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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Monday, March 14, 2016 - Vol. 44 N° 65

Clause-by-clause consideration of Bill 70, An Act to allow a better match between training and jobs and to facilitate labour market entry


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures quatre minutes)

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Polo (Laval-des-Rapides) est remplacé par M. Girard (Trois-Rivières); Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) est remplacée par M. Fortin (Pontiac); M. Bergeron (Verchères) est remplacé par Mme Lamarre (Taillon); M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); M. Therrien (Sanguinet) est remplacé par M. LeBel (Rimouski).

Mémoires déposés

Le Président (M. Hardy) : Merci. Avant de débuter les remarques préliminaires, je dépose les mémoires que la commission a reçus depuis la fin des consultations particulières.

Remarques préliminaires

Nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, vous disposez de 20 minutes.

M. François Blais

M. Blais : Alors, merci beaucoup, M. le Président. Je salue aussi, à mon tour, tous les membres de la commission, les collègues, bien sûr, du parti ministériel, nos collègues de l'opposition et je tiens à peut-être présenter, si vous me permettez, là, les personnes qui m'accompagnent plus spécifiquement pour nous aider dans nos travaux : tout d'abord, le sous-ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, M. Bernard Matte; Mme la sous-ministre associée d'Emploi-Québec, Mme Johanne Bourassa; Mme la sous-ministre adjointe du secteur des politiques, de l'analyse stratégique et de l'action communautaire, Mme Chantal Maltais; et notre légiste, Me Hugues Melançon. Ces personnes, bien entendu, sont également accompagnées de leurs équipes respectives afin, encore une fois, de nous appuyer dans notre travail.

M. le Président, le Québec fait face à un phénomène de vieillissement de la population et de rareté grandissante de la main-d'oeuvre. Cette situation a des répercussions directes sur les possibilités de croissance de nos entreprises et, par le fait même, sur la santé économique du Québec. Nous avons la responsabilité collective d'agir pour permettre à un plus grand nombre de chercheurs d'emploi et de travailleurs d'intégrer le marché du travail ou de s'y maintenir. Pour ce faire, nous devons nous assurer que la main-d'oeuvre actuelle et future soit en mesure de répondre aux besoins de recrutement et des compétences des entreprises d'ici.

Lors de son dépôt, le projet de loi n° 70 a rapidement trouvé écho auprès de nombreux groupes et associations. Nous avons pris note des commentaires et suggestions qui nous ont été faits. Je rappelle toutefois l'importance de la collaboration de toutes les parties prenantes de ce dossier. L'adéquation formation-emploi est un enjeu prioritaire pour le Québec. Nous avons la responsabilité collective de faire en sorte que le bassin de main-d'oeuvre fournisse des candidats qualifiés pour les postes à pourvoir et que les individus puissent trouver un emploi qui leur permette de mettre en pratique leurs connaissances.

Le projet de loi prévoit des modifications à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail. Ces changements visent notamment à donner à la Commission des partenaires du marché du travail un rôle stratégique accru en matière d'adéquation formation-emploi en renforçant son mandat à l'égard des politiques et orientations stratégiques en matière de main-d'oeuvre et d'emploi, en lui ajoutant le mandat de définir les besoins en développement des compétences de la main-d'oeuvre future en adéquation avec les besoins des entreprises et les perspectives du marché du travail en plus de continuer de s'occuper du développement des compétences de la main-d'oeuvre actuelle, en lui accordant le droit de formuler des recommandations aux ministères membres de la commission en vue de mieux répondre aux besoins du marché du travail en matière d'acquisition et de développement des compétences. Les ministères devront ensuite faire rapport à la commission des actions prises à la suite de ces recommandations. Ces modifications visent à permettre de dresser un portrait juste de la situation du marché du travail et des besoins des employeurs puis à favoriser la mise en oeuvre de solutions pour améliorer l'adéquation entre les compétences de la main-d'oeuvre et les emplois disponibles.

Les services publics d'emploi et les services de solidarité sociale demeureront des lignes d'affaires visibles et reconnues auprès du public et des institutions. Le réseau du ministère est le plus décentralisé au gouvernement, et son action est primordiale. Nous voulons justement miser sur sa présence en région pour améliorer la prestation de services à la population.

Je vous rappelle que la Commission de révision permanente des programmes a souligné, dans son rapport d'août 2015, l'importance de simplifier les rapports entre l'État, les citoyens et les entreprises. À la suite du dépôt de ce rapport, le gouvernement a annoncé qu'il modernisera et optimisera le modèle actuel de Services Québec. L'objectif est de faciliter l'accès aux services gouvernementaux et de simplifier les démarches des citoyens et des entreprises pour obtenir les services, tout en portant une attention particulière aux régions.

• (14 h 10) •

Considérant la volonté gouvernementale de faire de Services Québec la porte d'entrée principale des services gouvernementaux sur l'ensemble du territoire québécois, il était requis de modifier notre loi constitutive afin de reconfigurer la prestation de services publics ainsi que les champs de responsabilité et d'imputabilité.

Nous proposons aussi de modifier la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre. L'objectif de cette démarche est d'élargir la portée de la loi en faveur de la participation active des employeurs à la formation de la future main-d'oeuvre en plus de celle des travailleurs en emploi. Cet élément permettra ainsi de favoriser un meilleur accès à la formation et au développement des compétences pour la main-d'oeuvre québécoise.

Je vous rappelle que 50 % des postes à combler au cours des prochaines années le seront par les jeunes d'aujourd'hui. Les employeurs, les représentants des travailleurs doivent dès maintenant se préoccuper davantage de la formation que les jeunes et les immigrants reçoivent s'ils souhaitent bénéficier de candidats ayant les qualifications nécessaires.

Les modifications demandées à la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles permettront principalement de créer le programme Objectif emploi. Ce programme obligatoire vise environ 17 000 personnes admissibles au Programme d'aide sociale qui formulent une première demande d'aide financière et qui n'ont pas accès... et qui n'ont pas, pardon, de contraintes à l'emploi. Nous souhaitons leur offrir un accompagnement personnalisé sur leurs besoins spécifiques afin de favoriser leur intégration au marché du travail. Il est évident que l'intensité de l'aide variera d'une personne à l'autre, le soutien offert sera adapté à la situation de chacun des individus. Nous sommes confiants que ce programme amènera la grande majorité des participants à définir un projet d'intégration en emploi réaliste correspondant à leur potentiel et à leurs intérêts — et j'insiste beaucoup là-dessus, M. le Président — correspondant à leur potentiel et à leurs intérêts.

Les personnes visées par le programme Objectif emploi bénéficieront d'une entrevue d'évaluation et d'aide à l'emploi. Cette rencontre constitue un moment privilégié nécessaire pour dresser avec elles le bilan de leurs compétences, des forces et ressources personnelles et sociales face à l'emploi tout en tenant compte des obstacles qu'elles pourraient rencontrer en vue de leur insertion en emploi. Nous conviendrons, avec les participants, d'un plan personnalisé d'intégration. Encore une fois, j'insiste là-dessus, nous conviendrons, avec les participants, d'un plan dans lequel les activités à réaliser pour atteindre leurs objectifs d'intégration en emploi seraient définies. Ainsi, selon la situation de la personne, trois types de démarches pourraient être entreprises : tout d'abord, la recherche active d'emploi; le développement des compétences; ou encore, dans certains cas, le développement des habiletés sociales, ce qu'on appelle la préemployabilité.

Tout au long de la démarche, le plan intégration en emploi serait ajusté afin de tenir compte de l'évolution de la situation ou des difficultés que pourraient rencontrer les participants. Si une personne n'a pas d'idée quant à l'emploi qu'elle voudrait occuper, qu'elle ne connaît pas son potentiel et ne sait pas quelles compétences elle pourrait développer, le plan pourrait d'abord prévoir uniquement la réalisation d'un bilan de compétences et d'une démarche d'orientation. Par la suite, il serait bonifié en fonction des résultats de ces premières activités. Les participants pourraient compter sur un accompagnement soutenu, personnalisé et axé sur leurs besoins offert par le personnel d'Emploi-Québec et ses partenaires : les organismes en développement de l'employabilité et les établissements de formation.

En plus d'une prestation de base équivalente à celle accordée au Programme d'aide sociale, une aide financière additionnelle serait accordée en fonction de la démarche entreprise par le participant afin d'améliorer ses chances d'intégration à l'emploi.

Au sujet des obligations des participants, permettez-moi de rappeler que, selon l'Organisation de coopération et de développement économiques, trois conditions doivent être réunies pour assurer le succès d'une stratégie d'activation et d'intégration au marché du travail : une incitation financière au travail, une aide par des services publics d'emploi adéquats et une obligation de recherche d'emploi pour les personnes aptes au travail en contrepartie de leur droit à une prestation, assortie de sanctions modérées appliquées de façon stricte dans le cas de celles qui manquent à leurs obligations, bien entendu. Plusieurs pays tels que la Suède, la Norvège, le Danemark, l'Allemagne, la France approchent... appliquent, pardon, cette approche préconisée par l'OCDE, de même que toutes les autres provinces canadiennes, sauf Terre-Neuve-et-Labrador.

Le programme Objectif emploi viserait les personnes qui sont en mesure d'entreprendre une démarche menant à l'intégration du marché du travail. Cette démarche tiendrait compte de la situation et des capacités du participant, et ce, tout au long du processus. Cette approche individualisée s'appliquerait également à la question des manquements. Ceux-ci seraient analysés en tenant compte de la situation de la personne et conformément à l'évaluation effectuée dans le cadre du plan d'intégration en emploi. Ainsi, si elles vivent des difficultés, elles pourraient en discuter avec leurs agents et convenir ensemble des moyens pour les surmonter. Dans une telle situation, aucune diminution ne serait imposée, bien entendu. Tous les Québécois et les Québécoises qui en ont la capacité doivent prendre part activement à la société.

Notre gouvernement souhaite aussi mieux soutenir les prestataires du Programme de solidarité sociale en suggérant l'introduction d'une habilitation permettant d'exclure des revenus provenant d'une succession. Cette proposition viserait, par exemple, à protéger des sommes versées par fiducie testamentaire par des parents d'un enfant handicapé afin de sécuriser son avenir. Cette proposition fait d'ailleurs suite à une recommandation émise par la Protectrice du citoyen.

Enfin, nous croyons utile de modifier les règles afin de permettre d'éliminer l'obligation pour les ménages prestataires d'aide sociale de produire une déclaration relative à leur situation à tous les mois. Ce changement contribuera à simplifier les démarches administratives liées aux déclarations effectuées par les prestataires. Il permettra également d'assurer une meilleure cohérence entre les différents processus en place.

En terminant, j'ai la conviction, M. le Président, que ce projet de loi contribuera, à sa façon, à la prospérité du Québec. Les entreprises qui ont l'ambition de prospérer pourront trouver plus facilement leur main-d'oeuvre plus qualifiée dont elles ont besoin. Les personnes qui désirent occuper un emploi ou développer leurs compétences pourront également le faire plus facilement.

Je m'inscris en faux contre les interprétations véhiculées par certains qui laissent croire que le projet de loi n° 70, s'il était adopté, encouragerait les préjugés. Au contraire, il représente un moyen concret d'aider des gens à sortir des filets de la pauvreté selon leurs capacités et leur rythme, bien entendu. À mon sens, l'objectif d'intégrer un emploi ne discrimine pas les citoyens et les citoyennes, mais contribue plutôt à combattre l'exclusion et à élever le sentiment de dignité des individus.

Je suis maintenant disposé, M. le Président, à entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70 et à entendre bien sûr les remarques de mes collègues des partis d'opposition. Je vous propose un cadre d'étude basé sur la logique suivante : nous pourrions ainsi débuter par un premier bloc qui regrouperait les mesures permettant une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi, en abordant les articles touchés par la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre; dans un deuxième bloc, nous étudierions ceux liés à la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et sur la Commission des partenaires du marché du travail; ensuite, nous enchaînerions avec les mesures favorisant l'intégration en emploi, nous verrions alors les articles de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles.

Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Je nous souhaite d'excellents échanges.

• (14 h 20) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Permettez-moi, à ce moment-ci, de saluer tous les gens qui sont autour de la table. J'ai omis de vous saluer tantôt. Ça fait que c'est fait. M. le ministre, bon après-midi.

J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi et d'économie sociale et député de Saint-Jean à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes. À vous la parole.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Je vous salue, à votre tour, dans votre fonction, M. le ministre, ainsi que toute l'équipe qui a été présentée, les collègues du gouvernement, mes collègues du Parti québécois, la députée de Taillon, le député de Rimouski, ainsi que mon collègue de la CAQ, de Drummond—Bois-Francs, ainsi que son recherchiste, notre recherchiste et toutes nos équipes respectives.

M. le Président, je ne pourrais pas dans ce cas-ci mentionner que c'est avec plaisir que nous débutons l'étude détaillée du projet de loi n° 70, parce que plusieurs questions demeurent encore sans réponse à ce stade-ci de nos travaux.

Pourtant, nous avons eu l'occasion d'entendre quelques groupes. Malheureusement, nous n'avons pas eu l'occasion d'avoir des consultations générales comme nous l'avions demandé et qui auraient permis aux nombreux groupes qui ont écrit des mémoires... Vous l'avez même fait précédemment, déposé un certain nombre de mémoires de groupes qui, suite à la fin des consultations, ont transmis leurs mémoires. C'est plus de 80 mémoires qui ont été déposés jusqu'à maintenant pour ce projet de loi là. Ça démontre, selon moi, M. le Président, que c'est un projet de loi qui touche les organisations sur le terrain, les organismes mais aussi des individus, des citoyens, parce que certains citoyens nous ont transmis leurs mémoires, comme vous l'avez vu, M. le Président.

Ce n'est pas avec plaisir que nous débutons l'étude détaillée du projet de loi à ce moment-ci, d'autant plus que nous avons fait beaucoup d'interventions lors de l'adoption de principe pour justement poser des questions dans l'espoir d'obtenir des réponses à nos questions, parce que jusqu'à maintenant le projet de loi est très ambigu sur certaines questions. Le ministre en a parlé dans ses remarques préliminaires, toute la question d'Emploi-Québec, donc, de la perte d'autonomie d'Emploi-Québec. Nous, ça nous inquiète, ça nous questionne. La Commission des partenaires du marché du travail, nous aussi, ça nous inquiète, la perte de pouvoirs, si on peut dire, hein, d'autonomie de... pas d'autonomie, mais la perte de pouvoirs de la Commission des partenaires du marché du travail nous questionne. Pourquoi? Est-ce que c'est parce que la commission ne fait pas bien son travail actuellement? Est-ce que c'est parce qu'elle pourrait faire mieux? On n'a pas eu encore de réponse claire sur cette question-là.

Le projet de loi vise principalement deux aspects : on parle de l'adéquation entre la formation et l'emploi et l'intégration en emploi. En termes d'adéquation entre la formation et l'emploi, nous aurions aimé savoir ce qui est arrivé des recommandations, des pistes d'action qui avaient été élaborées lors du forum de Lévis en 2011. Il y avait des actions qui avaient été mises en place à ce moment-là qui avaient été déterminées par l'actuelle ministre du Tourisme maintenant, qui était ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale à l'époque, et Line Beauchamp, qui était ministre de l'Éducation. Donc, qu'est-ce qui arrive avec ça?

Au fond, pourquoi je vous dis ça, M. le Président? C'est que je me questionne, nous nous questionnons sur la plus-value de ce projet de loi là. Le ministre mentionnait tantôt dans ses remarques préliminaires tout l'accompagnement qui sera offert aux gens : une rencontre, on va voir leurs forces, les obstacles qui... Ça ne prend pas un projet de loi pour rencontrer des gens, M. le Président. Moi, je crois qu'actuellement les gens qui sont dans les centres locaux d'emploi aimeraient pouvoir rencontrer les nouveaux demandeurs mais même, je pourrais dire, les demandeurs d'aide sociale. Mais en ce moment ce n'est pas possible, ce n'est pas possible parce qu'il y a de moins en moins de gens qui travaillent dans les centres locaux d'emploi.

M. le Président, dans les dernières années, on a vu une diminution de plus de 500 personnes dans les équipes d'Emploi-Québec. Bien, plus de 500 personnes de moins, ça fait en sorte qu'il y a moins de gens pour rencontrer les bénéficiaires. Moins de centres locaux d'emploi. Il y a de plus en plus de régions qui n'ont plus de centres locaux d'emploi. Juste en Montérégie, là, Contrecoeur, Saint-Rémi, il n'y en a plus. Pointe-aux-Trembles, il n'y en a plus. Je pourrais vous parler... sûrement que mes collègues aussi en ont d'autres, il y en a d'autres qui ont été aussi annoncés, là, qui seront fermés prochainement aussi. Même dans ma circonscription, à Saint-Jean, il y a une centralisation des employés du centre local d'emploi de Saint-Jean, qui seront transférés en partie à Longueuil ou à Châteauguay. Il ne restera que quelques agents seulement à Saint-Jean. Mais pourtant il n'y a pas de transport en commun pour se rendre à Châteauguay, puis il n'y en a pas à Châteauguay, puis, à Longueuil, bien, il faut passer par Montréal. Ça devient compliqué pour des gens qui justement vivent de la pauvreté.

Le ministre nous dit : Le projet de loi n° 70, je me porte en faux contre les gens qui prétendent que le projet de loi n° 70 va augmenter les préjugés ou du moins créer des préjugés à l'endroit des personnes les plus démunies. Mais je m'excuse de le dire comme ça, M. le Président, mais je ne partage pas son opinion. Le projet de loi n° 70 va créer de la pauvreté, le projet de loi n° 70 s'attaque aux plus démunis, M. le Président.

On l'a vu et on l'a répété, et on n'a toujours pas de réponse à cette question-là : De combien les gens seront coupés, pour ceux qui ne peuvent pas participer au parcours d'employabilité, M. le Président? L'ancien ministre nous parlait : Jusqu'à la moitié du chèque d'aide sociale. Mais la moitié du chèque d'aide sociale, là, c'est plus de 300 $ par mois de coupés sur un chèque de 623 $. Donc, je regrette, mais je ne pense pas qu'aujourd'hui quelqu'un, au Québec, peut vivre avec moins de 312 $ par mois — c'est impensable, M. le Président — au même moment où le gouvernement tient — puis je vais le dire comme je le pense — derrière des portes closes, dans le bureau du ministre... pour le plan de lutte à la pauvreté et contre l'exclusion sociale.

Moi, je crois que c'est travailler à l'envers, M. le Président. Je crois que le ministre... je comprends que ce n'est pas lui qui était ministre à ce moment-là, c'était son prédécesseur, mais je crois que, comme nouveau ministre — surtout qu'il a eu cette fonction-là de ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, il connaît quand même cette question-là — il aurait pu dire : Bien, écoutez, on va faire les consultations sur le plan de lutte à la pauvreté, nous allons présenter notre plan de lutte et, suite à ça, des recommandations, des actions, des pistes de réflexion qui auront émané du plan de lutte nous pourrons amener une législature qui inclura certaines mesures dont le plan de lutte aura besoin. C'est comme ça qu'on travaille, M. le Président.

Là, le ministre nous dépose un projet de loi qui, selon nous et selon plusieurs, force est de le constater, va créer de la pauvreté, va augmenter la pauvreté. Et, en même temps, le ministre ou... je dis «en même temps», ce serait plutôt après, là, parce que le plan de lutte va arriver après l'adoption du projet de loi sûrement... le plan de lutte va arriver puis va peut-être aller à l'encontre du projet de loi n° 70. On va être obligé de refaire un autre projet de loi puis de modifier encore la loi. Ce n'est pas comme ça qu'on travaille, M. le Président.

Au même moment où le premier ministre — et là ce n'est pas n'importe qui, c'est quand même le premier ministre qui est ministre responsable de la Jeunesse — va déposer, dans les prochains jours, les prochaines semaines, la politique jeunesse du gouvernement, on ne sait pas vers où la politique jeunesse s'en va. Cependant, si on nous dit... mais je comprends que le ministre doit avoir une idée d'où la politique jeunesse du gouvernement actuel va, mais, s'il nous dit qu'elle va en droite ligne avec le projet de loi n° 70, on a un gros problème, on a un gros problème pour les jeunes du Québec, M. le Président.

On ne sait toujours pas où en est la politique d'éducation des adultes et de formation continue. Lorsque le ministre actuel a été ministre de l'Éducation, j'ai eu l'occasion de le questionner à ce sujet lors de l'étude des crédits. Il m'a dit qu'il avait besoin d'étudier davantage, de peaufiner sa réflexion et la pertinence d'avoir une telle politique. C'est à peu près les mots qu'il a utilisés, mais avec une expression qui est propre à lui, là, les mots qui lui appartiennent, mais c'est à peu près, grosso modo, cette idée-là. Bon, si c'est ça, c'est une chose, mais où en... Il a été quand même pratiquement un an ministre de l'Éducation. Elle a évolué, sa réflexion. Le nouveau ministre de l'Éducation, que fera-t-il avec la politique d'éducation des adultes?

Pourquoi je vous parle de ça, M. le Président? Parce que, on l'a dit, c'est l'adéquation entre la formation et l'emploi. On revoit le mandat de la Commission des partenaires du marché du travail. La Commission des partenaires du marché du travail offre de la formation en entreprise, organise la formation en entreprise, fait en sorte, dans le projet de loi, qu'on ajoute la main-d'oeuvre future dans le rôle et la fonction, là, de travail, là, de la Commission des partenaires du marché du travail. Bien, ça, ça a un impact sur la formation continue, sur ce qui se passe en entreprise, mais aussi pour s'y rendre. Quand on voit que pratiquement la moitié de... 52 % de la population a des problèmes de lecture, des troubles de lecture et d'écriture, ça a un impact sur l'emploi, bien entendu, M. le Président.

Je pourrais vous parler d'autres programmes plus spécifiques, qu'on a eu l'occasion d'entendre, en commission parlementaire, des groupes qui sont venus nous parler de différents programmes qui existaient et qui se questionnent où on en est. Par exemple, Ma place au soleil, on le voit dans plusieurs régions du Québec, mon collègue de Rimouski va peut-être en parler un peu, mais dans sa région, à Rimouski, on ne l'offre pratiquement plus; en Gaspésie non plus. Sur la Côte-Nord il n'y en a quasiment plus.

• (14 h 30) •

Donc, c'est encore les régions du Québec qui sont touchées quand on voit que le projet de loi même actuel, le projet de loi n° 70, s'attaque aux régions, parce qu'on ne met pas de distance pour un emploi convenable. Donc, on va faire en sorte que quelqu'un qui habite la Gaspésie, ou Rimouski, le Bas-Saint-Laurent, ou Chicoutimi au Saguenay—Lac-Saint-Jean, peu importe... M. le Président, bien, ces gens-là, qui ne sont pas capables de se trouver un emploi dit convenable... et on ne sait pas c'est quoi, un emploi convenable, encore. C'est dans le règlement. Bon, bien, ces gens-là vont être forcés de s'en venir à Québec. L'ancien ministre l'a dit. Il me l'a même dit, à moi, au salon bleu, M. le Président. Il a dit : Vous le faites, vous, Montréal-Québec. Si, vous, vous êtes capable de le faire, les autres seront capables de le faire aussi. Mais là, je m'excuse, M. le Président, ce n'est pas le même ordre d'idées, là. Moi, je ne déménage pas à Québec, là, pas que je n'aime pas la ville de Québec, mais ce n'est pas ma ville, là, je n'habite pas ici. Moi, c'est Saint-Jean-sur-Richelieu, ma ville. Donc, M. le Président, on se questionne beaucoup sur cette question-là.

Ma place au soleil, ça aide qui? Ça aide les femmes principalement, ça aide les familles, les mères monoparentales. Souvent, on le sait, les familles monoparentales, malheureusement, c'est souvent davantage les femmes qui sont le pilier familial. Mais qu'est-ce qui arrivera aussi aux femmes? Parce qu'on n'en parle pas beaucoup, de ça, hein, dans le projet de loi. On parle qu'on va s'attaquer aux jeunes, mais on s'attaque aussi aux femmes, on s'attaque aux femmes aussi, parce que, on l'a vu... Puis je pourrais vous parler des organismes en employabilité féminins. La semaine passée, ma collègue la députée d'Hochelaga-Maisonneuve a posé une question à la ministre de la Condition féminine à ce sujet-là, 1,2 million de dollars, M. le Président, 1,2 million de dollars qui est coupé aux organismes d'employabilité pour les femmes. Et pourtant ces organismes-là ont démontré qu'ils obtenaient des résultats plus qu'enviables — plus qu'enviables — pour faire en sorte que les femmes qui sont actuellement à l'aide sociale puissent se trouver un emploi ou retourner sur le marché du travail.

