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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Wednesday, September 18, 2019 - Vol. 45 N° 19

Special consultations and public hearings on Bill 33, An Act to amend the Labour Code concerning the maintenance of essential services in public services and in the public and parapublic sectors


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Auditions (suite)

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)

Fédération des employés du préhospitalier du Québec (FPHQ)

Documents déposés

Intervenants

Mme Claire IsaBelle, présidente

Mme Chantale Jeannotte, présidente suppléante

M. Jean Boulet

M. Jean Rousselle

Mme Monique Sauvé

M. Alexandre Leduc

*          M. Yvon Soucy, FQM

*          M. Sylvain Lepage, idem

*          Mme Sonia Éthier, CSQ

*          Mme Claire Montour, idem

*          M. Marc Daoud, idem

*          Mme Carolle Dubé, APTS

*          M. Robert Comeau, idem

*          M. Guy Tessier, idem

*          M. Michel Fradette, FPHQ

*          M. Daniel Chouinard, idem

*          M. Danny Venditti, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Douze heures quinze minutes)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Bonjour, tout le monde. Alors, bonjour, tout le monde. Je constate que nous avons le quorum. Je déclare donc la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je demande à toutes les personnes qui ont un appareil dans la salle de bien le fermer.

Alors, la commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 33, Loi modifiant le Code du travail concernant le maintien des services essentiels dans les services publics et dans les secteurs public et parapublic.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements ?

La Secrétaire : Non, Mme la Présidente.

Auditions (suite)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous allons donc commencer immédiatement avec le premier groupe que nous recevons, la Fédération québécoise des municipalités, avec Mme Desgagnés, M. Lepage, M. Soucy et Mme Harvey. Vous savez que vous avez 10 minutes, et je vous inviterais aussi à vous présenter avant de commencer votre exposé.

Fédération québécoise des municipalités (FQM)

M. Soucy (Yvon) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, je me présente, Yvon Soucy, je sus le préfet de la MRC de Kamouraska puis premier vice-président de la Fédération québécoise des municipalités. Je suis accompagné de notre directeur général, Me Sylvain Lepage, également de Me Héloïse Desgagnés, Me Catherine Filteau, Me Cassandra Nadeau et de Mme Mélanie Harvey, qui est conseillère politique à la FQM.

M. le ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale, distingués membres de la Commission de l'économie et du travail, MM. et Mmes les députés, merci d'accueillir la Fédération québécoise des municipalités dans le cadre de cette commission parlementaire sur le projet de loi n° 33. Fondée en 1944, nous célébrons cette année nos 75 ans d'existence. La fédération est le porte-parole des régions et regroupe près de 1 000 municipalités locales et régionales au Québec. Ce sont quatre municipalités sur cinq et la totalité des MRC qui, sur une base volontaire, forment nos rangs.

Donc, la FQM est consciente que le projet de loi n° 33 découle de l'obligation du gouvernement de procéder à certaines modifications au Code du travail, en vertu d'une décision rendue le 31 août 2017 par le Tribunal administratif du travail portant sur l'encadrement du droit de grève des secteurs public et parapublic et que, dans ce contexte, le gouvernement a également choisi d'apporter des modifications au régime de services essentiels applicable aux services publics, notamment aux municipalités.

D'entrée de jeu, la FQM tient à souligner qu'elle est satisfaite des modifications proposées dans leur ensemble. Toutefois, la FQM nourrit quelques inquiétudes quant à l'application pratique de certaines dispositions du projet de loi qui pourraient favoriser une déresponsabilisation du Tribunal administratif du travail en faveur d'une personne intéressée, telle une municipalité, qui pourrait ne pas être en mesure d'assumer ces nouvelles responsabilités.

Dans son mémoire, la FQM propose certaines modifications au projet de loi. En voici les principales. Ce projet de loi prévoit essentiellement l'attribution de nouveaux pouvoirs au Tribunal administratif du travail, qui se voit notamment confier la responsabilité de déterminer l'assujettissement ou non des services publics et des services publics et parapublics au régime de services essentiels. Cela aura donc pour incidence de réduire le fardeau gouvernemental tout en permettant une réaction plus rapide afin d'assurer le maintien des services essentiels aux citoyens. Cette modification constitue en soi une amélioration. Toutefois, la FQM désire s'assurer que celle-ci n'ait pas d'impact négatif imprévu.

La FQM s'inquiète des conséquences sur ses membres du remplacement du décret gouvernemental par une décision du Tribunal administratif du travail. En effet, nous craignons qu'il n'y ait pas de prise en charge automatique par le TAT permettant d'évaluer la pertinence d'ordonner le maintien des services essentiels en cas de grève, de sorte qu'il reviendra aux personnes intéressées d'en faire la demande.

Certaines municipalités, faute de moyens et de ressources, pourraient ne pas accomplir les démarches pour l'obtention d'une décision les assujettissant ou assujettissant l'un de ses fournisseurs au maintien des services essentiels et qu'en conséquence certains dossiers puissent tomber entre deux chaises. De ce fait, il est important qu'il soit précisé qu'un employeur ou une personne intéressée puisse demander en tout temps au Tribunal administratif du travail de se saisir d'un litige et de déterminer si un service est un service essentiel.

• (12 h 20) •

Par ailleurs, le projet de loi n'est pas clair sur les représentations qui peuvent être faites pour la détermination des services essentiels. Compte tenu des moyens limités dont disposent certaines municipalités, la loi devrait prévoir des représentations écrites et la tenue d'une audition lorsque le TAT le juge à propos après la réception d'une demande d'une partie intéressée.

De plus, si les démarches sont à la responsabilité de la municipalité, il est vraisemblable que celles-ci entraîneront des coûts, notamment en frais de représentation et d'administration. Il apparaît donc nécessaire qu'une analyse soit faite des impacts de la mise en oeuvre de cette loi pour les municipalités au cours des prochaines années, afin d'y apporter des correctifs, le cas échéant. Trop souvent, au cours des dernières années, les municipalités ont dû assumer le coût élevé découlant des choix législatifs gouvernementaux, sans compensation ni nouvelles ressources.

Selon l'enquête de rémunération des élus réalisée par la FQM auprès de ses membres en 2019, 88 % des municipalités répondantes ont 30 employés ou moins. Les municipalités ont un capital humain limité, et l'ajout de responsabilités administratives pèsera certainement sur leurs épaules.

Par ailleurs, la FQM est favorable à l'élargissement du pouvoir du Tribunal administratif d'ordonner le maintien des services essentiels à une entreprise non incluse dans la définition du service public. Ainsi, certains sous-traitants des municipalités, par exemple, les services de gestion des matières résiduelles et de déneigement, pour ne nommer que ceux-là, pourront être visés par les services essentiels. Cette modification permettra d'assurer le maintien de services de qualité à nos citoyens. Il s'agit d'un nouveau pouvoir qui sera certainement utile pour les plus petites municipalités qui ont tendance à requérir ce genre de services.

Ceci dit, il apparaît incongru qu'une personne intéressée puisse demander à ce qu'une entreprise soit déclarée service public et ait l'obligation de maintenir des services essentiels sans par ailleurs pouvoir intervenir sur l'étendue des services à maintenir. La FQM demande que la reconnaissance du statut de personne intéressée conduise au droit d'intervenir lors de la définition du caractère suffisant et approprié des services essentiels. D'ailleurs, à l'article 10 du projet de loi, le ministre propose un élargissement au droit de requête en injonction actuellement réservé au procureur général lors du refus de respecter la suspension de l'exercice du droit de grève. La FQM est d'accord, mais croit qu'il est nécessaire d'aller au bout de l'idée. Cette modification rejoint notre argumentaire à l'effet que les personnes intéressées doivent pouvoir intervenir sur la détermination des services essentiels. La loi devrait donc prévoir qu'une personne intéressée peut demander une telle injonction.

Quant à l'assujettissement au régime des services essentiels, la FQM croit qu'il serait intéressant d'alléger le fardeau administratif, tant pour le TAT que pour les personnes intéressées, entre autres les municipalités, en maintenant en vigueur les décisions du tribunal administratif quant aux services essentiels à rendre par le service public jusqu'à ce qu'une partie ou une personne intéressée en demande la réévaluation. Cette modification vise à éviter qu'il n'y ait aucune décision en vigueur lors de la réouverture d'une convention collective, surtout qu'il est à prévoir que les réouvertures de convention collective seront de plus en plus fréquentes, vu que la durée des conventions collectives est plus longue dans le secteur municipal. La FQM demande donc que les décisions du tribunal administratif soient maintenues en vigueur jusqu'à ce qu'une partie ou une personne intéressée en demande la révision.

Liste qui détermine les services essentiels. Les syndicats sont actuellement soumis, en vertu du Code du travail, à maintenir des services essentiels en cas de grève dans les services publics, seulement si le service public est visé par un décret. Il revient au syndicat de déterminer la liste des services essentiels à défaut d'entente avec le service public, notamment les municipalités.

De façon générale, les associations syndicales souhaitent avoir le plus grand nombre d'employés en grève et proposent des listes de services essentiels très limitées, rendant difficile la prestation de services aux citoyens. Il est également arrivé d'assister à une situation inverse, c'est-à-dire que les associations syndicales établissent des listes qui ne se limitent pas aux services essentiels. Les municipalités se voient alors contraintes de rémunérer des employés dont la présence est jugée inutile et excédentaire dans un contexte de grève.

Les municipalités se retrouvent alors dans une situation sans issue, étant donné que le Tribunal administratif se contente de juger la suffisance, et non la pertinence, des services essentiels proposés. Dans ce contexte où le gouvernement apporte des modifications au Code du travail relativement aux services essentiels, il semble impératif qu'il modifie la loi afin que le tribunal puisse se pencher sur le caractère approprié des services proposés, et non pas seulement sur la suffisance, rétablissant du même coup le rapport de force plus équitable entre les parties et permettant aux municipalités de ne plus avoir à assumer un tel fardeau, surtout dans un contexte où ce sont les fonds publics qui sont en jeu.

La FQM demande qu'à défaut d'entente entre l'employeur et l'association accréditée dans le service public, le tribunal analyse la liste, non seulement quant à sa suffisance, mais aussi quant à son caractère approprié et, à cette fin, entende les représentations des personnes intéressées, le cas échéant.

La FQM est en accord avec les modifications proposées aux articles 18 et 19 du projet de loi qui élargissent la portée du pouvoir d'enquête et d'ordonnance du tribunal dans le cas où les services essentiels prévus s'avéreraient insuffisants, et non plus seulement si ces derniers ne sont pas rendus.

Toutefois, la FQM se questionne quant à la lourdeur de la preuve qui pourrait être exigée aux municipalités pour faire la démonstration que les services essentiels prévus... rendus sont insuffisants, inappropriés ou à risque de mettre en danger la sécurité publique.

En conclusion, les modifications que nous proposons visent à assurer que les municipalités puissent assumer, même en cas de grève, les services auxquels les Québécois ont droit.

Je vous remercie. Nous sommes maintenant prêts à répondre à vos questions, et, compte tenu de l'aspect très technique, là, il est fort probable que je réfère à mes collègues plusieurs questions. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Pas de problème pour vous référer à vos collègues pour répondre à certaines questions. Merci pour votre exposé.

Nous donnons maintenant la parole au ministre pour commencer la période d'échange. Alors, M. le ministre, vous avez 16 min 30 s.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. J'aimerais, dans un premier temps, vous remercier, non seulement pour la préparation de votre mémoire, mais pour la qualité, M. Soucy, de votre présentation et votre solide accompagnement, comme je l'ai mentionné un peu plus tôt.

Je vais simplement vous faire des commentaires ou essayer peut-être de vous donner certaines précisions. Dans votre mémoire, la recommandation 1, vous dites : «La FQM demande que soit précisé dans la loi qu'un employeur puisse demander en tout temps, durant la phase de négociation, au TAT de se saisir d'un litige et de déterminer si un service est un service essentiel.»

111.0.17 répond, je pense, en bonne partie, quand on dit que... bien, moi, ma compréhension, c'est que le tribunal peut intervenir en tout temps, quand il est d'avis qu'une grève peut avoir pour effet de mettre en danger la santé ou la sécurité publique. Donc, le tribunal peut le faire, peut intervenir pour ordonner à des parties, dans un service public, de maintenir des services essentiels en cas de grève.

Moi, ma compréhension de la loi, du Code du travail, de cet article-là me permet de vous dire que c'est possible de le demander au Tribunal administratif du travail.

M. Lepage (Sylvain) : Si je peux me permettre, M. le ministre.

M. Boulet : Oui, allez-y.

M. Lepage (Sylvain) : Effectivement, comme vous l'avez dit, vous nous éclairez sur la portée du nouvel article modifié, 111.0.17, mais, compte tenu que l'objectif notamment de la loi est de faire en sorte que des personnes intéressées puissent aussi faire ce genre de demande là, nous croyons que la loi devrait être claire, parce que vous le faites par interprétation. La loi devrait être claire pour préciser que l'une ou l'autre des parties, là, c'est-à-dire l'employeur, le syndicat ou une personne intéressée peut s'adresser à la commission... pardon, la commission, ça reflète mon âge, au tribunal pour...

Une voix : ...

M. Lepage (Sylvain) : Oui, on a pratiqué tous les deux longtemps dans une commission, alors... donc peut demander, justement, au tribunal de se saisir de la question, alors que ce qu'on comprend de ça, c'est qu'il y aurait comme une vigie implicite du tribunal qui suivrait, comme autrefois l'ancien Conseil des services essentiels, un peu ce qui se passe. Alors, nous, on croit qu'il ne devrait pas y avoir de débat possible sur le fait qu'une municipalité ou une personne intéressée peut demander au tribunal de se saisir de la question.

M. Boulet : Oui. En même temps, la personne intéressée, vous savez que ce concept-là est bien défini par les tribunaux puis est soumis au respect de certains critères, là. Puis j'ai eu l'occasion d'en discuter hier, ça prend un intérêt direct, personnel, né et actuel, ça prend une question sérieuse, puis ça prend une personne qui va être directement affectée...

M. Lepage (Sylvain) : Affectée.

M. Boulet : ...par l'issue du conflit. Ça comprend l'employeur aussi.

M. Lepage (Sylvain) : Oui, tout à fait, mais... On est tout à fait d'accord avec ce que vous nous dites, mais je prends le cas d'une municipalité, par exemple, qui serait en sous-traitance, O.K., l'employeur en grève peut être, par exemple, un entrepreneur qui ouvre, excusez l'expression, des rangs, comme on disait chez nous. Donc, un sous-traitant, mais la municipalité doit avoir le droit de dire à la commission : Écoutez, nous, on veut que vous vous saisissiez du fait qu'il y a deux pieds de neige dans les rangs puis que les routes ne sont pas ouvertes, là. Puis c'est des situations très courantes dans les plus petites municipalités.

• (12 h 30) •

M. Boulet : Oui, oui, puis je comprends vraiment bien cette réalité-là, puis ça touche deux sujets. Tu sais, quand vous disiez que vous étiez d'accord avec l'élargissement de la notion de service public, ce n'est pas parce que ce n'est pas dans l'énumération qui apparaît au Code du travail que nécessairement, en cas de grève, ça ne risque pas d'affecter la santé, sécurité publique. Puis vous référiez à des entreprises notamment de déneigement...

M. Lepage (Sylvain) : Je peux vous donner plusieurs exemples. Ça peut être le cas des matières résiduelles, bon, par exemple...

M. Boulet : La gestion des matières résiduelles, c'est un autre exemple, mais la personne intéressée, qui pourrait être la municipalité membre de la FQM pourrait faire une demande au Tribunal administratif du travail. Puis 111.0.17 dit clairement que le TAT aurait, dans ce cas-là, le pouvoir d'ordonner à l'employeur et à l'association accréditée de s'assurer du maintien des services essentiels, donc à l'entreprise à qui, comme municipalité, on sous-traite.

M. Lepage (Sylvain) : Je vous entends parfaitement, M. le ministre, mais tout ce que l'on dit, c'est que nous, ce qu'on suggère, c'est de rajouter une ligne qui dise qu'à la demande d'une partie intéressée, d'un employeur ou d'un syndicat, le tribunal peut... Mais je suis d'accord avec vous quand vous me dites, par implication nécessaire, c'est ce qui découle de 111.17.

M. Boulet : O.K. Mais je sens le besoin de le préciser clairement, c'est vraiment notre intention. C'est vraiment... Moi, dans mon esprit, c'est assez clair, mais je comprends votre... quand vous dites : par implication nécessaire, mais c'est le tribunal, de sa propre initiative, ou une personne intéressée, dans le cas que vous nous soumettez, manifestement, la municipalité qui sous-traite la gestion des matières résiduelles ou l'enlèvement de la neige.

M. Lepage (Sylvain) : Vous nous rassurez, M. le ministre.

M. Boulet : O.K. Merci. Je ne pourrai pas toutes les traiter, là, parce que Mme la Présidente me donne une durée de temps limitée.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste 10 minutes.

M. Boulet : Donc, la recommandation 2, maître, vous dites : «La FQM demande que la loi prévoie des représentations écrites et la tenue d'une audition lorsque le TAT le juge à propos après réception d'une demande d'une partie intéressée.»

M. Lepage (Sylvain) : Essentiellement, comme vous le savez...

M. Boulet : On dit à 111.22 que le TAT devrait, puis c'est probablement à ça que vous référez, devrait pouvoir disposer... pouvoir décider sur dossier, donc, sans qu'il y ait nécessairement des représentations et une audience formelle. Ce que vous souhaitez, c'est que les parties aient la possibilité d'être entendues devant le TAT.

M. Lepage (Sylvain) : Oui, effectivement, je reprends l'exemple précédemment... précédent, pardon. On veut que, lorsqu'une partie ou une personne fait une demande, si les gens s'entendent ou si... parce qu'il arrive parfois que les situations ne sont pas conflictuelles, comprenez-vous, les gens s'entendent.

Alors, si nous, on fait une demande... parce que vous savez qu'on représente des municipalités plus petites puis qu'on cherche à éviter des frais inutiles. Bien, si on fait une demande écrite, puis, par exemple, la partie syndicale dit carrément : Écoutez, oui, on est d'accord, bien il ne devrait pas y avoir de convocation obligatoire puis d'audition obligatoire des parties. Donc, on devrait soumettre nos arguments par écrit, et là le tribunal décidera, parce que ça peut être contesté, vous le savez bien, là, décidera s'il y a matière à tenir une audition, là, compte tenu de la nature du dossier.

Évidemment, le tribunal... pardon, la loi s'applique à une gamme de situations qui vont des situations les plus claires, hein... par exemple, dans le cas des hôpitaux, je pense que personne ne va contester le fait qu'il doit y avoir des services minimums de rendus, mais c'est sur la suffisance que le débat sera davantage axé, là.

Donc, tout ce qu'on dit, comme vous venez de le résumer, c'est que l'audition ne doit pas être nécessaire.

M. Boulet : Non. On est d'accord, mais... audition si nécessaire, mais elle ne devrait pas être nécessaire. On est, sur le fond, totalement d'accord. Ce qu'on souhaite, c'est que les parties s'approprient la définition ainsi que les tenants et aboutissants des services essentiels. C'est ça, d'ailleurs, qui est la pierre angulaire de tout ce qui concerne les régimes des services essentiels, là, tant dans les services publics que dans le... santé et services sociaux que la fonction publique. Ce n'est qu'à défaut que la liste est soumise par l'association accréditée.

Puis, en cas d'intervention du TAT, il faut que le TAT ait la possibilité de s'exprimer sur dossier. Puis vous le dites, quand les deux parties sont d'accord... puis il n'y a rien qui empêche les deux parties de soumettre une argumentation écrite, comme c'est fait... comme on a la possibilité de le faire dans plusieurs lois du travail statutaires au Québec. Si nécessaire, moi, ma compréhension, c'est que les Règles de preuve et de procédure du TAT permettraient au TAT de convoquer les parties pour des compléments de preuve puis... et même par écrit.

