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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, May 4, 1982 - Vol. 26 N° 85

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Éducation


Journal des débats

 

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de l'éducation est réunie pour l'étude des crédits du ministère. Est-ce que vous avez des modifications quant aux noms des membres de la commission? Non.

M. Lalonde: Pas que je sache. Si vous voulez me donner les noms.

Le Président (M. Rodrigue): Très bien. Alors, les membres de cette commission sont: MM. Brouillet (Chauveau), Champagne (Mille-Îles), Chevrette (Joliette), Cusano (Viau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre) et Paquette (Rosemont).

Les intervenants à cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), French (Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Paré (Shefford), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Rochefort (Gouin), Ryan (Argenteuil) et Saintonge (Laprairie).

M. Paquette: M. le Président, est-ce que vous pourriez remplacer le nom de M. Chevrette par celui du député de Vachon, M. David Payne?

Le Président (M. Rodrigue): Alors, M. Payne (Vachon) remplace M. Chevrette (Joliette).

M. Lalonde: Pour ce qui est de notre côté, M. le Président, M. Dauphin (Marquette) remplacerait M. Polak (Sainte-Anne).

Le Président (M. Rodrigue): Dans les intervenants, M. Dauphin (Marquette) remplace M. Polak (Sainte-Anne).

M. Lalonde: Tous ces remplacements pourront être révisés chaque fois qu'on commence une séance.

Le Président (M. Rodrigue): À ce stade-ci, nous devons nommer un rapporteur de la commission. Est-ce qu'il y a une proposition?

M. Paquette: M. le Président, je propose le député de Mille-Îles.

Le Président (M. Rodrigue): Le député de Mille-Îles, M. Champagne. Est-ce qu'il y a d'autres suggestions?

M. Lalonde: C'est unanime.

Le Président (M. Rodrigue): Unanime. M. Champagne (Mille-Îles) agira comme rapporteur de la commission.

Alors, l'objet de nos travaux est d'étudier les crédits du ministère. Cependant, comme il est d'usage à l'ouverture d'une séance de commission parlementaire pour l'étude des crédits, je vais d'abord céder la parole au ministre pour des remarques préliminaires, puis au représentant de l'Opposition.

M. le ministre.

Exposés préliminaires M. Camille Laurin

M. Laurin: M. le Président, chers collègues, c'est sous le signe de l'essentiel que j'ai voulu, au cours de l'année 1981-1982 et pour l'ensemble de mon mandat à l'Éducation, placer mon action et celle de mon ministère. Un essentiel qu'il n'est pas toujours facile de discerner et de poursuivre dans un contexte sociétal fortement perturbé par une crise économique et politique qui risque de se transformer dans le secret des coeurs sinon dans les discours publics, en crise de confiance dans les institutions sociales, voire de confiance en soi. Mais un essentiel vers lequel il n'est pas question de ne pas maintenir le cap sous peine de renier les valeurs qui doivent présider au développement de notre système scolaire et qui - je me permets de l'ajouter - sont celles-là mêmes qui inspirent l'ensemble de mon action personnelle et de mes engagements politiques.

Au moment de soumettre à cette commission parlementaire les crédits détaillés de 1982-1983, il m'apparaît indiqué de faire le point sur cette option de fond et sur les principaux chantiers dans lesquels j'ai indiqué ici même, l'année dernière, que je comptais la voir traduire en priorité. Je ferai donc brièvement le bilan de ce qui, à travers les grands programmes dont les crédits sont aujourd'hui portés à votre attention, a été réalisé dans cette voie au cours de la dernière année et qui sera poursuivi ou relancé en 1982-1983. Je souhaite vivement

que puisse ainsi apparaître le plus clairement possible que, à travers les contraintes actuelles, tous ces chantiers visent méthodiquement et obstinément le même essentiel.

Une visée essentielle: la qualité de l'acte d'apprendre et de son environnement.

Viser l'essentiel en éducation est une tâche éminemment concrète, toute proche de la quotidienneté vécue des écoles, des collèges, des universités et du ministère même. Puisque, en dernière analyse, c'est de l'aménagement même de notre système scolaire qu'il s'agit. Un système scolaire qu'il faut, chaque jour davantage, et à coups de gestes patiemment posés dans la même direction, recentrer sur sa mission éducative de service aux personnes et à la collectivité et modeler en fonction de l'acte d'apprendre qui en constitue l'ultime légitimation.

À la source du système scolaire, et lui donnant son âme - à certains jours, un nécessaire "supplément d'âme" - il y a le désir de connaître des personnes, des communautés locales et régionales, de l'ensemble de la collectivité, dont le développement harmonieux ou boiteux fait le succès ou l'échec de l'entreprise éducative. À quelque niveau qu'on le considère, le système scolaire nous renvoie toujours à ce dynamisme fondamental des personnes. Cette démarche sans cesse relancée qui conduit vers l'acquisition des compétences et, à travers elles, vers le développement intégral de leur potentialité, voire de leur soif de savoir, d'aimer, et de vivre. Il nous renvoie ainsi vers les sujets de cette démarche, l'enfant, l'adolescent, l'adulte en processus d'apprentissage et de développement engagé dans une relation privilégiée avec des hommes et des femmes spécialement voués à cette grande tâche.

Pour un ministre et un ministère de l'Éducation, viser cet essentiel c'est assurément sans cesse le rappeler à l'attention de tous, le dire, le nommer s'il est vrai qu'on ne s'approprie bien que ce que l'on réussi à dire et à nommer. Au commencement était le verbe, n'est-ce pas? mais c'est surtout, ou mieux en même temps, dans l'enchaînement des décisions quotidiennes, essayer de faire du système scolaire et de chacun de ses éléments un environnement de plus en plus propice à l'épanouissement et au succès des démarches d'apprentissage. Cet environnement éducatif, nous le savons tous d'expérience, est déterminant pour la réalisation de nos cheminements personnels, car nous n'apprenons jamais que nous ne soyons en relation avec un environnement, une altérité qui devient justement nôtre dans l'acte d'apprendre.

Cette altérité, cet environnement éducatif, ce sont d'abord des personnes avec lesquelles nous arrivons à nouer des relations pédagogiques positives, c'est-à-dire des relations qui aiguisent la soif d'apprendre et indiquent, montrent, comme savent le faire les vrais maîtres, des objets de connaissance à assimiler, et grâce auxquelles grandir soi-même; c'est autour de cette relation pédagogique que se joue la qualité du système scolaire. C'est par la médiation de cette relation que tous les services du système scolaire rejoignent les personnes en démarche d'apprentissage. Le système scolaire tire même sa signification de ce qui se passe chez les personnes qui apprennent et se développent avec l'aide d'éducateurs compétents et conscients de leurs responsabilités. Les uns et les autres sont engagés dans une même aventure, celle exaltante du projet éducatif.

Le projet éducatif n'a rien d'un concept abstrait, d'une idée floue ou fumeuse; il est bien plutôt, dans le quotidien de l'établissement scolaire, l'utilisation de chaque moment, de chaque ressource, de chaque activité, de chaque agent en fonction des besoins et des objectifs d'apprentissage des usagers du système scolaire. Il y a projet éducatif authentique lorsque tous les partenaires se sentent solidairement responsables de définir, d'organiser, de réaliser et d'évaluer les démarches d'apprentissage, lorsque, en concertation, ils s'appliquent à identifier les besoins, à fixer les priorités, à choisir les moyens, à les mettre en oeuvre et à juger aussi bien de la démarche suivie que des résultats obtenus. L'environnement éducatif doit servir ce projet éducatif.

L'environnement éducatif, c'est aussi des régimes pédagogiques à la fois stimulants et exigeants, des programmes d'études riches et équilibrés, résolument axés sur l'acquisition d'une solide formation de base et des compétences professionnelles les plus poussées possible. C'est également des pratiques pédagogiques, des instruments didactiques, des modes d'organisation de la vie de tous les jours, des attitudes aussi qui permettent qu'il fasse bon d'apprendre ou qui émoussent jusqu'au goût d'apprendre.

L'environnement éducatif, c'est encore des ressources équitablement réparties, des pouvoirs et des responsabilités exercés en esprit de collaboration et de concertation, des structures institutionnelles qui soient elles-mêmes au service de l'acte d'apprendre. Chacun sait que les intentions et les objectifs les plus nobles tournent parfois court, faute d'avoir pu inspirer les structures et les moyens mis en place pour les atteindre. Améliorer les aménagements, c'est être au service de l'acte d'apprendre.

L'environnement éducatif, c'est aussi l'enracinement socio-communautaire des établissements scolaires, leur ouverture aux réalités culturelles, sociales, économiques et politiques des communautés qui les

soutiennent, les animent et leur expriment sans cesse leurs besoins et leurs aspirations. Pour être vraiment éducatifs, l'école, le collège, l'université doivent être des instruments de développement des communautés, des lieux de rassemblement et de ressourcement, des "foyers de culture", des "lieux de convergence" de la culture. Des ferments d'éducation permanente aussi - et, par là, des instruments de démocratisation et d'égalisation des chances - dans la mesure où jeunes et moins jeunes peuvent y trouver une occasion sans cesse renouvelée d'apprendre et de se développer. Il n'y a pas de "cité éducative" possible, si les établissements scolaires ne sont pas eux-mêmes pleinement éducatifs pour tous ceux qui, d'une manière ou d'une autre, participent à leur vie.

L'école - et entendons ici aussi bien le collège et l'université - qu'il nous faut bâtir ensemble comme un des pivots de cette cité éducative est une école qui sera de part en part éducative, humaine, personnalisée, façonnée selon les valeurs et les aspirations de ses usagers, de ses agents et de sa communauté d'appartenance, une école qui soit en même temps reflet de ce que nous sommes et invitation à devenir ce que nous voulons être, une école responsable de son projet éducatif, ouverte et accueillante aux besoins, lieu de maturation où il soit possible d'aimer ce qu'on apprend à connaître et ainsi de le mieux connaître.

Essayer d'aménager ainsi l'école en un environnement éducatif plus fécond et plus centré sur la relation pédagogique, c'est opter pour la qualité. La qualité est devenue une sorte de leitmotiv chez ceux qui se préoccupent d'éducation, comme chez tous les contribuables, d'ailleurs. Tout le monde en parle, parce que tout le monde exprime ainsi une attente et une volonté dont tous perçoivent le bien-fondé et l'opportunité. L'identification des critères de la qualité elle-même ne peut sans doute guère échapper à un débat philosophique sur les finalités de l'éducation; mais l'accord se fait généralement assez rapidement sur les conditions qui, certaines plus que d'autres, permettent et favorisent une relation éducative de qualité. Tout le monde semble ainsi s'accorder à reconnaître que, en valorisant l'école, ses agents et son projet éducatif, on met vraiment l'accent sur la condition essentielle de la qualité du système scolaire: un milieu centré sur les enjeux éducatifs, animé par des agents solidairement responsables de leurs objectifs, de leurs moyens d'action et de leurs résultats.

Comme chacun le sait, l'éducation est en quelque sorte "atmosphérique"; elle est largement affaire de climat. D'où l'importance capitale de communautés éducatives conscientes de leur mission, responsables de leurs décisions, ouvertes à l'innovation et à l'autocritique; l'importance aussi capitale de communautés éducatives dont les partenaires sont profondément motivés et collaborent dans un esprit de respect et d'estime réciproques. Travailler à susciter, à développer et à maintenir de tels milieux, c'est travailler à humaniser l'école, à en faire tout le contraire d'une boîte à cours ou d'une entreprise bureaucratique où les agents répètent machinalement les mêmes gestes routiniers et tuent leur goût de vivre à force de tuer le temps. Un environnement éducatif de qualité suppose une prise en charge par l'ensemble des partenaires et une appropriation commune des objectifs, des moyens d'action et des résultats. Il exige que chacun soit reconnu, accepté et promu dans son rôle propre et que les divergences soient discutées avec "fair play". Par-dessus tout, il repose sur une perception partagée du projet éducatif et des visées qui lui donnent corps.

Travailler à l'amélioration de tout l'environnement éducatif, c'est aborder le problème de la qualité à sa source môme, si l'on peut dire. Non pas par quelque critère abstrait applicable aux processus d'apprentissage ou à leur produit, mais plutôt par la mise en valeur du terreau quotidien où se forment et se vivent les projets éducatifs. C'est poursuivre un objectif singulièrement intégrateur de l'ensemble des réalités que la plupart des gens évoquent quand ils parlent de qualité de l'éducation, comme aussi lorsqu'ils parlent de retour à l'essentiel. C'est, jour après jour, à la manière du cheminement éducatif en quoi consiste la culture elle-même, franchir des pas vers une démocratie culturelle qui soit vraiment participation aux biens culturels et à la création même de ces biens. Telle est, en dernière instance, la visée fondamentale que je poursuis.

De la maternelle à l'université: des chantiers convergents. Cette volonté d'aménager le système scolaire à la manière d'un environnement éducatif favorable à l'acte d'apprendre, nous l'avons systématiquement poursuivie au cours de 1981-1982 à travers l'ensemble des chantiers dont j'avais annoncé l'ouverture, la relance ou la continuation. Je veux maintenant passer brièvement ces chantiers en revue pour rappeler ce qui y a été fait au cours de l'année qui s'achève et pour indiquer les pas que je me propose de franchir en 1982-1983. (10 h 30)

Les réseaux de l'éducation préscolaire et de l'enseignement primaire et secondaire ont été, au cours de l'année 1981-1982, un terrain d'intense activité. Les milieux scolaires ont continué de se familiariser avec les nouveaux régimes pédagogiques et en ont résolument entrepris l'implantation progressive. Ces régimes pédagogiques, comme vous le savez, constituent les pièces centrales de tout le renouveau pédagogique

amorcé avec l'école québécoise. Ils visent la consolidation et l'amélioration des services publics d'éducation, notamment en proposant une répartition des matières d'enseignement plus nettement orientée vers l'acquisition d'une formation de base plus riche et plus équilibrée, en précisant de nouveaux équilibres à respecter entre cours obligatoires et cours à option, en définissant l'esprit et la facture générale de nouveaux programmes destinés à remplacer les programmes-cadres jugés insuffisamment précis, en consacrant l'usage d'un guide pédagogique pour chaque programme et d'un manuel pour chaque matière d'enseignement.

Ces nouveaux programmes sont pratiquement tous prêts et la préparation des guides pédagogiques est également très avancée. La politique d'évaluation pédagogique qui découle de ce régime est également en bonne voie d'appropriation et d'implantation. De plus, les services personnels aux élèves ont fait l'objet de réflexion des milieux scolaires et un ensemble d'orientations et de mesures sera sous peu rendu public. Des propositions relatives aux services complémentaires seront également bientôt soumises à la consultation. Il y a là autant d'éléments d'un environnement qui, dans la vie quotidienne de l'école, conditionne la qualité et la possibilité même d'un vrai projet éducatif.

Au cours de l'année 1981-1982, on a aussi beaucoup parlé de réforme des structures scolaires. Non sans raison, d'ailleurs, puisque le ministère et moi-même y avons investi d'importantes énergies. La proposition que je compte faire à la population à ce sujet approche même de sa forme définitive et est actuellement à l'étude au Conseil des ministres.

Ce projet de réforme scolaire s'inscrit directement dans la foulée de ce que nous avons entrepris avec L'École québécoise et les régimes pédagogiques, de même qu'avec les diverses opérations qui en découlent. En fait, c'est une sorte de phase II de L'École québécoise qu'il propose de réaliser, comme moyen de rendre pleinement possible la mise en oeuvre des projets éducatifs et d'assurer le renouveau pédagogique préconisé. Tout se passe, en effet, comme si les mesures d'amélioration et de redressement des contenus et des pratiques d'apprentissage souhaitées par la majorité des gens risquaient de ne pas pouvoir donner les résultats attendus, à cause de contraintes qui tiennent au partage des responsabilités et aux structures de décision et de fonctionnement. Ainsi, l'implantation du renouveau L'École québécoise ramène d'elle-même à l'attention collective la question des structures de notre système d'écoles primaires et secondaires. Tout donne même à penser que ce renouveau est difficilement réalisable, voire menacé, en raison d'un aménagement des pouvoirs et de structures qui ne laisse pas à l'école une marge de manoeuvre suffisante. Les maigres pouvoirs de l'école sont vite récupérés par les technocraties du ministère, aussi bien que par celles des commissions scolaires et des syndicats. D'où ce sentiment d'impuissance fréquemment éprouvé au niveau de l'école, là où se joue pourtant l'essentiel de l'activité éducative et où se vit la qualité de la pédagogie et des apprentissages.

Le projet de restructuration en voie de préparation vise le réaménagement d'éléments fondamentaux de l'environnement éducatif. Il veut redonner l'école à son milieu d'appartenance et en faire le véritable pivot du système scolaire. Il veut favoriser la prise en charge du projet éducatif par la communauté scolaire, élargir les marges d'autonomie de l'école, accroître sa stabilité ainsi que sa capacité d'assumer la responsabilité de ses orientations et de sa vie quotidienne. Toutes des composantes de cela même qui conditionne la qualité de l'acte d'apprendre et de son environnement. Ce projet constituera un chantier prioritaire au cours de 1982-1983: présentation à la population, discussion publique, dépôt et adoption d'un projet de loi, premières implantations en . marqueront les grandes étapes.

Dans le réseau de l'enseignement collégial, c'est à l'implantation des mesures annoncées dans Les Collèges du Québec que les principaux efforts ont été consacrés cette année. Accroissement de l'accessibilité aux études collégiales, en particulier pour les diplômés de l'enseignement secondaire professionnel, développement des programmes d'enseignement professionnel, élaboration des conditions de création de centres spécialisés d'enseignement professionnel, révision de programmes actuels de formation générale et professionnelle, soutien à l'expérimentation et à l'innovation pédagogiques, production de plus d'une vingtaine de guides pédagogiques, élaboration d'orientations relatives aux services aux étudiants et aux affaires étudiantes, rationalisation de la gestion des établissements, perfectionnement du personnel des collèges, mise en oeuvre des dispositions de la politique de développement culturel et des recommandations du Conseil du statut de la femme: voilà autant de champs où des pas ont été franchis, tous orientés vers l'aménagement d'environnements éducatifs mis au service de l'acte d'apprendre.

Mesure intégratrice s'il est est une, le projet de règlement des études collégiales a fait, au cours de l'année 1981-1982, l'objet d'une vaste consultation de l'ensemble des partenaires. Il en est ressorti amélioré, davantage enraciné dans les besoins vécus des étudiants et des agents de la vie quotidienne des collèges. Le libellé que je compte soumettre bientôt au Conseil des collèges et aux partenaires du réseau

collégial, puis au Conseil des ministres, est pratiquement arrêté. Conçu pour consacrer les traits spécifiques de l'enseignement collégial, pour consolider l'unité, la cohérence et la stabilité de ce réseau qui nous est propre, pour servir de base solide à l'octroi des diplômes d'État, pour garantir les droits pédagogiques des étudiants, ce règlement devrait marquer, en même temps que la fin d'une étape, un nouveau départ pour le développement novateur de nos collèges. Ce règlement consacrera les objectifs visés par la création du niveau collégial, notamment ceux qui portent sur l'accès aux études collégiales et sur le principe toujours actuel de la polyvalence. Il fera de la formation fondamentale le principe intégrateur des programmes d'études, confirmera l'importance qu'il attache à la mission éducative des collèges au sein de la collectivité, consacrera le droit des étudiants à une formation de qualité. Il établira aussi avec netteté la possibilité pour les collèges de procéder aux innovations et aux expérimentations susceptibles de leur permettre de répondre aux exigences sans cesse changeantes des régions du Québec. À n'en pas douter, ce régime pédagogique marquera un pas important dans notre entreprise collective d'amélioration de l'environnement éducatif offert aux étudiants et aux étudiantes des collèges.

L'année 1982-1983 sera donc marquée par la mise au point de ce nouveau régime pédagogique et par l'implantation d'un certain nombre de mesures qui en découlent: révision des programmes d'enseignement du français et de philosophie, implantation des nouveaux cours d'économie, d'histoire et institutions du Québec, création de centres spécialisés, production de matériel didactique, soutien à l'innovation pédagogique. Ainsi, étape par étape, nous continuerons de poursuivre nos objectifs de qualité des apprentissages, d'amélioration de la pédagogie, d'insertion culturelle et socio-communautaire, de contribution au développement économique régional: tout cela qui, au collégial, doit constituer des éléments déterminants de l'environnement éducatif et qu'il importe, là aussi, de mettre au service de l'acte d'apprendre.

Le réseau des établissements universitaires a poursuivi, au cours de 1981-1982, la démarche d'approfondissement, de rationalisation et de concertation à laquelle je l'avais convié il y a une quinzaine de mois. Dans le prolongement du discours programme que j'ai prononcé en février 1981, j'ai tenu, au cours de l'automne dernier, les ateliers que j'avais annoncés. Le processus n'a pas été sans difficulté, ni sans incident de parcours. Mais il aura permis aux principaux partenaires (administrateurs, professeurs, étudiants, ministère) de prendre acte des grandes questions qui sollicitent actuellement les universités et d'explorer les moyens d'y répondre le plus efficacement possible, dans le respect de l'autonomie des établissements aussi bien que des enjeux collectifs qui y sont impliqués.

Des éléments importants d'une politique des universités ont donc commencé d'être mis en oeuvre au cours des derniers mois, notamment en matière de financement, de coordination, de concertation et de promotion de l'accessibilité, cet objectif toujours impérieux pour le Québec. C'est ainsi que, dans les limites d'une enveloppe budgétaire encore très serrée pour la prochaine année, les subventions aux universités tiendront compte du même taux d'indexation que les subventions aux autres réseaux. Avec les administrateurs universitaires, nous avons aussi discuté d'un mode de financement des clientèles additionnelles qui favoriserait un meilleur partage de l'effort d'accessibilité entre les établissements et constituerait une forme d'incitation à l'accueil de nouveaux étudiants. Le Conseil des universités prépare actuellement un avis sur cette question. Nous avons aussi discuté d'une formule de répartition des ressources qui permettrait d'opérer un réajustement des bases de financement et sur laquelle le Conseil des universités sera consulté au cours de l'automne. Toutes ces mesures posent les jalons d'une refonte en profondeur des méthodes actuelles de financement des universités que nous comptons mettre au point en concertation avec les universités.

On a également entrepris la mise en place de systèmes d'information mieux accordés aux besoins des divers partenaires et plus propices à une gestion concertée et transparente du réseau des universités. Avec les établissements de la région de Montréal, une démarche de concertation a aussi été solidement amorcée, qui vise l'utilisation plus rationnelle des ressources disponibles, voire une certaine mise en commun; en ce qui a trait aux services et aux mécanismes d'admission, les travaux entrepris devraient même permettre d'atteindre les premiers résultats pour la prochaine rentrée. Enfin, les impératifs généraux de coordination et de concertation de l'ensemble du réseau m'ont conduit à confirmer et à préciser récemment devant le Conseil des universités les rôles et les responsabilités des divers partenaires. J'ai alors confié au Conseil des universités d'importants mandats d'évaluation des programmes d'enseignement et de recherche dont les résultats éclaireront les décisions du ministère concernant le développement rationnel du réseau.

Ces travaux ont été menés jour après jour, semaine après semaine, avec une volonté maintes fois exprimée d'assurer un développement de nos universités qui tienne compte des capacités financières limitées de l'État, mais ne sacrifie en rien nos grands

objectifs de qualité et d'accessibilité. Je puis dire que les universités collaborent étroitement à ce projet; j'oserais même avancer qu'elles ont vraiment décidé de faire plus avec moins. Nous poursuivrons ces travaux en 1982-1983, avec la même ténacité et la même volonté de dialogue. Chacun de ces travaux s'inscrit comme un élément dans un ensemble dont j'ai déjà exprimé le dessein en toute clarté et qui, comme aux autres niveaux d'enseignement, vise la constitution de milieux d'étude et de recherche de haute qualité, voués sans équivoque au déploiement de l'acte d'apprendre et au service des personnes et des communautés qui en attendent les retombées. Je me propose, d'ailleurs, de faire bientôt publiquement le point sur cet important dossier de notre politique des universités.

En éducation des adultes, l'année 1981-1982, une année de coupures budgétaires particulièrement pénibles dans ce secteur, aura été une année d'approfondissement et de maturation dont les effets sont loin d'être tous négatifs. Les programmes ont été réexaminés, émondés, recentrés sur des objectifs éducatifs plus précis et plus sélectifs; leur administration s'est aussi faite plus rigoureuse. De manière générale, l'essentiel des activités de formation a pu être maintenu et tout indique que le projet socioculturel majeur que constitue l'éducation des adultes en sort indemne et même conforté dans ses dynamismes et ses visées de fond.

C'est dans ce contexte de remise en question qu'a été déposé le rapport de la commission d'étude sur la formation des adultes. Ce volumineux rapport, qui interpelle avec vigueur notre système scolaire et l'ensemble de notre société, fait actuellement l'objet d'une étude attentive dans les plus hautes instances gouvernementales. Au ministère même, nous sommes à nous approprier cet important document et nous explorons les moyens d'y donner la meilleure suite possible dans nos programmes d'action. D'ores et déjà, je puis affirmer que la trame de fond du rapport suscite chez nous des connivences culturelles et pédagogiques profondes. Plus encore, dans plusieurs de ces suggestions particulières, la commission évoque des actions dont nous étudiions déjà la mise en oeuvre ou même que nous avions déjà amorcées; je pense ici, par exemple, à la reconnaissance des acquis, à l'alphabétisation, à la formation à distance et, plus globalement, aux principes et aux exigences d'une authentique formation de base. (10 h 45)

L'année qui vient sera déterminante pour les suites qu'il convient de donner au rapport. Je m'y emploierai moi-même avec mes collègues du comité ministériel spécialement formé à cette fin. J'ai aussi demandé à mon ministère de tout mettre en oeuvre pour activer nos propres projets qui trouvent dans le rapport de la commission des échos de convergence et des confirmations - et ce n'est assurément pas peu de choses, puisque, jusque dans son titre même, le rapport est lui aussi centré sur l'acte d'apprendre et son environnement.

En formation professionnelle, les travaux que j'avais commandés en vue d'élaborer une politique d'ensemble ont franchi, en 1981-1982 des étapes décisives. Profitant des éclairages simultanés et convergents de l'expérience d'implantation du régime pédagogique du secondaire, des avis reçus sur le projet de règlement des études collégiales et du rapport de la commission Jean, je serai en mesure de présenter sous peu - en fait, dans quelques jours - des propositions de relance et de renouveau concernant la formation professionnelle offerte aux jeunes dans les établissements de niveaux secondaire et collégial. Au cours des prochains mois, les milieux intéressés auront l'occasion de discuter ces propositions et de faire des suggestions. Après quoi, je compte adopter les mesures qui conviennent.

Quant au dossier de la formation professionnelle des adultes, un dossier dont les enjeux culturels, sociaux et économiques apparaissent aujourd'hui avec une acuité toute particulière, c'est de concert avec mes collègues du Travail, de l'Immigration et des Affaires intergouvernementales que je collabore activement à la formulation d'une position gouvernementale québécoise qui servira de base à nos pourparlers avec le gouvernement fédéral. Ce qu'il nous faut y sauvegarder en priorité, c'est que la participation fédérale s'inscrive harmonieusement dans les priorités québécoises de développement économique, social et culturel. La formation professionnelle des adultes est trop intimement liée à l'ensemble de notre entreprise éducative et de nos compétences en matière de main-d'oeuvre et de développement économique pour que sa maîtrise d'oeuvre ne puisse pas être assurée par le Québec.

Dans le projet des individus comme dans celui de l'ensemble de la collectivité, l'acquisition des compétences professionnelles constitue une tâche de première importance, déterminante pour l'avenir. C'est pourquoi il faut en faire, avec tout ce que cela comporte d'exigences d'approfondissement, un authentique acte d'apprendre, porteur de progrès et développement intégral des personnes en fonction duquel un environnement éducatif adéquat doit être aménagé.

La vie étudiante continue d'être pour moi une préoccupation. Tout au long de l'année, le ministère a poursuivi sa réflexion

et intensifié son rapprochement avec les milieux étudiants. Moi-même, j'ai tenu à avoir des contacts réguliers avec des étudiants, trouvant chez eux, en même temps que le questionnement de l'avenir, le rappel vivant - encombrant, devrions-nous espérer -de ce pour quoi tournent toutes les machines administratives du monde de l'éducation. Les ateliers universitaires de l'automne ont d'ailleurs démontré sans équivoque tout ce que la voix des étudiants peut apporter à nos analyses et à nos entreprises.

La définition de nos orientations en matière de services personnels et complémentaires à offrir aux étudiants, le dossier de la reconnaissance des associations étudiantes, la promotion des droits des étudiants sont autant de chantiers qui ont franchi cette année des étapes importantes d'approfondissement. C'est pour assurer la cohérence de ses actions en ce domaine que le ministère a récemment créé une mission des affaires étudiantes. Nous sommes également à mettre la dernière main à la formulation de ce qui pourra constituer une politique ministérielle de vie étudiante, disant en clair nos objectifs et nos moyens d'action en cette matière.

L'importance d'un tel dossier se passe de tout commentaire: les étudiants ne sont-ils pas ultimement la raison d'être d'un système d'éducation, les sujets irréductibles de l'acte d'apprendre? Surtout en ces temps où la vie se fait très dure pour beaucoup d'entre eux, les étudiants doivent habiter l'ensemble de nos projets, sans que nous ne puissions, cependant, et sans qu'ils ne puissent eux-mêmes oublier la masse de ceux et celles qui, à l'extérieur du système scolaire et souvent pourvus d'une préparation scolaire et professionnelle insuffisante, se débattent avec difficulté dans la crise économique actuelle. Cet horizon plus vaste et plus réel, nous en tiendrons de plus en plus compte dans nos interventions auprès des étudiants.

Pour l'ensemble des chantiers auxquels nous travaillons, la formation et le perfectionnement des maîtres constituent une sorte de plaque tournante. Nous le savons pour ainsi dire d'instinct: les maîtres sont les partenaires majeurs et irremplaçables de l'acte d'apprendre, en tout cas les éléments les plus déterminants de tous les environnements éducatifs. C'est donc sans hésitation qu'il faut voir dans leur formation et leur perfectionnement une sorte de condition de toute adhésion à l'essentiel en éducation.

C'est un dossier qui, au Québec comme ailleurs, est un dossier difficile. La baisse des clientèles scolaires, la stabilisation des effectifs, la diminution des taux d'entrée dans la profession, les dispositions des conventions collectives sont autant d'éléments qui limitent singulièrement les marges de manoeuvre en cette matière et qui expliquent qu'on ne progresse pas ici avec toute la célérité que nous souhaiterions. Nous y travaillons cependant avec détermination, je puis vous l'assurer.

Ainsi, à la suite du rapport de la Commission d'étude sur les universités et dans la foulée de L'École québécoise et des régimes pédagogiques qui en sont issus, j'ai formulé, dès mars 1981, les éléments d'une politique d'ensemble et indiqué mon propos de poursuivre l'élaboration d'une politique à caractère plus complet, en relançant la discussion sur les aménagements et les pratiques, à la faveur d'un dialogue direct avec les intervenants concernés.

Cette autre étape d'élaboration est actuellement en cours et porte, en particulier, sur le brevet d'enseignement, la probation, le cadre général de la formation des maîtres du secondaire, la formation pratique et le perfectionnement. Nous nous employons à formuler des hypothèses qui tiennent compte des perspectives exprimées par la commission Jean, comme aussi de celles qui découlent du projet de règlement des études collégiales et des propositions que je ferai sous peu sur la formation professionnelle des jeunes. Nous attendons aussi les études et les recommandations que doivent compléter prochainement l'Office des professions et le Conseil des universités sur la formation professionnelle à l'université. C'est au centre de convergence de toutes ces démarches que je souhaite pouvoir, dès que la chose sera possible, formuler des propositions d'amélioration et de relance.

Pas plus en ce dossier qu'en d'autres, nous n'avons de solution miracle. Mais, tout spécialement dans celui-ci, nous souhaitons pouvoir aller à l'essentiel. Car les maîtres sont au coeur de tout notre projet de qualité et d'approfondissement de l'acte pédagogique.

Le dossier de la recherche a franchi des pas importants en 1981-1982. Dans les perspectives mises de l'avant par l'énoncé de politique gouvernementale Un projet collectif, j'ai récemment lancé la première tranche de notre politique ministérielle de recherche, portant sur ce qu'on peut appeler le cadre organisationnel de la recherche au ministère. Cet énoncé définit les objectifs, les lieux de responsabilité et les mécanismes de coordination qui président à la gestion de ce dossier essentiel à la vie du ministère et de nos réseaux. On y traite de la recherche réalisée en vue de soutenir l'action politique et administrative du ministère, de la recherche orientée vers le développement des réseaux d'enseignement, du soutien à la mission de recherche dans les universités et les collèges, du soutien au développement de la recherche en éducation. On y précise et consolide ainsi l'action du ministère en ce domaine.

