transformer en agent de la paix. Il importe de préserver le rôle prédominant de leader pédagogique tel que défini dans la Loi sur l'instruction publique.

Quant aux parents, qui sont nos principaux collaborateurs, le projet de loi leur confie un rôle que nous pourrions qualifier d'un peu passif, alors qu'ils sont des acteurs de premier plan pour leurs enfants. Outre les responsabilités dévolues à l'école et à la commission scolaire, et en complément de ces dernières, l'ACSQ est d'avis que le projet de loi devrait identifier des moyens de responsabiliser les parents dans le cas d'intimidation et de violence mettant en cause leurs enfants. On pense ici à la prévention, l'accompagnement, suivi, recherche de solutions. Le projet de loi devrait aussi prévoir des mécanismes d'intervention envers les adultes intimidateurs, qui sont parfois des parents, bien que cela puisse comporter un caractère exceptionnel, qui sont eux-mêmes malheureusement parfois auteurs d'actes de violence et d'intimidation envers des élèves, d'autres parents ou membres du personnel.

Toujours au regard des rôles, nous nous questionnons sur le rôle enrichi du protecteur de l'élève défini dans le présent projet de loi. L'ACSQ est d'avis que celui-ci doit conserver sa neutralité dans le traitement et l'examen des plaintes afin de préserver sa fonction d'arbitre externe. Aussi, si son rôle consiste à porter assistance aux parents, ce dernier ne perdrait-il pas l'indépendance et la neutralité nécessaires pour pouvoir juger du bien-fondé d'une plainte?

De plus, comme le règlement des plaintes vient à peine d'être mis en application, tout comme l'instauration de la fonction du protecteur d'élève, et compte tenu que les observations récentes portent à croire que les procédures mises en place sont efficaces, nous recommandons d'éliminer la référence au protecteur d'élève dans les articles du projet de loi.

Par ailleurs, nous nous étonnons de constater que, sous le couvert d'un projet de loi visant à lutter contre la violence et l'intimidation, on propose d'ouvrir la porte à des sanctions pécuniaires à tout manquement à la Loi sur l'instruction publique ou à ses règlements d'application, qui sont nombreux et qui, pour la plupart, ne concernent pas la violence et l'intimidation à l'école. Aussi, l'ACSQ recommande le retrait de l'article 477 proposé dans le projet de loi. cette disposition nous paraissant contre-productive.

Enfin, l'ACSQ s'interroge sur les raisons qui motivent un traitement différent pour les établissements privés. Le projet de loi comporte des articles qui ne s'appliqueront qu'aux établissements publics. Dans une perspective d'équité, l'ACSQ recommande d'accorder le même traitement aux établissements d'enseignement publics et privés.

En conclusion, l'ACSQ réitère son appui à l'objectif poursuivi par le dépôt du projet de loi n° 56, soit celui de rendre obligatoire l'adoption des mesures pour lutter contre l'intimidation et la violence dans les écoles. Nous souhaiterions cependant que les ajouts à la Loi sur l'instruction publique apportés par ce projet de loi tiennent davantage compte des autres lois et règlements déjà en vigueur auxquels le réseau scolaire doit se soumettre. Nous invitons le ministère à harmoniser davantage les moyens retenus aux diverses obligations de reddition de comptes déjà en place, tant pour les commissions scolaires que pour les écoles. La préoccupation de réduire la bureaucratie que nous partageons avec le ministère nous motive également.

Les cadres scolaires sont appelés, dans leurs champs d'expertise respectifs, à apporter leur soutien aux écoles afin de les aider à répondre aux nouvelles obligations qui viendront s'ajouter. Nous répondrons positivement à leur appel, comme nous avons l'habitude de le faire, tout en espérant que la diminution de nos ressources humaines et financières ne viendra pas limiter notre possibilité de supporter les écoles, particulièrement lorsque de nouvelles responsabilités sont confiées. Vous pouvez cependant compter sur notre habituelle collaboration dans la poursuite de ce dossier, car, tout comme vous, notre première préoccupation est le mieux-être de l'élève.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie bien. Et nous allons immédiatement débuter la période d'échange, et je vais céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup. Bonjour, Mme Demers, et bienvenue à tout le monde. Merci. Je pense vraiment que votre éclairage va être super important comme cadres scolaires.

Ma première question, j'ai constaté qu'à quelques occasions vous avez fait des commentaires -- et je les comprends bien -- sur le fait que, depuis déjà de nombreuses années, vos membres, vous vous êtes engagés dans cette question de la lutte contre l'intimidation, et tout ça, et je le reconnais, je prends juste le temps de vous dire que je le reconnais, mais je pense qu'on doit profiter de votre passage devant cette commission parlementaire pour quand même creuser avec vous la question suivante: À partir de votre connaissance terrain de ce qui se passe dans les commissions scolaires et dans les écoles, comment vous expliquez le fait que le plan d'action 2008-2011 n'a pas eu tous les effets escomptés? Comment vous expliquez même qu'il ait été critiqué, par exemple, par les professeurs, qui ont dit: Moi, j'enseigne dans une classe, là, et moi, là, je n'ai jamais vu les effets de la mise en place d'un plan d'action, bien que le gouvernement y mette 6 millions de dollars par année, et tout ça?

Je pense qu'on a besoin de votre éclairage sur qu'est-ce qui fait qu'une approche sur une base volontaire mais d'engagement avec des... Vous le savez comme moi, là, le plan d'action était quand même précis, est doté de moyens financiers. Comment vous expliquez qu'il ne va pas plus loin? Je vous pose la question parce que vous avez fait des commentaires sur le rôle du directeur d'école puis vous dites: Le directeur d'école, on ne doit pas le transformer en police, là -- vous ne l'avez pas dit comme ça, mais... -- puis tout ça. Là, je reçois ça bien. Vous faites même le commentaire en disant: Bien là, quand on regarde ce que ça va donner, l'ensemble du corpus législatif... Vous avez même fait le commentaire en disant: Bien, peut-être que les articles d'une loi sur l'intimidation prennent trop de place par rapport à tous les enjeux d'une école. J'écoute ça, mais, tu sais, je suis là puis je me dis: Vous faites ces commentaires-là, mais la réalité, à la fin, c'est que, si on ne procède pas par loi, il semble bien qu'un fort pourcentage des écoles, en tout cas, ne donnent pas l'impression de s'en occuper, ne sont pas capables de répondre à des questions minimales sur: Avez-vous appliqué le plan d'action, il se passe quoi?

Ça fait que je veux juste vous entendre. Tu sais, je reçois certaines doléances, mais en même temps, à la fin... C'est bien beau de me dire peut-être que l'intimidation prend trop de place, mais, si, à la fin, j'ai un certain pourcentage d'écoles qui sont incapables de nous dire ce qu'elles font, on est rendus là, on est rendus par loi. Ça fait que je veux juste vous entendre sur comment vous expliquez ça, le fait que, sur la base d'un plan d'action, je suis toujours devant le fait qu'un assez bon pourcentage d'écoles sont incapables de me dire ce qu'elles ont fait?

Mme Demers (Lucie): Je vais laisser mon collègue, si vous permettez, qui est directeur d'école... Il va pouvoir répondre à ça.

M. Vachon (Mario): Donc, bonjour. Comme on l'a dit tantôt, au niveau du projet de loi comme tel, on n'est pas contre le fait qu'on ait à légiférer, parce que, dans les milieux, on sent aussi qu'il y a des besoins, qu'il faut apporter un encadrement qui va permettre aux gens d'avoir des outils, d'avoir, je dirais, des liens, une formation, un développement qui vont leur permettre, justement, de contrer la violence avec des outils qui sont bien adaptés. On l'a dit aussi, qu'il se faisait déjà beaucoup de choses dans les milieux scolaires. Cependant, le plan comme tel, effectivement, n'est pas descendu dans tous les milieux comme on l'aurait souhaité, compte tenu de différents, je dirais... différents besoins, différents moyens qui étaient mis en place, mais ce qui est clair, c'est que les gens ont besoin de cet encadrement-là pour bien développer.

**(12 h 30)**

Les conventions de gestion et de réussite vont sûrement permettre, je dirais, de mieux intégrer dans les pratiques, je dirais, les obligations et la compréhension du milieu face aux interventions qui doivent être faites. Donc, c'est dans ce contexte-là, je pense, que les choses vont mieux évoluer. Il va peut-être être plus facile aussi de s'associer le partenariat des différents services, qu'ils soient de l'ordre de la santé ou encore de la sécurité publique, pour bien intégrer ça dans les milieux.

Mais c'est de plus en plus complexe. Vous l'avez dit, à travers le projet de loi on le dit aussi, les formes sont de plus en plus variées. Au niveau des problématiques, on parle de cyberintimidation ou encore de... en tout cas de difficultés au niveau de l'intégration aussi des différentes communautés ethniques, qui sont de plus en plus présentes. Donc, il y a des éléments, je pense, sur lesquels une formation plus adéquate, un partenariat mieux développé, des outils mieux intégrés à l'intérieur des obligations des milieux scolaires vont faire en sorte qu'on va voir une généralisation plus importante tout en tenant compte, bien sûr, aussi des milieux, parce qu'il y a des milieux qui ont moins de moyens et devront évoluer d'une façon un peu plus, je dirais, adaptée à leurs capacités.

Le Président (M. Marsan): Ça va? Alors, Mme la députée de Mille-Îles.

Mme Charbonneau: Merci, M. le Président. Bonjour. Les cadres scolaires ont un défi quotidien, hein? Il y a non seulement le leadership pédagogique, il y a de faire équipe avec l'ensemble de l'équipe-école et faire équipe avec l'ensemble des parents qui viennent. Et quelquefois on dit un peu à la blague: Un enfant peut venir avec deux parents, mais des fois il vient avec six. Ce n'est pas toujours simple.

Les gens que nous avons entendus jusqu'ici nous ont fait plusieurs remarques sur comment on fait pour pouvoir aviser d'une situation sans mettre en péril la sécurité de l'enfant qui vit cette situation, à l'intérieur du bâtiment scolaire mais à l'extérieur du bâtiment scolaire, et, malheureusement, quelquefois on doit le protéger de sa propre famille, que ce soit pour annoncer à son parent que l'enfant est ciblé par ses pairs pour une accusation quelconque, ou parce que, chez nous on dit bêtement, c'est une tête à claques, ou parce qu'on l'accuse d'avoir une orientation sexuelle quelconque, mais ça peut faire en sorte aussi que, quand la direction d'école avise le parent -- parce que c'est lui qui en a la responsabilité dans le projet de loi qu'on a sur la table -- on met en péril l'enfant plus à l'extérieur qu'à l'intérieur. Le défi du législateur, c'est de l'écrire correctement pour donner aux cadres scolaires cette latitude et cette responsabilité là en prenant en compte l'ensemble de la situation de l'enfant. Notre difficulté à nous, c'est de faire en sorte qu'on l'écrit pour donner au cadre scolaire son sens du jugement, mais, je vous le dis, je n'ai pas une grande expérience de législateur, ça fait trois ans, mais le défi d'écriture est grand. Aidez-nous à mieux écrire ce qu'on pourrait vous donner comme responsabilités à l'intérieur d'une loi qui fait en sorte que le jugement du cadre scolaire, du directeur d'école vient nous aider à mieux faire les choses, autrement dit on devient complices en mettant en place quelque chose d'intéressant pour les cadres scolaires.

M. Barrette (André): Je peux me permettre?

Le Président (M. Marsan): M. Barrette.

M. Barrette (André): En fait, je pense que l'intention, c'est un zéro intimidation. Ça, c'est l'intention.

Maintenant, c'est sûr qu'il est difficile d'écrire en mots justes comment intervenir, c'est ce que vous nous dites. Moi, à titre de secrétaire général, je traite des plaintes que les parents apportent, et j'en ai... bon, une commission scolaire d'environ 14 000, 15 000 élèves, donc j'en ai à tous les jours, et, là-dedans, ce que je constate, c'est qu'il n'y a pas de manuel où on suit l'étape 1 à 10 pour bien faire les choses. Quand vous dites «le jugement», c'est un élément important, important, et de là l'importance, je pense, de nous, les cadres, que ce soient les directions d'école mais nous, les directions au niveau des services administratifs, être de bons guides là-dedans. Combien de fois je prends le temps de parler aux parents et, après ça, je prends le temps de parler à la direction d'école, d'établir la meilleure méthode, la meilleure méthode, établir un contact, un lien vers une solution? Et chaque cas est un peu différent, alors je comprends, le défi, qu'il est grand.

Mais, vous savez, dans certains cas on dit... on part de loin, il faut... parce que le parent, souvent, a besoin d'être guidé, il a besoin même d'être éduqué sur la problématique, et ça, il faut préparer le terrain, il faut le faire, mais l'école et la commission scolaire, on a quand même des outils, on a des spécialistes qui peuvent aider. Mais, d'abord et avant tout, moi, je me souviens, dans mon autre vie j'étais en relations de travail, et on disait toujours: Quand on fait des liens, quand ça va bien, c'est beaucoup plus facile, après ça, de continuer les liens quand ça va mal. Donc, il faut d'abord établir des liens avec les gens. Mais c'est sûr qu'on est dans un univers où on voit... les parents, on les croise de temps en temps, à différents moments, lors des plans d'intervention, lors de la remise des bulletins ou autres choses comme ça, mais il n'en restera pas moins qu'il faut laisser passer... il faut que le texte soit clair à l'effet qu'on ne veut plus d'intimidation, mais il faut laisser de la place, comme vous dites, au jugement. Mais, dans le vécu, c'est ce que l'on fait, c'est ce que l'on fait et de façon soignée. Il faut mettre le temps, il faut être prêt à mettre le temps.

Mme Charbonneau: Vous m'avez parlé de la technique, mais vous ne m'avez pas parlé de mon écriture. Mais je comprends le défi puis, en tant que secrétaire générale d'une commission scolaire, je comprends très bien que, la plupart du temps, les plaintes rentrent par vous et de part et d'autre, hein? Vous avez dit: Je reçois des plaintes des parents. Vous recevez nécessairement -- parce que je connais bien ce département -- des plaintes aussi des directions d'école qu'ils ont des situations où un parent vient de poser un geste qu'on pourrait dire d'intimidation, parce qu'il y a l'intimidation à l'école puis il y a l'intimidation qu'attirent certaines choses.

Mais, encore une fois, comment je fais pour écrire que je dois laisser le bon jugement quand je sais que, si le parent appelle à la maison pour dire que l'enfant a été ciblé et a fait partie de quelque chose... Puis là je vous parle autant de l'intimideur que de l'intimidé. Un enfant qui tabasse un autre enfant, peut-être que, rendu chez lui, il va subir le même contrecoup parce que, là, son parent n'est pas content d'avoir reçu le coup de téléphone de l'école. Comment le directeur d'école... ou comment je peux faire comme législation pour écrire quelque chose qui fait en sorte qu'on s'y retrouve? Et je ne veux surtout pas faire du mur-à-mur, parce que ma réalité, elle est différente dans chacune des écoles que j'ai.

M. Barrette (André): En fait, il faut écrire qu'il y a une démarche d'évaluation, sans tomber dans du temps qui est trop long, là, soyons clairs, mais il faut écrire qu'il y a une démarche d'évaluation, qu'avant de faire une intervention avec une personne extérieure, en l'occurrence le parent, il faut absolument qu'une personne nommée du milieu, dans certains cas c'est le directeur, dans d'autres cas c'est le directeur adjoint ou... une personne nommée du milieu soit saisie de la situation, et que la personne qui est au courant de l'intimidation en ait discuté, et qu'ils se soient entendus sur une méthode. Mais évidemment, là, je ne suis pas capable d'écrire maintenant, là, mais je pense qu'il est important qu'on sente ça, qu'il y a ce temps d'évaluation là. Des fois, c'est du temps qui permet de sauver beaucoup de fausses manoeuvres.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Je vais donner la parole à Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je veux vous entendre sur le commentaire que vous avez fait concernant l'espace. Donc, vous avez donné l'exemple de l'élève marcheur, donc je veux vous entendre. Avec votre perspective, vous voyez ça comment?

Je prends juste le temps de vous dire qu'en Ontario il y a eu le dépôt d'un projet de loi, puis il y a eu un autre dépôt de projet de loi de l'opposition en Ontario, donc il y a plusieurs textes qui circulent, où certains textes sont extrêmement précis, là, en calcul de mètres sur où est-ce que ça se passe, et tout ça. Je n'ai pas d'idée préconçue, moi, je veux juste vous entendre. Vous, vous avez soulevé la question, mais je vous la retourne un peu. Vous souhaitez qu'on voie ça comment? Comment vous voulez qu'on vienne circonscrire cet élément-là de l'espace où pourraient se dérouler des gestes d'intimidation?

**(12 h 40)**

Mme Demers (Lucie): Oui, effectivement, on mentionne le temps de l'élève marcheur par rapport au temps qu'il est dans l'autobus, et on a aussi, dans cette intervention-là, parlé de la cyberintimidation et des médias sociaux, où on voulait attirer votre attention, naturellement, à l'espace-temps et l'espace... et le lieu, parce que ça ne se passe pas toujours à l'école, entre autres pour la cyberintimidation. Et je suis bien placée pour en parler. Étant moi-même directrice des technologies, je peux vous dire qu'on est interpellés régulièrement par nos directions d'établissement pour pouvoir vérifier qu'est-ce qui s'est passé, y a-t-il lieu d'intervenir, mais, quand ça dépasse l'espace école, nos limites sont plus vite atteintes. C'est sûr qu'on travaille avec les corps de police, tout ça, mais ce n'est pas toujours de cette envergure-là. Parfois, il y a lieu de prévenir.

Et là, bien sûr, on parle de l'espace cyberintimidation et médias sociaux, donc on pense tout de suite à l'extérieur de l'école, mais il y en a beaucoup qui se passe aussi dans l'école, sachant qu'on met à la disposition de nos élèves, maintenant, de plus en plus d'outils technologiques. Et, avec l'école branchée 2.0, vous voyez que ça va être encore davantage. Donc, il va falloir se préoccuper beaucoup de cette notion-là qui prend de plus en plus d'envergure. Ça, je peux vous en assurer.

Quant au type d'élève marcheur, on est peut-être à la même lecture que vous, dire: Comment va-t-on définir la distance? À quel moment le parent devient responsable ou est tout de suite responsable de... et où s'arrête la responsabilité de l'école? On n'a pas fait de recherche plus loin et plus précise par rapport à ça, on souhaitait le souligner parce que le projet de loi mentionne beaucoup le volet transport en autobus. Mais, sachant que, de plus en plus, nos élèves, c'est des marcheurs, on s'en va vers ça, il va falloir qu'on ait la préoccupation.

Je ne sais pas si mon collègue veut rajouter quelque chose.

M. Vachon (Mario): Mais c'est clair... Tantôt, on parlait de jugement, on parlait de placer la direction d'école au centre, justement, des interventions pour s'assurer de contrer mais surtout de prévenir. On a des corridors scolaires, on sait qu'il y a des endroits qui sont déjà identifiés, mais ce qui est clair, c'est que, dès qu'il se produit un conflit, une situation d'intimidation, une situation de violence, c'est la direction qui est contactée, et, à ce moment-là, jusqu'où on intervient, c'est plus une question, souvent, de jugement que de distance, là encore, et on essaie ensemble, avec les jeunes, de vérifier le motif de la situation et par la suite le type d'intervention qui doit être fait avec les parents. Donc, dans ce contexte-là, c'est là qu'on se situe aussi.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Mme la ministre a une dernière question...

Mme Beauchamp: Je veux juste faire un commentaire.

Le Président (M. Marsan): ...ou un commentaire.

Mme Beauchamp: On pourra en discuter. Je veux juste vous dire que moi, je vais toujours être vigilante qu'on ne fasse pas tout reposer sur le dos de l'école. Je prends juste le temps de vous dire ceci. À un moment donné, là, l'école fait partie de la solution, mais elle fait partie d'une société, puis il faut faire attention de ne pas tout faire reposer sur le dos de l'école. Et, dans ce sens-là, ma distance va être plus petite que plus grande, je veux juste vous le dire.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme la ministre, ceci termine cette période d'échange avec le parti ministériel. Nous poursuivons avec l'opposition officielle, et je vais donner la parole à M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui, merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup pour votre présence à cette commission et du temps, de l'énergie, de la compétence, de la rigueur que vous avez mis dans la rédaction de votre mémoire.

Écoutez, j'aurais beaucoup, beaucoup de questions, je pense que vous en avez abordé plusieurs avec mes collègues du gouvernement, mais vous dites à quelque part dans votre mémoire... Oui, c'est à votre recommandation n° 2. Concernant les termes, là, et les définitions, vous dites qu'il faut faire des nuances entre «manquement», et «plainte», et «signalement», entre «cas allégués» et «cas avérés». Pouvez-vous élaborer un petit peu plus là-dessus? Comment vous pouvez nous guider pour être sûrs de choisir les bons termes, les bonnes expressions?

M. Barrette (André): En fait, ce qu'on se dit, c'est qu'il faut quand même être plus précis sur selon que c'est des cas avérés ou allégués, parce que, sinon, on va se ramasser avec des rapports inutiles, trop élaborés. Il faut vraiment s'assurer que la plainte, elle est justifiée.

Écoutez, je vais vous donner un exemple simple, là, mais prenez-le un petit peu comme un exemple simplement. Vous savez, pour m'occuper des plaintes, comme je disais tantôt, et aussi pour être souvent avec le protecteur de l'élève, il a reçu une plainte récemment parce qu'une enseignante disait le terme «wow» dans une classe, wow, w-o-w, c'est en anglais. C'était une plainte, mais là, à un moment donné, il faut quand même circonscrire, là. Que l'enseignante... Que le parent se plaigne de ça, qu'il en parle à l'enseignante, qu'il en parle à la direction d'école, oui, mais de là à aller à d'autres instances... Je pense qu'on s'y perd un peu, là. C'est un exemple.

Mais donc c'est pour ça. Quand on dit «avéré», «allégué», il faut quand même s'assurer que la plainte, elle est avérée, comprenez-vous? C'est dans ce sens-là.

M. Gaudreault: O.K., bon, j'ai l'impression que ça nous pose plus de questions que de réponses, mais je comprends la nuance que vous voulez apporter. Mais, entre «plainte» et «signalement», est-ce qu'on doit baliser... Parce que, là, on fait référence à l'article de la loi sur le rôle du directeur de l'école, là: «Il reçoit et traite avec diligence tout...» Je suis à l'article 11 du projet de loi: «[Le directeur] reçoit et traite avec diligence tout signalement et toute plainte concernant un acte d'intimidation ou de violence.»

Est-ce que, pour vous... Expliquez-moi un peu. Vous êtes habitués de traiter les plaintes, là, c'est ce que je comprends, dans votre travail de tous les jours. Alors, quelle nuance faites-vous entre «signalement» et «plainte», de votre côté?

M. Barrette (André): Bien, je pense que le signalement, ça relève plus de la préoccupation d'un événement ou d'une situation, en ce sens qu'un signalement peut... il s'agit, à ce moment-là, de faire une analyse puis voir s'il y a vraiment matière à aller plus loin. Il faut quand même évaluer.

La plainte, là, c'est vraiment plus fort, en ce sens qu'on se dit: Bien là, il n'y a pas un doute, il y a, on peut dire, une certitude sur la problématique, tandis que le signalement, ça va être plus une indication de peut-être quelque chose.

M. Gaudreault: Est-ce que je comprends bien si je dis que vous croyez que la plainte, d'une certaine manière, est plus formelle, elle est rédigée, elle est formellement déposée, tandis qu'un signalement, ça peut être, je ne sais pas, moi, un prof qui vous croise dans le corridor et qui dit: Écoute, tu devrais peut-être vérifier tel étudiant, là, je ne suis pas sûr, mais je trouve qu'il est comme isolé, bon?

