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Étude des projets de loi nos 24 et 25
(Quinze heures vingt-sept minutes)
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente de l'éducation est réunie pour
entendre les mémoires concernant les projets de loi nos 24 et 25, le
projet de loi no 24 étant la Loi sur le Conseil des collèges et
le projet de loi no 25, Loi modifiant la Loi des collèges d'enseignement
général et professionnel.
Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau), M. Goldbloom
(D'Arcy McGee), remplacé par M. Rivest (Jean-Talon); M. Jolivet
(Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), Mme La-voie-Roux (L'Acadie), M. Le
Moignan (Gaspé), M. Marquis (Matapédia), M. Morin (Sauvé),
M. Paquet-te (Rosemont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Chevrette
(Joliette-Montcalm), remplacé par M. Gosselin (Sherbrooke); M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Desbiens (Dubuc), remplacé par M.
Fallu (Terrebonne); M. Goulet (Bellechasse), M. Picotte (Maskinongé), M.
Samson (Rouyn-Noranda), M. Springate (Westmount).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires du Conseil des
universités, de la Fédération des associations de parents
des cégeps, de l'exécutif des présidents des conseils
d'administration des collèges, de la Fédération des
cégeps, de l'Association des collèges du Québec et de
l'Association des directeurs généraux des cégeps du
Québec.
M. le ministre.
Remarques préliminaires
M. Morin (Sauvé): M. le Président, ces deux projets
de loi, on le sait, s'inscrivent dans la foulée de
l'énoncé de politique du gouvernement à l'endroit des
cégeps. Bien sûr, plusieurs aspects de cette nouvelle politique
sont applicables également aux institutions privées, de sorte
qu'il était tout à fait légitime que se présente
devant cette commission, à côté des organismes qui
représentent davantage le secteur public, l'Association des
collèges du Québec. (15 h 30)
Les projets de loi qui nous sont soumis et sur lesquels nous entendrons
cet après-midi des commentaires, portent sur deux objets principaux:
d'abord, la création d'un Conseil des collèges avec, avant tout,
des fonctions consultatives auprès du ministre de l'Éducation,
mais également quelques fonctions accessoires liées, par exemple,
à l'évaluation. Le second projet porte sur le fonctionnement,
l'administration des collèges d'enseignement général et
professionnel et propose un certain nombre de modifications à la
législation existante.
Nous avons voulu, avant que ne soient adoptés en principe ces
projets de loi devant l'Assemblée nationale, c'est-à-dire avant
ce qu'on appelle, en droit parlementaire, la seconde lecture, entendre les
principaux représentants du milieu des collèges, mais
également le Conseil des universités ainsi qu'un certain nombre
de représentants des associations d'enseignants et d'étudiants,
de même que des représentants du milieu du travail comme, par
exemple, le Centre des dirigeants d'entreprises, des milieux de la
coopération.
La plupart de ceux qui ont été invités à se
présenter devant cette commission ont accepté de venir nous
éclairer sur leur attitude à l'endroit de ces projets de loi.
Cela a de l'importance pour le gouvernement: nous voulons être pleinement
éclairés; cela a certainement de l'importance également du
point de vue de l'Opposition qui a à nous faire part de sa
réaction à ces projets de loi.
Sans plus tarder, M. le Président, et réservant pour la
seconde lecture, c'est-à-dire pour l'adoption de principe de ces projets
de loi, les explications générales qui entourent ces projets de
loi, je vous demanderai d'appeler immédiatement le premier intervenant
pour que nous puissions entendre ses observations et procéder ensuite
à une période de questions, si nous en ressentons le besoin, tant
du côté gouvernemental que du côté de
l'Opposition.
Je m'empresse de rappeler que ces projets de loi ne sont pas neufs, ils
sont la fidèle transcription des politiques annoncées depuis huit
mois, dans deux jours, à l'occasion de la publication de
l'énoncé de politique, quelquefois appelé livre blanc, sur
l'avenir de nos cégeps. M. le Président, je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je pense que si
on devait se réjouir qu'enfin le ministre de l'Éducation, pour la
première fois depuis que son gouvernement est au pouvoir, dépose
un projet de loi substantiel en éducation, également, on devrait
se réjouir que, du côté de l'enseignement collégial,
on présente une législation qui, normalement, devrait mettre
à jour et rajeunir une législation qui existe depuis 1968. Par
contre, il est vraiment déplorable que le ministre de l'Éducation
ait décidé de profiter de la période de travaux
extrêmement intensifs qui débute aujourd'hui, à
l'Assemblée nationale, pour présenter des projets de loi
complexes et qui auront des répercussions considérables non
seulement sur le réseau de l'enseignement collégial, mais
également, sur l'ensemble des réseaux et plus
particulièrement, possiblement, sur le Conseil supérieur de
l'éducation.
Je trouve, et je dois le dire, M. le Président, tout à
fait inadmissible que devant ces projets de loi, alors que le ministre nous
avait promis je lui posais des questions à cet égard
à l'étude des crédits pour 1977/78 et je suis probablement
revenue à la charge chaque année par la suite, sauf cette
année, évidemment d'abord la production du livre blanc, ce
qui est arrivé avec un an de retard en octobre 1978, mais il m'avait
assurée
à, ce moment-là que si cela devait donner suite à
une loi quelconque, cette loi serait précédée d'une large
consultation avant l'adoption du projet de loi. Or, nous nous trouvons
aujourd'hui, devant une commission parlementaire qui a limité le nombre
d'intervenants qui pourront se faire entendre. Non seulement on leur demande de
se faire entendre à une période de l'année où nous
sommes bousculés on commence les sessions de nuit, sans doute
qu'on pourra faire les débats de deuxième lecture à 23
heures ou à minuit ou même plus tardivement mais
également, on convoque cette commission parlementaire, où le
nombre d'invités est limité, à une période
où les collèges sont fermés, pour la totalité ou la
quasi totalité d'entre eux, au cas où il y en aurait encore un
ouvert, à faire de rattrapage.
Les élèves ne sont plus au collège et les
activités des enseignants dans le milieu collégial, s'ils s'y
trouvent encore, doivent être limitées au strict minimum. Si bien
qu'on écarte du débat à la fois les étudiants et
les enseignants.
Le ministre rétorquera sans doute que l'Association des
étudiants, l'ANEQ se fera entendre, qu'il y a des représentants
des associations syndicales des enseignants qui se feront entendre. Je pense
qu'en dehors de ceci, il aurait été extrêmement important
que l'ensemble des enseignants, même certains individus ou certains
groupes d'individus qui avaient des choses à dire sur l'orientation
future des collèges, puissent se faire entendre.
Je ne suis pas du tout certaine si certains groupes de parents, qui ne
se retrouveront pas nécessairement à l'intérieur de
l'Association des parents des collèges, n'auraient pas eu aussi des
choses intéressantes à dire, parce que, même si dans les
débats publics l'accent est mis davantage sur le scolaire,
l'élémentaire et le primaire, il n'en demeure pas moins que la
population a aussi un intérêt très grand pour
l'enseignement collégial. Je ne peux pas déplorer cette attitude
du ministre.
Je crains fort que dans la foulée de ses livres, tout ça
ne foule un peu au pied l'enseignement collégial en précipitant
les choses dans une période de travaux aussi intense que celle des fins
de session. Je pourrais imputer des motifs au ministre pour agir de la sorte,
probablement que ce ne sont pas des projets de loi faciles, c'est
peut-être mieux de les étudier dans des circonstances plus
précipitées où il y a moins de risques d'avoir des
réactions du public. Il y a aussi j'admets que ce sont des
imputations de motifs, M. le Président qu'il est peut-être
bon que ceci passe en douce avant les négociations de l'automne.
Enfin, quelles que soient les raisons, je pense qu'il demeure
fondamental que ces projets de loi sont extrêmement importants pour tout
le secteur, le réseau collégial et on ne crée pas les
meilleures conditions possibles pour qu'on puisse adopter, s'ils doivent
être adoptés, des projets de loi qui assurent vraiment un
progrès à tout le réseau collégial.
Pour notre part, M. le Président, à titre de porte-parole
de l'Opposition officielle, je dois vous dire que l'attitude que j'ai toujours
eue à l'égard des problèmes d'éducation, je la
maintiendrai en ce sens que nous serons prêts à supporter tout ce
qui nous apparaîtra comme devant assurer un progrès sensible au
réseau collégial, mais que nous nous opposerons également
avec beaucoup de vigueur à tout ce qui nous apparaîtra ne pas
être dans la voie du progrès pour l'enseignement
collégial.
J'aurais évidemment des réserves à faire sur le
projet de loi, ne serait-ce que de parler de l'esprit centralisateur qu'on y
retrouve, mais, de toute façon, je pense qu'on est ici pour
écouter les gens et non pas pour donner notre propre point de vue sur
les projets de loi qui sont devant nous. Ces remarques étant faites, je
suis prête à entendre les participants qui ont accepté de
venir nous faire connaître leur point de vue sur les projets de loi 24 et
25.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Ce sera très bref, M. le Président.
Nous avons reçu une feuille de route, un peu comme tout le monde
aujourd'hui. Quand on regarde le menu de la semaine, avec les projets de loi
24, 25 et 30, c'est très indigeste. Ce sont trois gros projets de loi
qui nous sont soumis à la dernière minute. Nous avons les
mémoires, nous en avions un certain nombre en fin de semaine. J'en ai
parcouru quelques-uns. Celui du Conseil supérieur de l'éducation
vient de nous être remis à l'instant. Le ministre est bien
forcé d'admettre que, pour de pauvres petits législateurs comme
nous, cela fait beaucoup de pain sur la planche. Même si nous avions
déjà lu les projets de loi que nous avions en main, 24 et 25.
Nous n'avions pas encore eu les réactions du monde
intéressé. Nous allons les connaître. Et comme Mme le
député de L'Acadie vient de le dire, on n'a pas à faire
trop de remarques. Ce qui est important, ce sont les points de vue
là-bas.
Je sais très bien que, d'ici le 22 juin, nous serons souvent des
oiseaux de nuit. Si on prend l'expérience de décembre dernier,
à deux ou trois heures du matin, la cocologie fonctionne quelquefois au
ralenti.
M. Morin (Sauvé): Sûrement pas, M. le
député.
Mme Lavoie-Roux: Vous allez inquiéter nos
invités...
M. Le Moignan: Le ministre sait très bien que nous avons
le poids du jour et, dans certains cas, le poids des ans qui s'y ajoute. Cela
demande du courage. Le courage, nous en avons en réserve, on ne craint
pas de ce côté-là.
Avant de commencer, j'aurais peut-être un petit point. Nous avons
une liste d'invités qui vont nous déposer des mémoires. Il
y a probablement d'autres groupes dans la province qui ont manifesté le
désir de se faire entendre, parce que j'ai reçu
un mémoire du cégep Édouard-Montpetit. On m'envoie
une lettre d'ailleurs qui fut envoyée au ministère de
l'Éducation. On lui laissait certains espoirs et, finalement, il n'a pas
été invité à se présenter. C'est un cas que
j'ai. C'est la raison pour laquelle je pose la question, puisque j'ai
reçu le mémoire personnellement. Il doit être
également déposé au secrétariat des
commissions.
Peut-être un autre petit point, en terminant, au sujet du projet
de loi no 30. Est-ce que le ministre, dans son intention, avait projeté
de convoquer des groupes qui pourraient faire part également de leurs
observations concernant ce projet de loi no 30 que nous allons aborder
dès cette semaine? Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Y a-t-il d'autres
députés qui veulent s'exprimer?
M. de Bellefeuille: M. le Président, j'ai une demande de
directive, s'il vous plaît. Les députés de L'Acadie et de
Gaspé ont signalé que nous entrons dans une cadence nouvelle de
nos travaux parlementaires. Vu que nous sortons du salon bleu qui est
réfrigéré et que cette pièce-ci est très
chaude, je me demande si les membres masculins de la commission de même
que nos invités masculins auraient la permission de faire tomber la
veste, à l'instar de nos collègues féminines qui ne
portent pas de veste.
M. Le Moignan: Madame ne proteste pas. Nous comptons sur votre
diligence, madame.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes assez vieux pour savoir quoi
faire.
Le Président (M. Marcoux): Je vais reprendre l'esprit des
directives déjà émises par le président de
l'Assemblée nationale avant que la télévision
débute à l'Assemblée nationale. Tout en formulant le
souhait qu'il y ait un certain décorum, ces directives étaient de
laisser tout de même une liberté à chaque membre d'agir
à sa convenance, tout en respectant ses collègues féminins
ou masculins.
M. le député, je ne tranche pas, je vous laisse le soin de
trancher selon votre bon jugement. M. le ministre. (15 h 45)
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je souhaite que
ces audiences et les débats qui suivront se situent à un
très haut niveau. J'entends par là que nous sommes ici pour
traiter de questions qui se prêtent mal à des interventions
partisanes. Dans cet esprit, je ne voudrais pas manquer de relever une ou deux
affirmations pour que les choses soient bien claires. On nous reproche, d'une
part, c'est Mme le député de L'Acadie qui le faisait, d'avoir
pris un an de retard dans la publication de l'énoncé de
politique, parce que nous avions voulu être sûrs d'élargir
notre consultation le plus possible. Maintenant, d'autre part, on vient nous
reprocher d'aller de l'avant, une fois cette politique connue depuis huit
mois.
Je regrette que le député de L'Acadie, tout en faisant
mine de ne pas m'avoir imputé des motifs, m'en ait imputé tout de
même. Je l'autorise, toutefois, à m'imputer un motif. Nous voulons
mettre cette législation et l'énoncé de politique en
oeuvre avant qu'une nouvelle année collégiale ne s'ouvre,
autrement nous perdrions rapidement une année. En particulier, il nous
paraît urgent que soit créé le conseil des collèges.
Il nous paraît également urgent que soient clarifiés
certains aspects de l'administration des collèges. Si elle veut
m'imputer ce motif, je n'aurais aucune objection à ce qu'elle le fasse,
mais qu'elle m'en impute d'autres, tout en faisant mine de ne pas le faire, je
l'admets plus difficilement, de la part du député de L'Acadie, en
particulier.
La limite qui a été mise au nombre des intervenants vient
du fait que nous savions que certains d'entre eux peuvent nous éclairer
pleinement sur les débats qui ont cours au sujet de ces projets de loi.
Nous avons offert d'allonger la liste, et depuis trois semaines, j'attends les
suggestions des membres de l'Opposition. Il est maintenant évidemment
trop tard, puisque la liste a été arrêtée ce matin,
de façon définitive. Nous ne pouvons pas nous permettre
d'allonger au dernier moment une liste. J'ai attendu. J'avais averti mes
collègues de l'Opposition qu'il leur était loisible de nous faire
des suggestions pour allonger la liste.
Pour ce qui est des cégeps qui ne sont pas ouverts en ce moment,
précisément, c'est le meilleur moment, alors que les
administrateurs sont moins aux prises avec les affres de l'administration et
les difficultés de fin d'année, alors qu'ils sont un peu plus
libres, alors que les enseignants sont censés être encore dans les
collèges, mais qu'ils sont un peu plus libres puisqu'ils n'ont plus
d'enseignement à donner. C'est le moment idéal pour
procéder à l'audition de ceux que ces projets de loi peuvent
intéresser et, ma foi, M. le Président, je terminerai en disant
que ce mois de juin est aussi indiqué que tous les autres pour
légiférer.
Je vous remercie.
M. Le Moignan: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie m'avait fait signe auparavant. C'est parce que vous voulez avoir une
réponse à votre question, je suppose?
M. Le Moignan: Une réponse à ma question. Mme
Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Concernant le collège
de...
M. Le Moignan: À la suite de la réception d'un
mémoire... Je ne connais personne au collège
Édouard-Montpetit, mais j'ai reçu ce mémoire par la
poste.
M. Morin (Sauvé): Oui. M. le Président, nous allons
prendre connaissance du mémoire. Nous
allons en tenir compte, mais je ne voudrais pas l'ajouter, d'abord,
parce qu'il est trop tard et, en second lieu, parce que nous ne pensons pas
qu'il soit opportun d'entendre un cégep; il faudrait les entendre tous.
Évidemment, il y en aurait pour une semaine ou deux d'audiences. Cela
nous mènerait trop loin.
M. Le Moignan: Non, j'ai posé la question, parce que je
l'ai déjà depuis quelque temps, d'ailleurs.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais la Fédération
des cégeps est ici; la Fédération des parents se trouve
parmi nous. Tous les grands organismes représentatifs sont là et
je pense qu'ils ont consulté chacun leur milieu respectif avant de venir
nous entretenir des projets de loi.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, vous me permettrez de
revenir sur deux remarques du ministre de l'Éducation: la
première, voulant qu'on lui ait dit qu'il avait tardé à
produire le livre blanc et, la deuxième, voulant qu'on lui reproche
maintenant de faire quelque chose. Je pense que ce n'est pas ce que j'ai
dit.
Ce que j'ai dit, c'est qu'on devait se réjouir, d'une part, que
finalement on allait légiférer pour les collèges, mais ce
qu'on devait déplorer, c'est qu'on le fasse dans les conditions
où on travaille d'une façon précipitée et non pas
d'une façon qui puisse être plus réfléchie, qui
permette une meilleure participation. C'est bien ce que j'ai dit.
Quant à la liste, le ministre de l'Éducation semble
être très généreux en disant: Nous avons
demandé à l'Opposition ou aux partis d'Opposition de faire
connaître les noms des gens qui désiraient être entendus. On
était très ouvert.
M. le Président, je vous ferai remarquer que si le ministre avait
simplement suivi la procédure habituelle des commissions parlementaires,
tout le monde voulant se faire entendre aurait eu le loisir de se faire
entendre. Je ne sache pas qu'avec les moyens que nous avons à notre
disposition, comparativement à ceux du ministre, ce dont je ne lui fais
pas reproche, remarquez bien, ce soit le rôle de l'Opposition, qu'elle
soit officielle ou non, d'aller faire les sondages auprès des gens,
à savoir s'ils veulent se faire entendre, particulièrement ce
projet de loi ayant été déposé il y a à
peine quinze jours. Je ne connais pas la date exacte, mais ça ne fait
guère plus de quinze jours que le projet de loi a été
déposé. Alors, même si vous vouliez nous faire porter un
peu de l'odieux du fait que tout le monde n'a pas été
appelé à cette commission, je pense que le gouvernement seul
devrait en prendre la responsabilité, parce que les procédures
ordinaires des commissions parlementaires prévoient un délai de
30 jours. Cela fait huit mois que le livre blanc a été
déposé. Il y a eu amplement de temps pour rencontrer cette
échéance d'une commission parlementaire régulière,
mais c'est bien que le ministre a voulu attendre à la dernière
minute.
Il nous reste 30 jours de travaux accélérés des
commissions parlementaires et de l'Assemblée nationale, si bien que,
là, on procède avec une commission sur invitation. Comme je le
disais tout à l'heure, je pense que tous les organismes qui sont
là sont représentatifs, mais il est quand même dommage, et
je le répète, de l'avoir limitée, alors que d'autres
auraient pu également faire entendre des points de vue
intéressants. Les gens qui sont invités trois jours ou une
semaine avant, je vous assure qu'il faut qu'ils aient des loisirs pour
préparer un mémoire en temps voulu.
Le Président (M. Marcoux): Je demanderais aux membres de
la commission si quelqu'un a une proposition à faire sur le code
d'utilisation...
M. Rivest: Est-ce que l'expression de volonté sur la
manière de procéder que vient de faire le ministre constitue une
réponse? Vous avez répondu au député de L'Acadie,
mais il y a quand même également la Fédération des
enseignants des cégeps, ainsi que la Fédération nationale
des enseignants québécois qui ont adressé au gouvernement
des demandes au même effet que le député de L'Acadie. La
réponse du ministre constitue-t-elle également une réponse
à ces organismes du milieu de l'éducation?
M. Morin (Sauvé): Exactement, nous connaissons l'attitude
de ces organismes depuis le début. Déjà, à propos
de l'énoncé de politique sur les collèges, ils avaient
fait connaître leur attitude négative, non pas
spécifiquement, mais ils avaient fait connaître leur attitude
négative, nous connaissons depuis plusieurs mois cette attitude; il
semble bien qu'elle n'ait pas changé et je ne pense pas qu'elle change,
même si on adoptait cette législation l'an prochain, il s'agit
d'attitudes de principe et ces attitudes sont connues du public. Je pense
qu'elles ont trouvé d'ailleurs, chez certains journalistes, d'excellents
porte-parole.
Nous pouvons maintenant, M. le Président, avec votre permission,
procéder à l'audition des mémoires.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, une dernière
question avant que...
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: ... nous ne procédions. J'aimerais quand
même que nous nous entendions quant à la période de temps
qui sera dévolue à chacun des groupes, pour que, en cours de
route, on ne recommence pas à discuter sur...
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous avez une
suggestion à faire?
Mme Lavoie-Roux: II reviendrait peut-être au ministre de
faire une suggestion. Si elle ne nous sied pas, on pourra toujours
négocier!
M. Morin (Sauvé): Bien, M. le Président, je pense
que nous pouvons nous permettre d'écouter avec attention chacun des
organismes. Nous avons devant nous, en somme, la période qui va de 16
heures à 18 heures si je ne m'abuse et, ce soir, la
période qui va de 20 heures à 22 heures. Est-ce que j'ai raison
de penser...
M. Le Moignan: De 20 heures à 24 heures, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Ou à 24 heures, le cas
échéant.
Le Président (M. Marcoux): De 20 heures à 24
heures.
M. Morin (Sauvé): C'est juste, de 20 heures à 24
heures, de sorte que nous avons tout le temps voulu. Je suis sûr que si
chaque organisme voulait bien prendre une vingtaine de minutes pour son
exposé, nous pourrions ensuite en consacrer autant ou un peu plus, le
cas échéant, à l'échange, au dialogue entre
l'organisme comparant et nous-mêmes, de sorte que nous aurions fini ce
soir, à ce rythme, vers 22 heures ou 22 h 30. Si c'est à
ça que pense Mme le député de L'Acadie, j'en conviens
très volontiers.
M. Le Moignan: Combien de groupes sont convoqués pour
aujourd'hui?
M. Morin (Sauvé): Six, M. le député. M.
Le Moignan: Six pour aujourd'hui.
Mme Lavoie-Roux: Ce qui donnerait une heure par groupe.
Le Président (M. Marcoux): La proposition du ministre est
plutôt de 45 minutes par groupe; 20 minutes pour l'audition du
mémoire et 20 ou 25minutes pour les questions.
M. Morin (Sauvé): D'habitude, c'est 45 minutes, M. le
Président. Dans les autres commissions parlementaires et dans celle-ci
même, nous nous en sommes tenus, dans le passé, à 45
minutes par organisme environ.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que cette proposition
convient aux membres de la commission?
Mme Lavoie-Roux: Je n'aime jamais, M. le Président... Je
comprends qu'il y ait certaines balises...
Le Président (M. Marcoux): Une norme...
Mme Lavoie-Roux: C'est ça. Il peut y avoir un
mémoire qui nécessite moins de temps; par contre, un autre
nécessite davantage; je veux qu'il y ait quand même cette
flexibilité-là, avec une moyenne, disons, de 45 minutes.
Le Président (M. Marcoux): J'essaierai de vous guider dans
cette voie. Avant de procéder à l'appel du premier
mémoire, j'aimerais vous suggérer, puisque j'ai oublié de
le faire, de nommer un rapporteur et je vous suggérerais le
député de Matapédia.
M. Le Moignan: D'accord.
Le Président (M. Marcoux): Alors, le député
de Matapédia sera rapporteur de nos travaux. À moins que le
député de Jean-Talon ne veuille être rapporteur pour la
première fois de sa vie?
M. Rivest: Non, je ne veux pas commencer ma carrière sur
ce pied.
M. Morin (Sauvé): Vous auriez dû sauter sur
l'occasion, ça ne se représentera peut-être pas de
sitôt.
M. de Bellefeuille: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Sur la même question.
M. de Bellefeuille: Sur la question du partage du temps. Il
s'agit, si je comprends bien, d'un arrangement à l'amiable entre les
parties, mais, si certaines circonstances se présentent, le droit de
chaque membre et intervenant de la commission de parler pendant 20 minutes
prime sur l'arrangement à l'amiable. Autrement dit, ce n'est pas parce
que les...
Le Président (M. Marcoux): Je l'interpréterai de la
façon suivante. On s'entend pour consacrer environ 45 minutes par
mémoire et, lorsque des membres de la commission jugeront que tel
mémoire demanderait des explications supplémentaires, il sera
loisible de prolonger la période peut-être jusqu'à 1 heure,
1 heure 15 au maximum.
Je pense qu'il faut procéder avec...
M. Le Moignan: À ce moment-là, il y a 25 minutes
seulement pour la période de questions.
Le Président (M. Marcoux): Oui. J'inviterais le premier
groupe à venir nous présenter son mémoire. Le Conseil des
universités. Mme...
M. Morin (Sauvé): Mme Paule Leduc, présidente.
Le Président (M. Marcoux): Mme Paule Leduc qui...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je m'excuse encore une
fois d'interrompre, mais vous appelez le premier groupe, le Conseil des
universités; je n'ai aucune objection, au contraire, mais est-ce que
ceci veut dire que le Conseil supérieur de l'éducation ne sera
pas présent?
M. Morin (Sauvé): II se peut qu'il soit présent;
effectivement, il l'est par son président, mais je crois qu'il s'agit
d'une tradition de la part du Conseil supérieur de l'éducation
en tout cas, tradition qui dure depuis quelque temps de ne point
se présenter devant une commission parlementai-
re, mais de nous faire connaître son avis par la voie
écrite, ce qui, d'ailleurs, a été fait, comme Mme le
député de L'Acadie le sait sans doute.
Mme La voie-Roux: Mais je viens de le recevoir sur-le-champ, M.
le ministre.
M. Morin (Sauvé): Je voudrais porter à votre
connaissance, M. le Président, la lettre que j'ai reçue du
secrétaire du Conseil supérieur de l'éducation, le 1er
juin, et qui est adressée, à M. Pouliot, du secrétariat
des commissions parlementaires: "M. le secrétaire, l'invitation que vous
avez adressée le 18 mai par télégramme" puisque le
projet de loi a été déposé en première
lecture le 17 mai, il y a donc trois semaines "au Conseil
supérieur de l'éducation, est bien parvenue. Le Président
du conseil vous a informé par téléphone que l'organisme
n'avait pas l'intention de demander d'être entendu par la commission
parlementaire de l'éducation au sujet des projets de loi 24, Loi sur le
Conseil des collèges, et 25, Loi modifiant la loi des cégeps. Le
conseil a en effet déjà soumis au ministre de l'Éducation,
d'une part, un avis adopté le 9 février sur "La création
éventuelle d'un Conseil des collèges et ses répercussions
sur le Conseil supérieur de l'éducation" et, d'autre part, un
rapport adopté par sa commission de l'enseignement collégial le
23 février sur "Le projet du gouvernement à l'endroit des
cégeps". Je vous fais tenir des exemplaires de ces deux documents afin
qu'ils soient joints au dossier des membres de la commission parlementaire". Et
les formules de politesse habituelles.
Voilà, M. le Président, les raisons qui expliquent
l'absence toute relative du Conseil supérieur de l'éducation,
mais je ne doute pas que son président ne suive ces débats avec
beaucoup d'intérêt.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, évidemment, il
faut bien que j'accepte les explications qui vous ont été
formulées par le président du Conseil supérieur de
l'éducation, mais je me permets quand même de regretter qu'il ne
se présente pas devant nous de façon formelle pour que nous
puissions lui poser des questions, compte tenu que la création des
collèges, d'un conseil des collèges devrait directement ou
indirectement avoir des répercussions assez considérables sur
l'avenir du Conseil supérieur de l'éducation. (16 heures)
Je me souviens qu'au moment de la loi 101, il s'était
désisté, mais je pense que nous nous trouvions dans des
circonstances particulières à ce moment-là, il s'agissait
d'un projet de loi je pense que tout le monde le reconnaîtra bien
aisément qui avait des ramifications, si je peux dire, politiques
considérables, il a préféré s'abstenir. Je n'ai eu
aucune objection à ce moment-là, même si nous avions fait
une motion pour qu'il se fasse entendre.
Aujourd'hui, tout ce que je ferais, c'est d'exprimer un voeu au ministre
de l'Éducation. J'ai exprimé une raison, la création du
Conseil des collèges qui pourrait avoir des répercussions sur le
Conseil supérieur de l'éducation. Il y a aussi le fait que le
Conseil supérieur de l'éducation, depuis sa création, soit
comme tel ou soit par le truchement de sa commission de l'enseignement
collégial, a quand même suivi, au cours des années,
l'évolution du réseau collégial. Le voeu que j'exprime,
c'est que M. le ministre réitère son invitation au Conseil
supérieur de l'éducation et qu'à la fin de l'audition de
ces mémoires, le conseil de l'éducation, si nous le jugeons
opportun, consente à apporter un éclairage
supplémentaire.
J'aimerais faire ce voeu que le ministre de l'Éducation
réitère cette demande au Conseil supérieur de
l'éducation. Chacun pourrait en tirer un grand bénéfice.
Je répète qu'il n'est pas dans notre esprit de mettre le Conseil
supérieur de l'éducation dans une situation politique
périlleuse. Je pense qu'il faut faire une différence entre le
projet de loi 101 et les projets 24 et 25 qui sont devant nous. Non seulement
l'objet n'est pas le même, mais je pense que la dimension politique, au
moins dans un sens plus partisan, à notre point de vue, est certainement
plus absente ou sera plus absente qu'à l'égard de la loi 101.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais
abonder dans le sens du député de L'Acadie et lui faire savoir
que ce n'est certainement pas parce que je me serais opposé à la
présence du Conseil supérieur de l'éducation, qu'il n'est
pas présent, du moins au point de nous communiquer de vive voix son avis
sur les projets de loi.
Je m'entretiendrai sûrement, avant la fin de la séance,
avec le président du conseil qui est présent parmi nous et nous
verrons si vos propos et ceux que je ne manquerai pas de lui tenir pourraient
l'amener à changer d'idée.
Le Président (M. Marcoux): J'appelle maintenant le
représentant du Conseil des universités, Mme Paule Leduc et je
l'invite à nous présenter son mémoire.
Vous avez bien entendu, vous disposez d'une vingtaine de minutes pour
nous résumer ou pour nous lire votre mémoire et ensuite, ce sera
la période d'échange.
Conseil des universités
Mme Leduc (Paule): Je vais tenter de réduire, le plus
possible, le temps qui m'est alloué, parce que je sens tous mes
collègues de l'enseignement collégial derrière qui doivent
piétiner d'impatience pour déposer leur point de vue. Je me sens
un peu usurpatrice de venir au début donner le point de vue du Conseil
des universités.
Toutefois, je voudrais que la commission parlementaire soit consciente
que c'est dans un but positif que le Conseil des universités a
accepté de venir, étant donné qu'il nous semble que le
lien entre l'enseignement collégial et l'enseignement
supérieur au Québec, dit enseignement universitaire, est
extrêmement important et mérite d'être examiné plus
en profondeur, surtout dans une perspective d'avenir. Nous avons
déposé un court mémoire que je vais me permettre de ne pas
lire, si vous permettez, je vais en rappeler les grandes lignes.
Notre intervention portera sur ce qui nous paraîtrait une question
pertinente à poser et qui semble ne pas avoir été
posée, tant dans le livre blanc que dans le projet de loi sur le conseil
des collèges, c'est-à-dire la question de la coordination des
activités de la formation collégiale et universitaire.
Nous avons souscrit avec beaucoup de plaisir aux orientations
fondamentales qu'il y avait dans le livre blanc concernant l'enseignement
collégial. Ces orientations, qu'on retrouve dans le livre blanc, font
suite à une large consultation qui a suivi le rapport Nadeau. Les avis
du Conseil des universités et les avis des universités avaient
fait voir, à ce moment-là, la nécessité de mieux
définir les objectifs spécifiques de la formation
collégiale, avaient aussi et c'est vraiment du fond du coeur que
je le dis senti le besoin que les collèges soient affranchis
d'une tutelle qui paraissait pouvoir être imposée par les
universités.
Nous sommes tout à fait heureux de voir que le livre blanc sur
les collèges permet de bien saisir le rôle particulier des
collèges dans notre système qui est, vous le savez, tout à
fait particulier dans le monde nord-américain et même au Canada,
puisque nous avons séparé l'enseignement supérieur en
deux, ce qui n'est pas le cas dans les autres provinces.
Toutefois, étant donné que le livre blanc et les principes
qu'il met de l'avant risquent d'entraîner des changements fort importants
à l'intérieur de la programmation si vous me permettez cet
anglicisme des collèges, en particulier quand on pense aux troncs
communs dans l'enseignement professionnel, quand on pense à la refonte
des concentrations du secteur général, quand on pense
également à des ajustements qui paraissent un peu plus simples,
soit l'ajout de cours d'économie, de civilisation, d'art et de
mathématiques, il nous apparaît donc, étant donné
que ces principes vont apporter des changements fort importants dans le
développement académique des cégeps, que des
paramètres essentiels de ces changements auraient besoin d'être
précisés. On présume que les collèges et le
ministère feront le nécessaire.
On me dit d'utiliser le micro. Qu'est-ce que je dois faire?
Le Président (M. Marcoux): Rapprochez le micro.
Mme Leduc: Je m'excuse, je ne connais pas bien ces questions
techniques. Nous pensons donc qu'il y aura des discussions pour rendre plus
opérationnels ces changements proposés.
Toutefois, il nous apparaît que certaines affirmations du livre
blanc mériteraient d'être tempérées. Je cite, si
vous permettez: Chaque niveau d'enseignement doit faire cheminer
l'étudiant vers les objectifs qu'il fixe lui-même, mais chaque
niveau d'enseignement doit également posséder ses objectifs
propres et tenir compte du bagage des connaissances des étudiants qu'il
accueille.
Dans le cadre de l'enseignement collégial, cela signifie qu'il
n'appartient ni aux universités, ni au marché du travail, de
dicter les objectifs et les contenus des programmes de formation. Je viens de
citer le livre blanc.
Toutefois, indépendamment de la véracité du fond de
cette affirmation, il faudra voir de quelle manière on peut affirmer des
choses de ce type-là, sans les tempérer par un certain nombre
d'analyses. Le Conseil des universités utilise son expérience des
dix années antérieures pour dire ceci: La
spécificité des objectifs du niveau collégial et du
premier cycle universitaire reste encore à préciser. Je vous
donnerai uniquement pour exemple en particulier, le domaine de l'enseignement
professionnel, où on peut constater qu'il est difficile et nous
rencontrons ces difficultés chaque fois que nous examinons des
programmes universitaires de premier cycle de bien saisir la
différence qui existe entre certains enseignements de cégep et
certains enseignements de niveau universitaire.
Il faudra porter une attention particulière à la
frontière entre ces enseignements qui n'a pas été bien
marquée jusqu'à maintenant et qui ne l'est pas vraiment dans le
livre blanc.
D'autre part, je voudrais signaler un certain nombre d'autres
phénomènes qu'il nous apparaît important d'examiner, eu
égard au livre blanc sur les collèges. Le phénomène
de concurrence qui existe entre les établissements fonctionnant aux
niveaux universitaire et collégial, ceci n'étant pas, de ma part,
une affirmation négative, bien entendu, mais on sait que, en particulier
dans le domaine de l'éducation des adultes, nous ne sommes pas exempts
de concurrence entre les deux niveaux. Il faudrait vérifier dans quelle
mesure cette concurrence est saine et si on ne pourrait pas l'améliorer
par une coopération, par exemple, plus approfondie.
D'autre part, nous avons pu constater également que certaines
demandes venant des étudiants, mais plus particulièrement du
marché du travail, se sont traduites à certains moments par une
surenchère dans la "diplomation", en particulier pour certaines
professions.
Étant donné toutes ces questions, il nous apparaît
essentiel que soit posé le problème de la coordination entre le
niveau universitaire et le niveau collégial. Ceci nous apparaît
d'autant plus important qu'une autonomie accrue au niveau de la programmation
au collégial exigera de la part des universités une plus grande
souplesse dans la programmation, ce qui, évidemment, supposera des
modifications importantes dans les programmes de premier cycle dans les
universités.
Le livre blanc sur les collèges semble élargir la fonction
sociale, si je puis dire, des collèges, ce qui n'est pas sans nous
paraître important, en particulier dans le domaine de l'éducation
des adultes, des services à la collectivité, de la recher-
che technologique et de certains blocs d'activités de formation
générale et professionnelle.
Le secteur de l'enseignement collégial peut effectivement,
étant donné sa distribution géographique, étant
donné ses structures juridiques, étant donné certains
moyens plus considérables et plus diversifiés qu'il
possède en particulier dans les régions éloignées
où il n'existe pas, par exemple, d'université, ce rôle
accru des collèges nous apparaît, nous semble-t-il,
extrêmement positif pour l'évolution de l'enseignement au
Québec.
Toutefois, il nous apparaît qu'il faudrait davantage examiner
l'assertion du livre blanc qui donne au collège un rôle de
leadership en éducation permanente. On y dit même que le
collège serait la pierre angulaire de l'éducation permanente dans
les régions. Je ne sais pas si c'est bien comprendre l'éducation
permanente que de confier ce rôle de leadership à un seul niveau
d'enseignement. Il nous apparaît au contraire que c'est à tous les
niveaux d'enseignement que doit être pensée l'éducation
permanente et qu'il y aurait avantage sur cette question à une
concertation positive entre les différents niveaux, et j'inclus ici les
niveaux primaire et secondaire.
Dans le domaine du développement technologique, la suggestion de
mise sur pied de missions, de centres spécialisés pourvus d'un
rôle de recherche appliquée vient d'une certaine façon
compléter, espérons-le, plutôt que dédoubler les
efforts de l'université. Dans ce domaine-là, il nous
apparaîtrait pertinent que soient examinées les relations entre
l'université et le collège sur ces questions, ceci toujours dans
mon esprit ne voulant pas dire que l'université aura la
prérogative de toutes les questions. Je crois que nous sommes au
contraire dans une ère où la concertation est
nécessaire.
Ceci étant dit, cela m'amène à parler plus
spécifiquement des modalités possibles de concertation ou de
coordination entre le collégial et l'universitaire. Nous vivons
et je crois que c'est probablement un des défauts de notre
système d'éducation et ce n'est probablement pas le seul
système qui est muni de ce défaut qui est peut-être une
qualité, mais j'en doute nous avons tendance, je crois, à
multiplier les rôles qui soient assumés par plusieurs personnes ou
plusieurs personnes morales, j'entends ici dans le sens d'organismes, et nous
pensons qu'il faudra, avant que la création du Conseil des
collèges soit arrêtée, que soient examinés de
façon extrêmement importante les moyens, les modes de coordination
entre ces deux niveaux. (16 h 15)
Dans la Loi du conseil des universités, je ne citerai pas
l'article, mais nous avons un article qui nous donne le mandat de
suggérer au ministre les moyens de promouvoir la collaboration entre le
niveau collégial et universitaire. Dans le mandat du Conseil
supérieur de l'éducation existe également cette même
possibilité. Dans le mandat du Conseil des collèges, nous
retrouvons aussi, dans la loi qui est devant nous, cette possibilité que
le
Conseil des collèges soit un organisme qui suggère au
ministre les modes de coordination entre le niveau collégial et
universitaire. D'autre part, il existe un autre organisme, cette fois non
régi par une loi, qui s'appelle le CLESEC et qui a aussi les mêmes
mandats. Il nous apparaît coûteux, non pas uniquement en termes de
ressources financières, mais en termes de ressources humaines, que
plusieurs organismes se partagent les mêmes mandats de coordination entre
niveaux. Il nous apparaît que c'est la meilleure façon qu'il ne
s'en fasse pas.
L'avenir passé si je puis dire, nous amène à croire
que, comme plusieurs organismes avaient ce mandat, on peut dire que la
coordination interniveaux ne s'est pas soldée par des succès
retentissants. On peut s'interroger sur le fait qu'il existait plusieurs
organismes avec le mandat et que chacun s'en reportait à l'autre, de
sorte que nous suggérons je vais rapidement arriver à nos
conclusions que, vu les changements d'orientation et de contenu
proposés pour les programmes collégiaux, il est essentiel
qu'entre les deux conseils, le Conseil des universités et le Conseil des
collèges, s'il voit le jour bientôt, il existe un mécanisme
formel de coordination qui examinerait d'égal à égal, si
je peux me permettre cette expression, les difficultés sans
aucune connotation politique, M. le ministre de jouxter, si je peux me
permettre, les programmes de ce niveau, tant les programmes
généraux que spécialisés, qui aurait
également pour mandat de voir de quelle manière pourraient
s'établir la concertation et les expérimentations dans des
domaines neufs, en particulier, par exemple, dans le domaine de la recherche
technologique ou des collèges à vocation plus
spécialisée. Pour ce faire, il nous apparaît que l'article
qui est prévu dans la loi est insuffisant. L'article 16 laisse au
Conseil des universités, au Conseil supérieur de
l'éducation et, bien sûr, au Conseil des collèges le soin
de publier des rapports conjoints sur des questions d'intérêt
commun. Il nous apparaît que ce n'est pas aller suffisamment loin pour
assurer une concertation positive entre les niveaux. C'est une recommandation
formelle du Conseil des universités que soit mise sur pied cette
commission conjointe des deux conseils qui aurait pour mandat de faire un
travail de réflexion qui amènerait une harmonie qui est
souhaitable, je pense, entre les niveaux collégial et universitaire.
En ce sens, il faudrait, et c'est ce que le conseil recommande
également, réexaminer le rôle du CLESEC. Je dois faire une
parenthèse ici pour dire que tel n'est pas l'avis de l'ensemble des
universités. Comme je ne représente pas les universités
ici, mais bien le Conseil des universités, je me sens tout à fait
à l'aise pour faire une recommandation qui est contraire à la
recommandation que mes collègues des universités ont faite. Nous
pensons que le CLESEC qui a pour mandat de veiller à la
complémentarité des niveaux universitaire et collégial,
d'assurer la coordination entre les universités et les collèges,
de rendre harmonieux le partage de tous les étu-
diants d'un niveau à l'autre, nous pensons que c'est un organisme
qui dédoublera le Conseil des universités et le Conseil des
collèges. En ce sens, nous en faisons une recommandation formelle.
Nous avons choisi également, M. le ministre, madame et messieurs
les députés, de ne pas faire un examen de la pertinence
non pas de la pertinence de la création d'un Conseil des collèges
de certains des articles de sa loi, en dépit de
l'expérience que le Conseil des universités a retiré, dans
les dix années antérieures de l'exercice, si je puis dire, d'une
loi relativement proche de la Loi du Conseil des collèges, d'une part,
parce que les deux systèmes universitaire et collégial sont
très différents sur le plan de la gestion et qu'on présume
que le Conseil des collèges, s'il vit avec une loi qui est très
près de celle du conseil des universités, le vivra sûrement
de façon différente et mettra les accents probablement sur des
éléments différents de ceux que le Conseil des
universités a cru devoir examiner. Toutefois, le Conseil des
universités se réserve, pour le livre blanc, on espère,
qui viendra sur les universités, le soin de faire une autopsie de son
expérience, si on peut se permettre la chose et si le gouvernement nous
le permet.
J'arrête ici mes commentaires, M. le ministre. Je suis, bien
sûr, disposée à répondre à vos questions, si
vous le jugez à propos.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il était
tout à fait souhaitable que la première intervention fut celle du
Conseil des universités et je ne doutais pas que votre intervention
montre, in concreto, à quel point les conseils consultatifs peuvent
être utiles.
Vous avez soulevé, Mme la Présidente, la question de la
coordination des deux niveaux d'études, supérieur et
collégial. Je dois convenir qu'autant il est important que chaque niveau
soit autonome et se donne des objectifs qui soient les siens, autant la
coordination est essentielle. Ce sont, d'ailleurs, l'avers et le revers d'une
même médaille que l'autonomie et la coordination. Il n'y a pas de
véritable autonomie sans coordination, de sorte que le problème
que vous avez soulevé est réel et a, d'ailleurs, retenu notre
attention à plusieurs reprises.
Il convient que les collèges, comme vous l'avez dit, sachent se
donner des objectifs spécifiques, affranchis, selon l'expression que
vous utilisez dans votre mémoire, de la tutelle des
universités.
Cela étant, puisque nous sommes d'accord avec cette idée,
nous avons voulu, dans l'énoncé de politique sur les
collèges, mettre l'accent sur une idée générale et
ne pas nous prononcer dès maintenant sur les mécanismes de
coordination. Nous avons voulu, parce que nous sentions que cela était
une nécessité pédagogique, mettre l'accent sur une
formation plus fondamentale, des enseignements fondamentaux
améliorés. C'est l'une des lignes majeures de
l'énoncé de politique.
Mais, comme vous l'avez fait observer, cela laisse intacte la question
de la coordination, du mécanisme de coordination entre les
collèges et les universités dont ils ou elles ne sauraient se
passer. À cet égard, vous faites observer que l'article 16 est
peut-être insuffisant puisqu'il ne fait allusion qu'à la
possibilité de rapports conjoints sur des questions
d'intérêt commun qui nous seraient soumis par votre conseil et par
le Conseil des collèges.
Le lieu actuel de coordination entre les collèges et
l'université, vous l'avez mentionné, c'est le CLESEC. Vous savez
que les universités y tiennent beaucoup et nous n'avons pas voulu mettre
au rancart cet organisme avant de savoir ce dont pourrait convenir un Conseil
des universités qui existe déjà et un Conseil des
collèges que nous allons créer maintenant. Je dois vous dire
cependant que le livre blanc a été discuté au CLESEC
à trois reprises. Donc, cette question a été
retournée et examinée sous tous les angles. De même, je
m'attends que le rapport de la Commission d'étude sur les
universités, qui devrait nous être remis jeudi prochain, le 7 juin
et que je déposerai devant la Chambre le jour même, aborde la
question de façon spécifique. Nous aurons donc un son de cloche
qui nous vient d'un organisme qui a été créé
justement pour nous éclairer sur l'avenir des universités.
La conférence des secteurs, dans son mémoire sur le livre
blanc, non seulement souhaite maintenir le CLESEC, mais souhaiterait le
renforcer. Je vous dirai que, pour ma part, je n'entends trancher cette
question que lorsque le Conseil des collèges aura été
créé et que vous vous serez, ensemble, penchés sur cette
question, parce que la loi n'exclut absolument pas, bien au contraire, que vous
discutiez de questions d'intérêt commun; elle n'exclut même
pas que vous vous donniez des comités communs pour explorer des
problèmes comme ceux-là. S'il advenait que vous vous entendiez
comme, je pense, c'est possible que vous puissiez créer un
mécanisme de cet ordre et que nous puissions, je n'exclurait pas du tout
que ce mécanisme à inventer puisse éventuellement se
substituer au CLESEC. C'est une hypothèse, ce n'est qu'une
hypothèse, mais sachez que je ne l'exclus pas.
