Journal des débats (Hansard) of the Committee on Culture and Education
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(November 29, 2022 au September 10, 2025)
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Thursday, June 5, 2025
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Vol. 47 N° 69
Clause-by-clause consideration of Bill 94, An Act to, in particular, reinforce laicity in the education network and to amend various legislative provisions
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11 h 30 (version non révisée)
(Onze heures quarante-huit minutes)
La Présidente (Mme Dionne) : Bonjour,
tout le monde! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la
Commission de la culture et de l'éducation ouverte.
La commission est réunie aujourd'hui afin
d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 94, Loi visant
notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant
diverses dispositions législatives.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Lévesque
(Chauveau); Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est remplacée par M. Morin
(Acadie); Mme Gentilcore (Terrebonne) est remplacée par M. Bérubé
(Matane-Matapédia).
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup. Donc, avant de débuter, je dépose les mémoires qui ont été reçues
depuis la fin des consultations particulières.
Donc, nous en sommes maintenant aux
remarques préliminaires pour lesquelles chaque membre dispose de 20 minutes.
Donc, j'invite en entrée de jeu le ministre à faire ces remarques
préliminaires.
M. Drainville : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Très heureux de vous retrouver et très heureux, évidemment,
de retrouver les collègues. Bonjour, chers collègues, collègues, de notre côté,
de notre famille politique, mais également...
M. Drainville : ...les
collègues d'en face. Je nous souhaite une très bonne étude de ce projet de loi n° 94. Je salue également tout le personnel à ma gauche,
Mme la sous-ministre adjointe, Stéphanie Vachon, accompagnée, bien entendu, de
notre juriste qui nous a accompagnés déjà dans quelques projets de loi,
n'est-ce pas? C'est le troisième, n'est-ce pas? Très bien, très bien, on est
contents de vous retrouver. À ma droite, M. Maxime Beaulieu, qui est du
cabinet, bien entendu, et il y a quelques juristes qui sont... qui font partie
de l'équipe qui va nous appuyer, donc, dans ces travaux, dans cette étude,
article par article.
Alors, petit résumé, Mme la
Présidente, des raisons pour lesquelles nous sommes ici, des raisons pour
lesquelles nous avons déposé ce projet de loi. D'abord, je vous rappelle, mise
en contexte, les événements de l'école Bedford qui nous ont troublés, qui ont
troublé une bonne partie de la population québécoise, les événements de Bedford
qui ont mené à des vérifications qui nous ont permis de découvrir et de
confirmer qu'il y avait, dans plusieurs écoles du Québec, des manquements à la
laïcité. Et donc, Mme la Présidente... et puis il y a eu des reportages à
travers ça, l'école Lavoie, notamment, l'école Saint-Maxime. Beaucoup de
témoignages, donc, qui nous ont amenés, Mme la Présidente, à déposer ce projet
de loi n° 94, qui vise donc à s'assurer que les
écoles du Québec restent des lieux d'apprentissage sains, sécuritaires et
laïques pour nos élèves.
Ma responsabilité, je dirais, Mme la
Présidente, notre responsabilité, c'est de renforcer tout ce qui peut être
renforcé, et c'est ce que nous faisons avec ce projet de loi, parce que l'école
québécoise est laïque, elle doit être un lieu à l'abri des influences idéologiques
ou religieuses, un lieu où la liberté de pensée et la liberté de conscience des
élèves doivent être respectées. L'école québécoise, Mme la Présidente, doit
être un lieu où on inculque à nos élèves que l'égalité entre les femmes et les
hommes est une valeur fondamentale non négociable. L'école québécoise doit être
un lieu où la science et l'éducation sexuelle, par exemple, sont enseignées,
comme le veut le régime pédagogique québécois.
Le projet de loi qui est devant nous, Mme
la Présidente, vise à offrir à nos enfants une éducation publique qui les
prépare à devenir des citoyens québécois pleinement engagés dans notre société.
Et je vous rappelle les cinq grands thèmes qui composent donc ce projet de loi.
D'abord, Mme la Présidente, premier grand
thème, si on peut dire, l'égalité entre les femmes et les hommes. Nous
affirmons, dans ce projet de loi, Mme la Présidente, que cette égalité est une
valeur fondamentale au Québec. Cette valeur, cette égalité entre les hommes et
les femmes, est intégrée à la mission de l'école publique québécoise dans ce
projet de loi. Le projet de loi, il intègre cette mission également à tout ce
qui est centre de services scolaires, à tout ce qui est commission scolaire.
Donc, les valeurs fondamentales que sont l'égalité entre les femmes et les
hommes, la laïcité de l'État, ces grands principes sont intégrés aux missions
de l'école, des centres de services, des commissions scolaires. Tout le
personnel scolaire, Mme la Présidente, devra respecter ces principes. Le projet
de loi prévoit que tout le personnel scolaire devra avoir une conduite exempte
de considérations religieuses. Le projet de loi prévoit que les élèves ont eux
aussi des devoirs, dont celui de respecter l'égalité entre les hommes et les
femmes et celui aussi de créer un environnement scolaire sans violence, sans
intimidation et exempt de racisme et de discrimination, discrimination, par
exemple, envers les personnes homosexuelles. Il est d'ailleurs prévu, Mme la
Présidente, que ces obligations que devront respecter les élèves...
M. Drainville : ...inscrite
dans les règles de conduite de l'école, le code de vie de l'école.
Le deuxième grand thème du projet de loi,
Mme la Présidente : toutes les matières doivent être respectées, et ce,
dans toutes les écoles. Pour garantir une éducation de qualité à tous nos
élèves québécois, le gouvernement propose, dans ce projet de loi, de mettre en
place de nouveaux mécanismes pour mieux encadrer l'enseignement et ainsi
s'assurer que toutes les matières soient enseignées, et ce, dans toutes les
écoles. Pour ce faire, chaque centre de services scolaire devra mettre sur pied
un comité qui aura la responsabilité de veiller à la qualité des services éducatifs
qui sont offerts dans les écoles du territoire. Il est aussi proposé dans ce
projet de loi, Mme la Présidente, que les enseignants soumettent leur
planification annuelle à la direction de l'école, qui s'assurera qu'elles
respectent le régime pédagogique québécois. Une évaluation annuelle des
enseignants est également prévue.
Mme la Présidente, troisième grand
thème : l'obligation d'avoir le visage découvert et l'élargissement de
l'interdiction de porter un signe religieux. Avec ce projet de loi n° 94, Mme la Présidente, le gouvernement propose d'élargir
l'obligation d'avoir le visage découvert en tout temps dans toutes les écoles
publiques et privées, qu'elles soient subventionnées ou non, tant pour les
élèves que pour le personnel, et ce, afin de favoriser une meilleure
communication entre les élèves et le personnel, assurer un meilleur engagement
et un meilleur apprentissage à l'école et également permettre l'identification
des personnes qui circulent dans l'école afin de renforcer le sentiment de sécurité
au sein de l'école.
Par ailleurs, Mme la Présidente, toute
personne pouvant représenter une figure d'autorité pour l'élève devra rester
neutre et n'afficher d'aucune manière ses convictions religieuses.
Le projet de loi n° 94
prévoit donc... prévoit également, devrais-je dire, d'élargir l'interdiction de
porter des signes religieux à l'ensemble du personnel des écoles publiques,
incluant les enseignants, le personnel de soutien, comme les éducatrices et les
TES, par exemple, les professionnels, le personnel administratif ainsi que les
personnes qui travaillent sous contrat ou dans le cadre d'ententes avec les
établissements scolaires. Cette règle s'appliquera aussi aux directeurs
généraux, aux directeurs généraux adjoints, aux directeurs des centres de
services scolaires et ceux des commissions scolaires.
De plus, il est proposé, Mme la
Présidente, dans ce projet de loi n° 94, que la
directive actuelle qui interdit les lieux de prière et les activités
religieuses dans les écoles soit intégrée à la loi.
Quatrième grand thème de ce projet de loi n° 94, Mme la Présidente : le projet de loi prévoit un
meilleur encadrement des demandes d'accommodement pour des motifs religieux en
milieu scolaire afin de s'assurer que les mêmes règles s'appliquent à tous. Je
vous rappelle cet extrait du rapport sur les 17 écoles, là, je cite : «Un
employé pratiquant une religion peut se voir accorder plus de congés rémunérés
qu'un employé ne pratiquant aucune religion», fin de citation, Mme la
Présidente. Une telle pratique viole l'égalité, et donc on va s'assurer, avec
l'adoption de ce projet de loi, Mme la Présidente... on veut s'assurer qu'en ce
qui a trait aux demandes d'absence pour des motifs religieux, eh bien, on veut
s'assurer qu'elles soient strictement encadrées pour préserver la continuité du
service de garde, pour s'assurer de la continuité de l'enseignement, des
services éducatifs, et pour assurer l'équité entre les membres du personnel.
Toujours dans le contexte, donc, de ces
limites strictes que nous voulons mettre en place en matière d'accommodements
religieux, les élèves devront obligatoirement fréquenter l'école et prendre
part aux évaluations et aux activités prévues par l'école. Les écoles ne
pourront plus adapter leurs méthodes d'enseignement, ou leur matériel
pédagogique, ou leurs programmes pour des raisons religieuses. L'offre
alimentaire et les activités organisées lors des journées...
M. Drainville :
...pédagogiques seront soumises aux mêmes règles pour tous.
Cinquième et dernier grand thème de ce
projet de loi, Mme la Présidente : le français dans nos écoles. Dans le
but de protéger et de renforcer la place du français comme langue officielle et
commune au Québec, le projet de loi prévoit que les membres du personnel d'un
centre de services francophone doivent utiliser exclusivement le français
lorsqu'ils sont à l'école et qu'ils communiquent oralement ou par écrit avec un
élève ou avec un autre membre du personnel. Ce projet de loi prévoit que cette
obligation s'applique également à toute personne qui, dans le cadre de tout
contrat de service avec un centre de services francophone, serait appelée à
travailler auprès d'élèves ou être régulièrement en contact avec eux dans
l'établissement scolaire ou sur ses terrains.
En guise de conclusion, Mme la Présidente,
j'en appelle à notre sens des responsabilités. Nos écoles publiques doivent
être laïques, nous avons une responsabilité, comme institutions, de nous en
assurer. Quand je parle comme institutions, je parle des institutions au
pluriel, donc je parle de nos écoles, je parle de nos centres de services
scolaire, de nos commissions scolaires. Je parle aussi de l'institution qu'est
cette Assemblée nationale, Mme la Présidente. Nous avons, collectivement, ici,
une responsabilité d'assurer la laïcité de l'école publique. Nous avons une
responsabilité également, comme partis politiques, d'assurer la laïcité dans
les écoles publiques du Québec.
• (12 heures) •
Il faut, à un moment donné, Mme la
Présidente, que cette laïcité s'incarne. Ça ne peut pas... ça ne peut pas être
seulement qu'un discours, elle doit être visible, cette laïcité, elle doit
s'incarner dans des gestes du quotidien, elle doit s'incarner dans des
pratiques qui régulent les journées à l'école. Il faut que ce soit du concret,
la laïcité, Mme la Présidente. Et je pense que, comme formations politiques,
comme partis politiques, nous avons une responsabilité d'y veiller.
Donc, responsabilité comme institutions,
responsabilité institutionnelle, responsabilité collective, comme famille
politique et responsabilité individuelle également, comme membres de
l'Assemblée nationale, Mme la Présidente, comme députés. Nous avons, j'en ai la
conviction profonde, la responsabilité d'assurer la laïcité dans nos écoles, de
s'assurer que nos élèves sont respectés dans leur liberté de conscience,
s'assurer également que certaines grandes valeurs que je qualifierais de
sacrées soient protégées, renforcées. Je parle en particulier de l'égalité
entre les hommes et les femmes.
Bref, Mme la Présidente, nous sommes tous
placés devant nos responsabilités, en matière de laïcité, et ce projet de loi,
c'est l'occasion, Mme la Présidente, d'envoyer un signal clair à la société
québécoise que les dérives qui ont été observées depuis un certain temps, que
ces dérives-là ne sont pas acceptables et que nous allons mettre en place des
moyens, des balises, un cadre qui va nous assurer que ces dérives ne se
reproduisent pas.
Et, Mme la Présidente, on va aussi déposer
des amendements, parce qu'évidemment on a eu des consultations particulières,
puis ces consultations particulières ont produit un certain nombre de
propositions, de suggestions. Et donc, Mme la Présidente, après réflexion, nous
avons décidé, donc, de procéder à un certain nombre d'ajustements, de clarifications,
d'éclaircissements qui feront l'objet, donc, de ces amendements et qui
pourront, donc, être étudiés avec le reste du projet de loi dans les prochaines
heures, prochains jours, prochaines semaines...
12 h (version non révisée)
M. Drainville : ...et donc, Mme
la Présidente, si vous me permettez, je vais déposer, donc, cette première
série d'amendements. Je l'ai en copie papier. Ça a été déposé sur le site du...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Je vous informe que les amendements ont été déposés sur Greffier. Ils sont
accessibles à tous.
M. Drainville : Voilà. Très
bien. Alors, voilà qui est fait, Mme la Présidente.
Je souhaite, en terminant, que nos travaux
se déroulent dans le respect, dans une certaine sérénité. Même si c'est un
sujet, la laïcité, qui peut parfois nous amener à... qui peut parfois
déclencher des moments de passion, c'est un sujet éminemment délicat, qui nous
touche dans nos convictions profondes. Mais... Puis je pense qu'on aura sans
doute de ces moments, parfois, d'émotion, de passion, de... où on exprimera
avec force nos convictions personnelles, nos convictions politiques. Mais, je
pense, Mme la Présidente, qu'il est possible de réussir l'étude de ce projet de
loi dans un climat respectueux des positions des uns et des autres. Évidemment,
Mme la Présidente, je ne vous cacherai pas que je souhaite la collaboration des
oppositions. J'espère qu'on pourra, au terme d'une étude rigoureuse, faire
avancer le projet de loi. Je ne souhaite évidemment pas qu'une attitude, par
exemple de blocage, vienne nous empêcher de faire avancer le projet de loi. Il
y aura des oppositions, il y aura des désaccords, c'est tout à fait normal, ça
fait partie du processus démocratique, mais j'espère sincèrement, Mme la
Présidente, qu'on réussira... une fois qu'on aura exprimé nos positions de part
et d'autre, nos différends, j'espère qu'on réussira quand même à trouver un
rythme qui nous permettra, à terme, d'achever dans de belles conditions, dans
de bonnes conditions, l'étude de ce projet de loi.
Cela conclut mes remarques préliminaires, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. C'est avec des sentiments, je dirais, d'indignation, de
tristesse et de désarroi que je commence aujourd'hui avec vous l'étude de ce
projet de loi là. Parce que je trouve ça triste, ce qui se passe. Les
intentions du projet de loi, telles qu'elles sont dites, elles paraissent
nobles, mais les conséquences de ce projet de loi là, ça va être exactement le
contraire. C'est un projet de loi drapé d'intentions nobles, hein, la laïcité,
l'égalité entre les femmes et les hommes, mais la réalité, c'est que ce projet
de loi là va faire reculer la laïcité au Québec, il va faire reculer les
droits, il va faire reculer l'égalité entre les femmes et les hommes. Et c'est
extrêmement grave.
Je ne sais pas à quel point le ministre va
avoir de l'ouverture ou, je ne sais pas, une espèce d'illumination pour, tout à
coup, s'en rendre compte et le retirer, mais je pense que ce serait
souhaitable. On va clairement voter contre ça. On l'a déjà dit. Et on va
évidemment analyser les amendements qui ont été déposés à la dernière minute,
mais ça m'étonnerait qu'il y ait quoi que ce soit, là-dedans, qui change la
nature profonde du projet de loi.
Le projet de loi, ce qui est problématique
là-dedans, c'est qu'il véhicule une conception fausse de la laïcité. C'est
drôle, parce que, même à l'article un, on fait une définition qui est... qui
est bonne, de la «laïcité», mais en même temps, quand on regarde les impacts du
projet loi, ça va complètement contre ça.
La laïcité est là pour défendre la liberté
de conscience et la liberté de religion. La liberté de conscience et la liberté
de religion vont reculer avec ce projet de loi là. Ils vont reculer.
La laïcité est là pour assurer la
neutralité de l'État. La neutralité de l'État, ce n'est pas ce qui est dans ce
projet de loi là. Ce projet de loi là, c'est un État qui va créer des
discriminations sur la base de la religion. Alors, on fait reculer la laïcité.
C'est un grand recul pour la laïcité. Le projet de loi n° 94 est pire que
la loi 21 en ce sens. Et c'est comme s'il y avait eu une banalisation de l'interdiction
des signes religieux, à ce moment-là, qui a fait reculer les droits au Québec.
Et c'est tellement conscient de la part du
gouvernement qu'il a mis et la loi 21 et la loi 94 à l'abri de l'examen
des tribunaux. Il ne faudrait surtout pas que quelqu'un se penche là-dessus
honnêtement pour voir si ça fait reculer les droits des Québécoises et des
Québécois. Pourquoi? Parce qu'ils se rendraient compte que ça les fait reculer.
Ils le savent très bien...
M. Zanetti : ...et c'est pour
ça qu'ils utilisent la clause dérogatoire, qui pourrait être utilisée à des
fins parfaitement nobles, mais, cette fois-ci, l'utilisation de la clause
dérogatoire dans le cas de la loi 21 et dans le cas de la loi 94,
elle vient faire reculer les droits. Et ils le savent, sinon ils ne s'en
serviraient pas. Je n'en reviens pas. Je pense que cette loi-là, autant la 21
que la 94, ce ne sont pas des lois éternelles. Je pense qu'un jour on reviendra
là-dessus au Québec, je le souhaite fortement. Et je pense que, quand on va
regarder, on va porter un regard historique sur cette période-là, on va se
dire : Oui, nous avons erré, nous avons erré solidement et nous avons
laissé les droits et libertés, au Québec, des Québécoises et des Québécois
partir à la dérive. Je trouve ça vraiment grave. Ce sera l'héritage du ministre
et de ce gouvernement et les gens porteront leur jugement.
Je ne peux pas passer sous silence le
moment qui a été choisi pour débattre, commencer l'étude détaillée du projet
loi 94, Mme la Présidente. Ça fait deux semaines qu'on pourrait l'étudier
en commission parlementaire, et là il commence quel jour, la veille des bilans.
C'est quoi? Qu'est-ce que ça dit, ça, de la fonction politique de ce projet de
loi là? Ce que ça nous dit, c'est que c'est une diversion. C'est là pour qu'on
parle d'autre chose que le vrai bilan de la CAQ en éducation, en santé,
SAAQclic, Northvolt, l'environnement, les droits des travailleurs en général,
tout le monde, crise du logement. C'est fait pour essayer qu'on regarde
ailleurs, comme les magiciens font, là : Regardez ici, pendant que le tour
se trouve à une autre place. Et ça, je trouve ça déplorable. C'est tellement
grossier. La veille, la veille des bilans. C'est tellement clair, je veux dire.
• (12 h 10) •
Ce projet de loi là, c'est un projet de
loi d'exclusion sociale. C'est un projet de loi qui va fragmenter le sentiment
d'appartenance à la nation québécoise. Et ça, pour un parti nationaliste, c'est
impardonnable. La principale préoccupation d'un parti nationaliste, ça devrait
être de s'assurer que tout le monde qui vit au Québec, là, se sente appartenir
à la nation québécoise, que personne ne se sente sur la base de ses origines,
ou de la religion, ou de quelqu'autre dimension de son identité... se sente mis
à part, comme si lui ou elle avait moins de droits. Et les torts que ça fait,
la loi 21 puis la loi 94, qui vient juste en remettre, les torts que
ça fait au sentiment d'appartenance de beaucoup de Québécoises et de Québécois
à la nation, c'est des torts qui seront malheureusement durables. Ça divise la
société. Et ça va... ça va miner notre capacité collective à faire des grands
projets.
C'est fou parce qu'il y a beaucoup de gens
qui ont annoncé leur opposition à ce projet de loi là. Puis je veux juste le
rappeler, parce qu'on sent... on sent le ministre... Le ministre se sent dans
une position de force, comme si l'unanimité au Québec était derrière lui, comme
si tous les Québécoises et les Québécois et la société se disaient : Il
s'agit là d'un choix évident, d'une politique rassembleuse, O.K.? Mais je veux
quand même noter tous les gens qui sont contre puis qui sont venus le dire en
commission, et puis là, bien, il y a beaucoup plus de gens... d'organisations
qui sont contre, mais, évidemment, tout le monde n'est pas... n'a pas eu la
chance de venir s'exprimer en commission. Mais je pense à la lettre ouverte qui
a été écrite par trois anciennes députées et ministres de l'Assemblée
nationale, Françoise David, Louise Harel et Christine St-Pierre, de trois
partis différents, unies contre ce projet de loi là. Je pense aux centrales
syndicales, à la CSQ, à la centrale, mais aussi à la FSE, la Fédération des
syndicats de l'enseignement affiliée à la CSQ. Je pense à la CSN, à la FAE qui
représente les travailleuses et les travailleurs du milieu de l'éducation. Ils
ont tous et toutes dit : Ça n'a pas de bon sens, non seulement pour des enjeux
liés aux droits et libertés, au recul de l'égalité entre les femmes et les
hommes, au recul de la laïcité, mais aussi à cause de ce que ça va faire subir
aux travailleurs, à qui on est en train de faire subir des compressions.
Puis, en même temps, qu'est-ce qu'on va
faire? Bien là, le gouvernement va leur jeter sur le dos une charge
bureaucratique complètement démesurée et irréaliste. J'espère qu'au moins,
là-dessus, il y aura ouverture à des amendements. On dirait que... Je ne sais
pas à quel point le ministre sera à l'écoute de son milieu. Pour l'instant, ce
n'est pas tant ça, le sentiment de la base, mais on va s'essayer parce que
c'est notre devoir. Parmi les gens qui sont contre, la Commission des droits de
la personne et...
M. Zanetti : ...Mme la
Présidente. La Ligue des droits et libertés, l'éminent intellectuel québécois
Gérard Bouchard, Louis-Philippe Lampron, professeur à l'université en droit,
plusieurs professeurs de plusieurs facultés d'éducation dans les universités du
Québec. Parmi les groupes de femmes qui se sont opposés à ça, hein, parce
que...
Comment ça se fait qu'un projet de loi
supposé améliorer l'égalité entre les femmes et les hommes fait réagir
négativement autant de groupes de femmes? Pouvez-vous m'expliquer ça, si c'est
si évident? Je vais vous le dire qui est contre dans les réseaux des groupes
des femmes : les Réseaux des tables régionales des groupes de femmes du
Québec, la Fédération des femmes du Québec, la Table de concertation des
organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, la Fédération des
maisons d'hébergement pour femmes, le Conseil d'intervention pour l'accès des
femmes au travail, l'Observatoire pour la justice migrante, le Réseau québécois
d'action pour la santé des femmes, le Conseil canadien des femmes musulmanes,
la Fédération du Québec pour le planning des naissances, les Regroupements
québécois des CALACS, les Fonds d'action et d'éducation juridique pour les
femmes, Association québécoise des organismes de coopération internationale,
les Relais femmes, et beaucoup d'autres choses ont été critiquées par d'autres
acteurs de la société civile.
Mais comment un projet de loi censé
améliorer l'égalité entre les femmes et les hommes pourrait-il créer une telle
réaction chez les groupes de femmes, une réaction aussi épidermique et
nombreuse? Il doit y avoir quelque chose qui ne fonctionne pas. D'habitude,
quand on fait avancer les droits des femmes, ça fonctionne, puis les groupes
des femmes le reconnaissent. Normalement, c'est ça qui se passe. Mais là,
clairement, c'est une intention du projet de loi, mais ce n'est pas ça, les
effets qui vont en découler.
J'ai parlé un peu de la charge contre les
enseignants et les cadres, mais je vais donner des détails. En ce moment, les enseignantes,
les enseignants du Québec, les cadres, les gens qui travaillent, les autres
corps de métier dans le système de l'éducation, ils sont en grande pénurie de
main-d'œuvre, une pénurie de main-d'œuvre immense qui crée une surcharge de
travail pour les travailleuses et travailleurs qui sont là déjà. Et là, en
plus, on va se couper de plein de monde qui pourrait venir contribuer au
système d'éducation, des femmes, entre autres, qui portent les hijabs, qui sont
formées, qui sont excellentes, qui sont d'une haute qualification. On va leur
dire : Bien non, sur la base du fait que de votre liberté de conscience,
vous ne pourrez pas venir servir la société québécoise et contribuer. Ça, c'est
très grave, c'est complètement irrationnel.
Et je n'en reviens pas aussi, ça a été
assez clairement dit par la ministre de la Famille, à qui on a dit :
Voulez-vous que... c'était... qu'en toute cohérence, avec le projet de loi
n° 94, on interdise aussi le voile, par exemple, dans les services de
garde éducatifs? Elle a dit : Bien, si on fait ça, je ne serai pas capable
de donner des services. Tu sais, c'est assez clair puis c'est... Le phénomène
sera-t-il aussi marqué dans le système d'éducation pour les autres corps de
métier, que les enseignants pour qui c'est déjà interdit depuis un bout? C'est
difficile à mesurer, mais c'est une évidence, tu sais, on ne peut pas le
mesurer, quantifier exactement, mais c'est une évidence. Et toute cette
surcharge-là, elle va s'empiler sur les épaules de ceux et celles qui restent,
qui ne sont pas encore en épuisement professionnel. Et les cadres, imaginez,
les cadres, on va leur demander, en plus de la pénurie de cadres, en plus de
tout ce qu'ils ont à faire, on va leur demander d'évaluer de la paperasse, des
comptes rendus dont les impacts sont vraiment nébuleux, là, on n'est pas sûr
que ça va donner vraiment quelque chose.
Puis, par rapport aux évaluations des
professeurs, c'est très noble d'évaluer les professeurs, puis il faut évaluer
les professeurs. Il y a toutes sortes de choses là-dedans, et ça pourrait être
bien fait, mais là on va dire : Une évaluation par professeur par année.
Ils ont clairement dit que ça prenait cinq heures, au moins, à un directeur,
une directrice, évaluer un professeur. Imaginez une école à 100 personnes,
à 100 enseignants à évaluer par année, 500 heures, c'est trois mois de
travail pour une direction déjà surchargée. Où pensez-vous qu'ils vont trouver
ces trois mois de travail? Ce n'est pas comme si ça venait à une époque où on
disait : On va ajouter des fonds en éducation, on est en période de
compressions et d'austérité, ça va être vécu. Et ça, là, tout ça, on fait ça à
la grandeur du Québec, pour un problème qui est survenu dans une école puis où
tous les gens du milieu disent, en gros : Pas besoin de nouvelles lois
pour régler les problèmes. Ces problèmes-là auraient tous pu être réglés dans
le cadre législatif actuel, et il y a juste du monde qui n'ont pas assumé leurs
responsabilités, puis aussi d'autres causes systémiques probablement qui ont
causé ça, puis on pourrait les analyser, ce serait intéressant.
Mais au lieu de regarder ça, puis de
regarder au ministre... le ministre, au lieu de regarder son réseau puis
dire : Comment j'aurais pu les aider à passer à travers ça? Bien là, il
arrive avec une voie législative, une façon non concertée, puis il leur envoie
plus de bureaucratie sur le dos. C'est vraiment grave...
M. Zanetti : ...quand je
disais tout à l'heure que cette... l'intention d'aller servir et améliorer la
laïcité de l'État au Québec, c'était une intention qui était proclamée comme
ça, mais que, dans le fond, les conséquences du projet de loi ne vont pas dans
cette direction-là, je voudrais mentionner une autre chose qui est absente du
projet de loi, c'est la question du financement des écoles qui donnent un
enseignement religieux. Ça fait longtemps, à Québec solidaire, qu'on est en
faveur de la laïcité de l'État et qu'on dit qu'il faut cesser de donner de
l'argent à des écoles qui font de l'enseignement religieux. Et là le ministre
ne va pas, là. On l'a questionné en étude détaillée, puis il ne sait même pas
il y en a combien, des écoles comme ça qui enseignent la religion, et qu'il
finance. C'est comme un sujet qui ne l'intéresse pas, parce que les écoles
privées, pour lui, c'est sacré, et qu'on ne peut pas se questionner sur le
financement de ces entités-là. C'est quelque chose auquel on ne touchera
jamais, je ne sais pas pourquoi. Mais on pourrait même sauver de l'argent, on
pourrait avoir un système d'éducation qui est plus juste, plus accessible à
tous, plus laïque, et, si le ministre voulait aller dans cette direction-là,
clairement, il aurait commencé par ça. Mais ce n'est pas ça, la préoccupation
du gouvernement.
• (12 h 20) •
Dans ses remarques préliminaires, le
ministre a parlé de ce qui s'est passé à l'école Bedford. Ce qui s'est passé à
l'école Bedford, c'est terrible. Ça a fait l'unanimité, dans la société
québécoise, que ça n'a pas de bon sens, ce qui s'est passé là. Il y a des
comportements complètement inacceptables qui n'auraient jamais dû avoir lieu,
il y a du monde qui n'ont pas agi, ça a traîné pendant huit ans, il y a eu une
rotation de cadres, tout le monde s'est renvoyé la balle. Il y a un problème
énorme qui s'est passé là. Mais de voir l'écart entre le projet de loi et la
situation à l'école Bedford, c'est quand même impressionnant, parce
qu'essentiellement l'élément déclencheur, c'est des hommes, à l'école Bedford,
qui ne portent pas de signes religieux, puis qui ont des comportements
inacceptables, et là, finalement, on se retrouve avec un projet de loi qui,
essentiellement, va interdire les signes religieux, principalement à des
femmes. Alors, les hommes qui font du trouble... puis, encore une fois, ça va
être des femmes qui vont assumer la majorité des conséquences. Il y a quelque
chose, là-dedans, qui ne sert clairement pas l'égalité entre les femmes et les
hommes au Québec. C'est une contradiction évidente et inacceptable, c'est...
c'est....
Puis même, dans... quand on regarde le
rapport des 17 écoles... Parce qu'évidemment, le ministre a reçu le rapport de
l'école Bedford, puis là il n'y avait rien là-dedans qui justifiait vraiment
d'étendre l'interdiction des signes religieux, ça n'en parlait pas vraiment, et
puis ce n'était pas ça, les recommandations. Donc là, il a fait faire un
rapport sur 17 écoles et puis là, il a trouvé une école au Québec où,
justement, il y avait des signes religieux, il y avait des visages couverts,
puis là il s'est dit : Ah! parfait, là, j'ai mon prétexte, je vais faire
une loi mur à mur partout au Québec. Et c'est comme si... Je ne sais pas
qu'est-ce que ça montre exactement là, mais ça montre un peu l'espèce de
distance entre les éléments déclencheurs et la réponse législative. L'espèce
d'incohérence entre les deux nous laisse penser, Mme la Présidente, que les
intentions derrière ça, elles ne sont pas là, la date à laquelle commence
l'étude détaillée et avant les bilans. Écoutez, tu sais, je veux dire, on
dirait vraiment, là, on dirait vraiment que c'est fait pour faire une éclipse
médiatique sur le bilan catastrophique du gouvernement, essayer de faire qu'on
parle de tout ça plutôt que d'autres choses. Je trouve que c'est inacceptable.
Je veux être sûr de ne rien manquer de ce
que je voulais vous dire, aujourd'hui, par rapport à ça. C'est, comme je le
disais tout à l'heure, une des choses qui vont être... Évidemment, ce projet de
loi là va briser des rêves, là, puis va briser des carrières, puis ça va
complètement changer l'orientation de vie de plein de personnes, et ça va avoir
des marques profondes dans la société québécoise. La loi 21 a laissé des traces
profondes dans la société québécoise. Bien, évidemment, le gouvernement
n'enquête pas là-dessus. Mais pour toutes les personnes qui, même si elles ne
portent pas de signes religieux, ont quelqu'un dans leur famille qui en porte,
puis qui ont vu les conséquences concrètes que ça a eu sur ces personnes là,
ces gens-là se sont sentis indirectement attaqués et visés aussi. Et c'est
comme si le message qui était envoyé, c'était : Vous n'avez pas les mêmes
droits que les autres...
M. Zanetti : ...ne sera jamais
reconnu. Et pour moi, ça, je trouve que c'est tellement violent. Chaque fois
que ça arrive dans les médias, là, puis que là on parle ici, puis qu'il y a un
projet de loi sur l'interdiction des signes religieux qui est complètement
distinct de la question de la laïcité, mais ce que ça génère, là, on le voit
sur les réseaux sociaux, là, ça dégêne des commentaires racistes, ça dégêne des
propos qui sont violents. Et les gens qui reçoivent ça, ils ne méritent pas ça.
Les gens qui reçoivent ça, là, ça les marque pour longtemps, puis ça marque
leur famille, ça marque leurs enfants, et c'est d'une tristesse infinie. Puis,
des fois, je me demande à quel point le ministre et les membres de ce
gouvernement-là sont conscients de ça. Je me demande si, à un moment donné, ils
ont osé aller leur demander qu'est-ce que ça faisait.
Le ministre aime rappeler, là, l'anecdote
de la personne, une fois, dont il a entendu parler, que c'est une enseignante
puis elle, elle porte l'hidjab, mais elle l'enlève juste pour travailler, puis
elle le remet après, puis ça ne la dérange pas, là, comme la preuve qu'il n'y
en a pas de problème puis ce n'est pas une atteinte à la liberté de conscience
parce que les... parce que, etc. Mais au-delà de cet exemple-là qui fait son
affaire, est-il allé demander à ces personnes-là qui allaient subir les impacts
de cette loi là, qu'est ce que ça allait faire, qu'elles allaient être les
conséquences pour elles principalement? Est-ce qu'il s'est soucié de ça, de
comment se sentiraient ces personnes-là puis de comment est ce qu'il faudrait
agir avec elles et eux pour être capable de faire une société ensemble, une
société évidemment laïque, une société où il y a une véritable égalité entre
les femmes et les hommes, une société plus juste, une société sans
discrimination, sans école à trois vitesses, une société dans laquelle tout le
monde se sent bien, dans laquelle... à laquelle tout le monde se sent
appartenir? Je doute que le ministre ait fait cet effort-là, et je le déplore,
et c'est dans cet esprit vraiment d'indignation qu'on va commencer, Mme la
Présidente, s'il le faut, l'étude de ce projet de loi. Terminé
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Donc, je cède maintenant la parole au député de
Matane-Matapédia-Métis. La parole est à vous.
M. Bérubé : Merci, Mme la
Présidente. La laïcité, c'est... de nos institutions publiques, c'est la
garantie de liberté de conscience pour tous et toutes. C'est comme ça qu'on le
voit. On est d'accord avec tout ce qui est dans le projet de loi. Il manque des
éléments, mais on est d'accord. C'est la deuxième tentative législative de la
CAQ sur cet enjeu. On y a participé à chaque fois. On a voté pour la loi n° 21.
