Journal des débats (Hansard) of the Committee on Labour and the Economy
Version préliminaire
42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, February 17, 2021
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Vol. 45 N° 71
Special consultations and public hearings Bill 78, An Act mainly to improve the transparency of enterprises
Aller directement au contenu du Journal des débats
Intervenants par tranches d'heure
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IsaBelle, Claire
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Boulet, Jean
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Derraji, Monsef
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Derraji, Monsef
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IsaBelle, Claire
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Marissal, Vincent
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Perry Mélançon, Méganne
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Boulet, Jean
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Boulet, Jean
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IsaBelle, Claire
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Derraji, Monsef
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Leitão, Carlos J.
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Marissal, Vincent
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Perry Mélançon, Méganne
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IsaBelle, Claire
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Boulet, Jean
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Derraji, Monsef
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Derraji, Monsef
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IsaBelle, Claire
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Leitão, Carlos J.
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Marissal, Vincent
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IsaBelle, Claire
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Boulet, Jean
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Derraji, Monsef
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Derraji, Monsef
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IsaBelle, Claire
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Leitão, Carlos J.
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Marissal, Vincent
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Perry Mélançon, Méganne
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IsaBelle, Claire
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Boulet, Jean
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Derraji, Monsef
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Derraji, Monsef
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IsaBelle, Claire
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Leitão, Carlos J.
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Marissal, Vincent
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Perry Mélançon, Méganne
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IsaBelle, Claire
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Boulet, Jean
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Derraji, Monsef
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Derraji, Monsef
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IsaBelle, Claire
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Leitão, Carlos J.
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Marissal, Vincent
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Perry Mélançon, Méganne
11 h (version révisée)
(Onze heures vingt-trois minutes)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, bonjour. Bonjour à vous toutes et tous. Ayant constaté le quorum, je
déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte.
La commission est réunie virtuellement
afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur
le projet de loi n° 78, Loi visant principalement à
améliorer la transparence des entreprises.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire
: Oui,
Mme la Présidente. M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve) est remplacé par M. Marissal
(Rosemont) et Mme Richard (Duplessis), par Mme Perry Mélançon (Gaspé).
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Ce matin, nous débuterons par les remarques préliminaires, et puis nous
entendrons par visioconférence les groupes suivants : l'Ordre des
comptables professionnels agréés du Québec et la Pre Pascale Cornut
St-Pierre.
Alors, j'invite maintenant le ministre du
Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale à faire ses remarques
préliminaires. M. le ministre, vous disposez de six minutes.
M. Boulet : Ah! il faut aller rapidement.
Merci, Mme la Présidente. Bon matin, tout <le monde...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
…alors, j'invite
maintenant le
ministre du Travail, de l'Emploi
et de la Solidarité sociale à faire ses remarques préliminaires.
M. le
ministre, vous disposez de six minutes.
M. Boulet : Ah! il faut
aller
rapidement.
Merci, Mme la Présidente. Bon matin,
tout
>le monde. J'aimerais saluer, d'ailleurs, l'ensemble de mes collègues,
là, des partis d'opposition et du parti gouvernemental, et, de façon
particulière, mon collègue de Robert-Baldwin, qui est impliqué dans des
consultations, qui est à l'origine aussi des tenants et aboutissants de ce
projet de loi là.
Vous le savez, ça émerge d'un consensus,
ça donne suite à des travaux qui ont été menés en collaboration avec le
ministère des Finances et autres organisations gouvernementales. Il y a eu,
souvenons-nous, la Commission des finances publiques en 2017, il y a une
consultation publique qui a été menée à l'automne 2019, il y a eu des
orientations proposées notamment dans le dernier budget. Je tiens aussi à rappeler
que nous partageons tous le même objectif, c'est d'améliorer la protection du
public par une meilleure transparence des entreprises.
Mme la Présidente, bien que le registraire
tienne l'un des registres les plus transparents et les plus accessibles, il
faut quand même continuer de perpétuer la réputation du Québec, comme étant un
précurseur en matière de transparence corporative, en franchissant un pas de
plus pour identifier les individus qui se trouvent réellement aux commandes des
entreprises. Donc, le projet de loi veut diminuer l'opacité résultant du
recours, notamment, à des sociétés-écrans anonymes ou à des prête-noms. Il veut
aussi décourager l'usage de tels stratagèmes qui, on le sait, sont souvent
utilisés par certains pour échapper à leurs obligations légales ou fiscales.
Il y a des modifications de trois natures.
Évidemment, il y a une obligation nouvelle de divulguer l'identité des
bénéficiaires ultimes. Ça, évidemment, c'est des personnes qui ont un contrôle
important, qui se cachent derrière la personnalité juridique ou des sociétés-écrans.
Et on s'inspire beaucoup du modèle européen de transparence, de ce qui se fait
dans les pays membres de l'OCDE, de façon plus spécifique le Royaume-Uni. Il y
a aussi la possibilité nouvelle de faire des recherches par nom de personne
physique.
Évidemment, il y a des mesures pour
protéger la vie privée des personnes, particulièrement la date de naissance,
les enfants mineurs, les personnes dont il peut y avoir potentiellement une
menace à leur sécurité, l'adresse personnelle, dans la mesure où on décide
d'utiliser une adresse professionnelle selon la faculté de celui qui est
assujetti à la Loi sur la publicité légale des entreprises.
Et enfin il y a eu des rencontres des
ministres impliqués dans <le commerce…
M. Boulet : ...
une
adresse professionnelle selon la faculté de celui qui est assujetti à la Loi
sur la publicité légale des entreprises.
Et enfin il y a eu des rencontres des
ministres impliqués dans >le commerce interprovincial au Canada. Donc,
il y a une possibilité de dispense du paiement des droits d'immatriculation
pour les entreprises qui font affaire dans d'autres provinces au Canada, qui
font du commerce interprovincial. Donc, pour stimuler ce commerce-là, pour
diminuer le fardeau administratif des entreprises, on prévoit, bien sûr, cette
dispense-là dans une perspective de réciprocité. Il y aura des investissements,
qui ont été prévus dans le budget, de 4,9 millions pour les cinq
prochaines années.
Donc, Mme la Présidente, le Québec
s'inscrit dans une mouvance internationale visant à améliorer la transparence
des entreprises, ce qui va contribuer à la lutte contre l'évasion fiscale,
l'évitement fiscal abusif, le blanchiment d'argent, la corruption, la fraude,
les activités criminelles. Rappelons qu'il y a plus de
900 000 entreprises qui sont actives et inscrites au REQ, environ
75 000 nouvelles inscriptions par année. Donc, ça nous permettrait
d'avoir un portrait, avec ce projet de loi, beaucoup plus précis des individus
avec qui on transige et de favoriser un marché d'affaires exempt de corruption,
de fraude, bref exempt de criminalité. Avec le projet de loi, on veut continuer
à améliorer la protection des citoyens, présenter le Québec comme une
juridiction active sur le plan de la transparence et de la gouvernance.
Donc, Mme la Présidente, maintenant, ça va
me faire plaisir de rencontrer les groupes. C'est une étape extrêmement
intéressante d'une commission parlementaire. Les groupes qui viennent faire des
recommandations devant nous, je tiens à les remercier d'avance, leur dire qu'on
va les écouter et on va s'en inspirer lors de l'étude détaillée, article après
article, avec les membres, bien sûr, de la commission parlementaire. Alors,
merci à tout le monde, puis j'espère encore une fois qu'on va avoir un peu de
plaisir dans cette commission parlementaire. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, M. le ministre. Alors, nous invitons maintenant le porte-parole de
l'opposition officielle et le député de Nelligan à faire ses remarques
préliminaires pour une durée maximale de quatre minutes.
M. Derraji : Quatre minutes,
plus une minute que j'ai toujours, Mme la Présidente. Bon, bon, bon.
Bon matin, bon début de commission. Mes
salutations à M. le ministre, à l'ensemble des collègues de cette commission.
Donc, un projet de loi important, loi
n° 78 visant principalement à améliorer la transparence des
entreprises. Permettez-moi, Mme la Présidente, de faire un bref
historique. Et je salue le ministre d'avoir évoqué, en fait, dans son constat,
dans ses remarques préliminaires, le travail qui a été déjà effectué par mon
collègue le député de Robert-Baldwin, qui nous a, tout à l'heure, parlé du nom
de sa circonscription et l'historique de sa circonscription. Mais je tiens
juste à rappeler le document, le plan d'action pour...
11 h 30 (version révisée)
M. Derraji : ...en fait, dans
son constat, dans ses remarques préliminaires, le travail qui a été déjà
effectué par mon collègue le député de Robert-Baldwin, qui nous a, tout à
l'heure, parlé du nom de sa circonscription et l'historique de sa
circonscription, mais je tiens juste à rappeler le document, le Plan
d'action pour assurer l'équité fiscale. Notre collègue le député de Robert-Baldwin
avait fait un premier pas pour lutter contre l'évasion fiscale. Il faut
toujours lutter contre ce fléau. Le plan donne suite à une commission
parlementaire sur le même sujet qui s'est tenue dans le dernier mandat au nom
de la Commission des finances publiques et qui avait fait un mandat
d'initiative sur le sujet du 30 septembre 2015 au
15 septembre 2016. Donc, très hâte à ce qu'on commence ce travail
ensemble et que le tout s'inscrit dans un projet de continuité.
Permettez-moi, Mme la Présidente, de
soulever aussi que c'est un projet de loi qui est important, un projet de loi
pour... qui oblige les entreprises à divulguer leurs bénéficiaires ultimes au
registre des entreprises du Québec et à déclarer certaines informations
relatives aux personnes physiques qui sont leurs bénéficiaires ultimes, dont
leur nom, leur domicile et leur date de naissance. Le projet de loi aussi
prévoit toutefois que tout assujetti peut également déclarer l'adresse
professionnelle d'une personne physique dont le domicile doit être déclaré. Si
une telle adresse professionnelle est déclarée, l'information relative au
domicile de cette personne ne peut être consultée.
Donc, vous voyez, à cette introduction sur
ce projet de loi, qu'il y a quand même des questions que j'aimerais bien
clarifier avec les groupes qu'on va avoir l'occasion d'entendre, que je tiens
déjà à les remercier parce qu'ils vont nous éclairer par rapport au contenu et
comment on peut améliorer, bonifier, amender ce projet de loi.
Comme je l'ai dit, Mme la Présidente,
à la lumière de la première lecture des mémoires que nous avons reçus, des
thèmes se dégagent, tels que les ressources du registraire pour appliquer la
loi, la définition de certains termes, l'utilisation des pouvoirs
réglementaires, des sanctions trop clémentes, l'acuité de l'information dans le
registre, seuils d'ajustement plus bas.
Alors, Mme la Présidente, clairement,
c'est un projet de loi qui va nous permettre d'avancer, d'avoir... améliorer
collectivement cette lutte, mais, à la lumière de ces enjeux et de ces
thématiques que nous avons devant nous, j'espère que l'ensemble des groupes
qu'on va avoir l'occasion de rencontrer tout au long de cet exercice vont nous
clarifier un peu certaines tendances et comment on peut améliorer notre projet
de loi.
Le but du projet, c'est justement
d'enrayer les stratagèmes utilisés par des entreprises pour dissimuler
l'identité réelle de leurs propriétaires, ceci... comme je l'ai dit au début, d'ensuite...
la commission parlementaire de l'Assemblée nationale qui s'est penchée sur le
recours aux paradis fiscaux par des multinationales pour éviter de payer des
impôts dans les pays où elles exercent des activités en 2016. Donc, de
plus...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
<Merci...
M. Derraji : ...pour
dissimuler
l'identité réelle de leurs propriétaires, ceci... comme je l'ai dit au début,
d'ensuite... la commission parlementaire de l'Assemblée nationale qui s'est
penchée sur le recours aux paradis fiscaux par des multinationales pour éviter
de payer des impôts dans les pays où elles exercent des activités en 2016.
Donc, de plus…
La Présidente (Mme IsaBelle) :
>Merci, M. le député de Nelligan. Vous aurez toute l'occasion de pouvoir
aussi vous exprimer lors des échanges. Merci beaucoup.
M. Derraji : Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci beaucoup pour votre remarque préliminaire. Nous poursuivons maintenant
avec le deuxième groupe d'opposition et le député de Rosemont, à faire ses
remarques préliminaires pour une durée maximale d'une minute.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Chers collègues. M. le ministre, c'est la première fois que j'ai le
plaisir de travailler avec vous, même si, ne le prenez certainement pas mal, je
suis un peu surpris que ce ne soit pas mon ami et collègue le ministre des
Finances qui chapeaute ce projet de loi. C'est peut-être purement technique, et
n'y voyez certainement pas d'aversion de ma part. Au contraire, on m'a dit du
bien de vous, et je suis heureux de pouvoir travailler avec vous dans le
plaisir, si possible, comme vous l'avez dit tout à l'heure.
Cela dit, je me retrouve ici devant le
proverbial verre d'eau à moitié plein ou à moitié vide, je vois la partie vide,
je vois la partie pleine. C'est certainement un bon pas dans la bonne
direction. Reste à savoir si c'est un bien petit pas pour un gouvernement et un
pas de géant pour la transparence. C'est ce que j'aimerais déterminer. Je reste
à être convaincu, mais j'entreprends l'étude de ce projet de loi avec la plus
grande des bonnes fois et avec énormément d'intérêt, parce qu'il est plus que
temps qu'on se penche là-dessus. Merci beaucoup, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Nous poursuivons maintenant avec le porte-parole du troisième groupe
d'opposition et la députée de Gaspé, à faire ses remarques préliminaires pour
une durée maximale d'une minute.
Mme Perry Mélançon : Merci,
Mme la Présidente. Alors, salutations à tous les collègues membres de la
commission, à M. le ministre et à nos invités. Je serai brève également.
J'ai déjà pris le temps, là, de faire les
lectures des mémoires qu'on avait déjà en main. Alors, je vois qu'effectivement
c'est un principe qui va vers une plus grande transparence, quelque chose qui
est très souhaité. On aura l'occasion d'entendre des gens qui utilisent au
quotidien le registre des entreprises du Québec. Alors, ce sera important, je
pense, d'écouter quelles sont les recommandations, quels sont les bons points,
quels sont les éléments, là, à ajuster au besoin.
Alors, je vois que c'est un projet de loi
qui est souhaité. Est-ce qu'il va assez loin? Je pense que c'est là qu'on va
devoir, là, travailler et statuer. Alors, ça me fera plaisir de collaborer
également. Et bien hâte d'entendre, là, qu'est-ce que nos invités ont à dire
aujourd'hui et au cours de la semaine. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, merci. Merci pour vos remarques préliminaires. Nous allons maintenant
débuter les auditions. Nous souhaitons donc la bienvenue aux représentantes de
l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec. Alors, tel que déjà
mentionné, je vous invite, mesdames, à bien vous présenter avant de commencer votre
exposé d'une durée de 10 minutes. Merci.
(Visioconférence)
Mme Mottard (Geneviève) :
Bonjour, Mme la Présidente. M. le <ministre...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...nous
souhaitons donc la bienvenue aux représentantes de l'Ordre des comptables
professionnels agréés du Québec. Alors, tel que déjà mentionné, je vous invite,
mesdames, à bien vous présenter avant de commencer votre exposé d'une durée de
10 minutes. Merci.
(Visioconférence)
Mme Mottard (Geneviève) :
Bonjour, Mme la Présidente. M. le >ministre, chers collègues, Mmes et
MM. membres de la commission, bonjour. Mon nom est Geneviève Mottard. Je suis
présidente et chef de la direction de l'Ordre des CPA du Québec et je suis
accompagnée aujourd'hui de Me Stéphanie Vallée. Je dois vous dire aussi
bonjour, M. le député de Nelligan, salutations particulières. Vous êtes mon
député dans l'Ouest-de-l'Île de Montréal, alors je tenais à vous le dire.
M. Derraji : Merci.
Mme Mottard (Geneviève) : Je
commence ma comparution, mon petit mot envers vous aujourd'hui en vous disant
que l'ordre, évidemment, souscrit sans réserve aux objectifs du projet de loi
qui, vous le savez, vise à rendre le Québec beaucoup plus transparent et à améliorer la protection du public, qui est notre mission, par
contraindre et réduire l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent. Évidemment,
c'est un de nous sujets qui nous est très cher et qui rejoint très bien notre
mission.
D'ailleurs, la profession
comptable s'est engagée dans cette lutte sur la scène non seulement ici, au
Québec, mais nationalement et internationalement. Pas plus tard qu'en 2014,
l'International Federation of Accountants, qui regroupe les professions
comptables de plus de 130 pays, avait lancé un appel à l'action au G20 et
s'était engagée auprès du International Bar Association à lutter contre la
corruption.
Alors, les commentaires
qu'on va vous formuler sur le projet de loi aujourd'hui visent à assurer une
efficacité et une efficience optimales du registre des entreprises afin
d'atteindre une meilleure transparence corporative, encore une fois, dans
l'intérêt public et pour la protection du public. Et nous souhaitons
sincèrement, M. le ministre, que vos démarches aboutissent, et ça nous fait
plaisir d'y contribuer encore une fois.
Le Québec a renforcé ses
exigences et des sanctions en matière de divulgation obligatoire pour combattre
l'évasion fiscale, et la... planification fiscale abusive, pardon, le
blanchiment d'argent, et le crime organisé par divers projets de loi et
mesures, et c'est très bien. Il faut maintenant affirmer, à notre avis, haut et
fort que le Québec ne badine pas avec la transparence des entreprises qui
veulent venir faire des affaires ici et ni avec la fiabilité des informations
qu'elles transmettent au Registraire des entreprises. Notre analyse, donc, du
projet de loi portera essentiellement sur les moyens proposés pour atteindre
ces objectifs.
D'abord, nous recommandons
que les parlementaires apportent une attention soutenue, et ça a été soulevé
dans certains de vos commentaires d'ouverture, au concept utilisé à la
définition de qu'est-ce qu'un bénéficiaire ultime. Le seuil de détention
de 25 % proposé au projet de loi nous apparaît trop permissif. Et, par
exemple, une entité criminelle mal intentionnée pourrait avoir seulement deux
ou trois bénéficiaires à 23 %, <24 %...
Mme Mottard (Geneviève) :
...
utilisé à la définition de qu'est-ce qu'un bénéficiaire
ultime.
Le seuil de détention de 25 % proposé au projet de
loi nous apparaît trop permissif. Et, par exemple, une entité criminelle mal
intentionnée pourrait avoir seulement deux ou trois bénéficiaires à 23 %, >24 %
pour contrôler une entreprise et n'avoir aucune déclaration à faire à cet
égard.
Alors, bien qu'idéalement, dans un monde
utopique, tous les détenteurs d'actions devraient être consignés, nous vous
recommandons d'abaisser de 25 % à 10 % le seuil de détention, et ce,
en cohérence avec ce qui existe déjà dans plusieurs projets de loi au Québec,
qu'on pense à la Loi sur les centres financiers internationaux, la Loi sur le
bâtiment ou encore la Loi sur les valeurs mobilières.
• (11 h 40) •
Prochain concept à examiner d'un peu plus
près est la notion de contrôle de faits, de détention indirecte et de
bénéficiaire d'actions. Ce sont des termes qui peuvent laisser une large
interprétation discrétionnaire de la part de la personne qui complétera la
déclaration d'immatriculation ou la déclaration modificative, ce qui entraînera
nécessairement la déclaration de données erronées, incomplètes et à grande
géométrie variable. La valeur et l'efficacité du registre va dépendre de la
qualité de l'information qu'on y retrouve. Nous suggérons donc que ces notions
soient précisées au moment de l'étude détaillée du projet de loi. Nous croyons
par ailleurs que la définition de bénéficiaire ultime ne devrait pas être
modifiée par voie de règlement par souci de clarté et de transparence.
L'ordre salue chaleureusement la volonté
du gouvernement d'ajouter aux informations recueillies au registre la date de
naissance des administrateurs, des principaux actionnaires et des bénéficiaires
ultimes afin d'en permettre une meilleure identification. Nous suggérons d'y
ajouter aussi l'obligation de divulguer les autres noms sous lesquels ces
personnes sont connues tels que des surnoms ou des noms d'emprunt. Cette
dernière exigence est d'autant plus pertinente que la Loi sur la publicité
légale des entreprises s'applique à toutes les entreprises faisant affaire au
Québec, y compris celles constituées à l'étranger, et que certaines personnes,
vous le savez bien, traduisent ou des fois américanisent leur patronyme.
Ensuite, la question de l'accès au
registre en est une qui est centrale. En proposant d'utiliser le registre des
entreprises comme véhicule de la transparence, le gouvernement affiche sa
volonté de faire de celle-ci une valeur d'affaires au Québec. Unique en son
genre, le registre québécois, je vous le confirme, est déjà une référence au
Canada puisqu'il donne gratuitement accès à des données relatives aux
entreprises. Les informations contenues au registre sont importantes pour le
public et ne doivent pas être accessibles, à notre avis, aux seuls organismes
gouvernementaux chargés de lutter contre la corruption et l'évasion fiscale.
Les journalistes, les juricomptables, par exemple, doivent avoir accès aux
informations qui permettent d'identifier les bénéficiaires ultimes des sociétés
faisant affaire au Québec.
Il est important ici de rappeler que, si
le droit confère une personnalité juridique aux personnes morales, il s'agit
ici d'une création de la loi, d'une fiction créée par la loi. Et donc <pour...
>la possibilité pour une personne physique de faire des affaires par une
entité distincte, une personne morale, en limitant sa responsabilité <constitue...
Mme Mottard (Geneviève) :
...
important ici de rappeler que, si le droit confère une personnalité
juridique aux personnes morales, il s'agit ici d'une création de la loi, d'une
fiction créée par la loi. Et donc pour... la possibilité pour une personne
physique de faire des affaires par une entité distincte, une personne morale,
en limitant sa responsabilité >constitue un privilège qui requiert une transparence
totale quant à l'identité du détenteur de ce privilège.
Alors, dans ce contexte, il nous apparaît
injustifié que l'article du projet de loi permette de modifier un aspect aussi fondamental
que le caractère public des informations contenues au registre par le biais d'un
règlement. Si le gouvernement désire souscrire certaines informations du regard
public, il devrait l'identifier au projet de loi et prévoir de quelle façon
certaines personnes pourraient, malgré tout, y avoir accès en démontrant un
intérêt légitime.
Un registre, quel qu'il soit, n'aura
aucune utilité si l'information qui y est consignée est désuète, voire carrément
fausse. Donc, bien que le projet de loi prévoie une importante bonification des
informations qui doivent être divulguées au registre, on ne prévoit aucun
mécanisme de vérification systématique de la validité de l'information
transmise. Alors, pour bonifier, nous proposions de modifier l'article 2
du projet de loi afin que le registraire soit chargé de prendre les moyens
raisonnables pour assurer la fiabilité des informations contenues au registre.
Ensuite, nous vous suggérions aussi de
bonifier l'article 7 du projet de loi pour accorder au registraire le
pouvoir de requérir tout document officiel afin de valider l'exactitude des renseignements
contenus à la déclaration d'immatriculation. Ainsi le formulaire aussi, et c'est
une autre recommandation qu'on fait, gagnerait non seulement à être signé, mais
également à être attesté par la personne qui le remplit, et potentiellement
accompagné d'une résolution des administrateurs. Alors, en l'absence d'un
mécanisme de validation structuré, des organisations criminelles pourraient
fournir des informations erronées au registraire en créant, par exemple, de
fausses identités ou, pire encore, en volant l'identité des tiers et créer de
toutes pièces des faux bénéficiaires.
Afin de remplir sa mission bonifiée, le registraire
doit ensuite pouvoir compter sur une équipe de professionnels détenant
l'expertise nécessaire pour vérifier et valider l'information qui lui est
transmise pour procéder à des vérifications spontanées et à enquêter. Il est
donc essentiel, à notre avis, que des ressources humaines et financières
conséquentes lui soient accordées, que des pouvoirs d'inspection et d'en-tête...
d'enquête, pardon, puissent être exercés de manière indépendante. Alors, à cet
effet, nous vous proposions de modifier l'article 124 de la loi pour
accorder au registraire le pouvoir d'entreprendre des inspections et des
enquêtes de sa propre initiative ou à la demande du ministre et de doter le
registraire des crédits budgétaires requis afin de <livrer... >pouvoir
se livrer à des vérifications ponctuelles et des enquêtes.
À moins d'une bonification du projet de
loi, les pénalités et mesures administratives existantes continueront de
s'appliquer. Donc, face aux organisations criminelles, celles-ci nous semblent
nettement insuffisantes pour avoir un véritable effet dissuasif. Nous proposons
donc que les pénalités soient substantiellement majorées et accompagnées d'autres
mesures dissuasives comme l'inscription des contrevenants au RENA et que le
délai de la prescription pour une infraction pénale à la loi de la publicité
des entreprises devrait être <prolongé...
Mme Mottard (Geneviève) :
...pour
avoir un véritable effet dissuasif. Nous proposons donc que les
pénalités soient substantiellement majorées et accompagnées d'autres mesures
dissuasives comme l'inscription des contrevenants au RENA et que le délai de la
prescription pour une infraction pénale à la loi de la publicité des
entreprises devrait être >prolongé.
Je termine mes remarques en vous disant
que l'ambition du gouvernement, vous l'avez bien dit, M. le ministre, est
d'élever le Québec au rang des juridictions les plus transparentes au monde et
de s'inspirer des bonnes pratiques qui existent ailleurs. Alors, à notre avis,
une bonification du projet de loi pourrait lui permettre d'atteindre cet
objectif qui est tout à fait noble, et nous espérons pouvoir y contribuer en ce
sens. Je vous remercie, et, Stéphanie et moi, ça nous fera plaisir de répondre
à vos questions. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci pour votre exposé. Alors, nous allons maintenant débuter la
période des échanges avec M. le ministre. Alors, M. le ministre, vous disposez
de 16 min 30 s.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Merci à l'Ordre des CPA pour la qualité de sa présentation et le
contenu du mémoire. Sachez, Mme Mottard, que je connais bien votre
prédécesseur, M. Daniel McMahon, qui, après son mandat à l'ordre, est
redevenu recteur à l'Université du Québec à Trois-Rivières.
J'aimerais ça, faire un échange avec vous
sur un certain nombre de vos recommandations. D'abord, le seuil pour être un
bénéficiaire ultime. Évidemment, ce qui nous a motivés le plus quant au 25 %,
c'est l'harmonisation avec notamment Ottawa, notamment le Royaume-Uni, la
France. Puis, bon, aux États-Unis, c'est maintenant 25 %, c'est tout à
fait nouveau. Et c'est sûr qu'on fait affaire surtout avec des pays membres de
l'OCDE, puis l'OCDE considère que c'est un seuil acceptable.
Est-ce que... Puis vous le savez, là, puis
Me Vallée est membre aussi, probablement, du Barreau du Québec et du
Barreau canadien, il y en a qui militent en faveur d'un risque... qu'on va trop
loin dans notre projet de loi. Ça risque de provoquer un exode ou des sociétés
étrangères ne viendront pas faire affaire au Québec parce que c'est trop à
divulguer. Des sociétés qui font affaire en Ontario ou en Colombie-Britannique
pourraient hésiter de venir faire affaire au Québec.
On pense qu'on fait un immense grand
premier pas dans la bonne direction. À 25 %, on s'harmonise, on maintient
la compétitivité de l'environnement législatif québécois. Est-ce qu'il y aurait
des juridictions qui pourraient nous inspirer? Parce que je sais que vous
faites référence à d'autres lois, la Régie du bâtiment, la Loi sur les sociétés
par actions ou les centres financiers, mais évidemment ces autres lois là ont <d'autres...
M. Boulet : ...est-ce
qu'il
y aurait des juridictions qui pourraient nous inspirer? Parce que je sais que
vous faites référence à d'autres lois, la Régie du bâtiment, la Loi sur les
sociétés par actions ou les centres financiers, mais évidemment ces autres lois
là ont >d'autres finalités, d'autres objets.
Alors, je vous dirais que c'est principalement
ce qui nous a guidés, là, dans l'établissement du seuil. Il y avait un
consensus. Mon collègue de Robert-Baldwin était là puis il connaît bien ce
consensus-là. Il y a eu des consultations. Alors, je tenais à vous préciser que
ce seuil-là avait été établi de cette manière-là.
Mais je comprends qu'on pourrait aller
plus loin puis que tout est possible. Il y en a qui vont nous dire : C'est
trop bas, 25 %, ou : Vous allez trop loin, mais je pense qu'on a
trouvé... je pense que c'est un compromis. En fait, c'est un seuil qui est
reconnu comme non seulement un qui permet l'harmonisation, mais qui maintient
la compétitivité des entreprises qui font affaire au Québec.
Quand vous dites, cependant :
Clarifiez les concepts qui sont utilisés, je pense que je comprends bien.
Est-ce que c'est, par exemple, il me semble que j'ai lu dans votre mémoire, le
contrôle de faits? Est-ce que c'est la notion, selon vous, Mme Mottard ou
Me Vallée, qui requerrait le plus de précisions dans la définition que
vous retrouvez dans le projet de loi?
Mme Mottard (Geneviève) : Oui,
merci, M. le ministre. Si vous me permettez, je pourrais répondre aussi à votre
seuil de 25 % puis vous expliquez pourquoi on vous avait recommandé
10 %. Et votre exposé est tout à fait juste. Je comprends tout à fait d'où
vous arrivez pour faire cette recommandation-là. Nous, on vous le faisait dans l'objectif
de protection du public, donc d'aller le plus loin possible, à notre avis, et
dans la mesure où les informations étaient déjà disponibles, c'est-à-dire les
entreprises doivent déjà faire ce travail-là pour se conformer à d'autres lois.
On ne voyait pas, peut-être, le travail additionnel ou le poids additionnel que
ça demandait aux entreprises, parce qu'elles doivent déjà colliger cette
information-là à d'autres fins, mais c'est une décision, évidemment, qui vous
revient complètement.
• (11 h 50) •
Sur la question du contrôle, oui, je vous
dirais que c'est une notion qui est très large. Puis je vais vous faire rire,
je vais vous parler un peu de ma vie de comptable. Si vous ouvrez le manuel des
normes comptables, la notion de contrôle fait au moins quatre pages. Alors, le
contrôle, ça peut avoir, pour des professionnels qui risquent d'accompagner,
hein, les entreprises à se conformer et à remplir leur déclaration... Si c'est
un CPA, il va le faire avec son cadre normatif de CPA. Si c'est un avocat, il
aurait peut-être une lunette différente. Alors, c'est un terme qui peut être
interprété à toutes les sauces, je vais dire. Pour le commun des mortels, ça a
l'air bien simple, là, mais, quand on... quand un <professionnel...
Mme Mottard (Geneviève) : ...si
c'est un CPA, il va le faire avec son cadre normatif de CPA. Si c'est un
avocat, il aurait peut-être une lunette différente. Alors, c'est un terme qui
peut être interprété à toutes les sauces, je vais dire. Pour le commun des
mortels, ça a l'air bien simple, là, mais, quand on... quand un >professionnel
doit aider une entreprise à se conformer, la notion de contrôle peut être
interprétée très différemment.
Et donc on vous suggère de bonifier la
définition. Quelle est votre intention derrière? Qu'est-ce que vous, vous
considérez comme étant contrôle? Parce que sinon vous risquez d'avoir toutes
sortes de personnes l'interpréter de façons différentes. Puis peut-être,
Stéphanie, je ne sais pas, avec ton oeil d'avocate, si tu veux ajouter à mon
explication.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Bien, avec votre permission, M. le ministre, pour ce qui est du seuil de
10 %, oui, d'autres juridictions l'ont déjà mis en place. D'ailleurs, ce
ne sont pas nécessairement les juridictions qui apparaissent comme étant les
juridictions qui sont, disons, les plus en avance pour contrer le crime
organisé. On parle du... on parle de la Jamaïque, on parle d'une série de
petits pays qui ont mis un seuil de 10 % en place pour pouvoir déclarer
les bénéficiaires ultimes. Et le seuil de 25 % nous apparaît beaucoup plus
large parce qu'il donne énormément de flexibilité à ceux et celles qui sont mal
intentionnés pour mettre en place des structures encore plus compliquées. Donc,
en ayant un seuil restreint, on permet de travailler et de réduire les mailles
du filet.
Et, pour ce qui est de la compétitivité,
le 10 %, moi, je ne partage pas nécessairement l'avis... Nous, évidemment,
on représente un ordre qui est là pour la protection du public. Je vous dirais
que la transparence, c'est une valeur d'affaires, et on gagne à devenir une
place d'affaires transparente, et le Québec va gagner. Alors, je ne partage pas
cette opinion-là. Il y a beaucoup d'écrits, il y a beaucoup de documentations
qui vont être tout à fait à l'effet contraire. Et, si vous consultez le mémoire
que nous avons déposé dans le cadre de votre consultation de l'automne dernier,
nous nous sommes attardés à cette question-là.
