(Onze
heures seize minutes)
La Présidente (Mme
Dionne) :
Alors, bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la commission de l'éducation et de la culture ouverte.
La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et des auditions
publiques dans le cadre du mandat d'initiative
portant sur les révélations de violence lors des initiations dans le milieu du
hockey junior et la possible situation dans d'autres sports.
M. le secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
Le Secrétaire :
...
Auditions
La Présidente (Mme
Dionne) : OK. Donc, nous entendrons, cet avant-midi, l'organisme et
les personnes suivantes, dans le fond,
l'Institut national de santé publique
du Québec. Alors, nous avons, de
gauche... de ma gauche à la droite,
Mme Dominique Gagné, conseillère scientifique, on a aussi
M. Pierre-Gerlier Forest, président-directeur général, ensuite, Dre Johanne Laguë, médecin
spécialiste en santé publique et médecine préventive, adjointe à la
programmation scientifique et qualité
et, finalement, Dr François Desbiens, qui est médecin spécialiste en santé
publique, je me... oui, également médecin spécialiste en santé publique
et médecine préventive et vice-président aux affaires scientifiques. Désolée.
Alors
donc, nous entendrons également Mme Danièle Sauvageau, conseillère,
conférencière, coaching exécutif et sportif, conjointement avec M. Camille
Thériault, qui est un ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick qui
sera avec nous en visioconférence.
Donc,
je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Institut national de la
santé... de santé publique du Québec. Donc, je vous rappelle que vous avez
10 minutes pour votre exposé. Après quoi, nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Donc, je vous invite donc à vous présenter à
tour de rôle et, par la suite, à nous faire part de votre présentation de
10 minutes.
Institut national de santé publique du Québec (INSPQ)
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Et puis,
évidemment, bonjour aussi, chers membres de
la commission. Mon nom est Pierre-Gerlier Forest. Je suis le
président-directeur général de l'Institut national de santé publique. Nous
sommes un organisme public qui est rattaché au portefeuille de la Santé et des
Services sociaux. Et, depuis
25 ans, nous sommes, au Québec, le principal centre de référence et
d'expertise en santé publique. Ça va sans dire, on est vraiment très honorés par votre invitation. Vous faites un
travail très important. J'ai été un parent moi aussi. Alors, nous sommes
vraiment très, très heureux de pouvoir y contribuer.
Comme vous l'avez
souligné, je suis accompagné de trois excellents collègues qui vont pouvoir
répondre à vos questions dans quelques minutes. À ma droite, donc, Dominique
Gagné, qui est la coordinatrice de l'équipe de l'institut qui s'intéresse à la
promotion de la sécurité et à la prévention de la violence. C'est une des
meilleures expertes au Québec en matière de
violence dans les sports. La Dre Johanne Laguë, à ma gauche, qui est un
médecin, comme vous l'avez mentionné, un médecin de santé publique, mais
c'est surtout une experte des risques psychosociaux et la façon dont ils
affectent les individus et les communautés. Donc, sa présence ici fait beaucoup
de sens compte tenu de votre mandat. Et finalement le Dr François Desbiens, qui
est le vice-président aux affaires scientifiques de l'institut, c'est lui aussi
un médecin spécialiste de santé publique, mais j'ai pensé à l'inviter à se
joindre à nous parce qu'il a une expérience
régionale tout à fait unique. C'est quelqu'un qui a travaillé à la fois en
milieu urbain, semi-urbain et rural, et
donc il a un très bon sens des ressources qui sont disponibles dans chacun de
ces environnements-là pour mettre en oeuvre des programmes ou des
politiques.
D'entrée de jeu,
l'INSPQ salue l'initiative de la commission. En santé publique, on sait que la
violence a des effets terribles, des effets terribles sur la santé physique et
psychique de ceux qui la subissent, et des effets, c'est probablement pour ça
qu'on s'y intéresse tant, qui vont au-delà du moment où ont été... ont été
perpétrés les gestes de violence, les gestes
d'intimidation, les gestes d'humiliation. Il y a des victimes qui vont garder
des traces toute leur vie de ces événements-là et qui vont transmettre
leurs blessures, leurs propres blessures à leurs proches et à leurs enfants.
S'il y a bien une leçon que nous avons toutes et tous gardée de l'histoire des
pensionnats, c'est bien celle-là, que les blessures se transmettent de
génération en génération.
• (11 h 20) •
Or, loin
d'être une fatalité, nous pensons que c'est possible de réduire l'ampleur du
phénomène de la violence et ses
conséquences à long terme. Agir en amont, miser sur des interventions dont
l'efficacité a été démontrée par l'expérience, par
l'observation, mais aussi par la science, ça devrait nous permettre de mettre
un terme au cycle de la violence. Et, si nous réussissons, je suis sûr que c'est ce que vous souhaitez, je pense qu'on
aura collectivement changé pour le mieux la vie de nombreux jeunes, de leur entourage, non seulement maintenant, mais
aussi pour demain. Donc, je vous remercie encore une fois de l'occasion qui nous est donnée de faire valoir une
perspective de santé publique aujourd'hui dans cette discussion.
Un des... un
des rôles essentiels de l'INSPQ, c'est d'informer la population sur son état de
santé, de bien-être, de parler des
problèmes en émergence et des déterminants de la santé humaine. Et, dès 2018,
on a été... on a été sollicités pour coordonner un grand rapport sur...
québécois sur la violence et la santé, qui donnait déjà un portrait précis et assez complet de la violence telle qu'elle est
vécue chez nous, au Québec, à différents moments de la vie et dans différents
milieux. Quand vous considérez l'ampleur du phénomène dans les sports, de ses
conséquences sur la santé physique et
mentale, comme je l'ai dit, du potentiel de revictimisation, de toute la
gestion des facteurs de risque que ça suppose, vous ne serez pas surpris
qu'il y avait déjà un chapitre entier du rapport de 2018 qui était consacré à
la violence en contexte sportif. Et les conclusions de cette époque-là sont
toujours valides, on ne doit pas avoir peur des mots des symptômes de choc post-traumatique : les
dépendances, les troubles alimentaires, l'anxiété, l'idéation suicidaire,
l'abandon de la pratique du sport. Les effets, comme je l'ai dit, de
la... de la violence en contexte sportif ne sont pas seulement immédiats, ils peuvent perdurer, compromettre la
santé, le développement des jeunes à plus long terme et, évidemment,
entraîner des effets sur d'autres sphères de leur vie.
Ce que nous voudrions faire, puis ce qu'on a
essayé de faire dans le mémoire que nous avons déposé, c'est de mettre en
lumière trois grands objectifs. Le premier de ces objectifs, c'est de montrer
que les manifestations de violence interpersonnelle en contexte sportif sont
très multiples, et donc qu'elles nécessitent un large éventail de mesures et
une approche concertée qui va impliquer toutes sortes d'acteurs. Étudier les
facteurs de risque de... qui sont liés à la violence en contexte sportif, c'est
complexe. Le tableau 1 dans le mémoire synthétise, là, d'une façon qu'on
pense très utile. Les manifestations de violence interpersonnelle se déclinent
sous toutes sortes de formes : la violence sexuelle, la violence
psychologique, la violence physique. Elles sont vécues dans différents
contextes. Les initiations, c'est seulement une partie du problème, un exemple
parmi d'autres. Elles peuvent être perpétrées par des personnes en position
d'autorité, mais aussi, comme on l'a vu, par les athlètes elles-mêmes ou
eux-mêmes, et même évidemment par des spectateurs.
Alors, quand vous considérez ce tableau, quand
vous considérez le phénomène dans toute son ampleur, vous comprenez aussi que
seul le déploiement d'une action concertée tous azimuts, qui va impliquer les
milieux de l'éducation, du sport et des loisirs, les municipalités, les
organisations privées puis toutes les autres organisations ou entités qui sont
engagées dans le milieu sportif, est susceptible de garantir que les
orientations soient non seulement cohérentes, mais aussi diffusées et surtout,
surtout appliquées. On pense aussi qu'il faut accorder une attention
particulière à la banalisation, à la normalisation de la violence, autant des
acteurs du système sportif que des médias et de la population en général.
Le deuxième
grand objectif de notre mémoire, c'est de montrer l'urgence d'accroître
l'imputabilité des acteurs clés. Disons-le sans détour, les organismes
et les fédérations sportives, tout comme les milieux académiques, sont appelés
à jouer un rôle essentiel pour assurer aux participantes et aux participants un
milieu sain et sécuritaire. Alors, l'INSPQ
reconnaît qu'il y a eu des progrès en la matière, des nombreuses initiatives
qui ont été prises par le gouvernement en
matière réglementaire, des efforts de sensibilisation et de formation qui ont
été menés par les... par les associations sportives, mais il faut
consolider ces mécanismes. Il faut consolider ces actions avec des systèmes de
reddition de comptes qui vont au-delà du traitement des plaintes et qui parlent
directement aux athlètes, qui leur permet, à eux, de comprendre ce qui se
passe, et de voir comment ils sont impliqués, et comment se défendre,
évidemment, lorsqu'ils sont menacés.
En troisième lieu, il faut des données. C'est
une demande répétée de la Santé publique, cette demande-là. On ne peut... on ne
peut rien faire, nous sommes impuissants, les gens de santé publique, si nous
n'avons pas accès à des données. Il faut documenter la problématique de la
violence en contexte sportif québécois. Ce n'est pas possible d'imaginer des
interventions, ce n'est pas possible d'évaluer des programmes si on n'a pas accès
à des données, si on n'est pas capable de
documenter ce qui se passe. Donc, l'INSPQ réitère l'importance de bien
documenter l'ampleur, les risques, les effets de la violence qui est
vécue en contexte sportif au Québec.
Il y a
actuellement une enquête sur le vécu des athlètes qui est donnée par l'Institut de la statistique du Québec. Ça
va nous donner assez rapidement des données essentielles sur la violence envers
les athlètes québécois de 14 à 30 ans,
mais je pense... et nous pensons qu'il faut, dès à présent, commencer à penser
à pérenniser cette enquête, à faire en
sorte qu'on fasse cet exercice-là sur une base régulière, de façon à ce qu'on
puisse suivre les effets du travail qu'on fait en ce moment ensemble et
qu'on puisse voir s'il y a effectivement des progrès. Ce serait aussi utile
d'avoir un registre qui compile les
informations qui émanent du mécanisme de traitement des plaintes, de façon à ce
qu'on ait cette information-là et
qu'on puisse là, encore une fois, se rendre compte des progrès ou, au contraire,
du fait que la situation n'avance pas.
En conclusion, j'espère que ces réflexions, qui,
comme vous l'avez vu dans le mémoire, c'est l'habitude de l'INSPQ, sont appuyées sur les connaissances
scientifiques disponibles, que ces considérations-là vous seront utiles. Et, bien entendu, il va nous faire plaisir de répondre
à vos questions. On vous remercie encore une fois de votre attention et,
évidemment, de l'invitation à participer aux travaux de la commission.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
infiniment pour votre exposé. Je voulais juste vous informer que la commission
n'a pas reçu le mémoire en question. Alors, si c'était possible pour vous de le
transmettre au secrétariat, je pense que les membres de la commission
apprécieraient grandement.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Absolument.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci. Nous allons donc débuter nos échanges.
Alors, je cède la parole du côté du gouvernement. Alors, qui se lance
pour... Oui, M. le député, allez-y.
M. Émond : Oui. Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci beaucoup pour votre présence à vous quatre, ce matin, c'est apprécié, pour votre
participation. Je suis convaincu que les collègues membres de l'opposition...
pas de l'opposition, mais de la commission, pardon, et de l'opposition vont
apprécier également votre passage. On va prendre connaissance de votre mémoire, bien entendu, dès qu'il sera rendu sur le
site Greffier de la commission, mais j'ai quand même quelques questions
pour vous, puis je vais passer rapidement la parole aux collègues.
Dans votre
introduction, vous avez parlé de l'importance des processus de plaintes, hein,
des systèmes de gestion et du
processus des plaintes. Est-ce que vous avez une opinion concernant le
processus actuel des plaintes dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec? Parce que, et je vous le répète, le
commissaire sortant, M. Courteau, le 22 février dernier, nous apprenait que le système de gestion
des plaintes à l'interne, les plaintes sont reçues directement, actuellement,
par la directrice des services aux joueurs
de la ligue. Alors, selon vous, est-ce que c'est un processus qui est
convenable et surtout suffisamment indépendant? Et je ne vous demande
pas, là, je vous assure, de faire le procès du passé, mais peut-être
d'aiguiller les nouveaux... le nouveau commissaire dans son rôle, qui aura à
développer, probablement, une gestion des
plaintes plus efficace ou plus indépendante afin que les choses dont nous avons
été témoins ne se reproduisent pas dans le futur.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Je vais demander d'abord à Dominique de répondre à
la partie plus technique de votre question puis je ferai... dire un mot
après.
Mme Gagné (Dominique) : Effectivement,
nous, ce qu'on suggère, c'est d'avoir un mécanisme le plus indépendant
possible, notamment pour favoriser le... pour... excusez moi, pour faire en
sorte que les personnes victimes puissent
être dans un milieu sécuritaire pour déposer leur plainte aussi. Parce que, des
fois, ça peut être difficile de dire : Je vais déposer une plainte,
alors que je la dépose directement à la personne qui est dans mon organisation.
Donc, on suggère évidemment un mécanisme le plus indépendant possible.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : L'autre critère qu'on a mentionné dans le mémoire,
que j'ai rappelé aujourd'hui, c'est aussi un critère de transparence de ces
mécanismes-là, de faire en sorte qu'il y ait un moyen de documenter les
plaintes. Parce que sinon, encore une fois, on ne pourra pas voir le progrès
auquel on aspire tous dans ce domaine.
M. Émond : Bon, tandis que vous
abordez le point de la transparence, je vous amène sur votre affirmation concernant les données que vous avez faite dans
votre introduction. Pour un organisme comme le vôtre, les données... les
données, c'est le nerf de la guerre, hein, en quelque sorte, là, vous pouvez
appuyer vos recommandations, vos recherches sur des données probantes. Et ce
que je crois comprendre, c'est que, là, vous déplorez un peu que vous n'avez
pas accès à l'ensemble des données du milieu sportif, entre autres qu'il soit
dans le milieu de l'éducation, parce qu'on a
quand même reçu les gens du RSEQ mais également des ligues privées. Donc, votre
souhait, c'est que... une plus grande transparence dans le processus des
plaintes, des résultats également, mais l'ensemble des données pour que vous
puissiez vous appuyer sur des données probantes, c'est bien ça?
• (11 h 30) •
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui.
Puis, Johanne, veux-tu commenter sur ça?
Mme Laguë
(Johanne) : Oui, effectivement, pour travailler, on a besoin
de bonnes données, et actuellement, pour la violence en contexte
sportif, c'est très peu documenté au Québec. On a accès à très peu de données,
il y a très peu d'enquêtes. Il y a une première enquête qui est en cours, c'est
la première, mais, si on veut voir les tendances, il faudra les répéter. Donc,
on... effectivement, on n'a pas un bon accès. Peut-être qu'il y a des données
qui existent auxquelles on n'a pas accès, mais des données... Ça prend aussi
des données populationnelles et des données des organisations pour voir un peu
le portrait d'ensemble puis pouvoir dégager, vraiment, des leçons à tirer de
tout ça. Alors, c'est sûr que l'accès aux
données, c'est un... Puis des données le plus possible comparables, ça, c'est
important aussi. Donc, ce serait
intéressant de voir à ce qu'il y ait une organisation qui chapeaute un peu les
recueils de données, là, si ça se fait dans différents contextes, pour
qu'on puisse obtenir des données comparables.
M. Émond : Pour qu'il y ait une
certaine standardisation des données que vous allez recevoir, que les
comparables soient...
Mme Laguë (Johanne) : Oui.
M. Émond : OK. J'espère que votre
appel sera entendu aujourd'hui. Je suis convaincu qu'il l'a été chez les
membres de la commission.
Dernière question pour moi, Mme la Présidente.
Ça m'a un peu... bien, pas surpris, mais, quand même, dans votre introduction,
vous avez parlé de la banalisation qui était présente non seulement dans le
milieu, mais également dans les médias.
Est-ce que vous pouvez m'en dire davantage? Parce que je pense que c'est un des
buts, hein, également, de la commission qu'on tient, entre autres, aujourd'hui, d'essayer de
mettre les projecteurs sur des pratiques complètement inacceptables et
que la banalisation, bien, soit enlevée, là, du processus.
Mme Gagné
(Dominique) : Oui. Au niveau de la banalisation, je vous dirais qu'il
y a un besoin de prendre conscience de c'est
quoi, la violence. Souvent, par exemple, quand on va parler de violence
conjugale ou d'intimidation, les gens ne savent pas trop à quoi on
réfère quand on parle de ça. Ça fait que, des fois, le fait qu'on comprend
moins, on nomme moins c'est quoi, les comportements qui sont des comportements
violents ou des gestes violents, ça peut contribuer
à la banalisation parce que, finalement, on ne se rend peut-être pas compte
qu'on est en train de poser des gestes qui sont appropriés ou qui sont
violents.
C'est sûr qu'à
travers les médias... On a des gens, on a travaillé, à l'institut, on a déjà
plusieurs outils qui visent à documenter les
effets, là, de la couverture médiatique puis de donner aussi des outils, des
manières de bien présenter, là, la
violence, pour justement éviter de banaliser. Par exemple, je vais vous donner
l'exemple, en violence conjugale, quand on couvre les cas d'homicides,
si on dit que la personne a tué son enfant par amour, bien, on envoie une image
que, finalement, tu sais, ça peut être justifié
par un geste d'amour. Ça fait qu'il faut vraiment faire attention dans la façon
dont c'est présenté, dont c'est nommé, puis prendre conscience vraiment de
qu'est-ce qu'on entend par violence, quelles sont les manifestations, quels
sont les types de violence.
M. Émond : Je
comprends très bien. Les mots ont de l'importance, hein, comme vous dites?
Mme Gagné
(Dominique) : Énormément.
M. Émond : Merci,
Mme la Présidente. Je cède la parole aux collègues.
La Présidente (Mme
Dionne) :
Oui. M. le député de Beauce-Sud.
M. Poulin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames,
messieurs, bonjour, bienvenue à la commission. Est-ce que l'Institut
national de santé publique a déjà rencontré la Ligue de hockey junior majeur du
Québec?
Mme Gagné
(Dominique) : Non.
M. Poulin : Est-ce que l'INESSS serait intéressé... l'institut
national serait intéressé à rencontrer la ligue de hockey?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui,
a priori. Vous savez, on rencontre beaucoup, beaucoup d'intervenants, on a des
discussions avec des gens, il y a des gens qui nous consultent tout le temps,
donc c'est tout à fait envisageable, oui.
M. Poulin : OK.
Parce que vous êtes une institution publique, et là il faut trouver une façon
que vos études, vos constats que vous venez nous partager se rendent sur le
terrain. Et là j'ai l'impression qu'il y a un maillon qui manque, là. Notre rôle, comme commission, sera
effectivement de faire des recommandations, de déposer un rapport. Vous
avez fait un travail qui est sérieux, qui est crédible, mais visiblement ça ne
se rend pas, là, sur le terrain. Alors, tu sais, vous n'avez pas rencontré la
ligue de hockey... Là, je prends ceux-là comme exemple, parce que, si est
réunis ici, aujourd'hui, c'est entre autres
parce que ça a émané de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, mais vous
ne les avez pas rencontrés. Est-ce que vous seriez à l'aise à ce que
notre commission émette une recommandation à ce que vous fassiez la tournée des
ligues?
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
Oui, absolument, ça ne pose aucun problème, ça fait partie du mandat
général de l'institut. Il faut comprendre que, comme organisation publique, on
répond aussi à des demandes et à des mandats qui nous sont donnés par le
ministre de la Santé, d'abord, mais aussi par d'autres ministères. Alors,
évidemment, le mandat qui nous serait donné par la commission nous obligerait
immédiatement.
M. Poulin : Parce
que ces ligues-là peuvent être, par moment, dépourvues d'outils pour pouvoir
faire le travail que vous, vous avez fait,
alors je pense que de les rencontrer sur une base régulière pour présenter vos
travaux, ça pourrait aider.
Maintenant,
vous êtes des professionnels de la santé, des médecins en santé publique, vous
avez une expertise importante. Est-ce que, selon vous, des initiations,
c'est bon pour des jeunes, ou un rite de passage? Je veux vous entendre
là-dessus.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : C'est ça, oui. Mes amis anthropologues vous
diraient que toutes les sociétés ont des rites d'initiation, mais ces rites
d'initiation là ne conduisent pas nécessairement à la violence, à
l'humiliation. Ils sont là pour que les jeunes puissent s'intégrer, pour
démontrer leur courage, leur valeur, leur appartenance à la communauté. En soi, ce n'est pas mauvais, en soi,
au contraire. Je connais peu de sociétés humaines qui ne pratiquent pas des initiations sous une forme ou
sous une autre. Mais là on ne parle pas de ça, on parle de bizutage, là, on parle de violence, on parle d'humiliation, on
parle de choses qui peuvent laisser des marques pendant toute votre vie.
C'est vraiment, je pense, deux... justement, deux choses assez différentes.
M. Poulin : Mais
c'est important, quand même, de vous entendre sur les rites de passage, sur le
bizutage, sur l'initiation. On est très conscients qu'il y a des initiations où
il y a eu trop de violence, et je pense que c'est unanime au Québec qu'on doit
condamner ça et l'interdire. Mais, du moment où on sait qu'au Québec, dans
différents sports, le député de Marquette en a parlé, il se tient encore des
rites de passage, des initiations... La ligue de hockey nous a dit hier, 2015‑2017,
il y en a eu. Puis savez-vous quoi? Je n'ai pas l'information, mais je pense
qu'à peu près à toutes les fins de semaine, au Québec, se tient ce genre de
rites de passage là. Vous êtes des médecins en santé publique. Si vous aviez
une recommandation à faire aux parlementaires québécois, au niveau de
l'encadrement des rites de passage ou des initiations... McGill sont venus ici,
ils ont défini clairement qu'est-ce qui était un rite de passage qui avait du
sens. Vous êtes des médecins en santé publique. Quelle recommandation
faites-vous aux parlementaires? Est-ce qu'on doit le faire comme McGill, bien
le définir, ou est-ce qu'on doit l'interdire, pur et simplement?
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Je pense que la position qu'on a prise dans le
mémoire, et je vais laisser Johanne compléter,
mais la position qu'on a prise dans le mémoire, c'est que, si on est incapable
de l'encadrer, il faut l'interdire. C'est ça, la position de l'institut,
à ce moment-ci. Johanne, veux-tu compléter?
Mme Laguë (Johanne) : Ça résume bien
notre position, effectivement, je pense qu'il faut absolument encadrer ces
initiations-là pour qu'elles soient exemptes de violence et qu'elles
contribuent au développement des jeunes dans
leur développement personnel, leur développement de vie, et, si on n'est pas
capable d'y arriver, bien, il vaut mieux les interdire.
M. Poulin : Et je conclurais, avant
de laisser la parole aux collègues : Les parents, là-dedans, on les situe
où? On les amène où? Parce qu'ils font partie de l'équation.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Oui,
eux aussi. On touche à cette question-là, là, l'importance d'associer les parents à ces questions-là, de les associer dans
les processus, par exemple, de formation, de les associer à des processus
qui conduisent à ce que les athlètes, leurs entraîneurs, les gens qui les
entourent mais aussi les familles s'engagent, elles aussi, dans un processus de
reconnaissance du problème que pose la violence dans les sports.
M. Poulin : Excellent.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Encore
une fois, comme je vous l'ai dit au départ, j'ai été parent, je vois tout à
fait le problème que ça pose et l'importance de nous associer directement à ces
questions-là.
M. Poulin : Je pense qu'une
rencontre avec Mario Cecchini, qui va prendre, le 8 mai, ses fonctions comme commissaire,
sera certainement très apprécié. Merci pour votre participation à nos travaux.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Je cède la parole au député de Côte-du-Sud.
M. Rivest : ...collègue qui pose une
excellente question. Parce que j'ai été moi-même assez présent dans le monde de
l'éducation, dans le monde des jeunes, puis effectivement ces rites de passage
là qui sont importants, non seulement dans le domaine sportif, mais aussi dans
le domaine culturel, dans différents domaines de notre société, ce que je comprends de vos affirmations, c'est de
dire : Si on n'est pas en mesure d'encadrer d'une façon efficace, vaut
mieux l'interdire. C'est ce qu'on comprend juste des... de vos discussions,
là. Merci.
Dans les informations que vous nous avez
transmises, vous parlez de violences interpersonnelles chez les jeunes en contexte sportif, puis tout à l'heure on
a parlé de différentes formes de violence. J'aimerais savoir, si on avait
une tarte, là, pouvez-vous un peu définir la
violence entre sportifs, la violence dans les estrades, les parents? Est-ce
qu'on est en mesure de faire un pourcentage, un petit peu, qui présente,
selon vous, là, sommairement, les types de violence qu'on peut rencontrer puis
leurs pourcentages à l'intérieur du monde sportif?
• (11 h 40) •
Mme Gagné (Dominique) : Bien, je
vais y aller, dans le fond, comme... je vais y aller avec les données qu'on a présentement de disponibles. Il y a une
étude qui a été réalisée au Québec en 2017 auprès de 1 055 jeunes
athlètes qui a fait ressortir qu'au cours de leur carrière sportive, là,
il y avait 80 % qui avaient au moins vécu une expérience de violence psychologique. Puis ça, ça ressort
dans les études, là, c'est... Tu sais, on met souvent l'emphase sur la violence
physique, mais la violence psychologique est davantage prévalente, selon les
données qu'on a disponibles. Dans la même étude, on avait à peu près
40 % qui avaient au moins vécu une forme de violence physique puis on
avait aussi la négligence en sport, à 35 %, puis, un 28 %, de la
violence sexuelle. Ce qu'on a aussi, souvent, comme... puis ce... vous pourrez
le voir quand vous allez prendre connaissance du mémoire, là...
M. Rivest : ...pouvez-vous nous donner
juste l'information sommaire de... les données viennent d'où puis combien de
personnes traitées environ?
Mme Gagné
(Dominique) : OK. On a aussi... Dans le fond, selon ce qui
ressortait, là, dans le Rapport québécois sur la violence et
la santé, on voit que la grande majorité de la violence vécue par les
athlètes est vécue entre pairs, beaucoup,
notamment lors des séances d'initiation. Puis, quand on tombe dans les athlètes
de haut niveau, là, c'est un peu plus au niveau de
l'entraînement, au niveau de l'entraîneur, au niveau de l'association. Donc,
là, on change un peu d'auteur ou de personne qui va perpétrer les gestes. Au
niveau des spectateurs, ça, je n'ai pas de données, là, malheureusement, à vous
présenter aujourd'hui, là, mais... C'est ça, c'est un peu ce que j'avais. Puis
il y a aussi, si ça peut vous intéresser... il y avait quelques données sur le
bizutage, aussi, qui disaient, là... On avait une étude qui a été réalisée
auprès de 388 athlètes universitaires canadiens...
La Présidente (Mme
Dionne) : Désolée de vous interrompre, il vous reste 25 secondes
pour conclure.
Mme Gagné
(Dominique) : OK. Bon, juste pour dire que ça, c'est quelque chose
aussi qui est documenté, et pas juste au hockey, dans d'autres types de sport,
chez les athlètes de haut niveau.
M. Rivest :
Merci. J'avais d'autres questions pour vous, M. Desbiens, pour savoir la
relation entre le rural puis l'urbain, mais on y reviendra en coulisse tout à
l'heure.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Je cède la parole maintenant au porte-parole de l'opposition officielle,
le député de Marquette.
M. Ciccone : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour à vous quatre, merci beaucoup d'être là.
C'est tellement important de vous avoir. Vous êtes des experts dans la
matière, de santé publique, c'est important de vous entendre.
Vous avez parlé,
d'entrée de jeu, que 2018... Parce que je suis allé voir sur votre site
Internet, malgré qu'on n'a pas eu votre mémoire, là, je suis allé voir sur
votre site Internet, puis vous vous êtes penchés sur cet aspect-là, notamment, la violence interpersonnelle chez les
jeunes en contexte sportif, intimidation en contexte sportif également.
Alors, j'ai fait mes devoirs, puis il y a des choses qui sont sorties, quand
même, intéressantes, puis je veux l'aborder avec vous.
Vous avez parlé en
2018. Pourquoi en 2018? Pourquoi pas avant? Pourquoi vous avez senti le besoin
de sortir des données, de donner votre expertise sur cet élément-là de...
justement, d'intimidation, de harcèlement dans le contexte sportif, en 2018
seulement, alors qu'on sait que ça date... ça ne date pas d'hier, ça là, là?
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : C'est essentiellement un problème de financement.
On a eu les mandats pour faire le travail à ce moment-là.
M. Ciccone : C'était
une question que j'avais, que je voulais vous poser plus tard, mais vous me
forcez à poser cette question-là. Justement, vous, votre mandat, je
comprends que c'est un mandat qui doit... qui est de soutenir le ministre et son ministère. Mais pouvez-vous être
proactifs ou vous devez attendre une mission qu'on doit vous donner, avant de, justement, déposer une expertise dans
n'importe quel domaine que ce soit? Juste pour comprendre un peu votre
travail, là.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : C'est une question complexe, mais, en gros, on peut
dire qu'une grande partie de notre travail, on répond à des mandats qui nous
sont donnés. On est financés en partie sur cette base-là. Mais, en même temps,
l'institut a été créé pour créer... pour constituer, au Québec, une espèce de
base d'expertise en santé publique. Donc, on
est aussi capables de mobiliser les ressources intellectuelles, scientifiques
de l'institut sur des problèmes quand ils surgissent, des problèmes
émergents. Vous le voyez souvent, là, dans l'actualité, sur les questions de
santé environnementale, en ce moment, parce que ça fait les nouvelles
continuellement. On n'a pas de mandat, mais on prépare les situations, on est
prêts, et, quand le problème arrive, que le ministère nous sollicite, bien, on
a des experts qui sont déjà capables
d'intervenir. Et c'est ce qui s'est passé dans ce domaine-là, c'est-à-dire
qu'on a une des directions de l'institut qui fait beaucoup, beaucoup de
travail en prévention et qui s'est intéressée à ce problème de la violence
depuis très longtemps.
M.
Ciccone : Qui vous a donné le mandat, en
2018?
Mme Gagné
(Dominique) : Le ministère de la Santé et des Services sociaux.