Ce n'était pas la première fois que l'Assemblée nationale aborder ces
questions, ce n'est pas moi qui vais apprendre ça au ministre. J'étais avec lui
au Parti québécois lorsqu'on a abordé ces questions-là. Et je reconnais au
ministre, pour le connaître, une véritable conviction sur ces enjeux-là et un
courage dont il a fait preuve à l'époque où il était dans le gouvernement de la
première ministre Marois, d'expliquer pourquoi il fallait le faire pour
garantir la liberté de conscience, pour avoir une cohérence dans l'ensemble de
la société, aujourd'hui, on parle plus d'éducation, et pour s'assurer que
d'envoyer un message aux personnes qui viennent chez nous, que dans les valeurs
importantes, il y a aussi la laïcité, il y a la primauté du français, il y a
l'égalité entre les hommes et les femmes. Alors, je sais qu'il le fait par
conviction et je ne lui prête pas d'autres intentions, je tiens à le dire.
Alors, à partir du moment où on étudie ces questions-là, ça nous intéresse, et
on aura des propositions à faire. Évidemment, si le point de départ, c'est
l'école Bedford, mais essayons de régler ce qui a été rapporté dans le rapport.
Je suis bien conscient que ça va plus loin que ça, que c'est une occasion de
légiférer sur des choses qu'on n'a pas légiféré puis des nouveaux phénomènes ou
des phénomènes qu'on découvre qui apparaissent. Ça nous va, on est capables
d'échanger là-dessus. Le point de départ, c'est Bedford, mais il faudrait quand
même que le ministre convienne que c'est une autre occasion d'échanger puis ce
n'est pas pour répondre uniquement à Bedford, c'est bien plus large que ça.
O.K.
Alors, deuxième tentative, qu'est ce qu'on
nous dit? Il y a un ensemble de mesures avec lesquelles je suis d'accord. Ma
principale préoccupation, c'est l'application. Comment on va réussir à
appliquer ça? Parce que ce qui est le plus problématique pour moi, ce n'est pas
ce qui est visible, c'est ce qui est invisible, c'est ce qui est dans la tête
des personnes, puis c'est ce qui est dit qui ne nous est pas rapporté, ça, ça
m'intéresse beaucoup. Alors là, on aurait pu ne pas légiférer et avoir des
mesures très claires d'application. Ce n'était pas nécessaire d'avoir une loi,
soit dit en passant. Le ministre a réussi à mettre fin à notre demande
d'ailleurs, aux lieux de prière, avec...
M.
Bérubé
:
…consigne assez claire qui je pense est respecté pas mal partout. En tout cas,
si ce n'était pas respecté ça serait médiatisé, je suis convaincu de ça. Donc,
il a des outils pour faire appliquer des règles. Il l'a fait pour le cellulaire
à l'école, aussi, à notre demande, il l'a fait… pas avec une loi, avec une
volonté exprimée. Puis je crois à ça, moi. Donc, une loi n'était pas
nécessaire. Mais s'il y a une loi, nous, on participe puis on fait des
propositions en matière de laïcité.
Donc, l'application de cette loi-là, c'est
important pour nous. L'évaluation des enseignants et des enseignantes. Chaque
année, je trouve que c'est trop. Je trouve que c'est lourd. On est d'accord
avec le principe. On comprend pourquoi il veut le faire. Chaque année, c'est
trop. Alors, est-ce qu'on peut arriver avec une autre proposition? Il a la
chance de compter… Puis je le vois sur… une de ses collègues qui connaît bien
l'enseignement, c'est une ancienne syndicaliste, il faudrait le rappeler au
premier ministre, il y a des syndicalistes dans son caucus. On parle beaucoup
de syndicats ces temps-ci. C'est beaucoup. On leur demande beaucoup. On vient
de régler une négociation avec les enseignants. Si on rajoute à chaque année
une évaluation à sa face même, c'est beaucoup trop. Donc, on va plaider pour
ça.
• (12 h 30) •
Ensuite, et là, c'est le plus important,
le ministre fait une distinction entre les écoles publiques et les écoles
privées. Pour nous, c'est inacceptable. Je ne parle pas du financement des
écoles privées, là, je ne parle pas, là, de ce qu'on nous dit. Des fois, vous
voulez retirer le droit à des parents. Non. Je veux que la même application de
notre éducation nationale s'applique au privé et au public. Il n'y a aucune
raison que quelqu'un qui paie au privé puisse s'acheter une dispense de
certaines lois québécoises. Donc, égalité, si on est cohérent. Mêmes règles au
public qu'au privé.
C'est aussi l'occasion, puis on s'entend
là-dessus, mon collègue de Québec solidaire et moi, sur la question du
financement des écoles religieuses, ça ne tient pas debout. Je veux dire, on ne
peut pas financer des écoles où le projet éducatif repose sur un enseignement
et des gestes explicites au plan religieux. Et ces écoles, elles sont de toutes
confessions. Il y a des écoles musulmanes, il y a des écoles juives, des écoles
catholiques, des écoles orthodoxes. Ça, c'est l'égalité. Vous voyez, là, dans
ce que je vous présente, c'est l'égalité. Il faut que ce soient les mêmes
règles pour tout le monde. Ces écoles peuvent exister, mais on n'est pas obligé
de les financer. Il y en a plusieurs dizaines. Puis là, j'ai été curieux
d'apprendre, je pense que c'était à l'étude des crédits, qu'il n'y a pas
vraiment de liste de ces écoles-là. Moi, j'invite le ministre, puis je suis
convaincu que, personnellement, il est ouvert à ça, à se questionner sur le
financement des écoles religieuses. Ça serait un complément à cette
législation, important, de dire, en toute cohérence, sans remettre en question
le choix des parents pour leurs enfants, d'envoyer leurs enfants à l'école
privée… de dire : Vous avez ce choix, mais on n'est pas obligé de le
financer. J'envoie ce message-là au ministre. C'est une proposition que je
fais.
Je lui fais aussi la recommandation qu'il
puisse recommander à sa collègue de l'enseignement supérieur de regarder ce qui
se fait dans le réseau collégial pour qu'elle puisse s'inspirer de nos travaux.
Par exemple, je sais très bien qu'il y a des lieux de prière dans plusieurs
cégeps du Québec. Je le sais. J'ai une liste. J'aimerais ça que ce message-là
se rende à la ministre de l'Enseignement supérieur en disant : On peut
intervenir au plan collégial, ça se fait, là, et c'est une question de
cohérence aussi.
Donc, le débat de la laïcité, pour nous,
ça… je veux dire, c'est des questions réelles, je veux dire, ce n'est pas
dénaturé du quotidien. C'est pour affronter les situations actuelles. C'est à
titre préventif, c'est manifester la primauté de valeurs qui ne sont pas
religieuses. Je veux dire, la religion, ça ne se… La religion, ça se pratique
dans les lieux de culte, dans les centres communautaires, dans sa… dans sa
résidence Puis intérieurement. Est-ce qu'on doit… Est-ce que l'école doit
continuer d'être un prolongement de l'affirmation de sa foi religieuse? Moi, je
ne pense pas. Je veux dire, il y a plein d'endroits, là, pour la foi. Est-ce
qu'il faut... Il y a des parents, là, au Québec présentement, là, qui croient,
là, qu'il faut arrêter pour des prières à plusieurs moments durant une journée,
qu'il doit y avoir des lieux de prière, qu'il y a certaines matières qui ne
devraient pas être enseignées. Ça, ça existe au Québec présentement. On peut
l'accepter ou pas. Nous, on ne l'accepte pas. C'est la même école pour tous.
Puis quand on n'est plus à l'école, bien là on est libre. Des lieux de culte,
là, il y en a partout au Québec où les gens peuvent être accueillis…
12 h 30 (version non révisée)
M.
Bérubé
: ...mais
l'école... je ne sais pas si le «mot sanctuaire», c'est une bonne expression,
mais au plan religieux, c'est la... il faut garantir la liberté de conscience.
Si moi, là, je suis profondément athée, est-ce que je dois être confronté à des
gens qui affichent de façon ostentatoire leur religion? La seule façon de le garantir,
c'est égalité pour tout le monde puis, à l'extérieur de l'école, vous faites ce
que vous voulez. C'est une conviction qu'on a.
Je note que je fais des recommandations au
ministre, mais il remarquera comme moi que... quand on a amené le débat de la
laïcité avec le gouvernement de la première ministre Marois, pourquoi ça n'a
pas été adopté? Notamment parce que la formation politique qu'il a choisie dans
sa deuxième partie de vie politique trouvait qu'on allait trop loin. C'était
pour ça, il le sait, sinon ça serait adopté depuis 2013. Donc, s'il veut, avec
son gouvernement, compléter, on est disponibles puis on a des propositions à
faire, j'en ai évoqué quelques-unes, il y en a d'autres un peu plus techniques.
Donc, c'est là qu'on en est. Moi, le moment de débattre de ça, n'importe quand,
je veux dire, on est disponible aujourd'hui, ce n'est pas un enjeu.
Je terminerai en disant, de façon
relativement simple en m'adressant aux Québécois qui s'intéressent à ces
questions, les Québécois et Québécoises peuvent compter sur le Parti québécois
en matière de laïcité. On était là avant la CAQ. Et si les Québécois et Québécoises
le souhaitent, on sera là après aussi. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Je cède maintenant la parole à M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Alors, bonjour, Mme
la Présidente. Merci. D'abord, permettez-moi de m'excuser pour mon retard. J'avais
une intervention à faire au salon rouge et ce n'était pas par manque de respect
pour les travaux de cette commission, je tiens à le souligner. Et permettez-moi
aussi d'abord de vous saluer, de saluer M. le ministre, les collègues de la
banquette gouvernementale, l'équipe ministérielle qui vous accompagne, M. le
ministre, et les collègues des oppositions.
J'aimerais, dans un premier temps,
rappeler, au fond, c'est ma compréhension, pourquoi on est ici. Et, pour moi, l'élément
déclencheur, c'est ce qui s'est passé à l'école Bedford. Et, quand on a appris
ce qui se passait à l'école Bedford, je vous dirai que... d'abord, c'est une
histoire excessivement troublante, c'est totalement inacceptable, et, quant à
moi, on ne peut pas tolérer ce genre de situation là. Et ça, je veux le dire d'emblée,
là, je pense qu'il faut que ce soit clair, et, d'ailleurs, je l'ai dit dans le
cadre d'une motion précédente qui avait été présentée au salon rouge par le
Parti québécois, jamais, jamais on ne va accepter que l'égalité homme-femme
soit bafouée. Dans notre société, là, c'est clair, c'est fondamental et ce n'est
pas quelque chose qui est acquis, il faut y travailler, il faut y travailler à tous
les jours. Mais comme principe, là, jamais on ne va accepter que l'égalité
homme-femme soit bafouée.
Je tiens à rappeler aussi, et ça, c'est
aussi très clair, l'État au Québec est laïc et, la laïcité de l'État, on est
pour, totalement. Mais je souligne également que la société, elle... les gens
dans leur quotidien ne sont pas nécessairement laïques, il y en a qui
pratiquent des religions, et l'enjeu, c'est toujours de trouver un équilibre
entre tout ça. Et je vous dirai d'emblée que ce n'est pas facile, ce n'est pas
facile, mais je pense qu'il faut être capable de travailler pour faire en sorte
qu'on va être capable de s'assurer que les principes que j'ai énoncés
précédemment vont être capables de s'accorder avec le fait que, dans notre
société, les gens ont le droit de pratiquer une religion, comme il y a des gens
qui ont le droit d'être athées puis il y a des gens aussi qui sont agnostiques.
Ça fait qu'au fond on a ces trois catégories là de personnes.
Mais j'aimerais prendre quelques instants,
Mme la Présidente, pour rappeler un peu les événements et, entre autres, entre
autres...
M. Morin : ...autres l'enquête
qu'avait faite la journaliste Valérie Lebeuf sur l'histoire du climat toxique à
l'école Bedford dans Côte-des-Neiges à Montréal. Et, suite à ces faits troublants,
le gouvernement a agi et il a déclenché une enquête.
Permettez-moi de rappeler, si mon souvenir
est bon, que le rapport d'enquête, lui, a été publié en octobre dernier. Et
qu'est-ce qu'on a constaté? Des faits très troublants, des gestes et des comportements
inquiétants concernant la sécurité des élèves. La dernière chose qu'on veut,
quand des élèves ou des enfants vont à l'école, c'est qu'ils soient exposés à
des comportements inquiétants ou toxiques, un climat toxique dans l'école. Je
tiens à le rappeler. Et il y avait même un climat de peur et d'intimidation
instauré par un clan dominant. Et, ça, c'est tout à fait néfaste. Si mon
souvenir est bon, le 22 octobre dernier, M. le ministre a suspendu les
11 enseignants mis en cause dans le rapport. Et c'était la chose à faire.
Parce que ce n'est pas ce qu'on veut.
• (12 h 40) •
Puis, après ça, bien, il y a eu une
enquête dans 17 autres écoles entre novembre 2024 et janvier 2025. Et le
rapport a été rendu public le 28 février. Et, par la suite, le gouvernement
nous a manifesté son intention de légiférer. Et, un mois plus tard, en mars, le
ministre déposait le projet de loi n° 94, projet de loi dont nous
commençons aujourd'hui, Mme la Présidente, l'étude détaillée.
Évidemment, est-ce qu'on veut qu'un autre
cas Bedford se produise, évidemment, la réponse, c'est non. Est-ce qu'on veut
éviter un autre cas Bedford, évidemment, la réponse, c'est oui, ça va de soi.
Mais j'ai eu le privilège d'assister... à étudier, dialoguer avec plusieurs
groupes qui sont venus nous voir en consultations particulières avec ma
collègue, entre autres, la députée de Bourassa-Sauvé. Et on a posé la question.
Parce qu'au fond, au fond, ce que je comprends, c'est que, clairement, Bedford,
là, il n'en est pas question, clairement. Puis, les principes que j'ai énoncés
plus tôt, on doit les maintenir. Mais est-ce que le projet de loi va éviter un
autre Bedford? Parce que, pour moi, c'est un élément fondamental. C'est un
élément de taille. Si on est ici, comme parlementaires, pour étudier un projet
de loi, bien, il faut qu'en bout de piste on soit capables de s'assurer que ça
ne va pas se reproduire. Et là, évidemment, ça aurait été si simple, si les
groupes, les experts nous avaient répondu : Oui, oui, oui, pas de souci,
c'est la recette, il n'y aura pas d'autres cas de Bedford. Mais
malheureusement, c'est... ce n'est pas ce qu'on a entendu. Ce n'est pas ce
qu'on est venu nous dire.
En fait, ce qui est troublant, et je le
dis respectueusement, c'est qu'il y a même plusieurs groupes qui sont venus
nous dire que le projet de loi n'empêchera pas un autre Bedford. Ça fait que
là, permettez-moi de vous dire que ça m'inquiète. Et, parmi ces groupes-là, et
pas n'importe qui, il y a la CSN, il y a la Ligue des droits et libertés, il y
a l'Association montréalaise des directions d'établissements scolaires, il y a
des professeurs d'université, des experts. Parce qu'évidemment, c'était, je
pense, la question à poser. Et on nous a dit : Écoutez, avec ça, là, ça
touche à plein de choses, mais Bedford numéro deux, là, ou Bedford 2.0,
là, ça pourrait arriver.
On nous a dit aussi que, si la Loi sur
l'instruction publique avait été appliquée correctement, on n'en serait pas là.
Et, ça, pour moi, je vous dirai... et ça, entre autres, c'est... c'est le
Regroupement des comités de parents autonomes qui nous en a parlé, mais ça, je
peux vous dire que ça a été aussi pour moi un élément que j'ai trouvé, comment
dirais-je, troublant. Parce qu'on en a des lois au Québec, il y en a une
multitude, avec des règlements, mais encore faut-il s'en servir, encore faut-il
que l'État, ou les centres de services scolaires dans ce cas-ci...
M. Morin : ...non seulement
s'assure d'utiliser les lois d'une façon correcte, mais il s'assure aussi
qu'elles seront respectées, qu'elles seront utilisées. Pour moi, c'est
fondamental.
Ce qu'on nous disait, entre autres, c'est
que, si les gestionnaires si les dirigeants avaient pris les mesures
appropriées dès le départ, on n'en serait pas là, puis il n'y a pas des gens
qui auraient vécu un climat aussi toxique pendant des années. Et ça, je trouve
que c'est particulièrement troublant si on le conjugue avec le fait que
plusieurs groupes sont venus nous dire que la mouture du projet de loi actuelle
ne réglerait pas un Bedford numéro deux.
Et il y a eu aussi des articles dans les
journaux... quand on parle de climat toxique, parce que c'est malheureusement
ce que des gens ont vécu à Bedford, qui existe toujours, et ça, moi, comme
député de l'opposition, ça m'interpelle. Et je vous réfère, Mme la Présidente,
à un article qui a été publié dans le Journal de Montréal le 20 mai 2025
par Dominique Scali, qui décrit un climat toxique, mais là dans une école à
Sherbrooke, cette fois-ci. Et on nous dit : «Jamais, et là je cite, je ne
m'étais fait engueuler comme ça.» Un prof qui pétait des coches et qui pétait
des plombs. Et c'est navrant, et c'est inacceptable de voir que, dans un milieu
de travail, on peut en être rendu là.
Donc, ça, pour moi, c'est un enjeu de
taille puis c'est un enjeu qu'il va falloir régler, qu'il va falloir discuter,
qu'il va falloir en parler parce que ce n'est pas acceptable. Comment se
fait-il que des dirigeants ne soient pas intervenus plus rapidement? Ça soulève
une série de questions, donc. Et là c'est... Moi, Mme la Présidente, je me
réfère à ce que des groupes d'experts ont dit, ce n'est pas moi qui l'invente,
ce n'est pas moi qui est venu témoigner à la commission. Donc, pas certain que
le projet de loi va empêcher un autre Bedford.
Cependant, le projet de loi va renforcer
la laïcité et va toucher à plusieurs dispositions législatives. Et là on a eu
aussi une mise en garde de la part de la Commission des droits de la personne
et des droits de la jeunesse, dans leur mémoire, et je me permets de les citer :
«Durcir la laïcité à chaque fois qu'une administration n'aura pas assumé ses
responsabilités ou appliqué les outils à sa disposition apparaît comme une voie
qui est risquée.» C'est à la page 59 de leur mémoire, donc. Et ça, moi,
j'ai hâte d'avoir une discussion avec M. le ministre là-dessus, parce qu'il
faut être capable de trouver une façon de faire pour, d'abord éliminer, les
climats toxiques, bien sûr, mais aussi s'assurer que les droits de tous et
chacun seront respectés.
Je vous rappelle aussi, Mme la Présidente,
pendant les consultations particulières, M. le ministre posait toujours cette
question : Êtes-vous d'accord avec l'obligation d'avoir le visage
découvert dans les écoles? La réponse est oui, bien oui, ça, c'est clair, mais
il demandait aussi si on était d'accord avec l'interdiction des signes
religieux. Et là c'est plus compliqué parce que cette mesure-là aura des
impacts. Et là aussi j'ai hâte d'en discuter avec M. le ministre, parce que je
ne suis pas certain qu'on a bien évalué l'ensemble de tous ces impacts-là dans
le réseau, et là ça m'apparaît important. En fait, il y a même des groupes qui
sont venus nous dire le contraire, c'est-à-dire que cette mesure-là pourrait
amplifier la pénurie de main-d'oeuvre. C'est ce que l'Association québécoise du
personnel de direction d'école nous a dit.
Et je vous réfère, Mme la Présidente, à un
autre cas très concret, celui de M. Sébastien Cléroux, directeur d'école
de Montréal, qui est venu nous décrire simplement, candidement, sa situation.
Il a un petit service de garde et, dans son service de garde,
12 éducatrices sur 14 portent un voile. Donc là, il est inquiet. Au niveau
pratique, ça risque d'avoir un impact important...
M. Morin : ...Donc, il faudra
en discuter avec M. le ministre. Est-ce qu'on a bien évalué l'impact de
l'interdiction des signes religieux au Québec? Moi, à date, je n'ai pas eu de
réponse convaincante. On a demandé s'il y avait une analyse d'impact
réglementaire, et ça, on l'attend encore. Donc, ça m'apparaît être un point
très important où on devra en discuter avec la partie gouvernementale.
Il y a aussi un autre élément. M. le
ministre, nous disait que le personnel qui est visé par l'interdiction va
toujours demeurer en fonction... il pourrait bénéficier d'un droit acquis, mais
aussi longtemps qu'il occupera la même fonction au sein du même centre de
service scolaire. C'est ce que j'ai compris. Et là, avec la mobilité, avec la pénurie
de personnel, il est très probable que, pour bien des gens, le droit acquis ne
vive pas très longtemps. Donc, ça aussi, ça pose... ça pose un enjeu. On a qu'à
penser dans certains centres ou certaines administrations que, pendant l'été,
il y a beaucoup de personnel qui... dont l'emploi prend fin. Donc, qu'est-ce
qui va arriver en septembre s'ils sont rappelés? Est-ce que ça va faire en
sorte qu'ils vont perdre leurs droits acquis? C'est autant d'éléments où on
aura, évidemment, un dialogue avec M. le ministre.
• (12 h 50) •
Et il y a un autre élément que j'aimerais
soulever d'emblée qui, pour nous, à l'opposition officielle, pose toujours un
problème, c'est l'utilisation de la clause dérogatoire. Et, écoutez, je ne m'en
cacherai pas, ma formation politique, on est, évidemment, excessivement
respectueux de la charte québécoise des droits et libertés puis on a toujours
certains enjeux quand on utilise la clause dérogatoire parce que ça a pour
effet d'empêcher des gens d'exercer leurs droits, leurs droits fondamentaux.
C'est un petit peu ironique, je vous dirais, Mme la Présidente, parce qu'en
2025 on célèbre les 50 ans de la charte québécoise des droits et libertés,
puis là, avec l'étude du projet de loi n° 94, on va célébrer son
anniversaire en disant : En passant, les droits qui sont dedans, vous ne
pourrez pas les utiliser. Si vous me permettez l'expression, ça casse un peu le
party d'anniversaire. Permettez-moi de m'exprimer ainsi, et ce n'est pas la
première fois que la CAQ fait ça. Et là il y a plusieurs groupes qui sont venus
nous demander de retirer ces articles, notamment la Commission des droits de la
personne, la Ligue des droits et libertés. Et ma compréhension, et puis ça, on
aura la chance d'en reparler avec M. le ministre, mais ma compréhension, c'est
que l'utilisation que le gouvernement veut faire de la clause dérogatoire,
c'est une utilisation mur à mur, sans exception. Et donc il faut se demander
quelles sont les études que le gouvernement a réalisées pour faire en sorte que
cette mesure pourrait être justifiée. Et là, Mme la Présidente, on a deux cas
de figure possibles, ou bien le gouvernement a fait une étude, et, à ce
moment-là, bien, évidemment, pour éclairer les parlementaires, je demanderais
au ministre de nous la divulguer, ça fait que, comme ça, on va être capables
d'avoir un dialogue sur un document concret, ou il n'y a rien qui a été fait.
Là, c'est un petit peu plus inquiétant parce que, là, on va faire en sorte
qu'on va mettre de côté des droits fondamentaux des gens. Ça, c'est un volet
important.
L'autre élément aussi, c'est que
l'utilisation de la clause dérogatoire, elle est déjà inscrite dans le projet
de loi avant même qu'il soit adopté. L'autre question qu'on peut se poser, avec
respect, c'est : Est-ce qu'il y en a une, étude, et que le gouvernement
est tellement convaincu que son projet est anticonstitutionnel qu'il dépose
immédiatement une disposition qui invoque la clause de dérogation? Et, si c'est
ça, c'est au gouvernement de décider. Ça va être au gouvernement, après ça, de
vivre avec les conséquences de son choix, sauf que ça serait intéressant, qu'on
puisse le savoir...
M. Morin : ...pour qu'on soit
capables d'en débattre respectueusement avec M. le ministre.
Est-ce que le ministre serait prêt à enlever
ces articles? On verra. Moi, je vous dirai que j'aborde l'étude de ce projet de
loi là avec beaucoup d'ouverture, avec la main tendue avec M. le ministre, on
va voir jusqu'où on va se rendre, mais je tenais, dans le cadre, évidemment, de
ces remarques préliminaires, de souligner quelques éléments qui, pour nous, au
Parti libéral, font en sorte qu'on a un questionnement. On va avoir un
dialogue, on va avoir un échange avec le ministre, mais déjà d'emblée, je
tenais à, si vous me permettez l'expression, afficher mes couleurs, comme ça,
bien, ça va permettre dans le cadre de l'étude du projet de loi, d'avancer puis
de voir où il y a des dispositions qui sont plus problématiques que d'autres.
Et c'est la raison pour laquelle, d'emblée, je tenais à les souligner.
Maintenant, je comprends que, prochaine
étape, on débute l'étude détaillée du projet de loi. Je vous dirai que le
ministre peut compter sur notre ouverture, notre collaboration. M. le ministre,
au départ, disait, puis je suis d'accord avec lui, qu'au fond, c'est un sujet
qui soulève souvent des passions, des débats, mais je pense qu'il faut les
aborder le plus sereinement possible pour avoir des échanges pour le bien de la
population qui nous regarde. Et, sur ces paroles, je vous remercie.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Donc, je cède maintenant la parole au député de
Saint-Jean.
M. Drainville : Mme la
Présidente, juste un instant, avant que mon collègue prenne la parole...
La Présidente (Mme Dionne) : Bien
sûr.
M. Drainville : On m'indique
que les amendements déposés ne sont toujours pas accessibles au public. Est-ce
qu'il est possible de demander le consentement pour que les personnes qui nous
écoutent puissent avoir accès aux amendements?
La Présidente (Mme Dionne) : Il
n'y a pas besoin de consentement, j'autorise le dépôt public de ces
amendements. Alors, vous avez juste besoin de l'autorisation de la présidence.
M. Drainville : Merci. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Ce
sera fait, M. le ministre. M. le député de Saint-Jean.
M. Lemieux : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Il faut dire que le ministre a déjà tout dit et bien dit, mais
depuis tout ce qui a suivi, je sentais le besoin de rajouter mon grain de sel
et de vous dire que je suis très heureux d'être à la CCE, de retour à la CCE
puisque j'y ai passé plusieurs années, mais depuis les quelques derniers mois,
je n'étais pas membre permanent. Mais me revoici membre permanent de la
Commission de la culture et de l'éducation, et ça tombe bien pour l'étude
détaillée de ce projet de loi n° 94.
On ne peut pas parler d'éléphants dans la
pièce, parce que, quand on dit ça, on le cherche. Il est là, mais c'est comme
si on rajoutait ça dans la conversation. Dans ce cas-ci, c'est très clair,
c'est nommé, c'est dit, c'est expliqué, c'est Bedford. Bien, pas que Bedford,
parce qu'il y a 17 autres écoles qui font partie de la perspective du ministre
lorsqu'il a écrit cette loi-là, mais c'est clair que, pour moi, c'est très
important parce qu'on a tous été un peu saisi, même qu'il a fallu prendre un
peu de recul pour comprendre l'ampleur. Et c'est ce que le ministre a fait.
D'ailleurs, moi, en ce qui me concerne, ce projet de loi là arrive après avoir
pris acte et avoir analysé, étudié, mesuré et trouvé une façon équilibrée de
passer à autre chose en n'essayant pas d'oublier le passé, mais de s'inspirer
de ce qui s'est passé, de ce qu'on sait qu'il s'est passé pour ne pas que ça se
reproduise, mais surtout pour qu'on puisse replacer — puis ça, il y
en a qui l'ont dit autour de la table, la laïcité de l'État plus proche de ce
qu'on espère qu'elle sera dans le milieu scolaire parce que le milieu scolaire
étant ce qu'il est, il a été un des premiers à nous montrer qu'il y avait un
problème.
J'ai presque terminé, Mme la Présidente,
parce que je vous vois regarder l'heure et c'est ce que je faisais moi aussi,
mais ce que je veux dire, c'est que, pas plus tard que la semaine dernière,
j'ai assisté à la sanction du projet de loi n° 84 et
je n'ai jamais pensé, depuis sept ans que je suis au Parlement, à être aussi
heureux et fier d'aller à la sanction d'un projet de loi, c'est le projet de
loi sur l'intégration des nouveaux arrivants, projet de loi d'intégration dans
l'État québécois. Et, en écoutant le ministre au début, je tenais à dire que
non seulement je suis derrière lui, mais je suis très fier de la posture et de
l'approche de ce projet de loi que je vais participer à étudier avec vous au...
M. Lemieux : ...au cours des
prochaines heures, journées. Puis, pour ce qui est du reste, bien, on verra
jusqu'où on s'en à va l'automne. Mais c'est avec beaucoup d'ouverture. Parce
que, la laïcité de l'État... Il y a encore des gens qui comprennent ce que
c'est, la laïcité, mais qui ne comprennent pas les limites de la laïcité de
l'État. Et les éléments du projet de loi n° 94 vont nous aider ailleurs,
je pense, que dans les écoles et dans le milieu scolaire, à mieux intégrer la
laïcité dans notre quotidien de Québécois. Merci, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député.
Donc, sur ces belles paroles, je suspends
les travaux jusqu'à 14 h 45.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
14 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 14 h 47)
La Présidente (Mme Dionne) : Bon
après-midi. Donc, la Commission de la culture et de l'éducation reprend ses
travaux.
Nous poursuivons l'étude détaillée du projet
de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau
de l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives.
Lors de la suspension des travaux cet
avant-midi, nous en étions aux remarques préliminaires. Donc, y a-t-il d'autres
membres qui souhaitent intervenir pour des remarques préliminaires? Donc, c'est
complet pour les remarques préliminaires.
Donc, avant de débuter l'étude article par
article, est-ce qu'il y a des motions préliminaires? Oui, M. le député.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, j'ai une motion préliminaire que j'aimerais présenter. Donc,
ça va partir. Donc, le Greffier devrait recevoir la motion préliminaire
bientôt.
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
on va vérifier ça sur le site. Je vais vous inviter à en faire la lecture, M.
le député.
M. Morin : Oui, absolument,
avec plaisir. Ils ne l'ont pas reçue? Vous ne l'avez pas reçue encore?
La Présidente (Mme Dionne) : Bon,
on va suspendre quelques instants, le temps que… de recevoir la motion.
(Suspension de la séance à 14 h 48)
(Reprise à 14 h 49)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend ses travaux. Donc, nous avons bien reçu votre motion, M. le
député. Donc, je vous invite à en faire la lecture.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, la motion préliminaire se lit comme suit :
«Que la Commission de la culture et de
l'éducation, dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 94, Loi visant
notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant
diverses dispositions législatives, demande au ministère de l'Éducation de
transmettre dans les plus brefs délais les documents cités par le député de
Saint-Jean concernant les analyses, les études ainsi que tout autre document
ayant permis de mesurer et trouver un équilibre avec le projet de loi;
«Que, dans le cadre de son mandat, la
commission exige du ministre de l'Éducation qu'il s'assure que l'ensemble des
membres de la commission ont accès aux mêmes informations que les membres du
groupe formant le gouvernement.»
• (14 h 50) •
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Donc...
M. Morin : ...lecture étant
terminée, je vais...
La Présidente (Mme Dionne) : ...terminée,
je vais... place au... oui, je vous invite à débuter le débat.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je dépose cette motion parce qu'au moment où on a procédé
avec les remarques préliminaires, j'ai écouté attentivement M. le député de
Saint-Jean qui nous a dit, et permettez-moi de citer ce qu'il disait ce
matin : «En ce qui me concerne, ce projet de loi là arrive après avoir
pris acte et avoir analysé, étudié, mesuré et trouvé une façon équilibrée de
passer à une autre chose.»
Et évidemment, vous comprendrez, Mme la
Présidente, que, quand on a des collègues députés qui parlent, on écoute avec
beaucoup d'attention, parce que tous leurs mots, effectivement, ont un sens,
ont une portée. Et c'est particulièrement important dans le cadre de l'étude
détaillée du projet de loi, qu'évidemment moi, j'aimerais bien qu'il y ait une analyse
d'impact réglementaire. Je souhaite vivement que le gouvernement ait mesuré les
mesures qu'il entend mettre de l'avant dans son projet de loi. Vous comprendrez
que... Et c'est particulièrement important, parce que, dans son projet de loi,
il y a des dispositions qui vont porter atteinte à des droits. Et, bien sûr,
dans ce cas-là, ce qu'on essaie de voir, c'est s'il y a eu une analyse qui a
été faite pour nous assurer que c'est mesuré, que c'est pondéré. Or, jusqu'à
maintenant, nous n'avons rien eu.
Alors, permettez-moi de vous dire que j'ai
été un peu... j'ai été un peu étonné quand le député de Saint-Jean a référé,
plus tôt ce matin, à l'effet qu'il a pris acte, après avoir analysé, étudié, et
mesuré, et trouvé. Donc, visiblement, il a analysé des documents ou des
statistiques... en fait, il a analysé quelque chose. Ça, c'est sûr. Il a aussi
étudié des documents. Puis, évidemment, dans ces documents-là, il devait
certainement y avoir une mesure quelconque parce que ce sont les mots qu'il
utilise.
Alors, moi, je me dis, dans le but,
finalement, d'aider tout le monde, à commencer par M. le ministre et le
gouvernement, moi, j'aimerais ça qu'on partage avec nous ces documents, ces
analyses, ces études, parce que ça nous permettrait de mieux comprendre. Puis,
par la suite, bien, ça nous permettrait de déterminer est-ce qu'il y a des
amendements qu'on va proposer ou pas, est-ce qu'il y a une justification
particulière à un choix, à une décision qui a été prise par le gouvernement.
Et vous comprendrez que, dans notre rôle
comme députés mais aussi comme législateurs, ça fait partie de notre mandat.
C'est fondamental, pour moi, pour être capable d'exercer mes fonctions de
député d'une façon convenable, correcte, appropriée et surtout éclairée, bien,
d'avoir accès...
M. Morin : ...à ces études, et
je présume qu'elles existent puisque le député de Saint-Jean y fait référence.
Donc, ça m'apparaît totalement pertinent et essentiel.
Et, vous savez, quand je regardais nos
règlements, dans le cadre des travaux d'une commission... et je vous... je vous
réfère à l'article 162 de nos règlements, Mme la Présidente, qui dit
qu'évidemment un document ne peut être déposé à commission qu'avec la
permission de son président ou de sa présidente. Donc, je vous souligne que
vous avez cette compétence-là, qui vous est attribuée par nos règlements, et
que... Par ailleurs, je vous réfère également à l'article 59 de nos règlements,
qui traite des documents d'intérêt public, et qui souligne que des ministres
peuvent déposer tout document qu'ils jugent d'intérêt public. Et vous
comprendrez que, dans le cadre d'une analyse d'un projet de loi qui est aussi
important que celui-ci, bien, moi, j'inviterais M. le ministre à nous partager
ou nous déposer des études, afin que nous puissions, nous, parlementaires,
faire notre travail. Donc, ça m'apparaît tout à fait fondamental que l'on
puisse avoir ces documents-là.
