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Version préliminaire

42nd Legislature, 2nd Session
(October 19, 2021 au August 28, 2022)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Tuesday, May 24, 2022 - Vol. 46 N° 21

Special consultations and public hearings on Bill 35, An Act to harmonize and modernize the rules relating to the professional status of artists


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Journal des débats

9 h (version non révisée)

(Neuf heures une minute)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour, tout le monde. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de l'économie et du travail ouverte. Je vous souhaite la bienvenue et je vous demande de bien vous assurer d'éteindre la sonnerie de votre appareil électronique.

La commission est réunie afin de procéder aux consultations particulières et aux auditions publiques sur le projet de loi n° 35, Loi visant à harmoniser et à moderniser les règles relatives au statut professionnel de l'artiste.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente : Madame Lavallée (Repentigny) est remplacée par M. Lemieux (Saint-Jean); M. Tanguay (LaFontaine) par madame St-Pierre (Acadie); et Monsieur Leduc (Hochelaga-Maisonneuve) par madame Dorion (Taschereau).

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous débutons ce matin par les remarques préliminaires puis nous poursuivrons rapidement avec les organismes suivants : l'Union des artistes et la Guilde des musiciens et des musiciennes du Québec. Ensuite, nous entendrons l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec, conjointement avec la Fédération nationale des communications et de la culture et les Travailleuses et travailleurs regroupés des arts, de la culture et de l'événementiel. Ensuite, nous entendrons l'Association nationale des éditeurs de livres et, finalement, l'Association québécoise des autrices et des auteurs dramatiques, conjointement avec l'Union des écrivaines et écrivains québécois.

Alors, nous commençons immédiatement les remarques préliminaires. J'invite maintenant la ministre de la Culture et des Communications à faire ses remarques. Vous disposez de six minutes.

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Alors, je ne prendrai pas ce six minutes, parce qu'on a des invités extrêmement importants, mais vous allez me permettre, un, de remercier à l'avance tous les groupes qui vont venir nous parler, nous expliquer dans quelle mesure le p.l. 35 va les aider, parce qu'on est ici pour améliorer les conditions socioéconomiques des artistes.

Je veux aussi remercier, d'entrée de jeu, naturellement, tous les députés qui sont autour de la table, les députés de la partie gouvernementale, mais également les oppositions. D'abord, entre autres, Québec solidaire, qui nous a fait la suggestion de changer de commission pour pouvoir être ici, pour pouvoir procéder. Ça a fonctionné, merci, mais ça a fonctionné pourquoi? Parce que tous les partis d'opposition se sont mis d'accord. Alors, je veux saluer, là-dessus, la députée de l'Acadie, entre autres, qui est ici avec nous pour faire avancer le projet. Sachez qu'avec l'accord des partis d'opposition, nous avons déjà fait adopter en accéléré l'adoption de principe. Donc, on a une étape qui est déjà franchie.

Maintenant, aujourd'hui, on y va avec les groupes. Les groupes, vous allez voir, sont rassemblés, ça aussi, c'est à la demande même des groupes pour accélérer le processus. C'est pour vous dire jusqu'à quel point on souhaite adopter ce projet de loi. C'est une suggestion des groupes, et les oppositions l'ont, encore une fois, acceptée. Et nous allons tout faire pour que ce projet de loi soit adopté le plus rapidement possible et que l'étude détaillée débute le plus rapidement possible.

Alors, je vais me taire ici pour laisser mon temps aux groupes. Merci, Mme la Présidente. Merci à l'avance pour les travaux.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous poursuivons maintenant avec la porte-parole de l'opposition officielle et députée de l'Acadie à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez de quatre minutes.

Mme St-Pierre : Merci. Merci, Mme la Présidente. Alors, je salue la ministre, toute l'équipe qui l'accompagne, les députés aussi de la partie gouvernementale, ma collègue de Taschereau. Je salue les invités qui sont avec nous ce matin et tous ceux et celles qui vont participer à cette commission parlementaire, cette consultation.

Nous avons appelé de tous nos vœux ce projet de loi depuis des mois. Nous avons demandé à ce qu'il soit déposé et adopté avant la fin des travaux parlementaires, et je souhaite bien sûr qu'il soit adopté. Je pense que c'est dans l'ordre des choses, et il y a énormément de bonne volonté de notre côté.

J'ai lu, j'ai parcouru à la vitesse grand V les mémoires. Le projet de loi n'est pas parfait, et je m'attends à ce qu'il y ait une écoute très attentive de la part de l'équipe de la ministre. Parce que moi, je n'ai pas, comme vous voyez, une armada d'avocats avec moi, et il y a des éléments très, très pertinents qui sont soulevés. Moi, je n'ai pas l'intention de faire en sorte que les travaux, là, s'éternisent puis qu'on s'accroche sur les points puis les virgules, mais il y a des choses très pertinentes qui ont été soulevées dans les mémoires, notamment, je vois l'UDA et la Guilde des musiciens, qui vont être les premiers à nous parler. Alors, il faut que ce projet de loi là aille rondement. Mais il faut aussi que l'équipe de la ministre se mette au travail. Nous n'avons eu qu'une offre de briefing pour...

Mme St-Pierre : ...projet de loi, une heure, alors que ça fait quatre ans que ce projet de loi doit être analysé, déposé, enfin, doit être évidemment conçu avant de le déposer. Et nous, nous avons eu une offre pour une heure de briefing. Alors, vous comprenez que je vais faire tout ce que je peux. Je veux faire tout mon possible. J'ai déjà été ministre de la Culture, et je comprends les attentes du milieu culturel. Ça a été aussi un engagement dans la politique culturelle de revoir la loi sur le statut d'artiste. Alors, tout le monde est unanime sur la question de revoir, moderniser la loi sur le statut d'artiste. Le monde a changé. Et il faut aussi, je pense, rendre hommage à Lise Bacon qui, à l'époque, avec la complicité de l'UDA, avaient révolutionné le milieu artistique et le monde artistique avec la Loi sur le statut d'artiste. Ces deux lois-là n'étaient pas parfaites, bien évidemment. Le monde a changé aussi, les nouvelles technologies, tout a évidemment changé depuis ce temps, mais c'était vraiment une pierre d'assise pour faire en sorte que les artistes aient de meilleures conditions de travail.

J'ai moi-même changé la loi en 2010. Encore là, ce n'était peut-être pas complet, mais il y avait à ce moment-là, vous vous souviendrez, une crise dans le milieu du cinéma, et les techniciens de cinéma voulaient être reconnus dans la loi. C'est ce que nous avons fait.

Donc, je comprends vraiment l'urgence d'agir. Il faut le faire. Je répète encore que je m'attends à ce qu'il y ait des amendements. Il y a des notions très, très pertinentes qui ont été présentées dans les mémoires. Et il faut absolument que cette loi-là soit la plus parfaite possible. Elle ne sera pas parfaite parce qu'une loi n'est jamais parfaite. Elle sera imparfaite puisque nous n'aurons pas pris tout le temps nécessaire. Il aurait fallu, je pense, beaucoup plus de temps, d'heures de travail en commission parlementaire. Nous allons nous soumettre à cet échéancier très serré. La loi est prête, selon mes informations, depuis plusieurs semaines. Elle aurait pu être déposée bien avant. On aurait pu travailler encore plus en profondeur. Mais sachez que de notre côté, vous avez toute notre collaboration et nous ferons évidemment de notre mieux. Alors, je vous souhaite encore une fois la bienvenue. Puis j'ai bien hâte de vous entendre parce que je vous ai lu, puis j'ai pas mal de questions. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci. Merci beaucoup. Alors, nous poursuivons avec cette fois-ci la porte-parole du deuxième groupe d'opposition et députée de Taschereau à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez d'une minute.

Mme Dorion : Merci. Ça va aller vite. Moi, je n'ai jamais été ministre de la Culture. Moi, je suis une militante pour l'art. Puis je suis très contente de voir qu'on a la ministre Roy de notre côté. Merci d'avoir fait ce qu'il fallait, mais je ne sais pas comment ça se passe au Conseil des ministres. Ça ne doit pas être toujours facile, mais merci pour ça. Merci aussi au passage pour l'église Saint-Sacrement. C'est vraiment, je le... C'est reconnu et c'est très apprécié quand on voit une ministre qui fait ça.

Donc, ce qui est beau avec ce projet de loi là, c'est que tout le monde veut aller dans la même direction. Saint-Exupéry dit que s'aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, mais regarder ensemble dans la même direction. Ça fait que si les Québécois aiment la culture, aiment leur culture, bien, on est sur la bonne voie.

Bravo à toutes les organisations d'artistes qui ont travaillé tellement fort pour ne pas que... pour échapper à la politisation de cet enjeu-là. C'est merveilleux où on est en ce moment. Je croise les doigts très, très fort pour que ça aille rondement, bien, et dans le sens où les artistes veulent que ça aille, finalement. On est avec eux, on est réunis aujourd'hui pour que ça avance. Je vais faire tout ce que je peux pour que ça aille dans ce sens-là. Alors, merci et, bien, bonne commission, bonnes auditions à tout le monde.

• (9 h 10) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous souhaitons maintenant... nous commençons donc les auditions. Nous souhaitons maintenant la bienvenue aux représentants de l'Union des artistes, Mme Prégent et Mme Fortin. Je vous invite, avant de commencer votre exposé, à bien vous présenter. Et vous disposez de cinq minutes.

Mme Prégent (Sophie) : Bonjour, Sophie Prégent. Je suis présidente de l'Union des artistes depuis 2013. Et Christine Fortin, qui est avocate à l'Union des artistes depuis cinq, six ans?

Mme Fortin (Christine) : Oui.

Mme Prégent (Sophie) : Déjà, ça va vite. Voilà. Alors, je ne vous présenterais pas l'Union des artistes. Je pense que vous connaissez tous les 13 000 membres de l'Union des artistes qui sont des chanteurs, des danseurs, des animateurs et des acteurs.

L'Union estime que le projet de loi n° 35 apporte plusieurs modifications nécessaires à la Loi sur le statut de l'artiste et qu'il importe d'adopter celui-ci avant la fin de la session parlementaire afin de faire bénéficier les artistes des avancées qu'il contient et qui sont attendues depuis fort longtemps. L'Union relève...

Mme Prégent (Sophie) : ...notamment, à ce titre, l'élargissement des compétences du Tribunal administratif du travail. Bravo! L'ajout de dispositions pour contrer le harcèlement psychologique. Bravo encore. L'Union des artistes est par ailleurs d'avis que certaines dispositions du projet de loi soulèvent des inquiétudes et nécessitent certains ajustements. L'article 24.2 présente une problématique majeure pour les associations d'artistes. Il impose un devoir de représentation envers tous les artistes qui font partie des secteurs de négociation pour lesquels une association d'artistes détient une reconnaissance, même si aucune entente collective n'existe et même si l'association ne reçoit aucune cotisation syndicale.

L'article 24.2 ne prend pas compte la nature foncièrement différente de la Loi sur le statut de l'artiste par rapport au régime des accréditations du code, par exemple. Une accréditation en vertu du code ne peut se rattacher qu'à un seul employeur, alors que les reconnaissances octroyées en vertu de la Loi sur le statut de l'artiste visent la totalité d'un secteur et donc l'ensemble des producteurs. Toutefois, dans la mesure où un producteur n'est pas membre d'une association liée par une entente collective, nous devons négocier individuellement avec ceux-ci.

Enfin, notons que les associations d'artistes ne détiennent pas le monopole exclusif de représentation et que la défense de nos droits est à la hauteur des ressources financières limitées dont nous disposons. Dans ce contexte, il serait impensable et voire même impossible pour les associations d'artistes d'assumer un devoir de représentation qui couvre l'entièreté des productions pour lesquelles elle détient une reconnaissance. Il est donc primordial de modifier l'article 24.2 pour qu'il vise les artistes assujettis à une entente collective négociée par une association d'artistes. Donc, nous proposons que 24.2 pourrait se lire comme suit : Une association d'artistes reconnue ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, ni faire preuve de... de négligence, pardon, grave à l'endroit des artistes visés par une entente collective à laquelle elle est partie, peu importe qu'ils soient ses membres ou non.

Article 68.6. Pouvoir réglementaire du ministre de décréter des conditions minimales. L'Union salue l'introduction de ce nouveau mécanisme. Bravo! Il reste toutefois à préciser les conditions dans lesquelles ce mécanisme est accessible et ses modalités d'application. Nous estimons qu'il devrait être accessible pour viser toute situation où un artiste ne bénéficie pas d'une entente collective. De plus, la fixation des conditions minimales de cet article devrait être enclenchée sur demande sans que cela soit assujetti à une discrétion. Nous sommes d'avis que cette demande devrait provenir uniquement des associations d'artistes reconnues et non d'un producteur ou d'une association de production. En effet, permettre à une association de producteurs de faire une telle demande permettrait à celle-ci de contourner le chapitre de la loi actuelle concernant l'obtention d'une reconnaissance formelle entraînant pour elle des droits et des obligations. Une telle demande provenant d'une association de producteurs pourrait entraîner une baisse importante des conditions de travail de nos artistes. Enfin, une fois que des conditions minimales auront été décrétées par le gouvernement, celles-ci devraient être assimilées à une entente collective. Recommandations concernant 68.6, qui pourraient débuter ainsi : Sur demande d'une association d'artistes reconnue, le gouvernement peut, par règlement, après consultation de l'association d'artistes et de l'association de producteurs reconnues, etc.

Les aspects manquants, maintenant. Première proposition. Ajouter dans la loi sur le statut de l'artiste un pouvoir conféré au ministre d'ordonner aux organismes subventionnaires de la culture d'exiger des producteurs l'application de conditions de travail minimales pour les artistes avant de leur octroyer un sou de financement.

Proposition numéro deux. Modifier les programmes de soutien de l'État, le CALQ, la SODEC, etc., de manière à préciser que l'octroi de financement est conditionnel à l'application par les producteurs de conditions de travail minimales pour les artistes ainsi que d'une reddition de comptes obligatoire. Que fait-on avec notre argent?

Et finalement, prévoir un examen périodique de la loi, donc un mécanisme de révision obligatoire et automatique de la loi sur le statut de l'artiste aux cinq ans. Voilà. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, madame Prégent. Nous continuons cette fois-ci avec Monsieur Fortin et Monsieur Lefebvre de la Guilde des musiciens et des musiciens du Québec. Vous disposez également...

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...cinq minutes.

M. Fortin (Luc) : Oui. Alors, je me présente Luc Fortin, je suis président de la Guilde des musiciens et musiciennes du Québec, et mon collègue Me Éric Lefebvre, qui est secrétaire-trésorier, qui m'accompagne aujourd'hui. Et on tient à remercier la ministre de la Culture et la commission de nous avoir invités à cette consultation importante.

Beaucoup de choses que Mme Prégent a dites, on les supporte, on les partage. Dans notre mémoire donc on a énuméré beaucoup de points, six points qui représentent pour nous des avancées importantes. Je vais mentionner là-dessus l'harmonisation et l'intégration des deux lois en une seule, l'intégration des dispositions sur les normes du travail visant le harcèlement psychologique, et aussi, bien, de pouvoir définir par règlement des termes et expressions utilisés dans la NSA, soit le 68.5. Et l'autre article important, c'est de fixer des conditions contractuelles minimales dans un secteur par l'article 68.6. Et on est d'avis que le projet de loi aura pour effet d'améliorer sensiblement l'encadrement des relations contractuelles entre des artistes et les producteurs.

Il faut vous rappeler aussi que le but premier de la révision de la Loi sur le statut de l'artiste était mentionné déjà dans le Plan d'action gouvernemental 2018-2023 qui s'appelait Partout la culture, puis o y mentionne très clairement que, pour améliorer les conditions socioéconomiques des artistes, on doit mettre en œuvre à court terme des solutions concrètes. Et là, dans ces solutions à court terme, il y avait en tête de liste la révision des deux lois sur le statut de l'artiste. Ça fait quatre ans que c'est écrit dans le plan d'action qu'on est rendu là. On souligne aussi que selon un récent sondage commandé par la FNCC, la vaste majorité des répondants appuient nos revendications. On parle de 80 %. Et 75 % des Québécois sondés pensent que le gouvernement de respecter sa promesse et adopter la loi le plus tôt possible.

Donc maintenant quelques remarques. Je vais vous parler aussi de 24.2 qui suscite des préoccupations. On pense que, tel que rédigé ça imposerait un fardeau démesuré aux associations d'artistes. Ce fardeau-là n'est pas imposé aux syndicats de travailleurs par exemple. Ils sont tenus de représenter seulement les employés qui travaillent pour un seul employeur et dans le cadre d'une convention collective. Bien que les associations d'artistes représentent en principe tous les artistes dans le secteur de négociation qui lui a été conféré, ça nous serait pratiquement impossible de représenter tout le monde dans certains secteurs où il n'y a pas d'entente puis il n'y a pas d'interlocuteur commun, il n'y a pas d'association avec qui négocie. Ça se complique beaucoup dans ces secteurs-là, puis ça devient ingérable pour nous. Si on avait des demandes de représentation dans ces secteurs-là, il faudrait y aller au cas par cas avec une multitude d'employeurs. Ça serait ingouvernable. Donc, on ne peut pas parler de négligence de représentation dans ces cas-là. Et on appuie aussi ce qu'a dit madame Prégent par rapport à 68.6, il faut que ça soit demandé par les associations d'artistes. Donc, il faut limiter la portée de l'article pour que, le devoir de représentation, ça s'applique juste aux artistes visés par l'entente collective à laquelle il est partie. Ensuite, ça, c'est 24.2. 68.6, par règlement, on peut fixer des conditions minimales applicables. Comme elle venait de dire tantôt, il faut que ça soit demandé par l'association d'artistes. C'est un article quand même intéressant parce que ça permettrait de structurer des secteurs qui ne sont pas structurés du tout, qui sont difficiles à gérer comme je disais tantôt. Et ça nous permettrait de demander au gouvernement de mettre de l'ordre dans certains secteurs qu'on considère un peu anarchiques et dans lesquels il n'y a pas d'interlocuteurs. Donc, il est nécessaire d'aussi, par contre, dans 68.6, de prévoir que les artistes puissent avoir des recours si les conditions ne sont pas rencontrées par les producteurs, puis s'ils ne suivent pas les règlements. À ce moment-là, actuellement, dans le projet de loi, il n'y a pas d'instance à qui s'adresser. Il faudrait que, comme tous les travailleurs du Québec, on puisse s'adresser à la CNESST comme en cas de non-respect pour les normes du travail. Ça serait par souci d'équité.

• (9 h 20) •

Et finalement on parle de responsabilité de l'état et de reddition de comptes. On va taper sur le même clou que l'UDA. Ça fait des années qu'on en parle. On pense que c'est obligatoire de prévoir que le financement assuré par des sociétés d'État soit conditionnel au respect des conventions de travail négociées par les associations reconnues. D'ailleurs, pendant la pandémie, on était très heureux de voir que l'octroi des mesures particulières à la diffusion de spectacles était conditionnel à une reddition complète quant à la rémunération des artistes et artisans du spectacle impliqués dans la production. C'est la première fois qu'on voyait une telle politique qui semblait tellement évidente. Donc, le chemin est tracé. Maintenant, l'État doit continuer dans la même direction...

M. Fortin (Luc) : ...tous ces programmes de subventions en culture. Merci de votre attention.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, effectivement, merci aussi, M. Fortin, pour votre exposé, très intéressant. Alors, nous allons commencer la période d'échange. Même la ministre, la parole est à vous. Vous disposez de 17 min 30 s.

Mme Roy : Parfait, merci beaucoup. Merci pour vos mémoires, que j'ai lus avec attention. Juste pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, moi aussi, à mon tour, tout comme la députée de l'Acadie l'a fait, j'aimerais saluer Mme Lise Bacon, qui est à l'origine des premières lois sur le statut de l'artiste, 1987, 1988. Ça fait quand même un petit bout de temps. Et cette refonte-là, elle était importante pour vous, puis on l'a tous senti ici. Donc, on veut tous travailler dans cette direction.

Et je veux aussi saluer Mmes Liza Frulla et Louise Beaudoin parce qu'il faut savoir que cette promesse-là, oui, il y a quatre ans qu'elle a été faite, vous avez raison. Elle était dans le plan en culture du précédent gouvernement, que nous avons fait nôtre lorsque nous sommes arrivés au pouvoir. Alors, vous avez raison que ce plan... que cette adoption de loi, elle a été éditée en 2018, et avant notre arrivée, mais nous avons dit: On reprend le flambeau puis on va y aller. Puis je voulais spécifier que je salue Mmes Beaudoin et Frulla parce que, rappelez-vous, en décembre 2019, on avait commencé les travaux, et j'avais demandé à ces deux ex-ministres de la Culture de travailler avec nous. Malheureusement, la pandémie est arrivée. On a dû arrêter les travaux, ce qui a fait que, bon, il a fallu tout reprendre après un certain temps lorsque le milieu a été prêt à reprendre et nous a envoyé les mémoires. Donc, on aurait aimé travailler plus rapidement. Il y a eu des aléas de la vie, mais on est rendus ici. Mais je pensais que c'était important aussi de signifier ça et de les remercier, toutes ces ex-ministres de la Culture, pour le travail précédent.

Et d'ailleurs vous avez remarqué que certains nous ont déjà parlé, dans les précédents mémoires, il y a 1 000 pages de mémoires ici, là, entre autres, de donner un statut d'intermittent aux artistes. Ça, c'est la formule française, en France. Nous, on a décidé de garder la formule québécoise, au Québec, mais de la bonifier avec une refonte importante. Alors, je voulais spécifier ces choses et remercier les ex-ministres d'avoir travaillé avec nous. Et on voulait aussi lancer le message qu'il s'agit ici d'un projet de loi non partisan. Alors, on est là pour vous, pour vous aider, pour aider les artistes.

Maintenant, revenons aux mémoires. Dans votre rédaction de mémoire, il y a des choses extrêmement intéressantes, et j'aimerais que vous nous disiez, dans le pratico-pratique, autant à l'UDA, à l'Union des artistes, qu'à la Guilde des musiciens, qu'est-ce que l'adoption du projet de loi va changer concrètement dans la vie de vos artistes?

Mme Prégent (Sophie) : C'est une bonne question, mais on avait une sectorielle la semaine dernière, ils m'ont posé la même question: Qu'est-ce que ça va changer dans nos vies?

