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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Tuesday, April 10, 1984 - Vol. 27 N° 3

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère de l'Éducation


Journal des débats

 

(Neuf heures quarante-six minutes)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons commencer la séance de la commission parlementaire de l'éducation. D'abord, je vais faire l'appel des membres présents: M. Ryan (Argenteuil), vice-président de la commission, M. Champagne (Mille-Îles), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Laplante (Bourassa), M. Leduc (Fabre) et M. Leduc (Saint-Laurent). Notre secrétaire peut-elle nous indiquer s'il y a des remplacements? Je ne crois pas.

La Secrétaire: Non.

Ordre des travaux

Le Président (M. Charbonneau): II n'y a donc pas de remplacements. Je rappelle le mandat de la commission: il s'agit d'étudier les crédits budgétaires du ministère de l'Éducation. Je voudrais immédiatement indiquer à nos invités quelques décisions que la commission a prises. D'abord, au sujet de l'horaire de nos travaux, aujourd'hui, nous commençons à 9 h 46 parce que la séance de travail de la commission s'est un peu prolongée; cet après-midi, nous allons aborder la discussion immédiatement après la période des questions et ce soir ce sera à 20 heures. Demain matin, nous siégerons de 10 heures à 12 h 30. Jeudi matin et vendredi matin, nous siégerons de 9 h 30 à 12 heures. Mercredi après-midi, nous siégerons après la période des questions. Jeudi après-midi et jeudi soir, nous siégerons à la fois après la période des questions et en soirée, de 20 heures à 22 heures. Pardon? Cet après-midi, bien sûr, nous siégeons.

Donc, si je récapitule, aujourd'hui de 9 h 50 à autour de 12 heures, 12 h 15; cet après-midi, après la période des questions, jusqu'à 18 heures; ce soir, de 20 heures à 22 heures. Demain, mercredi, de 10 heures à 12 h 30; par la suite, après la période des questions jusqu'à 18 heures. Jeudi matin, à 9 h 30 jusqu'à 12 heures et après la période des questions dans l'après-midi, jusqu'à 18 heures. Cette fois, ce sera la commission mixte de l'éducation et des affaires sociales qui étudiera le programme de l'aide sociale du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. L'étude des crédits du ministère de l'Éducation sera donc suspendue dans l'après-midi de jeudi et reprendra jeudi soir, de 20 heures à 22 heures, pour se terminer, et, vendredi matin, la commission étudiera deux programmes du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Cela va?

Quant aux programmes, je pense que nous avons communiqué aux membres de la commission, ainsi qu'au ministre l'ordre de l'étude des programmes que nous souhaitons prendre. Je le donne pour information. Aujourd'hui, après les remarques d'ordre général des membres de la commission et du ministre, nous étudierons les programme 4 et 7, c'est-à-dire l'enseignement primaire et secondaire public, ainsi que la formation des adultes.

Demain matin, nous entreprendrons l'étude des programmes 6 et 9, c'est-à-dire l'enseignement universitaire et le fonds pour la formation de chercheurs et d'action concertée. Demain après-midi, nous étudierons l'organisation et la réglementation des professions, c'est-à-dire l'Office des professions.

Jeudi avant-midi, nous aborderons l'étude des programmes 5 et 3, c'est-à-dire l'enseignement collégial public et l'aide financière aux étudiants. Dans la soirée de jeudi, nous aborderons l'étude des programmes 8, 1 et 2, c'est-à-dire l'enseignement privé, l'administration et la consultation. M. le Vice-Président.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais m'informer au sujet de la publication des débats de la commission. Est-ce prévu dans nos règlements que nos débats doivent être publiés ou s'il faut faire une demande spéciale au président de l'Assemblée nationale à cette fin?

Le Président (M. Charbonneau): Je crois que l'étude des crédits, à moins qu'on ne m'indique le contraire, c'est à la fois enregistré et publié dans le journal des Débats.

Cela étant fait, au niveau du temps de parole, les membres de la commission se sont entendus...

M. Bérubé: M. le Président, je m'excuse. Sur une question de privilège, je ne peux pas dire que j'entends très bien, particulièrement le député d'Argenteuil. C'est peut-être une question de tonalité de voix ou d'ajustement de microphone, mais j'ai un peu de difficulté à l'entendre ici.

Le Président (M. Charbonneau): II y a peut-être possibilité de corriger cet inconvénient. J'espère que vous m'entendez bien.

M. Bérubé: Dans votre cas, M. le Président, je n'oserais faire aucun commentaire dérogatoire sur la portée de votre voix.

M. Ryan: Le ministre n'a pas à s'inquiéter; les deux premières minutes, je ne dis jamais rien.

Le Président (M. Charbonneau): Je rappelle aussi qu'au niveau du temps de parole nous nous sommes entendus pour essayer de répartir équitablement le temps de parole du côté ministériel et du côté de l'Opposition.

Nous en sommes maintenant aux remarques d'ordre général. D'abord, avant de céder la parole au ministre, au vice-président qui est aussi le porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation et, par la suite, aux autres membres, je voudrais simplement indiquer que nous abordons l'étude des crédits, une étude importante puisque nous étudions à peu près le quart du budget de l'État québécois. Lorsqu'on regarde les sujets d'actualité qui concernent le mandat de la commission, qui pourront être abordés d'une façon ou d'une autre lors de l'étude des crédits, nous nous rendons compte que nous allons aborder des questions qui sont importantes pour nos concitoyens et qui impliquent des montants importants au niveau des fonds publics. En ce sens, les travaux que nous allons faire sont, à mon avis et, je pense, de l'avis unanime des membres de la commission, d'une importance indéniable. J'espère que nous aurons l'occasion d'approfondir le maximum de sujets - c'est le souhait que les membres de la commission ont formulé en séance de travail - et que nous ne serons pas embêtés par des questions de procédure. Je pense qu'il est de l'intérêt et du désir de tous les membres de la commission que nous allions le plus possible au fond des choses sur le maximum des questions.

Cela étant dit, je vais céder immédiatement la parole au ministre de l'Éducation pour ses remarques d'ordre général. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Yves Bérubé

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Ainsi que vous le soulignez, M. le Président, nous allons étudier le budget d'un ministère qui requiert à lui seul effectivement le quart du budget gouvernemental. Il est donc important en termes d'impact sur la fiscalité qui prévaut au Québec, d'une part, par l'importance des prélèvements qu'il impose. Il est également extrêmement important quant à l'avenir de la société qu'il permet de construire. C'est avec une certaine fierté que je viens, à titre de nouveau ministre de l'Éducation, défendre le budget d'un ministère qui, à mes yeux, correspond au ministère qui a en main véritablement l'avenir de notre société.

Je suis entouré en ce moment par mon sous-ministre M. Lucier et M. Pronovost. Au fur et à mesure des travaux de notre commission, en ce qui a trait aux nombreux intervenants qui m'entourent et que je ne saurais, malheureusement, pas présenter tous par leur nom propre, nous aurons l'occasion de faire les présentations qui s'imposent.

M. le Président, la crise économique que nous venons de traverser aura eu pour effet positif de nous inviter à serrer les rangs. Nous avons été rappelés à l'ordre et contraints de faire des choix, à n'en pas douter. L'interdépendance des facteurs de développement nous apparaît aujourd'hui avec une nouvelle acuité. Au fil des années d'opulence, dans la fébrilité de l'action, soutenue par des ressources apparemment sans limites, nous avons eu tendance à opposer le culturel, le social et l'économique. Devant les difficultés économiques actuelles, la complémentarité des approches et la solidarité des agents s'imposent avec une nécessité accrue.

C'est finalement le type de société que nous voulons bâtir qui est ici en cause. Voulons-nous une société riche, mais sujette à la domination culturelle de quelques-uns et aux inégalités sociales? Voulons-nous, au contraire, une société égalitaire, mais qui serait ignorante ou pauvre? Voulons-nous une société de gens cultivés, mais socialement élitistes et tolérant l'inéquité? C'est pourtant ce à quoi nous mèneraient des choix qui se fonderaient sur des dichotomies comme celles que nous refusons ici où, consacrant trop de ressources aux uns, nous devrions oublier les autres.

Nous disons que l'accès du plus grand nombre, jeunes ou adultes, aux ressouces éducatives - le pari de la qualification -repose non seulement sur les ressources humaines et matérielles consacrées aux institutions d'enseignement, mais aussi sur la vitalité et la qualité de la culture, sur une économie qui offre à chacun l'espoir d'un avenir valorisant. À condition, bien sûr, que ces divers aspects du développement soient pensés et poursuivis à la manière d'un tout organique, alors l'éducation peut prendre sa valeur centrale au sein de notre société. C'est dans cette perspective que je présente la défense des crédits du ministère de l'Éducation pour l'année 1984-1985.

Le Québec a profité des années d'abondance pour se doter de leviers

indispensables à une présence dynamique au sein des nations modernes. Il n'a pas fait les choses à moitié. Inspiré par l'idéal démocratique, il a notamment mis en place des systèmes d'éducation et de santé qui font l'envie de plusieurs pays. Mais la crise économique mondiale a surpris le Québec par sa soudaineté et son intensité. Elle a fait ressortir le caractère éphémère et artificiel de la croissance effrénée, tout en nous plaçant devant la difficile obligation de tenir les engagements de nos prédécesseurs. (10 heures)

Étouffé par les exigences croissantes du service de la dette publique, le gouvernement ne disposait plus de la marge de manoeuvre nécessaire à la relance économique. Comment récupérer cette marge de manoeuvre sans augmenter le fardeau déjà trop lourd des contribuables et sans mettre en péril la survie des systèmes d'éducation et de santé, ainsi que la qualité des services qui y sont dispensés? Voilà le défi devant lequel nous nous trouvions. Nul ne devra minimiser l'effort et le sens du dépassement peu ordinaire qui a été demandé aux cadres et employés des secteurs public et parapublic. Très peu de sociétés auront réussi à relever le défi avec autant de succès que le Québec.

Mais les efforts soutenus de redressement budgétaire entrepris au milieu de la dernière décennie ne pouvaient être couronnés de succès sans une intervention énergique pour modifier la dynamique de croissance explosive des dépenses en éducation. La rupture de tendance ne pouvait se faire sans une réorientation majeure de la politique salariale du gouvernement et sans remettre en question la tendance systématique des rapports maître-élèves à s'accroître au fil des conventions collectives. Ainsi, le nombre d'élèves dont a charge en moyenne l'enseignant québécois aura-t-il crû de 16,5 à 18,5 en cinq ans, mais encore faudra-t-il comparer ce nombre aux 21 élèves que l'on confie à l'enseignant de la province voisine dont les ressources sont pourtant plus grandes encore.

Ces mesures nécessaires n'ont pas eu pour effet de compromettre la mission essentielle du ministère et l'atteinte des grands objectifs du système scolaire. Les ressources consacrées à l'éducation de base demeurent largement suffisantes et l'effort du Québec en ce domaine se compare avantageusement à celui qui est consenti par tous nos voisins. De façon générale, les employés qui relèvent de l'État peuvent aussi sans crainte comparer leur rémunération à celle d'homologues étrangers.

Les données objectives de comparaison, si elles permettent de justifier les choix, n'entraînent pas d'elles-mêmes l'adhésion immédiate de tous ceux qui ont été mis à contribution. Chacun, au fil des bonnes années, avait développé l'habitude de ressources additionnelles chaque fois qu'un besoin nouveau apparaissait. Voilà qu'il faut maintenant satisfaire de nouveaux besoins avec les mêmes ressources. Il faut redéployer les ressources. C'est donc à un changement radical d'attitudes que nous sommes tous conviés, à une libération en chacun de nous des capacités d'ouverture et d'imagination. Il nous faut développer assez d'ingéniosité pour accroître notre productivité, pour inventer de nouvelles formes d'organisation scolaire et assez de courage pour briser le carcan d'une spécialisation qui limite nos possibilités de partage des tâches.

C'est aussi à la volonté de partage et au sentiment de solidarité qu'invitent ces redressements budgétaires. Selon le bon vieux principe des vases communicants, les déplacements de ressources favoriseront l'accès d'autres groupes aux biens culturels et économiques. D'autres développements qui étaient empêchés ou retardés seront désormais possibles. Des rattrapages devront se faire dans d'autres secteurs que l'éducation et nos concitoyens laissés pour compte dans le système actuel d'éducation devront faire l'objet de nos préoccupations.

C'est sans doute dans le secteur économique que les rattrapages sont actuellement les plus nécessaires et les plus urgents. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe de laisser gaspiller nos ressources humaines. Il faut offrir aux jeunes engagés dans le système scolaire une perspective motivante de trouver un emploi lorsqu'ils arriveront sur le marché du travail. Il faut aussi favoriser la réinsertion professionnelle des adultes qui sont actuellement sans emploi. Grâce au redressement de la situation financière, nous avons aujourd'hui la capacité de consacrer des efforts substantiels à la restructuration de notre économie et au soutien de l'emploi.

Il n'y a pas de dichotomie entre le développement de l'éducation et celui de l'économie. Les deux univers sont intimement liés, car, en fin de compte, c'est le développement du potentiel humain qui constitue le plus puissant levier de la reprise économique, de même qu'une économie saine et dynamique confère une signification accrue aux efforts déployés par les maîtres et les élèves.

La répartition des crédits du ministère de l'Éducation pour l'année 1984-1985 procède de cette volonté d'associer l'éducatif, l'économique et le social. En apparence seulement, les crédits affectés à l'éducation par le gouvernement du Québec diminuent de 3,7%, soit de 240 000 000 $ par rapport à l'exercice précédent. Mais cette diminution est due à la situation particulière de l'enseignement primaire et secondaire où des dépenses ont été acquittées par anticipation en 1983-1984. En

fait, les autres programmes connaissent une augmentation moyenne de 5% en 1984-1985. La détermination marquée dans les redressements précédents se maintient tout en laissant place à un développement sélectif.

De manière générale, l'accent sera mis dans tous les secteurs sur l'accroissement de la productivité. Je suis convaincu qu'au Québec plus que partout ailleurs, et à ce moment-ci plus qu'en tout autre temps, nous sommes condamnés à l'excellence. Les rendez-vous de l'avenir nous pressent et il nous faut, sous peine d'étiolement, pratiquer les vertus qui nous permettront de relever les défis de la concurrence: effort, sens du devoir et originalité. Ajoutons la lucidité qui permet d'évaluer la progression et le courage pour accélérer le pas et corriger l'itinéraire. L'évaluation est le seul moyen efficace d'éviter la pérennité des disfonctions du système, de rétablir les équilibres et de combler les lacunes.

Dans le réseau des universités, la croissance des crédits, qui est de 2,5% par rapport à l'exercice précédent, est reliée en grande partie au plan de relance adopté l'automne dernier par le gouvernement. Ces crédits couvriront en particulier une augmentation de clientèle dans les disciplines identifiées comme prioritaires en regard du virage technologique et permettront d'amorcer la mise en place d'une quarantaine d'équipes de recherche dans les secteurs de pointe. L'aide à la recherche et à la formation de chercheurs se traduit en outre par une augmentation de 4,6% des crédits attribués au fonds FCAC. Cette croissance s'explique par le fait que ce programme n'a subi aucune compression après avoir bénéficié des indexations et d'une subvention à la gestion.

Ajoutons que le cadre budgétaire du réseau universitaire pour l'année 1984-1985 entend consolider la réforme de la formule de financement engagée ces dernières années. Une proposition sera soumise sous peu à la consultation du Conseil des universités et des établissements universitaires. Le cadre de financement est conçu de manière à permettre une plus grande équité dans la répartition des subventions entre les établissements et une plus grande flexibilité d'application en rapport avec des objectifs prioritaires de développement du réseau.

Pour l'essentiel, ces objectifs sont les suivants, tels qu'ils ont été dégagés et affirmés au cours des trois dernières années: dégager des ressources par une meilleure utilisation des moyens existants, en visant une meilleure productivité des ressources financières, matérielles et humaines, en partageant les efforts de développement dans une perspective de réseau; consolider les activités de premier cycle et, en particulier, rationaliser le développement des programmes courts et éliminer les dédoublements d'activités dans les réseaux d'enseignement; stimuler les études à temps complet, surtout les études de deuxième et troisième cycles; améliorer la productivité des programmes des cycles supérieurs; promouvoir le développement de la recherche et renforcer la place de cette mission dans nos universités; promouvoir, dans les secteurs porteurs d'avenir pour le développement économique et technologique du Québec, la formation de la main-d'oeuvre spécialisée, de chercheurs et de personnel scientifique, de même que la création de centres d'excellence et d'équipes de recherche.

Dans les collèges, on peut affirmer que, dans l'ensemble, le nouveau règlement sur le régime pédagogique a été accueilli avec beaucoup de satisfaction comme base de référence mettant fin aux tergiversations et levant les hypothèques des dernières années. Les énergies ainsi libérées pourront être investies plus résolument dans l'accomplissement de tâches plus prioritaires. Parmi les priorités qui se traduisent par une augmentation de crédits, il faut mentionner notamment la création de centres spécialisés, l'ouverture de programmes professionnels dans des secteurs de pointe et la modernisation des équipements. Ajoutons que la croissance des clientèles constitue un autre facteur d'augmentation des crédits.

Dans le discours qu'il prononçait en mai 1983 à l'occasion de la défense des crédits du ministère de l'Éducation, mon prédécesseur annonçait la création des premiers centres spécialisés dans des secteurs liés à des atouts régionaux ou nationaux reconnus. Six de ces centres ont vu le jour en 1983-1984. Trois autres sont prévus en 1984-1985. De plus, en vue d'assurer une meilleure adéquation entre la formation professionnelle et l'emploi et en vue de favoriser l'insertion des jeunes au marché du travail, le ministère a autorisé des collèges à ouvrir des enseignements professionnels. Vingt-six autorisations ont été accordées en 1983-1984, surtout dans des secteurs de pointe comme l'informatique, l'électronique appliquée aux systèmes, la conception et la fabrication assistées par ordinateur. Une vingtaine d'autres sont prévues en 1984-1985. Enfin, des crédits seront alloués afin de permettre aux collèges de moderniser ou d'acheter les équipements nécessaires à un enseignement adéquat. Il convient de souligner, en passant, que le ministère ne fait pas qu'autoriser de nouveaux enseignements; il veille également à ce que les collèges procèdent à une rationalisation de leurs programmes.

Les crédits affectés à l'éducation des adultes s'accroissent de 20%. Cet accroissement accompagne la politique d'ensemble qui vient d'être énoncée. Il demeure modeste si l'on considère les immenses besoins mis en lumière par tous les travaux qui ont préparé

cette politique. Mais les ressources sont limitées; tous les rattrapages et tous les développements ne peuvent s'accomplir en même temps. Le gouvernement a défini les orientations nécessaires pour guider notamment tout le mouvement de reprise et de progrès de l'éducation des adultes. Dans le sens de ces orientations, il s'est fixé des cibles prioritaires. Le moment est venu d'appliquer les ressources dont nous disposons à des actions concrètes.

Les lignes directrices sont claires et largement inspiratrices pour l'avenir: l'intégration du système scolaire et de toute l'action gouvernementale en éducation des adultes à des perspectives d'éducation permanente; la reconnaissance de la diversité des lieux et des modes de formation en misant davantage sur l'entreprise comme milieu de formation; l'accessibilité des ressources éducatives et, particulièrement, du système public d'éducation; la priorité de formations qualifiantes, c'est-à-dire de formations qui entraînent une forme de reconnaissance professionnelle et sociale; le respect de la spécificité de l'éducation des adultes et la faveur accordée à l'approche de la formation sur mesure.

Les lieux où il faut prioritairement commencer et continuer à présent de mettre en oeuvre ces orientations sont aussi désignés clairement. Dans le système public d'éducation, trois cibles sont découpées. La première concerne l'accroissement de la capacité d'accueillir et de soutenir des adultes, principalement de jeunes adultes, qui sont désireux ou que l'on convaincrait de reprendre un cheminement scolaire pouvant les conduire à l'obtention d'un diplôme d'études secondaires ou collégiales.

La deuxième cible a trait à l'ouverture effective du système scolaire à l'ensemble des groupes de population et de leurs besoins de formation. L'accent est mis, à cet égard, sur le rodage des structures et des pratiques susceptibles de garantir aux adultes une réelle accessibilité: services d'accueil et de référence pour personnaliser l'accès à l'orientation, à l'information scolaire et professionnelle et à l'évaluation officielle du dossier; reconnaissance des acquis de formation, scolaires et "expérientiels", pour permettre l'accès à des études, à un emploi, à un corps de métier, à une promotion; formation à distance par une plus grande utilisation du potentiel des médias de communication; déduction fiscale de frais de garde des enfants et ajouts de place en garderie pour favoriser l'accès des femmes aux services éducatifs. L'intégration de l'éducation des adultes à la mission de base des établissements scolaires s'accompagne également de mesures visant à satisfaire les besoins spécifiques des adultes. Ces mesures consistent dans le maintien des services éducatifs des adultes, la légitimité réaffirmée des formations sur mesure et des pratiques pédagogiques diversifiées, et la promotion d'une formation adaptée aux formateurs d'adultes. À l'intérieur du ministère, chaque direction de réseau devient responsable de l'éducation des adultes, mais on maintient des unités visibles et repérables.

La troisième cible consiste en l'amélioration de l'organisation des programmes de formation professionnelle dispensés dans le système scolaire: des programmes et des équipements mis à jour, des enseignants au fait de l'évolution technologique, une carte des enseignements équilibrée et offrant un nombre suffisant de places aux femmes comme aux hommes dans les secteurs d'avenir, des mécanismes efficaces de concertation éducation - travail constituent les conditions de base auxquelles il faut travailler.

Au chapitre de la concertation, le gouvernement a choisi de créer des structures légères impliquant les principaux ministères concernés. Il respecte ainsi les principes de l'économie de moyens et de la multiplicité des lieux de responsabilité. Par exemple, la concertation privilégiée avec le ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu s'inscrit dans une logique qui donne à ce dernier les moyens correspondant à ses responsabilités de mettre en oeuvre une politique de main-d'oeuvre souhaitée par tous.

Pour les activités d'éducation populaire, aussi bien celles qui sont dispensées dans le secteur des établissements publics que celles qui sont dispensées dans le secteur des associations autonomes, quatre priorités ont été retenues: l'alphabétisation, le soutien des projets communautaires des jeunes adultes défavorisés, chômeurs ou inactifs, les programmes destinés aux femmes désireuses de retourner aux études ou d'accéder au marché du travail, l'insertion sociale des personnes handicapées. Les choix ainsi arrêtés pour le développement de l'éducation des adultes disposent à des efforts concrètement appliqués pour l'exploitation de ressources qui, en dépit de leur caractère trop modeste en regard de tous les besoins, demeurent importantes. (10 h 15)

En mai prochain je tiendrai, avec mes collègues les plus directement concernés, des séances de travail avec les principaux groupes impliqués afin de discuter des modalités d'implantation et d'affiner la précision des mécanismes à mettre en place.

La contribution du secteur de l'éducation à la relance économique s'exprimera aussi par l'amélioration de nos dispositifs scolaires de formation professionnelle. D'abord formulées en 1982, des propositions de relance et de renouveau ont ensuite été débattues dans deux vagues

successives de consultation auprès de tous les intéressés responsables et agents des différents ordres d'enseignement, ceux du secteur dit régulier et ceux du secteur de l'éducation des adultes, partenaires du monde de l'éducation et ceux du monde du travail, ministère de l'Éducation, ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, autres ministères selon les secteurs d'activité économique intéressés, organismes et établissements d'enseignement, associations professionnelles du personnel de l'enseignement, commissions de formation professionnelle, corporations et ordres professionnels, entreprises et organismes socio-économiques.

Ces consultations ont permis de valider les grandes visées de départ. La formation professionnelle doit s'appuyer sur une formation de base qui reconnaît la valeur culturelle et pédagogique de la technique et de la technologie. Ceci implique, entre autres conséquences, le développement de cours d'initiation à la technologie à l'intérieur du curriculum de formation dite générale. Le système scolaire doit donner au plus grand nombre la possibilité d'acquérir une formation professionnelle de qualité, c'est-à-dire une formation assez poussée pour permettre l'ajustement aux changements technologiques, mais en même temps assez large et polyvalente pour favoriser la mobilité, le recyclage et le perfectionnement dans un contexte d'éducation permanente. Le système scolaire de la formation professionnelle peut améliorer et rationaliser son organisation, notamment par la concertation avec le monde du travail et entre les divers ordres d'enseignement, par une meilleure répartition territoriale des programmes et par une articulation plus serrée des instances ministérielles qui partagent une responsabilité dans cette formation.

Ces orientations touchent surtout l'école secondaire, car c'est là que se jouent et se déterminent les sélections sociales et culturelles les plus marquantes pour l'avenir. Les changements nécessaires suivront le rythme d'implantation du nouveau régime pédagogique de 1981, selon des étapes progressives qui pourront s'étendre jusqu'en septembre 1988, compte tenu des modifications nécessitées par la loi 40 pour que toutes les années du secondaire aient été atteintes.

En vue de favoriser ce renouvellement de la formation professionnelle, un plan de perfectionnement des maîtres de l'enseignement général et professionnel sera établi en 1984-1985. D'autre part, l'effort de modernisation des équipements, particulièrement dans les domaines de formation plus touchés par les changements technologiques, sera renouvelé en 1984-1985. Des crédits de 10 000 000 $ seront affectés au budget d'immobilisation des commissions scolaires.

Les consensus étaient plus faciles lorsque nous étions installés autour d'une table abondante. Le frugalité oblige à choisir et le risque est grand de voir les intérêts de groupes prendre le dessus. Pourtant, c'est à l'heure des menaces les plus sérieuses à notre développement collectif qu'il convient plus que jamais de serrer les rangs et de dépasser les intérêts personnels. Il vaut alors mieux nous employer à trouver les raisons d'être solidaires que celles de nous diviser.

Pour ma part, j'entends ne ménager aucun effort pour établir les contacts nécessaires avec les groupes vraiment désireux d'améliorer le climat pédagogique des écoles. Au secondaire en particulier, je suis conscient qu'il y a des ajustements à faire pour harmoniser dans un ensemble cohérent le régime pédagogique, les règles budgétaires et les mécanismes de partage des tâches. Un mouvement dans cette direction a été fait auprès de la Centrale de l'enseignement du Québec. Un comité mixte sur la tâche des enseignants poursuit actuellement les travaux dont j'attends beaucoup d'effets positifs. J'ai aussi bon espoir que les réflexions du Conseil supérieur de l'éducation apporteront sur cette question des éclairages révélateurs.

Ma volonté de dialogue et d'ouverture s'adresse également aux groupes d'étudiants. Ce serait plutôt ironique que je demeure sourd aux attentes de ceux vers qui, en définitive, toutes les autres démarches ont été orientées. C'est pourquoi je rencontrerai cette semaine des représentants des étudiants, dans le cadre d'un effort sérieux d'identification des problèmes et des moyens pour les résoudre.

L'année 1984-1985 sera aussi celle de l'adoption de la nouvelle Loi sur l'enseignement primaire et secondaire public. Les réformes ne sont réelles et durables que si elles rejoignent un certain consensus. Le projet que je déposerai à l'Assemblée nationale comportera les mêmes visées que le précédent: des cellules plus humaines, plus responsables, plus communautaires, c'est-à-dire une école plus autonome et des parents davantage impliqués.

Pour que les objectifs deviennent plus souhaitables pour l'ensemble des intéressés, le projet favorisera un cadre évolutif ménageant des rythmes d'implantation et des plages d'expérimentation respectueux des contraintes propres aux collectivités locales. Là aussi, des contacts ont été faits et des démarches entreprises afin de dégager des consensus possibles. J'ai déjà affirmé que, pour donner libre cours à la créativité, il fallait refuser l'uniformité: les rigidités qui affectent toute organisation sociale doivent, au Québec, demeurer toujours objet de méfiance; il faut que l'imagination puisse s'exprimer librement, sans contrainte. Je n'ai

pas changé d'idée depuis cette déclaration et j'entends qu'elle me serve de guide dans la conduite du projet de loi jusqu'à sa sanction législative.

Ce refus de l'uniformité et de la rigidité va s'exprimer également dans la poursuite de l'examen critique de l'action propre au ministère de l'Éducation dans l'ensemble du système scolaire. En vue de la cure d'amaigrissement à laquelle il est astreint depuis déjà quelques années, le ministère est à réviser sa contribution spécifique dans l'économie du système et entend manifester concrètement sa volonté de se débureaucratiser et de se centrer sur sa mission essentielle. C'est au niveau du système lui-même et non au niveau et à la place des partenaires constitués qu'il doit exercer ses responsabilités d'orientation, de développement, de confirmation, de coordination et d'évaluation.

Il faudra du temps et de la persévérance pour modifier les styles d'intervention, pour briser les réflexes de dépendance et pour réfréner les appétits de pouvoir. La lenteur du processus et les obstacles ne nous détourneront pas du but, car nous avons la conviction que cette étape est nécessaire à l'acquisition d'une plus grande maturité sociale.

Voilà donc les principaux engagements du ministère de l'Éducation pour l'année 1984-1985. L'examen des crédits que je dépose aujourd'hui révèle que les redressements budgétaires se poursuivent sans menacer le succès de notre mission éducative. Les défis sont de taille, mais j'ai confiance qu'ils agiront comme stimulants auprès de tous ceux qui ont à coeur l'épanouissement des personnes et le progrès du Québec.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. M. le député d'Argenteuil.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord, au début de nos travaux, saluer le nouveau ministre de l'Éducation qui est entré en fonction il y a quelques semaines et lui souhaiter de nouveau bonne chance. Je voudrais le remercier de la collaboration qu'il m'a apportée dans la préparation de nos travaux des prochains jours. La semaine dernière, je lui ai adressé une liste assez abondante de renseignements dont je pensais avoir besoin. Hier soir, à ma grande surprise, vers 22 heures, un collaborateur du ministre est venu déposer à mon bureau, une boîte de documents que je n'ai pas eu le temps de lire au complet avant la séance de ce matin, mais qui nous seront sans doute très utiles au cours des prochains jours.

Je rappelle, évidemment, au ministre qu'il a donné des réponses à peu près à la moitié des demandes que nous lui avions faites. Il y a certains documents qui ne demanderaient pas beaucoup de travail si on voulait les mettre à notre disposition, parce qu'il s'agit de documents qui sont là, mais que le gouvernement semble vouloir considérer comme étant réservés à son usage strictement privé. C'est une attitude que nous contestons vivement, mais nous aurons l'occasion d'en reparler en cours de route. Pour l'instant, je voulais souligner que le ministre a répondu avec empressement à une très bonne partie des demandes que je lui avais faites et je l'ai vivement apprécié.

Brièvement, je voudrais évoquer le souvenir du prédécesseur du ministre, M. Laurin, avec qui nous avions eu le plaisir l'an dernier de faire l'étude des crédits, avec qui il nous a été donné à plusieurs reprises de siéger en commission parlementaire au cours de la dernière année. Nous avons critiqué plusieurs politiques de M. Laurin, mais j'ai toujours estimé qu'il avait porté un intérêt extrêmement vif à la cause de l'éducation, qu'il s'était identifié en profondeur avec l'idéal d'un développement culturel beaucoup plus substantiel pour notre peuple du Québec. Je pense que, de ce point de vue, nous lui devons une marque d'appréciation qu'il me fait plaisir d'exprimer ce matin en mon nom et, je pense bien, aussi au nom de nos concitoyens.

L'étude des crédits nous fournit chaque année l'occasion de commencer nos travaux par une sorte de tour d'horizon sur les réalisations de la dernière année et les perspectives de l'année qui commence. Le ministre vient de le faire dans des termes qui restent, forcément, généraux vu les contraintes de temps à l'intérieur desquelles nous devons désormais évoluer. Je le suivrai et j'essaierai d'être bref aussi. Je vous soumettrai un certain nombre de remarques groupées autour de trois thèmes principaux: tout d'abord, les aspects positifs de la dernière année; deuxièmement, les échecs et les déceptions de la dernière année; troisièmement, les priorités qui devraient être retenues par le gouvernement et tous ceux qui se préoccupent du progrès de l'éducation au cours de l'année à venir.

Nous avons l'habitude de souligner surtout les choses qui ne fonctionnent pas dans l'action du gouvernement. Je pense que c'est normal de la part de l'Opposition, c'est sa raison d'être en démocratie de souligner les carences de l'action des autorités politiques. Mais, dans une circonstance comme celle-ci, je pense qu'il est normal de souligner qu'il y a, tout de même, un certain nombre de points dans le système d'enseignement qui ont donné lieu à des motifs de satisfaction au cours de la dernière année. J'en mentionne quelques-uns.

D'abord, je pense que l'événement dominant, c'est l'arrêt dans la chute des

inscriptions aux niveaux primaire et secondaire. Depuis 1976-1977, nous assistons à une véritable saignée des effectifs scolaires au Québec: de 1 322 000 élèves que nous avions dans des écoles primaires et secondaires en 1976-1977, le total était tombé l'an dernier à 1 060 000, c'est-à-dire une chute de plus de 260 000, ce qui est énorme. On constate que les pronostics du ministère - avec toute la réserve qui doit accompagner l'accueil de ces pronostics, car on sait que le ministère pèche par un excès de conservatisme dans ces choses, surtout aux niveaux collégial et universitaire, au niveau de l'enseignement privé également - annoncent pour l'année 1984-1985 des effectifs à peu près semblables à ceux de la dernière année. Il y a une légère différence d'à peu près 2000. Il y a lieu de s'en réjouir et j'espère qu'au cours des années à venir nous assisterons à une remontée de ce côté.

Je regrette, entre parenthèses, que, dans le cahier explicatif des crédits que le ministère met à notre disposition, la section qui était consacrée l'an dernier aux travaux de la division des études démographiques ait été plutôt amputée cette année. J'ose espérer que cette section voudra nous fournir des données sur les prévisions qu'elle a établies en vue des prochaines années en matière de clientèle scolaire, surtout aux niveaux primaire et secondaire.

Nous remarquons qu'au niveau collégial il y a eu une progression sensible. Je pense que les effectifs sont passés au cours de la dernière année de 132 000 à 139 000, une augmentation de 7000 qui est bien supérieure aux prévisions qu'on nous avait soumises l'an dernier. De même, au niveau universitaire, il y a eu une augmentation de 143 000 à 146 000, toujours d'après les prévisions. Je pense que cela sera plus élevé en pratique. De toute manière, on constate qu'aux niveaux collégial et universitaire il y a une progression remarquable des effectifs, ce qui nous autorise à croire que l'objectif qui vise à faire du peuple du Québec un peuple sans cesse plus instruit, plus qualifié intellectuellement pour faire face aux défis non seulement économiques, mais aussi sociaux, culturels, moraux, politiques qui attendent la génération de demain, sera beaucoup mieux préparé de ce côté. Il y a bien des lacunes qu'on pourrait souligner évidemment, mais je pense que ces tendances de fond valent d'être soulignées, surtout à une période où on est enclin à mettre l'accent sur les choses qui marchent moins bien.

L'année 1983-1984 s'est déroulée dans un climat de tranquillité relative dont nous avons lieu de nous réjouir après coup. Au début de mars l'an dernier, nous avions des raisons très sérieuses de craindre que l'année ne soit extrêmement agitée, extrêmement dominée par l'insécurité et les tensions, mais on a réussi à passer à travers l'année 1983- 1984 qui s'achève dans un climat de tranquillité relative et je pense qu'il faut en féliciter de manière particulière les enseignants et le personnel professionnel de nos institutions d'enseignement qui, malgré les conditions très dures dans lesquelles ils ont été appelés à travailler, ont fourni un rendement qui, dans le contexte, doit être considéré comme très satisfaisant. (10 h 30)

Troisièmement, le travail de renouvellement des programmes, dont nous parlons peu, dont nous espérons avoir la chance de parler davantage au cours de la prochaine année, s'est poursuivi tant aux niveaux primaire et secondaire qu'au niveau collégial. Je pense qu'on doit dire que de manière générale les échéanciers sont précis, sont assez largement respectés en ce qui concerne le contenu des programmes, les guides pédagogiques. Il y a des lacunes dont nous aurons l'occasion de parler quand nous traiterons des crédits de l'enseignement primaire et secondaire de manière plus spéciale. Mais je voudrais signaler, à ce stade-ci, que, de façon générale, d'après les échos qui nous en parviennent et l'examen fort partiel qu'il m'a été donné d'en faire personnellement, la qualité des nouveaux programmes est en général excellente. Et comme ces programmes ont été préparés, en très grande partie, par des personnes qui oeuvrent dans le secteur de l'enseignement, je pense qu'il faut leur rendre l'hommage auquel ils ont droit.

Je voudrais signaler qu'au cours de la dernière année les organismes consultatifs chargés par des dispositions législatives de conseiller le gouvernement en matière d'éducation ont fourni un apport substantiel à nos recherches et à nos débats. Je voudrais souligner de manière toute particulière les nombreuses interventions du Conseil supérieur de l'éducation qui s'est signalé par la précision de ses interventions, par la liberté avec laquelle il les a faites et par le souci qu'il a constamment manifesté de maintenir et d'étendre le contact direct avec la population et les milieux concernés. Moi, je ne suis pas d'accord avec tous les avis que le Conseil supérieur de l'éducation émet; il m'est arrivé même au cours de l'année d'émettre des dissidences, mais j'estime la vigueur avec laquelle le Conseil supérieur de l'éducation poursuit son travail, et j'espère qu'on lui fournira, à l'avenir, les conditions requises pour qu'il continue de le faire.

Je voudrais également signaler les études de haute qualité du Conseil des universités, dont on parle peu et dont nous aurons l'occasion de traiter quand nous parlerons des universités. Mais je pense que le Conseil des universités a produit des études d'excellente qualité qui, dans bien des cas, vont au fond des choses et devraient éveiller l'attention, hélas: un peu somnolente,

du gouvernement dans ce domaine. Le Conseil des collèges a produit une opinion, en particulier au cours de la dernière année, sur le projet de régime des études collégiales, qui a été vivement appréciée. Il poursuit une consultation actuellement sur laquelle nous aurons l'occasion de nous prononcer plus tard. Mais, de façon générale, je voulais souligner cet apport important que fournissent les organismes consultatifs créés par voie législative dans l'élaboration des politiques éducatives québécoises.

