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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Friday, March 30, 1984 - Vol. 27 N° 2

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Interpellation: L'implantation de micro-ordinateurs dans le système d'enseignement


Journal des débats

 

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames et messieurs, bonjour et bon avant-midi. Nous allons commencer la première activité publique de la nouvelle commission parlementaire permanente de l'éducation et de la main-d'oeuvre. La commission est réunie ce matin pour entendre l'interpellation du député d'Argenteuil au ministre de l'Éducation sur le sujet brûlant d'actualité: l'implantation de micro-ordinateurs dans le système d'enseignement.

Les membres de la commission présents sont les suivants: MM. Ryan (Argenteuil), vice-président de la commission, Champagne (Mille-Îles), Leduc (Fabre), Leduc (Saint-Laurent). Je crois que c'est tout. Je vais demander à la secrétaire de la commission de nous faire part des remplacements temporaires pour la durée de l'interpellation, s'il y en a.

La Secrétaire: II n'y a qu'un seul remplacement, M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) remplace Mme Dougherty (Jacques-Cartier).

Le Président (M. Charbonneau): Merci, Me Giguère.

Je vais vous lire les règles de procédure qui vont régir l'interpellation et qui découlent des articles 287 à 295 de notre règlement. Le député qui a donné l'avis d'interpellation intervient le premier pendant dix minutes. Le ministre interpellé va intervenir ensuite pendant dix minutes. Il y a ensuite alternance dans les interventions, c'est-à-dire un député du ou des groupes de l'Opposition; par la suite, le ministre, un député de la formation ministérielle; par la suite, un député de l'Opposition, le ministre et ainsi de suite. Cet ordre des interventions a été convenu cette semaine lors d'une réunion des leaders des deux groupes parlementaires. Chaque intervenant a droit à un temps de parole de cinq minutes, conformément à l'article 293. Je pense qu'il est important que les membres de la commission et le ministre notent que, si un intervenant utilise moins de cinq minutes, le temps non utilisé est perdu et qu'on passe à un député d'un autre groupe parlementaire.

Je vous signale que, selon le règlement, je pourrais, à titre de président de ces nouvelles commissions parlementaires, moi aussi intervenir pendant le débat, mais je pense que, pour les premières fois que la commission va utiliser le nouveau règlement, il est préférable que je m'abstienne d'intervenir dans le débat. Donc, le débat se fera sans que le président participe aux échanges. Par la suite, vingt minutes avant la fin de la séance, j'accorderai un dernier temps de parole de dix minutes au ministre de l'Éducation et ensuite le député d'Argenteuil aura un droit de réplique de dix minutes. Je mettrai fin aux travaux de la commission sans qu'il soit nécessaire de faire motion à cet effet.

Lorsqu'une interpellation a lieu, je vous rappelle qu'il n'y a pas de motion, ni de rapport, ni de vote et qu'on ne peut invoquer non plus le défaut de quorum.

S'il n'y a pas de question sur les règles de procédure, je vais immédiatement demander au député d'Argenteuil et vice-président de la commission de prendre la parole et d'interpeller le ministre.

Exposé du sujet M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, le dossier relatif à l'approvisionnement des réseaux scolaires québécois en matière de microordinateurs est l'un des plus tristes exemples de l'incompétence et de la confusion dans lesquelles baigne l'action du gouvernement. Cette histoire commence par un rêve. En décembre 1982, le ministre fraîchement nommé de la Science et de la Technologie annonce l'implantation prochaine de 70 000 ordinateurs dans les écoles du Québec. Trois mois plus tard, l'ancien ministre de l'Éducation, que nul n'a jamais accusé de pécher par excès de réalisme, ramène l'objectif à 42 000 appareils sur une période de cinq ans. Il fait alors connaître, en mars 1983, une politique qui a été arrêtée -prend-il soin de préciser - avec un appui substantiel de la base même du système scolaire. Nous verrons tantôt que cet appui était un autre rêve.

En juin 1983, le gouvernement fait connaître les conditions auxquelles devront satisfaire les entreprises intéressées à fournir des ordinateurs aux écoles et aux collèges. Pour se qualifier, le gouvernement indique,

entre autres, qu'il faudra que les entreprises soient capables de fournir un produit qui soit en conformité pleine et entière avec les spécifications définies par le gouvernement. Ces différentes conditions furent présentées aux firmes intéressées en juin 1983. Elles s'attendaient à être appelées à présenter des soumissions au cours de l'été, mais tout l'automne s'écoula sans qu'elles ne reçoivent aucune nouvelle du gouvernement. Soudain, à la fin de novembre 1983, un télex envoyé un vendredi soir, après la fermeture des bureaux, les pressait de soumettre des propositions en dedans d'une semaine. Malgré ces conditions très défavorables, plus d'une quinzaine d'entreprises s'exécutèrent. Elles s'attendaient naturellement que leurs propositions soient examinées sérieusement. Appelée à examiner d'urgence les propositions, une équipe de fonctionnaires soumettait quelques jours plus tard au gouvernement un rapport concluant que trois groupes: Positron-Burroughs, Matrox-Olivetti et Comterm-Matra se conformaient "entièrement" - le mot "entièrement " est entre guillemets, je le tire du rapport des fonctionnaires - aux exigences émises dans le télex du 25 novembre et dans les spécifications du gouvernement.

La prochaine étape devait logiquement consister pour le gouvernement à établir le contact avec les trois firmes concernées afin de pousser les vérifications plus loin avec chacune et de déterminer en fin de compte laquelle ou lesquelles devraient être retenues. Le rapport des fonctionnaires reposait en effet sur des données très sommaires qui n'avaient pu donner lieu à aucune vérification systématique. Par conséquent, il ne pouvait en aucune manière justifier un choix exclusif et définitif. Mais, contrairement à toute raison, le premier ministre annonçait à Paris le 6 décembre que le gouvernement avait décidé de retenir la proposition du groupe Comterm-Matra.

Pressé de questions, le gouvernement, au cours des semaines qui suivirent, tenta de justifier son choix en soutenant qu'il avait choisi un appareil qui répondait très bien à ses spécifications, qu'il avait choisi un appareil comportant le prix le plus avantageux - ce sont toutes des explications qui ont été avancées à un moment ou à un autre par des porte-parole du gouvernement - qu'il avait choisi la proposition offrant les meilleures garanties de retombées économiques, qu'il avait choisi l'appareil offrant les plus fortes garanties de contenu québécois, qu'il avait voulu privilégier la filière technologique française.

Quatre mois après cette décision, nous savons davantage à quoi nous en tenir. Ce que le gouvernement a refusé d'expliquer à l'époque, les faits ont permis de le connaître peu à peu. Voici comment s'établit le bilan de l'action gouvernementale dans le dossier des micro-ordinateurs.

La preuve est désormais faite que le choix de l'appareil Axel-20 était objectivement mauvais. Les rapports d'experts ont établi que l'appareil ne répond pas aux spécifications définies par le gouvernement en juin 1983. Ce modèle a été carrément rejeté par les deux bancs d'essais qui en ont fait l'examen. La preuve est en train de se faire qu'au moins un autre modèle mis de l'avant par une firme concurrente et rejeté par le gouvernement répondait beaucoup mieux aux spécifications gouvernementales. Le prétention gouvernementale voulant que l'appareil Axel-20 ait été offert à meilleur prix est également fausse. Nous pouvons aujourd'hui affirmer qu'à spécifications égales d'autres appareils qui répondaient beaucoup mieux aux spécifications du gouvernement pouvaient être obtenus à prix égal sinon meilleur, mais ces propositions ont été laissées de côté sans examen et sans même qu'on daigne adresser aux firmes intéressées un accusé de réception.

Sur le plan du contenu québécois, la proposition Comterm-Matra n'était en rien supérieure aux deux autres qui furent laissées de côté. Quel que soit l'appareil retenu, des éléments aussi essentiels que les circuits intégrées, le boîtier, l'écran et les puces viendront très généralement de l'extérieur. Quant aux autres aspects, il n'y avait aucune différence importante entre les trois propositions principales.

La même observation doit être formulée au sujet des retombées économiques pour le Québec. À cet égard, il n'y avait aucune raison pour le gouvernement de choisir arbitrairement la proposition Comterm-Matra sur la seule foi des propositions succinctes soumises par diverses firmes à la fin de novembre.

Quant à la pénétration des marchés étrangers, les deux propositions laissées de côté par le gouvernement offraient à bien des égards des possibilités plus intéressantes ou, à tout le moins, aussi intéressantes que celles de Comterm-Matra. Le groupe Comterm ne s'est vu attribuer d'exclusivité par son partenaire français que pour le marché canadien sur lequel, en dehors du Québec, ses chances de pénétration restent fort minces, surtout étant donné les événements des derniers mois. Les groupes Matrox-Olivetti et Positron-Burroughs, en raison de leur association avec des firmes multinationales solidement engagées dans le secteur électronique, jouissaient de dispositions intéressantes dans leurs ententes respectives avec leurs partenaires qui auraient à faire des perspectives peut-être plus positives.

En ce qui touche la filière française, l'une des deux propositions laissées de côté pouvait se qualifier en raison de la présence importante du groupe Olivetti en France, des

intérêts substantiels que le gouvernement français lui-même détient au sein de ce groupe et de la place non négligeable qu'occupent déjà les appareils d'une firme filiale d'Olivetti, la firme Logabax, dans les écoles françaises, contrairement aux appareils Matra qui attendent encore à la porte de ces écoles.

Par ailleurs, on s'étonne de constater que le ministre de la Science et de la Technologie ainsi que le président de Comterm-Matra se déclarent déjà publiquement disposés à laisser tomber la filière française au profit d'un autre appareil de conception purement nord-américaine, le modèle Hyperion. Les propos de M. Gilbert Paquette à ce sujet se comprennent d'autant moins qu'il y a peu de temps le ministre des Finances, M. Jacques Parizeau, était dépêché en France par le gouvernement pour tenter d'y sauver ce qui reste de la filière française dans ce dossier.

Le ministre de l'Éducation soutient qu'un nouveau banc d'essai aura lieu à la fin d'avril et qu'on saura alors à quoi s'en tenir. Si le ministre a bien lu le rapport du banc d'essai des commissions scolaires, il doit savoir que ce groupe d'experts a recommandé le rejet pur et simple du modèle Axel-20 et qu'il exige que le gouvernement s'en tienne à cette conclusion, et je cite un extrait de son rapport: "Tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas pu faire des tests avec un modèle réel qui réponde à nos exigences. L'accent doit être mis dans cette recommandation sur le mot "réel". Les membres du banc d'essai veulent examiner un appareil réel, prêt à servir, et non pas un modèle théorique ou un modèle artificiellement corrigé pour des fins politiques dont il resterait ensuite à vérifier le fonctionnement et les qualités au plan pratique. Il ne semble pas que cette exigence puisse se réaliser raisonnablement avant l'été prochain." (10 h 15)

Devant un dossier aussi accablant, la société québécoise doit exiger des explications de la part du gouvernement. Au ministre de l'Éducation qui est censé être le principal responsable de ce dossier, je demande ceci: Comment peut-il justifier pareil bafouillage de la part du gouvernement dont il faisait partie et dont il fait toujours partie? Deuxièmement, qu'entend-il faire pour remettre de l'ordre dans le dossier des micro-ordinateurs? Troisièmement, quelle mesure entend-il prendre pour que les besoins des institutions d'enseignement puissent être satisfaits à temps pour les séances de la prochaine année scolaire, c'est-à-dire d'ici l'été de la présente année? Ces questions mettent en jeu la compétence et le sérieux du gouvernement, elles touchent au plus haut point l'intérêt public et le ministre de l'Éducation ne saurait les éluder.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député d'Argenteuil. Je vous remercie particulièrement pour avoir respecté votre temps de parole. Je passe maintenant la parole au ministre de l'Éducation et député de Matane.

Réponse du ministre M. Yves Bérubé

M. Bérubé: M. le Président, ce qui est intéressant dans l'intervention du député d'Argenteuil, d'une part, c'est cette emphase sur la quincaillerie et l'absence totale de préoccupation pour toutes les considérations pédagogiques qui, de toute évidence, ne semblent pas être au coeur de la réflexion du Parti libéral. Il va donc falloir mettre un peu l'accent sur le pourquoi de l'utilisation des ordinateurs, pourquoi la normalisation, pourquoi tel type d'appareils, ce qui ne semble pas effectivement intéresser le député d'Argenteuil.

Évidemment, il faut quand même le dire, c'est vrai qu'on a mis à mon avis beaucoup trop d'accent sur la quincaillerie au Québec, s'imaginant qu'il suffirait de rentrer une série d'appareils dans nos écoles pour que subitement, du jour au lendemain, on devienne des experts de l'an 2000. Or, il n'en est rien. Cette folie furieuse autour d'un dossier, fondamentalement un dossier éducatif, mais qui peut évidemment se traiter dans un contexte de développement économique et également dans un contexte de développement de relations internationales, par exemple avec la France, c'est un dossier qui est en soi complexe.

Il y a des fois où je me demande si c'est simplement parce qu'on discuste avec un consortium franco-québécois et que, chez certains de nos interlocuteurs, on sent toujours cette espèce de mentalité antifrancophobe ou francophobe purement et simplement qui résulte peut-être d'une sorte de frustration reliée à l'isolement ou à l'abandon. Ou encore, est-ce que c'est une espèce de bravade de petits gars qui veulent montrer qu'ils sont effectivement meilleurs que les Français? Je l'ignore. En tout cas, cela colore beaucoup de ces interventions politiques et, en même temps, cela explique peut-être pourquoi la préoccupation éducative autour de l'ordinateur n'est pas centrale dans les interventions politiques du Parti libéral.

Premièrement, répondons à une première question, soit l'importance de l'information dans nos écoles. Il faut comprendre que l'informatique envahit très rapidement notre vie quotidienne. De plus en plus, évidemment, les logiciels, la programmation est plus raffinée et on a peut-être de moins en moins à savoir comment fonctionne l'ordinateur. On n'a qu'à voir nos enfants jouer dans les arcades, ces

jeux électroniques, pour bien se rendre compte qu'ils ne connaissent pas un mot de l'électronique et, néanmoins, ils jouent avec un appareil électronique de la même façon que beaucoup de nos concitoyens conduisent une voiturs sans nécessairement pouvoir la réparer lorsqu'elle fait défaut. C'est normal. On n'est pas obligé de connaître les entrailles d'un ordinateur pour pouvoir utiliser l'informatique.