Et, pour ce qui est de la définition de
contrôle, bien, oui, effectivement, il faudrait définir ce qui est entendu
parce que, tant au niveau comptable qu'au niveau, même, de la définition
fédérale, il y a une interprétation qui est très large, les juristes se
questionnent. Je sais que vous entendrez l'Association du Barreau canadien, la
division Québec, ils ont des arguments très forts pour plaider en faveur d'une
meilleure précision. Parce qu'encore une fois plus les termes seront larges,
plus on laissera place à la créativité de ceux et celles qui souhaitent, pour
des mauvais objectifs, contourner les objectifs de votre projet de loi.
M. Boulet : Oui, tout à fait.
Écoutez, Me Vallée, oui, il y a certains pays... Quand je faisais <l'inventaire...
Mme Vallée (Stéphanie) :
...plus on laissera place à la créativité de ceux et celles qui souhaitent,
pour des mauvais objectifs, contourner les objectifs de votre
projet de
loi.
M. Boulet : Oui, tout à
fait. Écoutez, Me Vallée, oui, il y a certains pays... Quand je faisais
>l'inventaire des seuils à l'échelle internationale, il y a des pays de
l'Amérique latine qui ont un seuil de 10 %, mais ce n'était manifestement
pas l'unité de mesure qui a été utilisée par ceux qui nous ont précédés à
l'Assemblée nationale, mais absolument pas. Puis d'ailleurs il y a une
directive de la commission économique européenne pour le seuil de 25 %,
là. Donc, on est manifestement dans le peloton de tête des pays occidentaux ou
des pays avec lesquels nous transigeons sur une base un peu plus régulière.
La définition, il ne faut pas la limiter
cependant, vous connaissez l'article 0.3, au contrôle de fait, là. Tu
sais, si tu es détenteur ou bénéficiaire, parce que tu peux être bénéficiaire
sans être détenteur, de 25 % des actions qui confèrent un droit de vote ou
qui sont... représentent 25 % de la juste valeur marchande, on parle du
commandité dans le cas d'une société en commandite, la définition est quand
même assez précise. Ceci dit, en matière de sémantique, d'interprétation ou
d'application, tout est perfectible, je suis d'accord avec vous. D'ailleurs,
c'est la raison pour laquelle on va faire une étude détaillée article par
article, puis ça va comprendre, bien sûr, cette définition-là.
Je veux y aller un peu de façon
télégraphique parce que je regrette toujours de ne pas avoir assez de temps
dans cette portion-là des commissions parlementaires. L'arrimage avec Revenu
Québec... D'ailleurs, pour le bénéfice de mon collègue de Rosemont, le registre
a été transféré au MTESS en 2017 par ceux qui nous ont précédés parce que
l'expertise en matière de gestion de registre et l'infrastructure technologique
étaient sous le MTESS. Et donc ça fait quelques années et ce n'est pas le seul
registre qui est géré, là, dans mon ministère, mais donc, de façon
télégraphique, il y a déjà un arrimage avec Revenu Québec.
Quand vous disiez : Modifier
l'article 2 pour assurer la fiabilité plutôt qu'améliorer, vous savez, Me Vallée,
on dit aussi «les moyens raisonnables pour améliorer», alors que vous enlevez
«raisonnables» puis vous dites «assurer la fiabilité». C'est sûr qu'on fait
attention à ne pas transformer l'obligation de moyens en obligation de
résultat. Ceci dit, moi, je ne suis pas fermé, là, à ce libellé-là, là. Je
vois, Me Vallée, que vous avez peut-être un commentaire à faire. Est-ce
que c'est le cas?
Mme Vallée (Stéphanie) :
Bien, en fait, oui. Si vous voyez notre mémoire, on utilise «assurer» plutôt
que, dans le projet de loi, vous...
M. Boulet : Améliorer.
Mme Mottard (Geneviève) :
Améliorer...
Mme Vallée (Stéphanie) :
...vous mentionnez «améliorer». Alors, dans le libellé, ce qu'on vous propose
de faire, c'est changer ce <mot-là...
Mme Vallée (Stéphanie) :
...bien,
en fait, oui. Si vous voyez notre mémoire, on utilise «assurer»
plutôt que, dans le projet de loi, vous...
M. Boulet : Améliorer.
Mme Mottard (Geneviève) :
Améliorer...
Mme Vallée (Stéphanie) :
...vous mentionnez «améliorer». Alors, dans le libellé, ce qu'on vous propose
de faire, c'est changer ce >mot-là. Et je comprends qu'il y a la
question de moyens raisonnables, mais, en même temps, si on souhaite que le
registraire puisse réellement assurer la fiabilité des données, bien, il faut
lui donner les ressources puis il faut lui donner les moyens de le faire.
Puis, dans la loi actuelle, il est un
petit peu attaché, votre registraire, parce que son mandat était différent.
Donc, à partir du moment où on lui donne un mandat... Et il doit participer à
la lutte à l'évasion fiscale, à la lutte au blanchiment d'argent, à la lutte à
la corruption, il n'est pas face à des enfants de choeur. Alors, il faut lui
donner des moyens un peu plus musclés, il faut lui donner une certaine
autonomie puis il faut lui donner la possibilité de requérir... sans nécessité,
sans se retourner et obtenir l'autorisation ministérielle, être capable
d'entamer des enquêtes et des inspections.
M. Boulet : C'est un excellent
point, Me Vallée. D'ailleurs, on travaille déjà en amont. Au registraire,
il y a déjà eu embauche de six inspecteurs puis il y a déjà des échanges, un
processus d'échange d'information, que ce soit avec la Sûreté du Québec ou avec
Revenu Québec.
Puis c'est important de préciser. À un
moment donné, vous dites : Le pouvoir d'enquête du registraire est
assujetti à l'autorisation du ministre. Ce n'est pas le cas. C'est assujetti à
l'autorisation du ministre seulement, Me Vallée, quand le registraire doit
donner mandat à un autre de faire l'enquête, là, comme Revenu Québec ou la
Sûreté du Québec, parce qu'ils ont maintenant les pouvoirs des commissaires
d'enquête. Il y a des inspecteurs, il y a des ressources qui sont déjà
ajoutées.
Et il y a eu un bel omnibus qui a été
adopté l'année passée par mon collègue aux Finances. Et, à l'article 131,
maintenant, le registraire, au-delà de pouvoir faire enquête, d'avoir les
ressources, il va pouvoir faire des dénonciations au DPCP. Et c'est prévu à l'article 131
et c'est un article qui a été amendé l'année dernière. Ça fait que votre
sensibilité aux outils puis aux ressources que le registraire pourrait avoir
pour atteindre les finalités de la loi, bien sûr, je partage totalement cette
sensibilité-là.
Le délai de prescription, quand on passe
d'un à cinq, là... En fait, pour le bénéfice de tout le monde, là, c'est un à
trois, oui, c'est un an de la connaissance avec un maximum de trois ans de la
perpétration. Vous souhaiteriez que ce soit arrimé avez d'autres lois où on
parle de trois ans de la connaissance jusqu'à un maximum de sept ans de la date
de perpétration. Moi...
12 h (version révisée)
M. Boulet : ...de trois
ans de la perpétration. <C'est... >Vous souhaiteriez que ce soit
arrimé avec d'autres lois où on parle de trois ans de la connaissance jusqu'à
un maximum de sept ans de la date de perpétration.
Mme Mottard (Geneviève) :
Exact.
M. Boulet : Moi, je
trouve que c'est une idée qui est intéressante à explorer. Tenant compte de la
finalité et de la complexité des stratagèmes qui sont utilisés pour faire de
l'évasion, ou de la fraude, ou de la corruption, c'est une idée qui mérite
d'être explorée plus avant.
Les sanctions administratives et pénales,
bon, là, c'est de 500 $ à 25 000 $. Pouvez-vous me redire quelle
est votre recommandation sur le niveau des sanctions? Parce qu'administratives,
c'est une radiation et les sanctions pénales. Est-ce qu'il y a d'autres idées à
soumettre pour les sanctions administratives, puis la hauteur des sanctions
pénales, Mme Mottard ou Me Vallée?
Mme Mottard (Geneviève) :
Je vais laisser Stéphanie répondre.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Au niveau de...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Il reste... Je tiens à souligner qu'il ne reste que 1 min 15 s
Mme Vallée (Stéphanie) :
Merci, Mme la Présidente. Au niveau des sanctions administratives, ma collègue
vous a mentionné un peu plus tôt, lors de sa présentation, l'inscription au
RENA, qui pourrait être une sanction intéressante, qui a été ajoutée,
d'ailleurs, par votre collègue lors des projets de loi n° 37
et 41, des modifications qui ont été apportées à la Loi sur l'impôt pour,
justement, contrer ou s'attaquer à ces malversations-là.
Et pour ce qui est des sanctions pénales,
bien, écoutez, il y a eu plusieurs bonifications qui ont été apportées au cours
des dernières années, que ce soit à la loi sur le Commissaire au lobbyisme, que
ce soit au Code des professions. Il y a certainement moyen de s'inspirer de ça,
parce que les objectifs... Suite à la commission Charbonneau, plusieurs lois
ont été amendées, et les sanctions pénales ont ainsi été amendées. La Loi sur
l'impôt comprend des sanctions pénales importantes aussi pour ceux et celles <qui
obligent de... >qui négligent de déclarer des prête-noms et de déclarer
un certain nombre d'opérations désignées. Donc, je pense que vous avez, là, une
diversité de sanctions...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, je vous remercie, c'est tout le temps que nous avons.
M. Boulet : Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Nous poursuivons maintenant avec le député de Nelligan. Vous disposez de 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Et je tiens à vous rassurer que mon chronomètre est déjà au mode
«on». Et je vous invite à m'arrêter en mi-chemin parce que mon collègue le
député de Robert-Baldwin a aussi une question.
Merci. Merci pour la qualité de votre
mémoire. Et, Mme Mottard, très chanceux de m'entretenir avec vous parce
que vous vivez dans le magnifique comté... En tout respect à tous mes collègues,
c'est le plus beau comté au Québec. Ça, c'est la fameuse...
Mme Mottard (Geneviève) :
C'est sûr.
M. Derraji : C'est la
fameuse, fameuse, fameuse citation de tous les députés à l'Assemblée nationale.
Me Vallée, bienvenue dans cette commission.
J'ai vraiment aimé «la transparence est
une valeur d'affaires». Et vous avez raison. Vous <avez raison, et...
M. Derraji : ...
parce
que vous vivez dans le magnifique comté... En tout respect à tous mes
collègues, c'est le plus beau comté au Québec. Ça, c'est la fameuse...
Mme Mottard (Geneviève)T :
C'est sûr.
M. Derraji : C'est la
fameuse, fameuse, fameuse citation de tous les députés à l'Assemblée nationale.
Me Vallée, bienvenue dans cette commission.
J'ai vraiment aimé «la transparence est
une valeur d'affaires». Et vous avez raison. Vous >avez raison, et c'est
ce qui doit nous inspirer, tous. J'ai bien entendu vos explications par rapport
au seuil de 10 % versus 25 %. Ce qui m'a un peu interpelé, c'est que
vous avez dit, dans votre mémoire : De plus, on propose de mieux définir
dans la loi «...des notions telles le contrôle de faits, la détention indirecte
et les bénéficiaires d'actions». Et selon vous, c'est une large interprétation.
Pouvez-vous juste expliquer le pourquoi que vous soulevez cet enjeu, s'il vous
plaît?
Mme Mottard (Geneviève) :
Bien, merci. Ça revient un petit peu au commentaire que j'échangeais avec le ministre
un petit peu plus tôt, ça dépend de la lunette au travers de laquelle la personne
qui complète la déclaration va la lire, parce que le projet de loi ne définit
pas assez, à notre avis, ce qu'on veut dire par contrôle, par exemple, puis je
vous faisais rire tantôt en vous disant que la définition comptable fait quatre
pages. La définition juridique doit être encore plus longue.
Il y aurait lieu de préciser, dans le projet
de loi, quelle est votre intention, quelle est l'intention du ministre, qu'est-ce
qu'on veut dire par contrôle de faits parce que, sinon, notre préoccupation,
c'est que parce que ces notions-là sont à géométrie variable, dépendront des
connaissances de la personne et de l'interprétation qu'elle en fera lorsqu'elle
remplira la déclaration, bien, ça risque de ne pas atteindre l'objectif. C'est-à-dire
que, si on ne définit pas ces termes-là, bien, ça sera à géométrie variable. Encore
une fois, je me répète un petit peu, là, mais retournez à quel est l'objectif
que vous visez par ces termes-là, dans votre tête, là, qu'est-ce que vous
essayez d'accomplir et allez le définir dans le projet de loi. Parce que, comme
je vous dis, notre crainte, c'est que ce soit interprété très, très largement,
dépendamment de qui le regardera. Puis je ne sais pas, Stéphanie, si tu veux
bonifier ou... Tu es sur «mute», Stéphanie. C'est la phrase de l'année, hein?
M. Derraji : Oui.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Oui. Désolée. C'est ça. C'est qu'il s'agit de notions qui ne sont pas clairement
définies dans le projet de loi et qui pourront être utilisées en fonction du
prisme à travers lequel la personne qui complète sa déclaration va analyser la situation
de l'assujetti. Et donc, si l'intention du législateur est clairement définie, ça
va aider, ça va permettre aux gens de se conformer aux obligations qui sont les
leurs.
M. Derraji : Merci
beaucoup. Et j'espère que M. le ministre et son équipe écoutent. Et j'espère
qu'on va avoir... Je pense que ça mérite une clarification. M. le ministre a
l'habitude de fonctionner toujours comme ça avec moi. Donc, contrôle de faits,
détention indirecte et bénéficiaire d'actions, on doit être beaucoup plus
clair. Je pense que ce serait un des premiers amendements à voir, hein? Je
compte sur vous, M. le ministre.
Vous avez aussi mentionné que l'ordre est
contre la disposition prévue au dernier alinéa de l'article 0.3 par lequel
le gouvernement se réserve le droit de déterminer, <par voie de...
M. Derraji : ...détention
indirecte et bénéficiaire d'actions, on doit être
beaucoup plus clair.
Je pense que ce serait un des premiers amendements à voir, hein? Je compte sur
vous, M. le ministre.
Vous avez aussi mentionné que l'ordre
est contre la disposition prévue au dernier alinéa de l'article 0.3 par
lequel le gouvernement se réserve le droit de déterminer, >par voie de règlement,
d'autres conditions selon lesquelles une personne physique pourrait être
considérée comme un bénéficiaire ultime. On revient toujours au bénéficiaire
ultime. Donc, on ne fait que retirer le pouvoir réglementaire de la loi ou
est-ce qu'on ajoute des conditions dans le projet de loi?
Mme Vallée (Stéphanie) :
Bien, si l'intention du gouvernement ou du législateur, c'est d'ajouter des
conditions, nous, on n'y voit pas de problème. Par contre, ce que l'on prétend,
c'est que ces conditions-là doivent être inscrites au projet de loi et non arriver
plus tard par le biais d'un règlement. On comprend que ça puisse évoluer aussi,
mais les projets de loi peuvent toujours être amendés. Puis il y a tellement de
projets de loi omnibus. Les omnibus fiscaux qui peuvent être utilisés à cette
fin, votre collègue en sait quelque chose.
M. Derraji : Bien, merci
beaucoup. J'ai noté aussi que vous parlez de simplifier le fardeau
administratif. En tant que défenseur de PME, pourquoi vous dites que vous voyez
que, vraiment, il faut qu'on simplifie le fardeau administratif des
entreprises?
Mme Vallée (Stéphanie) :
En fait, ce qu'on voulait vous indiquer, c'est qu'il pourrait y avoir une
déclaration unique qui soit transmise à Revenu Québec et au REQ pour la
divulgation des administrateurs ultimes. Il y a déjà un temps de divulgation
qui doit être fait dans certaines circonstances par les entreprises suite aux
amendements récents apportés à la loi sur l'impôt. Donc, pourquoi ne pas
profiter de l'occasion pour faire de ces obligations un élément où on arrive
avec un formulaire, on répond à l'ensemble des obligations, mais on n'a pas à y
répondre à des moments donnés différents à l'intérieur de l'année? Donc...
M. Derraji : Donc, si
j'ai bien compris, vous voulez qu'on amende le projet de loi pour qu'il y ait
un arrimage, si j'ai bien compris.
Mme Mottard (Geneviève) :
Exact.
Mme Vallée (Stéphanie) :
En fait, je ne crois pas que... Bien, je ne crois pas que ça soit nécessaire de
le faire à travers d'un projet de loi, mais de façon administrative il y a
possiblement la possibilité d'aller de l'avant avec cette proposition-là.
M. Derraji : O.K. Excellent.
Mme la Présidente, combien il me reste de temps? Parce que je ne veux pas...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Il reste 5 min 14 s
M. Derraji : O.K. Parce
que je ne veux pas perdre mon collègue de Robert-Baldwin. Une dernière
question. Vous avez parlé d'autonomie, tout à l'heure, lors d'une réponse
que... une question, une réponse à M. le ministre. Qu'est-ce que vous voulez
dire par rapport à l'autonomie du registraire?
Mme Vallée (Stéphanie) :
Bien, c'est qu'il faut lui donner... Et M. le ministre semble mentionner que
les outils déjà en place sont suffisants. Nous, on considère qu'il faut lui en
donner peut-être un peu plus, lui permettre d'initier davantage les actions,
lui permettre d'exiger davantage des documents. Donc, au moment où il reçoit
des déclarations, être capable rapidement de demander les preuves à l'appui de
certaines déclarations. Est-ce qu'on ne pourrait pas <demander...
Mme Vallée (Stéphanie)T :
...
considère qu'il faut lui en donner peut-être un peu plus, lui
permettre d'initier davantage les actions, lui permettre d'exiger davantage des
documents. Donc, au moment où il reçoit des déclarations, être capable
rapidement de demander les preuves à l'appui de certaines déclarations. Est-ce
qu'on ne pourrait pas >demander, par exemple, des preuves d'identité des
bénéficiaires avec photo?
On a fait la référence dans le mémoire à
un rapport de l'Institut C.D. Howe qui critique le registre qui a été mis en
place en Colombie-Britannique. D'ailleurs, c'est 10 %, le seuil de
détention.
M. Derraji : Oui.
• (12 h 10) •
Mme Vallée (Stéphanie) :
Et j'avais... Ça m'avait échappé lors de ma réponse au ministre, mais... Et on
nous dit, il faut donner des pouvoirs additionnels quand on crée des gestes
parce qu'autrement le crime organisé va simplement être plus créatif qu'il ne
l'est déjà. Alors... Et le rapport de l'Institut C.D. Howe est en ligne. Vous
avez le lien dans notre mémoire.
M. Derraji : Mais j'en
suis...
Mme Mottard (Geneviève) :
Et vous me permettrez d'ajouter, M. le député, c'est... L'essentiel de notre
message, ici, c'est de donner au registre l'ambition, les moyens de ses
ambitions parce que c'est un outil fabuleux. Il existe déjà, contrairement à
toutes les provinces canadiennes où ce concept-là n'existe pas ou pas dans sa
forme actuelle, donc donner au registraire les moyens de ses ambitions pour
rencontrer les objectifs du projet de loi à laquelle nous souscrivons totalement.
M. Derraji : Ne vous
inquiétez pas, on va tout faire pour s'assurer que le ministre va donner tous
les moyens au registraire. C'est notre volonté, et j'en suis sûr et certain,
Me Vallée, mon collègue le député de Robert-Baldwin va continuer dans ma
logique parce que vous ouvrez la porte au C.D. Howe. Donc, Mme la Présidente,
j'ai terminé ma partie. Salutations à l'ordre que j'aime beaucoup. Ma femme des
CPA. Donc, je connais très bien l'ordre. Donc, merci beaucoup. Je cède la
parole à mon collègue de Robert-Baldwin, Mme la Présidente.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, effectivement, à vous la parole. Il vous
reste 2 min 50 s
M. Leitão : Oui. Bon, ça
va aller vite, Mme la Présidente. Bonjour. Bonjour, mesdames. Bonjour,
Me Vallée...
Une voix
: Bonjour.
M. Leitão : ...Stéphanie,
ministre, Mme la ministre, parce que je pense qu'une fois ministre on est
toujours ministre, n'est-ce pas? Mme la Présidente, nous avons siégé quatre ans
au Conseil des ministres, et Mme Vallée avait son siège juste à côté du
mien, on était voisins.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Merci.
M. Leitão : Merci de
faire référence au rapport du C.D. Howe, et justement, là, Broken on Arrival.
Et la question que je veux vous poser, parce que j'aurai juste le temps pour
une question, concerne ce que le C.D. Howe avait aussi mentionné, en
Colombie-Britannique, c'est-à-dire les sanctions. Est-ce que les sanctions sont
trop clémentes? Est-ce qu'on pourrait ou est-ce qu'on devrait aller plus loin?
Évidemment, en Colombie-Britannique, le C.D. Howe militait ou proposait que ça
pourrait même, éventuellement, comporter des peines d'emprisonnement. Quel est
votre avis là-dessus? Plusieurs légistes nous ont dit : Mais non, dans
notre droit, on ne peut pas vraiment faire ça. Dans l'intérêt de cette loi, ici,
comment est-ce que vous voyez ça?
Mme Vallée (Stéphanie) :
Comme je mentionnais au ministre, je suis désolée, là, je ne sais pas comment
vous appeler. Alors, M. le député, <honnêtement...
M. Leitão : ...
on
ne peut pas vraiment faire ça. Dans l'intérêt de cette loi, ici, comment est-ce
que vous voyez ça?
Mme Vallée (Stéphanie) :
Comme je mentionnais au ministre, je suis désolée, là, je ne sais pas comment
vous appeler. Alors, M. le député, >honnêtement, on considère que les
sanctions actuelles, qui ont été prévues alors que le registraire avait un
mandat qui était de consigner de l'information, sont insuffisantes. Ça, c'est
clair. <On s'attaque... >L'objectif, c'est de s'attaquer à des organisations
qui n'ont pas nécessairement des objectifs très nobles. Alors, il faut que les
sanctions soient dissuasives. Autrement, c'est une peccadille pour ces organisations-là
de verser une pénalité de 25 000 $.
Je pense que le Québec s'est outillé, au
cours des 10 dernières années, d'une série de mesures pour dissuader ce
type d'organisation là. On en a intégré à la loi sur l'impôt, on en a intégré à
travers d'autres lois, la Loi électorale, le Commissaire au lobbyisme. Alors,
on saura certainement trouver et accorder au registraire le pouvoir d'émettre
des sanctions beaucoup plus importantes et beaucoup plus dissuasives.
C'est certain que celles qui sont
actuellement consignées à la loi, bien, ce n'est pas grand-chose. Puis,
regardons, le Code des professions prévoit des sanctions plus élevées que ça,
et on s'adresse à des professionnels. La Loi électorale prévoit des sanctions
plus importantes.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Alors, je vous dirais qu'il y a lieu de bonifier.
M. Leitão : Merci
beaucoup. Et au plaisir de vous revoir, Stéphanie.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, nous donnons maintenant la parole au député de Rosemont. Vous
disposez de 2 min 45 s
M. Marissal : Merci, Mme
la Présidente. Merci, Mmes Vallée et Mottard. Merci d'être là.
J'aime beaucoup, beaucoup votre mémoire.
Je pense que ça respecte assurément et à 100 % le mandat de votre ordre,
qui est aussi de protéger la population. Puis c'est de la musique à mes
oreilles quand vous parlez de transparence et de faire tout pour la
transparence. Parce qu'on peut être à moitié transparent, il y aura toujours au
moins la moitié dans le noir si on se contente de demi-mesures. Alors, j'aime
ce que vous dites.
Je vais vous permettre, parce que j'ai
très peu de temps, de poursuivre la réponse que vous étiez en train de faire à
mon collègue de Robert-Baldwin sur d'autres mesures de sanctions. Parce que je
suis d'accord avec vous que, quand on brasse, là, des millions et des millions,
là, une petite tape sur les doigts de 25 000 $, là, c'est presque
ridicule, entre vous et moi, là.
Quelles autres fonctions? Vous
dites : On a moyen de trouver. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Vous
avez parlé du RENA, c'est assurément une option. Je ne sais pas, un calcul par
pourcentage sur les chiffres d'affaires des entreprises? Parce qu'on le sait,
ces entreprises-là, pour leur faire mal, il faut taper là où ça fait mal, puis
là où ça fait mal, c'est le portefeuille.
Mme Vallée (Stéphanie) :
Bien, d'ailleurs, le projet de loi n° 64 prévoit un pourcentage du chiffre
d'affaires des entreprises comme étant une possible sanction. Votre <collègue...
M. Marissal : ...
chiffres
d'affaires des entreprises? Parce qu'on le sait, ces entreprises-là, pour leur
faire mal, il faut taper là où ça fait mal, puis là où ça fait mal, c'est le
portefeuille.
Mme Vallée (Stéphanie)T :
Bien, d'ailleurs, le projet de loi n° 64 prévoit un pourcentage du chiffre
d'affaires des entreprises comme étant une possible sanction. Votre >collègue,
le collègue du ministre, le ministre de la Transformation numérique est
responsable d'un projet de loi où les sanctions pour un défaut de se conformer
à la protection des renseignements et aux obligations de protection des renseignements
personnels offrent... proposent des sanctions très, très importantes. Alors,
oui, <c'est... >voici un outil : des pénalités importantes,
plus importantes tant pour les personnes physiques que pour les personnes
morales; des sanctions ou une impossibilité de contracter avec l'État, parce
que le RENA, pour ceux et celles qui nous écoutent qui ne le connaissent pas, a
comme objectif de dresser une liste des entités qui ne peuvent contracter avec l'État.
C'en est une, puis je pense que ça peut faire mal pour bien des entreprises qui
cherchent justement à obtenir les largesses des contrats publics. Les sanctions
d'emprisonnement, bon, on le retrouve aussi dans la loi fédérale, qui a été
amendée au cours des dernières années. Alors, ça en fait partie, mais... Alors,
vous avez là une série de propositions qui permettent de dire... de lancer le
message que la transparence, c'est une affaire sérieuse pour le Québec.
Geneviève...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. C'est tout le temps que nous avons ou que nous avions. Nous poursuivons maintenant
avec la députée de Gaspé. Vous disposez de 2 min 45 s
Mme Perry Mélançon : Merci,
Mme la Présidente. Bien, bonjour à vous deux. Très intéressant. C'est certain qu'il
y a déjà quelques réponses, là, qui ont été données à mes collègues qui vont
répondre aussi aux miennes. Alors, je comprends finalement que vous voulez
qu'on renforce autant les mécanismes de vérification systématique, donc dès qu'on
inscrit une entreprise au registraire, mais aussi vous parliez de mettre sur
pied une unité spécialisée dédiée aux inspections et aux enquêtes. Je trouvais
ça intéressant. On n'a pas beaucoup parlé de ça, mais est-ce que... Parce que
vous dites inspiré des pratiques de Revenu Québec. Est-ce que vous voyez une
forme de collaboration avec déjà une institution comme l'UPAC, qui pourrait
être mise en oeuvre? Comment vous voyez ça?
Mme Mottard (Geneviève) :
Bien, moi, je vais faire un commentaire puis je vais passer la parole à
Stéphanie. Encore une fois, on va changer, ici, la mission du Registraire des entreprises.
Donc, d'un simple registraire, on va en faire maintenant un outil très, très,
très important dans la lutte contre le blanchiment d'argent et la corruption.
Alors, il faut se poser la question : Dans la façon dont opère le
registraire, les équipes qu'il a, les ressources qu'il a, est-ce que, si on
change sa mission, bien, il faut faire suivre ensuite le côté opérationnel? Et
là, nous, ce qu'on vous dit, c'est, si vous voulez que ce registraire-là ait du
succès, bien, en anglais, on dit «Set it up for success», alors, investissez
pour en faire un succès qui passerait notamment par des équipes d'enquête.
Stéphanie, si tu veux <bonifier...
Mme Mottard (Geneviève) :
... les ressources qu'il a,
est-ce que, si on change sa mission, bien,
il faut faire suivre ensuite le côté opérationnel? Et là, nous, ce qu'on vous
dit, c'est, s
i vous voulez que ce registraire-là ait du succès, bien, en
anglais, on dit «Set it up for success», alors, investissez pour en faire un
succès qui passerait
notamment par des équipes d'enquête. Stéphanie, si
tu veux >bonifier ma réponse.
Mme Vallée (Stéphanie) :
En fait, au cours des dernières années, Revenu Québec a mis en place des
équipes qui vont faire, par exemple, des enquêtes ponctuelles, des vérifications
ponctuelles sur la base de la déclaration volontaire des individus, des
entreprises. Et le registre, bien, c'est la même chose, c'est une déclaration
qui est faite par un assujetti de la liste de ces bénéficiaires ultimes. Donc,
il pourrait y avoir à l'interne des équipes chargées d'effectuer ces vérifications-là,
aller assurer que l'information qui est colligée, elle est exacte. Et on a
vu... Je pense qu'il y a eu des articles de presse qui ont fait état du succès
des équipes qui ont été mises en place chez Revenu Québec. Donc, ça fonctionne.
Est-ce qu'il y a lieu de... Et je pense que l'indépendance, c'est-à-dire que
les équipes soient des équipes du registraire, avec l'expertise, est plus utile
que de faire affaire avec une entité autre, par exemple, l'UPAC.
Mme Perry Mélançon : O.K.
Merci. Rapidement, vous parliez d'ouvrir le registre, par exemple, l'accès aux
juristes, aux journalistes. Présentement, dans la forme actuelle, c'est-u parce
qu'on parle d'un règlement qui pourrait enlever ces conditions-là?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : En 10 secondes.
Mme Vallée (Stéphanie) :
L'article 16 du projet de loi prévoit que le gouvernement peut, par règlement,
établir la liste de l'information qui n'est pas accessible, et donc qui ne peut
être consultée. Donc, c'est dans ce contexte-là qu'on dit : Bien, écoutez,
qu'il y ait des éléments qu'on garde privés pour la protection de la vie
privée, ça va, mais il faudrait donner la possibilité à des gens qui veulent en
faire une utilisation légitime, la possibilité d'y accéder.
Puis, si on veut retirer de l'information,
encore une fois, n'utilisons pas le pouvoir réglementaire du gouvernement,
indiquons-le clairement dans la loi, que notre intention est de retirer
certaines informations, que l'on énumérera, de l'accès à certaines personnes.
• (12 h 20) •
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, on vous remercie. Merci. Alors, merci,
Mme Mottard, merci, Mme Vallée, pour votre contribution à la commission.
Nous suspendons quelques instants, le
temps de se préparer pour accueillir le prochain groupe.
M. Marissal : Merci
beaucoup.
Mme Mottard (Geneviève) :
Au plaisir de travailler avec vous. Au revoir.
(Suspension de la séance à 12 h 21)
(Reprise à 12 h 30)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous poursuivons. Nous souhaitons maintenant la...
12 h 30 (version révisée)
(Reprise à 12 h 30)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous poursuivons. Nous souhaitons maintenant la bienvenue à
Mme Pascale Cornut St-Pierre. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour faire votre exposé. Avant de commencer, je vous invite à
bien vous présenter ainsi qu'à nommer votre rôle, et ensuite vous pourrez
poursuivre avec votre exposé.
(Visioconférence)
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Merci, Mme la Présidente. M. le ministre, messieurs et mesdames les députés, je
vous remercie pour cette opportunité de vous présenter mes observations par
rapport au projet de loi n° 78. Donc, je suis professeure à la Section de
droit civil de l'Université d'Ottawa, où j'enseigne, entre autres choses, le
cours obligatoire de droit de l'entreprise que doivent suivre tous les
étudiants de notre licence en droit et qui couvre notamment le régime de publicité
légale des entreprises aux Québec.
Donc, mon intervention d'aujourd'hui
s'appuie sur le mémoire que j'ai déposé en décembre 2019 dans le cadre des
consultations publiques sur la transparence corporative ainsi que sur un
article que j'ai publié, en 2019 également, sur les finalités et les usages des
registres d'entreprises. Donc, ces deux documents, je crois, vous ont été
communiqués et abordent plusieurs thèmes pertinents aux discussions concernant
le projet de loi n° 78.
Donc, je commence mon exposé en vous
disant d'entrée de jeu que je suis très favorable aux mesures proposées dans le
projet de loi. Donc, dans l'article que je publiais en 2019, je constatais, en
effet, que le régime québécois de publicité légale des entreprises accusait un
certain retard par rapport aux développements récents dans d'autres pays et je
m'inquiétais en particulier du fait que plusieurs acteurs clés de notre régime,
à commencer par le Registraire des entreprises lui-même, semblaient privilégier
une lecture indûment restrictive de la finalité du registre des entreprises du
Québec, une lecture restrictive qui risquait de limiter fortement l'utilité que
pourrait avoir ce registre pour répondre à certains défis de notre époque.