Et, évidemment, je vous souligne également
que, dans la jurisprudence de l'Assemblée, la décision 59-3 du
25 mai 1995, on y écrit : «Contrairement au dépôt de documents à
l'Assemblée, qui peut se faire soit en vertu de dispositions réglementaires
spécifiques, soit du consentement unanime, seul le président de la commission
peut autoriser le dépôt de documents en commission. Aussi, vu le rôle
particulier des commissions parlementaires — que l'on pense, entre
autres, aux consultations générales ou particulières, ou à la surveillance des
organismes publics — le dépôt de documents en commission est souvent
nécessaire à la réalisation du mandat de la commission.»
Donc, le président, dans sa décision,
souhaitait laisser à chaque président de commission... évidemment, quand on
parle du président, on parle du président, ici, de l'Assemblée... souhaite
laisser à chaque président de commission le soin d'exercer pleinement le
pouvoir qui lui est dévolu par l'article 162, à laquelle je faisais référence,
donc en ce qui concerne vous. «Et en ce qui a trait au dépôt de documents, en
vertu de ce pouvoir, le président d'une commission pourrait déterminer, au
mérite, si le dépôt d'un document — en l'occurrence, un document
audiovisuel, dans ce cas-ci — est souhaitable et nécessaire pour
éclairer les membres de la commission dans l'exécution d'un mandat. Il pourrait
en être ainsi lorsqu'un document audiovisuel — dans ce cas-ci, là — accompagne
ou complète un document écrit qui est présenté et déposé en commission.»
Alors, évidemment, ici, on ne parle pas de
documents... bien, en fait, je ne sais pas, c'est peut-être un document
audiovisuel aussi, c'est peut-être un PowerPoint, c'est peut-être une vidéo,
c'est peut-être un balado, je ne le sais pas. Mais il y a une chose qui est
sûre, c'est qu'il y a sûrement des documents quelque part parce que le député
de Saint-Jean y fait référence. Et moi, je vous soumets respectueusement que le
partage de ces documents, à ce stade-ci... parce qu'on vient, Mme la
Présidente, de compléter les remarques préliminaires, mais on n'a pas encore
commencé à analyser, article par article, tous les éléments du projet de loi...
ce serait absolument essentiel pour permettre, et pas juste à l'opposition
officielle, mais à tous les membres de la commission... de nous permettre de
travailler, puis de nous éclairer dans le cadre de l'exécution de notre mandat.
Puis, compte tenu de l'importance du... de ce projet de loi, vous comprendrez
que je tiens absolument à ce que les membres de la commission soient pleinement
éclairés, pour qu'on puisse prendre de bonnes décisions et, évidemment, poser
de bonnes questions, et faire de bons choix.
Alors, c'est... c'est la raison pour
laquelle, Mme la Présidente, je tenais absolument à présenter cette motion
préliminaire, et donc, d'entrer dans un dialogue avec le gouvernement pour
qu'on ait accès bien sûr, aux documents cités par le député de Saint-Jean, et
ça m'apparaît essentiel, compte tenu des différentes dispositions qui sont dans
le projet de loi, et de l'impact que ça peut avoir sur certains groupes de la
société civile. Alors, je vous remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Et, effectivement, selon l'article 162, je peux
autoriser le dépôt de documents. Par contre, je ne peux pas obliger aucun
député ou aucun ministre à déposer un document s'il juge que ce n'est pas dans
l'intérêt public. Voilà. Alors, est-ce qu'il y a des interventions M. le
ministre? Est-ce que vous souhaitez intervenir à ce stade-ci?
M. Drainville : Je ne peux
pas faire autrement, Mme la Présidente...
M. Drainville : ...de
reconnaître que, malgré son expérience limitée comme parlementaire, je trouve
que le député de l'Acadie s'en tire fort bien pour justifier cette remarque
préliminaire... cette motion préliminaire, dis-je bien. Je salue sa capacité à
développer un argumentaire autour d'une déclaration qu'aurait commise mon
député... mon collègue député de Saint-Jean, qui, évidemment, dans ses propos,
faisait référence aux nombreux rapports, reportages, témoignages qui ont été
abondamment circulés, commentés et analysés sur toute la question de la
laïcité, que ce soit le rapport Bedford, que ce soit le rapport sur les 17
écoles, que ce soit le plan d'action des accompagnateurs à Bedford, que ce
soient les multiples reportages, par exemple, ceux sur l'école Lavoie, que je
vous invite à réécouter ou à relire, si vous n'avez pas eu l'occasion de le
faire, même chose pour l'école Saint Maxime, même chose pour les rapports qui
ont circulé également en provenance des centres de services scolaires, qui ont
rapporté, pour plusieurs d'entre eux, un certain nombre de manquements à la
laïcité, hein, que ce soit le centre de services scolaire des Draveurs, que ce
soit le centre des services scolaire de Laval, que ce soit le centre de
services scolaire de Montréal.
• (15 heures) •
Alors, il y a eu de multiples reportages,
vérifications, confirmations, signalements qui ont été faits, et c'est sur la
base, Mme la Présidente, de tous ces faits, de toute cette documentation, de
toute cette information que nous avons déposé, donc, ce projet de loi n° 94. Il n'y a rien d'autre, M. le député d'Acadie... de
l'Acadie, pardonnez-moi, que ce que je viens de vous présenter. Il n'y a pas de
document, je ne sais pas, là, secret, ou, je ne sais trop. Ce qui a été dévoilé
publiquement, c'est l'ensemble de la preuve, si on peut dire. Je pense qu'on va
bien, s'entendre, vous et moi, M. le député de l'Acadie.
M. Morin : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Malheureusement,
il n'y a pas de droit de réplique à ce stade-ci des remarques préliminaires...
des motions préliminaires. Alors, vous pouvez poursuivre, monsieur....
M. Drainville : Nous pouvons
passer au vote?
La Présidente (Mme Dionne) : Non.
J'ai une demande d'intervention de M. le député de Jean-Lesage par la suite,
mais vous, vous avez encore 27 minutes, si vous voulez utiliser...
M. Drainville : O.K., mais on
ne peut pas dialoguer.
La Présidente (Mme Dionne) : Non,
c'est ça.
M. Drainville : Une fois
qu'on a répondu, c'est terminé.
La Présidente (Mme Dionne) : C'est
terminé. Alors...
M. Drainville : Ah! bien, il
y aura sans doute d'autres occasions.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Oui, merci, Mme
la Présidente. Bien, évidemment, moi, j'appuie cette motion, je trouve... je
pense que c'est important. J'entends aussi ce que le ministre dit, mais ça
m'amène à une question : Est-ce qu'une ADS+ a été faite sur ce projet de
loi, c'est-à-dire une analyse différenciée selon les sexes et autres
caractéristiques, là, pour voir si les impacts de cette loi-là... les
conséquences, pardon, c'est un anglicisme, «impacts»... dans ce cas-ci, vont
avoir... être différents selon qu'on est un homme, une femme ou on appartient à
d'autres catégories, par exemple? Je vois le ministre sourciller, je ne sais
pas trop si je...
M. Drainville : Bien, Mme la
Présidente, est-ce que je peux répondre, là?
M. Zanetti : En fait, je
voudrais savoir s'il y a une ADS+ qui a été faite sur le projet de loi, et, si
elle a été faite, j'aimerais bien, effectivement, qu'elle soit déposée.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a... Oui. Donc, c'était votre temps d'intervention. O.K. Donc, est-ce
qu'il y a consentement pour que le ministre puisse répondre avant qu'on passe à
la mise aux voix?
M. Drainville : Attendez, ça
prend le consentement pour que je réponde?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
parce qu'à ce stade-ci, il n'y a pas de débat. C'est une motion, donc chaque
groupe parlementaire dispose d'un temps pour débattre de la motion, et on passe
la motion... on met la motion aux voix par la suite. Mais là je vous ai demandé
le consentement...
M. Drainville : Ma réponse à
la... enfin, aux interrogations du député... du député de l'Acadie,
pardonnez-moi, c'était considéré comme mon intervention, c'est cela?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
voilà. Donc, bien là, M. le député de Jean-Lesage vous pose une question. Donc,
s'il y a consentement que vous puissiez répondre... ou, sinon, on met aux voix
la motion. Donc...
M. Morin : Consentement...
15 h (version non révisée)
M. Drainville : ...plus ça va
prendre de temps, plus il y a consentement. Moi, c'est ce que je comprends, Mme
la Présidente.
Alors... Alors, Mme la Présidente, les...
les grands principes sur lesquels s'appuie ce projet de loi, que ce soit l'égalité
hommes-femmes, que ce soit la laïcité, que ce soit de limiter les
accommodements religieux qui créent une iniquité, que ce soit l'obligation des
élèves, que ce soit l'obligation des membres des centres de... des membres de
conseils d'administration ou conseil d'établissement, peu importe l'obligation
qui est créée, peu importe l'interdiction qui est faite, elle s'applique et s'applique
à tous les sexes. Et les... Je ne crois pas que le principe de la laïcité est
moins important pour un sexe qu'un autre. Je ne crois pas que le principe de l'égalité
hommes-femmes est moins important pour un sexe que pour un autre. Alors, on le
fait pour tous les Québécois, Mme la Présidente, tous les citoyens québécois.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Donc, nous allons mettre aux voix la motion préliminaire du député d'Acadie...
de l'Acadie. Oui, M. le député.
M. Morin : Oui. Est-ce que je
peux vous demander un vote à l'appel nominal, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Dionne) :
Très certainement, M. le député. Alors, vote par appel nominal.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Morin (Acadie)?
M. Morin : Pour.
Le Secrétaire
: M. Drainville
(Lévis)?
M. Drainville : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
Le Secrétaire
: M. Asselin
(Vanier-Les Rivières)?
M. Asselin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lévesque
(Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) : Contre.
Le Secrétaire
: M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Contre.
Le Secrétaire
: M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
Le Secrétaire
: M. Zanetti
(Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire
: Mme Dionne
(Rivière-du-Loup—Témiscouata)?
La Présidente (Mme Dionne) :
Abstention. Donc, la motion est rejetée.
Avant de débuter l'étude article par
article... Oui, M. le député de Jean-Lesage, je pense, vous avez une motion.
Est-ce qu'elle a été envoyée sur... à la commission?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
nous avons la motion. Nous allons l'afficher à l'écran.
M. Zanetti : C'est bon? J'y
vais?
La Présidente (Mme Dionne) : Je
pense que ce n'est pas la bonne.
M. Zanetti : Ce n'est pas
encore elle, hein, c'est ça?
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
je... Oui, on y arrive tout juste ici. Voilà. Motion du député de Jean-Lesage.
Je vous laisse en faire la lecture, M. le député.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Alors que, conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée
nationale, soit transmis à la Commission de la culture et de l'éducation, avant
de reprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 94, Loi visant
notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant
diverses dispositions législatives, à la reprise du calendrier régulier des
travaux en septembre 2025, une analyse différenciée selon les sexes dans une
perspective intersectionnelle ADS+.
Je vais... je vais... J'ai... Bien, dans
la réponse à la question que j'ai posée tout à l'heure, j'ai réalisé que le
ministre ne semble pas exactement savoir c'est quoi, une ADS+, alors je vais,
comme, donner la définition qui est sur le site du gouvernement du Québec.
Parce que, quand le ministre dit : Nous, notre loi va s'appliquer à tout
le monde égal, en fait, c'est qu'une ADS+, c'est justement de vérifier si une
politique appliquée de façon uniforme va créer les mêmes effets chez les
hommes, les femmes, les personnes... non binaires ou... Et, dans le cas d'un
projet de loi comme celui-ci, il m'apparaît assez évident qu'il va y avoir des
effets plus importants chez les femmes, notamment chez les femmes de confession
musulmane, et c'est ce qu'une ADS+, une analyse différenciée selon les sexes,
pourrait établir. Et je... c'est quand même très étonnant, dans un projet de
loi qui attaque les droits et libertés, qui met à l'abri de la charte
québécoise des droits et libertés et de toute procédure judiciaire cette loi-là,
qu'il n'y ait même pas une ADS+ qui ait été faite.
Je vais lire c'est quoi, une ADS+. «...différenciée
selon les sexes est un processus d'analyse qui vise à prendre en compte les
réalités distinctes des femmes et des hommes dans la mise en place de projets,
de programmes, de politiques, etc. L'ADS vise l'atteinte de l'égalité de fait
entre les femmes et les hommes dans les initiatives publiques, locales,
régionales, nationales. En effet, un programme gouvernemental peut sembler
présenter des caractéristiques neutres, mais tout de même produire des effets
inégaux sur les femmes et les hommes lorsqu'il est appliqué en raison des
réalités et des besoins différenciés des unes et des autres. L'ADS permet aux
responsables d'un programme d'être plus attentifs...
M. Zanetti : ...aux besoins
spécifiques des femmes et des hommes et de prévoir les effets du programme sur
ces personnes. Des solutions qui favoriseront l'égalité entre les genres
peuvent être mises en place. L'ADS gagne à être intégrée dès la phase de
planification de tout projet pour mener à des solutions plus ciblées. Dans le
cadre stratégique de la Stratégie gouvernementale pour l'égalité entre les
femmes et les hommes 2022-2027, le gouvernement met en place des projets
pilotes pour intégrer la perspective intersectionnelle à l'ADS qui devient
l'ADS+. Alors, c'est ça, une ADS, c'est ça, une ADS+. Et, s'il y a un projet de
loi, actuellement, du gouvernement pour lequel il serait pertinent d'en avoir
une, c'est bien celle-là.
C'est pour ça que, dans la motion, je
propose que le gouvernement... le ministre de l'Éducation qui, manifestement,
n'a pas commandé ce type d'analyse, le fasse pour qu'au moins on l'ait à un
moment donné. J'ai terminé.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci beaucoup, M. le député de Jean-Lesage. Donc, M. le ministre.
• (15 h 10) •
M. Drainville : J'ai déjà
donné ma réponse, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci. Oui, M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la Présidente.
Alors, j'aimerais, pendant quelques instants, appuyer la motion du collègue de
Jean-Lesage qui m'apparaît pertinente, parce que, Mme la Présidente, le
gouvernement du Québec... Et, d'ailleurs, dans ses politiques, là, sur la page
principale, Pour des initiatives publiques plus égalitaires pour toutes et
tous, ils ont un cadre. Le gouvernement du Québec — en fait, c'est
d'ailleurs indiqué sur la page principale, «votre gouvernement» — donc,
votre gouvernement a un cadre de référence 2022-2027 pour faire des analyses
différenciées selon les sexes dans une perspective intersectionnelle. Et donc
c'est important, il s'agit d'une politique de l'État québécois. La politique a
été réalisée par le Secrétariat à la condition féminine, et on y indique, au fond,
la mise en œuvre des différentes modalités.
Et cette politique-là... Et j'ai bien
écouté la réponse de M. le ministre qui disait : Oui, bien, écoutez, nous,
c'est égalitaire, on ne fait pas de distinction, ça, je le comprends. Mais,
comme le soulignait le collègue de Jean-Lesage, une analyse, dans une
perspective intersectionnelle, de l'ADS+, ce n'est pas ça que ça vise. Ce que
ça vise à faire, c'est de faire en sorte qu'on va prendre des dispositions d'un
projet de loi ou d'une politique gouvernementale et, donc, de faire en sorte
qu'on va, dans un cadre d'analyse, voir s'il y a des groupes qui sont plus
défavorisés que d'autres, compte tenu de la mesure de la politique ou du cadre
législatif qui veut être mis de l'avant par le gouvernement.
Et c'est particulièrement important, je
vous dirai, parce que, dans notre société, quand on regarde un ensemble de
groupes, parfois, on se dit : Ça n'aura pas d'impact. Mais quand on
applique le modèle, bien là, on se rend compte que ça peut, en fait, faire en sorte
que certains groupes vont être défavorisés par la politique gouvernementale. Et
donc le gouvernement du Québec a mis en place cette politique et ce cadre
d'analyse. Comme je vous le soulignais, et je fais une référence à la politique
gouvernementale du gouvernement du Québec, en discernant, et je cite, «en
discernant les effets différenciés que peut avoir un projet sur des
collectivités et les personnes qui les composent, l'ADS+ prévient donc la
création ou la reproduction d'inégalités entre les hommes et les femmes, entre
les femmes elles-mêmes, et donc l'ADS+ est pertinente», et ça, ça vient du
gouvernement du Québec actuel, la la politique. Donc, elle est pertinente,
cette méthode d'analyse là, pour tous les types de projets : politiques,
stratégies, plans d'action, lois ou règlements.
Et donc, ça m'apparaît tout à fait
important, comme le souligne le collègue de Jean-Lesage, et M. le ministre aura
l'opportunité de répondre, si l'analyse n'a pas été faite. Mme la Présidente,
moi, j'inviterais le gouvernement à la faire, parce que le projet de loi n'est
pas adopté. Et c'est très éclairant, parce que ça permettrait, après, de voir
s'il y a des dispositions du projet de loi qui, effectivement...
M. Morin : ...vont entraîner
une distinction, une différence ou une plus grande discrimination pour un
groupe au sein de notre société plutôt qu'un autre.
Et puis après ça, bien, évidemment, ça
permet d'apporter des correctifs appropriés, parce qu'évidemment on ne veut pas
qu'une politique ou qu'une loi en soi, quand elle commence, soit
discriminatoire. Et c'est exactement ce que la grille d'analyse vient faire. Et
y a donc plusieurs possibilités, plusieurs mises en œuvre, et c'est une
démarche qui est encouragée par le gouvernement, le gouvernement du Québec.
Donc, c'est important, dans la planification, notamment, de définir les enjeux,
d'évaluer l'atteinte des objectifs puis, après ça, de déterminer les paramètres
pour s'assurer qu'il n'y aura pas de discrimination à l'étape de la mise en
œuvre. Et ça, ça vient directement de la politique du gouvernement.
Donc, l'ADS+ comme méthode d'analyse
repose sur une bonne connaissance du portrait démographique de la population
visée. Et, quand on lit ça, je pense que, dans le cadre du projet de loi n° 94, c'est particulièrement pertinent.
Par la suite, l'analyse de données
désagrégées qui permet de discerner les réalités et les besoins des hommes et
des femmes ainsi que ceux des personnes s'identifiant à des groupes sociaux
susceptibles de subir davantage de discrimination, c'est aussi un élément
excessivement pertinent, la consultation des femmes s'identifiant aux groupes
sociaux concernés par le projet, puis, dans le projet de loi qui est sous étude
présentement, il y a effectivement des groupes de femmes qui sont identifiés et
identifiables et qui vont avoir un impact du projet de loi. Et évidemment, par
la suite, l'utilisation de stratégies de communication capables de joindre les
personnes visées, de les représenter. Et donc c'est un processus qui permet un
accompagnement à toutes les étapes des activités, par exemple, ou de la vie
d'un projet de loi, puis après ça, bien, ça permet de définir des indicateurs
ADS+ pertinents.
Il y a au gouvernement un comité de
travail ADS+ à la condition féminine qui sont là pour accompagner et fournir
des informations d'intérêt général sur le processus. Donc, je tiens à le
souligner, je pense que c'est important pour les parlementaires qui sont ici
mais aussi pour ceux qui nous écoutent, parce que... en tout cas, je n'ai pas
d'indication à l'effet que l'analyse a été appliquée puis que ça a été fait
dans ce projet de loi là, mais je pense que c'est important d'en parler.
Et par la suite, bien, une fois que ça
s'est fait et une fois que le comité de travail a accompagné, dans un cas comme
celui-ci, ça pourrait être, M. le ministre ou les légistes, donc, de mettre en
place des dispositions réglementaires ou législatives qui vont faire en sorte
qu'on va minimiser le plus possible des impacts sur des groupes identifiés ou
identifiables. Ça fait que ça, ça m'apparaît tout à fait important. Et donc par
la suite, bien, ça permet de suivre les retombées de la ADS+ et de s'assurer
qu'il n'y aura pas de groupes qui vont être discriminés.
Et donc ça dit ici, et ça aussi, c'est
très important parce que, dans la politique gouvernementale, puis je tiens à le
souligner, les ministères et organismes participants sont responsables de
l'intégration de l'ADS+ aux diverses étapes du projet... Alors, je ne sais pas
si, dans ce cas-ci, le ministère de l'Éducation ou M. le ministre de
l'Éducation ont intégré l'ADS+ dans les différentes étapes du projet, mais je
tiens à rappeler par ailleurs qu'il y a une politique gouvernementale à cet
effet-là. Et donc moi, j'aimerais ça, évidemment, entendre M. le ministre
là-dessus, parce que, si ça n'a pas été fait, bien là, évidemment, les gens qui
sont membres de la commission ne peuvent pas dire que, là, ils ne sont pas au
courant que la politique existe. Puis je le souligne à nouveau, là, c'est une
politique du gouvernement du Québec qui était en vigueur jusqu'en 2027, donc ce
n'est pas périmé, là.
Et normalement, par la suite, on doit
prendre en recommandation les recommandations issues de l'ACS+ aux différentes
étapes, donc, excessivement important pour qu'un projet puisse cheminer puis
qu'à la fin, bien, on s'assure qu'il n'y aura pas de discrimination. Et c'est
le Secrétariat à la condition féminine du gouvernement du Québec qui est prêt à
aider tous les ministères dans tous leurs projets afin de s'assurer qu'un
projet, un projet de loi, un règlement ne visera pas un groupe en particulier
ou n'aura pas une portée ou une atteinte plus grave sur un groupe en
particulier.
Donc, pour toutes ces raisons, moi, je
tenais absolument à prendre quelques instants pour rappeler l'importance de
cette...
M. Morin : ...de cette
politique-là qui a été mise de l'avant par le gouvernement du Québec, par le
Secrétariat à la condition féminine, et donc de voir si, dans le cadre de ce
projet de loi, une telle analyse a été faite. Alors, je vous... je vous
remercie, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Donc, nous allons mettre aux voix la motion du député
de Jean-Lesage. Est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix : Adopté.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
la motion... Un vote nominal. Oui, M. le député. Donc, un vote par appel
nominal.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Zanetti (Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire : M. Drainville
(Lévis)?
M. Drainville : Contre.
Le Secrétaire : Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
Le Secrétaire : M. Asselin
(Vanier-Les Rivières)?
M. Asselin : Contre.
Le Secrétaire : M. Lévesque
(Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) : Contre.
Le Secrétaire : M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Contre.
Le Secrétaire : M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
• (15 h 20) •
Le Secrétaire : M. Morin
(Acadie)?
M. Morin : Pour.
Le Secrétaire : Mme Dionne
(Rivière-du-Loup—Témiscouata)?
La Présidente (Mme Dionne) : Abstention.
Donc, cette motion est rejetée. Donc, prochaine... Est-ce qu'il y a d'autres
motions? On va procéder à l'étude... Oui, M. le député de Jean-Lesage. Je pense
qu'on l'a reçu, d'ailleurs. Donc, nous l'affichons ici à l'écran. Alors, je
vous laisse en faire la lecture, M. le député.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Alors :
«Que, conformément à l'article 244 du
Règlement de l'Assemblée nationale, la Commission de la culture et de
l'éducation, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi
n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de
l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives, tienne des
consultations particulières et qu'à cette fin elle entend les groupes
suivants : Conseil canadien des femmes musulmanes, Observatoire des
inégalités raciales du Québec (OIRQ).»
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Oui, je suis prête à vous entendre, M. le député.
M. Zanetti : Alors, la raison
pour laquelle je pense que ces audiences-là seraient importantes, sont
importantes, c'est parce que le projet loi 94, dans sa forme actuelle, va avoir
des impacts considérables sur les femmes musulmanes, sur diverses communautés
racisées et on ne les a pas entendues, en fait, en commission parlementaire.
Ces groupes-là, ces personnes-là n'ont pas été invités et accueillis puis on ne
les a pas entendues. Alors, je pense que ce serait important d'avoir leur point
de vue pour pouvoir continuer l'étude détaillée de ce projet de loi. C'est
quand même... C'est quand même particulier, que tout ça se fasse sans même
qu'on ait entendu ce qu'ils ont à dire là-dessus puis sans même qu'on ait pu
entendre les témoignages des conséquences que ça va avoir dans leur vie bien
concrète. J'ai terminé, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Donc, M. le ministre, souhaitez-vous intervenir?
M. Drainville : Bien, je vais
attendre l'intervention du député de... M. le député de l'Acadie.
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
M. le député de l'Acadie, la parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, écoutez, on n'a pas débuté officiellement, on n'a pas étudié
encore un article du projet de loi. J'écoute le collègue, député de
Jean-Lesage, je pense qu'il n'y a jamais de mal dans un Parlement à entendre
des groupes. Je faisais référence dans la motion précédente à l'ADS+, et, visiblement,
je ne crois pas que cette analyse-là a été faite dans le cadre du projet de
loi. Il y a une chose qui est sûre, ces groupes-là pourraient nous aider à
comprendre l'impact du projet de loi dans la société et particulièrement pour
les gens qui composent ces deux organismes.
Alors, je vous dirais que pour moi, c'est
un plus, plus on entend de gens. On est des élus, on est là comme... Mme la
Présidente de l'Assemblée, l'Assemblée, c'est la Maison du peuple, alors,
écoutons, écoutons ceux qui ont... qui ont à nous parler, à nous dire. Puis
après, bien évidemment, le gouvernement prend des décisions, mais, par
principe, je pense que c'est une bonne chose d'entendre des groupes puis des
organismes. Voilà.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Bien, Mme la
Présidente, les groupes qui ont participé aux consultations particulières ont
fait l'objet d'une discussion entre les différents partis. On s'est entendus
sur un certain nombre de groupes et puis on a conclu une entente sur les
groupes qu'on devait entendre, on les a entendus. Les consultations
particulières sont dorénavant terminées, et on en est à l'étape de l'étude
article par article, et nous souhaitons donc l'étape de l'étude article...
M. Drainville : ...par article
puisse démarrer comme il se doit.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Donc, nous allons mettre aux voix la motion du député de
Jean-Lesage. Donc, est-ce que cette motion est adoptée? Alors, la motion est
rejetée. Est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires? Oui. M. le député de
Jean-Lesage. Est-ce que vous nous l'avez fait parvenir?
M. Zanetti : Je... Oui. Elle
vous est parvenue.
La Présidente (Mme Dionne) : Nous
allons la mettre à l'écran. Donc, oui, nous l'avons ici à l'écran. Je vous
laisse en faire la lecture.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Alors :
«Que, conformément à l'article 244 du
règlement de l'Assemblée nationale, soit transmis à la Commission de la culture
et de l'éducation, avant de reprendre l'étude détaillée du projet de loi
n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de
l'éducation et modifiant diverses dispositions législatives, à la reprise du
calendrier régulier des travaux en septembre 2025, la liste des écoles privées
confessionnelles financées par des fonds publics, accompagnée d'un portrait
complet et détaillé de l'enseignement de la religion dans les écoles.»
Alors, je pense que c'est quelque chose
dont on a besoin pour pouvoir faire potentiellement des amendements à ce projet
de loi, afin qu'il y ait quelque chose de la laïcité qui soit véritablement
réalisée par ce projet de loi. Donc, dans l'étude détaillée et dans les
échanges qu'on avait eus, j'avais bien vu que le ministre, au fond, ne savait
pas, n'avait pas ce portrait complet là, ne s'était pas intéressé vraiment à
cette question, à savoir, on enseigne la religion dans les écoles au Québec,
c'est financé par des fonds publics, sait-on il y a combien d'écoles. Le
ministre avait lui-même posé la question à un groupe représentant des écoles
privées confessionnelles pour leur demander des statistiques et des données à
cet effet. Donc, ça m'avait évidemment étonné énormément. Et je pense que c'est
une lacune importante qui doit être comblée. Et je pense que la façon de faire
ça, et on aurait totalement le temps de le faire d'ici la reprise des travaux
en septembre, ce serait effectivement de faire cette analyse-là. Le ministère
de l'Éducation est clairement capable de faire ce recensement-là. Dans la
mesure où on est capables de financer ces écoles-là, on est capables de les
identifier dans un document, d'avoir des données par rapport à ça, d'avoir un
portrait qui pourrait peut-être inspirer au ministre lui-même et aux autres
législateurs des bonnes idées d'amendements pour que ce projet de loi là fasse
quelque chose au sujet du financement public qui est donné pour enseigner la
religion dans les écoles.
J'ai terminé, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre, est-ce que vous souhaitez intervenir? M. le
député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, écoutez, je crois savoir que, dans le cadre de l'étude des
crédits, cette question-là a été posée à M. le ministre. Je ne suis pas
convaincu qu'à ce moment-là M. le ministre avait une liste. Mais, les crédits,
ça fait déjà quelques semaines. Alors, si jamais cette liste a été
confectionnée et qu'elle est en possession présentement du ministère, je pense
qu'effectivement ce serait... ce serait intéressant que nous l'ayons dans le
cadre de l'étude de ce projet de loi. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Mme la
Présidente, sur la question des écoles privées, ce que nous avons dit, c'est
que nous allions faire des travaux sur cet enjeu dans un deuxième temps. Et
nous maintenons cette position, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Donc, nous allons mettre aux voix la motion du député de
Jean-Lesage. Est-ce que cette... Oui.
M. Zanetti : ...un vote par
appel nominal, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
Alors, un vote par appel nominal.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Zanetti (Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire
: M. Drainville
(Lévis)?
M. Drainville : Contre.
Le Secrétaire
: M. Asselin
(Vanier-Les Rivières)?
M. Asselin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lévesque
(Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) : Contre.
Le Secrétaire
: M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Contre.
Le Secrétaire
: M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
Le Secrétaire
: M. Morin
(Acadie)?
M. Morin : Pour. Voilà.
Merci.
Le Secrétaire : Mme Dionne
(Rivière-du-Loup—Témiscouata)?
La Présidente (Mme Dionne) : Abstention.
Donc, la motion est rejetée. Avant de poursuivre dans l'étude détaillée, est-ce
qu'il y a d'autres motions préliminaires? Donc, s'il n'y a pas d'autre motion
préliminaire, je prends en considération l'article...
La Présidente (Mme Dionne) :
…un du projet de loi. Donc, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Drainville : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, article 1 : La loi sur
l'instruction publique, chapitre 1-13.3) est modifié par l'ajout, avant le
chapitre un du suivant : « Chapitre 0.1. Objet. 0.1. La présente
loi a pour objet de mobiliser l'ensemble de la communauté éducative autour de
la réussite de l'élève par une offre de services éducatifs de qualité et un
accès à un milieu d'apprentissage sain et sécuritaire propice au développement
du plein potentiel de l'élève et à la formation de citoyens responsables et
pleinement engagés dans la vie démocratique, sociale, communautaire, économique
et culturelle de l'État du Québec.
• (15 h 30) •
« À cette fin, elle établit un
système scolaire public fondé sur les valeurs démocratiques et les valeurs
québécoises, dont l'égalité entre les femmes et les hommes et sur la laïcité de
l'État, laquelle repose sur : 1 : la séparation de l'État et des
religions;2 : La neutralité religieuse de l'État; trois : L'égalité
de tous les citoyens et citoyennes; quatre : La liberté de conscience et
la liberté de religion. Elle a également pour objet — la laïcité de
l'État, donc, hein — elle a également pour objet de promouvoir, notamment
dans le cadre des services éducatifs, la qualité du français, seule langue
commune de la nation… » en fait, non, je reprends, le l ici en question,
c'est la présente loi. Pardonnez-moi. Alors je reprends la lecture au terme des
quatre alinéas.
«Elle a également pour objet de
promouvoir, notamment dans le cadre des services éducatifs, la qualité du
français, seule langue commune de la nation québécoise, au sein du système
scolaire public, afin de permettre l'adhésion et la contribution de tous à la
culture distincte de cette nation. »
Commentaires. Cet article propose
d'ajouter une disposition d'objet à la Loi sur l'instruction publique,
précisant que cette loi établit un système scolaire public fondé sur les
valeurs démocratiques et les valeurs québécoises, dont l'égalité entre les femmes
et les hommes et sur la laïcité de l'État. La disposition rappelle également le
rôle du système scolaire public dans la promotion de la qualité du français.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 1?
Oui, M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. le ministre, dans cet ajout-là, qui vise l'objet de la
loi, vous faites référence, et je cite, « aux valeurs québécoises ».
Qu'est-ce que vous entendez par valeurs québécoises dans le cadre de l'objet
que vous allez ajouter à la Loi sur l'instruction publique?
M. Drainville : Bien, les
valeurs québécoises, Mme la Présidente, c'est, par exemple, la démocratie. Ça,
c'est une valeur québécoise. On ne définit pas dans le projet de loi les
valeurs. On donne l'exemple, par contre, on nomme explicitement l'égalité entre
les hommes et les femmes, parce qu'on souhaite mettre évidemment l'emphase sur
cette valeur-là. Je pense que, Mme la Présidente… je pense qu'on peut discuter,
M. le député de l'Acadie et moi, de ce que c'est qu'une valeur québécoise, ce
que sont les valeurs québécoises. Je pense qu'on en… on en arriverait
probablement au terme d'une bonne discussion à un certain consensus. Mais je
pense que c'est important, dans ce débat sur cette question, d'affirmer qu'une
telle chose existe et d'insister, de mettre l'emphase en particulier sur
l'égalité entre les femmes et les hommes, qui fait l'objet d'un très large
consensus et qui est… qui n'a pas toujours été un état de fait. On sait que
l'égalité entre les femmes et les hommes, ça a été un long combat au Québec,
Mme la Présidente. Et donc nous souhaitions, par ce projet de loi, en renforcer
le caractère…
15 h 30 (version non révisée)
M. Morin : ...bien, c'est... et
je suis tout à fait d'accord avec vous. J'ai écouté attentivement votre
réponse, M. le ministre, puis, au début de votre réponse, vous avez dit... en
fait, vous avez fait référence à la démocratie puis à ses valeurs. Sauf que
dans le libellé de votre article, ça commence par les valeurs démocratiques,
donc les valeurs... et ça dit après «et les valeurs québécoises». Donc, ça doit
vouloir dire autre chose. Et, évidemment, vous comprendrez que c'est superimportant.
Donc, quand ça va être incorporé à la Loi sur l'instruction publique, je
voudrais simplement savoir ce que vous avez en tête. Pour moi, quand vous
parlez de l'égalité homme-femme, c'est un concept qui est très clair, il n'y a
pas d'ambiguïté possible. Bon, les valeurs démocratiques aussi, ça se définit.
Les valeurs québécoises, c'est plus vague, en tout cas, un peu. Et ça, je pense
qu'il y a des groupes aussi qui ont fait cette remarque-là. Donc, c'est la
raison pour laquelle, j'aimerais ça si vous pouviez nous en dire davantage sur
ce que vous avez en tête, ce que vous cherchez à accomplir.