M. Barrette (André): Disons que le signalement serait plus près de l'observation, et la plainte serait plus près du fait. Est-ce que ça pourrait aider?

M. Gaudreault: Oui, mais la plainte n'est pas... il ne faut pas prendre pour acquis que la plainte est nécessairement fondée.

M. Barrette (André): Bien, c'est-à-dire qu'il faut, je pense, toujours effectivement prendre le temps d'écouter, de s'assurer qu'il y a un fondement et puis de valider effectivement les faits, oui.

M. Gaudreault: O.K. Sur un autre sujet, en tout cas périphérique à ce dont on vient de parler, vous avez quand même des propos assez clairs sur l'élimination de toute référence au protecteur de l'élève dans le projet de loi n° 56. J'aimerais ça vous entendre un petit peu plus là-dessus. Je pense que vous avez dit tout à l'heure, M. Barrette, que vous traitez souvent avec le protecteur de l'élève dans votre milieu. Pourquoi vous êtes aussi clairs que ça quant à l'élimination de toute référence au protecteur de l'élève dans le projet de loi?

M. Barrette (André): O.K. La Loi de l'instruction publique prévoit déjà, dans les articles 9 à 12, un processus quand même lié à la demande de révision, où on doit apporter assistance aux parents.

Bon, ensuite, dans les dernières années, il y a eu des modifications à la Loi de l'instruction publique où on nous a demandé -- et ça va bien -- de faire un règlement lié aux plaintes, et là on a bien statué le rôle de chacun, on a statué le rôle du directeur de l'école, le rôle du centre administratif, en l'occurrence le secrétariat général, dans la plupart des cas, et le rôle du protecteur de l'élève, qui venait, en bout de ligne, apporter une dernière étude d'une situation définie ou décidée et faisait une recommandation au protecteur de l'élève.

Donc, dans ce sens-là, prenons un exemple de chez nous, aux Trois-Lacs -- on parle de ce qu'on connaît aussi. On a établi des étapes très précises -- vous l'aurez d'ailleurs dans le document qui vous sera remis tantôt -- des étapes très précises qui viennent définir notre rôle, notre intervention et l'intervention du protecteur. Le protecteur, donc, dans les règlements qui ont été bâtis -- puis ça, maintenant, ça fait à peu près deux ans qu'on fonctionne avec ça, et ça va bien -- le protecteur fait un rôle de recommandation face à une situation, mais nous intervenons avant, de sorte que, dans beaucoup de cas, le protecteur n'a pas à agir, c'est nous. Soit la direction d'école, selon l'étape, ou soit au secrétariat général, nous intervenons pour solutionner le problème. Donc, on discute avec les parents, comme je vous le mentionnais tantôt, et on arrive à la solution.

Alors, on se dit: Si on va directement au protecteur de l'élève, premièrement, on lui enlève peut-être son objectivité quand il aura, en vertu du règlement, à faire une recommandation puis, deuxièmement, on nous enlève une responsabilité que, je pense, on fait bien, parce qu'écoutez -- donnons un exemple chez moi -- sur minimum 200 plaintes que je reçois, le protecteur, il peut s'en rendre deux, trois. Donc, je me dis, on fait bien la tâche. Et pourquoi, à ce moment-là, passer à côté de cette démarche-là qui fonctionne bien?

**(12 h 50)**

M. Gaudreault: Est-ce que vous trouvez que c'est comme un peu trop élargir ou étirer, si vous me permettez l'expression, l'élastique, là, du rôle du protecteur de l'élève par rapport à ce à quoi il était dédié lors de la création de ce poste-là, d'une certaine manière? Et est-ce que dans la vraie vie, pour reprendre l'expression de la ministre, le protecteur de l'élève a le temps, les... Parce que, moi, ce que je connais des protecteurs de l'élève, en tout cas, dans mon coin, c'est souvent des retraités, par exemple, qui font ça à demi-temps, comme consultants ou quelque chose du genre. Alors, est-ce que là on viendrait trop alourdir sa tâche, d'une certaine manière?

M. Barrette (André): Bien, c'est parce que je trouve qu'on avait bien campé son rôle dans la Loi de l'instruction publique, dans le règlement aussi. On avait vraiment bien campé son rôle de pouvoir, même après une décision d'un comité de révision, regarder une fois de plus la décision et de se pencher avec une façon plus objective.

Pour ce qui est de la tâche, écoutez, il y a des gens qui seraient très heureux, parce que, dans certains cas, comme vous dites, c'est peut-être des retraités, mais, dans d'autres cas, ce sont des avocats, je pense, sur la Rive-Sud il y a des bureaux d'avocats qui ont ce dossier-là. Évidemment, ce ne sont pas des employés des commissions scolaires, ça pourrait avoir un effet économique, mais, moi, ce n'est pas ça que je pense qui est l'essentiel, c'est vraiment que... Pourquoi déplacer le rôle alors qu'il était bien campé?

M. Gaudreault: On a eu entre autres, hier, presque la présentation d'un manifeste antibureaucratie, là, par des représentants des directions d'école. On a eu d'autres représentations aussi d'intervenants à l'effet qu'il y avait beaucoup de bureaucratie amenée par le projet de loi. Je pense que vous êtes bien placés pour porter un jugement aussi à cet égard-là, d'une part. Et, deuxièmement, si on tient un discours: Moins, moins de bureaucratie, alléger les structures, moins de redditions de comptes parce que c'est de la paperasse, jusqu'où on doit aller quand même dans la liberté, je dirais, ou le marge de manoeuvre qu'on doit accorder aux directions d'école quant à leur rôle via le projet de loi n° 56, là? Parce que c'est comme, pour moi, un peu la contrepartie. Si on dit: Moins de bureaucratie et plus d'autonomie ou de marge de manoeuvre, je veux bien, là, mais elle est où, la barre, là?

Mme Demers (Lucie): Par rapport à ce volet-là de la bureaucratie, nous, notre position, c'était: Y a-t-il... On n'est pas contre la reddition de comptes. On pense que, dans un contexte comme celui-là puis comme plusieurs autres, on se doit de rendre des comptes. On est des employés publics, on travaille aussi pour le public. Pour nous, ça fait partie des responsabilités. On doit rendre des comptes là-dessus, on n'est pas contre.

Sur la façon, sur la forme, sur la lourdeur, est-ce qu'il y aurait moyen de regarder comment ça va se passer? Parce que ce qui est demandé, c'est quand même assez détaillé, assez lourd de compilation de données, de recherche d'information. Si je prends l'exemple... Bien, déjà, je sais qu'il y a un comité qui se penche sur la bureaucratie. Et je pense que les travaux cheminent bien et qu'on commence à voir des résultats.

L'exemple que je peux vous donner, c'est la mise en application de la loi n° 133, qui, au premier coup d'oeil -- c'est la loi sur la gouvernance des ressources informationnelles -- au premier coup d'oeil, première lecture, on se disait: Ouf! On va avoir beaucoup de redditions de comptes à faire, on va avoir beaucoup de rapports à préparer. Et c'est sûr que ça nous fait un petit peu reculer, parce qu'on aime mieux être dans notre discipline pure que de préparer des redditions de comptes. Ça, je pense que ça fait partie de l'humain.

Par ailleurs, depuis la mise en place de ce comité-là sur la bureaucratie, on a vu un changement, parce que les objets de la loi n° 133 ne peuvent pas atterrir dans nos commissions scolaires sans d'abord avoir passé par ce comité-là, puis on voit les effets. Ce qui nous est demandé est beaucoup plus allégé, et, d'une façon réaliste, on est capables de rendre des comptes. Donc, on se dit: Comme c'est déjà en place pour d'autres lois qui se mettent en vigueur, pourquoi ne pas aussi ne pas oublier que... dans cette loi-là qui demande des redditions de comptes, de se baser sur le modèle qui s'applique par le comité sur la bureaucratie?

Donc, c'était l'esprit dans lequel on s'avançait pour dire: Oui, on va le faire. Oui, on va supporter nos établissements aussi, parce que nous, on est plus les cadres qui oeuvrons dans les services scolaires en support aux établissements, donc on a quand même un rôle de préparation, de soutien à faire. Donc, on se dit: Dans cet esprit-là, pour mieux aider nos écoles, est-ce qu'on peut penser à l'allégement bureaucratique sans omettre l'obligation de reddition de comptes?

M. Barrette (André): Est-ce que je pourrais... En même temps, je pense qu'il faut comprendre l'importance d'une reddition de comptes qui permet de démontrer une transparence puis de faire voir ou faire connaître les situations. Ça, je pense que c'est important, c'est bien.

Évidemment, on aurait toujours la préoccupation, parce qu'on ne veut pas non plus que certains milieux soient trop identifiés comme des milieux problèmes. Vous avez tous en tête une école, un milieu qui est un peu plus... moins favorisé et qui pourrait être plus identifié comme encore une école qu'on ne veut pas... Ça fait que je pense qu'on a cette dualité-là, hein, cette préoccupation-là actuellement. Ça fait que, d'une part, oui, il faut... ça prend une transparence, puis, dans ce sens-là, le projet le démontre, tu sais, c'est correct, mais en même temps comment faire?

M. Gaudreault: Là, il me reste trois minutes à peu près, mais j'aurais deux questions importantes, alors je vous demande de vraiment faire un effort -- comme moi aussi d'ailleurs, là -- de concision.

Premièrement, vous avez une recommandation très forte, la numéro 7, là, concernant le même traitement aux établissements publics et privés. Je voudrais vous entendre plus là-dessus.

Et deuxième question, je pense, c'est: M. Vachon, vous êtes issu du milieu plus secteur professionnel, secteur adultes dans votre milieu de travail. Est-ce que le projet de loi n° 56 devrait s'appliquer également au secteur de la formation aux adultes?

Mme Demers (Lucie): Bien, brièvement, sur la recommandation de dire le même traitement aux écoles d'enseignement privé ou public, c'est que ce qu'on pouvait constater, c'est qu'ils n'étaient pas soumis, au privé, aux mêmes dates. Il y avait des dates qui étaient campées dans le projet de loi pour la remise des rapports de reddition de comptes, mais ce n'était pas présent pour le volet privé, entre autres. Je vous donne un exemple, mais on en avait plusieurs à cet effet-là, puis c'est pour ça qu'on a nommé les articles qui n'étaient pas visés par les établissements privés. Pour nous, s'il y a des redditions de comptes à faire en intimidation, c'est transparent, c'est dans les deux réseaux qu'elles devraient être faites, pour éviter, comme on dit, une espèce de catégorisation.

Pour l'autre volet, je vais laisser mon collègue...

M. Vachon (Mario): Oui. Effectivement, je suis directeur d'un centre de formation générale aux adultes. J'ai été aussi directeur d'école primaire et d'école secondaire.

Donc, ce qui est clair, ce qui nous préoccupe, c'est, bien sûr, de prévenir toute forme de violence, d'intimidation au niveau des personnes qui fréquentent, hein? Donc, on veut surtout préserver les jeunes. On voit de plus en plus de jeunes dans nos centres de formation générale aux adultes, c'est clair, en termes de proportion. En même temps, on a parlé tantôt de difficulté de bien implanter ou d'appliquer des projets de loi de ce type-là. Présentement, je pense que le secteur jeunes doit s'approprier cette démarche-là, et bien sûr que le secteur de l'éducation des adultes pourra compléter par la suite avec ses particularités et son environnement propices aussi à d'autres types de situation. Mais, dans les deux cas, c'est sûr qu'on veut prévenir autant pour les jeunes qui sont dans les écoles que dans les centres, qui arrivent maintenant dans les centres.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, Mme Demers, M. Barrette et M. Vachon, de nous avoir donné le point de vue de l'Association des cadres scolaires du Québec sur le projet de loi n° 56.

Avant de suspendre nos travaux, prenez note que, cet après-midi, les consultations se poursuivront à la salle Louis-Joseph-Papineau. La commission suspend donc ses travaux jusqu'à 15 heures.

Une voix: ...

Le Président (M. Marsan): C'est au La Fontaine cet après-midi? On m'indique que c'est au La Fontaine. Alors, je vous remercie, et bon appétit.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

 

(Reprise à 15 h 12)

Le Président (M. Marsan): À l'ordre, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission de la culture et de l'éducation ouverte et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 56, Loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école.

Cet après-midi, nous recevons l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire, conjointement avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles, et un peu plus tard l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.

Alors, ça nous fait plaisir de vous accueillir. Et je vais demander à M. Gaétan Neault, qui est président de l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire, de nous présenter les gens qui vous accompagnent et pour ensuite aller avec la présentation que vous devez nous faire. M. Neault, la parole est à vous.

Association montréalaise des directions d'établissement
scolaire (AMDES) et Association québécoise du
personnel de direction des écoles (AQPDE)

M. Neault (Gaétan): Merci, M. le Président. Je vais laisser ma collègue, Mme Boucher, présenter les personnes qui sont avec elle. En ce qui me concerne, je suis accompagné de M. Jean-François Bouchard, qui est directeur de l'école secondaire Henri-Bourassa, école que connaît bien Mme la ministre, je crois, puisque c'est dans sa circonscription. Dans la salle se retrouve aussi mon vice-président à la commission scolaire de Montréal, M. Laurent Landry, ainsi que M. Alain Blais, vice-président à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île. Alors, nous sommes bien heureux d'être ici parmi vous aujourd'hui.

Mme la ministre, MM. et Mmes les députés, l'Association québécoise du personnel de direction, l'AQPDE, et notre association ont souhaité présenté un mémoire conjointement, premièrement, d'abord et avant tout parce que nous adoptons, nous endossons des positions similaires. Nous représentons aussi près de 1 000 directions d'établissement scolaire, milieu urbain essentiellement, la région de Québec et de Montréal.

Donc, le message que nos membres veulent vous transmettre aujourd'hui, il est simple, il est clair: Nous croyons foncièrement que, quand les élèves sont heureux dans leur milieu, quand les élèves se sentent en sécurité, ils y investissent, et éventuellement ils réussissent et ils persévèrent. Mais, comme rien n'est parfait en ce bas monde, les projets de loi n'échappant pas à la règle, on a souhaité vous apporter quelques propositions, quelques suggestions afin d'améliorer ce qui pourrait être l'efficacité dans la lutte contre l'intimidation et la violence. J'insiste sur le mot «efficacité», nous allons y revenir.

D'entrée de jeu, je vous dis que nous ne nous prononcerons pas sur tous les points. Nous avons choisi des cibles. Afin de synthétiser nos propos, nous avons priorisé certaines recommandations. Il ne faudrait pas en déduire qu'il s'agit des seuls questionnements que nous pourrions avoir concernant le projet de loi. À titre d'exemple, nous n'abordons pas la question du protecteur de l'élève, bien que nous pouvons vous dire que nous nous questionnons énormément sur les nouveaux rôles qu'on veut lui confier.

Nous insistons essentiellement sur six volets, je vous les mentionne rapidement avant de passer la parole à Mme Boucher: d'abord, un problème avec, selon nous, la définition de l'intimidation; deuxièmement, l'importance du volet éducatif et préventif par rapport au volet, j'appellerais, coercitif de la loi; troisièmement, la notion de frontières de l'école dans le temps et dans l'espace; quatrièmement, certaines problématiques que l'on soulève au niveau de la bureaucratie, de la lourdeur bureaucratique; cinquièmement, notion de responsabilité parentale; et finalement toute la question de l'augmentation des tâches, des devoirs par rapport aux pouvoirs qui nous sont conférés. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Allez-y. C'est Mme Boucher.

Mme Boucher (Danielle): Alors, bonjour, M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés. Ça me fait grand plaisir d'accompagner mon collègue de l'AMDES. Je ne redirai pas ce qu'il a dit, mais je vais quand même prendre le soin de présenter mon collègue, M. Dominic Flamand, qui est directeur d'une école primaire de 395 élèves à Sainte-Marie de Beauce, qui est une population à peu près de 12 000 personnes. Et aussi, dans l'assistance, nous avons des directions d'établissement qui sont présentes aujourd'hui. Nous avons Mme Sylvie Drouin, qui est de la commission scolaire de la Capitale; M. Pierre Drouin, qui est de la commission scolaire Appalaches; M. Daniel Lemelin, qui est de la commission scolaire des Découvreurs; et M. Carl Ouellet, qui est de la commission scolaire des Premières-Seigneuries.

Alors, d'entrée de jeu, je vous parle de la définition, parce que je crois que c'est le squelette du projet de loi, et force est de constater que... l'importance d'y accorder une attention particulière pour effectivement, par la suite, poser les gestes adéquats qui s'imposent. Alors, nous avons pris la peine tout de même de consulter la recherche, et, en ce sens, je sais que Mme Claire Beaumont, qui est codirectrice de l'Observatoire canadien pour la prévention de la violence à l'école, va déposer un mémoire sur l'ensemble des définitions sur la question, en tout cas ce que la recherche en dit, et je nous invite à y prendre... lire ce qu'elle va dire, parce que je pense que ça pourrait être intéressant de s'en inspirer.

Tout d'abord, dans la définition -- puis là je ne suis pas la seule à le dire aujourd'hui, donc je vais essayer d'être très concise, étant donné que vous avez entendu à peu près le même discours pendant trois, quatre jours -- c'est évident que l'intimidation, c'est une forme de violence et ça ne peut pas inclure tout acte de violence. Donc, ça prend un certain nombre de caractéristiques, et, pour nous, c'est extrêmement important de pouvoir justement les reconnaître dans la définition.

Alors là, je vais débaptiser le monsieur en question, qui est un grand chercheur sur la question et qui a été le premier à vraiment documenter, qui est un monsieur Olweus. C'est ça?

Une voix: ...

Mme Boucher (Danielle): Olweus. Merci beaucoup. Donc, c'est le w comme le v en allemand. On aime. Alors, ça, je sais comment le dire, à ce moment-là.

Alors, il parle d'un déséquilibre dans le rapport de force, ça, c'est une première chose. Il parle de l'intention, il parle de la nature répétitive du geste. Alors, je pense que l'on devrait voir dans la définition... ajuster pour que les critères qui caractérisent l'intimidation comme telle soient présents.

Un deuxième élément dont on veut seulement souligner, c'est qu'il s'agit vraiment d'un projet de loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence. Donc, ça serait important aussi de bien définir la violence, parce que la violence est quand même... elle a une définition qui est déjà, hein, dans les documents du ministère et qui nous apparaît très bien. Alors, on a des bons coups aussi, hein, il faut les nommer. Et, dans les gestes de violence aussi, on va même jusqu'à définir chacun qu'on peut retrouver. Donc, je pense que ça serait intéressant de pouvoir également avoir la définition de la violence dans le projet de loi.

Dans un deuxième ordre d'idées, dans l'esprit de la définition, ce qu'on comprend, c'est que ça ne s'adresse pas uniquement aux élèves, et nous, on est favorables, parce qu'on trouve qu'effectivement... mais il faut quand même... Je vais nuancer, là, parce que c'est quand même plus rare, il faut le dire. Les gestes peuvent être aussi posés envers ou par des adultes. Alors, si un élève intimide un enseignant, on applique le plan, mais, si, par contre, une situation... un membre du personnel est intimidé... ou un élève, c'est-à-dire, est intimidé par un membre du personnel, là on questionne, là. Il faut voir qu'est-ce qu'on applique, parce que présentement, dans nos commissions scolaires, lorsque, deux adultes, il y a une problématique d'intimidation, il y a une politique dans nos commissions scolaires pour contrer le harcèlement. Alors, ça, c'est un deuxième élément.

**(15 h 20)**

Alors, je ne pense pas avoir oublié rien par rapport à la définition. Ce que je peux vous dire dans la stratégie gouvernementale qui se décline en quatre actions, le volet Mobiliser, pour nous, ça a toute sa saveur, dans le sens où la responsabilité de toute violence et intimidation dans le milieu scolaire ne peut pas appartenir à une seule personne mais doit appartenir à l'ensemble des acteurs qui composent l'équipe-école.

Alors, je passerais maintenant... Je m'excuse pour les membres de la commission. Je saute d'une page à l'autre parce qu'on s'est partagé le discours, mais ça ne va pas toujours avec l'ordre des pages. Mais tout de même je continuerai avec la responsabilité parentale, qui, je dois vous dire, sont des partenaires précieux pour les directions d'établissement.

Alors, pour nous, c'est clair que le premier responsable du développement d'un enfant, c'est son parent. C'est clair pour nous que cet élément-là, on aimerait, on souhaiterait le voir davantage interpellé dans le projet de loi. Dans le même sens que je viens de vous dire, on ne peut pas intervenir en tout temps et en tout lieu lors d'actes d'intimidation et de violence, puis là je pense à la cyberintimidation, où, là, on aura à définir les zones, les zones d'actes, de gestes qu'on doit poser, qu'est-ce qui nous appartient. Alors, pour nous, c'est important de clarifier cet élément parce que, comme le parent doit jouer un rôle majeur envers son enfant, nous souhaitons vraiment que ce rôle soit mis en évidence.

Alors, le projet de loi, ce qu'on en comprend, c'est qu'il précise uniquement que le parent doit prendre connaissance du plan de lutte, ce qui nous apparaît un peu réducteur parce que le parent, non seulement il doit en prendre connaissance, mais il doit collaborer, il doit participer à la démarche scolaire visant à corriger le comportement déviant de l'enfant. Et ça, c'est dans un souci aussi d'intervention, vous comprendrez, éducative, parce que nous sommes dans une maison d'éducation. Donc, quand on est rendus à poser des gestes de coercition, il faut vraiment que les gestes soient majeurs, et ça, nous, pour nous, on veut bien le nommer parce que c'est très important.

Maintenant, je vais passer au volet préventif, qui, je dois le dire, m'interpelle particulièrement, parce que je crois fondamentalement que plus on fait de prévention, plus on évite la coercition. Et, ceci étant dit, je crois vraiment que les pratiques gagnantes sont des gestes récurrents au quotidien que l'on pose dans l'école, et je vous dirais qu'en regard de cela les codes de vie, les règles de vie sont déjà clairement travaillés dans les établissements, et je vous dirais que c'est un objet du conseil d'établissement. Donc, on doit les revoir à chaque année, et c'est la façon de travailler avec nos équipes pour mettre en place ces pratiques pour prévenir et contrer la violence à l'école.

Je sais qu'il y a un budget. Puis là je vais faire une parenthèse, mais je ne veux pas qu'on... Ce n'est pas là-dessus que porte, là, l'essentiel du message, mais tout de même il est important de savoir que, dans les membres que nous représentons, après sondage, il y a 50 % de l'enveloppe qui est dédiée à la lutte pour contrer l'intimidation et la violence qui descend dans les écoles, et ce n'est pas parce que nécessairement c'est tout le temps mal utilisé, là, je veux quand même nuancer les choses, parce qu'il y a des alternatives à la suspension, qui est une forme pour contrer la violence qu'on met en place dans les commissions scolaires. Mais peu importe. Ça veut dire, ça, au bout... C'est un constat qu'on aime bien expliquer, là, c'est que ça veut dire que, dans une école de 200 élèves, c'est 500 $, 600 $ qu'on a pour lutter.

Alors, je le sais, que ce n'est pas très gagnant de parler de ressources, mais, que voulez-vous, on en est là quand même. Quand on sait que la recherche dit que les pratiques gagnantes, c'est les gestes qui sont récurrents au quotidien, bien on voit mal comment une formation sur le civisme, aussi bien intentionnée soit-elle... Puis ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas en faire, ce n'est pas ça que je dis, mais il ne faut pas que ça soit l'unique façon de travailler pour contrer la violence et l'intimidation.