Dans les Règles de preuve et de procédure, l'article 47, on le précise même, ce que je viens de mentionner : «Une personne — donc une municipalité membre de la FQM — qui prétend avoir un intérêt dans une affaire...» Ça va quand même assez loin, là, puis on ne touche pas à ça avec le p.l. n° 33, là, mais c'est important de le dire pour le bénéfice de vos membres. Donc : «Une personne qui prétend avoir un intérêt dans une affaire peut déposer une demande d'intervention au [TAT] au moyen d'un écrit [concernant] les renseignements prévus [...] un exposé sommaire des motifs justifiant son intérêt» et obtenir un suivi, là, du TAT, là, qui jugera de l'opportunité de convoquer ou non les parties. Mais je reviens à votre commentaire de base, souhaitons que généralement les parties soient en mesure de s'entendre.

Mais ça me préoccupe puis ça me convainc encore plus de la pertinence d'élargir... qu'on ait la possibilité d'élargir le service public, parce que vous donnez beaucoup de contrats de sous-traitance, là. Évidemment, ça dépend de la grosseur des municipalités. C'est superimportant. Puis, de deux, que vous soyez clairement reconnus comme une partie intéressée qui peut faire des demandes au tribunal d'intervenir, moi, je pense qu'on est pas mal sur la même longueur d'onde, là, sur ces points-là. Est-ce que ça vous va sur ces recommandations, là?

M. Lepage (Sylvain) : Oui, tout à fait, M. le ministre, oui.

M. Boulet : La 5, la... Il y en a une couple, là, qui m'interpellent, là. Vous demandez que les décisions du TAT soient maintenues en vigueur jusqu'à ce qu'une partie ou une personne intéressée en demande la réévaluation.

M. Lepage (Sylvain) : Jusqu'à révocation. L'objectif, M. le ministre, si je peux me permettre, c'est évidemment d'économiser des frais. Il y a une décision qui va être rendue... par exemple, si on disait, reprenons mon exemple de rang, que tel entrepreneur qui, en sous-traitance, ouvre le rang avec sa charrue, comme on disait chez nous, bien, on ne voudrait pas, quatre ans plus tard, lors d'un second conflit, ou 10 ans plus tard, huit ans plus tard, devoir replaider cette question-là, à moins que l'une des parties ou une personne intéressée soulève le fait que ça devrait être révoqué. Par exemple, la partie syndicale aura intérêt pour dire : Écoutez, nous, on pense que ce n'est plus un service essentiel parce que l'autoroute passe à côté maintenant... ou peu importent les circonstances.

Mais ce qu'on dit, c'est de demander à chaque fois de retourner au tribunal... il faut comprendre que les gens qu'on représente ont des moyens financiers limités. Donc, c'est extrêmement important que, si on fait le débat, puis qu'on investit ces sommes-là, puis que le tribunal décide qu'une situation x doit être assujettie à des services essentiels... Un peu comme l'accréditation, vous le savez, ce n'est pas révisé à... ce n'est pas pour quatre ans, hein? C'est de façon permanente jusqu'à ce que la situation...

M. Boulet : ...

M. Lepage (Sylvain) : Oui, ou changement de la situation factuelle qui peut amener un... puis vous savez que c'est difficile.

Alors, nous, ce qu'on dit, sans que ce soit aussi difficile que dans le cas d'une accréditation, une partie pourra demander la révocation ou une modification. Mais, entre-temps, tant que ce n'est pas revu, quand la... un peu comme les décrets. Vous savez, aujourd'hui, quand le décret est émis, le décret est émis, puis, tant que le gouvernement ne changeait pas d'idée, bien, le service y était assujetti, là.

M. Boulet : Absolument. On a vraiment la même compréhension. Et l'article 3 du projet de loi n° 33 a le même effet que ce que vous nous soumettez. C'est 111.0.17... Pour moi, c'est maintenu, ces tenants et aboutissants là des services essentiels, à chaque phase des négociations, jusqu'à révocation. Puis la deuxième phrase le dit : «Toutefois, le tribunal peut [...] révoquer la décision d'ordonner le maintien des services essentiels.»

Mais nous, on... C'est vraiment un des objets du projet de loi n° 33. On vise à permanentiser le plus possible jusqu'à ce qu'une nouvelle décision soit rendue ou jusqu'à... permettez-moi, jusqu'à ce que les parties décident d'elles-mêmes de réviser le contenu des services essentiels et de soumettre une nouvelle entente au Tribunal administratif du travail.

• (12 h 40) •

M. Lepage (Sylvain) : C'est parce que notre compréhension, M. le ministre, concernant 111.0.17, c'est que c'est un pouvoir d'ordonnance, hein? Pour le même motif, le tribunal peut, de son propre chef, ordonner à l'employeur de, hein, de maintenir les services essentiels. Mais pour nous, ce n'était pas clair que la décision rendue par le TAT s'applique pendant un an, cinq ans, 10 ans, c'est-à-dire tant qu'elle n'est pas révoquée.

Oui, je comprends bien le pouvoir d'ordonnance que vous m'indiquez, mais le pouvoir d'ordonnance, c'est après — merci, Mme la Présidente — c'est après, comprenez-vous, qu'il y a eu une première décision qui décide qu'il y a des services à maintenir.

Nous, tout ce qu'on dit, M. le ministre, c'est que ça doit être clair que, quand la commission décide qu'un service est assujetti, cette décision-là... parce qu'on va signer au lendemain de ça, tôt ou tard, une convention collective. À ce moment-là, il n'y a pas de problème. Dans une grève subséquente ou des moyens de pression subséquents, ça doit être clair qu'on n'a pas à retourner une autre fois. Là, à ce moment-là, on retournerait simplement pour demander l'application... soit la détermination, parce que ça, selon les circonstances, ça peut avoir changé, la détermination du niveau de services ou encore pour faire appliquer l'ancienne décision, mais pas sur la question de savoir si c'est assujetti ou non, à moins que ça ait été révoqué.

Et je pense que c'est extrêmement important, parce qu'il faut comprendre qu'une audition, vous le savez, M. le ministre, pour déterminer si, oui ou non, un service est un service essentiel, on ne parle pas d'investir 5 000 $ ou 10 000 $, là, on peut investir facilement 50 000 $ ou 75 000 $ de fonds publics pour avoir une détermination comme celle-là. Il ne faudrait pas qu'on recommence à chaque quatre ans, là.

M. Boulet : O.K. Je reviens, puis ceci dit avec respect, quand je lis 111.0.17.1, ça m'apparaît quand même assez clair. Le premier paragraphe, on dit : «La décision du tribunal d'assujettir un service public au maintien des services essentiels en cas de grève s'applique à chaque phase des négociations.» Puis plus loin... bien, avant plutôt, à 111.0.17, là, on a le pouvoir d'ordonner une révocation. Mais je comprends...

M. Lepage (Sylvain) : Mais je vous entends bien, mais vous et moi, on a gagné notre vie à plaider sur des situations qui, au départ, devaient être très claires quand on était assis ici puis... probablement que vous pouvez me sortir et je peux vous sortir plein de décisions où j'ai passé plusieurs jours en cour à plaider sur des décisions très claires, là, sur des textes très clairs. Alors, voyez-vous, on aime mieux quand c'est écrit puis... j'ai appris ça...

M. Boulet : On aura beau parler pendant des heures... même la langue française à ses interprétations.

M. Lepage (Sylvain) : Que voulez-vous, hein?

M. Boulet : Elle nous impose de discuter puis...

La Présidente (Mme IsaBelle) : M. le ministre, vous ne pourrez pas en parler pendant des heures puisque votre temps est écoulé. Alors, nous y allons avec l'opposition officielle avec le député de Vimont.

M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. M. Soucy, M. Lepage, Mmes Harvey, Desgagnés, Filteau et Nadeau, bienvenue. Effectivement, vous êtes bien entourés, une bonne équipe. Merci de votre mémoire. D'ailleurs, le mémoire, on l'a vu, le professionnalisme, là-dedans. Vous avez échangé votre mémoire pour des petites coquilles, donc vraiment ça démontre le professionnalisme de votre part. Donc, merci d'être ici aussi.

Écoutez, vous représentez des moyennes et petites, des très petites municipalités, vraiment. Je regarde ça, le changement qui arrive dans cette loi-là. Il y a des municipalités qui ont peut-être un D.G., peut-être une personne qui s'occupe de la voirie ou, en tout cas, peut-être qu'il y a cinq employés seulement.

Vous, avec la modification qu'on apporte aujourd'hui, est-ce que vous voyez un certain danger ou un problème dû au fait que ces gens-là sont... là, je ne sais pas si, vous, vous les accompagnez, à ce moment-là, dans des litiges, mais est-ce qu'il y a un mécanisme qui peut aider ces gens-là à négocier? Parce que, là, on parle de négociations soit avec leurs employés, mais aussi vous avez parlé aussi de gens qui... des sous-contractants, là, parce qu'on comprend bien, de ces municipalités que je parle, elles n'ont pas de... elles ont une personne à la voirie, donc ça prend vraiment plusieurs camions pour passer, donc sûrement qu'elles font affaire avec des compagnies privées.

M. Soucy (Yvon) : Effectivement, c'est la réalité, là, de plusieurs des municipalités qu'on représente d'avoir quelques employés, mais on représente également des municipalités de plus grande taille.

Comme je le disais au départ, sur peut-être 1 150 municipalités au Québec, on en représente tout de même 1 000, près de 1 000. Mais, en fait, il y a toute la question... nos municipalités ont beaucoup de sous-traitants, puis c'est ce qu'on trouvait intéressant aussi dans le projet de loi, de pouvoir s'adresser comme personnes intéressées puis de faire... d'avoir une décision pour que les services essentiels à nos populations soient rendus. Mais effectivement, il y a toujours une question de coûts. Pour des municipalités plus petites, ça peut être difficile, parfois, d'assumer également là, toutes les charges qui sont inhérentes à des choses comme celles-là lorsqu'elles se présentent.

M. Rousselle : On a rencontré des syndicats, pas besoin de vous dire, là, on rencontre tout le monde parce qu'on veut se faire vraiment une tête complète, pour vraiment avoir la meilleure loi, pour satisfaire, justement, autant la population que les droits des travailleurs, parce qu'il faut penser aussi aux droits des travailleurs.

J'ai deux ou trois syndicats qui m'ont parlé, justement, de l'avis de sept jours concernant une grève. Eux, ils parlent qu'à un moment donné, si jamais qu'ils changent une date, un exemple, qu'ils décident que c'est le 28, mais, pour peu importe la raison, ils décident que c'est le 29, dans la loi actuelle, là, c'est qu'il faut que tu refasses un autre... il faut que tu attendes un autre sept jours. Eux autres trouvent ça comme inconcevable dû au fait que c'est... écoute, on l'a donné, notre avis, c'est juste reporté le lendemain. Vous, vous en pensez quoi?

M. Lepage (Sylvain) : On n'est pas d'accord avec les syndicats, parce que la logique de la loi, surtout en matière, évidemment, de services essentiels, c'est que les gens soient en mesure de se préparer, et ça devient une stratégie de dire : Bien, finalement, je vais être en grève demain, mais je ne le suis pas, en grève, je le retire, mon avis, mais je vais l'être après-demain.

Vous savez, dans toutes les organisations publiques, puis surtout dans les nôtres, comme vous l'avez dit, il n'y a pas beaucoup de cadres. On ne peut pas garder les gens sur le qui-vive pendant 24 heures par jour, pendant sept jours, puis se faire remettre la grève de journée en journée, tu sais. Ça fait que la logique de la loi, qui est compréhensible, c'est sept jours, vous êtes en grève. Vous retirez votre avis? Parfait, on va vous permettre de retirer votre avis.

Parce qu'il faut savoir, vous rappeler que les municipalités n'ont pas le droit de lock-out, parce qu'un employeur normal, lui, va dire : Bien, tu retires ton avis mais tu restes dehors quand même. Mais nous, on n'a pas cette latitude-là. Ça fait que, comme on n'a pas cette latitude-là, bien, c'est extrêmement important qu'ils doivent donner un autre avis de sept jours. Mais s'ils veulent échanger ça contre le droit au lock-out, ça, on peut peut-être en parler, mais je ne suis pas certain qu'ils vont être d'accord.

M. Rousselle : Je regardais votre recommandation 7... à moins que toutes les informations que le ministre vous a données, ça vous a satisfaits, mais votre recommandation 7 informe que la FQM demande que l'article 24 du projet de loi soit modifié pour les décrets pris en vertu de l'article 11.0.17 du Code du travail avant la date de sanction et que la loi continue d'avoir effet jusqu'à ce qu'une partie ou une personne intéressée demande sa révision et sa révocation.

M. Lepage (Sylvain) : Bien, écoutez, j'ai bien entendu les explications de M. le ministre, puis ce qui est intéressant, c'est que ça va être enregistré, vous le savez. Vous savez que les tribunaux regardent ce que le ministre dit, normalement, dans l'interprétation des lois. J'ai sa parole où il nous a dit que c'était l'effet de la loi. Je suis content de savoir qu'il n'y a pas un autre avocat que moi, parce que je ne vais plus à la cour depuis que je suis à la FQM, qui n'aura pas à faire plusieurs jours d'auditions pour convaincre le tribunal de... Mais, pour nous, je pense que c'est souhaitable que ce soit le cas, que ce soit... Si c'est l'effet actuel de la loi, évidemment, on est satisfaits de la réponse.

Je pense qu'un des éléments aussi importants, sur lequel vous devez vous prononcer, qui est extrêmement important, c'est le fait qu'une personne intéressée, comme une municipalité, puisse intervenir aussi sur la suffisance, hein, ou sur le caractère approprié des services essentiels. Vous savez qu'actuellement le syndicat dépose sa liste finale, et le seul rôle du tribunal, c'est de s'assurer que c'est suffisant. Mais évidemment, il y a... personne ne mesure à savoir c'est quoi le bon niveau approprié. À l'époque où il y avait une relation employeur-syndicat, ça pouvait se valoir. Mais évidemment, dans la mesure où il y a une tierce partie, maintenant, que nous pouvons être, qui est une personne intéressée, il faut que cette personne-là, une fois qu'on a reconnu que mon rang doit être déneigé, bien, il faut que j'aie à dire un mot sur : O.K., mais il va-tu être déneigé quand il y a un pied de neige, six pouces de neige, trois pouces de neige, à chaque semaine, à chaque mois, à... alors que, là, le projet de loi, là-dessus, ne dit pas un mot, là. Tu sais, autrement... au contraire, il semble laisser entendre qu'une fois qu'on a déterminé qu'un service est un service essentiel, la personne intéressée, que nous pouvons être, n'a pas un mot à dire sur la suffisance ou sur le caractère approprié. Et ça, oui, c'est un changement par rapport à la législation actuelle, mais, en ce qui nous concerne, c'est la conséquence logique d'avoir décidé que ce n'est plus le gouvernement qui décide ce qui est un service essentiel et qui, dans certains cas, participait à définir le niveau de service. Est-ce que je suis clair?

M. Rousselle : Je vais passer la parole à ma collègue de Fabre.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, la parole est donnée à la députée de Fabre. Il vous reste 4 min 20 s.

• (12 h 50) •

Mme Sauvé : Merci beaucoup, Mme la Présidente. J'étais pour vous le demander. Vous me... On s'entend très bien.

Alors, écoutez, bienvenue. Merci d'être là, M. Soucy, Me Lepage. La qualité de votre mémoire, la qualité de votre présentation... Écoutez, il y a un aspect sur lequel je veux mettre un peu l'accent, c'est votre recommandation n° 3. Pour moi, c'est de la musique à mes oreilles quand j'entends à quel point c'est important pour vous de voir la suite des choses et l'application, et l'impact de la loi, puisqu'évidemment la loi prévoit, on le sait, là, l'élargissement de la définition des services essentiels en incluant la réalité qui est la vôtre, de sous-traitance et tout ça, et les services à la population. Moi, je suis tellement heureuse d'entendre ça, parce que souvent, effectivement, il y a des lois qui sont adoptées, puis, au niveau des impacts et tout ça, ce n'est pas toujours le cas où on se donne la vigie nécessaire. Alors là, vous mettez un horizon de deux ans, qui est un horizon très réaliste, et l'obligation de rendre compte à l'Assemblée nationale par le ministre. Alors, je suis très, très, très favorable à ça.

Dans le fond, ma question, c'est qu'habituellement, quand on souhaite vraiment vérifier ou mesurer l'impact de l'application d'une loi, on y va justement sur des indicateurs d'impact et tout ça, et je comprends bien que c'est une de vos préoccupations. Mais il y a aussi toute la notion des bonnes pratiques que va amener ce projet de loi avec un certain enseignement pour les différentes municipalités qui pourraient s'en prévaloir. Je comprends ça dans ce que vous avez écrit.

Comment on fait ça? Je veux vous entendre là-dessus, parce que c'est une chose de se donner un suivi par rapport à l'impact direct de la loi, mais comment on fait en sorte qu'on mesure ce qui mérite d'être déployé, ce qui mérite d'être bonne pratique pour l'ensemble d'autres municipalités qui pourraient en bénéficier, puis comment on le déploie après. Alors, je voulais vous entendre là-dessus.

M. Lepage (Sylvain) : Bien, essentiellement, évidemment, il faudrait voir si, dans une période de deux ans, on a eu suffisamment de dossiers pour permettre de mesurer ça. Alors, est-ce que la période de deux ans est la bonne? Peut-être que oui, peut-être que non.

Deuxièmement, nous, on a un service de relations de travail, à la FQM, qui fait de la vigie, qui évidemment regarde les décisions qui sortent, qui les indexe. Alors, évidemment, en fonction, je vous dirais, de ce qui va se passer, on va être en mesure de se présenter devant cette commission ou une commission pour expliquer : Écoutez, dans les trois dernières années, par exemple, ça a fonctionné ou ça n'a pas fonctionné. Pour reprendre ce qu'un de vos collègues posait comme question puis ce que M. Soucy vous a dit, c'est clair qu'il y a un problème de ressources financières, parce que c'est souvent des litiges très coûteux.

Alors, je pense qu'une des choses sur lesquelles la commission devrait s'interroger, c'est : C'est beau, mais est-ce que les gens auront la capacité financière de faire des combats comme ceux-là ? Alors, ça, ça va devoir être mesuré, vous avez raison.

Mme Sauvé : Merci beaucoup pour votre réponse. Ça va.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste 1 min 16 s.

Mme Sauvé : Ça va.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est tout? C'est beau. Alors, nous donnons la parole maintenant au député d'Hochelaga-Maisonneuve, au porte-parole du deuxième groupe d'opposition.

M. Leduc : Mme la Présidente, je me demandais si je pouvais utiliser le temps non imparti.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Donc, vous voulez utiliser le temps du Parti québécois, de... Oh! pardon, du troisième groupe d'opposition. Je m'en excuse. Alors, vous auriez donc 5 min 15 s au total, mais on doit d'abord demander l'approbation. Est-ce qu'on a le consentement? Oui. Alors, allez-y, vous avez 5 min 15 s.

M. Leduc : Merci beaucoup. Merci d'être présents aujourd'hui, c'est très apprécié. C'est, en effet, un mémoire très intéressant.

J'ai d'abord une question sur le concept de service essentiel, parce que, quand il y a une entreprise qui est déjà syndiquée puis qui peut vendre une partie, il y a une négociation qui se fait parfois sur le concept d'aliénation d'entreprise, puis on doit vérifier si la partie qui sort est partie essentielle de la mission et donc est-ce que l'accréditation est demeurée. Bref, je veux vérifier avec vous, quand vous parlez de déneigement, par exemple, qui est en sous-traitance, n'est-ce pas là une mission essentielle à la base d'une municipalité? Et, auquel cas, pourquoi est-elle sous-traitée?

M. Lepage (Sylvain) : Bien, écoutez, je pense qu'en toute honnêteté, M. le député, si on peut penser qu'une municipalité qui a un directeur général, un directeur des travaux, deux cols bleus peut ouvrir les routes, des kilomètres qui ont des... par exemple, 5 000 kilomètres carrés, là, de territoire, là... parce qu'il faut comprendre que souvent, les plus petites municipalités ont des territoires immenses, là. Le Québec, vous le savez, c'est très, très grand.