M. Ciccone : Merci
beaucoup. Je regardais, là, justement, on va traverser ce que j'ai lu sur votre
expertise, là, sous la rubrique Facteurs associés à un plus grand risque de
victimisation chez les jeunes, et vous avez, là, les facteurs
individuels, notamment sportifs qui évoluent dans des niveaux de compétition
plus élevés, vous parlez également spécialisation hâtive dans un seul sport.
Moi, je veux comprendre un peu cet élément-là, parce qu'aujourd'hui on est à l'ère d'essayer de comprendre, là, ce qui est
arrivé puis pourquoi que c'est présent, ça, dans le monde sportif. Je sais qu'on
parle beaucoup de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, mais je vais le
répéter, là, je refuse de penser que c'est
juste dans le hockey, là. Puis je refuse de penser que c'est juste avec les
garçons, aussi, parce qu'on a entendu des histoires également chez les
équipes féminines de plusieurs sports. Pourquoi la spécialisation hâtive dans
un seul sport fait en sorte qu'il va y avoir
plus d'intimidation, de harcèlement, justement, chez un sportif ou une équipe
sportive, là, notamment?
Mme Gagné
(Dominique) : Je n'ai pas la réponse directement pour cette
question-là, mais je vais vous retourner aussi... je vais faire un
boomerang, là. Vous avez vu aussi, sur la même page, il y a beaucoup de
facteurs de risque associés à l'organisation et aux normes
de la société, puis je vous dirais qu'il y a beaucoup le fait, aussi, de...
excusez-moi, dans les stratégies qui sont utilisées par le coach, dans la
culture de l'organisation, puis c'est sûr que, si l'athlète est toujours dans la même organisation, en jeune âge, où il y
a des comportements comme ça qui sont permis, ça peut expliquer le
facteur de risque associé au fait d'être toujours dans le même sport.
M. Ciccone :
OK. Parce ma question,
c'est : Pourquoi vous êtes arrivés avec des éléments très, très, très
précis? Parce que, tu sais, on peut déborder, là, sur la façon de développer
nos jeunes sportifs au Québec. Puis là vous parlez de spécialisation, ça, ça vient me toucher beaucoup
parce qu'on s'aperçoit que c'est une problématique, pour développer certains athlètes : on développe des
spécialistes au lieu de développer des athlètes, puis on voit que ça leur fait
du tort. Mais que vous l'ayez inclus dans votre expertise, je trouvais
ça pertinent de vous en parler.
Il y a
plusieurs efforts... vous avez dit qu'il y a eu plusieurs efforts, là, du côté
du gouvernement, mais comment est-ce qu'on voit, selon vous, des
changements puis des résultats concrets, présentement, ou une évolution? Ce
n'est pas parfait, là, parce qu'on est ici
aujourd'hui, là, mais avez-vous vu une évolution, une amélioration depuis,
justement, les efforts du gouvernement, que ce soit le gouvernement
actuel ou le gouvernement passé?
Mme Gagné
(Dominique) : Je vous dirais que oui, il y a des efforts qui ont
été mis en place. Malheureusement, on n'a pas les données pour comparer ce
qu'il y avait avant, ce qu'il y avait après. Sauf que, par exemple, depuis
2014, là, il y a Sport'Aide qui est
en place, que vous allez entendre, qui est là pour soutenir les athlètes, pour
faire la prévention, la promotion d'un milieu sécuritaire. Il y a
l'officier aux plaintes aussi, qui est un mécanisme plus indépendant, qui est là pour soutenir. Puis il y a quand même aussi
certaines organisations, là, qui ont... avec la politique d'intégrité, il y a
des codes de conduite, des choses, tu sais,
pour s'assurer que les entraîneurs, les parents, les athlètes sportifs aient
aussi un encadrement.
Donc, c'est sûr que ça va être intéressant de
pouvoir suivre ça avec les données qui vont être disponibles. Puis je vous
dirais qu'il faut s'assurer que ça soit pérenne, aussi, que les gens soient
informés, qu'on revoie le code de conduite fréquemment. Parce que, vous savez,
quand on veut modifier des comportements, des attitudes, ça peut être très
long, il faut le répéter, il faut le ramener souvent comme étant quelque chose
de très important pour contrecarrer les comportements violents.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : S'il y
a un progrès, de notre point de vue, c'est qu'il n'y a plus personne qui nous
demande pourquoi on s'occupe de ça. Ça, c'est un changement culturel important.
C'est-à-dire qu'il n'y a personne qui s'étonne de voir la Santé publique se
pencher sur ces dossiers-là, ce qui n'était certainement pas le cas il y a une
dizaine d'années.
M. Ciccone : Quand vous parlez de données... Puis, je veux dire, c'est
la base de votre expertise, il faut avoir des données, puis parfois ça prend
des années et des années avant d'être capable de sortir un diagnostic ou une
expertise, dans le cas qui nous intéresse aujourd'hui, là, justement. Puis je
suis content que vous fassiez la différence entre bizutage et initiation, ça,
c'est important de le faire. Mais les données... Ça fait que vous allez
chercher vos données chez Sport'Aide, vous allez... Là, il y a un nouvel
officier des plaintes qui est présent depuis 2020, alors là, ça va être une
façon également d'aller chercher des données. Mais la grosse problématique,
puis on l'a vu, là, c'est que, dans ce domaine-là sportif de haut niveau,
notamment, là, on n'est pas capable d'avoir de l'information. Puis vous avez
parlé aussi de dépôt de plainte, tu sais? Mais la culture, c'est que c'est un
passage obligé, ça devient une normalité. Puis c'est à l'âge de... mon âge, 50,
52 ans, qu'on dit : Maudit, qu'on était niaiseux. C'est là qu'on
réalise, c'est là qu'on réalise :
Franchement, c'est-tu vraiment nécessaire? Alors, comment vous allez faire pour
aller chercher les réelles données? Parce que les seules données que
vous pouvez avoir, c'est ceux de Sport'Aide puis ceux de l'officier aux
plaintes.
• (11 h 50) •
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Il y a
probablement trois réponses différentes à votre question. La première, c'est
qu'il faut continuer à documenter l'expérience des athlètes, c'est-à-dire ne
pas seulement attendre les plaintes, mais aussi continuer de façon proactive à
essayer de comprendre ce qui arrive dans leur vécu. Et c'est la raison pour
laquelle on soutient l'enquête actuelle puis on vous demande de recommander sa
pérennisation pour qu'on puisse continuer à comprendre ce qui se passe. Ça,
c'est essentiel.
La deuxième chose, c'est un registre des
plaintes, comme on l'a mentionné, qui soit centralisé, avec des données
standardisées, accessibles et transparentes. Ça, ça nous permet de voir... de
faire des mesures sur l'évolution du phénomène.
Mais la troisième chose que j'ai mentionnée dans
mon allocution, qu'on mentionne dans le mémoire, c'est la nécessité de créer un
espace où les athlètes puissent à la fois s'informer, interagir avec des gens
qui peuvent les aider à comprendre ce qui est en train de leur arriver puis les
conseiller quand ce qui leur arrive n'est pas normal. Et cet espace-là n'existe pas en ce moment, et il faut
qu'il existe à un niveau tel que vous puissiez sortir de votre discipline, hein?
Parce que, sinon, c'est très difficile. Si vous avez... Si vous êtes dans une
discipline de haut niveau, c'est très difficile de sortir de ce cercle-là. Mais
c'est possible d'imaginer des espaces comme ça qui soient accessibles.
M. Ciccone : Il me reste une minute et demie, je pense?
La Présidente (Mme Dionne) : Deux
minutes.
M. Ciccone : Deux
minutes? Bon, justement, encore dans votre expertise, sous la rubrique
Intimidation en contexte sportif, l'ampleur de l'intimidation chez les jeunes
en contexte sportif et, là, les facteurs de risque. Et là je vois ici les
victimes, puis là vous déterminez qui, potentiellement, peut être victime ou
les plus faciles à être victimes, c'est ce que je comprends, et là les auteurs.
Premier point : être un garçon. Pourquoi vous arrêtez à «être un garçon»?
Pourquoi que vous ne mettez pas également aussi... Parce qu'on l'a vu, là, je
ne sais pas si vous avez vu ça passer, là, le club de hockey Harvard, des
femmes, le basket-ball à McGill, il y avait des filles aussi dans ça. Ça fait
que, tu sais, je ne veux pas qu'on tire juste à un endroit, là. Si on veut
régler le problème, il faut regarder l'entièreté du problème. Puis ça arrive
partout, là. Pourquoi vous dites juste «être un garçon» aussi, dans les
auteurs?
Mme Laguë
(Johanne) : Bien, en fait, il faut... Vous êtes dans la section des
facteurs de risque. Pour identifier les facteurs de risque, ce qu'on regarde,
c'est la... la fréquence de survenue d'un problème et on regarde quels sont les
facteurs qui augmentent cette fréquence-là dans un groupe par rapport à
l'autre. Tout ce que le facteur de risque dit, c'est qu'être un garçon fait en
sorte que le risque augmente. Mais ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de
risque si vous n'êtes pas un garçon.
Donc, c'est toujours
comparativement à ce qu'on observe de façon générale dans une population de
sportifs, garçons et filles. Bien, le fait
d'être un garçon augmente le risque d'intimider, d'être un intimidateur, mais
ça ne veut pas dire qu'il n'y a pas de filles qui ne font pas... qui font de
l'intimidation. Donc, c'est la compréhension du facteur de risque.
Et nos, nos analyses
sont basées sur les études scientifiques qui sont publiées, qui sont faites
dans des universités dans... Puis, comme on
disait au début, le... une des limites qu'on a, c'est que le phénomène de la
violence en contexte sportif est très peu étudié et documenté. Ça fait
très peu d'années qu'on se penche sur cette question-là, donc on n'a pas beaucoup de données. Alors, on
travaille puis on bâtit l'expertise à partir du corpus de données qui nous
est accessible et qu'il faut enrichir,
absolument, puis bien présenter les choses. Parce que, vous avez raison, ce
n'est pas...
La Présidente (Mme
Dionne) : Désolée de vous interrompre, notre temps est écoulé. Merci
beaucoup.
M.
Ciccone : Merci. Non, c'est...
La Présidente (Mme Dionne) : Non,
ce n'est pas... Il n'y a pas de problème. Merci, merci. Je cède maintenant la
parole au porte-parole du deuxième groupe d'opposition, le député... M. le
député de Rosemont.
M. Marissal :
Oui. Merci d'être là. Vous avez trouvé ça court avec mon collègue? Bien,
imaginez, avec moi, ça va être 3 min 53 s, alors on va y aller
rondement, puis tant pis pour les salutations, on les fera après.
J'ai
l'impression que vous voulez vraiment sauter dans l'arène, mais qu'on ne vous
ouvre pas nécessairement... ou sur la glace, puis qu'on ne vous ouvre
pas nécessairement la possibilité de le faire.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : ...je pense qu'on a... on prend la place qui est la
nôtre. Puis c'est pour ça que, lorsqu'on a
reçu la convocation pour cette commission, on a sauté sur l'occasion
immédiatement, en disant : Oui, c'est une conversation qu'on veut
avoir avec les acteurs, on pense qu'on a une perspective et une contribution
particulière à faire, dans ce domaine-là, qui est différente de celles de
beaucoup des autres acteurs que vous avez invités.
M. Marissal :
OK. Vous avez dit, tout à
l'heure : Il faut plus de données, il faut les centraliser. Ça serait le
rôle de qui ou de quoi de les centraliser?
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Qu'est-ce que ce serait, ta solution, Dominique?
Mme Gagné
(Dominique) : Bien, il faut nécessairement que ça... Ça pourrait être
au niveau soit du... Par exemple, au niveau de la direction loisirs et sports
du ministère de l'Éducation. Mais il faut clairement que ce soit centralisé par
un organisme indépendant.
M. Marissal :
OK. La ministre Charest travaille sur une nouvelle politique, hein, en
prévention de violence, intimidation dans le sport. Bref, elle se penche
là-dessus. Puis les événements des dernières semaines ont précipité la chose
ou, en tout cas, ont rendu la chose plus nécessaire, là. De un, est-ce que vous
avez été invités à participer à ces travaux de la ministre Charest? De deux,
est-ce que, par exemple, la création, là, d'un réel poste de commissaire au traitement des plaintes et à l'intégrité dans le
sport, plus qu'un bureau qui n'est qu'un bureau, là — en
tout respect pour les gens qui travaillent là, ce n'est qu'un bureau — est-ce
que c'est une avenue valable, à vos yeux?
M.
Desbiens (François) : Dans les mécanismes
gouvernementaux, vous avez différentes possibilités pour responsabiliser soit
un ministère soit des commissaires ou des ombudsmen. On n'a pas fait de
réflexion précise sur la meilleure modalité, mais il est vrai qu'il faut qu'il
y ait une personne avec un statut, avec une responsabilité, de neutre, pour
pouvoir faire ces données-là. Une fois qu'elles seraient faites, nous, à
l'institut, ce qu'on veut, c'est pouvoir y accéder pour pouvoir compléter, pour
utiliser l'information qui aura été compilée, pour pouvoir continuer de suivre
adéquatement l'état de santé physique et mentale des jeunes et des jeunes
adultes qui font leur sport. Donc, on n'a pas finalisé notre réflexion sur le
modèle précis, à votre question.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...poser
des questions.
M. Marissal : Un
instant. Je comprends seulement, de votre hochement de tête à la négative, que
vous n'avez pas été consultés par la ministre Charest. Parce que les
scripteurs ne prennent pas les hochements de tête, dans nos transcripts, pour
s'assurer de...
Une voix : Excusez-moi.
On n'a pas été consultés.
M. Marissal :
Allez-y.
M. Forest
(Pierre-Gerlier) : Je voulais juste dire que l'important, c'est
d'avoir quelqu'un qui peut poser des questions et qui peut faire rapport. C'est
ça qui est important, quelle que soit la forme institutionnelle qu'on prend.
M. Marissal :
OK. Je vais rapidement, là. Dans votre rapport, dont vous avez parlé tout à
l'heure, là : «Smits et ses collaborateurs — ça, c'est un chercheur — dressent
également le portrait de certaines organisations sportives où l'accès aux
parents est restreint, voire interdit, où peu d'explications leur sont données
sur le cheminement de leur enfant et où les liens des jeunes avec l'extérieur
sont restreints. Ce genre de milieu favorise une certaine forme d'isolement
chez les jeunes sportifs à l'intérieur de la structure, les rendant ainsi plus
vulnérables.»
J'ai l'impression de
lire un peu un chapitre qui toucherait assez fortement la Ligue de hockey
junior majeur. Est-ce que vous avez étudié, justement, précisément cet
écosystème qui est très particulier avec des jeunes mineurs?
La Présidente (Mme
Dionne) : ...il vous reste à peu près 15 secondes.
Mme Gagné
(Dominique) : Non.
M. Marissal :
Merci.
La Présidente (Mme
Dionne) : ...contribution à ces travaux. J'informe aussi les membres de
la commission que le mémoire est effectivement déposé, donc, sur le site de
Greffier. Vous pourrez le consulter.
En ce qui me
concerne, j'ajourne les travaux pour accueillir notre deuxième groupe. Merci.
(Suspension de la séance à
11 h 58)
(Reprise à 12 h 04)
La Présidente (Mme
Dionne) :
Donc, la Commission de la culture et de l'éducation
reprend ses travaux.
Nous accueillons
maintenant Mme Danièle Sauvageau ici, en présence avec nous, conseillère,
conférencière en coaching exécutif et sportif, et également M. Camille
Thériault, ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick, accompagnés de
M. Éric Normandeau, de la firme Léger, en visioconférence. Donc, je vous
rappelle que vous avez 10 minutes pour
faire votre exposé. Suite à cela, nous procéderons aux échanges. Donc, je vous
invite à vous présenter à tour de rôle et ensuite nous exposer votre
présentation.
M. Camille Thériault et Mme Danièle Sauvageau
M.
Thériault (Camille) : ...mon nom est Camille Thériault. Je suis ancien
premier ministre du Nouveau-Brunswick et
ancien PDG des caisses populaires acadiennes, maintenant connues comme UNI
Coopération financière. Là, je suis censé être à la retraite, mais on
dirait que je me tiens quand même assez occupé. Et je dois vous dire que c'est
un plaisir pour nous d'être là aujourd'hui
pour partager avec vous le rapport qu'on avait été mandaté de faire par la
ligue. Si vous permettez, j'aimerais aussi vous mentionner le nom de Sheldon
Kennedy, qui était membre à part entière de notre
comité. Sheldon est un ancien champion de la coupe Memorial, un ancien joueur
de la Ligue nationale bien connu pour
avoir porté en avant-plan la cause des abus dans le sport. Malheureusement, il
ne peut pas être là aujourd'hui, mais je peux vous dire que c'est un
champion de la cause. Aussi avec nous, M. Normandeau. Éric, tu peux te
présenter?
M. Normandeau
(Éric) : Oui, bonjour. Éric Normandeau, je travaille chez Léger, dans
la division Affaires publiques. Donc, je
m'occupe de dossiers sociaux et politiques depuis bientôt une quinzaine
d'années. Et, il y a trois ans, on a été... la firme a été mandatée
pour réaliser un sondage pour connaître un peu l'ampleur des problèmes de
discrimination, intimidation et harcèlement auprès des joueurs, du personnel,
des gérants et du coach et des familles d'accueil
qui gravitent autour de la ligue. Donc, on a remis un rapport au comité
indépendant et présenté à la ligue il y a bientôt trois ans.
M. Thériault (Camille) : Merci, Éric. Aussi, on
va... Là, on va passer la parole à Danièle, qui est en place avec vous
autres. Donc, Danièle.
Mme Sauvageau
(Danièle) : Alors, bonjour, tout le monde. Merci de cette invitation à
venir vous présenter devant vous, en fait,
la résultante de la recherche de l'enquête et ainsi de vous faire part, là, du
rapport qui a été déposé à la Ligue canadienne de hockey.
Alors,
je me présente d'abord. Mon nom est Danièle Sauvageau. J'ai été 33 ans au
niveau des services policiers et, présentement, je dirige un centre de
haute performance en hockey. Je suis professeure associée au Département de
management des Hautes Études commerciales et ainsi... et aussi directrice
associée du Pôle sports de Montréal. Je collabore à différents projets visant,
justement, une démarche de professionnalisation continue, évolutive et adaptée
à la réalité de l'industrie sportive du Canada.
De par le passé, au cours des 20 dernières
années, j'ai eu l'occasion de prendre place et part à certaines recherches et révisions, notamment en 2002,
2004, la révision du système sportif canadien. J'ai été aussi coprésidente du comité
de la violence de la Ligue junior majeur du Québec en 2008, membre du groupe dont on présente
aujourd'hui, membre du comité
provincial qui a déposé le rapport du hockey il y a maintenant un an, soit
le 22 avril 2022, et, au cours des dernières années, soit entre
aujourd'hui et 2003, plusieurs mandats de révision d'enquête provenant
notamment du milieu sportif, différentes fédérations.
Aujourd'hui, on vous présente, effectivement, ce
que nous avons récolté. D'abord et avant tout, peut-être une petite chronologie de la raison pour laquelle nous
avons été impliqués à faire ce rapport le 26 juin 2020, une semaine...
soit après le début d'un recours collectif, la Ligue canadienne a annoncé
qu'ils nommeraient un comité d'examen indépendant
afin d'examiner l'efficacité des politiques et pratiques actuelles relatives au
bizutage, l'abus, le harcèlement, l'intimidation ainsi qu'aux
allégations que les joueurs ne se sentent pas à l'aise de signaler des
comportements qui enfreignent à ces politiques. Nous avons été nommés le
20 juillet 2020. Nous avons examiné les politiques, entendu les commissaires, les dirigeants de la ligue,
interviewé et entendu des présentations d'experts sur la violence, le bien-être
sportif, la traumatologie médicolégale, des
psychologues du sport, rencontré des agents, des joueurs, des anciens joueurs,
des directeurs généraux, entraîneurs, propriétaires, hauts dirigeants de
d'autres, aussi, associations et organisations sportives canadiennes et revu
des articles de recherche, examiné des plaintes aux cours et travaillé, tel que
vous l'avez vu, avec la société Léger.
• (12 h 10) •
Nous avons présenté en personne — en
fait, en visioconférence — un...
un PowerPoint, pardon, qui résumait le rapport qui fut présenté le
5 novembre 2020 aux dirigeants de la ligue et certains propriétaires. Le
rapport est composé de 13 constats, 13 recommandations préventives.
Et évidemment, si on résume très rapidement, parce que je pense que l'essence
et la conversation qu'on va avoir aujourd'hui... le comité a constaté qu'il
existe effectivement des comportements répréhensifs en dehors de la glace de la
ligue, que la culture systémique qui règne au sein de la ligue a fait en sorte
que des comportements sont devenus une norme culturelle, que la maltraitance
qui, en dehors du hockey, ne serait pas acceptable est désormais un
comportement ancré, qu'il est difficile de déclarer les déficiences et des
incidents. Il est extrêmement difficile pour les intervenants, incluant les
joueurs, de rapporter toute forme de maltraitance qui pourrait arriver. Et la
loi du silence a fait que... de ne pas savoir comment s'y prendre pour faire
une déclaration, le manque de confiance
envers les personnes recevant les déclarations, la peur, la loyauté et/ou une
conviction selon laquelle les conséquences ne seraient pas suffisantes.
Alors, nous avons... Évidemment, ce qui est
intéressant, c'est qu'un pourcentage important de répondants, notamment du sondage, a indiqué qu'il existe des
problèmes au sein de la ligue en matière d'intimidation, harcèlement, discrimination, que le problème du
harcèlement a été signalé comme étant répandu. Il est cependant intéressant
de remarquer que ce sont les membres du personnel, les joueurs et les familles
d'accueil qui ont davantage déclaré qu'il existe des problèmes, plus que les
entraîneurs et les directeurs généraux.
Par ailleurs, les programmes de formation sont
rares. De manière générale, il y a de la formation, voire plutôt de la sensibilisation, en début de saison et peu
de formation durant la saison. Au quotidien, dans les vestiaires, le sujet
de la maltraitance n'est pas abordé. Il en va de même pour les politiques,
procédures concernant la maltraitance des joueurs.
Au quotidien, les joueurs mettent leurs habiletés physiques en pratique afin de
les perfectionner, de les exécuter sans effort. Il devrait en être de même
pour leurs connaissances en matière de maltraitance. On se doit de solliciter
les joueurs, on se doit de solliciter leur réflexion, on se doit de les
impliquer évidemment aux solutions. On a aussi, en effet, observé que personne
en particulier n'est responsable de la sécurité des joueurs, et, lorsque
personne n'est responsable, certaines choses passent évidemment à travers les
mailles du filet.
Alors, le comportement répréhensible en dehors
de la glace, notamment l'intimidation, le harcèlement et la discrimination, existe. C'est difficile de le
rapporter. Par manque de formation, les choses ont de la difficulté à changer,
à évoluer. Et évidemment, aujourd'hui, ce qu'on souhaite, c'est de marquer le
temps, de garder le cap, c'est-à-dire avoir des mécanismes de suivi et faire en
sorte que l'ensemble des rapports qu'on vous a parlés ou celui-ci fasse en
sorte qu'on passe en mode solutions, qu'on garde le cap avec des mécanismes de
suivi et qu'on voit nettement un changement si... advenant le cas qu'on reviendrait
ici dans un an.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci infiniment, Mme Sauvageau. Nous allons
débuter les échanges. Je cède la parole, du côté du gouvernement, avec
M. le député de Côte-du-Sud.
M.
Rivest : Merci, Mme la Présidente. Merci à vous trois
d'être présents avec nous. Écoutez, dans la prémisse, si on veut, du document puis du rapport qui a été
amené, là, The impact is real... action is needed... Est-ce que vous
pouvez nous dire la prémisse de ce
rapport-là, votre implication, quelle a été votre implication dans
l'organisation du rapport? Je crois que vous y avez participé tous les
deux.
Mme
Sauvageau (Danièle) : En fait, M. Thériault était et est encore,
d'une certaine façon, le leader, un groupe de trois. Nous avions,
évidemment, un rôle très... très présent. Tel que mentionné, nous avons
rencontré plusieurs personnes, de novembre... en fait,
d'octobre jusqu'au temps de... pardon, jusqu'au temps qu'on dépose notre
rapport, en novembre 2020. Et donc,
au-delà des... que ce soit lors des rencontres, que ce soit lors des débats de
réflexion, on a eu, là, une série... et on pourra évidemment, là, vous déposer
l'ensemble des rencontres et même des PV qui a été... qui ont été écrits
lors de ces rencontres. Alors, à notre niveau, on avait un rôle très présent et
qui nous a amenés, évidemment, à déposer le rapport que vous avez devant vous
aujourd'hui.
M. Thériault (Camille) : Puis aussi,
si je peux... si je peux, Mme la Présidente, juste aussi pour vous dire qu'on a
été nommés par la ligue du hockey canadienne, mais on était nommés comme un
comité indépendant. Et je veux dire, à ce
moment ici, que la ligue nous a laissé faire notre travail. Et, lorsqu'on avait
besoin de certaines choses, par exemple, l'embauche de consultants, on
allait là juste pour une approbation de budget, mais, le travail qu'on a fait, on n'a pas été influencés, de part et
d'autre, par la Ligue canadienne, et je crois qu'on a quand même fait un
travail qui a pris en considération qu'est-ce qu'on avait vu, qu'est-ce
qu'on avait entendu, aussi l'implication de Léger. Et c'est de là qu'on a fait
une série de recommandations. Malheureusement, après qu'on a présenté ça à la
ligue le 5 novembre, on n'a pas beaucoup entendu parler de la ligue par la
suite.
M. Rivest : Je comprends. Selon
vous, là, avec ces études-là, ces analyses-là, ça remonte à quand, les
problématiques que vous parlez, systémiques, dans le domaine du hockey? Mais,
j'imagine, c'est peut-être similaire dans
d'autres sports. Mais, selon vous, là, si on avait à mettre une date puis un
point de bascule, peut-être, par la suite, suite au rapport, est-ce
qu'il y a un point de bascule qui nous a menés à empêcher l'ensemble des
initiations ou des problématiques dans le hockey?
M. Thériault (Camille) : Le mandat
qui nous avait...
Mme Sauvageau (Danièle) : En fait...
M. Thériault (Camille) : Ah!
Danièle, tu peux y aller.
Mme Sauvageau (Danièle) : Allez-y,
M. Thériault, allez-y.
M. Rivest : Un ou l'autre, mais pas
les deux en même temps.
M. Thériault (Camille) : Le mandat
qui nous avait été donné était pour faire un retour en arrière de
trois ans de la date où on avait été mandaté, c'est-à-dire pour les trois
années précédant 2020.
M. Rivest : Et vous étiez conscients
pour ces trois années avant 2020, là, évidemment, qu'il y avait des
problématiques, là?
M.
Thériault (Camille) : Bien, on a fait du travail, et ça nous a été
démontré avec l'aide de Léger, qu'il y avait définitivement encore
certains problèmes.
M. Rivest : Puis, selon vous, c'est
quoi qui a fait en sorte que cette problématique systémique là a perduré dans
le temps? Qui sont imputables de ça?
M. Thériault (Camille) : Danièle?
Mme Sauvageau (Danièle) : Oui, je
pensais que la question vous était posée, alors désolée. En fait, qui qui est imputable? En bout de piste, ce sont les...
d'une certaine façon, les dirigeants de la ligue. Comme un responsable de ligue,
on se doit, lorsqu'on est en charge d'un groupe, d'une équipe ou d'une ligue,
de s'assurer de la mise en place de facteurs et de programmes de formation, de
suivis, de mécanismes de suivi pour s'assurer que l'environnement est sain et
sécuritaire.
M.
Rivest : ...l'impression que vos 13 recommandations ou
vos 13 constats, particulièrement les recommandations, ont été
écoutés à venir jusqu'à maintenant?
Mme Sauvageau (Danièle) : En fait,
tel que mentionné par M. Thériault, entre le moment où nous avons déposé
notre rapport, avec une recommandation explicite à l'effet que ce rapport se
devait d'être distribué à travers la Ligue
canadienne le plus rapidement possible pour qu'ensemble on puisse, évidemment,
mettre de l'avant certaines recommandations... On avait d'ailleurs, lors
de la rencontre, déposé, là, une série d'actions qui pouvaient être mises en place rapidement, à peu de coûts, en fait, pour
que... justement, que la ligue puisse marquer le temps, c'est-à-dire qu'à partir d'aujourd'hui, avec ce qui est devant nous,
on se doit d'agir. Alors, ensuite, on a demandé à savoir quand est-ce
que le rapport était pour être public. Ce rapport a été rendu public en
janvier, soit plus de 14 mois après son dépôt.
M. Rivest : Merci. Afin de laisser
de la place, je vais vous poser une courte question à deux volets, mais vous
pouvez répondre d'une façon succincte. Vous avez travaillé beaucoup dans le
hockey féminin. Pouvez-vous me dire si ce type d'initiation, ou d'activité, de violence, ou etc., avait
lieu également dans le milieu féminin, ou vous constatez une différence marquée? Et est-ce qu'il y avait ce
type d'initiation où... dans le... par exemple, dans le centre de haute
performance en hockey pour lequel vous avez travaillé?
• (12 h 20) •
Mme Sauvageau (Danièle) : La réponse
est non au niveau du centre de hockey. C'est un centre qui a été mis en place
il y a trois ans. Est-ce qu'il y a des activités de rencontre, d'intégration
qui sont sécuritaires et qui sont saines? J'ose croire que oui. Le centre,
évidemment, là, tu sais, notre... vise à encadrer, d'abord et avant tout, nos olympiennes, nos joueuses de la prochaine
génération. Et les joueuses, l'été dernier, ont publié d'ailleurs une lettre à
l'effet que, suivant les situations,
les événements avec Hockey Canada... qu'elles demandaient d'avoir des réponses,
qu'elles... évidemment, qu'elles voulaient savoir qu'est-ce qui s'était
passé avec principalement l'équipe junior. Et la lettre ne mentionnait en
aucun... aucune situation, là, des demandes plus particulières à ce programme.
M. Rivest : Puis, en lien avec le
hockey féminin, vous ne voyez pas de...
Mme Sauvageau (Danièle) : À ma
connaissance... J'ai entendu, comme vous tous, les allégations qui... qui font, justement, les médias dans les... au cours
des derniers jours, des dernières semaines, de ce qui se passe à l'Université
de Harvard, mais, à notre connaissance, il n'y a pas eu de ce genre de ce qu'on
parle ici, dans le rapport, au niveau du hockey féminin.
M. Rivest : Merci, merci à vous
trois.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. le député de Beauce-Sud.