Ça va essentiellement changer beaucoup de choses pour la défense de nos artistes parce que ça va donner beaucoup plus d'encadrement à la loi. Nous, ça va être beaucoup plus profitable pour nous. Ça, c'est ce qui n'est pas concret pour eux. Ce qui est concret, c'est que, dans certains secteurs, ça a toujours été un peu le far west, pour m'exprimer ainsi, puis là on va pouvoir donc améliorer leur travail, leurs conditions de travail. C'est sûr que, si on se bute à un phénomène de non-communication, puis de, à la limite, mauvaise foi, mais qu'on ne peut pas l'adresser, bien, forcément, là, le train, il reste à la gare, il n'avance pas. Alors là, l'entente devient complètement désuète, elle n'a plus rapport avec la réalité. Après ça, on se fait reprocher de ne pas avoir de prise sur la réalité. Ça, ça va permettre d'être toujours à jour, de vous adresser les problèmes qu'on est incapables de régler depuis des années et qu'on traîne, qui sont énergivores, chers, dispendieux. Et, pendant ce temps-là, sur le terrain, on est moins présents.

Alors, c'est fou, mais une loi avec des bons règlements, ça fait en sorte que nous, au bout du compte, on est physiquement plus présents pour nos artistes. Plus qu'on l'est là, là, présentement. Parce qu'on se bat devant les tribunaux. C'est ça qu'on fait pour l'instant, avec beaucoup, beaucoup de coûts engendrés à ça. Puis ça, ça ne fait pas qu'on fait de la vigie. Ça, ça ne fait pas qu'on améliore nos relations avec les producteurs. Parce que moi, je suis sur le terrain, dans la vie, là, je m'en vais tourner, moi, cet après-midi. Ce ne sont pas nos ennemis, ces gens-là. On travaille avec eux.

Par contre, quand l'encadrement est mou, forcément, c'est nous, parce que c'est une chaîne, c'est toujours le dernier qui pogne le choc électrique. Le choc électrique, c'est nous qui le pognons. Si tout ça est clair, ça va être encore plus facile d'avoir de bonnes relations avec les producteurs. Je suis convaincue de ça. Veux-tu ajouter quelque chose?

Mme Fortin (Christine) : ...ajouter quelque chose, le pouvoir réglementaire qui est instauré à 686, c'est une très belle avancée dans les secteurs, comme Sophie disait, où est-ce qu'on a de la difficulté à conclure des ententes...

Mme Fortin (Christine) : ...parlons du secteur de la danse, de la scène en général, il y a beaucoup de problématiques. Donc, le pouvoir réglementaire va nous aider à aller chercher le règlement du gouvernement dont on a besoin. Après ça, évidemment, il va falloir le préciser. Mais ça va permettre enfin à des artistes qui sont sans filet social, sans conditions de travail minimales d'obtenir ce qu'ils devraient avoir via la LSA.

Et également une très belle avancée, c'est le Tribunal administratif du travail. La liberté d'association, ça doit venir avec un tribunal accessible et peu coûteux et rapide et spécialisé. Enfin, le TAT va pouvoir traiter l'ensemble des litiges qui découlent de la LSA. Donc, c'est ce qui était demandé depuis plusieurs années et même par nos amis les producteurs. Alors, c'est clair que ça, c'est une excellente avancée dans des cas, justement, des négociations de mauvaise foi sur une table de négociation ou d'ingérence ou quoi que ce soit. On va pouvoir aller devant le TAT et traiter tout litige de manière efficace.

Mme Roy : Et du côté de la Guilde?

M. Fortin (Luc) : Oui, je vais vous laisser la parole, M. Lefebvre.

M. Lefebvre (Eric) : Oui, bien, en fait, j'aimerais souligner un élément. Il y a quelques années, en fait, de 1976, je crois, à 1989, il existait un décret applicable aux musiciens dans la région de Montréal. Lorsque la première Loi sur le statut de l'artiste a été adoptée, en 1987, si je me souviens bien, eh bien... c'est-à-dire, la Guilde et les associations des producteurs ont décidé d'abandonner, dans le fond, le décret. Il a été par la suite abrogé. C'est un juste retour, dans le fond, des choses que, dans certains secteurs, il est très difficile de faire en sorte que les conditions de travail minimales soient respectées. Dans ce cas-ci, c'était un décret qui visait essentiellement la musique, qui concernait les musiciens de scène.

Et effectivement l'article 68.6 est un élément important dans la stratégie à venir. En tout cas, on espère que le gouvernement ira de l'avant lorsqu'on fera des demandes pour effectivement structurer certains secteurs culturels... qui est nécessaire, en fait, que la structure est nécessaire afin d'améliorer les conditions. Pour ça que 68.6, c'est une première étape. Mais 68.6 a effectivement besoin d'être modifié afin de faire en sorte que, lorsqu'un règlement est adopté par le gouvernement pour fixer des conditions de travail minimales, il est nécessaire d'avoir certaines dispositions, dans la loi, qui permettent de faire respecter ces conditions-là une fois que le règlement a été adopté.

C'est pour ça, dans le fond, que nous, ce qu'on propose, c'est que ce règlement-là devient comme... est réputé une entente collective entre l'association d'artistes et les producteurs visés par le... bien, je dis «par le décret», mais c'est un règlement dans ce cas-ci, justement pour faire en sorte que l'association d'artistes puisse déposer un grief si, par la suite, des producteurs ne respectent pas les conditions qui sont fixées par règlement. C'est l'élément qui manque actuellement dans la loi, la Loi sur les décrets des conventions collectives, qui est une autre loi qui vise l'adoption de décrets justement pour assujettir tout un secteur d'activité à des conditions minimales. Bien, il y a un comité paritaire, il y a déjà des ententes collectives qui sont étendues juridiquement. Mais là, dans ce cas-ci, on a une disposition, l'article 68.6, qui demande un petit peu plus d'agressivité au plan législatif pour faire en sorte que les conditions minimales, une fois que le règlement... puissent être véritablement appliquées sur le terrain.

Mme Roy : ...combien de temps?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste 9 minutes.

Mme Roy : Parfait. Vous parlez, dans vos mémoires, tous les deux, dans des termes un peu différents, mais c'est la même chose... puis juste pour référence pour les collègues, entre autres, dans le mémoire de la Guilde des musiciens, dans vos recommandations, au point cinq, vous nous demandez d'introduire dans notre nouvelle loi un mécanisme semblable à celui de l'article 154 de la Loi sur les sociétés par actions, afin que la responsabilité des administrateurs d'une société soit engagée en cas de non-paiement du cachet des artistes. Pouvez-vous me dire en quoi ce mécanisme-là, qui serait calqué sur le 154 de la Loi sur les sociétés par actions, ça serait utile pour vos membres?

• (9 h 30) •

Mme Fortin (Christine) : Mme la ministre, à l'UDA, nous avons à peu près une vingtaine de sentences arbitrales qu'on n'est pas en mesure d'exécuter sur le terrain. Donc, des producteurs partent des compagnies, obtiennent des subventions du gouvernement, tournent un film, signent des contrats UDA, se lient à des ententes collectives existantes... fait travailler nos artistes puis, au bout de la production, ne paie pas les artistes. Donc, j'ai beaucoup de sentences arbitrales à l'UDA où est-ce que... là, je vous parle, un cas, là, à peu près 100 000 $ de cachets où est-ce que je ne suis pas en mesure d'aller chercher ces sous-là pour les artistes. Alors, même si j'attends de poursuivre le producteur, j'obtiens une sentence arbitrale en ma faveur, mais je ne suis pas capable de l'exécuter puisque la personne n'a pas d'actif. La compagnie qu'elle a constituée n'a pas d'actif. Elle tente même, par exemple, d'aller faire le film ailleurs. J'essaie de faire toutes sortes de moyens pour bloquer...


 
 

9 h 30 (version non révisée)

Mme Fortin (Christine) : ...la diffusion du film, ce n'est pas possible. C'est très coûteux d'aller chercher ces sous-là. Donc, ce que ça ferait en sorte, c'est que la responsabilité des administrateurs, en fait, de cette compagnie-là seraient importants pour pouvoir aller chercher cela ces sous-là en cas de non-paiement des artistes. Alors, une personne qui va partir une compagnie va devoir être sérieuse. Si elle sait que sa responsabilité personnelle serait engagée en cas de non-paiement, elle va faire ce qu'il faut pour payer les artistes. J'ai plein d'exemples. On l'a cité dans le mémoire en février, alors ça, c'est très important parce qu'on en a beaucoup, beaucoup, beaucoup. Évidemment, des producteurs sérieux qui sont membres d'une association de producteurs, les... au Québec, on n'a pas de problème puisque toutes les sociétés sont liées. Ils ont des statuts et règlements à l'effet qu'ils sont responsables des cachets, c'est beaucoup plus facile. Mais tous les petits producteurs émergents qui font des excellents films, ceci dit, bien, ils doivent avoir un... ils doivent être sérieux pour faire un film, puis ils doivent payer nos artistes.

Mme Roy : ...oui, du côté de La Guilde.

M. Lefebvre (Eric) : Oui, j'ai un élément supplémentaire, peut-être, pour vous expliquer pourquoi on... L'article 154, de la façon dont il est érigé actuellement, s'applique aux salariés d'une entreprise, mais elle ne s'applique pas aux travailleurs autonomes. Essentiellement, les artistes qui sont représentés par nos associations sont des travailleurs autonomes à peut-être 85 % ou 90 %. Donc, dans ce cas-là, l'article 154 n'est pas applicable puisque ce ne sont pas des salariés. Alors, c'est dans cet esprit-là, dans le fond, qu'on demande une modification pour que, justement, ce que Christine vient de décrire puisse nous donner des outils supplémentaires afin de poursuivre personnellement les administrateurs d'une corporation qui serait, dans le fond, débiteur de cachets des artistes.

Mme Prégent (Sophie) : La même personne pourrait, en plus, faire un autre film après en n'ayant pas payé les artistes dans le premier film, mais avoir quand même le droit à certaines subventions pour faire un deuxième film. Nous, comme l'imputabilité ne suit pas, on n'a rien, on est pieds et poings liés et on ne peut rien faire. Ce n'est pas normal que quelqu'un puisse retourner un film alors qu'il n'a pas respecté les contrats initiaux de son œuvre initiale.

Mme Roy : Si je comprends bien, c'est une façon... Puis je l'ai lu, là, c'est vraiment une façon de lever le voile corporatif, entre autres, sur ces coquilles pour aller chercher la personne, le mauvais payeur, finalement, pour permettre aussi, quand vous avez des sentences arbitrales, qu'elles soient exécutoires parce que vous savez qui est le débiteur. C'est ce que je comprends bien? Je vous ai bien entendus.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste cinq minutes.

Mme Roy : Cinq minutes. J'ai mon collègue, le député de... Où est-il? Il est là. De Saint-Jean, qui aimerait intervenir. Et comme c'est quelqu'un du milieu des communications, vous le connaissez bien. Je ne peux pas dire son nom, hein, je n'ai pas le droit de dire son non, je suis obligée de dire le député de Saint-Jean, qui aimerait prendre la parole. Alors, je vais lui céder.

M. Lemieux : Merci beaucoup, Mme la ministre. Bonjour. Pour la petite histoire, on est en mode, disons, accéléré et particulier, non partisan dans la mesure du possible. Vous aussi, dans la mesure où vous avez regroupé les intervenants ici, aujourd'hui, vous avez regroupé les recommandations par rapport au projet de loi que vous avez, mais ça fait des années que vous intervenez et que vous discutez. J'étais curieux de savoir jusqu'à quel point, sans aller dans chacune des recommandations, jusqu'à quel point c'est aussi, pour vous, gagnant-gagnant dans la mesure où tout ce qu'on va pouvoir sortir de plus que ce qu'on avait, c'est des gains importants.

Et là-dessus, Mme Prégent, et d'ailleurs. Me Fortin en a parlé, vous avez dit dans... un mot en particulier dans une question en particulier : C'est énergivore, c'est cher, c'est dispendieux. Le TAT ne réglera pas tout, mais le TAT, c'est un des outils que vous n'aviez pas dans votre coffre à outils. Est-ce que c'est un bon exemple de ce que vous allez retrouver dans le projet de loi n° 35 qui deviendra, je l'espère, loi avant la fin de la législature? Ce genre d'outil que vous n'aviez pas, qui vient - et le nom du projet de loi le dit bien - moderniser, harmoniser d'abord, puis ça, on va en parler plus tard avec ceux qui sont vraiment... qui étaient dans la deuxième loi, qui avaient beaucoup moins d'outils, là, et de dents, en réalité, mais effectivement, c'est les outils que vous allez trouver dans l'harmonisation et dans la modernisation.

Mme Prégent (Sophie) : Exactement. Quelqu'un d'intelligent me disait : Une loi, c'est une idéologie. L'encadrement et les règlements font en sorte que cette idéologie-là se poursuit. Si une loi, c'est fait pour améliorer les conditions socioéconomiques des artistes, il faut encadrer cette loi-là pour faire en sorte que, nous, sur le terrain, on ne perde pas notre temps à faire tout le temps des serpents au jeu de l'échelle et du serpent où il n'y a pas d'échelle, il n'y a que des serpents. Il y a des choses qu'on n'est pas capables de régler présentement. Le tribunal nous...

Mme Prégent (Sophie) : ...dit : Je n'ai pas la compétence pour régler ceci ou cela. Adressez-vous à un autre tribunal, qui nous répond la même chose. Pendant ce temps là, ça coûte 1 million à l'Union des artistes, à 2.5 de cotisations syndicales. Pendant ce temps là, on n'est pas sur le terrain. On ne vérifie pas si nos ententes collectives sont bien suivies. Puis, à chaque fois qu'on débarque, on les met... tout d'un coup, ils deviennent sans connaissance. Mais si on y allait un peu, toujours, puis qu'on réussissait à travailler sur le terrain, c'est plus la philosophie qui aurait de nous, que tout d'un coup, le gros méchant de l'Union des artistes débarque, juste pour voir. Non, o aurait, dans le travail quotidien, une relation tout à fait normale, comme dans tous les autres secteurs, qui la construction, la santé, peu importe, je ne sais trop, mais bref, c'est... Mme Roy l'a dit, madame St-Pierre aussi, merci, madame Bacon, c'est une bonne loi. Je vois à la Fédération internationale des acteurs, je le sais, cette loi-là n'existe pas ailleurs. C'est pour nous, à nous, ça, faut que ça reste. Faut juste lui donner un petit peu plus de mordant.

M. Lemieux : ...pour faire œuvre utile pour ceux qui nous regardent, d'aventure, et qui essayent de comprendre, parce qu'on est presque entre initiés ici. Ça fait, comme je le disais, des années que vous faites des... Quand vous parlez de tribunal, juste pour être très clair, je vous ai parlé du TAT, c'est le tribunal administratif du travail, auquel vous n'aviez pas accès. Quand vous disiez tantôt : On va au tribunal, ça coûte des fortunes. C'est que vous étiez un peu condamnés à monter dans les tribunaux de hautes instances, dans le fond.

Mme Prégent (Sophie) : Ce qu'il faut comprendre, c'est que nous, l'union des artistes, on défend tous nos membres devant le Tribunal administratif du travail. Les producteurs, comme ils ne sont pas associés, défendent leurs griefs. Un grief. Nous, on défend tous les griefs. Imaginez-vous ce que ça coûte à l'Union des artistes de défendre tous les griefs déposés. Ce n'est pas AQPM qui défend ses griefs. C'est le producteur en question avec qui on a déposé un grief. C'est une autre façon de voir. C'est ça, l'argent que ça coûte.

M. Lemieux : ...Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il ne vous reste que 40 secondes. 39, 38... Parfait.

M. Lemieux : Vous me savez très docile. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Et c'est surtout...

Une voix : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, allez-y. 30 secondes.

M. Fortin (Luc) : ...député de Saint-Jean, si vous permettez. Par rapport au TAT, là, le Tribunal administratif du travail, par le passé, si on avait eu ça, on avait sauvé des centaines de milliers de dollars en frais d'avocats. Il y a des causes qui se sont ramassées à la Cour d'appel. Ça commence par la commission des relations artistes producteurs. Ça s'en va en révision. Ça s'en va là, ça s'en va là, c'est hallucinant. Alors, si on avait eu notre tribunal spécialisé, ça aurait probablement arrêté au premier niveau, ça aurait été réglé. On parle de deux causes célèbres, entre autres, la fameuse saga Festival contre l'UDA, etc., et d'autres....

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Vous aurez sûrement l'occasion d'en reparler. Pardon. Pardon, monsieur Fortin, il faut respecter le temps. Je vous remercie. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci Mme la Présidente, j'aime bien vos décomptes. Bon, alors oui, c'était fort intéressant, votre présentation. Il y a des questions qui surgissent. J'aimerais ça, quand vous me parlez de l'article 24, pour que je comprenne vraiment bien ce que vous avez voulu nous dire tout à l'heure, pouvez-vous nous donner un exemple concret d'une situation qui devra être... Bien, en fait, je pense que vous demandez à ce qu'il soit changé, l'article 24. Une situation qui échapperait à ce qu'on veut faire aujourd'hui, c'est-à-dire une meilleure protection des artistes.

• (9 h 40) •

Mme Fortin (Christine) : En ce moment, dans la mouture actuelle, avec 24.2, on a importé textuellement le 47.2 du Code du travail sans faire les nuances. Donc, comme disait tantôt Sophie, ce code du travail, les syndicats ont le monopole exclusif du travail... de représentation, pardon. Alors, un exemple concret dans le secteur de la danse, où est-ce que nous n'avons pas d'entente collective, un danseur qui aurait un problème avec son producteur pourrait venir dire à l'union : Bien, viens m'aider, j'ai un problème. J'ai une situation particulière avec mon contrat. Voulez-vous faire un recours, etc., me représenter jusqu'à la fin? Et là, on serait obligés, par le nouvel article 24.2, de le faire, lorsque dans ce secteur-là nous n'avons pas d'entente collective. Donc, nous allons prendre des cotisations syndicales de nos membres dans des secteurs visés par une entente collective et nous allons devoir déployer des ressources financières pour défendre ce danseur-là qui est dans une situation fort problématique. Alors, c'est quand même injuste pour nous et c'est fort problématique parce que là on ne connaît pas la situation litigieuse avec cette personne-là, ce danseur-là face à un producteur. On n'est pas dans le milieu, on n'est pas son représentant officiel parce qu'il n'y a pas d'entente collective. Alors il y a une panoplie de situations où est ce qu'on est... on va devoir la représenter sans avoir une représentation au niveau de ses conditions de travail.

Également, la loi prévoit la possibilité de négocier individuellement des cachets supérieurs à la loi, donc tout ce qui échappe à la négociation collective par l'UDA, par exemple, un problème...

Mme Fortin (Christine) : ...qui touche un excédent négocié par un acteur, par exemple, bien là, est-ce qu'on va devoir le représenter pour ce litige-là, qui ne concerne pas une condition minimale de travail?

Mme St-Pierre : Donc, qu'est-ce que vous voulez au juste qu'on ajoute pour que ça, là, ça soit réglé, là? Donc, il faudrait ajouter «visé par une entente collective à laquelle elle est partie».

Mme Fortin (Christine) : Voilà. Oui.

Mme St-Pierre : Mais si vous n'avez pas d'entente collective avec le producteur pour le danseur.

Mme Fortin (Christine) : Bien, justement, on ne veut pas avoir l'obligation de juste représentation s'il n'y a pas d'entente collective. Nous voulons le statu quo, tel qu'elle est actuellement. S'il y a une entente collective visée, je n'ai aucun problème à représenter le danseur, qu'il soit membre ou non membre chez nous, mais s'il n'y a pas d'entente collective, comment voulez-vous que je le représente? Je ne connais pas la situation du tout d'un contractuel.

Mme St-Pierre : Ce danseur-là, s'il n'a pas d'entente collective, ce danseur-là, il est laissé dans...

Mme Prégent (Sophie) : Bien, c'est-à-dire qu'avec le 68.8 qu'on a, là, présentement, on pourrait avoir une poigne justement dans un secteur au grand complet, faire en sorte qu'il y ait une entente collective, ou alors la responsabilité, ce dont on parlait, le 68.6 pourrait permettre justement d'aller attacher tout ce secteur-là, puis, après ça, quand on l'aura rattaché, forcément, il va y avoir... il va... une entente collective ou semblable, et là, on va pouvoir mieux les défendre, on va être au courant.

Mme St-Pierre : C'est très lié, c'est très lié, il faut qu'on fasse la modification à 28, il faut qu'on aille faire la modification à 68 pour que ce soit sur demande.

Mme Prégent (Sophie) : Exactement.

Mme St-Pierre : Sur demande, je n'ai pas beaucoup de temps puis j'ai beaucoup de questions, sur demande, ça veut dire après combien de temps, est-ce que c'est sur demande, parce que pouf, il arrive un scandale, puis là, boum, on demande, ou s'il faut qu'il... Est-ce qu'il faudrait préciser... moi, je suis d'accord avec le «sur demande», je vous le dis tout de suite, puis j'envoie le message aux personnes qui tiennent le crayon de l'autre bord. Mais, sur demande, après combien de temps? Ça ne peut pas être sur demande après deux jours de négo ou deux jours de... il faut qu'il y ait quand même une possibilité que les parties s'entendent avant que le gouvernement intervienne, parce que là, on demande au gouvernement d'intervenir.

M. Fortin (Luc) : Si vous permettez, il y a des secteurs que ça fait éternellement qui ne sont pas structurés. Je vais donner un exemple, l'événementiel puis les congrès, c'est n'importe quoi, ça, il n'y a pas d'interlocuteur commun, ça «poppe» un peu partout, ça apparaît, ça disparaît, c'est impossible de...

Mme St-Pierre : Mais la loi ne vous donne pas d'interlocuteur commun.

M. Fortin (Luc) : Non, mais, c'est parce que, mettons, que j'ai 50 organisateurs d'un congrès au Québec, je ne peux pas aller négocier individuellement avec chacun d'eux, ça va me prendre 50 ans avant d'en venir à bout, là.

Mme St-Pierre : Alors, ce que vous...

M. Fortin (Luc) : Il n'y a pas des ressources pour ça, mais un article comme 68.6, on pourrait dire, exemple, là : Bien là, on aimerait qu'il y ait des conditions minimales dans ce secteur-là, à ce moment-là, on est en business, on peut commencer même à représenter...

Mme St-Pierre : C'est le gouvernement qui ferait ce cadre-là, cette entente-cadre-là.

M. Fortin (Luc) : C'est ça, comme les bars, c'est pareil...

Mme St-Pierre : O.K. Mais pour le «sur demande», ce serait après combien de temps?

