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(Onze heures vingt-quatre minutes)
Le Président (M. Rodrigue): La commission parlementaire de
l'Éducation est ouverte. Le mandat de cette commission est
d'étudier les crédits du ministère de
l'Éducation.
Les membres de cette commission sont: M. Brouillet (Chauveau), M.
Champagne (Mille-Îles), M. Chevrette (Joliette) remplacé par M.
Paré (Shefford), M. Cusano (Viau), M. de Bellefeuille (Oeux-Montagnes)
remplacé par M. Charbonneau (Verchères), Mme Dougherty
(Jacques-Cartier), M. Hains (Saint-Henri), M. Lalonde (Marquerite-Bourqeoys),
M. Laurin (Bourget), M. Leduc (Fabre), M. Paquette (Rosemont). Les intervenants
à cette commission sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. French
(Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), M. Paré (Shefford) qui est en
remplacement comme membre maintenant, M. Polak (Sainte-Anne), M. Proulx
(Saint-Jean), M. Rochefort (Gouin), M. Ryan (Argenteuil) et M. Saintonge
(Laprairie).
Est-ce que les ministériels ont une proposition pour la
nomination d'un rapporteur?
M. Charbonneau: Je proposerais M. Paquet (Rosemont).
Le Président (M. Rodrigue): M. Paquet (Rosemont) est
nommé rapporteur de la commission.
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Rodrigue): Sur la procédure
à suivre, nous avons quatorze programmes et chacun comporte plusieurs
éléments. On a plutôt dix programmes? Onze programmes.
Si vous le permettez, nous allons procéder à la discussion
de tous les éléments d'un programme à l'intérieur
d'une certaine période de temps que vous déterminerez
vous-même par le nombre de questions que vous poserez, et j'appellerai
l'adoption des programmes incluant chacun des éléments à
la fin de la discussion sur ce programme-là, plutôt que de
procéder élément par élément, parce qu'il
devient très difficile à ce moment de décider si
l'intervention porte vraiment sur l'élément 1,
l'élément 2 ou l'élément 3 du programme. Cela
entraîne des discussions interminables et on perd du temps inutilement
là-dessus. Est-ce que vous êtes d'accord sur cette
procédure afin que l'on procède programme par programme? La
discussion se fera sur l'ensemble du orogramme et quand on aura terminé
ce programme, on procédera à l'adoption de ses
éléments et du programme lui-même.
M. Lalonde: Oui, M. le Président. Cela m'apparaît
non seulement souple, mais conforme à la tradition. C'est ce qu'on a
toujours fait.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre, je vais vous
demander à ce moment-ci si vous voulez faire une intervention pour
lancer la discussion sur l'étude de vos crédits.
Remarques préliminaires M. Camille
Laurin
M. Laurin: Oui, M. le Président. Je salue d'abord les
collègues de la commission et je souhaite plein succès à
nos travaux.
M. le Président, chers collègues, les crédits
détaillés du ministère de l'Éducation que je
soumets aujourd'hui à l'examen de cette commission parlementaire sont
lourds de messages et de défis pour l'avenir de l'éducation au
Québec.
Ainsi que je l'indiquerai plus loin avec précision, ces
crédits reflètent une conjoncture nouvelle, aussi difficile que
stimulante, et dessinent des tâches énormes pour les agents de
notre système d'éducation.
Avant de décrire cette conjoncture, de traiter des
caractéristiques du présent budqet et d'énumérer
les principaux chantiers du ministère en 1981-1982, il me paraît
nécessaire de vous faire brièvement part des perspectives
éducatives et culturelles ou, si vous préférez, de la
vision de l'éducation dont j'entends m'inspirer pour guider mon action
et celle du ministère de l'Éducation.
Dès le début de nos travaux, je tiens à rappeler
que, derrière la masse impressionnante de tous ces proqrammes,
éléments de proqramme, activités, projets et sous-projets,
et leur donnant finalement sens et consistance, se profile et doit s'imposer
à nous l'image du personnage clé de toutes nos entreprises
éducatives: l'enfant, l'adolescent ou l'adulte enqaqé dans un
processus d'apprentissage et de développement personnel.
Je l'ai dit maintes fois au cours des
derniers mois, au coeur de toute conception et de toute pratique de
l'éducation qui ne se détournent pas de leur objet, il doit y
avoir un immense respect pour la personne humaine, son désir d'apprendre
et de se développer, sa soif de connaître, sa passion de vivre,
ses rythmes d'évolution, sa manière originale et toujours
imprévisible de se découvrir elle-même, en même temps
qu'elle découvre le monde et se l'approprie.
L'enfant - et il faut en dire autant de l'adolescent et de l'adulte en
processus d'apprentissage - n'est pas un réservoir que l'on remplit. Il
est bien plutôt un être qui, en découvrant le monde et en
apprenant à le nommer et à le maîtriser, renoue pour ainsi
dire avec sa nature profonde, qui est elle-même mémoire
d'humanité, capacité insatiable de connaître, d'aimer,
d'entrer en relation avec l'autre, capacité de qoûter aussi,
d'apprécier, de distinquer, de choisir, selon son élan ou ce
qu'on pourrait appeler sa pente irrépressible de liberté et
d'autonomie. (11 h 30)
Etre agent éducateur, c'est donc aller à la rencontre d'un
dynamisme déjà imprégné d'intelligence, de
désir, de liberté et même de projets. Bien sûr, tout
le monde sait que, même lorsque nous sommes tout disposé à
apprendre et à progresser, des obstacles nombreux se dressent devant
nous à commencer par ceux qui surqissent au-dedans de nous-même:
la paresse, la lassitude, la peur de l'effort, l'ennui nous guettent sans
cesse. C'est pour cela que l'apprentissaqe et donc l'acte éducatif est
aussi effort, discipline, rigueur, évaluation, ajustement constant,
parfois redressement. Mais éduquer, c'est toujours accompagner un sujet
qui est son propre aqent de développement et qui est finalement
responsable de sa propre croissance. Eduquer, c'est aider quelqu'un à
croître, voire à s'éduquer ou à s'élever
lui-même en créant les conditions favorables à un
cheminement de qualité.
On pensera peut-être que me voilà bien loin de ma
présentation des crédits du ministère de l'Education, mais
j'v suis en plein coeur - on l'aura parfaitement compris - car les efforts de
renouveau qui ont été entrepris au cours des dernières
années et que nous entendons poursuivre à l'aide des
crédits que nous sollicitons sont profondément enracinés
dans ce pour quoi et pour qui l'école existe, l'enfant, l'adolescent et
l'adulte en situation d'apprentissage. Ce que nos divers énoncés,
nos plans d'action ont mis de l'avant, c'est précisément cet
essentiel que constitue l'acte d'apprentissage et son correla indispensable,
l'acte pédagogique, lesquels rejoignent des réalités aussi
fondamentales que l'éveil de la vie, l'éveil à la vie,
l'éveil de l'intelliqence et de l'affectivité, la
découverte de soi et de l'autre, I'apprentissaqe de la vie sociale, la
formation de la conscience morale, le développement de
l'intériorité. Le renouvellement et l'humanisation des
institutions scolaires passent nécessairement par une prise en compte
plus fine des besoins et des capacités des personnes, par
l'amélioration de l'environnement éducatif, par la valorisation
de l'acte pédaqoqigue et des moyens qui en favorisent l'exercice, par
l'approfondissement des contenus et des méthodes d'apprentissage, par un
encadrement pédagogique adapté à l'âge et aux
besoins des élèves et des étudiants, par la mise sur pied
de services éducatifs personnels et collectifs de qualité, cela
même que visent nos grands programmes, et que nous avons voulu mettre au
service de l'essentiel, c'est-à-dire, la qualité et la pertinence
de la formation de base, son caractère fondamental, et je dirais
fondateur, son caractère intégrateur par rapport à tous
les apprentissaqes spécialisés. Cette éducation de
qualité, nous voulons aussi et plus que jamais qu'elle soit pleinement
accessible au plus grand nombre possible de citoyens. Telle est l'une des
visées les plus nettes de nos efforts des dernières années
que nous entendons, d'ailleurs, poursuivre avec détermination et en
accordant une attention spéciale aux plus démunis, ceux-là
même qui en ont justement le plus besoin.
Le projet de société que nous poursuivons s'inspire d'un
tel idéal démocratique articulé autour de valeurs et
d'objectifs qui ont noms égalité des chances, accès aux
biens économiques et culturels, promotion individuelle et collective,
qualité de la vie et de l'environnement socio-culturel aussi bien que
naturel, participation au savoir et à la création. Ce projet de
société est, à sa source et dans sa forme, un projet
fondamentalement éducatif. Dans leur essence même, la
démocratie visée est une démocratie culturelle et la
cité à bâtir, une cité éducative. La culture
est elle-même pédagoqie, n'est-ce pas? puisqu'elle est continuel
apprentissage des signes par lesquels nous comprenons et maîtrisons la
réalité, puisqu'elle est création de nouveaux signes,
puisqu'elle est lieu de communication entre les personnes, puisqu'elle est
toujours à apprendre et à enrichir tout à la fois le
discours, la mémoire et l'imaginaire d'une société.
Nos objectifs d'accessibilité et de démocratisation des
services éducatifs s'inspirent de cette vision des choses et
sous-tendent nos efforts de développement des ressources humaines, de
fondamentalisation des programmes de formation, d'amélioration et
d'évaluation de la qualité, de recherche et d'innovation
pédagogique; tous des objectifs que poursuivent les grands programmes
auxquels nous voulons affecter les deniers publics. Voilà qui indique
donc clairement où nous
entendons aller en matière d'éducation et voilà qui
inspirera l'ensemble de nos travaux des prochaines années.
Mais ce n'est pas en toute tranquillité d'esprit que nous
pourrons et devrons, en 1981-1982 et au cours des prochaines années,
poursuivre ces qrands objectifs de qualité et de démocratisation.
Ne maquillons pas la réalité. Avec la plupart des pays du monde,
nous entrons dans une ère d'austérité financière et
de contraintes économiques dont les coupures budqétaires que vous
savez ne représentent, en dépit de leur caractère
spectaculaire, que des symptômes et les premières
conséquences. Je parle de symptômes, parce que ces compressions
reflètent un contexte qénéral qui affecte l'ensemble des
secteurs d'activité et semble devoir marquer les années 1980. On
pressentait bien, depuis un certain nombre d'années, que les taux de
croissance des engagements publics ne pourraient pas indéfiniment
croître au rythme auquel nous avions fini par nous habituer. On sentait
bien aussi que les budqets publics, pas plus que les impôts et les
produits de la société industrielle, ne pourraient
connaître des croissances illimitées. Même si nous le
voulions, nous ne pourrions pas continuer à financer des expansions
aussi rapides de nos programmes de services publics, nous n'en avons tout
simplement pas les moyens.
Il va donc nous falloir, comme et après bien d'autres
sociétés, apprendre à gérer
l'austérité et, sans doute, avant longtemps, une certaine
décroissance. Tout indique même que cette austérité
qui frappe nos pratiques individuelles aussi bien que tous les niveaux
d'enseignement ne sera pas temporaire. Dans son discours inauqural du 19 mai
dernier, le premier ministre a vigoureusement décrit cette conjoncture
nouvelle. Parlant de réalisme courageux et de rigueur sans
précédent, il a rappelé que le temps des croissances tous
azimuts est révolu et qu'il nous faudra savoir choisir désormais
avec le plus grand soin chacun de nos programmes nouveaux.
Il faut dire qu'en ce qui concerne notre système
d'éducation, ces contraintes financières surviennent à un
moment rie son évolution qui était déjà, avec des
différences d'accent, selon les niveaux d'enseignement
considérés, sous le signe de la fin prochaine de la croissance,
de la stabilisation ou de la décroissance pure et simple. C'est dire
que, même sans la nouvelle conjoncture financière que nous
subissons, il nous aurait fallu faire le point, nous interroger sur la
manière de faire face à un contexte d'expansion limitée ou
de fin d'expansion. Il est clair que les développements des
années à venir ne pourront pas se comparer à ce que nous
avons connu. En somme, les contraintes financières ne viennent que
donner plus de force, plus d'urgence aux interrogations qui, de toute
façon, se seraient Dosées et se posaient déjà
à nous à ce moment-ci de l'évolution de notre
système d'éducation.
Ce n'est pas, faut-il le souligner, que notre système scolaire
soit démuni: ses ressources sont considérables et le niveau des
fonds publics qui lui est consenti reste relativement plus élevé
chez nous qu'en plusieurs États voisins. Ce n'est pas non plus que nous
devions renoncer à toute espèce de développement, encore
moins, selon le mot du premier ministre, rogner sur l'essentiel. Mais il devra
s'agir de développements plus qualitatifs, plus sélectifs, mieux
coordonnés, mieux équilibrés. Nous devrons
réévaluer nos activités, définir plus nettement nos
priorités, faire courageusement des choix plus clairs, enqaqer de
nouvelles collaborations. Nous devrons, comme je l'ai récemment
souliqné aux universités, faire encore plus et mieux, mais avec
des ressources qui ne croîtront plus au même rythme.
Il est passé le temps où la mise sur pied de nouvelles
activités, où l'énoncé de nouvelles orientations
entraînait nresque automatiquement l'injection de nouvelles ressources
financières dans notre système scolaire. Le gouvernement a donc
dû procéder à une compression qénérale des
dépenses publigues. Cela était devenu absolument
nécessaire. Le seul maintien des activités existantes aurait
entraîné une augmentation budgétaire de plus de 18%, alors
que la richesse collective ne s'accroît que de 11%. Tout comme il
était normal que les ministères ayant les budqets les plus
importants aient à assumer leur part de ces coupures, une part qui, en
chiffres absolus, est forcément lourde, mais qui, dans le cas du
ministère de l'Éducation, a été proportionnellement
moins lourde, c'est-à-dire 14%, que ce qu'aurait pu entraîner la
part de l'éducation dans le budget global de l'État,
c'est-à-dire environ 30%.
Le budget de l'Éducation a effectivement subi des compressions
ou, selon le mot qui fera époque, des coupures. Il y a coupures et
coupures, car ce serait tomber dans la démagogie que de passer sous
silence le fait que le budget de l'Éducation connaît en 1981-1982
une croissance de 13,7% par rapport à celui de 1980-1981. Ce n'est donc
pas jeu de mots que de parler de croissance limitée, une croissance gui
est d'ailleurs plus élevée que celle que connaissent les budgets
d'éducation de la plupart de nos voisins. Cependant, je ne serai pas
démagogue à mon tour et ne vous cacherai pas que, selon des
programmes et compte tenu du taux élevé d'inflation, il y a
effectivement eu des coupures et que certaines d'entre elles feront mal. Je ne
vous dirai même pas que leur à-propos est toujours hors de tout
doute. Mais nous avons tout fait pour éviter le pire et, dans toute la
mesure du possible, pour protéger l'essentiel des orientations et
des
mesures que j'ai rappelées tout à l'heure devant vous. Je
suis même convaincu que, dans l'ensemble, nous avons réussi
à continuer l'implantation, mais une implantation moins rapide que nous
l'aurions souhaité, des grandes pièces du renouveau entrepris.
Nous avons maintenu nos objectifs d'accessibilité et de
démocratisation des services, de même que les qrandes
stratéqies mises de l'avant dans nos énoncés des
dernières années.
Ces opérations de compression - je tiens aussi à le dire
ici - nous auront cruellement fait toucher du doigt les limites qu'imposent
à nos décisions les règles et les conventions que nous
nous sommes collectivement données. Pour tout dire, même si nous
avons réussi à éviter le pire, nous n'avons pas vraiment
eu le choix des objets de compression. Nous avons coupé là
où il était techniquement possible de le faire,
c'est-à-dire dans des éléments de programme dont les modes
de financement ne sont pas intouchables et dans les subventions de base ou
qénérales dont les organismes scolaires ont l'entière
responsabilité de gestion.
Nous constatons que les règles du jeu que nous nous sommes
fixées limitent singulièrement la marge de manoeuvre du
gouvernement, lors même que celui-ci pourrait vouloir réaliser des
actions souhaitées par la majorité de la population. Je vous le
disais dès le départ, ce budget de 1981-1982, surtout si on le
replace dans le contexte nouveau gui se dessine pour les années
quatre-vingt, convie, de lui-même, tous les agents de l'éducation
à déployer des habiletés et des attitudes gue les
situations antérieures de croissance accélérée
n'ont pas exigées avec la même acuité ou la même
urqence.
Il leur faudra et il nous faudra faire preuve d'imagination, de
créativité, de sens de l'innovation pour utiliser avec
intelligence et discernement des ressources dont la masse ne croîtra plus
au rythme gue nous avons connu. Il nous faudra exercer notre sens des
priorités et notre attachement à l'essentiel. Il faudra
nécessairement gue nous entreprenions d'accroître la
productivité et l'efficience de nos ressources et de nos
activités. Par-dessus tout, il faudra que nous consentions à
subordonner nos analyses et nos choix aux impératifs du progrès
de l'apprentissage et de la pédagogie et que nous soyons de plus en plus
animés par ce que j'ai appelé ailleurs une commune passion de
l'enfant et de la personne en situation d'apprentissage. (11 h 45)
Je suis de plus en plus porté à penser que nous ne
pourrons pas esquiver certaines interrogations sur le contenu, le style et la
portée des conventions collectives gue nous avons signées et de
celles que nous préparerons bientôt. Chacun sait, n'est-ce-pas,
gue ces conventions déterminent la guasi-totalité des budgets de
l'Éducation et gue les ajustements budgétaires auxquels il
pourrait être juqé opportun ou nécessaire de
procéder, ne représentent finalement, en regard des masses
monétaires globales de l'éducation, qu'une infime partie et qu'un
bien fraqile instrument d'action.
Ce sont, évidemment, les coûts de système qui sont
lourds et ces coûts de système nous échappent
littéralement à tous. Je voudrais bien qu'on ne me
soupçonne pas de brandir ici, à quelques mois des prochaines
négociations des secteurs publics et parapublics, quelque menace que ce
soit, encore moins de remettre en cause des ententes que nous avons conclues de
bonne foi. Comme citoyen, comme éducateur, comme ministre responsable,
je ne fais que dire tout haut ce qu'un nombre croissant de citoyens pensent et
commencent à exprimer, c'est-à-dire que nos conventions
collectives, ou du moins certaines de leurs clauses, n'ont peut-être pas
toute la souplesse qu'exiqerait, surtout en ces temps difficiles, la mise en
oeuvre d'un renouveau pédaqogigue et la poursuite d'objectifs plus fins
et plus différenciés de démocratisation,
d'accessibilité et de personnalisation des services éducatifs.
Dans certaines de leurs clauses, nos conventions protégeraient-elles
plus scrupuleusement des intérêts corporatistes gue la
qualité de l'enseignement? Et le développement des
élèves et des étudiants? Ces questions sont difficiles,
j'en conviens, mais nous devrons accepter de les prendre collectivement en
considération. J'invite d'ailleurs tous les partenaires de
l'éducation à y réfléchir, à en discuter et
à chercher des solutions. Il serait néfaste, pour notre
système d'éducation et pour ses usagers, que chaque année
de la prochaine décennie, nous soyons contraints de faire des
compressions budgétaires sans avoir vraiment le choix de les exercer
là où il serait mieux indiqué et moins dommageable de le
faire et sans avoir de prise sur la base même d'un système devenu
trop coûteux.
C'est dans ce contexte de discernement de l'essentiel et d'accroissement
de la productivité ou de la fécondité gue le
ministère de l'Éducation entreprend sa prochaine année de
travail. Un contexte difficile, mais encore riche de chantiers nouveaux
à explorer, à approfondir et à mener à terme. Ces
chantiers importants, j'aurai l'occasion, au moment de présenter chacun
des grands programmes du ministère, d'en souligner les principaux
éléments, mais il me paraît utile d'en dire ici quelgues
mots, surtout que plusieurs d'entre eux débordent du cadre d'un
programme particulier et exigeront d'intenses collaborations intersectorielles.
Au surplus, d'en traiter ici brièvement, cela permettra
de constater combien nombreuses sont les tâches que sollicitent
les agents de l'éducation, combien aussi il sera exigeant de devoir
penser le développement dans un contexte d'austérité sans
identifier développement et expansion.
La prochaine année sera d'abord capitale pour la mise en oeuvre
des régimes pédagogiques de notre système public. Au
préscolaire, au primaire et au secondaire, ces régimes ont
été récemment promulgués et l'année qui
vient devra en voir les premières phases d'implantation. Nul besoin de
vous dire que j'attache la plus qrande importance à cette implantation
puisque c'est là que se joue l'avenir des orientations de l'école
québécoise.
Au collégial, la consultation et la réflexion se
poursuivront avec intensité autour du projet de règlement des
études. Là encore, il s'agit d'enjeux extrêmement
importants gui sont au coeur du renouveau mis de l'avant dans les
collèges du Québec. Nous travaillerons avec diligence à ce
dossier en essayant de tirer le meilleur parti des thèses qui
s'affrontent actuellement, notre souci majeur étant ici de favoriser au
mieux la valorisation de l'essentiel dont nous avons fait le pivot de nos
énoncés et de nos plans d'action.
Dans les deux cas, le ministère continuera, de concert avec les
partenaires de nos réseaux scolaires, de viser à
l'amélioration de la qualité des apprentissages et de la
pédagogie.
Deuxièmement, la prochaine année sera également
déterminante pour l'avenir de la formation professionnelle des jeunes au
Québec. À tous ceux qui nourrissent des attentes à ce
sujet, je tiens à dire que ce dossier de la formation professionnelle me
tient particulièrement à coeur.
Riches des enseignements tirés des points de vue
déjà exprimés et des orientations que nous avons mises de
l'avant dans nos politiques récentes en matière
d'éducation et de culture, nous devrions être en mesure, au cours
de l'automne 1981, de soumettre certaines orientations et certaines mesures
à la consultation des intéressés.
Si les réactions sont positives, nous ne tarderons pas à
passer ensuite aux actes. Je m'y engage personnellement. Il y a là des
enjeux pédagogiques, culturels, sociaux et économiques trop
importants pour que nous acceptions de reporter indûment les
décisions qui s'imposent.
Troisièmement, ainsi que j'en ai maintes fois parlé au
cours des derniers mois, l'année qui vient devrait marquer une
étape importante en tout ce qui touche aux droits des étudiants
et à la condition de vie étudiante, aussi bien en ce qui concerne
les services éducatifs complémentaires qu'en ce qui concerne
l'organisation collective des étudiants et leur participation à
la vie des institutions qu'ils fréquentent.
Plusieurs actions ont déjà été
enclenchées au cours des derniers mois à tous les niveaux du
système scolaire pour assurer à tous des services
éducatifs de qualité, comme aussi pour établir des
conditions propices à la qualité de la vie étudiante dans
les écoles, dans les collèges et dans les universités.
Nous continuerons dans le même sens. L'intérêt grandissant
que les étudiants eux-mêmes manifestent en ces matières me
confirme chaque jour davantaqe dans ma conviction gu'il y a là des
enjeux réels et importants pour l'avenir.
Quatrièmement, c'est au cours de la prochaine année que la
commission Jean déposera son rapport final. Les hypothèses
provisoires de la commission ont déjà été
abondamment commentées et discutées et nul doute qu'il devrait
sortir de tous ces échanges des propositions importantes pour l'avenir
de l'éducation des adultes. Sans doute aussi pour celui de
l'éducation permanente. Le ministère suit de près ces
travaux et c'est dans un esprit d'ouverture et de perméabilité
qu'il se dispose à recevoir le rapport final de la commission. Je ne
vous cacherai pas l'immense intérêt que je porte personnellement
à ces questions si vitales pour la promotion des personnes et pour le
développement culturel, social et économique de notre
collectivité.
Cinquièmement, au cours de la prochaine année, je compte
faire franchir de nouveaux pas au dossier de la formation et du
perfectionnement des maîtres. En mars dernier, j'ai fait connaître
les orientations que j'entendais privilégier. Il reste maintenant
à déterminer, à la faveur d'ateliers de travail qui
doivent être tenus au cours de l'automne, certaines modalités de
mise en oeuvre.
Dans une perspective de valorisation de l'activité
pédagogique et dans un contexte de réduction des effectifs, je
n'ai pas besoin d'insister sur l'importance de ce dossier. J'ai
déjà dit aux enseignants ma très haute estime pour les
fonctions qu'ils exercent, je la leur redit ici, en même temps que mon
souci de trouver avec eux les moyens d'accroître la qualité de nos
pratiques pédaqoqiques et de promouvoir leur fierté d'exercer ce
que je considère toujours, même après plusieurs
années d'abandon forcé des tâches d'enseignement, comme le
plus beau métier du monde.
En sixième lieu, nous continuerons au cours de la prochaine
année de travailler à l'élaboration et à la mise au
point de pratiques plus articulées d'évaluation
pédagogique et administrative. Aux différents niveaux du
système scolaire, des gestes ont été posés et des
processus d'implantation ont sans doute été solidement
amorcés. Mais notre recherche globale de qualité et de
discernement de l'essentiel nous invite tout
naturellement à essayer de formuler une approche
générale qui, dans le respect des particularités de chaque
réseau du système, s'applique à traduire des
préoccupations et des perspectives communes. Nous nous y emploierons
activement au cours de l'année qui vient.