Dans ces temps de difficultés et

d'inquiétudes que nous traversons et au moment où nous voulons procéder à des aménagements des environnements éducatifs vraiment centrés sur l'acte d'apprendre et sur les personnes qui le vivent, la fonction recherche revêt une importance toute particulière. Aujourd'hui moins que jamais il n'est question de sacrifier la recherche au profit de quelque urgence immédiate. Pour discerner l'essentiel et pour travailler chaque jour à en inspirer l'ensemble du système scolaire, nous avons besoin de cette quête méthodique et patiente d'une connaissance de plus en plus exacte de la réalité. C'est par cet acte d'apprendre, nécessaire s'il en est un, qu'il nous fait éclairer nos décisions d'orientation et de gestion, ici même au ministère et dans l'ensemble des réseaux d'enseignement. À cet égard, il n'est d'ailleurs pas sans signification que le ministère se soit engagé dans des actions de diffusion des données de recherche en éducation, comme en fait foi la banque EDUQ, dont j'ai aussi récemment lancé le premier numéro imprimé.

En 1982-1983 ces travaux se poursuivront. Ainsi, je compte énoncer des orientations et annoncer des mesures pour le développement de la recherche universitaire, y compris les principes qui doivent guider les "actions structurantes" que, selon la politique gouvernementale de recherche, le ministère a la charge d'entreprendre et de soutenir. Je ferai de même en ce qui a trait à la recherche dans les collèges. Les deux dossiers progressent à bon rythme.

Enfin, je déposerai à l'Assemblée nationale un projet de loi créant la Fondation FCAC. Le fonds FCAC a déjà expérimenté une forme plus marquée d'autonomie administrative et il convient de la consacrer par voie législative. Cette arrivée à maturité de cet important mécanisme de subvention à la recherche permettra d'en accroître la visibilité et la transparence, tout en maintenant les liaisons organiques qui s'imposent entre le subventionnement de la recherche, le développement des réseaux d'enseignement et la formation des ressources humaines.

Enfin, l'administration interne du ministère est aussi directement conviée à participer, en l'incarnant elle-même dans son quotidien, à cette même quête de l'essentiel. Rationalisation de la gestion, croissance de la productivité, coordination et concertation entre les diverses unités associent actuellement le ministère - de l'intérieur, pour ainsi dire - aux efforts demandés à l'ensemble des réseaux d'enseignement.

Plus près encore de cet essentiel que nous poursuivons, le ministère est à revoir les modes de gestion de son propre personnel, ses règles de communication interne, les mécanismes par lesquels il associe son personnel à l'élaboration et à la gestion de ses programmes d'action. À sa manière, un ministère de l'Éducation se doit d'être lui-même un environnement éducatif de qualité, permettant aussi l'éclosion permanente de l'acte d'apprendre. Ainsi seulement peut-il, en toute ouverture, travailler à l'amélioration de l'environnement éducatif de l'ensemble des réseaux d'enseignement.

En 1981-1982, la formation, à même les unités existantes, d'un nouveau secteur de l'administration a permis de lancer ces opérations sur des bases plus claires et plus solides. Je me réjouis de cette décision dont les fruits sont chaque jour plus sensibles. En 1982-1983, je souhaite engager le ministère dans une démarche encore plus incisive de réflexion et de recentration sur sa mission proprement éducative. Dans l'esprit des questions et des propositions que nous soumettons à l'ensemble de nos partenaires des réseaux, il me paraît nécessaire que nous cherchions aussi les moyens, dussent-ils être éventuellement assez radicaux, de délester le ministère de certaines fonctions accessoires, de poursuivre sa dynamique de décentralisation, d'accentuer ses mécanismes de concertation et de coordination, de l'organiser très nettement en fonction de sa mission propre, de le convier lui aussi à faire plus avec moins. Je compte activer résolument ce dossier au cours de la prochaine année.

Les chantiers sont nombreux, encore que j'aie dû me limiter aux plus intégrateurs et aux plus engageants. Ce que j'ai voulu mettre en lumière, par-delà les informations que je me dois de communiquer à cette commission ou, mieux, comme l'élément le plus important de ces informations mêmes, c'est la convergence fondamentale de tous ces travaux. Ceux-ci sont autant de pas quotidiennement franchis dans une direction, toujours la même, c'est-à-dire la promotion de l'acte d'apprendre et l'amélioration de son environnement.

Une conjoncture difficile: des obstacles à transformer en instruments de progrès. Dans mon dernier message des fêtes, j'ai dû formuler des voeux sans avoir de cadeaux à offrir. Je n'en ai pas davantage au seuil de cette nouvelle année budgétaire. Les temps sont difficiles, je n'apprends rien à personne.

Difficultés financières, d'abord, que tous les partenaires des réseaux de l'éducation connaissent aussi bien que moi et dont ils ont dû assumer les effets et les contraintes. L'état des finances publiques n'est pas plus exaltant aujourd'hui et c'est dans l'austérité que nous entreprenons cette autre année.

Difficultés politiques et constitutionnelles aussi. Le Québec est encore à se remettre, péniblement, mais courageusement, de l'offensive sans précédent du gouvernement fédéral contre les pouvoirs

de l'Assemblée nationale et les droits du peuple québécois lui-même. Et cela, dans des domaines comme la langue d'enseignement, qui touchent de plein fouet la mission éducative et culturelle. À quoi s'ajoute l'offensive non moins massive que traduisent les propositions relatives aux accords fiscaux, lesquels concernent directement des champs de compétence aussi déterminants que l'enseignement postsecondaire et la formation des adultes.

Tiraillements sociaux, enfin, comme il arrive dans les périodes de crise économique et politique. Les inégalités s'accentuent, les rapports se tendent, les intérêts se durcissent, la morosité menace de s'installer. Dans les réseaux de l'éducation, la négociation des conventions collectives entraînera peut-être son cortège de tensions et de confrontations. Et nul ne peut certifier à l'avance que l'environnement éducatif, voire l'acte même d'apprendre, n'en subiront pas quelque soubresaut.

Tel sera le contexte de notre action en 1982-1983. Tel sera le pays réel dans lequel il nous faudra continuer de poursuivre l'essentiel. Sans fanfare ni prétention, vous devinez bien. Mais avec courage, lucidité, cohérence, obstination, comme il convient à des partenaires qui ne se racontent pas d'histoires, mais qui ont assez le sens de l'histoire pour protéger les acquis et, contre vents et marées, s'appliquer à garder l'avenir ouvert. Et l'avenir de l'éducation est assurément ouvert, quand, dans des milliers d'endroits sur l'ensemble du territoire, dans le quotidien des salles de cours, des laboratoires, des bureaux ou des médiathèques, des personnes apprennent et s'approprient des connaissances et trouvent de la joie à le faire. Cela, nous devons le maintenir et le développer à tout prix.

L'évocation de telles zones plus illuminées n'est d'ailleurs pas simple artifice de rhétorique. Je pense, en particulier, aux taux de fréquentation scolaire et de passage aux niveaux supérieurs d'enseignement. Des progrès sensibles ont été réalisés tout récemment, et en dépit des contraintes que vous savez. Selon des travaux en cours dans nos services d'étude et de recherche, la situation, sans être parfaite, s'améliore nettement. Ainsi, une génération de 100 personnes, qui connaîtrait au cours de sa vie les phénomènes observés à chaque âge en 1981, compterait 63 diplômés de l'enseignement secondaire régulier, contre 54 selon les comportements observés en 1976. 8 autres obtiendraient un diplôme d'études secondaires dans le cadre de l'éducation des adultes; il y en avait 5 en 1976. Dans cette génération de 100 personnes, 45 s'inscrivent dans l'enseignement collégial régulier à plein temps et 27 obtiennent un diplôme - la prise en compte des durées variables de séjour au collège nous amènerait même à des chiffres un peu plus élevés. En 1976, on comptait 40 inscrits et 23 diplômés. Dans la même génération de 100 personnes, environ 30 accèdent à l'université, dont 19 à temps plein.

Ce n'est donc pas chimère que de parler du maintien de nos objectifs d'accessibilité et de hausse du niveau général de scolarisation. Les faits montrent que nous progressons en ce sens et nous confirment dans notre volonté d'accroître le nombre de diplômés du secondaire et les taux de fréquentation de l'enseignement collégial et universitaire. Les efforts collectifs du Québec portent donc leurs fruits et ce n'est pas sans résultat que le Québec a consacré à l'éducation une part aussi importante de son produit intérieur brut, 7,5% en 1979-1980, comparativement à 5,6% pour l'Ontario.

J'ai la conviction que les difficultés que nous traversons ne comportent pas que des inconvénients. Non pas que je veuille ici en sous-estimer le poids. Mais j'ai toujours pensé que les obstacles peuvent être transformés en tremplins d'approfondissement et de progrès, pourvu que nous sachions en assumer les dynamismes de vie et de relance. Aussi, en revenant sur l'année qui s'achève, j'ai plaisir à noter que, partout dans les milieux d'éducation du Québec, l'heure est effectivement à la réflexion, au discernement de l'essentiel, à la réorientation, à la maturation, à la concertation aussi. Je continue d'être convaincu que nous pourrons, ensemble, passer au travers et sans que nous ayons à y sacrifier quoi que ce soit de nos grands objectifs éducatifs et culturels. L'examen détaillé des crédits que je dépose aujourd'hui révèle, me semble-t-il, qu'il est possible, avec les ressources que la collectivité peut mettre à notre disposition, de construire chaque jour davantage la cité éducative que nous souhaitons et aménager des environnements éducatifs de qualité au service de l'acte d'apprendre. Nous devons et pouvons maintenir le cap. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rodrigue): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Fernand Lalonde

M. Lalonde: M. le Président, permettez-moi d'abord de dire quelques mots sur la préparation de l'étude des crédits. Nous avons eu accès au livre vert plus de 24 heures avant le début de nos travaux. C'est déjà une amélioration. J'en remercie le ministre, ses collègues et ses assistants. Autrefois, nous l'avions, à peu près, la veille du début de l'étude de nos crédits, nous n'avions pas le loisir d'en prendre connaissance. C'est donc un précédent, mais il y a inconvénient à permettre à

l'Opposition de lire les documents du ministre. C'est qu'on peut maintenant se rendre compte du caractère irréel du message ministériel. Et j'ai dit irréel pour être très poli.

Ce document peut être divisé en deux parties: premièrement, les faits, les chiffres et tableaux et, deuxièmement, les bilans 1981-1982 et les orientations 1982-1983. Les bilans sont tous positifs, le croirez-vous? Par exemple, à l'enseignement collégial public, le ministre se félicite de l'amélioration de l'accessibilité aux études collégiales. Nous y reviendrons. Il se félicite du développement de l'enseignement professionnel. Nous y reviendrons aussi. À l'enseignement universitaire, l'asphyxie des universités devient la rationalisation du financement. L'inaction dans la formation des maîtres est pudiquement voilée sur la réflexion qui se poursuit. La crise financière de l'UQAM, en quasi faillite, devient un effort de générosité du gouvernement. Les coupures scandaleuses du financement des bibliothèques universitaires sont passées sous silence. Le vocabulaire du personnel politique a tout de même des limites. À l'éducation des adultes, on nage dans la fiction. Bilan 1981-1982, limite des impacts négatifs de compression budgétaire. La diminution de 65% du volume d'activité, c'est l'épuration de la liste des cours. Orientation 1982-1983: Faire la même chose.

Pour les orientations 1982-1983, on retrouve ad nauseam les phrases creuses et insipides suivantes: Améliorer les programmes, maintenir les orientations, la plupart des orientations inscrites en 1981-1982 seront maintenues, des accents particuliers seront mis, des efforts particuliers, etc. Un projet énorme: la réforme scolaire reçoit un paragraphe. Je vais vous le lire, M. le Président, et vous essaierez de me dire, si vous pouvez le deviner, de quelle réforme parle le ministre. Je cite: "Le secteur de l'enseignement primaire et secondaire complète la réalisation des objectifs de L'École québécoise. Dans la foulée - c'est la cinquième, je pense - de cet énoncé de politique, il poursuit le développement du réseau en initiant une réforme qui vise à faire de l'école le pivot du système d'enseignement, et de la commission scolaire, un lieu de planification, de coordination et de gestion des services communs aux écoles de son territoire." Je poursuis la lecture, M. le Président: "Cette réforme suppose une réaménagement des pouvoirs, une réévaluation des territoires, de même qu'une réorganisation politique et administrative des institutions scolaires. Elle suppose, également, une refonte de la Loi sur l'instruction publique et de la réglementation qui en découle. Ces règlements touchent à la fois le régime pédagogique, les conditions de travail du personnel de cadre et de gérance, le régime financier et la gestion des biens, des services et des archives." Je termine la citation, M. le Président: "De plus, cette réforme exige la préparation de guides et d'instruments qui en permettront la mise en place progressive." Fin de la citation.

Pouvez-vous nous dire, M. le Président, de quoi aura l'air le système scolaire, après? Je ne peux pas, c'est nébuleux, c'est vague, opaque, ambigu et obscur. M. le Président, je vous laisse l'initiative de décrire ce caractère irréel des propositions du ministère et du ministre, dans son livre vert. Pas une seule erreur en 1981-1982, ni de la part du ministre ni de la part des réseaux. On a administré au-delà de 5 000 000 000 $, et pas une erreur. Je suis convaincu, M. le ministre, que dans la profession que vous exerciez avant d'entrer en politique, vous avez dû prodiguer vos soins à plusieurs patients de ce genre qui affirmaient ne faire jamais d'erreur. Je conserve précieusement le document du ministre. Il pourra me servir plus tard pour démontrer aux Québécois que nous avons un gouvernement malade.

Quant au discours, il s'inspire des mêmes sources et mériterait un autre titre que Maintenir le cap. On pourrait plutôt lui donner le titre La fuite dans l'imaginaire ou les visions d'un ministre.

Ce qui est la réalité des choses au Québec, en 1982, dans le domaine de l'éducation, c'est un avenir bloqué. Un petit retour en arrière servira, je l'espère, à comprendre à quels problèmes fait face le gouvernement actuellement dans le domaine de l'éducation. C'est dans le domaine de l'éducation plus que dans tout autre que la révolution tranquille s'est concrètement manifestée. Ce fut un effort collectif sans précédent de la part d'une société foncièrement rurale, centrée sur la famille, dominée par l'Église, mais aussi de plus en plus industrialisée et urbaine. Le Québec avait un besoin pressant d'être propulsé dans le XXe siècle. Un secteur public diminué, un secteur privé en plein essor qui constitue la voie privilégiée, sinon unique, pour accéder à l'université. 76% des élèves du secteur public sont au primaire. On en trouve seulement 280 000 au secondaire, et encore sont-ils concentrés dans les deux ou trois premières années, de la 8e à la 11e. Au secondaire privé: académies, instituts commerciaux et familiaux etc. et dans les collèges classiques, il y a 120 000 élèves.

Les carences fondamentales d'une telle structure étaient de deux ordres: la non-accessibilité de l'éducation secondaire et universitaire à toutes les couches de la société et, surtout, le manque de diversité des disciplines, ce qui créait une lacune sérieuse au niveau de la préparation pour le marché du travail ou bien forçait les jeunes à aller parfaire leur éducation à l'extérieur

du Québec dans plusieurs domaines, restreignant ainsi l'égalité des éduqués devant le système scolaire. Il existait aussi un manque d'équité; les commissions scolaires étant à ce moment largement financées par la taxe scolaire, celles des régions les plus riches étaient beaucoup mieux munies que celles des régions les plus pauvres. Il est facile d'imaginer les effets de cette situation sur les possibilités de réussite scolaire.

L'importante contribution du Parti libéral du Québec à l'essor de l'éducation au Québec. Presque tout reste à faire, en 1960, au Québec dans le domaine de l'éducation. Un adulte sur deux a moins de sept ans de scolarité. Le secondaire, le collégial et, à plus forte raison, l'université sont inaccessibles à la majorité de la population. Qui veut s'instruire doit payer. Si l'on jette un coup d'oeil en arrière, force est de constater que l'ampleur des changements a été colossale: introduction généralisée des maternelles publiques et du progrès continu à l'élémentaire, "regénérescence" du curriculum secondaire, création du secteur collégial, fondation de l'Université du Québec, syndicalisation de la profession d'enseignant, regroupement des commissions scolaires et institutions légales des comités de parents, pour ne nommer que ceux-là. La contribution du Parti libéral du Québec à ces transformations de notre système éducatif est importante, et, par conséquent, mérite d'être rappelée à nouveau, ne serait-ce que brièvement.

Le 22 juin 1960, le Parti libéral, dirigé par M. Jean Lesage, remportait la victoire à l'élection générale tenue au Québec. D'importantes réformes étaient inscrites au programme de notre formation politique à cette époque, notamment dans le domaine de l'éducation. Le principal objectif de ces projets était de garantir le libre accès de l'école à tous les jeunes en âge de la fréquenter. Dès son arrivée au pouvoir, le nouveau gouvernement s'applique à réaliser graduellement ce programme. Bien avant la réception du premier volume du rapport de la Commission royale d'enquête sur l'enseignement dans la province, le gouvernement a entrepris la réforme du système scolaire, soit par des décisions administratives, soit par des lois adoptées avant la création du ministère de l'Éducation, en 1964: prolongation de la scolarité obligatoire jusqu'à 16 ans, gratuité des manuels scolaires, octroi du droit de vote aux parents aux élections scolaires, jusque-là, seuls les propriétaires y avaient droit, programme quinquennal de 175 000 000 $ pour le développement universitaire, obligation pour les commissions scolaires à dispenser l'enseignement secondaire, gratuité scolaire jusqu'à la He année, accroissement du régime de bourses et prêts gouvernementaux.

(11 h 15)

Au même moment, le gouvernement de M. Jean Lesage prenait l'une de ses importantes décisions en créant une commission royale d'enquête sur l'enseignement, la commission Parent. La commission Parent a défini trois objectifs d'un système éducationnel nouveau: donner à tous l'opportunité de s'instruire, fournir à chacun le genre d'éducation le mieux approprié à ses aptitudes et à ses intérêts, préparer l'individu à la vie en société. Ces objectifs demeurent encore très valables aujourd'hui. Aussi, il importe de les mettre en lumière à la face d'un ministre de l'Éducation dont les préoccupations actuelles concernent les bouleversements de structures, à la face d'un ministre instigateur de certaines perturbations dans le système scolaire actuellement.

En 1964, c'était la création du ministère de l'Éducation et, au cours de la même année, le gouvernement libéral lance l'opération 55 qui visait à implanter sur l'ensemble du territoire québécois 55 commissions scolaires régionales pour assurer la constitution d'un réseau d'écoles secondaires publiques.

Inspirée par le souffle de renouveau et le train de mesures législatives et réglementaires mises de l'avant par les libéraux dans le but de démocratiser l'éducation, outil de promotion sociale et économique pour toute la collectivité québécoise, l'Union Nationale poursuit les réformes amorcées par le Parti libéral de 1966 à 1970. De retour au pouvoir, de 1970 à 1976, le Parti libéral du Québec sous M. Robert Bourassa introduit à son tour des réformes et innovations majeures au nombre desquelles on peut retenir les suivantes: amélioration du système financier et administratif de l'éducation; regroupement des commissions scolaires locales; amélioration du régime pédagogique; création de nouvelles écoles et de nouveaux cégeps, participation institutionnalisée des parents et élection des commissaires au suffrage universel, donc, démocratisation; création du Conseil scolaire de l'île de Montréal; développement de l'Université du Québec.

En somme, sous l'impulsion des libéraux du Québec, la société québécoise a vu son système d'enseignement passer d'un système inspiré par une tradition patriarcale à un système orienté vers l'avenir, faisant une large place à la technologie et à la formation d'une main-d'oeuvre qualifiée pour être à la hauteur des défis économiques du Québec.

L'effort du gouvernement du 15 novembre en matière d'éducation se reflète plus visiblement dans les livres de toutes les couleurs couvrant tous les niveaux d'enseignement, en n'oubliant pas les domaines de la recherche scientifique, de la

formation professionnelle, des milieux économiquement faibles, de l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, de même que l'éducation aux adultes. Ces multiples études qui ne se sont pas toutes traduites à l'heure qu'il est en énoncés de politique, de même que la consultation dont elles furent la plupart du temps entourées représentent, il faut l'admettre, un effort considérable de réflexion collective en vue de mieux définir les orientations et les méthodes de l'école publique québécoise à tous les niveaux.

Il ne faudrait pas être dupe, cependant, et croire naïvement que les projets du ministère de l'Éducation en vue de pallier aux carences de l'école publique sont nés avec l'arrivée du Parti québécois au pouvoir. M. Jacques-Yvan Morin lui-même reconnaissait, d'ailleurs, avoir trouvé lors de son entrée en fonction comme ministre de l'Éducation - je cite - "de volumineux et utiles dossiers sur la question." À titre d'exemple, la politique touchant les enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage reprenait dans ses grandes lignes le rapport COPEX dont le gouvernement avait hérité lors de son arrivée au pouvoir.

Les livres multicolores du ministère de l'Éducation du Québec sous la gouverne péquiste ne sauraient témoigner à eux seuls de sa performance réelle en matière d'éducation. En effet, la plus saine méfiance nous commande d'user de prudence et de convenir, comme l'écrivait Paul-Émile Gingras dans la revue Prospective que - je cite - "ces livres sont le lieu des bilans rapides, des orientations, des consultations; on leur doit le pouvoir d'exorciser les écoles; ici, l'on confesse; là, on affirme sa volonté de redresser, de contrôler, de reprendre; c'est écrit, cela se fera. Est-ce stratégie ou naïveté? Le peuple peut réagir devant les orientations, les ministres peuvent ensuite agir à leur guise, réformer à la pièce; on consulte sur des orientations; on adopte des mesures; on donne des directives."

À vrai dire, il existe deux ordres de réalités concernant la politique du gouvernement actuel dans le champ de l'éducation. Il y a, tout d'abord, la réalité des livres, semblable en plusieurs points à celle des déclarations et des programmes. À écouter les discours tenus par le ministre de l'Éducation, M. Morin, et son successeur le ministre actuel de l'Éducation, reprenant infatigablement les mêmes thèmes: responsabilité locale, consultation, renouveau, qualité de l'enseignement, ou à lire le livre orange ou encore à parcourir le programme du Parti québécois, on serait porté à croire que l'éducation au Québec affiche une allure de plus en plus florissante. Mais cette pseudo-réalité que le pouvoir politique, tant bien que mal, tente inlassablement de nous vendre s'estompe en grande partie lorsque l'on confronte l'image à la réalité. C'est à ce moment que le voile est levé sur un autre ordre de réalité, celui du fonctionnement d'une école où des problèmes tels l'abandon scolaire, la piètre qualité du français écrit, la pauvreté d'un trop grand nombre de bibliothèques scolaires, la détérioration de la qualité de l'enseignement engendrée par des coupures budgétaires improvisées sont pourtant monnaie courante.

Le Parti québécois, par les choix improvisés qu'il pose en matière d'éducation, dans ce contexte de ralentissement de la croissance des dépenses publiques, est en train d'instituer une politique de fait qui remet en question les deux grands objectifs de la révolution tranquille, à savoir une formation de qualité et l'accessibilité à cette formation.

Tout en dressant sommairement le bilan de l'action gouvernementale dans chaque secteur depuis 1976, c'est cette thèse que nous nous appliquerons à démontrer au cours des prochaines minutes pour chacun des niveaux d'enseignement.

Enseignement primaire et secondaire. L'enseignement primaire et secondaire sous le régime péquiste a été soumis à une évaluation globale, à l'automne 1977, avec la publication du livre vert sur l'enseignement primaire et secondaire et la vaste consultation qui s'ensuivit.

De l'analyse de données qui suivit la période de consultation est résulté, en février 1979, L'École québécoise, énoncé de politique et plan d'action, qui reflète des choix d'orientation, d'objectifs et de moyens à privilégier en vue d'une qualité accrue de l'enseignement. L'entreprise est ambitieuse puisqu'il faut agir sur plusieurs tableaux à la fois, notamment les programmes d'étude, les régimes pédagogiques, le matériel d'enseignement, l'encadrement des élèves, la participation des parents, l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage et les clientèles des milieux défavorisés. Mais, de l'énoncé de politique à l'action concrète, il y a plus d'un pas, surtout dans la conjoncture actuelle où on cherche désespérément à entendre un discours cohérent de la part des ministres des Finances et de l'Éducation sur la logique qui a présidé à la détermination des coupures budgétaires en matière d'éducation.

Il va de soi que les coupures ainsi opérées sont très nombreuses et touchent une foule de secteurs. Certaines, même si elles choquent quelques spécialistes, n'auront guère d'effet sur le public, déclarait le ministre des Finances, Jacques Parizeau, lors de la présentation du budget en mai 1981.

Ces coupures sont bien loin de s'avérer seulement une affaire de spécialistes, comme cherche à nous le faire croire le gouvernement, mais elles sont plutôt ressenties concrètement par les agents éducatifs dans

le milieu scolaire.

Le président du Conseil supérieur de l'éducation, M. Claude Benjamin, ex-conseiller spécial de l'ex-ministre de l'Éducation, exposait, il y a quelques semaines, dans le bulletin officiel de l'organisme, les principaux effets des coupures budgétaires qui attaquent de plein front les orientations de fond du système que sont la qualité et l'accessibilité à l'éducation. M. Benjamin retenait les effets suivants: diminution des services offerts aux plus démunis, gel du développement des maternelles pour enfants de quatre ans et retrait de programmes maternelle maison et maternelle animation qui s'adressent aux milieux économiquement faibles, retard dans l'application de nouvelles mesures qui s'adresse aux enfants qui connaissent des difficultés d'adaptation et d'apprentissage et à ceux qui vivent en milieux défavorisés, ralentissement dans l'application des mesures énoncées dans L'École québécoise et plus particulièrement de certaines qui visaient à assurer une éducation de qualité - pensons à l'implantation des nouveaux programmes, à l'application de la politique sur l'évaluation pédagogique, aux manuels scolaires et aux autres instruments didactiques, à l'adaptation des divers instruments pédagogiques aux besoins des élèves les plus démunis - enfin, diminution, toujours selon M. Benjamin, des effectifs qui auraient permis un meilleur soutien pédagogique auprès des enseignants ou encore un meilleur encadrement des élèves, notamment au niveau secondaire. Ces principaux effets empêchent, à des degrés divers, la réalisation des objectifs retenus dans L'École québécoise ou en diffèrent leur application.

Il n'est donc pas surprenant, dans ces circonstances, de constater que l'institution scolaire québécoise souffre d'une crise de crédibilité aigüe auprès de la population. La popularité croissante de l'école privée, en dépit de la hausse des coûts, constitue à cet égard un indice dont l'importance est loin d'être négligeable. Cette crise de crédibilité envers l'école québécoise risque de s'aggraver d'autant plus que les citoyens en sont largement convaincus. Comme l'a démontré un sondage mené par deux professeurs de l'Université de Montréal, l'automne dernier, l'école québécoise est moins bonne qu'elle ne l'était avant ces compressions. "L'opinion des citoyens - ajoutent les auteurs - risque d'avoir un caractère prophétique. L'opinion peut engendrer des conséquences qui finissent par la rendre réelle. Dans la mesure où, écrivent-ils, l'opinion québécoise juge les coupures nuisibles à la qualité de l'éducation, elles peuvent déterminer chez les agents d'éducation des attitudes et comportements défaitistes - le ministre parlait de morosité, à la fin de son discours - qui augmentent les possibilités que cette opinion devienne réalité".

Une foule d'autres problèmes de nature pédagogique caractérisent aujourd'hui l'enseignement primaire et secondaire au Québec. Ceux-ci sont relatifs, par exemple, à la qualité du français écrit, à l'enseignement des langues secondes, à l'intégration des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, à l'enseignement professionnel et à l'abandon scolaire.

Comment un ministre de l'Éducation qui parlait d'un retour à l'essentiel, lors de sa nomination à ce poste - il l'a répété encore aujourd'hui - peut-il expliquer décemment que toutes ses énergies, toutes les compétences de son ministère ne se consacrent pas, à ce moment-ci, à préserver la qualité de l'enseignement dans ces milieux d'apprentissage que sont les écoles, au lieu d'investir les efforts de plusieurs fonctionnaires dans la préparation d'un plan visant à chambarder les structures scolaires que nous connaissons? Le ministre n'a pas encore réussi à convaincre la population que son projet de restructuration scolaire contribuera substantiellement à la relance de la qualité de l'éducation.

En parallèle, au chapitre de l'administration de l'enseignement primaire et secondaire, émerge d'abord l'orientation générale suivante, sous la gouverne péquiste: la dévalorisation constante du rôle des commissions scolaires accompagnée d'une perte de pouvoirs significative pour elles. En dépit des intentions maintes fois répétées des ministres Morin et Laurin, à l'effet de décentraliser la gestion de l'éducation, il faut bien se rendre à l'évidence que les gestes posés à l'endroit des commissions scolaires ces cinq dernières années nous fournissent la preuve qu'ils n'ont raté aucune occasion de brimer leur autonomie. Des exemples ne manquent pas: contrôles administratifs tracassiers, limitation du pouvoir de taxer des commissions scolaires, mise en tutelle de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Globalement, les actes posés par le gouvernement péquiste vis-à-vis des commissions scolaires depuis son arrivée au pouvoir doivent être analysés dans une perspective d'ensemble d'où émerge l'idée de gouvernements régionaux, comme nous le confirme le projet de restructuration scolaire. Alors, qu'il a toujours prétendu revaloriser le rôle joué par les commissions scolaires, il est aujourd'hui aisé de constater, avec un peu de recul, que le Parti québécois est en train de leur préparer un enterrement de première classe. Sur le plan administratif toujours, on ne peut non plus passer sous silence l'incurie administrative du gouvernement péquiste qui a laissé se creuser un trou de 500 000 000 $. L'absence de contrôle budgétaire approprié au ministère de M. Jacques-Yvan Morin et aussi au Conseil du trésor et, partant, l'énorme tort ainsi

causé à la réputation du bon gouvernement nous ont sans doute valu un nouveau titulaire à l'Éducation.

L'enseignement collégial. Annoncée en 1977-1978, la priorité accordée à la préparation d'un livre blanc sur l'enseignement collégial allait déboucher, en octobre de la même année, sur la publication du projet du gouvernement à l'endroit des cégeps. La première suite que le gouvernement donna à son énoncé de politique fut d'ordre législatif. En juin 1979 furent promulguées les lois no 24 et 25, l'une créant un Conseil des collèges, et l'autre modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, lesquelles ont débouché sur un débat serré à l'Assemblée nationale, vu la volte-face de l'ex-ministre de l'Éducation malgré ses promesses concernant la tenue d'une consultation sur ces projets de loi. L'adoption à la vapeur, en fin d'année scolaire, au moment où la mobilisation est moins facile chez les étudiants et les enseignants, témoigne des méthodes et de la démarche odieuse du gouvernement dans ce dossier.

Il est bien connu que la façon de faire qui préside à l'élaboration d'une politique ou à son application est aussi révélatrice des intérêts défendus par un ministre que les contenus de ses projets. Au-delà des discours du ministre de l'époque, qui parlait, dans son livre blanc, et je cite: du "renforcement des responsabilités pédagogiques et administratives locales comme deuxième des priorités essentielles du renouveau des cégeps", il faut voir dans ces deux projets de loi la manifestation des visées centralisatrices du ministère de l'Éducation. Mme Lise Bissonnette, alors éditorialiste au Devoir, avait à ce moment pertinemment souligné qu'on ne pouvait aucunement voir dans l'accroissement des pouvoirs réglementaires du ministre et l'élargissement de ses pouvoirs de tutelle qui découlent de l'amendement de la Loi sur les collèges, la traduction des intentions ministérielles de décentralisation, bien au contraire. Je cite Mme Bissonnette: "Le ministère de l'Éducation, les deux projets de loi le prouvent, porte, sur la gestion du réseau collégial et notamment sur les conseils d'administration des cégeps, le même jugement sévère que lui faisait refuser la velléité d'autonomie des commissions scolaires aux niveaux primaire et secondaire. Il ne l'a pas dit dans son livre blanc d'octobre; au contraire, il s'est pourfendu de cent compliments tous plus sédatifs les uns que les autres. Aujourd'hui, il sert complètement la vis par une loi et perpétue l'illusion d'autonomie par une autre. À la pièce, la réforme prend corps et elle est centralisatrice. Nul ne peut s'y tromper." (11 h 30)

L'éditorialiste avait alors raison de frémir devant le spectre de collège d'État. Cela sonne une cloche, il me semble entendre l'écho de l'école d'État que le ministre se défendait si violemment de vouloir implanter par sa réforme scolaire, à la fin de notre question avec débat du 5 mars dernier. L'évolution du réseau d'enseignement collégial, sous le régime péquiste, s'est traduite comme prévu par un centralisme croissant de l'État en matière scolaire. La volonté récente du MEQ de déterminer le contenu du rapport annuel d'activité des collèges, de dicter la conduite à adopter dans l'élaboration de règlements de vie étudiante, la prolifération de règlements, l'absence de consultation auprès des cégeps relativement aux modifications importantes apportées à l'éducation des adultes pour l'exercice financier 1981-1982, de même que le projet de règlement des études collégiales dans sa version originale, tout cela nous porte à croire que la tentation bureaucratique gagne constamment en vivacité au sein de ce ministère et auprès du ministre en titre.