Mme Fortin (Christine) : Dès que l'association d'artistes est prête. Nous, dans le secteur de la danse, là, on a juste à monter un projet de règlement qu'on soumettrait au gouvernement. On analyse la situation, on a des ententes collectives avec certains producteurs. Dès qu'on est prêts, on y va, là, on dépose, puis le gouvernement doit faire ses consultations et décréter.

Mme St-Pierre : O.K. Vous parlez de l'article 12, là, puis, là aussi, je vais vraiment vouloir avoir des explications, vous demandez à ce qu'on mette une modification «rassemble le plus grand nombre d'artistes», à l'article 12.

Mme Fortin (Christine) : ...

Mme St-Pierre : J'essaie de vous suivre, là. 

Mme Fortin (Christine) : On veut une harmonisation puisque, en ce moment, vous avez changé le critère... dans le projet de loi, on a changé le critère de la majorité pour le plus grand nombre. Alors, on veut juste... on veut harmoniser ça, et surtout, effectivement, l'article 12, «rassemble le plus grand nombre» puisque vous utilisez deux terminologies... en fait, le gouvernement utilise deux terminologies, la plus représentative et le plus grand nombre. Donc, on veut juste harmoniser la terminologie, et surtout l'article 20, il faut changer ça, parce qu'on parle de 25 % de l'effectif de l'association pour annuler une demande de reconnaissance. Or, il y a un problème juridique, puisqu'on a plusieurs reconnaissances, c'est impossible d'aller chercher 25 % de l'effectif de l'Union des artistes, par exemple, pour aller chercher...

Mme St-Pierre : Il y a un autre méli-mélo, ici, là. L'UDA estime que la terminologie devrait être uniformisée, il y a du méli-mélo. Gardez la formulation de l'article 8, soit les termes «conditions contractuelles», parce qu'ailleurs, si on parle de «conditions minimales applicables aux contrats conclus»... enfin, c'est un peu mélangé.

Mme Fortin (Christine) : Nous, on veut juste...

Mme St-Pierre : Les gens qui ont les gens qui ont conçu ce projet de loi là, c'est des spécialistes. Alors, j'essaie de comprendre pourquoi ils ont utilisé ces termes-là plutôt qu'uniformiser, comme vous le demandez.

Mme Fortin (Christine) : Bien, c'est une très bonne question, on va le demander au législateur...

Mme St-Pierre : ...crayon, donc ils pourront changer leur texte.

Mme Fortin (Christine) : En fait, notre point de vue là-dessus, c'est juste, justement, d'uniformiser et d'utiliser la condition contractuelle. Alors, on a importé, dans le fond, ce qu'on a compris de nos appels avec le ministère, c'est qu'on a importé la loi no 2, là, S-3201, dans notre loi. Alors, il y avait plusieurs terminologies différentes. Alors, l'idée, c'est de juste harmoniser quand on parle de conditions d'engagement, versus conditions contractuelles. On parle de... contrats professionnels. Alors, ça, devant un juge, moi, en tant que juriste, ça peut être plus compliqué de faire la distinction. Alors, pour uniformiser, on soumet au gouvernement d'uniformiser la terminologie pour être la plus englobante possible, à savoir des conditions contractuelles minimales, tout simplement, partout dans la loi, pour uniformiser. Parce qu'on comprend que c'est une importation de la deuxième loi, là, qui a fait peut-être un peu dévier, là, les termes.

Mme St-Pierre : Vous parlez de plusieurs aspects manquants aussi dans votre mémoire. Vous n'avez pas eu le temps d'élaborer là-dessus. Quelles sont les priorités dans vos aspects manquants qu'il faudrait ajouter? Vous comprenez, cette loi-là, là, la dernière, elle date des années 80, il y a eu un changement en 2010, puis là on est peut-être dans un processus qui ne sera pas changé avant les 30 prochaines années, là. Alors, je comprends que la loi, c'est l'idéologie, mais la loi, à un moment donné, elle peut devenir hyper rigide. Alors, vous souhaitez... Vous dites qu'il y a des aspects manquants dans la loi. Est-ce qu'il y a des choses qu'on devrait vraiment... sur lesquelles on devrait se pencher, puis bonifier cette loi-là?

Mme Prégent (Sophie) : Entre autres, la reddition de comptes, là, l'obligation d'être en règle avec les associations à partir du moment où quelqu'un a un financement public, là...

Mme St-Pierre : Ça, ça m'apparaît vraiment...

Mme Prégent (Sophie) : Bon, ça, c'est l'essentiel. Puis, si ce n'est pas dans la loi, ça pourrait être autrement, là, on est bien ouverts, là, à toutes sortes de solutions, nous autres, là...

Mme St-Pierre : Dans un autre dossier qui est...

Mme Prégent (Sophie) : Mais le début étant ça, parce que c'est ça qui n'est pas normal. On ne peut pas recevoir de l'argent public, puis faire un peu n'importe quoi, ne pas être en règle avec les associations, pas payer les musiciens, pas payer les artistes, mais ce n'est pas grave, on va faire un deuxième film, puis je vais me racheter, puis ça va bien aller le deuxième, là. Ça ne peut pas fonctionner comme ça. Ça...

Mme St-Pierre : Ça m'étonne, parce que quand on donne une subvention, il me semble que la subvention vient avec... en fait, la subvention ne vient pas avec une reddition de compte? Donc, je donne 3 millions pour un film, puis je n'ai jamais personne qui dit comment l'argent a été dépensé.

Mme Fortin (Christine) : Bien, je ne sais pas... gouvernement l'a dit, mais certainement on n'a pas... il n'y a pas d'obligation conditionnelle à ce que les artistes soient payés. Il n'y a pas d'obligation d'avoir... de signer des contrats.

Mme Prégent (Sophie) : Il y a probablement un budget de déposé ou je ne sais trop, mais s'il n'y a pas de reddition de comptes, puis si ce n'est pas une condition sine qua non, être en règle avec les associations, merci, bonjour.

Mme St-Pierre : Puis le mécanisme de révision, tous les cinq ans?

Mme Prégent (Sophie) : Oui, ça, ça éviterait ce qu'on est en train de vivre, c'est-à-dire 30 ans ou 20 ans, sans avoir ... tu sais... je vais le dire un peu en langage de Shakespeare, mais"up to date", tu sais, faire en sorte...

Mme St-Pierre : Mais ça ne garantit pas un changement, mais quand même ça pourrait rafraîchir.

Mme Prégent (Sophie) : Non, non, mais si tel est le besoin, par contre, là, il y a quand même une certaine accumulation, là, depuis les années, là.

Mme St-Pierre : Hum-hum. Est-ce qu'il me reste du temps?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste 1 min 40 s.

Mme St-Pierre : Ah! Bien, mon Dieu! C'est formidable. Sur le projet de loi en général, tout le monde s'entend qu'on va y arriver, mais je pense que votre message est vraiment très clair qu'il n'est pas encore... il est perfectible, là, il faut vraiment y apporter... parce qu'il va y avoir des trous, là, dans lesquels on pourra peut-être s'incruster et faire en sorte que les artistes n'aient pas toute la protection qui est nécessaire. Combien de producteurs devront... les négociations ne se feront pas avec un ensemble de producteurs, mais ça sera des producteurs. Combien vous prévoyez de négociations?

Mme Prégent (Sophie) : Avec des producteurs?

Mme St-Pierre : Oui.

Mme Prégent (Sophie) : À l'Union des artistes, on a 57 ententes collectives et 200 lettres d'entente.

Mme St-Pierre : Puis celle qui est désuète depuis 20 ans?

Mme Prégent (Sophie) : Ah! ça, c'est tout dans le milieu de la musique, avec ADISQ, pour ne pas les nommer, désolée, même chose avec la guilde.

• (9 h 50) •

M. Fortin (Luc) : Oui, on a des... énormément d'ententes, mais il y a énormément d'ententes qu'on n'a pas non plus dans des secteurs qui ne sont pas structurés, qui sont un peu anarchiques.

Mme St-Pierre : Mais la loi ne vous prévoit pas comme une entente-cadre, la loi prévoit que vous allez être obligés de prendre le processus avec chacune de ces...

Mme Prégent (Sophie) : 68.6, pourrait régler ça, encore une fois, 67.6 pourrait faire en sorte qu'on fait une forme de décret dans un secteur bien précis. Puis là, bien, on va avancer. Moi... on l'a dit puis on le redit, hein, 68.6, là, ah! c'est ça pour nous, là, tu sais, c'est un peu ça.

Mme St-Pierre : Mais vous ne serez peut-être pas plus contents, parce que, là, ce n'est pas vous autres qui va les décider, des conditions, ça va être le...

Mme Prégent (Sophie) : Bien, au moins, on va avancer, tu sais, au moins, on va pouvoir l'adresser, au moins, il y a quelqu'un qui va nous entendre, tu sais, c'est déjà bien.

Mme St-Pierre : Donc, ma question : Après combien de temps vous allez... Quand vous dites : Sur demande, là, vous comprenez que ça ne peut pas, pour le ministre, là, dire... on reçoit une lettre, puis si le ministre dit : O.K., on y va demain matin.

Mme Prégent (Sophie) : Bien, ça fait partie de nos demandes, là, que ces modalités-là d'application soient plus claires, là...

Mme Prégent (Sophie) : Parce qu'effectivement, là, l'idée, elle est bonne, mais comment ça va se traduire, tout ça? Puis comment ça va fonctionner, ça? Pour nous, ce n'est pas clair, encore, là.

Mme Fortin (Christine) : C'est sûr que la priorité, ça va être d'utiliser 68.6 dans les secteurs où est-ce qu'il n'y a pas d'entente collective clairement. Des négociations qui durent depuis 20 ans, le mécanisme que je vois, d'emblée, c'est d'aller au TAQ puis dire : attention, on est en train de faire la négociation de mauvaise foi, il y a quelque chose qui ne marche pas, on refuse systématiquement toutes les demandes, il y a de l'obstruction. On va aller chercher une ordonnance du TAQ pour dire : ça suffit, assoyez-vous et terminez cette négociation-là. Donc, ça, c'est une première chose.

Pour le 68.6, moi, en tout cas, à l'Union des artistes, on va se dire : bien, quels sont les secteurs à prioriser? Où est-ce qu'on n'a pas d'entente collective présentement.

Mme St-Pierre : ...Conscients que le TAQ a aussi des délais qui peuvent être longs.

Mme Fortin (Christine) : Ah, ça peut aller vite au niveau... En tout cas, ça va être beaucoup plus vite qu'en ce moment, je peux vous le dire.

Mme St-Pierre : Qu'en ce moment.

Mme Fortin (Christine) : Mais les ordonnances de négociation de mauvaise foi, ça va très vite, là.

Mme St-Pierre : O.K. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci. Nous poursuivons cette fois-ci avec la parole... Avec la... nous donnons maintenant la parole à la députée de Taschereau. Vous disposez de deux minutes 55 secondes.

Mme Dorion : Moi, je m'intéresse à l'aspect manquant de l'imputabilité de ceux qui reçoivent des subventions. C'est vrai, chaque artiste que je connais, là, a des histoires de producteur qui va chercher des subventions puis qui ne paye pas les artistes. Ça fait que ce n'est pas tous les producteurs, c'est loin d'être tous les producteurs, mais il y en a, ça existe parce que la loi est floue, parce qu'il y a une possibilité de faire ça. Donc, moi, je me demande ça serait quoi, l'idéal, tu sais, Parce que pour les gros producteurs, c'est extraordinaire qu'on puisse savoir... Que l'État surveille est-ce que tu as payé les artistes. Ça serait quoi, la meilleure manière? Puis pour les petits producteurs, après, tu sais, pour ceux qui font des shows de théâtre, ils sont quatre, c'est autoproduit, ils essaient d'aller chercher des sous à gauche, à droite, ils ne veulent pas avoir une tonne de paperasse, donc, question générale là-dessus, là : comment, dans les faits, ça se ferait, cette vérification-là?

Mme Prégent (Sophie) : Bien, pour les petits producteurs, ce n'est pas un problème, on a tout ce que ça prend dans nos ententes collectives. On a des artistes entrepreneurs, il y a même des artistes interprètes qui ne veulent pas nécessairement s'associer à une association de producteurs. Nous, on fait ça avec eux, tu sais, on les suit. À Québec, il y a beaucoup de théâtres, entre autres, on le sait, c'est toutes des petites compagnies de théâtre, on ne fait pas mourir ces gens-là, là. Donc, il faut quand même une mesure flexible de dérogation, par exemple, à des ententes collectives, etc., Etc. Peut-être que tu pourrais...

Mme Fortin (Christine) : Bien, c'est exactement ça. Puis après ça, ils le font d'emblée. Mais, si au moins dans les programmes de la SODEC ou du CALQ, on dit : regarde, va chercher des contrats UDA à l'union puis nous, on va faire un plan de match adapté avec le théâtre en question, ce qu'on fait déjà tous les jours, mais au moins, ça va lui donner un incitatif. S'il est obligé de déposer des contrats UDA pour avoir sa subvention, bien, on va aller tous les chercher, les petits théâtres, là, puis les gens vont avoir leur filet social. Donc, voilà.

M. Fortin (Luc) : Je vais vous donner l'exemple des artistes qui... Des demandes... qui ont des bourses de création du CALQ, on soumet beaucoup plus de redditions de comptes qu'à un gros producteur qui reçoit 200 000 $. Parce que quand tu as fini ton... quand tu fais ton rapport de bourse, il faut que tu prouves toutes tes dépenses, de A à Z. S'il te manque quelque chose, tu ne pourras plus avoir de bourse après; dans les cas extrêmes, il faut que tu rembourses. Les producteurs ne sont pas soumis à la même chose. Quelqu'un à la SODEC m'a déjà dit... je lui avais demandé : Est-ce que vous êtes certain, une fois que le projet est terminé, que tout le monde a été payé correct? Il me disait : Non. C'était clair comme de l'eau de roche parce qu'il n'y a pas de mécanisme, aussi simple que ça.

Mme Dorion : Là, mon 2 minutes est quasiment fini. Pour les gros, comment qu'on ferait? Ça serait quoi, le mécanisme idéal, tu sais, pour vérifier?

M. Fortin (Luc) : Bien, comme pour les petits, quand tu as fini ton rapport... Tu fais ton rapport puis tu prouves que tout le monde a été payé, c'est tout, sans ça, tu n'en auras pas d'autres après. Voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Il vous restait 20 secondes.

Mme Dorion : Parfait.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est beau? Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec le député de Matane-Matapédia. Vous disposez, vous aussi, de deux minutes 55 secondes.

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Je veux, d'entrée de jeu, révéler un intérêt : Ma conjointe est membre de l'Union des artistes. Alors, ce que je vais faire, c'est que je vais offrir tout mon temps à l'Union des artistes pour nous parler d'un élément qui ne se retrouve pas dans le projet de loi ou un élément qui ne devrait pas se retrouver. Alors, je vous donne tout le mon temps pour vous adresser à nous.

Mme Prégent (Sophie) : C'est trop gentil, monsieur Bérubé.

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...2 min 40 s, hein?

M. Bérubé : ...

Mme Prégent (Sophie) : Vas-y.

M. Bérubé : ...

Mme Fortin (Christine) : Bien, moi, je parlerais... Dans notre mémoire, on a parlé des fonctions réputées, à l'article 1.2, qu'on ne retrouve pas. Nous avons beaucoup d'artistes qui travaillent dans le milieu de la scène, par exemple, des régisseurs, des assistants-metteurs en scène qui sont toujours non syndicables en ce moment puisque le 1.2, pour tout ce qui est fonction réputée, est limité au secteur de l'audiovisuel. Nous, c'est un enjeu important. Il y a des gens qui viennent nous voir pour avoir des conditions de travail, mais on ne peut pas aller chercher une reconnaissance pour ces gens-là puisque les fonctions réputées, donc toutes les assistants-metteurs en scène, régisseurs, il y a une panoplie de techniciens, également, qui ne peuvent pas aller chercher une reconnaissance syndicale puisque l'article 1.2 de la loi actuelle est limité...

Mme Fortin (Christine) : ...à l'audiovisuel. Donc, nous, ce qu'on voudrait, c'est élargir à tous les domaines de production artistique, qui pourrait enfin donner la chance à d'autres artistes d'aller chercher la protection syndicale.

M. Bérubé : D'autres éléments... porter à l'attention de la commission?

Mme Prégent (Sophie) : Bien, peut-être un dernier mot. Tu sais, je sais qu'on a l'air un peu, prêcher pour nos paroisses en disant : Ça prend des contrats union des artistes ou ça prend des contrats guildes. Mais la seule façon d'améliorer les conditions socioéconomiques des artistes, c'est qu'ils soient liés avec nous, c'est comme ça qu'ils vont avoir des assurances. Puis au bout de 20 ans, ils sont contents d'avoir des assurances bronze, argent, platine ou peu importe. C'est la même chose avec le filet social, avec le congé payé, 4 %. C'est la seule façon, en tout cas, c'est la seule que je connais... Et ceux qui sont les plus vulnérables, le secteur de la danse, par exemple, ou même de la musique, c'est les endroits où ils travaillent sans contrat parce qu'ils n'ont pas de filet social, parce qu'ils ne réussissent pas à mettre l'argent de côté, ils n'ont pas de REER, il n'y a pas la part producteur. La part producteur sur un contrat, c'est 10 % que ça va dans notre REER, plus l'ajout qu'on y fait nous-mêmes. Bien, au bout du compte, quand tu as un peu travaillé, dans la vie, tu as un REER, un REER qui a été payé par le producteur, puis que, nous, on négocie avec la Caisse de sécurité des artistes d'année en année, à raison de 1 % de plus. Moi, c'est la seule façon que je connaisse qui puisse améliorer les conditions socioéconomiques des artistes.

J'entends beaucoup le mot «culture» dans la vie. Je tiens à dire qu'il n'y a pas de culture sans artiste, c'est tout. Si Fred Pellerin ne nous racontait pas ses histoires, on ne les connaîtrait pas, puis notre culture, elle serait autre chose. Elle est ça parce qu'il existe, parce qu'il vous parle, et que les gens s'identifient à lui. Voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.

Une voix : C'est tout. Non... temps.

M. Bérubé : ...mais c'était important de vous révéler mon intérêt.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien. Alors, merci, Mme Prégent, Mme Fortin, M. Fortin et M. Lefebvre, pour votre bonne contribution et belle contribution aux travaux de la commission.

Nous allons donc maintenant suspendre les travaux, le temps de donner au prochain groupe... de s'installer. Merci beaucoup. Merci encore.

(Suspension de la séance à 9 h 59)


 
 

10 h (version non révisée)

(Reprise à 10 h 9)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous accueillons maintenant la Fédération nationale des communications et de la culture ainsi... qui sont réunis ensemble, conjointement, les Travailleuses et travailleurs regroupés des arts, de la culture et de l'événementiel. Mme Charette et Mme Baril-Jannard, je vous invite à bien vous présenter avant de commencer votre exposé.

Mme Charette (Annick) : Bonjour. Annick Charette, présidente de la Fédération nationale des communications et de la culture. Je viens du milieu de la télévision et je suis fille de chanteurs lyriques, donc je connais très bien la condition d'être élevée sous la Loi du statut de l'artiste.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bonjour, Mathilde Baril-Jannard. Je travaille pour le service juridique de la CSN depuis plus de huit ans. Merci de l'invitation.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, vous pouvez commencer votre exposé.

• (10 h 10) •

Mme Charette (Annick) : D'abord, la FNCC est très, très contente d'être assise ici pour pouvoir discuter de ce projet de loi avec vous. Et en tant qu'organisation syndicale, la raison d'être de la FNCC est d'assurer et de promouvoir la liberté d'association, le droit à la négociation collective et la liberté de presse et d'expression et l'amélioration des conditions de pratique et de travail de ses membres : des artistes, des artisans, du milieu de la communication et de la culture en général, y compris les travailleurs regroupés des arts, de la culture et de l'événementiel.

Dans un premier temps, la FNCC est très contente de souligner l'aspect historique du projet de loi n° 35 pour l'amélioration de nos institutions de travail, en premier, et la promotion et la liberté d'association par l'instauration d'un processus de négociation collective pour les artistes professionnels exerçant dans les domaines des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature. C'est très important pour nous que nous soyons tous sous le même régime.

Nous tenons également à mentionner que l'introduction des dispositions en matière de harcèlement psychologique et sexuel dans la loi est une avancée essentielle pour le bien être et la santé au travail des artistes. Et c'est quelque chose qui me tient particulièrement à coeur. Avec cette insertion législative, contrer le harcèlement psychologique et sexuel dans les milieux artistiques ne sera dorénavant plus une monnaie d'échange dans la négociation des conventions collectives, mais un droit à respecter pour les artistes et les artisans, les femmes et les hommes qui oeuvrent dans ce...

Mme Charette (Annick) : ...et qui ont été sous la loi de l'omerta pendant tant de temps. D'autre part, nous soulignons l'élargissement des pouvoirs du Tribunal administratif du travail, notamment à l'égard de l'entrave à l'intimidation des activités syndicales, de la négociation de mauvaise foi et des actions concertées. Cet élargissement des compétences du TAT était d'ailleurs une autre de nos revendications à la FNCC. Cette demande est donc comblée et même au-delà de nos attentes puisque les associations d'artistes auront désormais un recours en matière de prélèvement de cotisations syndicales. En somme, la FNCC considère que ces apports législatifs comme étant les plus significatifs du projet de loi no8 35 et ce faisant, elle désire les voir subsister sans aucune modification. Par contre, nous avons quelques commentaires sur d'autres aspects du projet de loi, et je passe la parole à Mathilde ici présente.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui. Donc, bonjour. Ma présentation va axer sur les modifications et les précisions que la FNCC-CSN recherche dans le cadre du projet de loi n° 35. Dans le mémoire qui a été déposé par la FNCC-CSN, le 1ᵉʳ février 2021, la FNCC, la fédération recherchait en fait un mécanisme, une adhésion forcée obligatoire pour les producteurs et les diffuseurs dorénavant, en fait obligation de s'associer à une association de producteurs ou de diffuseurs parce qu'actuellement un producteur ou un diffuseur non-membre d'une association n'est pas lié par les ententes collectives du secteur. Alors, cette obligation... mais en fait cette adhésion obligatoire aurait permis d'obtenir un régime de rapports collectifs sectoriels,  un réel régime de rapports collectifs sectoriels. Le législateur n'a pas pris cette voie. Il a plutôt pris la voie qui est en fait l'article 68.6 dont... et sur lequel l'UDA et la guilde a parlé ce matin. C'est une voie qui est intéressante effectivement, surtout dans les secteurs que l'on dit à découvert, notamment le secteur de la danse où il n'y a pas d'entente collective, et également, c'est une voie intéressante aussi pour les secteurs où il y a des ententes collectives, mais pour... En fait, il pourrait y avoir également une réglementation qui viendrait lier les producteurs et les diffuseurs non membres des associations. Donc, par exemple, dans le milieu des concepteurs de l'Association des professionnels des arts de la scène où il y a des ententes collectives, mais ça fait en sorte que, lorsque les producteurs et diffuseurs sont non-membres, l'association d'artistes doit faire une chasse à la négociation des producteurs, et souvent les productions sont déjà terminées avant même qu'une entente collective soit conclue. Par conséquent, un règlement dans un secteur où il y a déjà une entente, mais qui lierait les producteurs et les diffuseurs non-membres des associations, permettrait donc d'obtenir un peu... en fait cette visée d'avoir un réel régime de rapports collectifs sectoriels. Bien entendu, nous espérons que le gouvernement puisse... en fait exerce ce devoir. Et là, on appuie également la revendication de l'UDA que ça soit sur demande et que ça devienne obligatoire lorsque c'est sur demande d'une association d'artistes.