Ce n'est pas ça, l'objectif du ministre, actuellement, de faire en sorte qu'il y ait des gens qui ne sont pas sur le marché du travail... retournent sur le marché du travail? Bien, ces groupes-là l'ont démontré, ils le font bien, ils le font bien. Pratiquement les trois quarts des participantes des programmes ont réussi à se trouver un emploi. Plus de la moitié ont réussi à avoir un salaire, un revenu mensuels plus élevés. Bien, si c'est ça, l'objectif du ministre, actuellement, de faire en sorte qu'il y ait moins de gens à l'aide sociale, qu'il y ait plus de gens sur le marché du travail, bien, pourquoi, lui, sa collègue à la Condition féminine et le gouvernement libéral s'attaquent aux organismes d'employabilité féminins? C'est des organismes... il en reste juste 16, M. le Président, 16, au Québec. Bon, bien, ces organismes-là ont amené des résultats.

Je pourrais parler des carrefours jeunesse-emploi, M. le Président, je pourrais parler des carrefours. Les carrefours, le ministre actuel, lorsqu'il était ministre, il y a de ça plus d'un an... bien, le ministre s'est attaqué au modèle des carrefours jeunesse-emploi. Il a fait en sorte de mettre de côté des jeunes. Il va me dire et il va me répondre que, non, il n'a pas mis de côté des jeunes qui sont actuellement à l'aide sociale ou des jeunes... Bon. Bien non. Mais, de toute façon, le projet de loi actuel ne touche pas des jeunes qui sont déjà, actuellement, à l'aide sociale. C'est des nouveaux demandeurs. Donc, moi, ma lecture, M. le Président, si on aide des jeunes qui ne sont pas actuellement sur l'aide sociale à se trouver un emploi ou à trouver un meilleur emploi, bien c'est moins de jeunes qui vont faire éventuellement une demande à l'aide sociale. Donc, pourquoi le ministre a attaqué le modèle des carrefours jeunesse-emploi, qui avaient des bons succès, qui avaient amené des résultats, eux aussi? Bien, on le voit, les carrefours jeunesse-emploi sont obligés, selon des régions — encore, c'est très arbitraire, mais, bon... — selon des régions, ils peuvent aider des jeunes qui sont aux études; dans d'autres régions, non. Dans des régions, ils ne peuvent pas aider les 16-17 ans; dans des régions, ils peuvent les aider. Bon, ça dépend des régions, encore là, puis c'est souvent les régions les plus éloignées qui sont les plus durement touchées par ce jugement arbitraire, si on peut dire, pour l'aide aux jeunes.

M. le Président, je n'ai pas parlé des pertes d'emploi, je n'ai pas parlé des pertes d'emploi. Depuis l'arrivée du gouvernement libéral, il y a des pertes d'emploi au Québec. On le voit à tous les mois. On voit aussi que, depuis l'arrivée du Parti libéral au pouvoir, le nombre de jeunes à l'aide sociale a augmenté. Avant, le nombre de jeunes à l'aide sociale diminuait. Je comprends que, là, le ministre va dire : Bon, vous voyez, il y a une raison pourquoi il faut déposer le projet de loi n° 70, il faut faire en sorte qu'il y ait moins de jeunes qui demandent leurs chèques d'aide sociale. Puis ça, encore là, c'est prendre le problème par l'autre bout. Moi, je crois que, si on aide les jeunes qui ne sont pas à l'aide sociale actuellement ou qui sont sur le marché du travail mais avec un emploi précaire et qu'on les aide à avoir un meilleur emploi ou à se trouver un emploi, ces jeunes-là n'auront pas besoin de faire de demande d'aide sociale. Mais je comprends, M. le Président, que, quand tous les gens... pas tous les gens, il ne faut pas généraliser, mais, quand un certain nombre de Québécois ou de Québécoises — merci, M. le Président — perdent leur emploi, bien, ce n'est pas surprenant que ces gens-là cherchent des emplois et que c'est les jeunes qui sont pénalisés, effectivement, parce qu'ils ont moins d'expérience, moins de formation que des gens plus âgés, donc, qui prennent les emplois.

On ne parle pas des banques alimentaires, M. le Président. Le nombre de demandes dans les banques alimentaires augmente. Le ministre ne peut pas nous dire que le projet de loi ne touche pas les plus démunis et que le projet de loi ne créera pas de la pauvreté, M. le Président. On le sait, on le voit. Quand quelqu'un devra vivre avec seulement 312 $, 313 $ par mois, bien c'est inévitablement... inévitablement, ces gens-là n'auront pas d'autre choix que d'avoir davantage recours aux banques alimentaires, qui débordent et... pas débordent de nourriture, M. le Président, débordent de demandes.

Donc, nous, M. le Président, nous considérons que le ministre et son gouvernement... bon, on a espoir qu'il dépose encore une politique économique, là, mais là ça, ça semble être... on va devoir attendre un nouveau gouvernement pour le faire. Bon, on a espoir encore. Mais la politique jeunesse, le plan de lutte à la pauvreté, le plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, que nous attendons d'avoir de véritables consultations sur le plan de lutte... Nous espérons, pour le projet de loi n° 70 plus particulièrement, parce que nous devons commencer l'étude du projet de loi, donc, obtenir des réponses sur la perte d'autonomie d'Emploi-Québec, la Commission des partenaires du marché du travail. Qu'est-ce qui compose ce règlement-là, ce fameux règlement-là, M. le Président? C'est quoi, un emploi convenable? C'est quoi, les distances? C'est quoi, le nombre d'heures, le salaire qui est accepté, les distances? Si je ne l'ai pas dit, je le répète, parce que c'est important, M. le Président.

Donc, beaucoup, beaucoup, beaucoup de questions. Je n'ai pas parlé de ce que ça veut dire pour la main-d'oeuvre future. Ça veut dire quoi, ça? On va payer des stages? On va payer des jeunes qui sont aux études à... Ce n'est pas clair, là. Est-ce que c'est en lien avec le modèle dual, ou le modèle allemand, en formation professionnelle, que le ministre actuel voulait implanter lorsqu'il était ministre de l'Éducation? Donc, c'est toutes des questions, M. le Président, que nous attendons des réponses.

M. le Président, je sais que mes collègues voudront aussi faire des remarques préliminaires — parce que chacun a une réalité dans sa circonscription, dans sa région — et ont des questions aussi, sûrement, à poser au ministre. Donc, nous espérons que le ministre, au fur et à mesure, durant les travaux de la commission, pourra répondre à nos questions, et peut-être que, dans certains cas, ça trouvera une voie de passage. Nous avions déposé une motion de scission du projet de loi pour faciliter l'étude du projet de loi, pour faire en sorte que ce qui pose moins problème ou ce qu'on... à l'heure actuelle, ce n'est que quelques questions ou des préoccupations, qu'on puisse l'avancer; dans d'autres cas, qu'on puisse avoir plus de temps pour y réfléchir. Le gouvernement a décidé de ne pas retenir notre proposition. Notre collègue de Québec solidaire avait déposé aussi une motion pour suspendre l'étude le temps de faire l'étude d'impact et l'analyse différenciée selon les sexes, que nous n'avons toujours pas eue, donc, qui demandera plusieurs questions.

Mais je veux quand même vous aviser, M. le Président, qu'après les collègues... qu'ils auront intervenu pour leurs remarques préliminaires nous avons l'intention de déposer des motions en vertu de l'article 244 pour faire en sorte qu'on puisse entendre quelques groupes. Donc, je vous en avise dès maintenant, M. le Président, pour que vous puissiez me faire signe à ce moment-là, mais je vais vous suivre quand même.

Donc, je vous remercie beaucoup, M. le Président, et je souhaite que nous ayons des bons travaux.

• (14 h 40) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition en matière d'emploi et de solidarité sociale et député de Drummond—Bois-Francs à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. Alors, en partant, j'en profite pour vous saluer. Je salue aussi le ministre et toute son équipe, aussi les collègues députés ministériels, le député de Saint-Jean et ses collègues — je vous salue — et toute l'équipe qui participe aux... bien, à la commission aujourd'hui.

Nous avons appuyé, la semaine dernière, le principe du projet de loi n° 70. En effet, les deux volets du projet de loi sont, selon nous, des ajustements législatifs nécessaires. Les modifications à la CPMT pour exclure les cours, entre guillemets, je dirais, de rigologie ou, comme on a vu, du giron de la loi du 1 % nous apparaissent essentielles. Également, la pondération des formations est une voie prometteuse.

Du côté de l'aide sociale, il va sans dire qu'un programme d'accompagnement des nouveaux prestataires dans une optique de retour au travail nous rejoint. Seulement, comme plusieurs groupes sont venus l'expliquer, cet accompagnement ne doit pas se faire à l'aveuglette, il doit favoriser la participation la plus volontaire possible du prestataire. Le plus gros problème du projet de loi réside dans le fait que le règlement d'application qui en constituera le moteur n'est pas encore public. En effet, il y a fort à parier que ce règlement est déjà conçu et prêt à être lancé sous réserve de l'adoption de la loi et des amendements qui seront... qui y seront apportés, pardon. Le ministre calmerait beaucoup de craintes et simplifierait d'autant nos travaux en déposant dès aujourd'hui son projet de règlement.

Il y a plusieurs éléments importants que nous souhaitons retrouver au texte du projet de loi au terme de cette étude. La définition d'un emploi convenable établissant un critère de distance clair et adapté aux prestataires en est un. Il y a également une série de modifications, important à ajouter... importantes à ajouter, pardon, à la définition du plan d'intégration à l'emploi pour en faire un processus concerté et d'accompagnement. Nous veillerons ensuite à ajouter à la loi une bonification des recours des prestataires ainsi qu'un processus de révision de la loi afin d'en confirmer l'efficacité. Nous avons l'intention de collaborer à la progression des travaux dans la mesure où le ministre témoigne de son ouverture à nos idées et nos commentaires. Nous nous réservons cependant le droit de rejeter le projet de loi au terme du processus si le ministre persistait à imposer un texte où en omettrait les précisions dont je viens de parler.

En terminant, je voudrais aussi saluer tous les groupes et gens qui ont déposé des mémoires afin de mieux nous diriger et je souhaite évidemment que cette étude soit fructueuse pour tous les gens, surtout pour les gens qui subiront les conséquences de cette loi. Alors, merci, M. le Président.

Et là j'aimerais amener un commentaire qui est très personnel mais qui peut peut-être aussi toucher d'autres personnes, qui n'est pas en lien avec le projet de loi. Nous avons été convoqués à cette audience aujourd'hui pas plus tard que vendredi, 3 heures. Il y a quelque temps, la ministre de la Condition féminine faisait un beau discours sur la conciliation famille dans le but ici de nous dire : Il faut avoir plus de femmes, surtout de jeunes femmes, à venir postuler pour être députées. Moi, je pense que tout le monde est d'accord là-dessus. Par contre, quand on vient nous convoquer à 3 heures de l'après-midi pour un lundi qui est supposé être une journée pour les travaux de député à l'intérieur de la circonscription... Pour ma part, j'ai des enfants en bas âge, et ce n'est pas toujours évident de concilier travail-famille. Alors, je vous le dis puis je n'ai pas peur de le dire. Là, j'ai quelqu'un aujourd'hui qui va me dépanner, parce que ma conjointe a aussi une vie professionnelle et souvent elle en profite le lundi soir pour prendre des rendez-vous avec... dans ses fonctions. Alors, j'ai quelqu'un aujourd'hui qui va faire 50 kilomètres pour recueillir mes enfants à l'école et les amener chez nous, en attendant que ma conjointe revienne tard ce soir. Et c'est ça, la réalité.

Alors, j'aimerais ça qu'on ait au moins de la délicatesse quand on veut avoir une commission le lundi. Puis je ne suis pas ici pour faire brailler personne, là, pas du tout. Tout le monde, peu importent les emplois confondus, on a tous cette problématique-là, mais, quand on fait un discours, bien, essayez de suivre ce discours-là, puis au moins nous demander quelques jours à l'avance si c'est possible de le faire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Nous prenons en note votre idée, que vous nous avez apportée, votre recommandation. Maintenant, y a-t-il...

M. LeBel : ...des remarques préliminaires aussi, M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Oui, je suis rendu là, mon cher monsieur député de Rimouski.

M. LeBel : O.K. On est rendus à la même place.

Le Président (M. Hardy) : Bon. Et voilà. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires?

M. LeBel : C'est là qu'il faut que je dise oui.

Le Président (M. Hardy) : M. le député de Rimouski, à vous la parole.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Oui. Merci, M. le Président. Bien, bonjour, tout le monde, en ce beau lundi, et je reprends les paroles de mon collègue, effectivement. Et, effectivement, les lundis, c'est très précieux pour les députés dans leurs circonscriptions, puis souvent aussi ça permet de faire un peu de conciliation famille-travail, c'est bien clair. Et, comme whip, vous avez deviné que j'ai souvent ce genre d'interventions, à mon bureau, de plein de députés qui disent qu'il y a de plus en plus de commissions les lundis. Je ne jette pas la faute sur personne, parce que c'est beaucoup aussi le... on fait beaucoup de consultations maintenant, on fait beaucoup de... On a un Parlement qui est démocratique, on essaie d'écouter le plus de monde possible, ça fait que ça prend du temps et ça prend des heures, mais il faudra éventuellement se pencher là-dessus pour voir comment on peut encore mieux organiser tout ça.

Je suis content de participer à cette commission. Pourquoi? Parce que le dossier de la lutte à la pauvreté, ça vient me chercher beaucoup. Si je fais de la politique aujourd'hui, c'est que j'ai deux ou trois éléments qui m'ont motivé : le premier élément, c'est l'indépendance du Québec, c'est la souveraineté, c'est bien certain; le deuxième, c'est les régions, l'avenir de nos régions; puis le troisième élément, c'est l'égalité des chances, qu'on ait de moins en moins de monde qui vivent des situations de pauvreté qui sont inacceptables puis qui frôlent l'injustice.

Ça fait que, bref, c'est pour ça que je voulais venir travailler avec mes collègues, là, puis essayer d'aller plus loin un peu dans ce projet de loi. Et je sais que ce n'est pas... dans un certain sens, ce n'est pas une job... nos sensibilités à la pauvreté, ce n'est pas que partisan, c'est... Je le sais, ici, tous les députés, là, dans leurs bureaux de comté, accueillent des gens qui ont des difficultés, et chacun essaie de trouver des solutions. Je suis convaincu que mon collègue de Jean-Lesage, pour connaître un peu sa circonscription... je suis certain qu'il est très sensible à ça, pour lui en avoir déjà discuté, puis je sais qu'il y a des cas qu'il voit dans son comté puis il travaille comme un fou pour essayer de trouver des solutions. À Trois-Rivières, c'est la même chose, à Trois-Rivières, il y a plein d'organismes communautaires qui travaillent fort, il y a des comptoirs alimentaires dynamiques, il y a des groupes communautaires. À Trois-Rivières, c'est comme... dans le communautaire au Québec, c'est un peu... Il y a beaucoup de leadership dans le milieu, dans Trois-Rivières. Je connais bien du monde, là, qui sont... Au niveau de l'éducation populaire, au niveau de l'action communautaire autonome, c'est... Pour avoir travaillé dans le milieu communautaire un bout de temps, je sais qu'à... on visait souvent Trois-Rivières parce que c'étaient des gens qui nous amenaient encore plus loin.

Ça fait que je suis certain que ces députés-là ont une sensibilité ou ils connaissent la situation au niveau de la pauvreté. Même chose dans la région de Laval ou dans l'Outaouais, je suis convaincu aussi, c'est bien certain. Moi, j'ai une soeur qui travaille dans la région de Laval, qui travaille dans une maison de la famille, et des fois elle m'instruit beaucoup sur l'image de la pauvreté dans cette région-là, qui est carrément bien différente de ce qu'on peut vivre dans le Bas-du-Fleuve, avec les communautés culturelles, avec les besoins au niveau du logement, au niveau... C'est une réalité que je connais moins dans ma région mais qui est là, qui existe au Québec. C'est pour ça que ça nous démontre aussi que, dans chaque région, quand on parle de pauvreté, le visage de la pauvreté est différent de région en région.

Et je sais que la façon de faire les commissions parlementaires, ce n'est pas... on a une façon de procéder, mais des fois ce serait bien de s'arrêter, puis de faire des tours de table, puis d'écouter chacun des députés parler un peu de leur réalité dans leurs comtés. On apprendrait beaucoup de choses. La façon de faire ici, des fois, nous empêche de faire ça, mais c'est un peu dommage.

Dans les années 2000, 2002, on avait adopté la loi pour lutter contre la pauvreté puis à ce moment-là on avait laissé beaucoup de place à l'ensemble de la députation pour s'assurer qu'on avance dans un projet social pour lutter contre la pauvreté, mais qu'on avance ensemble, ce qui avait fait que le projet de loi avait été adopté à l'unanimité, et ça avait fait une avancée importante pour le Québec.

Ça me permet, quand je parle des régions, de dire que c'est peut-être un des problèmes de ce projet de loi là, qui est un projet de loi qui est très centralisateur, qui est un peu à l'image de ce que fait le gouvernement depuis son entrée en fonction. C'est un gouvernement qui a comme coupé les ponts avec les régions. Les réalités de région, ça vient moins les chercher, on dirait, tellement qu'il y a deux semaines ou... en réponse à un de mes collègues à la période de questions, le ministre des Transports disait : Si vous voulez parler de transport en Gaspésie, ce n'est pas en Gaspésie que ça se fait, c'est ici, à Québec, c'est ici que les décisions se prennent, c'est ici que ça se passe, à Québec.

• (14 h 50) •

Cette façon de faire, cette façon de voir là, on la devine dans presque tous les projets de loi qui sont faits. Beaucoup de décisions qui sont prises par le ministre dorénavant... on se porte moins sur la concertation régionale, on se porte moins sur des initiatives de région, on décide de Québec, on oriente à partir de Québec, et c'est ce qu'on voit dans ce projet de loi là. Puis c'est un projet de loi aussi qui... ça vient me chercher, c'est qu'ils mettent... on dirait que la... si quelqu'un vit dans la pauvreté, bien c'est de sa faute, c'est de sa faute à cette personne-là. Toute la pression est sur la personne. C'est à cette personne-là qu'on s'adresse, on dit : Tu devrais... il faut que tu t'embarques dans un cheminement, il faut que tu... On ne se pose pas la question : Est-ce que l'entourage, est-ce que l'environnement de la personne est assez solide pour créer de l'emploi ou intégrer cette personne-là? On ne se pose pas cette question-là, on se dit : La personne est à l'aide sociale, la personne vit la pauvreté, c'est son problème, et il faut qu'elle s'en sorte, et on s'en vient dans le coercitif, on essaie de mettre beaucoup plus de pression sur la personne en se disant : C'est cette personne-là qui doit s'en sortir.

Et là on va sortir des arguments ou des slogans, dire : Chaque personne doit participer à la richesse collective, chaque personne, on ne doit pas recevoir de l'argent du public sans faire un effort, toujours des mots qui laissent entrevoir que les personnes ne peuvent pas donner des efforts. Le ministre a même dit à un moment donné : Nous, on offre des services, mais, sur une centaine de personnes, il y en a juste deux ou quatre qui sont venues nous rencontrer... qui ne viennent pas nous voir, en laissant entrevoir que, les autres, bien, ça ne les intéresse pas d'embarquer dans une démarche. On parle de plan personnalisé pour... on va vous faire un... chacun, on va les prendre un à un puis on va faire un plan personnalisé, mais on ne se pose pas la question : Est-ce qu'un plan personnalisé peut être bien différent pour un jeune qui vient de Gros-Morne, en Gaspésie, ou qui vient de Limoilou, à Québec? C'est pareil, c'est la même chose. Pourtant, on sait bien que ce n'est pas la même chose. Puis, je le disais par rapport à la région de Laval, les jeunes qui arrivent à l'aide sociale qui viennent des communautés culturelles ou d'ailleurs, c'est bien différent du jeune qui vient de Trinité-des-Monts, d'Esprit-Saint ou de Saint-Cyprien, ou de je ne sais pas... c'est bien différent, et ça, on ne prend pas ça en compte. On ne prend pas en compte quand je parle de l'entourage ou de l'environnement de la personne.

Un autre élément important, c'est l'emploi disponible. Dans la Gaspésie, dans les régions périphériques, on le voit, là, c'est sorti il y a une semaine ou deux, en Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, l'Abitibi, Saguenay—Lac-Saint-Jean, on l'a vu, il y a un solde migratoire négatif, ça veut dire que les jeunes sortent de la région. C'est la première fois qu'on voit ça depuis des années. Les régions se vident, sont en train de se vider. Pourquoi? Parce que les emplois disponibles se font plus rares. Et ça, on travaille pour essayer de... on va sortir les jeunes de la pauvreté sans se soucier de ce qui se passe à côté, sans se soucier que le fédéral vient de changer l'assurance chômage. Le chômage saisonnier est plus dur à aller chercher, puis on vit, nous autres, en région, beaucoup d'emplois saisonniers. Il faut voir, là, la pêche au crabe commence bientôt, c'est très bon, mais c'est des emplois saisonniers. Il y a des réalités comme ça qu'il y a en région qu'on n'a pas l'air à prendre en compte.

Le gouvernement fait des actions aussi. Récemment, le ministre de l'Agriculture accueille un rapport, le rapport Gagné, qui va déstabiliser toute l'industrie acéricole dans le Bas-Saint-Laurent, qui va mettre en danger la vitalité, là, la survie même de certains villages dans le Bas-Saint-Laurent. Bien, derrière ça, il y a des individus, il y a des jeunes entre autres, qui travaillent dans l'industrie acéricole qui vont se retrouver, du jour au lendemain, déstabilisés ou ils vont travailler peut-être dans leurs villages; probablement pas, pas d'emploi, et là on embarque dans ce processus-là où on va déraciner la personne, probablement. Mon collègue parlait des voyages Montréal-Québec. J'imagine qu'on va voir beaucoup de jeunes à l'aide sociale, où on leur mettra de la pression pour s'intégrer à l'emploi, ça va être encore de l'exode de nos régions, parce qu'on fait ça, mais, d'une autre main, on ne crée pas de l'emploi en région... et qu'on ne donne pas de place pour ces personnes-là en région.

Il y a des façons de faire et il y a un comité intéressant qui a été mis en place dans le cadre de la loi pour lutter contre la pauvreté, qui s'appelle le Comité consultatif de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est un comité qui fait des avis régulièrement, des mémoires mais qui ne semble pas être très écouté par le gouvernement, mais il fait une bonne job, à mon avis, quand tu prends le temps de regarder ou de voir ce qu'il propose. Il y a déjà un an, il avait déposé un mémoire, un avis sur l'intégration durable à l'emploi, l'aide à l'emploi. Il faut vraiment prendre le temps de regarder cet avis-là puis voir le projet de loi actuel. C'est vraiment le jour puis la nuit. On dirait que tout ce qui... Tu sais, on disait qu'il ne fallait pas aller dans le coercitif, il fallait travailler sur l'emploi, il fallait soutenir les initiatives locales avec le Fonds québécois d'initiatives sociales.

Il y a plusieurs éléments qui étaient dans cet avis-là qui, aujourd'hui, on dirait... je ne sais pas, ça s'est perdu dans l'année, je ne sais pas où, là, cet été ou quand les ministres ont changé, dans des boîtes... peut-être qu'on a perdu des papiers, je ne sais pas, mais on a perdu ce qu'on... Le projet de loi ne ressemble pas pantoute à ce que le comité avait proposé. Le comité proposait, entre autres, une vraie politique de création d'emplois, des emplois, des bons emplois dans nos régions, dans les régions du Québec pour faire en sorte qu'on puisse intégrer des jeunes dans ces emplois-là, faire des plateaux de travail éventuellement et soutenir des emplois qui sont collés aux réalités de nos régions. Est-ce que vous pensez qu'il y a une stratégie de création d'emplois au Québec actuellement? Non, il n'y en a pas, puis surtout pas en région, parce que, comme je vous le disais tantôt, l'avenir des jeunes en région, de création d'emplois en région, c'est de plus en plus sombre.

Le comité parlait aussi d'accompagnement, s'assurer que les jeunes qui arrivent à l'aide sociale puissent avoir accès à l'accompagnement.

Il me reste combien de temps à peu près?

Le Président (M. Hardy) : Huit minutes.

M. LeBel : Huit minutes? C'est bon. Accès à un accompagnement. Un accompagnement, c'est quoi? C'est des groupes communautaires, c'est des groupes Alpha, c'est des groupes qui s'occupent de logements sociaux.

Qu'est-ce qui arrive avec les groupes communautaires? Qu'est-ce qui arrive avec les groupes Alpha? Qu'est-ce qui arrive avec le logement social? Qu'est-ce qui arrive avec nos comptoirs alimentaires, qui sont débordés? Bien, le soutien à ces groupes-là a diminué encore. On parle d'accompagnement, on voudrait que ces groupes-là accompagnent notre monde. Aïe! on coupe dans les groupes d'Alpha, il faut le faire, là! Si on veut commencer à intégrer ou à soutenir notre monde, bien il faut peut-être aussi aider les groupes qui aident à l'alphabétisation. C'est la base de tout.