D'ailleurs, le Conseil des collèges, dans son deuxième rapport annuel, n'a pas manqué d'attirer l'attention du ministre sur cette question de l'autonomie administrative et pédagogique des collèges qui, constate-t-on, est en voie de régression à cause de la multitude d'interventions dont ils sont l'objet de la part de l'État.

L'organisme consultatif juge la situation à ce point alarmante qu'il a décidé d'accorder priorité à ce problème au cours de la prochaine année. Est-il besoin de rappeler que l'autonomie des collèges, dès leur création en 1963 à venir jusqu'à il y a quelques années, était toujours perçue à la fois par le milieu et par le pouvoir politique comme un attribut essentiel à la réalisation de la mission éducative de chacune des institutions.

Le Parti libéral du Québec, avec le Conseil des collèges, croient toujours que l'autonomie des collèges est une réalité nécessaire que le pouvoir doit accepter quand il privilégie le respect des personnes ayant l'uniformisation des comportements ou l'attention au besoin avant la standardisation des résultats.

C'est actuellement de ce contexte où ils jouissent de moins en moins d'autonomie que les cégeps sont appelés à relever le défi sans doute le plus exigeant depuis le début de leur création, soit la gestion de la décroissance des ressources financières parallèlement à l'accroissement inattendu des clientèles, selon les démographes du ministère.

En septembre dernier, le MEQ estimait que la clientèle des cégeps publics tournerait autour de 118 450 étudiants. C'est 3000 étudiants de plus qui ont été admis dans les faits. La prolongation par les jeunes de leurs

études, en raison du chômage qui les atteint si durement, contribue partiellement à comprendre les causes d'une telle augmentation.

Malgré ce phénomène quelque peu inattendu, le ministère semble pourtant bien décidé à maintenir sa politique de décroissance de la clientèle scolaire et ce, en dépit des faits troublants suivants:

La moitié des étudiants ne terminent pas leurs études secondaires. Et on change les structures.

La moitié de ceux qui les terminent ne vont pas au collège. Et on change les structures.

La moitié de ceux qui vont au collège ne terminent pas leurs études et n'obtiennent pas de DEC. On est rendu à la moitié de la moitié de la moitié.

Et, enfin, la moitié de ceux qui obtiennent un DEC sont inscrits aux études préparant à l'université.

Des données publiées dans la revue Cégepropos viennent confirmer que l'écart entre l'accessibilité potentielle et l'accessibilité réelle aux études collégiales est de l'ordre de 25%; et le ministre nous sert, à la fin de son discours, un scénario d'accessibilité que j'avoue ne pas avoir complètement compris, qui semble plutôt tenir de la fiction que de la réalité. On y voit des chiffres, mais dans la réalité des choses 50% des étudiants ne terminent pas leurs études secondaires; de ces 50%, seulement la moitié va au collège et de cette moitié, seulement la moitié termine les études collégiales.

L'accessibilité est donc loin d'être acquise, mais le Parti québécois semble avoir abandonné l'idée d'investir directement dans l'avenir en refusant, comme pour les universités, de subventionner pleinement l'arrivée des nouveaux étudiants. Une règle budgétaire lourde de conséquences pour le futur stipule, en effet, que les cégeps qui admettent, ô catastrophe, plus d'étudiants que ce qui était prévu ne se voient accorder que 50% de la subvention que le gouvernement accorde pour chaque étudiant inscrit dans un collège. Une telle politique peut facilement être qualifiée, comme on l'a déjà dit, de "l'une des plus défaitistes, des plus suicidaires jamais imaginées à la direction d'un État qui a l'ironie de se prétendre nationaliste"; je cite Mme Lise Bissonnette. On a entendu des rumeurs à savoir que le gouvernement ou le ministère aurait changé d'attitude à l'égard du financement de ces clientèles additionnelles, mais nous n'avons eu jusqu'à maintenant aucune confirmation et nous demandons au ministre de profiter de l'étude de ses crédits pour nous donner des confirmations à cet égard.

D'autres pratiques, soit le relèvement des préalables à l'admission et le contingentement par discipline dans des secteurs de pointe, font souvent subtilement leur apparition comme cela s'est fait à l'université. Alors que les barrières d'accès à l'enseignement postsecondaire devraient tomber l'une après l'autre sous l'impulsion du MEQ, ce dernier crée plutôt les conditions favorables à leur maintien et même à leur hausse. Le gouvernement devrait, plutôt, prendre les mesures nécessaires pour hausser le taux de passage des finissants du secondaire vers le collégial, lequel ne s'est guère amélioré au cours des dernières années malgré tous les scénarios du ministre; il était de 41,1% en septembre 1975 et de 41,9% en septembre 1980. Celles-ci pourraient être de divers ordres: reprise de la campagne d'incitation "Le cégep, c'est pour toi" auprès des finissants du secondaire et spécialement des milieux défavorisés, modification du régime des prêts et bourses pour venir en aide aux étudiants des milieux défavorisés, importance accrue à l'information scolaire et professionnelle, développement de sous-centres pour rapprocher l'enseignement collégial des usagers. Le taux de passage des finissants du secondaire est plus faible dans les régions éloignées que dans les centres urbains.

Quant à la qualité de l'enseignement et des services offerts dans les collèges, des compressions budgétaires de l'ordre de 20 000 000 $ cette année l'ont compromise quelque peu, entre autres en mettant en veilleuse des programmes prometteurs ou encore en empêchant quelques autres d'atteindre un niveau d'excellence à court terme.

L'enseignement universitaire. Le gouvernement du Parti québécois procédait, en juillet 1977, à la création d'une commission d'étude sur les universités, mandatée de faire état de la situation dans le monde universitaire québécois et d'en dégager les voies d'avenir. Les rapports de la commission Angers ont été publiés en juin 1979 dans l'ensemble. Ont suivi les commentaires des universités, de même qu'un avis du Conseil des universités en mars 1980 sur ces rapports. Depuis ce moment, les milieux concernés attendent en vain la publication par le ministère de l'Éducation du Québec d'un énoncé de politique en matière de développement du réseau universitaire qui va poser les jalons des orientations de l'avenir en ce secteur. L'absence d'une politique des universités en cette période de difficultés financières du gouvernement se fait cruellement sentir. Mais le net tournant qu'a pris la politique du ministère de l'Éducation en réduisant considérablement cette subvention à l'enseignement supérieur aura un impact considérable à long terme sur l'essor de l'enseignement supérieur au Québec.

Le ministre Laurin - c'est maintenant

bien connu de tous - a procédé depuis sa mutation à l'Éducation à la réduction brutale de l'université. Entre les années 1977-1978 et 1981-1982, les universités ont fait face à d'importantes compressions budgétaires. Elles ont dû comprimer leurs dépenses de 220 000 000 $, soit de 141 000 000 $ entre 1977-1978 et 1980-1981, puis d'une autre tranche de 80 000 000 $ cette année. Le ministère de l'Éducation exige, de plus, un effort supplémentaire en les obligeant à des compressions de 180 000 000 $ réparties sur les trois années suivantes, 1982 à 1985, ce qui représente 20% de l'enveloppe budgétaire actuelle. Cette année, le secteur universitaire doit absorber à lui seul 50%, la moitié, des coupures pratiquées dans le secteur de l'éducation, alors que les subventions aux universités représentent 15% seulement du budget total du ministère de l'Éducation.

La politique des coupures budgétaires s'est substituée à une véritable politique des universités. À tout le moins, on peut affirmer sans réserve aucune qu'elle en conditionne drôlement l'orientation. Le professeur Léon Dion tenait récemment des propos semblables en affirmant "qu'au lieu que ce soit, comme au cours des 20 dernières années, l'énoncé de normes sociales: amélioration de la santé publique, accès universel à l'éducation, etc., qui fondent les prévisions budgétaires, ce sont désormais les prévisions budgétaires qui vont fonder les normes sociales."

Ce revirement subit, caractérisé par des amputations budgétaires à l'ampleur et au rythme démesurés, survient sans qu'un débat public véritable, libre et bien informé n'ait eu lieu. Il faudrait être bien naïf pour attribuer le mérite d'avoir comblé un tel vide à la tenue des ateliers bidons et aux petits déjeuners du Ritz animés par le ministre et dont le cadre et les guides de discussion ont amené les professeurs à claquer la porte. Personne, au cours des derniers mois, n'a contesté la nécessité pour les universités d'avoir à réduire le taux d'augmentation de leurs dépenses. Mais l'ampleur des restrictions qu'on leur demande est en train de menacer leur avenir, ce qui s'avérera préjudiciable à l'ensemble de la société. Un débat fondamental constitue la toile de fonds de cette ère de vaches maigres, celui de l'accessibilité réelle des Québécois à l'enseignement supérieur. Les modifications aux règles de financement, dès 1977, ont favorisé un financement marginal de clientèle additionnelle et ont dissuadé les universités de s'ouvrir à elle. Et la seule qui a décidé qu'elle continuait de le faire, l'UQAM, a failli tomber en faillite il y a quelques mois, ce qui va à l'encontre du principe même de l'accessibilité. La formule de financement actuelle a ceci d'original qu'elle conduit les institutions accueillantes - je parlais de l'UQAM - à s'appauvrir davantage chaque année, tandis que les institutions plus fermées maintiennent leur rythme de croisière ou ont tendance à s'enrichir. De plus, les compressions actuelles et celles à venir favorisent le contingentement et la sélection plutôt que l'accessibilité. Une telle volte-face dans la poursuite de l'accessibilité aux études supérieures, qui figurait comme l'objectif de tout un peuple, prend place alors que la plupart des intervenants s'entendent pour dire que le Québec francophone n'a pas encore terminé son effort de rattrapage et que notre société demeure encore sous-instruite malgré tous les progrès accomplis.

L'augmentation des taux de fréquentation scolaire au niveau supérieur chez les francophones québécois reste encore inférieure à celle du taux des Québécois anglophones et des Ontariens. Le ministre doit justifier publiquement son choix de renoncer scandaleusement à ce but, alors qu'on est encore loin de l'avoir atteint, ou il doit nous dévoiler, plus de quinze mois après son discours fleuve sur les universités, ce qu'il entend concrètement par une poursuite, et je cite, "plus différenciée de l'accessibilité et de la démocratisation".

On est, aussi, bien loin de l'objectif au niveau de l'égalisation des chances d'accès à l'enseignement supérieur. Dans un document de travail du ministère déposé au mois d'octobre dernier à l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économique, on peut lire qu'"actuellement, parmi la population francophone, l'étudiant de l'école secondaire dont le père est professionnel ou cadre supérieur a deux fois plus de chances de poursuivre des études universitaires que le fils ou la fille d'un semi-professionnel ou cadre moyen, et quatre fois plus de chances que le fils ou la fille d'un père col blanc, ouvrier ou fermier."

C'est donc dire qu'un freinage de l'élan des universités à ce stade-ci nuira d'abord aux strates de la population les moins favorisées. Nous devons nous rendre à l'évidence, tel que l'affirmait Mme Lise Bissonnette dans un article intitulé Le vrai référendum, oui ou non à l'école: "La génération qui a le plus profité du déblocage des années 1960 est maintenant au pouvoir, en train de refuser à celle qui la suit une véritable égalité des chances." De plus, les choix budgétaires et politiques délibérés du gouvernement vis-à-vis des universités remettent non seulement en question les plans de développement élaborés au cours des dernières années, mais vont y rendre impossibles, comme plusieurs voix l'ont clamé ces derniers temps, un enseignement et une recherche de qualité. L'opération coupure se traduit sur le campus par une réduction importante des budgets spéciaux de la recherche, une diminution excessive des

budgets des bibliothèques - et je pourrais dire une diminution scandaleuse des budgets des bibliothèques - l'accroissement des charges d'enseignement des professeurs, l'abolition de programmes et peut-être même de facultés, le vieillissement du corps professoral. La relève est éliminée actuellement dans le corps professoral des universités. Les répercussions de l'austérité actuelle ne pourront être mesurées avant plusieurs années et risquent de faire mal, notamment dans les secteurs de l'informatique, des techniques de pointe, de la formation des scientifiques, qui exigent des investissements considérables étalés sur plusieurs années, et qui sont d'une importance vitale pour le Québec de demain, avertissait, en décembre dernier, le Conseil supérieur de l'éducation. (11 h 45)

Le gouvernement du Parti québécois doit mettre fin à l'étranglement financier qui empêche les universités de remplir leur mission essentielle et qui compromet irrémédiablement l'avenir. Les universités, quant à elles, doivent éviter d'effectuer des coupures dans des services aux fins pédagogiques et doivent explorer des avenues du côté de l'administration.

L'éducation des adultes, maintenant. L'accroissement accéléré de la clientèle du secteur de l'éducation des adultes au cours de la dernière décennie, la diversification des activités, lieux, conditions et agents qui s'y rattachent, de même que l'évolution du concept de l'éducation des adultes figurent au nombre des multiples facteurs ayant suscité la réflexion d'abord, puis la réalisation de travaux importants chez de nombreux individus et organismes, dont le Conseil supérieur de l'éducation et l'Institut canadien d'éducation des adultes, pour ne nommer que ceux-là.

Chaque année, depuis que le Parti québécois est au pouvoir, depuis 1976, le rapport de la commission sur l'éducation des adultes a fait valoir la nécessité et l'urgence d'une politique d'ensemble cohérente. De tels avis répétés, joints aux pressions issues des milieux concernés, ont sans doute contribué à persuader le gouvernement, alors réfugié dans le confort de l'immobilisme, à créer une commission d'étude sur l'éducation des adultes, la commission Jean, dans le but de faire le point sur une multitude d'expériences et de réalisations dans ce domaine. Il importe de souligner que la prolifération rapide d'activités de qualité très inégale, au cours des dernières années, de même que le fouillis administratif observé dans ce secteur commandaient, de toute urgence, une action en propriété de la part de l'État.

Le rapport de la Commission d'étude sur la formation des adultes ouvre des perspectives de renouveau et permet d'entretenir certains espoirs, mais il arrive dans une conjoncture de crise qui pèse lourd sur l'avenir de l'éducation des adultes. En effet, les commissaires ont remis le rapport final dans l'attente prochaine des modifications des politiques fédérales de financement de l'enseignement postsecondaire et, surtout, dans un contexte où les conséquences désastreuses des coupures budgétaires imposées par le gouvernement du Québec à ce secteur ont été douloureusement ressenties au cours des derniers mois. À ce moment-ci, il nous reste seulement à espérer que l'étude des recommandations de la commission Jean sera intensive de façon que celles-ci se traduisent au plus tôt par l'implantation d'une politique gouvernementale. Si l'on se réfère au dossier noir préparé par la coalition nationale contre les coupures en éducation des adultes, la situation actuelle est vraiment catastrophique quand on sait qu'il existe encore, au Québec, plus de 500 000 analphabètes et plus de 2 300 000 personnes qui n'ont pas la formation minimale de base pour obtenir un emploi. Ce sont précisément ces personnes qui bénéficient le plus des cours d'éducation aux adultes. La décision du gouvernement, lors de la présentation du budget 1981-1982, à l'effet de ne pas indexer, mais de réduire les ressources de l'éducation des adultes -décision assez incohérente de la part d'un gouvernement dont les nombreuses déclarations ministérielles indiquent une volonté de donner un nouvel essor à l'éducation permanente - a eu des effets désastreux sur ce secteur déjà sous-développé, même si le ministre minimisait, lors de l'étude des crédits de l'an dernier, l'importance des coupures, notamment, en ce qui concerne une hausse éventuelle des frais d'inscription, la qualité des services et le nombre d'heures-cours offerts. Il maintenait, et je le cite, que "la qualité des cours n'était pas mise en cause et que la quantité des services d'enseignement offerts aux adultes en 1981-1982 sera sensiblement la même que l'année précédente." C'était à l'étude des crédits du ministère, le 15 juin 1981.

L'impact réel des coupures sur les services offerts à tous les niveaux du système public d'éducation est cependant beaucoup plus grave que ce à quoi le ministre s'attendait. La hausse en flèche des frais d'inscription, la chute brutale du nombre d'inscriptions - 66,3%, deux tiers de moins d'inscriptions - l'instauration de nouveaux coûts, la disparition de sous-centres, 25% - c'est cela, l'accessibilité - la réduction des services d'aide pédagogique, les mises à pied et les mises en disponibilité viennent aujourd'hui confirmer la justesse de ce pronostic.

Au moins trois constats s'imposent. Premièrement, le Québec se retire substantiellement du financement de

l'éducation des adultes. Depuis plusieurs années, le gouvernement péquiste réclame à hauts cris le retrait du gouvernement fédéral dans le domaine de l'éducation. Le Québec n'a, en fait, à peu près aucun contrôle sur les cours de formation générale et professionnelle, à temps plein, qui se donnent aux adultes en chômage. Il est paradoxal de constater, parallèlement, que le même gouvernement n'indexe pas les ressources allouées l'an dernier au service de l'éducation aux adultes et qu'il diminue même le budget qui leur était accordé en sachant très bien que la part du budget affectée à ce secteur constitue à peine 1% du budget total du ministère de l'Éducation. Le gouvernement fédéral, de son côté, maintient ses subventions et les indexe au taux de 9,3%. "Les coupures en éducation des adultes, comme le fait remarquer avec justesse M. Paul Bélanger, directeur général de l'Institut canadien de l'éducation des adultes ont essentiellement consisté à supprimer la majeure partie des fonds spécifiquement québécois, de sorte que la contribution fédérale est passée de 78% à plus de 90%." "Comment comprendre - et je cite le Conseil supérieur de l'éducation - que le gouvernement fédéral sans compétence constitutionnelle dans l'éducation augmente sa participation au financement de la formation des adultes québécois, tandis que le gouvernement du Québec décrète des coupures imposantes? Le gouvernement du Québec va-t-il cesser d'être le maître d'oeuvre de l'éducation des adultes? Désormais, qui assurera la conception et le financement de la formation des adultes? Ottawa ou Québec?"

Deuxièmement, l'accessibilité à la formation individuelle est menacée surtout chez les plus démunis. Nous l'avons déjà mentionné précédemment, un nombre considérable d'adultes n'ont pas accès aux cours cette année à la suite des coupures, soit à cause de l'augmentation des frais de scolarité, soit parce qu'il devient plus difficile de former des groupes, surtout dans les régions périphériques, en raison de l'incitation du ministère à augmenter le nombre d'adultes de 15 à 20 pour la formation professionnelle. "Il est à craindre que ce soient les personnes les plus démunies en termes de moyens financiers, de même que celles qui sont sous-scolarisées, qui fassent les frais d'une telle politique. Pour ces individus, est-il besoin de le préciser, les services d'éducation des adultes constituent une chance de rattrapage, de développement de leurs aspirations et de perfectionnement dans leur métier. L'acte de l'éducation, qui est répété à plusieurs reprises dans le discours du ministre, vaut-il moins pour les adultes que pour les enfants? "Quant aux adultes qui n'ont pas renoncé, ils s'inscrivent à moins d'activités en raison du coût élevé, de la distance à franchir, et voient ainsi l'atteinte de leurs objectifs retardée de plusieurs années. En n'assumant pas ses responsabilités en formation professionnelle, par exemple, le gouvernement du Québec condamne des milliers d'adultes à demeurer ou à devenir des assistés sociaux. Comment peut-on oublier ainsi que le coût social qui en découle s'avère dix fois plus élevé que la dépense occasionnée par le recyclage ou l'apprentissage d'un métier?" Ces quelques derniers mots sont du Conseil supérieur de l'éducation.

Troisièmement, les acquis récents et le développement futur de l'éducation des adultes s'en trouveront modifiés. Depuis une dizaine d'années, le Québec a consenti au prix de longs et coûteux efforts à effectuer un certain rattrapage en éducation des adultes. Le chemin qui reste à parcourir demeure malgré tout assez long, car, au Québec, les divers organismes d'enseignement sont peu fréquentés par la population. Ainsi, 85% des jeunes Québécois n'utilisent pas leurs ressources universitaires, 67% n'atteignent pas le niveau collégial, et environ 45% de la population scolaire n'obtiennent pas le diplôme de fin d'études secondaires.

Dans un tel contexte, comment accepter que les coupures draconiennes imposées par le ministère de l'Éducation du Québec mettent en péril l'existence même de certains secteurs de l'éducation des adultes? Comment comprendre que le gouvernement du Québec n'hésite pas, en dépit de ses déclarations rassurantes, à sabrer allègrement dans un secteur jugé depuis longtemps comme le parent pauvre du secteur de l'éducation, et ce avant même qu'une politique globale et cohérente ait été formulée? Les coupures tendent à établir une politique de fait dans le domaine de l'éducation des adultes.

Les promoteurs d'une démocratisation très large de l'éducation des adultes devront d'abord s'attaquer à cette contre-réforme avant même d'aborder le rapport de la commission d'étude sur la formation des adultes. Cette dernière citation est de Richard Nantel et porte un dur coup au programme d'éducation des adultes.

Maintenant l'aide financière aux étudiants. Depuis 1974, année de la refonte du système de prêts et bourses, l'efficacité administrative du régime québécois d'aide financière aux étudiants n'a cessé de s'améliorer. Par exemple, le traitement des dossiers individuels est définitivement beaucoup plus rapide qu'auparavant. Bien que le programme du Parti québécois prône la gratuité scolaire, le gouvernement a décidé de reporter indéfiniment les réalisations de

cette mesure évaluée à 60 000 000 $. Je vois le député de Rosemont sourire, je suis certain que ce n'est pas à mes propos.

M. Paquette: Non, c'est votre habileté. Allez-y.

M. Lalonde: Non, c'est parce que je ne trouvais pas cela drôle.

M. Paquette: C'est un hommage à votre habileté.

M. Lalonde: Alors, je répète. Bien que le programme du Parti québécois prône la gratuité scolaire, le gouvernement a décidé de reporter indéfiniment la réalisation de cette mesure évaluée à 60 000 000 $.

La commission d'étude sur les universités s'est d'ailleurs inscrite en faux contre la gratuité scolaire à l'université. L'évolution du régime d'aide financière aux étudiants, depuis 1976, a été marquée par des ajustements mineurs au nombre desquels on peut retenir notamment: les bourses sont devenues plus importantes par rapport aux prêts, le report du remboursement de la dette contractée à six mois après l'obtention d'un emploi et enfin l'indexation des divers montants servant à définir l'aide financière. Il faut noter qu'il subsiste quand même un écart de 3% entre l'indexation des prêts et bourses et le taux réel d'inflation.

Il faut cependant noter que ces améliorations ont été gagnées de haute lutte par le mouvement étudiant. Souvenons-nous seulement qu'à l'automne 1978, la quasi-totalité des institutions d'enseignement postsecondaire ont été paralysées étant donné les revendications des étudiants concernant le système des prêts et bourses. Cette grève qu'ont menée les étudiants en 1978 reflétait une profonde insatisfaction de ces derniers à l'égard de plusieurs aspects du régime alors en vigueur. Le Parti libéral du Québec s'est particulièrement préoccupé du dossier des prêts et bourses à ce moment. Il a pressé le gouvernement de formuler des propositions acceptables à la fois pour la communauté étudiante et pour la société en général.

À la suite d'un conflit, le ministre, Jacques-Yvan Morin, annonçait, en décembre 1978, une série de cinq mesures qui rejoignaient dans une faible proportion les revendications des étudiants, mais qui a permis néanmoins de désamorcer la crise. Il a fallu attendre plus de deux ans cependant pour que l'un de ces engagements relatif à la modification du mode de remboursement des prêts pour l'étudiant qui se trouve en chômage à la fin de ses études puisse se concrétiser, au grand dam des étudiants.

Le gouvernement a étudié au cours des deux dernières années et explore encore aujourd'hui des alternatives au système actuel pensé davantage en fonction de l'étudiant régulier. Le ministre devrait au plus tôt, premièrement, dévoiler le résultat des études menées sur les alternatives au système actuel; deuxièmement, examiner la possibilité de réduire certains coûts, sans affecter l'atteinte des objectifs entraînés par un contrôle insuffisant des gains réels de l'étudiant, de même que certains coûts administratifs et, troisièmement, se pencher prioritairement sur l'aide financière à apporter aux clientèles défavorisées par les normes actuelles, les étudiants adultes, les étudiants dépendant de leurs parents, mais vivant des difficultés familiales, par exemple.

Le programme du Parti libéral du Québec va exactement dans ce sens. On y prône une révision du système des prêts et bourses de manière à redéfinir, dans une optique plus juste et plus équitable, les facteurs servant au calcul du montant d'aide financière allouée, indépendance par rapport à la famille, lieu de résidence et contribution de l'étudiant.

Dans son programme, le Parti libéral du Québec suggère aussi la création d'une instance auprès de laquelle l'étudiant pourrait se prévaloir d'un droit d'appel sur toute décision rendue par le service des prêts et bourses.

De plus, l'actuel régime de soutien financier aux étudiants n'est pas juste et équitable, en ce sens que les groupes socio-économiques les moins présents à l'université contribuent proportionnellement plus que les autres par leurs impôts au maintien de ces niveaux. C'est du moins ce que nous apprend une étude du Conseil des universités qui nous révèle, en somme, que les mesures fiscales et le régime d'aide financière ne favorisent pas ceux qui en auraient le plus besoin. Il va donc sans dire que la recherche de formules alternatives au système actuel doit être entreprise dans une perspective d'ensemble, dans une perspective d'équité sociale et non pas à la pièce.

Sur l'enseignement privé, M. le Président, s'il est une caractéristique que l'on peut retenir du gouvernement péquiste relativement au dossier de l'enseignement privé, c'est bien le report continuel de l'échéancier de publication de l'énoncé de politique en ce domaine.

À de multiples reprises, l'Opposition a insisté en vue d'obtenir un engagement précis du ministre Morin quant au moment de l'annonce de la nouvelle politique sur l'enseignement privé. Chaque fois - son remplaçant n'a pas non plus dérogé à cette règle - on entonnait le sempiternel refrain péquiste sur le sort de l'enseignement privé au Québec. La question, nous répondait-on, est toujours à l'étude au Conseil des ministres.

Malgré les paroles rassurantes du premier ministre et des ministres de l'Éducation qui se sont succédé relativement

au maintien et au développement de l'enseignement privé, la situation dans ce secteur ne s'est pas améliorée depuis l'élection du Parti québécois. Le gouvernement du PQ adoptait en effet une série de mesures qui allaient porter un dur coup au secteur de l'enseignement privé. (12 heures)

Depuis 1977, aucune nouvelle institution privée subventionnée n'a ouvert ses portes au Québec. Toute initiative locale est ainsi étouffée avant même de naître, qu'elle vienne de parents, d'enseignants ou autres agents. Aucune institution existante susceptible que son statut s'améliore n'a pu obtenir justice et équité. Les clientèles des institutions privées sont ainsi gelées au seul nombre que permettent d'accueillir les écoles existantes. La population des territoires où n'existe pas d'enseignement privé est incapable de se donner les institutions de son choix. Voilà les conséquences de l'absence de politique du gouvernement.

La paralysie politique réussie, selon l'expression utilisée par l'Association des institutions d'enseignement secondaire, le gouvernement en arrive à la deuxième phase de sa démarche: la suppression lente de l'enseignement privé, comme en fait foi son programme politique. Le 18 juin 1981 le gouvernement fait adopter la loi no 11 qui, sournoisement, vient modifier le mode de financement de l'enseignement privé. Le taux de croissance des subventions accordées par l'État aux institutions privées est ainsi ralenti. Si la loi no 56, au chapitre du financement, avait continué à s'appliquer, c'est 200 $ de plus par élève que les maisons d'enseignement privé de niveau secondaire auraient reçus. Bon nombre de maisons ont maintenant des situations déficitaires. Pour y faire face les écoles privées n'ont pas le choix: elles doivent compresser leurs dépenses, augmenter les frais de scolarité et trouver de nouvelles sources de financement pour compenser la diminution des subventions gouvernementales. Mais ce sont surtout les parents des élèves qui font les frais des difficultés financières de l'école privée. Ils se voient dans l'obligation de supporter une hausse de frais de scolarité de 50 $ à 125 $ au secondaire et davantage au collégial, ce qui menace de rendre l'enseignement privé moins accessible à la population moins favorisée. Malgré les coûts élevés, l'enseignement privé attire quand même de plus en plus de Québécois. Plusieurs institutions ne peuvent même pas répondre à leurs demandes pour 1982-1983. Le secteur privé gagne de plus en plus la confiance de la population. Le ministre de l'Éducation devrait tirer les conclusions qui s'imposent à ce phénomène. Il devrait voir également un sérieux avertissement, ce qu'est venu confirmer d'ailleurs le sondage effectué récemment par la Société Plurimar qui révèle, entre autres, que plus de sept Québécois sur dix aimeraient pouvoir envoyer leurs enfants à l'école secondaire privée parce que huit Québécois sur dix estiment que la formation donnée dans les écoles privées est de qualité. La perspective d'une abolition des écoles secondaires privées par le gouvernement est rejetée par 84% de la population. "Comment un parti politique peut-il encore prétendre imposer une pratique contraire à une si forte majorité de gens", interrogeait l'éditorialiste Jean-Guy Dubuc, à la suite de la publication des résultats de ce sondage? "Outre la situation intolérable que crée le climat d'insécurité actuel auprès des institutions d'enseignement privé, il existe au moins une autre raison qui milite en faveur de la divulgation par le gouvernement dans les plus brefs délais de ses intentions quant au maintien ou non d'un réseau d'enseignement privé. Il s'agit de la tendance évoquée par la Fédération nationale des enseignants québécois, à savoir la disparition de plusieurs petites institutions privées et le maintien de plus grosses qui feront des économies d'échelle et imposeront des frais plus importants aux étudiants, comme la loi no 11 le permet. Il résulte de cette politique une situation où l'injustice du réseau privé devient plus criante puisque l'accessibilité en est réduite et que ce sont les bien nantis qui sont subventionnés." Francine Lalonde: "L'avenir des collèges privés, les professeurs sont inquiets". Le Devoir, vendredi 16 octobre 1981.

M. le Président, le Parti libéral du Québec, comme la vaste majorité des Québécois, remet en question le type de gestion de l'austérité que pratique actuellement le gouvernement dans le secteur de l'éducation. Il pense également, comme la majorité d'entre eux, qu'une stratégie budgétaire de rechange doit passer par une véritable diminution du nombre d'administrateurs et de fonctionnaires affectés à l'éducation plutôt que par l'élimination des écoles privées ou encore une réduction importante des services reliés à l'enseignement. Le gouvernement péquiste procède actuellement à des choix à courte vue, sans égard aux conditions de vie futures des Québécois et des Québécoises, jeunes ou moins jeunes. Le vieux mythe du chômeur instruit achève de s'effriter, une scolarité supérieure demeure le meilleur antidote au chômage, aux bas salaires et aux emplois à temps partiel, même en cette période difficile. C'est ce que démontrent toutes les études, y compris celle du ministère de l'Éducation, "Relance". Ce qui constituait, il n'y a pas si longtemps encore, un droit strict, le droit à l'éducation n'est-il pas en train de devenir un privilège?

Le Parti québécois détourne l'attention de la population en accusant le gouvernement

fédéral et en invoquant la situation économique mondiale afin de tenter de justifier ses coupures sévères dans le domaine de l'éducation. La majorité de la population n'est pas dupe. Elle sait très bien que c'est le gouvernement québécois qui, au seuil d'une ère où les cerveaux constitueront la première ressource des peuples, pratique une politique de l'aberration qui heurte de front les grands objectifs de la révolution tranquille.

Dans une entrevue qu'il accordait au journal Le Soleil dès son arrivée au ministère de l'Éducation, le ministre actuel exprimait sa volonté de rapprocher davantage les politiques du ministère du programme du Parti québécois. L'heure est maintenant venue pour ce dernier - c'est l'avenir même du Québec qui le commande - de rapprocher les politiques de son ministère des aspirations des Québécois et des Québécoises, même si les coûts et les sacrifices lui apparaissent très lourds dans l'immédiat.