Cinquièmement, l'éducation est de plus en plus un sujet de première importance sur la place publique. La plupart du temps, les journaux quotidiens consacrent chaque jour plusieurs articles aux questions de l'éducation. C'est une chose qui m'a frappé au cours de la dernière année. Je pense que l'éducation - c'est peut-être parce que je lis un journal plus que d'autres - occupe une place très importante dans la matière que présentent chaque jour nos journaux quotidiens et aussi les médias électroniques. Je pense que c'est excellent. Nous avons pu, au cours de la dernière année, grâce à cette attention soutenue que les médias portent à la question de l'éducation, aborder en profondeur et de manière assez large des sujets aussi importants que le rôle de l'école dans la communauté, le rôle des parents dans l'école, la place des valeurs religieuses et morales dans l'école, la place des commissions scolaires dans notre système d'enseignement et combien d'autres sujets. La plupart du temps, les débats se font à un niveau élevé et généralement exempt de partisanerie. Je pense que l'exemple de la commission parlementaire qui a siégé sur le projet de loi 40 au cours de la dernière année est une bonne illustration de ceci. Pendant six semaines, les parlementaires ont été à l'écoute d'organismes en provenance de toutes les régions, de tous les secteurs de la population et je pense que, de manière très très générale, les échanges se sont faits dans un climat exempt de partisanerie.

En terminant, je voudrais souligner à ce sujet la capacité de réaction très élevée des milieux de l'éducation. Je pense que ceux qui oeuvrent dans le secteur de l'éducation ont un énorme avantage sur ceux qui oeuvrent dans la plupart des autres secteurs. Ils transigent avec des acteurs qui ont une capacité de réaction et un pouvoir d'attention soutenu beaucoup plus élevés que la moyenne. Ceci permet une production de documentation et une capacité de réaction critique beaucoup plus fortes, dont nous avons du côté de l'Opposition beaucoup profité au cours des derniers mois et auxquelles je souhaiterais que le gouvernement apporte davantage d'attention en certaines circonstances.

Je voudrais maintenant souligner les principaux échecs et les principales sources de déception que nous avons dû enregistrer au cours de la dernière année. Le ministre y a fait allusion tantôt. Je voudrais le souligner pour ma part également. Je pense que la source d'inquiétude majeure en ce qui touche notre système d'enseignement, c'est, évidemment, cette hantise des débouchés qui occupe la réflexion à la fois des étudiants, des éducateurs et des parents à longueur d'année. On a de très bonnes choses dans notre système d'enseignement, mais, comme l'a souligné le ministre tantôt, tant que nous n'aurons pas trouvé le moyen de faire fonctionner l'économie au niveau de rendement qu'exigent ces investissements faits dans le secteur de l'éducation par les années qui courent, il y aura un problème très sérieux auquel nous sommes loin d'avoir trouvé toutes les solutions. Ils sont des milliers les jeunes Québécois qui ont reçu une formation remarquable et qui attendent chez eux des réponses aux innombrables démarches qu'ils multiplient dans toutes les directions afin de trouver une occasion de mettre leur formation et leurs talents au service de leurs concitoyens.

Deuxièmement, les décrets ont laissé des blessures profondes et un goût de cendre dans les milieux de l'éducation. Nous en avons eu la preuve. Le gouvernement était le seul à ne point s'en être aperçu. Le gouvernement pensait que tout marchait bien. Que de fois j'ai entendu le ministre de l'Éducation nous le dire en pleine Chambre, jusqu'à ce que, enfin, on consente à demander au Conseil supérieur de l'éducation de faire une enquête spéciale à ce sujet. Si on a parcouru l'immense documentation qui a été mise à la disposition du Conseil supérieur de l'éducation, on doit constater qu'il y a des conséquences des décrets qui sont extrêmement onéreuses non seulement pour les enseignants, mais pour la qualité de l'éducation. J'espère vivement que les entretiens qui se déroulent ces jours-ci ne seront pas seulement de la frime, mais qu'ils conduiront à des conclusions sérieuses. Si cela devait être uniquement un jeu d'ombres, un jeu d'apparences et que cela ne dût conduire à aucune conclusion pratique, je pense que ce serait ajouter de l'huile sur le feu.

M. le Président, je voudrais souligner que le gouvernement n'a pas encore donné suite au voeu émis par l'Assemblée nationale le 26 mai dernier, demandant que soit abrogée formellement et officiellement l'odieuse loi 111 qui a mis le Québec au rang des pays les moins avancés en matière de respect des libertés fondamentales. On nous avait promis une action rapide à ce sujet. Le gouvernement avait imposé un léger amendement. J'avais présenté moi-même une motion dans laquelle j'insistais pour que l'abrogation se fasse immédiatement. On a changé cela par un amendement qui disait:

dans les meilleurs délais. On voit ce que cela veut dire "dans les meilleurs délais" avec le gouvernement. La motion a été adoptée le 26 mai dernier; nous sommes rendus au mois d'avril et les meilleurs délais se prolongent indéfiniment. Cela laisse une mauvaise trace.

En tout cas, sur tout ceci, l'effet des décrets, je ne voudrais pas que le gouvernement et surtout le nouveau ministre de l'Éducation nourrissent la moindre illusion: les blessures sont très profondes. Elles ne sont aucunement cicatrisées pour l'heure et je pense qu'il faudrait des gestes concrets pour que la bonne volonté du gouvernement soit acceptée comme un facteur dans le débat qui doit se poursuivre.

La politique de l'informatique du gouvernement est un échec assez lamentable jusqu'à maintenant. On me dira qu'il y a des choses qui se font. Fort heureusement, le gouvernement ne les a pas empêchées de se faire. Dans la mesure où il ne les empêche pas de se faire, cela a marché; mais dans la mesure où on a dépendu de la politique du gouvernement pour fonctionner, c'est évident que les échecs et les ratés sont énormes. Je n'insiste point là-dessus, parce que nous avons eu, l'autre jour, un débat prolongé à ce sujet et nous aurons l'occasion d'y revenir à propos de chacun des secteurs.

La politique de l'éducation des adultes. Cette politique a beaucoup trop tardé et a énormément déçu les milieux de l'éducation des adultes au point qu'ils ont été unanimes à réclamer la tenue d'une commission parlementaire pour que cette politique du gouvernement soit examinée de manière critique avant d'être mise en oeuvre. Or, j'ai écouté attentivement ce que le ministre de l'Éducation a dit à ce sujet tantôt et je n'ai trouvé aucun engagement à donner suite à cette volonté exprimée par de très nombreux organismes. Il nous a parlé d'une journée de concertation avec les principaux agents, mais, dans une journée, on ne fait pas de concertation, M. le Président. Il faut être sérieux. La concertation est un processus long qui demande énormément d'échanges. Seulement pour dresser une problématique qui soit communément acceptable, cela prend beaucoup plus qu'une journée et, ensuite, pour arriver à des orientations sur lesquelles on puisse s'entendre, à plus forte raison cela demande un petit peu de temps. J'espère que de ce côté on voudra donner suite à un voeu qui a été formulé, je pense, de manière très raisonnable.

Les rapports du gouvernement avec les commissions scolaires, en général, n'ont pas été trop bons au cours de la dernière année. Je pense qu'il y a eu des affrontements dont on aurait pu nous faire l'économie. J'ose espérer qu'au cours de la prochaine année on sera beaucoup mieux orienté de ce côté.

La politique de financement des universités, j'aurai l'occasion d'en parler, est une source de recul actuellement pour la qualité de l'enseignement et de la recherche à l'université. Les documents qui étayent cette affirmation sont abondants. Ceux du Conseil des universités en particulier sont spécialement éloquents. Je me dispense de précisions additionnelles vu les contraintes de temps à l'intérieur desquelles nous fonctionnons.

La politique du gouvernement en matière d'enseignement privé nous est annoncée depuis sept ans maintenant. Nous l'attendons toujours. Nous n'avons eu aucune indication au cours de la dernière année, seulement une couple d'impropères, de lamentations du ministre de l'Éducation, votre prédécesseur, M. le ministre, qui n'ont débouché sur aucune mesure concrète. Par conséquent, nous ne sommes pas plus avancés de ce côté que nous ne l'étions.

Le gouvernement a trop souvent ignoré, au cours de la dernière année, les avis qui lui étaient communiqués par des organismes officiellement et légalement mandatés pour le conseiller. Que de fois le gouvernement n'a tenu aucun compte des avis qui lui étaient donnés? Je trouve cela formidable qu'on dépense des fonds publics pour faire fonctionner ces organismes, pour leur demander de formuler des avis alors que, dans des questions très importantes, on a littéralement ignoré les avis qui étaient fournis par des organismes.

Je termine cette partie de mon exposé en soulignant - je lance même un cri d'alarme, M. le Président - le recul inquiétant de l'éducation dans la hiérarchie des priorités gouvernementales. En vue de nos travaux, j'ai dressé mes calculs sur l'évolution des dernières années. J'ai été content de voir ces calculs confirmés par des données que nous fournit le cahier de notes explicatives préparé en vue de nos travaux. En 1976-1977, lorsque le présent gouvernement est arrivé au pouvoir, l'éducation représentait 28,3% de l'ensemble des dépenses gouvernementales. Ce total était monté à 28,9% en 1980-1981. Je pense qu'il est allé à 29% l'année suivante, année des conventions collectives qui ont précédé l'élection, pour qu'on n'oublie jamais cette espèce de facilité dans laquelle a glissé à ce moment le gouvernement pour des fins, évidemment, électoralistes; référendum, élections. Il avait bien de l'argent à ce moment. Ensuite, on est descendu à 26,1% l'an dernier et, cette année, c'est 24,5%. Cela commence à être une chute. Je pense que c'est extrêmement inquiétant.

Tantôt, j'entendais le ministre nous dire: C'est explicable par la chute des effectifs aux niveaux primaire et secondaire. Je pense qu'on pourra lui faire la preuve au cours des prochains jours que là n'est pas la principale, ni la seule explication. Il y a

d'autres explications qui témoignent d'un changement dans les priorités du gouvernement, qui doit nous inquiéter profondément et qui fera, je l'espère, l'objet d'un vigoureux redressement dans les meilleurs délais. (10 h 45)

Je voudrais terminer en émettant le voeu qu'au cours de la prochaine année un vigoureux redressement s'impose dans les priorités du gouvernement. Il faut que l'éducation retrouve la place qui lui revient dans les priorités du gouvernement, qu'elle cesse d'être le bouc émissaire sur lequel on frappe chaque fois qu'on a des excuses à fournir pour des erreurs qui ont pu être commises à d'autres niveaux. Il faut qu'on cesse aussi de la subordonner de manière étroite, comme on l'a trop souvent fait au cours de la dernière année, à des impératifs économiques à courte vue qui ne sont peut-être même pas économiques au bon sens du terme sur une longue période.

Je pense qu'un effort de réflexion et de révision profonde s'impose. Il faut que l'éducation - je l'affirme avec toute la force dont je suis capable - soit respectée dans son objet propre. L'objet propre de l'éducation n'est pas uniquement de fournir des travailleurs pour tel ou tel corps de métier, pour telle ou telle industrie, pour tel ou tel secteur de l'économie, mais de former des hommes et des femmes, des citoyens complets qui seront, évidemment, capables de gagner leur vie - c'est une première exigence - mais qui seront également capables d'exercer avec maturité les responsabilités de la vie adulte dans tous les secteurs de la vie individuelle et collective. J'ai l'impression qu'un redressement important s'impose de ce côté parce qu'un glissement de plus en plus perceptible s'est produit dans les priorités gouvernementales. Je pense que ce glissement au niveau de la pensée et de la philosophie explique le glissement qui se produit maintenant de manière visible dans les chiffres et dans les budgets.

Deuxièmement, il faut absolument refaire un climat de confiance et de dialogue dans le secteur de l'enseignement. Le ministre n'a pas eu l'occasion de circuler encore beaucoup dans les cégeps, dans les universités, dans les commissions scolaires, dans les écoles primaires et secondaires. Je suis sûr que, si ses collaborateurs, au lieu de l'emprisonner uniquement dans des devoirs bureaucratiques, lui laissent la chance de sortir pour aller humer l'air véritable qui circule dans nos écoles, dans nos collèges et dans nos universités, il constatera qu'il y a un travail très exigeant à accomplir pour restaurer dans ce secteur de notre société -secteur capital pour notre avenir - le climat de confiance et de dialogue sans lequel l'oeuvre de l'éducation est gravement compromise. Je pense que le premier geste qu'il devra poser résidera dans les décisions qu'il sera appelé à prendre au sujet de la deuxième et de la troisième années des décrets. On attendra ses décisions avec un immense intérêt.

Troisièmement, l'année 1984-1985 doit donner lieu à un débat public sur plusieurs volets majeurs de la politique du gouvernement qui n'ont donné lieu, jusqu'à maintenant, à aucune discussion véritable. Je souligne d'une manière particulière à cet égard l'éducation des adultes, le financement des universités, la formation professionnelle à tous les niveaux.

Je termine, M. le Président, en disant qu'il faut que le gouvernement fasse connaître le plus tôt possible la politique qu'il entend suivre à l'occasion de la prochaine ronde de négociations pour l'année 1984-1985. L'année 1985 marquera l'expiration des décrets imposés l'an dernier. Par conséquent, il faut que nous sachions au cours de la prochaine année 1984-1985 - et je dirais d'ici la fin de 1984 - où le gouvernement entend se loger en matière de politique de négociations. Allons-nous continuer à procéder par décrets? Allons-nous revenir à des négociations véritables? À ma connaissance, le ministre n'a fait aucune allusion à cela. Des documents circulent déjà sous les auspices du Conseil du trésor, des documents émanant du ministère de l'Éducation et nous demanderons des explications au cours des débats des prochains jours sur cette question vitale.

Voilà, M. le Président, comment m1 apparaît le tableau de l'éducation alors que nous entreprenons l'étude des crédits du ministère pour l'année 1984-1985.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le Vice-Président. M. le député de Fabre.

M. Michel Leduc

M. Leduc (Fabre): Merci, M. le Président. Avant de faire quelques commentaires relatifs aux crédits qui sont devant nous, relatifs aussi à ce qu'ont dit le ministre de l'Éducation et le député d'Argenteuil, quelques mots pour dire que, la semaine dernière, j'ai eu l'occasion d'assister à la Conférence des ministres de l'Éducation des pays de langue française à laquelle participe activement le Québec. Cette année, cette conférence avait lieu à Kinshasa au Zaïre. C'est la deuxième fois que j'ai l'occasion de représenter le Québec à cette conférence. Si je le mentionne, c'est parce que j'ai trouvé un vif plaisir à représenter le Québec, mais aussi parce que j'ai pu constater, encore une fois, que le Québec était vivement apprécié, que sa contribution à la conférence des ministres est extrêmement importante. Cette conférence,

qui regroupe 26 pays de langue française, majoritairement des pays africains, permet au Québec nons seulement d'être présent, mais d'entreprendre des projets extrêmement intéressants et de faire profiter les divers pays de l'énorme expérience qu'il a dans le monde de l'éducation.

Le Québec, on le voit, M. le Président, est reconnu internationalement pour la qualité de son éducation, pour la capacité de ses experts d'entreprendre des projets extrêmement importants dans le tiers monde. Je pourrais donner de multiples exemples, mais je n'en ai guère le temps. Je voulais signaler que, si ici, au Québec, nous vivons présentement un certain climat de morosité par rapport à l'éducation, je dois dire que, sur la scène internationale, la réputation du Québec est demeurée intacte et qu'on continue à faire appel à la grande expérience que nous avons dans le monde de l'éducation pour entreprendre des projets surtout à l'égard des pays en voie de développement.

Cela m'a permis aussi de comparer ce que nous faisons ici avec ce qui se fait en France et en Belgique, pays également membres de la conférence. Je dois dire - je m'adresse un peu au député d'Argenteuil -que la France et la Belgique présentement connaissent les mêmes difficultés que nous connaissons ici au Québec et que ces pays doivent également effectuer des compressions budgétaires dans le domaine de l'éducation. Donc, on n'est pas les seuls à devoir vivre un certain nombre de difficultés d'ordre budgétaire et de l'ordre aussi du redéploiement des ressources.

M. le Président, je regrette que le député d'Argenteuil n'ait pas signalé, dans les points positifs qui ont été soulignés par le ministre de l'Éducation, cette volonté de redéploiement des ressources. Il me semble qu'il s'agit là d'une opération extrêmement importante qui s'effectue en parallèle avec l'opération compressions budgétaires qu'on a vécue. Nous admettons tous qu'il était devenu impossible, pour nous, comme il est impossible dans d'autres pays avancés également - je parlais de la France et la Belgique - de soutenir le rythme de croissance des budgets que nous avons connus et que ces pays ont connus également dans le passé. Il faut donc, M. le Président, comme gouvernement responsable, procéder à des rajustements qui sont douloureux et qui nous conduisent à des compressions comme celles que nous avons connues et qui nous conduisent également à fixer un certain nombre de priorités pour mieux répondre aux besoins de la population et, en particulier, aux besoins des jeunes.

Le redéploiement des ressources - je vais en parler brièvement - touche, en particulier, les jeunes et vise à leur trouver des débouchés. Je suis d'accord avec le député d'Argenteuil: s'il y a un problème majeur qu'il faut souligner non seulement dans notre système - il ne s'agit pas ici du système d'éducation comme tel mais de notre système en tant que société - c'est le problème des débouchés pour nos jeunes finissants, qu'ils soient du niveau secondaire, collégial ou universitaire.

Sur cette question du redéploiement des ressources, M. le Président, il faut mentionner, en particulier dans le budget de 1984-1985, les efforts du ministère en matière de développement. Je pense qu'il s'agit là d'un point extrêmement positif. Je voudrais rappeler à la commission que, si on peut se permettre un effort de redéploiement des ressources dans des domaines qui jusqu'ici ont été négligés, c'est parce qu'on a réussi l'opération compressions budgétaires.

Mais permettez-moi de rappeler que des sommes importantes vont être dirigées dans des domaines tels que l'insertion sociale et professionnelle des jeunes. En 1983-1984, le système d'éducation a permis à 4000 jeunes décrocheurs de réintégrer notre système d'éducation. C'est une réussite, compte tenu des moyens qui ont été mis à la disposition du système d'éducation en 1983-1984. Pour 1984-1985, il faut mentionner que l'objectif est de permettre à 9000 jeunes étudiants de réintégrer notre système d'éducation. Il s'agit, encore une fois, de jeunes parmi les plus démunis de notre société et il faut féliciter le ministère de l'Éducation à cet égard d'avoir mis dans ses priorités l'insertion sociale et professionnelle des jeunes.

Mentionnons également toute la réflexion et tous les efforts faits pour améliorer notre système dans le domaine de la formation professionnelle. Malheureusement, notre système vit encore sous l'effet du décrochage au niveau secondaire, en ce sens qu'il y a encore 30% de nos jeunes qui n'obtiennent pas leur diplôme de niveau secondaire et ceci est relié, bien sûr, en grande partie à la formation professionnelle qui, à mon sens, jusqu'à maintenant, n'a pas satisfait les demandes et les besoins de ces jeunes. Donc, l'effort qui est fait de ce côté est à souligner.

J'aurais plusieurs questions à poser dans le domaine de la formation professionnelle. J'aurai l'occasion d'y revenir. Il faudrait, je pense, qu'on nous présente un état de la situation, compte tenu qu'il y a de nouveaux programmes qui vont être mis en place. Il y a tout un changement de structures d'accueil pour les jeunes et je pense en particulier aux jeunes qui sont en formation professionnelle courte.

Il y a également à souligner, toujours dans cet effort de redéploiement en matière de développement pour 1984-1985, les centres spécialisés au collégial. Là, on touche aussi à cet effort pour trouver des débouchés aux

jeunes. Les centres spécialisés au collégial vont permettre aux collèges de mieux jouer leur rôle dans le domaine de l'insertion sociale et professionnelle de nos jeunes. Il est important que le collège remplisse sa mission socioculturelle et, pour mieux le remplir, il faut que les collèges soient mieux axés sur les besoins du milieu. Or, les centres spécialisés vont précisément permettre au collège de remplir cette vocation en fonction de son milieu et de former aussi nos jeunes en fonction des ressources industrielles du milieu. Encore une fois, il faut se féliciter que cette direction soit prise.

Également, il y a tous les efforts qui sont faits afin que dans le domaine universitaire en particulier nos jeunes se dirigent dans le sens des priorités fixées par le virage technologique. Il me semble extrêmement important que cela se fasse au niveau collégial et que cela se fasse également au niveau universitaire. Cet effort, on va le constater lorsqu'on arrivera, dans l'étude des crédits, au niveau universitaire, mais on le constate déjà. Il y a des efforts énormes qui sont faits pour assurer un financement adéquat aux universités afin de permettre à nos jeunes de s'inscrire dans les facultés, dans les domaines qui s'inscrivent dans les secteurs identifiés par le virage technologique. Il y a, entre autres, et je le mentionne rapidement, le soutien des équipes de recherche en milieu universitaire, le financement des effectifs étudiants universitaires dans les disciplines prioritaires. Il y a des montants importants qui sont alloués à cette fin. (11 heures)

Finalement, je voudrais mentionner également l'aide financière aux étudiants où l'on assiste à un redéploiement des ressources, à un élargissement intéressant de la clientèle qui pourra avoir accès à l'aide financière aux étudiants. Nos décrocheurs, encore une fois, qui sont parmi les plus démunis auront accès dorénavant à l'aide financière. Il y a des modifications importantes qui sont apportées à la méthode de calcul qui vont favoriser le retour aux études des femmes au foyer. Il y a également, bien sûr, il faut le mentionner, un accroissement substantiel de l'aide aux étudiants: l'aide aux étudiants a fait l'objet d'une croissance de l'ordre de 300% depuis 1976-1977.

Le député d'Argenteuil déplorait que l'éducation ait perdu la place qu'elle occupait antérieurement dans la liste des priorités du gouvernement. Bien sûr, on peut, de façon un peu artificielle, mentionner la part du budget de l'éducation par rapport au budget global. On constate qu'il y a effectivement une diminution, mais cette diminution ne doit pas nous faire perdre de vue un certain nombre de choses. Il y a des paiements anticipés de l'ordre de 280 000 000 $ qui sont été faits l'année précédente et qui font que le budget diminue. Il y aussi une décroissance de la clientèle qui est assez importante aux niveaux primaire et secondaire. Mais je voudrais mentionner au député d'Argenteuil que, depuis 1976-1977, l'augmentation des crédits au primaire et au secondaire a été de l'ordre de 122% malgré une diminution de la clientèle de l'ordre de 20,3%.

M. le Président, compte tenu des efforts énormes qui ont été faits depuis 1976-77 au primaire et au secondaire -l'augmentation des crédits est de l'ordre, je le répète, de 122%; la diminution de la clientèle, de l'ordre de 20% - il est donc normal qu'il y ait une certaine diminution des crédits affectés au primaire et au secondaire. Il faut mentionner également que, depuis l'adoption de la loi 57, il y eu un transfert d'impôt fiscal de 500 000 000 $ du ministère de l'Éducation vers les commissions scolaires, ce qui a permis à nos commissions scolaires depuis 1980 d'augmenter leurs ressources. Ce transfert du champ d'impôt fiscal a permis au ministère d'injecter des sommes additionnelles de 500 000 000 $ aux commissions scolaires. Ceci fait partie du 122% dont je parlais.

Il y a eu, M. le Président, des changements importants qui ont été introduits dans notre système depuis 1976-1977, c'est-à-dire depuis l'avènement du gouvernement du Parti québécois et je pense que c'est un peu simpliste de parler de recul de l'éducation dans la liste des priorités du gouvernement. Je pense qu'on ne tient pas compte, quand on dit cela, des efforts de redéploiement qui ont été faits vers des secteurs importants: orientation de sommes vers l'éducation des adultes, vers l'insertion sociale et professionnelle des jeunes, vers les secteurs clés du virage technologique. Ces orientations n'auraient pas pu être données sans les efforts de compressions et de réorientation des sommes qui ont été effectuées en particulier depuis 1981.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Fabre. Mme la députée de Jacques-Cartier, je vous signale, compte tenu du temps qui reste, que je vais essayer - je pense qu'on y est arrivé jusqu'à maintenant -de donner un temps de parole équivalent aux membres de l'Opposition et aux députés ministériels qui voudraient intervenir dans les remarques d'ordre général.

M. Bérubé: M. le Président, j'aimerais me familiariser avec les nouvelles règles des travaux en commission. Je crois comprendre également que le ministre a un droit de parole après chaque intervenant s'il le juge bon, si je ne m'abuse?

Le Président (M. Charbonneau): Oui, sauf pour la période des remarques générales. Normalement, quand on va passer à l'étude des programmes comme telle, vous avez raison. Cependant, pour les remarques générales, si on veut permettre à l'ensemble des membres de la commission de faire leurs remarques, si on ne veut pas passer deux séances sur les remarques générales, si on veut consacrer, par exemple, la séance de ce matin aux remarques générales et être certain que cet après-midi et ce soir on puisse consacrer les deux séances à l'étude des deux programmes qu'on a prévu étudier aujourd'hui, vous conviendrez avec moi que la formule qu'on a adoptée jusqu'à maintenant est la bonne: vous avez eu un temps de parole d'à peu près une demi-heure; le vice-président, qui est aussi le critique officiel de l'Oppostion, a eu une demi-heure; les autres membres de la commission vont avoir moins de temps chacun pour faire leurs remarques d'ordre général. Par la suite, on pourra mettre fin à la séance de ce matin et aborder...

M. Bérubé: Cependant, lorsque les exposés des différents intervenants auront été complétés, j'aimerais que l'on puisse me laisser quelques instants pour, peut-être, ramasser certaines interventions et voir dans quelle mesure on peut y apporter des nuances.

Le Président (M. Charbonneau): C'était mon intention, parce que la tradition veut que, une fois les remarques générales faites, le ministre reprenne un certain nombre de commentaires qui ont été formulés. Il n'y aura pas de problème.

M. Bérubé: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): C'est cela. Ce qu'on essaie, c'est de concilier les nouvelles règles tout en respectant la tradition.

Mme la députée de Jacques-Cartier.

M. Bérubé: Je pense qu'avec la nouvelle règle, le porte-parole de l'Opposition, qui est également le vice-président de cette commission, a quand même la possibilité de souffler plus facilement dans l'oreille du président que je ne l'ai à cette distance.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, je vais essayer de faire en sorte que les soufflements s'équivalent malgré les distances.

M. Bérubé: Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Mme la députée.

Mme Joan Dougnerty

Mme Dougherty: Je n'ai que quelques commentaires à faire au début, parce que je préfère réserver mes commentaires pour l'étude des programmes.

J'ai été un peu étonnée du beau discours du ministre qui met tellement l'accent sur l'importance du développement de nos ressources humaines pour améliorer et surtout pour assurer notre succès économique à l'avenir. Il me semble qu'il y a un gros écart entre le discours du ministre et la situation. J'aimerais dire quelques mots sur la situation dans les universités. J'ai eu l'occasion de faire un tour des universités et surtout de leurs équipes de recherche pour être plus au courant de la situation comme porte-parole de l'Opposition sur la science et la technologie. Partout j'ai entendu la même histoire: les universités ne sont plus la priorité du gouvernement; l'équipement est désuet; il n'y a pas d'espace pour les étudiants dans les secteurs du virage technologique; on fait toutes sortes de jeux avec l'argent; des promesses d'argent sont faites pour les nouvelles clientèles; on retire d'une main le budget des universités et on le donne comme de l'argent nouveau pour des programmes envisagés par le gouvernement, et c'est toujours inadéquat; les effectifs des enseignants vieillissent; l'impact de la loi 15 sur les universités est considérable; les bibliothèques se détériorent; toute l'infrastructure des universités, qui est tellement importante, selon le gouvernement, se détériore.

Il ne suffit pas de de crier, de pallier de grandes annonces de relance, de créer 40 équipes de recherche. Ce n'est pas comme cela qu'on va améliorer le pouvoir et les possibilités de nos universités. Ls universités à qui j'ai parlé n'étaient même pas consultées sur la création des 40 équipes de recherche. Pourquoi 40 équipes de recherche? Pourquoi 20 personnes par équipe? Pourquoi pas 2, 30, 100? On ne crée pas des activités de recherche par des annonces comme cela.

Je crois qu'il est grand temps qu'on considère l'éducation comme un investissement et non comme une dépense de notre société. Si on parle uniquement du virage technologique dont le ministre s'occupe tellement, les pays qui ont du succès en ce qui concerne le virage technologique, comme le Japon, la Suède, l'Allemagne, vous devriez voir les priorités qu'ils mettent sur l'éducation, la proportion de leur budget global qu'ils y consacrent. Le budget gouvernemental qu'ils consacrent à l'éducation est beaucoup plus important que le pourcentage que nous y consacrons.

Je crois qu'on doit cesser de toujours se comparer à l'Ontario. L'Ontario n'est pas nécessairement la meilleure comparaison. Il faut décider de mettre davantage l'accent

sur le développement de nos ressources humaines puisqu'elles sont stratégiques pour l'avenir. C'est notre capital humain qui est la meilleure ressource que nous ayons.

L'autre aspect sur lequel j'aimerais faire quelques remarques: je crois qu'une des attitudes qui caractérisent le gouvernement du Québec et surtout le ministère de l'Éducation, c'est un manque de confiance dans la base. On ne peut gérer l'éducation d'en haut. Il faut avoir confiance dans les solutions, dans les capacités, dans les qualités, dans l'imagination de la base. Je crois que ce gouvernement, à plusieurs reprises, a démontré une méfiance, un manque de confiance dans ceux qui oeuvrent à la base. L'éducation, c'est fondamentalement une activité personnelle, une activité de créativité, une activité d'imagination.

Quand on dit constamment que la solution semble être d'augmenter la productivité, de rationaliser les ressources, ce n'est pas aussi simple que cela. Le coeur d'une bonne éducation, c'est la motivation: la motivation des enseignants, la motivation des élèves. Il faut, d'abord et avant tout, un climat de respect et de confiance. Il faut avoir un climat de stabilité parce que sans ce climat on ne réussira jamais à avoir une éducation de qualité. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, Mme la députée de Jacques-Cartier. M. le député de Mille-Îles. (11 h 15)

M. Jean-Paul Champagne

M. Champagne (Mille-Îles): Merci, M. le Président. Nous sommes ici, les membres de la commission parlementaire, autour de cette table, pour étudier un budget et, à travers ce budget, je pense qu'il y a des enfants, des enseignants, des commissaires d'écoles, des fonctionnaires. On ne devrait jamais oublier que c'est l'enfant qui, avant tout, devrait être notre préoccupation fondamentale. Je pense, hélas, qu'on est rendu dans un concept trop particulier. Il faudrait avoir un concept plus global de l'enseignement, un concept basé sur l'enfant, sur la pédagogie, plutôt qu'un concept - on est souvent arrêté comme cela - déshumanisant basé sur peut-être un budget, sur du minutage, sur des tâches. Je pense qu'on oublie qu'à travers tout cela la principale préoccupation est une préoccupation pédagogique basée sur l'enfant.

J'ai eu cette préoccupation comme enseignant du primaire et du secondaire dans le passé. J'ai aussi cette préoccupation comme ancien syndiqué de la CEQ. Je m'aperçois que, dans l'évolution de notre système, nous sommes à le déshumaniser. Nous sommes à établir un système tatillon basé sur le non-respect des personnes qui doivent peut-être donner l'éducation à nos enfants. Peut-être qu'il y a eu des erreurs dans le passé; ce n'est pas d'hier, mais je pense que cela revient. Je me souviens que, dans les années cinquante, il y avait 1% de la population qui allait à l'université. On a eu, dans les années soixante, la création du ministère de l'Éducation, l'opération 55. On a eu de plus en plus l'effet de la démocratisation de l'enseignement. On le voit par le taux d'occupation de nos écoles, de nos universités, de nos cégeps. On a vu, dans les années soixante-dix, de plus en plus d'implication des parents. On voit que la population s'implique et s'intéresse davantage. Les membres de la commission parlementaire l'ont justement vu, durant les mois de janvier et février, par le nombre de mémoires qui ont été déposés à cette commission sur le projet de loi 40. On a vu depuis quelques années l'implication aussi de la population lorsqu'on a déposé le livre vert, le livre orange, le livre blanc. On voit qu'actuellement il y a un grand intérêt.

Mais à travers tout cela on oublie peut-être l'enfant. On oublie l'enseignant qui est un professionnel. Nos enseignants au Québec sont très qualifiés. Ils sont généreux, mais actuellement on sent qu'il y a un climat plutôt malsain parce qu'ils sont trop encadrés par du tatillonnage. On ne les considère peut-être pas comme des professionnels; on les considère peut-être, hélas! comme des robots. Je suis content de voir que le ministre a déjà rencontré il y a quelque temps les gens de la CEQ. Il a eu des contacts d'ouverture. Je pense qu'il faut reprendre le dialogue parce qu'on a peut-être trop centralisé le système, on a trop uniformisé le système. Je dirais que c'est depuis l'année 1968, lorsqu'on a eu la loi 25 où on a uniformisé au niveau de toute la province à la fois la tâche et les conditions de travail. Depuis ce temps-là, on sent qu'il y a non pas un climat de générosité, non pas un climat de confiance dans nos écoles, mais un climat plutôt individualiste et négatif, un climat où le désintéressement et la générosité sont absents.

Je pense que, autour de cette table, on doit voir à ce que - je parle bien principalement des niveaux primaire et secondaire - le climat avec les enfants soit amélioré. Je serais attentif à ce que le Conseil supérieur de l'éducation nous dira -si on l'invite ici à la commission parlementaire - pour améliorer cette attitude. Je me réjouis du discours du ministre qui nous annonce qu'aux niveaux primaire et secondaire il y aura un accroissement de 5% du budget, que l'éducation des adultes aura une augmentation de 20% et qu'au niveau universitaire il y aura une augmentation de 2,6% comparativement à l'an passé.

Je veux insister sur un point aussi,

c'est la réorientation de l'aide sociale. Ceux qui sont bénéficiaires de l'aide sociale et qui veulent s'intégrer au système scolaire pourront bénéficier, à ce moment, d'une aide additionnelle. Je pense que, comme réorientation, on peut se réjouir. On a également une politique pour les décrocheurs. Si on a une population instruite - cela a toujours été une priorité gouvernementale et cela le demeure - elle est prête aussi, si on lui fait confiance, à relever les défis, parce qu'il y a des défis.

J'attends beaucoup des membres de la commission. J'attends beaucoup du ministre qui a déjà commencé à faire des approches avec le monde l'éducation. J'attends aussi beaucoup des commissaires d'écoles, des enseignants, des enfants et des parents pour qu'on puisse trouver ensemble les solutions de concertation pour assurer une meilleure éducation à nos enfants et aussi un meilleur avenir aux Québécois.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député. M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): M. le Président, je voudrais toucher certains points. Au début, je pense que ce qui peut nous frapper, ce qui a sans doute frappé particulièrement les participants à cette commission, c'est l'argent qu'on affecte au ministère de l'Éducation. En 1980-1981, on affectait 28,8%; en 1981-1982, 29%. Ensuite, cela diminue chaque année. En 1982-1983, 27,5%; en 1983-1984, 26% et, en 1984-1985, 24,5%.

Le ministre nous a dit tantôt qu'il fallait peut-être faire des sacrifices dans le domaine de l'éducation parce qu'il fallait affecter certaines sommes à l'économie. Je veux bien qu'on se préoccupe de l'économie, qu'on affecte des sommes un peu plus importantes à l'économie. Par contre, quand on voit cet écart de 5% dans le budget de l'Éducation, je pense que c'est nettement trop. C'est l'écart qu'on constate entre 1981-1982 et 1984-1985. Qu'on nous parle de 1%, 2%, peut-être, d'ajustement, cela pourrait être acceptable, mais une diminution de 5%, je pense que c'est inacceptable.

D'ailleurs, il faut parler aux commissions scolaires, il faut parler à ceux qui oeuvrent dans le monde de l'éducation pour réaliser qu'on ne met pas à leur disposition les moyens pour atteindre les objectifs qu'ils peuvent se fixer ou que le ministère veut fixer à ses organismes. On a implanté un nouveau programme. Lui a-t-on donné les moyens financiers pour son implantation? On a introduit dans les écoles des nouveaux volumes; on n'a donné aucune somme additionnelle à ces fins. Je pense que c'est se créer des illusions, penser qu'on va faire quelque chose avec rien. On a introduit la science informatique. A-t-on donné de l'argent aux commissions scolaires pour réaliser ce progrès? Pas du tout. A-t-on affecté de l'argent pour le logiciel, pour le didacticiel? Aucune somme.

Je pense qu'il faudrait comprendre qu'il y a une relation entre le pourcentage d'argent qu'on affecte à l'éducation et les résultats qu'on peut obtenir. Si on ne donne pas les moyens aux organismes scolaires de réaliser les objectifs qu'on leur fixe, on se berce d'illusions. Je pense que ce n'est pas sérieux et je ne crois pas qu'on puisse accepter, comme on disait tantôt, une diminution de 5% dans les crédits de l'éducation.

Je voudrais toucher également un autre point qui peut-être fait problème dans le monde de l'éducation. On envoie chaque année le projet de règles budgétaires aux commissions scolaires. On leur envoie ce projet quelques mois seulement avant le début de l'année scolaire qui vient. Alors, cela oblige les commissions scolaires à prendre des décisions importantes qui vont avoir des conséquences considérables dans un délai très court. Il faudrait donc, à mon sens, que l'on fournisse comme instrument de planification indispendable des paramètres de financement triennaux. Je pense que cela serait un moyen d'aider les commissions scolaires. Cela leur donnerait beaucoup plus de temps, à mon sens, pour planifier le ou les programmes qu'ils auront à appliquer.

Quand on réduit les crédits à l'éducation de 5%, c'est sûr qu'on coupe le ratio, qu'on diminue le ratio maître-élèves. Je ne sais pas si les fonctionnaires au ministère ont réalisé qu'avec les nouvelles règles cette année le rapport maître-élèves va représenter un resserrement considérable par rapport à celui appliqué en 1983-1984. Également, s'est-on posé la question: Est-ce que cela aura un impact sur les nouveaux ratios pour les classes d'accueil au primaire? Il y a eu des simulations qui ont été faites et on en a conclu que, si on appliquait ces nouvelles règles, cela ne permettrait pas de satisfaire aux obligations de l'article 1 que vous connaissez. Également, quand on considère la moyenne d'élèves par groupe, le ministère n'a pas retenu les moyennes maximales du décret pour le calcul des nombres de groupes. Ce sont des questions très pertinentes. Il faudrait peut-être y apporter certaines solutions. Si, ensuite, on parle de moyens qu'on donne aux commissions scolaires, aux organismes scolaires, on constate qu'on leur impose davantage d'obligations et qu'on ne leur donne pas les moyens pour répondre à ces obligations.

