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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Wednesday, November 16, 1988 - Vol. 30 N° 31

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 65 - Loi modifiant la Loi sur la santé et la sécurité du travail


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Kehoe): Le mandat de la commission est de faire l'étude détaillée du projet de loi 65, Loi modifiant la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Je demande au secrétaire d'annoncer les remplaçants.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. On m'a informé que M. Gobé (Lafontaine) remplace M. Tremblay (Iberville).

Le Président (M. Kehoe): Y a-t-il des motions préliminaires? Je demande au ministre s'il a des déclarations d'ouverture ou s'il a des commentaires.

Remarques préliminaires M. Yves Séguin

M. Séguin: Quelques mots, M. le Président. Je voudrais saluer les collègues de la commission pour l'exercice que nous avons, l'étude du projet de loi 65 qui modifie la Loi sur la santé et la sécurité du travail bien connue sous l'appellation de loi de la CSST, afin d'Introduire un nouveau système d'information. On aura l'occasion dans les prochaines minutes, M. le Président, d'en étudier le fondement article par article.

Je voudrais simplement rappeler que ce projet de loi est le fruit d'une vaste consultation commencée il y a plusieurs années, au tout début de 1980-1981, qu'il y a eu des comités dans toutes les provinces pour s'associer à un projet pancanadien qu'avait lancé le gouvernement fédéral pour que, dans l'ensemble des entreprises au pays, particulièrement au Québec en ce qui nous concerne, on puisse retrouver un minimum d'obligation pour un employeur ou un fabricant de donner une information sur l'étiquette qui accompagne certains produits jugés dangereux ou dont la manipulation peut présenter des risques, ce qui n'existe pas à l'heure actuelle.

Donc, c'est quand même une forme d'innovation; c'est un complément, je pense, à tout exercice de prévention. Le but de la loi, c'est simple, c'est d'obliger des employeurs, des fabricants dans certains cas, à mettre un avis, une étiquette donnant un minimum d'information sur le produit, accompagné d'une fiche signalétique, c'est-à-dire une feuille un peu plus complète qu'une simple étiquette qui donne les moyens d'intervention s'il y a une manipulation dangereuse ou un bris, ou s'il arrive un accident. Alors cette fiche donnera plus de détails. Troisièmement, il y a l'obligation pour un employeur de fournir un programme de formation sur les produits concernés; par exemple, les moyens que l'employé peut utiliser en cas d'accident afin d'éviter des brûlures, des problè- mes personnels.

C'est un projet de loi qui s'harmonise avec l'ensemble des provinces à l'initiative du gouvernement fédéral pour que ce soit uniforme dans toutes les provinces et que toutes les provinces aient les mêmes obligations. Compte tenu du fait qu'au Québec plusieurs employeurs font affaire dans plusieurs provinces, compte tenu du fait que plusieurs fabricants peuvent faire circuler les mêmes produits d'une province à l'autre, il aurait été plus difficile, et même aberrant dans certaines circonstances, que chacune des provinces procède séparément. Vis-à-vis des employeurs et des produits qui circulent, on aurait trouvé des situations où, dans une province, le traitement aurait été différent de celui d'une autre. Alors, dans les années 1982, 1983, 1984 et les suivantes, jusqu'à l'arrivée d'un projet de loi fédéral en 1986, tout le monde était d'accord pour qu'il y ait un système uniforme dans l'ensemble des provinces, et particulièrement au Québec, afin que l'obligation soit la même et que l'on n'en arrive pas à des situations où certains en seraient exemptés à un endroit et non exemptés à l'autre, ou que les applications soient différentes d'une province ou d'une entreprise à l'autre.

Ce projet de loi origine de la CSST qui me l'a recommandé de façon unanime par son conseil d'administration. On sait qui siège au conseil d'administration de la CSST. C'est un conseil paritaire. La moitié du conseil est composée de représentants syndicaux et l'autre moitié de représentants des parties patronales. Pendant les années que j'évoquais tantôt, de 1982 jusqu'à 1985, 1986 environ, le premier avant-projet de loi a été constitué au niveau fédéral et, par ricochet, au niveau des provinces. Un représentant de la CSST siégeait au comité pancanadien, si je peux dire, pour acheminer les arguments et les représentations des parties patronales, syndicales et autres du Québec.

Depuis que le projet de loi a été préparé - c'était surtout durant le printemps et l'été derniers - il a été acheminé aux différentes parties syndicales et patronales du Québec, dont la CSST et d'autres. Les commentaires que j'ai reçus depuis sont, dans l'ensemble, unanimement favorables. Quelques-uns ont fait part de quelques points de perfectionnement, s'il y avait lieu, mais on verra que le règlement peut apporter des compléments au projet de loi. Il me semble que le projet de loi, à l'heure actuelle, représente un équilibre, un consensus très complet, sachant très bien qu'un nouveau système comme celui-là n'est jamais parfait au moment où on le fait et qu'il devra peut-être recevoir des bonifications l'année prochaine et l'année suivante. On va voir comment le projet de loi va fonctionner.

Je pense que les conseils reçus, l'expérience du fédéral et la façon dont les autres provinces ont adapté le même système dans chacune de

leurs lois nous permettent de croire que nous sommes actuellement prêts à procéder raisonnablement à l'adoption du projet de loi, d'autant plus que l'élément de l'uniformité est très important, de sorte que l'ensemble des projets de loi et des règlements au niveau des provinces est conforme à celui du fédéral pour être sûr que l'obligation donnée à l'employeur de faire les étiquettes, de fournir la fiche signalétique et de donner des cours de formation se retrouve partout et que personne n'ait de traitement différent. Je pense que la sécurité des travailleurs en dépend, et c'est important.

Il y a une question de délai que je voudrais évoquer en terminant. Le projet de loi fédéral voulait que l'ensemble de la réglementation de la loi soit en vigueur le 31 octobre; donc, effectivement, le fédéral a sa loi et ses règlements en vigueur depuis le 31 octobre et l'ensemble des provinces aussi, sauf quelques-unes. Au Québec, avec notre système, on ne pouvait, évidemment, pas avoir une loi adoptée le 31 octobre puisque la session n'était commencée que depuis quelque temps. Le projet de loi n'était pas tout à fait prêt parce que sur certains points nous avons des particularités, nous les verrons tantôt. Ce n'est rien de fondamental, mais quand même. Donc, je pense qu'il serait important et très attendu que nous puissions procéder à la sanction de la loi avant le mois de décembre pour que, à tout le moins, après le retour du congé des fêtes, en janvier, on puisse informer les employeurs de leurs obligations dont ils sont déjà conscients, puisqu'ils ont déjà pris connaissance du projet de loi, ne serait-ce que par le fédéral, mais ils ont pris aussi connaissance de notre projet de loi. Je pense que le délai est actuellement important pour que, sans nous bousculer inutilement, mais sans perdre le peu de temps que nous avons dans la présente session, nous procédions avant la fin de la session, le 21 décembre, à l'adoption de la loi.

M. le Président, j'aurai un amendement que je vous présenterai lorsque nous arriverons à l'article 2 pour apporter un petit ajout à l'article 62.19; je l'expliquerai à ce moment-là. Par ailleurs, je suis accompagné de quelques collaborateurs qui pourront, si besoin en est, fournir des renseignements ou donner des explications puisqu'ils ont participé activement et de très près à l'étude et à la confection du système que nous présentons par le projet de loi. Il me fera plaisir de répondre à toutes les questions que les membres voudront poser. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Kehoe): Merci,M. le ministre. Je demande au porte-parole de l'Opposition et député de Laviolette s'il a des remarques préliminaires à faire.

M. Jean-Pierre Jolivet M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'en ai quelques-unes. Vous n'êtes pas sans savoir que le projet de loi a été déposé à l'Assemblée nationale le 3 novembre dernier, que le ministre et moi avons eu l'occasion d'échanger des idées sur le principe du projet de loi jeudi passé, le 10. Lorsque j'ai discuté de ce projet de loi avec lui sur le principe même, je lui ai fait mention que nous avions eu des discussions et que nous allions fort probablement demander qu'on entende des gens sur ce projet de loi, parce qu'il y va de la santé et de la sécurité de l'ensemble des travailleurs mais qu'il y va aussi de la sécurité de l'ensemble de la population qui vit autour de ces usines-là. En conséquence, on ne pouvait pas regarder ce projet de loi à la légère, sans consultations qui nous permettent de bien voir si, oui ou non, l'ensemble des sujets touchés par le projet de loi est convenables à notre avis.

J'avais pris la précaution, quand la présidente ou le président - je ne me souviens pas duquel des deux était sur le siège jeudi passé - nous a demandé si on acceptait le principe du projet de loi, de poser une question au ministre, à savoir s'il acceptait, à la suite des consultations qu'on est en train de faire, d'entendre de façon restreinte certains groupes, plus particulièrement ceux qui participent au conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est-à-dire au moins les côtés patronal et syndical, de façon qu'on s'entende sur une liste qui pourrait être l'objet d'une participation ici à l'Assemblée nationale, à la commission parlementaire.

Je m'excuse, je ne suis pas considéré comme une personne qui arrive en retard à ses rendez-vous. J'étais convoqué pour 10 heures ce matin, mais je dois vous dire que depuis ce matin, après la discussion que j'ai eue hier soir avec le ministre, qui m'avait appelé à mon bureau et que j'ai vu ensuite à l'Assemblée nationale, j'ai eu des consultations sur le sujet avec des gens encore ce matin, ce qui m'a amené à un retard de quelques minutes ici, parce qu'ils avaient beaucoup de choses à dire.

Ce matin, la commission entreprend ses travaux et comme députés de l'Opposition, dans le "rush" de la fin de session, comme on dit souvent, on se sent un peu bousculés. Le ministre a pris la précaution de dire qu'il n'avait l'intention de bousculer personne, mais je vous donne les dates. Moi, comme membre de l'Opposition, j'ai pris connaissance du dossier - avec l'aide de notre recherchiste qui a fait les contacts nécessaires - le 3 novembre dernier; le 10, on discutait du principe à l'Assemblée nationale en exprimant les réticences que nous avions sur certains points qui ont été oubliés dans le projet de loi. Nos contacts nous indiquent qu'effectivement il y a des gens qui seraient intéressés à faire valoir leur point de vue et à voir de quelle façon on peut améliorer le projet de loi. À la suite des discussions que j'ai eues avec le ministre hier, j'ai quelques inquiétudes. On aura l'occasion de l'entendre

parler davantage lorsque nous en serons à la motion que j'ai l'intention de présenter. Je veux, quand même, vous mentionner que des gens nous ont contactés et qu'on en a contacté aussi, parce qu'on voulait être sûrs, nous aussi, de bien aller dans l'intérêt des travailleurs.

Je faisais mention au ministre que j'avais eu l'occasion, comme simple député à l'époque où Pierre Marois était responsable du dossier, d'étudier à fond l'ensemble du dossier de la santé et de la sécurité au travail. J'ai eu l'occasion, au nom du ministre, d'aller faire des discours dans l'ensemble du Québec, de rencontrer des gens au niveau patronal et au niveau syndical. Je vous dis, comme je le disais à l'époque, qu'il n'est pas question, d'aucune façon, de devoir entrer en scaphandre dans une usine pour se protéger contre le bruit, contre les odeurs, contre les bris qui pourraient survenir à une machine, contre tout ce qui pourrait être dommageable à la santé de l'individu à l'intérieur. En conséquence, il fallait plutôt s'assurer d'avoir sur les lieux de travail des moyens de prévention pour la diminution du bruit, la diminution des émanations, la diminution des dangers de manutention. On allait plus loin en disant qu'il fallait aussi en arriver, si on faisait de la prévention à l'intérieur, à ce qu'il y ait en même temps de l'information à l'extérieur.

Le projet de loi que nous avons devant nous, M. le Président, ne nous indique pas que ce qui s'est produit à Saint-Basile-le-Grand par exemple, ne pourrait pas se produire dans une usine fabriquant et faisant la manutention de produits dangereux; que cela ne pourrait pas se reproduire si la population à l'extérieur n'était pas informée. Si des gens aussi importants que le chef des services d'incendie ne connaissent pas la teneur de la fiche signalétique qui leur permettrait de réagir rapidement à des dangers qui pourraient surgir dans le milieu; si on ne permet pas, sous le signe de la confidentialité, à l'ensemble du public d'être au courant de certaines difficultés qui pourraient exister, par l'intermédiaire du département de santé communautaire qui est un milieu de prévention, un milieu de recherche... Le département de santé communautaire, tel qu'on le connaît aujourd'hui par rapport à ce qu'il a été à l'époque où il était à la fois CLSC et département de santé communautaire, est précisément ancré dans l'ensemble de la recherche épidémiologique, comme on dit, dans l'ensemble des problèmes qui peuvent exister dans un milieu donné, mais, en même temps, il est responsable de la prévention, responsable de l'information au public. On ne retrouve rien dans le projet de loi qui dise que la population qui est désireuse de connaître ce qui se fait chez elle, ce qui se passe chez elle, sera informée. Je pense qu'il y a beaucoup de trous dans le projet de loi. On parle juste des agents physiques dangereux qui, par rapport à la loi de l'Ontario ne sont pas dans notre loi au Québec. Pourtant, on parle de faire une loi uniforme pour l'ensemble du Canada. Il y a des problèmes qui peuvent exister, M. le Président, vous en êtes certainement conscient. Seulement concernant la langue, il y a dans une usine des gens qui ne parlent ni français ni anglais, qui ont des problèmes relativement à la connaissance du dossier. Il pourrait, dans certains cas, y avoir des informations en italien ou en russe, s'il le fallait, M. le Président. Il y a des choses qui n'existent pas dans la loi. On y reviendra en cours de route.

Il y a toute la question des médecins qui seront informés en cas d'urgence alors que, normalement, ils devraient être informés, et vous êtes au courant, des maladies qui sont, à long terme, cancérigènes ou qui peuvent rendre asthmatiques. Ils pourraient être informés avant de la teneur des ingrédients, des substances qu'on utilisera, de façon à le dire aux médecins des départements de santé communautaire, aux médecins qui, en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, sont responsables du retrait préventif ou du programme de santé à l'intérieur de l'industrie, aux médecins qui, en vertu de la loi 42 sur le travail, sont responsables de l'ensemble de cette information qu'ils doivent posséder s'ils veulent non seulement agir dans les cas d'extrême urgence, mais agir aussi dans le cas de maladies à long terme, parfois pernicieuses, qui font que, si on ne les connaît pas dès le départ, on a des problèmes.

Je pense qu'il n'y a rien là-dedans. Les chefs des services d'incendie, je le répète, disent que ce serait intéressant. Il y a des gens qui les ont contactés pour leur dire: Oui, avant même qu'arrive un accident ou un incident, il faut que ces gens-là soient informés de l'ensemble des produits utilisés à l'intérieur de l'usine. Tout cela sous le signe de la confidentialité. Même une personne pourrait vouloir être informée et voir la fiche signalétique parce qu'elle est dans l'environnement de l'usine et qu'elle voudrait savoir s'il y a des effets sur sa propre santé par l'intermédiaire du département de santé communautaire. Encore une fois, tout cela sous le principe de la confidentialité. Rien dans le projet de loi ne nous l'indique.

Le ministre pourra peut-être me dire: C'est dans la réglementation, on y reviendra à ce moment-là, mais une chose est certaine, c'est qu'il y a des affaires qui doivent être dans la loi et qui permettraient à la population d'être sécurisée. Le cas de Saint-Basile-le-Grand ne doit plus se produire, on l'espère tous, mais on ne peut pas contrôler la nature, ni tout; donc, il va encore y avoir des incidents et des accidents. A ce moment-là, il faut que les gens soient préparés en conséquence. Ça n'a pas de bon sens que dans la loi, à un autre article, on exclue même certains produits et qu'on ne réglemente pas la question de l'entreposage.

On dit qu'il y a des gens qui ont été consultés. Je vous dis: Souvent, dans ma carrière,

j'ai participé comme individu à bien des comités consultatifs. Le député de Saint-Maurice en est ici un témoin vivant, même le député de Trois-Rivières aussi, fort probablement, parce qu'il était aux commissions scolaires. Ils ont vu le travail que j'ai fait au plan syndical dans mon propre milieu. Je peux vous dire que j'ai participé à bien des comités consultatifs, même à des comités décisionnels, parfois, sauf qu'on prenait toutes les précautions nécessaires pour protéger l'ensemble des gens qu'on représentait contre ce qu'on croyait avoir besoin de les protéger.

Qu'on vienne me dire aujourd'hui que MM. Laberge et Larose sont d'accord, ainsi que d'autres personnes, soit. Même moi, je vais être d'accord avec un principe qui est là. Peut-être ne sera-t-on pas d'accord, cependant, avec l'ensemble qui est là-dedans, que ce soit des personnes de la CSN, de la CSD ou de la FTQ. Ces gens ne nous ont pas envoyé de la documentation pour rien, mais pour nous dire qu'il y avait des choses à voir et à entendre.

C'est dans ce sens-là que, sans vouloir retarder quoi que ce soit et sans vouloir être bousculé de quelque façon que ce soit, comme membre de l'Opposition, je n'ai pas l'intention de faire un travail où on me dirait: Jolivet, ce que tu as à faire aujourd'hui, c'est "one, two, three, pass to go", mon cher, et c'est fini, on n'en parle plus, tu es obligé de me faire confiance. Ce n'est pas de cette façon que cela fonctionne.

Motion proposant la tenue de consultations particulières

C'est dans ce sens-là, M. le Président, qu'en vertu du règlement qui nous gouverne je ferais une proposition pour entendre - on pourrait s'entendre, de part et d'autre, sur une liste sans nommer les gens ici - des personnes qui vivent quotidiennement les problèmes de la santé et de la sécurité dans leur milieu de travail. Que l'on tienne donc des audiences particulières qui seraient restreintes à un groupe de personnes dont on fera la nomenclature de part et d'autre, sur lesquelles on pourra s'entendre, vu qu'il y a dans notre règlement cette possibilité.

Alors, je fais la recommandation; j'argumenterai ensuite. Je fais la motion actuellement. Je vous demande si elle est recevable ou non. Si elle est recevable, je ferai l'argumentation ensuite.

Le Président (M. Kehoe): La motion, telle que vous la présentez, c'est pour des consultations particulières...

M. Jolivet: Oui.

Le Président (M. Kehoe): ...des groupes que vous allez déterminer par la suite.

M. Jolivet: Ensemble.

Le Président (M. Kehoe): Bien sûr, la motion est recevable. Maintenant, je vais demander au ministre de répondre, par exemple, et de nous dire quelle est sa position sur la motion.

M. Jolivet: Avant de répondre, je voudrais au moins la...

Le Président (M. Kehoe): Excusez-moi.

M. Jolivet: ...faire valoir.

Le Président (M. Kehoe): II y aura un débat qui va s'engager.

M. Séguin: Elle est recevable.

Le Président (M. Jolivet): Peut-être pouvez-vous commencer sur votre motion, M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, à la suite de ce que je disais au ministre sur l'acceptation du principe, jeudi dernier, le ministre me répondait qu'il n'avait pas d'objection à ce que des groupes soient entendus. Par l'intermédiaire de mon recherchiste et par les appels téléphoniques que j'ai faits, les contacts que j'ai eus, j'ai donc la conviction que, même s'il est louable et qu'il est acceptable qu'on donne notre appui à cette motion d'adoption du projet de loi article par article, il serait bien que l'on fasse entendre des groupes qui auraient des recommandations à nous faire sur les points que j'ai rapidement touchés tout à l'heure. Je vous fais mention de lettres que j'ai reçues par l'intermédiaire du télécopieur de la Centrale des syndicats démocratiques, par la Fédération démocratique de la métallurgie, des mines et des produits chimiques, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, la FTQ, avec un long commentaire pour le moment. C'est la même chose avec la CSN qui doit nous faire parvenir... J'ai parlé avec quelqu'un de la CSN, ce matin, qui me donnait les grands points de leur argumentation et ils demandent d'être entendus. (10 h 30)

Dans un texte qu'elle nous envoyait, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec "estime qu'il est nécessaire que soient entendus ses représentants en commission parlementaire, en comparution particulière et restreinte, au sujet du projet de loi 65 qui a été débattu à l'Assemblée nationale en première lecture la semaine dernière". En fait, c'était en deuxième lecture, puisque c'était le principe du projet de loi. "Avant que ne débute l'étude article par article de ce projet de loi sur les SIMDUT en deuxième lecture, il est dans l'intérêt des travailleurs et des travailleuses du

Québec visés par la SIMDUT que certains éléments du projet de loi soient corrigés ou carrément retranchés.

Nos représentations peuvent se faire sans ajouter aux délais déjà encourus." Là, on dit: "Ainsi, par ordre chronologique, nous soumettons ce qui suit..." Et on donne une série d'articles qu'ils voudraient voir amender. J'aurai l'occasion, lorsque j'arriverai à l'étude article par article, de le faire. L'expéditeur est Louis Laberge.

Ensuite, vous avez la même chose. L'expéditeur est M. Claude Gingras, de la CSD, qui dit ceci au ministre: "Nous avons pris connaissance du projet de loi 65 relatif aux SIMDUT, modifiant la Loi sur la santé et la sécurité du travail. La CSD désire déposer ses représentations dans le cadre de l'étude de ce projet de loi à l'occasion de la commission parlementaire prévue à cette fin. Nous espérons, M. le ministre, que vous accéderez à notre demande et que nous recevrons communication sur l'heure, l'endroit et la journée prévus à cet effet."

La CSN nous a rejoints par téléphone et elle doit nous faire parvenir la documentation concernée.

D'un autre côté, le ministre pourrait nous dire aujourd'hui: Écoutez, vous êtes un peu en retard, M. le député de Laviolette, on est à l'étape de l'étude article par article. Le ministre comprendra très bien que j'ai pris mes précautions la dernière fois parce que ce n'est pas moi qui détermine quand on va faire l'étude du projet de loi. Je vous le répète: II était déposé le 3 novembre, le 10, on discutait du principe à l'Assemblée nationale. Nous adoptons le principe, mais on a des recommandations sur les modalités. Nous faisons mention, à ce moment-là, au ministre que nous voudrions entendre des gens lors de l'étude article par article.

Quand on m'a demandé si j'étais prêt à venir ici, ce matin, pour l'étude article par article, j'ai fait mention au ministre et on en avait parlé au téléphone ensemble, que je ferais une première motion pour entendre des groupes, parce que cela se fait, M. le Président. L'exemple que l'on a est le suivant. Pas plus tard que le semaine dernière, le ministre de l'Éducation a décidé, avec la motion qui avait été présentée devant la commission, d'arrêter la commission. On a fait une convocation de certains groupes; ils ont été entendus hier toute la journée et, après cela, on continue le travail aujourd'hui en s'assurant d'avoir tout l'éclairage nécessaire.

Je suis un député de l'Opposition et j'ai compris le message de la vice-première ministre au mois de décembre 1985 qui disait: Premièrement, on ne bousculera personne et, deuxièmement, on fera en sorte de mieux légiférer. Actuellement, avec les points d'interrogation que nous avons sur le projet de loi, je pense qu'il est de mon devoir, premièrement de ne pas me laisser bousculer, deuxièmement, de ne pas recevoir de blâme pour quoi que ce soit et, troisièmement, de permettre aux gens de venir s'exprimer sans retarder quoi que ce soit.

Le ministre dit: Normalement, le projet de loi aurait dû être adopté le 31 octobre", à plus forte raison ayant été discuté et même recommandé par la Commission de la santé et de la sécurité du travail au mois de juin dernier au ministre qui l'a précédé. Je comprends que l'actuel ministre ait saisi l'occasion, c'est normal, de le rergarder avant de prendre quelque décision que ce soit. Je sais qu'on siégeait seulement au mois d'octobre, mais ce n'est pas ma faute, si le projet de loi est arrivé le 3 novembre. Donc, le ministre pourra dire, il en a fait mention tout à l'heure, qu'il a reçu une demande de la CSST qu'il a déposée à l'Assemblée nationale et que les délais ne lui permettaient pas de la déposer avant. Mais ce n'est pas ma faute.

Ce n'est pas, non plus, ma faute si on s'aperçoit que le projet de loi mérite d'être bonifié. Il me semble que c'est mon travail, comme membre de la députation ici, à l'Assemblée nationale, de quelque côté que ce soit, de faire en sorte qu'on entende des groupes qui viendront nous faire des représentations, sans retarder, comme le disait le télégramme, envoyé par télécopieur, de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Ils disaient qu'effectivement ils ne voulaient pas qu'il y ait de retard indu. Cela ne nous empêche pas de prendre le temps qu'il faut pour bien légiférer et s'assurer que le projet de loi réponde le plus possible à l'ensemble des demandes.