La Fédération des cégeps, de son côté
elle viendra sans doute nous le dire tout à l'heure
souhaite un mécanisme nouveau. De quelle nature pourrait-il être?
Nous le lui demanderons tout à l'heure.
Je pourrais vous demander, comme première question, Mme la
Présidente, quel genre de mécanisme vous envisageriez? On
pourrait peut-être faire ce pas dès cet après-midi, de
sorte que les nouveaux membres du Conseil des collèges, en entrant en
fonction d'ici quelques semaines j'imagine, à l'automne au plus tard,
pourraient déjà se trouver devant des éléments de
réponse et pourraient se pencher, en priorité, sur cette
question.
Je voudrais ajouter qu'il pourrait également être question
d'associer à cette réflexion le Conseil supérieur de
l'éducation. Je ne l'exclurais non plus d'une question qui pourrait
l'intéresser.
En d'autres termes, l'article 16 n'exclut absolument pas des
mécanismes conjoints, des mécanismes communs. De quelle nature
pourraient-ils être, Mme la Présidente?
Mme Leduc: Dans notre document, nous avons suggéré
un sous-organisme à caractère conjoint, se rapportant aux deux
conseils et qui pourrait être présidé alternativement par
le titulaire de l'un ou l'autre des conseils. Nous avons suggéré
aussi davantage: "De même les présidents de chaque conseil
devraient siéger, à titre d'orbservateur, au sein de l'autre,"
c'est-à-dire le président du Conseil des collèges au
Conseil des universités et inversement.
Je crois que cette question, M. le ministre, est une question de lieu.
Où doit se faire la coordination? Je présume qu'il faudra en
venir à discuter cette question: Est-ce que la coordination se fait
entre partenaires? Est-ce que les universités pour ne pas blesser
mes collègues des collèges peuvent très bien se
coordonner entre elles? C'est une chose possible.
M. Morin (Sauvé): Elles le font déjà.
Mme Leduc: Elles le font déjà. Est-ce que la
coordination doit se faire au ministère, etc.?
L'expérience des années antérieures, dans plusieurs
États américains et dans plusieurs provinces canadiennes, montre
qu'il est préférable qu'un organisme de coordination qui ait
à examiner ces problèmes, soit, si je puis dire, au-dessus des
conflits d'intérêts, soit une espèce d'arbitre entre les
différents intervenants. C'est pourquoi il nous semble cette
question de la coordination, vous le dites, reste ouverte qu'il faille
s'interroger sur le lieu de la coordination pour qu'elle soit
véritablement efficace. Si nous en sommes venus à proposer ce
sous-organisme, c'est à la suite d'une expérience de plusieurs
années et à la suite aussi d'expertises que nous avons
tenté de mener auprès d'organismes qui ont vécu ces
expériences. On se rend compte que c'est beaucoup plus efficace quand
c'est si je puis me permettre de dire au-dessus des
intérêts individuels et les décisions, parfois difficiles
se prennent plus facilement, avec moins de déchirement.
Cette question est donc une question de lieu, ce qui n'exclut pas que
les collèges doivent se coordonner entre eux et se concerter, que les
universités doivent également le faire, mais quand il y a une
décision à prendre, quand il y a un choix à faire
c'est ce que ça suppose l'expérience de plusieurs pays
montre qu'il est plus facile de les faire à un niveau qui, tout en
étant humain, est un peu plus au-dessus des conflits
d'intérêts. (16 h 30)
M. Morin (Sauvé): Nos vues ne sont pas tellement
éloignées, Mme la Présidente. Je devrai cependant tenir
compte d'un fait qui est important, c'est celui-ci: vous savez que les
institutions sont formellement représentées au sein du CLESEC,
alors qu'elles ne le seraient pas, pas formellement en tout cas, dans un
mécanisme à inventer, un mécanisme conjoint qui serait
interconseils. Mais peut-être qu'il y a moyen de trouver des solutions
à ça.
Mme Leduc: M. le ministre, c'est justement parce qu'elles ne
seraient formellement pas représentées que ça nous
apparaît plus grave.
M. Morin (Sauvé): Bien.
Mme Leduc: Je serai directe et franche.
M. Morin (Sauvé): C'est bien noté. J'ai une autre
question à vous poser et, ensuite, nous pourrons passer peut-être,
du côté de l'Opposition et de mes collègues du
côté gouvernemental, c'est au sujet de l'éducation
permanente. Vous nous avez dit que vous n'étiez pas en accord total avec
cette proposition de l'énoncé de politique qui fait des
collèges le lieu principal de l'éducation des adultes. Vous avez,
bien sûr, dit que cela mettait le leadership à un seul niveau. Je
vous avoue que, dans notre esprit, cela n'exclut absolument pas la
concertation, la coordination, cette même question semblable à
celle que vous avez soulevée il y a un instant. Vous savez qu'il existe
déjà, même que le député de Sherbrooke serait
là pour en parler avec éloquence, des mécanismes comme
Fer-de-lance, qui permettent de coordonner l'éducation des adultes du
haut en bas, puisque c'est une question verticale et non plus une question de
niveau. Comment verriez-vous c'est ma seconde question, ma
dernière pour l'instant cette concertation inter-niveaux et
j'attire votre attention sur le fait qu'il n'est pas impossible aussi je
sais que ça s'est débattu en tout cas, à la Commission
d'étude sur les universités qu'elle veuille mettre son
grain de sel dans la balance à propos de cette question justement dans
deux ou trois jours.
Mme Leduc: M. le ministre, je voudrais corriger peut-être
une impression que j'ai donnée, si c'est celle-là que j'ai
donnée, je ne pense pas que nous sommes opposés au fait que les
collèges aient aussi un rôle extrêmement important à
jouer dans le domaine de l'éducation permanente, mais il nous
apparaît que voilà un élément où la
coordination est essentielle. Dans notre document, nous disons que ça
peut prêter à ambiguïté que de leur donner, par
exemple, le rôle, si je puis dire je ne me souviens plus de votre
terme, je l'ai cité tout à l'heure, mais je l'oublie de
pierre angulaire, nous apparaissait un peu forcé, si vous me permettez
cette expression.
Effectivement, nous sommes très au courant d'expériences
comme celle de Fer-de-lance dans la région de Sherbrooke et, quand nous
proposons un mécanisme de coordination entre les niveaux, et cette
fois-là, c'est entre tous les niveaux, pas seulement collégial et
universitaire, nous pensons à l'élaboration de programmes
conjoints, c'est ce qui se fait dans la région de Sherbrooke, nous
pensons à la mise en commun de ressources physiques pour répondre
à ces
besoins, nous pensons à l'échange de professeurs entre les
niveaux. Nous pensons à l'évaluation des résultats et,
pour ce faire, il nous apparaît qu'il est essentiel qu'il y ait un
mécanisme de coordination prévu entre chacun des niveaux pour
examiner spécifiquement ces questions-là.
On peut dire que la région de Sherbrooke est peut-être, je
pense, à l'avant-garde sur cette question-là, ce n'est pas le
cas, M. le ministre, dans toutes les régions du Québec.
M. Morin (Sauvé): Non.
M. Gosselin: Nonobstant le fait que la région de
Sherbrooke soit à l'avant-garde, je devrais dire qu'il subsiste aussi
des problèmes et que tout n'est pas solutionné. L'organisme
Fer-de-lance a eu le mérite d'innover très fondamentalement dans
le fait de réunir régulièrement les collèges avec
la commission scolaire régionale et avec l'université et de
développer des projets pilotes très intéressants pour des
clientèles cibles qui faisaient que chacune des institutions se
libérait des ressources, mais il reste quand même qu'au niveau de
la coordination concrète de programmes entre le collège et
l'université, je regrette de dire qu'on en est encore à des
balbutiements, il faut le dire.
Je voudrais citer uniquement l'exemple du secteur très populaire
des techniques administratives où je ne peux pas m'empêcher de
penser qu'il subsiste encore, chez nous comme ailleurs, des rivalités
entre les rôles qu'assument le cégep et l'université. Il y
a là une anomalie, je vous donne raison sur le point d'une juste
discrimination quant aux programmes qui sont relatifs, qui doivent être
l'apanage des universités ou l'apanage des collèges. Je pense
qu'on multiplie parfois, entre les universités et les collèges,
des programmes à peu près similaires.
L'exemple des techniques administratives est particulièrement
patent. Je vais citer un autre exemple, toujours dans le même ordre. Chez
nous, le ministère de l'Éducation va commencer...
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que cela va être
très long?
M. Gosselin: Non, c'est un petit exemple dans le secteur de
l'éducation permanente. Le ministère de l'Éducation va
commencer, auprès des petits industriels, auprès de la petite
entreprise... On se préoccupe beaucoup de développer les aides
pour la formation du personnel-cadre et de nouveaux administrateurs dans les
entreprises. Les collèges ont un programme d'éducation
économique spécifique, quelques expériences pilotes au
Québec, et Sherbrooke va pouvoir donner des cours là-dessus.
Ceci entre un peu en concurrence avec les programmes similaires ou un
peu différents, mais très apparentés que développe
la faculté d'administration à l'université. Je ne connais
pas de lieu de coordination actuellement, même s'il y a des efforts qui
se font chez nous plus qu'ailleurs, qui permette de bien camper le rôle
spécifique du collège par rapport au rôle de
l'université et d'éviter qu'il y ait des
dédoublements.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je désire
remercier la présidente du Conseil des universités pour son
mémoire. Je constate qu'elle s'est peu prononcée sur les projets
de loi eux-mêmes, les contenus des projets de loi 24 et 25, et qu'elle a
davantage centré ses propos sur des problèmes qui existent
présentement entre les niveaux collégial et universitaire et que
le Conseil des universités, j'imagine, voudrait voir, à
l'occasion de ces projets de loi, se modifier, s'atténuer ou prendre une
direction qui soit plus facile que celle que vous vivez actuellement. La
question des problèmes de concurrence entre les différents
niveaux du système d'éducation est fort connue et se situe
également entre le scolaire, le collégial, les
universités, etc.
Vous soulevez le problème, je reviens là-dessus pour
donner mon point de vue sur cette question de l'éducation permanente. Je
dois vous dire que je partage totalement votre point de vue là-dessus.
Il s'agit vraiment, quand on pense en fonction de l'éducation
permanente, c'est un continuum dans la vie d'un individu et ce n'est pas une
chose sur laquelle... Peut-être que, pour un individu, le secteur
collégial prendra plus d'importance que le secteur universitaire ou vice
versa, selon la philosophie que l'on développe à l'égard
de l'éducation permanente pour l'ensemble des individus d'une
société.
Mais il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas encore de politique
d'éducation permanente, comme il y a une politique d'éducation
des adultes, qui est aussi, peut-être un peu plus facile à
définir, en termes de gestes ponctuels qu'on pose. Mais les deux sont
encore en souffrance et je pense que tant que ce problème ne sera pas
réglé, on pourra se poser les mêmes questions: Où
est-ce que cela se situe? Mais je pense que c'est une vision d'ensemble qu'il
faut avoir, et non pas une vision compartimentée.
Je vois que vous dites ce ne sont peut-être pas les termes
que vous avez utilisés que vous êtes prêts à
souscrire à la création d'un Conseil des collèges,
puisqu'il existe un Conseil des universités. Vous auriez mauvaise
grâce de vous y opposer. Ce que je veux savoir, c'est quel est je
connais le Conseil des universités son fonctionnement quotidien,
mais avec la loi et les règlements qui le régissent, je ne suis
pas familière. Quel est votre indépendance à
l'égard du ministère de l'Éducation et également
votre façon de travailler, avec le Conseil supérieur de
l'éducation? Je pense que ce serait intéressant de voir quel
modèle constitue le Conseil des universités?
M. Morin (Sauvé): C'est une
indépendance-association.
Mme Lavoie-Roux: On sait depuis hier que cela reste à
définir. C'est-à-dire pas depuis hier.
Ce nous fut répété hier, que cela reste à
définir, pour la nième fois.
Mais, Mme la Présidente, pourriez-vous nous expliquer
l'articulation entre le conseil supérieur et le Conseil des
universités, et également votre statut à l'égard du
ministère de l'Éducation?
Mme Leduc: Je dois dire en toute honnêteté, Mme le
député, que nos liens avec le Conseil supérieur de
l'éducation sont assez ténus. Il y a une commission de
l'enseignement supérieur au Conseil supérieur de
l'éducation. Il y a un Conseil des universités. Je dois dire que
nos mandats sont sensiblement les mêmes.
Nous avons relativement peu de relations. Première réponse
très franche.
Deuxième réponse, par rapport au ministère de
l'Éducation, je crois que nous nous sentons très
indépendants, si ce n'est que nous avons besoin de son argent pour
vivre. Mais nous sentons toute l'indépendance d'esprit, je crois,
nécessaire, à nos avis, face au ministère de
l'Éducation et également face aux universités. Je pense
que c'est important de noter cette question. Nous sommes dans la situation
inconfortable, très fréquente, d'être assis entre deux
chaises, ce qui est le rôle nécessaire d'un organisme comme le
nôtre, mais difficile.
Mais je dois dire que nous avons parfois donné des avis au
ministre de l'Éducation, qui n'allaient pas du tout dans le sens des
intentions qui étaient annoncées dans les documents de
consultation qu'il nous envoyait. Et de même, il nous est arrivé
de donner des avis qui n'allaient pas non plus dans le sens de ce que les
universités auraient voulu, parce qu'on a tenté de mettre
ensemble ce qui nous apparaît, dans notre loi, essentiel, les besoins de
la société et les besoins de l'enseignement supérieur.
Et je crois que sur ce plan, s'il y a eu utilité d'avoir un
organisme consultatif comme le nôtre, c'est là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: C'est votre indépendance.
Mme Leduc: Notre indépendance et notre obligation morale
de donner des avis en tenant compte, pas uniquement des besoins des
établissements universitaires ni des désirs du ministère
mais en tenant compte des besoins de la société, comme c'est bien
défini dans notre loi. Et je crois que le Conseil des collèges
pourrait servir heureusement le Québec en conservant à l'esprit
cette nécessité de mettre en équilibre le désir et
les besoins, et les capacités de notre société, tant sur
le plan économique que culturel, ce qui veut dire parfois des choix
difficiles.
Mme Lavoie-Roux: Alors, est-ce que c'est juste de dire que votre
rôle est consultatif à l'égard du ministre? Il est
consultatif à l'égard des universités?
Mme Leduc: II est consultatif à l'égard du
ministre, c'est la loi qui le dit. Il nous arrive parfois de recommander aux
universités d'agir dans tel sens, même dans nos recommandations au
ministre. Mais en fait, nous ne sommes pas consultatifs auprès des
universités. (16 h 45)
Mme Lavoie-Roux: Non. Alors vous n'avez aucune action directe sur
les universités si ce n'est, suite à des études que vous
faites, par certaines recommandations ou orientations que vous pourriez
suggérer aux universités. Vous n'avez pas de relation directe
avec les universités, j'entends "directe" dans le sens de les inciter
à l'action ou de...
Mme Leduc: La question que vous posez m'amène à
vous dire qu'étant donné, je crois, l'utilité d'un
organisme comme le nôtre dans le sens de la mesure des besoins de la
société socio-économique comme culturelle, sa composition
est fort importante. Si vous n'y mettez et je m'en excuse auprès
de mes collègues des universités que j'estime
énormément que des universitaires, il manque un bout de la
balance. Dans notre conseil, comme dans ce conseil, il y a quand même la
venue de gens de l'extérieur des universités ou de
l'extérieur des collèges. C'est extrêmement
bénéfique pour l'examen des questions même parfois
difficiles pour des gens qui ne sont pas à l'intérieur de
l'université, mais c'est ce qui nous permet, je crois, de pouvoir, dans
la mesure où les humains sont capables d'être objectifs, donner
des avis aux ministres qui, en tout cas, veulent trancher dans le sens du bien
de la société, étant donné ses besoins. Je ne sais
pas si je réponds à votre question, Mme Lavoie-Roux.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Oui, c'est cela. Y a-t-il des
fonctionnaires du gouvernement sur votre conseil?
Mme Leduc: II y a deux fonctionnaires prévus dans la loi.
Sur 17 membres, 2 fonctionnaires sont membres du conseil.
Mme Lavoie-Roux: Ceci ne vient-il pas, d'une certaine
façon, du point de vue de votre indépendance vis-à-vis du
ministère ou vis-à-vis du ministre ou vis-à-vis du
gouvernement, créer un poids qui, je comprends, n'est pas
prépondérant, puisqu'il s'agit de 2 membres sur 17, mais qui
affecterait votre indépendance à l'égard du pouvoir
politique?
Mme Leduc: Je dois dire que non, en toute franchise.
L'expérience que j'ai vécue de la présence des
fonctionnaires au sein du conseil nous permet d'avoir le point de vue
gouvernemental sur les problèmes qui nous sont posés. C'est un
point de vue qui est important, je crois, de la même façon que
celui des universités ou celui des représentants du monde du
travail ou du monde syndical. Jusqu'à maintenant, je dois dire que je
n'ai pas vu là un danger de faire balancer, si je puis dire, le conseil
vers une volonté de répondre aux désirs intégraux
du ministère. Cela nous a
paru, au contraire, être un apport positif, puisqu'il y avait des
informations qui pouvaient nous être données de cette
manière-là que nous n'aurions pas eues autrement. C'est un point
de vue de gens, je crois, responsables, quoi qu'on en dise.
Mme Lavoie-Roux: Nous avons discuté tout à l'heure
du rôle du CLESEC. Je voudrais savoir de quelle façon un autre
type d'organisme ou de sous-organisme pourrait remplir les mêmes
fonctions que le CLESEC, parce que les problèmes que vous soulignez
à l'égard du livre blanc sur les collèges, une
possibilité de chevauchement à l'égard de l'enseignement
technique et professionnel, de chevauchement à l'égard de
l'éducation des adultes, ne sont pas des problèmes qui sont
créés par le livre blanc, ce sont des problèmes qui
existent présentement. Comment le CLESEC a-t-il fonctionné et
dans quelle mesure ceci a-t-il réussi à apporter des solutions et
comment un organisme différent pourrait-il apporter de meilleures
solutions?
Mme Leduc: Je vous rappellerai que le CLESEC a été
créé à partir d'une recommandation du Conseil des
universités au ministre, donc, je suis très à l'aise de
vous en parler, puisque nous jugions, à l'époque, pertinent qu'il
y ait un organisme pour faire la liaison entre les cégeps et les
collèges c'est ce que veut dire un comité de liaison
en particulier...
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela, une liaison.
Mme Leduc: ... pour bien définir les critères
d'admission à l'université. C'était notre objectif. Depuis
lors, le CLESEC a rempli un rôle extrêmement important sur cette
question et je vous ferai remarquer que nous avons recommandé de revoir
ces modalités de fonctionnement, parce que, récemment, le CLESEC
a modifié son rôle je dois dire que nous n'avons pas
été consultés sur cette modification et il a
élargi considérablement ses responsabilités par rapport
à ce que nous avions suggéré au début. Cela nous
apparaît dédoubler les responsabilités que nous avons, par
exemple, dans notre loi. C'est uniquement pour cela. Quand je vous dis
"harmoniser", il faudrait voir qui fait quoi et pourquoi deux groupes feraient
la même chose, à moins que ce ne soit prouvé que c'est
essentiel. Sur le rôle du CLESEC, dès le début, nous
jugions pertinent qu'il y ait des mécanismes de liaison, en particulier
pour déterminer les seuils d'accueil, les cours nécessaires pour
l'admission à l'université. Cela, il faudra sûrement
continuer à examiner cette question. Il n'est pas nécessaire que
ce soit, par exemple, le sous-organisme que nous suggérons qui fasse
cette question. Je pense plutôt que ce sous-organisme que nous
suggérons s'occupe de la coordination au niveau des programmes, tant
réguliers qu'irréguliers, j'allais dire, je pense à
l'éducation permanente, ceux qui se situent à un niveau un petit
peu moins technique, si je puis dire, plus politique.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je vous comprends bien quand j'en
déduis que vous dites que CLESEC pourrait continuer de vivre, quitte
à reconsidérer ses modes ou ses modalités de
fonctionnement et qu'en plus, il y aurait cet autre sous-comité qui,
lui, aurait d'autres tâches particulières? Est-ce que je vous ai
mal comprise?
Mme Leduc: Non, vous ne m'avez pas mal comprise. Je crois que
CLESEC existait avec un mandat qui était particulier, qui était
précis, concernant le passage, le niveau d'admission entre les deux
programmes. Il s'agissait d'un comité composé de registraires des
universités et de représentants des collèges. On a
modifié le CLESEC récemment, et c'est là que nous avons
des difficultés, parce que cela devient un organisme... J'ai lu tout
à l'heure le mandat de ce nouveau CLESEC. Là, je crois qu'il faut
harmoniser le rôle de ces organismes. Si nous avons un Conseil des
collèges, un Conseil des universités... Vous savez qu'au Conseil
des universités, nous avons un comité des programmes, où
nous examinons les programmes qui sont déposés par les
universités. Nous croyons, par exemple, qu'un sous-organisme tel que
celui que je propose pourrait examiner conjointement les programmes qui ont des
précédents aux collèges, pour voir dans quelle mesure ils
s'harmonisent. Cela se situe à des niveaux largement plus politiques, si
je puis dire. Dans l'état actuel des choses, le nouveau CLESEC
c'est notre jargon, on parle comme cela c'est un organisme qui a le
même mandat que le Conseil supérieur ou que le Conseil des
collèges ou que le Conseil des universités, sur le plan de la
complémentarité des niveaux, de la coordination entre
universités et collèges. Je trouve qu'ainsi, il y en a trop qui
font la même chose. Ou on l'enlève au Conseil des
universités ou au Conseil des collèges ou on le donne au CLESEC,
ou inversement, mais il faut harmoniser. Bien sûr, je suggère que
le Conseil des universités, étant donné son
expérience, puisse travailler avec le Conseil des collèges sur
ces questions.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que, selon vos propos, il semble y
avoir de la place pour de la clarification, parce qu'au tout départ,
vous avez parlé aussi d'un certain dédoublement entre le
comité de l'enseignement supérieur du Conseil supérieur de
l'éducation et le rôle du Conseil des universités.
Mme Leduc: C'est-à-dire que, dans la loi, en tout
cas...
Mme Lavoie-Roux: Oui. Au point de vue...
Mme Leduc: Oui. Dans les faits, je crois que nous avons fait
notre travail, nous avons répondu aux avis. Nous avons pris des
initiatives, en particulier, définir les orientations de l'enseignement
supérieur et les axes de développement des établissements.
Le Conseil supérieur a toujours, dans le domaine de l'enseignement
supérieur, évalué les besoins de l'enseignement
supérieur et
les a fait connaître au ministre par cette commission de
l'enseignement supérieur. Remarquez que nous faisons la même chose
aussi.
Mme Lavoie-Roux: II y a seulement une dernière question
que je voudrais vous poser et qui touche je ne retrouve pas l'endroit
le chevauchement des programmes entre l'enseignement collégial et
les études de premier cycle au niveau universitaire. Devant tous les
organismes qui existent, je ne suis plus du tout sûre que c'est CLESEC
qui s'est penché là-dessus ou si c'est le Conseil des
universités. Où en êtes-vous dans ce partage de
responsabilités?
Mme Leduc: Dans l'enfance de l'art. En fait, il n'y a jamais eu
de tentative organisée, continue et sérieuse de faite
là-dessus. Je dois dire, et je fais amende honorable, nous aurions
dû le faire, nous ne l'avons pas fait de façon efficace, il faut
que quelqu'un le fasse. Là-dessus, je pense essentiel...
Nous étudions à chaque année une quarantaine de
programmes que les universités déposent à notre bureau
pour ouverture de nouveaux programmes et, sur ces quarante programmes, il y en
a la moitié qui sont dans la suite de programmes des cégeps et
nous nous demandons, les mains en l'air: Est-ce qu'il y a vraiment des
différences essentielles entre ces deux programmes? Là-dessus, il
y a un problème évident qui n'a pas été, je pense,
examiné en profondeur et qui mériterait de l'être. Je ne
vous donnerai comme exemple que le problème de la formation dans le
domaine de la santé; toute une série de professions qui ont leurs
techniques au cégep, qui ont leur premier cycle à
l'université et, dans cette jungle des programmes, il est
extrêmement difficile de savoir ce qui est spécifique au
collège et à l'université et si, en fait, les formations
conduisent à l'exercice d'une profession qui soit vraiment
différente l'une de l'autre. Cela nous apparaît extrêmement
coûteux pour le Québec.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je pense que ce
sera très bref.
Je remercie madame de son exposé très intéressant.
Je pense que nous avons là un gâteau enrichi de toutes les
vitamines, de toutes les substances et très indigeste à avaler
d'un coup sec. Je pense qu'il y aurait tellement de questions là-dedans,
vous abordez tellement de problèmes, mais je voudrais me limiter
à quelques observations.
Évidemment, il s'agit ici d'un projet de loi pour créer un
Conseil des collèges et, comme vous l'avez mentionné un peu,
quand on regarde l'éducation qui, pour moi, est un tout, est global,
qu'on parte de la prématernelle, du primaire, du secondaire, du
collégial, de l'universitaire, les conflits d'intérêt,
comme vous le mentionniez tout à l'heure, c'est toujours possible et
cela arrive même à l'intérieur des meilleures choses.
Votre mémoire a pour but d'apporter des suggestions d'ordre
très pratique et, quand vous parlez, par exemple, d'éducation aux
adultes ou d'éducation permanente, il me semble, dans l'idée
qu'on peut se faire aujourd'hui de l'éducation des adultes... Est-ce que
vous êtes d'accord sur ce concept que c'est de l'éducation
permanente en permanence, je dirais? Parce qu'on voit des jeunes qui sortent
des collèges, qui vont aller sur le marché du travail un an, deux
ans, trois ans, qui vont revenir encore au collège ou à
l'université plus tard. Est-ce que, dans votre idée, quand on
parle d'éducation des adultes, vous y verriez plutôt cette
idée d'éducation permanente, quel que soit le niveau, quels que
soient les âges?
Mme Leduc: Sans aucun doute, M. le député.
D'ailleurs, je pense que le livre blanc sur les collèges nous fait faire
un pas en avant dans cette direction, puisque, si on pense le système
d'éducation comme étant une période transitoire qui permet
à la personne humaine de s'instruire et de revenir, dans la mesure de
ses besoins, on doit penser nos programmes dans ce sens-là
également.
On pense que nos programmes ne donnent pas tout ce qu'il faut à
l'étudiant sur le plan de la connaissance technique, approfondie,
spécialisée ou hyperspécialisée. On croit donc
qu'il faut que les systèmes d'éducation soient pensés en
vertu d'une possibilité pour l'individu de venir là chercher un
certain nombre de besoins, d'y revenir et d'y retourner et c'est pourquoi il
nous a semblé que le livre blanc sur les collèges, qui
prône une espèce de formation générale bien assise,
permet justement de penser mieux l'éducation permanente puisqu'il y aura
l'essentiel pour l'individu qui pourra revenir chercher les connaissances
techniques ou spécialisées si c'est nécessaire, mais il y
aura aussi ce qui est la base de l'éducation de l'individu, à
quelque niveau que ce soit. Là-dessus, l'universitaire est loin
d'être sans péché quant à la conception de ses
programmes face à un système d'éducation qui est
pensé pour la vie entière et non pas uniquement pour une
période très courte, qui est quand même celle de
l'enseignement organisé.
Je ne sais pas si je réponds à votre question. (17
heures)
M. Le Moignan: Je crois que je vous rejoins un peu, parce que
nous vivons dans une société et les besoins de main-d'oeuvre, au
Québec ou ailleurs, sont au niveau de la technologie. Alors, dans le cas
présent, ça se limite peut-être un peu trop aux
collèges. Que ce soit pour l'éducation aux adultes ou
l'éducation permanente, je crois que dans votre idée, puisque la
technologie est tellement importante, ça déborde un peu le cadre
du collège, ça rejoint l'université à ce
moment-là.
Mme Leduc: À tous les niveaux; le secondaire
également.
M. Le Moignan: Le secondaire également, puisqu'il y en a
qui terminent au secondaire et aussitôt entrent sur le marché du
travail.
Mme Leduc: C'est ça, tout à fait.
M. Le Moignan: Vous avez parlé, je crois, de zone grise
qui existe entre le cégep et l'université au sujet de certaines
matières, de certains ajustements. D'autres mémoires en font
également mention, que ce soit dans le cours d'économie, de
civilisation québécoise. On voudrait que ça se limite
à un niveau, d'autres, moins au secondaire, plus au collégial,
d'autres, moins au collégial et plus à l'université.
Avez-vous examiné cette question?
Mme Leduc: C'est-à-dire que nous savons qu'il existe des
zones grises importantes; notre suggestion d'une meilleure coopération,
c'est pour tenter de les éclairer, M. le député; mais il
est évident qu'il doit y avoir des réflexions plus
poussées sur ces questions.
M. Le Moignan: Cela reste dans vos préoccupations,
peut-être pour l'avenir, de pousser pour l'information.
Mme Leduc: Voilà.
M. Le Moignan: Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Vous avez évoqué, au début de vos
remarques, les modifications ou les redéfinitions qui vont être
apportées au niveau des collèges, soit sur les propositions du
livre blanc ou même à l'intérieur, sur le plan
administratif, des projets de loi suivants et que cela va nécessairement
avoir des conséquences importantes au niveau universitaire sur le plan
de la coordination. Est-ce qu'il vous apparaît que, relativement aux
orientations nouvelles qui vont être données à la
"programmation", au niveau des collèges, au niveau universitaire,
présentement, vous êtes complètement dans le blanc, il n'y
a pas d'étude disponible, le milieu universitaire, le Conseil des
universités n'a pas été mis dans le coup là-dessus
pour prévoir les conséquences, ne serait-ce qu'au niveau de
l'organisation du milieu universitaire en tant que tel, pour absorber ces
conséquences?
Mme Leduc: Ces conséquences seront perceptibles surtout au
premier cycle universitaire. Or, il est difficile, pour nous, de bien
préciser ces conséquences et d'y faire face maintenant, tant que
nous ne saurons pas quelles seront les modifications véritables aux
programmes du collégial. Par exemple, le tronc commun pour le
cégep général, quel sera-t-il? Alors, par rapport aux
programmes universitaires, avec quel bagage les étudiants du
cégep arriveront-ils à l'université? Le problème
qui se pose, qui est très net, c'est que les programmes universitaires
au premier cycle, ont une tendance à être très
spécialisés, de sorte que si l'étudiant du niveau
collégial l'est un peu moins, il y aura nettement un ajustement à
faire, parce que l'étudiant n'aura pas les exigences requises par
l'université, par exemple, pour les programmes actuels qui sont
là. Cela est d'importance, croyez-moi!
M. Rivest: En ce moment, il n'y a évidemment rien, dans la
mesure où ces mesures sont à venir et, pour l'instant, sur les
orientations générales est-ce que le milieu universitaire soit le
Conseil des universités ou les autres, a été vraiment mis
dans le coup là-dessus, de façon à prévoir à
tout le moins?
Mme Leduc: Les universités sont toutes conscientes
je crois que dans leur mémoire, c'est très clair de
l'impact qu'auront ces mesures sur leur premier cycle universitaire et auront
espérons qu'elles le feront avec diligence à
repenser leurs programmes. Je pense qu'il faut éviter, toutefois, que ce
soit le réseau universitaire qui fasse les programmes du
collégial, pour que ça s'ajuste bien à leurs programmes.
Là-dessus, vous verrez que je ne défends pas mon
territoire ça ne m'apparaîtrait pas être à
l'avantage de l'ensemble du réseau. C'est là qu'il
m'apparaît qu'un mécanisme de coordination le plus objectif
possible pourrait permettre des poussées trop fortes ou des tutelles
déguisées de l'université sur le collégial.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: Simplement comme observation. Tout à l'heure
j'ai parlé de la coordination nécessaire entre le collège
et l'université. Je pense qu'il est important je veux simplement
reprendre une idée qui a été exprimée par madame et
peut-être la renforcer encore qu'il y ait quelqu'un qui tranche et
que, le moins possible, les intérêts des universités et des
collèges jouent dans la définition spécifique de ce que
doit être le type de formation dispensée et l'harmonisation des
programmes. Je pense que les universités du Québec sont
diablement en retard, actuellement, quant à l'adaptation de leurs
programmes à un niveau de formation que les cégeps ont su donner
ces dernières années, qui a été
accéléré et où on a fait preuve
d'énormément de souplesse. À cet égard, il va
falloir trouver le moyen d'harmoniser les programmes universitaires et de
vraiment permettre que les universités fassent preuve d'autant
d'innovation que les cégeps dans le passé.
Mme Leduc: Ce n'est pas moi qui ai dit ça, mais je suis
d'accord avec vous.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): II ne me reste qu'à remercier Mme
la présidente du Conseil des universités...
Mme Lavoie-Roux: Mme la présidente.
M. Morin (Sauvé): Je ne trancherai pas cette querelle
linguistique aujourd'hui et je m'en remettrai à Mme le président
ou la présidente, selon ce qui lui siéra le mieux. Je veux la
remercier simplement de nous avoir apporté l'éclairage du conseil
qui a été des plus utiles. Il faudra bien sûr que nous
continuions à nous entretenir de cela une fois que nous aurons sous les
yeux le rapport de la commission d'étude sur l'avenir des
universités. Merci infiniment Mme le président.
Mme Leduc: Je me permets de souhaiter longue vie aux
collèges du Québec!
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie beaucoup, Mme
Leduc. J'inviterais maintenant la Fédération des associations de
parents des cégeps à venir nous présenter son
mémoire.
Fédération des associations de parents
de cégeps
M. Pilote (Christian): M. le Président, M. le ministre,
mesdames et messieurs, la Fédération des associations de parents
des cégeps du Québec qui fut fondée en 1974 regroupe
présentement quinze associations qui couvrent, par leurs
représentations, les diverses régions de la province de
Québec.
Les buts de la Fédération des associations de parents des
cégeps du Québec sont les suivants:
Etre, au niveau collégial, par son travail et sa
compétence, une autorité consultative de la qualité de
vie, afin que la formation soit optimale;
Amener les parents à une prise de conscience plus intime face
à leur responsabilité d'éducateurs;
Propager et appliquer les principes de droit naturel des parents en
matière d'éducation et de culture;
Collaborer et encourager, par tous les moyens, les étudiants dans
leurs activités académiques, para-académiques et
sociales;
Etre à la disposition du ministre de l'Éducation, du
ministère de l'Éducation, du Conseil supérieur de
l'éducation, des cégeps, des étudiants et de tous les
autres organismes poursuivant les mêmes buts en éducation, afin de
participer aux recherches nécessaires en vue de solutionner les divers
problèmes soulevés en éducation;
Ce sont donc les principales raisons qui amènent les membres de
la Fédération des associations de parents des cégeps du
Québec à se présenter devant la commission parlementaire
de l'éducation, afin de donner leur avis sur les deux projets de loi
à l'étude, tout en tenant compte des études
déjà présentées par les parents à la suite
de la parution du livre blanc, dans le but de s'assurer que lesdites lois sont
conformes aux énoncés antérieurs et à l'objectif
visé du nouveau départ.
Le Président (M. Marcoux): Avant d'en arriver au contenu
même, est-ce que vous pourriez vous identifier et identifier vos
collègues, s'il vous plaît? J'ai oublié de vous le demander
tantôt.
M. Pilote: Alors, Christian Pilote, Président de la
Fédération des associations de parents.
Mme Raymond (Gisèle): Gisèle Raymond,
secrétaire général.
M. Mongeau (Jean-Paul): Jean-Paul Mon-geau, cégep
Montmorency.
Mme Tremblay (Colette): Mme Tremblay, parent, cégep de
Jonquière.
Mme Hamel (Denise): Denise Hamel, Alma...
M. Bonneau (Jacques): Jacques Bonneau, cégep de
Jonquière.
Mme Julien (Denise): Denise Julien, Sainte-Foy.
Mme Blanchet (Jacqueline): Jacqueline Blanchet, Sainte-Foy.
M. Pilote: Dans un avis succinct adressé au ministre de
l'Éducation en mars dernier, nous lui faisions part de notre
réticence devant l'élaboration du projet de création du
Conseil des collèges. Nous laisserons à d'autres organismes le
soin d'analyser et commenter un à un les articles de ce projet de loi.
Quant à nous, nous nous en tiendrons à un commentaire, nous
appuyant sur des citations du livre blanc et sur des questions pratiques que se
sont posées les parents.
Le premier passage du livre blanc concernant l'utilisation des fonds
publics, nous le trouvons d'ailleurs à la page 63, cela signifie
simplement que l'enseignement collégial, au même titre que les
autres niveaux d'enseignement, ne pourra plus évoluer sous le signe de
l'abondance qui a marqué les dernières années. Les fonds
publics seront administrés avec plus d'économie et leur
utilisation sera scrutée avec plus d'attention. Ce sont là autant
de raisons de miser désormais sur l'excellence plutôt que sur
l'expansion". Une autre citation dit: "Les structures du Conseil des
collèges demeureront relativement légères".
Par la suite, en étudiant les rôles et les fonctions
qu'aura à remplir le Conseil des collèges, les membres de la
Fédération des associations de parents de cégeps ont en
même temps interrogé les structures et les vues d'autres
organismes dont la responsabilité est de s'occuper d'éducation:
le Conseil supérieur de l'éducation, la Direction
générale de l'enseignement collégial et la
Fédération des cégeps.
À notre étonnement, nous avons découvert que
certaines des responsabilités que le gouvernement désire confier
au Conseil des collèges sont déjà attribuées, en
tout ou en partie, aux orga-
nismes déjà cités. Si des études sur les
rôles et fonctions de ces organismes oeuvrant au niveau collégial
ont été exécutées en regard de la création
du Conseil des collèges, elles ne sont pas parvenues jusqu'à
nous. Si tel était le cas, nous nous permettrions de le déplorer
ici, car la suite de notre propos deviendrait inutile.
Cependant, nous nous étonnons quand même de ce que
l'article 13 du projet de loi 24 donne comme fonction au futur Conseil des
collèges des tâches déjà accomplies par le Conseil
supérieur de l'éducation.
La seule différence dans les fonctions décrites au Conseil
supérieur de l'éducation et dans celles du Conseil des
collèges se trouve dans la spécificité au niveau
collégial.
Si notre connaissance du Conseil supérieur de l'éducation
est suffisante, la spécificité au conseil supérieur est du
ressort de la commission collégiale, où se retrouvent les
mêmes spécialistes que ceux nommés à l'article 2 de
ce projet de création dans le Conseil des collèges.
Donc, une première question: "Pourquoi ne pas utiliser ce qui
existe déjà au lieu de dissoudre pour reconstituer ailleurs?
Quant aux études, opinions, avis à être soumis par le
ministre de l'Éducation, certains de ceux-ci pourraient s'adresser,
à notre avis, à d'autres organismes en meilleure position
actuellement pour y répondre adéquatement.
La Direction générale de l'enseignement collégial
et la Fédération des collèges doivent, à l'heure
actuelle, remplir ces mêmes fonctions que l'on veut attribuer au futur
conseil des collèges.
Pour ce qui est des alinéas d), e), f) de l'article 14, l'endroit
privilégié pour débattre ces questions serait la
fédération des collèges, lieu naturel de concertation des
collèges, lieu de rencontre des principaux intéressés. Les
collèges se voient ainsi retirer, par cette proposition, des projets et
études où ils sont les plus intéressés et, à
notre humble avis, les meilleurs juges.
Nous croyons que le Conseil des collèges pourrait laisser
à ceux qui sont les plus concernés les fonctions et les
décisions qui sont les leurs.
Le Conseil des collèges pourrait se consacrer entièrement
à l'évaluation des collèges, évaluation que nous
désirons obligatoire et faire à date déterminée;
offrir davantage de temps, d'énergie et de compétence à la
Commission de l'enseignement professionnel. Avec l'analyse des projets de
création des nouveaux collèges et autres mandats qui pourraient
lui être confiés, sans toutefois s'immiscer dans les mandats et
fonctions d'autres organismes, il y aurait suffisamment à faire pour
mener à bien ces tâches.
Quant au rappel fait de l'utilisation des fonds publics, pour nous qui
représentons la classe sur qui pèse lourdement la tâche
fiscale, notre souci est de nous assurer que soient utilisées au
maximum, en éducation comme ailleurs, les structures déjà
en place avant de penser en créer d'autres.
C'est la multiplication de petites structures, conseils, commissions qui
finit par compliquer les systèmes et alourdir les charges
financières des populations.
C'est dans les choses simples et bien planifiées que se trouvent
sûrement le plus d'efficacité, de rentabilité, de
succès.
Nous recommandons que soit modifié ce projet de loi en
considération des fonctions remplies ou qui pourraient être
remplies par des organismes de niveau collégial possédant les
personnes qualifiées et les infrastructures adéquates; que soient
réservés au Conseil des collèges les autres rôles
mentionnés lors du projet de loi 24.
Nous recommandons aussi que, dans la composition du Conseil des
collèges, un parent soit désigné comme membre pour y
siéger et ce, après consultation avec la Fédération
des associations de parents de cégeps.
Nous souhaitons que ces réflexions puissent vous être
utiles et nous vous remercions de nous avoir permis de nous exprimer à
ce sujet.
Je demanderais à Mme Raymond de nous faire la lecture dès
recommandations au sujet de la loi 25.
Mme Raymond: Pour ce qui est du projet de loi 25, nous en avons
pris connaissance avec beaucoup d'intérêt, surtout que certains de
ces amendements répondaient à des voeux exprimés par la
Fédération des associations de parents dans un court
mémoire que nous avions déjà présenté, en
mars dernier, au ministre. (17 h 15)
Cependant, d'autres semblent vouloir maintenir un statu quo avec lequel
nous ne sommes pas d'accord et, finalement, certains nous laissent craindre une
véritable centralisation des collèges entre les mains de
l'État.
Le premier changement majeur apporté, et dont nous ne pouvons
nier l'opportunité, consiste en la nomination des membres par le
ministre de l'Éducation. Sur le sujet, nous sommes entièrement
d'accord, de sorte que les nominations se feront plus rapidement et cela
permettra ainsi de combler promptement les postes vacants et de maintenir un
équilibre dans les représentations.
Quant à la représentativité des membres
nommés, nous avions compris, dans les énoncés du livre
blanc, que le gouvernement du Québec et le ministre de
l'Éducation désiraient un conseil d'administration capable
d'être au-dessus des intérêts de groupes particuliers et en
mesure de protéger ceux de la collectivité.
En effet, dans son projet, le gouvernement semblait disposé
à prendre de telles mesures et nous citons: "... la principale
nouveauté consiste en l'obligation de répondre plus formellement
devant l'État et la collectivité de l'administration du
collège. Les conseils d'administration ne peuvent se contenter
d'être de simples comités de gestion et encore moins
l'arène où s'affronteraient les visées partisanes, voire
les intérêts de groupes de pression." Je pense que c'est inutile
que je continue les citations qui touchent les collèges.
Toute la population doit prendre en main l'administration de cette
corporation publique. Elle a les compétences voulues et les groupes que
nous favorisons peuvent les fournir. Pour les parents, ils rejoignent en cela
d'autres groupes.
Cette composition confirme le souci de protéger les
intérêts publics et répond à l'esprit même du
rapport Parent. Je pense que c'est inutile de le citer ici, les gens le
connaissent bien, depuis le temps qu'on en parle.
Pour nous, il est évident que la composition du conseil
d'administration doit avoir une nette proportion de membres venant de
l'extérieur, qui aient pour eux la prépondérance.
Nous avons discuté longuement de la proposition et nous en sommes
venus à la composition que vous voyez ici dans laquelle les membres
seraient tous nommés pour trois ans. Ce sont: deux professeurs, un
représentant des professionnels non enseignants, un représentant
du personnel de soutien, un étudiant du secteur régulier, un
étudiant du secteur des adultes, les directeur des services
pédagogiques, le directeur des services étudiants, six
socio-économiques, cinq parents et le directeur général,
principal administrateur et gestionnaire, personne-ressource, à qui nous
enlèverions le droit de vote.
Nous sommes assurés que les parties composantes du collège
peuvent très bien, au sein des comités et des commissions, avoir
une participation active à l'administration du collège, en
donnant leur avis sur les dossiers importants. Il n'est donc pas
nécessaire de maintenir une représentation supérieure des
membres de l'interne au conseil d'administration.
Ici, on demandait d'ajouter: "De plus, nous croyons que la
représentation syndicale que veulent se donner, à l'heure
actuelle, les composantes de l'intérieur, nous oblige à penser
qu'il y a là un véritable conflit d'intérêts
permanent, d'où viennent toutes les difficultés actuelles aux
conseils d'administration."
La nomination, comme nous l'avons dit tout à l'heure, devrait
être de trois ans, vu que, dans le livre blanc, en se
référant à la page 74, il était dit simplement: "La
durée de mandat demeurera de trois (3) ans et sera renouvelable."
Cette phrase n'est précédée ni suivie par aucune
indication de la durée du mandat pour les groupes nommés. Elle
semble claire et, pour nous, elle répond à une demande
formulée depuis quelques années déjà et
répétée dans notre avis au ministre de l'Éducation,
en mars dernier, au sujet du mandat des représentants des parents.
Nous insistons donc aujourd'hui afin que le mandat des parents soit lui
aussi porté à trois ans. Nous sommes des éducateurs, nous
croyons que notre intérêt dans l'éducation demeure toujours
vivace. Nos représentants aux conseils d'administration ont
simultanément des jeunes qui fréquentent le secondaire ou
d'autres le collégial et même l'université. Ils sont donc
intéressés à continuer leur participation. En plus, pour
appuyer cette demande, rares sont les jeunes, qu'ils soient au secteur
général ou au secteur professionnel, qui obtiennent leur
diplôme d'études collégiales dans la période
déterminée. Ils complètent, pour la majorité, une
session supplémentaire et nous en trouvons la preuve en nous
référant à la page 131 du livre blanc, où il est
dit: "La durée des études est donnée comme étant de
deux à quatre ans." Ceci signifie donc qu'on ajoute une
demi-année quelque part, ce qui donne quatre ans.
Dernier argument: Comme citoyens, nous sommes tout autant
intéressés que les autres représentants des autres
groupes.
En plus, par l'article 10 leur assurant de pouvoir compléter leur
mandat et n'étant plus contraints par la clause de perte de
qualité, ils auront le temps, dans un mandat complet de trois ans,
d'assimiler tous les aspects de l'administration des collèges et de
donner un plein rendement. .