Ici, je voudrais mentionner le financement requis pour l'application de nouvelles lois, que l'on pense aux lois 65, 17

et 3. La loi 65, Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels: on oblige les commissions scolaires à assumer les frais qui découlent de cette loi. Également, la Loi sur la santé et sécurité du travail: on les oblige à se conformer aux exigences de cette loi, mais aucun moyen. La Loi sur les archives, la loi 3: est-ce qu'on donne les moyens aux organismes scolaires de se conformer et de répondre aux exigences de la loi 3, Loi sur les archives? D'aucune façon. Ce qui se produit, c'est que le ministère demande aux commissions scolaires de diminuer des services pédagogiques. Alors, on diminue la qualité de la pédagogie au niveau des commissions scolaires pour se conformer aux obligations, aux exigences de ces nouvelles lois. C'est une situation, à mon sens, absolument inacceptable. (11 h 30)

Autre chose. Plus tôt, le ministre a mentionné que les crédits affectés à l'éducation par le gouvernement du Québec diminuent de 3,7%, mais que c'était strictement en apparence, parce que l'an passé on avait affecté un montant additionnel important au niveau de l'enseignement primaire et secondaire. Il y a peut-être une question qu'il faudrait se poser. Est-ce que les commissions scolaires étaient informées de cela? En fait, c'est une compression rétroactive d'un montant accordé a priori en 1983-1984. Il y aurait peut-être lieu de vérifier si, dans les règles budgétaires de l'année 1983-1984, on a fait mention de cet ajustement anticipé de 1984-1985. C'est une question, je pense, qui est très pertinente et il faudrait peut-être lui apporter une réponse. On dit: L'an passé, on a affecté de l'argent, on ne l'affectera pas cette année. Est-ce qu'ils étaient conscients que cet argent était pour 1984-1985? Je pense qu'il faudrait que le taux d'indexation soit de 5% sans qu'il y ait imposition de compressions rétroactives aux commissions scolaires.

Ce sont là quelques considérations que je voulais apporter. J'en aurais peut-être d'autres, mais je passe la parole à quelqu'un d'autre.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le député de Saint-Laurent. M. le député de Bourassa.

M. Patrice Laplante

M. Laplante: M. le Président, ce ne sera pas long. Je veux simplement féliciter le ministre pour le discours qu'il nous fait ce matin. C'est un discours d'espoir tant au niveau de l'école secondaire qu'au niveau de l'éducation des adultes. J'y vois beaucoup d'espoir par les consultations qu'il a pu avoir faites dans le milieu. Les grandes lignes directrices sont claires, à mon point de vue, sur l'avenir de tout le secteur professionnel; il restera à rattacher les fils par des consultations, afin de revaloriser, en somme, le secteur professionnel et de lui faire prendre le vrai virage technologique.

Le député de Saint-Laurent, cela me fait un peu de peine de l'entendre se pencher sur les difficultés des commissions scolaires. Si l'on se reporte à 1976, jamais les commissions scolaires n'avaient des surplus budgétaires. Elles étaient toujours en déficit, si bien qu'en 1976 nous avons été obligés d'absorber un trou de 500 000 000 $ dans l'administration des commissions scolaires; mais personne ne dit que, depuis deux ans, les mêmes commissions scolaires, par exemple l'an passé, ont eu des surplus budgétaires de 140 000 000 $. Cette année, on nous dit que les surplus budgétaires seront d'environ 150 000 000 $. Il me semble que ces sommes auraient pu être adaptées à des programmes à l'intérieur de chaque commission scolaire. Elles ont assez de latitude aujourd'hui avec la décentralisation pour pouvoir, justement, donner des services aux élèves avec cet argent. Mais non, certaines commissions scolaires vont jusqu'à faire payer des feuilles à photocopie à des élèves. C'est une vraie "maudite" honte, M. le Président! Aussi, quand des commissions scolaires se permettent de dépenser de 3 000 000 $ à 4 000 000 $ seulement en publicité, pour publiciser une opinion qu'elles pouvaient avoir contre un projet de loi, c'est encore de l'argent qui appartenait aux élèves. Quand on veut avoir l'éducation à coeur... Mme la députée de Jacques-Cartier faisait elle-même état, à un moment donné, des difficultés des commissions scolaires, du financement du virage technologique, de l'adaptation de ces élèves à des nouveaux programmes. Bien, elles ont l'argent, elles ont 150 000 000 $ en surplus budgétaire. J'aimerais que le ministre nous parle un peu des surplus des commissions scolaires. J'aimerais qu'il nous dise aussi comment ces surplus auraient pu être utilisés pour servir la clientèle scolaire.

Sur ce, M. le Président, pour donner la chance à M. le ministre de nous répondre avant le lunch, je lui cède la parole.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre de l'Éducation, il reste 25 minutes avant la suspension de midi. Je ne sais pas combien de temps vous pouvez prendre.

M. Bérubé: II est en difficulté. Le Président (M. Charbonneau): Pardon? M. Bérubé: C'est là votre problème. Le Président (M. Charbonneau): Non,

mais dans la mesure où vous prenez un peu moins de temps, peut-être qu'on pourra permettre à M. Ryan de dire quelques mots aussi. Je pense qu'on pourrait terminer vers midi et commencer, à la séance de cet après-midi, le programme 4. Si on pouvait terminer les remarques d'ordre général ce matin, on pourrait immédiatement aborder l'étude des programmes cet après-midi.

M. Yves Bérubé (réplique)

M. Bérubé: Merci, M. le Président. En fait, je ne voudrais pas évacuer ici le débat où nous étudierons un à un les programmes et où nous aurons l'occasion de fouiller plus en profondeur. Je voudrais donc m'en tenir à certaines considérations d'ordre général portant sur l'ensemble du dossier.

En fait, ce qui frappe de prime abord à l'examen des crédits, c'est essentiellement la croissance nulle du budget de l'éducation. Cela doit ressortir de prime abord. Je mets en garde contre une interprétation fautive: si on veut parler de décroissance, il n'y a pas de décroissance. Nous avions un versement à faire pour couvrir des arrérages des commissions scolaires pour 1984-1985. Au lieu de le faire dans le budget de 1984-1985, nous l'avons fait en 1983-1984 grâce à des surplus qui s'étaient accumulés à la suite d'une reprise économique supérieure à ce qui avait été anticipé. Donc, ayant payé d'avance une facture que, normalement, nous aurions dû avoir dans le budget de cette année, évidemment les dépenses baissent d'autant cette année. Mais, une fois cette correction faite pour environ 280 000 000 $, il ressort que le budget global à l'éducation est stable. Ceci entraîne nécessairement un débat autour de la croissance insuffisante des dépenses à l'éducation par rapport aux autres missions gouvernementales. Je pense que cela a fait l'objet d'un certain nombre d'interventions de la part de l'Opposition.

Comme le disait le député de Bourassa, en dépit de cette conjoncture économique très difficile, les commissions scolaires avaient, néanmoins, réussi à se dégager des surplus pouvant dépasser la centaine de millions de dollars. Le député de Bourassa s'interroge sur l'utilisation par les commissions scolaires de tels surplus dans une période où on aurait à faire face à une pénurie de ressources. C'est une question appropriée à laquelle je n'ai peut-être pas de réponse; dans la mesure où la gestion est très décentralisée, il n'est pas facile en ce moment de déterminer exactement l'utilisation que l'on pourrait faire de tels surplus, mais je pense que la question est pertinente.

Donc, on peut poser la question de l'importance relative de la mission éducative et culturelle au sein du gouvernement. De fait, si on devait regarder la croissance des budgets de 1981-1982 à 1984-1985, donc pour une période assez longue, on observerait que la mission éducative croît de 9% alors que la mission sociale croît de 33%, la mission administrative de 33% et la mission économique de 39%. Attention, je devrais être clair, c'est la répartition...

M. Ryan: Excusez-moi, M. le Président. Le ministre pourrait-il répéter ces chiffres pour que je les aie clairement?

M. Bérubé: Oui, exactement. C'est préférable pour moi de bien clairement exprimer ce que veut dire cette croissance. Si l'on regarde la croissance des dépenses de 1981-1982 à 1984-1985 et qu'on essaie de voir la répartition de cette croissance entre les différentes missions, on constate que 39% de cette croissance des dépenses gouvernementales sont allés à la mission économique, que 33% sont allés à la mission administrative, que 33% sont allés à la mission sociale et qu'à peu près 9% sont allés à la mission éducative et culturelle. Donc, à nouveau, on remarque un peu le même phénomène.

M. Ryan: C'est encore une question de précision. Vous dites que 33% de l'augmentation des dépenses gouvernementales sont allés à l'administration. Vous arrivez au-dessus de 100%.

M. Bérubé: Non. Si vous additionnez 39% plus 9% plus 33% et 33%, cela devrait vous donner 100% de l'augmentation.

M. Ryan: Mais 3 fois 33 cela fait 99, et vous avez un 6 à ajouter puis un 9.

M. Bérubé: Je vais vous le calculer.

M. Ryan: On n'a pas de calculatrice, mais l'autre machine marche.

M. Bérubé: 38, 9, 9, 2, j'ai un total de 100... Vous avez raison, dans le total qui m'est donné ici, c'est la mission économique qui doit être un peu trop forte. J'ai les chiffres bruts, je peux vous les faire calculer, de telle sorte que nous aurons la répartition en pourcentages plus précis.

Une voix: Je pense que tout le monde apprécierait que le total donne 100!

Une voix: Ah oui!

M. Bérubé: On a fait le calcul rapidement à partir des chiffres bruts. On peut le regarder par pourcentages. Nous l'aurons tantôt. De toute façon, vous tirerez la même conclusion générale avec un peu plus de précision sur un des chiffres qui a été mal divisé.

Vous observerez donc à nouveau cette constante que les missions sociale, administrative et économique ont crû plus rapidement que la mission éducative. Je pense que c'est le constat que l'on peut tous faire.

C'est lorsqu'on examine les causes de ces croissances qu'on trouve les clés qui expliquent ces disparités de croissance. En effet, le député d'Argenteuil, dans ses remarques, a mis l'accent - et il avait raison - en tout premier lieu sur cette hantise que l'on retrouve chez nos étudiants à l'heure actuelle qui ne se trouvent pas d'emploi sur le marché du travail. Il a même souligné que nombre de diplômés au Québec se retrouvent chez eux voués à l'inactivité, faute de se trouver un travail correspondant à leur formation. C'est là une réalité que nous vivons tous et qui a amené le gouvernement à décider que la priorité dans son allocation de dépenses irait vers la solution de ce problème. On a donc décidé que, il est vrai, l'éducation est importante, il est vrai que les autres missions sont importantes, mais si, au bout, il n'y a pas les emplois requis pour mettre en valeur ceux qui ont des talents que l'on a contribué à développer, la société se retrouve dans une voie sans issue. D'où l'importance que nous avons accordée à la mission économique.

Lorsqu'on examine les deux autres missions, on comprend également les raisons de leur croissance. La mission sociale croît très rapidement pour une seule et unique raison: l'aide sociale. C'est dire que l'impact de la crise sur l'économie québécoise a fait en sorte que nous avons dû injecter des sommes massives au niveau de l'aide à nos concitoyens victimes du chômage. Un budget qui représentait, il y a cinq ans ou six ans, à peu près 500 000 000 $ en représente aujourd'hui 2 000 000 000 $. Donc, la première raison, est à nouveau reliée à la crise: la crise nous a forcés à accroître nos dépenses dites sociales pour couvrir les augmentations de clientèle à l'aide sociale.

Le service de la dette est la raison essentielle de l'augmentation des dépenses administratives, car nous avons procédé à des coupures sombres au niveau de toutes les dépenses d'administration des ministères par une réduction effective du personnel. C'est, en fait, le service de la dette qui explique l'essentiel de l'accroissement de la mission administrative.

Donc, lorsqu'on reprend ces chiffres dans leur contexte, on constate ceci: la crise économique nous a forcés à injecter davantage de ressources pour venir en aide à ceux qui étaient les victimes les plus durement touchées par la crise. Deuxièmement, pous ne pas accroître l'impact sur nos concitoyens d'une augmentation aussi dramatique des dépenses, on a dû accepter des déficits plus élevés depuis 1980-1981, qui se traduisent par un accroissement très important du service de la dette. L'on comprendra aussi que plus le service de la dette croît en importance, plus il exerce des pressions sur les autres dépenses et que, par conséquent, l'accroissement du déficit ne saurait être la réponse dans une sorte de fuite en avant pour tenter de maintenir des services à coup de déficits additionnels. (11 h 45)

II fallait donc examiner à ce moment-là où faire porter l'essentiel de l'effort. Lorsqu'on regarde où faire porter l'effort, on s'aperçoit que les dépenses dans le secteur de l'éducation ont dû être réduites d'à peu près 9%, les dépenses dans le réseau des affaires sociales d'à peu près 9% et les dépenses administratives gouvernementales d'à peu près 15%, autres que le service de la dette et l'aide sociale. Voilà exactement l'impact de la crise économique qui a amené le gouvernement à ne pas surtaxer une économie essoufflée, à ne pas hypothéquer l'avenir par des déficits massifs qui auraient pu avoir comme conséquence - par des services de la dette additionnels - de réduire encore davantage notre capacité d'offrir des services, mais à consacrer l'essentiel de son effort au chapitre du développement économique et de la relance.

Aujourd'hui, il faut bien reconnaître que les pronostics pour 1984 sont que les investissements manufacturiers au Québec devraient croître de 38%, alors qu'on prévoit une décroissance pour l'ensemble du Canada. Effectivement, il faut bien reconnaître que les priorités que nous avons établies ont comme conséquence aujourd'hui qu'il y a 143 000 Québécois qui travaillent et qui ne travaillaient pas il y a un an. En d'autres termes, l'effort consenti a permis à un plus grand nombre de nos concitoyens d'échapper au fléau du chômage et de pouvoir envisager de mettre en valeur les ressources qu'ils développent grâce à un service éducatif de qualité.

Ceci m'amène à traiter de l'importance des ressources. Dans ce cahier que nous avons fait distribuer... Peut-être qu'on pourrait regarder les chiffres. J'essaierai de concilier les chiffres. On a une colonne qui vous a été distribuée dans une fiche.

M. Lucier (Pierre): M. le député d'Argenteuil avait raison de constater que l'addition des chiffres donnés dépassait 100. C'est qu'il ne fallait pas additionner ces chiffres. Il s'agit, en fait, du taux de variation des crédits alloués aux différentes missions. Ce que M. Bérubé disait, c'est que entre 1981-1982 et 1984-1985 il y avait eu une augmentation des dépenses gouvernementales à la mission économique de l'ordre de 38,9%, à la mission éducative et culturelle de l'ordre 9,2%, au social de l'ordre de 33,1% et à la mission

gouvernementale et administrative de l'ordre de 33%, pour un total, paradoxalement, de 25% à peu près de croissance.

Le Président (M. Charbonneau): Je vous remercie de cette précision.

M. Bérubé: II faut pondérer les pourcentages par l'importance relative de la mission, de manière à retrouver la croissance globale des dépenses gouvernementales. Je pense qu'à ce moment-là les chiffres tiennent toujours. Il faut simplement les pondérer de manière à les additionner.

Ceci m'amène à parler de l'importance relative des ressources que nous consacrons à l'éducation. Dans une des fiches ou dans le texte qui vous a été distribué dans le cahier explicatif des crédits, on verra qu'en fait la clientèle... Page 28.

En fait, si on compare 1976-1977 avec 1983-1984 pour voir l'évolution des ressources, on doit constater que le nombre de nos élèves au primaire et au secondaire a décru de 19%. Nous avons donc une diminution du nombre d'enfants à l'école.

On peut maintenant s'interroger sur ce qui s'est produit au sujet du nombre d'enseignants dans nos classes. Nous constatons que le nombre d'enseignants a décru de 14%, c'est-à-dire moins rapidement que le nombre d'enfants. Nous avons donc, de 1976-1977 à 1983-1984, augmenté le nombre d'enseignants pour s'occuper de nos enfants dans nos classes et non pas l'inverse. Il est donc absolument capital de bien relativiser la nature des débats auxquels on assiste dans la société. Nous n'avons pas diminué le nombre d'enseignants pour s'occuper de nos enfants; nous avons, toutes proportions gardées, observé une diminution de 19% de nos enfants, de nos élèves dans les écoles, alors que le nombre d'enseignants a décru de 14%. C'est la première observation. Je pense qu'il est capital de le faire.

Une deuxième observation qu'il est tout aussi capital de faire, c'est de toujours regarder ce qui est consacré ailleurs pour des missions semblables. Je ne veux pas me lancer dans une comparaison Québec-Ontario ou Québec-Saskatchewan ou Québec-Alberta, mais il est toujours approprié de se comparer avec d'autres sociétés riches, disposant de moyens et qui consacrent à l'éducation des sommes importantes qui leur permettent de se doter d'un système également considéré de qualité. Il faut bien reconnaître qu'il y a quelques années à peine, pour l'éducation de nos enfants au primaire et au secondaire, il nous en coûtait 800 000 000 $ de plus et qu'aujourd'hui il nous en coûte à peu près 350 000 000 $ de plus pour des populations étudiantes comparables. Il est vrai que, ramenées sur une base per capita, aujourd'hui nos dépenses en éducation sont très voisines des dépenses ontariennes. Nous dépensons plus par enfant parce que nous avons moins d'enfants per capita, c'est tout.

Donc, il demeure encore aujourd'hui qu'une fois qu'on a exclu les dépenses de transport scolaire et de financement du service de la dette - qu'on ne doit pas inclure dans la comparaison à cause des politiques différentes poursuivies par les deux gouvernements au cours des vingt dernières années - qui sont plus élevées au Québec -mais c'est naturel qu'il en soit ainsi compte tenu des décisions qui ont été prises - on doit encore constater que nous consacrons plus de ressources à l'éducation que nos voisins. C'est également une réalité.

D'ailleurs, cette réalité fait aussi en sorte que le système d'éducation au Québec a eu tendance à s'ouvrir auprès de nos concitoyens plutôt qu'à se fermer. Ainsi, en 1976, c'est-à-dire à la fin de l'administration libérale, à l'âge de seize ans, 78% de nos jeunes étaient inscrits à l'école secondaire. Aujourd'hui, c'est 86%. Nous n'avons pas réduit la fréquentation scolaire, nous l'avons accrue. Les gestes posés par ce gouvernement ont eu comme conséquence d'accroître la participation de nos jeunes -prenons l'âge de seize ans, qui est l'âge limite de fréquentation scolaire obligatoire -d'amener une augmentation de la fréquentation de 78% à 86%.

Je regarde le collégial: alors qu'à la fin de l'administration libérale précédente 22,5% de nos jeunes de dix-sept ans fréquentaient le collège, aujourd'hui c'est 35%. Le présent gouvernement a mis en place des politiques qui ont accru la fréquentation scolaire et non l'inverse. À 18 ans, la fréquentation au collège est passée de 26% à 33,6%.

À nouveau, la même observation au niveau universitaire où la députée de Jacques-Cartier est intervenue pour souligner l'insuffisance des ressources. Il n'y a jamais assez de ressources. Il faut quand même dire que les subventions du Québec à nos universités, lorsqu'on les ramène sur la base de richesse comparable, représentent 1,1% du produit intérieur brut contre 0,7% chez notre voisin plus riche que nous et que, par étudiant à temps complet, nous retrouvons des chiffres qui ont fait en sorte que, de 1980-1981 à aujourd'hui, si je ne m'abuse, le montant des subventions est passé de 6899 $ à 7418 % au Québec, alors qu'en Ontario il est passé de 5199 $ à 5963 $, croissance plus rapide en Ontario, mais à partir d'une base inférieure.

M. Ryan: M. le ministre, voulez-vous répéter, s'il vous plaît?

M. Bérubé: Les subventions par étudiant à temps complet inscrit à l'université, au Québec, passent à 6899 $ à 7418 $.

M. Ryan: Est-ce que vous pourriez nous dire où se trouvent ces chiffres dans le cahier des explications budgétaires? Est-ce que cela y est, dans le cahier?

M. Bérubé: Je ne pourrais pas vous dire si ces chiffres sont dans le cahier.

M. Ryan: On a d'autres chiffres à ce sujet dans le cahier.

M. Bérubé: Vous avez probablement non pas les étudiants à temps complet, mais vous l'avez sans doute par étudiant. Car nous avons au Québec une tendance beaucoup plus importante à la fréquentation à temps partiel à l'université que chez nos voisins, ce qui fait que, lorsque l'on fait la moyenne pour l'ensemble des étudiants, on retrouve aujourd'hui des coûts assez voisins entre notre système et celui de nos voisins.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, je vous inviterais à conclure.

M. Bérubé: Oui, je termine, M. le Président, sur quelques remarques finales. En d'autres termes, ce que j'essaie de souligner, ce n'est pas qu'il y a assez de ressources dans notre système d'éducation, car je crois que nous devons en injecter davantage. Je crois qu'au fur et à mesure que nous dégagerons des ressources nous devrons les consacrer à l'éducation, car c'est un des meilleurs investissements que l'on puisse envisager. Il ne faudra pas oublier, cependant, que les jeunes terminant des études collégiales ou universitaires ou secondaires devront aussi pouvoir se trouver un emploi. Il faudra donc mettre un certain accent sur la création d'emplois pour ces jeunes que nous formons. Il y a donc un équilibre à établir entre l'investissement que nous faisons pour former nos concitoyens et l'investissement que nous faisons pour permettre à nos concitoyens de travailler. Il y a un équilibre à établir entre les deux. On ne peut jamais discuter des dépenses dans un secteur particulier sans les relativiser par rapport aux autres secteurs.

M. le Président, quelques remarques finales sur le climat qui règne dans nos écoles à la suite des décrets qui ont suivi la dernière ronde de négociations. Il ne faut pas se le cacher, le député d'Argenteuil a eu raison de le souligner, la blessure est profonde. Peut-être pas uniquement à cause du contenu des décrets, mais peut-être tout simplement à cause d'un processus qui a été aussi durement ressenti au niveau des jeunes qui ont participé à la négociation du côté gouvernemental; eux, non plus, n'ont pas aimé ce qui s'est passé à la dernière ronde de négociations. Peut-être que la réalité, c'est que nous avons été coincés entre l'arbre et l'écorce; que l'enseignant a été coincé entre un appareil un peu aveugle syndical et un appareil un peu aveugle gouvernemental; qu'il a eu l'impression d'être le jouet de forces qu'il ne contrôlait pas. C'est réel.

J'ai bien entendu le discours du député d'Argenteuil concernant la loi 111. Mais tout récemment je lisais les rapports du Bureau international du travail sur le déroulement de la dernière ronde de négociations et l'évaluation que faisait le ministère du Travail de ces jugements qui ont été portés. Il faut quand même reconnaître que cet organisme international chargé de la défense du syndicalisme dans le monde n'a pas tiré les conclusions fort sévères que l'Opposition a parfois tirées à l'égard du gouvernement; au contraire, le Bureau international du travail a pris en compte les efforts très réels de concertation au sommet de mars à Québec, les efforts de négociation, et a dû conclure qu'alors que beaucoup de gouvernements dans les autres provinces canadiennes et au niveau fédéral n'ont pas respecté le processus normal de négociation, le gouvernement du Québec a, lui, tenté de le respecter et c'est devant la force des événements que le gouvernement a dû trancher. (12 heures)

Je pense donc qu'il est important d'établir une certaine relativité dans les jugements que l'on porte. Lorsqu'un organisme international comme le Bureau international du travail, voué à la défense du syndicalisme dans le monde, doit tirer des conclusions fort différentes de celles que tirait le député d'Argenteuil et que beaucoup de nos concitoyens au Québec ont tirées à l'époque, peut-être doit-on ajouter une certaine crédibilité à un organisme qui n'a pas le nez collé sur les arbres, mais qui peut prendre une certaine distance et regarder l'ensemble de la forêt. Peut-être que son jugement est plus sûr.

Je souligne, concernant l'éducation des adultes, qu'il faut écouter les organismes de revendication dans ce secteur, mais encore faut-il aussi écouter ceux qui font de l'éducation des adultes, encore faut-il écouter ceux qui ont des problèmes dans nos entreprises avec le type de formation que l'on accorde à nos adultes et les besoins qu'ils vivent, eux.

M. le Président, je pense que, oui, le budget de l'éducation est marqué d'une croissance modeste. Je pense que la crise que nous venons de traverser a mis à vif des sensibilités, et qu'elle peut expliquer les mauvaises relations qui ont pu s'établir dans un climat où les ressources étaient limitées et où il a fallu faire des choix difficiles. Je le reconnais, M. le Président, mais je reconnais également que les choix que nous avons faits nous donnent aujourd'hui une croissance économique supérieure à celle de

nos voisins et peuvent peut-être maintenant nous permettre de parler d'espoir, ce qui n'aurait pas été possible sans un certain nombre de mesures énergiques que nous avons su prendre au bon moment. C'est cela gouverner, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. Je vais accorder quelques minutes au député d'Argenteuil et, par la suite, nous ajournerons sine die jusqu'à ce que la période des questions soit terminée. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voudrais, tout d'abord, souligner avec fermeté que la réduction des ressources que l'État consacre au développement de l'éducation au Québec est un fait solidement établi et gravement préoccupant. Le ministre nous disait plus tôt que le gouvernement continuait de pratiquer une politique d'accessibilité aux niveaux collégial et universitaire. C'est vrai, et la meilleure preuve en est dans le gel des frais de scolarité qui se poursuit depuis environ quinze ans. Mais ce que le ministre a oublié d'ajouter, c'est que le gouvernement, tout en pratiquant d'un côté une politique d'accessibilité accrue, a refusé de verser aux institutions qui accueillent les nouvelles clientèles des ressources qui eussent simplement équivalu à l'augmentation des coûts. Je vais vous donner des chiffres qui, de ce côté, sont irréfutables.

Le montant des subventions per capita versées pour l'enseignement primaire et secondaire de 1979-1980 à 1983-1984. En 1979-1980 elles étaient de 2014 $ par tête; en dollars constants, tenant compte de l'inflation, c'est passé à 2189 $ en 1984-1985, d'après les prévisions que vous nous avez soumises. Par conséquent, il n'y pas eu gros d'amélioration de ce côté. Là, on parle de subventions per capita. Cela veut dire qu'on piétine sur place depuis cinq ans. Dans le secteur collégial public, en dollars constants, on est passé, M. le ministre, de 4051 $ par tête à 3322 $ pour l'année 1984-1985. Dans le secteur universitaire, écoutez bien ceci: 5377 $ en 1979-1980 et, là, on va se réveiller en 1984-1985 avec 4078 $ en dollars constants per capita. Dans le secteur privé, on est passé de 1899 $ per capita en 1979-1980 à 1600 $ per capita en dollars constants. Il y a eu inflation pendant ces cinq années. Je n'ai pas le pourcentage exact, mais nous avons fait des calculs et, si les experts du ministre veulent infirmer ces chiffres, ils pourront le faire. Je pense que c'est une donnée de base dont j'espère qu'on acceptera de tenir compte dans les débats qui vont suivre et je ne veux pas m'étendre davantage sur ce point particulier.

Il y a une chose dans les explications que le gouvernement a fournies depuis quelques semaines, c'est-à-dire depuis le dernier budget supplémentaire, qui m'a beaucoup préoccupé. J'attendais qu'on ait l'examen des crédits pour en parler. Je fais simplement une petite introduction à ce moment-ci. Le ministre nous dit: L'an dernier, on est allé chercher 280 000 000 $ de trop par rapport aux prévisions qu'on avait établies - vous nous donnerez les précisions plus tard - somme qu'on a affectée pour verser des paiements anticipés aux commissions scolaires sur des obligations que le gouvernement aurait normalement dû combler au cours de la prochaine année et des années suivantes. 280 000 000 $ de plus.

En plus, vous avez réduit les taxes dans ce budget supplémentaire: vous avez réduit la taxe sur l'essence de 40% à 30%. Or, vous avez réussi à trouver 280 000 000 $ pour prendre de l'avance sur vos paiements. Je pense que toute entreprise qui prend de l'avance sur ses paiements doit être félicitée, à condition qu'elle ne le fasse pas sur le dos de ses employés.

Vous avez un problème. Vous venez de nous dire que vous avez trouvé 280 000 000 $ en 1983-1984. Le coût de P2, vous-même, dans vos documents, vous l'estimez à 35 000 000 $. Là, vous aurez une décision à prendre. Je vous la laisse comme réflexion. J'espère qu'elle sera positive et je vous rappelle qu'en acceptant d'ouvrir des négociations avec la partie syndicale vous avez contracté un engagement parce que, si c'était votre intention de ne rien faire, il eût été infiniment mieux que vous disiez: Pas de négociations. Maintenant que vous avez ouvert les négociations, nous attendrons les résultats, à la lumière de ces données que vous avez vous-même confirmées, qui m'ont étonné à l'époque et qui m'étonnent encore aujourd'hui. D'un côté, je serais prêt à m'en féliciter, mais il faudrait que j'aie en retour des garanties raisonnables quant au comportement humain du gouvernement dans ses rapports avec ses travailleurs.

Une chose qu'on ne doit pas oublier, c'est que la grosse source des sommes plus considérables que le gouvernement a pu mettre à la disposition de ses politiques économiques, par exemple, est double. D'un côté, le gouvernement est allé chercher encore plus d'argent dans l'économie qu'avant. Le pourcentage du produit intérieur brut qui est allé pour le secteur public québécois a augmenté jusqu'à cette année. Pour la prochaine année, je ne sais pas comment cela va se présenter, il va diminuer un peu. Il diminue de la moitié d'un point de pourcentage. C'est pas mal de ce côté-là; c'est un redressement que je salue avec satisfaction. Mais, pendant que la part du gouvernement passait de 23,9% en 1979-1980 à 26,8%, l'éducation restait non seulement

stagnante, mais, dans les secteurs, vitaux pour l'avenir, de la formation collégiale et universitaire, elle accusait une diminution très réelle et très inquiétante. Je n'engage pas le débat sur les politiques économiques. Nous le ferons à l'occasion du discours sur le budget.

Les comparaisons Québec-Ontario, M. le ministre, j'ai souvent signalé à votre prédécesseur qu'elles sont extrêmement périlleuses. J'ai entendu évoquer des chiffres globaux tantôt que je ne suis pas prêt à accepter tout de go. Il va falloir les vérifier de très près. Je ne sais pas ce que votre ministère a fait, mais l'an dernier on nous a dit: II y a toutes sortes de recherches en marche. J'aimerais que vous nous déposiez les résultats de ces recherches à l'occasion de l'étude des crédits. On n'a rien eu depuis ce temps-là. On a eu des affirmations générales globales à l'occasion des débats sur la loi 85 et sur la loi 111, mais j'aimerais que vous nous disiez où vous en êtes dans les études précises qui nous permettraient de porter des jugements vraiment exacts là-dessus. Vous savez comme moi que, simplement au point de vue du financement des commissions scolaires, en Ontario la part qui vient de la taxe foncière est beaucoup plus élevée qu'ici. C'est à peu près la moitié du budget des commissions scolaires. C'est évident que la part du budget du gouvernement ontarien qui va à l'éducation est affectée en conséquence. Je n'infirme pas ce que vous avez dit; je vous dis: II faudrait qu'on soit sûr qu'on parle exactement des mêmes choses pour être en mesure de progresser dans la recherche de solutions, dans un dialogue constructif.

À propos de la loi 111, j'étais content que vous reconnaissiez - je l'ai apprécié depuis votre entrée en fonction - le caractère profond de la blessure qui a été créée par les événements de 1983 dans le secteur de l'éducation. J'aurais pensé que vous seriez prêt aujourd'hui, après ces longs mois d'attente, à confirmer l'engagement du gouvernement d'abroger la loi 111 - pas dans les meilleurs délais, parce que c'est une formule extrêmement remplie d'embûches, c'est une formule trop gouvernementale pour que je lui fasse confiance - mais maintenant. Vous n'avez pas été précis à ce sujet. Vous nous avez cité l'Organisation internationale du travail qui, seulement pour des fins de précision, n'est pas un organisme voué à la défense des syndicats, mais voué à la promotion de meilleures relations du travail entre le patronat et les syndicats sur une base tripartite. Patrons, États, employés sont là sur une base égale. Par conséquent, ce n'est pas toujours le meilleur garant de tout. Là-bas, on doit arriver à des compromis. De toute manière, je suis très content que certains jugements aient pu vous donner bonne conscience, mais cela ne change rien à l'opinion que j'ai moi-même. J'ai lu souvent des rapports internationaux et je sais qu'ils reposent souvent sur des renseignements qui avaient été fournis par des fonctionnaires et des gens près des gouvernements. Les rapports de l'OCDE en particulier brillent souvent par cette qualité.

M. Bérubé: Messieurs! Mesdames!

M. Ryan: Mais il faut bien qu'on les prenne quelque part. Ce que je demande au gouvernement, c'est de reconnaître le caractère excessif de cette loi - même s'il la jugeait nécessaire il y a un an, elle ne l'est plus depuis longtemps - et de déposer à l'Assemblée nationale sans délai un projet de loi de quelques lignes pour en assurer l'abrogation. C'est tout pour l'instant. Pour le reste, on aura l'occasion d'y revenir, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Je pense que la séance de ce matin a ouvert bien des portes. J'ai l'impression qu'on va avoir à la fois du pain sur la planche et beaucoup d'intérêt dans les débats qui vont suivre dans les prochains jours. La séance est ajournée sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 11)

(Reprise de la séance à 15 h 28)

Le Président (M. Charbonneau): La commission de l'éducation reprend ses travaux afin d'étudier les crédits budgétaires du ministère de l'Éducation. J'appelle le programme 4, Enseignement primaire et secondaire public.

Pendant que le ministre s'installe, je voudrais proposer ceci aux membres de la commission. Étant donné que nous avons deux programmes à étudier aujourd'hui, selon l'entente que nous avons prise ce matin, et que, dans l'enseignement primaire et secondaire il y a l'aspect de la réinsertion sociale et professionnelle des jeunes, ainsi que le plan d'action sur la formation professionnelle qui pourraient s'apparenter au programme 7 qui porte sur la formation des adultes, je vous suggérerais ceci. S'il n'y a pas d'objection, afin d'avoir plus de temps à consacrer aux autres questions portant sur l'enseignement primaire et secondaire, on pourrait étudier les autres sujets et réserver les interventions sur la réinsertion sociale et professionnelle et la formation professionnelle des jeunes pour ce soir, en même temps qu'on étudiera le programme sur l'éducation des adultes, les deux ayant un lien de parenté. On pourrait prendre les autres questions concernant l'enseignement primaire et secondaire cet après-midi. Est-ce que cela vous conviendrait?

M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, j'admets que la question de la réinsertion sociale et professionnelle est un peu spéciale, un peu particulière dans le système, mais la formation professionnelle touche l'enseignement secondaire. Je préférerais qu'on touche à cet aspect dans le programme 4, compte tenu qu'il fait partie de l'enseignement secondaire.

Le Président (M. Charbonneau): Cela ne me dérange pas du tout de le modifier. On n'est pas obligés de terminer...

M. Bérubé: M. le Président...

Le Président (M. Charbonneau): Pardon?

M. Bérubé: ...question de règlement. Si la conversation que vous avez n'est pas confidentielle, nous aimerions y participer.

Le Président (M. Charbonneau): Nous ne croyons pas qu'elle soit confidentielle, M. le ministre. J'ai d'abord appelé les membres de la commission et je vous ai fait signe. J'essaie actuellement d'organiser l'ordre des travaux de cet après-midi. Pour votre information, je proposais aux membres de la commission et à vous-même, d'ailleurs, que dans le cadre de l'étude de cet après-midi, le programme 4 sur l'enseignement primaire et secondaire, nous réservions deux questions importantes dont vous avez parlé ce matin et auxquelles plusieurs membres de la commission, dont le député de Fabre, ont fait allusion, soit le plan de réinsertion sociale et professionnelle et la politique de formation professionnelle des jeunes, pour le début de la soirée avec le programme 7, étant donné que ces questions sont quelque peu apparentées. C'était là-dessus que le député de Fabre réagissait à ce moment-ci.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: J'aurais une suggestion à faire pour tenir compte de la réaction du député de Fabre. Peut-être pourriez-vous attendre que nous ayons discuté de la formation professionnelle avant d'adopter le programme 4. Si cela venait au début de la soirée, je pense que cela ne créerait pas de problème; cela resterait dans le cadre que nous avons établi.

Le Président (M. Charbonneau): C'est une bonne suggestion. Est-ce qu'elle agrée à tous les membres de la commission? Cela va. Pour qu'on se comprenne bien, l'ensemble des questions concernant le programme 4 pourrait être abordé cet après-midi. Nous réserverions pour la soirée le plan de réinsertion sociale et professionnelle et la formation professionnelle des jeunes, qui sont au programme 4. Nous enchaînerions, par la suite, avec le programme 7, la formation des adultes. Quand nous aurons terminé les deux questions liées au programme 4, nous adopterions ce programme pour ensuite adopter le programme 7.

M. le ministre de l'Éducation, avez-vous des commentaires particuliers à formuler pour introduire l'étude du programme 4 ou voulez-vous qu'on procède immédiatement à des questions?

M. Bérubé: Je n'ai aucune objection, M. le Président, à ce que vous procédiez.

Le Président (M. Charbonneau): Je pourrais peut-être demander au vice-président, le député d'Argenteuil, d'aborder l'étude du programme 4.

Enseignement primaire et secondaire public

M. Ryan: M. le Président, le 5 avril dernier, j'ai adressé une lettre au ministre lui demandant un certain nombre de renseignements ou documents qui pourraient nous être utiles pour l'étude des crédits. Ainsi que je l'ai dit ce matin, le ministre m'a répondu de manière expéditive, dans la soirée d'hier, en m'adressant une liasse de documents très intéressants.

Je voudrais simplement faire le point avec lui quant aux demandes demeurées sans réponse en ce qui touche l'enseignement primaire et secondaire et lui demander où il en est là-dessus, là où il n'a pas répondu. C'est à la page 2 de la lettre que j'avais adressée au ministre. Je vais essayer d'en trouver une copie pour le président. Est-ce qu'on aurait une copie de cettre lettre-là?

On demandait, d'abord, la liste des programmes d'études terminés au primaire et au secondaire, avec l'échéancier d'implantation prévu pour chaque programme. Nous avons écrit à côté: À venir.

M. Bérubé: Je vais faire vérifier cela par ceux qui ont préparé les réponses, afin de pouvoir vous fournir tous les détails nécessaires.

M. Ryan: Très bien. Je veux souligner au passage, M. le Président, pendant que le ministre consulte ses collaborateurs, que nous avons toujours joui en ces choses d'une excellente collaboration de la part des fonctionnaires du ministère. Je les en remercie de nouveau, comme je l'ai fait dans le passé. Ce n'est pas du tout par esprit d'inquisition que nous demandons ces choses, mais par souci de bien accomplir notre devoir. Nous le comprenons tous.

Le deuxième sujet sur lequel nous n'avons pas reçu de réponse: Liste des traductions disponibles au 31 mars 1984 et

des traductions en cours, pour chaque programme. Ajouter pour chaque programme si le guide pédagogique est disponible et si un ou des manuels étaient disponibles -évidemment, tout ceci en langue anglaise -au 31 mars 1984.

Troisièmement, état de la situation des surplus d'enseignants et impact des mesures de résorption du personnel en disponibilité (coûts et personnel) au 31 mars 1984.