Donc, de plus en plus, je pense que la sophistication des instruments, associée à l'informatique, va faire en sorte que l'ordinateur n'aura pas à être connu dans son fonctionnement. Mais c'est néanmoins un instrument qui prépare à une certaine logique et à une certaine rigueur. C'est un instrument qui peut accomplir des tâches pédagogiques utiles, par exemple, poser des questions, surveiller la réponse, la corriger, le cas échéant, permettre des exercices en géométrie, en trigonométrie. On voit là, par exemple, l'utilisation très intéressante d'un langage informatique comme le logo, l'utilisation également de l'ordinateur à des fins de développement mathématique, pour améliorer les programmes. Également, l'ordinateur peut servir à des jeux familiaux, mais à des jeux également éducatifs.

Il faut donc se rendre compte que l'informatique va envahir notre vie de tous les jours. Il faudra donc distinguer aussi trois objectifs que l'on peut associer à la pénétration de l'informatique dans nos écoles. D'une part, doit présider, je pense, l'idée de démystifier un appareil qui, en soi, est mystérieux pour un grand nombre de nos concitoyens, parce qu'il est nouveau et qu'on a tendance à l'approcher avec crainte, ne réalisant pas, en fait, combien il est simple - je dirais même simpliste - et assez facile d'accès.

Donc, il faut démystifier un appareil, mais il faut aussi pouvoir l'utiliser pour résoudre des problèmes. Certains problèmes mathématiques se résolvent plus facilement avec un ordinateur que mathématiquement. Également, l'utilisation de fichiers de classement peut se faire plus facilement avec un ordinateur que si on le fait manuellement. On peut donc initier l'étudiant à la solution d'un certain nombre de problèmes pratiques. On peut également utiliser l'ordinateur à des fins pédagogiques, c'est-à-dire faire répéter des leçons, vérifier des apprentissages à l'aide de questionnaires et donc favoriser un autocontrôle de la progression de l'étudiant dans ses cours.

Donc, il n'y a aucun doute, l'informatique va pénétrer notre milieu scolaire, va pénétrer notre vie en société, mais il ne faut pas non plus vouloir aller trop vite. En fait, nous voulons nous donner de véritales régimes pédagogiques nouveaux en lieu et place de ces anciens programmes-cadres qui définissaient de façon un peu trop vague le contenu des matières à enseigner. On s'est retrouvé au Québec avec, très fréquemment, des enseignements très disparates d'école en école, des problèmes de passage d'un enfant d'une école à l'autre, des difficultés de production de manuels, d'instruments pédagogiques; faute d'une certaine uniformité désirable, nous avons, depuis maintenant 1980, entrepris de mettre en place de nouveaux régimes pédagogiques. Ceci suppose, à ce moment-là, puisqu'ils sont remarquablement bien faits en termes d'objectifs, de préparation de guides, un certain nombre d'instruments pédagogiques qui se font plus lentement ou qui se préparent plus lentement. De fait, on doit admettre qu'il y a un certain retard.

Donc, introduire un nouvel instrument pédagogique au milieu des changements actuels peut représenter des problèmes additionnels. Il y a donc lieu de ne pas exagérer la rapidité de la pénétration d'un tel appareil, comme l'ordinateur, si, en même temps, on n'a pas prévu des guides pédagogiques qui puissent permettre à l'enseignant de les utiliser à l'intérieur de leurs cours réguliers.

Donc, l'utilisation de l'ordinateur à des fins directement de pédagogie va entrer au Québec, sans doute, plus lentement qu'on ne le voudrait. Mais il demeure qu'il y a tout l'aspect de l'initiation à l'informatique pour lequel nous avons une clientèle. Pour l'année dernière, près de 18 000 étudiants se sont inscrits à ces cours. Ce sont près de 150 écoles qui ont donné cet enseignement. C'est un enseignement qui, je pense, répond à un besoin immédiat, pour lequel on a une clientèle définie et pour lequel on a besoin d'appareils.

Lorsqu'on dit qu'on a besoin d'appareils, on a besoin d'un appareil standard. Voilà un aspect que n'a pas traité le député d'Argenteuil. Peut-être parce qu'il ne s'intéresse pas à cette question. Pourquoi dit-on un appareil standard? C'est qu'il faut quand même constater qu'au Québec nous entrons dans nos écoles des appareils de Radio-Shack, des Commodore, des Apple, des IBM. Aucun de ces appareils ne peut communiquer l'un avec l'autre. Il n'est pas possible, à l'heure actuelle, de préparer un logiciel, un didacticiel, pour aider à l'enseignement d'une matière, qui ira sur ces quatre appareils, avec comme conséquence qu'il n'est pas possible, pour une entreprise spécialisée dans la préparation d'instruments pédagogiques, de préparer un tel instrument pédagogique puisqu'elle ne connaît pas l'instrument sur lequel il sera utilisé. Cette absence de standardisation a donc comme conséquence que la pénétration des instruments pédagogiques se fera beaucoup plus lentement.

Le député d'Argenteuil ne se préoccupe pas de ce problème de standardisation de la

recherche la plus rapide possible d'un appareil; ce qu'il voudrait, c'est que l'on continue à s'éparpiller dans toutes les directions, que nos écoles ne puissent se doter d'instruments pédagogiques. Évidemment, à ce moment-là, il aurait réussi à faire sa bataille politique, mais, pratiquement, c'est l'enfant, c'est l'étudiant qui paierait le prix de sa bataille. Il faut donc effectivement standardiser le type d'appareil.

Deuxièmement, il faut y aller assez rapidement. Le député d'Argenteuil parlait de la précipitation du gouvernement, mais il faut y aller quand même assez rapidement. Il y a un an, il y avait quoi? 400 appareils au Québec. Cette année, il doit y en avoir à peu près 5000; donc, en une année, il s'en est acheté tout près de 4000. Nous prévoyons qu'au moins pour septembre il nous en faudra encore de 3000 à 4000; en d'autres termes, le nombre d'ordinateurs augmente très rapidement. Mais il faut bien se rendre compte que nous sommes dans la situation très simple où vous avez une école qui achète un tourne-disque avec une vitesse de rotation de 33 tours, une autre en achète un avec une vitesse de rotation de 45 tours, une autre avec une vitesse de rotation de 78 tours, et on se demande comment on va faire pour fournir un disque à tout le monde. Ce n'est pas possible! Il faut standardiser et assez rapidement, avant que notre parc d'ordinateurs soit complètement désorganisé et impossible à structurer.

Donc, si on reprend les questions du député d'Argenteuil, non, il n'y a pas cafouillage, il y a une volonté de standardiser, il y a une volonté de permettre la pénétration de logiciels, ce que le député d'Argenteuil n'a malheureusement pas compris. Je me serais attendu d'ailleurs qu'il s'attarde davantage sur les préoccupations pédagogiques; c'est quand même un domaine où il faut lui reconnaître une certaine force, mais qu'il laisse à d'autres la question de la quincaillerie, de l'électronique qu'il connaît sans doute moins bien. Mais non, il a préféré s'intéresser à la quincaillerie et laisser la pédagogie de côté; je pense que c'est dommage dans son interpellation.

Ce qui est important, c'est d'arriver à définir ce que serait cet appareil. Donc, le ministère, en juin, a déterminé ses caractéristiques. Il s'est interrogé. Pourquoi y a-t-il eu un tel délai entre juin et novembre? C'est très simple, la Fédération des commissions scolaires a été consultée, elle a demandé plus de temps, ce que nous avons accepté. L'industrie, par le Conseil de l'industrie électronique du Québec, a également demandé un moratoire - on s'en souviendra - a également demandé plus de temps; il y a donc eu des délais. Voilà pour la première question.

M. le Président, vous me faites signe.

Il n'y a pas de problème, j'aurai l'occasion, dans la suite de la discussion, de répondre aux autres questions du député d'Argenteuil. Je tenais quand même, au départ, à bien poser le problème dans son cadre pédagogique plutôt que sous cet angle de pure quincaillerie finalement un peu mesquin qui traduit une absence de préoccupation vis-à-vis de l'enfant, vis-à-vis de l'éducation.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre de l'Éducation. Je cède de nouveau la parole au député d'Argenteuil.

Argumentation M. Claude Ryan

M. Ryan: Dès le mois d'avril dernier, dans une intervention détaillée que j'ai faite sur la question de l'informatique à l'école, j'ai souligné avec force que le gouvernement ne se préoccupait pas assez de la pédagogie et beaucoup trop de la quincaillerie. Je lui ai demandé de réviser ses priorités de manière que nous ne soyons pas aux prises avec le genre de problèmes auxquels nous faisons face aujourd'hui.

Je ne pense pas que le ministre de l'Éducation fasse quelque millage que ce soit en essayant de faire porter sur le dos de l'Opposition une faute qui revient en tout premier lieu au gouvernement. Si le ministre veut relire les textes nombreux que j'ai publiés sur le sujet depuis un an, il se rendra compte - je comprends qu'il est nouveau comme ministre de l'Éducation - qu'il y a bien des choses qui ont été dites avant qu'il ne vienne les répéter ce matin pour la nième fois, pour notre intérêt mutuel.

Si le gouvernement avait eu plus d'intérêt véritable pour la question pédagogique, cela se serait reflété dans les chiffres de ses prévisions budgétaires pour les cinq prochaines années en matière de politique informatique. Le ministre sait très bien que le gros du budget de 150 000 000 $ qui a été prévu pour les cinq prochaines années était affecté à la quincaillerie. Je pense que cela va en chercher à peu près 140 000 000 $. Sur la pédagogie dont vous parlez avec tant d'emphase ce matin, la recherche et l'expérimentation, nous en sommes à cent pour cent. Savez-vous combien vous avez prévu pour la présente année? À peu près 175 000 $ sur un budget total d'une quinzaine de millions. C'est tout ce que vous avez mis de côté.

Vous avez dit: On va s'occuper de la formation des maîtres, c'est très important, mais, les commissions scolaires, arrangez-vous avec les budgets que vous avez déjà. On n'a pas d'argent spécial à mettre à votre disposition. 175 000 $ pour l'ensemble du Québec, c'est parfaitement ridicule.

D'ailleurs, dans une note que vous m'avez communiquée hier qui répondait très incomplètement aux renseignements et aux demandes de documentation que je vous avais formulés, vous m'avez dit vous-même: On n'a pas dépensé tout ce qui avait été prévu pour la présente année au point de vue quincaillerie. Il nous reste un surplus de 9 000 000 $ et on va essayer de demander que ce soit transféré pour les fins de la formation de l'année prochaine. Il me semble que cela aurait été plus judicieux d'établir des priorités plus vraies dès le début de l'exercice. Toutes les priorités qui ont été établies ici témoignaient d'une obsession pour la quincaillerie qui a été malheureusement typique de l'attitude du gouvernement jusqu'à maintenant. (10 h 30)

Vous parlez de besoin d'un appareil standard comme si on ne s'était pas préoccupé de cette question-là. C'est l'enfance même de l'art, M. le ministre. C'est pour cela qu'il y a eu toute la démarche engagée depuis un an. Nous n'avons pas contesté la démarche elle-même. Nous savons très bien qu'il faut en venir à une standardisation de notre équipement et de notre fonctionnement dans le domaine de l'informatique à l'école. C'est le postulat sur lequel nous discutons. Vous pouvez bien prendre tout le temps que vous avez pour démontrer des évidences, mais je voudrais vous dire qu'en ce qui me touche vous perdez votre temps.

Ce qui nous préoccupe, c'est que cet équipement standard dont nous avons besoin soit acquis dans des conditions de rationalité, de sérieux, de compétence, d'honnêteté, de respect des interlocuteurs que doit observer le gouvernement et qu'il se vante d'observer dans d'autres domaines. Nous vous disons: Dans ce domaine-ci, ces conditions n'ont pas été respectées. Si nous sommes obligés d'attacher tant d'importance à cet aspect du débat, c'est parce que le gouvernement a mal fait son devoir et j'ose espérer, maintenant que vous avez le temps de vous en occuper un peu plus immédiatement, que vous n'êtes pas là uniquement pour ratifier des demandes qu'on vous fait, en fin de compte. J'ose espérer que vous y verrez et que vous mettrez de l'ordre dans un dossier où il n'y en a pas eu.

J'aimerais que vous nous disiez clairement pourquoi on a laissé de côté d'autres propositions qui étaient également très intéressantes et, à certains égards, plus intéressantes que celles que vous avez retenues. Qu'est-ce qui vous a pris, surtout s'il ne fallait pas verser dans la précipitation, d'aller si vite et de marcher de manière aussi unilatérale, aussi irrespectueuse des gens mêmes que vous aviez invités à vous soumettre des propositions?

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: M. le Président je pense que la meilleure façon de répondre à la question du député d'Argenteuil, c'est de poser clairement le problème tel que le gouvernement avait à le résoudre et, à ce moment-là, de voir les choix qu'il a faits.

Donc, première démarche, concevoir ce que devrait être l'appareil des cinq prochaines années au Québec pour éviter que désormais chaque école parte dans une direction. Non pas que ce ne soit pas louable que l'école bénéficie de son autonomie, mais avec le problème qu'un enfant qui est formé sur un ordinateur dans une école, lorsqu'il transfère à une autre école qui n'a pas le même ordinateur, a des problèmes et il n'y a pas d'uniformité, ce qui est non désirable.

Donc, concevoir l'appareil. Il faut bien se dire, et on a peut-être tendance à l'oublier, que, l'été dernier, l'ordinateur d'IBM n'était pas sur le marché, le Mclntosh d'Apple n'était pas sur le marché, l'OPC d'Olivetti, que représente la compagnie Matrox, n'était pas sur le marché. En d'autres termes, l'appareil idéal existait chez certains producteurs, fabricants à la fine pointe de la technologie, mais dans l'ensemble on peut dire qu'il n'existait pas sur le marché.

C'est à partir des principales caractéristiques des meilleurs appareils sur le marché que le ministère, de concert avec la Fédération des commissions scolaires, a élaboré un devis. Quel serait cet ordinateur idéal? La réponse est venue en juin avec un ensemble des spécifications désirées pour l'appareil. Certes, à ce moment, aucune compagnie ne pouvait prétendre satisfaire ces exigences. Mais les compagnies pouvaient regarder ce qui était demandé et se poser la question suivante: Sommes-nous en mesure de répondre à ces exigences? Il y a donc eu une certaine maturation, l'industrie a demandé un délai et, de fait, nous le lui avons accordé pour lui permettre d'examiner si, effectivement, elle ne pourrait pas concevoir un tel appareil pour notre marché en maximisant les retombées économiques chez nous.