Le ministre dit que le projet de loi est perfectible. J'en conviens avec lui. Je dois lui dire, tout simplement, que j'ai participé à une autre commission parlementaire sur le projet de loi 150, Loi sur les forêts, qui était perfectible et on le leur avait dit à l'époque. Il y a des trous qu'ils sont en train de combler par un projet de loi qui a été déposé hier. On le leur avait dit, il y a deux ans, quand ils l'ont déposé. On le leur avait dit pourtant. Aujourd'hui, ils vont les corriger, mais il ne faut pas oublier que ce qu'ils sont en train de corriger dans certaines parties de la loi, pas dans toutes parce qu'on n'est pas d'accord sur tout, on leur en avait parlé à l'époque. On leur avait dit que des parties devaient être corrigées et ils ne l'avaient pas fait. Ils ont dit: Non, non, ne vous inquiétez pas, cela va être bon.

C'est la même chose quand j'ai parlé au ministre de l'Éducation. Il présentait un projet de loi de quatre articles sur une commission scolaire. Sur le coup, j'ai dit: Quatre articles, ce n'est pas gros, cela va être facile à adopter. Je convoque les représentants de la commission scolaire, je parle avec eux et le député d'Ungava m'en parle. Je me retrouve avec la commission scolaire qui dit: On est en train de se faire spolier par le gouvernement. Je dis au ministre: Cela n'a pas de bon sens, est-ce que c'est vrai? Écoutez, y aurait-il moyen d'avoir une convocation spéciale et d'écouter les gens de la commis-

sion scolaire? Le ministre dit: C'est une bonne idée, M. le député. Vous connaissez M. le ministre de l'Éducation. On les convoque d'un commun accord. On se retrouve avec les gens comme témoins. La commission scolaire fait la démonstration que les gens qui ont préparé le projet de loi sont en train de spolier la commission scolaire.

Le ministre sursaute un peu et dit: D'accord, on va regarder cela. Il dépose un autre projet de loi et on est en pleine session intensive du mois de décembre. De quatre articles qu'il avait, il présente un projet de loi de huit articles, ce qu'on appelle un document réimprimé, réécrit. Cela lui prenait mon O.K. comme membre de l'Opposition parce qu'il n'avait pas le droit de faire cela en temps de session intensive, on avait dépassé le 15 novembre. Comme tout homme normalement responsable et sage, je dis: Oui, M. le ministre, ce que vous avez écrit là-dedans, c'est exactement ce dont on a discuté avec la commission scolaire et on est d'accord avec vous. Je me souviens même d'avoir eu une discussion sur un point et j'avais dit: Si vous ne mettez pas cela dedans, on ne vous donne pas notre permission. Cela touchait les travailleurs. Le ministre a finalement accepté notre position, malgré les recommandations de ses fonctionnaires. La loi a été adoptée. Il n'y a pas eu de retard indu. On a fait un projet de loi en bons législateurs et j'ai fait mon travail comme membre de l'Opposition pour perfectionner le projet de loi.

Ce n'est pas moi qui ai la responsabilité de déposer les projets de loi, mais j'ai, au moins, la responsabilité de les corriger si nécessaire. C'est dans ce sens que mon travail de député de l'Opposition doit se faire et j'ai l'intention de le faire sans me laisser bousculer, sans me faire dire que ce sera ma faute s'il est retardé. Ce n'est pas ma faute et je vous dis d'avance que je n'accepterai jamais une telle offense à l'intégrité de mon caractère et à ce que je suis capable de faire. Mon travail, je le fais le plus honnêtement possible pour le bien-être des travailleurs.

Je vous demande, donc, d'accepter la motion que je dépose ce matin. On pourra arrêter les travaux de la commission. Le ministre et moi pourrons nous entendre sur les groupes. Une fois qu'on se sera entendus, on dira: Maintenant, on les convoque de telle date à telle date. On ira voir chacun de nos leaders, on ira ensemble, s'il le faut, et on leur dira: On s'est entendus et on veut que ce soit mardi prochain. On appellera immédiatement tous ces gens par l'intermédiaire du Secrétariat des commissions, en leur disant: Faites un mémoire, vous avez 20 minutes pour la présentation, les membres du parti au pouvoir et les membres de l'Opposition ont 20 minutes pour poser des questions et on vous écoute. Après cela, on légiférera et on fera les accommodements nécessaires à ce que vous proposez comme étant logique. À ce moment-là, j'aurai avec eux les moyens de faire les pressions qui s'imposent auprès du ministre pour le convaincre de faire les amendements qui sont nécessaires au projet de loi pour le rendre le plus parfait possible.

M. le Président, c'est le but de ma proposition. J'attends la réponse du ministre sur cette question.

Le Président (M. Kehoe): M. le ministre, sur la motion.

M. Yves Séguin

M. Séguin: M. le Président, je remercie mon collègue d'établir sa préoccupation pour perfectionner le projet de loi. Il croit utile à ce stade-ci de suspendre nos travaux. Le but de la motion serait de suspendre notre séance de ce matin, de prendre une prochaine séance pour entendre quelques groupes, quelques intervenants, ce qui prendrait probablement une journée ou une demi-journée, enfin, une durée qu'on pourrait déterminer pour, ensuite, revenir et continuer l'étude article par article à la lumière des interventions qu'on aurait eues et des documents qui auraient été déposés. Remarquez que je n'ai absolument aucune hésitation à penser que cela pourrait être intéressant, très valable, constructif et plein d'enrichissements d'entendre les gens et de faire cet exercice. Cependant, je l'ai déjà indiqué à mon collègue et je dois le lui indiquer à nouveau: S'il arrivait que le projet de loi ne soit pas sanctionné à la fin de la session - je pense que c'est le 21 décembre que se terminent nos travaux - il serait refoulé a la prochaine session, au printemps et serait peut-être adopté en mai ou en juin 1989. On serait donc la seule province au Canada à ne pas suivre les SIMDUT, de sorte que les employeurs n'auraient pas l'obligation, au Québec, de faire l'affichage et l'étiquetage de l'information sur les produits dangereux. Et ce serait, je pense, un résultat regrettable puisqu'on ne donne jamais assez de moyens d'intervention pour améliorer la prévention et là on retarderait peut-être la mise en oeuvre d'un système qui se veut un moyen d'intervention pour améliorer la prévention des accidents dans les milieux de travail.

Je comprends, par ailleurs, que, comme c'est nouveau - c'est la première fois au Québec qu'on introduit cette obligation-là - on va peut-être, sur tel ou tel point, penser à telle façon de procéder qui pourrait être meilleure. L'expérience d'un nouveau système mérite un certain rodage et je pense que les règlements sont assez larges d'application pour répondre déjà à des interventions qui m'ont été acheminées. Le règlement d'application répond déjà à des questions qui ont été posées.

Mon inquiétude, M. le Président, la seule que j'ai si on procède à la consultation, vu qu'il y a plusieurs projets de loi et que notre commission, M. le Président, a probablement des engagements vis-à-vis d'autres projets de loi, c'est toute la question du processus parlementaire sur

lequel on n'a pas de contrôle. Si on fait la consultation qui va peut-être retarder nos travaux d'une semaine, dix jours, parce qu'il y a des questions de disponibilité de ma part, de la part de mon collègue, le critique de l'Opposition, et de vous, M. le Président, pour les travaux de la commission - je ne suis pas très au fait des règles de procédure - est-ce que le mandat de l'Assemblée nationale nous demanderait de retourner à l'Assemblée nationale pour compléter notre mandat, pour engager la consultation, ce qui va, évidemment, déférer dans le temps l'exercice que nous faisons? Alors, à l'égard de toutes ces procédures la seule inquiétude que j'ai, c'est d'arriver dans le temps à une loi sanctionnée pour la présente session, pour éviter de la retarder au printemps prochain.

M. le Président, j'ai eu beaucoup de demandes de l'ensemble des travailleurs représentés par leurs dirigeants syndicaux pour qu'on procède avec célérité, sans retard. Les principales centrales syndicales ont participé au cheminement du dossier, ont participé à l'élaboration de la loi que nous voyons, ont participé aux discussions avec le fédéral et n'ont pas hésité à me le recommander unanimement. Alors, je me trouve dans la situation où, hier soir, j'ai parlé à M. Laberge, à M. Larose, à Mme Céline Lamontagne, représentante de la CSN intéressée au dossier, et ils m'ont dit qu'idéalement ils auraient aimé avoir une consultation, mais qu'ils comprenaient et n'en faisaient pas une demande sine qua non pour le cheminement du dossier. Cela aurait été une préférence et c'est vrai qu'ils auraient été disponibles pour venir nous voir, pour nous faire part de leurs commentaires, de leurs améliorations, mais, d'autre part, ils n'auraient pas voulu que ça retarde l'adoption du projet de loi pour le mois de décembre, en tout cas dans la présente session. Encore hier soir, on me disait: Si c'était possible, bien sûr, mais on me disait que c'était à nous, dans notre bon jugement, de voir, si c'était possible ou non et qu'ils n'en faisaient pas, indépendamment de la décision qu'on prenait, un cas particulier ou qu'ils ne s'en sentiraient pas particulièrement offusqués ou frustrés. C'était une préférence, c'était un souhait, mais dans la mesure où c'était possible. Et ils sont conscients effectivement, que dans les trois ou quatre semaines de travaux parlementaires qu'il nous reste, bien des brouhahas peuvent faire que, si on retarde encore d'une semaine ou dix jours le processus de notre deuxième lecture ou de l'étude article par article, on n'a pas la garantie de se retrouver avec une sanction le 21 décembre ou avant la fin de la session. (10 h 45)

Par ailleurs, j'ai offert aux parties de me faire parvenir leurs commentaires que j'ai reçus hier par télex ou bélino et dont j'ai pris connaissance. Je dois vous dire, M. le Président, qu'il y a des points intéressants, mais qui ne soulèvent rien de fondamental par rapport au projet de loi. Il y a plus de questions sur des silences apparents du projet de foi que des objections formelles à certains articles. Ainsi, je leur ai expliqué que, je pouvais en tenir compte et tenir compte, évidemment, des commentaires que pourra me formuler l'Opposition dans l'étude que nous ferons. Évidemment, si on se rend compte qu'on peut bonifier un article, on peut le faire dans le processus actuel et, en tout temps d'ailleurs, avant la sanction de la loi; même en troisième lecture, on peut introduire un amendement si on juge que c'est opportun de le faire. Deuxièmement, on peut le faire au niveau du règlement qui est plus large d'application et qui peut, dans certains cas, techniquement, combler des lacunes, des silences ou ce qui peut nous apparaître des défauts dans la loi. Ou, à la rigueur, on pourra en cours d'année ou l'année prochaine, bien sûr en tout temps, revenir sur des dispositions qui nous apparaîtraient mériter un amendement.

Par ailleurs, je pense qu'on peut comprendre que, s'il y avait des amendements, ce n'est la faute de personne, mais je pense qu'il faut en être conscient - je devrai consulter le conseil d'administration de la CSST, par respect pour le fait qu'ils ont été les principaux collaborateurs au cheminement du projet de loi et qu'ils sont représentatifs des parties syndicales et patronales au Québec, qui siègent au conseil d'administration de la CSST. Comme ils m'ont transmis une résolution unanime recommandant l'adoption du projet de loi, si on entrevoyait des amendements qui m'apparaîtraient nouveaux ou des mesures nouvelles, etc., par respect pour le conseil d'administration de la CSST, je leur soumettrais à nouveau les amendements pour être sûr qu'ils sont d'accord.

Cela ne veut pas dire que, si on croit utile de procéder à un amendement, on puisse pas le faire. Bien sûr, on n'est pas soumis à une obligation automatique de procéder aveuglément. Moi aussi, je pense être très intéressé à regarder si on peut améliorer des dispositions, mais je devrai tenir compte du temps qui est contre nous, dans l'intérêt des travailleurs, et également de l'obligation pour moi de, quand même, consulter ou revenir devant le conseil d'administration de la CSST s'il fallait que nous introduisions des amendements jugés substantiels. Si ce sont des amendements de forme, je pense qu'on peut les faire sans changer la teneur d'une disposition, mais si ça devait la changer, je pense que je ferai au moins une consultation avec le conseil d'administration de la CSST où, comme je le disais, siègent les représentants syndicaux et ceux du patronat.

Consulter des groupes de l'extérieur qui ont été représentés et qui le sont encore par leurs leaders syndicaux et le Conseil du patronat me semble peut-être utile en temps normal, mais, dans les circonstances, cela peut être trop lourd compte tenu des défais et compte tenu du fait, comme je l'ai mentionné, que le Conseil du

patronat, qui représente les intervenants que nous pourrions entendre, a déjà fait part de ses commentaires dont certains ont été pris en considération et d'autres sont à l'étude, et que les représentants syndicaux ont déjà été consultés au sein de la CSST. Et les organismes que nous pourrions entendre sont représentés soit par la CSN, la FTQ, la CSD ou quelques autres dont les dirigeants m'ont déjà fait part de leurs commentaires et de leur désir que le projet de loi, évidemment, soit sanctionné pour le mois de décembre.

Si ce n'était de cela, M. le Président, en terminant, je dirais à mon collègue que nous pourrions même faire une commission parlementaire consultative, pleine, large, sur un projet comme celui-là pour entendre tous ceux qui ont des opinions à exprimer, mais ma seule inquiétude, comme je le mentionnais, c'est de ne pas pouvoir terminer nos travaux pour le 21 décembre. On serait alors dans l'obligation d'attendre la session du printemps.

Malheureusement, compte tenu du fait que j'ai reçu les commentaires, que je me suis engagé à en tenir compte et que je me suis engagé à réagir à ces commentaires, par exemple, en échangeant des idées avec ces gens-là - je suis prêt à en discuter avec mon collègue de l'Opposition - si on procédait à une audition de ces personnes, à toutes fins utiles, elles viendraient juste répéter ce qu'elles m'ont déjà acheminé par écrit. Je leur ai confirmé personnellement au téléphone, hier, que j'avais reçu leurs commentaires, que j'étais assuré que mon collègue de l'Opposition les ferait valoir et que j'étais prêt à en discuter et à en tenir compte dans la mesure du possible dans le cheminement actuel. Je leur ai expliqué que la demande formulée pour une consultation était très valable, mais qu'en pratique elle n'était peut-être pas souhaitable. Ils m'ont assuré qu'ils se fiaient à notre bon jugement pour le faire, mais que, dans le cas contraire, ils ne soulèveraient pas d'objections majeures vu qu'il y a déjà eu des consultations et qu'ils ont déjà exprimé les points qui ont été soulevés depuis hier.

Alors, M. le Président, soit que mon collègue veuille peut-être tout simplement retirer la motion compte tenu des explications ou, s'il le désire, on peut simplement procéder à un vote. Il a suggéré une motion qui me semble intéressante, mais, pour les raisons que j'ai expliquées, elle ne me semble pas réalisable dans l'état actuel des choses.

Le Président (M. Kehoe): Est-ce qu'il y a d'autres députés qui veulent intervenir sur la motion? M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Chez nous, on dirait: J'ai mon maudit voyage! Je vais me retenir, je suis en commission parlementaire, je vais dire mon ardent voyage! Le ministre vient de me dire: II n'y a pas de contrôle. Cela me surprend bien gros. Premièrement, c'est sûr et certain que, lorsqu'on dépose à l'Assemblée nationale 30 projets de loi le 15 novembre pour adoption avant le 21 décembre, quelque part il y a quelqu'un qui n'a pas fait sa "job". Deuxièmement, il faut absolument arriver à faire en sorte qu'un choix soit fait. Parmi les 30 projets de loi et les autres qui étaient déjà là, quels sont ceux qui sont prioritaires et qui doivent être adoptés pour le 21 décembre? Si le ministre considère que celui-là doit être adopté pour le 21 décembre, ne vous inquiétez pas, la disponibilité, je l'ai et il va l'avoir; la commission va l'avoir aussi. Si c'est une décision qui appartient normalement au leader et qu'il dit: Moi, comme ministre, je tiens à ma loi, et que cela se discute au Conseil des ministres... Il ne me fera pas accroire que cela ne se discute pas quelque part, cette "priorisation" des projets de loi qui doivent être adoptés. On a connu cela, on connaît cela et on va continuer à connaître cela. D'une façon ou d'une autre, il y a, à un moment donné, des projets qui ne seront pas adoptés et d'autres qui le seront; finalement, on va arriver à la fin et ceux que le gouvernement veut faire adopter, il va prendre les moyens pour les faire adopter. C'est la première chose: pas de contrôle, ce n'est pas vrai. Disponibilité: on se rendra disponibles, surtout si c'est pour le bien-être des travailleurs.

Qu'on ne vienne pas me faire accroire, par exemple, qu'au bout de la course le problème qui existe, c'est que cela ne sera pas adopté pour le 21 décembre parce qu'on va avoir pris une journée pour entendre des gens et voir s'il n'y a pas moyen de faire des changements. En plus de cela, on me dit que, s'il y a des amendements majeurs, on va devoir consulter le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, par souci de respect envers eux, alors que, comme gouvernement et comme Opposition, nous avons ici la capacité de prendre toutes les décisions qui s'imposent pour le bien-être des travailleurs. Jamais on ne va me faire accroire que c'est notre décision d'entendre du monde qui va retarder l'adoption d'un projet de loi qui, normalement, aurait dû être présenté le 31 octobre dernier, qui va être adopté le 21 décembre, avec ce que cela va comporter. Voyons donc, M. le Président! Cela veut tout simplement dire: Jolivet, aujourd'hui, ne présente pas d'amendement, cela ne sert à rien parce que, si je considère que c'est un amendement de fond, tu vas retarder l'adoption du projet de loi. Jamais on ne me mettra cette pression sur le dos comme membre de l'Opposition. Ce n'est pas moi qui l'ai présenté le 3 novembre; ce n'est pas moi qui vous ai demandé d'en discuter le 10 novembre. Écoutez, j'ai mon ardent voyage!

Comme membre de l'Opposition, on vient de me dire aujourd'hui, dans le fond: Prends donc le projet de loi tel qu'il est là; s'il y a des

amendements majeurs, laissez-moi les faire et, à ce moment-là, on n'aura pas de problème, mais ne les propose pas. C'est ce que cela veut dire, dans le fond. Si tu proposes des choses majeures, il va dire: Moi, comme ministre, je voulais bien l'adopter, mais c'est Jolivet qui l'a retardé. C'est ce qu'il va dire. Je ne suis pas fou; je suis habitué en politique à me faire mettre sur le dos des choses que je n'ai pas faites. C'est ça qu'il va dire. Il va dire: Si je ne l'ai pas présenté avant, c'est parce que la CSST me l'a apporté trop tard et si, à la fin, il n'est pas adopté, c'est la faute à Jolivet. Voyons donc!

Ce n'est pas ce que je demande, je suis capable d'agir en homme responsable. Je suis capable de dire au ministre: On va prendre une journée, on va questionner le monde et on va voir; ensemble, on déterminera si on présente des amendements. Je veux améliorer le projet de loi. Les gens dont le ministre fait mention, MM. Laberge et Larose, j'ai bien confiance en eux; je suis bien content. Je sais que Céline Lamontagne était au comité, ainsi que Robert Bouchard, de la FTQ; je vais parler des autres de la CSD. Je comprends tout cela. Les gens disent: On a donné notre accord sur un principe de départ, mais, sur les modalités, on a eu des objections, on en a encore et on voudrait les faire valoir. C'est dans ce sens-là que les gens le demandent. Ce n'est donc pas dans le sens de retarder quoi que ce soit. C'est pour améliorer, au même titre que le ministre, pour le bien-être des travailleurs et, j'ajoute davantage, pour le bien-être des gens qui sont autour. Les gens qui vivent autour de cette usine, quand ils voient exploser l'usine et les travailleurs qui y meurent, ils ont intérêt à savoir ce qui se passe chez eux. C'est le département de santé communautaire qui a des possibilités au plan de la prévention, c'est la Commission de la santé et de la sécurité du travail, c'est l'ensemble.

Comment se fait-il qu'on dise dans ce que j'ai, en termes d'information qu'on donne aux gens: Pourquoi ne regarde-t-on pas l'association accréditée? Pourquoi ne regarde-t-on pas cela? Pourquoi dit-on, à ce moment-là: Faites-nous confiance, les règlements sont larges? Bien, "bout de viarge" les règlements sont larges, là! Quelqu'un me disait cela, de l'autre bord, que les règlements, ça n'avait plus de bon sens. J'étais au pouvoir dans le temps et, maintenant je suis dans l'Opposition. On nous a répété cela en commission parlementaire lorsqu'on a étudié toute la question réglementaire. Et là, on va donner à la CSST le pouvoir de faire les règlements. Le ministre me dit: Écoutez, peut-être qu'on regardera la question de la prépublication et ces affaires-là pour éviter des délais, etc. Il est prêt à regarder cela. Mais vous vous imaginez? On va donner à la CSST le pouvoir, peut-être en catimini, de passer un règlement et les gens seront mis au courant ensuite. Cela n'a pas de bon sens! Et moi, je vais accepter cela comme membre de l'Opposition et, en plus de cela, je vais me faire dire: C'est ta faute s'il n'est pas passé. Aïe! Un instant, là! Je trouve cela un peu aberrant ce matin.

Les amendements que je voudrais apporter, je n'ose même plus en parler. Je vais dire au ministre: Prenez-le, votre projet de loi, il est adopté: 1, 2, 3, 4, 5, 6 et c'est fini, n'en parlons plus. Si j'ai la malchance de proposer un amendement, le ministre va dire: C'est tellement majeur qu'il faut que j'aille consulter la CSST, de telle sorte que je ne peux pas adopter le projet de loi et le député de Laviolette a retardé l'adoption du projet de loi. On sera la. seule province au Canada qui ne l'aura pas, à cause de Jolivet. Je connais cela, ces affaires-là. Mais vous ne me ferez pas accroire, M. le Président, que cela a du bon sens. Pourquoi refuser d'entendre les gens une journée? Je suis prêt à dire au ministre: Une fois qu'on les aura entendus, donnons-nous un délai d'une journée pour regarder cela, pour voir comment on va ajuster cela au gouvernement, pour donner aux spécialistes du ministre le soin de le regarder et, ensuite, faire les amendements qui s'imposent. Au lieu d'avoir comme ce matin, comme on dit dans notre langage, un papillon d'un amendement, il y en aura peut-être quatre ou cinq; il y en aura peut-être plus que cela et, au mois de décembre, il sera adopté.

Je me suis fait avoir dans un dossier où le ministre m'avait indiqué la même chose. Le ministre de l'Agriculture me l'avait dit à l'époque sur les chevaux: C'est votre faute si ce n'est pas passé. On l'a adopté, voyons donc! On a fait des amendements, par exemple, qui s'imposaient. On a fait les recommandations qui s'imposaient; on a fait valoir notre point de vue comme cela s'imposait.

Une fois qu'on a dit cela, M. le Président, ce n'est pas difficile. On commence par adopter cela. On arrête notre réunion ici dans deux minutes, on s'installe et on dit qui on convoque. On a le droit, en séance de travail, de déterminer trois, quatre, cinq ou six organismes. On leur dit: Écoutez, vous avez une heure; dans six heures, c'est fini. Mardi prochain, on fait cela et, mardi soir, on est prêts. Le lendemain, mercredi, on prend le temps de regarder cela et, le jeudi suivant, on y va. Je pense qu'il n'y a rien qui nous empêche de faire cela. Comme on va siéger cinq jours par semaine, du lundi au vendredi, de 10 heures le matin à minuit, en commission parlementaire, dans les jours qui viennent, entre le 1er et le 21 décembre, ne me faites pas accroire qu'on n'aura pas le temps d'adopter ce projet de loi, mais on l'aura fait le mieux possible. C'est cela que je dis.

Si on accepte cette proposition de part et d'autre, on va ensemble assumer la responsabilité - on n'imputera pas la faute à quelqu'un - en disant: Oui, on va l'adopter pour le 21 décembre prochain. Je ne m'engage pas à le faire si le ministre m'amène toutes sortes d'affaires en cours de route, mais je suis assez intelligent

pour prendre les meilleures décisions et pour dire: Oui, moi aussi, je juge que cette loi doit être adoptée avant le 21 décembre, mais non pas dans la bousculade et par n'importe quel moyen. En tout cas, c'est ma position et je la maintiens.

Le Président (M. Kehoe): M. le ministre. M. Yves Séguin

M. Séguin: Oui, quelques mots, M. le Président. Mon collègue a le verbe houleux facilement. Je pense que, dans le processus parlementaire, on donne aux membres de la commission tout le temps voulu pour faire l'étude article par article; c'est ce que nous faisons. Je ne vois pas le problème.