Septièmement, je compte accélérer au cours des
prochains mois l'examen de notre carte scolaire. En ces temps de croissance
limitée et de dures contraintes financières, il nous faut tout
faire pour utiliser nos ressources au maximum, pour rationaliser et coordonner
nos investissements, pour répartir judicieusement et
équitablement les services éducatifs sur l'ensemble du
territoire, pour supprimer les dédoublements, pour alléger les
processus, pour réduire les bureaucraties. J'ai déjà
signifié aux universités, notamment celles de la réqion
métropolitaine, que nous devrons nous pencher ensemble sur cette
question épineuse et lourde de conséquences. Mais c'est pour tous
les réseaux que nous devrons entreprendre ces examens. Il nous faudra
rationaliser notre répartition des proqrammes d'enseignement
collégial, mieux coordonner nos multiples engagements en
éducation des adultes, consolider la présence des écoles
primaires et secondaires au sein de leur communauté d'appartenance. I! y
a là un chantier vaste et complexe dont chacun comprendra
aisément l'importance aussi bien pour la qestion des fonds publics que
pour la qualité de vie des citoyens et la démocratisation de
l'enseignement. C'est un travail de plusieurs années, mais je compte lui
donner sans tarder une impulsion décisive.
Huitièmement, dans le prolongement de la politique
québécoise de recherche scientifique que j'ai
élaborée et présentée au nom du gouvernement, je
vous informe qu'au cours de 1981-1982, le ministère sera en mesure de
soumettre à la discussion un projet de politique de la recherche en
éducation. L'importance de la recherche pour la santé et le
développement de notre système scolaire, notamment pour
l'approfondissement de la pédagogie et pour l'amélioration de la
formation et du perfectionnement des maîtres, donne beaucoup de poids aux
orientations que nous aurons à prendre. Vous comprendrez que j'y accorde
une attention particulière.
En neuvième lieu, je vous rappelle qu'au cours de la prochaine
année, le gouvernement du Ouébec aura à néqocier
avec le gouvernement fédéral le renouvellement des accords
fiscaux relatifs à l'enseignement postsecondaire. Inutile d'insister ici
sur l'importance des enjeux financiers, culturels et politiques de ces grandes
rondes de discussion. En concertation étroite avec mes collègues
concernés, en particulier avec le ministre des Finances et le ministre
des Affaires intergouvernementales, j'entends m'engager intensément dans
ces travaux.
Enfin, il est un dossier sectoriel que je tiens à mentionner ici
parce qu'il constitue une nouvelle pièce majeure de nos entreprises de
renouveau de l'ensemble du système scolaire. Je veux parler de la
politique des universités. J'ai déjà formulé
l'essentiel d'une telle politique, mais, à la lumière des
discussions prévues pour l'automne, je compte identifier, en
concertation avec les milieux universitaires, les moyens appropriés d'y
donner suite.
J'arrête ici ma première liste de projets pour la prochaine
année. Ils sont nombreux, comme vous pouvez le constater, mais il faut
bien que ces ministères qu'on qualifie de ministères monstres
aient des menus adaptés à leur taille. Malqré le nombre et
l'ampleur des tâches, je tiens à vous dire que nous demeurerons
réalistes et modestes. Bien sûr, parce que les temps nous y
obligent, mais aussi parce que nous n'avons pas la prétention d'avoir
les solutions à tous les problèmes non plus que de savoir avec
certitude comment traverser les orages actuels et à venir sans
compromettre l'avenir, par-dessus tout parce que c'est dans la constance et le
courage et non dans la présomption et la fanfaronnade que l'on arrive
à discerner l'essentiel. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): Alors, madame et messieurs les
membres de la commission, avant de permettre au représentant de
l'Opposition de faire son intervention préliminaire, j'aimerais vous
signaler que le programme 10, Organisation et réqlementation des
professions, n'est pas soumis à l'étude de la présente
commission ayant été soumis à une autre commission. C'est
donc de dix programmes que nous aurons à disposer et non pas de onze
comme je l'ai signalé au début. 0 2 heures)
M. Lalonde: Vous avez bien raison.
Le Président (M. Rodrigue): M. le représentant de
l'Opposition.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais, avant d'exprimer
certaines observations en réaction, ou en réponse, ou en
écho aux notes du ministre, l'accueillir comme nouveau ministre de
l'Éducation au Québec. C'est la première fois en effet
qu'il a à présenter, à l'occasion de l'étude de ses
crédits, sa conception de la mission qui lui a été
confiée et, à ce titre, l'Opposition lui souhaite les meilleurs
succès dans la tâche difficile qu'il a accepté
d'entreprendre. De notre côté, nous avons, à l'occasion de
l'élection de nouveaux membres de l'Opposition officielle,
restructuré notre
façon de travailler et, en ce qui concerne l'éducation, on
m'en a confié la mission dans l'Opposition. Nous avons le
privilège d'avoir avec nous pour travailler, pour offrir notre
collaboration au gouvernement, des nouveaux députés qui sont
tous, gui ont tous été - je devrais dire toutes aussi - à
un titre ou à un autre, impliqués, mais très
profondément, dans l'éducation à divers niveaux.
C'est ainsi que le député de Viger, non, de Viau, - je
m'excuse, c'est parce que je travaillais avec le député de Viger
avant-hier - sera responsable plus particulièrement, pour l'Opposition
officielle, des secteurs primaires et secondaires, catholiques anqlophones; le
député de Saint-Henri - on va les apprendre un jour, M. le
Président - sera responsable plus particulièrement des secteurs
primaires et secondaires francophones catholiques, et Mme la
députée de Jacques-Cartier - c'est bien ça - sera
responsable, dans l'Opposition, des secteurs primaires et secondaires
protestants. Le député de Westmount aura une préoccupation
plus immédiate à l'éqard du réseau collégial
et des universités.
Nous sommes donc bien préparés à aider le
gouvernement à relever les défis nombreux qui s'offrent à
lui au début de ce nouveau mandat.
Le ministre a défini sa mission, c'était la
première occasion, je pense, dans cette assemblée, de le faire
d'une façon aussi élaborée. Inutile de dire gue lorsgu'il
situe l'enfant ou la personne en apprentissage, comme au centre de ses
préoccupations, il trouvera aussi longtemps qu'il le fera, un accord
complet de la part de l'Opposition officielle; il n'y aura pas de
désaccord, au contraire. À cet égard, nous allons, avec
lui, au cours de l'étude de ses premiers crédits, tenter
justement d'identifier guels sont les moyens, pour le gouvernement, d'atteindre
le plus haut degré de perfection dans cette tâche, d'amener soit
l'enfant, soit l'adolescent ou la personne en apprentissage gui recouvre, qui
comprend, j'en suis sûr, dans l'esprit du ministre, tous les adultes -on
ne peut pas oublier l'important secteur de l'éducation des adultes -
tous ces qens à un plus grand degré de perfectionnement
individuel. Ces moyens sont malheureusement de plus en plus complexes et aussi
difficiles.
Nous allons poser un certain nombre de guestions au ministre concernant,
par exemple, le régime pédagogique. Il a effleuré cette
importante réforme guand il l'annonçait comme étant un
retour à l'essentiel, il y a quelques mois. Beaucoup de
Québécois ont été impressionnés non pas par
son contenu, qu'on ne connaissait pas encore, mais par son importance. Un
certain scepticisme s'est dessiné dans certains quartiers, y compris
dans la presse, mais c'est souvent de bon aloi.
L'aide financière aux étudiants fera l'objet d'une grande
préoccupation de la part de l'Opposition. On a posé une question
ce matin à l'Assemblée nationale. On a appris -j'en étais
déjà sûr - gue cela fait aussi l'objet de
préoccupations de la part des députés ministériels.
Ils vont trouver chez nous une sympathie complète.
L'enseignement des lanques secondes est un sujet qui nous
préoccupe. La restructuration scolaire semble avoir été
escamotée jusqu'à maintenant par ce gouvernement, en incluant le
précédent, c'est-à-dire dans son premier mandat, et
apparemment aurait fait l'objet d'un rapport ou d'une étude que le
ministre aurait reçu, si on en croit les journaux ou les autres sources
d'information. Il pourrait clarifier la situation là-dessus.
L'enseignement sexuel fera l'objet aussi de guestions, non pas à
cause de son caractère sensationnel ou controversé, mais nous
voulons nous intéresser à ce problème avec tout le
sérieux gu'il exige.
La loi 71, où en sommes-nous avec la réforme gu'elle
contenait? L'enseignement des sciences, qu'en est-il? Il semble gue le bilan
soit très modeste, sinon négatif. Le tragigue bilan de l'abandon
scolaire nous inguiète au plus haut point, surtout lorsgu'on doit
s'imposer dans un secteur aussi important, aussi vital gue l'éducation
en soi et, permettons-nous de le penser, pour les Québécois
formant une minorité linguistigue, guant à la majorité
d'entre eux, et aussi pour les autres gui font partie des minorités
linguistiques.
L'éducation a toujours été ce bien précieux
sur lequel nous avons fait reposer une grande partie de l'avenir qu'on voulait
pour les nôtres. Lorsqu'on est obliqé d'imposer des mesures
d'austérité, comme on le voit actuellement depuis un an, et qu'en
même temps on a un phénomène d'abandon scolaire aussi grave
dont le ministre, j'en suis convaincu, est conscient, si j'en crois ce qu'il a
écrit lors de la publication d'un cahier, nous aimerions savoir ce qu'il
entend faire de concret à cet égard.
Nous venons de connaître encore un "phénomène
démocratigue" gu'on appelle les élections scolaires. Petite
amélioration, d'après ce gu'on entend dire, de 25% à 28%
de participation. Cela soulève tout le problème de l'avenir des
commissions scolaires, comme partenaire, comme agent extrêmement
important dans la mission de l'éducation au Québec. Qu'est-ce que
le ministre en pense et quels sont ses projets à ce sujet?
L'intégration scolaire des déficients nous
intéresse au plus haut point. C'est une entreprise, un objectif
difficile à atteindre, qui présente beaucoup d'écueils. On
aura d'ailleurs, je pense, par le biais de l'exercice que nous allons nous
imposer ce soir, lorsque
nous entendrons les représentants de certaines institutions
privées, qui sont spécialisées justement dans
l'éducation des inadaptés, la chance d'apprendre peut-être
quels sont les problèmes que comporte cet objectif ou enfin cet exercice
d'intégrer les déficients dans les classes.
Quant à l'enseignement professionnel, le ministre nous a
assurés de sa plus grande préoccupation à cet
éqard. Nous aimerions avoir un peu plus de précisions quant
à l'état de la réflexion du gouvernement. C'est un
secteur, comme il le sait, qui a toujours été en crise, c'est
peut-être un peu fort, mais en état d'effervescence, et il ne
semble pas qu'on ait trouvé la formule qui permette d'atteindre les
objectifs qu'on s'est donnés il y a quand même plusieurs
années.
J'étais content d'entendre le ministre parler des conventions
collectives à négocier et je suis sûr, c'est de cette
manière que je l'ai entendu, que je l'ai compris, qu'il ne s'agissait
pas de menaces, comme le ministre d'ailleurs nous a bien mis en garde de le
penser, mais combien elles sont importantes, lorsqu'on sait qu'une des
contraintes, la principale contrainte peut-être ou enfin en ordre de
qrandeur sûrement, qui force le gouvernement a faire des coupures dans
des secteurs aussi précieux que l'éducation des adultes, les
étudiants, vient du fait que, parmi les 13,7% d'augmentation, les
conventions collectives constituent un facteur majeur. Si nous voulons pouvoir
gérer l'austérité, comme le ministre nous invite à
le faire dans l'avenir, il faudra commencer par obtenir un peu plus de
liberté ou de marge de manoeuvre, comme on l'appelle, au
qouvernement.
Nous invitons le ministre à nous dire très franchement -
nous allons lui offrir notre collaboration la plus entière à ce
sujet quels sont les objectifs qu'il entend poursuivre, quelles sont les
contraintes, comment il conçoit, autrement dit, que les conventions
collectives à négocier puissent lui permettre, comme principal
responsable de l'éducation au Québec, de faire les choix,
d'établir les priorités dans le sens d'une plus grande
qualité de l'enseignement, d'une plus grande accessibilité et je
voudrais le citer, une plus grande démocratisation, une plus grande
personnalisation, et j'en passe. (12 h 15)
Nous aimerions qu'il nous dise de façon un peu plus
précise, sans naturellement commencer à faire les
négociations ici, ce n'est pas le forum et nous n'avons pas les pouvoirs
de le faire, mais c'est important que le ministre de l'Éducation fasse
connaître à tous, y compris les députés, quel est le
cadre qu'il aimerait voir présider à ces négociations
où enfin quels sont les objectifs qu'il aimerait voir réaliser
une fois les négociations terminées.
J'ai parlé de l'éducation des adultes, en effet, surtout
dans le cadre des coupures, nous allons poser un certain nombre de guestions
là-dessus. Au collégial, c'est le projet de règlement qui
fait l'objet des préoccupations à bon droit. Il semble qu'on ait
retardé sa publication et son adoption finale à cause d'un
certain nombre d'objections du milieu. Nous espérons que le qouvernement
trouvera la juste mesure afin d'obtenir les objectifs qu'il poursuit.
En ce gui concerne les universités, toutefois, je pense que la
formation et le perfectionnement des maîtres, auquel le ministre s'est
adressé, n'est pas le seul défi qui attend le ministre dans
l'année qui s'en vient. On sait que le rapport Angers n'a pas
reçu de réactions complètes et articulées de la
part du qouvernement. On attend depuis quoi, un an et demi? est-ce qu'il n'a
pas été déposé en juin? deux ans
déjà, ce que le gouvernement entend faire à la suite de
recommandations de la commission d'étude sur les universités qui
s'est quand même imposé un travail très sérieux,
très exiqeant et qui mérite de dépasser le stade de la
réflexion au bout de deux ans de la part du gouvernement. Mais
malheureusement, pour le ministre, on ne choisit pas naturellement toutes ces
conditions lorsqu'on accepte un défi, comme il l'a fait.
Malheureusement, c'est dans un climat morose, il l'a dit, de coupures
qu'il entreprend son mandat. Il nous a invités à gérer
l'austérité, à faire preuve d'imagination, de
créativité, sans doute, mais le plus grand reproche que nous
faisons - ne s'adresse pas au ministre seulement, il a sûrement une part
de responsabilité, mais il arrivait lorsque l'exercice a
été entrepris au gouvernement - justement c'est de n'avoir pas su
gérer cette austérité. Nous et tout le monde avons vu
venir cette situation de décroissance, peut-être pas encore, mais
enfin, d'absence de croissance au moins, nous l'avons vue venir, on s'en
souvient lors du premier déficit qui frisait le milliard mais qui avait
fait l'objet de certains discours politiques en 1976, davantage en 1978 et que
dire des déficits de 1979-1980 alors que le qouvernement devait, ou
croyait devoir accepter d'endetter les Québécois pour combien de
générations jusqu'à concurrence de 10 000 000 000 % en
cinq ans! Est-ce qu'il n'y avait pas là un cri d'alarme? II me semble
que oui, que le gouvernement aurait dû savoir à ce
moment-là et planifier la décroissance, d'abord analyser ces
investissements de nos ressources collectives, je parle plus
particulièrement de l'éducation, mais par voie de
conséquence, cela comprend son action.
Il aurait dû faire l'analyse justement de ces coûts.
Où va exactement le dollar investi par le Québécois, la
Québécoise, en matière d'éducation, le dollar qu'il
confie au qouvernement? Est-ce gu'on s'est déjà imposé
cette analyse? Il est grand temps que le gouvernement le fasse, que le
ministère de l'Éducation le fasse. Cela aurait dû
être fait. C'est facile à dire, mais c'est vrai. Il me semble que,
faute de cette analyse - coûts et bénéfices - et de la
planification de la décroissance qui exiqe une grande consultation,
quand on connaît la structure que nous avons, surtout chez nous, avec les
commissions scolaires et tous les autres agents, faute donc de cette analyse et
de cette planification, nous voyons un gouvernement recourir à
l'improvisation et à une certaine panique.
Le ministre n'a-t-il pas dit tout à l'heure - et si j'ai mal
interprété ses propos, il pourra me corriqer plus tard - que le
gouvernement a tenté d'éviter le pire? Quand est-ce gu'on
évite le pire? C'est justement dans ce temps-là qu'on prend des
décisions de panique.
Il a aussi dit qu'on a fait les coupures là où
c'était techniquement possible de le faire. Mais quel aveu! Quel aveu
d'improvisation! Cela me fait penser, lorsque le ministre des Finances dit:
Nous avons coupé dans le gras. Mais le gras, est-ce que c'est parce
qu'il y a des gros chiffres à côté? Est-ce que parce qu'on
investit des milliards de dollars dans l'éducation, qui est une mission
absolument fondamentale pour un gouvernement, qui est le métier le plus
noble des hommes et des femmes, est-ce que c'est cela, le gras ou si c'est le
programme de 100 000 000 $ ou même de 25 000 000 $ de publicité
gouvernementale, ou...? Enfin, Je ne veux pas commencer de débat
politigue ici.
Il me semble que lorsqu'on avoue avoir coupé dans ce qui
était techniquement possible de le faire, parce qu'il s'agit de
transfert, qu'on a simplement enlevé 200 000 000 $ et tant pis pour les
agents qui sont obligés de vivre avec, c'est qu'on fait un aveu
d'improvisation; on est allé au plus commode, on a manqué
d'imagination et de créativité, M. le ministre. On n'a pas
géré l'austérité de la part du gouvernement depuis
trois ans.
Et c'est pour cette raison. Croyez bien, il faut s'entendre
là-dessus, que l'Opposition sait très bien que le gouvernement ne
peut pas continuer à dépenser cmme on le faisait, il y a dix ans.
On sait très bien que le gouvernement du Québec ne peut compter
actuellement que sur une croissance quasi automatique, qui était presque
devenue une seconde culture chez nous, au point qu'on la tenait pour acquise,
la croissance. Cela, on en est conscient. On sait que la clientèle
scolaire diminue. Tout le monde sait cela. Donc, nous ne sommes pas, d'un
côté, pour vous reprocher des déficits, et vous dire, de
l'autre côté: Vous ne devez pas couper.
Mais ce qui aurait dû être fait, c'est la planification de
la décroissance, décroissance des investissements du gouvernement
en matière d'éducation. C'est un reproche que nous faisons au
gouvernement et ce sont des questions que nous posons au ministre en
particulier. C'est la raison pour laquelle nous allons poser des questions, sur
les coupures sans aucune gêne. Nous allons demander au ministre - quoique
maintenant, je crains d'avoir eu la réponse - quelles sont les raisons -
parce que j'espère que c'est autre chose que "techniquement possible de
le faire" - qui ont amené à couper à tel endroit
plutôt qu'à tel autre. J'espère que le ministre pourra nous
faire part du raisonnement qui a été fait par lui-même et
ses collèques depuis le mois - on parle de presque sept, huit mois
maintenant, cela se prépare en septembre, octobre, novembre, les
budgets, si c'est comme avant - alors, quel raisonnement a été
fait, quels sont les critères des décisions qui ont
été prises?
En terminant, M. le Président, le ministre a empreint ses notes
ou ses observations d'un certain lyrisme.
Malheureusement, au moment de la définition des grands objectifs,
ce lyrisme trouvait un écho parfait chez nous, mais il s'est rapidement
buté aux dures réalités de la vie et des défis gui
se présentent à lui.
Pour le Parti libéral du Québec, et je n'ai pas un
plaidoyer très éloquent à faire, je pense que l'histoire,
et la plus récente, en témoigne, pour le Parti libéral du
Québec, l'éducation est sûrement à la tête des
préoccupations, des objectifs de la raison d'être même d'un
gouvernement. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles nos
réactions sont les moins partisanes en éducation que dans
d'autres domaines; nous savons que nous poursuivons les mêmes objectifs,
nous nous distinguons de temps à autre en ce gui concerne les moyens de
faire, mais vous trouverez toujours, M. le ministre, chez nous la collaboration
la plus totale lorsque nous serons convaincus que vos décisions sont
dans le sens de l'intérêt des Québécois qui
méritent, en éducation, plus particulièrement, le meilleur
qu'un gouvernement peut lui donner. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): J'appelle maintenant
l'étude des programmes. Je pense qu'il y a effectivement... Est-ce pour
des remarques préliminaires?
M. Paquette: M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président, d'habitude, cela se passait,
ainsi: le ministre réaqissait peut-être aux questions que
l'Opposition posait, et mes collègues aussi en
général.
M. Gilbert Paquette M. Paquette: On pourra passer à
l'étude
des programmes par la suite, M. le Président. J'avais simplement
quelques remarques à ajouter. Tout d'abord, il était
rafraichissant d'entendre le député de Marguerite-Bourgeoys
offrir sa collaboration au parti ministériel en ce qui concerne
l'éducation, c'était un petit peu nouveau par rapport aux quatre
premières années.
M. Lalonde: Vous n'en doutez pas?
M. Paquette: C'est avec qrand plaisir que nous l'avons
écouté.
De notre côté, M. le Président, nous pouvons
bénéficier du fait que, d'une part, le ministre est un homme
d'équipe et, d'autre part, les compétences en matière
d'éducation dans la députation ministérielle ne manquent
pas. n'est ainsi qu'à cette commission parlementaire et sur toutes les
questions à l'avenir qui concerneront l'éducation, le ministre
m'a demandé, en tant qu'adjoint parlementaire, de réunir un
groupe d'un quinzaine de députés ministériels qui vont
participer à l'élaboration des politiques. Malheureusement, nous
n'avons pu participer à l'élaboration des crédits de cette
année. Nous espérons pouvoir le faire l'année prochaine,
mais nous avons au moins entrepris ensemble l'étude de ces
crédits, et nous aurons au cours de la discussion quelques questions
également à poser au ministre.
J'aimerais simplement mentionner que le député de
Verchères s'occupera plus spécifiguement des questions de l'aide
financière aux étudiants, le député de
Mille-Îles se penchera sur l'enseignement primaire et secondaire, le
député de Fabre s'occupera de l'enseignement collégial et
également de la formation des adultes, le député de
Chauveau de l'enseignement universitaire et du fonds pour la formation de
chercheurs et actions concertées, le député de Shefford de
la formation des adultes et de l'enseignement privé. Plusieurs autres
députés qui ne sont pas membres de cette commission travaillent
et travailleront en collaboration avec le ministre sur tous les dossiers,
toutes les priorités du ministère de l'Éducation au cours
de la prochaine année. (12 h 30)
Je voudrais simplement relever la remarque terminale du
député de Marguerite-Bourgeoys concernant le fait que le
gouvernement n'a pas su gérer l'austérité.
Malheureusement, M. le Président, les faits et les chiffres viennent
démentir cette affirmation. Il suffit de regarder. Je pense qu'une bonne
façon de mesurer, c'est d'évaluer le taux de croissance des
dépenses publiques par rapport au taux de croissance du produit
intérieur brut du Québec. Je pense que c'est un bon étalon
de mesure. On constate que, pour la période de 1960 à 1976 les
dépenses publiques au Québec ont crû beaucoup plus
rapidement que le produit intérieur brut. En fait, le rapport des deux
taux de croissance est de 1,36. Pour la période de 1975 à 1979,
ce rapport a été ramené à 1, c'est-à-dire
que les dépenses publiques au Québec ont crû exactement en
fonction du taux de croissance du produit intérieur brut.
Je pense qu'il y a eu un effort de ralentissement des dépenses
à la mesure de nos moyens, à la mesure de la production de
l'économie. Je pense, M. le Président, que ce que le ministre a
mis en évidence dans son discours, c'est que, malgré ce contexte
d'austérité budgétaire, il n'était pas dans
l'intention du gouvernement et du ministère de l'Éducation en
particulier de revenir de guelque façon que ce soit sur ces objectifs,
mais au contraire d'aller de l'avant. Je pense que la période actuelle
de difficultés ne nécessite pas un gouvernement moins
social-démocrate, mais un gouvernement qui le soit plus, dans trois
directions en particulier.
Premièrement, je pense qu'il est important, et là-dessus
je crois que nous pourrons obtenir un appui de la part de l'Opposition, de
décentraliser davantage le système d'éducation, de
réduire les paliers hiérarchiques, de débureaucratiser le
système d'éducation. Je pense qu'il y a une fausse conception qui
circule suivant laquelle être social-démocrate, ça signifie
nécessairement de lourds appareils bureaucratiques. Je pense qu'aller
dans cette direction non seulement permettra de personnaliser davantaqe
l'enseignement, mais également de tenir compte de la situation
financière plus serrée dans laquelle nous avons à
évoluer.
Une deuxième direction; je pense qu'il est important que nous
commencions, non seulement dans le domaine de l'éducation, mais tous les
autres domaines, à penser davantage en termes de société
de conservation plutôt que de société de consommation. Il y
a un gaspillage qui se fait dans tous les domaines, et dont on est parfois
assez peu conscient, et qui devrait nous amener à réduire les
dépenses dans des domaines qui vont nous permettre non pas de reculer,
mais de progresser dans la voie d'une société qui utilise
davantaqe et à meilleur escient les ressources mises à sa
disposition.