Lorsqu'en novembre l'appel de soumission sommaire a été fait, il n'a pas été fait sur des appareils physiques. Oui, existait l'appareil Micom, par exemple, développé en Ontario qui a coûté très cher et qui coûte encore très cher, développé spécifiquement pour le marché ontarien par le ministère ontarien de l'Éducation. Oui, existait un appareil qui répondait sensiblement à nos besoins. Il existait d'autres appareils sur le marché qui ne répondaient pas à nos besoins. La compagnie

IBM n'avait pas encore mis au monde son ordinateur ni la société Apple avec son nouveau Mclntosh.

C'est donc sur la base d'une proposition sur papier où l'entreprise disait si, oui ou non, elle pourrait satisfaire à des spécifications que le choix a été fait, d'une part, et c'est normal puisque aucun de ces ordinateurs en général n'existait. C'est donc sur la base d'une proposition sur papier et également sur une proposition quant aux prix, quant aux retombées, c'est sur cette base que le choix a été fait. Il est toujours facile pour un concurrent après coup de dire: Je pourrais vous livrer cet ordinateur à 12% moins cher que le prix affiché; oui, parce que maintenant il connaît le prix de l'autre. Mais quand il a fait sa soumission, je regrette, ce n'était pas le prix qu'il avait affiché. Donc, c'est très facile, une fois que les soumissions sont ouvertes, de dire: J'aurais pu soumissionner plus bas. Ah oui! mais vous ne l'avez pas fait. Ce sont les règles du jeu.

Donc, lorsqu'on examine l'ordinateur avec lequel on faisait affaires, il s'agissait d'ordinateur sur le papier, d'ordinateur pour lequel nous avions des propositions de prix, des propositions de retombées et donc, sur la base de ces propositions, on a choisi un consortium et un appareil. Mais il était bien évident que c'est un choix d'entamer des négociations préliminaires et non un choix définitif, parce que, entre un ordinateur sur le papier et l'ordinateur réel sur le banc d'essai, il y a un écart. Là où le député d'Argenteuil induit en erreur - je ne sais pas si c'est sciemment - lorsqu'il parle du banc d'essai concernant l'Axel-20, c'est qu'il dit: Cet ordinateur ne répond pas aux besoins, aux spécifications. Tout le monde le savait. La compagnie aussi le savait. L'ordinateur dont elle parlait dans sa proposition n'était pas l'ordinateur qu'elle avait en vente. Ce serait exactement comme dire qu'une entreprise ne peut pas vous livrer aujourd'hui un appareil qui répond à vos besoins sous prétexte qu'il y a cinq ans cette compagnie faisait un autre appareil. C'est complètement irrationnel.

C'est bien évident que les ordinateurs de premières séries qui ont été faits tant par Apple, par IBM et les autres ne répondent pas aux besoins actuels, mais on ne doit pas tirer la conclusion que ces compagnies qui ont fait un ordinateur il y a quelques années ne peuvent pas en faire un aujourd'hui qui réponde aux besoins. L'erreur vient de ce qu'on a pris au mot un banc d'essai sur un appareil de série vendu présentement sur le marché, mais qui ne répond pas à nos spécifications. Je vous dirais même que cet ordinateur, qui est une véritable petite merveille, le Mclntosh d'Appel, ne répond pas non plus à nos spécifications. Il ne pourrait être choisi. Il n'a pas d'écran en couleur, en particulier. La vérité, c'est que, même dans des ordinateurs très à l'avant-garde aujourd'hui, on ne répond pas nécessairement aux besoins dans le secteur de l'éducation. Le choix s'est fait sur la base de devis préparés conjointement avec les commissions scolaires, sur la base de prix, sur la base de propositions de retombées pour choisir celui avec lequel on négocierait l'appareil futur que l'on retiendrait.

Il est bien évident que, si l'entreprise ne peut pas respecter l'essentiel du devis qui définit bien nos besoins, à ce moment, ce que cela veut dire, c'est que cette entreprise ne répond pas aux exigences du processus de soumission et on devra, à ce moment, procéder avec une autre entreprise.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Fabre.

M. Michel Leduc

M. Leduc (Fabre): Merci. Je me serais attendu que le député d'Argenteuil situe un peu mieux le problème. Je pense qu'il n'y est pas arrivé. Il a parlé de cafouillage dans le dossier. On essaie exactement de comprendre ce qu'il entend par cafouillage. Si je résume un peu ce que j'ai compris, c'est qu'il semble reprocher au gouvernement d'avoir choisi la firme Comterm-Matra. Si j'ai bien compris, il nous dit qu'il y avait d'autres firmes qui étaient fort intéressantes. Le gouvernement s'est empressé de choisir la proposition qui était faite par Comterm-Matra. Il s'agissait d'une proposition sur papier, le ministre vient de le dire. Le député d'Argenteuil a en main un document que j'ai également, qui s'appelle une grille d'analyse, et on trouve une comparaison des différentes compagnies qui ont fait des soumissions en décembre dernier.

Je regarde ce que Bytec-Comterm extraordinateur proposait et moi, en tant que profane, je trouve cela extrêmement intéressant. Bien sûr, il s'agit d'une proposition sur papier. Qu'est-ce que je vois? Je vois que, pour commencer, Comterm-Matra, Bytec-Comterm, il s'agit d'une compagnie québécoise. Cela me semble, au départ, être extrêmement intéressant que la proposition vienne d'une compagnie québécoise. Ceci, d'ailleurs, a été souligné par un article écrit par le journaliste Alain Dubuc dans lequel il dit: "Dès le départ, le gouvernement, à juste titre, a voulu utiliser ces fonds comme levier pour maximiser les retombées économiques et technologiques pour le Québec. On a décidé d'accorder le contrat à une compagnie québécoise qui pourrait garantir le contenu québécois. L'appareil Comterm de Pointe-Claire répondait..." etc.

Si je regarde la grille d'analyse, je

remarque que, du point de vue de la fabrication et du contenu québécois, sur papier en tout cas, on dit que ce contenu ira au-delà de 50%. Si je regarde la qualité et l'importance des retombées économiques et technologiques, je constate qu'il y aura 105 emplois directement reliés au contrat de 10 000 ordinateurs; une nouvelle usine de 100 000 pieds carrés représentant plusieurs millions d'investissements au Québec; 30 nouveaux emplois; des possibilités d'exportation ailleurs au Canada et aux États-Unis; la possibilité d'un projet de fabrication micro-électronique; un circuit hybride et un circuit monolithique dans la région de Sherbrooke. C'est extrêmement intéressant.

Il s'agit, bien sûr, d'une proposition sur papier. Mais les autres compagnies ont fait le même type de proposition. Le gouvernement a choisi la proposition de Bytec-Comterm parce qu'elle lui semblait la plus intéressante.

Je ne comprends pas le reproche que fait le député d'Argenteuil, puisque cette proposition était parmi les meilleures qui furent présentées. Par la suite, on a mis cet appareil au banc d'essai. Là aussi, on a procédé tel que convenu. Et cela s'est fait en collaboration avec les commissions scolaires. Il arrive souvent que le député d'Argenteuil reproche au gouvernement de ne pas collaborer avec les commissions scolaires. Or, cela s'est fait avec les commissions scolaires. Alors, que reproche-t-il au gouvernement exactement? Il y a eu analyse sérieuse d'un appareil qui va être utilisé dans les écoles en fonction de critères déterminés pour des fins pédagogiques. Est-ce que le gouvernement a procédé ou non à l'analyse de cet appareil? Oui. Et il l'a fait en collaboration avec ses partenaires. On s'est aperçu, finalement, que l'appareil en question dont on avait la proposition sur papier ne répondait pas tout à fait aux critères exigés. On a fixé un nouvel échéancier pour permettre à cette compagnie de satisfaire aux critères indispensables pour que l'appareil réponde aux besoins de nos élèves. Il me semble que le gouvernement et les commissions scolaires ont fait leur devoir. Je ne comprends pas le problème soulevé par le député d'Argenteuil.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Fabre. Je cède maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen; Merci, M. le Président. M. le député de Fabre ne comprend pas le problème. Il n'a pas lu les journaux depuis six ou huit mois. Tout le monde reproche au gouvernement de ne pas avoir fait sa "job". L'idée de base est excellente. Comme le ministre l'a dit, on cherche un ordinateur qui convient à tout le monde, dont les logiciels sont disponibles partout, qui est fabriqué à 100% au Québec, qui est livré dans les délais prévus, avec lequel on peut développer des liens avec la France. On est d'accord avec tout cela. Le problème, c'est que vous ne l'avez pas fait. Depuis, on va de contradiction en contradiction chez vos propres ministres.

J'ai entendu le ministre ce matin dire: "II faut aller assez rapidement dans cette affaire." Il l'a dit deux fois. J'ai ici un article de journal qui date de seulement quelques semaines dans lequel on cite M. Bérubé: "L'ordinateur à l'école, ce n'est pas une urgence." C'est l'incohérence totale. J'ai un document ici fourni par M. Biron, ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, qui dit que le choix de microordinateurs a été fait en faveur de Comterm tout simplement parce que son offre était la meilleure. Il a refusé toutefois de rendre publics les documents qui permettraient de vérifier cette assertion. Une semaine plus tard, nous avons une évaluation faite par la Fédération des commissions scolaires du Québec dans laquelle elle dit que ce même ordinateur est rejeté comme produit collectif pour le réseau des commissions scolaires et cela, tant et aussi longtemps que ne seront pas faits les tests qui conviennent. Ce sont des contradictions l'une après l'autre. (10 h 45)

Est-ce que vous pensez que M. Parizeau est allé en France parce qu'il n'y avait pas de problème dans le dossier des ordinateurs? Voyons donc! Je veux poser une question au ministre. Il me semble que le coeur du problème se situe dans les décisions du gouvernement de traiter l'achat de ces ordinateurs comme si c'était un achat de tracteurs ou de chaises. Le ministre a dit à plusieurs reprises, même dans les textes de ce matin que je peux lire ici, que c'est une industrie en pleine évolution. Il y a des instruments disponibles aujourd'hui qui n'étaient pas disponibles hier. Il a même dit et je le cite, que "dans cinq ans, toute décision prise aujourd'hui semblera totalement dépassée". Alors, on vit dans une situation où nous avons une industrie en pleine évolution ou même en pleine révolution.

À un moment donné, le ministre a le culot de dire que le gouvernement du Québec peut définir - et je le cite - l'ordinateur idéal pour les fins pédagogiques au Québec. Un seul ordinateur idéal pour tout le réseau d'éducation du Québec, de l'élémentaire à l'universitaire, dit-il, un gouvernement de fonctionnaires peut aujourd'hui concevoir cet ordinateur idéal en fonction de tout ce qui existe aujourd'hui. Ils n'ont pas l'imagination pour savoir ce qu'il peut venir après et de dire: Bon, dorénavant on va acheter

seulement ce mandat.

C'est pourquoi on s'est trouvé en difficulté parce que le lendemain de cette déclaration on réalisait qu'il y avait d'autres aspects, que c'était complètement changé. J'ai cherché à comprendre comment il pouvait y avoir un peu de bon sens dans cette contradiction et j'ai finalement trouvé quelque chose dans un document remis aux journalistes, le 6 mars, par le ministre de la Science et de la Technologie. Je pense que j'ai la clé de l'idée du gouvernement si je comprends. Le ministre disait effectivement vous n'avez pas acheté un ordinateur de Comterm-Matrox - et je le cite: "Le gouvernement du Québec n'a pas choisi un appareil - cela contredit à peu près tout ce que les autres ministres ont dit -mais un consortium chargé de concevoir ou de modifier un appareil, de le fabriquer et de le faire évaluer en fonction des besoins pédagogiques propres au Québec."

Alors, si je comprends le sens de cette déclaration vous avez effectivement décidé de nationaliser l'industrie d'ordinateurs pédagogiques au Québec. Vous avez nommé un groupe Comterm-Matrox pour devenir la direction générale de la fabrication et de la conception des ordinateurs pour les fins de l'enseignement au Québec. On va mettre toutes nos cartes dans leur capacité d'évoluer, pendant des années, aussi vite que toutes les autres personnes et compagnies en Amérique du Nord, en France et au Japon qui sont dans cette industrie. Si c'est le cas il n'est pas question de poser des questions au sujet de Matrox ou de Apple. Il n'est pas question d'un équipement qu'on a acheté. On n'a pas acheté Axel, on n'a pas acheté Hypérion. On a choisi un consortium chargé de concevoir, de modifier, de fabriquer et de faire évoluer les ordinateurs en fonction des besoins pédagogiques du Québec. Est-ce vrai, M. le ministre? Maintenant les gens de Bytec-Comterm sont ceux qui, pour un avenir indéfini, vont décider ce que nous allons avoir comme ordinateurs dans tout le système pédagogique au Québec.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: M. le Président, il y a dans la question du député de Notre-Dame-de-Grâce toujours cette espèce de complexe d'infériorité rampant que l'on retrouve dans les interventions souvent des députés du Parti libéral, c'est-à-dire cette espèce de sentiment d'infériorité que le Québec ne peut pas concevoir des technologies de pointe, des technologies qui lui sont propres et qu'on devrait être perpétuellement à la remorque des autres. Je pense que je peux lui laisser ses opinions. Il ne s'en aperçoit pas mais dans toutes ses interventions cela ressort tout le temps.

Lorsqu'on parle de concevoir un ordinateur idéal il faut toujours le mettre en perspective. L'ordinateur idéal aujourd'hui veut simplement dire celui qui est le mieux équipé et qui regroupe le plus d'avantages de tous les ordinateurs sur le marché, donc qui combine un ensemble de qualités que l'on retrouve chez plusieurs concurrents en un seul appareil. C'est ce que l'on peut appeler un ordinateur un peu idéal. Par exemple, un ordinateur où on aurait incorporé les principales caractéristiques avantageuses d'ordinateur produit par différentes compagnies industrielles. Carrément, je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce n'a pas saisi l'importance de la standardisation, donc de l'achat d'un ordinateur uniforme dans l'ensemble des institutions du Québec, car il ne comprend pas l'importance de logiciels dans la pédagogie.

En effet, un logiciel c'est comme un livre. Je pourrais écrire des livres en russe et vouloir les passer dans mes écoles au Québec et trouver peu de preneurs. Il faut que je les écrive dans une langue que l'étudiant va comprendre. De la même façon, si je dois préparer des logiciels qui vont servir à l'enseignement, il faut que je les écrive dans une langue que l'ordinateur va comprendre. Il faut donc que je choisisse l'ordinateur d'abord pour savoir quelle langue je vais utiliser. Si j'ai trois ordinateurs différents dans mes écoles, je devrai composer trois livres différents de manière à pouvoir communiquer avec ces appareils. C'est ce que nous cherchons à éviter. C'est simple et limpide, il n'y a que le député de Notre-Dame-de-Grâce qui va comprendre, mais c'est son problème.