Alors, à la page 5 également de notre mémoire, nous faisons une... c'est la même recommandation que l'UDA, donc que les associations d'artistes se sont concertées pour offrir une modification en fait consensuelle à travers les associations d'artistes. Alors, à la page 5 de notre mémoire, vous avez donc la modification que nous recherchions à l'article 68.5... 68.6, pardonnez-moi.

Le deuxième point que nous souhaiterions avoir une précision à l'égard du projet de loi, c'est la question du devoir de juste représentation qui est instauré à l'article 24.2. Nous tenons toutefois à indiquer d'emblée que la FNCC-CSN et que la CSN ne remettent aucunement en question l'importance d'avoir de juste représentation lorsqu'une association syndicale exerce son... en fait, exerce sa représentation lorsqu'elle est dans le cadre de sa représentation exclusive. Or, le projet de loi n° 35 est un calque de l'article 47.2. Nous tenons également à indiquer que ce calque est inexact puisque le Code du travail impose un monopole de représentation exclusive à l'association... à l'association de personnes salariées. Et le corollaire de ce monopole de représentation exclusif, le devoir de représentation. Il n'y a aucun espace de négociation entre une personne salariée et un employeur. Il n'y a pas de négociation individuelle. Dans le contexte bien particulier de la loi S-32.1, il y a un espace de négociation entre un artiste et un producteur. Par conséquent, l'association d'artistes n'a pas un monopole de représentation exclusif. Alors, la disposition 24.2 doit refléter ce particularisme et cette idiosyncrasie.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, merci. Nous poursuivons, cette fois-ci, avec l'Association des professionnels des arts de la scène du Québec, avec M. Delorme...

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...

M. Delorme-Bouchard (Cédric) : Merci. Bien, je commencerais tout de suite en disant que j'appuie les revendications...

En fait, je présente aussi Mme Viviane Morin, directrice générale de l'APASQ. Cédric Delorme-Bouchard, président de l'APASQ.

Donc, nous appuyons évidemment les revendications de nos collègues de la FNCC et de l'UDA, aussi de la Guilde des musiciens, qui sont passés juste avant nous.

Durant le temps qui m'est imparti, ce que j'aimerais, c'est pointer sur une particularité qui est vraiment au domaine des personnes conceptrices, donc des artistes concepteurs. Et ici je parle comme président de l'APASQ, mais aussi comme artiste concepteur. Je suis scénographe, metteur en scène. J'ai signé quelque 300 conceptions de théâtre, de danse, d'opéra, autant à Québec qu'à l'étranger. J'enseigne la conception au niveau collégial, universitaire. C'est mon domaine, c'est mon univers, donc c'est de ça que je viens vous parler aujourd'hui.

Présentement, dans le projet de loi, il y a un angle mort pour les artistes concepteurs, et ça faisait partie d'une des recommandations déposées par L'APASQ dans le mémoire de janvier 2021, qui était d'élargir la définition d'artiste pour inclure la portion conception et la portion réalisation. Et là c'est vraiment quelque chose qui est propre au domaine des artistes concepteurs de théâtre, scénographes, concepteurs costumes, concepteurs lumières, compositeurs musique pour les arts de la scène, etc.

Donc, pour bien comprendre la différence, la portion conception, si on prend une personne conceptrice de costumes, par exemple, la portion conception, ça va être l'étape d'idéation, de croquis, d'esquisse et du dessin de toutes ces maquettes qui vont représenter l'ensemble des éléments de costumes d'une production. Évidemment, ça s'applique à tous les métiers, je prends costumes en exemple. Lorsqu'on rentre dans la phase de réalisation, présentement, on cesse d'être reconnus comme des artistes au sens de la loi. Donc, on n'est plus couverts par cette portion, contrairement à la loi de l'audiovisuel, où les concepteurs, les artistes sont reconnus comme artistes du début à la fin du processus. Ça, c'est une différence majeure et ça crée d'énormes inéquités dans le milieu.

Je reviens à l'exemple d'un artiste concepteur de costumes. Donc, à partir du moment qu'on rentre en réalisation, en fabrication, on ne se poserait pas de questions si on était en présence d'un artiste peintre qui applique de la peinture sur sa toile, d'un sculpteur qui qui manipule l'argile pour lui donner forme. C'est la même chose. L'artiste concepteur fait appel à son savoir-faire et aussi à son idéation du projet pour lui donner forme par le médium qu'il maîtrise, que ce soit la lumière, l'espace, le costume, etc.

Donc, à partir de ça, ça cause deux grands problèmes pour le domaine de la conception. Le premier, à partir de la phase de réalisation, comme on n'est plus considérés comme artistes concepteurs, les associations d'artistes, on n'a pas de moyens d'aller négocier des conditions de travail pour cette portion-là. Et malheureusement ça représente... La portion réalisation commence très, très tôt dans le processus, donc à partir du tiers et même des fois du quart du calendrier de production, on n'est plus des artistes. Et toute cette portion-là, les associations ne peuvent pas négocier des cachets décents, des conditions de travail décentes. Et, même si ça se passe bien avec certains producteurs dans d'autres domaines, ça peut arriver que les artistes sont très mal payés, voire parfois même la rémunération disparaît complètement. Il n'y a pas de moyen de réussir à se faire rémunérer pour ce travail, qui est obligatoire et qu'on ne peut pas séparer de la conception. C'est deux choses qui vont ensemble. On essaierait de diviser ces deux aspects entre deux personnes différentes, on n'y arriverait pas. C'est inclus à l'intérieur. La conception inclut de la réalisation.

J'arrive à mon 3 min 30. Je terminerai avec... On n'est pas non plus couverts au chapitre III sur la loi pour la... bien, en fait, pour la protection contre le harcèlement psychologique. Donc, on cesse, dans la nouvelle loi, d'être protégés pour harcèlement psychologique au tiers du contrat. Merci.

• (10 h 20) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci pour vos exposés très instructifs. Nous allons maintenant, effectivement, débuter la période d'échange avec Mme la ministre. À vous la parole. Vous disposez de 17 min 30 s.

Mme Roy : Merci. Merci beaucoup d'être là. On s'est vu, la plupart d'entre nous, en Teams. On en a fait, des réunions, cet hiver, et on a discuté de beaucoup de choses. Et merci pour votre présentation. La présentation... Je n'avais pas la présentation écrite de ce que vous venez de me dire, mais il y a matière à réflexion. On a pris des notes.

Maintenant, j'aimerais savoir, plus techniquement, vous avez commencé à en parler du côté de la FNCC, entre autres, vous proposez un amendement - puis là on rentre vraiment dans le corps du sujet, parce qu'on n'avait pas terminé - à l'article 24 deux du p.l. no 35, ce fameux article qui nous parle de la représentation. Vous nous dites... Je vous apporte à la page 6. Vous nous recommandez une modification sur le juste devoir de représentation, puis la modification que vous nous demandez de faire, elle est différente de celle qui a été faite ou présentée juste avant par l'UDA et la guilde, entre autres. Vous nous dites, et c'est votre modification : «Une association d'artistes reconnue ne doit pas agir de mauvaise foi ou de...

Mme Roy : ...manière arbitraire, discriminatoire ni faire preuve»... attendez un petit peu. Je ne veux pas... Je veux être au bon endroit, oui. Alors, je poursuis. «...arbitraire, discriminatoire ni faire preuve de négligence grave à l'endroit des artistes visés par une entente collective ou lorsqu'une entente prévue à l'article 26.1 a été conclue, à laquelle l'association est partie, peu importe qu'il soit membre ou non». Donc, cet amendement que vous proposez à 24.2, on n'en avait pas parlé, mais il est dans votre mémoire. Pourquoi est-il différent de celui qui a été proposé par les collègues de La Guilde et de l'UDA?

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui, je vais y aller. Donc, j'y vais parce que c'est un point assez technique. Mais c'est que l'article 26.1 actuel de la loi prévoit qu'à compter du moment où l'avis de négociation prévu à l'article 28 a été transmis, une association reconnue d'artistes, une association de producteurs ou un producteur ne faisant pas partie d'une association de producteurs peuvent convenir par écrit qu'un producteur devra retenir, sur la rémunération, la cotisation syndicale. Alors, s'il y a une entente de cette nature-là, suivant l'avis de négociation, une cotisation syndicale est donc prélevée sur le cachet que reçoit... sur le montant, la rémunération que reçoit un artiste.

Par conséquent, et je me suis basée sur les enseignements du Pr Jean-Yves Brière, c'est que, pour lui, la cotisation syndicale est aussi une contrepartie au devoir de juste représentation. Lorsqu'une personne salariée donne une cotisation syndicale, alors, là, c'est... en fait, il dit que «l'intégration de l'obligation. En effet, cette obligation syndicale serait, en quelque sorte, la contrepartie de l'obligation faite à chaque salarié de contribuer aux frais collectifs». Alors, la FNCC se disait donc, et c'était un souci des associations d'artistes, que le devoir de juste représentation s'applique dans un cas où il n'y a aucune cotisation syndicale, notamment lorsque... considérant qu'il n'y a pas d'entente collective. Toutefois, si une telle entente est faite, bien, il y a une cotisation syndicale qui est perçue sur la rémunération de l'artiste, alors c'est pour ça que nous avons mis cette distinction-là. Donc, le devoir de juste représentation débuterait à ce moment-là puisque les personnes artistes déboursent déjà des cotisations syndicales. Alors, c'était pour nous, également, un compromis qu'on verrait.

Mme Roy : Merci. Je vous ramène à la page 5 de votre mémoire, encore toujours sur le devoir de juste représentation qui, lui, est l'article 15 du projet de loi n° 35. Vous nous dites : «La disposition 24.2 est, en somme, un calque de la disposition 47.2 du Code du travail.» Vous avez totalement raison, c'est exactement ce qu'on a fait et on l'a fait parce qu'entre autres c'est un projet de loi qui a été travaillé avec trois ministères. Le ministère de la Culture, avec les spécialistes au ministère de la Culture, avec, également, les spécialistes de la direction des affaires juridiques du gouvernement, donc, le ministère de la Justice et avec les collègues juristes du ministère de l'Emploi, du Travail. Et ces collègues nous ont dit : Ça va nous prendre cet article-là parce qu'il est important.

Mais vous arrivez en disant : Faites attention, ici, on est... et c'est vrai, vous avez raison, je vous le dis, là, d'entrée de jeu, vous avez raison, et les deux autres groupes ont fait la même remarque ce matin. Vous avez raison, on a fait une adaptation peut-être un peu trop identique à l'article 47.2 et je crois qu'il y a des adaptations... pourrait faire, compte tenu du fait, entre autres, que ce fameux corollaire, là, du monopole de la représentation est exclusif quand on parle de salariés. Mais dans le cas présent, c'est ça qu'il est extrêmement important de comprendre, les artistes ne sont pas des salariés au sens de la loi, ils sont des travailleurs autonomes. C'est une loi d'exception qu'on est en train de créer, sur laquelle on travaille. C'était déjà une loi d'exception. Et je pense vraiment que vos remarques à cet égard-là sont judicieuses, tout comme les deux autres groupes qu'on a entendus. Alors, sachez-le, là, je pense qu'il y a des adaptations qui pourraient s'imposer et je vous invite à élaborer sur les adaptations que vous aimeriez voir parce qu'il est important, cet article 47.2. Alors, quelles sont les adaptations que vous aimeriez y voir?

Mme Charette (Annick) : On en a parlé, mais je vais laisser Mathilde, qui a le langage juridique un peu plus évolué que le mien, vous en reparler.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien, en fait, c'est vraiment... Les adaptations que nous souhaiterions voir à l'article 24.2, c'est vraiment la modification qu'on vous propose à la page 6 de notre mémoire. Pour nous, dans ce contexte-là, le législateur québécois a déjà fait, dans d'autres régimes particuliers de rapports collectifs... et là, je pense notamment à la Loi sur les relations de travail dans le milieu de la construction. À l'article 27, où on importe également le devoir de juste représentation dans cette loi-là, le législateur, à ce moment-là, a choisi le vocable «avec les adaptations nécessaires», donc, pour refléter le particularisme, l'idiosyncrasie de ce régime, qui est... ce régime particulier qui s'applique au...

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : ...de la construction. Toutefois, donc, le législateur aurait pu prendre cette voie-là. Toutefois, on vous soumet une voie plus précise parce qu'il est clair que dans certains secteurs où il n'y a pas d'entente collective, c'est qu'il faut comprendre que l'association d'artistes exerce son pouvoir de représentation exclusif lorsqu'elle négocie une entente collective et lorsqu'elle applique les conditions minimales d'une entente collective. Alors, c'est pour ça qu'à l'article 22.2, nous souhaiterions avoir, à l'instar de l'UDA, que cette précision-là, que les artistes visés par une entente collective. Et on a également rajouté notre petite subtilité CSN, FNCC sur l'entente prévue à l'article 26.1. Mais c'est vraiment... Ce sont les modifications que nous souhaiterions avoir.

Mme Roy : Merci. Et on va travailler ensemble pour que tout soit plus précis à cet égard. Je vais vous dire ça comme ça. Je ne peux pas présumer de rien, mais on est là pour vous aider. On est tous là pour vous aider.

Mme Charette, je voudrais vous parler de deux choses. D'abord, dans votre mémoire, vous dites : des recommandations non prises en considération. Puis je vais le dire tout de suite, d'entrée de jeu, vous nous avez demandé que les journalistes indépendants soient sous l'égide de la Loi sur le statut de l'artiste. On en a parlé ensemble. Mme la députée de l'Acadie, vous avez été journaliste une bonne partie de votre vie, moi également. Donc, vous connaissez le travail. Et pour nous, les journalistes ne sont pas des artistes. On veut vraiment aider les artistes, alors c'est la raison pour laquelle... mais il y aura d'autres choses, on peut aider les journalistes de différentes façons. Mais je voulais le spécifier parce qu'on a une sensibilité à l'égard des journalistes également.

Par ailleurs, Mme Charette, j'aimerais savoir dans quelle mesure... puis vous nous disiez, d'entrée de jeu, que ça vous avait particulièrement touché les... vous tenez particulièrement aux mesures qui font en sorte que nous allons transposer les dispositions de la Loi sur les normes du travail qui concernent le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel dans cette loi pour les artistes. Expliquez-nous concrètement qu'est-ce que ça va changer pour les artistes selon votre lecture du p.l. 35.

Mme Charette (Annick) : Bien, ça va officialiser ou peut-être faire la promotion qu'il existe un filet à cet égard-là dans le milieu de la communication et de la culture, qui est un milieu qui a été, ma foi, assez interpellé sur ce type de conditions de harcèlement sexuel et psychologique. Et je pense que ça marque d'une pierre le fait que maintenant, notamment au niveau des conventions collectives, quand il fallait «trader» des dispositions de prévention en matière, excusez l'anglicisme, de matière de prévention de harcèlement psychologique et sexuel contre d'autres dispositions quand les associations négociaient avec les producteurs. Je pense que le fait que ce soit maintenant à l'intérieur de la loi, ça enlève cette chose-là d'un aléatoire possible, donc ça devient officiel.

Et c'est un message fort important pour l'ensemble du milieu d'entendre que des artistes, parce que les artistes sont toujours... participent à quelque chose qui est souvent plus grand que soi. Ils sont en relation de dépendance au niveau de pouvoir. Souvent, si tu veux exister comme artiste, tu dois être produit, tu dois pouvoir te faire entendre, te faire voir, te faire lire, te faire... Donc, tu dépends toujours d'un tiers. Le tiers étant le producteur, le metteur en scène qui va te choisir, l'éditeur qui va t'éditer. Et ce tiers-là a toujours un rapport de force prédominant sur plusieurs aspects, dont celui-là, et je l'ai dit dans un autre contexte, la loi de l'omerta doit terminer dans ces milieux-là à cet égard-là. Et je pense que ceci va marquer d'une pierre, je vous en remercie à cet égard-là.

• (10 h 30) •

Il y a d'autres dispositions d'ailleurs qui ont été instaurées par le projet p.l. 59 qui est devenu la loi 27 qui vont devoir, j'en ai parlé avec Mme Doucet, il y a une harmonisation qui va devoir se faire aussi sur certaines normes de la loi du travail qui vont pouvoir se répercuter là-dedans. Je ne sais pas encore lesquelles parce qu'on n'a pas eu le temps de le faire comme exercice ni de votre côté, mais ça, ça va s'associer à ça.

Pour l'AJIQ, je ne pouvais pas faire d'économie de ne pas parler. On a eu cette conversation, je vous l'accorde, et on va continuer à travailler avec Me Baril-Jannard, ici. On a des choses sur lesquelles on va vous voir à cet égard-là, mais c'était quand même des gens qui sont sans filet social, comme beaucoup d'artistes sont sans filet social. Donc, c'était important de les mentionner à cet égard.

L'autre chose, la reddition de comptes. Vous avez entendu parler dans ce qui n'a pas été... dans nos choses qu'on souhaitait voir et qui ne sont pas là. On comprend qu'il y a peut-être d'autres mécanismes. Et le fait d'être dans la loi, ça empêcherait que ces mécanismes-là ne puissent pas être mis en place ou être soumis à la volonté de certains dirigeants qui voudraient ne peut-être pas vouloir les promouvoir. Donc, la reddition de comptes est très importante. Moi, j'ai travaillé pendant des années dans le milieu de la télévision. Ce n'est pas qu'il n'y a pas de reddition de comptes, notamment en audiovisuel, de producteurs qui reçoivent de l'argent. Il y en a une certaine forme parce qu'évidemment ils doivent fournir des états financiers vérifiés, mais il n'est pas dit dans ces états financiers...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

Mme Charette (Annick) : ...que ça a respecté des ententes minimums, c'est le step au dessus, la marche qu'on doit monter pour avoir ces redditions de comptes là, à l'image de ce qu'elles devraient être, c'est-à-dire tenir compte des artistes, qui sont la matière première de toute production culturelle et l'essence de notre vitalité, je dirais, identitaire québécoise.

Mme Roy : ...Madame Charette. Je vous hocher la tête, monsieur, quand madame Charette parlait des dispositions pour contrer le harcèlement et le harcèlement psychologique et sexuel. Et du côté des arts de la scène, dans quelle mesure l'adoption de ces articles, que nous souhaitons, vont vous aider concrètement, là?

M. Delorme-Bouchard (Cédric) : Bien, évidemment, on disait le rapport avec le producteur, le metteur en scène, avec toute personne en position d'autorité pour programmer un artiste, pour l'inclure dans une saison officielle. Je pense qu'on ne peut même pas comparer ça, un rapport traditionnel entre un employeur et un salarié. Le pouvoir d'un producteur, d'un metteur en scène d'engager ou non, de choisir ou non, a un impact sur une carrière, c'est immense. Donc, le pouvoir qui est conféré est très, très grand. Le fait qu'il n'y ait aucune protection pour harcèlement psychologique, c'est un angle mort immense.

Et comme je le disais à la fin aussi, la portion très spécifique aux artistes concepteurs, donc toute personne conceptrice pour les arts de la scène, présentement, fait aussi qu'à partir d'un moment dans le calendrier, comme je disais tout à l'heure, ça arrive très tôt dans le processus parce que la portion réalisation, ce n'est pas ce qui arrive une semaine avant la représentation. Ça commence des fois deux semaines... pas de semaines, deux mois après le début du processus, on tombe en réalisation. Il nous reste un an de travail, ce qui fait que cette portion-là n'est plus couverte. Et s'il y a des problèmes de harcèlement qui vont apparaître, ce sera peut-être pas dans les deux premiers mois du projet et, au contraire, ça risque de se concrétiser, surtout dans la ligne finale, dans les moments de grand stress, dans les moments de pression, dans les moments où la première approche, dans les moments où les échéanciers, les contraintes budgétaires, la réalité rattrape le projet, et c'est dans ces moments-là que ça risque d'arriver. Donc, la section trois, le chapitre trois de la nouvelle loi permet de protéger en partie, mais pour les artistes concepteurs, il faut penser à eux jusqu'à la fin du processus de création, et pas seulement en début uniquement, sinon on retomberait comme dans l'ancienne loi, on tomberait... les personnes conceptrices non couvertes à la moitié du parcours.

Mme Roy : Une précision. Madame la présidente, il me reste combien de temps?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Quatre minutes.

Mme Roy : O.K. Je vais y aller avec une autre question qui est plus pointue, qui est plus technique. Mais vous êtes la FNCC, vous connaissez le droit du travail, alors c'est pour vous. Vous avez remarqué qu'on a ajouté, dans le projet de loi, l'article 42, une interdiction de représailles à l'encontre d'un artiste qui exercerait un droit prévu. Est-ce que ça aussi c'est quelque chose qui va aider les artistes concrètement? Dans quelle mesure? Pourquoi? Avez-vous des exemples?