M. Drainville : Bien, comme
je vous ai dit, Mme la Présidente, notre objectif, ce n'est pas d'arriver avec
une liste finale de ce que sont les valeurs québécoises. Je pense que ça peut
faire l'objet d'une discussion démocratique. Je pense que le respect de la
démocratie et des institutions démocratiques, je pense qu'on peut dire que c'est
une valeur québécoise. Je pense qu'on pourrait très bien dire que le respect
des droits des minorités, c'est également une valeur québécoise. Je pense qu'on
pourrait soutenir que la diversité ethnoculturelle de notre société, le fait qu'on
est une société de plus en plus multiethnique, et donc que cela commande le respect
des droits individuels, je pense que, ça aussi, ça peut être une valeur...
considéré comme une valeur québécoise.
Le français est une très grande valeur
québécoise, et j'attire l'attention du député sur le fait que nous en faisons
un objectif explicite du projet de loi. Donc, de se limiter à une liste qui
serait finale, ce serait, je pense, faire fi, Mme la Présidente, du fait que la
société québécoise évolue. Et donc je pense qu'il est souhaitable que nous
laissions cette discussion-là ouverte, mais que le projet de loi attire l'attention
du citoyen et du législateur sur le fait qu'il y a ce concept qui existe de
valeurs québécoises, je pense que c'est souhaitable, je pense que c'est une
bonne idée, qu'on l'accole au concept de valeurs démocratiques, je pense que c'est
une bonne chose.
M. Morin : Bien, et je suis d'accord
avec M. le ministre quand il faisait référence un peu plus tôt à la qualité du
français, notamment dans le cadre des services éducatifs. Le français, c'est
notre langue commune et c'est très important qu'on la parle et qu'on la parle
bien et qu'on l'écrive bien aussi. Ça doit se matérialiser particulièrement
dans une loi comme la Loi sur l'instruction publique. Et je reviens... et je
comprends, j'écoute, j'entends la réponse de M. le ministre, mais, évidemment,
quand on parle la qualité du français, dans ma tête, c'est très clair. Quand on
parle du français comme notre seule langue commune, c'est aussi très clair.
Maintenant, quand on parle après ça de culture
distincte, de valeurs québécoises, là, comme des groupes l'ont souligné d'ailleurs,
c'est... là, c'est un peu plus vague et c'est un peu plus flou. D'autant plus,
comme je le disais précédemment, que la façon dont le texte est rédigé... on
parle des valeurs démocratiques et des valeurs québécoises. Donc, c'est
forcément autre chose, sinon il n'y aurait pas eu un «et», ça n'aurait pas été
rédigé de cette façon-là. Quand on parle des des valeurs québécoises, on parle
dont l'égalité homme-femme, mais il y a sûrement autre chose parce qu'on a un
«dont», et après on rajoute «et sur la laïcité de l'État» qui, pour moi, la
façon dont c'est rédigé, c'est un autre concept.
Alors, je... en tout cas, je demandais un
peu plus de précision, compte tenu de ce que certains groupes ont souligné... ont
souligné eux-mêmes. Et là, évidemment, est-ce qu'il fait référence, comme
certains groupes l'ont souligné, aux valeurs prévues dans la charte québécoise?
Alors, vous comprendrez, c'est là que ça devient un peu flou, mais je pense que
l'ensemble de la population aura un...
M. Morin : …à en apprendre
davantage sur ce concept-là. C'est mon point, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Souhaitez-vous revenir là-dessus, M. le ministre?
M. Drainville : Oui, bien, je
veux juste ajouter un élément d'information qui serait peut-être utile pour mon
collègue de l'Acadie. Dans le projet de loi n° 84, la Loi sur
l'intégration nationale, qui a été adopté récemment, au troisième paragraphe du
cinquième article, il est écrit : «L'adhésion aux valeurs démocratiques et
aux valeurs québécoises exprimées notamment par la Charte des droits et
libertés de la personne, dont l'égalité entre les femmes et les hommes.» Donc,
il y a un souci de cohérence également ici, là.
M. Morin : Parfait. Je vous
remercie. Est-ce que... Compte tenu de la réponse de M. le ministre, est-ce que
je peux vous demander une suspension, s'il vous plaît?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
certainement. Alors, la commission suspend quelques instants.
(Suspension de la séance à 15 h 40)
(Reprise à 15 h 49)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, M. le député de l'Acadie, je
vous laisse poursuivre.
M. Morin : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Alors, merci pour la suspension, ça nous a permis de parler
informellement avec M. le ministre et parler de l'amendement qui est sur le
Greffier et que je souhaiterais déposer, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Dionne) : ...projeter
l'amendement à l'écran.
M. Morin : Je vous remercie.
Et donc je pourrai en faire la lecture.
La Présidente (Mme Dionne) :
Oui, vous pourrez en faire la lecture, effectivement. Alors, voici, je vous laisse
poursuivre, M. le député.
• (15 h 50) •
M. Morin : Merci. Donc, Loi
visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et
modifiant diverses dispositions législatives, projet de loi n° 94,
article 1. L'article 0.1, introduit par l'article 1 du projet de
loi, est modifié par le remplacement, dans le deuxième alinéa, des mots «les
valeurs démocratiques et les valeurs québécoises» par les mots «les valeurs
démocratiques, les valeurs québécoises et les droits et libertés consacrés par
la Charte des droits et libertés de la personne».
Donc, l'article modifié se lirait comme
suit... Si nous pouvons un peu dérouler. Merci. Donc, 1. La loi sur
l'instruction publique (chapitre I-13.3) est modifiée par l'ajout, avant
le chapitre I, du suivant : Chapitre 0.1, objet 0.1. La présente
loi a pour objet de mobiliser l'ensemble de la communauté éducative autour de
la réussite de l'élève par une offre de service éducatif de qualité et un accès
à un milieu d'apprentissage sain et sécuritaire propice au développement du
plein potentiel de l'élève et à la formation de citoyens responsables et
pleinement engagés dans la vie démocratique, sociale, communautaire, économique
et culturelle de l'État du Québec. À cette fin, elle établit un système scolaire
public fondé sur les valeurs démocratiques, les valeurs québécoises et les
droits et libertés consacrés par la Charte des droits et libertés de la
personne, dont l'égalité entre les hommes... entre les femmes et les hommes et
sur la laïcité de l'État, laquelle repose sur : 1° la séparation de l'État
et des religions; 2° la neutralité religieuse de l'État; 3° l'égalité de tous
les citoyens et citoyennes; 4° la liberté de conscience et la liberté de
religion. Voilà.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Donc, M. le ministre, est-ce que vous avez des
interventions ou vous voulez...
M. Drainville : Bien, si je
peux me permettre, Mme la Présidente, je propose que nous suspendions l'étude
de l'amendement proposé par mon collègue. On a des discussions, réflexions qui
sont en cours, et donc, dépendamment du résultat de ces discussions,
réflexions, on pourra réagir formellement à sa proposition, mais je ne suis pas
en mesure de le faire présentement. Et donc, si les membres de la commission
sont d'accord, on pourrait suspendre l'étude de l'amendement du député le temps
que nous puissions lui donner une réponse formelle. Et on pourrait continuer à
discuter de cet article pendant qu'on attend les analyses, le résultat des
analyses.
La Présidente (Mme Dionne) :
Est-ce qu'il y a consentement?
M. Morin : Oui, ça me
convient. Il y a consentement.
La Présidente (Mme Dionne) :
Oui, M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Bien, moi, je...
ce que je proposerais, en fait, c'est qu'on continue encore un petit peu, parce
que, dans le fond, moi, j'aurais un sous-amendement à proposer à cet
amendement-là, ça fait que j'aimerais ça qu'on puisse faire la discussion avant
que le ministre prenne ça en délibéré puis peut-être arrive probablement avec
un amendement synthèse avec lequel il serait à l'aise, là, parce que j'ai
l'impression que c'est là que ça s'en va. Ça fait que juste avant que ça, ça
démarre comme processus, j'aimerais moi aussi pouvoir participer à la
discussion, puis amener un sous-amendement, puis les principes qui sont
sous-jacents à ma proposition.
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
vous aimeriez déposer un sous-amendement. Est-ce que vous l'avez envoyé sur...
M. Zanetti : Il est en cours
de rédaction.
La Présidente (Mme Dionne) :
Il est en cours de rédaction.
M. Zanetti : Parce que je
pensais faire un amendement, mais là je le transforme.
La Présidente (Mme Dionne) : O.K.
Donc, est-ce qu'il y a consentement pour permettre au député de Jean-Lesage de
déposer un sous-amendement?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
D'accord. Alors, nous allons suspendre quelques instants, le temps de recevoir
votre sous-amendement.
(Suspension de la séance à 15 h 54)
(Reprise à 16 h 06)
La Présidente (Mme Dionne) :
La commission reprend maintenant ses travaux. Donc, M. le député de
Jean-Lesage, je vous laisse faire la lecture de votre sous-amendement.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. Alors, l'amendement à l'article 0.1 qui est introduit par
l'article 1 du projet de loi est modifié par :
1° l'insertion, après les mots
«fondés sur», des mots «l'égalité des chances»;
2° l'insertion, après les mots «les
femmes et les hommes», des mots «ainsi que la lutte contre le racisme et la
discrimination».
L'amendement tel que modifié se lirait
comme suit :
«À cette fin, elle établit un système
scolaire public fondé sur l'égalité des chances, les valeurs démocratiques, les
valeurs québécoises et les droits et libertés consacrés par la Charte des
droits et libertés de la personne, dont l'égalité entre les femmes et les
hommes ainsi que la lutte contre le racisme et la discrimination, et sur la
laïcité de l'État, laquelle repose sur :
«1° la séparation de l'État et des
religions;
«2° la neutralité religieuse de
l'État;
«3° l'égalité de tous les citoyens et
citoyennes;
«4° la liberté de conscience et la
liberté de religion.»
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci beaucoup, M. le député. Donc, est-ce qu'il y a des interventions suite
au... Bien, oui, vous pouvez...
M. Zanetti : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
Vous voulez l'expliquer? Oui, allez-y, M. le député.
M. Zanetti : Je vais
l'expliquer. Donc, si vous pouvez baisser un petit peu. Dans le fond, si on
est, dans ce moment-là du projet de loi, à nommer et à expliciter des principes
et des valeurs sur lesquels sont appuyés le projet de loi et sur lesquels doit
s'appuyer le système d'éducation en entier, je me dis qu'on pourrait allonger
un peu la liste et inclure la question de l'égalité des chances, qui est
vraiment extrêmement importante, qui est la base d'une société démocratique.
Puis, étant donné que les valeurs démocratiques, c'est là, je me dis : Ça
pourrait bien marcher. Le fait aussi d'ajouter «ainsi que la lutte contre le
racisme et la discrimination», ça me paraît être quelque chose d'important, je
pense que c'est une valeur québécoise importante, comme la laïcité de l'État,
comme l'égalité entre les femmes et les hommes. Alors, c'est pour ça que je
propose qu'on ajoute ça aussi, tant qu'à y être.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le député. Est-ce qu'il y a des interventions sur le sous-amendement
de M. le député de Jean-Lesage?
M. Drainville : Oui, Mme la
Présidente, on va... s'il y a consentement, on va suspendre pour qu'on puisse
prendre connaissance, là, de l'amendement et du... sous-amendement dis-je bien.
Et on a également eu les résultats de nos réflexions, analyses, là, par rapport
à l'amendement déposé par le député de l'Acadie, alors on pourra faire le point
là-dessus également. Donc, je propose de suspendre un instant, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Dionne) :
Parfait, M. le ministre.
Donc, la commission suspend quelques
instants.
(Suspension de la séance à 16 h 09)
16 h (version non révisée)
(Reprise à 16 h 15)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, avant la suspension, nous en
étions sur le sous-amendement de M. le député de Jean-Lesage. Donc, je suggère
de poursuivre sur le sous-amendement. Ça vous convient, monsieur… Oui? D'accord.
Alors, M. le ministre.
M. Drainville : Oui. Alors, Mme
la Présidente, d'abord, je tiens à préciser, pour les gens qui nous écoutent,
là… nous avons trouvé une formulation qui rejoint l'objectif de l'amendement du
député de l'Acadie. Donc, on a trouvé un libellé qui satisfait la position de l'opposition
officielle.
Pour ce qui est du sous-amendement du
député de Jean-Lesage, je tiens à souligner d'abord que le concept d'égalité
des chances, il est déjà à la Loi sur l'instruction publique, c'est l'article
36, deuxième alinéa, et c'est très explicite, là : «L'école a pour
mission, dans le respect du principe de l'égalité des chances, d'instruire, de
socialiser et de qualifier les élèves tout en les rendant aptes à entreprendre
et à réussir un parcours scolaire.» Donc, le concept d'égalité des chances, il
est déjà inscrit à la Loi sur l'instruction publique. Donc, on ne souhaite pas
de redondance.
Par ailleurs, sur la notion de lutte
contre le racisme et la discrimination, nous n'allons pas donner notre accord à
cette proposition, Mme la Présidente, pour la simple et bonne raison que le
projet de loi dont nous sommes saisis, le projet de loi n° 94 sur la laïcité,
ce n'est pas un projet de loi, Mme la Présidente, sur l'intégration, par
exemple, des nouveaux arrivants, ce n'est pas… Il n'y a pas de lien avec l'immigration
parce qu'il faut savoir que cette référence à «racisme et discrimination», ça a
été un amendement qui a été apporté à la loi n° 84
sur l'intégration nationale, et on peut comprendre que ce concept-là soit
intégré à la Loi sur l'intégration nationale, mais, dans le cas de la Loi sur
la laïcité, je pense que ces concepts-là débordent de l'objectif visé par la
Loi sur la laïcité.
Il faut rappeler, Mme la Présidente, que l'objet,
là, de ce projet de loi, donc l'article 0.1, c'est une clause interprétative. Donc,
c'est une clause qui va teinter l'ensemble des dispositions législatives de la
loi. Donc, c'est un article qui est évidemment important, mais qui ne doit pas
non plus dédoubler ce qui existe déjà dans la LIP. Donc, nous allons voter
contre l'amendement proposé par le député de Jean-Lesage, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Oui, M. le député.
M. Zanetti : Oui, merci
beaucoup, Mme la Présidente. Bon, je comprends l'argument du ministre au sujet
du concept de l'égalité des chances qui est présent à l'article 36 de la LIP.
On l'avait souligné, mais, comme on semble, ici, être dans un moment où est-ce
qu'on vient dire des choses qui sont déjà dites ailleurs, on se disait que ça
pourrait être le moment de rappeler ça pour en montrer l'importance qu'on y
porte.
L'autre question, la lutte contre le
racisme et la discrimination, bien, c'est justement en cohérence avec le projet
de loi n° 84 sur l'intégration nationale qu'on se dit
que ça vaudrait la peine de l'insérer ici. De dire que le projet de loi actuel
n'a rien à voir avec les enjeux de discrimination, c'est quand même quelque
chose qui est à contre-courant de l'opinion de beaucoup de gens qui sont venus
témoigner ici, là, c'est-à-dire que ne serait-ce que la commission…
M. Zanetti : ...droits... des
droits de la personne et de la jeunesse, la Ligue des droits et libertés,
beaucoup des gens qui se soucient de la question des droits et libertés sont
venus dire : Ce projet de loi va causer de la discrimination. Donc, de
dire qu'il n'y a aucun lien entre ce projet de loi et des enjeux de
discrimination, c'est... c'est vraiment, tu sais, occulter beaucoup des
commentaires qu'on a reçus en commission parlementaire.
Donc, je pense que ce serait pertinent,
étant donné que l'objectif du ministre de l'Éducation, on veut... on veut
croire que c'est aussi que le système d'éducation ait pour but de lutter contre
le racisme et la discrimination, sinon, comment, où est-ce qu'on va lutter
contre le racisme et la discrimination dans la société, si ce n'est pas à
l'école.
Alors, je pense que ça enverrait un bon
message, d'insérer ça à ce moment-ci. Non seulement ce serait cohérent avec un
projet... une pièce législative qui vient d'être déposée, qui vient d'être
adoptée, projet de loi n° 84 sur l'intégration nationale, donc ce ne
serait pas comme un revirement total de positionnement pour le gouvernement.
Puis, en même temps, je pense que ce serait à propos, étant donné la teneur du
projet de loi puis des opinions qui ont été émises à ce sujet.
• (16 h 20) •
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le sous-amendement de
M. le député de Jean-Lesage? Donc, s'il n'y a pas d'autres interventions, nous
allons mettre aux voix le sous-amendement. Est-ce que le...
M. Drainville : ...quelque
chose, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Allez-y, M. le ministre.
M. Drainville : Je tiens
quand même à souligner, pour le bénéfice de notre collègue de Jean-Lesage, que
le plan de lutte contre la violence et l'intimidation que chaque conseil
d'établissement doit adopter, dont chaque école doit se doter, prévoit,
n'est-ce pas, au deuxième paragraphe, des mesures de prévention qui visent à
contrer toute forme d'intimidation ou de violence motivée notamment par le
racisme. Donc, ce n'est pas comme... ce n'est pas comme si l'école québécoise
n'avait pas pour volonté de lutter contre le racisme, là. Le plan de lutte
contre la violence et l'intimidation prévoit spécifiquement la lutte contre le
racisme.
Et j'attire également l'attention du
député de Jean-Lesage sur les obligations qui sont faites aux élèves, dans
notre projet de loi, où il est question du code de conduite, donc, des élèves.
Ça, c'est l'article 13, l'article 13, premier paragraphe, où on dit
que «les règles de conduite des élèves, donc, doivent notamment prévoir les
attitudes et le comportement devant être adoptés en toute circonstance par
l'élève, excluant toute forme d'intimidation ou de violence motivée notamment
par le racisme, l'orientation sexuelle, l'homophobie», etc.
Une voix : ...
M. Drainville : Et c'est
également, me chuchote-t-on à l'oreille, l'article trois, où il est question
également... Si vous regardez les obligations de l'élève, au deuxième
paragraphe, on fait référence là aussi au fait que «les comportements des
élèves doivent être exempts de toute forme de violence motivée notamment par le
racisme, l'orientation sexuelle», etc. Donc, nous n'ignorons pas cette
dynamique ou cette dimension, M. le député de Jean-Lesage. Je voulais juste
attirer votre attention là-dessus. Voilà, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Oui. M. le député.
M. Zanetti : Bien, en fait,
tous les arguments du ministre plaident vraiment en faveur de l'adoption de mon
sous-amendement, à mon avis. Parce que non seulement on vient de réaliser que,
finalement, il y a déjà des choses dans ce projet de loi qui concernent le
thème de la lutte contre le racisme, la discrimination, puis en plus, bien, ce
serait en cohérence avec le reste. Alors, je réitère mon invitation à
reconsidérer sa décision.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le
sous-amendement du député de Jean-Lesage? S'il n'y a pas d'autre intervention,
nous allons mettre aux voix le sous-amendement. Est-ce que le... Oui. M. le
député.
M. Zanetti : Vote par appel
nominal, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Avec plaisir. Donc, vote par appel nominal.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Zanetti (Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Pour.
Le Secrétaire
: M. Drainville
(Lévis)?
M. Drainville : Contre.
Le Secrétaire
: Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Contre.
Le Secrétaire
: M. Asselin
(Vanier-Les Rivières)?
M. Asselin : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lévesque
(Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) :
Contre.
Le Secrétaire
: M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Contre.
Le Secrétaire
: M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Contre.
Le Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Contre.
Le Secrétaire
: M. Morin
(Acadie)?
M. Morin : Abstention.
Le Secrétaire
: Mme Dionne
(Rivière-du-Loup—Témiscouata)?
La Présidente (Mme Dionne) : Abstention.
Donc, ce sous-amendement est rejeté. Alors, on va revenir à l'amendement de M.
le député de l'Acadie. Donc, des interventions? Oui.
M. Morin : Oui, Mme la
Présidente, je vous remercie. Alors, je comprends qu'à la suite du dépôt de
l'amendement, comme le soulignaient M. le ministre et les légistes...
M. Morin : ...on fait un
travail qui fait en sorte qu'on nous a proposé un libellé conforme à ce qui est
fait dans la législation québécoise, et donc, pour en avoir discuté avec M. le
ministre, je suis d'accord avec le libellé qui est soumis. Donc, normalement,
vous devriez avoir dans Greffier le libellé qui était proposé par le légiste du
gouvernement et qu'on pourra évidemment proposer et expliquer rapidement dès
que vous l'aurez, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Donc, est-ce que nous avons reçu la modification? Alors, nous
allons projeter à l'écran. Donc, j'imagine, M. le ministre, que vous allez en
faire la lecture, ou M. le député.
M. le député, avant de faire la lecture,
on doit... dans le fond, je... on retirerait votre premier amendement. Donc, il
y a consentement pour retirer le premier amendement du député de l'Acadie?
M. Morin : Je vais vous
demander de retirer l'amendement adopté. Bon. Alors, je vais vous demander de
retirer, merci, l'amendement que j'ai proposé et qui sera remplacé par
celui-là.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député.
M. Morin : Je vous en prie.
La Présidente (Mme Dionne) :
Il vous reste à en faire la lecture.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Donc, article 1 : L'article 0.1, introduit par
l'article 1 du projet de loi est modifié par le remplacement, dans le
deuxième alinéa, des mots «les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises»
par les mots «les valeurs démocratiques, les valeurs québécoises et les droits
et libertés consacrés par la Charte des droits et libertés de la personne.»
L'article modifié se dirait comme
suit : «La Loi sur l'instruction publique, chapitre...»
La Présidente (Mme Dionne) : Je
m'excuse, M. le député, je pense que je vais vous interrompre parce qu'on n'a
pas la bonne version, parce que si je ne m'abuse, je suis désolée...
M. Morin : En fait, il y a...
il y a un «notamment», en tout cas, dans la bonne version clairement, là.
La Présidente (Mme Dionne) : Il
y a un «notamment» dans la bonne version. Donc, on va s'assurer de voir le...
oui, «notamment», voilà! Alors là, on est vraiment à la bonne version.
M. Morin : Voilà! Bon.
La Présidente (Mme Dionne) : Je
suis désolée pour ce petit contretemps.
M. Morin : Je vous en prie.
Je vous en prie
La Présidente (Mme Dionne) : Reprenez
la lecture.
M. Morin : Tant qu'à le
faire, on va le faire bien. Voilà! Alors, je recommence, Mme la Présidente.
Donc, article 1. Article 0.1 de
la Loi sur l'instruction publique :
Insérer, dans le deuxième alinéa de
l'article 0.1 de la Loi sur l'instruction publique proposé par
l'article 1 du projet de loi et, après «valeurs québécoises», «exprimées
notamment par la Charte des droits et libertés de la personne chapitre C-12».
Commentaire, l'amendement vise à référer à
la Charte québécoise des droits et libertés de la personne donc à
l'article 0.1. Alors, ça aurait pour effet... Et là je vais le
relire :
«La présente loi a pour objet de mobiliser
l'ensemble de la communauté éducative autour de la réussite de l'élève par une
offre de services éducatifs de qualité et un accès à un milieu d'apprentissage
sain et sécuritaire propice au développement du plein potentiel de l'élève et à
la formation de citoyens responsables et pleinement engagés dans la vie
démocratique, sociale, communautaire, économique et culturelle de l'État du
Québec.
«À cette fin, elle établit un système
scolaire public fondé sur les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises,
exprimées notamment par la Charte des droits et libertés de la personne
(chapitre C-12), dont l'égalité entre les femmes et les hommes sur la
laïcité de l'État, laquelle repose sur :
«1° la séparation de l'État et des
religions;
«2° la neutralité religieuse de l'État;
«3° l'égalité de tous les citoyens et
citoyennes;
«4° la liberté de conscience et la liberté
de religion.»
Voilà!
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Des interventions sur cet amendement?
M. Drainville : Mme la
Présidente, c'est un libellé sur lequel nous nous sommes mis d'accord. Je veux
juste, en toute transparence, là, préciser d'emblée, pour pas qu'il y ait de malentendus
puis qu'il y ait des manifestations d'irritation ou de frustration par la
suite, nous avons souhaité donc donner notre accord à cet ajout. Maintenant, je
tiens à préciser d'emblée qu'on ne va pas le faire à chaque fois qu'on parle de
valeurs québécoises, là, parce qu'on parle de valeurs québécoises quand même à
plusieurs endroits dans le projet de loi. On le fait à ce stade-ci. Et pourquoi
est-ce qu'on le fait à ce stade-ci? Parce que l'objet, donc cette disposition
avec laquelle débute le projet de loi, c'est une clause interprétative, c'est
une sorte de déclaration de principe, et donc...
M. Drainville : ...on pense
que c'est le bon moment pour apporter cet éclaircissement, cette précision,
faire cet ajout dans le libellé, mais je veux juste signifier à mon distingué
collègue qu'on ne va pas... on ne va pas, à toutes les fois qu'il est question
de valeurs québécoises, arriver avec ce nouvel amendement là. Enfin, si vous
souhaitez le faire, c'est votre droit le plus légitime de vouloir le faire,
mais je veux juste vous dire qu'on ne va pas donner notre accord, là, pour
ajouter, à toutes les fois qu'il est question de valeurs québécoises, ce
libellé de votre cru, là. Je voulais juste que ce soit clair, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Des interventions? Oui, M. le député de Jean-Lesage puis,
ensuite, M. le député de l'Acadie.
M. Zanetti : Bien, moi, en
fait, je veux juste m'assurer que je vais pouvoir intervenir sur
l'article 1, tel qu'amendé, après le vote sur l'amendement du député de
l'Acadie.
• (16 h 30) •
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Dans le fond, on va adopter l'amendement puis on va poursuivre sur
l'article 1.
M. Zanetti : Parfait.
La Présidente (Mme Dionne) : Ça
va? M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Oui. Bien, merci,
Mme la Présidente. Écoutez, je comprends la position de M. le ministre.
Effectivement, on est dans l'objet, donc, au tout début de la loi. Et donc, par
la suite, dans le projet de loi, tout, normalement, devrait être cohérent et
couler de source. Et puisque le législateur ne parle pas pour rien dire, bien,
évidemment, cette clause-là va continuer. Donc, ça me convient, ça me convient
très bien, Mme la Présidente. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le député. Donc, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons
mettre aux voix. Donc, est-ce que l'amendement du député de l'Acadie est
adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Alors, amendement adopté, donc on poursuit nos discussions sur
l'article 1. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député de
Jean-Lesage, oui, la parole est à vous.
M. Zanetti : Oui. Bien, je
voulais savoir, en fait... questionner le ministre à savoir si, dans le fond,
la présence dans l'article de cette référence à la Charte québécoise des droits
et libertés, ça venait, en quelque sorte, peut-être, je ne sais pas, annuler
l'utilisation de la clause dérogatoire. Il y a quand même, d'un point de vue
législatif, une contradiction importante entre le fait d'écrire dans la
loi : On respecte les droits puis, en même temps, d'écrire dans la
loi : Mais on ne va quand même pas les appliquer à cette loi-là, par
exemple. Alors, je voulais voir comment le ministre voit cette contradiction-là
entre la référence à la charte et puis l'utilisation de la clause dérogatoire.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Oui, bien, je
rappelle à mon collègue de Jean-Lesage, Mme la Présidente, que la clause de
souveraineté parlementaire, autrement appelée clause dérogatoire, existe à
l'intérieur de la charte des droits, aussi bien la charte québécoise des droits
que la charte canadienne des droits. Et donc la clause de dérogation à la
clause de souveraineté parlementaire est en équilibre avec les droits qui sont
inscrits dans les deux chartes, la québécoise et la canadienne. La clause de
souveraineté parlementaire cohabite, coexiste avec l'énoncé des droits, et on
observera la même chose avec le projet de loi no 94.
M. Zanetti : Et est-ce que le
ministre reconnaît qu'il y a une contradiction logique, quand même, entre le
fait de faire un projet de loi qui fait l'éloge des droits et, en même temps,
de mettre ce même projet de loi là à l'abri de l'examen des tribunaux qui sont
là pour faire respecter les droits?
M. Drainville : Mme la
Présidente, on pourrait avoir un long, long débat philosophique, M. le député
de Jean-Lesage et moi, sur cette question.
Le recours à la clause dérogatoire, Mme la
Présidente, c'est d'abord et avant tout un recours pour assurer la sécurité du
projet de loi et c'est en toute cohérence avec le recours à la clause dans la
loi no 21, et ça se limite à ça, Mme la Présidente.
M. Zanetti : Bien, sur la
question de la sécurité, là, de la loi, là, qu'est-ce qui pourrait arriver à la
loi si on vérifiait qu'elle respecte ou non les droits et libertés au Québec?
C'est ma question pour le ministre... qui arrive à la loi si on permettait aux
tribunaux d'examiner si elle respecte les droits et libertés?
M. Drainville : Mme la
Présidente, le gouvernement a pris sa décision, et c'est une décision qui fut
longuement réfléchie...
16 h 30 (version non révisée)
M. Drainville : ...bien
entendu, on a... un gouvernement ne décide pas d'avoir recours à la clause
dérogatoire à la légère. Donc, c'est une décision qui a été mûrement réfléchie,
et nous allons de l'avant avec cette décision, Mme la Présidente.
M. Zanetti : J'ai une question.
Moi, j'aimerais savoir : Est-ce que le ministre peut affirmer qu'il est
confiant que cette loi-là, si elle était examinée par les tribunaux,
respecterait la charte québécoise des droits et libertés de la personne?
M. Drainville : Mme la
Présidente, nous considérons que le droit à la laïcité et les autres droits et
valeurs qui sont affirmés dans ce projet de loi sont importants, essentiels,
fondamentaux, et c'est la raison pour laquelle ces droits, et principes, et
valeurs font l'objet de la loi n° 94.
M. Zanetti : Bien, je vais...
je vais conclure parce que, dans le fond... je vais conclure de l'échange que j'ai
avec le ministre, en fait, qu'il n'est pas confiant que sa loi, examinée par
les tribunaux, respecterait la charte québécoise des droits et libertés, là. Je
ne vais pas lui reposer la question sous une autre forme pour obtenir une autre
réponse un peu évasive, mais je comprends que le ministre sait bien que, devant
les tribunaux, ça ne passerait pas et qu'on dirait clairement que ça ne
respecte pas les droits et libertés de la personne.
M. Drainville : Mme la
Présidente, la question qui est posée par la députée de Jean-Lesage est une
question hypothétique. Ce qui n'est pas hypothétique, c'est le fait que la
liberté de conscience de certains de nos enfants a été bafouée à l'école
Bedford, l'a été aussi dans d'autres écoles, que l'égalité entre les hommes et
les femmes et, pour être plus précis, l'égalité entre les garçons et les filles
a été bafouée également dans d'autres circonstances.
Ce qui est clair également, Mme la
Présidente, c'est qu'il y a eu des cas qui nous ont été rapportés dans la
sphère publique, où un enseignant, par exemple, homosexuel a été victime d'intimidation,
sinon de menaces, ce qui justifie, nous le croyons, que certaines obligations
soient créées pour les élèves dans les écoles québécoises en vertu du code de
conduite.
Ce qui est clair également, Mme la
Présidente, c'est que certaines personnes qui ont une religion ont eu droit à
plus de congés rémunérés que d'autres personnes qui n'ont pas de religion, ce
qui crée visiblement une discrimination et une iniquité.
Alors, Mme la Présidente, ça, ce n'est pas
hypothétique. Ça, c'est avéré, c'est documenté, et c'est pour répondre
notamment à ces cas, à ces exemples documentés, réels, avérés que nous avons
décidé de déposer ce projet de loi.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre.
M. Zanetti : Bien, j'ajouterais
que, si le ministre était confiant que sa loi respecte les droits et libertés
au Québec et qu'elle respecte la charte québécoise des droits et libertés, s'il
était confiant que c'est ça que ça faisait, son projet de loi, il n'utiliserait
pas la clause dérogatoire. Il n'y aurait aucune gêne, aucune inquiétude à
laisser les tribunaux l'examiner. Puis, on aurait probablement quelque chose
qui respecte davantage les droits et libertés. Parce que c'est à ça qu'elle
sert, la charte québécoise des droits et libertés, en fait. Elle sert à empêcher
les législateurs de nier les droits et libertés des Québécoises et des
Québécois.
Alors là, je ne sais pas, on dirait que le
ministre est en train de dire : Oui, mais là, la charte, si on la laissait
s'appliquer, c'est comme si elle permettrait des atteintes aux droits. C'est un
peu... Il y a une grosse confusion là-dedans, puis moi, je pense que la
meilleure cohérence, ce serait d'enlever la clause dérogatoire à cette... Mais
on aura... on aura le débat à un autre moment, j'imagine.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 1? Oui, M.
le député de l'Acadie.
M. Morin : En fait, sur l'article
1...
La Présidente (Mme Dionne) : Amendé.
M. Morin : ... tel qu'amendé,
là, oui. En fait, j'aurais un autre amendement à présenter sur l'article 1. On
peut le partager, l'envoyer sur Greffier, et je pourrai en faire la lecture et
expliquer les raisons pour lesquelles je propose cet amendement, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Donc, nous allons mettre à l'écran votre amendement, qu'on n'a
pas reçu encore.
Donc, on va suspendre juste quelques
instants, le temps de recevoir l'amendement.
(Suspension de la séance à 16 h 39)
(Reprise à 16 h 40)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, M. le député de l'Acadie, je
vous laisse faire la lecture de votre amendement.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, un amendement à l'article, en fait, 1, tel qu'amendé :
L'article 0.1, introduit par l'article 1
du projet de loi, est modifié par l'ajout, dans le deuxième alinéa, après le
paragraphe 4°, du paragraphe suivant :
«5° la protection de l'intérêt de
l'enfant».
Donc, l'article modifié se lirait comme
suit :
La Loi sur l'instruction publique est
modifiée par l'ajout, avant le chapitre I, du suivant :
«Chapitre 0.1
«Objet
«0.1. La présente loi a pour objet de
mobiliser l'ensemble de la communauté éducative autour de la réussite de
l'élève par une offre de services éducatifs de qualité et un accès à un milieu
d'apprentissage sain et sécuritaire propice au développement du plein potentiel
de l'élève et à la formation de citoyens responsables et pleinement engagés
dans la vie démocratique, sociale, communautaire, économique et culturelle de
l'État du Québec.»
Et donc, après ça, à la fin, on
arrive :
«À cette fin, elle établit un système
scolaire public fondé sur les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises,
dont l'égalité entre les femmes et les hommes et la laïcité de l'État.»
Donc, je comprends que notre amendement
qui a été accepté n'a pas été rajouté. Mais, enfin, bref, ce qui est important,
c'est :
«1° la séparation de l'État et des
religions;
«2° la neutralité religieuse de
l'État;
«3° l'égalité de tous les citoyens et
citoyennes;
«4° la liberté de conscience et la
liberté de religion;» et l'ajout :
«5° la protection de l'intérêt de
l'enfant.»