Il se plaint qu'il n'aura peut-être même pas l'occasion de présenter des amendements. Il a toutes les occasions de le faire. Il a eu, par écrit, les suggestions que certains groupes veulent faire quant au projet de loi. Quel est le problème? Il les a par écrit; il en a lu une partie tantôt. N'est-il pas en mesure lui-même de les regarder? S'il croit devoir les faire valoir quand nous serons à l'article pertinent, il pourra le faire. Il peut même présenter à chacun des articles les amendements qu'il veut. Je ne vois pas le problème, M. le Président. Son droit n'est pas brimé. Il a tout le temps voulu pour prolonger notre séance d'une semaine s'il le veut et faire en sorte que nous passions une centaine d'heures sur l'ensemble des articles. Je veux dire que notre règlement permet un droit de parole à chacun des articles et le droit de faire des amendements. (11 heures)

Ce qu'il dit, c'est que lui, comme député, il aimerait rencontrer, pour son enrichissement personnel et pour sa consultation personnelle, des groupes. Je ne pense pas que l'ensemble des membres de la commission trouve nécessaire, à ce stade-ci, de rencontrer les gens qui ont déjà acheminé par écrit leurs représentations. Je les ai, les représentations; ils sont là, les points. Autant le député critique de l'Opposition peut expliquer qu'il veut faire des amendements, autant j'ai le droit de décider si je peux les accepter ou non dans le cadre du projet de loi. Son droit, c'est de faire des représentations; nous sommes en démocratie. Moi aussi, j'ai le droit d'être pour ou contre les amendements. S'il me semble que les suggestions qu'il fait sont non recevables, je ferai valoir qu'elles sont non recevables. Je porte la responsabilité de présenter un projet de loi et il porte la responsabilité de faire des représentations. Mais il y a quand même quelqu'un qui va décider quelque chose quelque part. Et ce n'est pas parce qu'il a le droit de parole qu'il peut s'étendre jusqu'au 21 décembre dans l'exercice que nous faisons ici, s'il décide de le faire. Il peut présenter des amendements à chaque article et on peut siéger ici jusqu'au 21 décembre sans être capables de sortir de la présente séance. Donc, je pense qu'il a toute la chance, le temps voulu et les moyens qu'il faut pour faire valoir toutes les suggestions et les recommandations qu'il veut.

J'ai indiqué tantôt que j'ai reçu de quelques-uns de ces groupes, la CSN, la FTQ, l'AECQ et la CSD, les points sur lesquels ils auraient aimé attirer notre attention; je les ai par écrit. Il les a par écrit. Quel est le problème? Suspendre nos travaux, faire tout un processus pour aviser ces gens, les réentendre en groupe, le dépôt des rapports, l'étude des rapports - ils vont peut-être compléter des choses ou ils vont s'en tenir à ce qu'ils nous ont envoyé par télex - reprendre l'étude article par article, et il me dit que cela ne peut pas retarder notre processus. Nous sommes déjà le 16 novembre ce matin. On sait que la session se termine le 21 et qu'il y a 30, 35 projets de loi. Les disponibilités ne sont pas automatiques. Je vous pose la question, M. le Président: Est-ce qu'on ne sera pas obligés de retourner à l'Assemblée nationale pour demander un complément de mandat? Ce que je comprends de notre mandat, c'est de procéder à l'étude article par article.

Maintenant, c'est un détail et ce n'est pas là le point parce que je suis d'accord avec la consultation si on en avait le temps. Je ne voudrais pas que mon collègue trouve cela aberrant parce que cela ne l'est pas. Je ne vois pas où est le problème fondamental. Il suggère quelque chose qui pourrait être intéressant. Oui, il pourrait être intéressant d'entendre des gens qui ont déjà formulé leurs représentations par écrit. Mais je ne crois pas que le fait qu'ils viennent nous les dire verbalement va ajouter aux documents qu'ils ont déjà déposés. Je les ai, les documents. Mon critique va faire valoir les points et on verra à chaque article si on peut les accepter ou non. La question que je dois en déférer au conseil d'administration de la CSST, c'est mon problème, ce n'est pas le sien. Je l'ai indiqué juste comme contrainte dans les délais pour informer un conseil d'administration de quinze personnes. Et si j'ai des amendements, c'est mon problème de les consulter. Je pense que les dirigeants syndicaux et ceux du patronat qui siègent à la CSST, qui ont élaboré le projet de loi et qui me l'ont recommandé unanimement, ont le droit d'être saisis des amendements qui pourraient surgir. Que ce soit à la demande de mon collègue de l'Opposition ou à la demande des membres du parti ministériel, je pense que, par respect pour les membres du conseil d'administration, je le ferai, comme ils ont bien voulu, par respect, me recommander ce projet de loi avec insistance pour qu'il ne soit pas retardé après la présente session.

Je ne veux d'aucune façon que les gens de l'Opposition pensent que mon intérêt est de les empêcher de faire des projets de consultation, des amendements, etc. La seule chose que je souhaite, c'est qu'on procède sans perdre de vue qu'il est de l'intérêt des travailleurs qu'on

adopte ce projet de loi. Les principaux intervenants syndicaux me l'ont demandé; je pense qu'ils ont raison et je voudrais me rendre à leur souhait.

Deuxièmement, il est vrai que la consultation ne retardera peut-être pas automatiquement. Il n'y a rien d'automatique dans cela. Peut-être qu'une journée de consultation ne changerait rien, mais déjà il faudrait ajourner la séance d'aujourd'hui. Il est 11 h 5, on annule la séance d'aujourd'hui. On n'a encore rien fait. On n'a même pas étudié l'article 1. On n'a pas commencé l'étude du projet de loi et on irait vers une consultation qui ne peut pas avoir lieu avant la semaine prochaine. Quelle journée? Quelles sont les disponibilités? J'ai quatre projets de loi. Mon collègue a peut-être d'autres engagements à d'autres commissions. Admettons qu'on trouve une journée qui fasse consensus entre les partis pour la semaine prochaine, ces gens-là vont venir pendant une journée déposer des documents qu'on a déjà et ils m'ont tous dit, M. le Président, qu'ils n'avaient pas d'objection à ce qu'on procède si on ne pouvait pas faire la consultation. Ils m'ont dit que c'était un souhait mais qu'ils n'y tenaient pas étant donné les échéanciers serrés. Hier soir, j'ai eu l'appui des dirigeants syndicaux dans ce sens-là. Ils m'ont dit: Si vous pensez que vous pouvez le faire, tant mieux. Si vous ne pouvez pas le faire, ce n'est pas plus grave que ça. Nous vous envoyons nos notes. Mme Lamontagne, de la CSN, m'a dit hier que, de toute façon, elle m'envoyait les notes aujourd'hui, ce matin, par télex; elle se disait au moins satisfaite que je les aie et que je puisse en tenir compte dans la mesure du possible. Voilà!

Donc, je dis que, si on commence l'étude article par article, l'Opposition - je l'ai dit tantôt - a pleine liberté, plein de temps pour faire valoir toutes ses interventions et toutes ses représentations. S'ils ont des amendements à chacun des articles, ils peuvent les faire. Mais vous en conviendrez avec moi, M. le Président, ce n'est pas parce que l'Opposition a le droit de faire des amendements ou qu'un membre a le droit de faire un amendement qu'il va être adopté automatiquement. J'ai toujours le devoir - dans l'intérêt public et dans l'intérêt de ma charge, de ma mission, de mes fonctions - de voir si un amendement peut être acceptable ou non. Je verrai aussi à le faire à chaque article. On comprendra que si j'indique, par exemple, que je dois en référer à la CSST, ce n'est pas parce que ça fait partie du projet de loi, c'est simplement pour expliquer le souci que j'ai justement qu'on consulte ceux qui, les premiers, sont représentatifs du mouvement des travailleurs, du mouvement syndical et des employeurs. Comment voulez-vous, M. le Président, que je sois respectueux de faire un minimum de consultations acceptable sur ce projet de loi si je ne me réfère pas au conseil d'administration de la CSST, qui est un consensus patronal-syndical où siègent directement les leaders syndicaux qu'on connaît, MM. Larose, Laberge, la CEQ, M. Dufour, du Conseil du patronat, et d'autres intervenants? Ils sont eux-mêmes, comme chefs, comme leaders de leur mouvement, membres du conseil d'administration de la CSST et ils m'ont demandé d'être informés si des changements relativement importants intervenaient parce qu'ils ont étudié le projet de loi et ils me l'ont recommandé unanimement. Je souhaiterais que, si on change le cours du projet, ils soient mis au courant parce que cela a fait l'objet d'un équilibre et d'un consensus dans tout le Canada avec la législation fédérale. Chaque changement qu'on risque d'introduire peut soulever une modification de l'équilibre des choses sur lesquelles toutes les parties se sont entendues. Je vous le dis c'est le fruit de quand même six ou sept ans de travail. Et, dans l'ensemble, on est uniforme avec la législation fédérale. J'indique ça simplement pour dire que, si on veut introduire des changements, ça va prendre de saprées bonnes raisons et de saprés bons arguments pour modifier notre projet de loi, non pas qu'on n'aurait pas raison sur certains points, mais juste pour tenir compte de ça. Voulez-vous qu'on ait une législation tellement particulière au Québec que les fournisseurs, par exemple, se retrouvent, dans certains cas, non réglementés au Québec, mais réglementés en Ontario parce qu'ils auraient adopté la législation fédérale qui serait sur certains points plus rigoureuse que la nôtre? Comment, pour les entreprises qui font affaire dans plusieurs provinces avec des produits qui transitent dans plusieurs provinces, peut-on s'assurer d'une uniformité minimale? Je dois vous dire que la FTQ est celle qui me fait le plus de représentations pour m'indiquer qu'il est très important, en termes de sécurité, que le système soit uniforme. Il ne faut pas qu'il y ait de trous d'une province à l'autre. Il ne faut pas qu'il y ait de distinctions chez les employeurs.

Donc, je dis, M. le Président, qu'on devrait maintenant procéder à l'étude article par article et, justement, regarder chacun des articles, entendre les commentaires et les questions des membres. Si certains veulent faire des amendements, ils sont les bienvenus. On discutera pourquoi dans certains cas on peut les recevoir ou, dans d'autres, on ne le peut pas. Et ça, c'est démocratique. C'est ce qu'on fait actuellement et je ne vois pas en quoi ce droit-là serait brimé parce qu'on n'entendrait pas verbalement des gens qui nous ont déjà acheminé par écrit leurs commentaires. Et, au danger que ça peut représenter de reculer d'une semaine ou de dix jours notre processus, je dis simplement, M. le Président, que ça ne nous donne aucune garantie qu'on pourra terminer le projet de loi le 20 ou le 21 décembre. Je maintiens ce que j'ai dit, M. le Président. J'accueille avec beaucoup de sympathie la demande de l'Opposition de faire une consultation mais, pour les raisons que j'ai données, malheureusement, je crois que, pour le

moment, ce n'est peut-être pas faisable. Je dis simplement "faisable". Je ne dis pas que ce n'est pas souhaitable. Oui, c'est souhaitable et ce peut être très valeureux, très intéressant d'entendre des gens qui nous ont écrit, mais je peux assurer que j'ai déjà les commentaires qu'ils ont formulés par écrit et j'ai déjà eu des discussions avec eux au téléphone ou par courrier là-dessus. Si, en cours de route, ça peut amener un éclairage, tant mieux, et je suis prêt à le faire...dans le sens qu'il ne me semble pas approprié actuellement d'interrompre notre séance pour entendre ces gens-là tout simplement.

Le Président (M. Kehoe): Merci, M. le ministre. Je donne la parole à M. le député de La Peltrie.

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Merci, M. le Président. Je vois bien que mon collègue et critique de l'Opposition est un politicien très habile. D'ailleurs, je me permets de lui souhaiter un joyeux anniversaire à l'occasion de ses douze ans de vie parlementaire à l'Assemblée nationale.

M. Jolivet: Merci beaucoup.

M. Cannon: J'ai écouté attentivement son argumentation et je vous avoue, M. le Président, qu'elle m'a ébranlé. Je me disais que c'est possible et, dans le fond, il a raison. À écouter par ailleurs le ministre qui, de son côté, a tenu à nous rassurer quant à sa préoccupation très profonde de faire des consultations auprès des différents intervenants, il me rassure d'autant plus lorsqu'il m'indique que cette réforme-là est connue depuis au moins six ou sept ans et qu'effectivement d'autres Parlements canadiens y ont travaillé. Il s'agit d'une législation fédérale qui vise à établir une certaine standardisation, une uniformité dans tout le Canada en ce qui concerne ces choses-là. Je me disais: Oui, il a peut-être raison s'il s'agit là d'une réforme en profondeur, mais on n'est pas en train d'ouvrir l'ensemble de la législation qui touche la CSST. On est en train d'inclure dans cette législation un volet qui permette une standardisation. La question pour nous, parlementaires, c'est: Est-ce que, finalement, nous sommes suffisamment éclairés là-dessus? Je dis: Oui, nous sommes éclairés. Le ministre s'est fait rassurant. Le ministre nous a dit: Écoutez, j'ai effectué des consultations; j'ai des commentaires écrits; je suis prêt à déposer ces commentaires écrits. J'imagine, en bon politicien qu'est le député de Laviolette, qu'il a également ces commentaires-là. Si, au cours de nos conversations, au cours des audiences que nous tiendrons ici dans les prochaines semaines, le député arrive avec des amendements percutants qui pourraient bonifier le projet de loi - je pense que c'est un objectif très louable et extrêmement légitime de sa part d'essayer d'améliorer le projet de loi, et le ministre s'est montré très ouvert là-dessus - je ne vois pas, M. le Président, pourquoi nous retarderions indûment la prise en considération, la discussion à cette commission parlementaire de ce projet de loi article par article pour entendre des choses qui sont effectivement déjà connues. C'est le propos que je voulais tenir et j'espère que nous allons procéder dans la plus grande diligence.

Le Président (M. Kehoe): M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, vous allez peut-être me dire qu'il me reste deux ou trois minutes encore. Je vais simplement vous dire que, devant ce qui est le mur de l'autre côté, je ne prendrai pas moins de deux minutes, mais je vais en prendre plus, c'est sûr. Sauf que, pour éviter que vous ne me rappeliez à l'ordre et que vous ne me disiez que je n'ai plus de temps, je pourrais faire une nouvelle motion, mais, vu que je ne veux pas retarder quoi que ce soit, vous allez me permettre de dépasser les deux ou trois minutes qu'il me reste.

Le Président (M. Kehoe): D'ailleurs, il vous reste douze minutes, pour être précis.

M. Jolivet: Ah bon! D'accord. D'abord, je vais répondre au ministre. Personne ne peut lui répondre ici parce qu'il n'a pas le temps de répondre sur cette petite technicité-là. Si on acceptait aujourd'hui de suspendre nos travaux, d'aller en consultation particulière mardi prochain, disons, en déterminant entre nous le nombre de groupes, il y a juste une chose à faire, c'est que, tout de suite après le dîner, quand on arrivera à la période des travaux parlementaires, le leader du gouvernement, en consultation avec le leader de l'Opposition, détermine qu'à la suite d'une entente en commission parlementaire, il y aura audition particulière. (11 h 15)

La convocation n'est pas la même que celle qu'on a habituellement pour un avis public, de telle sorte que le secrétaire de la commission pourra dire: On s'est entendus, vous êtes convoqués et, entre-temps, vous et moi allons parler à ces personnes. C'est une question de consentement unanime, on vous le donne tout de suite. Cela ne retarde rien: mardi prochain, on fait la consultation; mercredi, on prend un moment de réflexion; jeudi, on recommence l'étude article par article du projet de loi. Vous, vous allez vous organiser pour que votre leader, puisque c'est important pour vous, pour les travailleurs et pour les employeurs, l'adopte. D'ici au 21 décembre, soyez sûr de ma pleine collaboration. Mon but n'est pas de retarder quoi que ce soit,

soyez-en sûr. Regardez le travail que j'ai fait jusqu'à maintenant dans toutes les commissions parlementaires, cela n'a jamais été mon but.

Deuxièmement, quand le ministre nous dit qu'en commission parlementaire on pourra apporter des amendements, il jugera si l'amendement est acceptable ou pas. J'en suis bien aise parce que le président acceptera s'il est recevable ou pas et, vous, vous déciderez, une fois qu'il est reçu, si vous l'acceptez ou pas. Je comprends tout cela. Quand le ministre dit: On veut avoir une uniformité dans tout l'ensemble canadien des discussions qu'on a depuis sept ans sur le dossier, le député de La Peltrie en a fait mention, je dois vous dire, M. le député, que votre ministre ne vous a pas mis au courant des amendements qui sont proposés parce qu'aucun amendement n'a pour but d'enlever l'uniformité canadienne.

Cela dit, le but de l'argumentation qu'on apporte est de regarder aussi ce qui se passe au Québec. Je dois vous dire qu'en vertu de la loi ontarienne il y a des choses qui sont inscrites et qui n'existent pas dans la loi du Québec. Donc, si on veut parler d'uniformité, on va le faire. Dans ce contexte, on n'a pas, en aucune façon, de préoccupation, à savoir si cela va défaire la belle mosaïque canadienne. Cela ne la défera pas. Tout le monde semble d'accord sur le principe. Le ministre me dit: J'ai consulté le monde. En politique, ce n'est pas juste une question de demander au pouvoir de consulter, il faut que l'Opposition soit aussi capable de consulter, ce qu'on fait. La demande de consultation particulière n'est pas de savoir si vous avez consulté et si je suis capable de consulter, cette question n'est pas là du tout. La question est bien simple: Des gens vont venir consigner dans un papier officiel, ici à l'Assemblée nationale, leur position. J'ai entendu ça à l'Assemblée nationale de quelqu'un qui est le ministre responsable de la région, le grand organisateur en chef du Parti libéral du Canada et du Parti libéral du Québec, un dénommé Marc-Yvan Côté, député de Charlesbourg. Il a dit: Écoutez, ces gens vont venir nous parler en pleine commission parlementaire et cela va être écrit. Ils ne pourront plus reculer comme ils l'ont fait en flouant le ministre de l'Industrie et du Commerce. C'est ce qu'il a dit. Bien, donnez-moi donc la chance d'avoir la même chose, si vous voulez, mais ce n'est pas cela que je demande parce que je suis sûr qu'ils vont dire la même chose.

Quand je regarde ça, on vient me dire: Ce n'est pas nécessaire, consultez de votre bord, on va consulter du nôtre et amenez vos revendications. Voyons donc! Ce n'est pas ça la consultation qu'on demande. On demande aux gens de venir s'exprimer et, là, on se fera un jugement parce qu'on aura leur opinion, on les aura entendus. Je vous donne des exemples de ça. Je fais la tournée de mon comté depuis douze ans maintenant - merci de vos félicitations, j'espère être encore là si la population me donne ce pouvoir -deux fois par année avec le gars du transport et ses adjoints. Dans chaque municipalité, on règle bien plus les problèmes que si lui disait: C'est la faute à Jolivet, ou que moi je disais: C'est la faute au chef de district. Il n'y a personne qui a une faute, tout le monde est ensemble. Les MRC, dans mes territoires éloignés, quand je vais à Clova et à Parent, on y va ensemble, le représentant de la MRC et moi. Donc, jamais le gars de la MRC ne peut dire aux gens de Parent ou de Clova: Jolivet ne veut pas, et je ne peux pas dire que le gars de la MRC ne veut pas. On est ensemble devant tout le monde, on décide et on discute ensemble. À la fin, on se trouve à avoir devant nous la vraie version, il n'y a pas de chicane possible et on règle des problèmes.

Dans ce contexte, le ministre vient me dire aujourd'hui: Je déciderai si c'est important ou pas. Si c'est important, on l'amendera; si ce n'est pas important, on laissera tomber. Si c'est important, j'ai un problème. Il faut que j'aille consulter les autres ou, au moins, les renseigner. Il me semblait que l'Assemblée nationale était maîtresse de toutes ses décisions. Il nous propose, comme CSST, un projet de loi; on l'accepte comme discussion et on y fait les amendements nécessaires, selon les besoins de l'ensemble de notre population et des travailleurs. Je n'accepterai jamais de me faire dire ça. Comme j'essaie toujours, dans le travail que je fais, d'amener des parties positives, je dirais au député de La Peltrie: Qu'il aille voir dans le dictionnaire. J'aime bien qu'il me dise en bon politicien, mais je n'aime pas le mot policitien parce que, dans le dictionnaire, cela veut dire politicailleur. Non, non, je comprends ce que vous voulez dire: en homme politique responsable, en femme politique responsable. Cela, j'accepterais cela. C'est dans ce sens-là que vous l'avez dit. Mais je veux seulement vous dire que je n'aime pas le mot politicien, c'est négatif.

M. Cannon: On corrige les galées.

M. Jolivet: Bon, parfait! Moi, dans ce sens-là, je vous dis que j'agis en homme politique responsable. Maintenant, que le pouvoir me dise après et là, je vais arrêter l'argumentation, je pense que j'aurai fait valoir mon point de vue au nom des travailleurs... Qu'il dise à ceux à qui j'ai parlé: M. Robert Bouchard, de la FTQ, Mme Andrée Bouchard, de la CSN, qui m'a parlé au nom de Céline Lamontagne que j'ai appelée ce matin à la suite de l'audition qu'on a eue hier soir, les gens de la CSD qui nous ont communiqué des documents par télégramme... Ces gens-là disent: Oui, c'est vrai, le ministre a raison de dire qu'on a consulté la CSST par l'intermédiaire du processus normal. Oui, il n'y a pas de problème, mais on ne lui a pas donné le "wording", le mot à mot de la loi. Ces gens ont aussi dit: Ils nous ont consulté sur le principe. On a dit: Oui,

préparez le projet de loi, présentez-le et on le discutera. C'est cela qui est arrivé. Les gens disent: On n'en a pas contre le principe, et moi non plus je n'en ai pas contre le principe, mais j'en ai contre les modalités, par exemple, qui vont permettre aux gens à l'extérieur... J'aurais bien aimé, quand on avait la CIL à Shawinigan, qu'on avait Carbure, qu'on avait ceci et cela... Les gens des alentours auraient été intéressés à savoir, quand Carbure ou quand Shawbec a sauté, ce qui se passait dans cette affaire-là.

Le député de Saint-Maurice me comprend, il sait de quoi je parle. C'est la réalité quotidienne des choses. Mme Lamontagne vit cela tous les jours parce qu'elle va voir les gens dans le milieu. Robert Bouchard fait la même chose. Je comprends que M. Larose et que M. Laberge qui contrôlent tout cela en haut disent: Oui, on a consulté nos gens et on est d'accord. Oui, mais ils ont le principe général eux aussi. Ils n'ont pas l'actualité continuelle de chaque jour, sauf que, lorsqu'on arrive à un problème, on le leur dit. C'est donc le travail qu'ils font entre eux. Céline Lamontagne va parler avec Gérald Larose. Robert Bouchard va parler avec M. Laberge qui va dire: Oui, on est d'accord avec cela, et M. Laberge va normalement faire le travail qui s'impose.

Tout cela pour dire que la préoccupation de M. Larose et de M. Laberge est tout à fait louable; leur travail est tout à fait exceptionnel. Je dis simplement qu'en plus de cela on devrait tenir compte maintenant de l'actualité quotidienne: il y a des gens qui pourraient venir le dire ici par l'intermédiaire de M. Larose ou de M. Laberge, et de leurs adjoints pour confirmer que ce que dit M. Laberge est correct, que c'est parfait. Mais qu'on ne vienne pas me dire qu'ils ont vu le projet de loi mot à mot et qu'ils ont donné leur accord sur tel ou tel mot. Non. Ils ont vu les principes de base; ils ont demandé de les mettre dans le projet de loi; ils ont étudié cela au conseil d'administration de la CSST et, après cela, ils ont déposé cela. Mais il y a des gens qui disent que, malgré tout cela, malgré tout le travail qu'ils ont très bien fait, il reste une chose, c'est qu'il y a des modalités qu'il faut absolument regarder plus à fond. C'est dans ce sens-là que je le fais.

Maintenant, si le ministre me dit: Je les ai appelés et j'ai dit à Mme Lamontagne: Écoutez, vous savez, le temps nous presse. S'il y a trop de délais, moi j'ai du travail, j'ai trois ou quatre projets de loi à faire, ce n'est pas moi qui décide des projets de loi qui seront adoptés à l'Assemblée nationale, ma disponibilité et celle de l'Opposition, je ne les connaissais pas, vous savez, il y a des dangers que cela ne soit pas adopté, dans ce contexte, si j'étais membre de la CSN ou de la FTQ, je dirais: Câline, passez-le que j'aie au moins le principe et on verra pour le reste, mais essayez de tenir compte de ce que je vous ai envoyé par télex ce matin. C'est comme cela que je vois cela. J'ai assez négocié dans ma vie pour dire que c'est cela. Ce n'est pas la première fois, je ne suis pas tombé de la pluie d'hier. Cela fait des années que je négocie et que je discute avec des gens. Finalement, je comprends cela. Je comprends que la personne, en voyant que le projet de loi ne sera pas adopté et qu'on est déjà en retard sur la date du 31 octobre, dise: Écoutez, M. le ministre, on va accepter votre décision. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Mais on va vous envoyer un télex le plus rapidement possible. Je l'ai noté, je l'ai ici ce que Mme Bouchard m'a donné ce matin, morceau par morceau; j'en ai fait mention tranquillement. Je vais recevoir le texte par télex, s'il n'est pas déjà arrivé à mon bureau en haut. Je vais faire mon possible pour le présenter en leur nom. Je vais espérer que le ministre le comprenne et l'accepte. Je vais espérer que le ministre me dise en fin de compte: Ecoutez, M. le député, vous savez, si vous me demandez d'adopter cet article, cet amendement, cela va retarder encore parce qu'il faut que j'aille voir la CSST. Je ne sais pas quand elle va se réunir, peut-être au début de décembre. Je comprends tout cela, mais cela ne veut pas dire que je l'accepte.