M. Poulin :
...
La Présidente (Mme Dionne) : Il nous
reste 10 minutes.
M. Poulin : Je vais y aller
rapidement. Bonjour à vous tous. Merci pour la participation à nos travaux. Je
vais faire du pouce sur ce que mon collègue le député de Côte-du-Sud vient de
dire. Mme Sauvageau, vous avez une grande expérience particulièrement
auprès d'athlètes féminines et de hockey féminin. Je pose peut-être la question
différemment. Est-ce que vous, dans votre carrière, vous avez été témoin
d'initiations dans des équipes féminines de sport au Québec ou entendu parler,
du moins, dans le domaine du sport?
Mme Sauvageau (Danièle) : J'ai, au
cours des dernières années, eu à faire certaines révisions et enquêtes qui avaient a trait à des comportements dits de
harcèlement et d'intimidation, pas nécessairement reliés à des initiations, cependant.
M. Poulin : D'accord.
Est-ce que c'est connu, qu'il y a des initiations ou des rites de passage dans
des équipes sportives féminines au Québec?
Mme Sauvageau (Danièle) : Oui, dans
le sens où... que ça soit des situations où les gens sont appelés à chanter, à
se déguiser, à faire des sketchs, comme on dit, donc davantage, là, d'activités
d'intégration, que ça soit le passage d'un chandail, par exemple, la joueuse
qui quitte une des équipes qui va remettre son numéro à la prochaine. Alors,
d'avoir ce genre de rite de passage, de faire en sorte que le flambeau est
passé, de développer ce qu'on appelle l'ADN des programmes, oui.
M. Poulin : Et c'est important, pour
vous, ces rites de passage là dans l'esprit sportif d'une équipe?
Mme Sauvageau (Danièle) : Oui, je
pense que ça fait partie de laisser un peu de soi à chacun de ces programmes et
de dire qu'on est encore là. On dit souvent que, lorsqu'on fait partie d'une
organisation sportive, ça va rester avec nous en souvenir jusqu'à, évidemment,
toute notre vie. Alors, c'est important, justement, de s'assurer que
l'encadrement est positif pour laisser, justement, un impact positif auprès des
athlètes.
M. Poulin : L'encadrement de ces
activités-là, ça devient difficile à un moment ou un autre. Une nouvelle équipe, par exemple, de basketball d'une
université où on va louer un chalet, une fin de semaine, entre filles, et il y
a du calage d'alcool, tu sais, qui arrive en cours de route, alors qu'au début
on devait simplement, justement, se passer le gilet ou se passer le flambeau
dans l'équipe d'une équipe à l'autre. Comment on fait pour baliser lorsque
c'est loin des regards, lorsque c'est justement... Parce que, moi, ce
que j'entends parler, c'est de la location de chalet, là. Souvent, on va passer une fin de semaine ensemble. Puis là
je dis des filles, mais ça peut être des garçons aussi. Puis là, après ça, ça
se met à déraper. Comment on fait pour encadrer ça lorsque c'est loin de nous,
ce n'est pas dans un lieu public, ce n'est pas dans un restaurant, ce n'est pas
dans un bar? Comment on fait pour baliser ça?
Mme
Sauvageau (Danièle) : Je pense que le rôle qu'on a comme adultes, c'est
justement de le baliser, de les... que ça soit de l'éducation, de
rappeler le rôle de l'athlète, de rappeler les valeurs de l'équipe, de
s'assurer de nommer des
comportements qui sont acceptables, de nommer des comportements qui ne le sont
pas, de rappeler aussi, avec tout ce qui
a été... il y a quelques années, l'arrivée des médias sociaux, qu'une photo
avec... dans un... justement, un chalet, pour reprendre vos termes, pourrait, justement, se... si c'était publié sur
les médias sociaux. Alors, de s'assurer de l'environnement dans lequel on est et de rappeler, justement,
que... via des présentations sensibilisation. Vous avez entendu hier le mot
«prévention primaire», de s'assurer que ces valeurs sont bien ancrées. C'est le
rôle qu'on a comme adultes.
Vous parlez, évidemment, potentiellement, là,
d'équipes sportives adultes. Ce qui touche, cependant, la ligue junior majeur du Québec ou la Ligue canadienne, on
parle aussi de mineurs. Alors, il faut s'assurer que les programmes de formation sont en lien aussi avec le public
cible avec lequel on travaille. Lorsqu'on a 16 ans, on n'est pas
exactement là où un 20 ans est, avec les mêmes motivations ou les mêmes
comportements. Alors, comme adultes et comme organisation, on se doit de
leader, on se doit de s'assurer que les bons comportements sont nommés, que les
comportements qui sont attendus dans ce genre... si ça arrive, et de leur
rappeler, justement, qu'ils sont en... qu'ils sont responsables aussi de leurs
actions.
M. Poulin : Je vous remercie
beaucoup. Je cède la parole à mes collègues. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : M. le
député de Richelieu. Il vous reste six minutes.
M. Émond : D'accord, parfait. Je
vous remercie pour votre participation aux travaux de la commission,
Mme Sauvageau, M. le premier ministre Thériault et M. Normandeau.
Je voudrais vous diriger vers quelques-unes des
recommandations de votre rapport dans le but, peut-être, d'aiguiller les
membres de la commission. Je ne voudrais pas parler avec vous du passé, mais
bien de l'avenir, de voir de quelle manière on peut améliorer les choses. Je
vous amène à votre recommandation n° 3 qui dit que la
Ligue canadienne de hockey doit établir un mécanisme indépendant pour gérer les
plaintes des joueurs et assurer une certaine intégrité du processus. Là,
j'aurais envie de faire une inversion et dire : Une intégrité certaine du
processus, mais tout ça pour dire que, comme
membre de la commission, on a tous été interpelés par le... pas la non-transparence,
mais, au sein de la Ligue de hockey junior majeur du Québec, l'indépendance du
processus d'évaluation des plaintes, puisque
c'est quelqu'un à l'interne qui joue un rôle dans ce sens, mais également
d'autres rôles. Alors, on peut peut-être douter un peu du mécanisme.
J'aimerais vous entendre. Vous souhaitez que la
Ligue canadienne de hockey mette en place un mécanisme indépendant.
Dites-nous-en davantage dans votre souhait. Qu'est-ce que vous avez recommandé
au juste? Et est-ce que tout ça a été appliqué par la LCH?
Mme Sauvageau (Danièle) : On ne...
Je ne suis pas en mesure aujourd'hui devant vous de vous dire si la ligue l'a
appliqué ou pas. Je sais ici, au Québec, que ça fait plusieurs années, en fait,
qu'on en parle. Mais vous l'avez dit, le
principe d'autorégulation amène à un manque d'indépendance flagrant. Et le
recours à une partie indépendante pour
la consultation, la déclaration des incidents et la réalisation des enquêtes
amène justement ce que... une dimension d'intégrité au processus qui est
important.
Il faut quand même que les plaintes se rendent.
Il faut quand même que les plaintes arrivent aux bonnes personnes au bon moment. Et c'est justement l'environnement de confiance
qu'on se doit à partir évidemment d'aujourd'hui. Et j'ose croire que les
gens qui nous écoutent, plusieurs personnes diront : On tente de le faire,
et ce, depuis plusieurs années. Bien, il faut continuer de faire en sorte que
nos joueurs, nos joueuses, que nos coachs, nos entraîneurs, nos intervenants se
sentent à l'aise, justement, de prendre le téléphone en temps réel et de
dire : Voici la situation qui nous arrive, comment tu peux me guider? Et
ça, ça a été pour nous une dimension très importante, que l'intervenant puisse justement, en temps réel,
téléphoner des gens, et, d'abord et avant tout, de pouvoir gérer la situation,
et ensuite, si besoin il avait, de la rapporter à une unité, évidemment,
indépendante.
M. Émond : D'accord, je comprends.
Donc, si votre comité a émis la recommandation de la pertinence d'établir un
mécanisme indépendant pour gérer les plaintes, comment ça se passait quand vous
avez fait le constat? Comment se déroule le processus de dépôt et d'évaluation
des plaintes présentement à la LCH?
Mme Sauvageau (Danièle) : À la LCH
et à la Ligue, évidemment, canadienne, parce que je vous rappelle que ce
rapport a été fait en lien avec... pour la Ligue canadienne, au niveau de la
ligue junior majeur du Québec, on a demandé
s'il y avait un registre, justement, ce qu'on appelle, là, de risques. On nous
a rapporté entre 15 et 17, aucune au niveau
de la ligue de l'Ontario et quelques-unes au niveau de la ligue de l'Ouest,
soit deux en 2018 et aucune en 2017. Alors, c'est très peu.
• (12 h 30) •
M. Émond : Bon, Mme Sauvageau...
Oui, puis c'est très peu. Je suis d'accord avec vous, je m'excuse de vous interrompre parce que le chronomètre ne joue
pas en ma faveur, mais là vous serez d'accord avec moi, là, dans les chiffres que vous évoquez, c'est très peu, zéro
dans la ligue de hockey en Ontario. Là, permettez-moi d'avoir un regard en
forme de point d'interrogation.
Mais je veux vous amener... parce que ça, c'est
les données qui vous ont été données. Vous dites, à la recommandation n° 11, qu'il serait important de recueillir des données des
statistiques à l'interne afin d'être en mesure d'améliorer ces processus et de
prévenir certaines problématiques. Bon, je ne peux pas être plus d'accord avec
la recommandation de votre comité, tout comme nos invités précédents, les
membres de la Santé publique, qui nous ont affirmé que les données sont le nerf de la guerre. Selon vous,
comment devrait... Qui devrait gérer la collusion ou la... non...
La Présidente (Mme
Dionne) : ...
M. Émond :
Qui devrait colliger l'ensemble de ces... — merci, Mme la Présidente — qui
devrait colliger l'ensemble de ces données-là, souhaitons-le, de manière la
plus indépendante possible, mais également avec une certaine forme de
standardisation? Parce qu'on ne veut pas répéter ce qui se passe quand on tente
de centraliser des données, hein, que tout ça arrive d'une façon un peu
pêle-mêle, puis des... comme le vôtre, où les gens de la santé publique,
ensuite, ne sont pas en mesure de faire des recommandations efficaces.
Mme Sauvageau
(Danièle) : Évidemment, lorsqu'on parle de données qui nous amènent à
pouvoir, d'abord et avant tout, avoir un portrait beaucoup plus clair de la
situation et, par la suite, pouvoir agir... Je pense que tout le monde, à travers le Canada, qui est impliqué dans
le sport, en grande majorité, veulent bien servir... Alors, d'être colligées par,
justement, un comité ou un groupe dit indépendant, ne serait-ce que le
téléphone, qui demande de l'information, à
savoir : Voici la situation dans laquelle je me retrouve, est-ce que c'est
de l'intimidation, est-ce que c'est du harcèlement, j'aurais peut être besoin d'une ressource, toutes
ces données sont importantes, justement, pour venir marquer le temps, pour
bien saisir le portrait et, ensuite, agir.
M. Thériault
(Camille) : Si je peux standardiser...
La Présidente (Mme
Dionne) : Je suis désolée. Je dois passer la parole à notre
porte-parole de l'opposition officielle, le député de Marquette.
M. Ciccone : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, M. le premier ministre. Bonjour,
Mme Sauvageau. Bonjour, M. Léger.
J'ai
lu avec intérêt le rapport qui... que j'ai sous les mains, The impact
is real... action is needed.
Honnêtement, je me trouve chanceux de
l'avoir sous la main. Vous avez eu le mandat d'avoir... de faire ce rapport-là,
d'enquêter sur la Ligue de hockey junior majeur du Québec, en juillet
2020, Mme Sauvageau, vous l'avez dit. Le rapport a été soumis en 2020, novembre 2020, 14 mois plus tard, on
l'a rendu public. Il a été rendu public seulement parce que le juge Perrell,
dans le recours collectif, a demandé de le déposer au tribunal. J'aimerais vous
entendre là-dessus. Comment vous vous êtes
sentis, à savoir que vous avez donné votre temps, vous avez travaillé fort,
vous êtes des gens sérieux, et qu'on cache ce rapport-là pendant
14 mois?
M. Thériault (Camille) : Juste une clarification,
M. le député. Le mandat qui nous avait été donné, ce n'était pas juste
pour regarder ce qui se passait au Québec, mais c'était un rapport pour la
Ligue canadienne.
M.
Ciccone : Non, Ligue canadienne, oui.
M. Thériault (Camille) : Donc, les trois ligues. On avait été dit, lors du
début du travail, que c'était définitivement l'intention de la ligue de rendre
ce rapport public, là, parce que, pour nous, ça, c'était très, très important.
C'est sûr, lorsqu'après la présentation, et même pendant la présentation qu'on
a faite devant la Ligue canadienne de hockey, on a été aussi un peu surpris par le manque d'intérêt. Aucune question ne
nous a été demandée lorsqu'on a fait la présentation. Il y a eu un commentaire qui est resté avec moi
pendant longtemps. Il y a un des propriétaires qui a dit, juste en bon
français, en bon acadien, en shakant la tête, il a dit : On a
beaucoup de travail à faire.
Et nous, notre rôle, c'était
non seulement d'identifier, mais de préparer un genre de plan d'action qui ne
pourrait pas nécessairement régler tous les problèmes qu'on avait identifiés du
jour au lendemain, mais, quand même, qui était un plan pour aller de l'avant.
Il fallait qu'on arrête, après toutes ces années-ci, de débattre si, oui ou non, il y a des problèmes de maltraitance dans le
hockey junior, et on en a. Léger nous l'a prouvé. Donc, il fallait passer
à l'action. Et, pour moi, la déception, pendant cette longue période, avant le
recours collectif, où est-ce qu'ils l'ont mis public, c'était la non-urgence de
la Ligue canadienne de montrer aux gens le travail qui avait été fait et des
pistes de solution pour leur donner un coup de main.
M.
Ciccone : Merci beaucoup de m'avoir
corrigé, M. Thériault. Effectivement, c'était la Ligue canadienne de
hockey. J'ai fait un petit lapsus. Maintenant, est-ce que, justement, quand
vous avez déposé ce rapport-là en novembre 2020, on vous a empêché d'en parler
médiatiquement, de ce rapport-là, publiquement?
M. Thériault
(Camille) : On avait signé, tous les trois, une entente de
confidentialité avec la ligue. Donc, c'était
à eux autres, à un moment donné, de le rendre... et nous, on avait dit qu'on
allait être d'accord avec ça lorsqu'on a signé l'entente pour faire le
travail parce qu'on croyait vraiment qu'ils allaient le rendre public.
M.
Ciccone : Quand la Ligue canadienne...
Quand le juge Perrell a ordonné de déposer ce rapport-là devant le tribunal, quand il y a eu le recours collectif,
la Ligue canadienne de hockey a commandé en vitesse un autre rapport à une firme d'avocats. La Ligue canadienne de hockey
a camouflé votre rapport, là, dans un onglet, là, dans le deuxième rapport. J'aimerais vous entendre, là.
Mme Sauvageau, on a travaillé ensemble sur le... dans la... sur le comité
antiviolence qui avait été appelé par la ministre
Courchesne à l'époque. Je connais votre diligence. Je sais de la façon que vous
travaillez. Je sais également comment vous avez à coeur le bien-être, la santé
et la sécurité des jeunes sportifs et sportives. D'avoir vu ça, d'avoir vu que
la Ligue canadienne a camouflé, a tenté d'améliorer, d'embellir son rapport,
j'aimerais vous entendre là-dessus, comment vous vous êtes sentie?
Mme Sauvageau (Danièle) : Très
déçue, déçue d'avoir été mandatée pour faire un travail sérieux, professionnel,
dans... avec la prémisse de déposer des recommandations préventives pour tenter
de faire partie justement de la solution. Nous avons trouvé ça très long,
14 mois, d'autant plus que je vous rappelle que c'était à la fin ou en
pleine pandémie. La ligue avait le temps de se pencher sur l'ensemble des
recommandations et de voir comment pouvoir avancer
ou ne serait-ce que de marquer le temps, comme je le mentionnais tantôt, et de
dire : Bon, bien, ce qu'on a mis en place il y a trois, quatre ou
cinq ans fonctionne plus ou moins ou au deçà de nos attentes.
Alors, lorsqu'on a su
qu'il y avait eu, justement, une demande d'un deuxième rapport qui a été,
justement, déposé, le bureau, notamment, de
M. Sheldon Kennedy a fait l'analyse de ce rapport pour s'apercevoir,
notamment, que les programmes, politiques et procédures sur lesquels
cette firme s'est penchée étaient des procédures, programmes et politiques
différents qu'on nous avait fournis.
Alors, dès le départ,
on se demandait vraiment pourquoi que ce rapport avait été demandé, d'autant
plus qu'aucune question ne nous avait été posée lors de la présentation et dans
les 13 mois suivants, en disant : Est-ce qu'on pourrait avoir des explications, des nuances? Est-ce qu'il y a des
choses qu'il faut peut-être prioriser, d'aller un petit peu plus loin...
Et on tenait énormément à présenter le rapport en personne, en fait, en
vidéoconférence, parce que la première demande avait été de simplement leur
acheminer notre rapport, et de ne pas pouvoir avoir la chance de l'expliquer.
Je ne sais pas si,
M. Thériault, vous aimeriez ajouter quelque chose?
M. Thériault
(Camille) : ...surprise puis déception, je crois que c'est les deux
mots qui me viennent à l'idée.
M. Ciccone : Merci beaucoup. Pouvez-vous juste confirmer l'information
que j'ai eue à l'effet que, suite, justement,
à la déposition du recours collectif, on vous a demandé, justement, de faire un
rapport, on vous a tous rejoint, cependant le mandat qui vous a été
donné par la ligue de hockey... la Ligue canadienne de hockey, était d'enquêter
sur le hockey junior, mais vous n'aviez pas le droit de poser des questions
relatives à des agressions sexuelles et physiques durant vos travaux. Est-ce
que j'ai raison?
M. Thériault
(Camille) : Absolument.
M. Ciccone : Bien, comment on veut régler une situation, quand on parle
d'harcèlement, d'intimidation, puis on sait que ça peut déborder, qu'on vous
donne un mandat, mais il y a des restrictions à l'effet que vous ne pouvez pas
poser toutes les questions pour avoir une image claire de la situation? Comment
est-ce qu'on peut faire un travail diligent quand on a des barrières à
respecter?
• (12 h 40) •
Mme Sauvageau
(Danièle) : En fait, c'est une des raisons pour lesquelles on a voulu
entendre plusieurs experts, qui sont venus nous dire que, lorsque... les
constats que vous avez devant vous, que ce soit en matière de harcèlement,
d'intimidation... peut amener, vous l'avez mentionné, à des débordements qui
peut, évidemment, là, s'échelonner sur... ce qu'on a entendu lors des dernières
semaines et des dernières années.
M. Ciccone : Croyez-vous que, si vous aviez eu l'opportunité de poser ce
genre de question là... que votre rapport aurait été plus... aurait été... je
ne dis pas qu'il n'est pas bon, votre rapport, il est excellent... qu'il aurait
été plus exhaustif puis il aurait été plus complet?
Mme Sauvageau
(Danièle) : Bien, il aurait répondu à des questions que vous posez
aujourd'hui.
M. Ciccone : Merci beaucoup. Là, je veux passer... Je suis un petit peu
fâché en ce moment. Ça fait que je ne sais
pas si vous le voyez, ça me déboussole, tout ça, ce que je viens d'entendre. On
va parler du constat du rapport, vous avez fait des constats en 2020,
premier constat : Hors glace... il existe, hors glace, des conduites...
des mauvaises conduites, du «bullying», du harcèlement et de la discrimination.
C'était votre première constatation. Pourquoi vous l'avez mise en première
constatation, parce que, selon vous, c'était ce qui était le plus important?
Mme Sauvageau
(Danièle) : Non, en fait, l'ensemble des constats et des
recommandations fait en sorte que la
prémisse même du mandat était de regarder ces... de s'assurer... Là, je vais le
reprendre exactement, c'est... le mandat se penchait sur... à savoir, justement,
s'il y avait du bizutage, de l'abus, du harcèlement, de l'intimidation ainsi
que de regarder les allégations que les joueurs ne se sentaient pas à l'aise de
signaler les comportements qui enfreignent ces politiques, alors de mettre en
premier que ça existe, que c'est présent, que c'est banalisé, qu'il y a une loi
du silence qui existe et que, par le manque de suivi, ces comportements sont
banalisés et ne changent pas.
M. Ciccone : Comment... Puis là je veux avoir votre opinion là-dessus. Comment
vous voulez que la loi du silence soit enrayée, parce qu'on doit régler une
problématique, quand, en haut de la pyramide, on vous soumet, vous, au silence?
Comment vous voulez que ça se règle?
Mme
Sauvageau (Danièle) : C'est une bonne question, monsieur.
M.
Ciccone : M. le premier ministre?
M. Thériault (Camille) : ...puis la loi du
silence, elle existe, mais, pour moi, ce qui est encore plus important,
aujourd'hui, il faut qu'on arrête de débattre l'enjeu si, oui ou non, il y a un
problème. Il y a des problèmes, et voici un plan d'action qu'on a
présenté dans le mandat qui nous était donné. Malheureusement, il n'allait
peut-être pas aussi loin qu'on aurait aimé d'aller, mais c'était le mandat,
quand même, qui nous avait été donné.
M. Ciccone : Deuxième
constatation : «Une culture systémique qui existe dans la Ligue canadienne
de hockey, qui conduit à un mauvais traitement, qui devient une normalité.» Je
l'ai dit à plusieurs reprises, là, on parle de la loi du silence, mais,
en même temps, quand on voit ce genre de comportement là, souvent, le joueur...
Quand on vieillit, on réalise ce qui s'est
produit dans le passé puis on dit : Ça n'a pas de bon sens, ce qu'on a
fait, puis qu'est-ce qu'on a subi également, mais, justement, trouvez-vous
ça grave que ce soit en haut de la loi du silence, ça devienne normal, puis les joueurs n'en parlent même pas parce qu'ils
pensent que c'est normal, puis dans... Puis on parle de hockey, ici, là, mais
c'est dans tous sports confondus, là, je tiens à le rappeler encore une fois.
Mme Sauvageau
(Danièle) : En fait, c'est par les programmes dits de formation
primaire qui va faire en sorte que les
comportements vont être nommés, qu'est-ce qui est acceptable, qu'est-ce qui ne
l'est pas, et, maintenant, lorsque c'est inacceptable, on se doit
justement d'en parler, de réfléchir et de le changer, que ça appartient à
chacun des intervenants qui est impliqué de près ou de loin au sport. Ici,
notamment, évidemment, on parle de la ligue junior majeur du Québec, mais, vous
avez raison, il y a aussi des études, là... Kirk, en 2019, qui avait réalisé
des études sur la maltraitance auprès
d'athlètes d'équipes nationales et arrive à peu près avec les mêmes
statistiques que le sondage Léger est arrivé.
Donc,
c'est important de s'assurer, là, que... comme je le mentionnais tantôt, qu'on
marque le temps et qu'on garde le
cap. Si on veut garder le cap... Vous le savez, monsieur, un des symboles qui
est le plus respecté dans une chambre de hockey, c'est de ne pas marcher sur le logo dans le vestiaire. Est-ce
qu'on peut faire la même chose pour les comportements qui sont
inacceptables? Alors, est-ce qu'on peut doter nos joueurs, nos joueuses, nos
entraîneurs, nos intervenants... de se
rappeler les comportements qui sont acceptables et, lorsque ça devient
inacceptable, de les encourager justement à vouloir les faire changer?
M.
Ciccone : 10e constatation :
«Les programmes d'éducation et de sensibilisation existants sont incohérents entre les ligues et les parties prenantes. Ils ne
sont pas assez fréquents et ne sont pas conformes aux politiques et procédures
d'inconduite hors glace.» Un, je veux vous
entendre là-dessus. Puis, deuxièmement, là, ma deuxième question, ce n'est pas
de... un concours, qui est meilleur que l'autre, là, mais avez-vous ressenti
une plus grande problématique dans une ligue plus qu'une autre?
Mme Sauvageau
(Danièle) : On n'a pas fait l'exercice de comparer. On a cependant
comptabilisé le nombre de programmes, de
politiques et de procédures, pour arriver à une conclusion telle que vous
l'avez mentionnée, que c'est difficile de s'y retrouver. Je vous rappelle que
c'est une ligue qui touche les 16-20 ans. Alors, de pouvoir comprendre,
même pour les intervenants, l'ensemble des politiques, procédures et programmes
de formation, c'est à s'y perdre. On souhaitait
même... On a parlé de page blanche à un moment donné, de dire : On va
partir d'une page blanche et est-ce que...
qu'est-ce qu'on doit garder, qu'est-ce qu'on doit bonifier pour essayer de simplifier...
pour s'assurer que, dans le doute, on sait où aller, on sait qui fait
quoi, comment on le fait et c'est quoi, la marche à suivre?
M.
Ciccone : Vous avez dit 16-20 ans,
mais je veux mentionner qu'il y a des 15 ans parfois qui rentrent dans la
ligue, qui vont avoir 16 ans juste au mois de décembre. Alors, il y a des
15 ans également qui vont fouler les patinoires de la Ligue canadienne de
hockey.
Vous avez parlé de
loyauté un peu plus tôt dans votre exposé. Quand on parle de loyauté... Vous
savez, vous avez été une championne
olympique, Mme Sauvageau, quand on parle de loyauté, c'est ce qui est dans
le vestiaire, ça reste dans le vestiaire. On se bat pour le logo. On se
bat pour notre pays. On se bat pour notre équipe, notre province. Comment les joueurs vont aller porter plainte
quand on leur met ça dans la tête, à partir de quatre, cinq, six ans, sept ans,
dans tous les sports confondus, que la chose la plus importante, ce n'est pas
l'individu, dans une équipe, c'est le logo, il faut protéger le logo à
tout prix? Comment est-ce qu'on va faire pour délier les langues?
Mme Sauvageau
(Danièle) : En fait, ce n'est pas de protéger le logo à tout prix, et
ce qui se passe, dans une chambre, de façon positive, doit y rester, mais,
lorsqu'on parle de complicité, lorsqu'on parle d'abus, lorsqu'on parle d'actes
quasi criminels, en l'occurrence, on se doit de continuer à s'assurer que les
programmes d'éducation font en sorte que les gens ont développé la confiance de
dire : Ça, c'est non, et que les intervenants autour doivent avoir leur
radar très aiguisé pour pouvoir agir rapidement, en temps réel, et, en
l'occurrence, de rapporter si le changement n'est pas adopté.
M.
Ciccone : Il me reste 30 secondes,
Mme Sauvageau. Croyez-vous ça, vous, au code du vestiaire?
Mme
Sauvageau (Danièle) : Le code du vestiaire, ça veut dire que ça reste
dans le vestiaire. Je pense que ça prend un code de vie qui dépasse justement
le vestiaire pour faire en sorte que les comportements qui vont être dans le
vestiaire vont être aussi sur la patinoire et à l'extérieur.
M.
Ciccone : Merci beaucoup à vous trois.
Merci.
La
Présidente (Mme Dionne) :
Merci. Je cède maintenant la parole au porte-parole
du deuxième groupe d'opposition, le député de Rosemont.
M. Marissal :
Oui, merci, Mme la Présidente.
Là, juste pour préciser... Bonjour à vous trois. Je saute les salutations.
Je n'ai pas de temps, moi, ici.
Alors, juste pour
préciser puis que ce soit dans le transcript, là, la Ligue canadienne de
hockey, c'est la ligue qui chapeaute les trois ligues juniors du pays, donc
l'Ouest canadien, l'Ontario et la Ligue de hockey junior majeur, juste pour que
ce soit bien dit, là, qu'on ne parle pas de quelque chose qui s'est passé à
Kamloops, là, quelque part perdu, là. Ça
s'est passé partout, et je présume qu'il y avait, parmi les gens qui ne vous
ont pas posé de question à votre rapport, des représentants de la Ligue
de hockey junior majeur puisqu'ils sont représentés là.
Mme Sauvageau
(Danièle) : Effectivement, oui.
M. Marissal :
Merci de la réponse rapide. Vous dites que le carré de sable dans lequel on
vous a permis de jouer était restreint. Vous n'aviez pas l'autorisation de
poser des questions, notamment sur les inconduites sexuelles. Est-ce que vous
aviez des questions à poser là-dessus?
Mme Sauvageau
(Danièle) : En fait, le mandat qui a été, effectivement, accepté par
notre comité était le carré de sable que
vous avez mentionné. Alors, on est... on s'est maintenus à l'intérieur du mandat
qu'on nous avait donné.
• (12 h 50) •
M. Marissal :
On regarde la chronologie. Vous commencez en juillet 2020. L'histoire, dont
on connaît maintenant certains détails, là,
avec le hockey junior, touchant certains joueurs juniors, ça s'est passé en
2018. Je parle d'un viol collectif.
Il y a eu d'autres histoires depuis qui ont couru. Est-ce que vous aviez
vent... ma question, c'est ça, est-ce que vous aviez vent d'inconduites
qui allaient plus... plus loin que les initiations ou que le code de vestiaire?
Est-ce que vous auriez eu du matériel à
fouiller là-dessus? Parce que M. Thériault disait tantôt : Ça nous a
fortement déçus de ne pas pouvoir aller plus loin, mais c'était le
mandat qu'on avait. Auriez-vous souhaité aller plus loin?
Mme Sauvageau
(Danièle) : Oui.
M. Marissal :
Aviez-vous des raisons de croire que vous deviez aller plus loin?
Mme Sauvageau
(Danièle) : En fait, d'avoir des allégations, d'entendre des choses,
certaines rumeurs, d'avoir, évidemment, des gens qui nous ont parlé... On a
parlé quand même à plusieurs personnes, et le sondage, là, rejoint 660 ou tout
près de 700 personnes. Alors, on avait quand même des indications qui nous
auraient porté sur des pistes qui... qu'on
aurait évidemment pu aller, mais, à
l'intérieur du mandat dans lequel on
s'est retrouvés, on a été évidemment alertes. On a travaillé les
questions. On a travaillé... On a même aussi déposé l'ensemble des questions
auprès d'un avocat avec lequel on travaillait pour s'assurer qu'on demeurait à
l'intérieur de notre mandat.
M. Marissal :
OK, vous aviez les mains quand même un peu attachées, là?
Mme Sauvageau
(Danièle) : On devait... Évidemment, la ligue nous avait demandé de
voir les questions au préalable, ce qu'on a
refusé. M. Thériault, tantôt, vous a mentionné qu'on se devait de garder
le caractère indépendant de notre
comité. Alors, c'est nous-mêmes qui avons choisi l'avocat pour s'assurer qu'on
restait à l'intérieur de notre mandat.