Des groupes qui luttaient contre le décrochage scolaire, eux autres aussi, ils sont coupés, ils sont coupés partout, et ils essaient de s'arracher la vie d'année en année... À Rimouski, j'ai un groupe qui s'appelle Je raccroche. À chaque année, ils sont obligés de se battre, couper du personnel, essayer de repousser les attentes. Les jeunes qui ne sont pas là, là, qui ne réussissent pas à faire leur session, là, avec le groupe Je raccroche, faute d'argent, ces jeunes-là se retrouvent dans la rue, souvent. Et on a besoin de cet accompagnement-là. Et là on met la pression sur la personne, mais on déglingue tout ce qui pourrait être à côté des groupes qui pourraient aider.

Le comité disait que, s'il y a une affaire qu'il ne fallait pas faire, c'est de couper dans le revenu, couper à l'aide sociale ou mettre de la pression sur la personne en disant : On va couper dans ton chèque d'aide sociale si tu ne participes pas. On met de la pression. Pour eux autres, le comité, c'était l'affaire qu'il ne fallait pas faire. Pourtant, on s'en va là-dedans. Ils disaient qu'il ne fallait pas faire ça, parce que la pauvreté gèle. Tu ne peux pas demander à quelqu'un qui est déjà sous le seuil de la pauvreté, qui a déjà de la difficulté à arriver... tu ne peux pas dire : Regarde, tu embarques là-dedans, sinon on va te couper. Il y a une base à quoi on ne peut pas toucher, et le gouvernement va jusqu'à toucher à cette base-là, et ça ne permet pas aux jeunes de s'en sortir. C'est sûr que ça ne permet pas au jeune de s'en sortir, ça ne fait que lui mettre de la pression sur lui.

Il y avait des projets aussi qui étaient soutenus par des régions, qui allaient chercher ces jeunes-là, qui étaient soutenus par le Fonds québécois d'initiatives sociales, qui intervenaient autour de la CRE, dans les régions du Québec, on appelait ça les alliances. Beaucoup de projets, beaucoup d'initiatives ont été pensés, réfléchis en région, concertés avec les commissions scolaires, avec les entreprises, avec les municipalités, avec des groupes communautaires, avec le milieu de la santé, aussi, des travailleurs de rue; des rencontres, des fois, des pièces de théâtre pour lutter contre la pauvreté. Il y avait plein de choses qui bougeaient dans nos régions, qui venaient aider et venaient sortir de l'isolement, qui venaient aider des gens qui étaient isolés dans leurs milieux, les sortir de là et les embarquer dans un processus qui était communautaire, un processus communauté, pas un processus qui nous venait d'en haut, de l'État, avec des cubicules de fonctionnaires qui disaient : Vous allez venir nous rencontrer. C'était : on embarquait les gens.

Quand je parle de cubicules de fonctionnaires, ce n'est pas négatif, parce que je sais que ces gens-là, en région, travaillent comme des fous pour accueillir le monde, puis, des fois, ce n'est pas facile. Et eux autres aussi sont coupés dans les services auprès des gens, et on ne fait, par le projet de loi, que leur mettre de la pression.

• (15 heures) •

Bref, je pense que ce projet de loi aurait dû, comme la normalité des choses l'exige... C'est-à-dire, on a une loi-cadre, une loi-cadre qui existe depuis 2002, qui vient lutter contre la pauvreté et l'exclusion, puis le mot «exclusion», ce n'est pas naïf, là-dedans. Il faut lutter contre la pauvreté mais tout ce qu'on appelle exclusion sociale. Cette loi-là aurait dû, à mon avis, après dix ans, aurait dû être étudiée par les parlementaires. On aurait dû réinviter les gens pour faire un bilan, parce que c'était une loi qui était adoptée d'une façon non partisane, une loi qui était issue de la communauté. On aurait dû avoir la sensibilité de remettre la loi un peu au jeu puis de voir qu'est-ce que... On s'était donné des cibles il y a dix ans. Est-ce qu'on a atteint nos cibles? Si oui, pourquoi, quels éléments qu'on a atteints puis qu'est-ce qu'il faudrait aller plus loin? Sinon, pourquoi on n'a pas réussi?

Et, selon le comité, dans cette loi-là il y a eu des éléments-phares qui nous ont permis d'avancer sur la lutte à la pauvreté, entre autres la régionalisation puis la décentralisation de nos actions.

On aurait peut-être pu prendre du temps, on aurait peut-être pu aller en région écouter notre monde, voir un peu qu'est-ce qui a été bien fait dans chacune des régions. Je pense qu'on aurait pu avancer un peu là-dedans. Mais on n'a pas fait ça, on est allé assez rapidement là-dessus, et non seulement on n'a pas fait ça, mais on s'en va sur un plan d'action avec une loi-cadre qui nous dit comment on pourrait faire pour lutter contre la pauvreté. On ne fait pas de bilan, on s'aligne sur un plan d'action, on n'a pas de nouvelle cible, mais ce n'est pas grave, on s'aligne sur un plan d'action, on fait des consultations un peu... en tout cas, je ne peux pas dire le mot, là, mais on fait ça pas très ouvert, là, mettons, on pourrait dire ça comme ça, et on ne sait pas trop où est-ce qu'on s'en va avec le plan d'action et on s'aligne sur une réforme de l'aide sociale. Il me semble qu'on aurait pu aller autrement, on aurait pu revoir un peu notre action de lutter contre la pauvreté à partir de la loi. À partir de ça, on aurait pu refaire un peu un plan d'action, sachant mieux où est-ce qu'on s'en va, puis, à partir du plan d'action, voir quelle sorte de programme qu'on met en place qui correspond au plan d'action et à la loi-cadre. Mais, non, ce n'est pas comme ça qu'on s'en va.

Puis, en plus, pour rajouter un peu à tout ça, bien, le premier ministre nomme un nouveau ministre et lui dit : Vous pourriez... Le ministre a demandé aussi de regarder qu'est-ce qu'on pourrait faire sur un revenu minimum garanti. Bref, on s'aligne dans une grande patente, et en même temps il y a un mandat qui est pendant, qui est là, qu'on dit : On pourrait-u tout revoir ça avec un revenu minimum garanti?

Bref, on ne sait pas où est-ce qu'on s'en va avec ce gouvernement-là, et tout ce qu'on sait, c'est qu'on s'aligne sur un projet de loi qui met toute la pression sur la personne, sur l'individu, sans se soucier de son environnement, sans se soucier des réalités régionales. Et je pense qu'on fait fausse route en faisant ça. On aurait dû faire plus confiance aux gens en région, à la communauté en leur donnant des moyens pour lutter contre la pauvreté, puis accompagner nos jeunes en région, faire en sorte qu'on continue à prospérer dans nos régions du Québec. Merci.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Rimouski. Est-ce qu'il y a d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Mme la députée de Taillon, à vous la parole pour 20 minutes.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je transmets également mes salutations les plus sincères à tous. Je suis nouvelle au sein de ce comité et je suis très contente de me joindre à vous et de côtoyer de nouveaux députés — M. le ministre, c'est notre premier contact plus direct au niveau d'échanges parlementaires — ainsi que tous les fonctionnaires, qui sont si importants dans le travail des députés. Je salue également mon collègue député de Drummond—Bois-Francs, de la CAQ, et bien sûr mes collègues du Parti québécois : M. le député de Rimouski et le député de Saint-Jean, Richelieu.

Alors, d'abord, au niveau du titre du projet de loi, la Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, il reste qu'on aurait bien aimé que ces deux sujets puissent faire l'objet d'une scission et qu'on puisse en discuter de façon distincte, parce que je crois que sous ces paroles, sous ses titres, qui sont... dans le fond, qui témoignent d'une très bonne intention, je pense qu'il y a des enjeux très différents dans chacun des deux éléments qui sont visés comme moyens pour atteindre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi que favoriser l'intégration en emploi.

D'abord, je veux juste dire que pour un projet de loi je pense qu'il faut que les enjeux soient vraiment de nature sociétale et tantôt j'ai été un peu surprise de voir... d'entendre, en fait, le commentaire de mon collègue de la CAQ, le député de Drummond—Bois-Francs, dire qu'une partie des objectifs de ce projet de loi visait à exclure, par exemple, des cours inadéquats en rigolothérapie. Je dois vous dire que, ce genre de mesure là, je pense que ça caricature beaucoup, beaucoup... médiatiquement, peut-être que ça donne un message qui rend les gens sympathiques à la cause, mais je pense que, si on n'a pas les moyens actuellement au sein de notre gouvernement pour baliser, contrôler, mieux gérer la nature des cours sans passer par un projet de loi, on a un problème.

Alors, je pense qu'on doit faire référence davantage à des mécanismes de contrôle adéquats et qu'à chaque fois que l'État consacre de l'argent ou reçoit de l'argent d'un employeur qui doit être dédié, par exemple, à la formation on doit s'assurer que c'est bien fait. Il y a des façons préalables de le faire. Dans des organisations, on va demander que les gens fassent confirmer l'objet de leur formation avant de l'autoriser. Je pense qu'il pourrait y avoir un mécanisme. En même temps, je nous mettrais en garde, parfois le titre d'une formation est un titre qui justement crée une certaine attraction auprès de certaines populations qui sont peut-être moins mobilisées par des formations avec des terminologies scientifiques, mais, dans le contenu, il reste qu'on atteint très souvent certains objectifs. Et donc je ferais attention à ce genre d'amalgame, où, sous un titre qui a l'air justement facilement dénonçable, on peut parfois retrouver des informations ou des formations qui sont pertinentes.

Et je nous mets aussi beaucoup, beaucoup en garde par rapport au fait que, si on veut vraiment favoriser l'insertion et l'intégration à l'emploi, c'est seulement des cours de nature technique qui vont être nécessaires. Et j'ai aimé tantôt que le ministre évoque la notion d'accompagnement, parce que je crois que les gens qui actuellement n'ont pas accès au marché du travail, ce ne sont pas seulement des gens qui ont des difficultés ou des lacunes au niveau d'une formation technique, ce sont des gens qui, dès leur enfance, ont vécu énormément d'atteintes à leur estime de soi, qui ont été victimes d'abus, de violence, de traumatismes, qui ont été victimes de dénigrement, qui n'ont pas eu accès aux mêmes chances que tous, et ces éléments-là ne se reconstruisent pas simplement par des formations techniques, ce sont des éléments qui mettent des années, des années à être reconstruits. Et je vous citerai tantôt un exemple qui permettra peut-être de mieux saisir... parce que j'ai, dans ma circonscription, des gens qui sont venus témoigner de leurs difficultés à ce niveau-là.

Alors, on a deux grandes parties dans ce projet de loi. La première partie... et, là encore, je suis très contente que le ministre ait cité les pays scandinaves en référence par rapport à des politiques d'intégration à l'emploi, mais je ne peux pas m'empêcher de faire un parallèle entre ce projet de loi et le projet de loi n° 10, auquel... je vois certains de mes collègues qui ont assisté à certaines périodes du projet de loi n° 10 — également du côté de l'aile gouvernementale — où on a vraiment choisi de centraliser, et, quand je lis la première partie de ce projet de loi, il y a clairement une volonté de centralisation des décisions, centralisation qui, par elle-même, éloigne la proximité avec les caractéristiques locales, qui fait perdre certaines caractéristiques locales. Et je peux vous parler de ma circonscription, de Taillon, qui est à Longueuil, où le revenu moyen est tout à fait dans la moyenne du Québec, mais où j'ai quelques poches de... en fait, quelques zones qui sont très, très privilégiées et de nombreuses poches de pauvreté importante et de pauvreté, je vous dirais, profonde qui ne se régleront pas simplement par le fait d'avoir un emploi et pour lesquelles la crainte d'avoir la perte de cet emploi et une détérioration de leurs conditions, qui les mettent déjà dans un haut niveau de vulnérabilité, bien, ça crée encore davantage d'anxiété, d'angoisse et de préoccupations.

• (15 h 10) •

Donc, je veux vraiment qu'on soit très sensibles au fait que plus on éloigne les décisions en ce qui concerne les éléments de pauvreté, plus on les éloigne du centre, de la proximité du lieu où les gens la vivent, plus on s'expose à être décalés par rapport à la réalité que ces gens-là vivent. C'est vrai en emploi, c'est vrai en éducation, c'est vrai en santé aussi, il y a des réalités différentes, il y a des raisons différentes. J'ai fait une tournée, cet été, avec les policiers de la circonscription de Longueuil, un vendredi soir. Je peux vous dire qu'il y a des secteurs où c'était la prostitution à Longueuil qui était prévalente; à d'autres, c'était la violence; à d'autres, c'était la toxicomanie.

Alors, il y a des enjeux différents, et je pense que, quand on centralise tout ça, ça devient très difficile pour les gens de pouvoir apporter des solutions plus précises à des contextes qui sont vraiment plus sous-régionaux et, parfois, même sous-locaux.

Donc, dans cette première partie, je trouve que la centralisation amène une zone de préoccupation qui est tout à fait justifiée. En ce qui concerne l'ensemble de notre préoccupation... et, pour illustrer tout ça, bien je vous dirais que, dans cette première partie, le fait que les membres issus des milieux communautaires et éducatifs perdent de leur importance dans les comités régionaux et que la présence de représentants, par exemple, du ministère de l'Enseignement et de l'Éducation supérieure, dans le même esprit... également le fait qu'on abolisse la présence de membres du ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion, c'est préoccupant. C'étaient des membres qui étaient non votants, mais c'étaient quand même des membres qui témoignaient de certaines populations avec des besoins distincts, des besoins particuliers et qui, au niveau de l'accès à l'emploi, ont des caractéristiques particulières auxquelles il faut pouvoir prêter oreille attentivement. Et là, vraiment, on élimine, on évacue des voix qui avaient leur raison d'être, des voix qui traduisaient des besoins de nuancer et d'améliorer nos besoins et surtout les besoins de la population, parce qu'on est là pour ces personnes.

Alors, je voudrais également qu'on soit très attentifs — et j'y reviendrai un peu plus tard — mais à l'opinion des gens qui côtoient au quotidien ces personnes qui ont de la difficulté à accéder à l'emploi. Ma réalité de pharmacienne m'a amené à me dire : On est dans un milieu parfois qui est un peu plus favorisé ou un milieu qui ne prend pas toujours le pouls juste de ce que la population vit sur le terrain. Je vous dirais par contre que, comme pharmacienne communautaire, le fait d'être au contact, pendant plus de 20 ans, avec le public, avec la population, avec la population vulnérable, ça m'a permis d'entendre, de recevoir la dure réalité de ces gens-là. Je vous dirais qu'une dame que je trouvais qu'elle prenait... une dame âgée de 72 ans qui prenait trop de médicaments pour dormir et à qui je disais : Non, je ne peux pas renouveler vos médicaments pour dormir à tous les mois, parce qu'elle était toujours huit, 10 jours, parfois davantage, en avance, ça m'a pris des mois avant de pouvoir réaliser que, si elle revenait rapidement, c'est qu'elle avait un fils qui était en libération conditionnelle les fins de semaine qui revenait chez elle et qui lui volait ses médicaments et que, si elle ne les lui donnait pas, il la battait. Alors, ce sont des situations comme celle-là que les gens qui sont vulnérables vivent, et je pense qu'avant de porter un jugement il faut être très proche. C'est pour ça que je crois qu'on a le devoir, comme représentants du gouvernement, d'entendre tous les groupes qui sont très proches de ces gens-là, qui les côtoient au quotidien, parce que notre perception n'est pas leur réalité.

Et, dans ce contexte, je prends exemple du mémoire de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, que, malheureusement, la commission a refusé, jusqu'à maintenant, d'entendre, et je constate que ces gens-là, qui sont sur le terrain, des gens qui, dans leur quotidien, 35, 40, probablement 50 heures, parce que plusieurs d'entre eux font encore plus de temps que leur travail rémunéré... bien, ces gens-là, leur lecture, c'est qu'il y a moins de 10 % des prestataires sans contraintes sévères à l'emploi qui sont en mesure d'intégrer le marché du travail sans un accompagnement important.

Alors, attention, on peut donner l'impression que les prestataires de l'aide sociale sont, en majorité, des gens qui devraient retourner au travail facilement si on leur trouvait du travail. Et ça, ce n'est pas ce que les gens qui les côtoient au quotidien nous disent, qu'ils nous écrivent et qu'ils veulent nous expliquer. Et je crois que nous devons — nous devons — sincèrement porter une attention importante à cette statistique : moins de 10 % des prestataires sans contraintes sévères à l'emploi sont en mesure d'intégrer le marché du travail sans un accompagnement important. Alors, est-ce que ce projet de loi vise ce 10 % de prestataires? Est-ce que c'est seulement celui-là qui va être touché par notre projet de loi? Je pense que nous avons un devoir de grande vigilance à cet endroit-là.

Je continuerais en voulant parler de la deuxième partie du projet de loi, deuxième partie qui a suscité, au niveau de ma circonscription, énormément de réactions, des réactions, encore une fois, de groupes qui côtoient au quotidien ces personnes, qui sont vulnérables et qui n'ont peut-être pas eu toute la même chance que certains autres dès leur naissance, et je vais prendre deux sous-groupes.

Alors, le CAP Longueuil, le comité d'action politique, regroupe plusieurs organismes, a émis un communiqué, mais plusieurs organismes communautaires de Longueuil ont voulu donner l'alerte, ont voulu nous dire : Attention à ce que vous vous apprêtez à faire. Et je vais en citer seulement quelques-uns, mais ils sont nombreux — j'en ai plus d'une dizaine — mais je vais prendre deux témoignages qui regroupent probablement des sous-groupes de patients particulièrement visés.

L'organisme D'un couvert à l'autre. Alors, D'un couvert à l'autre est un organisme qui accueille, depuis 15 ans, une centaine de patients atteints de schizophrénie et qui leur donne un petit travail, un travail modeste mais qui fait en sorte que ces gens-là ont un rendez-vous quotidien avec d'autres personnes, qu'ils ont un encadrement et qu'ils ont une forme de dignité à travers tout ça. Il y avait, pour ces gens-là, des repas communautaires qui étaient offerts, il y avait 150 personnes qui y allaient et qui y participaient depuis plusieurs années. Or, les coupures aux organismes communautaires ont fait en sorte que ces repas ont été supprimés. Et, en l'espace d'un mois, il y a deux patients qui ont été hospitalisés d'urgence. Probablement qu'il aurait pu y en avoir un certain nombre aussi, mais ces patients étaient stables depuis longtemps, sauf que le fait de ne plus avoir un rendez-vous quotidien, de ne plus avoir un repas garanti, eh bien, ça a amené deux hospitalisations. Et, juste parce qu'on doit être conscients de l'argent, et j'en suis consciente aussi, une journée d'hospitalisation pour ces patients correspond à 1 600 $, 1 600 $. Avec ce montant, on pouvait donner un repas 365 jours par année à ces personnes. Alors, on a des choix à faire et, parfois, on pense économiser, et l'impact final n'est vraiment pas celui qu'on souhaitait.

Donc, des patients schizophrènes, atteints de schizophrénie, alors, je ne sais pas, dans la politique, est-ce qu'on vise ce type de patients ou s'ils sont systématiquement exclus. On sait que ces patients-là ont des périodes où ils sont relativement stables et puis d'autres périodes où, vraiment, ils sont en décompensation. Alors, est-ce qu'ils entrent dans le 10 % que l'Ordre des travailleurs nous indique ou bien s'ils sont ailleurs? Alors, ça, ce serait important de rassurer les gens.

Le deuxième groupe est vraiment un groupe qui représente principalement des patients, des personnes... le Centre des femmes de Longueuil, le Carrefour pour Elle, L'Entraide chez nous, des lieux qui accueillent des gens qui sont vraiment défavorisés, des femmes qui ont été victimes de violence ou tout simplement qui ont eu la malchance de naître dans un contexte qui est défavorable pour elles.

• (15 h 20) •

J'ai accueilli six de ces femmes-là la semaine dernière à mon bureau de circonscription, et une d'entre elles me disait qu'elle avait une grande fille de 18 ans — et 18 ans, c'est un âge fatidique — une jeune fille de 18 ans avec un lourd handicap, un lourd handicap mental, donc elle devait prendre soin de cette jeune fille, et elle-même était prestataire de l'aide sociale. Alors, elle se demandait si elle serait visée par le projet de loi parce que, de toute évidence, elle sentait qu'elle devait prendre soin de sa fille de 18 ans à la maison, que socialement on avait mis fin au soutien qu'elle pouvait avoir. Et elle se disait : Mettons que je suis considérée apte au travail — parce que, si on regarde son contexte, c'est sûr qu'elle était apte au travail — mais est-ce que je vais devoir accepter un emploi qui pourrait me conduire à plusieurs dizaines de kilomètres de la maison? De quelle façon je vais me trouver une gardienne? Est-ce que c'est avec 623 $ par semaine que je vais devoir en plus payer une gardienne pour ma fille de 18 ans? Et, une fois que j'aurai un travail, que j'aurai un emploi, est-ce que, cet emploi-là, je serai tenu de l'accepter, peu importe le contexte dans lequel j'y travaillerai? Est-ce que l'employeur que j'aurai saura faire la distinction? Est-ce qu'il ne profitera pas de ma vulnérabilité dans ce contexte-là? Et je vous avoue qu'il y avait énormément de détresse dans son message, et ça nous donne la mesure de la complexité des gens qui actuellement sont prestataires de l'aide sociale, et qui n'ont pas nécessairement d'emploi et qui pourraient être considérés à première vue comme aptes au travail mais dont l'ensemble du contexte social fait en sorte que ces gens-là rendent service à la population, jusqu'à un certain point, nous rendent service parce que, si sa jeune fille de 18 ans avec un lourd handicap mental devait être mise en institution, ça nous coûterait finalement beaucoup plus cher que la prestation d'aide sociale que le gouvernement lui verse à ce moment-ci.

Alors, je me fais un peu la voix des organismes communautaires. Et ils sont très inquiets sur le stress chronique des femmes en situation de pauvreté, autant au niveau physique que mental. Ils trouvent que cette mesure peut amener des difficultés pour la conciliation travail-famille et ils trouvent également que, dans certains cas, certaines femmes pourraient être mises en situation de grande vulnérabilité, ne serait-ce qu'au niveau du transport, mais aussi au niveau du fait que, si, pour une raison ou pour une autre, elles devaient quitter cet emploi soit parce qu'il y a un harcèlement au niveau du travail... eh bien, qu'elles seraient doublement pénalisées, puisqu'on a prévu, dans le projet de loi, des pénalités pour les femmes et les hommes qui quitteraient leur emploi alors qu'elles feraient l'objet de ce projet.

Le Président (M. Hardy) : Merci, Mme la députée de Taillon. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Alors, s'il n'y a pas d'autre membre... M. le député de Saint-Jean.

(Consultation)

Le Président (M. Hardy) : Ah! vous voulez déposer la motion.

Une voix : C'est ça.

Le Président (M. Hardy) : Ah! O.K. M. le député de Rimouski...

Une voix : On va finir par se comprendre.

Le Président (M. Hardy) : ... — oui — vous avez une motion préliminaire à déposer.

M. LeBel : Je ne comprends pas vite, hein? Ça fait juste deux ans que je suis député puis j'ai encore de la misère, des fois, à savoir quand est-ce qu'il faut déposer les motions. Mais ça va finir par y arriver, je suis certain.

Oui, je voudrais déposer une motion en vertu de l'article 244, s'il vous plaît. Je vous lis la motion? C'est ça que je fais?

Le Président (M. Hardy) : Oui, s'il vous plaît.

Motion proposant d'entendre Action populaire Rimouski-Neigette

M. LeBel : «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible l'Action populaire Rimouski-Neigette.»

Le Président (M. Hardy) : Donc, on va prendre votre motion. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 24)

(Reprise à 15 h 27)

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Je vous rappelle que vous avez, à titre d'auteur, M. le député de Rimouski, 30 minutes pour nous la présenter, ensuite les représentants des groupes parlementaires ont aussi 30 minutes, finalement les autres intervenants ont 10 minutes. Je vous rappelle que ce temps de parole est pour une seule intervention. À la fin des interventions, nous mettrons la motion aux voix.

M. le député de Rimouski, à vous la parole.

M. Harold LeBel

M. LeBel : Merci, M. le Président. C'est ça, j'essayais de voir si on pouvait...

Des voix : ...

M. LeBel : Qu'est-ce que j'ai fait encore? Le ministre me trouve drôle, ça va bien, ça va bien se passer. Non, mais, sérieusement, ce que j'essaie de voir... je suis très content de ce qui se passe dans notre région au niveau de la mobilisation, des gens qui s'impliquent, puis, comme je viens un peu de ce milieu-là aussi, de l'action communautaire, je pense qu'on aurait intérêt à entendre le travail terrain, des gens qui sont sur le terrain, qui rencontrent du monde qui vivent la pauvreté, qui sont quotidiennement avec eux autres puis qui essaient de défendre leurs intérêts.