Donc, ce que l'on recherche, c'est l'appareil le plus performant et standardisé, de telle sorte que l'on puisse mettre l'accent là où je vais le mettre maintenant pour la deuxième partie de mon intervention.

Il faut effectivement parler maintenant de pédagogie. Tantôt, le député d'Argenteuil a voulu commencer à ouvrir davantage en citant des propos antérieurs. Je pense qu'ils auraient eu leur place dans son intervention liminaire plutôt que de mettre l'accent sur la mécanique, mais, enfin. Le choix qu'il a fait n'était pas celui-là, mais il a raison d'insister sur la formation des maîtres. Je pense que le député d'Argenteuil ne sait pas, par exemple, qu'il y a maintenant près de 10 000 enseignants qui ont reçu une formation de base en informatique au Québec, qu'il y en a 4000 à l'heure où je vous parle en formation universitaire en informatique de manière à pouvoir introduire l'informatique dans leur enseignement.

Le député d'Argenteuil oublie qu'il existe dans nos conventions collectives des provisions pour les enveloppes de

perfectionnement des maîtres qui servent à cette fin.' Donc, dans les calculs d'argent que nous consacrons à la formation des maîtres il oublie d'en tenir compte. Cette année c'est près de 4 000 000 $ que nous allons mettre en préparation de logiciels et de formation. Mais, attention, il y a deux questions auxquelles il a oublié de répondre dans son intervention. Il nous pose la première question: Vous mettez trop peu dans les logiciels, vous devriez mettre plus d'argent dans les logiciels. Qu'attendez-vous? Je lui réponds: Oui, je veux bien. Pour quelle machine? Je vais investir des millions de dollars pour écrire des livres en quelle langue? Pour les utiliser dans quel appareil? Si je ne sais pas, ce serait un très mauvais investissement que de s'engager dans la préparation de logiciels pour un appareil que je ne connaîtrais pas, donc avec le risque qu'il soit inutilisé. Et il nous reprocherait ce gaspillage de fonds publics et il aurait raison. C'est néanmoins ce qu'il propose. Donc, mettre plus d'argent dans les logiciels? Oui, mais pour quel appareil?

Deuxièmement, nous devrions consacrer plus de ressources à la formation des maîtres? Oui, mais lorsque le maître retourne en classe, avec quel appareil travaille-t-il? Y a-t-il des appareils dans sa classe? Va-t-il utiliser les logiciels qu'il a peut-être conçus dans ses travaux sur un ordinateur quelconque et lequel? Voilà les questions auxquelles le député d'Argenteuil omet de répondre et voilà les questions auxquelles le gouvernement, lui, doit répondre, parce que le gouvernement ne peut se contenter d'une simple attitude critique, négative, qui ne permet pas à la société de progresser. C'est d'ailleurs pour cela que le Parti libéral est dans l'Opposition. Ils sont nettement meilleurs pour énoncer toutes sortes de propositions critiques qui ne font guère avancer les dossiers. C'est un problème bien simple qu'il nous faut résoudre: Quelle machine répondrait le mieux à nos besoins?

Le Président (M. Charbonneau): On va devoir en rester à cette question. Je pense que vous aurez l'occasion de reprendre...

M. Bérubé: M. le Président, nous sommes en train de trouver cette machine.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député des Mille-Îles.

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne (Mille-Îles): M. le Président. Je pense que nous sommes réunis ce matin pour savoir, en fin de compte, quel serait le meilleur instrument, le meilleur ordinateur pour qu'enfin nos étudiants puissent apprendre le plus adéquatement possible. Je pense qu'il faut avoir une préoccupation avant tout pédagogique. La pédagogie, c'est important pour les enseignants et aussi pour les étudiants. Est-ce que l'instrument dont il est question, dont on va faire le choix, va faire en sorte que l'apprentissage dans chacune des écoles, dans chacune des classes au Québec, sera le meilleur pour pouvoir absorber des connaissances, pour pouvoir comprendre des connaissances?

Une autre préoccupation pédagogique aussi: Est-ce que le choix de cet ordinateur va faire en sorte que les étudiants, à leur sortie de l'école, auront aussi les connaissances nécessaires pour s'adapter à d'autres types d'informatique, à d'autres types d'ordinateurs?

Au moment où on se parle, je pense que c'est assez inquiétant, si on parle de quincaillerie. Il semble y avoir une sorte d'anarchie dans les commissions scolaires. J'ai ici un tableau qui illustre un relevé d'information sur l'utilisation des micro-ordinateurs en pédagogie dans les écoles du Québec. Il y a quatorze appareils différents qui sont utilisés dans des commissions scolaires. J'en prends quelques-uns pour vous donner des exemples: Le Apple. Sur 4702 appareils en fonctionnement actuellement au Québec, il y en a 1228 qui sont de la compagnie Apple, pour un pourcentage de 26%. Vous avez Atari 400 et 800. Il y a l'emploi d'appareils pour un pourcentage de 1%. Pour Axel-20, il y a un pourcentage de 3,3. Le Commodore Vic et 64: il y a 24% des appareils utilisés dans les écoles du Québec au moment où on se parle. IBM, c'est 16,5%. Vous avez Texas Instruments ici, le numéro 99a: il y a 3,9% d'appareils dans nos institutions et, au moment où on se parle, on sait que Texas Instruments se retire du marché; il est presque face à la faillite. On ne sait pas comment ces écoles vont faire aussi pour renouveler leur stock ou perfectionner leurs appareils s'ils se retirent du marché. C'est une préoccupation.

On s'aperçoit que dans le Québec, dans les commissions scolaires, c'est un petit peu à la va-comme-je-te-pousse, selon l'inspiration du moment, selon qu'une commission scolaire puisse analyser que peut-être ce serait un instrument plutôt que tel autre. Je pense que, comme gouvernement, nous avons le devoir de dire non à cette anarchie et de prendre position.

Je suis un petit peu navré de voir que la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec, l'automne dernier, prendre l'attitude de dire: II s'agit de ne pas acheter un seul type d'appareil mais de laisser les fabricants en concurrence. Allons-y à la va-comme-je-te-pousse. Je suis surpris d'entendre le député de Notre-Dame-de-Grâce ce matin venir en contradiction avec la position de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. Je pense

que nous avons le devoir de suggérer très fortement, sinon d'imposer un appareil qui va rejoindre notre préoccupation pédagogique, soit l'enseignement. (11 heures)

Si on prend quand même la comparaison, je serais alarmé si dans certaines écoles, on prenait un tourne-disques 33 tours, comme on en donnait un exemple tout à l'heure, qu'une autre commission scolaire, choisirait un 45 tours, tandis qu'une troisième opterait pour un 78 tours. Le producteur de disques se disait en fin de compte: qu'est-ce que je vais faire avec tout cela?

Je pense que cela demeure de l'anarchie. Si on regarde dans un contexte de déplacement d'étudiants, de déplacement de professeurs, nous avons, je pense, devant nous la bonne attitude, à savoir, après consultation et étude des spécifications les plus universelles possible de nos écoles, nous avons le devoir d'exposer ou de suggérer un ordinateur et c'est celui qui est sur la table.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Mille-Îles. M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, j'entendais plus tôt le ministre dire qu'il n'y a pas eu de cafouillage dans ce dossier. Il a absolument raison. Cela a été du "cacafouillage". Or, il est certainement le seul à penser de cette façon. J'ai fait venir toutes les coupures de journaux qui parlaient de ce problème et il y en avait environ deux pouces d'épais. J'ai trouvé, au plus, dix articles qui ne condamnaient pas la position du gouvernement dans ce domaine.

Je pense que la première question, et peut-être la seule qu'on devrait se poser ce matin, c'est: est-ce qu'on veut répondre aux besoins des usagers? Est-ce notre préoccupation primordiale? Je dis que notre préoccupation est sûrement primordiale et notre seule préoccupation devrait être de répondre aux besoins des usagers.

J'écoutais plus tôt le député de Mille-Îles dire qu'effectivement il fallait se préoccuper des usagers et des besoins des usagers. J'ai nettement l'impression que dans ce dossier tout le monde s'en est mêlé, surtout les ministères à caractère économique. On s'est beaucoup plus préoccupé, je pense, du développement économique, du développement technologique dans cela que du besoin des enfants, des étudiants. On a peut-être voulu également faire plaisir aux Français. Je n'ai absolument rien contre la France. Je veux bien, si c'est possible, qu'on fasse des ententes et qu'on ait un certain contenu français, mais je pense que cela fut peut-être la préoccupation première du gouvernement. On a d'abord voulu faire plaisir aux Français, ensuite on a voulu peut-être également qu'il y ait un contenu québécois. Il aurait possiblement fallu qu'on se préoccupe d'abord d'avoir un contenu québécois et ensuite considérer la participation de la France.

On a dit plus tôt, et je voudrais relever cela, que l'Axel-20, génération 1, ce n'était pas cet appareil qu'on devait acheter. Bien je m'excuse! C'est cet appareil que vous deviez acheter. Oui, oui c'est trop facile de dire, par la suite bien écoutez, non c'est la génération 2 qu'on devait acheter. Non, c'était l'appareil et même il a passé au banc d'essai. Vous avez fait des tests. C'est trop facile aujourd'hui de venir nous dire, bien écoutez, ce n'était pas la machine qu'on voulait acheter. C'est bien évident qu'on s'aperçoit aujourd'hui que ce n'était pas l'appareil qui répondait aux besoins. Il faut lire et j'ai ici un article qui dit: En premier lieu, on découvre que la machine choisie, l'Axel-20, ne convient pas très bien aux usagers - c'est un expert, M. Yves Leclerc, que je cite - et aurait besoin d'être sérieusement révisée - on parle toujours de l'Axel-20 - pour répondre aux spécifications du ministre de l'Éducation."

La seule chose étonnante dans cela, c'est qu'on ne s'en soit pas rendu compte plus tôt. C'est très évident qu'on ne s'est pas préoccupé du tout des besoins des écoles dans cette matière. Je suis inquiet. Je pense qu'il faudrait soulever cette question: c'est que j'ai l'impression qu'on s'en va vers un autre Quebecair, Sodispro, Asbestos. On est en train de gaspiller l'argent des Québécois. On a dit qu'on devrait répondre aux besoins des écoles mais est-ce qu'on ne devrait pas également essayer d'avoir la meilleure machine au meilleur coût possible? Voilà la première question. Cela, je pense qu'on ne s'en est pas préoccupé, on s'en est foutu complètement. Aujourd'hui on regarde sur le marché, on a une Mclntosh Apple pour laquelle on parle d'un coût de 1300 $. Apparemment, c'est une merveille. Elle aurait une génération en avant sur l'Axel-20. Puis on parle d'un coût d'environ 150 000 000 $, comme si c'était à peu près comme LG 2, l'électricité. Il s'agit simplement d'un contrat; je dis oui, 150 000 000 $ qu'on pourrait peut-être ramener à 75 000 000 $. Mais savez-vous qu'on consacre environ 6 000 000 000 $ au ministère de l'Éducation? On doit en acheter drôlement des équipements au Québec et cela doit dépasser les 75 000 000 $. Je pense qu'on devrait se diriger plutôt vers le logiciel, le didacticiel. Si j'ai bien compris, on pense affecter environ 600 000 000 $. Alors, la quincaillerie, le "hardware", je ne sais pas si on devrait s'en préoccuper tant que cela.

On a dit qu'il fallait avoir un modèle

unique. Encore là, j'ai certaines restrictions. Je me demande si nos étudiants lorsqu'ils vont sortir de nos écoles, de nos institutions d'enseignement s'ils vont tous travailler sur la même machine. C'est peut-être une question qu'on devrait se poser. Il faudait peut-être qu'on prépare ces étudiants, pour qu'ils aient le meilleur "background" possible, à travailler sur différentes machines.

Quand le ministre a dit tantôt qu'il faudrait peut-être avoir un modèle unique parce qu'on ne pourra pas avoir le logiciel, le fameux disque, il faut voir la compétition qui existe dans ce domaine. Je vous garantis qu'il y a une évolution énorme qui se fait et d'une façon rapide. Je pense qu'il pourrait sûrement répondre à nos besoins. D'ailleurs, il faut voir le nombre d'entreprises qui sont intéressées à nous desservir.

Il y a une chose que je voudrais savoir. Pourquoi ne laisserait-on pas jouer le rôle -simplement on a parlé beaucoup et le gouvernement en a parlé - à l'entreprise privée. Pourquoi ne laisserait-on pas jouer le jeu de l'offre et de la demande là-dedans? Qu'on s'assure qu'il y ait un contenu québécois, je veux bien. Je ne veux pas que ce soit à n'importe quel prix et je ne veux pas m'embarquer dans d'autres Quebecair, Sodispro, Asbestos et également SIDBEC. Je pense que ce sont des questions à se poser. Est-ce qu'on ne devrait pas jouer le jeu de l'appel d'offres? Ensuite, on les étudie et qu'on demande qu'elles soient compatibles, c'est évident.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Vous avez presque tenté la présidence en parlant de SIDBEC. Comme j'ai dit que je n'interviendrais pas dans le cours du débat, je vais m'abstenir de relever vos commentaires et laisser la parole au ministre de l'Éducation.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Je pense que l'intervention extrêmement intéressante du député de Mille-Îles est éclairante. Il va falloir la répéter et il n'y a qu'une seule façon c'est répéter, répéter et répéter et à la longue, l'Opposition va finir par comprendre. Pourquoi ne pas se retrouver avec sept ou huit machines différentes dans nos écoles? C'est très simple. Lorsqu'un enseignant développe un programme... Imaginons un enseignant de mathématique qui enseigne des fonctions mathématiques en secondaire V, s'intéresse à l'informatique et conçoit un petit programme où on pourra tracer les fonctions mathématiques sur l'écran pour donner une vision plus concrète de l'expression mathématique et des résultats qu'elle donne lorsqu'on introduit les variables dedans. Il a conçu un programme utile sur le plan pédagogique. S'il a travaillé avec une machine qui utilise un logiciel pour le graphisme avec un positionnement dans la mémoire différent d'une autre machine, il y a des chances qu'on ne puisse pas prendre son programme et l'utiliser dans une autre école sur un appareil différent. Donc, il est seul avec son logiciel à pouvoir l'utiliser.