Alors, c'est totalement impossible, si je peux me permettre, de penser que ces gens-là ou que ces municipalités-là seraient en mesure d'assumer eux-mêmes le déneigement sans recours à la sous-traitance. C'est totalement impossible.

M. Leduc : Donc, une municipalité de moyenne ou grande taille n'aurait pas ce même dilemme là, si je comprends bien?

M. Soucy (Yvon) : Si vous me permettez peut-être de compléter également, il y a le volume, souvent, qui n'est pas là aussi pour offrir le service, donc la municipalité n'a pas le choix d'aller en sous-traitance, ou parfois il y a également des regroupements, des régies intermunicipales qui sont créées, mais souvent aussi ce sont des sous-traitances. Puis ça se fait régulièrement, là, dans l'ensemble des municipalités du Québec, là, pour les services que les municipalités offrent aux citoyens.

M. Leduc : Parce que vous comprendrez que, dans plusieurs situations, la question de la sous-traitance amène des débats par rapport aux conditions de travail qui sont souvent beaucoup moins intéressantes que le même emploi dans un contexte d'une fonction publique municipale standard, syndiquée. Alors, c'est un peu dans ce sens-là que je vous posais la question. Et je comprends l'enjeu des petites municipalités, mais, pour les moyennes et grandes tailles, donc la question pourrait quand même se poser.

Mais là où je voulais atterrir avec ça également, c'est toute la question du lock-out. Je comprends que les municipalités n'ont pas droit au lock-out parce qu'elles sont de facto dans les services essentiels, mais là, si on étire...

M. Lepage (Sylvain) : La loi interdit le lock-out dans les municipalités.

M. Leduc : Parfait. Si on étire puis on va chercher d'autres entreprises, notamment, donc, des sous-traitants, que vous désirez qu'ils puissent être soumis à la loi des services essentiels, est-ce que ça veut dire qu'un sous-traitant qui déneige, par exemple, qui ouvre un rang, pour reprendre votre expression, et qui est dans une entreprise syndiquée et qui exerce un droit du lock-out...

M. Lepage (Sylvain) : Bien, évidemment, l'effet des services essentiels va empêcher le droit au lock-out, parce qu'évidemment, si je vous oblige à ouvrir, à conserver un nombre x de salariés, peut-être que vous aimeriez faire un lock-out, mais la loi vise à la fois le syndicat et l'employeur. Alors, évidemment, c'est l'effet direct d'assujettir ces services-là la loi puis aux règles du service essentiel. Mais c'est ça la conséquence, effectivement, puis on est tout à fait d'accord avec ça.

M. Leduc : Donc, juste pour reformuler, pour être bien certain de comprendre, pour vous, cette logique-là de protéger les citoyens puis d'assurer un service, peu importe si l'entreprise... en cas de grève ou de lock-out, vous, comme partie intéressée, vous iriez demander à ce que ça soit appliqué.

M. Lepage (Sylvain) : Tout à fait, puis on va demander à s'assurer que les services rendus soient non seulement suffisants, mais appropriés.

M. Leduc : Je comprends. Maintenant, je vais faire du chemin sur ce que ma collègue...

M. Lepage (Sylvain) : Même, si je peux rajouter, M. le député...

M. Leduc : Oui, allez-y.

M. Lepage (Sylvain) : Même si l'employeur n'est pas d'accord, parce que ça peut arriver que l'employeur... On parle beaucoup, souvent, les gens ont une perspective, tu sais, syndicale, mais l'employeur peut vouloir faire un plein lock-out ou peut vouloir donner des services à la limite de la suffisance. Ça, pour nous, c'est un débat qui oppose employeur et syndicat. Nous, dans ces cas-là, on est là pour s'assurer que nos citoyens aient le service approprié dans les circonstances.

M. Leduc : Votre explication est très claire. Merci. Je reviens sur ce que ma précédente collègue mentionnait par rapport à l'analyse d'impact. Je trouve ça intéressant aussi, souvent assez commun dans des types de lois. Par contre, je voulais vérifier avec vous... comme c'est une loi qui découle d'un jugement, l'arrêt Flageole, ce n'est pas tout qui pourrait être considéré. Vous comprenez? Donc, l'élément des pourcentages, on ne pourrait pas y revenir à l'issue d'une analyse d'impact. Alors, est-ce que, vous, vous avez...

M. Lepage (Sylvain) : Je vais être honnête avec vous, M. le député, je ne suis pas certain de ce que vous dites. Qu'est-ce que la cour va décider en fonction des résultats, ça, personne ne peut le savoir à l'avance. Je pense qu'on peut prendre pour acquis qu'actuellement la décision a été à l'effet de dire qu'on ne devrait pas fixer à l'avance des barèmes. Ça va être très difficile de contester un jugement comme celui-là. Puis normalement, la loi va permettre de régler cette question-là. Je serais surpris qu'on ait de mauvaises surprises, si vous suivez les recommandations qu'on vous a fournies.

M. Leduc : Donc, l'analyse, selon vous, selon votre perspective... combien?

La Présidente (Mme IsaBelle) : 30.

M. Leduc : Oh! Alors, selon vous, cette analyse-là ne vise pas à rouvrir ce débat-là dans deux ou trois ans.

M. Lepage (Sylvain) : Absolument pas. C'est de s'assurer que le régime mis en place par la loi répond au besoin qui est de faire en sorte que les citoyens ne se retrouvent pas entre l'arbre et l'écorce, si je peux me permettre de prendre cette expression.

M. Leduc : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Bien, merci beaucoup à la Fédération québécoise des municipalités, Mme Desgagnés, M. Lepage, M. Soucy et Mme Harvey, pour votre contribution à la commission, très apprécié.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprise à 15 h 03)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous allons recommencer. On s'excuse pour le léger retard. La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Alors, tous ceux qui ont un appareil de sonnerie ou un appareil électronique, de bien éteindre la sonnerie, s'il vous plaît. Merci.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 33, loi modifiant le Code du travail concernant le maintien des services essentiels dans les... services publics, pardon, et dans les secteurs public et parapublic.

Alors, nous avons le premier groupe pour cet après-midi, nous avons le groupe de la Centrale des syndicats du Québec avec Mme Éthier, Mme Montour et M. Daoud. Alors, vous savez que vous avez 10 minutes pour présenter, et, avant de présenter votre exposé, je vous demanderais de vous présenter chacun. Merci.

Centrale des syndicats du Québec (CSQ)

Mme Éthier (Sonia) : Merci beaucoup. Sonia Éthier, présidente de la Centrale des syndicats du Québec.

Mme Montour (Claire) : Oui, bonjour. Claire Montour, présidente de la Fédération de la santé du Québec, FSQ.

M. Daoud (Marc) : Bonjour. Marc Daoud, conseiller syndical à la CSQ.

Mme Éthier (Sonia) : Alors, M. le ministre, Mme la Présidente, membres de la commission, je vous remercie beaucoup de permettre à la Centrale des syndicats du Québec et à sa Fédération de la santé du Québec de faire entendre notre point de vue, hein, concernant le projet de loi n° 33.

Comme vous le savez, la centrale, quand même, représente 200 000 membres, et on compte 10 fédérations dans ses rangs, et, en particulier, pour ce projet de loi, nous représentons 5 000 membres en santé et services sociaux.

Donc, dans son ensemble, la CSQ accueille favorablement l'objectif général du projet de loi, au fond, de s'adapter à la nouvelle réalité juridique des services essentiels. Et évidemment, nous allons vous soumettre des commentaires — vous avez probablement pris connaissance du mémoire — et aussi des recommandations qu'on désire soumettre à votre attention.

Premièrement, il y a un principe général qu'il est important de se rappeler, c'est que... et je pense que vous l'avez rappelé vous-même, que le droit de grève, c'est un droit constitutionnel. Et si on cite la Cour suprême, c'est que le droit de grève n'est pas seulement dérivé de la négociation collective, mais il constitue une composante indispensable. Et le juge dit : Le temps me paraît venu de le consacrer constitutionnellement, et c'est dans ces termes, tirés de l'arrêt Saskatchewan, que la Cour suprême reconnaît au droit de grève une protection constitutionnelle. Donc, pour nous, ça, c'est la base.

Et on est d'avis aussi qu'il est vraiment important de rappeler que la notion de services essentiels doit être restreinte à ce qui est strictement et véritablement essentiel à la protection de la santé et de la sécurité d'une partie de la population ou de son ensemble.

Alors, on veut spécifier que certains services publics, tels que l'enseignement, la petite enfance, à notre sens et au sens de la Cour suprême, ne sont pas des services essentiels, et leur droit de grève ne s'en trouve pas affecté. Donc, je vous réfère à la page 6 du mémoire pour retrouver les propos de la Cour suprême là-dessus.

Il faut aussi rappeler que la grève, même dans un service essentiel, doit être exercée de façon à ce qu'elle ne passe pas inaperçue, et cet aspect, entre guillemets, dérangeant permet de rétablir un rapport de force entre les parties. Mais on sait que ce rapport de force, ce retour à l'équilibre est quand même fragile, et le Code du travail encadre, de façon très serrée, la notion de services essentiels limitant le droit de grève.

Alors, pour nous, il est important de distinguer les inconvénients, les incommodités qui résultent de l'exercice du droit de grève, et on a aussi, par rapport à cet élément-là, un énoncé de principe, une première proposition que vous avez... qui sont regroupés à la toute fin, page 14 et 15, et que le projet de loi intègre au Code du travail la protection et la reconnaissance du droit de grève des travailleuses et travailleurs, etc.

Donc, le deuxième point qu'on voulait aborder avec vous, c'est la négociation des services essentiels à maintenir. Donc, le nouvel article 111.10.1, qui est le coeur du projet de loi, vient remplacer l'article actuel, et les services essentiels feront l'objet de négociations entre les syndicats et les employeurs, et l'entente est soumise au TAT.

Donc, pour nous, on est d'avis que l'article, dans son ensemble, est une réponse législative adéquate au jugement Flageole et à l'ensemble des recours judiciaires, mais on a quand même certaines questions sur l'objectif recherché par la deuxième phrase du premier alinéa, où l'objectif semble vouloir donner ouverture à une négociation à deux niveaux.

Donc, le modèle qui nous est proposé par le gouvernement semble inspiré de ce qui existe en Colombie-Britannique, et, dans cette province-là, les parties, sous la supervision de l'équivalent du TAT, sont soumises à une ordonnance globale au niveau provincial. Et ce qu'on constate, c'est que ces ordonnances permettent d'encadrer la négociation qui se fera au niveau local.

Donc, pour nous, et on l'a déplié davantage, là, dans le mémoire, c'est impératif que le cadre de négociation soit défini pour que le régime fonctionne dès l'adoption du projet de loi. Et on pense que ce serait important d'obtenir un mécanisme plus complet et similaire à celui de la Colombie-Britannique. Nous avons deux recommandations, 2 et 3, en lien avec cet aspect qui est de retirer le premier... la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 111.10.1, et qu'on pense que ce serait bien d'introduire, dans le projet de loi, un mécanisme complet pour établir un cadre général de négociation.

• (15 h 10) •

Ensuite, le troisième aspect, c'est toute la question de la transmission des informations. Le projet de loi oblige l'employeur à transmettre les informations au sujet des salariés et ensuite de transmettre ces informations-là au syndicat. On pense aussi que, dans ce projet de loi, les informations qui concernent les cadres devraient également être transmises, parce que c'est possible que plusieurs d'entre eux aient les connaissances, l'expérience requise pour accomplir des tâches qui sont dévolues aux salariés. Donc, on pense qu'il serait aussi important de prévoir un délai pour transmettre ces données et aussi pertinent d'inclure, dans le mécanisme qui met en place les ordonnances globales, le délai et les informations concernant les salariés et les cadres.

Donc, on a deux recommandations, pages 4 et 5 : que soit ajoutée, à l'article 111.10.2, l'obligation de transmettre des informations concernant les cadres, et qu'il y ait, la proposition 5, un délai.

Donc, à la suite de ces recommandations, on s'est attardé aussi à l'article 111.0.17 qui introduit la possibilité pour une personne intéressée de demander au TAT, au tribunal d'intervenir en ordonnant que soient maintenus des services essentiels en cas de grève. Alors, pour nous, là, cette notion de personne intéressée, ça demeure vague et ça pourrait, selon nous, permettre à des tiers de s'immiscer dans un rapport de négociation au détriment des droits des travailleurs. Et même si la demande devait être rejetée par le TAT, ça oblige les parties à se présenter au tribunal et de faire des représentations, alors que les parties avaient préalablement convenu des services essentiels.

Donc, il faut se rappeler que... rappelons-nous que le TAT possède déjà tous les pouvoirs, si les modalités ou le Code du travail ne sont pas respectés. Donc, pour nous, la question de la personne intéressée, ça pose problème. Et d'ailleurs on a une recommandation, la recommandation 6 : que soient retirés les termes «ou à la demande d'une personne intéressée» des articles concernés. Ensuite, nous accueillons aussi favorablement l'objectif recherché par l'introduction de ce projet de loi, qui répond aux décisions judiciaires, on l'a dit, tout à l'heure, qui modernise la négociation du maintien des services publics, tout en respectant les droits constitutionnels.

Mais il y a toute la question d'entreprise, là, qui nous inquiète. On croit que le projet de loi entrouvre une porte qui permet l'assujettissement de nombreux travailleurs. Donc, le nouvel article 111.0.17, au second alinéa, introduit la possibilité de permettre au TAT d'assujettir une entreprise, qui n'est pas un service public qui a l'obligation de maintenir des services essentiels au sens où on l'a mentionné tout à l'heure. Puis on dit aussi que le Code du travail, à l'article 111.0.16, définit expressément les entreprises qui doivent maintenir des services essentiels.

Alors, on l'a mentionné, ce projet de loi permettra d'instaurer une nouvelle dynamique de négociation. Et toutefois, le projet de loi ne prévoit pas explicitement que cette négociation doit commencer et se poursuivre avec diligence et bonne foi. Donc, comme le prévoit l'article 53 en regard de la négociation, pour nous, ça serait important d'introduire cet élément-là, là, dans cette loi-là. On croit aussi que la négociation des modalités qui entourent l'exercice du droit de grève devrait recevoir la même protection que celle octroyée par cet article au processus de négociation collective. Et on pense aussi que, dès le départ, le tribunal devrait nommer un agent de relations de travail, dès le départ, pour aider les parties à cheminer.

La Présidente (Mme IsaBelle) : En conclusion. Il vous reste 30 secondes.

Mme Éthier (Sonia) : Bien, on a deux recommandations supplémentaires, en lien avec la négociation de bonne foi, et aussi de désigner un agent de relations de travail dès le départ. Alors, merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Merci pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange et de questions. Alors, M. le ministre, à vous la parole. Vous disposez de 16 min 30 s.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Éthier, merci à la CSQ pour la qualité de votre présentation puis pour votre déplacement. On est bien heureux de vous rencontrer.

Peut-être quelques commentaires généraux, là, Mme Éthier, puis quelques précisions. Sachez que ce projet de loi vise fondamentalement à respecter ce qui découle de la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire qui s'est déroulée en Saskatchewan. Le droit de grève découle du droit d'association qui est reconnu dans les chartes, et ça nous apparaît, nous, important de le redire. C'est un droit qui est extrêmement important dans un contexte de rapport collectif de travail, et l'exercice du droit de grève confère un rapport à un syndicat, un rapport de négociation qui est utile, qui doit parfois être exercé.

Ça fait qu'il faut, le moins possible, le limiter. C'est un droit constitutionnellement reconnu, et ça, je respecte totalement ça. C'est la raison pour laquelle on se départit des seuils minimums. On évacue les pourcentages, on évite d'imposer, on évite de faire des choses qui peuvent être interprétées comme restreignant, de façon trop importante, l'exercice du droit de grève d'une association accréditée. Donc, on veut le limiter, mais le moins possible.

C'est la raison pour laquelle on s'inspire du concept de santé, sécurité du public, qui est reconnu partout non seulement par la Cour suprême du Canada, mais par toutes les juridictions modernes à travers... tu sais, même l'Organisation internationale du travail reconnaît que c'est le critère de base dans la détermination de ce qu'est et de ce que doit être un service essentiel au moment d'une grève. Ça fait que pour vos commentaires généraux au départ, soyez rassurés, on va toujours être guidés par cette approche-là dans la discussion qu'on aura avec les partis d'opposition article par article.

Sur une autre de vos recommandations, tu sais, quand vous parlez de l'inspiration Colombie-Britannique, négociation à l'échelle nationale, ce n'est pas notre intention qu'il y ait... eux autres appellent ça un «global order» puis un «local order», là. Les négociations se font à deux niveaux. Ce qu'on dit, nous, c'est que la détermination des services essentiels, ça appartient, d'abord et avant tout, aux parties qui ont une maîtrise et une connaissance complète de leur milieu de travail. À défaut d'entente, c'est l'association accréditée qui fournit une liste de services essentiels, et le tribunal aura le pouvoir d'apprécier.

Mais ce qu'on donne comme option aux parties, c'est la possibilité de faire des regroupements. Ce n'est pas un regroupement qui est imposé. Ce que nous dit 111.10.1, c'est plus que les parties pourraient décider de se regrouper et d'établir des paramètres convenus. Il faut que ces paramètres-là soient convenus, entendus entre les parties, et ça, ça peut guider... ça guide, en fait, le Tribunal administratif du travail dans sa décision. Mais ce n'est pas précisément le modèle de Colombie-Britannique. On veut vraiment laisser la souplesse aux parties.

Puis il y a des syndicats qui sont venus faire des représentations ici, à la commission parlementaire, puis qui nous disaient l'inverse, il devrait y avoir une négociation imposée au niveau national, parce que ce qui est un service, on ne voudrait pas qu'il y ait trop de disparités dans les services essentiels, dépendamment des régions puis dépendamment des établissements. Nous, on prend plutôt le pari de respecter les parties, au niveau local, par établissement. C'est sur cette base-là, de toute façon, que s'appuie le processus d'accréditation syndicale au Québec, c'est-à-dire établissement par établissement. Si, cependant, il y a des associations, ou des établissements, ou des associations accréditées qui veulent se regrouper et convenir de paramètres nationaux, c'est ce que le projet de loi n° 33 prévoit.

Est-ce que avez, là-dessus, Mme Éthier, des commentaires additionnels ou est-ce que vous comprenez ce que je vous mentionne? On ne veut pas imposer, mais on ne veut pas empêcher... on ne veut pas prohiber puis on ne veut pas imposer non plus.

Mme Éthier (Sonia) : Je comprends, le sens de ce que vous dites, c'est que... c'est parce que nous, on disait, «le cas échéant», qu'est-ce que ça veut dire «le cas échéant»? Ça prêtait à confusion, ça. Ça prête à confusion.

M. Boulet : Tout à fait, ça peut.

Mme Éthier (Sonia) : Là, je comprends que les parties, les associations qui veulent se regrouper peuvent le faire, mais ce n'est pas comme on l'avait pensé ou lu, que c'était absolument à deux niveaux.

• (15 h 20) •

M. Boulet : Absolument, on se comprend très bien. On est vraiment, encore une fois, sur la même longueur d'onde. Puis s'il y a des précisions, bien, les partis d'opposition se feront certainement un plaisir de nous le rappeler au moment de l'étude article par article, mais, sur le sens, on est d'accord. On ne veut ni imposer ni prohiber. Puis ce qu'un autre syndicat nous mentionnait, on n'a pas l'intention d'aller dans cette direction-là, c'est-à-dire d'imposer une négociation à l'échelle nationale pour éviter une diversité de services essentiels en fonction des établissements ou des régions.