À un moment donné, j'avais parlé... à une certaine époque, il n'y a pas très longtemps, j'étais critique de la lutte à la pauvreté, et c'était le même ministre qui était devant moi, toujours aussi gentil, et on avait discuté ensemble, entre autres, d'action communautaire avec le SACAIS dans l'étude de crédits — je ne sais pas si vous vous souvenez — puis je disais que c'était important d'avoir des groupes de défense de droits. Des fois, c'est un peu fatigant parce qu'ils viennent devant les bureaux puis ils font du bruit, mais... surtout quand tu es au pouvoir; à l'opposition, ils viennent moins souvent.

Une voix : ...

M. LeBel : On les encourage à aller chez vous.

Des voix : Ha, ha, ha!

• (15 h 30) •

M. LeBel : Mais c'est des groupes qui sont importants parce qu'ils défendent vraiment les intérêts des personnes, ils les renseignent sur leurs droits, sur les services qu'ils pourraient avoir accès. Puis c'est des renseignements que tu n'aurais pas ailleurs. C'est organisé par la communauté, c'est des gens qui se sont pris en main.

Je me rappelle, le ministre avait dit à l'époque... il m'avait dit ça d'une façon très correcte, là, mais il dit : Vous ne trouvez pas, des fois, que ces groupes-là, peut-être, ils ont tendance à monter la tête des gens sur... C'est sûr que, quand on essaie de défendre les droits des personnes puis quand les personnes décident de s'impliquer dans un processus pour défendre leurs droits, bien là ça peut être fatigant, parce qu'il faut que tu trouves des réponses puis il faut que tu cherches un peu la justice là-dedans, mais, ces groupes-là — le groupe que je propose d'entendre, Action populaire Rimouski-Neigette, c'est un groupe comme ça — il y en a partout.

Récemment, j'étais avec mon collègue de Saint-Jean, on était à Chicoutimi — un adon, pourquoi qu'on était à Chicoutimi?, on passait par là — on est allés à Chicoutimi pour... et on a rencontré des groupes là-bas qui... entre autres, une table qui s'appelle la Table de lutte contre la pauvreté de Chicoutimi, et, juste pour vous montrer ce qu'ils peuvent produire, des affichettes comme ça qu'ils installent un peu partout pour lutter contre la pauvreté, comme : maladie, faillite, fermeture d'usine, divorce, harcèlement, accident, on est tous à l'abri de la pauvreté, le croyez-vous?, pour montrer que ce n'est pas vrai, que tout le monde... il n'y a personne qui est à l'abri, un jour ou l'autre, à partir d'une maladie, d'une faillite, de vivre la pauvreté. Donc, l'affichette, c'est : «La pauvreté dans une famille, c'est héréditaire, le croyez-vous?» Ça aussi, on entend souvent ça, que l'aide sociale, des fois, c'est de génération en génération puis qu'il faut casser cette affaire-là au plus sacrant.

Ça fait que c'est des préjugés, et ce groupe-là travaille pour lutter contre les préjugés à Chicoutimi, c'est la même chose pour ce qui est d'Action populaire Rimouski-Neigette, puis il y en a dans toutes vos régions, là, des groupes comme ça, qui sont financés en partie, parce qu'ils sont souvent sous-financés, parce que, la défense de droits, on ne reconnaît pas ça facilement. On reconnaît beaucoup les groupes qui interviennent en santé directement par des services, mais la défense de droits, c'est un peu plus difficile parce qu'on finance des gens qui peuvent être tannants éventuellement puis on trouve ça plus difficile, ce qui fait que les groupes de défense de droits sont souvent... déjà que les groupes communautaires en général sont sous-financés, les groupes de défense de droits sont encore plus sous-financés et sont en queue de peloton.

Mais actuellement je peux vous dire qu'ils ont beaucoup, beaucoup de pression sur eux autres, beaucoup de demandes, entre autres, au niveau de l'aide sociale, parce que c'est une loi qui est hypercompliquée. Le sous-ministre — parce que c'est le même sous-ministre qui y était quand j'étais là aussi — avait dit à un moment donné en commission, parce que je posais la question... Des fois, tu veux t'informer sur un élément de la loi, je ne sais pas, moi, la vie maritale ou... tu as plein de choses qui sont un peu compliquées à comprendre, là, puis tu as plein d'affaires, c'est une loi assez compliquée. Et le sous-ministre avait dit : La loi est compliquée tellement que, dans le ministère, maintenant tu as des réseaux, tu as des spécialistes de parties de loi. Ça fait que, si tu appelles, je ne sais pas, moi, au CLE à Rimouski puis tu parles d'un élément de la loi, ça se pourrait qu'il n'y ait personne à Rimouski qui peut te répondre parce que c'est une partie plus spécialisée, il faut qu'ils t'envoient à un centre d'appels à Mont-Joli ou ailleurs au Québec où, là, tu vas tomber sur un spécialiste de cette partie de loi d'aide sociale.

C'est juste pour montrer que la loi, année après année puis réforme après réforme, la loi s'est compliquée puis ça s'est, oui... je ne dirai pas le mot, là, mais ça s'est vraiment pas mal compliqué, mettons, et ce qui fait que les gens sur le terrain, les gens en région, les gens qui vivent des situations de pauvreté, qui n'ont pas voulu ou qui sont là à défendre leurs droits, bien ils se virent de bord puis ils vont... première réaction, c'est d'aller vers ces groupes-là.

Il y en a deux à Rimouski que je connais bien, là. Le Comité logement, qui donne de l'information sur le droit au logement, les baux, favorise les échanges, défend les personnes plus vulnérables, dont les femmes et les enfants qui vivent des problématiques avec leurs propriétaires, il accompagne les personnes lorsqu'elles doivent se rendre à la Régie du logement. En passant, la Régie du logement, chez nous, on vient de couper la seule personne qui travaillait là. Il y a une personne à temps partiel qui travaille entre Rivière-du-Loup, Rimouski puis, des fois, Matane, parce que... en tout cas, ils n'ont pas réussi à remplacer un congé de maternité. Je dis ça, là, mais ça fait partie encore un peu de... quand je dis qu'il faut comprendre les réalités région par région, c'est des réalités qu'on doit savoir ou qu'on doit... En décentralisant un peu nos actions, on permet que ces actions-là justement soient un peu plus collées aux réalités de nos régions.

L'autre groupe, celui que je vous propose d'entendre, c'est Action populaire Rimouski-Neigette, qui est un organisme travaillant à l'amélioration des conditions de vie et à la défense des droits des personnes assistées sociales, des sans-emploi et des personnes économiquement défavorisées. Par exemple, il informe sur les procédures de l'aide sociale, offre de l'aide pour remplir les formulaires et défend les personnes qui se retrouvent dans des circonstances problématiques. Les agents d'aide sociale ne sont pas toujours disponibles, il est donc important qu'un organisme puisse accompagner les personnes dans leurs démarches, sinon les procédures peuvent être mal suivies, et les documents, remplis incorrectement, ce qui peut entraîner des accusations de fraude portées contre les bénéficiaires. Et ça, on l'a vu souvent, des gens... pas pour mal faire, mais la loi est tellement compliquée que, dans leurs déclarations, certains oublis... puis je suis certain que, les autres députés, vous avez vu ça aussi dans vos comtés, parce qu'ils viennent dans nos bureaux de comté aussi, ces gens-là, et on réussit à intervenir pour corriger la situation, mais des fois il est trop tard, et les gens sont pris avec des pénalités à payer et qui ne font que les renfoncer encore davantage dans la pauvreté.

Un groupe comme Action populaire Rimouski-Neigette pourrait nous donner des éclairages différents sur l'impact du projet de loi n° 70 et pourrait aussi nous... Oui, je vais faire une parenthèse là-dessus avant d'aller là. Quand je parle de problématiques régionales, tu sais, quand on... Tantôt, j'expliquais qu'est-ce qui arrive avec les acériculteurs. Tu sais, ça ne vient pas du champ gauche, là, ce n'est pas un élément qui ne touche pas la réalité économique puis qui ne touche pas la réalité du projet de loi que vous déposez.

À un moment donné, le ministre m'avait dit aussi qu'il fallait comme resserrer... Ça, c'était l'autre ministre, ce n'était pas vous, c'était le député de Louis-Hébert. Il m'avait dit que ce projet de loi là, c'était aussi pour éviter le travail au noir, puis là je prenais l'exemple de quelqu'un qui est au Témiscouata qui pourrait aller travailler au Nouveau-Brunswick puis revenir puis... parce qu'il... de l'autre côté de la frontière. Tu vas à Edmundston, puis tu reviens, ce n'est pas bien, bien compliqué. Je me demandais comment ce projet de loi pourrait éviter tout ça, puis là il y avait toute une procédure qu'il m'expliquait. Mais c'est sûr que, demain matin — dans le Témiscouata, là, c'est 250 acériculteurs, des producteurs acéricoles — tu déstabilises ces entreprises-là, c'est sûr que c'est moins de jeunes qui travaillent dans ces industries-là, c'est sûr que c'est des jeunes qui avaient accès à certains revenus qui ne pourront pas avoir accès à ces revenus-là dans cette région-là, c'est sûr que c'est des jeunes qui, avant d'arriver à l'aide sociale, ils vont se débrouiller, parce que c'est des gens qui se débrouillent chez nous, ils vont trouver des façons de... et on ne peut pas faire abstraction de tout ça. On ne peut pas faire abstraction de municipalités dévitalisées qui sont comme... avec la fin des CLD puis des CRE, qui n'ont plus accès à des moyens pour développer leur économie, développer des petits commerces, faire des petites productions agricoles. Tu dévitalises ça, tu donnes moins à l'organisation, à ces gens-là, bien c'est moins d'entreprises dans ces régions-là, moins de monde qui travaille.

Les gens qui travaillent en forêt, en forêt privée, c'est du monde qui travaille très fort. Bien, souvent, les revenus qui vont là, qu'est-ce que ça leur permet, ça permet à engager des gens dans leurs communautés pour faire de l'entretien, pour la machinerie, pour faire... ça fait rouler. Tu coupes dans la forêt privée, tu coupes dans les emplois, c'est des gens qui vont perdre ces emplois-là. Ils ne peuvent plus engager du monde dans leurs municipalités, c'est de l'argent de moins dans leurs municipalités, c'est des gens qui ont moins accès à des emplois. Et, à un moment donné, avec les nouvelles règles de chômage, qui sont de plus en plus compliquées, bien, comme disait l'affichette de Chicoutimi, c'est que ce n'est pas de ta faute, là, ce n'est pas parce que ton père, ton grand-père puis ton arrière-grand-père est à l'aide sociale... ça n'a aucun rapport, c'est que la situation économique te pousse vers ça, et là vers... d'aller jusqu'au bout du rouleau, le chômage, l'aide sociale. Et là c'est quoi, à l'aide sociale? Qu'est-ce que tu fais à l'aide sociale quand tu vis à... je ne sais pas, moi, tiens, je vais parler de mon village à Squatec, dans le Témiscouata? Tu sais, avec ce projet de loi n° 70 là, la seule façon, ça va être de sortir de là, d'aller ailleurs, retourner en ville ou je ne sais pas trop quoi.

Ça fait que ce n'est pas très encourageant et ce n'est pas très motivant pour les jeunes de chez nous de participer à ça. Ils vont essayer de se trouver d'autres façons de gagner leur vie pour essayer de rester dans leurs villages, rester proche de leurs parents, rester proche de leur réalité. C'est des gens fiers. Ça fait qu'on ne peut pas faire abstraction du peu de vision que le gouvernement a sur l'économie puis du peu de vision que le gouvernement a sur l'économie locale et régionale. Tu sais, quand l'ancien ministre de l'Économie disait que c'est sûr que ça fait mal, une entreprise qui part dans le village, parce que c'est le roi du village qui fait faillite, c'est sûr que c'est dur pour son orgueil... Quand tu es parlementaire puis tu es régionaliste, là, ça a beau venir de n'importe qui, tu... ça ne passe pas, là, ça reste un peu de travers dans la gorge, tu dis : Voyons donc! Ces rois du village là, pendant des années, c'est eux autres qui ont fait vivre le village, puis il y a une difficulté économique — puis, entre autres, dans le bois de sciage, on a vu ça souvent — et là le gouvernement, de haut, il dit : Ah! c'est le roi du village, c'est sûr que ça doit être dur pour l'ego, mais aïe! aïe! au bout de ça, là, c'est du monde, c'est des pères de famille qui perdent leurs jobs, c'est des familles, des jeunes qui vont déserter du village, c'est l'école qui va fermer.

• (15 h 40) •

Quand je parle d'environnement de la personne, c'est ça, puis c'est ce qu'on ne voit nulle part, là. On prend la personne à l'aide sociale comme une personne qui est la même personne. Qu'il vienne de la Gaspésie ou de l'Abitibi, ou de Laval, ou de Trois-Rivières, ou de Québec, du comté de Jean-Lesage, c'est la même personne, c'est la même affaire, c'est le même individu qu'on prend de la même façon, puis qu'on va encadrer de la même façon, puis qu'on va analyser de la même façon, puis qu'on va essayer de suivre ou d'aider de la même façon.

Ce que les gens d'Action populaire pourraient nous amener, c'est cette vision différente, parce que, je le répète, là, dans les régions, là, cette année, c'est la première fois qu'on voit des gens... un solde migratoire déficitaire dans toutes les régions périphériques, pas juste une ou deux, là, dans toutes les régions périphériques. On coupe les services de transport dans les régions. Tout ce qu'on mettait dans des fonds pour aider la concertation, entre autres, du milieu scolaire, la santé, les groupes communautaires, les municipalités pour lutter contre la pauvreté, pour faire des actions, pour soutenir des plateaux de travail, aider nos jeunes de chez nous, qu'on connaît bien, ça transitait par la CRE, cette concertation-là, on abolit tout ça. On abolit toutes ces structures-là, où on pouvait se parler en région puis avec des moyens. On abolit la Commission jeunesse, qui avait un peu d'argent, qui avait un petit montant d'argent, chez nous — je pense que c'était 500 000$ — pouvait soutenir des projets jeunes dans des municipalités, une patinoire, refaire, tu sais, la vie, la vie dans nos communautés, essayer d'aider. Ça aussi, on décide qu'on coupe, on sabre là-dedans, puis après ça on se dit : Aïe! comment ça se fait que la région se vide? Comment ça se fait que des gens à l'aide sociale, ça augmente dans les régions? Comment ça se fait que les jeunes se cherchent de l'emploi autant? Bien, c'est parce qu'on a tout dévitalisé autour, on a tout déglingué ce qu'il y avait comme soutien autour de ces jeunes-là. Dans les écoles, les coupes dans les commissions scolaires... quand on coupe les orthopédagogues, quand on coupe... c'est des jeunes qui décrochent, qui se retournent, là. Puis là je parle du gouvernement du Québec, mais à Ottawa, avec les conservateurs, c'était aussi pire, là, sinon pire. J'ai hâte de voir, avec le gouvernement libéral, si on va comme corriger la situation. Mais tout ça, ça crée un paysage social puis économique en région qui n'est pas beau, ce n'est pas jojo, et qui fait qu'on échappe des gens puis on échappe, entre autres, nos jeunes.

Ça fait qu'il faut les aider au niveau de l'intégration à l'emploi, il faut les soutenir, il faut leur donner des formations. Pour ça, il faut arrêter de couper dans les commissions scolaires. Pour ça, il faut aussi soutenir les CPE. Tu en as encore aussi dans les centres de la petite enfance qui viennent lutter contre la pauvreté. On vient aussi comme désorganiser ces réseaux-là. Et il y avait beaucoup de jeunes femmes qui travaillaient dans ces réseaux-là. Ce qu'on me dit, c'est que la formation, entre autres, pour les... il y avait beaucoup de jeunes femmes qui s'inscrivaient, au cégep à Rivière-du-Loup, pour la formation en services de garde. Je peux-tu vous dire qu'actuellement ça les intéresse un peu moins? Quand elles regardent ce qui se passe avec les CPE, elles se disent : Y a-tu de l'avenir là? Pas sûr. Ça fait que les inscriptions baissent.

C'est des réalités vécues en région que les gens d'Action populaire Rimouski-Neigette pourraient peut-être venir nous expliquer, puis on pourrait comparer à ce qui est fait dans les autres régions du Québec, parce qu'il y a des groupes comme ce groupe-là dans d'autres régions du Québec. Ce qu'ils ont fait, disons... pour le retrouver, ce qu'ils ont essayé de faire, ces gens-là... C'est que c'est des gens qui accueillent des gens à l'aide sociale. Ça fait qu'ils ont fait un exercice qui est assez intéressant — je vais essayer de vous retrouver ça — où ils ont comparé, ils ont pris une situation puis ils se sont dit : Qu'est-ce que ça ferait s'il y avait le projet de loi n° 70, qu'est-ce que ça viendrait changer? C'est un genre d'étude de cas fictifs, mais c'est intéressant de voir un peu comment ça pourrait se faire. Je vais vous en lire quelques-unes, ça vaut la peine.

Un exemple — puis ça, c'est un exemple qui existe pour de vrai, là, qui est arrivé dans leur groupe : Nous pensons ici à l'histoire vécue d'une femme début quarantaine ayant une faible scolarité — secondaire non terminé — et deux enfants d'âge scolaire. Une rupture survient dans son couple, puisqu'elle a décidé de quitter son conjoint, qui avait des comportements nocifs — violence, etc. Cette femme n'a pas travaillé au cours des 10 dernières années, puisqu'elle s'est occupée de ses enfants et de sa mère malade — proche aidante. Son ex-conjoint travaille au salaire minimum et versera, donc, une faible pension pour les enfants. Le couple a toujours été en union libre, et madame n'a pas son nom sur les biens matériels acquis par le couple durant leur relation — auto, meubles, etc. Elle se retrouve donc sans ressource financière et matérielle. De plus, elle n'a pas droit à une pension alimentaire, puisque le couple vivait en union libre. Cette femme doit nécessairement faire une première demande d'aide sociale.

Difficultés ajoutées par le projet de loi n° 70 à la situation de la personne, selon le groupe : stress supplémentaire dans une situation de vie déjà extrêmement stressante; qu'est-ce qu'un emploi convenable pour elle, qui n'a pas de secondaire V, qui n'a pas été sur le marché du travail au cours des 10 dernières années? Possibilité de devoir déménager loin de son réseau social et de sa mère malade pour accepter un emploi ailleurs, sinon elle sera pénalisée sur le montant reçu. Elle doit aussi s'occuper de sa mère vieillissante et de ses enfants seule, le père ayant des problèmes de consommation, mais manque de temps pour le faire. Beaucoup de stress pour les enfants également. Devront-ils déménager de leurs milieux, si leur mère ne trouve pas un emploi, changer d'école... L'impact dans la communauté : augmentation des problèmes liés à la santé mentale de la femme; augmentation de l'utilisation des services sociaux et des ressources communautaires du milieu; augmentation du stress et des besoins de la mère vieillissante; augmentation de l'utilisation des services du réseau de la santé et des services sociaux ainsi que des organismes communautaires afin de répondre aux besoins de la mère vieillissante. C'est un cas d'une personne qui, on le voit, vient... le projet de loi n° 70 ne viendrait pas aider ce cas-là en tant que tel.

On en donne un autre : Pierre, un nom fictif, mais un cas réel. Pierre a 20 ans. Depuis son jeune âge, il vit dans une famille dysfonctionnelle. Il a subi la violence, la maltraitance physique et psychologique. Son frère a développé à son endroit une violence peu commune à tout lui passer sur le dos. Il a un TDAH qui l'empêche à être à ses affaires à l'école ou ailleurs. Il a complété sa sixième année primaire. Il a été pris en charge par la DPJ et le centre d'accueil avec des différentes expériences non adaptées à ses besoins. Sorti du centre d'accueil à 18 ans, il décide de se faire justice, refuse toute aide gouvernementale — consommation, vol, itinérance. Il développe une personnalité antisociale. Présentement, il a rencontré une personne significative, un intervenant différent, et il décide de reprendre sa vie en main. Si le projet de loi n° 70 était appliqué, en faisant sa première demande d'aide sociale, il ne pourrait répondre aux exigences de participation à une mesure d'employabilité. Comment faire pour reconnaître ses grandes difficultés au niveau de sa santé mentale, sa consommation et sa tendance antisociale? Pas de contraintes temporaires possibles à court terme. Son agent d'aide à l'emploi ne pourrait pas, en une seule rencontre, établir un plan d'intégration adapté réellement à sa situation si la personne n'expose pas clairement sa situation, ce qui est fréquent. Oui vers l'emploi, mais d'abord vers une rééducation. Quel soutien concret lui offrir dans l'offre de services sur son territoire? S'il va vers un organisme en toxicomanie, quelle est la possibilité d'aide financière pour l'hébergement? Comment lui proposer un programme de réinsertion sociale? Son stress, ses blessures passées, ses problèmes de santé mentale, de consommation et de comportement ne peuvent être servis par des objectifs d'intégration en emploi uniquement. Devant l'impasse des menaces de coupures, qui augmente sa détresse au lieu de stimuler sa motivation, cela aura des conséquences financières sur le système de santé et au judiciaire.

Je pourrais vous en lire plein et je pense que ça serait pertinent qu'un groupe comme eux autres puisse venir témoigner, témoigner de ces exemples-là, parce que je suis convaincu que la meilleure façon de sortir quelqu'un de la pauvreté, la meilleure façon d'aller chercher les gens puis de briser leur isolement, c'est par une action communautaire, avec des groupes communautaires puis une action régionalisée, c'est-à-dire avec des façons de faire qui sont conformes aux réalités de la région. C'est ce qu'on faisait avec les projets des alliances à la pauvreté, là. Puis, comme je vous rappelle, le Comité consultatif arrivait à la conclusion que, si on était arrivés à avancer dans la lutte à la pauvreté, c'est beaucoup à cause de ces alliances-là, c'est beaucoup à cause de ces interventions-là, interventions faites sur le terrain, à partir de gens qui se connaissent. Parce que c'est un peu ça aussi, hein? En région, on connaît notre monde. Dans les quartiers, c'est la même chose, les quartiers en ville, on connaît le monde puis on est capables d'aller les chercher, de les mobiliser. Ça fait deux ans que je fais ça.

Je vais à un groupe qui s'appelle Je raccroche, un groupe qui soutient peut-être une quinzaine de jeunes, peut-être même plus que ça, des jeunes, là, qui sont vraiment loin du marché du travail. Le gars qui s'occupe de Je raccroche, c'est un moyen «buddy», là, c'est quelqu'un qui s'amuse avec les jeunes, qui va les chercher et qui leur donne des orientations, des indications. Il va les aider, mais c'est un compagnon de route pour eux autres, là, c'est quelqu'un qui travaille avec eux autres puis qui est fier de leurs démarches puis que... chaque matin, il arrive à la salle de... parce qu'il y a un genre de salle, eux autres, là, à la commission scolaire. Ça fait qu'il arrive là, il les rencontre, puis, s'il sent que ça ne va pas bien, s'il y en a deux ou trois qui sont en détresse de quelque chose ou que... tu sais, il peut s'ajuster, tu sais.

• (15 h 50) •

Ça fait deux années que je vais. Et ils me demandent de discuter avec eux autres un peu de c'est quoi, la passion, c'est quoi, qu'est-ce qui va... Ils ont plein de questions sur la politique, sur la vie en général, mais c'est une façon de travailler avec eux autres. Là, on leur donne confiance. Quand j'y vais, moi, je les rencontre un en arrière de l'autre, puis je leur parle, puis j'essaie de voir puis de... je leur parle de ce qu'on fait ici puis comment... puis je pense que ça leur donne... ils ont impression que je ne viens pas... il n'y a pas de jugement, on travaille avec eux autres pour leur permettre de s'en sortir. C'est ça, l'action des groupes communautaires.

Ce groupe-là, Je raccroche, était financé par le fédéral, et, à un moment donné, les conservateurs ont lâché, et là ils sont tombés dans le creux de la vague, ils ne pouvaient plus accueillir personne. La pression était tellement forte dans la région, parce que les jeunes qui allaient là, dans ces groupes-là, ils ne se retrouvaient nulle part, bien c'est Emploi-Québec... c'est Québec qui a pris la relève, qui a réussi à trouver un peu d'argent pour financer l'organisme — je remercie le gouvernement d'avoir fait ça — mais ce n'est pas récurrent. Ça fait que, là, encore l'année prochaine, on ne sait pas trop où est-ce qu'on s'en va.

Il y avait deux autres groupes qui s'appelaient... un qui s'appelait Les Maraîchers du coeur. C'est des jeunes qui allaient travailler, puis qui cultivaient la terre avec d'autres, puis qui faisaient des légumes, puis tout ça. Ils cultivaient, en même temps ils discutaient de... tu sais, ça les sortait de l'isolement, ils pouvaient discuter un peu de leur situation. Il y avait un peu, là, d'argent qui venait avec ça. Ils se mobilisaient, puis ça donnait un peu un genre de tremplin pour faire d'autre chose, pour aller ailleurs, tu sais. Bien, ça, Les Maraîchers aussi, ça a été comme coupé. Ça fait que ces jeunes-là... puis là le gars qui est de Je raccroche m'avait dit : L'année où ils ont été obligés un peu de décrocher, ils ont été... ce qui est arrivé, c'est que, les jeunes qui allaient là, ils les ont retrouvés où? Dans la rue, dans la rue, la dope, la désolation. Ça fait qu'on a besoin de ces réseaux-là, on a besoin de ces réseaux-là pour se mobiliser.