Et donc je crois que le projet de loi actuel
rectifie le tir et qu'il le fait essentiellement de trois façons : donc,
tout d'abord, en énonçant pour la première fois de manière explicite les objectifs
du registre des entreprises; ensuite, en levant l'un des principaux obstacles
qui empêchaient la mise en place de fonctions de recherche avancées à
l'intérieur du registre; et finalement, en intégrant, au sein du registre
actuel, des informations sur les bénéficiaires ultimes des entreprises conformément
aux bonnes pratiques, là, qui se mettent en place un peu partout dans le monde à
l'heure actuelle. Donc, je vais aborder, dans mon exposé, tour à tour chacun de
ces trois points.
Donc, premier point, les objectifs du
registre des entreprises. Donc, le projet de loi propose d'introduire un nouvel
article 0.1, à la Loi sur la publicité légale des entreprises, qui énonce
les objectifs du registre. Donc, le registre doit favoriser la transparence des
entreprises, renforcer la protection du public et notamment contribuer aux
actions de prévention et de lutte contre l'évasion fiscale, le blanchiment
d'argent et la corruption. Donc, cet article est important pour guider l'interprétation
de la loi et la façon dont le registraire va en assurer la <mise
en oeuvre…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
…le registre doit favoriser la transparence des
entreprises, renforcer
la protection du public et
notamment contribuer aux actions de
prévention et de lutte contre l'évasion fiscale, le blanchiment d'argent et la
corruption. Donc, cet
article est
important pour guider l'
interprétation
de la loi et la façon dont le registraire va en assurer la >mise en
oeuvre.
Donc, au cours des dernières années, on
pouvait observer que le registraire semblait tenir pour suspectes les utilisations
du registre <pour fins…> par exemple, pour fins d'enquête des
journalistes ou des citoyens et en était venu à s'opposer activement à des
organismes qui proposaient de diffuser plus largement les données du registre
ou qui proposaient de donner accès à des fonctionnalités de recherche plus
avancées, des données qui sont pourtant publiques et que c'est un peu étrange
de voir le registraire tenter de restreindre.
Donc, en affirmant que le registre des
entreprises vise de manière générale à assurer la transparence des entreprises,
et non seulement la protection des personnes qui font affaire avec une
entreprise, et en affirmant aussi que le registre participe aux efforts de
prévention et de lutte contre certaines formes de délinquance d'affaires, ce nouvel
article 0.1 permettra, à mon avis, de mieux cadrer les débats qui opposent
la publicité légale des entreprises aux enjeux de protection de la vie privée,
par exemple.
Donc, deuxième point, la possibilité
d'effectuer des recherches avancées à l'intérieur du registre. Donc, la Loi sur
la publicité légale des entreprises laisse au registraire la discrétion de
déterminer lui-même les technologies qui vont permettre la consultation en
ligne des données contenues dans le registre des entreprises, donc, c'est à
l'article 99 de la loi. Donc, le projet de loi actuel ne fournit aucune
indication supplémentaire, là, quant aux fonctions de recherche qui seront
permises ou non après son adoption. Donc, le projet de loi modifie toutefois
l'article 101 de la loi pour retirer l'interdiction qui était faite au
registraire de fournir des regroupements d'informations qui contiennent le nom
d'une personne physique. Et donc, suite à l'adoption du projet de loi, le
registraire aurait la possibilité, mais non l'obligation, de mettre en place
des fonctions de recherche plus avancées qu'actuellement et que… Ça pourrait
éventuellement se traduire par un outil technologique plus efficace pour
retracer, par exemple, des structures d'entreprise qui peuvent être parfois
très complexes.
Donc, à ce sujet, je pense que
l'amélioration de la transparence des entreprises va dépendre des mesures
concrètes que mettra ou non en place le registraire pour permettre des
recherches à partir de tous les champs d'information contenus dans le registre
des entreprises. Donc, on pourrait ainsi effectuer des recherches par noms
d'entreprises, comme on peut le faire actuellement, mais aussi éventuellement
par noms d'administrateurs, d'actionnaires ou d'associés, mais on pourrait
aussi envisager des fonctions plus larges encore, des recherches par adresses,
par dates de création ou de dissolution de l'entreprise, par secteurs
d'activité, etc.
Donc, il faudrait aussi que le registre
révise les conditions d'utilisation qu'il impose actuellement pour permettre la
libre rediffusion des données qui peuvent être consultées dans le registre, et
ça, c'est essentiel pour permettre de croiser les données du registre québécois
avec les données d'autres registres dans <le monde, comme les…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
…que le registre révise les conditions d'utilisation qu'il impose actuellement
pour permettre la libre rediffusion des données qui peuvent être consultées
dans le registre, et ça, c'est essentiel pour permettre de croiser les données
du registre québécois avec les données d'autres registres dans >le
monde, comme les entreprises sont de plus en plus transnationales. Donc, ce ne
sont pas forcément des choses qui doivent apparaître dans la loi, mais ces
mesures vont déterminer concrètement si, oui ou non, on améliore
significativement la transparence des entreprises. Donc, ce sera à surveiller,
comment le registraire va mettre tout ça en oeuvre.
J'ai une dernière
observation concernant les fonctions de recherche au registre des
entreprises. Je m'explique mal que l'on continue, dans le projet de loi actuel,
d'interdire les regroupements d'informations basés sur l'adresse d'une personne
physique, donc c'est le futur article 101, alinéa deux, 1°, du projet
de loi, de la future Loi sur la publicité légale, dans la mesure où l'adresse
qui sera rendue publique pourrait maintenant être une adresse professionnelle
plutôt qu'une adresse de résidence personnelle. Et donc, vu cet aménagement-là,
je pense qu'une interdiction de faire des regroupements basés sur une
information qui ne peut pas être consultée, donc, c'est déjà en place dans le
projet de loi, serait suffisante. On n'a pas besoin d'ajouter l'interdiction de
faire des recherches par adresses de personnes physiques.
Troisième point, les informations sur les
bénéficiaires ultimes. Donc, le registre des entreprises recueillera dorénavant
des informations sur les bénéficiaires ultimes des entreprises assujetties. Et
je crois que la décision d'intégrer ces informations-là au registre des
entreprises actuel plutôt que de créer un registre distinct ou de demander aux
entreprises de tenir elles-mêmes leurs propres registres, c'est de loin la
meilleure solution qu'on puisse envisager au Québec.
Je salue aussi la décision de donner aux
informations concernant les bénéficiaires ultimes le même statut que les
principales informations qui figurent actuellement au registre des entreprises,
c'est-à-dire d'en faire, d'une part, des informations accessibles publiquement
et gratuitement, et je pourrai vous expliquer, dans la période de questions,
pourquoi je pense qu'un accès plus limité ne serait pas satisfaisant, et d'en
faire aussi une information qui a les pleins effets juridiques qui sont
normalement attachés à la publicité légale, donc une information qui soit
opposable aux tiers et qui ait force probante en cas de litige.
Je termine en mentionnant brièvement
certaines améliorations qui pourraient, à mon avis, être apportées à la
définition des bénéficiaires ultimes que propose actuellement le projet de loi.
D'une part, le seuil qui est proposé actuellement, de 25 % des droits de
vote, offre, certes, l'avantage de s'harmoniser avec les définitions retenues ailleurs,
notamment dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions et dans plusieurs
pays de l'Union européenne, mais il faut quand même souligner qu'il s'agit d'un
seuil élevé, qui est facile à contourner en pratique.
Et, pour vous donner un simple exemple
tout récent, il y a eu une enquête publiée par les journalistes du Monde
la semaine dernière, OpenLux, qui révélait qu'avec un tel seuil de 25 %
près de la moitié des sociétés inscrites au registre du Luxembourg étaient parvenues
à ne déclarer <aucun bénéficiaire…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...
en pratique.
Et, pour vous donner un simple
exemple tout récent, il y a eu une enquête publiée par les journalistes du Monde
la semaine dernière, OpenLux, qui révélait qu'avec un tel seuil de 25 %
près de la moitié des sociétés inscrites au registre du Luxembourg étaient
parvenues à ne déclarer >aucun bénéficiaire effectif. Donc, il y aurait
de bonnes raisons de vouloir abaisser ce seuil de déclaration prévu, par
exemple, à 10 %, comme le réclament plusieurs groupes de la société
civile.
Donc, deuxième élément qu'on pourrait
peut-être améliorer dans la définition des bénéficiaires ultimes, je pense
qu'il y aurait lieu d'ajouter à la définition proposée un critère axé non seulement
sur le contrôle, mais aussi sur la réception de bénéfices, ce qui reflète
d'ailleurs la notion même de bénéficiaire ultime.
• (12 h 40) •
Donc, pour donner quelques exemples
concrets, l'actionnaire sans droit de vote, le commanditaire d'une société en
commandite ou encore le bénéficiaire d'une fiducie devraient tous, à mon avis,
pouvoir être identifiés comme des bénéficiaires ultimes, dès lors que ces
personnes-là peuvent prétendre à une part importante des bénéfices d'une
entreprise. Et donc là, ici, on pourrait parler d'un seuil de 25 % ou d'un
seuil moindre. On va calibrer... Vous calibrerez comme vous pensez que c'est
pertinent, mais je crois que la notion de bénéfice est importante aussi, en
plus du contrôle.
Donc, je vous remercie…
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui, je termine. Donc, je vous remercie pour votre attention et je suis à votre
disposition pour répondre à vos questions.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci, Mme Cornut St-Pierre. Alors, nous commençons la période
d'échange avec M. le ministre. La parole est à vous. Vous disposez de
16 min 30 s.
M. Boulet : Oui. Merci, Mme la
Présidente. Bienvenue. Merci, hein, Mme Cornut St-Pierre, qui enseignez le
droit de l'entreprise, cours que j'ai suivi à la Faculté de droit de
l'Université Laval. Vous devez avoir beaucoup de plaisir à faire cet
enseignement. Merci pour vos commentaires sur le projet de loi.
Je comprends que vous adhérez totalement
aux finalités, aux objectifs. Puis c'est intéressant que vous ayez une
perspective un petit peu de l'évolution du comportement du registraire en ce
qui concerne les demandes externes pour lutter, notamment, contre l'évasion
fiscale. Puis ça peut venir des journalistes. Puis vous savez qu'il y a eu des
décisions de jurisprudence, notamment je pense à Radio-Canada, qui rendaient le
registraire un peu plus prudent, un peu plus réservé, alors que le projet de
loi définit bien quels sont les objectifs. Puis, dans la mesure où le
registraire pourra contribuer à sa façon à lutter contre la criminalité au Québec,
ce sera certainement bénéfique. Je pense qu'à Revenu Québec on estime qu'il y a
à peu près 3,8 milliards de dollars perdus au Québec en évasion fiscale, puis
c'est une estimation sans compter les autres volets dont on a parlé, là,
corruption, transactions illicites, <et autres...
M. Boulet : …je pense qu'à
Revenu
Québec on estime qu'il y a
à peu près 3,8
milliards de
dollars perdus au
Québec en évasion fiscale, puis c'est une estimation
sans compter les autres volets dont on a parlé, là, corruption, transactions
illicites, >et autres.
Quand vous dites «les mesures concrètes»…
prendre un petit peu de temps pour vous rassurer. Moi aussi, ça me préoccupe
qu'on ait les ressources. Le budget est là. Il y a une préparation en amont. Il
y a eu une embauche d'inspecteurs, on est rendus à six, et il y a eu des
amendements qui ont déjà été faits à la loi, l'an passé, par un omnibus sous le
parrainage de mon collègue aux Finances. Et les inspecteurs ont les pouvoirs,
en vertu de la Loi sur les commissions d'enquête, et donc ça, ça va être
extrêmement bénéfique pour l'atteinte des objectifs et le respect des finalités
du projet de loi.
Là, je vais vous poser des questions
larges, là, parce que je veux vous écouter. Vous disiez : Bon, la notion
de bénéficiaire ultime… Bon, à 0.3, on définit, bon, c'est le détenteur ou le
bénéficiaire, on fait référence à 25 % des droits de vote, détenteur ou
bénéficiaire, 25 % de la juste valeur marchande. On réfère à la personne
qui est commanditée quand c'est une société en commandite. Puis il y a aussi le
bénéficiaire… Dans le cas de plusieurs personnes ensemble, là, des personnes
physiques qui sont regroupées, il y a la personne qui exerce le contrôle de
fait de l'assujetti. Mais vous souhaitiez comme un raffinement ou un
éclaircissement quant à la notion de bénéficiaire ultime, la personne qui
reçoit des bénéfices. <Est-ce que… >J'aimerais ça vous écouter sur
une proposition concrète qui pourrait nous permettre peut-être de mieux définir
le bénéficiaire ultime. Je pense qu'on s'est inspirés de définitions dans
d'autres lois, on essaie d'être le plus large possible, mais je vous écouterais
sur ce point-là, Mme Cornut St-Pierre.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, selon ma lecture des différents critères, là, quand on dit qu'une
personne est détentrice ou bénéficiaire d'un nombre d'actions qui lui donne 25 %
des droits de vote, le terme «bénéficiaire» ici indique que cette personne-là,
ultimement, est celle qui va exercer le droit de vote, va bénéficier du droit
de vote et pas forcément des profits de l'entreprise.
Donc, si on avait, par exemple, un
actionnaire qui a des actions sans droit de vote, c'est un mécanisme qui
existe, et supposons que cette personne-là a suffisamment d'actions pour
prétendre avoir la moitié des bénéfices d'une société par actions, je crois
qu'on pourrait l'indiquer comme un bénéficiaire ultime.
Et là je ne sais pas si c'est… Un des
critères <qui me… >que je ne savais pas bien comment on
appliquerait concerne la détention d'unités qui correspondent à 25 % ou
plus de la juste valeur <marchande. Et…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
…
comme un bénéficiaire ultime.
Et là je ne sais pas si c'est… Un des
critères qui me… que je ne savais pas bien comment on appliquerait concerne la
détention d'unités qui correspondent à 25 % ou plus de la juste valeur
>marchande. Et mon intuition… Mais je crois que vous aurez d'autres
intervenants qui vont… par exemple, l'association des comptables agréés,
peut-être eux ont une meilleure compréhension fine de comment on met en oeuvre
ces critères-là, mais je comprends que la juste valeur marchande, pour des
entreprises où il n'y a pas de marché pour échanger les actions, c'est un
critère assez hypothétique, qui n'est pas facile à évaluer en pratique, qui
peut être sujet à débat. Tandis que, si on parle d'une proportion des bénéfices
qu'on a le droit de recevoir, ça, je crois que c'est un peu plus facile à
établir en vertu des statuts de l'entreprise, de la société, et tout ça. Ça, c'est
mon intuition.
Pour compléter, je vois deux cas de
figure, là, où ce serait important de faire cette distinction-là entre qui
contrôle et qui bénéficie d'une entreprise.
Bon, le cas des sociétés en commandite.
Donc, le quatrième paragraphe, là, de l'article 0.3 nous dit que le
commandité d'une société en commandite va être un bénéficiaire ultime, et ça,
parce que le commandité, c'est la personne qui contrôle la société en
commandite. Par contre, le commanditaire est celui qui retire le profit,
typiquement, de la société en commandite. Et on peut avoir des cas où il y a
une multitude de commanditaires, et donc là on serait en deçà des seuils. Si on
met un seuil à 25 % ou 10 %, on serait possiblement en dessous de ça.
Mais, si on a un commanditaire qui retire 50 % des bénéfices de la société
en commandite, je crois que c'est important de l'indiquer comme bénéficiaire
ultime. Et on aurait le même raisonnement dans le cas des fiducies.
Donc là, en ce moment, les fiducies non
commerciales ne sont pas des assujetties au régime, mais elles peuvent être des
actionnaires, par exemple, et donc elles peuvent se retrouver comme
bénéficiaires ultimes. Et donc, si on tombe sur une fiducie, qui est-ce qu'on
identifie comme bénéficiaire ultime? Là, je comprends, dans les définitions
actuelles, qu'on identifierait l'administrateur de la fiducie et non pas le
bénéficiaire qui, ultimement, va pouvoir toucher les profits de l'entreprise
qui seront distribués, s'ils le sont. Et donc, je pense, ce serait important
d'identifier comme bénéficiaires ultimes tous ces gens-là, à la fois ceux qui
ont le contrôle mais ceux qui vont en tirer les profits d'une façon importante.
M. Boulet : Oui, O.K. Je vous
comprends bien. Vous avez aussi abordé le sujet des
formes de recherche. J'aimerais ça que vous m'entreteniez sur la perception que
vous avez de la façon dont on peut faire actuellement de la recherche et ce que
vous considéreriez <comme…
M. Boulet : …vous
avez
aussi abordé le sujet des formes de recherche. J'aimerais ça que vous
m'entreteniez sur la perception que vous avez de la façon dont on peut faire
actuellement de la recherche et ce que vous considéreriez >comme étant
mieux pour l'atteinte des objectifs et le respect des finalités de la loi. Vous
avez parlé, à un moment donné, des administrateurs, des associés, des
actionnaires, puis moi, je vous suivais, là, j'étais d'accord, mais… ce que
vous percevez comme l'état actuel des choses et ce que vous souhaiteriez comme
étant l'idéal.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, je vais vous donner un exemple bien concret. Chaque année, dans mon
cours de droit de l'entreprise, j'organise un exercice de recherche au sein du
registre des entreprises du Québec avec comme objectif, pour les étudiants,
d'essayer de reconstituer quelle est la structure juridique de l'entreprise, parce
qu'un des objectifs du cours, c'est d'apprendre aux futurs juristes de
distinguer entre… bien, on peut avoir une entreprise, qui a une réalité
socioéconomique, des gens qui travaillent ensemble, qui mettent des capitaux en
commun pour faire certaines activités, mais on a aussi la structure juridique.
Et une entreprise ne se traduit pas forcément par une seule entité juridique
mais souvent par plusieurs, et parfois ça peut être des centaines d'entités
juridiques qui composent l'entreprise. Et donc je leur demande… je leur donne
quelques points de départ, et ils doivent après essayer d'identifier, bien,
c'est quoi, la structure juridique de l'entreprise, à partir de recherches dans
le registre.
Et la conclusion de l'exercice est
typiquement que, oui, le registre nous donne beaucoup d'informations mais ne
rend pas cette recherche-là d'une structure, des liens entre les entités
juridiques très facile. Et donc, si on réussit à partir de <la bonne… >disons,
la dernière entreprise d'une chaîne, on peut remonter, par exemple, les
actionnaires, si c'est une société par actions, on remonte, on remonte, on
remonte. On peut aller assez loin comme ça, mais on ne peut pas faire le chemin
en sens inverse. On ne peut pas savoir quelle société a quelle filiale. Donc,
on ne peut jamais redescendre. Et <on tombe souvent… >quand on
remonte la chaîne, comme ça, de propriétés ou de détentions, on tombe souvent
sur certains culs-de-sac. Et là, typiquement, il y en a deux principaux : on
tombe sur une fiducie, et donc là on ne sait plus après qui détient ça, ou on
tombe sur une société étrangère pour laquelle on n'a pas d'information dans le
registre québécois et pour laquelle, souvent, n'existe pas de registre simple
d'accès à l'étranger.
• (12 h 50) •
Et donc, si on avait des fonctions de
recherche <mieux… >disons, plus complètes, comme un catalogue de
bibliothèque, par exemple, où on peut chercher un titre, on peut chercher un
auteur, on peut chercher une date, ça nous permettrait de plus facilement
savoir, bien : Donc là, j'ai identifié une branche de l'entreprise, mais
est-ce qu'il y a une branche parallèle, est-ce qu'il y a des sociétés soeurs?,
puis là commencer à voir : Mais qui est actionnaire de quoi? Et là, comme
ça, on a le réseau complet plutôt que d'avoir juste une vue très partielle.
Donc, je ne sais pas si ça répond bien à la question.
M. Boulet : Bien oui, je vous
suis bien, là. En fait, vous souhaiteriez que la <recherche…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
…mais
qui est actionnaire de quoi? Et là, comme ça, on a le réseau
complet plutôt que d'avoir juste une vue très partielle. Donc, je ne sais pas
si ça répond bien à la question.
M. Boulet : Bien oui, je
vous suis bien, là. En fait, vous souhaiteriez que la >recherche nous
permette de saisir tous les tentacules d'une organisation plutôt que simplement
certains fragments. C'est bien…
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
C'est ça.
M. Boulet : O.K.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui, donc, c'est ça. Et, peut-être, pourquoi est-ce que c'est pertinent? Un des
exemples, un des exercices, là, que je proposais, une année, aux étudiants,
c'était l'exemple de l'industrie du cannabis, où, dans la loi, il faut
s'assurer qu'il n'y ait personne d'impliqué qui ait des antécédents judiciaires,
donc on ne veut pas que ce soit le secteur des trafiquants de drogue qui
s'invite dans cette industrie légalisée là… et de se rendre compte qu'en fait
c'est excessivement difficile d'identifier ça justement à cause de ces
structures-là, que c'est facile pour quelqu'un de s'impliquer dans cette
industrie-là sans devenir visible dans le registre.
Bon, un autre exemple, qui est peut-être
encore beaucoup plus simple. Chaque année, à la saison des déménagements, on a
des entreprises très louches qui se créent pour la saison du déménagement et se
dissolvent par la suite, et là il y a plein de plaintes de consommateurs qui
ont été un peu floués parce qu'ils ont mal fait leur travail. On n'a pas de
moyen de chercher, par exemple, un individu et de se rendre compte que, bien
cette personne-là, année après année, crée une nouvelle entreprise qui fait
faillite, et en recrée une nouvelle, et en recrée une nouvelle. On ne peut pas
chercher ça en ce moment dans le registre des entreprises, et pourtant c'est quelque
chose… Ça serait une utilité assez légitime du registre quand on essaie
d'évaluer la crédibilité d'une entreprise. <Une entreprise… >Une
personne impliquée dans des entreprises qui font faillite continuellement,
c'est inquiétant. Donc, il y a beaucoup de raisons comme ça de vouloir élargir
les critères de recherche.
M. Boulet : Ah! totalement.
Bien, écoutez, je pense que vous êtes une personne de contenu, de détails, puis
vous voulez vous assurer que, dans l'opérationnalisation de la loi, on soit bien
en mesure de rencontrer les objectifs. J'aimerais ça, puis c'est peut-être une
question un peu académique, là, mais… écouter votre opinion sur… Parce qu'on
parle de transparence corporative, hein? Puis souvent, en matière de droit, il
faut trouver un équilibre entre un droit personnel puis un droit collectif,
quand on est en entreprise, entre le droit de gestion de l'entreprise puis la
liberté du travailleur. Ici, c'est la vie privée et la transparence corporative,
dans la mesure où, évidemment, ça protège le public, parce que c'est ça,
ultimement, que nous souhaitons faire avec ce projet de loi là. Qu'est-ce que
vous auriez à nous dire sur comment bien atteindre cet équilibre-là entre la
protection de la vie privée et la transparence corporative?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, dans mon mémoire, je proposais d'enlever <l'irritant…
M. Boulet : ...
ce
projet de loi là. Qu'est-ce que vous auriez à nous dire sur comment bien
atteindre cet équilibre-là entre la protection de la vie privée et la
transparence corporative?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, dans mon mémoire, je proposais d'enlever >l'irritant majeur,
et j'ai pu voir, dans les autres mémoires qui avaient été déposés, là, l'an dernier,
que c'était en effet l'irritant que tout le monde mentionnait, c'est la
question de la résidence personnelle. <Donc... >Et ça, je pense
que tout le monde peut comprendre que ce n'est pas agréable de savoir que
n'importe qui qui fait une recherche sur nous peut trouver notre adresse de
résidence personnelle, peut... Avec les outils aujourd'hui, là, Google Maps, et
tout ça, là, on peut aller voir visuellement où vous habitez, et tout ça. Donc,
ça, je pense, quand on essaie de faire une mise en balance, là, de… ça, c'est
l'irritant majeur. Je vous proposais de l'enlever et je crois que vous avez,
dans le projet de loi, intégré ça. Et donc moi, je pense qu'on atteint un
meilleur équilibre comme ça.
Pour le reste, il y a quand même l'idée,
qui est très ancienne, qui dit : Mais, si on prétend bénéficier d'une
forme de responsabilité limitée, qui est un truc un peu exorbitant du droit
commun… Donc, normalement, on est responsable de nos actes. Si on s'endette, on
va devoir payer nos créanciers, et tout ça. Là, les entités juridiques, en
particulier la société par actions, nous permettent d'avoir une forme de
responsabilité limitée, et ça, historiquement, c'est venu aussi avec une
exigence de publicité, en disant : Mais il nous faut certaines garanties
pour contrebalancer ça. Et donc je pense qu'il y a ce principe-là que, oui, en
se lançant dans la vie des affaires, on se résigne à perdre un peu de vie
privée.
M. Boulet : Eh que je
suis d'accord avec ça!
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Voilà. Donc, c'est...
M. Boulet : Non, mais… Je
suis en train de me dire : J'adhère complètement à votre propos. Il y a
comme une renonciation implicite à la protection de certains renseignements
pour le bénéfice de la protection du public puis pour permettre aussi à une
société de lutter contre l'évasion, la fraude, la corruption et autres
phénomènes qui nous préoccupent par ce projet de loi là. Écoutez...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
M. le ministre, oui, il reste 50 secondes.
M. Boulet : Donc, simplement,
Mme la professeure Cornut St-Pierre, j'ai bien apprécié votre mémoire, la
qualité de votre présentation puis votre propos, puis je suis content d'avoir
eu cette opportunité-là de converser avec vous, et au plaisir de vous revoir
bientôt. Merci.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
C'est moi qui vous remercie. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci pour l'échange. Nous poursuivons maintenant avec le député de Nelligan.
Vous disposez de 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. S'il vous plaît, m'arrêter à la cinquième minute parce que mon
collègue le député de Robert-Baldwin a des questions.
Professeure, merci beaucoup pour votre
présence, la qualité de votre mémoire. On voit que vous êtes vraiment une
personne dédiée à cette cause. Et j'ai bien lu <votre document...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
…
minutes.
M. Derraji : Merci,
Mme la Présidente. S'il vous plaît, m'arrêter à la cinquième minute parce que
mon collègue le député de Robert-Baldwin a des questions.
Professeure, merci beaucoup pour votre
présence, la qualité de votre mémoire. On voit que vous êtes vraiment une
personne dédiée à cette cause. Et j'ai bien lu >votre document Usages
et finalités des registres d'entreprises à l'ère numérique : de
l'efficience économique à la surveillance citoyenne des entreprises. Merci beaucoup.
C'est un document que je vais le garder, parce que vous savez quoi? J'ai
vraiment aimé votre angle : la surveillance citoyenne des entreprises. Et,
si j'ai bien compris, pour vous, une démarche d'ouverture, bien, ça inclut
aussi la société civile. Vous évoquez, dans votre lettre que vous avez adressée
aux membres de notre commission, le rôle des banques. Et, si on veut combattre
ce fléau, de blanchiment ou autre, bien, c'est un combat pas uniquement d'une
personne mais de toute une société : société civile, journalistes,
banques, gouvernements, tous les intervenants. Et c'est là où j'aimerais
vraiment que vous nous partagiez un peu les outils qu'on peut mettre.
J'ai deux questions. La première question,
ça concerne les ressources nécessaires, j'ai des inquiétudes, le rôle du Registraire
des entreprises. Premièrement, vous dites, vous mentionnez l'importance pour le
registraire de «compter sur un personnel qualifié disposant des ressources
nécessaires pour identifier les bénéficiaires ultimes d'entreprises aux
structures juridiques parfois excessivement complexes». Donc, comment, en tant
que législateurs, aujourd'hui, peut-on nous assurer que les ressources
nécessaires sont disponibles? Un, définir les ressources nécessaires. Et, selon
vous, est-ce qu'avec l'adoption du projet de loi le Registraire des entreprises
et les gens… sont habiles et ils ont l'ensemble des moyens de bien remplir leur
mandat?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Donc, le projet de loi, en ce moment, donne au… Qu'est-ce qu'on dit, là? Le registraire
va avoir les pouvoirs de prendre des moyens raisonnables pour s'assurer de la
fiabilité des renseignements qu'on lui soumet. Et donc ça, c'est très vague. Je
ne sais pas si on veut un niveau beaucoup plus détaillé dans la loi elle-même.
Donc, c'est un peu comme les critères de recherche. Des fois, pour garder une
loi simple, pour lui permettre d'évoluer en fonction de la pratique, on ne veut
pas forcément mettre tous les détails dans la loi. Mais je peux vous dire un
peu qu'est-ce que j'envisagerais ou qu'est-ce que d'autres organismes
envisagent en termes de moyens à mettre en oeuvre pour assurer une fiabilité
raisonnable des renseignements qui apparaissent au registre.
Bien, tout d'abord, je pense que ça prend
une vérification d'identité assez systématique, là, des individus qui sont
mentionnés au registre. Et ça, d'un certain point de vue, c'est étonnant que ce
ne soit pas déjà exigé, parce que, dans tout le secteur financier, par exemple,
on oblige les institutions à faire cette vérification-là. Dans toutes les
règles antiblanchiment d'argent, on force les acteurs du secteur privé à mettre
en place ces mesures de vérification là, que le gouvernement, jusqu'à
maintenant, ne s'est pas…
13 h (version révisée)
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...étonnant que ce ne soit pas déjà exigé parce que, dans tout le secteur
financier par exemple, on oblige les institutions à faire cette vérification-là.
Donc, toutes les règles anti-blanchiment d'argent, on force les acteurs du
secteur privé à mettre en place ces mesures de vérification là que le gouvernement,
jusqu'à maintenant, ne s'est pas imposées à lui-même, mais donc on comprend mal
cette incohérence-là entre ce qu'on impose à des institutions financières et ce
qu'on fait au Registraire des entreprises.
Et donc ça, ça pourrait être assez simple
à mettre en oeuvre. Je pense à... Bon, un exemple qu'on peut prendre en tête,
là, si on voyage et qu'on loue une chambre Airbnb à l'étranger, pour faire ça,
Airbnb va nous demander, à un moment, d'avoir une copie de notre passeport pour
s'assurer qu'on est bien la personne qu'on prétend être. Et donc, si une
entreprise comme ça est capable de le mettre en oeuvre, c'est assez simple, en
fait, comme utilisateur aussi à fournir comme preuve, je ne vois pas pourquoi
le registraire ne le ferait pas.
M. Derraji : Oui, et vous avez
très bien expliqué le tout avec, vraiment, éloquence, c'est que vous dites
que... vous mentionnez qu'il s'agit d'une avancée, mais vous invitez le gouvernement
à aller plus loin.
Il y a un autre point qui m'a interpellé :
«J'aimerais toutefois encourager le gouvernement à aller plus loin sur cette
voie, en donnant accès au registre des entreprises du Québec sous forme de
données ouvertes, c'est-à-dire de données numériques lisibles par ordinateur et
susceptibles d'être utilisées et rediffusées sans restriction.» Bon, vous
suivez nos travaux. L'utilisation des données ouvertes, vous savez les
problèmes liés aux données. J'en suis sûr et certain, plusieurs collègues vont
vous poser des questions. Bon, comment, un, s'assurer de la bonne diffusion de
l'information, deux, la protection de l'information?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
<Donc, si... >Donc, le format ouvert qu'on pourrait envisager...
Parce que, selon le projet de loi actuel, il y aurait des données consultables
et des données non consultables. Donc, le format de données ouvertes qu'on
pourrait mettre à disposition du public serait évidemment composé des données
consultables. Donc, l'idée serait qu'on ne puisse pas aller au-delà de ce qui
peut être consulté publiquement dans le registre.
Mais donc c'est qu'il y a déjà des modèles
qui existent, là. Donc, dans mon article, là, je parlais de l'ONG
OpenCorporates. Donc, si vous allez sur leur site, vous voyez un exemple de... Vraiment,
c'est un outil de recherche qui fait un croisement entre toutes les données...
tous les registres existants qui permettent l'utilisation de leurs données, si
bien qu'on est capable, d'une simple recherche, de voir, par exemple, qu'une
entreprise transnationale comme, on pourrait... Bombardier, par exemple, bien,
a des entités au Québec mais en a aussi en France, dans d'autres pays, et tout
ça, et là on est capable de voir un peu un portrait mondial de l'entreprise.
Donc, c'est à ça que ça sert, les données ouvertes, donc cette capacité-là de
beaucoup plus systématiquement faire des outils informatiques, créer les liens entre
les registres.
C'est ce qui permet aussi... Donc, il y a
des chercheurs au Royaume-Uni... Le Royaume-Uni offre le registre en données
ouvertes c'est ce qui permet aux chercheurs de constater que... plein de
lacunes au niveau de la fiabilité des <données...
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...informatiques,
créer les liens entre les registres.
C'est ce qui permet aussi... Donc, il y
a des chercheurs au Royaume-Uni... Le Royaume-Uni offre le registre en données
ouvertes c'est ce qui permet aux chercheurs de constater que... plein de
lacunes au niveau de la fiabilité des >données, par exemple qu'il y a
beaucoup d'utilisateurs qui seraient nés à des années qui n'ont aucun sens, là,
qui auraient maintenant 200 ans ou 150 ans, ou encore des enfants de
deux ans qui sont propriétaires de cinq sociétés par actions. Donc, ça permet
de faire ces recherches fines là que le registre lui-même ne permet pas
toujours de faire facilement.