Troisièmement, je pense qu'il est important que nous augmentions
les revenus gouvernementaux. C'est là-dessus que nous allons
peut-être trouver des divergences d'opinions. Autant l'Opposition est
d'accord pour réduire la bureaucratie, autant elle voudrait,
jusqu'à un certain point, du moins c'est ce qu'on croit sentir dans ses
propos, réduire les pouvoirs d'intervention du gouvernement du
Québec, réduire la présence du qouvernement du
Québec dans beaucoup de secteurs, notamment dans l'économie.
Nous, de ce côté-ci, nous pensons que réduire la
bureaucratie ne signifie pas nécessairement réduire le pouvoir
d'intervention de l'État. Il faut, au contraire, augmenter le pouvoir
d'intervention de l'État si nous voulons que l'économie produise
davantage de revenus pour les Québécois. Ce sont des directions
à long terme.
On peut déplorer également, avec le député
de Marguerite-Bourgeoys, une certaine brusquerie dans l'élaboration du
présent budget. Je le dis en mon nom personnel, je le déplore
également. Je pense que ce qu'il faut faire maintenant, c'est lancer,
comme le soulignait le ministre dans son exposé, un vaste débat
qui va impliquer tous les agents sociaux et, dans le domaine de
l'éducation, tous nos partenaires, particulièrement les centrales
syndicales, sur les questions de fond. Je pense que nos partenaires doivent
participer à l'orientation des grands paramètres du budget de
l'année prochaine et des autres années, de façon que nous
puissions concilier les objectifs d'un projet de société qui sera
de plus en plus social-démocrate avec une meilleure gestion des
ressources qui puissent faciliter l'atteinte de ces objectifs.
M. le Président, en terminant, je tiens à vous assurer
également de toute la collaboration de l'équipe des
députés ministériels qui comptent participer très
activement à cette commission.
Le Président (M. Rodrigue): Le député de
Viau.
M. William Cusano
M. Cusano: M. le Président, venant de
l'élémentaire et y ayant passé 18 ans, j'aimerais, avant
de parler de certains points, porter à l'attention de tout le monde que
si, aujourd'hui, nous tous autour de la table, on est capable de
défricher tous les documents qui nous sont présentés, il
faudrait bien remercier le professeur ou l'institutrice de la première
année, qui nous a enseigné à lire et à
écrire.
Je vais toucher, en quelques instants, la présence ou le manque
de présence anglophone au sein des structures du MEQ. Depuis sa
création en 1964 et, plus récemment, depuis la création
des onze bureaux régionaux, la communauté anglophone du
Québec a assisté à la dispersion de ses interlocuteurs
traditionnels au niveau des instances précitées. L'existence de
réseaux d'enseignement public en langue anglaise, catholique et
protestant, soulève des problèmes de coordination et
d'intégration au niveau des orientations et des objectifs poursuivis par
notre système d'éducation.
À mon avis, ces problèmes motivent une
considération de l'approche administrative présentement en
vigueur et impliquent que l'on envisage un modèle de participation qui
reconnaisse les besoins spécifiques, psycho-pédagogiques et
socioculturels de la commuanuté anglophone. Essentiellement, il s'aqit
de déterminer si les structures actuelles sont en mesure de
répondre adéquatement et efficacement aux besoins
pédagoqiques et administratifs des clientèles anglophones qui
fréquentent le système scolaire public.
Où trouve-t-on des interlocuteurs de la communauté
anglophone dans les structures actuelles? Combien y a-t-il d'anglophones aux
échelons supérieurs du MEQ, à l'exception du sous-ministre
associé, dans le secteur protestant? Comment envisage-t-on
l'élaboration de la programmation, du développement et de
l'évaluation de l'enseignement en langue anglaise au Québec?
Comment les bureaux régionaux, même ceux de la région
métropolitaine de Montréal, peuvent-ils disperser ces services au
réseau d'enseignement en langue anglaise, tant catholique que
protestant?
Il n'est pas superflu de noter que la création des bureaux
réqionaux a contribué, pour une large part, à l'isolement
des regroupements anglophones dispersés à l'échelle du
territoire. Environ 20% de la cientèle scolaire anglophone relève
de huit bureaux différents, les autres 80% se répartissant dans
trois bureaux régionaux de la région de Montréal. Pour
l'année 1979- 1980, la Direction des études économiques et
démographiques, au document 55 de janvier 1981, établissait la
clientèle scolaire anglophone à 14,8% des effectifs provinciaux,
soit 173 549 élèves, c'est au tableau 1.1 de la page 7. Au
tableau 3.1 de la paqe 24, 99 535 élèves étaient inscrits
à l'enseignement en anglais dans les huit commissions scolaires de
l'île de Montréal, soit 57,4% des effectifs anglophones au niveau
provincial. Ces effectifs se répartissent également entre
anglophones de foi catholique et anglophones de foi protestante. À mon
avis, ces quelques données soulignent la nécessité
d'envisager l'élaboration des mécanismes de participation
à l'organisation et au développement du système
d'éducation.
Présentement, les anglophones sont partenaires absents à
tous les niveaux de l'administration de l'enseignement public du
ministère. On ne dispose pas de regroupements fonctionnels capables de
traduire adéguatement au sein de structures administratives du MEQ les
besoins de la communauté anglophone et particulièrement
anglo-catholique.
La recherche et le développement pédagogiques s'adressent
naturellement et prioritairement aux besoins de la clientèle
francophone. C'est normal. Nous cherchons en vain l'existence d'un programme
pédagogique conforme aux dimensions
culturelles de notre communauté linguistique. L'absence d'une
structure de coordination diminue d'autant la possibilité d'apporter une
contribution éclairée à la définition des objectifs
à atteindre, de même qu'à la mise en place des moyens
prévus pour les atteindre.
Il est temps de concevoir des mesures qui corrigeront, M. le ministre,
ces lacunes sérieuses dans les mécanismes de la direction,
communication et coordination du MEQ avec le réseau public
d'enseignement primaire et secondaire de langue anglaise. En définitive,
il s'agit d'associer des ressources importantes au fonctionnement d'une
structure de communications intégrée à l'appareil
administratif du système d'éducation et d'y prévoir une
participation équitable des anglo-catholiques. Merci.
Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée
de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: ...
M. Lalonde: Si je comprends bien, le ministre répondra
à toutes nos interrogations dans une intervention après un tour
de table.
Mme Joan Dougherty
Mme Dougherty: Merci. J'ai quelques remarques très
générales. J'ai une question qui touche quelque chose qui est
peut-être la clef de notre problème ici, quand il s'agit des
coupures.
J'aimerais dire d'abord que je suis tout à fait d'accord avec les
buts éducatifs dont le ministre a parlé dans ses remarques
préliminaires. Je suis d'accord que notre but, quand on examine le
problème des coupures et le manque d'arqent, c'est de protéger
l'essentiel. Il n'y a pas de question. Le problème est que je crois que
les coupures qu'on a recommandées pour l'année qui vient risquent
de compromettre l'essentiel, de menacer l'essentiel.
Vous avez parlé d'une croissance de 13,7%. L'autre jour, le
ministre a dit à l'Assemblée nationale, il me semble, avec une
certaine fierté - je ne sais pas pourquoi - que la croissance a
été plus grande et que le montant d'argent versé par
élève ici, au Québec, excède celui de l'Ontario.
Mais je crois que le montant absolu n'est pas la meilleure façon de
mesurer la valeur de ce qu'on reçoit. Si on examine, par exemple, les
dollars versés au Québec par personne âgée entre
cinq ans et vingt ans, par rapport à l'Ontario - l'ensemble des
dépenses, non pas seulement celles du gouvernement, parce que le mode de
financement est différent en Ontario - on voit très clairement la
carence entre les montants. Par élève, le montant versé
ici, au Québec, en comparaison du montant versé en Ontario, en
1976, il y avait un ratio de 1,04% entre les deux provinces et, maintenant, en
1980, on a une carence plus grande soit de 1,3%. (12 h 45)
La question qui ressort de tout cela, c'est: Quelle est la valeur qu'on
reçoit pour notre argent, dollar pour dollar, en éducation? En
éducation, guelle est la valeur qu'on reçoit pour notre argent?
C'est cela la question à laquelle on doit répondre pour le
public. Le public a le droit d'avoir le plus de valeur pour son arqent.
Vous avez parlé, M. le ministre, des conventions collectives.
Comme le député de Marguerite-Bourgeoys, je suis très
heureuse que vous ayez soulevé cette question, parce que, à mon
sens, la plupart - ce n'est pas une exaqération, je crois - de nos
problèmes de qualité et de coûts de l'éducation
découlent du processus de continuité des conventions collectives,
du processus de négociation et de son résultat. Je crois qu'il
est grand temps qu'on sorte des nuages, concernant ces questions. On ne peut
pas vivre dans un vacuum par rapport aux conditions de travail, aux salaires,
aux bénéfices sociaux, à la tâche de l'enseiqnement
et tous les paramètres établis dans les conventions collectives.
Je me demande si on ne devrait peut-être pas commencer, pour
améliorer la qualité de la situation et pour recevoir plus de
valeur pour notre notre argent ici au Québec, peut-être que nous
pourrions examiner cela très très soigneusement et faire une
comparaison entre la situation ici au Québec par rapport à
l'Ontario. Est-ce que le gouvernement n'a jamais considéré une
telle étude?
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Verchères.
M. Jean-Pierre Charbonneau
M. Charbonneau: Merci M. le Président. Quelgues remarques
brèves. D'abord, je voudrais exprimer ma satisfaction d'avoir
retrouvé dans les objectifs premiers du ministre de l'Éducation
une réaffirmation de l'objectif majeur de l'accessibilité accrue
et de la démocratisation de l'école au Québec, du
réseau de l'enseignement au Québec. Eace à la discussion
actuellement en cours au niveau du gouvernement, notamment sur l'aide
financière aux étudiants, je pense qu'il était opportun de
rappeler cet objectif fondamental. Personnellement, pour avoir travaillé
de nombreux mois auprès du milieu étudiant, j'espère que
les membres du gouvernement, les collèques du ministre de
l'Éducation prendront connaissance du rappel de cet objectif
fondamental.
D'autre part, je me réjouis aussi de voir dans le chantier
proposé par le ministre de l'Éducation une importance
significative accordée à tout ce qui touche les droits des
étudiants et les conditions de vie des
étudiants. Le ministre, à bon droit, a souligné
dans son intervention un intérêt grandissant des étudiants
eux-mêmes pour ces guestions. On n'a qu'à se rappeler qu'il y a
à peine quelques mois, le RAEU, c'est-à-dire le Regroupement des
associations étudiantes universitaires a pris l'iniative d'organiser un
colloque qui s'est tenu à l'Université de Montréal et qui
a regroupé une bonne partie des représentants des milieux
étudiants du Québec autour de l'idée d'une charte des
droits de l'étudiant. Malgré les divergences gui se sont fait
jour à ce moment-là chez les étudiants eux-mêmes,
chez les représentants des étudiants, je pense que la simple
tenue de ce colloque et l'importance des participants qui s'y sont rendus
témoignent également que le ministre avait raison de souligner
l'intérêt grandissant des étudiants pour ces guestions.
On n'a aussi qu'à se rappeler comment les associations
étudiantes ont tenu à participer au colloque orqanisé il y
a guelques semaines par le secrétariat des conférences
socio-économiques, et la revue Critère, qui touchait
également l'aspect des conditions de vie des étudiants un peu de
la même façon qu'on pourrait parler de la condition de vie des
travailleurs dans une usine.
Ce que j'espère, c'est qu'au cours de la prochaine année
on franchira des pas importants. Je sais que le ministre a donné de
nombreuses assurances au milieu étudiant et je sais également -
on pourra y revenir un peu plus tard - que depuis quelque temps, il y a une
insistance particulière de la part du ministère de
l'Éducation à venir en aide aux associations étudiantes
afin qu'elles se structurent mieux, s'organisent mieux et gu'elles jouent mieux
le rôle qu'elles ont déjà joué à
différentes époques de l'histoire du Québec.
Ce que l'on peut déplorer - je l'ai déploré
à quelques reprises - c'est qu'au cours des dernières
années, tout le monde des étudiants, en particulier dans le
domaine des études supérieures, a été passablement
absent de beaucoup de débats importants dans notre
société, y compris des débats qui les intéressaient
eux, au premier titre. Les étudiants manifestent un regain
d'intérêt face à des questions qui les concernent
eux-mêmes, si on pense aux réactions sur le règlement sur
les études collégiales et sur leurs propres droits et leurs
conditions de vie. Peut-être que c'est une ouverture dont il faut
profiter. Il faut faire en sorte gu'on puisse aider le milieu des
étudiants à se structurer d'une façon permanente. Le
problème est que l'effectif change; le personnel de ces associations
d'étudiants chanqe par la force des choses. Il y a une telle fluctuation
qu'on n'y retrouve pas une certaine permanence et une certaine constance dans
l'action et dans l'apport positif que cela peut amener, tant pour les
étudiants que pour l'ensemble de la société
québécoise.
En terminant, je voudrais faire une petite remargue gue je me sens
obliqé de faire, parce que cela m'a un peu choqué. C'est au sujet
des propos du député de Viau. Je ne veux pas m'en prendre, pour
le moment, au contenu même des propos du député de Viau.
Cependant, je trouve un peu déplorable que l'Opposition ait
décidé, pour parler des droits de la communauté anqlophone
du Québec, de choisir guelgu'un qui s'est présenté comme
porte-parole d'une communauté culturelle, en particulier la
communauté italienne.
Je pense qu'en faisant cela, l'Opposition officielle contribue à
créer l'impression que et la communauté italienne et d'autres
communautés culturelles au Québec ne sont attachées et
intéressées qu'à la partie anglophone de notre
société. Je pense que c'est dommage. J'aurais vu d'un très
bon oeil que le député de Jacques-Cartier fasse cette
intervention.
M. Lalonde: Question de règlement.
Le Président (M. Rodrigue): Je vais écouter la
guestion de règlement.
M. Lalonde: II y a des propos indignes qui sont dits, qui ne
peuvent pas être tolérés par notre règlement. Je
mets en garde le député contre la tentation qu'il a d'aller plus
loin. Depuis quand est-il interdit à quelque député autour
de la taule de soulever quelque question que ce soit à cause de son nom
ou de la communauté culturelle dont il est issu?
Le Président (M. Rodrigue): Un instant. Sur la question de
règlement, M. le député de Rosemont.
M. Paquette: Sur la question de règlement gui n'en est pas
une de toute évidence, autant le député de Viau a le droit
de faire les commentaires qu'il veut, autant le député de
Verchères a le droit de les interpréter. Et je pense que son
interprétation nous indique une certaine orientation du
côté de l'Opposition officielle qui voit le Québec
essentiellement comme subdivisé en deux communautés, une
majorité francophone et une minorité anglophone, entre lesquelles
il faudrait maintenir les distinctions et tâches.
Mon collèque de Verchères a tout à fait raison de
souligner que le député de Viau aurait peut-être dû
céder la parole à quelqu'un d'autre sur cette question.
M. Lalonde: Je trouve cela absolument épouvantable
l'intolérance dont vous faites preuve actuellement: Vous devriez
avoir
honte. Ce n'est pas parce qu'on est Italien d'origine qu'on a pas le
droit de défendre les anqlophones ou les francophones.
M. Paquette: Bien sûr, bien sûr.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Paquette: Je regrette...
Une voix: C'est absolument détestable.
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous
plaît.
M. Paquette: M. le Président, je veux simplement terminer
là-dessus. Ce n'est pas une question d'intolérance, M. le
Président. Je pense qu'il est important de mettre en évidence les
idéologies de chacun des deux partis. Ce n'est pas une question
d'intolérance, on respecte parfaitement le droit de parole du
député de Viau. Il n'y a aucun problème
là-dessus.
Le Président (M. Rodrigue): S'il vous plaît, nous
allons cesser la discussion.
M. Lalonde: À certains moments, l'intolérance frise
le racisme, M. le député de Rosemont.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys, s'il vous plaît! J'ai entendu la question de
règlement j'ai entendu un intervenant sur la question de
rèqlement. À mon sens, il ne s'agit pas là d'une question
de règlement et je n'ai pas entendu, quant à moi, de propos
injurieux à l'égard d'un membre de cette commission. Donc, je
rejette la question de règlement qui a été posée et
je demande au député de Verchères de poursuivre son
intervention.
M. Charbonneau: M. le Président, j'avais presque
terminé, je n'ai pas l'intention d'en faire un plat, et pour
avoir...
M. Lalonde: Vous aviez les deux pieds dedans.
M. Charbonneau: Non, au contraire. Je pense que le Québec
c'est autre chose que ce que vous essayez de représenter, et si vous
étiez un peu plus soucieux de cette réalité pluraliste,
vous auriez peut-être été un peu plus attentif, un peu plus
délicat sur la représentation que vous voulez faire. Quand
quelqu'un se présente et se fait élire, il y a à peine
quelques semaines, comme le représentant d'une communauté
particulière...
M. Lalonde: C'est faux. Il était Québécois
quand il s'est présenté. Arrêtez donc de diviser les uns
contre les autres parce qu'ils ont un nom italien ou grec.
M. Charbonneau: On est tous Québécois parce qu'on
vit tous au Québec. Essayez donc, vous, de cesser d'associer toutes les
communautés ethniques culturelles à une section ou une partie de
la population, cette minorité globale qui serait anglophone, en essayant
de diviser les communautés ethniques et la population francophone du
Québec. C'est ce que vous avez fait à plusieurs reprises et c'est
ce que votre intervention continue de faire de la façon dont vous
choississez vos porte-parole.
Le Président (M. Rodrigue): Je voudrais rappeler aux
membres de cette commission que lorsqu'un député parle, à
moins de soulever une question de règlement, on ne doit pas
l'interrompre. Je pense que cela va faciliter nos débats. Je comprends
que parfois on a une remarque à faire qui nous brûle la langue,
mais enfin, j'aimerais que l'on puisse poursuivre comme on avait
débuté ce matin, dans une relative harmonie. Est-ce que d'autres
députés de cette commission veulent intervenir dans le
débat général?
M. Lalonde: Une question de directive. Il est une heure moins
quarante secondes. Si le député veut faire son intervention
générale, est-ce que l'on pourrait revenir à 15
heures?
Le Président (M. Rodrigue): Oui, on pourrait
sûrement suspendre jusqu'à 15 heures. J'ai le député
de Saint-Henri et le député de Fabre qui m'ont demandé la
parole dans le débat général, alors nous reprendrons les
travaux à 15 heures avec l'intervention du député de
Saint-Henri.
(Suspension de la séance à 13 h 01)
(Reprise de la séance à 15 h 23)
Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre! Nous en
sommes toujours au débat général.
M. le député de Saint-Henri.
M. Roma Hains
M. Hains: M. le Président, la rapidité avec
laguelle la réforme scolaire s'est faite ces derniers temps n'a pas
permis d'accorder toute l'importance qu'il aurait fallu à la
qualité des services offerts. Elle a coïncidé avec un
contexte social qui remettait en question nombre de valeurs traditionnelles qui
touchaient non seulement la mission de l'école, mais aussi celle de la
famille, de l'église et du milieu de travail, ce qui rendait difficile
un certain consensus de base.
La consultation à laquelle a donné lieu ces
dernières années le livre vert sur l'enseignement primaire et
secondaire, le livre blanc sur les collèges et la commission
d'enquête sur les universités ont toutefois permis de constater
que les Québécois réclamaient de plus en plus du
système d'éducation une plus grande rigueur d'approche et une
formation plus humaine et plus complète.
Pour les années quatre-vingt, l'accent doit être mis,
à tous les niveaux: primaire, secondaire, collégial et
universitaire, non sur la prolifération, mais sur la consolidation et la
recherche de l'excellence des services. D'une part, les milieux de
l'éducation doivent devenir plus exigeants et se soumettre
eux-mêmes à une évaluation stricte; d'autre part, des
services adéquats doivent être mis à la disposition des
clientèles qui ont des difficultés à atteindre les
objectifs généraux.
Bien sûr, cet objectif de formation et d'excellence ne doit pas
être compris comme une suggestion de retour à des méthodes
révolues, du passé. Au contraire, il s'agit d'un effort
gualitatif qui nous permettra de joindre franchement, comme vous le disiez ce
matin, M. le ministre, les possibilités d'accessibilité et de
démocratisation. Pour assurer cette excellence, je me pose quatre
questions:
Premièrement, comment va-t-on finir par en arriver à
mesurer la qualité des apprentissages du côté des
élèves, car il faut cesser de laisser à des
appréciations personnelles le vrai avancement des
élèves?
Deuxièmement, comment alléger les directions
d'école de leurs tâches administratives afin qu'elles puissent se
consacrer à leurs tâches pédaqogiques?
Troisièmement, comment assurer, chez des professeurs, cette
primauté de la qualité de l'enseignement? Autrefois,
c'était une vocation; aujourd'hui, c'est devenu une profession. Mais,
toujours, la qualité de l'enseignement devrait primer.
Enfin, quatrièmement, comment susciter chez les parents
l'intérêt qui semble très difficile à
éveiller dans certains cas, comme on a eu l'occasion de le voir la
semaine dernière avec les élections scolaires, comment susciter
chez des parents l'intérêt pour l'école?
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Fabre.
M. Michel Leduc
M. Leduc: Je suis heureux de voir que les membres de l'Opposition
s'entendent pour dire que les coupures dans certains secteurs sont
inévitables et, par contre, qu'il faut protéger l'essentiel. Je
pense que c'est dans ce domaine qu'il faudra être le plus attentif pour
voir ce que constitue l'essentiel quant à eux. Si on se fie aux discours
qu'ils ont tenus en Chambre, ils semblent accorder beaucoup d'importance au
secteur de l'éducation privée, qui est également important
pour nous, mais la question, je pense, qu'on doit se poser, c'est: Est-ce que
c'est le secteur le plus essentiel? Est-ce qu'il n'y a pas d'autres secteurs
qui doivent passer avant? Et je pense en particulier à des secteurs qui
touchent aux plus démunis de la société. Je ne crois pas
que les plus démunis fréquentent l'école privée. Je
ne crois pas non plus que ce soient uniquement les gens fortunés gui
fréquentent l'école privée. Je crois qu'il y a des gens de
classe moyenne, mais je ne crois pas... Et si nos amis d'en face avaient des
statistiques sur la fréquentation de l'école privée, je
pense que ce serait intéressant qu'ils nous remettent, s'ils le veulent
bien, copie de ces statistiques, de même s'il était possible
d'avoir copie du document auquel se référait la
députée de Jacques-Cartier qui mentionnait qu'il est important
que les citoyens reçoivent plus pour leur argent, surtout dans la
conjoncture économique que nous vivons.
Je pense qu'on s'entend là-dessus. Il faut que chaque dollar
dépensé rapporte beaucoup plus que par le passé. La
députée de Jacques-Cartier a mentionné l'Ontario. Ce
serait intéressant, si elle le voulait bien, que nous ayons copie de ce
document qu'elle semble avoir et qui établit un certain parallèle
entre l'argent qui est dépensé au Québec pour
l'éducation et l'argent qui est dépensé en Ontario pour
l'éducation.
Quant au secteur des conventions collectives, je pense que cela demeure
du domaine des voeux pour l'instant. C'est mentionné d'ailleurs dans le
document du ministre que nous souhaitons tous qu'il y ait des assouplissements
qui soient apportés aux conventions collectives, de telle sorte que des
réaménagements deviennent possibles pour en arriver à une
plus qrande efficacité dans le domaine de l'enseignement. Merci, M. le
Président. (15 h 30)
Le Président (M. Rodrigue): Y a-t-il d'autres
députés qui veulent intervenir dans le débat sur les
remarques générales? M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: M. le Président, ce serait seulement sur
un point. Quand on veut comparer les coûts de l'éducation au
Québec et ceux de l'Ontario, je ne m'y oppose pas, sauf que j'aimerais,
quand on le fait, qu'on tienne compte de points précis. Je pense que
certaines situations sont pas mal différentes. J'aimerais qu'on regarde,
par exemple, ce qu'on offre aux commissions scolaires anglophones et
francophones en Ontario, et
ce qu'on leur offre au Québec, ce qu'on offre aussi aux
commissions scolaires catholiques et protestantes. Est-ce qu'on a des
systèmes unifiés ou seulement pour un qroupe? Quelle sorte
d'aide, aussi, apporte-ton au secteur de l'enseignement privé en
Ontario?
C'est bon de comparer ces domaines, et je pense que c'est toujours en
faveur du Québec. Si ça nous coûte plus cher, c'est qu'on
offre au Québec des avantaqes et une plus grande liberté. Tenant
justement compte qu'il y a des qroupes spécifiques au Québec, on
le reconnaît, on doit payer pour, et je pense qu'on n'a rien contre ca.
Que ce soient des écoles pour les minorités, des écoles
pour la religion de chacun des qroupes, ou que ce soit l'enseignement
privé au public, on reconnaît les systèmes et on doit payer
pour. Je pense que c'est bon de regarder cela. Quand on veut faire une
comparaison dans les coûts, il serait bon de regarder si, en Ontario
comme au Québec, la clientèle étudiante est en progression
ou en récession. Je pense que ca vient pas mal expliquer pour quelle
raison on doit défrayer certains coûts; ça s'explique assez
facilement. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Viau.
M. William Cusano
M- Cusano: M. le Président, j'ai laissé
s'écouler une certaine période depuis la déclaration du
député de Verchères, ce matin, parce que je pense que
c'est mieux de parler dans le calme que dans une situation émotionnelle.
