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(Dix heures huit minutes)
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre,
messieurs!
La commission élue permanente de l'éducation reprend
l'étude des crédits du ministère pour l'année
1982-1983.
Les membres de la commission pour la présente séance sont:
M. Brouillet (Chauveau), M. Champagne (Mille-Îles), M. Chevrette
(Joliette), M. Cusano (Viau), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Mme
Dougherty (Jacques-Cartier), M. Hains (Saint-Henri), M. Lalonde
(Marguerite-Bourgeoys), M. Laurin (Bourget), M. Leduc (Fabre), M. Paquette
(Rosemont).
Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. French
(Westmount), Mme Harel (Maisonneuve), M. Paré (Shefford), M. Polak
(Sainte-Anne), M. Proulx (Saint-Jean), M. Rochefort (Gouin), M. Ryan
(Argenteuil), M. Saintonge (Laprairie).
Vous avez adopté les programmes 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 9.
M. le député de Vachon.
M. Payne: Payne (Vachon) remplace Chevrette (Joliette).
Le Président (M. Desbiens): D'accord. Il reste à
étudier les programmes 7, 8 et 11. M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Tout simplement, je ne prévois pas de
remplacement mais au cas où, au cours de la matinée, il y en
aurait parmi les députés de notre côté, j'imagine
qu'il n'y aura pas d'objection à ce qu'ils s'adressent à la
commission.
Le Président (M. Desbiens): S'il est nécessaire au
cours de la matinée de remplacer un député, y aura-t-il
consentement? Consentement.
J'appelle le programme 7. Est-ce qu'il est adopté? La formation
des adultes.
Formation des adultes
M. Laurin: Nous en avons déjà parlé, M. le
Président. Dans mon exposé liminaire, je faisais un bilan de la
situation et le député de Marguerite-Bourgeoys a
déjà eu l'occasion de commenter ce que j'avais à dire
à ce moment. Donc, pour ne pas prendre trop de temps, je ne reprendrai
pas une longue déclaration. Je voudrais me contenter de quelques brefs
commentaires.
En 1981-1982, l'éducation des adultes, comme chacun le sait a
été lourdement touchée par les compressions
budgétaires, aussi bien en ce qui concerne les activités que les
clientèles et le corps professoral. Cependant, comme j'ai
déjà eu l'occasion de le dire, si on examine de plus près
les données et les statistiques de l'année, on pourra faire un
certain nombre de constatations.
La première, c'est que ce sont les activités
d'éducation populaire qu'on appelle aussi parfois socioculturelles dans
les commissions | scolaires qui ont été principalement]
touchées. Lors d'une séance antérieure, j'ai
déjà établi une liste, qui était non exhaustive,
des activités que le ministère a décidé de ne plus
subventionner.
La deuxième constatation, c'est que les compressions
budgétaires ont plutôt affecté les professeurs à
temps partiel et particulièrement les professeurs à temps partiel
qui dispensaient ces activités d'éducation populaire. La plupart
de ces professeurs à temps partiel, d'ailleurs, trouvaient dans cet
enseignement un revenu d'appoint.
La troisième constatation, c'est que ce sont les coûts
d'encadrement administratif qui ont surlout été réduits,
en vertu d'ailleurs d'une décision délibérée du
ministère de l'Éducation. Cette diminution des coûts, qui a
été assez considérable, nous a permis par ailleurs de
sauvegarder un grand nombre d'activités de formation
générale et professionnelle.
On pourrait donc tirer la conclusion que, malgré me année
difficile, nous avons pu en 1981-1982 conserver l'essentiel des
activités du programme et amorcer des réformes administratives en
vue de réduire les coûts de gestion.
Comment abordons-nous maintenant la situation en 1982-1983? Je crois
qu'on pourrait dire que, malgré une situation qui continue d'être
financièrement difficile, le ministère a pu prévoir pour
la prochaine année 1982-1983 les sommes qui vont nous permettre de
conserver la quasi-totalité des activités de formation
effectuées en 1981-1982 et ceci en augmentant de 10,5% les subventions
à l'éducation des adultes.
Je pense qu'il convient de terminer ces brefs commentaires en faisant
état du rapport de la commission Jean, qui a remis au gouvernemement son
rapport final au mois
de février. Évidemment, une bonne partie des
recommandations de la commission Jean touche le ministère de
l'Éducation. Dès la parution du rapport, le ministère de
l'Éducation - et particulièrement la division
générale de l'éducation des adultes - a commencé
à analyser d'une façon exhaustive les recommandations qui
touchent particulièrement l'activité du ministère. En
même temps, le gouvernement a instauré un comité
ministériel composé de plusieurs ministères, dont celui du
Développement social, du Développement économique, du
Développement culturel; ce comité est présidé par
le ministre d'État au Développement culturel et scientifique,
auquel s'ajoutent mes collègues du ministère du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, du ministère
des Communautés culturelles et de l'Immigration et du ministère
de l'Éducation. Ce comité ministériel a pour mandat de
recevoir le rapport et de proposer au Conseil des ministres les
éléments qui pourraient constituer la politique gouvernementale
en matière de l'éducation des adultes. (10 h 15)
Le gouvernement a aussi formé un sous-comité
ministériel composé des sous-ministres des mêmes
ministères dont j'ai parlé. Ce sous-comité a
déjà tenu deux réunions. Je peux dire que tous les
ministères concernés sont en train de terminer leur analyse des
recommandations de la commission Jean et une première réunion du
comité interministériel est prévue pour bientôt.
Nous espérons bien pouvoir présenter au Conseil des ministres,
dès l'automne, une proposition générale touchant notre
politique future de l'éducation des adultes.
M. Cusano: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau.
M. Cusano: La dernière fois qu'on siégait, et
même ce matin, le ministre a mentionné, a donné toute une
liste de cours qui ont été coupés dans l'éducation
populaire. Il est même sorti un peu de son ton ordinaire, parce que cela
a tourné un peu en rigolade, lorsqu'il a donné cette liste de
cours qui ont été coupés. Ce qui est malheureux dans cela,
M. le Président, c'est que le ministre ne réalise pas qu'un
principe fondamental en éducation est le principe "to begin where the
learner is". Dans le cas de l'éducation populaire, ces cours avaient
été instaurés pour attirer à l'éducation
permanente des gens qui avaient quitté l'école depuis longtemps.
C'est une façon de se réintégrer dans le système
scolaire. La façon farfelue dont le ministre a touché ces cours
me laisse croire qu'il n'y a pas beaucoup de sérieux lorsqu'on attaque
l'éducation des adultes.
Au moment où la commission d'étude sur la formation des
adultes vient de rendre public son rapport, lequel, vous le savez, contient
au-delà de 430 recommandations, on ne peut s'empêcher de se
demander si le sort qui lui est réservé s'apparente à
celui de la commission d'étude sur les universités, mieux connu
sous le nom de rapport Angers, en 1978; ou à celui de l'état et
des besoins de l'enseignement collégial, connu sous le nom du rapport
Nadeau, ce qui fait que le gouvernement commande étude sur étude
sans se préoccuper d'y donner suite. Ce gouvernement en est sans doute
rendu à être obligé de créer commission sur
commission pour noyer les véritables problèmes et ainsi passer
outre aux véritables objectifs de mettre en place de vrais
mécanismes de la gestion, de l'évolution du système et de
la formation du perfectionnement et de la main-d'oeuvre dans le cadre de
politiques cohérentes de l'éducation aux adultes, accordant
à toutes les personnes intéressées les services
adéquats et les ressources nécessaires.
Le gouvernement pourra-t-il enfin assurer la réalisation de
l'égalité des chances et des résultats et ainsi permettre,
par l'organisation de ces programmes et par les méthodes
éducatives mises de l'avant, la poursuite de cet important processus de
démocratisation? Le gouvernement sera-t-il capable, M. le
Président, de répondre à ces besoins nouveaux socialement
importants et de s'ouvrir ainsi à cette clientèle de
l'éducation des adultes? Permettez-moi, M. le Président, d'en
douter en me basant sur le vieux proverbe qui dit que le passé est
garant de l'avenir.
En effet, le domaine de l'éducation aux adultes a connu, au cours
des dernières années, un développement
accéléré, polymorphe et parfois désordonné.
La clientèle et les besoins n'ont cessé de croître et ce,
en l'absence d'une politique globale de l'éducation des adultes
réclamée depuis longtemps par les milieux afin de mettre un terme
à ce fouillis administratif. C'est précisément, et on les
félicite, dans le but de dresser le bilan des expériences et des
réalisations dans ce secteur ainsi que pour proposer au gouvernement une
politique cohérente en formation professionnelle et socioculturelle des
adultes, dans une perspective d'éducation permanente, que fut
créée en janvier 1980 la commission Jean.
Si les travaux de cette commission ont ouvert jusqu'ici des perspectives
de renouveau et permettent d'entretenir certains espoirs, ils ont pris
malheureusement fin dans une conjoncture de crise qui pèse lourd sur
l'avenir de l'éducation des adultes. Cette même commission a
été aussi étonnée que l'ensemble des
Québécois et des Québécoises
par l'illogisme des coupures. Dans un de ses communiqués, on le
sait très bien, elle a déclaré qu'elle
dénonçait l'incohérence d'un gouvernement qui, avant
même que la commission n'ait remis son rapport et sous prétexte de
rationalisation budgétaire, charcute les forces vives de
l'éducation des adultes au Québec. Comment comprendre dans un tel
contexte les nombreuses déclarations ministérielles statuant sur
la volonté de l'éducation des adultes au Québec? Il serait
vain d'essayer de trouver une justification logique à la
sévérité des coupures dans ce secteur déjà
sous-développé, d'autant plus que le ministre des Finances, M.
Parizeau lui-même, avait promis l'an dernier, dans une déclaration
devant la coalition nationale contre les coupures à l'éducation
des adultes, que, dès la sortie du rapport de la commission Jean, on
ajusterait les budgets à la valeur - et je répète -
à la valeur de 1981-1982. Le ministre peut-il maintenant nous expliquer
comment il se fait que les budgets de cette année impliquent
plutôt une compression budgétaire de 2% ou 3% et que les coupures
de l'an dernier se maintiennent?
Par ailleurs, le ministre de l'Éducation avait affirmé
lui-même en commission parlementaire, lors de l'étude des
crédits au printemps dernier, que le fait que le secteur de
l'éducation aux adultes soit faiblement protégé expliquait
la décision de couper dans ce secteur. Je le cite, il disait que ce
secteur était plus fragile et plus vulnérable. Ce serait donc ce
genre de contingence qui tiendrait lieu de politique. Au cours de cette
même commission parlementaire, le ministre de l'Éducation
minimisait aussi l'importance des coupures, notamment, en ce qui concerne une
hausse éventuelle des frais d'inscription et la qualité des
services. Il maintenait, et je le cite, que la qualité des cours
n'était pas mise en cause ni la quantité des services
d'enseignement offerts aux adultes en 1981-1982.
L'impact réel des coupures des services offerts à tous les
niveaux du système d'éducation des adultes est cependant beaucoup
plus grave que ne le prétend le ministre. Pour la seule région de
Montréal, sur le territoire de la CECM, cela implique un manque à
gagner de 2 000 000 $ se traduisant par la fermeture de trois centres
fréquentés majoritairement par des gens peu scolarisés,
soit un centre de l'automobile, un centre sur les soins personnels et un centre
de secrétariat et de commerce. Au niveau de la clientèle de la
formation professionnelle à temps plein, ceci signifie une baisse de 1/6
de cette clientèle et fait passer de nombre d'heures/groupes au niveau
de l'enseignement de 750 000 heures/groupes en 1981 à 650 000 pour
1982-1983. Quant aux services d'accueil et de référence, ces
compressions budgétaires amèneront une baisse de 2 400 000 $
engendrant d'autres coupures de postes au niveau de tout le territoire du
Québec. Quand on examine le sort réservé aux organismes
volontaires de l'éducation populaire, on assiste à une croissance
de seulement 700 000 $ pour un total de 4 600 000 $, alors que les besoins sont
de l'ordre de 17 000 000 $.
Bref, comme on peut le constater, il s'agit d'une décroissance de
l'éducation des adultes. Nous sommes en présence de budgets de
fonctionnement non véritablement indexés tandis que les salaires
le sont. Alors que nous assistons à une chute de 50% des
activités en 1981 et à une hausse des frais de scolarité,
tout nous porte à croire qu'il en sera de même pour l'année
qui vient, malgré les promesses énoncées. Comme les
coupures de l'an passé ne sont pas modifiées, le nombre des
adultes inscrits au service de l'éducation des adultes continuera
à décroître. De 225 000 qu'ils étaient en 1980, ils
sont passés à 125 000 adultes en 1981 et la perspective pour 1982
se situe aux alentours de 100 000 inscriptions seulement. Dans le seul domaine
de la formation générale et socioculturelle, il y a
déjà une baisse de 50% au niveau de la clientèle. Par
ailleurs, comme les points de service n'ont pas été
corrigés, d'autres baisses de clientèle et de nouvelles coupures
sont à prévoir. Fait important à souligner, le coût
d'une heure de cours varie de 1 $ à 1,25 $, alors que la commission
Parent avait demandé en 1967, si on s'en souvient, d'implanter le
système de gratuité scolaire pour les services d'enseignement des
adultes.
Des activités sont données dans des groupes plus nombreux
aujourd'hui, dans moins de centres, centres qui sont plus
éloignés et ceci à la moitié de la clientèle
qui était inscrite l'année dernière. Il faut ajouter
à cela que ces privilégiés qui continuent à
recevoir des services paient en moyenne deux fois plus cher que l'an dernier
pour les frais d'inscription qui ont doublé et dans certains cas
même triplé. C'est beaucoup pour être des utilisateurs de
seconde zone d'équipement qu'on a payé de ses propres taxes et
pour recevoir des services qu'on paie encore à même l'impôt
actuel. Les citoyens qui n'ont pas simplement renoncé s'inscrivent
à moins d'activités en raison du coût élevé,
des distances à franchir, et voient ainsi l'atteinte de leur objectif
retardée de plusieurs années. Faut-il rappeler que cet objectif
personnel, dans la plupart des cas, est de l'ordre d'un diplôme du
secondaire V ou d'un cours de métier, de notions de lecture ou
d'écriture, pour pouvoir mieux se débrouiller dans une
société en pleine évolution.
Si on regarde un peu ce que cela veut dire en termes de formation,
à la formation générale à temps partiel qui
comporte des cours conduisant à l'atteinte d'un certificat
de fin d'études secondaires, c'est-à-dire le secondaire V,
on y trouve des citoyens qui se donnent souvent cette formation parce qu'elle
est prérequise à une formation professionnelle ou donne
accès à une formation où la pratique de certains
métiers est régie par des comités paritaires.