L'élément du volet préventif qu'il faudrait absolument penser, c'est la formation obligatoire de l'ensemble des personnels, l'ensemble des personnels pour être capable de faire une intervention juste mais aussi pour être capable de juger de la situation, pour faire en sorte que, par la suite, l'intervention soit juste. Alors, ça, il m'apparaît que c'est un incontournable.

Je glisserai rapidement un mot sur les ententes de collaboration avec les ressources policières. Je dois vous dire qu'on n'est pas du tout contre le fait que la commission scolaire puisse avoir un partenariat, un cadre de référence, mais j'attire votre attention sur le fait que les ententes particulières de partenariat avec les forces policières doivent se faire avec les établissements, parce que chaque établissement a sa couleur, a ses particularités, a ses besoins qui sont différents. Et là-dessus je vous invite également à regarder ce que la recherche dit, parce qu'elle est très claire là-dessus. Quand il y a des ententes de partenariat qui s'inscrivent avec la direction d'établissement et le policier, ça a des portées très, très positives, autant une mesure de prévention dans l'entente que mesure d'urgence et que mesure de sanction légale, on va dire, parce qu'il faut dire qu'on en prend aussi, de ces décisions-là. Et puis je pense que j'ai fait le tour.

M. Neault (Gaétan): Merci, Mme Boucher. M. le Président, en abordant la question de la lourdeur bureaucratique, nous nous sommes posés une seule et simple question: Est-ce que le projet de loi nous aide à combattre l'intimidation ou au contraire est-ce qu'il alourdit notre action? Est-ce qu'il supporte nos efforts? Est-ce que ce qu'il propose fournit un appui et des outils additionnels ou au contraire vient-il compliquer ou étirer dans le temps nos actions? En d'autres mots, nous aidera-t-il?

La fonction de directeur consiste à s'assurer de la qualité des services éducatifs dispensés dans son établissement et, entre autres, de veiller à ce que le milieu soit sécuritaire. Or, en regardant de plus près le projet de loi, on constate qu'il y a un alourdissement considérable des tâches administratives demandées aux directions d'établissement dans l'élaboration d'abord et l'application du plan de lutte ainsi qu'au niveau de la reddition de comptes. Nous croyons qu'à certains égards il existe plusieurs doublons ou duplications d'activités ou d'opérations qui sont déjà menées ou prévues dans la Loi sur l'instruction publique.

À titre d'exemple, au niveau de l'élaboration et de l'approbation d'un plan de lutte comme tel, il faut comprendre qu'il existe déjà dans la Loi sur l'instruction publique la notion de plan de réussite mais surtout de convention de gestion. Avec le but 4 de la ministre, on peut facilement traiter de toute la question de la sécurité dans l'école dans le cadre de la convention de gestion, qui prévoit d'ailleurs les portraits de milieu. Alors, c'est une obligation qui est faite aux directions. Il s'agit de s'assurer, évidemment, que le travail est fait, mais on pense que, dans le cadre de cette mesure-là, des choses peuvent être faites sans qu'on traite de façon indépendante ou autonome la question du plan de réussite.

À l'article 75.1 de la Loi sur l'instruction publique, il est stipulé qu'il doit y avoir une analyse de la situation dans l'école. Encore là, comme je le répète, cette opération-là est menée dans le cadre de l'élaboration de la convention de gestion. En traitant l'intimidation distinctement, on vient alourdir le processus. Certains éléments, comme les sanctions, pourraient très facilement être intégrés aux règles de conduite. L'article 76 de la LIP prévoit que c'est le conseil d'établissement qui approuve ces règles de conduite et mesures, donc, selon nous, il lui reviendrait également d'approuver le plan de lutte à travers les règles de conduite et à travers la convention de gestion.

Donc, on ne croit pas qu'une adoption parallèle du plan de lutte soit nécessaire. Nous pourrions retrouver dans le plan des mesures de prévention visant à contrer toute forme d'intimidation et de violence, les modalités ainsi que les mesures de confidentialité. Il est à noter que la quasi-totalité de nos membres ont déjà déployé un plan de lutte contre l'intimidation et adapté à la réalité de chacune des écoles.

Au niveau de la reddition de comptes et de l'évaluation, c'est un peu la même chose, les choses devraient être faites à travers le rapport annuel qui est présenté à chaque année par la direction de l'école.

La question des statistiques ou des différents rapports qui doivent être remis à la commission scolaire nous questionne. Nous voyons là un élément de dangerosité quant à la création de palmarès des écoles les plus violentes ou les moins... où se passe le moins d'intimidation. Donc, à quoi serviront ces rapports? Quelles fins statistiques veut-on en faire?

À notre avis, lorsque ces données permettent à une école de se comparer d'une année à l'autre, de se comparer à elle-même, l'évolution dans le temps, ça peut être fort intéressant. Par ailleurs, on pense que ce n'est pas très porteur que de se comparer d'une école à l'autre. Donc, on a parlé d'évaluer le plan de réussite, d'évaluer son application à travers le plan, c'est-à-dire le plan... d'évaluer l'application et l'efficacité du plan d'intervention à travers le plan de réussite. Pour nous, c'est une économie et dans le temps et dans l'énergie.

**(15 h 30)**

Au niveau de l'application du plan, la procédure est très normée, elle est systématique et elle peut devenir très, très accaparante dans le temps, d'autant plus, comme l'a soulevé Mme Boucher, que, si la définition d'«intimidation» est très large, on pourrait se retrouver avec une application qui demande énormément de temps.

Vous avez, dans le plan de... dans le projet Ça vaut le coup d'agir ensemble! qui avait été présenté, un aide-mémoire pour la direction lorsqu'il est question d'intervention au niveau de l'intimidation, on y parle d'évaluer rapidement l'événement, de rencontrer les victimes, de mettre des mesures de protection en place, de rencontrer les parents des personnes intimidées, des intimidateurs. On peut facilement comprendre que, dépendant de la situation, ce type d'activité peut prendre pratiquement une journée ou deux dans les tâches d'une direction d'établissement. Nous sommes entièrement d'accord, c'est la chose qu'il faut faire dans les cas de réelle intimidation. La question est: Comment départager, à partir de la définition qui nous est posée, les cas les plus lourds? Comment distinguer, si vous voulez, les petites chicanes de corridor ou de cour de récréation des vrais cas d'intimidation?

Alors, tout cela soulève aussi la question du jugement de la direction d'établissement. Il faut nécessairement laisser une marge de manoeuvre à la direction. Il faut que la loi trouve un équilibre optimal entre offrir à la direction d'établissement des outils supplémentaires en termes de sanctions, en termes de pouvoir, mais en même temps conserver une part de jugement quant à l'application systématique de ces questions. Donc, dans nos propositions, on suggère que le plan de lutte soit enchâssé dans la convention de gestion ou le projet éducatif et qu'il soit ainsi l'objet d'approbation par le conseil d'établissement; deuxièmement, que la reddition de comptes relative au plan de lutte contre l'intimidation soit effectuée à travers l'opération du rapport annuel de l'école; et, troisièmement, que les directions d'école ne soient pas tenues de transmettre les rapports concernant les actes d'intimidation et de violence aux commissions scolaires, afin d'éviter le palmarès des écoles.

La question de la frontière des écoles et dans le temps et dans l'espace, on l'a soulevé, est très importante. L'élève n'est pas à l'école 24 heures par jour. Il y a les fins de semaine, il y a les vacances. Il faut aussi prendre en compte la notion de territoire. Que se passe-t-il, surtout avec la cyberintimidation, quand les activités se passent à l'extérieur de l'école?

On pense que la loi devrait être un peu plus claire à cet égard, à l'image de celle qui est proposée en Ontario, l'idée étant de préserver le principe fondamental que l'équipe-école et le parent forment un tout. Il ne faut pas isoler la direction ou l'un ou l'autre des acteurs à ce niveau-là.

Au niveau des pouvoirs et devoirs qui sont imposés par le nouveau projet de loi, beaucoup de nouvelles responsabilités incombent à la direction. À l'intérieur des modalités prévues par le projet de loi n° 56, plusieurs actions sont demandées. Premièrement, l'article 11 qui modifie 96.12, on demande au directeur de désigner parmi les membres du personnel de l'école une personne à charge et de former un comité. La question qu'on se pose: Comment? Qui formera ce comité? Qui sera la personne responsable? Y a-t-il un risque qu'en identifiant un répondant, un porteur de dossier, on déresponsabilise l'ensemble des intervenants?

Une chose est certaine, c'est qu'en ciblant prioritairement l'école on risque d'envoyer un message que les choses... Tout en reconnaissant que l'école est un pivot, il faut absolument préserver les liens de collaboration essentiels avec les autres acteurs de la communauté ou du milieu. Nommer un technicien en éducation spécialisée ne nous apparaît pas la solution idéale, puisque cette personne peut être appelée à enquêter, entre guillemets, auprès de collègues, auprès d'adultes. Alors, on pense qu'essentiellement ce sera éventuellement la direction qui devra être responsable du dossier qui devrait être le coordonnateur du comité.

Maintenant, que faire dans des situations, surtout en milieu rural, où une direction couvre trois bâtiments ou trois établissements à raison d'une journée et demie semaine chacun? On ne peut pas commander des interventions de cette façon-là, l'intimidation n'attend pas que le directeur soit là pour se produire.

Il n'est pas populaire de parler d'ajout de ressources, ça, on l'a mentionné. Par ailleurs, on est forcés de constater que les choses qui fonctionnent... On a mentionné dans le cadre de cette commission-ci les initiatives de la Fondation Jasmin Roy. Alors, il faut se rappeler qu'il s'agit là d'une personne qui est libérée, d'une personne qui est ajoutée au personnel de l'école.

La solution: la nécessité de travailler ensemble. C'est très important, c'est une responsabilité partagée. On trouve que ça ne ressort pas suffisamment dans l'actuel projet de loi, l'école est ciblée. Donc, au contraire, y a-t-il un risque, comme je le disais, de déresponsabilisation?

Voilà. Alors, nous sommes maintenant en mesure de répondre à vos questions, M. le Président.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie pour cet exposé. Nous allons débuter immédiatement la période d'échange, et je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport. Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour à vous tous, ça me fait plaisir de vous revoir. M. Neault, Mme Boucher, M. Bouchard, bienvenue à Québec, ça me fait plaisir de vous voir ailleurs qu'à Montréal-Nord, bienvenue, et également M. Flamand. Et merci pour votre mémoire, puis on aura l'occasion donc assez longuement d'échanger avec vous.

Il y a quelque chose que je veux quand même éclaircir. Mme Boucher, bien que ce n'était pas là le principal angle de vos propos, vous avez quand même dit que, selon un sondage fait auprès de vos membres, vous estimez que 50 % des montants dévolus à la lutte contre l'intimidation atterrissaient dans les écoles, mais je vous ai aussi entendue dire que vous n'êtes pas en train de dire que... parce que... Mais c'est important. Et je ne veux pas mettre des mots dans votre bouche, mais, quand on entend ça comme ça, on dirait que les conclusions qui viennent de façon spontanée, deux, trois éléments, la première conclusion, c'est de se poser la question: Est-ce que vous êtes en train de nous dire que les commissions scolaires détournent des sommes destinées à l'intimidation vers d'autres fonctions? Est-ce que vous êtes en train de me dire que 50 % des sommes ne sont pas détournées mais sont perdues dans une forme de... de bureaucratie, pardon, qui accompagne le plan d'action contre l'intimidation?

Aussi -- puis je vous ai entendus le dire, mais je veux juste savoir, là -- ça peut être une combinaison des trois aussi, là, mais le dernier élément, c'est que vous avez semblé donner comme exemple le fait que, dans le plan d'action 2008-2011, il y avait nommément inscrit le fait qu'on demandait aux écoles d'instaurer le service d'accompagnement de l'élève intimidateur. Je sais, pour ma part, que c'est fait à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île avec notamment le YMCA -- notamment, là, je pense que ce n'est pas le seul organisme -- avec certaines maisons de jeunes, et donc vous êtes en train de me dire qu'il y a eu des sommes disponibles à la commission scolaire qui ont quand même été dévolues à une forme de service à l'élève qui est, là, l'encadrement de l'élève intimidateur.

Mais je veux vous entendre plus, parce qu'honnêtement, moi, comme ministre et comme législateur, c'est un éclairage important. Parce que pourquoi aujourd'hui je suis devant un projet de loi? Puis j'y reviendrai, là, mais notamment c'est parce qu'il y a eu un plan d'action avec des ressources financières et qu'on s'est fait dire, au bout d'un certain temps, qu'on n'était pas capable d'avoir un portrait juste... ou même on s'est fait dire qu'un certain pourcentage d'écoles -- on n'a pas de portrait, ça fait que c'est... ça semble être 30 %, 40 % des écoles -- n'ont pas mené d'action de lutte contre l'intimidation. Ça fait que c'est pour ça que je suis devant un projet de loi. Donc, mon projet de loi ne peut pas passer à côté de la cible qui est de dire qu'il faut que les actions soient prises.

Donc, je veux vous entendre. Pour moi, c'est bien important de vous entendre au complet sur... Donnez-moi le vrai éclairage sur pourquoi on a entendu ces critiques sur le plan d'action 2008-2011, pourquoi les professeurs nous disent: On n'a rien vu, nous autres. Moi, j'enseigne dans ma classe; je ne le sais pas, qu'il y a un plan d'action, je n'ai rien vu comme services. C'est ça qu'on a entendu par des sondages faits auprès des professeurs, et tout ça, puis c'est pour ça qu'on essaie d'y répondre dans un régime d'obligation d'intervention en cas d'intimidation. Mais racontez-moi l'histoire. Dites-moi ce qui, selon vous, est arrivé avec les montants d'argent pour qu'on puisse... Moi, ça va me donner l'éclairage sur: J'oblige les gens à faire quoi? Une fois que j'ai un régime d'obligation, j'ai un régime possible de sanctions, j'ai un régime de transparence, donc, ça me prend le bon éclairage historique pour prendre les bonnes décisions dans le cadre de ce projet de loi.

**(15 h 40)**

Mme Boucher (Danielle): Écoutez, je n'ai pas fait d'enquête dans chacune des commissions scolaires qui composent les membres de mon association. Moi, ce que j'ai fait, c'est que j'ai vérifié auprès de mes membres à l'association -- puis ça a été la même chose au niveau de l'association montréalaise -- du plan de lutte, du 6 millions, qu'est-ce qui descend dans les écoles pour venir supporter les écoles à mettre en place le plan de lutte pour contrer la violence, et le résultat est ça. Qu'est-ce qu'on fait avec les sous? Je ne dis pas qu'il y a des gens qui détournent, là, bien loin de moi l'idée d'accuser qui que ce soit. Probablement qu'il y a eu une partie des sommes qui a été engagée pour une personne à la commission scolaire pour supporter les écoles, puis au niveau de la bureaucratie il y a peut-être des sommes, parce qu'il faut remplir certainement des rapports, mais en plus il y a eu aussi des commissions scolaires qui ont pris l'engagement de donner des services alternatifs à la suspension, puis c'est dans ce cadre-là qu'ils ont pu utiliser les sommes. Donc, c'est devenu une partie centralisée puis une partie décentralisée, mais vous comprendrez que je ne veux pas juger de ce qu'on a fait, je dis juste qu'il y a 50 % des sommes qui sont à l'école.

Alors, nous, on travaille avec 50 % des sommes avec des défis importants. Alors, est-ce que c'est pour ça que le personnel ne s'est pas rendu compte qu'il y avait eu des choses de faites? Ça m'étonne d'entendre ce genre de commentaire parce qu'écoutez, quand on travaille avec du personnel, qu'on est dans une école, on travaille souvent... je peux vous dire que, dans beaucoup d'assemblées de personnel, on parle de règles de vie, on parle des problématiques qu'on peut rencontrer, par exemple, dans un mois: Bon, là, il y a telle situation, comment on peut faire pour redresser? C'est dans le cadre, ça, du plan de lutte pour contrer la violence. Alors, il m'apparaît en tout cas questionnant... Et je pense qu'une des réponses qu'on pourrait se faire, c'est au niveau de la mobilisation. Il y a peut-être quelque chose là à aller creuser davantage, comment on peut faire pour mobiliser les gens puis vraiment qu'on comprenne qu'on est en train de parler du plan de lutte, parce que le plan de lutte pour contrer la violence, il peut s'inscrire dans plusieurs choses dans l'école, pas seulement une chose. Donc, le fait de l'inscrire de cette façon fait peut-être en sorte... Il n'y a pas de document comme tel où on le nomme de cette façon-là, mais, quand on revoit avec l'ensemble de l'équipe-école la façon dont on gère les règles de vie, où on fait venir des ressources spécialisées pour vraiment distinguer un manquement mineur d'un manquement majeur, comment on doit libeller les règles de vie, quelle sorte d'intervention qu'on peut faire, écoutez, c'en est, ça, ça en fait partie, des moyens qu'on prend, l'école, pour contrer la violence.

Dans ma deuxième partie de réponse, je permettrais à M. Bouchard de poursuivre la discussion.

Le Président (M. Marsan): M. Bouchard.

M. Bouchard (Jean-François): Bonjour. En fait, moi, je vais vous parler de ce que je connais. L'intimidation, dernièrement, c'est un sujet... Je l'entendais en assemblée générale le 12 mars dernier, je revenais de vacances, on a parlé qu'on aura à se doter de peut-être quelque chose, et j'ai posé une question très claire, j'ai dit: Avez-vous l'impression qu'à l'école... Puis je n'ai pas juste dit: La direction de l'école ne s'occupe pas de l'intimidation. J'ai dit: Est-ce que vous avez l'impression que l'équipe-école ne s'occupe pas de l'intimidation?, et, de façon très unanime, les gens m'ont dit: Non, on s'en occupe, vous vous en occupez dans les classes, on est vos yeux, on est vos oreilles. Donc, il y a comme eu une espèce de consensus.

La question qu'on pose, c'est: Est-ce que c'est mis dans un plan d'action? C'est-u écrit «intervention n° 1», «sanction n° 1»? Après tant de choses, est-ce qu'on fait des...

Dans l'école, en tout cas dans les écoles que moi, je connais -- j'en connais quand même plusieurs à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île -- il y a des codes de vie qui sont particulièrement efficaces, qui sont dotés, là, de toutes sortes de choses, des actions coercitives, des actions positives à tous les niveaux. On tient compte également de nos partenaires de la communauté. Quand il arrive telle chose, on peut aller alternative à la suspension si nos commissions scolaires se sont dotées de partenariats de cette nature-là.

Ensuite, tout l'avènement des conventions de gestion, nous avons discuté de façon importante. Il y a eu des arrêts, j'ai appelé ça, moi, des arrêts intelligents dans nos écoles, où on s'est dit: Il faut qu'on discute de tout, et un des plus gros buts sur les cinq, c'était le but n° 4, un environnement sain et sécuritaire. Quand on fait l'analyse de la situation, c'est là qu'on va chercher dans tous les questionnaires qu'on pose soit aux enfants, aux membres du personnel, aux membres... aux parents. C'est là que tout sort. Et, dans nos conventions de gestion, on a identifié des zones, des grandes zones de vulnérabilité, et c'est en fonction de ces zones-là qu'on a défini certains objectifs à atteindre, donc nos fameuses cibles, mais on a mis des moyens en place. Mais est-ce que ça s'appelle un plan d'action en bonne et due forme? Peut-être que non.

Par contre, je suis capable de vous dire que j'ai un plan d'intervention en situation critique. On va nommer des grosses choses. Un élève, par exemple, là, qui commet un geste épouvantable, là, on peut parler, je ne sais pas, moi, une tentative de suicide, ses parents, il est arrivé un accident, il y a eu une alerte à la bombe, peu importe, ça, on est dotés de plans de cette nature-là de la même façon qu'on est dotés de plans d'intervention particuliers s'il y a des tireurs fous dans les écoles. On a été obligés, on l'a fait. Ça, ça apparaît dans nos conventions de gestion.

Par contre, si la pierre angulaire... En tout cas, dans la mienne, c'est comme ça. Le but n° 4, c'est l'environnement sain et sécuritaire, on l'a mentionné tout à l'heure. Moi, un enfant qui est bien dans son école, qui a du plaisir, où les membres du personnel sont agréables avec les enfants, sont agréables avec nous et vice versa, bien ça crée un environnement socioéducatif qui fait en sorte que nos taux de réussite vont augmenter, nos taux de décrochage vont diminuer.

Moi, je ne suis pas capable de vous dire si je reçois la moitié du montant d'argent, si c'est 1 000 $, je reçois-tu 500 $. Je ne le sais pas. Ce que je sais, c'est que j'en aurais besoin d'un petit peu plus pour ne pas que l'action soit uniquement ponctuelle, parce que, dans tout, tout, tout ce qu'on fait, dans les analyses, quand on s'adjoint des partenaires importants, des chercheurs dans nos écoles, entre autres l'Institut national de santé publique qui nous a accompagnés pour aller chercher les pratiques gagnantes, et quand on regarde le fameux but n° 4, ce qui est clair, c'est: Cessez de faire des actions ponctuelles. Un petit geste par année pour contrer la violence, ça ne marche pas. O.K.?

Ce que je peux vous dire, c'est que le niveau de violence a diminué dans l'école, le vandalisme a diminué au fil des années, et certainement les actions qu'on a posées au fil des années, ça doit être dans un plan d'action. Il y a une équation, c'est une multitude de petits gestes.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci. Mme la ministre.

Des voix: ...

Le Président (M. Marsan): Bon, s'il vous plaît! On va suspendre pour quelques instants, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 15 h 47)

(Reprise à 15 h 48)

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie, nous reprenons nos travaux, et je vais donner la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports.

Mme Beauchamp: Je veux vous dire que j'ai beaucoup de respect puis beaucoup, même, d'admiration pour le rôle du directeur d'école, je veux juste prendre le temps de vous le dire. Et je suis consciente que, dans le projet de loi, le projet de loi met au coeur de l'action contre l'intimidation le directeur ou la directrice d'école.

Vous avez plus d'une fois, dans vos propos, là, parlé de la notion de déresponsabilisation liée au fait que, dans la loi, on dit qu'il doit y avoir une personne désignée responsable. Je veux avoir un échange avec vous là-dessus parce que je vais vous dire un peu ma vision, moi, que j'ai de l'équilibre atteint, là, je dirais, ou de l'économie organisationnelle qu'il y a derrière le projet de loi. Oui, on dit dans la loi qu'il faut qu'il y ait quelqu'un de désigné, c'est vrai, mais franchement, et même dans les entrevues que j'ai données, si on me demandait qui est le leader dans la lutte contre l'intimidation, je pense que la loi dit plutôt que c'est le directeur d'école, qui est désigné dans beaucoup d'éléments comme étant la personne responsable dans son rôle de leader pédagogique et bien sûr de leader dans l'école.

**(15 h 50)**

Je vais vous faire une comparaison. Elles sont toujours, toujours, toujours boiteuses, là, je ne veux pas avoir l'air d'être réductrice dans ma comparaison, mais j'ai été ministre de l'Environnement, puis, quand on parlait de l'enjeu du développement durable, comment faire pour qu'une organisation adopte les valeurs du développement durable, très souvent on nous disait: Évitez de faire une case dans l'organigramme avec quelqu'un responsable du développement durable, parce que ça veut dire que tous les autres vont se dire: C'est sa job, ce n'est pas la mienne. Mais la vraie solution, ce n'était pas non plus qu'il n'y ait pas de case développement durable. La vraie solution, c'était que, dans les hautes instances de l'entreprise ou de l'organisation publique, les dirigeants soient conscientisés et soient responsables de ce dossier, en ayant un répondant par ailleurs dans l'organigramme.