Notre expérience des conseils d'administration permet d'avancer
qu'un mandat de deux ans ou moins ne peut permettre aux membres parents de
remplir la tâche qui leur est confiée avec toute
l'efficacité qu'ils souhaitent et dont ils sont capables. En outre, il
est reconnu que les membres extérieurs, les parents en particulier, sont
les plus assidus aux réunions.
Quant au mode d'élection suggéré et pouvant
être employé par l'officier désigné et permettant
d'utiliser le scrutin par la poste, nous nous y opposons.
Ce pouvoir peut être discrétionnaire et les questions qui
ont surgi de la part des parents sont: D'où viendront les mises en
candidature? Par qui seront-elles faites? Qui établira les
procédures à suivre pour un tel mode de scrutin? Comment
pourra-t-on s'assurer que les bonnes personnes se sont prévalues du
droit de vote? Les parents craignent que cette procédure ne conduise
à la fraude et à la manipulation. Nous estimons que, pour la
nomination à un poste, les personnes doivent être présentes
afin d'assurer leur disponibilité et être connues par ceux qui les
élisent.
Il se pourrait que lors de cas extraordinaires ou particuliers, afin de
légiférer sur un litige quelconque sur la nomination de
personnes, un règlement d'exception puisse être établi et
cela en vertu de l'article 18 qui concerne les pouvoirs accordés au
ministre de l'Éducation et en vertu de l'article 19 qui concerne les
pouvoirs accordés aux collèges.
Nous demandons donc que soit modifié l'article 9 concernant la
durée des mandats pour inclure les membres visés par le
paragraphe d) de l'article 8, c'est-à-dire l'article qui concerne les
parents, afin que leur mandat soit d'une durée de trois ans comme les
autres et nous demandons aussi que disparaisse la clause concernant le scrutin
par la poste.
L'article 17a qui dit que le ministre pourrait reconnaître
d'intérêt national le programme d'enseignement professionnel que
dispense un collège, cet article est demeuré un point
d'interrogation pour les parents. Que sous-tend-il? Devant ce peu de
définition, nous désirons qu'il soit plus largement défini
afin que soient connus les véritables objectifs poursuivis. Nous
désirons en outre que, si les corrections nécessaires à sa
clarification ne sont pas ajoutées, il faille le faire accepter à
l'unanimité de l'Assemblée nationale. Le respect de toute une
population nous impose le devoir de faire cette demande.
L'article 18. Les pouvoirs discrétionnaires accordés par
cet article sont étendus et répondent en partie aux demandes des
parents, lesquelles ont été formulées en mars dernier.
Cependant, nous ne désirions pas que le ministre de l'Éducation
s'assure par règlement la quasi-totalité des
responsabilités pédagogiques et administratives des
collèges.
Que par certains règlements le ministre de l'Éducation
s'assure une coordination sur le plan provincial, nous estimons qu'il doit s'en
assurer. Cependant, alors que les énoncés du livre blanc parlent
de démocratisation, de décentralisation et d'autonomie, ces
mêmes énoncés nous font craindre des pouvoirs trop
centralisés entre les mains du ministre.
Nous ne ferons que répéter ce que nous avons
déjà demandé: définir dans une loi, de façon
précise, les responsabilités des collèges, leur donner les
pouvoirs afin qu'ils assument leurs responsabilités. À vouloir
centraliser des décisions majeures, les collèges ne deviendront
alors que de passifs exécutants à pouvoirs réduits. Qui
sera intéressé alors à pareille administration? Les
pouvoirs de réglementer devraient leur être laissés en les
assurant par voie de législation qu'ils auront la possibilité
d'appliquer ces règlements.
Quant à l'article 20, tout en nous réjouissant de la
décision prise de porter le mandat des directeurs généraux
et pédagogiques de trois à cinq ans, mais la prolongation seule
de ce mandat ne réglera en rien les conditions de vie de ces mêmes
directeurs.
Ils seront toujours sujets aux tracasseries des évaluations
partiales des groupes minoritaires à buts mal définis. Nous
croyons à un règlement et à des définitions de
tâches précises leur assurant plus de sécurité afin
d'assurer leurs responsabilités sans craindre de se voir remis en
question à tout moment. Ils pourront être soumis aux mêmes
évaluations que les autres groupes dans une évaluation
institutionnelle obligatoire sans qu'entre-temps ils aient à en subir
d'autres.
Mesdames et messieurs, l'attitude de la population est encore
négative à l'égard de nos collèges. Il ne faudrait
pas que les corrections apportées ne changent que peu de chose aux
situations dénoncées.
Nous avons tenté de traduire dans ce mémoire le fruit de
certaines expériences vécues par nos membres qui siègent
aux conseils d'administration de même que les réactions de groupes
de parents qui se sont interrogés sur les renouveaux annoncés par
le gouvernement.
Nous espérons les avoir traduits fidèlement et nous
souhaitons que ces quelques remarques, venant d'une partie de la population,
seront prises en considération.
Nous vous remercions.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie de ce mémoire.
J'aimerais vous poser quelques questions. J'adresse ma première question
indistincte- ment au président ou à Mme le secrétaire.
J'imagine que vous prenez connaissance également des avis rendus publics
par le Conseil supérieur de l'éducation. Je suis un peu
étonné de vous entendre dire que vous n'avez jamais entendu
parler de la création du Conseil des collèges, à titre de
projet. Est-ce que vous saviez que c'est une recommandation du Conseil
supérieur de l'éducation que de créer le Conseil des
collèges? Si vous le saviez, pourquoi n'en faites-vous pas état
dans votre mémoire?
Mme Raymond: Je pense, monsieur, que cela a pu nous
échapper, vu le laps de temps très court qui nous a
été donné pour étudier les projets de loi tels que
formulés à l'heure actuelle. Nous avions eu connaissance du
mémoire Nadeau. Je pense que la formulation qui était faite dans
le mémoire Nadeau n'était pas tout à fait la même
que celle qu'il y a ici à l'heure actuelle dans le projet de loi.
Maintenant, ce que nous venons vous apporter ici, c'est ce que les parents ont
décidé de dire, même en ayant tous ces renseignements.
M. Morin (Sauvé): Bon. Vous êtes donc consciente que
dans son avis... Oui?
Mme Raymond: Je m'excuse, M. le ministre, mais je pense que les
gens ne sont pas contre la création d'un Conseil des collèges
comme tel. Ils le souhaitent, mais voudraient voir les mandats qu'on lui donne,
peut-être un petit peu diversifiés et autres.
M. Morin (Sauvé): Nous allons explorer cela ensemble. Je
suis heureux de vous entendre dire que les parents ne sont pas contre la
création d'un Conseil des collèges, parce qu'à lire le
mémoire, on aurait pu, à tout le moins, se poser la question.
Vous êtes donc consciente que dans son avis du 20 février 1979, le
Conseil supérieur de l'éducation nous a dit ceci, c'est un avis
public que vous avez certainement eu, puisque cela portait sur un sujet qui
vous tient à coeur: II reconnaît l'utilité d'organismes
consultatifs de niveaux qui présentent des avis sur des questions
spécifiques à leur champ respectif de compétence. Il est
conséquemment d'accord avec la création d'un Conseil des
collèges. Vous étiez au courant de cela, n'est-ce pas?
Mme Raymond: Si, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Très bien. Cela étant,
abordons maintenant la question des fonctions que pourrait avoir ce conseil.
D'après vous, d'après les parents, quelles seraient les fonctions
naturelles qu'on pourrait vouloir confier à un Conseil des
collèges?
M. Pilote: Disons que pour notre organisme, la consultation que
nous avons tenue auprès des parents, il semble que de façon quasi
unanime, la fonction de l'évaluation pourrait très bien lui
revenir comme telle. Pour ce qui est des autres
fonctions actuelles, il semble qu'il y ait de la duplicité,
à savoir que, par exemple, le Conseil supérieur de
l'éducation, par l'intermédiaire de sa commission
collégiale, la Fédération des cégeps, ces
organismes jouent déjà des fonctions qui sont, semble-t-il,
dévolues ou voulues par la création des collèges, alors
que, présentement, l'évaluation, tant l'évaluation
institutionnelle que l'évaluation des contenus, l'évaluation de
la qualité de l'enseignement, nous la verrions, à ce moment,
jouée par le Conseil des collèges comme tel.
M. Morin (Sauvé): J'imagine que si nous créons le
Conseil des collèges, la commission qui traite des collèges au
sein du Conseil supérieur n'aura plus de raison d'être
particulière, et qu'il faudra que les conseils se concertent sur des
questions qui intéressent les deux conseils et aussi, peut-être,
cela reste à voir du point de vue du Conseil
supérieur de l'éducation, des questions qui transcendent les
niveaux. Cette question est encore à régler. Est-ce que vous
seriez d'accord pour que le Conseil des collèges, à supposer
qu'il soit l'organisme spécifiquement chargé du niveau
collégial, est-ce que vous seriez d'accord pour qu'il propose des
objectifs à la population, au gouvernement, au ministre, qui doivent
être poursuivis pour que soit assuré le développement de
l'enseignement collégial? Est-ce que vous seriez d'accord pour qu'il
puisse réviser ces objectifs de temps à autre et faire des
recommandations en conséquence au ministre et au gouvernement? (17 h
30)
M. Pilote: Nous serions évidemment d'accord, mais,
à ce moment-là, on ne voit plus la nécessité
d'avoir, comme telle, la Commission collégiale, ni la
Fédération des cégeps non plus comme telle.
M. Morin (Sauvé): Pour l'instant, parlons des autres
organismes consultatifs comme, par exemple...
M. Pilote: Ah bon!
M. Morin (Sauvé): ... la Commission collégiale. Je
pense que là, nous sommes d'accord.
Mais, à supposer que la Commission de niveau collégial
n'existe plus et qu'on s'en réfère désormais au Conseil
des collèges, vous seriez d'accord pour que le ministre puisse avoir
recours à un organisme compétent pour lui donner des avis sur les
objectifs généraux, par exemple.
M. Pilote: Oui, je pense que nous serions tout à fait
d'accord avec cette politique.
M. Morin (Sauvé): Bon! C'est un bon point à
préciser.
Mme Raymond: J'aimerais bien, M. le ministre, justement, apporter
quelque chose là-dessus. Les parents voyaient que la Commission
collégiale du Conseil supérieur à l'heure actuelle jouait
ce rôle ou si elle ne l'a pas joué exactement, c'est probablement
parce que le ministre de l'Éducation n'a pas demandé au Conseil
supérieur des mandats dans ce sens-là. C'est de cette
façon que les parents, avec les informations qu'ils possédaient,
ont amorcé cette discussion.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Raymond: Ils se sont posé la question justement, en
disant: Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité qu'on reprenne les
mandats confiés au Conseil supérieur par le biais de sa
Commission collégiale, qu'on lui définisse d'une autre
façon si ça ne répond pas exactement, à l'heure
actuelle, et qu'on laisse à un Conseil des collèges certaines
autres choses bien spécifiques comme, par exemple vient de le dire le
président, l'évaluation que nous, nous demandons obligatoire et
qui donnerait, à ce moment-là, passablement de boulot à un
conseil des collèges et, par la suite la création de nouveaux
collèges puisque c'est inscrit dans le projet de loi. Il y a donc dans
l'air certains projets qui pourraient être élaborés. Je
pense qu'il y aurait là des études assez poussées à
faire auprès d'une population, avec tout ce que comporte la
création d'un collège.
Ensuite de ça, il reste aussi que vous parlez d'une commission
professionnelle. Je pense que là aussi, il est urgent que quelqu'un
prenne en main l'enseignement professionnel au niveau collégial. Il y a
beaucoup de boulot et nous voyons là encore un autre mandat pour le
Conseil des collèges où on lui donnerait suffisamment de travaux
pour le remplir, surtout dans ce que disait le livre blanc, dans la structure
légère qu'on voulait voir pour le Conseil des
collèges.
M. Morin (Sauvé): Mais, à supposer que nous
reconnaissions au conseil un rôle d'évaluation. On va en parler un
petit peu plus loin. Forcément, comme vient de le dire M. le
Président, c'est quand même important, à ce
moment-là, qu'il sache quels sont les objectifs, parce qu'on ne peut pas
faire de l'évaluation si on n'a pas d'objectifs. Donc, on se met
d'accord sur cette idée que ce conseil pourrait me donner des avis sur
les objectifs généraux de l'enseignement collégial. Je
pense que ça, c'est d'une logique imperturbable. Autrement, on ne peut
pas lui demander d'évaluer s'il n'y a pas de critères. Bon!
Maintenant que le Conseil supérieur de l'éducation nous a
fait la recommandation de créer le Conseil des collèges, je pense
bien qu'il va falloir trouver des mécanismes de concertation entre les
collèges.
Est-ce que vous pensez que les parents devraient pouvoir s'adresser au
Conseil des collèges pour, par exemple, lui présenter des
requêtes au sujet de l'enseignement collégial? Est-ce que, par
exemple, le Conseil des collèges pourrait solliciter des opinions,
recevoir et entendre des recommandations sur toutes questions qui
intéressent l'enseignement collégial? Pensez-vous que ce serait
raisonnable de lui donner ce genre de compétence?
M. Pilote: Je pense que oui, parce qu'en fait, il y aurait quand
même un interlocuteur au lieu d'en retrouver deux ou trois.
Présentement, ce qui arrive, c'est qu'ils ne savent pas à qui
s'adresser. Une partie peut peut-être aller, par exemple, au Conseil
supérieur, l'autre partie à la Fédération des
cégeps. C'est évident que s'il n'y a qu'un seul organisme en
place, c'est certainement plus facile d'avoir du dialogue et d'être
capable, à ce moment-là, de donner nos avis et d'amener nos
doléances.
M. Morin (Sauvé): Oui. Pensez-vous que ce Conseil pourrait
également me soumettre, à moi, comme ministre de
l'Éducation, qui ai souvent besoin d'avis et d'être
conseillé, pensez-vous que ce Conseil des collèges pourrait, par
exemple, me faire des recommandations sur tout aspect de l'enseignement
collégial?
M. Pilote: Je pense que nous pouvons croire à la
possibilité certaine d'une telle organisation.
M. Morin (Sauvé): Je crois effectivement que ce serait
fort utile, n'est-ce pas, que je puisse m'appuyer sur un conseil vraiment
spécialisé dans ces questions.
Pensez-vous que le collège pourrait faire effectuer des
études ou des recherches qu'il estimerait nécessaires à
l'exercice de ses fonctions? J'entends les fonctions du conseil, bien
sûr!
Mme Raymond: Je pense que sur ce point, M. le ministre, il va de
soi qu'un conseil, lorsqu'il est créé, a besoin de faire des
études et d'aller chercher des avis pour mener à bien ses
tâches, comme vous le dites.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Raymond: Mais lorsque les parents ont étudié,
en regardant les fonctions et ce que la loi avait donné au conseil
supérieur, et qu'ils retrouvaient, par exemple: solliciter des opinions,
recevoir et entendre des requêtes et suggestions du public en
matière d'enseignement collégial, alors ils se disaient: Halte
là! Ce sont les mêmes définitions de tâches qu'on
avait données au Conseil supérieur de l'éducation.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Raymond: Le Conseil supérieur de l'éducation,
lui, à ce moment, le faisait par le biais d'une commission qu'il
s'était donnée, commission et comité que lui donnait la
loi, et se disait... Je vais citer de mémoire ce qu'un parent disait,
parce que je transmets ce qu'avaient dit les parents lors de ces rencontres; il
a dit: Si le ministre de l'Éducation et le ministère de
l'Éducation sont insatisfaits des avis qui viennent de la part du
Conseil supérieur, peut-être qu'il pourra aller le leur dire et
leur demander de faire autrement. Cela disait tout simplement ce que je vous ai
dit tout à l'heure; si les organismes en place ne répondent pas
absolument, à l'heure actuelle, aux tâches qui devraient
être accomplies par ces organismes, pour donner des avis au ministre,
peut-être qu'il pourrait leur demander de changer un peu leurs
structures, et même, amender la loi du Conseil supérieur, demander
à la Fédération des collèges de se donner d'autres
objectifs et leur faire remplir des mandats tels quels. Ce entre quoi les
parents en avaient le plus, c'était surtout quand on arrivait à
la définition de ces pouvoirs et surtout sur cette phrase où on
disait: Le Conseil des collèges aura une structure simple. Vous savez
que les parents, lorsqu'ils se rencontrent, ce sont des citoyens sur qui
pèse le fardeau fiscal, je pense que cela a été dit, on
nous avait demandé d'insister beaucoup là-dessus.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Raymond: Lorsqu'ils voient que de nouvelles structures sont
créées et qu'on revient constamment avec de nouveaux
comités, de nouvelles commissions, etc., ils se disent: À la fin,
c'est nous qui payons la note, quelle sera-t-elle?
C'est dans ce sens que les parents se sont interrogés et ont dit:
Si on veut conserver une structure légère, il serait
peut-être bon qu'on donne certains rôles bien spécifiques au
Conseil des collèges, comme il l'a été mentionné;
l'évaluation, qu'on veut voir institutionnelle, donc, dans l'optique des
parents, le mandat d'une évaluation obligatoire était acquis, et
l'enseignement professionnel étant une autre chose, on disait aussi que
la loi 24 donnait, au Conseil des collèges, certains autres mandats qui
lui seraient suffisants avec sa structure légère.
M. Morin (Sauvé): Oui.
Mme Raymond: C'est la raison pour laquelle, finalement, on
demande au ministre: Redéfinissez ce qui existe. Quand vous l'aurez
redéfini et aurez confié de nouveaux mandats, donnez au Conseil
des collèges ce qu'il y aura.
M. Morin (Sauvé): Je suis heureux, tout de même, de
voir qu'une fois ce Conseil des collèges créé, vous soyez
d'accord avec les quatre objectifs qui lui sont octroyés à
l'article 13 du projet de loi.
Passons maintenant à la question de l'évaluation. À
l'article 17 du projet de loi, vous savez que nous proposons de créer,
auprès du collège justement, une commission d'évaluation
et une commission d'enseignement professionnel c'est ce à quoi
vous avez fait allusion il y a un instant. Jusqu'où devrait aller
l'évaluation que nous voulons confier à cette commission? Est-ce
que vous pourriez nous donner... J'ai senti que vous insistiez beaucoup
là-dessus et que vous nous disiez en quelque sorte: Quant à
créer un Conseil des collèges, donnez-lui des fonctions
spécifiques dans ce domaine; c'est ce que nous voulons faire. J'aimerais
savoir jusqu'où vous verriez cette compétence d'évaluation
s'étendre.
M. Pilote: II y avait d'abord, au départ, un doute dans
notre esprit: C'était que le mot "facul-
tatif" avait été inséré comme tel, dans le
livre blanc, face à cette question d'évaluation. Nous
étions fort inquiets et nous disions: Si on fait une évaluation
et qu'on organise toute une batterie pour évaluer les contenus, les
contenants, etc., et si on la met facultative, c'est aussi bien de ne pas en
mettre à ce moment-là car qui va s'en servir? Est-ce que le
cégep X va s'en servir? Le cégep Y ne s'en servira
peut-être pas. À ce moment-là on se retrouve dans à
peu près la même situation qu'actuellement. On fait
l'évaluation parfois à la bonne franquette, ce qui justement chez
nous, sème un certain doute sur la question de l'évaluation.
Alors on s'est dit ceci: II faudra que l'évaluation soit
obligatoire. Il ne s'agit pas de faire l'évaluation avec un examen
global peut-être comme on ferait à travers la province au niveau
secondaire, mais quand même une forme d'évaluation qui puisse,
justement, être d'une certaine uniformité parmi les
cégeps.
M. Morin (Sauvé): Oui. Évidemment, c'est une
compétence tout à fait nouvelle parce que le Conseil
supérieur de l'éducation n'a pas ce genre de service
d'évaluation, comme vous le savez. C'est déjà quelque
chose de différent par rapport à ce qui existe
déjà. Donc, à ce seul point de vue, je pense que la
création du conseil s'imposerait. Maintenant, jusqu'où doit-on
aller? Vous nous dites: II faudrait que ce soit obligatoire. Nous,
effectivement, avons pensé que si l'organisme existait, on y aurait
recours. Vous savez qu'il y a au moins un cégep de la région de
Québec qui a été obligé récemment d'avoir
recours à un mécanisme du genre. L'un ou l'autre des organismes
voudra peut-être tout à l'heure nous en dire deux mots de cette
évaluation qui va aboutir ces jours-ci justement. Il y a un
comité ad hoc qui a été créé sous la
présidence de M. Arthur Tremblay, le premier sous-ministre au
ministère de l'Éducation, qui va faire rapport à l'un des
cégeps de la région de Québec sur les problèmes
pédagogiques qui s'y posaient.
Ne pensez-vous pas qu'un cégep qui a des problèmes va
avoir tendance à aller chercher de l'expertise comme cela a
été le cas pour ce collège?
M. Pilote: Ce serait bien souhaitable, mais est-ce que dans la
réalité ce sera autre chose? On n'est pas des devins pour deviner
ce qui va se passer.
M. Morin (Sauvé): Maintenant, jusqu'où cette
évaluation devrait-elle aller? Est-ce qu'elle devrait porter sur les
programmes, les enseignements, l'enseignement de chaque enseignant?
M. Pilote: C'est-à-dire que pour nous, quand on dit
l'évaluation du contenu, évidemment que c'est pour s'assurer de
l'uniformité au sujet du contenu des programmes, de façon que
d'un cégep à l'autre, il n'y ait pas des contenus
différents.
Par exemple, on s'est retrouvé... Vous vous rappelez le
problème de la philosophie qu'on a vécu à travers certains
cégeps, de façon que s'il y avait peut-être un type
d'examen, sans nécessairement aller dans tous les détails, au
moins sur les grands principes, que l'on puisse se rendre compte justement que
le contenu qui a voulu être donné dans une espèce de cahier
comme on avait avant, s'assurer que cette matière ait été
couverte, de façon que l'étudiant ne soit pas, au niveau
universitaire devant des contenus différents.
Il y aurait donc cette forme d'évaluation sur le contenu et il y
aura aussi peut-être cette forme d'évaluation sur la
qualité comme telle de l'enseignement, de façon qu'on ait
justement un produit fini à la fin de ces deux, trois ou quatre ans,
produit fini qui soit valable, vraiment valable, qu'il ait reçu les
cours substantiels et qu'il y ait retenu quand même un certain bagage et
qu'il en ressorte enrichi.
M. Morin (Sauvé): Oui, je pense qu'on peut convenir avec
vous que c'est important qu'on puisse comparer les programmes d'un endroit
à l'autre; d'ailleurs, l'article 13 dont nous discutions il y a un
instant, quand vous approuviez l'un après l'autre les objectifs que nous
voulons donner au conseil, dit bien clairement qu'on peut proposer des
objectifs, qu'on peut soumettre au ministre de l'Éducation des
recommandations sur toute question concernant l'enseignement collégial,
etc. Donc, ça pourrait faire l'objet de recommandations de ce
genre-là. Jusqu'où peut-on aller pour s'assurer que les
programmes sont effectivement appliqués? Iriez-vous jusqu'à aller
dans chaque classe, par exemple?
M. Pilote: Je ne pense pas qu'il faille être tatillon
à ce point-là et aller voir même le cahier de
préparation de classe du professeur. Il faut quand même rester
dans des grands principes généraux.
M. Morin (Sauvé): Techniquement, jusqu'où peut-on
aller?
M. Pilote: Évidemment, pour nous, se prononcer sur la
question comme vous la posez, je pense que c'est difficile d'y répondre
avec précision. (17 h 45)
M. Morin (Sauvé): Effectivement, c'est fort délicat
et c'est la raison pour laquelle nous avons l'intention de procéder avec
beaucoup de circonspection dans un domaine où les tenants et
aboutissants sont à étudier avec soin avant de s'engager.
J'aurais une dernière question; je voudrais donner la chance
à mes collègues de la commission de vous interroger. Vous nous
parliez tout à l'heure de la fédération des cégeps
et vous nous disiez: Ils exercent déjà un certain nombre de
compétences, pourquoi créer maintenant un conseil qui pourrait
leur enlever ou faire des choses qu'ils font déjà?
Pourriez-vous nous dire spécifiquement ce que fait la
Fédération des cégeps, que viendrait
dédoubler le Conseil des collèges? Pourriez-vous me dire
également comment est composée la Fédération des
cégeps? Vous savez, bien sûr, que les directeurs
généraux y jouent un rôle considérable. Cela
étant et puisque vous êtes prêt à reconnaître
un rôle considérable aux directeurs généraux,
comment se fait-il que vous les excluiez du conseil d'administration lorsque
vient le moment de prendre le vote?
M. Pilote: Nous n'excluons qu'une seule personne, seulement le
directeur général.
M. Morin (Sauvé): Oui, le DSP y reste, mais le DG n'est
là que comme observateur, en tout cas, il n'a pas le droit de vote.
Je vois là une certaine distorsion; vous êtes prêt
à reconnaître à la Fédération des
cégeps, où le rôle des directeurs généraux
est celui qu'on connaît, des compétences sur lesquelles porte ma
question, puisque vous nous avez dit qu'il y aurait dédoublement.
Lorsque vient le moment de parler du conseil d'administration, vous les excluez
du droit de vote, je cherche la logique qui lie ces deux propositions.
M. Pilote: La raison qui a fait naître cette espèce
de consensus au niveau de notre fédération, c'est justement pour
éviter qu'il y ait ces conflits d'intérêts, à savoir
que si un vote est pris et qu'il a à appliquer cette décision et
qu'il a voté contre ou pour, ça le place parfois dans des
drôles de situations.
M. Morin (Sauvé): Ce serait vrai pour le DSP aussi.
M. Pilote: Peut-être moins parce que le directeur
général a un rôle prépondérant à jouer
au niveau de l'administration du collège.
M. Morin (Sauvé): Je comprends la nature de votre point de
vue là-dessus. Alors, où est le dédoublement entre la
fédération des cégeps, telle qu'elle existe actuellement,
et le Conseil des collèges? Qu'est-ce que vous verriez qui devrait
rester à la fédération des cégeps, où on
connaît le rôle des directeurs généraux, par rapport
au Conseil des collèges?
Mme Raymond: Si vous me permettez, à l'article 14, il y a
sûrement deux choses que la fédération peut se
réserver, c'est le plan de répartition par collège des
programmes d'enseignement collégial et le projet de création de
nouveaux programmes d'enseignement. Je pense qu'ils ont en main toutes les
connaissances voulues au sein de la fédération pour pouvoir
discuter et donner des avis valables sur ce sujet. C'est dans ce sens que les
parents ont abordé la question.
Maintenant, M. le ministre, si vous me le permettez, j'aimerais
revenir...
M. Morin (Sauvé): II faudrait éclaircir cela
jusqu'au fond, pour être bien sûr qu'on se comprend.
Mme Raymond: Oui.
M. Morin (Sauvé): Vous nous dites, d'une part: On ne peut
pas les faire voter, parce qu'ils pourraient se trouver en conflit
d'intérêts au sein du conseil d'administration. C'est le
président qui disait cela il y a un instant.
Maintenant, vous nous dites: On pourrait confier à la
fédération des cégeps, où on retrouve les
mêmes directeurs généraux aux postes que vous savez, on va
leur confier des fonctions d'arbitrage entre les collèges, par exemple.
Vous ne trouvez pas qu'ils vont se trouver en conflit d'intérêts
là aussi?
Mme Raymond: Peut-être. Mais le fond du problème,
lorsque les parents ont décidé d'enlever le droit de vote,
c'était en relation, justement avec son poste, le mandat qu'il a
à exécuter pendant une durée de trois ans aux conseils
d'administration. Cela peut paraître simpliste, vous savez, les
mémoires que vient de présenter l'association des parents.
M. Morin (Sauvé): Non.
Mme Raymond: Vous semblez vouloir nous prouver que nous avons
commis bien des erreurs en venant présenter...
M. Morin (Sauvé): Je veux comprendre la portée de
ce que vous me dites, madame. C'est tout.
Mme Raymond: Ce que nous voulons apporter ici, c'est ce que des
parents, pendant deux jours, ont étudié. Ils en sont venus
à cette conclusion. Ils avaient en main toute la documentation
nécessaire. S'ils en sont venus à de telles propositions, c'est
que, par leur présence aux conseils d'administration, ils ont vu
détruire des hommes, complètement, avec pratiquement plus
d'avenir devant eux, dans le réseau.
C'est un peu sur... C'est peut-être très émotif, ce
qui les a amenés à parler de leur enlever le droit de vote. Mais
il reste quand même qu'ils sont les exécutants à la suite
des réunions du conseil d'administration, ils sont ceux qui viennent
porter les mandats. Et ils permettaient aussi et c'est dans cette
optique que les parents voulaient le voir aux membres du conseil
d'administration de jouer pleinement leur rôle et d'assumer parfaitement
eux-mêmes leurs décisions. Or, à l'heure actuelle, par
certains groupements, il est reproché aux représentants
extérieurs des conseils d'administration de ne décider que comme
le vote du directeur général. C'était dans cette optique,
on voulait que les membres soient véritablement responsables par une
décision qu'ils auraient prise, en approfondissant davantage leurs
dossiers. C'est tout simplement pour cela et pour protéger des
carrières d'hommes qu'on détruit allègrement sous divers
prétextes. Cela rejoint aussi l'évaluation dont vous parliez tout
à l'heure. L'évaluation que les parents veulent voir, ils la
veulent obligatoire, pour les personnels, pour
l'ensemble des programmes et Ils le veulent aussi pour l'ensemble des
étudiants, pour s'assurer que la qualité de l'enseignement qu'on
leur a dispensé est véritablement là et que, lorsqu'on
décerne un DEC, que ce ne soit plus un DEC à rabais comme nos
enfants ont eus jusqu'à maintenant.
On veut que les enfants qui viendront aient une qualité
d'enseignement, avec un personnel véritablement reconnu qualifié
dans ce qu'il dispense et une institution qui, elle aussi, fonctionne en
fonction d'étudiants et non pas en fonction de constants conflits qu'il
faut régler.
M. Morin (Sauvé): Bien. Veuillez croire, madame, que nous
sommes en sympathie sur plusieurs des objectifs que vous venez de mentionner.
D'ailleurs, ce sont ceux en définitive de cet énoncé de
politique.
Une dernière question. Si nous créons ce conseil des
collèges, est-ce que vous pensez que nous devrions consulter votre
association pour la nomination de certains membres de ce conseil?
Mme Raymond: Je pense que le mémoire le dit, M. le
ministre, c'est-à-dire que nous devrions être consultés.
Les parents ont demandé qu'un parent siège à ce conseil.
Inévitablement, les parents veulent être consultés sur la
nomination des membres.
M. Morin (Sauvé): Je pense que ce serait probablement
souhaitable, effectivement, un parent. J'imagine que vous n'auriez pas de
difficulté à en trouver un parmi vous qui soit compétent,
qui ait l'expérience. Je pense que cela va s'imposer. On n'a pas
d'engagement solennel, parce que c'est tellement difficile d'équilibrer
toutes les représentations nécessaires, mais je pense que vous
avez raison.
M. le Président, je pourrais continuer à m'entretenir
pendant des heures avec des représentants des parents, mais je pense
qu'il faut maintenant que je cède la parole à mes
collègues.
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je voudrais
remercier les représentants de la Fédération des
associations de parents des collèges du Québec pour leur
mémoire. Je veux les féliciter pour leur courage. Ce n'est pas
facile de venir devant une commission parlementaire et d'avoir ce courage.
Là, je fais abstraction du gouvernement qui est en place, de quelque
gouvernement que ce soit. Quand on est en opposition avec un dossier qui met en
cause des principes qui nous apparaissent fondamentaux quant à
l'amélioration, dans le cas qui nous occupe, de l'éducation, je
pense que c'est heureux qu'il se trouve des gens qui soient capables de venir
le dire. Je pense que le parallèle que je fais, c'est un peu avec
là commission parlementaire à laquelle j'assistais non pas l'an
dernier, mais la semaine dernière, où on est venu encenser un
ministre, mais je pense qu'à ce moment-ci, je veux le signaler. J'ai
bien observé la tactique du ministre qui, voyant que vous faisiez
opposition non pas à un conseil des collèges ce n'est pas
ce qui est dans votre chose mais à la vocation de ce conseil des
collèges et aux fonctions qui lui sont réservées, voyant
que vous aviez exprimé des réserves.
Ainsi, c'était fort amusant de voir à l'article 13 le
ministre vous poser A, B, C, D successivement pour vous demander si vous
étiez bien d'accord avec cela. Évidemment, tout le monde est
d'accord avec des grands objectifs comme cela, mais le problème que vous
avez posé, c'est vraiment relié à la multiplication des
structures et à la meilleure utilisation possible des structures qu'on
a, si on doit en créer de nouvelles. Je pense que c'est le message que
vous êtes venu nous porter. C'était agssi simple que cela. Le
ministre voudrait bien que les gens lui disent: C'est bien beau, votre Conseil
des collèges, tel quel, etc. Je suppose que pour un ministre, c'est
d'essayer de vendre sa salade. Je ne sais pas, c'est peut-être normal. Je
pense qu'il ne faut quand même pas contourner les difficultés et
évidemment recevoir les représentations que les gens font
à leur mérite, telles qu'elles sont.
J'aurais une question à vous poser. D'ailleurs, c'est vous qui le
dites, peut-être que la première question ira au ministre, parce
que moi aussi, je suis dans la même ignorance que vous. C'est
peut-être le fait que je n'ai pas 2000 fonctionnaires derrière
moi.
À la page 4, vous dites: Si des études sur les rôles
et fonctions de ces organismes, oeuvrant au niveau collégial ont
été exécutées en regard de la création du
Conseil des collèges, elles ne sont pas parvenues jusqu'à nous.
Si tel était le cas, très modestement, vous dites: Nous nous
permettrions de le déplorer ici, car la suite de nos propos deviendrait
inutile.
J'aimerais demander au ministre s'il y a de telles études qui
existent sur la façon dont ces organismes d'éducation, conseil
supérieur, Conseil des universités, se sont acquittés de
leur rôle. Pour décider de les modifier, il faut quand même
se baser sur certains principes. Est-ce que...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puisque le
député de L'Acadie m'en donne l'occasion, je voudrais dire une ou
deux choses. Je me suis tenu coi en dépit des intentions qu'elle me
prêtait. Elle n'a cessé depuis le début de cette commission
de me prêter des intentions. Je proteste. J'ai le droit de m'entretenir
avec nos invités. J'ai le droit de comprendre leurs pensées. Vous
n'avez pas à m'imputer des motifs. Je n'ai pas à répondre
aux questions du député de L'Acadie. Nous ferons cela au moment
de l'étude article par article. Nous sommes là pour entendre nos
invités.
M. Rivest: Quelle modestie!
Mme Lavoie-Roux: À tout événement, il est
trois minutes avant 18 heures. Je pense que l'observation que j'ai faite
n'avait pas pour but
d'imputer quoi que ce soit au ministre. Toute la salle a
été témoin de la façon que vous avez
procédé. On pourrait aller demander aux invités leurs
opinions, mais c'est à eux de juger, et non pas à vous, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Cessez donc de faire de la politique
avec des choses qui sont plus sérieuses que ça.
Mme Lavoie-Roux: Bon! Cela, c'est un autre argument très
facile.
M. Rivest: Le bien et le mal.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes surtout offusqué que
quelqu'un ne soit pas venu vous dire: C'est beau, bon et bien! Non, je vais me
retenir, parce que...
M. Morin (Sauvé): Mais oui, retenez-vous!
Mme Lavoie-Roux: ... je pourrais en ajouter bien davantage. Il
n'a pas voulu me répondre, le ministre. Je voulais aussi savoir si les
études avaient eu lieu, tel que vous le demandez à la page 4,
parce que moi-même, j'étais dans l'ignorance à savoir s'il
y en avait eu.
Il y a un autre problème que vous soulevez, c'est celui,
évidemment, de la centralisation qui apparaît à travers les
deux projets de loi. Je voudrais vous demander, par contre... Il me semble
quand même y avoir une certaine contradiction dans les propos que vous
avez tenus.
D'une part, moi, je suis portée à être d'avis avec
vous qu'il y a évidence de centralisation dans les deux projets. Par
contre, quand vous discutez du problème d'évaluation, vous dites:
II faudrait de l'évaluation d'une façon obligatoire. C'est un
souci qui a été manifesté ou exprimé à
plusieurs reprises. Mais où voyez-vous ce Conseil des collèges,
à qui donneriez-vous une fonction d'évaluation, selon la
recommandation que vous faites? Jusqu'à quel point, dans votre esprit,
ce conseil devrait-il s'immiscer dans l'évaluation des institutions
elles-mêmes? Parce que là, ce serait quand même un autre
palier qui viendrait, jusqu'à un certain point, s'ingérer dans le
fonctionnement d'un collège. Est-ce que vous avez réfléchi
à ça? D'une part, vous êtes contre la centralisation et
c'est évident que ce projet de loi est dans le même esprit que le
livre orangé du ministre de l'Éducation. Il n'aimera pas
ça, encore une fois, mais il faut quand même dire les choses
telles qu'elles sont. C'est un projet qui vise à la centralisation
toujours plus grande du ministère de l'Éducation. (18 heures)
Par contre, je sens chez vous aussi cette espèce d'ambivalence.
D'une part, vous voulez de la décentralisation et, d'autre part, vous
dites qu'il faut de l'évaluation. Je suis d'accord avec vous pour qu'il
y ait de l'évaluation, mais comment devraient être
réparties les responsabilités de cette évaluation?
Devraient-elles être laissées aux collèges qui pourraient,
par exemple, se servir d'outils que le conseil leur préparerait, ou
est-ce que les conseils eux-mêmes devraient avoir des
responsabilités à l'égard de l'évaluation des
institutions? Quand je dis: L'évaluation des institutions, c'est tout ce
que ça peut comporter!
Mme Raymond: Lorsque nous avons discuté,
d'évaluation, nous croyions que l'évaluation obligatoire devait
être décidée par le ministère de l'Éducation
lui-même et qu'à la suite de ça, au Conseil des
collèges, on confiait le soin d'offrir aux collèges les outils,
que les collèges faisaient eux-mêmes leur évaluation et
que, à la suite de ça, les résultats de ces
évaluations étaient étudiés par le Conseil des
collèges, qui recommandait aux collèges les améliorations
nécessaires à apporter pour répondre à certains
critères de qualité que se serait donnés le réseau
collégial.
C'est dans ce sens que les parents ont abordé la discussion et
probablement qu'on a mal explicité cette chose, mais c'est dans ce sens
que ça avait été abordé. C'est-à-dire que le
Conseil des collèges ne faisait, en fait, que fournir les instruments au
départ et analyser par la suite les évaluations et faire
certaines recommandations que les collèges devraient mettre en
application par la suite.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je demanderais la
suspension du débat. Je m'excuse auprès de nos invités,
mais je ne pense pas qu'on puisse, dans cinq minutes, terminer la
période des questions. Pouvez-vous revenir après souper? Sans
ça, ça va retarder...
Le Président (M. Marcoux): À moins que les membres
de la commission préfèrent terminer immédiatement.
M. Le Moignan: Cela dépend combien de minutes on devrait
ajouter.
M. Morin (Sauvé): Nous, nous sommes prêts, pour
accommoder tout le monde, à continuer pendant peut-être un quart
d'heure, si ça peut suffire, et même jusqu'à 18 h 30.
M. Le Moignan: Quitte à recommencer à 20 h 15.
M. Morin (Sauvé): Quitte à recommencer un peu plus
tard avec les autres. Cela permettrait de libérer ces personnes. Enfin,
nous sommes à votre disposition!
Le Président (M. Marcoux): D'accord pour continuer au
moins 15 minutes?
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord pour continuer jusqu'à
18 h 30, mais à condition qu'on puisse recommencer plus tard.
Le Président (M. Marcoux): Oui. M. Morin
(Sauvé): Oui.
Mme Lavoie-Roux: À ce moment-là, je suis
d'accord.
L'autre problème que vous soulevez, c'est celui de la formation
du conseil d'administration statué dans la loi 25. Je pense que vous
avez très bien situé le problème en vous
référant à des extraits du livre blanc qui l'avaient
diagnostiqué tel que vous le présentez dans vos recommandations,
peut-être pas nécessairement quant à la distribution des
représentants, mais à la nécessité que les conseils
d'administration ne peuvent se contenter d'être de simples comités
de gestion et encore moins l'arène où s'affronteraient les
idées partisanes, voire les intérêts des groupes de
pression. Cela est une expression d'opinion ou un diagnostic qui avait
été fait, même avant la production du livre blanc sur les
collèges, avant même que ce gouvernement soit au pouvoir.
Je pense que c'est le problème, un des problèmes en tout
cas qu'on a sentis depuis des années dans l'administration des
cégeps. Alors, je pense que vous le rapportez et les recommandations que
vous faites et je retiendrais plutôt celle-là que la
distribution exacte que vous faites en ce sens que la majorité
des membres doivent venir de l'extérieur. Le ministre aime souvent
comparer l'autonomie des cégeps, c'est-à-dire faire une analogie
entre le fait que les commissions scolaires n'ayant pas de ressource autonome
de financement ne sont pas plus à plaindre que les cégeps et les
universités.
Réciproquement on pourrait dire aussi que les commissions
scolaires prévoient que les commissaires d'école ne doivent pas
être employés de la commission où ils exercent le poste de
commissaires justement pour éviter le conflit d'intérêts.
Par contre, je pense qu'il faut bien reconnaître que les conseils
d'administration des cégeps qui ont été prévus par
la loi 21 voulaient être une expérience de participation qui,
malheureusement, ne s'est pas avérée aussi heureuse qu'on
l'aurait souhaité.
Je pense que le fait que vous faites valoir, à savoir que la
majorité des membres doivent venir de l'extérieur, me semble
très juste. Une question sur la nomination des membres que vous
prévoyez. Est-ce que vous ne trouvez pas... Évidemment c'est 19
membres, comme il existe présentement 19 membres. Est-ce que, comme
fonctionnement de conseil d'administration, vous avez trouvé cela lourd
ou s'il n'y a pas d'autre choix que de rester à 19 membres? Quelle est
votre expérience?
M. Pilote: II est sûr qu'avec les mécanismes
déjà en place actuellement, de la façon que les conseils
d'administration fonctionnent, souvent on joue le rôle comme tel un peu
d'estampiller les décisions ou d'entériner des décisions.
C'est dommage d'être pris dans des situations comme celles-là,
mais ça fait trois ans que je siège au conseil d'administration
d'un cégep et la seule chose... On reçoit les documents et c'est
très rapidement qu'on doit se prononcer. Tout ce qu'on a à
faire... Les Anglais ont une expression pour dire jouer le rôle de
"rubber stamp". C'est en fait souvent ce qu'un grand nombre des gens de
l'extérieur sont obligés de jouer. Ils n'ont pas la chance de
recevoir la formation ou encore l'intégration leur permettant de prendre
conscience de la façon dont ça fonctionne, le mécanisme et
toute la tuyauterie qui est là; ça rend lourd actuellement.
Mme Lavoie-Roux: Maintenant, dans la loi...
Mme Raymond: Me permettez-vous, madame, d'ajouter quelque
chose?
Mme Lavoie-Roux: Oui, certainement.
Mme Raymond: Lorsque vous parlez de lourdeur de fonctionnement,
je pense que, si on enlevait, premièrement, le climat de tension
constante qu'il y a là, par rapport aux objectifs que poursuivent
certains groupes... Le président disait: Si les gens avaient les
dossiers plus tôt, c'est une question interne, dans chaque
collège. Il reste que, si les gens avaient le temps voulu, en demeurant
plus longuement aux conseils d'administration, de pouvoir s'habituer à
ce fonctionnement, à partir de ces deux premières conditions et
d'autres qui pourraient être ajoutées, c'est-à-dire former
les membres au départ, les habituer au fonctionnement des
assemblées délibérantes, les habituer à comprendre
la lecture des dossiers par des séances de formation ou
d'intégration, comme vous voulez le dire...
Ce n'est pas le nombre de personnes qui rendrait lourd le fonctionnement
des conseils. C'est ce qui se vit à l'intérieur qui fait que
c'est très lourd. Il suffirait de modifier un peu les règles du
jeu, d'asseoir un conseil d'administration avec des règlements et des
pouvoirs réels, qu'on lui permette, par une formation autre, d'avoir le
pouvoir de prendre ses décisions et qu'elles puissent être rendues
dans un climat plus serein. Je pense que le nombre n'y serait pour rien, quant
à la lourdeur ou au bon fonctionnement. C'est justement la structure
telle quelle et les pouvoirs qu'il faudrait définir de façon plus
nette pour qu'ils puissent bien fonctionner.
Mme Lavoie-Roux: Je vois également que les deux membres
cooptés disparaissent. Est-ce qu'il n'y avait pas des avantages à
ce que des membres soient cooptés pour tenir compte d'un problème
particulier que le cégep pourrait avoir, soit par exemple expertise dans
l'enseignement professionnel, expertise dans le développement.
Là, vous les faites sauter.
Mme Raymond: On les fait sauter à la lumière de
certaines expériences; plusieurs d'entre nous ont vécu des
expériences et parfois assez longuement à des conseils
d'administration des collèges. Lorsqu'est venue la nomination, cela a
créé d'extrêmes tensions. Il s'est fait un jeu de pressions
pour que tel parti soit nommé pour renforcer certaines positions
à des conseils d'administration, au lieu d'aller chercher des gens
compétents qui auraient complété avantageusement un
conseil d'administration.
En changeant la structure et en ajoutant à deux paliers de
personnes qui sont là, c'est-à-dire les socio-économiques
et les parents. Cela n'empêche pas, par les règlements ou par
d'autres façons il semble qu'un gouvernement ait beaucoup de
pouvoir à ce sujet d'aller chercher les compétences
nécessaires pour rendre efficace un conseil d'administration. Ce n'est
pas le nom qui fait la qualité des gens. C'est d'aller chercher les
bonnes personnes, quel que soit le nom sous lequel elles siègent.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question sur le
fonctionnement des conseils d'administration. Vous vous réunissez une
fois par mois?
Mme Raymond: La loi dit que les conseils d'administration peuvent
se réunir quatre fois par année. Les directeurs
généraux et les présidents et présidentes de
conseils d'administration jugent de la pertinence des rencontres, et je sais
que pour un certain collège, à l'heure actuelle, il y a eu
au-delà de 23 réunions du conseil d'administration, pour cette
année, et, je pense, 19 réunions de conseil exécutif.
Mme Lavoie-Roux: Selon les besoins, vous vous
réunissez.