Le rapport Jean nous informe qu'il y a ici, dans la province de
Québec, 200 000 analphabètes entre les âges de 15 et 65
ans. Par ailleurs, cette même commission recommande qu'un budget
spécifique soit alloué pour mener à bien une campagne
d'alphabétisation dont la population cible pourrait être
fixée à environ 100 000 adultes.
Cette campagne devrait s'étendre sur cinq ans avec un compte de
dépenses nécessaires estimé à 8 000 000 $ par
année avec indexation subséquente, s'il y a lieu. Face à
cette dernière recommandation, il est inquiétant de constater que
le gouvernement actuel a décidé de ne consacrer à ce
chapitre que 250 000 $ de plus par rapport à l'an dernier, et alors
même que l'UNESCO vient de faire une déclaration - c'est aux Indes
en janvier 1981 - réclamant que l'analphabétisme comme entrave au
développement soit effacé dans tous les pays du monde d'ici l'an
2000.
À ce même chapitre, j'aimerais souligner qu'il y a eu une
diminution - en dépit de ce que le ministre peut dire - de plus de 28,6%
des étudiants qui étaient inscrits l'année
dernière. Je crois que les principales raisons sont les suivantes. Je
l'ai mentionné tout à l'heure. Il y a des services qui ont
été fermés; les frais d'inscription ont plus que
doublé et, dans certains cas où l'on payait 4,65 $ par quinze
heures de cours, ces activités sont passées à 15 $ par
quinze heures de cours, une augmentation de plus de 200%.
J'aimerais mentionner dans... Combien de temps me reste-t-il, M. le
Président?
Le Président (M. Desbiens): II vous reste environ sept ou
huit minutes.
M. Cusano: M. le Président, les coupures dans
l'éducation des adultes sont plus sévères que le ministre
voudrait nous le faire croire, et je pense qu'il faudrait les regarder d'une
façon très réaliste. C'est qu'il faut regarder comment les
frais d'inscription ont doublé et même triplé. De plus,
lorsqu'on parle de la formation des adultes, on parle des gens qui sont le plus
démunis, qui n'ont pas le moyen de se payer ces cours, et pour un
ministère et un gouvernement qui se disent sociaux démocrates,
j'ai beaucoup de difficulté à comprendre comment ils expliquent
cette augmentation des frais d'inscription de la part des étudiants.
J'aurais quelques autres questions à poser au ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: Les commentaires du député sont
abondants...
Le Président (M. Desbiens): Le député avait
mentionné des questions, est-ce que ce sera pour après les
commentaires? Oui. M. le ministre.
M. Laurin: Les commentaires du député sont
abondants, mais, à l'instar de ceux de ses collègues qui ont
traité des divers programmes, ils contiennent des procès
d'intention, des erreurs, des exagérations dont la liste serait trop
longue pour que je puisse les relever un à un, car cela pourrait nous
mener beaucoup plus loin que le terme prévu pour cette commission. (10 h
30)
J'y ai déjà répondu en bonne partie, au
début de nos travaux, en réponse à l'intervention du
député de Marguerite-Bourqeoys. J'y réfère les
membres de la commission aussi bien que la population. Cependant, ces propos de
ce matin m'incitent quand même à quelques commentaires
additionnels.
Je répète que les crédits de 1980-1981 non
seulement ont été maintenus en 1982-1983, mais qu'ils ont
été augmentés de 10%. La majeure partie des
éléments du programme ont été augmentés. Par
exemple, le réseau des commissions scolaires a été
augmenté de 9,1% dont 12% pour la formation générale et
socioculturelle; 17,3%, pour la formation socio-économique et, là
où il y a réduction, c'est justement dans l'encadrement
administratif et pédagogique dont les crédits sont
diminués de 0,7% par rapport à l'an dernier, ce qui confirme
l'affirmation que je faisais au début des travaux de cette commission ce
matin. Il en va de même pour les collèges publics où les
crédits non seulement ont été maintenus et
augmentés, dans toutes les catégories, entre 8% et 10%, mais
surtout les crédits ont été augmentés en ce qui
concerne les autres éléments du programme, c'est-à-dire la
formation socioculturelle que dispensent les OVEP, c'est-à-dire les
organismes volontaires de l'éducation populaire, où les
crédits sont augmentés de 27,9% et où les crédits
également de la formation professionnelle dispensée par les
institutions spécialisées sont augmentés de 164,6%, ce qui
montre bien quand même que nous faisons un effort dans les secteurs
où les besoins sont particulièrement aigus.
Bien sûr, si les ressources de l'État
québécois étaient plus fortes, nous aurions
augmenté davantage ces crédits, car nous sommes bien convaincus,
nous aussi, que c'est là un des secteurs où les besoins croissent
en flèche, témoignent d'une prise
en charge par la population de ses propres besoins et témoignent
aussi de l'émergence de besoins sociaux croissants auxquels les
populations elles-mêmes, avec l'aide de l'État, entendent apporter
des solutions appropriées. D'ailleurs, nous sommes à
étudier actuellement les recommandations de la commission Jean et, comme
je le disais au début, le comité interministériel
proposera une politique globale au gouvernement et il n'est pas du tout
interdit de penser qu'une fois en possession de ces éléments, le
gouvernement fera un effort additionnel.
Ce n'est pas simplement pour noyer le poisson, comme dit le
député, que le gouvernement institue des commissions et, en
particulier, la commission Jean. Dans le domaine de l'éducation des
adultes, il n'y a pas que des problèmes financiers; il y a aussi des
problèmes administratifs, des problèmes d'organisation, des
problèmes professionnels. Mentionnons simplement celui de l'articulation
entre l'éducation des adultes et l'enseignement régulier;
mentionnons également l'importance accordée à l'un ou
l'autre des éléments d'une politique de formation des adultes;
mentionnons celui de l'équivalence des acquis; mentionnons celui de la
certification professionnelle. C'est pour faire le point sur toutes ces
questions que nous avons instauré la commission Jean et je suis heureux
de constater que, parmi les 400 recommandations, le plus grand nombre portent
justement sur des questions pédagogiques, des questions
professionnelles, des questions d'articulation entre le monde de
l'éducation et le monde du travail et il sera possible de donner suite
à ces recommandations sans que nous puissions augmenter d'une
façon considérable les crédits de l'État. Ce sont
pourtant des réformes qu'il nous fallait absolument faire.
Sur le plan financier, encore une fois, j'ai bon espoir que le
gouvernement pourra débloquer les crédits qui nous paraissent
essentiels pour maintenir et développer davantage l'éducation des
adultes dans les secteurs où l'urgence s'impose. Par exemple, dans
l'alphabétisation, déjà le gouvernement, au cours des
récentes années, a augmenté son effort en ce domaine. Nous
savons très bien que les besoins sont beaucoup plus grands que les
ressources disponibles, mais il reste cependant que pour 1981-1982 la
priorité, en ce qui concerne l'alphabétisation, est maintenue
malgré le contexte de restrictions budgétaires. Le gouvernement
accroîtra même les investissements, tant au niveau des
activités de formation qu'au niveau des productions diverses. Par
exemple, des subventions seront accordées à 51 commissions
scolaires et à 22 groupes populaires. Le coût global de ce
programme ALPHA est estimé approximativement, pour 1981-1982, à 2
300 000 $, alors qu'il y avait en 1980-1981 8778 inscrits dans 695 classes,
pour un total de 48 740 heures-groupes de formation. Pour 1981-1982-1983, les
chiffres vont connaître une augmentation relativement
considérable.
Donc, ce n'est pas simplement pour le plaisir de créer des
commissions que nous en créons. Au contraire, nous entendons
étudier avec beaucoup d'attention ces recommandations et y donner suite
dans toute la mesure du possible. Je pourrais dire, d'ailleurs, la même
chose du rapport Angers, que le député a mentionné, ou du
rapport Nadeau car le rapport Nadeau a donné lieu par la suite à
une politique sur les collèges du Québec. Comme j'ai
déjà eu l'occasion de le dire, nous arrivons au terme du
processus qui nous amènera à énoncer un règlement
pédagogique pour l'ensemble des collèges du Québec.
En ce qui concerne le rapport Angers, loin de nous croiser les bras,
comme semble l'indiquer le député, nous avons déjà
mis en oeuvre plusieurs des recommandations de ce rapport. Nous nous
préparons, comme je l'ai d'ailleurs déjà dit lorsque nous
avons discuté des universités, à présenter au
Conseil du trésor de nouvelles hypothèses de financement des
nouvelles clientèles, de nouvelles hypothèses quant au
financement de base des universités qui s'inscrivent directement dans la
foulée, dans le prolongement du rapport Angers. Bien sûr, nous
sommes d'accord avec l'objectif général que tout le monde
partage, d'ailleurs, de l'égalité des chances pour tous les
citoyens et non pas seulement pour les étudiants inscrits aux cours
réguliers, mais il reste que nous devons baliser l'application de ce
principe selon les conditions propres à chacun des secteurs et en
fonction également des ressources disponibles de l'État.
Je voudrais revenir ici sur ce que le député appelle les
frais de scolarité. Nous n'avons pas augmenté les frais de
scolarité. Ce qui a été augmenté, en fonction des
ressources disponibles, ce sont les frais d'inscription mais ces frais
d'inscription, quant à leur nature, quant à leurs taux, ont
été effectués par les commissions scolaires
elles-mêmes dans la limite de leurs responsabilités. Les
informations que nous avons indiquent que l'augmentation de ces taux
d'inscription a varié selon les clientèles desservies, selon la
nature des clientèles desservies. Ceci revient à dire que les
commissions scolaires n'ont pas imposé des taux d'inscription
irrationnels mais, au contraire, des taux qui tiennent compte de la
capacité de payer des diverses catégories de personnes qui
s'inscrivent à ces cours.
De la même façon, le gouvernement n'a pas fermé de
centres qui dispensaient l'éducation des adultes mais, à
même l'enveloppe qui a été dispensée aux commissions
scolaires, les commissions scolaires se sont demandé si elles
pouvaient
maintenir leurs centres d'éducation des adultes. Comme vous le
savez, il y actuellement 79 centres d'éducation des adultes au sein de
nos 248 commissions scolaires. Je peux dire au député qu'aucun de
ces centres d'éducation des adultes n'a été fermé.
Cependant, l'élément de vérité que comporte
l'affirmation du député est peut-être que certains
sous-centres ont été fermés, mais ces sous-centres ont pu
être fermés en fonction de décisions prises par diverses
commissions scolaires quant à l'opportunité de les maintenir,
soit pour des fins d'organisation, soit pour des fins d'administration,
beaucoup plus que pour des fins de services.
La même chose pour les frais de scolarité. Je pense que le
député mélange délibérément ou
inconsidérément frais d'inscription et frais de scolarité.
Le gouvernement n'a pas statué sur les frais de scolarité. Tout
ce qui est survenu de nouveau, ce sont des changements au niveau des frais
d'inscription mais, encore une fois, il s'agit de décisions qui ont
été prises par les commissions scolaires en fonction de l'analyse
qu'elles ont faites de la situation et de leurs besoins.
Lors de la première séance consacrée à
l'étude des crédits, j'ai fait mention de la suppression de
certains cours d'éducation aux adultes. Encore une fois, ces
décisions ont été prises par les commissions scolaires en
coopération avec la Direction générale de
l'éducation des adultes à la suite de réunions, de
rencontres qui ont eu lieu entre les commissions scolaires et notre direction
générale.
Ce que le député a oublié de mentionner, c'est que
les cours ou les activités qui ont été supprimés
l'ont été en fonction de nouvelles analyses des besoins et que,
par ailleurs, il était toujours possible pour une commission scolaire de
maintenir ses cours à condition que ses activités puissent
s'autofinancer, soit par une augmentation des frais d'inscription, soit par un
réaménagement des structures administratives qui pouvaient en
diminuer les coûts. Je pense qu'il importe d'apporter ce commentaire pour
bien faire comprendre les perspectives dans lesquelles les décisions ont
été prises. Je pourrais continuer ainsi durant longtemps, mais je
pense que je préfère attendre les questions du
député pour pouvoir lui donner des réponses plus
concrètes.
Le Président (M. Desbiens): M. le
député.
M. Lalonde: M. le Président, je trouve cela encore amusant
ce matin que le ministre fasse une grande distinction entre "frais
d'inscription" et "frais de scolarité". Je crois que ce qui est
important, c'est le montant que l'adulte doit débourser. Que ce soit
appelé "frais d'inscription" ou "frais de scolarité" ou de
n'importe quel autre mot que le ministre veuille inventer, cela n'a pas
d'importance. C'est le fait que cet individu, pour obtenir des cours, doit
débourser un certain montant d'argent. Le ministre peut-il nous dire,
d'après les informations du ministère de l'Éducation, quel
est exactement le montant comparé à l'année
dernière qu'un étudiant, dans n'importe quelle des formations,
doit aujourd'hui débourser? Cela, c'est précis, j'aimerais savoir
combien cela coûte de plus à cet étudiant? Pour celui qui
veut suivre un cours en mécanique, par exemple, combien cela lui
coûte-t-il de plus cette année par comparaison avec l'année
dernière?
M. Laurin: Je viens justement de répondre au
député que la très grande partie de ces décisions,
pour ne pas dire la totalité, a été prise par les
commissions scolaires dans le respect de leur autonomie, à même
les enveloppes budgétaires...
M. Lalonde: ... j'ai demandé le montant, s'il vous
plaît.
M. Laurin: ... qui leur sont consenties. Donc, il serait
très difficile pour moi de donner une réponse précise au
député, puisque c'est une décision qui relève des
commissions scolaires, et il nous faudrait faire une sorte d'inventaire de
toutes les décisions prises par les diverses commissions scolaires. Pour
essayer de contenter davantage le député, je demanderais à
M. Girard d'ajouter ses propres précisions.
Pour l'exemple que vous avez donné, celui de la mécanique
automobile, pour les étudiants en formation professionnelle inscrits
à temps plein, il n'y a aucun frais de scolarité. Donc, pour
l'exemple que vous avez donné, aucun frais d'inscription n'est
exigé de l'étudiant.
Pour ce qui est des taux qui ont été décidés
par les différentes commissions scolaires, nous pourrons en faire
l'analyse au terme de la présente année, à partir des
états financiers qui seront présentés par chacune des
commissions scolaires. C'est notre intention de constater quels taux ont
été imposés par les différentes commissions
scolaires.
M. Lalonde: Vous voulez nous dire qu'à ce moment-ci vous
n'êtes pas au courant de ces déboursés que les gens doivent
payer?