Moi, je regarde la loi maintenant puis je me dis: Il me semble que j'atteins ça, c'est-à-dire on dit: Ça prend quand même quelqu'un qui est une référence dans l'école, mais il me semble qu'il y a un rôle de responsabilisation au niveau de l'autorité que représente le directeur de l'école. Mais je suis sensible à vos commentaires, ça fait que je veux voir si on peut partager la même vision là-dessus. Moi, je vous le dis de façon claire, puis vous avez même le droit de me dire: C'est trop, mais moi, si on me disait: C'est qui, là, ultimement, dans la loi, là, qui porte la responsabilité qu'il y ait un plan, qu'on soit sûrs qu'il y ait les interventions, qu'il y a 100 % d'intervention s'il y a un geste d'intimidation, qui est responsable de la reddition de comptes, de la clarté de ce qui se passe, de la transparence dans ce qui se passe dans l'école, etc., franchement je dis: Ce n'est pas le protecteur de l'élève, ce n'est pas la commission scolaire, ce n'est pas non plus la personne désignée dans l'école; franchement, c'est le directeur de l'école.

Est-ce que vous voyez ça comme moi? Est-ce que vous trouvez que c'est ça que traduit la loi? Puis, si oui, est-ce que vous trouvez que c'est la bonne chose? Mais moi ce serait un peu ça, mes commentaires puis ma réponse à votre inquiétude de la déresponsabilisation face au dossier.

M. Neault (Gaétan): Je peux peut-être répondre en partie. Je pense, Mme la ministre, que c'est déjà ce qui se fait dans les écoles. La direction d'établissement, quoi que puisse en penser mon ami M. St-Germain, là, est très au fait des situations et s'en occupe, les choses sont prises en main présentement, et puis, à cet égard-là, ce que vient ajouter la loi m'apparaît plutôt être de la confusion.

Ce que vous mentionnez là, je pense que, si c'était clairement édicté dans la loi, à ce moment-là ça devient davantage aidant. Maintenant, il n'y a rien qui spécifie ce que vous venez de dire, là, que le directeur devrait avoir l'autorité, devrait avoir des pouvoirs accrus à cet égard-là.

Mme Beauchamp: Pardonnez-moi, mais on ne fait pas la même lecture. La loi dit que c'est le directeur qui doit s'assurer qu'il y ait un plan, adopté par le conseil d'établissement, mais qu'il y ait intervention, là. Ce que ça dit, là, c'est que ça revient au directeur de s'assurer qu'il y a une intervention s'il y a dénonciation d'un geste d'intimidation ou s'il y a plainte. Ça devient... C'est le directeur qui doit s'assurer qu'on communique avec les parents, communique avec les parents de l'élève intimidateur, c'est le directeur qui doit communiquer l'information vers la direction de la commission scolaire. J'ai, moi, de la difficulté à comprendre pourquoi vous dites: Ce n'est pas clair, quand je me dis... Franchement, même, je pensais que vous alliez me dire: Vous nous en mettez trop sur les épaules, je ne pensais pas que vous alliez me répondre: C'est de la confusion. Moi, à la limite, je m'inquiétais en disant: Là, on lui en met beaucoup sur les épaules, au directeur d'école, mais c'est son rôle, c'est son rôle pédagogique, c'est son rôle d'administrateur. Mais la confusion, elle m'étonne. Que vous me parliez de confusion, on ne fait pas la même lecture des articles parlant du directeur, à ce moment-là, dans la loi.

M. Neault (Gaétan): Moi, je fais référence au comité dont on parle dans la loi, qui doit être mis sur place avec un responsable, sans spécifier qui sera ce responsable. D'ailleurs, les enseignants à la commission ici se demandaient si c'était pour être des gens qui seraient nommés parmi leur groupe. Si on énonce clairement que la direction a la responsabilité, oui, je vous dirai qu'on en a déjà beaucoup sur les épaules, ça vient s'ajouter, mais en même temps c'est déjà la façon dont on perçoit notre rôle par rapport à la sécurité dans l'école, par rapport aux questions de... aux problématiques d'intimidation, aux incidents qui peuvent arriver, ce que décrivait M. Bouchard. Maintenant, donnons davantage de pouvoir à la direction dans le cadre de la loi, précisons que c'est lui qui est le porteur, qui est l'ultime responsable du dossier, mais je ne vois pas, le comité qui est formé avec le responsable, ce que ça vient ajouter.

Je ne sais pas si mes collègues sur le plancher peuvent... Dominic.

Mme Beauchamp: ...compte tenu qu'on a plusieurs questions, juste vous dire, là, j'écoute et en même temps je prends juste le temps de vous préciser que la volonté était d'exprimer clairement... je sais que c'est a contrario de ce que vous dites, mais c'était plutôt d'illustrer clairement que la lutte contre l'intimidation, ça concerne tout le monde, tu sais, c'est pour créer le fait de dire: Ça concerne tout le monde. On essaie d'ailleurs d'insister pour dire: Ça ne se passe pas juste à l'école, ça concerne toute la société, parce que ce n'est pas juste un projet de loi, c'est une campagne de mobilisation, c'est une campagne d'information, et donc c'est une volonté de dire: Ça concerne tout le monde et ça... Vous comprenez ce que je veux dire? C'est qu'il y a aussi un danger de dire: On met... Il me semble qu'il y a un danger de dire: On ne met pas de comité en place, pas de répondant, puis c'est le directeur. Il me semble aussi que ça crée un effet de dire: Ce n'est pas mon problème. Ça devient le problème du directeur de l'école.

Ça fait que j'essaie de trouver l'équilibre, là, entre vos propos, vos inquiétudes et ce que j'ai entendu d'autres intervenants ici réclamer, à savoir de dire: Assurez-vous que ça soit l'affaire de tout le monde, certains nous reprochant même qu'on n'intègre pas assez encore tout le monde, comme les témoins, etc.

Mais j'ai d'autres questions pour vous. Je veux...

Le Président (M. Marsan): C'est parce que c'est terminé, mais il y aura...

Mme Beauchamp: Ah, c'est terminé? D'accord. On a un autre bloc? Oui, c'est ça. O.K.

Le Président (M. Marsan): Exactement. Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Ceci termine le premier échange avec le parti ministériel.

Nous allons poursuivre avec l'opposition officielle, et je vais donner la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'enseignement primaire et secondaire, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui, merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup pour votre présence ici et pour votre préparation, le travail que vous avez fait en consultant, sûrement, puis en vous assoyant sérieusement pour produire ce document. Merci aussi d'amener des praticiens, je dirais, des directeurs d'école autant en milieu urbain qu'en milieu rural... bien, plus rural, en tout cas plus en région -- rural, c'est un peu fort, mais plus en région, là -- pour pouvoir éventuellement répondre ou témoigner de vos réalités respectives.

J'aimerais d'abord vous entendre de façon plus globale et plus générale, parce que je constate que vous êtes d'accord avec le projet de loi, en même temps vous nous dites qu'il y a déjà beaucoup d'éléments qui existent en vertu de la Loi sur l'instruction publique ou en vertu, par exemple, des conventions de gestion qui permettent d'agir, qui permettent d'agir et qui permettent d'intervenir. Donc, j'aimerais que vous nous disiez, selon vous, qu'est-ce que le projet de loi n° 56 apporte de plus à ce qu'on peut déjà faire contre l'intimidation dans nos écoles.

Mme Boucher (Danielle): O.K., c'est moi.

Une voix: ...

Mme Boucher (Danielle): Oh! Excusez-moi. Moi, je parlais tout bas à mon collègue.

Le Président (M. Marsan): Alors, Mme Boucher.

Mme Boucher (Danielle): Bien, écoutez, on se l'est posée, la question, parce qu'effectivement la Loi sur l'instruction publique prévoit quand même un certain nombre de choses puis avec les projets qui ont été amendés par la suite, qui sont venus amender le projet de loi, dont, entre autres, les conventions de gestion qui sont arrivées par la suite, et on a eu le but 4 aussi de la ministre. Donc, il y a tout ça, puis on a essayé de voir c'était quoi, l'essence même qu'on voulait, dans le fond, livrer comme message.

C'est sûr qu'il y a tout un contexte, il faut se le dire, là, qui a amené le projet de loi, puis en même temps j'ai le goût de vous dire qu'on est sensibles, là, à l'intimidation et à la violence à l'école. C'est bien clair qu'on ne peut pas dire: Non, on ne veut pas lutter contre la violence. C'est clair que c'est dans nos gènes, on veut lutter contre la violence et l'intimidation à l'école. Peut-être qu'on l'a échappé, mais on pense que peut-être que ce projet de loi là, ce qu'il veut, c'est responsabiliser le plus de monde possible, le plus grand nombre de personnes possible, toute l'équipe-école, et non faire porter seulement sur une personne la responsabilité de la question de l'intimidation et de la violence à l'école. Alors, c'est un petit peu, ça, dans un contexte où il y a de la mobilisation. Alors, moi, j'aime bien l'idée.

Maintenant, ce que j'aurais souhaité, c'est avoir beaucoup plus de prévention puis d'obligations au niveau de la formation des différents personnels. Je dis tous les personnels. Ça, je pense que ça, ça doit être de façon récurrente aussi, et ça, je pense que, si ça, ça vient aussi s'inscrire dans le nouveau... dans le projet de loi dont on parle aujourd'hui, ça pourra venir bonifier déjà ce qu'on fait, le fait de dire: Bien là, on met l'accent sur la prévention de façon récurrente et obligatoire, on doit tous être interpellés par la situation.

Maintenant, la mobilisation veut dire aussi des outils. Alors, on souhaite grandement avoir des outils supplémentaires, j'imagine, parce qu'on on a quelque chose de nouveau qui est la cyberintimidation. Ça ne fait quand même pas 20 ans qu'on travaille avec les outils comme Facebook, etc., et je vous dirais que la zone n'est pas tout à fait délimitée en ce qui appartient à l'école puis ce qui appartient à la maison, puis ça, je pense qu'on est très inconfortables avec l'idée de ne pas trop savoir elle est où, la zone, là.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question, mais je suis allée vraiment personnellement, là, comme...

M. Gaudreault: Bien, en fait, il n'y avait pas de bonne ou de mauvaise réponse...

Mme Boucher (Danielle): Non, hein?

**(16 heures)**

M. Gaudreault: ...il y avait votre réponse. Mais, tant qu'à être justement sur ce que vous appelez la zone, là, ou le territoire, l'espace-temps du projet de loi n° 56... Et vous parlez de la cyberintimidation, je suis d'accord avec vous que c'est un phénomène récent, c'est un phénomène qui amène toute une différence. Parce qu'on entend souvent: Ah, l'intimidation, il y en a toujours eu, ce qui est malheureusement vrai. La différence aujourd'hui, c'est que ça se poursuit à la maison avec Facebook, Twitter, les réseaux sociaux.

Alors, j'aimerais ça vous entendre un petit peu plus là-dessus. Au-delà de dire: On voit mal jusqu'où ça peut aller, quelle est notre responsabilité? J'imagine que vous avez réfléchi un peu plus là-dessus, peut-être dans le concret, là, des gens sur le terrain, mais, moi, par rapport à la cyberintimidation, ça me questionne beaucoup, ça interpelle évidemment le rôle des parents aussi là-dessus. Mais jusqu'où vous, vous voyez votre rôle, là? Ça arrête où, là, votre frontière?

Mme Boucher (Danielle): O.K. Dans un premier temps, ce qui se passe à la maison, quand il y a des répercussions à l'école, je pense que la direction d'école doit jouer un rôle, hein, c'est évident, parce qu'il y a une relation avec le parent, mais elle ne doit pas être seule à régler la situation quand il y a une situation qui se passe à la maison le soir, les fins de semaine. Puis là c'est parce que, si c'est juste la direction d'école, qu'est-ce qu'on va faire aux vacances estivales, là, tu sais? On va avoir un problème tantôt. Donc, je pense, c'est dans ce cadre-là que je nommais que, la cyberintimidation, il faut quand même délimiter. Et je pense que le parent... Je vous dirais que la très grande majorité des parents, on a une collaboration, ça va très bien avec les parents, donc il ne faut pas non plus sous-estimer le rôle qu'ils ont à jouer.

Puis je vais vous raconter une histoire bien banale, là. Juste Facebook, là, il semblerait, hein, que ça prend un âge minimal. Bien, je peux vous dire que, dans les écoles primaires, là, il y en a à huit, neuf ans qui ont déjà leurs comptes sur Facebook, donc juste de sensibiliser les parents à dire: Bon, il a un compte, c'est une chose, mais est-ce que tu vois qu'est-ce qu'il écrit dessus puis est-ce que tu interviens, est-ce que tu fais de l'éducation? Puis là je ne dis pas ça pour taper sur les parents, je dis juste que c'est un phénomène nouveau, qu'on ne s'est pas encore attardés à cette situation-là, puis c'est grand temps qu'on s'y attarde pour justement éviter les dérapages.

Alors, pour le reste de la réponse, je laisserais M. Flamand terminer.

Le Président (M. Marsan): M. Flamand.

M. Flamand (Dominic): Bonjour. J'en ai fait beaucoup, de prévention dans mes écoles sur la cyberintimidation ces dernières années. Écoutez, une école de 395 élèves, quand on va à 16 assemblées de parents en début d'année, c'est beaucoup, je l'ai fait. Pour vous dire, au niveau des enfants qui ont des comptes Facebook en troisième année, c'est à peu près les deux tiers des élèves chez nous, c'est jeune, et puis il y a beaucoup de travail à faire au niveau des parents, de la sensibilisation, parce qu'il y a une naïveté par rapport à ces outils-là que plusieurs parents sont plus ou moins à l'aise ou plus ou moins conscients. Pour eux, ils sont tranquilles devant l'ordinateur, ils ne font pas de mal. On a une bonne collaboration avec la majorité des parents, sauf quelques exceptions, mais il arrive des cas où on intervient, puis, au bout de quelque temps, le parent va relâcher sa vigilance.

On a aussi des situations, moi, que j'ai vécues, où ça ne concernait pas du tout, du tout l'école, ça n'avait pas d'influence sur l'école, puis le parent -- avant le projet de loi -- voulait que je m'en occupe, et je ne me sentais pas capable de faire quelque chose parce que dans l'école il n'y avait aucune répercussion, mais ça causait des problèmes. C'était vraiment quelque chose en dehors complètement de l'école. Ça fait qu'il y a quelque chose qui n'est pas clair à ce niveau-là, qui est questionnant de notre côté, dans notre travail.

Mais, écoutez, au niveau de la sensibilisation, de la prévention, c'est évident que notre porte va toujours être ouverte, c'est notre premier rôle. Puis un acte de prévention, je ne sais pas combien ça peut enlever d'actes de coercition aussi. On y croit, là.

Le Président (M. Marsan): Merci. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui. On pourra revenir sur la prévention un petit peu plus tard, parce qu'effectivement je suis d'accord avec vous, c'est fondamental. Mais est-ce que je comprends bien? Même si vous avez certaines difficultés à bien cerner comment pouvoir intervenir autour des réseaux sociaux, autour de Facebook et tout, vous me dites quand même qu'il faut envisager cette question-là sous l'angle des répercussions sur l'école. Donc, quand il y a répercussion sur l'école, ça vous concerne. Donc, ça élargit quand même, d'une certaine manière, le spectre, parce que des répercussions sur l'école, si en soirée il y a un genre de chat qui se passe entre des élèves qui intimident... Bien, j'ai en tête... on a tous lu, là, les propos qui ont été tenus concernant la jeune de Sainte-Anne-des-Monts quelque temps avant son suicide, bien malheureusement, là, qui était souvent le soir, la fin de semaine, par tous des élèves de l'école. Est-ce que, pour vous, ça, cet exemple-là... Même si c'est en dehors de l'école, en dehors des heures de l'école, ça a eu forcément des répercussions sur l'école, alors il y a comme un... ça touche votre territoire d'une certaine manière par ça, là. Alors, oui, il y a une limite.

Ou on pourrait prendre, par exemple, un autre exemple. Là, je viens de vous donner un exemple virtuel, mais -- on en parlait un petit peu plus tôt aujourd'hui -- si on prend un exemple réel, l'élève qui n'a pas besoin de prendre l'autobus pour se rendre à l'école ou retourner chez eux, bon, bien est-ce qu'on va y aller comme le contrôle de la cigarette, là, à neuf mètres de la porte de l'établissement, ou l'élève est sous contrôle de l'école jusqu'à ce qu'il soit rendu à la porte de sa maison? C'est un petit peu la même question qui se pose. Alors, je vous lance ça.

M. Neault (Gaétan): Je peux tenter une intervention par rapport à ça. Je pense qu'encore là il faut trouver un équilibre et puis il faut distinguer entre des balises, des balises claires et la vraie vie aussi. Il n'y a pas une direction d'établissement qui n'interviendra pas ou qui ne demandera pas à son personnel de soutenir un élève qui a eu une problématique en fin de semaine, parce qu'on sait très bien qu'il va y avoir éventuellement une répercussion tôt ou tard dans l'école. Donc, lorsqu'on est informés, indépendamment du fait... de la question de territoire ou de la question du temps dans la semaine où ça s'est produit, si on pense que ça peut avoir un impact négatif sur le milieu, il y a une intervention.

Maintenant, ce qu'on veut éviter, c'est ce qu'un membre m'a rapporté à titre d'exemple il y a deux semaines. L'acte d'intimidation s'est produit à 9 heures le samedi soir; à 8 h 30 le lundi matin, le père était dans le bureau de la direction pour lui demander ce qu'il était pour faire pour régler la situation. Le directeur a demandé: Est-ce qu'il s'agit d'un élève de l'école? Le père ne le savait pas. Alors, il y a quand même... Là, je dois vous dire, c'est un exemple assez extrême, là, mais il faut départager comment on collabore ensemble là-dedans puis qu'est-ce qui revient à qui.

Je sais aussi que, dans les écoles secondaires, il y a des choses qui se font qui vont au-delà, bien au-delà des règles établies ou bien au-delà des normes. On pense juste à la collaboration avec les postes de quartier et avec les policiers. Ce n'est pas nécessairement documenté, structuré, couché dans une entente très, très claire, mais il y a des collaborations extrêmement précieuses qui sont en cours présentement, puis, encore là, il y a un danger qu'elles pourraient peut-être risquer de disparaître si on voudrait trop les formaliser.

Jean-François, veux-tu compléter avec les...

M. Bouchard (Jean-François): Moi, je peux compléter par des exemples en disant que tout ce qui arrive à l'école qui peut avoir une incidence, que ce soit un samedi soir, un dimanche matin, on s'en occupe clairement, on essaie de savoir si ça va avoir un impact sur quelqu'un.

Maintenant, il y a un travail d'éducation aussi à faire avec nos parents. Moi, je n'ai pas de problème à être celui... vraiment pas. Puis on ne fait pas pitié dans les écoles, là, on a des ressources, on est capables de s'organiser.

Par contre, moi, ce que je semble des fois ne pas voir, c'est toute la responsabilisation des autres. J'aimerais ça le voir écrit quelque part, moi, que l'ensemble du personnel enseignant, la table des services éducatifs complémentaires, vous avez également une forme de... Tu sais, tantôt j'ai dit «mes yeux et mes oreilles». Vous devez aussi me le dire, parce que ça se passe à quelque part, mais c'est le directeur d'école qui est responsable. Ils l'ont tous vu, mais ils ne l'ont pas fait. J'aimerais ça qu'il y ait... Tu sais, à partir du moment où moi, je le sais, que quelqu'un le savait, bien je vais le voir: Pourquoi toi, tu n'es pas intervenu? Viens me voir, je vais t'aider. O.K.?

Moi, je suis prêt à la prendre toute la... On le fait déjà, on le fait déjà assez bien dans plusieurs quartiers toujours pas très simples, mais, quand on met la main à la pâte tout le monde, on arrive... Moi, c'est le petit bout qui me manque dans le projet de loi, où j'aimerais ça voir peut-être plus spécifiquement... Le directeur d'école, c'est une chose, mais trouver un libellé, une phrase qui pourrait aussi attacher une responsabilisation à l'ensemble de l'équipe-école. Puis, quand je dis «l'ensemble de l'équipe-école», j'inclus les parents et la communauté.

**(16 h 10)**

M. Gaudreault: Oui, parce qu'en même temps je vous écoutais puis je me disais: Par exemple, un jeune qui participe à une activité sportive, par exemple il fait partie d'une équipe de hockey dans sa ville ou... bon, ça n'a rien à voir avec l'école, mais il peut y avoir de l'intimidation là la fin de semaine, pendant qu'il participe au tournoi pee-wee de Jonquière, puis, quand il retourne chez eux, bien là il y a des conséquences dans son école, forcément. Mais ce que je veux dire, c'est que les organisations, par exemple, de sport amateur ou ces choses-là... ou de sport jeunesse peuvent être concernées aussi quand vous parlez de communauté, mais là, en même temps, on élargit énormément le spectre.

Mais je voulais que vous me disiez précisément... bien un peu plus précisément quand vous parlez de votre proposition, là, à la page 8 du mémoire, en haut, et vous dites qu'il faut que les parents s'engagent à prendre connaissance du plan d'action pour contrer l'intimidation et la violence et à soutenir l'établissement dans son application. Alors, comment, au juste, vous voyez ça? Est-ce que ça serait, par exemple, à chaque année, il faudrait que... ou à chaque début de session, par exemple à chaque début d'année scolaire, au mois d'août, là, le parent reçoit le plan, il le signe, il le redonne à son enfant, vous compilez ça? Je ne sais pas, là. Vous pensiez à quoi, là, quand vous avez écrit qu'il faut que les parents s'engagent à cet égard?

Mme Boucher (Danielle): Non, on ne veut pas ça, là, parce que, là, on va courir après les signatures, puis ce n'est pas ça, le rôle. Le rôle, c'est d'agir.

Ce qu'on veut dire par là, c'est que, quand on a une situation dans une école où il y a vraiment un cas d'intimidation, puis qu'on doit intervenir, puis qu'on intervient, il faut s'associer le parent. C'est son enfant, c'est bien évident qu'il faut qu'il soit là. Donc, on s'attend à ce qu'il nous aide là-dedans et on s'attend à ce que lui aussi fasse des interventions. C'est ça que ça veut dire. Il faut qu'il soutienne l'établissement dans l'application des sanctions qu'on va donner, des mesures.

Ça m'amènerait à dire que, nous autres, les sanctions telles l'expulsion de l'école ou la suspension de l'école, on s'entend que ce n'est pas toujours gagnant, là. Ça fait que, dans un sens où on suspend à la maison, on n'aide pas l'enfant, souvent, puis on n'aide pas le parent, ça fait que ce n'est pas toujours la solution gagnante.

Ce qu'on a besoin, par contre, c'est si l'enfant a besoin de consulter ou peu importe, parce que ce que la recherche dit, c'est que les enfants qui sont victimes ou intimidateurs ont des problématiques d'estime de soi. Ce n'est pas moi qui le dis, là, c'est la recherche. Donc, il y a quelque chose là à aller travailler.

Moi, j'aime bien trouver c'est quoi, la nature du problème, et non d'essayer de régler les causes et les effets pour la suite. Il faut aussi s'attaquer au fond du problème, et c'est dans ce sens-là qu'on dit: Bien, c'est important d'avoir des ressources professionnelles. Je ne suis pas psychologue, je suis directrice d'école, puis je ne suis pas psychiatre non plus, mais, si, un enfant, il y a une problématique d'intimidation telle qu'il y a besoin d'intervention, il faut que le parent accepte d'accompagner son jeune, puis de le faire suivre, puis d'aller en... avec lui. C'est dans ce sens-là qu'on dit: On a besoin du parent. On ne peut pas, nous, remplacer le parent dans ces situations-là.

M. Gaudreault: Je vous entends très bien. Donc, je comprends que vous êtes d'accord avec le troisième alinéa de l'article 11 qui dit que le... du projet de loi, bien sûr, qui dit que «le directeur de l'école qui est saisi d'une plainte concernant un acte d'intimidation ou de violence doit communiquer promptement avec les parents de l'élève qui est victime d'un tel acte». Oui ou non? Pas sûrs?