Je trouve que sa déclaration de ce matin est un peu malheureuse, parce
qu'on essaie s'éloigner de certains problèmes réels dans
le domaine éducationnel en faisant allusion à mon milieu de
naissance, à mon milieu de travail et à mon milieu
socio-culturel.
Depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale, on a
entendu de belles paroles de la part des ministres. On a parlé
d'intégration, de respect des idées et on a dit que tous les
Québécois étaient des Québécois à
part entière. Comme député dûment élu en
vertu du processus le plus démocratique d'un pays libre, je dois
représenter tous les citoyens à part entière, non
seulement ceux du comté de Viau, mais tous les citoyens de cette
province. Depuis longtemps, je fais partie de la collectivité
québécoise, qu'elle soit de descendance amérindienne,
française, anglaise, polonaise, allemande ou autre, qu'elle mesure 4
pieds et 2 pouces ou 6 pieds, qu'elle pèse 50 livres ou 250 livres,
qu'elle soit de complexion blanche, noire, jaune ou n'importe quelle autre, que
son nom soit de résonance française, anglaise, italienne, turque,
arabe, grecque, italo-francaise ou italo-anglaise ou n'importe quelle autre
catégorie que le député de Verchères puisse
inventer dans son optigue minuscule, qu'elle soit catholique, protestante,
bouddhiste ou autre, qu'elle soit d'idéologie péguiste,
libérale, unioniste, socialiste ou communiste.
Depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale,
j'étais fier du fait que, contrairement aux cinq dernières
années, aucun individu auquel j'ai eu l'occasion d'exprimer mes
sentiments, qu'il soit ministre ou député, du côté
ministériel ou du côté de l'Opposition, ne m'avait
démontré d'intolérance ou n'avait affiché des
préjugés comme l'a fait le député de
Verchères. Je déplore ce manque de respect, de sens humanitaire,
ce manque de vision de l'avenir, la contradiction qu'il y a entre ses
énoncés et ceux du premier ministre, du ministre des Finances, du
ministre des Affaires culturelles, du ministre de la Fonction publique, du
ministre de l'Immigration et même du ministre de l'Éducation.
Je désire informer le député de Verchères -
malheureusement, il n'est pas ici pour m'entendre, je suis sûr qu'il va
lire le texte plus tard - puisqu'il croit avoir le monopole de la
vérité absolue, que pour autant que je siège à
l'Assemblée nationale, à une commission parlementaire ou que je
participe à n'importe quelle autre activité parlementaire, j'ai
le privilège et le droit de faire valoir mes idées personnelles
et celles de la population de Viau et de la population du Québec.
Merci.
Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre, est-ce que
vous allez conclure ce débat général avant que nous
passions à l'étude du programme 4?
Réponse du ministre
M. Laurin: Oui, M. le Président. Je veux d'abord remercier
tous les intervenants gui se sont exprimés sur l'orientation
générale de la mission éducative et je veux remercier, en
particulier, les membres du Parti libéral pour les vues gu'ils ont
exprimées. J'en profite pour féliciter le superporte-parole de
l'Opposition, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ainsi que
l'équipe qui travaillera avec lui sur les problèmes de
l'éducation. Je pense que le choix qu'a fait le parti est excellent,
particulièrement si on en juge par l'intervention qu'a commise ce matin
le député de Marguerite-Bourgeoys. Je pense qu'il a maintenu le
débat à un très haut niveau, gue son intervention
était de qualité et que ceci laisse très bien
préjuger de nos travaux ultérieurs. Je dirais la même chose
également pour tous les collaborateurs qui travaillent avec lui. Je
pense que leurs interventions ont été éclairantes et
très
instructives.
Le député de Marguerite-Bourgeoys, et j'en ai
été ravi, s'est dit d'accord sur les objectifs que nous
poursuivons et que nous entendons poursuivre au cours de ce mandat. Je suis
très heureux de savoir au départ que je puis compter sur la
collaboration de l'Opposition quant à l'orientation fondamentale que
nous entendons imprimer à notre action au cours des prochaines
années. Il a dit, bien sûr, que cet accord sur les objectifs ne
sous-entendait pas nécessairement un accord sur les moyens que nous
pourrions mettre en application. Cela est parfaitement normal et je m'en
réjouis également, car quelqu'un a déjà dit que du
choc des idées jaillissait la lumière. J'espère bien que
du choc de nos idées respectives jaillira une lumière dont pourra
profiter le monde de l'éducation.
Dans son intervention préliminaire, le député de
Marguerite-Bourgeoys a touché à beaucoup de sujets. Les uns sont
précis, intéressent un secteur particulier du monde de
l'éducation; les autres sont cependant plus généraux, sont
intersectoriels et touchent même à des problèmes de fond.
Si le député le veut bien, j'essaierai de répondre de la
façon la plus ad hoc possible à tous les points qu'il a
soulevés, même les points qui touchent à des sujets
précis que nous aurions, par ailleurs, l'occasion d'aborder lors de
l'étude des différents programmes, sachant par expérience
que, si nous vidons certains de ces sujets lors de l'étude du point 1,
nous n'aurons pas l'occasion d'y revenir lorsque nous aborderons ces
éléments précis. À condition, bien sûr, que
mes réponses le satisfassent et ne provoquent pas d'autres questions
auxquelles il me fera d'ailleurs plaisir de répondre.
La première question qu'a abordée le député
de Marguerite-Bourgeoys, c'est celle des régimes pédagogiques et
je m'en réjouis, car c'est' là la pierre d'angle du
système d'enseignement préscolaire, primaire et secondaire. Je
m'en réjouis aussi parce que cette question des régimes
pédagogigues a mobilisé la plus grande partie de notre attention
au cours des dernières années et particulièrement de la
dernière année et même depuis que j'ai assumé la
responsabilité du ministère de l'Éducation.
Après l'énoncé de politique sur l'école
québécoise, il s'imposait, en effet, de traduire en termes
concrets, et j'entends ici pédagogiques, les orientations, ainsi que les
projets principaux, fondamentaux du ministère en matière de
pédagogie, et c'est ce que nous avons tenté de faire dans les
régimes pédagogiques. Nous y avons beaucoup
réfléchi, nous avons préparé plusieurs projets
successifs qui ont été soumis à la consultation du milieu.
Ce que nous avons rendu public, il y a maintenant quelques mois,
représente, j'en suis sûr, non seulement avec exactitude la
position du plan d'action, mais également l'opinion
générale de la population que nous avons consultée et de
la population en général.
Je rappelle que ces régimes pédagogiques sont maintenant
entre les mains du milieu, que chacun des articles est accompagné d'un
commentaire qui en explique la portée, que ces régimes
pédagogiques sont précédés d'une
présentation générale qui en indique l'esprit en
même temps que les points principaux.
Nous croyons que ces régimes pédagogiques incarnent
l'essentiel de ce que la population exigeait et qu'elle nous a fait savoir au
cours des consultations des dernières années. Je ne veux pas
résumer ici à nouveau tout ce que contiennent ces régimes
pédagogiques, je ne veux en dégaqer que les grands thèmes.
Le régime pédagogigue se veut, comme je le disais ce matin, un
retour à l'essentiel, dans ce sens qu'il met l'accent sur la formation
qénérale, et qu'il met l'accent sur l'éducation et non pas
seulement sur l'instruction.
Nous voyons, par exemple, dans ces régimes pédagogiques,
que l'enseignement primaire sera plus étoffé qu'il ne
l'était, que la formation fondamentale y trouvera davantage son compte,
qu'à côté des matières traditionnelles,
fondamentales, toujours aussi nécessaires, on y trouvera maintenant un
enseignement qui initiera déjà l'enfant à une meilleure
connaissance de son milieu, de lui-même, en même temps qu'il lui
permettra d'avoir accès à un savoir qui est devenu fondamental,
et je pense ici en particulier au domaine des sciences.
Ce programme pédagogique met aussi l'accent sur la formation
commune, sur la formation de base que devront maintenant recevoir tous les
élèves du Québec. Un plus qrand nombre de matières
seront enseignées, mais aussi cet enseignement sera obligatoire pour un
bon nombre de disciplines. On peut dire la même chose d'ailleurs du
secondaire où cette formation fondamentale, élargie pour convenir
à l'évolution de notre société, sera elle aussi
commune et obligatoire. Je pense qu'il y a là un redressement
qu'exigeait, encore une fois depuis plusieurs années, la population
québécoise.
Cela nous oblige évidemment à reporter d'un an le choix
que faisaient auparavant les élèves d'une option dans les
concentrations de matières qui l'intéressaient ou même dans
un début de spécialisation qui pouvait l'intéresser. Je
pense que cela est extrêmement nécessaire et important en ce sens
qu'une formation de base est nécessaire et qu'une formation fondamentale
s'impose, et que, même, elle constitue non seulement une partie
essentielle de l'éducation, de la formation de l'élève,
mais qu'elle constitue la base la meilleure pour un recyclage ultérieur
car, lorsqu'un adulte a à se
recycler, la meilleure chance ou la meilleure garantie de succès
du recyclage est de puiser dans une bonne formation fondamentale. Donc, report
d'une année de l'option. Allongement d'une année de la formation
générale. Report à peut-être une sixième
année de la spécialisation professionnelle. Voilà autant
d'éléments essentiels à la conception de
l'éducation que se fait maintenant la population. (15 h 30)
Le régime pédagogique prévoit également un
meilleur encadrement, prévoit également un meilleur appui
à l'élève. Je veux parler ici de l'importance
considérable que nous apportons aux programmes, des programmes plus
précis, accompagnés de devis pédagogiques, l'introduction
graduelle, mais continue, de matériel didactique approprié, y
compris un manuel par matière, et je pense que c'est là, encore
une fois, mettre l'accent sur la qualité de l'éducation.
Je m'arrête ici dans cette brève énumération
des éléments principaux du régime pédagogique,
simplement pour marquer ce souci de la qualité de l'excellence, pour ne
pas dire, parfois, du redressement qui a guidé l'action du
ministère.
L'entrée en vigueur des régimes pédagogiques, par
ailleurs, n'entraînera pas des dépenses excessives et même
n'entraînera que des dépenses minimes puisque les mesures mises en
oeuvre ne comporteront, du moins pour cette première année et
même la deuxième année, aucune implication
financière significative.
Parmi les mesures susceptibles d'entraîner plus tard des
coûts supplémentaires, il faut retenir principalement le report de
la spécialisation professionnelle après la 5e année du
secondaire, dont l'entrée en vigueur probable est prévue au plus
tôt en septembre 1984; deuxièmement, la mise en application d'une
mesure visant à assurer à l'élève un manuel
scolaire pour chaque matière, troisièmement, le report progressif
sur trois ans, comme je l'ai annoncé il y a quelques jours en Chambre,
de l'âge d'admission des élèves au préscolaire et au
primaire à compter de septembre 1982.
Dans ce même domaine des régimes pédagogiques, le
député de Marguerite-Bourgeoys a soulevé le
problème de l'enseignement des langues secondes. Le régime
pédagogique s'y réfère d'une façon
spécifique puisqu'il y est dit que l'enseignement du français
langue seconde, pour les élèves anglophones, commencera
dès la première année et que l'enseignement de l'anglais
langue seconde, pour les élèves francophones, commencera au
deuxième cycle du secondaire.
Pourquoi cette différence?
Principalement, parce que nous avons voulu nous rendre aux expressions
d'opinion exprimées dans le milieu. Lors de la consultation, le monde
anglophone de l'éducation nous a manifesté sa volonté de
faire commencer l'enseignement du français langue seconde dès la
première année du premier cycle du primaire. Je pense qu'il en
connaît les raisons mieux que je ne saurais le dire. Je crois que la
minorité anglophone du Québec sait et sent que le Québec
va devenir de plus en plus français. La minorité anglophone veut
garder ses enfants le plus longtemps possible, sinon pour toujours, au
Québec. En conséquence, les parents anglophones veulent donc que
leurs enfants soient très bien préparés à assumer
l'exercice de leur métier, de leur profession dans un Québec
qu'ils aiment et dont ils s'estiment les héritiers.
Ceci est parfaitement compréhensible. Ils savent en
conséquence que, pour avoir plus de chance d'intégration sociale,
vocationnelle, professionnelle, il est impératif pour eux, qu'il est
impératif pour leurs enfants d'avoir une connaissance non seulement
d'usage, mais une connaissance courante et parfaite de la langue
française. Je crois que c'est en raison de cet impératif qu'ils
ont demandé à l'unanimité que l'enseignement du
français langue seconde commence dès la première
année et nous avons accédé à leur désir.
La situation est quand même différente pour les
élèves francophones car ces élèves francophones
constituent ici la majorité. Ils habitent une province qui est pour eux
un pays en même temps qu'une nation et ils sentent que, tout en devant,
idéalement ou utilement, posséder une connaissance de la langue
anglaise, qui est la langue du Canada et la langue de l'Amérique du
Nord, il leur faut quand même au départ connaître les
arcanes, les fondements, la base de leur langue maternelle. Même s'il y a
des controverses entre savants là-dessus aujourd'hui, le courant le plus
répandu semble être qu'il faille d'abord bien connaître les
fondements de sa langue maternelle avant d'y ajouter un enseignement en langue
seconde, guelle gu'elle soit, et que peut-être même cette
connaissance plus fouillée, cette maîtrise de la langue maternelle
peut constituer un adjuvant pour une meilleure maîtrise de la langue
seconde. C'est la politique que nous avons adoptée dans notre
régime pédagogigue.
Je veux dire immédiatement au député de
Marguerite-Bourgeoys que cela ne veut pas dire que nous nous satisfaisons de
l'enseignement des langues tel que nous en avons hérité.
D'ailleurs, il y a toujours matière à progrès, à
perfectionnement, au fur et à mesure que la didactique progresse, que la
pédagogie progresse et, d'autre part, je pense bien qu'on avait
signalé à nos prédécesseurs aussi bien qu'à
nous que cet
enseignement des langues comportait encore des carences. Nous y avons
donc travaillé avec intensité au cours des dernières
années. Nous avons déjà publié nos nouveaux
programmes pédagogiques en matière de français pour tous
les niveaux du primaire et pour presque tous les niveaux du secondaire. Je
pense que nos écoles sont maintenant en possession d'un programme
pédagogique en français, langue maternelle, qui est à la
fine pointe de la pédagogie de la didactique et qui respecte en
même temps ce souci que nous avons d'enseigner aux
générations futures un français de qualité qui leur
permettra de maîtriser leur langue maternelle.
Il en va de même pour l'enseignement de l'anglais langue seconde.
C'est là un chantier où nous avons été très
actifs au cours des deux dernières années. Le travail est
maintenant presque terminé. J'ai eu l'occasion de parcourir le nouveau
projet de programme d'enseignement de l'anglais langue seconde; nous sommes
maintenant à y apporter les dernières retouches et, si tout va
bien, je pense bien être en mesure de publier ce nouveau programme de
l'enseignement de l'anglais langue seconde dans les prochaines semaines. Je
pense que, là aussi, il est très important que nos
élèves francophones, en particulier, puissent avoir tous les
moyens et outils qui leur permettront de maîtriser cette langue aussi
importante pour les citoyens qui, pour quelque raison que ce soit, raison de
loisirs ou raison de communication ou raison de formation, ont
intérêt à connaître cette langue à ce point
importante.
Quant à l'enseignement de l'anglais langue maternelle, là
aussi le chantier est très actif; les travaux sont quand même
moins avancés, mais je pense que nous serons en mesure, l'an prochain,
de présenter un proqramme qui a été préparé,
il va sans dire, par des professionnels anglophones et qui répondra,
là aussi, aux exigences de la didactique en même temps qu'aux
exigences légitimes, d'un autre ordre, des parents anglophones.
Le député de Marguerite-Bourgeoys a aussi parlé de
l'enseignement des sciences au primaire et au secondaire. Voilà un autre
domaine qui nous préoccupe beaucoup. J'en ai parlé
personnellement dans le livre blanc sur le développement scientifique.
J'ai moi-même sonné quelques cloches d'alarme à cet
égard. J'ai émis des souhaits. J'ai fait des recommandations qui
ont été reprises à son compte par le gouvernement. Mais
dès avant la parution de ce livre blanc sur le développement
scientifique, le ministère de l'Éducation avait commencé
une remise en question du programme complet de l'enseignement des sciences au
primaire ou au secondaire - et j'en profite pour le souligner, il faudrait le
souligner pour tous les programmes qui sont en révision - en
collaboration très étroite avec les professeurs de sciences, avec
l'Association des professeurs de sciences.
Ce travail a déjà abouti jusqu'à un certain point,
puisque nous voyons, par exemple, dans les nouveaux règlements
pédagogiques que l'enseignement des sciences naturelles est maintenant
obligatoire au niveau primaire et ce, à tous les degrés du niveau
primaire. Quant au niveau secondaire, les nouveaux régimes
pédagogiques comportent, pour la première fois, un enseignement
obligatoire de l'écologie dès la première année, un
enseignement obligatoire de la biologie dès la troisième
année et aussi une obligation d'avoir réussi, soit en biologie,
soit en chimie, soit en physique pour obtenir le certificat d'études
supérieures. Je pense que c'est là un progrès assez
remarquable par rapport au régime pédagogique antérieur.
Je ne dis pas que nous en sommes satisfaits, mais voilà quand même
une première étape, la deuxième étape comportant,
bien sûr, l'élaboration de programmes, encore une fois, plus
précis, mieux adaptés au développement du savoir, en
même temps qu'à la didactique.
Je veux aussi souligner qu'il s'agit ici non pas simplement de
transmission d'un savoir scientifique, mais d'une véritable
éducation scientifique. Ce que nous visons dans ces régimes
pédagogiques et dans cet enseignement, c'est non pas simplement
d'informer l'élève d'un savoir de plus en plus
considérable, mais également une utilisation plus grande de ce
savoir dans la vie quotidienne, dans l'insertion sociale, dans la formation
générale de la personnalité. Donc, comme je le disais,
d'ailleurs, dans mon exposé préliminaire, il ne s'agit pas
simplement de remplir une tête avec un savoir constitué, mais de
contribuer à la formation générale de l'étudiant,
en même temps qu'à son insertion professionnelle.
Ces programmes, nous y travaillons comme à ceux que j'ai
déjà mentionnés. En chantier, nous avons actuellement un
programme portant sur la biologie, l'écologie, la chimie, la physique au
secondaire et je pense que l'état des travaux est assez avancé
pour que je puisse dire qu'il y a de bonnes chances que ces programmes soient
lancés au cours de l'année scolaire 1981-19B2. Je rappelle aussi
que le nouveau programme des sciences de la nature au primaire est
déjà terminé et est déjà rendu public. Nous
en sommes maintenant rendus à la phase de l'implantation.
Encore une fois, M. le Président, il s'agit d'un progrès
réel, même important. Je ne dis pas qu'il faille s'en contenter;
nous lisons, comme tout le monde, les critiques qui sont faites à notre
enseignement des sciences actuellement. Ces critiques sont soigneusement
analysées et la révision se poursuit, en même temps que
nous continuons
à travailler à l'élaboration de nos programmes.
Le député de Marguerite-Bourgeoys a abordé aussi un
problème qu'il estime, j'en suis sûr, très important et que
j'estime également important, celui de la restructuration scolaire. Je
suis sûr qu'il l'estime très important puisgu'il est membre d'un
parti qui a déjà présenté un projet de loi
là-dessus à l'Assemblée nationale il y a quelques
années, et qui en a fait adopter un autre, la loi 71... (16 heures)
M. Lalonde: Je n'étais pas là.
M. Laurin: ...je ne suis donc pas étonné qu'il ait
toujours présente à l'esprit cette préoccupation. Je dois
dire qu'ayant participé à la discussion de ces deux projets de
loi, j'épouse ses préoccupations. Il ne s'agit donc pas pour moi
de nier l'importance de ce problème, mais je ne voudrais pas cependant
que le député pense que le problème de la restructuration
scolaire ne se pose que pour l'île de Montréal, je pense qu'il se
pose à l'échelle du Québec. Peut-être que,
d'ailleurs, il faudrait maintenant poser ce problème autrement. Il y a
toujours danger à identifier un problème en particulier du fait
précisément qu'il a fait l'objet de projets de loi
antérieurs qui n'ont pas contribué à le régler
d'une façon importante ou significative. II y a danger à
l'identifier, à lui donner une étiquette et à continuer
à le voir sous le même angle qu'il se posait à une
époque antérieure.
Je crois pour ma part qu'il y a danger à considérer
séparément en soi ce problème de la restructuration. Il
importerait plutôt, je crois, de le situer dans un contexte plus
existentiel, dans un contexte plus social, le contexte d'une
société qui est en évolution, qui est marquée par
l'adoption d'autres lois, comme, par exemple, la charte du français au
Québec, qui en a modifié certaines données, ou la loi 57,
qui a redistribué les bassins de la taxation des municipalités et
des commissions scolaires. Il y aurait surtout danger à le
considérer sans tenir compte de cet effort fondamental et
considérable que nous avons fait depuis trois ou quatre ans pour
repenser le problème de l'école et de ses orientations.
Je pense que c'est dans ce sens qu'il faut poser le problème des
structures scolaires. En effet, M. le Président, il ne faudrait quand
même pas mettre la charrue avant les boeufs. Les structures, dans ma
lecture de la vie, ont toujours été des instruments au service
d'une fin, au service d'une orientation. Les structures ont toujours
constitué une modalité, une sorte de canal d'acheminement d'une
philosophie, une sorte de moule où prenait place une philosophie, et,
à considérer les structures sans tenir compte de la vie telle
qu'elle évolue, telle qu'elle doit se vivre, je pense que nous courrions
le risque d'aboutir immédiatement à une impasse.
Il est vrai que nous pensons aux structures scolaires. Nous ne pouvons
pas ne pas y penser, surtout quand, comme le dit le député de
Marguerite-Bourgeoys, nous constatons que l'intérêt des citoyens
à l'égard des élections scolaires est tellement mince, et
que aussi peu de citoyens se dérangent pour élire leurs
commissaires. Nous sommes obligés aussi d'y penser toutes les fois que
nous négocions des conventions collectives. Nous sommes obligés
d'y penser toutes les fois que nous les consultons pour les orientations
fondamentales de l'éducation et que nous discutons avec eux de
règles budgétaires.
Notre pensée sur les structures scolaires informe donc toutes nos
autres activités. Nous sommes particulièrement obligés d'y
penser depuis quelques années en vertu de la baisse des
clientèles scolaires qui a obligé les commissions scolaires
à fermer un nombre croissant d'écoles. Nous sommes obligés
aussi d'y penser, d'y faire face lorsque nous sommes forcés de
considérer le problème de l'étalement urbain, de la
transhumance des populations, des centre-ville vers les banlieues, du retour
des habitants de certaines banlieues vers les centre-ville en vertu d'autres
développements. Donc, il est sûr que ce problème des
structures scolaires constitue pour nous une préoccupation constante.
Nous y travaillons actuellement parce que nous n'avons pas le choix de ne pas y
travailler, mais nous voulons y travailler, encore une fois, en
considérant que les structures doivent être au service d'une
conception, d'une vision, d'une philosophie de l'éducation. Il nous faut
partir, encore une fois, de l'enfant, de l'élève, adulte ou
enfant, en situation d'apprentissage.
Nous devons y penser à partir de la nature humaine, telle que
nous la connaissons, des besoins de l'élève et de
l'étudiant, à partir de l'environnement éducatif dont
l'élève ou l'étudiant a besoin pour se développer.
Nous devons y penser aussi en raison de lois, aussi bien biologiques que
psychologiques, qui veulent que, dans l'environnement éducatif, la
personne la plus importante, c'est le parent, et qu'il importe de tenir
rapproché le plus longtemps possible l'élève et surtout
l'enfant de son milieu d'origine initial, le milieu le plus important, le plus
fécondant qu'est la famille. C'est pour cette raison que depuis quelques
années - et même avant nous - le gouvernement s'oriente de plus en
plus vers une décentralisation des structures, mais aussi une
décentralisation des décisions.
Depuis deux ou trois ans, nous travaillons encore plus
intensément à mettre au point cette conception de
l'éducation, du
développement de l'enfant, de l'élève, de
l'environnement éducatif, des services personnels, collectifs dont
l'enfant a besoin pour se développer. C'est en fonction de cette
conception, de cette philosophie que nous allons aborder ensuite le
problème des structures en nous posant la question: Quelles seraient les
structures les plus idoines, les plus appropriées pour que cet objectif
que nous avons puisse s'incarner, se cristalliser, pour que cet objectif puisse
être atteint dans le minimum de temps, avec le maximum
d'efficacité? Quelles seraient les structures qui nous permettraient de
mettre en place le meilleur environnement éducatif? Quelles seraient les
structures qui nous permettraient de garder le plus longtemps possible l'enfant
près de ses parents? Quelles seraient les structures qui nous
permettraient également de faire jouer à l'école son
rôle de pôle social, de ferment social, de pôle communautaire
d'activité? Si nous abordons le problème des structures dans
cette optique, peut-être éviterons-nous les impasses ou les
pièges dont je parlais tout à l'heure.