M. Marissal :
Ne prenez pas mal ma question, il faut que je la pose, là : Pourquoi
avoir accepté ce mandat-là dans ces conditions-là?
Mme Sauvageau (Danièle) : Parce qu'on voulait...
Évidemment, lorsque vous avez devant vous trois personnes qui est
responsables, professionnelles, passionnées de servir le sport... M. Sheldon
Kennedy, je vous le rappelle, était absent. On se
devait... On l'a pris pour vouloir, évidemment, servir avec tout notre
professionnalisme qu'on nous reconnait, et, avec les recommandations... les constats, d'abord, et les recommandations
qu'on a déposés, on a la forte conviction que ce rapport va aider
l'environnement positif qu'on se doit de créer pour nos jeunes.
M. Marissal :
M. Thériault, j'aimerais vous entendre sur la même question, s'il vous
plaît.
M. Thériault
(Camille) : C'est pas mal la même chose. On connaissait bien le mandat
qui nous avait été donné et on a fait un
travail sérieux, avec des constats et des recommandations qu'on espère bien
pourront être acceptés, et qui va donner une lueur d'espoir pour régler
certains des problèmes qui existent présentement dans le hockey junior au
Canada.
M. Marissal : OK,
mais je crois comprendre, sans vous mettre des mots dans la bouche, que vous
avez quand même vécu quelques frustrations avant, pendant et après le rapport?
M. Thériault (Camille) : Vous me
mettez des mots dans la bouche, mais, oui, c'est ça.
M. Marissal : Mais ce sont les bons
mots?
M. Thériault (Camille) : Oui.
M. Marissal : Bon, vous ne serez pas
dans le club des mal cités, c'est déjà ça de pris. Pour un ancien journaliste,
c'est assez important de ma part.
Par ailleurs,
M. Kennedy disait récemment, dans une entrevue, qu'il avait confiance de
voir la ligue, finalement, mettre de l'avant, là, vos recommandations,
tout ça, mais il précisait : C'est fait grâce à la pression. J'ose croire,
avec une certaine modestie ou une modestie
certaine, qu'on fait de la pression ici aussi, mais les médias aussi font
beaucoup de travail là-dessus, et on les remercie, d'ailleurs. Peut-être
qu'il y a un éveil qui se fait. Êtes vous d'accord avec M. Kennedy quand il dit que, s'il n'y avait pas eu cette
pression-là, probablement que votre rapport et les recommandations
n'auraient pas cheminé, en tout cas certainement pas aussi vite?
Mme
Sauvageau (Danièle) : Une chose est certaine, c'est que ça a pris
14 mois, et vous connaissez les raisons pour lesquelles le rapport
a été rendu public.
M. Marissal : Mme Sauvageau, je
ne veux pas vous mettre sur le «hot seat», mais je vous ai entendu décrire des
matchs de hockey assez souvent. Je sais que vous êtes en verve, vous avez le
verbe haut, vous ne manquez pas de mots,
d'habitude. Là, depuis tout à l'heure, je vous vois lire vos notes, vous êtes
très prudente, puis c'est correct, là, je préfère ça qu'un cowboy, là,
mais c'est compliqué de parler de ça? Vous sentez encore les balises ou...
Mme
Sauvageau (Danièle) : Non, pas du tout. Je regarde mes notes pour m'assurer,
là... surtout lorsqu'arrive des chiffres, il y a plusieurs chiffres qui sont
galvaudés. Alors, lorsque j'ai repris mes notes, c'était davantage pour
aller chercher les bons chiffres. Et, lorsqu'on m'amenait sur des
recommandations, bien, ça me permettait évidemment de vous entendre et de les
avoir, là... non, c'est de développer... Monsieur, j'ai été... Nous avons...
Comme M. Thériault l'a mentionné, on se doit, ensemble, d'aller beaucoup
plus loin pour créer des environnements qui sont sains et sécuritaires. J'aime
le hockey. J'aime le sport. Je suis dans les arénas quasi à tous les jours.
J'ai beaucoup... J'ai même utilisé des
programmes sportifs pour rejoindre des jeunes lorsque j'étais au sein du Service de police de la ville de Montréal... pour rejoindre des jeunes dans des quartiers plus défavorisés. Alors,
je crois au pouvoir positif du sport, et on se doit, ensemble, justement,
de marquer le temps.
La Présidente (Mme Dionne) : Je dois
malheureusement vous interrompre, désolée, notre temps est écoulé. Merci
infiniment pour votre...
M. Marissal : Merci à vous trois.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
infiniment pour votre contribution à ces travaux.
Donc, je suspends la commission jusqu'à
16 h 05. Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 56)
(Reprise à 16 h 05)
La
Présidente (Mme Dionne) :
Bonjour à tous. La Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux.
Donc, nous poursuivons aujourd'hui les
consultations particulières et les auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative portant sur les révélations de
violence lors des initiations dans le milieu du hockey junior et la possible
situation dans d'autres sports.
Cet après-midi, nous entendrons les organismes
suivants : M. Dany Bernard, docteur en psychologie, en psychologie du sport, l'Officier des plaintes de la protection de l'intégrité dans
le sport, et Me Félix-Antoine Michaud, avocat associé chez
Triviüm, spécialiste en droit du travail.
Donc, je souhaite la bienvenue à M. Dany
Bernard. Donc, M. Bernard, vous avez 10 minutes pour vous présenter,
exposer aussi votre vision. Donc, suite à cela, on poursuivra les échanges et
les consultations. Donc, vous pouvez commencer, et je vous invite à vous
présenter, et à nous faire votre exposé par la suite.
M.
Dany Bernard
M. Bernard (Dany) :
Alors, merci. Mmes, MM. les
députés, merci pour l'invitation. Par cette présentation, j'essaierai
humblement d'amener des pistes d'explication aux comportements lors des
initiations dans le milieu du hockey sur glace, tout ça
afin de mieux cibler des futures stratégies et pistes d'intervention pour le
bien des athlètes et le bien du sport.
Donc, d'entrée de jeu, ce qui arrive au sport
nous fait mal, parce qu'on a une vision un peu romantique du sport, hein, la
vision britannique du XVIIIe et du XIXe siècle, qui disait que, si on fait
du sport, on va développer un bon citoyen, on va développer un administrateur
honnête, tout ça. Mais, fondamentalement, plus le piédestal est haut, plus on
tombe de haut. Donc, le sport n'est ni bon ni mauvais, il est neutre. Il peut
former ou déformer, il peut construire ou détruire, il peut éduquer ou abrutir,
tout dépend de l'utilisation qu'on va en faire. Et la pièce maîtresse de
l'échiquier sportif québécois, c'est l'entraîneur, et c'est le personnel
d'encadrement. Ça, c'est important à retenir, c'est ce qui va faire que
l'expérience d'un enfant, d'un athlète va être positive ou négative.
Ce qui va
être important aussi, c'est d'identifier... Et ça, je veux être clair
là-dessus, c'est que le hockey sur glace est solidement visé
dernièrement, il n'est pas le seul sport qui est... qui pourrait être visé par
de tels agissements, il n'est pas le seul. Par contre, on a une responsabilité
à l'égard de ce sport-là. C'est une création du Québec, ça a été créé, inventé
à Montréal, et c'est un legs québécois à la planète mondiale... à la culture
mondiale du sport, donc on a une responsabilité de le protéger, de le
développer et de le promouvoir. C'est un sport extrêmement difficile à jouer aussi. C'est un des seuls sports avec deux
extensions, hein, les patins, parce que ce n'est pas un moyen de transport
normal, et également, le bâton, parce
qu'on ne contrôle pas l'objet par la main. Donc, un sport fantastique et c'est
notre devoir, comme Québécois, d'en faire... de le promouvoir puis d'en faire
un sport qui peut faire rejaillir le Québec sur... au niveau mondial.
Donc, ça, pour moi, c'est fondamental.
Par contre, il n'est pas parfait. Il y a une
culture... une sous-culture en hockey sur glace. Ça, il faut l'adresser. Le
hockey sur glace possède ses propres façons de faire. Les normes formelles et
informelles qui s'y trouvent contribueraient à créer un environnement où les
joueurs et entraîneurs sont en mesure d'interpréter et de prévoir des actes.
Nous sommes face à une sous-culture occupationnelle de la violence. Cette
sous-culture limiterait les dires et les
actions des joueurs et des entraîneurs. Dans notre cas, c'est important, cette
phrase-là : limiter les dires des joueurs par rapport à ce qui se
passe chez eux. Il serait impensable de s'élever contre cette façon de faire, à
moins d'en payer le prix, d'être mis sur la piste d'évitement, la voie
d'évitement.
L'intégration des normes de la sous-culture est
encouragée et renforcée, et leur intégration complète favoriserait la mobilité
sociale. C'est un autre point important. Dans ce qu'on vit présentement, la
mobilité sociale d'aller le plus loin possible, soit la grande ligue, la Ligue
nationale de hockey, donc, les comportements font en sorte qu'on se censure de
façon à ne pas perdre notre idéal, notre rêve, qui est d'atteindre la Ligue
nationale de hockey. Donc, l'intégration des
normes de la sous-culture est encouragée et renforcée, je l'ai dit. Les joueurs
et les entraîneurs qui vivent le
hockey de compétition depuis suffisamment longtemps ont intégré ces règles et
les normes de la sous-culture afin de ne pas être éliminés par
celles-ci. Ainsi, nos athlètes sont socialisés à son idéologie et son style de
vie par un vaste réseau de récompenses et de sanctions sociales, que les
membres se fournissent entre eux dans leurs activités quotidiennes.
De cette sous-culture ressortent des valeurs importantes,
puis il y a un noyau dur de valeurs. Premièrement, l'effort, l'effort. Pour eux autres, difficile de ne pas valoriser
l'effort, parce qu'il nous permet d'aller... de remporter la victoire. Le travail d'équipe également, cette
synergie-là qui nous permet, encore une fois, d'aller chercher la victoire, et
ça fait deux fois que je le dis. La propriété émergente du sport, selon la
définition de Donald Guay, c'est vraiment la victoire. Elle n'est ni
mauvaise ni bonne. Souvent, on voit la compétition comme étant quelque chose
d'extrêmement mauvais à la base. Ce n'est pas mauvais à la base, c'est une
propriété émergente du sport.
• (16 h 10) •
Donc, dans ces valeurs-là, le travail d'équipe,
on va avoir une certaine discipline, hein, le respect de certaines conventions sociales. C'est un peu paradoxal à ce
qu'on a vécu, à ce que... aux comportements qui nous ont été rapportés. Respect des règles de performance, hein, c'est
important. Les habitudes de vie versus la victoire, la performance, la
nutrition, l'entraînement. Et le
respect des règles du jeu, mais ça, c'est à titre purement instrumental, ne pas
prendre de punitions inutiles. Par contre, il pourrait y avoir de bonnes
punitions.
Donc, compétences techniques et tactiques, c'est
important. Un, les entraîneurs considèrent que c'est leur première responsabilité. Un, c'est de mener
l'équipe à la victoire par une compétence aux niveaux technique, tactique,
stratégique, chez les athlètes, encore plus.
En améliorant leurs habiletés et leurs connaissances du hockey, ils sont plus
en mesure de satisfaire les demandes de l'entraîneur, d'améliorer leur
réputation et de favoriser leur mobilité sociale.
Maintenant, arrive la victoire, parce que, de
ça, la victoire, dépendent bien des comportements déviants. La victoire fait
partie du sport, mais gagner à tout prix fait partie de la survalorisation du
sport, et là apparaissent des comportements déviants. On va parler de
transgression de règles, transgression de règles. Il ne s'agit pas de respecter
les règlements à la lettre, il faut savoir les interpréter et les utiliser...
et les utiliser, ce qui veut vouloir dire les enfreindre volontairement, dans
le but, un, de donner un avantage tactique, de défendre un adversaire et de
sauver un but. On va même jusqu'à dire que
les joueurs qui peuvent satisfaire les préalables légaux et illégaux sont mieux
perçus par les entraîneurs et les dépisteurs que les joueurs qui
n'utilisent que des moyens légaux.
L'utilisation de l'intimidation également. Ça,
ça a un lien très important avec ce qu'on a vécu dans les intimidations... dans
les initiations. Avec la réputation de ne pas être intimidables, les joueurs se
protègent contre de futures... contre de
futures agressions, alors que de faire face à un adversaire est un moyen de
gagner le respect. De se désister ou reculer devient un moyen de perdre
le respect. Ça, c'est important.
Initiation à la prise de risque. La philosophie
de la victoire à tout prix a des effets sur la manière d'évaluer les risques.
Les joueurs sont prêts à tout donner pour remporter la victoire. Ils peuvent
mettre en péril leur intégrité physique.
C'est ce qu'on appelle la surconformité. L'athlète doit faire des sacrifices.
L'athlète recherche constamment à s'améliorer et à
se rapprocher de la perfection et l'athlète doit faire abstraction de la
douleur, de la pression et de la peur. Ça, on le voit encore. Quand on a tous
les témoignages sur les initiations, ces points-là ressortent, la peur, hein,
l'omerta aussi. Donc, l'acceptation de risques, alors, apparaît comme une
preuve de courage et de dévouement.
Certains chercheurs
traitent de la violence et de la masculinité. Les hommes considèrent la violence
comme un élément inhérent à la structure du sport, elle est donc légitime et
naturelle. Puis une incapacité de se conformer à ces valeurs met en péril les
possibilités d'une carrière de joueur et diminue de beaucoup sa contribution à
l'équipe.
Maintenant, pour
terminer, les fameuses initiations, les fameux rites de passage positifs. Les
rites de passage ou les rites initiatiques,
ça peut être bon, ça peut être bon, ça... Comme je l'ai dit tantôt, au même
niveau que le sport, ça peut être
bon, et ça peut avoir des conséquences positives. Il faut... il faut l'utiliser
systématiquement, systémiquement, le planifier
et l'expliquer aux athlètes. Il faut commencer en bas âge. Les initiations
commencent parfois chez les pee-wee, mais surtout au niveau bantam, et
c'est là qu'on doit agir. On doit agir en amont pour qu'une fois rendus plus
loin ils puissent reconnaître ce qui est un bon rite initiatique ou un mauvais
rite initiatique. L'importance du rite initiatique ou rite de passage, se connaître soi-même, connaître ses coéquipiers,
créer des conditions optimales pour une masculinité authentique et saine, créer une synergie... hein, le
fameux travail d'équipe, on en a parlé tantôt... une synergie, véritable
esprit d'équipe, qui va avoir un impact sur la performance, parce que, bien
souvent, ce qu'on a peur c'est... quand l'aspect éducatif du sport est
présenté, c'est qu'on a peur que ça nuise à la victoire et au développement de
l'athlète et de l'excellence. Donc, ça,
c'est important. Ça, c'est un... c'est une croyance commune qu'il faut vraiment
balayer du revers de la main.
Donc, avec une
approche systémique basée sur le développement humain, et surtout, sur la
dignité humaine, le rite initiatique peut
créer... peut laisser une marque indélébile positive chez chaque athlète. Donc,
prendre du temps, les... ça prend du temps, de la connaissance, mais il
faut surtout que, dans le contexte du hockey sur glace, on puisse donner du
temps à ce rite initiatique là, ce qui n'est pas toujours faisable à tous les
niveaux de hockey.
Donc, finalement,
comme conclusion, le sport n'est ni bon ni mauvais, tout dépend de
l'utilisation qu'on en fait. Et, comme je l'ai dit, les rites de passage
peuvent être très positifs dans l'intégration des enfants dans un groupe. Ils doivent être planifiés systématiquement et
systémiquement. Puis cette crise-là est une opportunité idéale pour redorer l'image
du sport, parce qu'on peut le prendre... on peut aller... on peut être
découragés à en pleurer, mais allons-y sur les opportunités de changement,
surtout de procurer aux participants un climat optimal de développement, qu'on
soit au hockey mineur ou au hockey majeur. Puis, comme je l'ai dit tantôt,
comme nation, on a une grande responsabilité envers le hockey sur glace. Il a été
inventé par nous. Il a été longtemps aussi un symbole d'émancipation pour le
peuple québécois.
La Présidente (Mme
Dionne) : Il vous reste 10 secondes, M. Bernard.
M. Bernard
(Dany) : Parfait. Donc, comme je l'ai dit, le Québec est une société
progressiste et doit, par le fait même, assumer son rôle de leadership à
l'égard du hockey et de ses participants, enfants, adolescents et jeunes
adultes. Je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci infiniment pour cet exposé. Nous allons débuter les
échanges. Je cède la parole du côté du gouvernement, avec le député... M. le
député de Vanier-Les Rivières.
M. Asselin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je voudrais
déclarer mes intérêts. J'ai devant moi quelqu'un qui a participé à la culture positive du hockey avec un maître, par
rapport à moi. Quand j'étais au département d'éducation physique à l'Université
Laval, je pense que je partais, puis vous, vous arriviez, mais on a tous deux
été fortement impressionnés par un homme comme Gaston Marcotte, qui a fait
beaucoup pour le hockey en particulier, pour le sport en général. Et puis
j'aimerais ça, puisque vous parlez... Les conditions avec lesquelles
l'initiation peut avoir un caractère
positif, on n'en a pas assez parlé. Bien, évidemment, on n'a pas parlé beaucoup
de ce sujet-là, c'est plutôt le caractère négatif qui est exploré, mais
je sais, pour avoir suivi vos travaux, que vous avez, comme praticien, essayé
de focusser sur du positif. Quelle pourrait être, justement, disons, la
contribution de ce secteur-là comme tel, qui pourrait entraîner une
modification du comportement comme tel?
M. Bernard
(Dany) : Bien, ce qui va être important, fondamentalement si,
admettons, stratégiquement, on veut rentrer, c'est de faire en sorte de
présenter cette initiation-là comme étant un élément important dans la cohésion
d'équipe, parce que, rapidement, les
athlètes vont mettre le lien entre cohésion d'équipe et victoire. Parce que, si
on veut rentrer, il ne faut pas... il faut y aller, je dirais, comme le yin et
le yang, là, de façon douce, faire en sorte que, l'initiation, on se donne du temps pour le faire. Parce que, si
on prend l'exemple du junior majeur, beaucoup de matchs hors concours, rapidement, on embarque avec la saison régulière.
On a des dates limites pour les étudiants, l'inscription des étudiants,
soit au secondaire, au cégep, à l'université. Donc, à ce niveau-là, faire en
sorte qu'on soit... que les entraîneurs soient accompagnés là-dedans, soient accompagnés, parce que les entraîneurs, je
l'ai dit tantôt, ils se concentrent sur l'aspect technique, tactique,
stratégique, ils ne sont pas accompagnés là-dessus.
Même, présentement,
le sport évolue. On a des préparateurs physiques, on a des préparateurs
mentaux. Pourquoi ne pas donner au
préparateur mental cette responsabilité-là, de dire : Tu vas nous
développer un rite initiatique qui va être positif, qui va travailler
sur la cohésion des joueurs, puis qui va surtout mettre l'accent sur un groupe,
sur connaissance de soi, on se présente à tout le monde, qui on est, quelles
sont nos valeurs, où on s'en va, connaissances des groupes... du groupe, et des
activités de résolution de problèmes puis de travail de cohésion d'équipe? Et
ça, excusez-moi, on pourrait remplir cet édifice-là de livres, de moyens pour
faire en sorte que ce soit positif.
Parce
qu'il ne faut pas oublier que, même junior majeur, peu d'athlètes atteignent la
Ligue nationale de hockey. Et quand on regarde l'impact des initiations sur la
vie des gens, à l'extérieur du hockey sur glace, c'est d'une grande tristesse,
alors qu'on pourrait y aller avec des initiatives qui font en sorte qu'elles
vont marquer positivement les athlètes, et
que ça va même les aider dans leur vie de tous les jours, parce qu'il y a une
possibilité de transfert dans la vie de tous les jours. D'ailleurs,
c'est comme ça qu'on vante le sport, c'est : Aïe! le sport peut développer
ci, ça et même... on peut même le transférer dans la vie quotidienne.
Présentement, les études ne vont pas nécessairement de ce côté-là. Les sports
de contact physique, football, hockey, on a tendance à développer la violence
comme mode de résolution de problèmes dans la société civile. Donc, on a du
travail à faire, tu sais, on a du travail à faire, mais on a les outils pour le
faire, puis on pourrait le faire, si on se donne la volonté et l'intention de
le faire.
M. Asselin : Je
sais que vous avez travaillé fort aussi du côté des bagarres, en particulier.
Mais, disons, sur le volet de l'opportunité
qu'on vit, avec les difficultés qui sont sorties à travers les médias puis dans
la commission, est-ce que vous croyez
vraiment qu'effectivement il y a un futur positif qui pourrait se dessiner avec
l'opportunité qu'on vit?
• (16 h 20) •
M. Bernard
(Dany) : Je crois que oui, parce que je ne serais pas ici si je
croyais le contraire. Donc, je crois que
oui. Ça va demander beaucoup d'efforts, parce que, quand on parle du hockey
junior majeur, il y a des qualités, mais c'est également des entreprises
privées. Si on le fait au hockey mineur, bien, on travaille avec des
organisations, avec des entraîneurs, des
bénévoles. Ça aussi, c'est... on doit travailler fort avec eux. Mais le sport
spectacle versus le sport amateur, il y a une différence. Donc, au niveau de la
Ligue de hockey junior majeur du Québec, je crois qu'on pourrait le faire si la volonté y est, si on accompagne
bien les entraîneurs et, surtout, si on valorise cette initiation-là comme
étant un travail de cohésion d'équipe. Là, on ne perdra pas. Là, on va aller
chercher le ralliement des gens puis on ne sera pas trop loin de leur volonté, tu sais, de l'entraîneur, qui est :
développer techniquement, tactiquement. Il va y avoir... Tout
comportement humain, hein, c'est coûts-bénéfice. Donc, si j'ai quelqu'un qui
fait une initiation qui a vraiment du sens,
qui va m'amener... qui va amener l'équipe en avance, hein, en début de saison,
déjà, donc, va faire en sorte que ça va être achetable. Donc, en termes
de stratégie de changement de comportement, ça, c'est important.
M. Asselin : Je
vais laisser la place aux autres collègues.
M. Bernard
(Dany) : Est-ce que ça répond à votre question, M. le député?
M. Asselin : Oui,
merci beaucoup, M. Bernard. Et puis bravo pour votre travail.
M. Bernard (Dany) :
Merci.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci. M. le député de Richelieu.
M. Émond : Oui, merci, Mme la Présidente. Bonjour,
M. Bernard. Merci pour votre présence et votre contribution aux
travaux de la commission.
Vous
parlez de notre sport national avec beaucoup de passion, on le sent que c'est
quelque chose qui vous anime. Je note même que vous dites que, comme
nation québécoise, on a l'obligation ou la responsabilité de porter haut, de défendre notre sport national, et surtout, faire
en sorte qu'il se pratique de façon correcte et acceptable chez nos plus
jeunes, mais également chez les personnes une fois au stade adulte.
M. Bernard,
vous avez parlé de sous-culture valorisant la violence, je ne veux pas mal vous
citer, là, valorisant la violence, le
silence des joueurs. Ça, donc, c'est quelque chose que vous avez décodé à
travers vos années d'expertise. Est-ce que vous considérez que c'est
toujours présent, là, présentement, dans le milieu du hockey?
M. Bernard (Dany) :
Toujours présent. Comme je l'ai dit, l'élément où ça fait mal, c'est la
mobilité sociale. Tu sais, on veut aller dans la Ligue nationale de hockey, et
l'humain, souvent, va... a une grande capacité à accepter l'inacceptable, donc, on l'a vu. Donc, cette
sous-culture-là existe toujours. Il y a des changements, et c'est très
cyclique, hein, donc la violence est
très cyclique. Il y a des interventions qui ont eu lieu pour diminuer le nombre
de bagarres, les règles un peu plus
strictes, mais elle demeure, elle demeure, parce qu'on va l'utiliser pour
avoir, pour atteindre la victoire, donc l'intimidation, transgression de
règles.
Tu sais, c'est un des
rares sports où on dit : Aïe! ça, c'est une très bonne punition. Et c'est
un des rares sports où, lorsqu'on prend une
punition, on te donne un avantage que tu n'as pas à cinq contre cinq. Donc, à
cinq contre cinq, tu n'as pas le droit
de dégager. Tu enfreins les règles, on te permet de dégager. Et s'il y a
quelqu'un qui est le moindrement
brillant sur le banc ou en arrière du banc, alors qu'un bon avantage numérique
est à 23 %, bien, j'ai quand même
77 % des chances de m'en sortir en étant puni. Donc, imaginez-vous, quand
je parle de sous-culture, c'est à ça qu'on a affaire, c'est à ça qu'on a
affaire. Donc, elle est toujours présente.
M. Émond : Je
comprends très bien. Puis vous nous embarquez dans la technicalité du sport du
hockey, là. C'est intéressant, mais je ne voudrais pas qu'on aille...
M. Bernard
(Dany) : Non, pas trop loin.
M. Émond : ...un peu trop... malgré que j'ai pris, dans mes
lectures vous concernant, là, que vous avez plaidé pour permettre les
mises en échec uniquement lorsque deux joueurs sont dans le même sens de la
patinoire. Mais on ne va pas aller là-dedans, là, je vais laisser ça aux
spécialistes qui sont en face de moi.
Mais dites-moi,
M. Bernard, plus sérieusement, est-ce que vous pensez... Parce que vous
avez beaucoup parlé de la responsabilité des
entraîneurs. Ça, je trouve ça intéressant, parce que moi, je suis de ceux qui
pensent, en tout cas, depuis les
travaux de la commission, qu'ils ont tellement un double rôle parce que ce sont
eux, comme vous le dites, qui poussent
les jeunes à se dépasser lorsqu'ils sont derrière le banc. Donc, je ne suis pas
en train de vous dire qu'ils poussent les jeunes à adopter des
comportements inacceptables en tout temps, entre autres, dans les initiations,
mais moi, je suis de ceux qui a plaidé beaucoup sur le rôle de leadership que
doivent exercer, dans le cas qui nous occupe, dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec, entre autres, les gouverneurs,
mais également, le commissaire, hein, qui est un peu l'autorité suprême,
là, de s'adresser directement aux jeunes.
Mais j'aimerais vous
entendre un peu plus précisément sur le rôle de l'entraîneur qu'il devrait
avoir dans ses annonces, son comportement
face aux jeunes, puis surtout, pour leur dire : Est-ce que vous croyez
qu'on doit clairement identifier ce
qui est inacceptable et... inacceptable dans le cadre des initiations? Parce
que je pense que vous l'avez dit, vous
êtes un de ceux qui plaident qu'elles doivent continuer d'exister là, il y a un
rôle d'initiation... Les initiations ont un rôle important, les anthropologues, les sociologues pourraient nous
le dire, mais c'est lorsqu'ils sont exercés de façon inacceptable, là,
que c'est...
M. Bernard (Dany) : Exactement. Donc, pour
répondre à votre question, et corrigez-moi si je dérive, mais, si je comprends bien, oui, effectivement, l'entraîneur a
un rôle important. Et pour expliquer le comportement de l'entraîneur, aussi,
face aux rites initiatiques, c'est qu'en sport tu as ce que je vais appeler un
territoire unique entraîneur, territoire unique
joueurs puis des territoires mixtes, hein, parce que, souvent, les joueurs vont
avoir leurs particularités puis leurs moments où ils sont ensemble, les
entraîneurs également. Mais dans le cas de l'initiation, c'est que l'entraîneur
devrait avoir une responsabilité. J'irais plus loin que ça. C'est que le comité
d'initiation, hein, les vétérans devraient présenter
à l'entraîneur et à l'équipe d'entraîneurs : Voici ce qu'on entend faire
pour l'initiation. Et ça va plus loin que ça, aussi, dans la présentation, tu sais, dans l'accueil des joueurs au camp
de sélection. Voici qui on est comme organisation, voici les valeurs privilégiées, voici ce qu'on
veut. Et ça, ces valeurs-là, on veut les avoir du début de l'année à la fin de l'année,
en séance d'entraînement hors glace, sur glace, à l'initiation jusqu'à la fin
de l'année.
Donc, il faudrait le
voir comme un processus de passage à long terme. Autant j'accueille les
nouveaux dans notre organisation, autant quand ils quittent aussi, d'avoir un
processus, quand les enfants ou les athlètes quittent, de récompenses ou de travail avec ces gens-là, pour
faire en sorte que le passage va être important, et il va y avoir quelque
chose de positif qu'on va retirer de ça.
M. Émond : Je
comprends très bien. C'est intéressant. Merci.
M. Bernard
(Dany) : Est-ce que ça répond à votre question?
M. Émond : Tout
à fait. Je vous en pose une dernière, très courte, avec une réponse courte,
pour laisser un peu de temps à ma collègue,
s'il vous plaît. Dites-moi, avec votre connaissance que vous avez du circuit
américain, est-ce que vous pouvez
éclairer les membres de la commission... est-ce que vous avez perçu le même
type de bizutage inacceptable chez nos voisins du Sud? Et, si oui,
quelles sont les mesures qu'ils ont mises en place pour tenter d'éliminer...
M. Bernard
(Dany) : Bien, du côté américain, oui, parce que je travaille... J'ai
travaillé beaucoup, lorsque j'étais à
l'académie Saint-Louis... on a... on a développé le programme Prep School, où
on jouait aux États-Unis, là, pour présenter
nos athlètes aux «prep schools» américains, aux universités américaines. Il y
en a eu aussi, des abus, il y en a eu énormément. Ils ont mis fin à ces
initiations-là, un peu comme nos universités, aussi, au Québec, qui y ont mis
fin. Mais je ne crois pas, moi, à un règlement de cette façon-là. Moi, je veux
avoir une approche positive, intégrale, qui fait que le rite initiatique est
important pour la cohésion d'équipe, pour l'identification à l'équipe,
l'identification à l'institution, parce que
c'est la force de nos voisins du Sud. Le sport, à l'école, fait en sorte qu'on
s'identifie à l'institution, et une institution de haut niveau ne voudra
pas perdre son nom par rapport à une initiation qui dérape.
M. Émond : C'est
très clair, merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente.
M. Bernard (Dany) : Donc, quand on a Harvard
ou Princeton, où ça s'est... où il s'est déjà passé des choses, bien, ce
n'est pas long qu'on agit parce que c'est vraiment la réputation de
l'institution qui est en première ligne.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
nous reste environ deux minutes, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Je
vais y aller rapidement. Merci d'être là. Tout à l'heure, vous avez parlé de gagner à tout prix, que ça, selon vous,
ça entraîne des comportements déviants, puis, bien, selon vous, ce serait la... est-ce que ce serait la source de la culture
malsaine puis la culture du silence? J'aimerais vous entendre là-dessus.