C'est la même chose dans nos villages. Quand je dis à des gens : Quand tu interviens sur un projet de maintien d'activité sociale pour des jeunes, tu sais, la patinoire du village, c'est des petits montants d'argent, mais souvent ça va permettre à des jeunes, entre autres, de rester dans le village puis se mobiliser, puis se motiver puis d'embarquer sur des projets qui vont leur permettre de s'en sortir, de prendre confiance en eux autres.

Puis, comme je dis, ça, c'est ce que je vis, là, à Rimouski. Puis, il y a une trentaine d'années, j'étais animateur social dans le bout de Rivière-du-Loup puis je voyais la même chose, là. Quand tu vas dans une soupe... j'ai déjà animé des soupes populaires, bien, tu le vois. Quand tu animes la soupe populaire, les gens viennent manger, tu les vois, là, tu vois la personne, là, arriver, tu vois s'il y a un stress ou il y a une détresse. Comme animateur, là, tu le devines et là tu peux intervenir. C'est des actions qui semblent, des fois, pas très gouvernementales mais qui amènent plus de succès, souvent, qui permettent d'aller voir, de sortir le monde de l'isolement, puis de les reconnaître puis de travailler avec eux autres.

Ce groupe-là, avec d'autres, à Rimouski ont parti un genre de pièce de théâtre pour lutter contre les préjugés. Je suis allé à leur représentation. Ils font le tour des écoles, ils font d'autres présentations, puis les acteurs, c'est des gens qui étaient à l'aide sociale, là, qui ont embarqué dans ce processus-là puis qui viennent... puis, à travers la pièce, font valoir un peu leur situation. Ça aussi, c'est des... Puis les gens qui vont là se reconnaissent là-dedans, puis ça crée une dynamique qui fait qu'on permet à du monde de se réintégrer. C'est des initiatives populaires, des initiatives communautaires, citoyennes qui sont encouragées par l'ensemble de la communauté, et tout ça, avec la fin, là, des CRE puis des CLD puis... tout ça est laissé à l'abandon.

Un groupe comme Action populaire Rimouski-Neigette, comme j'ai dit, il y en a partout ailleurs, pourrait venir nous témoigner puis nous expliquer cas par cas, individu par individu, les cas les plus parlants qu'ils peuvent rencontrer et nous expliquer un peu l'impact... Parce qu'ils ont fait un maudit beau travail, là. Il faut voir leur mémoire, là. Je ne sais pas si le ministre a eu le temps de le lire, parce qu'il a été quand même envoyé... c'était... Il faut voir ce que c'est, là, pour ces gens-là, là. C'est des gens à l'aide sociale. Avec un animateur ou deux, ils ont assis tout le monde ensemble puis ils ont décidé de voir comment écrire ce mémoire-là. Ce n'est pas rien. Puis, à un moment donné, je suis allé les rencontrer puis j'ai décidé de... il me reste deux minutes, je vais l'expliquer, j'ai décidé de... Ils voulaient que je fasse un discours...

Le Président (M. Hardy) : ...

M. LeBel : 2 min 33 s. Ils voulaient que je fasse un discours.

Écoutez bien ça, M. le ministre, ce que j'ai fait. J'ai décidé de faire l'Assemblée nationale, ça criait un peu moins fort, je vais vous dire. Mais j'ai placé les gens, ceux qui vivaient la pauvreté. J'ai nommé un ministre dans la gang, je l'ai mis de l'autre bord, j'en ai mis deux, trois autour, puis je me suis placé comme président de l'Assemblée puis j'ai donné des règles de l'Assemblée, j'ai dit : Vous avez, chacun, tant de minutes pour poser la question, le ministre doit répondre en tant de minutes, vous avez des complémentaires. J'ai sorti mes cravates, j'avais une dizaine de cravates. J'ai mis une cravate à un : Toi, tu es le député de, le député de... Ça fait que, là, je me suis levé, j'ai dit : Vous, vous êtes le député de la cravate jaune, posez votre question au ministre. Et il a posé la question au ministre. Ça fait que chacun, la cravate barrée, la cravate... chacun a posé sa question au ministre. C'était assez intéressant de voir les questions, puis le ministre était pas pire aussi, il répondait en disant toujours que c'était la faute du PQ, ça fait qu'il avait trouvé la ligne, ça fait que, là... mais c'était bien, et j'ai pris ces questions-là, j'ai pris ces questions-là et j'ai transmis ça au feuilleton, et vous avez répondu aux questions, je ne sais pas si c'était vous ou c'était l'autre ministre, là, et j'ai ramassé les dizaines de réponses et j'ai redonné ça au groupe.

Et juste cette façon de faire là, ça les a mobilisés, ça leur a dit : On est capables, on est capables de défendre nos droits, on est capables de poser des questions au ministre, on est capables d'avoir certaines réponses. Et c'est ce qu'ils ont fait par ce mémoire qu'ils vous déposent actuellement. C'est des gens de coeur qui ont des réalités différentes, et je pense qu'on devrait être capables de les entendre et voir avec eux autres les conséquences directes du projet de loi sur la réalité des individus, sur la réalité du monde concrètement, cas par cas. C'est ce qu'ils font dans le mémoire. Je vous invite au moins à le lire, je pense qu'il y a quelque chose là à comprendre. Puis, si on n'a pas ce monde-là, si on n'a pas ces gens-là qui réfléchissent, qui accueillent ces gens, les gens qui vivent la pauvreté, si on n'a pas ces gens-là sur le terrain, je vais vous dire... n'importe quel gouvernement aurait un meilleur programme de lutter contre la pauvreté, si on n'a pas des gens mobilisés sur le terrain, des gens de coeur qui travaillent pour lutter contre la pauvreté, on n'y arrivera pas. Ça fait qu'on devrait les entendre...

Le Président (M. Hardy) : En terminant.

M. LeBel : ...de temps en temps, on devrait prendre le temps de les entendre. Et je vous garantis que, prendre le temps d'entendre Action populaire Rimouski-Neigette, vous reconnaîtrez beaucoup de groupes de vos régions là-dedans. Merci.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Rimouski. Avant de poursuivre la discussion sur la motion du député de Rimouski, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 58)

(Reprise à 16 h 4)

Le Président (M. Hardy) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons la discussion sur la motion du député de Rimouski. M. le ministre, la parole est à vous pour 30 minutes.

M. François Blais

M. Blais : Oui. Alors, merci, M. le Président, de me donner autant de temps que ça, vous êtes bien généreux, mais je n'en aurai pas besoin autant. J'ai écouté mon collègue d'en face. Ça m'apparaît très, très évident, là, qu'il y a beaucoup de méprise sur... je n'ai pas dit «de mépris», mais de méprise sur la nature même du projet de loi, sur la portée, ceux qui pourraient être affectés et de quelle façon ils le seraient. La seule façon de mettre à plat ces méprises-là, c'est de progresser, d'aller vers l'étude article par article. Ensuite, vous verrez bien qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites, hein, qui inquiètent le collègue mais qui n'ont aucune raison de l'inquiéter, parce que les choses ne vont pas du tout se passer de cette façon-là et ça ne fait même pas partie du projet de loi.

C'est pour ça, là, que je ne donnerai pas mon consentement à la proposition, là, qu'il nous fait aujourd'hui.

Le Président (M. Hardy) : C'est tout?

M. Blais : C'est tout.

Le Président (M. Hardy) : C'est tout. Bien, merci, M. le ministre. Maintenant, je vais passer la parole au député de Drummond—Bois-Francs. À vous la parole.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Oui. Alors, merci, M. le Président. Alors, bon, j'ai écouté ce que le député de Rimouski, dans son long verbatim... c'est surtout au niveau du discours sur les régions, ce qui est toujours très plaisant à entendre, puis c'est vrai qu'il y a des réalités régionales qui sont vraiment très différentes.

Par contre, ici, la motion est portée sur un groupe qui voulait... ce que je peux dire, qui voulait venir déposer son mémoire ici public en commission, qui n'a pas été pris. J'ai, moi aussi, des groupes qui ont été refusés, là, dans mon comté. Par contre, ce que j'ai fait, c'est que j'ai été les voir, puis je me suis assis avec eux puis je les ai écoutés. Puis, par les amendements qu'on amène, c'est un peu... selon ce que notre formation politique veut avancer, mais c'est un peu ce qui est un peu des chapitres ou des bouts de ces personnes-là que j'ai rencontrées que je dépose en amendements, c'est leur voix que je dépose.

Moi, je pense que j'ai un groupe similaire, qui est le RDDS, à Drummondville, qui vient vraiment en défense au niveau des personnes assistées sociales et je peux vous dire qu'ils font mais un très bon travail et oui, malheureusement, c'est un petit organisme que... moi, je peux le dire, là, qu'il est vraiment sous-financé, qu'ils font des miracles. Et souvent, justement, ça peut aider ces gens-là, parce que, la problématique de ces gens-là, souvent ils sont mal informés. Et, quand ils ont une meilleure information, souvent ils s'en sortent plus facilement. Puis, des fois, et malheureusement, on a un système qui est loin d'être parfait mais qui a des lacunes, puis ça fait en sorte que des fois ces gens-là tombent dans des failles.

Maintenant, je reviens à la motion. Je ne sais pas quelle est l'approche de l'opposition officielle. Maintenant, s'ils décident de déposer motion pour motion pour faire du temps, c'est leur choix, je veux dire, c'est l'approche, c'est tout à fait leur droit de le faire. Moi, par contre, j'aimerais...

M. LeBel : M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Oui, M. le député de Rimouski.

M. LeBel : Il y a une différence entre dire qu'on veut faire du temps et vouloir écouter les gens. Moi, je vais vous dire, l'idée, c'était d'écouter ces gens-là.

M. Schneeberger : Non, mais écoutez-moi, à la fin.

Le Président (M. Hardy) : Veuillez poursuivre, M. le député.

M. Schneeberger : Maintenant, bon, avec nos systèmes parlementaires, c'est tout à fait leur droit de le faire. Puis, par son intervention, et s'il en profite pour souligner des lacunes, c'est tout à fait leur droit de le faire.

Dans ce cas-ci, je vais appuyer la motion, parce que je pense que c'est des groupes qui, pour moi, m'ont aidé beaucoup. Maintenant, c'est sûr que, s'il y aurait d'autres motions comme ça qui s'éternisent, je n'appuierai plus... O.K., je veux être solidaire là-dessus. J'aurais peut-être préféré m'abstenir, mais moi, j'ai toujours dit qu'un député qui s'abstient est un député qui ne fait pas sa job. Alors, il faut prendre une décision. Alors, pour ce cas-ci, je vais appuyer la motion. Et puis je souhaite qu'on passe au vif du sujet. Merci.

• (16 h 10) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. La parole est maintenant au député de Saint-Jean pour une période de 30 minutes.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Moi, je trouve ça très intéressant, ce que le député de Drummond—Bois-Francs vient de mentionner, parce qu'effectivement on a tous des organismes comme l'organisme Action populaire Rimouski-Neigette qui oeuvrent dans nos circonscriptions, qui nous sensibilisent, qui sensibilisent la population mais qui nous sensibilisent aussi comme représentants de la population. C'est important aussi d'être sensibilisés, parce qu'on en a beaucoup.

Comme députés, avant d'être députés, on a chacun nos professions, on a nos métiers, on est spécialistes dans notre domaine, mais, comme députés, on est un peu, hein, des généralistes et on a la responsabilité de connaître et d'oeuvrer dans tous les domaines, et ce n'est pas toujours nos champs d'expertise. Donc, d'avoir des organismes comme Action populaire Rimouski-Neigette, dans le cas de notre collègue de Rimouski... non, mais je vois qu'il le sensibilise régulièrement — moi aussi, dans ma circonscription, j'en ai, bon, les autres en ont tous — donc, je trouve ça assez intéressant, assez intéressant qu'on les entende, parce qu'on n'a pas vraiment entendu d'organismes.

Nous, on aurait aimé avoir des consultations générales, on l'a mentionné, M. le Président, mais on n'a pas entendu beaucoup d'organismes qui sont directement sur le terrain, dans une région. On a entendu beaucoup de groupes nationaux, ce qui est très bien, parce qu'ils représentent des groupes des différentes circonscriptions, des différentes régions et nous arrivent avec un arrimage intéressant, mais je crois qu'il y a quand même quelques oublis, là, de certains groupes qui auraient dû être entendus pour justement, pour justement, pas juste qu'un... parce que nous aussi, on les rencontre individuellement, ceux qui n'ont pas été entendus, puis j'espère que le ministre en fait autant, mais d'entendre ici... premièrement, que ce soit enregistré, hein, que les citoyens puis les autres personnes puissent entendre ce que les groupes ont à dire, parce qu'un mémoire, c'est une chose, mais, quand on a la période d'échange, des questions et réponses à la fin, c'est intéressant parce qu'on peut approfondir certaines réflexions, certains commentaires, puis, on l'a vu, certains groupes avaient une position dans un mémoire mais ont pu raffiner davantage leurs opinions en posant des questions, puis finalement on a trouvé des consensus ou des terrains d'entente, si on peut dire ça ainsi.

Donc, je trouve ça quand même important et intéressant, surtout que, dans le cas de cet organisme-là, franchement, M. le Président, si vous n'avez pas eu l'occasion de regarder leur mémoire, là... c'est quand même un document de 49 pages puis ce n'est pas écrit sur le coin d'une table, là, on s'entend, là, c'est vraiment avec des études, avec des références et aussi un travail, là, de recherche. Donc, dans ce cas-ci, je crois que c'est un organisme qui peut effectivement nous amener un éclairage intéressant.

M. le Président, je vais juste mentionner quelques extraits, là, du mémoire pour être sûr qu'on... comme ça, les gens qui ne l'auront pas entendu pourront au moins entendre ça, parce qu'on a entendu que le ministre ne voulait pas les inviter en commission. Donc, au moins, ça restera dans le débat, ça restera dans le débat pour l'étude détaillée du projet de loi.

Donc, à la page 8 du mémoire, ils mentionnent : «[La] réflexion autour [des] statistiques et résultats d'une étude internationale.» Très intéressant, très important, cette section-là, parce que ça parle, justement... mais, je vais en mentionner, là, mais sur le nombre de gens à l'aide sociale, qui diminue, et les fameux jeunes, hein, les fameux jeunes qu'on veut aider à se sortir de l'aide sociale. Donc : «Les chiffres du [ministère] de novembre 2015 montrent qu'il y a d'année en année une baisse du nombre d'adultes prestataires. En novembre 2014, le Québec comptait 347 490 adultes prestataires d'aide sociale, alors que [le] nombre est passé à 339 405 l'année suivante. Pourquoi mettre en vigueur une loi punitive lorsque le nombre de prestataires est en baisse?»

C'est une bonne question. Bon, le ministre pourra peut-être mentionner que le nombre de jeunes à l'aide sociale, en ce moment, augmente, mais, dans l'espace-temps, ce n'est que depuis le retour au gouvernement du Parti libéral. Dans les tribunes médiatiques et à l'Assemblée nationale, l'ancien ministre a répété que sa réforme visait à aider les jeunes issus de familles ayant déjà reçu des prestataires d'aide sociale et briser le cirque... pas le cirque, le cycle de la dépendance intergénérationnelle. On l'a entendu tantôt, on en a parlé, de ça.

«Le nombre de jeunes prestataires serait de 6 200 sur [...] 17 000 nouveaux demandeurs. Toutefois, il nous semble qu'il manque une analyse approfondie des causes réelles menant à une première demande d'aide sociale des jeunes. A priori, le ministre ne cible qu'une seule caractéristique : le fait que son parent ait déjà eu recours à l'aide sociale. Ainsi, il nous semble disproportionné que l'ensemble des 6 200 jeunes par année fassent une demande dans une dynamique intergénérationnelle de dépendance à l'aide sociale. Certains parents ont eu recours à l'aide sociale de façon très transitoire, et nous sommes d'avis que plusieurs de ces jeunes sont des travailleuses et des travailleurs victimes de l'insuffisance de l'emploi qui en auront recours aussi de façon temporaire.»

Ce qu'il est important de mentionner... puis je pourrais faire référence à la lettre, M. le Président, que Serge Petitclerc, qui est porte-parole du Collectif pour un Québec sans pauvreté, a parue ce matin dans les médias, qui explique... puis je l'ai mentionnée lors du débat de l'adoption de principe aussi, cette argumentation-là, et j'aimerais ça que le ministre puisse nous en faire part, de ce qu'il pense de cette analyse-là.

Dans la vie courante, une personne qui est sur le marché du travail qui a un enfant, aussitôt l'anniversaire de 18 ans du jeune ou de la jeune en question... bien, si le jeune ou la jeune n'a pas d'emploi et est à la maison sans être aux études nécessairement, bien, le parent ou les parents vont continuer à subvenir aux besoins dudit jeune. Si les parents sont à l'aide sociale ou si la mère ou le père d'une famille monoparentale est à l'aide sociale, bien, le jeune, dès ses 18 ans, devra s'inscrire à l'aide sociale, parce que sinon il y aura une sanction sur le chèque d'aide sociale de ses parents ou de son parent, soit son père ou sa mère. Et est-ce que c'est normal, est-ce que correct?, on pourra faire le débat un jour, mais il y a donc une obligation, si on peut dire ça ainsi, institutionnalisée que le jeune, dès le jour de ses 18 ans, s'inscrive à l'aide sociale, à moins qu'il se trouve un emploi ou se rende aux études. Bon, s'il se rend aux études... bon, il l'est peut-être déjà, en train de faire son secondaire ou, du moins, de tenter de le terminer, mais, s'il se trouve un emploi, bien, ce n'est pas la journée de ses 18 ans qu'il faut s'en occuper.

Et c'est là que je reviens avec la réforme des carrefours jeunesse-emploi qui a été faite par le ministre. Actuellement, ce jeune-là en question, il a 16 ou 17 ans, il n'est donc pas à l'aide sociale, parce qu'il n'a pas 18 ans, et dans plusieurs régions, bien, il ne peut pas être aidé par un carrefour jeunesse-emploi. Donc, comment on peut faire en sorte pour que ce jeune-là soit retourne aux études ou se trouve un emploi avant d'arriver à l'aide sociale? Donc, il y a, selon moi, une mauvaise décision de la part du ministre d'avoir mis en place cette réforme des carrefours jeunesse-emploi. Donc, vous pourrez lire la lettre de Serge Petitclerc, ce matin, sur LeHuffington Post, qui était très intéressante, dans ce sens-là. M. le Président, moi, j'aimerais... puis d'ailleurs, dans leur mémoire, Action populaire Rimouski-Neigette mentionne et fait une très bonne analyse par rapport aux carrefours jeunesse-emploi et les impacts de la réforme du ministre actuel dans ce dossier-là.

M. le Président, je vais passer aux recommandations de l'organisme, comme ça nous aurons en tête ce que l'organisme a recommandé dans son mémoire : annuler l'obligation d'adhésion à l'emploi convenable et au plan d'intégration en emploi suivi de la pénalité financière; hausser les allocations et favoriser l'accès aux mesures de préemployabilité, la création d'emplois adaptés et le soutien au maintien en emploi; offrir la possibilité de bénéficier de l'aide sociale tout en étudiant à temps plein aux personnes qui souhaitent terminer leur secondaire et faciliter la poursuite des études postsecondaires; étendre la tenue statistique du ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale pour recueillir des données à long et moyen long terme sur le parcours qualitatif d'employabilité des participantes et des participants — autres facteurs que l'intégration en emploi suivant la mesure; considérer les véritables causes de la précarité d'emploi ou de l'insuffisance de revenus; tenir compte des données scientifiques et faire des études d'impact approfondies avant de mettre en place des lois punitives et de couper dans les services publics; prioriser la création d'emplois et la stabilité des emplois afin de diversifier les opportunités d'emploi de qualité; s'assurer de la qualification de la main-d'oeuvre, l'accès à l'éducation postsecondaire et les mesures favorisant le raccrochage scolaire... soient prioritaires pour soutenir l'ensemble des personnes sans emploi, travailleuses et travailleurs; favoriser les concertations régionales en lien avec le développement socioéconomique et en assurer la représentativité démocratique au sein de la Commission des partenaires du marché du travail; décentraliser le pouvoir du ministre concernant les besoins de main-d'oeuvre; favoriser la collaboration entre le... ça doit être le ministère de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur, de la Science et de la Technologie, qui a maintenant changé de nom, et le ministère du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale sans subordonner un à l'autre.

• (16 h 20) •

Réinvestir dans les centres de la petite enfance et l'école publique afin d'assurer la qualité des services éducatifs et l'accessibilité pour toutes et tous, sans surcharge du corps enseignant, avec des ressources adaptées pour les jeunes en difficulté; offrir la possibilité de bénéficier de l'aide sociale tout en étudiant à temps plein aux personnes qui souhaitent terminer leur secondaire; faciliter la poursuite des études postsecondaires; rendre accessibles les services d'aide à l'emploi à toutes les personnes sans emploi; valoriser la mise en place de programmes et d'interventions de longue durée permettant une aide adaptée et souple en fonction des besoins existants et souscrivant à un soutien dans toutes les sphères de la vie de la personne afin de maximiser les chances de réussite de son insertion professionnelle; rendre obligatoire la collaboration avec les différents ministères impliqués dans la réinsertion en emploi; réduire la lourdeur administrative et les cercles vicieux qui en découlent; faciliter l'accès au travail et permettre aux prestataires d'avoir plus de gains de travail; faciliter l'accès à l'aide sociale ou à un revenu minimum universel garanti; étendre la couverture des soins de santé accessibles... admissibles, pardonnez-moi, aux prestataires, après deux ans, à l'ensemble de la population; évaluer la pertinence d'abolir les catégories en rapport à l'existence de la contrainte à l'emploi et le faire en analysant les impacts en termes de coûts dans les différents ministères, pas seulement en termes d'économies de prestations.

Pour les jeunes spécifiquement, maintenir les services des carrefours jeunesse-emploi, respecter leurs missions et leurs particularités régionales; favoriser l'implantation des meilleures pratiques préventives dans l'ensemble des carrefours jeunesse-emploi du Québec; réinvestir dans les centres de la petite enfance et l'école publique — je l'ai mentionné tantôt, ils le répètent, ça doit être important, réinvestir dans l'école publique; offrir la possibilité de bénéficier de l'aide sociale tout en étant étudiant à temps plein aux personnes — ça aussi, on l'a mentionné.

Donc, quelques éléments importants de leurs recommandations. Donc, M. le Président, je pourrais mentionner beaucoup d'autres éléments, je sais qu'il me reste pratiquement 15 minutes, mais l'objectif, ce n'est pas d'étirer le temps, hein, c'est de faire entendre un organisme. Je comprends que, dans ce cas-ci, le ministre souhaite ne pas les entendre. Peut-être qu'à la lumière de ce qui a été dit par mon collègue de la CAQ, et ainsi que ma... par mon ajout, ma modeste contribution, peut-être que le ministre va réviser sa position, ce que nous souhaiterions, mais on va le laisser prendre sa décision en conséquence. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur la motion déposée par le député de Rimouski?

Une voix : ...c'est fini.

Le Président (M. Hardy) : C'est bien. Il n'y a pas d'interventions? Oui.

M. Turcotte : ...vous allez passer au vote, un vote nominal.

Mise aux voix

Le Président (M. Hardy) : Oui. S'il n'y a pas d'intervention, nous allons mettre aux voix la motion.

Le Secrétaire : Donc, sur la motion, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

Le Secrétaire : Mme Lamarre (Taillon)?

Mme Lamarre : Pour.

Le Secrétaire : M. LeBel (Rimouski)?

M. LeBel : Pour.

Le Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

Le Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

Le Secrétaire : M. Girard (Trois-Rivières)?

M. Girard : Contre.

Le Secrétaire : M. Fortin (Pontiac)?

M. Fortin (Pontiac) : Contre.

Le Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Pour.

Le Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

Le Président (M. Hardy) : Abstention.

Le Secrétaire : La motion est rejetée.

Le Président (M. Hardy) : La motion est rejetée. Donc, est-ce qu'il y a d'autres motions préliminaires?

Motion proposant d'entendre l'Ordre des
travailleurs sociaux et des thérapeutes
conjugaux et familiaux du Québec

Mme Lamarre : Oui. J'aimerais déposer une motion, s'il vous plaît, M. le Président. Donc, la motion, en vertu de l'article 244 : «Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec.»

Le Président (M. Hardy) : Merci. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 16  h 24)

(Reprise à 16 h 28)

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons nos travaux. Mme la députée de Taillon, qui êtes l'auteur de cette motion, vous avez 30 minutes pour nous la présenter.