De la même façon, si au ministère de l'Éducation on conçoit, pour aider à l'apprentissage du français au niveau de secondaire III, un didacticiel qui serait disponible dans toutes les écoles du Québec, qu'on découvre qu'il n'y a pas une école qui a le même ordinateur il ne pourra donc pas utiliser le logiciel. On ne développera pas le logiciel; c'est-à-dire que tout l'aspect pédagogique de l'utilisation de l'informatique ne pourra être développé. La seule chose qu'on pourra faire sur l'appareil, c'est l'apprentissage d'un langage. C'est la solution de problème. Oui, on peut faire cela sur à peu près n'importe quelle machine. D'ailleurs, il est de peu d'importance qu'on soit formé sur un appareil et devoir travailler plus tard avec un autre appareil car les langages sont fondamentalement les mêmes et nous exigeons dans les spécifications que l'appareil que nous achèterons soit compatible avec la plupart des grands langages utilisés en Amérique du Nord, de telle sorte que l'étudiant pourra passer un jour sur un autre appareil sans difficulté et il se familiarisera très rapidement. Le problème n'est donc pas pour l'étudiant de se familiariser avec un appareil. Le problème n'est pas du tout là. Le député de Saint-Laurent est passé à côté de la question.

Le problème, c'est que lorsqu'on a mis au point un petit programme sur une disquette et qu'on veut l'utiliser dans des écoles du Québec, il faut que tout le monde soit équipé avec un appareil qui permette d'utiliser cette disquette et qu'on ne soit pas obligé de la traduire dans N formats différents, parce qu'il y a N ordinateurs différents. Il est là le problème. Donc, nous cherchons des spécifications standards de manière à nous assurer que désormais, lorsque l'on développera des instruments pédagogiques, toutes les écoles y aient accès. On ne peut donc pas accepter qu'il y ait tantôt du Apple, tantôt du IBM qui sont deux ordinateurs non compatibles. Si on permet aux commissions scolaires d'acheter ces deux ordinateurs en concurrence, comme le dirait le député de Saint-Laurent, nous allons morceler le système d'éducation et nous ne serons pas en mesure, effectivement, de doter nos étudiants d'instruments pédagogiques. C'est cela, l'objectif. Je ne peux pas comprendre pourquoi le Parti libéral ne comprend pas que l'objectif est de donner des instruments d'enseignement à nos enfants et que ces instruments d'enseignement doivent être le plus universels possible. C'est

ce qu'il ne comprend pas. Il voudrait qu'on écrive des livres en russe, en italien et en espagnol et qu'on donne cela à des enfants Québécois francophones ou anglophones qui ne comprennent pas la langue. C'est malheureux. On ne peut pas faire cela. Donc, premier problème, une certaine uniformité.

Deuxième problème. Le député de Saint-Laurent laisse entendre qu'on choisit la machine qui coûte le plus cher. Il a des chiffres, pourquoi ne les cite-t-il pas? Non. Les prix soumissionnés et proposés par les entreprises indiquaient pour le Comterm-Matra, par exemple, 2850 $ à comparer à 2995 $ pour Matrox. C'est le chiffre utilisé par la firme. Ce ne sont pas des chiffres inventés. La firme a mis cela dans sa soumission. Je regrette, mais Comterm-Matra était le meilleur marché. Il devrait les lire, ces chiffres. On les lui a donnés, mais il ne les consulte pas.

Dernier point, qu'arrive-t-il si l'étudiant, après avoir toujours travaillé sur la même machine, se retrouve dans une entreprise avec une autre machine? C'est évident qu'effectivement, dans l'industrie, on aura des appareils IBM, Apple, Bytec. On aura toutes sortes d'appareils, mais de fait, il n'y a pas de problème. Ils utilisent tous fondamentalement le même langage et par conséquent, une fois la formation acquise, la logique apprise, à ce moment-là, on peut l'exercer sur à peu près n'importe quel type d'instrument.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Fabre.

M. Michel Leduc

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Je pense que le député de Saint-Laurent a posé une excellente question. Veut-on répondre aux besoins des usagers, en premier lieu? Bien sûr! La réponse est oui. On veut répondre aux besoins des usagers avant tout en priorité et si ce n'était pas le cas, on n'aurait pas soumis l'Axel-20 au banc d'essai avec les commissions scolaires. Cela s'est fait conjointement, encore une fois. Donc, il y a un processus extrêmement sérieux qui a été entrepris pour vérifier si l'appareil répondait aux besoins des usagers. On a répondu non dans un premier temps et on a demandé à la compagnie de se soumettre aux spécifications exigées. Donc, il y a une volonté très nette de répondre aux besoins des usagers. Je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce a posé, finalement, le véritable problème de l'Opposition. C'est la question de l'appareil standardisé. Je ne sais pas si l'Opposition préfère la tour de Babel informatique, que chaque commission scolaire développe ses appareils ou fasse l'achat d'appareils qui ne répondraient pas à des spécifications ou à une standardisation.

Je pense qu'il est là, le véritable problème.

Je voudrais rappeler le cas de l'Ontario. Cela peut peut-être nous servir, en tout cas, de point de référence, parce que l'Ontario a connu de grandes difficultés. Il s'agit d'un domaine extrêmement complexe et extrêmement mouvant. Ce n'est pas facile de s'y retrouver et si le Québec connaît un certain nombre de difficultés pour arriver justement à choisir le meilleur appareil possible, on connaît les mêmes problèmes ailleurs. (11 h 15)

En 1981, le ministère de l'Éducation et le ministère de l'Industrie de l'Ontario publiaient un plan de développement sur l'utilisation de l'ordinateur à l'école. On voulait alors venir en aide à l'industrie électronique ontarienne. Donc, il y avait une volonté de venir en aide à l'industrie ontarienne. Cela ne se produit pas seulement au Québec. Cela se fait du côté de l'Ontario. Selon ce plan, le gouvernement ontarien financerait jusqu'à 80% de l'achat des micro-ordinateurs pour les institutions scolaires.

De plus, et c'est important, le gouvernement voulait susciter la création d'un rnicro-ordinateur éducatif canadien. Donc, là aussi, on préférait un appareil standardisé pour l'Ontario. Il faut dire que c'était la première fois qu'on assistait à une pareille intervention de l'État en Ontario. On a donc établi les spécifications d'un appareil qu'on a surnommé "le castor bionique". Il en est résulté que ce qui devait être un rnicro-ordinateur bon marché s'est transformé, en avril 1982, en un mini-ordinateur au coût de 10 000 $ environ. Aucun prototype de cet appareil n'a été fabriqué.

Là aussi, on connaît d'énormes difficultés malgré toute la bonne volonté du gouvernement de vouloir venir en aide à l'industrie ontarienne, malgré sa bonne volonté d'en arriver à un appareil standardisé et répondant aux besoins des étudiants en Ontario. Devant ces résultats, les industriels ont hésité à investir dans le projet. Deux ans plus tard, le castor bionique n'a toujours pas vu le jour. Deux ans plus tard, M. le Président. Le développement de l'utilisation de l'ordinateur à l'école s'est fait, mais au profit de Commodore et d'Apple plutôt qu'au profit de l'industrie ontarienne.

Là aussi, on connaît des difficultés. Je pourrais rappeler les difficultés qu'a connues également l'Alberta. Là aussi, il a fallu se tourner vers des appareils étrangers. Qu'au Québec, on veuille d'une part chercher le meilleur appareil pour répondre aux besoins des usagers, c'est très clair mais, d'autre part, qu'on veuille également tenter de favoriser une compagnie québécoise, et donner la chance de développer cet appareil au Québec, je pense que c'est tout à fait normal.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Reed Scowen

M. Scowen: Sur deux sujets, M. le Président. Premièrement, le ministre a fait grand état de cette question de logiciels. Je sais qu'il est un amateur des mini-ordinateurs. Il pense qu'il peut donner des leçons à tout le monde. Moi aussi, j'ai un petit ordinateur dans mon bureau. Je vous montre un logiciel. Ce sont des petits disques dans un manuel. C'est ce dont on parle quand on parle des logiciels. Ce n'est pas plus compliqué que cela. J'en ai d'autres ici pour des fins différentes.

Il est certain qu'un élément de la problématique est de trouver des équipements qui soient compatibles avec un type de logiciel. C'est un peu, comme on l'a mentionné, de faire fonctionner vos disques de musique sur les 33 tours plutôt que sur les 45 tours. Il y a quand même plusieurs façons de régler ce problème. Je vais vous en donner seulement une. C'est de décider que les équipements dans les écoles doivent être compatibles avec le système qu'on appelle aujourd'hui le système IBM. Dans ce cas-là, vous pouvez préparer vos programmes sur la base des logiciels du système IBM. On peut aussi les acheter de la France parce qu'il y a plusieurs logiciels disponibles là-bas et compatibles avec le système IBM.

Nous avons un choix de dizaines d'équipements. Personnellement, l'équipement que j'ai dans mon bureau n'est pas un appareil IBM, mais il est compatible avec tous les logiciels de IBM. Le Hyperion, fabriqué par Bytec-Comterm, est compatible avec tous les logiciels de IBM. On peut en ajouter qui sont conçus par l'entreprise privée québécoise, pour des fins pédagogiques, par le ministère québécois de l'Éducation, par d'autres ministères et par n'importe qui. Il n'est pas nécessaire de dire que, parce qu'il y a des 33 tours, des 45 tours et des 78 tours qui ont été inventés par les autres, il faut que nous fabriquions des 25,2 tours pour que ce produit soit uniquement québécois. C'est complètement farfelu.

Je pense que le ministre pourrait maintenant arrêter de nous faire des petites leçons de pédagogie. Il y a beaucoup de gens ici au Québec qui le comprennent beaucoup mieux que lui.

En terminant, je veux lui poser une deuxième question parce que je trouve que, dans un sens, c'est la clé du problème. Je reviens à cette déclaration du ministre de la Science et de la Technologie dans laquelle il a dit - j'aimerais que le ministre me dise aujourd'hui s'il est solidaire de cette déclaration du ministre Paquette - ce qui suit: En faisant le choix de Bytec-Comterm, le gouvernement du Québec n'a pas choisi un appareil, mais un consortium chargé de concevoir, modifier, fabriquer et faire évoluer en fonction des besoins pédagogiques du Québec.

Si c'est le choix qu'on a fait, je trouve que la façon de choisir un consortium chargé de faire évoluer les besoins pédagogiques du Québec - cela a été fait en fonction d'une demande du ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, si je ne m'abuse, qui a suggéré de choisir un ordinateur pouvant satisfaire les besoins en microordinateurs du réseau scolaire québécois pour les 18 prochains mois - est un non-sens, une absurdité et c'est faire preuve d'une stupidité évidente.

Si je comprends bien, le gouvernement a choisi un consortium pour faire évoluer nos besoins en matière d'ordinateurs dans les écoles du Québec à l'avenir, sur la base d'une demande de soumissions pour du "hardware", des ordinateurs pour les prochains 18 mois. Je pose la question au ministre: Est-il solidaire avec la déclaration du 6 mars du ministre Paquette quant à la vraie nature du choix qui a été fait?

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Premièrement, concernant l'ordinateur qui a été choisi, le député de Notre-Dame-de-Grâce a raison de dire qu'il faut régler le problème en exigeant la compatibilité IBM; ce peut être une exigence, ce qui élimine à ce moment-là, évidemment, des firmes comme Commodore, comme Apple et cela réduit le marché des ordinateurs possibles à un petit nombre de compagnies. Il pourrait choisir cette voie, c'est possible.

Soulignons cependant qu'en juin dernier IBM n'avait pas encore d'ordinateur personnel sur le marché; on prévoyait sa venue sur le marché. D'ailleurs, beaucoup ont été déçus lorsque finalement l'ordinateur personnel de IBM a été connu, lorsque l'on a constaté qu'il n'incorporait que relativement peu de technologie originale, qu'il s'agissait tout simplement d'assemblage de composantes standardisées et que l'ensemble était fort peu novateur. Mais on pourrait effectivement choisir cette voie, c'est une voie.

La voie qui a été choisie a été, au contraire, par le biais d'un ensemble de spécifications, de rechercher un ordinateur qui répond essentiellement à cette compatibilité, mais qui, en même temps, a des caractéristiques assez uniformes. La compatibilité dite IBM n'est jamais à 100%; on peut avoir des compatibilités à 80%, à 90%, à 60%, on n'a jamais une compatibilité

complète. Donc, c'est plus simple de choisir carrément une technologie, un appareil.

Le choix qui a été fait a été celui d'un appareil répondant à un ensemble de spécifications. Même la compagnie Comterm-Matra, dans sa proposition, explique que l'appareil qu'elle produit déjà, l'Axel-20, elle le présente comme répondant à la plupart des critères de la configuration désirée, à la plupart des critères. Mais même la compagnie reconnaît que la configuration finale de l'Axel-20 va devoir faire l'objet de développement et indique que son service de recherche et de développement est à travailler activement à des modifications qui vont faire que l'appareil Axel-20 modifié répondra aux spécifications qui sont demandées et exigées par le ministère et les commissions scolaires.

Donc, l'Axel-20, en partant, est connu comme un ordinateur de première génération qu'il faudra améliorer. Ce sur quoi on s'est basé, c'est non pas sur un ordinateur physique, mais sur un ordinateur sur le papier. Comme d'ailleurs, dans le cas de IBM qui n'était pas à ce moment-là sur le marché, c'était également un ordinateur sur le papier, comme d'ailleurs la plupart des ordinateurs qui nous étaient proposés. Il s'agissait d'ordinateurs théoriques.

Quant à la deuxième question qu'il me pose concernant l'affirmation du ministre de la Science et de la Technologie, je dois vous dire que je ne partage pas l'opinion du ministre de la Science et de la Technologie. Je crois qu'elle est incorrecte quant au fond, dans la mesure où ce qui a été demandé a été une soumission par des firmes pour un produit identifié. Ce que nous examinons, c'est exactement l'Axel-20 modifié ou encore le PC, je ne sais trop lequel, d'Olivetti. Il y a un numéro, une identification, un appareil et la demande de soumission porte sur un appareil et sur un consortium et on ne peut pas dissocier l'un de l'autre. Là-dessus, je ne partage pas l'opinion du ministre de la Science et de la Technologie.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre de l'Éducation. M. le député de Mille-Îles.

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne (Mille-Îles): Merci, M. le Président. Dans toute cette discussion, c'est sûr, pédagogie oui; produit québécois, je pense qu'il faut y tendre aussi. Un produit à caractère qui s'allie peut-être à la technique américaine et à la francophonie aussi, je dis oui à tout cela.