Puis aussi, vous parlez de mieux accompagner les entraîneurs. J'aimerais vous
entendre aussi là-dessus.
• (16 h 30) •
M. Bernard
(Dany) : OK. Le premier volet, puis vous me corrigerez si
je réponds mal à la question — je
vieillis, hein, des fois, j'oublie,
mais rappelez-moi à l'ordre — donc,
pour la première question, qui dit... qu'on parlait, là, de la victoire comme étant... la victoire à tout prix comme étant
le lien de cause à effet des initiations un peu barbares qu'on a vécues, c'est une partie, mais c'est
surtout les comportements qui viennent avec ça qui font en sorte qu'on s'en
va vers une sous-culture du silence. Je dirais, la victoire à tout prix, mais
surtout, la volonté de percer, tu sais, parce qu'on veut gagner à tout prix,
mais, avant tout, chez les athlètes juniors majeurs, c'est d'atteindre le rêve
de la Ligue nationale de hockey, un rêve qu'ils caressent depuis l'âge pee-wee.
Donc, c'est le travail, l'entraînement d'été, les écoles de hockey, tout... même... je pourrais dire, même,
à l'école, là, la récupération à l'école, pour ne pas manquer les pratiques.
Donc, quand on
se rend compte qu'on est... qu'on cogne à la porte du grand circuit et qu'on
subit des comportements de cette façon la sous-culture nous dit que,
bien, si je parle, bien, je vais être mis sur la voie d'écart, la voie d'évitement. Donc, c'est beaucoup plus le
fait de ne pas atteindre la Ligue
nationale de hockey qui fait en sorte
qu'on va créer des comportements déviants,
au même... au même titre que la victoire à tout prix. La victoire à tout prix
va nous amener transgressions de règles, violences, tout ça, mais le fait de ne
pas atteindre le haut niveau, c'est là où on va avoir cet... ce
comportement-là de silence ou d'omerta.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Pour
l'accompagnement des entraîneurs?
M. Bernard (Dany) : Par rapport aux
rites initiatiques?
Mme
Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Bien, comment on peut mieux accompagner les élèves et les entraîneurs
pour ne plus que ça arrive, là, ces comportements déviants là?
M. Bernard (Dany) : Bien, comme je
le disais, c'est une très bonne question parce que les entraîneurs en hockey sur glace, pour la majorité, leur rôle se
cantonne à : développement technique, tactique, stratégique. On va
chercher, comme je l'ai dit, des
préparateurs physiques, des préparateurs mentals. Donc, je pense que de
travailler avec les entraîneurs...
La
Présidente (Mme Dionne) :
On doit malheureusement... Je
dois maintenant céder de la parole à... Désolée, on a de... le temps est
calculé, alors...
M. Bernard (Dany) : Excusez-moi.
La
Présidente (Mme Dionne) : Ce n'est pas... Désolée. Je cède la parole au
porte-parole de l'opposition officielle, le député de Marquette.
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour,
M. Bernard.
M. Bernard (Dany) :
Bonjour.
M. Ciccone : Je suis vraiment content de vous voir. J'ai lu pas mal tout
ce que vous avez fait, je veux juste vous le
dire. Vous êtes reconnu, ici, pas pour lancer des fleurs avant de commencer,
là, mais vous êtes reconnu comme étant une personne très connaissante et
une sommité dans la matière, notamment dans le sport, dans la psychologie.
Tantôt, vous avez parlé du hockey puis des
mauvaises pénalités, vous m'avez regardé, je ne sais pas si vous vouliez me
passer un message, établir votre territoire, mais je l'ai compris, soit dit en
passant. Vous parliez tantôt de comment on
élève nos enfants. Vous avez dit, tantôt : Les jeunes du pee-wee veulent
tous jouer dans la ligue nationale, puis même, moi, je dirais avant ça,
là. On est petit gars, puis on a cinq, six ans, puis on met notre pyjama de...
moi, à l'époque, c'était mon pyjama d'Yvan Cournoyer. Tu regardes la
télévision, puis, tout de suite, tu dis : Je vais jouer dans la ligue
nationale un jour, puis tu es prêt à tout faire, hein, tu es prêt à tout faire,
tu es prêt à... Puis je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, mon entraîneur, à
l'époque, à 16, 17, 18 ans, m'avait dit : Enrico, tu dois sauter en
bas du pont Jacques-Cartier si tu veux jouer
dans la ligue nationale, il n'aurait pas fini sa phrase, M. Bernard,
j'aurais déjà sauté, je l'aurais fait.
Où je veux en venir, avec ma première question,
c'est parce qu'on est ici aujourd'hui parce qu'évidemment il y a une
problématique, on s'est retrouvés vraiment dans une tourmente, là, puis c'est
le hockey qui a explosé, mais je suis d'accord avec vous, c'est dans tous les
sports. Puis vous êtes également connaisseur sur le sport américain, également. J'ai des amis qui ont joué dans la
NCAA, dans les «prep schools», puis les histoires ne sont pas mieux, là,
elles ne sont vraiment pas mieux.
Bien, pensez-vous que, justement, c'est de la
façon... puis c'est peut-être fait de façon inconsciente, là, c'est peut-être
fait de façon inconsciente des entraîneurs, et même des parents, là, que... Si
tu veux réussir, tu dois travailler fort, tu dois passer à travers ton
adversaire, tu dois être un guerrier, tu dois être meilleur que les autres, tu
dois être loyal envers ton équipe, tu ne dois pas faire mal à ton logo. Tu
sais, quand on utilise ce langage-là pendant des années, des années et des
années chez nos athlètes masculins, et même féminins, bien, à un moment donné,
est-ce qu'on se retrouve à un endroit où on trouve que tout ce qui nous arrive
dans le sport, on est prêt à accepter n'importe quoi, n'importe quoi pour
arriver à nos fins? Pensez-vous qu'inconsciemment, là, le problème se fait
avant qu'on arrive dans les grandes ligues?
M. Bernard (Dany) : Oui, je l'ai
précisé tantôt, puis c'est une excellente question, à savoir, c'est tout le phénomène de sous-culture, hein, c'est le
phénomène... Dès qu'on s'inscrit, c'est toutes les valeurs qui sont véhiculées à travers le sport qui font en sorte qu'il n'y a pas de
dissonance cognitive, c'est toujours le même message, puis on est prêt à
accepter l'inacceptable, tolérer l'intolérable. Mais, effectivement, vous êtes
dans le mille, quand on dit que ces règles formelles et informelles là sont
développées tout au long de notre pratique et fait en sorte qu'il y a comme une restructuration cognitive, là, puis on
fait : Bien oui, ça fait partie du monde, puis, si je veux atteindre mon
objectif, il faut que je passe à travers cette période-là qui n'est pas
très agréable, mais... Et voilà.
M.
Ciccone : Puis, bien, ce qui est désolant
aussi, aujourd'hui... Puis des gars comme moi, qui ont traversé cette
culture-là, on se retrouve à 50 ans puis on se dit... puis là, ça fait un
mois, cinq semaines que je suis en réflexion constamment,
puis tu essaies de comprendre, puis, aujourd'hui, je ne suis pas capable de
comprendre encore. Puis c'est pour ça que vous êtes là, pour essayer de
nous éclairer.
Vous
parliez tantôt de la peur, vraiment, vous parliez de la peur. Pour un athlète,
là, puis corrigez-moi si j'ai tort, mais
moi, je vais parler pour mon expérience personnelle, pour un athlète, là, la
peur de perdre est importante, la peur de ne pas aller au niveau
supérieur, également, est atroce, crée de l'anxiété, de l'angoisse, mais la
peur du rejet de son groupe, je vous le dis, moi, je pense que c'est pire que
n'importe quoi. Moi, quand j'étais sur la glace, puis que je devais lâcher les
gants pour aider mes coéquipiers, pour défendre mes coéquipiers, je n'avais pas
peur de me faire blesser, j'avais peur de laisser tomber mes collègues si je
tombais sur le dos. Pouvez-vous un peu nous expliquer ce phénomène-là de la
peur du rejet et de laisser tomber ses coéquipiers?
M. Bernard
(Dany) : Bien, ça fait partie vraiment de la sous-culture, hein? Donc,
nos gens initiés, nos gens initiés, c'est la
même chose. Donc, ils ont subi des traitements qu'on va dire dégradants, mais,
effectivement, la peur du rejet... On
va se dire : Si je cède à la peur, si je parle, mes coéquipiers vont
douter de moi dans des situations critiques et dans des situations où ça va demander un peu plus de vigueur musculaire,
un peu plus de tolérance à la douleur. Donc, cette peur-là s'explique de
cette façon-là : Est-ce que je vais pouvoir compter sur lui? Et ça, ce
doute-là se transmet, et c'est cette peur-là
de créer le doute chez ses coéquipiers quant à sa capacité de réaliser les
tâches qui vont lui incomber en hockey sur glace. C'est exactement ça.
M.
Ciccone : Mais là ce qui est pervers dans
tout ça... Est-ce qu'il y a une façon autre que... d'arriver à ses fins, de monter au niveau supérieur? Parce qu'on
dit souvent, là, les athlètes vivent dans leur monde, ils sont un petit peu
cinglés sur les bords, parce qu'ils vont être capables de subir des choses lors
des entraînements, la douleur, les blessures, puis ils vont être
capables de... ils vont atteindre un seuil de mal, de douleur plus haut qu'un
citoyen normal. Bien, est-ce qu'on est
capable d'en arriver là, justement, en... Je fais un parallèle avec l'armée.
L'armée, là, on va les traiter, du jour un, comme des guerriers, on va
les déprogrammer, on va les reprogrammer pour qu'ils soient capables d'avancer
au front sans avoir peur. Bien, on est-tu capables de faire ça avec des
athlètes? Il est où, le juste milieu, là?
M. Bernard
(Dany) : Exactement, le juste milieu, pour moi, c'est un changement de
paradigme. Là, on va être philosophiques, là, mais c'est un changement de
paradigme, parce que, là, on a un sport qui est centré sur la performance,
alors que ce qu'on devrait proposer, c'est un sport centré sur l'être humain.
Donc, c'est là... Et là on a vraiment deux
paradigmes complètement différents. C'est très philosophique, mais c'est la
base, c'est la base de tout. Tu sais, mes pays mythiques sont les pays
scandinaves, là, on en parle constamment, mais vous savez que, dans les pays
scandinaves, tu n'as pas le droit de boxe. La boxe n'existe pas, ce n'est
pas... tu n'as pas le droit, parce que le but premier
de ce sport-là, c'est de causer une commotion cérébrale. Donc, comme peuple,
pour moi, bien, on amène le côté humain à un autre niveau, mais pour
répondre à votre question, M. le député, c'est un changement de paradigme, un
sport où l'être humain va être au centre, versus un sport où la performance est
au centre.
Et là tous les
comportements vont changer, et on va avoir une approche complètement
différente. Et je suis sûr, je suis sûr qu'à
la fin, bien, on va avoir d'aussi bonnes performances, mais on va avoir des
athlètes plus équilibrés puis qui vont jouer un rôle meilleur dans la
société en postcarrière.
M.
Ciccone : On a une maudite côte à monter,
parce que, je veux dire, moi... On est tous ici parce qu'on veut que ça change, puis on voudrait tous, là, quand on
finit cette commission-là, on remet notre rapport, nos recommandations,
puis, à partir du lendemain, c'est réglé, mais on sait que ce ne sera pas le
cas. On a une grande, une méchante grande côte
à monter parce que, quand on regarde... Un dicton dans le sport, notamment, là,
l'entraîneur disait : Si tu ne triches pas, là, c'est parce que tu n'as
pas tout essayé, tu sais, puis on a besoin de gagner. Ça fait que comment... À
un moment donné, il faut changer ces paroles-là aussi. Ça fait que
comment... Ça va prendre combien de temps, d'après vous, si, vraiment, là, on
fait toutes les choses de façon parfaite, là. Ça va-tu prendre une génération?
• (16 h 40) •
M. Bernard
(Dany) : C'est une excellente question. Je ne remettrais pas mon
doctorat en cause, là, sur la qualité de ma réponse, mais, à ce niveau-là, je
vous dirais, écoutez, bien là, si je prends un peu de recul, je pense que notre
planche de salut, c'est le hockey à l'école, c'est le hockey à l'école. C'est
notre planche de salut.
Par contre, faites
attention, encore une fois, ce n'est pas parce qu'on met le hockey à l'école
que ça va être automatiquement meilleur. Si l'école prend n'importe quel
entraîneur, prend un ancien étudiant pour encadrer le hockey, ça ne sera pas un
hockey éducatif, c'est qu'on va avoir changé de boîte, une boîte verte pour une
boîte bleue. Il faut vraiment que ça fasse partie du projet éducatif de l'école
de faire en sorte de développer un meilleur être humain par le sport et, si ça fait un athlète d'excellence, bien là, il
sera tout un modèle pour les générations qui suivent.
Donc, je vous dirais minimalement 10 ans,
rapidement, comme ça, là, puis, encore une fois, c'est de la pure spéculation,
mais notre planche de salut revient au hockey à l'école, mais où l'école et les
gouvernements vont prendre leurs responsabilités et ils
vont engager des professionnels pour entraîner les enfants ou pour superviser
les entraîneurs. Donc, si on n'a pas l'argent pour payer des entraîneurs
professionnels, je parle former, développer, à la fois sur le plan hockey mais avant tout sur le développement d'un être
humain, bien là, on va revenir à la même place. Parce qu'en plus, tu sais, on a
un roulement, au niveau des entraîneurs, que ce soit junior majeur ou en bas.
Donc, c'est cinq à huit ans,
puis après on rechange, il faut recommencer. Donc, la continuité va demeurer à
l'école, va demeurer à l'école.
M.
Ciccone : Vous avez parlé d'argent, puis
il y a plusieurs groupes qui ont plein de bonne volonté, ont des suggestions, ont des recommandations, également,
mais ce qui est le dénominateur commun... souvent, ils vont dire : Bien,
c'est parce qu'on n'a pas de financement, on cogne à des portes, on n'est pas
capables de le faire.
Pour amener un
changement, là, vraiment concret, là, concret, là, ça prend quoi? Ça prend
quoi, au juste, du financement? Mais quelle sorte de financement? De la part
des gouvernements, du local, de Hockey Québec, par exemple, ou des fédérations sportives? Je vais vous dire... je vais
poser une question de même parce que je n'ai pas beaucoup de temps, là, dans le sport, au Québec, là, il y a
168 millions qui est investi dans le sport au Québec. Ça en
prend combien?
M. Bernard
(Dany) : Je vous dirais le plus possible, étant un acteur du sport, le
plus possible. Par contre, si le sport continue comme il est là, on devrait
enlever de l'argent, hein, parce que les résultats qu'on a ne sont pas très
concluants, mais, comme je vous dis, je ne pourrais pas parler en termes
d'argent, mais en termes de structure puis d'encadrement, donc, ramener le
hockey à l'école, en faire vraiment un projet de société, un projet de
développement humain par le hockey sur glace, c'est là qu'on l'amènerait. Et là
aussi c'est une contribution de tous et chacun, hein, on ne parle pas juste du gouvernement puis on s'en lave les mains, c'est
tous les paliers, du municipal au gouvernement du Québec, de façon à faire en sorte que toutes les actions soient dans
la même direction puis de faire un hockey sain, un hockey intéressant
puis un hockey qui va faire rayonner le Québec.
M.
Ciccone : Merci.
La Présidente (Mme
Dionne) :
À peine neuf secondes.
M.
Ciccone : À peine neuf secondes. Bien,
merci beaucoup d'être venu, M. Bernard. Ce fut très apprécié, merci
beaucoup.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de
Rosemont, porte-parole du deuxième groupe d'opposition.
M. Marissal :
J'ai combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme
Dionne) : Vous avez 3 min 53 s exactement.
M. Marissal :
52, 51, 50... Bonjour, Monsieur Bernard. Bien, merci d'être là. Vous disiez
tout à l'heure, là, qu'il faut encadrer les
initiations, bon, puis mettre les adultes dans le coup aussi. L'initiation,
c'est un moment précis, là, dans le temps, là, puis c'est beaucoup de ça
dont on parle parce que ça a fait les manchettes pour plein de mauvaises
raisons, là, mais il y a tout le reste de la culture, là, tu sais.
L'intimidation, ça dure toute la saison. Puis moi,
on m'a raconté des histoires de petits gars qui arrivaient dans la Ligue de
hockey junior majeur à 16 ans, là, qui se sont fait écoeurer, là, pendant
deux ans et demi, par leur coach, là, jusqu'à la limite du suicide, là. Tu
sais, initiation ou pas, là, ce petit gars-là, il est scrap, là. Ça fait
que, oui, je comprends qu'on met beaucoup d'attention sur l'initiation, surtout
quand ça se fait de façon criminelle, mais il y a tout le reste.
M. Bernard
(Dany) : Entièrement d'accord. Ça fait partie de la sous-culture, on
en a parlé tantôt. Le sport n'est ni bon ni mauvais, tout dépend de
l'utilisation qu'on va en faire, puis, comme je l'ai dit, la pièce maîtresse de
l'échiquier sportif, c'est l'entraîneur et son personnel d'encadrement. Et
c'est ça qui va faire que l'expérience va être positive ou négative,
constructive ou destructive, mais, effectivement, c'est dans la formation des
entraîneurs que ça va être important, dans le suivi des entraîneurs aussi.
Puis, il faut faire
attention, tu sais, je ne veux pas tout tirer à l'entraîneur, parce que lui
aussi, il est dans une sous-culture, hein,
et son poste dépend de son ratio gains-défaites. Ça aussi, ça amène une
pression auprès de l'entraîneur, mais ça ne lui permet pas, comme vous
l'avez dit, tu sais, de pousser un enfant à des comportements qui seraient
suicidaires.
Donc, encore une
fois, pièce maîtresse, c'est l'entraîneur. La pièce maîtresse de l'échiquier
sportif, c'est l'entraîneur, c'est sa formation, pas uniquement technique et
tactique, mais sur... la formation sur le développement de l'être humain, puis
quels types d'êtres humains. J'utiliserais le terme, même, le sport devrait
développer l'être humain, devrait humaniser
l'être humain. C'est ça. Et là on aurait une véritable force, une valeur
ajoutée au sport. Et là ça voudrait... ça pourrait justifier les
investissements en temps, en individus puis en argent, mais je suis entièrement
d'accord avec vous, quand on me demandait, quand même, de parler de
l'initiation, mais ça va bien au-delà de ça, et vous l'avez bien pigé, là.
M. Marissal :
Avez-vous écouté, hier, le témoignage de Michel Dorais, professeur émérite
à la retraite?
M. Bernard
(Dany) : Non.
M. Marissal : Vous connaissez
peut-être ses travaux, là...
M. Bernard (Dany) : Oui.
M. Marissal : ...il a énormément
travaillé, là. Alors, mettons qu'on fait un heureux mélange, là, de vos positions, vos propositions, qui sont parfois philosophiques,
puis je n'ai vraiment rien contre, là, je ne le dis pas du tout de façon
péjorative, au contraire, et les approches beaucoup plus précises, là, même
protocoles, de monsieur Dorais, là, qu'est-ce que ça donne, justement,
pour qu'on soit capables de suivre les entraîneurs et tout le monde autour, là?
Moi, j'irais peut-être même aux directeurs généraux puis aux propriétaires, là,
au moins une fois ou deux par année qu'on leur rappelle. Comment on fait ça,
là, dans une ligue, là, qui est quand même assez occupée, là, il y a beaucoup
de matchs, ça va vite, et ils n'ont pas que ça à faire, puis ils vont le faire
une fois, puis ils ne le feront plus, là?
M. Bernard (Dany) : Bonne question.
Pour moi, là, il faut vraiment revenir en amont. Ça se passe au niveau de la formation, au départ, là, dans le système
sportif québécois ou le système hockey québécois dans sa formation, dans
sa supervision. Puis on devrait avoir
aussi... J'amènerais des mentors, là, des mentors, au niveau de la Ligue de
hockey junior majeur du Québec, qui
suivent les entraîneurs, qui ramènent sur certains incidents critiques, sur des
types d'intervention en situation de match, en situation d'entraînement,
en situation de hors glace. Parce que c'est tout ça aussi, le contexte du hockey,
c'est hors glace, sur glace, en situation de match, en situation de séance
d'entraînement. Donc, j'irais là-dessus.
Puis on parlait de philosophique, tantôt, pour
moi, c'est fondamental. Quand je regardais... quand je regarde les Norvégiens
travailler...
La
Présidente (Mme Dionne) : Je dois... Malheureusement, c'est tout le temps
qu'on avait, M. Bernard, mais merci à tous pour vos contributions.
Alors, je suspends les travaux quelques
instants, le temps qu'on accueille notre deuxième groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 48)
(Reprise à 16 h 52)
La
Présidente (Mme Dionne) : Bonjour à tous. La Commission de la culture et de
l'éducation reprend ses travaux.
Donc, nous
accueillons cet après-midi l'Officier des plaintes de la protection de
l'intégrité dans le sport, donc, représenté par M. Sylvain Lalonde,
président-directeur général de Regroupement Loisir et sport du Québec, qui est
avec nous en personne, ainsi que Mme Lise Charbonneau, directrice
du Service de gestion du risque et de la protection de l'intégrité au
Regroupement Loisir et sport du Québec, qui est avec nous en visioconférence.
Je vous rappelle que vous avez 10 minutes
pour vous présenter et nous faire votre exposé. Par la suite, nous débuterons
les échanges. Alors, la parole est à vous.
Officier des plaintes
de la protection de l'intégrité dans le sport
M. Lalonde (Sylvain B.) : Alors,
merci. Mmes, MM. les députés, bonjour. Il nous fait plaisir de participer à cette commission parlementaire pour vous permettre
de connaître le mécanisme de signalement Je porte plainte, et du traitement indépendant qu'il déploie pour les
fédérations sportives et organismes de loisirs québécois. D'entrée de jeu,
nous trouvons important de mentionner que les interventions en matière
d'intégrité est une responsabilité partagée par
l'ensemble de notre population, que ce soient les participants, participantes,
les entraîneurs, les bénévoles, les parents. Et ça inclut également le
gouvernement.
Alors, le 20 novembre 2020, la ministre
Isabelle Charest annonçait son support pour la mise en place d'une politique d'intégrité cadre pour l'ensemble des
fédérations sportives québécoises, incluant un mécanisme indépendant de gestion des plaintes. Cette politique était le
résultat d'une demande formulée un an plus tôt par la ministre pour répondre
à l'énoncé ministériel déposé en novembre 2019.
L'énoncé ministériel comporte trois
éléments : une politique en matière de protection de l'intégrité, incluant
un mécanisme de gestion des plaintes
indépendant; une politique de vérification des antécédents judiciaires; des
mesures de sensibilisation, d'information et de formation. Ainsi, le
regroupement reçoit un premier mandat du ministère pour produire un canevas
d'une politique répondant aux objectifs de l'énoncé ministériel et d'un
deuxième mandat pour la mise en place d'un mécanisme indépendant de signalement
et de gestion des plaintes. Je porte plainte devient donc le lien de cette politique et du mécanisme. Le fait
pour chaque fédération d'utiliser le même canevas et d'avoir une base
commune garantit au milieu du sport et du loisir québécois une uniformité de la
procédure et des règles applicables en matière de protection de l'intégrité.
Dans le cadre
de sa mission, la fédération, parce que cette politique appartient à la
fédération, a la responsabilité de
protéger ses membres en leur offrant un environnement sécuritaire, juste et
dans lequel on peut avoir confiance, et ce, pour tous les niveaux de paliers d'intervention, qu'ils soient locaux,
régionaux, provinciaux, nationaux et même internationaux.
La politique propose...
proposée, pardon, devient une politique, règles et procédures que chaque
fédération doit entériner et enchâsser dans
leur règlement afin que celle-ci puisse prendre application auprès de ses
membres, alors, que toutes les sanctions puissent prendre action une
fois que ces règlements sont entérinés.
Les objectifs
de la politique, règles et procédures poursuivis sont : sensibiliser toutes les
personnes impliquées de près ou de loin dans le milieu au fait que toute
forme d'abus, de harcèlement, de négligence ou de violence n'est pas tolérée; de prendre les moyens raisonnables
pour offrir un milieu sain, exempt d'abus, de harcèlement, de négligence
ou de violence; d'instaurer des mesures qui
favorisent le respect de la dignité et de l'intégrité psychologique, physique
des personnes évoluant dans le milieu; de favoriser la dénonciation de
comportements de paroles, d'actes ou de gestes
d'abus, de harcèlement, de négligence ou de violence dès leur apparition;
mettre en place une procédure efficace en matière de protection de
l'intégrité en mettant en place, entre autres, un comité de protection de
l'intégrité et, au préalable, si les parties
le désirent et y consentent, une démarche informelle de résolution de conflits,
telle la médiation. Comme autres objectifs, prendre des mesures
administratives et disciplinaires nécessaires afin de faire cesser l'abus et le
harcèlement, la négligence ou la violence portée à sa connaissance et également
approuver... la fédération a également à
approuver le mandat de l'officier des plaintes indépendant pour traiter de
toute plainte d'abus, de harcèlement, de négligence ou de violence.
La politique s'applique à toutes les personnes
impliquées dans le milieu. La politique ne vise pas les cas d'abus entre les
employés, il s'agit de la politique de relations de travail, mais les
situations traitées peuvent survenir dans
n'importe quelle activité, programme sanctionné ou toute activité autre que
sportive ou récréative, tels les partys de Noël, les partys de fin de saison, les sorties après un match, etc. La
politique a préséance sur toutes les autres politiques qui existent ou règles qui existent au sein de la
fédération, et la politique lie tous les membres de la fédération. La politique
vise une intervention rapide et efficace afin de mettre fin à un comportement
inapproprié.
Le rôle,
maintenant, de l'Officier des plaintes. Le rôle de l'Officier des plaintes est
de coordonner le cheminement des
plaintes, détermine la recevabilité des plaintes reçues. Celle-ci doit être en
lien avec la politique. Il met en place des procédures de médiation, le
cas échéant, il met en place aussi la composition du comité de protection de
l'intégrité. Il procède et orchestre à
l'exclusion des auteurs présumés d'actes répréhensibles, à caractère sexuel ou
compromettant la sécurité des
membres. Il agit en concertation avec les corps policiers à cet égard. Il
rédige les mesures administratives pour
les plaintes visant les non-membres. Il effectue également les vérifications
nécessaires auprès des membres afin d'assurer le respect des décisions
rendues en exécution de la politique. Il a l'obligation également de signaler à
la DPJ toute plainte de violence, d'abus physique et de négligence si une
présumée victime est mineure. Il agit avec indépendance et bienveillance avec
toutes les personnes impliquées.
Comment les victimes et les plaignants peuvent
porter plainte? Il y a un mécanisme de signalement qui a été mis en place. Nous
avons choisi une firme spécialisée, ALIAS, ligne de signalement. Les plaintes
sont effectuées en ligne en complétant un formulaire entièrement adapté à la
politique pour permettre une prise en charge de toute situation en relation
avec les abus, le harcèlement, la violence et la négligence. Un bouton Je porte
plainte est placé en évidence sur tous les sites Internet des fédérations
sportives et des organismes de loisirs, également sur tous les partenaires,
alors Sports Québec Sport'Aide, le Conseil québécois du loisir, l'Institut
national du sport, les URLS, ainsi que sur le regroupement. Il est également
possible de porter plainte par téléphone en rejoignant la ligne d'aide de
Sport'Aide.
Une plainte d'abus, harcèlement ou de violence à
caractère sexuel peut être déposée à tout moment, peu importe où l'événement a eu lieu ou à quel moment l'événement a eu lieu.
Une plainte d'abus, de harcèlement, violence ou négligence à caractère
autre que sexuel, celle-ci doit être déposée dans les délais de 120 jours
suivant l'événement ou près de l'événement. Dans ce dernier cas, l'objectif
visé est une intervention rapide et efficace afin de mettre fin à un
comportement inapproprié.
• (17 heures) •
Si l'Officier des plaintes statue qu'une plainte
est recevable, il est transféré... il transmet la copie au comité de protection
de l'intégrité. Le comité de protection de l'intégrité est formé de trois
personnes choisies par l'Officier des plaintes parmi une liste de candidats
qualifiés et indépendants n'ayant aucun conflit d'intérêts et intérêts avec la
fédération en question.
Les règles de justice naturelle guident les
travaux du comité, alors l'avis de convocation ou d'audition transmis à
l'auteur présumé doit faire état des motifs pour lesquels il est convoqué. Le
comité peut siéger partout au Québec selon les besoins. Le comité peut aussi
tenir l'audition en visioconférence.
Le comité de protection de l'intégrité. Celui-ci
peut accueillir ou rejeter la plainte suite à l'audition. Avant que le CPI
transmettre... le CPI, le comité de protection de l'intégrité, transmette sa
décision aux parties, le CPI fait entériner sa décision par la fédération afin
d'éviter que la décision ne soit portée en appel à la plus haute instance de la
fédération, qui est le conseil d'administration au sens de la loi. Sans cette
mesure, la situation serait traitée par le conseil d'administration de la
fédération, et la perte d'indépendance pourrait être compromise. Les décisions du
comité d'intégrité sont donc finales et sans appel. Les renseignements
personnels obtenus et les décisions prises en application de la politique de
nature confidentielle dans les limites prévues par la loi... sont confidentiels
dans les limites prévues dans la loi, pardon.
L'application de la politique en matière
d'intégrité est en vigueur depuis le 1er février 2021 pour le volet
sportif et est en vigueur depuis le 30 septembre dernier pour le volet
loisir. 127 plaintes ont été déposées la première année et depuis le 1er février 2022. Et, à ce jour, nous avons
361 plaintes qui ont été déposées. Plus de 50 % de ces plaintes
déposées ne sont pas en relation directe avec l'abus, le harcèlement, la
violence ou la négligence, mais sont en relation
avec la régie du sport, ou la régie de l'activité de loisir, ou l'arbitrage,
exemple, qui n'est pas une conséquence par rapport à la politique. Dans l'ensemble des
plaintes qui ont été retenues, 12 % sont de nature de harcèlement sexuel, violence
sexuelle, abus sexuel ou agression sexuelle, 9 % sont dans les catégories
de négligence, 2 % de violence physique, 10 % de violence
psychologique et intimidation, 12 % sont à caractère de harcèlement
psychologique.