M. Laurin: La réponse que je vous donnerais est que je
ferais appel à la nouvelle politique que nous avons instaurée
pour l'allocation des ressources budgétaires dans les commissions
scolaires. Je pense que tous sont d'accord sur son orientation: ou on
décentralise ou on ne décentralise pas. Le
ministère de l'Éducation aurait eu le choix d'imposer pour
ce qui est de l'éducation des adultes des taux uniformes; on a
pensé que ce n'était pas la meilleure solution et qu'il fallait
laisser aux commissions scolaires une autonomie qu'elles réclament et
avec laquelle tous sont d'accord pour fixer les taux d'inscription suivant les
clientèles et à partir des particularités propres à
chacune des commissions scolaires. Les contrôles, comme on l'a
indiqué à plusieurs reprises, seront faits a posteriori à
partir de l'analyse des états financiers.
M. Beaudoin aurait une remarque à ajouter. (10 h 45)
Comme les frais d'inscription varient d'une commission scolaire à
l'autre et d'un type de cours à l'autre, c'est à la fin de juin
que nous recevrons des commissions scolaires toutes les données qui nous
permettront de savoir très exactement, dans chaque commission scolaire,
quel a été le taux d'inscription imposé. À ce
moment-ci, nous n'avons pas ces données; c'est à la fin de juin
qu'elles nous parviendront.
M. Cusano: M. le ministre...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau.
M. Cusano: ... en janvier dernier, le ministre
fédéral, M. Axworthy, rendait publiques, lors d'une rencontre
fédérale-provinciale à Vancouver, les propositions du
gouvernement fédéral sur la nature des besoins et des
priorités dans la formation des adultes. On sait que la direction
générale de l'éducation des adultes s'est vu confier
depuis un mandat de négociation sur lesdites propositions. Comme il va
de l'intérêt de plusieurs centaines de milliers de
Québécois, il nous apparaît important que le mandat de
négociation de même que les contre-propositions du Québec
soient rendus publics. Je demande au ministre: Quand a-t-il l'intention de le
faire?
M. Laurin: M. le Président, je pense que le
député fait une légère erreur. Ce n'est pas au
ministère de l'Éducation du Québec qu'a été
confié le mandat de négocier avec le ministre Axworthy, mais bien
au ministre du Travail. Cette proposition est actuellement à
l'étude au ministère du Travail dans la perspective du mandat qui
lui a été confié. Comme on le sait, un certain
délai a été convenu entre les autorités
fédérales et les autorités provinciales, un délai
de cinq mois, pour permettre une étude plus approfondie non seulement
des propositions fédérales, mais pour permettre aussi aux
provinces de mieux pousser leurs propres études, afin d'en arriver, si
possible, à une meilleure articulation pour ne pas dire à une
entente.
Cette étude se poursuit actuellement au sein du ministère
du Travail en collaboration avec certains autres ministères, dont le
ministère de l'Éducation. Ces études ne sont pas
terminées à l'heure actuelle, mais, dès qu'elles le seront
et qu'un mandat de négociation formel et final sera confié par le
gouvernement au ministère du Travail, il me fera plaisir d'en informer
l'Opposition ou le ministre du Travail se fera sûrement un plaisir d'en
informer l'Opposition.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Vachon.
M. Payne: M. le Président, je remarque effectivement que
les propositions du gouvernement fédéral ont été
déposées tout dernièrement, c'est-à-dire dans les
derniers mois, si je ne m'abuse. Les propositions iront seulement
jusqu'à la fin d'août, je crois, plutôt que l'année
prochaine. Le gouvernement fédéral n'a pas fait très
tôt ses propositions au gouvernement du Québec, mais
l'échéance arrive très tôt.
Il y a quelque chose qui m'intéresse beaucoup. Peut-être
que le ministre pourrait clarifier la politique là-dessus. Il semble que
la politique du gouvernement fédéral va de plus en plus vers la
spécialisation. Or, le député de l'Opposition a
souligné tout à l'heure qu'il était très
préoccupé par la formation générale. En
réalité, ce que je perçois, c'est que la politique du
gouvernement du Québec est hautement pénalisée par la
politique actuelle du fédéral. À titre d'exemple, le
programme transition de travail qui a comme effet d'améliorer la
réinsertion des femmes au travail, c'est quelque chose qui est
proposé par le gouvernement du Québec, c'est un exemple de
programme de formation générale qui aide la plus grande partie de
la population. Or, la proposition du gouvernement fédéral,
d'Ottawa, favorise davantage une très minime partie de la
clientèle.
D'autre part, n'est-ce pas aussi vrai que l'évolution des
subventions, en ce qui concerne, par exemple, le programme OVEP, a
augmenté de presque 30% cette année? L'éducation populaire
- je peux en témoigner, parce que j'ai beaucoup d'exemples sur la rive
sud de Montréal - va très bien. C'est parce que le gouvernement
du Québec, je pense, le ministère de l'Éducation a tenu un
rapport très étroit avec les milieux. Voici ma question au
ministre: Comment vont les discussions avec le fédéral pour
encourager davantage le fédéral pour qu'il puisse favoriser,
à mon avis, quelque chose de plus important, l'éducation en
général plutôt que la spécialisation?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: En fait, les négociations n'ont pas
véritablement commencé à l'heure actuelle. Ce qui nous a
été présenté comme d'habitude, ce sont des ukases,
des diktats s'appuyant d'ailleurs sur des promesses de mises de fonds
additionnelles auxquelles on prétend contraindre les provinces. Donc, il
n'y a pas eu de véritables négociations. Ce que nous savons
cependant et ce qui ressort très bien de la lecture des rapports
fédéraux dont le rapport Dodge et le rapport Allmand, c'est que
les politiques de main-d'oeuvre du fédéral qui constituaient
déjà une intrusion dans les juridictions des provinces ont
été un échec lamentable, malgré les mises de fonds
considérables qui les appuyaient. Dans ces rapports que je viens de
mentionner, les constatations sont évidentes, les approches jusqu'ici
utilisées par le gouvernement fédéral n'ont pas permis de
combler la demande dans les secteurs de main-d'oeuvre où il y avait et
où il y a encore pénurie. C'est justement pour renouveler ces
programmes, pour les moderniser que le fédéral entend maintenant
utiliser une nouvelle approche et présenter de nouveaux programmes. Si
l'avenir est garant du passé comme vient de le dire le
député...
M. Lalonde: C'est le contraire, c'est le passé qui est
garant de l'avenir, je pense.
M. Laurin: Si le passé est garant de l'avenir, on peut
penser que ces programmes ne réussiront pas, encore une fois, à
atteindre les objectifs. D'ailleurs, je rappelle au député que
l'ensemble des ministres de l'Éducation réunis d'une façon
régulière ont dénoncé déjà à
deux reprises l'approche générale utilisée par le
fédéral pour plusieurs raisons. D'abord parce que, encore une
fois, cela constitue une intrusion insidieuse et marquée dans un champ
de compétence qui appartient strictement aux provinces. En somme, le
fédéral essaie par le biais de sa politique d'emploi et de sa
politique de main-d'oeuvre de faire des entorses aux juridictions des
provinces, comme il l'a toujours fait. Deuxièmement, son approche nous
apparaît, aux ministres de l'Éducation des provinces, mal
orientée. On le sait, d'ailleurs certains ministres
fédéraux l'ont dit, elle est orientée vers ce qu'on
appelle des mégaprojets. Les ministères fédéraux
sont hypnotisés par ces mégaprojets qui tombent d'ailleurs les
uns après les autres à la suite des événements que
l'on sait. On sent bien à la lecture des rapports Dodge et Allmand que
ce qui préoccupe le fédéral, c'est la mobilité des
travailleurs, c'est la tentative d'amener les travailleurs de toutes les
provinces et particulièrement des provinces centrales et des provinces
maritimes à diriger une main-d'oeuvre de plus en plus
spécialisée vers les projets de développement
pétrolier de l'Ouest. Je ne sais pas maintenant comment M. Axworthy ou
M. Lalonde pourront modifier ces projets à la suite de l'échec du
projet Alsands en particulier ou du projet Esso. La disparition de ces
mégaprojets entraînera, je l'espère, une
réorientation de l'approche jusqu'ici utilisée.
Le Québec a des raisons additionnelles pour s'opposer à
cette approche. Bien sûr, nous sommes en faveur d'une formation
professionnelle de plus en plus spécialisée dans les secteurs
où il y a pénurie. Mon collègue du développement
économique vient de le rappeler dans son exposé qui porte sur le
virage technologique. Il est bien évident que le Québec devra
faire un effort additionnel dans la formation professionnelle
spécialisée susceptible de nous procurer les ressources humaines
nécessaires dans les secteurs où le Québec doit faire
porter son développement, comme par exemple, les technologies nouvelles
en matière d'électronique, en matière de robotique, en
matière de télématique, en matière
d'aéronautique également. Mais ce que le projet
fédéral ne respecte pas, c'est précisément les
priorités que se donnent elles-mêmes les provinces dans des champs
ou des secteurs dont elles sont immédiatement responsables. Si le
fédéral veut vraiment coopérer avec les provinces pour
augmenter la qualité de la formation professionnelle dans des secteurs
que nous nous entendons à reconnaître comme urgents ou
nécessaires, je pense qu'on pourrait s'y prendre bien autrement.
On pourrait d'abord demander aux provinces leur propre analyse de leurs
besoins et, ensuite, prévoir des modes de collaboration, soit
financières, soit administratives qui permettent justement aux provinces
d'élaborer des politiques et de poser des gestes susceptibles de les
aider à atteindre ces objectifs. Mais, encore une fois, ce n'est pas du
tout l'approche qui semble se dessiner. Le gouvernement fédéral
nous menace depuis quelques mois de déposer bientôt un projet de
loi à la Chambre des communes et on nous dit que, tant que ce projet de
loi ne sera pas déposé, il n'est pas très utile de
commencer à négocier. Il est possible que ce projet de loi soit
déposé dans les quelques semaines qui suivent, mais nous nous
attendons - toutes les provinces -encore une fois à la
répétition de cette attitude arrogante, hautaine,
méprisante du fédéral à l'endroit des provinces qui
consiste à leur dire: Nous avons l'argent, nous avons des ressources qui
dépassent nos compétences, vous avez des besoins plus amples que
ceux que vos ressources vous permettraient de combler, nous profitons de cette
situation de force pour vous imposer nos solutions.
Ce n'est pas une attitude de fédéralisme coopératif
la plus excitante qui
soit. D'ailleurs, cela est parfaitement conforme avec l'attitude du
premier ministre, M. Trudeau, qui a annoncé il y a déjà
quelques mois que le fédéralisme coopératif est mort et
qui insiste pour une visibilité parfaite des efforts du
fédéral, même si ces efforts se font au détriment
des compétences propres aux provinces et que le "BNA Act", dans les
parties qui n'ont pas été modifiées, continue de leur
assurer.
Nous nous préparons à faire face à la musique,
évidemment, et nous nous y préparons en concertation avec toutes
les autres provinces mais, encore une fois, quand le moment sera venu il fera
plaisir à mon collègue du Travail ou à moi-même
d'annoncer à l'Opposition les positions que le gouvernement du
Québec entendra prendre non seulement pour faire face à cette
nouvelle intrusion fédérale, mais surtout pour travailler d'une
façon positive à l'analyse et, surtout, à la
réalisation de nos propres besoins.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Vachon pour compléter sur la même question.
M. Payne: Très brièvement, je pense qu'en tant que
parlementaires québécois on devrait être très
vigilants pour la mise en application du programme PFMC parce que les remarques
du ministre Lalonde sont encore fraîches dans ma mémoire alors
qu'il disait dans mon comté, il y a à peine deux semaines, que le
gouvernement du Québec se traîne les pieds en matière
d'éducation. J'ai remarqué tout à l'heure qu'effectivement
le gouvernement du Québec a reçu les propositions du gouvernement
fédéral il y a à peine deux mois pour une période
qui arriverait à échéance dans deux mois, à la fin
d'août 1982, lorsque normalement elle devrait arriver à
échéance au printemps de 1983. Je pense qu'il est à
remarquer que les ententes fédérales-provinciales en ce qui
concerne, dans un autre ordre d'idées, les ententes-cadres
Québec-Ottawa ont augmenté - c'est intéressant à
noter - de 120% depuis l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois par rapport au passé. En tout cas, j'aimerais
souligner qu'on doit être très vigilant.
L'autre remarque - je ne veux pas prendre trop de temps - c'est
plutôt une exhortation en ce qui concerne l'enseignement de la langue
seconde. Je remarque que les normes heures-groupes pour 1980-1981 ont
augmenté par rapport à l'année précédente;
48 000 heures-groupes par rapport à 28 000 pour 1979-1980. Je trouve que
cela est un encouragement, je n'ai pas les détails budgétaires
parce qu'ils ne sont pas dans les crédits, mais ça semble
être quelque chose d'encourageant. Le ministre pourrait peut-être
faire des remarques là-dessus, à savoir si l'enseignement du
français, particulièrement du français langue seconde, est
vraiment à la hausse en termes de quantité et en termes de
qualité. Merci. (11 heures)
M. Laurin: M. le Président, il est vrai que nous ayons
augmenté considérablement cet élément du programme,
mais nous savons encore une fois que l'effort qu'il nous faudrait faire est
encore plus considérable, parce que nous constatons, en effet, que plus
le Québec devient français, plus les anglophones, en particulier,
sentent le besoin de compenser leur connaissance nulle ou partielle d'une
langue qui leur devient de plus en plus essentielle pour trouver un emploi et,
particulièrement, un emploi bien rémunéré. Nous
sommes très conscients du besoin, c'est la raison pour laquelle nous
faisons un effort additionnel et nous tentons, dans la mesure de nos moyens, de
continuer à accroître régulièrement cet
élément du programme.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Le ministre a mentionné tout à l'heure
la question de la robotique et de la télématique. Pourrait-il
nous dire, dans ces deux domaines, les gestes concrets qu'il a faits ou qu'il a
l'intention de faire afin de recycler la main-d'oeuvre et de familiariser les
gens avec ces techniques?
M. Laurin: J'ai déjà dit, lors de l'étude
des crédits de l'enseignement collégial, qu'il y avait
actuellement 26 programmes d'informatique ou de robotique dans nos
collèges où se dispense l'enseignement régulier. Je pense
que j'ai déjà eu aussi l'occasion de dire que les programmes de
l'éducation des adultes comportent un accroissement dans l'enseignement
de ces diverses disciplines et je sais qu'il y a des négociations en
cours actuellement pour que nous continuions à accroître le nombre
de nos programmes d'éducation des adultes affectés à
l'enseignement de ces disciplines. Pour répondre d'une façon plus
technique à la question du député, je vais demander
à M. Girard de compléter ma réponse.