Et je soumets cet amendement, Mme la
Présidente, qui nous provient du mémoire du protecteur national de l'élève. Et
on se rappellera, pendant les consultations particulières, le protecteur
national de l'élève soulignait, dans le cadre de son travail, comment il était
important de considérer la protection de l'intérêt de l'enfant comme étant une
valeur québécoise. Et, puisque... et, puisque, dans cet article, qui est dans
l'objet de la loi, on définit les valeurs québécoises... et, au fond, ça vient
un peu ajouter et aider, si vous me permettez l'expression, M. le ministre,
dans sa définition des valeurs québécoises, dont je lui posais des questions
tout à l'heure.
Et donc de dire, finalement, que la
protection de l'intérêt de l'enfant devrait être normalement au centre de nos
préoccupations, et devrait être au centre de la loi qui traite, bien sûr, de
l'instruction publique... et donc ça devrait devenir une valeur québécoise.
Pourquoi? Bien, parce que, comme le souligne le protecteur national de l'élève,
plusieurs lois importantes au Québec font... et je cite son mémoire, à la page
6, «font déjà référence à l'importance qui doit être donnée à la protection de
l'intérêt de l'enfant — et là il y a plusieurs exemples — notamment
aux articles 32 et 33 du Code civil du Québec — et, évidemment, pas
besoin d'épiloguer longtemps sur l'importance du Code civil du Québec, qui
est... qui est une valeur fondamentale au Québec, qui nous distingue des autres
provinces du Canada — au préambule et à l'article 3 de la Loi sur la
protection de la jeunesse, et à l'article 39 de la Charte des droits et
libertés de la personne, ou plus encore, récemment, la Loi sur le Commissaire
au bien-être et aux droits des enfants.»
Donc, il est clair que le législateur...
M. Morin : …dans son corpus
législatif à différents endroits, mais dans des textes de loi importants, dont
la Charte, dont le Code civil fait déjà référence à la protection de l'intérêt
de l'enfant. Puis, au surplus, le Québec s'est déclaré lié par la Convention
relative aux droits de l'enfant. La Convention relative aux droits de l'enfant
du 20 novembre 1989, elle est entrée en vigueur par un décret du
gouvernement du Québec, laquelle prévoit à son article trois que l'intérêt
supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les
décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient prises par des
institutions publiques ou privées de protection sociale, des autorités
administratives, des tribunaux, des organes législatifs. Comme le souligne le protecteur
national de l'élève, comme la loi sur l'instruction publique, la LIP, comme on
l'appelle, est une loi qui concerne principalement nos enfants et leur droit à
l'éducation… Donc un protecteur national de l'élève suggère ou est d'avis qu'il
serait important que la nouvelle disposition dans l'objet fasse référence à la
protection de l'intérêt de l'enfant à titre de valeur québécoise.
Et je vous dirais, Mme la Présidente, que
c'est particulièrement important parce que j'écoutais attentivement, M. le ministre,
dans l'objet de la loi, on veut… on parle, on fait référence d'une façon
spécifique à un apprentissage sain et sécuritaire, on parle du développement du
plein potentiel de l'élève pour éventuellement qu'il devienne des citoyens
responsables. Et on a rajouté une référence à la Charte québécoise. Et on
définit également des valeurs, et des valeurs québécoises. Donc, parce qu'on
est au cœur d'une loi qui vise l'éducation et qui évidemment touche
fondamentalement, entre autres, les enfants, je suis d'avis que nous devrions
accorder une attention toute particulière à la recommandation du Protecteur
national de l'élève. Et c'est la raison pour laquelle je vous propose cet
amendement. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci beaucoup, M. le député. Donc, est-ce qu'il y a des interventions? M. le
ministre.
M. Drainville : Oui, Mme la
Présidente. Il y a un petit enjeu, n'est-ce pas? Puisque l'amendement de notre
collègue, qui deviendrait donc le cinquième paragraphe de la définition de la
laïcité, nous mettrait en contradiction avec la définition de la laïcité de
l'État qui est prévue à la loi sur la laïcité de l'État. La définition que nous
avons utilisée dans le projet de loi n° 94 que nous étudions, c'est
exactement le même libellé mot pour mot que celui de la loi 21. Et donc il
ne sera tout simplement pas possible, Mme la Présidente, de modifier la
définition de la laïcité de l'État, qui est déjà prévue dans la loi 21.
Sur le fond des choses, je comprends
l'intention du député de l'Acadie. Je ne me prononce pas si je suis favorable
ou pas, là, j'en suis encore à l'analyser, mais je comprends son intention, et
donc je l'invite… sans présumer de notre position, mais je l'invite très
respectueusement à voir s'il ne devrait pas insérer cette notion ailleurs dans
l'article plutôt que d'en faire le cinquième paragraphe de la laïcité de
l'État.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le ministre. M. le député.
M. Morin : Oui. Je remercie
M. le ministre pour l'information. Évidemment, vous comprendrez que le but ici
n'est pas de venir changer la définition de la laïcité de l'État. Donc, je vous
entends très bien. Mais plutôt d'ajouter dans l'objet de la loi en tant que
valeur québécoise, parce que je reprends les commentaires et la recommandation
du protecteur national de l'élève. Et donc, s'il y a une ouverture de la part
de M. le ministre, on pourrait le placer ailleurs dans l'objet, quand on fait
référence aux valeurs québécoises, on parlait de la charte de l'égalité entre
les femmes et les hommes, et donc là on pourrait mettre, finalement, la
protection de l'intérêt de l'enfant avant la référence à la laïcité de l'État,
qui repose sur ces quatre éléments-là. Donc, si c'est une chose qui est
acceptable pour M. le ministre, moi, je serais… je serais bien d'accord pour
qu'on puisse modifier le libellé…
M. Morin : ...et qu'on place
évidemment cet élément-là ailleurs dans l'article 0.1, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Je
proposerais, Mme la Présidente, que nous suspendus un instant pour voir
d'abord, sur le fond des choses, est-ce que cette ouverture à considérer va se
traduire par un appui? Et, si oui, à quel endroit devrions-nous l'insérer?
Alors, je pense qu'il vaut mieux avoir ces discussions-là pendant un moment de
suspension, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Parfait,
M. le ministre. Donc, nous suspendons les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 16 h 50)
17 h (version non révisée)
(Reprise à 17 h 15)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, M. le ministre, à vous la
parole.
M. Drainville : Oui, merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, nous avons eu des discussions à micros
fermés avec l'opposition, et nous croyons avoir trouvé à la fois le libellé et
le bon endroit pour l'insérer dans le projet de loi. Et donc je vais laisser
mon collègue de l'Acadie nous faire cette proposition.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre, M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, effectivement, on a eu de fructueuses discussions pendant l'ajournement.
Je vais, Mme la Présidente, retirer mon amendement, parce que, suite aux
discussions, l'endroit où je suggérais de placer l'amendement aurait eu un
impact sur la définition de la laïcité de l'État. L'objectif de l'amendement
est de rappeler l'importance de l'intérêt de l'élève, et donc...
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
qu'il y a consentement pour retirer l'amendement?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
parfait. Vous pouvez poursuivre, M. le député.
M. Morin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Et donc, suite à nos discussions, on va pouvoir trouver un
endroit où c'est plus approprié, et donc je vais faire la lecture de l'article 1.
Et je remercie les juristes et les légistes de l'État pour leur aide.
Donc, l'article 1 : Remplacer,
dans le premier alinéa de l'article 0.1 de la Loi sur l'instruction
publique, proposé par l'article 1 du projet de loi, «l'ensemble de la
communauté éducative autour de la réussite de l'élève» par «dans le meilleur
intérêt de l'élève et de sa réussite, l'ensemble de la communauté éducative».
Commentaires : L'amendement vise à
référer au meilleur intérêt de l'élève, donc l'article 1 du projet de loi,
tel que modifié :
1° la Loi sur l'instruction publique (chapitre I-13.3)
est modifiée par l'ajout, avant le chapitre I, du suivant :
Chapitre 0.1, objet 0.1 :
La présente loi a pour objet de mobiliser, dans le meilleur intérêt de l'élève
et de sa réussite, l'ensemble de la communauté éducative par une offre de
services éducatifs de qualité et un accès à un milieu d'apprentissage sain et
sécuritaire propice au développement du plein potentiel de l'élève et à la
formation de citoyens responsables et pleinement engagés dans la vie
démocratique, sociale, communautaire, économique et culturelle de l'État du
Québec.
À cette fin, elle établit un système
scolaire public fondé sur les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises,
exprimées notamment par la Charte des droits et libertés de la personne (chapitre C-12),
dont l'égalité entre les femmes et les hommes et sur la laïcité de l'État,
laquelle repose sur :
1° la séparation de l'État et des
religions;
2° la neutralité religieuse de l'État;
3° l'égalité de tous les citoyens et
citoyennes;
4° la liberté de conscience et la liberté
de religion.
Alors, cet amendement rappelle l'importance
de l'intérêt de l'élève et c'est une recommandation, comme je le mentionnais
précédemment, Mme la Présidente, qui avait été faite par le Protecteur national
de l'élève. Le Protecteur national de l'élève suggérait l'intérêt... la
protection et l'intérêt de l'enfant. Mais suite à des discussions fructueuses,
on s'est entendus pour dire que, dans certains cas, notamment dans des cours
professionnels ou des cours aux adultes, bien là, on ne parle plus d'enfants. Donc,
on a parlé... c'est la raison pour laquelle on suggère dans l'intérêt de l'élève,
donc...
M. Morin : ...donc ça inclut
tout le monde. Et je pense que ça permet aussi de tenir compte de la
recommandation du Protecteur national de l'élève. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'amendement? Est-ce
que l'amendement de M. le député de l'Acadie est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Donc, si on revient à l'article 1 amendé, est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur l'article 1 amendé? Est-ce que l'article 1 amendé
est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Alors, nous sommes rendus à l'article 2. M. le ministre, je vous laisse en
faire la lecture.
M. Drainville : ...Mme la
Présidente, je signale d'emblée, et les oppositions le savent déjà, puisque
nous avons déposé nos amendements dans le site du... sur le site du Greffier,
qu'il y aura, donc, un amendement qui sera déposé. Alors, je vais d'abord lire
la disposition d'origine, Mme la Présidente, et je lirai par la suite
l'amendement. Article 2 : Cette loi est modifiée par l'insertion,
après l'article 5, du suivant :
• (17 h 20) •
«16. L'enfant qui reçoit un enseignement à
la maison ainsi que ses parents doivent avoir le visage découvert lors de la
prestation de tout service qui leur est rendu par le centre de services
scolaires, y compris les services rendus pour le compte de celui-ci, ou par un
membre du personnel du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, sauf
lorsque le visage doit être couvert en raison d'un motif de santé, d'un
handicap ou des exigences propres à l'exécution de certaines tâches.»
Commentaire. Cet article propose d'ajouter
une obligation pour les enfants qui reçoivent l'enseignement à la maison ainsi
que pour leurs parents d'avoir le visage découvert en tout temps lors de la
prestation de services par un centre de services scolaire ou par un membre du
personnel du ministère de l'Éducation.
Il propose de limiter les exceptions à
cette obligation au motif de santé ou lié à un handicap ou aux exigences
propres à l'exécution de certaines tâches.
Et l'amendement maintenant. Mme la
Présidente, est-ce que c'est votre souhait que je le lise?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
On l'a mis à l'écran. Vous pouvez en faire la lecture, M. le ministre.
M. Drainville : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, article 2, entre parenthèses,
article 16 de la Loi sur l'instruction publique : Ajouter, à la fin
de l'article 16 de la Loi sur l'instruction publique, proposé par
l'article 2 du projet de loi, la phrase suivante : «La personne qui
ne respecte pas l'obligation d'avoir le visage découvert ne peut recevoir le
service qu'elle demande.»
Commentaire. L'amendement vise à préciser
les conséquences du non-respect de l'obligation d'avoir le visage découvert
pour les enfants qui reçoivent l'enseignement à la maison et leurs parents. Il
s'agit d'une précision équivalente à celle qui est prévue au deuxième alinéa de
l'article 8 de la Loi sur la laïcité de l'État.
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
vous pouvez faire la lecture de la modification, M. le ministre.
M. Drainville : Alors, c'est
bien noté, Mme la Présidente. Article 2 du projet de loi tel que
modifié : Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 15,
du suivant :
«16. L'enfant qui reçoit un enseignement à
la maison ainsi que ses parents doivent avoir le visage découvert lors de la
prestation de service qui leur est rendu par le centre de services scolaire, y
compris les services rendus pour le compte de celui-ci, ou par un membre du
personnel du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, sauf lorsque le
visage doit être couvert en raison d'un motif de santé, d'un handicap ou des
exigences propres à l'exécution de certaines tâches. La personne qui ne
respecte pas l'obligation d'avoir le visage découvert ne peut recevoir le
service qu'elle demande.»
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement? Oui, M. le
député de l'Acadie.
M. Morin : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Donc, je comprends, M. le ministre, que votre ajout, donc, votre
amendement vise essentiellement à expliquer, décrire les conséquences de ne pas
avoir le visage à découvert...
M. Drainville : …Mme la
Présidente, la raison pour laquelle on a senti le besoin de l'ajouter, c'était
essentiellement pour préciser qu'il y aurait sanction s'il n'y avait pas
respect du visage à découvert. Ce sont les administrateurs, je pense, des
commissions… des centres de services scolaires qui l'ont précisé pendant les
consultations particulières. Donc, pour plus de certitude, nous avons décidé
d'ajouter cette phrase.
M. Morin : Bien…
La Présidente (Mme Dionne) :
Terminé?
M. Morin : Non, je n'avais
pas terminé, Mme la Présidente. Et, quand vous faites référence à la personne,
c'est l'enfant ou l'adulte?
M. Drainville : Les deux.
M. Morin : Les deux?
M. Drainville : Oui.
M. Morin : Donc, si, pour
toutes sortes de raisons, il y a… bon, appelons-le un enfant ou un élève…
reçoit des services à la maison parce qu'il reçoit finalement son instruction à
la maison, si l'enfant a le visage couvert, il ne pourra pas recevoir le
service, on peut parler de services d'un spécialiste, orthopédagogue, ou
psychologue, ou autre, mais, si l'enfant a le visage découvert, mais que le
parent ou la personne qui est là a le visage couvert, il ne pourra pas…
l'enfant ne pourra pas non plus recevoir le service. O.K. Ma question est la
suivante. Comment vous conciliez cet article, qui va devenir l'article 16, avec
l'article 1 de la Loi sur l'instruction publique, qui dit que toute personne a
droit aux services de l'éducation?
M. Drainville : Bien, on lui
donne accès à l'éducation. On est prêts à lui offrir des services à la maison,
sauf qu'on veut s'assurer que cette personne-là… que l'identité de cet élève-là
soit établie, que l'identité du parent le soit également, et, je dirais, plus
largement, nous souhaitons, à travers ce projet de loi, affirmer que le visage
à découvert dans le contexte scolaire est une exigence incontournable, non
négociable. Il y a vraiment, M. le député de l'Acadie, une volonté de notre
part de dire que le visage à découvert, là, au Québec, là, ce n'est pas
acceptable dans un contexte scolaire. Ce n'est pas acceptable. C'est une
déclaration de principe que nous faisons à travers ce projet de loi. Le niqab,
la burqa, peu importe, dès qu'on veut cacher le visage d'un élève ou d'un
adulte qui est, d'une manière ou d'une autre, engagé dans le processus
scolaire, ce n'est pas acceptable. C'est une ligne rouge que nous traçons et
qui, à notre avis, ne doit pas être franchie, voilà.
M. Morin : Sauf que, dans ce
cas-ci, si l'élève reçoit l'enseignement à la maison, vous êtes dans une
résidence privée, et là on ne parle pas du port d'un signe religieux dans
l'espace public…
La Présidente (Mme Dionne) :
... est-ce que vous...
M. Drainville : ...M. le
député de l'Acadie?
M. Morin : C'était :
Dans ce cas-ci, la personne va recevoir l'éducation à la maison, donc elle est
dans un lieu privé, et là...
M. Drainville : Mais elle
reçoit un service public. Elle reçoit un service public.
M. Morin : Oui, je le
comprends. Mais, si vous établissez ça comme norme, jusqu'où on va aller avec
les services publics que quelqu'un peut recevoir dans sa résidence privée?
• (17 h 30) •
M. Drainville : M. le député,
notre projet de loi, pour l'essentiel, porte sur la Loi sur l'instruction
publique, vise à modifier la Loi sur l'instruction publique, donc on est dans
un contexte de scolarisation, et, dans ce contexte-là, nous avons pris la
décision d'enchâsser, par la voie législative, le principe du visage à
découvert en tout temps. Je pourrais vous trouver trois ou quatre autres
manières de l'affirmer, là, mais ça ne changerait rien au fond des choses.
M. Morin : O.K. Donc, votre
projet de loi va faire en sorte que si, par une conviction sincère, quelqu'un
croit... Puis moi, je ne porte pas de jugement sur la croyance des gens, là, il
y en a de toutes sortes, et on y référait même dans les remarques
préliminaires. O.K., quelqu'un qui estime que cette personne-là, là, doit avoir
le visage couvert, pour toutes sortes de raisons qui lui sont propres, et que
son enfant a, lui ou elle, le visage découvert, l'État ne lui offrira pas de
services en lien avec l'éducation dans une résidence privée?
M. Drainville : Mme la
Présidente, une fois que la loi aura été adoptée, si elle l'est, je ne présume
pas de l'aboutissement du processus législatif, mais, comme on dit en bon
français, on jase, là, alors, dans l'hypothèse où la loi a été adoptée et que
les conditions du contrat scolaire, si on peut l'appeler ainsi, ont été
précisées, ce sera la décision du parent ou peut-être, dans certains cas, de
l'élève, de se soustraire à cette obligation que nous avons de lui donner un
service éducatif. Si la personne que nous voulons scolariser tel que le prévoit
la loi décide, par sa décision, de créer les conditions en vertu desquelles
l'État n'est pas en mesure de lui donner son service éducatif parce qu'elle
prend la décision de se couvrir le visage, à ce moment-là, c'est cette personne
qui décide de se soustraire à cette responsabilité que nous avons.
L'enseignement à la maison, c'est un
service éducatif mais qui est délocalisé, qui ne se produit pas dans une école,
qui se produit dans une résidence, mais ça reste un service éducatif qui est
donné par l'État, qui est encadré par l'État : Règlement sur
l'enseignement à la maison, puis là vous avez toute une série de dispositions
dans l'enseignement à la maison. Alors, je vous invite à le consulter, c'est
très, très, très bien encadré, alors, on précise là-dedans les responsabilités
des uns et des autres. Alors, on vient moduler cela, bien oui, on vient le
moduler au nom d'un principe sacré. Ce n'est pas compliqué, c'est sacré, au
Québec : tu es à l'école, tu dois être à l'école à visage découvert, y
compris quand le service...
17 h 30 (version non révisée)
M. Drainville : …scolaire qui
était donné par l'école, par le centre de services scolaire, se produit à la
maison. Fin du débat. C'est là qu'on est. Alors, vous pouvez être d'accord,
vous pouvez être en désaccord, mais moi, je vous le dis, là, sur la question du
visage à découvert, là, la position de principe, elle est on ne peut plus
claire. Aucune concession là-dessus. Ce n'est pas compliqué, aucune concession
là-dessus. C'est tout.
Ça fait des années que ça dure ce
débat-là, ça fait des années que ça dure. Ça aurait dû être réglé depuis
longtemps. Alors là, on prend une position claire. On espère votre appui. Si on
ne l'a pas, qu'est-ce que vous voulez? Ce sera votre décision, M. le député de
l'Acadie, mais je vous invite, si vous… On vit en société, là. Nos concitoyens,
là, je vais vous dire une affaire, là. On peut discuter de plein de choses, on
peut débattre de plein d'aspects de la laïcité, mais sur la question du visage à
découvert, là, vous allez voir… En tout cas, moi, c'est mon expérience. Peut
être que... peut-être que ma lecture n'est pas exacte. Tu sais, ça se peut.
Mais moi, je pense que si vous demandez à vos concitoyens ce qu'ils pensent du
niqab, là, dans un contexte scolaire, là, je pense que vous allez avoir une
réponse très, très claire. C'est une ligne que nous ne sommes pas prêts à
franchir comme société. Moi, je pense que notre position comme gouvernement,
là, elle reflète un très, très large consensus au sein de la société
québécoise.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, monsieur… Oui, allez-y, monsieur...
M. Morin : Mais, si vous me
permettez, Mme la Présidente, mon point n'est pas là, là. J'essaie… J'essaie de…
J'essaie de comprendre. Et quand on fait référence à la loi, entre autres, qui
traite de la laïcité de l'État et qui traite d'interdiction de porter des
signes religieux, du service à visage découvert et que M. le ministre fait une
référence à l'article huit, bien, je le comprends. C'est clair. Mais ça, ce
n'est pas dans le contexte d'une résidence privée.
Et je comprends très bien, M. le ministre,
si… je vous donne un exemple, si quelqu'un vient chercher son enfant, par
exemple dans un CPE ou à la garderie dans une école et que la personne n'a pas
le visage découvert pour toutes sortes de raisons, je peux très bien comprendre
que les… le personnel de l'institution ne vont pas remettre l'enfant, ils ne
savent pas à qui ils remettent l'enfant.
Et d'ailleurs, et d'ailleurs dans la loi
sur la laïcité, on précise entre autres, pourquoi il faut avoir le visage à
découvert, Mme la Présidente. Et c'est logique. Ça di, entre autres, pour
permettre la vérification de son identité ou pour des motifs de sécurité.
Alors, c'est exactement ce que je dis avec mon exemple, quelqu'un qui vient
chercher l'enfant, vous ne voulez pas remettre l'enfant à quelqu'un que vous ne
savez pas c'est qui, ça, c'est logique. Puis, pour les faits d'identité, c'est
logique également. Je le saisis très bien. Mais ma question, ce n'est pas ça.
Et là j'en suis à discuter avec M. le
ministre, relativement à l'ajout que le gouvernement fait à l'article deux. On
est dans un contexte d'une résidence privée. Et dans notre droit, on respecte la
résidence privée des gens, on respecte leur vie privée. Si l'enfant n'a pas le
visage couvert, bien, on est capable de l'identifier. Et puis il est chez eux,
donc, ce n'est pas une question de sécurité. Et c'est là qu'en fait je veux en
apprendre davantage de la part de M. le ministre, parce que, comme je le disais
au départ, dans la loi sur l'instruction publique, le gouvernement, l'État dit,
la loi dit que toute personne a droit aux services de l'éducation. C'est un
droit que nous avons. Et donc j'essaie de concilier ce droit que les élèves ont
et la disposition du projet de loi qui, dans un cas de…
M. Morin : ...d'une résidence
privée, alors... puis, dans mon hypothèse et dans mon exemple, l'enfant a le
visage à découvert, ça ne peut pas être une question d'identification. Alors,
c'est là que j'aimerais en apprendre davantage. Et je comprends qu'il y a aussi
des politiques gouvernementales qui font état du fait que, dans certaines
circonstances, un enfant va recevoir de l'enseignement à la maison. J'attire
aussi l'attention du ministre sur l'article 14 de la Loi sur l'instruction
publique qui dit que «tout enfant qui est résident du Québec doit fréquenter
une école». Alors là, il y a une obligation. Donc, dans les deux cas, on a une
obligation. Alors, est-ce que je comprends, que ce soit à 14 ou ailleurs dans
la loi, si l'enfant n'a pas le visage découvert, il ne pourra pas recevoir les
services de l'État? Et c'est là que j'aimerais entendre quelle est la position
du gouvernement là-dedans, compte tenu des obligations qui sont dans la loi,
puis je me réfère encore à l'article 1, pour le droit de l'élève. Et par
la suite, quand on va dans la Loi sur l'instruction publique, il y a une
obligation de fréquentation scolaire. Est-ce que le gouvernement dit : On
fait abstraction de ça? Et, dans l'amendement qui est proposé, il n'y a aucune
référence à ces deux articles.
• (17 h 40) •
M. Drainville : Mme la
Présidente, je pense avoir répondu à cet article... à cet argument, là, cette
position. Le droit à l'instruction est un droit, bien entendu, mais il faut
respecter le cadre à l'intérieur duquel ce droit s'exerce. Et ce que nous
disons, nous, c'est que, pour que ce droit s'exerce, tu dois avoir le visage
découvert en tout temps, peu importe le contexte. Alors, je ne sais pas comment
je peux le dire, là. Ça a beau être dans une résidence, c'est un service
public. Ce sont des personnes de l'école, ou des personnes du centre de
services scolaire, ou des personnes du ministère qui se rendent à la maison
pour donner un service public. Ce que nous disons, c'est que, si tu veux
recevoir ce service public, tu dois le faire à visage découvert. Ce n'est pas
compliqué. Tu dois le faire à visage découvert, notamment pour des raisons
d'identification, bien entendu, mais, plus largement, nous en faisons une
question de principe. Tu veux recevoir un service scolaire, tu dois le faire à
visage découvert, c'est tout. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Puis là je ne
parle pas des autres arguments qui pourraient s'ajouter.
Le processus de l'enseignement, le
processus d'apprentissage se fait, je pense qu'il est consensuel de le dire, se
fait d'une manière beaucoup plus bénéfique à la fois pour celui ou celle qui
procède à l'enseignement que celui ou celle qui le reçoit lorsque l'on peut
voir la réaction de l'élève ou de l'enfant, lorsqu'on peut voir ses réactions,
les... ce qu'on appelle le non-verbal. N'importe qui qui a été un peu mêlé au
processus d'éducation, qui a un peu réfléchi à ces questions ou qui a eu des enfants,
par exemple, on sait très bien à quel point la communication avec un enfant,
avec un élève passe souvent par le non-verbal. On décode beaucoup plus
rapidement, parfois, la réaction d'incompréhension d'un élève, d'un enfant
quand on voit sa réaction.
Alors, c'est normal, en plus des autres
arguments que je viens de vous soumettre, c'est normal que, dans le cadre d'un
processus d'apprentissage... qu'on souhaite voir le visage de l'enfant parce
que cela nous éclaire sur sa capacité à comprendre la matière enseignée, par
exemple, pour qu'on puisse s'ajuster. Alors, il y a ça aussi qui rentre dans
le... comment dire, dans les raisons pour lesquelles on pense que le visage à
découvert est une condition fondamentale et non négociable. Mme la Présidente, honnêtement,
j'ai dit tout ce que j'avais à dire là-dessus. Je pense que le citoyen qui nous
écoute... je pense que, là, à un moment donné, il faut décider. Est-ce qu'on
pense que le visage à découvert, c'est...
M. Drainville : ...est-ce
qu'on pense que c'est une condition raisonnable pour recevoir un service public
dans un contexte scolaire? Si c'est oui, bien, on vote pour l'amendement puis
pour la disposition générale, puis, si on ne le pense pas, bien, on vote
contre. C'est tout.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Oui, M. le député.
M. Morin : ...vous permettez,
et, justement, dans mon exemple... et je reviens à mon exemple... l'enfant a le
visage découvert. Donc, je suis... je comprends, M. le ministre, c'est sûr,
quand vous enseignez à quelqu'un, effectivement, il y a autant de verbal que de
non-verbal. Là-dessus, on n'est pas en désaccord. Quand vous parlez
d'identification, bien, c'est la même chose. Mais ce que vous faites avec votre
amendement, c'est que, que ce soit le parent ou l'enfant, dans un cas comme
dans l'autre, ils ne pourront pas avoir le service. Donc, si vous avez un
enfant qui a le visage découvert, que ses parents ont décidé... parce que, dans
des cas, c'est ce qui arrive... que le parent a le visage couvert, l'enfant ne
recevra pas le service, alors que vous pouvez l'identifier, que vous pouvez
interagir avec son verbal et son non-verbal. Alors, il est... il est là, mon
point. Mais ça... On s'entend, M. le ministre, c'est sûr que, si l'enfant lui-même
a le visage couvert, ça pose un problème. Mais mon exemple, ce n'est pas ça.
M. Drainville : M. le député
de l'Acadie, si le comportement du parent a pour résultat de priver l'enfant de
son droit à la fréquentation scolaire, qui est prévue par la loi, à ce
moment-là, le devoir du fonctionnaire, de l'enseignant, de l'éducatrice, peu
importe la personne, l'adulte enseignant, c'est de rapporter le cas en question
à la direction de la protection de la jeunesse. Parce que, dans les faits, ce
que cet adulte-là fait, c'est de priver l'enfant de son droit à la
fréquentation scolaire en se couvrant le visage, alors que la loi prévoit
qu'elle ne peut pas... que cette personne-là ne peut pas avoir le visage
couvert dans un contexte où on donne un service éducatif. C'est ce qui se passe
dans les écoles québécoises, M. le député, vous le savez sans doute, vous êtes
un homme érudit.
Alors, lorsque l'école se rend compte que
le droit de l'élève à l'éducation est brimé, bien, c'est la responsabilité de
la personne qui l'a constaté de le dénoncer à la direction de la protection de
la jeunesse, qui prend, à ce moment-là, le relais, parce que c'est la
responsabilité de la DPJ de s'assurer du respect de ce droit qu'a l'enfant,
qu'a l'élève à l'instruction jusqu'à l'âge de 16 ans.
M. Morin : ...si je vous
comprends bien, M. le ministre, puis je reprends mon exemple, il y a un enfant
qui reçoit l'éducation à la maison, l'enfant a le visage découvert, mais le
parent, là, a le visage couvert, il ne recevra pas les services de l'État, il y
aura un signalement qui va être fait à la DPJ, et la DPJ va pouvoir retirer
l'enfant de son milieu familial — est-ce que c'est ce que je
comprends? — pour le mettre dans un centre d'accueil et l'amener au
tribunal? Est-ce que c'est ce que je comprends?
M. Drainville : M. le député,
un parent aimant qui souhaite la réussite de son enfant va réagir, puis va
s'ajuster, puis va respecter la loi, puis va se découvrir le visage pendant que
le service est donné. C'est ce qui va arriver. Puis, si un... si un parent
n'aime pas suffisamment son enfant et ne souhaite pas suffisamment son accès à
l'éducation en refusant systématiquement, obstinément, de se découvrir le
visage, et, ce faisant, empêche son enfant de recevoir le service éducatif,
honnêtement, là, une situation comme celle-là, si ça se produit, il faut se
poser la question si l'enfant doit rester dans cette... dans cette famille-là,
et c'est... on en revient à la DPJ. C'est comme ça que la loi est faite, M. le
député, c'est comme ça que la loi est faite. La loi est faite, si les parents,
si des parents empêchent un enfant de recevoir l'instruction auquelle ils ont
droit, c'est la responsabilité...
M. Drainville : ...de la DPJ,
d'agir. «Le centre de service scolaire doit, à la demande du ministre et en
utilisant les renseignements qu'il lui fournit concernant un enfant qui ne
pourrait pas remplir son obligation de fréquentation scolaire ou ses parents,
effectuer auprès de ces derniers les démarches qui lui indique afin de
connaître et, le cas échéant, de régulariser la situation de cet enfant.» Ça,
c'est la loi actuelle, là. «À cette occasion, il doit en outre informer les
parents des obligations découlant des articles 14 à 17 ainsi que des services
éducatifs auxquels l'enfant a droit en vertu de la présente loi», Loi sur
l'instruction publique. «Les parents doivent fournir au centre de services
scolaire, dans un délai raisonnable, tout renseignement qu'il requière
relativement à la situation de leur enfant. Lorsque les démarches n'ont pas
permis de connaître la situation de l'enfant ou de la régulariser, le centre de
services scolaire le signale au directeur de la protection de la jeunesse après
en avoir avisé par écrit les parents de l'enfant.» C'est la loi.
• (17 h 50) •
M. Morin : Sauf qu'on
s'entend que, sans votre projet de loi actuel, un parent, dans sa résidence,
qui aurait le visage couvert, pour toutes sortes de raisons, et l'enfant...
M. Drainville : ...la
prestation du service.
M. Morin : Oui, c'est ça,
mais...
M. Drainville : Pendant la
prestation de service. Vous avez l'air... Vous parlez, M. le député de
l'Acadie, comme si la loi allait obliger, je ne sais pas trop par quel moyen,
un parent qui veut avoir le visage couvert, de... de se mettre le visage à
découvert en tout temps dans sa résidence. Pas de ce dont il s'agit. Ce que le
parent fait dans sa résidence, c'est son affaire. L'État n'a rien à voir
là-dedans. Sauf, lorsque le service public est effectué et rendu pendant la
durée du service public, ça se fait à visage découvert. Fin du débat.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions, M. le député?
M. Morin : Je vous remercie.
Le Président (M. Morin) : Oui,
M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. J'ai quelques questions pour le ministre. Le rapport sur les 17
écoles, au fond, a révélé combien de cas de niqab? Environ quatre. Peut-être
qu'une dizaine d'élèves, peut-être, une dizaine d'élèves qui portent le masque
de procédure plus longtemps que pour une grippe.
La question, c'est : Comment est-ce
que le ministre s'explique qu'au Québec des personnes, des élèves portent le
niqab, par exemple? Qu'est-ce que le ministre s'imagine que sont les motifs de
ces raisons-là? Pourquoi, selon lui?
M. Drainville : Mme la
Présidente, je vais laisser le député répondre à sa propre question s'il
souhaite y répondre. Moi, je ne m'engage pas dans cette discussion-là. Tout ce
que je dis, c'est qu'il y a eu, effectivement, un certain nombre de cas qui ont
été identifiés et nous agissons pour des raisons de principe, pour des raisons
d'identification, pour des raisons de communication, pour des raisons
d'éducation et, oui, pour des raisons de sécurité. Parce que, oui, ce n'est pas
normal que, dans une école québécoise, on ait des élèves qui se promènent dans
les corridors puis on ne puisse pas savoir qui ils sont. Ce n'est pas normal
puis ce n'est pas acceptable.
Dans le rapport sur les 17 écoles, il y a
des... il y a au moins un enseignant qui rapporte que, dans sa classe, il y
avait au moins deux élèves qui avaient le visage couvert puis il dit : Je
ne suis pas capable de savoir laquelle est laquelle. Ce n'est pas normal. Et
donc, si le député de Jean-Lesage, Mme la Présidente, trouve que trois cas,
quatre cas, 10 cas, ce n'est pas assez pour agir, je le laisse à sa position.
Dans notre cas à nous, un cas, c'est déjà
un de trop parce que c'est une question de principe. Et, oui, je n'ai pas peur
de le dire, il y a une forme d'action préventive. On agit aussi de façon...
M. Drainville : … préventive.
On n'attendra pas qu'il y ait 50, 100 cas, 1 000 cas, à un moment
donné, il y a visiblement actuellement dans au moins une école du Québec, des
élèves qui sont… qui portent le niqab pendant la journée scolaire. C'est un cas
où il… c'est un cas… C'est le cas, c'est confirmé. Et il y a d'autres élèves
qui s'en fabriquent un, niqab avec un masque chirurgical, sauf que,
bizarrement, comme le notent les vérificateurs du rapport, ils portent ce niqab
artisanal, dirions-nous, pendant une très longue période de temps, qui dépasse
largement la période d'infection habituelle. Alors, c'est une façon détournée.