Mme Diane Lamarre

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, je vous remercie d'accepter, là, de recevoir mes commentaires sur cette motion en vertu de l'article 244, qui vise finalement à élargir le nombre d'organismes que nous recevons dans le cadre de nos travaux. Je dois vous dire que nous l'avons déjà utilisée dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 20, où nous avions demandé à entendre la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec en lien avec le dépôt du projet de loi n° 20, qui visait finalement à améliorer l'accès au système de soins, et que le fait d'entendre quelques organismes supplémentaires — dans ce cas-ci, on avait entendu la FMOQ — avait apporté un éclairage très constructif.

Le dépôt de ma motion — et je le dis vraiment très sincèrement — dans un projet de loi qui porte comme titre Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, un projet de loi dont toute la deuxième partie vise les prestataires de l'aide sociale... eh bien, qu'on exclue... ou qu'on ait jugé non pertinent d'entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, ça m'étonne, ça m'étonne beaucoup, et j'espère qu'on aura l'occasion d'entendre les motifs qui justifient... Tantôt, le ministre nous a dit qu'il avait des explications à nous fournir. Bien, j'aimerais bien entendre les motifs qui justifient le refus d'entendre un ordre professionnel.

• (16 h 30) •

Et, je le redis, là, l'Ordre des travailleurs sociaux... bien, d'abord, les travailleurs sociaux, ce sont les gens qui côtoient les gens qui ont des problèmes sociaux, et, de toute évidence, les prestataires de l'aide sociale sont des gens qui vivent des difficultés au niveau social.

Et l'autre groupe, toujours sous cet ordre-là, c'est l'ordre des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, et, là aussi, on sait qu'il y a énormément de problèmes qui se concluent par finalement la mise... je vous dirais, le fait d'avoir accès à des prestations d'aide sociale qui relève de problèmes conjugaux, de problèmes familiaux, d'antécédents familiaux et de contextes conjugaux difficiles. Alors, il m'aurait vraiment paru, et je le crois encore et j'en fais encore une demande très, très sérieuse et très formelle au ministre, que, d'entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, il me semble que ces gens-là auraient eu une contribution particulière, d'autant plus qu'ils ont une mission qui reflète, justement, cette pertinence d'être un peu, jusqu'à un certain point, des conseillers de l'État tout en étant au service de la protection de la population et qu'ils ont une expérience très intense et une analyse, également, de par leur formation, une analyse des facteurs qui contribuent à ce que les gens soient bénéficiaires de cette aide sociale, mais aussi des enjeux sociétaux qui conduisent la population à être dans une situation comme celle-là. Et je redis — je regarde sur leur site, là — les valeurs : le respect de la dignité de tout être humain, des droits des personnes, des groupes et des collectivités, du principe d'autonomie de la personne, du droit de tout individu en danger de recevoir assistance et protection selon ses besoins, ainsi que les principes de justice sociale. Il me semble que tous ici, dans cette salle, on a ce désir, cette volonté, par nos différentes actions — et le projet de loi n° 70 ne fait pas exception à ça — de travailler à une meilleure justice sociale mais en même temps de bien tenir compte de l'environnement.

Et tantôt j'entendais le ministre favoriser l'autonomie de la personne. Moi aussi, je crois qu'on doit favoriser l'autonomie de la personne. C'est juste que l'action qui est préconisée par le projet de loi n° 70 m'apparaît arriver au moment d'un parcours de vie où il y a déjà beaucoup de cicatrices qui ont été enregistrées et où ce n'est pas simplement la recherche d'un emploi qui va faire la différence et que même le fait d'occuper un emploi pendant un an ne nous donne pas les garanties que les gens vont vraiment retrouver une confiance en eux et une estime de soi qui va leur garantir la pérennité au niveau de cet emploi-là — ou, en tout cas, le goût de continuer — la confiance en soi pour pouvoir garder un emploi, pour pouvoir accéder à des promotions, pour pouvoir finalement améliorer leur autonomie.

Alors, je pense que l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec a vraiment quelque chose à nous apporter. Je voudrais vraiment comprendre pourquoi on a... comment, sur quels motifs on a pu exclure la représentation de ce groupe-là.

Dans les valeurs de cet ordre, il y a aussi la croyance en la capacité humaine d'évoluer, de se développer. Alors, moi, je pense que c'est exactement... le projet de loi n° 70 s'inscrit, je pense, dans une volonté d'aider les gens, et peut-être que, sous cette volonté-là, le moyen choisi n'est pas le bon, ou est peut-être perfectible, ou doit peut-être être complété par des mesures en amont et des mesures en aval de ce qu'on a prévu, et donc que l'éclairage de l'Ordre des travailleurs sociaux serait certainement pertinent. Et, la reconnaissance de la nécessité de percevoir et de comprendre l'être humain en tant qu'élément de systèmes interdépendants et potentiellement porteurs de changements, eh bien, là aussi, je pense que nous avons tous des formations et des expériences de vie mais qu'il y a des gens qui ont une certaine expertise dans cette capacité de comprendre l'être humain, et les systèmes indépendants, et la façon dont nos systèmes de soutien sociaux ont leur influence, l'impact qu'ils ont sur l'être humain et sur une meilleure compréhension des impacts.

Alors, je ne doute pas de la bonne foi de nos travaux et de ce que nous espérons faire, mais je pense qu'il y a des gens qui ont des compétences plus avancées que nous comme parlementaires et je pense qu'on doit absolument entendre ces gens-là et recueillir le fruit de leurs expériences, de leur travail au quotidien, mais aussi... et je crois sincèrement que, dans ce domaine-là aussi, il y a des données scientifiques, il y a des données probantes, il y a des données qui ont été évaluées, il y a des expériences qui ont été tentées ailleurs et il y a des expériences qui ont porté fruit, il y en a d'autres qui ont été moins réussies.

Et donc, dans ce contexte-là, je suis convaincue qu'on aurait intérêt à accueillir l'Ordre des travailleurs sociaux. C'est une heure, en général, les présentations, ce n'est pas très long, et il me semble qu'on se prive d'un éclairage tout à fait pertinent.

Alors, je vais donner quelques éléments de leur mémoire en espérant peut-être... tantôt, j'en ai donné un dans ma première présentation, mais je veux vraiment en donner quelques-uns. Il n'y en a pas beaucoup, il y en a six, mais je crois qu'en les lisant on voit très bien toutes les compétences et également le vécu que ces personnes, ces professionnels ont avec ces groupes de personnes chez qui on veut favoriser l'emploi.

Donc, leur premier thème précise : Un projet de loi qui fragilise davantage des personnes déjà vulnérables. Je suis sûre que ce n'est pas ce qu'on souhaite, personne, mais je pense que, quand un ordre professionnel nous donne cette alerte-là, on a un devoir de l'écouter et de l'entendre. Alors, parmi les éléments, l'individualisation d'une problématique sociale... Et je crois qu'on a... moi, ça m'a pris un certain temps, je vais vous dire, avant de réaliser qu'effectivement la pauvreté n'était pas un choix que les gens faisaient, que c'était vraiment la somme de contextes sociaux dans lesquels ils arrivaient, dans lesquels ils naissaient, dans lesquels ils grandissaient, et je crois qu'on a, on le voit actuellement... Souvent, on va dire qu'on vit dans une société qui est plus individualiste. Alors, je crois qu'on a à faire une démonstration et une éducation de notre responsabilité collective, de l'importance de la justice sociale si on veut amener l'égalité des chances.

Et j'ai beaucoup aimé tantôt quand le ministre a cité les pays scandinaves. Je pense que ce sont des modèles de pays où on affirme clairement, régulièrement la valeur ajoutée de la mise en commun, la valeur ajoutée du bien commun. Et, je vais vous dire, un des éléments qui m'apparaît me faire craindre, c'est qu'actuellement nous ne sommes pas dans un contexte de croissance économique, nous sommes dans un contexte où nous gérons une décroissance, où nous avons de l'austérité. Alors, il y a des mesures qui, lorsqu'elles s'installent dans un contexte qui est favorable, où on a tous un peu plus d'argent, bien on peut penser, au niveau d'une société, qu'on va avoir des conditions gagnantes pour faire que la mesure d'accompagnement qui est prévue dans le projet de loi n° 70 va vraiment arriver dans des entreprises qui, ayant une certaine croissance, vont faire une part pour finalement diminuer l'injustice sociale et favoriser l'égalité des chances. Par contre, dans une période où on n'est pas dans une période de croissance, là on peut un peu se questionner parce que... et le mémoire de l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec nous dit «attention», parce que, dans une période de décroissance, on n'a pas de place, chaque entreprise veut le candidat le plus performant, veut le candidat idéal. Et donc toute cette solidarité sociale, qu'on souhaite tous, elle risque d'être encore plus difficile à obtenir dans un contexte où les entreprises subissent elles-mêmes des contraintes à différents niveaux.

• (16 h 40) •

Donc, dans leur mémoire, on dit : «...la pauvreté et l'insuffisance de revenus constituent un déterminant majeur de la santé physique et mentale, et il importe de considérer les dépenses pour les contrer comme un investissement social. Il est donc inconcevable de chercher à faire des économies sur le dos de ces personnes, [qui sont] déjà lourdement fragilisées.»

Alors, le contexte économique dans lequel le gouvernement travaille actuellement fait en sorte que... et, je dirais, le contexte économique... ou, en tout cas, l'austérité qu'il choisit d'imposer, cette austérité, déjà, plusieurs l'ont qualifiée de sélective. On n'est pas sûr qu'on vise vraiment les plus riches dans l'application de l'austérité comme elle est imposée aux Québécois depuis deux ans. Or, clairement, ce que l'Ordre des travailleurs sociaux nous indique, c'est que ce n'est pas le bon endroit, faire des économies — d'abord, ça risque d'être des économies de bouts de chandelles, ce n'est pas des montants significatifs — sur le dos de gens qui sont déjà fragiles dans un contexte où les entreprises qui vont les accueillir, elles aussi ne sont pas dans un contexte optimal pour bien les recevoir. Pour illustrer ça, bien, dans le mémoire, l'Ordre des travailleurs sociaux dit que «ce qui retient d'abord notre attention est le fait que le projet de loi fait porter sur les épaules des personnes visées une problématique sociale, économique et politique» qui dépasse largement leur seule responsabilité et que le marché du travail, donc, comme je l'ai dit tantôt, est peu accueillant pour les personnes qui ont une certaine vulnérabilité. On cite également un rapport d'Oxfam International qui sonne l'alarme en observant que «1 % des plus riches posséderont plus que le reste de la population en 2016».

Alors, dans cette politique, est-ce qu'on est sûr que les gens qu'on surveille et qu'on contrôle sont vraiment ceux qui contribuent le plus à ce que le gouvernement essaie de réduire au niveau de son déficit? Moi, je crois qu'on a actuellement des choix qui sont faits qui ne ciblent pas nécessairement les bonnes personnes, et que, dans notre société, on a certainement un travail à faire sur le 1 % des plus riches, et qu'actuellement d'essayer de serrer la vis à des gens qui ont déjà énormément de difficultés, bien c'est beaucoup plus risqué, et tout ça dans un environnement, parce que, dans ma circonscription... mais aussi on en entend parler, mes collègues l'ont évoqué, dans un contexte où on coupe en santé publique, où on coupe au niveau des organismes communautaires, où on coupe des centres de désintoxication, où on réduit la lutte au décrochage scolaire — on espère que le budget amènera certaines bonnes nouvelles — où on coupe dans les centres de la petite enfance, écoutez, ce sont tous des instruments qui gravitent autour de ces personnes et qui sont autant de points d'ancrage pour les aider à sortir de leur pauvreté. Et là non seulement on dit : On va faire un projet de loi puis on va avoir une approche qui est un peu, comme j'ai dit tantôt, mécanique, une personne prestataire, un emploi, avec un petit accompagnement, on en convient, mais on voit qu'en même temps on atténue, on coupe dans tous les points d'ancrage de ces personnes plus vulnérables au niveau de la santé publique, la prévention du tabagisme, qui est un déterminant fondamental pour ces gens-là, le contrôle de l'obésité, les mesures pour la prévention des infections transmissibles sexuellement.

Les organismes communautaires, qui sont vraiment des parrains, dans certains cas, qui se substituent à la famille de ces prestataires de l'aide sociale là, bien, on coupe dans ces organismes communautaires. La semaine passée, j'ai rencontré un organisme qui fait de l'aide à des proches aidants de patients qui sont très vulnérables, et ils avaient un budget de 300 000 $ et ils se le font amputer de 130 000 $. Alors, c'est énorme. Et, des fois, ce n'est pas nécessairement directement la mesure du gouvernement, c'est un effet de cascade. C'est qu'en coupant dans les hôpitaux, en coupant au niveau de la santé, en coupant au niveau des services sociaux, en coupant du côté... parce qu'il y a des choix qui sont faits aussi au niveau de Centraide, bien, il y a des conséquences qui finalement cumulent toutes au niveau des organismes communautaires, qui se retrouvent avec des budgets nettement affaiblis. Alors, encore une fois, dans ce contexte-là, est-ce que c'est le bon moment, est-ce que c'est la bonne chose à faire que de dire : Il faut que, pour le 10 % seulement des gens qui sont prestataires de l'aide sociale et qui sont peut-être ceux qu'on devrait viser... Est-ce que le projet de loi, avec les mesures qui sont prévues en particulier dans sa partie II, est vraiment le bon outil?

Et, en tout cas, moi, j'aimerais bien entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux, ils ont peut-être d'autres éléments aussi sur lesquels on pourrait certainement intervenir, et certainement qu'on pourrait bonifier notre projet de loi. Il est certain que, dans leurs recommandations au niveau de leur mémoire, le programme des CPE et les coupures dans le programme de CPE, ça m'apparaît être... amputer l'avenir, clairement, et je vais vous le dire, parce que, d'une part, pour ces personnes qui pourraient être en situation d'emploi où on leur imposerait un emploi, il est certain que, à tout le moins, de savoir que les enfants de ces personnes-là se retrouvent dans un centre éducatif, que, s'ils ont certains déficits de langage, certains déficits au niveau de leur évolution, au niveau... bien, il faut qu'ils soient dans un milieu non pas juste où on les garde, mais dans un endroit où au moins ils vont avoir des services éducatifs qui vont aider à faire en sorte que ces enfants-là arriveront à l'école avec le maximum de potentiel, qu'ils ne seront pas déjà pénalisés parce qu'on n'aura pas su corriger ces déficiences, qui sont autant de handicaps qui conduisent au manque de l'estime de soi, au manque de confiance de soi, mais aussi aux échecs scolaires, et ensuite au décrochage scolaire, et parfois, malheureusement, à la délinquance, à la toxicomanie. Alors, il y a une progression prévisible dans beaucoup de ces paramètres-là. Et donc, au moment où on coupe dans les CPE, qu'on établisse aussi une mesure aussi contraignante pour des parents, c'est très, très... en tout cas, moi, ça me préoccupe énormément.

Imaginons, là, qu'on aurait décidé d'investir dans les CPE, qu'on aurait dit : On fait la promotion... on augmente les CPE, on les favorise parce que ça joue sur nos 0-5 ans, et ça, on pense que c'est l'avenir. Moi, je vous certifie que, quand on joue et qu'on investit dans les 0-5 ans, bien, d'ici 15 ans, quand ces enfants-là vont avoir 18 ans, on va avoir moins de prestataires de l'aide sociale, c'est certain. On va contribuer à donner un meilleur départ à ces enfants-là. Et l'Association des économistes québécois, dans un article de La Presse de la fin de semaine dernière, clairement, dans les recommandations qu'elle faisait en prévision du budget du gouvernement, disait... il y avait un paragraphe complet sur l'importance d'investir dans les CPE, l'importance d'investir dans la jeunesse, et c'était la meilleure façon pour eux de diminuer le décrochage scolaire, d'améliorer la persévérance scolaire, mais également on parlait même de qualifications d'emploi, on parlait de qualifications d'emploi. Alors, je pense qu'on est exactement où on veut être, mais, au moment où on coupe dans les CPE, on a ces exigences-là pour les prestataires de l'aide sociale, je vous avoue que c'est très déroutant et que je pense qu'à travers tout ça il y aura des conséquences où on handicape l'avenir à court, moyen et long terme plutôt que d'investir, et, clairement, l'Association des économistes disait que c'était un investissement que d'investir dans les CPE.

• (16 h 50) •

L'autre dimension, c'est toute la dimension des emplois, de la création d'emplois dans les régions ressources en particulier. Là encore, le contexte économique est difficile, dans toutes les régions il y a migration des gens et il y a des pertes d'emploi significatif. Je vous donne en exemple, là, dans le domaine de la santé, la centralisation, qui a fait en sorte que, par exemple, dans la région du Lac-Saint-Jean, il y a 70 emplois de cadres qui ont été perdus... de cadres en santé. Alors, c'est sûr que ce n'est pas un contexte qui favorise l'emploi et la création d'emplois intéressants ou d'emplois stimulants pour une société. Donc, on gère de la décroissance.

Donc, le critère de distance, c'est un élément majeur, et mon collègue député de Saint-Jean, à plusieurs occasions, il a demandé au ministre de dire ce serait quoi, une distance raisonnable, une distance raisonnable pour qu'un emploi soit trouvé — peut-être que, si le ministre nous le disait déjà, ça nous aiderait, ça nous aiderait, peut-être que ça apaiserait certaines de nos préoccupations — mais certainement la distance mais aussi la compréhension du circuit. Je vais vous donner très concrètement... et les groupes qui m'ont remis leurs documents pour la Montérégie, pour Longueuil font référence à une femme qui demeurerait à Saint-Hubert et qui devrait occuper un emploi à Brossard. Ce n'est pourtant pas très loin, mais les moyens de transport, les mécanismes de transport public ne communiquent pas du tout entre Saint-Hubert et Brossard, il faut revenir au métro Longueuil, il faut repartir, et donc c'est des délais très, très importants et c'est vraiment, donc... même dans des régions urbaines comme Longueuil mais, imaginons, dans des régions plus éloignées où on peut avoir des distances importantes à parcourir. Et, très souvent, bien, ces candidats à un emploi, bien, ils ne possèdent pas de véhicule, et le réseau de transport est souvent déficient ou inexistant. Alors, là aussi, peut-être que le ministre pourrait nous permettre d'avoir un peu plus de détails éventuellement sur comment on va réussir à faire ça, mais j'aurais aimé qu'on puisse permettre à l'Ordre des travailleurs sociaux de nous donner d'autres exemples de comment, sur le terrain, certaines choses qui nous semblent assez évidentes se traduisent par des obstacles insurmontables pour l'accès à un emploi et pour le maintien à un emploi lorsqu'on est un prestataire de l'aide sociale.

Un des éléments qui est également soulevé, ce sont les mesures d'accompagnement, et je sais que le ministre a certainement l'intention... il en a parlé, qu'il y aurait des mesures d'accompagnement. Moi, je veux juste donner l'exemple de l'ampleur, de l'importance de certaines mesures d'accompagnement.

J'ai rencontré, dans un organisme qui est dans ma circonscription, qui s'appelle les Batifoleries, une dame qui correspond, je crois, aux personnes qu'on veut aider, une dame qui était à la troisième génération comme prestataire de l'aide sociale et qui avait dit à sa petite fille de six ans : On va s'en sortir, on va changer. Cette dame, elle était, depuis six mois, dans cet organisme de réinsertion sociale, qui offre, entre autres, des cours de couture mais qui offre aussi beaucoup de formation sur la valorisation et sur, bon, une façon d'aborder les femmes qui va leur permettre d'avoir plus confiance en elles, et cette dame a réussi à obtenir un emploi dans un Tim Hortons. Et elle m'a raconté comment elle avait été fière d'avoir cet emploi-là, et, donc, ça faisait six mois qu'elle était dans cet organisme d'accompagnement... mais trois générations de prestataires de l'aide sociale, et comment elle était fière de porter son uniforme de Tim Hortons et de pouvoir dire à sa fille qu'elle avait un emploi et qu'elle se sortait de ça, et je pense que c'est ça qu'on recherche, mais, dans la réalité, elle s'est retrouvée, au jour 3 de son emploi, laissée toute seule dans le Tim Hortons et elle a... c'était une plus petite boutique, là, ce n'était pas un gros magasin, mais elle est restée là, et, son manque de confiance en elle, pour toutes sortes de raisons, quand elle m'en a parlé, elle s'est mise à pleurer et elle m'a dit : Écoutez, je le voulais tellement, cet emploi-là, mais je n'ai pas été capable de le garder, et, quand je suis revenue à la maison, ça faisait un échec supplémentaire dans ma vie, ça faisait une situation supplémentaire. Et donc elle avait besoin de plus que six mois.

Alors, moi, je veux juste dire que l'accompagnement, c'est un accompagnement soutenu qui peut prendre plus qu'un an, qui peut prendre plus que deux ans, parce que souvent c'est 30 ans de discrédit, d'abandon que ces femmes ont vécu ou que des hommes vont avoir vécu et dans un contexte où souvent il y a des enfants dont on doit prendre soin, en plus. Donc, la durée suffisante, selon les besoins, et, malheureusement, le projet de loi n° 70, en tout cas, dans la version qu'on a, ne garantit aucunement comment l'État va garantir que la durée d'accompagnement va être suffisante. Et je ne pense pas qu'on puisse la déterminer de façon... c'est quelque chose qui doit être individualisé, cette durée d'accompagnement là, qui doit être modulé en fonction de chaque prestataire, de chaque personne qu'on souhaite aider.

Je vous dirais — j'essaie de terminer — les prestations insuffisantes... déjà, vous savez, la menace de se faire couper sa prestation, il faut savoir qu'est-ce qu'on peut vivre... comment on peut vivre avec 623 $ par mois actuellement au Québec, quel loyer on peut avoir, comment on peut espérer faire une épicerie. Moi, dans Longueuil, je vais vous dire, on a 10 000 personnes qui ont besoin d'avoir recours à des banques alimentaires. Ces gens-là sont triés, il faut qu'ils présentent des preuves, ils doivent donner 10 $ pour avoir accès à un panier qui en vaut 200 $ dans lequel on donne des aliments des quatre groupes alimentaires. Alors, il y a quand même une vigilance, mais c'est une réalité actuellement. Alors, comment on peut laisser planer sur la tête de ces personnes le fait qu'on puisse couper leurs prestations? Et, encore une fois, on ne parle pas de contrôler des abus. Il y a toujours des gens qui sont prêts à frauder. Or, les fraudeurs, il faut les trouver. Mais c'est une minorité de fraudeurs. Et actuellement, dans le projet de loi n° 70, on ne voit pas cette insistance pour sanctionner, et surveiller, et contrôler l'approche de gens qui veulent vraiment abuser du système, on ne le départit pas de ceux qui sont victimes du système, de ceux qui n'ont pas eu le bon jeu de cartes, au départ, dans leur vie. Alors, je pense qu'on doit être très, très vigilants. Et la mesure du panier de consommation, eh bien, c'est un indicateur minimal et largement reconnu de la pauvreté du Québec, et donc, si on coupe la prestation d'aide sociale... et déjà, actuellement, les prestations qui sont données, quand elles sont complètes, ne permettent pas de rencontrer les besoins définis par la mesure du panier de consommation.

Alors, pour toutes ces raisons, j'espère avoir convaincu le ministre qu'il y aurait pertinence... ce serait une heure bien investie de recevoir l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Merci, Mme la députée de Taillon, pour votre intervention sur votre motion préliminaire. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre.

M. François Blais

M. Blais : Alors, je remercie ma collègue pour sa suggestion. C'est un organisme que je connais assez bien à cause de mes anciennes fonctions, notamment M. Leblond, que vous avez probablement fréquenté aussi, vous, madame, pour vos anciennes fonctions. Donc, l'ordre a déjà déposé un mémoire ici, je pense qu'on a eu l'occasion de le lire. Vous avez eu l'occasion de le lire aussi. Moi, je conseille, là, que, si jamais il y a des arguments qui sont importants pour le projet de loi, on puisse les utiliser nous-mêmes, ou encore nos collègues d'en face.

J'ai remarqué que, pour l'essentiel, là, de ses remarques, ma collègue a beaucoup interpellé le projet de loi lui-même. Elle a dit : Écoutez, j'espère qu'il y aura cet élément dans le projet de loi, j'espère que telle chose sera là, ou ceci nous inquiète, on a hâte de voir, etc. Donc, elle a interpellé à plusieurs reprises le projet de loi, et la seule façon d'y voir clair, hein, c'est, bien sûr, de procéder, de commencer, là, article par article, et on pourra répondre, à ce moment-là, aux préoccupations, là... dont je reconnais la légitimité, et j'ai même très hâte de pouvoir lui en parler, là, aux préoccupations de ma collègue. Donc, je n'accorderai pas mon consentement, là, à la motion.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je laisse la parole au député de Drummond—Bois-Francs.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : Merci, M. le Président. Lors de la motion précédente, j'avais appuyé cette motion pour les raisons que j'avais signifiées, surtout parce que je pense que chaque groupe a le droit de venir plaider ou déposer un mémoire, là, et exprimer ses commentaires, et j'avais aussi eu une crainte dont je ne peux répéter, malheureusement, sur la motion elle-même, là, le but, peut-être.