En même temps que nous nous poserons ces questions, nous nous
poserons également des questions sur les structures que nous
possédons à l'heure actuelle. Depuis les années que nous
vivons avec ce système, je pense que nous avons pu nous rendre compte de
ses lacunes, de ses inconvénients, des problèmes d'arrimage,
d'intégration qu'il peut poser, mais nous ferons, à l'occasion de
cette réflexion, le tour des constatations que nous avons pu faire
depuis une vingtaine ou une dizaine d'années, particulièrement au
cours des dernières années. C'est à la lumière des
critiques ou des lacunes que nous avons déjà observées que
nous pourrons également éclairer notre réflexion, y
apporter un autre pan, un autre élément et que nous serons
peut-être en mesure, lorsque nous serons prêts, de penser à
des structures, encore une fois, qui serviront plus exactement, plus
fidèlement, plus rapidement aussi les objectifs que nous nous sommes
fixés et que vous nous avez dit tout à l'heure partager.
Vous avez parlé tout à l'heure d'études formelles,
il n'y en a pas à l'heure actuelle. C'est plutôt une
préoccupation que nous avons, qui s'exprime surtout par des discussions,
des réflexions, des échanges et je pense que c'est là la
meilleure façon de procéder. En temps et lieu, le fruit
mûrira et nous verrons si, à ce moment-là, ce fruit
mérite d'être présenté aux instances
gouvernementales et à la population.
Il est évident que ce problème est lié à un
autre que vous avez soulevé, celui des élections scolaires. Il
est vrai que la participation est encore minime, peu importante. On peut se
poser des questions sur ce problème très précis. Serait-ce
que les commissaires se sont cantonnés dans un rôle trop exclusif
de gestionnaires financiers, dans un rôle trop exclusif
d'administrateurs? Je parle d'une façon générale,
évidemment, sans vouloir faire des particularités. Je sais que
certaines commissions scolaires se préoccupent intensément de
l'aspect pédagogique, de la vie pédagogique, de
l'éducation entendue dans tous les sens du terme, mais peut-être y
a-t-il lieu quand même de poser la question, surtout à la
lumière de tout ce qui a été écrit et dit depuis
quelques années sur la part de plus en plus grande des
responsabilités d'ordre social et pédagogique que pourraient et
devraient assumer les commissions scolaires.
On peut se demander d'ailleurs si cet intérêt des parents
pour les élections scolaires va se maintenir au niveau que nous
connaissons actuellement. S'il devait se maintenir, je pense que ce serait
là un signe comme un autre d'insatisfaction de la population à
l'endroit des commissions scolaires ou du moins du rôle qu'elle voit
jouer aux commissions scolaires, ou peut-être le signe d'une
insatisfaction plus profonde et le désir de structures nouvelles, comme
je le disais tout à l'heure, qui leur permettraient d'être
davantage présents du lieu décisionnel ou des lieux
décisionnels les plus importants.
En ce qui nous concerne, en tout cas au gouvernement, nous entendons
continuer à considérer les commissions scolaires comme des
partenaires à part entière, des agents essentiels du
développement scolaire et du développement pédagogique.
Nous entendons travailler en consultation étroite avec elles et je tiens
à leur redire le besoin que nous avons de leur collaboration de tous les
instants.
Vous avez soulevé aussi le problème de l'éducation
sexuelle. C'est là un problème qui a fait couler beaucoup d'encre
au cours des dernières années et en particulier au cours des
derniers mois. Je remercie le député de Marguerite-Bourgeoys de
l'avoir abordé de façon aussi sereine. À son exemple,
j'essaierai de le dépassionner dans toute la mesure du possible, mais je
dis bien dans toute la mesure du possible, car la limite est vite atteinte dans
ce domaine, puisque l'éducation sexuelle touche au plus intime de notre
être, que l'existence même de la sexualité, sans parler de
son exercice, ayant fait l'objet depuis des siècles d'injonctions
morales, de chapitres dans tous les traités théologiques, il
n'est donc pas possible, évidemment, d'aborder ce sujet sans susciter
des émois profonds et intimes. (16 h 15)
II reste cependant que l'éducation sexuelle est
nécessaire. On peut dire que ce sont les parents qui en ont la
responsabilité première, et je pense qu'il me sera facile d'avoir
l'unanimité de la commission là-dessus, puisqu'elle fait partie
intégrante de l'éducation initiale, que cette
éducation
commence au berceau et que les moments forts de cette éducation
sont entre la première et la sixième année de la vie,
moment où l'enfant ne va pas encore ou rarement à l'école.
Donc, il est bien entendu que le gouvernement n'entend pas contester cette
responsabilité première du parent quant à
l'éducation de son enfant à l'assomption de sa différence
sexuelle, et de tout ce qu'elle implique, et de tout ce qu'elle comporte.
Je pense qu'il sera aussi facile de faire l'unanimité sur un
autre point. C'est que l'éducation sexuelle ou l'éducation
à la sexualité ne peut pas être séparée de la
formation ou du développement général ou global de
l'enfant. Fernand Séguin disait récemment qu'il n'y a pas
à s'en étonner, nous sommes notre corps et, en ce sens-là,
il nous faut connaître notre corps. Nous sommes également autre
chose que notre corps. Nous sommes chacune de ses autres composantes qui
constituent la nature humaine. Nous sommes notre esprit, nous sommes notre
âme, nous sommes nos sentiments. Mais il demeure que la différence
sexuelle imprime une coloration en même temps qu'un rôle social
tout à fait particulier qui doit être connu et qui doit être
intégré, qui fait partie du développement. C'est en ce
sens que l'éducation sexuelle doit trouver place à
l'intérieur d'une éducation intégrale ou globale où
doivent être connues, pour une intégration éventuelle, les
autres composantes de notre nature. C'est la raison pour laquelle je
considérerais impensable que l'éducation sexuelle se limite
à une instruction sexuelle et impensable également une
éducation sexuelle qui ne s'arrimerait pas avec d'autres volets de
l'éducation et en particulier avec celui de la formation personnelle et
de la formation sociale.
Il reste cependant que cette éducation sexuelle, dont les parents
ont la première responsabilité et dont un temps fort sont les
premières années de la vie, ne s'effectue pas toujours dans les
meilleures des conditions. Beaucoup de parents ne réussissent pas
à transmettre a leurs enfants les éléments cognitifs
nécessaires en vertu de conditionnements, ou soit à cause d'un
savoir limité, ou en vertu de tabous aussi, qui peuvent constituer une
censure qui bloque la communication, laissant l'enfant impuissant devant des
questions qu'il ne peut s'empêcher de se poser, surtout avec une
curiosité qui lui est naturelle. Il est donc important, pour ne pas dire
essentiel, que l'école, à son tour, prenne le relais des parents.
Il faut que l'école puisse transmettre à l'enfant des questions
qui lui viennent tout naturellement et surtout les réponses à ces
questions, d'autant plus que nous vivons dans un monde où les
instruments de communication, les médias de communication sont
très importants, très développés et apportent
à l'enfant soit des réponses ou des non-réponses.
Nous savons aussi que l'enfant ne vit pas seul dans la
société. Il est entouré d'autres personnes qui peuvent
avoir leurs problèmes, leurs difficultés avec leur propre
sexualité et qui peuvent constituer, à l'occasion, des agents
agresseurs pour l'enfant, a quelque sexe qu'il appartienne.
Pour que l'éducation à la sexualité se fasse dans
les meilleures conditions, il importe donc que l'école puisse donner un
savoir, puisse intégrer un savoir spécifique sur la
sexualité, intégrer ce savoir avec les autres que l'enfant doit
connaître sur le plan personnel et social, et c'est là l'objet.
C'est un savoir également qui doit le protéger contre les
agressions éventuelles, un savoir qui lui permettra de se
connaître et de se développer dans les meilleures conditions. Ce
sont là toutes les raisons pour lesquelles l'école doit assumer
un rôle important bien que complémentaire à celui des
parents. C'est la raison pour laquelle le ministère de
l'Éducation a assumé ses responsabilités par la
préparation d'un premier projet de programme en 1976, projet de
programme qui a été laissé pour ses modalités
d'implantation aux commissions scolaires. Une cinquantaine l'ont fait avec un
succès relatif puisqu'une enquête récente nous a fait
savoir que les commissions scolaires dans leur très grande
majorité ne sont pas satisfaites des programmes actuels, facultatifs,
d'éducation sexuelle et qu'elles demandent au ministère d'assumer
plus largement ses responsabilités dans ce domaine.
C'est à la suite de ces demandes légitimes du milieu que
le ministère a préparé un premier projet qui a
été soumis à la lecture comme tous les autres projets de
spécialistes en la matière et qui a été aussi
expérimenté dans un très petit nombre de commissions
scolaires et soumis à la consultation dans un certain nombre d'autres.
À la lumière des ces opinions, avis, expérimentation,
commentaires, nous achevons actuellement la rédaction d'un
deuxième projet. Je pense que, lorsqu'il sera connu, on évitera
de répéter les aberrations, les faussetés
démagogiques ou maladives qui ont été colportées au
cours des derniers mois.
J'entends aussi non seulement soumettre ce projet aux voies usuelles
d'examen, d'analyse, de critique et d'approbation du ministère, qui
culminent dans la présentation du projet au comité catholique et
au comité protestant, mais j'entends également le soumettre
à la réflexion critique d'un certain nombre de
représentants de la population qui l'étudieront sous tous les
angles, quant aux objectifs, quant au contenu, quant aux modalités
d'implantation, quant au rôle respectif qu'y doivent jouer les parents,
les enseignants, le personnel non enseignant, les
comités d'école et aussi quant à son
caractère facultatif ou obligatoire.
J'annonce aujourd'hui la création de ce comité-conseil qui
sera saisi du projet dès qu'il sera terminé et qui me fera
rapport d'ici quelques mois. J'annoncerai bientôt la composition de ce
comité-conseil.
Donc, nous entendons prendre toutes les précautions, toutes les
garanties, de toutes les assurances nécessaires pour que ce projet
rejoigne exactement, fidèlement les préoccupations des parents,
les besoins des enfants. Je pense qu'en cela, nous serons parfaitement
conformes aux orientations exprimées récemment dans le document
qu'ont fait paraître les évêques du Québec. Aussi,
j'entends prendre toutes ces assurances pour que le programme atteigne
véritablement les objectifs que nous nous fixons et qui sont le
développement intégral, harmonieux de l'enfant, qui lui permettra
d'assumer sa différenciation sexuelle dans toute ses dimensions, qui lui
permettra de se développer harmonieusement et qui lui permettra aussi de
se protéger contre les dangers de tous ordres qui existent dans ce
domaine, que l'on parle des maladies physiques ou morales qu'il faut
éviter ou qu'il s'agisse des agressions dont je parlais tout à
l'heure, ou qu'il s'agisse aussi de toutes ces difficultés qui guettent
l'harmonisation effective, pratique des divers rôles sexuels en
société.
Le député de Marguerite-Bourgeoys a abordé
également le problème de la loi 71 et de son contenu. Je rappelle
que la loi 71, qui a été adoptée, il y a quelques
années, avait des objectifs très précis, et je comprends
que le député de Marguerite-Bourgeoys s'inquiète de savoir
en quelle mesure nous avons pu travailler à la réalisation de ces
objectifs.
Le but premier de la loi 71, c'était de favoriser la
réalisation d'un projet éducatif pour chaque école et d'y
assurer la participation des élèves, des parents, du personnel de
l'école et de la commission scolaire. Pour la première fois,
l'école y était définie en vue de donner à cette
école un statut. Dans la loi, on voit que l'école doit devenir
une entité institutionnelle à l'activité de laquelle,
encore une fois, participent tous les agents et intervenants de
l'école.
Dans ce projet de loi, nous avions complété d'autres lois
antérieures, en profitant de l'expérience des dernières
années, pour mieux situer le rôle du comité d'école,
pour donner à ce comité d'école une plus grande souplesse
et pour mieux définir non seulement sa composition, mais son
fonctionnement. Nous avions aussi accordé une grande importance au
directeur d'école, nous avions tenté de préciser ses
responsabilités.
Je pense qu'on peut dire, M. le Président, qu'après deux
ans, les objectifs que se fixait la loi 101 n'ont pas été
atteints, mais qu'ils sont en voie de réalisation avec un succès
inégal...
Une voix: 71.
M. Laurin: 71?
M. Lalonde: Vous avez dit 101.
M. Laurin: 71.
M. Lalonde: II se comprend. Nous aborderons cela au programme
11.
M. Laurin: ...selon les régions et selon les secteurs.
Je pense que je puis dire que plusieurs écoles sont en train de
travailler maintenant à leur projet éducatif, projet
éducatif que nous avons défini par des publications qui en
étudient chacun des aspects et par d'autres publications
également qui se voulaient plus pédagogiques et qui indiquaient
certaines façons de procéder pour que ce projet éducatif,
propre à chaque école, répondant aux besoins de son
milieu, puisse devenir un sujet de préoccupation commun pour tous les
agents de l'école. Dans plusieurs régions, dans plusieurs
écoles, les projets éducatifs sont en bonne voie
d'élaboration - je ne dis pas de réalisation - mais
d'élaboration et c'est là pour moi ce qui est le plus important.
Je pense que le message a été compris. Je pense que ce besoin
auquel correspond le projet éducatif s'est incarné dans la
concertation qui est nécessaire pour cette élaboration du projet
éducatif.
Le projet de loi no 71 prévoyait une structure: le conseil
d'orientation. Je pense que sur ce point, nous avons eu moins de succès.
Remarquons que la réalisation du projet éducatif n'est pas
nécessairement liée à la mise sur pied d'un conseil
d'orientation, bien qu'elle puisse y aider considérablement, bien
qu'elle puisse le favoriser. Mais je tiens quand même à
établir une distinction entre la visée essentielle de la loi, qui
était la mise en place d'un projet éducatif, et le conseil
d'orientation qui, tout en étant important, souhaitable, constitue,
à mon avis, une structure, donc, quelque chose qui doit être mis
au service de la visée du projet éducatif. (16 h 30)
Comme je le disais tout à l'heure, nous avons eu moins de
succès dans la mise en place de ces conseils d'orientation. Les
syndicats d'enseignants y ont vu ou un piège, ou une menace, y ont vu
peut-être une dilution éventuelle de leur rôle. Il faut bien
comprendre que, jusqu'ici, ce sont les syndicats d'enseignants qui ont
été les interlocuteurs privilégiés du gouvernement
dans la négociation des conventions
collectives, conventions collectives par le biais desquelles ils avaient
l'intention et la volonté de travailler à une amélioration
de la qualité de l'école. Ils ont donc vu dans ce conseil
d'orientation un moyen qui risquait de court-circuiter leur action dans
d'autres domaines, qui risquait de diluer leur importance ou leur place ou leur
statut au sein même de l'école et ils se sont opposés
à ce que leurs représentants participent à la mise en
place de ces conseils d'orientation. Cette réticence ou cette
opposition, bien qu'exprimée d'une façon officielle et
générale, n'a quand même pas empêché la
constitution d'un certain nombre de conseils d'orientation, mais je dois avouer
que le nombre en est encore limité et loin de ce que nous pouvions
attendre.
En ce qui concerne les comités d'école, cependant, je
pense qu'il y a lieu de se féliciter de l'évolution de la
situation. Je participais, en fin de semaine, au congrès de la
Fédération des comités de parents et j'y ai appris avec
joie qu'au moment où nous nous parlons 40 000 parents participent
continuellement, au sein de leur comité d'école, à la vie
de l'école au moyen de réunions hebdomadaires, en
s'insérant dans le vécu de l'école, en participant
très souvent aux décisions très importantes qui se
prennent au niveau de l'école.
Dans notre loi, nous avions voulu être souples, nous avions
donné une liste des sujets sur lesquels le comité d'école
devait être consulté par la commission scolaire. Je les
énumère juste pour fins de rappel: les orientations propres
à l'école, le projet éducatif et son contenu, les
modalités d'application du régime pédagogique, le choix
des manuels scolaires, du matériel didactique, le choix des
activités éducatives, la réglementation relative à
la conduite des élèves, la détermination des
critères pour l'engagement du directeur, les modalités
d'intégration des enfants éprouvant des difficultés
d'adaptation, les mesures de sécurité, et ainsi de suite.
Pour nous, cette liste n'était pas exhaustive; pour nous, ceci ne
constituait pas une obligation de s'en tenir à cette liste que je viens
d'énumérer. Le comité d'école peut y ajouter, peut
en retrancher; en somme, il peut exiger de la commission scolaire d'être
consulté sur les points qu'il déterminera lui-même. On me
dit que les comités d'école ont pris cette responsabilité
très au sérieux et qu'effectivement ils sont maintenant
consultés par les commissions scolaires sur la plus grande partie des
points que je viens de mentionner, en particulier sur celui des fermetures
d'école. Je pense que c'est là un progrès dans cette
direction que j'esquissais ce matin de l'école vue comme un lieu de
concertation, un lieu de participation. Je pense que ceci nous oblige à
continuer dans le même sens et à accorder à l'école
une importance de plus en plus grande, à l'école comme
entité institutionnelle.
Dans cette loi 71, nous parlions aussi du directeur d'école. Je
pense qu'il convenait enfin de mieux préciser son rôle, ses
fonctions, ses responsabilités. Le directeur d'école est le
premier des enseignants, on l'a déjà appelé comme cela
puisqu'on disait de lui "le principal"; il est donc investi d'abord d'une
mission éducative et il joue à ce titre un rôle
d'animateur, un rôle de ferment dans l'école. Je pense qu'on ne
rappellera jamais assez aux directeurs d'école que voilà leur
mission essentielle, leur mission principale. Mais il arrive que le directeur
d'école se voie aussi investi par la commission scolaire d'un rôle
administratif qui est devenu de plus en plus important au fur et à
mesure que l'éducation devient plus complexe, dans tous les sens du
terme. Il est donc obligé également d'assumer cette fonction
administrative. Elle est d'autant plus complexe que les personnels se sont
multipliés au sein de l'école, non seulement avec des
spécialistes de chacune des disciplines, mais également nous
avons vu arriver dans l'école du personnel non enseignant, qu'il
s'agisse de l'infirmière, qu'il s'agisse du psychologue, de
l'orthopédagogue, qu'il s'agisse aussi du personnel de soutien, qui
jouent un rôle également important dans l'école.
Il y a donc là un rôle administratif en même temps
qu'humain très important. Il faut appliquer à chacun de ces corps
d'emploi les dispositions contenues soit dans les conventions collectives, soit
dans les directives gouvernementales ou les directives de la commission
scolaire locale ou régionale. C'est un problème complexe,
difficile, et il convient que ce rôle du directeur d'école soit
précisé, et aussi, en même temps, qu'on lui donne les
moyens de se préparer à assumer ces fonctions par des cours de
perfectionnement qui, à mon avis, devraient être plus
étendus, plus nombreux, plus approfondis. Je rejoins ici la
préoccupation du député de Saint-Henri, malgré
cette tâche administrative qui ne cesse de s'accroître, je pense,
en effet, qu'il faudrait toujours réserver une place primordiale, pour
ne pas dire essentielle, à la première fonction du directeur
d'école, qui est d'abord une fonction éducative et c'est dans ce
sens que nous poursuivons nos négociations avec la
Fédération québécoise des directeurs
d'école.
Pour compléter ce tour d'horizon de la loi 71, sans pouvoir
rapporter progrès comme je le souhaiterais sur tous les
éléments, je pense qu'elle constitue une étape vers la
réalisation d'un objectif que nous nous sommes fixé, de meilleure
qualité de l'éducation, de contribution, de participation plus
importante et améliorée de la part des parents à la
direction de l'école, à la vie de
l'école, au vécu de l'école, vers la mise en place
d'un projet éducatif qui commence à prendre forme dans un
très grand nombre d'écoles, tout ceci devant nous mener, j'en
suis sûr, vers cette conception de l'école que j'esquissais tout
à l'heure, comme lieu principal de l'activité éducative en
même temps que pôle communautaire et ferment social.
Le député de Marguerite-Bourgeoys et la
députée de Jacques-Cartier ont aussi abordé le
problème de l'intégration scolaire des enfants en
difficulté. Le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas fait
une distinction que j'aurais aimé lui voir faire, car il y a des
degrés, il y a des niveaux dans les déficiences ou les handicaps
dont sont affectés les enfants. On ne peut, par exemple, adopter des
mesures identiques ou similaires à l'endroit des enfants lourdement
handicapés et à l'endroit des déficients légers. Je
pense que chacune de ces catégories appelle un traitement
différent.
Le ministère de l'Éducation, autant sous l'ancien
gouvernement que sous le gouvernement actuel, s'est toujours
intéressé grandement au cas des enfants lourdement
handicapés, car nous partageons sûrement cet objectif et cette
philosophie, il est bien suffisant qu'un enfant soit affligé par la
nature d'un handicap sans qu'on y ajoute par la négligence ou l'incurie
dont il pourrait être l'objet dans une des dimensions les plus
fondamentales de son développement, c'est-à-dire
l'éducation.
En ce qui concerne les handicapés lourds, je pense que nous avons
continué depuis quatre ans l'effort entrepris dans les années
antérieures. Nous tentons le plus possible de les scolariser, de leur
apporter cette chance, cet élément indispensable de
développement que constitue une éducation de qualité.
Malgré les handicaps dont ils souffrent, que ce soit un handicap
sensoriel -je pense aux visuels, aux aveugles, aux sourds - que ce soient des
handicaps moteurs, que ce soient des handicaps neurologiques, que ce soient des
handicaps affectifs ou des handicaps psychologiques, nous tentons de les
scolariser par tous les moyens, mais il est évident que, lorsque le
handicap est trop lourd, nous ne pouvons pas scolariser ces enfants dans des
classes régulières. Même si c'est là notre
visée essentielle pour des fins d'insertion sociale, de
développement social, il est évident que nous ne pouvons pas le
faire pour tous et particulièrement pour le cas des handicapés
lourds.
Nous avons donc, pour un certain nombre d'entre eux qui sont plus
profondément affectés, gardé des classes spéciales,
en les dotant de tous les moyens nécessaires. Voilà justement un
secteur où il faut multiplier les moyens et, Dieu merci, la science nous
procure des instruments, des outils et un savoir de plus en plus
considérables.
Je ne pourrais pas dire au député la somme d'argent que
nous consacrons par élève à ces étudiants
lourdement handicapés, mais je ne crois pas être loin de la
vérité en disant que nous y consacrons probablement trois fois
plus d'argent que pour l'élève régulier, justement parce
que nous tenons, dans un souci d'égalité des chances et de
justice, à réparer, dans toute la mesure du possible, leur
handicap naturel.
Grâce à l'expérience que nous avons poursuivie dans
ce domaine depuis quelques années et également aux
expériences pilotes que nous poursuivons, nous en arrivons au point
où nous serons bientôt en mesure de mettre sur pied des plans de
services définis pour cette catégorie d'élèves.
Dans ce domaine, nous travaillons en liaison étroite avec le
ministère des Affaires sociales et, comme je viens de le dire, nous
atteindrons le point où nous serons en mesure probablement cette
année déjà, et davantage l'an prochain - de mettre sur
pied des plans de services qui répondront d'une façon
appropriée aux besoins de ces élèves, qu'il s'agisse des
enfants autistiques, des enfants lourdement handicapés sur le plan
sensoriel ou même d'enfants qui souffrent de handicaps multiples, ce qui
est véritablement le cas le plus grave.
Lorsque nous parlons des déficients légers, la situation
est bien différente. Là, nous entendons poursuivre, d'une
façon beaucoup plus affirmée, beaucoup plus
générale, les objectifs que nous nous sommes fixés, qui
sont, d'abord, d'éviter la marginalisation, mais, plus positivement,
l'intégration aux classes régulières des déficients
légers.
Je pense que, grâce aux efforts qui ont été faits au
cours des deux ou trois dernières années et qu'annonçait
notre énoncé de politique, il y a déjà près
de 30 000 élèves qui ont pu être intégrés aux
classes régulières. J'espère bien que la progression va
continuer dans ce domaine. Il n'y a pas de place, pour ces
élèves, il n'y a pas de place pour les voies
allégées que nous avons connues, il n'y a pas de place pour la
ségrégation, il n'y a pas de place pour la marginalisation.
Je rappelle cependant au député de Marguerite-Bourgeoys
que nous ne sommes pas les seuls responsables de ces programmes. Les
commissions scolaires ont également un rôle important à
jouer. Et particulièrement, ce sont les commissions scolaires qui sont
responsables des modalités de l'intégration des déficients
léqers dans les classes régulières, à même
les enveloppes financières que nous leur fournissons, enveloppes
financières maintenant régies par la méthode du budget
fermé, enveloppes financières où il y a
transférabilité possible
d'un poste à l'autre. Donc nous comptons sur les commissions
scolaires pour que cette intégration aux classes
régulières continue de s'effectuer de la façon la plus
rapide possible, la plus efficace possible et la plus harmonieuse possible. (16
h 45)
Je sais que nous entendons assez souvent des plaintes à cet
effet. Il semble que, dans certaines écoles ou dans certaines
régions, cette intégration ne corresponde pas au tableau que je
viens de dresser, soit que l'on dise que l'intégration ne s'y fasse pas
ou qu'au contraire l'intégration se fasse en ne ménageant pas les
étapes de transition ou en ne fournissant pas aux enseignants les
mesures d'appui ou de soutien que pourraient leur procurer, par exemple,
certains personnels spécialisés non enseignants.