Devant cela, le mur étant devant moi, je vais demander, M. le Président, ce qui est tout à fait normal, c'est votre droit maintenant, que la motion soit passée aux voix; elle sera battue. J'aurai l'occasion fort probablement de présenter des amendements, mais j'ai l'impression qu'ils vont être battus. Comme je ne voudrais pas être un gars battu d'avance, je vais faire valoir mon point de vue. Je ne pense pas aller jusqu'au 21 décembre, ce n'est pas mon but non plus, j'ai d'autre travail à faire que ça et j'ai à m'occuper de mon comté.

Deuxièmement, le ministre, s'il s'était aperçu qu'on faisait de l'obstruction systématique qui n'avait pas de bon sens, aurait les pouvoirs de l'Assemblée nationale de mettre une clôture à tout ça. Mais je ne pense pas que, pour le bien-être de l'ensemble des travailleurs, mon travail soit de faire de l'obstruction systématique, ce n'est pas vrai.

Ceci dit, en homme politique responsable, je ferai donc mon travail et j'accepterai la décision démocratique qui sera prise ici en me disant qu'elle a été prise sans nécessairement être d'accord.

Le Président (M. Kehoe): Pardon? M. Théorêt: J'ai une intervention.

Le Président (M. Kehoe): M. le député de Vimont.

M. Jean-Paul Théorêt

M. Théorêt: Oui, M. le Président, juste une très courte intervention avant de passer au vote qu'a demandé le député de Laviolette. De toute

l'argumentation qu'a faite le député de Laviolette, je retiens une affirmation importante - et vous pourrez vérifier dans les galées, M. le Président; je vais essayer de le dire textuellement - c'est quand il a affirmé: Écoutez, M. le Président, il y a 30 projets de loi et on sait tous par expérience qu'il y en a qui vont passer et que d'autres ne passeront pas. Cette seule affirmation, M. le Président, vient justement confirmer les inquiétudes du ministre qui se demande s'il se pourrait que le sien soit celui qui ne passe pas parmi ceux dont le député de Laviolette a dit qu'ils ne passeraient pas. C'est également pour ces raisons, M. le Président, que les travailleurs et travailleuses qui ont envoyé des notes au ministre hier et qui ont présenté strictement certaines demandes, la veille de l'étude du projet de loi article par article, ont compris que leur priorité était de voir ce projet de loi adopté avant les fêtes, avant la fin de la session, justement, pour qu'ils soient protégés dès la fin de la présente session. Comprenant qu'ils font leur demande la veille seulement de l'étude article par article du projet de loi, ils ne tiennent absolument pas à en retarder l'adoption, en aucune façon.

Le député de Laviolette, critique de l'Opposition, a confirmé qu'il y a des projets de loi qui ne seront pas adoptés avant la fin de la session. Cela vient confirmer les inquiétudes du ministre et, à ce moment-là, M. le Président, on serait d'accord pour passer au vote sur la motion.

Le Président (M. Kehoe): Merci, M. le député. Je vais lire la motion avant de procéder au vote.

La motion proposée par le député de Laviolette est la suivante: Que la commission tienne des consultations particulières sur le projet de loi 65. Le vote enregistré est demandé. Je demande aux personnes en faveur de la motion.

Le Secrétaire: Mme Bélanger (Mégantic-Compton)?

Mme Bélanger: Contre.

Le Secrétaire: M. Cannon (La Peltrie)?

M. Cannon: Contre.

Le Secrétaire: M. Hétu (Labelle)?

M. Hétu: Contre.

Le Secrétaire: M. Jolivet (Laviolette)?

M. Jolivet: Pour.

Le Secrétaire: M. Larouche (Anjou)?

M. Larouche: Contre.

Le Secrétaire: M. Philibert (Trois-Rivières)?

M. Philibert: Contre.

Le Secrétaire: M. Théorêt (Vimont)?

M. Théorêt: Contre.

Le Secrétaire: M. Séguin (Montmorency)?

M. Séguin: Contre.

Le Secrétaire: Sept contre, un pour, M. le Président.

Le Président (M. Kehoe): Donc, la motion du député de Laviolette est rejetée.

Nous allons procéder à l'étude du projet de loi 65 article par article. À cet effet, j'appelle l'article numéro 1. M. le ministre.

Étude détaillée Définitions

M. Séguin: En fait, M. le Président, à l'article 1, on introduit la définition de produit contrôlé. Ce sont les produits sur lesquels on veut faire porter le nouveau système d'information. Alors, comme la loi le dit, c'est une matière comprise dans la classification établie par règlement ou répondant aux critères déterminés dans cette classification. Tout au long du projet de loi, les produits assujettis sont ceux qu'on définira comme produits contrôlés. Par ailleurs, cela correspond à l'article 2 de la loi sur les produits dangereux du gouvernement fédéral dans un souci d'uniformité et comme résultat de différentes consultations pour faire en sorte que, dans les différentes provinces, les différents fournisseurs ou employeurs qui ont des activités dans plusieurs provinces soient assujettis aux mêmes obligations. (11 h 30)

Le Président (M. Kehoe): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Quand le ministre parle de produits contrôlés, est-ce qu'il pourrait nous dire ce qu'il entend par produits contrôlés? Est-ce qu'il entend des agents physiques dangereux? On parie de laser de plus en plus. On parle d'utilisation à ce sujet. Qu'est-ce qu'il pourrait nous donner comme indication en ce qui concerne pour lui le produit dangereux?

M. Séguin: Comme je le disais, cela se réfère à la classification qui est déjà faite dans la loi fédérale, à l'annexe 2 de la Loi sur les produits dangereux. C'est une classification qui apparaît à la partie 5 du règlement sur les produits contrôlés sous l'abréviation DORS-88-66 du 31 décembre 1987 et à la partie 2 du 20 janvier 1988. Alors, c'est une nomenclature de produits qui sont désignés. Ce sont habituellement, bien sûr, des produits qui peuvent avoir

une certaine toxicité. Ce sont habituellement des produits chimiques. On pense au chlore, on pense à des substances qui, à l'état où elles sont présentées, soit dans des récipients habituellement ou dans d'autres contenants, peuvent avoir des émanations, peuvent avoir des effets corrosifs et autres et qui, par ces effets, peuvent entraîner un certain danger dans la manipulation qui est faite par les travailleurs.

M. Jolivet: Est-ce que dans ce dossier... On parle dans les règlements ou ailleurs de tenir un inventaire, de déclarer l'ensemble de l'inventaire sur les produits contrôlés. Ce sont des matières comprises dans la classification, mais est-ce qu'on va devoir tenir un inventaire de tout cela? Est-ce qu'on va avoir à faire les déclarations qui s'imposent pour ce produit, cette matière dangereuse?

M. Séguin: En fait, le système n'impose pas à un organisme la confection d'un inventaire. Le but de la loi est de dire, comme on le verra à l'article suivant, que le fabricant ou l'employeur qui met à la disposition des travailleurs des produits dans le cadre de leur travail, sur les lieux de travail doit apposer une étiquette indiquant la substance qui est un produit contrôlé, donc une substance qui peut avoir des effets dangereux dans sa manipulation. C'est le but de la loi. Ce n'est pas de doubler ou de compléter le travail que peuvent faire d'autres lois ou les interventions que peut faire le ministère de l'Environnement. C'est simplement une mesure de sécurité additionnelle dans les lieux de travail pour faire en sorte que les contenants qui ont des produits à caractère dangereux aient une affiche, une étiquette à l'extérieur du contenant pour que le travailleur sache qu'il est en train de manipuler un contenant qui contient une substance qui peut être dangereuse. Ce sera accompagné d'une fiche signalétique, qui est un autre document dans le lieu de travail - on verra comment - laquelle fiche va donner plus de détails techniques sur le produit. Elle va donner, par exemple, des moyens d'intervention, si besoin est. Donc, ce qu'on veut faire avec le projet de loi, c'est au moins que le travailleur, s'il manipule des barils, des contenants, qu'importe leur forme, sache par une étiquette ce que cela contient. Le but de la loi n'est pas d'édicter ce que des fabricants ou des employeurs peuvent avoir à l'intérieur de leurs usines ou non. Il y a d'autres lois pour cela. Le ministre du Travail présente un projet de loi pour assurer une information minimum sur des produits dangereux qui sont sur les lieux de travail. D'autres lois peuvent permettre des interventions, soit par le ministère de l'Environnement, soit par certaines lois fédérales qui contrôlent la circulation de certains produits dangereux, soit nucléaires ou d'autres. C'est évident. Par ses inspecteurs, la CSST n'a pas mandat d'aller vérifier la qualité de sécurité par rapport à tel produit dangereux. Elle va avoir, par rapport à ce projet de loi, la responsabilité de s'assurer que les étiquettes apparaissent sur tes contenants, tel que le veut le projet de loi. Donc, pour répondre plus précisément à la question, il n'y a pas d'inventaire de fiches, il n'y a pas de constitution d'une banque de données centrale avec le projet de loi puisque c'est l'employeur, au risque de certaines sanctions, comme on le verra dans le projet de loi, qui doit apposer l'étiquette pour assurer un minimum d'information.

M. Jolivet: Le ministre n'a pas répondu à ma question de façon directe. Il y a répondu par l'information qu'il nous donne sur la liste. À propos du laser, des agents physiques dangereux, est-ce que le ministre peut nous dire qu'à l'intérieur de ces produits contrôlés il est inscrit quelque part?

M. Séguin: Si vous permettez, M. le Président, je suis accompagné de M. Marc Baril, chef du répertoire toxicologique de la CSST, qui pourrait peut-être apporter une précision technique à la question.

M. Jolivet: Parfait.

Le Président (M. Kehoe): Encore une fois, monsieur, pourriez-vous vous identifier pour le Journal des débats, s'il vous plaît.

M. Baril (Marc): Je suis le Dr Marc Baril, chef du service du répertoire toxicologique de la Commission de la santé et la sécurité du travail.

Le Président (M. Kehoe): Merci, pouvez-vous répondre à la question.

M. Baril: Je m'excuse, pour le protocole, je pense que je dois m'adresser à M. le Président. En fait, le système couvre ce qu'on appelle les contaminants chimiques et les contaminants biologiques. Le système comprend des catégories de contaminants, la première étant les gaz comprimés, les matières inflammables et les combustibles, les matières oxydantes, les matières toxiques qu'on retrouve sous différentes classes, c'est-à-dire matières ayant des effets immédiats et graves, matières ayant d'autres effets toxiques, matières infectieuses où l'on retrouve notamment les contaminants biologiques. On retrouve également une catégorie pour les matières corrosives et une pour les matières dangeureusement réactives.

M. Jolivet: Dans le contexte où un changement technologique s'en vient avec des dangers additionnels, est-ce qu'il n'y aurait pas intérêt à ce moment-là à avoir une partie qui concerne, par exemple, le laser, qui est utilisé de plus en plus à l'intérieur des usines? Est-ce qu'il y

aurait intérêt à ce moment-là à faire un amendement à quelque part, et où faudrait-il le faire? Comment considérez-vous d'abord le laser?

M. Séguin: On me dit, M. le Président, que le laser est considéré comme un contaminant physique.

M. Jolivet: C'est ce dont j'ai parlé, d'agents physiques dangereux. C'est ce que je dis, vous parlez d'agents chimiques, biologiques, mais il y a maintenant de plus en plus l'utilisation physique. Dans ce sens, qu'est-ce qui se passe, est-ce que les travailleurs qui vont avoir à manipuler des instruments au laser vont avoir une protection? Est-ce que la Commission de la santé et la sécurité du travail n'a pas intérêt, justement, à pousser sur cela pour en arriver finalement à considérer l'information nécessaire pour l'utilisation du laser?

M. Séguin: Si on dit au départ que le laser peut être considéré comme un produit contaminant par ses effets, j'imagine que l'énergie déployée par un laser peut être suffisante pour provoquer des brûlures et autres et peut constituer dans sa manipulation un certain danger, bien sûr. Maintenant, je pense qu'il faut réaliser que le laser ne s'emmagasine pas; à moins que je me trompe, c'est comme l'énergie électrique, comme une énergie fournie par un appareil quelconque, donc qui n'est pas dans un contenant. Je pense que les travailleurs qui travaillent auprès d'un appareil qui fournit un rayon laser sont suffisamment informés qu'ils travaillent sur un appareil de rayon laser que la présence d'une étiquette disant que l'appareil produit un rayon laser me semble, plus ou moins...

M. Jolivet: M. le ministre, vous êtes au courant qu'il y a des gens qui ont des fours à micro-ondes. On leur dit de ne pas regarder par la fenêtre, mais il y en a plusieurs qui regardent par la fenêtre.

M. Séguin: Oui, mais ici le projet de loi ne vise pas l'ensemble des produits. On verra qu'on veut s'assurer qu'une information est donnée aux employés, aux travailleurs et travailleuses dans une usine quant à la présence auprès d'eux de produits dangereux et fournir une fiche signalé-tique qui peut donner des moyens d'intervention en cas de danger. Nous ne sommes pas dans un projet de loi pour légiférer sur la présence ou non, ou les dangers ou les interventions. Cela peut relever soit du ministère de l'Environnement ou d'autres lois qui peuvent contraindre la circulation ou l'utilisation de certains produits. Par exemple, les fours à micro-ondes produisent de l'énergie micro-ondes. Alors, il y a de la réglementation pour assurer la sécurité du public. Ce n'est pas le ministre du Travail, dans son projet de loi, qui vient compléter cette législa- tion.

Le projet de loi SIMDUT vise, comme je le dis, à faire apparaître, à tout le moins, une étiquette sur le contenant du produit, ou sur le produit qui est jugé contrôlé. Dans le cas du rayon laser, ma foi, s'il fallait qu'on soit obligé de mettre une étiquette pour faire réaliser à ceux qui manipulent l'appareil de rayon laser qu'il s'agit d'un appareil de rayon laser, contenant un rayon laser qui peut être dangereux, bien, je n'ai pas de difficulté à accepter ça. Ce n'est peut-être pas le meilleur exemple à donner des effets bénéfiques du SIMDUT dans une usine, je pense que mon collègue le comprend aussi. Le laser n'est pas dans un contenant où le manipulateur ne le sait pas.

M. Jolivet: M. le Président, je ferai remarquer au ministre qu'on a parlé de prévention; on parle aussi, dans ce cas-là, de manutention et d'utilisation. Je dois dire au ministre que je connais - et mes collègues de ma région pourraient en faire mention - des gens qui travaillaient dans le cuir. On avait beau leur dire: Faites attention quand vous pesez sur le bouton pour faire descendre la presse qui coupe le cuir, pour faire des gants de telle dimension, des personnes se sont coupé des doigts en dessous de ça. Qu'a-t-il fallu faire? Il a fallu inventer des moyens où la personne n'avait pas les doigts en dessous de cet appareil-là; donc, il fallait, pour que ça parte, non plus peser au pied, mais peser sur le côté, il fallait que les deux doigts soient dessus pour que ça puisse tomber.

L'autre chose qu'on avait regardée, à l'époque, même la senteur humaine, la chaleur humaine faisait en sorte que la machine arrêtait. Il y a combien de personnes qui ont eu les doigts coupés, au Québec, parce qu'ils travaillaient dans des presses à cuir? Venez voir ça chez nous et on vous en parlera.

Donc, ce que je dis, actuellement, on est en train de faire une loi qui a pour but d'informer l'ensemble des travailleurs du danger de l'utilisation de certains produits dangereux qui sont emmagasinés quelque part ou qui servent à l'ensemble des besoins de l'usine. Vous disiez, lors de votre discours en deuxième lecture, qu'il y a des produits, s'ils ne sont pas dans les conditions normales d'utilisation, dont on ne pourrait même pas faire la manutention, et la personne serait en droit de refuser de transporter le contenant, si un danger quelconque pouvait se produire. Alors, je pense qu'on s'en va vers des utilisations différentes. Vous dites: La personne devrait, normalement, être bien au courant que, si elle utilise le laser ou tel produit chimique, il peut arriver un problème. C'est une chose. Mais de là à dire: Parce qu'ils sont censés être au courant, on n'en parle pas, ça m'inquiète un peu. Je comprends très bien le ministre qui me dit que le laser, c'est l'utilisation d'une puissance, c'est une force qui n'est pas emmagasinable; je le comprends très bien. Mais est-ce

que le projet de loi n'est pas là, non plus, pour faire mention de ces agents physiques qui, de plus en plus, arrivent dans l'industrie et qui sont aussi d'utilisation dangereuse?

Le Président (M. Kehoe): M. le ministre.

M. Séguin: Si vous me permettez, M. le Président, de simplement faire remarquer à mon collègue que le projet de loi ne vise qu'un système SIMDUT d'information des produits dangereux, et non pas toutes les autres interventions législatives possibles que peut faire la CSST sur les questions de prévention, retrait préventif, etc. Mon collègue mentionne la préoccupation qu'il a pour les dangers au travail, mais avec le projet de loi on n'est pas en train de couvrir l'ensemble des dangers au travail; on vise simplement à introduire un système d'information. Par ailleurs, la CSST et d'autres intervenants gouvernementaux ont la responsabilité d'assurer la sécurité du public et des travailleurs, la circulation de produits dangereux, la manipulation de produits, etc.

Il faudrait bien qu'on comprenne que le projet de loi ne visera pas à compléter toutes les questions qu'on pourrait Imaginer dans la protection des travailleurs. C'est déjà couvert par une certaine réglementation sous la responsabilité de la CSST, mais ce n'est pas le sujet de notre projet de loi. Il vise simplement à introduire une nouvelle obligation aux employeurs d'informer, par un étiquetage minimum, sur la présence de produits et des moyens d'intervention, et aussi par de la formation, pour faire en sorte d'avoir une meilleure information sur les produits dangereux. Mais la question à savoir si des appareils dangereux, à l'Intérieur de certaines entreprises, peuvent être perfectionnés... (11 h 45)

J'ai vu, l'année passée, que l'IRSST avait recommandé, entre autres, que les scies à chaîne aient une garde particulière pour éviter qu'on se blesse, lorsqu'on fait une coupe à la renverse, comme on dit - et je connais cela parce qu'ayant été draveur pendant un bon bout de temps, pendant que j'étais étudiant, j'ai eu à manipuler des scies à chaîne; alors je sais combien cela peut être dangereux. L'IRSST, l'année passée, a réussi à convaincre l'industrie de faire une garde particulière pour éviter qu'un certain retour de chaîne coupe un bras ou fasse des blessures. Mais tout cela relève d'une autre loi, d'une autre réglementation, en partie sous le contrôle ou la responsabilité de la CSST, j'en conviens, mais qui n'est quand même pas l'objet du présent projet de loi.

Le projet de loi, comme je l'ai dit, vise à introduire une responsabilité à pleine charge des employeurs à s'assurer de la présence minimale des étiquettes et fiches signalétiques et à offrir une espèce de cours de formation sur la manipulation et les moyens d'intervention. On verra que la sanction comme telle, s'il y a défaut, c'est de mettre les scellés sur les contenants qui ne respecteraient pas le projet ou la réglementation et cela peut aller jusqu'à faire interrompre les activités. La CSST a un certain pouvoir de faire interrompre les activités et elle peut même aller jusqu'à faire cesser les activités de toute l'entreprise si, à la suite de certains avis, certaines prescriptions de la CSST, l'entreprise continuait à ne pas avoir les étiquettes, à ne pas se conformer au projet de loi. C'est cela la sanction.

Mais cela n'empêche pas que, pendant ce temps, toute la question des moyens qu'on pourrait entrevoir pour assurer une meilleure protection... D'ailleurs, sous la responsabilité de la CSST, il y a déjà de la réglementation qui peut être perfectionnée. Ce n'est pas l'objet du projet de loi, mais cela n'empêche pas que le commentaire de mon collègue est intéressant, sauf que ce que je veux dire, c'est que ce n'est greffé ni à l'article 1 que nous avons ni à d'autres articles du projet de loi.

Le Président (M. Kehoe): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Jolivet: Avec les commentaires que j'ai faits, M. le Président, adopté.

information concernant les produits contrôlés

Le Président (M. Kehoe): J'appelle l'article 2, paragraphe 1, qui est le paragraphe 62.1.

M. Séguin: M. le Président, c'est un article relativement long parce qu'il comporte un ensemble de sous-articles, par l'article 62.1 et suivants, et qui se trouve être le coeur, proprement dit, du projet de loi. Alors, à l'article 62.1... Je suggère, M. le Président, que nous étudiions...

Le Président (M. Kehoe): Séparément chacun des articles.

M. Séguin: ...séparément chacun des articles. Le Président (M. Kehoe): D'accord.

M. Séguin: ...quoique certaines explications vont déborder parce que les articles sont interreliés, mais mon collègue comprendra l'ensemble des explications. Donc, à l'article 62.1 - je pense que c'est l'article essentiel du principe du projet de loi - on dit: "Un employeur ne peut permettre l'utilisation ou l'entreposage d'un produit contrôlé sur un lieu de travail à moins qu'il ne soit pourvu d'une étiquette et d'une fiche signalétique conformes aux dispositions de la présente loi et des règlements et que le travailleur n'ait reçu la formation et l'information requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié."

Le deuxième paragraphe vise particulièrement l'entreposage. Il se lit comme suit: "Un employeur peut toutefois entreposer un produit contrôlé sur un lieu de travail s'il fait, avec diligence, toutes les démarches nécessaires afin que ce produit soit pourvu d'une étiquette et d'une fiche signalétique conformes et que le travailleur reçoive la formation et l'information prévues au premier alinéa."

Dans un premier temps, c'est une forme d'interdiction d'avoir des produits qui n'ont ni l'étiquette ni la fiche. Il y a ces deux documents: l'étiquette est collée ou apposée sur le produit ou le contenant, alors que la fiche est dans le lieu de travail. On verra un petit peu plus loin de quelle façon. Le deuxième paragraphe dit que, à la rigueur et pour un temps limité, temporairement, il peut l'entreposer, le conserver comme tel sur les lieux de l'entreprise, mais à la condition de faire avec diligence toutes les démarches qu'il doit faire pour fournir l'étiquette, la fiche signalétique, la formation et l'information.

Le Président (M. Kehoe): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, je vais parler un peu plus longuement sur celui-là parce que moi aussi je vais déborder sur les autres. Je voudrais poser des questions au ministre. D'abord, il y a une chose qui nous inquiète, je pense que je ne suis pas le seul à le dire, les travailleurs le disent aussi, c'est... Le ministre parle de diligence. Est-ce qu'il pourrait me dire, d'après lui, quel est le type de délai qu'il envisage quand il dit que l'employeur doit traiter cela "avec diligence"? Je pense que c'est important. Pourquoi dit-on "avec diligence"? Y a-t-il un délai, y a-t-il quelque chose? Pourrait-il arriver, par hasard, qu'on interprète de façon tellement élastique le mot "diligence" que, finalement, l'absence de délai précis entraînerait des abus? Moi, je voudrais avoir, de la part du ministre, une première information en ce qui concerne le mot "diligence".

Deuxièmement, question d'information, concernant les produits contrôlés, disons qu'on décide, dans une usine donnée, de mettre sur informatique l'ensemble de toutes les données et qu'on dise: Écoutez, là, les gens vont être informés, on met ça sur informatique. Faut-il s'assurer que l'individu qui va avoir affaire à ça y ait d'abord accès et, deuxièmement, qu'il soit préparé à cela, donc qu'on lui donne la formation nécessaire pour pouvoir utiliser la machine informatique? Vous savez, l'employeur dit: Écoutez, j'ai fait ça avec diligence, j'ai mis tout ça sur informatique; ils ont juste à peser sur un bouton, mais la personne n'a pas accès au local parce qu'elle est trop loin et la machine à informatiser n'est pas continuellement accessible. Et, deuxièmement, quand la personne n'est même pas préparée à utiliser le lieu où se trouve la machine à informatiser, je pense qu'on a à ce moment-là l'obligation de donner le plus de visibilité possible. Est-ce que le ministre veut en arriver à permettre aux travailleurs d'être dans les conditions de vie les meilleures possible?