Pour ce qui est de l'éducation des adultes dans les
cégeps, on a fait le même effort que pour l'enseignement
régulier et, depuis 197B-1979, la progression a été la
suivante: en 197B-1979, 7 cours d'informatique dans 4 cégeps; en
1979-1980, 3 cours dans 3 cégeps; en 1980-1981, 12 cours dans 9
cégeps; en 1981-1982, 17 cours dans 13 cégeps et, pour 1982-1983,
25 cours dans 17 cégeps. Donc, la priorité pour ce qui est de
l'informatique, pour ce qui est de la robotique, pour ce qui est plus
particulièrement des microprocesseurs est affirmée, je pense,
dans ces chiffres que je
viens de vous donner.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau... Le programme 7 est-il adopté?
Une voix: Sur division.
Enseignement privé
Le Président (M. Desbiens): Adopté, sur division.
Programme 8, sur l'enseignement privé. M. le ministre.
M. Cusano: Si vous permettez, j'ai seulement une question
à poser au ministre, parce qu'il nous reste d'autres programmes.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Dans le domaine de l'école privée, il
n'y a pas trop longtemps, certains syndicats de la FNEQ associés
à la CSN nous ont fait une demande pour négocier leur entente
collective. À cause des coupures que vous avez instaurées dans la
loi 11, les conditions de travail pour ces instituteurs se sont vraiment
détériorées. Ils ont demandé de négocier une
entente collective à une table centrale. Pourrait-on savoir la
réponse que vous avez donnée aux syndicats et quelles sont vos
intentions, brièvement, s'il vous plaît?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: Oui, M. le Président, je tenterai de
répondre à cette question du député dans le cadre
de mes remarques générales d'introduction.
Je voudrais d'abord dire que l'adoption de la loi 11, au printemps de
1981, a permis d'effectuer à l'enseignement privé les
compressions budgétaires qui étaient imposées au secteur
public. Pourtant, malgré ces compressions, aucune des catastrophes que
l'on nous annonçait ou que l'on prévoyait n'a eu lieu. En effet,
après un an, je peux dire à l'Opposition que toutes les
institutions privées subventionnées ont pu continuer leurs
activités. Par ailleurs, en décembre 1980, le ministère a
ajouté près de 2 000 000 $ de subventions aux institutions
privées pour les enfants en difficulté d'adaptation. Cette
subvention additionnelle portait le taux d'augmentation pour ces institutions
de 7,6% à 14%, soit un taux d'augmentation égal à celui
observé dans le public. On peut donc dire maintenant à coup
sûr que ce type d'institution privée est financé à
100%. Quelle sera la situation en 1982-1983? En appliquant les prescriptions de
la loi 11, les institutions privées subventionnées
bénéficieraient, en 1982-1983, d'un taux d'augmentation d'environ
13%. Par ailleurs, depuis près d'un an, le ministère de
l'Éducation explore, avec la collaboration des associations
d'établissements privés, c'est-à-dire l'AIES, l'ACQ,
l'AIPEQ et les écoles juives, des hypothèses d'évolution
de ce secteur d'enseignement. Ces discussions se poursuivent et viennent
d'être élargies par des rencontres régionales avec les
directions des institutions privées. C'est au terme de ce processus de
discussion et de consultation, mais pas avant, que le ministère fera
connaître ses intentions. Donc, je puis répéter que ces
travaux de consultation ne sont pas orientés vers une suppression du
secteur privé, mais vers un arrimage plus cohérent et plus
efficace avec l'ensemble du système québécois
d'éducation.
Quant à la place des institutions privées à la
table centrale pour les prochaines négociations, le gouvernement n'a pas
encore annoncé sa décision, décision, par exemple, qui
serait d'amender ou non la loi 55. Pour le moment, je puis dire que le
gouvernement ne penche pas tellement vers une solution qui l'amènerait
à amender la loi 55, mais, encore une fois, la décision n'est pas
finale et elle sera probablement annoncée d'ici quelque temps.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Viau.
M. Cusano: Seulement une autre petite question. Dans les fuites
sur la restructuration scolaire, les documents que nous avons eus en main
laissent le chapitre sur l'école privée en plan. Il semble qu'il
y aurait... Je sais que vous vous hâtez lentement, comme vous l'avez dit
en Chambre. À quel moment pensez-vous... Je sais que vous avez un peu
répondu à cela, mais êtes-vous capable de me donner une
date plus ou moins précise, à savoir quand le gouvernement va se
prononcer sur le sort de l'école privée?
M. Laurin: II est probable que le Conseil des ministres
poursuivra son étude sur ce projet au cours des prochaines semaines et
qu'on peut, sans pouvoir le garantir, prévoir qu'une décision
sera prise au cours du mois de juin.
M. Cusano: Merci.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 8 est-il
adopté?
Une voix: Sur division.
Le Président (M. Desbiens): Le programme 8 est
adopté sur division. J'appelle le programme 11. Les programmes 9 et 10
ont été adoptés lors d'une autre séance de la
commission. Programme 11, la
Charte de la langue française. M. le ministre, avez-vous des
remarques préliminaires?
M. Laurin: M. le Président, avant que nous n'abordions
l'autre élément, je demanderais la permission de la commission
pour déposer, ici à la commission, le projet de politique
d'enseignement professionnel dont...
M. Cusano: Ah, bon!
M. Laurin: ... j'ai fait état récemment avec, bien
sûr, les...
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, comme il n'y a
pas de dépôt de documents en commission, vous pouvez tout
simplement les faire distribuer.
M. Laurin: Non, c'est seulement pour les faire distribuer...
Charte de la langue française
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, sur le
programme 11.
M. Laurin: M. le Président, dans le cahier que j'ai fait
parvenir à l'Opposition, en réponse à sa demande, sur
l'année écoulée, j'ai inclus un bilan pour l'année
1981-1982 des activités de l'Office de la langue française, ainsi
que sur ses perspectives, son avenir. C'est un texte que j'aurais pu lire
à la commission, mais comme il est très long et que, par
ailleurs, il contient des renseignements intéressants et importants, je
demanderais à la commission la permission de ne pas lire ce texte, mais
de le déposer, pour qu'il puisse apparaître au compte rendu des
travaux de la commission.
M. Lalonde: M. le Président, je n'ai pas d'objection, sauf
que je pensais que c'était une tradition qui était
terminée de permettre aux intervenants de déposer un texte sans
le lire.
M. Laurin: Autrement, je peux le lire.
M. Lalonde: Je suis d'emblée d'accord que tous les textes
du ministre soient déposés plutôt que lus. Je suis
d'accord, si cela se fait, il n'y a pas de problème.
Le Président (M. Desbiens): II n'y a jamais de
dépôt en commission parlementaire, vous avez parfaitement
raison.
M. Lalonde: Ce que le ministre demande, c'est que son texte soit
reproduit dans le journal des Débats, comme s'il avait été
lu.
Le Président (M. Desbiens): Ce n'est pas dans les
habitudes. Vous allez être contraint soit de le lire ou...
M. Lalonde: M. le Président, il a été
distribué aux membres de la commission, nous en avons pris
connaissance...
M. Laurin: Le journal des Débats va plus loin, il atteint
plus de personnes que...
M. Lalonde: Que le ministre fasse une conférence de
presse, je n'ai pas d'objection.
Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! M.
Lalonde: II nous reste une heure.
Le Président (M. Desbiens): Ce qui se passe, soit que vous
en fassiez une présentation orale à la commission, pour qu'il
puisse être reproduit au journal des Débats, autrement le texte
peut être gardé aux archives, sans être inséré
au journal des Débats.
M. Laurin: D'accord, je vais essayer de résumer. Depuis
l'adoption de la Charte de la langue française en 1977, l'office a
consacré la majeure partie de ses efforts à la mise en place de
mécanismes conduisant à la francisation de l'administration et
des entreprises employant plus de 50 personnes au Québec. Qu'en est-il
pour 1981-1982? Je rappelle que le processus de certification doit être
terminé à la fin de 1983. Au 31 mars 1982, les deux tiers du
temps prévu pour l'exécution de cette opération
étaient écoulés et les deux tiers de la tâche
avaient été accomplis.
Au sens de la charte, les grandes entreprises sont celles qui emploient
plus de 100 personnes au Québec. Elles sont au nombre de 1609. L'analyse
de leur situation linguistique est terminée, sauf pour 26, soit 1,6%
d'entre elles seulement. Dans 341 cas, soit 21,2%, le français a
déjà atteint le niveau d'utilisation demandé par le
législateur et un certificat à cet effet a été
délivré. L'office a aussi délivré des certificats
de francisation à 606 autres entreprises, soit 37,6%, qui ont entrepris
de réaliser un programme de francisation.
Il faut noter que l'application des programmes de francisation à
l'intérieur des sièges sociaux et des centres de recherche peut
faire l'objet d'ententes particulières avec l'office. Quand une telle
entente est en vigueur, ces sièges sociaux et ces laboratoires sont
présumés respecter la charte. Elles permettent que l'anglais soit
la langue de fonctionnement, mais visent à augmenter la présence
du français. Je peux informer l'Opposition que nous avons conclu, avec
ce genre de sièges sociaux et de centres de recherche, 250 ententes sur
un
maximum possible de 300. Malgré le cas de certaines entreprises
qui accusent des retards, le processus de francisation progresse selon les
attentes du législateur. Parmi celles qui emploient plus de 500
personnes, il n'y en a qu'une quinzaine, soit environ 5% d'entre elles, qui,
pour diverses raisons, n'ont pas encore accepté de participer au
processus de certification. (11 h 15)
Les petites et moyennes entreprises. Ces entreprises sont celles qui
emploient entre 50 et 100 personnes au Québec. Elles sont au nombre de
2297, dont 2198, soit 95,6%, ont déjà fourni à l'office
les renseignements généraux demandés. 91% d'entre elles,
soit 2000 sur 2198, ont déjà procédé à
l'analyse de leur situation linguistique et ont soumis des projets de
programmes de francisation. L'office a approuvé les programmes de
francisation de 34% d'entre elles, soit 682, et il a reconnu, dans 341 autres
cas, soit 17%, que l'entreprise fonctionnait déjà en
français.
Dans les PME comme dans les grandes entreprises, nous remarquons qu'il
existe des retards dans l'exécution des programmes de francisation. Nous
sommes conscients que, en période de difficultés
économiques, les entreprises font face à de nouvelles
contraintes, mais nous ne devons pas pour autant oublier l'objectif final qui
est de faire du français la langue normale et habituelle du travail le
plus tôt possible.
Passons maintenant à l'administration. Le processus de
certification et de francisation des organismes de l'administration est encore
plus avancé que celui des entreprises. Nous avons déjà mis
en place les mécanismes nécessaires pour s'assurer que les
programmes de francisation sont exécutés conformément aux
échéanciers convenus. Les dossiers de tous les organismes
devraient normalement avoir été traités avant le 31
décembre 1983. Nous dénombrons 3411 organismes, au 31 mars 1982.
L'office avait délivré à 2026 d'entre eux un certificat
stipulant qu'ils s'étaient conformés à la charte. De plus,
il avait approuvé le programme de francisation de 374 autres
organismes.
Nous remarquons, dans ce secteur, les répercussions des efforts
faits au cours des années antérieures. L'office a entrepris de
franciser l'administration en commençant par les organismes les plus
importants. Les fournisseurs de ces derniers qui sont
généralement les mêmes que pour les plus petits organismes
ont déjà effectué les changements prévus à
la charte. Il en résulte que les produits et les services fournis aux
organismes de l'administration qui adoptent maintenant un programme de
francisation sont de plus en plus conformes à la charte.
Sur 246 organismes scolaires, 115 ont un certificat de conformité
à la charte et 37 exécutent un programme de francisation. La
situation est dans l'ensemble satisfaisante, bien qu'il est à souligner
que plus nous approchons des échéances, plus nous rencontrons des
îlots de résistance. On invoque diverses raisons,
particulièrement d'ordre financier, pour retarder l'exécution de
programmes de francisation.
Les services de santé et les services sociaux comptent 1280
organismes, dont 1047 ont reçu de l'office un certificat de
conformité à la charte. De plus, 135 autres organismes sont en
voie d'exécuter un programme de francisation. Il y a cependant encore
beaucoup à faire dans certains milieux hospitaliers anglophones pour que
les patients de langue française soient assurés d'obtenir dans
leur langue, partout et en tout temps, les services auxquels ils ont droit car
nous remarquons souvent une absence de volonté de travailler en
français. En plus de priver les patients francophones du droit
d'être soignés dans leur langue, cette attitude oblige les autres
professionnels de la santé à travailler en anglais, les privant
eux aussi d'un autre droit linguistique fondamental que vise à
protéger la charte. Les infirmières et les infirmières
auxiliaires réussiraient sans doute mieux aux tests de français
si elles avaient l'occasion d'utiliser cette langue au travail. Dans
l'ensemble, cependant, nous devons reconnaître qu'il y a eu des
progrès.
Sur 1800 organismes municipaux du Québec, 1117 ont un certificat
de conformité et 195 sont en train d'exécuter un programme de
francisation approuvé par l'office. Nous déplorons des retards
dans la francisation de l'affichage et de la signalisation routière sans
qu'il y ait eu nécessairement négligence de la part des
organismes municipaux. L'instruction générale sur la
signalisation routière, qui vient d'être publiée par le
ministère des Transports, et le règlement sur l'autonomie de la
Commission de toponymie vont continuer, bien sûr, à
améliorer davantage la situation. L'office accepte quand même de
leur délivrer des certificats de conformité étant convenu
avec ces organismes que ces deux points, dont la publication vient d'être
annoncée dans un cas et le sera bientôt dans l'autre, seront
corrigés dans un avenir prochain.
Quant aux ordres professionnels, les candidats doivent démontrer
qu'ils ont du français une connaissance appropriée à
l'exercice de leur profession. Au cours de l'année
écoulée, ces tests ont fait l'objet de critiques dans les
médias d'information. Nous avons invité une vingtaine de
journalistes, en majorité de langue maternelle autre que
française, à venir passer les mêmes examens pour leur
permettre d'en juger par eux-mêmes le niveau de difficulté. Leur
réaction a été unanimement favorable. Le taux global de
réussite aux tests depuis leur instauration
témoigne d'ailleurs de leur facilité. 68% des candidats
ont réussi à la première tentative et 84% ont
réussi après plus d'un essai. Si l'on exclut les
infirmières et les infirmières auxiliaires, 81% des candidats ont
réussi la première fois et 88% ont réussi après
deux ou plusieurs essais. J'ai annoncé, par ailleurs, une
révision des tests qui se poursuit depuis quelque temps et je suis
heureux de dire que ces tests pourront commencer à être
utilisés dès la fin de juin.