Ça va... L'autre, la notion de personne intéressée, Mme Éthier, vous savez que ce concept-là, il est bien défini en jurisprudence et c'est vraiment limitatif. La personne intéressée doit démontrer un intérêt direct, personnel, né et actuel, doit faire la preuve qu'il s'agit d'une question sérieuse et, enfin, ce doit être une personne dont les droits seront directement affectés par l'issue d'un conflit ou par l'occurrence d'un conflit. Ça fait que ce concept-là, il est vraiment limité par la jurisprudence québécoise, et je ne voudrais pas interpréter ça comme ouvrant la porte à n'importe qui. Mais il pourrait... puis ça existe dans la vaste majorité des lois du travail statutaires au Québec, ce concept-là de personne intéressée, mais, encore une fois, le fardeau de preuve est vraiment imposant. Donc, je tenais à vous apporter ces précisions-là.

Vous me parlez de... Là, j'amenais ça vous réentendre là-dessus. Tu sais, quand on définit ce qu'est un service public, vous avez vu qu'on s'assurait d'actualiser la définition de «service public» pour enlever, notamment, les agences de services de santé et services sociaux, qui n'existent plus depuis la création des CIUSSS et des CISSS, et on a enlevé l'entreprise de téléphone parce que ça n'existe plus aujourd'hui. Est-ce que vous aviez... puis je pense que j'ai compris que, dans votre mémoire, vous faisiez des commentaires défavorables à l'égard de la possibilité pour le temps d'élargir ce concept-là de services publics à d'autres organisations. Est-ce que j'ai bien compris?

Mme Éthier (Sonia) : C'est ça. Dans le fond, on veut que ce soit restreint, là. Comme on l'a expliqué dans le mémoire puis comme je l'ai expliqué, c'est vraiment en lien avec la sécurité du public ou une partie de la santé et de la sécurité d'une partie ou de la totalité de la population, là.

Tu sais, on ne voudrait pas, au fond, que ce soit élargi, comme je l'ai mentionné puis comme on l'a écrit dans le mémoire, par exemple, au domaine de l'enseignement, où... puis dans le mémoire, là, on cite, je pense, c'est à la page 8, ce que la Cour suprême entend par... je vais le retrouver, là, puis... puis je ne voudrais pas vous faire la lecture, mais on dit : «On ne saurait faire droit à la prétention selon laquelle, par exemple, le travail de chacun des salariés de tous les ministères, de tous les organismes, sociétés d'État, dans tous les villages, toutes les villes et de tous les établissements d'enseignement correspond à un service si essentiel que son interruption mettrait en péril la santé et la sécurité de la collectivité.» Ça fait que c'est dans ce sens-là qu'on spécifiait la restriction.

M. Boulet : On s'entend bien aussi là-dessus. En même temps, moi, je suis un partisan de quand on définit, quand on ne veut pas que le diable soit dans les détails, si on fait une énumération trop détaillée, on va se perdre puis on n'est plus en mesure de moderniser sans faire des amendements législatifs. Puis, tu sais, la nature de la reddition de la prestation de services, notamment en santé et services sociaux, ça évolue, puis je ne veux pas qu'une définition trop restrictive nous empêche d'imposer le maintien des services essentiels en cas de grève.

Puis j'ai donné des exemples hier, par exemple, une définition qui ne comprend pas les services de transport des personnes handicapées par véhicule automobile. Ce n'est pas prévu dans la définition, mais le temps pourrait considérer qu'une grève dans ce type de service là pourrait porter atteinte à la santé et sécurité publique et donc que ça puisse être une définition qui s'adapte à la réalité de cette situation-là.

Les organismes communautaires, Mme Éthier, vous le savez, qui ne sont pas des établissements de santé au sens de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, mais qui offrent, par exemple, des services à domicile pourraient être considérés comme un service public. Il y a des grèves au sein de certains organismes communautaires qui font des services de première ligne, qui désengorgent notre réseau traditionnel, qui pourraient être considérés comme des services publics : les centres de désintoxication, les offices municipaux d'habitation, il y en a plusieurs.

Ce matin, on rencontrait les gens de la Fédération québécoise des municipalités. Il y a beaucoup de petites municipalités qui donnent des sous-contrats à des entreprises de gestion des matières résiduelles ou qui font déneiger les rues pour des raisons de sécurité citoyenne. Il y a de ce type d'entreprises là qui pourraient être considérées comme rendant un service public, mais il faut que ce soit vraiment un service apparenté à une mission publique. Il faut que ce soit des organismes de même nature. Mais je ne veux pas qu'on ouvre la valve puis qu'on vienne limiter l'exercice du droit de grève un peu partout, le moins possible, Mme Éthier. Et je vous le redis, on sera toujours guidé par le principe que vous avez bien évoqué au départ, qui découle de l'application de l'affaire Saskatchewan, là. Ça vous va là-dessus?

Mme Éthier (Sonia) : Ça va.

M. Boulet : O.K. Peut-être, dernier point, la désignation par le TAT d'un agent de relations de travail, nous, on y voyait un moyen de facilitation de l'atteinte d'une entente entre les parties sur les services essentiels. Vous êtes d'accord avec ça, mais vous dites que ça devrait être plus systématique ou...

Mme Éthier (Sonia) : Bien, étant donné que ça va changer les cultures, hein... Au départ, là, ça va être très différent d'un pourcentage. Puis comme, dans le projet de loi, on prévoit par unité ou, bon, par service, je pense que les parties auraient avantage à être accompagnées dès le départ pour les aider, c'est ce qu'on pense, à cheminer vers une entente, pour que ça procède rondement, là.

M. Boulet : Moi, là-dessus, j'étais un partisan mais pas fermé. Moi, j'aime ça, une commission parlementaire, parce que ça va nous permettre de s'entendre, puis il y a un peu de négociation là-dedans. Moi, je suis un partisan de : si les parties ont besoin d'un agent pour les aider, qu'elles le demandent. Puis il y a des parties qui me disent : Jean, on... pas Jean, mais ils pourraient dire : On n'en a vraiment pas besoin, on est capables de s'entendre. Puis, dans la vaste majorité des cas, les associations accréditées puis les établissements s'entendent. Il y a un respect mutuel. Il y a de la négociation raisonnée qui se fait de façon presque continuelle, puis, à l'amorce des négociations, elles s'entendent sur les paramètres des services essentiels. C'est pour ça que je disais : Mais, si les parties le souhaitent, ou à leur demande, on va en nommer... que le tribunal en nomme un rapidement, avec diligence.

Je ne pense pas que ce soit nécessairement... ou requis que ce soit automatique dans tous les cas. Mais la volonté que nous avons, c'est d'aider les parties, et on a les ressources suffisantes au TAT. On a fait les vérifications au moment des consultations, on a suffisamment de monde. Puis si jamais, au départ, parce qu'on sait que les conventions vont se terminer au 31 mars l'année prochaine, si jamais il y a un goulot d'étranglement, le TAT va certainement s'assurer d'avoir le nombre d'agents conciliateurs qui seront requis par la négociation des premiers services essentiels, entre guillemets.

Mme Éthier (Sonia) : Ça va.

M. Boulet : Merci, hein, merci de votre présentation. Puis on a beaucoup de respect pour la CSQ, hein, vous le savez, hein? Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est tout?

M. Boulet : Oui. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, M. le ministre. Alors, nous cédons la parole à l'opposition officielle avec le député de M. Vimont. Vous disposez de 11 minutes.

M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. Mme Éthier, Mme Montour et M. Daoud, merci d'être ici. Merci d'avoir préparé le document. Je sais que, des fois, ça prend du temps, mais merci de l'avoir fait puis merci surtout de votre présence.

Je regarde ça, vous êtes une centrale syndicale qui représente 200 000 membres dans 11 fédérations, 240 syndicats affiliés. Donc, vous couvrez large tout de même. Vous allez à bien des endroits. Moi, je voudrais... puis surtout avec 357 titres d'emploi, donc ça, ça vient mettre encore plus compliqué, parce que, là, quand on parle de services essentiels, des fois, ça peut être... c'est sûrement... c'est différent d'un titre d'emploi à un autre.

Dites-moi, vous, l'impact de cette nouvelle loi là, vous devez l'avoir analysé sur votre quotidien, sur vos membres. C'est quoi que vous pourriez me dire là-dessus?

• (15 h 30) •

Mme Montour (Claire) : Bien, l'impact, si je peux me permettre, pour les membres de la FSQ, c'est 100 % de nos membres. Je représente des infirmières, des infirmières auxiliaires, des inhalothérapeutes qui travaillent dans le secteur public, ce qu'on connaît, la catégorie I. Donc, ce projet de loi là couvre ou vise 100 % de nos membres. Tous nos établissements qui sont appelés, s'il y a une grève, devront négocier les services essentiels.

M. Rousselle : Je veux savoir... c'est que la différence avec l'ancienne loi... bien, la loi actuelle, là, parce que, là, elle est encore en vigueur, mais elle va changer. Juste me dire, vous la voyez comment? Parce que j'ai entendu d'autres syndicats qui disent : Bien écoute, il y plus de personnel en période de grève qu'en temps régulier. Donc, vous, vous le voyez comment?

Mme Montour (Claire) : Bien, plus largement, c'est sûr que, quand on regarde le projet de loi, là... pas le projet de loi, mais la loi initiale avec des pourcentages, on n'avait pas ou, je vais dire, à peu près pas à négocier le pourcentage. Il était dans la loi. Puis quand je dis à peu près pas, il y a, pour des employeurs, pour certains centres d'activité où, là, les employeurs essayaient de nous amener à déposer des listes avec des pourcentages plus élevés que la loi.

Je vais donner l'exemple des CLSC, où ils étaient à 60 %. On a eu de bonnes discussions, de longues discussions. Et moi-même, j'ai dû me retrouver devant le TAT avec un employeur parce qu'il ne voulait pas le 60 %. Il voulait 90 %. Ça fait que, là, c'étaient des négociations. C'est un peu comme ça que ça se passait. Je n'ai pas d'autre expérience, c'est un projet de loi, là.

Donc, il y avait des pourcentages, mais toute la négociation des horaires de travail, de qui est dans le département... Je vous donne un exemple. On sait tous, bon, de me répondre... pour qu'un employeur me dise : Nous avons 14 postes. Ça ne veut pas dire que les 14 sont remplacés. Ça ne veut pas dire qu'ils sont tout le temps là. Est-ce qu'il y a des journées qu'il y a plus de personnel pour toutes sortes de raisons? Exemple, en chirurgie, le bloc opératoire est ouvert, on va avoir plus d'admissions. Il y a toutes sortes de considérations comme ça, et c'est cette difficulté-là que nous avions.

C'est pour ça qu'une des recommandations visait à avoir un délai pour obtenir les documents, parce que toute cette base de négociation là, il faut quelle soit faite à partir de données objectives : l'horaire de travail, des cédules, des postes remplacés, pas remplacés, des surcroits, pas de... Il y a toutes sortes de données. Et là je vous rappelle que, maintenant, les CISSS et les CIUSSS... Ça fait que la connaissance de tous les centres d'activité, de tous les services... Des départements peuvent être totalement différents, même s'ils donnent le même service. Quand on parle d'une urgence dans un grand CISSS, les urgences ne sont pas toutes pareilles. Donc, ça va nous amener beaucoup de travail à ce niveau-là et de discussions. Je pense que quand on avait... la recommandation qui dit, oui, un délai pour obtenir les documents, je pense que c'est ce qui va faciliter cette négociation-là et arriver, de part et d'autre, à une entente dans un délai raisonnable aussi, là.

Il ne faut pas non plus retarder les discussions, puis faire durer le plaisir, je vais le dire comme ça, puis ne pas être capable de s'entendre. Et oui, on demandait quelqu'un, dès le départ, au niveau du TAT, justement, pour accompagner les parties et non pas de devoir, de façon commune, demander l'intervention. Et là est-ce qu'on s'entend tous les deux pour demander l'intervention? Quand je parle des deux, c'est de part et d'autre. Est-ce qu'on veut l'intervention? Une partie ne veut pas. Comment ça va arriver? Il faut essayer d'éviter, à notre avis, pour les membres que je représente, de prendre beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps à négocier ou à s'entendre autour de ces modalités-là avant d'arriver dans le vif du sujet.

Donc, oui, on a déjà vu, à des moments, essayer d'avoir plus de personnel. Et là ça pose la question aujourd'hui, avec tout ce qu'on vit de pénurie puis tout ça. Mais quand on n'a pas les documents, tous les documents nécessaires, bien... Puis oui, c'est vrai, je l'entends, puis on l'a déjà nous aussi, des fois, ça nous tente de faire... demander l'intervention des services essentiels pour avoir plus de personnes qu'il y a en temps régulier, parce qu'il manque de personnes, là. Ça, on ne cachera pas personne, là. On a tous pensé à ça.

M. Rousselle : Donc, vous me dites, effectivement, que tout tourne alentour de la liste, de la rapidité d'avoir la liste pour pouvoir, justement, avoir une entente entre les parties. Ça, ça va faciliter vraiment.

Mme Montour (Claire) : La liste, les documents, les horaires, bon, tout ça, là.

M. Rousselle : Bon, bien, merci. Ma collègue de Fabre va...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, je laisse la parole à la députée de Fabre. Il vous reste 4 min 32 s.

Mme Sauvé : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, Mme Éthier, Mme Montour et M. Daoud, merci pour votre présentation, le rôle important que vous jouez et la qualité de votre mémoire.

Je sais que vous avez manqué un petit peu de temps à la fin, dans votre présentation, entre autres, dans votre mémoire, sur toute la notion de la négociation de bonne foi. Alors, vous avez fait ça rapidement, puis je voudrais peut-être vous entendre. Je sais, tantôt, que le ministre a un peu dialogué avec vous sur cette question-là par rapport à la demande que vous faites d'avoir un agent de relation de travail. Et là, au fil des discussions avec mon collègue, j'ai bien compris qu'il y a la négociation de bonne foi, la demande qui est faite, de votre côté, d'avoir un agent de relation de travail pour la négo puis conclure l'entente, mais, en même temps, bon, le ministre mentionne, ça devrait être non systématique et à la demande. J'entends de votre côté aussi que l'ajout de l'agent de relation de travail, c'est non seulement dans le principe de négociation de bonne foi, mais aussi d'accompagnement face à une complexité, parce que, vous l'avez dit, c'est fort complexe. Il y a une variante extraordinaire de la réalité des soins d'un établissement à l'autre.

Alors, qu'est-ce qui vous amène, dans un premier temps, à avoir à mettre de l'avant... parce qu'il me semble que ça devrait être évident, mais la négociation de bonne foi, pourquoi il faut le mentionner, pourquoi c'est important? Puis pourquoi, de façon systématique, pas seulement pour la bonne foi, mais aussi pour l'accompagnement dans la complexité, vous demandez un agent de relation de travail?

Mme Éthier (Sonia) : Bien, je pense que je l'ai un peu expliqué au départ, parce que c'est vraiment... c'est un changement de culture, là, hein? On ne parle plus de pourcentage, on parle de la réalité de ce qui se passe. Mme Montour l'a expliqué tout à l'heure, c'est prévu, là, dans le projet de loi, les services essentiels par unité de soins, catégorie de soins, c'est prévu à l'article 111.10.1, le fonctionnement normal des unités des soins intensifs, le libre accès d'une personne, bon, etc.

C'est surtout les premiers... les points 1 et 2, et c'est nouveau, là, et ce pour quoi on pensait important que l'agent de relation de travail soit, dès le départ, pour accompagner les parties... Mais évidemment, M. le ministre l'a précisé qu'à la demande, il y en aura un. Mais, c'est vrai... Mais, tu sais, Mme Montour, tantôt, quand elle disait : Il ne faudrait pas que ça retarde le processus, puis est-ce que, si une partie désire être accompagnée, l'autre partie... Tu sais, il ne faudrait pas qu'il y ait une... que le processus retarde pour compliquer les affaires. Ça fait que c'était un peu dans ce sens-là, mais c'était spécifiquement sur la question que... On change la culture, là, hein? Ça va être un... On modernise, on fonctionne différemment, puis c'est un peu en ce sens-là.

Puis sur la question, bien, de la bonne foi, bien, on disait que le projet de loi n'en parle pas spécifiquement que la négociation doive débuter et se poursuivre avec diligence et bonne foi comme c'est déjà prévu à l'article 53. Donc, pour nous, c'était une précision, puis peut-être que Me Daoud pourrait compléter, mais on pensait que c'était important de la spécifier parce que, de part et d'autre, il faut fonctionner de bonne foi pour y arriver à la toute fin.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Me Daoud, il vous reste 35 secondes.

• (15 h 40) •

M. Daoud (Marc) : Oui, effectivement, c'est un principe quand même assez fondamental, le fait de négocier... de bonne foi, excusez-moi, et on sait que l'obligation va être là. Mais l'article existe déjà dans le Code du travail, l'article 53. Pourquoi ne pas l'élargir pour inclure la négociation de bonne foi?

Et je rajouterais, en complément à Mme Éthier, que l'agent... si on déjà un agent de relation de travail avec un pouvoir d'enquête de nommé au départ... on sait que l'entente, au final, doit être transmise au tribunal pour approbation. Donc, si on a déjà un agent qui l'accompagne, on sait que ça va faciliter l'approbation et réduire les délais.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Merci pour le bel échange. Nous laissons maintenant la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve. Vous avez 2 min 45 s.

M. Leduc : Mme la Présidente, j'aimerais pouvoir utiliser du temps qui ne sera pas utilisé par mes collègues.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Est-ce qu'on a l'accord? On a le consentement?

M. Boulet : À l'arrachée.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous y allons rapidement. Député d'Hochelaga-Maisonneuve, vous avez 5 min 15 s.

M. Leduc : Vous vous magasinez une étude détaillée très difficile, M. le ministre, très difficile. Bonjour, bienvenue. Bienvenue parmi nous. Merci d'être là, merci d'avoir préparé un beau mémoire.

J'avais ma première question concernant la question de l'élargissement des groupes ou des accréditations qui pourraient être assujetties, donc, aux services essentiels. Ma question s'adresse d'abord... en fait, je comprends que vous n'êtes pas tout à fait favorables à ça, là, vous recommandez de retirer un alinéa complet. Mais plus spécifiquement, pour la CSQ, est-ce qu'il y a des gens qui sont membres de votre centrale qui pourraient être assujettis à ça, si on élargit, ou si vous avez en tête des gens qui pourraient éventuellement être membres de la centrale qui seraient touchés à ça, ou c'est une position de principe plus générale?

M. Daoud (Marc) : En fait, c'est une position de principe générale parce que la façon que c'est rédigé, éventuellement, ça pourrait donner une ouverture à ce qu'un tribunal ou un juge décide de l'élargir à pas mal n'importe quelle entreprise. C'est vraiment large. On dit : Toutes les entreprises qui ne sont pas inscrites à l'article 111.0.16 pourraient théoriquement être assujetties à ça. On sait aussi que l'arrêt Saskatchewan délimite très bien, on l'a mentionné, restreint le concept de service essentiel. Donc, d'un côté, on essaie de l'élargir et, de l'autre côté, on a un principe, déjà, dans un arrêt de la Cour suprême, qui dit que ça doit être restreint. Donc, c'est deux objectifs qui vont à l'opposé l'un de l'autre. Et... juste un instant.

Et, en fait, l'autre risque, c'est que même si, en bout de ligne, on sait que le tribunal... ou on peut entrevoir que le tribunal va rejeter des demandes d'intervention qui visent à élargir l'assujettissement des entreprises, c'est quand même de l'énergie qui va être dépensée à s'attaquer à des tentatives théoriques. Donc, il pourrait... et surtout que la personne intéressée pourrait le faire. On vous a très bien entendu, au niveau de la personne intéressée, que oui, la jurisprudence a tendance à le restreindre, mais n'importe qui peut quand même tenter de se faire passer pour une personne intéressée. Il va y avoir un débat, le tribunal va se poser sur la question à savoir si cette personne-là a un intérêt ou non.

Donc, les parties, alors qu'elles sont peut-être en grève, vont être obligées de revenir et d'essayer de... bien, en fait, de, tout simplement, faire des représentations et de mettre de l'énergie et du temps à éviter de perdre des droits qu'ils pensaient... étaient déjà acquis.