Mme Boucher (Danielle): Je vais laisser M. Neault...

M. Neault (Gaétan): À cet égard-là, encore là, là, je pense que le jugement de la direction s'impose. Vous comprenez bien qu'il y a des situations parfois où ce n'est pas nécessairement l'action à prendre, le parent qui est la meilleure personne.

M. Gaudreault: ...

M. Neault (Gaétan): Si on parle d'une situation d'urgence, au moment où l'incident se produit, en tout cas, je peux vous dire qu'en milieu montréalais, dans certaines situations, on préfère bien analyser les conséquences qu'il pourrait y avoir lorsqu'on appelle un parent pour lui soumettre une problématique, autant dans le cas de l'élève intimidé que de l'agresseur, là. Il y a des situations qui ne sont pas nécessairement porteuses à long terme, là, pour l'enfant.

M. Gaudreault: Autrement dit... Puis je vois, je sens que M. Flamand trépigne de répondre, mais, autrement dit, vous jugez qu'il y a peut-être des cas -- puis je vais laisser M. Flamand terminer -- où interpeller le parent, à la limite, va caler, entre guillemets, encore plus l'enfant. M. Flamand.

M. Flamand (Dominic): Bien, c'est vrai, ce que vous venez de dire, mais également c'est important d'avoir... il ne faut pas traiter tous les cas d'intimidation ou de harcèlement sur le même pied d'égalité. Comme direction d'école, m'occuper d'un cas simple où il y a deux personnes qui intimident puis une personne qui se fait intimider, rencontrer tout le monde dans un contexte idéal quand j'ai des jeunes qui reconnaissent ce qu'ils ont fait de pas correct, un intimidé qui est capable de faire face aux intimidateurs, deux parents qui collaborent, je n'ai pas commencé les rapports puis j'ai une heure de travail minimum. Si j'en ai huit dans ma semaine, c'est huit heures, puis, sur huit, je ne suis pas sûr qu'ils vont tous bien collaborer. Alors, ajouter des rapports à ça, ça peut facilement représenter deux jours.

J'aimerais, moi, en tant que direction d'école, avoir la possibilité de me servir de mon jugement. Il y a des cas qui se sont réglés, les parents sont satisfaits, ça va bien. On peut-u dire pour ces cas-là que les rapports, ce n'est peut-être pas pertinent, mais, pour des cas qu'il y a de la résistance, puis qu'on sent que c'est plus corsé, puis on a refus de service -- de la part du parent, j'entends -- bien là c'est sûr qu'il faut documenter, là? C'est important, en tout cas à notre point de vue, de distinguer ça.

Le Président (M. Marsan): Alors, je vous remercie. Ceci termine la période d'échange avec l'opposition officielle. Nous poursuivons avec le parti ministériel, et de nouveau je cède la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et des Sports.

Mme Beauchamp: Merci. Je voudrais parler du personnel enseignant avec vous. Et vous avez spécifié que des problématiques entre deux adultes dans une école peut plus faire référence à des notions de harcèlement, par exemple, en milieu de travail que faire référence à cette loi. Lorsque la FAE s'est présentée devant nous, ils ont même spécifié que, pour eux, alors que, dans la définition de ce que doit comprendre le plan d'action, on indique qu'on doit parler de soutien, là, je le dis de mémoire, mais de soutien à du personnel enseignant qui aurait vécu de l'intimidation... ils ont dit: Vous devriez enlever ça parce que ça ne relève pas d'un plan adopté par un conseil d'établissement, ça, ça relève de nos relations de travail, puis on est des employés de la commission scolaire, donc on ne veut pas que le conseil d'établissement vienne...

Une voix: Encadrer.

Mme Beauchamp: ... -- oui, c'est ça, merci, merci -- vienne encadrer ou agir dans ce type de situation.

Je veux votre éclairage, je les ai écoutés attentivement. Nous ici, là, on ne veut pas compliquer les choses, on veut bien outiller les bonnes personnes puis être en support au bon endroit, ça fait que je veux vous entendre sur cet aspect-là du personnel enseignant avec qui vous travaillez et comment on doit encadrer cet aspect-là. Parce que je vais vous dire ce que j'ai dit à M. St-Germain et à ses collègues, je disais que moi... Je l'ai reconnu d'emblée, là, peut-être naïvement, mais moi, j'ai dit: Écoutez, il faut nommer que parfois c'est le personnel enseignant qui est victime d'intimidation dans... parfois c'est ça, et donc, pour moi, ça ne se faisait pas que mon projet de loi soit muet sur... Il faut qu'un plan d'action contre l'intimidation à l'école nomme ça aussi. Peut-être qu'on ne le fait pas de la bonne façon, mais là je voudrais avoir votre éclairage puis vos commentaires sur cet aspect-là, s'il vous plaît.

M. Neault (Gaétan): Moi, je dirais simplement que j'ai tendance à être d'accord avec ça, avec la position qui dit qu'il existe déjà, à l'intérieur des établissements scolaires, des politiques commission scolaire...

Mme Beauchamp: C'est M. St-Germain qui va être content de savoir que vous êtes d'accord avec lui.

M. Neault (Gaétan): Oui, c'est ça. C'est rare qu'il est content quand je parle, alors je suis heureux qu'il... J'espère qu'il écoute.

Par ailleurs, ce qu'il faut comprendre aussi, dans un bureau de direction, là, parfois, là, on a un élève qui vient nous voir, là, puis qui nous dit qu'il en a assez puis qu'il ne veut plus aller dans cette classe-là, qu'il ne veut plus voir ce prof-là, et puis ce que je veux dire, la question qui va se poser, c'est: Est-ce qu'on applique la politique, la loi qui va être promulguée, et qu'on l'applique dans le cas d'une prétendue intimidation de la part d'un adulte vers un élève? Il y a ça aussi, là. Puis, à cet égard-là, ce que j'ai compris de M. St-Germain, c'est qu'il souhaitait, encore là, qu'il y ait beaucoup de latitude de la part de la direction, que le jugement soit utilisé. Alors, quand vient le temps d'être un peu l'espèce de tampon, là, on a raison d'avoir du jugement. Par ailleurs, à d'autres moments on n'intervient pas assez, là. Je trouve ça un petit peu malheureux, là, dans le discours de M. St-Germain. Mais, au-delà de ça, oui, je pense qu'il faut distinguer les politiques commission scolaire qui traitent le harcèlement en milieu de travail et puis l'intimidation, parce qu'il peut y avoir aussi des situations entre des adultes aussi, là.

**(16 h 20)**

Mme Beauchamp: Puis, juste pour préciser, je ne crois pas qu'on était seulement dans la sphère du harcèlement et de problématiques entre adultes. Je pense que leur position était de dire: Si on est pour parler d'une forme de soutien, de support à donner à un enseignant, peu importe la forme d'intimidation qu'il a vécue, ça ne relève pas du conseil d'établissement de définir ce cadre-là, ça relève de la commission scolaire qui est mon employeur. On se comprend? Donc, ce n'est pas juste sur des notions de harcèlement entre adultes au travail, c'est de façon... Et vous dites que vous êtes plutôt d'accord avec ça, de dire: Mettons les choses dans le bon carré de sable, et ça, ça relève de l'encadrement que... en fait de la relation de travail, la relation de travail entre l'employeur et l'employé, et non pas d'un plan adopté par un conseil d'établissement.

M. Neault (Gaétan): Tout à fait.

Mme Beauchamp: On se comprend? O.K. Je voulais juste avoir votre éclairage là-dessus, je vous en remercie.

M. Flamand -- c'est bien ça, hein, M. Flamand? -- ...

M. Flamand (Dominic): Oui.

Mme Beauchamp: ...je veux revenir sur votre dernier témoignage, parce que j'écoute avec beaucoup de respect ce que vous me dites, ce que vous nous racontez sur la notion du jugement qu'a à exercer le directeur de l'établissement, le directeur d'école. Un peu plus tôt, par exemple, on a rencontré des représentants de groupes de lutte contre l'homophobie qui sont venus, par exemple, nous expliquer que, dans certains cas, lorsqu'il était question de l'orientation sexuelle d'un jeune, parfois il pouvait être très problématique d'avoir l'obligation d'informer un parent que tel jeune identifié à une orientation sexuelle, que ça soit vrai ou pas, mais, parce qu'il est identifié à une orientation sexuelle, est victime d'intimidation, d'en informer le parent, ça peut être problématique... ou encore certains autres tout simplement ont dit: Écoutez, des fois, là, si vous m'obligez à appeler le parent, peu importe la raison, je pense que je provoque plus de problèmes au jeune qui retourne à la maison, du genre un parent qui va lui dire: Bien, prends tes poings, défends-toi, je t'oblige à te battre demain, en tout cas ce genre d'affaire là qu'on dit: Laissez le directeur de l'école juger. Je comprends bien ça. Honnêtement, j'ai bien compris ce message-là.

Votre propos maintenant, l'exemple que vous avez donné est plus lié à la question de tout ce qui est prévu dans la loi sur la transparence, sur quand la loi, effectivement, oblige de dire s'il y a eu plainte. S'il y a eu action de lutte contre l'intimidation, on demande qu'il y ait rapport et que le rapport soit transmis vers la commission scolaire, et on dit même: Ça doit donner l'objet d'un portrait public. Vous, vous me dites: Laissez-moi juger si c'était important ou pas. Si j'ai réglé la question très rapidement, vous m'obligez de faire un rapport, c'est trop lourd, et tout ça. Mais en même temps je dois aussi écouter certains parents, certains témoignages qu'on a entendus où des parents... Bien que vous nous disiez -- et je n'en doute pas -- que la majorité de vos membres, et tout ça, font leur boulot et s'en occupent, vous savez comme moi que je suis devant une réalité ou en tout cas une perception qui est le fait que j'ai un certain pourcentage d'écoles qui n'ont pas déployé de plan d'action puis qu'il y a des parents qui vont dire: Moi, j'ai eu l'impression que, quand j'ai interpellé mon directeur d'école... je n'ai pas senti de support, je n'ai pas senti qu'on prenait ça au sérieux, ou encore même un autre élément qui était: J'ai senti que mon enfant victime d'intimidation, c'était lui qui était devenu le problème, puis on m'a proposé de le changer d'école ou de l'isoler, tu sais, toute cette dynamique-là qu'on entend également.

Ça fait que moi, je vous avoue que je suis, encore là, toujours à la recherche d'équilibre, mais je suis là et je me dis: Il y a la question de lutter contre la bureaucratie, mais à la fin, je me dis, le dossier de l'intimidation a ses caractéristiques propres. À mes yeux, ce n'est pas un dossier comme... ce n'est pas un enjeu qu'il y a dans les milieux de l'éducation, ce n'est pas un enjeu comme un autre parce que c'est un enjeu qui demande, qui commande qu'on dénonce les situations, qu'on les nomme et qu'on intervienne. Et je me mets à la place de parents, et tout ça, et de dire qu'on ne peut pas avoir cet éclairage de savoir que j'ai... Par exemple, prenons un cas type, là, mais que c'est un parent qui a porté plainte, et de savoir que c'est documenté, l'intervention, et tout ça, je me dis, il me semble, en tout cas, que ça mettrait un baume, ça mettrait le bon éclairage de la transparence au nom de dénoncer ce qui s'est fait, au nom de la transparence, au nom de prouver qu'il y a eu intervention.

Donc, je veux revenir sur cette question. On est tous très sensibles -- c'est le député de Jonquière qui le disait puis c'est vrai -- tous très sensibles à la lutte contre la bureaucratie, mais ici on parle d'un dossier qui a ses caractéristiques propres. Ça fait que je veux que vous complétiez votre intervention de tantôt, que vous commentiez plus en profondeur.

M. Flamand (Dominic): Tout d'abord, pour compléter ce que je voulais dire, c'est que, dans l'exemple que je donnais, la boucle était bouclée, le parent... tous les parents, tout le monde savait tout, là. La prise de statistiques ou tenir compte de ce qu'on a fait, puis le nombre de cas, puis la prise de notes qu'on fait pour se garder des traces parce qu'il faut s'en garder, nous, avec des enfants, qu'on intervient une première fois, une deuxième fois puis une troisième fois, il faut s'en garder de toute façon, des traces dans nos dossiers, mais, à un moment donné, il y a une question de lourdeur qui peut faire qu'on peut être embourbés dans de la bureaucratie et, durant ce temps-là, on n'est pas sur le terrain. Parce qu'on est tous sensibles à l'enjeu de l'intimidation, puis tout ça, là, on ne peut pas nier que c'est important, mais il y a beaucoup d'enjeux qui sont tout aussi importants. Dans les conventions de gestion, ce n'est que ça, des enjeux majeurs. Alors, à quelque part, c'est qu'il y a des dossiers... Moi, je l'ai même dit à des parents. Une fois que j'avais fini mon intervention, j'ai dit: Mesdames messieurs, si la loi, demain matin, était appliquée, il faudrait que je fasse un rapport. Ils m'ont tous répondu: Pourquoi? Vous l'avez réglé, le problème.

Mme Beauchamp: Monsieur... Peut-être avoir l'éclairage. Je pense qu'on retrouve ça dans la loi aussi parce que le plan d'action initial prévoyait qu'il y ait des portraits de faits, un monitorage, des portraits, etc., et je le dis avec un sourire, là -- là je vais porter vraiment mon chapeau de responsable du ministère de l'Éducation -- avec le recul, ça fait penser que tout le monde veut bien faire. Tout le monde a critiqué le ministère parce qu'après trois ans le portrait n'existait pas. J'ai une de vos vis-à-vis, présidente d'une association de directeurs d'école, qui a dit: Il y a un certain nombre de directeurs d'école qui peut-être n'ont pas collaboré parce qu'ils avaient la crainte que leur école soit identifiée comme une école problématique, puis je me dis: C'est comme si tout le monde veut qu'on leur dise exactement ce qui se passe, puis il faudrait que ce soit à partir de Québec qu'on soit capable de le faire, sans qu'il n'y ait rien qui se passe nommément sur le terrain, et tout ça. Tu sais, autrement dit, des fois je me dis: Franchement, le ministère de l'Éducation sert de bon «punching bag» -- excusez l'expression, là -- en disant: Ça, ça devrait être fait, puis, tiens, ça ne sera pas nous autres, puis on va dire que c'est à partir du complexe G à Québec que ça doit être fait, tu sais.

Ça fait que je pense qu'il y a notamment ce contexte-là qu'il faut nommer. Les gens ont demandé qu'il y ait un monitorage, ont demandé qu'il y ait un portrait, ont demandé qu'on puisse suivre la situation à l'échelle de toutes les école, puis, une fois qu'on le met dans une loi puis qu'on dit: Écoutez, ça aurait dû être fait, ça n'a pas été fait, on va le mettre dans une loi, on va rendre publics les événements d'intimidation qui se sont passés, on va savoir si les correctifs sont apportés, si la situation s'améliore ou se détériore, tout d'un coup il ne faut plus le faire.

Je vous pose la même question que j'ai posée à Réjean Parent puis qu'il a répondu: Merci de nous mettre devant nos contradictions, là, mais je veux vous entendre là-dessus parce que moi, je suis ministre puis je suis interpellée là-dessus. Je veux dire, voilà... en 2008, tout le monde trouvait que c'était une bonne idée d'avoir des portraits, puis tout d'un coup je le mets dans une loi, il ne faut plus qu'on le fasse. Ça fait que je vous écoute.

**(16 h 30)**

M. Bouchard (Jean-François): Il y a deux éléments, et on m'a dit d'être bref tantôt, ça a l'air que je parle trop. Bon. Alors, moi, je veux dire d'emblée de jeu: On ne cache rien. Moi, je suis capable de vous dire: Dans mon école, il y en a, de la drogue, il y a de la violence, il y a du vandalisme, ta, ta, ta. Est-ce qu'il y en a à grande échelle? Non. Est-ce que ça diminue? Oui. O.K.? Ça, c'est clair. Je réponds à M. St-Germain, là, on ne cache pas ça. Il y en a peut-être qui le font, alors allons voir ceux qui cachent, ce n'est pas la majorité.

À l'interne, il y en a, des compilations. On a des outils qui s'appellent GPI Internet. Je fais une intervention qui est facile, qui se règle avec des parents collaborants, des enseignants collaborants, des élèves collaborants, tout le monde collabore; je l'indique, je laisse une trace, il y a des codes. Je veux savoir tous ceux qui ont une compilation de violence verbale, je tape code 12. Bing! J'en ai eu 49 dans le dernier mois. Ça, ça se compile facilement, O.K., je ne suis pas obligé de l'envoyer à tout le monde. Si on me le demande, je suis capable de le fournir.

Maintenant, il y a beaucoup de perceptions des parents, il y a beaucoup de perceptions des membres du personnel relativement à toute la violence ou l'intimidation dans l'école. La perception, c'est ce qui est le plus dur à travailler, O.K., on est d'accord avec ça.

Maintenant, pour la loi n° 88, vous m'avez imposé, le ministère, de faire une convention de gestion en fonction d'une convention de partenariat que le ministère signe avec la commission scolaire. Son travail, à la commission scolaire, c'est de s'assurer que son directeur d'école, il la fait, sa convention de gestion, puis ça nous impose de faire un portrait de situation comme ancien enseignant je faisais des portraits de classe pour savoir, le petit Untel, il a-tu des problèmes en mathématiques, dans ci, dans ça, et ainsi de suite.

J'ai fait la même chose avec mon école avec le but n° 4. La loi n° 88, elle m'a imposé ça, un an, puis j'ai jusqu'en 2015 pour monitorer mon travail. En 2015, j'espère que je vais m'être amélioré, mais, pour moi, c'est ça qu'on m'a demandé, pour l'ensemble des collègues. Donc, je n'ai pas besoin, moi, en ce qui me concerne, d'une autre loi. Je ne dis pas que ce n'est pas important de parler d'intimidation, mais je les ai, les outils, avec la loi n° 88. C'était une loi qui m'a permis de mobiliser l'ensemble de mon personnel derrière une multitude d'enjeux dans l'école, dont l'intimidation, liés à un environnement sain et sécuritaire.

Mme Beauchamp: M. Bouchard, si je joue à l'avocate du diable parce que, quand je dis ça, c'est de vous rapporter l'autre son de cloche qu'on a, l'autre son de cloche qu'on a, c'est de dire: Tout ça, tout ce que vous venez de nous raconter sous l'angle de l'objectif n° 4, des conventions de partenariat sur le climat sain et sécuritaire dans écoles, vous avez des enseignants qui vont nous dire: Ah oui, ça, on a fait un crochet un coup qu'il y a eu un plan d'évacuation identifié, tu sais, ils vont dire... Ça a été ça, ça a été perçu comme ça, là, un climat sain et sécuritaire. Je ne veux pas être réductrice, mais c'est quand même ça qu'on nous raconte, c'est de dire: Bien, parce qu'il y a eu un bon plan d'évacuation de l'école, on a fait un crochet puis on a rempli une bonne partie de l'objectif poursuivi. Honnêtement, on est loin de ce que la loi ici, devant nous, prévoit de ce que doit comprendre un plan d'action de lutte contre l'intimidation avec la série, toute la série de paragraphes qui dit nommément ce que ça doit comprendre.

Je vous pose la question notamment pour bien comprendre. Quand tantôt vous avez dit, plusieurs d'entre vous: On les a tous, les outils, là, conventions de partenariat, conventions de gestion, les codes de vie, les règles de conduite, et tout ça, je vais essayer de bien comprendre. Est-ce que, dans un... Comment vous l'appelez, déjà? Pas le... Le code de vie, oui, je pense que c'est dans le code de vie. Quand vous me dites: On pourrait plutôt intégrer ça dans le code de vie, est-ce qu'on se comprend que vous êtes en train de me dire que vous prendriez l'engagement ou qu'on doit prévoir que tous les items prévus ici, là, devant nous, à ce que doit comprendre un plan de lutte contre l'intimidation... Je vous fais référence à certains des paragraphes qui, pour moi, sont importants, par exemple le fait qu'un tel plan doit comprendre les actions qui doivent être entreprises lorsqu'un acte d'intimidation est constaté par un élève, ou un enseignant, ou tout autre membre du personnel, tu sais, que ça nomme qu'est-ce qui doit être entrepris, c'est quoi, les sanctions, etc. Est-ce que ce que vous me dites, c'est: On est prêts à tout faire ça, à avoir un plan qui répond à tout ça, mais faites-nous le mettre dans le code de vie adopté par... approuvé, pardon, par le conseil d'établissement? Tu sais, si c'est ça, moi, je ne fais pas une grande bataille là-dessus, là, c'est... Si ça répond à ce à quoi on s'attend de voir dans un plan d'action de lutte contre l'intimidation, je ne fais pas de bataille là-dessus, mais je ne suis pas sûre qu'à la fin ça ressemblerait vraiment à ça. C'est là que j'ai besoin de vous entendre, d'être rassurée.

Puis je termine. Là, vous m'avez comprise, là, parce que moi, j'entends trop souvent dire... une école saine et sécuritaire, ça a trop souvent pris la forme de: Oui, je vous le dis, on a un plan d'évacuation, mais ça n'a pas été jusqu'à parler de lutte contre l'intimidation dans tous les cas.

Mme Boucher (Danielle): C'est qui, là? Est-ce que la question s'adressait à...

Une voix: O.K., c'est à moi?

Mme Beauchamp: Bien non, elle est très...

Mme Boucher (Danielle): O.K., n'importe qui.

Mme Beauchamp: Elle est tellement longue qu'elle s'adressait à tout le monde, là.

M. Neault (Gaétan): Oui. Bien, je pense qu'effectivement on peut... Dans le fond, votre crainte, c'est que les choses ne soient pas faites, disons-le, là. Nous, ce qu'on dit, c'est que, oui, les éléments sont en place.

Maintenant, est-ce que d'avoir le projet de loi tel qu'il est formulé ici va vous assurer que toutes ces conditions-là, ces modalités-là sont précisées? Moi, je pense qu'il y a un devoir, puis on l'a dit tout à l'heure, là, on a un employeur qui est la commission scolaire, il y a des règles, il y a des... Est-ce que tout doit faire l'objet d'une loi? Je pense que non. On peut édicter. Vous le faites, vous avez la possibilité de le faire, là, via la convention de partenariat puis qui descend chez nous avec la convention de gestion.

Mme Beauchamp: ...juste vous dire: Moi, j'entends, là, d'ici du monde me dire: Il existait un plan d'action, tu sais, qui dictait des éléments auxquels on s'attendait, c'était accompagné de ressources financières, il existe tous les outils que vous me dites depuis 2008, puis le résultat, c'est qu'on m'a dit: Il y a 30 % à 40 % des écoles où il ne s'est pas rien fait. Ça fait que moi, je suis là, je reçois ce que vous me dites, mais en même temps je me dis: Comment je fais? Comment je fais? Parce que, si tout était en place puis que c'était à 100 % dédié à lutter contre l'intimidation, je ne serais pas devant le fait qu'on me dit: Il semblerait bien qu'il y a 30 % à 40 % des écoles où il n'y a pas eu d'action déployée contre l'intimidation. Ça, ça... Parce que j'ai envie de dire: L'approche que vous me proposez, qui est une approche basée sur le jugement, la volonté, les outils existants, est une approche où... en tout cas dans l'opinion publique, en termes de perception, est une approche qui a eu ses failles.

Le Président (M. Marsan): Mme Boucher.

M. Neault (Gaétan): Mais, si vous permettez, rapidement...

Le Président (M. Marsan): M. Neault. En terminant, s'il vous plaît.