Quatrièmement, ajustement prévu pour les années 1984-1985 et 1985-1986 au cadre financier découlant du rapport Désilets, ainsi qu'aux prévisions des mises en disponibilité et mesures de résorption pour les deux mêmes années.

Je m'apperçois que, dans la section sur l'enseignement primaire et secondaire, la plupart de nos demandes n'ont pas reçu de réponse pour l'instant.

Cinquièmement, implications financières prévisibles de la demande de la CEQ et des autres syndicats d'enseignants voulant que les conditions de travail, en particulier les conditions relatives à la charge de travail, soient gelées pour P2 et P3.

Sixièmement, texte du projet de règles budgétaires - cela a été reçu.

Septièmement, état des surplus et des déficits par commission scolaire au 31 mars 1984. Ceci n'a pas été reçu.

Je ne sais pas si le ministre a des commentaires à faire sur ces points avant que nous passions à l'examen de sujets plus précis.

M. Bérubé: Quant à l'élément 2, la liste des traductions disponibles, effectivement, j'ai pu, entre-temps, obtenir une telle liste, que j'ai ici. Nous vous ferons faire les copies appropriées de sorte que vous puissiez la consulter.

L'élément 3 vous est déjà fourni dans le document principal portant sur le cahier explicatif des crédits. Vous y trouverez donc la réponse.

L'élément 4, nous ne l'avions pas à portée de la main puisque cela remonte déjà à plusieurs mois. Nous ne l'avions pas à portée de la main.

Quant à l'élément 5, je préférerais, si vous le voulez, que nous ayons une discussion en tête à tête, qu'on se cantonne à une discussion privée dans la mesure où, chaque fois qu'on a abordé des questions de modification aux conditions de travail, de l'impact budgétaire de telle ou telle hypothèse, il faut aller beaucoup plus loin que la simple considération de un ou deux chiffres. En effet, il y a des interactions entre des différents articles des conventions collectives qui peuvent faire que le coût varie énormément suivant que l'on modifie un, deux ou trois articles de manière à obtenir un effet moyen moins important en termes de coût.

En général, c'est ce genre de discussion qu'on laisse au niveau des tables mixtes de travail, mais, éventuellement, si on devait convenir, au niveau de ces comités mixtes de travail, de la nécessité de rouvrir des conventions collectives, il est bien évident qu'il faudrait constituer une table proprement dite de négociations. En général, on n'a pas l'habitude de discuter sur la place publique de telles questions. Donc, pour l'élément 5, il m'apparaît difficile d'en discuter en commission parlementaire.

À l'élément 7, il est bien évident que l'état des surplus au 31 mars 1984 n'est pas encore disponible. Les états financiers des commissions scolaires ne seront disponibles que beaucoup plus tard. On peut vous fournir les données pour 1982-1983 qui, je pense, est la dernière année pour laquelle nous avons des états vérifiés. Cela devrait répondre à votre question.

M. Ryan: Au point 7, est-ce que vous pourriez avoir cela assez rapidement parce que l'étude des crédits, c'est aujourd'hui, pour les secteurs primaire et secondaire?

M. Bérubé: Oui, pour 1982-1983, nous pourrions vous l'obtenir rapidement.

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait indiquer en même temps quel a été l'effet de la ponction de 40 000 000 $? Quelle a été l'implication pour chaque commission scolaire qui avait un surplus de cette ponction? Cela disposerait d'un problème que je me posais, qu'on sache exactement ce qui en est.

M. Bérubé: On me dit que, cette information étant connue, on pourrait vous faire un tableau, mais cela n'était pas disponible hier, sur ce point spécifique. Alors, on pourrait vous le faire préparer.

M. Ryan: C'est bien. Il y a seulement un point que je vous souligne. On va le discuter de manière plus précise tantôt, mais nous en sommes au stade des prolégomènes. Vous disiez, à propos de la demande formulée au cinquième point: Nous ne pouvons pas vous le donner pour toutes sortes de considérations. Je constate que le cahier d'explications que vous nous avez soumis mentionne ceci. Vous y affirmez que vous entendez récupérer 35 000 000 $ à même l'augmentation de la tâche qui est prévue pour P2, dans le cas des enseignants. C'est un chiffre que vous maintenez, par conséquent.

M. Bérubé: Oui. Il s'agit là de l'effet global de l'ensemble des clauses des conventions collectives, ce qui tient compte, évidemment, des décisions prises concernant l'augmentation du temps de présence des enfants au premier cycle du cours primaire,

par exemple. Donc, il s'agit d'un chiffre qui tient compte de plusieurs paramètres de détermination de la tâche. Le problème, c'est la décomposition de ces paramètres, de manière à les identifier. C'est cette partie-là que je ne voudrais pas discuter sur la place publique.

Gel de la tâche des enseignants

M. Ryan: Puisque nous y sommes, c'est peut-être le sujet qu'il faudrait aborder. Voulez-vous nous dire où vous en êtes dans les négociations avec la CEQ, quant à la tâche des enseignants, l'augmentation qui s'annonce à la lumière du décret tel qu'il est actuellement? Est-ce que nous avons abordé le fond du problème? Quelles sont les intentions du gouvernement là-dessus? Il y a une autre question à laquelle vous pourriez peut-être répondre en même temps: Est-ce une conversation qui se déroule sous le mode de la négociation, ou sous un autre mode que vous daigneriez préciser, puisque vous semblez affectionner les conversations privées?

M. Bérubé: D'une part, il n'y a pas de négociation au sens traditionnel du terme. Les conventions collectives prévoient, à l'article 9.4, un mécanisme de réouverture des conventions collectives, mais nous n'avons pas encore enclenché ce mécanisme. En effet, la position que j'ai maintenue auprès de la Centrale de l'enseignement du Québec et publiquement est la suivante: le problème de la tâche des enseignants n'est pas spécifiquement ou uniquement un problème de contenu des conventions collectives.

À titre d'exemple, celui qui enseigne une matière spécialisée une heure par semaine et qui doit remplir un horaire de 20 ou 21 heures d'enseignement est forcé de rencontrer 20 ou 21 groupes de 30 ou 32 élèves. On peut voir immédiatement le nombre d'étudiants qu'il doit rencontrer: c'est de l'ordre de 600. Sa tâche, même si elle peut être considérée, comme, en apparence, identique à celle d'un enseignant qui resterait avec le même groupe pendant la même période de temps - en enseignant, à ce moment-là, plusieurs matières - lorsqu'elle est présentée en termes de nombre d'élèves et de groupes rencontrés, est évidemment très différente. Un enseignant pourra donc dire qu'il est forcé de rencontrer 21 groupes de 32 élèves, alors que l'autre dira: Moi, dans les mêmes conditions, je rencontre un groupe de 32 élèves pendant 21 heures. Pourtant, les deux ont la même tâche d'enseignement.

L'organisation académique joue donc un rôle extrêmement important dans ce que l'on appelle la tâche de l'enseignant. Cela s'applique, par exemple, à l'aspect de la spécialisation de l'enseignant qui l'amène à n'enseigner qu'un nombre limité de matières à beaucoup d'étudiants, mais cela s'applique également à l'organisation des horaires où on peut concentrer la matière sur une plus courte période de manière à diminuer le nombre de groupes rencontrés. En d'autres termes, l'organisation scolaire peut jouer un rôle important dans la tâche.

Parmi les autres facteurs qui influent sur la tâche, il y a l'intégration de l'enfance en difficulté, laquelle peut ne pas se faire, c'est-à-dire qu'on peut envisager la création, la constitution de classes spéciales où on isole l'enfant ou, au contraire, on peut favoriser son intégration dans une classe régulière en dégageant les ressources équivalentes de manière à diminuer le nombre d'élèves en classe ou à ajouter des ressources spécialisées pour aider l'enseignant. (15 h 45)

Il va de soi que l'approche suivie par une commission scolaire a une incidence directe sur le type de travail que l'enseignant doit fournir. Je pourrais continuer à ajouter, comme cela, un certain nombre d'autres facteurs et, évidemment, nommer la tâche proprement dite, c'est-à-dire le nombre d'heures en moyenne qu'un enseignant doit fournir dans le cadre de son emploi.

La position que j'ai maintenue jusqu'à maintenant a toujours été la suivante: examinons ce qui se passe en classe, les problèmes que nous vivons et examinons dans quelle mesure nous pouvons effectivement améliorer la qualité de l'enseignement, améliorer le climat qui règne dans nos écoles en favorisant un milieu plus humain. Si cela doit se traduire par certains assouplissements au niveau des conditions de travail, je n'y suis pas opposé, mais je n'ai pas posé comme principe que la solution à tous nos problèmes était la réouverture des conventions collectives et, par exemple, le gel. J'ai refusé de poser ce principe.

En effet, il me semble que si un enseignant doit, par exemple, voir 300 élèves dans le cadre de ses fonctions et qu'à la suite des décrets il doit en voir 315, certes, il y a augmentation de la tâche, mais est-ce l'augmentation de 300 à 315 qui pose le problème ou le point de départ, qui est de 300? Il est clair qu'on pourrait opposer un moratoire et laisser cet enseignant rencontrer 300 élèves, mais tout en n'ayant rien changé au problème de la tâche. Il m'apparaît donc que nous devrions examiner de plus près le cloisonnement de notre enseignement, le problème de nos grilles horaires et peut-être poser des gestes qui auront un impact nettement plus grand sur l'allégement de la tâche qu'un simple moratoire. C'est la position que j'ai maintenue depuis le début.

J'ajouterai, compte tenu de mes remarques liminaires en début de cette commission - il faut quand même le reconnaître - par rapport à la décroissance de notre clientèle à l'école et de la diminution concomitante du nombre de nos enseignants, que la clientèle a décru plus rapidement que le nombre d'enseignants. Il y a donc plus de ressources humaines pour faire le travail dans nos écoles qu'il n'y en avait en 1976, et non pas l'inverse. Donc, le problème de la tâche a des possibilités d'être relié à des paramètres autres que celui de la simple considération de la tâche au sens strict des conventions collectives. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas voulu m'engager dans une espèce de cul-de-sac qui consisterait à penser qu'il s'agit simplement d'injecter des ressources additionnelles, alors qu'on peut faire la démonstration hors de tout doute qu'il y a plus de ressources aujourd'hui qu'il n'y en avait en 1976. Néammoins, les gens se plaignent des conditions de travail; on en a donc fait la preuve.

J'ai fait la preuve, ce matin, que si on arrive à augmenter les ressources disponibles en se retrouvant en même temps avec une tâche plus lourde, c'est que le problème n'est peut-être pas au niveau de l'injection des ressources, mais à d'autres niveaux. Si on doit régler les problèmes, il faut les régler à ces niveaux d'abord. Si cela doit impliquer une réouverture des conventions collectives, soit, mais je ne pose pas le principe qu'en injectant des ressources additionnelles on va régler le problème de base. Ce n'est pas nécessairement vrai. C'est cela que j'ai essayé de soulever.

M. Ryan: Je vous rappellerais simplement que, depuis 1976, il s'est écoulé exactement huit ans, période pendant laquelle il y a eu deux rondes de négociations collectives, lesquelles ont entraîné des changements dans les conditions de travail qui existaient en 1976. Cela a influé également sur le rapport élèves-enseignants d'une manière qui, dans plusieurs cas, ne peut être changée radicalement ou unilatéralement. Quand vous faites ces comparaisons, je pense que vous êtes largement responsable de la différence de 3% par des conventions que vous avez signées vous-même et que vous n'avez peut-être pas toujours respectées.

Je voudrais vous poser une couple de questions additionnelles à ce sujet, M. le ministre. Vous savez comme moi qu'il y a une échéance pour faire des ajustements en vue de la prochaine année scolaire, échéance que les milieux avec lesquels j'ai causé situent autour du 1er mai. Nous sommes au 10 avril. Pensez-vous qu'il y ait des possibilités d'en arriver à une conclusion dans un avenir rapproché? Deuxièmement, j'aimerais que vous me disiez quel mandat au juste vous avez donné à vos gens qui vous représentent au comité paritaire qui discute cela avec les syndicats, d'après ce que j'ai compris. Troisièmement, êtes-vous prêt à faire face à la possibilité qu'il faille faire des ajustements dans votre cadre financier? Quatrièmement, avez-vous reçu des représentations du Conseil supérieur de l'éducation, jusqu'à maintenant, à ce sujet? En attendez-vous bientôt?

M. Bérubé: Premièrement, je pense que nous devons tout mettre en oeuvre pour être prêt pour le 1er mai, à cause des échéances inévitables que doivent respecter les commissions scolaires dans l'organisation scolaire de l'année prochaine.

Concernant les mandats, ils sont de deux ordres. Dans un premier temps, il s'agit d'identifier clairement les problèmes vécus, donc de les systématiser, car il ne suffit pas d'arriver avec un cas exceptionnel. On m'a soumis, par exemple, des cas de gestion aberrante de la part d'une direction quelconque. Or, il est bien évident que, dans un système très décentralisé, il y aura des cas de gestion aberrante, mais on ne doit pas pour autant tirer la conclusion que l'ensemble du système se comporte de la même façon. Il faut savoir faire confiance aux institutions décentralisées qui sont censées utiliser leur jugement dans l'application des conditions de travail prévues dans les conventions collectives.

Donc, il ne s'agit pas de s'accrocher à quelques cas aberrants de comportement local, mais d'identifier une problématique générale, d'une part, et, autour de ces problèmes généraux bien identifiés, d'identifier différentes solutions possibles à partir desquelles nous pourrons engager la discussion plus précisément sur les remèdes que nous comptons apporter. Pour l'instant, le mandat est au niveau de l'identification des problèmes et des solutions que les parties reconnaissent comme plausibles.

M. Ryan: Vous n'avez pas répondu à deux parties de ma question. D'abord, les implications financières. Si des solutions plausibles et acceptables aux deux côtés se dessinaient, êtes-vous prêt à envisager certaines conséquences financières que cela pourrait entraîner? Deuxièmement, le Conseil supérieur de l'éducation vous a-t-il fait signe? Attendez-vous de ses nouvelles et attachez-vous de l'importance à cette opinion?

M. Bérubé: Si le problème est réel, fait l'objet d'un consensus entre les parties au comité mixte et fait l'objet d'une recommandation qui amène certaines modifications au contenu des décrets, cela implique des coûts, somme toute, quand

même modestes, dans la mesure où il faut toujours retenir le principe des vases communicants, et on peut toujours se fermer les yeux et ne jamais se poser la question à savoir où retombera l'impact d'un accroissement des dépenses à un endroit, mais il y a toujours un endroit où l'impact se fait sentir.

En général, il est toujours plus facile pour l'Opposition - cela, évidemment, je le reconnais comme une réalité - de trouver qu'on n'investit pas suffisamment d'argent dans l'éducation, les affaires sociales, l'université, l'indemnisation des victimes d'actes criminels ou autres; enfin, je pourrais énumérer à peu près tous les dossiers où nos honorables collègues ont identifié, en commission parlementaire, des secteurs où ils investiraient plus d'argent. Ce qui est généralement intéressant dans tous ces débats, c'est qu'on souligne assez rarement les domaines où, au contraire, il faudrait retirer de l'argent. C'est assez rarissime qu'on ait de telles propositions. On veut presque tous aller au ciel, mais fort peu de gens aiment penser à la mort qui doit précéder, malheureusement, ce départ et ce voyage bienheureux.

Hélas, je pense que, lorsqu'on est à la tête d'un État, il faut dépasser ces considérations, peut-être un peu partisanes et toujours se poser la question: Qui va payer? Il y a toujours quelqu'un qui paie à la fin. Je pense que je garderai toujours à l'esprit les paroles du député d'Argenteuil qui, au cours de la dernière crise, à de nombreuses reprises, trouvait, par exemple, que les compressions à l'éducation des adultes, au niveau des professionnels non enseignants, semblaient plus fortes là qu'ailleurs. Évidemment, cela se comprend; les conventions collectives le permettaient. Le jour où les conventions collectives sont modifiées de manière à répartir l'effort, il faut s'interroger. Va-t-on redemander encore davantage à ceux qui ont déjà payé durement la dernière crise? J'ai de la difficulté à imaginer, personnellement, après avoir travaillé au Conseil du trésor quelques années, qu'il y ait encore beaucoup d'endroits au gouvernement où on puisse réaliser une réduction des coûts qui ne se traduise pas, en fin de piste, par des coupures de services auxquels tient la population.

Tout au long de ce débat que nous aurons au comité mixte, j'aurai toujours à l'esprit que pour toute décision que je prendrai favorisant un accroissement des coûts de l'éducation il y aura quelqu'un qui paiera. Je garderai toujours cela à l'esprit.

M. Ryan: Juste une question pour que ce soit bien précis. Est-ce que vous avez donné à vos représentants au comité mixte un mandat comportant des restrictions précises concernant la dimension financière des changements qui pourraient s'imposer? Est-ce que vous leur avez donné une certaine permission d'examiner cette dimension ou si vous leur avez dit qu'il ne faut pas de modification?

M. Bérubé: Non, j'ai indiqué très clairement aux représentants de la Centrale de l'enseignement du Québec que nos représentants au comité mixte auraient le mandat approprié pour régler les problèmes, quand on s'entend sur la nature des problèmes.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que d'autres membres de la commission auraient des questions à poser sur les décrets, ou leur application et ses conséquences? Autrement, on passerait à un autre sujet. Cela va. On va passer à un autre sujet. Est-ce que quelqu'un veut aborder l'étude d'un autre sujet?

Mme Dougherty: M. le Président, j'ai des questions sur les surplus d'enseignants, les personnes en disponibilité. Est-ce que cela fait partie de...

Le Président (M. Charbonneau: Je pense qu'on pourrait considérer que c'est assez...

Vieillissement du personnel enseignant

Mme Dougherty: Je voudrais aborder ces questions. Avec la baisse de leur clientèle, les écoles ont subi un vieillissement de leurs enseignants.

M. Bérubé: Comme nous tous, d'ailleurs.

Mme Dougherty: Cela touche toute la société, vous avez raison. Cela touche la qualité de l'éducation, car on a de moins en moins de jeunes enseignants et les jeunes sont menacés par ce système de l'ancienneté qui détermine les personnes mises en disponibilité et le non-rengagement. Avez-vous des chiffres qui démontrent, premièrement, la moyenne d'âge des enseignants dans nos écoles, et, deuxièmement, le nombre de nouveaux enseignants qui entrent dans le système chaque année? (16 heures)

M. Bérubé: On me dit que la moyenne d'âge est de 39 ans pour l'ensemble du Québec et de 42 ans à Montréal. Je présume qu'elle augmente d'un an par année, mais ce n'est pas une mauvaise blaque dans le sens où, comme il n'y a pas beaucoup de recrutement de jeunes enseignants, comme vous l'avez indiqué, forcément, l'âge moyen du système a tendance à suivre l'âge des individus.

Mme Dougherty: N'avez-vous pas des chiffres qui démontrent le cheminement du problème?

M. Bérubé: Non, je n'en ai pas sous la main. On pourrait vous les obtenir, mais la conclusion que vous en tireriez serait celle que je viens de tirer, c'est-à-dire que l'âge moyen est autour de 40 ans et il augmente, bon an mal an, d'un an par année ou à peu près.

Mme Dougherty: Un élément de ce problème, c'est de savoir si le nombre de diplômés des écoles de formation de nouveaux enseignants diminue d'une façon importante. Est-ce en proportion avec le nombre de diplômés qui trouvent des postes dans le système scolaire? Je crois que c'est un problème réel. Nous avons des chiffres ici concernant les surplus. J'ai l'impression que, chaque année, il faut se rendre à un niveau d'expérience plus élevé dans le système. Si, cette année, ceux qui ont une expérience de quatorze ans dans une commission scolaire sont menacés, l'an prochain, ceux qui auront une expérience de quinze ans le seront. C'est difficile de l'expliquer en français. Ceux qui sont vulnérables dans ce système de déclaration des surplus sont-ils de plus en plus âgés? C'est un élément qui touche la stabilité et le moral des enseignants. On se sent de plus en plus vulnérable. J'ai l'impression qu'on perd beaucoup de nos enseignants, et peut-être les plus qualifiés, à cause de la menace dans ce système. Il y a plusieurs éléments à ce problème. L'année dernière, on a parlé de la possibilité d'implanter un système d'année sabatique à coûts partagés entre le système et les enseignants. A-t-on actuellement implanté un tel système afin de créer un certain renouveau qui améliorerait le problème du "teacher burnout", parce que les baisses de clientèle, les coupures dans ce système rendent le personnel de plus en plus vulnérable, dans un état d'insécurité qui démoralise les gens. C'est à cette gamme de problèmes que j'aimerais avoir des réponses.

M. Bérubé: Le problème soulevé par la députée de Jacques-Cartier est loin d'être un faux problème. Je me souviens, à un moment donné, d'un débat sur la place publique où une déclaration équivalente à celle de la députée de Jacques-Cartier, concernant l'âge moyen des enseignants, avait soulevé une tempête. C'est un problème que nous vivons dans nos universités, mais, il faut bien le dire, c'est un problème que nous vivons dans l'ensemble de la société aussi, dans la mesuré où l'examen de nos pyramides d'âge au Québec fait immédiatement ressortir un gonflement anormal, vers l'âge de 30 ans et une contraction extrêmement importante, jusqu'au bas âge, de la population.

De fait, nous n'avons pas un taux de natalité qui nous permette de maintenir une structure d'âge comme celle que nous connaissions alors que la population du Québec était en pleine croissance. Soit dit en passant, ce n'est pas un problème unique au Québec, c'est un problème qui atteint toutes les sociétés occidentales et qui peut avoir des impacts, en particulier au niveau des enseignants.

Est-il pire chez les travailleurs intellectuels qui sont en contact continu avec des jeunes dans une milieu quand même stimulant, parce que le monde de l'éducation est stimulant? Je rencontrais un groupe d'enseignants de cégep hier après-midi. La réaction unanime des gens présents, c'est qu'ils trouvaient qu'ils exerçaient un métier extraordinaire. C'est vrai que l'éduction est un beau métier.

Est-ce que ce problème du vieillissement du corps enseignant est pire que le problème général du vieillissement de la population? Je pense que la question doit être posée. Certains prétendent qu'il est plus grave au niveau de l'université, car on prétend que la production scientifique est généralement plus prolifique à 30, 35 ou 40 ans et qu'elle décroît subséquemment. À ce moment-là, un vieillissement trop rapide du corps professoral peut avoir comme conséquence de tarir la capacité scientifique ou la capacité innovatrice de l'université, ce qui pourrait amener celle-ci à se cantonner à certains sillons déjà tracés qui ont pu faire l'excellence de l'université, à un certain moment, mais l'empêcher de découvrir de nouvelles orientations.

Le problème est réel, indéniablement. C'est ce qui nous a amenés à promouvoir un ensemble de mesures. Par exemple, nous avons ouvert, au ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, près d'une centaine de postes à des enseignants désireux de quitter le monde de l'enseignement et de s'impliquer dans le domaine économique. Nous avons profité de la création de ces maisons de l'industrie, un peu partout au Québec, de ces portes uniques d'accès, pour offrir à ces enseignants une possibilité de changer d'orientation.

Nous avons également favorisé tout un ensemble, toute une gamme de mesures, dont le contrat de travail à temps partiel sans perte de privilèges acquis, tels que l'ancienneté ou le régime de retraite, ce qui permet à un enseignant de travailler à temps partiel. C'est parfois désiré lorsque les deux travaillent au sein d'un couple; à ce moment-là, on choisit un travail à mi-temps pour profiter de la période où on s'occupe plus activement de l'éducation des enfants pour se décharger un peu du côté travail.

On a également mis en place le congé sabbatique à traitement différé, où l'enseignant reçoit l'équivalent de 80% de

son salaire pendant cinq ans. Par contre, une année sur cinq, il peut vaquer à d'autres occupations que celle de l'enseignement proprement dit. Il y en a une centaine qui ont choisi cette voie.

Nous avons introduit la préretraite - je ne devrais pas dire la préretraite, car c'est la retraite anticipée - avec pleine revalorisation de la rente de manière qu'il n'y ait pas pénalisation pour celui qui choisit cette voie. C'est évidemment un moyen extrêmement coûteux et, par conséquent, limité. Soit dit en passant, les 40 000 000 $ dont parlait le député d'Argenteuil, à propos de la compression additionnelle dans les commissions scolaires, ont servi à financer cette mesure. Elle permet donc, entre autres, de réduire de façon assez significative le nombre d'enseignants en disponibilité.

C'est ce qui explique que, le 1er juin 1983, il y avait 7388 enseignants en disponibilité, que ce nombre chutait, le 15 octobre, à 3846 et, au 20 mars dernier, il était de 2986. Si vous vous souvenez des prévisions un peu alarmistes de 8000 mises en disponibilité lancées un peu à tort et à travers il n'y a pas tellement de mois, on se rend bien compte que le nombre s'est avéré nettement inférieur à ce qui était anticipé. Si on devait projeter pour l'année prochaine, sans introduire de mesure de réduction de l'effectif en disponibilité, le nombre s'accroîtrait d'à peu près 1300. Cependant, si on tient compte de l'ensemble des mesures, soit la réaffectation à l'intérieur de la commission scolaire, la préretraite, les primes de séparation, la création de postes réguliers pour de la suppléance, la retraite anticipée, enfin toutes les mesures dont je vous parlais tantôt pour la résorption de l'effectif en surplus, on pourrait imaginer que le nombre d'enseignants en disponibilité serait nettement inférieur à ce qui pourrait être anticipé, donc quelque part entre 3000 et 4000, sur environ 60 000 ou 70 000 enseignants au total, si je ne m'abuse.

Donc, cela touche à peu près 4% des enseignants. Alors, parler d'une insécurité généralisée, lorsque 96% des enseignants ne sont pas menacés, cela m'apparaît un peu abusif. Je ne dis pas qu'il faille minimiser le sentiment d'insécurité que cela peut induire chez les jeunes enseignants, cela est indéniable, même pour les enseignants qui ont une ancienneté assez importante puisque, comme vous le dites, l'âge moyen a tendance à augmenter. Il demeure quand même que, lorsque l'on parle des mises en disponibilité, on parle de quelque chose qui touche 3% à 5% des enseignants, et non pas 100%.

Mme Dougherty: Simplement une remarque en terminant, M. le Président. Je sais très bien qu'il n'y a pas de solution facile à ce problème. Mais cela reste un problème, qui ne va pas disparaître, cela va continuer. Je suis convaincue que la qualité de notre système dépendra de la qualité de nos ressources humaines avant tout autre élément, toute autre condition. Je crois qu'il est urgent de considérer la possibilité de changer les règles du jeu pour favoriser le maintien de nos meilleures ressources et je parle des ressources, humaines. Je crois que le gouvernement doit aborder, en consultation et en concertation avec les commissions scolaires et les syndicats, tout ce problème du vieillissement afin de trouver de nouvelles règles du jeu pour maintenir les meilleures ressources humaines que nous ayons et attirer les meilleurs enseignants qui sortent de nos universités.

J'espère que, dans les discussions que vous aurez pour préparer les prochaines négociations, cette question sera abordée parce que, dans tout ce problème de l'ancienneté, les anciennes règles du jeu ne sont pas nécessairement les meilleures pour assurer une qualité de l'enseignement dans l'avenir.

M. Bérubé: Vous avez raison et c'est ce qui explique pourquoi, lors de la dernière ronde, nous avons tenu à introduire des paramètres de capacité alliés aux paramètres d'ancienneté dans le processus de mise en disponibilité.

Le Président (M. Charbonneau): Le député de Fabre m'indiquait qu'il a quelques remarques à faire sur le même sujet.

M. Leduc (Fabre): Oui, sur le même sujet, M. le Président. M. le ministre a parlé des mesures de résorption qui ont connu un succès certain, puisque l'effectif en disponibilité a diminué de 59,5% grâce à l'application d'au moins sept mesures. Je voudrais savoir si on a l'intention de maintenir ces mesures dont on parle dans le programme 4. On en énumère sept. Est-ce qu'on a l'intention de les maintenir comme telles? Est-ce que ces mesures font également l'objet de discussions avec la CEQ? (16 h 15)

Troisièmement, je note que le coût de la sécurité d'emploi pour le personnel augmente malgré tout; il y a une augmentation du coût de la sécurité d'emploi de l'ordre de 9,5%. On passe de 119 000 000 $ à 120 000 000 $. Comment expliquez-vous cette augmentation du coût de la sécurité d'emploi? Est-ce que c'est parce qu'on paie à 100% durant la deuxième année de la convention collective, les enseignants en disponibilité? Qu'est-ce qui explique cette augmentation du coût de la sécurité d'emploi?

M. Bérubé: J'aurais tendance à parler

d'une baisse puisqu'en 1983-1984, si je lis bien la colonne, je lirais 121 700 000 $ et, en 1984-1985, 120 200 000 $. C'est à la page 30 du cahier que vous avez normalement sous les yeux. Donc, je parlais d'une diminution, d'une part, en dollars courants et, compte tenu de l'inflation et de l'indexation applicable aux salaires, j'aurais tendance à parler d'une diminution encore plus importante.

M. Leduc (Fabre): Je me référais à la page 32, justification des écarts entre les années scolaires; coût net prévu: augmentation du coût de la sécurité d'emploi, 9 500 000 $. Compte tenu de l'inflation, cela vous permet de dire qu'il n'y a pas d'augmentation. Vous vous référez à des dollars courants. Ici, on parle de l'augmentation du coût de la sécurité d'emploi.

M. Bérubé: Je vois. J'essaie de réconcilier le tableau de la page 32 avec le tableau de la page...

M. Leduc (Fabre): Page 30.

M. Bérubé: Évidemment, à la page 30, on n'aurait pas tendance à conclure de la même façon.

On me dit que, dans le cas de la sécurité d'emploi pour les autres personnes, c'est incorporé dans la base. Lorsque je me référais tantôt au coût de la sécurité d'emploi, c'était pour les enseignants. Si on prenait le coût global de la sécurité d'emploi, à la fois pour les enseignants et pour les autres personnes, à ce moment-là, on tirerait la conclusion qu'il y a un accroissement de 9,5%.

M. Leduc (Fabre): Est-ce qu'on paie les enseignants en disponibilité à 100% dans le P2? Est-ce cela qui est prévu maintenant?

M. Bérubé: Nous n'avons pas encore de chiffres définitifs. Les projections que vous avez ici reposent sur une substitution salariale de 100% la première année et de 80% pour les deux années subséquentes.

Toutefois, l'annexe 9 de la convention collective prévoit ceci: À la suite de la mise en application de mesures de résorption des effectifs en disponibilité, lorsqu'on réduit le nombre des enseignants en disponibilité en deçà des seuils prescrits par les textes des conventions, il y a bonification du taux de rémunération pour les autres enseignants restés en disponibilité. En d'autres termes, on reporte sur les autres enseignants les économies ainsi faites, ce qui nous amènerait à dire, à l'heure actuelle, que nous devrions viser à entre 90 et 100, mais nous ne pourrions pas vous donner un chiffre précis maintenant.

M. Leduc (Fabre): Est-ce qu'on a l'intention de maintenir intégralement les mêmes mesures qui ont été efficaces pour 1983-1984? Je ne suis pas sûr pour la retraite anticipée. J'ai entendu dire qu'on ne maintiendrait pas le point 9.

M. Bérubé: Dans le cas de la retraite anticipée, il n'est pas acquis que nous pourrons bénéficier de crédits nous permettant de continuer la mise en place de ce programme. Il faut dire que c'est l'élément du programme le plus coûteux, puisqu'il s'agit évidemment d'anticiper le paiement d'une rente et, en même temps, de se priver d'un revenu résultant des cotisations pendant la période équivalente de préretraite.

Il y a donc, d'un côté, une diminution des entrées au fonds de retraite et un accroissement substantiel des déboursés. L'effet combiné, évidemment, a comme résultat que le coût de cette mesure est très élevé. Nous aurions dégagé une enveloppe fermée - qu'on me dit quasi épuisée - et, par conséquent, il n'est pas du tout certain que nous puissons avoir les crédits l'année prochaine.

M. Leduc (Fabre): De quel ordre était cette enveloppe? 15 000 000 $?

M. Bérubé: 15 000 000 $.

M. Leduc (Fabre): C'est une mesure fort intéressante, si on veut renouveler le corps enseignant et donner l'occasion aux jeunes de prendre leur place; là-dessus, je partage les préoccupations de Mme la députée. Malheureusement, le corps enseignant vieillit, mais il faut aussi penser à la jeune génération qui pousse derrière et qui s'attend, évidemment, à trouver sa place dans le milieu de l'enseignement.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si vous me le permettez, je voudrais revenir sur la question soulevée pas ma collègue de Jacques-Cartier concernant le vieillissement des enseignants. L'an passé, nous avons adopté la loi 15. Ne croyez-vous pas que la loi 15 pourrait contribuer à la moyenne d'âge élevée des enseignants, particulièrement au niveau des universités? Les enseignants détenant une chaire à l'université ne seraient-ils pas tentés de continuer à enseigner au-delà de 65 ans? Cela pourrait avoir deux conséquences: empêcher la relève par les jeunes et empêcher ou ne pas contribuer à l'excellence de l'enseignement. Je pense bien qu'au-delà de 65 ans les enseignants se sentent peut-être un peu fatigués et, ne connaissant pas l'évaluation à ces niveaux, je

pense que c'est peut-être... En tout cas, à mon sens, cela pourrait être un handicap au renouvellement des enseignants. Cela pourrait nuire surtout au niveau des universités.

Je ne sais pas si, jusqu'à maintenant -on a pu constater ce qui s'est passé - les enseignants se sont prévalus ou non de la loi 15. Je ne sais pas si vous avez des chiffres, mais je pense qu'il aurait peut-être fallu que la loi 15 ne s'applique pas, enfin que les enseignants, surtout au niveau universitaire, ne puissent pas se prévaloir de la loi 15. Sans dire que ce soit catastrophique, c'est certainement nuisible à l'excellence de l'enseignement qui peut être dispensé au niveau universitaire, sans compter les coûts additionnels, évidemment, que cela peut entraîner. J'aimerais entendre vos commentaires.

M. Bérubé: Non, le travail étant fourni, il n'y a pas de coûts encourus du fait que la personne ne prend pas sa retraite, premièrement. Le problème que cela soulève, je pense que vous y avez fait référence. Il est clair qu'une personne ayant atteint l'âge de 65 ans qui choisit de ne pas prendre sa retraite occupe un poste qu'elle ferme, évidemment, à un jeune intervenant qui pourrait prendre sa place sur le marché du travail. Je pense que c'est clair.

Deuxièmement - je n'ai pas de chiffres précis à la mémoire et j'espère que vous ne m'en voudrez pas s'il pouvait y avoir une certaine imprécision dans ma réponse - nous avons fait compiler, d'un mois à l'autre, le pourcentage des gens ayant atteint l'âge de la retraite au gouvernement, dans les réseaux et choisissant de ne pas prendre leur retraite. Il est clair, cependant, que de tels chiffres sont fallacieux dans la mesure où le régime vient d'être mis en place. Cela veut dire que quelqu'un peut choisir de prolonger de six mois son travail avant de prendre sa retraite, ou de prolonger d'un an ou de deux ans. Éventuellement, nous découvrirons un régime de croisière que nous n'avons pas encore atteint.

Donc, à l'heure actuelle, nous sommes en train de faire le plein de gens qui choisissent de continuer à travailler. Je pense, si je ne m'abuse, que le taux de rétention était de l'ordre de 30% dans l'ensemble gouvernemental, c'est-à-dire ministères et réseaux. Si je me souviens bien, il n'y aurait pas vraiment beaucoup d'écart entre les secteurs, mais je ne pourrais dire quoi que ce soit de la catégorie des enseignants; non plus que je ne pourrais traiter du problème des professeurs à l'université.

Le Président (M. Charbonneau): Alors, ça va? Je vais passer la parole au député d'Argenteuil. Juste avant, j'aurais une petite question à poser au ministre sur le même sujet. Est-ce qu'on a un état de la situation des étudiants qui sont actuellement à l'université, dans différentes facultés, et qui s'apprêtent ou qui étudient pour devenir des enseignants? Compte tenu du faible taux des entrées ou du recrutement des jeunes enseignants, il y en a combien qui sortent des universités, ne se trouvent pas d'emploi et, finalement, attendent des années et des années?

M. Bérubé: La question a été posée tantôt par la députée de Jacques-Cartier et nous cherchons la réponse à l'heure actuelle.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. M. le député d'Argenteuil.

M. Bérubé: Nous les comptons un par un.

Le Président (M. Charbonneau): Nous n'en doutons point.

Subventions de rattrapage aux commissions scolaires

M. Ryan: M. le Président, je voudrais ouvrir un autre chapitre de la discussion sur les relations financières du gouvernement avec les commissions scolaires. Il y a une foule de points qui se situent à l'intérieur de ce sujet. On pourrait peut-être en disposer un par un. Tout d'abord, il y a les subventions de rattrapage qui ont été versées en 1983-1984. Est-ce qu'on pourrait nous indiquer exactement, pour les sommes dues, pour quelles années ces subventions ont été affectées? En même temps, où en est-on dans les paiements dus aux commissions scolaires pour les années passées?

M. Rousseau (André): Nous pouvons faire un dépôt de ce document qui précisera exactement...

M. Ryan: Je vous posais la question maintenant. Vous devez avoir les renseignements parce qu'un dépôt dans deux heures, cela ne donnera rien. On va avoir fini l'étude des crédits sur l'enseignement primaire et secondaire.

M. Bérubé: Vous avez parlé des subventions de rattrapage.

M. Ryan: Oui. Le mot n'est pas exact, ce sont des paiements anticipés sur des subventions dont certaines parties, relatives à des années passées, auraient dû être versées en 1984-1985.

M. Bérubé: Ah! d'accord! Ce sont les subventions pour combler les arrérages de versements des années passées.

M. Ryan: Exactement, c'est cela.

M. Bérubé: Là, c'est beaucoup plus facile, on peut vous fournir la réponse. Je sais exactement...

M. Ryan: J'étais sûr que vous l'aviez. Le total de ces subventions qui ont été versées par anticipation, c'est à peu près 280 000 000 $; est-ce ce que vous avez ce matin? L'an dernier - je vous rappelle cela -on avait demandé des précisions sur le montant qui restait. Il n'a pas été possible de l'obtenir. On nous a dit que cela prendrait bien du temps. Ce n'est jamais venu par la suite. (16 h 30)

M. Bérubé: Vous avez, à la page 33, le chiffre exact - c'est-à-dire 281 000 000 $ -qui a été versé en 1983-1984 par avance, mais qui normalement aurait dû être versé en 1984-1985.

M. Ryan: Oui, mais je vous ai demandé...

M. Bérubé: Vous voulez l'obtenir par commission scolaire.

M. Ryan: Non, par commission scolaire, je ne suis pas particulièrement intéressé; je veux savoir les années que cela couvre.