Quant à l'affichage public, la Charte de la langue
française prévoit que cet affichage doit se faire uniquement en
français sauf dans certains cas spécifiques. Cette disposition
est en vigueur depuis 1977, mais la loi accordait un délai jusqu'au 1er
septembre 1981 à ceux qui avaient installé des affiches bilingues
pour se conformer à la Loi sur la langue officielle de 1974,
c'est-à-dire la loi no 22. En vue de cette échéance,
l'office a conduit une importante campagne d'information et il nous semble
évident qu'elle a porté des fruits tout comme celle qui l'avait
précédée l'an dernier sur les raisons sociales. À
l'été 1981, plus de 95% des entreprises avaient une raison
sociale en langue française. Celles qui avaient uniquement un nom
anglais y ont ajouté une version française bien que de plus en
plus de raisons sociales soient devenues unilingues françaises, en
particulier dans les régions de Montréal, Sherbrooke, l'Outaouais
et la Côte-Nord.
Parlons, durant quelques minutes, de l'action du gouvernement
fédéral. Il existe une contradiction fondamentale entre les
objectifs de la Loi sur les langues officielles du Canada et la Charte de la
langue française. La première cherche à promouvoir le
bilinguisme institutionnel alors que la dernière cherche justement
à y mettre fin. Traditionnellement, le bilinguisme du gouvernement
fédéral a consisté à permettre à ses
employés francophones au Québec d'utiliser leur langue en plus de
l'anglais lorsque cela n'obligeait pas leurs interlocuteurs à utiliser
le français. Des changements fondamentaux s'avèrent
nécessaires en ce qui a trait à la langue des communications
internes. Il en va de même pour la langue de communication avec les
entreprises. La tâche est gigantesque et les obstacles très
nombreux parce que les anglophones contrôlent massivement l'appareil
administratif fédéral. Pour l'apprécier, il suffit de lire
les rapports que le commissaire aux langues officielles publie chaque
année. Des exemples d'accrocs à la Loi sur les langues
officielles y foisonnent et c'est une question qui a malheureusement peu
d'écho au Parlement fédéral ou dans la presse.
L'équilibre entre les deux groupes linguistiques que prétend
rechercher l'État fédéral s'avérera un leurre tant
et aussi longtemps qu'on ne reconnaîtra pas le caractère
français du Québec. Aussi longtemps que la région de
Montréal sera considérée territoire bilingue par le
gouvernement fédéral, l'anglais continuera d'être la langue
largement dominante des institutions fédérales et le
français réservé aux communications locales.
Passons aux questions terminologiques. Lorsqu'il fut mis sur pied en
1962, l'Office de la langue française s'occupait presque exclusivement
de questions linguistiques. Une équipe de linguistes et de terminologues
fut mise sur pied pour fournir des services linguistiques à
l'administration, aux entreprises et à la population. Il fallait, d'une
part, aller chercher, en France surtout, les terminologies dont le
Québec avait besoin pour se franciser. D'autre part, il fallait utiliser
les ressources de la langue française pour désigner en
français les réalités nord-américaines. Il fallait
aussi mettre en oeuvre des moyens efficaces et économiques de diffuser
ces terminologies auprès des clientèles prioritaires de l'office.
Nous avons confectionné des dizaines de lexiques dans les domaines
où la demande nous semblait la plus forte.
La banque de terminologie du Québec, par ailleurs, est un
gigantesque fichier terminologique de plus de 1 000 000 de termes dans toutes
les sphères d'activités économiques et industrielles. Elle
résulte d'un inventaire des travaux terminologiques existant dans la
francophonie. Cet inventaire de plus de 40 000 titres d'ouvrages
terminologiques est un des éléments constitutifs de la banque
à laquelle les usagers ont accès soit par des abonnements par
terminal, soit par un service SVP en différé et enfin par des
publications. L'abonnement permet aux entreprises et aux organismes qui ont un
terminal d'interroger la banque et de recevoir une réponse
instantanée moyennant un tarif de 45 $ l'heure. Pour payer sa facture,
l'abonné peut se prévaloir d'une option de compensation et
expédier à l'office des renseignements terminologiques et
documentaires s'ils ne sont pas consignés dans la banque.
À la fin de l'année budgétaire, seize entreprises
étaient reliées à la Banque de terminologie du
Québec, soit onze de plus que l'année précédente.
Les entreprises peuvent également obtenir des renseignements par
correspondance ou par téléphone. Les réponses sont
données sur listage d'ordinateur et elles sont expédiées
par la poste dans les jours qui suivent. Au cours de l'année
budgétaire 1981-1982, 910 entreprises et organismes de l'administration
se sont adressés à la banque pour avoir des renseignements
terminologiques et documentaires.
Afin d'accélérer la diffusion de son contenu tout en
minimisant les coûts, la banque a entrepris la diffusion sectorielle
de
son contenu sur le plan terminologique et documentaire par des
publications.
Nous avons aussi réorienté nos travaux terminologiques
pour que nos terminologues participent à l'épuration des fiches
de la banque portant sur les domaines dont ils étaient
déjà spécialistes. En même temps, nos terminologues
n'en ont pas moins poursuivi leurs travaux de production de lexiques,
d'évaluation de manuels scolaires et de consultation terminologique. Ils
ont terminé un long cycle de production et 35 lexiques sont maintenant
prêts à être publiés. Ils ont intensifié leurs
travaux de terminologie juridique comme, par exemple, dans le domaine des
valeurs mobilières, à cause du grand effet d'entraînement
des lois sur la terminologie utilisée dans les secteurs
spécialisés.
Les linguistes-conseils, pour leur part, contribuent en priorité
au processus de certification des entreprises. Ils ont dû réduire
momentanément l'animation de certains comités
interentreprises.
Le service des consultations terminologiques que nous maintenons peut
répondre à 60 000 questions écrites ou
téléphoniques par année, mais le besoin est cependant
beaucoup plus grand. Pour améliorer le service avec les mêmes
effectifs, il va falloir privilégier le service aux entreprises. Une
politique à ce sujet est en voie de préparation à partir
des données fournies par un nouveau système de gestion
informatisée qui nous permet d'évaluer la demande et de mieux
connaître notre clientèle.
Nous attachons beaucoup d'importance à l'amélioration de
la qualité du français des manuels scolaires au primaire et au
secondaire. Au niveau collégial, nous fournissons une aide à la
rédaction de manuels pour contrer la trop grande utilisation des manuels
anglais vendus à un prix inférieur.
La diffusion auprès des utilisateurs de la terminologie et des
néologismes est un problème complexe et représente une
tâche difficile à cause de la résistance offerte à
une terminologie nouvelle. Nous avons eu recours à un cabinet-conseil
pour effectuer une étude portant sur la diffusion et l'utilisation de la
terminologie technique de langue française dans une douzaine de grandes
entreprises québécoises. Cette étude avait pour but de
mieux orienter l'action de l'office en matière de terminologie pour
guider l'entreprise dans sa démarche de francisation de sa
terminologie.
Quant à la régionalisation des services, elle s'est
achevée au cours de l'année. L'Office de la langue
française est maintenant présent dans les dix régions
administratives du Québec par le biais d'un bureau régional qui
offre assistance linguistique et information sur la charte. Au cours de la
dernière année, l'office a déplacé trois personnes
de Montréal à Saint-Jérôme afin de mieux servir la
population de la région Laurentides-Lanaudière.
Pour l'année 1982-1983, l'office a maintenant fixé ses
priorités. Il doit d'abord poursuivre l'exécution de son mandat
en tenant compte des contraintes budgétaires générales
à l'administration et des directives budgétaires du Conseil du
trésor pour les prochaines années. Il a élaboré son
plan d'action en tenant compte des priorités suivantes. La
première est la poursuite du processus de certification. Nous devons
poursuivre le processus de certification des entreprises et de l'administration
pour faire en sorte que l'opération se termine dans les délais
stipulés par le législateur.
Simultanément nous complétons la mise en place d'un
mécanisme qui nous permettra de mesurer le degré de
réalisation des programmes de francisation. La certification est un
moyen de parvenir à la francisation. Comme nous l'avons dit
déjà, l'office ne peut pas franciser seul les entreprises. C'est
à ces dernières qu'il appartient de poser les gestes
nécessaires et d'exécuter les programmes. (11 h 30)
Quant aux tests linguistiques, j'en ai déjà parlé;
je voudrais simplement signaler qu'un groupe de 20 hôpitaux de la
région de Montréal ont déjà confié en commun
certains de leurs services à l'Institut conjoint hospitalier de
Montréal et ont ainsi été mis au point des tests
spécifiques qui ont été approuvés par l'office. Il
s'agit d'une expérience intéressante et nous avons confiance
qu'elle soit fructueuse et qu'elle puisse être
répétée dans d'autres secteurs.
La troisième priorité est la diffusion et l'implantation
de la terminologie. À partir des résultats de recherches
commandées par l'office, nous devons affiner notre stratégie
d'implantation terminologique. Nous demandons aux entreprises qui adoptent un
programme de francisation de se procurer la terminologie française
propre à leur domaine d'activité. Nos linguistes-conseils les
guideront dans leurs démarches. Cette terminologie peut souvent
d'ailleurs être obtenue de leurs fournisseurs. Les entreprises disposent
de nombreuses sources de référence: banque de terminologie,
lexique, catalogue, documentation technique, etc. La prochaine étape
qu'elles doivent franchir est maintenant l'utilisation de cette terminologie
par leurs employés et l'un des meilleurs moyens d'y parvenir consiste
à l'employer dans les formulaires de l'entreprise.
La quatrième priorité est l'aide aux groupes et aux
personnes. Pour parvenir à la francisation du Québec, les
énergies du plus grand nombre d'intéressés doivent
être mises à contribution. L'État est incapable d'y
parvenir seul. La charte prévoit d'ailleurs
spécifiquement la contribution d'autres acteurs. Ainsi, il est
prévu que ce sont les comités de francisation des entreprises
employant plus de 100 personnes au Québec qui doivent procéder
à l'analyse de la situation linguistique des entreprises. Ces
comités sont aussi chargés d'établir un programme de
francisation, s'il y a lieu, et d'en surveiller l'application. Comme le tiers
des membres du comité représentent les travailleurs, il importe
que ces derniers participent activement au programme.
Depuis que l'État est intervenu pour promouvoir la langue
française, les divers groupements qui s'en occupaient à titre
privé, traditionnellement, ont pu voir leur rôle réduit.
Ces groupes demeurent importants et doivent avoir désormais une
participation plus grande. Il faudra soutenir leur action. Nous devons susciter
toutes les collaborations disponibles et utiliser tous les leviers pour
multiplier nos moyens. À titre d'exemple, nous entendons former dans
chaque ministère et organisme du gouvernement des animateurs
linguistiques qui pourront donner des cours sur le français de
secrétariat en utilisant une publication à grand tirage de
l'office, Le français au bureau. Dans la même veine, nous
délivrons des certificats d'agrément de réviseur de
manuels scolaires. Les maisons d'édition peuvent recourir à ces
spécialistes du français pour réviser les manuscrits.
Il est important, enfin, de sensibiliser les différents groupes
ethniques à la francisation du Québec et de les écouter.
La charte prévoit que nos objectifs doivent être poursuivis dans
un climat de justice et d'ouverture à l'égard des
minorités ethniques, dont l'apport précieux au
développement du Québec est un fait reconnu.
À la cinquième priorité, ce sont les subventions
à la recherche. Nous soutenons, depuis l'adoption de la charte,
grâce à notre programme de subventions, les recherches de nombreux
chercheurs de différentes disciplines reliées aux
préoccupations de l'office. Nous entendons poursuivre cette
politique.
Une sixième priorité est l'information du public cible au
sujet de l'application de l'article 46 de la charte. L'office a tranché,
au cours de l'année écoulée, beaucoup moins de litiges
découlant de l'application de l'article 46, c'est-à-dire du fait
que des employeurs exigent la connaissance d'une autre langue que le
français lorsqu'ils recrutent des employés. Nous croyons que
l'article 46 institue un mécanisme important parce qu'il vise à
éliminer une pratique qui était devenue presque
systématique, soit celle d'exiger que les travailleurs connaissent
l'anglais. Nous remarquons, en lisant les offres d'emploi dans certains
journaux, que cette pratique se continue. Il y a donc lieu d'informer les
citoyens de leurs droits à ce sujet.
Voilà, en gros, le bilan que l'on peut faire de l'année
écoulée et une idée des perspectives qui se dessinent pour
1982-1983. On peut donc dire, après quatre ans d'application de la loi
101, que le processus de francisation est engagé d'une façon
efficace et qu'il commence à porter les fruits escomptés. Mais
cela ne veut pas dire que la francisation est désormais assurée.
Cette francisation devra s'inscrire dans un nombre d'années qui
dépassent de loin l'année cible inscrite dans la charte puisque
c'est un processus qui doit s'inscrire dans une réalité nourrie
par des attitudes et des mentalités qui, elles, évoluent beaucoup
plus lentement. Elle doit s'inscrire aussi dans un contexte politique fragile
où les conquêtes d'aujourd'hui peuvent toujours être
diminuées ou même éliminées par des actions
politiques qui s'inscrivent aussi bien dans le tissus québécois
que dans le tissus canadien.
Donc, l'avenir de la francisation n'est pas encore assuré, il est
encore aléatoire, il demeure fragile et il importe qu'il soit maintenu
à bout de bras par les divers organismes de la loi 101, mais aussi par
la volonté collective des Québécois, par leur engagement
renouvelé et quotidien en faveur des objectifs de francisation qui
correspondent à ce désir d'identité en même temps
que ce besoin de dignité, de fierté qui se traduit par la
volonté de maintenir au Québec et d'épanouir au
Québec son caractère français. Des exemples récents
nous ont montré, d'ailleurs, à l'occasion de la conjoncture, que
cet avenir de la francisation se trouve toujours menacé, du moins dans
certains secteurs de la société. Des attaques renouvelées
ont été portées contre la Charte du français au
Québec, attaques renouvelées dans certains secteurs aussi bien
qu'à d'autres niveaux de gouvernement. Ces attaques renouvelées,
plus vives, ont pu engendrer une certaine confusion, certains malaises dans
l'opinion francophone, d'autant plus qu'elles s'employaient souvent avec
habileté à activer, à actualiser un certain sentiment de
culpabilité collective, d'autant plus naturel, dans une
collectivité pas encore habituée à ses nouveaux objectifs
et qui peut ressentir un certain malaise à les affirmer avec toute la
force et la vigueur que manifestent depuis des siècles d'autres
collectivités qui n'ont pas été soumises aux mêmes
contraintes que nous avons connues.
En dépit de ces difficultés nouvelles, l'acquis et le
positif demeurent de loin supérieurs. Il me fait plaisir de constater
que tous les organismes de la loi 101, aussi bien que leurs réactions
à certains événements récents au sein de la
population, témoignent toujours de cette volonté...