Mme Raymond: Oui, c'est au besoin que la chose se fait et c'est,
parfois, beaucoup plus souvent que certains membres le désireraient.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question sur le projet de
création d'un comité de l'enseignement professionnel qui serait
rattaché au conseil des collèges. Évidemment, vous
êtes heureux de cela, parce qu'il y a des problèmes d'enseignement
professionnel au niveau collégial. Mais ne croyez-vous pas que les
problèmes d'enseignement professionnel débordent, tant du
côté du scolaire que du côté de l'université,
et que ce n'est pas un problème strictement de niveau
collégial?
Mme Raymond: Non, madame. C'est un problème, à
l'heure actuelle, qui regroupe tous les niveaux, que ce soit le niveau
secondaire, le niveau collégial, comme le niveau universitaire. Il y a
des problèmes et il y aura, possiblement, besoin de concertation sur le
sujet. Mais c'est justement au niveau collégial qui est le niveau
qui nous préoccupe qu'on sent vraiment le besoin qu'il y ait un
organisme qui prenne en main l'étude et les problèmes de ce
niveau et cherche des solutions à assez brève
échéance, parce que je crois que c'est urgent qu'on se
préoccupe de la question.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, madame.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: II me fait bien plaisir d'apporter quelques
commentaires à la Fédération des associations de parents
des cégeps. J'ai bien aimé votre mémoire, tout en
indiquant que je ne veux imputer aucun motif politique.
Mme Lavoie-Roux: Prenez vos précautions parce que...
M. Le Moignan: Je prends toutes mes précautions.
Une voix: II est méchant.
M. Le Moignan: Et je ne veux inventer aucun motif au
ministre.
M. Morin (Sauvé): On pourrait dire, comme Buffon dit de
l'ours: C'est un animal méchant; quand on l'attaque, il se
défend.
M. Le Moignan: Je ne vous ai pas encore attaqué, M. le
ministre.
Une voix: Bouffon.
Une voix: Qu'est-ce que vous avez dit?
Une voix: Bouffon.
M. Morin (Sauvé): J'imagine que le député
sait qu'il y a un très grand auteur qui s'appelle Buffon.
Mme Lavoie-Roux: Oui, on le sait.
M. Morin (Sauvé): Je m'étonne que cela ait
automatiquement éveillé dans son esprit le mot "bouffon".
M. Rivest: Vous le citiez fréquemment à la
faculté de droit, lorsque vous étiez mon professeur.
M. Le Moignan: On va laisser Buffon de côté.
Mme Lavoie-Roux: Connaissez-vous mieux, M. Lafontaine?
M. Le Moignan: Je trouve que le ministre a procédé
de façon très habile. Je ne veux pas minimiser la valeur de votre
fédération, bien au contraire. En arrivant ici au début,
on avait peut-être l'impression que vous étiez l'artillerie
légère et le ministre, avec tous ses pouvoirs et tout ce qu'on
veut, l'artillerie lourde, parce que le ministre est fort bien
documenté, il a une vaste expérience, il est politicien. Vous
avez très bien répondu. Il vous a amenés sur son terrain,
graduellement. Vous avez semblé vouloir concéder, mais, en cours
de route, en précisant vos positions, je pense qu'on les comprend
très bien. Il y a chez vous certaines inquiétudes. D'après
vos discussions je ne veux pas être malin, je vais vous poser une
question directe ayant écouté la lecture de votre
mémoire, pensez-vous que ce projet de loi 24, cette création d'un
Conseil des
collèges, peut provoquer chez vous un certain malaise ou une
diminution de certains pouvoirs que vous possédez en ce moment? Je suis
honnête, je vous pose la question directement.
M. Pilote: Je pense qu'on n'a pas consulté comme telles
les associations locales pour répondre, mais je ne pense pas que cela
sème chez nous un malaise qui soit à ce point maladif et qui nous
rende inaptes ou incapables d'agir dans des situations concrètes. Je ne
crois pas, je ne pense pas. Là, je parle peut-être en mon nom
personnel. (18 h 15)
M. Le Moignan: C'est parce que vous faites affaires avec d'autres
groupes que vous avez mentionnés, à certains pouvoirs qui sont
déjà détenus par d'autres et, à un moment
donné, vous demandez pourquoi on arrive... Vous avez surtout
insisté sur certains petits points là-dedans. Il y a la
Fédération des parents et il y a la Fédération
aussi des cégeps comme tels. On sait que cela peut faire l'objet de
frictions. On disait tout à l'heure qu'il pouvait y avoir des conflits
d'intérêts entre les groupes. À ce moment-ci, face à
ce projet de loi, quelle est votre position et comment la voyez-vous dans
l'avenir?
Mme Raymond: Nous, personnellement, n'avons pas de friction ni de
conflit d'intérêts avec aucun de ces organismes-là qui
fonctionnent sur un autre plan que nous. Je ne vis pas tous les jours avec les
parents, même si je suis secrétaire général, mais je
peux vous dire que j'ai cinq enfants qui sont passés au collège
et je sais un peu de quoi je parle aussi.
Je vais prendre au départ ce que vous avez dit, à savoir
qu'à un moment donné le ministre a semblé vouloir un petit
peu nous faire la morale en nous disant qu'on était peut-être un
peu légers. Il reste que lorsque les parents ont étudié
pendant deux jours ces mémoires, ils l'ont fait avec la connaissance
qu'ils avaient et beaucoup avec leur coeur et leurs tripes de parents qui ont
des étudiants, à l'heure actuelle, au niveau collégial et
qui doivent subir tout ce qui se passe. Ils se sont dit... Lorsqu'ils ont vu ce
nouvel organisme, ils ont craint justement qu'on complique davantage le
réseau collégial et que finalement, en fin de course, ce soient
toujours les étudiants qui écopent quant tout le monde est
ensemble à se demander qui doit et à quel palier, qui est
responsable de, et de qui, et de quoi? Finalement, l'inquiétude a
été surtout à ce niveau.
Pour nous, nous n'entrons jamais en conflit avec personne. Lorsque nous
avons à nous adresser à un organisme, je pense que nous nous
adressons à lui, de façon simpliste peut-être pour des
grands penseurs, mais nous disons ce que nous avons à dire tout
simplement. Je pense qu'on le fait pour les parents eux-mêmes comme tels
qui, il faut bien le souligner, sont clients aussi du niveau collégial
par l'éducation des adultes. Nous le faisons aussi pour nos enfants, nos
jeunes pour qui on demande une amélioration de leur sort.
L'amélioration de ce sort passe par l'amélioration de toute la
structure collégiale. Pour nous, il n'y a pas de conflit
d'intérêts en rien avec ces organismes. Nous nous donnons le droit
d'être consultatifs auprès du ministre de l'Éducation, du
Conseil supérieur, de la Fédération des collèges et
de tout autre organisme qui aura des pouvoirs décisionnels au niveau
collégial.
M. Le Moignan: Heureusement que ce projet de loi a suscité
chez vous des inquiétudes, autrement, c'est là que ce serait
inquiétant, parce que vous avez tout de même une prise de
conscience de votre pouvoir et un certain pouvoir que vous exercez parce que
vous êtes des parents.
Vis-à-vis de la création du Conseil des collèges,
vous posez certainement une question. C'était cela que je voulais dire
tout à l'heure. Qu'est-ce que nous devenons, nous, là-dedans, les
parents? Est-ce qu'on pourra jouer le rôle qu'on joue actuellement?
M. Pilote: En fait, on n'a pas de bataille à gagner. On
n'a pas non plus de combat à engager ni aucune lutte politique. On ne va
pas là dans le but justement de se livrer sur l'arène politique.
On envoie nos enfants et on veut suivre l'évolution du produit. On veut
savoir à la fin ce qui va en sortir.
Mme Raymond: Je pense que ce que M. Le Moignan veut nous entendre
dire, c'est ce qu'on va aller faire... On est inquiets, si nous ne sommes pas
au Conseil des collèges comme tel et quel est le rôle que nous
irions jouer là. Est-ce que c'est ça que vous voulez savoir?
M. Le Moignan: Oui, est-ce que vous avez peur que votre
rôle, votre influence ne diminue au Conseil des collèges?
Mme Raymond: Non, pas du tout. Nous ne le croyons pas, parce que,
comme je vous le dis, on n'est pas sur le même palier. Le rôle que
nous pourrions jouer au Conseil des collèges serait justement d'aller
porter les inquiétudes des parents à l'attention d'un organisme
qui pourrait intervenir quant à la création de nouveaux
programmes d'enseignement. On sait que plusieurs d'entre eux sont
contingentés. Il faudrait aller parler aussi de ça, de ce qu'on
désire au sein d'un Conseil des collèges quant aux programmes
contingentés, s'assurer justement que les nouveaux programmes que l'on
créera ne seront pas de nouveaux programmes contingentés
très rapidement. Je pense qu'il y a des inquiétudes que les
parents peuvent aller porter là. Je le répète
peut-être encore de façon simpliste, mais il reste qu'on a des
choses à dire et dans nos mots on ira les dire où il se doit.
M. Le Moignan: Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: M. le Président, je voudrais d'abord rendre
hommage aux parents qui se sont présentés ici, les
féliciter de leur participation,
participation qui est à tout prix essentielle et qui est
malheureusement sous-estimée par nos structures. Les parents ont
été les grands exclus des paliers décisionnels dans les
grandes réformes de notre système qui tardaient et qui devaient
se réaliser. Je sens un peu que vous tentez de rattraper un niveau
où vous vous sentez absolument nécessaires, indispensables, parce
que légitimement vous en êtes les premiers répondants.
Je pense que votre mémoire est un petit peu le témoin de
la tourmente dans laquelle vous vous sentez face au système et face
à l'état de désemparement qu'est un peu le vôtre. Je
pense que vous ne devriez à aucun titre qualifier ou prétendre
que des gens qualifieraient vos présentations en commission
parlementaire de simplistes. Vous êtes légitimement
habilités à dire ce que vous avez à dire à partir
du niveau d'analyse qu'est le vôtre et à travers un langage qui
sort crûment. Je pense que les parlementaires acceptent et doivent
accepter ce niveau de participation spontanée qui est un niveau,
d'ailleurs, qu'on doit tenter vraiment de considérer selon son
mérite et son poids.
Cela ne veut pas dire que j'endosse tout ce que vous avez apporté
en commission. Par ailleurs, il y a au moins une partie que j'endosse, c'est le
voeu que vous formulez de voir accroître substantiellement la
participation des parents, au niveau des collèges. Moi, je serais
porté à endosser tout au moins la partie qui a trait à ce
que le premier mandat soit allongé à 3 ans. D'autre part, est-ce
qu'on augmente le nombre de parents qui siégeraient au conseil
d'administration? Quant à ce que ce soit cinq personnes, il s'agit de
voir, mais il me semble que ça fait partie des nécessités
d'une démocratisation qui doit se faire, qui sera laborieuse, mais
où on a le devoir d'agir de façon à renforcer le
rôle des parents dans le secteur de l'enseignement collégial.
Une remarque précise ou particulière; vous parlez des
groupes qui peuvent être en conflit d'intérêts. Est-ce que
vous pouvez en parler plus franchement et expliquer comment, par
l'expérience que vous en avez, ces groupes sont en conflit
d'intérêts ou quelles situations ont pu être
engendrées par ça?
M. Pilote: Disons que ces conflits d'intérêts, on
les voit particulièrement avec le groupe des enseignants qui viennent
siéger au conseil d'administration, qui sont les porte-parole du
syndicat et qui vont siéger comme membres du syndicat; ils ne vont pas
siéger là comme représentants du personnel, ils sont
peut-être désignés davantage par le syndicat, ça,
c'est un premier groupe de pression. Il y a un deuxième groupe de
pression, c'est le groupe des étudiants qui, lui aussi, est un groupe de
pression à peu près du même type que celui des enseignants.
Depuis trois ans, j'ai vu voter les étudiants trois fois pour des
propositions et, dans 99,8%, ils s'abstiennent de voter ou ils votent contre;
ils sont là uniquement pour surveiller l'intérêt de
l'association étudiante du cégep; ils ne sont pas là dans
le but, justement, de promouvoir le vrai rôle qu'ils devraient en fait
jouer.
Ces deux groupes de pression font bloc, ce qui fait que ça
entrave énormément le mécanisme de fonctionnement d'un
conseil d'administration; ça rend très lourd.
M. Gosselin: Vous les excluriez purement et simplement?
M. Pilote: Non, on ne les exclut pas dans notre projet, on dit:
II est quant même important qu'il y ait au moins un porte-parole de ce
groupe qui puisse venir apporter le son de cloche que les étudiants
peuvent apporter et que les enseignants peuvent avoir. Ils ont certainement des
choses à dire et, comme ce sont des parties constituantes, je ne pense
pas qu'on puisse les éliminer.
M. Gosselin: Vous déplorez simplement le niveau
d'influence qui s'exerce comparativement possiblement au vôtre sur les
conseils d'administration.
M. Pilote: C'est ce que nous avons constaté jusqu'à
maintenant.
M. Gosselin: II y a pour moi une question préalable qui
aurait pu être formulée au début, mais que je trouve
importante à ce moment-ci pour mon éclairage, celle des
fédérations d'associations de parents dans les collèges.
Vous dites que c'est formé depuis 1974, et que ça
représente une quinzaine d'associations. J'aimerais avoir plus de
détails sur votre cheminement et le type d'associations que vous
représentez. Est-ce que les quinze associations sont réparties
dans tout le territoire du Québec? J'aimerais avoir des
précisions là-dessus et savoir combien de personnes ça
regroupe actuellement.
Mme Raymond: Je vais commencer par la fin de votre question.
À l'heure actuelle, les quinze associations membres regroupent
précisément 105 232 parents. Elles représentent toutes les
régions, puisque nous en avons qui vont de Sept-Îles
jusqu'à Alma en passant par l'Estrie, Montréal et le reste de la
province. Elles représentent à peu près toutes les
régions du Québec, à l'exception de l'Abitibi. Nous avons
d'énormes difficultés de fonctionnement du fait que nous sommes
sans ressources. La fédération a un peu d'argent à l'heure
actuelle il vient du gouvernement pour asseoir un
secrétariat permanent, mais cela ne permet pas plus que ça, ce
qui fait que, pour nous, il a été extrêmement difficile de
nous permettre d'avoir les personnes nécessaires pour faire de la
recherche et pour pouvoir asseoir davantage ou fouiller davantage les textes
qu'on voulait présenter.
Il reste que les parents sont là et ils veulent y demeurer au
niveau collégial et les raisons sont multiples pour le faire.
M. Gosselin: Est-ce que vous avez de l'aide comme
fédération au niveau du financement pour organiser et maintenir
votre secrétariat, qui permet justement de consulter les parents?
Mme Raymond: Pour trois ans, nous en avons suffisamment pour
maintenir un secrétariat avec une permanence, c'est-à-dire une
secrétaire générale et une dactylo pour l'assister.
Passé ce moment-là, si la question financière n'est pas
résolue, le nombre d'associations ira possiblement en diminuant, parce
qu'il n'y a rien de prévu dans aucune loi qui permette l'article
24 de la Loi des collèges ne le permet pas d'inclure une
cotisation pour les associations.
Les collèges sont réticents à fournir une aide
financière aux associations, parce qu'on s'appuie sur l'article 24 pour
leur refuser cet argent, ce qui fait que, des années, nous avons eu 18
associations et que, cette année, en cours de route, nous en avons
perdu, parce qu'elles n'avaient plus les moyens financiers pour inviter les
gens à se réunir au niveau local et ensuite venir se concerter au
niveau provincial.
Pour nous, au niveau du Québec, c'est très important que
nous puissions les réunir assez souvent; malheureusement, on ne peut
pas.
M. Gosselin: Est-ce que le financement est apporté par vos
membres, intégralement ou en partie?
Mme Raymond: C'est un financement qui nous est venu du
ministère de l'Éducation, grâce à la Direction
générale de l'enseignement collégial, mais c'est un
financement qui se limite à trois ans. Dans trois ans, nous retomberons
au point où on était il y a cinq ans, c'est-à-dire
à du bénévolat et très peu de contacts entre nous,
sauf de moyens financiers pour établir ces contacts.
M. Gosselin: En terminant, je veux espérer que la
Fédération des parents des collèges n'en soit qu'à
ses débuts comme présence et comme poids auprès des
instances démocratiques parce que ça me semble vraiment
être un rôle essentiel, je le répète.
Là-dessus, je vous félicite pour votre mémoire,
au-delà du fait que la discussion ne se soit pas faite au complet
là-dessus. Je pense qu'elle mérite d'être reprise et
d'être continuée. Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): On s'était entendu pour
terminer à 18 h 30. Comme il reste trois interventions, mais que je
présume qu'elles seront brèves, je souhaiterais qu'on
complète, après avoir décidé de
compléter.
Mme Lavoie-Roux: II vaut mieux terminer.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Deux-Montagnes. (18 h 30)
M. de Bellefeuille: J'essaie de me faire une idée sur
cette question de la répartition entre ce qu'on appelle les internes et
les externes. Je voudrais introduire dans cette réflexion des
éléments empiriques. Pour ce qui est des éléments
théoriques, je pense que tout a été dit, dans les rapports
que vous citez. Votre mémoire apporte des considérations qui sont
claires, "une position qui est claire: il est indispensable, nous en sommes
fortement convaincus, que la majorité des membres doivent venir de
l'extérieur."
Mais il y a un facteur empirique et un facteur d'ordre pratique qui
intervient et c'est là-dessus que je voudrais vous interroger. C'est
l'assiduité.
On peut supposer et moi, je ne suis pas de ce milieu-là;
alors, je n'en sais rien on peut supposer que les internes, puisque
c'est leur activité professionnelle, puisque c'est leur gagne-pain qui
est en cause et leur intérêt professionnel et personnel qui est en
cause, on pourrait évoquer comme hypothèse que les internes
seraient plus assidus aux réunions des conseils d'administration que les
externes pour qui cette tâche est un fardeau qui s'ajoute à tout
ce qu'ils ont à faire, par ailleurs. Là, je ne critique personne,
je veux vous demander, puisque vous connaissez le milieu, si vous avez une
impression générale des taux d'assiduité. Est-ce que,
effectivement, les internes sont plus assidus aux réunions des conseils
d'administration que les externes ou si les externes, malgré la
difficulté que cela représente pour eux de s'imposer ce fardeau
supplémentaire alors qu'ils n'ont pas la même motivation
professionnelle d'intérêt parfois personnel, si l'on veut, sont
quand même aussi assidus que les internes, dans la pratique?
Mme Raymond: Je me permets de donner la réponse, M. le
Président. Évidemment que les internes pourraient être
beaucoup plus assidus que pourraient l'être les externes. Ils ont
justement, on l'a dit à quelques reprises, des buts précis qu'ils
poursuivent, ils tiennent à ce qu'ils soient poursuivis jusqu'aux
conseils d'administration.
Pour ce qui est des membres de l'externe, pour ce qui est des parents,
ils sont les plus assidus de tous les groupes. Ils sont constamment là.
Alors, à très rares exceptions... Pour ce qui est des
socio-économiques, ils sont assidus eux aussi, mais vient des moments
où on a de la difficulté à les rejoindre, non pas parce
qu'ils ne sont pas disponibles, mais vous me permettrez d'employer le
mot direct par écoeurement.
Vous savez, quand on est constamment sujet à des pressions
et je n'emploie que ce mot alors que j'en aurais peut-être d'autres aussi
indues et qu'on éternise les débats, justement, en faisant
voir que, si les positions qu'on prend ne sont pas celles qu'on désire,
il pourrait y avoir... Il vient qu'à un moment donné, les gens se
dégoûtent d'être obligés de subir de telles
choses.
C'est ce qui fait que, parfois et pas sur un temps constant
on a de la difficulté à obtenir un quorum, et ce n'est pas
par manque de disponibilité des gens, non.
M. de Bellefeuille: Vous entendez "disponibilité" quant
aux intentions.
Mme Raymond: Oui.
M. de Bellefeuille: Je vous en donne le crédit sans la
moindre hésitation, mais je vous remercie de votre réponse qui
éclaire ma lanterne.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: M. le Président, si on avait tenté de
refaire la Loi des collèges après les cinq premières
années d'exercice de la loi 21, on aurait sans doute, et probablement
sans presque aucune hésitation, rayé le groupe des parents des
conseils d'administration à cause de l'ensemble des difficultés
vécues au cours des premières années dans, notamment, le
recrutement des parents.
Entre-temps, je crois que des parents ont pour ainsi dire gagné
leurs lettres de créance. Elles sont là. Effectivement, il y a eu
quelques administrateurs peut-être un peu plus futés que d'autres
qui ont vu à susciter la participation. Je me souviens d'un de ces
directeurs qui fait le tour de sa région pour tenir des
assemblées de parents un peu partout dans le territoire. C'est une
responsabilité qu'il a assumée librement et je l'en
félicite.
D'autre part, il y a eu cette sorte de prise en main par le biais de
l'association ou de la fédération qui a créé aussi
un peu plus d'intérêt. Le projet de loi sur cela, on vous
demande votre opinion, vous l'avez émise veut même susciter
davantage la participation. On a, comme cela, proposé même le vote
par la poste, justement dans le but d'une participation supplémentaire
pour amener davantage. Ce n'est peut-être pas la bonne méthode, on
vous le demande précisément. Vous nous avez dit tantôt que
vous y croyez plus ou moins. J'aimerais que vous me disiez peut-être
quelle autre méthode serait utile pour davantage amener... Enfin, on a
pour le moment, celle-là. Première question.
Deuxième question. Évidemment, je ne suis nullement
surpris de voir dans votre proposition de formation du conseil d'administration
cinq parents. J'imagine assez volontiers que si la FNEQ venait se
présenter, on aurait probablement une proportion de l'interne, comme on
dit habituellement, plus forte que la vôtre, etc. C'est normal. Je ne
veux pas critiquer, sauf que j'ai une question à vous poser pour le
moins sur la formation que vous proposez ici et qui est conforme au projet de
loi.
Je veux justement savoir jusqu'à quel point, comment vous
justifiez cette conformité que vous voulez respecter. Comment
justifiez-vous la présence du directeur des services aux
étudiants à un conseil d'administration? Dans un collège
sur deux, cette fonction n'existe pas. Quelle autorité suprême,
quel pouvoir spécial a-t-il dans l'institution qui fassent qu'il puisse
se trouver au conseil d'administration, qui se trouve au conseil de
régie, qui se trouve n'importe où ailleurs, je veux bien?
Personnellement, je me pose des questions sur le projet de loi
lui-même et, à plus forte raison, sur le fait que vous l'incluiez
vous-même ici. Je m'arrête là, parce que je sais que ce
serait indécent d'aller plus loin.
M. Pilote: À votre première question, comme tel, le
directeur général ou l'administration en général a
quand même un certain rôle à jouer pour faciliter la
formation comme telle d'associations locales. Je pense qu'elle a un certain
rôle à jouer, parce qu'elle doit aller les chercher, si on a
besoin disons de trois parents, mais actuellement, c'est quatre parents, dont a
besoin le conseil d'administration. Ce qui arrive, c'est que, dans certains
cégeps, on a une très bonne collaboration face à
l'administration en général. Dans d'autres, c'est très
mitigé. Dans d'autres, c'est presque l'opposition. Partiellement,
à votre première question, il y a un besoin d'aide, si vous
voulez, au départ, pour aider à la formation ou à la
création. Cette aide, je pense qu'elle peut venir de l'intérieur.
Pour nous, en tant que fédération, ce sera un stimulant de sentir
l'appui de ce côté. Je pense qu'on ne l'a pas à 100%.
Pour votre deuxième question, vous demandez pourquoi le directeur
des services aux étudiants dans un conseil d'administration. J'y vois
pour lui un rôle aussi important, sinon presque plus important que le
rôle du directeur général. Si le cégep a
été fait pour les étudiants, le premier qui vit avec eux
et qui s'occupe de toutes les activités ou qui a à participer
à la vie comme telle, je pense qu'il est bien placé pour venir
nous informer des besoins des étudiants et de susciter même la
créativité de façon à donner au conseil
d'administration les moyens de fournir aux étudiants ce dont ils ont
besoin.
Une voix: Vous avez quelque chose à ajouter, Madame?
Mme Raymond: Oui, M. le Président. Pour ce qui concerne la
première question, les parents sur les conseils d'administration, on est
complètement en désaccord pour le vote par la poste parce que,
justement, ne sachant pas de quelle façon tout le processus sera
amorcé avant d'en arriver là, c'est impossible de dire que ce
sera une des meilleures solutions. Si c'est parce qu'on veut atteindre un plus
grand nombre de parents, à la suite d'un sondage qu'on a fait, nous,
l'année dernière, auprès de 3000 parents, on s'est rendu
compte que, justement, quand on s'adressait par la poste comme ça aux
parents, il se pouvait que, dans certains cas, ce qu'on voulait que les parents
aient entre les mains ne leur parviennent pas, parce que le questionnaire que
nous avions envoyé, certains étudiants se l'étaient
approprié et y avaient répondu.
Parfois, c'était valable et parfois aussi, c'était
vraiment amusant de lire ce qu'on nous répondait. Alors, ça nous
a rendus quand même un petit peu "suspicieux" quant à un pareil
mode de votation pour les parents et c'est la raison pour laquelle on
a employé le mot "fraude" et le mot "manipulation" dans la
question tout à l'heure.
Ensuite, nous suggérons que les associations de parents
participent très activement à la nomination des parents au
conseil d'administration, parce que, partout où il y a des associations,
ce sont elles qui se sont souciées d'amener aux réunions
générales un plus grand nombre de parents. C'est où il y a
des associations de parents qu'on retrouve un plus grand nombre de parents pour
les élections; par leurs interventions auprès des parents
qu'elles font au cours de l'année et tout ça, elles ont
suscité beaucoup plus d'intérêt et ont amené un
nombre de parents plus grand. Cela a permis aussi d'améliorer la
qualité de la représentation, pour certaines parties, quant
à moi, je pose des restrictions, une qualité de parents beaucoup
plus valable et je pense que vous pouvez avoir à votre disposition,
messieurs de l'Assemblée nationale, les listes des membres qui
siègent sur les conseils d'administration. Vous pourrez constater que
les parents qui sont maintenant nommés sur les conseils d'administration
ont autant de valeur et autant de connaissance sur le plan, si je peux me
permettre, académique, sur le plan des diplômes, que les autres
composantes qui sont là.
Je pense que c'est essentiel que les parents soient là, que les
associations soient là pour permettre de choisir une qualité et
s'assurer que la représentation soit faite par des parents disponibles
et capables de juger des dossiers à étudier aux conseils
d'administration.
Le Président (M. Marcoux): Oui, madame, voulez-vous vous
identifier pour les fins du journal des Débats, s'il vous
plaît?
Mme Julien (Denise): Je voudrais ajouter quelque chose à
ce qu'a dit Mme Raymond sur la participation des parents. Si je suis ici
aujourd'hui, c'est pour appuyer Mme Raymond et M. Pilote, mais je suis aussi
ici pour vous dire que nous, les parents, on nous a habitués à la
participation, par la loi 27, à l'élémentaire et au
secondaire. C'est irréversible, il faudra les endurer au niveau
collégial.
D'abord, nos enfants n'ont pas 18 ans, ils font tous leur
première année de cégep étant mineurs; donc, il
faudra apprendre, autant du côté du ministère que du
côté de la direction, à composer avec les parents parce que
nous sommes là et nous nous attendons d'y être longtemps.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Simplement une question et une remarque. Je voudrais
poser au ministre la question que vous avez vous-mêmes soulevée
dans votre mémoire et qu'a reprise ma collègue de L'Acadie.
Est-ce que des études sur le rôle et les fonctions respectives des
différents organismes existent et sur quelles bases le ministère
a-t-il décidé de modifier, dans un sens ou dans l'autre, les
organismes consultatifs?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, très
brièvement, puisque l'heure est tardive. Il n'y a pas eu d'étude
formelle, mais nous avons réfléchi systématiquement et
à plusieurs reprises à la représentation des divers
groupes, des divers agents de l'éducation au sein du cégep. Avant
même d'aboutir à la composition qui est suggérée
dans l'énoncé de politique, il y a eu des heures et des heures de
débats là-dessus.
M. Rivest: Et de consultations; je suppose que c'est venu de
consultations que le ministre ou le ministère a menées.
M. Morin (Sauvé): Oui, effectivement.
M. Rivest: Vous avez... (18 h 45)
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le Président. Je pense
que vous avez répondu sur la composition des conseils
d'administration.
M. Morin (Sauvé): La question portait, si j'ai bien
compris, sur...
M. Rivest: Sur la définition des fonctions que les
organismes, le Conseil supérieur de l'éducation, etc., qui ont
souvent des fonctions actuellement qui sont... Pourquoi les changements?
Pourquoi avoir transporté tel type de pouvoir ou de fonction au Conseil
des collèges?
M. Morin (Sauvé): Exactement, vous pouvez bien songer
qu'avant de nous déterminer à suivre l'avis du Conseil
supérieur de l'éducation et de créer un nouvel organisme,
nous nous sommes posé pas mal de questions, comme l'a fait, d'ailleurs,
l'association des parents.
Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas d'étude formelle?
M. Morin (Sauvé): Non, il y a cependant l'avis du Conseil
supérieur.
M. Rivest: Je fais cette remarque au ministre parce qu'autant
pour l'intervenant précédent du Conseil des universités
que pour la fédération des parents, on semble, dans le milieu
aussi à cause de rencontres que ma collègue a eues
trouver qu'il y a une certaine gratuité dans la définition ou
dans l'octroi de certaines fonctions qui sont exercées par d'autres
organismes.
Il semble, dans le milieu, qu'on ne voit pas exactement les raisons
précises qui ont amené le ministère de l'Éducation
à faire les changements. Est-ce que les organismes qui avaient ces
fonctions les exerçaient mal ou ne les exerçaient pas? Il me
semble que dans le cadre des discussions...
M. Morin (Sauvé): II y avait tout ça, bien
sûr et nous y avons beaucoup réfléchi, nous en avons
beaucoup débattu au ministère, au comité
interministériel de développement culturel et au Conseil des
ministres.
M. Rivest: Très bien. Sur votre remarque à la page
10 au sujet de l'article 17a, le ministre reconnaît
d'intérêt national un programme d'enseignement professionnel que
dispense un collège. Vous manifestez votre scepticisme devant la
signification réelle de cette disposition et vous ajoutez: "Nous
désirons en outre que si les corrections nécessaires à sa
clarification ne sont pas ajoutées, il faille le faire accepter à
l'unanimité de l'Assemblée nationale". Pourquoi posez-vous une
telle exigence? Quelle est l'inquiétude sur l'interprétation que
cet article soulève chez les membres de votre
fédération?
M. Pilote: Pour ce qui est de l'article 17a, pourquoi nous avons
posé cette condition? Ce n'est pas une condition, nous demandons
justement que ce soit ramené si une décision est prise
devant l'Assemblée nationale pour discussion.
M. Rivest: Vous ne savez pas je pense que je suis un peu
sceptique aussi ...
M. Pilote: On n'a peut-être pas tout le...
M. Rivest: ... vous n'arrivez pas à savoir exactement ce
que vise cet article, c'est ça?
M. Pilote: Non, c'est ça.
Mme Raymond: Justement et je pense que mon confrère vient
de me dire en fait la raison pour laquelle cela avait été inclus
comme ça, c'est justement que si devant le peu de clarification de
ça, si on exigeait la condition que ce soit adopté à
l'unanimité de la Chambre, ça provoquerait sûrement la
définition...
M. Rivest: Est-ce que le ministre peut, en deux mots, rapidement,
en concluant... Quelle est la portée réelle ou enfin les
intentions...
M. Morin (Sauvé): Je pense que les termes ne sont
peut-être pas suffisamment clairs dans l'énoncé de
politique. On parle de programme reconnu d'intérêt national, c'est
une expression ambiguë. Il aurait peut-être fallu être un peu
plus modeste. Ce sont des programmes comme ceux qui existent
déjà, que vous connaissez. Celui de Chicoutimi pour le pilotage,
celui de l'aéronautique...
Mme Lavoie-Roux: L'enseignement technique très
spécialisé, dans le fond.
M. Morin (Sauvé): Oui, hautement
spécialisé... M. Pilote: Nous l'avons saisi, nous, comme
tel.
M. Morin (Sauvé): C'est ça qu'on avait à
l'esprit, vous voyez. Bien sûr, il ne s'agit pas de quelque chose
d'extraordinaire, qui devrait être approuvé à
l'unanimité de l'Assemblée nationale, il s'agit simplement de
programmes existants, mais on veut que ces programmes hautement
spécialisés et qui n'existent qu'à un endroit puissent
faire l'objet d'accords au sein du cégep.
M. Rivest: Cela pourrait peut-être intéresser nos
amis de Jonquière, qui ont un cours sur les communications.
Mme Lavoie-Roux: C'est d'intérêt national.
M. Rivest: Ou en parler aux gens de Saint-Hyacinthe.
Mme Lavoie-Roux: Cela doit être d'intérêt
national. Bonne école.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie la
Fédération des parents des collèges du Québec pour
la présentation de son mémoire et je vous donne rendez-vous
à 20 h 45.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je voudrais
également remercier les représentants des parents d'être
venus nous entretenir et de s'être prêtés à un jeu de
questions serrées qui nous ont permis de bien saisir la substantifique
moelle de leur pensée.
M. Rivest: Amende honorable!
Le Président (M. Marcoux): La commission ajourne ses
travaux à 20 h 30.
(Suspension de la séance à 18 h 51)
(Reprise de la séance à 20 h 48)
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, mesdames et
messieurs!
Mesdames et messieurs, venez poursuivre le dialogue avec nous!
La commission de l'éducation est réunie pour poursuivre
l'audition des mémoires concernant les projets de loi 24 et 25.
J'appellerais maintenant l'Exécutif des présidents des conseils
d'administration des collèges à venir nous présenter son
mémoire.
M. Le Moignan: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé voudrait avoir une directive.
M. Le Moignan: À la suspension, il y a quelqu'un dans la
salle qui m'a dit qu'il y avait quatre groupes ce soir et qu'il y a des gens
qui venaient de l'extérieur. On m'a demandé s'il était
possible de respecter l'ordre établi de 45 minutes. Je n'ai pas pu
m'engager. Je ne veux bousculer personne. J'ai dit que c'était le
désir des membres de la commission.
Le Président (M. Marcoux): Je pense que j'ai une partie de
la réponse à votre question. Moi non plus, je ne peux pas
m'engager à faire respecter les 45 minutes, à moins que vous en
décidiez ainsi. Vous connaissez nos règlements.
Mais on m'apprend que l'Association des directeurs
généraux des cégeps du Québec ne présentera
pas son mémoire, mais souhaiterait simplement qu'il soit versé au
journal des Débats.
Il nous resterait trois mémoires à entendre d'ici la fin
de la soirée. Je pense que nous pourrions, avec votre collaboration,
arriver à entendre les trois groupes qui restent à se faire
entendre. Je ferai tout en mon possible pour nous restreindre ensemble.
M. Le Moignan: Pour demain, M. le Président, on me dit que
la CEQ et la CSN ne viendront pas présenter leur mémoire. Est-ce
que le ministre en est informé?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je dois dire que
les nouvelles sont changeantes. Tantôt ils viennent, tantôt ils ne
viennent pas. J'aimerais pouvoir vous dire, en fin de soirée, exactement
ce qu'il en est. Je vais demander qu'on arrête la liste de façon
définitive ce soir.
Pour l'instant, nous savons que la CEQ sera des nôtres, de
même que la Fédération des enseignants de cégeps, et
l'Association nationale des étudiants du Québec, ce qui fait
trois organismes. Il n'est pas impossible que, répondant au voeu
exprimé plus tôt aujourd'hui, le Conseil supérieur de
l'éducation veuille également se présenter. Cela voudrait
dire quatre organismes demain matin.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que cela répond
à votre question?
M. Le Moignan: Pour le moment, oui.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Dans le même ordre d'idées, le ministre,
cet après-midi, a indiqué aux gens du Collège
Édouard-Montpetit que, malheureusement, ils ne pouvaient, étant
donné que sa liste était fermée cet après-midi,
mais là, il semble qu'il y a quelques ouvertures qui se font... C'est
parce que les gens du Collège Édouard-Montpetit ont reçu
une lettre d'un secrétaire particulier adjoint du ministre au mois de
février, leur donnant l'assurance qu'ils seraient entendus à la
commission parlementaire. Les gens sont ici, ils ont présenté un
mémoire. Je me demande si le ministre ne pourrait pas
reconsidérer le refus, enfin, ce qu'on a interprété
certainement comme un refus, d'entendre ce groupe-là. Ce ne serait pas
nécessairement plus long. Étant donné qu'ils se sont
donné la peine, sur la foi de la lettre d'un membre du cabinet du
ministre, en février dernier, de préparer un mémoire...
J'en fais la demande au ministre. Je pense qu'elle est tout à fait
légitime.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, la lettre qui a
été expédiée par un membre de mon cabinet l'a
été avant qu'il ne fût décidé de
procéder sur invitation pour éviter justement que ne
défilent pendant des jours, en commission parlementaire, des
représentants des divers cégeps. Nous avons le mémoire
écrit du cégep. Nous allons en prendre connaissance avec beaucoup
d'intérêt. Je crois que c'est la limite de ce que nous pouvons
faire, parce qu'autrement, nous allons certainement créer un sentiment
d'injustice chez les autres.
M. Rivest: M. le Président, si vous me permettez...
M. Morin (Sauvé): Parce que nous avons dû refuser
à d'autres, une fois que furent connus l'attitude et le temps
disponibles surtout, étant donné la législation qui se
trouve devant l'Assemblée nationale, nous avons dû dire non,
malheureusement, au Collège de Jonquière et au Collège de
Chicoutimi également.
M. Rivest: Je ne veux pas faire de débat, mais est-ce que
vous avez spécifiquement avisé les gens du Collège
Édouard-Montpetit qui se trouvent ici? Je pense que, par simple
délicatesse ou courtoisie à leur endroit, étant
donné qu'ils ont pu facilement interprété la lettre que je
cite comme étant un invitation à venir, ou enfin une garantie
à venir présenter leur mémoire à la commission, je
pense que le ministre se réfugie derrière un certain
côté légaliste que je trouve inadmissible dans les
circonstances.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, on me dit qu'on
a tenté de les rejoindre par tous les moyens et que cela n'a pas
été possible.
M. Rivest: Oui, ils sont effectivement ici; vous allez simplement
les renvoyer.
M. Morin (Sauvé): Non, nous avons leur mémoire
aussi. Je ne sais pas quand il est entré. Je ne sais pas s'il est
entré récemment à la commission. Est-ce que le
mémoire du Collège Édouard-Montpetit est entré
récemment à la commission parlementaire? Il vient d'arriver. Ah
non! raison de plus, il n'est pas arrivé dans les délais. Je suis
obligé...
Je vous le dis tout de go, je ne veux pas créer de
préférence en faveur d'un collège. Nous avons dû le
refuser à d'autres. Nous allons prendre connaissance du mémoire,
je m'y engage, mais je ne pense pas que nous puissions faire plus.
M. Rivest: Je veux simplement conclure en soulignant au ministre
pas simplement au ministre de l'Éducation, mais cela s'est
passé aussi avec le ministre des Communications que cette
façon de procéder dans les commissions parlementaires par
invitation peut effectivement, on en a la preuve, empêcher des gens
directement intéressés par les projets de loi, de se faire
entendre comme normalement ils devraient l'être au niveau d'une
commission parlementaire. Les remarques que le député de L'Acadie
a formulées en début de séance sont illustrées par
la décision que le ministre rend à l'égard du
Collège Édouard-Montpetit. Je pense qu'il faut le regretter.
Le Président (M. Marcoux): J'invite maintenant
l'Exécutif des présidents des conseils d'administration des
collèges. Mme Jeanne Blackburn, si vous voulez nous présenter vos
collègues et procéder à la présentation de votre
mémoire, selon les règles que vous avez dû suivre cet
après-midi.
Exécutif des présidents des conseils
d'administration des collèges
Mme Blackburn (Jeanne): Merci, M. le Président. Je
voudrais commencer par ma droite: Dr Mildred Eisenberg, président du
Collège de Vanier, du CA de Vanier; M. Richard Fortier, président
du conseil d'administration du Collège de Rosemont; à ma gauche,
M. Claude Fortier, président du conseil d'administration de
Lionel-Groulx; M. Serge Boucher, président du conseil d'administration
de Saint-Jérôme; et M. Paiement, qui est président du
conseil d'administration de Limoilou. Je suis présidente du conseil de
gestion du Collège de Chicoutimi.
M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs les
députés, avant de vous présenter notre mémoire,
j'aimerais d'abord vous assurer de notre intérêt et vous dire que
notre intervention se veut la plus positive et vise à permettre le
redressement d'une situation qui a, par le passé, été
fortement dénoncée. Vous l'aurez sans doute compris, notre
intervention portera sur une question qui nous semble fondamentale, et à
la source de bien des problèmes, sinon de tous, c'est-à-dire la
composition des conseils d'administration.
Avant de commencer la lecture du mémoire, j'aimerais vous dire
que la demande de paraître à la commission parlementaire a
été faite au nom de l'exécutif des présidents. Nous
n'avions pas eu le temps de consulter la conférence des
présidents. Toutefois, à la réunion des 18 et 19 mai, les
présidents ont été consultés; comme vous vous en
doutez, ils ont donné leur accord unanime à la
présentation d'un mémoire devant cette commission. C'est donc au
nom des présidents des CA de collèges que nous présentons,
ce soir, ce mémoire.
Je vous prierais également d'excuser les quelques coquilles qui
se sont glissées dans le document. Je pourrais invoquer le peu de temps
et le manque de disponibilité technique.
La Conférence des présidents de conseils d'administration
de cégep. Depuis 1973, les présidents de conseils
d'administration de cégeps tiennent des assemblées
d'échange et de concertation sur les aspects du réseau
collégial qui sont plus particulièrement de leur ressort. Ces
assemblées regroupent plus de 50% des présidents, ce qui assure
une représentativité acceptable, compte tenu du caractère
bénévole de la fonction de président, de l'absence d'une
structure formelle de regroupement et des disponibilités limitées
du secrétariat que la Fédération des cégeps met
à notre disposition.
La Conférence des présidents est dotée d'un
exécutif de présidents de six personnes qui prépare ses
assemblées et en assure le suivi. Cet exécutif est
habilité à parler au nom des présidents lorsqu'il est
spécifiquement mandaté pour le faire, comme c'est le cas
aujourd'hui.
Les présidents face aux projets de loi nos 24 et 25. Notre
expérience au sein des conseils d'administration des cégeps nous
a incités à réagir dès le début au projet
gouvernemental à l'égard des cégeps. L'exécutif des
présidents a tenu plusieurs réunions sur le sujet,
consulté les membres des conseils d'administration par le biais d'un
questionnaire, suscité la participation des présidents au
congrès spécial de la fédération en mars dernier et
convoqué une assemblée spéciale à Montréal
les 18 et 19 mai dernier.
En attendant une réforme des structures de la
Fédération des cégeps qui est en préparation, les
présidents ont décidé d'exprimer clairement leur appui
autonome à l'essentiel des positions que cette dernière
présentera à cette commission et d'enrichir le débat du
point de vue spécifique de mandataires bénévoles,
élus par leurs collègues du conseil d'administration,
dégagés de tout intérêt pécuniaire ou
professionnel en regard de la question des collèges publics.
Nous aurions aujourd'hui préféré vous faire
entendre la voix autorisée des conseils d'administration
eux-mêmes, mais la suite de nos propos expliquera pourquoi ceux-ci ne
sont pas encore en mesure de s'exprimer de façon cohérente et
concertée à l'échelle du Québec. (21 heures)
La composition des conseils d'administration, clef de voûte de
toute réforme: bilan. Vu sous tous ses angles, le bilan des conseils
d'administration des collèges actuels est largement négatif.
Déjà en 1974, un groupe d'administrateurs et d'ex-administrateurs
du cégep de Maisonneuve écrivait ce qui suit: "Dans beaucoup de
cas et en particulier dans les moments de crise le conseil est
devenu un lieu où les groupes d'intérêts se
définissent comme les porteurs d'étendards et défenseurs
de leurs mandataires. Des blocs se forment qui se liguent ou s'affrontent,
selon les intérêts de l'heure. Les professeurs et les
étudiants se retrouvent généralement d'un
côté de la barrière et les autres groupes de l'autre
côté. Dans certains cas, les membres de l'extérieur sont
pris à témoin de querelles internes et assistent en spectateurs
à des matchs entre la direction, d'une part, les étudiants et/ou
les professeurs, d'autre part."
Ce diagnostic brutal fut repris, à peu de choses près, par
le rapport Nadeau, la Fédération des parents,
l'ex-président du cégep Maisonneuve, de même que le
gouvernement actuel dans son énoncé de politique sur les
cégeps.
Nous sommes venus vous rencontrer aujourd'hui pour vous
répéter avec force que les con-
seils d'administration ne peuvent jouer sainement leurs rôles
d'orientation et de gestion du cégep. Leur influence est réduite,
leur pouvoir d'initiative est mis en échec par les divisions internes,
leur attention est "kidnappée" par les intérêts corporatifs
qui y siègent.
La majorité des directeurs généraux et des
directeurs de services pédagogiques se méfient, non sans raison,
des conseils d'administration. Ils s'arrangent, dans les faits, pour y recourir
le moins possible. Nous comprenons cette attitude courante des principaux
officiers du collège, qui manoeuvrent pour faire triompher leurs vues au
sein du conseil d'administration, face à d'autres manoeuvres. Faire
autrement serait, plus souvent qu'autrement, courir au bûcher.
La grande majorité des administrateurs externes au
collège: parents, socio-économiques, cooptés sont
très conscients de ces luttes qui se livrent sous leurs yeux. Leur
situation de bénévoles, face à des permanents à
temps plein du collège ne leur laisse pas la possibilité de
reprendre l'initiative de redéfinir les règles du jeu au conseil
d'administration, d'orienter le travail du conseil d'administration sur les
questions primordiales telles que les grandes politiques, les projets
particuliers, l'intégration dans le milieu, la qualité de vie, la
qualité de l'enseignement, et j'en passe. Ils sont constamment pris
à régler des questions urgentes ou à éteindre des
feux. D'assemblée en assemblée, les administrateurs externes
portent des jugements ad hoc sur des situations et des dossiers qu'on leur
présente, sans réussir à influencer les grandes
priorités du collège.
Par conséquent, le temps et l'intérêt des
bénévoles qui siègent au conseil d'administration sont
distraits des fins pour lesquelles on les a désignés à
cette table. Pour bien faire fonctionner un conseil d'administration, il faut
un minimum de consensus, un esprit de corps, un minimum de confiance mutuelle
entre les individus. Trop souvent, les professeurs sont identifiés comme
seuls fauteurs de troubles et montrés du doigt.