Je faisais mention, tout à l'heure dans ma discussion, du chef des incendies. Est-ce que la fiche signalétique permettant d'avoir toutes les données nécessaires aux réactions rapides - toujours selon le principe de la confidentialité, bien entendu... Est-ce que le chef des incendies sera mis au courant de la manière de réagir à un incendie qui se produira dans le coin? Les chefs d'incendie en font mention, ça les inquiète un peu, parce qu'à Saint-Basile-le-Grand il n'y avait pas beaucoup de données qui existaient là. Ce sont des occasions qu'on a, j'en suis assuré, de ne pas reproduire de telles circonstances.

Je faisais mention du public. C'est beau d'avertir le travailleur, mais que devient le public dans ça? Est-ce qu'il y a quelque chose qui permettrait au public qui sent certains malaises d'aller au département de santé communautaire, toujours sous la formule de la confidentialité, avec la fiche signalétique qu'on lui donne de tel produit, afin que la personne, comme médecin traitant, puisse y avoir accès, et, comme public, être informée? Il me semble qu'il y a quelque chose qui manque dans ça.

La première question que j'ai posée est sur la diligence; la deuxième question, sur l'informatisation; la troisième question, sur le chef des incendies et la quatrième question, sur le public. J'aimerais entendre le ministre me donner des réponses à ces questions. On pourra argumenter davantage. Sur la question de la diligence, le mot "diligence", comme le dit la FTQ, ne définit pas assez bien le laps de temps à l'intérieur duquel l'employeur doit faire les démarches pour se pourvoir d'une étiquette et d'une fiche signalétique sur la matière dangeureuse, le produit contrôlé. Alors, j'aimerais entendre le ministre sur ces questions.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Séguin: Oui, en fait, si je comprends bien, c'est le deuxième paragraphe de 62.1 qui retient l'attention de mon collègue. Sur la question de l'entreposage, il s'agit de prendre les moyens avec diligence pour que l'étiquette et la fiche soient fournies, tel que prévu au projet de loi.

Le mot "diligence" a été préféré à un délai de rigueur parce que chaque cas sera relativement particulier et les inspecteurs de la CSST, lorsqu'ils auront à entrer dans un lieu de travail et a constater la présence de produits qui ne seraient pas conformes, vont devoir tenir compte de délais minimaux nécessaires pour expliquer pourquoi l'étiquette n'est pas disponible. Ce n'est peut-être pas la faute de l'employeur, c'est peut-être le fabricant qui a expédié une certaine

quantité de barils, qui, habituellement, avaient des étiquettes, sans étiquette sur un certain lot; alors, le temps qu'il puisse peut-être contacter qui de droit et obtenir les étiquettes pour les apposer lui-même ou retourner les barils, etc., on peut imaginer toutes sortes de scénarios. Comme c'est une mise en vigueur nouvelle au Québec, il ne s'agit pas non plus d'arriver le 1er janvier 1989 avec un délai de rigueur pour dire à 250 000 entreprises au Québec: À partir du 1er janvier, si vos produits n'ont pas d'étiquette, l'inspecteur peut les sortir ou arrêter l'entreprise. Je pense qu'il y a une espèce d'équilibre. On m'indique qu'on entrevoit, à la CSST, que l'inspecteur pourrait donner un avis de contravention, un peu comme certains policiers le font lorsqu'on n'est pas conforme au Code de la route. Ils vous donnent un avis de 48 heures, une semaine, parce que vous avez un feu de brûlé, etc., pour que vous vous conformiez. On pense avoir des délais assez serrés d'une semaine, deux semaines, dans certains cas de deux ou trois jours, si on croit que le défaut peut être réparé très rapidement. Donc, les inspecteurs vont faire cela dans l'optique que le terme "diligence" indique un temps très court: quelques jours, une semaine, deux semaines et non pas trois mois, six mois, un an.

Les Inspecteurs vont quand même revenir sur place si on voit que les pénalités ou les sanctions ou les amendes sont en crescendo, s'il y a récidive, s'il y a vraiment une espèce de mauvaise foi ou s'il y a de l'indifférence de la part d'employeurs. Je pense qu'on va alors s'assurer que la récidive ne demeure pas non plus dans l'indifférence des inspecteurs et qu'il y ait une sanction assez forte. On va aller voir un peu plus loin que les pénalités, à un moment donné. La sanction ultime de voir fermer l'entreprise par l'inspecteur qui jugerait que l'ensemble des produits n'est pas conforme est dangereuse; c'est quand même une épée de Damoclès assez forte. Mais, pour répondre à la question, la diligence, c'est un laps de temps très court. On parle de quelques jours, une semaine, deux semaines. C'est l'optique qu'on va élaborer. S'il arrivait qu'à l'expérience cela s'avérât malheureusement inapproprié, c'est peut-être un élément sur lequel on pourrait, éventuellement, suggérer des délais de rigueur, des délais plus sévères. Mais, pour le moment, on croit qu'on peut très bien fonctionner avec cela.

La deuxième question, sur l'aspect de l'informatique ou de la forme que peut prendre l'étiquette ou la fiche, c'est prévu que la forme physique tant des étiquettes que de la fiche comme telle doit être sur du papier, etc. Donc, c'est vraiment un avis écrit sur un carton ou un papier quelconque et non pas sur du traitement informatique. C'est vraiment un support matériel physique. Alors, quand on parle d'étiquette, je pense qu'on se comprend bien. C'est un morceau de papier où est écrit l'avis que cela contient tel produit et que cela peut être dangereux. Il ne faut pas non plus sous-estimer une autre loi qui dit d'indiquer en signes symboliques certains produits, soit qu'ils sont corrosifs, etc. Il y a des signes ou des symboles qui doivent apparaître sur des contenants si, par exemple, il y a de l'essence, etc., soit par des têtes de mort, enfin, les signes avertisseurs que tout le monde connaît. Mais l'étiquette n'est pas... Ces symboles sont déjà prévus dans une autre loi. L'étiquette doit simplement afficher la présence du produit, son nom. La fiche signalétique, elle, est un document. Cela peut être... On verra un peu plus loin que cela se réfère aux règlements qui donnent le détail du document remis à certaines parties. On va voir cela un peu plus loin. Il y a un chapitre dans le règlement qui dit comment confectionner la fiche, la grandeur, ce que cela doit contenir et à qui cela doit être remis. Ce n'est pas un document qui est susceptible d'être caché dans le tiroir de l'employeur, que personne n'a vu et qui demeure secret. Au contraire, la fiche doit être disponible et est automatiquement remise à certaines parties définies dans le milieu de travail.

En ce qui concerne la question de la protection, le Bureau de la protection civile, à notre invitation, a été invité à participer au projet. Il y a un comité, actuellement, entre la CSST et le Bureau de la protection civile, qui travaille sur des modalités qui pourraient permettre, par exemple, aux pompiers, lorsqu'ils arrivent sur un lieu où se trouvent des produits, de connaître les éléments essentiels des produits ou de prendre connaissance de la fiche signalétique. On ne sait pas exactement comment et je vous avoue que même le Bureau de la protection civile ne sait pas comment et ne veut surtout pas se constituer une banque de données informatiques de l'ensemble de toutes les fiches signalétiques, par exemple, au Québec. (12 heures)

Vous pouvez imaginer que, dans la seule région de Montréal, s'il fallait que les employeurs soient obligés d'envoyer au Bureau de la protection civile du Québec copie de chacune des fiches signalétiques, et copie de chacun des changements de fiches signalétiques, parce que dans l'année une grosse entreprise peut changer les fiches, et la fiche vise un produit; alors, une entreprise qui aurait 200 produits aurait 200 fiches signalétiques, donc, cela ferait une gestion de documents absolument importante, de plusieurs millions de pièces et - quoique ce pourrait être pensable, mais je pense qu'en pratique cela fait peur - étant donné l'énormité des documents à vérifier, à contrôler et, en cas d'appel d'urgence, il n'est pas sûr que le Bureau de la protection civile aurait le temps - pour une telle entreprise, dans ses millions de pièces de fiches signalétiques - de sortir la bonne fiche, d'en prendre connaissance, d'autre part, de s'assurer que c'est la dernière en date, parce que cela peut avoir changé depuis deux ou trois mois. Mais, par ailleurs, il ne s'agit pas non plus de demeurer

complètement indifférent à cela, et c'est pourquoi nous avons un comité qui siège actuellement, entre les deux organismes, pour penser à l'aspect le plus pratique et le plus salutaire.

Je pense que, lorsque les pompiers arrivent dans un lieu, ils doivent savoir qu'il y a des produits dangereux, leur nature, et ce qui est suggéré comme moyen d'intervention. Est-ce que l'eau ou les poudres sont plus indiquées pour éteindre le feu? On verra peut-être à adopter avec le Bureau de la protection civile... Et on lui a offert de nous Indiquer ce qu'il pouvait souhaiter comme information et modalité pour prendre connaissance de ces fiches.

Ensuite, oui, j'oubliais le dernier aspect. Vous parliez de l'intérêt public. Le projet de loi ne prévoit pas d'information pour le grand public. Il n'y a pas d'avis dans les journaux, disons que nous visons le milieu de travail, ce sont les travailleurs et travailleuses, les représentants syndicaux, les représentants des différents regroupements d'employés, s'il n'y a pas de syndicat, qui peuvent demander l'information, avoir droit à l'information, à la fiche et à la présence des étiquettes, et qui peuvent de temps à autre soit porter appel ou contester, on verra cela un petit peu plus loin. Mais le grand public n'est pas visé par le projet de loi et, si un simple résident veut entrer dans une usine et demander de prendre connaissance de la fiche signalétique, ce n'est pas prévu comme tel, mais on peut imaginer que, par le droit que possèdent les représentants des travailleurs, il pourrait être relativement facile, à ce moment-là, de faire valoir la demande et d'obtenir copie d'une fiche, parce que la fiche comme telle n'est pas jugée un document confidentiel. L'information que peut contenir une fiche ou une étiquette, on le verra, peut être exemptée à la demande de l'employeur, et il y a des procédures à suivre. Mais les étiquettes ne sont pas confidentielles; au contraire, on veut qu'elles apparaissent très bien sur les contenants pour aviser les gens, comme la fiche signalétique doit être à la disposition du milieu de l'usine concernée, pour que l'information soit connue.

Mais nous n'avons pas pensé avoir accès, comme tel, au grand public, quoique dans certains cas, par exemple un médecin traitant, si un travailleur dans l'usine a absorbé un produit dangereux, va obtenir la fiche signalétique pour faire un bon diagnostic et prendre les bons moyens d'intervention.

M. Jolivet: M. le Président, j'écoute le ministre avec beaucoup d'attention et je dois dire que de plus en plus les gens veulent être informés de ce qui se fabrique chez eux et des conditions dans lesquelles se fabriquent ces produits. Alors, ce que nous avons devant nous maintenant doit tenir compte de ce qui s'est passé dernièrement, et on ne peut pas ne pas le vivre comme tel. On espère toujours qu'il n'y ait pas d'incidents et d'accidents, mais malheureuse- ment on ne peut pas les empêcher. Le principe même de la définition d'un accident, c'est quelque chose de fortuit.

Ceci étant dit, nous nous retrouvons donc devant un phénomène voulant que la discussion qui a été faite au Québec et au Canada depuis six ou sept ans sur l'utilisation des produits dangereux nous amène donc à davantage faire des constatations, mais en même temps les préventions qui s'imposent. Dans ce contexte, les frissons peuvent parfois nous passer dans le dos. Je vous le dis bien honnêtement, M. le Président, nous sommes dans un contexte où le monde, de plus en plus, au point de vue santé, au point de vue écologique, se pose de sérieuses questions. Est-ce qu'on doit impunément utiliser ces produits sans tenir compte qu'il y a à la fois des gens qui travaillent à l'intérieur et d'autres qui vivent à l'extérieur?

Vous savez, on ne se posait pas beaucoup de questions autrefois, en 1920-1930, sur l'utilisation de l'acier, qui avait remplacé le bois, on s'en souvient. On en avait absolument besoin pour construire des bateaux, à l'époque. Mais nous n'avons qu'à regarder ce qui s'est passé à Sudbury: les émanations qui se sont répandues et la végétation qui est disparue. Cela veut dire qui, si cela a des effets sur la végétation, cela doit certainement en avoir sur la population. Et si tel est le cas, on doit être maintenant en mesure de le savoir et, lorsqu'on établit une usine quelque part, d'informer l'ensemble de la population qui est de plus en plus nerveuse vis-à-vis de ces questions. Vous avez l'exemple des BPC alors que les gens ont réagi émotivement à des choses qui, normalement, auraient dû être rationnelles, si on avait pris les précautions qui s'imposaient.

Alors, dans ce contexte, le mot diligence, pour moi, devient important. Le ministre dit que, dans le texte, on ne peut pas inscrire de date; on dit qu'à compter du 1er janvier 1989 tout le monde a tant de semaines pour se mettre à la page et l'indiquer. Je comprends très bien, le ministre n'as pas besoin de me faire un dessin, ce n'est pas de cela que je parie. Je demande, lorsqu'un produit arrive, dans combien de temps l'employeur y sera-t-il obligé? Le ministre me dit: Cela dépendra de l'inspecteur qui ira faire l'inspection, qui prendra une décision. Il dira: Ecoutez, vous avez deux jours, trois jours, une semaine, un mois pour vous conformer à la loi. C'est peut-être cela qu'il fallait regarder. Et là, je trouve intéressant ce que le ministre disait: L'individu vient et rédige une sorte de contravention. N'appelons pas cela une contravention, disons un avis disant que, dans l'usine, l'utilisation de tel produit exige qu'il y ait une fiche signalétique, des informations qui soient fournies et une formation qui soit donnée pour l'utilisation de ces produits.

Alors, je trouverais peut-être normal, à ce moment-là, que quelque part - je ne sais pas si c'est dans le règlement - le ministre indique

des délais maximums, parce qu'on ne peut pas parler de minimum, on peut peut-être parler de maximum, dans un délai X, selon ce que l'inspecteur, la personne qui vérifiera, a comme libre arbitre de décider. C'est peut-être dans ce sens que je l'ai examiné. Il faut peut-être donner un délai maximum sur la fiche qui sera donnée à la compagnie, avec avertissement au niveau des représentants syndicaux ou de l'organisme accrédité à l'intérieur, ou des représentants des travailleurs s'il n'y a pas de syndicat. Au moment où un produit entre dans l'usine, on avertit la compagnie que dans un X délai ce produit devrait être indiqué.

Donc, pour moi, le mot diligence ne veut pas dire, comme le ministre le disait, qu'à compter de telle date tout le monde devrait... Je comprends ça très bien et le ministre n'a pas besoin de me faire un dessin.

Quant à la question de l'informatisation, il sera peut-être plus pratique, dans certains cas - et c'est pour cela que je dis que je ne veux pas empêcher qu'il y ait une fiche signalétique, un avertissement, une affiche quelconque qui avertira les travailleurs des dangers - une fois qu'on a donné l'avertissement majeur, d'informatiser l'ensemble des données. Je pense bien qu'il y a du monde qui va les utiliser pour des besoins internes de la compagnie et à ce moment-là, s'il se produisait un événement, aller voir sur la fiche quels sont les moyens qu'on a de contrôler tel incendie, tel dégât, telle affaire, et ce qui arrive si quelqu'un, par malheur, a ingurgité tel produit chimique, et quels sont les moyens à prendre. Donc, la fiche signalétique, c'est une chose, soit signaler ce qui en est, le contenu, mais c'est aussi la fiche qui va indiquer quels sont les moyens à prendre pour pallier à une situation urgente.

Il est sûr et certain qu'il y aura dans les usines, compte tenu de cette mentalité nouvelle, des données informatisées. À ce moment-là, il faudrait que le travailleur soit préparé à pouvoir les utiliser et qu'il ait accès à ces données.

Quant à la question de la protection civile, le ministre me permettra de penser qu'encore une fois, pour l'ensemble des données - s'il me parle - autrefois on disait: à la mitaine - s'il me parle des fiches et du système: si on a besoin de la lettre "A", on met le bâton, toutes les fiches "A" tombent et on choisit dedans, c'est dépassé. Aujourd'hui, c'est l'informatique. En l'espace de quelques secondes, à partir d'un bouton sur lequel on pèse, on peut avoir la donnée dont on a besoin; peut-être que c'est dans ce sens-là que le comité dont il fait mention devrait se diriger. C'est une information rapide qui ne demande pas de compiler dans des boîtes et dans des bâtisses les données. Ce sont des fiches informatisées de telle sorte qu'on sait, si un incendie se produit, quel moyen on a pour l'éteindre; alors, au lieu d'activer l'incendie, on en arrive à le contrôler.

Quant à la question du public en général, le ministre me permettra de dire que de plus en plus il n'aura pas le choix, lui comme les autres qui vont suivre à titre de ministres responsables, d'en arriver, avec l'aide du ministre de l'Environnement, avec l'aide du ministre du Travail, que vous êtes, ou du ministre responsable de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, que vous êtes aussi, il devra donner les informations que la population va demander. C'est dans ce sens que je disais qu'il y a moyen de regarder cet article-là dans cette grande nomenclature actuelle de la prévention à l'intérieur des usines et de l'information à l'extérieur des usines.

J'ai donné mon opinion là-dessus. J'aurais cependant un amendement à l'article 62.1 qui se lirait comme suit: L'article 62.1, tel qu'introduit par l'article 2 de ce projet de loi, est modifié par l'insertion, à la première ligne du premier alinéa, entre les mots "l'utilisation" et "ou", des mots "la manutention". Donc, ce que je pense qui devrait être fait, parce que c'est une chose que je crois aussi importante, c'est: "un employeur ne peut permettre l'utilisation ou la manutention ou l'entreposage." Je pense que le ministre devrait comprendre qu'il y a l'utilisation, qu'il y a l'entreposage, mais qu'entre les deux il y a aussi la manutention du produit dangereux. Il me semble que ce ne serait pas un amendement difficile à ajouter ici puisque tout le monde l'indique. On l'a peut-être oublié, c'est peut-être un oubli, c'est peut-être un trou, et le ministre peut me donner son impression de cet amendement que je proposerais d'ajouter, les mots "la manutention".

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Séguin: Mme la Présidente, si vous me permettez de répondre à la première question relative à l'entreposage, au premier paragraphe, on prévoit déjà que, si l'employeur n'est pas conforme et que dans certains cas il peut entreposer le produit, il ne peut quand même pas l'utiliser, et l'utilisation interdite est immédiate. Alors, dès que, à titre d'exemple, il recevrait des produits non conformes, parce que l'étiquette n'apparaîtrait pas sur les contenants, il lui est immédiatement interdit d'utiliser les produits. Donc, c'est immédiat et, si c'est vérifié par un inspecteur, l'infraction sera immédiate et l'utilisation doit être interdite séance tenante. La seule modération qui est apportée, c'est qu'il peut continuer à l'entreposer temporairement simplement pour se conformer dans un délai rapide à l'infraction et il ne doit plus l'utiliser. Donc, les travailleurs sont protégés dans le sens où, dès que le produit n'est pas conforme, il doit être retiré du lieu de travail et entreposé, de sorte que les travailleurs ne soient pas exposés au danger puisqu'ils n'ont pas à manipuler ou à utiliser le produit.

En ce qui concerne la suggestion par amendement de l'Opposition...

M. Jolivet: Mme la Présidente, si le ministre me le permet, justement, ce que les gens disent, c'est qu'un employeur peut toutefois entreposer un produit. Puis, quant au mot diligence, c'est là qu'arrive toute la question des délais. Parce que les gens, ce qu'ils disent, c'est que, lorsqu'en milieu de travail quelqu'un n'est pas informé, même si c'est indiqué "non utilisé", cette personne peut aller fouiller dedans et se brûler pour une raison ou pour une autre. Je pense que c'est important. Vous dites qu'il ne peut pas l'utiliser, soit, mais qu'il peut l'entreposer. Puis on donne un délai pour qu'il ait la fiche signalétique de telle sorte qu'il pourra l'utiliser à ce moment-là. Mais mon problème est le suivant, c'est que, s'il y a quelque chose d'entreposé, vous savez, le monde est curieux, il veut aller voir ce que c'est pour une raison ou pour une autre. Quels sont les moyens qu'on a de s'assurer que personne ne va y toucher? (12 h 15)

M. Séguin: Les employeurs ont, par ailleurs, beaucoup de responsabilités vis-à-vis des dangers qu'ils peuvent constituer et sont toujours... Indépendamment de cette législation, chaque employeur a toujours le devoir d'être, en bon père de famille comme on dit, diligent dans les moyens qu'il peut mettre. Il engage sa responsabilité.

M. Jolivet: Si vous aviez la prison et la condamnation au bout de la course, je vous croirais, mais ce n'est pas tout à fait cela qu'on a vécu au Québec, pas plus ailleurs au monde.

M. Séguin: Non.

M. Jolivet: Le bon père de famille, il n'est pas toujours bon.

M. Séguin: Je ne peux pas dire que le gouvernement précédent a fait oeuvre dans ce sens-là.

M. Jolivet: Mme la Présidente, je n'accepte pas...

M. Séguin: Je pense que les comparaisons ne seraient pas bonnes.

M. Jolivet: Je pense que le ministre aborde quelque chose que je n'ai pas utilisé encore et que je n'utiliserai pas.

M. Séguin: C'est vous qui l'apportez, alors...

M. Jolivet: Non, ce n'est pas cela que je dis.

M. Séguin: Ne le dites pas et je n'en parlerai pas.

M. Jolivet: Non. M. le ministre, vous ne comprenez pas ce que je dis. Ce que je dis, c'est que vous parlez de bon père de famille...

M. Séguin: Cela se peut-il, midi et quart?

M. Jolivet: ...et, comme bon père de famille, je vous dis que ce n'est pas sûr que ce soit si vrai que cela quand on regarde l'ensemble de ce qui s'est passé dans le monde, je ne parle pas d'ici seulement. Je vous dis simplement cela et, à partir de cela, que la curiosité humaine est toujours là pour qui que ce soit dans quelque pays qu'on soit. Je vous dis qu'il y a un danger et je veux juste savoir quand on dit avec diligence, parce que c'est de cela que vous faites mention, quels sont les devoirs. Je dis que, s'il y avait un délai maximum qui était prévu où la personne va visiter l'usine... Parce que vous allez faire l'ensemble des usines pour vérifier cela et dire: Voici, bon, sur tel produit on considère qu'en vertu de la nouvelle loi vous devez mettre une fiche signalétique, vous devez informer et former tout le monde sur son utilisation et, si vous ne faites pas cela, vous ne pouvez pas l'utiliser, mais vous avez le droit de l'entreposer. Le délai maximum, c'est quoi? Le délai minimum, c'est quoi? Vous dites: On ne peut pas parce qu'on laisse au bon arbitre le choix du personnage qui va aller visiter l'usine, mais je dis que ce n'est pas suffisant.

M. Séguin: Je réponds par cela que le mot diligence devrait s'interpréter en une durée très courte. Je disais à titre d'exemple que cela pouvait être quelques jours, une semaine, deux semaines et c'est ce que comprend que doit faire la CSST à l'heure actuelle et ce seront les avis qu'elle donnera. Pendant cette durée-là, les produits sont entreposés et, je l'ai déjà indiqué, il y a d'autres réglementations, lois, qui assujettissent les entreprises, les employeurs, les fabricants à la manipulation et à l'utilisation d'un produit dangereux. C'est beaucoup plus le ministère de l'Environnement qui pourrait, à ce moment-là, par sa réglementation décider d'intervenir que la CSST en application d'un projet de loi qui veut mettre en marche un système d'information. On pense que, de toute façon, ces produits-là sont déjà utilisés dans les usines, et s'ils étaient de par leur nature jugés en soi si dangereux que leur seule présence à l'Intérieur de l'usine serait dangereuse, ils ne seraient pas là. La législation ne le permettrait pas. Les lois fédérales, actuellement, interdisent la seule présence de certains produits parce que dans leur seul état ils sont dangereux. Donc, cela contraint les entreprises, les usines et les fabricants à n'utiliser dans leur usine que les produits qui respectent un minimum de sécurité en vertu de différentes lois tant fédérales que celles du ministère de l'Environnement.

Nous, ce qu'on leur Impose en plus, et ce n'est pas la CSST qui détermine quels sont les produits dont la présence est tolérée ou accep-

table même s'ils sont dangereux, ce sont d'autres législations, cela existe déjà et c'est vrai que, comme le souligne le collègue de l'Opposition, à chaque désastre, à chaque situation regrettable, les différents gouvernements de différents pays introduisent des lois de plus en plus sévères, de plus en plus contraignantes, que ce soit Bhopal et d'autres. A chaque fois, on croit utile de le faire, que ce soit dans les bases nucléaires, par exemple, sans rappeler Three Mile Island où on a évacué toute la ville et encore aujourd'hui, après douze ou quatorze ans, Seabrook, etc. et même chez nous au Québec. Une base nucléaire a été stoppée étant donné les dangers qu'on a découverts à un moment donné, mais ce sont d'autres lois. Celle-ci vise à s'assurer que l'information soit là et, à la rigueur, si elle n'y est pas, il ne peut pas l'utiliser et il peut juste le garder pas loin, entreposé, pour un temps minimum pour s'y conformer. Mais, si les produits sont si dangereux que cela, il y a probablement interdiction totale par une autre loi qui va faire en sorte qu'ils ne pourront pas... Mais, ici, ce sont des produits tout de même courants dans l'entreprise.