M. Neault (Gaétan): Oui. C'est faire abstraction de ce qui s'est passé, là, depuis un an et demi autour de l'intimidation. On l'a dit tout à l'heure, là, il y a une mobilisation énorme. Mme Courchesne, votre prédécesseure, avait lancé le bal. Les médias ont été très actifs là-dedans, là. Une bonne campagne de communication, on voit que ça fait bouger les choses. Je ne pense pas qu'on est au même endroit, il y a un cheminement qui a été fait. Si vous dites qu'il y a 30 % des écoles qui n'ont pas fait leur travail, je ne suis pas certain que, si on s'assoit ici dans un an, on va avoir le même chiffre, là, en fonction de ce qui s'est produit.

Maintenant, la question, c'est simplement: Est-ce qu'on n'utilise pas un outil qui... une arme qui est trop pesante, disons-le comme ça, toujours avec l'objectif d'efficacité dans l'intervention par rapport à ce qu'on veut attendre? Est-ce qu'il n'y a pas d'autre voie pour arriver aux mêmes fins, dans le fond, là?

Le Président (M. Marsan): Alors, merci. Ceci termine cette période d'échange avec le parti ministériel. Nous poursuivons avec l'opposition officielle, et je vais donner la parole à Mme la députée de Marguerite-D'Youville.

Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci, M. le Président. Merci, messieurs et madame, de votre contribution.

Moi, je vais revenir encore sur toute la question de la reddition des comptes, parce que c'est vrai que probablement qu'on n'est pas au même endroit qu'on était il y a un an et demi, c'est vrai qu'il y a les contrats de gestion qui existent, mais c'est aussi vrai qu'on est obligés de constater que, dans un certain pourcentage de nos écoles, les actions qui étaient prévues dans le cadre du plan de lutte à la violence, et tout ça, n'ont pas été mises en place. Et, à partir de ce moment-là, trouvons ensemble le processus ou la démarche la plus allégée possible pour faire en sorte que, lors de la reddition de comptes, on en arrive à des résultats, une amélioration dans chacune de nos écoles à partir de la réalité de chacune de ces écoles.

Moi, je comprends que le projet de loi que nous étudions situe le directeur d'école au coeur de l'action comme étant responsable, qui, lui, propose une personne, en termes de coordination, qui va se donner un comité de travail pour l'appuyer à partir des objectifs du plan qu'il va proposer, qui va être mis en place et qui va mettre à contribution l'équipe-école. Si on doit resserrer un certain nombre de choses, on le fera, mais en même temps je pense qu'on a, à cause de la conjoncture sociale autour de tout ce débat-là, une espèce d'obligation de reddition de comptes.

Je suis d'accord avec vous quand vous soulevez la question des palmarès. Ça me donne des boutons à chaque fois d'en parler parce que je suis convaincue que les palmarès qu'on a déjà vécus, qu'on vit toujours n'aident absolument pas à la mobilisation dans nos écoles, et il faut éviter d'en arriver à ça. Mais en même temps vous avez dit, chacun d'entre vous qui avez eu à intervenir: On laisse des traces de nos dossiers.

Comment vous la voyez, votre reddition de comptes à la commission scolaire qui doit répondre à la ministre de l'Éducation dans le cadre des ententes qui sont prises? Comment vous la voyez? On ne veut pas savoir à la demi-heure près comment vous agissez, mais comment vous la voyez, cette reddition de comptes là qui va faire en sorte qu'on va être capables de comprendre que, dans chacune des écoles du Québec, il y a engagement à partir de la volonté politique émise par le projet de loi? Et, à partir du moment où on entend ça, on aura probablement le moyen d'alléger les choses pour répondre à l'ampleur du travail que ça va vous demander, on en est très conscients, mais en même temps je pense que socialement on est conscients qu'on a une obligation de résultat.

**(16 h 40)**

Mme Boucher (Danielle): Je pense que, dans les situations extrêmes où c'est vraiment un cas complexe, on doit faire quelque chose, on doit remplir quelque chose. Ça, j'en conviens, je n'ai pas de problème avec ça, mais ce qu'on ne veut pas, nous autres, c'est 40 pages. Parce qu'on est habitués. Quand on a une reddition de comptes à faire, quand ça descend dans nos écoles, c'est beaucoup de pages, et ce n'est pas ça, l'idée. Quand on fait une intervention comme direction d'école, par exemple, par rapport à un acte de violence. quand on dit: On se met des notes, là, ce n'est pas quatre pages, là, c'est une page, on fait vraiment... -- puis on les connaît, nos élèves, là -- ou on va l'inscrire dans GPI, on se met deux, trois notes, puis c'est correct, ça suffit, on est capables de savoir qu'on est intervenus, le nombre de fois auprès de ce jeune-là, quelle conséquence on lui a donnée, si on a rencontré le parent. On fait déjà tout ça. Là, s'il faut prendre ça puis l'inscrire dans un rapport qui va avoir 40 pages...

Écoutez, là, je veux dire, la majorité des écoles... il y a beaucoup d'écoles au Québec, c'est-à-dire, qui ont la stratégie d'intervention Agir autrement. Moi-même, j'ai été personnellement dans une école à stratégie d'intervention Agir autrement. C'est 40 pages, là, le rapport, puis ça, c'est en plus du plan de réussite, puis ça, c'est en plus du reste. À un moment donné, là, il faut être sérieux, là. C'est où on veut mettre l'énergie, c'est-u sur l'intervention ou sur le papier? Alors, moi, je veux bien qu'on rende des comptes, mais il faut le faire de façon intelligente pour éviter que ça devienne quelque chose de trop pesant. C'est ça qu'on dit, dans le fond.

Puis on comprend l'inquiétude qui dit qu'on n'a pas de portrait. Moi, ça me questionne tout le temps d'entendre ça, parce que je me dis: Coudon, les commissions scolaires, là, elles signent avec nous des conventions de gestion. Là, c'est quoi, le problème, là? C'est ça qu'on a à faire, nous, une analyse de la situation. Comment ça se fait qu'ils ne l'ont pas? Ça, c'est la question de départ qu'il faut se poser. Moi, le 30 %, 40 %, j'aimerais bien ça savoir il vient d'où, le 30 %, 40 %.

Puis je vais aller plus loin que ça. Dans le plan de lutte à l'intimidation, on ne dit pas qu'on n'en veut pas, on dit qu'il y a des affaires là-dedans qui pourraient faire partie des règles de vie, exemple les modalités... -- non, ça, ce n'est pas ça -- les actions qui doivent être prises dans un acte d'intimidation, les mesures de soutien...

Une voix: ...

Mme Boucher (Danielle): Oui, mais, dans le plan de lutte, ça devrait être départagé. Puis je pense qu'on en a nommé dans notre mémoire puis on pourrait retravailler ça, ce n'est pas un problème. Il y a des choses qui appartiennent aux règles de vie quand on parle de sanction, quand on parle des élèves qui perdent des privilèges, quand... Bon.

Mais, par contre, sur ce qui est du plan de lutte, ça pourrait être, par exemple, les mesures de prévention, ça pourrait être les mesures visant à assurer la confidentialité, ça pourrait être le suivi qu'on entend donner. Mais là il ne faut pas que le suivi, ça soit prescriptif pour tout, il faut laisser le jugement à la direction d'école, parce qu'on ne peut pas faire le même suivi avec un élève puis un autre élève. On s'entend qu'il faut que ça prenne la couleur du geste.

Mais on n'est pas contre la reddition de comptes, on n'a pas peur de ça, là, tu sais, il ne faut pas entendre qu'on ne veut pas faire de reddition de comptes. On veut le faire dans un esprit de collaboration mais dans un esprit aussi d'efficience. Je pourrais dire que les épaules commencent à être pesantes, là, avec le nombre de plans qu'il faut mettre de l'avant. Et je vous dirais que tout ce qui tombe à l'école, nous, on considère que c'est important. Alors, le français, c'est important. La réussite des élèves, c'est important. Les garçons, c'est important. Les saines alimentations... Là, j'en nomme, des choses, là, mais on a tous des obligations par rapport à ça.

Donc, on comprend que le but 4, il est extrêmement important, mais il faut le faire de façon intelligente pour ne pas que ça amène, au bout du compte, des situations difficiles, parce qu'il y a des directions d'école qui ont trois écoles. Comment voulez-vous, tu sais, qu'ils arrivent à quelque chose d'intelligent à trois écoles? Ils sont là une journée par semaine, puis ça, si on compte les réunions où on est obligés d'être à l'extérieur. Il y a des écoles, des fois, qui ne la voient pas de la semaine, la direction d'école, alors je comprends un peu Mme Bernard qui dit... Ils se sentent seuls, je comprends. Nous autres aussi, on se sent seuls des fois, je peux vous dire.

Mme Richard (Marguerite-D'Youville): Merci. Une autre question. Vous avez dit tout à l'heure, Mme Boucher: La pratique gagnante, ça veut dire des petits gestes récurrents au quotidien. Comment vous la voyez, la pratique gagnante, dans le cadre d'un plan de lutte à l'intimidation?

Mme Boucher (Danielle): Je vais prendre un exemple. Quand j'étais directrice d'école -- ça ne fait pas si longtemps que ça que j'ai quitté les écoles, là -- ce qui était gagnant, c'est que, quand il y avait des assemblées générales ou quand il y avait des rencontres cycles avec nos profs, notre personnel, on était capables de nommer les choses qui allaient moins bien puis on se donnait des plans d'action. On se disait: Bon, bien là, regarde, on va faire ça de telle façon, ou on va assurer de la surveillance plus importante, ou on va se donner une formation sur comment on effectue la surveillance pour qu'elle devienne efficace, on va essayer de voir, bon, c'est où, les zones où c'est plus fragile. C'est dans ce sens-là. Ce n'est pas de faire une action une année, après ça on n'en parle plus. Ce n'est pas ça, l'idée. C'est d'en parler souvent, régulièrement.

Dans nos rapports aussi enseignant ou autre personnel avec ses élèves mais les autres aussi, parce que ce n'est pas parce que ce n'est pas ton élève qu'il ne faut pas que tu interviennes, on s'entend, bon, bien ça aussi, tu sais, il y a comme... il faut être capable de parler de ça avec notre équipe-école puis il faut se donner aussi la marge de manoeuvre de le faire. C'est dans ce sens-là que je le vois.

Mais je pense que monsieur... Est-ce que tu voulais ajouter quelque chose, parce que c'est un élément qui te...

M. Bouchard (Jean-François): Bien, moi, là, l'élément le plus important, là, c'est le lien signifiant entre des adultes puis des enfants dans nos écoles... puis des élèves. Ça, là, c'est important. Vous allez me trouver candide peut-être, là, ça fait quand même 10 ans que je suis à l'école secondaire Henri-Bourassa, c'est un milieu que j'aime, je suis là par choix, puis je vous le dis, moi, j'ai confiance, là... D'abord, les élèves, là, je leur fait éminemment confiance sur leur réussite. J'ai confiance, moi. Ma prémisse de départ, c'est de dire: Ils vont réussir. Mon personnel, j'en ai des bons, j'en ai des moyennement bons, j'en ai des un petit peu moins bons, mais, en bout de ligne, j'ai éminemment confiance en tout mon personnel et j'ai évidemment confiance en mes collègues directeurs d'école. Est-ce que ça a besoin d'être mis dans une loi? Là, on tourne alentour de ça, là.

Moi, je dis que... Il y a eu une réunion il y a deux ans, les écoles-phares, 133 écoles se sont réunies ensemble pour mettre en commun des pratiques gagnantes. J'en suis une, école-phare. J'estime qu'on travaille fort -- ça, c'est un jeu de mots involontaire, là -- qu'on travaille fort pour améliorer l'ensemble des pratiques éducatives, incluant l'intimidation, O.K.? Tous les jours, les liens signifiants avec des enfants, la notion de plaisir, on n'en entend pas parler, avoir du plaisir à l'école. Je ne dis pas de se pogner au plafond, là, je dis: Avoir du plaisir dans nos institutions, bien c'est aussi, dans l'équation, une variable qui fait diminuer l'intimidation. O.K.?

Nos rapports de suspension qu'on fait une fois par mois à la commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, je suis capable de dire les agressions verbales, les agressions physiques, c'est demandé par la direction générale de la commission scolaire, déposé au conseil des commissaires. C'est peut-être à géométrie variable à travers le Québec, je ne le sais pas, moi, je vous parle de ce que je connais, mais il y en a, des redditions de comptes, et je fais les mêmes redditions de comptes annuellement à mon conseil d'établissement, de la même façon que je rends compte du nombre d'activités qu'il y a eu et du nombre d'incidents qu'il y a eu négatifs dans mon école.

Alors, on en fait déjà, des redditions de comptes. Puis je vous le dis, là, moi, j'ai 2 000 élèves, je ne sais pas combien j'ai de parents, mettons 1 000, bien ça fait 2 000 yeux qui me regardent, plus la communauté, plus mes enseignants, plus tout le monde. Donc, il y en a une, reddition de comptes, qui est presque quotidienne.

Le Président (M. Marsan): Merci. M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je comprends que, si, évidemment, il y avait plus de ressources, on serait capables de faire plus. C'est une vérité de La Palice, évidemment. On souhaite toujours avoir plus de moyens.

Est-ce que vous seriez favorables... Est-ce que vous trouvez que, par exemple, le projet de loi devrait être plus, comment je pourrais dire, actif quant à nommer l'obligation d'accorder des ressources davantage? Autrement dit, si on veut vraiment faire de la lutte contre l'intimidation et la violence un véritable projet ou une véritable priorité, il faut qu'il y ait des ressources qui aillent avec ça, et, si vous aviez plus de ressources, ça permettrait peut-être d'allouer... de libérer une personne responsable de... Il y a, par exemple, d'autres groupes qui sont venus avant vous, qui nous ont dit: Bon, bien ça pourrait être... Je pense que c'est la Fondation Jasmin Roy qui nous disait: Bon, bien on peut déléguer un psychologue, par exemple, dans une école une journée-semaine au dossier intimidation, mais ça, en bout de ligne, il faut le payer, là. Alors, seriez-vous favorables à une proposition qui irait vraiment plus dans ce sens-là?

M. Neault (Gaétan): On ne peut qu'être favorables à plus de ressources dans l'école, là. Comme vous le dites, là, plus on a de moyens, plus on peut intervenir.

Je reviens au comité qu'on pense mettre en place. Je vous le dis, là, je me reporte aussi, là, à il y a quatre ans, quand j'étais directeur d'école -- ou plutôt six ans déjà -- je ne sais pas comment... à qui j'aurais demandé ça, parce que nécessairement il y a des enseignants... Je pense à ma psychoéducatrice qui était débordée au niveau du suivi de persévérance scolaire, aux deux éducateurs spécialisés qui étaient engagés dans des classes avec des troubles spécifiques, des troubles de comportement puis des troubles langagiers. Je pense aux enseignants qui avaient une tâche pleine puis qui sont requis aussi pour faire de la récupération, tout ça. Je ne vois juste pas.

Donc, effectivement, il faut... c'est une question de choix. Puis je rejoins toute la problématique autour de la reddition de comptes, c'est toujours de soupeser qu'est-ce qui est suffisamment important ou qu'est-ce qui doit être prioritaire dans ce vers quoi on met les énergies, le temps, les personnels puis ce qu'on rapporte aussi, parce que le problème avec l'intimidation puis, à la limite, les gestes de violence, c'est que malheureusement c'est très élastique, ça. La description que faisait M. Flamand, tout à l'heure, de son cas, est-ce qu'on considère que c'est un cas réglé, que c'est un cas qui somme toute, en deux heures, vaut la peine d'avoir le même type de reddition de comptes que le petit bonhomme qu'on suit, là, depuis un an et demi, là, qui a des gros problèmes et qui, lui, se valorise en intimidant? C'est tellement à géométrie variable qu'on ne peut pas nécessairement, là... Alors, à cet égard-là, tout professionnel non enseignant est bienvenu dans... est plus que bienvenu, est nécessaire dans le milieu, là. Ça, c'est évident.

Est-ce que ça doit être inscrit dans la loi? Ça, ce serait certainement une façon de valider puis de... son utilité, c'est bien clair, à notre point de vue.

**(16 h 50)**

M. Gaudreault: Oui. Je voudrais vous entendre davantage sur la prévention, parce que je remarque que, d'entrée de jeu, vous avez débuté votre présentation en nous parlant de l'importance de la prévention. Si vous aviez à apporter un jugement critique global, disons, sur le projet de loi, est-ce que vous trouvez qu'il ne va pas assez en amont puis il va trop sur la mécanique ou, à la limite, même la coercition? Et, si on dit oui à la prévention -- en tout cas, moi, je le dis, je dis oui à bien des choses, là, au niveau politique, mais je dis oui à la prévention -- comment peut-on, au juste, prévoir cette... c'est-à-dire comment on peut, au juste, faire atterrir cette prévention, comment on peut la matérialiser? Vous avez parlé tout à l'heure de formation. Est-ce qu'on doit agir dans la formation des maîtres, par exemple? Qu'est-ce qu'on doit ajouter, qu'est-ce qui manque en matière de prévention? Comment, dans cette prévention, on peut embarquer également -- on l'a dit aussi d'entrée de jeu -- les parents davantage, la communauté? On parlait peut-être des entraîneurs d'équipe de hockey, etc. En tout cas, je vais très loin, là. Mais, quand vous parlez de prévention, par rapport à un jugement plus critique du projet de loi, je voudrais vous entendre plus là-dessus.

M. Flamand (Dominic): Bien, moi, ce que je voudrais vous dire là-dessus, c'est que je pense que, oui, il faut aller plus loin dans la prévention. Puis, quand on parlait, il y a quelques minutes, là, d'une personne-ressource ou d'un comité, dans le mémoire qu'on vous présente on parle de formation pour tout le monde. C'est important d'impliquer tout le monde. Pour avoir refait les règles de vie dans plusieurs écoles, quand on le fait ensemble avec une philosophie qu'il y a en arrière qui est d'aller beaucoup plus vers l'éducatif que le coercitif, c'est très gagnant. Dans ce qu'on garde à l'interne pour garder des traces de billet de manquement ou tout autre, on voit une diminution.

Moi, ce que je trouve important, vous l'avez sûrement déjà entendu: ça prend tout un village pour élever un enfant. Dans ce projet de loi là, le ministère, c'est des Loisirs et des Sports. Les loisirs et les sports, c'est capital. On peut bien faire plein d'interventions, de prévention dans le cadre du cours d'éducation physique, mais, si ce qui se passe à l'aréna la fin de semaine vient tout défaire, on repart à zéro.

Je pense que c'est très... On parle de collaboration, dans le projet de loi, avec les policiers puis avec les services sociaux, mais moi, je ne suis pas le patron des services sociaux, là, puis j'en vois, des priorités, que, dépendamment des services sociaux, ils n'ont pas toujours les mêmes. Moi, je pense qu'il faut aller loin pour se coordonner. Il y a des endroits où on répète les mêmes interventions, services sociaux et écoles, puis, dans d'autres, bien, à un moment donné, il faudrait être complémentaires. En tout cas, je ne sais pas le comment, mais je le soulève. Moi, je pense qu'il faut vraiment être ensemble, parce que l'intimidation, oui, il y en a à l'école, mais l'école est à l'image de la société.

M. Gaudreault: J'interprète ce que vous me dites en disant: Bien, il faut trouver une manière, sûrement, de préparer davantage les intervenants, qu'ils soient enseignants, qu'ils soient professionnels, qu'ils soient chauffeurs d'autobus, sur l'intimidation. Est-ce que c'est par de la formation? Est-ce que c'est en revoyant un certain nombre de cursus, de cours de formation des maîtres? En tout cas, j'entends bien ce message-là, et nous le retenons.

Mais il me reste deux minutes, et vous avez un propos très, très bref sur le protecteur de l'élève. Je voudrais quand même vous entendre un petit peu plus là-dessus, parce que la ministre, dans le projet de loi, a inclus des éléments, là, concernant le protecteur de l'élève. Vous, vous voyez ça comment? Est-ce que vous pensez que justement ça ajoute une couche de bureaucratie, à la limite, pour reprendre ce qu'on disait tout à l'heure? Est-ce qu'on est en train d'étirer l'élastique de son rôle par rapport au mandat d'origine qui était donné au protecteur de l'élève dans la loi au moment où il a été créé? Alors, quelques mots là-dessus.

Mme Boucher (Danielle): Je vais commencer. Effectivement, nous, ce qu'on voit, c'est que le rôle est en train de changer. On trouve ça important, le protecteur de l'élève. On est contents d'avoir un protecteur de l'élève parce qu'il y a un rôle à jouer, puis le rôle qu'il joue présentement, il est parfait, il est très bien comme ça.

Maintenant, s'il faut qu'il se mette à regarder les plans de lutte des écoles, écoutez, on vient effectivement de lui donner tout un nouveau rôle qui a des conséquences aussi, là, ça vient avec, hein? Je veux dire, si on lui donne d'autres mandats, bien il faut qu'il les remplisse. Donc, il faut vraiment que, si on fait ça, c'est parce qu'il y a une plus-value, là.

Nous, on se questionne. On se dit: Bien, ça va-tu vraiment apporter quelque chose de plus? On se questionne, on n'est pas tout à fait à l'aise avec l'idée. On pense que présentement, comme il est là, ça peut... il remplit bien son rôle, puis on souhaite qu'il continue de le faire de cette façon-là.

Maintenant, M. Neault voudrait peut-être continuer.

M. Neault (Gaétan): Bien, en fait...

Le Président (M. Marsan): En terminant.

M. Neault (Gaétan): Oui. Bien, écoutez, ça rejoint ce que Mme Boucher vous disait. Si vous permettez, M. le Président, très rapidement, je veux revenir sur la question de la mobilisation. On a parlé de l'ensemble des acteurs; on oublie les élèves eux-mêmes. Avec la publicité qui s'est faite autour de l'intimidation, là, cette dernière année, là, vous avez vu la mobilisation de certains jeunes, des jeunes qui avaient été intimidés eux-mêmes. Les jeunes, ils nous écoutent, ils nous regardent. Et on dit qu'un témoin d'intimidation qui intervient, qui dit à l'intimidateur: Pour qui tu te prends?, ou: Où tu t'en vas?, dans sept cas sur 10 ça règle la situation. Il faut miser là-dessus aussi. On parlait de solutions tout à l'heure, prévention, oui, des concours du type de ce qui a été annoncé pour encourager les jeunes à élaborer des messages publicitaires, vidéos ou posters pour contrer l'intimidation. Il ne faut pas sous-estimer ce genre de chose là. Le discours est en train de changer présentement dans les écoles au niveau des jeunes eux-mêmes. Comme disait M. Bouchard tout à l'heure, il faut leur faire une grande confiance, à nos jeunes.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci beaucoup, M. Neault, Mme Boucher, M. Bouchard et M. Flamand, pour nous avoir donné le point de vue de l'Association montréalaise des directions d'établissement scolaire et Association québécoise du personnel de direction des écoles.

J'inviterais maintenant les représentants de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec à venir prendre place. Je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 58)

 

(Reprise à 17 h 15)

Le Président (M. Marsan): Alors, nous reprenons nos travaux, je vous remercie, et nous avons le plaisir de recevoir l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec. Et je vais demander au président de cette association, M. David D'Aoust, de nous présenter les gens qui vous accompagnent, et vous avez une période de 15 minutes pour nous faire votre présentation. La parole est à vous.

Association des commissions scolaires
anglophones du Québec (ACSAQ)

M. D'Aoust (David C.): Merci, M. le Président. Mme la ministre, membres de la commission. À ma gauche, M. Frank Verrillo, vice-président de l'association des commissions scolaires, et, à ma droite, vous connaissez sûrement ce personnage, c'est notre directeur général, David Birnbaum. Alors, je peux continuer? Merci.