M. Derraji : Merci,
professeure, mais je pense, mon collègue... Je pense que j'ai épuisé mes
5 minutes. Mon collègue va poursuivre avec vous. Merci encore une fois,
professeure.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous donnons la parole au député de Robert-Baldwin. Vous disposez de
4 min 50 s.
M. Leitão : Très bien, merci
beaucoup. Alors, bonjour. Bonjour, madame. Merci d'être là. Très intéressant,
votre travail, votre présentation, votre papier.
La question que j'avais a déjà été abordée
avant, de 25 %. Je pense qu'on parlera de ça quand le moment arrivera pour
faire l'étude détaillée du projet de loi, mais je pense qu'il y a là lieu à
amélioration, même si je comprends tous les enjeux d'harmonisation.
Mais là où j'ai trouvé très intéressant,
c'est quand vous parlez de contrôle versus qui en bénéficie vraiment. Et ça, je
pense que ça serait très utile si on pouvait y aller de façon un peu plus
précise. Parce que des fois vous pouvez peut-être, sur papier, être en contrôle
de l'entreprise mais peut-être ne pas nécessairement être la personne qui,
ultimement, va bénéficier monétairement de cette entreprise-là. Alors, comment
est-ce que vous voyez ça? Qu'est-ce qu'on pourrait ajouter sans trop alourdir
aussi le processus d'enregistrement mais qu'on puisse aller chercher aussi pas
seulement celui qui contrôle mais celui qui bénéficie vraiment de l'entreprise?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc là, vous me demandez un exercice que je n'ai pas fait, donc une
espèce de libellé comme ça, là. Je ne suis pas légiste, donc vous me prenez un
peu au dépourvu, mais on pourrait imaginer...
M. Leitão : De façon générale.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Donc, je prends le paragraphe 3°, là, la personne qui exerce le contrôle
de fait de l'entreprise. Donc, on pourrait imaginer un critère similaire, aussi
large mais qui... la personne qui, de fait, reçoit 25 % des bénéfices de
l'entreprise, par exemple. Et là peut-être ne pas chiffrer, peut-être dire :
Une part importante des bénéfices. Bon, là, les gens n'aimeront pas ça parce
que c'est très vague, mais donc de vraiment se référer plutôt à la réception de
bénéfices. Puis on pourrait compléter avec, par exemple, le paragraphe 4°
qui parle du commandité d'une société en commandite, bien, on pourrait
mentionner également le commanditaire qui <reçoit...
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...les gens n'aimeront pas ça parce que c'est très vague, mais donc de vraiment
se référer plutôt à la réception de bénéfices. Puis on pourrait compléter avec,
par exemple, le paragraphe 4° qui parle du commandité d'une société en
commandite, bien, on pourrait mentionner également le commanditaire qui >reçoit,
par exemple, 25 % et plus des profits.
On pourrait... (panne de son) ...fiducies,
parce que les fiducies ici ne sont pas nommément mentionnées, et mentionner que,
dans le cas d'une fiducie, en fait, on veut et l'administrateur de la fiducie
et le bénéficiaire. Donc, ce serait une façon vraiment, bien, juste d'insister
que ce n'est pas une simple question de contrôle. Parce que tous les critères,
en fait, renvoient à la capacité de contrôler, de prendre des décisions au nom
d'une entité juridique, d'une société ou d'une autre forme d'entité juridique.
Donc là, l'idée serait vraiment de dire : Mais c'est aussi la capacité de
tirer profit...
M. Leitão : Très bien.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
On veut avoir un «ou», oui, un ou l'autre.
M. Leitão : Oui, très
bien. Et je pense que cette question des fiducies aussi,<... je pense que>
c'est extrêmement important. Parce qu'on peut faire toutes ces démarches-là, et
puis, à la fin, bon, c'est une fiducie, mais qui contrôle ou qui bénéficie de
la fiducie, ça, ça devient un problème.
Une chose que vous avez mentionnée aussi,
je trouve que ça serait intéressant, c'est de trouver un moyen pour que le
registraire puisse bénéficier ou consulter les autres sources d'information qui
existent déjà, que ce soit à l'intérieur de l'État, Revenu Québec, par exemple,
où il y a déjà beaucoup d'informations, ou les institutions financières.
Maintenant, il y a toutes sortes de
questions qui se poseraient de protection des données personnelles, etc., mais
moi, je pense que c'est possible. Est-ce que vous avez vu ça ailleurs, où un
organisme qui semble au registraire peut avoir accès aux données du fisc, par
exemple, ou consulter le fisc?
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, ce à quoi je pense quand vous me posez la question, c'est un rapport
de Tax Justice Network sur comment vérifier ou assurer la fiabilité des données
d'un registre d'entreprises. Donc, <il ne parlait pas... >le
rapport ne parlait pas spécifiquement, là, des ententes entre parties du
gouvernement mais insistait plutôt sur les mesures informatiques, notamment
d'intelligence artificielle, le big data, à mettre en oeuvre. Donc, une
première étape, c'est de vérifier la fiabilité des données qui entrent, là, donc
on a parlé de vérification de l'entité.
La deuxième étape, c'est de
systématiquement croiser les données puis de développer des critères
d'identification du risque, ce que font déjà les institutions financières, en
fait, là, donc une sorte de «screening», là, puis on se rend compte qu'il y a
des motifs récurrents liés à des activités frauduleuses ou de blanchiment
d'argent, et d'être capable, une fois qu'on a identifié ces patterns-là, de les
identifier ailleurs, donc des choses qui ne semblaient pas a priori louches
mais qu'on se rend compte : O.K., il y a les mêmes genres de choses qui se
passent, donc on va examiner ça de plus près. Et donc là il y avait vraiment
une insistance sur les capacités informatiques qui devaient être développées
par le registraire pour être capable d'avoir automatiquement, là, un petit
drapeau rouge qui se lève en disant : Oups! <Cette...
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...a
priori louches mais qu'on se rend compte : O.K., il y a les
mêmes genres de choses qui se passent, donc on va examiner ça de plus près. Et
donc là il y avait vraiment une insistance sur les capacités informatiques qui
devaient être développées par le registraire pour être capable d'avoir
automatiquement, là, un petit drapeau rouge qui se lève en disant : Oups!
>Cette déclaration-là a plusieurs éléments qui nous permettent de croire
qu'il faudrait enquêter un peu plus profondément.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci pour l'échange, merci. Alors, nous poursuivons maintenant avec le député
de Rosemont. Vous disposez de 2 minutes 45 secondes.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Ne partez pas le chrono tout de suite. Avec le consentement de mes
collègues, est-ce que je peux récupérer le temps de ma collègue de la troisième
opposition, qui semble nous avoir quittés?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Écoutez, j'ai déjà donné une minute au parti avant vous.
• (13 h 10) •
M. Marissal : Alors, il m'en
reste une.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
J'allais vous l'accorder de toute façon. Allez-y.
M. Marissal : Les grands
esprits se rencontrent. Merci, Mme la Présidente. Mme Cornut St-Pierre,
merci d'être là. J'ai beaucoup apprécié votre présentation, votre mémoire, c'est
clair, ça va droit au but. Vous savez peut-être ce que je faisais dans la vie
avant, alors, comme journaliste, je ne peux qu'être d'accord avec la
transparence, et la plus grande des transparences. Je veux dire, pour moi, ce n'est
pas quelque chose qu'on devrait négocier.
Et j'ai bien noté toutes les exclamations
enthousiastes du ministre à chacune de vos propositions, il y a un astérisque à
côté de chacune de celles-ci. Et suivra vraisemblablement des amendements,
même, puisque le ministre a exprimé une ouverture vraiment très intéressante à
vos propositions, et j'en prends bonne note. Je suis sûr que mes collègues sont
à la même place que moi là-dessus.
Rapidement, parce que je ne vais quand
même pas brûler tout le temps que je viens de gagner, pouvez-vous nous parler
un peu de ce qui est arrivé au Luxembourg, où vous avez parlé d'un fiasco assez
total, me semble-t-il? Je vous écoute.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Oui. Donc, vraiment, la semaine dernière, là, je pense qu'il y a une série
d'articles qui ont été publiés à partir du 8 février, donc c'est dans la
série des différents «leaks» ou les différents scandales, là, liés à des fuites
de données. Donc là, celui-là, ils l'ont appelé OpenLux. Et donc c'est vraiment
une enquête sur les registres de bénéficiaires ultimes, et en partie celui du Luxembourg,
pour se rendre compte que, dans toutes les entreprises qui sont enregistrées au
Luxembourg, il y en a à peu près 50 % qui respectent leurs obligations en
vertu de la loi mais qui ne déclarent aucun bénéficiaire ultime.
Et donc c'est qu'on voit, depuis l'entrée
en vigueur de ces normes-là sur les bénéficiaires ultimes... Je crois qu'on a
identifié un peu le même phénomène en Grande-Bretagne. Il y a une capacité des
entreprises qui ne souhaitent pas divulguer l'information de se restructurer
légèrement de façon à contourner les seuils qui sont mis en place.
Et donc ça, c'est tout le problème, en
fait, des seuils. Un seuil chiffré, c'est à la fois quelque chose qu'on aime
parce que c'est clair, les gens n'ont pas besoin d'engager, par exemple, un
juriste qui va leur faire un long mémo sur, bien, qu'est-ce que ça signifie, ce
critère-là. Donc, c'est simple, mais c'est aussi un peu une recette pour
contourner le seuil. Donc, à partir du moment où on a quelque chose de très <clairement...
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
...c'est clair, les gens n'ont pas besoin d'engager, par exemple, un juriste
qui va leur faire un long mémo sur, bien, qu'est-ce que ça signifie, ce
critère-là. Donc, c'est simple, mais c'est aussi un peu une recette pour
contourner le seuil. Donc, à partir du moment où on a quelque chose de très
>clairement délimité, on peut se positionner juste à côté, puis là on n'est
plus inquiété. Et donc c'est cet équilibre-là qui est délicat.
Je sais que les organismes les plus
actifs, là, par exemple Tax Justice Network, eux proposent, finalement, de ne
pas avoir de seuil, de dire : Le seuil, en fait, c'est : dès qu'il y
a une action, vous êtes un bénéficiaire ultime. Ça, c'est la seule chose qui
nous garantit qu'on ne pourra pas contourner ça, mais, bon, après ça, ça peut
être... ça finit par faire beaucoup de gens qui vont être concernés par ça. Et
donc, souvent, un compromis serait de dire : Bon, on commence par
10 %, puis on voit comment ça va avec ça, puis peu à peu peut-être qu'on
baisse le seuil.
Déjà, 10 %... Bon, quelle est
différence entre 25 % et 10 %? Bien, 10 % devient techniquement
plus compliqué et plus coûteux à contourner. Ce n'est pas impossible, ce n'est
jamais impossible, mais il va falloir mettre en oeuvre des structures encore
plus complexes pour contourner le 10 %. Donc, on imagine qu'il y a moins
de cas où ça va valoir la peine de le faire, et donc moins de gens vont le
faire.
M. Marissal : Je comprends
bien, je comprends bien. Je vous arrête là-dessus, madame. Merci beaucoup de la
présentation. Je pense qu'on a pris des notes, et des notes fort utiles pour la
suite des choses. Je vous remercie beaucoup.
Mme Cornut St-Pierre (Pascale) :
Bien, je vous remercie pour votre attention.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, merci. Merci, Mme Cornut St-Pierre. C'est tout pour le moment.
Merci pour votre grande contribution à l'avancement des travaux de la commission.
Alors, écoutez, compte tenu de l'heure,
nous suspendons les travaux jusqu'à 15 h 30. Alors, merci.
(Suspension de la séance à 13 h 14)
15 h 30 (version révisée)
(Reprise à 15 h 30)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Bonjour. Alors, bienvenue à la Commission de l'économie et du travail.
La commission est réunie virtuellement
afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur
le projet de loi n° 78, Loi visant principalement à
améliorer la transparence des entreprises. Cet après-midi nous
entendrons les groupes suivants : la Chambre des notaires du Québec, le
collectif Échec aux paradis fiscaux et la Chambre des huissiers de justice du
Québec.
Alors, nous accueillons immédiatement,
dans un premier temps, la Chambre des notaires du Québec. Je vous invite, Mme Potvin
et M. Amabili-Rivet, à bien vous présenter, à dire votre titre et ensuite
de commencer votre exposé. Vous savez que vous disposez de 10 minutes.
Alors, la parole est à vous.
(Visioconférence)
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Bonjour. Donc, Raphaël Amabili-Rivet, notaire à la direction des Services
juridiques et Relations institutionnelles de la Chambre des notaires du Québec.
Mme Potvin (Hélène) :
Alors, bonjour. Hélène Potvin, notaire, présidente de la Chambre des notaires
du Québec.
Alors, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes,
MM. les députés, au nom de la Chambre des notaires du Québec, je vous remercie
de votre invitation à cette consultation particulière portant sur le projet de
loi n° 78, Loi visant principalement à améliorer la
transparence des entreprises.
Nous tenons tout d'abord à dire que nous
appuyons et nous accueillons favorablement ce projet de loi. Il était
nécessaire afin que le Québec emboîte le pas aux autres provinces canadiennes
et à certains pays de l'Union européenne en matière de transparence des
entreprises, notamment, dans le cadre de la lutte contre le blanchiment
d'argent.
Nous comprenons par la teneur du p.l. n° 78
que la vision du ministre est celle de la transparence absolue du registre des
entreprises au Québec. En effet, le projet de loi propose de rendre accessibles
au public les renseignements et les informations portant sur le bénéficiaire
ultime d'un assujetti. Selon nous, le fait d'opter pour cette solution
extrêmement forte en termes de la transparence entraîne plusieurs questions et
préoccupations qui ont été laissées sans réponse par le projet de loi. À cet
égard, je vais m'attarder, aujourd'hui, à vous présenter les principales
recommandations que nous avons proposées dans notre mémoire pour alimenter la
réflexion dans le cadre de l'étude du p.l. n° 78.
D'abord, nous croyons essentiel que le
projet de loi vienne préciser quels sont les effets et conséquences juridiques
attendus du régime des bénéficiaires ultimes. Il s'agit de notre
recommandation 4 de notre mémoire. En effet, nous comprenons que le régime
proposé par le p.l. n° 78 vise en quelque sorte à intégrer une vision
fiscale du régime des bénéficiaires ultimes et du contrôle de fait d'un
assujetti au sein du registre des <entreprises...
Mme Potvin (Hélène) : ...
notre
recommandation 4 de notre mémoire. En effet, nous comprenons que le régime
proposé par le p.l. n° 78 vise en quelque sorte à intégrer une vision
fiscale du régime des bénéficiaires ultimes et du contrôle de fait d'un
assujetti au sein du registre des >entreprises au Québec.
Il y aura toutefois des conséquences juridiques qui découleront du fait que ces
informations plus fiscales soient rendues accessibles au public et lui soient,
du même coup, opposables en étant publiées au registre des entreprises. On peut
ainsi légitimement se demander quel sera l'impact pour le public qui
constatera, en consultant le registre des entreprises, que la propriété
effective et la propriété juridique d'un assujetti sont différentes. Le
bénéficiaire ultime d'un assujetti peut, en effet, n'avoir aucun lien juridique
avec ce dernier. Or, est-ce à dire que, si l'assujetti commettait une faute
contractuelle grave, le bénéficiaire ultime pourrait être tenu responsable des
actions de l'assujetti? Si oui, dans quelles circonstances?
On comprend donc qu'il y a d'importantes
zones d'ombre sur l'application pratique des mesures proposées par le p.l. n° 78, d'autant plus qu'il faut se rappeler que, pour des raisons
qui peuvent être tout à fait légitimes, on peut souhaiter limiter l'accès à de
telles informations. Cela pourrait ainsi créer certains effets négatifs,
notamment, si on se met dans la peau d'entrepreneur. Je vous partage deux
exemples. Une personne physique, dont le plan d'affaires est d'acquérir des
participations dans des sociétés concurrentes, ne sera plus en mesure d'assurer
une certaine discrétion dans le dévoilement des informations stratégiques, car
ces informations seront connues de tous. La croissance de son entreprise
pourrait être ainsi compromise. Autre exemple. Tous les proches d'une personne
physique auront accès à des informations sensibles quant à certains intérêts
qu'elle possède dans une entreprise, ce qui peut causer des conflits familiaux
ou des difficultés interpersonnelles importantes.
Pour illustrer à nouveau la
difficulté juridique d'application de ces mesures, prenons un dernier exemple
qui pourrait, cette fois, avoir des effets plus positifs quand on se met dans
la peau du public en général. On pense ici à la pratique des coquilles vides, dans
le domaine de la construction, pour laquelle le p.l. n° 78 n'apporte pas
plus de réponses. Comme le rappelait récemment l'émission Enquête, il y
aurait une pratique d'usage au Québec, dans le domaine de la construction, qui
consiste à créer des entités indépendantes ou coquilles corporatives pour
développer des projets domiciliaires. Ces coquilles corporatives disparaissent
aussitôt que le projet immobilier est complété. Ce stratagème, par ailleurs
tout à fait légal, amène plusieurs interrogations lorsque l'acheteur se
retrouve sans recours devant une telle entité vidée complètement de son capital
et incapable d'assumer ses responsabilités. En rendant les informations du
bénéficiaire ultime accessibles au public, <le p.l. n° 78...
Mme Potvin (Hélène) :
...
Ce stratagème, par ailleurs tout à fait légal, amène
plusieurs interrogations lorsque l'acheteur se retrouve sans recours devant une
telle entité vidée complètement de son capital et incapable d'assumer ses
responsabilités. En rendant les informations du bénéficiaire ultime accessibles
au public, >le p.l. n° 78 ouvre la
porte à ce qu'un acheteur ait un recours direct contre le bénéficiaire ultime
de cette coquille vide. Cela pourrait donc être une avancée majeure pour la
protection du public. Cela dit, comme ce genre de situation est complexe et
n'est pas spécifiquement encadré par le projet de loi, des questions demeurent.
Il serait intéressant que le p.l. n° 78 s'y penche.
En résumé à cette recommandation principale, nous croyons que le p.l. n° 78 doit être adapté afin qu'on puisse mesurer clairement
les effets juridiques attendus quant à l'opposabilité aux tiers des
renseignements et des informations concernant le bénéficiaire ultime d'un
assujetti.
Je souhaite maintenant vous entretenir de l'importance
du règlement d'application. On note que des éléments essentiels ne sont pas
traités au sein du p.l. n° 78. Ces éléments devraient
donc apparaître éventuellement au sein d'un règlement d'application. Nous
aurions souhaité que les dispositions de ce règlement d'application se
retrouvent au sein du p.l. n° 78. D'autant plus que
le projet de loi modifie déjà certaines dispositions du règlement d'application
de la loi sur la publicité légale. Pourquoi ne pas les avoir intégrées au p.l. n° 78, donc, les éléments qui doivent se retrouver au sein
du règlement?
Plusieurs questions d'application pratique
découlent de cette absence de règlement d'application. Les recommandations 1
à 3 de notre mémoire traitent d'ailleurs de ces questions et amènent certaines
pistes de solution pour y répondre. D'abord, la question des fiducies doit être
traitée et précisée. À l'heure actuelle, il manque d'éléments au sein de la loi
pour être en mesure de déterminer spécifiquement quels types de fiducies à
caractère commercial ont réellement l'obligation de s'immatriculer au sens de
la loi. Le p.l. n° 78 devrait répondre à cette
imprécision.
De plus, il serait essentiel de prévoir,
dans le règlement d'application, les conditions permettant de déterminer, en
toutes circonstances, le bénéficiaire ultime d'une telle fiducie. On le sait,
et nous l'avons soulevé à plusieurs occasions, la pratique tend à démontrer
qu'il peut être particulièrement complexe de déterminer le bénéficiaire d'une
fiducie. Nous pourrons y revenir dans le cadre de l'échange des questions si
vous le souhaitez.
Une autre question fondamentale à laquelle
nous sommes confrontés est celle de savoir ce que le législateur entend par
l'expression «contrôle de fait». Cette notion est étrangère au droit québécois,
mais est pourtant au coeur du p.l. n° 78 et du régime
du bénéficiaire ultime. Il serait ainsi tout indiqué de définir clairement
cette expression afin qu'elle puisse être bien comprise par le public et par
les juristes qui doivent <conseiller...
Mme Potvin (Hélène) : ...
Cette
notion est étrangère au droit québécois, mais est pourtant au coeur du p.l.
n°
78 et du régime du bénéficiaire ultime. Il serait
ainsi tout indiqué de définir clairement cette expression afin qu'elle puisse
être bien comprise par le public et par les juristes qui doivent >conseiller
et guider leurs clients.
Enfin, une autre question fondamentale
pour le public, quelle mesure concrète le législateur entend-il mettre en
oeuvre afin de protéger les renseignements personnels qui apparaîtront
désormais au registre des entreprises? Nous comprenons que le registre
comportera désormais davantage de renseignements sur l'assujetti, mais aussi
sur les personnes physiques qui y gravitent, comme leurs noms, domiciles et
dates de naissance. Ces informations sont sensibles et doivent être protégées
afin d'éviter qu'elles soient utilisées de façon à porter atteinte à la
personne qui en est titulaire. Il sera donc important de répondre à cet enjeu
afin qu'il y ait un équilibre entre la transparence des entreprises et la
protection des renseignements personnels.
• (15 h 40) •
En terminant, nous comprenons que le p.l. n° 78
permet de replacer le Québec sur l'échiquier international à titre de
juridiction complètement transparente à l'égard de son registre des
entreprises. Si cela amène de nombreux avantages, vous remarquerez que les
inconvénients et répercussions négatives semblent tout aussi présents. En fait,
après l'analyse du p.l. n° 78, nous restons avec beaucoup de questions qui
sont laissées sans réponse. Il demeure essentiel que le législateur les étudie
sérieusement et y apporte les précisions que le public est en droit d'attendre.
Nous sommes, bien sûr, disponibles pour apporter tout complément d'information
dans le cadre des échanges avec les membres de la commission. Et soyez
d'ailleurs assuré, M. le ministre, de toute notre collaboration pour la suite
de ce dossier. Alors, je vous remercie de votre attention.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci, Mme Potvin, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la
période de questions. M. le ministre, la parole est à vous. Vous disposez de
16 min 30 s
M. Boulet : ...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Votre micro.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Merci à la Chambre des notaires. Me Rivet, Me Potvin,
bienvenue à notre commission parlementaire. Félicitations pour la qualité du
mémoire puis la concision de vos recommandations.
Évidemment, ayant bénéficié d'une
formation en droit, je comprends bien le concept d'opposabilité aux tiers, là,
même si on veut rentrer dans des nuances, là, quand même assez fondamentales.
Mais clarifier les effets juridiques de l'opposabilité aux tiers, évidemment,
il y a beaucoup de paramètres déjà établis par les décisions des tribunaux au
Québec. Mais quand vous référiez aux trois exemples, c'est sûr que le troisième
exemple, il est souvent utilisé. Bon, on en a parlé dans les médias, à
Radio-Canada, l'entrepreneur qui se sert d'une coquille <vide puis...
M. Boulet : ...
déjà
établis par les décisions des tribunaux au Québec. Mais quand vous référiez aux
trois exemples, c'est sûr que le troisième exemple, il est souvent utilisé.
Bon, on en a parlé dans les médias, à Radio-Canada, l'entrepreneur qui se sert
d'une coquille >vide puis... Ça, c'est certainement un avantage marqué
que le projet de loi n° 78 va conférer au public québécois, leur
permettant de détecter ou de démasquer la personne qui est derrière ce que vous
appelez la coquille vide, là, ou la société-écran. Et donc il y aurait un
recours potentiel contre le bénéficiaire ultime.
C'est sûr qu'il y a des exemples, cependant,
dont il faut tenir compte, là. Vous parliez de quelqu'un qui acquiert, par
exemple, 5 %... bien, 28 % du capital-actions d'une entreprise puis
qui le fait dans un contexte d'expansion. Ce que vous considérez, c'est que ça
peut avoir pour effet de révéler ses plans de croissance, et ça, ça serait un
effet indésirable de la mise en application de tout le volet transparence
corporative du p.l. n° 78. Mais évidemment le seuil à 25 % limite
considérablement l'incidence de l'exemple que vous avez soulevé. <Êtes-vous...
>Est-ce que vous comprenez mon point? Est-ce que vous auriez un
commentaire, Me Potvin, à faire sur cet exemple-là?
Mme Potvin (Hélène) :
Oui, je comprends. À savoir est-ce que ça aurait une incidence, je ne suis pas
en mesure... Les exemples que l'on a pris, c'était pour essayer d'illustrer les
conséquences qui découlent, justement, de cette transparence-là. Donc, il y a...
il peut y avoir des conséquences stratégiques, des conséquences de croissance
d'entreprise. Donc, de les mesurer... Alors, c'est ce qu'on essayait d'apporter
par ces exemples-là. Et à savoir si le pourcentage peut avoir une incidence sur
les conséquences, bien, je... On a déjà fait des travaux là-dessus. Peut-être
Raphaël peut compléter.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Oui, en fait, on a entendu les autres intervenants ce matin qui
s'interrogeaient. Est-ce qu'on devrait aller vers le 10 %, vers le
25 %? On n'a pas été jusqu'à traiter de cet élément-là spécifiquement dans
notre mémoire pour la simple et bonne raison qu'on voyait très bien que c'était
pour s'arrimer au régime fédéral. La question qu'on se pose, à brûle-pourpoint,
là, sur la vision ou la volonté de diminuer à 10 %, on s'interroge si ça
ne pouvait pas mener à une forme d'exode des sociétés par actions qui sont
incorporées sur les lois provinciales vers le régime fédéral qui pourrait être
plus souple. Donc, je pense, ça, c'est un élément sur lequel réfléchir.
M. Boulet : Ah!
Me Rivet, puis je le comprends, puis il y a un groupe qui va venir demain,
qui va nous dire : Le projet de loi peut avoir cette répercussion-là, là,
de provoquer un certain exode, là, des <entreprises...
M. Amabili-Rivet
(Raphaël) : ...provinciales vers le régime fédéral qui pourrait être
plus souple. Donc, je pense, ça, c'est un élément sur lequel réfléchir.
M. Boulet : Ah!
Me Rivet, puis je le comprends, puis il y a un groupe qui va venir demain,
qui va nous dire : Le
projet de loi peut avoir cette
répercussion-là, là, de provoquer un certain exode, là, des >entreprises
qui vont éviter de venir faire affaire au Québec en raison de l'obligation de
divulguer l'identité des bénéficiaires ultimes, mais il y a un prix à payer
pour la transparence. Puis le but fondamental de ce projet de loi là, c'est de
protéger la population et de permettre de démasquer les personnes qui se servent
notamment des sociétés-écrans pour faire de l'évasion fiscale.
Je l'ai dit ce matin, selon les
estimations de Revenu Québec, c'est à peu près 3,8 milliards que, comme
société, nous échappons en raison de stratagèmes divers. Moi, je pense qu'il y
a un prix à payer. Puis l'exemple, Me Potvin, je le comprends, là,
croissance de son entreprise, mais le risque est tellement faible. Puis, à un
moment donné, il faut faire la balance des inconvénients. Puis je pense que
l'opacité nous coûte beaucoup plus cher que la transparence. Et c'est l'avenue
que nous souhaitons emprunter. L'autre exemple que vous utilisiez, c'est les
conflits familiaux. J'aurais à peu près les mêmes observations, là, même si je
ne veux pas aller dans ce détail-là.
Avant d'aller à vos autres points
soulevés, dans votre mémoire, vous dites, bon, ça serait peut-être intéressant
de préciser ce qui peut, à l'égard des assujettis, être un renseignement
personnel qui peut constituer une menace sérieuse à leur sécurité. Je voulais
juste vous informer que l'article 100, tel que libellé, permet à une
personne assujettie, parce que votre mémoire faisait comme nous laisser croire
que ce n'était pas possible de le faire, mais un assujetti peut faire une
demande, en vertu de l'article 100 de la Loi sur la publicité légale des entreprises,
au registraire en disant : Je ne veux pas que tel renseignement soit
accessible au public parce que pouvant constituer une menace sérieuse à ma
sécurité. Puis tout à l'heure on me confirmait qu'il y avait eu 55 cas de
cette nature-là dans les deux dernières années. Ça fait que je le dis,
Me Potvin, parce que ça me permet aussi de donner l'information à
l'ensemble des personnes qui sont à notre commission parlementaire.
La fiducie à caractère commercial, je
comprends, mais c'est beaucoup par opposition à la fiducie familiale. La
fiducie familiale n'est pas soumise à la loi. La fiducie à caractère commercial
l'est. Je n'ai pas vérifié s'il y avait eu des conflits ou des décisions de
tribunaux pour tracer la ligne, mais j'ai bien compris votre point. Ça ne nous
apparaissait pas comme étant un enjeu parce qu'il y avait clairement une
opposition puis une ligne de démarcation entre les deux.
Le règlement <d'application...
M. Boulet : ...vérifié
s'il y avait eu des conflits ou des décisions de tribunaux pour tracer la
ligne, mais j'ai bien compris votre point. Ça ne nous apparaissait pas comme
étant un enjeu
parce qu'il y avait clairement une opposition puis une
ligne de démarcation entre les deux.
Le
règlement >d'application,
je vous avoue que, dans une perspective de protection des renseignements
personnels, il y en a qui vont plaider que la protection des renseignements
personnels est incompatible avec l'adoption d'une loi de cette nature-là. Mais
moi, à votre propos, est-ce que ça ne devrait pas être dans la loi plutôt que
le règlement, je suis assez sensible à ça parce que ce qui est clair, pour moi,
c'est qu'une date de naissance, ce n'est pas accessible. Une adresse
personnelle, on ouvre une option qui est intéressante. L'assujetti peut donner
une adresse professionnelle et, le cas échéant, protège son adresse
personnelle. La personne mineure, ce n'est pas un renseignement accessible. La
personne dont un des renseignements, on vient d'en parler, peut constituer une
menace à sa sécurité, il y a un certain nombre de renseignements personnels puis,
pour fins de meilleure compréhension, bien, on va certainement en discuter avec
nos collègues, là, lors de l'étude détaillée, article par article, pour bien
identifier les paramètres, là, de ce que constitue un renseignement personnel.
Puis j'apprécie cette précision-là que vous apportez.
Un autre point. Dans votre mémoire, vous
dites corriger une coquille apparaissant à 98, alinéa... paragraphe 15.
J'ai vérifié, puis il n'y en a pas, de coquille. Vous allez voir que, quand on
dit de remplacer, c'est parce qu'à l'article 15, on disait remplacer,
partout où ils se trouvent, «les nom et domicile» par «nom, domicile et date de
naissance». À 98, 15°, ce n'était pas «nom et domicile», il y avait une
virgule entre «nom» et «domicile». Donc, on n'a pas changé. Il ne fallait pas
le changer parce que ce n'était pas tout à fait le même libellé. Je voulais
juste, Me Rivest puis Me Potvin, le préciser pour... Puis, si jamais
vous considérez qu'il y a d'autres coquilles, bien, je sais que vous
n'hésiterez pas à le faire.
Contrôle de fait, Me Potvin, moi, je
l'ai vu dans la loi, bon, dans la loi fiscale, la Loi sur les impôts du Québec,
je pense, c'est... on me disait 21.25. On réfère à ce concept-là, de
contrôle de fait. Mais si je vous demandais de me définir les tenants et
aboutissants de ce qu'est un contrôle de fait, qu'est-ce que vous me diriez?
• (15 h 50) •
Mme Potvin (Hélène) :
C'est une question piège, que vous me posez, M. Boulet?
M. Boulet : Non, c'est
une question d'ami, Me Potvin, c'est une question de... Tu sais, c'est
parce que vous dites : On aurait peut-être intérêt à le préciser.
Évidemment, on a voulu définir le bénéficiaire ultime de la façon la plus
précise possible, mais on ne sera jamais complètement à l'abri des problèmes
d'interprétation ou <d'application, mais...
M. Boulet : ...Non,
c'est une question d'ami, Me Potvin, c'est une question de... Tu sais,
c'est parce que vous dites : On aurait
peut-être intérêt à le
préciser. Évidemment, on a voulu définir le bénéficiaire ultime de la façon la
plus précise possible, mais on ne sera jamais complètement à l'abri des
problèmes d'interprétation ou >d'application, mais vous êtes le deuxième
groupe à référer à cette notion-là. On s'est inspiré de lois en matière
fiscale. Mais est-ce que vous avez soit des exemples, ou soit un projet de définition,
ou des critères?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Si je peux me permettre, M. le ministre.
Mme Potvin (Hélène) :
Oui, Raphaël.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
La vision de contrôle de fait, comme celle de bénéficiaire ultime, c'est deux
notions qui sont introduites par le p.l. n° 78 ou
reprises. On faisait bien référence dans notre mémoire également à
l'article 21.25 de Loi sur les impôts. Mais comme c'est des éléments qui
sont au coeur de l'application du projet de loi n° 78, notre prétention, c'est
qu'elles doivent être bien comprises et circonscrites...