Avec les informations que j'ai actuellement... vous savez, quand on fait un projet de loi, il y a toujours les groupes qu'on reçoit, chaque parti amène des groupes ou convoque les groupes qu'il souhaite, et, avec les informations que j'ai jusqu'à présent, les deux groupes mentionnés n'ont fait aucunement partie des discussions.

Alors, moi, j'aurais une demande du côté de l'opposition officielle : Pour quelles raisons que ces groupes-là ne figuraient pas parmi vos discussions avec le leader du gouvernement? Alors, pour ça, je n'appuierai pas cette motion-là.

• (17 heures) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Maintenant, je cède la parole au député de Saint-Jean.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Bien, moi, je vais aviser le député de Drummond—Bois-Francs qu'effectivement l'Ordre des travailleurs sociaux est un groupe que nous avons demandé, hein, et nous avons fait des démarches. Nous avons même fait une conférence de presse avec ma collègue députée de Gouin justement pour faire entendre ce groupe-là ici, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire. Donc, ce n'est pas d'hier qu'on demande que l'ordre soit entendu plus particulièrement ici, en commission parlementaire sur le projet de loi n° 70. Pourquoi? Bien, ma collègue députée de Taillon l'a mentionné avec éloquence, c'est des gens qui sont sur le terrain mais qui ont une approche différente.

On ne dépose pas des motions pour déposer des motions ici aujourd'hui, on a choisi des groupes qui sont très pertinents et qui apportent une approche différente. Donc, dans le cas de mon précédent collègue, le député de Rimouski, il a amené une motion pour un organisme d'une circonscription en région qui a fait un mémoire très étoffé, qui aurait pu nous amener une lecture, une appréciation très régionales et très locales du projet de loi et faire en sorte qu'on puisse bonifier le projet de loi au mieux en fonction des recommandations qui... eux, ont à côtoyer des gens et des organisations sur le terrain. Dans le cas de ma collègue députée de Taillon, l'ordre, bien, c'est des gens qui sont sur le terrain d'une autre façon, c'est des gens qui sont dans des CLSC, dans les hôpitaux, qui sont un peu partout, qui sont dans des organismes aussi, dans certains cas, dans des institutions publiques en santé et en services sociaux mais aussi qui travaillent peut-être même à leur compte, dans certains cas, ou qui ont un passage, un passé... par le passé, côtoyé des gens et qui, dans le cas des travailleurs sociaux et des travailleurs conjugaux... donc, qui vivent les réalités des familles.

On l'a mentionné tantôt, que pour les familles ça a un impact, ce projet de loi là. On l'a vu pour les enfants mais aussi pour les conjoints et conjointes. Dans le cas où un conjoint... les deux sont à l'aide sociale mais que le conjoint, pour plein de raisons, ne peut accepter l'emploi dit convenable, bien, qui sera pénalisé? Parce que le montant d'aide sociale est recompté si c'est un couple. Ce n'est pas un chèque individuel, là, il y a une comptabilité de couple à l'aide sociale, donc, ce qui fait en sorte que, dans ce cas-ci, ce serait la femme qui serait aussi pénalisée sur le fait que l'homme ne peut pas accepter l'emploi pour x raisons. Ou, inversement, si la femme ne peut accepter l'emploi dit convenable parce que ça ne fonctionne pas avec les horaires pour les enfants, parce qu'elle n'a pas de place en centre de la petite enfance, pour plein de raisons ou elle n'a pas les moyens d'aller en garderie privée, donc, ça a un impact sur le couple, M. le Président.

Donc, d'entendre l'ordre en question, moi, je crois que ça amène une touche différente au projet de loi, et nous n'avons pas, à moins que... moi, j'ai assisté aux mêmes consultations que tous, mais je n'ai pas entendu de groupes parler de ces réalités-là. Pourquoi? Parce que le meilleur groupe pour en parler, dans ce cas-ci, c'est l'ordre des travailleurs sociaux et conjugaux du Québec.

M. le Président, je pourrais mentionner quelques éléments de leur mémoire brièvement, parce que l'objectif, c'est de faire entendre ces groupes d'une façon ou d'une autre, donc, pour faire en sorte que leurs recommandations, leurs points de vue soient ici entendus à l'Assemblée nationale et que ça soit enregistré pour faire en sorte qu'on puisse y référer, parce que les paroles s'envolent, mais les écrits restent. Donc, tout ce qu'on dit ici est enregistré, et ça permet, dans l'analyse du projet de loi maintenant mais aussi dans un futur, lorsque nous aurons à valider la loi, bien, que tout le monde puisse avoir entendu ce que nous avons dit ici.

Donc, M. le Président, l'ordre mentionne, bon : «...[le] projet de loi va à contresens de l'esprit et de la lettre de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, pourtant adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 2002.» Ça, on en a parlé, là, beaucoup durant l'adoption de principe, c'est un aspect important. Il faudra que le ministre nous explique comment il voit que le projet de loi n° 70 ne va pas à l'encontre de la loi n° 112, donc, la loi qui vise à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Bon, eux prétendent que «le ministre fait fausse route avec [le] projet de loi, qui non seulement ne permettra pas d'atteindre les objectifs qu'il s'est donnés, mais plongera encore plus profondément les personnes visées dans la pauvreté — avec tout ce que cela comporte au plan humain et psychologique — alimentera les préjugés à leur égard et accentuera le fossé des inégalités sociales toujours en croissance au Québec». Comme ma collègue l'a mentionné, puis il faut le mentionner, le rappeler, dans leur mémoire, ils mentionnent que «la pauvreté et l'insuffisance de revenus constituent un déterminant majeur de la santé physique et mentale et il importe de considérer les dépenses pour les contrer comme un investissement social».

Donc, le précédent ministre... pas le ministre actuel, mais le précédent ministre a mentionné qu'avec Objectif emploi le gouvernement allait économiser 50 millions de dollars. Donc, si tel est le cas, bien, on peut supposer qu'avec cet élément-là il y aura une augmentation des coûts de santé et de services sociaux, donc ça ne serait pas une vraie économie. Et il faut savoir : Est-ce que c'est vraiment l'objectif de faire économiser pour économiser ou d'aider les citoyens du Québec? Donc, toute la question se pose, M. le Président.

«Ce qui retient d'abord notre attention — toujours l'ordre qui parle — est le fait que le projet de loi fait porter sur les épaules des personnes visées une problématique sociale, économique et politique qui pourtant les dépasse largement. En effet, le projet de loi n° 70 laisse entendre que les personnes visées ne font pas suffisamment "d'efforts" pour intégrer le marché du travail, passant ainsi sous silence les responsabilités de l'État face à ces citoyens. Or, cette opinion ne tient pas compte du fait que le marché du travail est peu accueillant pour les personnes ayant une certaine vulnérabilité.»

Un peu plus loin : «Cela dit, nous sommes d'avis que le projet de loi n° 70 contribue au rétrécissement des responsabilités de l'État envers les personnes plus vulnérables et s'ajoute à toutes ces mesures déjà annoncées et en vigueur depuis les dernières années : effritement de l'offre générale de services sociaux, mesures d'austérité et coupes budgétaires, réduction du financement en santé publique et au niveau des organismes communautaires, fermeture des centres de [désintox], réduction de la lutte au décrochage, coupes dans les centres de la petite enfance, etc.»

Le «etc.», là, on l'a mentionné précédemment, hein, on pourrait parler des centres... des groupes d'employabilité féminins, on pourrait parler des carrefours jeunesse-emploi, on pourrait parler même... si on étire la sauce un peu, on pourrait parler des forums jeunesse, qui, en abolissant les FRIJ, les fonds régionaux d'investissement jeunesse, avaient des programmes, avaient des activités, des éléments structurants pour aider les jeunes justement dans les communautés, et cet argent-là pouvait faire en sorte qu'on puisse restimuler des jeunes et qu'on évite qu'ils se rendent à l'aide sociale.

Donc, l'ordre estime que «le projet de loi n° 70 fait fi des constats scientifiques». Et, bon, une citation ici qui nous est faite : «Jamais, depuis l'existence de l'aide sociale en 1969, un gouvernement n'est allé aussi loin dans le "workfare" et [dans] la négociation des droits fondamentaux des plus pauvres de notre société. [...]Il faut mettre en parallèle les coupes de 50 millions de dollars à l'aide sociale et les centaines de millions offerts aux médecins.» Je l'ai mentionné, ça, tantôt... pas l'histoire des médecins, ça, on en a parlé beaucoup en période de questions, on y reviendra aussi, mais, dans le cas du 50 millions, la question se pose. «Pourtant, il existe des exemples, au Québec, [des] mesures efficaces pour progresser dans la lutte contre la pauvreté; nous pensons aux mesures de soutien aux familles et au programme de garde en petite enfance, lesquels ont eu des effets mesurables sur le revenu des familles, plus particulièrement les ménages monoparentaux.» On pourrait ajouter à ça Ma place au soleil, M. le Président, j'en ai parlé précédemment, un beau programme mis en place par le Parti québécois à l'époque et qui aujourd'hui est de moins en moins recommandé dans les centres locaux d'emploi, si on peut dire ça ainsi, M. le Président, parce que, bon, les ressources ne sont pas là, sur le terrain.

Donc, je pourrais aussi dire : «Il importe également de prendre en compte le contexte économique dans lequel s'inscrit le projet de loi n° 70, un contexte où le Québec vit une stagnation au niveau de la création d'emplois, particulièrement dans les régions ressources.»

Donc, M. le Président, je pourrais continuer la... il y a plusieurs autres bons arguments dans leur mémoire, le mémoire de l'ordre, mais je terminerais sur la question de... ils mentionnent, et à juste titre, et je l'ai mentionné, l'importance de tenir de véritables consultations sur le plan de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale, qui se fait actuellement en parallèle du projet de loi n° 70. Mais pourtant le projet de loi n° 70 aura des impacts significatifs sur la pauvreté, et ces impacts-là ne seront pas nécessairement positifs, mais ils seront négatifs, si vous avez bien suivi mon intervention, du moins selon notre lunette, M. le Président.

Donc, pour toutes ces raisons, nous aurions aimé, au Parti québécois, que le gouvernement accepte d'entendre l'Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec. J'ai compris de l'intervention du ministre que le ministre n'était pas favorable à cette motion. Donc, M. le Président, à moins que le ministre ait changé d'idée, j'ai dit tout ce que j'avais à dire. J'aurais pu en dire plus, mais, dans l'objectif de pouvoir poursuivre les travaux, je vais m'arrêter ici pour l'instant.

• (17 h 10) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants concernant la motion présentée par la députée de Taillon?

Mise aux voix

Il n'y a pas d'autre intervenant, donc nous allons procéder aux voix pour cette motion. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Turcotte : Est-ce qu'on peut faire un vote par appel nominal?

Le Président (M. Hardy) : Oui, on va faire un vote par appel nominal.

Le Secrétaire : Donc, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

Le Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

Le Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

Le Secrétaire : M. Girard (Trois-Rivières)?

M. Girard : Contre.

Le Secrétaire : M. Fortin (Pontiac)?

M. Fortin (Pontiac) : Contre.

Le Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

Le Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

Le Président (M. Hardy) : Abstention.

Le Secrétaire : Rejeté.

Le Président (M. Hardy) : Rejeté. La motion est rejetée.

Une voix : ...

Le Président (M. Hardy) : M. le député de Saint-Jean, vous avez une autre motion à nous présenter?

M. Turcotte : Oui.

Le Président (M. Hardy) : Si vous voulez la lire, s'il vous plaît.

Motion proposant d'entendre le Collectif autonome
des carrefours jeunesse-emploi du Québec

M. Turcotte : M. le Président, «il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec».

Le Président (M. Hardy) : Donc, nous allons suspendre quelques instants pour en faire des photocopies. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 13)

(Reprise à 17 h 15)

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous reprenons nos travaux.

Des voix : ...

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je cède la parole à M. le député de Saint-Jean. Comme vous le savez, à titre d'auteur, vous avez 30 minutes pour nous la présenter.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, nous demandons, aujourd'hui, à ce moment-ci, d'entendre le Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec.

Nous avons entendu le Réseau des carrefours jeunesse-emploi du Québec et, lors de cette présentation-là, nous avons eu, donc, une présentation de la vision du réseau. Dans la structure des carrefours jeunesse-emploi au Québec, il y a une autre organisation, qui est le Collectif autonome des carrefours jeunesse-emploi du Québec, qui regroupe quand même un certain nombre important de carrefours, environ 25 membres maintenant — donc, sur 110 carrefours, un peu moins que le quart des carrefours jeunesse-emploi — et qui sont, bon, de différentes régions et qui ont déposé un mémoire assez intéressant, avec des pistes de réflexion.

Pourquoi que nous avons ciblé cet organisme-là? C'est, bien entendu, parce que le ministre... pas tant le ministre actuel plutôt que le précédent ministre a beaucoup mentionné, a beaucoup mentionné que c'était pour les jeunes que ce projet de loi là était présenté, donc, parce qu'il voyait, dans les 6 200 jeunes, là, qui sont actuellement des nouveaux demandeurs par année, donc, comment on pouvait les aider. On a aussi cru bon de rencontrer ce groupe, cette organisation-là, parce qu'à plusieurs occasions tant le précédent ministre que le ministre actuel ont fait référence justement au fait que les carrefours jeunesse-emploi n'étaient... ou autres organismes, là, n'étaient pas capables d'atteindre les objectifs qu'on leur fixait, dans le sens où ils n'étaient pas capables de recruter les gens, les nouveaux demandeurs à l'aide sociale et faire en sorte que ces gens-là puissent avoir l'accompagnement voulu par Objectif emploi.

Donc, après avoir entendu à plusieurs reprises le ministre actuel et l'ancien ministre sur : Oui, mais comment, vous, les organismes, vous pouvez faire pour rejoindre ces gens-là... on vous soumet une liste de 100 jeunes, il y en a juste deux sur les 100, jeunes, qui acceptent la rencontre, ça ne pas d'allure, ça fait que c'est pour ça qu'il faut les obliger... donc, embarquer, là, dans un parcours, dans un processus et dans Objectif emploi. Donc, c'est comme ça que ça s'appelle. Donc, étant donné que le collectif des carrefours jeunesse-emploi, dans son mémoire, et, bon, dans toute la littérature entourant le mémoire, a développé une approche intéressante et a développé, justement, des pistes de réflexion qui pourraient alimenter le ministre et qui pourraient faire en sorte que le ministre et le gouvernement pourraient atteindre les mêmes objectifs, donc l'objectif de faire en sorte que le plus grand nombre de jeunes possible ne se rendent pas à l'aide sociale, donc, pas parce qu'on les empêche, mais parce que ces jeunes-là pourraient avoir trouvé un emploi ou avoir retourné aux études, finir leur secondaire ou avoir un diplôme d'études professionnelles, etc., M. le Président...

Donc, dans leur mémoire, le collectif mentionne... bon, disons, ils rappellent un sondage récent qui a été mené pour le compte de la Fondation Lucie-et-André-Chagnon qui a démontré que 50 % des Québécois considèrent qu'ils sont pauvres ou ont peur de le devenir. Ça, c'est la moitié de la population, M. le Président. Le même sondage révélait que la majorité des Québécois, 61 %, croient que la prévention de la pauvreté est d'abord une responsabilité collective et 67 % considère que, collectivement, nous n'en faisons pas assez à ce sujet.

Quand on parle des banques alimentaires — j'en ai parlé, M. le Président, précédemment — bien, on parle de ça, là, hein, de comment prévenir la pauvreté, mais aussi comment la guérir, et aussi, je pourrais même dire, des fois, on a toujours l'image qui nous revient, là, donc, d'enseigner aux gens à pêcher plutôt que de leur donner le poisson. Donc, comment on fait pour les aider? Bien, ça, M. le Président, pour les jeunes, bien, les carrefours jeunesse-emploi font un excellent travail à ce sujet-là. Ça, il n'y a pas personne ici, je pense, qui peut remettre en question le travail des carrefours jeunesse-emploi dans ce domaine-là.

• (17 h 20) •

Ce sondage établit clairement que la pauvreté constitue une préoccupation réelle de la population québécoise. Il ajoute aussi : «Car, si ce programme vise au premier chef la réduction du nombre de prestataires d'aide sociale — on parle d'Objectif emploi — l'objectif social qui est poursuivi est de réduire la pauvreté en faisant en sorte que le plus grand nombre possible de personnes puissent acquérir leur autonomie financière, brisant ainsi le cercle vicieux de l'aide sociale.» On a souvent parlé de ça, là, hein, que de père en fils ou de mère en fille, là, de génération en génération, les gens se retrouvaient sur l'aide sociale. Donc, comment on fait pour briser ça si c'est vraiment le cas, si ça existe pour... il y a des chercheurs qui se questionnent là-dessus. Sûrement que le ministre a sa propre lecture de cette analyse-là, bien évidemment.

«Les carrefours jeunesse-emploi du Québec constituent un formidable instrument pour agir de façon concrète en prévention de la pauvreté. En effet, il est généralement reconnu que de donner accès à un emploi constitue la manière la plus efficace, la plus durable et la plus productive de sortir quelqu'un de la pauvreté.»

Ça, là-dessus, le ministre est tout à fait d'accord avec cet élément-là, je suppose, parce que c'est l'objectif d'Objectif emploi de faire en sorte que les gens se trouvent un emploi. La meilleure façon de lutter contre la pauvreté : se trouver un emploi. Le ministre hésite un peu, là, mais il aura le temps, il a 30 minutes pour intervenir suite à mon intervention.

«Cela est d'autant plus vrai que les clientèles âgées entre 16 et 35 ans, puisque c'est à cet âge que l'on acquiert les aptitudes et l'expérience nécessaires à la mise en place des conditions qui favoriseront la poursuite d'une carrière stimulante et productive et qui permettront de bien gagner sa vie et celle de sa famille. Depuis leur création en 1995, les carrefours jeunesse-emploi du Québec ont démontré qu'il était possible, en offrant des services flexibles et adaptés aux réalités du milieu local, d'agir de façon efficace auprès des jeunes pour les soutenir dans l'acquisition [des attitudes] et les accompagner sur le chemin de l'emploi.»

Ça aussi, M. le Président, c'est important. On en a parlé lorsque nous avons entendu le Regroupement des Auberges du coeur du Québec. Ils ont mentionné, bon, les fameux jeunes qui arrivent avec leurs sacs verts, etc. Ils sont rendus à un certain moment de leur vie où, ces jeunes-là, malheureusement, même si on les accompagne, là, sur le plan personnel, là, puis un à un pour se trouver un emploi, ils ne sont peut-être pas rendus, à ce moment-là de leur vie, aptes ou... la tête à se trouver un emploi. Ils ont plutôt la tête à régler des problèmes, donc, peut-être, toxicomanie, dépendance, jeu, etc. Je sais que le ministre va dire : Oui, dans Objectif emploi, on parle de l'accompagnement pour la recherche d'emploi, on parle de l'accompagnement pour la formation et on parle d'autres types d'accompagnement. M. le Président, moi, je crois qu'on n'a pas besoin d'un projet de loi pour accompagner nos jeunes à s'en sortir. On a des organisations, il y a les centres locaux d'emploi, il y a les carrefours jeunesse-emploi, il y a les organismes communautaires. Si tout le monde était financé justement et correctement pour respecter sa mission... Parce que, dans ce cas-ci, on en parle. Les carrefours jeunesse-emploi n'ont plus de financement à la mission. Donc, c'est en fonction des jeunes qui sont ciblés ou que le centre local d'emploi réfère aux carrefours jeunesse-emploi qu'ils sont aidés. Donc, les autres jeunes ne peuvent pas être aidés, M. le Président.

«Les causes qui font en sorte que ces jeunes "échappent au système" sont diverses : [de divers] enjeux de persévérance scolaire, difficultés d'intégration, soutien familial insuffisant, problèmes de santé physique ou mentale, troubles d'adaptation, etc.»

Bien, c'est sûr qu'avec toutes les coupes que nous avons eues en éducation ce n'est pas surprenant que ce problème-là s'aggrave et que, nous le verrons... parce que les, conséquences des coupures en éducation, M. le Président, on ne les a pas vues encore. Ce sera plus tard que nous allons les voir, parce que ça prend quand même quelques années. Ces jeunes-là, là, qu'on a mis de côté, bien, on va voir les conséquences, et il faudra y voir et agir en ce sens.

«Or, pour prévenir efficacement la pauvreté et réduire le nombre de personnes qui reçoivent de l'aide sociale, notre expérience démontre qu'il faut certes travailler avec les prestataires, mais aussi en amont auprès de tous les jeunes, afin d'éviter que ceux-ci ne se rendent au dépôt d'une première demande.»

Donc, conditions gagnantes découlant de l'expérience des carrefours jeunesse-emploi : accueil universel de tous les jeunes dans un espace neutre et rassurant dans lequel les jeunes se reconnaissent, se sentent valorisés et surtout non jugés. Ça, là-dessus, là, j'ai... on l'a revenu beaucoup dans le débat de la réforme des carrefours jeunesse-emploi, là, mais c'est important que, le jeune qui se présente dans un carrefour, la seule question qu'on peut lui poser, c'est : Qu'est-ce qu'on peut faire aujourd'hui pour t'aider? Donc, moi, je crois, M. le Président, beaucoup, beaucoup en ça. Puis, malheureusement, là, ce n'est plus le cas, bon, ils doivent passer par le centre local d'emploi. On a vu que tous les... pas tous les jeunes sont au fait de l'existence des centres locaux d'emploi. On a vu la fermeture de certains centres locaux d'emploi. Donc, la distance à parcourir est plus grande avant de pouvoir avoir accès à leurs carrefours jeunesse-emploi.

Un autre point : la flexibilité des mesures d'accompagnement et la capacité à offrir un encadrement personnalisé. Ça aussi, c'est important, la flexibilité. Même si les centres locaux d'emploi font un travail extraordinaire, et je leur lève mon chapeau, M. le Président, ils n'ont pas la même flexibilité que les carrefours jeunesse-emploi pouvaient avoir ou aimeraient pouvoir avoir.

La mise en place de stratégies visant l'acquisition des compétences préparatoires à l'emploi comme la ponctualité, l'assiduité, l'alphabétisation, l'acquisition d'expériences, tout ça, là, M. le Président, on en a parlé précédemment, faire en sorte que le jeune, bien, qu'il soit capable... Puis, pour nous, ça semble être évident que, le matin, on doit se lever à l'heure, puis se préparer, puis avoir une attitude positive, puis tout ça, mais, pour certains, là, de ces jeunes-là, pour plein de raisons, là, bien ce n'est pas acquis encore. Puis, bien, les carrefours pouvaient permettre de faire ça.

Capacité d'innover localement en mettant en place des projets adaptés aux réalités du milieu qui diffèrent passablement d'une région à l'autre en raison des facteurs économiques, sociaux et territoriaux. Bien là, ça aussi, M. le Président, une de nos craintes que nous avons dans la perte de pouvoirs... dans la perte de l'autonomie d'Emploi-Québec : Est-ce que chaque région va pouvoir garder sa couleur, hein, et sa saveur? Ça, on l'a dit, les carrefours jeunesse-emploi ont ça, mais est-ce que les centres locaux d'emploi vont pouvoir continuer à le faire?

Le travail en concertation avec les autres organismes du milieu, par exemple, en matière de santé, de logement, d'intégration culturelle. Quand on n'a plus de financement à la mission pour les carrefours jeunesse-emploi, bien, c'est difficile de faire de la concertation avec d'autres organismes, surtout quand il ne reste plus grand organismes locaux et régionaux, il n'y a plus de CLD, il n'y a plus de forums jeunesse, les groupes d'employabilité féminins, il en reste juste 16, puis, bon, ils sont menacés — on pourrait faire la liste, là... — les CRE — conférences régionales des élus — les FQIS n'existent plus... ou pratiquement plus. Donc, ça pose problème. Et la mobilisation des jeunes autour de projets attrayants et stimulants afin de favoriser la participation libre et volontaire des jeunes aux mesures d'intégration à l'emploi.

Donc, M. le Président, plusieurs éléments qui ont été mentionnés. Je pourrais mentionner... bon, il ajoute, là, des éléments à souligner, je vais terminer là-dessus, M. le Président. Bon, certains éléments du programme énoncés dans le projet de loi méritent d'être soulignés, en particulier : bon, la durée de la participation du programme à 12 mois — bon, il se questionne là-dessus; adapter la situation aux participants, donc faire en sorte que le plan d'intégration à l'emploi soit adapté à chacun des jeunes — le ministre, précédemment, dans ses remarques préliminaires, a parlé d'une rencontre, il a parlé d'une rencontre pour établir les forces, les faiblesses de chacun, puis tout ça, moi, je crois que ce n'est pas en une rencontre qu'on va pouvoir arriver à cet objectif-là, M. le Président; la mise en place de mesures incitatives à la participation sous la forme d'allocations à la participation et en permettant le remboursement des dépenses liées à la participation au programme, ce qui est susceptible de stimuler la participation volontaire au programme; plusieurs autres éléments.