C'est l'école, et non le Parti québécois, qui décerne les passeports de l'avenir. Notre avenir doit se fonder sur une éducation de qualité. Quels que soient les choix politiques, économiques et sociaux que feront les Québécois, il est inutile d'en attendre quoi que ce soit s'ils ne sont pas appuyés par une échelle de valeurs acceptée par l'ensemble de la population et alimentée par un système scolaire de qualité, rapportait Paule des Rivières dans le Devoir du 1er avril 1978. Ces dernières paroles ont été prononcées par l'ex-ministre de l'Éducation, M. Jacques-Yvan Morin, lors du lancement de la semaine de l'éducation au mois d'avril 1978. Si le ministre Morin croit encore aujourd'hui ce qu'il a dit à l'époque, il doit certainement se rendre à l'évidence aujourd'hui que la politique de son successeur risque de mener les Québécois et les Québécoises dans un cul-de-sac, à bloquer l'avenir de ceux pour qui la promotion collective équivaut à la somme des promotions individuelles.

La politique du gouvernement en matière d'éducation doit être assise sur des objectifs à long terme plutôt que sur une dictature budgétaire. Quelle est la première partie de la politique? L'éducation. La seconde? L'éducation. La troisième? L'éducation. Michelet. C'est en partageant cette vision du rôle de l'éducation dans une société, vision à la fois idéaliste et pragmatique, que le ministre doit désormais fixer ses orientations et ses attitudes comme titulaire du ministère.

Pour toute communauté, l'éducation est la pierre angulaire de la qualité de la vie des personnes, la source irremplaçable de liberté et de développement des gens. Et c'est encore plus vrai pour les Québécois. Le Parti libéral du Québec l'avait compris depuis longtemps. À l'instar de plusieurs Québécois, je croyais que le Parti québécois partageait cette préoccupation.

Issu du Parti libéral du Québec dans une bonne proportion de ses fondateurs, le Parti québécois fait porter tout son projet politique sur l'avenir du peuple québécois. Il a réussi, prétend-il, à sensibiliser un grand nombre d'agents de l'éducation à ses politiques dites nationales. C'est donc avec stupeur que de plus en plus de Québécois se rendent compte de l'insouciance du Parti québécois à l'égard de la qualité de l'enseignement prodigué aux Québécois.

C'est être très présomptueux pour le Parti québécois de croire que l'éducation de nos jeunes est assurée par le simple fait que le PQ croit compter plusieurs adeptes dans ce milieu. S'il était évident, en 1960, que le développement du Québec exigeait un rattrapage énorme des Québécois en éducation, il n'en reste pas moins impératif que dans les temps difficiles que nous traversons nous devions protéger comme la prunelle de nos yeux la qualité de l'enseignement. Dans ces temps difficiles nous devons protéger l'essentiel, et l'éducation est essentielle. Le Parti libéral a compris cela.

Sacrifions ailleurs, mais investissons au maximum dans nos jeunes. Donnons-leur une formation de qualité et accessible à la majorité, pas à 6%. C'est là le choix du Parti libéral du Québec. Prenons les devants. La révolution tranquille est trahie par le Parti québécois qui appauvrit et affaiblit. La preuve en est terriblement et tristement faite aujourd'hui par un gouvernement essoufflé, sans imagination et par un ministre qui gaspille ses ressources à faire de la structure au lieu de s'appliquer à améliorer la qualité de l'éducation.

L'entêtement du ministre à vouloir imposer au ministère les politiques du Parti québécois plutôt que de les adapter aux aspirations des Québécois constitue un véritable scandale, M. le Président. Inexorablement, l'intérêt des Québécois, que le ministre a pourtant juré de promouvoir, de poursuivre, exige que le ministre mette d'abord et avant tout, dans l'ordre de ses priorités, non pas le programme du Parti québécois, mais les aspirations des Québécois à une formation solide et complète, le règlement de problèmes extrêmement troublants des décrocheurs, du blocage de l'enseignement supérieur de l'enseignement des sciences, de l'enseignement de la langue première, de l'enseignement de la langue seconde et autres, les coûts. Le Parti libéral du Québec, M. le Président, qui a présidé à la révolution tranquille, s'appliquera à exiger du gouvernement du Parti québécois qu'il respecte les acquis et qu'il cesse de bloquer l'avenir des Québécois. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rodrigue): M. le

député de Rosemont.

M. Gilbert Paquette

M. Paquette: M. le Président, l'étude des crédits du ministère de l'Éducation est chaque année un moment extrêmement important dans nos travaux parlementaires puisque, dans les politiques d'éducation, se joue l'avenir du peuple québécois et, de ce côté-ci, la députation ministérielle ne s'y intéresse pas pendant quelques jours, mais toute l'année. Quand on a travaillé avec le ministre à préparer ses crédits à l'occasion de la revue des programmes au cours de l'automne dernier, nous avons essayé de l'alimenter du meilleur de nos connaissances et de ce qu'on ressent dans les divers milieux éducatifs de façon à faire que la situation d'austérité dans laquelle le Québec est placé ait le minimum de conséquences possible sur les étudiants qui sont au centre de nos préoccupations, sur la qualité de l'enseignement et même qu'au contraire on puisse continuer à progresser malgré les contraintes. Le député de Marguerite-Bourgeoys a voulu rebaptiser le discours du ministre et le qualifier de fuite dans l'imaginaire. Je pense qu'on pourrait qualifier le sien de délire partisan. Tout a été fait par le Parti libéral au cours des 20 dernières années, M. le Président, toutes les réformes ont été faites par le Parti libéral et rien n'a été fait par les gouvernements de quelque autre parti que ce soit, rien de bon n'a été fait par le gouvernement du Parti québécois.

À ce compte, sûrement que le ministre de l'Éducation a eu parmi ses patients beaucoup de personnes qui ressemblaient au député de Marguerite-Bourgeoys également. Au contraire, M. le Président, la réalité est beaucoup plus dans le discours du ministre que dans celui du député de Marguerite-Bourgeoys parce que la réalité, c'est le contexte économique extrêmement difficile dans lequel on est placé et la réalité que négligent continuellement les députés de l'Opposition, c'est que le Québec est une société qui est constamment perturbée de l'extérieur et qui n'est pas maîtresse de l'ensemble de ses politiques. Avant de passer à la critique des orientations budgétaires, dont on peut tenir responsable le gouvernement, parce que c'est lui qui est responsable de dire: "On va faire des coupures budgétaires à tel ou tel endroit, je pense qu'on ne doit pas passer sous silence que l'ampleur de ces coupures ne dépend pas de nous, n'est pas causée par nous essentiellement mais dépend de coupures sauvages du gouvernement fédéral dans les paiements de transferts, de l'augmentation inconsidérée des taux d'intérêt, qui nuit à l'économie. On a fait un calcul rapide. Vous savez, M. le Président, que les paiements de transferts augmentaient d'à peu près 18% par année pour la période de 1970 à 1976. Depuis 1976, ils ont augmenté en moyenne de 8% par année. Donc, en deçà de l'inflation et chaque année, M. le Président, le gouvernement du Québec, depuis cinq ans, a à assumer dans ses budgets des sommes qui s'accumulent et qui augmentent d'année en année, un manque à gagner qui était, l'année dernière, d'environ 700 000 000 $, un manque à gagner par rapport à l'inflation, un manque à gagner de la part des paiements de transfert du gouvernement fédéral qui ne sont que le juste retour de nos impôts. (12 h 15)

Cette année, quand on accumule tout ce manque à gagner, si les paiements fédéraux s'étaient maintenus au rythme de l'inflation, on en arrive à un total d'à peu près 1 500 000 000 $. Si on ajoute à cette somme les taux d'intérêt élevés que le gouvernement du Québec doit payer sur ses emprunts, les coûts additionnels qu'il doit assumer sur le budget de l'aide sociale à cause de l'augmentation du chômage qui est créée par les faillites qui sont occasionnées par ces taux d'intérêt, on en arrive à la situation que le gouvernement du Québec, quel que soit le parti au pouvoir, aurait eu à faire peut-être des compressions normales, qui sont toujours nécessaires dans une optique de saine gestion, mais jamais des compressions de cette ampleur, si le gouvernement fédéral n'avait pas décidé de refiler son déficit sur le dos des provinces, et particulièrement du Québec, puisque 73% des coupures fédérales dans les paiements de transfert se font sur le dos des Québécois et du gouvernement du Québec, et si ce gouvernement n'avait pas décidé de massacrer l'économie pour tenter de lutter sans succès contre l'inflation.

M. le Président, je pense que l'ampleur du problème, l'ampleur des coupures budgétaires ou des mesures budgétaires que le gouvernement du Québec a à prendre, il est un peu puéril et irréaliste aussi, si on veut parler de réalisme et de ce qui exprime la réalité, il est irréaliste de les attribuer au gouvernement du Québec. Ceci dit, il reste que le gouvernement du Québec est responsable de l'endroit, de la façon, des mesures, de la valeur et de la qualité des mesures qu'il a à prendre pour faire face à cette situation et à ces contraintes.

En ce sens, on n'a pas entendu beaucoup ce que l'Opposition proposerait comme alternative. Une toute petite phrase à la fin du discours du député de Marguerite-Bourgeoys qui nous dit: "Le Parti libéral est favorable à une alternative budgétaire qui consiste à réduire le nombre d'administrateurs." C'est tout ce qu'on a entendu du député de Marguerite-Bourgeoys dans tout son discours, comme alternative budgétaire. Je pense qu'on peut lui dire que

c'est déjà fait, c'est déjà en voie de se faire, que cela va se continuer, mais que ce n'est sûrement pas de ce côté qu'on va trouver la solution de la crise budgétaire. On n'a qu'à examiner les chiffres quant aux effectifs du ministère - on a cela dans le cahier qui nous a été fourni - et je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas eu assez de 24 heures pour lire le document, parce qu'il a proposé une chose qui est déjà faite au niveau du ministère. En 1980-1981, les effectifs ont été réduits de 1%; en 1981-1982, de 3%; en 1982-1983, tout près de 4%, soit 3.9%. Lorsqu'on arrivera à l'étude de l'enseignement élémentaire et secondaire, il sera intéressant d'examiner aussi l'impact que pourra avoir ce projet de réforme, que le député de Marguerite-Bourgeoys a évoqué fort négativement et dont le ministre a parlé dans son discours. Quand on sait que l'ensemble du budget de l'administration du ministère compte pour 4,3% de l'ensemble des crédits de l'Éducation, c'est tout à fait irréaliste et c'est du délire partisan de proposer une coupure du nombre d'administrateurs comme solution au problème que nous laisse le gouvernement fédéral sur le plan budgétaire. J'aimerais savoir, au cours de cette commission parlementaire, quelles sont les solutions du Parti libéral. Lui qui aspire à remplacer ce gouvernement, que pourrait-il faire de mieux dans cette situation? Quelles sont ses propositions? Je viens de démontrer que sa solution budgétaire, proposée par le député de Marguerite-Bourgeoys, est totalement irréaliste. Quelles sont ses propositions?

Au contraire, dans le discours du ministre, on sent la préoccupation d'un homme et d'une administration au ministère, parce qu'on a beaucoup dénaturé tous les efforts qui ont été faits depuis un an et demi par tous les fonctionnaires du ministère de l'Éducation - j'ai été à même de l'observer de près et même d'y participer à l'occasion - pour continuer à vaincre la morosité qui risque de s'installer lorsqu'une situation qui ne dépend pas de nous nous amène à poser certains gestes qu'on préférerait ne pas poser, à essayer de sauvegarder les acquis essentiels et à maintenir un esprit de réforme qu'on ne sent pas beaucoup du côté de l'Opposition.

Nous, les députés ministériels, pensons que, pour le budget de l'année 1981-1982, il y a eu des difficultés d'ajustement. Il fallait apprendre à faire face à cette situation qui nous tombait sur la tête. Il y a eu des difficultés dans l'éducation des adultes - on ne tombera pas dans le délire partisan du député de Marguerite-Bourgeoys - il y a eu des difficultés. Il y a eu des projets qui n'allaient pas dans le sens du programme du Parti québécois au niveau des prêts et bourses. Les difficultés ont été surmontées.

Cette année, dans les crédits qui nous sont proposés, nous sommes heureux de constater que les suggestions qu'on a faites, bien avant le député de Marguerite-Bourgeoys, de réduire et de comprimer dans l'administration ont été réalisées en bonne partie; que, d'autre part, on aura, dans les crédits de cette année, une augmentation des crédits à l'éducation des adultes qui vont permettre de maintenir et même de faire progresser les activités; qu'on a également une indexation totale du budget des prêts et bourses, ce qui va permettre aux étudiants de continuer, et, particulièrement dans cette période de chômage accru, à avoir pleinement accès aux études supérieures. À ce point de vue, je comprends mal l'accusation du député de Marguerite-Bourgeoys qui dit: Au niveau de l'enseignement collégial, on demande aux collèges de faire face à une augmentation de clientèle et en même temps on coupe les budgets. Les budgets sont accordés en fonction de la clientèle; si la clientèle augmente, les budgets vont augmenter en conséquence.

Ceci met en évidence justement le fait que l'accessibilité aux études supérieures a augmenté. Je pense que tout le monde est conscient du phénomène de dénatalité aux niveaux élémentaire et secondaire; il y a une diminution assez importante de clientèle depuis plusieurs années. Normalement, la clientèle du collégial devrait diminuer mais elle augmente. Elle a augmenté de 4,5% l'année dernière et elle augmentera possiblement de 1% à 2% encore cette année; c'est donc que le taux de passage a augmenté. Effectivement, lorsqu'on regarde les chiffres, le taux de passage du secondaire au collégial était peut-être de 40%, il y a une dizaine d'années, et le député de Marguerite-Bourgeoys a admis lui-même qu'on était rendu à 50%. Oui, je pense que si on tient compte du retour aux études... J'ai les chiffres ici. C'est 43% de passage direct, mais lorsqu'on tient compte du retour aux études de gens qui les ont interrompues pendant un an ou deux et puis qui reviennent aux études au niveau collégial, on peut dire qu'il y a à peu près 50% de la population québécoise qui bénéficie de l'enseignement collégial.

Le député de Marguerite-Bourgeoys a voulu peindre à dessein, un tableau qui est déjà difficile, le ministre l'a souligné dans son discours, personne ne va nier la réalité. On a essayé de mettre en évidence un peu pourquoi cette situation était difficile, mais le député a pondu un tableau qui n'avait pas besoin de ses exagérations partisanes. On doit prendre en compte le fait suivant qui est quand même déterminant: c'est que l'ensemble du budget du ministère de l'Éducation, dans les dépenses gouvernementales totales, est resté au même niveau depuis cinq ans, malgré les coupures,

c'est-à-dire à peu près 28%. Certaines années, cela a pu augmenter à 29%, d'autres années à 26%, mais la part de l'ensemble des dépenses gouvernementales consacrées à l'éducation est restée au niveau de 28%. Prétendre que le gouvernement du Québec a réduit l'importance de l'éducation dans son budget, c'est une fausseté monumentale, M. le Président. On peut simplement s'y adonner quand on est soumis à ce genre de délire partisan. Je le soulignais au début.

Quand on se compare aussi avec la province voisine, avec l'Ontario, on se rend compte qu'entre 1972-1973 et 1979-1980, la part du produit intérieur brut, c'est-à-dire de l'ensemble des richesses de la collectivité québécoise consacrée à l'enseignement, a légèrement augmenté au Québec. Elle est passée de 7,1% à 7,5%.

Donc, pour l'ensemble de la richesse collective des Québécois, la part consacrée à l'éducation a augmenté de 7,1% à 7,5%, alors qu'en Ontario, elle a diminué de 6% à 5,6%. Les derniers chiffres qu'on a sont ceux de 1979-1980. Vous allez dire: C'était avant les coupures. Je pense que tout le monde va admettre que l'Ontario a un programme de coupures au moins aussi sévère que celui du gouvernement du Québec et que ces chiffres ont dû se maintenir.

Autrement dit, l'effort de rattrapage en éducation, malgré les compressions, se poursuit sous ce gouvernement et ce gouvernement attache toujours la même importance, du moins sur le plan financier, à l'éducation qu'aux autres secteurs d'activité.

Cependant, M. le Président, tout n'est pas que chiffres, tout n'est pas que budget. C'est dans ce sens malgré des compressions budgétaires qui, je le répète, nous sont imposées de l'extérieur et que nous essayons d'administrer avec le moins de mal possible, ce qui n'est pas facile, puisque 90% du budget de l'éducation sont bloqués par des conventions collectives, par des dépenses incompressibles, et c'est seulement avec les 10% qui restent qu'on peut réussir à réduire les dépenses gouvernementales, malgré cette situation où on doit faire des compressions budgétaires - je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys ne pourra pas le nier, il faut en faire - on a quand même réussi à maintenir l'effort budgétaire et à mettre en route un ensemble quand même assez impressionnant de réformes qui, pour la plupart, vont aboutir au cours de l'année et qui ont fait l'objet de travaux extrêmement intensifs au niveau du ministère depuis une année et demie. On a parlé de la réforme de l'enseignement élémentaire et secondaire. À la simple nomenclature des sujets qui font l'objet de cette réforme, nomenclature que faisait le député de Marguerite-Bourgeoys, je pense qu'on doit se rendre compte que c'est une réforme d'envergure; c'est une réforme qui va au coeur du processus d'apprentissage.

Le député de Marguerite-Bourgeoys veut laisser croire qu'il s'agit simplement d'une réforme de structure; c'est beaucoup plus que cela. Quand on sait l'importance pour l'apprentissage de la relation qui se passe au niveau de l'école entre l'enseignant et l'étudiant, on ne peut que se dire que c'est dans l'école que la qualité de l'enseignement va s'améliorer, non pas dans les bureaux du ministère et non pas dans les bureaux des commissions scolaires, comme le défend continuellement le député de Marguerite-Bourgeoys. Ce n'est pas la bureaucratie du ministère, ce n'est pas la bureaucratie des commissions scolaires qui va d'abord améliorer l'enseignement dans l'école. Sans nier l'importance des activités de soutien et du support pédagogique et didactique qui doit être fourni aux écoles, si on veut vraiment être décentralisateur, si on veut vraiment lutter contre la bureaucratie, il ne faut pas arrêter la décentralisation au niveau des commissions scolaires, mais la faire se rendre jusqu'au niveau de l'école, de façon qu'enseignants, éducateurs, étudiants, aient à leur disposition la liberté justement, la marge de manoeuvre que le Parti libéral voudrait restreindre au niveau des commissions scolaires, mais que ce gouvernement et ce ministère voudraient remettre au niveau des artisans principaux du processus éducatif qui sont dans l'école. (12 h 30)

M. le Président, je pense qu'on a là une réforme majeure qui montre qu'on peut continuer à faire progresser la qualité de l'enseignement et même à lui faire faire un pas en avant assez considérable malgré la situation d'austérité budgétaire dans laquelle on est placé.

J'aimerais terminer là-dessus. Je regrette qu'on doive, dans ces débats, d'un côté présenter toujours la vie en rose, et, de l'autre côté, la situation la plus noire possible. Je pense que la vérité se situe entre les deux et que cette année doit nous laisser beaucoup d'espoir puisque tout le travail des quinze derniers mois va aboutir au cours de cette année malgré les compressions budgétaires. Je vous remercie.

Le Président (M. Rodrigue): La commission élue permanente de l'éducation ajourne ses travaux sine die.

M. Lalonde: Excusez-moi, M. le Président, je ne savais pas qu'on ajournait nos travaux à midi et demi. Je pensais qu'on allait jusqu'à 13 heures.

Le Président (M. Rodrigue): Étant donné que l'Assemblée reprend ses travaux à 14 heures, nous ajournons à midi et demi.

M. Lalonde: Avant l'ajournement, est-ce qu'on pourrait simplement prévoir la marche

de nos travaux pour le moment où nous reviendrons? Le chef de cabinet du ministre a communiqué avec moi vendredi dernier pour voir à peu près de quelle façon... J'avais proposé un calendrier, je ne sais pas s'il est accepté.

Le Président (M. Rodrigue): Si vous voulez vous entretenir avec le ministre et ses représentants à l'heure du dîner et me faire part des ententes intervenues, s'il y a lieu, à la reprise des travaux cet après-midi.

M. Lalonde: Cela va.

M. Paquette: M. le Président, si vous me permettez, avant de commencer l'étude du premier programme, il y a également quelques-uns de mes collègues qui auraient des remarques particulières à faire sur l'ensemble. Cela ne devrait pas prendre énormément de temps, mais je pense qu'il serait important...

Le Président (M. Rodrigue): J'ai noté les noms de ces collègues. Il est possible, également, que des députés de l'Opposition voudront faire de même.

M. Paquette: D'accord.

Le Président (M. Rodrigue): Tout cela est noté et à la reprise des travaux nous poursuivrons les remarques préliminaires avant d'entamer l'étude des crédits proprement dite.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise de la séance à 16 h 43)

Le Président (M. Rodrigue): La commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux pour l'étude des crédits du ministère.

Les membres de cette commission sont les députés: MM. Brouillet (Chauveau), Champagne (Mille-Îles), Chevrette (Joliette) remplacé par M. Payne (Vachon), MM. Cusano (Viau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre), Paquette (Rosemont).

Les intervenants à cette commission sont les députés: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), French (Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Paré (Shefford), Polak (Sainte-Anne) remplacé par M. Dauphin (Marquette), MM. Proulx (Saint-Jean), Rochefort (Gouin), Ryan (Argenteuil), Saintonge (Laprairie).

Nous en étions aux remarques préliminaires.

M. le député de Mille-Îles.

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne: Merci, M. le Président. C'est avec fierté et beaucoup d'intérêt que je fais partie de cette commission parlementaire de l'éducation. On en est à l'étude des crédits de l'éducation.

Personnellement, longuement j'ai oeuvré dans ce domaine en tant qu'administrateur, en tant qu'enseignant, en tant que parent aussi, j'ai oeuvré au comité d'école, soit dans le secteur privé et le secteur public. C'est pour cela que je considère cette commission importante. Aussi, je souscris d'emblée à l'exposé du ministre ce matin, exposé qui couvrait tout le domaine de l'enseignement, que ce soit l'enseignement collégial, primaire, secondaire, les établissements universitaires, l'éducation des adultes, la formation professionnelle. On parlait de la vie étudiante, de la formation et du perfectionnement des maîtres. On parlait de l'ensemble de notre système d'éducation. Je souscris d'emblée à l'exposé du ministre.

Maintenant, en réponse, le député de Marguerite-Bourgeoys a traité le sujet de l'éducation d'une façon que je considère superficielle. On a parlé de tout et de rien. Sa vision globale a été très négative et pessimiste.

Je pense que, considérant l'importance du budget de l'éducation qui est d'au-delà de 6 000 000 000 $, on voit que le gouvernement insiste sur la qualité des services et la qualité de l'enseignement. Une commission parlementaire de l'éducation devrait être un genre de comité sélect et on ne devrait pas faire de partisanerie. Il ne devrait pas y avoir d'opposition et un parti ministériel qui défend des positions... On devrait travailler ensemble pour avoir le meilleur système d'éducation possible. On va souhaiter que la prochaine commission parlementaire qui deviendra un comité sélect soit la commission parlementaire de l'éducation.

C'est bien sûr qu'on voit l'importance de l'éducation de par les effectifs qu'elle contient, de par l'importance du budget et la variété des programmes qu'elle comprend. Je pense que la qualité des membres d'une nation en devenir est directement proportionnelle à la qualité de l'éducation qu'elle donne, soit dans la famille, soit dans l'école, soit dans les cégeps, soit dans les universités. Je pense qu'ici autour de cette table, chaque parent, chaque citoyen a le devoir de voir à ce que chacun des Québécois ait la meilleure éducation et le meilleur enseignement possible. Ce n'est pas ici qu'on doit savoir qui on doit privilégier, un secteur plutôt qu'un autre. Je m'adressais dernièrement à un conseil d'administration du secteur privé et je disais tout bonnement qu'autour de la table tout le monde devrait

se demander comment améliorer, parce que tout le monde paie des taxes, le système de l'éducation dans le secteur public. Je pense que c'est l'affaire de tout le monde.

Alors, l'éducation ne nous appartient pas, nous qui sommes autour de la table, que ce soit le ministre, les députés ou les commissions scolaires. L'éducation appartient aux parents et les parents viennent d'un milieu, et la nouvelle philosophie, la réforme scolaire est basée sur les parents, sur le milieu et sur l'école qui est le pivot de tout le système d'enseignement. Dans cette réforme, on voit qu'on veut décentraliser le pouvoir, parce que c'est autour de l'école qu'on peut constater la dimension du vécu quotidien et c'est dans ce sens-là que la réforme scolaire respecte les parents qui sont les premiers responsables de l'éducation. Elle respecte aussi, cette réforme, les éducateurs qui font partie du comité d'école, le principal d'école et les étudiants. Tous ensemble, dans leur milieu de vie, ils doivent bâtir un projet éducatif, un projet collectif. On leur donne, à ces agents du milieu, tout ce qu'il faut, soit un régime pédagogique à leur image, à l'image du milieu. On leur donne, à travers cette réforme, des budgets. Si les gens veulent favoriser des activités sociales, favoriser des activités culturelles, favoriser le parascolaire, ils se donnent les services qu'ils veulent. Alors, c'est par le milieu, pour le milieu. C'est cela la réforme scolaire qui s'en vient. J'entendais, ce matin, le député de Marguerite-Bourgeoys qui disait: C'est un projet qui est flou, qui est opaque. Et on le rejetait du revers de la main. Dans le sens où l'éducation appartient aux parents, je pense que cette réforme est très importante en vue de la décentralisation. On s'aperçoit que certains députés de l'Opposition voudraient donner quand même plus d'autorité aux commissions scolaires. Nous respectons, dans cette réforme, l'autorité des commissions scolaires et aussi l'autorité du ministère de l'Éducation.

Je pense que, si l'école est au service du milieu, les parents ou l'école peuvent se donner des services, que ce soit des services de garde des enfants, que ce soit un service de transport, si on le veut, que ce soit des activités diverses. Dans ce sens, la réforme scolaire doit être acceptée et, en fin de compte, désirée par tous les parents impliqués dans le milieu scolaire.

Le mode électif, avec la réforme scolaire, sera basé sur les gens qui sont directement impliqués dans le milieu. Les présidents des comités d'école feront partie de la future commission scolaire. Contrairement à ce qu'on a dit ce matin, les commissions scolaires ne sont pas abolies dans cette réforme scolaire; elles vont continuer. Maintenant, les gens qui vont faire partie de cette commission scolaire viendront directement du milieu, à savoir des écoles qui auront nommé ou élu leur président. C'est bien sûr que ces commissions scolaires et le ministère de l'Éducation subsistent; ils auront pour tâche de voir aux grandes orientations du système; ils auront à voir à l'élaboration des programmes et aussi à répartir le budget de l'Éducation.

Actuellement, nous sommes dans une période de consultation. On dit que le livre blanc sortira très prochainement. Il y aura aussi consultation publique; il y aura dépôt de la loi et espérons que, dans un avenir prochain, cette loi sera en application dans cette nouvelle réforme.

Alors, je pense qu'avec ce qui est devant nous, à savoir un budget de plus de 6 000 000 000 $, nous, comme membres de cette commission, on doit voir à ce qu'il y ait une rigueur administrative dans tout ce qu'il y a comme budget dans chacun des sujets, et je pense que les commissions scolaires, les écoles, les cégeps et les universités doivent, comme le ministère le fait, avoir une rigueur administrative.

Déjà on a connu l'an passé des compressions budgétaires. Face à la conjoncture économique qui est difficile, on doit tous ensemble, tous les agents de l'éducation, voir à la meilleure qualité de l'enseignement, et je pense qu'avec le dynamisme du personnel, avec les enseignants, avec les administrateurs, cela nous préparera à accueillir la nouvelle réforme scolaire qui s'en vient. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: M. le Président, ce matin, nous avons entendu le ministre, qui a parlé de beaux principes. Moi aussi, je partage ces beaux principes, mais je crois que ce n'est pas un retour à l'essentiel en éducation qui va solutionner nos problèmes. Mon collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, a parlé du bilan du péquisme, et c'est loin de réaliser ces beaux principes. Je soutiens qu'on n'arrivera jamais à améliorer la qualité de l'éducation tant que le gouvernement n'aura pas fait face à l'essentiel du problème. Le vrai problème, ce n'est pas la faute d'Ottawa, ce n'est pas la faute de la crise économique; c'est la faute du gouvernement et la façon dont il gère les ressources humaines en éducation.

Je vais parler en anglais parce que c'est plus clair et c'est plus vite pour tout le monde.

I am going to talk about the management of human resources in education because, I think, if the Government does not have the courage to face the real problems with respect to the management of the

human resources in education, then none of the beautiful goals and ideals which are going to improve the quality of education, none of these things will ever be realized. As a matter of fact, we will experience a further and further deterioration of education.

The costs of education in Québec have been rising rapidly for several years. They now represent, I believe, 28% of the Government expenditures. Expressed as a percentage of the gross national product of Quebec, it is becoming a larger and larger proportion, as was pointed out by the député de Rosemont this morning, and it now stands at 7,8% of the gross national product. I should not say now, these are 1979-1980 figures that I received from the ministry.

But even more alarming, the cost per student eats up 35,9% of the individual riches per person in this province, 35,9%. The individual in this province - and I am still talking about 1979-1980 figures -generates 9 800 087 $; 35,9% per student, per person's riches are taken up by educational costs in this province.

I think it is important, in looking at this problem, that we look at what is happening in Ontario, because it is true that a larger proportion of our gross national product is being devoted to education in this province, but we are concluding falsely if we think that we are doing a better job. It is true that Ontario has a lesser proportion, it is going down and ours is going up in proportion to our riches, but the clue is that in the same year, 1979-1980, the average student cost - and I am talking globally - in this province was 500 $ more per student than in the Province of Ontario.

I think we have to ask ourselves the question and, obviously, the Government has: Can we afford it? Obviously not. What has been the Government's response to this situation? The Government's response - and the Minister said it this morning - is: We must do more with less. Global cuts, therefore. Let the chips fall where they may, because that is what is happening.

This year, the cut, I should say the rise, is only 7,9%. The Education global budget is up 7,9%. 80% of that are salaries, on a global basis, but in elementary and secondary education, the salaries represent 88% and in those salaries, according to the ministry's own figures, in the sous-ministre's own statements, the average rise in the salaries that will be given is 12 plus 2 per scale, 14%. It is clear that a budget hike of 7,9% is totally inadequate to cover the salaries.

Now, fortunately, there is a bit of a cushion because of declining enrollment in the school system. The gap between the increase in the Education budget would be even greater if it were not for that declining enrollment. Faced with severe cuts imposed on the school boards - and my remarks from here on are going to be related just to elementary and secondary education, although the same analysis could be made at the other levels. Faced with the cuts, faced with the amount of money available to the school boards, what are their options? (17 heures)

First of all, with regard to the teachers which occupy most of the school board budgets, the boards have no choice but to use all of the "masse salariale" that is given to them because of the contract provisions which they have to respect in order to staff the schools. So that money is gone. That represents about 70% of the monies that come to the boards. They have to find the cuts elsewhere than in the teachers' salaries. Therefore, what do they have to look at? They look at the maintenance of buildings, oil, electricity, textbooks, library books, other learning materials but, most importantly, they have to look at support staff and non-teaching professionals that are not protected by any norms in their contracts.

To make matters worse, the school boards are faced with budgetary rules which are unloading an increasing proportion of personnel in surplus on the school boards, because the Government has not seemed to pay the full cost of the commitments in the contracts of those personnel. Last year, it was 80% paid by the Government, now it is only 50% and the school boards have to find the balance somewhere in the other expenses. The Superior Council has deplored this practice, just as the school boards have, and said in their document of 1981 that the Government simply must agree to pay the full commitment of their engagements in the contracts, so that the school boards do not have to carry the load and find other things to cut to pay for the surplus.

The boards are faced with ridiculous trade-offs. They have no other administrative alternative but to trade off teaching personnel versus oil, professional personnel and support staff versus books. Posts are abolished that are desperately needed. In the last three years, according to the figures that we received, in the professionals alone, in 1981, 340 professionals were put on surplus and 135 non reengaged. Last year, -this is October 1981 - 231 on surplus, 83 non reengaged. In 1982, 200 on surplus, 80 non reengaged. This is far beyond what one would expect in terms of dropping enrollment. The total professional teaching force, according to these figures, in 1981-1982 was 3583. These are the people that are getting hit: guidance services. The ratios for guidance are already very poor in Québec.