Encore une fois, bien que nous entendons assumer notre
responsabilité dans ce domaine - et nous rappellerons à cet
égard nos positions antérieures - il reste que nous avons besoin
de la participation des commissions scolaires qui pourront, à cet
égard, utiliser les enveloppes que nous leur dispensons et qui nous
paraissent suffisantes. Il est possible qu'en période de compressions
les commissions scolaires puissent ne pas s'estimer satisfaites du personnel de
soutien dont elles peuvent disposer à cet égard. Mais il faudrait
qu'elles nous en fassent la preuve. De toute façon, elles ont, encore
une fois, une certaine latitude à l'intérieur du budget qu'elles
ont et il leur revient d'affecter à ce secteur, de
préférence à un autre, le personnel ou les mesures
qu'elles estimeraient indispensables pour cette intégration harmonieuse
des déficients légers.
Je rappelle aussi au député de Marguerite-Bourgeoys que,
dans ce domaine, dans ce secteur, nous avons mené, depuis deux ans, 117
projets pilotes qui intéressent surtout le secteur des déficients
légers, mais aussi parfois certains élèves affectés
de handicaps plus lourds. À la fin de ces deux années où
nous avons mené ces projets pilotes, arrive pour nous le moment de les
analyser, de les critiquer, d'en tirer les conclusions qui s'imposent. Dans ce
domaine, également, nous aboutirons à la mise en place de plans
de services qui nous permettront, je l'espère en tout cas, d'atteindre
encore plus rapidement les objectifs que nous nous sommes fixés.
Cette année, nous procéderons à l'analyse de ces
117 projets pilotes. Ceux qui bénéficiaient de ces projets
pilotes continueront à en bénéficier en dépit des
compressions budgétaires. Après cette période d'analyse,
nous reprendrons, je l'espère, une marche en avant qui nous rapprochera
de l'atteinte de notre objectif.
Le député de Marguerite-Bourgeoys, aussi, a touché
le problème de l'enseignement professionnel. Voilà un autre
problème qui ne date pas d'aujourd'hui, qui est très important,
qui a donné lieu à...
M. Lalonde: Est-ce que je pourrais interrompre le ministre, juste
avant qu'il aborde un nouveau sujet?
M. Laurin: Oui.
M. Lalonde: Nous avons écouté et j'écoute
encore avec beaucoup d'intérêt les propos du ministre, même
si cela fait une heure et quelques minutes.
Le temps est assez limité. Je voudrais simplement être
sûr que tous les autres membres sont d'accord pour qu'on procède
comme cela. En ce qui me concerne, cela me satisfait. Le ministre pourrait
peut-être nous dire à peu près vers quelle heure il va
pouvoir finir.
M. Laurin: J'essaie de ne pas trop m'attarder sur chaque sujet,
mais, comme vous avez abordé plusieurs sujets, j'essaie d'y
répondre le plus adéquatement possible.
M. Lalonde: D'accord?
M. Laurin: L'enseignement professionnel a donné lieu
à un premier projet de politique du ministère de
l'Éducation qui a fait l'objet déjà d'une très
vaste consultation dans les milieux intéressés. Nous avons
reçu ces consultations, mais, malgré l'ampleur de cette
consultation, nous avons bien été obligés de constater que
nous étions loin de l'unanimité. Il y avait des points de vue
contradictoires, opposés, divergents; il y avait aussi de profondes
nuances dans les opinions exprimées selon qu'elles provenaient de tel ou
tel secteur de l'opinion. C'est pourquoi nous avons jugé bon de
préparer un nouveau projet dont je vais vous parler tantôt. Mais
il reste, cependant, que la consultation nous a aussi permis de dégager
des consensus, certains points sur lesquels toutes les opinions se
rejoignaient, et c'est ce consensus qui nous a permis d'introduire dès
maintenant dans les régimes pédagogiques les premiers
éléments d'une politique de l'enseignement professionnel. C'est,
par exemple, la consultation qui nous a confirmés dans notre intention
de mettre davantage l'accent sur la formation générale, d'y
consacrer une année supplémentaire, qui nous a incités
à reporter d'un an, en troisième année du secondaire, un
premier choix d'option, qui nous a incités à prévoir une
sixième année de spécialisation professionnelle, qui nous
a convaincus qu'il fallait mettre fin à ce que j'appelais tout à
l'heure la voie allégée et ce que je pourrais peut-être
appeler autrement maintenant, la voie du professionnel court, qui nous a
amenés en somme à décloisonner l'enseignement qui se
dispense aux premières
années du secondaire, qui nous a incités aussi à
instituer des voies de passage entre ce qu'on appelait anciennement la voie
allégée, le professionnel court, et le courant
général de l'enseignement du secondaire.
Nous n'avons pas voulu que les élèves, soit dans la voie
allégée ou dans le professionnel court, considèrent que
c'était là pour eux une voie de garage ou une voie de terminus.
Nous sentons que, si nous améliorons l'enseignement, un plus grand
nombre d'élèves voudront probablement, du fait qu'ils en
profitent, reprendre leur place dans le courant général,
continuer leur progression soit vers le cégep ou soit vers la
spécialisation professionnelle à la fin de la cinquième
année du secondaire.
Donc, déjà, nous avons appliqué certains
résultats de la consultation que nous avons menée, mais il reste,
évidemment, beaucoup de problèmes dans l'enseignement
professionnel sur lesquels il nous faut travailler davantage.
Le député de Marguerite-Bourgeoys m'a demandé de
lui expliquer brièvement ou de lui énoncer brièvement les
thèmes majeurs qui constitueraient l'assise de notre deuxième
projet. C'est avec plaisir que je me rends à sa demande.
Le nouveau projet que nous préparons et qui fera l'objet
d'échanges à l'automne avec tous les agents du milieu que nous
avons déjà consultés aura une approche qui s'inspirera de
la mission éducative du ministère. Donc, on ne cherchera pas,
à la faveur d'une politique de la formation professionnelle, à
faire oeuvre de politique de main-d'oeuvre, de travail ou même de
développement économique et industriel. C'est en abordant les
problèmes et les solutions sous l'angle proprement éducatif que
le ministère peut le mieux remplir sa mission, respecter ses
compétences et participer valablement à l'élaboration de
politiques gouvernementales plus globales.
Deuxièmement, nous parlerons d'une exploration conceptuelle et
sémantique du thème professionnel qui permette d'en saisir la
diversité et la foncière unité de même que les
enjeux réels. Ce sera l'occasion de bien cerner des facteurs comme la
longueur de la formation professionnelle, son caractère terminal, la
largeur et la profondeur de ses bases, ses niveaux de spécialisation,
son impact sur la promotion individuelle, sur la mobilité
professionnelle, sur la productivité nationale, etc. Ces clarifications
conceptuelles devraient donc avoir un certain effet démystificateur.
Nous tenterons ensuite d'élaborer une problématique qui
sera articulée selon les niveaux d'enseignement. Au secondaire, par
exemple, variétés des situations, problèmes de
l'école obligatoire, objectifs de l'école, polyvalence, enjeux
pédagogiques, problèmes du professionnel court, etc. Au
collégial, cours communs obligatoires, polyvalence, enjeux
pédagogiques, centres spécialisés, incitation sectorielle,
développement rationnel des programmes, etc. À l'universitaire,
objectifs du premier cycle, liens avec les corporations professionnelles,
développement rationnel des programmes, etc. Enfin, en formation des
adultes, souplesse des stuctures d'accès, reconnaissance des acquis,
développement rationnel des services, etc.
Nous essaierons, bien sûr, de tenir compte des recommandations de
la commission Jean en cette matière. Nous aborderons aussi, en
même temps, après ces particularités propres à
chaque niveau, des éléments systémiques, des
éléments communs d'ordre systémique comme, par exemple, le
décloisonnement, la reconnaissance des acquis, la carte des programmes
et des services, les liens avec le monde du travail et de l'entreprise, la
formation pratique, les services d'information et d'orientation, la formation
et le perfectionnement des formateurs, le problème des
décrocheurs -auquel on a fait allusion tout à l'heure - la
nécessité d'une politique de la main-d'oeuvre. Enfin, nous
parlerons d'orientations et de mesures qui ont fait l'objet de choix
historiques, sinon de mise en oeuvre pleinement satisfaisante.
Nous réitérerons notre volonté collective
d'accroître le niveau général de formation et de
scolarisation, d'instaurer la polyvalence, de valoriser la formation
fondamentale, de démocratiser, de décloisonner les services
éducatifs, de promouvoir l'éducation permanente, de contribuer,
par le système scolaire, au développement culturel, social et
économique des régions ainsi que de l'ensemble de la
collectivité.
Finalement, nous essaierons d'arrimer cette politique avec les autres
politiques, avec les autres choix qui ont été formulés
dans d'autres politiques venant d'autres secteurs ou d'autres ministères
comme, par exemple, la politique québécoise de
développement culturel, l'école québécoise, le
développement scientifique, "Bâtir le Québec", l'avenir des
universités et la formation des maîtres.
Nous terminerons ce projet en lançant dans le milieu des
hypothèses quant aux orientations, mais aussi quant aux moyens d'action
que nous entendons, en tant que société, mettre en oeuvre au
cours des prochaines années, hypothèses qui tiendront compte,
évidemment, du partage nécessaire des responsabilités
entre le ministère et les divers niveaux d'enseignement.
Voilà donc ce à quoi nous pensons. Encore une fois,
j'espère que notre réflexion, qui se poursuit à un rythme
accéléré, nous permettra de présenter à la
population dès cet automne ce projet que nous entendons soumettre
à la discussion.
Enseignement primaire et secondaire public
Le Président (M. Rodrigue): J'appelle l'étude du
programme 4 et de ses éléments 1, 2 et 3.
M. Laurin: Je n'ai pas terminé.
Le Président (M. Rodrigue): Je m'excuse.
M. Lalonde: M. le Président, nous avons probablement la
même pensée.
Le Président (M. Rodrigue): J'avais l'impression que vous
aviez terminé, je m'excuse, M. le ministre.
M. Laurin: Si je me réfère aux questions qu'on m'a
posées ce matin, j'en aurais encore cinq: la question des abandons
scolaires, des anglophones...
Le Président (M. Rodrigue): Est-ce qu'on ne pourrait pas
les prendre dans les programmes spécifiques?
M. Laurin: Je n'ai aucune objection.
M. Lalonde: Je ne voulais pas, j'hésitais à
interrompre le ministre...
M. Laurin: Quand on me pose des questions, j'aime bien y
répondre.
M. Lalonde: ... parce que sa contribution, sa connaissance des
réalités du ministère est exceptionnelle dans
l'exposé qu'il vient de faire. Toutefois, notre temps est limité.
Peut-être que nous pourrons aborder les autres questions que j'avais
annoncées, plutôt que posées, dans mes observations du
début, lorsque nous arriverons à ces programmes.
Je remercie donc le ministre de ses réponses qui ne satisfont pas
toutes les appréhensions et les questions que nous avons à poser,
mais qui donnent quand même, d'une façon honnête,
l'état de la question pour chacune des interrogations que nous avions et
qui ouvrent aussi la porte à d'autres questions. (17 heures)
J'aimerais que les membres se sentent parfaitement libres d'intervenir
à quelque niveau que ce soit. Nous abordons le programme 4. Donc, comme
on l'avait fait, je pense, l'an passé, on commençait par
l'enseignement primaire et secondaire public. Il y a plusieurs des questions
qui ont été posées et des réponses qui ont
été données qui sont dans ce programme.
M. Laurin: Pourrais-je demander au député de
Marguerite-Bourgeoys, pour raccourcir un peu nos délibérations...
J'avais préparé une introduction à l'étude du
programme 4 comportant un certain nombre d'éléments. Étant
donné qu'on a pris un peu de temps pour répondre aux questions
que vous m'aviez posées, je demanderais l'autorisation de déposer
le document à la commission avec permission qu'il soit reproduit au
journal des Débats. En même temps, évidemment, je vais en
faire parvenir une copie aux membres de la commission. Ils pourront le lire
à loisir et peut-être en nourrir leurs prochaines questions lors
de notre réunion ultérieure. C'est pour épargner du
temps...
M. Lalonde: Oui. J'accueille avec beaucoup d'enthousiasme cette
suggestion, M. le Président.
Le Président (M. Rodrigue): Le ministre de
l'Éducation dépose le document de l'éducation
préscolaire et de l'enseignement primaire et secondaire public.
M. Lalonde: II n'y a pas de dépôt de documents en
commission, mais c'est une demande pour qu'il soit reproduit comme s'il avait
été lu a la commission.
M. Laurin: C'est cela.
Le Président (M. Rodrigue): II peut y avoir
dépôt, mais on ne fera pas de débat là-dessus.
M. Lalonde: Oui, à moins qu'il n'y ait une nouvelle
jurisprudence.
Le Président (M. Rodrigue): Non? Vous avez raison.
M. Laurin: L'éducation préscolaire et
l'enseignement primaire et secondaire public. Le secteur de l'éducation
préscolaire et de l'enseignement primaire et secondaire public constitue
le plus imposant programme du ministère de l'Éducation. Sans
doute aussi le plus important quant aux valeurs et aux enjeux
d'accessibilité et de démocratisation qui y sont
impliqués.
Les suites de l'École québécoise. Depuis la
parution de l'École québécoise, plusieurs gestes
législatifs et administratifs ont été posés, qui
ont commencé à modifier les structures et les pratiques de nos
écoles.
Ainsi, la Loi sur l'instruction publique a été
amendée pour permettre l'émergence de projets éducatifs
locaux et la création des conseils d'orientation, comme aussi pour
assurer la représentation des parents au Conseil des commissaires et
pour mieux définir le rôle du directeur d'école. Les
nouveaux régimes pédagogiques ont aussi été
adoptés et promulgués, de même que des mesures
spéciales concernant l'éducation en
milieux défavorisés et l'enfance en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage. De plus, une politique de l'évaluation
pédagogique a été lancée, un projet relatif aux
services personnels et collectifs offerts aux élèves est en cours
de consultation et une politique de la formation professionnelle des jeunes est
en voie d'élaboration.
Quant aux nouveaux programmes d'études, plusieurs ont
été publiés; d'autres le seront prochainement. Ainsi, au
primaire, les programmes de français langue maternelle, de sciences de
la nature, d'arts, d'éducation physique et de mathématiques ont
été lancés. Suivront, à l'automne 1981, les
programmes de français langue seconde, d'anglais langue seconde, de
sciences humaines. S'ajouteront ensuite les programmes d'anglais langue
maternelle, d'enseignement religieux protestant, de formation personnelle et
sociale et d'activités manuelles. Tous les nouveaux programmes du
primaire seront ainsi disponibles d'ici la fin de 1982. Au secondaire, le
programme de français a été publié. En octobre
1981, ce sera au tour des programmes d'enseignement moral, d'éducation
physique et d'écologie. Une douzaine d'autres programmes
paraîtront au cours de 1982; quelques autres en 1983. Chaque programme
sera accompagné d'un guide pédagogique, qui devrait soutenir les
enseignants dans leurs tâches. Pour chaque programme, un devis sera
également transmis aux organismes et aux maisons d'édition
responsables de la préparation des manuels scolaires et du
matériel didactique.
La nouvelle méthode d'allocation des ressources. C'est en
1980-1981 qu'était appliquée pour la première fois une
nouvelle méthode d'allocation des ressources, dont la
caractéristique essentielle est d'introduire la notion de budget
fermé.
Les règles budgétaires de 1981-1982 comportent, quant
à la méthode elle-même, peu de changements par rapport
à celles de 1980-1981. Les modifications qui ont été
apportées aux allocations de base visent à atténuer les
disparités entre les commissions scolaires, notamment en ce qui a trait
à la suppléance des enseignants et aux contributions de
l'employeur. Elles consistent également en certains réajustements
destinés à harmoniser la rémunération des
enseignants avec les coûts réels. C'est ainsi qu'une restauration
des salaires en fonction du vieillissement réel et un ajout de sommes
destinées à combler certains écarts constatés en ce
qui touche les droits parentaux ont accru l'équité dans la
distribution des subventions. De même, un système de
péréquation a été institué pour tenir compte
de la faible capacité de taxation de certaines commissions scolaires
qui, autrement, auraient été dans l'impossibilité de se
donner une marge de manoeuvre sans augmenter indûment le fardeau de la
taxe foncière de leurs contribuables. Ces subventions de
péréquation visent donc aussi un objectif
d'équité.
L'analyse préliminaire des états financiers
démontre que la collaboration des commissions scolaires est
satisfaisante. C'est ainsi que l'on a pu mettre au point des moyens plus
efficaces pour contrôler les clientèles et pour établir des
prévisions qui correspondent davantage à la
réalité. De même, la nouvelle méthode d'allocation
des ressources, caractérisée par le principe du budget
fermé, a permis au ministère de l'Éducation de respecter
le niveau de crédits alloués à l'éducation
préscolaire et à l'enseignement primaire et secondaire public
sans qu'aucun déficit ne soit enregistré et sans qu'on doive
recourir à un budget supplémentaire.
L'ancienne méthode d'allocation des ressources, qui a
été utilisée jusqu'en 1979-1980 et qui a causé tant
de problèmes aux gouvernements actuel et antérieurs, est
maintenant chose du passé. Bien sûr, l'ensemble du monde scolaire
doit encore se familiariser avec la nouvelle façon de procéder,
mais on peut d'ores et déjà affirmer que cette méthode
facilite la gestion d'ensemble du système, tout en établissant
des règles simplifiées et claires.
Les nouveaux régimes pédagogiques. L'année
1981-1982 marquera, pour l'éducation préscolaire et pour
l'enseignement primaire et secondaire public, le début de l'application
des nouveaux régimes pédagogiques.
Approuvés par le Conseil des ministres et rendus publics en
février dernier, ces nouveaux règlements s'inscrivent dans la
voie de la consolidation et de l'amélioration des services
éducatifs dont L'École québécoise a tracé
les grandes orientations. Ces régimes pédagogiques poursuivent
essentiellement trois objectifs: faciliter l'accès de tous les jeunes
Québécois à des services éducatifs de
qualité, promouvoir l'égalité des chances en
éducation, favoriser une personnalisation accrue de l'acte
pédagogique.
L'un des changements majeurs découlant des nouveaux
régimes pédagogiques consiste dans l'obligation faite aux
commissions scolaires de dispenser un contenu minimal d'enseignement dans un
nombre déterminé de matières. Le ministre de
l'Éducation s'assurera ainsi, puisque la responsabilité lui en
incombe, que tous les jeunes Québécois puissent s'innitier,
à chaque degré du primaire, à des champs
diversifiés de connaissance. Selon la répartition des
matières au primaire, il sera possible, outre l'enseignement des
matières de base usuelles, d'aborder des domaines aussi variés
que ceux des arts, des sciences humaines et des sciences de la nature, alors
que tout nous porte à croire que ces sujets ont été
jusqu'ici passablement négligés, voire
totalement ignorés, dans plusieurs écoles primaires
québécoises.
Cette exigence des nouveaux règlements requiert de l'école
primaire qu'elle ne se confine pas à des objectifs d'ordre exclusivement
cognitif, mais qu'elle accorde dorénavant une importance égale au
développement affectif et social, au perfectionnement d'habiletés
et d'attitudes exigées par l'amorce d'une formation
générale, dont le secondaire assurera la suite logique et
cohérente.
C'est dans les mêmes perspectives que, au secondaire, on reportera
la spécialisation après la cinquième année, afin
d'éviter de préparer hâtivement les élèves en
fonction des besoins immédiats du marché du travail. Nous avons
toujours la conviction qu'une formation générale, axée sur
le développement de l'autonomie, de la connaissance de soi, d'un
jugement sain et du sens des responsabilités, est plus propice à
l'orientation adéquate des élèves et à leur
mobilité de futurs travailleurs qu'une formation
prématurément dominée par la spécialisation.
L'implantation des nouveaux régimes pédagogiques ne pourra
évidemment pas se réaliser de façon improvisée et
précipitée. La plupart de leurs dispositions exigeront même
une planification minutieuse et diligente. Nous connaissons d'ailleurs
pertinemment les difficultés que recèle l'introduction de
changements aussi fondamentaux, de même que les défis exigeants
auxquels les écoles, les commissions scolaires et le ministère de
l'Éducation devront faire face. Pensons ici, par exemple, au
remplacement des programmes-cadres actuels par des programmes d'études
au contenu plus précis et aux objectifs d'apprentissage clairement
établis. Pensons aussi à l'intégration de certains
élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage dans
des classes régulières, une mesure de démarginalisation
qui suscite des inquiétudes dans certains milieux, mais qui nous
apparaît vraiment prioritaire. Enfin, pensons aux conséquences,
également appréhendées en certains milieux, de la
disparition du professionnel court. À ce propos, notons que le nouveau
régime pédagogique ne vise pas à supprimer la
clientèle de ce profil d'études, mais bien plutôt -
progressivement, cela va sans dire -à modifier nos structures d'accueil,
de manière à privilégier la formation
générale et à différer les apprentissages
strictement professionnels.
En somme, en raison de l'ampleur et de la portée du renouveau
qu'ils proposent, les régimes pédagogiques exigeront d'être
implantés dans un climat de réflexion, d'imagination et de
collaboration. Je n'hésite pas à convier à ces
tâches tous les agents de l'éducation.
Les crédits de 1981-1982. Pour l'éducation
préscolaire et pour l'enseignement primaire et secondaire public, les
crédits que nous demandons à l'Assemblée nationale
s'établissent à 3 606 183 600 $. Il s'agit là, en
année gouvernementale, d'une augmentation de 514 millions de dollars,
soit de 16,6% par rapport à l'année 1980-1981. Pour ce qui est de
l'année scolaire 1981-1982, l'augmentation des subventions
destinées aux opérations courantes est de 326,5 millions de
dollars, soit 10,8% par rapport à l'année
précédente. Malgré la conjoncture actuelle, les sommes
affectées à ce secteur s'accroissent donc, mais à un
rythme plus modéré, mieux accordé à l'augmentation
de la production nationale et à la décroissance de la population
scolaire (qui est actuellement de 3% par année).
Le principal facteur de la croissance des dépenses est
l'indexation prévue par les ententes nationales; on comprend facilement
l'impact de ces ententes sur le budget du secteur, quand on sait que la masse
salariale représente environ 3 milliards de dollars sur un montant
global de 3,3 milliards de dollars.
Pour maintenir ainsi à 10,8% la croissance des dépenses de
l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire et
secondaire public, un certain nombre de choix budgétaires a
évidemment dû être fait. Il faut constater, toutefois, que
la marge de manoeuvre du gouvernement demeure très mince et que toute
addition de ressources à l'un ou l'autre des articles de l'enveloppe
budgétaire entraîne automatiquement une réduction
proportionnelle à un autre article.
Le gouvernement a fait ses choix en fonction d'un grand critère
de base: celui de l'accessibilité aux services éducatifs. Il a
donc évité, dans toute la mesure du possible, de réduire
ou de couper des services qui touchent directement l'élève. En
conséquence, ce sont surtout les allocations supplémentaires qui
absorbent la majeure partie des compressions, là où la
réalisation des programmes n'a pas paru d'une nécessité
vitale immédiate. Sans renoncer aux priorités gouvernementales,
certaines mesures ont ainsi été supprimées, alors que
d'autres devront être étalées sur une période plus
longue.
Par contre, un montant de 10 000 000 $ est affecté aux
activités de soutien pédagogique aux enseignants,
particulièrement dans les domaines de l'éducation
chrétienne, de l'adaptation scolaire, de l'enseignement des langues et
de l'éducation physique. De même, certains ajustements ont
été apportés aux paramètres utilisés dans le
calcul de la masse salariale des enseignants, qui ont pour effet d'augmenter le
niveau des ressources. Une somme de 2 000 000 $ a aussi été
ajoutée au programme "Passe-Partout" - un programme qui s'adresse de
façon spéciale aux milieux économiquement faibles - afin
de
maintenir les activités d'animation des parents, qui
complètent l'émission télévisée. Dans le
même esprit, on a maintenu les budgets destinés à assurer
l'accessibilité des enfants de quatre ans des milieux
économiquement faibles à des services éducatifs de
qualité.
En somme, les paramètres budgétaires transmis aux
commissions scolaires permettent de respecter les ententes nationales et
d'assurer une égale qualité à l'ensemble des
activités éducatives. De plus, par une utilisation rationnelle
des ressources qui lui sont allouées, le ministère de
l'Éducation compte être en mesure de respecter les
priorités gouvernementales, tout en tenant compte des objectifs du
budget déposé à l'Assemblée nationale.
M. Lalonde: En ce qui concerne l'enseignement du français
comme langue première, on sait les problèmes que l'enseignement
du français a connus il y a quelques années. On sait aussi qu'un
nouveau programme a été introduit. Je pense que c'est tout
à fait récemment. Je ne pense pas qu'on soit en mesure d'en faire
l'évaluation à ce stade-ci. C'est pour cette raison que, tout en
déclarant notre intérêt très vif sur cette question,
pour les mêmes raisons, j'imagine, que non seulement le ministre, mais
toute personne qui respecte sa langue doit espérer qu'elle soit apprise,
comprise, connue et développée chez chacun d'entre nous, je passe
donc à la langue seconde, à moins qu'il n'y ait d'autres
personnes qui voudraient parler de l'enseignement du français ou du
nouveau programme, mais je pense qu'il a été introduit il y a
seulement un an, je crois.