Donc, je pourrais continuer la nomenclature, parce que c'est des inquiétudes et c'est des éléments qui questionnent beaucoup le collectif, notamment tout ce qui est la politique de «workfare», qu'on a parlé quand même à plusieurs occasions. Le ministre prétend que ce n'est pas de type «workfare», son projet de loi.

Nous aurons l'occasion de débattre de ça dans l'étude détaillée du projet de loi que nous commençons, mais quand même, M. le Président... puis je vais terminer là-dessus pour vrai, parce que le collectif des carrefours jeunesse-emploi du Québec, c'est une expérience concrète, c'est des solutions qui nous sont amenées, intéressantes, et surtout, M. le Président, surtout parce que le projet de loi vise principalement les jeunes, hein, le retour des jeunes sur le marché du travail ou, du moins, l'entrée des jeunes sur le marché du travail, dans ce cas-là, et pour toutes les raisons que j'ai mentionnées ici, mais que j'ai mentionnées lors de l'adoption de principe, que mes collègues ont mentionnées, mais aussi que j'ai mentionnées dans le débat de la réforme des carrefours jeunesse-emploi, toute la question que c'est différent d'une région à l'autre, que les 16-17 ans ne sont pas aidés dans une région puis ils sont aidés dans une autre.

Je pourrais parler des jeunes qui sont aux études qui ne sont pas aidés dans... M. le Président, vous savez, il y a très peu de régions au Québec que tous les jeunes, sans exception, peuvent être aidés, hein, très peu. J'en ai quelques-unes en tête, là, des régions, il y a l'Outaouais, il y a Laval. Je ne suis pas sûr qu'il y en ait bien, bien d'autres, là, M. le Président... peut-être une ou deux autres, mais, pratiquement, peu d'autres régions au Québec ont cet avantage-là. Je dis «avantage», parce que, pour les régions qui ne peuvent pas aider les 16-17 ans ou qui ne peuvent pas aider des gens qui ont un emploi précaire mais qui voudraient avoir un meilleur emploi... ou des jeunes qui sont aux études mais qu'ils voulaient avoir un emploi, bien, inévitablement, ces jeunes-là, bien, s'ils ne sont pas aidés par le carrefour jeunesse-emploi, bien, inévitablement, risquent de se retrouver sur l'aide sociale. Et là le ministre va dire : Bien, il faut les aider. Si on les aide en amont, bien on n'aura pas ce problème-là.

Donc, M. le Président, sur ce, je vais terminer là-dessus et en souhaitant que le ministre accepte d'entendre ce groupe ici, en commission parlementaire.

• (17 h 30) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Maintenant, je cède la parole à M. le ministre.

M. François Blais

M. Blais : Merci, M. le Président. Donc, je voudrais rappeler à mon collègue, là, qu'il y a déjà eu une rencontre, en commission parlementaire, avec le réseau québécois des carrefours jeunesse, c'est quand même 80 %, hein, de tous les carrefours jeunesse, là, au Québec.

Une voix : ...

M. Blais : Autour de 80 %, je crois, ou à peu près. C'était d'ailleurs une rencontre qui était assez intéressante. Moi, je m'en souviens bien parce que, dans l'échange, on a pu voir qu'il y avait vraiment des zones de rapprochement possible, là, avec le projet de loi n° 70 une fois que j'ai eu l'occasion de clarifier certains points. On demeure, nous, au ministère, en contact avec les deux organisations qui représentent les carrefours jeunesse-emploi, d'autant plus qu'on essaie de voir jusqu'à quel point, là, ils peuvent collaborer avec nous éventuellement, là, dans le cadre du projet de loi n° 70.

Donc, pour ces raisons-là — donc, on a essentiellement déjà rencontré un groupe, on a pu avoir le mémoire aussi comme dans les autres cas, on a pu lire le mémoire, là, du second groupe — je ne donnerai pas mon consentement. Puis je voudrais rappeler à mon collègue qu'il a terminé un peu ses propos en disant qu'il faut intervenir en amont, ce avec quoi je suis entièrement d'accord. Le principe d'Objectif emploi, parce que finalement ici on ne parle que d'Objectif emploi, là — je pense que le Parti québécois a des difficultés avec Objectif emploi — le principe, c'est vraiment d'agir en amont, hein? Si on voulait, du jour au lendemain, réaliser les mêmes mesures pour l'ensemble de la clientèle de l'aide sociale, je pense qu'on aurait plusieurs difficultés puis on pourrait s'entendre assez facilement ensemble sur ces difficultés-là. Mais là c'est vraiment d'agir en amont, parce que c'est des personnes qui, en principe, là, n'ont jamais été à l'aide sociale et qui ont une capacité d'employabilité qui est très élevée... de retourner en emploi, plutôt, qui est parmi les plus élevées.

Donc, pour toutes ces raisons, parce qu'on revient toujours sur... le fond étant qu'il y a les préoccupations de la part de nos collègues du Parti québécois, la seule façon de progresser dans la discussion, bien sûr, c'est de regarder ce projet de loi article par article, et on verra bien, là, si ces préoccupations-là sont légitimes ou pas. Moi, je pense qu'on peut éclaircir beaucoup de choses mais en commençant, bien sûr, nos travaux et en mettant fin, là, au retard, là, sur lequel on s'applique pour le moment.

Donc, je ne donnerai pas mon consentement à cette motion, M. le Président.

          Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je passe la parole à M. le député de Drummond—Bois-Francs.

M. Schneeberger : Aucun commentaire, M. le Président.

Le Président (M. Hardy) : Vous ne prenez pas votre droit de parole? Parfait.

Mise aux voix

Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions, intervenants sur cette motion? S'il n'y a pas d'autre intervention...

M. Turcotte : Bien, j'aimerais passer au vote.

Le Président (M. Hardy) : Oui.

M. Turcotte : Vote par appel nominal.

Le Président (M. Hardy) : Vote nominal?

M. Turcotte : Oui.

Le Président (M. Hardy) : Parfait. Donc, M. le secrétaire.

Le Secrétaire : Pour, contre, abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

Le Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

Le Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

Le Secrétaire : M. Girard (Trois-Rivières)?

M. Girard : Contre.

Le Secrétaire : M. Fortin (Pontiac)?

M. Fortin (Pontiac) : Contre.

Le Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

Le Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

Le Président (M. Hardy) : Abstention.

Le Secrétaire : La motion est rejetée.

Le Président (M. Hardy) : La motion, elle est rejetée.

Est-ce qu'on a d'autres motions préliminaires? M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Est-ce qu'il y a un problème? Je n'ai pas le droit de déposer des motions?

Le Président (M. Hardy) : Non.

M. Turcotte : J'ai comme entendu une réaction, là.

Le Président (M. Hardy) : Non, non, c'est correct.

Motion proposant d'entendre le Syndicat de la fonction
publique et parapublique du Québec inc.

M. Turcotte : O.K. Bon. Bien, moi, j'ai une autre motion, M. le Président :

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec...»

Le Président (M. Hardy) : Donc, nous allons suspendre quelques instants pour distribuer les feuillets de la motion.

(Suspension de la séance à 17 h 36)

(Reprise à 17 h 39)

Le Président (M. Hardy) : À l'ordre, s'il vous plaît! Merci de votre dépôt de motion préliminaire, M. le député de Saint-Jean. Je vous rappelle que vous avez 30 minutes pour nous la présenter. À vous la parole.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, ce n'est pas sans surprise que nous avons déposé cette motion. Comme je l'ai dit, durant l'intermission, si on peut appeler ça comme ça, la pause, hein, la suspension, au ministre, nous avons fait un point de presse avec notre députée, la collègue... ce n'est pas la nôtre, là, et elle appartient à tout le monde, là, surtout à ses citoyens de sa circonscription, mais la députée de Gouin, et nous avons demandé d'entendre un certain nombre de groupes.

Donc, on considère que certains groupes auraient dû être entendus dès le départ puis finalement on aurait peut-être eu... Si on les avait entendus dès le départ, on aurait passé moins de temps à répéter ça et à faire ces motions-là. Mais on veut au moins avoir... pour l'occasion qui nous est présentée selon le règlement de l'Assemblée nationale, qu'on puisse débattre de la pertinence ou non d'entendre ces groupes-là.

Dans le cas qui nous occupe, de cette motion-ci, M. le Président, c'est le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec. Pourquoi? Parce que nous avons entendu pratiquement toutes les centrales syndicales du Québec, hein? Nous avons entendu la CSN, la FTQ et la CSQ, mais nous n'avons pas entendu le Syndicat de la fonction publique du Québec. Pourtant, M. le Président, le syndicat de la fonction publique du Québec et parapublique, bien, représente, parmi leurs membres, des agents qui auront à appliquer le projet de loi n° 70 et qui vivent la réalité, au quotidien, du projet... bien, qui vivront au quotidien le projet de loi n° 70 mais, du moins, auraient pu nous amener des éclairages nouveaux et intéressants, tellement que le ministre l'a lui-même mentionné. Il a dit, dès son arrivée comme ministre... bien, son retour comme ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, il nous l'a mentionné ici, à l'Assemblée nationale, qu'il rencontrait, qu'il visitait des centres locaux d'emploi pour rencontrer des agents de... bon, socioéconomiques, là, le nom exact. Bon, c'est des agents d'aide sociale, on s'entend, là.

• (17 h 40) •

M. Blais : D'aide à l'emploi.

M. Turcotte : Bien ça, d'aide à l'emploi, c'est le volet plus emploi, mais vous, vous rencontrez des agents d'aide à l'emploi, c'est que je comprends. Donc, ils sont quand même représentés par le Syndicat de la fonction publique, là, le point est le même.

Et donc, ces agents-là, le ministre les rencontre pour avoir leurs lumières et leur son de cloche sur le terrain, comment, bon, ça pouvait s'articuler, etc. Donc, moi, je me suis dit : Si le ministre rencontre des agents, on peut rencontrer les nôtres dans nos circonscriptions. Moi, comme porte-parole... mon collègue de la Coalition avenir Québec peut rencontrer un peu partout à travers le Québec... on est porte-parole, hein, de l'opposition ou de la deuxième opposition, on peut faire ce travail-là. Mais on aurait trouvé pertinent que le syndicat puisse venir ici pour nous présenter, justement, ce qu'ils entendent de leurs membres et eux comme syndicat.

Si on n'avait pas entendu aucun syndicat, c'est une chose, mais là on en a entendu trois qui sont touchés par une partie du projet de loi, qui est la Commission des partenaires du marché du travail. Donc, comment le ministre peut justifier qu'un autre syndicat touché par un autre volet du projet de loi, lui, il ne peut pas être entendu ici, en commission parlementaire? D'autant plus que, les trois centrales, on les a entendues, pas ici, dans cette salle-là, mais l'autre côté, dans l'autre salle, La Fontaine, et elles étaient, toutes les centrales, toutes en même temps, là. Et on a eu plus de temps qu'à l'accoutumée, là, au lieu d'avoir 45 minutes, nous avons eu, là, une heure quelques... là, je pense que c'était, bon, le double du temps, au fond, puis on a eu même deux fois des tours de parole, là. On a fait un premier tour, après ça on a eu un deuxième tour de... moi, je n'avais jamais vu ça, là... trois mandats que je suis ici, là... je n'avais jamais vu ça, mais on l'a fait pour trois centrales syndicales.

Pourquoi qu'on n'a pas ajouté une quatrième chaise à côté pour ajouter le Syndicat de la fonction publique du Québec? Je ne sais pas, je ne sais pas. Pourtant, le mémoire du Syndicat de la fonction publique du Québec est très éloquent, très éloquent, aborde plusieurs aspects. Je pourrais vous parler de la question, du fait que... pas l'autonomie, je n'aime pas ça dire... bien, aborde la question de l'autonomie d'Emploi-Québec, ça, c'est une chose, bon, ça, ils abordent la question, ils effleurent la question de la Commission des partenaires du marché du travail, mais plus ou moins. Mais c'est sur, au fond, le fait que pour les agents il y ait... j'essaie de me rappelle le terme exact, là, M. le Président, qu'il y a une certaine... comment qu'on dit... bien, ça va me revenir en le disant, en l'expliquant, là... faire en sorte que les agents actuellement ont un pouvoir discrétionnaire — discrétionnaire, j'aurais dû y penser, c'est la période des discrétionnaires au ministre actuellement — mais donc le pouvoir discrétionnaire des agents qui auront une possibilité pour eux d'évaluer si l'emploi est convenable ou les raisons que la personne a manqué une rencontre, pour... enfant malade, tempête de neige, bon, il n'avait pas les bottes pour l'hiver, bon, peu importe, puis tout ça, ce qui fait en sorte que ça laisse beaucoup de place au discrétionnaire, et les agents, bon, se questionnent comment ils vont gérer ça et comment ça va être appliqué, cette question-là. Donc, ça, ça aurait pu être intéressant.

Ils abordent toute la question de... j'en ai parlé beaucoup, là, mais je vais le citer, tant qu'à l'avoir sous les yeux, là, de Ma place au soleil, que j'ai parlé à plusieurs occasions. Ils le mentionnent à la page 12 de leur mémoire, ce n'est pas moi qui l'invente, là. On a entendu un groupe, dans les consultations particulières, qui ont mentionné ça, et le ministre avait comme paru surpris que ce programme-là n'existait pas. Bon, il avait demandé au sous-ministre exactement qu'est-ce qu'il en est. Peut-être que, lorsqu'on commencera l'étude détaillée, nous pourrons avoir des réponses à ce moment-là... ou, peut-être, après mon intervention ici, le ministre voudra clarifier certains éléments sur Ma place au soleil, mais ils le mentionnent, eux : «Ce programme, destiné principalement aux jeunes mères chefs de famille monoparentale, a été mis en place en 2000 — bon, sous un gouvernement du Parti québécois, ça, c'est moi qui l'ajoute. L'approche était au départ basée sur une démarche de réinsertion par la formation qui prévoyait "un accompagnement soutenu durant la formation, [et] la mise en commun des ressources gouvernementales, institutionnelles et, dans certains cas, communautaires". L'intervention des agentes et des agents est réalisée dans une perspective globale qui tient compte des "obstacles systémiques — comme la garderie et le transport — et des difficultés personnelles" auxquels les personnes sont confrontées. Cette mesure, appréciée des participantes, est unanimement reconnue comme un bon programme. Malheureusement, un tel programme est en voie de disparition au Québec. Par exemple, en Gaspésie et au Bas-Saint-Laurent, ce programme n'est pratiquement plus offert. Au CLE de Baie-Comeau, le nombre de personnes participantes est passé de 30 en 2011 à huit en 2015. Un peu partout, nos membres d'Emploi-Québec observent que les programmes et mesures axés sur l'accompagnement sont en recul au profit des mesures à plus court terme et orientées vers l'intégration rapide en emploi.»

Ça, c'est un bout important, M. le Président, la dernière phrase, là, «l'intégration rapide en emploi». «Intégration rapide en emploi» ne signifie pas «une intégration durable en emploi».

Donc, M. le Président, pour toutes ces raisons — vous pourrez lire le mémoire — nous aurions aimé entendre le Syndicat de la fonction publique, d'autant plus que nous avons entendu d'autres centrales syndicales et pas celle-ci, et celle-ci, elle est principalement touchée... du moins, certains membres du Syndicat de la fonction publique sont touchés par le projet de loi et auraient pu nous amener un éclairage différent, d'autant plus que le ministre nous a même avoué qu'il en rencontrait, là, en visitant des centres locaux d'emploi, lui-même. Donc, ça doit être effectivement pertinent, ce qu'ils ont à dire. Donc, sur ce, j'aimerais entendre la réponse du ministre.

Vous êtes surpris, hein?

Le Président (M. Hardy) : Eh oui, parce qu'il vous reste encore 21 minutes.

M. Turcotte : Oui, oui, mais on s'en garde pour les autres.

Le Président (M. Hardy) : Bon. Parfait. Ça fait que je cède la parole à M. le ministre.

M. François Blais

M. Blais : Merci, M. le Président. Ça va être à peu près les mêmes types de commentaire que j'ai faits plus tôt. On a déjà rencontré les grandes centrales syndicales là-dessus, sur plusieurs éléments du projet de loi, on a eu accès aussi à des mémoires. Ces mémoires-là, là, sont déposés. Tous ici autour de la table, on peut aller puiser un argumentaire.

Je rappelle qu'aussi dans ce que j'ai entendu de mon collègue, encore une fois, le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec avait un certain nombre de craintes par rapport au projet de loi. Je pense qu'on peut très bien disposer d'un certain nombre de ces craintes-là, là, en le présentant, mais pour ça il faut progresser, il faut qu'on puisse déposer le projet de loi et l'étudier article par article. On aura l'occasion de dissiper ces craintes-là. Donc, je vais m'opposer, là, à la proposition, à la motion.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Maintenant, je cède la parole au député de Drummond—Bois-Francs.

M. Sébastien Schneeberger

M. Schneeberger : M. le Président, le député de Saint-Jean émet beaucoup de commentaires pertinents, bien entendu.

Moi, de mon côté, j'ai rencontré quand même plusieurs groupes et puis je peux vous dire des points qu'il faudrait améliorer, puis ça, c'est vraiment de quoi qu'on pourrait regarder, approfondir, c'est les délais.

Quand une personne qui est sur l'aide sociale demande de revoir son statut, pour peu importent les raisons que ce soient, les délais sont interminables — on parle, des fois, des délais d'un an, 18 mois — et ça, malheureusement, ça, c'est des points vraiment qu'on pourrait se pencher, parce que ces gens-là, durant cette période-là, malheureusement, vivent avec un chèque de 623 $ par mois, alors que, dans certains cas, probablement ces gens-là devraient avoir un chèque... ou ce qu'on appelle des contraintes temporaires et même, des fois, permanentes. Et, durant ces mois qui passent, ce sont des personnes qui continuent à vivre dans l'extrême pauvreté. Et, actuellement, tous ces gens que j'ai rencontrés sont pas mal unanimes là-dessus, c'est vraiment ces délais-là qu'il faudrait vraiment remédier, et ça, je pense, ce seraient des bonnes discussions à avoir là-dessus. Alors, c'était mon point.

Maintenant, pour ce qui est de la motion, nous n'appuierons pas cette motion. Merci.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Drummond—Bois-Francs. Est-ce que nous avons d'autres interventions sur cette motion?

Mise aux voix

Si nous n'avons pas d'autre intervention, je vais mettre la motion aux voix. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Turcotte : M. le Président, j'aimerais qu'on passe au vote par appel nominal.

Le Président (M. Hardy) : Nous passons au vote par appel nominal.

Le Secrétaire : Donc, pour, contre ou abstention. M. Turcotte (Saint-Jean)?

M. Turcotte : Pour.

Le Secrétaire : M. Blais (Charlesbourg)?

M. Blais : Contre.

Le Secrétaire : Mme Sauvé (Fabre)?

Mme Sauvé : Contre.

Le Secrétaire : M. Girard (Trois-Rivières)?

M. Girard : Contre.

Le Secrétaire : M. Fortin (Pontiac)?

M. Fortin (Pontiac) : Contre.

Le Secrétaire : M. Drolet (Jean-Lesage)?

M. Drolet : Contre.

Le Secrétaire : M. Schneeberger (Drummond—Bois-Francs)?

M. Schneeberger : Contre.

Le Secrétaire : M. Hardy (Saint-François)?

Le Président (M. Hardy) : Abstention.

Le Secrétaire : La motion est rejetée.

Le Président (M. Hardy) : Cette motion est rejetée. Est-ce qu'on a d'autres motions préliminaires? M. le député de Saint-Jean, vous avez une autre motion.

Motion proposant d'entendre le Réseau Solidarité
Itinérance du Québec et le Réseau d'aide aux
personnes seules et itinérantes de Montréal inc.

M. Turcotte : M. le Président, j'aimerais déposer la motion suivante :

«Il est proposé qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure, la Commission de l'économie et du travail tienne, avant d'entendre l'étude détaillée du projet de loi n° 70, Loi visant à permettre une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi ainsi qu'à favoriser l'intégration en emploi, des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende dès que possible le Réseau Solidarité Itinérance du Québec (RSIQ) et le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal ([le] RAPSIM).»

Le Président (M. Hardy) : Donc, cette motion est déposée. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 52)

(Reprise à 17 h 55)

Le Président (M. Hardy) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Jean, je vous rappelle que vous avez, à titre d'auteur, 30 minutes pour nous présenter votre motion.

M. Dave Turcotte

M. Turcotte : Merci, M. le Président. Donc, cette motion inclut deux organismes : un qui est national, Réseau Solidarité Itinérance du Québec, le RSIQ, communément appelé; et l'autre organisme, le RAPSIM, qui est le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal.

Bon, le RAPSIM, c'est sûr qu'effectivement, étant à Montréal, bon, ils vivent cette réalité-là davantage. On le voit, on le constate. Même, bon, mes collègues aujourd'hui... le député de Rosemont et d'autres collègues ont fait une conférence de presse aujourd'hui — vous l'avez peut-être vu passer, là — pour demander un fonds d'urgence aux organismes en itinérance, parce qu'on le voit, qu'il y a de plus en plus de problématiques et de... la réalité, on le voit qu'elle est criante, à Montréal. Mais nous tenions quand même, oui... tenions quand même et aussi à entendre un groupe qui est d'envergure nationale, donc qui couvre la région de la Capitale-Nationale, qui couvre d'autres régions. On le voit, hein, à la période de l'automne, habituellement, les nuits, il doit y avoir des sans-abri un peu partout au Québec : à Longueuil, à Rimouski, etc. Bon, bien, c'est parce qu'on voit une itinérance qui est de plus en plus présente dans différentes régions du Québec, sous différentes formes.

Je pourrais longuement aborder cette question-là, mais le groupe que mon collègue de Rimouski a mentionné précédemment lors de sa motion, Action populaire Rimouski-Neigette, avait un bout de leur mémoire justement sur la forme de l'itinérance à Rimouski, comment c'est différent qu'à Montréal, donc, bon, vie dans les autos, etc. J'ai rencontré des groupes aussi à Saint-Rémi, en Montérégie, bon, bien, ce n'est pas la même chose qu'à Montréal, mais c'est une forme différente. Et nous croyons qu'il y aura une hausse des cas d'itinérance s'il vient que le gouvernement à appliquer... parce qu'on ne le connaît pas, le règlement. Tout ça, là, on n'aurait peut-être pas passé autant de temps à ces questions-là si on avait eu le règlement ou des éléments du règlement puis avoir, bon, les distances, etc., mais aussi la hauteur de la sanction.

Donc, quand l'ancien ministre parlait d'une sanction de plus de la moitié du chèque d'aide sociale... bien, inévitablement, la personne ne sera même pas capable de se payer un loyer. Si elle n'est pas capable de se payer un loyer, bien elle sera à la rue. Si elle est à la rue, elle est une itinérante. Donc, d'entendre deux groupes qui oeuvrent sur le terrain, qui ont une expérience terrain des choses.

Je pourrais vous parler du RSIQ. Dans leur mémoire, ils mentionnent : «Paradoxalement, alors que le ministre s'apprête à mettre en place un programme d'employabilité coercitif, des programmes volontaires et mieux adaptés aux personnes en situation ou à risque d'itinérance tels qu'Alternative jeunesse et PAAS Action sont abolis ou réorientés. Rappelons que l'année dernière une personne assistée sociale sur trois a participé volontairement à de tels programmes, et ce, en dépit des compressions et restrictions dans ces mêmes programmes.»

Donc, ça démontre qu'il y a une volonté, quand même, des gens de se reprendre en main, d'embarquer dans le marché du travail, de faire un retour... ou d'y entrer, mais ça prend une véritable volonté ou, du moins, une aide présente de la part du gouvernement, donc financer les organismes communautaires, etc., mais aussi la proximité des services.

Donc, nous considérons, M. le Président, que ces deux organismes-là pourraient nous apporter un éclairage différent, parce qu'ils n'ont pas été entendus, malheureusement, mais dans leurs mémoires beaucoup d'éléments permettaient, là, justement, là, sur la question du logement... On n'a pas beaucoup parlé du logement, de la question du logement, la salubrité des logements, M. le Président, mais ça a un impact. Les tarifs d'électricité, l'alimentation, les vêtements, l'hygiène personnelle, tout ça, là, ça a un coût, puis, avec le chèque actuel d'aide sociale, c'est difficile d'arriver à ça.

Donc, M. le Président, c'est pour ça que nous avons fait cette motion pour entendre le RSIQ et le RAPSIM.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le député de Saint-Jean. Compte tenu de l'heure...

Une voix : ...

Le Président (M. Hardy) : La parole au ministre. Il reste une minute, M. le ministre.

M. François Blais

M. Blais : Oui. Donc, je ne donnerai pas mon consentement, pour des raisons que j'ai déjà invoquées. On a déjà le mémoire, puis tout ça, on connaît déjà leur argument. Donc, les collègues pourront l'utiliser. Je pense qu'on devrait procéder à l'étude article par article.

Le Président (M. Hardy) : Merci, M. le ministre. Bien, compte tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 18 heures)

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