Nous croyons fermement que le milieu sportif et
du loisir québécois est maintenant muni d'un mécanisme efficace, indépendant
permettant d'intervenir et de sanctionner rapidement les comportements
inappropriés de toute personne évoluant dans
le milieu. L'approche bienveillante de la plainte, logée en toute confidentialité
dans un contexte non litigieux qui permet aux parties de se faire
entendre librement est, sans aucun doute, plus rassurante qu'une démarche où
l'investigation est au coeur de processus, avec tout...
La Présidente (Mme Dionne) : C'est
malheureusement, tout le temps qu'on... Ah! Bien, allez-y.
M. Lalonde (Sylvain B.) : J'étais...
deux paragraphes qu'il me restait. Je me suis timé, j'ai manqué celle-là.
La Présidente (Mme Dionne) : Désolée
de vous interrompre.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Je
suis hors jeu. Je suis hors jeu.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci beaucoup pour cet exposé. Je vais maintenant
céder la parole au... M. le député de Côte-du-Sud, du côté du
gouvernement. Nous allons débuter les échanges.
M. Rivest : Avant
de poser ma question, je vais vous laisser quelques secondes pour compléter vos
deux paragraphes.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : ...je vais vous finir ça. Bien, en fait, je disais
que l'approche bienveillante des plaintes, des plaintes logées en toute confidentialité dans un contexte ou... non
litigieux qui permet aux parties de se faire entendre librement est, sans aucun
doute, plus rassurante qu'une démarche où l'investigation est au coeur des
processus, avec tous les délais qui
s'y rattachent. Mais il est important, ici, de noter que la... que la déception
d'une partie suite à une décision rendue
ou le fait pour une partie de contrevenir à l'obligation de confidentialité
imposée par la politique peuvent porter ombrage au succès et à
l'efficacité du mécanisme.
Malgré tout,
et sous toute réserve des améliorations que nous pouvons y apporter, nous
croyons que le Québec en particulier
peut être fier d'être un modèle en ce qui concerne les actions prises en
matière de protection de l'intégrité pour le loisir et pour le sport et
fier de la mise en place du mécanisme de signalement d'une politique en matière
de protection de l'intégrité.
M. Rivest : On s'entend...
M. Lalonde (Sylvain B.) : Merci.
M. Rivest : Merci.
On s'entend que ce mécanisme-là, si je comprends bien, est quand même
relativement récent dans... dans
l'histoire du Québec. Donc, c'est bien d'être fier, mais il reste que... Si
j'avais peut-être une petite question particulière, là... Si je vous posais
la question... Dans l'ensemble des fédérations, d'abord, premier point, quelles
sont ces fédérations-là que vous parlez, là? Quelles sont-elles? Pouvez-vous
juste me les... me les énumérer rapidement?
M. Lalonde (Sylvain B.) : En
fait, il y a 67 fédérations sportives.
M. Rivest : D'accord.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Et je
vous dirais qu'il y en a... Il y a 23 organismes de loisirs. Alors,
loisirs, on peut toucher à la fédération des échecs, des... le Scrabble, du
folklore. Bref, ce sont toutes des fédérations en loisirs. En sport, bien, vous avez tous les sports :
basketball, volleyball, hockey, vous avez du racquetball. En fait, tous les
sports qui existent. Il y en a 67 qui sont fédérées, reconnues par le
ministère de... le ministère de l'Éducation.
M. Rivest : Merci. J'imagine
qu'il n'y a pas d'initiations nécessairement aussi importantes que le bizutage
dans tous... tous ces réseaux-là et ces fédérations-là, mais...
M. Lalonde (Sylvain B.) : Vous
seriez surpris.
M. Rivest : Vous seriez
surpris?
M. Lalonde (Sylvain B.) : En
fait, il ne faut pas laisser de côté aucune situation particulière.
M. Rivest : Tout à fait
M. Lalonde
(Sylvain B.) : D'ailleurs, c'est mis en place depuis le mois de
février 2021 pour le sport, mais c'est en place depuis le mois de septembre
cette année pour le loisir. Et curieusement, bien, vous allez... curieusement,
il y a des plaintes
qui sont logées, ne serait-ce qu'à la fédération de loisirs comme la FADOQ. La
FADOQ qui est une fédération reconnue
en loisir, bien, il y a des plaintes qui sont logées pour nos aînés. Alors,
c'est un mécanisme qui permet, de façon indépendante, justement, de
loger des plaintes, où les gens, dans certains cas, fort probablement, ne
s'adresseraient peut-être pas à leur fédération directement.
M. Rivest : Je
comprends.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Alors... Et c'est
vraiment... Et ça, c'est pour tout organisme en sports ou en loisirs.
M. Rivest : Pouvez-vous
nous dire dans les... On voit, là, qu'il y a eu une grande progression,
justement, des... On voit 240 %, je
crois, dans les derniers... dans les derniers mois. Puis je lisais qu'il y a
79 % des plaintes qui sont complétées. Pouvez-vous nous donner les raisons
pour lesquelles il y a 21 % de plaintes qui ne sont pas complétées.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Bien, il y a toujours des plaintes... La
problématique... D'ailleurs, ça fait partie même de nos recommandations, parce
qu'il y a des plaintes qui sont à l'intérieur de nos statistiques qui ne sont
pas complétées parce que les gens retirent
leur plainte. Ils ne veulent pas aller au processus ou aller... ou directement
à la fin du processus. Alors, on trouve ça malheureux.
Notre officier des
plaintes... en fait, c'est une équipe, hein, d'officiers des plaintes, ce n'est
pas un officier des plaintes ou une, là, c'est une équipe qui travaille à tous
les jours, quand elle reçoit les... les plaintes, pour gérer et faire... assurer
la gestion de... du mécanisme... Et je vous dirais qu'un des... un des enjeux
que nous avons, c'est que les gens portent
plainte, des fois c'est de façon anonyme, des fois c'est de façon conviviale,
mais ils vont retirer leurs plaintes. Alors,
ce qui fait qu'il y a des résultats qui ne peuvent pas être calculés à
l'intérieur de nos statistiques, effectivement.
M. Rivest : Puis,
d'après vous, si on encourageait davantage le fait de porter plainte puis de
faciliter l'accès, sur les 330 ou 360 que vous dites qu'on est rendus
actuellement, il y en aurait combien?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Bien, écoutez, c'est évident que lorsque... Et on le
voit d'ailleurs à l'intérieur du mémoire, on vous a placé un petit graphique,
et puis faites peut-être une petite recherche, vous allez voir que, quand il y a un... quand il y a un «peak», passez-moi
l'expression, quand il y a une avancée importante au niveau des... des plaintes
qui sont logées, c'est qu'il y a eu des
situations qui ont été publicisées. Alors, comme vous pouvez voir, il y a eu de
la publicité dernièrement de toute activité, et vous pouvez voir que le
mois de février a été très actif en termes de déclarations
de plaintes. Alors ça, on voit... on l'a vu depuis le début et on voit que plus
ça... ça s'accentue, on considère que,
bien, quand il y a des situations qui sont publicisées, bien, ça amène les gens
à sortir de l'ombre et de porter plainte.
Et, bon, bien, comme
je vous le disais, il y a des gens qui vont aller au bout de l'exercice. Dans
certains cas, peut-être même juste de porter plainte, ça va leur donner aussi
un sentiment d'avoir fait quelque chose et ça va leur donner... ça va être...
c'est leur situation à eux, hein? Vous savez, dans une situation où on est
devant un tribunal domestique, parce que c'est très convivial, la façon dont ça
fonctionne, les deux parties sont devant et ils répondent à l'ensemble des questions. Alors, c'est évident
qu'à partir de ce moment-là il peut y avoir des résultats fort positifs qui
peuvent résulter de cet exercice. Dans certains cas, ils ne veulent pas,
naturellement, faire l'ensemble de l'exercice, mais le fait d'avoir porté
plainte, déjà là, il y a comme un fardeau de moins sur leurs épaules.
M. Rivest : Afin
de laisser du temps à mes collègues, je vais vous poser une... deux, trois
questions en rafale.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Allez-y.
M. Rivest : Le 22 février dernier, M. Courteau, lors
de son passage ici, a mentionné avoir un service de gestion des plaintes
internes. Est-ce que vous jugez que c'est un système qui... qui est adéquat
d'après vous?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Vous parlez du système de la Ligue de hockey junior
majeur du Québec?
M. Rivest : Exactement.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Je ne connais pas le système qu'ils emploient. Je ne
peux pas vous répondre, à ce niveau-là. Je ne suis pas connaissant.
M. Rivest : Est-ce
que des athlètes de la ligue pourraient utiliser Je porte plainte?
• (17 h 10) •
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Oui, ils pourraient le faire, parce que, naturellement,
il n'y a pas... on n'a pas d'emprise au
niveau de la décision prise, mais toute plainte qui est logée à la... toute
plainte qui est logée à Je porte plainte est prise en considération. Je
m'explique. Vous avez tous ceux qui, naturellement, vont appartenir à une
fédération sportive où on a un levier parce que c'est un règlement. Alors, la
sanction, on a un levier. Toute organisation qui est non fédérée, mais qu'il y aurait des situations où on aurait une... on
aurait une plainte portée, on va contacter... admettons, c'est au
Québec, on va contacter l'organisation et on va faire un suivi avec eux pour
voir : Est-ce que vous avez des mécanismes en place pour entendre les
parties, être en mesure de faire des suivis avec eux? Puis on veut les
résultats. Alors, on ne fait pas juste envoyer par la poste, mais on veut un
résultat.
Et c'est la même chose qui
se passe au niveau d'un athlète international ou... ou au niveau national
plutôt. Un athlète qui s'entraîne à
l'Institut national du sport, mais qui s'entraîne pour une fédération sportive
nationale, mais qui porterait plainte à travers le... à travers le
mécanisme mis en place au Québec, l'officier des plaintes va en prendre acte, va faire les démarches avec la fédération
nationale pour connaître quel est le mécanisme qu'ils vont mettre en place
pour solutionner la situation qui est portée à l'attention de l'officier des
plaintes. Alors, on ne laisse pas rien tomber, si vous me permettez
l'expression, entre deux chaises, des situations qui sont à caractère... en
matière, entre autres, d'intégrité, alors, on fait des suivis à cet égard-là.
On a eu des ententes également avec le
commissaire au niveau national, où toute situation devrait... qui n'est pas de la juridiction provinciale, bien, on va le
transmettre à la commission... à la commissaire au niveau national. Et, à cet
effet-là, bien, on va s'assurer que le mécanisme au niveau national soit aussi
pris en charge.
M.
Rivest : Je comprends. Pour terminer, si vous avez un
jeune, là, de la fédération qui nous entend puis qui... qui hésite à faire un signalement, quels sont, là,
peut-être, les... la motivation qu'on peut lui donner de ce cheminement-là, dans
Je porte plainte, de la façon que c'est traité?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Bien, de
deux choses, l'une; la première, un, ils sont tous sur... sur Internet, ça fait qu'ils peuvent... ils peuvent naturellement
actionner le bouton Je porte plainte à n'importe quel endroit, sur n'importe
quelle fédération en tant que telle. Ils peuvent le faire sur leur propre
fédération. S'ils pensent avoir des représailles, ils peuvent le faire sur...
sur Je porte plainte, sur les sites Internet d'autres organismes. Ça, c'est
possible de le faire.
Il veut être
accompagné, il voudrait se faire entendre avant, même, bien, il peut faire
aussi un appel à Sport'Aide. Sport'Aide, naturellement, ça va être de
façon anonyme, mais, minimalement, Sport'Aide, ils sont habilités aussi à diriger les jeunes vers Je porte plainte pour
déposer une plainte, alors ils sont habilités à le faire. Nous avons
naturellement cette entente avec les gens de Sport'Aide.
M. Rivest : Merci.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Voilà.
La Présidente (Mme Dionne) : M. le
député de Beauce-Sud.
M. Poulin : Oui. Il nous reste
combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Dionne) : Il nous
reste six minutes.
M. Poulin : Excellent. Merci
beaucoup. Bonjour, Mme Murphy. Bonjour, M. Lalonde. Depuis le début
de nos travaux, on s'est entendu, et le député de Marquette nous le rappelle à
juste titre, que le hockey n'est pas le seul endroit
où on peut vivre des situations comme celles-là. Est-ce que, tout de même, dans
les plaintes que vous recevez, il y a un sport en particulier dans
lequel il semble se dégager davantage un climat toxique ou, du moins, que c'est
le plus difficile.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Bon, bien,
je suis désolé de vous décevoir, mais c'est le hockey.
M. Poulin : D'accord. Et dans
quelles proportions?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Dans l'ensemble de nos statistiques, en tant que
telles, la... le hockey, pas la fédération, mais plutôt le hockey, les
plaintes qui sont portées à l'attention du... de l'officier des plaintes sont
majoritairement... c'est... sont en grande progression au niveau du hockey en
particulier.
M. Poulin : Pouvez-vous nous dire
des chiffres?
M. Lalonde (Sylvain B.) : On parle
de 39 %, là, je l'ai en tête, là. On parle de 39 %. Je vais remettre
mon écran, là, je vais être capable de vous
donner... Mais on parle de 39 % qui provient de la... du... de la
discipline, plutôt, du hockey.
M. Poulin : Avez-vous une
explication sur le fait que le hockey représente 39 %?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Oui, en
fait, c'est la popularité. Tout est considéré en termes de popularité. Vous allez le voir, là, le basket, très populaire, le
hockey, très populaire, le soccer, très populaire. Alors, on voit... Alors, tout
est relatif... en fait, c'est notre analyse,
là, tout est relatif par rapport au nombre de membres. Alors, plus vous avez de
membres, plus vous avez de situations problématiques potentielles. Alors, tout
est relatif par rapport à ça.
M. Poulin : D'accord. Est-ce qu'il y
a un sport en particulier dans lequel il y a davantage une culture du silence? Dans ce que vous... les enquêtes que vous
avez menées, est-ce que vous dites, justement, la pression est tellement
grande envers ces athlètes-là en particulier? Est-ce qu'il y a un sport en
particulier?
M.
Lalonde (Sylvain B.) : Je suis obligé de vous dire que... Bon, un, on
ne s'est pas attardé à ces choses-là. Là, c'est vraiment personnel, ce que je
vais vous dire par rapport à notre expérience, OK? Je peux vous dire que, plus
on avance dans le temps, plus on parle de matière d'intégrité, plus on dégage,
en fait, les possibilités pour les gens de pouvoir avoir un accès pour en
parler. Alors, quand vous me dites que... Tu sais, le climat toxique qui peut
exister dans le milieu du sport, peu importe, hein, que ce soit au hockey, et
ça peut être dans d'autres sports, je pense que plus on avance dans le temps,
plus on ouvre les portes, plus on dégage, finalement. Alors, on s'en va vers
là, on s'en va vers un bon endroit, là.
M. Poulin : OK.
Je comprends bien. On s'est d'abord réunis ici aujourd'hui, entre autres,
beaucoup sur les enjeux du bizutage et de le... les initiations. En quoi
représentent les plaintes que vous recevez, qui sont liées au bizutage ou aux
initiations?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : En fait, nous, c'est plus... Il y a deux plaintes qui
sont logées dans toute l'expérience qu'on a
depuis le... depuis février 2021, il y a deux plaintes qui sont logées en
matière d'initiation. Il y en a deux. Ils sont connus, ils sont connus,
ils ont fait la publicité, ils ont fait... ils ont fait les manchettes, là, et
ce sont deux événements qui sont survenus dans des écoles. Une... une en
basket, en basketball en particulier, et puis l'autre qui est en hockey.
M. Poulin :
Donc, seulement, pour bien comprendre, seulement deux plaintes dans toutes vos
données...
M. Lalonde
(Sylvain B.) : En matière d'initiation.
M. Poulin :
...sont liées aux initiations.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Initiations.
M. Poulin :
OK. Ce n'est pas beaucoup.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Alors, les autres, on a... tous les autres qui sont en
matière... en matière, entre autres, abus, harcèlement, ça peut être abus,
harcèlement sexuel, ça peut être des comportements non criminels, hein, en
passant, là, parce que tout ce qui est criminel, naturellement, est porté à
l'attention des instances appropriées, soit les
corps policiers. Puis, il y a du cheminement qui se fait avec... avec toutes
ces plaintes-là de concert avec les policiers.
D'ailleurs, je tiens
juste à le mentionner, quand on a une plainte qui est logée en matière sexuelle
puis on accompagne les gens vers... vers la
police. La police, on travaille de concert avec les gens de la... avec les
corps policiers, pardon, et on... on a une... dans la politique, on a
une exclusion automatique, une exclusion, ce qui fait que... Et ça, on va le
faire strictement lorsque le corps policier va nous donner l'autorisation de le
faire. Ça veut dire que l'officier des plaintes va avoir l'autorisation pour ne
pas compromettre soit l'enquête qui est... Mais, dans la grande majorité des cas, je vous dirais, de 24, 48 heures,
les corps policiers réagissent très rapidement. Et ils sont contents, ils sont
heureux de voir que, dans le domaine où on est, les gens, ils peuvent...
ils sont automatiquement exclus de l'activité dont ils font face.
M. Poulin :
Donc, ce que vous nous dites, là, c'est qu'à travers toutes les plaintes
que vous avez eues il y en a seulement deux qui sont liées aux initiations ou
au bizutage. C'est ce que je comprends.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Exactement.
M. Poulin :
OK. Mais vous n'êtes pas inquiet de ça? Le fait que... Parce que sachant
qu'il y a eu des rites de passage avec des débordements, sachant qu'il y a des
équipes qui réservent des chalets où ils boivent de la vodka puis ils font du
calage d'alcool, ça, ça ne vous... Moi, je suis surpris qu'il y ait seulement
deux plaintes qui sont liées aux initiations. C'est très peu.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Bien, moi... Bien, c'est très peu parce que le
mécanisme est quand même très nouveau. Et je vous dirais que fort probablement
que dans les prochaines semaines, avec ce qui s'est produit, fort probablement
qu'il va y avoir, comme on dit, un dénouement plus positif par rapport à ça, où
les gens n'auront pas de crainte. Ne serait-ce que d'être ici, aujourd'hui,
pour expliquer le mécanisme, c'est un avantage additionnel de compréhension de
la part de la population. Et fort probablement que ça va encourager des parents
aussi à dire : On ne peut plus accepter des comportements de la sorte.
M. Poulin :
OK. Est-ce que... Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente
(Mme Dionne) : ...
M. Poulin :
Vous parlez des parents. Est-ce qu'il y a des parents qui vont vous voir,
disant : Mon jeune, il est gêné de ce
qu'il a vécu, de la situation, de l'humiliation qu'il a vécue? Puis il peut
avoir différents types... Mais est-ce que, des fois, c'est difficile de
convaincre l'enfant de porter plainte? Vous comprenez ce que je veux dire?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Oui.
M. Poulin : Dans le sens où je
comprends qu'il a des parents... mais, tu sais, le parent doit convaincre son
enfant de se confier et de venir vous voir, de vous parler. Comment fonctionne
cette mécanique-là?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Bien,
écoutez, je vous dirais que c'est un... c'est une situation qui a beaucoup
évoluée parce que notre officier des plaintes ou notre équipe d'officiers des plaintes,
ils sont bienveillants. Alors, ils prennent toutes les dispositions, ils
prennent le temps nécessaire également pour expliquer comment ça fonctionne,
comment ça va... on va procéder. Et, dans la majorité des cas, lorsque les
jeunes sont... sont aussi mineurs...
La Présidente (Mme Dionne) : En
terminant, M. Lalonde.
M. Lalonde (Sylvain B.) : ...ils
sont... excusez, ils sont accompagnés de leurs parents, bref.
M. Poulin : D'accord. Merci
beaucoup.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci. Merci beaucoup. Je passe maintenant la
parole à M. le député de Marquette, notre porte-parole de l'opposition
officielle.
• (17 h 20) •
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, Me Charbonneau.
Bonjour, M. Lalonde. Je suis content de vous retrouver.
Quand le député de Beauce-Sud vous a posé la
question : Quel endroit? Vous étiez tout mal de dire que c'était le
hockey. Je veux dire, je ne suis pas surpris, là, que c'est le hockey, c'est
sûr et certain. C'est notre... c'est notre sport national puis c'est là que
tout le monde pense qu'ils vont tous jouer dans la Ligue nationale. Puis on
sait que la pression des parents... Ils sont là, je veux dire, puis ça crée des
fois des problématiques également qui... qui se retrouvent plus tard quand les
jeunes vieillissent puis qu'ils se retrouvent en groupe. Puis on sait tous que,
qu'on ait 14, 15, 16 ans, 18,
20 ans et même 30 ans, là, on met 20, 25 gars ensemble, puis le
quotient intellectuel va descendre. Ça, c'est... c'est prouvé, là. Ça,
c'est prouvé.
C'est
relativement nouveau, l'officier aux plaintes. Puis honnêtement, moi, je
suis... Je ne suis pas toujours d'accord. Moi puis la ministre Charest, on ne
s'entend pas toujours sur différents dossiers, mais, là-dessus, vraiment, ça a
été... ça a été une excellente décision.
Vous êtes relativement jeune. Est-ce qu'avec ce
que vous voyez, là, pensez-vous que... Elle est où, la place à amélioration?
Quel genre de pouvoir vous aimeriez avoir plus pour être capable de faire, là,
votre... votre travail, là, encore mieux?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Bien,
écoutez, je vais faire encore... Je vais quand même poursuivre sur la question qui était aussi, tantôt... parce que,
dans le fond, c'est de permettre à un plus grand nombre de personnes, de jeunes
au Québec, de famille de pouvoir accéder à
ce processus-là, de ne pas avoir de crainte de pouvoir s'adresser à Je porte
plainte.
Je vous le dis tout de suite, la démarche, elle
est bienveillante. C'est une équipe qui est... qui est quand même très
expérimentée. Alors, ce n'est pas moi qui reçois les plaintes, en passant, là.
On a une équipe complète qui est... qui est
engagée par rapport à cette situation-là. Alors, c'est évident que,
naturellement, si on en fait la promotion encore plus, je pense que les gens
vont être habilités à participer de façon active et d'enrayer tout comportement
qui n'est... qui n'est pas approprié.
Les différents défis qu'on a, je vous dirais que
toute la gestion de confidentialité parce que, bon, on le vit. Au cours des
derniers mois, on considère qu'il y a des gens qui vont sur la place publique.
On est... on est confronté avec le tribunal
populaire, hein? Vous le savez, là. Alors, cette démarche qui est là est une
démarche qui est non... qui n'est pas...
qui est un tribunal domestique. On veut le rendre simple, on veut le rendre
accessible. Et ce qui est important, c'est que, justement, on ne veut
pas avoir de tribunal populaire.
Alors,
s'assurer que peut-être... je sais que ce n'est pas légal, mais que s'il y a
des exclusions, des suspensions ou
des expulsions de personnes qui... qui soient connues, alors, présentement, ce
n'est pas possible. Il y aura possiblement une modification, on va peut-être challenger le milieu... le milieu,
entre autres, si on est poursuivis, mais, chose certaine, c'est qu'on ne peut
pas se permettre que des entraîneurs qui sont suspendus, surtout à caractère
sexuel, on s'entend, se ramassent dans d'autres équipes ailleurs, alors
ça, et je pense qu'il y a une position à prendre par rapport à ça.
Au niveau scolaire, je vous dirais, aussi, au
niveau scolaire, on a un défi parce que toutes les fédérations sportives sont
soumises à leur propre réglementation et ils ont des leviers pour suspendre,
tandis que dans le milieu scolaire, il y a
des différences. Il y a des différences entre les organisations qui sont
fédérées au sein même du scolaire, des fédérations...
des organisations qui ne sont pas fédérées. Il y a des organisations qui
appartiennent au RSEQ. Bref, on a un niveau de gestion qui est très différent.
Et les institutions scolaires ont souvent l'habileté, ou je ne sais pas s'ils
l'ont, l'habileté, mais ils font... ils vont prendre acte qu'en toute...
dans toute situation et, des fois, ça peut être contraire à la réglementation
qui peut exister, même au sein même d'une fédération.
Bref, il y
aurait peut-être lieu, ici, d'avoir un amalgame entre... de travail à faire
avec autant le milieu fédéré que le milieu scolaire et les institutions
scolaires, parce que le milieu scolaire, ça, ça va, les gens se parlent, mais
au niveau de l'institution scolaire pour qu'on puisse amalgamer plutôt les
prises de position concernant ça.
M. Ciccone : Vous...
Juste parler un peu de la mécanique, là. Alors, vous recevez une plainte...
Puis, tantôt, je sais que vous parlez de la confidentialité, et puis on parle
de situation qui est arrivée avec un entraîneur midget, au M-18, là, dans... dans la région du Saguenay. Là,
vous recevez une plainte, vous rencontrez des... les potentielles victimes,
vous rencontrez également ceux sur lequel...
les personnes qui ont reçu justement... qui sont en faute ou présumément en
faute parce qu'on ne le sait pas encore. Là,
vous prenez une décision. Est-ce que vous avez un pouvoir de... de... exécutoire
ou un pouvoir juste de recommandation?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : C'est un pouvoir exécutoire.
M. Ciccone : Exécutoire. Alors, vous dites aux fédérations : Il doit être
suspendu un an, deux mois. Il doit suivre une thérapie. Il doit suivre
un cours de sensibilisation. La fédération est obligée de respecter ce que vous
dites.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Exactement. Dans le processus ici, un, ça leur appartient,
cette politique-là. Alors, et ils... aussi,
ils engagent, entre guillemets, l'officier des plaintes. L'officier des
plaintes, lorsqu'il reçoit... la plainte est... naturellement... considère que c'est recevable en matière de négligence,
en matière d'abus, de harcèlement ou de violence, naturellement, va
convoquer en audition les parties. Il va être entendu devant un comité de
protection de l'intégrité formé de trois
personnes. Les décisions prises par ce comité de trois personnes là, elles sont
entérinées pour que... justement, éviter
que ces mêmes personnes-là aillent en appel au conseil d'administration.
L'objectif derrière ça, c'est l'indépendance, ce qu'on n'avait pas dans
le milieu depuis x nombres d'années, parce que je suis dans le milieu depuis
quand même un certain nombre d'années. Et
puis, bien, écoutez, c'est comme un comité de discipline qui est indépendant,
mais, dans certains cas, ce sont des
situations où les membres de conseils d'administration doivent se libérer de
toute responsabilité par rapport à ça. Tout ce qu'ils ont à faire, c'est
d'entériner la position prise par un comité, et elle est exécutoire.
M.
Ciccone : Vous avez combien d'officiers en
tout?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Le nombre... le nombre
d'officiers des plaintes... En fait, c'est une équipe de sept personnes
que nous avons parce que c'est du 24 sur 24, sept jours par semaine, en fait,
il peut y avoir des situations qui peuvent arriver, là, les week-ends. On ne
travaille pas du lundi au vendredi dans ces situations-là, on travaille à la
réception des plaintes.
M.
Ciccone : La personne qui est mise en
cause, par exemple, dans n'importe quelle plainte, avez-vous le pouvoir de...
de le faire assigner? Si la personne dit : Moi, je ne veux pas participer
à ce... à ce processus-là, est-ce qu'il est suspendu automatiquement? Avez-vous
un pouvoir d'envoyer un subpoena : Non, tu es obligé de venir? Vous pouvez
faire ça, vous avez ce pouvoir-là?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Définitivement. Quelqu'un qui ne se présente pas devant
un comité d'intégrité, bien, il ne se
présente pas pour pouvoir se... pour pouvoir, en fait, discuter de cette
situation, l'autre partie va avoir plus de place. Alors, non,
définitivement. Mais, à l'heure où on se parle, pendant les deux dernières
années, pratiquement, il n'y a aucune situation problématique à cet égard-là.
Les gens, dans la grande majorité des cas... bien, en fait, dans tous les cas,
ils se présentent en audition devant les membres du comité pour venir
s'expliquer, parce que c'est ça, l'objectif de la chose. Dans certains cas
aussi, il y a des résolutions de conflits, parce que, souvent, c'est des
conflits, hein, on parle... on ne parle pas
juste d'abus sexuels ici, on parle d'abus non sexuels, et, souvent, c'est par
rapport à des conflits de... de personnalités, des gens qui ne se sont
pas bien entendus, des comportements qui sont inappropriés. Mais, dans la
grande majorité des cas, il peut être en médiation ou il peut être devant le
comité d'intégrité, et il y a des résultats.
M.
Ciccone : Quand on parle de hockey, parce
que vous avez été directeur général de Hockey Québec assez longtemps, vous savez qu'il peut y avoir des
plaintes, des plaintes frivoles, il peut y avoir... Il y a combien de plaintes
qui sont acceptées et rejetées que vous recevez?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Je vais laisser Me Charbonneau répondre à cette
question. Je ne sais pas si elle est capable.
Mme Charbonneau
(Lise) : Oui, oui. Ce qu'on a comme statistique, c'est que, dans
l'ensemble des plaintes, et non seulement pour le hockey, dans l'ensemble des
plaintes, il y a environ 50 % de ces plaintes-là qui ne sont pas
recevables parce qu'elles ne relèvent pas de l'abus du harcèlement, de la
négligence ou de la violence, mais souvent du jeu lui-même, donc de la régie
interne.
Si
on prend le hockey, bien, ce serait, par exemple, un parent qui se plaindrait
du temps de jeu de son enfant. Alors, ils vont porter une plainte sur Je porte
plainte, sauf que ce n'est pas du ressort de l'officier des plaintes de les
entendre. Voilà.
M. Ciccone : OK.
Tantôt, vous avez parlé de plaintes anonymes. Vous faites quoi avec des
plaintes anonymes, est-ce que vous les recevez ou la personne doit
s'identifier pour une plainte?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : On les reçoit, on les reçoit. Alors, si on est en
mesure d'identifier les gens, d'identifier... Souvent, bien, on va
identifier l'entraîneur, je vais prendre l'exemple, on peut identifier
l'entraîneur. Cependant, on est, puis je disais tantôt, dans un... dans une situation de tribunal
domestique, ça prend deux parties pour pouvoir entendre les parties. On
est quand même dans une justice naturelle, là, on ne peut pas accuser les gens
sans avoir... sans avoir au moins une preuve, une situation qui est portée à
notre attention, oui. Ce qui se produit, dans ce temps-là, bien, on fait une
vigie, on assure une vigie. Parce qu'on en a reçu, ça, encore là, par
expérience, on peut recevoir beaucoup de demandes
de façon anonyme pour nous parler d'entraîneurs, pour nous parler d'officiels.