In the United States, the ratio of 300 pupils per guidance counselor is not unusual. In Ontario, the norm is 365. What is the norm here? A practice not set out by law, but what does one observe in Québec, one to 1000 pupils. These are the people that are still getting cut, because the boards have no other choice. Career guidance people, people who are preoccupied with orienting students to find useful work after school, work study programs. All these things are very much in line with the Government's own orientations. The gap between school and work is one of the most serious gaps that we have in our society; we have hundreds of thousands of students that are graduating without the skills and without any idea of where they are going to find work. These are the people that are helping those students get on track.

Crisis teachers, some boards have found ways to buy crisis teachers. These people are going because of the cuts. These are the people that look after the students in trouble. There are hundreds of thousands of students in trouble. I have a report here from the Conseil scolaire de l'île de Montréal prepared by Mr. Wener, very recently, and one of his major conclusions - it is an extensive report of the estimated 5% of children who have behavior problems, very complex problems combined with acting out problems of learning. These are the children that are going to be our dropouts, our delinquents and very costly, socially, in the long run to our society. The conclusion of Mr. Wener is that we simply do not have enough. It is not that we are using necessarily in the best way the resources we have, but it is critical that we have more resources to look after these children in trouble.

Help for inner-city students, another priority announced by the Government in these documents. This takes personnel, it takes professional personnel over and above teaching personnel. Speech therapists, special programs that some boards are trying to do something to rescue those children who have already dropped out from our schools. There are community based programs. I have some in my own county, run by the YMCA, that are doing a splendid job in rescuing children who have dropped out. Do you think that they can get any money from the Department of Education to do anything about it, to support the professionals that are so desperately needed and should be doing the job in the schools? No.

Special support services for the integration of special ed. children. Integration is a beautiful theory. I happen to be a member of the COPEX committee that worked three years to produce that report that the Government is now trying to implement. But integration cannot be done without support for the teachers. These are nonteaching professionals that I am talking about and these are the people that the boards are putting out, knowing that it is an unwise decision.

The other people that are getting the chop: librarians, lab technicians, library technicians. It is grand to talk about the importance of library services, but if you have no bodies in there to make it come alive, you have no library services. Technical vocational programs. Guess which ones get the chop. The expensive ones get the chop, the cheap ones are kept. It is not because the boards are malicious or have not got good judgment. These are the kinds of decisions that they are making and I think it is totally unacceptable.

The Conseil supérieur looked at what was happening because - this was in 1981, last year, - of the budget, because of the cuts, and the way the cuts were made. And they said: Certain so-called priority measures which had obtained a consensus from the school world at large as well as a firm place in the schools of Québec and in other policy statements may, in all likelyhood, find no form of application. Will school boards have the means to guarantee the provisions of the new "régime pédagogique" and especially revised programs, provision to... students of all basic textbooks as well as the requirements of the new subject period schedules? Will they be financially able to comply with the policy of keeping the last school alive in a district or with policies pertaining to exemption from religious instruction, the integration of children with special needs, the educational needs of disadvantaged areas and the forthcoming policy on vocational education?

Under the present circumstances, the Conseil supérieur said: Our answer is no. How do we get out of this mess? Because what is happening is that the quality of education is going down, down, down with each new budget. Where do we look to do something about it? I think, first of all, we have to recognize that because the costs of education in Quebec are going up, we should not be patting ourselves on the back, as I have seen the Minister do, and say: Look how grand we are, we are doing more than they are in other places. I think the key question we have to ask ourselves is: Are we getting our money's worth in education? And since 88% - I am talking about elementary and secondary education - of the money goes in salaries, I think we have to look at the productivity and the cost benefit of our teaching force.

I think that, in Québec, we are no richer. As a matter of fact, in many ways, the individual richness that is generated by the individual is less than in much of Canada. I think that we can at least expect, in Québec, that we should get as good a job

done with our dollar as they do in other provinces. Now, I think that a very important study was contracted by the ministry, of which I received a copy just the other day. It is a study prepared for you of the work load of teachers across this country. I want to tell you just the conclusions.

The study is dated January 25th 1982 and it is a study of the teaching work load, the pupil timetable in elementary and secondary, the work here and so on; class sizes in Sudbury, Windsor, London, Toronto, Ontario (Ontario School Trusties), in Winnipeg, Calgary, Edmonton and Vancouver. I think it is important that these are big cities, where the working conditions have been developed by agressive unions in discussion with their boards. The chances are that these conditions would be more rigorous, perhaps, than in other areas. So I think they make a good comparison. Now, the important conclusions from this study are as follows.

Québec, in general, compared to all of these other places, the pupils have fewer days per year in school and fewer minutes of instruction, or hours of instruction per week than anywhere else in Canada. I am talking about these big boards. The teachers have fewer pedagogical days in other places and in other places - I think it is important almost everywhere - the teachers are present in school all day, plus 15 minutes at each end of the school day.

Le Président (M. Rodrigue): Mme la députée de Jacques-Cartier, étant donné que le temps qui vous est alloué est épuisé, je vais vous demander de conclure rapidement, s'il vous plaît.

Mme Dougherty: The teacher-pupil ratios are higher. There are more teachers per pupil in the other provinces. The teacher work load is 15% to 20% higher in other provinces and the class size, on the average, is equal or higher. I think these are very very important and it is important also to note that in the elementary schools, in this province, next year, the elementary work load for our teachers is going to drop, which will cost 30 000 000 $, that is 1 000 000 $ for every minute that one drops in work load.

Le Président (M. Rodrigue): Je m'excuse, le temps qui vous est alloué est écoulé.

M. le député de Fabre, vous avez droit à vingt minutes pour vos remarques préliminaires.

(17 h 15)

M. Michel Leduc

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Le député de Rosemont, tout à l'heure, a mentionné que, de ce côté-ci, tout était rose; de l'autre côté, tout est noir. Effectivement, on est obligé de constater que tout est vraiment noir de l'autre côté, du côté de l'Opposition, et je voudrais relever quelques commentaires qu'ont faits Mme la députée de Jacques-Cartier et M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

Mme la députée de Jacques-Cartier a mentionné qu'il était nécessaire pour le ministère de l'Éducation de faire face aux vrais problèmes. Elle a mentionné aussi - je prends simplement quelques idées importantes - que la qualité de l'éducation baisse d'un budget à l'autre, et elle a fait une comparaison avec ce qui se passe dans les autres provinces du Canada pour en arriver à démontrer que le travail des enseignants est beaucoup plus élevé dans les autres provinces canadiennes, qu'il y a plus d'élèves par classe dans les autres provinces canadiennes, qu'il y a moins de journées pédagogiques, que les professeurs sont présents aux journées pédagogiques, etc., et tout cela pour conclure que la qualité de l'enseignement est plus élevée dans les autres provinces canadiennes.

Je dois dire qu'elle ne m'a guère convaincu et qu'on pourrait aisément démontrer que le fait d'avoir moins d'élèves par classe est au contraire un gage de qualité de l'enseignement, que le fait pour les enseignants du Québec d'avoir moins de minutes d'enseignement à faire dans une journée est également un gage de qualité pour l'enseignement au Québec. C'est assez curieux, selon Mme la députée de Jacques-Cartier, plus les enseignants passent d'heures en classe, plus la qualité de l'enseignement est assurée; curieux raisonnement puisqu'on pourrait aisément démontrer qu'au contraire, plus les enseignants ont de temps pour se préparer adéquatement, ça peut être au contraire un gage également de qualité de l'enseignement. Les arguments sont fallacieux, et je m'attendais qu'il y ait un certain nombre de solutions, finalement, face aux difficultés qu'on traverse, et je n'ai rien entendu de sa part; aucune solution; rien, absolument rien de concret de sa part. Uniquement des critiques et, encore une fois, des critiques basées sur une dépréciation de notre système d'enseignement au Québec par rapport au système d'enseignement dans les autres provinces canadiennes.

Quant au député de Marguerite-Bourgeoys, je me demande sincèrement s'il a lu le même livre que nous, s'il a reçu le même livre que nous, ou peut-être qu'il a composé son discours avant d'avoir lu ou avant d'avoir pris connaissance du livre que nous avons parce que je cherchais ses points de référence dans le livre, et je n'en ai trouvé aucun. J'ai entendu beaucoup d'opinions, d'opinions qui me semblent tout à fait gratuites. Évidemment, je n'ai pas eu le

temps de les relever toutes, mais je voudrais simplement me concentrer sur les remarques qu'il a faites au sujet du système, au sujet du niveau collégial.

Je vais concentrer en particulier mes commentaires sur trois points. D'abord, le premier point, la question de la centralisation. Il a mentionné les lois 24 et 25 qui avaient contribué à augmenter la centralisation au niveau du ministère quant au système collégial et pourtant, en aucun temps, il n'a réussi à nous dire en quoi les collègues étaient véritablement affectés par cette centralisation. J'attendais des exemples concrets, vécus dans le milieu, à la suite de l'adoption des lois 24 et 25, et je n'en ai entendu aucun. C'est vrai qu'à l'époque, on a beaucoup critiqué le fait que les lois 24 et 25 aient été adoptées un peu trop hâtivement, mais, quant aux résultats, on n'a entendu aucune critique concrète, et c'est cette même Opposition, par contre, qui réclame des enquêtes à tout bout de champ de la part du ministère de l'Éducation. Notamment, dans le cas du cégep d'Ahuntsic, on réclame à cor et à cri une intervention du ministère de l'Éducation au lieu de laisser le milieu régler ses problèmes à partir d'un rapport d'enquête qui a été déposé et à partir d'un conseil d'administration qui doit prendre ses responsabilités.

Quant à la politique de décroissance scolaire dont il a été fait mention, je ne sais pas si le député de Marguerite-Bourgeoys a lu la page 6 de son manuel, section 5, mais il est étonnant de voir qu'il est mentionné qu'en 1981-1982, la clientèle a augmenté au-delà des prévisions. Si on vérifie un peu plus loin dans le même manuel, on constate qu'entre 1976 et 1981, la clientèle du collégial est passée de 107 204 élèves à 124 480 élèves, soit une augmentation de 13% de la clientèle depuis 1976. Comment peut-on parler d'une politique de décroissance scolaire alors qu'il y a une augmentation constante de la clientèle depuis 1976?

En passant, je voudrais souligner - je pense que c'est intéressant de le mentionner - qu'il y a une augmentation marquée de la clientèle de sexe féminin, maintenant supérieure en nombre à celle du sexe masculin, et un accroissement du secteur général par rapport au secteur professionnel pour l'année 1981-1982. Il est étonnant encore une fois d'entendre parler de politique de décroissance scolaire dans un tel contexte. Je pense que les cégeps reçoivent présentement ces clientèles. Bien sûr, on vit dans un contexte de compressions budgétaires; on n'a pas le choix, mais je pense que les collèges arrivent à vivre avec cette clientèle et que, somme toute, les critiques, bien qu'elles existent, ne font pas les premières pages de journaux ce temps-ci, en tout cas quant à la réception de la clientèle dans les cégeps.

Il a mentionné aussi, dans ses commentaires sur la politique de décroissance scolaire, que la moitié des étudiants du secondaire ne réalisaient pas le passage du secondaire au collégial. C'est vrai, M. le Président, mais la présentation est fausse. Ce qu'il aurait fallu dire, c'est qu'en l'espace de quelques années, on est passé d'un taux de passage de 40% à 43%. Et cela, M. le député ne l'a pas dit. Si on reculait au temps où les libéraux étaient au pouvoir, on s'apercevrait que le taux de passage a considérablement augmenté depuis ce temps-là. Alors pourquoi ne pas dire la vérité quant à la politique de croissance scolaire, au contraire, qu'a connue le milieu collégial?

Il a mentionné aussi la question de l'implantation des programmes au niveau collégial, implantation qui, selon lui, est remise en question présentement. Pourtant, M. le Président, on lit très bien, aux pages 9 et 11, une série de réalisations pour 1981-1982 et des projets très intéressants pour 1982-1983, toujours dans le domaine de l'implantation des programmes. Le député a-t-il pris connaissance de ces pages?

Je mentionne, M. le Président, qu'en 1981-1982, l'accès à quatre programmes professionnels a été facilité par l'élargissement de leur distribution dans le réseau. Il s'agit des programmes de gestion d'entreprises agricoles, de techniques du génie civil, de techniques correctionnelles, de techniques de design industriel et, en 1982-1983, cinq programmes connaîtront une plus large diffusion dans le réseau: aménagement forestier, exploitation forestière, dessin de conception mécanique; en troisième année, garderies d'enfants, informatique dans les collèges. On peut retrouver le nom des collèges à côté de ces techniques dont l'implantation sera étendue. Comment peut-on alors parler d'une remise en cause des programmes d'implantation?

À la page 11, on retrouve une série de programmes présentement dans le réseau, mais à l'état expérimental. Il ne s'agit pas de deux ou trois programmes, mais de plusieurs programmes. Dans une première catégorie, on retrouve les cours d'expérimentation suivants dans le réseau: techniques dentaires, techniques de denturologie, techniques d'électro-physiologie médicale, prothèses visuelles, etc. Il y en a dix de ce type. Comment peut-on parler d'une remise en cause de l'implantation des programmes quand, au contraire, on voit qu'il y a une expansion des programmes, entre autres, de certains programmes qui sont dispensés présentement en milieu privé et qui seront intégrés à l'enseignement collégial? Il s'agit de trois programmes qui étaient offerts uniquement en milieu privé et qui passent au milieu public. Il s'agit de techniques de thanatologie, de ballet-danse,

de sciences de la parole, trois programmes nouveaux qui seront implantés dans le milieu. Je mentionne deux autres programmes qui sont présentement expérimentés dans le réseau: techniques du milieu naturel, techniques de soins infirmiers.

C'est assez curieux, encore une fois, de trouver une critique, finalement, qui ne se fonde pas sur les faits, mais qui se fonde, au contraire, sur des a priori, basée sur une approximation de la situation vécue dans le milieu collégial. Le temps ne me permet pas de poursuivre la critique, mais je suis convaincu que, si on examinait la critique qu'il a faite des milieux primaire, secondaire et universitaire, on en arriverait à la même conclusion, soit que le député de Marguerite-Bourgeoys a sans doute rédigé son discours avant de prendre connaissance du manuel qui est devant nous.

M. Lalonde: En vertu de l'article 96.

Le Président (M. Rodrigue): En vertu de l'article 96.

M. Lalonde: Étant donné que le député de Fabre a tiré des conclusions de mon discours, je voudrais lui dire que je n'ai pas parlé de décroissance, j'ai parlé de défaut d'amélioration de l'accessibilité. C'est tout à fait différent. Quand il demande, concernant la centralisation dans le domaine collégial, pourquoi je n'ai pas donné d'exemple, je lui rappellerai - je comprends qu'il n'avait pas le texte de mon discours - que je me suis même référé non seulement à l'article de Mme Bissonnette, mais au Conseil des collèges qui, dans son deuxième rapport annuel, n'a pas manqué d'attirer l'attention du ministre sur cette question de l'autonomie administrative et pédagogique des collèges. L'organisme consultatif juge la situation à ce point alarmante qu'il a décidé d'accorder priorité à ce problème au cours de la prochaine année. Il me semble que c'est assez sérieux pour qu'on le soulève ici, à l'étude des crédits. Lorsqu'on abordera l'étude de ces différents programmes, je pourrai donner plus de détails, M. le Président.

Le Président (M. Rodrigue): M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: M. le Président, je n'aborderai pas des sujets précis, mais je vais plutôt intervenir et apporter des commentaires sur les deux discours de présentation concernant le budget du ministère de l'Éducation pour 1982-1983, surtout sur les visions et les orientations, qui sont totalement différentes. Je ne dirai pas que l'un est rose et que l'autre est noir parce que, finalement, j'aime mieux qu'on étudie programme par programme pour s'apercevoir, finalement, de ce qu'est la réalité. On interprétera dossier par dossier.

Au niveau de la vision générale, le ministre présente son budget dans un contexte économique difficile, dans une situation de crise économique, de crise budgétaire. On essaie avec moins de faire plus et de faire mieux. D'après les commentaires qu'on a entendus de l'autre côté, on se rend compte que c'est possible parce qu'en faisant des comparaisons avec d'autres provinces, on s'aperçoit que c'est possible, c'est faisable. Ce qu'on va essayer de faire, c'est justement d'améliorer ce qu'on a, d'utiliser le potentiel qu'on a, autant humain que physique et, évidemment, financier. (17 h 30)

Donc, ce qu'on va essayer de faire, c'est de préserver la qualité de l'enseignement qu'on va donner en touchant les structures, en touchant ce qui est, finalement, d'utilité, des services à donner à celui pour qui l'éducation a été faite, c'est-à-dire l'étudiant. Cela a été fait, pensé avec un budget en période de crise économique. Donc, on va s'attaquer - c'est ce que le ministre a dit - à des changements de structures. Ce qu'on entend de l'autre côté venant du député de Marguerite-Bourgeoys, c'est que, finalement, les coupures ou l'argent, on devrait pas couper, on devrait faire plaisir à tout le monde, on devrait même augmenter. Je ne pense pas qu'on doive augmenter quand cela prend déjà plus de 28% du budget; l'éducation doit comme le reste participer à la crise qu'on subit. Il ne faudrait pas oublier qu'on n'est plus en période préolympique, mais on est en période de crise économique. Donc, les deux visions sont complètement différentes, c'est évident. Sauf que la situation qu'on vit, elle est réelle, elle est actuelle, puis les budgets doivent en tenir compte.

Donc, on fait quoi à partir de ça? Nous autres, on dit les structures. On entend souvent les remarques, en disant: "Cessez le gaspillage, ayez de meilleurs contrôles, rendez la machine plus efficace, plus fonctionnelle", c'est exactement ce qu'on est en train de faire. Entre autres, avec la restructuration scolaire, rendre l'école au milieu, c'est ce qu'on dit, c'est ce qui est demandé par la consultation. On a consulté, ce n'est pas quelque chose qui est imposé; c'est quelque chose qui semble contesté de façon politique, sauf qu'on répond à une demande et à une étude qui s'est allongée sur plusieurs années, mais cela va répondre vraiment au milieu.

Juste un exemple. C'est impensable de continuer comme ça et c'est vrai qu'il y a du gaspillage, et c'est en éliminant le gaspillage justement qu'on n'aura pas besoin

d'augmenter les budgets, mais de mieux utiliser ces mêmes budgets. Comment se fait-il, surtout dans les petites places, que les conseils municipaux doivent investir dans un terrain de baseball, par exemple, parce qu'ils ne peuvent pas utiliser la cour de l'école le soir et les fins de semaine? C'est impensable, cela a été demandé par le milieu de changer ça et c'est ce qu'on va faire.

Le projet n'est pas connu et ce n'est pas moi qui vais le dévoiler, sauf que cela va répondre aux besoins du milieu et j'aimerais mieux qu'on le conteste ou qu'on attende de l'avoir en main et de l'étudier avant de le contester comme tel. Donc, ce qu'on propose, ce n'est pas d'enlever des services, ce n'est pas d'enlever de la qualité non plus. C'est de mieux utiliser tout ce qu'on a pour être capable de donner de la qualité, pas nécessairement avec plus d'argent, mais avec plus de bonne volonté, des structures meilleures, mieux adaptées à l'école et à l'étudiant. Donc, c'est dans ce sens qu'on le voit et ce n'est pas nécessaire d'augmenter les services.

Quand on parle aussi de la popularité croissante de l'école privée, on ne s'assoira certainement pas sur le tas à regarder passer la misère et à constater que, finalement, c'est vrai que l'école privée est drôlement bien vue par la population. Et ça, c'est dû à des facteurs qui datent déjà. Entre autres, une des plaintes qu'on a souvent, c'est que les écoles publiques sont trop grandes. On ne peut pas nous le reprocher à nous: elles sont là depuis plusieurs années. Et nous devrons fonctionner aussi avec ça. On doit faire en sorte de rendre l'école publique plus attrayante, ou du moins aussi attrayante que l'école privée, et c'est ce qu'on est en train de faire en répondant justement aux gens, à la population locale. Donc, il ne faut pas nous reprocher de vouloir corriger une situation. Et la corriger, ce n'est pas en mettant plus d'argent à l'intérieur parce que vous allez nous reprocher, vous serez les premiers à nous reprocher de réinvestir davantage et d'avoir moins d'élèves par classe et moins de minutes et toutes sortes de choses. Donc, ce n'est pas ça la solution, ce n'est pas d'investir davantage. C'est quoi? C'est au niveau des structures qu'il y a quelque chose à changer, et c'est au niveau des structures qu'on va s'attaquer.

Donc, cela va nous permettre non seulement un meilleur contrôle, mais plus d'économies aussi. C'est dans ce sens que nous autres, nous allons fonctionner et c'est pour cela que les budgets sont encore énormes. Ils ne seront pas, par contre, augmentés dans l'ensemble du budget au niveau du pourcentage.

Un autre exemple qu'on pourrait prendre, où on nous fait des reproches - le député de Marguerite-Bourgeoys y faisant allusion - c'est l'éducation des adultes; c'est évident qu'il y a eu une grande partie des gens qui ont abandonné l'éducation des adultes. Si on regarde, par exemple, les chiffres qui apparaissent dans le livre des crédits qui est déposé aujourd'hui, on se rend compte que, là où cela a lâché, c'est dans le socioculturel. Et est-ce que ce n'est pas justement une bonne chose que cela se produise? Est-ce que ce ne sont pas plutôt des loisirs? Est-ce qu'on n'a pas plutôt... Et c'est un reproche que vous nous faites souvent de vouloir toujours centraliser, étatiser, que le gouvernement prend tout en main et se charge de tout ce que la population locale faisait de façon bénévole auparavant! Est-ce qu'on n'est pas en train de le tuer, le bénévole? Justement parce qu'on a ouvert trop grands nos programmes, étant donné qu'on pouvait, à meilleur coût, fournir des équipements de luxe à des gens, on a pris des cours de macramé, de danse, toutes sortes de choses, qui étaient donnés par d'autres groupes, qui coûtaient moins cher à la société, qui relevaient du loisir. On les a pris et cela a fait en sorte que les coûts de l'éducation sont devenus aussi énormes. Que les domaines socioculturels retournent finalement là où ils doivent aller, ce n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Ce qu'on peut remarquer, par exemple, c'est qu'à l'éducation des adultes, dans le général, cela demeure stable et, dans le socio-économique, cela augmente. Donc, si l'éducation doit servir justement à préparer l'avenir et non pas nécessairement fournir des loisirs, je pense qu'on atteint quand même les objectifs auxquels le ministère de l'Éducation doit répondre.

Donc, c'était surtout cela, globalement, sur les perceptions, les vues générales, les deux façons de voir l'éducation, que je voulais intervenir particulièrement. Je continue à dire que ce n'est pas en augmentant les budgets, que ce n'est pas nécessairement en changeant non plus tout le système qu'on a, mais c'est en faisant en sorte que les structures répondent à l'éducation à donner à l'étudiant et se rapprochent du milieu, c'est-à-dire de l'école. C'est exactement ce qu'on dit. Donc, cela va nous permettre d'éviter ce qui pouvait se produire parce que, finalement, on décentralisait tellement qu'on s'est ramassé avec des trous énormes dont on a souvent parlé. C'est ce qu'on veut éviter. C'est justement en étant plus près de l'étudiant, plus près de la population locale qu'on va pouvoir s'assurer de répondre à leurs besoins et qu'on va être capable de dépenser, je pense, plus efficacement l'argent dans le domaine de l'éducation.

Je vais plutôt réserver mes autres questions pour chacun des programmes.

Le Président (M. Rodrigue): M. le député de Vachon.

M. David Payne

M. Payne: M. le Président, je suis tenté de m'éloigner de mes préoccupations de ce matin suivant les remarques invoquées par Mme la députée de Jacques-Cartier, qui semble vouloir suggérer aux Québécois, évoquer aux Québécois une vision cauchemardesque de l'éducation au Québec. Je pense que ce serait plus dans l'ordre, de notre intérêt, de nous amener à la réalité plus spécifique de certains autres programmes. Elle s'est bien défendue de vouloir attaquer exclusivement ce qu'on peut appeler le programme 4.

Pour ma part, j'aimerais aller plus en détail dans mes remarques préliminaires. Je ne m'adresserai pas directement aux crédits de cette année. On y reviendra plus tard ce soir. Mais pour qu'on puisse avoir un bon point de départ, peut-être qu'on peut faire des comparaisons avec l'année dernière, l'année qui précédait, etc.

Par exemple, elle a mentionné j'espère que vous avez bien saisi la nature de ses remarques, M. le Président - le cas des personnes en difficulté de réadaptation et celui des services éducatifs, si je l'ai bien comprise, aux déficients mentaux. Je pense que le gouvernement actuel est en mesure de bien défendre son dossier. Par exemple, concernant les services éducatifs aux jeunes présentant - comment dit-on cela en français - des signes psychopathologiques, ceux qui souffrent d'autisme, depuis quelque temps, les pressions s'accentuent pour qu'on offre des services éducatifs dans les écoles à des jeunes présentant de telles difficultés. Or, Mme la députée de Jacques-Cartier, qui est tout à fait prête à blâmer le gouvernement d'enlever des services, n'est pas prête à assumer, pour sa part, une réalité, à savoir que ce sont vraiment, la plupart du temps, les commissions scolaires qui sont récalcitrantes, difficilement prêtes à vraiment instaurer des services éducatifs aux jeunes présentant ce genre de difficulté. Je vois qu'elle montre des signes de désaccord, mais je pourrai peut-être me référer aux deux cas qui ont été débattus, si ma mémoire est fidèle, devant les tribunaux. Je pense que c'est à Sainte-Foy et à Drummondville. Même si le taux d'expansion de ce genre de maladie est assez minime, je pense que cela représente un défi de taille pour les commissions scolaires.

Au sujet de l'accessibilité en général des élèves en difficulté d'apprentissage, je pense qu'on pourrait aussi souligner une certaine lacune en ce qui concerne certaines commissions scolaires. N'oublions pas que le MEQ donne aux commissions scolaires une enveloppe globale et les sommes supplémentaires sont toujours disponibles devant le Conseil du trésor pour favoriser davantage l'accessibilité des élèves aux services éducatifs. Le MEQ, d'après mon expérience, a toujours insisté pour que les commissions scolaires se donnent une politique d'organisation des services aux élèves, y compris les services à l'intention des élèves en difficulté d'apprentissage.

La députée de Jacques-Cartier, qui veut imputer au gouvernement le fait de ne pas vouloir décentraliser ses services, se refuse encore à accepter le fait que, peut-être dans tous les cas, les commissions scolaires n'ont pas montré toute la bonne foi nécessaire à cet égard. Pour justifier mes craintes, je pourrais peut-être invoquer un autre exemple dans le programme 4 auquel fait référence la députée de Jacques-Cartier. Je suggérerais aussi que les commissions scolaires... Le gouvernement actuel, depuis 1978, je crois, a instauré le projet de service de garde en milieu scolaire. J'ai constaté, dans mon comté et dans plusieurs comtés avoisinants, que les commissions scolaires ont montré une certaine réticence à divulguer les détails de cet intéressant programme. Or, une étude précise et concise de la situation nous montre les budgets accordés par le gouvernement du Québec pour le développement de ce programme qui est très remarquable, à mon avis. En 1978, c'était une modeste somme de 53 000 $. L'année suivante, 238 000 $. En 1980, 934 000 $ et en 1981, 1 800 000 $. Le nombre de commissions scolaires dispensant ce service est de 15 en 1978 et, aujourd'hui de 66.

Je trouve ça assez intéressant et je porte à l'attention du ministre ma préoccupation, que peut-être les commissions scolaires ont encore une certaine responsabilité à assumer, et peut-être explorer les problèmes évoqués par la députée de Jacques-Cartier. Lorsqu'elle parlait du personnel de soutien mis en disponibilité, elle a cité les chiffres, qui n'étaient pas les bons d'ailleurs, mais je n'ouvrirai pas une parenthèse là-dessus. Ce personnel de soutien pourrait peut-être être bien utilisé pour aider la mise en application de ce service de garde en milieu scolaire.

Mes discussions sont fondées sur des discussions avec les enseignants, avec les parents et avec les administrateurs des commissions scolaires. Parfois, et souvent, les commissions scolaires sont peu intéressées à mettre en application ce programme. Pourquoi? Parce que ça prend du temps, ça prend un certain effort, ça prend une certaine technique de négociation avec les syndicats pour les convaincre de l'importance de cela. Cela exigerait aussi le besoin de négocier les descriptions de tâches et les descriptions du nombre de postes disponibles.

Je pense que, si certaines commissions scolaires étaient plus intéressées à accepter et mettre en application ce bon principe de décentralisation, assumant leurs responsabilités en ce qui concerne ce

programme, par exemple, elles pourraient peut-être avoir plus de pouvoirs qu'elles n'en ont actuellement. Je sais qu'au mois d'octobre dernier, si je me souviens bien, le ministère de l'Éducation a pris l'initiative de former un comité ministériel MEC-MAS, qui fonctionne très bien, et je pense que c'est le genre d'exemple pour l'avenir, où on peut faire mieux avec moins. (17 h 45)

Tout en étant solidaire de mes collègues, je pense que les critères d'évaluation des programmes et des services ne devraient pas être faits en fonction des sommes d'argent dépensées pour les programmes, mais plutôt en termes de rendement des services que nous retirons de nos programmes. On peut faire mieux avec moins. En terminant mes remarques, je parlerai particulièrement de la situation qui prévaut à l'heure actuelle sur l'île de Montréal justement au sujet de ce principe de décentralisation. Je m'adresserai brièvement... Est-ce que j'ai quelques minutes, M. le Président?

Le Président (M. Rodrigue): II vous reste effectivement douze minutes.

M. Payne: Je ne prendrai pas ces douze minutes, mais je tiens à parler du principe de décentralisation. La députée de Jacques-Cartier ne semble pas porter beaucoup d'intérêt aux réformes proposées par le gouvernement. Dans ses grandes lignes, la réforme proposée semble vouloir apporter un certain élément décentralisateur. La députée de Jacques-Cartier est bien au courant de la situation du fait que nous avons à peu près 250 commissions scolaires, les commissions scolaires régionales, les commissions scolaires élémentaires et secondaires; nous avons une gamme de services administratifs.

Au niveau des commissions scolaires, beaucoup de services sont déjà très décentralisés, mais si le Parti libéral du Québec veut être conséquent avec ses idées, pourquoi ses membres sont-ils prêts à faire une campagne de peur, particulièrement dans le milieu anglophone de Montréal, en lui disant que les anglophones de Montréal vont perdre le pouvoir qu'ils ont à l'heure actuelle? Pourquoi veulent-ils tellement y mener une campagne de propagande féroce, une campagne défensive, une campagne de peur pour empêcher justement que le comité des parents et les écoles deviennent peut-être une corporation publique dans le sens de la loi? Pourquoi sont-ils tellement contre l'idée que l'école publique devienne quelque chose de plus important que ce qu'elle est à l'heure actuelle?

Est-ce que la députée de Jacques-Cartier et ses collègues de l'Assemblée nationale ont tellement peur de la réforme qu'ils sont prêts à enlever aux parents les pouvoirs qu'ils ont à l'heure actuelle? Sont-ils prêts à discuter avec le gouvernement d'un projet de réforme qui aurait pour effet et comme conséquence de donner plus de pouvoirs aux parents? Je ne suis pas sûr que les parents soient vraiment incapables de s'intéresser à un projet de réforme scolaire et, par conséquent, d'accepter par la suite les responsabilités qui accompagnent une telle réforme. Je donne, à titre d'exemple, quelque chose qui a été souligné en Chambre il y a à peine quelques semaines par la députée de Jacques-Cartier. Elle s'inquiétait du problème du transport, si jamais il y a avait une réforme, qui aurait comme effet d'uniformiser certains services. À l'heure actuelle, pour le transport scolaire, cela coûte - je donne un chiffre rond - à peu près 2 000 000 $ par année. Avec une réforme scolaire, selon laquelle le milieu anglophone serait regroupé, il serait possible d'économiser davantage. Si on avait moins de commissions scolaires, 100 ou 150 au lieu de 250, je ne sais trop, cela pourrait beaucoup aider en termes de services, cela pourrait aider au rendement du produit.

Si nous avons une diversification de notre produit éducatif, si je peux l'appeler ainsi, si on peut avoir une école qui ne soit pas nécessairement la même exactement, en termes d'application du régime pédagogique, dans une école anglophone sur la Basse-Côte-Nord que dans une école francophone de l'Est de Montréal, peut-être qu'on pourrait économiser de l'argent. Cela pourrait peut-être favoriser davantage et le milieu anglophone de la Basse-Côte-Nord, d'une part et, d'autre part, l'école francophone de l'Est de la ville de Montréal, qui peuvent faire des économies assez intéressantes avec une réforme. À l'heure actuelle - il faut que je fasse attention devant les fonctionnaires -nous avons 29,000 fonctionnaires au Québec qui travaillent dans le milieu. Je n'ose pas dire que c'est trop, mais en réalité, peut-être qu'on pourrait faire mieux avec moins.