M. Jolivet: Connaissez-vous l'huile à transformateur?

M. Séguin: Si je connais?

M. Jolivet: L'huile électrique? Je vais vous dire, M. le ministre, écoutez, il y a des évolutions dans l'ensemble du monde actuellement en ce qui a trait à l'utilisation de certains produits. La fameuse huile électrique, savez-vous ce qu'on faisait chez nous dans notre temps avec cela? Tout le monde se lavait les mains pour enlever la peinture, jusqu'à ce qu'en 1979 on s'aperçoive que ce fameux BPC était cancérigène s'il était chauffé. Il faut faire attention: en lui-même il ne l'est pas, mais s'il est chauffé à telle température il devient cancérigène parce qu'il amène de la dioxine de furanne. Il n'y a personne qui le savait; en 1972, chez nous, quand on utilisait cela dans notre coin, et quand le gars ramassait un transformeur d'Hydro-Québec dans le bois et qu'il le gardait dans la cour, il le faisait chauffer, il partait même ses feux avec cela. Mais, quand on s'en est aperçu, on a arrêté.

Aujourd'hui, ne me parlez pas de ce qui est dans les usines. Je pense qu'on est à même de bien s'assurer que ces produits sont corrects en sachant que ce sont des produits dangereux. Ce n'est pas cela que je dis, c'est que désormais il va y avoir de plus en plus de nouveaux produits qui vont entrer sur le marché; on en découvre à tous les jours et à tous les ans il y a de nouveaux produits qui rentrent dans les usines, c'est de cela qu'on parle, en plus.

Alors, moi, je vous dis que, quand on parle d'entreposage, l'employeur qui veut entreposer quelque chose a le droit de l'entreposer, et avec diligence il doit préparer une fiche signalétique à la demande d'un inspecteur et il ne peut pas l'utiliser avant cela. Il va falloir qu'on s'assure qu'il y ait un inventaire quelque part de ces choses qui rentrent, qu'il se fasse. Il va falloir s'assurer que quelqu'un aille vérifier immédiatement et, là, on aura l'occasion de discuter pour savoir qui va être responsable de l'information de l'introduction de ces produits dans l'usine.

C'est de cela qu'on parie. Je ne parie pas du passé, le passé, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, on a vécu avec. Ils ont découvert la roue à un moment donné et ils ont commencé à rouler et depuis ce temps-là il y a des accidents parce qu'on a augmenté les forces de moteur, mais cela ne veut rien dire. Ce que cela veut dire, c'est que demain matin il va y avoir un nouveau produit dans le laboratoire Untel à CIL ou à Consol ou qu'à telle place ils inventent un nouveau produit, ils veulent l'utiliser. Moi, je crois comprendre - si je me trompe vous me le dites - qu'au moment où ils veulent utiliser ce produit on va devoir vérifier s'il est dangereux ou pas, et là il y aura toute la fameuse vérification qui sera faite par le fédéral et il y a le provincial qui s'ajuste à cela, mais à un moment donné il va arriver dans l'usine Unetelle qu'on dise: Un instant, tu ne peux pas l'utiliser si tu n'as pas de fiche signalétique, et s'il n'en a pas une, tu peux l'entreposer, mais en attendant tu ne peux pas l'utiliser; c'est de cela que je parie. Si je me trompe dis-le-moi. Le passé est passé, qu'est-ce que vous voulez que je dise, on allait avec les connaissances qu'on avait. Aujourd'hui, on a de meilleures connaissances et c'est normal, cela évolue. Ce n'est pas qu'il n'y avait pas de bonnes connaissances dans le temps, on avait les meilleures connaissances du temps, aujourd'hui c'est changé. C'est dans ce sens que je parie et c'est pour cela que je parie, sinon je n'aurais pas aujourd'hui à vous parler. Je m'en irais tout de suite et je dirais: Adoptez-le, votre mosus de projet de loi. Mais c'est de cela que je vous parie. Je dis que les travailleurs doivent être...

M. Séguin: Qu'est-ce que vous trouvez qui n'est pas acceptable?

M. Jolivet: Je vous le dis là.

M. Séguin: Vous suggérez quoi? Qu'on fasse une ordonnance pour que l'entreprise sorte les produits de l'usine et les renvoie aux fabricants? Est-ce cela?

M. Jolivet: II y a peut-être...

M. Séguin: Cela ne me fait rien, faites-moi une suggestion.

M. Jolivet: II y a peut-être une chose, c'est qu'on délimite le mot "diligence". Je vous ai proposé de mettre un maximum de temps dans lequel le libre arbitre de l'inspecteur va...

M. Séguin: Je comprends cela, c'est comme

dans la Loi sur l'impôt où on dit que le ministre rembourse avec diligence, cotise avec diligence. Alors, on n'a jamais voulu préciser parce que chaque cas peut être particulier. Dans des cas, cela peut être deux jours, dans d'autres cela peut être deux mois. Cela dépend de chaque entreprise. Je pense bien que mon collègue est bien conscient qu'il ne s'agit pas non plus de faire stopper les activités d'une entreprise parce qu'on aurait découvert trois barils de chlore indispensable à la fabrication d'un produit qui ne porteraient pas d'étiquette, simplement parce que l'étiquette aurait été mal apposée sur un certain lot de barils ou enfin... Je pense qu'on peut se fier. Pourquoi ne se fierait-on pas à la notion de diligence par des inspecteurs? Est-ce qu'on pense que les gens de la CSST vont être très évasifs, désintéressés, qu'ils vont se complaire à donner des délais exagérés? Si c'était le cas on serait peut-être obligé, à ce moment, d'adopter un règlement ou de sévir davantage et de restreindre. Mais, comme le système est nouveau, c'est cela qu'il faut comprendre aussi, on va avoir besoin d'une forme d'adaptation et on ne sait pas comment les cas par cas vont se présenter. Je pense bien que mon collègue lui-même serait bien embêté de trancher dans le vif ce qui serait un délai. Serait-ce 2, 15, 30, 45 jours? C'est très difficile, et je pense que c'est peut-être plus prudent à l'arrivée d'un nouveau système... C'est nouveau, c'est la première fois. Et, si on fait l'inventaire de l'ensemble des entreprises, on voit qu'il y a eu des réactions des entrepreneurs qui disaient: Ce sera quand même assez onéreux pour plusieurs employeurs qui devront s'y conformer. Dans votre comté, dans le mien et dans tous les comtés, on aura peut-être des représentations d'employeurs qui diront: J'ai une petite shoppe, j'ai quinze employés, je suis obligé de faire des étiquettes et des fiches signalétiques, comment cela va-t-il fonctionner, etc? C'est pour cela que je dis que...

M. Jolivet: II n'y a rien de trop dispendieux pour la sécurité et la vie d'une personne.

M. Séguin: ...dans le processus d'implantation d'un système qui est totalement nouveau au Québec, il est peut-être prudent de faire une balise par la diligence qui peut être laissée aux inspecteurs de vérifier. Elle peut se restreindre avec l'expérience qu'on aura et je vous indique déjà que la CSST m'informe qu'elle a l'intention d'avoir une politique de très courte durée en termes de diligence. Ce n'est pas trois, mais six mois ou un an, on parle de quelques jours, peut-être une ou deux semaines. C'est ce qu'elle calibre comme étant à peu près le temps de diligence pour donner un avis à l'employeur, et si l'inspecteur a eu connaissance de l'infraction, c'est un autre problème. On n'a pas 15 000 inspecteurs qui vont toutes les semaines inspecter toutes les usines et tous les lieux de travail au Québec. Donc, on est confiants que les travailleurs, par leurs représentants, par les comités de sécurité dans les différentes usines, aviseront certainement la CSST ou les inspecteurs s'ils constatent des anomalies. Les inspecteurs vont quand même se promener et vérifier de temps à autre si c'est conforme et lorsqu'ils constateront l'infraction, ils donneront un avis de se conformer, avec un temps raisonnable de diligence, pour faire en sorte que la sécurité soit assurée. Cela pourrait être dans certains cas une journée, 48 heures, si on voit que c'est simplement une négligence très technique. Dans d'autres cas, par exemple, s'il s'agit du seul produit dont un fabricant a absolument besoin, que la prochaine livraison est dans trois semaines et qu'entre-temps il ne peut pas en avoir, est-ce qu'on va lui dire: Tu ne peux pas les utiliser, tu ne peux même pas les entreproser, il faut que tu les sortes?

M. Jolivet: J'espère qu'on n'aura pas le scénario suivant et qui pourrait être plausible comme n'importe quoi. L'inspecteur qui fait l'inspection dans une usine, dit: Vous avez trois jours pour vous conformer, mon cher monsieur, entre-temps vous avez le droit de l'entreposer et non de l'utiliser. Pendant ce temps l'entreprise appelle un député, un ministre, le ministre rappelle l'inspecteur et dit: Es-tu capable de lui donner un délai de cinq jours de plus? Finalement, au bout de la course, l'individu lui accorde cinq jours de plus et il y a une explosion: deux morts. Que fait-on avec cela?

M. Séguin: Comme ministre du Revenu, je reçois beaucoup de demandes, et depuis un mois particulièrement, de députés de l'Opposition qui me demandent d'utiliser certains jugements arbitraires contenus dans la loi où le mot "diligence" donne au ministre du Revenu certaines appréciations.

M. Jolivet: Le ministre du Revenu, avec un impôt qu'on ne donne pas de façon diligente, il est évident que vous avez raison, mais là ce n'est pas ça, c'est la santé et la sécurité au travail, dans le milieu de travail.

M. Séguin: Oui.

M. Jolivet: Je comprends...

M. Séguin: Je vous explique que ce n'est pas à la CSST, dans le cadre de ce projet de loi, de savoir si le produit, par sa seule présence, est acceptable, dangereux ou inacceptable. Le projet de loi vise à s'assurer que l'information par étiquette et fiche est conforme. Il y a d'autres lois, par exemple, une qui permet au ministère de l'Environnement d'intervenir sur un lieu s'il constate qu'on entrepose là des produits jugés dangereux pour le public, la sécurité publique. Ce n'est pas la CSST qui, en vertu de cette loi, se donnera le pouvoir de faire sortir

d'un lieu de travail un produit que la CSST jugera dangereux. Ce n'est pas dans notre mandat.

M. Jolivet: Vous m'inquiétez.

M. Séguin: Ce n'est pas le projet de loi, ce sont d'autres lois et réglementations qui prévoient ça.

M. Jolivet: En tout cas, vous m'inquiétez beaucoup quand vous dites ça. Je vous le dis bien honnêtement, vous m'inquiétez énormément. Si j'étais employé dans une usine et que j'entendais dire du ministre responsable de ma santé et de ma sécurité au travail qu'il n'a pas certains pouvoirs, même celui d'aller devant le juge pour déterminer telle affaire... Vous m'inquiétez énormément.

M. Séguin: Là, vous mélangez les choses, je pense.

M. Jolivet: Mais non.

M. Séguin: Si c'était si pressant, pourquoi ne l'avez-vous pas fait dans le temps que vous étiez là?

M. Jolivet: Ne posez pas cela de même. Ce n'est pas cela.

M. Séguin: Non, mais c'est la réalité.

M. Jolivet: Vous avez dit que c'était une discussion qui était amorcée...

M. Séguin: On arrive...

M. Jolivet: Vous n'arrivez pas, cela fait trois ans que vous êtes là.

M. Séguin: Qui a le droit de parole, Mme la Présidente?

M. Jolivet: Excusez-moi.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est le ministre qui a la parole.

M. Jolivet: C'est vrai. (12 h 30)

M. Séguin: Je dis simplement: Voilà un nouveau système. On peut lui reprocher des défauts, c'est sûr. On fait quelque chose de nouveau au Québec, pour la première fois, dans un système d'informations au travailleur. Je ne prétends pas, Mme la Présidente, que ce projet de loi est parfait. Je ne prétends pas ça. Il n'y a aucun projet de loi dont on soit vraiment sûr qu'il soit parfait. Peu importent les gouvernements qui se succèdent ici, il n'est jamais sûr, peu importe le projet de loi, qu'il soit parfait. Nous sommes des humains, des hommes et des femmes, on n'est pas parfaits et c'est nous qui les faisons ou qui contribuons à les faire. On y va d'après notre jugement et notre "raisonnabilité".

Cet article me semble raisonnable. Mon collègue suggère qu'on mette un délai. C'est difficile, à ce stade-ci. Comme le système n'a jamais fonctionné au Québec, on ne sait pas, à l'usage, ce qui va paraître être un délai, comment les entreprises vont pouvoir s'adapter à ces délais. Est-ce qu'on parle de quinze jours, vingt-et-un jours, deux mois, deux jours? On ne le sait pas. Alors, je pense que c'est sage de se fier à la notion de diligence et les inspecteurs de la CSST ont l'obligation d'appliquer la loi.

Ce que je disais il y a quelques minutes à mon collègue, ce n'est pas que la CSST n'a aucun pouvoir et ne fera rien, seulement vérifier des étiquettes. On n'est pas ici, Mme la Présidente, pour parler du rôle de la CSST dans la question de la prévention au travail, etc. Notre mandat, c'est d'étudier un projet de loi.

Il y a une autre loi qui donne des pouvoirs à la CSST, comme il y a d'autres lois qui donnent un pouvoir au ministère de l'Environnement. D'ailleurs, il y a déjà un projet de loi devant l'Assemblée nationale pour donner d'autres pouvoirs au ministre de l'Environnement. Le débat actuel, ce n'est pas de savoir tout ce que peut faire la CSST dans un lieu de travail, si elle constate que des normes...

D'ailleurs, je pourrais ajouter, à titre de ministre du Travail, que le ministère du Travail est responsable de l'application de la loi sur la sécurité publique dans les bâtiments. Je pourrais élaborer toute une autre dynamique d'interventions possibles quand, par exemple, des circuits électriques ne sont pas conformes, quand les lampes ne sont pas conformes, les tapis ne sont pas conformes, etc. J'ai 850 inspecteurs au ministère du Travail. Cela représente les deux tiers de l'effectif de tout le ministère du Travail qui sont voués à l'application de la sécurité publique dans les bâtiments. J'en ai plus que dans les conflits de travail.

À ce titre, j'ai une loi qui me permet, au ministère du Travail, d'intervenir dans certains lieux publics pour m'assurer, par exemple dans les piscines, les lieux publics, les édifices, que les ascenseurs, les escaliers, les murs, les planchers, les installations électriques, sanitaires et autres sont conformes à des normes de sécurité.

Mais ce n'est pas le débat ici de discuter de tout ce qu'un gouvernement a fait, n'a pas fait ou fait actuellement par rapport à la prévention. Je suis à l'étude d'un projet de loi qui vise une nouvelle obligation aux employeurs de faire un affichage par étiquette. L'étiquette, c'est quoi? C'est une feuille, c'est un carton, c'est n'importe quoi sur lequel on peut écrire quelque chose qui est apposé sur un contenant et qui dit: Là-dedans, il y a telle chose.

La fiche signalétique donne plus de détails, c'est décrit au règlement, par exemple, la

formule chimique ou des moyens d'intervention. Est-ce qu'on met de l'eau pour l'éteindre si c'est en feu, une poudre ou telle chose? Ce sont des informations purement pour aider pour que, en cas d'accident, des travailleurs soient protégés vis-à-vis de ce produit. Mais on ne vise nullement, dans le projet de loi, toute la dynamique qui peut exister ailleurs, pour savoir si le produit, légalement, peut être dans l'usine ou si l'entreprise a le droit d'en faire des rejets dans l'environnement.

Le cas des huiles usées qu'on me mentionnait tantôt n'est pas couvert dans notre projet de loi, parce que c'est considéré comme un déchet industriel qui est déjà assujetti à une autre loi qui en interdit la manipulation ou l'utilisation dans certaines conditions, par exemple, on interdit la présence de BPC dans ces huiles depuis 1978. Mais cela n'a rien à faire avec notre projet de loi.

Donc, je reviens, Mme la Présidente, à la notion de diligence qui, dans le concept actuel, me semble raisonnable, à défaut de pouvoir déterminer avec la même "raisonnabilité" un autre délai. Je peux assurer que la CSST va vraiment envisager la notion de diligence dans une durée très courte, très restreinte, très contraignante.

La deuxième intervention que je voulais faire, c'est au sujet de l'amendement proposé par mon collègue...

M. Jolivet: ...recevable, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Bélanger): Elle est recevable.

M. Séguin: ...d'ajouter au mot "utilisation", le mot "manutention" ou "manipulation".

M. Jolivet: Manutention. M. Séguin: Manutention. M. Jolivet: C'est plus que manipulation.

M. Séguin: Je crois comprendre que le mot "utiliser" sous-entend la manutention. On ne pourrait pas penser faire de la manutention si on n'utilisait pas le produit, mais on peut utiliser le produit en faisant de la manutention.

M. Jolivet: Répétez donc cela, vous. J'ai mal compris.

M. Séguin: Je pense qu'on ne pourrait pas dire qu'on fait la manutention d'un produit si on ne l'utilisait pas.

M. Jolivet: Ah! C'est nouveau, cela.

M. Séguin: Bien non, par sens de déduction. Pouvez-vous concevoir une situation physique où vous seriez capable de faire la manutention d'un produit sans l'utiliser?

M. Jolivet: Vous êtes sûr que la manutention, cela veut dire l'utilisation?

M. Séguin: Bien...

M. Jolivet: Allez donc chercher le dictionnaire, pour voir.

M. Séguin: À moins qu'on ne comprenne pas ce...

M. Jolivet: La manipulation, c'est une chose, on manipule une personne, mais on manutentionne un produit.

M. Séguin: C'est cela. C'est dans le sens...

M. Jolivet: Manutentionner un produit, cela ne veut pas dire l'utiliser.

M. Séguin: Non?

M. Jolivet: Bien non. Cela ne veut pas dire que je l'utilise au bout de la course. Je peux le transporter...

M. Séguin: Bien, vous l'utilisez, le mot "utiliser"...

M. Jolivet: Non, non, l'utiliser... Un instant.

M. Séguin: Le mot "utiliser" ne veut pas dire: utiliser dans la fabrication ou la production d'un autre produit...

M. Jolivet: Bien là, cela...

M. Séguin: Le mot "utiliser" veut dire qu'une personne physique utilise le produit. Cela veut dire que cela comprend la manutention, la manipulation, toutes les formes physiques de contact entre l'objet et la personne, il me semble. Non?

M. Jolivet: "Utiliser", c'est "user". Il y a une bonne différence. Quand j'use de quelque chose... Aie! Un instant, là.

M. Séguin: Le dictionnaire...

M. Jolivet: Je vais aller chercher mes mots croisés...

M. Séguin: Le dictionnaire... M. Jolivet: Pas Le Petit Robert.

M. Séguin: Oui, Le Petit Robert, dictionnaire de la langue française. Je peux vous donner la date d'édition au cas où vous croiriez que c'est édition tellement vieille qu'elle n'est plus fiable. Je pense que c'est une édition...

Une voix: Ce n'est pas l'Ancien Testament, c'est le Nouveau Testament.

M. Séguin: 1987; le Petit Robert 1987 nous dit, au mot utilisation: "Action, manière d'utiliser. V. Application, destination, emploi, maniement". Cela comprend maniement. Alors, je pense que manutention et manipulation font partie du concept de manier un objet. Le mot "utiliser", quand on parle d'une personne physique qui doit utiliser ou non un objet, comprend, je pense, tout contact physique ou lien mécanique interposé entre la personne et l'objet. Alors, pourquoi ajouter un sous-entendu au mot "utilisation"? Qu'est-ce que cela ajoute à l'article?

M. Jolivet: Oui. Vous n'êtes pas avocat, moi non plus.

M. Séguin: Oui, oui, je m'excuse.

M. Jolivet: Excusez-moi, vous êtes avocat. Je pensais que vous étiez fiscaliste.

Une voix: C'est un fiscaliste avocat. M. Jolivet: Ah! Excusez-moi. M. Séguin: Je m'excuse de l'être. M. Jolivet: C'est vrai. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Jolivet: Quand je participais aux commissions parlementaires où on m'en parlait toujours, quand je négociais, on disait: Trop fort casse pas. C'est un bon principe.

Chose certaine, Mme la Présidente, c'est que, dans l'utilisation du mot, les gens disent qu'il est mieux de le prévoir que de ne pas le prévoir. La manutention ne veut pas nécessairement dire qu'on utilise, mais on amène... Quand on dit, le maniement, le maniement d'armes, c'est qu'on les utilise. Manutention, cela peut être apporter l'appareil, apporter l'instrument, mais pas nécessairement en faire une utilisation dans le milieu du travail. Donc, je peux manutentionner une huile quelconque, l'apporter d'un lieu à l'autre sans nécessairement l'utiliser dans la fabrication.

Une voix: Oh...

M. Jolivet: Non, non, vous riez, mais je pense que c'est important. Bien oui. Ce n'est pas indiqué à la télévision, il n'y a pas de télévision ici. Les gestes qu'on pose ont quelquefois plus de signification que les mots qu'on dit. C'est ce que je dis du député de La Peltrie qui fait toutes sortes d'insinuations par les gestes.

M. Cannon: Je n'oserais jamais, M. le député.

M. Jolivet: Je vous connais assez pour savoir ce qui en est. Je ne vois pas pourquoi on empêcherait le mot "manutention" qui va plus loin que la simple utilisation.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, l'amendement est-il adopté?

M. Séguin: Ce que je dis, c'est que je ne vois pas l'intérêt de préciser le mot "utilisation". Je me suis même permis de vous donner une définition du dictionnaire qui est éloquente. On dit que cela inclut le maniement et on veut le faire préciser. Pourquoi l'ajouterait-on? Je pense que le mot "utilisation" est pris dans son sens large. On dit: L'employeur ne peut utiliser, cela inclut toutes formes d'intervention sur le produit, que ce soit manipulation, manutention et d'autres, il ne peut même pas l'utiliser dans un lieu de travail. Quel terme voulez-vous qui soit plus global, plus général que "utiliser dans un lieu de travail"? Tous les autres termes ne sont que des sous-entendus et des particules qui se rattachent au mot "utilisation". Je veux bien comprendre qu'un amendement peut être intéressant lorsqu'il bonifie, mais je ne comprends pas l'intérêt de préciser le mot "utilisation", Mme la Présidente. Je pense que c'est clair. À moins qu'on ne comprenne pas le sens du mot "utiliser", ou peut-être que je fais erreur, mais il me semble que, quand on dit: "Un employeur ne peut permettre l'utilisation ou l'entreposage d'un produit contrôlé sur un lieu de travail", c'est clair. À force majeure et a fortiori, il ne peut permettre ni l'utilisation, ni le maniement, ni toute forme physique directe ou indirecte d'intervention sur le produit, que ce soit par des machines ou par d'autres formes, même par des robots, oublions la personne humaine. Cela veut dire qu'il ne pourrait même pas le faire transiter, le faire travailler dans l'usine, même par des robots.

La Présidente (Mme Bélanger): Cela va, M. le député de Laviolette?

M. Jolivet: Oh non! Écoutez, je ne sais pas quel mot vous avez lu. Vous avez lu "utilisation"?

M. Séguin: "Utiliser" ou "utilisation".

M. Jolivet: Bon, à "utilisation", c'est écrit: "Action, manière d'utiliser. V. Application, destination, emploi, maniement." Cela, c'est votre mot utilisation. Allons donc à "manutention", toujours dans le même dictionnaire, de la même année: "Maintien", "gestion. Cela, c'est la façon dont on le décrit dans le dictionnaire, à partir du mot grec et du mot latin. V. Maintenir cela veut dire: "Manipulation, ça comprend quelque chose, cela, déplacement manuel ou mécanique de marchandises - c'est autre chose

que ce que vous dites, soit que le mot manutention veut dire utilisation - en vue de l'emmagasinage, de l'expédition et de la vente. Appareils de manutention."

Je maintiens le mot "manutention", Mme la Présidente. La manutention, c'est le moyen par lequel on déplace des objets considérés dangereux, qui sont dans des contenants ou autres; donc, il faut absolument éviter la manutention, pas juste l'utilisation. Pour l'utilisation, c'est évident. Si je prends ça, je mets de l'eau, j'utilise tout l'ensemble, je vais boire de l'eau au bout de la course, si, au moins, je l'amène jusqu'à la bouche. Mais la manutention, entre les deux, qu'est-ce qu'elle fait? Il y a un contenant et je peux l'utiliser en prenant ce qu'il y a dedans. Mais la manutention, c'est de le transporter, avec le fait que, s'il tombe à terre et s'ouvre, qu'il se déplace et que ça va dans les égouts sanitaires ou pluviaux de la bâtisse, il y a du danger pour l'environnement. Vous comprendrez très bien que le mot "manutention" est intéressant, tel que décrit dans le dictionnaire Petit Robert.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Séguin: Mme la Présidente, je suis déchiré dans un combat spirituel intense, à savoir si on doit utiliser le mot "utiliser".