Et, à cet égard... d'organisations ou
peut-être même d'administrateurs. Bref, on fait... on assure une vigie dans
certains cas. Fort probablement qu'on est en mesure aussi, des fois, de demander à la personne anonyme de pouvoir
s'identifier, justement, pour faire progresser la situation.
• (17 h 30) •
M. Ciccone : Il ne me reste pas beaucoup de temps, là. Je veux juste...
Quelques petites questions rapides, là. Avez-vous
le devoir de... de rapporter un abus sexuel sans le consentement? Pouvez-vous
le faire sans le consentement de la victime à la police?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Définitivement.
D'une façon ou d'une autre, toute action, toute plainte qui a été logée en matière sexuelle, quand c'est de façon
mineure, automatiquement, c'est... c'est signalé à la DPJ. Alors, 18 ans et
moins, bien, il faut le signaler à la DPJ. C'est un... c'est une situation où
on fait partie de la population, alors toute personne de la population doit
faire ça aussi. Alors, c'est déjà inscrit dans notre propre politique. Et, si
c'est une personne majeure, mais nous, on le signale à la police. Cependant, la
police a besoin toujours d'une... d'une personne pour pouvoir être... pour
pouvoir porter des accusations potentielles. Alors là, encore là, il y a du
travail qui se fait constamment entre les...
la victime, le corps policier et l'officier des plaintes pour les convaincre de
porter plainte à la police dans certaines situations.
M. Ciccone : Et la DPJ, ça, on savait, là.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Oui, c'est
clair.
M.
Ciccone : Mais vous avez le devoir de le faire. Bien, c'est
quand même majeur, je voulais juste le savoir. Là, c'est vraiment ma...
ma dernière question.
La Présidente (Mme Dionne) :
En
terminant. Il reste 15 secondes.
M.
Ciccone : Oui. Toutes les fédérations doivent entériner les règlements
et les procédures. Est-ce que toutes les fédérations l'ont fait ou il
n'y a personne... il n'y a pas de retardataire, aucun?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Aucun
retardataire. En date du 1er février 2021, toutes les fédérations
sportives avaient entériné leurs politiques en matière d'intégrité.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup.
M. Ciccone : Merci.
La
Présidente (Mme Dionne) :
Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député de Rosemont, porte-parole
du deuxième groupe d'opposition.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour.
M. Lalonde (Sylvain B.) : Bonjour.
M. Marissal : Merci d'être là. Merci
à madame aussi d'être là. Vous avez dit qu'il y a quand même plusieurs plaintes
qui sont abandonnées en cours de route. Oui, vous avez l'air dubitatif, là.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Oui, oui. Bien non, il y en a, il y en a qui sont
abandonnées, effectivement, où il n'y a personne dans la boîte pour venir expliquer la situation, effectivement.
Il y a des gens qui... qui vont retirer leur plainte avant la fin du
processus.
M. Marissal : Est-ce que vous faites
le suivi auprès de ces gens-là à savoir pourquoi ils ont retiré la plainte?
M. Lalonde (Sylvain B.) : Je peux,
définitivement. Je vais laisser Me Charbonneau vous répondre ici.
Mme
Charbonneau (Lise) : Oui, bonjour. Oui, les plaintes qui sont
abandonnées, bien évidemment, l'officier des plaintes, dans sa
procédure, dans sa bienveillance, est en contact avec le plaignant et il va
l'encourager, donc, à poursuivre, à aller
plus loin. Évidemment, ce qui fait peur souvent, c'est d'aller en audition,
donc d'être entendu devant trois
personnes, bon. Puis parfois, les plaignants vont abandonner. Cependant,
puisqu'on a de l'information concernant un auteur présumé d'un geste particulier, l'officier des plaintes va
faire le nécessaire auprès, par exemple, de la fédération ou du club, de l'association où travaille la personne, parce
que c'est souvent des entraîneurs, là, et va faire un suivi afin qu'on ait un regard sur son comportement, là.
Alors, ça, c'est sûr, qu'il y a... que la plainte ne tombe pas à l'oubli.
M. Marissal :
Donc, vous dites que la plus...
le plus souvent, les plaintes vont viser un entraîneur ou une entraîneure.
Mme Charbonneau
(Lise) : On a beaucoup de plaintes qui traitent... qui impliquent des
entraîneurs. On a des plaintes, évidemment, de jeunes entre eux aussi, dans des
équipes. Dans tous ces cas-là, là, même si la plainte ne va pas en audition parce que le plaignant ou la
victime se... se désiste, il y aura un suivi qui est effectué par l'officier
des plaintes afin que la plainte ne tombe pas entre deux chaises,
souvent.
M. Marissal :
OK, mais, cela dit, si le plaignant ou la plaignante décide réellement de
se désister après une tentative, je présume que vous laissez aller, puis c'est
la fin de l'histoire.
Mme Charbonneau
(Lise) : Bien, une, ou deux, ou trois tentatives, là, dépendant de
l'individu. Ça, on laisse ça au soin... c'est l'officier des plaintes qui juge
par les gens. Je vous dirais qu'ils sont très, comme je vous dis,
bienveillants, et qu'ils voient à ce que ça aboutisse vers une audition, mais
on ne peut forcer personne, évidemment.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Je dirais bienveillants et persévérants aussi.
Mme Charbonneau
(Lise) : Oui.
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Parce que c'est une question de crédibilité. Un mécanisme
comme celui-là, on ne se permet pas de laisser tomber les éléments, on veut que
les situations qui sont portées à l'attention de l'officier des plaintes
aillent jusqu'au bout. Alors, oui, malheureusement, dans certains cas, il y a
des gens qui abandonnent. Alors, s'il n'y a pas de partie à notre côté, on ne
peut pas aller... on ne peut pas faire avancer, mais je vous dirais qu'on ne
laisse pas tomber de façon... de façon intrinsèque.
M. Marissal :
Vous êtes... Je comprends bien, puis ça vous honore, mais est-ce que vous
êtes persuadé que l'étanchéité est optimale, c'est-à-dire qu'il n'y a pas un
entraîneur qui peut savoir qu'il est sous... qu'il risque d'être sous enquête
ou qu'il y a un des joueurs qui est en train de faire... Parce que ce que vous
pouvez faire est quand même assez drastique, là, dans vos règlements, puis il
n'y a pas 56 façons d'arracher un pissenlit, là, normalement, je suis
d'accord avec ça, mais est-ce que vous êtes persuadé que vous avez l'étanchéité
pour ne pas que ça coule puis que la personne ait des pressions, la personne
étant le jeune, là?
M. Lalonde
(Sylvain B.) : Dans la situation actuelle, d'ailleurs, c'est un de nos
défis qu'on vous a identifiés, parce que c'est un mécanisme quand même
relativement nouveau, et, effectivement, dans les expériences, il y a...
La Présidente (Mme
Dionne) : ...
M. Lalonde (Sylvain
B.) : Parfait. Dans les expériences, ce qui est intéressant ou ce qui
est important aussi, c'est justement la question de représailles. Alors on
s'attaque à cette situation-là en particulier.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci. Merci beaucoup pour vos contributions.
Alors, je dois
suspendre les travaux pour accueillir notre prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à
17 h 36)
(Reprise à 17 h 40)
La Présidente (Mme
Dionne) : Bonjour à tous. La commission va reprendre les travaux.
Donc, notre prochain
invité que nous avons le plaisir d'accueillir est Me Félix-Antoine
Michaud, avocat associé chez Trivium,
spécialiste en droit du travail. Donc, M. Michaud, vous disposez de
10 minutes pour nous... vous présenter et nous faire votre exposé, et nous
continuerons les échanges par la suite avec les membres de la commission.
M. Félix-Antoine Michaud
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Merci, Mme la Présidente. Merci à la commission de
m'avoir... de m'avoir invité. Donc,
Félix-Antoine Michaud, avocat. J'ai à mon actif plusieurs dossiers... je suis
un avocat de droit du travail, à la
base, mais j'ai travaillé dans plusieurs domaines connexes au droit du travail,
qui ont un lien avec le droit associatif. Et vous allez voir, dans le
cadre de ma présentation, le lien avec le droit associatif et les éléments que
je voulais vous présenter. J'ai aussi été
impliqué dans divers dossiers juridiques concernant les diverses ligues de
hockey junior au Canada et... et j'ai aussi, comme je vous disais, une
expérience, là, en droit du travail.
Mon exposé, là, de
10 minutes, je vais commencer par un bref historique rapide du statut du
joueur ou du statut qu'on a voulu donner à la ligue, ensuite le comparer avec
les autres ligues qui ont le même genre d'éléments. Et par la suite je voulais soumettre à la commission une idée, une
proposition qui pourrait permettre d'arriver à des solutions face aux
divers problèmes sur lesquels vous... auxquels vous devez étudier aujourd'hui.
Alors, le statut du joueur de hockey, là, junior
a quand même évolué dans les dernières années. Il y avait un certain flou
juridique, et ce flou juridique là, malgré ce qu'on peut penser, ne s'est
pas... ne s'est pas réglé. Dans la dernière modification, là, que tout le
monde... que tout le monde ici présent a vu, là, lorsqu'on a décidé que la Loi
sur les normes du travail ne s'appliquerait plus aux joueurs juniors, ça a été
un peu plus nuancé que ça. On a dit que, compte tenu du statut d'amateur, la
Loi sur les normes du travail ne s'appliquerait plus à eux, et on est arrivé
avec un prérequis, une prédisposition idéologique disant : Comme ils sont
amateurs, la Loi sur les normes ne s'appliquerait pas à eux, mais ça ne veut pas dire que toutes les lois du travail ne
s'appliqueraient pas à eux, ça fait juste dire que la Loi sur les normes
du travail ne s'appliquerait pas à eux. Et l'idée derrière ça, c'est qu'ils
auraient un statut de joueurs amateurs. Bien évidemment, le premier critère qui
a été étudié ou qu'on étudie pour déterminer si quelqu'un est un professionnel,
là, c'est la question du salaire, hein. Est-ce qu'on bénéficie d'un salaire?
Mais il y a d'autres éléments qui nous permettent d'établir si on est un
professionnel ou si on est un amateur.
Quand on regarde la ligue de hockey... les
ligues de hockey juniors canadiennes, donc la Ligue de l'Ouest, la Ligue de
l'Ontario et la Ligue de hockey junior majeur du Québec, ces ligues-là, par
contre, ont toutes, par contre, les
prérogatives des ligues professionnelles. Tout d'abord, c'est un marché fermé.
Donc, pour entrer dans ces ligues-là, on doit majoritairement passer par
un processus de repêchage, contrairement à la plupart des ligues amateurs. Si
on prend, par exemple, le Québec pour donner des exemples que tout le monde
peut comprendre, là, si quelqu'un veut jouer au football amateur, bon, je vais
être trahir mon alma mater, pour le Rouge et Or, il devra... il va appliquer à
l'Université Laval, puis il va être admis à l'Université Laval, puis il jouera
pour le Rouge et Or. Il ne sera pas repêché
par les Carabins puis il va être obligé d'aller jouer pour les Carabins. Ça,
c'est le principe des ligues amateurs. Dans
la Ligue de hockey junior, il y a un repêchage, hein? On te repêche à
Baie-Comeau, tu dois aller jouer à Baie-Comeau. Donc, cette liberté contractuelle, cette liberté de choix qui est
synonyme des ligues amateures, c'est ça, le principe d'un amateur, il va
jouer le niveau le plus bas d'amateur, là, il va jouer au hockey dans sa ville,
il va jouer avec ses chums. Bien, tu choisis l'endroit où tu veux jouer. Par
exemple, dans les ligues professionnelles nord-américaines, c'est des marchés fermés. Donc, ici, par exemple, la
ligue... la Ligue de hockey junior majeur, on va te repêcher, on va exiger que tu ailles jouer pour telle équipe, on va te faire
signer un contrat et on va t'enlever une partie de cette liberté contractuelle
là qui est synonyme des ligues professionnelles.
Autre élément que la ligue a, que les ligues
professionnelles ont et que les ligues amateurs n'ont pas, c'est la possibilité
d'être échangé. Les ligues professionnelles ont toutes ça en Amérique du Nord.
Tu joues pour une équipe, tu peux être échangé. Bien, dans la Ligue de hockey
junior majeur, tu peux jouer pour Baie-Comeau puis tu vas être échangé à Moncton. Oui, il y a des règles, il y a
des dates limites de transactions, mais, comme dans la Ligue nationale
de hockey, ils ont pris certaines prérogatives en fonction de l'année scolaire,
mais tu peux être échangé de Baie-Comeau à Moncton puis tu n'as pas un mot à
dire. Si tu ne participes pas à ce processus-là, si tu n'es pas d'accord, bien,
tu ne respectes plus ton contrat et, dans ce cas-là, bien, tu ne pourras plus
jouer dans la ligue. Cette prérogative d'échange est aussi caractérisée des ligues professionnelles et non pas des ligues
amateures. Tu joues pour les Carabins, tu ne seras pas échangé à Québec
pour aller jouer pour le Rouge et Or de l'Université de Montréal, tu choisis
l'endroit où tu vas, et tu ne fais pas partie
d'une ligue fermée dans laquelle tu peux être échangé... échangé ou libéré, où
on ne te veut plus.
La
plupart des ligues fermées qui ont des processus de repêchage et des processus
d'échange ont une chose en commun, pour que ce soit... que ça ait été considéré
légal dans le temps, ils ont tous un élément : ils ont permis, accepté, et
c'est même devenu une nécessité que les joueurs de ces ligues-là aient une
association qui les représente. La
contrepartie de perdre son droit contractuel... Parce que c'est ça, hein, on
dit : Tu t'en vas jouer là. C'est comme si on prenait un employé
aujourd'hui qui travaille pour la BNC puis on lui disait : Salut, moi, je
suis la Banque Nationale, je m'en vais à HEC, puis je te recrute, puis
tu t'en viens chez nous, puis tu es obligé, tu ne peux pas aller ailleurs, puis, dans deux ans, on va t'échanger à la Banque
Royale, puis c'est comme ça, bien, c'est un peu ça qu'ils vivent, ces
gens-là. Tu sais, ils ont perdu cette liberté-là. Dans toutes les ligues
professionnelles où cette liberté professionnelle et contractuelle est, d'une certaine façon, enlevée, c'est justifié par
le fait qu'une association représente ces joueurs-là et va défendre leurs intérêts dans l'objectif de
s'assurer, dans le sport professionnel, bien, qu'il y ait des salaires décents,
qu'ils partagent les revenus de manière équitable avec les
propriétaires, qu'il y ait des règles de sécurité. Parce que ta liberté n'est plus là, donc ton avenir va dépendre
beaucoup de ce qu'on va décider de faire de toi. Est-ce qu'on va décider
de t'échanger? Est-ce qu'on va décider de ne
plus te faire jouer? Alors, comme tu perds cette liberté-là, il fallait trouver
un mécanisme de protection, et ce qu'on a
pensé, c'est de faire une association des joueurs dans toutes les ligues
professionnelles.
Il serait possible de faire ça avec les ligues
de hockey junior, et une des avenues qui a déjà été tentée par le passé,
c'était de... de leur demander de se syndiquer en fonction du Code du travail.
Et moi, ce que je vous soumets aujourd'hui, c'est qu'au Québec, il y a beaucoup
de groupes qui ont des lois particulières qui permettent leurs associations et
qui ne sont pas assujettis au Code du travail, et il y a deux groupes en
particulier que je connais bien par ma pratique professionnelle d'avocat. Le
premier, c'est les étudiants. Au Québec, on est une des seules places dans le
monde qui a une loi spéciale sur l'accréditation des associations étudiantes.
Donc, les étudiants qui sont... qui ont un droit d'association dont leur
liberté d'association est encadrée, ce n'est pas par le Code du travail que les
étudiants sont associés, ils sont associés en fonction d'une loi particulière,
qui est la Loi sur l'accréditation des associations étudiantes. Même chose avec
les... les artistes et l'Union des artistes. Les artistes ont une union, un
syndicat, ont une protection et ils ne font pas... et chaque artiste n'a pas
besoin de faire signer des cartes de membre d'un syndicat
sur chaque plateau de tournage pour avoir le droit à une association. On a fait
une loi spécifique qui s'appelle la loi sur le statut de l'artiste. Et, suite à
ça, bien, les artistes ont eu une protection mutualisée, une protection globale
à travers ce... ce processus-là.
Donc, pour... selon
l'analyse que j'en ai faite, un des enjeux majeurs devant vous, c'est quand
même la protection des jeunes qui évoluent dans la Ligue de hockey junior
majeur, et il existerait des moyens législatifs, comme on a donné aux artistes,
comme on a fait dans le milieu de la construction. Dans le milieu de la
construction, là, ils n'ont pas besoin de syndiquer chacun des chantiers pour
avoir une protection, une représentation ou une association, on a fait des lois spéciales pour les artistes, pour les
étudiants, pour les... pour le domaine de la construction, et ça permet
de poser une réponse particulière à des groupes particuliers. Et, dans le cas
qui nous occupe, ça permettrait à des jeunes qu'on considère amateurs d'avoir
un regroupement face à des propriétaires, dans la mesure où ils ne seraient
plus individuellement «one-on-one» dans ces négociations-là, mais il y aurait
une association qui pourrait contrebalancer les désavantages des repêchages, des
échanges et du fait que ta destinée est entre les mains de ces propriétaires-là, sans que ces jeunes-là, disons-le qui ont entre
16 et 20 ans, aient quelconque mesure de protection possible.
La Présidente (Mme
Dionne) : Merci, M. Michaud. Donc, nous allons commencer les
échanges. Je cède la parole du côté du gouvernement, avec... Quelqu'un veut
débuter ces échanges?
M. Émond : Allons-y.
La Présidente (Mme
Dionne) : Député de Richelieu, oui, allez-y.
• (17 h 50) •
M. Émond : Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, Me Michaud. Merci pour votre présence et votre
contribution aux travaux de la commission. Je vais faire du pouce sur votre...
la dernière partie de votre intervention. Vous dites qu'une pièce législative
serait possible pour envisager la création d'une association. Vous avez parlé,
à juste titre de ce qui se fait dans le
domaine culturel avec la loi... le statut de l'artiste, en quelque sorte, qui a
été d'ailleurs amendé ou bonifié, là, dans les derniers mois, dernières
années. Mais, selon vous, puis je voudrais vous ramener dans ce qui nous concerne, hein, on veut essayer d'encadrer ou, en tout
cas, éliminer les activités de bizutage. Quel rôle pourrait jouer ce
type d'association? De quelle manière vous voyez... de quelle manière bénéfique
pourrait encadrer une association de la sorte?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Oui. Je pense qu'une association de la sorte serait
un meilleur interlocuteur, hein, pour la
ligue afin de déterminer ou d'encadrer. Quand on parle d'éliminer, là, les
activités de bizutage, on comprend que ça va toujours être difficile
d'empêcher des gens de se réunir, mais ce qu'on veut le plus possible, c'est
que la ligue prenne ses responsabilités. Et cette association-là serait un
interlocuteur crédible, avec un poids face à la ligue et face aux équipes, face
aux propriétaires, afin de créer cet encadrement-là et de le faire respecter.
Dans les ligues
professionnelles, là, il y a beaucoup de choses qui ont évolué. Je suis
persuadé que, quand M. Ciccone jouait dans la Ligue nationale, ils étaient
peut-être... je pense qu'ils étaient peut-être deux par chambre, mais des
cochambreurs. Aujourd'hui... on essaie de changer certains éléments. Tu sais,
ça a l'air anodin, mais c'est ces pratiques-là, ces manières de faire là, puis
ces... puis ces bizutages, que vous appelez, s'inscrivent dans une culture
générale, et si une association était présente et s'assurait du respect de
règles d'éthique, qu'il aurait des... puis il y aurait de l'arbitrage quand ce
n'est pas respecté... Si on met des règles, par exemple, on dit, bien, je ne
sais pas, moi, s'il est interdit de faire
telle, telle, telle pratique et que c'est fait, qui va protéger le joueur en ce
moment? Personne. Une association pourrait prendre fait et cause pour
les jeunes, avoir un tribunal d'arbitrage, aller devant ce tribunal d'arbitrage
là, et défendre le jeune, et défendre le fait que cette pratique-là ne devrait
pas avoir lieu selon... on va appeler ça le contrat de travail ou le contrat
d'association. Parce qu'en ce moment, on a bien beau mettre toutes les règles
en place, l'adolescent de 17 ans, de 18 ans qui n'est pas content, il
va faire quoi? Il va cogner à la porte du coach pour se défendre seul? Tandis
que cette association-là pourrait prendre fait et cause pour lui. Ça serait une
des méthodes pour s'assurer le respect des nouvelles règles qu'on voudrait
mettre en place pour empêcher les... le genre d'activités qu'on a entendu dans
les dernières semaines.
M. Émond : Bon,
mais là, vous m'amenez directement... vous avez... puis ça sera ma dernière
question, Mme la Présidente, avant de céder la parole à un des collègues, une
des collègues, vous m'amenez directement... vous
dites l'exemple d'un jeune qui va cogner à la porte, puis là c'est l'entraîneur
qui doit... Dans votre pratique et avec votre expertise, qu'est-ce que vous proposeriez aux membres de la
commission comme mécanisme indépendant de gestion des plaintes, dans ce
cas-là? Qu'est-ce que... qu'est-ce qui, selon vous, serait efficace, là, dans
ce domaine-là?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Ce qui serait le plus efficace, s'il y avait une
association, là, ce serait...
M. Émond : Mais...
puis je m'excuse de vous interrompre, mais au-delà de l'association, et là je
vois que vous dirigez votre intervention vers la création peut-être d'un...
d'une telle association, pardon, mais... mais vous pouvez y aller, mais même en
dehors de ce cadre-là, là.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
c'est qu'en dehors de ce cadre-là, par expérience, parce que je vais vous
donner l'exemple avec les travailleurs que je représente, c'est les... des
travailleurs qui n'ont pas à... qui n'ont pas de... qui
n'ont pas de syndicat, par exemple, puis qui vont aller se plaindre à... puis
qui, à... puis qui, en plus, s'ils ne sont
pas syndiqués, qu'ils n'ont pas de tribunal d'arbitrage possible, c'est très
difficile d'aller faire valoir ses droits devant l'employeur. Ça serait
quoi le mécanisme? Je pense que même si on mettait tout un mécanisme, puis
c'est mon opinion par rapport à ça, même si
on avait un mécanisme indépendant d'analyse de ces plaintes-là, s'il n'y a pas
un regroupement qui va prendre fait et cause, qui va aider, qui va
soutenir, qui va financer, qui va aider ce jeune-là, je pense que ce mécanisme-là
va perdre beaucoup de... beaucoup d'efficacité, pour répondre à votre question.
M. Émond : Puis croyez-vous que
c'est par l'absence d'une telle association qui a mené aux dérives qu'on a
vécues dans les dernières années?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Je
pense que si les... la ligue avait réussi à s'autoréguler, on le saurait.
M.
Émond : Donc, vous n'avez pas beaucoup d'espoir en la
volonté de la ligue, le changement de commissaire, entre autres, tout
ça, là?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Pour
moi, c'est anecdotique. Le... tu sais, le problème reste majeur. Tu as des
jeunes de... entre 16 et 20 ans qu'on traite comme des professionnels dans
une ligue où l'importance c'est de gagner, puis
il n'y a pas de contre-pouvoir. Quand il n'y a pas de contre-pouvoir, il n'y a
pas de contre-forces, c'est très rare que ceux qui ont le pouvoir s'autorégulent par eux-mêmes. Vous faites partie
aujourd'hui... aujourd'hui, si la commission est là, s'attaque à ça de
manière momentanée... mais vous ne serez pas toujours là, il n'y aura pas une
commission permanente pour regarder ce qui
se passe dans le hockey au Québec. Donc, je pense que l'absence de
contre-pouvoir rend très difficile de rendre pérennes des modifications
que vous souhaitez.
M. Émond : Je vous entends bien.
Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions? M. le député de Côte-du-Sud.
M. Rivest : Merci. Écoutez, moi, je
suis comme un peu surpris, là, d'entendre un autre regard, hein, de voir la
position que vous avez puis de me dire que... Est-ce que vous ne trouvez pas, à
ce moment-là, que c'est de prendre une
décision parce qu'il y a quelque chose actuellement qui ne fonctionne pas?
Comprenez-vous? C'est... tu sais, il y a déjà beaucoup de structures,
hein, on a vu beaucoup de regroupements, de fédérations. M. Ciccone
connaît davantage que moi, là, cette
structure-là. Vous la connaissez très bien aussi de... cette structure-là de la
hiérarchie qu'il y a à l'intérieur de la ligue. J'ai comme l'impression
qu'on arrive... tu sais, il n'y a rien de parfait, là, je connais très bien la
loi du statut de l'artiste, entre autres, il y a quand même aussi des éléments
qui sont à prendre en considération lorsqu'on souhaite légiférer d'une telle
façon. On entend bien ce que vous dites, c'est votre position, c'est votre
partage, mais j'aimerais quand même mieux
comprendre que... D'après nous, actuellement, si on change cette culture-là, si
on amène des éléments, si on en parle comme on le fait actuellement, on
a déjà quand même une piste de solution puis on est déjà en train de mettre des
actions comme Je porte plainte ou des mécanismes indépendants, etc.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Mais ce
n'est pas la première fois qu'on en parle. Quand il y a eu l'incident Jonathan Roy et Bobby Nadeau à Chicoutimi, on
s'est mis à parler de la violence qui est un... qui n'est pas exactement
le sujet de votre... de votre... de votre
commission, mais qui est quand même un sujet selon la culture qu'on parle, puis
ça a été un sujet important, il y a eu des discussions, on devrait abolir les
bagarres ou pas, puis ça fait... On parle de 2008, là, à peu près, si mon
souvenir est bon. Donc là, en 2008, c'est un sujet extrêmement important, puis
là, à un moment donné, c'est tombé un peu
plus dans l'oubli, on a arrêté d'en parler. Puis là, il arrive un autre
événement, on en reparle. Donc, avec
égard, je pense que, si ces mécanismes-là ne sont pas là, bien, là, ça devient
important, ça devient un enjeu comme en 2008, là. En 2008, c'étaient
partout, là, les images de cette fameuse bagarre entre deux gardiens de but, avec un qui ne se défend pas, un qui
frappe, c'était devenu l'enjeu numéro un de cette ligue-là, puis là, après ça, plus
personne n'en a parlé. Donc, moi, je pense qu'il y a de quoi de structurel.
Et, je reviens là-dessus, la ligue de hockey,
les Ligues canadiennes de hockey junior, là, avec les trois ligues, sont quand
même les seules ligues où les jeunes n'ont pas de liberté, donc leur avenir est
extrêmement dépendant des décisions des directeurs généraux et des coachs, sans
avoir ce mécanisme-là d'association. C'est la seule. Il n'existe pas d'autre
modèle, en Amérique du Nord, comme ça.
Donc, c'est sûr que ce n'est peut-être pas... Tu
sais, j'ai l'air de revenir beaucoup là-dessus, mais c'est parce que j'ai
étudié cette question-là, j'ai tenté de réfléchir à d'autres possibilités puis,
pour moi, ce n'est pas le modèle traditionnel syndical, là, ce n'est pas de...
Ce n'est pas un syndicat qui syndique les Remparts de Québec, selon moi, ce n'est pas ça, le modèle. Il faut avoir un
modèle adapté avec une loi particulière. Oui, il y a beaucoup de lois. Oui, le statut
de l'artiste n'est pas parfait, mais le Québec est fier de cette loi-là, puis
je pense que le Québec est aussi fier de la
Loi sur l'accréditation des étudiants, qui est une des rares lois comme ça au
monde, qui permet à des étudiants de se regrouper puis de faire valoir leurs intérêts. C'est... Sinon, bien, je
pense que, sporadiquement, ça va redevenir d'actualité comme ça l'a été
en 2008, comme ça l'est en 2023, mais que, structurellement parlant, il n'y a
rien qui va changer.
M.
Rivest : On... Je vois bien. Par contre, cette
hiérarchie-là, si on veut, dans une loi d'association comme ça,
fonctionne beaucoup par hiérarchie employeur-employé. Dans ce cas-ci, ce n'est
pas nécessairement des employés, vous l'avez dit, c'est plus un statut. Qu'est-ce qui arrive... qu'est-ce
qui arrive dans une fonction d'une plainte, qui est donnée par un père,
qui est donnée par un collègue qui fait le même sport que toi?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Oui.
C'est sûr que, tu sais, dans les... ce n'est pas des employés. C'est... Ça,
ça... La Loi sur les normes ne s'applique pas à eux. Ça ne s'applique pas à
d'autres gens qui sont considérés aussi comme des salariés dans d'autres
perspectives. On a juste décidé qu'on ne voulait pas que les propriétaires
soient obligés de les payer le salaire minimum, là, c'est la raison, c'est le
fondement derrière le fait de ne pas appliquer la Loi sur les normes à ces...
aux joueurs. Ce qui fait, par exemple, tu sais, si cette décision-là n'avait
pas été prise, peut-être qu'il y aurait eu d'autres mécanismes, tu sais.
L'article 123 de la Loi sur les normes, qui
permet de faire une plainte de harcèlement psychologique, par exemple, aurait
pu être un moyen efficace. Mais, comme on a décidé que la Loi sur les normes ne
s'appliquait pas, bien, il y a des
dispositions. Puis, comme on ne les considère pas comme des salariés, bien, il
y existe des mécanismes déjà dans nos
lois, comme les mécanismes de harcèlement psychologique de plainte, qui sont
extrêmement, maintenant, détaillés par nos tribunaux, qui pourraient
être incorporés dans ces lois-là, comme on l'a incorporé dans la Loi sur les normes, comme... Ces dispositions-là pourraient
faire partie d'une loi qui accrédite, qui associe les joueurs de hockey junior,
avec des processus, si, entre eux... Tu sais, ça existe déjà dans diverses
lois, ces mécanismes-là, ce ne serait pas tant compliqué, les amalgamer puis faire un... faire une loi qui permettrait
d'encadrer ce genre de plaintes là, par exemple, avec un type
d'autorité. Tu sais, les étudiants qui ont le droit de s'associer avec une loi,
il y a un... il n'y a pas un commissaire,
mais il y a un agent d'accréditation qui allait sur les
campus, là. C'est plutôt rare, là, j'en ai fait une, il n'y a pas longtemps,
parce qu'ils sont pas mal tous accrédités, là. Mais il en restait deux au
Québec, que j'ai fait dernièrement, où
il y a eu un agent d'accréditation qui est venu voir le référendum puis qui a
dit : Bien oui, en effet, ces étudiants-là s'associent. Puis ce
n'est pas employé-employeur, ça reste... Puis il y a des règles, puis il y a
des règles de gouvernance, puis ils sont obligés de... ils sont obligés d'avoir
des statuts, puis il faut qu'ils déterminent un montant qu'ils peuvent prendre aux étudiants, puis tout ça est encadré, puis on
n'est pas dans une relation employé-employeur.