M. Leduc : Je comprends, dans votre mémoire, que vous vous inquiétez qu'il n'y ait pas de critère par rapport à ça, à la personne intéressée. Advenant que, dans l'étude détaillée, je ne réussisse pas à convaincre le ministre de retirer l'alinéa, comme vous le réclamez, est-ce que l'intégration de critères qui pourraient restreindre la portée de cet élargissement-là pourrait être une forme de compromis qui...

Mme Éthier (Sonia) : Au niveau de la personne intéressée, là, je les ai notés tout à l'heure, là, ça pourrait être un compromis, mais on préférerait que ce soit retiré.

M. Leduc : Peut-être que M. le ministre va faire des devoirs préalables à l'étude détaillée, il va nous arriver avec des amendements. C'est ce qu'il a fait la dernière fois, donc on va s'attendre au même niveau de rigueur.

M. Boulet : On a toujours des discussions raisonnées, hein? Je rappellerais à mon collègue que...

M. Leduc : Oui, tout à fait. Tout à fait. Et toujours, donc, sur personne intéressée, vous... peut-être vous n'étiez pas là tantôt, mais on a eu une discussion avec la FQM, Fédération québécoise des municipalités, qui prenait l'exemple de sous-contractants qui allaient déneiger, par exemple. Et là eux autres, ils disaient : Moi, comme ville, si jamais il y a une grève ou un lock-out entre le sous-contractant et ses employés, moi, comme personne intéressée, je veux pouvoir intervenir, en matière de services essentiels, pour le déneigement de ma ville.

Est-ce que, là, dans ce cadre-là, c'est quelque chose qui, par principe, toujours, vous aimeriez mieux écarter, ou avec des critères, si c'est un... La question des sous-traitants, finalement, est assez centrale dans la question des personnes intéressées. C'est un peu ça que j'essaie de dire.

Mme Éthier (Sonia) : On n'a pas entendu exactement, là. Vous nous indiquez de quelle façon il voyait la notion de personne intéressée, mais — une minute — c'est peut-être un exemple, justement, qui pourrait nous mener à un endroit où on ne devrait pas aller. C'est exactement l'exemple. Il y a, oui, du déneigement qui... puis, tu sais, ce n'est pas dans notre expertise, là.

Mais, dans le fond, ce que j'essaie d'exprimer, c'est qu'il ne faut pas... Il faut faire attention de ne pas faire en sorte que le droit de grève se trouve dilué parce que tout un chacun va déterminer qu'il est une personne intéressée puis qu'on va venir compromettre le droit de grève, qui est légitime.

M. Leduc : Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci C'est bien. Alors, M. Daoud, Mme Éthier, Mme Montour, de la Centrale des syndicats du Québec, on vous remercie beaucoup pour votre contribution aux travaux à la commission.

Nous allons suspendre les travaux quelques instants, le temps de donner la chance au deuxième groupe de s'installer. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 46)

(Reprise à 15 h 48)

La Présidente (Mme Jeannotte) : Alors, je souhaite la bienvenue à l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.

Alliance du personnel professionnel et technique
de la santé et des services sociaux (APTS)

Mme Dubé (Carolle) : D'accord, merci. Carolle Dubé, présidente de l'APTS.

M. Comeau (Robert) : Je suis Robert Comeau, vice-président.

M. Tessier (Guy) : Guy Tessier, coordonnateur au sein de l'équipe de relations de travail de l'APTS.

Mme Dubé (Carolle) : D'abord, M. le ministre, Mme la Présidente de la commission et membres de la commission, d'abord, je tiens à vous remercier de donner à l'APTS l'occasion de faire valoir notre opinion sur le projet de loi n° 33.

L'APTS représente plus de 56 000 personnes professionnelles techniciennes qui pratiquent dans la très grande majorité des établissements du réseau québécois de la santé et des services sociaux. 86 % de nos membres sont des femmes. Nos membres pratiquent dans plusieurs... dans plus d'une centaine de types d'emploi différents, dans plusieurs centres d'activité, secteurs d'activité. En fait, nos membres travaillent dans toutes les missions que l'on retrouve, là, dans le réseau.

• (15 h 50) •

Je ne vous cacherai pas que l'APTS accueille avec quelques réserves le projet de loi n° 33, des réserves qui n'ont rien à voir avec l'intention, qui est louable. C'est tout à l'honneur du gouvernement du Québec de prendre les moyens pour se conformer aux décisions de la magistrature, notamment la décision de la Cour suprême en 2015 et celle du tribunal du travail en 2017. Ces deux jugements-là ont bouleversé l'ordre établi. Le temps est venu d'ajuster le Code du travail pour trouver un nouvel équilibre entre le droit de faire la grève dans les secteurs public et parapublic et naturellement le droit des citoyens et des citoyennes de recevoir ces services.

Nous reconnaissons que le projet de loi n° 33 contient des dispositions qui peuvent améliorer le rapport de force des syndicats, pour qui la grève constitue le seul moyen de pression efficace pour servir les intérêts des personnes salariées. Nos craintes principales, avec le projet de loi n° 33, c'est qu'il peut devenir techniquement long et difficile à appliquer. Considérant d'abord le grand nombre de titres d'emplois représentés par l'APTS et la complexité administrative des nouveaux centres, les CI et les CIUSSS, on peut s'attendre à d'interminables débats entre les parties quand viendra le temps de définir les services essentiels dans le nouveau contexte qui est proposé.

Le recours au personnel-cadre, on ne s'y oppose pas, mais pourra aussi contribuer au maintien des services essentiels. On pense que ça ne sera pas simple non plus. Ces considérations laissent entrevoir des risques de judiciarisation de l'application des nouvelles règles. Si les problèmes de mise en place d'ententes et de listes sur les services essentiels s'accumulent, c'est carrément l'accès à la grève qui peut être compromis. Mais nous pensons qu'on peut prévenir bien des litiges en améliorant le projet de loi, et c'est le sens de nos recommandations.

D'abord, sur la détermination des services essentiels, en cas de grève, le projet de loi remplace l'obligation de maintenir un pourcentage de salariés par corps de travail par l'obligation de maintenir les services dont l'interruption peut mettre en danger la santé ou la sécurité publique. Pour nous, c'est la modification la plus significative du projet de loi, mais ça veut dire... ça signifie qu'il faudra passer en revue toutes les tâches et les services assumés par une personne salariée et se demander si une interruption met en danger la santé et la sécurité publique. Si c'est non, on va reconnaître, à ce moment-là, que ces tâches-là ne font pas partie des services essentiels à maintenir pendant une grève. Et ça, on devra répéter ça pour beaucoup de secteurs, beaucoup de titres d'emplois.

Ça, c'est un travail qui est quand même assez colossal. On pense que nous, on va y arriver, mais on a des doutes, quand même, sur la capacité des employeurs du réseau de la santé de déterminer ces services-là pour s'assurer d'une bonne application. Parce qu'avec la création des CI et la création des CIUSSS, on a noté, on a observé un manque de temps important, d'interlocuteurs dans les dossiers de relations de travail. Et pour nous, les retards à prévoir pourraient venir faire en sorte de priver l'APTS et ses membres de faire la grève au moment jugé opportun. Donc, vous allez retrouver...

Puis on a vraiment un souci, comme je vous disais, de faire en sorte de ne pas judiciariser l'application de ces nouvelles règles là. Donc, vous retrouvez, là, à la page 7 de notre mémoire, plusieurs mesures qu'on vous propose pour faciliter, donner des moyens, donner des outils, des délais pour faciliter le travail au niveau local. Et à ce niveau-là, parmi cette recommandation-là, ce qu'il est aussi important de maintenir, c'est de permettre en tout temps à une organisation syndicale de pouvoir déposer des listes de services essentiels. Même si le processus est en cours, si ça ne va pas bien, on veut pouvoir garder cette possibilité-là.

Lors d'une journée de grève, cette nouvelle façon de déterminer les services essentiels pourrait faire en sorte qu'une personne salariée d'un centre d'activités assume une partie de ses tâches, tandis qu'une autre doit faire toutes ses tâches, tandis qu'une autre pourrait s'absenter totalement. Donc, ça va entraîner nécessairement une grande variabilité dans le temps de grève pour les personnes salariées. Nous, on pense que le projet de loi ne doit pas interdire que les parties s'entendent, par exemple, pour maintenir un pourcentage, comme on peut le vivre, actuellement, de manière à ce que les temps de grève soient égaux pour tout le monde. On est convaincus que le niveau de grève doit demeurer une liberté d'action syndicale et que ça appartient au syndicat de choisir, dans le respect, bien sûr, de ce qu'il y a de prévu à l'article 111.10. Et c'est dans cet esprit-là qu'on vous propose d'ajouter la notion, à 111.10, de dire que les services essentiels sont minimalement ceux dont l'interruption... tel que c'est déjà prévu, là, dans votre proposition.

On conteste la formulation aussi du premier paragraphe de l'article 111.10.1, qui dit que la négociation des services essentiels s'effectue selon les paramètres convenus entre les parties. Est-ce qu'il faut comprendre que les paramètres doivent obligatoirement être convenus comme préalables à une négociation ou à un dépôt d'une liste? Bon, j'ai entendu tout à l'heure vos commentaires. On pourra y revenir, on pourra échanger, parce que pour nous, là, on ne peut pas accepter que le droit de l'APTS de déclencher soit limité par une démarche, là, obligatoire qu'on devrait convenir pour établir les paramètres. Et, dans ce sens-là, on est d'avis que les services essentiels doivent pouvoir se négocier au niveau local, même s'il n'y a pas de paramètre convenu et qu'à défaut d'une entente, qu'on puisse déposer nos listes au tribunal.

Donc, on a aussi... vous allez retrouver, dans notre mémoire, là, à la recommandation 3, des propositions par rapport à cette notion-là de paramètres, et on pourra y revenir tout à l'heure.

L'article 18 du projet de loi présente une modification d'importance à la section 4 du Code du travail, qui élargit considérablement les pouvoirs du tribunal. Quelqu'un, par exemple, qui jugerait que les services essentiels ne sont pas suffisants pourrait demander au tribunal de les ravoir après qu'il les ait autorisés. On est tout à fait contre cette proposition à cause de son effet sur le droit de grève. On considère que le législateur va trop loin puis que ça met en péril aussi le droit de grève. Il faut donc limiter l'intervention du tribunal à ce niveau-là.

Mais si le législateur persiste à vouloir imposer une reconsidération des services essentiels, alors il faudrait établir une présomption que les services essentiels d'une entente, une liste qui aurait été préalablement autorisée, sont suffisants de manière à pouvoir maintenir la grève en cours le temps que le tribunal puisse auditionner l'affaire. Donc, c'est l'essence de la recommandation n° 4, de retirer l'article 18 et de maintenir l'article 111.16 du Code du travail sous sa forme actuelle.

La modification qui est proposée par l'article 13 au sujet de la transmission de l'information sur le nombre de personnes salariées qui sont habituellement au travail pour une période donnée, c'est vraiment bienvenu. On souligne aussi l'élément... on est parfaitement en accord, ça répond aussi à des besoins, mais on recommande de préciser le délai à respecter par l'établissement pour transmettre au syndicat lesdites informations. Et on vous recommande, là, de fixer au plus tard à 15 jours suivant la réception d'une demande.

Que les établissements puissent compter sur les cadres pour assurer les services essentiels, pour nous, c'est une bonne nouvelle, puisque ça va permettre à davantage de personnes salariées d'être en grève. C'est sûr que nous allons en tenir compte au moment de faire les ententes puis de déterminer les listes de services essentiels. On pense par contre que ça pourrait ne pas toujours être simple pour autant, parce qu'il faut reconnaître... il va falloir voir les connaissances et expériences. Beaucoup de nos membres sont des membres d'ordres professionnels avec des activités, des obligations d'appartenir, par exemple, à un ordre professionnel, mais, dans l'ensemble, je vous dirais qu'on est en faveur de cette modification.

Donc, pour conclure, on ne conteste pas d'obligation pour pouvoir faire la grève de respecter les étapes strictes qui sont prévues aux articles 111.11 et 111.12 du Code du travail. Cependant, il ne faudrait pas que les nouvelles règles viennent limiter l'accès à la grève. C'est pourquoi nous avons proposé d'ajouter des mesures pour favoriser, faire en sorte qu'on puisse bien s'entendre au niveau local pour déterminer les services essentiels.

Je terminerais en vous disant que, pour ma part, j'ai participé activement à plusieurs grandes négociations du secteur public. Je peux vous assurer que les membres qu'on représente dans notre organisation sont des gens qui ne voudront jamais, qui ne voudraient pas être dans une situation où la santé et la sécurité publiques sont menacées, et ça, même en période de transition avec... de tension, pardon, avec la partie patronale. C'est dans ce sens-là que nous voulons travailler avec les établissements pour déterminer les services essentiels lorsque la grève s'impose. Donc, voilà, merci de votre attention.

La Présidente (Mme Jeannotte) : Oui, merci. Je vous remercie beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange. Alors, M. le ministre, la parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.

• (16 heures) •

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Bravo pour la présentation, Mme Dubé, puis je remercie l'APTS d'avoir fait les efforts de préparer un mémoire aussi bien structuré, de vous être déplacés pour faire des recommandations. Et j'apprécie beaucoup... sur le fond, je pense qu'on s'entend bien. J'aime bien vos remarques préliminaires et vos remarques aussi de clôture.

On le reconnaît, le législateur québécois le reconnaît qu'il y a une décision qui a été rendue par la Cour suprême du Canada puis que le droit de grève est... Vous m'avez entendu tout à l'heure, là, je ne veux pas reprendre tout ce que j'ai mentionné, mais j'aime bien quand vous dites que les membres que vous représentez sont aussi soucieux du maintien des services essentiels qui vont assurer la santé, sécurité publique. Je pense qu'il y a un ordre social au Québec qui est relativement important à respecter, puis on a généralement un excellent climat de relations de travail. Je pense que c'est de bon augure pour l'amorce des négociations dans le secteur public et parapublic qui vont débuter bientôt.

Le critère général, je suis assez prudent, hein, parce que l'ancien article 111.10, on avait des seuils minimums, puis là ça vient limiter, parce que ça vient imposer puis ça empêche aussi un tiers indépendant de se prononcer sur la nature des services essentiels. Parce que le TAT, je ne veux pas que ce soit vu comme un organisme qui va peser lourd sur les épaules des parties. Vous l'avez mentionné, les services essentiels, ça appartient... c'est du domaine d'expertise des parties, établissement par établissement. Mais le critère, qui est plus général, de santé, sécurité publique... du public est comme un fardeau à supporter pour permettre que les associations accréditées puissent exercer ce droit fondamental là qu'est la grève, qui découle du droit d'association. Mais il faut que ce soit flexible, il faut que ce soit ordonné, et ce que j'ai réalisé dans les statistiques du TAT, c'est que, je pense, c'est au-delà de 80 %... dans à peu près 80 % des cas, il y a des... les négociations se sont soldées par une entente entre les parties. 81 % des négociations de services essentiels, entre 1992 et 2007, puis je présume que ça s'est accru au fil des années.

Ça fait qu'on fait confiance aux parties, il faut continuer de faire confiance aux parties, et on est convaincus que les modifications vont être un élément additionnel qui va permettre aux parties de bien s'entendre, parce que, vous le savez, les seuils minimaux, ça ne faisait pas l'affaire, puis il y a beaucoup de syndicats qui me disaient : Jean, avec les seuils minimums, on se retrouve, en cas de grève, avec un nombre supérieur de salariés syndiqués, donc ça ne marche pas. Puis c'est sûr que ça venait, selon les tribunaux, puis moi, je suis d'accord avec ça, limiter de façon trop importante l'exercice du droit de grève. Mais je pense qu'il faut se faire confiance au Québec. On va s'adapter à ce critère général là. Le TAT est un organisme indépendant. Puis moi, je suis extrêmement positif pour la mise en application de ce projet de loi là qui va devenir une loi éventuellement.

Puis vous avez fait référence aussi aux délais. Je pense qu'on a voulu, encore une fois, faire confiance aux parties, mais il va falloir agir avec diligence. Et le tribunal est contraint de se soumettre à des règles de diligence. Est-ce que ça prendrait un délai, par exemple, pour forcer l'employeur à donner les informations demandées par l'association accréditée? Ça, vous avez fait référence à ça, Mme Dubé, hein? Puis est-ce que vous avez des cas, des exemples où vous avez témoigné de négligence ou de retards indus par des établissements de soumettre les informations demandées par l'association accréditée au moment du début des pourparlers sur les services essentiels?

Mme Dubé (Carolle) : C'est sûr qu'on va le faire. Ce nouveau modèle là, on aura à le faire pour une première fois, mais on le fera aussi pour une première fois dans des établissements dont la composition a changé de façon majeure depuis la dernière ronde de négociations, hein? On est dans des CI, des CIUSSS, avec des milliers de membres du personnel étalés partout dans une région.

Puis, comme on l'a présenté dans le mémoire, c'est certain qu'on voit encore malheureusement, dans le réseau, un manque de... vis-à-vis des gens au niveau de nos vis-à-vis, où parfois ça manque... traiter nos dossiers quotidiens de relations de travail. C'est certain que, quand on voit ce que cette nouvelle loi là va amener en termes d'impact de temps, de travail qui devra être fait au niveau local... parce qu'on est d'accord que c'est un travail qui doit être fait au niveau local. Nous, on va se donner les moyens de le faire, mais on aimerait ça aussi que, de l'autre côté, les employeurs aient aussi les moyens, donc les ressources.

Ça fait que c'est pour ça qu'on pense que le projet de loi... la loi devrait prévoir un délai qui va forcer les parties. Puis peut-être qu'éventuellement vous aurez, comme gouvernement, à ajouter des ressources pour qu'on puisse y faire face. Parce que, si on n'est pas capables de le faire au niveau local puis que là tout est reporté au TAT, bien, ça va... votre objectif de donner un accès plus grand à la grève, bien, on pense qu'il ne se concrétisera pas.

M. Boulet : D'accord. Bon point, d'où l'importance de redire que, dans le projet de loi, on prévoit que le TAT puisse assigner un agent de relations de travail pour accompagner les parties. Puis cette espèce de mandat d'accompagnement là, il va s'imposer de façon encore plus aiguë au début de l'application, pour la première ronde de négociations.

Et on s'est assuré, là... parce qu'au moment des consultations préliminaires, on s'est assuré que le TAT avait des ressources suffisantes puis on nous confirme que oui. Il y en a 76, actuellement, des conciliateurs puis des agents de relations de travail, puis il y en a de 12 à 14 qui sont assignés plus spécifiquement aux services essentiels. Il y en a six à Québec puis de six à huit à Montréal. Puis, comme je vous disais, ça a mené, dans la vaste majorité des cas, à des ententes entre les parties. Les agents de relations de travail, ils reçoivent un signal clair qu'on veut agir avec diligence.

Et, s'il y a un goulot d'étranglement, je l'ai mentionné, si le TAT a besoin de ressources additionnelles, elles seront ajoutées, parce qu'on ne veut pas... je n'aime pas vraiment le terme «judiciarisation». Je ne veux pas que ça complexifie, mais je dis quand même qu'il y a un certain fardeau à assumer découlant de cette décision-là. Il y en a qui disent : C'est facile d'appliquer des pourcentages, ou des chiffres, ou des seuils minimums, mais, en même temps, je comprends que ça limite peut-être indûment l'exercice du droit de grève. Mais donc, il faut assumer ce que l'Organisation internationale du travail puis les tribunaux supérieurs reconnaissent comme étant le critère classique, c'est-à-dire la santé et la sécurité du public. Mais je suis totalement d'accord avec vous qu'il va falloir s'assurer que ça aille bien puis que ça se déroule de façon fluide et harmonieuse.