On discute ici à l'Assemblée nationale d'électronique, d'ordinateurs. C'est un monde qui évolue tellement vite. Au moment où on se parle, on peut peut-être avoir une option pour un ordinateur et déjà, dans certaines officines, on pense à la création d'autres choses et c'est déjà dépassé.

Un de mes amis est allé à une exposition l'automne dernier, à Dallas au Texas, où tous les grands fabricants du monde étaient là. Une observation se faisait: tous les produits américains concurrentiels, c'est-à-dire que des compagnies comme Commodore, Apple, IBM, TRS, Texas Instruments ont tous leurs accessoires particuliers, leurs logiciels particuliers, ce qui fera en sorte qu'éventuellement beaucoup de compagnies feront faillite même aux États-Unis et même de grands empires, même des multinationales. On l'a vu aussi pour la compagnie Osborne qui vient de déclarer faillite. Texas Instruments, qui passait pour la compagnie la plus dynamique, se retire du marché et, éventuellement, d'autres tomberont.

J'ai acheté un ordinateur pour mon fils et je viens d'apprendre que la compagnie est en difficultés financières. Je ne sais pas comment je vais compléter cet ordinateur. Il faut savoir aussi que la technologie japonaise viendra sur le marché nord-américain dans quelques années. Or, toutes les compagnies d'ordinateurs japonais ont les mêmes logiciels qui peuvent s'intégrer à toutes les fonctions de chacun de ces appareils. C'est l'homogénéité qui fera la force du marché japonais qui viendra éventuellement en Amérique. Nous ferons face à cette technologie qui fera qu'il y aura peut-être beaucoup plus d'uniformité, beaucoup plus de complémentarité.

Je crois aussi que les commissions scolaires doivent aller dans cette voie de l'uniformité, mais il ne faut pas non plus attendre trop de l'extérieur. Il faut penser à nous au Québec. Si on peut doubler une technologie française accompagnée d'une production québécoise qui crée de l'emploi au Québec, qui fait en sorte qu'il y a de l'exportation, j'en suis. Mais encore faut-il, à travers tout ce grand débat, qu'on ait une préoccupation pédagogique autour de cette table. On est membres de la commission de l'éducation, mais, si on peut à travers tout cela donner à nos étudiants, à la fin du cégep, à la fin du secondaire, après les études universitaires, la chance d'explorer une technologie sur le sol québécois, de faire en sorte qu'il y ait une production québécoise, j'en suis. (11 h 30)

II y a déjà sur la table une proposition de construction. Le consortium va faire en sorte qu'il y aura construction ici au Québec, cela amènera la création de 105 emplois, il y aura de 30% à 40% des coûts d'approvisionnement de cet appareil Comterm-Matra qui se feront ici, dans une proportion de 30% à 40% de contenu québécois. Je pense que le Québec est capable aussi, avec les 38 pays francophones

qu'il y a à travers le monde, les 250 000 000 de francophones, on peut aussi, avec la technologie française, combiner le tout et être des exportateurs de logiciels, être des exportateurs d'ordinateurs. Je pense que le Québec a innové dans bien des domaines, comme Hydro-Québec International; il y a une expertise au point de vue de l'électricité qu'on recherche à travers le monde. On vient voir au Québec ce qui se fait parce qu'on a eu des Québécois qui ont été ingénieux. On a ici des firmes-conseils qui sont très avant-gardistes et la demande se fait énormément par les autres pays. On a aussi beaucoup d'échanges de professeurs à travers le monde, que ce soit au Maroc, à la Côte-d'Ivoire et au Zaïre; il y a un marché assez important et même très important.

C'est sûr que, dans le choix qu'on aura a faire, il y a un certain risque, je l'avoue. Est-ce que IBM sera en vie dans trois ans? Je ne le sais pas. Est-ce que Apple le sera? On ne le sait pas. Mais il y a une chose, par exemple, je vous avertis, messieurs, que la technologie japonaise n'est pas arrivée ici en Amérique, elle viendra. C'est pour cela que, dans tout cela, il ne faut pas trop se fier exclusivement aux étrangers, mais il faut, d'une certaine façon, tout en étant prudent, se prendre en main et montrer qu'on est également capable de réaliser des choses tout en ayant en soi un objectif pédagogique et aussi un objectif de création d'emplois, de contenu québécois. On a montré dans le passé qu'on était capable de le faire et je pense qu'on est capable de le montrer dans l'avenir.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Mille-Îles. M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): Je me demande si le gouvernement ne s'est pas mis le bras dans le tordeur et que tout va y passer. J'ose espérer que le nouveau ministre de l'Éducation sera plus sage et peut-être qu'il pourrait - d'ailleurs, il l'a mentionné -revenir sur ce qui a été fait jusqu'à ce jour par le gouvernement.

J'aurais des questions très spécifiques à lui poser. Étant donné que chaque modification à l'Axel-20 demande l'approbation de Matra qui appartient au gouvernement français, il faudra, à mon sens, pour obtenir des modifications, obtenir la permission, le consentement du gouvernement français. Je comprends que le gouvernement français est peut-être très efficace, mais est-ce que vous ne pensez pas que cela pourrait être un processus drôlement et extrêmement lourd et lent, chaque fois qu'il faudra obtenir le consentement du gouvernement français?

Deuxième question: Quel engagement a contracté jusqu'à maintenant le gouvernement dans la filière des ordinateurs, d'abord avec Comterm et ensuite avec le gouvernement français? Qu'arrivera-t-il si, le 30 avril, l'Axel-20 ne répond toujours pas aux exigences du réseau scolaire?

Troisième question: Est-ce qu'il y a des engagements pour les 40 000 autres ordinateurs qu'on devra se procurer d'ici cinq ans? Au cas où l'Axel-20, génération 2, répondrait aux normes établies, est-on assuré qu'on aura le logiciel à la date prévue pour l'implantation de ces ordinateurs dans nos écoles? Si j'ai bien compris, les entreprises qui fournissent le logiciel ont mentionné qu'il fallait absolument qu'elles connaissent la machine et que la machine existe, non pas seulement une machine sur papier.

Une question qui est peut-être plus générale: Est-ce qu'il est logique et acceptable pour vous, M. le ministre, que l'on s'embarque dans un contrat de cinq ans dans un domaine aussi changeant que l'informatique et les ordinateurs? Dans ce domaine - comme je le mentionnais tantôt -une génération, c'est environ six mois. Étant donné qu'à mon sens on s'apprête à dilapider les deniers publics, pourquoi ne tiendrait-on pas une commission parlementaire vu que c'est un domaine aussi technique et ne pourrait-on pas recevoir les expertises nécessaires pour prendre une décision? Vous avez dit qu'il n'y avait pas d'urgence, je suis parfaitement d'accord. De la façon dont vous êtes partis, c'est sûr qu'il n'y a pas d'urgence. On s'en va vers une catastrophe. Je pense qu'il faudrait qu'il y ait une commission parlementaire, qu'on écoute les gens qui ont quelque chose à dire, qu'on écoute, bien sûr, les intervenants: les commissions scolaires, les cégeps, également les universités, mais qu'on écoute surtout les experts, ceux qui ont un mot à dire dans l'expertise.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va, M. le député?

M. Leduc (Saint-Laurent): Oui.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre de l'Éducation.

M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Merci. Tout d'abord, le député de Saint-Laurent nous parle de la lourdeur de l'approbation du gouvernement français. J'ai l'impression qu'il ne connaît pas le fonctionnement des sociétés d'État françaises. Elles sont administrées par des conseils d'administration autonomes. Comme notre Société générale de financement, comme nos autres sociétés, elles se développent avec leur propre personnel et,

évidemment, elles jouissent d'une autonomie complète. Également, j'ai l'impression que le député de Saint-Laurent, qui est là à se péter les bretelles en s'imaginant que lui connaît ça les ordinateurs, il ne sait pas que la compagnie Matra, c'est également elle qui fabrique les Exocet. C'est un des missiles les plus célèbres dans le monde. C'est une des sociétés les plus avancées dans le domaine de la recherche sur les matériaux composés. C'est une des sociétés à la fine pointe de la technologie. Vous savez, la compagnie Matra n'a pas de leçon à recevoir dans les domaines de la haute technologie. Elle est très concurrentielle avec beaucoup d'entreprises.

Le député de Saint-Laurent n'a pas besoin de s'inquiéter, même si Canadair est dans son comté. Avec Canadair, on vole avec des Challenger, c'est-à-dire qu'on essaie de voler avec des Challenger et on a beaucoup de difficulté. C'est la technologie du gouvernement fédéral. S'il veut parler de la mauvaise gestion des compagnies aéronautiques dans le monde, il faudrait qu'il parle de la mauvaise gestion d'une compagnie aéronautique dans son comté gérée par le gouvernement fédéral. Il pourrait donner des leçons aux autres, effectivement des leçons de mauvaise gestion. Vous savez, essayer de donner des leçons à la société Matra, je pense que c'est un peu gênant parce que ces gens sont reconnus comme étant à la fine pointe de la technologie dans leur domaine. Je ne prétends pas que, dans le domaine des micro-ordinateurs personnels, ils aient eu à consacrer beaucoup d'énergie. Non, effectivement, cela n'a jamais été au centre de leurs préoccupations. Toutefois, le gouvernement français a aussi décidé d'introduire des ordinateurs dans les écoles. Il veut que la société Matra occupe une partie du marché français. Donc, il veut qu'il y ait au moins un intérêt de la part de ces sociétés.

Comme cette société a déjà une très grande expertise dans le domaine de la micro-informatique, il faut vous dire qu'il n'y a pas beaucoup de secrets. D'ailleurs, cela a été la réaction d'absolument tous les commentateurs lorsqu'ils ont vu l'ordinateur PC d'IBM. Ils l'ont démonté. Ils ont examiné comment il était construit. C'est un mécano de pièces composées qui existe déjà couramment sur le marché. Il n'y a pas vraiment d'innovation technologique très spectaculaire. Ce n'est pas le cas du Apple Mclntosh où là on a, disons, du développement technologique plus fin. Il faut quand même se dire qu'il n'y a rien de bien sorcier dans la conception d'un ordinateur. Je n'ai pas trop de problèmes. Matra n'est pas gérée comme Canadair, si cela peut rassurer le député de Saint-Laurent. On va le rassurer parce que, effectivement, il espère que son avion vole, mais il doit se poser des questions de temps en temps.

Si, le 30 avril, l'appareil ne répond pas, je pense que nous sommes liés par le processus dans lequel nous nous sommes engagés, c'est-à-dire que nous avons demandé des soumissions. Nous devons examiner les résultats du produit soumis à quelque trois mois après la présentation des soumissions par le fabricant, le produit définitif et il faut examiner si ce produit répond aux spécifications. S'il ne répond pas aux spécifications, à ce moment, on peut soit regarder à l'intérieur des propositions qui étaient faites ou soit carrément mettre un terme au processus lui-même et reprocéder différemment dans le cas d'une autre opération, mais dans la mesure où, entre-temps, un bon nombre d'entreprises ont mis sur le marché des ordinateurs qui répondent aux spécifications parce qu'à ce moment, évidemment, on a un choix qui fait en sorte qu'on pourra s'assurer qu'il y aura des ordinateurs dans les écoles rapidement.

On pourra s'attaquer à une solution temporaire, comme d'ailleurs le gouvernement ontarien a dû faire pendant deux ans. Nous aurions a le Taire pendant quelques mois et à procéder, par exemple, à une nouvelle analyse du problème pour voir comment on pourrait peut-être concilier les objectifs de façon différente. Il n'y a pas de problème. Il n'y a pas de péril dans la demeure. Il y a beaucoup d'ordinateurs qui pourraient répondre à nos besoins et on pourrait peut-être quand même introduire un peu plus de rationalisation dans un procédé qui est un peu anarchique en ce qui a trait à l'achat d'ordinateurs par les commissions scolaires à l'heure actuelle. On nous dit que la machine doit être connue autrement que sur le papier. Là-dessus, le député de Saint-Laurent a parfaitement raison. La proposition qui était demandée aux entreprises reposait sur un ordinateur un peu théorique. Mais il est clair que nous ne recherchons pas - et ce n'est pas possible, d'ailleurs - une conformité absolue. Nous recherchons, dans le fond, un appareil qui répond essentiellement aux devis, qui répond essentiellement aux caractéristiques des appareils que l'on peut retrouver couramment sur le marché. Donc, il y aura un jugement porté sur l'appareil qui nous sera soumis, sauf qu'il faut que ce soit un appareil physique réel. Et, à partir de cela, évidemment, s'il est choisi, nous pourrons dire quel appareil nous utilisons dans nos écoles et donc indiquer aux entreprises fabriquant les logiciels, à celles qui veulent en concevoir, quel type d'appareil elles auront à fabriquer. C'est extrêmement important - là-dessus, le député de Saint-Laurent a raison - d'avoir un appareil concret car il faut développer un logiciel sur un appareil. Il faut s'asseoir devant cet appareil, parce qu'il a toujours des

caractéristiques physiques qui lui sont propres et, par conséquent, cela entraîne nécessairement des contraintes, souvent dans la confection même de l'appareil.

C'est d'ailleurs pour cela qu'il est un peu en contradiction avec le député de Notre-Dame-de-Grâce qui, tantôt, présentait le problème comme étant résolu, c'est-à-dire qu'il suffit d'aller chercher une compatibilité IBM, de manière à pouvoir faire n'importe quoi et avoir toujours un logiciel qui ira dans tous les appareils, pourvu qu'ils aient cette caractéristique de compatibilité.

Par contre, le député de Saint-Laurent a fouillé un peu plus le problème et il arrive à la conclusion qu'au contraire, il faut avoir un appareil bien spécifique pour pouvoir faire des logiciels. Ce serait bon qu'il y ait un caucus du Parti libéral pour que ses membres s'entendent, à savoir s'il est nécessaire d'avoir un appareil physique ou non. Ce serait intéressant. Mais enfin, on va leur laisser faire leur caucus; ils semblent avoir de la difficulté à s'entendre.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre...

M. Bérubé: Quant à la commission parlementaire, M. le Président, quand ils auront tenu leur caucus et qu'ils auront compris un peu le problème, peut-être qu'effectivement on pourra leur donner l'occasion de venir faire de la démagogie. Enfin, cela ne m'apparaît pas tellement important. Je leur suggérerais de retourner faire leur analyse, d'étudier leurs leçons, de faire leurs devoirs et, peut-être, comme le député de Notre-Dame-de-Grâce le fait présentement - et c'est une sage pratique -de s'acheter un rnicro-ordinateur, de s'initier à l'informatique, de découvrir ce qu'est un didacticiel, un logiciel. Quand ils auront amélioré leur compréhension des problèmes, on pourra peut-être envisager la tenue de commissions parlementaires et on aura des débats intéressants. Mais pour l'instant, à en juger par le genre d'interventions faites ce matin, ce serait vraiment faire perdre le temps de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député de Fabre.