Je vous assure que l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec, et, si vous me permettez, l'ACSAQ -- ça va aller beaucoup plus vite -- est très heureuse d'avoir cette opportunité de vous offrir ses commentaires au sujet de la loi n° 56, une loi visant à lutter contre l'intimidation et la violence à l'école. L'ACSAQ, d'entrée de jeu, félicite la ministre Beauchamp et son gouvernement pour attirer l'attention du public sur ce phénomène troublant et complexe. Aucune priorité n'est plus urgente que le bien-être et la sécurité de nos jeunes. L'implication et la recevabilité de tous les partenaires vis-à-vis cette priorité revêtent une importance capitale. C'est dans cette perspective que l'ACSAQ a examiné et analysé le projet de loi.

L'ACSAQ et ses neuf commissions scolaires membres ont depuis longtemps reconnu le rôle impératif de l'éducation, la prévention, l'engagement dans la lutte contre l'intimidation et la violence au sein des 340 écoles primaires et secondaires de même que des centres d'éducation pour les adultes et formation professionnelle qui sont sous leur gouverne. À cet égard, le plan d'action contre la violence est toujours bien en place dans nos centres et nos écoles. Les quelque 100 000 élèves que nous desservons ont tous et chacun le droit et la responsabilité d'établir une communauté scolaire saine et sécuritaire.

Des tragédies survenues récemment ont accentué la sensibilisation et l'inquiétude du grand public quant à l'intimidation et la violence en milieu scolaire et l'impact dévastateur que cela peut avoir à la sécurité et bien-être des élèves -- je le sais bien, j'ai enseigné hier dans une école secondaire et je vous garantis que ça a brassé des affaires. Alors que les défis dans ce domaine ont évolué avec le temps, les approches positives de nos enseignants, professionnels, administrateurs et conseils des commissaires ont également évolué grâce à votre plan, Mme la ministre, le plan d'action en vigueur. Ce n'est pas une observation désinvolte que l'ACSAQ offre mais bien un rappel important qui reflète notre grande surprise et peut-être, d'être très franc, notre déception envers un projet de loi qui a défini l'intimidation, diagnostiqué les causes, qui a proposé des mesures de prévention et imposé des sanctions disciplinaires, le tout reposant sur la proposition... la présomption explicite que l'administration actuelle des commissions scolaires au Québec échoue dans chacun de ces domaines importants -- et, si ce n'est pas le message, vous pouvez nous corriger -- et en supportant qu'une loi en soi va tout régler le problème. Comme la persévérance scolaire, c'est une responsabilité de notre société et de tout le monde, on ne peut pas le traiter à part et par juste un intervenant.

**(17 h 20)**

Soyons clairs, nos commentaires qui suivent reposent sur la meilleure façon de lutter, nous croyons, l'intimidation et la violence à l'école. Nos commissions scolaires ont la responsabilité de s'y attaquer et de rendre compte de leurs résultats au public de même qu'au ministre, et cela se fait par notre rapport annuel. Notre intention n'est pas de présenter une défense restreinte des pratiques actuelles ni des commissions scolaires qui les emploient. Cela dit, l'ACSAQ est d'avis que la législation qui serait éventuellement adoptée devrait reposer sur les meilleures pratiques, ressources et expertises actuelles de manière à protéger nos élèves le plus efficacement possible. Ce projet de loi ne peut simplement s'attaquer à ce défi à l'aide d'objectifs, de sanctions et de protocoles non testés. Tout effort pour contrer la violence et l'intimidation doit être fondé sur la réalité et le bon gros sens plutôt que sur l'espoir que tout va s'arrêter avec l'adoption d'une loi, ce ne serait pas le cas. Et je cite le journal Maclean's, que vous connaissez sans doute, et c'est l'édition du 19 mars 2012 et c'est un article écrit par un psychologue renommé, Dr Israel Kalman.

Notre mémoire, dont vous avez une copie devant vous, propose plusieurs observations sur la définition problématique, selon nous, de l'intimidation dans le projet de loi. Compte tenu de notre temps limité, je me permets de tout simplement suggérer une formulation alternative à celle qui apparaît à l'article 13.1.1°: L'intimidation est un comportement intentionnellement blessant et agressif, à caractère répétitif, où il y a un déséquilibre des forces entre l'agresseur et sa victime. Je vous réfère à notre texte pour la citation.

Le projet de loi contient une exigence plutôt vague, soit que le directeur d'école -- et vous avez entendu parler les directeurs, j'en suis sûr -- doit appuyer tout regroupement d'élèves désirant réaliser les activités qu'il estime utiles pour lutter contre l'intimidation et la violence. C'est une pratique que je vois toujours dans nos écoles et surtout dans celle où je travaille.

Outre cette référence, le reste du texte semble contenir peu de reconnaissance sur le rôle essentiel que doivent jouer les programmes d'enseignement ainsi que le personnel scolaire dans la prévention de l'intimidation et de la violence. Également, il n'y a aucune reconnaissance de la multitude de facteurs qui contribuent au problème et qui sûrement vont au-delà de la compétence des écoles et commissions scolaires locales.

Au sujet de la question complexe de la cyberintimidation, les commissions scolaires sont-elles responsables des cas d'abus en dehors des heures d'école? C'est une question qu'on se pose et que le public se pose aussi. La responsabilité de confronter les élèves, les enfants qui commettent des actes d'intimidation et de violence n'est-elle pas celle des parents en premier lieu -- et tout autre intervenant -- tout autant que celle des institutions scolaires? Et cela commence, d'après nous, au niveau du CPE et en milieu familial.

Je vais passer la parole à M. Verrillo.

M. Verrillo (Frank): Nous sommes particulièrement frappés par la quasi-absence d'un rôle explicitement prescrit et important assigné aux commissions scolaires. Chacune de nos commissions scolaires anglophones a développé une politique concernant le comportement des élèves avec des objectifs spécifiques et proactifs bien stipulés dans leurs énoncés de mission et mis en oeuvre dans les programmes scolaires, tous adaptés aux conditions locales.

Il y a plus de quatre ans que l'Association des commissions scolaires anglophones a réalisé une étude des plus innovatrices au sujet d'un problème à la fois émergent et omniprésent, à savoir la cyberintimidation, intitulé Épanouissement, respect, responsabilités. Les recommandations de l'étude ont été bien élaborées à l'aide du Dr Shaheen Shariff, professeure à l'Université McGill, un des experts mondiaux sur le sujet, et du capitaine Frédérick Gaudreau, coordonnateur de la lutte contre la cybercriminalité à la Sûreté du Québec -- et ça nous fera plaisir de vous donner le rapport à la fin de l'audience. À l'époque, le ministère... le ministre de l'Éducation, du Loisir et Sport a publiquement applaudi le rapport. Notre réseau scolaire public anglophone s'est fait le devoir de mettre sur pied des mesures préventives afin d'assurer un environnement sécuritaire et respectueux dans ses écoles.

Il ne fait pas de doute que les améliorations doivent continuellement être effectuées et que le ministère de l'Éducation, du Loisir et Sport a non seulement la prérogative, mais bien l'obligation de se faire chef de file et facilitateur de façon à améliorer la situation. Cependant, les approches formulées dans ce projet de loi relèguent les commissions scolaires à des rôles secondaires de vérificateur et rapporteur, entre autres choses l'obligation de soumettre encore un autre rapport annuel au ministre -- l'article 210.1 -- quantifiant le nombre d'actes d'intimidation ou de violence dans chaque école.

À notre avis, l'intention déclarée de la ministre de rendre publics les résultats de ces rapports n'augure rien de bon pour ce qui est d'une véritable amélioration de la sécurité en milieu scolaire. Ce que l'Association des commissions scolaires anglophones attend du ministère est un soutien assidu pour la création et le maintien d'un environnement scolaire harmonieux, un climat de confiance et d'inclusion offrant à nos élèves, nos employés et nos conseils de commissaires les outils pour prendre en main le problème de l'intimidation et la violence. Selon nous, l'éventualité d'un palmarès des écoles incriminées n'est guère l'approche la plus efficace.

Nos commissions scolaires anglophones, dans toute leur diversité, partagent la notion que nos directeurs d'école sont les leaders en matière pédagogique. Ce rôle fondamental leur permet de faire profiter nos élèves de leurs vastes compétences et de leur expérience. Nos directeurs d'école sont déjà débordés par leurs responsabilités administratives et bureaucratiques; nous regrettons que ce projet de loi propose d'ajouter à leur fardeau. Bien entendu, les directeurs d'école doivent être en toute première ligne afin de remplir notre devoir commun d'offrir aux élèves un environnement scolaire sécuritaire. Cela étant dit, nous ne sommes pas entièrement convaincus que la voie menant à la sécurité dans les écoles passe par la rédaction d'un rapport par le directeur dans le cas de chaque plainte relative à un acte d'intimidation ou de violence -- l'article 96.12 -- ni par la création dans chacune des écoles d'une équipe de lutte contre l'intimidation avec son propre coordonnateur.

M. Birnbaum (David): Le projet de loi prévoit aussi de plus grandes responsabilités pour les conseils d'établissement, une approche que l'ACSAQ aussi met en cause. D'abord, chaque conseil d'établissement doit adopter un plan de lutte contre l'intimidation et la violence -- article 75.1. L'ACSAQ n'arrive pas à comprendre la nécessité de quelque 340 plans individuels -- dans notre secteur -- et potentiellement contradictoires au sein de notre système. Comment les commissions scolaires pourront-elles par la suite répondre aux éventuelles demandes de recours de parents concernant les décisions prises selon les critères d'une école en particulier? Quel est le caractère équitable et l'avantage de transmettre cette responsabilité au conseil d'établissement pour ainsi se retrouver avec des règles, des sanctions et des exigences en matière de suivi potentiellement différentes d'une école à l'autre?

Le protecteur de l'élève, pour qui aucun fonds supplémentaire, d'ailleurs, n'est alloué, voit aussi sa description de tâches s'allonger de façon discutable et non sollicitée. Une telle marche à suivre va-t-elle résulter en un environnement plus sain et sécuritaire pour nos élèves? On se demande la... on se pose la question.

Le protecteur de l'élève ne possède aucune autorité légale sur les employés du conseil, mais on lui assigne désormais la tâche d'examiner les plaintes des parents en première instance. Présentement, c'est le directeur d'école qui est responsable de cette procédure, jusqu'à ce que sa décision soit contestée d'une façon ou d'une autre. Selon l'article 220, le protecteur de l'élève est dorénavant responsable de juger de l'efficacité des plans de lutte contre l'intimidation et la violence mis en oeuvre par les écoles. Pourquoi cette modification est-elle subitement supérieure à la surveillance actuelle placée sous la gouverne du directeur général, qui, pour sa part, est supervisé par le conseil des commissaires?

L'ACSAQ a déjà exprimé sa déception quant au manque d'emphase mise sur l'éducation et la prévention dans le projet de loi -- et on espère avoir le temps de parler davantage des programmes en place, des meilleures pratiques -- mais cette déception se transforme en colère lorsqu'on prend connaissance des propositions étendues et arbitraires quant aux sanctions radicales que le ministère entend imposer aux commissions scolaires jugées fautives de n'avoir pas respecté la loi. L'inclusion de cette section contribue très peu, de notre avis, à promouvoir le bien-être et la sécurité de nos enfants dans nos écoles et rien pour inspirer, il faut le dire, l'élaboration d'approches humaines et novatrices pour lutter contre l'intimidation et la violence. Plutôt, une approche punitive risque malheureusement d'inciter les conseils scolaires, les directeurs d'école, les enseignants et les professionnels, ainsi que les parents, à se concentrer strictement à la soumission des chiffres, dates, noms et détails requis pour chaque cas d'intimidation et de violence et d'effectuer cette tâche dans les délais requis, de peur de se voir imposer des sanctions pécuniaires. De toute évidence, la qualité des approches, la compassion et l'évaluation sérieuse des réels progrès effectués vont devenir des considérations à reléguer au second plan.

**(17 h 30)**

M. D'Aoust (David C.): Pour conclure, M. le Président, à l'instar du ministre, l'ACSAQ est sensible à la nature de l'importance vitale des problèmes énoncés dans le présent projet de loi de même que l'urgence qui est de s'y attaquer. La dévastation causée par l'intimidation et la violence systématique sur la vie d'un élève innocent est une véritable tragédie. Les talents et ressources et, oui, l'autorité de l'État et de ses institutions doivent être mis à profit de façon à améliorer la situation rapidement. Les résultats crédibles de ces efforts doivent être rapportés, évalués et améliorés encore plus par tous les intervenants.

Étant donné la sévérité du problème et en reconnaissance de la volonté générale et de l'expertise disponible pour y faire face, l'ACSAQ invite respectueusement la ministre à procéder à une importante révision de ce projet de loi -- et je termine -- de façon à produire une version finale qui va véritablement atteindre les objectifs que la ministre s'est déjà fixés pour cet exercice, basés sur la prévention, et l'éducation, et la formation. Il nous semble que ça serait la bonne piste à suivre, et on vous dit ça en toute sincérité. Nous avons une responsabilité envers nos élèves d'assurer que votre projet de loi soit le meilleur possible, et on reste comme partenaires, et on est prêts à participer.

Document déposé

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie pour votre présentation. Je voudrais juste... simplement m'assurer que le document que vous avez parlé, c'est bien le document que j'ai ici, Épanouissement, respect, responsabilités -- Rapport et recommandations sur l'impact d'Internet et des autres technologies de l'information sur les écoles publiques anglophones du Québec. Alors, nous recevons votre document, il va être distribué immédiatement, je vous remercie.

Nous débutons immédiatement la période d'échange, et je donne la parole à Mme la ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.

Mme Beauchamp: Merci beaucoup, M. le Président. Bienvenue. Merci d'être parmi nous.

Je voudrais avoir un échange avec vous sur le fait que vous campez tout votre mémoire en prenant une approche qui dit que... vous prétendez que tout le projet de loi est bâti sur la présomption explicite que l'administration actuelle des commissions scolaires a échoué dans des domaines importants. Je veux juste vous dire ceci: Honnêtement, vraiment, je ne crois pas que vous allez jamais trouver une seule remarque de ma part qui dit que les commissions scolaires ont échoué dans la lutte contre l'intimidation.

Par contre, vous savez comme moi que les résultats attendus du plan d'action, qui était bâti sur la présomption de la volonté de tous de régler le problème, avec accompagnement financier, avec des dimensions précises... Parce qu'il faut peut-être le rappeler aussi, hein? Le plan d'action 2008-2011 avait des dimensions précises et peut-être qu'il comportait des éléments qui rendaient difficile à voir que toutes les actions prises étaient en lien avec la lutte contre l'intimidation.

Je vais vous donner un exemple. Dans ce plan d'action, on identifiait le fait qu'il fallait agir de façon extrêmement précoce, et identifier dès le premier cycle du primaire les enfants qui étaient isolés, et intervenir auprès de ces enfants isolés, parce qu'on le sait, qu'ils peuvent être plus souvent objet d'intimidation par la suite, et parfois... ou encore on exprimait le fait qu'il y a, dans des commissions scolaires, des activités qui ont été réalisées où on veut outiller les enfants à améliorer leurs compétences sociales, leurs compétences en communication, leurs compétences relationnelles, parce qu'on sait que c'est une façon, s'ils sont moins particuliers, moins stigmatisés, de faciliter leur intégration dans un groupe et d'éviter qu'ils soient objet d'intimidation, et peut-être que ces activités-là, quand on outille un jeune à mieux communiquer... peut-être que les gens ne font pas le lien entre ça et que ça fait partie d'un plan contre l'intimidation, et pourtant c'était le cas.

Mais tout ça pour dire qu'à la fin, lorsqu'on demande une reddition de qu'est-ce qui s'est fait, une reddition de comptes, lorsqu'on demande une démonstration que les actions ont été prises partout de façon systématique, là, tout d'un coup, on n'est plus capables d'avoir un portrait juste. Ce n'est pas parler d'échec ou ce n'est pas parler d'incompétence ou la présomption d'échec des commissions scolaires, c'est parler d'une problématique où on n'est pas capables de démontrer aux citoyens et aux parents l'intervention systématique en cas d'intimidation.

Je vous en parle parce que je comprends que les gens du réseau de l'éducation nous disent: On travaille fort, on travaille bien, vous n'avez pas idée de tout ce qu'on fait, etc., mais il y a quand même eu des difficultés de répondre aux attentes de la population puis des parents à travers un plan d'action sur une base volontaire. Donc, ça m'importait de vous dire que je trouve que, si, toute la loi, vous le voyez sous un mode défensif, comme étant une attaque contre les commissions scolaires parce qu'on veut prouver qu'elles ont échoué, ce n'est pas la bonne lecture qu'il faut faire du projet de loi. Si, par contre, vous... Et je peux prendre le temps de vous le dire, il faut voir le projet de loi comme étant une nécessité de pouvoir... Dans des dossiers aussi délicats et parfois dramatiques que l'intimidation envers des enfants ou envers du personnel d'école, c'est un projet de loi rendu nécessaire pour qu'on soit capables de prouver que ce n'est pas zéro intimidation, ça ne sera peut-être jamais possible, mais que c'est 100 % intervention.

Et donc je veux un peu avoir votre réaction, parce que, moi, ça m'a fait réagir, de lire ça dans votre mémoire. Et honnêtement, si vous avez suivi cette commission, on n'est pas en mode trouver un coupable, on est en mode garantir des actions aux parents et surtout aux victimes d'intimidation.

M. D'Aoust (David C.): Mme la ministre, merci pour votre question assez longue. Vous avez dû être prof, vous.

Mme Beauchamp: Seulement de violon, je ne parlais pas.

M. D'Aoust (David C.): Bon, excellent.

Mme Beauchamp: Je me reprends.

M. D'Aoust (David C.): Pour répondre à votre question, qui était assez longue, là, je vous donne la réaction de nos membres, et c'était dans cette perspective-là: on était un peu surpris nous-mêmes, mais, en lisant la loi, on a vraiment senti qu'il n'y avait aucune reconnaissance pour les stratégies qui étaient mises en place, tous les événements qui se sont passés, tout ce qui s'est développé au niveau des enseignants et au niveau des élèves. Dans les corridors du secondaire -- puis je parle d'un secondaire francophone où j'enseigne -- j'entends des élèves dire à d'autres: Aïe, ça, c'est de l'intimidation! Alors, juste vous dire ça, c'est une idée que votre plan d'action qui était basé sur la formation, sur la sensibilisation a commencé à faire fruit, porter fruit, et c'est plutôt dans cette veine-là qu'on voudrait que ça continue. Et, si les commissions scolaires étaient un peu sous le choc, c'est parce qu'elles savent qu'elles sont sur une bonne piste et elles n'ont pas trouvé qu'il y avait une reconnaissance dans la loi de ce qui a été fait jusqu'à date. Alors, c'était simplement ça. Et c'était la déception réelle, je ne peux pas vous le cacher, mais soyez assurés que ce n'est qu'un obstacle pour nous. On part de là et on est prêts à continuer.

**(17 h 40)**

M. Birnbaum (David): Si je peux, je crois qu'une des choses qui a alimenté ce sentiment, c'était notre inquiétude que les seuils dont on vise dans la loi risquent de faire un portrait étroit de la problématique. À titre d'exemple, si je peux parler brièvement de quelques-uns des programmes en place -- et on essaie de nous voir dans le projet de loi, c'est des initiatives qui sont alimentées et encadrées par le plan d'action sur la violence, École en santé, et tout ça -- à titre d'exemple chacune de nos écoles est impliquée dans un sondage qui s'appelle Tell Them From Me, les élèves, les profs, les parents, et c'est taillé par école, les résultats, et on parle de problématiques vues de l'oeil des enfants, et des profs, et des directions d'école. Ça a été développé avec l'implication de nos conseils d'établissement. Chaque école a ses résultats qui sont divulgués et analysés conjointement avec les élèves, avec les profs, et il y a des stratégies taillées selon les résultats.

Voilà un exemple. Il y a d'autres... plusieurs écoles qui ont des approches basées sur le travail de Gordon Neufeld aux États-Unis où chaque fois qu'il y a un incident on interpelle l'élève qui aurait été responsable, d'autres qui étaient visés, d'autres qui ont témoigné cet incident et qui n'ont rien fait pour leur parler de leur expérience, pour voir s'ils ont compris pourquoi ils n'ont pas réagi; l'autre, l'élève qui l'a fait, pour le sensibiliser, sanctionner, s'il le faut, pour ce qu'il a fait. Tout cela pour dire: Voilà des choses encadrées dans une optique éducative qui est privilégiée, on le sait, par la ministre et le ministère.

Je crois qu'on ne se sentait pas visés, dans cette loi, par ces mesures-là et par plusieurs sections qui risquent de ne pas reconnaître ce genre de geste là. Si on parle d'un autre rapport annuel, il faut dire que ça risque d'ajouter aux lourdes tâches et à la bureaucratie, mais, si on parle d'une reddition de comptes qui est basée sur... en bonne foi mais sur des critères qui risquent d'être subjectifs et difficiles pour avoir une liste d'incidents qui se seraient produits dans une école ou une autre, est-ce qu'on a une façon réelle de mesurer et de motiver, évaluer la problématique ainsi que les résultats? C'est ça. Tout ça ensemble, c'est ça qui nous a amenés à nous poser des questions sur la perception ou la situation de notre rôle dans tout ça.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Bien, deux commentaires. Le premier, c'est que la loi fait partie d'un ensemble d'actions qui parlent aussi de mobilisation de la société ou d'une équipe-école, de prévention, et la loi en elle-même ne peut pas refléter toutes les actions. Quand vous me parlez de la reconnaissance de ce qui se fait comme programmes ou comme projets, la loi ne l'empêche pas, la loi amène un régime d'obligation d'intervention en cas d'intimidation. À la limite, même, je pourrais vous dire qu'au contraire la loi dit: Un directeur d'école doit appuyer des projets dans son école, par exemple, présentés par des comités étudiants. Donc, on ne soustrait pas, on additionne. Et la loi ne peut pas, par loi, couvrir tous les enjeux liés à la prévention ou liés à la formation ou à... qui fait partie du travail organisationnel et, je pourrais peut-être même dire, administratif d'une commission scolaire et des écoles.

Je veux bien comprendre. Dans votre mémoire, vous dites que vous ne voyez pas en quoi il est nécessaire que chacune des écoles ait un plan d'action. À l'échelle de vos commissions scolaires, vous dites que ça donnerait 300 quelques... 340 plans d'action, et par ailleurs...

Bien, deux choses. Le premier commentaire, c'est que vous disiez que vous étiez déçus de voir qu'on ne reconnaissait pas tous les efforts. Mettez-vous à ma place. Comment je peux être déçue, après un plan d'action bien reçu, des sommes d'argent mises en place, que je ne suis pas capable de répondre à des questions posées par les citoyens, qui est: Est-ce que toutes les écoles font quelque chose? Pas capable de répondre à cette question-là. Donc, moi aussi, je suis déçue de la transparence des résultats de la lutte contre l'intimidation.

Maintenant, vous venez de me donner un exemple où vous me dites: Toutes nos écoles utilisent un programme développé par une équipe universitaire, et tout ça. Ça fait que je veux comprendre. Si vous me dites que toutes vos écoles sont engagées dans la lutte contre l'intimidation, pourquoi vous me dites: Je ne peux pas croire que toutes nos écoles vont devoir avoir un plan?

M. D'Aoust (David C.): Mme la ministre, je sais qu'il y a un certain chemin à parcourir dans la redevance des comptes, et ce ne sont pas toutes les écoles qui utilisent le même programme du tout et la même approche, il y a une variation, mais elles ont toutes le même principe, c'est que tout doit être mis de l'avant pour aider les élèves, soit ceux qui font de l'intimidation et ceux qui sont au bout de la ligne, qui le reçoivent, pour comment combler la brèche entre les deux, comment en discuter, comment raisonner sans qu'il y ait de la violence. Et c'est une approche que nous privilégions dans nos écoles, pour la simple raison que ça met en vigueur une discussion entre les deux parties et que le prof n'est pas toujours la personne -- ou le directeur -- qui décide, qui statue sur la résolution de la problématique. C'est de responsabiliser nos élèves.