M. Bérubé: Cela se rapporte à l'année scolaire 1982-1983.

M. Ryan: Non, c'est bien avant cela. Est-ce que...

M. Bérubé: On ne peut pas décomposer l'année spécifique. Tout ce qu'on peut vous dire, c'est que c'est applicable à des arrérages encourus en 1979-1980, ou années antérieures.

M. Ryan: Est-ce qu'on peut avoir la somme totale des arrérages accumulés en date du 31 mars?

M. Bérubé: Du 31 mars 1984, après le paiement anticipé?

M. Ryan: C'est cela. Évidemment, il faudrait avoir chacune des années: 1980-1981, 1981-1982, 1982-1983.

M. Bérubé: II resterait 25 800 000 $ à couvrir d'ici à 1987, donc un tout petit montant.

M. Ryan: Je ne comprends pas. Cela ne comprend pas les deux tranches de 15% pour les deux prochaines années.

M. Bérubé: Non, il faut comprendre que...

M. Ryan: Alors, est-ce qu'il y aurait moyen...

M. Bérubé: II faut comprendre que nous avons choisi de consolider l'ensemble des dettes accumulées des commissions scolaires dans le réseau bancaire, de même que les dettes contractées par le réseau des affaires sociales, en un seul montant dont on a planifié le remboursement sur cinq ans. Nous avons accéléré le remboursement des dettes du réseau des commissions scolaires et, en devançant un paiement de 281 000 000 $ l'année dernière, je constate par les livres que j'ai ici qu'il resterait, dans le réseau des commissions scolaires, 26 000 000 $ à donner pour éteindre cette dette.

M. Ryan: Est-ce qu'il y aurait moyen de nous remettre un rapport écrit là-dessus, nous disant pour chaque année ce qu'on a payé par anticipation en 1983-1984 et au 31 mars...

M. Bérubé: On ne peut pas. Tout ce qu'on peut donner - ceci a été donné à l'Assemblée nationale, d'après les états financiers des années 1979-1980 et antérieures - c'est l'état des déficits accumulés du réseau des commissions scolaires. Deuxièmement, on peut donner la cédule de remboursement de ces arrérages sur un certain nombre d'années et indiquer quels sont les paiements qui ont déjà été faits. Ce que je vous dis, c'est que les paiements que nous faisons maintenant depuis trois ans, si on ajoute le paiement de 280 000 000 $ fait l'année dernière, cela a comme conséquence qu'il ne reste plus que 26 000 000 $ à combler. On ne pourra pas dire, à l'intérieur de l'année budgétaire 1982-1983 ou 1983-1984, spécifiquement si tel montant a été attribué à l'année 1979 puisque l'ensemble des dettes a été consolidé.

M. Ryan: Je ne comprends pas. Je vous le dis franchement: Plus vous parlez, moins c'est clair. Je vais demander un chose; je vais demander qu'on nous remette un rapport écrit à l'heure du souper sur lequel on pourra revenir brièvement au début de la soirée, parce que ce n'est pas clair pour moi. Les 25 000 000 $ qui resteraient...

M. Bérubé: ...à payer.

M. Ryan: ...les versements à payer sur des sommes dues par le gouvernement pour les années antérieures, incluant 1983-1984, cela m'apparaît...

M. Bérubé: Non, non, non, non.

M. Ryan: Incluant...

M. Bérubé: La question que vous avez posée, M. le député d'Argenteuil, si je ne m'abuse, a été la suivante: II existe au gouvernement une politique pour rembourser les arrérages encourus par les commissions scolaires pour les années scolaires antérieures à 1980-1981...

M. Ryan: Non, je m'excuse, on est aussi bien d'arrêter cela tout de suite. Je sais cela, je sais ce que vous m'avez dit pour ce qui concerne l'affectation du remboursement de 280 000 000 $, mais je vous ai dit que j'aimerais avoir un tableau clair jusqu'au 31 mars 1984. Qu'est-ce que le gouvernement doit aux commissions scolaires pour les années passées, y compris évidemment l'année 1983-1984?

M. Bérubé: Ah! là, c'est une question différente!

M. Ryan: Non, c'est ce que je vous ai demandé tantôt. S'il y avait moyen d'avoir cela, cela compléterait le tableau et cela éviterait qu'on se perde dans des dédales infinis.

Cela étant dit, si vous permettez, M. le Président, à moins que le ministre... Je n'ai plus de questions à poser. Par conséquent, j'imagine que le ministre n'a plus de réponses s'il n'y a pas de questions de posées. Peut-on avoir ce tableau?

M. Bérubé: Oui, il n'y a pas de problème. Il s'agit donc d'incorporer les arrérages au financement des années courantes. Comme on le sait, c'est financé par le gouvernement sur la base de 70-15-15, c'est-à-dire...

M. Ryan: C'est cela.

M. Bérubé: ... 70% pour l'année en cours, 15% pour l'année précédente et 15% pour l'année antérieure. Par conséquent, vous allez voir apparaître non seulement le remboursement des arrérages, mais également les remboursements étalés suivant la formule des 70-15-15 pour les trois années subséquentes.

M. Ryan: Pour cette partie de la dette qui a été remboursée, vous aviez fait un arrangement consolidé avec des institutions financières en vertu duquel le remboursement devait s'échelonner sur une période X. Je ne sais pas la longueur. C'est peut-être...

M. Bérubé: Cinq ans au départ.

M. Ryan: Cinq ans au départ, n'est-ce pas? Voici ma remarque. Lorsque vous nous avez présenté tout votre plan de ponction des salaires chez les enseignants et les travailleurs du secteur de l'éducation, vous nous avez dit: II y a une crise économique terrible. C'était effrayant, le Québec allait s'écrouler si ces méchants enseignants ne voulaient pas accepter d'être tondus par le gouvernement. Vous nous avez dit: Si on leur demande ceci et cela, c'est parce qu'on en a un besoin absolu. Il n'était même pas possible de discuter à ce moment-là. Vous nous avez fait adopter la loi 105 en l'espace d'une journée.

Dans les mois qui ont suivi, dans le même exercice financier, vous avez trouvé le moyen de faire deux choses. Tout d'abord, vous avez présenté un budget supplémentaire comportant une réduction de taxes assez sensible, de l'ordre de 100 000 000 $ ou 125 000 000 $, si mes souvenirs sont bons. Deuxièmement, vous êtes allés chercher un surplus de 280 000 000 $ que vous avez pu ajouter au remboursement anticipé d'une dette dont vous ne nous aviez pas parlé du tout lorsqu'on a discuté de ces urgences. On n'avait jamais entendu parler de cela. La première fois que nous en avons entendu parler, c'est lorsque le ministre des Finances a présenté son budget supplémentaire. Était-ce cela, la crise?

M. Bérubé: J'ai une réponse. Malheureusement, je pense que le député d'Argenteuil a suivi de très près les débats qui relèvent de l'éducation, mais qu'il a peut-être suivi de moins près le discours sur le budget de l'année dernière qui expliquait très clairement ce qui s'est produit. En effet, le problème vient de ce que, dans ses négociations avec le gouvernement fédéral, à de nombreuses reprises, le ministre des Finances avait souligné que les techniques de dénombrement de la population du Québec étaient faussées lors des recensements de Statistique Canada par le fait que le nombre de locataires étant plus élevé au Québec, ce dénombrement des locataires étant généralement moins précis et toujours par la négative, c'est-à-dire qu'il y a sous-dénombrement, il y avait donc, dans les calculs de la population du Québec, un sous-dénombrement systématique reconnu d'ailleurs par Statistique Canada qui publie régulièrement des mesures de sous-dénombrement résultant, par exemple, de l'existence d'un pourcentage important de locataires dans son habitat.

À plusieurs reprises, il y a donc eu des discussions fédérales-provinciales et, finalement, le ministre fédéral des Finances s'est rendu au raisonnement puisqu'il était en contradiction avec ses propres études venant de Statistique Canada. Comme on le sait, les ajustements au chapitre des paiements de péréquation ont comme caractéristique, généralement, de s'étaler sur plus d'une année et, de fait, on s'est retrouvé avec des

paiements de transfert ajustés à la hausse qui, cependant, ne s'appliquent que pour les deux années. Ce sont des remboursements pour des années passées. Évidemment, dans les perspectives de revenus futurs, on a tenu compte des calculs exacts de la population, mais dans la mesure où il y avait eu un manque à gagner, suivant les règles de péréquation, le Québec avait droit à une récupération sur les deux années antérieures. On ne peut pas remonter plus loin dans le temps, mais on pouvait remonter aux deux années précédentes.

Le fait de remonter à deux années en arrière, cela a fait en sorte que le gouvernement fédéral a dû verser au gouvernement du Québec un montant de transfert supérieur, mais non récurrent, à ce qui avait été anticipé. Jusqu'ici pas de problème. L'erreur la plus grave qu'un gouvernement pourrait faire, ce serait de s'engager dans des dépenses récurrentes sur la base d'un revenu exceptionnel. C'est ce que le ministre des Finances avait expliqué très clairement; il avait même dû, à un moment donné, je pense, faire un peu la leçon au député de Vaudreuil-Soulanges qui voulait amener le gouvernement à s'engager dans des dépenses récurrentes sur la base d'un revenu exceptionnel. C'est le genre d'erreurs que tout gestionnaire un peu rigoureux des finances publiques voudrait éviter et je peux comprendre que le ministre des Finances soit peu sensible aux propos du député d'Argenteuil qui reprend, à cet égard, les sophismes du député de Vaudreuil-Soulanges.

En fait, ce que le député d'Argenteuil nous reproche, c'est de ne pas nous engager dans des dépenses récurrentes sur la base d'un revenu unique non récurrent d'une année. Ceci m'apparaît erroné sur le plan des principes. Il était à ce moment-là plus sage de profiter de l'occasion pour rembourser des dettes passées, grâce à un revenu exceptionnel s'appliquant à des années passées, et c'est ce que nous avons fait.

M. Ryan: M. le Président, je réitère l'opinion que j'ai exprimée voulant que ce soit une politique absolument odieuse de la part du gouvernement de se comporter de cette manière à l'endroit des salariés du secteur public. Je pense que nous avons là la démonstration de cette espèce d'aveuglement avec lequel nous avons procédé, l'an dernier, à cette opération dont les conséquences pèsent encore si lourdement sur tout le système d'enseignement.

Je veux dire au ministre, pour ce qui touche les subventions en provenance du gouvernement fédéral, que cela fait quatre années de suite que le ministre des Finances se trompe dans ses calculs. On a fait l'addition de toutes les tragédies qui étaient censées nous arriver, si nous avions suivi à la lettre les discours sur le budget, et cela arrivait à au-delà d'un milliard de dollars, des choses que nous n'aurions pas reçues depuis la dernière élection et que nous avons reçues par une espèce de concours de circonstances. Vous avez évoqué un facteur; je me souviens très bien de cette situation particulière. Il y a en eu d'autres également, mais on nous a toujours prédit la catastrophe et, finalement, nous nous sommes réveillés avec des arrangements bien plus satisfaisants que ce qu'on avait laissé entrevoir.

Je ferme la parenthèse là-dessus, ce n'est pas la place pour engager tout un débat sur ce sujet, mais je réitère qu'au moment où le gouvernement est en train de négocier avec les enseignants les réaménagements possibles dont le coût serait immensément inférieur à ces surplus qu'il est allé chercher l'an dernier, grâce à des interprétations rétroactives, des arrangements fédéraux-provinciaux en matière de finances, parler de crise, de situation serrée, comme on l'a fait il y a à peu près un an, c'est très très difficilement justifiable par l'état des chiffres. J'aurais compris très bien que, sur une somme comme celle-là, on en prenne une certaine partie pour corriger les erreurs passées du gouvernement. Cela a pris du temps à mettre de l'ordre dans ce fameux trou qui était autrefois de 500 000 000 $ et je suis content de voir que nous progressons de ce côté-là. (16 h 45)

Si on avait pris la moitié de la somme pour cette fin et l'autre moitié pour procéder à un assouplissement des mesures dictatoriales et hautement autoritaires, souvent non démontrées, prises par le gouvernement quelques mois plus tôt, il me semble que cela aurait été infiniment plus humain, plus juste. Je me rappelle les débats interminables que nous avons eus avec le ministre, au temps où il était président du Conseil du trésor, sur la rémunération des enseignants aux adultes à temps partiel. Il nous a fait des thèses absolument interminables, laissant entrevoir qu'on ne savait pas compter. Ensuite, on a fait la preuve que ce que l'on demandait, c'était de l'ordre de 3 000 000 $. Ce n'était pas énorme pour être traité avec un peu plus d'équité; c'était absolument impossible, il n'y avait aucun moyen. Tout à coup, le magicien qui est aux finances nous a dit une bonne journée: Nous avons trouvé 280 000 000 $ et nous avons tout placé dans le remboursement anticipé de la dette. C'est franchement une comédie au point de vue de la présentation des finances publiques! C'est inadmissible, à mon point de vue.

Je termine là-dessus, mais j'ai une autre question, toujours dans le domaine des rapports financiers du gouvernement avec les commissions scolaires, les ajustements non récurrents. Je trouve, à la page 37 du cahier

des explications, qu'on prévoyait un montant de 40 000 000 $ pour Tannée 1983-1984. Ceci consistait dans cette ponction qu'on a exercée sur les surplus des commissions scolaires au 30 juin 1982 afin d'aider à financer des mesures de mise en disponibilité ou de retraite anticipée et les mesures de résorption.

Je vois dans le cahier 1984-1985, à la page 30, que pour l'année 1983-1984 il s'agirait d'un montant de 70 500 000 $ et qu'on prévoit, pour l'année 1984-1985, un montant de 32 800 000 $. Est-ce que je me trompe dans ma lecture ou s'il y a des interprétations à donner là-dessus? Est-ce qu'on est allé chercher 70 000 000 $ au lieu de 40 000 000 $ chez les commissions scolaires? Deuxièmement, est-ce qu'on s'apprête à aller chercher encore 33 000 000 $ en 1984-1985? Où trouve-t-on les explications à cela dans le cahier?

M. Bérubé: Effectivement, cela donne 40 000 000 $ plus 30 000 000 $. Les 40 000 000 $ de compression additionnels dans les budgets des commissions scolaires découlent, à l'origine, d'une indication par la fédération des commissions scolaires que le gouvernement devait être plus généreux en ce qui a trait aux mesures de sécurité d'emploi et du constat par le gouvernement que les commissions scolaires avaient les ressources pour soutenir leur discours puisqu'elles disposaient de surplus et qu'on devait présumer que, si elles nous demandaient d'être plus généreux, c'était avec leur argent. Par conséquent, on a jugé bon d'aller chercher 40 000 000 $ additionnels dans ces surplus, de manière à financer ces mesures de résorption de l'effectif en disponibilité. C'est là l'étape première des 40 000 000 $.

Les 30 000 000 $ additionnels que vous avez inscrits ici pour donner un total de 70 000 000 $, cela vient de ce que nous avons constaté que nous financions en trop les commissions scolaires au chapitre des congés monnayables. En effet, dans la mesure où les enseignants en disponibilité peuvent faire de la suppléance, même si tous les enseignants prenaient tous leurs congés de maladie, le nombre d'enseignants en disponibilité pour faire de la suppléance est tel que l'on pouvait pour ainsi dire, à peu de frais, effectuer toute la suppléance requise. Ceci avait donc comme conséquence que l'économie faite au chapitre de la "non-monnayabilité" des congés de maladie restait dans les enveloppes des commissions scolaires sous forme d'un coussin possible. Au moment où nous cherchions par tous les moyens à réduire nos coûts, ayant identifié ce montant additionnel, nous avons cru bon de le prélever.

M. Ryan: Très bien. Au cours de l'année 1984-1985, ce serait la source de la somme de 32 000 000 $ que vous prévoyez.

M. Bérubé: C'est cela. En 1984-1985, c'est le même montant de trop-perçu dans le budget des commissions scolaires qui est prélevé.

Règles budgétaires

M. Ryan: Maintenant, cela nous amène - veuillez m'interrompre, M. le Président, si mon temps est écoulé - à la question des règles budgétaires. Vous avez envoyé un document aux commissions scolaires au début de la présente année, en janvier 1984. Les commissions scolaires, autant certaines commissions individuelles que la Fédération des commissions scolaires catholiques, en particulier... Je ne sais pas si l'association des commissions scolaires protestantes vous a écrit également, mais la Fédération des commissions scolaires catholiques vous a adressé, en date du 8 mars, une communication dans laquelle elle vous faisait de nombreuses représentations au sujet des mesures qui tendent à restreindre encore davantage les horizons des commissions scolaires en matière financière et administrative. J'aurais aimé savoir de vous, en partant des recommandations qui vous ont été soumises, si vous entendez donner suite à ces recommandations ou si vous avez décidé d'appliquer littéralement les règles budgétaires comme vous les aviez conçues et où vous en êtes.

On peut commencer par la première, si vous voulez; je ne sais pas si tout est décidé, s'il y aura des modifications là-dessus. Vous pouvez nous le dire brièvement, mais il y a de nombreuses demandes qui vous ont été soumises par les commissions scolaires. Ce ne serait pas très long de les repasser pour qu'on sache s'il y a des chances d'amélioration ou si tout est pris dans le ciment.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, n'ayant pas examiné en détail chacune des demandes des commissions scolaires, tout ce que je me contenterai de dire, c'est qu'elles ont été, effectivement, analysées une à une. Il n'y a évidemment pas place pour une augmentation globale du niveau des ressources, mais certainement pour une multitude de réaménagements qui sont soulignés ici et là dans les demandes des commissions scolaires et auxquelles on peut faire raison.

M. Ryan: Je vais prendre quelques exemples, si vous me le permettez. Elles vous disent: On voudrait que vous assuriez les ressources nécessaires pour payer les

manuels scolaires promis aux élèves du Québec. On a de nouveaux programmes en quantité, les manuels se font attendre quelque peu, mais il va y en avoir. Une des représentations que nous avons entendues à maintes reprises, c'est qu'on n'avait pas donné aux commissions scolaires les ressources budgétaires nécessaires pour répondre vraiment aux besoins de ce côté-là. On a donné une allocation spéciale, l'an dernier; je pense que c'était de l'ordre de 15 000 000 $, si mes souvenirs sont bons. Mais quels sont vos projets de ce côté?

C'est écrit, à part cela, dans le régime pédagogique, que pour chaque programme il faut un manuel. Je pense que quelqu'un d'entre vous a dit, récemment, qu'on allait maintenir cette règle. Mais ces manuels sont mis dans les mains des élèves gratuitement. Si vous ne donnez pas d'allocation aux commissions scolaires correspondant aux coûts encourus, cela veut dire, encore là, que vous les obligez à rogner sur d'autres dépenses qui sont souvent absolument inévitables. Alors, quelle est votre politique sur ce point, les manuels scolaires, par exemple?

Je vous donne un autre point, la sécurité d'emploi. Vous leur avez transféré une grosse partie du coût des mesures de résorption qui ont été nécessitées par les décrets et par l'acceptation des rapports de conciliation. Est-ce que vous entendez continuer dans cette voie-là, à les gruger, à les rogner de plus en plus, ou si vous entendez écouter les représentations qui vous sont faites à ce sujet?

Il y a un autre point que je vous souligne, les mesures...

M. Bérubé: M. le Président...

M. Ryan: ...d'indexation pour les augmentations de clientèle. Si vous me le permettez, je vais vous donner juste un troisième exemple. L'indexation pour les augmentations de clientèle commençait à 2%, si mes souvenirs sont bons. On porte cela, cette année, à 3,5%. Il y a des représentations qui vous ont été faites par la commission scolaire de Saint-Eustache à ce sujet. Est-ce que vous allez en tenir compte? C'est évident que, si l'on porte cela à 3,5% une commission scolaire qui est en bas de ce niveau n'aura pas l'indexation qu'il faut pour certains postes de dépenses. Est-ce que je pourrais avoir des précisions sur ces points-là?

Il y a bien d'autres facteurs. Vous avez reçu des représentations très détaillées, extrêmement sérieuses à part cela. On aimerait savoir quelle est votre politique; il me semble que c'est le moment pour le dire et on n'aura pas beaucoup de temps pour le savoir.

M. Bérubé: De toute façon, les règles définitives de financement des commissions scolaires ne sont pas envoyées avant la fin d'avril. Nous sommes également à examiner tout le problème de la tâche d'enseignement; nous ne sommes donc pas prêts à donner une position finale concernant les règles de financement puisqu'un bon nombre de paramètres n'ont pas encore été déterminés. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que nous prenons note des interventions, d'une part, et, d'autre part, nous indiquons très clairement que l'enveloppe globale est fixe. Elle peut être réaménagée, mais elle est fixe.

M. Ryan: J'aimerais demander au ministre si les représentations de la commission scolaire de Saint-Eustache, en particulier - représentations très précises portant sur des points clairement identifiés -sont exactes ou si elles procèdent d'une fausse interprétation des faits.

M. Bérubé: M. le Président, tout ce que je pourrais vous dire en ce qui concerne la commission scolaire de Saint-Eustache, c'est que c'est sans doute une commission scolaire de grande importance, mais le ministère a fait porter son analyse non pas sur les considérations seules de la commission scolaire de Saint-Eustache, mais sur un regroupement de consultations menées auprès de l'ensemble des commissions scolaires, ce qui nous amène à dégager éventuellement des idées maîtresses de force dans les représentations des commissions scolaires.

Concernant la date de présentation du budget, je pourrais vous faire la synthèse des principaux sujets traités par les commissions scolaires et, dans certains cas, les commentaires du ministère concernant l'attitude qu'il compte prendre. J'en ai des pages et des pages. Je pense qu'il est extrêmement difficile d'entrer dans une analyse très détaillée de toutes les règles de financement des commissions scolaires, en connaissant la complexité, mais si le député d'Argenteuil veut soulever un point particulier on pourra essayer d'y répondre.

M. Ryan: Volontiers! Je peux vous donner deux ou trois exemples, si vous me le permettez, M. le Président.

On vous dit qu'il nous paraît inacceptable que les règles budgétaires n'assurent pas le plein financement de plusieurs mesures provenant du ministère de l'Éducation et dont il impose l'application aux commissions scolaires. Cela ne regarde pas seulement celle-ci, la commission scolaire dont je parle. Je la prends à titre d'exemple et ce n'est pas du tout parce qu'elle aurait un problème spécial au sujet duquel je viendrais implorer votre bienveillance; ce n'est pas cela du tout, ce

sont des problèmes d'intérêt général. Pour n'en mentionner que quelques-uns, elle cite l'exemption de l'enseignement religieux, l'enseignement à domicile, les cours spéciaux, les mesures d'accueil, etc.

M. Bérubé: Si on veut décomposer la question du député d'Argenteuil en des éléments auxquels on peut apporter une réponse, il a, dans les exemples soulevés, souligné des problèmes tantôt de personnel et tantôt possiblement d'autres coûts de fonctionnement, autres que de personnel.

Dans le cas du personnel, s'appliquent les compressions prévues au titre de l'augmentation de la tâche et les taux d'augmentation des salaires prévus dans les conventions collectives. Ces dépenses sont donc entièrement financées; il n'y a pas de sous-financement à ce chapitre, au chapitre du personnel, ce qui représente 80% à 85% des coûts des commissions scolaires.

Au chapitre des autres coûts, il y a une indexation des dépenses d'énergie et une compression dans la croissance des autres dépenses qui est effectivement appliquée, comme on a d'ailleurs appliqué à l'ensemble des dépenses gouvernementales un certain pourcentage de compression dans le but d'inciter à un accroissement de la productivité. (17 heures)

M. Ryan: M. le Président, une remarque et j'aurai terminé sur ce sujet. Voici ce que je trouve bizarre. D'un côté, je pense que nous sommes d'accord pour considérer que l'augmentation de la clientèle est un objectif très louable pour notre système d'enseignement, à tous les niveaux. Nous voulons que le plus de personnes possible entrent dans le système d'enseignement. Or, lorsqu'il y a une augmentation de la clientèle, vous dites: On va augmenter les ressources seulement dans une proportion limitée. Aux commissions scolaires, vous dites, comme je le mentionnais tantôt: Si vous avez une augmentation inférieure à 3,5%, vous n'aurez pas le même genre d'aide financière. Quant aux universités et aux collèges, on en reparlera, c'est le même principe qui s'applique. Ne trouvez-vous pas que, lorsqu'il y a une augmentation de la clientèle, vous devriez au moins augmenter les subventions en conséquence?

M. Bérubé: Aux niveaux primaire, secondaire et collégial, il y a un ajustement automatique, eu égard aux contraintes de réduction des coûts que peuvent représenter les modifications aux conditions de travail devant prévaloir l'année prochaine.

M. Ryan: Je vais vous lire ce qu'il y a dans la lettre que cette commission scolaire vous a adressée: "L'allocation prévue pour les commissions scolaires en croissance rapide et soutenue serait réservée aux commissions scolaires dont le taux moyen de croissance est égal ou supérieur à 3,5% au lieu de 2%. Cela nous apparaît une mesure d'évitement pour le ministère de l'Éducation qui semble ainsi vouloir se dérober à son obligation de subvenir raisonnablement aux besoins de ses commissions scolaires".

M. Laplante: J'aurais un commentaire à ce sujet, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): Oui, allez-y.

M. Laplante: II y a une variante entre la baisse de clientèle et l'augmentation. On a dit 14% ce matin sur une baisse de 20% du budget.

Le Président (M. Charbonneau): Pendant que le ministre consulte ses sous-ministres, j'aimerais signaler aux membres de la commission qu'il nous reste moins d'une heure pour l'étude du programme 4. Nous avons déjà consacré beaucoup de temps à ces questions fort importantes, mais qui appellent beaucoup de conciliabules, semble-t-il.

M. Rousseau: Si vous me le permettez, dans la question posée concernant le financement qui correspondrait au coût réel, il y a une question de fond qu'il faut d'abord regarder. Depuis 1979-1980, depuis la conférence Québec-commissions scolaires, il a été convenu, avec l'accord des commissions scolaires, que le ministère de l'Éducation cesserait de financer après avoir reçu les factures des commissions scolaires, mais prévoirait une enveloppe globale fermée pour les commissions scolaires, avec des sous-enveloppes transférables. Ceci veut dire que la commission scolaire de Saint-Eustache, comme les autres commissions scolaires, reçoit une envelopppe qui correspond à un coût historique ajusté, en tenant compte des caractéristiques spéciales de cette commission scolaire, si celle-ci, comme d'autres, avait des classes d'accueil, des exemptions de l'enseignement religieux ou de très petites écoles où il fallait ajouter du personnel supplémentaire. Mais à partir du moment où la photographie a été prise en 1979-1980, photographie qui a été reprise en 1981-1982, la commission scolaire reçoit cette enveloppe qui correspond à ses données historiques. C'est transférable. Voilà qui répond à la question relative à l'exemption de l'enseignement religieux, à la classe d'accueil et autres.

Concernant le financement qui tient compte de la croissance de la clientèle, comme il a été indiqué tantôt, lorsque le nombre d'élèves augmente, le nombre d'enseignants doit nécessairement et

obligatoirement augmenter. Il s'agit donc d'une enveloppe tout à fait ouverte et l'équation est parfaite. C'est à partir de la clientèle étudiante au 30 septembre que se fixe le nombre d'enseignants.

Pour ce qui concerne les autres personnes et les autres coûts, il va de soi qu'il n'y a pas un lien direct entre la croissance de la population scolaire et les coûts d'énergie, des directeurs d'école, des secrétaires, des professionnels de l'enseignement, des conseillers pédagogiques ou autres. Qu'il y ait 100 élèves de plus ou de moins, le directeur d'école coûte la même chose, la secrétaire aussi, de même que le chauffage, l'entretien et autres. Ceci veut dire que bon an, mal an, la règle qui a permis aux commissions scolaires - il faut le dire, finalement - de faire même des surplus indique, à l'article 2 qui couvre le personnel autre que les enseignants et à l'article 3 qui couvre les autres coûts, chauffage, entretien, etc., que le financement tient compte de 50% de la croissance de la population scolaire.

Cependant, lors de la consultation, des commissions scolaires ont indiqué que cette règle pouvait être injuste pour cette commission scolaire parce que la croissance était vraiment très accélérée. Dans ces cas-là, lorsque la croissance est très accélérée, lorsque le financement de 50% pour le personnel autre et les coûts autres est insuffisant, il y a une allocation supplémentaire. C'est une allocation supplémentaire qui s'applique donc dans le cas d'une croissance très accélérée de la population. Pour les autres, la règle des 50% semble avoir été satisfaisante, quand on regarde l'état de santé financière des commissions scolaires.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le sous-ministre. Je voudrais aborder maintenant un autre sujet qui concerne le programme 4, juste au niveau de l'alternance.

Sur le même sujet, monsieur...

M. Leduc (Saint-Laurent): Si je comprends bien, quand on regarde l'article 3, vous avez parlé de l'historique tantôt, mais je ne pense pas qu'on puisse parler d'historique quand on parle d'autres coûts. Si je comprends bien, le pourcentage d'augmentation serait de 1,9%.

Une voix: Cela dépend de l'historique.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est cela? Comment concilier 1,9% avec le taux d'indexation que nous allons connaître cette année, en 1984-1985, de 5%? Je veux bien que l'on me dise qu'il y a peut-être d'autres facteurs, mais si on parle d'acheter de l'huile ou d'autres dépenses, d'autres coûts, puisqu'on ne parle pas d'enseignants, je pense bien qu'il faut chauffer les établissements scolaires, alors je ne vois pas du tout comment ces commissions scolaires pourront fonctionner, arriver à boucler, avec une augmentation de 1,9% alors que l'on prévoit une indexation de 5%. De plus, on ne paie pas les manuels scolaires, ni non plus le matériel didactique. Je me demande, grand Dieu, quelle sorte de miracle les commissions scolaires vont être obligées de faire pour arriver. Moi, je pense que c'est absolument inacceptable d'accorder une augmentation de 1,9% quand l'indexation est de 5%. Je ne sais pas, là.

M. Bérubé: Si vous regardez l'évolution des autres coûts, que vous pouvez consulter à la page 30, vous verrez que les autres coûts, en 1983-1984, étaient de 300 800 000 $ pour passer à 312 700 000 $, c'est-à-dire une augmentation de l'ordre de 4%.

M. Leduc (Saint-Laurent): D'accord, mais, évidemment, je pense que l'on doit y inclure les fameux montants payés par anticipation.

M. Bérubé: Non, c'est complètement à l'extérieur de cela. Vous avez donc une augmentation de 3,9%. Si, de plus, vous tenez compte du fait qu'il y a une réduction de la clientèle globale, légère, mais néammoins réelle, vous retrouvez des taux de croissance compatibles avec ce qui se passe dans le système. Il y a une certaine compression aussi.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais vous ne pensez pas qu'il faudrait au moins aller jusqu'à l'indexation de 5% qui est prévue pour l'année 1984-1985?

M. Bérubé: D'abord, il n'y a pas de prévision de 5% d'inflation pour l'énergie, à l'heure actuelle, au Canada. Par conséquent, si on devait donner 5% d'augmentation, comme vous le suggérez, on couvrirait plus que les dépenses réelles encourues et on ferait porter le poids de cette erreur de prévision sur d'autres secteurs. Soulignons, en passant, que 60% de cette enveloppe est consacrée à l'énergie et on prévoit une indexation, cette année, de 2% pour les dépenses énergétiques. Par conséquent, il vous reste une marge de manoeuvre pour les autres dépenses.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que ça va?

M. Bérubé: Évidemment, je suis désolé que l'inflation ne soit pas plus élevée que cela, mais...

Le Président (M. Charbonneau): Sur le même sujet, M. le député.

M. Laplante: Non, sur un autre sujet. Vu qu'on a fini l'élémentaire et le secondaire, on peut en prendre un autre. Avez-vous l'intention de construire plusieurs écoles durant la prochaine année, comme à Mascouche et aux endroits où il y a...

M. Bérubé: Vous voulez savoir dans quels comtés?

M. Laplante: Non, pas nécessairement. Si vous le savez, tant mieux!

M. Bérubé: Oui, on a cela quelque part. On a quelque chose sur le nombre d'écoles. Un instant, je vais essayer de vous...

M. Laplante: Elles ont de la misère à arranger leurs horaires, il y a trop d'enfants.

M. Bérubé: Je vais essayer de vous trouver la liste des écoles que j'ai vue quelque part en feuilletant ce volumineux dossier.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Charbonneau): Oui.

M. Ryan: ...je ne sais pas si cela peut être utile au ministre, mais dans les renseignements qu'il m'a fait tenir il y a un document intitulé: Plan d'investissements 1981-1984, projets approuvés et projets à l'étude au 1er avril 1984.

Le Président (M. Charbonneau): On pourrait peut-être demander un dépôt de documents.

M. Ryan: Oui, je le mets à votre disposition, c'est public. J'ai fait mon devoir. Il ne se le rappelle même pas.

M. Bérubé: Je ne sais pas si l'école de Mascouche y est incorporée, mais je n'ai pas l'impression qu'elle y est pour l'instant. Je continue ma fouille. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il s'agit d'un budget de 6 000 000 000 $ et que, par conséquent...

M. Laplante: ...vous êtes là-dedans, monsieur.

M. Bérubé: Je suis incapable de vous trouver cette fiche...

M. Laplante: Dans l'investissement.

M. Bérubé: ...que j'avais demandé que l'on me prépare et qui portait sur les projets de construction. Dans les projets approuvés, je regarde à Mascouche. Non, le projet de

Mascouche est toujours sous étude. Il n'y a pas de décision de prise.

M. Laplante: Combien d'argent y a-t-il, cette année, en investissement? Qu'est-ce que vous avez dans vos projets? (17 h 15)

M. Bérubé: Le budget global est de 260 000 000 $, mais il faut faire le partage. J'ai 220 000 000 $, à la page 36, au plan des équipements globaux. Alors, vous avez, en 1984-1985, des déboursés en parachèvement, vous avez l'entretien des équipements actuels, un programme d'investissements pour améliorer l'équipement dans nos commissions scolaires en ce qui a trait à la formation professionnelle des jeunes. Si le projet de Mascouche devait être approuvé au Conseil du trésor, il serait incorporé dans la section Ajout d'espace.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Charbonneau): Une question additionnelle sur le même sujet...

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Charbonneau): ...pour des cas de comté.

M. Bérubé: Est-ce que vous avez une école également, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: Le ministre a-t-il été saisi d'un problème urgent d'agrandissement et de modernisation qui se pose aux deux écoles qui sont à Grenville? On a besoin d'un gymnase et de la modernisation des locaux qui ont été trouvés désuets par la direction régionale du ministère, d'ailleurs. Est-ce que ce projet...

M. Bérubé: Grenville.

M. Ryan: Ce n'est pas rendu jusque chez vous?

M. Bérubé: Non. Dans les projets qui sont présentement à l'étude, je n'ai pas Grenville. Quelle commission scolaire?

M. Ryan: La commission scolaire du Long Sault.

M. Bérubé: Non. M. Ryan: D'accord.

Matériel didactique

Le Président (M. Charbonneau): Je voudrais, M. le ministre, ouvrir un autre chapitre de la discussion, mettant fin ici, maintenant, au règlement des cas de comté et suggérant aux autres membres de la

commission qui auraient des cas particuliers de profiter de la présence des fonctionnaires pour les vérifier.

Je voudrais plutôt aborder, M. le ministre, la question des outils pédagogiques dans le document que vous nous avez fait parvenir concernant l'évolution du cadre pédagogique. À deux endroits, on y fait un aveu important et, compte tenu des remarques qui nous sont faites par les enseignants qu'on a l'occasion de rencontrer tant au niveau primaire qu'au niveau secondaire, il semble se poser un problème important au niveau du rythme de livraison et de production du matériel pédagogique, en particulier des manuels scolaires. Est-ce qu'il serait possible de connaître un peu l'état de la situation? Il semble que vous en soyez conscient puisque vous en parlez vous-même dans le cahier de l'étude des crédits du ministère. Ce qu'il serait intéressant de connaître, ce sont les intentions du ministère à l'égard de ce problème particulier, celui des manuels qui ne sont pas disponibles actuellement et qui sont en retard dans la production, dans la livraison.

On a parlé tantôt des règles budgétaires et des surplus dans les commissions scolaires. Je pense que le député d'Argenteuil a ouvert une porte également, en posant certaines questions de nature financière quant à la problématique de la livraison, en temps nécessaire, des manuels scolaires. Ce que j'aimerais connaître, d'abord, face à ce problème que vous avez identifié comme étant important -puisqu'à deux endroits, en pages 9 et 11, vous en parlez - c'est ce que le ministère de l'Éducation entend faire pour accélérer le règlement de cette situation.

M. Bérubé: Lorsque l'on parle de la disponibilité du matériel didactique, il faut toujours distinguer entre cette disponibilité sur le marché et l'achat, par la commission scolaire, des manuels en question. Il peut arriver qu'une commission scolaire, pour toutes sortes de raisons, n'ait pas fait l'acquisition de certains manuels et, par conséquent, ne puisse les mettre à la disposition des enseignants pour faciliter l'encadrement de l'enseignement. Là, c'est un problème local.

Évidemment, on pourra toujours se renvoyer la balle en disant que l'allocation pour autres coûts est insuffisante pour couvrir de tels coûts; cela est possible. Il faut dire aussi, en contrepartie, qu'on pourra invoquer l'existence de taxes locales pour financer de tels achats et l'existence de surplus budgétaires accumulés dans les commissions scolaires pour permettre, également, de tels achats. Donc, on pourra plaider la réelle disponibilité de fonds. Certes, si on veut tous les acheter ensemble, la même année, il pourrait y avoir des problèmes.

Distinguons, pour la commission scolaire, le problème de sa capacité financière à se procurer tous les manuels au moment voulu. Distinguons donc ce problème, ce cas de figure particulier d'un autre qui, lui, serait la disponibilité théorique. Or, lorsque l'on examine l'essentiel des nouveaux programmes, particulièrement au primaire, il nous faut bien constater qu'en général, dans la bonne majorité des cas, le matériel didactique a déjà été approuvé. Il existe. J'ai sous les yeux, par exemple, anglais, langue seconde, où, effectivement, nous avons des manuels qui ont été approuvés; en mathématiques, pour le programme de juillet, nous avons une liste de manuels didactiques approuvés; en sciences humaines, c'est la même chose. Je continue, en français, langue maternelle, nous avons également des manuels didactiques. Nous avons toute une liste de manuels et je peux continuer. En fait, si je fais le tour des programmes, je dois constater que, dans la très grande majorité des nouveaux programmes, nous avons des manuels disponibles.