M. Boulet : Oui, je
comprends.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
...pour le public, pour les entrepreneurs également. On voit que c'est des
notions qui puisent leur source dans une vision de «common law», dans une
vision fiscale. Et c'est surtout le fait que le contrôle de fait réfère à des
circonstances et des éléments factuels qui ne sont pas nécessairement liés à un
contrôle juridique de l'entité. Et c'est dans cette perspective-là, sans amener
une définition ou des critères précis, comme on réfère davantage à des éléments
circonstanciels, bien, on pense que ça devrait être bien compris ou, si c'est
vraiment un élément qui est au coeur du p.l. n° 78,
que ce soit bien décrit.
M. Boulet : Je vous
dirais, sur ce point-là aussi, je suis assez sensible, tu sais, parce qu'il y a
des personnes qui ne sont ni détenteurs ni bénéficiaires de quelque action que
ce soit dans le capital-actions et qui contrôlent, qui décident, qui câlent les
shots, là, comme on dit, ou qui, pour des raisons x, y ou z, là, ont peut-être
été déclarés coupables d'une infraction x, y ou z. Ils ne peuvent pas être
détenteurs d'actions ou, dans un contexte purement familial, il peut y avoir
quelqu'un qui contrôle le processus décisionnel de facto, comme les tribunaux
disent, sans détenir ou sans être bénéficiaire de quoi que ce soit.
On va certainement y penser en équipe, là,
avec nos collègues lors de l'étude détaillée. Mais moi, j'ai en tête, là, des
décisions de tribunaux qui délimitent bien les tenants et aboutissants de ce
qu'est un contrôle de fait. Je ne sentais pas nécessairement le besoin
d'alourdir le texte, mais je pense que ça peut être bénéfique. Mais c'est sûr
que, quand on met «contrôle de fait», c'est qu'on veut avoir une définition de «bénéficiaire
ultime» la plus englobante possible pour éviter que trop de personnes se
faufilent dans les craques et évitent d'être... évitent qu'on ait à divulguer
leur identité auprès du Registraire des entreprises.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Je ne sais pas si vous me permettez, M. le ministre.
M. Boulet : Oui.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Il y avait un élément aussi, dans la documentation budgétaire, qui référait,
quand on parlait de contrôle de fait, à une influence directe ou <indirecte...
M. Boulet : ...
et
évitent d'être... évitent qu'on ait à divulguer leur identité auprès du Registraire
des entreprises.
M. Amabili-Rivet
(Raphaël) : Je ne sais pas si vous me permettez, M. le ministre.
M. Boulet : Oui.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Il y avait un élément aussi, dans la documentation budgétaire, qui référait,
quand on parlait de contrôle de fait, à une influence directe ou >indirecte,
mais voyez-vous...
M. Boulet : Exact, oui.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Mais, déjà là, on a un peu plus d'information dans la documentation budgétaire
sur l'intention derrière cette notion qu'il y en a dans le projet de loi n° 78, selon notre compréhension à nous.
M. Boulet : C'est un
excellent commentaire, Me Rivet. Dernière affaire, vous dites :
«Reconnaître le rôle pouvant être joué par le notaire afin d'assister le registraire
[du REQ] dans sa recherche d'information de qualité à l'égard notamment du
nouveau régime du bénéficiaire ultime». Si vous aviez une suggestion maîtresse
à nous faire, quelle serait-elle?
Mme Potvin (Hélène) : Eh
bien, le notaire accompagne ses clients. Alors, c'est certain que le gouvernement
pourrait compter sur l'apport des notaires pour vérifier, parce qu'ils
vérifient déjà l'identité, donc vérifier aussi la qualité de bénéficiaire
ultime, donc les définitions qui se retrouvent dans les actes constitutifs de
fiducies, par exemple. Donc, il pourrait vraiment jouer un rôle de premier plan
sur la qualité des renseignements qui se retrouveront, là, au registre des
entreprises.
M. Boulet : O.K. C'est un
bon point. O.K. Bien, écoutez, pour conclure, sachez que les notaires sont <des...
>et demeureront des partenaires privilégiés dans l'élargissement du
mandat qu'aura le registraire en vertu du p.l. n° 78.
Et je ne peux, encore une fois, que vous remercier. Puis si jamais on a des précisions
quant à certains points de votre mémoire, on aura peut-être des communications
dans l'avenir, mais bravo! Beau travail. Puis merci d'être là. Merci de votre
mémoire. À bientôt.
Mme Potvin (Hélène) :
Merci beaucoup, M. le ministre. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci pour l'échange. Nous poursuivons maintenant avec le député de Nelligan.
Vous disposez de 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme
la Présidente. Je dispose de la moitié de 11 minutes. N'oubliez pas mon
collègue de Robert-Baldwin, s'il vous plaît.
Merci pour la qualité du mémoire et les
recommandations, dans le même sens que le ministre. Au-delà du rôle que la
Chambre des notaires et des notaires en général que vous pouvez jouer, au
niveau... J'aimerais bien revenir sur le registre lui-même. Est-ce qu'en date
d'aujourd'hui vous pensez que le registre et les ressources humaines qui
existent au registre sont capables de livrer la marchandise? Donc, si c'est
oui, tant mieux, si c'est non, c'est quoi, les choses qu'on devrait améliorer
ou ajouter pour que le registre puisse jouer ce rôle que le législateur
s'apprête à lui donner avec le projet de loi n° 78?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Si je peux me...
Mme Potvin (Hélène) : Oui,
vas-y, Raphaël.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Si je peux me permettre de répondre, peut-être deux éléments là-dessus, en lien
avec une intervention que le ministre a faite un peu plus tôt. C'est qu'avec le
projet de loi n° 78 il y a une forme de changement de paradigme où, alors
qu'on visait <strictement des...
M. Derraji : ...
le
législateur s'apprête à lui donner avec le projet de loi
n°
78?
M. Amabili-Rivet
(Raphaël) : Si je peux me...
Mme Potvin (Hélène) :
Oui, vas-y, Raphaël.
M. Amabili-Rivet
(Raphaël) : Si je peux me permettre de répondre, peut-être deux
éléments là-dessus, en lien avec une intervention que le ministre a faite un
peu plus tôt. C'est qu'avec le projet de loi n° 78 il y a une forme de
changement de paradigme où, alors qu'on visait >strictement des
assujettis, donc entreprises, on vient maintenant élargir le spectre sur les
personnes physiques qui gravitent autour de ces entreprises-là. Donc, pour
répondre à votre question, il faut évaluer si le régime actuel, là, je parle
plus au niveau des fondements, moins sur l'application pratique, mais si le
régime actuel est adapté à cette nouvelle réalité là d'élargissement vers les
personnes physiques qui gravitent autour des assujettis.
Quand on parlait dans notre mémoire un peu
plus tôt de l'article 100 de la Loi sur la publicité légale des
entreprises, c'est un peu en ce sens-là qu'on faisait notre intervention pour
la protection des renseignements personnels qui peuvent apparaître au registre.
Bien sûr, l'assujetti peut faire une demande au registre des entreprises, mais,
si c'est une personne physique dont l'information apparaît au registre des
entreprises, devrait-elle, elle aussi, être en mesure de pouvoir s'adresser au
registre des entreprises pour faire un ajustement?
M. Derraji : Est-ce que,
juste pour le bénéfice de nous tous, c'est là où vous mentionnez que c'est une
menace sérieuse à la sécurité?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
C'est ça. Cette expression-là est reprise dans la loi, mais on s'interroge si
ça ne devrait pas être un critère un peu plus... «Menace sérieuse», c'est très,
très large. Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir une vision un peu plus précise
sur ce qu'on entend ici?
M. Derraji : Mais qu'est-ce
que vous proposez? À votre niveau, si c'est vous, là, maintenant, vous proposez
quoi?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Au lieu d'une «menace sérieuse»?
M. Derraji : Oui.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Bien, en fait, c'est de voir jusqu'à quel niveau «menace sérieuse» permet de
répondre à la préoccupation de la protection des renseignements personnels.
M. Derraji : O.K.,
excellent. Tout à l'heure, Me Potvin, vous avez évoqué quelque chose qui m'a un
peu, je ne veux pas utiliser le mot, mais je n'ai pas d'autre synonyme, choqué,
«sociétés concurrentes». Et je comprends qu'au niveau fusion-acquisition il y a
de la recherche. Et ça, ça m'inquiète vraiment. Vous êtes la première à
mentionner ce point. Pouvez-vous juste le clarifier? Parce que je voulais
saisir la menace derrière. Et j'ai plein, plein, plein de contacts que c'est
ça, leur vie, c'est comme ça que... On veut avoir des entrepreneurs qui voient
grand, hein, mais vous êtes en train de nous dire que ça risque d'avoir un
impact.
Mme Potvin (Hélène) :
Bien, c'est-à-dire, si on connaît le plan d'affaires, le plan d'affaires est
mis à la vue de tous, bien, à ce moment-là, le plan stratégique, donc, qui peut
être fait par des acquisitions, des prises de participation minoritaire...
Parce que, vous savez, dans certains créneaux, le nombre de joueurs est limité,
le nombre d'entreprises qui... Alors donc, ça peut être une façon de mettre la
main sur certaines entreprises. Donc, on acquiert des participations
minoritaires, <ou des... >avec des droits pour acheter des autres
participations plus tard. Donc, le fait de mettre... de dévoiler ces
informations-là, donc, il peut y avoir aussi d'autres entreprises qui viennent
contrecarrer nos plans.
M. Derraji : Mais... Et
je comprends. Et j'ai plein, plein d'amis qui font la même chose, des prises
de... Et en fait j'ai même vu qui passent de 20, à 30, à 75 employés, à
100 employés, mais parfois...
16 h (version révisée)
Mme Potvin (Hélène) : ...de
dévoiler ces informations-là. Donc, il peut avoir aussi d'autres entreprises
qui viennent contrecarrer nos plans.
M. Derraji : Et je comprends
et j'ai plein, plein d'amis qui font la même chose, des prises de... Et, en
fait, j'ai même vu qu'ils passent de 20, 30, à 75 employés, à
100 employés, mais parfois ils veulent une place au niveau régional. Mais
c'est quoi... à part le risque d'affaires, mais c'est quoi <l'autre...
c'est quoi> le risque majeur que vous voyez? Est-ce que c'est juste un
risque d'affaires, que les cartes sont plus claires, ou il y a un autre enjeu
que vous voyez?
Mme Potvin (Hélène) : Bien,
dans ce cas-là, moi, je voyais plus des conséquences sur le développement de la
personne, le développement de l'entreprise, là. C'est ce qu'on essayait
d'illustrer dans : Est-ce qu'on a mesuré les conséquences? Donc, si on
veut protéger aussi nos entreprises, nos PME, bien, il faut être conscient que,
ça, c'est un risque potentiel et est-ce qu'on les a mesurés. Nous, c'est ce
qu'on dit parce que le public... nous assurons la protection du public et, le
public, donc, il y a aussi des entreprises. Donc, on se dit : Est-ce que
ce risque-là a été mesuré? Et bon...
M. Derraji : Vous me... penser
à l'analyse d'impact réglementaire. Je ne sais pas, je pose la question, je ne
l'ai pas vu. Pour la première fois, je ne l'ai pas vu, mais je ne sais pas, M.
le ministre, si quelqu'un peut juste nous répondre, s'il y a une étude d'impact
réglementaire qui a été faite sur ce projet de loi ou pas. Ce n'est pas urgent,
là, mais on peut juste l'avoir par la suite.
Un autre point, parce que, je pense, mon collègue
va continuer aussi. En fait, vous êtes le deuxième groupe qui demande la
clarification de contrôle de fait, et vous, vous ciblez plus le public. Est-ce
que vous nous suggérez que, dans le projet de loi, qu'on donne une définition à
ces nouveaux concepts dans le but que ça soit beaucoup plus facile pour M., Mme
Tout-le-monde, mais surtout les entrepreneurs, de comprendre qu'est-ce que le
législateur veut dire par rapport à ces contrôles de fait et les autres points?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Effectivement, que ce soit dans la loi ou, à tout le moins, dans le règlement
d'application. Mais comme je le disais un peu plus tôt, puisqu'on est en
présence d'éléments circonstanciels, d'une influence, on veut cibler qu'est-ce
qu'on recherche directement. Et, à l'heure actuelle, on comprend que le seul
article de loi qui traite de cette notion est l'article 2125 de la Loi sur
les impôts et que c'est l'interprétation qu'on pourrait faire de l'expression
«contrôle de fait». Est-ce que c'est vraiment ce qui est recherché derrière le p.l.
n° 78? Donc, comme on reste avec certaines questions,
on se demande... ou on souligne l'importance que ça soit précisé.
M. Derraji : O.K. merci
beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, nous donnons maintenant la parole au député de Robert-Baldwin.
Vous avez 4 min 25 s.
M. Leitão : Très bien. Merci,
Mme la Présidente. Alors, bonjour. Mme Potvin, M. Rivet, bonjour...
d'être là.
Mme Potvin (Hélène) : Bonjour.
M. Leitão : Je vais essayer
d'y aller rapidement. Je dois vous dire que votre recommandation numéro quatre
m'a laissé un peu perplexe. N'étant pas juriste, n'étant pas avocat, j'ai un
peu de difficulté à saisir. Donc, vous nous <soulevez...
M. Leitão : ... je vais
essayer d'y aller rapidement. Je dois vous dire que votre recommandation
no 4 m'a laissé un peu perplexe. N'étant pas juriste, n'étant pas avocat,
j'ai un peu de difficulté à saisir le... Donc, vous nous >soulevez un
drapeau : Faites attention aux effets juridiques de cette mesure. C'est là
où j'ai un peu de difficulté à comprendre, si vous pourriez m'aider un peu,
parce que le projet de loi dans le... d'ailleurs, on le mentionne au tout début,
qu'il vise à contribuer aux actions de prévention de la lutte contre l'évasion
fiscale, le blanchiment d'argent et la corruption, donc c'est ça, l'objectif.
Alors, j'ai un peu de difficulté à concilier ça avec les effets juridiques que
vous mentionnez.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
En fait, puis on appuie totalement et complètement les objectifs du projet de
loi, on le soulignait d'ailleurs initialement dans notre mémoire à quel point
on était heureux de voir un projet de loi qui vise encore à assurer la protection
du public. Mais la nouveauté ici, c'est un principe consacré, là, de séparation
des patrimoines où, quand on crée une société par actions et le constituant,
donc c'est deux patrimoines qui sont distincts. Habituellement, les personnes
qui gravitent autour de cette entité-là, c'est l'administrateur, les
actionnaires, le principal dirigeant, donc les classiques.
Avec le projet de loi n° 78, on se
retrouve à avoir un bénéficiaire ultime qui exerce un contrôle de fait, et
c'est là la difficulté, parce qu'on le disait un peu plus tôt : Contrôle
de fait, c'est des éléments circonstanciels qui vont finir à lier une personne
physique envers un assujetti. Donc, la question qu'on se pose ici, si jamais il
y avait une faute de la part d'un assujetti, est-ce qu'un membre du public peut
réellement avoir un recours vers un bénéficiaire ultime pour lequel le seul
lien qu'il y a envers l'assujetti est un lien de fait?
Donc, c'est cette nouveauté-là avec
laquelle on n'est pas contre, évidemment, mais qu'on croit qu'il faut baliser
parce que c'est quelque chose de nouveau, c'est en lien avec la séparation des
patrimoines, et on pense, effectivement, là, que mesurer les effets juridiques
de <cette nouvelle... >de cette nouveauté-là devrait être pris en
compte davantage par le projet de loi n° 78.
M. Leitão : Très bien. Je
pense que, s'il y a lieu, on pourrait faire cela, et je pense que l'équipe du
ministre, je pense, ils prennent des notes et peut-être qu'on pourrait faire ça
à l'étude détaillée. Mais l'objectif ici, c'est vraiment de limiter les
possibilités de créer des coquilles vides, justement, de...
M. Amabili-Rivet (Raphaël) : Ah!
de bien comprendre ce qu'on recherche, en effet, parce que les coquilles vides,
c'est des situations qui sont complexes, ce n'est pas... c'est quelque chose
qui est courant dans l'industrie de la construction, ce n'est pas toutes les
situations qui mènent à des problématiques. Mais, quand il y a effectivement
des problématiques, <qu'est-ce… >comment réagir comme membre du public
face à cette situation-là?
M. Leitão : En effet, et
d'ailleurs, bon, on voit qu'au Canada il y a déjà plusieurs provinces qui ont
légiféré dans ce sens-là. Et d'ailleurs, tout ce processus s'insère dans un
mouvement multilatéral <de contrôle…
M. Amabili-Rivet (Raphaël)T :
...comme membre du public face à cette situation-là?
M. Leitão : En effet, et
d'ailleurs, bon, on voit qu'au Canada il y a déjà plusieurs provinces qui ont
légiféré dans ce sens-là. Et d'ailleurs, tout ce processus s'insère dans un
mouvement multilatéral >de contrôle de la corruption et de blanchiment
d'argent. En Colombie-Britannique, cela a été fait aussi, d'ailleurs la
première province, et eux, ce qu'ils avaient justement en tête, c'était le
marché de l'immobilier. Ils voulaient vraiment s'assurer qu'ils avaient un
meilleur contrôle sur qui contrôle quoi dans l'investissement, dans la
construction de condominiums, etc., la propriété.
Une autre question qui a été soulevée en Colombie-Britannique,
et c'est là que je voudrais avoir votre opinion, si le temps le permet encore,
une question qui a été soulevée par l'Institut C.D. Howe et d'autres aussi,
mais surtout le C.D. Howe, c'était que les sanctions prévues au projet de loi
semblaient être beaucoup trop... en Colombie-Britannique, semblaient être trop
basses pour avoir un effet dissuasif. Ce qu'on voit ici, c'est que les
sanctions prévues ici aussi semblent être relativement modestes. Quel est votre
point de vue sur les sanctions prévues au projet de loi?
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Rapidement, s'il vous plaît, parce qu'il ne reste plus de secondes.
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Bien, en fait, ça n'a pas été visé par le projet de loi n° 78,
on était étonnés de le constater. Mais on se demande si encore là, comme le projet
de loi est recentré vers les personnes physiques, si les contraventions ne
devraient pas être non seulement sur l'assujetti, mais aussi sur les personnes
physiques. Et là je dis ça sous toute réserve, là, simplement pour la
discussion.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait, je vous remercie.
M. Leitão : Très bien, merci.
C'est intéressant, oui. Tout à fait, merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci pour l'échange. Nous poursuivons maintenant avec le député de Rosemont.
Vous disposez de 2 min 45 s.
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Me Potvin et Amabili-Rivet, bonjour. Merci d'être là. Je vais
abattre clairement mon jeu en partant. J'ai un problème d'ordre dichotomique
avec votre présentation. Parce que vous dites d'emblée et dans les premières
phrases que vous êtes en faveur du projet de loi. Moi, je vous écoute depuis
tantôt puis je conclurais le contraire. Vous avez levé quand même quelques
drapeaux rouge, ma foi, très rouge. Qu'est-ce qui vous permet de dire que vous
êtes favorables à ce projet de loi, considérant l'exposé que vous venez nous
faire?
Mme Potvin (Hélène) : Bien,
écoutez, la transparence des entreprises s'inscrit dans une lutte au
blanchiment d'argent. Alors, c'est sûr que la chambre a initié plusieurs
démarches, participe à des groupes canadiens, participe à des travaux
internationaux dans ce but-là. Alors, c'est sûr que nous sommes pour. Il y a
plusieurs effets qui vont trouver... je pense qu'on a plusieurs questions qui
vont trouver réponse aussi dans le règlement d'application. Donc, ce qu'on fait
ici, c'est qu'on sensibilise... on vous sensibilise sur le fait qu'on a des
questions, mais une fois que tout le projet sera étudié peut-être que nos <réponses
seront...
Mme Potvin (Hélène)T : ...
effets
qui vont trouver... je pense qu'on a plusieurs questions qui vont trouver
réponse aussi dans le règlement d'application. Donc, ce qu'on fait ici, c'est
qu'on sensibilise... on vous sensibilise sur le fait qu'on a des questions,
mais une fois que tout le projet sera étudié peut-être que nos >réponses
seront répondues. Alors, c'est dans ce sens-là où on est quand même en lien
avec... notre rôle est vraiment de vous sensibiliser et donc d'ajouter
peut-être certains points, et puis nous on sera à l'aise, là, avec cette
loi-là, là.
• (16 h 10) •
M. Marissal : On s'entend
assurément sur l'absence de règlements d'application, là, je dirais même, sans
partisanerie, que ça devient une mauvaise habitude de ce gouvernement dans à
peu près tous les projets de loi. En tout cas, ceux que je j'étudie et j'en
étudie un certain nombre, là, le projet de loi n° 60, en ce moment, on a
exactement le même problème. On a eu le même problème avec un paquet de projets
de loi. Je comprends votre point là-dessus.
On avait une professeure, ce matin, de
l'Université d'Ottawa,qui nous disait : L'intérêt du public de connaître
les structures de contrôle des entreprises l'emporte sur les expectatives de
vie privée des individus qui choisissent d'être impliqués au sein
d'entreprises. Ce à quoi le ministre à répondu d'un tonitruant :
Totalement. Vous, êtes-vous totalement d'accord avec ce que je viens de lire de
la professeure de l'Université d'Ottawa?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Si je peux me permettre, je pense que c'est... comme le dit la chanson :
Tout est une question d'équilibre. Et c'est en ce sens-là...
M. Marissal : C'est qui, ça?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Je ne me souviens plus, mais il me semble qu'il y a un titre de chanson comme
ça. Je pense que c'est Cabrel. Mais, bref, donc, avec des réponses dans le
règlement d'application, avec des mesures qui viennent clairement distinguer
qu'est-ce qu'on vise, comment préserver les renseignements personnels, voyez-vous,
dans la documentation budgétaire, on disait que la date de naissance, c'était
seulement le mois et l'année de naissance qui allaient être rendus accessibles
au public.
Dans le projet de loi n° 78, on ne
sait pas qu'est-ce qui va réellement être rendu accessible au public et ce
n'est vraiment pas une critique, mais plutôt un commentaire pour essayer de
voir quelle intention est recherchée derrière le projet de loi n° 78.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci
M. Marissal : Merci
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous poursuivons maintenant l'échange avec la députée de Gaspé. Vous
disposez de deux minutes ou 2 minutes 45 secondes.
Mme Perry Mélançon : Merci,
Mme la Présidente. J'irais peut-être... Bien, bonjour à vous deux. Dans les
recommandations que vous nous avez formulées, là, de façon plus sommaire dans
le mémoire, j'aurais peut-être voulu vous entendre sur le rôle que vous
pourriez jouer, bon, la Chambre des notaires, est-ce que vous seriez... parce
qu'on a entendu ça de l'Ordre des comptables, par exemple, qui est en faveur
d'avoir peut-être des mécanismes plus... qu'on ait des vérifications plus
systématiques, finalement, là, de l'identité, et tout ça. Est-ce que, ça, ça
fait partie de ce que vous avez aussi comme recommandations? Puis comment on
pourrait mieux faire ces vérifications-là?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Je pense que le meilleur exemple, c'est la question de la fiducie qui a été peu
abordée dans notre exposé aujourd'hui. Dans le cas des fiducies
discrétionnaires, <c'est toujours...
Mme Perry Mélançon : ...
de
ce que vous avez aussi comme recommandations? Puis comment on pourrait mieux
faire ces vérifications-là?
M. Amabili-Rivet (Raphaël)T :
Je pense que le meilleur exemple, c'est la question de la fiducie qui a été peu
abordée dans notre exposé aujourd'hui. Dans le cas des fiducies
discrétionnaires, >c'est toujours difficile de déterminer qui est le
bénéficiaire de cette fiducie-là. On est souvent en présence de descriptions.
Donc, on parle d'enfants à naître, on parle de quelqu'un qui détient une
certaine part d'actions, mais, bref, on n'identifie pas le nom du bénéficiaire
d'une fiducie.
Dans un cas comme celui-là, où c'est
complexe de déterminer qui est le bénéficiaire ultime d'une fiducie, c'est
certain qu'un conseiller juridique comme le notaire peut être en mesure de bien
guider, autant au moment de la constitution de l'entité juridique qu'est la
fiducie, autant au moment où il y a... le moment est venu de déclarer le
bénéficiaire ultime de cette fiducie-là au Registre des entreprises et, enfin,
pour assurer que cette information-là est maintenue à jour au sein du Registre
des entreprises.
(Panne de son)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Votre micro, députée de Gaspé.
Mme Perry Mélançon : Oui,
excusez-moi. Je me demandais si j'avais le temps d'une deuxième question, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Allez-y, allez-y.
Mme Perry Mélançon : Quant à
la recommandation 4, quand vous dites de mesurer clairement les effets
juridiques attendus quant à l'opposabilité aux tiers des renseignements et
informations concernant le bénéficiaire ultime, est-ce que vous avez des
exemples d'indicateurs qu'on pourrait utiliser pour mesurer ces effets
juridiques?
M. Amabili-Rivet (Raphaël) :
Je pense que l'élément essentiel, c'est au niveau du contrôle de faits, où
c'est là une notion un peu plus subjective, qui revient à des circonstances,
des éléments de faits, et non des éléments juridiques. Et dans cette mesure-là,
je pense que c'est peut-être un peu plus facile à mesurer cet élément-là, là.
Mme Perry Mélançon : Très
bien.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait, merci. Merci, Mme Potvin, merci, M. Amabili-Rivet, pour
votre contribution à la commission.
Alors, nous suspendons quelques instants
pour accueillir ou se préparer à accueillir le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 14)
(Reprise à 16 h 29)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, bonjour. Nous souhaitons donc maintenant la bienvenue aux représentantx
d'Échec aux paradis fiscaux. Nous donnons maintenant la parole au représentant.
Tel que mentionné, je vous invite à bien vous présenter, à donner votre titre,
et ensuite vous pourrez poursuivre immédiatement avec votre exposé de 10
minutes. Alors, à vous la parole.
M. Ross (William) : Bonjour,
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. Je me présente,
William Ross, coordonnateur du collectif Échec aux paradis fiscaux. Je suis
aujourd'hui accompagné de Samuel-Élie Lesage, qui est conseiller syndical à la
recherche et à la main-d'oeuvre à la Centrale des syndicats démocratiques. Il
est également coauteur du mémoire que nous avons déposé à la commission. Je
vous remercie de l'invitation faite au collectif Échec aux paradis fiscaux dans
le cadre des consultations sur le projet de loi n° 78. Le collectif Échec
aux paradis fiscaux a été fondé en 2010 et regroupe des organisations de la
société civile québécoise, en représentant plus de 1,7 million de membres.
Il a comme mandat de nourrir le débat public sur le phénomène du recours aux
paradis fiscaux ainsi...
16 h 30 (version révisée)
M. Ross (William) : ...aux paradis
fiscaux dans le cadre des consultations sur le projet de loi n° 78.
Le collectif Échec aux paradis fiscaux a été fondé en 2010 et regroupe des organisations
de la société civile québécoise en représentant plus de 1,7 million de
membres. Il a comme mandat de nourrir le débat public sur le phénomène du
recours aux paradis fiscaux ainsi que de formuler, soutenir et diffuser des
pistes de solution pour y mettre fin.
Dans le cadre de ma présentation,
j'aborderai d'abord les raisons pour lesquelles le collectif considère que le
projet de loi n° 78 constitue une avancée
considérable en matière de transparence corporative et de contribution aux
actions de prévention et de lutte contre l'évasion fiscale, le blanchiment
d'argent et la corruption. Je poursuivrai avec l'analyse de deux éléments du
projet de loi qui, selon nous, minent la capacité de réaliser pleinement ses
propres ambitions. Cette analyse sera accompagnée des solutions que nous
proposons afin d'assurer la pleine réussite de la réforme proposée.
Commençons par saluer le fait que le
régime proposé par le projet de loi n° 78 assujettira
les entreprises privées et les fiducies, qu'il révélera les pourcentages de
contrôle du ou des bénéficiaires ultimes et qu'il sera d'accès public et
gratuit. De manière générale, nous nous réjouissons de voir le gouvernement du
Québec aller de l'avant avec de nouveaux moyens de lutte contre la criminalité
corporative qui rendront publiques les informations permettant d'identifier les
bénéficiaires ultimes des entreprises assujetties.
Le collectif Échec aux paradis fiscaux
tient particulièrement à souligner l'importance de l'introduction de
l'article 0.1 dans la Loi sur la publicité légale des entreprises, dans
lequel il est mentionné que le REQ contribuera à la lutte contre l'évasion
fiscale, le blanchiment d'argent et la corruption. L'insertion de ce paragraphe
introductoire établit clairement que le REQ répond dorénavant à de nouvelles
finalités qui transforment la relation que la société civile, dans son ensemble,
entretiendra avec les informations qui y sont contenues.
Sur la base de cette nouvelle finalité, le
REQ devient une base de données permettant de mieux cibler les acteurs de
fraude légale, fiscale et criminelle. À ce titre, il nous apparaît que tous les
manquements au registre... manquements aux exigences du registre, pardon,
indiquent qu'un acte de camouflage est peut-être en train de se produire. Une information
erronée ou délibérément omise a dorénavant une portée beaucoup plus grande pour
la société civile.
Qui plus est, la nouvelle valeur qui est
accordée aux données du registre fait bouger la balance entre les intérêts de
la protection de la vie privée et la protection du public au profit de cette
dernière. Mieux encore, le projet de loi n° 78
confère à la société civile un rôle actif dans la lutte contre la criminalité
financière. Il est donc absolument légitime que le gouvernement se donne les moyens
d'assurer la protection de sa population et de l'intégrité de son économie par
la publication plénière des informations relatives aux bénéficiaires ultimes.
Cependant, deux aspects du projet de loi
n° 78 viennent, selon nous, diluer la portée de la réforme suggérée. Le
premier de ces aspects tient au traitement des informations recueillies par le
registre et le second a rapport au seuil d'assujettissement des bénéficiaires <ultimes...
M. Ross (William) :
...
aux bénéficiaires ultimes.
Cependant, deux aspects du projet de
loi n° 78 viennent, selon nous, diluer la portée de la réforme suggérée.
Le premier de ces aspects tient au traitement des informations recueillies par
le registre et le second a rapport au seuil d'assujettissement des bénéficiaires
>ultimes.
Les enjeux liés au premier aspect, celui
du traitement des informations recueillies, se déclinent en trois parties :
la vérification des données, les sanctions reliées au registre, et la publicité
des informations. En ce qui concerne la vérification des données qui seront
soumises au registre, le projet de loi n° 78 prévoit que le registraire
doit prendre des moyens raisonnables pour améliorer la fiabilité des
informations contenues au registre. Ces moyens ne sont malheureusement pas
spécifiés.
Or, l'on sait que l'une des faiblesses
principales des registres similaires à travers le monde est le manque de
garantie de la fiabilité des informations. Dans notre mémoire, nous avons cité
qu'au Royaume-Uni plusieurs cas farfelus ont été relevés par le journal The Guardian,
qui faisait état d'une situation dans laquelle certains bénéficiaires
choisissaient délibérément de rire à la figure de l'institution. Pour éviter
une telle situation au Québec, nous suggérons de mener une vérification systématique
des données soumises en demandant une preuve d'identité et de résidence.
Dans la même veine, l'article 11 du
projet de loi n° 78 dispose qu'il n'est possible d'utiliser qu'une seule
adresse professionnelle par personne physique pour l'ensemble des entités
assujetties. Cependant, à moins d'une vérification exhaustive et systématique,
la possibilité qu'une personne physique utilise plusieurs adresses
professionnelles reste intacte. Cela vient fragiliser la portée des recherches
par la société civile ainsi que de porter préjudice à la capacité d'effectuer
une diligence raisonnable. Comment confirmer que deux individus partageant le
même nom, la même date de naissance sont des individus différents s'il est
toujours possible que plusieurs adresses professionnelles réfèrent malgré tout
à la même personne?
De plus, dans le cas où la personne
physique aurait une adresse domiciliaire à l'extérieur du Québec, l'information
qui sera publiée ne sera que partielle. Nous recommandons l'utilisation donc d'un
numéro d'identification unique pour indexer toute personne physique
bénéficiaire ultime enregistrée au registre. De surcroît, il nous apparaît
essentiel de publier le pays de résidence pour les personnes vivant hors
Québec.
En ce qui concerne les sanctions liées au
non-respect de la divulgation des informations prévues dans le projet de loi,
nous désirons nous assurer qu'une réflexion se fasse sur le caractère dissuasif
des sanctions déjà prévues dans la Loi sur la publicité légale des entreprises.
Le projet de loi n° 78 ne touche pas à cet aspect de la loi, mais nous
croyons que les sanctions actuelles ne reflètent pas l'importance accordée aux
informations dans le cadre des nouvelles finalités du REQ.