Mme Charette (Annick) : Bien, c'est certain, parce que je l'ai mentionné, d'ailleurs, peut être rapidement en entrée de jeu, là, mais c'est certain que ça va aider. Parce qu'à partir du moment où tu as la sensation ou le sentiment que tu as une certaine protection, tu vas peut-être faire un pas en avant pour t'autoreprésenter dans des intérêts que tu as, mais Mathilde, tu veux peut-être... d'autre chose à rajouter là dessus. Mais c'est vraiment essentiel aussi, là, comme dans les milieux de travail, quand tu es protégé de ton droit de faire une action pour faire valoir tes droits, c'est essentiel.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Si je peux me permettre, en fait l'article 42 qui est instauré par l'article 24, effectivement, c'est un article qui est très similaire également à l'article quinze et suivants du Code du travail pour contrer les mesures de représailles dans les milieux de travail. Et c'est certain que l'article 42 de la loi est une illustration, en fait, permet de concrétiser l'exercice de la liberté d'association puisqu'on octroie, en fait, on insère, on met, on interdit, on prohibe un tel comportement d'un producteur à l'égard des personnes artistes. Alors très... il est certain que pour la FNCC et même la... que j'en suis certaine, si une personne artiste exerce un droit à l'égard de cette loi là, disons qu'il exerce, il fait une plainte pour harcèlement psychologique, donc, et que ça passe mal auprès d'un producteur, la personne de Cédric Delorme-Bouchard vous l'a dit, le pouvoir d'un metteur en scène et d'un producteur à l'égard d'une personne artiste sur sa carrière est immense. Alors, ce type de recours là va permettre ainsi aux personnes artistes, en fait, de mieux survivre. Donc c'était vraiment... c'était également dans notre...

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : ...nous soulignons également cet apport-là de la loi.

Puis j'avais... Si je peux me permettre, Mme la ministre, c'était simplement pour supporter également les propos du président de l'APASQ à l'égard des dispositions de harcèlement psychologique. C'est qu'en fait la loi, à l'article 1.2, et ça, ça a été instauré en 2009, là, pour les personnes de l'audiovisuel, donc les personnes qu'on dit techniciennes, donc en 2009, pour des considérations, disons, économiques, en ce sens que le législateur québécois avait éclairci le régime de rapport collectif qui s'appliquait aux artistes suivant le conflit, en fait, le conflit qui est survenu dans le milieu du cinéma, mais les personnes des arts, par exemple, ne sont pas visées par un tel élargissement de la notion d'artiste. C'est pourquoi, lorsqu'ils font la réalisation, ils ne sont pas couverts par la loi. Et donc c'est certain que c'est un écueil majeur du projet de loi n° 35, et nous en discutons d'ailleurs dans notre mémoire. Je vous remercie.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il ne reste que 20 secondes.

Mme Roy : 20 secondes... Vous n'aurez pas le temps de répondre à mes questions. Je laisse aux oppositions.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci, merci beaucoup. Alors, merci d'être parmi nous ce matin. C'est très intéressant de vous entendre, mais je suis vraiment restée sur la notion d'introduire dans la loi la protection aussi des concepteurs, comme c'est le cas pour l'audiovisuel. Donc, ça serait un amendement qui irait à l'article 1.2, c'est-à-dire de l'inclure.

Donc, ici, ça dit : «1.2. Dans le cadre d'une production audiovisuelle mentionnée à l'annexe I, est assimilée à un artiste...» Puis là on donne toutes les fonctions, les fonctions liées à la conception, la planification, la mise en place ou la réalisation de costumes, de coiffures, de prothèses, de maquillages, de marionnettes. Ça, c'est pour l'audiovisuel uniquement, et vous n'êtes pas inclus dans cette catégorie-là. Alors, ça serait assez simple, là, de le faire. Vous avez dû en faire des représentations quand il y a eu la conception de ce projet de loi là. Ça fait quatre ans, là, que le ministère est là-dessus. Pourquoi vous n'avez pas été entendus, vous pensez? 

Mme Morin (Viviane) : Je peux y aller. Bien, je ne veux pas présumer de rien, mais à l'APASQ, on est une toute petite association, on représente 280 artistes. On n'est pas donc, j'imagine, les plus entendus ou... Bon, tu sais, c'est qu'est-ce que je pense.

Une voix : ...

Mme Morin (Viviane) : Bien, on essaye, on essaye. Mais peut-être qu'on ne nous entend pas aussi bien que d'autres, parce que, surtout, on représente des personnes qui sont derrière la scène, donc qui sont, tu sais, plus dans les coulisses, qui travaillent... tu sais, qui ne sont pas au-devant de la scène. Ça fait que ça a peut-être un lien.

Mais effectivement, quand les personnes conceptrices... Dans nos ententes collectives, quand ils sont la portion conception, ils sont couverts, on peut négocier des ententes collectives. Mais la portion réalisation, qu'est-ce qui est mentionné dans nos ententes, c'est que ça ne fait pas partie du cachet de conception, et il y a un budget de réalisation qui est entendu entre la personne conceptrice et le producteur. Et les budgets sont tellement petits, et ça vient souvent sur les épaules de la personne conceptrice de budgéter. Et à la fin de ça, il reste aussi pas nécessairement de montant pour se payer. Puis il y a beaucoup de producteurs qui pensent que le travail de réalisation va être couvert par l'entièreté du cachet de conception. C'est une méconnaissance des ententes collectives, qu'est-ce qui fait qu'ils sont très peu rémunérés ou pas rémunérés des fois pour la réalisation.

Bref, donc, à partir du moment où ils réalisent, ils ne sont plus considérés comme des artistes. Mais Cédric pourra l'expliquer, le travail de conception, même si la réalisation n'est pas incluse, la plupart des personnes conceptrices réalisent leurs conceptions, et c'est...

Mme St-Pierre : ...

Mme Morin (Viviane) : Oui, mais la conception est là pour les personnes conceptrices, mais pas la réalisation. Et pour l'audiovisuel, la réalisation, elle est là.

Mme St-Pierre : Oui, c'est ça.

• (10 h 40) •

Mme Morin (Viviane) : C'est ça. C'est la portion qui nous manque pour être reconnus du début à la fin comme un artiste.

Mme St-Pierre : Oui, monsieur Delorme? Je pense que vous vouliez ajouter quelque chose… Mais là, vous êtes conjoints dans cette portion-là de nos consultations avec la CSN. Est-ce qu'on peut imaginer que c'est la CSN qui pourrait vous représenter? Vous avez dit que vous êtes une petite association.

Mme Charette (Annick) : L'APASQ est sous le chapeau... est un des membres de la FNCC.

Mme St-Pierre : O.K. Donc, c'est...

Mme Charette (Annick) : Et dans le mémoire que nous avons produit...

Mme St-Pierre : Oui, bien, vous en parlez dans votre mémoire, justement.

Mme Charette (Annick) : Dans celui-là, mais dans celui qu'on a produit précédemment aussi, on en a parlé...

Mme St-Pierre : Ah! l'autre avant, l'autre qu'on n'a pas vu.

Mme Charette (Annick) : ...et c'est une...

Mme Charette (Annick) : ...qu'on a fait de façon constante, est-ce que ça n'a pas été entendu dans sa subtilité? Peut-être, mais je pense qu'aujourd'hui la subtilité est moins subtile et plus évidente.

Mme St-Pierre : Bien, moi, j'invite à ce qu'on le fasse puis je pense qu'il faut le faire. Parce que j'ai été là quand on l'a fait pour l'audiovisuel en 2009, et ça a été un gros plus, puis ça a été... Puis je peux vous dire que les producteurs qui sont venus en commission parlementaire disaient : Ça va, arrêtez les productions, il n'y aura plus de production, ça va être bien épouvantable, puis ça ne s'est pas produit du tout. Puis mon estimée amie, madame... il y avait Mme Solange Drouin qui était vraiment montée aux barricades, puis je l'aime beaucoup, mais on prédisait le pire et ce n'est pas arrivé. Alors, je pense qu'il y en a qui peuvent en témoigner, là, qui sont ici, dans la salle, là, peuvent en témoigner que le pire n'est pas arrivé. Alors, moi, je pense qu'il faut absolument que la ministre et son équipe penchent sur cette possibilité-là. C'est un oubli qui est regrettable à mon avis et c'est important de le faire.

Sur la question du harcèlement sexuel et psychologique, je suis d'accord puis je trouve que c'est vraiment important de l'inclure dans la loi, mais l'artiste qui va subir ça, est-ce qu'il va avoir... est-ce qu'il va être capable encore aujourd'hui, avec tout ce qui a été... ce qui s'est passé dans les médias dans les dernières années, même s'il est enchâssé dans la loi, puis je pense qu'il faut que ça le soit, est-ce qu'on peut penser qu'il va encore hésiter à aller déposer une plainte pour harcèlement sexuel et psychologique?

Mme Charette (Annick) : Je pense qu'il y a quelque chose d'important à... la nature humaine va toujours être la nature humaine. À la FNCC, on a lancé une étude dernièrement pour, en collaboration avec le Département des sciences juridiques et le Département des sciences sociales de l'UQAM, pour documenter, en fait, la loi de l'omerta dans nos milieux de communication et de la culture, à cet égard là, c'est vraiment le but de l'opération, c'est ça, dans une condition de rapport de force, parce que c'est... précarité, les liens de précarité et de rapports de pouvoir. Donc, nous espérons que ces résultats-là vont nous aider à illustrer et à faire de l'éducation dans nos milieux pour faire reculer ça. Le fait que ce soit dans la loi, c'est quelque chose qu'on peut évoquer, alors que tu ne pouvais pas l'évoquer de façon... c'était silencieux avant.

Je pense qu'il y a une force quand même à mettre ça dans la loi. Tu sais, je l'ai dit dans un autre contexte, la loi ne précède jamais la société, mais je pense que la société ici est rendue là et que la loi y répond en ce moment, et c'est... je salue encore.

Mme St-Pierre : Vous avez parlé, la ministre l'a mentionné aussi, de la question des journalistes indépendants. C'est une question qui, je pense, est encore plus d'actualité aujourd'hui que dans mon temps, puis je me souviens qu'on en avait discuté. Moi, j'avais voulu, à l'époque, introduire la notion d'un statut de journaliste professionnel, ce n'était pas un ordre professionnel, c'était un journaliste professionnel. Je vous fais un petit sourire, parce que la CSN n'avait pas voulu accompagner le processus. Mais effectivement je pense qu'aujourd'hui avec la multiplication des réseaux sociaux et des médias, il faut accorder une protection aux journalistes indépendants, c'est majeur, majeur, majeur. Pourquoi on ne pourrait pas, justement... La ministre a dit : Il va avoir quelque chose pour les journalistes indépendants, puis c'est une loi pour les artistes, mais on pourrait faire un chapitre pour les journalistes indépendants. Est-ce que vous auriez une idée d'amendement qu'on pourrait apporter?

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien, en fait, à mon sens, ça serait dans la définition d'artiste, donc c'est qu'on mettrait... on inclurait également, dans la notion d'artiste, la question des journalistes indépendants.

Mme St-Pierre : ...ça serait faisable dans l'esprit de la loi selon vous?

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui, exact, avec les adaptations nécessaires s'il doit y avoir, là, entre les milieux journalistiques et culturels. Mais de cette façon-là, en les incluant dans la définition de ce qu'est une personne artiste... puis les journalistes contribuent à la culture, là, très certainement, dans une certaine...

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : En effet, je suis bien d'accord avec vous.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Alors, ils pourraient bénéficier de cette façon-là de la loi.

Mme St-Pierre : Puis pour la négociation, ça serait... les vis-à-vis seraient qui? Parce que le journaliste indépendant, il peut travailler pour plusieurs médias.

Mme Charette (Annick) : Bien, de la même façon que les artistes négocient avec plusieurs producteurs ou plusieurs associations de producteurs, je pense qu'il faudrait négocier avec l'ensemble des...

Mme St-Pierre : Des acheteurs de contenu?

Mme Charette (Annick) : ...des embaucheurs pour les journalistes indépendants. Mais notre préoccupation pour les journalistes indépendants, c'est l'absence totale, totale de rapport de force, et l'absence totale de filet de protection sociale, et les conditions de pratique qui sont de moins en moins évidentes.

Mme St-Pierre : Bien, je pense qu'on a l'occasion ici... Déposer une loi, ce n'est pas simple, ça prend du temps, celle-là a pris quatre ans. Essayer de vraiment donner gain de cause aux journalistes indépendants, moi, je plaide pour ça. J'appelle la ministre à faire... à poser un geste. Et on pourrait, je suis convaincue, l'écrire... l'inclure dans la loi. Puis, s'il faut changer le titre de la loi, on pourra le changer...

Mme St-Pierre : ...mais je pense que le temps est venu pour... pour une telle protection.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Pour votre réflexion, il y a le rapport Payette qui...

Mme St-Pierre : Que j'avais commandé.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Oui, que vous avez commandé et qui donne également beaucoup de recommandations, notamment l'instauration d'un régime qui est similaire à la Loi sur les artistes. Ça fait que, concrètement, il pourrait y avoir introduction dans la définition d'artiste, et un chapitre peut-être plus précis pour la question des journalistes, ou en annexe. Donc, ça serait des possibilités, là.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup. Il me reste deux minutes. Bon, bien, je pense que j'ai fait le tour, moi, pour mes questions de ce côté-là. Je vous remercie beaucoup. Je vous félicite M. Delorme-Bouchard, pour votre carrière parce qu'on vous définit comme étant une étoile montante, et vous êtes.... Et, Mme Charette, je veux en profiter parce que ça a été public, je veux vous féliciter pour votre courage et parce que, dans la loi, bien, on retrouve un peu de vous là-dedans, je pense, puis du courage que vous avez eu, puis vous avez donné l'exemple, vous allez donner l'exemple encore. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci. Nouspoursuivons cette fois-ci avec la députée de Taschereau. Vous disposez de 2 min 55 s. On pourra aller un peu plus.

Mme Dorion : Mon Dieu! je n'utiliserai jamais tout ça. Pour parler du dorénavant fameux article 68.6, moi, je suis intéressé de savoir, tu sais, c'est super intéressant la notion de... que, par règlement, on puisse fixer des conditions de travail minimales, surtout quand il y a une pléthore de producteurs, et que là c'est impossible d'y aller à la pièce. Mais je commence à voir que ça fait... ça comporte aussi une... bien, il y a des inquiétudes par rapport à ça. Qu'est-ce qu'on veut? Puis c'est écrit dans, dans le... dans votre mémoire. Qu'est-ce qu'il faut éviter avec ça? Qu'est-ce... tu sais, on voit cette capacité d'appeler pour qu'il y ait un règlement, demander au ministre qu'il y ait un règlement devrait être réservé aux associations d'artistes. Spontanément, j'en suis, mais expliquez-nous pourquoi. Puis on veut éviter quels problèmes aussi? Ça fait que comment est-ce que ça pourrait être spécifié, ce mécanisme-là, pour que ça serve le bien commun, finalement, des artistes?

Mme Charette (Annick) : Le bien commun étant le mot à retenir ici. Mathilde.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien, le fait que ça soit sur demande d'une ou plusieurs associations d'artistes, je pense que c'est l'idée que ça soit que le besoin vienne des associations d'artistes. Alors, très certainement, le fait que ça soit précisé dans la loi viendrait concrétiser cette nécessité-là. Parce qu'on ne souhaite pas non plus que ce soient les associations de producteurs qui viennent, eux, par déposer un projet de conditions minimales. Toutefois, on l'a dit dans notre mémoire, il faut qu'il y ait un dialogue social suivant cette demande, il faut qu'il y ait des consultations, là,  et nous sommes tout à fait pour le dialogue social. Alors, très certainement, il devrait y avoir des consultations. L'idée... ce qu'il faut, je crois, obtenir là-dedans, c'est une précision que le gouvernement va exercer ce pouvoir-là parce que, dans la loi S-32.01, bien que l'article était différent, mais il y avait un pouvoir de réglementation et également dans la loi S-32.01 et le gouvernement n'a jamais... n'a jamais exercé ce pouvoir-là. Alors là, il faut... il faut que vous... donc, dès qu'il y a demande, que le gouvernement enclenche un processus de consultation.

Mme Dorion : Donc, dès qu'une association d'artistes reconnue fait une demande, il faut absolument... il y aurait comme obligation pour le ou la ministre de dire : On arrive à un règlement à la fin d'un processus.

Mme Charette (Annick) : Puis il y a sûrement aussi peut être préciser, ce qu'en fait on souhaitait, hein, avoir des précisions sur la mécanique qui pouvait mener à ça. Le bien commun, c'est bien, mais quoi et comment. C'est un peu... c'était un peu flou.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Puis également la modification, comme on disait, c'était la même de l'UDA et la guilde. Là, on souhaite le règlement lie les producteurs et les associations de producteurs non membres, et que ce règlement confère les mêmes droits et pouvoirs qu'une entente collective à l'association d'artistes. Ça serait très important, là, de venir préciser ça, l'effet.

Mme Dorion : Donc, si je comprends bien, que ça soit... que ce soit juste les associations d'artistes qui puissent faire cette demande-là, et que ça lie tout le monde, peu importe qu'ils soient membres ou pas.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Suivant l'adoption, puis il y avait...

Mme Dorion : Tout le monde des producteurs.

• (10 h 50) •

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Il y avait une question à savoir après combien de temps. C'est certain que je ne pense pas que les associations d'artistes ni les associations de producteurs souhaitent. On veut laisser libre cours à la négociation collective. Toutefois, l'historique des relations a démontré, dans certains secteurs, surtout la danse, que certaines ententes collectives étaient impossibles à obtenir. Alors, je crois qu'un tel mécanisme, dans une telle circonstance, est nécessaire, puis également dans les secteurs où il y a des ententes collectives, mais où il y a une multiplicité des producteurs ou diffuseurs qui sont non-membres. Alors ça, c'est vraiment... c'est une voie très intéressante, mais encore là il faut, comme disait, je pense, Sophie Prégent, du mordant.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il ne vous reste que 25 secondes.

Mme Dorion : Bien moi, je veux juste ajouter que les concepteurs sont particulièrement vulnérables. Souvent,  c'est des artistes de la scène qui vont partir un projet, même dans les milieux où, tu sais, les gens commencent dans la relève. Les concepteurs sont face à des producteurs...

Mme Dorion : ...qui sont des fois eux-mêmes des artistes, qui gèrent l'argent comme ils peuvent, qui n'arrivent pas toujours. Puis il y a vraiment... il y a des situations où ils sont vraiment les derniers payés puis à être très souvent pas payés, en fait, à espérer être vus, puis tout. Ça fait qu'il y a vraiment... J'ajoute un peu de poids à la demande que fait l'APASQ, là, ça serait super important. La conception, c'est dans la tête, puis c'est dans les mains aussi puis c'est dans tout ce qu'on fait, c'est du début à la fin, ça fait que voilà.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Bien, merci. Merci beaucoup. Nous poursuivons, cette fois-ci, avec le député de Matane-Matapédia. Vous disposez de - on vous en donne un petit peu plus cette fois-ci - trois minutes 40 secondes.

M. Bérubé : Votre mansuétude vous honore, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Oui, oui grâce... effectivement.

M. Bérubé : Je veux souhaiter la bienvenue à l'ensemble des représentants de ces organisations. Vous avez parlé du devoir de juste représentation. J'aimerais qu'on puisse approfondir, qu'est-ce que ça veut dire. Souvent, les organisations viennent nous voir, alors je vous offrirais mon temps pour bien expliquer ce concept-là et vos attentes à l'égard du projet de loi. Qu'est-ce que ça veut dire puis qu'est-ce qu'on peut faire, dans le projet de loi, pour aider.

Mme Baril-Jannard (Mathilde) : Bien, le devoir de juste représentation est un incontournable en droit du travail nord-américain. Je veux dire, c'est quelque chose qui a été établi par la jurisprudence américaine, et c'était d'une nécessité absolue. Je pense, c'est l'arrêt Steel de la Cour suprême des États-Unis qui a fait en sorte d'établir un devoir de juste représentation qui s'exerce... En fait, une association ne peut être discriminatoire, négligente ou agir de manière arbitraire. Alors, c'est certain qu'une association... Et c'est pour ça que je l'ai dit d'emblée, la FNCC-CSN et la CSN ne remettent pas en question ce devoir de juste représentation, soit de ne pas agir de manière arbitraire, discriminatoire ou de mauvaise foi à l'égard des artistes.

Toutefois, comme on l'indiquait tout à l'heure, le devoir de juste représentation doit être adapté à la réalité du régime particulier de rapports collectifs qui gouverne les artistes, là. Alors, c'est pour ça que nous souhaitons une modification, que nous retrouvons à notre rapport.

Puis peut-être je ne l'ai pas dit tout à l'heure, mais même le Tribunal administratif du travail a reconnu le particularisme de ce régime -à. En fait, je crois que c'était le juge administratif Guy Roy qui a dit que l'association reconnue, donc l'association d'artistes, a donc le pouvoir exclusif de négocier des conditions minimales, mais elle ne possède pas le monopole de représentation. Alors, ce particularisme-là doit se refléter dans la loi, et c'est pour ça que nous demandons... Si je vais relire la modification qu'on souhaite, c'est : Une association d'artistes reconnue ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire ni faire preuve de négligence grave à l'endroit des artistes visés par une entente collective - j'ai indiqué les raisons tout à l'heure - ou lorsqu'une entente prévue à l'article 26.1, alinéa un, a été conclue, à laquelle l'association est partie, peu importe qu'il soit membre ou non-membre. Ça, c'est fondamental, qu'il soit membre ou non-membre.

Mme Charette (Annick) : J'allais ajouter que, quand on a commencé à discuter de ce projet de loi là et d'analyser les avenues et les réalités existantes, pour avoir un point de comparaison, on a pas mal discuté de la loi qui... Puis là je n'ai pas les numéros parce que, ça, c'est Mathilde, là, mais la loi qui régit la construction, en fait. Parce que les artistes sont souvent dans la même condition que les travailleurs de la construction, c'est-à-dire multiemployeurs, mutlicontrats. Et ceci, c'est un particularisme qu'il faut... dont il faut tenir compte quand tu... du devoir de représentation. Au niveau de la loi de la construction... ce n'est plus un décret, là, il y a un autre nom, que je ne me souviens plus parce que je ne travaille pas dans la construction. Mais il y a cette particularité-là qu'ils ont réussie... que le législateur a réussie à introduire qu'il y avait quand même un devoir d'égalité et de traitement égal de l'ensemble des travailleurs dans ces conditions-là, et c'est un petit peu ce qui est souhaité aussi avec la juste représentation. Notre... business à nous, notre... c'est de représenter les travailleurs, qu'ils soient travailleurs autonomes ou qu'ils soient salariés, dans un rapport collectif qui vise l'équité et le traitement à égalité.

Donc, la juste représentation est à la fois ce que... les devoirs qui doivent être rendus et les exigences par rapport au fait d'être syndiqué. Tu sais, on n'a pas la formule Rand ici, donc la juste représentation a quand même sa limite.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.

Mme Charette (Annick) : Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, c'est tout le temps que nous disposons. Merci beaucoup, hein, pour votre contribution très instructive aux travaux de la commission.