Je constate cependant, en français, langue maternelle, secondaire II, qu'il n'y a pas encore de matériel disponible actuellement. Il y a donc un certain nombre de cours, comme l'enseignement moral, premier cycle, où nous n'avons pas de matériel disponible actuellement. En latin, nous n'avons pas de matériel disponible. Par contre, en histoire générale, il n'y a pas vraiment de problème. En secondaire III, français, programme qui devrait entrer en vigueur en juillet 1984, nous n'avons pas encore de matériel disponible. En parcourant cela très vite, j'aurais l'impression que, peut-être, 80% ou 90% des programmes ont déjà des guides pédagogiques complétés depuis assez longtemps, en général. D'autre part, ils peuvent bénéficier d'un matériel didactique approuvé par le ministère qui existe donc sous forme de manuels imprimés chez les éditeurs québécois ou d'ailleurs.

Le Président (M. Charbonneau): Mais quand vous donnez ces pourcentages, vous parlez surtout du primaire ou du secondaire?

M. Bérubé: Je fais le tour, primaire et secondaire. Donc, dans l'ensemble, on pourrait dire que le matériel pédagogique devrait être disponible en ce moment, si je regarde les différents programmes. Effectivement, il semble que, dans l'ensemble, ce pourrait être jugé satisfaisant. Mais, comme je vous le soulignais - je prenais le cas du français, langue maternelle - en secondaire II et III, effectivement, il manque du matériel. Je pense au latin où il n'y a pas de matériel encore. Il y a donc encore quelques matières où, de fait, le matériel didactique n'a pas encore été

approuvé par le ministère et, par conséquent, manquerait aux enseignants. Dans ces cas-là, c'est clair, il faudra prendre un certain nombre de mesures et c'est ce que nous examinons présentement à la table mixte avec les enseignants et les commissions scolaires pour identifier plus clairement les secteurs.

Si je me résume, dans la majeure partie des programmes gouvernementaux, les guides existent et le matériel didactique a été approuvé. Cela ne veut pas dire, pour autant, que les commissions scolaires se sont procuré le matériel. À titre d'exemple, j'ai une grille que nous avons fait faire pour les différents cours du primaire et du secondaire avec, pour chaque région administrative du Québec, l'expression, de la capacité de l'ensemble des commissions scolaires du territoire, à implanter de tels programmes à l'heure actuelle. Je dois constater, malheureusement, que ma région n'est pas au premier rang, mais dans la région 01 les commissions scolaires estiment à 94,6% qu'elles peuvent, à l'heure actuelle, implanter les nouveaux programmes. Elles en ont les moyens. Il en va de même dans la région 08. J'ignore de quelle région il s'agit, mais le taux augmente à 97,5%. Par contre, dans une région comme Montréal, le taux baisse à 68%. Le problème de la capacité d'une commission scolaire à implanter un nouveau programme semble donc varier d'une région à l'autre. Deuxièmement, dans certains programmes particuliers, il faut reconnaître qu'il n'y a pas, à l'heure actuelle, de matériel didactique approuvé. Il y a donc deux problèmes combinés, mais il faut vraiment faire le partage des causes lorsqu'on analyse la question du matériel didactique.

Le Président (M. Charbonneau): Mais serait-il possible, si on voulait bien répondre aux interrogations des enseignants qui viennent nous voir, d'avoir une liste, à la fois pour le primaire et pour le secondaire, des programmes où on a le matériel et de ceux où on n'en a pas, où le matériel pourrait être disponible prochainement, d'une part? Deuxièmement, serait-il possible d'avoir la liste des commissions scolaires ou des régions où se présentent des problèmes particuliers?

Si on vous comprend bien, compte tenu de ce qui est également dit dans le document sur les crédits que vous nous avez présenté, le principal problème réside dans la volonté des commissions scolaires de procéder rapidement à l'achat des manuels avec les fonds dont elles disposent. Si on dit, par ailleurs - on en a parlé ce matin ou tantôt - que les commissions scolaires disposent de 150 000 000 $ de surplus et si vous nous dites qu'il y a des problèmes, surtout au niveau de la volonté des commissions scolaires de faire l'acquisition plutôt que la production pédagogique, il y a un problème particulier qui...

M. Bérubé: Non, je ne parlerais pas d'une volonté des commissions scolaires, parce que ce serait porter un jugement de valeur qui ne serait pas soutenu par la moindre analyse rigoureuse de ma part. Donc, on ne peut pas parler d'un manque de volonté de la part des commissions scolaires. Je préférerais laisser à d'autres toute interprétation de ce type.

Je me contenterai de souligner que la disponibilité des manuels scolaires dans une école précise est fonction de deux facteurs. L'approbation par le ministère d'un manuel à imprimer chez un éditeur qui peut le distribuer dans l'ensemble du territoire québécois en volume suffisant, voilà le premier problème. Le deuxième problème, c'est la disponibilité de fonds au moment précis de la mise en place du programme au sein de la commission scolaire pour financer de tels achats. À titre d'exemple, les programmes actuels n'entreront véritablement en vigueur qu'en 1986. Évidemment, pour éviter que tous les programmes n'entrent en vigueur en 1986, on a proposé un étalement. Il est toujours possible, pour une commission scolaire, d'aviser le ministère qu'elle ne peut pas répondre à l'objectif prévu pour un programme donné en septembre 1984, pour des raisons justifiées. À ce moment, elle ne fait que nous en aviser; cela règle le problème. En d'autres termes, il n'y pas d'obligation légale, à ma connaissance, à ce qu'une commission scolaire mette en vigueur, en ce moment, un nouveau programme.

Il faut donc que la commission scolaire planifie l'étalement de ses achats de manuels de manière que, au fur et à mesure qu'elle obtient le manuel nécessaire, elle mette le programme en place. Si elle a besoin de délais additionnels, elle peut, évidemment, en aviser le ministère.

Donc, le problème est double. On doit reconnaître que, pour les programmes prévus en septembre 1984, j'ai l'impression que les manuels didactiques ont été approuvés à environ 90%. Entre l'approbation par le ministère et leur disponibilité chez l'éditeur, qui doit en imprimer un nombre suffisamment grand, qui doit donc s'assurer auprès des commissions scolaires que celles-ci ont bel et bien l'intention de passer des commandes, et également entre la possibilité pour une commission scolaire de dégager le budget juste au moment précis où elle doit faire l'achat, si la commission scolaire a retardé quant à l'implantation d'autres programmes et se retrouve avec trop de programmes à mettre en place durant la même année, évidemment, elle se retrouve avec des achats de manuels trop élevés.

Il faut bien comprendre que nous avons

un système très décentralisé où un grand nombre d'intervenants, forts de leur autonomie, entendent bien prendre des décisions au fur et à mesure de leurs capacités. Il faut choisir: ou nous choisissons un système d'éducation très centralisé et, à ce moment-là, tout dépendra du gouvernement à Québec, ou, au contraire, on accepte un système plus décentralisé. (17 h 30)

Des problèmes tels que la disponibilité du matériel pédagogique deviennent, à ce moment-là, une responsabilité conjointe tantôt du gouvernement, par sa lenteur à donner certaines approbations et à être responsable de l'absence de matériel, tantôt ici, quand il s'agit des commissions scolaires, lorsque celles-ci retardent les décisions d'achat et font en sorte que leurs enseignants n'ont pas le matériel nécessaire. C'est un problème plus complexe.

Il va me faire plaisir de vous remettre la liste du matériel didactique qui est disponible pour les programmes que l'on prévoyait implanter en septembre 1984 dans la cédule d'implantation des nouveaux programmes. Vous pourrez voir que dans l'ensemble les manuels existent. J'ai même fait ajouter à cette liste, dans certains cas, du matériel didactique approuvé avant 1983-1984 qui demeure utilisable. En d'autres termes, le programme n'a pas été suffisamment modifié pour justifier la création d'un manuel complètement nouveau. Vous allez donc trouver, également, une troisième colonne vous donnant ce type de matériel qui était disponible antérieurement et qui peut toujours faire l'affaire. Vous allez trouver une grille additionnelle qui présente les résultats d'une enquête auprès des différentes commissions scolaires et qui porte plus spécifiquement sur leur capacité à mettre en vigueur les programmes prévus en septembre 1984.

Le Président (M. Charbonneau): Une dernière question sur cet aspect des manuels scolaires. Est-ce qu'il est dans votre intention de voir, avec les commissions scolaires concernées, la possibilité d'accélérer là où c'est possible pour que lorsqu'il y a des manuels déjà approuvés, par exemple au mois de septembre quand les nouveaux programmes rentreront en application, on ait les manuels? C'est la base, finalement. On se fait dire, à chaque fois qu'on rencontre des enseignants, qu'un des problèmes, c'est souvent qu'il n'y a pas de manuel disponible. Si on nous dit que les manuels sont là, il y aurait peut-être une opération particulière à amener.

M. Bérubé: La Fédération des commissions scolaires siège au comité mixte sur la tâche, également, à ma connaissance, elle va présenter un mémoire devant le Conseil supérieur de l'éducation. J'ose présumer que ses membres sont très sensibilisés, eux aussi, à ce problème, puisqu'ils le vivent quotidiennement dans leurs écoles. Je dois donc conclure qu'ils cherchent à opérationnaliser le plus rapidement possible l'implantation des nouveaux régimes. Est-ce possible de le faire partout au même rythme? Est-ce qu'on doit rajouter un peu d'étalement dans certains cas? C'est le genre de question qu'il va falloir examiner de concert avec les commissions scolaires et les enseignants qui vivent ces problèmes quotidiennement.

Le Président (M. Charbonneau): Une autre question en corollaire. Il y a des outils pédagogiques, mais il y a la capacité des enseignants et des éducateurs de les utiliser. Est-ce qu'il serait possible de nous identifier quels sont les mesures ou les efforts qui sont pris, actuellement, au niveau de la formation des maîtres ou du recyclage des enseignants? Il y a ces outils pédagogiques qui sont les manuels, il y a les nouveaux outils pédagogiques qui sont les machines informatiques, les micro-ordinateurs. Est-ce qu'il y a des efforts particuliers, en termes de recyclage et de formation des maîtres qui sont faits? C'est là aussi un des problèmes qu'on nous signale.

M. Bérubé: Je pense que le sous-ministre, M. Rousseau, responsable du primaire et du secondaire pourrait, mieux que tout autre, vous brosser un tableau des moyens mis en place pour assurer un perfectionnement des maîtres.

M. Rousseau: Donc, au point de départ il a été convenu, lors de la tournée qui a été faite avec le livre vert en 1977, que les enseignants devaient disposer de guides pédagogiques de manière à pouvoir assurer le plus possible leur propre autoperfectionnement. C'est pour cela que pour chaque programme d'études il y a un guide pédagogique qui propose toutes sortes d'avenues. Ces guides pédagogiques sont préparés par les enseignants qui ont déjà expérimenté ces projets de programmes et qui proposent, à toutes fins utiles, une forme d'autoperfectionnement pour l'enseignant.

Deuxièmement, les commissions scolaires, à même leur budget de perfectionnement, utilisent abondamment les journées pédagogiques pour assurer une implantation de ces programmes d'études.

Troisièmement, le ministère de l'Éducation prévoit dans ses budgets un montant de 2 000 000 $ de soutien pédagogique qui, en général, est plutôt utilisé par les directions régionales, par un mode que l'on appelle coopérative avec les commissions scolaires et ce sont les enseignants ou les conseillers pédagogiques

des commissions scolaires qui organisent ou qui offrent des sessions aux enseignants avec ces budgets. La règle de l'art que nous tenons à respecter, c'est qu'il n'y ait pas de programme qui devrait s'implanter s'il ne s'est pas écoulé une année entre le moment où le programme et le guide pédagogique sont parus et le moment où la commission scolaire décide d'implanter le programme. Il y a des cas où il faudra mettre plus de temps, il y en a d'autres où cela peut se faire plus rapidement.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce possible d'identifier, car nous sommes aux crédits, les sommes globales que le ministère de l'Éducation consacre au perfectionnement des maîtres ou au recyclage des enseignants?

M. Rousseau: Dans les budgets de perfectionnement pour ces fins-là, si je prends le perfectionnement relié à la micro-informatique pour 1984-85, il y a un montant de 1 200 000 $ qui est prévu en allocations supplémentaires. Ce montant découlant maintenant des conventions collectives pour les enseignants de 141 $ par enseignant, ce qui totalise un montant de 8 300 000 $ utilisé par les commissions scolaires.

Il y a également le perfectionnement des maîtres de l'enseignement professsionnel qui est de l'ordre de 200 000 $ qui sert à la mise à jour pour répondre à des programmes particuliers. Il y a également des perfectionnements organisés pour les animateurs de pastorale, pour les enseignants catholiques et protestants, pour les fins d'implantation de programmes de l'ordre de 180 000 $. En ce qui concerne les cadres et les professionnels, ainsi que les enseignants qui sont dans des régions éloignées, le budget de perfectionnement est de l'ordre 1 600 000 $, à part les 2 000 000 $ mentionnés plus tôt lequel sert dans des formules coopératives à assurer l'implantation des programmes, toujours comme source de perfectionnement des enseignants.

Le Président (M. Charbonneau): Cela ne comprend pas les montants payés pour les enseignants qui sont à l'université.

M. Rousseau: Cela ne comprend pas la formation universitaire. Non, c'est certain. Cela est uniquement à partir de nos programmes 2 et 4, des montants qui sont alloués aux commissions scolaires pour fins de perfectionnement. Mais si les universités -c'est leur rôle - dans le cadre des facultés de sciences de l'éducation ou dans le cadre des facultés de l'éducation permanente ou autres, offrent des services de perfectionnement, elles sont financées à même leur propre enveloppe. Elles peuvent exiger un montant par crédit et ces montants-là sont donc défrayés par les commissions scolaires.

M. Bérubé: J'aimerais, M. le Président, en même temps déposer à cette commission, même si j'ignore les règles... peut-on déposer des documents?

Le Président (M. Charbonneau): Oui, avec mon consentement vous pouvez le faire, paraît-il.

M. Bérubé: J'aimerais déposer le document demandé concernant la disponibilité de matériel pédagogique et la capacité pour les commissions scolaires, en septembre 1984, d'implanter ces nouveaux programmes.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre.

M. le député d'Argenteuil.

Enseignement des sciences

M. Ryan: En page 10 du cahier explicatif, on indique, entre autres, que les programmes de mathématiques et de sciences, pour secondaire IV et V, ne seront implantés qu'en 1988. Cela marque des retards par rapport à l'échéancier que vous aviez transmis l'an dernier.

Je me souviens que, l'an dernier, on avait dit que, pour les programmes de sciences et de mathématiques, il y avait un problème d'arrimage qui se posait avec le collégial. Je voudrais savoir comment vous expliquez le retard qui est arrivé. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'il faudrait mettre un peu plus d'urgence dans ces disciplines qui sont si importantes pour le virage technologique? Parce que le virage technologique, ce n'est pas seulement des appareils, comme aime à nous le dire le ministre; c'est le développement scientifique qui pourra, dans tous les champs de connaissances, faire usage des meilleurs instruments disponibles.

Je continue dans la même veine. J'ai deux ou trois questions précises là-dessus. Pourrait-on nous indiquer également la nature des travaux qui peuvent être en cours en vue de résoudre la difficulté? J'aimerais qu'on me précise également si le programme de physique 1 et 2, qui devait être appliqué obligatoirement en juillet 1985, doit toujours l'être à cette date, parce qu'il n'en est pas question dans la liste qu'on trouve dans le cahier explicatif.

Je voudrais également avoir des précisions sur le cours de chimie dont j'apprends qu'il aurait subi de nombreux retards et qu'une nouvelle équipe aurait été formée pour compléter la rédaction. Où en est-on par rapport à ce projet de cours? Ensuite, j'aurais une autre question: l'échéancier concernant l'informatique.

M. Rousseau: À l'égard de l'enseignement des sciences, vous vous souvenez sûrement, lors de la dernière défense des crédits, que le ministre de l'Éducation avait indiqué une certaine inquiétude concernant l'état d'un certain nombre de programmes. Il y a eu énormément de réflexion et de critique à l'égard du régime pédagogique considérant que le temps consacré à l'enseignement des sciences semblait être moins important au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Il y a donc eu une proposition de modification au régime pédagogique et un avis a été demandé au Conseil supérieur de l'éducation. Cette modification entraînerait donc nécessairement au programme d'étude, en physique, en chimie et en sciences, un cours de sciences générales regroupant la physique et la chimie en secondaire IV et offrant des cours à option en secondaire V. Il y a donc une révision des programmes actuels par une croissance du temps consacré à l'enseignement de cette matière et également par une continuité qui puisse permettre, selon l'expression qu'on utilise, un meilleur arrimage avec l'enseignement collégial.

Maintenant, pour l'implantation en 1988, puisque les programmes sont en train d'être réalisés, s'ils sont terminés l'an prochain -ce qui nous mène en 1985 - les commissions scolaires pourront les appliquer immédiatement. Comme je l'ai indiqué tantôt, notre règle de l'art est qu'on n'impose pas mais, avant d'imposer l'implantation d'un programme, on exige que le maître puisse avoir en main le programme et le guide pédagogique également. Mais une commission scolaire voulait accélérer le processus d'implantation, comme plusieurs l'ont fait dans des matières pour lesquelles le guide pédagogique n'était absolument pas complété, elles pourront toujours le faire. En termes d'obligation, il a été convenu qu'on respecterait les enseignants de manière à pouvoir leur fournir l'ensemble de la documentation avant de créer l'obligation.

M. Bérubé: J'ajouterais une considération politique autour de la question du député d'Argenteuil, dans sa demande pour accélérer l'implantation de nouveaux programmes. J'ai cru déceler une demande fréquente, entendue de part et d'autre, pour l'implantation plus rapide d'un programme, que ce soit l'économie familiale, l'initiation à la technologie, l'initiation à l'informatique. Les pressions sont perpétuelles pour qu'on implante de nouveaux programmes et surtout vite.

Ce que nous discutons justement, présentement, à notre comité mixte sur la tâche, c'est ce problème de trop, trop vite. En fait, chaque recommandation part d'un bon naturel. Le député d'Argenteuil n'a pas fait cette suggestion sans y avoir pensé à l'avance. Je pense qu'il est préoccupé par la formation scientifique au niveau secondaire et aimerait que l'on atteigne un haut niveau le plus rapidement possible. C'est toujours à partir de ces bonnes intentions que l'on se retrouve généralement avec un problème opérationnel d'un grand nombre de programmes à mettre en place trop vite.

M. Ryan: Je crois que le ministre fait erreur: il m'impute des suggestions que je n'ai jamais faites. J'ai posé des questions précises auxquelles j'ai reçu des réponses qui m'ont satisfait. Je n'ai pas parlé de cours d'économie familiale, d'introduction à la science informatique. Je vais vous en parler à propos de l'enseignement privé parce que, là, il y a quelque chose.

Vous donnez des avantages aux institutions du secteur public que vous refusez très souvent aux institutions du secteur privé, en particulier dans trois disciplines qui sont exactement celles que vous avez nommées. On aura l'occasion d'y revenir un peu plus tard, mais je n'ai exprimé aucune espèce d'opinion en rapport au cheminement de ces trois disciplines dans le secteur public dont nous discutons maintenant.

Les questions que j'ai posées portaient sur la physique, les sciences, les mathématiques, la chimie, etc. On aura l'occasion d'en reparler, M. le ministre. C'est un malentendu mineur, celui-là, à comparer avec d'autres.

Dans la même veine, on peut rattacher à ce qu'a soulevé le président de la commission tantôt, toute la question des programmes; évidemment la politique informatique du gouvernement. Je ne veux pas l'aborder sous des aspects plus politiques qui sont présentement l'objet d'échanges de vues à l'Assemblée nationale proprement dite. Ce qui m'intéresse de connaître ici aujourd'hui, c'est le cheminement de l'échéancier qu'on nous avait soumis l'an dernier. L'an dernier - les collaborateurs du ministre s'en souviendront - nous avions insisté pour obtenir un échéancier précis, c'est-à-dire une explication détaillée sur le plan quinquennal, qui avait été rendu public par le prédécesseur du ministre actuel, en mars 1983; il l'avait complété par d'autres interventions au cours des mois qui suivirent. (17 h 45)

On nous avait remis ce plan l'an dernier vers la fin de l'étude des crédits. Nous n'avons pas eu le temps de l'examiner sérieusement, à ce moment-là, parce que nous étions contraints par les limites de temps que vous connaissez. Mais, nous avons eu le temps de l'examiner, au cours de la dernière année. Je pense que le ministre a eu le temps d'en prendre connaissance depuis qu'il est responsable du dossier de

l'éducation. J'avais l'occasion de lui demander certaines précisions dans une lettre que je lui ai adressée il y a quelque temps. À cette lettre, il m'a répondu en me fournissant certaines informations qui étaient tirées, évidemment, du cahier des crédits, le livre bleu, pour l'année 1984-1985. Je lui laisserai l'occasion de fournir ces explications, tantôt.

Mais je constatais dans sa réponse que sur les sommes qui avaient été prévues pour une politique informatique, en 1983-1984, il était resté un surplus de 9 231 000 000 $. Le ministre ajoutait, à la fin de sa note, l'observation suivante: Une demande au Conseil du trésor est actuellement en cours pour autoriser le report du solde 1983-1984 à l'exercice financier 1984-1985, qui pourrait être utilisé pour la formation des maîtres du réseau primaire et secondaire pour le programme d'initiation à la science informatique au niveau secondaire, évidemment.

Tout d'abord, je voudrais rappeler au ministre ce que j'ai eu l'occasion d'exprimer déjà, mais je pense que c'est important de le redire ici. Dans l'équilibre de l'affectation des ressources, pour la première année et pour les années subséquentes, je trouvais que les sommes réservées pour les fins proprement pédagogiques, à commencer par la formation des maîtres, en incluant aussi le développement de logiciels et de didacticiels, la recherche, la production d'instruments qui puissent favoriser le développement de la science informatique et de la formation informatique, je trouvais que le programme qu'on nous avait présenté, dis-je, était très sensiblement débalancé en faveur de la quincaillerie.

Alors, je voudrais demander au ministre si des ajustements sont en train d'être apportés à ce programme quinquennal qui nous avait été soumis l'an dernier et de nous préciser dans quel sens.

M. Bérubé: II n'y a pas encore de décision ministérielle définitive quant à la pénétration de l'informatique dans notre réseau, dans la mesure où l'on m'a soumis un document de travail qui est un projet de nouvelle programmation en informatique, il y a quelques jours. Malheureusement - c'est un document qui a été préparé en mars de cette année - je n'ai pas eu le temps d'y consacrer toute l'attention qu'il mérite. Et on ne peut donc pas parler, à l'heure actuelle, d'une décision à tout le moins ministérielle en ce qui a trait à l'échéancier de pénétration de l'informatique dans le milieu scolaire, particulièrement en ce qui a trait à l'aspect pédagogique de l'utilisation de l'informatique dans le cadre des programmes existants. Ce qui m'apparaît cependant plus clair à l'heure actuelle, c'est le problème de l'initiation aux sciences informatiques, de l'identification des clientèles susceptibles de prendre un tel cours et des besoins du réseau pour assumer un tel enseignement. Je pense que, à cet égard, le ministère a certes une vue plus claire et plus facilement définissable, puisque la clientèle est bien connue, le cours également est bien connu ainsi que les besoins.

Si vous voulez, on peut développer cette question, la partie pédagogique de l'informatique en milieu scolaire. Vous noterez que, dans le budget de cette année, on prévoit des sommes de l'ordre d'à peu près 3 500 000 $ pour la formation pédagogique et plus particulièrement, la création de logiciels. Vous noterez également qu'il y a tout près de 4000 enseignants qui suivent, cette année, des cours d'introduction à l'informatique, qu'il y a tout près de 10 000 enseignants au Québec qui ont suivi des cours d'initiation à la science informatique. Donc, il y a un intérêt très réel de la part des enseignants pour une telle science, mais je ne pourrais pas élaborer beaucoup plus, puisque nous sommes dans un secteur en plein développement, où

Il est encore difficile de définir avec précision quels devraient être les objectifs quantitatifs de pénétration dans les différents programmes d'enseignement, puisqu'il y a là une question d'adéquation entre les didacticiels et les régimes pédagogiques eux-mêmes. Deuxièmement, il y a un problème de formation de l'enseignant à l'utilisation de ces didacticiels dans le cadre des cours réguliers. Finalement, il y a le problème de la disponibilité du matériel et du didacticiel directement dans les classes. Ce problème-là, je compte m'y consacrer, mais j'avouerai en toute franchise que je ne l'ai pas fait encore.

Mais si vous voulez que l'on discute des vues du ministère à ce jour, je n'ai absolument aucune objection à ce que M. Pronovost puisse élaborer sur ce qui s'est fait au ministère en ce qui a trait à la pénétration de l'informatique dans le milieu scolaire.

M. Ryan: Regardez, je pourrais peut-être vous adresser une couple de questions supplémentaires, et puis il pourra prendre le tout en même temps, car nous approchons 18 heures.

Vous avez fait mention, justement dans vos remarques d'un montant de 3 500 000 $ qui est inscrit dans les prévisions budgétaires. Pardon?

M. Bérubé: II est inscrit quelque part.

M. Ryan: Oui, à la page 13, programme 4, M. le ministre. Je trouve, à la page 35 du même programme 4, mention d'un montant de 2 400 000 $ qui sera injecté, selon la

terminologie barbare du ministère, au budget de fonctionnement à titre complémentaire au plan d'acquisition de matériel micro-informatique. Évidemment, lorsqu'il est question d'acquisition de matériel, cela nous fait frissonner un peu, étant donné les expériences vers lesquelles le gouvernement nous a entraînés. Je voudrais savoir si ces deux montants sont distincts ou si le 2 400 000 $ est partie du 3 500 000 $. Je vous signale que, dans les explications, j'ai fait un recensement de tous les endroits où il est question de politique informatique, nous avons peut-être une quinzaine d'endroits différents; ce n'est pas facile de se retrouver dans ce jargon. Je ne sais pas s'il y aurait possibilité que, l'an prochain, le cahier explicatif soit accompagné d'un index onomastique afin que nous puissions retrouver tous les passages relatifs à un sujet. Parce que c'est une tâche qui est pratiquement impossible pour des députés, à moins qu'ils n'aient une volonté terrible d'embarrasser le ministre, ce qui n'est pas notre cas.

Je remarque, par exemple, certains montants. Le premier, je croyais comprendre qu'il était pour des fins pédagogiques, 3 500 000 $; le deuxième, 2 400 000 $; je crois qu'il est pour l'acquisition de matériel micro-informatique. Ma question est la suivante: Est-ce que cela vient s'ajouter aux sommes qui étaient déjà dans le plan quinquennal qui nous a été soumis l'an dernier pour des fins pédagogiques? On prévoyait déjà une somme d'à peu près 5 000 000 $ pour des fins pédagogiques. Est-ce que cela vient s'ajouter, est-ce que c'est 3 500 000 $ plus 2 400 000 $ ou si cela fait partie de cela?

Deuxièmement, est-ce que les calculs, plus exactement les projections qui avaient été établies pour des dépenses aux fins d'acquisition d'équipement, de l'ordre de 34 000 000 $ pour la prochaine année, le sont indépendamment de ce qui s'est produit en 1983-1984?

M. Bérubé: D'abord, quand je parle de 3 500 000 $ ou de 3 800 000 $, le montant exact, j'incorpore l'informatique au niveau secondaire et au niveau collégial, alors que le montant que vous avez, 2 400 000 $, correspond au montant qui ira au niveau secondaire et porte plus spécifiquement sur l'aspect pédagogique, recherches, préparation de didacticiels et de logiciels.

M. Ryan: J'écoute mais je ne comprends pas.

M. Bérubé: Parfois, il y a la fatigue qui ralentit effectivement les cellules grises.

M. Ryan: Non mais c'est parce que vous parlez d'un montant de 3 800 000 $ que nous ne trouvons nulle part. Je parle d'un montant de 3 500 000 $ que je trouve à la page 13.

M. Bérubé: À la page 13.

M. Ryan: Oui. Programme 4. Et un autre montant de 2 400 000 $ que je trouve à la page 35. Ce sont ces montants que je voudrais voir expliquer et non des montants qui sortent de nulle part.

M. Bérubé: C'est le même montant exprimé tantôt en années scolaires, tantôt en crédits.

M. Ryan: Le même montant que quoi, M. le ministre?

M. Bérubé: Pour la partie pédagogique de l'informatique aux niveaux primaire et secondaire.

M. Ryan: Mais ma question était: est-ce que ce montant s'inscrit dans ce qui était déjà dans le plan quinquennal ou s'il vient s'ajouter?

M. Bérubé: Là, j'ai de la difficulté puisqu'il faudrait que je sache à quel document vous faites référence lorsque vous parlez du plan quinquennal qui vous a été fourni l'année dernière. Je préférerais que M. Pronovost réponde.

M. Ryan: Je comprends qu'on ne vous l'ait pas fourni, parce que cela fait longtemps qu'il semble dépassé.

M. Pronovost (Jean): Le plan quinquennal représente des prévisions qu'on avait faites l'an dernier. Le montant qu'on vient de citer représente l'investissement que le gouvernement fait pour l'année 1984-1985.

M. Ryan: Alors, cela va être moins...

M. Pronovost: II doit donc être compris comme faisant partie intégrante du plan quinquennal.

M. Ryan: Alors, cela va être moins que ce qui était prévu au plan quinquennal?

M. Pronovost: Les prévisions qu'on a faites sont sujettes à révision.

M. Ryan: Somme évolution vers la pédagogie!

M. Pronovost: On a fait une consultation parmi les commissions scolaires.

M. Ryan: Je suggère à M. le ministre de regarder cela de près, parce qu'il m'a fait des leçons l'autre jour me reprochant de me désintéresser de la pédagogie.

M. Bérubé: C'était, d'ailleurs, assez évident.

M. Ryan: Je m'aperçois qu'en 1984-1985 il y a moins d'argent prévu que ce qui avait été inscrit dans le plan quinquennal l'an dernier.

M. Bérubé: Je pense que...

M. Ryan: Je ne sais pas si vous pourrez regarder cela, mais si vous n'avez pas vu le plan quinquennal, j'aime autant qu'on n'en discute pas.

M. Bérubé: Si je devais exprimer une opinion concernant la pénétration de l'informatique à des fins pédagogiques, c'en serait une de prudence. Dans la mesure où il s'agit d'instruments nouveaux, je pense que nous devrons mesurer très soigneusement le rythme d'implantation, de telle sorte qu'ils correspondent véritablement à un investissement utile et non à un gaspillage de fonds publics.

Dans la mesure où le plan quinquennal initial représentait une première projection, je pense que le député d'Argenteuil ne devrait pas se surprendre que nous procédions à une réévaluation de ce plan quinquennal. Que les chiffres, une fois réévalués, ne concordent pas nécessairement à l'estimation initiale, il n'y a là rien de mystérieux. Je dirais même que c'est le résultat d'une saine sagesse qui fait que plus on approfondit une question, plus on peut assurer que les objectifs que l'on se définit ont des chances d'être atteints.

Le Président (M. Charbonneau): Sur cette réponse, se termine la séance de cet après-midi. Je vous rappelle que ce soir nous allons continuer l'étude du programme 4, mais particulièrement sous l'axe du plan d'insertion sociale et professionnel, du plan d'action et aussi sur la politique de formation professionnelle des jeunes. Par la suite, nous entamerons l'étude du programme 7, c'est-à-dire l'éducation des adultes.

Je suspends les travaux jusqu'à 20 heures, ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 59)

(Reprise de la séance à 20 h 15)

Le Président (M. Charbonneau): À l'ordre, s'il vous plaît! Mesdames et messieurs, si vous voulez prendre place, nous allons reprendre nos travaux. M. le député d'Argenteuil voudrait revenir sur une question qui avait été abordée précédemment et pour laquelle nous avons obtenu des compléments d'information du ministère de l'Éducation. M. le député d'Argenteuil, M. le ministre. Cela va à l'autre bout de la table.

M. Bérubé: Oui, M. le Président, je m'excuse, je suis désolé.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil.

Subventions de rattrapage aux commissions scolaires (suite)

M. Ryan: En réponse à une demande que j'avais faite avant l'ajournement pour le lunch, les collaborateurs du ministre m'ont remis tantôt un document qui s'intitule État des subventions dues aux commissions scolaires au 31 mars 1984. Je dois dire qu'à première vue les données contenues dans ce document répondent aux questions que j'avais posées. Je voulais connaître de manière claire la situation comme elle se présentait au 31 mars 1984 et la question a été bien comprise. Je remercie les fonctionnaires qui m'ont fourni ces données. Maintenant, je voudrais cependant ajouter un commentaire qui me paraît extrêmement important et qui se dégage des données qu'on nous a présentées. Nous avons fonctionné, dans le débat de cet après-midi, en partant de l'hypothèse que le gouvernement aurait remboursé sur les paiements qui étaient dus aux commissions scolaires les 281 000 000 $ en 1983-1984. Or, quand je fais l'addition des sommes qui sont contenues dans le rapport qu'on vient de déposer, le vrai total, c'est 465 000 000 $ dont d'après ce que je peux comprendre, un premier montant de 184 400 000 $ aurait consisté en des remboursements d'emprunts anticipés qui auraient été faits à même le fonds de suppléance du ministère des Finances et un autre groupe de paiements anticipés d'une valeur de 281 000 000 $ faits à même les fonds du ministère de l'Éducation, ce qui fait en tout 465 000 000 $ de paiements anticipés de dettes qu'on a financées à même toutes les mesures qui ont été imposées d'autorité juste à la veille de l'année 1983-1984. Je pense que c'est la première fois que nous prenons connaissance de ces chiffres. Ils nous ont toujours été pudiquement voilés par le gouvernement jusqu'à maintenant et je pense qu'ils renforcent considérablement la thèse que nous avons défendue cet après-midi.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, est-ce que vous avez un commentaire?

M. Ryan: Est-ce que vous en avez additionné deux fois trop?

Une voix: Non, non.

M. Ryan: Est-ce correct?

M. Bérubé: De mémoire, je dois reconstituer les faits. Là, vous essayez de faire la discussion complète sur tous les versements anticipés. Le ministre des Finances avait annoncé, lorsqu'il a déposé son budget l'année dernière - du moins, son budget supplémentaire - pour près de 450 000 000 $ de versements anticipés. Cela a été annoncé officiellement par le ministre des Finances. Il me faudrait, si on voulait vérifier exactement le montant, recourir au budget supplémentaire déposé par le ministre des Finances à l'automne. Seul ce budget supplémentaire nous permettrait, effectivement, d'évaluer le montant total. À ma connaissance, de . mémoire, c'était de l'ordre d'environ 450 000 000 $, si je ne me trompe pas.

M. Ryan: Et...

M. Bérubé: Alors, si je comprends bien, ces 450 000 000 $ annoncés par le ministre des Finances, on peut les décomposer en plusieurs types de dépenses anticipées. Si je comprends bien le tableau qui nous a été remis, il y aurait 184 000 000 $ de remboursement d'emprunts anticipés et 281 000 000 $, pour un total de 465 000 000 $. C'est probablement le montant qu'a annoncé le ministre des Finances à l'automne. Cela me semble de l'ordre de grandeur dont il parlait.

M. Ryan: Dans le cahier explicatif, on ne trouvait pas toutes ces données. Il a fallu les solliciter avec insistance.

M. Bérubé: II n'y a rien de confidentiel. Le ministre des Finances en a parlé très clairement dans la présentation de ses crédits. Je dois dire que j'ai même fait état, puisque c'est moi-même qui ai déposé les crédits, du montant très précis de l'anticipation des dépenses que nous faisions. D'ailleurs, ce montant de 400 000 000 $ à 500 000 000 $ avait fait l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale entre le député de Vaudreuil-Soulanges et le ministre des Finances. Il n'y avait absolument rien de caché. Il a toujours été là; il a toujours été connu. Il n'a pas changé, c'est le même.

M. Ryan: En tout cas, le gouvernement a fait...

M. Bérubé: Nous le voyons à rebours. Ce que nous avons vu à l'automne, nous l'avons vu en termes de décision d'engager les dépenses pour l'année suivante. Cette année, nous le revoyons à rebours, en ce sens que nous voyons baisser nos dépenses, compte tenu du paiement anticipé. Nous voyons la même chose deux fois.

M. Ryan: M. le Président, cet après- midi, au cours de la discussion que nous avons eue, le ministre semblait ignorer complètement la deuxième partie que nous mettons clairement au jour ce soir. Je réaffirme ce que je disais: C'est une opération considérablement lourde et abusive de la part du gouvernement d'avoir financé un remboursement accéléré de sa dette accumulée et le paiement de certains versements qui n'étaient pas dus aussi tôt en recourant à des mesures aussi autoritaires que celles qui ont été prises pour en arriver à ces fins. Cela prouve au moins une chose, c'est que l'argument qu'invoquait le ministre tantôt, c'est-à-dire le surplus imprévu au chapitre des versements fédéraux, ne servait à payer que la moitié de cela. L'autre moitié est venue de la poche des travailleurs du secteur public.

M. Bérubé: Mais non. M. Ryan: Voyons donc!

M. Bérubé: M. le Président, le député d'Argenteuil est tout mêlé dans ses papiers, que voulez-vous que je fasse! Le ministre des Finances a très clairement, de la façon la plus limpide, indiqué l'automne dernier lorsqu'il a présenté son budget supplémentaire, qu'à la suite de versements imprévus, rétroactifs pour les deux années précédentes en provenance du gouvernement fédéral, lesquels versements viennent en bonne partie d'une réévaluation de la population réelle du Québec, il avait le choix entre réduire son déficit pour l'année courante ou réduire ses dépenses de l'année suivante. Dans la mesure où son programme d'emprunt était essentiellement complété et qu'il n'y avait alors aucun intérêt à chercher à réduire son déficit, puisque son programme d'emprunt était largement complété, il a choisi de réduire ses dépenses de l'année suivante. Dans les crédits, j'ai déposé au fonds de suppléance un montant - de mémoire - de l'ordre de 450 000 000 $ qui devait servir à anticiper des factures de toutes sortes, de préférence des factures attribuables au service de la dette.

Cela était clair et limpide. Nous l'avons, de plus, expliqué, cela ne pouvait pas être plus clair. Je ne peux pas comprendre comment le député d'Argenteuil peut s'enfoncer dans une espèce de logique où il déforme systématiquement et méthodiquement les faits, les chiffres et les concepts, de manière à pouvoir s'autojustifier l'opinion préconçue qu'il a décidé d'avoir. La réalité, c'est que nous n'avons pas voulu, comme gouvernement, nous engager dans des dépenses récurrentes sur la base d'un revenu non récurrent. Par conséquent, le ministre des Finances n'a pas voulu s'engager dans une augmentation du niveau des dépenses récurrentes qui aurait fait que l'année

suivante, sans ce revenu exceptionnel, nous aurions dû, néanmoins, faire face à cette dépense. C'est l'absence de compréhension du député d'Argenteuil en ce qui a trait à la notion de dépenses récurrentes qui fait qu'il s'induit lui-même en erreur. Il "s'autopeluredebananise" essentiellement.