L'autre volet, si je vous comprends bien, les paramètres nationaux, ça, vous m'avez entendu tout à l'heure, à mes remarques, les paramètres nationaux, c'est si les parties le veulent bien, parce que je ne veux pas désapproprier la définition des services essentiels des parties. C'est les parties qui sont en maîtrise complète de leur environnement de travail, mais... puis je le disais encore, je pense que vous m'avez entendu, Mme Dubé, il y a des syndicats qui sont venus nous dire : On devrait plutôt imposer une négociation au niveau national, un peu suivant le modèle de la Colombie-Britannique, là, l'ordre global puis l'ordre local. Nous, on est allés un peu entre les deux. On laisse la faculté aux parties de déterminer leurs besoins... leurs services essentiels, puis, s'il y a des affaires au niveau national, bien, les parties pourront décider. Puis c'est des paramètres qui ne s'imposent pas non plus au Tribunal administratif du travail mais qui peuvent servir de guide.

Et ce qu'un syndicat nous mentionnait, hier, ça devrait être imposé au niveau national, parce que, là, on s'expose à une asymétrie dans les services essentiels, dépendamment des établissements et des régions, alors qu'il devrait y avoir un niveau national essentiel de services à maintenir. Ce n'est pas l'analyse qu'on fait. Donc, vraiment, le niveau local, je pense que c'est ça, d'abord et avant tout, le national, si les parties le veulent. Est-ce que ça vous va avec cette approche-là?

• (16 h 10) •

Mme Dubé (Carolle) : Oui. C'est juste qu'on n'est pas certains que le texte dit exactement ça. On a l'impression que le texte amène une obligation d'avoir déterminé des paramètres au niveau national. Donc, elle est là, notre réserve. On n'est pas en désaccord, puis, écoutez, je vous disais tantôt, c'est une première fois, un premier exercice qu'on va faire. On verra s'il y a des discussions.

Nous, on a un syndicat national en plus. Est-ce qu'on va faire une approche par exemple auprès de nos vis-à-vis de négociation? On va amorcer une réflexion après l'arrivée du projet de loi. Mais ce qu'on ne veut surtout pas, c'est que ça devienne une obligation, parce qu'en plus il n'y a pas rien qui vient prévoir que, si tu ne t'entends pas... il n'y a aucun mécanisme en plus pour en arriver à une entente.

Donc, pour nous, ça ne doit pas être une obligation, ça doit demeurer optionnel. Mais on a une réserve par rapport au texte puis peut-être que Guy serait meilleur que moi pour l'expliquer, là.

M. Tessier (Guy) : Tu penses?

Mme Dubé (Carolle) : Oui, je suis sûre, Guy.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Tessier (Guy) : Bien, si on regarde le texte, mettons, vu qu'on veut un peu se pencher sur ce texte-là, c'est qu'on laisse entendre, finalement, que... quand on veut déterminer des paramètres, on dit : Ces paramètres-là, là, à 111.10.1, c'est... le cas échéant, cette négociation s'effectue, donc,s'effectue selon, finalement, les paramètres convenus. Bien, il y a un caractère impératif que, finalement, on aimerait éviter.

C'est pour ça que, dans notre recommandation, finalement, on suggère au législateur de plutôt dire que cette négociation-là peut s'effectuer. Donc, à ce moment-là, s'il y a à convenir de paramètres... Puis encore une fois, qu'est-ce qu'on entend par paramètres, ce serait important de le définir, parce qu'on ne pourrait pas jouer, finalement... Pour nous, ça n'a pas de sens qu'on joue, finalement, dans les services essentiels au niveau d'un paramètre qui pourrait être négocié au niveau national. Donc, on pense que c'est plus de l'ordre logistique, qu'on met des balises pour faciliter, finalement, les parties, au niveau local, de convenir, de déterminer, finalement, leurs services essentiels.

Alors, sur ce point de vue là, bien, c'est ça, donc on suggère, dans la recommandation, finalement, de diluer, de ne pas, mettons, y aller avec le caractère impératif, mais plutôt de dire : Oui, on peut, finalement. C'est pour ça qu'on y va avec une suggestion qui dit : Bien, cette négociation-là peut s'effectuer. Donc, on pense qu'à ce moment-là les parties pourraient convenir de quelque chose, mais, encore là, il faudrait peut-être s'entendre sur qu'est-ce qu'on pourrait convenir au niveau, mettons, national, en termes de paramètres.

Je vous écoutais hier, M. le ministre, puis je comprenais que... Vous parliez, quand vous avez abordé la question des paramètres, à un moment donné... Je vous relance un petit peu sur vos discussions d'hier, là. Tu sais, vous avez dit, bien, nature, peut-être, des services, vous avez parlé de quantité. Donc, ce sont finalement des termes qui ont à voir avec les services essentiels. Et comme l'entente comme telle n'est pas, mettons, sous le regard, mettons, du tribunal, on peut s'interroger, finalement, si on veut... si vous voulez que, finalement, les parties se substituent au pouvoir du tribunal pour déterminer, en bout de ligne, ou d'approuver, finalement, en bout de ligne, quels seront les services essentiels. Alors, bon, c'est à peu près le commentaire que j'avais à faire.

M. Boulet : Oui, je le comprends bien, puis vous êtes le deuxième groupe à faire une représentation de cette nature-là. Moi, je redis que ce n'était pas notre intention. Quand on dit «le cas échéant», ça réfère à une faculté et non à une obligation, on s'entend là-dessus. Puis quand on utilise le terme «paramètres convenus», ça implique forcément qu'il y a une entente entre les parties. Ça fait que c'est clair, dans mon esprit puis dans notre esprit, que ce n'est pas une obligation.

Si cependant, puis là on ne plaidera pas comme si on était des avocats devant un tribunal, mais si on a besoin d'éclaircir pour que ça soit bien compris... parce que le but, ce n'est pas de judiciariser, c'est que ce soit simple d'application. Mais si, lors de l'étude article par article, on convient, tout le monde ensemble, que c'est mieux de l'écrire plus clairement... Nous, on pensait que c'était suffisamment clair, mais je veux enlever toute ambiguïté, là. Ce n'est pas un impératif, le national, c'est si les parties le conviennent.

Deuxième point, le TAT n'a pas à nécessairement dire : Les paramètres convenus, ce sera ça. Il peut être guidé par ces paramètres-là, mais il ne faut pas les isoler, ces paramètres-là, et faire abstraction des autres critères qui permettent de mettre du contenu au concept de santé et sécurité du public. C'est vraiment comme ça qu'il faut le voir.

Il y avait un autre élément, Mme Dubé. Je pense qu'à 111.10... je pense que c'était clair, cependant, bon, évidemment, lors d'une grève, les parties sont tenues de maintenir les services essentiels, puis ces services, c'est ceux dont l'interruption pourrait avoir pour effet de compromettre la santé et sécurité du public. Mais on a bien mis «ces services sont minimalement»... oui, puis c'est votre suggestion, d'ailleurs, puis à la suggestion d'autres aussi, là, mais les services pourraient aller au-delà de ce qui... si jamais ça fait l'objet d'une interruption, que ça pourrait mettre en danger la santé et sécurité publique, là. Ça fait que je voulais le souligner, là, parce que c'est un bon point.

Je voulais dire qu'actuellement aussi le gouvernement peut suspendre l'exercice d'un droit de grève dans les services publics quand les services essentiels ne sont pas suffisants, dont leur interruption pourrait mettre en danger la santé et sécurité. Ça a été exercé seulement trois fois, deux fois en 1986, une fois en 1987. Et donc ce qu'on maintient existait déjà actuellement et c'est vraiment rarement utilisé. Alors, c'est un... Merci, Mme la... Merci beaucoup pour votre présentation, très apprécié. Merci.

La Présidente (Mme Jeannotte) : Merci beaucoup, M. le ministre. Alors, je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle. Vous disposez de 11 minutes.

M. Rousselle : Merci, madame. Mme Dubé, M. Comeau, M. Tessier, bienvenue. Merci pour l'exercice que vous avez fait, un beau mémoire, puis je sais que c'est beaucoup de travail là-dedans, donc merci beaucoup. Et comme le ministre le disait, justement, on voit le côté professionnel là-dedans puis on peut le reconnaître, effectivement, de votre travail.

Écoutez, je regardais, justement, vous représentez 56 000 personnes à travers le Québec, donc 56 000 professionnels à travers le Québec. Donc, vous couvrez beaucoup de différents CIUSSS, CISSS, et ça, partout dans la province. Donc, on le sait qu'on parle d'un hôpital qui est de Montréal, mais qui peut être aussi dans la région, puis donc on peut tomber dans les petits hôpitaux. Et quand on parle de services essentiels, bien, ça peut varier d'une place à l'autre. Et je le sais aussi que ça peut varier justement d'un secteur d'activité comme à l'urgence ou sur les planchers, on peut dire, là. Ça peut être vraiment différent.

Je sais puis je l'ai vu aussi dans votre conclusion comme quoi que... puis vous avez raison, le droit de grève, c'est un droit acquis, c'est un droit important. Mais aussi vous avez marqué aussi que vos membres... je pense qu'ils ont une mission, mais aussi une vocation auprès de la clientèle qu'ils desservent. Je veux dire... puis ça, on le reconnaît... je pense surtout au milieu de la santé, les gens, ils l'ont vraiment à coeur, puis je comprends, sauf qu'il faut penser aux travailleurs aussi. Donc, si on veut les garder à l'emploi, c'est une question... il faut qu'ils soient bien rémunérés, mais il faut qu'ils soient bien traités aussi.

Vous avez parlé de la lourdeur, à un moment donné, parce que, là, oui, on parle... vous avez parlé de lourdeur qui vous inquiète et, oui, ça peut être inquiétant, effectivement, parce que, là, tout ce que je viens de vous énumérer, du fait que vous représentez partout au Québec, c'est que ça va être différent. Puis c'est bien beau qu'on peut être accompagné par quelqu'un du gouvernement, mais est-ce qu'il va en manquer, à un moment donné, parce qu'on couvre le Québec? Comme je vous dis, des activités différentes... et j'aimerais ça vous entendre là-dessus, parce que le droit de grève, il est là, mais on veut donner le service essentiel. J'aimerais ça que vous reveniez là-dessus, là, parce que la lourdeur, quand vous m'avez dit ça, là, ça m'est resté dans la tête, ça.

Mme Dubé (Carolle) : Bien, c'est sûr que quand on regarde, à l'APTS, le nombre de titres d'emploi qu'on représente, bien, on est présent dans tous les secteurs puis nos gens font un travail aussi qui est différent, hein? Ils ont des titres d'emploi, ils ont des responsabilités, des tâches. Donc, ça va être une première parce qu'avant, c'était simple, hein, on définissait un pourcentage puis on ne s'interrogeait pas sur : Est-ce que le travail qui continue à être fait, est-ce que c'est un travail qui répond à une définition de service essentiel? On n'était pas dans ça, c'est un pourcentage. Là, on devra se questionner sur : Est-ce que le travail qui est fait répond en fonction de la nouvelle définition?

Ça fait que ça, c'est pour l'APTS, mais il n'y aura pas que l'APTS qui va être en négociation. Les négociations dans le secteur public... bien, on ne fera peut-être pas tous la grève en même temps, ça, je ne le sais pas, je ne peux pas vous répondre à ça aujourd'hui, mais je pense qu'on sera quand même en négociation, des services essentiels, presque tous en même temps.

• (16 h 20) •

Les réserves qu'on a puis les craintes qu'on a, c'est la capacité des employeurs actuels d'être en mesure, en fonction des ressources, qui... on le sait, là, dans la restructuration des CI, bien, il y a eu des compressions au niveau du personnel administratif, dans les directions des ressources humaines. On le vit actuellement dans le travail qu'on a à faire dans les établissements pour les relations de travail. Ça fait que c'est certain que ce travail-là qui est à venir puis qu'on va faire pour une première fois... on aura une meilleure lecture après, mais à ce moment-ci, aujourd'hui, bien, on a des craintes sur le fait que les employeurs auront peut-être de la difficulté à répondre à cette tâche-là.

Et ça, bien, pour nous, c'est... bon, c'est un nouveau droit que les gens vont avoir. On pense que la grève pourra être utilisée d'une façon différente. Nos gens ont à coeur les soins, mais ils ont aussi... c'est un moment pour eux qui est privilégié pour améliorer leurs conditions de travail. Donc, on va chercher peut-être à utiliser la grève d'une façon différente, mais il faut qu'on puisse l'exercer et non pas être empêchés parce qu'on ne sera pas capables de négocier au niveau local.

M. Rousselle : J'écoutais le groupe avant vous, on parlait d'une liste, justement, parce que... dû au fait que, bon, on parle de grosses structures donc... et ça va être nouveau, ça va être nouveau pour tout le monde, là, l'importance de l'avoir rapidement, cette liste-là, pour pouvoir établir, justement, une entente possible, là, entre les parties aussi, là. Et, comme je vous ai dit aussi, la complexité de votre groupe d'être partout aussi, vous voyez ça comment, vous, le besoin d'avoir cette liste-là?

Mme Dubé (Carolle) : Ça, comme on l'a dit dans notre mémoire, on est contents de ça, parce qu'avant je pense que c'était transmis au TAT, puis il fallait aller les chercher au TAT ou... mais là ça va nous être transmis. En même temps, bien, ça fait partie des difficultés qu'on a dans les établissements par rapport aux listes, par rapport aux commandes.

Donc, on pense que ça serait intéressant qu'il y ait un délai de prévu à partir du moment où on fait une demande, mais que l'employeur ait un délai à respecter pour nous transmettre ces listes-là qui vont faciliter le travail aussi au niveau local pour les deux parties.

M. Rousselle : Parlez-moi donc de pénurie d'emploi. Vous en avez, on le sait. Quand on parle de négociation, quand on va parler, justement, de services essentiels, ça va venir s'ajouter ça, là, là. Vous, actuellement, est-ce que vous fonctionnez, tu sais, quasiment sur des services essentiels ou... comprenez-vous? C'est que, là, j'essaie de m'imaginer dans votre place, à essayer de trouver des services essentiels avec le patron. Et puis là, bon, bien, déjà dans... on a des manques dans certains endroits. Voulez-vous me parler là-dessus?

Mme Dubé (Carolle) : Bien, c'est quand même un mal qui est assez généralisé dans le réseau, qui est à la fois causé par des difficultés à recruter des gens, mais c'est aussi par le fait qu'il y a beaucoup de personnel actuellement qui, entre guillemets, tombe au combat. On a beaucoup de gens qui sont en absence maladie, qui sont sur la CNESST. On a des difficultés particulières, dans certains groupes, à recruter. Donc, c'est certain que, bien, peut-être que ça sera sûrement des arguments que l'employeur va nous amener aussi quand on aura à négocier les services essentiels.

M. Rousselle : Dites-moi, justement... parce que, là, à un moment donné, vous allez jaser avec le patron, vous allez vous entretenir, justement, des services essentiels. Dans le domaine de que vous êtes, un service qui n'est pas donné à quelqu'un dans la population, un jour ou deux jours, des fois, ce n'est peut-être pas essentiel dans son cas, mais qui peut devenir essentiel après une semaine, tu sais, j'imagine. Puis là je vous parle juste d'un cas, mais ça pourrait être plein de choses. Avez-vous pensé à quelque chose ou... à nous suggérer quelque chose là-dedans pour dire : Regarde, il faudrait peut-être revoir à la pièce ou revoir... se rasseoir pour redéterminer le service essentiel ou...

Mme Dubé (Carolle) : ...vraiment bonne, votre question. On se la pose, nous aussi. Non, mais c'est vrai, à un moment donné, il faut... Puis je pense qu'on n'a pas fait l'exercice. Il y aura sûrement aussi de la jurisprudence qui va se définir puis des... à la lumière des discussions. Parce que, vous avez raison, peut-être qu'un service qui est rendu, si la population en est privée une journée, ça a un impact, mais si, après une semaine, l'impact sera différent... C'est des bonnes réflexions qu'on aura à faire puis qu'on aura à partager, puis je pense que ça va évoluer en fonction des ententes, puis des discussions qu'on aura, puis peut-être des décisions qui vont se transmettre, là, qui vont se faire.

M. Rousselle : Surtout que vous couvrez très large, comme vous avez vu... j'ai vu dans votre mémoire, donc, je lisais des secteurs que vous êtes, là. Je suis persuadé, là, qu'il y a certains endroits, effectivement, que, tu sais, des services... tu sais, une journée, deux jours, même trois jours, peut-être que ce n'est pas grave, mais, à un moment donné, ça devient comme urgent puis ça presse vraiment.

Il y a des syndicats qui nous ont amené l'avis de sept jours. Eux autres, ils mentionnaient que... C'est sûr qu'il y a d'autres groupes qui ont dit : Ne va pas là-dedans, c'est certain. Mais sept jours, à un moment donné, si vous changez de date, par contre, là, il faut attendre un autre sept jours. Vous, vous le voyez comment, vous? Est-ce que vous êtes d'accord d'attendre un autre sept jours? Parce qu'il y a aussi la complexité du patron à se réenligner. Il y en a d'autres qui voient ça comme une stratégie syndicale aussi. Je voudrais vous entendre.

Mme Dubé (Carolle) : Bien, c'est sûr que c'est une contrainte, quand même, le sept jours, là. On n'a pas fait souvent la grève puis on ne l'a pas faite pendant des longues périodes, mais c'est quand même une contrainte, là. Mais je pense qu'on n'a rien dit par rapport à ça dans notre mémoire, là. C'est déjà la disposition actuelle, puis il n'y a pas de changements, je pense, qui sont prévus dans le projet de loi. Mais, si vous pensez que ça pourrait être raccourci, je pense qu'on ne dirait pas non, là.

M. Rousselle : Dans toutes les choses que le ministre vous a... a essayé de vous rassurer et tout, là, ou les échanges qu'on a eus avec moi aussi, là, c'est quoi qui serait vraiment le plus important pour vous, là, tu sais, dire : Écoutez, là, ça, là, c'est primordial, cet article-là? La suggestion qu'on a faite, là, ne sautez pas par-dessus ça, elle est importante. Puis je ne dis pas que les autres ne sont pas importantes, on s'entend, là, mais celle-là, c'est comme la majeure.

Mme Dubé (Carolle) : Bien, pour nous, en tout cas, les conditions qu'on a mises à la recommandation 1, là, les différents éléments pour faire en sorte de mieux encadrer, de donner des balises un peu plus pour la négociation au niveau local, pour nous, on pense que c'est très important, là. C'est là que ça doit se passer, donc on pense qu'on a besoin d'outils supplémentaires.

Sur la question des paramètres, bien, je suis un peu plus rassurée, mais, en même temps, je pense que vous devriez vous assurer que le texte exprime bien la pensée de ce qui a été dit, sinon...

M. Rousselle : Faites-vous en pas, on est là pour ça.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Rousselle : Monsieur allait parler, je pense, ou... Non?

Mme Dubé (Carolle) : Tu veux-tu rajouter quelque chose, Guy?

M. Tessier (Guy) : Non, mais j'ai... Pour le délai, finalement, de sept jours, mettons, je pense qu'on se joint, finalement, à la voix des autres organisations syndicales, là. Je pense que c'est important que, finalement, on n'ait pas à attendre un autre sept jours, si jamais on veut, finalement, changer un moment de grève.

Donc, on ne l'a pas relevé. Par contre, on a entendu, finalement, nos confrères puis nos consoeurs le relever, là, ici, en commission, puis on est d'accord avec ça, que finalement on devrait peut-être permettre, justement, que le... de ne pas attendre, excusez, de ne pas attendre le délai, finalement, de sept jours pour...

La Présidente (Mme Jeannotte) : Je vous remercie. Je cède maintenant la parole au porte-parole du deuxième groupe de l'opposition. Vous disposez de 2 min 45 s.

M. Leduc : Merci, Mme la Présidente. Je vais vous demander... comme présidente, je vous demanderais de pouvoir avoir accès au temps non utilisé.

La Présidente (Mme Jeannotte) : Alors, est-ce qu'il y a consentement? Donc, le temps est accordé.