Nous désirons aussi rappeler à la
commission la proposition 10 du rapport sur le phénomène du recours aux
paradis fiscaux de la Commission des finances publiques qui suggérait
d'interdire l'enregistrement d'entreprises dont le ou les propriétaires
physiques ultimes ne sont pas clairement identifiés avec tous les
renseignements pertinents pour les retracer. Sous la forme actuelle, la loi
prévoit de pénaliser, voire radier les entreprises qui ne s'y conforment pas.
Pourquoi ne pas appliquer d'abord le raisonnement inverse, c'est-à-dire
garantir que les <entreprises...
M. Ross (William) :
...
d'entreprises dont le ou les propriétaires physiques ultimes ne sont
pas clairement identifiés avec tous les renseignements pertinents pour les
retracer. Sous la forme actuelle, la loi prévoit de pénaliser, voire radier les
entreprises qui ne s'y conforment pas. Pourquoi ne pas appliquer d'abord le
raisonnement inverse, c'est-à-dire garantir que les >entreprises qui
font affaire au Québec se conforment d'abord et avant tout à nos lois?
Finalement, quant à la question de la
publicité de l'information, certaines formulations du projet de loi n° 78
laissent croire que les informations accessibles puissent être décidées par
règlement. Cette proposition vient priver les membres de la société civile
d'une garantie d'inconditionnalité quant à la disponibilité de ces données. À
ce titre, nous encourageons le ministre à préciser, à même le projet de loi,
les informations qui seront publiques en s'inspirant de nos recommandations.
J'en arrive au deuxième aspect : le
seuil d'assujettissement de 25 % pour la déclaration des bénéficiaires
ultimes. Nous ne sommes pas les seuls aujourd'hui, nous croyons qu'un seuil
aussi élevé risque de ne pas atteindre les objectifs politiques à l'origine
même du projet de loi n° 78. Nous recommandons à cet effet que le seuil
d'assujettissement soit abaissé à 10 %.
Dans notre mémoire, nous avons présenté
que le seuil de 25 % a été arbitrairement choisi par le Royaume-Uni et
calqué par d'autres pays et organisations. Nous avons aussi présenté que
d'autres pays ont choisi des seuils beaucoup plus bas, notamment les Bahamas,
la Barbade, le Belize et le Chili, qui ont chacun un seuil d'assujettissement
de 10 %.
Notre principale crainte vis-à-vis un
seuil de 25 % est qu'il n'est pas suffisamment représentatif, voire qu'il
reste aisé pour des bénéficiaires ultimes de camoufler leur identité. Il est
possible qu'une société soit organisée d'une telle façon qu'une personne y
détienne un contrôle prépondérant sans qu'elle détienne 25 % ou plus du
contrôle, ne tombant pas de la sorte sous le coup de la loi. Un individu
pourrait même sciemment réorganiser sa structure corporative expressément pour
échapper à la loi.
Nous ne sommes pas les seuls à revendiquer
un tel seuil de 10 %. Ce matin, vous avez entendu deux groupes qui
l'avaient fait. Il y a aussi le Tax Justice Network, le Global
Alliance for Tax Justice et Publish What You Pay qui, à l'international,
militent pour l'abaissement des seuils à 25 % en critique au seuil de
25 % établi par l'OCDE. Finalement, le seuil de 10 % a déjà une
assise au Canada et au Québec car tant Statistique Canada l'utilise pour
distinguer un investissement direct étranger d'un portefeuille d'investissement
que l'Autorité des marchés financiers considère la possession de 10 %
comme méritoire du statut d'initié.
Nous vous remercions pour votre attention
et votre invitation. Nous considérons que le projet de loi n° 78 est un
pas important pour le Québec et nous croyons que la population a tout à gagner
à l'instauration d'un régime élevé de transparence corporative. En vous
remerciant.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci pour votre exposé. Nous allons donc débuter la période d'échange
avec M. le ministre. La parole est à vous. Vous disposez de
16 min 30 s.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Merci au collectif. Merci, M. Ross. Merci, M. Lesage. C'est
un mémoire extrêmement intéressant, <là...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...nous
allons donc débuter la période d'échange avec M. le ministre. La
parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Boulet : Merci, Mme
la Présidente. Merci au collectif. Merci, M. Ross. Merci, M. Lesage.
C'est un mémoire extrêmement intéressant, >là. Puis que vous ayez pris quelques
minutes pour souligner l'avancée considérable de ce projet de loi là en matière
de transparence corporative, je pense qu'on est à l'avant-plan de ce qui se
fait en Amérique du Nord et dans les pays membres de l'OCDE, je pense, c'est important
de le souligner.
Puis j'aime bien... vous êtes les premiers
à dire, à 0.1, l'objet de la loi ou du projet de loi, parce que ça sert toujours
dans l'interprétation si jamais il y a un problème d'interprétation. Je vous
vois, tous les deux, hocher de la tête, l'objet de la loi sert de guide aux
tribunaux pour bien l'interpréter, l'appliquer. Et, quand on parle de lutte à l'évasion
fiscale, le blanchiment d'argent et la corruption... (Interruption) ...excusez-moi,
on comprend bien les finalités de ce projet de loi là.
• (16 h 40) •
Le seuil, M. Ross, ceci dit avec
respect, quand vous dites : Le 25 % est fixé arbitrairement par le
Royaume-Uni, je pense que... Oui, vous avez cité des pays, là, puis sans
hiérarchiser les pays, là, mais ce n'est pas des pays avec lesquels le Québec
transige énormément. Parce qu'il y a l'OCDE, il y a la Commission européenne
qui vient d'émettre une directive pour le seuil à 25 %, il y a la
Commission des finances publiques à laquelle, bien sûr, notre collègue de
Robert-Baldwin a participé, il y a le commerce interprovincial au Canada, il y
a les États-Unis, il y a Ottawa, il y a un ensemble de pays occidentaux.
Je sais que ce n'est pas parfait, mais,
25 %, on fait un pas considérable. Puis le 10 % n'élimine pas
totalement non plus les stratagèmes, là. Quelqu'un qui veut utiliser des
stratagèmes pour passer en dessous des bureaux, il va le faire, là,
indépendamment, mais je pense qu'on fait... Ce seuil-là nous permet de
s'harmoniser et de permettre un environnement législatif, comme je le disais ce
matin, qui est suffisamment compétitif, là, qui va éviter l'exode. Puis il y a
des groupes qui vont nous dire : Il ne faut pas aller dans la direction du
p.l. n° 78 parce que ça va engendrer un exode de
sociétés étrangères ou de sociétés dans le reste du Canada qui ne viendront pas
faire affaire au Québec parce qu'ils devront s'immatriculer puis identifier
leurs bénéficiaires ultimes. Je pense qu'on a trouvé un excellent équilibre.
Ceci dit, pour vous autres,
c'est... Tu sais, à un moment donné, vous avez dit, M. Ross : Bon, l'équilibre,
entre la transparence corporative puis la protection de la vie privée<,
on est allés...> et le <droit...
M. Boulet : ...
je
pense qu'on a trouvé un excellent équilibre.
Ceci dit, pour vous
autres, c'est... Tu sais, à un moment donné, vous avez dit, M. Ross :
Bon, l'équilibre, entre la transparence corporative puis la protection de la
vie privée, on est allés... et le >droit du public, on est allés
un peu plus loin vers la protection du public. Est-ce que c'est bien ce que
vous avez mentionné, M. Ross?
M. Ross (William) : Ce que je
dis, c'est que les nouvelles finalités du REQ, telles qu'elles sont présentées
dans le projet de loi n° 78, nous invitent à penser que, justement, on
fait pencher la balance du côté du respect des droits publics d'être respectés
par les lois corporatives et non pas le respect de la vie privée comme étant
une vache sacrée qui deviendrait l'élément central pour pouvoir faire des lois
corporatives au Québec, là.
M. Boulet : O.K. Je vais y
aller un peu de façon télégraphique maintenant. Comment vous nous comparez, au
Québec, par rapport aux autres provinces canadiennes, en quelques mots,
M. Ross?
M. Ross (William) : En
quelques mots, le Québec prend des mesures qui ne sont pas prises ailleurs au
Canada en ce moment. Et nous reconnaissons, depuis le début, là, à quel point
nous sommes contents et fiers d'être dans une province qui prend cette
situation-là au sérieux.
Cependant, nous continuons à considérer
que le seuil de 25 % est une erreur et que ce n'est pas en continuant une
erreur qu'elle va devenir plus vraie. La question que nous nous posons, c'est
que nous avons démontré, nous, le collectif mais d'autres entités aussi, qu'il
y a des dangers au seuil de 25 %, qui est facilement contournable. Nous
n'avons jamais entendu aucun argument qui faisait en sorte qu'on nous disait
que le seuil de 25 % était un bon seuil, un seuil qui faisait en sorte
qu'on était réellement capable d'éviter les fraudes fiscales.
Nous, ce qu'on dit, c'est qu'avec un seuil
de 10 % on est capable de non seulement ratisser plus large, mais aussi
qu'il devient beaucoup plus difficile pour des personnes qui voudraient
contourner de manière délibérée la loi de créer un stratagème qui impliquerait
beaucoup plus que quatre ou cinq personnes, mais on parle de 10 à 11 personnes.
Avec tous les coûts que ça impliquerait, ça serait beaucoup plus difficile à
cacher. Donc, c'est sûr qu'il n'y a aucun seuil qui est parfait par rapport à
ça. Nous, on fait juste dire : Si on veut se donner les moyens de
réellement donner du mordant à une loi sur la transparence corporative, bien,
c'est en allant du côté du 10 % qu'on va le trouver plutôt que du côté du
25 %.
M. Boulet : Oui, mais,
M. Ross, encore une fois, ceci dit avec respect, là, puis je vais me
répéter un peu, il y a le Royaume-Uni, la France, la Commission européenne, les
États-Unis, Ottawa, au Canada. Il y a des pays... il y a quelques pays que vous
avez identifiés où c'est à 10 %, mais, nous, ce qui doit nous guider, <c'est...
M. Boulet : ...mais,
M. Ross,
encore une fois, ceci dit avec respect, là, puis je vais me répéter un peu, il
y a le Royaume-Uni, la France, la Commission européenne, les États-Unis,
Ottawa, au Canada. Il y a des pays... il y a quelques pays que vous avez
identifiés où c'est à 10 %, mais, nous, ce qui doit nous guider, >c'est,
je pense, des principes fondamentaux d'harmonisation et de compétitivité.
Ceci dit, je sais que ça se contourne.
10 % se contourne, et 5 % peut se contourner, 50 % pourrait se
contourner encore plus aisément, mais je pense qu'il y a un consensus au
Québec, là, qui découle des consultations, du rapport de la Commission des
finances publiques et de ce qui s'ensuit. Puis je comprends Statistique Canada
puis les marchés financiers, mais c'est véritablement à d'autres fins, là, où
on parle de transaction d'initiés. Et la finalité d'autres lois, comme en
matière de bâtiment ou de centres financiers, n'est pas la même.
Sur les sanctions, M. Ross, bon, il y
a vérification, sanction, publicité. Je vais aller tout de suite à sanction
parce que je ne veux pas qu'on s'échappe. Qu'est-ce qui vous apparaîtrait, puis
ça, je suis assez sensible à ça, raisonnable comme niveau de sanction? Bon, il
y a des sanctions de nature administrative, de nature pénale. J'aimerais vous écouter
sur ce qui vous apparaîtrait raisonnable.
Puis c'est sûr qu'il va falloir s'assurer
de la cohésion aussi, là. On ne peut pas dire, parce qu'on est extrêmement
préoccupés par les paradis fiscaux, ça va être des montants d'amendes
astronomiques. Il va falloir s'assurer, avec nos collègues à la Justice, que c'est
cohérent avec les autres sanctions, dans les autres lois du Québec, pour des
infractions de même nature. On se comprend, mais votre opinion serait quoi,
M. Ross?
M. Ross (William) : Bien, c'est
pour ça que j'ai référé à la proposition 10 du rapport sur le phénomène du
recours aux paradis fiscaux de la commission parlementaire. La raison en est
que j'ai l'impression que cette recommandation-là dit : Assurons-nous que
chaque personne qui vient de s'inscrire au registre fait patte blanche et donne
l'ensemble des informations que nous demandons. Une fois que ça, c'est fait, si,
au final, la personne... Donc, on accompagne aussi, finalement, toutes les personnes
qui s'enregistrent pour s'assurer que les données sont bonnes.
Parce que le but, ce n'est pas de
pénaliser des gens qui feraient des erreurs, on s'entend, ou qui pourraient
donner une mauvaise information parce que, simplement, elle est là depuis trop
longtemps. Une fois qu'on a fait cette vérification-là, alors les erreurs ou
les fraudes commises à l'intérieur du REQ seraient des fraudes qui seraient
délibérées.
Et donc on s'entend qu'à partir de ce
moment-là on n'est plus dans une situation de simplement ne pas avoir ses
affaires en ordre, on est dans une situation où on essaie d'utiliser des
sauf-conduits qui peuvent exister par les lois. Parce que des lois peuvent
encore servir à ça, malheureusement, bien que ça ne soit pas leurs intentions
et leur finalité, mais on comprend que... on reconnaît que c'est ce qui se
passe en ce moment. Donc, de s'assurer que le gain qu'on peut faire en essayant
de faire des sauf-conduits soit inférieur à la <pénalité que..
M. Ross (William) :
...qui
peuvent exister par les lois.
Parce que des lois peuvent encore servir à
ça,
malheureusement, bien que ça ne soit pas leurs intentions et leur
finalité, mais on comprend que... on reconnaît que c'est ce qui se passe
en
ce moment. Donc, de s'assurer que le gain qu'on peut faire en essayant de faire
des sauf-conduits soit inférieur à la >pénalité que la sanction va
amener.
Nous, ce qu'on constate, c'est que, depuis
1995, que le registre des entreprises du Québec a été établi, il y a eu des
changements aux sanctions qui ont suivi l'indexation. C'est parfait. Ce qu'on
se demande, c'est : Est-ce que le projet de loi prend en compte que la
nouvelle nature de la valeur des données qui vont être au registre, comme, a la
même valeur en termes de sanctions? Est-ce que c'est de la même dissuasion
qu'on parle? Nous, on présume que les nouvelles informations ont une valeur
différente et que, justement, le caractère dissuasif doit suivre avec. C'est
pour ça qu'on demande de... La simple chose qu'on demande, parce qu'on n'est
pas là pour faire le travail de donner des chiffres par rapport à ça, c'est de
s'assurer qu'il y ait une réflexion politique qui soit faite sur la nature de
ces sanctions-là.
Il y a aussi la recommandation 33 de
la même Commission des finances publiques sur le phénomène du recours aux
paradis fiscaux qui demandait de s'harmoniser avec le gouvernement fédéral afin
de prévoir des pénalités criminelles dans le cas des manquements d'information
au registre. Donc, ça aussi, c'est quelque chose qui n'est pas dans le projet
de loi.
Je comprends que ça ne fait pas partie du
spectre de la réforme de la loi n° 78. Simplement, pour nous, ça fait
partie de, justement, cet ensemble-là d'une volonté du gouvernement à vouloir
s'assurer de garantir un climat de transparence corporative et de confiance en
l'égard de la société civile. Donc, peut-être de dénoncer, à l'intérieur du projet
de loi, que ces dispositions-là sont encore à venir ou qu'il y a des réflexions
à faire, ça serait absolument intéressant.
• (16 h 50) •
M. Boulet : Parfait. C'est
intéressant, vous touchez à plusieurs sujets. Évidemment, là, on est en matière
de droit pénal statutaire par opposition au droit criminel, là, qui est de
compétence fédérale.
Le niveau des sanctions, en fait, vous
n'avez pas de chiffres précis, mais vous ramenez ça à la nature de la
vérification. Puis, quand on dit, à 3, je pense bien, quatrième paragraphe,
«prendre les moyens raisonnables pour améliorer la fiabilité des informations»,
je sens le besoin de le préciser, là. Parce qu'à l'article 124 de la loi
le registraire a des pouvoirs d'inspection, des pouvoirs d'enquête et des
pouvoirs de vérification. Puis à l'article 129...
Vous le savez, M. Ross, au Québec, le
plus important pouvoir d'enquête, c'est celui qui découle de la loi sur les
commissions... sur les commissaires d'enquête, dit-on. Tu sais, les... Dans la mission
de mon ministère puis de bien d'autres ministères, si on <donne...
M. Boulet : ...puis à
l'article 129...
Vous le savez, M. Ross, au Québec,
le plus important pouvoir d'enquête, c'est celui qui découle de la loi sur les
commissions... sur les commissaires d'enquête, dit-on. Tu sais, les... Dans la
mission de mon ministère puis de bien d'autres ministères, si on >donne
l'exemple des inspecteurs à la CNESST, ils ont les pouvoirs d'ordonner la
production de documents, de vérifier l'exactitude des informations. On a, à ce
jour, déjà embauché six inspecteurs qui auront les pouvoirs, en vertu de la
loi, des commissaires d'enquête. Donc, on fait un grand pas en avant pour
s'assurer de respecter la finalité à laquelle vous avez fait référence, là, qui
est à l'article 0.1 du projet de loi.
Puis enfin il y a eu un bill omnibus,
l'année passée, qui a été adopté sous l'égide de mon collègue aux Finances, qui
amendait notamment l'article 131 de la Loi sur la publicité légale des entreprises.
Et le registraire peut faire une dénonciation à une personne autorisée, on
pense ici au DPCP, et il y aurait des poursuites qui pourraient être entamées
suite à une dénonciation faite par le registraire. Donc, on se donne une
barrière additionnelle de protection puis un moyen dissuasif.
Évidemment, il n'y a pas eu de cas encore parce
que c'est un nouveau paradigme, comme le groupe précédent nous mentionnait,
mais il y a une adaptation qui est déjà amorcée. Et ces pouvoirs-là auxquels
vous faites référence, inspection, enquête, vérification, on ne sera pas
parfaits du jour au lendemain, mais il va y avoir une période de temps d'adaptation
suite à l'entrée en vigueur de la loi, on parle d'une année, pour mettre en
fonction les nouvelles applications, s'adapter à cette nouvelle réalité là.
Puis, quand on parle de moyens
raisonnables, il faut aussi se dire qu'il y a déjà des ententes de transfert d'information
puis d'échange entre le registraire puis la Sûreté du Québec, par exemple, avec
Revenu Québec, avec la Régie du bâtiment. Puis il y a une vérification, mais...
Évidemment, c'est un principe d'autodéclaration, mais il y a des vérifications
a posteriori qui se font, qui donnent une protection encore aussi supplémentaire
pour s'assurer de l'exactitude des informations, mais je pense qu'on s'en va
tous ensemble dans un entonnoir qui va nous permettre de faire une lutte qui
est beaucoup plus efficace à l'évasion fiscale, notamment.
M. Ross (William) : Si vous
me permettez de répondre rapidement à ça.
M. Boulet : Bien sûr.
M. Ross (William) : J'ai
l'impression, effectivement, qu'on va tous dans la même direction, à entendre
le CPA aujourd'hui ou la Pre Pascale Cornut St-Pierre. Je pense que tout
le monde a demandé, par rapport à ça, d'avoir des clarifications à même le
projet de loi. C'est-à-dire, ce que vous dites par rapport aux sanctions, ce
que vous dites par rapport à la vérification, c'est tout à fait exact, puis <on...
M. Ross (William) :
...j'ai l'impression,
effectivement, qu'on va tous dans la même
direction, à entendre le CPA
aujourd'hui ou la Pre Pascale Cornut
St-Pierre. Je pense que
tout le monde a demandé,
par rapport à
ça, d'avoir des
clarifications à même le projet de loi. C'est-à-dire, ce
que vous dites par rapport aux sanctions, ce que vous dites par rapport à la
vérification, c'est tout à fait exact, puis >on voit qu'il y a quelque
chose qui va dans la bonne direction.
Moi, j'ai été surpris, à la lecture du projet
de loi, de voir finalement que la portée du projet de loi n° 78
n'incluait pas les articles sur les sanctions qui sont déjà prévues dans le
cadre de la Loi sur la publicité légale des entreprises. D'où ma question :
Est-ce qu'il y a une réflexion qui a été faite sur le fait que les nouvelles
données qui vont être incorporées, la valeur politique et la valeur juridique
qu'on leur attribue, constituent peut-être la base de réfléchir des nouvelles
sanctions?
M. Boulet : M. Ross, en
fait, le niveau des amendes, les montants d'amende n'ont pas changé. C'est la
raison pour laquelle ils ne sont pas inclus dans le p.l., mais, en même temps, il
n'y a rien qui nous empêche de faire une réflexion parce que c'est dans l'objet
du projet de loi, de faire les modifications qui s'imposent pour augmenter le
montant des sanctions pénales. Et moi, je suis totalement ouvert à ça.
Puis il y a un autre point, M. Ross,
qui m'amène à dire : Le pouvoir réglementaire, il faut l'utiliser mais uniquement
pour fin d'application de la loi. S'il y a des données additionnelles... Comme par
exemple, si on dit : On protège les renseignements personnels, il faut
bien les préciser. La date de naissance...
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion, M. le ministre.
M. Boulet : ...de quelqu'un,
et autres, on va s'assurer de faire les clarifications, M. Ross, qui
s'imposent.
Aïe! Merci à vous deux. Bien content de
vous avoir rencontrés. Puis félicitations pour votre travail. Puis je vous
assure qu'on a les mêmes objectifs. Merci beaucoup. À bientôt.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, merci, M. le ministre. Nous poursuivons maintenant avec le groupe d'opposition
officielle,< avec...> d'abord avec le député de Nelligan, et
ensuite avec le député Robert-Baldwin. Vous disposez à vous deux 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme la
Présidente. Merci au collectif Échec aux paradis fiscaux, vraiment, pour votre
présence, la clarté de vos propositions.
Première question. Le seuil d'ajustement,
vous n'êtes pas, en fait, le premier groupe... Ce qui m'a frappé, c'est la
comparaison que vous faites avec les autres juridictions : l'Argentine, 20 %;
République dominicaine, 20 %; l'Uruguay, 15 %; Costa Rica, 15 %;
Bahamas, 10 %; Barbade, 10 %; le Belize, 10 %; le Chili, 10 %;
la Colombie, 5 %. Et vous le dites, dans votre argumentaire :
Toutefois, on concède< que>, dans les pays occidentaux avec des
RBU gratuits et publics, que le seuil n'est pas basé sur aucune donnée
scientifique.
Donc, si j'ai bien compris votre présence
aujourd'hui en commission, c'est que, pour vous, c'est arbitraire, le
pourcentage du 25 %. Et ce que vous nous suggérez aujourd'hui, c'est d'aller
vers le 10 %, mais, si vous dites ça, sur quoi vous vous basez pour dire
que 10 % est un bon seuil? Est-ce que vous avez une donnée scientifique à
nous partager, et dire que le 10 %, c'est le pourcentage qu'il faut utiliser
et sur lequel il faut se <baser...
M. Derraji : ...le
pourcentage
du 25 %. Et ce que vous nous suggérez aujourd'hui, c'est d'aller vers le
10 %, mais, si vous dites ça, sur quoi vous vous basez pour dire que
10 % est un bon seuil? Est-ce que vous avez une donnée scientifique à nous
partager, et dire que le 10 %, c'est le pourcentage qu'il faut utiliser et
sur lequel il faut se >baser?
M. Lesage (Samuel-Élie) : Si
je peux me permettre, oui. Merci pour la question. Juste pour être bien clair,
quand on prend le mot «arbitraire», <c'est... >vous l'avez dit,
mais je veux vraiment le répéter, «arbitraire» ne veut pas dire que c'est tiré
d'un chapeau, hors de nulle part. Il est évident, au Royaume-Uni, le 25 %
doit être l'objet d'une négociation entre les parlementaires et des... qu'on
arrive à ce chiffre-là.
Ce que mon collègue, M. Ross, a dit
plus tôt,< c'est...> justement, c'est que oui, effectivement, il
n'existe pas d'étude scientifique qui... ou, comme, qui semble démontrer l'efficacité
de ce pourcentage-là, d'autant plus que, comme il a rappelé également, il
existe actuellement des cas où on semble pouvoir profiter de ce haut taux de
seuil d'assujettissement pour, justement, déclarer à la baisse l'information.
Par exemple, dans le Guardian, je
vois... relevait aussi que... pas le Guardian, excusez-moi, une autre
étude, excusez-moi, que le dixième d'entreprises britanniques n'avait pas de
bénéficiaire ultime. Il y a eu, il y a quelques jours ou quelques semaines, au
quotidien Le Monde, le OpenLux, là c'est la moitié des entreprises
qui n'ont pas de bénéficiaire ultime, donc où on se dit : Bien, il y a un
problème, c'est une situation qui est absolument absurde.
Et, le 10 %, personnellement, je vais
être honnête, moi, personnellement, je ne connais pas d'étude scientifique qui
va spécifiquement dire que ce chiffre-là est meilleur qu'un autre. Bien, pourquoi
on veut le 10 %? C'est parce qu'il s'applique sur des pratiques déjà
existantes, comme on l'a mentionné, à Statistique Canada, à l'Autorité des
marchés financiers. La Colombie-Britannique, son propre seuil pour son registre
de la transparence immobilière aussi fixe le 10 %. Et donc ce 10 % là
semble être davantage représentatif... pouvoir mieux capturer comment, donc,
est organisé des entreprises, leurs structures comparatives, et donc qui
bénéficie réellement des activités. Et c'est dans ce sens-là que nous, on se
dit que ce 10 % là est meilleur.
M. Derraji : Oui, oui, j'ai
bien compris. C'est juste, en fait, parce que vous basez votre argument, et ce
n'est pas... Je ne vous reproche rien, au contraire, c'est pour mon propre
bénéfice. Vous dites que ce seuil n'est pas basé sur aucune donnée
scientifique, et j'étais un peu curieux de savoir : Bien, est-ce que le
10 % est basé sur une donnée scientifique? S'il n'est pas basé sur une
donnée scientifique, ça veut dire : Nous sommes aussi dans l'arbitraire
avec 10 %. Parce que je peux vous dire : Bien, pourquoi pas 5 %
ou pourquoi pas 7,5 %?
Je veux juste qu'on soit clairs, en tant
que membres de cette commission, qu'on fait une avancée avec le 25 %.
Est-ce que c'est l'idéal? On peut se poser la question, mais dire que ce n'est
pas basé sur aucune donnée scientifique, je pense, même le 10 % n'est pas
basé sur aucune donnée scientifique. En fait, c'est juste pour que je puisse
comprendre le raisonnement derrière. Et je comprends que le Costa Rica avec 15 %,
les Bahamas avec 10 %... mais j'essaie de savoir, en tant que législateur,
aujourd'hui, est-ce que je vais baser mon analyse sur une donnée scientifique
et dire 10 % ou sur l'arbitraire et dire : Bien, écoute, probablement,
le 25 % est arbitraire. C'est juste ce point que je voulais clarifier avec
vous.
Vous avez dit que vous encouragez le
ministre à préciser à même le projet de loi les informations qui seront...
17 h (version révisée)
M. Derraji : …de savoir, en
tant que législateur, aujourd'hui, est-ce que je vais baser mon analyse sur une
donnée scientifique et dire 10 % ou sur l'arbitraire et dire : Bien,
écoute, probablement, le 25 % est arbitraire. C'est juste ce point que je
voulais clarifier avec vous.
Vous avez dit que vous encouragez le
ministre à préciser, à même le projet de loi, les informations qui seront
publiques et donc de ne pas agir par voie réglementaire. C'est quoi, le
problème que vous avez si on n'agit pas par voie réglementaire mais qu'on
précise le tout dans le projet de loi? Avez-vous des préoccupations?
M. Ross (William) : Pour
nous, la préoccupation principale de ce libellé-là, c'est celle de ne pas
soumettre à l'Assemblée nationale la question du… l'ajout ou du retrait des
informations qui seraient disponibles ou non à la consultation publique dans le
registre des entreprises du Québec. C'est-à-dire que… Je ne veux pas prêter de
mauvaises intentions à personne. La seule chose qui, pour nous, est importante,
c'est de dire : Lorsqu'il s'agit d'avoir une discussion sur la
transparence, il m'apparaît absolument fondamental que nous agissions de
manière transparente. Et donc que la condition d'accessibilité des informations
soit de la prérogative du ministre, qu'il puisse la décider par règlement, ça
nous apparaît, en fait, être un peu un non-sens au niveau des intentions mêmes
de la loi.
M. Derraji : O.K. Excellent.
Merci. Je pense que mon collègue de Robert-Baldwin va continuer. J'aimerais
bien qu'il vous pose une question sur les pénalités criminelles. Je suis très
curieux. Nous avons eu cette discussion, moi et lui.
M. Ross
(William) : Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, la parole est au député de Robert-Baldwin.
M. Leitão : Oui. J'essayais d'enlever
le microphone. Très bien. Merci. Bonjour, messieurs. Merci. Merci beaucoup
d'être là.
Alors, ça va peut-être vous étonner, ou
pas, mais je suis généralement en accord avec vos recommandations. La question
du seuil, donc le 10 % versus 25 %, je comprends très bien, j'étais
là avant, je comprends très bien la volonté de s'harmoniser avec le Canada et
les autres provinces canadiennes, mais je comprends aussi très bien que la
pratique nous a démontré que le 25 % ailleurs permet quand même certaines
déviations. Donc, peut-être, si on le baissait à 10 % ou à 15 %,
enfin, quel que soit le chiffre, ça pourrait être mieux. Donc, c'est quelque
chose à considérer, en effet, pour les seuils.
L'autre chose que vous mentionnez aussi et
que je trouve qui est très importante<, c'est… >concerne
l'information pour mieux identifier les bénéficiaires ultimes. Et je pense que
c'est là où on doit… Je pense qu'on doit aller un peu plus loin parce que ça,
c'est au coeur même de cette question. Et, écoutez, <j'ai évolué…
M. Leitão : …
concerne
l'information pour mieux identifier les bénéficiaires ultimes. Et je pense que
c'est là où on doit… Je pense qu'on doit aller un peu plus loin parce que ça,
c'est au coeur même de cette question. Et, écoutez, >j'ai évolué pendant
de longues années dans le monde financier, dans le système financier, et ouvrir
un compte dans une banque, ça prend plusieurs informations. Et donc je pense
que ça serait quand même important de le faire<. Alors…> dans le
contexte du projet de loi. Alors, qu'est-ce que vous proposez concrètement pour
qu'on puisse aller un peu plus loin dans le projet de loi n° 78 pour <mieux
serrer… >mieux resserrer l'identification des personnes?
M. Ross (William) : Merci
pour votre question. En fait, nous, on commençait d'abord et simplement <par…
>la vérification par une carte d'identité avec photo et une preuve
d'adresse. Je pense que ce n'est pas énorme de demander ce genre d'information
lorsqu'on veut faire affaire au Québec. Toute personne qui détient une carte de
bibliothèque au Québec a déjà donné ce genre d'information pour être capable de
louer une B.D. à son enfant. Donc, par rapport à ça, je pense que ce n'est pas quelque
chose qui est démesuré. Comme le disait la Pre Pascale Cornut St-Pierre,
Airbnb aussi demande ce genre de truc là, la même chose si l'on veut utiliser
des services de plusieurs compagnies. Donc, par rapport à ça, je n'ai pas
l'impression que ça soit quelque chose qui soit trop demander. Ça, c'est une
première chose.
Ensuite de ça, comment s'assurer de la
systématicité de ces vérifications-là? Nous, on n'est pas là pour faire un
travail de mise en place de ce genre de protocole là, dans la mesure où je ne
suis pas à la place des fonctionnaires qui travaillent avec cette matière-là.
J'amène des propositions politiques dans lesquelles je propose qu'il me semble
que ça pourrait être une situation ou une solution à faible coût, compte tenu
de l'importance du dossier, pour être capable de régler le problème.
L'autre enjeu qu'on amenait, c'était de
dire qu'on voulait une indexation des bénéficiaires ultimes avec un numéro
d'identification unique. Le but n'est pas là d'être capable… comme, d'avoir un
numéro sensible comme celui du numéro d'assurance sociale ou ce genre de truc
là, c'est simplement afin d'indexer pour s'assurer qu'il n'y ait pas de
dédoublement sur les adresses professionnelles.
Moi, je pourrais avoir quatre compagnies,
quatre adresses professionnelles différentes, de très bonne foi faire une
erreur et déclarer deux adresses professionnelles différentes dans l'ensemble
de mes compagnies pour faire ça, pourtant je suis la même personne. Le
gouvernement a accès à mon adresse domiciliaire, c'est parfait, mais la société
civile, elle? Les banques, qui sont prises à faire de la diligence raisonnable,
n'ont pas accès à <cette information-là…
M. Ross (William) :
...
très bonne foi faire une erreur et déclarer deux adresses
professionnelles différentes dans l'ensemble de mes compagnies pour faire ça, pourtant
je suis la même personne. Le gouvernement a accès à mon adresse domiciliaire,
c'est parfait, mais la société civile, elle? Les banques, qui sont prises à
faire de la diligence raisonnable, n'ont pas accès à >cette
information-là. Comment différencier, du point de vue du registre, ces deux
personnes-là? Est-ce la même personne ou n'est-ce pas la même personne?