M. Ryan: Avez-vous terminé?

Le Président (M. Charbonneau): Avez-vous terminé?

M. Bérubé: Oui, M. le Président, j'ai essentiellement terminé.

M. Ryan: M. le Président...

M. Bérubé: Le député d'Argenteuil, ouvrant tout grand le piège comptable qu'il a choisi lui-même de définir, tombe directement dedans. Le raisonnement que le gouvernement a fait est simple. Il ne s'agit pas d'accroître aujourd'hui un rythme de dépenses récurrent qui se reproduira l'année suivante, avec l'indexation en plus, en cherchant à le financer avec un revenu non récurrent. Ce serait comme quelqu'un qui déciderait d'augmenter son rythme de vie de 20 000 $ sous prétexte qu'il a gagné une fois à la Loto-Québec ce même montant. C'est parfait un an, mais cela pose des problèmes l'année suivante. C'est ce que le député d'Argenteuil n'a pas l'air de comprendre.

M. Ryan: M. le Président, avec le genre d'explications que le ministre essaie laborieusement de fournir depuis le début de la journée, il pourrait se passer de faire des leçons aux autres. On l'a vu assez souvent perdre du temps à consulter, parce qu'il ne savait pas quoi dire. Il pourrait au moins écouter avec un peu de respect ce qu'on lui dit. Nous autres, on discute de chiffres. On ne s'embarque pas dans des procès de compétence et ces choses-là. Mais je vous dis une chose: Le montant que nous avons ici en remboursements anticipés de dettes dans le domaine scolaire est de 465 000 000 $ pour la dernière année. C'est incontestable. Vous avez remboursé ce montant pendant qu'en même temps vous faisiez une ponction d'au-delà de 500 000 000 $ sur les salariés du secteur public par des mesures autoritaires que nous avons dénoncées à maintes reprises du côté de l'Opposition. Cela fait penser à un propriétaire d'entreprise qui dirait: Mon affaire est en train de faire faillite, il faut absolument que je vous coupe les salaires, cela n'a pas de bon sens. Et à la fin de l'exercice il dit: Savez-vous, il est arrivé certaines choses et tout cela, j'ai remboursé les trois quarts de ma dette et je vous remercie. Je n'étais pas pour rien faire d'autre. On continue comme avant. C'est l'impression qu'on a quand on voit ces chiffres. Je pense que vous devez être sensible à cet argument. Si j'avais fait cela comme directeur d'une entreprise pendant quinze ans, j'aurais encouru de très sévères représailles de la part de mes employés syndiqués. Ce sont des choses qu'on n'était pas autorisé à faire.

J'ajoute ceci: On me signale que, dans le supplément qui est parvenu d'Ottawa pour le dernier exercice, nous avons établi lors des débats qui ont eu lieu à ce sujet que la plus grande partie, contrairement à ce qu'affirme le ministre, est récurrente. Le gouvernement ne veut pas l'admettre. Ce sera comme toutes les choses qu'il a dites à ce sujet au cours des quatre dernières années, auxquelles il ne faut pas prêter foi parce qu'elles se sont avérées fausses et partiales.

M. Bérubé: M. le Président, je suis au courant des projections de revenus de transfert pour l'année prochaine et, malheureusement, c'est l'assertion du député d'Argenteuil qui est fausse. Il aura l'occasion de s'en apercevoir quand viendra le temps.

Deuxièmement, le député d'Argenteuil devrait, je pense, respecter jusqu'à un certain point une expertise qui existe au niveau des finances publiques. On ne peut pas reprocher au député d'Argenteuil de ne pas être nécessairement un spécialiste en finances publiques. Il a, par mégarde, omis de réaliser que cet apport additionnel identifié par le ministre des Finances a été fait à l'automne de l'année dernière; donc, il ne s'appliquait pas à l'exercice budgétaire de 1982-1983, mais bien à l'exercice budgétaire de 1983-1984 et l'opération de resserrement budgétaire, au cas où le député d'Argenteuil ne le saurait pas, s'est faite en 1982-1983, c'est-à-dire durant la période de récession économique que nous avons connue et qui a commencé à peu près à l'automne 1981 pour se prolonger pendant environ dix-huit mois. Donc, malheureusement, le député d'Argenteuil est mal informé à l'heure actuelle quant aux dates où les différents événements se sont produits. (20 h 30)

Insertion sociale et professionnelle des jeunes

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. le ministre. Nous allons maintenant, conformément à ce qu'on avait décidé plus tôt, aborder deux autres questions qui concernent le programme 4, soit le plan d'insertion sociale et professionnelle des jeunes et, par la suite, le plan d'action ou la politique de formation professionnelle des jeunes.

Je voudrais seulement poser quelques questions, d'abord, sur le plan de l'insertion

sociale. Le député de Fabre a des questions à poser sur la politique de formation professionnelle des jeunes. Étant donné qu'il est maintenant 20 h 30 et que l'on doit terminer à 22 heures, je suggérerais, si on pouvait prendre une demi-heure pour ces deux questions qui sont dans le programme 4, que l'on puisse se réserver une heure pour le programme 7 sur l'éducation des adultes.

Pour ma part, mes questions seront assez brèves, M. le ministre. En mars dernier, il y a un an maintenant, le premier ministre annonçait un plan d'action pour les jeunes dont un volet particulier de mesures dans le domaine de l'éducation, qui visaient la prévention du décrocheur scolaire et des mesures qui visaient à favoriser le retour aux études d'un certain nombre de jeunes qui avaient décroché au niveau secondaire en particulier, mais également au niveau collégial. Vous faites état, dans le bilan 1983-1984 et dans les orientations pour l'année 1984-1985, d'un certain certain nombre de chiffres. On en retrouve aussi un peu plus loin dans le cahier en particulier, pour l'année 1984-1985, un montant additionnel de 3 500 000 $ qui permettrait au ministère de rejoindre une clientèle beaucoup plus grande et de rattacher à l'école plus de 9000 autres décrocheurs.

J'aimerais savoir, en comparaison avec l'année 1983-1984 et les efforts financiers qui sont faits en 1984-1985, quels sont exactement les montants d'argent qui seront affectés à ces mesures également, quel est le niveau de collaboration que le ministère a obtenu de la part des commissions scolaires. Il semble qu'il serait utile de savoir si les subventions qui étaient accordées aux commissions scolaires ont reçu un accueil plus ou moins enthousiaste ou très enthousiaste de la part des commissions scolaires. Est-ce que les sommes d'argent qui avaient été initialement prévues en mars 1983 ont été suffisantes et ont permis le financement de l'ensemble des projets soumis par les commissions scolaires?

Il serait peut-être utile également de faire le lien par rapport aux ajouts dont vous parlez et aux annonces qui ont été faites au mois d'octobre, je crois, par le premier ministre qui, semble-t-il, visaient à bonifier les mesures annoncées au mois de mars 1983.

M. Bérubé: Je pense qu'il faut distinguer assez clairement les mesures qui ont été annoncées par le premier ministre et qui portent sur l'insertion sociale et professionnelle des jeunes et le programme de modification du régime d'aide sociale. Ce sont deux programmes distincts. Dans un cas, il s'agit des jeunes inscrits à l'aide sociale, qui n'ont, malheureusement, pas terminé leurs études secondaires, qui choisissent de retourner aux études secondaires et qui, par le passé, perdaient automatiquement leurs prestations d'aide sociale sans être admissibles au régime de prêts et bourses qui ne s'applique pas au niveau secondaire; ils verront maintenir leur admissibilité à l'aide sociale.

Nous avons fait plus que maintenir leur admissibilité à l'aide sociale; nous avons bonifié l'aide sociale comme nous l'avons fait dans le cas d'une insertion en milieu de travail par un apprentissage en usine, comme, d'ailleurs, nous la maintenons dans le cas de l'insertion dans du travail communautaire mis en place par une municipalité ou par un organisme sans but lucratif. Il y a donc cette volonté gouvernementale de faire en sorte que l'aide sociale cesse de s'identifier à ce ghetto, à ce piège dont on ne peut sortir, parce qu'il encourage à l'inaction et "désincite" tout effort de réinsertion en milieu de travail, en milieu d'activité ou en milieu éducatif.

C'est le volet annoncé par le gouvernement dans le cadre du plan de relance et qui porte sur une modification de la philosophie qui sous-tendait nos programmes d'aide sociale, particulièrement pour les jeunes. Nous espérons qu'après cette première expérimentation avec un bassin important, qui rejoint presque 150 000 bénéficiaires d'aide sociale, nous pourrons étendre ce type d'approche à l'ensemble de la clientèle, car elle nous paraît fondamentalement saine.

Dans la mesure où nous avons jugé que, parmi les activités valables que l'on pouvait offrir à un jeune, il y avait cette insertion sociale, le ministère de l'Éducation s'est vu mandaté pour mettre en place un ensemble de moyens d'accueil qui fassent en sorte que non seulement on puisse accueillir ces jeunes qui ont décroché, mais également éviter le décrochage. Cela se traduit, d'abord, par des services d'orientation, d'information, c'est-à-dire essentiellement des ressources humaines additionnelles, de la documentation, de l'information qui permet d'offrir un meilleur accueil aux jeunes qui s'adressent à une commission scolaire. L'année dernière, ce budget était d'à peu près 400 000 $.

On a prévu également des ressources additionnelles à l'intention de ces décrocheurs potentiels que l'on pourrait identifier dans les écoles. C'est-à-dire que ce sont des jeunes dont les résultats scolaires sont plutôt décourageants, dont l'absentéisme à l'école est mauvais présage d'une fin rapide des études. Donc, il s'agit de mettre en place des techniques de prévention par tests, questionnaires, en offrant un meilleur encadrement à l'intérieur de la commission scolaire, en prenant en charge plus directement les élèves qui ont été identifiés par le personnel de l'école. Il s'agit donc de ressources humaines que l'on insère à l'intérieur des commissions scolaires et qui prennent en charge ces jeunes dont on craint

qu'ils abandonnent l'école.

On a pu ainsi rejoindre à peu près 42 000 jeunes en 1983-1984. En 1984-1985, on pourra accroître l'importance de cette activité et rejoindre tout près de 60 000 jeunes dans nos écoles secondaires. Le budget de 1983-1984 était de 1 250 000 $.

De plus, nous avons...

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que vous pouvez répéter le dernier chiffre concernant le budget, M. le ministre?

M. Bérubé: Oui. Le budget de 1983-1984 était de 1 250 000 $. De plus, ayant identifié ces décrocheurs qui ont effectivement quitté l'école et non pas les décrocheurs potentiels, on a conçu, à l'intérieur des commissions scolaires, un certain nombre de cours adaptés pour ces jeunes - il y en a eu 3700 en 1983-1984 et 1200 adultes également pour la même période - où on a imaginé des cours mieux adaptés au type de formation que réclament ces jeunes. Par exemple, hier, je rencontrais un groupe d'étudiants décrocheurs qui se sont inscrits au cégep dans le cadre d'un cours d'initiation aux techniques d'économie d'énergie, qui va leur permettre d'obtenir une attestation d'études collégiales et de se réinsérer plus facilement sur le marché du travail, eux qui avaient connu des périodes assez longues soit de chômage ou d'aide sociale. Le budget en 1983-1984 a été de 1 800 000 $ en excluant, évidemment, toute aide sociale ou l'aide financière aux étudiants.

Nous avons également investi des sommes importantes pour accélérer le développement de l'enseignement professionnel. En fait, en 1983-1984 nous avons injecté près de 10 000 000 $ en équipement. Cela nous a permis de rejoindre 139 écoles dans le cas d'option en commerce, 23 écoles dans le cas d'option en électromécanique, 70 écoles dans le cas d'option en mécanique industrielle et 124 écoles dans le cas de cours de formation en équipement motorisé, machinerie fixe. Donc, nous reconduisons ce budget en 1984-1985 de 10 000 000 $ pour continuer à moderniser les équipements qui sont disponibles dans nos écoles pour la formation professionnelle. Mentionnons les programmes de perfectionnement des intervenants pour un budget d'à peu près 1 000 000 $. En 1984-1985, nous prévoyons ajouter, au budget global de 4 500 000 $ de l'année dernière, au niveau secondaire environ 1 800 000 $ et, également, au niveau de l'éducation des adultes, un autre montant d'à peu près 1 700 000 $. Voilà, en gros, les principales mesures concrètes que nous avons mises en place à l'intention des décrocheurs en 1983-1984.

Le Président (M. Charbonneau): Est-ce que vous pouvez nous dire si on a retrouvé des mesures comme celles-là dans chacune des commissions scolaires? Est-ce que chacune des commissions scolaires du Québec a répondu favorablement à l'invitation du ministère de mettre en place soit des mécanismes de prévention du décrochage ou des mesures spéciales pour favoriser le retour aux études de jeunes qui avaient décroché?

M. Bérubé: En termes de statistique, aux niveaux primaire et secondaire, comme je vous le disais tantôt, nous avons rejoint 42 000 étudiants dans 318 écoles touchant 82 commissions scolaires. C'est donc significatif sur un total de 110 commissions scolaires, au niveau secondaire. On peut parler d'une pénétration assez intéressante du programme, d'une participation très réelle de l'ensemble des commissions scolaires en fait, au Québec.

Le Président (M. Charbonneau): Merci. Je vais passer la parole au député de Fabre qui voulait enchaîner sur la formation professionnelle des jeunes.

M. Ryan: Sur l'insertion sociale et professionnelle, j'aurais une question, M. le Président.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil sur le même sujet qu'on vient d'aborder.

M. Ryan: Quand le ministre de l'Éducation avait annoncé le plan d'insertion sociale et professionnelle pour un montant de 27 000 000 $ pour l'année 1983-1984, il avait énuméré toute une série de postes qui devaient donner lieu à des dépenses de la part du gouvernement. Est-ce que le ministre et ses collaborateurs pourraient nous ventiler, pour chacun de ces postes, les sommes qui ont été effectivement dépensées en 1983-1984? Parce que nous cherchons dans le cahier d'explications, nous trouvons seulement une partie de la réponse et il y a beaucoup d'éléments qui n'y sont point.

M. Bérubé: On me dit que le budget de 27 000 000 $ impliquait 8 350 000 $ en crédits additionnels nouveaux qui ont été répartis de la façon suivante: service d'accueil et d'orientation, 420 000 $, ce que j'avais mentionné; maintien à l'école des décrocheurs potentiels 980 000 $; retour à l'école des décrocheurs identifiés, 742 000 $ et l'entraînement des intervenants, 1 000 000 $. Il s'agissait là des dépenses au niveau des secteurs primaire et secondaire. Quant à l'enseignement collégial, l'ouverture d'options professionnelles collégiales a entraîné des coûts, des dépenses de 2 788 000 $ ou, du moins, des intentions de dépenses,

puisqu'il s'agit de crédits. La création de sous-centres d'enseignement collégial, 457 000 $. L'enseignement aux adultes a signifié, au niveau de la création de groupes d'étudiants adultes, des dépenses de 1 873 000 $. Quant aux cours par correspondance, ils ont entraîné des coûts d'environ 90 000 $. Voilà donc en gros le décompte de ces 8 350 000 $ additionnels. Le reste des crédits constituait, à ce que je comprends, essentiellement, une reconduction d'activités existant antérieurement. Il s'agissait là vraiment des nouvelles activités.

M. Ryan: On cherchait à trouver l'explication d'un montant de 24 000 000 $ qui nous avait été annoncé par le ministre l'an dernier, qui est inscrit aux crédits de l'année 1983-1984. Est-ce que le ministre pourrait nous faire donner, au cours de la soirée, un rapport écrit pour qu'on puisse vraiment essayer de faire les liens? Parce que c'est impossible de comprendre seulement avec les explications parcellaires qu'on nous donne. Est-ce qu'on pourrait avoir une ventilation de ces dépenses? (20 h 45)

M. Bérubé: Je vais essayer d'obtenir un décompte du reste, c'est-à-dire des 19 000 000 $ que je n'ai pas en ce moment.

M. Ryan: Quand vous parlez de 8 000 000 $ supplémentaires, j'ai du mal à comprendre, parce que je crois me souvenir qu'il y avait 27 000 000 $ inscrits dans les crédits de l'année 1983-1984. Si vous parlez d'un supplément de 8 000 000 $, cela fait 35 000 000 $; cela aggrave le problème.

Une voix: Cela bonifie la mesure.

M. Ryan: Oui, oui, si on peut en rendre compte au complet. D'accord.

M. Bérubé: Alors, on va le décomposer, parce qu'il y a eu 10 000 000 $ d'équipement que j'ai mentionné tantôt. On va essayer de vous le décomposer au complet.

M. Ryan: Les 10 000 000 $ d'équipement, ne vous en inquiétez pas. Cela, on le sait. C'est déjà dans le cahier d'explications; il n'y a pas de problème dans mon esprit là-dessus.

M. Bérubé: Alors, si je comprends bien, nous avons identifié à peu près 18 000 000 $ ou 19 000 000 $ des 27 000 000 $ et il manque encore 8 000 000 $ à l'appel. Nous allons essayer de les identifier.

M. Ryan: Vous avez dit qu'il y a 8 000 000 $ supplémentaires.

Une voix: Qui seraient, M. le ministre...

M. Bérubé: Non. Dans les 27 000 000 $, il y a 3 500 000 $ d'activités nouvelles. C'est ce que j'ai identifié. J'ai identifié des activités proprement nouvelles. Dans le cas des immobilisations, on ne peut pas vraiment parler d'activités nouvelles.

Le Président (M. Charbonneau): Ce qui pourrait être utile dans le même document, ce serait qu'on indique à quel endroit - on parle ici de 3 500 000 $ additionnels prévus pour 1984-1985 - se greffent ces 3 500 000 $ par rapport à ce qui s'est dépensé en 1983-1984.

M. Bérubé: Nous avons planifié une table de concertation en mai avec les intervenants. Il faut dire que le comité des priorités a alloué l'équivalent de 35 000 000 $ pour divers programmes d'éducation des adultes et de formation professionnelle. Beaucoup de ces crédits auront à être transférés au ministère de la Main-d'Oeuvre pour la mise en place de stages de formation pratique et, par conséquent, les crédits en question n'ont pas été subdivisés encore. Donc, je ne peux pas vous donner de façon précise, à l'heure actuelle, comment seront partagés ces 35 000 000 $ de crédits additionnels, si ce n'est sur la base d'une proposition générale rendue publique par le ministre, mais qui fait encore l'objet de négociations, de tractations entre les différents ministères concernés.

Le Président (M. Charbonneau): M. le ministre, à moins que je ne me trompe, j'ai l'impression qu'on ne parle pas de la même chose actuellement. Il y a trois questions: le plan d'action de l'insertion sociale et professionnelle, la politique de formation professionnelle des jeunes et la politique d'éducation des adultes. Ce dont vous venez de parler, je pense que c'est de l'éducation des adultes.

M. Bérubé: Oui, mais dans le programme d'éducation des adultes où nous avons injecté 35 000 000 $, il y a énormément de fonds qui vont aller, par exemple, au recyclage des gens oeuvrant dans des métiers en perte de vitesse ou à la réinsertion des femmes sur le marché du travail, ou encore à la formation professionnelle dans des secteurs de haute technologie en grande demande au Québec présentement. Donc, il y a également, à l'intérieur de ces 35 000 000 $, des éléments importants de formation professionnelle. J'ai de la difficulté à faire la distinction entre les trois sujets que vous venez de mentionner.

Le Président (M. Charbonneau): Pas moi.

M. Bérubé: Je vous ai parlé du programme d'insertion sociale et professionnelle des jeunes. Mais lorsqu'on parle de formation professionnelle, on est bien obligé de parler de formation professionnelle autant des jeunes que des adultes. Et les 3 500 000 $ dont je vous parlais tantôt, je les ai décomposés en un montant pour les jeunes et un montant pour les adultes.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, quand le ministre va faire ses calculs, il faudrait lui rappeler que, dans le cahier d'explications, on dit que le ministère de l'Éducation aurait dépensé 15 000 000 $ en 1983-1984 et non pas 27 000 000 $ ou 35 000 000 $, disons 27 000 000 $, le montant de 35 000 000 $ est éliminé. C'est juste un rappel que je lui fais, parce que c'est dans le cahier ici.

Maintenant, la question qui me préoccupe, à la page 5 du programme 4... Ce n'est pas là-dessus que je voulais attirer l'attention du ministre. C'est pour la réponse écrite qu'il a promis d'essayer de nous donner d'ici la fin de la soirée.

M. Bérubé: Cela ne sera pas écrit; cela sera verbal. J'ai demandé aux adjoints ici d'essayer, à partir des données financières du ministère, de reconstituer exactement l'utilisation des sommes.

M. Ryan: M. le Président, autre question. Je voudrais savoir exactement quel est l'arrimage à la fois budgétaire et fonctionnel entre le projet qu'on nous décrit dans le cahier d'explications du ministère de l'Éducation où on nous dit qu'on entend consacrer une somme additionnelle de 3 500 000 $ pour rejoindre une clientèle plus grande et, notamment, rattacher à l'école plus de 9000 autres décrocheurs et celui que la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu prévoyait il y a quelque temps. Elle annonçait également un programme de rattrapage scolaire avec un budget de 15 800 000 $ pour deux ans, dont 11 800 000 $ pour l'année 1984-1985. Pouvez-vous me dire comment l'arrimage se fait entre ces deux projets, au point de vue budgétaire et au point de vue opérationnel?

M. Bérubé: Du point de vue opérationnel, l'objectif de la politique d'éducation des adultes vise à confier au ministère de la Main-d'Oeuvre, de concert avec le ministère de l'Éducation et les centres de formation professionnelle, le soin d'accueillir les jeunes, les adultes ayant des besoins de formation. Il revient également au ministère de la Main-d'Oeuvre d'identifier les besoins de l'entreprise en main-d'oeuvre spécialisée. Troisièmement, il revient aux centres de formation professionnelle de commander de façon privilégiée au ministère de l'Éducation les types d'enseignement qui correspondent aux besoins identifiés au sein de leur clientèle.

Lorsque le ministère de l'Éducation ne peut pas satisfaire aux besoins, soit par le biais de la formation générale ou par le biais d'une formation spécialisée en institution scolaire de type commission scolaire ou collégiale, le ministère de la Main-d'Oeuvre peut faire appel à des entreprises pour la mise au point de stages de formation en entreprise, encadrés par des professionnels dans le domaine, recrutés par le ministère de la Main-d'Oeuvre.

Lorsque nous parlons des 9000 jeunes assistés sociaux à qui nous offrons la possibilité de terminer leurs études secondaires dans des écoles de décrocheurs, nous parlons toujours du même programme, le ministère de la Main-d'Oeuvre assurant la prestation d'aide sociale bonifiée à cette clientèle, le ministère de l'Éducation prenant la responsabilité d'offrir les services éducatifs.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Fabre.

M. Ryan: Juste une dernière question. Il est question de 9000 décrocheurs additionnels dans le cahier explicatif du ministère de l'Éducation; il est question de 9000 décrocheurs dans le déclaration de Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre, est-ce qu'il s'agit des mêmes 9000?

M. Bérubé: On me dit qu'on prévoit, avec les ressources additionnelles déjà injectées dans les commissions scolaires, pouvoir maintenir en gros le même effort que l'année dernière en termes d'encadrement aux décrocheurs potentiels, de même qu'un meilleur accueil aux décrocheurs qui reviennent à l'école. On avait rejoint, l'année dernière, 3700 décrocheurs, comme je l'avais dit, 46 000 décrocheurs potentiels et 1200 adultes. On prévoit que, avec les mêmes ressources, on pourra accueillir ces 9000 bénéficiaires de l'aide sociale qui retournent à l'école secondaire. Il est bien évident, cependant, que 9000 étudiants de plus à l'école secondaire impliquent des ressources additionnelles dans les écoles en termes de services éducatifs, de professeurs et autres coûts qui s'ajoutent aux crédits réguliers, mais qui sont intégrés dans les enveloppes de base, qui ne sont donc pas identifiés de façon sélective.

J'ai obtenu le tableau de l'ensemble des dépenses des 27 000 000 $, tel qu'il avait

été préparé en date du 15 février 1983 dans le cadre du plan d'action. En fait, il y a une série d'activités représentant des coûts bruts, des mesures d'autofinancement par le ministère de certains de ces coûts et des coûts additionnels couverts directement par l'ajout de fonds par le comité des priorités. C'est ce qui explique pourquoi, globalement, on identifiait 27 000 000 $ d'activités additionnelles, que les crédits additionnels nouveaux ont été de 8 350 000 $ et que les autres dépenses ont été financées par le ministère, par un redéploiement de ses priorités vers ce secteur.

M. Ryan: L'argent frais qui a été mis là-dessus en sus de ce qui avait été inscrit au budget, c'est 8 000 000 $. On a fait de la publicité pour 27 000 000 $ pendant trois ou quatre mois.

M. Bérubé: De la même façon - c'est un concept nouveau qu'il faudra répéter jusqu'à ce que ces concepts finissent par pénétrer - nous nous sommes engagés dans une opération récurrente, depuis plusieurs années, qui consiste, chaque année, à remettre en cause un certain nombre d'activités gouvernementales et à dégager ainsi des ressources pour les injecter là où les besoins se font sentir. Or, le député d'Argenteuil ne pourra pas, systématiquement, dénoncer le pourcentage de plus en plus élevé que représentent les dépenses publiques dans le produit intérieur brut du Québec, en disant qu'il n'est pas normal que l'on accroisse l'importance des dépenses publiques globalement dans l'économie québécoise pour, après cela, nous reprocher de dégager des sommes à l'intérieur des sommes déjà consenties par nos concitoyens pour identifier un certain nombre de priorités. Donc, il est clair que, si nous voulons maintenir le pourcentage de nos dépenses publiques dans le produit intérieur brut québécois, il faudra nécessairement procéder, en bonne partie, par l'autofinancement des nouvelles activités identifiées comme prioritaires par le gouvernement. C'est une conséquence inévitable, un corollaire absolu du premier énoncé du député d'Argenteuil. Le problème, c'est qu'il faut avoir un peu de suite dans les idées.

M. Ryan: On a vu cela depuis le début d'après les explications que vous donnez sur ce point.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Fabre, sur la question de la formation professionnelle des jeunes.

Formation professionnelle des jeunes

M. Leduc (Fabre): Dans le cahier des crédits que nous avons, il faut constater qu'il n'y a aucune mention de l'enseignement professionnel, de la réforme dont on parle depuis deux ans déjà. On sait qu'il y a eu -je crois que c'est l'an passé - des colloques régionaux qui ont conduit à un colloque national, qui ont conduit à un certain nombre de prises de position venant de la base, qui venaient des secteurs de l'enseignement et des secteurs du monde du travail: syndicats, patrons, et autres. Il y a donc eu un travail de concertation très intéressant qui a été fait dans les différents milieux, à partir d'un document, intéressant également, qui a été préparé par le ministère de l'Éducation. (21 heures)

Où en sommes-nous, M. le ministre, dans cette réforme qu'on nous annonce? Quel est l'état de la situation de cette réforme? Quel est l'échéancier pour l'implantation de cette réforme de l'enseignement professionnel au secondaire qui toucherait l'enseignement professionnel long et l'enseignement professionnel court?

M. Bérubé: M. le Président, si vous le permettez, je pense que le sous-ministre de l'Éducation, M. Lucier, pourra plus facilement répondre à cette question puisqu'il a été très intimement impliqué dans ces rencontres dont on a fait état.

Le Président (M. Charbonneau): M.

Lucier.

M. Lucier: M. le Président, un mot très bref sur la démarche même. Ensuite, je vous indiquerai les quatre grands volets de ce plan et où on en est dans chacun des volets. Cette démarche a commencé en mai 1982 avec la parution de ce que le ministère avait appelé les propositions de relance et de renouveau, qui ont été soumises à une consultation à l'automne 1982 et à l'hiver 1983. On a publié aussi une sorte de synthèse de la consultation. C'est disponible, si les membres de la commission souhaitent la consulter.

À l'automne 1983, il y a eu une deuxième vague de consultation, cette fois sur un certain nombre de dossiers spécifiques où cela allait plus loin en termes de propositions concrètes. Cela concernait essentiellement les relations éducation-travail, des propositions sur des mécanismes de la carte des enseignements professionnels et des propositions sur des mécanismes de révision et d'évaluation des programmes de formation professionnelle. Il avait toujours été prévu qu'au printemps ou à l'été 1984 l'ensemble des actions serait étalé noir sur blanc et reproposé au milieu.

L'espèce de présupposé administratif et politique de ces propositions de relance et de renouveau voulait que l'ensemble de ces propositions trouverait corps à l'intérieur des

règlements actuels, au moins pour ce qui concerne le primaire-secondaire. Donc, il ne s'agissait d'aucun redéploiement nouveau qui aurait nécessité de nouvelles réglementations ou de nouvelles dispositions législatives. Il s'agissait de jouer pleinement les règles du jeu et l'esprit du régime pédagogique du secondaire.

Il y avait dans le cas du collégial -mais cela nous fait sortir du programme 4 -certaines implications réglementaires concernant, en particulier, le certificat d'études collégiales et on sait quelle a été la réponse réglementaire, au fond. Le régime d'études collégiales n'a pas retenu la proposition. Dans le cas du secondaire, donc, il s'agissait très explicitement de se situer à l'intérieur des règles du jeu du régime pédagogique actuel, donc, n'annonçant aucune nouvelle disposition réglementaire.

Ceci étant dit sur la démarche, on peut dire que l'ensemble de ces propositions, de ces propos aussi, des discussions qui ont eu cours dans les colloques régionaux et au colloque national, peut graviter autour de quatre pôles majeurs. Il y a, d'une part, ce qu'on pourrait appeler les objectifs de système en formation professionnelle. Il y a, deuxièmement, les contenus ou les objectifs de formation professionnelle. Il y a, troisièmement, l'organisation scolaire au secondaire, pour ce qui est des cheminements de formation professionnelle, et il y a, quatrièmement, les dispositions d'ensemble concernant l'organisation de la formation professionnelle dans notre système. Je les prends un à un, en essayant de rappeler brièvement où nous en sommes.

Quant aux objectifs de système, les propositions de relance et de renouveau de mai 1982 n'ont fait que dire en plus clair ce qui n'était même pas sous-jacent, mais déjà dessiné par le nouveau régime pédagogique du secondaire. Il y avait, entre autres, cette affirmation fondamentale, à savoir que toute formation professionnelle doit nous renvoyer, comme une espèce de préalable nécessaire, à une formation de base solide et accessible au plus grand nombre. Il fallait éviter, surtout au niveau secondaire, des formations pointues ou des cheminements cul-de-sac et il y avait avantage à s'assurer d'une formation de base la plus solide, la plus riche possible et la plus accessible à tous, de manière à y greffer des spécialisations professionnelles.

Il y avait cette autre affirmation dans le sens que la formation de base, que la formation générale devrait impliquer une dimension technique et technologique. C'est dans cette perspective qu'on peut dire, quand on regarde où on en est là-dessus, me semble-t-il - et c'est ma compréhension des choses - que l'application progressive du régime pédagogique du secondaire, avec ce qu'il comporte de nouveaux programmes, avec une nouvelle grille des matières plus équilibrée, plus riche, proposée à tout le monde, amène l'introduction d'un diplôme d'études secondaires unique. Au fond, c'est ce qui est prévu dans le nouveau régime pédagogique, même s'il n'y a pas encore d'étudiants qui l'ont expérimenté, puisque nous en sommes à l'an 3, mais ces dispositions sont dans le régime pédagogique. Elles prévoient, par exemple, que la formation professionnelle sera, d'une manière générale, offerte plutôt au terme des études secondaires, mais elle pourra aussi commencer avant. Le même régime pédagogique prévoit aussi un programme d'éducation à la technologie comme activité obligatoire de formation générale. Nous avons un cours d'initiation à la technologie, au secondaire III, et il y a une douzaine de commissions scolaires qui, l'année dernière, cette année et l'an prochain, vont continuer d'expérimenter des programmes possibles d'éducation à la technologie.

Voilà où nous en sommes en ce qui a trait au premier volet concernant la place de la formation professionnelle dans l'ensemble des objectifs de l'école secondaire. C'est, en fait, l'application du régime pédagogique. Là-dessus, nous pouvons dire que nous en sommes à l'an 3 et que les objectifs que les propositions de relance de 1982 mettaient de l'avant sont, en fait, mis en oeuvre au fur et à mesure que le régime pédagogique du secondaire prend corps dans le réseau.

Le deuxième pôle concerne les contenus ou les objectifs de formation professionnelle comme tels. Là encore, je vous réfère au processus de révision des programmes en cours. Il y a actuellement une bonne quarantaine de programmes de formation professionnelle qui ont été révisés et dont les textes sont disponibles depuis juin 1983; le reste suit. Donc, ce qui a été fait pour l'ensemble des programmes de formation dite générale est entamé, plus qu'entamé, est commencé dans le cas des programmes de formation professionnelle. Dans chacun des cas, il s'agit de vérifier l'à-propos des contenus de formation, de s'ajuster aux changements technologiques, d'élargir un certain nombre de programmes qui étaient peut-être trop pointus. Ce sont des activités de renouvellement qui, accompagnées d'une injection - pour prendre un mot dont on a rigolé cet après-midi - de ressources du côté des équipements de formation professionnelle, sont de nature à contribuer à une mise à jour générale des objectifs de formation professionnelle. Donc, nous sommes, quant au contenu de la formation au niveau secondaire, dans un processus de renouvellement analogue à ce qui été fait pour les programmes de formation générale.

Le troisième pôle est ce que nous pourrions appeler l'organisation scolaire, si vous voulez, ou l'organisation des cheminements de formation scolaire

professionnelle à l'intérieur de l'organisation de l'école secondaire. Ici aussi, je dirais que les propositions de relance de 1982, comme elles épousaient strictement les prescriptions du nouveau régime pédagogique, sont en train d'être mises en oeuvre au rythme même de l'implantation du régime pédagogique. Ce qu'il faut comprendre, c'est essentiellement ceci. La modification des grilles-horaires fait que, progressivement, au fur et à mesure que nous avançons dans l'implantation, les plages-horaires ou les créneaux ou les moments disponibles pour la formation professionnelle sont réduits progressivement d'une année à l'autre, un peu à la manière d'un tube de pâte dentifrice, si vous me permettez l'expression. Donc, si on fait l'hypothèse qu'un programme de formation professionnelle au secondaire comporte, de manière générale, 36 crédits, il est évident qu'il ne sera plus possible de faire les 36 crédits dans les créneaux prévus par le nouveau régime pédagogique et on insistera donc forcément sur un report non pas nécessairement total, mais progressif d'une partie de la formation professionnelle au secondaire, après la cinquième année.

Comme chacun le sait, le nouveau régime pédagogique prévoit qu'une formation professionnelle au secondaire donne droit à un diplôme d'études professionnelles spécifique, qui n'est plus à confondre avec le diplôme d'études secondaires. Cela n'est pas nouveau; c'était dans le régime pédagogique de 1981.

Dans le cas du quatrième pôle dont je vous parlais, ce qu'on pourrait appeler les dispositifs d'ensemble de l'organisation cette fois, il ne s'agit pas de cheminement scolaire ni d'objectifs de formation concernent plutôt les modes d'organisation de la formation professionnelle et, je dirais, par-delà les programmes de formation ou les ordres d'enseignement. Cela comportait quoi? Je vous donne des exemples très précis: des modalités renouvelées de concertation éducation-travail. Cela n'a pas besoin de base réglementaire comme telle. Il est prévu, il a été annoncé qu'il y aurait des tables de concertation au plan national et au plan régional. Ces tables sont en discussion actuellement et regroupent l'ensemble des partenaires. Dans certains cas, à des rythmes plus ou moins rapides, on pourrait assister à des émergences, à des naissances très prochaines. Donc, les tractations sont avancées. Voilà un premier exemple de dispositif.

Un deuxième exemple de dispositif, de structure ou de système, c'est celui de la carte nationale de répartition des programmes d'enseignement professionnel. Il n'y a pas de carte qui a été édictée; il y a un processus pour en faire une qui a été proposé. Cela aussi est soumis actuellement à des discussions serrées et concrètes, principalement en région, quant à la manière d'utiliser ce mécanisme pour améliorer le contenu de notre carte et aussi sa capacité de se renouveler.

Un autre exemple: les processus d'évaluation des programmes, qui concernent beaucoup les unités administratives à l'intérieur du ministère, mais aussi les partenaires des réseaux. Là aussi, les mécanismes sont prêts à être mis en place. Dans le cas de la concertation avec le ministère de la Main-d'Oeuvre, il est évident que la politique d'éducation permanente, dont nous allons forcément parler tout à l'heure dans le cadre du programme 7, a réaffirmé les bases de cette concertation. Là aussi, les tractations sont avancées et nous sommes à la toute veille de pouvoir mettre en place les mécanismes prévus.

Même chose du côté de l'information scolaire et professionnelle. Le ministère est engagé dans un programme accéléré d'informatisation des contenus d'information scolaire et professionnelle. Cela était souhaité par les milieux de formation professionnelle, de formation générale et c'est en cours avec, principalement, les ressources que nous avons pu trouver dans les réseaux scolaires. Au ministère même, il était aussi prévu un certain ménage, si je peux dire, ou, enfin, des efforts de concertation pour dépasser la compartimentation des ordres d'enseignement. Nous avons, au ministère, une coordination de la formation professionnelle, phénomène nouveau qui permet de discuter de ces choses et en réaliser.

Voilà où on en est essentiellement, selon ces quatre pôles. C'est d'inégale importance et cela se situe différemment dans l'ensemble du processus mais, quand on parle de politique de formation professionnelle au secondaire, en un sens, ce n'est que cela, mais c'est tout cela.

Le Président (M. Charbonneau): Merci, M. Lucier.

M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Une demande de précision. Est-ce qu'on peut dire que, pour l'été 1984, on connaîtra avec suffisamment de détails l'échéancier d'implantation? Vous avez beaucoup parlé du professionnel long et assez peu du professionnel court. On sait que le secteur qui a le plus besoin de revalorisation actuellement, c'est le professionnel court qui est considéré comme la voie de garage. Je ne serais pas étonné que, parmi les 30% de jeunes qui n'atteignent pas le secondaire, la majorité se retrouve au professionnel court. C'est donc ce secteur qui a besoin d'être revalorisé et vous en avez assez peu parlé. Est-ce qu'on peut avoir bon espoir qu'à l'été 1984, puisque je pense qu'à ce moment les consultations seront pas

mal terminées sur le plan de l'action et qu'il y aura plus de précisions, le secteur de l'éducation saura où il s'en va quant à la réforme, en particulier, du professionnel court?