Le principe de décentralisation souvent évoqué par le gouvernement actuel peut donc produire des conséquences intéressantes au niveau du budget pour le gouvernement du Québec. Et si nous sommes tentés d'invoquer le fait que le Québec a consacré 7,5% de son produit intérieur brut à l'enseignement en 1979 comparativement à 5,6% en Ontario. C'est que les membres de l'Opposition semblaient obsédés par les comparaisons avec d'autres provinces, alors que nous, au Québec, nous offrons beaucoup moins pour les sommes que nous consacrons à l'éducation.

Je laisse mes remarques préliminaires. J'aimerais revenir plus tard, au cours de l'étude des crédits, pour obtenir plus de détails, particulièrement en ce qui concerne les cégeps et les universités. Merci.

Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre.

Réponse du ministre

M. Laurin: M. le Président, je voudrais d'abord remercier mes collègues de la commission pour s'être exprimés à ce stade-ci de nos travaux sur les orientations générales, malgré que j'aie beaucoup mieux apprécié les commentaires éminemment positifs de mes collègues ministériels que les tableaux exagérément pessimistes et catastrophiques qu'ont voulu dresser les membres de l'Opposition. Je remarque que le critique officiel de l'éducation s'est exprimé cette année beaucoup plus longuement que l'an dernier.

M. Lalonde: C'est le mauvais exemple que j'ai suivi.

M. Laurin: II a même parlé vingt minutes de plus que le ministre, ce qui est un véritable exploit, si j'en crois les commentaires que me faisait l'an dernier le député de Marguerite-Bourgeoys. On peut même parler de sa part de discours fleuve, un discours fleuve qui a voulu reprendre chacun des volets ou éléments des crédits du ministère de l'Éducation. Je le remercie de cet effort, ainsi que tous les autres membres de la commission.

Je remarque cependant qu'il s'est plutôt fait l'avocat du diable, puisqu'il n'a rien trouvé de positif à dire sur les crédits qui font actuellement l'objet de notre discussion. Il s'est lancé dans une attaque à fond de train, tous azimuts, ne cherchant guère ses cibles, frappant sur tout ce qui bougeait. Je trouve cette attaque assez injuste étant donné que, dans mon discours d'ouverture, je n'ai sûrement pas tenté, ainsi qu'on m'en accuse, de prouver que le ministre et le ministère n'avaient fait aucune erreur au cours de l'année. Je n'ai pas non plus passé sous silence ni minimisé les difficultés considérables au milieu desquelles nous avons à mener notre action. Au contraire, j'ai décrit à grands traits les difficultés aussi bien économiques que sociales et politiques qui constituent autant de contraintes à notre action.

Cependant, j'ai tenté, dans une optique réaliste, de montrer à quel point le ministère de l'Éducation a été - j'inclus ici non seulement le ministère lui-même, mais tout le réseau, les divers secteurs - un véritable chantier et a tenté, avec des ressources moindres, de s'attaquer à tous les problèmes qui avaient été identifiés au cours des récentes années afin d'y apporter des solutions marquées au coin de la saine pédagogie, de la qualité et également de l'essentiel, comme je le disais. Je trouve donc cette attaque éminemment injuste, non seulement pour tous les fonctionnaires du ministère, mais pour tous les 29 000 permanents dont on vient de parler et qui se sont dévoués d'une façon extraordinaire pour l'amélioration de notre système d'éducation.

À vouloir trop exagérer, comme l'a fait le député de Marguerite-Bourgeoys, je pense qu'on nuit à la cause que l'on veut défendre. Le discours du député de Marguerite-Bourgeoys ne constituait peut-être pas une fuite dans l'imaginaire, mais il constituait, à coup sûr, une déformation de la réalité existante en même temps qu'une exagération au chapitre du catastrophisme et du pessimisme; en ce sens, je pense qu'il nous faut le taxer d'irréalisme et le rejeter en grande partie.

Dans son discours, d'une façon générale, le député de Marguerite-Bourgeoys, comme je le disais au début, a voulu se reprendre sur la critique qu'il faisait l'an dernier. J'ai même eu l'impression, à certains moments, qu'il faisait la critique des crédits de 1981-1982 et même de 1980-1981 plutôt que la critique des crédits de 1982-1983. À l'appui de cette thèse, je remarque que la plupart des citations dont il a assaisonné son discours avaient paru il y a deux ans, parfois il y a trois ans et parfois il y a quatre ans dans les divers journaux du Québec. On peut donc dire qu'il y avait là du réchauffé en grande partie, un réchauffé qui avait grandement perdu de son actualité puisque, dans beaucoup de cas, en tout cas, les situations qu'il dénonçait par personne interposée ont été corrigées. Dans les quelques citations qui s'appliqueraient davantage à la réalité présente, je pense qu'on peut remarquer, là aussi, des exagérations et des déformations sur lesquelles j'aurai d'ailleurs l'occasion de revenir.

M. le Président, étant donné qu'il est 17 h 58, je vous demanderais la permission de m'interrompre temporairement et de reprendre la parole lorsque la commission reprendra sa séance.

M. Lalonde: Je suis entièrement d'accord, M. le Président. Maintenant, est-ce que je peux profiter de ces deux minutes pour discuter de l'organisation des travaux, à savoir quels programmes nous allons aborder? J'avais discuté, comme je le disais ce matin, avec le chef de cabinet et j'avais demandé si c'était possible, tout d'abord, d'aborder les programmes 1 et 2. On en a discuté un peu ce midi. Autrefois, on faisait cela à la fin, mais je pense que, pour les grandes politiques, la gestion des ressources, c'est bon d'aborder cela au début. Ensuite, compte tenu de la disponibilité de nos différents porte-parole, on pourra y aller en tentant de couvrir tout le terrain, par exemple, si c'est possible.

M. Paquette: M. le Président, si l'Opposition préfère commencer par les programmes 1 et 2 plutôt que les autres, on n'a absolument aucune objection. La seule chose, c'est qu'on aimerait bien, autant que possible, que tous les programmes soient couverts. Dans ce sens-là, il serait peut-être intéressant qu'on s'entende sur une répartition approximative - il ne s'agit pas d'être rigide de façon excessive - pour être sûr de toucher les différents programmes: l'enseignement élémentaire et secondaire, l'enseignement aux adultes, l'Office de la langue française aussi. (18 heures)

M. Lalonde: Voici ce que j'avais suggéré à M. Leclerc. Je croyais que les discours d'introduction seraient terminés ce midi, à 13 heures. Enfin, cela a été un peu plus long et ils ont été plus nombreux que prévu.

Je croyais que, cet après-midi, nous pourrions étudier les programmes 1 et 2 - on ne les a pas encore abordés - et que, ce soir, on aurait les programmes 3 et 5, mais je pense qu'on va essayer de couvrir les programmes 1 et 2 ce soir. Demain matin, si cela vous va, on pourrait faire les programmes 3 et 5, quoique, si vous préférez commencer tout de suite le programme 4 avant les programmes 3 et 5, je n'ai pas d'objection, c'est très vaste. Étant donné qu'on a deux heures et demie demain matin, sans interruption et sans accident de parcours de l'Assemblée nationale, on sera sûr au moins de pouvoir travailler deux heures et demie là-dessus.

Le Président (M. Rodrigue): Est-ce qu'il y a accord pour que nous abordions d'abord l'étude des programmes 1 et 2 ce soir, puis le 4 demain matin?

M. Lalonde: Pour continuer à...

M. Paquette: Peut-être aurons-nous le temps d'aborder aussi le programme 3 ce soir, si c'est possible, sinon...

Le Président (M. Rodrigue): On verra.

M. Lalonde: Notre porte-parole n'est pas ici, il est malade, il a été obligé de subir un examen ce matin. Il est peut-être arrivé à Québec, je vais vérifier. Après ça, on pourrait faire les programmes 3 et 5, et 7 et 8. J'aimerais lancer tout de suite un appel. On a convenu d'un certain nombre d'heures et on a tassé ces heures pour terminer le tout jeudi midi, mais il ne semble pas qu'on puisse couvrir ce nombre d'heures. Je vais en parler au leader de l'Opposition, qui pourra discuter avec votre leader. Je ne voudrais pas qu'on escamote un seul des programmes. Malheureusement, on arrive toujours à la fin avec la langue française et il nous reste 30 ou 45 minutes pour ce sujet, beaucoup trop important pour le traiter de cette façon-là. J'invite le ministre à accepter d'avance cette indulgence sur l'étendue qu'on pourrait demander.

M. Laurin; Vous savez que j'aime parler.

Le Président (M. Rodrigue): La commission élue permanente de l'éducation suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 02)

(Reprise de la séance à 20 h 08)

Le Président (M. Rodrigue): La commission élue permanente de l'éducation reprend ses travaux. Son mandat est d'étudier les crédits du ministère de l'Éducation pour l'année 1982-1983.

Les membres de cette commission sont: MM. Brouillet (Chauveau), Champagne (Mille-Îles), Chevrette (Joliette) remplacé par Payne (Vachon), Cusano (Viau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Hains (Saint-Henri), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Laurin (Bourget), Leduc (Fabre), Paquette (Rosemont).

Les intervenants à cette commission sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), French (Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), MM. Paré (Shefford), Polak (Sainte-Anne) remplacé par Dauphin (Marquette), Proulx (Saint-Jean), Rochefort (Gouin), Ryan (Argenteuil), Saintonge (Laprairie).

Nous en étions à la réplique du ministre sur les remarques préliminaires.

M. le ministre.

M. Laurin: Dans sa réponse à mon intervention le député de Marguerite-Bourgeoys nous accuse en quelque sorte d'avoir comprimé dans tous les programmes, d'avoir comprimé inconsidérément, d'avoir comprimé sans réflexion suffisante. Il nous accuse, par exemple, d'avoir coupé dans presque tous les services, comme les services en milieux économiquement faibles, les services aux élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage, d'avoir coupé dans le soutien pédagogique d'une façon marquée. Au collégial, il nous accuse également d'avoir coupé dans les mesures de soutien pédagogique, dans les bibliothèques, également d'ailleurs aux niveaux primaire et secondaire, d'avoir trop coupé dans les bibliothèques, d'avoir coupé dans la recherche, d'avoir coupé dans l'éducation des adultes, d'avoir coupé dans les universités ou d'avoir comprimé, ce qui revient au même. Il mentionne des sommes astronomiques: 100 000 000 $, 80 000 000 $,

140 000 000 $, un peu comme s'il nous reprochait au fond d'avoir dû procéder à ces compressions et à ces coupures.

Si l'on fait la somme de toutes ces compressions ou coupures qu'il nous reproche d'avoir effectuées en laissant entendre que le gouvernement libéral ne les aurait pas effectuées, nous en arrivons à une somme assez astronomique qui dépasse les 500 000 000 $ ou 600 000 000 $ et peut-être même davantage.

En somme, cela veut dire, si je l'entends bien, qu'un gouvernement libéral aurait coupé ailleurs, comme il l'a dit à la fin de son exposé, qu'il aurait sacrifié d'autres missions gouvernementales, probablement la mission économique ou la mission sociale, et que la mission éducative aurait non seulement été maintenue, mais se serait considérablement développée. À l'entendre, j'ai vraiment l'impression que le député de Marguerite-Bourgeoys habite une autre planète, pour ne pas dire un autre pays, ou encore qu'il se croit il y a quinze ans passés où nous connaissions ce que l'économiste Galbraith a appelé "l'affluent society", où les revenus montaient en flèche et où les gouvernements pouvaient se permettre, bon an, mal an, d'augmenter les crédits gouvernementaux de 18%, 19% ou 20%.

On dirait donc que le député de Marguerite-Bourgeoys n'a pas lu les journaux depuis une quinzaine d'années et qu'il ne se rend pas compte que nous vivons dans une société qui est frappée, au moins depuis une dizaine d'années, par une crise qui a diminué considérablement les revenus des gouvernements en même temps que l'inflation frappait à nos portes et que nous connaissions même une inflation galopante. De là à venir dire maintenant que son gouvernement n'aurait procédé à aucune de ces coupures, qu'il aurait sacrifié ailleurs, qu'il aurait dépensé pour la mission éducative 500 000 000 $ de plus, cela m'apparaît ou irréaliste, ou complètement irresponsable, ou plutôt entièrement démagogique. Je remarque d'ailleurs que le député de Marguerite-Bourgeoys n'est pas suivi dans ce raisonnement par son chef qui a dit encore récemment que, si le Parti libéral avait été élu ou était élu dans un proche avenir, il continuerait d'effectuer des compressions et des coupures qui sont absolument indispensables ou inévitables, plutôt.

On a aussi la désagréable impression, quand on entend pareil discours, que la seule façon d'améliorer la mission éducative, c'est d'y ajouter plus d'argent et toujours plus d'argent. L'augmentation des crédits paraît alors comme une sorte de solution magique qui devrait régler tous les problèmes, alors que le gouvernement, d'une façon beaucoup plus responsable et réaliste, tenant compte de la situation créée par la conjoncture, essaie d'appliquer des solutions qui sont marquées au coin du réalisme économique tout en tentant d'explorer de nouvelles voies qui sauront sauvegarder l'essentiel, c'est-à-dire la qualité des divers enseignements en sacrifiant ou en rognant davantage sur ce qui paraît moins essentiel ou plus accessoire.

Je fais d'ailleurs remarquer, comme mes collègues l'ont fait avant moi, que, malgré une décroissance de clientèle de près de 6% au cours des quatre dernières années, le montant global alloué par le gouvernement à la mission éducative n'a pas varié depuis cinq ou six ans. Cette proportion du budget est toujours de 28% ou à peu près, malgré encore une fois cette décroissance de clientèle et malgré les difficultés que nous connaissons. (20 h 15)

Ce qu'il serait plus juste de dire, c'est que le budget de tout le gouvernement ou de toutes les missions n'a pu augmenter aussi rapidement qu'il le faisait auparavant et les causes de ce phénomène sont bien connues. D'une part, il y a cette récession mondiale à laquelle je viens de faire allusion, la crise du pétrole, la crise de l'inflation avec toutes ses conséquences et, depuis deux ans à peu près, les facteurs additionnels qui nous ont singulièrement compliqué l'existence comme, par exemple, cette augmentation rapide des taux d'intérêt, particulièrement aux États-Unis, et qui ont entraîné au Canada, évidemment, puisque le Canada est un satellite des États-Unis, une augmentation encore plus rapide et plus importante des taux d'intérêt qu'aux États-Unis.

On sait que cette augmentation de près de 10% des taux d'intérêt en moins de deux ans complique non seulement la vie des individus et des familles, mais également des gouvernements, qui sont obligés d'hypothéquer l'avenir, c'est-à-dire d'emprunter pour doter les générations futures de services dont elles ont besoin. On peut parler aussi d'une inflation qui, malgré une politique restrictive marquée par l'augmentation des taux d'intérêt, n'a quand même pas pu être contrôlée par les autorités fédérales, une inflation qui augmente considérablement tous les prix, biens et services que les gouvernements dispensent et que le ministère de l'Éducation, particulièrement, dispense à ses réseaux.

Quand on ajoute à cela la réduction considérable des taux de transfert venant d'Ottawa, il n'est pas étonnant de constater que nous ayons un manque à gagner, un manque à pourvoir que tout gouvernement responsable se doit de reconnaître et auquel il se doit aussi d'apporter des solutions, encore une fois, qui sont adaptées à la réalité, tout en tentant de minimiser, dans toute la mesure du possible, les conséquences difficiles qui peuvent s'ensuivre pour le maintien ou le développement des réseaux.

Mais ce raisonnement semble inconnu au député de Marguerite-Bourgeoys et il continue de réclamer une augmentation des dépenses dans tous les secteurs. Encore une fois, c'est une attitude qui m'apparaît très peu responsable et qui m'apparaît confinée à ce que mon collègue de Rosemont appelait tout à l'heure une sorte de délire partisan on ne peut plus irréel.

Le député de Marguerite-Bourgeoys nous accuse aussi d'avoir augmenté, accru, accentué le degré de centralisation, particulièrement dans la mission éducative. Peut-être pensait-il à l'adoption de la loi 57 qui a enlevé aux commissions scolaires une partie de leur pouvoir fiscal. Mais je rappellerai alors au député de Marguerite-Bourgeoys que ce mouvement a été commencé bien avant que le Parti québécois arrive au pouvoir. Je me rappelle, en particulier, lorsque j'étais chef parlementaire du Parti québécois, avoir entendu à plusieurs reprises le ministre des Finances d'alors, M. Garneau, qui disait qu'il convenait de diminuer l'apport de l'impôt foncier attribuable aux commissions scolaires pour le transférer aux municipalités. Et il a commencé, pendant qu'il était ministre des Finances, à effectuer ce transfert et nous n'avons fait, au fond, qu'aller jusqu'au bout de la logique qu'il avait lui-même énoncée à cette époque en transférant 94% des impôts fonciers aux municipalités.

Ceci ne veut pas dire, M. le Président, que le gouvernement a centralisé davantage ses services, en particulier en ce qui concerne les commissions scolaires. 11 fallait peut-être, bien sûr, à l'occasion de cette découverte, qui a été faite il y a quelques années, des dettes qu'avaient effectuées les commissions scolaires sans la connaissance du gouvernement aménager certains contrôles. Ceci peut expliquer, évidemment, certaines des mesures que le gouvernement a dû prendre, mais je rappellerai là encore au député de Marguerite-Bourgeoys que ces trous, que ces lacunes, que ces dettes considérables ont été contractées, pour près de 250 000 000 $, la première fois que le gouvernement en a pris connaissance, pendant l'administration libérale. Nous sommes arrivés, en 1977, avec cette désagréable découverte qu'il nous fallait assumer ces dettes qui avaient été effectuées par les commissions scolaires justement parce que le gouvernement d'alors n'avait pas mis en place des contrôles de dépenses propres à lui éviter pareille déconvenue.

Cette première tentative de contrôle s'est avérée insuffisante puisque par la suite, et précisément à l'occasion des études qui ont été rendues nécessaires par l'adoption de la loi no 57, nous nous sommes rendu compte que les commissions scolaires s'étaient endettées d'une façon encore plus considérable que nous ne le pensions, en raison justement des méthodes qui avaient cours à cette époque quant au contrôle des dépenses. Ce sont des sommes considérables dont il s'agissait, près de 300 000 000 $, et il a fallu mettre en place des contrôles plus rigoureux.

La mise en place de contrôles par un gouvernement n'implique pas que le gouvernement centralise tous les services. Au contraire, parallèlement à cette mise en place de contrôles, le gouvernement a procédé graduellement à une décentralisation progressive auprès des commissions scolaires. Si le député de Marguerite-Bourgeoys était véritablement au courant de la façon dont le secteur primaire et secondaire gère actuellement son secteur, il verrait que le reproche qu'il nous fait de centraliser davantage est absolument injustifié et non fondé. Sur cette question, il faudrait rappeler, par exemple, que les fondements de la nouvelle méthode d'allocation des ressources sont les suivants. D'abord, nous distribuons aux commissions scolaires une allocation globale a priori en fonction de paramètres propres à chaque commission scolaire. Nous laissons à chaque commission scolaire la possibilité d'utiliser des surplus et des déficits. Nous avons diminué considérablement les contrôles a priori au profit de contrôles a posteriori, moins nombreux et plus appropriés, nous conformant en cela aux méthodes les plus modernes de gestion.

Nous avons réussi aussi à simplifier d'une façon considérable le processus administratif. Avant d'imposer des règles budgétaires, nous consultons systé- matiquement les administrations locales et régionales; ceci est vrai pour les commissions scolaires, mais ceci est vrai également pour les collèges. Nous approuvons le budget avant même le début de l'exercice financier, ce qui permet aux commissions scolaires de planifier d'une façon beaucoup plus adéquate et cohérente leurs activités pour l'année en cours. Enfin, nous n'allouons les allocations supplémentaires qu'après avoir connu la clientèle scolaire de la commission, ce qui permet encore une fois à la commission scolaire de mieux planifier ses activités et aussi, incidemment - nous le voyons cette année - de diminuer le nombre de ses mises en disponibilité.

Donc, de ce bref résumé, je pense qu'il faut conclure que le gouvernement, loin d'avoir centralisé l'administration des commissions scolaires, l'a au contraire décentralisée. D'ailleurs, ceci est parfaitement conforme à ce que je disais sur les compressions et les coupures que nous avons dû effectuer parce que, précisément, cette décentralisation constitue un des moyens grâce auxquels nous avons pu parer en très grande partie à l'effet malencontreux de ces compressions ou de ces coupures

inévitables.

Nous ne croyons pas ici, en tout cas, de ce côté de la table, que la solution au problème de l'enseignement, que nous n'avons pas nié, passe nécessairement par un accroissement des crédits. Bien sûr, il en faut - encore une fois, la mission gouvernementale, la mission éducative se maintient à 28% - mais nous croyons aussi et peut-être même davantage à d'autres moyens pour augmenter la qualité et même la quantité des services. Nous croyons, par exemple, à cette consultation dont je viens de donner un exemple; nous croyons à la participation des milieux locaux et régionaux; nous croyons enfin à la concertation, c'est-à-dire à une recherche en commun des meilleurs moyens, y compris les moyens financiers, pour atteindre des objectifs que nous avons établis en commun.

Nous croyons aussi qu'après avoir mis en place durant un certain nombre d'années des services, il importe de les évaluer en vue d'en rationaliser, d'en aménager le mieux possible le rendement. Nous en avons donné plusieurs exemples au cours de l'année, particulièrement dans mon exposé d'ouverture, et je pense que ces divers moyens, participation, consultation, concertation, rationalisation, se sont avérés très efficaces et continueront de s'avérer très efficaces dans les années qui viennent.

Je n'ai pas mentionné un autre moyen sur lequel nous reviendrons probablement, c'est l'augmentation de la productivité, une augmentation de la productivité qui peut certes se calculer en ratio professeur-élèves, qui peut certes se calculer en charge de travail, en tâches, mais aussi qui peut s'évaluer, cette fois sur le plan qualitatif, par la mise en place de meilleurs mécanismes d'information, de consultation réciproque et de recherche en commun de moyens aptes à nous faire atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés.

Je rejette donc, comme absolument injuste et injustifié, le reproche de centralisation qu'on tente de nous faire. Bien loin de là, nous avons pris l'habitude de tenter par tous les moyens de débureaucratiser, de détechnocratiser, de déréglementer et, même s'il y a encore beaucoup d'efforts à faire dans cette direction, c'est bien celle que nous avons prise et que nous entendons continuer de prendre dans les années qui viennent.

Le député de Marguerite-Bourgeoys nous fait aussi reproche d'avoir négligé le problème de l'accessibilité et, encore une fois, à tous les niveaux. Qu'il s'agisse du préscolaire, du primaire-secondaire, du collégial, de l'université, de l'éducation des adultes et même de l'enseignement privé, là aussi, je pense que cette affirmation gratuite provient d'un manque d'information ou d'un manque de suivi dans les activités du ministère. D'ailleurs, les résultats sont là pour le prouver. J'y ai fait allusion dans mon exposé d'ouverture, mais, toutes les statistiques le prouvent, nous sommes en train de rattraper le retard qui avait nécessité la révolution tranquille en matière éducative et nous sommes en train de le rattraper rapidement, beaucoup plus rapidement qu'aucune autre société, grâce à l'effort financier considérable que notre collectivité s'est imposé et qu'elle continue de s'imposer depuis quinze ans.

Par exemple, on peut dire que près de 100% de notre population est maintenant scolarisée au préscolaire et au primaire. Nous pouvons dire que 63 étudiants sur 100 possèdent leur diplôme du secondaire, contrairement aux chiffres du député de Marguerite-Bourgeoys. Nous pouvons dire que, sur ces 63 étudiants qui ont leur diplôme du secondaire, 45 sont maintenant inscrits au cégep, ce qui est une augmentation considérable par rapport aux années précédentes. Si on ajoute à ces 45 ceux qui vont chercher un diplôme à l'éducation des adultes, nous atteignons le chiffre de 53.

Au niveau de l'enseignement universitaire, nous avons presque complètement rattrapé notre retard au niveau des études de premier cycle. Le Québec donne même maintenant plus de certificats de premier cycle que n'en donne l'Ontario. Évidemment, nous avons encore un retard à rattraper au niveau des maîtrises, au niveau des doctorats, c'est-à-dire au niveau des études de deuxième cycle, mais cet écart ne cesse de s'amenuiser, de se tasser au cours des années que nous venons de vivre et nous avons bon espoir qu'il continuera d'en être ainsi, malgré les compressions que la conjoncture nous impose. Car, cela est vrai autant au niveau du primaire, du secondaire, du collégial et de l'université, nous avons tenté de limiter les compressions ou les coupures dans des secteurs qui pouvaient laisser intact notre objectif d'accessibilité et qui pouvaient nous permettre de continuer à y travailler. (20 h 30)

Quant à l'enseignement privé, je pense que, là non plus, nous n'avons pas tenté de limiter l'accessibilité, puisque, cette année encore, nous constatons une augmentation de près de 2000 élèves au niveau de l'enseignement privé. J'ai cru comprendre que le député de Marguerite-Bourgeoys se plaignait plutôt en disant que nous avions découragé la croissance du secteur privé. Il a même parlé de suppression lente. Je lui rappellerai pourtant que c'est son prédécesseur, c'est-à-dire le gouvernement libéral, qui, le premier, a limité la croissance de l'enseignement privé. Le moratoire dont nos collègues libéraux se plaignent souvent a été institué par le ministre Cloutier, à l'époque. Nous n'avons

fait que continuer dans la direction qu'il a prise à cette époque. Il reste quand même que le ministre de l'époque, particulièrement au niveau de l'enseignement primaire, se refusait à accorder tout permis nouveau à l'enseignement privé.

Tout ceci pour vous démontrer que les affirmations du député de Marguerite-Bourgeoys sont le plus souvent gratuites ou manquent de nuance ou sont trop globales. Mais il y a probablement quelque chose de plus grave et peut-être que le député de Marguerite-Bourgeoys regrettera son discours-fleuve car, dans ce discours, non seulement a-t-il exagéré, non seulement a-t-il déformé, mais il a aussi dit des faussetés, des faussetés que je ne peux toutes relever tellement elles sont nombreuses, mais je veux quand même en relever quelques-unes. D'ailleurs, le fait de les relever pourra peut-être écourter nos débats lorsque nous arriverons à l'étude de chacun des réseaux puisque j'imagine que le député de Marguerite-Bourgeoys ne voudra pas y revenir. Par exemple, le député de Marguerite-Bourgeoys dit qu'il y a 76% des élèves du secteur public au primaire et qu'il y en a 280 000 au secondaire. Je ne sais pas où il a pris ses chiffres parce qu'ils ne correspondent pas du tout à ceux...

M. Lalonde: En 1960.

M. Laurin: ... que nous avons puisque maintenant, et le tableau 18 le montre bien, il y a 566 000 élèves au secteur public et il y en a 429 000 au secteur secondaire.

M. Lalonde: C'est en 1960, ce que je disais.

M. Laurin: Mais le député de Marguerite-Bourgeoys n'avait pas spécifié, quand il avait fait sa déclaration, qu'il s'agissait des chiffres de la révolution tranquille.

M. Lalonde: Bien oui.

M. Laurin: Non, je ne l'ai pas relogé dans son texte ou peut-être encore une fois le député de Marguerite-Bourgeoys se prélasse-t-il dans les nostalgies de la révolution tranquille.

M. Lalonde: Vous êtes contre ça, la révolution tranquille?

M. Laurin: Au contraire, mais le mouvement de la vie nous a déjà entraînés beaucoup plus loin.

M. Lalonde: II ne faut pas trahir ce qu'on a adoré.

M. Laurin: La commission Parent, puisque nous sommes toujours dans la révolution tranquille, a certes défini, comme le rappelait le député de Marguerite-Bourgeoys, trois objectifs d'un système éducationnel nouveau. Le premier était de donner à tous la possibilité de s'instruire, et là je lui rappelle que maintenant nous avons un taux d'accessibilité de 100% au primaire, une entrée de 100% au secondaire et 63% de diplomation au secondaire. Je lui rappelle aussi que le nombre de décrocheurs, sur lequel il a tellement insisté, est à la baisse à chaque année puisque justement 63%, effectivement, des étudiants décrochent maintenant leur diplôme secondaire. Le deuxième objectif, c'était fournir à chacun le genre d'éducation le mieux approprié à ses aptitudes et à ses intérêts. Je pense qu'on peut rapporter progrès là aussi d'une façon considérable puisque non seulement avons-nous scolarisé toute la population au niveau primaire et au niveau secondaire, à l'inscription et presque à la diplomation, mais en plus nous avons fait des efforts spéciaux pour les clientèles démunies ou qui avaient des problèmes particuliers.

Je pense, par exemple, aux efforts extraordinaires que nous faisons pour l'enfance en difficulté d'adaptation et d'apprentissage. Maintenant, nous intégrons la plus grande quantité des déficients légers dans des classes régulières et, dans ces classes régulières, près de 44% des étudiants peuvent bénéficier d'un soutien pédagogique tout en demeurant intégrés à leurs classes régulières. Pour les déficients plus profonds ou qui ont des handicaps plus spécifiques, bien, nous avons établi des programmes spéciaux, nous avons organisé des services spéciaux qui sont répartis dans tout le territoire, pour lesquels nous fournissons un effort qualitatif et quantitatif magnifique et considérable. Nous avons contribué, par exemple, malgré les contraintes budgétaires, des sommes considérables à ces classes spéciales d'enfants autistiques ou d'enfants sourds ou d'enfants souffrant de déficience visuelle, et nous nous préparons à établir d'une façon définitive près d'une vingtaine de programmes et de nouveaux services pour le bénéfice de ces clientèles.

Bien sûr, pour les milieux économiquement faibles, les compressions nous ont empêchés de faire autant que nous l'aurions voulu, mais nous n'avons pas sacrifié du moins l'accessibilité. Nous avons maintenu les maternelles en milieux économiquement faibles. Nous pratiquons l'enseignement à distance. Comme le député le sait, la série Passe-Partout, les 125 émissions de Passe-Partout constituent une réussite extraordinaire. Nous avons ainsi atteint des milliers et des milliers d'enfants de milieux économiquement faibles et même des parents de milieux économiquement faibles. Grâce aux subventions que nous

donnons aux animateurs qui travaillent avec ces parents et avec ces enfants, nous avons pu multiplier, démultiplier l'effet bénéfique de ces maternelles et de ces séries télévisées. Donc, nous nous occupons également du genre d'éducation le mieux approprié aux aptitudes et aux intérêts des clientèles spéciales.

Le troisième but était la préparation de l'individu à la vie en société. Je pense que nous tentons de plus en plus d'intégrer l'enseignement à la vie des milieux. Nous tentons de rendre cet enseignement toujours plus concret. Nous avons révisé tous les programmes du primaire et du secondaire et, d'ailleurs, je suis prêt à distribuer à l'Opposition tous les programmes que nous avons révisés et élaborés au cours de l'année dernière et de l'année qui précède. Je peux annoncer aussi au député de Marguerite-Bourgeoys qu'à la fin de cette année, 1982-1983, nous aurons terminé la révision de tous les programmes du primaire et du secondaire avec également la préparation des guides pédagogiques appropriés.

Quand je disais tout à l'heure que le député de Marguerite-Bourgeoys est très injuste pour les milliers de fonctionnaires qui ont oeuvré sur ces programmes au ministère et pour les milliers d'enseignants et de professionnels non enseignants qui ont aidé les fonctionnaires du ministère à préparer ces programmes, c'est en grande partie à cet aspect de notre travail que je faisais allusion car il s'agit d'un chantier qui a été on ne peut plus actif au cours de l'année qui vient de s'écouler et qui le sera encore au cours de l'année prochaine. S'il y a une démarche qualitative, c'est bien celle-là. Elle vise, en tout cas, à préparer toujours plus adéquatement l'étudiant à la vie en société telle qu'elle est faite actuellement. Si on en croit les analyses et les évaluations qui ont été faites de ces nouveaux programmes, plus particulièrement celles qui sont faites par les enseignants, je pense qu'il faut conclure à leur grande qualité et à une amélioration considérable par rapport aux programmes dont nous disposions auparavant et, en particulier, les programmes cadres dont chacun a dénoncé le caractère trop flou et trop imprécis. Donc, une autre fausseté qui, encore une fois, constitue une grande injustice pour ceux qui sont à l'origine de cette amélioration.