M. Jolivet: Non. Pas "utiliser", les deux.

M. Séguin: Ou les deux. J'avoue que c'est là un frisson ésotérique très important. Par contre, je me rassure en pensant que, à l'exemple qu'il donne, on ne peut faire de manutention si on ne peut utiliser un produit. Si je vous dis que vous ne pouvez pas utiliser, que vous avez interdiction d'utiliser le produit, vous ne pouvez pas y toucher, vous ne pouvez pas le transporter, vous ne pouvez pas le manutentionner, vous ne pouvez rien faire.

M. Jolivet: Bien non!

M. Séguin: Alors, vous avez une notion du mot "utiliser"...

M. Jolivet: Non, M. le ministre, l'utilisation du produit est à l'intérieur, c'est la manutention du contenant qui amène le produit interne. Voyons donc, vous! La manutention, ce n'est pas la manutention du produit qui est à l'intérieur, c'est la manutention de tout ce qui permet le transport du produit intérieur.

M. Séguin: On vient de lire dans le dictionnaire, lui-même le concède, que le mot "utilisation" comprenait le mot "maniement". Tout ce qu'il dit se réfère au maniement du produit. La manutention, c'est de manier un produit pour le transporter. Il propose un amendement, et il ne m'a pas convaincu que le mot "utilisation" n'était pas complet en soi. Il ne m'a pas convaincu. C'est à lui à me faire une démonstration que le mot "utilisation" ne serait pas global, ne serait pas utile, ne serait pas le plus descriptif. Il veut faire ajouter "manutention". Je lui dis: Manutention est compris dans le mot utilisation. Il me semble que c'est clair.

M. Jolivet: Ce n'est pas vrai.

M. Séguin: On a un débat linguistique...

M. Jolivet: Important.

M. Séguin: Je dis simplement qu'il ne m'a pas convaincu de l'opportunité d'accepter de changer le texte pour faire introduire le mot "manutention".

Une voix: ...le mot "maniement"?

La Présidente (Mme Bélanger): Manutention.

M. Jolivet: C'est retenu?

Une voix: Oui.

M. Jolivet: "Maniement...

Une voix: Avec les mains.

M. Jolivet: ...:Action de tâter, de palper... Chacun des amas graisseux..." Pas dans ce cas. "Manipulation...

Une voix: C'est ça. C'est celle-là, l'action. (12 h 45)

M. Jolivet: Action ou façon de manier, d'utiliser avec les mains.

M. Cannon: Avec les mains.

M. Jolivet: Bon, vous allez comprendre une chose. Le produit, ce n'est pas ce qui est là, ce n'est pas cela. Le produit est dedans. Vous ne me ferez pas accroire que vous allez avoir des difficultés à me faire comprendre cela. Le produit est à l'intérieur. Je ne peux pas manier l'ensemble, manipuler l'ensemble, manutentionner l'ensemble sans qu'il y ait de danger. Vous riez, mais que va-t-il se produire demain matin si un produit quelconque est manutentionné d'une place à l'autre comme les gens comprennent le mot manutention dans l'industrie. Ils amènent ce produit et, le couvercle pour une raison ou pour une autre tombe et il se répand à terre. L'ouvrier va être obligé de l'utiliser, il n'aura pas le choix de le ramasser, n'est-ce pas? La manutention amène d'autres actions subséquentes, mais vous ne me ferez pas accroire que vous ne pouvez pas le mettre dedans.

M. Cannon: Ce n'est pas possible, un

enseignant de la langue française. M. Jolivet: Bien, je comprends. M. Cannon: Incroyable!

M. Séguin: Vous êtes prêts à soutenir cela en public?

M. Jolivet: Bien je comprends. M. Séguin: Ah, tant mieux!

M. Jolivet: La preuve, c'est que tout ce que je dis est inscrit.

M. Séguin: Ah! C'est sûr.

M. Jolivet: Je n'amène pas cela en public, c'est public!

M. Séguin: Une chance que c'est inscrit.

M. Jolivet: Moi, je ne comprends pas pourquoi le ministre refuse de mettre - trop fort ne casse pas - un mot de plus qui ne dérange en rien ce qu'il pense, mais au moins rassure les gens.

M. Séguin: Je n'ai pas d'idée préconçue pour ou contre. J'essaie aussi de regarder un projet de loi avec "raisonnabilité" et intelligence. Si on me convainc d'ajouter des mots, de changer des phrases, de changer des dispositions ou d'améliorer, je suis le premier à y souscrire. Il faut tout de même faire une démonstration comme je le fais dans mes arguments quand je présente un projet de loi, j'essaie aussi de présenter des amendements qui convainquent ou au minimum justifient la présentation de mesures. Maintenant, si pour mon collègue c'est un tel déchirement spirituel, je proposerais la chose suivante pour montrer tout de même que je suis ouvert au dialogue et à la possibilité. On peut retenir pour le moment l'article 62.1 et à la fin de notre projet de loi on reviendra sur son désir de l'amender. Cela me donnera le temps d'y penser un peu, de voir dans d'autres dictionnaires, de consulter peut-être l'Office de la langue française et de voir s'il est logique que nous introduisions un autre mot pour compléter le sens du mot "utilisable". Je suis prêt à momentanément suspendre et quand on reviendra à la fin on aura l'occasion de le compléter.

M. Jolivet: Avant que vous acceptiez cette demande, je voudrais rappeler une phrase afin que le ministre ait cela dans sa réflexion: "Un employeur ne peut permettre l'utilisation ou l'entreposage d'un produit contrôlé sur un lieu de travail à moins qu'il ne soit pourvu d'une étiquette - j'espère que, si c'est un contenant liquide, cela va être indiqué sur le contenant, non pas sur le liquide - et d'une fiche signaléti- que conformes aux dispositions de la présente loi et des règlements et que le travailleur n'ait reçu la formation et l'information requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié."

Il y a un travail de manutention dans l'industrie qui va faire que le produit va être entreposé quelque part, il va être transporté dans une autre pièce ou à côté pour l'utilisation subséquente. C'est ce qu'on appelle la manutention. L'utilisation, c'est une fois que j'ai manutentionné le récipient dans lequel se trouve le produit, je l'ouvre et je prends pour utilité la fabrication du produit que je veux produire avec le mélange de l'un des deux, trois ou quatre produits que j'aurai qu'il y a à ce moment utilisation. Mais la manutention, vous allez me permettre de penser que c'est autre chose qu'une simple utilisation et l'utilisation comprend nécessairement la partie de la manutention de l'ensemble du produit, mais la manutention elle-même sans utilisation peut exister aussi parce que je peux transporter d'une pièce à l'autre l'autre récipient sans nécessairement utiliser le contenu du récipient. C'est cela que j'essaie de démontrer au ministre depuis tout à l'heure. C'est de cela que je parle. Je ne parle pas du contenu, je parie du contenant qui, en le transportant, peut être dangereux. Vous ne me ferez pas accroire que ce n'est pas possible.

M. Séguin: Est-ce que je peux me permettre un petit complément d'information?

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Séguin: Le mot "produit" que nous retrouvons à notre projet comprend le contenant, il faut s'entendre, par définition dans le règlement. Je pense que la distinction à faire entre le produit à l'état pur, un liquide par exemple, et le contenant... Il ne font qu'un au sens du projet de loi, étant bien entendu...

M. Jolivet: Lisez-moi donc cela!

M. Séguin: Étant bien entendu, Mme la Présidente, qu'on peut difficilement imaginer une livraison d'une certaine quantité de liquide, sans qu'il soit contenu dans un contenant.

M. Jolivet: Donnez-moi donc le règlement.

M. Séguin: L'état physique du produit à l'état pur nécessitant d'être contenu dans un contenant doit apparaître et le sens du produit contrôlé, s'il est dans une forme physique qui nécessite un contenant, parce que ce ne sont pas tous les produits contrôlés qui nécessitent un contenant... Vous avez des produits qui, à l'état pur, sont manipulables. Cela peut être certaines barres de métal, de l'amiante, des produits livrés en vrac comme la poudre, etc., ou qui sont

livrés à l'état solide sans emballage. Cela peut arriver. Des lingots de certains métaux, etc. Évidemment, les gaz qui sont livrés, on peut l'imaginer, sont habituellement dans des contenants. C'est difficile d'imaginer une situation physique où un gaz peut être livré sans contenant. Alors, la notion de produit contrôlé... D'ailleurs, dans les règlements on dit que l'étiquette doit être apposée sur le produit ou le contenant, si le produit est contenu dans un contenant. Alors, quand on parle du mot "utilisation", c'est dans son sens très large, parce qu'on pourrait, comme je l'ai dit tantôt, faire de l'utilisation sans manutention, mais on ne peut pas faire de manutention si on ne peut pas utiliser un produit.

Si mon collègue avait raison, je vois mal comment l'interdiction d'utiliser un produit pourrait permettre sa manutention.

M. Jolivet: Je m'excuse, Mme la Présidente. M.Séguin: Je pense qu'on tourne en rond.

M. Jolivet: Non, on ne tourne pas en rond. Le ministre dit: On peut entreposer, mais entreposer, cela veut dire quelque chose en français, si j'entrepose, je le transporte. Si je le transporte, je le manipule et si je le manipule, j'en fais la manutention dans le terme qu'on emploie, mais l'utilisation du produit, c'est autre chose, c'est l'utiliser pour fabriquer autre chose. Puis, quand le ministre me dit que dans le règlement il y a une place où le contenant s'appelle produit, dites-moi donc où parce que je ne l'ai pas encore trouvé. Ou vous me dites que le contenant équivaut au produit. La seule chose que je vois, c'est contenant: Tout emballage ou récipient, notamment, un sac, un baril, une bouteille, une boîte, un tonneau, une canette, un cylindre ou un réservoir de stockage, ce n'est vraiment pas un produit. Vous ne me ferez jamais croire cela. Le produit n'est pas l'aluminium qui entoure l'oxygène qu'il y a dedans.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Séguin: Mme la Présidente, le but de la loi, c'est de faire en sorte qu'apparaisse une étiquette sur un produit. Là, on est dans un débat profond, déchirant, à savoir si le mot "utilisation" est suffisant. Quel est l'objectif de la loi? On dit ici que, lorsqu'un employeur... La Présidente (Mme Bélanger): Étiqueter les produits.

M. Séguin: On dit ici l'obligation: Un employeur ne peut permettre l'utilisation s'il n'y a pas d'étiquette. Je dis à mon collègue: L'étiquette doit être apposée soit sur le produit, soit sur le contenant. C'est dans le règlement. Alors, je l'invite à lire le règlement et la loi partout où on dit "produit" ou "contenant" et à l'article 2 du règlement, on dit que le contenant, c'est tout emballage ou récipient, notamment, un sac, un baril, une bouteille, un tonneau, une canette, un cylindre ou un réservoir de stockage. L'étiquette: l'article 1, un écrit apposé sur un produit ou son contenant ou joint à ceux-ci par un mode quelconque. Il peut notamment s'agir d'un dispositif, d'une étiquette mobile, d'une estampille, d'un collant, d'un sceau ou d'un papier d'emballage. Je voudrais bien comprendre le but de mon collègue de suggérer une modification au mot "utilisation". C'est quoi, l'idée?

M. Jolivet: C'est parce que je veux la santé et la sécurité des travailleurs dans l'usine.

La Présidente (Mme Bélanger): Un instant, s'il vous plaît!

M. Jolivet: il me pose la question, je réponds.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre avait suggéré de suspendre cet article. Est-ce qu'on le suspend ou si on continue à le débattre?

M. Jolivet: Non, non.

M. Séguin: Là, il ne veut plus.

M. Jolivet: Ce n'est pas cela, la suspension se fera. On arrêtera le travail et on arrêtera à 16 heures; ce n'est pas mon problème. Actuellement, vous me posez une question, je vais vous répondre.

M. Séguin: Quel est le but de votre modification?

M. Jolivet: Dans une usine quelconque, vous dites ceci: La personne, tant et aussi longtemps qu'elle n'a pas une étiquette sur le produit qui est là, peut l'entreposer, sauf que, dans un délai dit de diligence, la personne qui fera la vérification par un moyen quelconque lui dira: Tu as tant de jours pour faire ceci. Pendant ce temps-là, je suis un travailleur, je ne connais aucunement le produit. Le patron me dit: Tu vas le transporter, l'amener de telle place à telle place en attendant. Je refuse de le manutentionner. Quel moyen j'ai comme individu, si je m'aperçois que c'est un produit dangereux puis que je ne veux pas le manutentionner pour le transporter d'une place à l'autre, parce que c'est différent "manutentionner" et "utiliser", soyez sûr de cela...

M. Séguin: Oui.

M. Jolivet: Non, laissez-moi finir! Si je dis: Tu vas le manutentionner et je décide de ne pas le manutentionner, qu'est-ce qui m'arrive?

Qu'est-ce qui m'arrive, comme individu? Est-ce que j'ai le droit de refuser? Si j'ai le droit de refuser, en vertu de quelle loi ai-je le droit de refuser si je n'ai même pas l'assurance que c'est ce que je pense qu'il y a là-dedans? Je reçois une boîte et je n'ai pas le droit de l'ouvrir et il faut que je transporte cette boîte, avec le danger que ça comporte. Je fais quoi? En vertu de quelle loi ai-je le droit de ne pas la transporter? Parce qu'on dit là-dedans, qu'il a le droit de l'entreposer. S'il a le droit de l'entreposer, il a le droit de le manipuler.

M. Séguin: Le droit de refus de l'empioyé existe.

M. Jolivet: Où ça?

M. Séguin: À l'article 12... M. Jolivet: Oui? On va y aller. M. Séguin: ...du projet de loi. M. Jolivet: Qu'est-ce qu'on dit?

M. Séguin: C'est-à-dire l'article 12 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail.

M. Jolivet: Ah, excusez-moi! Je ne le trouvais pas non plus.

M. Séguin: C'est le retrait préventif. "Un travailleur a le droit de refuser d'exécuter un travail s'il a des motifs raisonnables de croire que l'exécution de ce travail l'expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou peut avoir l'effet d'exposer une autre personne à un semblable danger." L'article 12.

M. Jolivet: Oui et vous avez vu... Si le gars dit: Écoute, ce n'est pas dangereux que je transporte tel produit. Tu vas le transporter et il y a un accident qui se produit.

M. Séguin: Non, mais écoutez... M. Jolivet: Non, je vous le dis.

M. Séguin: Si je comprends bien mon collègue, un inspecteur constate qu'un certain produit dans une usine n'est pas conforme parce qu'il n'a pas d'étiquette et on interdirait à l'employeur de le transporter dans un autre lieu pour l'entreposer puisque, d'après lui, ce serait inacceptable qu'on puisse le manutentionner pour le transporter ailleurs. Comment l'employeur va-t-il pouvoir l'entreposer s'il ne peut pas l'enlever du lieu de travail pour le mettre ailleurs? C'est quoi, l'idée? Qu'est-ce qu'on veut faire? Voyez-vous la situation concrète d'un inspecteur qui arrive dans une entreprise pétrochimique à Montréal et qui dit: Tel produit n'a pas d'éti- quette. Je vous donne quinze jours pour apposer vos étiquettes.

Comme les barils ou les contenants sont dans un lieu d'une chaîne de montage quelconque, l'employeur a le droit de les entreposer. Il peut, à la rigueur, décider de les laisser là ou de les amener ailleurs, en attendant. Est-ce qu'on va lui interdire la possibilité de les déplacer alors que le projet de loi a pour but, justement, de les mettre hors circuit des employés, des travailleurs, tant qu'ils ne sont pas conformes? Comment vont-ils les sortir, les travailleurs, si on leur dit qu'ils ne le peuvent pas?

M. Jolivet: Ce n'est pas ça que vous m'avez dit tout à l'heure. Tout à l'heure, vous m'avez dit que le but du projet de loi, c'est d'étiqueter.

M. Séguin: Bien, vous le savez autant que mol, le but.

M. Jolivet: Mais étiqueter, cela ne veut pas dire transporter.

M. Séguin: Non, mais le but ici...

M. Jolivet: Non, mais, écoutez, vous dites la même chose en même temps tout le temps.

M. Séguin: Bien oui, c'est ce que je vous dis. On veut empêcher l'employeur d'utiliser un produit qui n'est pas conforme.

M. Jolivet: Mais de l'entreposer en attendant.

M. Séguin: On lui dit: Tu peux l'entreposer en attendant. Cela veut dire qu'il n'est pas obligé de le sortir de l'usine. C'est ça que ça veut dire. Si on se parle, c'est ce que cela veut dire. L'inspecteur lui donne un délai raisonnable pour se conformer et il dit: En attendant, tu peux le laisser là ou l'entreposer. D'autres lois pourraient faire, comme je vous l'ai mentionné à l'article 12, que si l'employé estime que c'est dangereux pour lui et qu'il refuse, il demande, en vertu de l'article 12, son retrait préventif, parce que, cela, c'est dangereux; ça ne peut pas rester là.

L'employeur va faire quoi? Ou bien il se conforme à ça ou bien il prend les produits et il les enlève.

M. Jolivet: II demande à quelqu'un, à un individu: On sait que c'est dangereux, mais transporte-le quand même.

M. Séguin: L'étiquetage du produit n'a rien à faire avec la présence dangereuse ou non pour la santé et la sécurité des travailleurs. C'est couvert par d'autres dispositions. Je voudrais bien qu'on se comprenne, parce que si, à chaque fois, c'est le cas qu'on évoque, dans chaque article, on va se demander pourquoi la préven-

tion n'est pas assurée en vertu de notre projet de loi. Il n'y a rien dans notre projet de loi qui veut compléter la loi actuelle de la CSST sur les questions de présence de produits dangereux et de ce qu'on peut faire, les droits. C'est déjà couvert. On peut en discourir si on veut les bonifier ou non, mais ce n'est pas notre projet de loi.

Là, on regarde du matériel qui doit porter une étiquette et on dit: Avec diligence, l'employeur doit les entreposer. Mais il peut les entreposer là où ils sont. Il n'est pas obligé de les déplacer. Je pense que le mot "utilisation" est assez large pour comprendre tout ce qu'on peut faire avec des produits. Ce n'est pas "utilisation" dans la production. On se rappelle, par exemple, des barils de solvant pour nettoyer le plancher. Cela peut ne pas être un produit qui entre dans la fabrication, mais qui est juste accessoire à l'usine. Cela peut être des savons corrosifs pour se laver les mains.

M. Jolivet: Mais l'utilisation. En tout cas, prenez le mot "utilisation", vous allez savoir ce que ça veut dire.

M. Séguin: Ce que j'offre à Mme la Présidente, c'est de suspendre cet article et on continuera. On pourra revenir à la fin de notre projet de loi avec la proposition.

La Présidente (Mme Bélanger): D'accord. La commission de l'économie et du travail suspend ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 16 h 27)

Le Président (M. Maltais): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux qui avaient été suspendus à 13 heures. On reprend, à l'article 2, l'article 62.1. La parole était au ministre.

Une voix: II était question de suspension.

Le Président (M. Maltais): Oui. Je pense que vous aviez à ce moment, d'un commun accord, décidé de suspendre. Est-ce que c'est toujours le cas?

M. Séguin: Oui, M. le Président, quitte à y revenir un peu plus tard.

M. Jolivet: Juste une petite chose parce qu'entre-temps, M. le Président, j'ai reçu le texte de la CSN et le ministre l'a certainement reçu aussi. Le ministre a dit une chose ce matin, il a parlé d'uniformisation quant à la loi canadienne. Je veux lui rappeler ce pourquoi je faisais des interventions ce matin. Les rensei- gnements que j'avais eus par téléphone et que j'avais pris sur un bout de papier étaient sommaires, mais on dit que la loi ontarienne couvre les agents physiques dangereux dont je faisais mention - je parlais des lasers; deuxièmement, que les employeurs, dans la loi ontarienne, ont l'obligation de tenir des inventaires des agents physiques, biologiques ou chimiques qui sont dangereux et doivent déclarer ces inventaires, ce dont je faisais mention. On dit aussi que la population peut avoir accès à l'information sur les matières dangereuses par l'intermédiaire d'un médecin responsable de la santé publique, qui pourrait être l'équivalent, comme on le dit, d'un chef de département de santé communautaire au Québec. On dit que le chef du service des incendies de la localité où se trouve l'établissement doit être également informé. De plus, il y a une procédure de prévue en ce qui concerne la dilligence de l'employeur à obtenir les informations requises du fournisseur.

Tout cela simplement - je n'argumenterai pas plus longtemps - pour dire pourquoi je faisais allusion ce matin à ces discussions-là. C'était ce que j'avais lu, ce que d'autres confirment, parce que je donne la confirmation de ce que nous avons fait comme recherche dans la loi ontarienne. Je sais très bien que le ministre va me dire que la loi n'est pas adoptée, qu'elle n'est pas terminée, qu'elle suit son cours comme ici, qu'elle est déposée, etc., mais il reste quand même qu'il y a des choses qui sont uniformes quant aux principes de base. Il peut y avoir des modalités sur lesquelles le Québec peut prendre position comme l'Ontario l'a fait et comme, j'ajouterai, la Nouvelle-Écosse sur certaines autres parties dont j'aurai l'occasion de faire mention plus tard dans nos discussions. C'est simplement cela et j'arrête là mon argumentation. Je pourrais argumenter longuement, mais je ne suis pas sûr que le ministre accepte mes positions. Alors, pour le moment, c'est ce que je tenais à dire.

Le Président (M. Maltais): Alors, on suspend l'article 62.1 et son amendement. Avant d'entreprendre l'article 62.2, pour l'information des membres de la commission, après entente entre les deux partis pour fins d'accommodement, question d'urgence, la commission ajournera ses travaux à 17 heures jusqu'à demain, 10 heures.

M. Jolivet: Demain, après la période des questions.

Le Président (M. Maltais): Après la période des questions, je m'excuse, sine die.

M. Jolivet: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Maltais): Alors, ce soir, les travaux se termineront à 17 heures. L'article 62.2, M. le ministre.

M. Séguin: M. le Président, l'article 62.2 prévoit simplement cette obligation dont on parle depuis ce matin concernant l'employeur qui doit s'assurer d'apposer une étiquette sur le produit qu'il fabrique et élaborer une fiche signalétique conforme aux lois et règlements.

Le Président (M. Maltais): Cela va, M. le député de Laviolette?

M. Jolivet: Juste un instant, que je cherche.

Le Président (M. Maltais): Oui, M. le député.

M. Jolivet: Non, rien de spécial. Adopté.

Le Président (M. Maltais): Alors, on adopte cet article. L'article 62.2 est adopté. L'article 62.3. M. le ministre.

M. Séguin: Ici, on indique ce que doit contenir la fiche signalétique dont on vient de parler à l'article précédent, M. le Président. C'est, par exemple, la dénomination chimique du produit et, selon la substance du produit, on indique les concentrations, en fait, quelques particularités. C'est énuméré ici à l'article 62.3.

Le Président (M. Maltais): Merci, M. le ministre. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Voyez, M. le Président, pour dénoter qu'on ne s'entête jamais sur des choses correctes, on adopte l'article 62.3.

Le Président (M. Maltais): L'article 62.3 est adopté. Nous passons à l'article 62.4.

M. Séguin: Ici, M. le Président, on indique que l'étiquette et l'affiche d'un produit doivent être en langue française. Le texte français peut toutefois être assorti d'une ou de plusieurs traductions. Ceci afin de s'assurer que, contrairement à la législation fédérale qui dit que c'est le bilinguisme et que l'étiquette ou l'affiche doit être faite dans les deux langues officielles, ici on a pensé qu'il serait plus juste et équitable, compte tenu de notre législation au Québec, de nous assurer que le français soit prioritaire de sorte qu'on indique qu'à tout le moins elle doit être en français, mais que, évidemment, l'employeur peut décider de faire paraître une traduction, par exemple, en langue anglaise. Comme les mêmes employeurs devront se conformer à la législation fédérale qui prescrit les deux langues officielles, il y a tout lieu de croire qu'en pratique il serait assez peu vraisemblable de voir une entreprise n'afficher qu'en français au Québec puisqu'au même moment elle doit être conforme à la législation fédérale. Mais pour ne pas brimer la possibilité pour un employeur et ne pas brimer les droits de certains employés qui comprennent mal le français et comme ce sont des questions de sécurité et qu'on doit quand même être davantage précautionneux en termes de prévention plutôt qu'en termes linguistiques, on permet que cela puisse se faire dans une autre langue si l'employeur croit que l'autre langue peut assurer une meilleure compréhension de l'information dans l'entreprise.