À notre avis, leur attitude n'est pas l'unique source du
problème que nous décrivons. Le poids trop grand, au sein des
conseils d'administration des cégeps, de groupes organisés qui
appartiennent aux cégeps, professeurs, directeur général,
directeur des services pédagogiques, étudiants, entraîne
inévitablement des conflits d'intérêts persistants qui
teintent toutes les interventions de ces groupes, même dans le cas des
sujets les plus anodins.
De même, il serait permis de penser que le ministère
lui-même semble douter de l'aptitude des conseils d'administration
à gérer les collèges puisqu'il profite du projet de loi 25
pour augmenter considérablement la réglementation et les
contrôles comme en font foi les articles 10, 16 et 20.
Ne va-t-il pas jusqu'à fixer lui-même le terme du directeur
général et du directeur des services pédagogiques, cinq
ans, à la place du conseil d'administration? De plus, quand a-t-on vu le
ministère s'adresser au conseil d'administration en temps de crise.
Projet de loi 25: L'article 3 du projet de loi 25 donnera le coup de
grâce aux conseils d'administration des cégeps. Les membres issus
du collège, professeurs, directeur général, directeur des
services pédagogiques, directeur des services aux étudiants,
profesionnels et étudiants, seront plus nombreux que les membres
externes au collège. Le gouvernement accentuera ainsi le poids des
conflits d'intérêts au sein du conseil d'administration et les
malaises que nous avons vécus depuis dix ans.
Le gouvernement fait, à notre avis, un bien mauvais calcul s'il
pense améliorer les choses en réduisant le nombre des professeurs
pour augmenter celui de la direction et des étudiants. Nous
répétons que la source du problème réside dans le
poids global des membres internes par rapport aux membres externes. Les luttes
d'intérêts vont continuer de plus belle. Les chances de chacun de
l'emporter pourront se renverser à l'occasion, mais le collège
n'en sortira pas nécessairement gagnant.
Le gouvernement croit-il pouvoir comparer les étudiants aux
clients d'un centre local de services communautaires ou d'un hôpital pour
augmenter leur nombre au conseil d'administration? Qu'il n'oublie pas que les
étudiants sont également des travailleurs, dans le
collège, dont la société attend un certain rendement
scolaire. Les représentants des étudiants ne l'oublient pas et
font souvent des alliances au sein du conseil avec des groupes susceptibles de
fermer les yeux sur certaines exigences ou certains rendements scolaires.
Recommandations: Tout comme les directeurs généraux, comme
les directeurs des services pédagogiques qui se sont exprimés au
congrès de la Fédération des cégeps sur le sujet,
les représentants des conseils d'administration insistent pour que les
conseils d'administration comptent au moins deux tiers des membres externes au
collège, c'est-à-dire parents, socio-économiques et
cooptés.
Bien que le président considère qu'en principe, aucun des
administrateurs ne devrait jouir d'un statut qui puisse le placer en conflit
d'intérêts, il accepte néanmoins que chaque groupe
organisé du collège ait droit à une voix au conseil
d'administration, mais aucun ne doit être en mesure d'y exercer une
action déterminante et le total de ces voix doit demeurer largement
minoritaire.
L'expérience des dix dernières années prouve hors
de tout doute que les représentants de ces groupes s'en font
inévitablement les porte-parole et les défenseurs, même au
détriment des intérêts collectifs. À titre d'exemple
de composition de conseil d'administration, nous vous soumettons le
modèle qui suit: le directeur général, six
socio-économiques, quatre parents, un professeur, un étudiant
adulte, un professionnel, un employé de soutien, un cadre, deux
cooptés et un étudiant régulier pour un total de 19
personnes. L'énoncé
de politique du gouvernement fait grand état du caractère
de bien collectif des collèges. "Le cégep n'appartient pas
seulement à ceux qui y travaillent ou qui vont y chercher une formation.
Il est plutôt un bien collectif."
La composition que nous proposons respecte intégralement les
objectifs de participation des employés et des étudiants à
la gestion de leurs affaires, tout en préservant, dans la pratique, le
bien public pour lequel le cégep existe.
Nous croyons avoir le crédit nécessaire pour
démontrer que la composition proposée par le gouvernement
compromet plus que jamais le deuxième objectif, c'est-à-dire
celui d'assurer au collège son caractère fondamental de bien
collectif. L'angélisme du programme officiel du Parti
québécois à ce chapitre aurait-il plus de poids aux yeux
du gouvernement que l'expérience vécue pendant dix ans par les
représentants des conseils d'administration, les directeurs
généraux, les directeurs de service pédagogique et les
parents eux-mêmes? Les aveux des syndicats d'enseignants, quant au sens
qu'ils ont donné à leur participation au conseil d'administration
contredisent les illusions officielles du gouvernement. Ne sont-ils pas
allés, dernièrement, jusqu'à proposer comme mot d'ordre la
non-collaboration?
Dans ce contexte, les officiers des collèges ont eu la prudence
de ne pas avouer trop ouvertement leur méfiance des conseils
d'administration. Nous constatons tous leur préférence
marquée pour l'autocratisme, nécessité fait loi. Nous
insistons encore une fois pour que le gouvernement s'appuie sur la
réalité vécue depuis dix ans.
Autres aspects du projet de loi 25. Nous trouvons le ministre bien
prudent lorsque vient le temps pour lui de s'assurer que les conseils
d'administration ne dévieront pas de leur mandat de saine gestion. Le
moins qu'on puisse dire, c'est qu'il ne prend pas de chance aux articles 4, 5,
16, 18, 19, 20 du projet de loi 25. Même si nous reconnaissons la
légitimité de ces pouvoirs dévolus au ministre, nous
sommes convaincus qu'il n'aura pas à les utiliser si les conseils
d'administration sont orientés et guidés par des membres
provenant en majorité de l'extérieur du collège, dont le
seul motif ne peut être que la promotion du bien commun au sein du
cégep. Nous souhaiterions présenter trois amendements au texte
proposé.
À l'article 11: Les règlements adoptés par les
conseils d'administration des collèges ne requièrent pas
l'approbation du ministre.
L'obligation actuelle de faire approuver les règlements
entraîne des délais inutiles. C'est une responsabilité que
nous pouvons parfaitement assumer sans le ministère. Notre rapport
annuel suffira amplement à informer le ministre.
L'article 12 devrait se lire comme suit: "... pour une période
maximum de cinq ans".
Le ministre introduit une rigidité qui nous semble inutile et
même nuisible dans la décision que doit prendre un conseil
d'administration au moment d'engager ou de renouveler le contrat d'un directeur
général ou d'un directeur des services pédagogiques.
L'autre recommandation: Toute forme de tutelle prévue à
l'article 16 devrait être précédée d'une
enquête efficace qui déterminerait, s'il y a lieu, d'imposer de
telles contraintes à un conseil d'administration.
Nous signalons au ministre que l'article 7, sur le rôle du
président, ne donnerait aucun résultat intéressant si les
conseils d'administration ne répondent pas aux critères
d'objectivité et de cohésion que nous mettons de l'avant.
Les conseils d'administration composés tels que nous le proposons
sauront donner des mandats réalistes et éclairés à
leur président, pour s'assurer d'un fonctionnement dynamique au autonome
par rapport à tout groupe d'intérêt particulier.
Dans ce cadre, nous croyons la formulation de cet article très
heureuse.
D'autre part, il est sage de permettre aux parents élus au
conseil d'administration de terminer leur mandat de deux ans, même s'ils
perdent, avant cette échéance, la qualité de parents.
En ce qui concerne la nomination des membres socio-économiques,
nous suggérons au ministre de définir un mécanisme qui
éviterait que ces nominations se fassent en bloc. On éviterait
ainsi des ruptures désastreuses dans la gestion continue d'une
institution aussi complexe que le cégep.
Enfin, il serait souhaitable que le ministre accélère la
nomination des membres, de façon à limiter à 60 jours au
maximum les vacances au conseil d'administration.
Le conseil des collèges. La Fédération des
cégeps vous remettra sur ce projet de loi un avis que nous endossons en
tout point. Nous réitérons que le Conseil des collèges
doit être consultatif au ministre, qu'il doit respecter la
spécificité du niveau collégial, qu'il doit être
composé de membres qui représentent les milieux
socio-économique et culturel de toutes les régions du
Québec, et qui ne soient pas liés à l'un ou l'autre des
collèges.
La fédération se chargera, de façon autonome du
Conseil des collèges, de fournir au ministre le point de vue de ceux qui
administrent les collèges au jour le jour, point de vue forcément
plus technique et plus intéressé.
M. le Président, M. le ministre, mesdames et messieurs, ces
recommandations, qui visent à rendre faisable l'administration d'un
collège, ont pour seul objectif d'assurer un climat qui facilite un
enseignement de qualité, une meilleure réponse aux besoins du
milieu et qui sont, nous semble-t-il, les objectifs premiers des
collèges.
Voilà, M. le Président, l'essentiel des recommandations
que les présidents portent à votre attention. Nous remercions les
membres de cette commission de nous avoir écoutés et nous osons
croire qu'ils ne feront pas fi de l'expérience que nous vivons depuis
dix ans au sein des conseils d'administration de collèges et que nous
leur avons décrite aujourd'hui. Le gouvernement dispose d'une occasion
précieuse de régler à la racine même certains
problèmes du réseau collé-
gial. Nous espérons qu'il ne se contentera pas d'une
opération de relations publiques. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je désire
remercier tout d'abord la Conférence des présidents des conseils
d'administration de cégeps pour son mémoire. À l'instar de
la Conférence des recteurs d'université, cette conférence
peut espérer jouer, je pense, un rôle important dans l'avenir des
cégeps. Je suis heureux de constater que cet organisme prend du poil de
la bête et est déterminé à prendre au sein du
système des collèges la place qui revient aux présidents
des CA.
Mme la Présidente, j'aimerais tout d'abord vous poser une ou deux
questions sur l'approbation très générale que vous nous
donnez avec quelques conseils à l'endroit du Conseil des
collèges. Je sais que vous n'avez pas voulu vous étendre
là-dessus, mais il m'intéresse tout de même, à la
suite des conversations que vous avez pu entendre cet après-midi, de
vous poser une ou deux questions là-dessus. Pour le reste, j'y
reviendrai rapidement par la suite en ce qui concerne la composition du conseil
d'administration, par exemple.
Puisque vous nous dites dans votre mémoire que vous avez tenu de
nombreuses réunions sur l'énoncé de politique depuis
quelques mois, vous avez dû avoir l'occasion de vous pencher sur les
dispositions de l'énoncé de politique ou du livre blanc, comme on
l'appelle quelquefois, au sujet du Conseil des collèges. Vous avez
dû vous entretenir de ce sujet avec vos collègues, les autres
présidents. Est-ce que vous pourriez nous dire, en gros, quelle est
votre attitude sur les fonctions que le gouvernement entend confier au Conseil
des collèges et sur la question de l'évaluation? Cet
après-midi, nous avons entendu quelques opinions sur la question. Je
serais très heureux d'avoir quelques sons de cloche là-dessus et
je note qu'à votre gauche se trouve M. Paiement, qui a la
responsabilité d'un cégep de la région de Québec et
qui a dû justement traiter de graves problèmes d'évaluation
il n'y a pas longtemps. Je pense qu'il faut profiter de la présence de
personnes comme cela pour éclairer la commission. C'est ma
première question, très générale, comme vous le
voyez. (21 h 15)
Mme Blackburn: M. le Président, comme vous l'avez
remarqué à l'intérieur du mémoire qu'on vient de
présenter, quant à la question première qui nous a
amenés à cette commission, notre intervention s'est faite plus
particulièrement sur la composition des CA. Comme on a tenté de
le souligner, c'est, nous semble-t-il, la source de presque tous les
problèmes pour ne pas dire de tous les problèmes actuellement
dans le réseau, ce qui fait que, concernant le Conseil des
collèges, les présidents, moi, d'une part, et d'autres
présidents également, nous nous sommes penchés sur
l'énoncé de politique de même que sur le projet de loi
24.
Nous reprenons essentiellement la position de la
fédération sur la question, qui est que le Conseil des
collèges ne devrait pas être à la fois conseiller au
ministre et conseiller aux collèges. Vous comprendrez, je pense,
qu'à ce moment-là, la concertation et l'évaluation ne
devraient pas à notre avis là-dessus, nous partageons
l'opinion de la fédération relever du Conseil des
collèges. Cela répond peut-être globalement à une
question aussi globale.
M. Morin (Sauvé): Oui, mais la question de
l'évaluation est fort importante. C'est la préoccupation
gouvernementale qui est certainement l'une des raisons qui est à
l'origine de la création du Conseil des collèges. Si nous ne
confions pas l'évaluation au Conseil des collèges, quelle sorte
de mécanisme d'évaluation pouvons-nous mettre en place? Est-ce
que le fait de confier l'évaluation à une commission
rattachée au Conseil des collèges, mais néanmoins autonome
par rapport à celui-ci, permet de résoudre le problème?
Sinon, quelle solution pouvez-vous nous proposer? Parce que vous savez qu'on a
débattu depuis des mois et des mois de cette question.
Mme Blackburn: M. le Président, M. le ministre, je ne
voudrais pas vous donner l'impression qu'on minimise l'importance de
l'évaluation. Cela nous est apparu de tout temps un problème
extrêmement sérieux. Peut-être que je vous donnerai
l'impression de simplifier la chose chaque fois que je vous dis: Donnez-nous
les moyens d'administrer et peut-être qu'on se donnera les moyens de
s'évaluer. À savoir à quel lieu pourrait se faire cette
évaluation, la fédération, qui y a réfléchi
plus longuement, pourrait certes mieux vous répondre, mais, a priori, on
peut penser que, pour l'évaluation institutionnelle et
l'évaluation des enseignements, il faudrait d'abord se doter d'outils et
ensuite, cela pourrait, par exemple pour l'évaluation institutionnelle,
être fait par une entreprise privée, mais qui soit totalement
autonome et du Conseil des collèges et des collèges
eux-mêmes, de même que du ministère. C'est un avis que je ne
voudrais pas développer plus profondément, parce que la
fédération a davantage réfléchi là-dessus.
Toutefois, je pourrais peut-être demander à mes collègues
ici s'ils veulent ajouter quelque chose sur la question.
M. Morin (Sauvé): Je serais très
intéressé à les entendre.
Mme Eisenberg: J'aimerais ajouter un mot. Je pense qu'il y a une
évaluation actuellement dans le réseau qui ne se fait pas. C'est
la première de toutes, à mon avis, qui devrait se faire. C'est
celle qu'un conseil d'administration, conscient de ses responsabilités,
devrait faire chaque année de la situation dans son collège.
Cela, à ma connaissance, n'existe à peu près pas
actuellement dans le réseau. La raison est dans la description que nous
faisons de ces conseils d'administration. De la façon qu'ils sont
composés, ils n'arrivent pas à se
donner des méthodes de travail, à se donner des
priorités et, par conséquent, à remplir une de leurs
fonctions qui serait de faire une évaluation rigoureuse, honnête
de la situation, dans leur collège, de l'enseignement, de la direction,
des cadres, et ainsi de suite. C'est la première chose.
Pour le reste, je pense que la recommandation du mémoire de la
Fédération des cégeps nous apparaît acceptable. On
leur laisse un peu le leadership parce qu'ils sont, je pense, un peu plus au
fait que nous de cette question en ce qui concerne les relations entre le
ministère, le Conseil des collèges, la Fédération
des cégeps et ce qu'ils proposent, c'est-à-dire un centre
d'évaluation indépendant qui serait plus ou moins rattaché
au ministère... Je n'ai pas trop compris. Là-dessus, on leur
laisse le leadership.
M. Morin (Sauvé): Vous comprendrez l'intérêt
que je puisse avoir, puisque je vous ai devant nous. Vous êtes devant la
commission. Vous êtes les présidents des conseils
d'administration. Vous avez été aux prises avec ces
problèmes d'évaluation, certains d'entre vous de façon
assez dramatique. Vous comprendrez que je sois intéressé à
avoir votre point de vue. Celui des directeurs généraux
m'intéresse aussi. Quand la fédération viendra tout
à l'heure, ils auront l'occasion de nous le donner. Les directeurs
généraux sont dans l'administration, eux. Ils seraient
évalués aussi, éventuellement, de sorte qu'ils n'ont
peut-être pas trop intérêt à être en faveur
d'une évaluation un peu serrée tandis que vous, vous êtes
les présidents des CA. Vous êtes donc les bénévoles
là-dedans, vous êtes de l'extérieur. J'aimerais bien
connaître votre point de vue là-dessus.
Mme Blackburn: J'allais dire que je reviens à cette
dimension quand on parle d'évaluation, si les conseils d'administration
sont composés de manière telle qu'ils puissent exercer de
façon saine et dans un climat normal l'administration d'un cégep,
ils pourront aussi assumer, avec l'aide de mesures ou d'outils
d'évaluation, assumer cette dimension; mais pour parler de cette
dimension, je passerais à M. Fortier et ensuite M. Paiement qui, vous
disiez tout à l'heure, avaient subi aussi des problèmes
d'évaluation.
M. Morin (Sauvé): J'aimerais avoir votre point de vue. Le
gouvernement n'entend pas revenir sur la gestion participatoire des
cégeps. Que nous discutions, comme on l'a fait cet après-midi
dans un autre mémoire, de modifier, en ajouter un, en enlever un, on
peut examiner ça. Par exemple, l'absence des cooptés. Je sais que
vous venez de nous dire qu'il faudrait remettre les cooptés. Cet
après-midi, on nous a dit non. Je crois qu'il faut regarder ça;
il faut se pencher là-dessus. Il faut voir pourquoi leur présence
serait utile. Jusqu'ici, notre réflexion nous a plutôt
portés à penser le contraire. Mais, là-dessus, il faut
qu'on dialogue. Mais, tenez pour acquis quand même que le gouvernement ne
modifiera pas fondamentalement la gestion participatoire et cela étant
une donnée de la situation, comment peut-on, au mieux, évaluer ce
que nous faisons dans nos collèges? Je vous écoute,
messieurs.
M. Fortier (Claude): Oui, je voudrais suggérer qu'il y a
deux niveaux de responsabilité à ce point. Il y a d'abord la
responsabilité du ministre qu'il exerce au nom du gouvernement devant
l'Assemblée nationale. Il nous semble que cela commande un rapport
immédiat avec le conseil d'administration, donc avec l'organisme qui
représente et qui est responsable devant ces mandats, en l'occurrence le
ministre de l'Éducation et l'Assemblée nationale. La porte qui
s'ouvre par le rapport annuel du collège, qui devrait être le
rapport du conseil d'administration et non pas le rapport d'un officier
à l'intérieur, mais que ce soit vraiment le rapport qui engage le
collège, pourrait être une voie par laquelle le ministre s'assure
du sérieux de ce qui se passe à l'intérieur par le biais
de critères à partir desquels le rapport annuel puisse être
composé et qui pourrait servir de discussion, le cas
échéant, entre le ministre et le conseil d'administration. C'est
un premier niveau de responsabilité. Il y en a un autre, c'est celui du
collège lui-même. C'est peut-être faute d'avoir suffisamment
précisé, lors des discussions qu'on a pu avoir ici ou là
de ces deux niveaux qui sont aussi importants l'un que l'autre, ces niveaux de
responsabilité qu'on puisse se trouver embarrassé par l'une ou
l'autre des formules qui sont avancées. Là-dessus, il nous semble
que le conseil d'administration doit prendre les mesures à l'interne
pour exercer ses propres responsabilités vis-à-vis de ce qui se
passe dans le collège et pouvoir, de ce fait, en répondre
publiquement et devant la région vis-à-vis de laquelle il est
directement responsable en tout cas, il devrait se sentir responsable
et aussi devant le gouvernement, étant donné les liens
juridiques et financiers que le lient à la population par
l'intermédiaire du gouvernement. (21 h 15)
Sous cet aspect, aussi bien que sous le premier, je pense qu'il peut y
avoir intérêt, étant donné l'état assez peu
avance de l'expertise dans la province de Québec en cette matière
d'évaluation et particulièrement d'évaluation
institutionnelle, il pourrait y avoir intérêt à concentrer
les ressources dont on dispose au plan provincial, pour assurer aussi bien dans
une perspective d'utilisation par les collèges que dans d'autres
perspectives, celles, par exemple, d'un gouvernement ou d'une population qui
demande des comptes, une concentration des expertises qui puissent jouer,
à l'égard de ces deux niveaux de responsabilité, un
rôle de support, de soutien, de conception de mécanismes et aussi
de relations avec les milieux de recherche qui, actuellement, s'affairent
très activement, comme vous le savez, aussi bien aux États-Unis
qu'en Europe, sur cette question précisément.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Fortier: Donc, je voudrais redire tout simplement, en
conclusion, qu'il m'apparaît nécessaire, en tout cas probablement
fort utile de bien
partager, dans l'esprit de chacun, les niveaux de responsabilité
et, de ce fait, les conseils d'administration ne peuvent pas et ne devront pas
se soustraire à cette responsabilité de rendre des comptes. Cela
ne signifierait pas nécessairement les mêmes moyens et le
même niveau de réflexion que ceux qu'utilisera le ministre pour
demander des comptes aux collèges.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Fortier: La gestion interne du collège peut commander
une autre approche, mais l'une n'exclut pas l'autre et elles me semblent toutes
les deux complémentaires et indispensables.
M. Morin (Sauvé): Oui, bien. M. Paiement, avant que vous
n'interveniez, est-ce que je puis poser une question qui va, en quelque sorte,
préparer le terrain pour votre intervention que je crois très
importante?
Le ministre n'entend pas se défiler devant sa
responsabilité. D'ailleurs, voulut-il le faire que l'Assemblée
nationale, par la voie de l'Opposition, le mettrait sur la brèche
constamment.
Dans un cégep de Québec, récemment, il y a eu des
événements et, tous les jours en Chambre, on me demandait
où c'en était enfin presque tous les jours...
Mme Lavoie-Roux: Vous en gardez un bien mauvais souvenir. Ce ne
fut que deux ou trois fois, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Donc, le ministre, qu'il le veuille ou
qu'il ne le veuille pas, est un peu responsable de tout ce qui se passe,
même parfois de choses un peu aberrantes. Il doit répondre de
cela.
De son côté, le collège, lui aussi, doit
s'évaluer comme vous le faites observer. Est-ce qu'il ne manque pas,
entre les deux, l'expertise, un organisme où on trouve une certaine
expertise objective qui ne soit pas le pouvoir politique, mais qui puisse
conseiller le pouvoir politique et qui puisse également aider le
collège à faire cette évaluation pour laquelle il n'est
pas armé; à vrai dire, très souvent, il n'a pas
l'expertise. Est-ce qu'il n'est pas ce niveau-là? C'est celui-là
que nous avons cherché et, justement M. le Président du
cégep de Limoilou pourrait nous éclairer là-dessus
lorsque s'est posé récemment un problème
pédagogique particulièrement délicat dans son propre
cégep, il a été obligé non pas d'avoir recours au
ministre qui, évidemment, ne pouvait pas envoyer des gardes-chiourmes
dans son collège, il ne pouvait plus arriver à le faire de
façon interne, mais il a dû avoir recours à l'externe et
justement à une expertise du type de celle dont vous parliez il y a un
instant.
M. Paiement, j'en ai assez dit; peut-être pou-vez-vous maintenant
nous expliquer votre point de vue là-dessus?
M. Paiement (Paul-Aimé): Ce que je veux d'abord expliquer,
c'est ce qui s'est passé chez nous. Je pense que c'est un exemple qui va
nous aider à mieux comprendre.
Avant même que j'arrive au conseil d'administration parce
que ça ne fait pas tellement longtemps, un peu plus d'un an seulement
je constatais que le conseil d'administration de l'époque,
à plusieurs reprises, apportait ce problème de
l'évaluation, parce qu'il sentait le besoin d'évaluer ce qui se
passait là. À moins de manquer de lucidité, on voyait bien
qu'il y avait des problèmes. Or, ce qui se présentait et ce qui
amenait toujours le conseil d'administration à échouer dans ses
tentatives d'évaluation, c'était précisément la
composition même du conseil d'administration qui amenait des blocs qui
avaient intérêt ou qui pouvaient avoir intérêt
de toute façon, j'interprète peut-être en disant qu'ils
avaient intérêt à ce qu'il n'y ait pas
d'évaluation. Il a fallu jouer d'astuces pour avoir l'aide du ministre
parce qu'évidemment, ça prenait un financement. Quand on a
recours à des experts de l'extérieur, évidemment,
ça prend un financement qui n'est pas déjà prévu
dans les budgets qui sont alloués aux collèges. On a
réussi, avec cette expertise de l'extérieur, à avoir un
rapport qui serait déposé dans les prochains jours. (21 h 30)
Je ne veux pas préjuger des conclusions parce que je ne les ai
pas vues, mais j'imagine qu'elles seront très positives et qu'elles vont
aider non seulement le collège à se sortir du bois, mais
possiblement l'ensemble du système parce que j'imagine, de toute
façon, qu'il y a des problèmes qu'on a vécus dont la
responsabilité ne relève pas des personnes qui étaient en
place, mais qui peut relever même de déficiences dans la loi.
C'est un aspect qui m'apparaît excessivement important que les
collèges eux-mêmes, indépendamment de toute autre structure
gouvernementale que je ne nie pas, parce que je pense qu'il en faut
également, aient comme tels des moyens de s'évaluer ou de
procéder à l'occasion, surtout lorsqu'il y a des problèmes
particuliers, à une évaluation.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que...
M. Paiement: Ceci n'exclut pas évidemment...
M. Morin (Sauvé): Continuez, M. Paiement, je ne voulais
pas vous interrompre.
M. Paiement: J'allais dire que ceci n'exclut pas
évidemment à l'occasion que le gouvernement, par ses
mécanismes, apporte une aide à l'ensemble des
collèges.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que, dans votre
expérience, M. Paiement, puisque vous avez vécu des
événements de cet ordre, il peut être utile à un
collège d'avoir recours à une expertise extérieure?
M. Paiement: Je suis porté à le penser. Avec
l'expérience que j'ai vécue évidemment
c'était une situation qui était, il faut bien l'admettre,
très
détériorée, qui n'est peut-être pas l'exemple
type de l'ensemble des collèges, mais chez nous, c'est clair que, pour
nous sortir du bois, s'il y avait eu une expertise déjà connue,
cela aurait sûrement aidé les membres du conseil d'administration
à agir plus rapidement et plus efficacement.
M. Morin (Sauvé): Je m'empresse d'ajouter, M. le
Président, qu'il se fait de très bonnes choses dans votre
cégep.
M. Paiement: Absolument.
M. Morin (Sauvé): C'étaient des problèmes
particuliers, parce qu'à d'autres égards votre cégep est
à l'avant-garde pour certaines disciplines.
M. Paiement: C'est toujours ce que j'ai dit. Dans un cégep
comme le nôtre, il y a du mieux et il y a du pire.
M. de Bellefeuille: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. de Bellefeuille: J'estime que nous sommes réunis ici
pour étudier les projets de loi 24 et 25 à la lumière des
propositions qui nous sont faites par les groupes qui se présentent
devant nous, et non pas pour revenir en arrière et examiner en
détail certains incidents, certains événements qui ont pu
se produire dans un cégep en particulier.
Le Président (M. Marcoux): Je constate que ce n'est pas
une question de règlement, c'est un commentaire sur des questions et des
réponses qui sont fournies. Je fais simplement cette précision.
M. le ministre, est-ce que vous avez d'autres questions ou commentaires?
M. Morin (Sauvé): Je pense que, pour la question de
l'évaluation, nous sommes arrivés à la limite de ce que
peuvent donner nos échanges. Je pense qu'on voit un peu plus clairement
où on va. Je me tourne maintenant vers la question dont vous avez fait
l'objet de votre mémoire, qui est celle du conseil d'administration.
J'aimerais que nous examinions une ou deux questions particulières. Vous
avez fait allusion à deux reprises dans votre mémoire au fait que
le CA est souvent la proie de groupes organisés, qui peuvent être
en conflit d'intérêts et, parmi eux, vous avez mentionné
cela m'a un peu étonné à première vue
à deux reprises les directeurs généraux et, par la suite,
vous les amenez à titre de membres votants aux conseils
d'administration. Cet après-midi, un groupe est venu nous dire qu'il
souhaiterait que les directeurs généraux ne soient pas membres
des conseils d'administration. Pourriez-vous nous expliquer votre raisonnement
de façon un peu plus précise là-dessus? Pouvez-vous aussi
nous dire de façon plus précise quelle est votre attitude sur les
cooptés?
Mme Blackburn: Sur la première question, je reviens un peu
à votre intervention de tout à l'heure. Sachez que, pour nous, le
souci de la participation est aussi très grand. On ne voit pas un
conseil d'administration de collège qui ne serait composé que de
l'externe. Je pense l'avoir assez bien exprimé.
Quand on parle des gens de l'interne, vous avez demandé pourquoi
on incluait les directeurs généraux ou les DSP à
l'intérieur des groupes qui avaient aussi des intérêts. Il
nous semble évident que tout groupe du collège vient au conseil
d'administration, dans la situation actuelle, pour défendre des
intérêts plus particuliers et il vient plus ou moins
mandaté. C'est une chose qu'à l'avenir, on devra
reconnaître et avec laquelle on devra composer. Ce n'est pas le propre
des enseignants d'être mandatés, tout le monde sait que les
enseignants sont mandatés. Mais les autres groupes aussi, les
enseignants le sont. Quand on aura, et si on a les professionnels non
enseignants, comme on les aura possiblement, ils seront aussi
mandatés.
Le directeur général, je pense bien, avant chaque conseil
d'administration, réunit la régie et analyse chaque point au
conseil d'administration. Il ne s'en vient pas mandaté comme
l'enseignant, il s'en vient quand même avec certaines orientations
à vouloir donner. Donc, ils défendent chacun des
intérêts particuliers et cela n'a rien d'anormal. Je pense que ce
qui serait anormal, ce qu'on a appelé de l'angélisme, c'est de
penser qu'on pouvait amener des gens à être à la fois juge
et partie sur des questions comme ça.
Comment voulez-vous qu'avec un directeur général, le
conseil d'administration décide demain d'augmenter les contrôles?
Le directeur général ne sera pas plus heureux que l'enseignant
à qui on dira: On ira t'évaluer demain matin dans ton secteur.
C'est une réaction tout à fait humaine. Je me dis que, du moment
qu'on a accepté ce principe, on compose avec eux. Cependant, on ne peut
pas permettre que des intérêts particuliers empêchent que
des décisions soient prises par des gens qui sont capables d'un certain
recul parce que, précisément, ils ne seront pas impliqués
dans les décisions demain matin.
Quand on arrive avec le calendrier scolaire on a eu le
débrayage des étudiants qu'on demande aux étudiants
leur avis sur la durée de la dernière session, il n'y a pas un
étudiant qui aurait été favorable à ce que
ça se poursuive, jusqu'au 8 juin, comme ça se fait actuellement,
et jusqu'au 12 juin. C'est normal, il y en a qui ont un voyage, un travail, une
session à reprendre. C'est la même chose pour les enseignants.
Chaque fois qu'on demande à des gens de transcender des
intérêts, je pense que c'est irréaliste. On reconnaît
ce principe que tous les groupes soient représentés, mais qu'ils
n'aient pas le poids des décisions, c'est-à-dire que ce poids des
décisions repose à l'extérieur.
L'autre question, c'était sur les cooptés.
M. Morin (Sauvé): Oui, j'aimerais connaître de
façon plus précise votre attitude sur les cooptés.
Mme Blackburn: Sur les cooptés, j'ai entendu, comme vous
tous tout à l'heure, l'intervention de l'association qui nous a
précédés. Chez nous, les cooptés, contrairement
à cette impression générale qu'on laissait que cela
n'avait pas été vraiment la formule, lors de la dernière
assemblée générale des présidents des conseils
d'administration, on a vérifié autour de la table et au moins le
tiers des présidents autour de la table étaient des membres
cooptés.
Pour certains collèges, cela a pu causer des problèmes; je
ne vous dis pas que, chez nous, cela s'est fait en douceur, parce que ça
demande les deux tiers des voix pour proposer dans notre
règlement, je ne voudrais pas vérifier ailleurs ce qui
fait que, pour avoir les deux tiers des voix, il faut vraiment y voir. Cela
nous est apparu, aux présidents, comme une excellente formule parce que
ça permet d'aller chercher des gens compétents qu'on n'a pas
déjà autour de la table. C'est pourquoi on souhaitait que ce soit
maintenu.
Par rapport au vote des DG de l'assemblée de cet
après-midi, je n'arriverais pas à me prononcer sur les raisons
qui les ont amenés à proposer une telle mesure.
M. Morin (Sauvé): Je vous remercie et, comme nous nous
entretenons depuis déjà quelque temps et que je veux donner une
chance aux autres membres de la commission, je vais terminer en vous disant
que, pour ce qui est de l'approbation des règlements par le ministre, je
suis prêt à y réfléchir. Je vais y
réfléchir. Je ne sais pas encore quelle sera mon attitude, je
veux entendre celle des autres collègues, je vais voir comment les
autres organismes vont réagir. Évidemment, si le gouvernement
maintient, comme je vous l'ai dit, une gestion participatoire de l'ordre de
celle que nous connaissons actuellement, quitte à retoucher ceci ou
cela, si nous ne mettons pas en place le type d'organismes que vous nous
suggérez, dont vous nous suggérez la composition dans votre
mémoire, peut-être que cette approbation pourrait tout de
même demeurer de quelque utilité.
C'est à vous de me le dire. Pour ce qui est de la période
de cinq ans, ça aussi, c'est intéressant, mais est-ce qu'il ne
pourrait pas y avoir aussi une période minimum, peut-être trois
ans? C'est une question que nous nous posons aussi. Pour ce qui est de
l'enquête qui devrait précéder la tutelle, je suis
prêt à examiner cela également. Ce n'est pas la
première fois, d'ailleurs, que cette question est soulevée. Si
les autres organismes ont des choses à nous dire là-dessus, nous
les écouterons avec beaucoup d'attention.
Toutes ces choses étant dites et à moins que vous n'ayez
des commentaires, je laisserai mes collègues...
Mme Blackburn: Si le président me le permettait. Quand
vous parlez de gestion participatoire, nous sommes d'accord, et je me plais
à le répéter. Toutefois, il faudrait savoir où
définir les lieux. Il y a, comme on l'a dit tout à l'heure, au
conseil d'administration, certains modes de parti- cipation des
différents groupes. Ce qu'il faut savoir, c'est qu'à
l'intérieur des collèges, il y a divers lieux de participation
qui s'appellent la commission pédagogique, la régie
administrative, le CRT, l'association des étudiants, le syndicat, le
département, le secteur, le module. Et on pense que la participation de
l'interne devrait davantage se faire sur des actes pédagogiques
plutôt que sur des actes administratifs.
On se dit que finalement, l'objectif du collège, ce n'est pas la
participation. L'objectif du collège, c'est un enseignement de
qualité et des services à la collectivité. Ce qui fait que
la participation devient un moyen, du moment où ce moyen ne
détruit pas les objectifs premiers. Et quand on parle de participation,
pour nous, il nous apparaît important qu'il y en ait. On devrait voir
aussi à impliquer davantage les étudiants, à
l'intérieur de ces niveaux de participation, à l'intérieur
du collège. Mais c'est sur le lieux qu'on s'entend moins bien.
Par rapport aux cinq ans, vous parlez d'une période minimale et
maximale; ce qu'on dit, c'est qu'on peut avoir un excellent bonhomme, qu'on
engage demain, comme DG, mais il peut très bien mal s'entendre avec les
objectifs du collège ou encore pas très bien s'entendre avec les
cadres, on n'en a pas vraiment discuté, mais je me dis que trois ans,
cela m'apparaît déjà long, parce que c'était
déjà le contrat qu'on donnait le plus long aux DG et une
période de deux ans pourrait être acceptable. Plus de deux ans,
difficilement. M. Boucher.
M. Boucher (Serge): Est-ce que je vous ai bien compris, M. le
ministre? Vous dites que si vous acceptiez la proposition qu'on propose pour
les conseils d'administration, vous pourriez vous dispenser du pouvoir
d'approuver les règlements. Mais si vous maintenez votre proposition,
vous allez devoir maintenir votre pouvoir d'approuver les règlements des
conseils d'administration.
M. Morin (Sauvé): Non, ce n'est pas tout à fait
cela.
M. Boucher (Serge): Cela ressemblait à cela.
M. Morin (Sauvé): C'est une question de degré, tout
de même. C'est une question de degré parce que: Est-ce que
vraiment renoncer à la gestion participatoire...
M. Boucher (Serge): On n'y renonce pas.
M. Morin (Sauvé): ... au niveau du conseil
d'administration...
M. Boucher (Serge): On n'y renonce pas.
M. Morin (Sauvé): ... est-ce que cela ne va pas
créer plus de problèmes que ceux que nous connaissons
actuellement? Je ne nie pas que nous ayons des problèmes actuellement.
Mais est-ce qu'il n'y aura pas là un facteur de démobilisa-
tion? Est-ce qu'il n'y aura pas là un facteur de
démotivation de la part de ceux qui y sont actuellement? C'est une
question qu'on peut se poser. J'ai entendu, de toute façon, des gens
soutenir devant moi qu'en dépit de ces difficultés, cette
participation, au plus haut niveau, avait quelquefois tout de même
apporté des résultats favorables, des résultats positifs,
comme on dit quelquefois et que le bilan n'était pas, somme toute,
essentiellement négatif, comme celui que vous en dressez ce soir.
M. Boucher (Serge): Est-ce que je peux? Le Président
(M. Marcoux): Oui.
M. Boucher (Serge): Le bilan qu'on vous trace, c'est celui de la
Conférence des présidents de conseils d'administration. On a
mentionné qu'il y avait au moins de 20 à 25 présidents qui
avaient participé aux deux assemblées. Là-dessus, nous
avons un consensus. Je pense que nous sommes les mieux placés pour vous
décrire quel est le bilan. Qu'il y ait eu dans certains cas et
nous savons qu'il y en a des expériences positives, oui. Mais
quand on fait le bilan, la somme du négatif et du positif, c'est ce
qu'il y a ici.
Pour la démotivation, je pense que la situation actuelle est
beaucoup plus démotivante que ce que nous vous proposons. Si les
conseils d'administration avaient vraiment un pouvoir d'initiative, ils
pourraient beaucoup plus stimuler les différents groupes qui travaillent
dans les cégeps et motiver les gens. Le problème, actuellement,
c'est qu'il y a des intérêts particuliers qui se tiraillent et les
conseils d'administration sont enferrés dans cette lutte
d'intérêts particuliers et n'arrivent pas à en sortir et
à proposer des objectifs qui débordent et qui dépassent
les intérêts particuliers. C'est la situation telle que nous la
voyons. (21 h 45)
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux à
mon tour remercier la Conférence des présidents des conseils
d'administration des cégeps pour son mémoire. Je retiens de votre
mémoire qu'il y a un élément fondamental, c'est celui de
la composition du conseil d'administration. Vous avez abordé d'autres
questions, mais vous les avez moins développées, j'y reviendrai.
Je pense qu'on ne peut pas déduire des paroles du ministre que le
gouvernement ne bougera pas, mais il y a une chose contre laquelle je voudrais
le mettre en garde, c'est qu'il fasse jouer des oppositions touchant des
détails, par exemple, que le groupe qui vous a
précédé n'ait pas été pour les
cooptés tandis que vous êtes pour les cooptés, que vous
vouliez un droit de vote pour le directeur général et qu'il n'en
veuille pas. D'ailleurs, j'ai cru comprendre j'espère que j'aurai
l'occasion de le demander à nouveau, car c'est une interprétation
que j'ai faite non pas qu'il refusait, mais qu'il demandait que le
directeur général n'ait pas ce droit de vote pour le
protéger, parce qu'il pourrait se retrouver, le lendemain matin, face
à des groupes qui pourraient lui faire des reproches, lui, qui doit
vivre dans le quotidien, cela lui rendrait peut-être la vie plus
pénible. Je ne pense pas qu'il y ait des différences
fondamentales entre votre position et celle du groupe qui vous a
précédé. Est-ce que je me trompe? C'est peut-être au
groupe précédent qu'il faudrait que je demande cela, puisque vous
avez la position opposée.
Mme Blackburn: II n'y a pas, nous a-t-il semblé, de
différences majeures sur lesquelles il faille davantage insister.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Mme Blackburn: Ce que j'aurais le goût de retenir de
l'intervention de cet après-midi, c'est que cela allait essentiellement
je dis essentiellement dans le même sens que la
nôtre, c'est-à-dire une majoration des représentants de
l'externe. Par rapport à leur évaluation des cooptés,
c'est une autre question, on l'a peut-être vue différemment.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Mme Blackburn: Par rapport au vote des directeurs
généraux, je pense que vous avez bien compris, je me suis
laissé dire que c'était beaucoup plus dans le but justement de
protéger, parce que, s'ils participaient aux décisions, ils
avaient aussi à les appliquer le lendemain devant les collèges et
cela les mettait souvent dans une situation pénible.
Mme Lavoie-Roux: Tout ce que je peux souhaiter même
si le ministre ne m'écoute pas, on aura l'occasion de lui
répéter c'est qu'ils ne se contentent pas de voir une
modification du conseil d'administration dans le sens d'en ajouter un ou d'en
retrancher un. Je pense que là-dessus on pourrait tous s'entendre sans
difficulté. Que ce soient deux étudiants et un adulte, d'un type
de personnel ou d'un autre type de personnel, je pense qu'il n'y a pas
là de quoi se chicaner, mais c'est vraiment sur le principe même
de l'équilibre qui fait que, finalement, les gens qui gèrent le
collège ne devraient pas majoritairement ils ne le sont pas
nécessairement se retrouver dans des situations de conflits
d'intérêts.
Ceci dit, j'aimerais vous demander si vous avez examiné, en tant
que Conférence des présidents, des modèles de gestion
autres que celui que l'on connaît. Évidemment, celui-ci est un
modèle de participation et je pense que même si l'externe ou
l'interne est rééquilibré différemment, cela
n'enlève pas cette possibilité de participation, parce que si on
devait se référer à un équilibre parfait, il en
faudrait deux de chacun et là, peut-être qu'on aurait... C'est
cela, mais la participation, c'est vraiment que les principales composantes
soient appelées à dire leur mot à une table qui a la
responsabilité d'administrer un collège.
J'ai bien compris, ce n'était pas contre cela que vous vous
éleviez, comme d'ailleurs le groupe précédent, vous
vouliez simplement un équilibre. Mais je reviens à ma question:
Avez-vous examiné d'autres modèles de gestion de collèges?
Je comprends que les cégeps ont une vocation originale dans le sens
qu'ils ont tenté de faire la fusion entre le général et le
professionnel. Enfin, on n'entrera pas dans tous ces détails que vous
connaissez même mieux que moi, mais il y a quand même des
collèges ailleurs, soit des collèges communautaires dans les
autres provinces. Aux États-Unis, il y a certainement aussi des
collèges. Je ne sais pas comment on les appelle. Il y aurait d'autres
organismes d'éducation qui auraient un conseil d'administration. Quelle
est en général leur formation? Est-ce que vous vous êtes
penchés sur ce problème-là?
Mme Blackburn: Nous sommes allés d'un extrême
à l'autre, de voir un conseil d'administration entièrement
composé de représentants de gens de l'externe, excluant
même le DG et même carrément, uniquement de l'interne, avec
une espèce de régie administrative, genre collège
d'État. Nous avons également pris connaissance d'un modèle
ontarien, le président, le Dr Isabel, du collège Algonquin, est
venu nous présenter son mode de gestion, de conseil d'administration.
À toutes fins utiles, en évaluant ces divers modèles, il
nous est apparu que, dans le contexte actuel au Québec, dans cette
volonté de participation et des gens qui vivent la chose quotidiennement
et de l'externe, c'était la formule qui devait retenir notre attention.
Toujours pour revenir à la gestion participatoire, j'affirme que les
présidents des conseils d'administration y croient, compte tenu de notre
contexte. Si nous étions dans une autre province, dans un autre
État ou aux États-Unis, on pourrait peut-être penser
autrement, mais, chez nous, nous croyons que c'est la formule.
Nous avons d'ailleurs fait un sondage dans tous les collèges en
décembre dernier sur la composition actuelle des collèges, sur
celle qui était proposée dans les livres blancs. Nous avons
évalué la satisfaction et l'insatisfaction. Contrairement
à ce qu'on aurait pu croire, et tous les groupes ont été
consultés, c'est-à-dire les étudiants, les enseignants,
tous les représentants des conseils d'administration, nous avons eu
environ 25 réponses, de collèges qui ont répondu,
contrairement à l'impression qu'on avait au départ,
l'insatisfaction par rapport à la formule du livre blanc est plus grande
que par rapport à celle qui existait antérieurement. Cela nous a
renforcés dans notre volonté de dire que ce n'était pas la
formule qui était souhaitée, même à l'interne.
Mme Lavoie-Roux: Je veux bien vous comprendre, parce que c'est
extrêmement important, ce que vous venez de dire, si j'ai bien saisi.
Vous avez procédé à un sondage, non seulement
auprès des représentants socio-économiques qui sont
à l'intérieur des conseils d'administration mais également
les enseignants, les parents et les étudiants.
Mme Blackburn: Tous les membres du conseil.
Mme Lavoie-Roux: Par rapport à la proposition du livre
blanc, il est apparu, dans la majorité des 25 collèges qui ont
été consultés...
Mme Blackburn: Oui, que l'insatisfaction allait en croissant par
rapport à l'ensemble...
Mme Lavoie-Roux: ... irait en croissant si on ajoutait de la
participation de l'interne?
Mme Blackburn: Oui.
Mme Lavoie-Roux: C'est pour tous les groupes?
Mme Blackburn: Je voudrais vous apporter les chiffres
précis, mais l'écart était significatif, en tout cas
suffisant pour étonner. L'insatisfaction croissait du moment où
ils étaient déjà insatisfaits. Je ne pourrais vous le
rappeler de mémoire, mais le niveau d'insatisfaction des groupes qui
étaient déjà insatisfaits de la composition, mais
l'insatisfaction allait en croissant avec la proposition.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'est... Mme Blackburn:
L'insatisfaction, oui.
Mme Lavoie-Roux: ... assez intéressant. Il y a une
question que je voudrais vous poser, parce qu'on n'aura pas l'occasion de vous
reparler, et qui n'a pas été touchée cet
après-midi, que j'aurais peut-être voulu poser aux parents. Je
suis sûre que, parmi vous, il y a des parents d'étudiants de
cégeps, de toute façon. Le problème de la participation
des étudiants, non pas nécessairement au niveau du conseil
d'administration vous l'avez expliqué tout à l'heure, ils
arrivent un peu mandatés, il y a certaines alliances d'occasion qui se
forment, soit d'un côté, soit de l'autre mais en ce qui
touche leur vie à l'intérieur du cégep, en ce qui touche
leurs droits à l'intérieur des cégeps, vous n'y avez pas
touché, mais vous avez probablement fait quelques réflexions
là-dessus. On ne retrouve pas grand-chose dans les projets de loi qui
touchent les étudiants. Je me demandais si vous aviez des
réflexions à nous faire ou des recommandations à exprimer
ici sur ce sujet.