Bien, ce n'est pas plus acceptable que le niqab traditionnel, là. Alors, on
agit, Mme la Présidente. Encore une fois, je pense avoir donné tous les
arguments. Et puis là, après ça, c'est assez… c'est libre à chacun d'entre nous
et à nos formations politiques respectives de décider quelle est notre position
sur cette question.
M. Zanetti : Le ministre ne
répond pas exactement à ma question, puis je veux clarifier quelque chose, là,
à Québec solidaire, là, on n'a aucune sympathie pour le niqab et la burqa.
Quand des femmes dans des pays sont obligées de le porter, on s'en indigne, on
est solidaire d'elles. On est pour le droit des femmes à s'habiller comme elles
le veulent partout dans le monde, incluant au Québec.
La question que je pose, là… puis on est
d'accord avec le fait qu'il faut que ça se passe à visage découvert, on est
d'accord avec ça. Effectivement, un service éducatif, le visage couvert, ça
vient nuire à la prestation de services. Pas besoin de développer là-dessus, on
se comprend. Mais moi, la question que je veux savoir, c'est : est-ce que
le ministre s'est inquiété de ce qui se passe avec ces élèves-là? Est-ce qu'il
s'est dit : un instant, il y a des élèves qui portent le niqab, qu'est-ce
qui se passe avec elles? Il faudrait que quelqu'un aille vérifier. Est-ce que
ça va? Est-ce que le ministre a fait ces démarches-là, oui ou non? Est-ce qu'il
s'est… Est-ce qu'il y a de l'information? Est-ce qu'il a légiféré avant de
comprendre qu'est-ce qui se passait vraiment, ou est-ce qu'il a déployé des
efforts minimaux pour nous informer sur la situation de ces quatre
personnes-là, ces quatre enfants-là?
M. Drainville : Mme la
Présidente, est-ce que c'est le rôle de l'État d'investiguer chaque contexte
familial, puis d'essayer de se donner pour mandat de comprendre la dynamique
familiale qui a amené cette enfant-là, cette personne a affiché une tenue comme
celle-là? Les hypothèses du député sont aussi bonnes que les miennes. Moi, ce
que je sais, Mme la Présidente, c'est que ce symbole-là, il est porteur d'un
message qui dénigre la femme, qui vise à la faire disparaître de l'espace
public. La raison pour laquelle ces symboles religieux existent, c'est parce
que ceux et celles qui les imposent croient que la femme est une sous-personne,
une sous-citoyenne. Ce… ces symboles religieux sont des symboles anti-femmes.
Alors, pour un parti féministe, j'imagine que vous le déplorez puis que vous ne
souhaitez pas qu'on les tolère dans notre réseau scolaire public. J'imagine que
vous allez vous joindre à nous pour dire : C'est inacceptable. Ce symbole
porte un message anti-femmes. Ce n'est pas compliqué, tout le monde le sait. Le
niqab, c'est le symbole par excellence de l'Arabie Saoudite. La burqa, c'est le
symbole par excellence de l'Afghanistan. Bon, c'est de là que ça vient. Alors,
prenez votre position. Je n'ose pas dire : Prenez vos responsabilités,
mais prenez votre position.
M. Zanetti : Le ministre
confirme en quelque sorte qu'il ne sait absolument pas pourquoi ces élèves-là
ont porté…
M. Zanetti : ...niqab. Il ne
sait absolument pas pourquoi.
M. Drainville : Bien, allez
leur demander! M. le... Mme la Présidente, si le député...
M. Zanetti : Bien, je ne suis
pas ministre de l'Éducation, moi.
La Présidente (Mme Dionne) : ...
M. Drainville : ...si le
député de Jean-Lesage veut savoir pourquoi elles portent le niqab, qu'il aille
leur demander. Qu'est-ce qu'il veut qu'on fasse, là? Qu'on envoie quelqu'un
pour faire une entrevue auprès de ces jeunes femmes? À un moment donné, on ne
peut pas séparer l'objet du message qu'il porte. Alors, est-ce que vous êtes
d'accord avec le message qu'il porte, oui ou non? Est-ce que vous êtes d'accord
avec le message que ces tenues vestimentaires nous transmettent?
M. Zanetti : Moi, ce que je
voudrais...
La Présidente (Mme Dionne) : ...compte
tenu de l'heure, je vais suspendre.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
19 h.
(Suspension de la séance à 18 heures)
18 h 30 (version non révisée)
(Reprise à 19 h 01)
La Présidente (Mme Dionne) : La
Commission de la culture et de l'éducation reprend ses travaux. Nous
poursuivons l'étude détaillée du projet de loi n° 94, Loi visant notamment à
renforcer la laïcité dans le réseau de l'éducation et modifiant diverses
dispositions législatives.
Lors de la suspension de nos travaux, nous
en étions à l'étude de l'amendement à l'article 2 du ministre. Donc, M. le
député de Jean-Lesage, vous donne… je vous invite à poursuivre.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente. J'aimerais savoir… Dans le fond, on a compris, dans les échanges qu'on
a eus, que le ministre ne s'est pas vraiment intéressé à savoir pourquoi il y
avait des élèves au Québec qui portaient le niqab et la burqa. Il n'a pas
vérifié, il n'a pas demandé à personne de vérifier. Donc, le phénomène, il n'en
comprend pas les causes. Manifestement, il ne veut pas fournir d'hypothèses sur
les causes, pourquoi ça, ça se passe, mais par contre il légifère et il dit
clairement : Voici ce qu'on va faire, etc. Puis je le répète, à Québec
solidaire, là, aucune sympathie pour la burqa, aucune sympathie pour le niqab.
On est d'accord avec l'idée du visage découvert pour le service éducatif. C'est
utile de faire ça. Le visage couvert, ça nuit à la prestation de services. Mais
là la question de cet article là, c'est le droit à l'éducation des enfants, et
ce que le ministre est en train de mettre en place, Mme la Présidente, c'est
une négation du droit à l'éducation des enfants. Il est en train de dire :
Ces enfants-là, c'est des enfants, pas des adultes, des enfants, s'ils ne se
conforment pas au règlement, finis, les services éducatifs, finis même à la
maison, terminé. Pourtant, l'éducation est obligatoire jusqu'à 16 ans au
Québec. Qu'est-ce qui va se passer avec ces enfants-là? Pourquoi est-ce que le
ministre décide de les abandonner? C'est ma question.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Bien, d'abord,
Mme la Présidente, j'ai sourcillé un petit peu quand j'ai entendu le député de Jean-Lesage,
tout à l'heure, avant la pause repas, nous dire qu'à Québec solidaire ils n'ont
aucune sympathie pour la burqa, aucune sympathie pour le niqab, une position qu'il
vient de nous réitérer. Moi, Mme la Présidente, j'étais au conseil national de
Québec solidaire en 2019 lorsqu'ils ont voté sur la question des signes
religieux, lorsqu'ils ont renoncé à la position Bouchard-Taylor sur…
19 h (version non révisée)
M. Drainville : ...les signes.
Et lorsqu'ils ont, Mme la Présidente, voté contre toute forme d'interdiction, y
compris la burqa et le niqab, j'étais là dans la salle. Les militants de Québec
solidaire ont voté contre toute forme d'interdiction. Et j'ai le communiqué ici
daté du 30 mars 2019, je cite : Le port de vêtements couvrant le
visage pourra quant à lui être restreint pour les fonctionnaires ou personnes
employées de l'État si cela contrevient à un des quatre critères suivants :
prosélytisme, devoir de réserve, exercice de la profession ou normes de
sécurité». Mais à part ces quatre exceptions là, la position de Québec
solidaire, c'est : Tu peux faire ce que tu veux, tu peux porter n'importe
quoi, y compris un niqab puis une burqa. C'est ça, votre position, M. le député
de Jean-Lesage. Alors, quand vous dites que vous n'avez aucune sympathie pour
la burqa ou pour le niqab, bien, il faudrait que vous changiez la position du
parti que vous avez rallié. Parce que votre position comme parti politique actuellement,
c'est que vous êtes d'accord avec le visage couvert, vous êtes d'accord avec le
niqab ou la burqa, à moins qu'il y ait prosélytisme, etc. Ça, c'est la première
chose.
L'autre chose. Je pense que vous allez
reconnaître avec moi, M. le député de Jean-Lesage, qu'une burqa ou un niqab, c'est
un signe religieux. Vous êtes d'accord avec moi? Est-ce que vous êtes d'accord
avec moi qu'une burqa ou un niqab, c'est un signe religieux?
M. Zanetti : Je vais répondre
longuement à la fin de son intervention.
M. Drainville : Est-ce que
vous êtes d'accord avec moi qu'une burqa ou un niqab, c'est un signe religieux?
M. Zanetti : Je suis d'accord
avec vous qu'en Afghanistan, par exemple, la burqa, c'est un signe imposé par
un régime théocratique, puis on peut penser effectivement que c'est assez
religieux, effectivement. Est-ce que 100 % des cas...
Une voix : ...
M. Zanetti : Ah, le niqab aussi
dans d'autres pays, clairement, lorsqu'il est imposé pour des raisons
clairement religieuses. Au Québec, est-ce que 100 %... Vous, vous affirmez,
dans le fond, 100 %, tout le temps, c'est des signes religieux. C'est
difficile à répondre à cette question là lorsqu'on ne questionne même pas les
raisons pour lesquelles les gens font ce qu'ils font, comme le ministre fait. Le
ministre légifère sans regarder, il légifère sans étudier, sans essayer de
comprendre la réalité de ces élèves-là, de qui ils devraient avoir la
responsabilité et qu'il décide d'abandonner en niant leur droit à l'éducation. Moi,
c'est ça que je veux pointer aujourd'hui. Puis il y a quelque chose, là, qui
est vraiment navrant, il l'a dit tout à l'heure, là, il n'y a pas de... ces
enfants-là, si elles ne se conforment pas, pour une raison ou pour une autre, là,
que ce soit de leur propre gré ou à cause de pressions externes, si elles ne se
conforment pas, elles vont perdre le droit à avoir des services éducatifs au
Québec.
M. Drainville : Mme la
Présidente, on vient de convenir, le député de Jean-Lesage et moi, que la burqa
et le niqab sont des signes religieux. Alors, je vous lis cette citation :
«Contrairement à ce que suggérait le rapport Bouchard-Taylor, les enseignants
de l'école publique devraient aussi s'abstenir de porter des signes religieux
comme le niqab et la burqa. En effet, l'école est un lieu d'éducation ouvert où
toutes les questions doivent pouvoir être posées et toutes les idées soumises à
la critique. Le rôle de l'enseignant est de créer un environnement propice à la
liberté de pensée. Comment peut-il être crédible dans ce rôle s'il affiche son
appartenance à une religion, s'il affiche un signe religieux comme le niqab ou
la burqa?»
Mme la Présidente, 29 août 2013, ce
que je viens de vous lire, là, c'est une citation du député de Jean-Lesage en
2013, qui disait : «Les enseignants de l'école publique devraient aussi s'abstenir
de porter des signes religieux». Donc, en 2013, Mme la Présidente, le député de
Jean-Lesage était favorable à l'interdiction du port de signes religieux, y
compris le niqab et la burqa.
C'est au député de Jean-Lesage maintenant
de nous dire pourquoi il a changé d'idée, Mme la Présidente, puis c'est au
député de Jean-Lesage, qui est porte-parole de Québec solidaire, de nous dire
pourquoi est-ce qu'ils sont favorables au port de la burqa et du niqab, à moins
d'exceptions. C'est à vous de vous expliquer là-dessus, M. le député.
M. Zanetti : Je vais vous
expliquer avec plaisir, M. le député, pourquoi j'ai changé d'idée...
M. Zanetti : ...j'ai réfléchi,
et puis il y a des choses que je pensais vraies dont j'ai réalisé qu'elles ne
l'étaient pas. Et je pense que ça a été beaucoup surestimé dans le débat sur le
port des signes religieux qui a cours au Québec depuis plus de 10 ans,
même plus que ça, peut-être depuis 2007, peut-être avant, l'influence que peut
avoir sur la liberté de conscience de quelqu'un le fait que quelqu'un d'autre
porte un signe religieux. Et je ne pense pas... je pense que ça a été largement
surestimé, surévalué, et moi, je ne pense pas que ça a cet effet-là
aujourd'hui. Je ne pense pas que quelqu'un qui porte le hijab, ça incite les
autres à porter le hijab ou à devenir musulman. Je ne pense pas que quelqu'un
qui porte la burqa, ça incite qui que ce soit à porter la burqa ou à penser que
les femmes ne sont pas les égales des hommes. Je ne pense pas ça. Et je pense
aussi qu'il n'y a rien qui soutient ce préjugé-là, il n'y a rien qui soutient
ça.
• (19 h 10) •
Et une des façons de le constater aussi,
là, c'est qu'il y en a de plus en plus, là... bien là, il y en avait avant,
avant la loi no 21, là, des femmes dans le système d'éducation qui
portaient le hidjab, puis ça n'a jamais posé problème à personne. Puis là il y
en a dans les services de garde éducatifs, beaucoup, puis il n'y a pas d'enfants
qui se font endoctriner. Non. Savez-vous qu'est-ce qu'ils font? Ils réalisent
qu'une femme, là, qui est musulmane, qui porte le hidjab, là, bien, ça se peut,
il y en a dans la société québécoise, elles sont aimantes, bienveillantes,
elles respectent leurs libertés et les éduquent avec tout leur cœur. Et puis le
ministre de l'Éducation leur rend bien mal.
Mais je vais vous dire, Mme la Présidente,
ici, là, il y a une seule personne, pas juste une seule personne, en fait, il y
a une formation politique au complet, qui est en train de légiférer pour
restreindre le droit à l'éducation à des enfants. Et ça, c'est quelque chose
qu'on devrait considérer comme étant extrêmement grave. Littéralement,
qu'est-ce que vous pensez qu'il va arriver à ces personnes-là, à ces
enfants-là, à ces élèves que vous allez retirer du système d'éducation? Vous
faites ça pour leur bien, vraiment? Ces gens-là, vous pensez que vous allez les
intégrer à la société québécoise en les excluant comme ça, en les excluant tout
seuls dans leur coin? Vous pensez que leurs vues sur le monde vont s'arrimer
avec les valeurs québécoises de cette façon-là? S'il y avait de la vraie
bienveillance dans ce projet de loi là, ce n'est pas comme ça qu'on atteindrait
nos objectifs puis ce n'est pas comme ça qu'on interviendrait auprès des élèves
qui portent un signe religieux qui couvre le visage. Puis on pourrait très bien
dire : On veut que le visage soit découvert, ça pourrait très bien
exister, ce règlement-là, sans qu'on prive, puis qu'on brise le service éducatif,
puis qu'on dise à ces gens-là : On va vous exclure encore plus. Ça va
donner quoi, ça? Ça va donner quoi, à part donner une opportunité au ministre
de donner de... l'impression à quelqu'un qu'il défend quelque chose?
Ici, là, ce qu'il faut défendre, c'est le
droit à l'éducation. Le ministre est en train de le fouler aux pieds. Est-ce
qu'il le reconnaît, ça ou il le nie?
M. Drainville : Mme la
Présidente, Québec solidaire est favorable au visage couvert, est favorable à
la burqa, est favorable au niqab. Ils sont contre toute forme d'interdiction...
M. Zanetti : ...
M. Drainville : Ils sont
contre toute forme d'interdiction.
M. Zanetti : ...
M. Drainville : Bien, j'ai
cité votre... j'ai cité votre communiqué.
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui.
Oui. Un instant, s'il vous plaît. Excusez-moi, je vous demande juste de faire
attention à vos propos. C'est un sujet sensible. Merci. Vous pouvez poursuivre,
M. le ministre.
M. Drainville : Québec
solidaire doit décider de quel côté de... de quel côté de la barrière ils se
trouvent. Est-ce qu'ils vont défendre le port du niqab et de la burqa ou est-ce
qu'ils vont s'y opposer? Telle est la question.
M. Zanetti : La question, Mme
la Présidente, n'est absolument pas celle-là. Tout le monde s'entend ici qu'il
faut que le visage soit découvert. La question, c'est est-ce que le ministre va
renier le droit à l'éducation des jeunes, des élèves, des... puis surtout des
élèves de la communauté arabo-musulmane du Québec? Est-ce que c'est ça qu'il va
faire ou il va décider d'avoir une approche humaine, bienveillante,
pédagogique, véritablement bienveillante, ou est-ce qu'on essaie d'aller voir
comment est-ce qu'on peut inclure encore plus ces personnes-là à la société
québécoise? Si tel est le but, parce que, si le but, c'est de les exclure, le
projet de loi, il est parfait comme ça, puis son article... il n'y a rien à
changer, là.
M. Drainville : Mme la
Présidente, tout ce qu'on demande, comme société, à travers ce projet de loi,
c'est qu'ils montrent leur visage lorsqu'ils...
M. Drainville : ...reçoivent
le service éducatif. Ce que le député de Jean-Lesage nous dit, c'est que c'est
trop demander à un élève ou à son parent de montrer son visage pendant que
l'État québécois lui donne un service. C'est ça qu'il est en train de nous
dire. C'est trop lui demander. Il défend le droit de porter le niqab et la
burqa lorsqu'on donne un service éducatif. C'est ça, le principe qu'il défend.
Nous, ce qu'on dit, c'est que, pendant que
tu reçois, tu l'enlèves. C'est facile. Tu enlèves ta burqa, tu enlèves ton
niqab, pendant qu'on te donne le service. Pourquoi est-ce que c'est si
compliqué d'enlever son niqab ou sa burqa en échange du service auquel le
service de... le centre de services scolaire ou l'école te donne droit?
Pourquoi c'est si compliqué? Pourquoi est-ce qu'il refuse cette... comment
dire, cette hypothèse? Pourquoi est-ce que c'est inconcevable, pour Québec
solidaire et le député de Jean-Lesage, que tu enlèves ton niqab ou ta burqa
pendant que tu reçois un service de l'école? Pourquoi c'est si compliqué, M. le
député de Jean-Lesage? Pourquoi ce n'est pas possible? Pourquoi ce n'est pas
possible d'enlever ton niqab pendant que tu reçois un service de l'école?
M. Zanetti : Pourquoi vous ne
demandez pas cette question-là aux personnes qui portent des signes religieux?
Comment voulez...
M. Drainville : Non. C'est à
vous que je la demande. C'est vous qui parlez, c'est vous, le député.
M. Zanetti : Comment
voulez-vous que, moi, je réponde à ça?
La Présidente (Mme Dionne) : Un
à la fois, s'il vous plaît!
M. Zanetti : Comment
voulez...
M. Drainville : ...pendant
qu'on te donne les...
M. Zanetti : Est-ce qu'il va
me laisser parler, Mme la Présidente, ou il va se faire...
La Présidente (Mme Dionne) : M....
O.K. Écoutez, là, si ça se poursuit comme ça, vous allez vous adresser à la
présidence. Bon. M. le député de Jean-Lesage, veuillez répondre à la question.
M. Zanetti : Écoutez, moi, ce
que je vois, c'est le risque, le risque d'une rupture de services éducatifs à
des personnes qui en ont besoin, à des enfants québécois, à des enfants
québécoises qui sont sous la responsabilité du ministre et que le ministre
décide d'abandonner. C'est ça que je vois. C'est ça qui va se passer. C'est ça,
les conséquences de son projet de loi.
Qu'est-ce qui va se passer à quelqu'un qui
ne se conformerait pas? Le ministre est absolument sûr que ça ne se peut pas,
sans leur avoir jamais demandé, sans avoir vérifié, sans avoir regardé quelque
étude que ce soit, sans avoir rien analysé, lui, il dit : C'est sûr qu'ils
vont se conformer, c'est... la question ne se pose même pas. Mais qu'est-ce qui
arrive, si ces personnes-là... pour des raisons que je ne pourrais même pas
vous expliquer moi-même, qu'est-ce qui arrive si elles ne se conforment pas?
C'est ça, la question. Est-ce qu'elles vont avoir droit à l'éducation au
Québec?
M. Drainville : Ils ont droit
à l'éducation en autant qu'ils sont à visage découvert, Mme la Présidente.
Alors, je pense que, de mon point de vue en tout cas, on a vidé cette
question... sont claires. Moi, j'ai très hâte de voir le vote maintenant.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions sur l'amendement du ministre? Oui. M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Oui, je vous
remercie, Mme la Présidente. En fait, oui, j'aurais... j'aurais d'autres
questions pour M. le ministre. En fait, des éléments qui ont été soulevés dans
un mémoire par un comité de parents du centre de service scolaire de la
Capitale, et qui sont venus évidemment en commission, et qui ont eu... qui ont
pris le temps de nous soumettre un mémoire. Un des éléments qu'ils soulevaient,
c'est que, d'après eux, l'amendement est... que vous voulez apporter à
l'article deux, ne respecte pas l'article un de votre projet de loi. Et
j'aimerais ça vous entendre là-dessus.
M. Drainville : Bien,
présentez-moi leur argumentaire, M. le député.
M. Morin : Oui. Ça dit que
l'article deux, pour différentes raisons, ne respecte pas l'article un du
projet de loi. Parce qu'il y a une intrusion dans la vie privée des personnes,
une intrusion dans leur logis et en imposant une façon d'être. C'est... C'est
le mémoire du groupe... de comités de parents du centre de services scolaire de
la Capitale. Alors, je...
M. Drainville : ...article,
M. le député?
M. Morin : Bien, c'était
l'article deux, qu'on est en train de regarder, en lien avec l'article un de
votre projet de loi, M. le ministre.
M. Drainville : Et, alors,
votre question, c'est?
M. Morin : Bien, alors, ma
question, c'est... c'est un élément qu'ils posent. Alors, moi, j'aimerais avoir
votre position. Ils sont d'avis que l'amendement et l'article deux de votre
projet de loi ne respectent pas l'article un de votre projet de loi. Alors,
moi, j'aimerais savoir comment vous expliquez cette différence.
M. Drainville : On a une
interprétation différente. C'est tout. Ils ont droit à leur opinion. Nous, on
pense que c'est raisonnable de demander à un élève de se mettre à visage
découvert lorsqu'il reçoit un service...
M. Drainville : ...éducatif, y
compris à la maison, et on pense que le parent qui l'accompagne doit se... doit
être à visage découvert également. C'est tout.
M. Morin : J'ai bien compris
la position gouvernementale, Mme la Présidente. Mais ma question, ce n'est pas
ça. Dans le mémoire de ce groupe, ils soulignent que l'article 2 et
l'amendement ne respectent pas l'article 1 du projet de loi, quand dans le
projet de loi on dit qu'entre autres l'important c'est de travailler à la
réussite de l'élève, d'offrir des services éducatifs de qualité, accès à un
milieu d'apprentissage sain, développer le plein potentiel de l'élève. Donc,
c'est une question qui est posée par ce groupe, et j'aimerais savoir quelle est
la position de M. le ministre là-dessus.
• (19 h 20) •
M. Drainville : Bien, je suis
en désaccord avec leur position, je ne crois pas que ça contredit
l'article 1.
M. Morin : Bien. On en a
parlé un peu avant la pause pour le repas, M. le ministre : et si un
enfant, dans une résidence privée, la résidence de ses parents, a le visage
découvert mais qu'un parent, pour toutes sortes de raisons, ne l'a pas? Puis on
en a parlé avant la pause, quant à l'importance pour l'enfant de recevoir,
d'avoir le droit à l'éducation. Dans un cas comme celui-ci, est-ce que votre
projet de loi va empêcher l'enfant de recevoir l'éducation auquel il a droit?
M. Drainville : J'ai déjà
répondu à cette question, Mme la Présidente.
M. Morin : Donc, votre
réponse est oui?
M. Drainville : J'ai déjà
répondu à la question, j'ai déjà dit que, pour recevoir le service éducatif, il
fallait que l'enfant et le parent soient à visage découvert. Et j'invite les
gens qui nous écoutent à vérifier l'échange que nous avons eu, très
substantiel, avant la pause pour le repas.
M. Morin : Et si il y a plus
d'un parent dans la maison, qu'est-ce que vous faites?
M. Drainville : Pardon?
M. Morin : S'il y a plus d'un
parent dans la maison, il y en a un qui est à visage découvert, un à visage
couvert, puis l'enfant a le visage découvert, qu'est-ce que vous allez faire, M.
le ministre?
M. Drainville : Les adultes
qui sont présents lors de la prestation doivent être à visage découvert.
M. Morin : Tout le monde?
M. Drainville : Absolument.
M. Morin : Donc, alors, pour
toutes sortes de raisons que... Vous avez un enfant qui a le visage découvert
mais qui, pour toutes sortes de raisons, reçoit de l'éducation à la maison, il
a été expulsé de l'école... il y a une foule... il y a une foule de
possibilités, d'ailleurs c'est écrit dans la loi, M. le ministre, et que, dans
la résidence en question, là, il y a deux, ou trois, ou quatre personnes, il y
en a une qui a le visage couvert, l'enfant ne recevra pas l'éducation?
M. Drainville : Mme la
Présidente, la raison pour laquelle il faut que les adultes présents soient à
visage découvert, c'est qu'on doit s'assurer de les identifier, et il faut donc
s'assurer qu'on puisse distinguer qui sont les parents.
M. Morin : Donc, je
comprends, je comprends que, dans une situation comme celle-là où vous avez l'enfant
qui a le visage découvert, vous avez un parent qui a le visage découvert,
l'enfant a le visage découvert, vous avez d'autres personnes qui ont le visage
découvert, mais il y en a une personne dans la maison, dans une résidence
privée, qui a le visage couvert, et l'enfant ne recevra pas l'éducation auquel
il a droit?
M. Drainville : Alors, Mme la
Présidente, si, lorsque le service qui est rendu à la maison... a permis
d'établir l'identité de l'enfant qui reçoit le service et si on a pu établir
l'identité des parents parce qu'ils se sont mis à visage découvert, bien, à ce
moment-là, ils doivent rester à visage découvert pendant la prestation. Alors,
il faut que les adultes présents se mettent à visage découvert pour qu'on
puisse identifier qui sont les parents. Une fois que les parents sont
identifiés, la loi dit que ce sont les parents et les enfants qui doivent être
à visage découvert. Si les personnes qui sont présentes veulent remettre... se
remettre à visage couvert, ils peuvent le faire. Ce qui est important, c'est
d'établir qui sont les parents, il faut que... Ce que nous proposons, c'est que
les enfants et les parents de ces enfants qui reçoivent l'enseignement à la
maison soient à visage découvert pendant la prestation de service. Pour pouvoir
l'établir...
M. Drainville : …il faut que
les adultes présents nous montrent leur visage. C'est normal. Maintenant, je
rappelle, Mme la Présidente, que c'est le choix d'abord des parents, puis on
peut s'imaginer, dans certains cas, des élèves de, je ne sais pas, 15 ans, 16
ans. On peut penser que, dans certains cas, ce sera le choix de l'élève de
recevoir l'enseignement à la maison, mais je pense qu'on peut dire sans se
tromper que, dans la vaste majorité des cas, ce sont les parents qui décident
de donner l'enseignement à la maison, qui décident pour l'enfant d'avoir
l'enseignement à la maison. Alors, on s'imagine bien, Mme la Présidente, que,
si les parents décident que l'enseignement à la maison se fera pour leur
enfant, ils vont accepter de respecter les règles qui encadrent l'enseignement
à la maison. Tu ne peux pas, d'un côté, dire : Ah! l'État me doit un
service éducatif, je choisis l'enseignement à la maison, mais je ne respecterai
pas les règles qui encadrent l'enseignement à la maison. Ça me semble
raisonnable.
M. Morin : Est-ce qu'il est
possible, Mme la Présidente, que, dans certains cas, il arrive que l'enfant est
dans l'impossibilité de recevoir un service à l'école, et donc qu'il doit être
à la maison?
M. Drainville : L'article 15
de la LIP : «Est dispensé de l'obligation de fréquenter une école l'enfant
qui…» Alors, paragraphes 1°, 2°, 3° et 4°, «l'enfant qui reçoit à la maison un
enseignement approprié, pourvu que soient remplies les conditions
suivantes : Un avis écrit à cet effet est transmis par ses parents au
ministre — ici, l'appellation «ministre», c'est au ministère — et
au centre de services scolaire compétent, un projet d'apprentissage qui vise à
instruire, socialiser, qualifier l'enfant, développer ses compétences
fondamentales, littératie, numératie, etc. Le suivi de l'enseignement est
assuré par le ministère — par le ministre, par le ministère — tout
autre condition ou modalité déterminée par règlement du gouvernement,
notamment», etc. Alors, dans ce d, dorénavant, il y aura l'obligation d'avoir
le visage à découvert pour recevoir l'enseignement à la maison. Ce n'est pas
sorcier.
M. Morin : Je comprends la
référence que fait M. le ministre, mais, si on regarde l'article 15, Mme la
Présidente, à 3°, «ont été expulsés de l'école par le centre de services
scolaire en application de l'article 242». Ce cas de figure là peut arriver,
j'imagine. Si on va voir l'article 242, ça dit, entre autres : «Le centre
de services scolaire peut, à la demande d'un directeur d'école, pour une cause
juste et suffisante, après avoir donné à l'élève et ses parents l'occasion
d'être entendus, inscrire un élève dans une autre école ou l'expulser des
écoles.»
Alors, dans un cas comme celui-là, M. le
ministre, l'enfant a aussi le droit de recevoir de l'éducation. Et j'écoutais
votre réponse attentivement tout à l'heure, donc, et puis vous avez parlé que
c'est une question de sécurité puis que c'est une question d'identification.
M. Drainville : Et de
communication.
M. Morin : Oui, mais dans…
oui, ça, vous l'avez dit, vous avez raison, mais, dans mon exemple, moi,
l'enfant a toujours le visage découvert, parce que, là, je vous rejoins, si
l'enfant a le visage couvert, bien là on ne sait pas… ce n'est pas de ça dont je
vous parle. L'enfant a le visage découvert, un des parents a le visage couvert,
il y en a d'autres… d'autres parents, que ce soit le père, les grands-parents,
qui ont le visage découvert, on est capables d'identifier… bien, l'enfant, il
est facilement identifiable, il a le visage découvert, puis on est capables
d'identifier que ses parents sont là, mais vous avez un parent qui a le visage
couvert, à ce moment-là, il ne recevra pas le service, M. le ministre. Et, s'il
a été expulsé par l'école, il ne recevra pas le service auquel il a droit.
J'aimerais savoir c'est quoi, votre position là-dessus.
M. Drainville : Bien, c'est
la même que tout à l'heure.
M. Morin : Donc, pas de
service.
M. Drainville : «L'enfant qui
reçoit un enseignement à la maison ainsi que ses parents doivent avoir le
visage découvert lors de la prestation de tout service qui leur est rendu.»
M. Morin : Et est-ce qu'il
est possible que votre article puisse être modifié afin de s'assurer, pour ce
que vous avez dit, qu'au fond ce que vous vivez, c'est une identification… ce
que vous visez, c'est une identification puis une question de sécurité? Parce
que, là, la façon dont vous avez rédigé votre amendement, il y a aucune autre
possibilité, c'est absolu. Puis, comme je vous le faisais remarquer avant la
pause pour le repas, l'éducation, c'est un droit, au Québec. Donc, est-ce qu'il
y aurait moyen…
M. Morin : ...d'adapter votre
article pour tenir compte, bien, des différents cas de figure dont on est en
train de parler. C'est-à-dire, une fois que vous l'avez identifié, le parent ou
un des parents, puis que l'enfant a le visage découvert, et que vous savez que
c'est bien l'enfant, et que vous êtes capable de lui enseigner parce qu'il a le
visage découvert, est-ce que ce n'est pas un amendement qui pourrait être
envisagé?
M. Drainville : Non, parce
que les rencontres avec les parents, c'est... il y a un échange avec les
parents, également, là. Quand tu vas à la maison, tu vas vérifier un certain
nombre de choses, mais il y a un suivi qui est fait, à ce moment-là, avec le
parent, et c'est important que la communication puisse se faire correctement,
pas juste avec l'enfant, mais aussi avec le parent. Ce qu'on appliquait tout à
l'heure, c'est ce sur quoi on s'entendait, vous et moi, là, sur le fait que le
non verbal communique parfois autant sinon... sinon autant que le verbal, ce
n'est pas juste vrai pour les enfants, c'est vrai également pour les adultes.
Donc, la nécessité d'avoir un échange à visage découvert, elle s'impose aussi
bien pour l'enfant que pour le parent, et elle s'impose pendant toute la
prestation du service. Puis je me répète, mais on en fait aussi une question de
principe.
• (19 h 30) •
M. Morin : Oui, ça, j'ai bien
compris, que, pour vous, c'était une question de principe. Maintenant...
M. Drainville : Mme la
Présidente, si je peux me permettre, moi, je ne connais pas beaucoup le député
de l'Acadie, mais c'est un homme qui, depuis le début, là, que je le côtoie en
Chambre, parce qu'on s'observe, on apprend à se connaître... puis je pense que
c'est un homme qui est sage, moi, le député de l'Acadie, Mme la Présidente. Je
le crois sincèrement, je pense que c'est un homme qui est sage et j'ai le goût
de lui demander : Mais qu'est-ce que c'est que cette obsession de vouloir
défendre le niqab et la burqa? Honnêtement, je peux comprendre, le Parti
libéral a des enjeux avec les signes religieux, bon, ça fait des... ils sont
empêtrés dans le débat sur la laïcité depuis toujours. C'est une des raisons
pour lesquelles ils se sont coupés de l'électorat francophone, mais, sur la
question de la burqa et du niqab, arrêtez de défendre ça. Détachez-vous de ça,
voyons donc! Ça n'a pas de bon sens. Je ne sais pas... je serais curieux, là,
mais ça doit être 95, 97, 99 % de la société québécoise qui pense que ça
n'a pas d'allure. Voulez-vous bien me dire qu'est ce que vous avez à défendre
la burqa puis le niqab dans un service public? Voyons donc, M. le député de
l'Acadie.
M. Morin : Alors...
M. Drainville : Je vous le
dis en tout respect, là, je vous le dis en tout respect, là, j'ai été confronté
à ce débat-là, moi, j'ai eu affaire en commission parlementaire avec des
représentants du Parti libéral, notamment le député de LaFontaine, d'ailleurs,
qui était le porte-parole à ce moment-là.
M. Morin : Alors, avec
respect.
M. Drainville : Avec respect,
oui, avec respect.
M. Morin : Avec respect, Mme
la Présidente, le ministre pose mal la question. Ce que j'essaie de faire comme
député de l'opposition, c'est de comprendre où le ministre veut aller. Ce que
je dis à M. le ministre, et c'est la discussion que nous avons depuis plusieurs
minutes maintenant, et ce n'est pas juste moi qui le soulève, il y a un groupe
qui l'a soulevé, il y a une opposition entre le droit à l'éducation, le droit à
recevoir de l'enseignement. Et je ferai remarquer, Mme la Présidente, que
l'enseignement au Québec, il est laïc.