M. Lucier: À propos du professionnel court, je me permettrai de vous rappeler en trois mots les propositions de mai 1982. Il était évident que tout le monde souhaitait un renouveau du côté du professionnel court; personne n'osait parler d'une suppression, parce qu'on n'aurait pas supprimé les besoins ou les enfants impliqués dans ce processus, mais chacun sentait bien qu'on ne pouvait pas continuer dans des processus cul-de-sac, dans des processus "pseudo-professionna-lisants", finalement, qui ne donnaient pas de compétence réelle sur le marché. (21 h 15)

Ce qui a été proposé, ce n'est pas tellement de viser à une suppression du professionnel court comme milieu spécifique d'encadrement pédagogique permettant à des jeunes qui sont un peu plus en difficulté de cheminer correctement dans des objectifs de formation de base. C'est moins cela qu'un effort pour faire persévérer les jeunes de manière profitable plus longtemps et, pour cela, ne pas les enferrer dans des filières de formation pointues, cul-de-sac, mais plutôt leur proposer ce que nous avons appelé, dans un jargon qui n'a pas fait long feu au sens strict du terme, des cheminements de formation de base plus diversifiés, plus conformes à leurs besoins, utilisant, entre autres, des activités d'ordre manuel ou technique. Le but n'était pas d'amener à une "diplomation" de professionnel court, mais d'aller le plus loin possible dans l'atteinte des objectifs de l'école secondaire et de ne pas appeler "professionnel" ce qui est, en fait, un cheminement de formation de base. Il s'est fait une forme de consensus autour de cela. Il reste - et c'est en cours - à identifier les modalités de cheminement qui pourraient correspondre à un véritable renouveau. Je dois dire qu'il y a sur la table un certain nombre d'hypothèses qui nous viennent, en fait, des milieux scolaires. Le ministère sera bientôt prêt à les rendre publiques.

Le point le plus délicat de l'ensemble de ce dossier - dans le contexte où nous parlons - c'est la manière de réaliser ces transformations prévues par le régime pédagogique sans amener de rupture de continuité ou sans ajouter de problèmes concernant la tâche des enseignants, par exemple. Il y aurait des manières abruptes et sauvages d'effectuer ce processus de tube de dentifrice qui pourraient amener des ruptures et, donc, créer des mises en disponibilité qui ne sont pas nécessairement souhaitables et qui ne sont pas nécessaires, non plus. C'est, d'ailleurs, pour cela qu'il y a là un terrain de discussion. Au comité mixte et aussi dans les réseaux et au ministère, c'est une préoccupation majeure d'effectuer cette transformation prévue par le régime pédagogique en utilisant au maximum l'ensemble des ressources et sans risquer des ruptures qui auraient des apparences de sauvagerie ou d'inutilité, finalement.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Charbonneau): Mme la députée de Jacques-Cartier, sur le même sujet.

Mme Dougherty: Merci, M. le Président. Le Conseil supérieur de l'éducation a fait des recommandations très pertinentes en ce qui concerne les politiques du gouvernement vis-à-vis de l'enseignement professionnel chez les jeunes. J'aimerais lire quelques recommandations qui ont été faites dans son rapport du 21 avril 1983. J'aimerais savoir où vous en êtes dans votre considération de ces recommandations.

D'abord, j'ai ici le résumé du communiqué de presse du Conseil supérieur de l'éducation: Le conseil porte une attention particulière aux jeunes qui auraient besoin d'une formation professionnelle qui soit différente de celle conçue pour l'ensemble de la communauté scolaire, afin d'éviter des échecs irrémédiables pouvant même conduire à l'abandon des études. C'est pourquoi le conseil préconise qu'en troisième et quatrième secondaire ces élèves bénéficient à parts égales d'une formation de base dans les matières principales, selon des approches pédagogiques adaptées à leurs besoins et à leur motivation.

Il recommande que tous les élèves qui ont terminé avec succès la période d'études consacrée à leur formation professionnelle à l'école secondaire puissent bénéficier d'une période d'apprentissage en milieu de travail non obligatoire d'une durée variant de douze à dix-huit mois. Il recommande que la formation professionnelle au niveau d'enseignement secondaire soit dispensée au cours de la onzième année d'études - au lieu d'une douzième année suggérée par le régime pédagogique.

Il recommande la formation continue des enseignants, particulièrement par des stages en entreprise, la révision de certains programmes dans une corrélation rigoureuse avec les analyses des fonctions de travail, etc. Je crois que ces recommandations sont très pertinentes aux problèmes actuels. Où en êtes-vous dans votre considération de ces recommandations?

M. Lucier: Cet avis du Conseil supérieur de l'éducation avait reçu du ministre une très longue réponse...

M. Bérubé: Autres temps, autres moeurs.

M. Lucier: ...que je n'ai pas sous les yeux, mais que je possède assez en mémoire. Elle faisait part au Conseil supérieur de l'éducation de la profonde convergence de vues, je dirais, sur un bon nombre de questions. Il y avait dans le rapport du Conseil supérieur de l'éducation, si ma mémoire est bonne, quelque chose comme huit ou neuf propositions. Je crois que, sur six ou sept ou peut-être presque la totalité, il y avait l'expression d'une convergence de vues fondamentale.

Si je puis me permettre de reprendre les exemples que vous donnez, vous citez quatre de ces propositions, la première concernant la possibilité, en troisième et quatrième année du secondaire, de cheminer dans les matières obligatoires selon des modèles pédagogiques diversifiés. Cela traduit presque littéralement, je dirais, les propositions ministérielles, notamment dans ce qu'on a appelé, comme je vous le disais tantôt, les cheminements particuliers de formation de base dont c'est essentiellement l'esprit. Plutôt que d'engouffrer les jeunes dans des formations pseudo-professionnelles cul-de-sac, il vaut mieux les inciter à persévérer dans les matières jugées de base, mais par des approches pédagogiques suffisamment diversifiées pour les rejoindre dans leurs préoccupations et dans leur type d'apprentissage.

Voici un exemple de proposition qu'il reprenait presque littéralement et, si ma mémoire est bonne, le ministre avait signalé sa convergence de vues là-dessus. Il y a la proposition de la formation professionnelle en onzième année, ce qui veut dire le secondaire V. Si ma mémoire est bonne, le ministre avait rappelé au conseil que pas plus les propositions que le régime pédagogique, d'ailleurs, ne statuaient que, dorénavant, toute formation professionnelle ne viendrait obligatoirement pour tout le monde qu'après le secondaire V. La formulation même du régime pédagogique, à savoir que c'est normalement après le secondaire V avec possibilité de commencer avant, identifiait clairement la cinquième année, donc, la onzième année, le secondaire V comme un moment possible de début de formation professionnelle. Je dirais que les propositions de mai 1982 allaient même plus loin, puisqu'elles disaient que cela pourrait même commencer en quatrième année. Ce que le régime pédagogique a cerné comme cheminement dit intégré, où on poursuivrait à la fois des objectifs de formation professionnelle et des objectifs de formation de base, rejoint très substantiellement la proposition du conseil.

La question des stages. Si je me rappelle bien, la réponse ministérielle avait consisté à dire que, finalement, il y avait possibilité de rejoindre la vision du conseil et qu'on comptait y accéder par le biais de stages en fin de formation ou de stages en alternance dans certains profils de formation professionnelle. Mais on n'avait pas retenu la proposition spécifique du conseil d'avoir, pour tous ceux qui termineraient leur formation professionnelle, un stage de 12 à 18 mois parce qu'on ne voyait pas bien comment on pourrait l'organiser, dans le système d'entreprise que nous avons. Je dirais, pour compléter, que des événements nouveaux sont arrivés depuis. Le plan de relance, avec ce qu'il comporte de formation ou d'apprentissage en entreprise, est venu prendre le relais de cela, mais pour ceux qui ne sont pas dans le système scolaire. Donc, il y avait là aussi une sorte de convergence de vues, mais une divergence sur les moyens à prendre.

Quant à la formation des enseignants en entreprise, je crois me souvenir aussi que le ministre avait rappelé un certain nombre de programmes de perfectionnement qui, justement, font que des enseignants de formation professionnelle vont en entreprise. Je ne sais pas si cela rejoignait, quantitativement, tous les souhaits du Conseil supérieur de l'éducation, mais le ministre n'avait aucune difficulté à retrouver dans les recommandations du conseil l'esprit de ses propres propositions ministérielles.

Mme Dougherty: Mais est-ce que cela veut dire que vous allez changer le régime pédagogique et les règlements en conséquence pour reconnaître la validité de ces recommandations?

M. Lucier: II n'y avait pas de nécessité, à notre connaissance...

Mme Dougherty: La formation professionnelle au secondaire VI?

M. Lucier: C'est dans le régime pédagogique actuel.

Mme Dougherty: Oui, mais...

M. Lucier: C'est dans le nouveau régime pédagogique.

Mme Dougherty: Oui, c'est dans le régime pédagogique, mais tous les "décrocheurs" potentiels auront déjà...

Une voix: Décroché.

Mme Dougherty: ...décroché.

M. Lucier: Mais, précisément, ce que je...

Mme Dougherty: Mais il faudra changer

le régime pédagogique pour s'accommoder aux recommandations.

M. Lucier: Ma compréhension, c'est qu'on n'a pas besoin de changer le régime pédagogique pour accommoder les clientèles diverses, puisque le régime pédagogique parle de spécialités professionnelles normalement suivies après le secondaire V. On prévoit spéciquement qu'il puisse s'inscrire dans les créneaux de cours optionnels du secondaire V et il n'y a rien qui interdise de penser qu'il puisse s'inscrire dans les créneaux optionnels du secondaire IV. Alors, je ne vois pas à ce moment-ci - en tout cas, techniquement - la nécessité de modifier le régime pédagogique pour permettre ce genre d'accommodement. Cela a été la compréhension, me semble-t-il, de la plupart des milieux qui ont travaillé sur les propositions de mai 1982.

Mme Dougherty: Je l'espère. Merci.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Bourassa, en vous demandant une brève intervention et une réponse brève, si on veut avoir le temps d'aborder la question de l'éducation des adultes.

M. Laplante: Dans l'exploration que font les jeunes des métiers professionnels, avez-vous commencé à vouloir changer l'orientation de cette exploration? Au lieu de les diriger vers des métiers qui ne sont plus en demande, qui sont désuets, avez-vous commencé à vouloir prendre un virage technologique pour leur faire voir les nouveaux métiers?

M. Lucier: Si vous faites allusion aux activités d'information scolaire et professionnelle, je peux vous dire que dans...

M. Laplante: II y a toujours des stages d'exploration avant qu'un jeune puisse se consacrer... Dès le secondaire III...

M. Lucier: Oui.

M. Laplante: Au secondaire V, il aboutit au professionnel long, s'il s'en va là - au secondaire IV et V.

M. Lucier: Les dispositions du nouveau régime pédagogique prévoient, au secondaire III, une initiation à la technologie qui est, quand on en regarde le programme, plus large, plus exploratoire, plus générale aussi que ne pouvaient l'être les programmes d'exploration technique. Je crois qu'on peut dire qu'ils ont été conçus et qu'ils sont en rajeunissement dans une perspective d'ouverture aux technologies de demain et aux réalités d'aujourd'hui et de demain.

M. Laplante: Ce qui me préoccupe le plus, c'est qu'on veut conserver dans les polyvalentes, actuellement, les métiers de ferblanterie, de menuiserie, de tuyauterie, quand on sait que le marché en est saturé. Il y a tout le virage de machinerie nouvelle dans la mécanique d'ajustage. On est encore pris avec nos vieilles machines; les jeunes apprennent sur ces machines et, quand ils arrivent dans l'industrie, ce n'est plus cela du tout. Je suis pour l'exploration, pour qu'on montre des choses nouvelles aux jeunes. Quels sont les efforts du ministère pour décourager les commissions scolaires à favoriser des métiers désuets par rapport aux métiers plus modernes, plus compatibles avec le marché du travail?

M. Lucier: Je reviendrais à ce que je vous disais tantôt. Je pense qu'il faut se référer aux activités d'information scolaire et professionnelle. Je crois qu'avec les milieux scolaires on a adopté une attitude plus agressive concernant une information plus vigoureuse sur les voies qui ne mènent à rien ou sur les voies qui mènent à des débouchés difficiles et sur celles qui sont ouvertes sur l'avenir. Quant au contenu, la révision actuelle des programmes de formation tente précisément de rajeunir et d'évacuer tout ce qui apparaît comme désuet. Maintenant, cela laisse intact...

M. Laplante: Vous parlez précisément de l'orientation...

M. Lucier: Oui et du contenu des programmes. (21 h 30)

M. Laplante: Je suis d'accord avec vous. Quelle est l'information? Je pense qu'on ne peut pas se taxer d'avoir un système d'éducation comportant suffisamment d'orienteurs pour nos écoles secondaires. Il ne faut pas se le cacher, cela a toujours été le malaise. Du temps où j'étais commissaire à la CECM, s'il y avait un orienteur pour 2500 élèves, ce n'était que du "punchage" qui se faisait sur des cartes passées dans un ordinateur et c'est encore pareil. On se battra tous ensemble pour tenter d'améliorer cette affaire-là. Je veux savoir si la commission scolaire a les outils, après avoir donné l'information à ces jeunes et leur avoir conseillé de se diriger dans tel ou tel endroit, pour respecter le choix de l'élève et lui dire s'il est préparé pour cela. C'est beau de donner de l'information, mais si on n'a pas les outils...

M. Lucier: Ce que nous disions tantôt, concernant le plan d'insertion sociale et professionnelle des jeunes avec le développement des options professionnelles dites d'avenir, constitue l'outil majeur pour livrer la marchandise, quand on indique à des élèves qu'ils feraient bien de choisir des

secteurs d'avenir. C'est pour cela que tout ce qui est fait au niveau des équipements, des contenus de programmes, d'une information scolaire professionnelle agressive, bien au-delà de l'orienteur - cela va jusqu'à l'information publique - tout cela ensemble constitue des mesures qui sont de nature à rendre possible la réalisation des choix qu'on pourrait inciter les étudiants à prendre plutôt que d'autres.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Saint-Laurent.

Politique d'aliénation des immeubles

M. Leduc (Saint-Laurent): Je serai bref. Je regardais ce qui a trait à la politique d'aliénation des immeubles. On indique ici que la fin recherchée est de permettre l'acquisition de ces immeubles par certains organismes pour une somme nominale. Chez nous, on a eu une chicane assez célèbre, récemment. On disposait d'une école désaffectée depuis un bon moment et j'ai l'impression que la commission scolaire a tenté d'avoir le meilleur prix possible. Cela a créé des chicanes entre les différents organismes qui désiraient acheter l'école. Est-ce que c'est cela, la politique du gouvernement? Est-ce de permettre de vendre l'immeuble, de disposer de l'immeuble au meilleur prix possible, alors qu'on mentionne dans le cahier que ce n'est pas cette fin qu'on recherche? Je veux savoir si c'est permis, si on doit permettre la surenchère et aux organismes de se battre au niveau de la communauté. En fait, chez nous, c'est ce qui s'est produit et le plus fort enchérisseur, en l'occurrence la ville, l'a eu au détriment d'une coopérative.

M. Bérubé: On me dit, que la ville de Saint-Laurent étant sur le territoire du Conseil scolaire de l'île de Montréal, la politique gouvernementale n'est pas respectée par le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Je vois la députée de Jacques-Cartier hocher la tête avec un air entendu; si je ne me trompe pas, elle est familière avec le problème, selon le sourire élargi sur son visage. Je dois donc tirer la conclusion qu'il n'y aurait peut-être pas eu de chicane si la politique gouvernementale avait été respectée. Peut-être, je l'ignore. En fait, je ne connais pas le tempérament des concitoyens de Saint-Laurent, mais mes souvenirs de jeunesse...

M. Leduc (Fabre): Est-ce qu'il y a deux politiques à ce moment-là?

M. Bérubé: Non, il y a la politique gouvernementale en vertu de laquelle nous vendons pour une somme nominale aux municipalités ou autres organismes gouvernementaux financés par les fonds publics. Lorsqu'il n'est pas possible d'aliéner de cette façon les immeubles ou les biens meubles excédentaires, on procède par vente à la valeur marchande, c'est-à-dire, selon la définition même de la valeur marchande, au plus offrant.

M. Leduc (Fabre): II faudrait peut-être qu'il y ait une politique et qu'elle soit uniforme. Si c'est bon pour le reste de la province, cela devrait sûrement l'être pour l'île de Montréal.

M. Bérubé: Vous avez parfaitement raison. Il serait bon d'avoir une conversation avec M. Mongeau, du Conseil scolaire de l'île de Montréal.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous devez avoir une conversation avec Mongeau.

M. Bérubé: J'aurai sans doute l'occasion d'avoir une conversation avec lui. Je lui ferai part de vos préoccupations, à savoir que la politique poursuivie par le Conseil scolaire de l'île de Montréal semblerait inadmissible, d'après vous.

M. Leduc (Saint-Laurent): Non pas mes préoccupations, mais celles des citoyens du Québec et particulièrement, en l'occurrence, celles de Saint-Laurent.

M. Bérubé: Je me joindrai à vous, comme ex-citoyen de Saint-Laurent; j'ajouterai mes reproches aux vôtres.

Le Président (M. Charbonneau): Des avis d'intention. Cela met fin à l'étude du programme 4. Est-ce que le programme 4 est adopté?

M. Ryan: Adopté, M. le Président. Avant que vous demandiez le vote, j'aurais une précision à faire.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: C'est une double précision. Tout d'abord, il a été question, ce matin, du rapport de l'Organisation internationale du travail concernant les lois d'exception adoptées par l'Assemblée nationale, sa majorité gouvernementale, il y a un an et quelques mois. Le ministre a laissé entendre que l'Organisation internationale du travail aurait publié un rapport qui était plutôt favorable au gouvernement. J'ai pris soin de me procurer ce document. Je voudrais en résumer les conclusions pour que seule la vérité nous commande dans ces choses. Il y a trois conclusions et elles sont très brèves.

Le comité qui a examiné l'affaire a entendu les deux points de vue. Je dois

souligner, ayant fait la lecture de ce qui est donné, qu'il a écouté ces deux points de vue objectivement et il résume la thèse de chaque partie de manière impartiale. Il tire les conclusions suivantes. Le comité note que le gouvernement du Québec s'est efforcé de négocier avec les syndicats des secteurs public et parapublic et a abouti, pour un nombre considérable d'entre eux, y compris certains syndicats plaignants, à la conclusion d'une convention collective ou d'une entente modifiant les décrets réglementant les conditions de travail dans ces secteurs.

Il note, néanmoins, avec préoccupation que les lois 70 et 105 ont imposé d'importantes diminutions de salaire à certains salariés, parfois de l'ordre de 18%, en proclamant la supériorité des impératifs de la politique financière du gouvernement sur les conventions collectives. Le comité estime que l'imposition de telles restrictions par la loi 105 pendant une période de trois ans est trop longue.

Au sujet de la loi 111, le comité considère que les déductions de salaire pour les jours de grève ne soulèvent pas d'objections du point de vue des principes de la liberté syndicale, mais il n'en est pas de même des restrictions d'exercice normal du droit syndical des enseignants contenues dans la loi: menace de licenciement, piquet de grève, perte d'années d'ancienneté pour fait de grève, amendes, etc., allégués par les plaignants.

En ce qui concerne la loi 111, le comité rappelle que les travailleurs de l'enseignement devraient bénéficier du droit de grève du fait qu'ils ne travaillent pas dans un service essentiel au sens strict du terme. En conséquence, le comité prie le gouvernement de prendre des mesures afin de ne pas maintenir la suspension du droit de grève et les autres restrictions aux droits syndicaux imposées jusqu'en 1985 aux travailleurs de l'enseignement.

Cela va beaucoup plus dans le sens du voeu de l'Assemblée nationale qui a demandé au gouvernement d'abroger la loi 111 dans les meilleurs délais. Je ne vois pas en quoi ceci constitue une bénédiction de la voie suivie par le gouvernement.

M. Bérubé: Je pense qu'il faut lire l'ensemble du document, ce que le député d'Argenteuil a certainement fait et, deuxièmement, connaître les us et coutumes du Bureau international du travail. Par exemple, dans le cas d'autres provinces canadiennes qui ont rouvert les conventions collectives en cours d'exercice, le Bureau international du travail a mis ces gouvernements sous surveillance alors que, dans le cas du gouvernement du Québec, il a simplement exprimé une opinion concernant les événements qui se sont produits, mais a jugé qu'il ne devait pas aller au-delà de cela. Il ne soumet donc pas le gouvernement du Québec à la surveillance. Il fait donc simplement une objurgation ou une recommandation aux parties et s'en tient là.

Il faut connaître les règles du Bureau international du travail pour donner le véritable sens aux recommandations que vous avez là. De toute façon, à la lecture des recommandations, on voit quand même l'attitude du Bureau international du travail qui, évidemment, n'est pas là pour dire qu'il est souhaitable que les gouvernements aient à intervenir pour décréter les conditions de travail, mais le Bureau international du travail a, parmi ses règles, la prise en considération de l'intérêt national qui peut amener le gouvernement à intervenir d'office dans les conditions de travail des employés du secteur public. Cela fait partie des règles communément admises par le Bureau international du travail. C'est d'ailleurs ce à quoi ils font allusion dans leur conclusion.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: ...après tout ce verbiage, le gouvernement doit-il, oui ou non, abroger la loi 111?

M. Bérubé: Le problème de l'abrogation de la loi 111 découle purement et simplement des poursuites entreprises en vertu de cette loi. Son abrogation pourrait causer des problèmes juridiques fort complexes et le ministère de la Justice n'est pas favorable en ce moment, en tout cas, à l'abrogation de la loi 111 bien que, sous toutes les autres considérations, le gouvernement soit favorable à son abrogation.

Le Président (M. Charbonneau): Cela va. Donc, je repose la question: Le programme 4 est-il adopté?

M. Ryan: Sur division.

Le Président (M. Charbonneau): Adopté sur division. Nous allons passer à l'étude du programme 7 sur l'éducation des adultes. Je vous signale que le temps file à vive allure. Je vais maintenant donner la parole au député d'Argenteuil. M. le député.

Partage du temps

M. Ryan: M. le Président, avant d'aller plus loin, il ne serait peut-être pas mauvais, à la lumière de l'entente que nous avions faite au début des travaux de la commission, que vous nous donniez un bilan de la manière dont le temps a été utilisé jusqu'à maintenant par le ministre et le côté

gouvernemental et par l'Opposition, afin que nous ayons peut-être une indication quant à la voie à suivre dans la nouvelle partie de nos travaux que nous entreprenons maintenant.

M. Bérubé: M. le Président, je ne voudrais pas contredire le vice-président de cette commission, mais j'aimerais m'enquérir s'il existe des règles de partage du temps et si mon droit de parole comme ministre de l'Éducation peut être limité par des règles internes de la commission.

Le Président (M. Charbonneau): Non, mais les membres de la commission s'étaient entendus sur le partage le plus équitable possible du temps entre le côté ministériel et l'Opposition, suivant en cela la tradition qui veut qu'à l'étude des crédits les députés de l'Opposition aient une occasion particulière de questionner le gouvernement, par ses représentants, sur les orientations et les politiques adoptées. Dans ce sens, les membres de la commission avaient convenu que les interventions du ministre se situeraient à l'intérieur d'une espèce de banque ministérielle. Jusqu'à maintenant, les réponses données surtout par le ministre et ses collaborateurs ont fait en sorte que cette entente ne s'est pas avérée, dans les faits, un partage moitié-moitié du temps de parole utilisé depuis le début de la commission. Si bien que ce matin, pour répondre à la question du député d'Argenteuil, le parti ministériel, incluant le ministre, a utilisé...

M. Bérubé: M. le Président, c'est contraire à l'esprit de ces commissions. Je comprends bien que, dans l'esprit du nouveau règlement de nos commissions parlementaires, nous sommes invités à répondre aux questions, mais vous ne pouvez pas comptabiliser nos interventions à l'intérieur des interventions du parti ministériel, en vertu de cette indépendance du législatif face à l'exécutif.

Le Président (M. Charbonneau): Oui, mais il y a également une tradition, M. le ministre, qui a été invoquée à la commission de l'Assemblée nationale et qui a fait l'objet de discussions, notamment avec les leaders des deux formations politiques, voulant qu'on balise aussi le nouveau règlement par le respect d'une certaine tradition.

M. Laplante: M. le Président, ce matin, je pense que...

M. Ryan: Pourrais-je avoir la réponse à la question qui a été posée au président? Il était en train de nous donner les chiffres. On pourrait au moins écouter les chiffres.

M. Laplante: Au départ, je crois que quelque chose n'est pas exact.

Le Président (M. Charbonneau): Si vous voulez me laisser compléter, M. le député de Bourassa. Ce matin, le ministre a utilisé 54 minutes; pour l'ensemble des membres du côté ministériel, incluant le ministre, c'est une heure et vingt-deux minutes. Si vous faites la différence entre une heure et vingt-deux et 54 minutes, vous verrez ce que les députés ministériels ont utilisé. Du côté de l'Opposition, on a utilisé 51 minutes cet après-midi; du côté ministériel, incluant les réponses du ministre, on a utilisé 92 minutes. Ce soir, le parti ministériel, incluant les réponses du ministre et de ses conseillers ou de ses collaborateurs, a utilisé une période de deux heures et 34 minutes. Cela ne se peut pas. (21 h 45)

M. Ryan: Cela nous avance bien!

Le Président (M. Charbonneau): On me signale que c'est le cumulatif pour l'ensemble du programme 4, donc, pour cet après-midi et ce soir; le parti ministériel, incluant les interventions du ministre et de ses collaborateurs, a utilisé deux heures et 34 minutes; le parti libéral a utilisé 1 heure et 14 minutes.

M. Bérubé: M. le Président, si nous devons tenir une telle comptabilité, j'aimerais que vous fassiez la comptabilité de la durée des interventions des témoins gouvernementaux, en réponse aux questions qui nous sont soumises, et de celle des interventions du parti ministériel, d'une part, et du parti de l'Opposition, d'autre part. De la sorte, nous aurons un véritable partage du temps en trois parties, car il serait, je pense, injuste de comptabiliser les réponses que nous donnons à l'Opposition à l'intérieur des interventions du parti ministériel.

Le Président (M. Charbonneau): Bien sûr, si tout le monde veut remettre en question les discussions qu'on a eues en séance de travail, je veux bien, mais je pense qu'il y a eu une entente, qu'on n'a pas respectée de toute façon, et il est évident que c'était une entente de départ pour nous permettre de fonctionner.

M. Laplante: M. le Président, une petite mise au point. Ce matin, il a été décidé que, lorsque le ministre parlait, le temps des réponses était déduit à celui qui répondait.

Le Président (M. Charbonneau): Cela n'a pas été décidé ici.

Une voix: II n'y a pas concordance avec les autres.

M. Laplante: Au départ, je m'y oppose. C'est là-dessus que j'ai dit que...

Le Président (M. Charbonneau): Ce matin, nous avons pris la peine de faire une séance de travail pour régler ces questions. J'espère que nous ne passerons pas le reste de la séance d'aujourd'hui et une partie de la séance de demain à soulever des questions de procédure. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): M. le Président, nous avons convenu, en effet, de répartir le temps également entre l'Opposition et le côté ministériel, mais on n'a pas discuté en détail la façon dont on répartirait le temps de réponse du ministre. Or, il est évident pour nous que, lorsque le ministre répond à une question de l'Opposition, cette réponse ne peut pas en toute logique être comptabilisée dans le temps des députés ministériels. Cela va à l'encontre de la logique même. Cependant, si le ministre répond à une question du côté ministériel, bien sûr, cette réponse est comptabilisée du côté ministériel. Cela nous semblait aller de soi.

Le Président (M. Charbonneau): Mais il y a peut-être des choses qui...

M. Leduc (Fabre): Tenant compte de ces facteurs qui nous semblaient évidents, nous étions d'accord pour répartir le temps également. Or, il est évident que, si le ministre répond à une question de l'Opposition, cela ne peut pas compter sur notre temps.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je pense que le député de Fabre n'était pas ici ce matin, car ce n'est pas du tout ce qu'on a dit, mais pas du tout. Quand le ministre dit qu'il faudrait diviser cela en trois, s'il ne répond pas, c'est parce qu'il ne peut répondre et qu'il a besoin des fonctionnaires pour répondre. Je comprends cela et ils répondent donc pour lui. Cela me semble assez élémentaire.

Le Président (M. Charbonneau):

Messieurs et madame, ce qui me semble clair, à la lumière de vos interventions, c'est qu'il y a peut-être des gens, de part et d'autre, qui ont pris des choses pour acquis. Peut-être y avait-il des précisions qui n'étaient pas claires dans l'esprit des uns et des autres quant au déroulement de nos travaux pour l'étude des crédits. Cela ne me fait absolument rien d'utiliser le reste de la séance d'aujourd'hui pour clarifier des questions, mais c'est du temps de moins pour étudier les crédits.

J'ai essayé, dans cette répartition du temps, de permettre à tous les membres de la commission qui voulaient poser des questions de le faire tout en respectant la réalité qui veut qu'à l'étude des crédits, le ministre soit en première ligne et, naturellement, ait la plus grosse période de temps. C'est un peu normal, on est là pour l'interroger sur ses politiques.

Par ailleurs, mon intention était aussi de respecter la tradition qui veut que cette période serve à l'Opposition pour questionner adéquatement le gouvernement et, donc, les ministres sur leurs politiques. C'est un peu à la suite de la séance de la commission de l'Assemblée nationale de la semaine dernière que je tentais de faire mon travail, sans nécessairement utiliser des règles trop strictes. Jusqu'à maintenant, je pense que ça allait assez bien.

M. Laplante: Jusqu'à présent, M. le Président, cela a très bien fonctionné. Les députés ont des droits, ce sont des élus qui sont autour de la table et on n'a fait aucune différence entre l'Opposition et le gouvernement. On s'est dit: Nous sommes députés, il y a des comptes à rendre dans l'étude d'un budget comme celui-là et nous ne sommes pas ici pour suivre le ministre, contrairement à ce que l'Opposition peut penser. Vous connaissez notre rôle, nous avons pris connaissance du budget en même temps que tout le monde. Comme député, je ne veux pas qu'on brime mes droits de représentant de la population, qu'on limite mon droit de poser des questions au ministre présent.

Ce n'est pas pour rien qu'il est considéré comme témoin dans la nouvelle organisation des séances, il n'a même pas le droit de parler comme il le désire, il ne doit répondre qu'à des questions de fonctionnement. Il n'a même pas ce droit actuellement, il n'est là que comme témoin. Je veux bien me servir de mon droit, mais je ne veux pas en abuser, car je crois que l'Opposition a un grand rôle à jouer ici, dans l'étude des crédits, et je la respecte. Même si elle prend 60% du temps, cela ne fait rien, mais si j'ai besoin de trois minutes pour poser des questions, j'aimerais bien pouvoir les utiliser. C'est dans ce sens qu'on pourrait fonctionner à l'amiable.

Le Président (M. Charbonneau): La meilleure chose que je pourrais vous suggérer à tous, ce serait que dorénavant, comme cela s'est fait ce matin, on comptabilise clairement le temps afin de savoir le temps que le ministre et ses collaborateurs prennent et le temps que les députés ministériels et ceux de l'Opposition utilisent. Je tenterai aussi de respecter la tradition qui veut que l'Opposition ait suffisamment de temps pour questionner comme il se doit le ministre et ses collaborateurs, tout en permettant à tous les membres de la commission d'intervenir.

M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, il y a une chose qui est claire. D'abord, la proposition qui a été faite par vous ce matin avait une signification précise. Il y en a qui ne l'ont peut-être pas comprise, mais elle était très précise. Je peux en témoigner parce qu'elle a été préparée au comité directeur de la commission. Nous sommes parfaitement d'accord sur la signification qu'il convient de lui donner, nous y étions tous les deux, le président et moi-même, ainsi que la secrétaire.

On peut la contester par après si on veut, on peut la remettre en question, on peut dire qu'on ne l'accepte plus, c'est une autre affaire. Je pense qu'il n'y a pas de doute quant à la nature de la proposition qui avait été faite. Je ne sais pas si cette chose-là a été vérifiée auprès du ministre avant qu'il ne vienne, si on s'est assuré de son consentement également. Je ne me souviens pas de ce qui s'est passé exactement au début de sa participation à nos travaux ce matin, mais il y avait une entente claire de ce côté-là. C'était une expérience qu'on faisait.

M. Laplante: Cela a été enregistré. J'aimerais beaucoup voir l'enregistrement et vous verrez...

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Bourassa, je vais vous le rappeler très clairement et vous verrez que cela correspond au journal des Débats.

M. Laplante: Je l'ai cherché. Vous verrez que je m'opposais à ces choses-là, que je voulais avoir de l'équité.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député de Bourassa, je voudrais simplement rappeler clairement ici, comme le député d'Argenteuil le signale, que cette entente ne nous convient plus. Nous la reformulerons dans des termes qui satisferont l'ensemble des membres de la commission. Ce qui était clair dans mon esprit, ce matin, dans la proposition que le comité directeur avait faite, c'était qu'il y avait un partage équitable du temps. Je n'avais pas eu de directive particulière du bureau des leaders ou du bureau des whips. Le partage équitable du temps était celui-ci: les interventions du ministre étaient comprises dans le temps ministériel et, s'il y avait des députés indépendants qui intervenaient, le temps était compris dans le temps de l'Opposition.

Il semble que cette façon de fonctionner n'ait pas plu à tout le monde ailleurs, dans d'autres commissions. Maintenant, ce soir, on semble vouloir interpréter que le temps du ministre se divise en deux types d'interventions: quand il répond à un député ministériel, c'est compris dans le temps des députés ministériels et, quand il répond à un député de l'Opposition, c'est compris dans le temps des députés de l'Opposition. Il est possible de fonctionner de cette façon, sauf que je vous signale que ce n'était pas le sens de la proposition de ce matin et personne n'a signalé le problème particulier de deux types de réponses de la part du ministre, c'est-à-dire des réponses à des députés ministériels et des réponses à des députés de l'Opposition.

Si on veut maintenant faire ces distinctions, je pense qu'il est possible de le faire, mais qu'on ne confonde pas la proposition de ce matin avec des fonctionnements qui peuvent être modifiés.

M. Bérubé: M. le Président, je soumettrais humblement à votre considération que je n'ai pas vraiment d'objection à ce que l'on me soumette fort longuement aux supplices de la question. J'ai quelques réticences, cependant, à ce que l'on minute la longueur de mes réponses.

Essentiellement, il me semble qu'en partageant le temps en trois, on pourra peut-être, à un moment donné, observer que nous prenons trop de temps à répondre aux questions et, à ce moment, cela me fera plaisir d'essayer de restreindre la longueur de mes réponses si celle-ci fait obstacle. Je plaiderais en faveur de la réforme parlementaire qui, de façon fort symbolique, nous a situés à l'extrémité de cette table de travail pour bien établir une démarcation entre l'exécutif et le législatif et faire en sorte que le ministre soit appelé à répondre de son administration auprès des membres de l'ensemble de la commission.

À cet égard, je pense qu'on devrait peut-être essayer quand même de respecter l'esprit de cette réforme et faire en sorte qu'on minute le temps de la partie gouvernementale de façon séparée, de telle sorte que l'on puisse porter un jugement sur la longueur des réponses. Si on pense qu'effectivement elles sont trop longues, il me fera plaisir d'essayer de les restreindre. Je pourrais essayer également de minuter soigneusement la longueur de mes réponses de telle sorte que je réponde très brièvement quand l'Opposition m'interroge et très longuement quand le parti au pouvoir m'interroge, de manière à mieux équilibrer le temps si cela est important. Enfin, je vois difficilement comment on pourrait faire autrement.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je vous soumets qu'il y avait une entente et qu'elle avait été acceptée par tout le monde ce matin. Je trouverais extrêmement regrettable qu'elle soit brisée en cours de route. C'est une expérience qui est faite et qui n'engage pas l'avenir, qui

engage cette partie-ci des travaux de l'Assemblée nationale qui va durer trois jours. Maintenant, il me semble que la meilleure manière de venir à bout du problème, ce serait, pour le ministre et ses collaborateurs, de donner des réponses concises aux questions de manière qu'il y ait un peu plus de participation possible. Je pense que nous avons fait la preuve mathématique de ce que donnent des réponses abusivement longues et, avec un peu de collaboration et de bonne volonté de ce côté, si le parti ministériel dit qu'il ne veut plus d'entente comme celle-là, ils nous le dira à nous et on l'enregistrera, car on n'a pas de contrôle sur eux. Je trouverais extrêmement malheureux, parce qu'on s'aperçoit que cela a donné ce résultat, qu'on dise: Cela ne marche plus, la patente.

Qu'on attende que les travaux de la commission soient finis et, s'il y a un mouvement de retenue de la part de chacun... Je pense que la preuve est faite que nous n'avons point abusé du temps de parole qui nous est imparti. Si le ministre veut collaborer avec les députés qui sont membres de la commission, ainsi que ses collaborateurs, pour donner des réponses plus brèves, je pense qu'on pourrait arriver et continuer nos travaux. Mais, là, nous avons un problème que nous allons discuter ensemble parce qu'on a pris un sujet très important qui était inscrit au programme de la journée. Nous avions établi notre programme de telle manière qu'on procédait tranche par tranche, afin de ne pas laisser de côté des tranches importantes. Là, il y en a une tranche. On ne sait pas où on va la situer. Déjà, on a un problème majeur qui se pose à cause de cela.

Le Président (M. Charbonneau): Écoutez, il est 22 heures. Je vous propose que demain matin, plutôt que de prendre encore une autre demi-heure du temps de la commission pour régler cette question, si les membres de la commission étaient d'accord, nous nous réunissions en séance de travail quinze minutes avant le début de la séance publique pour régler ces problèmes de fonctionnement. Je trouve qu'après les dix minutes qu'on vient de prendre sur l'étude des crédits, si on poursuit ce débat demain matin sur le temps de l'étude des crédits, tout le monde va être perdant. À moins qu'il n'y ait des objections, j'ajournerais les travaux à demain matin et je convoquerais une séance de travail des membres de la commission à 9 h 40.

Une voix: D'accord.

M. Laplante: Je regrette, M. le Président, mais je ne serai pas présent pour cette séance. Je vais faire mon possible pour être ici à 10 heures à cause d'autres réunions. Je vous en avais averti ce matin. Tout de même, ce que je peux vous exprimer tout de suite, c'est que je ne démordrai pas, à ce stade-ci, pour qu'il y ait un temps équitable réparti entre les deux formations.

Le Président (M. Charbonneau): M. le député, nous avons enregistré votre position tantôt et je pense que les députés ministériels qui seront à la séance de travail pourront faire valoir ce point de vue.

M. Laplante: Je demande le consensus.

Le Président (M. Charbonneau): Les travaux sont ajournés à demain matin, 10 heures pour la séance publique, et je vous attends à 9 h 40 pour la séance de travail.

(Fin de la séance à 22 heures)

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