M. Laurin: Lequel?
M. Lalonde: Le nouveau programme d'enseignement du
français.
M. Laurin: Tout est lancé, comme je l'ai dit tout à
l'heure.
M. Lalonde: Cela fait un an?
M. Laurin: II y en a qui sont parus il y a un an. Il y en a qui
sont plus récents, mais, à tous les niveaux du primaire et du
secondaire, tout a été lancé. Les professeurs l'ont en
main.
M. Lalonde: J'imagine - c'est pour cette raison que je ne pose
pas la question, mais je soulève simplement le problème -que le
ministre n'est pas en mesure ou le ministère n'a pas d'évaluation
actuellement. Cela va prendre un certain temps.
Pour l'enseignement de la langue seconde, j'aimerais savoir quelles sont
les méthodes d'apprentissage, quels outils le ministre ou le
ministère a favorisés dans cette politique que, je crois, il nous
a annoncée pour bientôt. Favorise-t-il les classes d'immersion ou
l'enseignement intensif ou y a-t-il eu des expériences pilotes? Quelle
évaluation a été faite?
M. Laurin: Vous allez me forcer à entrer dans une
controverse extraordinaire. Il y a des écoles de pensée
très nombreuses là-dessus. Je ne sais pas si vous vous êtes
donné la peine de lire les nombreux articles de M. Wallace Lambert, de
Mme DeBilly, de M. Bibeau, de M. Bessette. Il y a beaucoup de divergences de
vues à cet égard. Les tenants de l'immersion disent que c'est
véritablement la meilleure méthode, qu'elle permet, à
cause du bain dans lequel baigne l'enfant, de s'imprégner non seulement
de la lettre d'une langue, mais de son esprit, d'y ajouter la dimension
psycho-affective et que les progrès aussi sont rapides, du fait qu'on y
apprend la langue de tous les jours, la langue de communication, la langue des
rapports sociaux. Donc, je ne veux pas résumer toutes la thèse de
M. Lambert et de son école; M. Lambert qui a d'ailleurs fait
école non seulement au Canada, mais dans d'autres pays. Par contre, les
tenants de l'autre thèse disent que, pour que l'immersion soit efficace,
il faut qu'elle se poursuive durant un bon nombre d'années, que, si
cette période est trop rapide et que l'élève retourne dans
son milieu naturel, selon l'âge qu'il a, il risque de perdre ce qu'il a
gagné du fait que les racines ne sont pas assez profondes, qu'un effort
insuffisant a été apporté à l'analyse, au fondement
même de la langue, et que c'est un peu comme dans l'évangile: la
plante n'a pas poussé assez profond et elle disparaît lorsque le
vent souffle trop fort. C'est une des critiques que l'on fait à
l'immersion qui d'ailleurs n'est pas une méthode, comme je le disais
tout à l'heure, mais plutôt une modalité d'organisation qui
se définit comme l'apprentissage d'une langue seconde par
l'intermédiaire d'une ou d'autres disciplines.
Les tenants de l'autre école préfèrent au contraire
un enseignement intensif d'une langue poursuivi durant une période
peut-être plus concentrée, mais un enseignement intensif qui,
cette fois, donne une connaissance verticale aussi bien qu'horizontale de la
langue. Je ne veux pas prendre parti pour l'une ou l'autre école. Je
pense qu'il est bon que des recherches se fassent par les tenants de l'une et
l'autre école. Il nous reviendra probablement d'évaluer dans
quelques années le bien-fondé de l'une ou l'autre modalité
d'organisation de la langue. Mais, de toute façon, je ne pense pas que
nous ayons à prendre parti. Comme je l'ai souligné à
quelques reprises, il revient, je crois, aux commissions scolaires de faire les
choix qui s'imposent dans ce
domaine.
M. Lalonde: Alors, le ministère ne favorisera pas d'outil
l'un plus que l'autre, une école plus que l'autre. Est-ce que le
ministère ou le ministre a fait une évaluation de
l'expérience pilote à la commission scolaire de Mille-Îles,
je pense? Quelle est l'évaluation que le ministère a faite de
cette expérience?
M. Laurin: En fait, je ne sais pas si on peut faire une
évaluation à l'heure actuelle. L'expérience de
Mille-Îles s'est poursuivie quand même durant un certain temps,
trois ans je crois, et ça commence à être important,
intéressant, valable, lorsqu'une expérience se poursuit sur une
période de temps aussi prolongée par des pédagogues, des
chercheurs qui connaissent leur affaire. Les rapports qu'on nous en fait sont
très intéressants. Ils sembleraient marquer, en effet, un certain
nombre d'avantages pour cette méthode. Mais, les tenants de l'autre
école critiquent férocement les résultats de
l'évaluation que les chercheurs de Mille-Îles ont publiés.
Ils y trouvent des failles, des lacunes; ils contestent certains des
résultats; ils disent que la validation n'est pas assez profonde, quelle
ne s'étend pas sur un assez grand nombre d'années, et le combat
continue de rager entre les deux écoles de pensée et même
entre les tenants de divers projets expérimentaux.
Malgré l'intérêt très profond que j'ai pour
le sujet, aussi bien en tant que ministre de l'Éducation qu'en tant que
psychologue et en tant que psychiatre, je pense que je ne suis pas en mesure
actuellement, en tant que ministre de l'Éducation, de départager
les opposants. Pour le moment, je préfère laisser se poursuivre
les expériences en espérant que la continuation de la
polémique et la décantation qui va inévitablement se faire
vont nous permettre graduellement d'en arriver à des conclusions.
À ce moment-là, le ministère pourrait peut-être
peser d'une façon plus importante sur les choix décisionnels
régionaux.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre favoriserait de subventionner
des études pour ne pas laisser l'expérience...
M. Laurin: Nous l'avons fait.
M. Lalonde: ...s'éparpiller? Est-ce que vous allez
continuer de le faire?
M. Laurin: Je n'ai pas les chiffres précis, mais je pense
que M. le sous-ministre adjoint au primaire et secondaire pourrait en parler.
M. Rousseau.
Pour l'année qui vient, nous continuons à financer les
projets de recherche qui n'étaient pas terminés. Dans le cas de
Mille-
Îles, nous pourrions vérifier pour vous donner le
renseignement. Nous n'avons pas amorcé de nouveaux projets de recherche
pour 1981-1982 sur cette question, nous continuons à financer les
recherches qui n'étaient pas complétées.
M. Lalonde: C'est seulement à Mille-Îles que vous
subventionnez de telles recherches?
M. Laurin: Pour 1980-1981, oui, mais il y en a eu d'autres, il y
a eu Greenfield Park, au primaire, et d'autres projets aussi qui ont
été subventionnés dans le passé.
M. Lalonde: Mais, pour 1981-1982, c'est seulement
Mille-Îles?
M. Laurin: Je crois que oui.
Le Président (M. Leduc): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le ministre, pour l'enseignement du
français, langue seconde, la CECM, secteur anglophone, pour les quatre
ou cinq dernières années, a obtenu des fonds dans le cadre des
projets novateurs et de recherche et, avec ces fonds, elle a été
capable d'établir des objectifs de communication orale de
français, langue seconde, basés sur l'approche fonctionnelle et
notionnelle. Elle a aussi préparé un programme, de la
première à la quatrième année, basé sur ces
objectifs et des objectifs de communication écrite pour le
deuxième cycle, c'est-à-dire quatrième, cinquième
et sixième année.
La CECM - corrigez-moi si je me trompe - a fait une demande pour le
recyclage de ses professeurs qui seraient affectés à de tels
programmes et en plus elle élaborerait, parallèlement au
programme d'expression orale, des programmes de communication écrite de
sixième année en français, langue seconde. Est-ce que ce
programme se meurt lentement, est-ce qu'il continue, qu'arrive-t-il?
M. Laurin: Je peux demander à M. Rousseau de
répondre à ça.
Dans le cadre du recyclage et du perfectionnement, chaque commission
scolaire a, pour chacun des enseignants - c'est prévu dans les
conventions collectives - un montant de 141 $ pour les fins de
perfectionnement. Dans le domaine des langues, que ce soit la langue maternelle
ou la langue seconde, le ministère a investi plusieurs millions de
dollars en perfectionnement et en recyclage depuis plusieurs années.
Dans le contexte de la recherche de compression budgétaire, de lieux de
compression, pour ces projets de perfectionnement, puisqu'ils peuvent
être financés à même les montants prévus
dans
les conventions collectives, le ministère a invité, par
ses règles budgétaires, les commissions scolaires à
établir leurs priorités et à choisir à même
le budget de 13 000 000 $ qu'il y a actuellement à l'intérieur du
réseau primaire et secondaire pour les fins de perfectionnement des
maîtres.
Sur l'autre sujet, le ministère a reçu les demandes de la
CECM pour le secteur anglophone. Cette demande s'accompagnait également
d'une augmentation du temps d'enseignement pour les élèves du
primaire d'à peu près deux heures par semaine, puisque, dans le
secteur anglophone de la CECM, on espérait appliquer
immédiatement la mesure qui était prévue dans le plan
d'action, soit de permettre aux commissions scolaires de donner 25 heures
d'enseignement par semaine à l'école primaire plutôt que 23
heures.
Vous comprenez que cette mesure, ce programme qui exige des sommes
additionnelles pourra être une mesure acceptée par le
ministère au fur et à mesure que le plan d'action s'appliquera,
mais, pour l'année 1981-1982, il y a d'autres priorités qui ont
été retenues. À l'égard du contenu de ces
programmes, dans la préparation des programmes d'études du
ministère pour le français, langue seconde, le projet de la CECM
a été largement utilisé de même que le personnel de
la CECM pour ces fins, ce qui veut dire qu'il n'y a pas du tout de
désaccord quant aux objectifs poursuivis.
M. Cusano: Vous êtes d'accord avec l'élaboration du
programme qui a été préparé pour la première
à la quatrième année, mais il reste le programme des
cinquième et sixième années. Alors, vous abandonnez, si je
comprends bien, les programmes pour les cinquième et sixième
années. Qu'est-ce que vous faites? (17 h 15)
M. Laurin: Le ministère de l'Éducation, avec la
collaboration des enseignants spécialisés dans les commissions
scolaires, dont ceux de la CECM, prépare actuellement un programme
québécois du français, langue seconde, pour l'ensemble des
commissions scolaires. Ce qui veut dire que l'apport de la partie du secteur
anglophone de la CECM est un apport positif, un apport favorable, mais le
ministère de l'Éducation a pris la décision de
préparer des programmes précis pour l'ensemble du Québec
plutôt que de financer les commissions scolaires dans la
préparation de leur propre programme précis. Il y a donc une
collaboration. Nous élaborons aussi un programme pour les
cinquième et sixième années pour les langues secondes.
M. Cusano: Est-ce que la collaboration veut dire que vous allez
chercher ces professeurs, les animateurs et les professeurs qui ont
travaillé à ce programme, et vous les amenez au MEQ?
M. Laurin: II y a plusieurs prêts de service qui ont
été transigés entre la CECM et le ministère de
l'Éducation pour ce programme comme pour d'autres et, pour 1981-1982, il
y en aura d'autres.
M. Cusano: Merci.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, au cours des
dernières années, le ministère a investi des fonds dans le
développement des programmes destinés aux enfants des milieux
défavorisés. Je pense qu'il a été question,
à un moment donné, dans le cadre des coupures budgétaires,
que certains programmes soient touchés. Qu'est-ce qu'il advient du
programme Passe-Partout, notamment, qui semblait donner de bons
résultats, dans la région de Montréal en particulier?
M. Laurin: Oui, effectivement, le programme Passe-Partout a
été un succès extraordinaire pour tous les enfants qui
peuvent l'écouter, le suivre à la télévision,
particulièrement dans les milieux défavorisés, parce que
c'est probablement pour plusieurs le seul moyen d'entrer en contact avec les
milieux éducatifs. C'est là qu'il a eu son plus plus grand
succès. À cause des compressions budgétaires, nous avons
dû diminuer les sommes qui étaient consacrées à
l'animation du programme Passe-Partout, parce que, évidemment, lorsque
nous parlons de sa pénétration dans les milieux
défavorisés, cela inclut qu'il faut soutenir les programmes par
des animateurs qui peuvent rencontrer les parents et qui peuvent prolonger
l'effet de ces émissions. Nous avons dû diminuer le support
financier que nous apportions, mais, heureusement, nous avons pu quand
même en garder la partie essentielle. Je pense que nous pourrons
consacrer cette année 2 000 000 $ au programme d'animation de
Passe-Partout en milieu défavorisé.
Peut-être aussi pourrais-je ajouter que le maintien de ce
programme d'animation nous permettra de rejoindre près de 12 000
enfants. Nous pourrons continuer à donner l'essentiel de ce que nous
donnions, c'est-à-dire des services d'animation de parents, mais aussi
la stimulation de la participation des parents à l'occasion de huit
à dix rencontres annuelles que nous continuerons à tenir sous la
responsabilité de l'animateur.
Dans le domaine de l'enfance défavorisée, nous avons
dû effectuer d'autres compressions, mais, encore une fois, nous avons
tenté de conserver l'essentiel. Par
exemple, nous allons maintenir les 182 maternelles quatre ans qui
assurent des services éducatifs à plus de 5500 enfants qui
donnent des services d'animation auprès des parents de ces enfants et
qui assurent la participation des parents là où il y a des
maternelles animation et des maternelles maisons. Je ne sais pas si tous les
membres de la commission connaissent ces expériences de maternelle
animation et de maternelle maison, mais disons que les maternelles animation
sont constituées habituellement de neuf qroupes de six enfants. Une fois
sur deux, l'éducatrice est présente à la rencontre
d'enfants et, l'autre fois, le parent est seul avec le groupe de six enfants.
Quant à la maternelle maison, elle permet une intervention auprès
de cinq groupes de six enfants; le parent est présent une fois à
toutes les six semaines. C'est ce que nous allons maintenir au cours de la
présente année, en espérant qu'au cours de l'année
qui vient, on pourra faire davantage, mais ceci ne limite pas cependant les
efforts faits pour les milieux défavorisés, puisque - le
député de Marguerite-Bourgeoys se le rappellera sûrement -
dans la loi qui constituait le conseil scolaire de l'île de
Montréal, on faisait une obligation au conseil scolaire de l'île
de s'occuper d'une façon particulière des enfants des milieux
défavorisés et nous aidons le conseil scolaire de l'île
à assumer cette responsabilité.
Par exemple, cette année, le conseil scolaire a reçu, pour
les interventions dans les milieux économiquement faibles, 2 382 000 $,
soit 18% de son budget, ce qui correspond à la proportion de la
clientèle de milieux économiquement faibles résidant sur
l'île de Montréal. En 1981-1982, il recevra moins, à cause
des compressions, mais il recevra quand même encore 1 285 715 $, ce qui
lui permettra de financer 39 maternelles quatre ans, ce qui le favorise, compte
tenu que la majorité des interventions qu'il finance sont des
maternelles quatre ans et que celles-ci seront maintenues pour 1981-1982.
M. Paquette: Justement, à ce point de vue, M. le
Président, comment fonctionne exactement, du point de vue du financement
des milieux défavorisés, la répartition de l'enveloppe que
le ministère met à la disposition des commissions scolaires?
Auparavant, le budget était basé principalement sur l'impôt
foncier. Maintenant, les revenus proviennent en presque totalité du
gouvenement du Québec à la suite de la réforme de la
fiscalité municipale. Quel en a été l'effet sur le plan de
la redistribution des richesses vers les zones ou les commissions scolaires qui
travaillent plus particulièrement en milieu
défavorisé?
M. Laurin: Je demanderais à M. Rousseau de
répondre.
Il faut dire que, pour les allocations qui étaient
destinées à la politique d'intervention en milieu
économiquement faible, dans notre modalité d'allocation des
ressources, ces allocations constituaient des allocations
supplémentaires. Pour 1981-1982, nous prévoyons un montant de 8
000 000 $ pour les milieux économiquement faibles et, en ce qui concerne
la distribution, il y avait, à l'intérieur de la politique, une
prévision de développement de services divers dont les classes de
la prématernelle pour les enfants de quatre ans, que ce soient les
maternelles animation, les maternelles maisons ou les maternelles
régulières. Pour 1981-1982 sont maintenues toutes les
activités dans les commissions scolaires qui avaient été
identifiées comme étant celles qui avaient les clientèles
les plus défavorisées. Ces services ont été
retenus, de même que l'animation Passe-Partout. Ces commissions scolaires
avaient présenté des projets, selon les modalités
prévues pour la dispersion des allocations supplémentaires, et
ces projets ont été reconduits pour 1981-1982, à toutes
fins utiles, aux deux tiers, puisque le budget passe de 3 000 000 $ à 2
000 000 $ pour l'animation des parents de Passe-Partout.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Paquette: J'avais une autre question à poser, M. le
Président, dans un autre ordre d'idées. Je ne veux pas accaparer
trop de temps non plus. En ce qui concerne la question du programme
d'enseignement en langue d'origine - c'est particulièrement important
sur l'île de Montréal - qui permet à nos concitoyens
québécois d'origine italienne, portugaise et grecque, je
pense...
M. Laurin: C'est cela.
M. Paquette: ... actuellement de recevoir des cours payés
à même les fonds publics, dans le cadre de l'horaire
régulier, dans leur langue d'origine, j'aimerais savoir si ce budget est
maintenu, si ce programme a donné de bons résultats au cours de
l'année dernière, s'il est relativement populaire et si c'est
l'intention du ministère de poursuivre l'effort en ce sens.
M. Laurin: Effectivement, M. le Président, le programme
d'enseignement en langue d'origine se poursuit d'une façon, je crois,
intéressante pour les élèves italophones,
hellénophones et les élèves portugais. Je pense que nous
progressons aussi dans ce domaine. Par exemple, les programmes de grec,
d'italien et de portugais ainsi que leurs guides pour les quatre
premières années du primaire seront
implantés prochainement alors que le programme de ces mêmes
trois langues pour la cinquième année et leurs guides
pédagogiques sont actuellement au stade de l'élaboration. Donc le
programme se continue et je pense que, graduellement, les membres des ces
communautés y accordent une importance toujours plus grande. On peut
même dire que certaines autres communautés culturelles commencent
à s'y intéresser, en particulier la communauté arabe, et
il est dans nos projets de commencer à étudier un programme
identique pour les communautés arabes.
M. Paquette: Actuellement, est-ce que le ministre ou le
sous-ministre aurait une idée du nombre d'enfants qui ont
été rejoints par ce programme l'année dernière?
M. Laurin: C'est très peu dans les écoles où
nous faisons les expériences actuellement, c'est moins de 100
élèves. Maintenant, il faut quand même dire que les
programmes étaient expérimentaux et qu'il fallait un personnel
bien préparé. Les outils pédagogiques sont en
développement, la tâche n'est donc pas facilitée, sauf que
plus les outils seront améliorés, évidemment, plus il y
aura de possibilités de développement.
M. Lalonde: M. le Président, j'aimerais revenir à
la première question du député de Rosemont sur l'effet des
coupures sur les programmes qui étaient destinés aux milieux
économiquement faibles. Le ministre dit que, pour 1981-1982, c'est 8 000
000 $; il avoue qu'en ce qui concerne les maternelles maisons, animation et
autres pour enfants de quatre ans, il y a eu une réduction de 3 000 000
$ à 2 000 000 $, c'est-à-dire que c'est Passe-Partout quoi, et le
conseil scolaire de l'île, c'est une autre réduction. Comment le
ministre peut-il dire que les services sont maintenus s'il manque 1 000 000 $
ici, 1 000 000 $ là? Et j'aimerais qu'il me dise, en ce qui concerne le
programme de 8 000 000 $, si c'est une augmentation sur 1980-1981.
M. Laurin: Non, ce n'est pas une augmentation, loin de là,
c'est une diminution que nous sommes les premiers à déplorer.
M. Lalonde: Si vous êtes les premiers à le
déplorer...
M. Laurin: Je le déplore d'autant plus qu'il y a quatre ou
cinq ans, il n'y avait rien. Maintenant, nous avons instauré des
programmes qui ont, bien sûr, satisfait cette population, qui ont
même créé des attentes, et à bon droit puisque, dans
notre énoncé de politique et notre plan d'action sur
l'école en milieu défavorisé, nous avions annoncé
que notre plan d'action s'élargirait au fil des années. C'est
sûr que nous n'étions pas très heureux de devoir maintenant
annoncer, après un début prometteur, un ralentissement. C'est
évident que ce n'est pas de gaieté de coeur que nous l'avons
fait. Nous avons dû, tout en maintenant ce que j'ai mentionné tout
à l'heure, éliminer un certain nombre d'initiatives qui avaient
déjà été prises, comme, par exemple, les
ludothèques, l'animation de parents au primaire, le perfectionnement des
équipes écoles. Il est évident que ces compressions ou ces
coupures, sans compromettre notre objectif, ralentissent
considérablement la réalisation du plan d'action que nous nous
étions donné.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous espérons qu'une
conjoncture plus favorable nous permettra de reprendre cela. Et, comme à
toute chose malheur est bon, peut-être allons-nous avoir l'occasion de
nous poser encore d'autres questions sur d'autres sujets et peut-être de
meilleures façons d'atteindre ces objectifs avec d'autres moyens.
M. Lalonde: Ce qu'on a de la difficulté à
comprendre - et je suis convaincu que ce sentiment est partagé par
plusieurs membres des deux côtés de la table ou de la Chambre
c'est que, sur un budget de quelques milliards de dollars, on ait
été obligé - je sais que ce n'est pas de gaieté de
coeur -que le ministre des Finances et le ministre de l'Éducation se
soient sentis obligés de couper quelques millions seulement, une
proportion minime, là où justement cela affecte les plus
démunis.
Est-ce que le ministre n'aurait pas pu être un peu plus
sévère à l'égard des effectifs du ministère?
Est-ce qu'il va imposer une coupure d'effectifs équivalente? Ou est-ce
qu'il n'aurait pas pu aller chercher ces millions justement en coupant des
effectifs? On sait que, là aussi, il y a des sommes importantes qui sont
dépensées.
Qu'est-ce qui a fait choisir cela? C'est justement en marche depuis
seulement quelques années; c'est un recul non seulement sur
l'efficacité et sur le progrès à long terme, mais qui va
être immédiatement ressenti par ces milieux. Il me semble qu'une
société qui se permet des luxes comme la nôtre pourrait
aller chercher ailleurs ces quelques millions qu'on enlève à des
gens qui en ont plus besoin que d'autres.
M. Laurin: Je rappelle que la coupure ou la compression
plutôt, dans le cas présent, n'est quand même pas
catastrophique, puisque nous passons d'un peu plus de 13 000 000 $ à 8
000 000 $. Il en reste beaucoup plus que la moitié. C'est
déjà beaucoup.
Mais je rappelle aussi que notre marge de manoeuvre n'est guère
considérable puisqu'il y a quelque chose d'intouchable,
comme je l'ai dit. C'est le respect des ententes,
particulièrement en ce qui concerne les salaires, et le salaire, surtout
en cette période d'inflation galopante que nous avons connue, mobilise
près de 87% de l'enveloppe du primaire et du secondaire. Donc, ce n'est
que dans les 13% qui restent qu'il fallait aller chercher les sommes qu'il nous
fallait trouver en fonction des compressions, en raison des compressions
générales que devaient subir tous les ministères du
gouvernement.
Cependant, s'il arrivait, comme c'est arrivé cette année,
que les enveloppes qu'on a consenties aux commissions scolaires soient plus que
suffisantes et engendrent même des crédits périmés,
comme c'est arrivé cette année, vous pouvez être
assuré que nous reprendrons avec plaisir et immédiatement cette
priorité que nous nous étions donnée et que nous
injecterons à nouveau dans ce domaine les sommes que nous voulons y
injecter.
M. Lalonde: C'est seulement pour l'an prochain. Pour cette
année... Les crédits périmés, on les connaît
à la fin de l'exercice. Alors, cette année, c'est 13%. 13%, cela
équivaut à combien de millions du budget total,
premièrement?
Deuxième question, est-ce que, pour tous les autres programmes
qui sont inclus dans les 13% compressibles...
M. Laurin: C'est 13% des crédits totaux du primaire et du
secondaire qui sont de 3 600 000 000 $.
M. Lalonde: 3 600 000 000 $. Cela fait quoi? 360 000 000 $, c'est
10%. Seulement 10%, c'est 360 000 000 $. Donc, c'est à peu près
400 000 000 $, qui est compressible, d'après ce que le ministre nous
dit. Est-ce que vous avez coupé de près de 40% tous les autres
programmes compressibles ou si vous avez choisi davantage, pour des raisons que
je m'explique mal, ce programme qui s'adresse aux gens les plus
défavorisés?
M. Laurin: Nous avons tenté, d'une façon
primordiale, de maintenir les services directs et essentiels aux
élèves inscrits dans nos écoles, c'est-à-dire la
relation enseignant-élèves. Nous avons tenté
également de respecter intégralement notre principe
d'accessibilité aux études, d'où par exemple les sommes
considérables que nous consacrons à l'intégration des
enfants en difficulté d'apprentissage. Nous avons tenté de
maintenir l'accent que nous avions mis sur la qualité de l'enseignement,
qu'il s'agisse des programmes auxquels nous travaillons continuellement, d'un
manuel par matière, nous continuons à faire des efforts dans ce
sens. Donc, le maintien de la qualité de l'enseignement, le maintien de
l'accessibilité, le maintien des services directs aux
élèves, l'encadrement, les cours spéciaux, le rattrapage
à l'endroit de la population qui étudie actuellement dans nos
écoles, telle a été notre première
préoccupation et c'est la raison pour laquelle l'essentiel des 460 000
000 $ dont vous parlez y ont été consacrés.