M. Michel Leduc

M. Leduc (Fabre); Merci, M. le Président. Effectivement, c'est un peu l'impression qu'on a. L'Opposition n'a pas réussi à définir avec suffisamment de cohérence le pourquoi du débat de ce matin. Les problèmes posés par l'Opposition sont extrêmement ambigus. Je retiens simplement la proposition du député de Saint-Laurent d'acheter un Mclntosh alors que le député de Notre-Dame-de-Grâce, lui, prétend qu'on devrait acheter des appareils IBM, quand on sait qu'il n'y a pas de compatibilité entre les deux. Ce sont seulement quelques exemples qui démontrent la difficulté qu'a l'Opposition de s'entendre dans ce dossier qui est - on s'entend là-dessus - extrêmement complexe.

On a vu que le Québec n'est pas le seul à connaître un certain nombre de difficultés avant d'en arriver à choisir cet appareil qui répondra aux besoins des usagers. Je me demande encore pourquoi l'Opposition n'est pas d'accord avec l'achat d'un appareil standardisé. Quels sont les avantages que l'Opposition voit dans l'achat d'une diversité d'appareils d'une commission scolaire à l'autre? Cela est une question qu'on renvoie à l'Opposition puisque tout ce que j'ai compris du débat jusqu'à maintenant, c'est que l'Opposition reproche au gouvernement de se diriger vers un appareil standardisé. Il faudrait qu'on nous indique les avantages d'avoir une multitude d'appareils dans nos écoles. Ce que je comprends, M. le Président, c'est que le gouvernement a manifesté la volonté de procéder rapidement, compte tenu des besoins de nos étudiants dans les écoles, mais quand même de façon prudente, compte tenu de la complexité du dossier et compte tenu aussi de la nécessité d'en arriver à choisir le meilleur appareil possible. (11 h 45)

Je comprends que le gouvernement a choisi un appareil sur papier, que cet appareil a été passé à un banc d'essai, qu'on attend une deuxième version de l'appareil et que, encore une fois, cette deuxième version sera passée au banc d'essai et on vérifiera réellement si cet appareil répond aux spécifications désirées par les commissions scolaires et par le ministère de l'Éducation. Cela me semble être suffisant comme garantie. Si l'appareil ne répond pas, on changera de direction. Mais oui, c'est cela M. le député. Je veux dire agir avec prudence. Si on avait agi de façon imprudente, on aurait choisi tout de suite l'Axel-20 sans le passer au banc d'essai. Mais il y a à la fois la nécessité d'agir le plus rapidement possible. Il faut également - et je retiens ceci - faire bénéficier le Québec des avantages d'un achat regroupé, des avantages que représente également, du point de vue du développement de l'industrie du logiciel, le choix d'un appareil standardisé. Compte tenu de ces besoins qu'a le Québec, qu'ont les écoliers du Québec également, nos étudiants dans les écoles, le Québec actuellement procède à la fois avec diligence, à la fois avec prudence et à la fois avec compétence afin d'en arriver à choisir cet appareil dont on a besoin.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Fabre. M. le député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je remercie le ministre de l'Éducation d'avoir reconnu franchement que son collègue, le ministre de la Science et de la Technologie, a parlé à travers son chapeau. Je pense qu'il pourrait dire la même chose de son prédécesseur lorsque celui-ci m'écrivait, en décembre dernier, que le gouvernement était parfaitement assuré que le modèle Axel-20 répondait à toutes les spécifications définies par le gouvernement. On pourrait continuer, je pense qu'on en trouverait d'autres, mais, étant donné qu'il nous reste peu de temps dans ce débat, malheureusement limité, je voudrais adresser au ministre un certain nombre de questions en terminant pour qu'il essaie de préciser des points qui sont restés obscurs.

Tout d'abord, ces jours derniers, je lui adressais une lettre dans laquelle je lui demandais de me fournir un certain nombre de documents dont nous avons absolument besoin pour nous former une idée complète sur le dossier, en particulier le texte des propositions qui ont été soumises en novembre dernier par les firmes intéressées à approvisionner nos institutions d'enseignement en micro-ordinateurs, le texte du rapport soumis au gouvernement par le groupe de fonctionnaires chargé d'étudier ces propositions, le texte des arrêtés en conseil, des décisions ministérielles concernant les micro-ordinateurs, la correspondance échangée par le gouvernement avec la firme Comterm-Matra, les autres firmes intéressées à pourvoir le réseau scolaire, la Fédération des commissions scolaires, la Fédération des cégeps, le gouvernement de France, etc. Tout ce que j'ai reçu en guise de réponse, cela a été un document qui avait déjà été déposé à l'Assemblée nationale en décembre dernier, que j'avais parfaitement lu et étudié et auquel j'aurai d'ailleurs l'occasion de faire allusion d'ici la fin du présent débat. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de rendre publiques les pièces essentielles à l'intelligence de ce dossier?

Deuxièmement, quand le gouvernement a choisi la firme Comterm-Matra au début de décembre, avait-il l'assurance, contrairement aux fonctionnaires qui avaient étudié le dossier, que cette firme était à ce moment-là effectivement contrôlée par des intérêts québécois?

Troisièmement, le gouvernement, par le truchement de la Caisse de dépôt et placement du Québec, est-il impliqué dans le capital-actions de la firme Comterm-Matra? Si oui, dans quelle proportion et depuis quand?

Quatrièmement, pourquoi le gouvernement a-t-il refusé, surtout étant donné le caractère imprécis des propositions reçues auxquelles faisait allusion le ministre tantôt, de converser avec les deux autres firmes, dont ses propres conseillers professionnels lui disaient qu'elles offraient des propositions intéressantes? Pourquoi est-il allé mettre tous ses oeufs dans le même panier si vite avant même de s'être assuré qu'il y aurait peut-être un choix ou une décision plus judicieuse? Le ministre est-il au courant que, selon une étude faite ces temps derniers par la Commission des écoles catholiques de Montréal, l'appareil PC-1050 de Matrox-Olivetti - je devrais dire d'Olivetti parce qu'il n'est pas fabriqué ici pour l'instant, pour des raisons évidentes -répond beaucoup mieux aux spécifications du gouvernement que l'appareil qui a été retenu par le gouvernement au mois de décembre dernier? Si Comterm-Matra est un consortium où la part de Comterm est majoritaire, où Comterm est la partenaire principale, comment expliquer que ce soit le ministre des Finances du gouvernement, et non pas le président de Comterm-Matra, qui a été obligé d'aller en France il y a quelque temps pour négocier avec Matra? Cette firme servirait-elle simplement de couverture à des plans du gouvernement? Comment fonctionnez-vous? Quelle est la hiérarchie des responsabilités que vous établissez? D'ailleurs, au sein de votre propre gouvernement, il y a quatre ou cinq ministres qui parlent de la question des ordinateurs. Lequel est responsable? Pourriez-vous nous dire quelles sont les responsabilités propres de chacun et lequel devons-nous croire quand ils tiennent des propos contradictoires?

Je termine là-dessus parce que je pense que mon temps est terminé. Nous ferons le reste dans la dernière période.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, nous en arrivons à la période de répliques. Vous avez donc un temps de parole de dix minutes et, par la suite, le député d'Argenteuil pourra conclure pendant dix minutes également.

Conclusions M. Yves Bérubé

M. Bérubé: M. le Président, le député d'Argenteuil aurait dû venir seul, parce qu'ils nous ont donné un triste spectacle de cafouillage généralisé à trois. Ce sont vraiment les trois mousquetaires, mais incapables de travailler ensemble. C'est un peu gênant de la part du député d'Argenteuil de vouloir dénoncer l'incohérence des déclarations de différents membres du gouvernement en pleine commission où on a eu droit à un spectacle absolument amusant d'incohérence. Par exemple, le député de Notre-Dame-de-Grâce veut une machine compatible avec IBM, en général, deux ou

trois modèles différents de compagnies différentes, mais compatibles avec IBM, supposant évidemment que cette compatibilité existe à 100%. Le député de Saint-Laurent, au contraire, veut un appareil bien précis pour s'assurer que les logiciels puissent fonctionner sans difficulté, ayant été conçus et utilisés antérieurement toujours sur la même machine physique. Ils ne se sont pas parlé. Il y en a un qui affirme qu'il faut standardiser, c'est le député d'Argenteuil; l'autre dit: Non, laissez faire la concurrence, de telle sorte qu'on ait plusieurs machines sur le marché. Alors là, vous voyez que, comme cohérence, c'est parfait. Au moins, peut-être qu'au gouvernement, à des semaines d'intervalle, on a des déclarations qui peuvent être interprétées différemment. À l'intérieur de l'Opposition, on a un avantage. C'est qu'ils peuvent faire des déclarations, à deux heures d'intervalle, totalement contradictoires et cela ne les gêne pas. Puis là, ils dénoncent l'incohérence.

Je pense que le député d'Argenteuil aurait dû venir tout seul. Au moins, il aurait cohérent avec lui-même et on n'aurait pas donné ce triste spectacle d'une Opposition désorganisée. C'est là ma première remarque.

Une voix: Elle n'est pas très forte.

M. Bérubé: Non, mais elle l'est assez parce que quiconque lira le journal des Débats verra la contradiction interne totale dans vos propos.

Deuxièmement, le député d'Argenteuil nous fait une proposition qui m'apparaît très dangereuse. Il dit: Pourquoi n'avez-vous pas négocié directement avec les trois de front? C'est là une pratique commerciale qui n'est à peu près jamais retenue au gouvernement. À peu près jamais, car elle permet à ce moment au gouvernement ou à l'acheteur de jouer l'un contre l'autre, donc de négocier continuellement.

C'est pour cela que, très fréquemment - c'est un problème que j'ai souvent eu au Conseil du trésor: le problème des soumissions publiques - on demande des soumissions, on obtient cinq ou six soumissionnaires et on prend le plus bas. Après cela, souvent l'administration - pas souvent, mais cela arrive - dit: Oui, c'est le plus bas, mais on a jasé avec le deuxième et il nous dit qu'il serait capable de faire mieux, et effectivement on pense qu'il serait capable de faire mieux. Puis on venait au Conseil du trésor pour aller en dérogation. C'était systématique: c'était non quand cela venait au Conseil du trésor. On a dit non. On va respecter un processus. Ces gens connaissaient les règles du jeu, ils ont couru leur risque, ils n'ont pas obtenu le contrat. Il ne s'agit pas de "fafiner" après pour chercher à contourner la règle.

C'est exactement ce que le député d'Argenteuil nous propose: l'ériger en système, c'est-à-dire qu'on commence par vous demander des propositions fermes et après on commence à jouer les uns contre les autres, les fabricants. Ah non! C'est malhonnête. On ne doit pas faire cela.

Je pense que le député d'Argenteuil a un sens de l'intégrité qui ferait, j'en suis convaincu, que, s'il était un jour au Conseil du trésor, il s'opposerait à une telle pratique. Il dirait: Que chacun prenne sa chance, fasse une proposition et que le meilleur gagne. C'est effectivement ce qui s'est produit, c'est-à-dire que celui qui a fait la proposition la meilleure l'a emporté.

Vous allez me dire: Qu'arrive-t-il si, entre l'ordinateur sur le papier... Parce que le député d'Argenteuil nous cite l'ordinateur d'Olivetti. Il n'existe pas; c'est un prototype. Eh oui! Alors que l'Axel existe commercialement. Non pas le modèle final qu'ils nous ont proposé, mais la base existe. Donc, ce que nous disons, c'est qu'une proposition a été demandée, nous avons comparé les propositions sur la table et nous avons supposé que le PC-1050 d'Olivetti répondrait aux spécifications, à l'essai. Nous avons supposé cela. Nous avons supposé que l'IBM PC Junior lui aussi répondrait et que, lorsqu'il serait mis sur le marché, il répondrait à nos spécifications. Nous avons supposé que, lorsque l'Axel modifié nous serait soumis, il répondrait aux spécifications. Nous avons supposé que les différents fabricants qui nous faisaient des propositions, lorsqu'ils nous présenteraient l'appareil tel que promis, celui-ci répondrait à nos attentes et, le 30 avril ou d'ici à la mi-mai, nous aurons un prototype et nous l'examinerons. Si vous me posez la question: Qu'arrive-t-il s'il ne répond pas aux spécifications? bien, je regrette, à ce moment, ils n'ont pas le contrat. Il faut donc regarder jusqu'à quel point le produit soumis répond aux attentes très clairement signifiées par le gouvernement et les commissions scolaires. Et c'est sur la base d'une analyse de ce produit que nous pourrons dire, à ce moment, si effectivement le produit est acceptable.

Donc, il faut respecter un certain nombre de règles du jeu, respecter vraiment une saine concurrence entre les fabricants qui avaient leur choix, leur chance et qui ont proposé un produit. On n'a pas raison de présumer qu'ils ne seront pas capables de satisfaire les exigences quand ils affirment qu'ils y répondraient et, à ce moment, respectant ce sain processus de soumission publique, nous avons choisi celui qui répondait le mieux à nos préoccupations. C'est à celui-là que nous avons dit: Bien, maintenant, il vaut la peine, effectivement que vous travailliez votre prototype, que vous nous arriviez avec une machine qui réponde à nos besoins et sur laquelle nous

pourrons axer, à ce moment, le développement de l'informatique au Québec.

Il y a un point sur lequel je veux insister en terminant. Dans la mesure où le Québec est de tradition francophone, il faut comprendre que nous sommes une petite société de 6 000 000 et, pour fabriquer des didacticiels, des logiciels, nous ne disposons pas du marché qui, effectivement, nous permettrait de bâtir une industrie rentable. Mais, par contre, nous sommes à la porte de l'Amérique. Nous avons accès à des technologies. Nous avons accès à des circuits d'information que nous pourrions utiliser pour pénétrer les marchés de Suisse, de Belgique, de France, les marchés africains. En d'autres termes, le Québec est admirablement bien placé, à la frontière de deux civilisations.

Sans doute que, si le Québec voulait envahir le marché américain avec un produit de masse, il affronterait un certain nombre d'obstacles. Peut-être réussirions-nous, peut-être que non, étant désavantagés au départ. Mais, de concert avec une société française, pénétrer un marché francophone, là nous bénéficions d'un avantage remarquable, d'autant plus remarquable que notre accès à des technologies américaines nous permet d'établir des ponts intéressants pour les acheteurs éventuels.