M. Lalonde: M. le Président, je
m'excuse d'interrompre le ministre. Est-ce que je pourrais demander sa
collaboration? Il avait dit qu'il ferait un résumé de son long
texte. Je le vois feuilleter quatre ou cinq autres pages. Il nous reste moins
d'une heure. Il est lancé dans un discours qu'il a déjà
écrit. Pourrait-il conclure, s'il vous plaît, parce qu'on n'aura
pas de questions?
M. Laurin: D'accord. ... de la population d'atteindre l'objectif
qu'elle s'est fixé et encouragent fortement le gouvernement à
témoigner au cours des prochaines années de la même
volonté politique soutenue qu'il a manifestée jusqu'ici.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Étant donné qu'il reste moins d'une
heure, je voudrais simplement passer aux questions. En ce qui concerne la
position...
Le Président (M. Desbiens): Je comprends qu'il y a un
consentement. Il y avait eu une entente à 14 heures, mais je comprends
qu'il y a un consentement pour se rendre jusqu'à midi trente, c'est
ça?
M. Lalonde: Étant donné qu'on siège à
14 heures.
Le Président (M. Desbiens): Oui, c'est ça, c'est
midi trente à la limite.
M. Lalonde: C'est difficile d'aller au-delà de midi
trente.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: J'aimerais poser un certain nombre de questions au
ministre. Son bilan semble un peu plus optimiste que celui que le
président de l'office a lui-même tracé dans son dernier
rapport annuel en ce qui concerne la francisation ou les progrès de la
francisation des entreprises. M. Gosselin, l'ancien président... Je sais
notamment que le ministre considère les rapports annuels des
présidents sortants comme étant des exercices futiles de
défoulement, mais il faudrait quand même qu'il explique comment il
se fait que le président lui avoue des retards dans la francisation des
entreprises. J'aimerais que le ministre nous explique ces retards. Avant de
passer à cette question, je voulais simplement réagir aux
quelques propos du ministre, au début. J'aimerais que le ministre nous
explique ce qu'il va faire concernant la loi elle-même et les
règlements qui ont reçu un avis défavorable de la part du
doyen de la faculté de droit de l'Université de Montréal,
Me Yves Ouellette, l'avis qui a été donné au conseil de la
langue, à la demande de ce dernier.
Quelle est la position du ministre à cet égard?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, je ne connais pas ce rapport.
Il ne m'a pas été remis. Il a probablement été
commandé par le Conseil de la langue française dans les limites
du mandat que je lui ai confié, de procéder après quatre
ans à une analyse de la loi 101 et de ses divers règlements afin
d'établir les perspectives pour les années qui viennent.
J'imagine que cette étude a été commandée dans
cette perspective. J'imagine aussi qu'elle n'est pas la seule, que d'autres
études ont été commandées ou seront
commandées. Comme toujours, en pareil cas, le conseil procédera
à l'analyse de ces diverses études. Il confiera le
résultat de son analyse préliminaire au Conseil de la langue
française, c'est-à-dire aux douze membres qui y siègent
et, par la suite, toujours, encore une fois, conformément aux habitudes
du conseil, des conclusions seront établies. Un rapport me sera soumis
et le ministre et le gouvernement assumeront leurs responsabilités et
prendront les décisions convenables.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ... c'est assez court. Il me semble que le ministre
n'a pas lu le rapport, le document lui-même du Conseil de la langue
française, où il apparaît...
M. Laurin: Effectivement, M. le Président.
M. Lalonde: ... dans la liste des commandites, des contrats
donnés aux organismes - le numéro ici est assez effacé, je
ne peux pas vous le donner - mais c'est inscrit comme projet: Effectuer une
étude sur certains aspects juridiques de la charte. Le nom est Yves
Ouellette. La date est le 22 septembre 1981. Cela fait déjà
plusieurs mois. Le ministre dit qu'il suppose que c'est un avis demandé
par le conseil dans son mandat de s'informer après quatre ans des effets
ou de la valeur de ses instruments légaux. Le montant de 4980 $ a
déjà été payé. Si le ministre n'a pas vu
l'avis, je pourrai lui en faire parvenir une copie. C'est extrêmement
intéressant et c'est extrêmement important que le ministre soit
conscient que le conseil a reçu du doyen de
la faculté de droit un avis à savoir que la
rédaction de la charte manque de rigueur, que plusieurs des
règlements - environ six sur quatorze - vont au-delà des pouvoirs
confiés par le législateur au gouvernement. C'est
extrêmement important pour la bonne marche de la francisation du
Québec que ce soit fait sur des assises valables. Il me semble que le
ministre devrait s'en préoccuper davantage et j'aimerais savoir du
conseil - je vois que le président du conseil est assis derrière
le ministre - la raison pour laquelle il a demandé un tel avis. Y
avait-il eu plusieurs plaintes ou des questions soulevées et par qui?
J'aimerais savoir si M. Plourde pourrait nous répondre.
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: Je vois que le service de renseignements ou
d'espionnage de l'Opposition fonctionne très bien, puisque l'Opposition
est déjà en possession d'un document que je n'ai pas encore eu la
chance de lire. Je comprends que le député de
Marguerite-Bourgeoys veuille en faire état, mais, effectivement, je n'ai
pas encore en main ce rapport et les habitudes du conseil sont que le conseil
mène ses études au rythme qu'il le veut, selon les
procédures qu'il choisit. D'ailleurs, il en va de même pour cette
étude comme pour toutes celles qui ont précédé. Il
y a parfois un délai, un décalage assez considérable entre
le moment où telle ou telle étude est demandée et celui
où, par la suite, les travaux d'analyse, de consultation et de
discussion sont menés et qu'un rapport est établi, mais je peux
demander à M. Plourde de répéter ici dans quelle optique
le ministre responsble a demandé de procéder à cette
analyse et d'ajouter quelques détails à ce qu'il m'a
déjà dit.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. Plourde, je vous remercie de répondre
à ma question. Le ministre vous a déjà tracé un
cadre très étroit. Il vous a dit qu'il faut répéter
tout ce qu'il a dit. En ce qui nous concerne, vous pouvez répondre en
toute liberté, vous savez.
M. Laurin: Cela ne me gêne pas du tout, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): M. Plourde, au nom du
ministre.
M. Laurin: Excusez-moi. Cela ne me gêne pas du tout, parce
que, de toute façon, c'est exactement cela. Le Conseil de la langue
française, à l'intérieur du mandat qui lui est
confié par la loi et à la demande du ministre lui-même, par
sa direction des affaires juridiques, poursuit - en tout cas, depuis que je
suis président, depuis bientôt trois ans - des études - ce
n'est pas nouveau - juridiques sur les règlements et la loi. C'est une
loi volumineuse, qui compte plus de 250 articles et des règlements
étoffés. Je pense qu'il est bon et normal pour l'évolution
et l'amélioration des politiques linguistiques du Québec que le
Conseil de la langue française, dont c'est le mandat par la loi, regarde
et réexamine périodiquement les questions juridiques
afférentes à la loi et aux règlements. (11 h 45)
C'est dans le cadre de ce mandat général que, le 22
septembre dernier, le conseil avait demandé à Me Ouellette de
fournir une opinion juridique sur certains aspects juridiques de la loi et des
règlements, ce qu'il a fait. Nous avons reçu cette opinion
juridique le 19 mars, la lettre de transmission de Me Ouellette était
datée du 15. Je me suis aperçu, en voyant dans la main d'un
journaliste une copie de cette opinion juridique, qu'il l'avait reçue le
même jour. Nous déplorons amèrement cette fuite. Nous
aimerions bien savoir d'où elle vient. Cela nous embête royalement
parce que nous aimons travailler dans le calme et la
sérénité, afin de pouvoir transmettre au ministre, tel que
la loi nous le demande, des avis objectifs, clairs, sereins, fondés,
appuyés. Ces fuites, dont j'ai l'impression que nous sommes victimes
depuis quelque temps, ne nous aident en rien, et je le déplore
amèrement.
Comme c'est le cas chaque fois au Conseil de la langue française,
que ce soit une étude sociologique, éconolinguistique ou une
étude juridique, cela varie, l'étude prend en
général entre un an et trois ans. L'étude sur les postes
occupés par les francophones au Québec, c'est une étude
qui a pris trois ans et demi. Les études juridiques peuvent prendre
jusqu'à un an ou deux ans, selon l'ampleur. Nous sommes en train
d'examiner cette opinion juridique. Nous en demanderons d'autres. Cette opinion
juridique est au niveau de la direction des affaires juridiques actuellement.
Il n'y a eu aucune réunion où le président du conseil
lui-même ait été impliqué, encore moins le
collège des conseillers, pour être saisi de la chose. C'est un
contrat pour une opinion juridique, normalement donné par la direction
des affaires juridiques, à l'intérieur du mandat découlant
de la loi et spécifié par le ministre. Cela va suivre son petit
bonhomme de chemin. Lorsque les opinions seront complétées,
lorsque nous aurons une vue d'ensemble de cette question extrêmement
importante, cela viendra au collège des conseillers. Après, selon
l'habitude du conseil, nous transmettrons un avis ou un rapport au
ministre.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, le petit bonhomme de chemin,
j'en suis bien; l'évolution lente et sereine, je suis d'accord avec cela
aussi, mais, depuis deux mois, le conseil a une étude juridique
explosive entre les mains, qui intéresse tous les
Québécois et non pas seulement les sages du conseil qui veulent
lentement réfléchir sur cette question, parce que la loi est
appliquée quotidiennement. Tous les jours, des citoyens du
Québec, francophones comme les autres, doivent ajuster leur
comportement, fonctionnent conformément à une loi et à des
règlements qui, selon votre propre conseiller juridique, qui n'est pas
le dernier venu, c'est le doyen de la faculté de droit, seraient
invalides pour un grand nombre. Il me semble que les Québécois
doivent s'attendre à un peu plus d'empressement de la part du conseil et
du ministre pour nous rassurer et prendre les dispositions nécessaires
pour corriger la situation. Est-ce que le conseil attend d'avoir une autre
opinion qui contredirait celle-ci? Est-ce que le conseil a déjà
examiné les règlements? N'a-t-il pas déjà
donné son avis sur des règlements qui sont justement
touchés par l'opinion juridique de Me Ouellette?
Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, le droit -je m'excuse
auprès de mon collègue qui est avocat - n'est pas une science
exacte...
M. Lalonde: ... comme la psychanalyse. M. Laurin: ... pas plus
que l'économie...
M. Lalonde: II a parlé de ma profession.
M. Laurin: Ce n'est pas d'aujourd'hui que nous voyons plusieurs
juristes ou plusieurs économistes différer d'opinion sur un
sujet. Si l'accord était toujours instantané et complet, il n'y
aurait pas de procès dans notre société, il n'y en aurait
jamais eu depuis des siècles. Il n'y aurait pas non plus la succession
d'équipes d'économistes qui conseillent les gouvernements. On
constate, par exemple, que, lorsque le président des États-Unis
change, l'équipe d'économistes est basculée au grand
complet pour être remplacée par une autre. D'ailleurs, les Latins
avaient déjà exprimé cela d'une façon très
concise et très brève il y a plusieurs siècles: tot
homines, tot opiniones; autant d'hommes, autant d'opinions. À un avis
sur l'opportunité d'une politique restrictive, il est toujours facile
d'opposer l'avis d'un autre économiste sur l'importance et
l'opportunité d'une politique expansionniste. De la même
façon, lorsque nous discutons de matières de droit, il est
très facile - et il est même opportun - de ne pas jeter son
dévolu immédiatement sur une seule opinion. Il est beaucoup plus
sage de recourir à plusieurs sources d'information, à plusieurs
opinions, puisque la vérité, comme on le sait, étant
cachée dans le fond d'un puits, il faut souvent beaucoup d'efforts et
beaucoup de coopération de la part de plusieurs agents pour aller la
chercher.
C'est toujours la politique qu'a suivie jusqu'ici le Conseil de la
langue française et je pense qu'il est sage de continuer à
procéder de cette façon. Même au moment où nous nous
parlons, il serait facile d'avancer quelques autres opinions, à savoir
que la loi 101 - avec ses règlements -constitue une bonne loi. Il y
aurait des témoignages tout aussi autorisés dont on pourrait se
prévaloir. Mais je ne veux pas m'engager sur cette pente, je
préfère laisser au conseil, avec l'autonomie qui lui a
été impartie, le soin de mener ses études au rythme et
selon les procédures qui l'ont bien servi dans le passé. Pour ma
part, je ne peux que garantir à l'Opposition que, quand le rapport du
conseil me sera parvenu, je l'étudierai avec la plus grande attention et
j'essaierai d'en tirer les conclusions qui s'imposent.
Le Président (M. Desbiens): M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Est-ce que le conseil a l'intention de consulter
d'autres conseillers juridiques, lesquels, et dans quel délai?
M. Laurin: M. le président vient de dire qu'il a
l'intention de demander d'autres études.
M. Lalonde: Lesquelles? M. Laurin: Je ne sais pas.
M. Lalonde: Vous avez dépensé 5000 $ pour avoir cet
avis. Je comprends que le ministre tente d'en minimiser l'importance. Votre
conseiller juridique pourra apprécier la confiance de son client, mais
il est d'intérêt public de savoir ce que le conseil a l'intention
de faire. Est-ce qu'il a l'intention de consulter indéfiniment
jusqu'à ce qu'il trouve quelque chose qui soit un peu plus conforme
à la pensée du ministre ou du conseil?
M. Laurin: Non, mais cette étude, jusqu'ici, porte sur la
cohérence juridique de la loi et des règlements. C'est un des
aspects de la loi et des règlements qu'il importe de considérer.
Sur ce seul point, d'autres avis peuvent être aussi valablement
établis. Ce n'est pas le seul aspect sur lequel l'étude
que j'ai demandée au conseil doit porter. Je pense qu'il importe de
balancer un aspect, un élément l'un par l'autre. Je pense aussi
qu'il importe d'analyser ces avis en fonction de l'intention du
législateur et des désirs de la société
québécoise. Je comprends parfaitement que, en cette
matière comme en d'autres, le conseil fasse montre de sa prudence et de
sa sagesse habituelles.
M. Lalonde: M. le Président, étant donné que
le temps fuit, j'aimerais, étant donné qu'on discute du
conseil... Dans les contrats donnés aux individus, si je compare la
liste - je ne veux pas créer d'injustice, mais sans donner de nom pour
l'instant, peut-être qu'il y a une explication - je vois le nom d'un
personnage qui a reçu un contrat pour écrire un article, contrat
570601, 1000 $; or, je retrouve un nom semblable dans la liste des cadres.
Est-ce que c'est possible que le conseil donne à ses cadres des contrats
pour écrire des articles, et qu'il les fait au-delà du montant de
leur salaire?