M. Lalonde: Je vois que les effectifs du ministère
demeurent les mêmes ou sont augmentés légèrement par
rapport à l'an dernier. Est-ce que le ministre a décidé de
couper là aussi?
M. Laurin: Oui.
M. Lalonde: Parce que cela n'apparaît pas dans les chiffres
qui sont présentés.
M. Laurin: On y reviendra tout à l'heure, à la fin
plutôt quand on parlera de l'administration du ministère, mais
vous verrez qu'on a continué à faire des efforts extraordinaires
pour comprimer nos effectifs. Je pense que notre effort a été non
seulement valable mais fructueux. De toute façon, nous ne consacrons
à l'administration de la mission éducative que 1,8% du
budget.
M. Lalonde: Une dernière question. Les centrales
syndicales avaient demandé un débat public sur les coupures. Moi,
j'avais suggéré une commission parlementaire. Le ministre
n'était pas réfractaire à l'idée, mais il semble
que le gouvernement ait choisi une autre formule. Un débat serait sur le
point d'être tenu, est-ce que le ministre peut nous dire quand, sous
quelle forme et s'il participera à ce débat?
M. Laurin: La forme n'en est pas encore complètement
décidée au moment où on se parle. Il y a encore des
négociations qui se poursuivent. Mais je sais que c'est un débat
où pourront se rencontrer d'une part des représentants des
centrales syndicales et du monde syndical, et d'autre part, des
représentants gouvernementaux, ainsi que nos partenaires patronaux
habituels, du primaire, du secondaire, du collégial, de l'universitaire
aussi, je crois. Je sais qu'il aura lieu demain, mais je ne peux pas vous dire
encore exactement à quelle heure et combien de temps il durera.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre va y participer?
M. Laurin: J'y participerai.
M. Lalonde: Est-ce qu'il y aura une large diffusion qui nous
permettra de revenir avec une meilleure connaissance lundi?
M. Laurin: Là aussi les discussions se poursuivent quant
à la transmission. À un moment donné, il était
question que tout soit télévisé, mais je sais qu'il y
avait des questions d'horaire et de temps d'antenne qui se posaient. Je ne
participe pas aux négociations qui se poursuivent cet après-midi
et pour cause, mais je pense que je serai informé avant la fin de la
journée.
M. Lalonde: Je voulais simplement dire à la commission
qu'avec le changement de programme de travail de la commission, une
séance étant prévue maintenant pour lundi, au lieu de
demain, nous avions convenu entre nous ici de l'Opposition d'attendre la tenue
de ce débat dont on avait entendu dire qu'il aurait lieu demain, pour
nous attaquer de façon plus immédiate à l'effet des
coupures.
Peut-être avez-vous d'autres questions sur les coupures? Cela
n'exclut rien de tel.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Mille-Îles.
M. Paquette: Je m'excuse, M. le Président, je veux
simplement pour compléter la réponse. Le sous-ministre vient de
nous donner les chiffres des effectifs du ministère. Or, la
réduction des effectifs au niveau du ministère depuis le 1er
avril 1980 est de 4,4%. L'augmentation du budget, si on compare 1981-1982 avec
l'année précédente 1980-1981, l'année en cours, est
de 1,6% seulement, si on parle de l'augmentation du budget du
ministère.
Je pense qu'on peut dire que les coupures ont d'abord été
faites au niveau du ministère plutôt qu'au niveau des
réseaux. D'ailleurs, le budget des réseaux augmente de 113% alors
que le budget du ministère lui-même augmente de 45%.
Voici un autre chiffre aussi: depuis 1976-1977, l'effectif du
ministère a diminué de plus de 9% on est passé de 2862
personnes-années à 2622.
M. Lalonde: Est-ce que le sous-ministre ou quelque expert, qui ne
se retrouverait pas dans les rangs des hommes politiques, pourrait m'expliquer
alors comment il se fait que, dans le document qui a été
déposé à l'Assemblée nationale, au moment du
discours sur le budget, au mois de mars, on retrouve des chiffres
différents? On dit qu'en 1980-1981, les effectifs permanents
étaient de 2831 et, pour 1981-1982, de 2847, donc une augmentation de
16. Alors que je viens d'entendre un chiffre, que je crois, de 2622. Comment se
fait-il? Est-ce que ce sont des postes non occupés qui sont
là-dedans?
M. Laurin: La réponse est bien simple; n'apparaît
pas au livre des crédits une réduction d'effectifs qui devait se
faire tout au long de l'année, qui a été
décidée par le
Conseil du trésor récemment et qui se fait tout d'un coup
au début de l'année. Le ministère de l'Éducation a
perdu 50 postes en début d'année. Cette coupure est intervenue
après que le livre des crédits eut été
imprimé; c'est pour ça que ce n'est pas reflété
dans le livre des crédits.
Le Président (M. Rodrigue): Cela va?
M. Lalonde: Cela ne va pas, mais ça val
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Mille-Îles.
M. Champagne: M. le Président, au niveau primaire et au
niveau secondaire, le taux de dénatalité a affecté les
effectifs de ces écoles au point qu'on ferme des classes et au point
qu'on ferme aussi des écoles.
Il en résulte qu'il y a beaucoup de professeurs, aux niveaux
primaire et secondaire, qui sont en disponibilité. Ma question s'adresse
au ministre; est-ce que le ministère a une politique d'emploi pour ces
professeurs en disponibilité?
M. Laurin: Oui, comme j'ai déjà eu l'occasion de le
dire, il y a certains chiffres qui ont été avancés quant
aux mises en disponibilité, mais ce ne sont pas des chiffres
définitifs. Depuis que les commissions scolaires ont des budgets
fermés, elles sont devenues beaucoup plus prudentes dans l'estimation de
leurs besoins, et comme elles doivent payer une partie du personnel mis en
disponibilité, elles sont encore plus prudentes. Surtout si l'on tient
compte que maintenant leur marge de taxation a été réduite
à 6%, l'enveloppe globale, ou à une taxation qui se limite
à 0,25 $ du 100 $ d'évaluation.
En même temps, le contrôle du ministère sur les
états financiers des commissions scolaires s'exerce d'une façon
autre qu'auparavant. Alors que les commissions scolaires ont pu
bénéficier depuis très longtemps d'un budget ouvert, elles
bénéficient maintenant - si on peut utiliser cette expression -
d'un budget fermé. Le budget est fermé au 30 septembre,
c'est-à-dire que le 30 septembre, nous devons savoir qui est inscrit
dans les écoles. On ne peut plus assister, comme auparavant, à
des cas où des élèves étaient inscrits à
deux écoles ou à trois écoles, du fait qu'il y avait eu
des déménagements entre la période de mars, où les
inscriptions commencent, et le mois de septembre, où l'instruction
commence. Il y a donc une sorte de resserrement des contrôles en
même temps qu'un nouveau mode de gestion qui font que les commissions
scolaires sont très prudentes dans l'estimation de leurs besoins, parce
qu'aucune d'entre elles ne veut taxer
indûment ou ne risquerait d'aller en référendum, au
cas où les dépenses excéderaient les revenus
escomptés.
Par ailleurs, les conventions collectives obligent les commissions
scolaires à annoncer au syndicat, dès le 1er mai, le nombre de
personnes dont elles estiment avoir besoin, donc à une époque
antérieure où elles connaissent leurs besoins réels.
Pour toutes ces raisons, elles mettent en disponibilité beaucoup
plus de personnel, soit enseignant, soit non enseignant, dont elles auront
effectivement besoin au cours de l'année. C'est comme ça depuis
un bon bout de temps et particulièrement depuis qu'elles ont un budget
fermé. (17 h 45)
Nous savons, par ailleurs, par l'expérience des années
passées, que le taux de résorption des enseignants ou des autres
personnes qui ont été mis en disponibilité est toujours
assez élevé. L'an dernier, par exemple, le taux de
résorption des enseiqnants mis en disponibilité a
été de 75% et il était de 94% en 1978-1979. Donc, on peut
s'attendre qu'en cours d'année - nous le saurons durant le mois
d'octobre - il y aura beaucoup de personnes qui seront rappelées,
qu'elles soient enseignantes, qu'elles appartiennent au personnel non
enseignant ou même qu'elles appartiennent au personnel de soutien.
Il reste, cependant, qu'en raison de la diminution du nombre des
inscriptions due à la dénatalité, il persistera un certain
nombre de mises en disponibilité. Ces enseignants mis en
disponibilité bénéficient de la sécurité
d'emploi, c'est-à-dire qu'ils sont assurés de leur plein salaire
payé en partie par le ministère et payé en partie par leur
commission scolaire. Il n'est sûrement pas idéal, quel que soit le
nombre de ces enseignants mis en disponibilité, qu'ils restent a ne rien
faire à la maison. Je suis sûr qu'ils n'aimeraient pas cela, que
la commission scolaire n'aimerait pas cela et que la collectivité, la
société n'aimerait pas cela non plus.
Donc, plusieurs efforts seront tentés pour trouver des
tâches pour ce personnel mis en disponibilité. Il y a une
tâche classique qui est assumée habituellement par ces enseignants
en disponibilité; c'est la suppléance. Il y a toujours beaucoup
de suppléance, soit qu'il y ait des enseignants qui prennent leur
retraite à l'âge prévu ou par anticipation, qui partent en
année sabbatique, qui décident de prendre un congé sans
solde ou qui sont prêtés au ministère pour les fins qu'on
décrivait tout à l'heure. Cela continuera, bien sûr, au
cours de l'année qui vient et une bonne partie du personnel en
disponibilité sera mise à contribution pour ces diverses
tâches.
Nous ne pensons pas, cependant, qu'avec ces moyens classiques nous
puissions résorber la totalité des enseignants ou du personnel
non enseignant mis en disponibilité. C'est la raison pour laquelle nous
allons tenter de trouver d'autres tâches qui pourraient convenir à
ces personnes, tout en respectant les conventions collectives, parce que les
conventions collectives limitent notre choix et il faut les respecter.
Il reste, cependant, que huit ou neuf avenues s'ouvrent à nous
pour la relocalisation de ce personnel mis en disponibilité. Pour que ce
plan d'action puisse réussir, il nous faut la collaboration de la
Centrale des enseignants du Québec et surtout de ses syndicats locaux.
Il nous faut également la collaboration des commissions scolaires. J'ai
déjà rencontré à cet égard le
président de la Centrale des enseignants du Québec et qui a
convenu avec moi que, de son côté comme du côté du
ministère et des commissions scolaires, tous les efforts devraient
être faits pour une relocalisation maximale et optimale de ces
personnels. Nous avons convenu de réunir une table de travail qui sera
tenue prochainement, où nous échangerons nos vues à cet
égard, et nous tenterons, concrètement, d'établir un plan
d'action qu'il communiquera ensuite à ses organismes locaux et que nous
communiquerons de notre côté aux commissions scolaires. Tous
ensemble, nous essaierons - ce sera une première - de résorber au
maximum ces mises en disponibilité et d'utiliser le plus efficacement
possible, pour les fins du développement des enfants, ces
enseignants.
Je pense que nous réussirons ainsi à absorber la plus
grande partie des mises en disponibilité.
M. Champagne: Je pense qu'en commission parlementaire il est
permis de faire des suggestions. Je viens du milieu primaire et secondaire, j'y
ai vécu pendant de nombreuses années et beaucoup d'enseignants
ont souvent exprimé le désir d'avoir des tâches à
demi-temps ou à trois quarts de temps. J'aimerais que le
ministère étudie cette avenue avec les agents du milieu, soit les
commissions scolaires, les enseignants et les syndicats. Je pense que ce serait
aussi une façon de résorber les gens en disponibilité et
cela rendrait tout le monde heureux, quoi.
M. Laurin: Je remercie beaucoup le député de sa
suggestion. Nous essaierons de creuser la possibilité de
réalisation de cette suggestion.
Le Président (M. Rodrigue): M. le député de
Sainte-Anne.
M. Polak: Je voudrais revenir sur la question des milieux
défavorisés, surtout de l'île de Montréal. Je ne
veux pas prendre le
ministre par surprise, mais, jusqu'à une date récente, au
mois d'avril, j'étais membre de l'exécutif du conseil scolaire
et, comme tel, j'étais une des victimes de directives, de
paramètres temporaires, définitifs, permanents, etc. Donc, je
voudrais établir les chiffres un peu plus clairement.
Le ministre dit que la subvention qui parvient du ministère au
conseil a été réduite, cette année, de 13 000 000 $
à 8 000 000 $, n'est-ce pas?
M. Laurin: Je parlais des milieux défavorisés, je
n'ai pas parlé de la contribution totale que le ministère de
l'Éducation verse au conseil scolaire de l'île de Montréal.
Évidemment, la contribution totale est plus considérable que le
chiffre que j'ai mentionné tout à l'heure.
M. Polak: Je voudrais parler du cas du conseil scolaire. À
l'île de Montréal, c'est là où le problème
est assez grave. Beaucoup des enfants qui bénéficient de ce
service s'y trouvent. Avez-vous les chiffres de la comparaison entre le montant
qui est disponible maintenant et le montant qui a été payé
l'année précédente?
M. Laurin: Oui, on va sûrement trouver ce chiffre. Je ne
l'ai pas sous la main, on le cherche et on va vous le donner dès qu'on
l'aura trouvé.
M. Polak: Maintenant, entre-temps...
M. Laurin: Je peux vous le dire, on l'a trouvé.
M. Polak: Parfait.
M. Laurin: L'an dernier, pour les fins d'aide aux milieux
économiquement faibles, c'était 2 382 000 $. Cette année,
c'est 1 285 715 $.
M. Polak: Donc, une réduction de presque 50%, 45%,
à peu près, presque 50%, n'est-ce pas?
M. Laurin: II reste qu'avec cette somme le conseil scolaire de
l'île va pouvoir maintenir toutes les maternelles de 4 ans qu'il
subventionnait.
M. Polak: Oui, mais il faut peut-être vous expliquer le
système. Le conseil a ces fonds, mais ce ne sont pas des fonds qui
parviennent du ministère, on va chercher cet argent par l'imposition
d'une taxe aux contribuables de l'île de Montréal, n'est-ce pas?
Comme ça, c'est le conseil qui fournit la plus grande partie de ce
programme.
M. Laurin: La somme que je viens de vous mentionner, c'est la
contribution du ministère.
M. Polak: Mais, pour être en mesure de donner le même
service, la différence entre la subvention donnée par votre
ministère et le montant actuel du programme, c'est le conseil qui
finance cela de ses propres fonds.
M. Laurin: C'est-à-dire que le conseil scolaire a aussi
son budget...
M. Polak: Oui.
M. Laurin: Et, à l'intérieur de son budget, au
moyen de la transférabilité des postes, il peut assigner, selon
ses choix, selon ses priorités, telle ou telle somme à tel ou tel
poste.
M. Polak: Mais le conseil est obligé d'aller chercher cet
argent directement chez le contribuable.
M. Laurin: Oui, bien sûr.
M. Polak: Pour bien se comprendre, il faut peut-être
expliquer que cet argent est fourni à part par les contribuables de
l'île de Montréal.
Je voudrais maintenant, revenir sur les problèmes administratifs
des milieux défavorisés. Vous avez le bureau de direction
régional, vous en avez un à Montréal aussi. Je me rappelle
qu'il y avait des problèmes, à Montréal, à la
commission scolaire; ensuite, il y a le conseil, qui est tout de même un
groupe de représentants élus directement par la commission
scolaire, sauf les trois nommés par le ministère. Vous savez sans
doute aussi qu'il y a cinq ou six mois, votre bureau régional a
écrit directement aux commissions scolaires disant: II y a encore des
fonds disponibles pour les milieux défavorisés voulez-vous nous
soumettre des programmes? Pourquoi le ministère n'a-t-il pas
laissé cela entre les mains du conseil scolaire? À ce
moment-là, on a encore un chevauchement de services et encore des frais
additionnels d'administration.
M. Laurin: Je pense que vous posez tout le problème du
rôle du conseil scolaire par rapport à la direction
régionale de Montréal. La direction régionale de
Montréal doit, comme les autres directions régionales du
ministère, occuper l'ensemble du terrain, mais, dans le cas auquel vous
faites allusion, je pense que la direction régionale a respecté
sa juridiction en ne traitant que du domaine qui relevait d'elle et qui
était financé par le ministère et non pas par le conseil
scolaire, c'est-à-dire l'animation des parents, nommément.
M. Polak: Tout de même, est-ce que cela n'aurait pas
été plus efficace de dire au
conseil scolaire: II y a une somme qui reste dans les coffres du
ministère. On vous transmet cela, voulez-vous le distribuer parmi les
commissions scolaires, parce que vous connaissez très bien le
système, vous travaillez dans le champ, le conseil scolaire? Pourquoi le
ministère a-t-il encore tout un appareil administratif avec des
directives, avec des programmes, avec des outils et avec des documents
épais comme cela, tandis qu'on aurait facilement employé cette
somme pour la distribuer selon les programmes, ce qui est déjà la
responsabilité du conseil?
M. Laurin: Je pense qu'il y a une responsabilité qui est
donnée à toutes les directions régionales, celle dans le
cadre des milieux défavorisés. La direction régionale de
Montréal a joué un rôle semblable à celui des autres
directions régionales, et je ne pense pas qu'en l'occurrence, il y a eu
chevauchement.
M. Polak: Dans ce cas, je dois demander, M. le Président,
au ministre: Quand vous savez qu'il y a donc deux organismes sur l'île de
Montréal, tout de même, cela coûte cher, cette
administration, parce qu'il y a le bureau de la direction régionale et
ensuite le conseil, avec toutes sortes de fonctionnaires partout, quelle est
l'intention du ministre pour réduire ces frais administratifs et ces
chevauchements de services qui existent sans doute et que j'ai vécus
personnellement?
M. Laurin: Dans toutes les régions du Québec, nous
n'avons que des remerciements et des félicitations pour l'effort
considérable de décentralisation effectué en mettant sur
pied des directions régionales. Cela a rapproché
singulièrement le ministère des instances institutionnelles
où se donne l'enseignement. S'il y a un cas particulier sur l'île
de Montréal, c'est parce qu'il y a eu une loi instituant le conseil
scolaire et qui lui a donné une certaine responsabilité en
certaines matières, dont les milieux défavorisés, mais
c'est un cas unique. Il reste que même si une loi a instauré le
conseil scolaire de l'île de Montréal avec un certain nombre de
responsabilités, le ministère était parfaitement
légitimé et autorisé à se décentraliser en
instaurant dans toutes les régions du Québec des directions
régionales qui ont quatre rôles. C'est d'abord un rôle
d'information, l'information à longueur de journée, de semaine,
sur les politiques du ministère, sur les règles
budgétaires du ministère. Il y a la rétroinformation
aussi, ce qu'on appelle le "feed back" parfois des milieux à l'endroit
des programmes ou des politiques du ministère. Il y a un soutien aussi
également, parce qu'il y a là un personnel - un personnel
pédagogique - qui peut aider singulièrement les commissions
scolaires à mettre en place des programmes. Enfin les directions
régionales aussi ont un rôle de plus en plus grand dans
l'évaluation des enseignements et le contrôle également des
finances.
Parce qu'une loi a instauré le conseil scolaire, on ne peut quand
même pas dire qu'il n'y a pas place à Montréal, comme dans
toutes les autres régions du Québec, pour une direction
régionale qui remplit ces rôles essentiels dans une optique de
décentralisation, de rapprochement du pouvoir central et des pouvoirs
régionaux. La direction régionale à Montréal
remplit aussi bien son rôle que dans les autres régions du
Québec. Évidemment, du fait que la loi a confié au conseil
scolaire un certain nombre d'attributions, il peut parfois y avoir des
problèmes délicats de frontières, mais nous en sommes
très conscients, nous y sommes très sensibles, nous tentons de ne
pas dépasser les attributions qui ont été confiées
à l'une ou à l'autre. La plupart du temps, je pense que cela
marche bien. Quand il s'agit, par exemple, du cas que vous mentionnez, la
direction régionale s'est contentée de transmettre les
informations en ce qui concerne les règles budgétaires, leur
réaménagement aussi à l'intérieur de l'enveloppe
que nous avions, des sommes consacrées à tel ou tel poste. Elle
n'a fait que son devoir. (18 heures)
M. Polak: Seulement une dernière question, M. le
Président. Je vois l'heure, je finis toujours le dernier,
savez-vous?
M. Lalonde: Pas à l'élection.
M. Polak: Je parle de l'île de Montréal. Je suis
d'accord avec vous que le système de direction régionale dans le
reste de la province vous a sans doute valu des compliments. Je peux comprendre
ça, je crois que ça coûterait cher. Mais prenons
l'île de Montréal. Comment se fait-il que le conseil responsable
des budqets des commissions scolaires pour toutes les commissions membres a
reçu des directives directement du bureau régional aux
commissions scolaires concernant des séances d'information sur le
budget?
C'est bien connu, la loi dit que c'est la commission scolaire qui est
responsable des budgets. J'étais là comme commissaire dans le
temps. La première chose qu'on a sue, c'est qu'on avait des
séances de partout, avec les fonctionnaires de votre département,
avec les commissions scolaires, avec tout le monde, c'était toujours la
contradiction et ca coûte aussi énormément de temps. Ces
fonctionnaires sont payés pour donner ces séances d'information,
et ce n'est pas juste une petite séance de deux heures, ce sont des
séances qui durent toute une soirée et se
prolongent le lendemain. Donc, ne croyez-vous pas que c'est un
chevauchement de services qui ne devrait pas exister? Peut-être, dans
l'île de Montréal, faudrait-il faire un exemple, comme
peut-être abolir le conseil, je ne sais pas quelles sont vos intentions
là-dessus, ou abolir la direction régionale à
Montréal et laisser le conseil qui est élu par les contribuables
directement continuer sa fonction, car, jusqu'à ce jour, il a
très bien travaillé.
M. Laurin: Je voudrais d'abord relever une première
affirmation. Quand vous dites que ça coûte cher, en fait,
ça ne coûte pas plus cher, parce que les directions
régionales sont composées de fonctionnaires qui travaillaient
auparavant au ministère. On a simplement transféré dans
les réqions du personnel du ministère. Ce qui veut dire que
certaines décisions, au lieu d'être prises au niveau du
ministère, sont maintenant prises au niveau des régions. Du
travail qui se faisait au ministère se fait maintenant au niveau des
régions.
Deuxièmement, pour votre deuxième question, c'est vrai que
la loi donne au conseil scolaire l'obligation de s'occuper du budget des huit
commissions scolaires qui sont sous sa juridiction, mais il reste quand
même que le budget du ministère de l'Éducation demeure la
responsabilité du ministère et le ministère ne peut pas se
dérober à cette responsabilité non plus. Puisque c'est une
responsabilité, il est bien obligé quand même d'informer
tous les agents, toutes les instances régionales de la politique
budgétaire du ministère.
Évidemment, à la fin, le conseil scolaire devra adopter le
budget des commissions scolaires. Mais ceci n'enlève rien à la
responsabilité du ministère et de ses directions
générales dans le domaine de l'information.
M. Lalonde: Si vous permettez, en vous demandant d'ajourner
à lundi, permettez-moi de dire que la définition de
décentralisation que j'ai entendue de la bouche du ministre ressemble
beaucoup à ce qu'on appelle ailleurs de la déconcentration.
M. Laurin: En fait, déconcentration et
décentralisation sont entre elles dans une relation dialectique et on ne
peut pas dire que la décentralisation n'implique pas une
déconcentration non plus.
M. Lalonde: Oui, d'accord. Mais, d'habitude, dans le domaine
politique ou administratif, quand on parle de décentralisation, on parle
de décentralisation des pouvoirs...
M. Laurin: II reste...
M. Lalonde: ...des centres de décision, alors que le
bureau régional est en fait l'oeil, l'oreille et le bras du
ministère.
M. Laurin: Les directions régionales, je vous le
concède volontiers, c'est une déconcentration. Cependant, ce que
toutes les lois accordent maintenant à l'école ou aux commissions
scolaires, comme, par exemple, dans la loi 71 et dans la loi 30, ça,
c'est de la décentralisation.
M. Lalonde: Dans la loi 57, c'était de
l'émasculation des commissions scolaires.
M. Laurin: Non, ça, c'est répondre au voeu
longtemps exprimé et qu'avait commencé à réaliser
le prédécesseur de M. Parizeau aux Finances, M. Garneau, un
transfert progressif de l'impôt foncier vers les municipalités.
Nous n'avons fait que compléter avec courage et rapidité un
travail entrepris par le prédécesseur de notre ministre des
Finances.
M. Lalonde: Vous allez le rendre responsable de bien des maux.
Comme ces choses sont bien dites! M. le Président. On ajourne à
lundi, 15 heures?
Le Président (M. Rodrigue): Les travaux de la commission
sont ajournés au lundi 15 juin, à 15 heures, sauf si
l'Assemblée nationale en décide autrement.
(Fin de la séance à 18 h 05)