Donc, miser sur une coopération avec la France, c'est miser sur un marché qui est original, qui nous est propre et nous avons une chance de réussir, alors que miser sur le marché nord-américain pour un produit de masse présente évidemment des obstacles qui ne sont pas insurmontables, mais qui sont évidemment plus grands. Donc, viser un objectif de coopération avec la France est désirable à cause du caractère francophone des 6 000 000 de Québécois et du grand nombre de nos enfants qui vont dans nos écoles. Également viser à ce qu'il y ait un maximum de retombées, que, par exemple, l'appareil puisse être fabriqué au Québec, de telle sorte qu'en ayant accès directement à un appareil fabriqué chez nous nous, en suivions l'évolution technologique et que toute notre industrie du logiciel soit accrochée à un produit qui se vend un peu partout dans les pays francophones, ceci peut permettre à notre industrie du logiciel de s'ouvrir des marchés qui, autrement, seraient beaucoup trop limités. Concevoir un logiciel pour 6 000 000 d'habitants, c'est une chose, mais le concevoir pour 100 000 000 d'habitants, c'est beaucoup mieux. Donc, une entreprise au Québec qui voudrait concevoir un logiciel français sur un appareil qui également répond aux normes françaises a un énorme avantage, c'est qu'il nous permet d'ouvrir le marché. (12 heures)

Donc, rechecher des retombées industrielles au Québec, rechercher une coopération avec la France est désirable en soi. Cependant, la première préoccupation que nous devrons toujours avoir devra être une préoccupation pédagogique, c'est-à-dire qu'il nous faudra nous assurer que cet appareil soit suffisamment standardisé pour que, lorsque nous développons un instrument pédagogique, il puisse servir dans toutes les écoles du Québec en même temps, et non pas, comme cela arrive parfois à quelqu'un qui s'est acheté un X-20. Il décide de changer son appareil pour un Commodore-64 et découvre que tous les programmes qu'il avait de peine et de misère réussi à rédiger ne font plus sur son Commodore-64, parce que la mémoire-écran n'est pas située au même endroit, parce qu'il n'y a pas le même nombre de colonnes sur l'écran. Donc, il y a des problèmes techniques.

En d'autres termes, il nous faut effectivement standardiser. Là-dessus, l'Opposition aurait avantage à se concerter et à comprendre l'importance d'un standard qui permette la pénétration de didacticiels dans l'ensemble de nos écoles. Il faut standardiser et également il nous faut quand même aller assez rapidement. Non pas qu'il faille inonder nos écoles de 40 000 ou 50 000 ordinateurs demain, la semaine prochaine. Non. Nous ne serions pas prêts à les utiliser correctement, mais, comme il y a des ordinateurs qui entrent dans nos écoles sur une base continue, assez rapide, il nous faut nous assurer que ces ordinateurs qui entrent auront au moins un certain nombre de traits communs. Je ne voudrais pas que, l'année prochaine, on ait 10 000 ordinateurs différents dans nos écoles et que le ministère, pressé de toutes parts pour qu'il encourage la fabrication de logiciels pour aider nos enseignants dans ces écoles qui ont des ordinateurs, soit obligé de déclarer forfait et que, faute d'une standardisation appropriée, nous ne soyons pas capables de produire un instrument pédagogique uniforme et utilisable partout, parce qu'il n'y en a pas un qui est équipé avec la même machine qui reçoit ce type de programmes en question.

Donc, les jolies petites disquettes du député de Notre-Dame-de-Grâce devraient pouvoir entrer dans chacun des petits lecteurs de disquette de nos ordinateurs de nos différentes écoles, de telle sorte que, s'il a conçu quelque chose d'utile en termes pédagogiques, ce qu'il a conçu soit utilisable par tous. L'objectif que nous devons poursuivre est un objectif de standardisation rapide afin que nous puissions le plus rapidement possible mettre à la disposition de nos écoles des instruments pédagogiques auxquels nous pourrons consacrer notre énergie. Par conséquent, mettre trop l'accent sur la quincaillerie, comme le fait le Parti libéral, c'est s'engager dans un faux débat. Malheureusement, c'est le piège que n'a pas su éviter l'Opposition et c'est regrettable.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, le ministre de l'Éducation vient de faire la preuve une fois de plus qu'il est un magnifique joueur de quatre coins intellectuels. Quand on lui dit que le gouvernement ne s'est pas assez occupé de la pédagogie, il nous dit qu'il faut un appareil pour que le reste fonctionne. Quand on lui dit que l'appareil choisi n'est pas bon, il dit qu'il faut s'occuper de la pédagogie. Il est bien facile d'avoir raison en jouant aux quatre coins, en se sauvant d'un coin à l'autre, mais cela ne fait pas avancer le débat du tout.

Je remarque que les questions que j'avais adressées au ministre sont restées sans réponse. Je lui avais adressé une dizaine de questions au cours de l'intervention précédente que j'ai faite. Il n'y a point répondu. J'espère qu'il trouvera le moyen de le faire au cours des prochains jours. Peut-être qu'il trouvait qu'il avait des choses plus essentielles à son point de vue à dire à la fin. Je ne veux pas lui en faire de grief. Mais je constate bien simplement qu'il n'a pas répondu à nos questions.

Afin qu'il n'y ait pas de malentendu, je voudrais clarifier certaines choses. Du côté de l'Opposition, les trois porte-parole qui ont été entendus ce matin sont favorables à une mesure élevée d'uniformisation et de standardisation pour que nous ayons un réseau d'équipement dans tout notre système scolaire, qu'il puisse répondre à des fonctions communes et en assurer l'exécution dans les meilleures conditions possible.

Nous vous disons, M. le ministre, que la première condition devrait être la compatibilité avec les normes IBM. C'est la première et la principale et c'est celle-là que vous n'avez même pas considérée quand vous avez pris votre décision. Vous avez choisi, parmi d'autres appareils qui vous offraient cette garantie de porte d'entrée, un appareil qui ne l'avait pas. C'est votre responsabilité. C'est la marque de l'incompétence de ceux qui ont pris la décision.

Vous parlez des logiciels et des didacticiels. J'espère que vous ne voulez pas proposer qu'on va fabriquer au Québec un modèle seulement pour nous, de la tribu ici, et qu'on aura nos petits logiciels et nos petits didacticiels à nous, qui vont entrer dans cet appareil et pas dans d'autres. Vous savez très bien, comme moi, que la banque disponible des logiciels et des didacticiels va être beaucoup plus importante au plan international que ce que nous pourrons produire avec nos seules ressources au Québec. Il faut que nous ayons un appareil qui soit capable d'incorporer les logiciels et les didacticiels en provenance d'autres sources. Il y en a déjà de très grandes quantités. Ce que nous vous disons, c'est que, parmi les appareils que vous avez laissés de côté, il y en avait au moins un qui répondait d'ores et déjà à cette exigence, comme la preuve en a été faite par l'expertise qui vient d'être faite à la Commission des écoles catholiques de Montréal.

Le grand reproche que je vous adresse est, quand vous avez pris votre décision en décembre dernier, sur la foi non pas de soumissions, contrairement aux termes que vous avez employés, mais de propositions très générales, qu'au lieu de faire votre choix tout de suite, vous auriez dû aller rencontrer ces gens. Je suis parfaitement d'accord avec vous: une fois qu'on a reçu des soumissions, on ne les tripote pas. Mais quand ce sont des propositions générales comme celles que vous aviez demandées, on demande des précisions, on rencontre les gens pour leur demander d'en arriver au stade d'une soumission au besoin ou encore de fournir des renseignements qui permettront de faire un choix. J'aurais compris, dans ce cas-ci, que vous mainteniez votre décision de ne point aller en soumission formelle, si vous aviez eu de bonnes raisons, mais vous avez fait votre choix alors que vous ne saviez même pas ce qu'il y avait dans les propositions, et je vous en donne un exemple.

Vous dites qu'il y a une compagnie qui a changé son prix pour arriver avec l'autre; c'est faux. Ce qu'elle vous dit, la compagnie, c'est que, dans l'appareil que vous avez retenu, il y avait un lecteur de disque - vous savez ce que c'est, je n'ai pas besoin de vous donner d'explication - alors que, dans l'autre, qui demandait quelques centaines de dollars de plus, il y en avait deux. Si vous mettez cela sur une même base, le prix de celui que vous avez laissé de côté était plus avantageux.

Vous pourriez me dire qu'il y avait autre chose. C'est entendu, mais je vous souligne que, seulement sur la foi de ce qu'on avait, il était impossible pour le gouvernement de prendre une décision exclusive, définitive qui serait annoncée à Paris par le premier ministre du Québec sans autre considération pour les autres. Sur ce point, je pense que vous n'avez pas du tout répondu aux critiques qui se sont élevées non seulement de la part de l'Opposition, mais de la part de tous les milieux concernés, sauf ceux qui sont immédiatement avantagés par votre décision des derniers mois.

Le comportement du gouvernement dans ce dossier a été confus et contradictoire depuis le début. Vous essayez de mettre un peu de cohérence là-dedans, nous l'apprécions, mais, quand vous aurez commencé à répondre véritablement aux

questions que nous vous posons, nous serons intéressés à vous suivre dans votre démarche. La démarche a été improvisée, marquée d'incompétence, injuste envers les entreprises intéressées qui méritaient d'être traitées avec plus de dignité et de considération.

Je voudrais aussi ajouter que nous sommes tout à fait favorables au projet d'une industrie québécoise de l'électronique. J'ai moi-même pris le soin d'aller visiter chacune des trois entreprises qui avaient été retenues par votre groupe de fonctionnaires, par vos conseillers. Je suis allé visiter Comterm-Matra, je suis allé visiter Matrox, je suis allé visiter également Positron et j'ai trouvé que ces trois entreprises "all and all", comme on dit, toutes choses considérées, sont des entreprises à peu près de même taille, à peu près de même envergure. Chacune a des choses très intéressantes à offrir au point de vue technologique. Il faut cesser de se péter les bretelles, comme on dit, et de penser que le Québec va pouvoir se donner une industrie qui va rivaliser avec l'industrie internationale. Si on veut survivre à côté d'IBM, il faut trouver le moyen de produire quelque chose qui aura une originalité et qui donnera peut-être un avantage au point de vue du prix.

Les deux autres maisons que vous avez laissées de côté, j'ai des nouvelles pour vous, avaient des choses très intéressantes à offrir au gouvernement du Québec et on les a traitées d'une manière cavalière, ce qui est absolument irresponsable et impardonnable. Je ne fais pas de plaidoyer pour l'une ou l'autre, je demande simplement qu'on les traite avec justice, équité et en pensant au bien général des citoyens du Québec.

Attitude méprisante envers les fonctionnaires. Il y en a qui vous entourent actuellement qui avaient l'air gêné en d'autres circonstances, quand des nouvelles ont été communiquées et qu'ils n'avaient pas le mandat de les communiquer, s'ils les savaient eux-même à ce moment-là.

Envers vos partenaires des réseaux éducatifs, une attitude incompréhensible et inadmissible. Vous dites que cela s'est fait en collaboration avec eux alors qu'ils sont venus vous dire en pleine face que ce n'est pas vrai. Je préfère dans ce temps-là prendre la version des victimes que celle de celui qui a fait ces excès-là.

Attitude cachottière envers l'opinion publique. Il n'y a pas moyen d'avoir les pièces de base. Je vous ai demandé l'automne dernier, à l'Assemblée nationale, de nous donner au moins le texte des propositions qui ont été soumises. Je vais vous dire une chose ce matin. Il y a quelqu'un de la firme qui a été choisie qui m'a dit: On va vous passer ce texte-là, si vous voulez. J'ai dit: Je n'en veux pas privément. Si le gouvernement trouve que je ne mérite pas de l'avoir, comme député de l'Assemblée nationale, je n'ai pas besoin de cela pour mon information privée. Pourquoi avez-vous caché ce document-là? Les autres firmes ont rendu leurs propositions publiques et celui-là est resté caché dans vos tiroirs, M. le ministre.

Vous parliez tantôt de pénétration des marchés étrangers. Savez-vous que tout ce que la firme Comterm-Matra a eu de Matra, c'est une licence exclusive pour le marché canadien? C'est tout ce qu'on a eu. Comment cela se fait-il? Il y a d'autres firmes qui avaient beaucoup plus que cela à vous proposer, mais vous n'en avez pas tenu compte, la décision était prise d'avance.

Vous avez suivi une démarche axée sur de fausses priorités. C'était écrit dans mes notes avant que vous ne parliez, au début de votre intervention préliminaire ce matin. Pendant tout le débat, par la faute du gouvernement qui déviait vers la question des équipements matériels, on perdait de vue les enjeux autrement plus vitaux que constituent la formation des enseignants en vue de l'informatique, la mise au point d'une véritable politique en matière de production de logiciels et de l'application de l'ordinateur à tout le champ de la pédagogie. Nous avons hâte qu'une fois corrigées vos erreurs en matière d'équipement, nous puissions entreprendre un débat sérieux et prolongé sur ces aspects beaucoup plus importants.

Je pense que votre politique a été également coûteuse pour le système scolaire du Québec qui prend des retards à cause de vous autres et pour l'ensemble du Québec qui présente une drôle de figure aux yeux de milliers de décideurs économiques qui sont attirés par le Québec, mais qui voudraient bien avoir l'assurance qu'ils seront traités d'une manière responsable, surtout par les autorités publiques.

Nous considérons que, dans ce dossier, le gouvernement a agi de manière erratique, de manière cachottière, de manière arbitraire et j'ose espérer que le ministre profitera du fait qu'il est nouveau dans ses responsabilités actuelles pour corriger le parcours dans les plus brefs délais et remettre le gouvernement, le ministère de l'Éducation et le système d'enseignement sur la voie d'une politique qui sera vraiment conforme à nos meilleurs intérêts.

Des voix: Très bien!

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député d'Argenteuil. En terminant, je voudrais remercier l'ensemble des participants à ce débat qui, je pense, est digne de l'Assemblée nationale. Je veux vous remercier entre autres pour la collaboration que vous m'avez apportée. Je n'ai eu à intervenir d'aucune façon. Je pense que cela a été un débat élevé.

Il me reste à ajourner les travaux sine

die en vous rappelant qu'on aura sans doute prochainement l'occasion de se revoir - une bonne partie d'entre nous - pour l'étude des crédits du ministère de l'Éducation et ceux du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

D'ici là, bonne journée et merci.

(Fin de la séance à 12 h 13)

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