Alors, nous allons suspendre les travaux quelques instants pour donner la chance au prochain groupe de s'installer. Merci beaucoup encore.

(Suspension de la séance à 10 h 57)


 
 

11 h (version non révisée)

(Reprise à 11 h 5)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Nous accueillons cette fois-ci l'Association nationale des éditeurs de livres avec M. Foulon, Mme Pigeon et Mme Vachon. Je vous inviterais, avant de commencer votre exposé, à vous présenter également.

M. Foulon (Arnaud) : Donc, je suis Arnaud Foulon. Je suis vice-président éditions Groupe HMH et président de l'Association nationale des éditeurs de livres.

Mme Pigeon (Geneviève) : Je suis Geneviève Pigeon, directrice, présidente des éditions L'instant même, membre du conseil d'administration de l'ANEL et présidente du comité du droit de l'ANEL.

Mme Vachon (Karine) : Je suis Karine Vachon, directrice générale de l'ANEL.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, vous pouvez commencer votre exposé de 10 minutes.

M. Foulon (Arnaud) : Merci. Bien, j'aimerais d'abord remercier la commission d'avoir invité notre association à prendre part à ses consultations sur le projet de loi n° 35.

La loi du statut de l'artiste est fondamentale dans l'exercice de notre métier et nous sommes reconnaissants de l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de commenter ce projet de loi.

C'est avec une inquiétude certaine que nous avons accueilli la fusion des lois S32.1 et S32.01. L'ANEL s'étant toujours montrée favorable au maintien de deux lois distinctes, estimant que la loi S32.01 protégeait les particularités de l'écosystème du livre et favorisait sa bibliodiversité. En effet, notre milieu réunit une panoplie d'auteurs et d'autrices qui écrivent une diversité de type d'ouvrages et qui ne revendiquent pas tous le statut d'artiste dans l'exercice de leurs projets d'écriture. À notre avis, nous sommes aujourd'hui devant un changement de paradigme qui a de quoi donner le vertige à certains et à certains éditeurs.

Néanmoins, nous comprenons la voie que souhaite prendre le gouvernement pour améliorer les conditions socioéconomiques des artistes et nous l'accueillant avec ouverture. Nous recommanderons quelques modifications, dans une optique de clarification, de cohérence et afin d'éviter les contrecoups qui auraient l'effet malheureux de freiner une industrie qui connaît finalement, après des années difficiles, une croissance, celle-là même qui favorise l'augmentation des revenus des créateurs.

Avant d'entrer...

M. Foulon (Arnaud) : ...dans le vif du sujet, vous me permettrez de rappeler que l'industrie du livre est également régie et encadrée par une autre loi, la loi 51 ou Loi sur le livre, dont on nous annonce des changements dans les réglementations depuis un certain temps. Nous nous étonnons d'ailleurs que le gouvernement souhaite rapidement entériner le projet de loi n° 35, mais que l'on ait pu nous donner, après des années de consultation, les conclusions finales et les changements au règlement de la loi 51 sur le livre. Ces changements auront-ils, par ailleurs, une incidence sur le projet de loi n° 35? On ne le sait pas. Toutes ces lois et réglementations, comme toutes les subventions et aides qui touchent le livre, ont un impact sur notre industrie, sur sa production et sur ses artisans.

Nous avons une première préoccupation concernant l'article 1, qui indique que la loi s'applique aux artistes du domaine de la littérature, en ce qui nous concerne, et aux diffuseurs qui contractent avec eux en vue de la diffusion d'œuvres préalablement créées ou qui retiennent leurs services professionnels. Rappelons ici, pardon, que c'est un contrat sur la publication et la diffusion d'une œuvre qui lie l'artiste littéraire et l'éditeur. Nous avions, dans notre mémoire et lors des consultations, expliqué le rapport qui lie les écrivains et les maisons d'édition. Ces dernières s'engagent dans un contrat par lequel l'auteur d'une œuvre leur cède ou leur octroie par licence le droit de fabriquer, de reproduire des exemplaires d'une œuvre à l'issue d'un processus éditorial entre l'éditeur et l'auteur, et selon des conditions déterminées de gré à gré. L'éditeur assume ensuite seul le risque financier lié à la publication et à la diffusion de l'œuvre. Si, de manière générale, les maisons d'édition reçoivent des œuvres préalablement écrites, un contrat peut aussi être signé à la suggestion des parties avant la rédaction d'une œuvre. Peu importe le contexte de création, l'auteur demeure toujours le seul détenteur des droits moraux sur son œuvre. Il ne cède à l'éditeur que les droits en lien avec la commercialisation de ladite œuvre. Il serait donc faux de considérer que l'éditeur retient les services de l'auteur. Nous demandons donc au législateur : Qu'entend-on, dans le domaine de la littérature, par «retient les services professionnels»? Est-ce des services postcréation, par exemple, pour les enjeux de promotion ou quelques services rendus au moment de la création? Une précision s'impose pour éviter des discussions et litiges potentiels relatifs à l'application de la loi.

Mme Pigeon (Geneviève) : Ensuite, dans ce contexte de refonte en profondeur des lois sur le statut de l'artiste, il nous semble fondamental de mieux définir la littérature à l'article 2. La définition présente dans le projet de loi reprend celle qu'on retrouvait dans la loi S-32.01, soit «la littérature est la création et la traduction d'œuvres littéraires originales, exprimée par le roman, le conte, la nouvelle, l'œuvre dramatique, la poésie, l'essai ou toute œuvre écrite de même nature». La fin de l'énoncé, donc «toute œuvre écrite de même nature», est un concept flou, problématique dans une optique de négociations collectives souhaitée par le gouvernement. Cette formulation ouvre la porte à de nombreuses contestations devant les tribunaux.

• (11 h 10) •

Nous proposons deux avenues pour y remédier, soit, premièrement, ajouter le mot «littéraire», donc «toute œuvre littéraire écrite de même nature», et, deuxièmement, s'appuyer sur les genres littéraires admissibles à la SODEC, où on cite les catégories suivantes : poésie, théâtre, bandes dessinées, romans, nouvelles, contes, albums pour la jeunesse, essais en sciences humaines, recueils de chansons. Cette énumération nous semble représentative de la littérature.

M. Foulon (Arnaud) : Au chapitre 3.3, il est prévu que les articles 30 à 36 et 38 à 42 de la loi S-32.01, portant sur les obligations des contrats individuels dans le domaine des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature, soient ajoutés à l'article 40 du présent projet de loi. L'ANEL reconnaît qu'il est cohérent d'avoir conservé ces obligations relatives aux contrats individuels dans le domaine de la littérature. Cela signifie également que l'on retrouve, dans la nouvelle mouture, le deuxième paragraphe de l'ancien article 30, qui indique que la loi s'applique également à tout contrat entre un diffuseur et une personne non visée par les chapitres I et II, et ayant pour objet la publication d'un livre.

Deux choses ici. Nous estimons que la nouvelle loi doit clarifier que tous les contrats individuels — contrats d'édition — sont soumis aux exigences de la loi, mais que seuls les artistes dans le domaine de la littérature ont droit à la représentation de l'association d'artistes reconnus dans le domaine de la littérature aux fins de négociation de quelque entente collective et de quelque représentations en lien avec l'exécution de leur contrat individuel. Car la loi, revenons à son titre, a pour but de protéger les artistes. Dans cette optique, nous suggérons au législateur qu'il aurait intérêt à ne pas supprimer l'article 37 de la loi S-32.01, qui précise que, et je cite : «Sauf renonciation expresse, tout différend sur l'interprétation du contrat est soumis à la demande d'une partie à un...

M. Foulon (Arnaud) : ...et un peu plus loin : «suivant les dispositions du titre deux du livre sept du Code de procédure civile.» En effet, il nous apparaît que cet article demeure pertinent pour les auteurs qui ne sont pas des artistes au sens de la loi et qui ne sont pas visés par la reconnaissance d'associations d'artistes reconnues dans le domaine de la littérature et dont les livres échappent à la portée de la littérature au sens de la loi. Rappelons que les auteurs et autrices qui ne sont pas visés par cette reconnaissance sont nombreux, car il se publie grand nombre de livres pratiques, de documentaires, d'ouvrages scolaires ou universitaires au Québec. Cette zone d'ombre risque de nuire à la cohérence de la nouvelle loi et à son application.

Mme Pigeon (Geneviève) : Nous souhaitons proposer des changements à l'article 24.1 indiquant que «dans l'exercice de ses fonctions, l'association reconnue peut notamment :

«1° représenter ses membres aux fins de la négociation et de l'exécution de leur contrat.»

L'ANEL propose deux modifications. Premièrement, remplacer le terme «représenter» par «assister». Étant donné le nombre de contrats d'édition littéraire qui sont signés chaque année au Québec, selon les plus récentes données de la BANQ, il s'est publié 3 500 titres de littérature en un an, nous croyons qu'il est impensable de demander à l'association d'artistes reconnue de représenter les auteurs dans les négociations individuelles. Cela risque d'étirer d'une manière substantielle les délais de signature et donc de retarder des parutions, une situation qui fragiliserait notre industrie devant la concurrence éditoriale internationale.

Nous suggérons aussi de préciser par le fait même que les contrats dont on parle dans cet article sont les contrats d'artistes ou les contrats d'édition, dans notre cas, qui interviendront à la suite de la conclusion d'une entente collective applicable. Nous sommes reconnaissants que le gouvernement ait proposé à l'article 27 que la négociation d'ententes collectives doivent prendre en considération l'objectif de faciliter l'intégration des artistes de la relève ainsi que les conditions économiques particulières qui caractérisent les producteurs émergents et les divers types de production. Nous proposons plutôt de mentionner les petites entreprises de production et de diffusion ainsi que les producteurs et diffuseurs émergents. Rappelons qu'au Québec les maisons d'édition demeurent souvent de très petites... des petites structures. Par exemple, sur les 115 membres de l'ANEL, 40 % ont un chiffre d'affaires qui ne dépasse pas 250 000 $ par année. Ces petites structures, publiant principalement des œuvres littéraires, sont importantes pour notre industrie, mais ne sont pas toutes émergentes.

M. Foulon (Arnaud) : Finalement, les articles 68.5 et 68.6 du chapitre 4.2 sont particulièrement surprenants. On y lit que, et je cite : «Le gouvernement peut, par règlement, définir les termes et les expressions utilisés dans la présente loi ou préciser les définitions qui y sont prévues - et un peu plus loin - et qu'il peut fixer des conditions minimales applicables dans la rémunération et les avantages sociaux.» L'ANEL questionne ce besoin d'instaurer un pouvoir de réglementation. De plus, nous recommandons de circonscrire davantage les circonstances qui motiveraient le gouvernement à faire usage de ce pouvoir.

En conclusion, je tiens à préciser que les éditeurs de livres oeuvrent avec passion et dans le plus grand respect des auteurs. Ils font partie d'un écosystème fragile. Il y a dans le milieu de l'édition une multitude de modèles de contrats puisqu'il existe une grande possibilité de projets éditoriaux, lesquels ne se limitent pas à la seule réalité littéraire. Si le gouvernement souhaite que la refonte des lois sur le statut de l'artiste puisse s'appliquer adéquatement dans le domaine de la littérature, il importe en priorité de clarifier que seuls les artistes du domaine de la littérature ont droit à la représentation de l'association d'artistes reconnue dans le domaine de la littérature aux fins de la négociation de quelque entente collective et de revoir la définition de la littérature afin d'en proposer une plus complète et exempte de termes flous.

Nous vous remercions de votre écoute, votre ouverture aux enjeux du domaine de la littérature, et nous vous remercions à l'avance des considérations que vous porterez aux modifications que nous proposons et aux réflexions que nous vous soumettons.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Merci pour l'exposé. Nous commençons donc la période d'échange avec Mme la ministre. À vous la parole.

Mme Roy : Merci beaucoup. Merci. Merci, M. Foulon, merci à vous tous d'être là, tous et toutes.

J'aimerais, d'entrée de jeu, dire que vous avez raison. C'est un changement de paradigme que nous faisons aujourd'hui. Nous le faisons après mûre réflexion, une réflexion qui a commencé très sérieusement lorsqu'on a finalement reçu tous les mémoires, il y a un an à peu près, parce qu'on n'avait pas les mémoires avant, même si on avait débuté, là. Ce changement de paradigme là, nous considérons qu'il est rendu nécessaire. Et, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent... Puis je vais répondre à vos interrogations puis à vos craintes, à certaines de vos craintes, parce que vous dites des choses, puis je veux justement vous rassurer sur l'interprétation que vous en faites ou la lecture que vous en faites. On est tous conscients que c'est hypercompliqué, que ce sont des lois du travail. Et ce changement de paradigme là vient du fait, entre autres, que les fameuses lois sur le statut de l'artiste...

Mme Roy : ...deux, au Québec, ce que les gens ignorent. Il y en a une première, on va l'appeler la première qui, elle, touche les artistes de la scène, de l'audiovisuel, de la musique, qui sont nos artistes des arts vivants, si vous voulez, là, je ne vais pas tous les énumérer. Puis il y en a une deuxième qui touche les artistes de la littérature, des métiers d'art et des arts visuels. Et c'est cette loi-là avec laquelle vous travaillez depuis près de 25 ans. C'est important de le souligner.

Naturellement, à 25 ans, les choses changent, les réalités changent, et force est de constater que dans la deuxième loi, c'est-à-dire celle qui s'applique spécifiquement à votre domaine d'intervention, le législateur de l'époque avait dit : Bien, les artistes et leurs diffuseurs, parce qu'on les appelle les diffuseurs, dans la deuxième loi, qui ne sont pas les mêmes diffuseurs de la première, juste pour mêler tout le monde, là, pourront se négocier des ententes. Bien, force est de constater qu'après 25 ans, il n'y a pas d'ententes qui ont été négociées. On y va par contrat, puis c'est correct. C'est ce que la loi prévoyait. Vous avez raison, la loi, c'est ce qu'elle prévoyait à l'époque. Mais nous sommes rendus à un changement de paradigme, vous l'avez dit. Et oui, dorénavant, ce que nous faisons, pour la compréhension des gens qui nous écoutent, nous prenons ces deux lois, nous incorporons la deuxième, c'est-à-dire celle qui touche à la littérature, aux arts visuels et aux métiers d'art, nous l'incorporons dans la première, pour ne plus qu'il n'y ait deux catégories d'artistes professionnels au Québec, mais une seule. Ils sont tous sous le même chapeau. Naturellement, avec les adaptations qui s'imposent, dépendamment des domaines très spécifiques et des réalités spécifiques à chacune des pratiques, entre autres à l'égard de la littérature.

Alors, c'est la raison pour laquelle il n'y a qu'une seule loi, que nous vous présentons aujourd'hui, qui est le PL 35. Nous harmonisons les articles qui peuvent l'être et d'autres demeureront parce que votre domaine est particulier, puis le domaine des arts de la scène est particulier, donc ce ne sont pas nécessairement les modalités qui doivent être les mêmes. Cependant, les grands pans du projet de loi n° 35, qui touchent entre autres tous les artistes que nous... pardons, les artistes, les articles que nous allons transférer de la Loi sur les normes du travail, qui touchent entre autres le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel, seront transposés à tout le monde. Ça, c'est important de le spécifier, ça, c'était des demandes qui sont faites depuis quelques années déjà par tout le milieu culturel, qu'on soit un auteur, un danseur, un artiste. Donc, c'est pour vous dire qu'il y a des dispositions qui s'appliquent d'emblée à tous, qui nous viennent de la Loi sur les normes du travail, que nous incorporons dans ce p.l. 35, et d'autres dispositions qui, à juste titre, sont vraiment les dispositions d'origine de votre loi, la deuxième loi, et qui sont reprises, même, textuellement, entre autres, à l'égard de la définition. J.

• (11 h 20) •

Je suis un petit peu surprise quand vous nous dites que vous avez un problème avec la définition de la littérature qu'on retrouve dans le PL 35, alors qu'on a repris exactement la définition de la littérature avec laquelle vous travaillez depuis 25 ans. C'est juste pour vous dire, c'est la même définition que nous avons conservée. Alors, probablement qu'on pourra ouvrir la discussion à cet égard là, mais c'est pour vous dire que des dispositions qui vous sont... qui sont strictement liées au milieu de la littérature, puisque c'est de ça qu'on parle avec vous aujourd'hui et non des arts visuels ou encore des métiers d'art, demeurent, demeureront dans ce PL 35.

Entre autres, les dispositions que nous avons mises en place relativement à l'élargissement de l'application des règles, parce que... puis je le souligne pour les gens qui nous écoutent, les artistes ne sont pas des salariés. La Loi sur les normes du travail ne s'applique pas aux artistes. Alors ce qu'on fait avec cette loi, qui est une loi d'exception, on utilise des moyens exceptionnels et on a travaillé énormément avec le ministère de l'Emploi et du Travail pour nous dire : Bien, quels sont les pans de la loi sur les normes du travail qui s'appliquent pour des salariés, pas pour des travailleurs autonomes, que nous pourrions transposer pour rendre la vie plus facile aux artistes, oui, mais aussi aux employeurs. Et à cet égard, on est allé chercher des pans de la Loi sur les normes du travail qui nous permet et qui permettra aux deux parties, autant employeurs qu'artistes, d'utiliser des recours devant le Tribunal administratif du travail, ce qui est beaucoup plus facile, rapide et moins coûteux qu'actuellement. Parce qu'actuellement, dans les lois, il n'y a pas beaucoup de recours au Tribunal administratif du travail, mais beaucoup de recours qui doivent se faire devant les tribunaux de droit commun, ce qui est très onéreux, vous le savez. Donc on a tenté, avec ce projet de loi, de trouver un équilibre entre les différentes forces en présence et les différentes parties, parce que, c'est important de le dire, tout ce monde-là, ce n'est pas des antagonistes, ce sont tous des gens qui...

Mme Roy : ...travailler ensemble. Et j'ai beaucoup aimé, puis on a fait des réunions TEAMS d'ailleurs ensemble cet hiver, j'ai beaucoup aimé entendre tous les éditeurs me dire jusqu'à quel point les contrats qu'ils faisaient respectaient les artistes, étaient adaptés aux artistes, etc. Parce que, dans le fond, ce que ce projet de loi nous dit, c'est que dorénavant, bien, il y aura aussi cette obligation de négocier des ententes collectives. Alors, j'ai tellement entendu de bonne foi et de bonne volonté venant de la part des éditeurs que ce sera l'occasion, je pense, pour la communauté littéraire et pour le monde du livre... De l'édition, de s'asseoir et de négocier des ententes avec les auteurs et dans l'optique d'avoir de meilleures conditions de travail, en quelque part, parce que c'est aussi du travail.

Donc, le changement de paradigme, oui, vous avez raison, il est là, mais soyez rassurés à l'effet que nous conservons des pans de votre loi pour votre domaine, entre autres, à l'égard de la définition, nous nous reprenions la même. Alors, là, je comprends que vous n'êtes pas d'accord avec ça.

Par ailleurs, vous nous dites, d'entrée de jeu, à votre point 9.3, vous dites : «Nous demandons donc au législateur que signifie «qui retiennent les services professionnels dans le domaine de la littérature? Est-ce des services postcréation, par exemple, pour des enjeux de promotion ou quelques services rendus au moment de la création? Une précision s'impose pour éviter les discussions et litiges potentiels relatifs à l'application de la loi.» Je vais vous la donner tout de suite, la précision : ne vous inquiétez pas, ça ne vous touche pas. Et je vais vous dire pourquoi. Le texte, la façon dont il est rédigé... Puis on comprend qu'il y a des petites redites puis il y a des... tout à l'heure, on parlait avec d'autres groupes, Il y avait des termes qui étaient là, puis qui apparaissaient de façon soudaine. On va affiner le projet de loi pour qu'il y ait le plus de clarté possible.

Mais dans le cas de la remarque que vous nous faites, vous nous dites, à l'article un, déjà, vous y voyez un problème, alors je voulais vous rassurer tout de suite. Alors, j'ai fait un long préambule parce que l'article 1, c'est ce qu'il fait, il nous dit : au paragraphe premier, quand on parle... «les services professionnels», bon, «s'applique aux artistes et aux producteurs qui retiennent leurs services professionnels.» Dans le paragraphe un de l'article un, on parle de ceux de la première loi, vous, vous n'êtes pas là, ça fait que ça, ça ne s'applique pas à vous, vous, vous êtes dans le deuxième paragraphe. Quand on dit «texte proposé, la loi s'applique également aux artistes qui oeuvrent dans les domaines des arts visuels, des métiers d'art, en littérature qui contractent avec eux en vue de la diffusion d'oeuvres préalablement créées ou qui retiennent leurs services professionnels.» Ces deux-là, là, c'est... Les deux paragraphes de l'article 1 sont distincts parce que le premier touche ceux de la première loi et le deuxième touche ceux de la seconde loi. Alors, je voulais vous rassurer à cet égard-là : on juxtapose deux réalités. Ça fait que je voulais vous rassurer.

Par ailleurs, et on transpose aussi les obligations de vos contrats, on les a gardées. Puis vous nous dites : «L'ANEL reconnaît qu'il est cohérent d'avoir conservé les obligations relatives aux contraintes visuelles.» Ça reste là, ça. C'est pour ça que je vous disais je suis très contente de vous avoir entendu dire que vos contrats, vous les négociez puis c'est vraiment du cas par cas, dépendamment des auteurs, du type d'oeuvre. Etc. Donc, on a vraiment transposé des portions de la loi qui vous touchent directement.

Par ailleurs - peut-être, on pourra discuter - j'aimerais que vous me disiez pourquoi, tiens, quand vous nous dites, au point dix... Vous nous parlez de la définition de la littérature, à l'article deux, puis qu'on reprend celle qui se trouve dans votre loi. Pourquoi vous voudriez changer cette définition-là maintenant puisque c'est la définition avec laquelle vous travaillez depuis 25 ans?

M. Foulon (Arnaud) : Je peux peut-être commencer. Il y a plusieurs éléments là-dedans. La définition de la loi S-32.01 date donc, je pense, de madame Bacon; il y avait déjà eu même un débat, à ce moment-là, pour ne pas y faire paraître la bande dessinée. Un exemple anodin, mais en 30 ans, la bande dessinée a complètement changé, donc il faut profiter de la loi pour être au goût du jour, ça, je pense que c'est important.