Par rapport à ça, bien, j'ai l'impression
qu'un numéro d'identification unique pourrait permettre de surmonter ce
problème-là sans nécessairement avoir à recommencer à traiter la question de la
publication ou non de l'adresse domiciliaire.
M. Leitão : Très bien, merci.
Oui, tout à fait. Merci. L'autre question, et c'est là où mon collègue n'a pas
eu le temps d'y aller, je voulais y aller, mais ça nous intéresse beaucoup
aussi, donc le caractère dissuasif du projet de loi. Donc, pour que la loi soit
suivie, c'est clair qu'il faut avoir des conséquences si on ne la suit pas.
Donc, je comprends qu'il y a des sérieuses questions quant à la possibilité ou
pas d'avoir des sanctions pénales. Vous avez mentionné, si j'ai bien compris,
que les sanctions pécuniaires devraient être... pas fixes, mais être en
relation avec l'ampleur de l'enjeu, c'est ça?
M. Ross (William) : Oui.
Bien, en fait, si je peux clarifier ce que je voulais dire par là, c'est que le
projet de loi reconnaît lui-même, par, justement, le paragraphe 0.1, qu'il
y a une nouvelle finalité politique et juridique qui est donnée au REQ. Par
rapport à ça, les informations sont aussi... Les mêmes informations, en bonus
des nouvelles informations qui y seront soumises, sont aussi mises sous cette
nouvelle finalité. Cette finalité, ce n'est plus simplement une manière pour le
monde des affaires de garantir qu'on sait c'est qui, les administrateurs, et de
permettre un climat de confiance pour le monde des affaires envers lui-même,
mais c'est aussi une relation avec la société civile pour garantir une
transparence sur la sanité de l'économie en lien avec la criminalité et l'évasion
fiscale.
Cette nouvelle donnée là, cette nouvelle
valeur là, selon nous, appelle un autre cadre dissuasif. C'est-à-dire, on
s'entend que ce n'est pas simplement la question de ne pas avoir mis à jour les
administrateurs d'une compagnie. Si <on... >comme le mentionnait
quelqu'un précédemment, aujourd'hui, qui a passé devant la commission, on parle
d'activités criminelles qui engendrent des millions de dollars, bien, les
pénalités qui sont prévues actuellement dans la Loi sur
la publicité légale des entreprises sont des pacotilles.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion, rapidement.
M. Ross (William) : Donc, par
rapport à ça, elles n'ont pas le caractère dissuasif que nous croyons qu'une
loi comme celle-ci devrait avoir.
M. Leitão : Très bien, merci
beaucoup. Merci beaucoup… vos commentaires. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, nous poursuivons rapidement avec le député <de Rosemont.
Vous...
M. Ross (William) :
…
dans
la Loi sur la publicité légale des entreprises sont des pacotilles.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion, rapidement.
M. Ross (William) :
Donc,
par rapport à ça, elles n'ont pas le caractère dissuasif que nous croyons
qu'une loi comme celle-ci devrait avoir.
M. Leitão : Très bien,
merci beaucoup. Merci beaucoup… vos commentaires. Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, nous poursuivons rapidement avec le député >de Rosemont.
Vous disposez de 2 min 45 s.
• (17 h 10) •
M. Marissal : Merci, Mme la
Présidente. Bien, M. Ross, M. Lesage, merci. C'est un plaisir de vous
revoir. Je vois que vous êtes cohérents avec vos positions, et vous continuez
de taper sur le clou, c'est bien. Il paraît que la pédagogie, c'est l'art de la
répétition. Des fois, il faut insister. Mais on s'en va dans la bonne direction,
le ministre l'a dit. Je suis d'accord avec lui sur le fait que c'est un pas
dans la bonne direction. Je le voudrais plus grand, ce pas… peut-être des plus
grandes foulées, mais on commence le projet de loi, on avance puis on entend
des choses vraiment intéressantes aujourd'hui, dont vous. Merci d'être là.
Les sanctions, ça revient souvent depuis
ce matin. C'est vrai que ce qu'on voit, là, dans le projet de loi, ça peut
paraître… bon, j'ai employé le mot «ridicule» ce matin, ce n'est peut-être pas
parlementaire, mais ce n'est pas très élevé, en tout cas, hein, on peut s'entendre
là-dessus. J'évoquais, par exemple, ce matin, avec les CPA, les deux dames des
CPA, peut-être une formule sur un pourcentage de chiffre d'affaires, comme ça
se fait, d'ailleurs, dans certaines juridictions, sur les GAFAM. Est-ce que c'est
quelque chose qui pourrait être éventuellement étudié?
M. Ross (William) : Ça peut
être étudié, c'est une voie qui pourrait peut-être être intéressante. Écoutez,
nous, on… Mon mandat, d'abord, tu sais, quand je me présente devant vous, ce n'est
pas de trouver la solution, c'est de simplement être… de voir <que… >qu'est-ce
qui constitue, au point de vue de la loi, au Québec, quelque chose de dissuasif
par rapport au degré de criminalité qui peut être impliqué à l'intérieur de ça.
C'est cette balance-là. Je ne suis pas juriste, je ne sais pas comment créer
cette balance-là.
Par contre, ce que je vois, c'est que le
projet de loi lui-même n'aborde pas cette question-là. Et, pour moi, il y a un manquement
dans, finalement, les moyens qu'on se donne et les ambitions qu'on veut avoir,
qui font en sorte que, bien, je pose la question en toute honnêteté : Qu'est-ce
qui serait dissuasif? Est-ce que le projet de loi en prend compte? Non. Et donc
c'est à ce niveau-là que, si on veut trouver une manière de comptabiliser
différemment pour le faire, je pense que c'est tout à fait louable, puis
faisons les recherches pour voir qu'est-ce que ça peut donner.
M. Marissal : Quant aux
seuils, M. Ross… Je vous arrête parce que je n'ai tellement pas de temps. Je
suis désolé, je ne veux pas être impoli. Je suis pressé, je ne suis pas impoli.
Quant aux seuils, là, on en parle beaucoup, là, de 25 % à 10 %, là,
on nous a dit, ça a été dit, je crois bien même que le ministre l'a formulé un
peu comme ça, mais je ne veux pas lui mettre des mots dans la bouche, que ça
pourrait avoir un effet rebutant sur certains entrepreneurs, qui pourraient
partir si d'aventure on disait : Non, ça va être 10 % <plutôt
que 25 %. J'aimerais ça…
M. Marissal : …on en parle
beaucoup, là, de 25 % à 10 %, là, on nous a dit, ça a été dit, je
crois bien même que le ministre l'a formulé un peu comme ça, mais je ne veux
pas lui mettre des mots dans la bouche, que ça pourrait avoir un effet rebutant
sur certains entrepreneurs, qui pourraient partir si d'aventure on disait :
Non, ça va être 10 % >plutôt que 25 %. J'aimerais ça vous
entendre là-dessus.
M. Lesage (Samuel-Élie) : Si
je peux me permettre… Merci pour la question. En fait, est-ce qu'un seuil plus
bas que 25 % va nuire au climat d'affaires? Nous ne le croyons pas. Je
pense que c'est les CPA qui ont dit plus tôt que, aujourd'hui, quand il y a un
bon climat d'affaires, il y a aussi, justement, de la transparence. La
disponibilité des informations, eh bien, ça en fait partie. Il y a ça également
qui est important. Et on se dit même qu'en tant que le p.l. n° 78 traite
de questions de transparence corporative en vue de lutter contre la criminalité
financière, bien là aussi, nécessairement, en fait, on ne va pas nuire au
climat d'affaires, on va, au contraire, y contribuer.
Et, bien, au Québec, il y a déjà un régime
élevé d'informations demandées des entreprises. Il y a le REQ, mais il y aussi,
je pense, le registre, par exemple, minier ou par rapport à d'autres comme ça.
À mon avis, il n'y aura pas un si grand problème à demander davantage
d'informations aux entreprises. Si on veut s'assurer que ça ne soit pas un
fardeau ou ce n'est pas trop pénible pour leurs affaires, il faut simplement
s'assurer qu'on leur offre à travers une demande qui est simple, qui est
cohérente et qui est facile à remplir, et voilà.
Après ça, est-ce que ça va créer un exode?
Bien, est-ce que les entreprises vont se priver d'un marché de 8 millions
de personnes, au Québec, parce qu'ils ne veulent pas identifier
10 bénéficiaires ultimes au lieu de quatre? Vous me permettrez d'en douter
à ce niveau-là.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. C'est tout le temps que nous disposons.
M. Marissal : Merci beaucoup.
Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous poursuivons avec la députée de Gaspé. Vous disposez de 2 min 45 s.
Mme Perry Mélançon : Merci, Mme
la Présidente. Bonjour. Très contente que vous soyez parmi nous, que vous ayez
accepté l'invitation. Dans le fond, vous misez beaucoup sur… de prendre le
problème à la source, qu'on mette beaucoup plus d'emphase sur la vérification
d'identité. Moi, c'est la première fois que j'entends la recommandation du
numéro d'identification unique. Je trouve que vous apportez des recommandations
qui sont intéressantes à vraiment, là, analyser en profondeur. C'est bien de vous
entendre parce que vous dites que vous n'avez pas nécessairement de… vous
n'avez pas en tête tout le procédé, mais, quand même, il y a ça, puis vous
dites aussi de renverser la logique, c'est-à-dire que, le bénéficiaire ultime,
on le connaisse avant même que l'entreprise soit enregistrée, là. Alors, il y a
ça.
Est-ce que vous diriez que, dans sa forme
actuelle, ce projet de loi là, il va… parce que vous avez les mêmes objectifs
que le ministre, il l'a bien dit, est-ce qu'il va assez loin? <Et… >Bien,
je pense connaître déjà la réponse, mais je veux quand même vous entendre, à
savoir : Est-ce que ce n'est pas juste un exercice de bonne conscience,
finalement?
M. Ross (William) : Je ne
crois pas qu'il s'agit simplement d'un exercice de bonne conscience. Je pense
qu'il y a quand même une volonté réelle de faire avancer <les choses.
Cependant… (panne de son) …c'est que…
M. Ross (William) :
...
je ne crois pas qu'il s'agit simplement d'un exercice de bonne
conscience. Je pense qu'il y a quand même une volonté réelle de faire avancer >les
choses.
Cependant… (panne
de son) …c'est que, <d'un point de vue... >avec des
arguments complètement différents, d'un point de vue juridique, politique,
sociologique, on arrive tous à la même conclusion que le seuil de 25 %
n'est pas suffisant. C'est là où, finalement, moi, je vais répéter, ça ne va
pas assez loin.
À ce niveau-là, je me demande : Pourquoi
copier d'autres pays dans lesquels, finalement, on réalise qu'au fil du temps,
bien, ce seuil-là était trop élevé? C'est tout à fait normal que le Royaume-Uni
choisisse un seuil puis réalise, quelques années après, puisqu'ils sont les
premiers à le faire, que ce n'était pas le bon seuil. Est-ce que c'est une
raison, pour nous, de faire le même constat?
Mme Perry Mélançon : Donc,
sans nécessairement avoir de données scientifiques exactement sur le seuil de
10 %, on a des exemples concrets de réussites de pays qui sont allés vers
un seuil beaucoup plus restrictif?
M. Ross (William) : Non
seulement ça, mais, comme le disait mon collègue juste avant, on parle, là,
finalement, d'identifier la différence entre quatre et 10 personnes, on parle
de six personnes supplémentaires. Si l'argument des entreprises qui voudraient
quitter le Québec pour dire que, finalement, identifier six personnes de plus,
c'est trop… on se demande réellement c'est quoi, le but de faire des affaires
au Québec. Je vois vraiment mal comment ces six personnes-là feraient toute la
différence dans la présence ou l'absence d'une compagnie au Québec.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci. C'est tout le temps que nous disposons. Alors, merci, M. Ross,
merci, M. Lesage, pour votre contribution à la commission.
Alors, nous suspendons quelques instants
les travaux, le temps de donner la chance au prochain groupe de s'installer.
Alors, merci.
(Suspension de la séance à 17 h 17)
17 h 30 (version révisée)
(Reprise à 17 h 30)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, nous commençons. Nous poursuivons. Nous souhaitons maintenant la
bienvenue aux représentants de la Chambre des huissiers de justice au Québec...
ou du Québec, pardon. Alors, j'inviterais M. Taillefer et Mme Guay à
bien vous présenter avec votre titre, et ensuite de commencer votre exposé de
10 minutes.
(Visioconférence)
M. Taillefer (François) :
Merci, Mme la Présidente. Alors, François Taillefer, président de la Chambre
des huissiers de justice du Québec. Je suis accompagné de Mme Béatrice
Guay, qui est la directrice générale de la Chambre des huissiers.
Mme Guay (Béatrice) : Bonjour.
M. Taillefer (François) :
Alors, Mme la Présidente, Mme la vice-présidente, M. le vice-président, Mmes,
MM. les membres de la commission, la Chambre des huissiers de justice du Québec
souhaite d'abord remercier les membres de la Commission de l'économie et du
travail de l'intérêt manifesté à connaître l'opinion de la Chambre des
huissiers de justice du Québec à l'égard du projet de loi n° 78
visant principalement à améliorer la transparence des entreprises. D'emblée, la
chambre appuie les objectifs du projet de loi n° 78.
Permettez-moi de préciser, en débutant,
que mes responsabilités comme président de la Chambre des huissiers de justice
motivent notre présentation d'aujourd'hui qui se veut un partage d'expérience
de la réalité à laquelle doivent faire face les huissiers de justice
relativement au registre des entreprises et à son amélioration visée par le projet
de loi.
Au niveau de l'introduction, la Chambre
des huissiers de justice, CHJQ, est un ordre professionnel à exercice exclusif
dont la mission première vise la protection du public. La Loi sur les huissiers
de justice et le Code des professions sont des lois-cadres définissant
l'exercice de la profession. Les huissiers de justice accomplissent principalement
leur mandat selon les dispositions du Code civil du Québec et du Code de
procédure civile du Québec, tout en devenant... tout en devant, pardon,
respecter diverses lois connexes listées à la section des références de notre document
à la page 8. Trois ordres professionnels relèvent du domaine du droit,
soit le Barreau du Québec, la Chambre des notaires et la Chambre des huissiers
de justice du Québec. Au total, au 31 mars 2020, on dénombrait 28 065 avocats,
3 870 notaires et 450 huissiers de justice. Obligatoirement
membres de la CHJQ, les huissiers de justice évoluent à l'intérieur de notre système
juridique selon les lois, procédures et règlements.
La profession de l'huissier de justice
comprend la signification des actes de procédure de tout tribunal, la
production de constats et toute autre fonction prévue par la loi ainsi que la réalisation
des actes à l'exécution des jugements sous l'autorité du tribunal. Par les
actes professionnels qu'il pose, l'huissier de justice contribue ainsi au
respect des droits des débiteurs et des créanciers. En lien avec la pratique
des huissiers s'ajoutent les fonctions de recherche et d'analyse qui
s'inscrivent régulièrement dans leurs démarches. À ce titre, le registre des entreprises
représente une source d'information importante et essentielle.
Au niveau du sommaire, protection du <public...
M. Taillefer (François) :
...des droits des débiteurs et des créanciers. En lien avec la pratique des
huissiers s'ajoutent les fonctions de recherche et d'analyse qui s'inscrivent
régulièrement
dans leurs démarches. À ce titre, le registre des
entreprises représente
une source d'
information
importante et essentielle.
Au niveau du sommaire,
protection du >public. À l'instar de l'ensemble des ordres
professionnels, la mission de la CHJQ porte sur la protection du public. Nous sommes...
Nous assurons la mise en oeuvre selon les différentes dispositions prévues. La
CHJQ salue cet objet du projet de loi visant la protection du public, tel
indiqué en introduction, et qui demeure omniprésent dans le document.
L'utilisation du registre des entreprises
par les huissiers de justice. Le registre des entreprises demeure un élément
important d'information pour les huissiers en exercice et leurs équipes de
travail qui consultent constamment les renseignements inscrits au registre
ainsi que les modifications. Très clairement, la fiabilité des renseignements
publiés s'avère fondamentale.
Au niveau de la fiabilité souhaitée des
renseignements. Les dispositions de l'article 125 du Code de procédure
civile prévoient la notification à une personne morale, société, association ou
autre groupement. Les huissiers doivent consulter le registre afin de vérifier,
entre autres, les adresses des dirigeants, administrateurs ou associés de
compagnie de toutes catégories de sociétés ainsi que les modifications, le cas
échéant. L'exemple de cette disposition du code démontre la pertinence que des
mises à jour des renseignements du registre des entreprises soient effectuées.
Modalités réglementaires autorisant
l'accès des huissiers de justice. Les articles 17 et 24 du projet de loi n° 35 semblent apporter des précisions à l'effet que, par
règlement, il serait permis dans certains cas et interdit dans d'autres que des
groupements puissent consulter certaines informations de nature plus
confidentielles mais disponibles au registre. La CHJQ souhaite qu'une réflexion
des membres de la commission entraîne une recommandation autorisant les
huissiers de justice en fonction à consulter toute l'information disponible au registre
des entreprises.
La mission : protection du public. La
CHJQ voit au respect de sa mission de protection du public par l'encadrement et
la surveillance de l'exercice de la profession, le programme de formation
continue, l'information au public et l'application des règles disciplinaires.
Dans la perspective de l'application de protection du public et du respect des
droits, il nous apparaît important de sensibiliser les membres de la commission
que le registre des entreprises doit demeurer un outil privilégié assurant la
protection du public, ce qui comprend les créanciers, débiteurs et officiers de
justice dans l'exercice de leur fonction. Dans cette optique, la CHJQ croit
que le respect des droits et, par ricochet, la protection du public sont
renforcés par les nouvelles exigences facilitant l'identification des
assujettis comme définis au projet de loi. L'amélioration de l'information du
registre revêt ainsi une dimension qui permettra à nos membres d'obtenir les
renseignements nécessaires afin de rejoindre plus efficacement un débiteur, et
ce, en respect des droits des créanciers. Il nous apparaît ainsi que la
protection du public s'en retrouverait améliorée.
Très brièvement, <permettez-moi...
M. Taillefer (François) :
...du registre revêt ainsi une dimension qui permettra à nos membres d'obtenir
les renseignements nécessaires afin de rejoindre plus efficacement un débiteur,
et ce, en respect des droits des créanciers. Il nous apparaît ainsi que la
protection du public s'en retrouverait améliorée.
Très brièvement, >permettez-moi
de vous rappeler que les actes professionnels des huissiers de justice précisés
dans la Loi sur les huissiers de justice du Québec et le Code des professions
comprennent principalement les responsabilités suivantes. En plus de signifier
des documents, les huissiers de justice exécutent des décisions de justice
ayant force exécutoire. Ils exercent toute autre fonction relevant de leurs
obligations professionnelles en vertu de la loi ou suivant les décisions du
tribunal. Les huissiers de justice présents dans l'ensemble de la vie économique,
sociale et juridique répondent aux demandes provenant de différents domaines
d'activité dans le milieu des affaires, le commerce et l'immobilier. Les administrateurs
publics, municipaux, provinciaux et fédéraux, les institutions financières
ainsi qui les sociétés du secteur juridique font également appel à leurs
services.
L'utilisation du registre des entreprises
par les huissiers de justice. Comme mentionné en introduction, il est
souhaitable, pour les mesures d'amélioration proposées... d'amélioration au registre
des entreprises soient implantées selon les normes élevées de qualité... Il
faut que celles-ci soient en adéquation avec les besoins des utilisateurs, dont
les huissiers qui s'y réfèrent, le registre étant une des sources principales d'information
dont ils disposent.
Les membres de la CHJQ consultent régulièrement
le registre des entreprises afin d'obtenir les noms des dirigeants, des
actionnaires d'une entreprise ou encore d'en vérifier les changements et de
possibles mises à jour. La consultation du registre permet aussi de trouver
l'adresse domiciliaire des dirigeants. Évidemment, ces renseignements
deviennent d'une grande utilité lorsque ces mêmes dirigeants ont mis fin aux
opérations de l'entreprise sans laisser d'adresse et que leurs locaux sont
délaissés sans bien.
Fiabilité souhaitée des renseignements.
Parmi les ajouts identifiés au projet de loi visant l'amélioration de la teneur
des informations, l'ajout de la date de naissance nous apparaît comme une
mesure forte. Les dates de naissance permettraient de favoriser les recherches
visant les administrateurs de sociétés et leurs dirigeants qui, volontairement
ou involontairement, ne collaborent pas avec l'huissier de justice qui doit les
retrouver et leur remettre, par exemple, une signification d'acte de procédure
ou pour signifier une citation à comparaître à un interrogatoire après le
jugement.
Cependant, l'effet découlant de l'ajout de
la date de naissance consisterait à permettre à l'assujetti de déclarer son
adresse professionnelle sans l'obligation de fournir également son adresse
domiciliaire. La CHJQ déplore cette disposition car elle a pour conséquence
d'assombrir la transparence visée au projet de loi.
À l'occasion, l'adresse professionnelle
d'un administrateur de société ou de son dirigeant n'est pas conforme à ce que
celle-ci se retrouve visée par les procédures de signification d'exécution par un
huissier de justice. Face à ces situations, la CHJQ croit que l'huissier en fonction
devrait avoir accès à toute l'information nécessaire dans l'exécution de ses
fonctions, incluant la date de naissance.
Toujours en lien avec la <fiabilité
des...
M. Taillefer (François) :
...n'est pas conforme à ce que celle-ci se retrouve visée par les procédures de
signification d'exécution par un huissier de justice. Face à ces situations, la
CHJQ croit que l'huissier en fonction devrait avoir accès à toute l'information
nécessaire dans l'exécution de ses fonctions, incluant la date de naissance.
Toujours en lien avec la >fiabilité
des renseignements du registre, nous avons porté aussi notre attention à savoir
que, par règlement, le gouvernement peut déterminer des modalités relatives à
la déclaration de certaines informations.
Sous cet angle, la CHJQ soumet l'hypothèse
d'inclure la vérification des renseignements par une approche concrète de
validation, et ainsi rehausser la fiabilité des renseignements publiés au
registre. Nous recommandons, par exemple, que soit vérifiée l'adresse professionnelle
des administrateurs et des dirigeants. Comme mentionné précédemment, les
huissiers constatent régulièrement que les adresses professionnelles les
administrateurs et leurs dirigeants ne sont pas conformes. Trop souvent ces
informations correspondent, en fait, à un casier postal ou encore à l'adresse d'un
bureau d'avocats. Évidemment, ces informations sont plutôt décevantes,
deviennent inutiles et compliquent grandement les recherches. Ne pouvant se
servir adéquatement de ces informations... ont pour effet de retarder le
processus de recherche de l'huissier en quête de trouver un administrateur ou
un dirigeant.
• (17 h 40) •
Accès aux huissiers de justice à
l'information aux modalités réglementaires. Les articles 17 et 24 semblent
apporter des modalités d'exclusion concernant l'information relative aux
personnes physiques. La CHJQ recommande que ses membres, lorsqu'ils sont en
fonction, aient accès à toute information disponible concernant les assujettis
et personnes morales constituées au Québec identifiés au projet de loi
n° 78. Cette option bien légitime s'inscrit dans l'orientation
d'efficacité du système judiciaire.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
En conclusion. Vous n'avez plus de temps.
M. Taillefer (François) :
Oh! pardon.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
C'est beau? Parfait. Donc, vous arrêtez là, c'est parfait. Alors, écoutez, nous
allons commencer la période d'échange. Nous y allons d'abord, au départ, avec
M. le ministre. La parole est à vous. Vous disposez de 16 min 30 s.
M. Boulet : Merci, Mme la
Présidente. Merci, M. Taillefer. Merci, Mme Guay. Évidemment, la
Chambre des huissiers de justice du Québec est un groupe extrêmement intéressé
par un projet de loi de la nature de celui que nous discutons aujourd'hui en
commission parlementaire. Vous avez un mémoire très bien écrit, très bien
rédigé. Je comprends bien les intérêts des huissiers, là, ayant déjà pratiqué
dans un secteur où j'avais des relations avec certains huissiers.
Évidemment, c'est une loi qui vise à
améliorer la transparence des compagnies, pas la transparence des individus.
Puis ce qui nous préoccupe, c'est de toujours trouver un équilibre entre la
protection de la vie privée et l'intérêt public. C'est pour ça que l'adresse
personnelle, dans la mesure où une des nouveautés de ce <projet...
M. Boulet : ...compagnies,
pas
la transparence des individus. Puis ce qui nous préoccupe, c'est de toujours
trouver un équilibre entre la protection de la vie privée et l'intérêt public.
C'est pour ça que l'adresse personnelle, dans la mesure où une des nouveautés
de ce >projet de loi là... Dans la mesure où on peut faire une recherche
par nom, c'était beaucoup plus opportun de s'assurer que l'adresse personnelle
soit protégée, ne soit pas accessible au public dans la mesure où la personne
donne une adresse professionnelle. Et, pour nous, ça nous apparaissait
extrêmement important. Ce n'est pas les individus à qui on demande d'être plus
transparents, c'est les entreprises qui font affaire au Québec et qui doivent
être immatriculées au registre des entreprises du Québec.
Mais, M. Taillefer, je vais prendre
la balle au bond, je vais... Tu sais, on va regarder l'article 125
ensemble. Tu sais, quand vous devez signifier... quand que vous devez notifier
une procédure, quand c'est une personne morale, c'est à son siège social, ce
n'est pas à l'adresse personnelle. Si le siège social est à l'extérieur du
Québec, c'est à l'un de ses établissements au Québec. Le deuxième paragraphe de
125, si c'est une société en nom collectif, il y en a beaucoup, ou une société
en commandite, on dit que c'est à son bureau, donc c'est l'adresse
professionnelle. <Si c'est un... >Là, cependant, si c'est un
fiduciaire, un liquidateur, une personne morale ou d'une entreprise... un
syndic de faillite, là, ça peut se faire à son domicile, mais on dit bien, à 125,
ou à son lieu de travail.
Ça fait que je veux juste comprendre,
quand vous êtes dans une impasse, quand vous n'avez pas la bonne adresse
personnelle, mettons, et là vous vérifiez au registraire des... Expliquez-moi
donc la démarche qu'un huissier fait quand il est confronté à une impasse, à
une impossibilité de signifier une procédure judiciaire à quelqu'un. C'est
quoi, la nature de la relation avec le registraire, là? Oui.
M. Taillefer (François) : O.K.
Bien, à titre d'exemple, ça arrive assez fréquemment qu'on doive procéder à une
saisie, par exemple, dans une place d'affaires incorporée ou limitée, peu
importe. On arrive sur les lieux, la bâtisse est là, il n'y a rien à
l'intérieur, il n'y a plus personne, il n'y a plus de meuble, et, dans le cadre
de l'exécution, notre client veut qu'on signifie le document d'une manière ou
d'une autre.
Alors, 125 prévoit qu'on puisse signifier
une compagnie à son dirigeant où qu'il soit. «Où qu'il soit», ça comprend,
évidemment, son lieu de travail, mais ça comprend aussi son domicile. Et, en
pratique, un domicile, c'est plus simple, c'est plus facile pour l'huissier de
trouver le représentant de la compagnie à son domicile qu'une place d'affaires
parce que, souvent, les dirigeants hauts gradés, là, le président,
vice-président ou le secrétaire d'une entreprise, c'est rare qu'on en trouve,
dans ma relation, depuis 35 ans que je suis huissier, qui sont sur place,
dans leur lieu de travail. On a plus de faciliter à les trouver <au...
M. Taillefer (François) :
...plus simple, c'est plus facile pour l'huissier de trouver le représentant de
la compagnie à son domicile qu'une place d'affaires parce que, souvent, les
dirigeants hauts gradés, là, le président, vice-président ou le secrétaire
d'une entreprise, c'est rare qu'on en trouve, dans ma relation, depuis
35 ans que je suis huissier, qui sont sur place, dans leur lieu de
travail. On a plus de faciliter à les trouver >au domicile.
C'est dans ce sens-là que je précise que
125, si on enlève l'adresse domiciliaire puis on doit aller au travail... Puis
les personnes qui collaborent, ça va, il n'y a pas de problème, mais ceux qui
ne collaborent pas, puis malheureusement il y en a trop, ils demandent à leur
secrétaire : Bien, si un huissier se présente, tu as juste à dire que je
ne suis pas là. On laisse des cartes d'affaires, on n'a pas de retour d'appel. C'est
dans ce sens-là que c'est plus facile d'avoir une adresse du domicile pour
remettre le document et/ou poser des questions au président de la compagnie.
Par exemple, bon, la compagnie est fermée,
les actifs sont à quel endroit? Je parle, par exemple, quand on a une saisie
pour une banque qui réclame des biens qu'ils ont financés alors que l'entreprise
a pignon sur rue, mais, comme je vous disais tantôt, les locaux sont vides,
alors ils sont allés où, les objets, les biens qui ont été financés. Ce genre
de question là qu'on doit poser aux administrateurs ou aux dirigeants des
entreprises, bien, il faut les retrouver. Il faut les retrouver pour être
capables de leur poser les questions, de leur remettre les documents.
Et souvent le demandant va nous demander
peut-être d'aller procéder à un interrogatoire après jugement par rapport aux
actifs de la compagnie. Bien, je me répète, c'est plus facile, dans ce cadre-là,
d'avoir l'adresse domiciliaire pour avoir accès au dirigeant rapidement.
M. Boulet : O.K., je
comprends. Puis vous dites : Oui, c'est plus facile, plus simple à
l'adresse personnelle. En même temps, nous, on a toujours le défi de protéger
les renseignements personnels.
Et, en pratique, puis conformément à
l'application de la Loi sur la publicité légale des entreprises, si un huissier,
puis on a des cas, là, par exemple, il vérifie au Registraire des entreprises,
puis l'adresse est inexacte, comme vous le disiez, M. Taillefer, on va là,
il n'y a rien, c'est une adresse bidon, là, il y a une bâtisse, mais il n'y a
aucun meuble, il n'y a absolument rien, donc vous ne pouvez pas signifier la
procédure à moins de la laisser au seuil de porte, ce qui est incertain, là, en
termes de résultats.
Mais, si le registraire tente de rectifier
l'identité de l'adresse et qu'il n'est pas en mesure... s'il n'a pas d'adresse
exacte, là il est en mesure de vous donner l'adresse personnelle. Ça fait que c'est
comme un moyen alternatif, à défaut, par l'huissier de signifier. Est-ce que ça
vous est déjà arrivé de vivre de type de cas là ou d'expérience,
M. Taillefer?
M. Taillefer (François) :
Assez rarement parce que, règle générale, dans une entreprise, il y a plus qu'un
administrateur ou actionnaire. Si je m'en vais à l'adresse du président, parce
que je pars toujours du plus haut au plus bas, si le président, l'adresse
domiciliaire que j'ai au registre n'est pas bonne parce qu'il est déménagé, ou
peu importe la raison, je vais passer au deuxième, au troisième jusqu'à tant
que je trouve quelqu'un, un des dirigeants ou un des administrateurs de la
compagnie, qui puisse répondre à mes questions puis qui puisse recevoir copie
de la procédure que je dois remettre.
Ça fait que c'est dans ce sens-là que je
vous disais : C'est plus facile au niveau des adresses domiciliaires,
parce <que...
M. Taillefer (François) :
...ou
peu importe la raison, je vais passer au deuxième, au troisième
jusqu'à tant que je trouve quelqu'un, un des dirigeants ou un des
administrateurs de la compagnie, qui puisse répondre à mes questions puis qui
puisse recevoir copie de la procédure que je dois remettre.
Ça fait que c'est dans ce sens-là que
je vous disais : C'est plus facile au niveau des adresses domiciliaires,
parce >que, règle générale, les administrateurs, bien, les fins de
semaine, ils sont à la maison ou, le soir, théoriquement, ils sont à la maison,
tandis que les adresses d'entreprise, bien, règle générale, c'est de 9 à 5. Si
les personnes qu'on recherche ne sont pas à l'entreprise, après 5 heures,
c'est fermé, ça ne donne rien d'y retourner, on sait que c'est fermé, on
retourne le lendemain. Comme je vous disais tantôt, les gens qui ne collaborent
pas, bien, c'est facile d'aller... on bloque à la réception puis on se fait
dire que M. ou Mme dirigeante Untelle ou Untelle n'est pas présente. Alors, ça,
malheureusement on voit ça trop souvent dans notre profession.