Donc, nous, au Parti libéral... je ne suis
pas en train de défendre la burqa, je défends le droit à l'enseignement laïc
pour les enfants. Et là je veux être très clair. Donc, c'est ce que je défends.
Et là on a une discussion, M. le ministre,
et moi, et les exemples que je lui donne depuis tout à l'heure, c'est :
Mais qu'est-ce qui arrive quand l'enfant, lui, a le visage découvert? Qu'est-ce
qui arrive s'il y a des parents dans la maison qui ont le visage découvert?
Est-ce qu'on va priver cet enfant-là de l'éducation auquel il a droit,
l'éducation laïque, par ailleurs? Est-ce qu'on va le priver de pouvoir
connaître les valeurs québécoises, connaître la charte, connaître
l'enseignement laïc? Elle est là, la question. Et là M. le ministre me
dit : Mais c'est une question de principe. D'accord, je respecte son
principe. D'ailleurs, c'est M. le ministre qui nous invitait, au début, dans
ses remarques préliminaires, à avoir un échange qui est respectueux. Je
respecte sa position...
La Présidente (Mme Dionne) : ...M.
le député, c'est tout le temps que nous avez.
M. Morin : Mais c'est ce que
je défends. Ce que je défends, c'est l'enseignement laïque au Québec dans
l'intérêt de l'enfant.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci.
M. Morin : L'enfant à visage
découvert.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Merci. M. le ministre, d'autres commentaires?
19 h 30 (version non révisée)
La Présidente (Mme Dionne) : ...sur
l'amendement. Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : ...
M. Zanetti : Le ministre... Il
me reste du temps?
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
oui, oui.
M. Zanetti : Oui, parfait. Le
ministre n'a pas répondu à notre question, je trouve, à savoir : Qu'est-ce
qui se passe dans le cas où quelqu'un décide de pas se conformer? Une élève
décide... décide ou se fait imposer une décision, peu importe le résultat où il
n'y a pas conformité au règlement, qu'est-ce qui se passe pour le droit à l'éducation?
C'est quoi la mécanique?
M. Drainville : J'ai déjà
répondu à cette question, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions?
M. Zanetti : Bien, moi, je ne
suis pas satisfait de la réponse, là, en ce sens que ce que je comprends, c'est
que cette personne-là, elle n'a pas de services éducatifs.
M. Drainville : Elle peut
avoir des services éducatifs si elle se met à visage découvert et si ses
parents se mettent à visage découvert dans le cas où ils ne seraient pas à
visage découvert.
M. Zanetti : Et donc il y a
une possibilité réelle que le résultat de ça, cette personne-là, avant même l'âge
de 16 ans, n'est plus éduquée au Québec.
M. Drainville : Mais je pense
que si les parents refusent que l'enfant se mette à visage découvert ou qu'eux-mêmes
refusent de se mettre à visage découvert, on devra conclure qu'ils refusent l'instruction
pour leur enfant, et donc les autorités devront saisir la DPJ comme je l'ai
expliqué tout à l'heure.
M. Zanetti : Donc, comme
ministre de l'Éducation, là, ce que vous vous dites, c'est la meilleure chose
qui pourrait arriver à cette enfant-là, là, dans le fond, là, c'est que la DPJ
la retire de sa famille. C'est ça, le chemin vers lequel vous enlignez cet
élève-là. Les quatre élèves, là, les quatre élèves de l'école, là...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
M. le député.
M. Lévesque (Chauveau) : J'ai
le sentiment qu'on est en train de prêter des intentions au ministre. Je vous
demanderais, s'il vous plaît, de rappeler le collègue à l'ordre.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Oui, faites attention à vos... vos propos.
M. Zanetti : Oui. Mais en
fait, ce que je fais, c'est simplement tirer les conclusions de l'article 2
et des amendements qui sont proposés par le ministre. Essentiellement, la voie
que la ministre est en train de tracer pour les quatre élèves très concrètes
dont parle le rapport des 17 écoles qui sont dans je ne sais pas quelle
école à Montréal, parce que ce n'est pas une information qui est publique, ces
quatre élèves-là, dans le fond, si jamais elles décident de ne pas se conformer
ou si jamais elles se font imposer la décision de ne... si jamais elles ne se
conforment pas pour quelque raison que ce soit, le chemin tracé par la loi du
ministre, c'est la DPJ et la séparation de sa famille.
M. Drainville : Mme la
Présidente, si un parent décide d'instrumentaliser son enfant pour servir une
religion obscurantiste qui dicte le port du niqab ou le port de la burqa, il
est du devoir de l'État de conclure que ce parent-là ne souhaite pas que son
enfant soit éduqué. Et la loi prévoit que la Direction de la protection de la
jeunesse doit se saisir de ce cas. Et honnêtement, Mme la Présidente, je ne
sais pas pourquoi le député de Québec solidaire tient absolument à défendre le
port du niqab et de la burqa. Je ne sais pas comment… Je m'explique mal, là, qu'il
défende le droit des parents de continuer à porter la burqa et le niqab, alors
qu'ils reçoivent un service public. Je comprends mal qu'il défende le droit d'un
enfant de porter le niqab et la burqa alors qu'il reçoit un service éducatif à
la maison. Je ne comprends pas la position et la posture de Québec solidaire, Mme
la Présidente. Je ne comprends pas.
M. Zanetti : Pourtant,elle
est pourtant fort simple, M. le ministre. On est en faveur du droit à l'éducation
puis on pense que chaque enfant au Québec a le droit d'être éduqué puis n'est pas
obligé d'être envoyé vers la DPJ et séparé de sa famille. On n'est pas
favorable au visage couvert, on n'est pas favorable au niqab, on n'est pas
favorable... Quand vous dites… à chaque fois que vous allez répéter ça, comme
vous allez le faire les prochains jours, là, ce sera des mensonges parce que je
vous dis que ce n'est pas ça.
M. Drainville : Bien, Mme la
Présidente, d'abord…
M. Zanetti : Et je veux juste...
Si je peux… non, mais si je peux terminer.
La Présidente (Mme Dionne) : M.
le député, non, mais là, on ne prête pas d'intentions de mensonge au ministre, s'il
vous plaît.
M. Zanetti : O.K., alors je
retire ce mot-là. On… je suis… Je ne suis pas satisfait de la réponse, mais je
la comprends très bien maintenant...
La Présidente (Mme Dionne) : ...c'est
ça. Je...
M. Zanetti : On ne peut...
La Présidente (Mme Dionne) : On
ne peut pas juger ni des questions ni des réponses. Donc...
M. Zanetti : Je comprends.
Mais, ce que je comprends, et ce qui est très clair, et ce que je pense que
tout le monde doit comprendre, c'est que, les quatre personnes très réelles qui
portent un niqab dans une école à Montréal, le ministre, essentiellement, il
fait une législation qui va les envoyer dans la DPJ, à un moment où la DPJ est
en crise, à un moment où la DPJ... les communautés racisées du Québec, les
enfants racisés du Québec sont surreprésentés à la DPJ. Et puis c'est vers ça
qu'il s'enligne. C'est ça, sa solution de ministre de l'Éducation. Ce n'est pas
une solution qui va inclure personne. Ce n'est pas une solution qui va intégrer
personne à la société québécoise. C'est une solution d'exclusion qui nie le
droit à l'éducation.
• (19 h 40) •
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions sur l'amendement? Est-ce que l'amendement à l'article deux est
adopté? Alors, l'amendement adopté. Donc, d'autres commentaires sur...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Sur
division. Pardon. Oui. Adopté sur division. Merci. Est-ce qu'il y a d'autres
commentaires sur l'article 2 amendé? Est-ce que l'article deux est adopté?
Sur division. Parfait. Alors, nous passons à l'article trois, M. le ministre.
Je vous laisse en faire la lecture.
M. Drainville : Merci, Mme la
Présidente. Article trois : L'article 18.1 de cette loi est
modifié :
1° par l'ajout, à la fin du premier
alinéa, de la phrase suivante : «Il doit en outre agir de manière à
respecter l'égalité entre les femmes et les hommes.»;
2° par l'insertion, dans le deuxième
alinéa et après «sécuritaire», de «et exempt de toute forme d'intimidation ou
de violence motivée notamment par le racisme, l'orientation sexuelle,
l'identité sexuelle ou de genre, l'homophobie, un handicap ou une
caractéristique physique».
La Présidente (Mme Dionne) : ...
M. Drainville : Commentaire.
Pardonnez-moi, Mme la Présidente, j'ai mis trop de temps à vous lire le
commentaire. Alors, commentaire : L'article 18.1 de la Loi sur
l'instruction publique concerne les obligations de l'élève. La modification
proposée par l'article trois du projet de loi propose d'ajouter à ces
obligations celle de respecter l'égalité entre les femmes et les hommes dans
les comportements qu'un élève doit adopter avec le personnel du centre de
services scolaire ainsi qu'envers ses pairs. Il vise également à préciser que
le milieu d'apprentissage sain et sécuritaire auquel l'élève doit contribuer
doit notamment être exempt de toute forme d'intimidation ou de violence, et
donne certains exemples.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci
beaucoup, M. le ministre. Donc, est-ce qu'il y a des interventions sur
l'article trois? M. le député de l'Acadie.
M. Morin : Oui, brièvement,
merci.
M. Drainville : ...de vous
interrompre. Est-ce que vous préférez que je le lise tout de suite,
l'amendement?
Une voix : ...
M. Drainville : Ce serait
mieux?
La Présidente (Mme Dionne) : ...consentement
pour que le ministre dépose son amendement tout de suite? D'accord.
M. Morin : Il n'y a pas... Il
n'y a pas de souci. J'allais...
M. Drainville : Excusez-moi.
Je... J'ai hésité. Alors, allons-y avec l'amendement pour qu'on ait la vue
d'ensemble.
M. Morin : Alors, il y a...
Alors, Mme... Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Juste...
Attendez, M. le ministre. Oui.
M. Morin : Alors, il y a...
il y a consentement pour que M. le ministre dépose son amendement.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Alors, M. le ministre, vous pouvez y aller.
M. Drainville : Alors,
l'amendement a été déposé au...
La Présidente (Mme Dionne) : ...à
l'écran.
M. Drainville : Alors, je
vais procéder à sa lecture. Article trois (article 18.1 de la Loi sur
l'instruction publique) : Remplacer le paragraphe deux de l'article trois
du projet de loi par le suivant :
«2° dans le deuxième alinéa :
«a) par le remplacement de "et sécuritaire"
par "sécuritaire et exempt de toute forme d'intimidation, de violence, de
manifestation de haine ou de discrimination motivée notamment par le racisme,
l'orientation sexuelle, l'identité sexuelle ou de genre, l'homophobie, un
handicap ou une caractéristique physique";
«b) par le remplacement de "et la
violence" par "la violence, les manifestations de la haine et la
discrimination".»
Commentaire : L'amendement vise à
préciser que le milieu d'apprentissage auquel l'élève doit contribuer doit être
exempt de manifestations de haine et de discrimination.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Donc, des interventions sur l'amendement? M. le député de
l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je comprends, entre autres, que...
M. Morin : ...que cet
amendement-là... On parle d'un handicap, on parle de l'homophobie et on veut
aussi remplacer violence par...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Oui,
oui. Désolée. M. le secrétaire a beaucoup de choses à gérer, là, donc. Il nous
manque un joueur. C'est... C'est correct? Bon, on a quelqu'un qui est allé.
Mais... Bon, O.K., poursuivez, M. le député.
M. Morin : Je vous remercie,
Mme la Présidente. En fait, j'ai une question pour M. le ministre. Lors des
consultations particulières, la CIJA a déposé un mémoire avec certaines
recommandations, notamment que... que les élèves puissent contribuer à
l'établissement d'un milieu d'apprentissage sain, sécuritaire, mais... exempt
de toute forme d'intimidation, de violence, mais qu'on enlève également «exempt
toute forme de haine» et que ce soit ajouté à l'énumération. Je comprends que
vous faites référence, dans votre amendement, à l'exemption de manifestation de
haine. Est-ce que c'est pour répondre aux recommandations qui nous ont été
faites par la CIJA?
M. Drainville : La réponse
est oui, Mme la Présidente.
M. Morin : Très bien. Je vous
remercie.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
commentaires sur l'amendement?
Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'article 3 amendé? M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Bien, c'est
juste que c'est vraiment... Moi, je suis bien d'accord avec cet article-là, là.
Zéro problème sur le fond. Mais c'est spécial, comment c'est formulé, parce
qu'on dirait qu'il y a des choses qui sont, comme, pas toutes sur le même
niveau, là. Je donne un exemple. Tu sais, quand on parle de... Bien là, la...
mettons, tel qu'amendé, pouvez-vous me le montrer tel qu'amendé?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
...l'expliquer, là. Ce qu'on doit voir à l'écran, c'est l'amendement. Le
commentaire, c'est un bonus, mais vous... Tu sais, dans le fond...
M. Zanetti : Exact.
La Présidente (Mme Dionne) :
...ce qui est important de montrer à l'écran, c'est l'article modifié, donc.
Mais vous pouvez aller chercher sur Greffier tout le commentaire.
M. Zanetti : O.K. Bien...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : C'est
l'article 3 du projet de loi tel que modifié. C'est la modification.
M. Zanetti : O.K. Donc là,
dans le fond, l'article 3, il y a un, puis l'alinéa deux est complètement
remplacé par?
M. Drainville : Moi, je
comprends le député de Jean-Lesage, Mme la Présidente. Descendez pour qu'on
vous...
Des voix : ...
M. Zanetti : Ah! O.K. C'est
ça qu'on veut. Parfait. Oui, c'est ça. Bon.
La Présidente (Mme Dionne) :
...là on est à la bonne place. O.K.
M. Zanetti : Alors, quand on
dit, bon, «sécuritaire et exempt de toute forme d'intimidation, de violence,
manifestation de haine et discrimination, notamment motivée par le racisme,
l'orientation sexuelle», c'est comme deux affaires différentes, tu sais. De
l'intimidation motivée par le racisme, O.K., mais de l'intimidation motivée par
l'orientation sexuelle... Est-ce qu'on ne veut pas plutôt dire homophobie, puis
homophobie est comme deux... C'est comme si, tu sais, le racisme, c'est une
motivation d'intimidation, alors que l'orientation sexuelle, c'est comme un
motif de... c'est une raison pour laquelle la personne se fait intimider. Ça
fait que c'est comme deux affaires qui sont sur des niveaux différents.
Puis c'est pour ça que moi, j'aurais peut-être
une proposition alternative, là, qui reprend les mêmes affaires, mais qui
utilise des termes qui semblent être comme de la même espèce, là, de concept.
M. Drainville : Je ne suis
pas... Mme la Présidente, si vous me permettez, je vais tenter une explication.
Puis, si je ne convaincs pas le député de Jean-Lesage, bien, évidemment, on
étudiera son amendement. Mais la façon qu'il faut le lire, là... Puis même,
même, je vous dirais, même là ce n'est pas évident. Pouvez-vous le descendre
plus bas, là où on voit : «article 18.1 de la loi telle que modifiée»? On
peut-tu l'avoir, le «tel que modifié»?
Une voix : ...
M. Drainville : Le «tel»...
La Présidente (Mme Dionne) : Vous
l'avez sur greffier, là. C'est parce que, là, on ne peut pas jouer à
«scroller»...
M. Drainville : Non, non,
mais je vois que vous pouvez descendre, là. Vous pouvez descendre le texte, là.
Regardez, là, la ligne bleue, là.
La Présidente (Mme Dionne) :
On a... M. le ministre, il y a... Vous l'avez sur papier, là. C'est parce que
j'ai un secrétaire ici, là, qui fait deux... Tu sais, c'est parce que...
M. Drainville : Non, mais
je... qu'il prenne son temps, là. On n'est pas... On n'est pas pressés, là. Je
comprends que vous ne voulez pas l'accabler, votre secrétaire, là. Qu'il prenne
le temps qu'il faut. Mais il faut s'assurer que... Parce que, moi, si j'étais à
la place du député de Jean-Lesage, puis j'ai déjà été à la place du député de Jean-Lesage
pendant de nombreuses années, j'ai fait plus d'années dans l'opposition qu'au
gouvernement, moi, là, là. Ça fait que j'aime ça, la clarté. Puis, quand il y a
une job de législateur à faire, il faut voir le texte...
M. Drainville : ...dans son
ensemble tel qu'amendé. Et pour ça, ça prend la dernière partie, là,
article 18.1 de la Loi sur l'instruction publique telle que modifiée.
C'est ce bout-là que ça nous prend.
M. Zanetti : On pourrait
suspendre pour...
La Présidente (Mme Dionne) : On
va suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 19 h 49)
(Reprise à 19 h 51)
La Présidente (Mme Dionne) :
La commission reprend maintenant ces travaux. Donc, M. le député de
Jean-Lesage, la parole est à vous.
M. Zanetti : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Moi, ce que je vous suggérerais, en fait, c'est de déposer
l'amendement que je voulais déposer en forme de sous-amendement, puis que je
puisse vous le montrer. Puis je pense que ça va être beaucoup plus clair que
les explications que je vais pouvoir donner, mais je vais l'expliquer pareil,
là.
La Présidente (Mme Dionne) : Donc,
vous voulez soumettre un sous-amendement. Là, on a... Parce que, là, cet
amendement-là, il est adopté. Donc, ce serait un amendement.
M. Zanetti : Alors, un
amendement.
La Présidente (Mme Dionne) : Parfait.
Alors...
M. Zanetti : Je vous envoie.
La Présidente (Mme Dionne) :
Vous allez envoyer ça. Donc, je vais suspendre quelques instants, le temps de
recevoir l'amendement.
(Suspension de la séance à 19 h 52)
(Reprise à 19 h 59)
La Présidente (Mme Dionne) : La
commission reprend maintenant ses travaux. Donc, M. le député de Jean-Lesage,
je vous laisse faire la lecture de votre amendement.
M. Zanetti : Oui, merci, Mme
la Présidente. Alors :
Remplacer, le deuxième alinéa de l'article
3 du projet de loi... les mots «l'orientation sexuelle, l'identité sexuelle ou
de genre, l'homophobie, un handicap ou une caractéristique physique» par les
mots «l'homophobie, le sexisme, la transphobie et le capacitisme».
Donc, le deuxième alinéa de l'article 18.1
de cette loi, tel qu'amendé, se lirait ainsi :
• (20 heures) •
«Il doit contribuer à l'établissement d'un
milieu d'apprentissage sain, sécuritaire et exempt de toute forme
d'intimidation ou de violence motivée notamment par le racisme, l'homophobie,
le sexisme, la transphobie ou le capacitisme. À cette fin, il est tenu de
participer aux activités de l'école qu'il fréquente concernant le civisme, la
prévention et la lutte contre l'intimidation et la violence.»
Alors, essentiellement, on vient reprendre
le même contenu, mais en l'exprimant dans une forme qui est comme plus
uniforme, là, parce que... Bon, c'est ça, je ne sais pas si ça paraît clair,
là, le capacitisme et la discrimination basée sur les... un handicap, par
exemple. Donc, voilà, on reprend les motifs de discrimination... quelques-uns
des motifs de discrimination identifiés par la charte québécoise des droits et
libertés. Il y en a plus, on pourrait tous les mettre, là, mais c'est juste
que... Voilà, je vous propose... C'est un peu formel comme amendement.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Oui, M. le ministre.
M. Drainville : Merci, Mme la
Présidente. Alors, je salue l'intention du député de Jean-Lesage, Mme la
Présidente. Je veux dire, à sa face même, c'est un... c'est une proposition qui
est inspirée de... des mêmes intentions que nous, dans le fond. Mais, si je
peux me permettre, Mme la Présidente, puis je le dis en tout respect pour le
député, pour sa proposition, je préfère notre formulation, je la trouve plus
claire, elle est plus concrète.
Et surtout, Mme la Présidente, puis je
pense que c'est important que notre collègue le sache, la formulation que nous
avons choisie s'inspire de la formulation qui est prévue dans le plan de lutte
contre la violence et l'intimidation, qui est dans la Loi sur l'instruction
publique. Dans la Loi sur l'instruction publique, on peut lire : «Le plan
de lutte contre l'intimidation et la violence doit notamment prévoir», etc., et
là on peut lire : «les mesures de prévention visant à contrer toute
forme d'intimidation ou de violence motivée notamment par le racisme,
l'orientation sexuelle, l'identité sexuelle, l'homophobie, un handicap, une
caractéristique physique». Alors, nous avons repris l'essentiel de cette
formulation qui est déjà dans la loi, déjà dans le plan de lutte, et nous
l'avons inséré dans le projet de loi, en y ajoutant... en y ajoutant un certain
nombre de bonifications. Alors, voilà.
Et ce que je voulais expliquer tout à
l'heure, Mme la Présidente, là, c'est qu'il faut lire la disposition en deux
temps. Puis là je vous réfère au texte écrit, là, que l'on vous a distribué il
y a un instant. Alors : «L'élève doit adopter un comportement empreint de
civisme et de respect envers le personnel du centre de services scolaire ainsi
qu'envers ses pairs. Il doit, en outre, agir de manière à respecter l'égalité
entre les femmes et les hommes.» Alors là, voilà : «Il doit contribuer à
l'établissement d'un milieu d'apprentissage sain, sécuritaire et exempt de
toute forme d'intimidation, de violence, de manifestation de haine ou de
discrimination.» Et là on y va avec des exemples qui pourraient motiver, qui
pourraient, malheureusement, inspirer ces manifestations de haine, de
discrimination, ces comportements d'intimidation, de violence, en donnant les
exemples de... alors, on dit : «motivée notamment par le racisme,
l'orientation sexuelle, l'identité sexuelle ou de genre, l'homophobie, un
handicap, une caractéristique physique». Et là il doit tenir... il est tenu de
participer à des activités, etc.
Donc, la première partie de l'affirmation,
c'est : il doit avoir... il doit contribuer, dis-je, à un climat sain et
sécuritaire, exempt de toute forme d'intimidation, de violence, de
manifestation de haine, de discrimination qui pourrait être motivée par le
racisme, l'orientation sexuelle, etc. Donc, la première partie, c'est une
affirmation du comportement que nous ejigeons des... que nous exigeons, dise...
il se fait tard, Mme la Présidente... que nous exigeons, dis-je... merci... des
élèves...
20 h (version non révisée)
M. Drainville : ...première partie
et, dans la deuxième partie, on dit : Ce comportement, exempt de... il
pourrait être motivé par un certain nombre de choses répréhensibles, et on
donne des exemples. Voilà. Ceci dit, Mme la Présidente, je remercie le député
de Jean-Lesage pour sa contribution, mais nous allons garder notre formulation
originelle.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. D'autres interventions sur l'amendement de M. le député de Jean-Lesage?
Est-ce que l'amendement est adopté?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Amendement
rejeté. Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur l'article 3 amendé?
Pas d'autre intervention? L'article 3 amendé est adopté?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Alors, nous sommes à l'article 4. M. le ministre, je vous cède la parole.
M. Drainville : Article 4 :
Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 18.2, du suivant :
«18.3. L'élève doit avoir le visage
découvert lorsqu'il se trouve sur les lieux, tel un local ou un immeuble, mis à
la disposition d'une école ou d'un centre ainsi que lors de la prestation de
tout service qui lui est rendu par le centre de services scolaire, y compris
les services rendus pour le compte de celui-ci ou ceux rendus dans le cadre de
la réalisation d'un projet pédagogique particulier, sauf lorsque le visage doit
être couvert en raison d'un motif de santé, d'un handicap ou des exigences
propres à l'exécution de certaines tâches.»
Commentaires : Cet article propose d'ajouter
une obligation pour les élèves d'avoir le visage découvert en tout temps lorsqu'ils
se trouvent sur les lieux mis à la disposition d'une école ou d'un centre ou
lors de la prestation de services. Il propose de limiter les exceptions aux
motifs de santé ou liés à un handicap ou aux exigences propres à l'exécution de
certaines tâches.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 4? M. le
député de l'Acadie.
M. Morin : Oui, brièvement, Mme
la Présidente. Je veux simplement soulever que, dans le cadre d'un lieu mis à
la disposition d'une école, d'une école... ou d'un local qui appartient ou est
mis à la disposition d'une école, il m'apparaît clair que l'élève doit avoir le
visage découvert, sauf dans les cas d'un handicap ou, bien sûr, d'exigences
propres à l'exécution de certaines tâches ou pour des motifs de santé.
M. Drainville : Alors, vous
êtes d'accord avec la disposition, est-ce que c'est ce que je comprends?
M. Morin : C'est exactement
ce que j'ai dit. Quand on parle d'une école, quand on parle d'un lieu, quand on
parle d'un centre qui est mis à la disposition d'une école, je suis d'accord, M.
le ministre.
M. Zanetti : ...
M. Morin : Moi, j'ai terminé.
M. Zanetti : C'est quoi, les
sanctions, M. le ministre, qui vont être prévues par ça, pour cette... en cas
de non-conformité à ce règlement?
M. Drainville : Bien, c'est
les sanctions qui s'appliquent habituellement dans le code de vie. Le code de
vie prévoit un certain nombre de sanctions, et puis elles vont s'appliquer, là.
L'article 76 de la LIP se lit comme suit :
«Le conseil d'établissement approuve les
règles de conduite et les mesures de sécurité proposées par le directeur de l'école — ça,
c'est la loi actuelle.
«Les règles de conduite doivent notamment
prévoir, en outre des éléments que le ministre peut prescrire par règlement :
«1°les attitudes et le comportement devant
être adoptés en toute circonstance par l'élève — alors, ça, c'était 1°,
paragraphe 1°;
«2° les gestes et les échanges proscrits
en tout temps, quel que soit le moyen utilisé, y compris ceux ayant lieu par l'intermédiaire
des médias sociaux et lors de l'utilisation du transport scolaire; et
«3° les sanctions disciplinaires
applicables selon la gravité ou le caractère répétitif de l'acte répréhensible.»
Et on déposera un amendement,
subséquemment, à l'effet que, dans le code de vie, il y aura dorénavant l'obligation
du visage à découvert. Mais les mesures qui s'appliquent en cas de manquement
au code de conduite sont prévues par le code de conduite...
M. Drainville : ...alors ça
peut aller de... dépendamment du geste, dépendamment du comportement, ça peut
être une lettre d'excuse, ça peut être une rencontre avec la personne qui a été
victime, ça peut être un geste réparateur, ça peut aller à un moment donné
jusqu'à une réprimande, une suspension, etc.
M. Zanetti : Mais au fond, ce
que je comprends, c'est que les sanctions par rapport à une élève d'une école à
Montréal qui porte le niqab, qui ne voudrait pas se conformer, ce serait
déterminé par le conseil d'établissement de son école.
• (20 h 10) •
M. Drainville : C'est
déterminé par le code de vie qui est adopté par le conseil d'établissement. On
aura l'occasion plus tard, dans l'étude de ce projet de loi, de parler du
contenu du code de vie et de la manière de le mettre en œuvre, mais on en
discutera à ce moment-là. Mais je... La réponse courte à votre question, c'est
oui, le code de vie, déjà dans toutes les écoles du Québec, prévoit des
sanctions. Alors, je vous donne des exemples.
Mesures réparatrices, mesures punitives,
mesures d'aide aussi qui peuvent être exigées advenant le cas où un élève ne
respecterait pas le code de vie. C'est l'exemple d'une école, je ne vais pas la
nommer, ce n'est pas nécessaire. Alors, les mesures d'aide, ça peut être un
avertissement, un contrat ou une feuille de route, un plan d'intervention,
récupération obligatoire, référence à des ressources extérieures, réintégration
avec les parents, suivi d'un professionnel de l'école, rencontre avec
l'enseignant ou l'encadreur. Ça, c'est pour la colonne Mesures d'aide.
Mesures réparatrices, ça peut être entente
verbale ou écrite, lettre d'excuse, réflexion, remboursement en cas de perte de
bris ou de vandalisme, retour à la maison pour changer la tenue vestimentaire,
travaux communautaires, etc.
Mesures punitives : Changement
d'école, référence au local de retrait, résultats scolaires conséquents avec la
faute, objets confisqués, retrait d'une activité, référence aux autorités
policières — ça, on s'entend que c'est dans des cas, par exemple, de
violence importante — la retenue, retour à la maison assumé par les
parents, retrait de la classe.
Alors, c'est une série d'exemples, puis ça
dépend de l'école, c'est au conseil d'établissement de décider. Puis, comme
vous le savez, au conseil d'établissement, il y a évidemment la direction
d'école, il y a des représentants du personnel, il y a des représentants des
parents et, dans le cas de l'école secondaire, il y a des représentants des
élèves également.
M. Zanetti : Donc, le
ministre est à l'aise avec le fait qu'en cas de non-conformité à ce
règlement-là, il est possible que les quatre élèves de Montréal, dans le fond,
puissent demeurer à l'école quand même.
M. Drainville : Il est à
l'aise avec quoi?
M. Zanetti : Vous êtes à
l'aise avec le fait que les quatre élèves bien concrètes de Montréal, qui
existent, là, dans une école, là, qu'elles restent à l'école en cas de
non-conformité au règlement.
M. Drainville : Bien,
c'est-à-dire qu'elles doivent se mettre à visage couvert.
M. Zanetti : Découvert.
M. Drainville : À visage
découvert, pardonnez-moi, elles doivent se mettre à visage découvert.
M. Zanetti : Si jamais elles
refusent, elles pourront rester à l'école quand même si le conseil
d'établissement le détermine ainsi?
M. Drainville : Non, non,
non.
M. Zanetti : Bien, c'est ce
qui est décrit dans le projet de loi comme il est rédigé, là.
M. Drainville : Oui. Bien, la
difficulté, Mme la Présidente, c'est qu'on ne sait pas... on n'est pas encore
rendu là dans le projet de loi, là, mais il n'y a pas d'accommodement possible
dans le cas du visage découvert.
M. Zanetti : Oui, mais
concrètement, comment ça s'opérationnalise? C'est quand même important de
savoir ça va être quoi, les sanctions, là.
M. Drainville : Alors, si on va
à l'article 40 du projet de loi, Mme la Présidente... alors, à
l'article 40 : Aucun accommodement ni aucune autre dérogation ou
adaptation ne peut être accordé en ce qui a trait à l'application des
articles 16, 18.3 et 258.0.4. Et, dans ce cas-ci, on parle de 18.3.
M. Zanetti : Bien, ma
question... je comprends, mais ça...
M. Zanetti : ...ça ne répond
pas à la question. Dans le sens que... Puis c'est quand même question
importante, là. L'Association des cadres scolaires, si je me souviens bien, là,
ils sont venus en commission parlementaire puis ils ont dit : S'il y a des
sanctions par rapport au visage couvert ou découvert, ces sanctions ne doivent
pas toucher les élèves, il ne doit pas y avoir de sanctions envers les élèves.
Est-ce que vous allez écouter la recommandation de l'Association des cadres
scolaires?
M. Drainville : Mme la
Présidente, le projet de loi prévoit que les élèves ont le visage découvert en
tout temps, en toute circonstance, sans parler du personnel scolaire. Et je
viens d'indiquer au député qu'il n'y aura aucun accommodement possible sur
cette question. Donc, si l'élève refuse de se mettre à visage découvert, il ne
pourra rester à l'école.
M. Zanetti : Bien, dans le
fond, alors, si je comprends bien, les quatre élèves de Montréal, là... bien,
probablement que c'est de Montréal, on ne le sait pas, les quatre élèves d'une
école quelque part qui portent le niqab, si elles refusent de se conformer,
elles ne peuvent pas rester à l'école. Si, donc, on les exclut du système
éducatif, on les exclut du meilleur moyen d'intégration à la société québécoise
qui existe, là, elles peuvent peut-être aller à l'école à la maison. Mais, en
même temps, à l'école à la maison, si jamais il n'y a pas conformité au
règlement, elles ne reçoivent pas de services non plus. Et là, essentiellement,
si elles ne reçoivent pas de services et qu'elles ont moins de 16 ans, la
DPJ va aller intervenir dans leur famille puis ils vont être retirés de leur
famille. C'est ça qui va se passer pour les quatre élèves qui portent le niqab
aujourd'hui, là.
M. Drainville : Bien, Mme la
Présidente, le député de Jean-Lesage ne cesse de nous formuler le même... la
même position. Pourquoi est-ce qu'il ne plaide pas plutôt pour que les
parents... dans le cas d'un enfant du primaire par exemple, pour que les
parents acceptent que leur enfant ne porte pas le niqab ou... le niqab,
mettons? Les cas qui ont été rapportés jusqu'à maintenant, c'étaient seulement
des élèves du secondaire. Il ne semble pas faire la différence, là. Il parle de
façon générale d'un enfant, d'un élève et de ses parents. Alors, moi, je
dis : Plutôt que de défendre le droit d'un enfant ou d'un parent à porter
le niqab, pourquoi est-ce qu'il ne soutient pas la position à l'effet que
c'est... ça n'a pas de bon sens puis qu'on devrait plutôt travailler auprès du
parent et de l'enfant pour qu'il retire le signe, le niqab, pour qu'il retire
le voile intégral afin que l'élève puisse recevoir son service? Il préfère
défendre le droit de porter le niqab plutôt que le droit à l'éducation sans
niqab. C'est quand même un peu curieux, Mme la Présidente.
Par ailleurs, il ne cesse de parler des
quatre cas, là. Là, j'ai été... j'ai été tolérant, là. Mais je le... je lui...
je porte à son attention la page neuf du rapport sur les 17 écoles, là,
hein, qui dit : «Il y aurait environ une dizaine d'élèves dans la même
situation, en parlant des élèves qui portent un voile et un masque, ce qui ne
laisse que le front et les yeux à découvert.» Bon. Alors, c'est une dizaine
d'élèves. Si on prend les élèves qui portaient un voile intégral plus les
élèves qui s'en fabriquaient un, on parle d'une dizaine de cas. Alors, je
voulais juste apporter cette distinction parce que je ne voudrais pas que les
gens pensent que le chiffre quatre est le chiffre que le rapport donne. Le
chiffre quatre est noté, mais par la suite, il est dit qu'il y aurait une
dizaine d'élèves qui se fabriquent un voile intégral. Voilà.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Oui. M. le député.
M. Zanetti : Bien, c'est
parce que... oui, effectivement. Mais c'est ça. C'est parce que je parlais du
niqab, là. Ça fait que, niqab, c'est quatre, puis peut-être une dizaine qui
portent un masque de procédure. Mais ce n'est quand même pas exactement la même
affaire, là. Je comprends l'amalgame qui est fait, mais ce n'est pas exactement
la même chose.