M. Laurin: De quoi s'agit-il exactement?
M. Lalonde: Contrat pour écrire un article portant sur des
éléments d'une théorie de la régulation
linguistique, Jean-Claude Corbeil. Donné le 28 mai 1981, 1000 $,
payé en 1981, et je vois J.-C. Corbeil dans les cadres. Est-ce que c'est
le même personnage?
M. Laurin: Non.
M. Lalonde: Ce n'est pas le même?
M. Laurin: M. le Président, je crois que ce qui est
arrivé, c'est que M. Jean-Claude Corbeil, à ce moment-là,
était à l'Institut Bourguiba des langues vivantes à Tunis.
Nous l'avions demandé comme expert pour préparer cet article et
c'est à ce moment-là que le contrat a été
signé. Après cela, quelques mois plus tard, M. Jean-Claude
Corbeil a été recruté sur concours pour devenir le
secrétaire du Centre international de recherche en linguistisme
fondamentale et appliquée, qui est un organisme international
dépendant de l'Agence de coopération culturelle et technique,
mais qui est rattaché, pour fins de locaux, au Conseil de la langue
française, et l'effectif a été viré au Conseil de
la langue française. C'est depuis tout récemment que M.
Jean-Claude Corbeil se trouve au Conseil de la langue française, M. le
Président.
M. Lalonde: Alors, je comprends bien qu'au moment où il a
reçu le contrat...
M. Laurin: II n'y a pas d'irrégularité...
M. Lalonde: ... il n'était pas salarié du
conseil.
M. Laurin: Non, pas du tout.
M. Lalonde: Merci, M. le Président. Est-ce qu'il y a
d'autres questions de ce côté-ci?
Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 11 est
adopté?
M. Lalonde: Non, je n'ai pas terminé, M. le
Président.
Le Président (M. Desbiens): Excusez-moi!
M. Lalonde: En fait, simplement sur le conseil, j'aimerais parler
de l'avenir du français dans les publications et communications
scientifiques et techniques. Il y a eu un colloque organisé, je pense,
par l'office ou le conseil. Ce serait le conseil, oui. Il vient dans le budget
du conseil. Ensuite, cela a fait l'objet aussi d'une étude de la
commission culturelle de l'AIPLF lors de sa dernière réunion en
janvier 1982. Chacun des parlementaires, ou des Parlements, qui a
participé non seulement à cette commission, mais aussi à
l'assemblée générale, l'assemblée
plénière, est retourné chez lui ou chez elle en se
promettant de travailler à la promotion de cet objectif.
Conformément à la promesse que je me suis faite à ce
moment-là, j'avais demandé au ministre ce qu'il avait l'intention
de faire pour promouvoir l'usage du français dans les publications et
communications scientifiques et techniques. Le ministre connaît le
bilan.
M. Laurin: Effectivement, c'est un sujet qui me préoccupe
beaucoup. J'ai eu l'occasion d'exposer mes vues complètement à ce
sujet à un congrès de l'Association des universités
complètement ou partiellement de langue française. J'ai ensuite
eu l'occasion d'exposer mes vues au colloque que le Conseil de la langue
française avait organisé et qui a été un grand
succès puisque nous avons réussi à réunir des
éléments importants de la francophonie, que ce soit celle de la
France, de la Belgique, de la Suisse, du Québec, de l'Afrique
francophone, et il y a eu des prises de conscience lors de ce colloque qui
marqueront, je pense, l'évolution de la francophonie
particulièrement dans le domaine scientifique.
Je sais aussi que l'Association internationale des parlementaires de
langue française s'est saisie du sujet. Je sais que le
député de Marguerite-Bourgeoys a participé à ses
assises. J'ai même eu l'occasion de parcourir, avec délices et
orgues, l'excellent
texte qu'il a communiqué à cette assemblée et qui
rejoignait, en gros, nos propres vues à ce sujet.
Je sais également que, tout récemment, la semaine
dernière, à Paris, se tenait un colloque organisé par la
France, cette fois, où on a repris les conclusions du colloque de
Montréal, mais je ne sais pas quelles conclusions ont été
retenues. Comme le président du conseil y participait, je pense qu'il
peut vous faire un bilan de la situation.
À ce sujet, je reviens justement de Paris et, comme disait M. le
ministre, nous avons résolu de mettre sur pied le comité dont il
avait été question à ce colloque, le comité
international. Il y a quelques difficultés parce qu'il y aura, en juin,
sur l'initiative de la Belgique, un colloque à Bruxelles pour essayer de
donner des suites à cela et nous aimerions arriver avant pour que le
comité international ou l'embryon de ce comité international soit
assumé par le Québec et la France. Avec la France, il n'y a eu
aucun problème. Il s'agit, au cours des quinze prochains jours, de
donner les suites voulues. Des noms ont été mis de l'avant. (12
heures)
Le directeur des relations culturelles au ministère des Relations
extérieures a donné une promesse très claire que la France
était prête, avec le Québec, à former ce
comité pour donner les suites précises dont il a
été question, d'ailleurs, je crois, M. le ministre, lors de la
visite de M. Mauroy, dans le communiqué final Mauroy-Lévesque,
à savoir l'établissement, probablement, d'une revue scientifique
de pointe. On a parlé deuxièmement, d'une sorte d'entente ou de
code d'éthique international, ou, en tout cas, commençons avec la
France, pour la tenue des colloques afin que la langue anglaise ne soit pas
toujours le premier véhicule dans les colloques internationaux
scientifiques.
Troisièmement, on a traité des mesures concrètes
pour l'interconnexion des banques de données et la consolidation des
banques de données à contenu français.
Ce comité-là est en bonne voie et, encore une fois, c'est
le Québec qui en a pris l'initiative et il sera annoncé
très vraisemblablement au colloque des 5 et 6 juin qui se tiendra
à Bruxelles sous le patronage conjoint du Conseil de la langue
française, du Haut comité de la langue française de Paris,
de la Commission de la culture francophone de l'agglomération de
Bruxelles, de l'Académie nationale de médecine de Paris et du
Conseil international de la langue française.
M. Lalonde: Je vous remercie. Dans les recherches que le conseil
a fait faire, on voit à plusieurs reprises le statut des lois
linguistiques à divers endroits dans le monde. Est-ce que le conseil
peut nous dire dans combien de pays on retrouve dans les lois linguistiques une
interdiction d'usage d'une langue sur les affiches publiques?
Avant que le président ne réponde, j'ai tenté de
faire faire une recherche ici par les services de recherche de
l'Assemblée nationale qui, fatalement et inévitablement, se sont
retournés soit vers l'office ou le conseil et ont reçu,
d'après l'explication qu'on m'a remise, la réponse à
l'effet qu'aucune recherche n'avait été faite de façon
exhaustive à ce sujet.
Je me suis laissé dire qu'il y a quelques pays - je n'ose pas les
nommer parce qu'on pourrait dire que je fais de la petite politique, de la
démagogie, étant donné qu'il s'agit là de certains
régimes qu'on ne voudrait pas avoir ici - qui interdisent l'usage d'une
langue sur les affiches publiques.
Je voudrais savoir si le conseil s'est penché sur cette
question.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, nous n'avons pas actuellement
de données spécifiques là-dessus. Les recherches qui ont
été faites à la direction des affaires juridiques
portaient sur les politiques linguistiques et les lois linguistiques en
général. Il est possible que, dans une ou l'autre des lois, il y
ait un article semblable. À ma connaissance aujourd'hui, je ne peux pas
répondre à cette question. Nous pourrions fouiller davantage et
vous répondre.
Il y a peut-être dans le décret de M. Spaak, 1974, je
crois, en Belgique, quelque chose...
M. Lalonde: C'est possible en Belgique, parce qu'on a
divisé le territoire en deux, un où la langue néerlandaise
est le seul véhicule et l'autre en Wallonie, où la langue
française est le seul véhicule, avec Bruxelles, au centre,
où le bilinguisme est reconnu.
Si le président du conseil veut bien poursuivre cette recherche,
je cherche un pays où, sur tout le territoire, on interdise une langue
quelconque - et si cette langue correspond à une minorité,
j'aimerais bien le savoir aussi - sur les affiches commerciales. Je ne parle
pas des affiches publiques, des indications routières, mais des affiches
même privées.
M. Laurin: Je pense que si cette étude était faite
- et je pense que c'est une suggestion valable de la part de l'Opposition - il
ne faudrait pas se limiter à l'aspect proprement législatif ou
légaliste ou juridique. Il faudrait que l'étude tienne compte
aussi d'autres facteurs qui conditionnent souvent l'opportunité des
décisions à prendre en pareil domaine, comme, par exemple, une
étude approfondie
de l'aspect démographique des communautés ou une
étude approfondie de l'aspect économique aussi, de la richesse
économique comparée, plus ou moins grande, des diverses
communautés ou, encore, de l'aspect sociologique et même politique
ou historique qui peut, au fur et à mesure qu'il s'étale dans le
temps, conditionner les comportements, aussi bien ceux de la majorité
que ceux de la minorité. Je pense que cette étude... Encore une
fois, je retiens la suggestion du député de Marguerite-Bourgeoys,
mais je pense que, pour qu'elle soit éclairante et pour qu'elle rejoigne
encore davantage cette vérité, il faudrait que cette étude
tienne compte de tous les facteurs que nous avons mentionnés.
M. Lalonde: Je suis sûr que le ministre saura expliquer,
voler à la défense de sa loi devant une étude qui
indiquerait, par exemple, que seulement le Soudan, la Libye et peut-être
l'Iran des ayatollahs ont une telle disposition juridique dans leur loi
linguistique, mais je pense que c'est prématuré. On verra quelles
seront les conclusions de cette étude. Depuis le début de ce
débat, que je ne veux pas refaire ici -j'en parle de la façon la
plus calme et la plus sereine possible, un peu comme le conseil de la langue -
il répugne à l'esprit libéral, l'esprit de liberté,
l'esprit démocratique d'interdire l'usage d'une langue, sauf dans des
conditions absolument dramatiques. C'est dans cet esprit que je voudrais que le
gouvernement s'impose cet exercice de revoir cet aspect particulièrement
blessant pour ceux dont l'anglais est la langue principale, la langue
maternelle.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Laurin: Le député n'a quand même pas pu
s'empêcher de mentionner le nom des pays qu'il avait en tête au
tout début de son exposé...
M. Lalonde: Ce sont les seuls que je connaisse actuellement.
M. Laurin: ... dans une perspective d'insinuation. Encore une
fois, je pourrais le renvoyer, pour une étude fouillée,
approfondie, libérale et impartiale de ce sujet, aux études de la
commission Gendron, que son propre gouvernement avait commandées et
où, justement, d'une façon beaucoup plus sage et beaucoup plus
prudente, aussi bien les commissaires que l'équipe de recherche avaient
tenté d'établir un diagnostic de la situation du français
au Québec en tenant compte de tous les facteurs que je viens de
mentionner, historique, démographique, économique, aussi bien que
les facteurs proprement linguistique ou juridique. Donc, je n'improvise pas, je
n'innove pas en opinant qu'une pareille étude, pour être
complète et éclairante, devrait tenir compte de tous ces
éléments et de tous ces facteurs; mais encore une fois, c'est une
bonne suggestion que je pourrai analyser et que j'espère pouvoir
retenir.
M. Plourde aurait un mot à ajouter, je crois.
M. le Président, il serait peut-être intéressant de
déposer une information récente sur la table à l'intention
de M. le député. Au tout récent colloque qui s'est tenu
à Paris sur l'application des législations linguistiques, un fait
assez nouveau est sorti de la bouche des Français. Les conclusions ont
été données par le ministre de la Consommation, Mme
Lalumière. J'ai d'ailleurs apporté une copie de son discours de
conclusion qui, à mon avis, est remarquable. C'était la
première fois, pour ma part, que j'entendais parler un
représentant du gouvernement français, qui prend peut-être
de plus en plus conscience de la nécessité d'intervenir
linguistiquement même en France, de la nécessité
d'intervenir dans l'étiquetage, les marques de commerce et les enseignes
publiques.
M. Lalonde: Comme quoi le mauvais exemple a toujours des
conséquences.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. M. le
député de Vachon.
M. Payne: Perhaps I will put my question in English. It is more
in the terms of a concern. When we read article 20 and article 34 of the Charte
de la langue française, we talk about somebody who is being promoted or
moving up in the scale in terms of the person's job, which is a praiseworthy
goal of the bill, of the law, namely that somebody should have a sufficient
knowledge of French. However, there is a consequence to that principle in
practical day-to-day life that I have seen on a number of occasions, and it is
this. Compagnies who are not, in fact, covered by articles 20 and 35 of the
bill very often use this as a means of quota, in other words, a kind of "moyen
de contingentement", to prevent people from moving up in the scale because they
do not have a sufficient knowledge of French when, in fact, the particular job
in question does not demand any knowledge of French. I think that it would be
useful, Mr. Minister, if the Conseil de la langue française could
concern itself with this very important question of social equity, "dans
l'intérêt de l'équité sociale". I think it is
incumbent upon the Council to look much better, to look much more carefully
into the ways in which this kind of subtle discrimination exercises itself. I
shall
not repeat that in French. I think you understand the preoccupation.
In other words, to put it in very simple language, I find it distressing
- and I found a number of reports of this - that a certain number of employees
are using the French Language Charter as a means to cut back on their
recruiting, for example, or to discriminate against individuals. In other
words, they are for too enthusiastic and, on the back of the Charter of the
French Language, I think it is unpleasant and repulsive that this kind of
practice should continue. I think it is my duty to point that out to you, as
Minister responsible.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Laurin: Yes, I agree with the statement of the Deputy for
Vachon. If such a practice is occurring, it is surely not on behalf of any
directives given by the Office de la langue française to any firm or
business. I think I will ask Mr. Aubin to give a few comments on that. I know
that some occurrences of that kind have happened in recent years and I agree
with the Deputy that directors of personnel of those firms have gone far away
from the spirit of the law. I would like to ask Mr. Aubin if this is a policy
that has been discussed between various firms and the Office de la langue
française, in the scope of francisation programs that are now being
negotiated.
Je profiterais de l'occasion pour présenter a la commission
parlementaire le nouveau président de l'office, M. Claude Aubin, qui a
été tout récemment nommé et des services duquel,
j'en suis sûr, la population n'aura qu'à se féliciter au
cours des prochaines années.
M. le Président, l'article 20 se réfère à la
langue française dans l'administration. Nous avons des communications
constantes avec les divers ministères et autres organismes qui
dépendent du gouvernement. Il est advenu, à notre connaissance,
qu'il y ait eu des cas qui pourraient être sur la frontière entre
l'équité et peut-être l'injustice. C'est une
préoccupation pour nous. Nous tâchons d'employer les meilleurs
moyens pour convaincre nos interlocuteurs d'être vigilants dans un
domaine aussi chatouilleux.