Mme Blackburn: En effet, dans la loi, on ne retrouve pas
grand-chose, mais, dans les énoncés de principe, cela nous
semblait beaucoup plus clair. Est-ce qu'il y aura d'autres moyens? Je sais
qu'on parle un peu d'une charte des étudiants. Ce qu'on dit, c'est que
les étudiants ont les mêmes droits ou devoirs qu'on donne à
tout citoyen qui s'adresse à une institution publique. Cependant, de
là à dire que les services qu'on donne actuellement dans les
collèges sont ce qu'ils devraient être, tant au niveau de
l'information qu'au niveau de l'évaluation qu'à d'autres niveaux,
je pense qu'il y a place à l'amélioration. Vous savez la
diffi-
culté qu'ont les collèges de permettre à
l'étudiant de s'intégrer dans la vie courante, ils y sont peu de
temps. Vous savez, au professionnel, c'est deux ans et, en technique, c'est
trois ans. En technique, de façon générale, ils
travaillent pour sortir de là le plus vite possible, ce qui fait qu'il
est extrêmement difficile d'organiser ou d'assurer de la participation.
Quand vous demandez aux étudiants quels sont les services aux
étudiants? Généralement, ils vont vous parler des
prêts-bourses, de l'information pour les résidences et j'en passe.
Ce dont ils ont besoin, ce sont des services pratiques demain matin et ensuite,
la participation, c'est une autre question. Il est certain que vous soulevez
là une question fort intéressante et il y aura lieu d'essayer d'y
remédier. M. Boucher.
M. Boucher (Serge): Je voudrais ajouter un petit mot en
réponse à votre question. On a parlé beaucoup
d'évaluation. Je pense que c'est un domaine où les
étudiants peuvent jouer un rôle important, particulièrement
en ce qui concerne l'évaluation de l'enseignement. Maintenant, il faut
que ce soit fait avec beaucoup de mesure et de méthode. Il faut faire
attention. Il y a des excès parfois. Des étudiants peuvent
blâmer un professeur parce qu'il est trop exigeant. Cela ne veut pas dire
que le professeur n'est pas bon.
Mais, avec des questionnaires qui sont vérifiés, qui sont
testés, améliorés, on pourrait avoir quand même,
dans l'ensemble, sauf pour des cas extrêmes, une excellente idée
de la valeur de l'enseignement qui est donné par les réponses des
étudiants à ces questionnaires. C'est un domaine où on
devrait beaucoup utiliser leur participation. Actuellement, on ne le fait
pas.
Je pense que, pour le faire, l'initiative, l'encadrement ou, enfin, la
directive pourrait venir des conseils d'administration s'ils étaient
aptes à vraiment gérer leur collège.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question touchant
l'évaluation. J'ai cru comprendre que vous insistiez beaucoup pour dire
que les possibilités d'évaluation de l'institution ou des
différents services à l'intérieur du collège
étaient reliées à la possibilité, pour le conseil
d'administration, de pouvoir fonctionner d'une façon
adéquate.
Est-ce que vous avez voulu dire par ça que, tels qu'ils
fonctionnent présentement d'une façon générale ou
là où ils créent des problèmes, c'est que les
personnes qui... Vous n'avez pas le temps de vous attacher aux questions
d'évaluation ou vous éprouveriez trop de résistance de la
part de certaines composantes du conseil d'administration?
Mme Blackburn: Ce serait, voyez-vous, je pense, un débat
à ne plus finir autour d'une table que de parler, par exemple demain
matin, d'évaluation des enseignements. C'est causé par cette
espèce de contexte ou de rapport de force où on perd de vue
l'objectif d'un collège. On finit par prendre la table du conseil
d'administration com- me étant une table de négociation où
plus on en tire, mieux on s'en porte, et ce n'est plus le lieu où on
devrait se concerter pour assurer ensemble une meilleure qualité
d'enseignement et une meilleure qualité de vie. C'est malheureux, parce
que c'est la situation, ce qui fait que, si on abordait... Parce que ça
nous est arrivé aussi, à titre personnel, dans le collège,
d'aborder ces questions d'évaluation et de déplorer le fait qu'on
évalue, par exemple, un cadre, en tout cas, quand ça fait trois
ans qu'il est là, pour dire qu'il y a une évaluation plus
serrée... Quand c'est au moment de renouveler son contrat, on dit: Ce
n'est peut-être pas le temps. Il aurait peut-être fallu corriger ce
qu'il y avait à corriger en cours de route. C'est la même chose
pour les enseignants, mais, du moment que vous parlez d'évaluation et
même d'évaluation de l'étudiant, attendez un peu quand on
en reparlera comme il faut, mais je vous assure que... Étant
donné que tous ces gens participent... Au conseil d'administration, ce
sont des questions qui sont quasi inabordables, elles sont taboues et, compte
tenu aussi, comme le soulignaient cet après-midi les parents, que
certains socio-économiques, au niveau de l'assiduité, certains
parents aussi, à un moment donné, en bons
Québécois, ont leur voyage et ne reviennent pas... Ce qui fait
que l'interne se ramasse majoritaire et qu'avant de le faire remplacer, comme
on sait que parfois c'est un peu long, cela a posé aussi certains
problèmes. Ce sont des questions qui ne s'abordent pas au conseil et
qui, à mon sens, devraient l'être.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si c'est une question qui est
totalement de votre ressort. En tout cas, je la risque. Quels seraient pour
vous les objets d'évaluation "normaux" d'un collège? Si on fait
l'évaluation d'un collège, quels seraient les objets plus
précis qui, selon vous, devraient faire l'objet d'évaluation?
Mme Blackburn: Je pense que M. le ministre l'a dit tout à
l'heure. Il faudrait d'abord redéfinir les objectifs et, ensuite, on
pourra se permettre de s'évaluer. Il faudra aussi se donner des
outils.
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Les minutes
tournent très vite. C'est bien dommage. Les groupes qui se
succèdent nous apportent un éclairage différent qui
permet, je crois, aux membres de cette commission de se mieux renseigner avant
de passer à l'action pour l'étude des projets de loi 24 et 25.
(22 heures)
Je voudrais simplement toucher deux ou trois points qui ont
déjà été abordés, mais je vous demanderais
des réponses très brèves. Je ne veux pas que vous entriez
dans des détails, dans des cas de personnalité ou de
difficulté de tel ou tel collège.
Vous parliez, au début, de mauvaise entente dans les moments de
crise, à l'intérieur des collèges. Ces conflits concernent
des groupes qui sont reliés dans les collèges. Je voudrais savoir
quel genre de conflits sans entrer dans les détails de tel
événement que les conseils d'administration rencontrent
avec les autorités, avec la direction du cégep, des
différents cadres?
Mme Blackburn: Pour répondre à cette question, si
vous le permettez, M. le Président, je donnerai la parole à M.
Fortier.
M. Fortier (Richard): M. le Président, je crois qu'un
exemple, qui est à notre mémoire et à la mémoire de
probablement tout le monde ici, ce sont les débrayages des
étudiants à propos de la question prêts et bourses qu'on a
connue l'automne passé.
Quand presque tout a rentré dans l'ordre, il a fallu voter des
prolongations de session ou des façons de récupérer. Quand
vous avez un point à l'ordre du jour d'une réunion de conseil
d'administration où on va débattre la possibilité
d'allonger une session ou bien de récupérer l'enseignement qui a
été perdu pendant la grève, vous avez des blocs qui
s'opposent, vous avez des professeurs qui veulent bien récupérer,
pour autant qu'ils soient payés; vous avez l'administration qui ne veut
pas payer de récupération, parce que ça entraîne un
déficit pas financé, et il faudra couper ailleurs; vous avez des
étudiants qui ont, eux, leur emploi d'été ou leur voyage
ou autre chose de prévu.
C'est un exemple parfait de conflit de bloc, dans un conseil
d'administration, qui s'est produit récemment.
M. Le Moignan: Est-ce que les conseils d'administration
pourraient se doter d'outils ou de mécanismes qui leur permettraient
d'essayer de régler ce genre de conflit ou bien si c'est très
difficile pour vous dans le moment?
Mme Blackburn: On en revient toujours à la composition;
ça devient difficile parce que ça fonctionne par rapport de
force. Si l'interne est plus pesant que l'externe, certains groupes font des
alliances, comme on le disait, et on renverse la décision.
Sur un autre point, une question, par exemple, de
récupération. C'est que les enseignants, qui avaient
débrayé, ont dit: Oui, on récupérera, si vous nous
payez pour la récupération; sachant qu'ils sont quand même
payés et disponibles au collège jusqu'au 22 juin. Cela nous
apparaît quelque chose d'assez surprenant, d'assez essoufflant.
Il est arrivé aussi dans certains collèges
là-dessus, je pense que MM. Paiement et Fortier ont vécu des
expériences particulières qu'on se vote des mesures qui
étaient susceptibles d'entraîner des déficits, comme, par
exemple, payer des journées de récupération où on
disait: Cela ne sera pas payé, ça va nécessairement
entraîner un déficit; le poids était plus grand de ce
côté, ça se votait et c'était un déficit.
C'est le genre de difficulté que pose l'actuelle composition.
M. Le Moignan: Quand vous dites que la majorité des
directeurs généraux ou des directeurs des services
pédagogiques se méfient un peu des conseils d'administration; y
a-t-il quelque chose à faire pour changer cette perception?
Mme Blackburn: Évidemment, c'est un peu tout ce poids de
l'interne. On retrouve toujours ces conflits de l'interne autour de la table du
conseil d'administration. Donc, ces gens qui ont à administrer
quotidiennement s'arrangent pour en amener le moins possible. Il ne faut pas
leur en vouloir.
M. Boucher (Serge): Ils sont exactement dans la position d'un
gouvernement minoritaire; ils ne savent jamais si, quand ils vont arriver au
conseil d'administration ou en Chambre ils vont avoir l'appui de
la majorité. Donc, dans la composition actuelle des CA, un directeur
général peut prendre des décisions qui sont de son
ressort, qui sont cohérentes, qui sont logiques sur le plan
administratif et il peut se faire renverser par un hasard de circonstances,
parce qu'il y a deux absences, des alliances ou parce que les parents
comprennent mal la logique administrative qu'il invoque et qu'ils sont
sympathiques à un argument des professeurs qui les touche plus
particulièrement. Ce sont des choses qui arrivent. Alors, devant une
incertitude comme celle-là, c'est tout à fait normal de leur
part, autant les directeurs généraux que les directeurs de
services pédagogiques, de se prémunir, d'avoir des
stratégies et de diriger leurs collèges, parce qu'en Chambre, aux
CA, ils sont minoritaires. Ils sont devant, en fait ils font partie d'un
gouvernement qui est minoritaire, ils ne savent jamais s'ils vont survivre;
c'est aussi simple que ça.
M. Le Moignan: Finalement, vous avez posé une question
à laquelle personne n'a répondu. Je vais vous la poser et la
deuxième partie s'adresse au ministre, d'autant plus que le ministre
n'est pas là depuis dix ans. Vous dites: "Quand a-t-on vu le
ministère s'adresser aux conseils d'administration en temps de crise?"
Est-ce que les conseils d'administration ont fait appel au ministère ou
au ministre? Des crises, il n'y en a pas seulement depuis deux ans et demi, M.
le ministre me comprend. Il y a le ministère qui est là depuis
dix ans. Alors, quelle est votre réponse et quelle est la
réaction du ministre, ensuite?
Mme Blackburn: La première question était:
"Quand...
M. Le Moignan: Vous dites: "Quand a-t-on-vu le ministère
s'adresser aux conseils d'administration en temps de crise? Des crises il y en
a eu depuis déjà des années..."
Mme Blackburn: Oui, on a un peu souligné cela. À un
moment donné, il y a eu cette recherche
à savoir qui représentait vraiment un collège?
Est-ce que c'était le directeur général ou le
président du CA? Après de nombreuses discussions, on s'est dit
que, compte tenu de la loi actuelle, ce n'était pas plus l'un que
l'autre qui était parce que les rôles n'étaient pas
suffisamment définis mieux mandaté pour
représenter. Dans la pratique, ce sont les directeurs
généraux qui ont, depuis 1972, peut-être, pris l'initiative
en modifiant la composition de la fédération où ils
composent l'assemblée générale de la
fédération.
Il faut dire également le ministère, lorsqu'il a à
s'adresser à un collège, exception pour certaines questions plus
politiques, s'adresse au directeur général.
L'autre question...
M. Le Moignan: L'autre question, je la dirigeais plutôt du
côté du ministre, mais le ministre n'est pas obligé de
répondre; il peut répondre s'il le veut.
M. Morin (Sauvé): Non, il faudrait que l'on fasse
l'histoire des interventions du ministre auprès des conseils
d'administration. L'expérience de mes deux ans et demi, c'est que je me
suis adressé aux présidents de conseils d'administration. M.
Paiement peut en témoigner, je n'ai pas eu d'autres démarches que
celle-là. Ce n'est pas que j'aie voulu exclure les directeurs
généraux, à l'occasion j'ai eu à m'entretenir avec
eux de problèmes, mais spontanément, c'est aux présidents
des conseils d'administration que je me suis adressé en temps de crise
et, d'ailleurs, eux-mêmes sont venus me voir directement et nous avons
traité de ces problèmes à ce niveau.
Mme Blackburn: Je reviens peut-être à la
deuxième partie de la question. C'est qu'à l'occasion, plus
souvent qu'autrement, les conseils s'adressent au ministre. Je pense que, sur
cet aspect, vous avez tout à fait raison.
Toute cette question ce soir et il semblait qu'on l'avait un peu
oubliée pose en son entier le problème d'autonomie des
collèges et de décentralisation.
M. Boucher (Serge): II y a peut-être une nuance à
apporter à la réponse du ministre et c'est strictement dans un
but de bonne information. Quand vous avez des crises dans un collège
particulier, cas de Limoilou, vous vous êtes adressé effectivement
au président du conseil d'administration, mais quand vous avez eu une
crise qui a touché plusieurs collèges, sinon la majorité,
comme, par exemple, les débrayages d'étudiants relativement aux
prêts et bourses, vous avez rencontré à ce moment-là
et vous avez convoqué à Québec les directeurs
généraux et non pas des gens mandatés par les conseils
d'administration. Ce n'est pas un reproche, on analyse une situation.
M. Morin (Sauvé): Ce sont les directeurs
généraux cette fois qui avaient demandé à me
rencontrer et avec lesquels je me suis entretenu, c'est un fait. Pour
être complet, c'est exact. On parlait dans la question du
député de Gaspé, d'un état de crise dans un
cégep en particulier. Dans ces cas-là, c'est au président
du conseil d'administration que je me suis adressé.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. Le Moignan: La question était vague...
M. de Bellefeuille: M. le Président, j'ai essentiellement
deux questions, mais je ne peux pas promettre que ça va être
seulement deux, parce que ça dépend des réponses. La
première, c'est à partir de toute cette question des internes,
des externes, de la participation de la documentation inépuisable qui
existe là-dessus, y compris le programme du Parti
québécois auquel vous faites allusion dans votre mémoire.
On parle de cogestion, c'est une cogestion à deux paliers, ce qui fait
une drôle de cogestion, parce qu'on parle de cogestion
professeur-étudiant, on parle de quelque chose qui semblerait être
la cogestion interne-externe. Comme vous le voyez, le programme du parti n'est
pas une bible. On peut y avoir une certaine naïveté. À cet
égard, madame, ne vous réjouissez pas trop vite. Je parle
à Mme le député et non pas à Mme la
présidente des présidents.
Je reviens à Mme la présidente des présidents. Je
me demande, à partir d'observations très courantes sur les
méthodes d'administration qui existent dans toutes sortes de domaines,
s'il n'y a pas une confusion quant au rôle du conseil d'administration
des cégeps. On voit s'y dérouler des conflits, d'après ce
que vous nous dites, on voit s'y discuter des questions de gestion interne qui
sont presque de la gestion au jour le jour.
Or, dans des organismes, des corporations, des compagnies, des
entreprises, tout ce que vous voudrez, il existe une chose qui est plus
proprement de gestion interne qui peut s'appeler un comité
exécutif, un comité de gestion, mais il me semble qu'il y a
là une confusion. S'il y avait une entente claire sur le rôle
à l'intérieur de chaque cégep d'un comité
exécutif, est-ce qu'à ce moment-là on ne pourrait pas,
à partir de ça, mieux s'entendre sur le rôle et la
composition du conseil d'administration? Je ne sais pas si mon impression est
exacte, mais je me demande s'il n'y a pas beaucoup de flottement ou de
différence d'un cas à l'autre par rapport à cette
structure que j'appelle un comité exécutif. Est-ce qu'il n'y a
pas une grande variété, un certain flottement?
Mme Blackburn: II y a, M. le Président, effectivement d'un
collège à l'autre des différences assez importantes par
rapport aux mandats qui sont dévolus au comité exécutif.
Comme les mandats dévolus au comité exécutif le sont par
le conseil d'administration, vous aurez compris qu'il n'est pas facile d'y
référer les questions qu'une certaine partie du conseil
d'administration souhaite voir à la table du conseil d'administration.
Vous
voyez que cela n'est pas aussi simple que ça le paraît au
premier abord.
M. Paiement: Juste un petit commentaire supplémentaire,
parce que je l'ai vécu ça aussi. Précisément
à cause de cette composition du conseil d'administration, je me suis
retrouvé avec un exécutif formé de deux enseignants, d'un
étudiant, du directeur général et du président.
Vous pouvez imaginer que le conseil d'administration, dans un cas comme
celui-là, n'est pas très porté à
déléguer des pouvoirs à l'exécutif, je pense avec
raison aussi. C'est simplement à titre d'exemple
supplémentaire.
M. de Bellefeuille: Autrement dit, ma première question ne
débouche pas sur grand-chose, en ce sens que, si on ne règle pas
ce qui, d'après votre mémoire, est un espèce de crise des
conseils d'administration, on ne pourra pas régler...
c'est-à-dire que le rôle du comité exécutif n'est
pas un élément de solution à ça. Il faudra faire
face à cette crise en elle-même.
Ma deuxième question, je l'adresse particulièrement
à Mme Eisenberg pour lui demander, par rapport à tout ce qui
s'est dit, si la situation est nettement différente dans les
cégeps anglophones, tels qu'elle les connaît, en particulier au
cégep Vanier, ou si c'est essentiellement la même chose.
Mme Eisenberg: Si je comprends bien votre question, M. de
Bellefeuille, vous voulez savoir s'il y a des différences entre les
deux, francophones et anglophones.
M. de Bellefeuille: Quant au problème dont nous sommes en
train de discuter. (22 h 15)
Mme Eisenberg: Non, c'est exactement la même chose. Mme
Blackburn a déjà décrit le questionnaire que nous avons
fait, le sondage que nous avons fait. Et les réponses étaient du
même aspect. On a pris conscience de tous ces détails. C'est la
même réponse.
M. de Bellefeuille: Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Sherbrooke.
M. Gosselin: M. le Président, j'écoute avec
beaucoup d'intérêt la discussion depuis tout à l'heure et
j'avoue que je cherchais intensément, avec tous les membres de la
commission, les issues, la problématique, et l'aboutissement, qui nous
permettraient de dégager les modèles d'administration qui
devraient être retenus. J'avais vaguement l'impression qu'on restait un
peu tous à la barrière, au niveau d'une analyse de
problématique, au niveau d'un diagnostic relativement
sévère de la situation qui vous amène à conclure,
notamment, que vu sous tous les angles, c'était textuellement ce que
vous exprimiez. Le bilan des conseils d'administration est largement
négatif.
Vous postulez vaguement, pas très loin, je pense, la
manière dont cela pourrait se solutionner. Vous le formulez au niveau
des principes. Tout à l'heure, on recevra la Fédération
des cégeps et, pour avoir parcouru rapidement leur mémoire, j'ai
l'impression qu'on s'en tient encore à une question de principe et qu'on
hésite à entrer dans le détail de ce qu'il faudrait faire
plus loin.
Par exemple, la notion du pouvoir participa-toire. Vous avez dit: Ce
n'est pas la question de nier le droit, c'est un acquis dans le réseau
québécois. On en est fier, mais c'est une question de lieu de
pouvoir. Ceci dit, je souhaiterais que la réflexion soit
continuée. C'est peut-être même une invitation que je vous
lance, je ne sais pas de quelle manière le ministre tirera les
conclusions des suites de la commission parlementaire, mais il m'apparaît
que, notamment, l'assemblée des présidents que vous êtes
aurait pu aller plus loin et pourrait peut-être encore aller plus loin.
Si vous pouvez réagir rapidement à ma...
Mme Blackburn: Je peux rapidement vous dire deux choses, c'est
que c'est à la fois une question de lieu et de poids. Le lieu, je
m'explique. On a dit: II y a divers lieux et les collèges ne sont pas
créés pour la participation, mais bien pour d'autres objectifs,
et la participation est un moyen. On est allé, je pense
peut-être que cela vous a échappé mais ce qu'on
propose comme solution, c'est de diminuer le poids de l'interne. Cela nous
semble être la solution, parce qu'on ne peut pas exclure, à notre
avis, une gestion participa-toire. Toutefois, il faut en réduire le
poids pour rendre ce système administrable, administrable en ce sens
qu'on administre en vue d'assurer la protection du bien collectif dans des
enseignements de qualité.
Par rapport au lieu, on se dit que l'interne aurait aussi avantage et,
déjà, participe à d'autres lieux à
l'intérieur du collège, qui sont beaucoup plus près des
actes pédagogiques et qui les concernent directement et dans leur
quotidien. On devrait privilégier ce type de participation.
M. Gosselin: Et peut-être aller plus loin que les
modèles qui existent à cet égard?
Mme Blackburn: Et peut-être se donner... On avait
déjà évalué la possibilité de créer
deux autres lieux de participation à l'intérieur d'un conseil.
Si, par exemple, on pensait à un conseil d'administration largement
composé d'externes, on aurait pu penser à l'intérieur,
à l'interne, un conseil des études et un conseil de la vie
étudiante, par exemple, qui aurait été composé
largement de l'interne et qui aurait pu prendre des décisions. Ce
modèle avait aussi été évalué, mais comme
c'était tout à fait neuf et que cela supposait une nouvelle
réflexion sur la question, on ne l'a finalement pas apporté. Il y
a deux intervenants.
M. Paiement: Je voudrais simplement ajouter aussi que dans
l'élaboration de notre mémoire, il fallait tenir compte des
expressions d'opinions qui
nous avaient été transmises lors du sondage. C'est clair,
en ce qui me concerne personnellement, j'aurais opté pour un conseil
d'administration composé de gens de l'extérieur, mais avec des
mécanismes de consultation et de participation des gens dans le
collège lui-même, une espèce de commission. C'est une
opinion bien personnelle, qui n'était pas reflétée dans le
sondage auprès des conseils d'administration.
Évidemment, il nous fallait opter à ce moment-là,
pour refléter l'opinion de l'ensemble des membres et c'est pour cela
qu'on en arrive à une solution peut-être un peu difficile
je le reconnais très bien pour le gouvernement. C'est un certain
éclairage, mais j'ai l'impression qu'il ne faudrait pas suivre la
réflexion, comme vous le mentionniez tout à l'heure.
M. Boucher (Serge): J'aurais voulu ajouter un mot
là-dessus. Quand même, dans l'illustration que nous faisons de
notre principe, il demeure qu'il y a 7 votes sur 19 qui sont dévolus
à des gens qui sont à l'intérieur du collège. Il me
semble que ce n'est pas rejeter, loin de là, la gestion participative,
bien au contraire. Seulement, je pense qu'on la rend malléable et
fonctionnelle, mais on ne la rejette pas. Je pense qu'on est encore à
l'avant-garde. On a vu, entre autres, le Collège Algonquin où il
n'y a personne de l'interne. On est à l'avant-garde des
Américains, à l'avant-garde des Onta-riens. Pour ce qui concerne
la participation, il n'y a pas d'inquiétude à avoir avec 7 sur
19. De là à aller à 10 sur 19, c'est dépasser le
bons sens.
M. Gosselin: Je retiens qu'il vous apparaît à tout
prix essentiel dans le principe de responsabilité pour les conseils
d'administration d'obtenir une représentation majoritaire vous
nous signalez les deux tiers significativement majoritaire
d'éléments de l'extérieur.
Une voix: Oui.
M. Gosselin: J'aurais aimé aussi savoir si le mode de
désignation des membres de l'extérieur actuellement vous
apparaît satisfaisant. C'est une autre grosse question aussi. La
définition des termes socio-économiques notamment et le mode de
consultation qui prévaut à la désignation des membres du
conseil d'administration, des gens de l'extérieur, est-ce que vous
pourriez un peu aborder cette question-là?
Mme Blackburn: Avant de répondre, en tout cas avant de
tenter de répondre à votre question, M. Fortier voudrait
peut-être terminer sur la première intervention.
M. Fortier: Oui, si vous permettez, brièvement. Un point,
je pense, couvrait votre question. À l'intérieur du
collège, il y a un organisme très important depuis le
début du collège, qui s'appelle la commission pédagogique.
Parmi les solutions dont Mme Blackburn m'a parlé qui ont fait l'objet
d'analyses, il y avait cette possibilité, pensant à un conseil
d'administration qui était majoritairement composé de l'externe,
de pouvoir établir de nouveaux liens avec des mécanismes à
l'interne dont particulièrement la commission pédagogique.
Je dois dire que, pour des gens de l'extérieur comme les
présidents, c'est assez difficile de discuter avec pertinence et avec
toutes les données du problème du sort et du devenir du partage
des juridictions à l'interne, étant donné en bonne part
que cette commission pédagogique est un peu soustraite, en pratique pour
beaucoup de personnes, du conseil d'administration en ce sens que sa
composition je dirais, non pas son statut, parce qu'il reste quand
même dans la loi actuelle ce qu'elle est devenue en pratique et
l'utilisation qu'on en fait est beaucoup plus discutée via les
conventions collectives et, en ce sens-là, ce n'est pas pour le
regretter, mais c'est pour constater que c'est une entité, c'est un
mécanisme que les membres du conseil d'administration et
particulièrement ceux de l'externe, ont un peu de difficultés
à considérer, vis-à-vis duquel ils ont un peu de
difficultés à se situer. Je pense que c'est un peu ce qui rendait
difficile à courte échéance une considération plus
poussée de ce partage possible et nouveau des juridictions à
l'interne étant entendu que ce postulat qu'on proposait, à savoir
une composition majoritairement de l'externe, appelait vraisemblablement de
nouvelles relations à l'interne pour donner aux gens de l'interne des
pouvoirs réels ce sur quoi ils sont particulièrement
compétents et ce pourquoi ils oeuvrent dans le collège.
Mme Blackburn: Vous permettez que je réponde à
votre question ou que je tente de le faire. Vous aviez deux parties à la
question, à savoir comment on définissait ou si le terme
socio-économique avait déjà été
défini. C'est à la fois large et très vague. Je dirais
que, même d'une région à l'autre, les groupes
concernés devant être les groupes socio-économiques varient
d'une région à l'autre.
Ce qu'on pourrait souhaiter, c'est que les nominations se fassent plus
rapidement, comme on l'a dit tout à l'heure. Ce qu'on pourrait
également souhaiter, c'est qu'il y ait une plus large consultation de
groupes différents, de groupes d'intérêts différents
également.
Je pense, entre autres, cela me vient comme cela aux
comités de citoyens. Je n'ai pas l'impression qu'on ne se soit jamais
adressé à eux pour savoir s'ils seraient intéressés
à avoir des représentants. Il est évident qu'en tant
qu'administrateurs on s'intéresse à ce que les
représentants qui sont appelés à siéger au conseil
d'administration couvrent le plus large champ possible de compétences.
Bien sûr qu'il ne serait pas souhaitable de n'avoir que des
représentants des comités de citoyens, comme il ne serait pas
souhaitable de n'avoir que des représentants de la chambre de commerce.
Au moment de ces nominations, il faudra voir à amener le plus grand
nombre de compétences. Est-ce que cela répond un peu?
M. Gosselin: Oui, je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Madame, une chose que j'aime beaucoup dans votre
présentation depuis que j'ai pris connaissance des mémoires et
des projets de loi, c'est un problème qui concerne beaucoup le domaine
de l'éducation et le domaine social. Je pense que votre
témoignage vous a porté justement vers des voies de solution qui
s'inspirent beaucoup plus du vécu des choses que vers des solutions
souvent un peu faciles que dans l'administration publique on imagine presque
naturellement, c'est-à-dire de pouvoir régler des
problèmes aussi réels que ceux que vous exprimez par des
modifications de structures. Je pense qu'on a, dans votre mémoire, un
témoignage éloquent de cette chose, parce qu'à travers
votre analyse, à partir du vécu des situations concrètes,
les mots "prise en charge des responsabilités par les collèges",
le mot "décentralisation" et même tout le problème de
l'évaluation à partir de critères de performance trouvent
une signification beaucoup plus concrète. Quant à moi, je pense
que c'est une façon de voir qu'on devrait promouvoir davantage à
l'intérieur de l'administration publique, d'autant plus au sujet des
collèges. Lorsque le ministre a affirmé d'une façon un peu
péremptoire que la gestion participatoire ne saurait être remise
en question, cette gestion participatoire, il faut comprendre qu'elle est venue
dans le contexte du détour des années 1968 et 1970, dans un
contexte socio-politique, d'ailleurs, qui débordait largement le
Québec. On sait tout ce qui est survenu, la participation, enfin, les
problèmes qu'il y a eu en particulier avec les étudiants.
Même le rapport Castonguay-Nepveu, pour déboucher un peu au niveau
des CLSC également... Aujourd'hui, à l'expérience, on
s'aperçoit qu'à certains égards cette gestion
participatoire peut être assez paralysante dans le domaine social et vous
nous apportez le témoignage que dans le domaine des collèges et
de l'enseignement cela pose aussi des difficultés très grandes.
Ce que j'aime dans votre mémoire, c'est que tout en favorisant
l'idée de participation... du côté du gouvernement, c'est
curieux, mais lorsqu'il s'agit du domaine économique, par exemple, la
gestion participatoire n'est nullement présente dans sa loi,
peut-être que c'est une bonne chose, on l'applique simplement au domaine
social et au domaine de l'éducation. On voit les difficultés
concrètes que cela pose.
J'aurais deux questions précises là-dessus. Est-ce
qu'à votre avis, compte tenu des discussions qu'on a eues ce soir, la
réforme des collèges qui fait suite aux propositions du ministre
et à toutes les consultations que le ministre et le ministère ont
menées, vous paraîtrait c'est une des conclusions, à
tous égards, que je tire de votre témoignage quelque peu
compromise si on refusait, si l'Assemblée nationale ou, enfin, le
gouvernement refusait de faire en sorte que les conseils d'administration
soient modifiés dans le sens que vous évoquez? C'est ma
première question.
Mme Blackburn: Je pense que nous l'avons exprimé de
façon assez claire. On est peut-être allé un peu plus loin
en disant que M. le ministre doutait de l'efficacité des conseils
lorsqu'il proposait d'augmenter ou de s'assurer par règlement d'une
saine gestion. C'est ce qui nous fait dire que, si le projet de loi
était adopté tel quel, pour nous cela compromettrait
sérieusement cette réforme qu'on annonçait dans
l'enseignement collégial. C'est notre avis. (22 h 30)
M. Rivest: Ceci étant votre point de vue
deuxième question est-ce qu'il vous apparaît que le milieu,
que vous représentez, les conseils d'administration, bien sûr, il
y a les enseignants, les étudiants qui pourraient avoir d'autres points
de vue, est-ce que le milieu, d'après vous, vous paraît prêt
je ne vous demande pas de parler pour les autres, juste donner votre
sentiment à accepter une réforme dans le sens de celle que
vous proposez? Je fais peut-être référence à la
remarque du ministre qui disait: Peut-être que si on acceptait ça,
cela créerait plus de problèmes ou peut-être plus
d'antagonisme qu'on en a actuellement.
Ma question est la suivante, parce que cette question n'a
peut-être pas été analysée à fond avec les
autres intervenants du milieu, est-ce qu'il vous apparaît qu'il y a
vraiment urgence pour qu'à cette période-ci de l'année, on
doive faire une réforme qui, pour vous et aux yeux mêmes des gens
du milieu, j'en suis aussi convaincu, a une signification aussi grande quant
à l'avenir des collèges au Québec?
Mme Blackburn: La première partie de la question, à
savoir comment réagiraient les autres groupes? Compte tenu que le
conseil est devenu cette espèce de lieu où s'exercent les
rapports de force et qui permettent finalement une certaine paralysie des
choses en attendant que ça se règle ailleurs ou à d'autres
niveaux, il est certain que je suis à peu près convaincue, sans
les avoir entendus, que certains groupes des collèges qui viendront
demain ne favoriseront pas nécessairement cette formule, c'est
certain.
Est-ce que cela amènerait des conflits tels que la proposition
qu'on fait perturberait le réseau? Cette dimension politique ne nous a
pas échappé, le geste qui fait une espèce de recul sur la
gestion participatoire, cette dimension ne nous a pas échappé.
Elle ne nous semble pas, toutefois, aussi dramatique qu'elle pourrait
l'être à première vue, parce que depuis un temps
déjà, dans certains collèges, pour ne pas dire dans la
majorité, certains groupes prétendent que, finalement, dans les
conseils d'administration, il se règle si peu de choses que ce n'est pas
si important d'y être, et certains groupes viennent au conseil pour se
prononcer uniquement sur des questions pour lesquelles ils ont
été mandatés.
Est-ce que ça créerait une perturbation très grande
et, si la question était clairement posée, est-ce que ça
pourrait compromettre les négociations? Évidemment, je ne suis
pas voyante. Je ne
pourrais pas vous dire, mais comme ça, à bout de nez, je
n'ai pas l'impression que ça ferait tellement de chahut.
M. Rivest: Est-ce qu'au fond, si le gouvernement, compte tenu de
l'expérience des collèges, et j'ai parlé de celle aussi
des CLSC, si le milieu pouvait avoir une connaissance directe et formelle d'une
volonté politique quelconque du gouvernement ou de l'Assemblée
nationale de vraiment essayer de faire en sorte que ces espèces de
souverainetés, au fond, jalouses, qui s'expriment sur le plan syndical
ou des étudiants, etc., au niveau des conseils d'administration, que ces
souverainetés jalouses finissent peut-être par rendre le
fonctionnement des conseils d'administration, enfin, finissent par
compromettre, finalement, les conseils d'administration, si le gouvernement
vous paraissait vraiment conscient de cette réalité et qu'il
l'indique au milieu, est-ce que le milieu accepterait de bonne grâce que
l'on puisse y penser deux fois avant de simplement accepter pour régler
le problème ou, enfin, tenter de régler le problème des
collèges, des modifications de structures telles que le proposent les
projets de loi que nous étudions en ce moment? Est-ce que ça
vaudrait la peine, à votre point de vue, de retarder peut-être
quelque peu cette espèce de mise à jour ou de
réorientation des collèges pour aborder une question aussi
fondamentale que celle que vous avez développée devant nous ce
soir?
Mme Blackburn: Je dirais dans ce sens-là,
j'abonderais presque dans le sens de M. le ministre c'est que la
réforme tant attendue, qui ne va pas dans le sens qu'on attendait
évidemment, en tout cas, pas sous tous ses aspects, à tout le
moins.
J'aurais le goût de dire: Plus on retarde, plus ça se
gâte, ça ne s'améliore pas. À savoir si, par
exemple, on retardait et qu'on puisse entre-temps consulter les groupes, compte
tenu du climat actuel, du climat des négociations et de tous ces enjeux,
je doute fort qu'on réussisse même à faire un consensus
je ne dirais pas l'unanimité sur de telles questions.
Serait-il opportun de reporter cette décision? Je ne me prononcerais pas
sur une telle question, mais, à mon avis, je ne vois pas que ça
solutionne quoi que ce soit. Quoi que je devrais prendre l'avis de mes
collègues là-dessus, on n'en a pas discuté, on a tenu pour
acquis que ça devait être adopté au mois de juin.
M. Morin (Sauvé): Cela risquerait d'être
reporté aux calendes grecques.
M. Rivest: Toujours en fonction de ce qu'il faut faire dans le
milieu, vous seriez prêts, de très mauvaise grâce, sans
doute avec beaucoup de regret, à ce que la gestion participatoire, dont
on a parlé, continue d'aller son petit bonhomme de chemin et de
paralyser, ainsi que vous l'avez décrit, le fonctionnement des conseils
d'administration?
Mme Blackburn: Vous nous dites que nous serions prêts... Je
m'excuse...
M. Rivest: Compte tenu des difficultés inhérentes
à réaliser un consensus avec les intervenants, dans le milieu,
autour des propositions que vous faites, de mauvaise grâce sans
doute et à regret vous considéreriez que ce serait quand
même un moindre mal par rapport aux inconvénients et aux
difficultés qu'il y aurait de réaliser, dans le milieu, un
consensus autour de vos propositions et en retardant un peu la réforme
des collèges?
Mme Blackburn: Dans ma réponse, je retenais un peu
l'ouverture que nous a faite, tout à l'heure, M. le ministre en disant
qu'il faudrait peut-être voir s'il n'y aurait pas des choses. C'est ce
que j'ai retenu.
Peut-être pour répondre à M. le ministre, si on
reportait totalement toutes les choses, le moins qu'on pourrait conserver,
c'est le statu quo, c'est peut-être mieux en tout cas ça
nous apparaît mieux que ce qu'il y a actuellement comme
propositions. Ce qui fait que, si on considère cet aspect uniquement, en
oubliant les autres, ça ne serait peut-être pas si dramatique de
laisser filer.
M. Boucher (Serge): M. le Président, je voudrais insister
là-dessus. Dans nos discussions, on n'a jamais opté... on ne
s'est jamais posé la question: Est-ce qu'on préfère le
statu quo ou les propositions qui sont contenues dans le projet de loi 25?
Mais, il ressort clairement de nos discussions que nous préférons
le statu quo, en ce qui concerne les conseils d'administration, à ce qui
est proposé dans le projet de loi 25. En ce sens, reporter cette partie
de la réforme aux calendes grecques, c'est mieux que ce qui est
proposé.
M. Rivest: Ah, bon!
M. Boucher (Serge): Mais on préfère qu'il y ait une
réforme dans le sens que...
M. Rivest: Oui, d'accord. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Terrebonne.
M. Fallu: Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord
saluer ces gens de chez moi, notamment mon président, si vous le
permettez.
Il y a, je crois, dans le débat, ce soir, des
éléments qu'on a oubliés. Je voudrais, si vous permettez,
réaligner complètement le débat à partir du projet
de loi 25. On pourrait toujours rêver d'une composition idéale, on
pourrait toujours revenir à la composition actuelle, à la loi 21
et on pourrait jouer aux dominos tout la nuit.
Je crois qu'il y a dans le projet de loi 25, l'article 5 qu'on a
oublié. Si vous me permettez, je vais lire en diagonale le
changement proposé à l'article 12 de la loi 21: "Cependant, un
membre du personnel d'un collège qui fait partie du con-
seil ne peut pas prendre part aux délibérations, ni voter
sur toute question concernant son engagement et ses conditions de travail ou
celle de la catégorie d'employés à laquelle il
appartient." On n'avait pas cela précédemment. De temps en temps
nous essayons bien de fignoler une espèce d'aménagement, on
essayait de faire voir au monde que c'était en conflit
d'intérêts, mais là, c'est dit carrément.
La situation vient d'être infléchie. On pourrait, j'allais
dire, à la limite avoir une très large majorité de gens de
l'externe, sur précisément les aspects que, historiquement, on a
reproché à ceux de l'interne, qui ne joueront plus maintenant,
puisqu'ils n'auront plus droit de vote sur leur propre condition. Premier
élément de réflexion.
Deuxième élément de réflexion: La
proposition que vous nous faites, au fond, est de placer 12 membres de
l'externe sur 19. Les conditions actuelles, il s'agit de 11 membres de
l'externe sur 19. La loi 25 prévoit 9 sur 19, un peu moins,
effectivement, mais avec les prévisions de l'article 5 toutefois. Quant
à la fédération des parents, ces gens nous ont
proposé tout à l'heure 11 sur 20, c'est-à-dire un peu dans
le sens de l'histoire ou dans le sens de votre proposition. Bon! Croyez-vous
que, peu importe qu'il y ait participation majoritaire ou minoritaire, que ce
soit, en somme, le projet de loi 25, le statut actuel ou votre proposition
d'une conférence des présidents, avec la provision 5, on soit
suffisamment bien armé pour que, ce que vous avez appelé à
juste titre ces conflits d'intérêts, cessent à
l'intérieur des conseils d'administration?
Mme Blackburn: Sans vouloir jouer de mauvaise foi, j'avais
souligné précisément cette partie de l'article et ces
conditions de travail et celles de la catégorie d'employés
à laquelle ils appartiennent. Si on adoptait à la lettre une
telle chose, on pourrait dire qu'on exclut a priori toute personne de l'interne
sur toutes les questions parce que chaque fois qu'on aborde une question,
qu'elle soit de budget, qu'elle soit de pédagogie, qu'elle soit de
qualité de l'enseignement, qu'elle soit de services à la
collectivité, les gens si on parle de l'éducation aux
adultes, qui impliquera une plus grande disponibilité, toutes ces
questions, finalement cela fait partie de leurs conditions de travail de
demain. Cette provision qu'on appelle...
M. de Bellefeuille: Une clause.
Mme Blackburn:... une clause, m'apparaît, en tout cas... Je
disais cela, si on la prend à la limite, on pourrait dire au directeur
général qu'il n'a à se prononcer sur aucune question parce
que ça règle son rythme de vie demain matin. Même chose
pour les enseignants et on pourrait dire, à la limite, la même
chose pour les étudiants, ce qui fait qu'on s'est souvent
demandé, au conseil d'administration, chez nous: Est-ce qu'on devrait
permettre aux étudiants de se prononcer sur le calendrier
pédagogique? Est-ce qu'on devrait permettre aux enseignants ils
sont directement concernés par la décision demain matin... Ce qui
fait que ça ne m'apparaît pas une garantie. Ce serait comme...
Vouloir l'utiliser à la limite, ce serait presque les éliminer
chaque fois des discussions.
M. Morin (Sauvé): Est-ce à dire, madame, que nous
pourrions retirer cet article-là sans que vous ayez d'objections?
Mme Blackburn: Vous savez, c'est comme si... Retirer...
M. Boucher (Serge): Je l'interprète et je pense qu'il doit
être interprété dans un sens restrictif. Dans le sens
restrictif qu'on peut lui prêter, je pense qu'il a son utilité. Il
est sage de le laisser là. Par exemple, si le collège
négocie avec le Syndicat des enseignants des conditions
particulières, des clauses particulières au collège dans
une convention collective, je pense que l'article qui est là
s'appliquerait à ce moment-là de façon précise et
spécifique, mais il ne s'appliquera pas et il ne doit pas, je pense,
s'appliquer dans un sens large. Le plus bel exemple, c'est le calendrier
scolaire. Ce n'est pas une clause de la convention collective, mais le
calendrier scolaire détermine quand les vacances des enseignants vont
finir. Cela est très important pour eux et, à chaque
année, il y a des interventions qui sont intéressées, qui
sont en fonction d'un horaire de vacances idéal. Je pense que la clause
en question ne s'appliquerait pas; malheureusement, c'est un sujet où
les intérêts particuliers jouent.
Alors, au fond, c'est un détail technique. Ce n'est pas ça
qui est fondamental. Je pense qu'on a assez bien décrit en longueur que
ce qui est important, c'est l'esprit dans lequel un conseil d'administration
travaille, la capacité qu'il a de faire équipe, sa
capacité de se donner des orientations et des priorités en dehors
des intérêts des individus qui sont là. Cela est
fondamental.
M. Fallu: Enfin, c'est précisément votre
réaction que je voulais susciter parce qu'il aurait pu
apparaître... Peut-être que c'est vraiment l'intention de la loi de
compenser cet ajout de membres de l'intérieur par cette clause. Je
reçois donc votre opinion.
Si vous permettez une petite parenthèse très brève
pour passer deux messages. Il a été question, entre autres, de la
nomination qui tardait énormément des membres du conseil. Vous
avez remarqué que le projet de loi prévoit que ce n'est plus le
Conseil des ministres, mais le ministre dorénavant. Donc, on saura dans
le dos de qui pousser dorénavant.
D'autre part, vous avez remarqué également que, dans le
projet de loi, chacun termine son mandat même s'il n'est plus
qualifié, à savoir un parent nommé pour deux ans restera
en poste deux ans. Le message étant terminé...
Je ne voudrais pas revenir sur la composition du conseil
d'administration, c'était la question qui devait peut-être clore
le débat là-dessus. Il y
aurait... Je ne veux pas abuser du temps quand même, mais,
rapidement... L'article 7, notamment, sur la fonction des présidents. On
sait que, dans la loi actuelle, il n'y a rien, il n'y a rien là non
plus, sauf qu'on donne au moins un cadre administratif aux collèges, on
les autorise à définir les fonctions du président. Vous
êtes vous-mêmes les présidents, comment
réagissez-vous devant l'article 7? (22 h 45)
Mme Blackburn: On le souligne dans le mémoire, ça
nous paraît une amélioration considérable et, toujours,
comme on le disait, si les conseils d'administration sont habiles à
administrer, ça devient faisable, je pense qu'avec cet article, on
pourra définir le mandat du président, et il nous paraît
qu'on pourra aussi, à la fois, définir, bien partager les
rôles entre le directeur général, ce qui revient à
la direction générale et ce qui revient à un
président. Pour nous, cela nous paraissait tout à fait
acceptable.
M. Fallu: Cela permettra sans doute à chaque
collège de se créer une personnalité qui lui soit
propre.
Mme Blackburn: Qui lui soit propre, en retenant ses
spécificités.
M. Fallu: II faudrait peut-être parler des
sociétés, qu'importe, puisque vous n'en parlez pas, j'imagine
que, si jamais ça accroche, quelqu'un d'autre saura en parler. Il
faudrait peut-être parler du pouvoir d'enquête nouveau qui est
ajouté au ministre dans la loi, notamment dans les matières se
rapportant à la pédagogie. On n'en parlera certainement pas ce
soir, on l'a évoqué rapidement tantôt. Il y a pourtant une
dimension sur laquelle j'aimerais avoir votre point de vue. Je ne veux pas
faire un discours, j'en aurai un à faire en deuxième lecture, si
on m'autorise à le faire, si mon leader m'autorise à le
faire.