L'autre chose, c'est que les sociétés d'État avec lesquelles on travaille, la SODEC, le CALQ, notamment, ont des définitions qui sont beaucoup plus précises que celles de la loi et nous, on pense qu'il faut s'arrimer avec celles que vous avez même suggérées ou, en tout cas, encouragé vos sociétés d'État à utiliser, qui sont plus récentes que celles-là, qui laissent place à moins de flous et qui sont plus adaptées à la littérature d'aujourd'hui. C'est dans cette optique-là qu'on a fait la remarque.

Mme Roy : Et j'aimerais rajouter que, lors de négociations d'ententes, vous pourrez y aller, effectivement, du contenu de la littérature - Pour vous, c'est quoi, ça signifie quoi - alors, il y a des discussions qui seront...

Mme Roy : ...avec le milieu, puis je pense que c'est pertinent de le faire à cet égard-là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste six minutes.

Mme Roy : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Je lis vos inquiétudes, entre autres. Moi, je plutôt positive. Je crois qu'on est rendus, 25 ans plus tard, à faire une refonte, dans la mesure... Et puis vous le dites, à juste titre : C'est une industrie qui a connu et qui connaît finalement, après des années ardues, une croissance. Puis je pense qu'il faut le souligner puis féliciter tout le milieu, toute la chaîne du livre qui a travaillé hyperfort. Puis on l'a vu durant la pandémie, je pense que les gens ont redécouvert la lecture, la littérature. Nos libraires ont fait de bonnes ventes puis nos artistes québécois ont été découverts. Alors, je ne peux que vous féliciter pour le travail qui est fait au niveau de l'édition. Donc, le travail devait être bon puisque les lecteurs étaient au rendez-vous. Dans quelle mesure vous craignez... et là, vous nous dites que vous craignez que ça freine votre croissance. Pouvez-vous me dire dans quelle mesure, quelles sont vos craintes de cette nature-là?

Mme Pigeon (Geneviève) : Je peux donner une réponse qui relève plutôt du concret, en fait, de la pratique d'une éditrice littéraire. Parmi les inquiétudes qui ont été véhiculées, qu'on a entendues de la part des éditeurs, il y a notamment le fait que, si des charges administratives supplémentaires devaient s'imposer, il y a un moment où des petites structures comme les nôtres ne peuvent pas faire face à énormément de dépenses supplémentaires. Et, quand on parle de dépenses, on ne parle pas juste de, malheureusement, ce qui pourrait être redonné aux artistes, alors que c'est là qu'on voudrait bien dépenser plus, mais plutôt des dépenses, justement, si on doit alourdir par exemple, la gestion des contrats, la gestion des contraintes administratives ou fiscales, il faut embaucher du personnel supplémentaire, il faut avoir recours à des expertises légales. Et là, c'est de l'argent qui s'en va dans l'administration plutôt que d'aller, justement, dans le soutien de la diffusion des œuvres littéraires. Et c'est une des grandes inquiétudes qu'on a entendues, c'est-à-dire ce potentiel alourdissement de la charge administrative ou comptable, finalement, qui serait imposée aux éditeurs et aux éditrices.

• (11 h 30) •

Mme Roy : Je voudrais quand même souligner, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, que le milieu du livre est extrêmement important. C'est hyperimportant, les livres, je pense, la littératie, la littérature, on doit lire davantage. Ça nous fait une société qui est allumée, une société qui est avertie, qui est instruite et qui prend de meilleures décisions. Et c'est la raison pour laquelle les gouvernements, tous les gouvernements précédents et le gouvernement actuel, investissent des sommes, et croient en la littérature, et soutiennent l'industrie, et la chaîne du livre. Donc, à cet égard-là, je pense que les sommes que nous avons investies au cours des dernières années ont été conséquentes, demeurent là. Il y a des subventions, il y a des crédits d'impôt. Donc, compte tenu du fait que le gouvernement investit de façon importante... parce que la culture, je crois foncièrement qu'au Québec, la culture, on doit la protéger puis on doit aussi l'aider financièrement. Parce que, vous avez raison, ça coûte cher, ça coûte cher créer des œuvres. Et à cet égard-là, nous croyons, et je crois et je persiste, et je signe que, lorsque des industries sont subventionnées minimalement, je pense qu'il serait favorable et il est souhaitable, et nous le mettons dans un projet de loi, que les conditions et les conditions, ultimement, socioéconomiques des artistes soient prises en considération et qu'il est important de négocier des ententes.

Alors, je vous soumets juste que le gouvernement demeure là, le crédit d'impôt demeure là, la SODEC demeure là pour vous aider. Puis on est conséquents avec, entre autres, l'achat de livres. Notre gouvernement a investi des sommes colossales, colossales au cours des quatre dernières années. Là, on parle de centaines de millions de dollars pour l'achat de livres, entre autres, pour nos bibliothèques scolaires. Alors, je pense que vous pouvez voir l'importance que nous vouons à la littérature, aux livres, aux maisons d'édition. Et je suis optimiste pour la suite des choses. Je pense qu'entre parlementaires de bonne volonté, on est capables de faire avancer un projet de loi. Puis on est là pour le faire avancer. Puis moi, je suis surtout là pour vous rassurer à l'égard des craintes que vous avez. Je pense qu'on est rendus, 25 ans plus tard, à prendre en considération, et c'est pour ça qu'on est là, là, c'est vraiment une loi sur le statut de l'artiste, les conditions socioéconomiques de nos artistes à l'égard de leurs relations avec ce qu'on appelle les diffuseurs, ça s'appelle comme ça dans la deuxième loi, qui n'a rien à voir avec un diffuseur de la première loi qui... une télévision, par exemple. Et oui, c'est une loi qui est complexe, mais je pense...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Roy : ...en bout de piste, nous y trouverons tous... nous y trouverons tous un avantage, puis au bénéfice des lecteurs, des artistes et également des éditeurs des maisons d'édition de toute la chaîne. C'est extrêmement important pour nous. Moi, je vous remercie pour le mémoire que vous nous avez soumis, que j'ai lu entre les interventions pendant la pause. Je vous remercie.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, nous poursuivons cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente, merci. Merci d'être avec nous ce matin. C'est absolument important votre présence ici ce matin parce qu'on a besoin d'entendre aussi vos préoccupations. On a eu des rencontres et je vous ai écoutés et j'ai vraiment... j'ai à cœur que vous ayez aussi... que vous participiez à ce processus-là parce que c'est un processus qui fait en sorte qu'on va mieux traiter les artistes québécois.

Je déclare, Mme la Présidente, mon conflit d'intérêts parce que j'ai publié en 2020 un livre et j'ai été très, très bien traitée par mon éditeur. Ça a été vraiment, effectivement très, très bien traité, mais moi, je n'en fais pas mon métier, je n'en fais pas mon gagne-pain. Ça a été un geste que j'ai posé. En fait, ça a été une aventure, mais ça sera probablement la dernière pour moi. Alors, il n'y en aura probablement pas d'autres puis c'est, je ne sais pas, une affaire unique qui s'est passée dans ma vie. Puis j'ai eu une très belle expérience. Mais convenez avec moi qu'il y a des maisons d'édition qui sont très voraces et qui vont ratisser très large. Et celui ou celle qui sort le minerai de la mine, bien, c'est la personne qui est sur son ordinateur puis qui a écrit l'oeuvre. Et je pense que ça, je sens qu'il y a eu une évolution chez vous pour dire : En effet, il y a des gens qui sont de véritables artistes dans ce domaine-là.

Donc, ce que vous proposez, vous, c'est de dire : Limitons la protection à des gens qui œuvrent dans différents genres littéraires et non pas à tous les genres. Par exemple, j'ai beaucoup de respect pour les gens qui écrivent des livres de cuisine ou des livres de mécanique, mais vous ne les voyez pas dans cette catégorie-là. Est-ce que c'est ça que je comprends?

Mme Vachon (Karine) : Bien, en fait, on ne les considère pas dans la catégorie de la littérature au sens large de la littérature, mais c'est pourquoi on reconnaissait, en fait, que les obligations individuelles de la loi S-32.01 a été transmis dans le nouveau projet de loi, justement parce qu'on a là des obligations nécessaires aux contrats qui vont toucher l'ensemble des auteurs, qu'ils soient, donc, des artistes de la littérature ou non. Donc, on considère qu'ils sont quand même protégés par des obligations qu'on demande aux éditeurs, mais que, pour la négociation d'ententes collectives, comme c'est une loi sur le statut de l'artiste et que des associations reconnues sont reconnues du domaine de la littérature, bien, que ça concerne des auteurs littéraires du domaine de la littérature.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Donc, les auteurs... c'est-à-dire ce qui est couvert par la SODEC.

M. Foulon (Arnaud) : Bien, c'est un peu le parallèle qu'on faisait. Nous, on travaille beaucoup avec la SODEC, vous le savez. Donc, il y a un lien étroit. Comme vous le disiez tout à l'heure, un livre pour faire son patio, à moins que ça soit devenu un métier d'art, mais je pense que ça n'a pas rapport avec le milieu artistique. C'est vraiment une spécificité technique de quelqu'un qui apporte son expertise, et puis qui la transmet dans un livre dans le cadre d'une proposition qui est faite pour quelqu'un qui voudrait construire un patio. Mais ce n'est pas du tout la même chose que quelqu'un qui écrit un roman, quelqu'un qui écrit de la poésie, quelqu'un qui écrit un album jeunesse où là on se retrouve davantage, comme disait Mme la ministre, notamment dans les achats de bibliothèques scolaires, et donc dans... Il y a un écosystème qui est différent pour ce genre de livre littéraire. Donc, il y a une distinction qui doit être faite par rapport à ce qui est imposé dans des ententes collectives, effectivement.

Mme St-Pierre : Mais je cherche à comprendre vos craintes. Parce que vous êtes des amoureux du domaine. Quelle est la... Quelles sont les craintes qui surgissent? Madame a parlé... pas de tracasseries, mais de surcharges administratives pour des petites maisons d'édition. Mais outre cela, quelles sont vos craintes par rapport à la... au fait qu'on amène les écrivains et les écrivaines dans la Loi sur le statut de l'artiste.

Mme Vachon (Karine) : C'est que les contrats varient beaucoup d'un genre de livre à l'autre. Donc, le domaine de l'édition scolaire, par exemple, c'est une réalité en soi. Les auteurs ont des très bonnes conditions qui oeuvrent dans le secteur du livre scolaire. Dans le domaine du livre pratique, il y a une multitude de modèles d'affaires aussi qui sont derrière la publication d'un livre. Donc, on a de la difficulté à voir comment on peut arriver à faire des ententes collectives pour une si large diversité de livres, alors que, dans le domaine de la littérature, bien là, on est capable de voir qu'on peut effectivement établir des conditions minimales, donc des ententes qui vont s'appuyer vraiment, là, sur...

Mme Vachon (Karine) : ...des contrats qui sont équivalents.

Mme St-Pierre : Je suis peut-être naïve, mais pourquoi vous ne pourriez pas être le principal interlocuteur de votre vis-à-vis? C'est à dire là, ce que je comprends, peut être que je suis dans le champ, là, c'est que le vis-à-vis pourrait, devrait négocier avec plusieurs maisons d'édition différents contrats, qui pourront être différents les uns et des autres, alors que s'il y avait un tronc commun de votre association comme étant le principal négociateur de cette... de ce beau projet-là, je trouve, de société, ça ne serait pas une avenue, ça?

M. Foulon (Arnaud) : Le tronc commun, comme disait Karine, peut être lié à un type de livre identique, Si on revient aux livres scolaires, si un éditeur décide, par exemple, dans le cadre d'un projet scolaire, de libérer le salaire d'un enseignant pour lui permettre d'écrire, ça ne se compare pas avec quelqu'un qui a déjà écrit un roman, qui vient de déposer. Ce n'est pas du tout le même genre de contrats qui vont être signés. Si on essaie de les comparer, les gens vont dire : Ça ne se compare pas. Donc est-ce que ça veut dire, sinon, qu'il faut avoir une panoplie d'ententes collectives? Donc c'est pour ça que pour nous, puis revenons à l'énoncé même de la loi, la loi sur le statut de l'artiste doit s'adresser aux artistes et non pas à tous les gens qui écrivent des livres. Il y a une nuance qui est importante là-dedans parce que sinon, on n'y arrivera jamais, là. Il n'y a pas de... le terrain de jeu est trop vaste, j'ai envie de dire, là.

Mme St-Pierre : Oui. Mais vous convenez avec moi que si on regarde en termes de cotisations syndicales, si un auteur vend 200 livres dans l'année, puis qu'il y en a... quelqu'un qui vend des livres de recettes en vend 10 000, bien, il va rapporter à votre vis-à-vis, de l'autre côté, plus de cotisations syndicales, ce qui va faire que... en fait,ça va être un tronc commun qui va aider d'autres artistes aussi, d'autres créateurs.

J'essaie... Vous savez, c'est comme quand on est dans un syndicat, je le sais, je suis une vieille syndicaliste, quand on est dans un syndicat, il y a des gens dans le syndicat qui gagnent beaucoup plus cher que d'autres. Mais tout ça s'équivalait valait parce qu'on payait des cotisations syndicales, les cotisations syndicales s'en allaient à la CSN, puis la CSN représentait tout le monde, les plus faibles comme les plus forts. Autrement dit, il y a des faibles puis il y a des forts. Faibles dans le sens... pas dans le sens négatif du terme, mais faibles dans le sens que le marché n'est pas nécessairement un marché pour des livres à grand public. Donc il y aurait une protection, à mon avis, pour tout le monde, pour les plus... bien, ceux qui essaient de faire de la littérature leur métier. Est-ce que vous me suivez?

Mme Vachon (Karine) : Bien, ça serait aux aux auteurs des secteurs non littéraires de vérifier leur volonté ou non de faire partie d'ententes collectives et d'associations d'artistes reconnus aussi. Donc, pour l'instant, l'association reconnue, elle représente le domaine de la littérature. Est-ce que des auteurs plus larges souhaitent en faire partie, des auteurs d'autres secteurs? Au sein des maisons d'édition, on n'a pas reçu de volonté d'auteurs de secteurs variés de négocier des ententes collectives avec nous pour le moment.

• (11 h 40) •

Mme St-Pierre : Quand vous parlez, ici, de remplacer le terme «représenter» par «assister», je ne sais pas si c'est la bonne.... vous faites la bonne lecture du mot" représenter". Représenter, ça ne voudrait pas dire nécessairement que l'auteur qui publie un livre puis qui discute avec la maison d'édition serait obligatoirement représenté. Ce ne serait pas lui ou elle qui discuterait, que ça serait son... j'appelle ça son syndicat, là, son union que c'est.... Faudrait... La façon dont, je pense, vous le voyez, c'est qu'il faudrait qu'à chaque fois cette personne là aille chercher l'aval de son association pour pouvoir négocier, pour pouvoir parler, discuter de son contrat.

Mme Pigeon (Geneviève) : ...en fait, oui et non. Je pense que l'inquiétude, ce n'est pas tellement... bien, enfin. Effectivement, c'est vrai qu'il y a peut-être une nuance à préciser ici, mais l'inquiétude, c'est vraiment une question aussi de délais. C'est à dire que même si ce n'est pas systématique que l'auteur soit représenté par son association, si, à chaque fois que l'auteur a une question, doit passer par un processus ou quelqu'un de l'association doit intervenir, à ce moment-là, avec 3550, bon, ils disaient, contrats annuels, par exemple, on craint d'être face à des délais et de retarder des projets de publication parce qu'on discute avec... en tout cas, personnellement, je discute avec les auteurs de contrats. Ça peut durer plusieurs heures, on clarifie des points, on jase, on explique des situations concrètes. Mais si à chaque fois une tierce partie doit intervenir, même, dans une discussion, pour expliquer un point ça pourrait devenir très lourd, effectivement. Donc je pense que c'est là l'inquiétude entre représenter et assister. En fait, c'est la lecture qu'on en a faite, nous, ici.

Mme St-Pierre : ...il y a une entente-cadre, il me semble que ça simplifierait votre travail, non?

Mme Pigeon (Geneviève) : Bien, c'est-à-dire qu'on...

Mme Pigeon (Geneviève) : ...on travaille déjà avec les paradigmes de la S-32.01, qui est déjà... donc, c'est déjà reproduit dans le projet de loi n° 35, là, dicte un certain nombre de conditions qu'on doit respecter. À partir de là, ce seraient des conditions minimales. Ce qui veut dire que chaque auteur pourrait quand même souhaiter discuter davantage et augmenter ses conditions, ou nuancer, ou préciser. Donc, je pense qu'on n'échappe pas, quand même, au risque ou à la possibilité que des discussions supplémentaires soient nécessaires pour les contrats de toute façon.

Mme St-Pierre : Quand il y a des salons du livre, les auteurs que vous invitez ne sont pas rémunérés dans... que les éditeurs invitent dans leurs différents secteurs, là, les auteurs ne sont pas rémunérés. Est-ce que vous trouvez ça normal qu'un auteur ne soit pas rémunéré pour aller dans un salon du livre, alors que la personne qui va s'occuper de vendre des billets va être rémunérée?

M. Foulon (Arnaud) : En fait, il y a deux éléments. Il y a des activités, des tables rondes, dans les salons du livre, organisés par les... Et ils sont rémunérés dans ces tables rondes, là, les auteurs, là, il faut faire attention, là. C'est pour ça, je corrige cet aspect-là. Un auteur qui est invité à participer à une table ronde avec d'autres auteurs ou à une entrevue avec un animateur va être rémunéré pour ça, et il faut qu'il le soit, c'est important. Un auteur qui fait des tournées scolaires, dans les écoles, va être rémunéré pour ça par rapport à être rémunéré pour faire une séance de signatures - c'est peut-être ça votre question. Effectivement, ça, c'est une activité de promotion pour son livre qui est incité par la maison d'édition même. Si la maison d'édition devait rémunérer ça, bien là, on s'en va vers peut-être une bestsellerisation des auteurs que vous allez avoir dans les salons du livre. Vous n'en aurez pas 1 500 au Salon du livre de Montréal, vous en aurez peut-être 200 ou 300. Parce que ce qu'on oublie, il y a un aspect quand même important, c'est que cette loi-là ne fait pas apparaître de l'argent dans le milieu du livre. Donc, on est quand même contraint par un domaine où les salaires sont très peu élevés par rapport à beaucoup d'autres domaines culturels, puis ça, c'est vrai pour plusieurs gens dans la chaîne du livre. Le Libraire, vous n'êtes pas sans savoir que, même si la loi du livre octroie 40 % de remise, bien, la marge bénéficiaire des libraires n'est pas énorme aujourd'hui. C'est vrai pour l'ensemble des artisans, donc il faut faire attention à cet aspect-là. J'ai l'impression que, des fois, quand on lit les propositions, on a l'impression que c'est la panacée puis que l'argent va apparaître. Ça, c'est une inquiétude qu'on a, elle n'apparaîtra pas, mais elle va amener une certaine surcharge, dont les éditeurs ne peuvent pas absorber seuls les frais. Il va falloir que ça se fasse en partage pour le bénéfice et le ruissellement jusqu'aux artistes, ça, c'est important.

Mme St-Pierre : Donc, votre proposition, c'est que vous êtes ouvert à ce qu'il soit inclus dans la loi un certain type d'œuvres littéraires et que certains autres ne soient pas dans la loi, et ça, vous seriez capables de vivre avec ça.

M. Foulon (Arnaud) : En fait, ils vont être dans la loi, mais qu'ils ne soient pas couverts par des ententes collectives. C'est pour ça que je fais la nuance. C'était le cas dans S-32.01, il y avait aussi cette nuance-là, qui était quand même assez claire. Quand on parle des personnes non visées, c'est les personnes non visées par les artistes... les clauses au niveau artistique, mais qui ont écrit un livre, donc ils doivent être régis par une loi quand on écrit un livre. Quelqu'un qui écrit un livre - pour revenir au livre de jardinage ou autre - pourrait avoir un conflit avec son éditeur, puis il faut qu'il y ait un recours... il faut qu'il y ait un recours qui existe devant les tribunaux pour pouvoir contester la chose, là. C'est important que ça existe, ça.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci.

Mme St-Pierre : ...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, nous poursuivons, cette fois-ci, avec la députée de Taschereau.

Mme Dorion : Bonjour. Contente de vous revoir. J'ai réfléchi aux discussions qu'on avait eues - j'ai juste deux minutes, je vais aller vite - à mon bureau de comté, puis j'ai reparlé aussi à beaucoup d'auteurs.

Bon, l'argument qu'ils disaient c'est : On comprend les difficultés dans lesquelles pourraient se trouver les éditeurs parce qu'effectivement l'argent ne tombe pas du ciel. Mais, nous, comme auteurs, on est souvent pris pour espérer que l'argent tombe des éditeurs, puis, eux, ils nous disent : Bien, nous, on n'en a pas d'argent. Et donc ils disaient... Vous pouvez peut-être m'aider à répondre à ça, mais ils disaient : Au moins, si on est régi et si tous, tous les livres font partie aussi de ce règlement-là, on va être un plus grand nombre à dire «Bien, l'argent, on en a besoin» et on ne sera pas les auteurs dépendant d'un ruissellement qui n'arrivera peut-être jamais.

C'est la question que je me pose aujourd'hui parce que ça pourrait... Je comprends que vous voulez faire une distinction entre les artistes qui écrivent et les non-artistes qui écrivent, mais il ne faudrait pas créer une situation où tout à coup ceux qui ne sont pas des artistes, c'est plus avantageux pour des éditeurs de faire affaire avec eux. Et, moi, j'ai peur de ça aussi.

Donc, ces deux craintes là, ces deux soucis là, si vous pouvez juste me dire votre avis là-dessus. Votre intelligence collective d'éditeur... Je n'ai jamais fait ce job-là, ça fait que je suis bien curieuse de savoir.

Mme Vachon (Karine) : Les éditeurs de livres valorisent toujours la bibliodiversité, donc, c'est-à-dire de publier une vaste catégorie de livres de tous genres, et la littérature est la partie la...

Mme Vachon (Karine) : ...plus importante de la création au Québec, là. Donc, je pense qu'il y aura toujours cette volonté de publier les œuvres de création, de publier donc les œuvres littéraires, et tout ça. Mais les livres d'autres genres, les livres pratiques puis les livres scolaires, et tout ça, sont créés, selon d'autres modèles aussi, qui nécessitent aussi un investissement important quand on fait du livre illustré, quand on fait des ouvrages universitaires avec des tableaux, des graphiques, et tout ça, d'un nombre de pages important.