M. Leduc : Merci. Bonjour, bienvenue. Bienvenue parmi nous. À la page 14 de votre mémoire, vous vous inquiétez des pouvoirs du TAT. C'est bien ça... 13 et 14, le fait que ça pourrait aller trop loin, là, qu'il pourrait aller rejouer dans des ententes déjà négociées.

Est-ce qu'il n'y a pas là une espèce de petite contradiction pour ce pouvoir-là du TAT, par rapport à l'intérêt, ou l'objectif, plutôt, du gouvernement, qui était un peu de dépolitiser le processus? S'il permet au TAT maintenant d'aller rejouer dans quelque chose qui est déjà réglé, est-ce que ce n'est pas une repolitisation, mais par un chemin différent? Ou est-ce que je fais des analyses un peu trop...

M. Tessier (Guy) : Abstraites.

M. Leduc : Abstraites.

M. Tessier (Guy) : Non, mais je vous dirais, finalement... Non, mais moi, je vous dirais que l'idée, c'est que, dans la notion de suffisance des services, bon, l'article... là, on est à l'article 111.16, c'est bien ça? Donc, c'est clair que, là, on est dans un moment où la grève est enclenchée. Donc, si la grève est enclenchée, nous, on pense qu'on devrait s'en tenir, finalement, aux interventions du TAT, tel que le Code du travail le prévoit actuellement, c'est-à-dire dans les limites, finalement, de ce qui a été convenu. Si ce qui a été convenu n'est pas rendu, à ce moment-là, oui, je pense qu'il peut y avoir une intervention.

Si on élargit sur la notion de suffisance puis on dit : Bien là, il y a une intervention d'une personne intéressée qui vient nous dire que : Ah! bien là, il y a une inquiétude par rapport à la suffisance, mettons, d'une liste préalablement enquêtée, autorisée, bien là, on pense que le tribunal, il va un petit peu trop loin. C'est pour ça qu'on recommande, finalement... le pouvoir du tribunal irait trop loin. C'est pour ça qu'on recommande, finalement, de revenir plutôt sur le statu quo, pour que, finalement, on n'enquête que sur les listes qui ne sont pas rendues, finalement.

M. Leduc : Puis selon vous, c'était quoi, l'objectif du gouvernement, de permettre ça?

• (16 h 30) •

M. Tessier (Guy) : Bien là, j'ai entendu le ministre, tout à l'heure, dire que c'est une pointe d'aiguille, là. Il y avait trois... il est arrivé trois cas. Ça fait que je me demande... peut-être que c'est quelque chose qu'on ne devrait peut-être pas se soucier, justement. Tu sais, à la limite, je pense, c'est peut-être le pointu du pointu, là, mais c'est parce qu'il y a le principe derrière. Le principe, c'est... bien, il y a une grève puis interrompre une grève, bien, ça va contre le sens, finalement, qu'on a d'un engagement de grève, là. C'est parce que, là, on s'en va en grève, là, tout à coup, woup, il arrive quelque chose. On ne sait pas ce qui va arriver, à la limite, mais ça pourrait amener le tribunal de suspendre la grève pour faire l'étude.

Bien, c'est pour ça que nous, on disait : Bien là, si on est dans cette... puis là on est dans les technicalités, mais, si on est là-dedans, bien, nous, ce qu'on propose, ce serait peut-être d'établir, finalement, une présomption pour que le débat se fasse jusqu'au fond pour ne pas remettre en question, finalement, la grève qui a été débutée, oui.

M. Leduc : Donc, en fait, dans les faits, de retirer au TAT le pouvoir de suspendre une grève, dans les faits.

M. Tessier (Guy) : C'est en plein ça, exactement.

M. Leduc : O.K. C'est très clair. Vous êtes assez nombreux, les centrales syndicales, à vous être inquiété d'une éventuelle insuffisance du TAT à fournir, là, par rapport aux requêtes qui seraient déposées. Est-ce que c'est basé sur une crainte par rapport au futur ou un peu basé aussi sur des difficultés actuelles avec le TAT sur ça ou sur d'autres aspects du TAT?

M. Tessier (Guy) : Bien, nous, on n'a pas soulevé cette problématique-là. On a écouté le ministre, il a été rassurant. Il a dit qu'il y avait des ressources puis qu'il était pour aussi mettre des ressources. Mais oui, on peut quand même penser qu'il va y avoir du travail au TAT, là, hein? Si, justement, on n'est pas capables d'organiser les négociations entre les parties au niveau local puis que, nous autres, dans notre volonté d'accéder à la grève, on dépose des listes, bien, il pourrait y avoir des contestations additionnelles, là, c'est clair parce que... Mais, si on va sur le fond puis on va discuter de ça avec les employeurs, bien, c'est clair qu'on va réduire cette possibilité-là. On va convenir d'ententes.

Donc, c'est pour ça qu'on met beaucoup d'emphase sur notre recommandation 1 pour organiser, finalement, les parties locales, à définir, finalement, des... mais à les encourager, par des paramètres, à définir, finalement, les services essentiels.

M. Leduc : À la page 8 de votre mémoire, par rapport à la variabilité dans les temps de grève et puis... à moins, sauf erreur, là, vos prédécesseurs, hier, de la Fédération des médecins résidents du Québec avaient des propos similaires par rapport à pouvoir moduler le niveau de grève à engager. Ça fait partie de votre recommandation numéro 2. Je pense que j'ai un peu de la misère à comprendre ce que vous entendez par là.

M. Tessier (Guy) : Bien, l'idée générale, c'est de permettre une modulation, c'est-à-dire qu'on pourrait... Les parties pourraient s'entendre, puis je pense qu'on le dit, là. Tu sais, on dit, nous autres, que, tu sais, un niveau de grève à engager, ça peut dépendre d'un ensemble de facteurs, ça. Ça peut dépendre de ce qui concourt à la table de négociation, ça peut dépendre aussi du contexte social, ça peut dépendre d'un ensemble de facteurs. Donc, dans cet engagement-là, bien, nous, on pense qu'il doit y avoir une possibilité pour l'organisation syndicale de définir des minima, des maxima puis, à la limite, de pouvoir justement moduler, finalement, à l'intérieur de ces minima et de ces maxima-là, ces engagements au niveau de la grève.

Donc, je ne sais pas si je suis un petit peu plus clair par rapport à ça, là, mais ça, ça voudrait dire qu'on pourrait le convenir aussi pour une même période avec l'employeur, mais il faudrait aussi que ça soit compris aussi et approuvé par le tribunal, si ça devenait... être aussi une liste, tu sais.

M. Leduc : Vous voulez convenir d'avance pour ne pas avoir à la renégocier à chaque fois pendant...

M. Tessier (Guy) : Exactement. C'est ça.

M. Leduc : Je comprends.

La Présidente (Mme Jeannotte) : Je vous remercie pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux pour quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 16 h 33)

(Reprise à 16 h 40)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, nous souhaitons la bienvenue à la Fédération des employés du préhospitalier du Québec, avec MM. Venditti, Chouinard et M. Fradette. C'est bien cela? Alors, vous connaissez les règles, vous avez 10 minutes pour votre exposé. Avant de commencer, je vous inviterais à vous présenter.

Fédération des employés du préhospitalier du Québec (FPHQ)

M. Fradette (Michel) : Michel Fradette, vice-président exécutif de la fédération.

M. Chouinard (Daniel) : Daniel Chouinard, président de la fédération.

M. Venditti (Danny) : Danny Venditti, chez Roy Bélanger avocats.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, vous pouvez commencer votre exposé.

M. Chouinard (Daniel) : Alors, la Fédération des employés du préhospitalier du Québec remercie la Commission de l'économie et du travail de lui donner la possibilité d'exprimer son opinion sur le projet de loi n° 33.

La FPHQ regroupe 46 associations syndicales représentant plus de 1 500 paramédics et répartiteurs médicaux d'urgence qui assument les services ambulanciers au Québec. La FPHQ est dûment accréditée suivant le Code du travail pour représenter les salariés de chaque association qu'elle regroupe.

Les services ambulanciers sont offerts par des entreprises privées, coopératives et OBNL qui sont représentés par quatre associations patronales. La Corporation d'urgences-santé, qui oeuvre sur le territoire de Montréal et Laval, relève directement du ministère de la Santé et des Services sociaux.

Nous comprenons que le projet de loi a pour objet d'adapter la législation aux décisions des tribunaux quant à l'exercice du droit de grève dans un contexte de services essentiels. À cet égard, nous n'avons pas de commentaire par rapport aux modifications proposées. Nous sommes cependant d'avis que le projet de loi ne va pas assez loin pour se conformer aux décisions de la Cour suprême du Canada, notamment dans l'affaire Saskatchewan Federation of Labour contre Saskatchewan.

En matière de services essentiels, la loi doit prévoir un mécanisme véritable de règlement des différends dans les cas où le maintien des services essentiels rend utopique ou symbolique l'exercice du droit de grève. C'est le cas qui nous concerne dans les services ambulanciers. Dans l'affaire Coopérative des paramédics du Grand-Portage et autres contre la Fédération des employés du préhospitalier du Québec, décision du 9 août 2017 produite en annexe du présent mémoire, le Tribunal administratif du travail mentionne ce qui suit : «Considérant la nature des services en cause, la plupart des tâches accomplies par les ambulanciers sont considérées comme essentielles.» En fait, ce sont toutes les tâches de paramédic qui sont considérées comme essentielles aux fins d'assurer la santé et la sécurité du public, les tâches pouvant être écartées sont marginales et de nature purement administratives. Pour la plupart, elles peuvent être remplies par un cadre de l'entreprise.

Il suffit de prendre connaissance de certaines dispositions de l'entente, jointe en annexe à ce mémoire, pour s'en convaincre, notamment les dispositions suivantes : en point 2 de services essentiels à être maintenus, en a, nous retrouvons tous les services des paramédics prévus aux horaires de jour, de soir, de nuit et de faction de l'employeur seront couverts à 100 %, incluant les ajouts demandés par l'employeur.

En c, les absences seront comblées jusqu'à concurrence de 100 % des effectifs prévus, selon le modèle horaire.

En e, le syndicat pour l'entreprise des personnes désignées collaborera avec l'employeur pour s'assurer de combler tout besoin en cas de problème lors d'un remplacement, d'une absence, d'une situation nécessitant du temps supplémentaire.

En f, tous les appels de priorité 0, 1, 2, 3, 4, 5 et 7 seront traités de la façon habituelle. Toutes les interventions impromptues seront traitées de la façon habituelle.

Et, en h, tous les appels de priorité 8 seront traités de la façon habituelle, sauf les retours à domicile qui, quant à eux, devront être effectués du lundi au vendredi, entre midi et 17 heures.

Bref, les services courants et usuels d'ambulance sont maintenus à 100 %. Les effectifs sont également maintenus à 100 % et on comble même toutes les absences et les besoins supplémentaires. Quelques couvertures ponctuelles lors d'événements spéciaux et très occasionnels ne sont pas affectées suivant l'article 3 de l'entente des services essentiels. En a, comme exemple, les relations communautaires; en b, les équipes affectées à la couverture d'un festival, d'un salon d'exposition ou tout autre événement du même genre ayant déjà un service de premiers soins sur place; en c, équipe affectée à la couverture d'un événement sportif; en d, équipe affectée lors d'un tournage de film ou autre plateau de tournage; en e, la supervision des stagiaires; en f, les séances de formation internes; et, en g, les équipes affectées à des transports interhospitaliers ne feront aucun retour d'escorte médicale, sauf si un patient est présent à bord du véhicule.

Ces événements spéciaux ne sont pas à découvert comme tel, puisque les équipes régulières sont disponibles pour répondre à tout appel de service, sans être nécessairement stationnées sur place. Il s'agit de situations dédiées et peu fréquentes, qui ne créent aucune pression sur l'employeur. Elles ne permettent pas non plus aux salariés d'exprimer leur mécontentement et de passer leur message. Enfin, quelques tâches ne sont pas effectuées, selon ce qui est prévu à l'article 4 de l'entente, notamment celles liées à l'entretien ménager de la caserne : vider les poubelles, le recyclage, etc.

Ce sont toutes les tâches qui peuvent attendre ou être remplies par des cadres, plus certaines tâches concernant les formulaires non essentiels et le fait de ne pas utiliser les cartes de points de l'employeur pour sa carte d'essence, bref, les tâches marginales et strictement administratives davantage du type moyen de pression que du type grève, que nous qualifions de moyen de pression modéré, peu dérangeant et peu efficace.

Il ne faut pas se surprendre que les conventions collectives et leur renouvellement peuvent prendre entre trois et quatre années pour aboutir. Dans l'affaire Saskatchewan précitée, la juge Abella, qui a rendu jugement pour la majorité, fait siens les propos d'une autorité en matière des relations de travail, comme suit : «La loi ne prévoit pas non plus d'autre moyen véritable, tel l'arbitrage, de mettre fin à l'impasse des négociations. Paul Weiler explique de manière convaincante en quoi l'existence d'un tel moyen est indispensable aux salariés qui assurent des services essentiels.»

Nos soulignements. Vu l'ampleur des services essentiels que les paramédics doivent maintenir, soit l'ensemble des services ambulanciers, il est évident qu'ils ne disposent pas d'un droit de grève véritable. Le sachant, le législateur doit prendre acte de leur situation, et, pour se conformer aux chartes du Canada et du Québec, nous soumettons respectueusement qu'il doit, dans leur cas, prévoir un mode alternatif de règlement de différend, soit l'arbitrage.

Les paramédics sont dans la même situation que les policiers et les pompiers. Ils ne peuvent d'aucune façon réduire leurs services. Dans leur cas comme dans le cas des paramédics, le temps de réponse est capital, tout comme le niveau de couverture. Il n'y a aucune marge.

Lorsque, comme dans le cas des paramédics, il n'y a pas de marge quant au niveau de service qui doit être maintenu, les mécanismes de contrôle que le projet de loi propose de mettre en place sont tout à fait inutiles. Devant le Tribunal administratif du travail, il n'y a en jeu que des babioles sans importance qui enlèvent tout son sens à l'exercice du droit de grève.

Le législateur ne peut se contenter de modifier les dispositions du Code du travail relatives aux services essentiels sans prévoir ce qu'il advient dans le cas où les services doivent être maintenus à 100 %. S'il s'abstient de le faire, sa loi porte atteinte à la liberté d'association et viole ainsi la charte du Canada et sa propre charte.

Le Code du travail doit s'adapter à cette nouvelle réalité. Il ne peut pas faire abstraction. Les paramédics sont nécessairement visés par le maintien des services essentiels, et la loi ne peut simplement les soumettre à une décision du Tribunal administratif du travail, alors qu'il est acquis qu'ils doivent maintenir 100 % des services qu'ils disposent.

La FPHQ est donc d'avis que le projet de loi doit être modifié de façon à prévoir que l'arbitrage prévu à la section I du chapitre IV du Code du travail est obligatoire au règlement d'un différend impliquant des paramédics. Sur ce, je cède la parole à Me Venditti.

M. Venditti (Danny) : Mme la Présidente, M. le ministre et membres de cette commission, bonjour. Comme le mentionne la FPHQ, la loi doit prévoir l'arbitrage obligatoire pour les employés du préhospitalier. C'est la conclusion qui s'impose.

Au même titre que la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Saskatchewan, nous sommes en présence d'une négation du droit de grève pour ces salariés. La situation n'est pas différente car 100 % des services doivent être rendus à la population.

Dans la décision rendue par le TAT concernant les CIUSSS, qui a, entre autres, mené à certains aménagements proposés par le projet de loi n° 33, le TAT avait conclu que maintenir à 90 % les services rend le droit de grève purement symbolique. Ils n'ont pas la faculté, les paramédics et les membres qu'ils représentent, de cesser de travailler de manière concertée, qui est essentielle à une négociation collective véritable.

L'imposition de la conciliation... pardon. Dans le même ordre d'idées, l'absence du droit de grève, tant par son interdiction législative que par son caractère purement symbolique, doit être compensée par le droit de recourir à son gré à l'arbitrage de différend. C'est la seule façon de garantir l'exercice réel du droit de négocier collectivement sur un pied d'égalité avec l'employeur.

Il ne faut pas négliger les effets positifs de prévoir un tel mécanisme sur les relations de travail, qui sont plus souvent qu'autrement brisées par des négociations interminables qui génèrent une accumulation des tensions. Les négociations finissent par aboutir, mais ce n'est que le début des hostilités entre les parties qui croisent le fer devant les tribunaux pour débattre des litiges qu'elles ont occasionnés.

En effet, en décembre 2018, la FPHQ a conclu une entente après 33 mois de négociations pour les paramédics. À ce jour, les négociations pour les répartiteurs sont toujours en cours. Par la suite, ils auront des mois, si pas des années, de litiges entamés par les employeurs devant la Cour supérieure et les arbitrages de griefs.

L'article 74 du Code du travail pourrait prévoir qu'un différend est soumis à un arbitre à la demande d'une association de salariés qui dispensent des services préhospitaliers à la population.

La Présidente (Mme IsaBelle) : En conclusion.

M. Venditti (Danny) : À défaut de prévoir de telles dispositions, nous avons deux recommandations, à la page 5 et 6 du mémoire de la FPHQ, qui pourraient y substituer. Merci.

• (16 h 50) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien. Merci. Alors, nous allons procéder à la période d'échange. Alors, M. le ministre, vous avez 16 min 30 s.

M. Boulet : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation, membres représentant la Fédération des employés du préhospitalier du Québec. Je pense que j'ai bien compris. Il m'apparaît que le maintien des services essentiels a un certain impact sur le droit de grève, et, au-delà d'un certain niveau, je peux comprendre la prétention que ça a un impact quand même assez important sur ce droit-là qui est maintenant, vous le savez très bien, là, jugé fondamental. En même temps, j'ai toujours considéré que le rapport de force pour les techniciens ambulanciers paramédics a quand même été assez fort.

Est-ce que je comprends de votre prétention que vous nous dites : Nous, dans notre cas, abolissons le droit de grève et permettons à une seule des parties de demander au ministre du Travail de nommer un arbitre de différend pour entendre les parties et, le cas échéant, rendre une sentence arbitrale de différend? Est-ce que vous êtes, à ce point, rendus à nous dire ça?

M. Chouinard (Daniel) : Bien, c'est qu'effectivement, comme on le prétend dans le mémoire puis c'est ce qu'on vit sur le terrain, c'est que, depuis que les services préhospitaliers sont comme ils sont, il faut comprendre que, dans la province, mis à part Urgences-Santé Montréal et Laval, ce sont des entreprises privées qui sont titulaires de permis qui sont émis par le ministère de la Santé. Donc, les entreprises sont complètement, au sens du code... seraient tributaires de la négociation.

Par contre, on ne vit pas cette réalité-là sur le terrain parce que leur budget émane du ministère de la Santé. Donc, ils vont négocier avec nous, mais étant donné qu'on a un pouvoir très limité de moyens de pression, dans le fond, ou de choses pour les faire... dans le fond, avoir une pression de négocier, ils peuvent, comme ça, attendre très, très longtemps parce que les moyens qu'on peut utiliser ont très peu d'impacts ou pas d'impact du tout.

M. Boulet : Ceci dit, avec respect, je vérifiais, il y a eu une seule loi spéciale qui a été adoptée pour mettre fin à une grève légale dans le secteur ambulancier depuis 1964, et vous vous souvenez, c'était le fameux conflit dans la région de Montréal. En 1984, le législateur québécois a adopté une loi sur la continuité des services et sur les conditions de travail des techniciens ambulanciers de la région de Montréal.

Moi, j'ai toujours vu et entendu des témoignages à l'effet que le rapport de force était parfois bien à l'avantage des techniciens ambulanciers, parce que, oui, c'est vrai qu'à peu près tout est un service essentiel, mais, en même temps, ça protège la rémunération des techniciens ambulanciers qui ne font plus... vous référiez à l'entretien ménager, c'est une chose, mais il y a beaucoup d'aspects administratifs qui ne sont plus assumés. Bon, vous référiez vous-même aux formulaires, mais il y a le transport aussi.