Si le leader.
M. Rivest: C'est encore pire.
Une voix: Si le ministre vous le permet.
M. Fallu: Chez vous, c'est le whip.
Mme Lavoie-Roux: Chez nous, c'est l'intérêt des
personnes.
M. Grenier: Question de règlement, j'interviens comme
whip, d'abord pour le partage du travail de mon équipe-Le
Président (M. Marcoux): Personnellement, je ne peux pas vous le
permettre, vous n'êtes pas membre de la commission, je présume
qu'il y a consentement...
Mme Lavoie-Roux: Consentement. M. Rivest: Consentement.
M. Grenier: Vous allez me permettre, comme whip, de partager mon
travail, on commence trois semaines de travail intense et on se rend compte
qu'on a encore trois mémoires qui nous attendent. Comme ça
prendrait le consentement à minuit pour continuer le travail, soyez
assurés que vous ne l'aurez pas de l'Union Nationale. On ne commencera
pas les trois semaines à finir à 3 heures demain matin avec une
équipe de dix personnes. Je pense qu'il serait peut-être bon qu'on
sache où on s'en va, parce que je pense qu'on avait pris un arrangement,
comme m'informe le député de Gaspé; on devait consacrer 45
minutes aux mémoires, j'ai l'impression qu'on a pris le double
jusqu'à maintenant. C'est bien sûr qu'on a peut-être
plusieurs questions à poser, mais il faut aussi agencer notre travail
avec notre équipe. Je voudrais que vous sachiez tout de suite que ce
n'est pas avec 15 minutes ou 20 minutes après minuit, ce ne sera pas une
minute après minuit.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie d'informer les
membres de la commission de votre intention.
M. Rivest: On regrette notre consentement, ça allait bien
ici.
Le Président (M. Marcoux): Je suis assuré que les
membres en tiendront compte. Quant à moi, je suis disposé
à être plus strict sur le temps, mais dans la mesure où les
membres de la commission le souhaiteront. Je présume que vous
acheviez?
M. Fallu: Oui, M. le Président. Dernière
question.
M. Rivest: C'est une invitation que le député de
Mégantic-Compton vient de vous lancer.
M. Fallu: Dernière question. L'article 10 prévoit
que, dorénavant, ce ne seront plus les fonctionnaires qui administreront
par décret ou par consigne quelconque les collèges.
Dorénavant, vous saurez que les règlements émaneront du
ministre. J'imagine que vous êtes en accord.
Mme Blackburn: Écoutez, dans notre...
M. Boucher (Serge): Si vous voulez nous faire dire les points sur
lesquels on est en accord, c'en est un. On ne voit pas de problème
là.
M. Fallu: Merci.
M. Boucher (Serge): Mais ce n'est pas fondamental pour nous.
M. Fallu: Non, mais enfin...
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie d'avoir
accepté de répondre à nos questions durant deux bonnes
heures. Je pense que les
questions des députés illustrent l'importance
attachée à votre mémoire, l'intérêt qu'il a
suscité. J'inviterais maintenant un autre groupe à venir nous
présenter son mémoire, la Fédération des
cégeps.
Mme Blackburn: On remercie les membres de cette commission
d'avoir voulu nous entendre et on espère que ça ne demeurera pas
lettre morte.
M. Rivest: Le ministre a fait une petite ouverture, on verra.
Le Président (M. Marcoux): Et le député de
Jean-Talon va le lui rappeler.
Je reconnais M. Laberge, le directeur général.
Pourriez-vous vous présenter et présenter ceux qui vous
accompagnent?
Fédération des cégeps
M. Lauzière (Benoît): Benoît Lauzière,
directeur général du Collège de Maisonneuve, dont la
totalité de la rémunération provient du collège de
Maisonneuve, et président de la fédération. Il y a Louise
Chené, permanente à la fédération, et Paul Lemire,
directeur du cégep régional de Bourg-chemin,
vice-président de la Fédération des cégeps.
Le Président (M. Marcoux): Et M. Laberge, directeur
général de la fédération.
M. Laberge: C'est bien cela.
M. Lauzière: M. le Président, étant
donné que le résumé du mémoire que je vais
immédiatement présenter diffère dans le libellé et,
pour certains points, ajoute au mémoire qu'on vous a déjà
fait parvenir, je commencerais d'abord par demander de déposer,
auprès du président et du ministre, un certain nombre
d'exemplaires du résumé du mémoire, et je vous demanderais
également que, tant le mémoire que le résumé,
soient reproduits intégralement en annexe au journal des
Débats.
Le Président (M. Marcoux): L'un ou l'autre? M.
Lauzière: Le résumé du mémoire.
Le Président (M. Marcoux): À ce moment-là,
cela va être automatique pour le résumé. Je suppose que les
membres acceptent le dépôt du mémoire original au journal
des Débats?
M. Morin (Sauvé): Volontiers, M. le Président.
(Voir annexe).
M. Rivest: M. le Président, je voudrais faire une demande
analogue au sujet du mémoire du Collège Édouard-Montpetit.
Vous savez qu'il n'a pas pu se faire entendre. Est-ce que le ministre ou les
membres de la commission auraient objection à ce qu'il figure en annexe
au journal des Débats?
M. Morin (Sauvé): Oui, M. le Président, puisque,
naturellement, comme ces gens n'ont pas comparu officiellement devant la
commission, je pense qu'il ne serait pas légitime de procéder de
la sorte. Mais, comme je l'ai dit, nous allons lire ce mémoire avec
beaucoup d'attention.
M. Rivest: II ne figurera pas. Vous vous opposez?
M. Morin (Sauvé): Non, il ne figurera pas, puisqu'ils
n'ont pas comparu devant la commission.
M. Rivest: Étant donné qu'ils sont venus ici,
est-ce que vous ne pourriez pas, pour les fins du dossier...? Franchement, cela
devient...
M. Morin (Sauvé): Non, d'autant que ce rapport n'a pas
été soumis dans les délais requis et que tous les autres
ont fait l'effort de soumettre leur rapport dans les délais requis.
M. Rivest: Je le demanderai demain.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on les a avisés à
nouveau?
M. Rivest: On ne les a pas avisés à nouveau, parce
que vous aviez dit vous-même que vous ne les aviez pas rejoints. Je
trouve cela, franchement...
Mme Lavoie-Roux: C'est la démocratie... M. Rivest:
C'est la gestion participatoire. Le Président (M. Marcoux):
M. Lauzière.
M. Lauzière: Je donnerai, conformément au
résumé du mémoire, quelques notes en manière
d'introduction, avant de réagir plus ponctuellement aux projets de loi
24 et 25.
La qualité et le développement des cégeps
intéressent au plus haut point la Fédération des
cégeps et ce, depuis fort longtemps. Incorporée depuis 1969, la
Fédération des cégeps, par la concertation qu'elle rend
possible, et par les services diversifiés et souples qu'elle offre,
contribue puissamment à la maturation de ces institutions plusieurs fois
perturbées et dont les difficultés ne sont pas toutes venues de
l'intérieur; à preuve ce qui nous amène ici.
Il n'était pas inutile de rappeler d'autant moins inutile
d'après les propos que j'entends déjà depuis quelques
heures que la Fédération des cégeps est le
regroupement libre de tous les collèges publics du Québec et
qu'à ce titre, elle est seule autorisée à parler au nom de
l'ensemble des collèges; de là à être
écoutée, l'histoire nous l'enseigne, il y a plus d'un pas.
Le mémoire que nous présentons aujourd'hui est le fruit
d'une réflexion qui se poursuit depuis plusieurs années et
à laquelle furent associés un
très grand nombre d'agents et d'officiers des collèges. Le
congrès d'orientation de 1976 qui, comme tous les congrès
d'orientation, réunissait, entre autres, cinq
délégués de chaque conseil d'administration,
s'était déjà penché sur les grandes orientations de
l'enseignement collégial.
Des groupes multidisciplinaires ont, par la suite, analysé et
approfondi les principales dimensions de ces niveaux d'enseignement. Le tout a
fait l'objet de synthèses, elles-mêmes soumises à la
consultation.
Le congrès d'orientation de l'automne 1978 était
dès lors en mesure de préciser les volontés profondes des
collèges, eu égard à leur développement. La
fédération était donc bien préparée à
comprendre le projet gouvernemental à l'endroit des collèges et
à y réagir à partir d'une lecture continue du milieu,
lecture dont l'essentielle qualité résulte de l'authentique
enracinement de ceux et celles qui la font quotidiennement.
C'est justement cette lecture de l'évolution de ces institutions
faite sous l'éclairage des principes fondamentaux qui inspiraient les
pères de ce nouveau niveau d'enseignement qui fondent les
réactions que nous vous communiquons aujourd'hui à la suite du
dépôt des projets de loi 24 et 25.
Ce qui frappe, même à première vue, c'est que les
principes en question, qui inspiraient les pères du nouveau niveau
d'enseignement qui est le réseau collégial, inspirent d'autant
plus les discours et les déclarations d'intention qu'ils ne
fécondent plus les actions.
En effet, entre la distinction si importante aux yeux des auteurs du
rapport Parent, distinction dans les fonctions devant caractériser les
trois étapes de la direction du système scolaire et la confusion
des rôles accrédités dans le projet de loi sur le Conseil
des collèges, il y a un monde. Quand je parle évidemment des
trois fonctions, des trois étapes de la direction, en citant à
peu près de mémoire le rapport Parent, on parlait de la
préparation des orientations d'ensemble en fonction d'une analyse des
besoins immédiats et futurs, d'une autre étape qui s'appelait la
discussion des projets de loi eu égard à d'autres dimensions,
à d'autres problématiques socio-économiques et une
troisième étape, l'application des lois par les organismes
intéressés.
Entre la distinction si importante entre les fonctions de ces trois
étapes et la confusion des rôles accrédités par le
projet de loi sur le Conseil des collèges, il y a un monde. Entre le
principe d'une autonomie accrue qui devait présider à l'existence
et au développement des collèges et la si peu subtile tutelle qui
caractérise le projet de loi modifiant la Loi des collèges, il y
a un écart qui n'a cessé de se creuser depuis l'origine.
En haut lieu, on s'est à ce point habitué à la
confusion des rôles et des responsabilités qu'on nous propose un
Conseil des collèges dont une commission, la commission
d'évaluation, dont tous les membres sont nommés par le ministre,
a un rôle d'examinateur et de prestation de services, un genre de
clinique Esso dont le propriétaire possède une station-service et
qui est le principal conseiller en législation sur l'entretien des
automobiles.
Pour ce qui concerne les collèges eux-mêmes, on est
à mille lieux des intentions tant et tant déclarées de
décentralisation, sauf la nomination j'attire votre attention
là-dessus, parce qu'il n'y a rien de changé là-dessus dans
le projet de loi du directeur général et du directeur des
services pédagogiques et la désignation du président du
conseil d'administration. Le collège n'a aucun pouvoir si ce n'est en
vertu de l'approbation du ministre ou du lieutenant-gouverneur en conseil avant
ou après le geste. L'incapacité d'agir présumée et
la volonté d'intervention sont telles que le projet de loi
prévoit une suspension des pouvoirs du conseil d'administration pour des
fins aussi vagues que des actions ou absence d'action incompatibles avec la
poursuite de ces fins: L'article 26a du projet de foi. Cette incapacité
d'agir présumée n'est pas étonnante, puisqu'au nom d'une
longue réflexion curieusement très résumée dans le
livre blanc, le conseil d'administration serait composé majoritairement
des membres provenant de l'institution elle-même. Une instance aussi
inefficace que conflictuelle ne peut que préparer le terrain à
l'intervention du ministre et à l'envahissement des fonctionnaires pour
qui le vide n'a rien d'horrifiant.
L'actuelle Loi des collèges elle-même limitait
déjà le champ d'ouverture dégagé par les auteurs du
rapport Parent et les auteurs du chapitre IV du document de l'éducation
no 3. Le vécu ministériel s'est chargé de restreindre
davantage ce qui restait d'ouverture. Le projet de loi 25 pousse à bout
ce mouvement de réduction et laisse voir ce qui arrive quand la
mentalité de contrôleurs et bureaucrates remplace l'esprit des
lois.
Nous voulons bien nous adonner à l'examen des principaux points
de ces deux projets de loi en vue d'en souligner les faiblesses les plus
importantes au cas où le pire arriverait, mais nous voulons surtout
attirer votre attention sur le fait que ce sont de mauvaises voies à
tous égards et que l'absence de situations d'urgence commande à
notre avis le report nécessaire à leur mûrissement.
Voyons les choses de plus près quant à notre
réaction aux deux projets de loi. Premièrement, le projet de loi
24, concernant la création d'un Conseil des collèges. En
principe, la Fédération des cégeps c'est
déjà dans le mémoire principal, je le reprends ici
est d'accord avec l'existence d'un Conseil des collèges qui n'est que
consultatif et ce, seulement auprès du ministre. (23 heures)
Le niveau d'intervention de ce conseil doit être bien situé
et distingué des autres niveaux d'intervention. Il doit intervenir au
niveau des orientations et des objectifs du réseau et non pas des
institutions, selon l'article 13 du projet de loi, ce qui, entre autres,
devrait avoir pour conséquence d'écarter les directions
générales du ministère de ce champ de
préoccupation. Ce que nous dénonçons depuis longtemps,
c'est justement la confusion des rôles des différents
intervenants.
Nous ne sommes pas d'accord avec les restrictions apportées par
l'article 14 au nombre d'objets à propos desquels le ministre doit
demander l'avis du conseil. Il devrait en être ainsi l'obligation
de consulter pour tous les objets de règlement prévus
à l'article 18 de la loi modifiée, sauf, évidemment, le
paragraphe a). Puisque le conseil devrait être une instance de
consultation auprès du ministre sur les questions relatives au
réseau, nous nous opposons fermement à l'article 18 du projet de
loi, création de la commission d'évaluation. Il nous semble que,
compte tenu de la nature, des fonctions et du niveau d'intervention d'un tel
conseil, c'est-à-dire le Conseil des collèges, il n'est pas
normal de lui attribuer, a fortiori par l'une de ses commissions, des
rôles d'examinateur des institutions et de prestateur de services
auprès de celles-ci.
Il est par ailleurs étonnant de constater que cette commission
d'évaluation située, et je cite, c'est l'article 17 du projet de
loi, "auprès du conseil, dont tous les membres sont nommés par le
ministre", a plus de pouvoirs que le conseil lui-même. Il est même
tentant de penser que tout le projet de loi constitue un emballage pour
justifier, par commission interposée, l'exercice de la
responsabilité d'évaluation.
Dans la même ligne de pensée, le risque est grand que la
constitution d'autres commissions prévues à l'article 23 serve un
peu d'armoire ou de fourre-tout où on refilerait tous les
problèmes embarrassants.
La complexité et le caractère délicat des
problèmes d'évaluation et de la mise en oeuvre des politiques
institutionnelles d'évaluation militent en faveur de laisser le temps
nécessaire au conseil de s'en saisir, de l'analyser et de recommander au
ministre les politiques et les objectifs qu'il juge à propos pour faire
avancer ce dossier qui n'est pas particulier au niveau collégial.
L'article 25 du projet de loi 24 prévoit que le rapport annuel du
conseil doit aussi contenir tous les renseignements que le ministre peut
prescrire. La constitution de banque de données exigée par le
ministre ne nous semble pas être une fonction conforme au rôle que
doit jouer cette instance. D'ailleurs, les fonctions attribuées par les
articles 13, 14, 16, 19 et 23 seront déjà assez difficiles
à remplir.
En résumé, en ce qui regarde le projet de loi 24, à
l'occasion de la création d'un conseil des collèges, il est
nécessaire de redéfinir le partage des responsabilités
entre les divers intervenants du réseau, de façon que chacun les
assume pleinement. C'est dans ce sens qu'un conseil des collèges ne
devrait être que consultatif et ce, seulement auprès du ministre,
sur des questions d'orientation concernant le réseau.
Relativement au projet de loi 25, nous avons regroupé l'examen du
projet de loi sous les quatre titres suivants: Les limites à l'exercice
des pouvoirs de la corporation, les modifications apportées à la
composition des conseils d'administration, les pouvoirs d'intervention
spéciale du lieutenant-gouverneur en conseil et du ministre, la
création de nouvelles structures à l'intérieur de la
corporation.
Si l'on dit procéder rapidement à l'adoption de ces deux
projets de loi, il nous apparaît essentiel d'y apporter des amendements
qui tiendront compte des remarques formulées ci-après. Les
limites maintenues à l'exercice des pouvoirs de la corporation sont en
contradiction, selon nous, avec tous les discours sur la
décentralisation. Dans la loi 21, je donne une série
d'exemples le collège, comme entité juridique distincte,
est bien assis par l'article 8 et l'article 13. Le collège, dit-on
à l'article 8 de l'actuelle loi 21, se compose d'un certain nombre de
personnes et ses droits du pouvoir sont exercés par un conseil. Dans le
projet de loi 25, on cherche cette entité et on sait, par ailleurs
c'est l'article 3 modifiant l'article 8 de la loi 21 qu'elle est
administrée par un conseil. Quant à nous, nous ne pouvons voir
aucune raison de modifier les textes actuels dans ce sens, alors qu'elle a
comme conséquence d'affaiblir l'assise juridique des
collèges.
Les seuls pouvoirs qu'un conseil d'administration peut exercer et qui ne
requièrent pas une autorisation préalable ou une approbation
ultérieure se limitent, dans la loi 21, et c'est reproduit dans le
projet de loi no 25, à la nomination du directeur général,
du directeur des services pédagogiques et du président du
conseil.
Il est inadmissible, selon nous, de penser, compte tenu de tout
l'encadrement réglementaire prévu au nouvel article 18, qu'on
maintienne, à l'article 19 du projet de loi, le dernier alinéa de
l'article 19 de l'actuelle loi 21, qui veut que les règlements que peut
faire un collège n'aient d'effet qu'à compter de leur approbation
par le ministre, ce qui présuppose, contrairement à ce qui existe
actuellement de toute façon, que le lieutenant-gouverneur en conseil
exerce son pouvoir de réglementation à l'intérieur duquel
les règlements qu'une corporation pourrait faire n'auraient pas besoin
d'être approuvés ultérieurement pour être
valides.
Il est également inadmissible, et je cite "qu'un collège
doit soumettre chaque année l'ensemble des enseignements qu'il doit
dispenser à ses étudiants lors de la prochaine année
scolaire..." ainsi que le prescrit l'ajout proposé à l'article 25
de la loi. C'est une attaque de bureaucratie "papivore", puisque l'article 2 de
la loi, modifié par l'article 1 du projet de loi, stipule que les
collèges ont pour fins de dispenser l'enseignement général
et professionnel de niveau collégial.
Nous sommes d'accord avec la réglementation par le
lieutenant-gouverneur en conseil des avantages sociaux et de la
rémunération des membres du personnel qui ne sont pas membres
d'une association accréditée, tel que le prévoit l'article
18h du projet de loi, mais nous ne sommes pas d'accord pour qu'il en soit
ainsi, c'est-à-dire la réglementation par le
lieutenant-gouverneur en conseil des autres conditions de travail de ce
personnel. Il s'agit évidemment, vous l'aurez compris, du personnel de
cadre et de gérance plus spécifiquement.
En tout état de cause, les limites maintenues à l'exercice
des pouvoirs des corporations sont conséquentes, croyons-nous, avec le
fait que la composition projetée de leur conseil d'administration ne
fera qu'augmenter leurs difficultés d'agir et justifierait d'autant plus
l'intervention providentielle de l'État, c'est-à-dire la
présence accrue des fonctionnaires.
En résumé, nous pensons que les corporations que
constituent les collèges devraient être dotées d'un pouvoir
de réglementation dont les seules limites seraient celles qui sont
propres à l'acte gouvernemental. Ici, je reprends presque textuellement,
dans le fond, ce dont rêvaient les pères du niveau et qui est fort
bien consigné particulièrement dans leur chapitre IV du document
de l'éducation, no 3, où on prévoyait justement cette
ligne de développement qui était concédée, que,
dans le début de l'existence du réseau, il y ait beaucoup plus de
mécanismes, beaucoup plus d'interventions aux fins de mettre en
existence de façon plus sûre ces institutions.
Les modifications, donc, apportées à la composition du
conseil... Je m'excuse. Le "donc" était de trop. J'aborde le
deuxième point, sur le conseil d'administration.
Les modifications apportées à la composition des conseils
d'administration, quant à nous, ne font qu'éroder davantage leur
crédibilité et rendent encore plus difficile la
réalisation du caractère essentiel d'un collège, une
corporation publique, c'est-à-dire une instance
décentralisée à qui l'État confie l'accomplissement
d'un service public.
Les argumentations suivent sur ce point. Une augmentation, nous
semble-t-il, de la représentation des membres provenant de
l'extérieur de l'institution et non une réduction de celle-ci,
est nécessaire pour maintenir le fragile équilibre entre
l'appartenance au milieu desservi et la participation des instances
internes.
Du point de vue même de l'exercice de la responsabilité
ministérielle, dans le cadre d'une gestion décentralisée,
seule une participation majoritaire des membres qui ne sont pas jugés
partie peut garantir à la société et à
l'État que la mission déléguée est accomplie dans
le sens de l'intérêt public et justifier la confiance du ministre
responsable.
En contrepartie, la loi devrait préciser la composition et les
fonctions de la commission pédagogique. Le projet de loi ne fait que
prévoir l'existence en maintenant les articles non modifiés de la
loi 21, une participation minimale en termes de nombre de professeurs. Il nous
semble qu'en centrepartie de la majoration de la représentation des
membres qui proviennent de l'extérieur de l'institution, la loi devrait
préciser la composition et les fonctions de la commission
pédagogique.
L'augmentation de la représentation des composantes internes,
telle que proposée dans le projet de loi, accentue le risque de
renfermement sur elle-même et le narcissisme qui guette ces institutions.
La majoration je m'excuse de la coquille; 2,5% ce n'est pas la
majorité, mais la majoration de la représentation des
instances internes, telle que proposée dans le projet de loi, peut
donner l'impression d'une confiance accrue en ces dernières. Il nous
semble qu'elle risque surtout d'exacerber la tendance aux conflits, à la
compromission et au blocage, tout en préparant le terrain aux
interventions spéciales du pouvoir central, interventions tellement
prévisibles qu'elles font l'objet de dispositions nouvelles dans le
même projet de loi.
Le troisième alinéa de l'article 5 du projet,
remplaçant les articles 11 et 12 de la loi c'est un sujet qui a
été abordé par le dernier groupe nous cause
également une difficulté. Il nous semble que, pour éviter
toute ambiguïté ce sont les articles qui font un cas
d'exception pour le personnel, relativement à son contrat de travail
et toute tartuferie, la loi devrait prévoir, non seulement qu'un
membre du personnel d'un collège qui fait partie du conseil ne peut pas
prendre part aux délibérations ni voter sur toute question
concernant son engagement et ses conditions de travail, ce qui devrait aller de
soi, mais aussi que cette même restriction s'applique à tout
membre du personnel syndiqué qui fait partie du conseil à
l'égard de la préparation de la négociation et de
l'interprétation des conventions collectives de toutes les
catégories d'employés syndiqués du collège.
Autrement, c'est le système d'intervention par collègues
interposés, c'est-à-dire la course à relais
là-dessus.
Étant donné que les fonctions du président du
conseil d'administration se situent surtout dans l'exercice de son pouvoir
moral et que l'exercice d'un tel pouvoir exige une grande
crédibilité et un désintéressement personnel, le
président ne doit avoir aucun intérêt personnel ou
immédiat dans les décisions prises par le collège. Ceci
exige qu'il soit élu parmi les personnes extérieures à
l'institution. Le projet de loi va, jusqu'à un certain point, dans ce
sens, n'excluant pas, cependant, qu'un étudiant de 22 ans puisse
être président du conseil. Il nous semble que la fonction
même exercée par le conseil devrait aller dans le sens de la
remarque que nous faisons.
En résumé, pour en fonder la crédibilité, la
composition du conseil doit garantir sa capacité de donner
priorité à l'intérêt collectif. Nous demandons donc,
contrairement au projet de loi, un conseil d'administration constitué
aux deux tiers de membres provenant de l'extérieur de l'institution.
Ceci garantirait davantage toutes les dimensions d'un tel sujet.
Troisième point de notre intervention sur le projet de loi 25:
Les pouvoirs d'intervention spéciale du lieutenant-gouverneur en conseil
et du ministre, dont il est question à l'article 16 et à
l'article 18 du projet de loi, nous semblent mal définis et
dangereusement peu encadrés. Ils devraient être justifiés
et s'exercer par étapes, selon un processus uniforme, quitte à
prévoir des situations d'urgence. Nous suggérons de regrouper ces
deux articles et de les remplacer par un article qui se lirait comme suit: "Le
lieutenant-gouverneur en conseil peut charger une personne qu'il
désigne
de faire enquête, lorsqu'un collège s'adonne à des
pratiques ou tolère une situation, non pas incompatible avec la
poursuite de ses fins d'une façon générale, mais
incompatible avec sa loi constitutive ou les règlements adoptés
en vertu de l'article 18 de cette loi." Ce qui encadrerait un peu le pouvoir
d'intervention, qui commencerait par une enquête et non pas par la
suspension de tous les pouvoirs. "La personne ainsi désignée est
investie, pour les fins de l'enquête, des pouvoirs et immunité
d'une commission nommée en vertu de la Loi des commissions
d'enquête" c'était déjà dans le projet de loi
21 modifié "Au cours de cette enquête, le collège
est entendu. Suite à cette enquête, le ministre peut recommander
au lieutenant-gouverneur en conseil de suspendre les pouvoirs d'un conseil et
de nommer un administrateur qui en exerce les pouvoirs."
Le quatrième point d'intervention sur le projet de loi 25: La
possibilité de la création de la société,
prévue à l'article 20, de même que la constitution possible
d'un comité chargé de l'organisation et de la gestion d'un
programme d'enseignement professionnel d'intérêt national nous
apparaissent comme une espèce d'éclatement des structures de
direction des collèges et nous inquiètent beaucoup. Nous croyons
que ces mesures ne sont pas les seules solutions possibles aux problèmes
qu'elles entendent régler et, compte tenu des conséquences
qu'elles peuvent avoir sur le développement du réseau, nous
croyons qu'il est imprudent de les faire passer telles quelles dans la loi. Non
pas que le problème ne soit pas réel, mais la mesure pour le
régler nous semble douteuse, quant à ses conséquences.
Si, comme nous le souhaitons, il y a report du projet de loi, nous
serons en mesure de faire des propositions précises à ce
sujet.
Voici, en résumé, M. le Président, le
mémoire que nous présentons à cette commission
parlementaire relativement aux projets de loi 24 et 25.
Le Président (M. Marcoux): Merci. M. le ministre. (23 h
15)
M. Morin (Sauvé): Merci, M. le Président. Je
voudrais d'abord vous dire deux mots de la question de la
décentralisation à laquelle M. le directeur général
du cégep de Maisonneuve a fait allusion, pardon, M. le président
de la fédération.
Le gouvernement a l'intention et, de fait, non seulement a l'intention,
mais confirme dans ce projet de loi et renforce le caractère
décentralisé du réseau des collèges en dépit
de ce qu'on tente d'alléguer. Je sais bien qu'il y a là quelques
conflits de fonctionnaires, il est assez plaisant de voir dans les paragraphes
1 et 2 du mémoire, qu'on tente d'écarter les directions
générales du ministère du champ de préoccupation
que sont les orientations et les objectifs du réseau. Il est assez
plaisant d'entendre des fonctionnaires s'attaquer à des fonctionnaires.
Je puis vous dire que je n'ai nullement l'intention, parce que nous aurons un
organisme consultatif auprès du ministère, d'abdiquer les
responsabilités essentielles du ministère dans ce domaine. Mais
cela étant, une fois définies certaines orientations et certains
grands objectifs avec l'aide du conseil consultatif, je pense qu'il faut
reconnaître que le réseau des collèges doit être plus
décentralisé qu'il ne l'est.
Dans la nouvelle loi, un conseil d'administration pourra, bien sûr
à l'intérieur de certaines limites financières, cela va de
soi, acquérir, construire, louer, agrandir, transformer, aliéner
un immeuble, ce qu'il ne saurait faire à l'heure actuelle. Un conseil
pourra, conformément, bien sûr, à des normes
générales, conclure des conventions, des ententes relatives
à l'enseignement que le collège peut dispenser. Encore là,
il s'agit d'un élément nouveau. Un collège pourra
créer un comité chargé de compétences
appropriées, pour gérer ce que nous appelons les centres
spécialisés auxquels il a été fait allusion plus
tôt aujourd'hui.
Un groupe de collèges pourra créer une
société de services ayant pour objet la gestion de services
communs. Les collèges, en matière de gestion pédagogique,
vont également obtenir un certain nombre de pouvoirs, offrir des
programmes de courte durée, en octroyant eux-mêmes les
attestations, déterminer des conditions particulières
d'admission, choisir des cours qui compléteront les programmes de
formation générale ou de formation professionnelle, participer
à la formation pédagogique des nouveaux enseignants,
évaluer les étudiants qui est une responsabilité
que nous confirmons cette fois engager des projets en innovation
pédagogique avec plus de moyens qu'avant.
Je pourrais continuer longtemps de la sorte. Les collèges, avec
le gouvernement, participent à la détermination des conditions de
travail de leurs employés. C'est ce que nous faisons à l'heure
actuelle dans le cadre des négociations. Et, bien sûr, nous nous
apprêtons à annoncer également d'autres mesures dans le
plan de travail qui fera suite à l'énoncé de politiques et
qui sera rendu public à la rentrée scolaire pour fins de
discussions.
De sorte que j'admets difficilement qu'on nous fasse le reproche de
vouloir centraliser, alors que se manifeste si clairement la volonté de
remettre aux collèges des pouvoirs administratifs et pédagogiques
plus grands que ceux qu'ils ne possèdent actuellement. Je sais bien que
nous sommes en présence de conflits, de sphères d'influence entre
fonctionnaires, mais il faudrait au moins le dire clairement. J'admets
difficilement qu'on nous propose en fait une querelle de juridictions.
Cela étant dit, permettez-moi d'aborder quelques questions
spécifiques dans le mémoire et de vous interroger sur la
portée de quelques-unes des considérations dont vous nous avez
fait part.
Dans le paragraphe 1.4, vous nous dites que le conseil devrait
être une instance de consultation auprès du ministre et que vous
vous opposez fermement, dites-vous, à ce que le conseil joue un
rôle d'examinateur, comme vous l'appelez, des institutions et de
prestateur de services auprès de celles-ci. Il n'a jamais
été question de faire du conseil un inspecteur ou un examinateur,
comme vous le dites. Nous avons, au contraire, pris bien
soin de donner au conseil des pouvoirs qui ne soient pas ceux d'un
inspecteur, mais bien qui lui permettent de fournir des services à ceux
qui en auront besoin. Ma première question, et j'aimerais avoir quelques
explications de votre part là-dessus: Quelle incompatibilité de
nature y a-t-il entre le rôle consultatif d'un conseil des
collèges et un rôle d'évaluation, à supposer que ce
soit le conseil lui-même qui l'exerce?
Y a-t-il là une incompatibilité de nature selon saint
Thomas, et si oui, expliquez-moi laquelle?
M. Lauzière: Je ne me référerai pas à
saint Thomas, je vais me rapprocher de l'auteur du rapport Parent,
particulièrement pour ce qui concerne le chapitre IV du document de
l'éducation, no 3 et je vous dirai, non pas en tant que fonctionnaire,
mais en tant que principal officier des corporations, que les
représentants de ces corporations et moi-même, pour fins de ce
mémoire à la commission parlementaire, avons justement
examiné cette question. L'essentiel de notre propos, c'est que si
conseil des collèges il y a, ce que nous souhaitons, dans la ligne de la
distinction entre les fonctions dans les étapes d'intervention dans les
systèmes scolaires, il nous paraît que la commission
d'évaluation dont il est question dans l'article 18 du projet de loi ne
se situe pas dans cette ligne. Pas que le problème d'évaluation
n'en est pas un, mais concernant le mot évaluation, il nous semble qu'il
y ait plusieurs choses différentes. Cela a été dit par un
groupe qui nous a précédé. S'il est question de l'exercice
de la responsabilité ministérielle et de l'obligation des
corporations de rendre des comptes, je pense que dans le projet de loi 25, il y
a tout ce qu'il faut, les corporations sont d'accord, l'ont même
proposé par l'entremise de leur fédération, c'est dans le
projet de loi, il s'agit du rapport annuel dont les éléments sont
déterminés par le ministre, suite à des recommandations
à cet effet du conseil des collèges.
S'il s'agit de l'ensemble de techniques et d'instruments qui devraient
être mis de plus en plus à la disposition des institutions pour
qu'elles analysent mieux ce qu'elles font, pour qu'elles détectent
davantage les lacunes qui sont les leurs et qu'elles se donnent les moyens d'y
remédier le cas échéant, il ne nous semble pas que cela
relève d'une commission d'évaluation dont le mandat est
d'examiner les politiques institutionnelles d'évaluation. Si le conseil,
si une commission du conseil jouait un rôle dans la ligne du conseil des
collèges, ce serait, à toutes fins utiles, des recommandations
sur la problématique d'évaluation du réseau
collégial, recommandations faites au ministre, qui pourrait, suite
à ces recommandations, compte tenu d'un certain nombre d'entre elles,
mettre sur pied, investir plus dans la recherche dans ce domaine. Je parle
toujours de l'évaluation en tant qu'ensemble de techniques et
d'instruments pour analyser son vécu, détecter ses lacunes et
s'améliorer, le cas échéant.
Il nous semble justement que ces choses existent, parce que quand on
parle de l'évaluation, M. le ministre, vous savez que dans le livre
blanc, c'est assez clair. On parle de l'évaluation des programmes, des
institutions, du personnel, des enseignements et des étudiants. Il y a
là toute une problématique qui est fort délicate,
semble-t-il, et pour laquelle, de toute façon et je reviens au
projet de loi 25 une majoration de la représentation des
composantes internes quelles qu'elles soient rend difficile l'idée
même, pour les institutions, de donner suite, d'avoir des politiques
institutionnelles, de les faire vivre, de faire en sorte qu'elles
fécondent un peu la réalité institutionnelle.
C'est dans ce sens que si je reviens à votre question en tant que
telle, il nous semble que cette question d'évaluation des politiques
institutionnelles n'est pas de la nature d'un conseil qui, pour nous, doit
être consultatif sur des questions de réseau. Si par le rapport
annuel, pour prendre un exemple qui peut se poser, il semblait au ministre qui
le reçoit, qu'il y a un certain nombre de données et
d'éléments qui figurent dans ce rapport annuel, et sur lesquels
le ministre pourrait s'inquiéter et, à ce moment-là,
pourrait, le cas échéant, proposer aux institutions de recourir
davantage à des services qui existent, c'est une chose. Mais je pense
que ce n'est pas du tout, pour nous, la fonction que doit remplir le Conseil
des collèges, relativement à la problématique de
l'évaluation. Il nous semble qu'effectivement, le Conseil des
collèges, dans l'analyse des besoins qu'il fait de l'état du
réseau, peut très bien remarquer qu'il manque de services
d'évaluation, qu'on n'a pas été loin dans ce domaine,
qu'il faudrait diversifier davantage, proposer un certain nombre de solutions,
ces recommandations étant faites au ministre qui peut, me semble-t-il,
mettre en oeuvre une série de choses à la suite de ces
recommandations.
Mais ce n'est pas du tout la même chose que de confier à
une commission de ce conseil l'examen des politiques et des institutions,
offrir le service d'évaluation et, en même temps, faire un rapport
sur l'état du réseau. Il me semble que, là, il y a des
conflits quant aux niveaux d'intervention. Et si je peux me permettre, M. le
ministre...
M. Morin (Sauvé): J'aimerais que vous m'expliquiez
l'incompatibilité de nature, parce que vous m'avez fait effectivement un
exposé intéressant, mais vous ne m'avez pas
démontré qu'il y a une incompatibilité de nature entre le
rôle consultatif qui, justement, va parler tôt ou tard de la
qualité de ce qui se fait dans les collèges, et la fonction
d'évaluation, ou la fonction qui consiste à mettre des services
d'évaluation à la disposition des collèges. Où est
l'incompatibilité de nature?
M. Lauzière: II y a incompatibilité pour nous, dans
la mesure où le Conseil des collèges fait des recommandations au
ministre sur les orientations relatives au réseau.
M. Morin (Sauvé): Oui.
M. Lauzière: Dans cette mesure, la fonction, le rôle
attribué à une commission du conseil
d'examiner les politiques institutionnelles de chacune des institutions
et d'offrir des services, et, en même temps, de faire état sur
l'état du réseau, cela nous semble incompatible, à sa face
même.
M. Morin (Sauvé): Mais expliquez-moi
l'incompatibilé de nature, puisqu'on va nous faire des recommandations.
Est-ce qu'il n'est pas justement bon qu'on soit informé des
problèmes d'évaluation qui se posent dans le réseau?
M. Lauzière: II y a justement l'expression qui est celle
que nous employons. Il est fort important que le Conseil des collèges
fasse des recommandations sur le problème d'évaluation que cela
pose dans le réseau. C'est autre chose, M. le ministre, selon nous, que
de faire cela, et d'être chargé d'examiner les politiques
institutionnelles des institutions pour lesquelles on offre nous-mêmes
les services. C'est ce qui m'a amené à appeler, de façon
un peu caricaturale, les conflits d'intérêts de la clinique Esso.
C'est autre chose de faire des recommandations sur des problèmes
d'évaluation qui se posent dans le réseau et d'examiner les
politiques institutionnelles de ces institutions qui auront recouru aux
services que nous-mêmes nous offrons quand même.
M. Morin (Sauvé): Notre expérience nous apprend, au
ministère, qu'il se présente des circonstances où nous
devons avoir recours à de l'expertise extérieure cela
s'est présenté récemment expertise à mettre
à la disposition d'un cégep qui a des problèmes d'ordre
pédagogique, par exemple.
Tout à l'heure, les représentants de la
Fédération des parents, et en particulier le président du
collège de Limoilou, nous ont expliqué que cela pouvait
être non seulement utile, mais nécessaire, à
l'occasion.
S'il s'agit de services de cette nature, ne pensez-vous pas qu'ils
pourraient être utilement rattachés au Conseil des
collèges, organisme indépendant du ministre et donc, agissant de
façon que le ministre ne mette pas ses gros pieds dans la
porcelaine?
M. Lauzière: Justement, M. le ministre, sur cet exemple,
s'il y a un problème qui se pose au niveau de la reddition de comptes
d'un collège, au niveau de l'examen de ce qui se passe et qui semble
affreux et, à juste titre, affreux, dans une hypothèse qu'on
pourrait faire, il me semble que ce sont justement les articles ou les pouvoirs
d'intervention spéciaux prévus au projet de loi 25. Le risque est
grand de tuer la crédibilité de tout système
d'évaluation pour fins d'amélioration, avec l'utilisation de ce
système, aux fins d'apporter un remède particulier à un
mal grave. Et je pense que toutes les lectures qu'on peut faire sur la
crédibilité des organismes des instruments d'évaluation,
militeraient pour distinguer l'exercice d'une responsabilité
ministérielle qui nomme un enquêteur, attribue, en quelque sorte,
à cet enquêteur, le cas échéant, des pouvoirs
très spéciaux, et même, apporte des remèdes à
une situation malheureuse, c'est fort différent de la
problématique d'évaluation du réseau. (23 h 30)
M. Morin (Sauvé): Allons, vous êtes placés
pour savoir les beaux résultats qu'ont obtenus les enquêteurs dans
le passé. Quand le milieu collégial se ferme et que personne ne
coopère avec eux, vous savez très bien que cela s'est
terminé par des impasses totales. Il est justement question
d'éviter ce genre d'impasse. Vous êtes placés pour le
savoir pourtant. Vous savez bien que cela n'a jamais abouti, ces enquêtes
et, justement, nous tentons de définir un type d'intervention plus
nuancé sous forme de services. Vous ne m'avez pas encore
démontré que cela ne pourrait pas être rattaché
à un organisme comme le Conseil des collèges. En tout cas, s'il
est rattaché au ministère, il sera tout de suite vu comme un
inspectorat et sera immédiatement vu comme étant une
ingérence et de la centralisation de sorte que, dans l'état
actuel de notre discussion, je ne vois pas de raison de modifier notre attitude
sur ce point.
Passons au suivant, qui est 1.5. Vous nous dites qu'il est par ailleurs
étonnant de constater que les membres de cette commission
d'évaluation située auprès du conseil sont nommés
par le ministre. Vous omettez de dire que c'est sur la recommandation du
conseil. Oui, mais de la façon dont c'est présenté, cela a
l'air tout à fait arbitraire. Le ministre désigne qui il veut. Ce
n'est pas le cas.
De même, vous dites qu'elle a plus de pouvoirs que le conseil
lui-même. Je ne pense pas. Je ne pense pas, puisque la commission fera
rapport au conseil et que c'est le conseil qui fera éventuellement des
recommandations au ministre ou à qui il devra en faire. Cela peut
être le collège, cela peut être le ministre.
M. Lauzière: Et au collège.
M. Morin (Sauvé): Mais oui, bien sûr.
M. Lauzière: C'est cela.
M. Morin (Sauvé): Cela peut être le collège.
Peut-être que cela n'a pas une importance telle que le ministre doive en
être saisi, cela peut être le collège tout simplement. Sur
ce plan-là, j'ai aussi quelques réserves.
Dans 1.6, vous me dites, dans la même ligne de pensée, que
le risque est grand que la constitution d'autres commissions prévues
à l'article 23 serve à refiler tous les problèmes
embarrassants.
M. Lauzière: Oui, c'est un risque.
M. Morin (Sauvé): Enfin, expliquez-nous un peu ce que vous
voulez dire par là. Qu'est-ce que cela signifie exactement?
M. Lauzière: Si vous permettez...
M. Morin (Sauvé): Vous tenez pour acquis que le conseil
est constitué d'idiots ou quoi?
M. Lauzière: Absolument pas, c'est qu'on essaie
d'envisager des risques possibles à partir d'une situation justement et
on dit bien: II est risqué. Je pense que c'est attirer l'attention sur
le risque que peut avoir la constitution de la commission chaque fois qu'un
problème se pose. Je m'excuse si cela ne vous fait pas plaisir, mais
enfin, c'est notre opinion.
Je veux dire quelque chose, si vous le permettez, M. le
Président, sur la question de la composition. Je pense que la loi du
Conseil supérieur de l'éducation il me semble que le
modèle n'était pas si bête au niveau de la mise sur pied
des commissions prévoit que les membres des commissions qui
relèvent du conseil soient nommés par le conseil. C'est dans ce
sens-là qu'on disait que pour ces commissions-là, qu'il nous
semblerait, le cas échéant, que s'il devait y avoir des
commissions, les membres du conseil devraient être nommés par le
conseil. Cela ne me semble pas si sorcier que cela.
M. Morin (Sauvé): C'est un point que je vais examiner.
Oui, je suis prêt à prendre cela en considération et
à y réfléchir.
Un dernier point avant de donner la parole à mes collègues
qui, je suis sûr, brûlent de vous poser également quelques
questions. À 1.7, vous nous dites: "La complexité, le
caractère délicat du problème d'évaluation et de la
mise en oeuvre de politiques institutionnelles d'évaluation militent en
faveur de laisser le temps nécessaire au conseil de s'en saisir, de
l'analyser, de recommander au ministre, etc." Oui, on ne peut pas être en
désaccord avec cela. Cela me paraît tout à fait
raisonnable.
M. Lauzière: Par ces lignes, ce qui nous intéresse
dans ce problème de l'évaluation, c'est qu'il semblerait
justement plus utile, avant de mettre sur pied une commission qui a les
fonctions prévues à l'article 18, de laisser le temps au conseil
de se saisir d'un problème qui est un problème réel du
réseau. Nous en convenons.
M. Morin (Sauvé): Oui, le conseil prendra le temps qu'il
faudra. D'ailleurs, dans une large mesure, il sera maître de son
comportement. Le ministre n'ira pas mettre son nez par dessus son épaule
constamment, pas plus qu'il le fait pour le Conseil des universités ou
le Conseil supérieur de l'éducation.
M. le Président, j'aurais beaucoup d'autres questions
passionnantes à soulever. J'y reviendrai peut-être si le temps
nous le permet, mais je ne voudrais pas priver mes collègues de la
faculté de poser des questions.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. On ne fait pas
encore partie de la même faculté, mais...
Le Président (M. Marcoux): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux:... je suis sûre que c'était dit
avec de bonnes intentions.
M. Morin (Sauvé): Vous connaissez l'histoire, M. le
Président.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez une histoire pour nous faire rire,
allez-y, M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): Oui, à cette heure. Dieu voulut
créer l'être le plus estimable, le plus merveilleux de la
création. Il inventa le professeur d'université. Il voulut
ensuite créer l'être le plus méprisable, le plus abject, il
créa le cher collègue.
Mme Lavoie-Roux: On voit que cela va avec la personnalité
du ministre, ces histoires. Quoi qu'il en soit, je veux remercier la
Fédération des cégeps pour le mémoire qu'elle nous
a présenté. Nous n'avons là que le résumé,
somme toute, du mémoire plus volumineux qui nous a été
remis et qui, j'en suis certaine, nous sera d'une grande utilité. Je
trouve fort intéressant de voir que le ministre nous cite comme signe de
décentralisation l'article 10, selon lequel à l'avenir les
collèges vont pouvoir, dans les limites financières qui leur
seront accordées, acquérir, construire, louer, agrandir,
transformer ou aliéner un immeuble sans l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil. Je trouve cela d'une très grande
générosité, alors que les cégeps sont à peu
près tous construits et à peu près tous
réaménagés, il reste peut-être quelques exceptions.
Quant à aliéner, cela ne doit pas se présenter très
souvent non plus.
Un autre exemple de la décentralisation, c'est le fait qu'un
conseil sera autorisé à former un comité de gestion
je ne retrouve pas la référence exacte pour administrer,
de toute façon, un service particulier. C'est l'article 9.17: "Un
collège peut, avec l'autorisation du ministre, constituer un
comité chargé de l'organisation et de la gestion d'un tel
programme d'enseignement professionnel et, à cette fin, lui
conférer par règlement les pouvoirs nécessaires."