Mais pour vous dire, là, par rapport à des redditions de comptes, oui, on a du chemin à faire, mais c'est pour trouver le bon chemin.

Le Président (M. Marsan): Mme la ministre.

Mme Beauchamp: Je prends juste le temps de vous dire... J'insiste, là, je trouve que parfois vous présentez le projet de loi comme s'il prescrit une démarche précise qui serait irrespectueuse de projets qui se déroulent dans vos écoles, alors que ce que le projet de loi fait, il ne vient pas prescrire comment intervenir ou comment traiter chacun des épisodes d'intimidation qui seraient portés à l'attention d'un directeur. Il vient plus dire: Chaque école, adoptez votre plan d'action, et justement une école pourrait choisir d'intervenir selon tel modèle ou tel modèle. Mais ce que la loi dit par contre, c'est: Il y a une obligation d'intervention. On doit garantir cette obligation d'intervention.

Donc, je voulais juste le préciser, là. On n'est pas en train de vouloir changer vos façons de faire, on est en train de vouloir qu'on soit capables de se dire ensemble, qu'on soit capables de dire aux parents: Je vous garantis 100 % d'intervention.

M. D'Aoust (David C.): D'accord, Mme la ministre, mais est-ce que... Cette responsabilité-là pour s'assurer qu'il y a un plan d'activité, qu'il y a un plan en place au niveau des écoles, ça doit rester avec la commission scolaire. C'est la commission scolaire qui doit être obligée de rendre compte de ces plans-là.

M. Birnbaum (David): Et, si je peux, nous avons cette préoccupation parce que vous savez aussi bien que nous la lourdeur des tâches sur nos directions d'école, sur les profs, et tout ça, et nous voyons en même temps que c'est prescriptif. On voit plusieurs endroits dans la loi qui, pour nous, risquent d'être des obstacles plutôt que des atouts en améliorant la situation. Quand on parle, à 75.3, de l'idée qu'on est, chacun des profs, des directions d'école, imputables pour éliminer à 100 % chaque épisode, et ça, qui s'assoit sur une définition, vous aurez entendu de d'autres, qui est très, très vaste et vague, est-ce que ça, c'est facilitateur pour améliorer la situation au niveau de l'école? Quand il y a un nouveau rôle dont a plein de questions pour le protecteur de l'élève, qui n'a pas nécessairement l'expertise nécessaire, on se demande si ça risque de faciliter notre travail. Quand on confie un rôle au conseil d'établissement, qui, dans notre cas, est très impliqué déjà, on se demande comment tout ça va nous rendre plus imputables et plus efficaces.

Mme Beauchamp: Je ne veux pas... Je veux juste vous faire part de mon étonnement. L'article que vous citez s'écrit ainsi: «Tout membre du personnel d'une école doit collaborer à la mise en oeuvre du plan de lutte contre l'intimidation et la violence et veiller à ce qu'aucun élève de l'école à laquelle il est affecté ne soit victime d'intimidation ou de violence.» Moi, là, la lecture que je fais ici, c'est: C'est l'affaire de tout le monde. C'est ça que ça veut dire. Ça veut dire que, si je suis témoin, si je suis... mon école a un plan d'action, et c'est l'affaire de tout le monde. Ce n'est pas l'affaire seulement d'une commission scolaire, ce n'est pas l'affaire seulement d'un directeur d'école, c'est l'affaire de tout le monde.

M. Birnbaum (David): Avec respect, on parle d'un libellé dans une loi qui est... dont on est... Ce n'est pas un discours, on parle d'une loi.

**(17 h 50)**

Mme Beauchamp: Tout à fait. Je l'enlève: je suis en train de dire que ça repose uniquement sur le directeur de l'école. C'est ça que vous êtes en train de me proposer si vous n'êtes pas en accord avec 75.3.

Je veux juste vous amener sur un autre sujet sur lequel les écoles des commissions scolaires anglophones, je pense qu'on peut dire, là, ont une... j'allais dire «une longueur d'avance», ou en tout cas ont entrepris une démarche qui est extrêmement intéressante, qui est le virage qu'on appelle un peu familièrement l'école 2.0. Et il y a plusieurs de vos écoles qui ont déjà introduit plusieurs outils informatiques, il y a des écoles dans les Cantons-de-l'Est où c'est avec les portables pour chaque étudiant, et tout et tout.

Ça me semble important qu'on prenne le temps de vous entendre à partir de cette expertise-là développée sur le terrain, la réalité terrain, de comment se vivent les interventions de l'école pour la lutte à la cyberintimidation. C'est en visitant une école d'une commission scolaire anglophone où la première fois, moi, j'ai entendu parler de toute la réflexion puis de la volonté de parler d'un programme de cybercitoyenneté, en disant: C'est incontournable qu'on développe des formations de comment je dois me comporter comme citoyen vis-à-vis le cyberespace, mes responsabilités, et tout ça.

Mais je veux vous entendre. Le projet de loi parle de cyberintimidation, donc avez-vous un éclairage à nous apporter à partir de l'expérience de vos écoles qui ont déjà pris le virage de l'école 2.0 notamment?

M. D'Aoust (David C.): Permettez-moi de vous dire que dans chacun de nos laboratoires où est-ce que les élèves travaillent, et souvent dans les salles de classe, aller plus loin que dire qu'on les observe, on essaie de voir ce qu'ils font, surtout quand ils travaillent sur un projet, et être capables de voir sans ouvrir leurs dossiers, parce que c'est un peu contre la loi, c'est difficile, mais de les sensibiliser au fait qu'on ne peut pas agir de cette façon est plutôt le remède pour nous, et on le fait. On le fait dans les écoles anglophones et dans les écoles francophones, j'imagine, à travers le Québec, mais, pour nous, c'était une première étape.

On reçoit souvent des jeunes qui arrivent à l'école avec des iPhone, des iPad, etc., et puis, au lieu de les encourager d'apporter ça dans les salles de classe puis ils font du textage en classe, les écoles ont mis fin à ça, parce que souvent il y a des affaires qui... des notes qui sortaient pendant les heures de classe à des élèves et à des profs, même. Alors, en établissant certaines règles, on peut le contrôler, mais où est-ce que ça se passe plus souvent, la cyberintimidation, c'est à partir de la maison et à partir du temps que l'élève n'est pas sur le campus de l'école.

Le Président (M. Marsan): Je vous remercie. Ceci termine la période d'échange avec le parti ministériel. Nous poursuivons avec l'opposition officielle, mais auparavant nous avons... Nous dépasserons 6 heures, c'est ça, 18 heures, et j'aurais besoin d'un consentement. C'est correct? Alors, M. le député de Jonquière, vous avez un maximum de 20 minutes à votre disposition.

M. Gaudreault: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. Verrillo, M. D'Aoust, M. Birnbaum. Ça nous fait plaisir de vous accueillir ici. Merci aussi pour le temps, la rigueur que vous avez mis dans la rédaction de votre mémoire. Et je vous avoue d'emblée que je suis très, très curieux de lire et de feuilleter votre rapport et vos recommandations sur l'impact d'Internet et des autres technologies de l'information sur les écoles publiques anglophones. Je vous avoue que je ne le connaissais pas, alors je vous confesse mon ignorance sur ce document. Alors, je vais le lire attentivement pour bien comprendre ce phénomène qui nous interpelle énormément, toute la question des réseaux sociaux, de l'intimidation via Internet. Vous avez un peu abordé cette question-là avec la ministre, on pourra peut-être y revenir plus tard.

Mais avant j'ai été un peu étonné de lire dans votre mémoire ce que je vois comme une contradiction. Peut-être que ça va me permettre de faire un peu de pouce sur ce que la ministre disait tout à l'heure.

Évidemment, je ne suis pas d'accord avec l'ensemble des détails du projet de loi. Nous sommes favorables, évidemment, à la lutte contre l'intimidation, contre la violence à l'école. Moi, j'ai la conviction que la lutte contre l'intimidation et la violence à l'école, c'est une affaire de responsabilité collective, c'est une question très large. Ce n'est pas juste la responsabilité d'une personne, ou d'un intervenant, ou d'un acteur dans le milieu de l'éducation comme ce n'est pas la responsabilité que du parent, ou que de l'élève, ou que du prof.

Et je vois dans votre mémoire que vous dites que -- à la page 6, en haut, là -- «nos directeurs d'école sont déjà débordés par leurs responsabilités administratives et bureaucratiques» -- alors, ça, on l'a entendu énormément lors des consultations jusqu'à maintenant -- mais trois ou quatre lignes plus loin vous dites: «Cela étant dit, nous ne sommes pas entièrement convaincus que la voie menant à la sécurité dans les écoles passe [...] -- là, je saute un bout -- par la création dans chacune des écoles d'une équipe de lutte contre l'intimidation avec son propre coordinateur.» Et là, j'imagine, vous faites référence directement au projet de loi, à l'article 11 du projet de loi, dernier alinéa, qui dit que «le directeur d'école doit désigner, parmi les membres du personnel de l'école, une personne chargée de coordonner les travaux d'une équipe qu'il doit constituer».

Alors, j'essaie de voir parce que moi, je pense qu'il faut envoyer un signal, effectivement, que c'est une affaire collective, la lutte contre l'intimidation. Là, je comprends qu'on peut voir ça d'un point de vue de lourdeur bureaucratique, de créer un autre comité. On peut discuter des moyens et des ressources alloués à la libération des professionnels responsables de ce comité, ça, c'est une chose, mais, quand même, moi, je vois la création d'un comité comme une manière d'alléger ou de soutenir, je dirais même, le directeur d'école, qui ultimement est responsable. Alors, j'essaie... Pour moi, il y a comme une contradiction, là, à la fois quand vous dites, d'un côté de la bouche: Les directeurs sont débordés, et, de l'autre côté: On est contre la création d'un comité qui pourrait les soutenir, au fond, dans cette responsabilité importante de lutte contre l'intimidation.

M. D'Aoust (David C.): Je dois vous dire honnêtement que, dans le monde de l'éducation, on est un peu débordés. C'est évident, je pense que vous l'avez entendu de d'autres groupes, c'est vrai, mais on reconnaît les bonnes intentions de cette loi. La création nécessaire d'un autre comité présume qu'il n'y a pas de comité en place. Veux ou veux pas, nos écoles fonctionnent, et je le dis très bien, en traitant toute cause de violence et d'intimidation. Oui, il y en a qui les échappent. Oui, il y a des tragédies qui arrivent, des fois incontrôlables. Est-ce que c'est toujours dû à un manque de présence ou d'attention de l'école? On n'est pas d'accord. Ça part en dehors de l'école, en dehors des heures d'école, mais c'est transmis des fois à l'école, ça se manifeste. Demander à nos enseignants, demander à nos directions d'école de créer et veiller à un autre comité quand il y a déjà des mécanismes en place... Que la loi soit ouverte à ça, qu'on utilise déjà les mécanismes qui sont là.

Chacune de nos écoles a un code de vie, presque chacune de nos écoles -- et là je parle du réseau anglophone uniquement -- a des politiques contre l'intimidation. J'ai travaillé pour une commission scolaire comme directeur général. Fumer de la drogue ou consommer de la drogue, la violence contre un membre du personnel, la violence contre un élève, avoir une arme blanche, c'est automatiquement expulsion. C'était zéro tolérance. Les journalistes l'ont critiqué à mort chaque fois qu'on faisait expulser un élève. Personne n'allait pas plus loin que ça, ils disaient: Ah, il est expulsé, elle est expulsée, mais on trouvait d'autres solutions pour les parents, on travaillait avec eux, on leur offrait une aide. Et il y avait des cas d'intimidation très graves, et, si on les expulsait de la commission scolaire, on essayait de trouver une commission scolaire avoisinante de prendre cet élève-là. Des fois, ce n'était pas possible, parce qu'il y avait des écoles qui étaient assez éloignées, et souvent on exigeait que ce soit... on déterminait que c'était une expulsion de cette école-là et on permettait un transfert avec ses moyens de transport, pas les nôtres, à une autre école avec un projet d'intégration. Et souvent, quand l'élève venait devant nous puis nous demandait un pardon, il nous faisait des garanties, il y avait un plan d'intégration, on acceptait.

Quand vous faites ça au niveau d'une école et au niveau d'une commission scolaire, vous travaillez en partenaire avec les écoles, ça prend beaucoup d'énergie et beaucoup de temps, beaucoup de ressources. Vous le savez comme moi, on est assez restreints, ces jours-ci, dans nos budgets. La ministre va vous dire autrement, c'est son droit, tout le monde doit faire sa contribution à diminuer la dette, on le reconnaît, on essaie de continuer, mais on n'a pas d'autre ressource, on ne peut pas engager... Nos enseignants nous disent souvent: Écoutez, là, on est étouffés, puis on essaie de les écouter. Les directions d'école nous disent: Écoutez, on ne peut pas apporter une solution à tous les problèmes du monde au niveau de l'école. On peut en parler, on peut en discuter, on peut encourager nos élèves d'être attentifs, mais ça prend une implication et une volonté. On sait que c'est là, mais, quand on dit qu'il y a trop à faire, on est honnêtes avec vous, c'est la réalité comme on le vit.

**(18 heures)**

M. Verrillo (Frank): Je peux ajouter quelque chose?

Le Président (M. Marsan): Allez-y.

M. Verrillo (Frank): Merci. Vous savez sans doute que, dans chaque école, il y a un comité d'enseignants qui est là comme moyen de consulter les enseignants, il y a toujours le conseil d'établissement dans chaque école, et souvent, dans les écoles secondaires, il y a des comités d'étudiants. Ils sont très efficaces. On le voit souvent dans des commissions scolaires, les étudiants se rassemblent même au niveau de la commission scolaire, un représentant de chaque école est présent à une assemblée des étudiants. Il y a des moyens d'intervenir avec ces moyens-là. Même dans les écoles où il y a un problème particulier, le directeur forme un comité. Mais pour dire qu'un comité doit exister avec la loi et qu'un rapport soit fait à la fin de l'année par le directeur, ça, c'est un peu... on dit peut-être que c'est un peu trop. Mais il y a des moyens, dans les petites écoles, de résoudre des problèmes avec les comités qui existent.

Le code de vie, on en a parlé, c'est le conseil d'établissement et le comité des enseignants qui approuvent tout ça, ce n'est pas le directeur tout seul qui dit: C'est moi qui vais s'en occuper. Puis, s'il y a une provision dans le code de vie contre le «bullying», alors c'est sûr que c'est là dans chaque école, c'est là comme politique de la commission scolaire. On peut exiger que chaque commission scolaire ait une politique, O.K., et ça, c'est facile de dire à chaque commission scolaire: Assurez-vous aussi que les écoles, elles ont un protocole d'entente avec le service de police, qu'il y a un protocole d'entente avec les CSSS, on peut l'exiger, c'est facile, c'est seulement une directive, mais de le mettre aussi dans la loi et attacher une obligation quand ça peut être facilement fait avec une directive aux commissions scolaires, de dire: Procédez avec une politique au niveau de la commission scolaire et une politique dans chaque école pour... contre l'intimidation.

M. Gaudreault: Vous terminez votre mémoire, dernier paragraphe, quand même de façon assez sévère, vous dites: «...l'ACSAQ invite respectueusement la ministre à procéder à une importante révision [du] projet de loi...» Je voudrais être sûr de bien comprendre. Est-ce que vous trouvez que le projet de loi n° 56 s'y prend vraiment mal? Est-ce que vous trouvez que le projet de loi n° 56 n'apporte rien de neuf quant à ce qu'on a déjà, en tout cas, dans vos milieux et ce qu'il est déjà possible de faire contre l'intimidation?

M. D'Aoust (David C.): ...on est très heureux qu'il y ait un projet de loi. Je ne vous le cache pas, là, je pense que la ministre est très courageuse de présenter le projet de loi, et de ne rien faire suite au dernier drame, ce serait de passer un message au public qu'on n'est pas inquiets, puis ce n'est pas vrai.

C'est peut-être la façon dont ça va être appliqué et le grand message qui va être résonné dans le réseau. Pour nous, la formation, l'éducation, la prévention sont très, très importants, éléments qui sont, oui, dans la loi mais qui ne le sont pas assez. Il faut qu'ils soient plus en évidence, et on n'a pas noté la présence... Parce qu'on parle de la loi, là, avec les ententes avec le ministère de la Justice ou la Sûreté du Québec. Déjà dans les écoles de ma région, secondaires, il y a des policiers intervenants auprès des élèves, et ça fonctionne bien. J'aurais aimé que le ministre de la Justice soit ici pour le dire, M. Fournier, mais ces policiers-là sont bien, bien formés et ont une volonté d'être là, travaillent bien avec les élèves, les voient souvent pour leur dire du positif et non pas seulement du négatif.

Le fait que les élèves eux-mêmes nous demandent pour engager des conférenciers pour parler du taxage et de l'intimidation, ça, c'est un changement récent, et peut-être parce qu'il y a la prise de position du gouvernement et aussi le fait qu'on avait déjà une politique en place, et, quand un drame arrive, on est plus équipés pour composer avec ces drames-là, malgré le fait que ça se passe. Mais les élèves, je dois vous avouer, l'éducation ne se passe pas seulement dans une salle de classe, c'est dans les corridors, sur le terrain de jeu, sur les voyages, les sorties scolaires, le parascolaire. Les élèves sont très... beaucoup plus ouverts qu'ils n'étaient à parler des cas d'intimidation et à aller solliciter de l'aide, et, si ce n'est pas pour eux-mêmes, c'est pour un copain ou une copine qu'ils connaissent. Et ça, c'est nouveau, très nouveau. Et souvent il y a des élèves qui vont vous dire: Monsieur, vous avez accusé mon copain d'intimidation, mais vous, vous avez élevé la voix, vous l'avez intimidé aussi. Et, pour les profs, des fois c'est dur, hein, parce qu'on est là puis il faut avoir le contrôle, et on ne peut pas toucher un élève, et, quand on crie, des fois c'est vu, c'est interprété comme des menaces.

Alors, être rendus à ce point-là où est-ce que les élèves sont très conscients de ce qui se passe, je crois, c'est dû à un effort collectif suite à la politique qui a été adoptée par le gouvernement au pouvoir, et c'est à partir de là qu'on voudrait continuer.

M. Gaudreault: Et ceux qui vont ont précédés ici, les directions d'école, les représentants de ces directeurs d'école là ont beaucoup parlé aussi de prévention, et vous dites, à la fin de la page 2, début de la page 3 de votre mémoire: «...le [...] texte semble contenir peu de reconnaissance sur le rôle essentiel que doivent jouer les programmes d'éducation eux-mêmes dans la prévention de l'intimidation et de la violence.»

Je comprends que vous voulez comme tourner... vous nous suggérez, d'une certaine manière, de tourner davantage le projet de loi vers la prévention. Est-ce que vous pouvez me donner des exemples un peu plus concrets, là, de ce que vous aimeriez voir apparaître dans le projet de loi et qui toucherait la prévention? Outre des énoncés de principe, qu'est-ce qu'on pourrait inclure plus précisément dans un projet de loi de ce type concernant la prévention?

M. Birnbaum (David): Ce n'est pas facile. Ce n'est pas nous qui doivent écrire des lois, il faut qu'on les implante. Mais ce qu'on...

M. Gaudreault: Vous êtes là pour nous conseiller.

**(18 h 10)**

M. Birnbaum (David): Oui. Non, non, je comprends. Ce que nous cherchons, et je crois qu'on doit dire volontiers que c'est un défi de taille, c'est de nous assurer que la loi encadre et facilite les meilleures pratiques pour éviter la... rayer la violence et l'intimidation. Y a-t-il une façon de légiférer, des conditions où on peut savoir que chaque école, sous l'égide d'une commission scolaire, assure un environnement sécuritaire? Y a-t-il une façon de mesurer et faciliter des programmes où les parents sont assurés d'une implication et d'une imputabilité en ce qui a trait aux politiques de la commission scolaire sur l'intimidation et la violence? Est-ce qu'il y a une façon d'encadrer la direction d'école pour assurer qu'on ait toujours le point de vue de nos neuf commissions scolaires? C'est le leader pédagogique de l'école. Ce n'est pas un chef d'administration, c'est le leader pédagogique. Y a-t-il de quoi à faire dans une loi qui facilite son rôle là-dessus?

On veut assurer que la façon de rendre compte est réelle, transparente et mesurable. Ce n'est pas qu'on veut éviter ça, mais c'est un sujet complexe et ça ne serait pas toujours quantifiable... ou, si oui, il faut qu'on soit ouverts à une souplesse qui n'élimine aucunement l'efficacité des gestes. Mais voilà les choses qui, pour nous, sont primordiales: Comment on positionne le directeur d'école pour faire son travail très complexe dans ce dossier-là? Comment, dans une loi, est-ce qu'on continue à faciliter les genres de programmes qui ont été instaurés, comme je dis, avec l'aide d'un plan d'action, de plusieurs plans d'action? Y a-t-il une façon de mettre l'emphase sur le rôle coopératif des parents dans tout ça? Tout ça, pour nous, est très important, et il nous semble, avec respect, qu'il y a de place pour l'amélioration sur ces sentiers-là.

M. Gaudreault: Rapidement -- il ne me reste pas beaucoup de temps, je suis désolé, puis vos réponses sont comptées dans mon temps, alors... -- je veux juste avoir quelques mots, en terminant, de votre part sur votre perception du rôle des parents. Jusqu'où on doit aller? On a eu tout un débat puis on l'a encore, je pense, là, sur la manière de communiquer ou qu'est-ce qu'on doit communiquer, comme directeur d'école, à un parent par rapport à son enfant qui vit de l'intimidation, jusqu'où on doit aller à cet égard, puis je trouve que... M. Birnbaum, vous avez mentionné le rôle coopératif des parents, j'aime cette façon de voir là. Mais concrètement.

M. D'Aoust (David C.): Moi, je vous dirai qu'on n'a pas trouvé que la loi parle assez du rôle des parents. Après tout, les parents doivent savoir ce que leurs enfants font, doivent les veiller, les superviser autant que les écoles, et ils ne peuvent pas prétendre que, ah, mais ça, c'est le problème de l'école, là, parce que c'est le problème de la communauté. Le fil conducteur, pour nous, c'est que le civisme à partir de la maison à l'école est important, et même le prof d'éduc doit être sûr qu'il est conscient du civisme dans sa leçon d'éducation physique, que le prof d'histoire... que celui qui enseigne le civisme aux responsables. Il y a certains fils conducteurs dans chacune de nos matières, on est conscients de ça, et le nouveau curriculum nous permet de le faire.

Alors, les parents, je crois, doivent assumer leur rôle, évidemment. Souvent, quand on téléphone les parents pour leur dire: Écoutez, là, ton enfant vient d'intimider le jeune Untel, la réaction est vive: Ah, pas mon enfant, tout le tralala, puis c'est presque comme ils n'acceptent pas la parole du prof, ou du témoin qui l'a vu, ou le directeur d'école. Alors, ça, là, il faut travailler là-dessus, c'est un devoir que nous avons comme commission scolaire à rectifier, parce que, souvent, la première rencontre avec les parents au téléphone, c'est la plus choquante.

Le Président (M. Marsan): Alors, merci, M. D'Aoust, M. Verrillo, M. Birnbaum, de nous avoir donné le point de vue de l'Association des commissions scolaires anglophones du Québec.

Et, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux à demain, après les affaires courantes, vers 11 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, où elle poursuivra son mandat. Merci et bon retour.

(Fin de la séance à 18 h 13)

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