Moi, ce que j'ai souvent entendu, c'est qu'il y a des infirmières qui doivent accompagner les patients dans les ambulances, puis on appelle ça, dans votre domaine, un retour d'escorte, là. On les ramène à leur lieu de résidence. Parfois, c'est des longues distances, c'est des frais de transport importants pour les employeurs et ça leur met une pression considérable. Moi, j'ai souvent entendu des employeurs dire : Mais le rapport de force est totalement à l'avantage des techniciens ambulanciers paramédics.

Ça fait qu'il y a quand même des impacts, pas seulement financiers... oui, les cadres, mais les cadres, ils ne peuvent pas tout faire, puis c'est des surcharges de travail, puis c'est du temps supplémentaire, puis c'est des coûts. Il y a des conséquences à ça. Ça, ça m'apparaît extrêmement important de le souligner. Il y a un rapport de force, moi, qui m'apparaît relativement maintenu, il y a un assez bon équilibre. Je comprends votre position. En même temps, vous dites : On maintient tout puis donc on ne devrait plus avoir... à la limite, on aimerait mieux ne pas avoir le droit de faire la grève puis avoir accès au processus d'arbitrage de différend.

Mais, à cet égard-là, moi, je saurai toujours un partisan de la position traditionnelle des gouvernements du Québec, c'est-à-dire de ne pas... à moins de circonstances exceptionnelles, là, les policiers-pompiers, il n'y a vraiment pas droit de grève. Puis, oui, il y a accès à un arbitre de différend, mais le gouvernement fait comme laisser le soin à un tiers de déterminer le contenu d'une convention collective de travail. Puis c'est des conditions de travail, puis il y a des incidences financières aussi importantes.

Moi, je pense toujours que les parties réussissent très bien à convenir, et le droit de grève confère un certain rapport de force aux techniciens ambulanciers paramédics, et que ça maintient un bon équilibre, là. Puis l'espèce d'équilibre qu'on essaie de trouver entre l'exercice du droit de grève puis le respect de la santé et sécurité du public par le maintien des services essentiels, ça nous apparaît encore une belle façon de faire, même pour votre fédération.

M. Chouinard (Daniel) : Bien, tous les moyens que les paramédics peuvent utiliser sont purement administratifs, comme on le disait tout à l'heure. Puis ça nous porte, des fois, à poser des gestes sur le terrain, des fois, qu'on a de la misère nous-mêmes, comme dirigeants syndicaux, à essayer de contrôler. On a l'exemple souvent de la gouache sur les véhicules, les choses comme ça, mais souvent nos membres se retrouvent dans des mesures disciplinaires parce que, si on met de la gouache sur un véhicule, c'est comme une forme de vandalisme au sens de la loi et tout ça.

Ça fait qu'il y a beaucoup de choses qui viennent exaspérer les travailleurs, parce que, justement, toutes leurs tâches de paramédic qu'ils doivent exécuter sur le terrain... Quand on parle des formulaires, c'est... on parle de formulaires d'inventaire, mais les inventaires doivent se faire quand même, les vérifications de moniteur-défibrillateur doivent se faire quand même. C'est le formulaire qui n'est pas rempli pour dire à l'employeur qu'on l'a complétée, notre vérification.

Donc, l'employeur, pour ces mesures-là, n'a pas une surcharge. Les non-retours d'escorte, c'est une des seules choses qu'on avait, mais qui nous a été retirée aussi par le tribunal, parce que c'est jugé essentiel, parce que l'escorte doit... l'infirmière — je ne sais pas le bon terme, nous, on parle d'escorte de patient dans ce cas-ci — on doit la ramener maintenant à l'hôpital parce qu'elle fait partie, elle, des services essentiels du centre hospitalier. Et souvent elle doit être de retour à l'urgence ou à l'unité de soins intensifs parce qu'elle part de là pour le transfert.

Donc, à chaque fois qu'on a eu des moyens où on a pu utiliser peut-être un certain levier, on se les fait retirer en litige avec les employeurs, devant le tribunal qui donne raison à l'employeur, qui fait en sorte que c'est un moyen... un service essentiel qui doit être maintenu.

M. Boulet : Pourtant, il y en a, des moyens de pression qui peuvent être utilisés, qui ne sont pas jugés comme étant des services essentiels. Ça peut être des autocollants, ça peut être des manifestations de l'expression de la volonté de vos membres. Et ça, il y a des coûts que ça engendre. Mais je vous dirais qu'à la fin de ma réflexion, j'en viens toujours à la même conclusion. En quoi c'est différent des infirmiers et infirmières? Ce n'est à peu près que des services essentiels, et les infirmières, elles doivent à peu près assurer l'ensemble des services qui sont jugés comme étant essentiels pour assurer la santé et sécurité du public. Mais, en même temps, la grève a quand même un impact. Il y a des incidences à l'exercice d'un droit de grève, mais il faut tenir compte des retombées pour la santé et sécurité du public. C'est pour ça qu'on dit : Il y a des services essentiels.

Puis, à un moment donné, on ne pourra pas se déresponsabiliser comme État puis dire : Bien, on va commencer avec les techniciens ambulanciers, puis après ça, c'est les infirmiers et puis les infirmières. Puis dans le domaine de la santé, il y a beaucoup qui est jugé essentiel. Puis je sais que les pourcentages puis les seuils minimums, c'est inopérant constitutionnellement. Je respecte ça, vous m'avez entendu le dire. Mais on ne peut pas dire, à un moment donné, un groupe après l'autre, il n'y a plus de droit de grève. Bien, il y en a qui ne seront vraiment pas contents, parce que le droit de grève, vous avez fait, le monde syndical, une lutte jusqu'en Cour suprême pour faire reconnaître ce droit-là comme étant un droit fondamental reconnu par la Constitution, par les chartes. C'est quand même un combat qui a donné des résultats quand même assez fracassants, ici, là, quand on lit l'ancien article ou l'article actuel, 111.10.

Ça fait qu'on ne peut pas, à la fin de la journée, je le redis, dire : On va prendre ça groupe après groupe, on va leur enlever le droit de grève puis on va dire à un arbitre, qui est un tiers : Décide du contenu des conventions collectives de travail. Moi, je ne peux pas aller, vraiment pas, dans cette direction-là. Puis là je vous exprime le fond de ma pensée puis, je pense, la philosophie de notre gouvernement puis, à cet égard-là, des gouvernements précédents, ceux qui nous ont précédés ici, à Québec, au pouvoir.

Alors, voilà. Moi, ça compléterait mes commentaires, Mme la Présidente, ceci dit, en vous remerciant beaucoup, encore une fois, non seulement de la qualité de votre mémoire mais de votre présence ici avec nous en commission parlementaire. Merci.

• (17 heures) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, M. le ministre. Merci pour l'échange. Nous y allons maintenant avec le député de Vimont, de l'opposition officielle. Vous disposez de 11 minutes.

M. Rousselle : Merci, Mme la Présidente. M. Chouinard, M. Fradette et M. Venditti, bienvenue. Bienvenue ici. Merci de votre mémoire. Ça demande toujours un travail puis des fois dans des temps pas trop longs. Donc, merci de l'avoir fait et puis merci d'être ici. J'apprécie beaucoup.

Je vous écoutai,s justement, services... parce que vous retrouvez... vous regroupez tout de même 46 associations, 1 500 paramédics, si j'ai bien noté. Pas nécessairement évident, hein, d'avoir le droit de grève puis protéger la population, hein? C'est une ligne assez mince, hein? Dans mon ancien travail, j'étais policier, donc je comprends que... droit de grève, là, je n'en avais pas, comprenez-vous.

Mais j'ai compris... puis je vous écoutais... parce que, là, vous parlez d'association et de regroupement, puisqu'on enlève Montréal, Laval, comme vous avez dit. Des fois, c'est dans des régions, dans des campagnes où, bien souvent, on connaît le propriétaire parce qu'on est dans ce patelin-là. Et puis là vous me direz si je fais erreur, là, mais, je pense, c'est pas mal ça, je suis pas mal dedans. Et puis, bien souvent, bien, on se connaît, hein? Dans un petit village, on se connaît tous et tout. Puis là, bien, justement, si Mme Tremblay a besoin d'un transport, bien, on va le faire pareil puis, bon, on va le...

Si j'ai bien compris... de votre intervention, c'est que le droit de grève, bien moi, je n'en ai pas. Moi, c'est ça que j'ai compris, si j'ai bien compris. Parce que dire : Écoutez, moi, je fonctionne toujours à 100 %, bien beau que... Bon, service de police, quand on fait une grève, tu n'as pas... Tu n'as pas le droit de faire la grève, mais tu ne donnes pas de billets, tu fais des choses, tu sais... on fait des choses qui ont quand même une connotation un petit peu plus sérieuse. Je comprends, mettre des étiquettes sur les autobus ou ne pas faire... ne pas ramasser les poubelles, ça ne dérange pas trop, trop, ça. En tout cas, moi, à mon avis, effectivement, vous avez raison de dire : Écoutez... Puis là je vous entendais dire : Aïe! ça a pris 33 mois pour un résultat, puis il y en a un qui fonctionne encore.

Moi, j'aimerais ça vous entendre parce que... suite à qu'est-ce que le ministre a dit, j'aimerais ça vous entendre un petit peu pour m'éclairer, là, parce que... Dites-moi, premièrement, si j'ai bien compris. Et, si je suis dans le champ, ramenez-moi à la bonne place, mais c'est ça que j'ai compris, moi. Donc, j'aimerais ça vous entendre là-dessus, puis allez-y.

M. Venditti (Danny) : Oui, effectivement, vous avez bien compris. Puis le droit de grève est si essentiel, c'est ça que la Cour suprême nous rappelle, qu'il faut qu'il soit véritablement exercé. S'il n'est pas exercé, s'il est symbolique ou s'il est purement académique, il doit être compensé par un véritable moyen de régler les différends. Ici, c'est ça qu'on prétend.

Je comprends que ça peut être... remettre entre les mains d'un tiers, ça peut engendrer un risque, mais ça engendre également un risque pour les paramédics. Mais ce risque-là est calculé dans le sens qu'il y a des tensions. Il y a des tensions qui s'accentuent en période de négociation, parce que ça prend 33 mois et, dans le cas des répartiteurs médicaux d'urgence, c'est un an de plus. On est rendu en septembre 2019 et ce n'est toujours pas réglé, depuis l'expiration en 2015.

Donc, éventuellement, ce qu'on fait, c'est qu'on attaque les... c'est qu'on prive les gens de s'exprimer de leur mécontentement, de faire un véritable moyen de pression, de faire... d'avoir une véritable négociation sur un même pied d'égalité parce que plus ça dure, plus c'est dans l'intérêt de l'employeur. Ce n'est pas dans l'intérêt des travailleurs de faire perdurer un conflit de travail.

Et, avec tout le respect pour le ministre, ce n'est pas vrai qu'on peut apposer des autocollants. Oui, on le fait. Oui, les gens le font, même dans le milieu policier, ils le font, mais on se fait refiler la facture par des décisions arbitrales par la suite, parce que ça constitue une violation du droit de propriété de l'employeur, et il nous refile la facture, qui s'élève parfois à des milliers de dollars, et il faut aller devant les tribunaux pour débattre de ça.

Donc, non seulement on négocie pendant 33 mois, pendant quatre ans, mais, ensuite de ça, la convention collective négociée, elle expire un an après, mais, pendant l'année qui reste, on se déchire les chemises devant les tribunaux et on recommence les négociations dans ce climat-là.

Donc, oui, le droit de grève est tellement essentiel que, s'il ne peut pas être exercé, ce qu'on demande, c'est de pouvoir avoir un véritable moyen de pouvoir régler les différends qui perdurent puis qui font en sorte que les relations de travail en souffrent.

M. Rousselle : Dites-moi, parce que... tu sais, je reviens toujours que c'est dans des petits secteurs, dans des petites municipalités, bien souvent, ça arrive, parce que vous, vous êtes à l'extérieur de Montréal, Laval. Vous avez une pénurie d'emploi sûrement qui vient en plus alourdir votre problème, justement. Donc, quand on parle qu'il faut que vous couvriez à 100 % tout le temps, ça, en plus, ça vient alourdir.

Et, toujours en continuant toujours dans... parce que j'essaie toujours de trouver une place pour un moyen de pression, dans le sens quelqu'un va dire : Bien, moi, on va y aller sur le minimum staff. Mais minimum staff, vous, c'est 100 %, que j'ai bien compris. Est-ce que les cadres, ce serait possible pour eux d'aller sur le terrain ou ils ne sont plus accrédités pour aller sur le terrain? Parce que ça prend un cours. Enfin, moi, je sais bien que j'ai bien beau... j'ai mon RCR, mais ça s'arrête là, là, donc ça prend plus que ça.

Donc, dites-moi, là, est-ce que les patrons qui pourraient, eux, aller sur le terrain, à ce moment-là, remplacer les gens... ou qu'est-ce que je dis ça n'a pas d'allure?

M. Chouinard (Daniel) : Il y a certains chefs d'équipe ou superviseurs qui pourraient toujours, qui le font déjà à l'occasion, là, aller faire du terrain pour maintenir leurs compétences à jour, leur carte valide au registre national. Par contre, la plupart, une fois qu'ils entrent dans le poste cadre de supervision, de directeur des opérations ou directeur général, dans des entreprises en région, n'ont plus le temps de faire du terrain et de faire les formations pour maintenir leurs compétences, c'est-à-dire que leur nom va être rayé du registre national. Il va falloir qu'ils recomplètent une formation, un suivi dans un CISSS ou un CIUSSS pour reprendre leurs privilèges de carte et être réinscrits au registre national. Donc, effectivement, c'est très rare que les cadres ne vont pas faire les tâches de paramédic sur le terrain.

M. Rousselle : Dites-moi, un ambulancier doit suivre des cours sur une base régulière sûrement pour maintenir une mise à niveau. Parce que vous me parlez comme quoi que c'est à 100 %, vous n'avez pas le choix, parce que si vous voulez... minimum staff, vous le maintenez à chaque jour. Mais l, ces gens-là qui partent, parce qu'ils doivent partir dans la semaine, sûrement, ce n'est pas la fin de semaine qu'ils font ça, vous devez être en deçà du 100 %, à ce moment-là. Est-ce que ça, c'est accepté ou...

M. Chouinard (Daniel) : Bien, effectivement, quand on est en temps de grève et puis qu'il manque de personnel, les formations sont souvent réduites au minimum. Les CISSS, les CIUSSS vont y aller au minimum des renouvellements de formation, mais souvent ils vont les reporter pour attendre la fin du conflit, pour pouvoir exécuter ces formations-là. À ce moment-là, il y a comme... ce n'est pas officiel, mais c'est comme une dérogation. Si tu n'as pas fait ton... si les gens n'ont pas terminé leur... n'ont pas fait leur formation dans l'année, exemple, en salbutamol ou des choses comme ça, bien, ils vont le reporter dans le temps, puis ils vont le refaire quand le conflit va être terminé, puis tout le monde repart sur le même pied, là.

M. Rousselle : Mais là on parle de 33 mois qu'il n'y a pas eu de mise à jour, là...

M. Chouinard (Daniel) : Mais il y en a eu. Il y en a eu quand même, des mises à jour, parce qu'il y en a qui ne peuvent pas attendre. Il y a des cours qu'il faut qu'il se donne, quand même, parce qu'il y a des endroits où, justement, les médicaments... il y a des nouveaux médicaments qui ont entré en fonction dans les dernières années, mais des fois les paramédics sont tenus, sont obligés d'aller faire cette formation-là parce que... Ça a justement fait partie d'un litige, à un moment donné. On ne voulait pas y aller, à cette formation-là, mais ça fait partie des services essentiels. Il faut avoir la formation pour exécuter notre travail sur le terrain.

M. Rousselle : Dites-moi, dans votre mémoire, y a-tu d'autre chose qu'il faudrait nous apporter à notre attention, vraiment, là, quelque chose qui serait comme important, dire : Oui, on a oublié ça ou... peut-être en écoutant les autres mémoires, ça vous a venu en tête, dire : Oui, on aurait peut-être dû ajouter ça à notre mémoire?

• (17 h 10) •

M. Venditti (Danny) : Non. Bien, ce n'est pas quelque chose particulièrement au mémoire ou qu'est-ce que les autres ont dit avant, mais il faut comprendre que... vous avez mentionné tantôt la pénurie de main-d'oeuvre.

Pour être associé à la FPHQ depuis plus de 10 ans maintenant, on constate que la pénurie de main-d'oeuvre, c'est parce que les gens deviennent paramédics puis ils utilisent ce métier-là ou cette profession-là comme tremplin pour s'en aller ailleurs dans le réseau de la santé, parce que les conditions de travail pour eux ne sont pas suffisamment adéquates pour exercer ce métier-là. Donc, lorsqu'on assiste aux assemblées où les gens doivent voter sur leurs conditions de travail, je dois vous dire que c'est en dépit des circonstances qu'ils vont accepter.

Un des chevaux de bataille de la fédération des paramédics, c'est les horaires de faction. Les horaires de faction existent depuis 1989. C'est depuis 1989 que les paramédics tentent de faire abolir ces horaires-là et ils ne réussissent pas. Ce n'est pas vrai qu'on va tenter de nous faire convaincre qu'on négocie sur un même pied d'égalité que les employeurs quand, depuis 1989, c'était supposé être un projet pilote, et on est en 2019, 30 ans plus tard, et nous sommes toujours avec ces horaires de faction dans les milieux urbains.

Donc, ce qu'on demande... pour ceux qui ne le savent pas, un horaire de faction, on demande aux paramédics de répondre 24 heures sur 24, sept jours sur sept, à tous les appels, même en période de grève. Et c'est les conditions que les paramédics considèrent qui sont indécentes. Même si elles sont conformes aux lois, ils les considèrent indécentes et ils quittent le métier, ils quittent la profession, et c'est ce qui cause une pénurie de main-d'oeuvre. Ce n'est pas mentionné dans le mémoire, mais je crois que c'est une illustration éloquente qu'on ne négocie pas d'un même pied d'égalité avec l'employeur.

M. Rousselle : Dites-moi... parce que, là, c'est sûr qu'on parle toujours de services essentiels. Est-ce qu'il y a de vos membres qui sont obligés de faire, des fois, des doubles shifts? Vous, c'est-u des quarts de travail — excusez, shift, là, c'est des quarts de travail — de huit heures, de 12 heures, ou est-ce qu'il y en a qui sont appelés à faire deux 12 heures ou...

M. Chouinard (Daniel) : Là, on n'a pas encore de... bien, ça commence, le TSO, oui. Avec la loi sur le temps supplémentaire obligatoire, effectivement, on voit une recrudescence de ça à cause qu'il manque de personnel, justement. Mais des quarts de travail, il y en a de tous les nombres, là. On a des huit heures, des 12 heures, des 16 heures, des 24 heures, les horaires sept jours sur sept, 24 heures également, là.

M. Venditti (Danny) : C'est l'employeur qui confectionne les horaires unilatéralement. Dans la convention collective, la seule chose qui est négociée, c'est le cadre de ces horaires-là. Mais l'employeur les confectionne tout seul.

M. Rousselle : Parce qu'à mon avis, après, je ne sais pas, moi, mettons, un 12 heures, là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : En conclusion.

M. Rousselle : En conclusion. Après un 12 heures, ça pourrait être dangereux, je pense, non? C'est la sécurité du public... Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est tout. Merci. Alors, merci, M. Venditti, M. Chouinard, M. Fradette, de la Fédération des employés du préhospitalier du Québec, pour votre contribution très appréciée.

Documents déposés

En terminant, je dépose les mémoires des personnes et des organismes non entendus.

Je vous remercie toutes et tous, membres de la commission, pour cette audience publique. Alors, nous nous retrouverons.

Nous ajournons les travaux d'aujourd'hui et nous nous retrouverons mardi le 24 septembre, après les affaires courantes, afin de procéder aux consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 27.

(Fin de la séance à 17 h 12)

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