Le Président (M. Maltais): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui. Les deux organismes qui nous ont fait parvenir de la documentation ont une position qui, dans le cas de la FTQ, dit: Tout au long de sa participation aux travaux d'élaboration du SIMDUT, tant au niveau de la CSST qu'au niveau pancanadien, elle avait proposé que les deux langues officielles soient inscrites sur la fiche signalétique. Donc, on ne prévoit pas cette possibilité, dans le texte actuel, de voir les langues française et anglaise inscrites, compte tenu justement des difficultés qui pourraient survenir dans le milieu de travail. La CSN parle, elle, toujours du texte français, mais elle aussi parle d'une traduction qui devrait être prescrite en vertu de la langue majoritairement parlée par la plupart des travailleurs et travailleuses de rétablissement. Je ne sais pas si le ministre peut nous indiquer à ce sujet-là de quelle façon on pourrait s'assurer... Parce qu'actuellement c'est laissé entre les mains fort probablement de l'inspecteur qui déterminera avec l'employeur quelle langue sera inscrite sur l'étiquette, en plus du français, parce que le français est obligatoire, et aussi sur la fiche signalétique.

Je veux savoir si le ministre serait d'accord pour indiquer que c'est par prescription que devrait être inscrite une traduction qui serait celle de la majorité des travailleurs et travailleuses de rétablissement pour éviter les problèmes de rapidité dans un contexte d'accident ou d'incident majeurs.

M. Séguin: C'est parce qu'on a des suggestions un peu ambivalentes. Certains groupes nous demandent plutôt les deux langues officielles, comme la FTQ dans son document. La CSN semble d'accord avec le principe de primauté du français, avec possibilité de traduction, mais traduction qui refléterait la majorité concernée. En pratique, comme je vous l'ai indiqué, on croyait que l'obligation du fédéral d'avoir les deux langues officielles était déjà une garantie qu'au moins l'anglais et le français apparaîtraient. Compte tenu du fait que, au Québec, on ne semble pas croire que dans des usines il y a des majorités d'employés qui ne parlent ni français ni anglais - ce n'est pas impossible; ce n'est peut-être pas très fréquent et j'avoue qu'on ne connaît pas de cas, à première vue, où ça pourrait se présenter - on croyait que, déjà, on faisait une légère entorse au principe des langues officielles qui était reconnu au fédéral

et qui était d'ailleurs recommandé par la FTQ.

Dans son dernier document, la FTQ nous répète qu'elle préférerait revenir aux deux langues officielles pour être sûre que, au moins, l'anglais et le français soient uniformes et que, pour une question de sécurité... C'est un peu comme dans les garages d'automobiles où les gens sont plus habitués à comprendre le nom des pièces d'automobile en anglais qu'en français. On s'est demandé comment pondérer cela. On veut reconnaître que la Charte de la langue française doit trouver l'application dans son principe en disant que c'est le texte français. Je pense que c'est clair là-dessus. Quant à la possibilité d'une traduction, la traduction peut être en anglais sans correspondre à un groupe d'employés qui pourraient avoir une troisième langue. Particulièrement au Québec, je pense que du seul fait que ça doive apparaître en français... S'il y a d'autres groupes ethniques qui ne comprennent ni le français ni l'anglais, est-ce qu'on doit imposer la traduction dans cette langue? Je ne sais pas si on peut aller jusque-là.

Le Président (M. Maltais): Si vous me permettez, je rencontre moi-même ce problème dans mon comté avec les autochtones. Vous savez que, pour la majorité d'entre eux... Il y a des Naskapis, des Montagnais et des Attikameks chez nous. La deuxième langue des Montagnais, c'est le français; celle des Naskapis est l'anglais et, pour les Attikameks, c'est mêlé. Ces gens travaillent en particulier sur les lignes de chemin de fer des villes nordiques. Il y en a qui ne parlent que leur langue maternelle. Je me posais la question à savoir si, dans des cas vraiment exceptionnels - ça doit également exister en Ungava, ça doit exister en Abitibi et peut-être même dans le nord de votre comté, M. le député de Laviolette - dans la réglementation que vous allez soumettre avec le projet de loi, on ne devrait pas indiquer à l'employeur, d'une certaine façon, qu'il doit s'assurer que les travailleurs pourront comprendre les étiquettes sur les produits. il y a un autre point que je voulais soulever comme question d'information, M. le ministre. Les produits d'importation qui sont, en général, dans la langue du pays où ils sont fabriqués sont étiquetés en anglais. Est-ce que dans la législation fédérale on a indiqué que ces produits qui vont entrer au Québec et au Canada devront être étiquetés en anglais et en français, ou dans la langue du pays de provenance et uniquement en anglais?

M. Séguin: Les produits qui vont circuler au Québec doivent avoir au moins le français et ils ne sont pas obligatoirement accompagnés de la traduction anglaise. Comme la plupart des fournisseurs et des employeurs vont vouloir avoir un système qui leur permette de livrer ces produits en Ontario et dans d'autres provinces, tant qu'à faire un étiquetage, ils vont le faire dans les deux langues officielles. On n'a pas voulu le limiter au seul usage du français. On aurait peut-être causé un problème en disant que seul le français est permis en interdisant l'affichage d'une traduction anglaise. On n'est pas dans l'affichage commercial, c'est simplement un étiquetage de sécurité, et je pense que cela serait allé au-delà de ce que la Charte de la langue française prévoyait. Je pense qu'on est d'accord là-dessus. On aurait soulevé un dilemme énorme pour les entreprises, en exigeant un double étiquetage; si le produit s'en va au Québec, on enlève la traduction, et s'il va en Ontario, c'est dans les deux langues officielles.

Les échos qu'on a de l'industrie et de l'ensemble des employeurs, c'est qu'ils ne courront pas de risque, ils vont faire les étiquettes dans les deux langues pour être sûrs que le produit va circuler une fois qu'il sera sur le marché. La plupart des employeurs concernés ont des entreprises en Ontario et au Québec, alors j'ai bien l'impression que... Cependant, on a estimé qu'on pourrait avoir une entreprise au Québec qui ne fait affaire qu'au Québec, qui est presque entièrement en langue française et dont certains employés parlent une autre langue. On rejoint le principe même suggéré par la CSN et la FTQ qui acceptaient une autre langue par mesure de sécurité. Ce n'est plus le temps, quand vous avez une explosion, de savoir si vous avez bien compris le mot français ou anglais. Donc, on met les deux langues.

M. Jolivet: On a eu ça avec le mot "manutention".

M. Séguin: Utilisation ou manutention. On le met dans les deux langues les plus connues, le français et l'anglais. Y a-t-il le danger qu'une tierce langue soit... On ne veut pas non plus en faire une prescription dans la loi pour obliger les entreprises à engager des traducteurs du seul fait qu'elles n'auraient qu'un seul employé qui parlerait une autre langue. Que déjà ça apparaisse dans les deux langues, ça nous semble très correct, très suffisant, et l'obligation est là. On a pensé que c'était encore plus respectueux de la langue française de l'écrire comme ça, en disant que ça doit être dans la version française, et de laisser le libre choix à une traduction - ça, c'est l'employeur qui l'ajoutera - que de permettre les deux langues officielles pour éviter que le français ne passe en deuxième par rapport à la façon d'étiqueter, etc.

Je pense qu'on indique vraiment, dans notre projet de loi, une espèce de primauté à la langue française et que le reste est une traduction. Pour éviter des conflits d'interprétation sur la rédaction du texte français, en disant que c'est le texte français qui prime et que les autres sont une traduction, on indique alors que la traduction est donnée à titre de service pour ceux qui parlent anglais ou une autre langue.

M. Jolivet: La tendance dont vous faites mention, M. le ministre, est justement de dire qu'on ne courra pas de risque, qu'on ne fera pas de fiches signalétiques ni d'étiquettes qui ne soient françaises et anglaises. Je pense que c'est l'impression qu'on peut avoir. Toutefois, si on l'interprète de façon restrictive comme des fois les gens sont portés à le faire, comme mon travail m'invite à le faire actuellement, on dit: "Le texte français peut être assorti d'une ou plusieurs traductions." La tendance qui pourrait exister, c'est que les gens disent: II y a déjà une traduction, elle est anglaise, ne m'achale plus, je n'en mets plus d'autres. Et c'est là qu'arrive la question que pose mon collègue de Saguenay et que je pose: Si on est à Montréal, par exemple, que des gens sont espagnols, chinois ou d'une autre langue et que, pour des raisons de sécurité, ils ont besoin d'une interprétation rapide, ils ne voient pas leur langue. C'est là qu'on devrait obliger et c'est là que je dis par prescription. Vous avez souvent dans le secteur du textile des groupes qui sont italiens, qui travaillent là depuis fort longtemps. On les voit, on les connaît. Vous avez d'autres personnes dans d'autres secteurs. Y aurait-il moyen, si ce n'est pas dans la loi, qu'au moins dans le règlement on dise: Après avoir consulté le monde là-bas, on s'aperçoit qu'une majorité, pas la majorité, qu'une majorité de travailleurs sont d'une autre langue et que pour leur sécurité - c'est ce que vous recherchez - il serait bon que la deuxième traduction - on ne considérerait pas l'anglais comme une traduction - soit dans la langue de ceux qui la parlent majoritairement?

Le Président (M. Maltais): N'y aurait-il pas une solution, M. le ministre - si vous me le permettez, M. le député de Laviolette - soit de permettre aux entreprises de réétiqueter pour la majorité des travailleurs en faisant imprimer des étiquettes et en les mettant là? On a vu ça dans certaines usines. J'ai vu ça, par exemple, à Québec, à l'Ontario Paper pour les autochtones; ils mettent une étiquette en montagnais sur des barils. Cela veut dire: Ne touche pas, n'allume pas de cigarette, ne fais rien là, ça va sauter. Mais il faut que le gars comprenne. Est-ce que ça peut se faire par réglementation? On n'est pas obligés de l'écrire dans le projet de loi?

M. Séguin: Remarquez qu'un employeur pourrait décider de ne pas rendre disponible une traduction et se limiter...

Le Président (M. Maltais): À la loi. Parce que c'est la sécurité...

M. Séguin: ...à l'étiquetage français. À moins qu'on ne revienne à l'autre version qui est de dire carrément que c'est dans les deux langues officielles, l'anglais et le français, et que c'est une obligation, comme c'est au gouvernement fédéral et comme certaines parties nous le recommandent. À ce moment-ci, à l'article 62.4, seul le français est obligatoire et l'employeur peut décider de rendre disponible une ou des versions dans d'autres langues. Mais il pourrait arriver que l'employeur décide de ne pas le faire, s'il est au Québec et que ça ne lui cause pas de problème. Mais on se dit qu'on est quand même au Québec, avec une population à 85 % francophone. Si un comité de sécurité ou un représentant syndical qui a reçu l'étiquette fait une représentation au nom des employés pour qu'ils aient une version, je ne vois pas pourquoi l'employeur refuserait. Ce n'est pas très onéreux. (16 h 45)

M. Jolivet: Je comprends très bien le français. Je pense que je n'ai pas d'objection que ce soit comme tel, c'est clair. La seule chose, c'est que, si on dit par prescription, on met dans le règlement quelque chose qui nous permet de dire: Après avoir vérifié la langue parlée de la majorité, on indique que ce sera l'anglais. Tant mieux si déjà... On parle de sécurité; d'ailleurs, la loi 101 faisait mention de ces problèmes parce qu'il faut tenir compte de la santé et de la sécurité des gens. À ce moment-là, qu'on indique que la langue prescrite dans cette usine, c'est l'anglais comme langue seconde qui serait la traduction. Dans d'autres cas, ce pourrait être une autre langue. C'est pour cela que je dis par prescription. On dit: Oui, d'accord, c'est le français en priorité, assorti d'une ou plusieurs traductions, lesquelles devraient être prescrites à la suite d'une rencontre dans l'usine.

M. Séguin: Je vais apporter un éclairage à mon collègue. L'article 51, au paragraphe 9°, de la Loi sur la santé et la sécurité du travail dit que l'employeur doit "informer adéquatement le travailleur sur les risques reliés à son travail et lui assurer la formation, l'entraînement et la supervision appropriés afin de faire en sorte que le travailleur ait l'habileté et les connaissances requises pour accomplir de façon sécuritaire le travail qui lui est confié". Dans ce sens-là, si un employé se sent dans une situation périlleuse parce qu'il ne comprend pas, il peut alléguer son droit et demander à être protégé de ce côté.

Le Président (M. Maltais): Vous avez raison, M. le ministre.

M. Séguin: On veut éviter que, si dans une entreprise dix personnes parlent espagnol, dix autres portugais, dix autres chinois, chacun demande une traduction, alors que ces gens comprennent peut-être communément l'anglais. Il y a plusieurs populations immigrantes au Québec qui sont peut-être moins familières avec le français, mais davantage avec l'anglais, ou l'inverse. C'est peut-être à l'employeur, qui a la responsabilité d'informer ses employés en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail, de mettre à leur disposition une information qu'ils peuvent comprendre; on devrait peut-être

se fier au bon sens des parties. Remarquez que, si on voyait une aberration se développer, on serait les premiers à réagir; mais on a un peu de difficulté à voir des situations. On dit à l'employeur: Vous pouvez faire des traductions pour informer vos gens; si vous avez dix traductions à donner, parce que vous avez dix langues courantes et que les gens ne comprennent ni le français ni l'anglais, vous les ferez. Sans cela, il ne pourra pas parler, de toute façon, de quoi que ce soit dans l'entreprise.

M. Jolivet: Je comprends ce que le ministre dit. La seule chose, c'est que, quand on parlait de langue majoritairement parlée dans l'usine, on comprenait que, si c'était le français, peut-être que l'anglais serait l'autre langue majoritairement parlée. D'un autre côté, des fois, ce peut être une autre langue, soit l'espagnol, le portugais ou l'italien, de telle sorte que les gens soient assurés qu'il y ait quelqu'un quelque part, comme l'inspecteur, qui pourrait dire: Écoutez, je prescris que ce doit être cette langue-là, pour qu'on s'assure que les gens aient fa meilleure information possible. C'est dans ce sens-là. Ce n'est peut-être pas dans la loi, mais peut-être dans le règlement, qu'il faut inscrire qu'on donne le rôle à l'inspecteur, après consultation, de prescrire une autre langue comme traduction en disant: Écoutez, essayez de vous organiser pour donner l'information aussi dans cette langue.

M. Séguin: On m'informe, comme je le mentionnais tantôt, que c'est déjà couvert par l'article 51.9° de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Les inspecteurs ont déjà comme mission de voir... On semble dire que c'est une protection suffisante pour le moment.

M. Jolivet: D'accord.

Le Président (M. Maltais): Adopté, mais avant, M. le député de La Peltrie.

M. Cannon: Peut-être un point d'information, M. le Président. Avant de me lancer activement en politique, j'étais propriétaire d'une entreprise et notre matière première nous parvenait à la fois des États-Unis et de la Suède. Inutile de vous dire que, lorsque nous recevions notre matière première de la Suède, ce n'était pas traduit. Nous ne passions pas par un grossiste, pour une question d'économie. Je me rappelle qu'à une occasion, un de nos fournisseurs des États-Unis, en ce qui a trait à un produit chimique dans un contenant plastifié - cela s'appelle du "flox", une espèce de produit utilisé avant la phase de soudure - nous avait envoyé le baril avec une fiche technique décrivant le contenant complètement en anglais, sans aucune traduction. Moi, je voudrais simplement être sûr, cet après-midi, dans l'éventualité où un manufacturier ou un producteur achète un produit de l'étranger sans passer par un grossiste québécois, qui, lui, va en traduire l'étiquette, qu'il y ait un mécanisme de prévu quelque part pour que celui qui achète et que les travailleurs sur le plancher de l'usine sachent très rapidement quel en est le contenu, advenant un cas de brûlure avec de l'acide ou quelque chose comme cela.

M. Séguin: Effectivement, la loi assujettit les lieux de travail au Québec, peu importent la provenance et la fabrication du produit, de sorte que, dès qu'on a un lieu de travail, cela s'applique, et les inspecteurs de la CSST vont pouvoir vérifier. On verra un peu plus loin que les représentants des travailleurs dans l'usine, dans le lieu de travail, ont certaines prérogatives pour s'assurer d'avoir l'information, le fiche au moins en français. Déjà, en partant, on s'assure de cela. L'employeur qui ne voudrait pas donner une version anglaise pourrait le faire, comme je l'ai indiqué tantôt. S'il y a des demandes à l'intérieur du groupe des travailleurs, il va quand même devoir respecter son obligation d'informer raisonnablement les travailleurs dans leur langue sur les conditions. Alors, en pratique, il va être obligé de le faire et l'inspecteur de la CSST pourrait sévir s'il ne le faisait pas. Par exemple, si des traductions étaient en français et dans une autre langue comme le suédois et que 40 % des ouvriers ne parlant qu'anglais se sentaient lésés de ne rien comprendre du français ou du suédois, ceux-ci pourraient alléguer l'article 59.1°; à ce moment-là, on pourrait contraindre l'employeur à donner, par la loi actuelle, l'information convenablement.

Le Président (M. Maltais): Ça va? L'article 62.4 étant adopté, j'appelle l'article 62.5. M. le ministre.

M. Séguin: Oui. Ici, on ajoute: "En outre des obligations qui lui sont faites en vertu de l'article 51...", et je viens de donner une obligation. L'article 51 est dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail et il prescrit un ensemble d'obligations et d'engagements qui incombent à l'employeur, dont celle que je viens de donner à l'article 51.9° d'informer convenablement les gens. Ce matin, on a vu à l'article 51.12 une autre obligation.

Ici, on dit: En plus de cela, "un employeur doit appliquer un programme de formation et d'information concernant les produits contrôlés dont le contenu minimum est déterminé par règlement. "Le programme de formation " et d'information est établi par le comité de santé et de sécurité. La procédure prévue à l'article 79 - toujours de la Loi sur la santé et la sécurité du travail - s'applique en cas de désaccord au sein du comité. "En l'absence de comité de santé et de sécurité, le programme de formation et d'information est établi par l'employeur, en consultation

avec toute personne désignée par entente entre celui-ci et les travailleurs - à titre d'exemple, des représentants du groupe de travailleurs. "Ce programme doit être mis à jour annuellement ou aussitôt que les circonstances le requièrent." Si c'est avant un an. "Il est intégré au programme de prévention lorsqu'un tel programme doit être mis en application dans l'établissement."

Je ne sais pas s'il y a des interventions?

M. Jolivet: Oui.

Le Président (M. Maltais): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Je m'excuse auprès du secrétaire qui nous a demandé de donner des amendements par écrit, mais on a reçu cela cet après-midi. Alors, on s'organisera pour que demain on puisse avoir les copies convenables. Je dois vous dire qu'on a un problème qui se situe à l'alinéa 3 de l'article 62.5. On dit: "En l'absence de comité de santé et de sécurité, le programme de formation et d'information est établi par l'employeur, en consultation avec toute personne désignée par entente entre celui-ci et les travailleurs."

Il y a une logique qui devrait normalement nous appeler à proposer un amendement: on devrait regarder l'association accréditée dans chacun des lieux de travail. Quand on dit "les travailleurs", cela laisse trop la porte ouverte à une vérification que l'employeur pourrait faire par-dessus la tête de l'organisme visé par le Code du travail. Donc, il me semble qu'il faut s'assurer qu'en l'absence d'un comité formé en vertu de la loi, comité qu'on appelle institutionnel pour l'ensemble de la santé et de la sécurité du travail, la consultation se fasse par l'association accréditée et, s'il n'y avait pas d'association accréditée, parce que cela pourrait exister, par toute personne désignée par les travailleurs. Donc, quand on dit "en consultation avec toute personne désignée par entente avec celle-ci et les travailleurs", c'est une chose, mais il y a aussi l'association accréditée. Les deux organismes syndicaux indiquent que des milliers d'établissements au Québec dont l'effectif est syndiqué ne possèdent malheureusement pas de comité institutionnel prévu par la Loi sur la santé et la sécurité du travail et, pourtant, ils ont un interlocuteur structuré, apte à discuter de programmes de formation et d'information.

Donc, je pense que la proposition que nous ferions serait d'ajouter à l'alinéa 3, après les mots "établi par l'employeur", les mots "en consultation avec l'association accréditée et, à défaut également de celle-ci, en consultation avec le représentant des travailleurs au sein de l'établissement." ou quelque chose de semblable. C'est la proposition que nous ferions, à savoir de montrer une sorte de hiérarchie qu'il est normal, convenable de présenter et qui indiquerait de consulter d'abord l'association accréditée et, s'il n'y en a pas, le représentant des travailleurs, mais au sein de l'établissement, parce que rien n'indique que ce soient les travailleurs qui sont au sein de l'établissement dans l'article qui est là. On dit: "toute personne désignée par entente entre celui-ci et les travailleurs".

Vous savez, des fois il y a des pressions qui peuvent exister dans les lieux où il n'y a pas de syndicat ou de comité consultatif. Il n'y a rien. Il n'y a pas de comité institutionnel en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. De telles pressions pourraient être exercées et on pourrait dire: Vous allez prendre celui-là, sinon je ne vous en donne pas. Je pense qu'il faut absolument s'assurer que les travailleurs qui vivent dans l'établissement soient ceux qui sont consultés, soit par la nomination d'une personne nommée après rencontre avec les travailleurs ou, encore, par l'association accréditée qui en est responsable en vertu de la loi sur le Code du travail.

Alors, l'amendement qu'on déposerait - on peut le discuter. Je pense qu'il est recevable - ce serait d'ajouter après le mot "employeur", les mots "en consultation avec l'association accréditée et, à défaut également de celle-ci, en consultation avec le représentant des travailleurs au sein de l'établissement." Donc, ça ferait sauter tout le reste après le mot "employeur,". On déposerait l'amendement de façon formelle demain matin, vu qu'on va terminer dans quelques minutes.

Le Président (M. Maltais): M. le ministre.

M. Séguin: Juste avant que vous ne vous prononciez sur la recevabilité - je pense qu'il n'y a aucun problème sur la recevabilité - je veux juste suggérer une chose. À l'article suivant, 62.6, il y a une formulation qui ressemble un peu à ça, au paragraphe 3°, où on dit: "sous réserve de l'article 62.7, révéler, sur demande, les sources de renseignements relatifs aux données toxicologiques ayant servi à l'élaboration de la fiche signalétique qu'il possède à tout travailleur intéressé de l'établissement, au comité de santé et de sécurité ou au représentant à la prévention, ou, à défaut de comité de santé et de sécurité et de représentant à la prévention, à l'association accréditée ou, à défaut également de celle-ci, au représentant des travailleurs au sein de l'établissement."

M. Jolivet: C'est exactement...

M. Séguin: Cette dernière formulation a fait l'objet de discussions, il n'y a pas longtemps, avec les parties patronales et syndicales et on croyait qu'ici on couvrait pas mal par cascades descendantes les autorités qui peuvent être consultées et qu'à leur défaut on passe à des... parce qu'il peut arriver que, dans des entreprises, II n'y ait pas de syndicat, de groupe ou de comité. Alors, on passe par priorité. Si mes

collègues de l'Opposition et les membres de la commission étaient d'accord là-dessus, on pourrait convenir d'uniformiser les deux textes 62.5 et 62.6.

M. Jolivet: Les deux textes, l'un pour l'information...

M. Séguin: La même phraséologie.

Le Président (M. Maltais): On adopterait l'article 62.5 et on reviendrait demain matin à votre amendement à 62.6.3°? Non?

M. Séguin: On peut le faire demain.

Une voix: Non, non! Ce n'est pas ce qu'il dit.

M. Jolivet: Non, non, non! Ce que je peux comprendre du ministre, c'est qu'on dirait qu'en l'absence du comité... On prendrait la même... Il faudrait peut-être le vérifier, mais je n'ai pas d'objection majeure dans le contexte où on dit ceci: "En l'absence de comité de santé et de sécurité, le programme de formation et d'information est établi par l'employeur", et là, on dirait: "en consultation avec l'association accréditée ou, à défaut également de celle-ci, avec le représentant des travailleurs au sein de l'établissement." S'il y avait ça, j'accepterais, avec l'amendement qu'on reformulerait demain matin pour être sûrs...

M. Séguin: Parfait! Reformulez votre amendement en vous inspirant de l'article 62.6.

M. Jolivet: Parfait!

Le Président (M. Maltais): Demain matin, M. le député de Laviolette, vous déposerez votre amendement et on fera la coordination.

M. Séguin: Je peux dire d'avance qu'il est recevable, M. le Président, et qu'on n'aura même pas besoin de débat.

Le Président (M. Maltais): C'est ça, il est recevable, il n'y a pas de problème. Compte tenu de l'entente qu'il y a eu, on adoptera l'article 62.5 demain avec l'amendement.

M. Jolivet: ...l'amendement qui, demain...

Le Président (M. Maltais): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 heures)

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