• (18 heures) •
M. Rivest : Mais un système de plaintes
fonctionnerait de quelle façon entre un joueur et un autre joueur?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
je pense que ce qui... Comment ça fonctionne? Mettons, si on prend une relation
d'employés, là, on a le cas de deux employés qui se font des plaintes entre eux
de harcèlement psychologique, c'est... l'association a... pourrait avoir, comme
on a mis dans la Loi sur les normes par rapport à l'employeur, l'obligation...
on pourrait dire que les équipes ont l'obligation de prendre les moyens
nécessaires afin qu'il n'y ait pas de harcèlement psychologique, de harcèlement
sexuel et que, s'ils ont des plaintes de ça, ils doivent prendre les mesures
nécessaires pour que ça n'arrive pas, et l'association aurait le mandat de
faire respecter ça. Donc, s'il y a des
plaintes, les plaintes seraient faites, hein, un peu comme en droit du travail,
à l'encontre de l'équipe qui devra prendre en place les mesures.
Mais, en ce moment, il n'y a rien, il n'y a
aucun mécanisme ni par rapport à la Loi sur les normes ni par rapport à une association. C'est un peu le néant.
Donc, si on veut mettre en place des processus, bien servons-nous-en pour faire
un vrai projet. Parce que, si on fait juste un projet de plaintes, j'ai... j'ai
peu d'espoir, mais, tu sais, ça serait très facile, dans une loi comme ça,
d'encadrer, hein, un processus de plainte formelle, dire aux équipes qu'ils
sont obligés d'avoir des mécanismes, des règlements anti-harcèlement
sexuel et psychologique, comme les employeurs ont l'obligation dans la Loi sur
les normes, ou l'obligation de faire respecter leur politique harcèlement
sexuel et psychologique et qu'advenant
qu'ils ne le font pas, l'association pourrait déposer une plainte devant un
arbitre, par exemple.
M. Rivest : On
souhaite quand même, là, établir ces politiques-là. Si on exclut cette
facette-là, est-ce qu'il y a des gens actuellement dans la ligue qui ont
peut-être trop de pouvoir ou qui...
M. Michaud (Félix-Antoine) : Ça,
je ne pourrais pas vous dire.
M. Rivest : OK. Selon votre
regard, vous n'êtes pas...
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
qui ont trop de pouvoir, je ne pourrais pas vous dire, là.
M. Rivest : OK.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Mais c'est sûr qu'en fonction du rêve d'un joueur
ou du désir de mieux performer, ton
entraîneur, ton directeur général va avoir une influence majeure sur le joueur.
Est-ce qu'il a trop de pouvoir? Ça, je ne pourrais pas vous dire.
M. Rivest : OK, merci.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Merci.
La
Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le député.
D'autres interventions? Il vous reste un temps de parole de quatre
minutes.
M. Émond :
Quatre minutes. Bien, je ferais peut-être un peu de pouce puis je vais
terminer là-dessus, mais juste pour revenir, je pense que le collègue a eu une
intervention qui est pertinente. Encore dans votre optique de la création d'une
association, vous ne pensez pas, Me Michaud, que comme le collègue
l'indiquait, là, une plainte entre collègues...
Parce que je percevais dans votre intervention, dans votre volonté, la création
d'une association où le rapport de
force employeurs-employés, ça, c'est correct, c'est bien. Mais vous n'êtes pas
convaincu qu'on déplacerait le problème avec une association de joueurs dans le cas d'une plainte qui vise un
autre joueur, un collègue, que l'omerta, que la loi du silence
s'appliquerait encore là, là, qu'on viendrait simplement déplacer le problème
au sein de votre association?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : C'est une... Vous faites bien de faire du pouce
parce que c'est une bonne question puis
c'est un vrai problème. Mais si on le prend en... L'exemple du droit du travail
là-dessus est assez parlant. Deux
employés syndiqués avec le même syndicat peuvent se faire des plaintes croisées
de harcèlement psychologique, là. L'employé A, pas contre le boss, il
dit : L'employé B m'a harcelé. Puis l'employé A, il dit : Bien non,
c'est lui qui m'a harcelé. Puis c'est le
même syndicat qui doit défendre les deux salariés. Mais, si on le met à
l'équipe, la responsabilité de faire en sorte qu'il n'y ait plus de
harcèlement comme ça et qu'il y en a, on pourrait... L'association n'aura pas
le choix de saisir, par exemple, un arbitre pour que cesse cette situation-là,
avec l'obligation de défendre ces joueurs-là. Il existe des moyens légaux pour
donner des obligations à cette association-là de défendre ces cas-là et de
s'assurer qu'il y ait une équité procédurale, un peu comme quand deux employés,
hein... si deux employés se chicanent, puis qu'un syndicat décide de ne pas
porter plainte, ne pas déposer de grief, bien, un employé peut prendre un
recours qu'on appelle un 47.2 du Code du travail pour dire à son
syndicat : Tu m'as mal représenté. Tu avais l'obligation de faire... de
faire arrêter le harcèlement à mon égard, même de la part d'un autre collègue.
M. Émond :
Je comprends très bien. Mais vous ne pensez pas qu'à l'intérieur même de la
culture du silence qui prévaut présentement, qu'un joueur serait ostracisé à
dénoncer?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : C'est sûr que la culture actuelle ne favorise pas
ça, vous avez raison, ne favorisera pas de dénoncer un collègue. Ça, vous avez
raison, puis je ne pense pas que la création d'une association va changer du
tout au tout la culture d'un bout à l'autre et que ça, ça va changer, vous avez
raison.
M. Émond :
Je vous entends. Je cède la parole à nouveau au collègue.
M. Rivest :
Une question blitz un peu.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Allez-y.
M. Rivest :
On a reçu tout à l'heure le réseau des loisirs et du sport du Québec...
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Exact.
M. Rivest : ...qui regroupe des gens
qui font du scrapbooking, qui font toutes sortes... Là, on parle du hockey,
hein, comme on parle quand même d'une association où est-ce qu'il y a beaucoup
de joueurs. Dans votre proposition, hein, qui arrive un peu du champ
gauche pour moi, mais que je trouve intéressante de voir d'autres regards,
comment voyez-vous ça? On serait-tu en train de faire une association de
protection de l'ensemble des gens ou on parle juste de la ligue de hockey, de
basketball, soccer, baseball, football?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Non,
et pour une simple... une simple raison, c'est comme ça que j'ai commencé
mon intervention, c'est la seule ligue dite
amateure dont les joueurs n'ont pas de liberté contractuelle. Tu sais, le
soccer, tu peux aller jouer où ça te tente. Tu n'es pas repêché par les
Carabins ou tu n'es pas repêché par une équipe. Le scrapbooking, là, d'après moi, tu n'es pas repêché par, je ne sais pas,
moi, par l'équipe de Rosemont de scrapbooking, là, tu sais, c'est... c'est... Le hockey a cette particularité-là où on
dit à des jeunes : On te prend. Si on n'est pas content, on peut
t'envoyer dans... on peut t'échanger à la pire équipe de la ligue, tu n'auras
pas un mot à dire. On peut te faire «bencher»
pendant trois games de suite. On peut décider qu'on te «healthy scratch», c'est-à-dire, même si tu es en santé, on... tu ne joueras pas, puis tu n'auras pas
de mécanisme... Il n'y a pas de contrat, il n'y a pas de convention, il n'y a
rien. Puis, si tu n'es pas content, tu ne peux rien faire, tu es pris
avec cette équipe-là.
M. Rivest :
Mais, en même temps, le jeune...
La Présidente
(Mme Dionne) : En terminant, s'il vous plaît.
M. Rivest :
...le jeune qui joue au soccer peut vivre quand même une problématique.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Il changera. Il changera d'équipe.
M. Rivest :
Oui.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Au
hockey, il ne peut pas.
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci. Je passe maintenant la parole au député de
Marquette, notre porte-parole de l'opposition officielle.
M. Ciccone : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, Me Michaud.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bonjour.
M. Ciccone : C'est sûr et certain que vous n'avez pas besoin de me
vanter les mérites d'une association des joueurs,
là. Vous parlez à un ancien représentant adjoint des joueurs de la Ligue nationale,
la NHLPA. C'est sûr et certain, quand... puis je comprends votre
position, là, quand une association... puis ce n'est pas un syndicat, là, c'est
une association, parce que je pense qu'il
faut démêler les deux parce que, souvent, on a tendance à faire un amalgame
entre une association et puis un
syndicat. Souvent les syndicats, on va dire : Bien, c'est sûr, ils s'en
vont voir les travailleurs. Il y a de l'argent à faire. Il n'y a pas
d'argent à faire avec des gens qui font du 60 $ par semaine, là. Ça... Ça,
c'est la première des choses. Je me
rappelle, à l'époque, en 2000... je ne veux pas dire de niaiseries, là, 2012‑2013,
si je ne me trompe pas, il y a eu une tentative, là, à un moment donné,
peut-être un peu plus tard.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Non,
2013‑2014, là.
M. Ciccone : C'est ça, 2013‑2014, il y a eu une tentative. Puis je me rappelle
d'avoir eu cette conversation-là avec
la ministre Viens à l'époque, parce que c'était mon parti qui était là. Puis il
faut dire les choses telles qu'elles sont, là, qu'ils avaient changé l'article 1 de la loi sur le travail.
Puis j'avais eu une discussion avec elle par la suite, je me rappelle, en campagne électorale en 2018. Puis je lui avais
expliqué les tenants et les aboutissants de... des sports puis comment
les jeunes voyageaient, le nombre de matchs qu'on faisait avec... avec les
joueurs. Puis je lui disais : On peut dire ce qu'on voudra, là, vous avez changé l'appellation de maintenant pour
joueurs-étudiants. Non, je veux dire, ils sont traités comme des
professionnels. On les utilise comme des professionnels. On les met sur la
glace également pour... pour une industrie
privée qui fait de l'argent. Ce n'est pas tout le monde, qui fait de l'argent,
là, mais c'est ça, c'est le produit.
C'est le produit puis, en bout de ligne, tu
dis : Mais qu'est-ce que ces jeunes-là ont en retour? Qu'est-ce qui leur
reste? Oui, il y a des bourses d'études, c'est bien. Mais en même temps, est-ce
qu'on pourrait leur donner un petit quelque
chose de plus? Moi, c'est juste ça. On a parlé même du salaire minimum à
l'époque. Puis j'ai dit : Ah! le salaire minimum, ça peut être dur.
Mais si on peut mettre un 1 500 $ par année, 3 000 $ par
année en REER par petit gars, pour trois
ans, ils sortent de là avec 10 000 $, 12 000 $. Puis à 50,
60 ans, ça va avoir fructifié. Ça fait que, moi... Moi, je le voyais comme ça. Cependant, puis je
vais le dire ouvertement, là, les gens en place qui étaient là à l'époque,
c'était très ordinaire. Puis je ne veux pas avoir... Vous n'êtes pas obligé de
commenter, maître.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
c'est chaud. Merci.
M. Ciccone : Vous n'êtes pas obligé de commenter, mais je vais faire un
peu de pouce sur ce que les collègues ont dit. Souvent, le premier coup de téléphone,
quand on a un problème, quand il y a une association qui est là pour nous soutenir, on va appeler
l'association, on ne va pas voir l'équipe, on va les voir parce que c'est eux
qui vont nous représenter, c'est eux qui vont nous diriger puis nous aider.
Est-ce que ce serait la même chose par exemple?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
je le pense. Puis je pense qu'il y aurait des mécanismes, tu sais, qui seraient
mis en place dans cette association-là pour prouver son utilité. Je pense qu'il
y a des... Dans une loi... Il est possible, dans une loi, d'encadrer cette
association-là, lui donner des devoirs, des obligations. L'exemple que vous
avez commencé en disant, tu sais, ce n'est pas juste... Il y a une différence
entre un syndicat puis une association, vous
faites bien de le dire. Les étudiants qui sont associés à une association
étudiante, là, il n'y a pas de balise. Il y a des cotisations qui sont amenées,
là, mais il n'y a pas de centrale syndicale derrière ça. Ils ne ramassent pas
des cotes, ils n'ont pas de salaire, les étudiants, là. Ils prennent
un... ils prennent un montant d'argent par étudiant, par année, sur les frais
de scolarité pour avoir des mécanismes pour se défendre, mais il n'y a pas
de... Il n'y a pas de salaire. Donc, il y a moyen d'avoir une association sans
syndicat. Puis le réflexe, la plupart du temps, vous faites bien de l'amener,
M. le député, c'est que le monde entendent association, ils entendent syndicat
puis ils voient tout de suite ça. Mais ce n'est
pas une... Il y a d'autres... Le droit d'association n'égale pas le droit
d'être syndiqué, mais le droit d'association, c'est un droit fondamental au Québec puis c'est un droit qui est protégé
par la charte. Puis je pense que ça serait bénéfique, la charte
québécoise des droits et libertés qui protège ce droit d'association là.
• (18 h 10) •
Deuxièmement, quand vous dites qu'ils ne font
pas tous de l'argent, c'est intéressant quand même. Mais ce n'est pas parce
qu'une entreprise ne fait pas d'argent que c'est une raison de ne pas payer le
monde. Tu sais, il y a des entreprises qui perdent de l'argent chaque année. On
ne dira pas : Bien là, vous avez perdu de l'argent cette année, vous allez
mettre votre monde bénévole. Tu sais, il y a des années que Bombardier a perdu
de l'argent. Ils ont continué à payer leurs ingénieurs, là. Ils n'ont pas
dit : Ah! je suis désolé, les gars, on ne fait pas d'argent, tu sais...
Donc, souvent, cette idée de non... Tu sais, ce n'est pas rentable, ça ne fait
pas de nous un OBNL, tu sais. Parce qu'il y a un objectif de rentabilité
derrière plusieurs équipes, pas toutes, parce qu'il y a des équipes qui
appartiennent à des communautés, pas beaucoup, mais il y en a une ou deux. En
fait, il y a moins d'objectifs mercantiles, mais ce n'est pas parce qu'on ne
réussit pas à être rentable qu'on est un OBNL.
M. Ciccone : Mais...
Non, mais vous apportez un bon point parce que, justement, je me rappelle, lors
des négociations, moi, j'ai fait partie du lock-out de 1994, puis il y en a eu,
par la suite, en 2004, après ça. Puis, souvent, la négociation avec les... On
avait une convention collective, puis la négociation a mené à un moment donné
où la Ligue nationale a amené un partage des revenus, là, tu sais. Il n'y a
rien qui empêche aussi Moncton puis Halifax, des clubs qui font bien de
l'argent, d'en envoyer un petit peu à Baie-Comeau, puis à Rouyn, puis à
Val-d'Or, tu sais, je veux dire, aussi, il
faut s'entraider parce que l'important pour les jeunes, c'est de justement avoir
plusieurs ligues, avoir l'opportunité
puis être capable de jouer. Parce que, si les clubs ne sont pas capables de
suivre, à un moment donné, on élimine les... des équipes, puis ce n'est
pas à l'avantage des joueurs et de la compétition.
Cependant, Me Michaud,
vous savez que, pour avoir une association, il faut des membres, hein? Puis
quand vous faites affaire avec des jeunes de
16, 17, 18 ans, qui, eux autres, ont... veulent tous jouer dans la Ligue
nationale, là, puis, en même temps,
ils ont tous, là, peur de faire un mauvais pas, c'est dur en tabarouette
d'aller chercher des signatures.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Bien, c'est pour ça que le modèle syndical
d'accréditation en disant à des jeunes :
Si vous voulez vous syndiquer, allez signer 40 cartes aux Remparts de
Québec, c'est un modèle qui n'est pas viable. Pour moi, ce n'est pas...
C'est impossible. Mais la Loi sur le statut de l'artiste, quand même, a un
modèle un peu différent. La loi sur les accréditations étudiantes, là,
aujourd'hui, si une associée... une université ou un cégep a une association
étudiante, là, à moins de vouloir en sortir par un vote démocratique, tous les
étudiants en sont automatiquement membres. Donc, tu n'as pas... Ce n'est pas un
«opting in», parce qu'avec un «opting in», comme vous... avec un «opting in», comme vous parlez, M. le député, en effet,
c'est plus dur. Mais, si tu as du «opting out», déjà, en partant, ne
rien faire te laisse dans l'association. Bon, tu sais, tu peux dire au
propriétaire : Moi, je fais juste ne rien
faire. Regarde, man! Je suis protégé, je fais juste ne pas m'en mêler. Ça peut
être une des manières de le faire, de dire, si des jeunes ne voulaient
plus être associés, s'il y a tant de pourcentage, c'est comme ça dans les
associations étudiantes, là, 50 % des élèves ne veulent plus l'être, puis
il y a un référendum, puis il y a des règles, ils peuvent ne plus être... ne
plus être associés. Mais, si on change la culture du «opting in» ou du «opting
out», déjà, on répondrait à un des enjeux que vous amenez, qui est un enjeu...
qui est un enjeu important. Puis il faut se poser... Vous parlez des
différentes équipes. Si on se pose la question réelle, là, l'idée d'avoir des
repêchages, puis des échanges, puis tout ça, là, c'est-tu au bénéfice des jeunes
ou c'est au bénéfice d'avoir une ligue où il va y avoir de l'équité qui rend la ligue plus attrayante pour les spectateurs puis
pour les équipes? Je ne vois pas beaucoup de bénéfices pour le jeune de se faire dire où il doit aller jouer sans qu'il
puisse le contrôler. C'est vraiment uniquement au bénéfice des propriétaires
d'avoir une ligue dite plus équitable qui fait que le show est meilleur, mais
il y aurait d'autres manières de le rendre équitable, le show, par le partage
des revenus, par exemple.
M. Ciccone : Je veux revenir un peu sur ce qui fait en sorte qu'on est
ici aujourd'hui, là. Pas que ce n'était pas
intéressant, ce que vous disiez, parce que c'est un sujet qui me touche
énormément, mais là je vais vous interpeler en votre qualité de juriste.
En matière de soutien juridique, là, qu'est-ce que les clubs et les ligues
peuvent apporter comme amélioration? Je fais référence à tout ce qui est
bizutage. Selon vous, parce que, je veux dire, vous êtes interpelé en droit du travail, mais, en même
temps, je suis persuadé que vous travaillez avec des collègues puis qu'il y a des
collègues qui ont... qui ont représenté des poursuites civiles, par exemple, ou
autres sur, justement, des situations qui nous... qui nous rejoignent
aujourd'hui, là.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Bien,
c'est sûr qu'il y a les deux grands... deux ou trois grands mécanismes, là, qui existent, de soutien ou... Comment qu'on fait
pour améliorer ça? Tu sais, il faut des mécanismes de plaintes crédibles,
avec une certaine neutralité puis une
certaine capacité de sanction, tu sais. Si on cherche des mécanismes, outre
l'association, là, il faut trouver le
mécanisme pour que, si une personne veut que les choses changent puis qu'elle
n'est pas d'accord avec ce qui lui est arrivé, qu'il y ait un mécanisme
de plainte quelconque, indépendant, avec un pouvoir de sanction. Tu sais, tu essaies un... Pour un... Un organisme
de plainte sans pouvoir de sanction, c'est inutile, là, premier élément.
Puis, au niveau
psychologique, bien, les autres mécanismes qui existent, bien, c'est les
mécanismes usuels de droit du travail, là,
des PAE, des programmes d'aide aux employés, ou des programmes d'aide aux
joueurs, qui doivent exister, là. Je ne sais pas si ça existe ou c'est
quoi le niveau de ces programmes... de ces programmes-là, mais je pense que les
principaux éléments, si on veut que ça arrête, c'est d'avoir des mécanismes, je
vais dire juridictionnels, c'est-à-dire des organismes de contrôle qui ont un
pouvoir de sanction. Puis il faut les trouver, ces organismes-là, mais ce n'est
pas évident à mettre en place. Puis il faut que ces organismes-là puissent
entendre et sanctionner par la suite ceux
qui ne respecteraient pas les codes d'éthique que vous pourriez mettre en
place. Tu sais, vous pourriez décider qu'il y a un code d'éthique dans le sport
puis que, si ce n'est pas respecté... Mais, encore là, il va falloir que cette organisation-là
ait un pouvoir au-delà de juste dire : Vous n'avez pas été fins, tu sais,
un peu comme le Conseil de presse qui va dire à un organe de presse : Tu
n'as pas respecté la règle. Ah! bien, c'est-tu plate un peu, tu sais, mais il
n'y a rien après.
M. Ciccone :
Oui.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Tu sais, si on veut que ça change, puis on quitte
le milieu... l'idée de l'association, il faut trouver une manière
d'avoir des organismes de régulation avec... avec des dents.
M. Ciccone : En tant qu'avocat, savez-vous si le Barreau s'est prononcé
sur les dernières révélations lors des initiations?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Je n'ai pas... Je n'ai pas vu ça. Je n'ai pas...
M. Ciccone : Pensez-vous que c'est le mandat du Barreau de... Vous ne
pensez pas?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Non.
Non, je ne pense pas que c'est le mandat...
M. Ciccone : De se prononcer sur ce genre de choses là, si...
M. Michaud (Félix-Antoine) : Non,
je ne pense pas que c'est le mandat du Barreau.
M. Ciccone :
Non?
M. Michaud (Félix-Antoine) : Le
Barreau est là pour protéger le public face aux agissements des avocats, face à
ces éléments-là. C'est plus ça le coeur de son... de son mandat. S'il y a... S'il
y a des propriétaires d'équipe avocats, peut-être que, là, ça amènerait un
autre débat. Mais là, je ne veux pas me faire des confrères ennemis. Donc, je
vais m'arrêter immédiatement.
M. Ciccone : Nous, ici, on a un pouvoir de recommandation. On va faire un rapport, on
va faire des recommandations. Mais
qu'est-ce que le gouvernement, là, après, justement, nos recommandations puis
qu'on ait produit un rapport peut faire, là, pour, juridiquement... pour
enrayer le phénomène des initiations qui sont dégradantes?
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Bien, c'est ce que je vous ai proposé. C'est une
association avec un encadrement strict, puis un organisme d'arbitrage
qui pourrait dire : Bien, voici le code d'éthique, voici le code
d'honneur, voici les règles en matière de
harcèlement sexuel, voici les règles en matière de harcèlement psychologique.
Puis vous avez une association qui va vous protéger là-dedans. On peut
commencer comme ça. Puis, au début, l'association n'est pas obligée d'être là pour tous les sujets, là. On n'est pas obligé de
parler tout de suite d'échanges puis des dates limites. On pourrait se... On pourrait concentrer ça avec
un tribunal d'arbitrage du sport, hein, sur ces sujets-là, une association
qui est là pour protéger les jeunes sur ces sujets-là puis qu'à travers les
équipes elle va être financée puis va être capable d'offrir un support
juridique. Tu sais, moi, dans ma pratique, je le vois, là, l'employé qui
rentre, là, puis qui veut faire une plainte de harcèlement, là, il a peur, tu
sais. Un syndicat m'engage : Félix, on a besoin de toi. Le gars qui vient dans mon bureau, il est syndiqué, il a
une sécurité d'emploi, il ne peut pas perdre sa job, il ne sera pas rétrogradé,
il n'y a rien puis il a peur.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
vous reste 30 secondes.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Je n'imagine pas le jeune qui n'a pas tout ça,
puis il faut qu'il aille se plaindre. Il ne fera jamais rien.
M. Ciccone : Oui. Bien, merci beaucoup, maître.
M. Michaud (Félix-Antoine) : Merci.
M. Ciccone : Merci beaucoup...
La
Présidente (Mme Dionne) : Merci. Je cède maintenant la parole à M. le député
de Rosemont, votre porte-parole du deuxième groupe d'opposition.
M. Marissal : Merci,
Mme la Présidente. C'est vrai, pour reprendre les paroles de mon collègue de
Côte-du-Sud, que vous nous amenez ailleurs, mais tant mieux, tant mieux.
À quoi bon faire des commissions si c'est pour entendre tout ce qu'on sait déjà? C'est utile de pousser un petit peu plus loin.
Puis, comme vous l'avez dit, par ailleurs, ce n'est pas totalement
nouveau non plus.
Puis la Ligue de hockey junior majeur pour
parler de celle-ci, profite quand même de... je ne dirais pas d'un laxisme, là,
mais d'un certain confort indifférent de la population et des gouvernements,
qui disent : Ça marche tout seul, cette
affaire-là, c'est bien correct. Mais c'est une bibitte particulière, la Ligue
de hockey junior majeur. Puis là vous nous
le dites de façon juridique, avec des termes, par exemple, d'«association». Et
on le voit bien que c'est particulier. Et ça... Je vais prendre juste
deux petites secondes, là, pour faire mon point. Ça nous sort du... de l'espèce
de préjugé favorable ou de l'impression générale qu'ils sont donc bien chanceux
ces petits gars là, hein? Écoute, ils jouent au hockey dans les meilleures
équipes, là, on s'occupe d'eux autres, hein, on les amène en autobus partout
puis ils vont peut-être faire la Ligue nationale. Écoute, le temps de leur vie,
ils vont vivre, tu sais, leur meilleure vie, puis tout ça. Puis ce n'est pas
tout le temps, ça. Puis notre collègue ici, de Marquette, l'a dit souvent,
c'est vrai aussi que ça peut être
enrichissant puis ça fait des super bons moments. Puis je n'en doute pas. Mais
ce n'est pas vrai que c'est juste des gros
bébés gâtés choyés, qui sont donc bien heureux puis tout. Ils sont dans des
conditions particulières, très particulières, hein, qui touchent effectivement parfois au droit associatif et au droit
du travail. Juste pour ça, merci de nous avoir ramené cette
discussion-là.
Mais je me pose la
question sur une association. Il y a beaucoup de roulement dans la Ligue de
hockey junior majeur. Je ne sais pas c'est combien le temps moyen que les
joueurs restent, ça doit être deux ans et demi, peut-être même pas, ça va vite.
Ils rentrent à 16 ans, sortent à 20 au plus tard. Certains font...
• (18 h 20) •
M. Ciccone : Trois ans. Ça peut être quatre.
M. Marissal : Ça prendrait des
permanents, ça prendrait une structure. Puis est-ce que les jeunes auraient le guts puis l'envie de s'impliquer en jouant
68 matchs, en faisant des études. Dans les meilleurs des cas, c'est...
c'est rushant, la vie, aussi, de ces jeunes-là, là.
M. Michaud
(Félix-Antoine) : Oui, c'est sûr que, ça, c'est un défi important,
là, comment rendre ça fonctionnel. Mais,
M. le député de Rosemont, vous avez raison, c'est un des enjeux. Dans le
roulement, tu sais, dans les assos étudiantes, il y a du roulement, encore plus, là. Tu sais, dans les cégeps, là,
ça... c'est au moins aux deux ans, deux, trois ans aussi. Puis ils ont
trouvé des mécanismes de permanence pour rendre ça... pour rendre ça plus
pérenne. Et je pense que ce serait nécessaire. On peut imaginer, la journée que
ça existe, parce que, là, ça n'existe pas... Donc, c'est très difficile de s'imaginer comment ça fonctionnerait. Mais M.
le député de Marquette parlait du NHLPA. Le NHLPA, en ce moment, ne s'en
occupe pas, ne voit rien là-dedans parce qu'il n'y a pas de comparable, mais la
journée qu'il y aura une association des
joueurs, où les joueurs auront passé par cette association-là, puis qui vont
aller jouer dans la Ligue nationale, puis
qu'ils vont, après ça, être dans l'Association des joueurs de la Ligue
nationale, il y aura peut-être des mécanismes qui pourraient être en
place. Là, on parle un peu de sport-fiction, mais c'est très... C'est beaucoup
plus facile d'imaginer, hein, un support, par exemple, de la NHLPA par rapport
à cette association-là une fois qu'elle existe. Aujourd'hui, elle n'existe pas. Les joueurs ne veulent pas s'en mêler,
les joueurs professionnels, tant qu'elle n'existe pas. Il y en a une
gang qui a des actions dans des équipes juniors. Il y en a, tu sais, il y a
trop... il y a trop de liens. Mais la journée qu'elle existe, ça va être
beaucoup plus facile de la rendre fonctionnelle à travers des associations de
joueurs professionnels, comme la NHLPA, et de mettre en place un mécanisme de
permanence, puis demander à des joueurs, quelques
joueurs, de s'impliquer eux-mêmes dans leur association. Mais si c'est possible
de le faire dans l'association des étudiants de médecine, hein, où ils font
leurs cours de médecine puis ils sont à la fois membres de leur asso,
c'est probablement... on est probablement capable de trouver quelques joueurs
qui auraient du temps pour être dans l'association des joueurs de hockey junior
et de jouer les parties à chaque année, mais c'est sûr que ça va être un défi à
monter.
Vous parliez tantôt des conditions, puis je veux
faire un mini-pouce là-dessus. Il y a aussi beaucoup, et une association
permettrait de peut-être rééquilibrer ça, de déséquilibre entre les diverses
conditions entre deux équipes. Si tu joues dans une équipe riche puis tu es sur
la route, là, on va arrêter au restaurant, puis ils vont dire : Mangez ce
que vous... Vous mangez ce que vous voulez, les gars, puis go! Si vous jouez
pour une équipe pauvre, ils vont vous donner... ils vont vous donner des
sandwichs dans l'autobus, puis vous n'arrêterez pas pour manger, puis il faut
flyer, on n'a pas d'argent. Tu sais, il y a aussi... Il n'y a pas de règle, tu
sais, il n'y a pas de standard à la LHJMQ, là. Ça dépend de ton équipe, si elle
a de l'argent. Puis, si elle n'en a pas, bien, tant pis, les gars, vous allez
moins bien vous nourrir, vous allez moins bien manger, puis vous allez... On va
faire moins d'arrêts puis, nous autres, on ne prendra jamais l'avion parce
qu'on n'a pas d'argent. Il y a aussi un immense déséquilibre, en fonction d'où
tu as été repêché, dans tes conditions d'exercice de ton travail. Mais je suis
d'accord avec vous qu'il y a un défi sur la fonctionnalité, mais je ne pense
pas que c'est un défi insurmontable.
La
Présidente (Mme Dionne) : C'est malheureusement tout le temps que nous
avions. Alors, je vous remercie beaucoup, M. Michaud, pour votre
contribution.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ces travaux au jeudi 23 mars, à 14 h 50, où on poursuivra
le mandat. Merci.
(Fin de la séance à 18 h 24)