Maintenant, moi, je veux bien être
d'accord avec le ministre, là, de dire : Oui oui, ces parents-là,
effectivement, là, ce serait bien qu'ils collaborent puis ce serait... Je suis
d'accord avec le fait que le service éducatif se donne beaucoup mieux à visage
découvert. On est d'accord avec ça. Mais là, la question, c'est que le ministre
fait une règle absolue, sans compromis. Il doit quand même être d'accord avec
les conséquences. Tu sais, il ne peut pas juste faire cette règle-là puis,
après ça, dire : De toute façon les gens vont se conformer puis on n'a pas
à se poser la question si...
M. Zanetti : ...c'est juste si
jamais les gens refusent de se conformer, tu sais. Il n'y a quand même pas
personne qui va aller leur arracher les vêtements du corps, là, tu sais. Alors,
la question est tout à fait légitime.
Ce que le ministre est en train de dire,
c'est que ces élèves là, bien... donc, peut-être 14, peut-être une dizaine, si
elles ne se conforment pas, elles vont être retirées de l'école... le meilleur
moyen d'intégration à la société québécoise, elles vont être exclues de la
société... elles vont pouvoir peut-être se rabattre sur un enseignement à la
maison, mais là, dès qu'elles vont vouloir avoir des services ça ne marchera
pas non plus, et si elles ont moins de 16 ans, le ministre va dire : Bien
là, c'est la DPJ qu'il faut qu'elle aille intervenir pour les sortir. Vous ne
trouvez pas que ça escalade rapidement? Vous ne trouvez pas qu'il y aurait une
façon plus humaine et concrète de fonctionner pour s'assurer qu'au Québec
justement, on intègre tout le monde à la société québécoise, puis qu'on fasse
respecter l'égalité entre les femmes et les hommes? Il me semble que... il me
semble que la voix bienveillante, là, elle est... elle serait plus porteuse.
Mais, manifestement, le ministre, ça ne le dérange pas, c'est ce que je
comprends. Je voulais savoir où ça allait, là. Maintenant, c'est très clair.
• (20 h 20) •
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions sur l'article 4? Est-ce que l'article 4 est adopté?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
Sur division.
M. Drainville : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
Oui, M. le ministre. Donc, vote par appel nominal.
Le Secrétaire : Pour, contre,
abstention. M. Drainville (Lévis)?
M. Drainville : Je suis pour,
Mme la Présidente.
Le Secrétaire
: Mme Tremblay
(Hull)?
Mme Tremblay : Pour.
Le Secrétaire
: M. Asselin
(Vanier-Les Rivières)?
M. Asselin : Pour.
Le Secrétaire
: M. Lévesque
(Chauveau)?
M. Lévesque (Chauveau) : Pour.
Le Secrétaire
: M. Rivest
(Côte-du-Sud)?
M. Rivest : Pour.
Le Secrétaire : M. Émond
(Richelieu)?
M. Émond : Pour.
Le Secrétaire
: M. Lemieux
(Saint-Jean)?
M. Lemieux : Pour.
Le Secrétaire
: M. Morin
(Acadie)?
M. Morin : Pour.
Le Secrétaire
: M. Zanetti
(Jean-Lesage)?
M. Zanetti : Contre.
Le Secrétaire : Mme Dionne
(Rivière-du-Loup—Témiscouata)?
La Présidente (Mme Dionne) : Abstention.
Alors, c'est adopté. Article 5, M. le ministre, la parole est à vous.
M. Drainville : Très bien.
Merci, Mme la Présidente :
L'article 19 de cette loi est modifié par
l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :
«Les modalités d'intervention pédagogique
et les instruments d'évaluation des élèves, y compris le matériel utilisé aux
fins d'intervention et d'évaluation, doivent être conformes au projet éducatif
de l'école, au régime pédagogique établi par le gouvernement, au programme
d'activités ou d'études établi par le ministre, aux activités ou contenus
prescrits dans les domaines généraux de formation et à tout autre encadrement
pédagogique applicable et s'inscrire en cohérence avec les valeurs
démocratiques et les valeurs québécoises, dont l'égalité entre les femmes et
les hommes et la laïcité de l'État.»
La Présidente (Mme Dionne) :
Avez-vous des commentaires, M. le ministre?
M. Drainville : Vous avez
raison, Mme la Présidente, il ne faut jamais oublier les commentaires.
L'article 19 de la Loi sur l'instruction publique concerne les droits de
l'enseignant. L'article 5 du projet de loi propose de préciser que les
modalités d'intervention pédagogique et les instruments d'évaluation des élèves
que les enseignants ont le droit de choisir, y compris le matériel utilisé à
ces fins, doivent respecter les encadrements pédagogiques et être cohérents
avec les valeurs démocratiques et les valeurs québécoises, ainsi qu'avec la
laïcité de l'État.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'article 5? Oui, M. le
député de l'Acadie.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Dans les différents mémoires que nous avons reçus, Mme la
Présidente, il y a des groupes qui s'interrogeaient, qui se posaient des
questions sur... dans la formulation de l'article 5, en ce qui a trait au «et à
tout autre encadrement pédagogique applicable». Et parmi les commentaires que
nous avons reçus, on nous faisait remarquer que cette expression-là avait un
libellé qui était particulièrement flou. On voulait savoir, et c'est une
question que je pose à M. le ministre : Est-ce que ça inclut des
documents, par exemple, à caractère pédagogique, mais non prescrits, comme
certaines politiques, guides, cadres de référence du ministère de l'Éducation?
Il semble à plusieurs organisations que, dans la loi, il y a déjà l'article 19
qui traite des droits de l'enseignant...
M. Morin : ...dans le cadre
des projets éducatifs de l'école, on lui permet notamment donc de choisir des
instruments d'évaluation des élèves, de prendre des modalités d'intervention
pédagogiques qui correspondent aux besoins et aux objectifs fixés pour chaque
groupe d'élèves. Donc, ça, c'est déjà dans la Loi sur l'instruction publique,
Mme la Présidente. Et quand, dans le projet de loi, on ajoute tout autre
amendement ou tout autre encadrement pédagogique, il y a effectivement un flou.
Donc, si M. le ministre pouvait nous éclairer sur l'intention du législateur,
ce serait fort apprécié.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : ...Mme la
Présidente, pour répondre bien spécifiquement à la question de notre collègue,
quand on parle, par exemple... je pense que ça répond à sa question, si ça ne
répond pas, il saura me le dire, quand on parle de tout autre encadrement
pédagogique applicable, on parle, par exemple, des cadres d'évaluation des
apprentissages, des cadres d'évaluation des apprentissages qui vont fournir
pour chaque discipline du programme de formation de l'école québécoise les
balises pour évaluer les apprentissages afin d'accorder aux élèves un résultat qui
correspond à une évaluation juste des acquis, la politique d'évaluation des
apprentissages pourrait se qualifier comme encadrement pédagogique, les normes
et modalités d'évaluation des apprentissages qui sont approuvées par la
direction de l'école — ça, c'est l'article 96.15 de la LIP — les
documents de progression des apprentissages qui sont liés aux différentes
matières, ce sont des exemples d'encadrements pédagogiques qui sont touchés
par... qui sont concernés par l'article 5.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. M. le député.
M. Morin : Oui, merci, Mme la
Présidente. Sauf que, si ces éléments-là sont déjà dans la loi, parce que M. le
ministre réfère à un article précis de la loi, et qu'à l'article 19 de la
même loi, on dit que, dans les droits de l'enseignant, que l'enseignant a le
droit de diriger la conduite de chaque groupe d'élèves et de choisir les
instruments d'évaluation des élèves qui lui sont confiés afin de mesurer et
d'évaluer constamment et périodiquement les besoins et l'atteinte des objectifs
par rapport à chacun des élèves qui lui sont confiés et que, par ailleurs, il y
a une référence à 96.15, que vise tout autre encadrement pédagogique? Parce
que, là, dans la loi, si le législateur veut ajouter ça, il faut que ça veuille
dire quelque chose d'autre. Et c'est là que j'aimerais avoir, s'il vous plaît,
certaines explications et précisions. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. M. le ministre.
M. Drainville : Mme la Présidente,
ce qu'on a vu à Bedford, là, on a vu, par exemple, des enseignants qui
n'enseignaient pas les sciences ou l'éducation sexuelle. On s'entend-tu, Mme la
Présidente, que les sciences, ça fait partie du programme scolaire? On
s'entend-tu que les sciences, ça fait partie du régime pédagogique, ça fait
partie du programme de formation de l'école québécoise? Alors, ce dont on veut
s'assurer, Mme la Présidente, c'est que le contenu qui doit être enseigné dans
les écoles québécoises le soit, que ce soit les sciences, que ce soit
l'éducation sexuelle, et que le matériel qui supporte cet enseignement soit
également respecté.
Donc, je dirais que c'est une disposition
qui couvre l'ensemble des activités pédagogiques et qui prescrit, oui, un
certain nombre de principes qui, dans le fond, peuvent être ramenés à une
essence. Et l'essence, c'est : Il y a un contenu qui doit être enseigné
dans l'école québécoise et on ne peut pas, pour des raisons religieuses, par
exemple, manquer à notre devoir d'enseigner ce contenu. Alors, on parle de
modalités d'intervention pédagogiques, on parle...
M. Drainville : ...de
l'évaluation, on parle du matériel, on parle du projet éducatif, on parle du
régime pédagogique, on parle des activités, des contenus, et tout autre encadrement,
dont j'ai donné des exemples. Et tout ça doit être utilisé, enseigné en
cohérence avec les valeurs démocratiques et québécoises, dont l'égalité entre
les hommes et les femmes et la laïcité de l'État.
• (20 h 30) •
La Présidente (Mme Dionne) : ...M.
le député.
M. Morin : Oui. Mais, Mme la
Présidente, enseigner les sciences, ce n'est pas déjà obligatoire?
M. Drainville : ...
M. Morin : Enseigner les
sciences, ce n'est pas déjà obligatoire?
M. Drainville : Bien oui.
C'est sûr.
M. Morin : Oui? Alors, si
c'est déjà obligatoire, qu'est-ce que... Et ma question, elle est précise. Je
comprends ce que vous dites, M. le ministre...
M. Drainville : ...ce que
l'on dit, c'est que c'est... ça devient... comment dirais-je?... on ne peut pas
ne pas enseigner ces matières-là pour des considérations religieuses. On ne
peut pas, par exemple, décider de ne pas enseigner le bout du cours d'éducation
sexuelle qui traite de l'homophobie parce que, par ma religion, je condamne
l'homosexualité. Ça ne se peut pas, ça. Alors, ce qu'on dit, c'est qu'il faut
que les valeurs québécoises imprègnent l'activité d'enseignement, l'activité
éducative au sein de l'école québécoise et il faut, notamment, que cet
enseignement, au sens très large, respecte l'égalité entre les femmes et les
hommes et la laïcité de l'État.
On donne un levier... dans le fond, Mme la
Présidente, on donne un levier aux enseignants pour, d'abord, être capables de
dire à un élève... «parle-moi pas d'homosexualité, ce n'est pas vrai, ça
n'existe pas, ce sont des mauvaises personnes, bouh!»... on donne aux
enseignants le levier légal pour dire à ces élèves-là : Aïe! Wo! moi, j'ai
un cours, là, à donner, là, j'ai une matière à te transmettre, puis je vais la
transmettre, c'est prévu dans le cours, ça, ça fait que tu ne peux pas, parce
que tu n'es pas d'accord avec le contenu, là, m'empêcher de faire mon travail
d'enseignant.
Et aussi, puis ça, c'est important, Mme la
Présidente, on donne un levier aux enseignants pas juste pour qu'ils puissent
affirmer l'autorité... leur autorité d'enseignant et leur devoir de transmettre
le contenu prévu au programme pédagogique. On leur donne aussi un levier pour
ne pas qu'ils se censurent. Parce qu'on l'a vu, ça, Mme la Présidente, on l'a
vu, des enseignants qui, craignant la réaction de la classe, décident de ne pas
enseigner une matière. Ce n'est pas acceptable.
À Bedford, par exemple, là, on constate
que l'école... enfin, que certains enseignants ont choisi de consacrer plus de
temps à l'enseignement du français et des mathématiques, ce qui a pour
conséquence de couper le temps d'enseignement dans d'autres matières, comme,
par exemple, la... l'éducation religieuse, ou encore, la science, l'éducation
religieuse au premier cycle, la science et la technologie au deuxième et au
troisième cycle. Alors, vous comprenez, Mme la Présidente, ce n'est pas
toujours, comment dire, exposé, là. «Je n'enseignerai pas la science puis je
m'en vante dans les corridors de l'école, là, ce n'est pas ça, là.» Alors, ils
prennent parfois des chemins détournés. C'est ce qui s'est passé à Bedford. Il
y a certains enseignants qui ont pris des chemins détournés pour ne pas
enseigner la matière qui était prévue au programme.
«Plusieurs témoins rencontrés par les
enquêteurs...
20 h 30 (version non révisée)
M. Drainville : ...ont affirmé
que certaines matières n'étaient pas enseignées, très peu enseignées ou
enseignées rapidement, en fin d'étape, à l'école. Selon les informations
transmises aux enquêteurs, il y aurait eu des lacunes dans l'enseignement de la
communication orale, des sciences et de la technologie, de l'éthique et de la
culture religieuse et de l'éducation à la sexualité. L'hésitation des témoins
entendus, à savoir si l'éthique et la culture religieuse sont enseignées à l'école
Bedford, est partagée par les enquêteurs. Les témoignages recueillis laissent
croire que la dimension éthique est peut-être abordée, mais pas la dimension
religieuse. Il n'y a aucune vérification effectuée par la direction de l'école,
puisque l'accès aux classes est limité. Les témoins entendus», etc., «se basent
sur des observations et des discussions auprès des élèves».
Alors, il y a ça aussi, Mme la Présidente,
dans notre projet de loi, on veut s'assurer de donner à nos enseignants et à
notre personnel scolaire le maximum d'outils pour être capables de faire leur
travail correctement, et quitte, Mme la Présidente, à dire, à un moment donné :
Aïe! tu n'es peut-être pas d'accord, là, mais la loi, la loi, que je dois
respecter, me dit que je dois te transmettre ce contenu. Alors, ECR, évidemment,
Mme la Présidente, on l'a remplacé par CCQ, mais dans le cas d'ECR, il y avait
toute cette dimension religieuse. Visiblement, il y avait des profs qui n'aimaient
pas enseigner certaines dimensions religieuses, là. Puis il y avait, évidemment,
l'éducation sexuelle, qui était enseignée en parallèle, qu'on a intégrée à CCQ.
Alors, on peut penser qu'un enseignant qui ne voulait pas enseigner l'éducation
sexuelle quand elle était en parallèle avec les autres cours il ne sera pas plus
enthousiaste d'enseigner l'éducation sexuelle qui fait partie maintenant du
cours CCQ. Puis la science, bien, qu'est-ce que vous voulez, la science, c'est
la science, elle n'a pas changé, elle.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. M. le député.
M. Morin : ...merci. Mais,
justement, le cours d'éducation sexuelle, les sciences, les mathématiques, ce n'est
pas déjà des matières obligatoires? Ce n'est pas déjà dans la loi?
M. Drainville : Ça fait
partie du régime pédagogique, mais on n'en a pas fait une obligation positive à
l'enseignant. Là, on en fait une obligation positive à l'enseignant.
M. Morin : ...est-ce qu'il y
avait vec des exceptions ou des exemptions pour les enseignants?
M. Drainville : Mais non.
M. Morin : Non. Donc, ils
doivent enseigner le régime pédagogique du ministère.
M. Drainville : En principe,
oui.
M. Morin : Oui, mais là, il y
a deux choses. Parce que, tout à l'heure, quand vous avez cité le cas de l'école
Bedford, vous avez fait référence à des manquements de la gestion. Ça, c'est
une chose. Peut-être que... là, je ne sais pas, moi, je n'ai pas fait l'enquête
à Bedford, mais ce qu'on... ce que j'ai compris, c'est que, dans bien des cas,
c'est la gestion qui n'avait pas été capable de prendre ses responsabilités. Et
corrigez-moi si je fais erreur, mais ça ne touche pas à la Loi sur l'instruction
publique comme telle. Ma compréhension, c'est que, si la direction avait dit :
Non, non, non, attendez, là, c'est dans la loi, vous l'enseignez, point barre, fini,
on n'aurait pas vécu ce qu'on a vécu là. Et je peux me tromper, M. le ministre,
corrigez-moi si je fais erreur.
Donc, je vous écoute attentivement, mais
il me semble que ce que vous dites, c'est déjà obligatoire dans la loi, c'est
déjà dans le régime pédagogique. Alors là, c'est pour ça que je vous posais la
question. Et, en plus, dans votre article, la façon dont il est rédigé, quand
vous faites une énumération et que vous ajoutez «tout autre cadre» ou «tout
autre encadrement pédagogique applicable», c'est là, à mon avis, que ça devient
flou, parce que le régime pédagogique est déjà prévu dans la loi et qu'il doit
être enseigné, à moins que vous me disiez qu'il y a des exceptions, mais, moi,
je n'en connais pas.
M. Drainville : Mme la
Présidente. Il y a beaucoup de vrai dans ce que le député dit, Mme la
Présidente, il y a beaucoup de vrai...
M. Drainville : ...le
malheur, c'est qu'à Bedford, pour toutes sortes de raisons, il y a des enseignants
qui n'ont pas fait leur travail. Il y en a d'autres, peut-être, qui ont eu peur
de faire leur travail, qui ont craint possiblement des représailles du clan
dominant, pour ne pas le nommer, qui étaient sous pression également du conseil
d'établissement. Parce qu'il ne faut jamais oublier, dans le cas de Bedford, il
y a un rôle très important qui a été joué par les parents. Les parents ont
décidé de se mêler de ce qui était enseigné dans les classes. Alors, c'est une
dynamique toxique, on l'a dit 1000 fois.
• (20 h 40) •
Et, dans le fond, Mme la Présidente, ce
qu'on essaie de faire actuellement, notamment avec cette disposition, c'est de
renforcer la Loi sur l'instruction publique. À certains égards, le député a
raison de dire, là, puis je paraphrase, là, mais je pense qu'il va être
d'accord avec l'interprétation que je fais de ses propos, d'une certaine façon,
on renforce par une loi ce qui est déjà la loi, bien oui, mais, à un moment
donné, Mme la Présidente, il faut envoyer des signaux comme ceux-là. Oui, en
principe, en principe, tous les enseignants doivent enseigner le programme
scolaire. Dans certains cas, malheureusement, ce n'est pas le cas.
Alors là, ce que l'on dit, c'est qu'on
ajoute à la ceinture une paire de bretelles et on dit aux enseignants :
Aïe! Il faut que ton enseignement soit fidèle au programme, il faut que ton
enseignement, que le matériel que tu utilises reflète le contenu que tu dois
transmettre. Il faut que les programmes, les activités, tout ça... il faut que
ça reflète le contenu que tu dois transmettre. Et ne te laisse pas distraire,
ne te laisse pas intimider, ne te laisse pas convaincre que ce n'est pas la
bonne chose à faire. Tu as des obligations et tu as l'appui de la loi. C'est
ça, la... c'est ça, la réalité.
Mme la députée de Hull, qui est à mes
côtés, qui a été enseignante, est-ce que vous souhaitez ajouter quelque chose
là-dessus?
Mme Tremblay : Oui, M. le
ministre. Bien, évidemment, j'ai bien compris ce que vous dites, là, mais la
pression... des fois, dans l'école, mais, des fois, elle vient de l'extérieur
de l'école, puis ça, ça vient renforcer le rôle... le fait que les enseignants
peuvent dire aux parents qui demandent, par exemple, là, de ne pas lire tel
livre en français en secondaire V, parce que, dans le livre, en secondaire V,
il y a des personnes qui s'embrassent ou qui ont des relations, donc... Puis
ça, là, ce n'est pas des exemples de voilà 10 ans, là, c'est des exemples qui
arrivent fréquemment dans l'école, puis des exemples comme ça, on en vit
fréquemment, là, de plus en plus, là.
Puis ça, ce qui est écrit ici, ça permet
de dire à l'enseignant, bien... puis c'est dit ailleurs, c'est vrai, là, on l'a
nommé, mais qu'il a cette... il a ce droit-là de choisir, puis dans le respect
du régime pédagogique puis de toutes les modalités qui sont nommées ici. Je
pense que c'est nécessaire de le faire pour, justement, bien... pour justement
faire en sorte qu'il n'y en ait plus, d'enjeu. Puis on le sait, qu'on est
contraint de ça, là, on le sait très bien, c'est prévu, puis on se doit de
suivre le programme, mais la pression, des fois... à l'école Bedford, elle est
venue de l'école, plus de l'interne puis de l'organisation à l'intérieur de
l'école, conseil d'établissement, mais parfois elle vient de l'extérieur aussi.
Puis d'être capable de dire à l'enseignant, bien : Vous avez toute la
liberté dans votre classe, mais dans le respect du régime pédagogique. Bien,
tout ça, je pense que ça vient leur donner cet outil-là de plus, quand ils font
des choix puis des interventions, puis dire aux parents : Moi, je suis lié
aussi par le régime pédagogique et tout ce qui est nommé ici, là, les
programmes d'études, évidemment, tout ce qui est prescrit dans la loi.
M. Drainville : Je vais le
dire autrement, Mme la Présidente, quitte à ce que ça fasse réagir un petit
peu : Au Québec, les enseignants ont une autonomie professionnelle dont
ils se réclament avec raison. D'une certaine façon, ici, on dit...
M. Drainville : …l'autonomie
professionnelle, elle est balisée par les valeurs québécoises, les valeurs
démocratiques, les grands principes comme l'égalité entre les hommes et les
femmes et la laïcité de l'État. On dit : Tu peux avoir des convictions
religieuses. Mais si tu enseignes les sciences, là, tes convictions religieuses
ne doivent pas s'ingérer dans ton enseignement. Il doit y avoir… la laïcité de
l'État, on l'a vu au début, ça comprend notamment la séparation entre les
religions et l'État. On dit : Toi, tu as un devoir comme enseignant, dans une
institution d'État qu'est l'école, de transmettre des savoirs et tes
convictions religieuses ne doivent pas venir contaminer, contaminer ton
enseignement.
Puis C'est ça qui s'est passé. C'est ce
qui s'est passé. Puis Bedford a été rapporté. Mais je peux vous dire une chose,
Mme la Présidente, ce n'est pas le seul cas où c'est arrivé. Ce n'est pas le
seul cas où c'est arrivé. Puis on peut le comprendre, Mme la Présidente, quand
c'est rendu que tu as des… ça, c'est… ça a été publicisé, ça, c'est… je pense,
c'est l'école Lavoie ou Saint-Maxime. L'enseignant, pendant la pause, fait
prier les élèves dans la salle de classe, ou en tout cas prie dans la salle de
classe avec des élèves. On peut penser que la religion est très importante, que
c'est une force vive de son… De son engagement, de son… de sa vie comme être
humain. Et puis, ça se peut qu'une personne comme celle-là qui est prête à
prier dans une salle de classe en présence des élèves ait à certains moments de
son enseignement la tentation de laisser parler sa conviction religieuse à
travers son enseignement. C'est une hypothèse qui me semble raisonnable. Bien,
on n'accepte pas ça. Ce n'est pas compliqué, on n'accepte pas ça.
De la même manière que si ta religion
t'amène à penser que la femme n'a pas les mêmes droits que l'homme puis que tu
dois enseigner l'égalité homme-femme dans le cadre de ton cours, bien, on peut
penser malheureusement que dans certains cas, il pourrait y avoir cette
tentation de laisser ta conviction religieuse influencer ton enseignement sur
l'égalité entre les hommes et les femmes, ou encore par exemple, sur
l'homosexualité. Bien, ça, ça dit : Attends un peu, là, non. Non. Valeurs
démocratiques, valeurs québécoises, égalité homme-femme, laïcité de l'État, ça
doit guider, ça doit inspirer ton enseignement, ton évaluation, le matériel que
tu utilises, tes interventions pédagogiques et tout le reste.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le ministre. Oui, M. le député.
M. Morin : Oui. Merci. Merci,
Mme la Présidente. Écoutez, j'ai écouté attentivement M. le ministre, et quand
je relis 19, j'ai l'impression qu'effectivement à 19 il y a déjà une ceinture
et des bretelles. J'ai écouté M. le ministre attentivement. Moi, j'ai
l'impression que le problème à Bedford, c'est que personne n'a mis ses
culottes. Ça fait que c'est un autre enjeu complètement, là. On est… on est
ailleurs.
Maintenant, je comprends ce que vous avez
dit, M. le ministre, sur l'ensemble de l'article cinq, mais moi, ma question
était… et je vous suis, M. le ministre, quand vous dites à cinq qu'il y a des
programmes d'activités, programmes d'études établis qui sont en cohérence avec
les valeurs démocratiques. Ma question était beaucoup plus « et à tout
autre encadrement pédagogique applicable ».
M. Drainville : Bien, je vous
ai donné des exemples.
M. Morin : Et là… et vous
avez donné, vous avez donné certaines précisions, mais ce que je voulais faire
remarquer, c'est qu'il y a plusieurs groupes qui ont posé ces questions, M. le
ministre, et ça a permis une clarification.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le député. Oui, M. le député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, Mme la
Présidente…
M. Zanetti : ...l'intention
dans l'article, on est d'accord avec ça. Cela dit, la formulation, puis je suis
d'accord avec le collègue, là, député de l'Acadie, c'est qu'on ouvre la porte à
des atteintes trop grandes à l'autonomie professionnelle des enseignantes, des
enseignants du Québec. Clairement, on pourrait... On va vous déposer un
amendement, là, dans lequel on a la ceinture, les bretelles, deux fois, là,
qu'il n'y a aucune possibilité, avec cette formulation-là, qu'il y ait des
dérives, des choses qui ne sont pas enseignées, des choses qui... des idéaux
qui sont... qui n'ont rien à voir avec l'école, qui viennent prendre la place
de l'enseignement, mais qui, en même temps, s'assurent qu'on qu'on respecte
l'autonomie professionnelle. Parce que, moi, la formulation, je comprends qu'il
a donné des détails, le ministre, sur tout autre programme dans tout autre
encadrement pédagogique applicable, mais c'est parce que ça, ça ouvre la porte,
pas juste à des choses qui existent aujourd'hui et que le ministre peut nommer,
mais ça ouvre la porte à des choses qui n'existent pas encore, dont on ignore
l'existence, puis qui là auraient force de loi. Et peut-être que ce serait
juste, mais peut-être que ça ne le serait pas. C'est une chance trop grande à
prendre.
• (20 h 50) •
Je pense que le milieu de l'éducation, les
enseignantes et enseignants, ils ont besoin de sentir qu'on les écoute, qu'on
respecte leur autonomie dans un monde où on leur donne... où on leur en demande
toujours plus à cause de la pénurie de main-d'oeuvre. Là, il faut qu'on soit
capable de... qu'ils se sentent respectés, écoutés là-dedans. Alors, je vais
déposer un amendement, Mme la Présidente, à ce sujet.
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci, M. le député. Oui, M. le ministre.
M. Drainville : Mme la
Présidente, juste avant que... parce que je soupçonne fortement que nous allons
suspendre, le temps que le député de Jean-Lesage nous prépare son amendement et
nous le dépose. Comme on va terminer les travaux dans 10 minutes, moins de
10 minutes, je voulais juste — je pense, que les membres de la
commission vont vont reconnaître que c'était une bonne idée — je
voulais juste saluer le départ de M. Alexandre Guyon Martin, qui est juriste
ici, qui nous a accompagnés pendant le projet de loi n° 23, le projet de
loi n° 47, qui a fortement contribué à la rédaction du présent projet de
loi. Qu'on soit pour ou qu'on soit contre, c'est un travail très important, de
nombreuses heures, beaucoup de rigueur, une attention aux détails, un
engagement exceptionnel. M. Guyon Martin nous quitte vers d'autres cieux professionnels.
On lui souhaite un grand succès, mais je
veux, Mme la Présidente, le remercier pour son service public, pour le travail
exceptionnel qu'il a fait au sein du ministère et je lui souhaite beaucoup de
succès pour la suite des choses. Je pense que c'est important qu'on dise merci,
une fois de temps en temps, à nos serviteurs publics, à ceux et celles qui nous
permettent...
Des voix : ...
La Présidente (Mme Dionne) :
Merci...
M. Drainville : Je remercie le
député de Jean-Lesage de m'avoir permis de procéder à ces remerciements. Merci.
La Présidente (Mme Dionne) :
Vous voulez ajouter, M. le député.
M. Zanetti : Bien...
La Présidente (Mme Dionne) :
Oui...
M. Morin : Merci, M. le
député de Jean-Lesage. Je voulais simplement vous dire, Mme la Présidente, je
veux prendre aussi quelques instants pour remercier Me Martin, d'abord, qui
nous a aidés tout à l'heure, quand on a parlé de différents amendements. Mais
je sais comment les fonctionnaires de l'État travaillent fort, ils travaillent
avec un grand professionnalisme. Ils nous permettent d'avancer, nous, dans le
travail des commissions, ainsi que le gouvernement. Je crois comprendre que
vous vous dirigez vers l'Office des professions. Alors, vous aurez plusieurs
défis à relever. Et j'ai le privilège d'être le porte-parole de l'opposition
officielle pour les lois professionnelles. Donc, nous aurons, sans aucun doute,
la chance de nous retrouver.
Et puisque le temps avance et que le
climat, n'est-ce pas, est un peu plus léger, je crois savoir, puisqu'on
souligne des événements importants, je crois savoir que M. le ministre, demain,
va célébrer son anniversaire de naissance. Alors, joyeux...
Une voix : ...
M. Morin : Bien là, je ne me
rendrai pas jusque-là, mais je vous souhaite un joyeux anniversaire, M. le
ministre. Voilà.
M. Drainville : C'est très
gentil, M. le député de l'Acadie, c'est effectivement ce jour, qui est de moins
en moins célébré au fur et à mesure où on avance dans la vie. Mais qu'est-ce
que tu veux, c'est comme ça. Il y a des avantages à vieillir, vous savez, Mme
la Présidente, l'expérience acquise nous rend plus sages, apparemment. Alors...
Une voix : ...
M. Drainville : Oui, demain,
on chante, demain, on chante.
La Présidente (Mme Dionne) :
Nous chanterons demain. Parfait. Alors, sur ces belles paroles, bien, ce fut un
plaisir, Alexandre. Et bonne fête en avance, M. le ministre.
Et je cède maintenant la parole au député
de Jean-Lesage, qui nous a déposé son amendement. Alors, oui, c'est fait.
Alors, je vous invite à en faire la lecture.
M. Zanetti : Alors, merci.
Alors, l'article 5 du projet de loi est modifié par, un, l'ajout, après
«être conforme», les mots «aux dispositions...
M. Zanetti : ...la présente
loi et la suppression des mots «au projet éducatif de l'école, au régime
pédagogique établi par le gouvernement, au programme d'activités et d'études
établi par le ministre. Aux activités et contenus prescrits dans les domaines
généraux de formation et à tout encadrement pédagogique applicables et
s'inscrit en cohérence avec les valeurs démocratiques et la société
québécoise... et valeurs québécoises, dans l'égalité entre les femmes et les
hommes et la laïcité de l'État».
La logique de ça... O.K.... L'article tel
qu'amendé se lirait comme suit :
L'article 19 de cette loi est modifié
par l'ajout, à la fin, de l'alinéa suivant :
«Les modalités d'intervention pédagogiques
et les instruments d'évaluation des élèves, y compris le matériel utilisé aux
fins d'intervention et d'évaluation, doivent être conformes aux dispositions de
la présente loi.»
Alors, tout ce qui concerne les valeurs
québécoises, l'égalité, la laïcité de l'État, tout ça, les programmes
pédagogiques, ça fait partie de la LIP, déjà, alors, en utilisant cette
formule-là, succincte, on vient, en fait, mettre toutes les bretelles et les
ceintures possibles pour éviter tous les dérapages imaginables, mais, en même
temps, on évite l'espèce de liste qui contient, entre autres, là, tout
encadrement pédagogique applicable, qui, ça, ouvre la porte à des encadrements
pédagogiques qui, potentiellement, n'existent pas encore, et qui pourraient
venir limiter de façon abusive, et n'ont même pas légiféré, et voulu, et
concerté l'autonomie professionnelle des enseignantes et des enseignants du
Québec.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le député. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'amendement du député de
Jean-Lesage?
M. Drainville : Mme la
Présidente, par la proposition que nous faisons, nous créons des obligations
spécifiques. Donc, on ne se contente pas d'une affirmation à caractère général,
mais on donne des exemples très concrets. Encore une fois, je salue la bonne
intention du député de Jean-Lesage, mais je pense que la formulation originelle
est plus complète, surtout qu'on donne des exemples concrets, mais on conclut
également avec les valeurs, l'égalité hommes-femmes, la laïcité de l'État. Ça,
je pense que c'est le cœur de l'affaire, là. Donc, nous allons voter contre
l'amendement du député de Jean-Lesage, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Dionne) : Merci,
M. le ministre. D'autres interventions sur l'amendement du député de
Jean-Lesage?
M. Zanetti : Est-ce que le
ministre est quand même prêt à accepter un amendement dans lequel je ferais
uniquement enlever «et à tout autre encadrement pédagogique applicable»? Juste
cette phrase-là qui est... c'est là, la porte ouverte à des choses qui
n'existent pas encore et qui pourraient éventuellement atteindre beaucoup trop
l'autonomie professionnelle, là.
M. Drainville : Encore une
fois, je salue sa bonne intention, mais je pense que «tout autre encadrement
pédagogique applicable», ça nous donne quand même une marge de manœuvre pour la
suite des choses. Ça nous crée un espace qui donne de la souplesse à la
disposition pour la suite des choses, donc je préfèrerais qu'on conserve ces
mots.
La Présidente (Mme Dionne) : D'autres
interventions sur l'amendement?
M. Zanetti : Rien à rajouter
de mon côté.
La Présidente (Mme Dionne) : Est-ce
que l'amendement est adopté?
Des voix : Rejeté.
La Présidente (Mme Dionne) : Alors,
rejeté. D'autres interventions sur l'article 5? Est-ce que
l'article 5 est adopté?
Des voix : Adopté.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
M. Drainville : Adopté... Je
n'ai pas entendu «sur division», donc tout le monde est favorable?
M. Zanetti : Article 5?
M. Drainville : Oui.
M. Zanetti : Oui, oui.
M. Drainville : Ah oui? Ah!
c'est bien.
La Présidente (Mme Dionne) : Adopté.
Il nous reste deux minutes. Je pense qu'on pourrait s'arrêter ici pour ce soir.
Consentement?
M. Drainville : Quand on
termine sur l'unanimité, Mme la Présidente, il faut la saisir.
La Présidente (Mme Dionne) : C'est
ça, je ne voulais pas gâcher ce beau moment. Alors, compte tenu de l'heure, la
commission ajourne ses travaux sine die. Donc, bonne fin de soirée, tout le
monde, et merci pour votre contribution.
(Fin de la séance à 20 h 58)