M. Boulet : O.K. Donc,
bon, je comprends, là, vous réitérez que c'est plus facile, plus simple avec
l'adresse personnelle, mais est-ce que vous avez eu des cas où, par exemple,
l'adresse professionnelle ou l'adresse du lieu de travail, là, parce que c'est
comme ça que c'est écrit à l'article 125 du Code de procédure civile, c'est
bidon, c'est une coquille, vous n'êtes pas capable de signifier, vous allez au registraire,
on demande... on vérifie, on tente de rectifier l'adresse, à défaut, on vous
donne l'adresse personnelle... Est-ce que c'est arrivé des cas où vous vous
êtes retrouvé, tu sais, comme, le bec à l'eau, incapable de signifier parce
qu'incapable à l'adresse professionnelle puis incapable d'obtenir l'adresse
personnelle de la part du Registraire des entreprises? Est-ce qu'il y a eu des
cas vécus comme ça, M. Taillefer?
M. Taillefer (François) :
Très peu souvent, M. le ministre, très peu souvent.
M. Boulet : O.K.
M. Taillefer (François) :
Parce que, règle générale, quand on consulte le registre actuel avec les
adresses des domiciles, c'est assez rare qu'on n'a pas de résultat.
M. Boulet : O.K. Puis
vous comprenez notre approche, on s'est dit : Comme dorénavant c'est
possible de faire une recherche au registre par nom, bien, évidemment comme c'est
déjà un peu intrusif, pour le bénéfice de la transparence corporative, on veut,
en même temps, minimiser l'impact sur la vie privée et s'assurer de protéger
l'adresse personnelle. On donne quand même la faculté d'identifier une adresse
professionnelle et, le cas échéant, l'adresse personnelle devient non
accessible au public. O.K., je pense qu'on se comprend bien.
• (17 h 50) •
Est-ce qu'il y a d'autres contextes que
vous pourriez nous soumettre où les huissiers de justice ont à transiger avec
le registraire? Parce que je réalisais qu'il y a 19 millions de
consultations au registre par année au Québec, puis, j'imagine, les huissiers
sont dans les demandeurs. Il y a beaucoup de demandes de la part des huissiers,
mais est-ce qu'il y a d'autres contextes que pour obtenir l'adresse personnelle
de quelqu'un pour fin de signification de procédures judiciaires? Encore une
fois, comme vous venez de le mentionner, c'est arrivé très peu souvent que vous
vous êtes retrouvés le bec à l'eau, mais est-ce qu'il y a d'autres <contextes...
M. Boulet : ...
il y a
beaucoup de demandes de la part des huissiers, mais est-ce qu'il y a d'autres
contextes que pour obtenir l'adresse personnelle de quelqu'un pour fin de
signification de procédures judiciaires? Encore une fois, comme vous venez de
le mentionner, c'est arrivé très peu souvent que vous vous êtes retrouvés le
bec à l'eau, mais
est-ce qu'il y a d'autres >contextes où vous
avez à transiger ou intervenir auprès du registraire?
M. Taillefer (François) :
C'est très fréquent, là, c'est tous du cas par cas, mais je vais parler de mon
expérience personnelle. Quand on veut valider la situation de l'entreprise qui
a pignon sur rue et on se fait dire, par exemple, là, que tu n'es pas à la
bonne place, puis notre mandant nous dit qu'on est à la bonne place, alors la
seule façon de valider hors de tout doute, hors de tout doute entre guillemets,
c'est d'avoir accès au registre, ce qu'on fait présentement, alors je vais
aller consulter le registre.
Si la compagnie ABC incorporée est
toujours située à cette adresse-là, les noms des dirigeants, c'est les mêmes,
et on me dit que je ne suis pas à la bonne place, alors, moi, le registre, il
n'y a pas de déclaration modificative, il n'y a pas de radiation de
l'entreprise, là ça me permet d'avoir des doutes sur ce que les gens me disent.
Parce que, comme je vous dis, règle générale, on a une bonne collaboration des
citoyens corporatifs, mais il arrive à l'occasion que les gens veulent tricher,
et c'est facile de se faire dire : Bien, écoutez, la compagnie a déménagé,
ce n'est pas nous.
Bon, le registre demeure un outil
essentiel pour les huissiers, là. Tous les huissiers que j'ai consultés,
régulièrement, à toutes les semaines, on va aller consulter le site du
registre, peu importe les circonstances. Des fois, c'est pour trouver un
dirigeant, mais des fois c'est pour valider si une entreprise est toujours
existante, toujours valide. Si c'est ABC incorporée qui a changé pour 123
Canada inc., puis, en arrière, c'est les mêmes dirigeants, puis que mon client
dit : Bien, écoute, fais ta saisie parce que moi, je vais faire lever le
voile corporatif, bien, avant de dire oui à mon client, je veux juste m'assurer
que moi, de mon côté, je ne fais pas de faute, puis qu'effectivement c'est le
même monde, c'est les mêmes actifs. Alors, je me répète, le registre, c'est un
outil indispensable pour nous.
M. Boulet : Ah! tout à fait.
Puis je comprends bien, M. Taillefer, puis je comprends pourquoi vous
dites que ça va être bénéfique, là, non seulement la recherche par nom, là,
mais l'obligation de divulgation des bénéficiaires ultimes. Ça va vous donner
accès à une mine d'informations qui va faciliter l'exécution de votre travail,
hein, c'est ce que je comprends?
M. Taillefer (François) : Tout
à fait, M. le ministre, tout à fait.
M. Boulet : O.K. Bien, merci
beaucoup. Moi, ça complétait... Est-ce que... Peut-être dernière question, M. Taillefer.
Si vous me dites : Il y a eu très peu de cas, mais il n'y a pas de moyen
alternatif au registre des entreprises? Si jamais vous vous retrouvez dans une
impasse totale, il n'y a pas d'autre... c'est comme le dernier recours, le
registre?
M. Taillefer (François) :
Bien, pour nous, oui. Après ça, bien, si le client veut dépenser un peu plus,
bien, il y a toujours des agences de détectives privés qui peuvent pousser la
recherche. Ça, ça fait partie des choses qu'on peut proposer au client.
Évidemment, ce n'est pas les mêmes coûts, ça dépend toujours du mandat, puis
c'est quoi, le budget, puis c'est le client qui décide.
Mais, nous, notre travail d'huissier, le
registre, c'est très facile, c'est très accessible. On peut consulter ça de
notre téléphone ou de notre ordinateur dans le véhicule. C'est un outil
indispensable, superutile, mais malheureusement, si quelqu'un veut se cacher,
il va réussir à se cacher de toute façon. <Alors...
M. Taillefer (François) : ...du
mandat, puis c'est quoi, le budget, puis c'est le client qui décide.
Mais, nous, notre travail d'huissier,
le registre, c'est très facile, c'est très accessible. On peut consulter ça de
notre téléphone ou de notre ordinateur dans le véhicule. C'est un outil
indispensable, superutile, mais malheureusement, si quelqu'un veut se cacher,
il va réussir à se cacher de toute façon. >Alors, rendu là, nous,
l'huissier, bien, fait le rapport à son client : Écoutez, ça ne fonctionne
pas pour telle ou telle raison, et j'ai vérifié le registre, je ne suis pas
capable de trouver les dirigeants pour telle ou telle raison, à l'impossible
nul n'est tenu. Ça fait que là ce sera au mandant de décider : Il veut-u
pousser plus loin son enquête ou pas?
M. Boulet : Ah! tout à fait.
Puis c'est un registre qui est public et gratuit, alors que, dans les autres
provinces, par exemple, il faut faire une recherche par entreprise, c'est des
registres par entreprise, d'où l'immense différence avec ce que nous faisons
ici au Québec en matière de transparence corporative.
Merci, M. Taillefer. Merci, Mme Guay.
Bien apprécié vous rencontrer, puis au plaisir. Au revoir.
M. Taillefer (François) :
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Alors, merci pour cet échange. Nous poursuivons avec le groupe
d'opposition officielle, avec le député de Nelligan et le député de
Robert-Baldwin. Vous disposez de 11 minutes.
M. Derraji : Merci, Mme Guay
et M. Taillefer, pour votre présence et pour le rapport que vous avez fait
parvenir aux membres de la commission. Au fait, votre expertise est extrêmement
importante parce que vous êtes, je dirais, parmi les groupes, et je vois les
chiffres de consultation,<... les groupes> qui utilisent le plus
le registre des entreprises. Corrigez-moi si je me trompe.
M. Taillefer (François) : On
l'utilise très fréquemment, oui. C'est un outil indispensable.
M. Derraji : C'est un outil
indispensable. Si le registre n'existe pas aujourd'hui au Québec, probablement
que vous allez avoir des problèmes pour travailler et fonctionner.
M. Taillefer (François) : Absolument.
C'est impensable que ça n'existe pas, on ne pourra pas... On va se mettre des
bâtons dans les roues de façon épouvantable. Ça fait 35 ans que j'utilise
le registre, et je ne me vois pas pratiquer ma profession sans cet outil-là,
qui est essentiel et indispensable.
M. Derraji : Voilà. Bien, vous
me facilitez la tâche, parce que j'ai quelques questions, mais je vais
commencer à vous poser une question pour bénéficier, au fait, de vos 35 ans
d'expérience. Vous avez beaucoup d'expérience entre vos deux mains et vous avez
vu beaucoup de cas d'entreprise, et autres.
Donc, aujourd'hui, je vais poser ma
première question d'une manière très directe : Est-ce que le contenu que
le registre a aujourd'hui est suffisant? Deux : Pensez-vous que l'équipe
du registraire est assez équipée avec les moyens humains mais aussi
technologiques, d'être à jour et de vous aider à jouer votre rôle aussi? Parce
que vous jouez un rôle, mais je pense que le Québec s'est doté de ce registre
justement pour qu'on joue notre rôle au niveau de la transparence.
M. Taillefer (François) :
Bien, pour répondre à votre question, présentement, le registre, moi,
personnellement, il me convient. L'ajout de la date de naissance, je pense que
c'est un plus, personnellement, pour l'ensemble de la profession des huissiers
parce que, je me répète, les gens qui ne collaborent pas, qui veulent se
cacher, c'est beaucoup plus facile de trouver quelqu'un avec une date de
naissance. Alors, <quand...
M. Taillefer (François) : ...b
ien,
pour répondre à votre question, présentement, le registre, moi, personnellement,
il me convient. L'ajout de la date de naissance, je pense que c'est un plus,
personnellement, pour l'ensemble de la profession des huissiers parce que, je
me répète, les gens qui ne collaborent pas, qui veulent se cacher, c'est
beaucoup plus facile de trouver quelqu'un avec une date de naissance. Alors,
>quand on donne ça à un détective privé, c'est la première question qu'il
va nous poser : François Taillefer, oui, mais as-tu sa date de naissance?
Si je ne l'ai pas, ça va rendre des recherches excessivement difficiles puis beaucoup
plus coûteuses. Ça fait que ça, en ce qui me concerne, c'est un plus, la date
de naissance, c'est une excellente idée en ce qui nous concerne.
M. Derraji : Oui. Vous avez
dit, dans votre mémoire, que le gouvernement se garde un pouvoir réglementaire
de déterminer les modalités relatives aux informations à déclarer. La chambre
propose que soit vérifiée l'adresse professionnelle des administrateurs et des
dirigeants. Avec votre expérience, avez-vous constaté des lacunes vu qu'on n'a
pas d'adresse professionnelle des administrateurs et des dirigeants?
Le but, selon vous, est de s'assurer que
les adresses sont conformes. Et vous avez vu comme nous, récemment on a vu que
le gouvernement, dans le cadre de la pandémie, avait donné des contrats gré à
gré à des entreprises. On s'est ramassés avec des boîtes postales au Mexique et
des boîtes postales aussi aux États-Unis. Donc, parfois, même le gouvernement
risque de se faire avoir quand il fait affaire avec des entreprises. Donc,
est-ce que vous pensez qu'il y a d'autres améliorations qui peuvent être
faites, à part ce que vous avez écrit dans votre mémoire?
M. Taillefer (François) :
Bien, écoutez, c'est délicat pour moi de répondre, parce que ça m'est arrivé à
quelques reprises dans ma carrière, au Québec, d'avoir les adresses de casiers
postaux, soit avec Postes Canada ou soit des casiers postaux privés. Alors, à
partir de ce moment-là, Postes Canada, c'est impossible, en tout cas pour nous,
les huissiers, d'avoir l'adresse de la personne qui loue le casier. Il y a eu
un débat avec les avocats d'Ottawa à ce niveau-là il y a quelque temps, et je
me suis fait dire d'arrêter d'insister, c'est sûr qu'ils ne répondraient pas à
ces questions-là.
Ça n'arrive pas souvent, mais, quand ça
arrive, bien, c'est l'adresse qu'on retrouve au registre, si ça correspond à
une adresse de casier postal, ce n'est pas évident pour personne de valider ça.
Parce que, souvent, ça va être marqué... ça ne sera pas marqué «casier», ça va
être marqué «appartement 103» avec un nom de rue qui existe. C'est en se
rendant sur place qu'on se rend compte que c'est un dépanneur qui loue
peut-être 10, 15, 50 casiers. Alors, ça induit tout le monde en erreur,
mais c'est délicat pour le registre ou pour n'importe qui d'aller valider
adresse par adresse.
Puis ça, malheureusement, ça n'arrive pas
souvent, tant mieux, mais quand ça arrive... C'est pour ça que je disais tantôt :
Si c'est possible de passer au deuxième puis au troisième dirigeant, quand il y
en a, parce qu'il y a des entreprises qu'il y a juste une personne actionnaire
puis juste un administrateur, si cette personne-là donne l'adresse de son
avocat ou l'adresse d'un casier postal, bien là, notre travail d'huissier est
bloqué là. Là, à partir de ce moment-là, il faut passer à une autre étape.
Comme je vous expliquais tantôt, la seule que je connaisse, c'est de donner ça
à un détective privé.
Mais, avec la date de naissance, je me
répète, le détective privé, si je lui dis : Bon, le nom du dirigeant c'est
M. Untel, Mme Unetelle, telle date de naissance, ça va...
18 h (version révisée)
M. Taillefer (François) : ...avocat
ou l'adresse d'un casier postal, bien là, notre travail d'huissier est bloqué
là. Là, à partir de ce moment-là, il faut passer à une autre étape. Comme
j'expliquais tantôt, la seule que je connais, c'est de donner ça à un détective
privé. Mais, avec la date de naissance, je me répète, détective privé, si je
lui dis : Bon, le nom du dirigeant c'est M. Untel, Mme Unetelle,
telle date de naissance, ça va faciliter grandement ses recherches.
M. Derraji : Oui, merci.
Dernière question avant que mon collègue... j'en suis sûr, il va vous poser des
questions aussi. Vous dites : En vertu des articles 17 et 24, des
exclusions, quant à l'accès aux données des personnes physiques, la Chambre
demande que, lorsque ces membres sont en fonction, ils aient accès à l'ensemble
des données concernant les assujettis et personnes morales, constituées au Québec,
identifiées au projet de loi n° 78. Pouvez-vous juste clarifier le
pourquoi que vous voulez que vos membres aient accès à l'ensemble des données?
M. Taillefer (François) :
C'est que, si j'avais le registre des informations qui ne sont pas publiques
quand on consulte, je dis bien «si» avec un S majuscule, nous, les huissiers,
on aimerait être capables... huissiers en fonction qui ne sont pas pour les
affaires personnelles, mais un huissier qui a un mandat, qui a besoin de
trouver un dirigeant puis, pour une raison ou pour une autre, on n'est pas
capables, bien, si le registre à l'adresse domiciliaire... je comprends que
vous voulez protéger les renseignements personnels puis je respecte ça, mais
dans des cas comme celui-là où est-ce que le huissier est capable de faire les
démonstrations que ça ne donne rien, les consultations n'ont pas abouti, et on
sait que le registre a des informations qui ne sont pas publiques, on aimerait
y avoir accès si c'est possible. C'est dans ce sens-là qu'on a écrit le mémoire.
M. Derraji : O.K., merci. Je
pense que mon collègue a des questions, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Parfait, merci. Alors, la parole est au député de Robert-Baldwin. Il vous reste
4 min 30 s
M. Leitão : Très bien, merci
beaucoup. Alors, c'était là où je voulais aller, Mme la Présidente. Alors, vous
voyez, moi et mon collègue, même si on n'est pas à la même place physiquement,
mais mentalement, on se complète, mais je pense que c'est une question très importante.
Donc, vous souhaiteriez, en tant qu'huissier, d'avoir accès aux informations du
registre qui ne sont pas publiques. On comprend que le registre avec les modifications
qu'on s'apprête à faire va disposer de plus d'informations que qu'est-ce qu'il
a présentement. Les informations ne seraient pas nécessairement rendues
publiques, comme l'adresse, par exemple. Et vous, en tant qu'huissier, vous
aimerez avoir une espèce de permission spéciale d'avoir accès à toute l'information
du registre, c'est bien ça?
M. Taillefer (François) : Dans
la mesure du possible, oui, c'est bien ça, oui.
M. Leitão : Et vous pensez que
c'est faisable? Vous pensez que c'est... Bon, vous seriez en train de suivre un
mandat, donc de poursuivre un mandat, des fois même, suite à une intervention
de la cour, et donc ça pourrait vous donner l'autorisation de consulter tout le
registre. Parce que, moi, je ne suis pas avocat, je ne sais pas, là. Est-ce que
c'est faisable, une telle chose, de vous donner à vous, huissier, accès à un
registre que les autres ordres professionnels ou le public en général <n'auraient...
M. Leitão : ...donc ça
pourrait vous donner l'autorisation de consulter tout le registre.
Parce
que, moi, je ne suis pas avocat,
je ne sais pas, là.
Est-ce que
c'est faisable, une telle chose, de vous donner à vous, huissier, accès à un
registre que les autres ordres
professionnels ou le public en général
>n'auraient pas accès?
M. Taillefer (François) :
Bien, je pense que oui, là, c'est avec tout le respect pour l'opinion
contraire, mais un huissier muni d'un mandat qu'il n'est pas capable d'exécuter
parce que les adresses qu'on trouve, soit professionnelles ou soit de la
compagnie, ne donnent strictement rien... J'expliquais tantôt que quelqu'un qui
ne veut pas répondre dans une entreprise, c'est qu'on bloque à la réception.
Puis ça, c'est des choses qui arrivent malheureusement trop souvent, et si on
n'a pas d'adresse domiciliaire, le travail s'arrête là. Alors, si je suis
capable de faire les démonstrations au registre, je parle à quelqu'un du
registre : Voici, voici ce que j'ai fait comme démarche, ça n'a pas
fonctionné à tel, tel endroit, tel, tel endroit au travail, ça ne fonctionne
pas, je n'ai aucune collaboration, j'aimerais si possible avoir l'adresse du
domicile, si le ministère, dans son règlement, peut permettre ça aux huissiers,
ça serait très apprécié de notre part.
M. Leitão : Très bien, je
comprends. M. le ministre, je ne sais pas si c'est faisable ou pas, mais je
pense qu'on en discutera.
L'autre chose, c'est le fait que le
registre va être aussi bon que l'information qu'on y met dedans, c'est un peu
une évidence en soi-même. Mais est-ce que le registre ou le registraire devrait
avoir les moyens, non seulement de s'assurer que l'information qui lui est
donnée est la bonne information, mais de faire le suivi? Parce qu'au fil du
temps, bon, les personnes déménagent, les compagnies aussi, donc de s'assurer
que le registre est toujours à jour. Est-ce que cela est la... c'est le registraire
qui a l'obligation de s'assurer que c'est toujours à jour ou est-ce que c'est
l'entreprise elle-même qui aurait l'obligation de communiquer des changements?
Comment est-ce que vous voulez... comment est-ce que vous voyez cet...
M. Taillefer (François) :
Bien, présentement, c'est, je pense, corrigez-moi si je me trompe... mais c'est
les entreprises qui ont l'obligation, quand ils changent quelque chose, de
faire une déclaration modificative. C'est très accessible, ça se fait très
facilement puis, en plus de ça, c'est gratuit. Est-ce que c'est toutes les
entreprises qui le font? La réponse, c'est non. Est-ce que c'est au registre de
vérifier tout le monde? Je pense, je me répète, que ça serait excessivement
difficile, mais dans le meilleur des mondes, c'est sûr que, dans un monde
idéal, il faudrait que les informations qui se retrouvent au registre soient le
plus conformes possible. Mais je comprends qu'à l'impossible, nul n'est tenu.
Mais règle générale, les gens qui
collaborent — quand je parle des gens, je parle des citoyens
corporatifs — qui font leurs modifications, nous, on a accès à ça
directement : Déclaration modificative, un dirigeant a démissionné la
veille, bon. À partir de ce moment-là, moi, j'avise mon client : Écoute,
on n'a pas la bonne personne, il a démissionné, c'est marqué dans le registre,
à condition que ça soit fait au jour le jour, mais je parle pour les gens qui
ne collaborent pas. La minorité qui ne collabore pas, c'est avec eux qu'on a
des problèmes. La fameuse boîte postale, c'est comme j'expliquais tantôt, ça
arrive trop souvent. Alors, je vais vous donner un exemple : Vous avez
deux camions <tracteurs...
M. Taillefer (François)T :
...j'avise mon client : Écoute, on n'a pas la bonne personne, il a
démissionné, c'est marqué dans le registre, à condition que ça soit fait au
jour le jour, mais je parle pour les gens qui ne collaborent pas. La minorité
qui ne collabore pas, c'est avec eux qu'on a des problèmes. La fameuse boîte
postale, c'est comme j'expliquais tantôt, ça arrive trop souvent. Alors, je
vais vous donner un exemple : Vous avez deux camions >tracteurs à
saisir. Je me ramasse dans une boîte postale. C'est certain que les camions ne
sont pas là. Et on fait quoi, là? La compagnie, c'est la boîte postale. Est-ce
que... Puis après, le dirigeant, pas capable de le trouver. L'adresse au
domicile n'est pas bonne. Bon, j'ai été très chanceux, je me suis fait arrêter
pour un excès de vitesse, puis c'est le policier qui m'a amené à l'aéroport de
Dorval. Il dit : Regarde, je pense que, dans ce coin-là, tu vas avoir les informations.
Puis, comme de fait, j'ai trouvé un employé qui n'était pas content, là, de son
patron puis qui m'a tout dénoncé ce que je devais savoir. Mais ça, c'est un
coup de chance.
Des voix
: Ha, ha, ha!
M. Taillefer (François) :
Mais le registre ici... c'est pour ça que j'insiste beaucoup sur le lieu de
travail parce qu'évidemment que, les huissiers, on a des petits trucs. Et, bon,
sans tout dévoiler ça, au domicile, c'est facile de savoir si les gens ne sont
pas là. On va là un samedi matin tôt. Il y a du va-et-vient dans la maison, bien,
c'est facile de savoir si la personne est là puis elle ne répond pas, puis elle
ne collabore pas. Après ça, on va prendre d'autres démarches. On peut
s'adresser à un juge pour aller chercher des instructions. Mais c'est pour ça
que j'insiste, autant que puisse se faire, si c'est possible de votre côté, de
nous permettre d'avoir accès au domicile quand ça ne fonctionne pas, les autres
façons.
M. Leitão : Une dernière
question. Est-ce que j'ai encore le temps?
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Vous avez déjà grugé une minute.
M. Leitão : Ah! Bon. O.K.
Ça va. Merci, c'était excellent. Merci beaucoup.
La Présidente
(Mme IsaBelle) : Alors, nous poursuivons avec le député de
Rosemont. Vous disposez de 2 min 45 s.
M. Marissal : Merci, Mme
la Présidente, Mme Guay, M. Taillefer. Bon, vous avez la solution,
M. Taillefer. Pas besoin du registre. Faites-vous arrêter par la police,
puis ça va régler vos problèmes, là. Excusez-moi, c'est une blague. Vous êtes
le dernier témoin d'une longue journée. Alors, je me suis permis de faire cette
petite blague. Mais, plus sérieusement, si d'aventure nous devions prendre
votre suggestion puis accorder aux gens de votre profession une dérogation, qui
est quand même quelque chose d'important que vous demandez, là, parce qu'en
regard de la protection des renseignements personnels, ce n'est pas banal, ce
que vous demandez. Puis nous, on fait l'équilibre de ça, là. Oui, il y a la
transparence, mais l'équilibre aussi de la protection des renseignements
personnels, est-ce que... Votre argument est déjà convaincant, mais est-ce que
vous iriez jusqu'à dire que de ne plus avoir ce renseignement-là ou cette
possibilité-là pourrait, à la limite, même dans l'absurde, nuire à
l'application de lois comme celles-ci qu'on essaie de perfectionner et puis
d'appliquer, notamment pour la transparence? Je suis conscient de vous donner
des arguments, là. Je ne pensais jamais donner des arguments à un huissier, là,
mais, voilà, je viens de le faire.
M. Taillefer (François) :
Bien, je suis d'accord avec vous. Oui, ça pourrait nuire à... Oui, tout à fait.
Puis je comprends très bien la protection des renseignements personnels, mais
présentement le registre est fait comme ça. On les a déjà, les adresses
personnelles. Et je me répète, pour nous, c'est indispensable. Alors, je
comprends que si on n'y a pas accès puis qu'on est capables de faire le travail
avec ce qui va être accessible avec la nouvelle loi, parfait. Les cas
exceptionnels où est-ce que ça ne fonctionnera pas, bien, on demande justement
cette dérogation-là si c'est <possible...
M. Taillefer (François)T :
...
registre est fait comme ça. On les a déjà, les adresses personnelles.
Et je me répète, pour nous, c'est indispensable. Alors, je comprends que si on
n'y a pas accès puis qu'on est capables de faire le travail avec ce qui va être
accessible avec la nouvelle loi, parfait. Les cas exceptionnels où est-ce que
ça ne fonctionnera pas, bien, on demande justement cette dérogation-là si c'est
>possible que le ministre, dans son règlement, permettre à un huissier
en fonction d'avoir l'avantage ou le privilège d'aller chercher un petit peu
plus que ce qui est publié.
• (18 h 10) •
M. Marissal : Dites-moi,
M. Taillefer, je ne suis pas très familier avec le travail des huissiers,
là, c'est probablement un milieu comme ça, prenez-le pas mal, mais je ne
préfère pas parler trop souvent à des huissiers, si ce n'est que pour mieux
connaître votre profession. Quel est le pourcentage de dossiers que vous avez
pour lequel vous avez déjà toutes les infos? Parce que vous ne partez pas
toujours de zéro, là. Je présume que, quand on vous donne un ordre de cour ou
quand vous suivez une procédure, le dossier a déjà été monté. Autrement dit, le
pourcentage de dossiers où vous pouvez partir faire votre job sans avoir besoin
du registre ou de fouiller davantage.
M. Taillefer (François) :
Bien, règle générale, quand on part avec un document, on a toutes les
informations. C'est rendu sur place qu'on s'aperçoit si l'information est bonne
ou pas. Et la facilité avec le registre, c'est que c'est très facile et très
accessible pour consulter. Peu importe la situation, dès que c'est une
entreprise et je m'aperçois que le lieu d'affaires, la place d'affaires, la
compagnie, peu importe, ce n'est pas bon, automatiquement, je vais aller
vérifier le registre voir s'il n'y a pas des modifications. Si c'est le siège
social qui a changé d'adresse, et souvent, ça peut être le cas, alors je vais
aller à l'autre adresse que je vois au registre. Et, par contre, quand c'est
vraiment fermé, puis, bon, que les gens veulent cacher leurs actifs, tricher
avec la loi, bien, c'est là que, je me répète, <c'est là que> le
domicile est important. Parce qu'il faut parler, il faut parler à nos
dirigeants des mandats qui viennent souvent de l'Agence du revenu du Québec et,
par ricochet, du fédéral. Bien, ils ont l'obligation de liquider au niveau des
entreprises. Puis, après ça, c'est directement l'actionnaire ou le dirigeant
qui va être visé. Alors, il faut savoir où le trouver. Et si l'entreprise,
bien, elle n'existe plus puis c'est juste un local vide, on perd notre temps,
on va toujours faire faire à un mur puis je ne pourrai pas signifier un
document à huit portes ou dans la boîte aux lettres de l'entreprise où est-ce
qu'il n'y a plus personne. Ça, c'est facile à vérifier, là. Règle générale, il
n'y a plus de... Ça fait qu'on voit très bien à l'intérieur de l'entreprise
qu'il n'y a plus personne, mais on va aller consulter les voisins qui vont nous
dire : Bien, c'est vide depuis trois jours, depuis deux semaines. Alors,
à partir de ce moment-là, la mission du huissier n'est pas terminée, là. Il
faut aller plus loi, nous autres, dans notre travail. Alors, il faut trouver le
dirigeant, il faut lui remettre le document, puis si on a des questions à lui
poser, il faut avoir accès à ces gens-là.
M. Marissal : Je comprends
bien. Je vous remercie, M. Taillefer.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Alors, merci. Nous poursuivons avec la députée de Gaspé. Vous disposez de
2 min 45 s.
Mme Perry Mélançon : Merci.
D'abord, bonjour... bien, bon soir. Heureuse de votre présence. Vous avez, je
pense, bien exposé, là, les raisons pour lesquelles vous nécessitez, dans le
cadre de vos fonctions, là, de l'entente des données. Je suis peut-être la
seule à me poser cette question-là en fin de consultations comme ça, mais, pour
vous, parce qu'il a été beaucoup question de ce sujet-là, là, avec d'autres
groupes précédemment...
Mme Perry Mélançon : ...
bien
exposé, là, les raisons pour lesquelles vous nécessitez, dans le cadre de vos
fonctions, là, de l'entente des données. Je suis peut-être la seule à me poser
cette question-là en fin de consultations comme ça, mais, pour vous, parce
qu'il a été beaucoup question de ce sujet-là, là, avec d'autres groupes précédemment,
est-ce que, dans le cadre de vos fonctions, justement, la question des seuils
qui se retrouve aussi dans le projet de loi qui nous est présenté, la question
des seuils d'assujettissement des bénéficiaires ultimes, qui est fixée à 25 %
ici, est-ce que... parce que là on entendait les gens qui disaient : Bien,
plus le seuil est élevé, moins sont claires les informations dont on dispose
sur les bénéficiaires ultimes. Est-ce que, pour vous, ça a un impact dans le
travail que vous faites?
M. Taillefer (François) : Non,
je ne vois pas de problème à ce niveau-là, non, pas du tout. L'important, moi,
c'est que je puisse parler à quelqu'un en autorité, peu importe c'est quoi, son
titre pour être capable d'accomplir mon mandat, peu importe c'est quoi. Alors,
parler à une personne en autorité qui peut parler au nom de la compagnie, alors
si c'est le président, c'est parfait, mais si c'est le vice-président ou le
secrétaire, c'est aussi bon. Ça peut être un administrateur dans une société,
il y a un des associés. Ça prend quelqu'un, par exemple, avec un contact
physique pour être capable de faire le travail jusqu'au bout. Parce que souvent
les ordres de cour, bien, comme je disais tantôt, oui, on part avec un
document, avec une adresse que l'avocat nous donne ou le notaire ou... ça peut
être un particulier. Il y a quelqu'un qui a un jugement qu'il veut faire
exécuter. À l'époque, il a eu son jugement à la cour, il avait une adresse, ils
se sont échangé les procédures. Il obtient un jugement, peu importe quand,
donne ça à un huissier qui s'en va faire son travail, puis là, il arrive à un
endroit qui est complètement vide ou qu'il se fait dire qu'il n'est pas à la
bonne place alors qu'il est à la bonne place, mais ça, des fois, on s'en fait
jouer des petites vites, en bon français, d'où l'importance d'être capable de
consulter rapidement, tel qu'on le fait présentement.
Mme Perry Mélançon : Parfait.
Puis, dans le fond, dans vos recommandations, vous dites : la vérification
des informations publiées au registre, le maintien de l'adresse domiciliaire
puis l'accès à toutes les informations disponibles au registre, est-ce que vous
avez autre chose à spécifier, parce qu'on a peut-être 30 secondes, là, qui
vous est attribué en conclusion...
M. Taillefer (François) : Non,
moi, je trouve qu'on a fait le tour dans notre mémoire. On vous demande ça
parce que je pense que c'est un outil de travail, je me répète, indispensable
autant que peut se faire. Puis c'est un privilège ou une... c'est ça, c'est un
privilège qu'on vous demande dans les cas où est-ce qu'on n'est pas capable de
réaliser le travail, compte tenu de ce que j'ai dit tantôt, d'avoir encore
accès au domicile dans les cas où est-ce qu'on n'est pas capable d'aller plus
loin.
Mme Perry Mélançon : Merci.
La Présidente (Mme IsaBelle) :
Merci. Merci, M. Taillefer. Merci, Mme Guay, pour votre contribution
à l'avancement des travaux de la commission.
Alors, compte tenu de l'heure, nous ajournons
les travaux jusqu'au jeudi 18 février 2021, après les affaires
courantes, où nous allons pouvoir poursuivre notre mandat. Merci. Nous vous
souhaitons une bonne soirée.
<(Fin de la séance à 18 h 15)
La Présidente (Mme IsaBelle) :
...nous allons pouvoir poursuivre notre mandat. Merci. Nous vous souhaitons une
bonne soirée.>
(Fin de la séance à 18 h 15)