Quand le député de Marguerite-Bourgeoys parle de l'abandon scolaire comme d'une catastrophe, de la qualité du français écrit qui ne cesse de se détériorer, je pense qu'il commet également une autre erreur ainsi qu'une autre injustice. J'ai parlé de l'abandon scolaire qui est en diminution. Même si nous continuons à le diminuer dans toute la mesure du possible - et nous ne serons satisfaits que lorsqu'il n'y aura plus d'abandon scolaire - il ne faut quand même pas minimiser les progrès que nous avons faits depuis quelque temps là-dessus. Quant à la qualité du français écrit, je viens de rappeler que tous les programmes de français ont été révisés à tous les niveaux. D'ailleurs, encore une fois, le député pourra se rendre compte par lui-même de la qualité de ce programme et les examens qui, après tout, constituent une façon de juger de la qualité d'un programme montrent déjà que le taux d'échecs ne cesse de diminuer en ce qui concerne les examens de français et que les copies sont de bien meilleure qualité depuis que les enseignants peuvent disposer de nouveaux programmes.

Je rappellerais aussi que, malgré les compressions et les coupures budgétaires que l'on nous reproche, nous avons consacré près de 45 000 000 $ à l'implantation des nouveaux régimes pédagogiques, régimes pédagogiques qui comprennent aussi, évidemment, l'implantation de ces nouveaux programmes qui ont été révisés dans une très grande proportion. Donc, un autre ballon se dégonfle, une autre fausseté à mettre au compte du député de Marguerite-Bourgeoys.

On pourrait relever bien d'autres faussetés, par exemple, lorsque le député dit qu'il faut se rendre à l'évidence que les gestes posés à l'endroit des commissions scolaires ces cinq dernières années nous fournissent la preuve qu'ils n'ont raté aucune occasion de brimer leur autonomie. Là aussi, c'est une autre fausseté et je crois l'avoir démontré en décrivant, non pas en détail mais en gros, les nouvelles attitudes ainsi que les nouvelles pratiques qui ont cours au ministère de l'Éducation en ce qui concerne les relations avec les commissions scolaires.

Donc, il est faux de dire que la tentation bureaucratique, comme le dit le député de Marguerite-Bourgeoys, gagne constamment en vivacité au sein de ce ministère et auprès du ministre en titre. C'est tout le contraire. Loin de nous diriger vers un centralisme croissant de l'État en matière scolaire, loin de nous diriger vers une école d'État ou un collège d'État, nous avons pris et prendrons encore une direction tout à fait opposée et le projet de réforme scolaire que nous espérons rendre public bientôt fera la preuve que, précisément, nous nous dirigeons dans une direction tout à fait opposée, qui fera de l'école le lieu majeur de dispensation de l'éducation, une école qui sera responsable en même temps qu'elle sera communautaire.

Le député de Marguerite-Bourgeoys a parlé de décroissance de la clientèle scolaire en disant assez curieusement que le ministère semble décidé à maintenir sa politique de décroissance de la clientèle scolaire. Je me demande où il a pris cette affirmation, puisque, au contraire - et je viens de le dire - notre objectif demeure toujours de maintenir l'accessibilité à tous

les niveaux d'enseignement et d'augmenter la clientèle scolaire par tous les moyens, aussi bien sur le plan qualitatif d'ailleurs que sur le plan quantitatif.

Nous reviendrons sur ce qu'il a dit à cet égard, en ce qui concerne l'accessibilité au collégial, mais lorsqu'il dit, en tout cas, que l'accessibilité réelle aux études collégiales est de l'ordre de 21%, je suis prêt à dire que nous avons encore des progrès à faire dans ce domaine. Mais, justement, nous nous en occupons et, très bientôt, comme je l'ai annoncé dans mon discours d'ouverture, nous annoncerons une réforme de l'enseignement professionnel. En mettant en place cette réforme, nous entendons bien faire diminuer cet écart de 21% entre l'accessibilité potentielle et l'accessibilité réelle aux études collégiales. (20 h 45)

J'en arrive maintenant aux universités. Je m'étonne que le député de Marguerite-Bourgeoys continue de colporter une affirmation que nous avons pourtant démentie un très grand nombre de fois, lorsqu'il dit, par exemple, que les universités ont porté 50% des compressions au ministère de l'Éducation, alors qu'elles ne comptent que pour 15% du budget global. Nous avons déjà, à quelques reprises, aussi bien dans les journaux qu'à l'Assemblée nationale, lors même de la discussion du budget supplémentaire, il y a quelques mois, démontré que le pourcentage de compressions qu'avaient dû subir les universités était de 28%, ce qui était trop élevé encore, à mon goût, 28% des compressions totales imposées à tous les secteurs, alors que le secteur de l'université représente 16% de la masse globale. Nous l'avons prouvé, mais on continue de colporter ce bobard. Probablement que le député de Marguerite-Bourgeoys ne vérifie pas régulièrement ses informations, car l'écart, même s'il est encore trop élevé à mon goût, entre 28% et 16%, n'atteint quand même pas un degré aussi considérable que celui que le député de Marguerite-Bourgeoys mentionne. Je dirais, d'ailleurs, la même chose de son affirmation au niveau des cégeps, quand il affirme qu'une règle budgétaire, lourde de conséquences pour l'avenir, stipule que les cégeps qui admettent plus d'étudiants que ce qui était prévu ne se voient accorder que 50% de la subvention que le gouvernement accorde pour chaque étudiant inscrit dans un collège. Cette affirmation est fausse, ou plutôt elle est partiellement fausse.

M. Lalonde: Ah! Elle est partiellement vraie.

M. Laurin: Oui, mais elle est...

M. Lalonde: Elle est vraie, en partie.

M. Laurin: Non. Elle est en grande partie fausse.

M. Lalonde: Ah bon!

M. Laurin: Je vais vous le prouver, car, s'il est vrai que le gouvernement accorde 50% au lieu de 100%, c'est pour les autres coûts, c'est-à-dire les coûts non reliés à l'enseignement, comme pour l'électricité, les professionnels non enseignants ou pour le soutien, alors qu'on sait que la masse la plus considérable, dans l'absolu, pour l'éducation provient évidemment des enseignants. C'est là qu'est le poste budgétaire le plus important. Donc, c'est une insinuation ou c'est une demi-vérité qui tend à masquer la vérité et à laisser une fausse impression à la population. C'est une erreur, peut-être involontaire, peut-être aussi délibérée...

M. Lalonde: Une demi-erreur.

M. Laurin: ... en vue de provoquer la confusion dans la population. Le député fait aussi état de rumeurs, à savoir que le gouvernement ou le ministère aurait changé d'attitude à l'égard du financement de ces clientèles additionnelles, mais nous n'avons eu, dit-il, jusqu'à maintenant aucune confirmation de cela. Si nous changeons les méthodes de financement au niveau des universités, nous l'annoncerons en temps opportun. Nous en avons parlé, nous avons parlé de nos hypothèses aux recteurs des universités...

M. Lalonde: Pour les collèges.

M. Laurin: Pour les collèges, il n'est pas question de changer d'une façon substantielle le mode de financement. Il est entendu que nous devons adapter l'enveloppe budgétaire des collèges à l'enveloppe générale qui nous est consentie par le Conseil du trésor et le gouvernement, mais nous n'entendons pas apporter des changements structuraux importants aux méthodes de financement des collèges. D'ailleurs, quand nous parlons de compressions budgétaires au niveau des collèges, malgré qu'elles soient plus considérables que ce que nous voudrions, là aussi, on peut dire que l'essentiel, c'est-à-dire l'accessibilité aux études et la qualité de l'enseignement telles que manifestées par les sommes budgétaires consenties aux enseignants, n'a pas été modifié ou l'a été très peu. C'est l'endroit où il y a quand même le moins de mises en disponibilité.

Quant aux universités, comme je viens de le dire, il est vrai que nous envisageons des changements aux méthodes de financement, à deux titres.

D'abord, nous entendons modifier le système de financement des clientèles

additionnelles.

Dans ce domaine, comme ça a été le cas dans le domaine des Affaires sociales il y a quelques années, nous financions les universités selon une méthode dite historique, et il est sûr que cette méthode historique privilégiait les universités traditionnelles, celles qui fonctionnaient depuis un certain nombre d'années. Elle favorisait ou privilégiait non seulement des universités plus solidement enracinées depuis quelque temps, mais dont la vocation était tournée vers certains secteurs; donc, elle pénalisait en conséquence les universités nouvelles, comme les constituantes de l'Université du Québec ou Concordia, qui s'étaient donné une vocation plus populiste, je dirais, axée sur les besoins des nouvelles clientèles d'adultes en recyclage ou en perfectionnement, et qui voulaient faire un effort pour démocratiser l'enseignement universitaire. Nous pensons que de toutes les discussions que nous avons eues sur le sujet peuvent naître des hypothèses nouvelles que nous avons discutées avec les recteurs, qui ont reçu un accueil favorable de leur part et que nous sommes en train maintenant de mettre au point et de discuter avec le Conseil du trésor.

Nous pensons aussi proposer de nouvelles hypothèses en ce qui concerne les bases mêmes du financement des universités. Par exemple, à cette méthode historique, nous pensons substituer un financement basé sur le coût moyen de l'enseignement universitaire par discipline, qui permettrait d'effectuer une comparaison plus exacte non plus entre les diverses universités, mais entre l'enseignement dispensé au niveau de chacune des disciplines. De cette façon je crois que nous aboutirions à une méthode de financement plus juste et plus équitable.

Voilà les deux hypothèses, en particulier, que nous considérons à l'heure actuelle, mais je ne suis pas encore en mesure d'annoncer une solution définitive à ce moment-ci. Si ces hypothèses étaient retenues, totalement ou partiellement, je pense que nous pourrions assainir la situation financière d'un certain nombre d'universités qui ont fait l'objet de discussions au cours des derniers mois. Nous pourrions aussi faciliter le maintien de l'équilibre budgétaire de certaines de ces universités. Nous pourrions maintenir et développer l'accessibilité en la partageant d'une façon plus équitable entre toutes les universités et nous pourrions continuer à travailler d'une façon plus efficace aux objectifs que nous nous sommes fixés.

Voilà donc un autre ballon lancé par le député de Marguerite-Bourgeoys qui se dégonfle, car nos efforts démontrent que nous avons pris très au sérieux les problèmes des universités, et que nous tentons de les régler d'une façon réaliste, efficace, dans le respect des objectifs d'accessibilité que nous nous sommes toujours fixés.

Il est vrai que les crédits ont diminué à l'éducation des adultes.

M. Lalonde: Ah! Un aveu!

M. Laurin: C'est vrai, mais encore une fois je pense que le discours du député de Marguerite-Bourgeoys content des demi-vérités, des erreurs flagrantes, des déformations ou des affirmations globales qu'il faudrait considérablement nuancer. Par exemple, dans son discours le député de Marguerite-Bourgeoys a déclaré que les coupures à l'éducation des adultes avaient amené une diminution de 66% des activités laissant entendre qu'il s'agissait là de 66% des activités, globales du secteur de l'éducation des adultes. Pourtant, si le député avait été mieux informé, il nous aurait dit que la diminution de 66% ne touche que les activités d'éducation populaire ou que les activités socioculturelles...

Une voix: C'est important.

M. Lalonde: Ce n'est pas certain.

M. Laurin: ... que les activités d'éducation populaire dans les commissions scolaires, que les activités d'éducation populaire que le MEQ a jugées non prioritaires dans le contexte économique actuel.

M. Lalonde: Le MEQ est important.

M. Laurin: Je vais vous donner un exemple de ces activités. Nous avons suspendu en 1980-1982 les cours d'éducation populaire suivants. Par exemple, dans le secteur alimentation, un cours sur les fondues, sur le crémage des gâteaux, sur le "brunch". Dans le secteur santé physique et mentale, nous avons suspendu les subventions, en 1981-1982, pour le judo, pour le karaté, pour le yoga, pour le taïki, etc. Dans le secteur développement de la personnalité, nous avons suspendu les subventions pour les cours de charme et de maintien, pour les cours de maquillage et de coiffure.

M. Paquette: Cela serait excellent.

M. Lalonde: Le ministre ne les a pas suivis?

M. Laurin: Nous avons suspendu, dans le secteur des relations humaines, les subventions pour les cours portant le titre suivant: Comment se faire des amis? Dans le secteur des arts plastiques, nous avons suspendu les subventions pour les cours - ce sont des exemples que je vous donne - de macramé, de courte-pointe. Dans le secteur expression physique, nous avons suspendu les

subventions sur les cours de danse du ventre. Dans le secteur des arts audiovisuels, nous avons suspendu les subventions pour les cours d'initiation au cinéma amateur. Dans le secteur des habilités manuelles ou domestiques, entre autres choses, nous avons suspendu les subventions pour les cours sur la décoration intérieure, l'entretien de motoneige, le bricolage, le crochetage, sur l'art de finir son sous-sol, sur l'initiation à l'habillement et, dans le secteur des habilités manuelles ou domestiques, nous avons, entre autres, suspendu les subventions pour le tricot au crochet. Mais nous avons maintenu intégralement toutes les subventions à des secteurs aussi importants que le secteur de la famille, aucune coupure; le secteur parents et école, aucune coupure; le secteur consommation, aucune coupure; économie et gestion, aucune coupure; condition féminine et condition masculine, aucune coupure...

M. Lalonde: La formation syndicale?

M. Laurin: ... retraite et préretraite, aucune coupure; vie politique...

M. Lalonde: La formation syndicale?

M. Laurin: ... aucune coupure; droits sociaux...

M. Lalonde: La formation syndicale?

M. Laurin: ... aucune coupure; participation et intervention sociale...

M. Lalonde: La formation syndicale?

M. Laurin: ... aucune coupure; communications et médias, aucune coupure; environnement...

M. Lalonde: La formation syndicale?

M. Laurin: ... aucune coupure; formation syndicale, une très légère coupure.

M. Lalonde: C'était pour préparer la réouverture des contrats.

M. Laurin: En somme...

M. Lalonde: Vous avez noté cela pendant tout ce temps-là?

M. Laurin: ... c'étaient des commissions scolaires qui offraient ces cours et qui demandaient des subventions et nous donnions des subventions globales.

M. Lalonde: Que les Québécois aimaient beaucoup.

M. Laurin: Mais justement les compressions budgétaires nous ont permis et nous ont forcés, en fait, à regarder avec beaucoup plus d'attention les pratiques des diverses commissions scolaires et même des cégeps. Nous n'avons pas coupé au hasard. Comme je le disais tout à l'heure, grâce à la compression, nous avons demandé aux commissions scolaires de juger elles-mêmes ce qui était prioritaire et nous leur avons dit, pour notre part, que nous ne subventionnerions que ce qui nous apparaissait vraiment prioritaire. Nous n'avons pas cependant interdit aux commissions scolaires d'offrir les cours dont je viens de parler, mais nous leur avons dit que, si elles les offraient, elles devraient les autofinancer.

On peut donc dire que, malgré les compressions ou les coupures, l'essentiel des efforts faits en éducation des adultes a été maintenu au cours de l'année dernière, particulièrement en ce qui concerne la formation générale, à temps complet ou à temps partiel, particulièrement la formation professionnelle également, particulièrement les organismes d'éducation populaire dont le budget a même augmenté au cours de l'année dernière. Je pense ici aux organismes volontaires d'éducation populaire, parce que justement ces organismes nous semblent très importants. Ce sont des organismes où des citoyens souvent démunis se prennent en charge et essaient de régler par eux-mêmes leurs problèmes en sollicitant l'aide des organismes scolaires. Voilà quelque chose que nous n'avons pas coupé et que nous n'avons pas l'intention de couper. D'ailleurs, si les circonstances étaient plus favorables, c'est dans ce sens que nous ferions un effort encore plus marqué. Il en va de même pour l'alphabétisation et d'autres tentatives qui nous paraissent importantes. (21 heures)

Le Président (M. Rodrigue): Un instant, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Une question de règlement. Je m'excuse d'interrompre le ministre après si peu de temps. Cela fait seulement 53 minutes qu'il parle, en réplique d'ailleurs. Dans le livre qu'il nous a remis, à la page 8 du programme 7, je lis ceci: Par ailleurs, devant une situation budgétaire difficile et afin d'assurer la survie de l'IRAI, le ministère a résolu de mettre fin aux programmes de formation syndicale. Comment peut-il...

M. Laurin: Cette affirmation qui paraît dans le cahier vert n'est pas encore une décision.

M. Lalonde: Ah!

M. Laurin: C'est une des hypothèses qui sont étudiées actuellement; s'il était possible de trouver un aménagement budgétaire qui

nous permette de la conserver, nous la conserverons.

M. Lalonde: M. le Président, combien d'affirmations dans ce livre sont des hypothèses?

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous plaît! Un instant.

M. Laurin: Nous parlons de ce cas précis et je vous donne une réponse précise.

M. Lalonde: II y en a d'autres.

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Laurin: Vous la poserez!

Le Président (M. Rodrigue): Vu qu'il ne s'agit pas d'une question de règlement, je vais inviter le député de Marguerite-Bourgeoys à poser sa question à l'occasion de l'étude des programmes. Je pense qu'on y arrive très bientôt.

M. Lalonde: Écoutez, M. le Président...

Le Président (M. Rodrigue): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je ne peux pas recevoir votre question comme étant une question de règlement.

M. Lalonde: Maintenant, j'en pose une autre, s'il vous plaît.

Le Président (M. Rodrigue): Vous avez plutôt profité de cela pour poser une question et, effectivement, ce n'est pas une question de règlement. Maintenant, je vous écoute sur une autre question de règlement.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je respecte votre jugement final. Je voudrais simplement rappeler au ministre que nous avons suggéré à la fin de l'après-midi de consacrer les deux heures de ce soir aux programmes 1 et 2. Je ne veux pas naturellement écourter le temps; d'ailleurs, il est illimité, d'après le règlement, et disponible au ministre pour tenter de justifier ses politiques. Il reste que son attitude actuelle met de côté l'entente que nous avons faite.

Le Président (M. Rodrigue): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il y avait eu accord à la fin de la séance de l'après-midi pour étudier les programmes 1 et 2 ce soir. Comme vous le savez, le président, dans ces circonstances, ne peut que rappeler aux membres de la commission qu'il y a eu entente et les inviter à faire en sorte que nous puissions passer à l'étude des programmes. Cependant, les règlements sont là et le ministre a toute latitude pour répliquer aux remarques préliminaires; son temps est illimité. Je me dois de le respecter. M. le ministre, si vous voulez continuer.

M. Lalonde: M. le Président, je m'excuse, le temps est peut-être illimité, mais notre patience ne l'est pas!

M. Laurin: M. le Président, je m'excuse d'avoir été aussi long. J'ai dit que je me contenterais surtout de relever les faussetés que contenait la réplique du député de Marguerite-Bourgeoys. Comme son discours est un véritable tissu de faussetés ou une litanie de faussetés, vous comprendrez que je dois consacrer beaucoup de temps à relever des faussetés que je ne peux tout de même pas laisser passer.

M. Lalonde: Si c'était si faux que cela, ça vous aurait pris cinq minutes.

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, messieurs!

M. Laurin: Pas du tout!

Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre, si vous voulez compléter vos remarques.

M. Laurin: II y a plusieurs autres faussetés, mais, pour ne pas abuser indûment de la patience du député de Marguerite-Bourgeoys, je ferai vite, espérant que nous pourrons y revenir à l'occasion de l'étude de programmes plus spécifiques. Par exemple, il est faux de dire qu'il y a eu une hausse en flèche des frais d'inscription à l'éducation des adultes, laissant entendre ainsi que ceci s'est effectué pour tous les programmes. La majeure partie des programmes maintenus, particulièrement dans les secteurs névralgiques que je viens de signaler, n'ont pas connu d'augmentation de programme. Là où il y a eu augmentation de programme en particulier, c'est dans les programmes comme ceux que je viens de mentionner et que les commissions scolaires ont cherché à maintenir, ce qui m'apparaît absolument justifiable.

Il est faux également de dire qu'il y a eu dans le secteur de l'éducation des adultes des mises à pied nombreuses, si l'on entend par ces mises à pied des mises à pied d'éducateurs à temps complet. Le secteur de l'éducation des adultes ne compte que 373 professeurs à temps plein, à temps complet. Je pense que les mises à pied dans ce secteur sont inexistantes ou très minimes. Évidemment, il y a eu moins de professeurs engagés à la leçon. Tous ces cours que nous avons suspendus signifient une réduction du nombre de leçons et probablement une

réduction du nombre des professeurs qui devaient les donner. Encore une fois, je ne crois pas que l'essentiel ait été atteint.

Quant à l'aide financière, M. le Président, nous y reviendrons, mais il est faux de dire que l'aide financière n'a pas été le lieu d'un effort considérable de la part du gouvernement. On peut même dire que c'est l'un des rares secteurs que nous avons protégés qui n'a pas été touché par les compressions ou les coupures. À telle enseigne, M. le Président, que le budget de l'aide financière a connu, en 1981-1982, une augmentation de 28%, probablement en raison de la conjoncture financière difficile que nous connaissions et qui a fait que les étudiants ayant moins travaillé cet été ont eu besoin de prêts ou de bourses plus élevés ou encore en raison du fait que la contribution des parents a été peut-être moins forte que nous ne l'aurions prévu. De toute façon, ce budget de l'aide financière a été considérablement plus élevé que ce que nous avions prévu. Nous avons annoncé que nous avons conservé tous les paramètres de fixation de l'aide financière, aussi bien en ce qui concerne les prêts que les bourses, et je pense que ceci nous a permis de faire un effort très sérieux qui est très important pour la poursuite de l'objectif de l'accessibilité que nous nous sommes fixé.

Il en est de même pour la recherche, M. le Président. Voilà un autre secteur que nous avons protégé où il n'y a pas eu de compressions ou de réductions budgétaires. Le budget de la FCAC ou du fonds FCAC non seulement a été maintenu, mais il a été augmenté, le nombre de bourses a été augmenté. Ceci ne veut pas dire que le budget total de la recherche a été augmenté dans toutes les universités, car les subventions gouvernementales ne sont pas la seule source sur laquelle les universités peuvent compter pour la recherche. Nous savons, en effet, que le gouvernement fédéral y contribue, que certaines entreprises y contribuent, qu'il y a des commandites de recherche qui sont faites aux universités par certains organismes. Il faut enfin rappeler également que les universités sont maîtresses de leurs politiques de recherche et qu'elles sont responsables, jusqu'à un certain point et parfois d'une façon considérable, de l'allocation des fonds de recherche dont peuvent bénéficier leurs professeurs.

Je pourrais continuer indéfiniment, M. le Président, mais je pense qu'il est déjà assez évident que ce discours, tout fleuve qu'il soit, ne correspond pas à la vérité, qu'il comporte des déformations, des exagérations, des généralisations, des erreurs et qu'il faudrait probablement demander, l'an prochain, au député de Marguerite-Bourgeoys de mieux faire ses devoirs afin de mieux éclairer la population.

En conséquence, je pense que l'appel par lequel le député de Marguerite-Bourgeoys termine son long exposé, où il nous dit que le gouvernement libéral a pris la décision, en matière d'éducation, de prendre les devants, sonne un peu faux. Je serais plutôt porté à croire, à la lumière du manifeste politique du Parti libéral que je viens de lire et à la lumière de l'exposé qu'il vient de nous faire, que le gouvernement libéral, aujourd'hui comme hier, a plutôt pris la décision de rentrer dans le rang et de faire du Québec, en matière d'éducation comme dans les autres domaines, une petite province repliée sur elle-même, inconsciente des défis, des enjeux qui se posent à notre société et insouciante des objectifs que nous devons nous fixer pour le développement de tous nos secteurs d'enseignement.

Administration générale

Le Président (M. Rodrigue): J'appelle l'étude du programme 1 qui est composé de quatre éléments. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, le programme 1, en fait, nous permet de poser des questions sur la gestion du ministère de l'Éducation et, dans ce cadre, je me permettrai de rappeler un certain nombre de faits au ministre. Si cela lui a pris une heure pour tenter de démontrer que le bilan que j'ai fait de son administration était faux, je crois qu'on peut conclure que la difficulté que le ministre a trouvée pour faire cette preuve est la principale source du temps qu'il y a mis. Il s'est plaint de mon bilan, mais s'il avait fallu compter sur les députés péquistes pour poser les bonnes questions, on serait déçu, M. le Président. On a vu que les députés du Parti québécois, autour de cette table, en réaction aux discours des députés de l'Opposition, étaient plutôt faibles. Je ne veux pas m'en prendre personnellement à chacun des députés. C'est peut-être un manque de préparation, mais enfin! Lorsque, par exemple, le député de Shefford parlait de l'utilisation des équipements scolaires, c'est un problème qui a été attaqué il y a beaucoup de temps, avant que le député de Shefford ne soit élu. Je n'en veux comme exemple que cette communication de la Fédération des commissions scolaires, en 1980, qui disait ceci: "Longtemps controversée et maintes fois mise au banc des accusés, la question de l'utilisation des locaux des commissions scolaires par les municipalités et les mouvements populaires pour des fins récréatives ou communautaires se clarifie. En effet, un sondage mené au cours des derniers mois par la Fédération des commissions scolaires révèle que les critiques formulées contre les commissions scolaires au sujet de la sous-utilisation de leurs locaux sont dénuées de tout fondement. Ce sondage

auquel 92% des commissions scolaires ont répondu indique que plus de 80% d'entre elles assument des responsabilités de location de locaux pour diverses activités." Je ne veux pas poursuivre la lecture, mais il est possible qu'à un endroit ou à un autre on n'ait pas réussi à conclure les ententes nécessaires entre les municipalités et les commissions scolaires. C'est fort possible. Mais est-ce que, parce qu'à un endroit ou à un autre au Québec on en est encore à rechercher la façon de s'entendre, on doive restructurer tout le système à la façon péquiste? Quand il y a un petit problème, il y a une grosse solution.

M. le Président, en ce qui concerne l'éducation des adultes, le même député disait que c'était surtout dans la formation éducative et socioculturelle que la diminution se trouvait. À ce moment-là, je pense que je réponds un peu à quelques prétentions du ministre. Je prends justement les documents qui m'ont été remis par le ministère. À la page 21, programme 7, on voit que dans la formation socio-économique...

M. Paquette: Je m'excuse d'interrompre le député, mais...

Le Président (M. Leduc): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: ... M. le Président, sur une question de règlement, je pense que vous aviez appelé, à la demande même du député de Marguerite-Bourgeoys, l'étude des programmes 1 et 2 et le député s'engage dans une réplique, ou réplique à la réplique du ministre.

M. Lalonde: Non, c'était... On parle de la gestion.

M. Paquette: Remarquez bien que je n'ai pas d'objection, mais j'aimerais bien, moi aussi, comme le député de Marguerite-Bourgeoys, qu'on puisse aborder les programmes 1 et 2 ce soir et essayer de les terminer.

M. Lalonde: Oui, oui. On parle de la gestion des ressources et c'est dans ce cadre-là que je fais les corrections nécessaires.

Le Président (M. Leduc): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur le programme 1.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Donc, ce tableau qui est celui du ministère dit que dans la formation socio-économique générale à plein temps, on en avait 12 241 en 1979-1980 et 8954 en 1982-1983. Pour la formation professionnelle à temps partiel -ce sont des travailleurs qui travaillent le jour, qui veulent augmenter leurs chances à une meilleure qualité de vie et qui, le soir, s'imposent des études - c'est passé de 73 000 $ à 56 000 $. M. le Président, je demande au député de Shefford si c'est du socioculturel, cela. C'est très important, cette diminution. J'aurais espéré que les députés du Parti québécois fassent autre chose que le dos rond devant le ministre, devant le gouvernement. Ils sont quand même ici à titre de représentants de leur population, de leurs électeurs, et c'est vrai qu'il y a des problèmes en éducation. Ils ont préféré la soumission ou l'asservissement, je ne sais pas lequel, je leur laisse le choix, et c'est tout à fait décevant, parce qu'on a connu d'autres commissions parlementaires où les députés choisissaient de poser des questions au ministre. (21 h 15)

M. Paquette: Question de règlement.

Le Président (M. Leduc): M. le député de Rosemont.

M. Paquette: Je pense, M. le Président, que le député de Marguerite-Bourgeoys s'est engagé dans une tentative de dénigrement du travail des députés ministériels, dont le travail a été fait, je l'ai dit d'ailleurs dans mes remarques ce matin, durant toute l'année et durant tout l'automne. On a eu amplement l'occasion de faire connaître nos positions au ministre et de l'aider à préparer les crédits. Je pense que s'il y a eu des remarques des députés ministériels, c'était devant l'énormité des affirmations du député de Marguerite-Bourgeoys et je souhaiterais, M. le Président, que vous le rameniez aux programmes 1 et 2, puisque vous avez appelé l'étude de ces deux programmes.

M. Lalonde: M. le Président, sur cette question de règlement, je pense que les Nordiques auraient besoin d'un "goaler" comme le député de Rosemont ce soir.

Le Président (M. Leduc): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: II ne veut pas que je pose de questions. C'est un débat, M. le député de Rosemont, vous n'êtes pas encore maire.

M. Paquette: M. le Président, je tiens à vous dire qu'on n'a absolument aucune objection à engager le débat avec le député de Marguerite-Bourgeoys, s'il veut répliquer...

M. Lalonde: Laissez donc parler le député de Marguerite-Bourgeoys, cela fait des heures que vous parlez.

M. Paquette: ... à nos répliques, nous allons répliquer à ses répliques.

M. Lalonde: Vous répliquerez tant que vous voudrez quand vous aurez le droit de parole, mais laissez-moi parler.

M. Paquette: Je vous signale, M. le Président, que vous avez appelé les programmes 1 et 2.

Le Président (M. Leduc): S'il vous plaît! M. le député...

M. Lalonde: C'est la gestion des ressources et, là-dessus, j'ai beaucoup de choses à dire.

Le Président (M. Leduc): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur le programme 1.

M. Paquette: Allez-y, on a hâte que vous disiez quelque chose.

M. Lalonde: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais que le député de Rosemont ne croie pas qu'il a déjà été élu maire. On sait qu'il y a des mesures dictatoriales dans ce milieu.

M. Paquette: M. le Président, le député enfreint de plus en plus le règlement.

Le Président (M. Leduc): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur le programme 1.

M. Lalonde: Pourtant, je n'ai aucune dent contre vous.

Le Président (M. Leduc): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Justement, dans ce programme, on parle de la gestion des ressources et de la gestion du ministère. Tout ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant de la part du côté ministériel, c'est simplement relié à la soumission; même le député de Rosemont est d'habitude plus critique, mais je comprends qu'il a une fonction d'adjoint parlementaire qui l'oblige un peu à protéger son ministre. Le député de Rosemont, d'ailleurs, et peut-être qu'on peut se l'expliquer maintenant, dans son intervention a dit - et je suis prêt à me faire corriger, parce que cela m'a surpris -que 50% de la population - je présume qu'il voulait parler de la population étudiante -avait accès au cégep. Je pense que vous devriez vous relire. Cela m'a surpris, parce que si on pense aux étudiants qui ont accès au cégep en 1981-1982, par exemple, ce sont ceux et celles qui se sont inscrits ou inscrites au primaire il y a à peu près une dizaine d'années, au début des années 1970. Il y en avait combien à ce moment-là? 1 400 000. On en retrouve 130 000 au cégep, c'est moins de 10%, c'est loin de 50%.

Je ne sais pas ce que le député a voulu...

M. Paquette: M. le Président, je pense qu'on va s'entendre rapidement là-dessus. Je ne me rappelle pas exactement mes paroles, mais je pense que le sens en était le suivant: c'est qu'on examinait les taux de passage du secondaire au collégial. Je pense que ce taux est autour de 50%, on va s'entendre rapidement là-dessus.

M. Lalonde: II est autour de 41%. Je veux permettre au député de Rosemont de me corriger, parce qu'il a dit que 50% de la population peut aller au cégep.

M. Paquette: Si, effectivement, j'ai dit cela, M. le Président, je pense qu'il serait bon de me corriger, parce que mon intention était de parler du taux de passage du secondaire au collégial.

M. Lalonde: Le taux de passage est passé de 41,1% en 1975 et à 41,9% en septembre 1980.

M. Paquette: J'ai indiqué dans mon intervention qu'il y avait aussi des étudiants qui cessaient les études un an ou deux après le secondaire et que, si on ajoutait ces étudiants, on se retrouvait autour de 50%.

M. Lalonde: On ne peut pas les ajouter à tous les ans parce que, si on les enlève pendant l'année où ils ne passent pas, on ne peut pas les ajouter quand ils passent.