Là encore, on peut se demander quel est l'objectif d'une telle
disposition. Le ministre l'interprète comme étant de la
décentralisation. Cela peut être aussi une disposition qui
crée des problèmes à un collège, puisque comment
ceci s'articulera-t-il? S'agira-t-il d'un petit collège à
l'intérieur du collège? Je l'ignore. De toute façon,
l'autre exemple de la grande décentralisation, c'est la
référence qu'il faisait il pourra me corriger si je l'ai
mal interprété à l'article 20. Désormais,
vous pourrez constituer des sociétés ou il pourra y avoir par
lettres patentes l'institution dé la "Société" ayant pour
objet de fournir des services auxiliaires aux collèges qui en font
partie.
En contrepartie, il y a les autres articles, l'article 10, l'article 16,
les pouvoirs d'enquête, toutes les approbations par le
lieutenant-gouverneur en conseil, la nécessité, par exemple, de
prévoir chaque année les cours qui seront donnés
l'année suivante, comme si tout cela pouvait se décider dans les
délais prévus, les rapports qui devront être donnés,
pour lesquels le ministre pourra exiger des choses très
particulières quant au contenu, et j'en passe. Je pense qu'on pourrait
avoir un long débat, à savoir si le ministère centralise
ou décentralise.
Évidemment, le ministre a fait jouer le jeu de la possible
je voudrais me rappeler son expression exacte il n'a pas dit
"rivalité" entre un type de fonctionnaire et un autre type de
fonctionnaire, mais ces mêmes remarques de centralisation nous ont
été faites par tous les organismes qui ont
précédé, si je ne m'abuse. Il y aurait lieu pour le
ministre de faire un examen particulier là-dessus avant de crier, comme
il l'a fait d'ailleurs à l'occasion des débats sur les
commissions scolaires, que ce gouvernement décentralise.
Là-dessus, en mettant... Non, il ne m'écoute pas, il
écoute peu de gens, d'ailleurs. C'est son problème et c'est aussi
le problème des gens qui sont...
M. Rivest: II fait cela constamment?
Mme Lavoie-Roux: Oui, presque constamment... qui sont venus
devant cette commission.
Je voudrais revenir sur la question de l'évaluation. Quant
à moi, je suis portée à être d'accord avec vous
quand vous dites: Cette commission du Conseil des collèges, qui devra se
pencher sur les problèmes d'évaluation, devra le faire dans une
perspective d'évaluation des instruments qui sont en place, qui
existent, dans le but d'inciter les collèges à s'en servir s'ils
en sentent le besoin. Mais quand on utilise le mot "examiner"
peut-être que vous pourriez me donner la référence exacte
à l'un des deux projets de loi... "La commission d'évaluation est
chargée de procéder à l'examen des politiques
institutionnelles d'évaluation". Elle-même fait
l'évaluation du collège. Si vous évaluez les politiques
institutionnelles d'évaluation d'un collège, vous portez un
jugement, à savoir si ce collège a des politiques
d'évaluation qui sont adéquates ou qui ne le sont pas, et
"d'adresser au Conseil et aux collèges en cause, les avis que lui
suggère un tel examen". Pour moi, ce n'est pas ambigu. On va examiner un
collège. On va lui dire: Vos politiques institutionnelles ne nous
apparaissent pas adéquates. On va lui donner un avis selon lequel il
doit les corriger ou il doit faire autre chose.
Quant à moi, je ne vois pas du tout le rôle d'un Conseil
des collèges, qu'on veut autonome, remplissant cette fonction à
l'égard des cégeps. Sinon, je suis portée à croire
que le ministre se donne un instrument qui le dégagera peut-être
directement de cette responsabilité que lui-même et son
ministère quand je dis "lui-même et son ministère",
ça peut être les ministres qui l'ont précédé
également auraient dû assumer à l'égard de
l'évaluation des collèges.
Le ministre dit: Vous allez m'accuser de faire telle chose. Est-ce que
c'est pour ça qu'on décide de créer ce Conseil des
collèges avec une commission d'évaluation? Je me demande quelle
sera la confiance des collèges eux-mêmes qui pourraient, dans des
situations particulières, enfin, sur une politique
générale, faire appel au conseil pour obtenir un avis ou un point
de vue, quand ils savent qu'en même temps ce conseil, par le truchement
de sa commission d'évaluation, va évaluer leur performance,
peut-être pas leur perfor- mance au jour le jour, mais au moins la
qualité de leur performance d'évaluation. Pour ma part, je trouve
qu'à ce moment-là on réduit le rôle que le Conseil
des collèges pourrait jouer à l'égard des institutions
elles-mêmes. Je comprends que les collèges peuvent voir le Conseil
des collèges comme un instrument qui sera partagé il sera
même en conflit entre son rôle de consultation auprès
du ministre et son rôle consultatif ou de conseiller auprès des
collèges.
En tout cas, il y a certainement lieu de réexaminer cette
disposition de la commission d'évaluation.
La question précise que je voulais vous poser à cet
égard je l'ai posée à un autre avant vous, je pense
que c'est au président des conseils d'administration c'est: Quels
sont d'après vous les objets d'évaluation qui devraient
être impartis à un conseil d'évaluation, enfin, appelons
comité d'évaluation. Selon la réponse que vous me
donnerez, j'ai l'impression qu'il s'agit sans doute de l'institution
elle-même, des programmes, des contenus, de la qualité de
l'enseignement, de l'évaluation des étudiants. Dans quelle mesure
ceci est-il possible, compte tenu des dispositions des conventions collectives
existantes? J'aurai une question supplémentaire après.
M. Lauzière: Si on parle des objets d'évaluation,
ils sont déjà énumérés assez exhaustivement,
me semble-t-il, dans le livre blanc, les institutions, les personnels, les
programmes, les enseignements, les étudiants. Bon! (23 h 45)
Je pense que si on regarde ce qui se fait dans le réseau, dans
les collèges depuis déjà un bon bout de temps et que si on
prend acte de ce qui se fait pour renforcer la tendance à
l'auto-évaluation, il y a déjà de quoi aller très
loin. Je pense aux évaluations des institutions. Il y a
déjà beaucoup de collèges qui utilisent une autre
méthode que celle des institutions qui font "la belle" en vue d'un
rapport au ministre. Il y a, par exemple, le fait que beaucoup de
collèges ont profité des services d'évaluation ou des
recherches en évaluation. Je pense à l'analyse institutionnelle.
Il y a beaucoup de cégeps qui ont profité de ces services pour
faire des démarches dans le sens de l'auto-évalua-tion.
L'évaluation des programmes: II y a déjà une
batterie de mécanismes en place pour l'évaluation des programmes
d'enseignement. Il se pourrait que le Conseil des collèges constate
qu'il faille aller plus loin ou différemment dans l'évaluation
des programmes. Mais il y a déjà beaucoup de choses qui se font
en termes d'évaluation de programmes: les comités
collèges-industries, les comités de coordination des programmes
qui réévaluent, à tous les trois ans, l'ensemble des
programmes. C'est déjà un fait. Il faut le lire, me semble-t-il,
avant d'inventer toute autre chose.
L'évaluation des étudiants, c'est essentiellement les
professeurs qui font cela. Il y en a au-delà de 9000 ou 10 000 dans le
réseau; c'est leur fonction propre. Alors, le Conseil des
collèges
analysant le problème de l'évaluation du réseau
sous cet angle, pourrait, le cas échéant, faire des
recommandations pour pousser davantage les recherches là-dessus, parce
que sauf pour certains cas farfelus fort connus, les professeurs, de
façon très générale, évaluent, de
façon fort satisfaisante, les apprentissages des étudiants. C'est
dans ce sens que nous disons: II y a d'abord une lecture à faire, une
analyse à faire de l'ensemble des démarches faites, de
l'évaluation de cet ensemble d'objets, avant, me semble-t-il, de mettre
sur pied une commission d'évaluation qui aurait pour but, entre autres,
d'examiner les politiques institutionelles des institutions.
Ce sont deux problématiques fort différentes et Dieu sait
que, dans le cas de l'évaluation, c'est autre chose parce qu'il y a
toujours une ambiguïté dans ce mot. Quand on parle de
l'évaluation, on en parle souvent, me semble-t-il, à partir d'un
discours assez répandu à savoir qu'on ne sait pas ce qui se passe
dans ces boîtes. Il faudrait une fois voir ce qui se passe effectivement
là-dedans. Cela nous semble effectivement un problème qui
reçoit une solution via, nous semble-t-il, la mise sur pied du rapport
annuel.
Là, c'est l'exercice de la responsabilité
ministérielle qui doit s'exercer directement. Les institutions n'ont
rien contre ça; elles l'ont elles-mêmes proposé. Mais, s'il
s'agit de l'évaluation, au sens de tous les instruments et techniques
qu'on peut se donner pour évaluer l'ensemble des objets qu'ils ont
énumérés, cela arrive dans les faits et c'est
fécond réellement par de toutes autres voies que celle qui
est proposée selon nous. Dans ce sens, ce n'est pas que nous voulons
écarter...
Je reviens à votre question, la difficulté; il y aura
toujours une difficulté. Il ne sert à rien de vouloir
l'éviter comme par magie, il y aura toujours une difficulté qui
est reliée à la coloration relations de travail dans toutes ces
dimensions. Je pense que nous n'avons pas de recette magique. Nous essayons,
dans les mandats que nous proposons pour la prochaine ronde de
négociations, de resserrer quelques mécanismes là-dessus,
mais il est clair que le rapport de force institutionnalisé, dans le
cadre des lois des relations de travail, joue sur toutes ces
matières.
Il y a quelque chose également qui joue, c'est la capacité
d'agir du conseil d'administration relativement à ces domaines. Il y a
déjà une grande coloration de tout dans ces institutions par la
problématique des relations de travail. Cela est d'autant plus
compliqué du fait souvent de l'incapacité d'agir qui deviendra
encore plus grande comme incapacité d'agir dans la composition
projetée du conseil d'administration où là, vraiment, les
gens de l'extérieur n'assisteraient, mais d'une façon presque
permanente, comparativement à ce qu'ils font actuellement, qui est de
façon intermittente, à des conflits entre l'administration et les
syndiqués. Ce n'est pas une manifestation de mauvaise foi des
syndiqués ou des administrateurs là-dessus. La structure le
permet et je dirais que c'est grâce à la vertu des individus, tant
syndiqués qu'administrateurs le cas échéant, qui fait
qu'on évite le conflit d'intérêts permanent. Il est
généré par la structure, il est fort favorisé en
tout cas.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous... Ce que vous me dites, c'est
qu'il faudrait que dans les conventions collectives, cette
nécessité d'évaluation soit prévue. Dans le moment,
est-ce que cela existe ou si cela n'existe pas?
M. Lauzière: Je ne crois pas. Pour l'évaluation des
étudiants, il y a déjà des stipulations des conventions
collectives qui accordent des droits clairs...
Mme Lavoie-Roux: Mais pas pour celles des...
M. Lauzière: ... pour l'évaluation des
institutions, des programmes et des enseignements, il n'y a rien de
prévu comme tel dans les conventions collectives. Là-dessus, nous
n'avons pas de position spécifique sur ce point de vue. Cependant, je
serais porté à penser qu'il ne faut pas renchérir sur la
tendance à vouloir régler tous ces problèmes via les
conventions collectives.
Mme Lavoie-Roux: Pourriez-vous me dire si, par exemple,
l'autonomie départementale, même si on mettait en place un
organisme d'évaluation autonome, est-ce que compte tenu de cette facture
des cégeps ou cette structure des cégeps qui prévoit les
départements et leur autonomie, est-ce que ce serait possible? Dans
quelle mesure est-ce possible d'évaluer ce qui se passe à
l'intérieur des départements? On parle toujours de leur
autonomie, etc. Il y a la commission pédagogique, il y a les
départements...
M. Lauzière: Bon! C'est très difficile
d'évaluer ce qui se passe à l'intérieur d'un
département actuellement. C'est déjà très
difficile, et je dirais, pour un, que ce n'est pas... il n'y a pas à
rêver que ce soit archi facile. Il y a quand même dans un
département des professeurs, des compétences réunies, aux
fins pour lesquelles ils sont engagés. Il y a lieu, cependant, et c'est
le sens de nos propositions, et là, on s'accroche vraiment aux
conventions collectives, de resserrer davantage les mécanismes de
relations, de dépendance du département dans l'exercice de cette
fonction pédagogique avec le pouvoir pédagogique du
collège en tant que tel. Nous faisons un effort actuellement
c'est dans les conventions collectives nous verrons bien si cela
réussit par la suite, mais nous faisons un effort les
collèges, en tout cas pour resserrer un peu le mécanisme
qui permet justement aux collèges, à la corporation, de jouer son
rôle d'évaluation de ce qui se fait via les
départements.
Mme Lavoie-Roux: Ce que vous me dites, c'est que dans les offres
patronales déposées je ne sais pas si elles sont
déposées ...
M. Lauzière: Oui, elles sont déposées.
Mme Lavoie-Roux: ... elles sont déposées, il y a
cette disposition qui est prévue pour corriger la situation dont on
parle.
M. Lauzière: II y avait cette possibilité de flou
des responsabilités, je ne dirais pas morales, mais structurelles.
Mme Lavoie-Roux: Oui. La raison pour laquelle je vous pose ces
questions-là, c'est qu'on peut bien avoir le meilleur système
d'évaluation du monde, ou enfin prévoir le meilleur
mécanisme pour faire de l'évaluation, si les structures internes,
les groupes qui vivent à l'intérieur d'une institution ne le
permettent pas, on ne se servira pas des outils ou on va mal s'en servir et, au
bout de la ligne, on ne sera peut-être pas plus avancés qu'on
l'était avant. Ce qui m'inquiète, c'est qu'il reste que l'opinion
publique, qu'elle soit fondée ou pas, et c'est d'ailleurs
peut-être ce que les parents sont venus nous dire tout à l'heure
quand ils ont dit: II faut de l'évaluation, et je pense que les parents,
à ce moment-là, reflétaient quand même... avaient
les réactions de bien des gens dans la population. Il y a eu des
problèmes dans les cégeps, des problèmes sérieux,
on a parlé tout à l'heure on ne le renommera pas
d'un cégep qu'on connaft en particulier; est-ce que ce sont des
situations qui se sont répétées dans plusieurs
cégeps? À ma connaissance, je connais celui-là. Il y en a
peut-être un autre que je ne nommerai pas. Qu'il y ait eu des conflits au
cours des ans dans les cégeps, ils ont peut-être été
davantage reliés à des conflits de l'administration à
cause de tous les mécanismes dont on a parlé auparavant, mais
est-ce que cette impression qu'on a dans le public, à savoir que les
objectifs ne sont peut-être pas atteints, que les élèves
sont mal évalués, que des alliances se font entre les professeurs
et les étudiants, font que la qualité des cours n'est pas aussi
bonne qu'elle devrait l'être? De quelle façon ceci est-il un
problème généralisé? Pourquoi est-ce que je vous
pose ces questions précises? C'est que l'on veut, quand même
essayer d'améliorer ce qui se passe à l'intérieur des
cégeps et essayer peut-être de mieux répondre au
désir, je dirais peut-être davantage des parents, que de la
population qui est quand même un peu plus loin de ça qu'elle ne
l'est des écoles au scolaire.
M. Lauzière: Effectivement, là-dessus, il y a un
problème, mais je pense que, justement, il y a toute une
médiation à faire faire par l'analyse de ce qui se fait entre un
discours populaire conjoncturel, à savoir que tout ce qui se fait dans
ces boîtes, ce n'est pas bon à partir de deux ou trois cas
d'espèce... La législation pourrait apporter des mesures
là-dessus, il me semble qu'il y a des médiations à
apporter. Il ne nous semble pas que de façon générale et
constante il y ait un problème d'évaluation, par exemple, des
apprentissages. Il y a certainement des choses qui sont venues très
vite. Je pense que dans l'ensemble du système sco- laire
ça ne vaut pas plus pour le système scolaire il y a eu
beaucoup de monde en même temps, beaucoup de bouleversements d'à
peu près tous les acquis et toutes les valeurs. C'est dans ce sens qu'il
s'est fait des expériences parfois malheureuses, il s'est fait des
choses à la limite de l'absurde ou de la folie furieuse.
Mais d'une façon générale je pense que le corps
professoral est fort conscient, dans le fond, est fort honnête dans ses
tentatives pour régler ce genre de problèmes. Nous entendons
fréquemment ce genre de discours qu'on peut exploiter
démagogiquement à toute espèce de fin, nous en sommes bien
conscients. Si, après avoir entendu ce premier discours, on analyse un
peu ce qui se fait dans le vécu des cégeps et je regarde l'effort
considérable d'un très grand nombre d'agents du réseau
je prends les professeurs puisqu'on en parle de perfectionnement,
d'innovation pédagogique pour laquelle, semble-t-il, on aurait beaucoup
de décentralisation maintenant... Je pensais que c'était la
fonction même des cégeps, je me dis qu'il se fait
déjà beaucoup de choses là-dessus qu'il faut analyser et
pousser. Le cas échéant, il faudra mettre sur pied des
mécanismes, aller plus loin dans la recherche. Il se fait
déjà de fort bonnes choses. Là-dessus, je ne suis pas
alarmiste.
Mme Lavoie-Roux: Je vous pose la question, parce que c'est
important d'avoir ça de la façon la plus claire possible. Je ne
voudrais qu'à partir de certains cas exceptionnels on adopte une loi qui
ait l'air de généraliser les problèmes et qui en
crée davantage qu'elle n'en règle. Je peux vous dire que dans le
comté que j'habite et dans les comtés voisins, il y a
d'excellents cégeps. Je ne les nommerai pas pour ne rendre personne
jaloux.
Je suis dans le comté de L'Acadie, on va retrouver le
cégep qui est là. J'en prends soin et de ceux des comtés
voisins aussi.
Il reste qu'il se fait d'excellentes choses au niveau des cégeps
et au fur et à mesure qu'on en fait la promotion, qu'on les fait
connaître, on corrige cette mauvaise impression que les cégeps ont
pu créer chez la population en général. Je vais
arrêter mes questions ici pour le moment.
Le Président (M. Marcoux): Comme il est minuit et que le
député de Gaspé m'a informé qu'il n'avait pas de
questions, le député de Terrebonne m'a dit qu'il avait des
questions... Est-ce qu'il y a des questions jusqu'à souhaiter...
Mme Lavoie-Roux: Le député de Jean-Talon.
Le Président (M. Marcoux): Jean-Talon également? Je
me vois dans l'obligation de vous demander de vous représenter, si vous
acceptez, demain matin. Est-ce que cela vous sera possible? Nous reprendrons
normalement nos travaux vers 11 heures ou 11 h 30. Disons plutôt 11
heures.
La commission ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 23 h 59
ANNEXE
MÉMOIRE DE LA FÉDÉRATION DES
cégeps
À LA COMMISSION PARLEMENTAIRE SUR L'EDUCATION CONCERNANT LES
PROJETS DE LOI NOS 24 ET 25
"LOI SUR LE CONSEIL DES COLLÈGES"
"LOI MODIFIANT LA LOI DES COLLÈGES
D'ENSEIGNEMENT GÉNÉRAL ET PROFESSIONNEL"
Monsieur le Ministre,
Madame,
Messieurs,
La Fédération des cégeps, qui regroupe les quarante
et un collèges publics de la province, dépose aujourd'hui devant
vous son mémoire concernant les projets de loi 24 et 25. Ce texte
constitue la synthèse de nombreuses études et consultations qui
firent appel à toutes les composantes du réseau collégial;
il a fait de plus l'objet d'un consensus de la part des principaux officiers
des cégeps.
Le présent mémoire n'inclut évidemment pas tous les
exemples, argumentations et réfutations utilisés au cours de sa
préparation, laquelle dut se référer alors au "projet du
gouvernement à l'endroit des cégeps" que le ministre de
l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, diffusa le 5 octobre 1978. Il ne
peut non plus tenir compte des articles de loi qui font référence
à des éléments nouveaux et dont la teneur était
inconnue et imprévisible avant le 18 mai dernier.
C'est pourquoi la Fédération des cégeps, lors de la
présentation de son mémoire, complétera ce texte de
façon à attirer l'attention sur les aspects qu'elle juge
essentiels et à s'ajuster plus immédiatement aux projets de
loi.
La Fédération des cégeps espère, ainsi,
contribuer, à l'intérieur de ses connaissances et de ses
compétences spécifiques, au développement du réseau
collégial.
Le président, Benoît Lauzière
Québec, le 4 juin 1979
INTRODUCTION
C'est à l'esprit et aux recommandations du rapport Parent que
réfèrent les éléments fondamentaux et les principes
de base qui ont guidé notre étude du document intitulé:
"Les Collèges du Québec, nouvelle étape" et des deux
projets de loi présentés en commission parlementaire. Nous nous
sommes attardés notamment à l'analyse du partage des fonctions,
des pouvoirs et des responsabilités qui devrait permettre le bon
fonctionnement du système scolaire.
D'après les auteurs du rapport Parent et les rédacteurs du
document d'éducation no 3 "la direction d'un système scolaire
comporte trois étapes qui pourraient être décrites comme
suit: élaboration des orientations d'ensemble en fonction des
besoins immédiats ou futurs; discussion des projets de loi au
cours de laquelle le gouvernement évalue les projets scolaires dans une
perspective politique et économique plus générale;
application des lois par les organismes intéressés."
Chacune de ces étapes implique l'existence de fonctions
distinctes qui relèvent de personnes ou de groupes différents:
fonction consultative, fonction de planification et fonction
d'exécution. Dans notre système scolaire, ces fonctions ont
été attribuées respectivement aux trois composantes
suivantes: le Conseil supérieur de l'éducation, le
ministère de l'Éducation et les réseaux d'enseignement
public.
Au moment de la réforme de l'enseignement, les pressions
démographiques et sociales ont provoqué la croissance
extrêmement rapide du réseau collégial, l'insistance sur la
fonction de planification et le difficile ajustement des niveaux des
responsabilités. Là se trouve, selon nous, la première
cause de l'angle de dérive qu'a pris l'évolution de ce
réseau avec le modèle proposé ce qui explique le partage
actuel des rôles et des zones d'influence entre les principaux
intervenants.
La volonté gouvernementale de créer un Conseil des
collèges nous semble l'occasion de redéfinir le partage des
responsabilités et de remettre entre les mains des différentes
composantes du réseau les pouvoirs et responsabilités qui leur
conviennent.
En ce qui a trait aux collèges eux-mêmes, la
répartition des rôles que nous connaissons actuellement prend sa
source, entre autres, dans le fait qu'ils sont des corporations au sens du Code
civil qui n'ont aucun pouvoir de taxation et reçoivent leurs budgets du
ministre de l'Éducation. Celui-ci, en raison de sa responsabilité
ministérielle, garde sur toute décision prise un certain
contrôle; dans les faits, ce contrôle a été
exercé par l'appareil administratif.
L'absence de réglementation fixant le cadre d'application de la
loi de façon claire a permis le foisonnement de directives de la part du
ministère et une répartition des pouvoirs entre le
lieutenant-gouverneur en conseil, le ministre de l'Éducation et les
conseils d'administration des collèges qui brime l'autonomie des
collèges et éloigne la pratique de la loi de son intention
première.
Un redressement majeur s'impose donc dans la pratique des pouvoirs de
façon à permettre aux collèges de jouir de l'autonomie que
leur confère leur nature juridique propre et à rétablir
l'équilibre entre les divers intervenants.
LE CONSEIL DES COLLÈGES
L'idée de créer un Conseil des collèges n'est pas
neuve. Elle a fait son chemin depuis la publication du rapport sur
l'état et les besoins de l'enseignement collégial et elle est
devenue le leitmotiv de plusieurs agents du réseau des collèges
sans que l'on sache très bien le contenu qu'elle avait pour chacun.
Le moment est venu d'en examiner le sens précis, à la
lumière de la proposition gouvernementale, certes, mais d'abord en
fonction de l'économie du réseau dans son ensemble et du partage
des rôles et des zones d'influence entre les principaux intervenants.
Nous pourrons ensuite proposer les mesures qui, à notre avis,
seraient susceptibles de favoriser l'atteinte des objectifs de
développement du réseau.
Le partage des rôles et des zones d'influence Le
ministère de l'Éducation: D.G.E.C.
Le ministère de l'Éducation du Québec et en
particulier la Direction générale de l'enseignement
collégial assument de multiples fonctions et prennent une part
importante dans la réalisation des trois étapes de direction du
réseau qu'incluait le modèle auquel nous avons fait
référence. Mandatée pour élaborer programmes et
politiques, la D.G.E.C. remplit un rôle consultatif auprès du
législateur et entretient des liens de consultation avec les personnels
du réseau jouant ainsi un rôle que les rédacteurs du
rapport Parent avaient assigné à un conseil consultatif
représentant la société. Elle joue aussi un rôle
marquant au niveau de l'application de la loi. Par ailleurs, la planification
dont elle est responsable se traduit souvent par l'émission de
directives, qui vu l'absence actuelle de règlements afférents
à la Loi des collèges, prennent une valeur quasi
législative. Enfin, elle offre aussi des services aux
collèges.
Donc, à l'exception de la discussion et du vote des lois, la
D.G.E.C. remplit tous les rôles qui devraient normalement être
partagés entre plusieurs intervenants.
Le Conseil supérieur de
l'éducation
La création du Conseil supérieur de l'éducation
était l'un des pivots de la réforme scolaire. Le Conseil
supérieur a le mandat très large de représenter le public,
ce qui se reflète dans sa composition, et d'aviser le ministre sur le
développement du système d'éducation au Québec. Il
se situe au premier niveau de responsabilité décrit par les
auteurs du rapport Parent. Toutefois, et quoiqu'il comprenne une commission de
l'enseignement collégial, il ne peut répondre aussi
adéquatement que nous le souhaitons de l'état et des besoins
spécifiques de ce réseau, puisque son mandat se situe
expressément au point de convergence des divers réseaux et de la
société. De plus la fonction de consultation qu'il devait assumer
a été obérée par la centralisation du
ministère de l'Éducation et par le fait que les commis de
l'État ont exercé eux-mêmes un rôle de consultation
spécifique et, dirions-nous morcelée.
Les cégeps
Le réseau collégial comporte quarante et un
établissements. Malgré leurs limites et leurs moyens restreints
ils sont responsables de la planification, de l'organisation, de
l'évaluation et du contrôle de l'ensemble de leurs
activités et donc se situent très exactement au niveau de
l'application des lois.
La Fédération des cégeps
Les collèges sont regroupés dans une
fédération qui favorise la réalisation de leurs objectifs
à travers l'établissement de mécanismes de concertation.
Dans le réseau collégial, la Fédération des
cégeps constitue un groupe de pression et agit comme représentant
des cégeps regroupés. Elle offre aussi aux collèges
certains services qui s'ajustent aux besoins de l'ensemble des
établissements. La Fédération des cégeps assume
donc une fonction de concertation des établissements entre eux.
De l'analyse qui précède on peut tirer les constations
suivantes: les objectifs de développement du réseau
collégial sont partagés entre plusieurs intervenants; les
niveaux de responsabilités ne sont pas toujours clairement
identifiés, certains intervenants assumant même des fonctions
incompatibles entre elles.
On peut se demander si cette situation ne constitue pas une des causes
importantes du problème de l'évaluation dans le réseau. En
effet, puisque d'une part l'instance responsable de la fonction de consultation
ne joue son rôle que très fragmentairement, puisque, d'autre part,
l'autonomie des cégeps est limitée non seulement par la Loi des
collèges, mais aussi par le double rôle des services et des
directions générales du M.E.Q. d'élaborer et de faire
accepter des politiques, et, puisqu'enfin la D.G.E.C. joue un rôle
à tous les niveaux de direction du réseau collégial,
assumant quelquefois des fonctions incompatibles entre elles et abusives quand
il s'agit de commis de l'État, il est plausible de penser que la
possibilité d'évaluer soit entravée par le fait que l'on
ne puisse identifier qui est responsable de quoi.
Plusieurs correctifs s'imposent donc: il faut exclure du mandat
de la D.G.E.C. ce qui concerne l'élaboration des politiques et la
détermination des objectifs de développement des collèges;
il importe d'affirmer au plus haut niveau la spécificité
du réseau collégial autrement que par l'existence, au sein du
C.S.E., d'une commission de l'enseignement collégial; il faut
modifier la loi 21 de telle sorte que l'on confirme l'autonomie des
cégeps et qu'on leur permette d'exercer effectivement leur mission. Cela
impliquera la nécessité que ceux-ci rendent compte de leurs
activités à la collectivité; il faut affirmer la
nécessité de maintenir, pour les collèges, un lieu
identifié de concertation; il faut envisager le problème
de l'évaluation d'une façon globale qui implique le réseau
tout entier.
Le projet gouvernemental
Les auteurs du projet gouvernemental à l'endroit des
cégeps se sont exprimés longuement sur le problème que
pose l'absence de mécanisme d'évaluation, sinon
d'évaluation même.
La Fédération des cégeps ne peut que
reconnaître cette lacune et se joindre à ceux qui espèrent
en proposer des correctifs. Mais elle doit formuler des réserves sur la
problématique gouvernementale à ce sujet.
La problématique
Selon le ministre, au passif du bilan des cégeps, figurent de
nouveaux problèmes dont celui de la qualité de l'enseignement,
causé à la fois, par la démocratisation
accélérée et la relative impréparation
pédagogique des professeurs. Les problèmes relatifs à la
qualité de l'enseignement lui semblent surtout liés à
"l'absence de mécanismes capables de mesurer avec quelque
précision la qualité des établissements et de
l'enseignement qui est dispensé non moins que celle des diplômes
décernés."
De plus, un peu partout, au Québec, on s'interroge sur la valeur
des services éducatifs et sociaux effectivement rendus par les
collèges. On leur demande de se justifier, de rendre des comptes.
Conscient de cette situation, le gouvernement entend faire du droit des
étudiants à un enseignement de qualité le principe
fondamental inspirant le renouveau qu'il propose et de l'évaluation, la
pierre d'assise de ce renouveau.
On distingue donc trois éléments constitutifs de la
problématique gouvernementale en matière d'évaluation:
droit des étudiants à un enseignement de qualité et
nécessaire garantie de cette qualité; constat de l'absence
de mécanisme d'évaluation, facteur causal des doutes qui
émergent dans la population au sujet de la qualité de
l'enseignement; obligation de rendre des comptes à la
population.
Si la Fédération des cégeps reconnaît la
valeur de ces éléments et la complexité du
problème, il lui semble toutefois que les correctifs proposés et,
en particulier, la création à cette fin d'un organisme nouveau
font fi de la réalité du réseau et de celle des
cégeps et des limites qu'elle impose à la volonté
d'évaluer. Elle s'inquiète des faibles moyens dont disposent les
cégeps afin de rendre des comptes sur la qualité des services
offerts à la communauté québécoise. Elle constate
également que cette situation est intimement liée aux
problèmes déjà soulevés par elle et
soulignés dans le projet gouvernemental, concernant l'autonomie
tronquée des collèges.
Un Conseil des collèges
Afin de contribuer à résoudre les problèmes du
réseau collégial, le gouvernement propose la création d'un
Conseil des collèges analogue à celui des universités.
Déjà une première réserve s'impose sur les
termes de l'analogie. Il nous semble en effet que trois facteurs au moins
devraient empêcher que les rôles et les structures du Conseil des
collèges soient calqués sur ceux du Conseil des
universités. D'une part, les collèges regroupés en
fédération ont développé des compétences
dans plusieurs domaines et mis au point des mécanismes de concertation
efficaces. D'autre part, le rôle centralisateur joué par la
D.G.E.C. dans tous les secteurs d'activités du réseau conditionne
une autonomie très partielle des collèges en regard de celle des
universités. Enfin, d'autres forces sociales s'affrontent dans les
cégeps où le militantisme syndical est important. La dynamique
dans laquelle devrait s'insérer un Conseil des collèges est donc
très différente de celle qui existait lors de la création
du Conseil des universités et cela devrait commander une prudente
réserve, même au niveau des références.
Les rôles et fonctions
La multiplicité des rôles que l'on entend faire jouer au
Conseil des collèges et à ses commissions nous laisse perplexes.
Doit-il en même temps aviser et fournir des services? Quelques exemples
permettront de préciser notre pensée. Ainsi, on voit mal comment
un même organisme pourrait aviser le ministre en matière de
politique et de pratiques institutionnelles d'évaluation, et offrir, en
même temps, des services d'évaluation aux collèges. On peut
penser que les collèges ne recourront pas volontiers, pour se faire
aider en matière d'évaluation, à l'organisme chargé
d'analyser leurs politiques institutionnelles et de faire au ministre les
recommandations qui s'imposent.
La composition
La multiplicité des rôles que nous venons d'énoncer
devient encore plus incompréhensible lorsqu'on l'étudie en regard
de la composition suggérée.
À titre d'exemple, on comprend difficilement le rôle que
pourront jouer les représentants des collèges lorsqu'il s'agira
d'aviser les collèges sur des sujets obligatoires qui les concernent
immédiatement ou alors l'intérêt que peuvent avoir les
représentants du gouvernement à se conseiller eux-mêmes sur
ces sujets.
La réaction de la Fédération des
cégeps
Compte tenu des conclusions de la première partie de notre
argumentation, à savoir: la nécessité de
créer une instance consultative spécifique au niveau
collégial; la nécessité de
régénérer l'autonomie des collèges; la
nécessité de clarifier le partage des responsabilités dans
le réseau; la nécessité de créer un
contrepoids politique au centralisme bureaucratique;
La Fédération des cégeps accepte la création
d'un Conseil des collèges, exclusivement consultatif auprès du
ministre de l'Éducation.
Le modèle que propose la
Fédération des cégeps
La proposition qui suit constitue un tout qu'il faut mettre en rapport
avec les principes que nous avons affirmés plus haut. Elle ne saurait
être scindée ou utilisée de façon parcellaire
à des fins autres que celle de promouvoir la création d'un
Conseil des collèges selon le modèle suivant:
La mission Conseiller le ministre dans le
développement du réseau collégial. Les fonctions
Donner des avis sur les besoins de l'enseignement collégial et
recommander les mesures à prendre pour y répondre. Etudier
les besoins de l'enseignement collégial, en tenant compte des besoins
culturels, scientifiques, sociaux, et économiques du Québec,
aussi bien que des ressources humaines et matérielles et des effectifs
étudiants. Proposer les objectifs qui doivent être
poursuivis pour que soit assuré le développement de
l'enseignement collégial et les réviser périodiquement.
Suggérer les politiques de développement des programmes et
d'innovation pédagogique. Proposer les politiques
d'évaluation des établissements d'enseignement collégial
et de leurs pratiques institutionnelles. Proposer les lignes directrices
des plans quinquennaux d'investissements et les critères de
répartition des crédits. Procéder
périodiquement à l'évaluation de ses objectifs propres et
de son fonctionnement. On s'apercevra que dans l'ensemble ces fonctions sont
semblables à celles que propose le gouvernement. Nous ne saurions
toutefois trop insister sur la différence majeure que constitue à
notre avis le fait de confier au Conseil le rôle d'aviser le ministre sur
les politiques d'évaluation des établissements d'enseigrement
collégial et leurs pratiques institutionnelles.
La composition
La Fédération des cégeps considère que la
composition du Conseil devrait être différente de celle que
propose le gouvernement et être basée sur les principes suivants:
Affirmer la spécificité du niveau collégial
(exclusion des représentants des niveaux universitaire et secondaire).
Reconnaître la nécessité d'assurer une
représentation régionale. Reconnaître la
nécessité d'assurer la présence de gens impliqués
dans le développement économique, social et culturel du
Québec.
Les membres devraient être choisis en fonction des critères
suivants: Connaissance de l'évolution et de la
spécificité du réseau collégial.
Crédibilité et intégrité (éviter les
situations de conflit d'intérêts).
Les commissions
La création de deux commissions auprès du Conseil nous
semble susceptible de permettre le traitement approfondi de certaines
questions. Nous nous interrogeons toutefois sur l'opportunité de confier
à la commission d'évaluation le rôle d'aviser le Conseil
mais aussi les collèges sur les politiques institutionnelles
d'évaluation. Plus encore, nous nous opposons au fait que cette
commission assure aussi un service d'évaluation. Ne serait-il pas
préférable de créer un centre d'évaluation,
complètement indépendant du ministère, du Conseil des
collèges et des collèges eux-mêmes, et dont la tâche
serait de produire des instruments d'évaluation et d'aider à leur
utilisation.
La Fédération des cégeps pense que les commissions
doivent être exclusivement consultatives auprès du Conseil et
rester le lieu privilégié d'intervention des représentants
du réseau.
En conclusion
La Fédération des cégeps recommande de
réaménager et au besoin de transférer vers d'autres
instances certaines fonctions actuellement assumées par les directions
générales du ministère de l'Éducation, notamment
les fonctions consultatives et de service.
La Fédération des cégeps, en outre, recommande de
réviser le mandat du Conseil supérieur de l'éducation pour
en exclure ce qui a trait au développement spécifique du
réseau collégial.
LA LOI DES COLLÈGES Les limites aux pouvoirs
d'un collège
L'article 6 de la Loi des collèges se lit comme suit: "Un
collège est une corporation au sens du Code civil et il peut exercer
tous les pouvoirs en outre des pouvoirs spéciaux que lui confère
la présente loi."
En analysant de près cette loi, on se rend compte que les
articles subséquents ont pour effet de tronquer cette autonomie
affirmée en principe.
Ainsi, outre le fait que la création d'un collège se fait
par lettres patentes autorisées par le lieutenant-gouverneur en conseil,
les pouvoirs d'intervention du lieutenant-gouverneur en conseil ou du ministre
s'étendent sur tout le fonctionnement du collège, qu'il s'agisse
des biens immobiliers, de l'administration, des règlements internes, de
l'embauche du personnel, des conditions d'admission des étudiants ou de
la nomination des membres d'un conseil d'administration. De plus, la loi
confère aussi au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir d'imposer
des sanctions.
Les pouvoirs qualifiés de "spéciaux" que la loi
confère aux collèges ne peuvent, à l'exception de deux
(recevoir des dons et placer ses biens), être exercés qu'à
la suite de l'approbation du ministre de l'Éducation.
Finalement, les autres pouvoirs qu'un conseil d'administration peut
exercer et qui ne requièrent pas une autorisation préalable ou
une approbation ultérieure se limitent à la nomination du
directeur général, du directeur des services pédagogiques
et du président du conseil. Cela est insuffisant.
Compte tenu de cette analyse de la situation, la
Fédération des cégeps est heureuse de constater que le
projet de loi 25 n'apporte aucune modification à l'article 6 de la Loi
des collèges, et qu'en conséquence le principe de
décentralisation est maintenu. Elle souhaite toutefois que le
gouvernement l'applique de manière à ce que les collèges
puissent exercer réellement les pouvoirs qui leur sont
octroyés.
Le projet gouvernemental Le pouvoir des
corporations
La Fédération des cégeps s'étonne du fait
que les modifications proposées au chapitre des pouvoirs des
corporations sont loin d'orienter les collèges dans la voie de la
décentralisation préconisée par le gouvernement. Au
contraire, l'article 18, presque entièrement de droit nouveau, contribue
à allonger en la précisant la liste des domaines dans lesquels
peut intervenir le lieutenant-gouverneur en conseil. L'article 19, qui
précise les champs de réglementation d'un conseil
d'administration de collège, ne subit, lui, aucune modification, sinon
de concordance. Dans l'ensemble, le projet de loi accentue donc le partage
antérieur des responsabilités.
Inutile de parler ici des mesures d'allégement bureaucratique que
constituent les modifications à l'article 2. Parlons plutôt des
articles 26 et 28b qui, loin d'atténuer les menaces de tutelle comme le
promettait le Livre blanc, ajoutent sans les préciser des domaines au
sujet desquels un collège pourrait encourir des sanctions. Nous pensons
à cet égard que le lieutenant-gouverneur en conseil devrait
ouvrir une enquête au cours de laquelle le collège pourrait faire
connaître sa position, et ce, avant d'appliquer quelque sanction ou de
nommer un contrôleur des finances.
Plus particulièrement la Fédération des
cégeps recommande:
Que le ministre, avant de prendre des mesures exceptionnelles visant
à porter atteinte aux pouvoirs des collèges ou à les
suspendre, fasse enquête au cours de laquelle le collège fera
valoir sa position. Suite à cette enquête, s'il doit y avoir
suspension de pouvoirs, qu'un tuteur soit nommé.
En vertu du principe de décentralisation auquel souscrit le
gouvernement actuel, les corporations devraient jouir de tous les pouvoirs
nécessaires à la réalisation de leur mission. D'une
façon générale, elles devraient avoir un pouvoir de
réglementation pour la poursuite de leurs fins sans avoir à
obtenir une autorisation préalable ou à se soumettre à une
approbation ultérieure.
La Fédération des cégeps recommande donc:
Que les corporations que constituent les collèges soient
dotées d'un pouvoir de réglementation dont les seules limites
seraient celles qui sont propres à l'acte gouvernemental.
Les seules limites que devrait subir l'action de la corporation seraient
les pouvoirs dévolus au gouvernement en tant que tel dans le domaine des
finances ou dans celui des études. Ces deux domaines doivent faire
l'objet de réglementation de la part du ministre.
Le régime pédagogique
En ce qui concerne le régime pédagogique, les
recommandations que contient le projet gouvernemental sont pour nous l'objet
d'une grande préoccupation; aussi y consacrons-nous ailleurs une
étude plus complète. Qu'il nous soit permis cependant de
soumettre ici trois des idées-maîtresses qui ont inspiré
notre analyse.
Nous croyons d'abord que la loi doit reconnaître le droit
fondamental de tous les adultes à l'éducation. Cette mesure leur
faciliterait l'admission aux études collégiales en
démarginalisant la clientèle particulière qu'ils
constituent à l'heure actuelle.
De plus, nous pensons que le ministre devrait établir un
régime pédagogique ayant force de règlement des
études collégiales.
Enfin nous nous interrogeons sur les dangers que comporte la
détermination par le ministre d'un plus grand nombre de crédits
de concentration ou de spécialisation, comme sur l'augmentation du
nombre de cours obligatoires. Il ne faudrait pas, sous prétexte
d'assurer un savoir minimum commun, éliminer l'espace dans lequel
s'affirme l'existence propre du niveau collégial. En augmentant la
proportion de cours obligatoires, on risque en effet de le secondariser.
Le conseil d'administration
Alors que la Loi des collèges d'enseignement
général et professionnel prévoyait que le conseil
d'administration serait le lieu quasi unique de participation de toutes les
instances concernées du collège, d'autres lieux se sont
créés, avec les années, plus proches des niveaux de
préoccupation de ceux qui y participent. Ce sont notamment les
départements et les comités de relation de travail. En outre, le
syndicalisme s'est installé dans les nouvelles institutions et y a
introduit des revendications qui ne se situent pas seulement au niveau des
conditions de travail, mais aussi au niveau du "pouvoir
pédagogique".
La montée du pouvoir syndical a donc créé dans
l'exercice de la participation des conditions différentes de celles qui
existaient au moment de la création des cégeps, si bien qu'on
peut dire à présent que le conseil d'administration ne peut ni ne
doit être le lieu privilégié de la participation à
l'intérieur d'un collège. C'est un lieu de décision et de
gestion.
Se référant à la composition que propose le
gouvernement, la Fédération des cégeps s'interroge sur
l'érosion de la crédibilité accordée par celui-ci
aux conseils d'administration. Étant donné les pouvoirs qui
devraient lui être conférés, le conseil d'administration
d'un collège devrait, de par sa composition, être toujours en
mesure de donner priorité à l'intérêt collectif. Or
ce n'est pas l'addition des intérêts particuliers qui fait
l'intérêt collectif, mais bien la capacité qu'ont les
participants de distinguer ce qui, dans l'ensemble des éléments
d'un dossier, est de l'intérêt collectif. Il nous semble donc que,
contrairement au modèle préconisé par le projet
gouvernemental, un conseil d'administration constitué aux 2/3 de membres
de l'extérieur (socio-économiques et parents) garantirait
davantage toutes les dimensions qui découlent d'un tel souci.
La Fédération des cégeps recommande:
Que le conseil d'administration d'un collège soit composé
aux deux-tiers de membres de l'extérieur (socio-économiques et
parents).
Il s'agirait alors d'un conseil d'administration qui remplirait son
mandat dans un climat de confiance auprès du ministre de
l'Éducation et dont la crédibilité serait manifeste.
En outre, le conseil d'administration aurait l'obligation de rendre des
comptes au ministre de l'Éducation par la transmission d'un rapport
annuel qui préciserait la façon dont la corporation s'est
comportée au cours de l'année, le degré de
réalisation de ses objectifs ainsi que la qualité de cette
réalisation. Les éléments que devrait inclure ce rapport
annuel pourraient être recommandés au ministre par le Conseil des
collèges. La corporation ferait donc l'objet d'une évaluation
annuelle, selon des critères et des mécanismes
préétablis et dont l'objectivité serait incontestable.
Les principaux officiers
Dans la pratique, le rôle de premier officier exécutif de
la corporation doit être assumé par le directeur
général, ce qui exige de sa part une compétence
particulière et une disponibilité de tous les instants.
Par ailleurs, étant donné que les fonctions du
président du conseil d'administration se situent surtout dans l'exercice
de son pouvoir moral et que l'exercice d'un tel pouvoir exige une grande
crédibilité et un désintéressement personnel, le
président ne doit avoir aucun intérêt personnel ou
immédiat dans les décisions prises par le collège. Ceci
exige qu'il soit élu parmi les personnes extérieures au
collège.
La Fédération des cégeps recommande:
Que le président du conseil d'administration soit élu
parmi les personnes extérieures au collège.
Que les fonctions du président du conseil d'administration soient
définies par le conseil lui-même.
CONCLUSION
Une analyse systématique du réseau collégial nous a
montré la confusion qui existe entre les rôles des divers
intervenants et permis d'en analyser les conséquences sur le partage de
leurs responsabilités.
Prenant appui sur la volonté gouvernementale de créer un
Conseil des collèges, nous avons insisté sur la
nécessité de redéfinir, à cette occasion, le
partage des responsabilités entre les divers intervenants du
réseau collégial, de manière à permettre à
chacun d'assumer les fonctions qui lui conviennent.
Dans cette optique, nous avons recommandé la création d'un
Conseil des collèges exclusivement consultatif auprès du ministre
de l'Éducation, et dont la composition, différente de celle que
propose le gouvernement, refléterait un souci de
spécificité et de crédibilité.
Pour ce qui est de la Loi des collèges, nous avons pu constater
que le projet de loi 25 ne propose aucun correctif important aux
problèmes qui entravent le fonctionnement des cégeps. Nous avons
donc développé une argumentation, basée sur les principes
du rapport Parent, selon laquelle il faut, d'une part, modifier la loi de
façon à accroître l'autonomie des collèges, et,
d'autre part, assurer une crédibilité aux conseils
d'administration en augmentant la proportion des représentants des
milieux socio-économiques et des parents qui y siègent.