Pour ce qui est des entreprises qui sont couvertes par d'autres
chapitres de la loi, les entreprises qui ont des programmes de francisation qui
ne sont pas complétés, il y a des mesures absolument directives
que ces entreprises doivent respecter. La langue française doit
être employée par tous les membres de ces entreprises qui sont de
langue française. Il n'est pas interdit pour ceux qui sont de langue
anglaise d'employer la langue anglaise dans leurs traitements entre eux de
langue anglaise, mais dès qu'un cadre, un employé est de langue
française, il a le droit fondamental de se servir de sa propre
langue.
Nos programmes visent justement à l'accomplissement de cette
directive.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la
députée de Jacques-Cartier. (12 h 15)
Mme Dougherty: One of the major aims of Bill 101 was to allow
French people to work and be served in French. Bill 101 is absolutely silent on
the rights of English people. Now, on page 6 - the Minister read this part -
you talk about the conflict between the federal policy of bilingualism and, in
fact, you go further than Bill 101 ever said and you say that the policy of
Québec or the "Charte de la langue française est de mettre fin au
bilinguisme institutionnel", in other words, an end to institutional
bilingualism; the implication is the institutional unilingualism. Now the
Government, as I understand it - I believe the Minister and other members of
the Government, have on many occasions talked about the policy of the
government which I do not believe is written anywhere - about their intention
to allow English institutions to exist. Now to me, there is a very serious
conflict of policy - I am all for English institutions existing, but if one is
going to francisige all English institutions, then what I want to know is what
in you view is an English institution?
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Laurin: Ce n'est pas nouveau de dire que la Charte de la
langue française et la politique du gouvernement est de mettre fin au
bilinguisme institutionnel. Quand nous employons cette expression, nous pensons
à la langue de l'État qui doit être celle de la
majorité de la population. Il est bien dit, aussi bien dans le
préambule de la loi 101 que dans certains autres articles, que le
français doit être la langue de l'administration et il est
même dit que le français au Québec est la seule langue
officielle. Donc, ce n'est pas nouveau.
Mais, incidemment, ce n'est pas du tout l'intention de la loi
fédérale que de faire de l'État fédéral un
État unilingue, au contraire, le but de la loi fédérale
est, dans les institutions fédérales, dans les ministères
fédéraux, d'instaurer le bilinguisme institutionnel. Ce qui,
d'ailleurs, est loin d'être le cas, comme en fait foi l'expérience
de tous ceux qui ont voyagé à travers le Canada, comme en fait
foi l'expérience de tous ceux qui travaillent dans les ministères
fédéraux au Québec ou dans les agences
fédérales au Québec. Même au Québec, ces
organismes ou ministères sont loin d'être bilingues. Comme
je le disais dans mon rapport annuel, beaucoup de francophones doivent
travailler en anglais au Québec dans les institutions ou les organismes
fédéraux.
Ceci, encore une fois, est parfaitement compatible avec l'autre principe
que la députée de Jacgues-Cartier invogue, c'est-à-dire
que la politique du gouvernement guébécois est de maintenir les
organismes anglophones et d'assurer leur maintien et leur développement.
Je pense que la députée fait ici référence à
une résolution récemment adoptée au congrès du
Parti québécois.
La loi 101 n'en parle pas à cet égard. Ce que la loi 101
reconnaît cependant, c'est le droit de tout anglophone, par exemple,
à recevoir un enseignement en anglais au Québec. Ce droit est
exercé à l'heure actuelle et le gouvernement du Québec y
consacre des sommes considérables. Par exemple, si un seul anglophone
demande d'être éduqué en anglais, même s'il est seul
dans le village ou dans la petite ville où il vit, s'il demande un
enseignement en anglais, le gouvernement s'engage à lui dispenser cet
enseignement. S'il ne peut créer une école au lieu même
où vivent ces anglophones, il prend les moyens de lui procurer dans une
école quelconque, loin de son domicile, l'enseignement dont il a besoin.
Il voit même à payer les frais de transport et même les
frais de résidence pour que cet anglophone puisse recevoir
l'enseignement en anglais.
Je pense que c'est une politique extrêmement humaine et
généreuse, et qui est loin de ressembler au traitement que les
francophones reçoivent dans les autres provinces. La charte n'avait pas
a aller plus loin que cela et, encore une fois, elle nous apparaît aller
beacoup plus loin que le Canada Bill dont il est question ces jours-ci. Il y
aussi d'autres articles qui reconnaissent le droit des anglophones de recevoir
des services en langue anglaise. Il y a l'article 16 ou l'article 20, qui
reconnaissent ce droit également, lorsqu'on s'adresse à
l'administration en anglais, de recevoir une réponse en anglais ou de
recevoir des services en anglais. Faut-il aller plus loin? Je le crois et c'est
la raison pour laquelle le Parti québécois s'est engagé
lors de son dernier congrès à assurer le maintien des
établissements anglophones, qu'il s'agisse d'établissements
scolaires ou d'établissements de santé. Le gouvernement n'a pas
encore agi dans ce sens d'une façon législative, mais il agit
quand même en pratique puisque, jusqu'ici, il assure le maintien de ces
établissements anglophones partout où ils existent.
Particulièrement dans le projet de réforme scolaire qui est
à l'étude présentement, le maintien de ces
établissements anglophones est assuré. Donc, je ne vois aucune
incompatibilité entre le maintien des principes et des pratiques
qu'affirme la Charte de la langue française sur le caractère
français du Québec, sur l'élimination du bilinguisme
institutionnel, d'une part, et, d'autre part, le maintien des
établissements anglophones au Québec.
Le Président (M. Bordeleau): Merci. Mme la
députée de Jacques-Cartier.
Mme Dougherty: I think the crux of my question is, in looking at
hospitals and social service institutions and maybe school boards although we
do not have any... There are some school boards that operate and administer
because of the preponderance of English service, they are English institutions
essentially. Now, on the level of service of hospitals and social services,
there are certain institutions that, by tradition, have given services in
English, that is changing - I am talking about the Montreal Children's Hospital
for instance - which, I think, provides bilingual services. It is still
essentially an English institution in terms of its administration. I think
there are two levels here, one is service, one is administration. Now, is that
administration going to be wrecked ? Will that institution be allowed - I am
just taking an example, I am not speaking for them, I am just using an example
- is an institution like the Montreal General Hospital going to be recognized
as an English institution and therefore will the same francization rules
pertain to that or will there be some recognition that it is an English
institution giving services in both languages? Therefore, some of the
requirements that now exist in some of the deadlines, very important deadlines
that are coming up in accordance with law number 101, are they going to be
required to meet those records in French and all this kind of thing? Because is
that not a denial of the principle that has been recognized by the Parti
québécois that English institutions should be allowed to live and
flurish? I feel a very serious conflict here and I think the Governement has to
face up to it and has very important implications for the future of the English
community.
Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.
M. Laurin: En plus des articles que j'ai mentionnés tout
à l'heure, la Charte de la langue française reconnaît quand
même qu'il existe une situation particulière, une situation
spéciale pour les établissements de langue anglaise, qu'il
s'agisse d'établissements scolaires ou d'établissements de
santé et plusieurs articles de la charte prévoient justement les
modalités de ces arrangements spéciaux pour ce type
d'établissements. Par
exemple, actuellement, le Montreal Children, puisque vous avez
mentionné ce cas, est reconnu par l'Office de la langue française
comme une institution anglophone en vertu du paragraphe f de l'article 113,
article qui nous permet et qui permet à l'office de reconnaître
comme institutions anglophones soit des organismes scolaires, soit des
organismes municipaux, soit des établissements de services de
santé et de services sociaux qui fournissent leurs services à des
personnes en majorité de langue anglaise. Donc, déjà,
à l'heure actuelle, ces établissements ont droit à un
traitement spécial; par exemple, les échéances ne sont pas
les mêmes, les exigences quant à la francisation ne sont pas les
mêmes. Ce que nous demandons, cependant, ce que le charte demande
à ces organismes, c'est que, même si on leur permet de fonctionner
en anglais, en ce qui concerne leurs rapports administratifs avec le
gouvernement, tout ce qui est public doit comporter un usage du français
du fait que le français, est la langue commune, du fait que le
français est la langue officielle.
Je ne partage pas les inquiétudes de la députée
à ce sujet, parce que je pense que ma position a été
établie à plusieurs reprises sur le plan politique, la charte
établit déjà des arrangements spéciaux et, encore
une fois, le Parti québécois a adopté une
résolution qui assure le maintien aussi bien que le développement
des établissements anglophones au Québec. Donc, je ne crois pas
que la députée doive entretenir de telles inquiétudes.
Je sais que certains incidents ont été relatés au
cours des derniers mois où, par exemple, certains établissements
anglophones, particulièrement certains services sociaux, ont dû
réduire leurs services en langue anglaise, mais ce n'est pas au nom de
la charte ou au nom de quelque parti politique que ce soit que ces mesures ont
dû être prises. Je pense que les établissements anglophones,
au même titre que les établissements francophones, ont dû se
soumettre à des compressions budgétaires qui ont pu amener des
aménagements nouveaux au niveau des services. Mais, encore une fois, ces
mesures administratives ne compromettent en rien la politique très
précise du gouvernement à cet égard.
Je ne sais pas si M. Lavigne, qui transige particulièrement avec
ces établissements au niveau de l'application de l'article 113, aurait
quelque chose à ajouter à cet égard.
Le Président (M. Bordeleau): M. Lavigne.
M. Laurin: Ce qu'on peut dire évidemment, c'est que les
programmes ont pour objet de faire en sorte que, d'abord, les clientèles
qui fréquentent ces institutions puissent être servies dans leur
langue. Je pense au Royal Victoria; par exemple; le journal The Gazette disait
dernièrement que 45% de sa clientèle était de langue
française. Alors, on comprendra facilement que, si la clientèle
d'une institution est à 45% de langue française, dans les faits,
c'est le bilinguisme qui est requis dans cette institution.
Si on regarde aussi les employés de ces institutions, on
s'aperçoit qu'ils sont loin d'être tous anglophones; alors, il y a
place évidemment au français. Les programmes que l'office a
discuté, a négocié avec ces institutions ont pour objet de
faire en sorte que le français s'élève dans l'organisme,
qu'il soit utilisé à côté de l'anglais, entre
autres, dans les formulaires, dans les documents techniques, parce qu'il peut y
avoir des employés de ces institutions qui ne parlent pas
nécessairement très bien l'anglais ou qui le comprennent
bien.
Alors, essentiellement, dans les institutions qui sont touchées
par l'article 113f, qui sont couvertes par l'article 113f, il s'est agi de
faire à côté de l'anglais la promotion du français.
C'est cela.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le Président, ce serait sur la question des
certificats d'admissibilité à l'école anglaise.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Viau, je veux simplement vous signaler que, comme il est 12 h 30, il me
faudrait le consentement pour continuer, en vous mentionnant que la Chambre
reprend à 14 heures. Si vous pouviez être concis...
M. Lalonde: Une dernière question. M. Cusano: Une
question très courte.
Le Président (M. Bordeleau): Si j'ai le consentement des
membres, on peut continuer quelques minutes.
M. Paquette: Encore quelques minutes, mais il y a certains
membres qui ont des réunions à 12 h 30. Il ne faudrait pas trop
dépasser.
Le Président (M. Bordeleau): M. le député de
Viau.
M. Cusano: M. le ministre, la pratique présente, lorsqu'un
individu veut obtenir un certificat d'admissibilité à
l'école anglaise, est qu'il en fait la demande au MEQ par l'entremise de
la commission scolaire. D'après les cas de comté que j'ai - comme
vous pouvez le constater, j'en ai pas mal - il
n'y a aucune difficulté à émettre le certificat
pour les enfants dont les parents ont ou dont un des parents a six ans
d'école élémentaire ici au Québec ou qui
étaient ici au mois d'août 1977. Le reste est automatiquement
refusé. (12 h 30)
Les requérants reçoivent une lettre les informant de faire
appel à la commission d'appel. La pratique, dans les dernières
années, à la commission d'appel a été que, si un
immigrant arrivé ici au Québec a commencé ses
études dans une école anglaise au niveau primaire, que ce soit en
troisième, quatrième, cinquième ou même en
sixième année, permission de fréquenter l'école
anglaise est donnée. Je pense que c'est à peu près dans
90% à 98% des cas.
Ma question est peut-être plutôt une suggestion. À
cause du grand nombre d'appels qui se font à la commission d'appel et du
nombre de retards qui s'accumulent, dans la plupart de ces cas-là,
spécialement ceux des enfants dont les parents ont
fréquenté une école anglaise trois, quatre ou cinq ans,
n'y aurait-il pas possibilité que ces certificats soient donnés
en premier lieu par le MEQ et de ne pas faire attendre les parents pendant des
périodes de deux, trois et même quatre mois? En même temps,
il y aurait moins de demandes à la commission d'appel, sa tâche en
serait moins lourde et elle pourrait se concentrer sur des cas humanitaires au
lieu des cas de technicité.
Le Président (M. Bordeleau): Monsieur le ministre.
M. Laurin: Effectivement, M. le Président, un des articles
du règlement qui régissent l'admissibilité de pareils
enfants à l'école n'est pas clair à ce point qu'il fasse
l'unanimité sur le plan de l'interprétation. Par exemple, quand
on dit dans le règlement qu'il faut que le parent ait
démontré que son enfant a reçu son instruction
élémentaire en français, le nombre d'années que
comporte cet enseignement n'est pas spécifié, d'où une
certaine ambiguïté. Je sais qu'il y a eu certains problèmes
autour de l'interprétation de cet article et c'est une autre des
raisons, d'ailleurs, pour laquelle j'ai demandé au Conseil de la langue
française de réviser aussi bien divers articles de la charte que
divers règlements. J'avais particulièrement en vue cet
article-là. Mais, en attendant que je puisse statuer ou conclure
là-dessus, je considérerai avec beaucoup d'attention la
suggestion du député et je verrai, s'il y a lieu, à lui
donner une suite.
Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va? Est-ce
que le programme 11 est adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Bordeleau): Pour résumer,
l'ensemble des programmes est donc adopté, sauf le programme 10, bien
sûr, qui a été adopté à une autre commission
parlementaire. Les crédits du ministère de l'Éducation,
dans leur ensemble et comprenant chacun des programmes, sont adoptés, ce
qui complète les travaux de la commission de l'éducation. Je
demanderai donc au rapporteur de la commission de faire rapport à
l'Assemblée nationale. Les travaux de la commission sont ajournés
sine die.
(Fin de la séance à 12 h 35)