M. le Président, le ministre a fait une pénible démonstration - pénible, oui, sûrement, pour lui, j'imagine; pour nous, on n'a pas à se plaindre - de la fausseté de ce que j'ai dit et pourtant j'ai pris soin d'appuyer chacune des propositions que j'ai faites, chacune des observations que j'ai faites soit sur des documents du ministère, soit sur des témoignages du milieu, y compris le Conseil supérieur de l'éducation. Le ministre lui-même a dit que mon discours était truffé de citations qu'il a, à l'occasion, mentionnées comme étant trop vieilles, soit de deux, trois ou quatre ans. Que voulez-vous, M. le Président? Quand ce n'est pas corrigé depuis deux, trois ou quatre ans, ces citations, ces témoignages sont encore valides. Il disait tout à l'heure que j'avais menti, que c'était faux - il ne m'a pas accusé de mentir - par exemple, quand j'ai dit que le coût de l'admission à l'éducation des adultes avait augmenté. J'ai un cas ici. À la Commission scolaire régionale du Lac-Saint-Jean, il y a quelques semaines, on me disait que le directeur du service de la formation des adultes, M. Marc-André Deschênes, dans un document d'octobre 1981,

brossait un tableau très noir de la situation dans ce secteur fortement touché par l'ampleur des coupures décrétées par le ministère de l'Éducation. Le budget de l'éducation des adultes consenti par le MEQ - c'est MEQ et non pas MEC - atteignait l'an dernier, disait-il, 1 500 000 $ et a été ramené à un peu plus de 950 000 $, soit une diminution d'environ un tiers. Les conséquences de ces restrictions, d'après le document que j'ai, c'est que le coût de la plupart des cours a triplé et parfois quadruplé, M. le ministre. Je ne sais pas où vous avez pris vos chiffres en disant que ce sont les mêmes coûts.

Je comprends que la danse du ventre, c'est une chose, mais ce n'est pas que cela. J'espère que vous n'allez pas insulter les Québécois, à savoir qu'ils ne fréquentaient que les cours de danse du ventre auparavant.

M. Payne: Ce sont des cours d'intérêt que vous parlez. Les cours d'intérêt sont à la discrétion du collège.

M. Lalonde: Quels sont les intérêts? C'est le député de Vachon qui va décider ce qui intéresse les Québécois. Voyons donc!

M. Payne: Je pense que cela intéresse tout le monde.

M. Lalonde: M. le Président.

M. Payne: Qu'on passe aux programmes 1 et 2; sinon, on va passer tout de suite au programme 5 et on va tous s'entendre là-dessus.

M. Lalonde: Je ne peux - le temps me l'interdit - relever les imprécisions, les pirouettes, en fait, de langage du ministre, dans sa réplique, dans sa très longue réplique, dans sa pénible réplique, mais je vais vous dire ceci: Dans le cadre... C'est pour cela que nous avons demandé d'aborder le programme 1 et le programme 2 au début. Contrairement à ce que le député de Shefford disait, nous n'avons pas demandé d'augmenter les crédits; nous avons accusé le gouvernement de faire des coupures sauvages, aveugles. Il l'a même avoué. Ce que nous voulons soulever aujourd'hui, c'est la gestion des ressources de la part du gouvernement. Lorsque le ministre parlait du retour à l'essentiel, il aurait dû avouer aussi que l'essentiel, il ne le contrôle que dans une très faible partie. L'essentiel, il l'a confié, par voie de convention collective, à des agents d'éducation. C'est dans ce cadre que nous voulons poser des questions au ministre. Le gouvernement s'apprête à renégocier les conventions collectives, dans le domaine de l'éducation, en particulier, très bientôt, dans les mois qui suivent. Or, on sait que les conventions collectives déterminent un grand nombre des éléments, des comportements, du fonctionnement des enseignants, agent principal - le ministre l'affirme, tout le monde le reconnaît - de la qualité de l'acte d'éducation.

Je veux demander au ministre, comme première question, quels sont les conditions de la négociation? Quels sont les éléments qu'il veut négocier avec les syndicats dans la nouvelle négociation des conventions collectives en ce qui concerne la tâche? Quelle est sa politique, autrement dit, de négociation comme ministre de l'Éducation? Va-t-il laisser cela au président du Conseil du trésor? Va-t-il laisser cela au ministre des Finances, comme cela a été le cas il y a trois ans? Est-ce qu'il va... Est-ce qu'il a l'intention de récupérer l'autorité qu'il devrait avoir, qu'il devrait conserver comme ministre de l'Éducation dans la prochaine négociation? Et quelle est sa politique? La politique qui présidera à cette négociation comme ministre de l'Éducation?

M. Laurin: M. le Président, la dernière ronde de négociations a eu lieu en 1979. Nous avions à négocier une nouvelle convention collective en même temps que nous avions à faire face à une situation difficile. Nous savons depuis un bon nombre d'années que le secteur public de l'éducation coûte beaucoup plus cher au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Nous savons aussi que l'écart entre le secteur privé et le secteur public en 1976 était de 16%. Nous avons donc hérité d'une situation extrêmement difficile et délicate, et cet écart est responsable d'une façon marquée pour les dépenses qu'exigeaient nos divers secteurs, le primaire, le secondaire et le collégial en particulier, mais il faut bien dire que c'est là un héritage que nous avait laissé le gouvernement précédent puisqu'il avait négocié, à quelques reprises en tout cas, avec les enseignants dans le secteur qui m'intéresse.

Cependant, en 1979 nous avons réussi à réduire cet écart entre le secteur public et le secteur privé de 16% à 11%. Peut-être aurions-nous dû faire davantage, aurions-nous dû réduire davantage cet écart entre le secteur privé et le secteur public, mais de toute façon, dans le contexte qui sévissait à ce moment-là, nous avons pensé quand même que c'était là une amélioration notable. Cette négociation a eu lieu en 1979 et nous avons signé de bonne foi, partie patronale et partie syndicale, cet accord.

Quand le député de Marguerite-Bourgeoys laisse entendre que les coupures que son gouvernement aurait effectuées n'auraient été faites dans aucun des services du primaire, du secondaire, du collégial, de l'universitaire, de l'éducation des adultes qu'il a mentionnés, est-ce qu'il veut faire croire que si son gouvernement, son parti

avait été au pouvoir il aurait rouvert les conventions collectives dès 1980 et qu'il aurait sabré dans les conventions collectives signées en 1979? Est-ce que c'est cela?

M. Lalonde: Répondez donc à la question que j'ai posée. Qu'est-ce que vous allez faire là dans un mois?

M. Laurin: La conclusion implicite de votre argumentation est que le seul endroit où il aurait été judicieux de couper, c'est dans les conventions collectives négociées en 1979.

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous allez faire dans un mois?

M. Laurin: Donc, j'en conclus que le Parti libéral aurait sabré libéralement dans les conventions collectives signées en 1979 et qu'il aurait même pris la décision de les rouvrir beaucoup plus tôt.

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous allez faire dans un mois?

M. Laurin: Quant à nous, nous avons signé ces conventions collectives en 1979. Il est vrai que la conjoncture de 1982 est beaucoup plus dure, beaucoup plus difficile que ce que nous avions prévu en 1979, avec tous les facteurs que mes collègues et moi avons mentionnés, et là nous sommes en face d'une nouvelle négociation collective.

M. Lalonde: Pas de référendum en vue? (21 h 30)

M. Laurin: Ah! un référendum, il ne faut quand même pas exagérer l'importance, car ces négociations ont eu lieu un an avant le référendum.

M. Lalonde: Le règlement, quelques mois avant.

M. Laurin: Nous sommes donc...

M. Lalonde: Qu'est-ce que vous allez faire?

M. Laurin: ... en face d'une nouvelle ronde de négociations.

M. Lalonde: Dites-nous ce que vous allez faire.

M. Laurin: II nous faut établir nos positions. Habituellement, la partie gouvernementale attend que la partie syndicale dépose ses demandes et, selon le calendrier prévu par la loi 55, ce dépôt d'offres aurait dû survenir ou devrait survenir au mois d'août. L'offre patronale ou la réponse patronale devrait être déposée au mois d'octobre, ce qui nous donne du temps pour discuter des diverses hypothèses ou des diverses éventualités qui s'offrent à nous et, effectivement, nous en avons commencé la discussion au sein des instances que le député connaît bien, en particulier le comité ministériel de la négociation, mais nous n'avons pas encore élaboré de position finale ou définitive à cet égard.

Il n'est pas du tout impossible que la position patronale touche, d'une part, le niveau de la rémunération, étant donné cet écart dont je parlais tout à l'heure qui existe entre le secteur public et le secteur privé. Étant donné cet écart de productivité ou de fécondité qui existe entre le secteur public québécois et le secteur ontarien, au même le secteur américain, il n'est pas non plus impossible que la position patronale inclue une position qui aurait pour effet d'augmenter la productivité, par exemple au niveau de la tâche. Mais ce sont toutes là des hypothèses que nous sommes en train de discuter actuellement et sur lesquelles nous en arriverons probablement d'une façon accélérée à une position finale, selon que se développera dans un sens ou dans l'autre le débat actuellement en cours entre le gouvernement et le monde du travail.

M. Lalonde: M. le Président, nous sommes actuellement face à une situation tout à fait exceptionnelle, jamais vue en fait au Québec. Un gouvernement qui a négocié et signé lui-même des conventions collectives en 1979 demande de les rouvrir et menace même de le faire unilatéralement si les autres parties n'y consentent pas. Premièrement, le ministre peut-il me dire s'il est d'accord avec la réouverture unilatérale?

M. Laurin: Je n'ai pas à donner une réponse au député là-dessus, c'est une position gouvernementale qui a été adoptée par le cabinet et dont je suis solidaire.

M. Lalonde: Vous êtes donc d'accord avec la réouverture unilatérale?

M. Laurin: C'est une position qui a été prise par le gouvernement dont je fais partie.

M. Lalonde: Oui, je sais, c'est facile de se cacher derrière le gouvernement, comme d'ailleurs vous vous êtes caché derrière les 29 000 intervenants en éducation tout à l'heure quand j'ai fait le bilan. Je ne vous fais pas un procès de courage.

M. Laurin: J'ai dit que vous étiez injuste à leur endroit...

M. Lalonde: Ce ne serait pas long d'ailleurs, on a jusqu'à 22 heures.

M. Laurin: ... que vous aviez minimisé leurs efforts.

M. Lalonde: Premièrement, la réponse, c'est que, oui, vous êtes d'accord avec la réouverture unilatérale. On en reparlera plus tard.

M. Laurin: Évidemment, c'est une position gouvernementale.

M. Lalonde: Oui, c'est le gouvernement. C'est facile, quand on est un sur 29.

M. le Président, deuxième question. Le ministre veut-il dire qu'il a déjà décidé de participer à la décision du gouvernement de rouvrir unilatéralement des conventions collectives qu'il a lui-même signées, c'est-à-dire que son gouvernement a signées et qu'il ne sait pas, qu'il n'est pas en mesure de nous dire ici quels sont les changements aux conventions collectives à négocier que lui-même est prêt à proposer, à préconiser lors de la prochaine convention collective?

M. Laurin: M. le Président, pour le moment, nous avons affaire à une offre gouvernementale, à une proposition gouvernementale, à une hypothèse gouvernementale qui a été soumise aux diverses centrales syndicales, qui ont demandé du temps, un délai pour y réfléchir et qui doivent donner, d'ici à quelques jours probablement, d'après ce que l'on nous dit, une réponse à cette offre, ou à cette hypothèse, ou à cette proposition gouvernementale. Il est donc prématuré pour le gouvernement d'apporter une contre-proposition à une réponse qui ne nous est pas encore parvenue, mais, si je comprends bien le député de Marguerite-Bourgeoys, est-ce qu'il entend me suggérer non seulement de rouvrir les conventions collectives, mais de déposer une offre ou une proposition patronale qui impliquerait non seulement une diminution du niveau de rémunération, mais également une augmentation de la tâche?

M. Lalonde: M. le Président, nous sommes rendus au point où le ministre est tellement mal pris, est tellement incapable de répondre aux questions qu'il en pose lui-même. Si le ministre n'a pas de réponse...

M. Paquette: ... auxquelles vous êtes incapable de répondre!

M. Lalonde: ... et qu'il est incapable de faire face à la situation, il sait quelle est la seule possibilité.

M. Laurin: Simplement que le moment n'est pas encore arrivé.

M. Lalonde: ... il pourra même la proposer!

M. Laurin: On ne peut pas donner une réponse...

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas terminé ma réponse. Il m'a posé une question.

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Paquette: Vous allez répondre. Ah bon!

M. Lalonde: Parce que la question était double.

M. Paquette: On a bien hâte d'entendre cela.

M. Lalonde: Premièrement, est-ce que j'ai suggéré la réouverture unilatérale des conventions collectives? Je n'ai jamais suggéré à quiconque de renier sa signature.

M. Laurin: Mais pourtant vous avez suggéré que...

M. Lalonde: Jamais je n'ai suggéré cela et jamais je n'appuierai une mesure dans ce sens parce qu'il me semble que, même quand on est mal pris comme vous l'êtes, il y a ce qui s'appelle l'honneur...

Une voix: ...

M. Lalonde: ... qu'on doit respecter, M. le ministre. Deuxièmement...

M. Laurin: ... mais vous avez suggéré que c'était le seul endroit où les coupures pouvaient se faire.

M. Lalonde: J'ai seulement demandé au ministre quelles étaient ses intentions pour la négociation qui s'en vient.

M. Laurin: Elles ne sont pas encore arrêtées parce que nous attendons une réponse qui ne nous est pas encore parvenue.

M. Lalonde: Écoutez! La réponse qui va vous parvenir, cela va régler quoi? Cela va régler ce que le ministre des Finances appelle son trou de 700 000 000 $ parce que les trous, il y en a tellement de ce temps-ci. Il y a eu celui de 500 000 000 $, il y a eu celui de 700 000 000 $, ce qui n'est pas le trou de 700 000 000 $ parce que c'est un trou de 4 200 000 000 $ moins un déficit, qu'il est prêt à accumuler avec les autres déficits de 15 000 000 000 $ depuis qu'il est au pouvoir, de 3 500 000 000 $ pour l'année qui s'en vient cela va être beau. Donc, la réouverture, d'après ce que je comprends, c'est simplement pour régler ce

trou de 700 000 000 $.

M. Laurin: II est encore dans le catastrophisme!

M. Lalonde: Ah oui! Le catastrophisme. Je regrette, mais je n'ai rien inventé en fait de catastrophe; on n'a qu'à regarder le bilan de ce gouvernement. Ma question s'adresse à l'avenir. On sait qu'une très grande proportion des 6 000 000 000 $ des fonds publics que vous allez chercher dans les poches des Québécois et qu'on retrouve au budget de l'éducation, se retrouve dans les salaires. C'est donc très important de nous arrêter quelques minutes à ce problème. On sait que la qualité de l'enseignement, quoi qu'en dise le député de Vachon, est très proche de la tâche qu'on décrit dans ces conventions collectives. Je ne lui ferai pas de procès actuellement, à savoir, si on passe moins de temps avec l'élève, l'élève apprend plus; je n'en suis pas sûr. Je ne suis pas sûr non plus que, si on passe trop de temps avec l'élève, il apprend moins. Je ne ferai pas de procès sur cela.

M. Payne: Vous vous trompez de député, c'était mon collègue.

M. Lalonde: Je veux le demander, parce que c'est important que nous le sachions. On nous demande ici, à nous les députés... Les députés du Parti québécois, il ne semble pas qu'ils se posent trop trop de questions. En fait, ils n'en n'ont pas posé.

Le Président (M. Rodrigue): À l'ordre!

M. Lalonde: On nous demande, les députés, d'approuver des dépenses de 6 000 000 000 $ pour l'année qui s'en vient, dont une grande partie va s'en aller dans des salaires, des salaires de gens dont la tâche est aussi en grande partie décrite dans des conventions collectives. Je dis au ministre qu'il est important qu'il nous réponde de la façon la plus franche et, si possible, la plus candide possible. Est-ce que le ministre est prêt à s'engager, à l'égard de la commission parlementaire qui est appelée à approuver ces crédits, à réviser la tâche de l'enseignant, premièrement?

M. Laurin: Est-ce que c'est une suggestion?

M. Lalonde: Deuxièmement, dans quels éléments de la tâche de l'enseignant est-il prêt, dans l'affirmative à la première question, à faire ces révisions?

M. Laurin: Je me demande encore si c'est une suggestion que me fait le député de Marguerite-Bourgeoys...

Une voix: ... des responsabilités, cela ne vous arrive pas souvent.

M. Laurin: ... mais je peux quand même lui dire que, jusqu'ici, nous avons respecté intégralement la convention collective que nous avons signée en 1979, même si l'inflation a connu une augmentation que l'on pourrait qualifier de galopante, même si cela s'est traduit par des augmentations de rémunérations de près de 17% ou de 18% au cours de la dernière année. Nous avons payé ces indexations et ces augmentations de rémunération par l'augmentation d'échelons, rubis sur l'ongle, et nous avons respecté, donc, toutes nos obligations, mais il reste que nous avons fait, comme je le disais tout à l'heure, une offre, une proposition, une hypothèse aux centrales syndicales, particulièrement à celles avec lesquelles nous avons négocié les anciennes conventions et avec lesquelles nous négocierons les nouvelles, et nous attendons, pour le moment, la réaction, la réponse ou les contre-propositions de ces centrales syndicales. Ce n'est que lorsque nous les aurons reçues que nous les examinerons et que nous verrons à modifier ou non les quelques hypothèses que nous avons été forcés, évidemment, d'envisager.

Le moment venu, nous prendrons nos responsabilités, comme nous les avons toujours prises, et nous ferons connaître, à ce moment, d'abord aux centrales syndicales, puis à la population, la réponse que nous ferons aux contre-propositions qui nous seront faites. Mais nous jugeons qu'il est prématuré, pour le moment, de franchir le pont, puisque nous ne sommes pas encore arrivés à la rivière. Le moment venu, le député peut être assuré que nous assumerons entièrement nos responsabilités.

M. Lalonde: M. le Président, tout d'abord, le ministre dit qu'il n'est pas rendu à la rivière. Je pense qu'il est dedans jusqu'au cou, premièrement...

M. Laurin: Nous ne sommes pas mouillés du tout encore.

M. Lalonde: L'inconscience du ministre m'étonne et m'attriste. Nous devons lui confier 6 000 000 000 $, M. le Président, et je commence à me poser de sérieuses questions s'il ne sait pas qu'il est rendu dans la rivière. Mais le ministre se rend-il compte qu'il est actuellement devant la commission parlementaire, devant l'Assemblée nationale qui nous a confié un mandat et que seule l'Assemblée nationale est habilitée à autoriser de dépenser 6 000 000 000 $, le plus gros budget du gouvernement. Est-ce qu'il se rend compte qu'il doit la franchise la plus totale aux députés en ce qui concerne les intentions du ministre et du

gouvernement dans la prochaine négociation des conventions collectives?

M. Laurin: Je ne peux quand même pas annoncer au député ou à la commission, ou à la population, des décisions qui ne sont pas prises et que nous prendrons en temps opportun, probablement pas avant quelques semaines. Tout ce que je peux dire au député, c'est que nous avons fait nos devoirs et que nous avons envisagé avec la plus grande confiance possible, la plus grande capacité de calcul possible diverses hypothèses, mais que pour le moment, avant d'aller plus loin, il nous faut connaître d'autres éléments qui ne sont pas encore en notre possession. Quand nous les aurons, nous progresserons davantage dans l'étude des hypothèses diverses que nous avons déjà envisagées, car un dialogue est fait de questions et de réponses et nous savons que parfois des discussions peuvent se prolonger, peuvent être ardues et qu'une conclusion heureuse ne peut s'ensuivre qu'après des échanges difficiles, longs et délicats. Mais, encore une fois, il est difficile d'apporter une réponse définitive avant que ce processus n'ait atteint son terme. Il n'a pas encore atteint son terme. Il nous manque des éléments et, lorsque nous les connaîtrons, il nous sera possible d'aller plus loin. À ce moment-là - je le répète - nous assumerons entièrement nos responsabilités.

M. Lalonde: Quels sont les éléments qui vous manquent?

M. Laurin: La réponse des centrales syndicales et les contre-propositions des centrales syndicales.

M. Lalonde: En ce qui concerne la tâche - quand on parle de la réponse des centrales syndicales, c'est pour rouvrir un contrat qui se termine le 31 décembre 1982, dans quelques mois - le budget qu'on nous demande de voter va aller au-delà de cela, va aller jusqu'au 31 mars de l'an prochain. Il me semble que vous devriez, avec la plus grande franchise, décrire aux membres de cette commission quelles sont vos intentions comme ministre de l'Éducation, à savoir la tâche de l'enseignant, telle que décrite, telle qu'encadrée par la convention collective. Quels sont les éléments de cette tâche que vous avez l'intention de changer dans la prochaine convention collective?

M. Laurin: C'est avec la plus grande franchise et la plus grande candeur que je réponds au député de Marguerite-Bourgeoys que nous sommes en plein processus et que ce processus comporte l'examen d'hypothèses auxquelles nous ne pouvons apporter une réponse tant que nous ne serons pas éclairés davantage sur les attitudes, propositions ou contre-hypothèses que pourra nous présenter la partie syndicale. Lorsqu'il est prématuré de prendre une décision, il devient irresponsable d'en faire état avant qu'elle ne puisse être prise et ce n'est qu'à ce moment-là que nous pourrons prendre des décisions, que ce soit en regard du niveau de rémunération, comme je le disais tout à l'heure, ou que ce soit en raison de clauses normatives qui font l'objet habituel des négociations entre la partie syndicale et la partie gouvernementale. Nous sommes en plein processus et, lorsque nous aurons poussé davantage nos échanges, il nous sera possible d'arrêter des hypothèses plus précises que nous pourrons alors soumettre à la négociation. Je ne peux dire à ce moment-ci au député de Marguerite-Bourgeoys si ces hypothèses ou ces propositions se limiteront au niveau de la rémunération exclusivement ou s'il sera opportun d'y ajouter des clauses normatives.

M. Lalonde: M. le Président, je répète ma question: Quels sont les éléments de la tâche de l'enseignant que le ministre a l'intention de soumettre à la négociation?

M. Laurin: Mon intention est flottante pour le moment, M. le Président.

M. Lalonde: Je dirais plutôt le genre calé que flottant.

M. Laurin: Elle est flottante parce que, comme le député le sait sûrement, dans toute négociation, il y a plusieurs paramètres, dont les uns ont un effet sur les autres, qu'il faut envisager globalement pour en connaître l'impact ou le résultat définitif. C'est la raison pour laquelle, même si nous jouons actuellement avec plusieurs paramètres, il est difficile d'arrêter l'un ou l'autre d'une façon définitive car ce qui nous importe, c'est le résultat final de ces calculs ou de ces articulations réciproques.

M. Lalonde: M. le Président, comment voulez-vous que les députés, en toute honnêteté et, si c'est possible, au-delà de l'appartenance à un parti...

M. Laurin: M. le Président...

M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas terminé!

M. Laurin: ... quand l'almanach dit que le soleil va se lever à 5 h 05, malgré tous les efforts du député, on ne pourra pas l'amener à se lever à 4 h 30. Le député me demande que le soleil se lève dix minutes avant le temps fixé par l'almanach. Donc, ce n'est pas possible.

M. Lalonde: D'abord, je n'ai pas posé la

question au soleil, c'est évident. Deuxièmement, je n'ai pas demandé au ministre de faire le Josué. Je lui demande simplement de me dire quelles sont ses intentions. Au fond, c'est cela que vous faites, M. le ministre, c'est ce que vous nous demandez aux députés, ici, autour de la table. Chacun de nous a une obligation de par la fonction que chacun occupe, de dire: Oui, nous allons dépenser tant d'argent. C'est le seul petit pouvoir qu'il nous reste à l'Assemblée nationale et il est très mince, parce qu'on doit adopter globalement, de toute façon, les budgets. Je vous demande comment vous voulez que nous fassions notre travail honnêtement, si, sachant que - quel est le pourcentage? - 80%, 78% ou 88% des 6 000 000 000 $ s'en vont dans les salaires? Non? C'est 50%, 70%...

M. Laurin: 88% pour le primaire et le secondaire, 85% pour le collégial et 70% à peu près pour l'université.

M. Lalonde: Alors, cela fait des taux de succès extraordinaires. C'est autour de 80% disons, en tout et partout?

M. Laurin: À peu près.

M. Lalonde: 80% des 6 000 000 000 $, près de 5 000 000 000 $ sont destinés à payer des salaires, dont une grande partie à des enseignants, et une grande partie de ces enseignants vont se retrouver à négocier avec le ministre et ses collègues d'ici quelques mois. Vous savez sûrement, nous avons fait une petite tournée, très modeste de la province, dans quelques régions: l'Outaouais, le Nord-Ouest, la Mauricie, le Saguenay, l'Estrie, le Grand Montréal, le Québec, dans le cadre de la proposition à venir du ministre, en ce qui concerne la réforme scolaire, mais une réforme scolaire, il faut le souligner, que les députés ministériels se sont appliqués à défendre dans leurs interventions, alors qu'elle n'est même pas déposée. M. le Président, comme docilité, le ministre ne peut pas désirer mieux. Nous avons parlé au monde, peut-être dans ce contexte, à un peu plus de monde que le ministre n'a parlé depuis quelques mois.

Une voix: Qui donc, cela?

M. Lalonde: Peut-être. Enfin, je n'ose pas le suggérer, je le suppose. La grande inquiétude, ce qui ressort constamment des discussions avec les administrateurs scolaires, pas nécessairement les membres des commissions scolaires que le gouvernement veut occire bientôt, mais aussi les administrateurs au niveau de l'école, c'est la complexité, le caractère enfermé des conventions collectives qui enlève toute possibilité de flexibilité, en ce qui concerne l'amélioration de la qualité de l'enseignement. C'est pour cela que nous insistons - vous me permettrez de le faire, M. le Président - auprès du ministre pour lui demander ce qu'il a l'intention de faire en ce qui concerne les conventions collectives. C'est là qu'est l'essentiel, M. le ministre, qu'on retrouve dans votre discours; c'est là qu'est l'essentiel de la qualité de l'enseignement dans la convention collective - non pas que je veuille qu'il n'y en ait pas - mais je veux savoir, avant de voter, et mes collègues aussi, ce que vous avez l'intention de faire parce que la négociation commence dans quelques mois. Vous me dites: Ce sont des hypothèses et quand ce sera réglé, ce sera réglé. Mais où est-ce qu'on va être, nous, les élus? Nulle part. Il me semble que c'est faire injure à l'autonomie de l'Assemblée nationale que d'avoir une telle approche.

Le Président (M. Rodrigue): M. le ministre, avant de vous permettre de répondre, je voudrais quand même attirer votre attention - j'ai laissé filer le débat là-dessus depuis le début de l'étude des crédits du programme 1 - cependant, je constate que, pratiquement, depuis le début de l'étude du programme 1, nous discutons surtout de l'étude des crédits du programme 4 où, si je ne m'abuse, et vous me corrigerez si je fais erreur, il me semble que c'est à ce programme que sont prévus les salaires pour ce qui est des réseaux. C'est pour le primaire et le secondaire; au programme 5, pour le collégial et au programme 6, pour l'enseignement universitaire. Alors, les questions portent surtout sur ces programmes. Je voudrais vous demander, même si j'ai laissé filer assez librement la discussion, de réserver vos questions qui traitent de ces programmes pour le moment où nous serons rendus à l'étude de ceux-ci. Nous en sommes au programme 1. Si nous voulons avancer dans nos discussions - je voudrais bien que mes paroles soient interprétées correctement, il ne s'agit pas de blâmer qui que ce soit - mais enfin, si nous voulons avancer dans l'étude du programme 1, je pense qu'il n'y a pas lieu de sauter d'emblée dans les programmes 4, 5 et 6, que nous devons aborder demain.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Rodrigue): Alors, j'aimerais qu'on en revienne autant que possible au programme 1. Je vais vous demander si vous avez des questions spécifiques à poser ou des remarques à faire concernant le programme 1.

M. Lalonde: M. le Président, sur le programme 1, vous me permettrez de lire ce

que le ministre nous propose sous la rubrique: Administration générale, et je cite: "Ce programme vise à assurer l'administration de l'ensemble des programmes confiés au ministère de l'Éducation..." et, je peux continuer, mais déjà, on a là la mission générale du ministère en ce qui concerne l'administration de l'ensemble des programmes. Je pense, le tout respectueusement suggéré, que c'est à cet endroit que nous devons poser des questions au ministre sur ses décisions politiques dans l'administration de l'ensemble des programmes. Vous n'avez pas été sans entendre les chiffres que j'ai cités, à savoir que près de 80% des crédits des programmes confiés au ministère de l'Éducation tels qu'on les retrouve ici se retrouvent dans les salaires. Il me semble que c'est au programme 1, à l'administration générale, au cabinet du ministre, aux cabinets des sous-ministres que se discutent ces choses-là, que se prennent les décisions. Ce n'est pas au programme 4, où on va retrouver le payeur, celui qui va faire les chèques de transfert d'environ 4 000 000 000 $ pour le primaire et le secondaire, que les décisions de cette nature vont se prendre. C'est pour cela que je pose la question à ce programme-là.

Le Président (M. Rodrigue): Au niveau du programme 1, on parle d'assurer l'administration de l'ensemble des programmes confiés au ministère de l'Éducation. Au programme 2, par ailleurs, on parle d'assurer la coordination des différents réseaux et leur fournir les services nécessaires en matière de soutien à l'enseignement et à la gestion. À quel endroit, M. le ministre, avez-vous prévu les sommes d'argent requises pour vos équipes de négociateurs? Est-ce que c'est dans le programme 1, le programme 2, le programme 4, le programme 5 ou le programme 6?

M. Laurin: Pour l'équipe de négociateurs, au programme 1.

Le Président (M. Rodrigue): Très bien. Alors, j'accepte la remarque du député de Marguerite-Bourgeoys et la question est pertinente.

M. Laurin: Cela va d'ailleurs nous coûter 4 000 000 $.

M. Paquette: Si vous permettez, sur une autre question de règlement, tout en me disant d'accord avec la décision que vous venez de rendre, j'allais justement vous faire cette remarque. C'est au programme 1 qu'il faut faire ce débat et c'est important qu'on le fasse.

Maintenant, on arrive à 9 h 45, je ne sais si le député de Marguerite-Bourgeoys serait d'accord pour prolonger quelque peu, pour qu'on puisse terminer si possible l'étude du programme 1, de façon à s'assurer, dans les contraintes de temps qui nous sont imposées, qu'on pourra étudier également les autres programmes, tel que prévu avant le souper.

M. Lalonde: En réponse à la question du député de Rosemont, c'est que j'avais suggéré qu'on trouve d'ici à la fin de semaine une période additionnelle pour nous permettre de couvrir tous les programmes; je ne pense pas qu'ajouter quelques minutes, dix ou quinze minutes, ça suffirait. Est-ce que...

M. Paquette: Compte tenu que les remarques préliminaires se sont prolongées quelque peu, on pourrait...

M. Lalonde: Mais est-ce qu'il serait possible de prévoir jeudi après-midi mercredi soir, c'est impossible, en ce qui me concerne; jeudi, on devait finir jeudi à midi, midi et trente ou 13 heures.

Une voix: II y a une période de questions à 14 heures.

M. Lalonde: Oui, il y a une période des questions à 14 heures, mais, de 15 h 15 à 18 heures, c'est beaucoup plus long que de 22 heures à 22 h 15. Si c'était possible jeudi après-midi, cela nous irait.

M. Laurin: On va y penser.

M. Paquette: De toute façon, M. le Président, cela devient difficile parce que, comme vous pouvez le constater, on doit déplacer beaucoup de personnes.

M. Lalonde: Je regrette et je m'excuse auprès de ces personnes très importantes, mais c'est simplement pour satisfaire la curiosité morbide de quelques petits députés de l'Opposition dont le seul défaut est d'avoir été élus.

M. Paquette: II me semble, M. le Président, que, si cette curiosité était tellement dévorante, on pourrait la satisfaire tout de suite.

M. Lalonde: M. le Président, cela fait une demi-heure que je pose des questions au ministre et ma curiosité, qui est tout à fait justifiée, n'a pas été satisfaite.

Le Président (M. Rodrigue): Je constate qu'il n'y a pas accord pour poursuivre nos travaux. Étant donné qu'il est maintenant 21 h 58, je pense qu'il y a lieu à ce stade-ci d'ajourner les travaux de la commission jusqu'à 10 heures, demain matin.

M. Lalonde: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rodrigue): La commission élue permanente de l'éducation ajourne ses travaux jusqu'à 10 heures, demain matin.

(Ajournement de la séance à 21 h 59)

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