Donc, je pense qu'il n'y a pas d'avantage à publier un genre de livre plus qu'un autre. Une oeuvre littéraire peut devenir un best-seller comme un livre de cuisine peut l'être, mais... et vice versa. Donc, c'est... Je ne pense pas que les éditeurs vont faire des choix en fonction de ce qui est couvert ou non par une loi. Ils vont faire des choix par rapport c'est quoi, le créneau de la maison d'édition, qu'est-ce qu'ils souhaitent publier. Et, à certains égards, bien, les conditions vont être les mêmes dans les contrats de toute façon, c'est juste que, dans certains types de livres, des fois, il y a des modèles d'affaires qui sont différents, il y a des conditions qui sont différentes, qui sont négociées avec les auteurs aussi, qui ne sont pas nécessairement désavantageuses pour le créateur pour autant, là.

M. Foulon (Arnaud) : Puis, si je peux compléter, il y a des livres qui ne sont pas subventionnés, des livres pratiques. Revenons au guide jardinage, il n'est pas subventionné, il ne s'en fait pas moins pour autant au Québec, ou le livre de cuisine. La SODEC, ce n'est pas son mandat. Donc, il faut faire attention. Il y a des livres qui se font, mais les... investissements, pardon, financiers sont quand même colossaux. Il y a l'embauche, notamment, je vais vous donner un exemple, de photographes pour ce genre de livres, là, bien, c'est quand même important, les dépenses qui sont liées à ça. Donc, ça amène un montage financier qui est différent, mais, heureusement, le milieu du livre au Québec est rendu concurrentiel avec l'international, et il s'en fait beaucoup, des livres comme ça, ce qui n'était pas le cas il y a 20 ans.

Donc, la crainte que vous avez, je ne la partage pas. Je pense vraiment que ces livres-là, si on laisse la latitude de travail, devraient continuer à se faire. L'exemple, c'est que sans certaines des subventions, ils se font quand même.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. C'est tout. Alors, c'est tout le temps que nous disposons. Nous poursuivons avec le député de Matane-Matapédia.

M. Bérubé : Merci, Mme la Présidente. Bienvenue à l'Assemblée nationale. La question de la reddition de comptes est vraiment importante, pour vous et pour nous. C'est de l'argent public qui est donné à des entreprises. Donc, les éditeurs de livres reçoivent tous de l'argent public. Qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Qu'est-ce qui devrait se retrouver dans le projet de loi pour améliorer la reddition de comptes et s'assurer que, d'abord, les créateurs puissent être les premiers servis?

M. Foulon (Arnaud) : Je dirais... Je ferais juste une correction, il y a des éditeurs qui ne reçoivent pas d'argent public, il y en a qui n'ont pas de subventions parce qu'ils ne respectent pas certains des critères.

M. Bérubé : Alors, pour ceux qui en reçoivent.

M. Foulon (Arnaud) : Pour ceux qui en reçoivent, je pense... puis là-dessus il faut que je lève mon chapeau au gouvernement et à la ministre, il y a eu beaucoup de choses qui ont été faites récemment. L'investissement dans les bibliothèques scolaires est un bon exemple. Donc, il y a plusieurs programmes qui existent. Là où il y a encore des lacunes aujourd'hui, je peux me permettre, au niveau des artistes, c'est... les bourses d'écriture au CALQ ne sont absolument pas concurrentielles avec ce qui existe au niveau fédéral. Il y a certains aspects où je vous dirais qu'il y a encore du travail qui peut être fait pour encourager la création et pour aider la création de nos artistes pour être plus concurrentiels sur la scène internationale. Donc, il y a des choses qui peuvent être faites.

• (11 h 50) •

Par rapport au projet de loi, nous, on a fait nos revendications par rapport à ce qui nous semble le plus logique pour aller de l'avant et dans un esprit d'ouverture, parce que, même si on n'était pas, et je le répète, d'accord avec la fusion de ces deux lois là, aujourd'hui, on se rend compte qu'on doit avancer tous ensemble, on est dans le même bateau, auteurs, éditeurs, distributeurs, libraires,nais, si on veut que le bateau continue à avancer, bien, je pense qu'il faut faire preuve aussi d'avancement dans ce sens-là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste une minute.

M. Bérubé : Est-ce qu'il y a un élément de votre présentation qu'on n'a pas discuté que vous aimeriez mettre en lumière ou préciser, avec le temps qui nous reste, que je vous offre?

M. Foulon (Arnaud) : Je suis surpris. Je...

M. Bérubé : Vous ne devriez pas l'être avec moi.

Mme Pigeon (Geneviève) : ...sur la question qui concernait le choix des éditeurs, est-ce qu'on va privilégier certains types de livres ou d'autres, parce que ça m'interpelle de façon personnelle dans la mesure où j'ai fait le choix d'être propriétaire d'une maison d'édition qui fait du très littéraire. Et je n'aurai... bien, enfin, je ne dirai pas «je n'aurai jamais», mais la best-sellerisation ne fait pas partie de mon quotidien, on va dire ça comme ça. Et, malgré tout ça, je n'estime pas avoir les compétences, l'énergie, l'envie de me lancer dans d'autres types d'œuvres, de publications. C'est ma passion, c'est ce que j'aime, c'est ce que je connais. Donc, en ce qui me concerne, ce risque-là n'existe pas. Je vais continuer à faire ce que je sais faire et ce que je fais bien. Et, en ce sens, je pense que chaque éditeur aurait pu venir à ma place et dire la même chose. Donc, ce qu'on souhaite vraiment, c'est plutôt d'avoir les moyens de pouvoir continuer à avancer et de bien le faire, en fait.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, merci, M. Foulon, Mme Pigeon et Mme Vachon pour votre contribution aux travaux de la commission. Merci encore.

Et nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 52)

(Reprise à 12 heures)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Pour ce bloc-ci, nous allons entendre deux groupes : l'Union des écrivaines et écrivains du Québec... ou québécois, pardon, et l'Association québécoise des autrices et des auteurs dramatiques.

Nous commençons d'abord par l'Union des écrivaines et écrivains québécois, avec madame Aubry. À vous la parole. Je vous demanderais de bien vous présenter avant de commencer votre exposé de huit minutes, si j'ai bien compris.

Mme Aubry (Suzanne) : Merci, Mme la Présidente. Je me présente, Suzanne Aubry, présidente de l'Union des écrivaines et des écrivains québécois, écrivaine et autrice dramatique. Mme la Présidente, Mme la ministre de la Culture et des Communications, Mme la députée de l'Acadie. Mme la députée de Taschereau, M. le député de Matane-Matapédia, Mmes et MM. les députés, nous souhaitons d'abord vous remercier infiniment d'avoir fait ce projet de loi, de l'avoir déposé et de nous recevoir aujourd'hui à cette commission parlementaire. Maintenant, je cède la parole à Laurent Dubois.

M. Dubois (Laurent) : Bonjour à toutes et tous. Laurent Dubois, directeur général de l'UNEQ, l'Union des écrivaines et écrivains québécois, qui est un syndicat professionnel fondé le 21 mars 1977, ça fait donc 45 ans. L'Union des écrivaines et des écrivains regroupe aujourd'hui plus de 1600 écrivaines et écrivains dans tous les genres, dans tous les genres littéraires : poésie, roman, théâtre, essai jeunesse, ouvrage scientifique et pratique, manuel scolaire, etc., guide de l'auto, et j'en passe. L'UNEQ protège un métier et non pas un genre.

Depuis 45 ans, l'UNEQ travaille à la défense des droits socioéconomiques des écrivaines et des écrivains ainsi qu'à la valorisation de la littérature québécoise. Et l'UNEQ a été reconnue en 1990 comme l'association la plus représentative des artistes du domaine de la littérature en vertu de la Loi sur le statut professionnel des artistes en arts visuels, des métiers d'art et de littérature, appelée loi S.3201...


 
 

12 h (version non révisée)

M. Dubois (Laurent) : ...pendant plus de 30 ans, les écrivaines et les écrivains que nous représentons ont dû vivre avec la loi 32.01 qui n'obligeait d'aucune façon les éditeurs et les producteurs à négocier des ententes collectives fixant les conditions minimales de contrat. Résultat : zéro entente en 30 ans.

Pendant plus de 30 ans, contrairement à la majorité des artistes, les autrices et auteurs ont exercé leur métier sans bénéficier d'ententes collectives encadrant leurs conditions de travail, sans filet social, sans recours à l'arbitrage ou au tribunal administratif du travail en cas de litige.

Pendant plus de 30 ans, les autrices et les auteurs ont dû négocier leurs contrats seuls face à des éditeurs de plus en plus puissants. Peu familiers avec le jargon juridique, embourbés dans des négociations de gré à gré, ils sont nombreux à signer des contrats abusifs qui vont les suivre pendant des décennies, souvent même après leur décès, avec des répercussions incalculables sur la suite de leur carrière.

Voici quelques exemples les plus criants des clauses tellement abusives qui ont été imposées dans les contrats des écrivaines et écrivains au fil des années.

Les clauses de préférence, par exemple, qu'imposent certaines maisons d'édition, qui condamnent l'artiste à réserver ses œuvres futures exclusivement aux diffuseurs, et ce, parfois, sans aucune limite dans le temps, ce qui revient à dire que vous êtes pieds et poings liés avec votre éditeur pour la suite de votre carrière.

Autre exemple des cessions de droits complètes, qui dépossèdent les autrices et les auteurs de tout contrôle sur les diverses exploitations futures de leurs œuvres, adaptations cinématographiques, livres audios, traductions, adaptations au théâtre, par exemple.

Et enfin des clauses appelées paiements intertitres qui permettent aux éditeurs de compenser l'éventuel manque de rentabilité d'une publication en ponctionnant les redevances à verser pour une autre œuvre.

Pendant plus de 30 ans, un abus de position dominante dû au déséquilibre du rapport de force entre les écrivains et les diffuseurs a favorisé un climat de travail parfois toxique, pouvant mener à du harcèlement psychologique ou, dans des cas rares, heureusement, à des situations d'agressions sexuelles, sans que la loi n'offre quelque protection que ce soit en cas d'abus. Aucun grief, aucune médiation, aucun recours facilement accessible.

Pendant plus de 30 ans, les autrices et les auteurs se sont vu offrir de participer à des activités de promotion ou de valorisation de la littérature sans contrepartie financière ou avec une rémunération indécente, bien en dessous des recommandations de l'UNEQ.

Pendant plus de 30 ans, l'UNEQ a été privée de son pouvoir de représenter comme il se doit les écrivains membres et non-membres, et par le fait même, ceux-ci ont été privés d'une partie importante de leur liberté de s'associer pour améliorer leurs conditions socioéconomiques.

Pendant plus de 30 ans, la loi S-32.01 a démontré qu'elle était inéquitable, injuste et inapplicable.

Mme Aubry (Suzanne) : Mme la ministre, Mmes et MM les députés, fort heureusement, aujourd'hui, un nouveau chapitre peut s'écrire en intégrant la littérature, le théâtre et les arts visuels parmi la liste des secteurs qui étaient auparavant encadrés par la loi S-32.01. Le projet de loi n° 35 instaure enfin une obligation pour les diffuseurs et producteurs de s'asseoir avec les syndicats pour négocier de bonne foi des ententes collectives fixant les conditions minimales des contrats.

En instituant une loi commune à toutes les disciplines artistiques, le législateur permet un rééquilibrage du rapport de force. Il sort les autrices et les auteurs et les auteurs de l'ornière du contrat négocié de gré à gré et donne à l'UNEQ le pouvoir de négocier des ententes collectives avec les différents partenaires du milieu du livre.

Ainsi, nos artistes ne seront plus jamais isolés dans cette étape cruciale qui est la signature d'un contrat. Des conditions minimales auront été négociées préalablement entre les parties, et la discussion ne porterait alors que sur une possible bonification de ces planchers.

Grâce au projet de loi n° 35, l'UNEQ entreprendra, aussi rapidement que possible, des négociations de bonne foi avec les éditeurs et autres diffuseurs afin de signer autant d'ententes collectives que nécessaire, et je le souligne ici, secteur par secteur, et ce, dans le but de tenir compte des différentes réalités dans la chaîne livre, ce qui répond aux interrogations de l'ANEL tantôt.

En élargissant les pouvoirs du Tribunal administratif du travail aux artistes, le projet de loi n° 35 favorise l'accès à la justice pour une catégorie de travailleurs et travailleuses obligés jusqu'alors en cas de litige de se tourner vers les tribunaux de droit commun aux procédures souvent longues et coûteuses.

Pour ce qui est du harcèlement psychologique ou sexuel, le projet de loi n° 35 donne enfin à tous les artistes les mêmes dispositions que celles qui s'appliquent aux travailleurs et travailleuses québécois qui figurent dans la Loi sur les normes du travail. Ces questions si fondamentales ne feront plus l'objet de négociations entente par entente. Le...

Mme Aubry (Suzanne) : ...le projet de loi no 35 donnera à l'UNEQ des moyens essentiels pour négocier avec tous les diffuseurs, que ce soit les salons du livre, les bibliothèques, les librairies, institutions scolaires. L'UNEQ salue la volonté politique du gouvernement et les efforts transpartisans de tous les partis politiques au soutien du projet de loi no 35 afin qu'il puisse être adopté rapidement. Le projet de loi no 35 doit à tout prix vivre, car il instaure équité et justice pour les écrivaines et les écrivains qui seront enfin considérés comme des artistes à part entière et auront les mêmes droits et les mêmes protections que les autres artistes. Nous appuyons fortement le projet de loi no 35 et demandons son adoption avant la fin des travaux parlementaires. Pour toutes ces raisons, le projet de loi no 35 est historique. Il constitue un projet... un progrès socioéconomique sans précédent pour les écrivaines et les écrivains. Il y aura un avant et un après-projet de loi pour notre amitié.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Nous poursuivons avec Mme Gagnon, de l'Association québécoise des autrices et des auteurs dramatiques. Je vous invite à bien vous présenter Mme Gagnon avant de commencer votre exposé de 2 min 20 s

Mme Gagnon (Marie-Eve) : Mon nom est Marie-Ève Gagnon. Je suis directrice générale de l'Association québécoise des autrices et auteurs dramatiques. L'AQAD salue le dépôt du projet de loi no 35 qui constitue une avancée absolument essentielle pour l'amélioration des conditions des artistes que nous représentons. Qui sont ces artistes que nous représentons? Ce sont ceux qui écrivent, traduisent ou adaptent les histoires que vous allez voir sur les scènes de théâtre et dans d'autres lieux, sur tout le territoire. Il faut savoir que l'AQAD est la seule association d'artistes visée par les deux lois sur le statut de l'artiste. Donc, on est à même de voir les différences très grandes des effets de chacune des lois.

Concrètement, ça veut dire qu'un auteur, une autrice qui a un contrat AQAD quand elle est engagée pour écrire une œuvre, si tout va bien, le producteur doit respecter les conditions minimales de l'entente collective. L'artiste écrit, est payé et reçoit des avantages sociaux. Toutefois, l'autre loi s'applique quand s'enclenche le travail de production et de diffusion de l'œuvre. Ça a pour conséquence que l'auteur se retrouve alors sans normes minimales, tout seul pour une négociation de gré à gré avec le producteur. Permettez-moi de citer Emmanuelle Jimenez, autrice et vice-présidente de l'AQAD : «J'exerce le métier d'autrice dramatique depuis près de 25 ans, mais j'éprouve une grande fatigue culturelle. Et cette fatigue, je l'ai ressentie dès mon premier contrat de licence. J'ai tout de suite constaté que je n'étais pas sur un pied d'égalité avec mes collègues artistes qui, eux et elles, voyaient leur patrie... leurs pratiques encadrées par un régime de travail. Mes collègues metteurs en scène, par exemple, auraient droit à une contribution du producteur à leur fonds de pension. Moi, non. Moi, pour avoir un minimum décent par représentation, il faut que je me batte, que je gagne mes conditions de travail à l'arraché. Il n'y a jamais rien d'acquis, même après 25 ans de pratique. À chaque contrat, c'est toujours à recommencer. Et ça, ça use. Je veux arrêter de me dire que, tous les jours, que la Loi sur le statut de l'artiste est contre moi.» Fin de la citation. Il faut absolument adopter ce projet de loi pour que les auteurs et autrices puissent enfin avoir un véritable impact sur leurs conditions de travail. Merci.

• (12 h 10) •

Mme Roy :  Alors, merci, effectivement.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci à vous aussi. Nous allons commencer la période d'échanges. Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Roy : Merci, Mme Aubry, M. Dubois, Mme Gagnon. Merci d'être ici. Merci pour votre témoignage. Merci pour votre résilience et votre combativité. On s'est rencontrés, on s'est vus même en personne à certains moments. C'est extraordinaire. On s'est vu aussi par Teams, Zoom, etc. Je veux vous dire que ce projet de loi là, la pierre angulaire de cette refonte, c'est entre autres le fait que, maintenant, il n'y a plus deux classes d'artistes au Québec, il y en a une seule, une seule classe d'artistes professionnels. Vous serez tous sous la même loi, naturellement, quand nous réussirons à l'adopter tous ensemble. Je ne veux rien, mais j'ai confiance, j'ai confiance. On est là pour vous, pour les artistes. Cette loi-là est pour les artistes. Et il n'est pas question, ici, d'antagoniser qui que ce soit ou quoi que ce soit. On est rendus ailleurs, je pense, en 2022, maintenant. J'aimerais très concrètement... Je sais, je vous ai lu. J'ai lu les articles que vous avez faits. J'avais même répondu à un journaliste qui me questionnait que j'avais un préjugé favorable à votre recommandation. Alors, le...

Mme Roy : ...vous avez lu entre les lignes, lisez tous entre les lignes, là. Mais l'idée de n'avoir qu'une seule loi et surtout de nous assurer que le secteur, donc, de la deuxième loi, qui était le secteur de la littérature, des arts visuels et des métiers d'art, fasse désormais partie de la même loi, d'une seule loi. Pour moi, c'était fondamental, ça allait de soi. Maintenant, on est rendu ailleurs.

Je vais vous poser des questions très concrètes maintenant dans l'application. Et puis, tout comme vous, je souhaite qu'elle soit adoptée d'ici la fin de la session, mais je veux juste vous rassurer dans la mesure où c'est possible, il y a suffisamment de temps, puis on écoute très attentivement pour voir dans quelle mesure on peut bonifier les choses. Entre autres, vous nous parlez du devoir de juste représentation, le fameux article 24.2. Naturellement, c'est l'AQAD qui nous parle de ça. C'est le fameux article 15 du projet de loi n° 35. Vous n'êtes pas le premier groupe qui nous en parler. Je pense qu'on peut faire des ajustements qui pourraient être intéressants. Je vais dire ça comme ça. Maintenant, je veux poser des questions parce que de façon plus concrète, puis il y a tout un pan aussi du projet de loi qui touche des articles de la Loi sur les normes du travail que nous transposons, que nous apportons à plusieurs égards, entre autres, vraiment à l'égard des tribunaux administratifs, du tribunal administratif du travail, mais également à l'égard... les dispositions à l'égard du harcèlement psychologique et sexuel. Dans quelle mesure, si le projet de loi est adopté, ces mesures-là vont pouvoir aider les artistes du milieu de la littérature, entre autres?

M. Dubois (Laurent) : Ça va tout changer, Mme la ministre, tout changer. Vous parlez des... notamment, vous faites allusion aux situations de harcèlement, vous savez... vous n'êtes pas sans savoir qu'en juillet 2020, on a eu droit dans le milieu à #MoiAussi littéraire où finalement on a eu plus de 150 victimes qui ont pu exprimer des plaintes qui ont été déposées au niveau de l'UNEQ, etc. Puis ces plaintes-là, moi, je ne peux rien en faire, je ne peux absolument rien en faire. En tant que directeur d'un syndicat, je ne peux pas contraindre un éditeur à s'intéresser à la question, à me parler, à s'asseoir pour qu'on regarde le cas, pour faire ce qu'on pourrait appeler une médiation ou pour entrer dans un processus d'accompagnement de la plainte. Je ne peux pas le faire aujourd'hui. Bien, avec ce projet de loi, tout ça est réglé. Donc, c'est sûr que s'il y a des écrivaines et des écrivains qui ont été victimes et qui nous écoutent, elles savent très bien... savent très bien que les choses peuvent changer grâce à ce projet de loi. Donc, bravo et merci pour ça.

Mme Roy : Merci à vous. Vous nous dites : Il est important que le projet de loi soit adopté avant la fin de la session parlementaire. Pourquoi cette urgence-là, là? J'ai une bonne idée, mais je veux juste vous entendre.

Mme Aubry (Suzanne) : Bien, parce que ça fait plus de 30 ans qu'on vit cette situation-là. Moi, quand je suis arrivé à l'UNEQ, mon seul but, quand j'ai constaté... je suis scénariste aussi, et j'ai constaté que j'étais protégée en vertu des ententes collectives qui avaient été négociées par la SARTEC. Et je suis devenue écrivaine et je n'avais aucune protection, rien, aucun filet social, aucune entente collective. Je suis arrivé à l'UNEQ, je me suis fait élire et j'ai annoncé que moi, ce que je voulais, mon seul but, c'était qu'il y ait une loi... enfin, qu'on puisse avoir des ententes collectives, qu'on puisse avoir la même protection et le même statut que les autres écrivains. Comme scénariste, j'étais en dichotomie avec l'écrivaine, et je trouvais ça insensé. Les métiers d'écriture, c'est d'écrire qu'on fasse un livre de botanique, qu'on écrive de la poésie, qu'on écrive un essai sur l'automobile. Quel que soit le genre, on est des écrivains à part entière. Or, cette loi le reconnaît. Et nous, on ne veut pas, en tant que syndicat, avoir des catégories d'artistes dont certains seraient protégés et d'autres pas. Ça va complètement à l'encontre de notre ADN. On veut protéger toutes les écrivaines et tous les écrivains, quel que soit le genre d'écriture. Comme le disait Laurent, tout à l'heure, on ne représente, on représente les artistes.

Mme Roy : J'aimerais vous poser une question, Mme Gagnon, à l'égard, plus précisément de votre association, l'Association québécoise des auteurs dramatiques. Dans ce projet de loi là, je vous ai dit qu'on a importé plusieurs dispositions qui sont des dispositions qu'on retrouve dans la Loi sur les normes du travail qui ne s'appliquent pas aux artistes. Donc, on va chercher des dispositions pour les appliquer aux artistes. Celles sur le harcèlement, on vient d'en parler, mais également des dispositions à l'égard du fameux tribunal administratif du travail. Et donc, on donne de nouveaux pouvoirs au Tribunal administratif du travail. Alors, s'il était adopté, ce projet de loi là, dans quelle mesure ça viendrait régler certains problèmes pour vous? Puis là, on parle de toute la dynamique syndicale, là.

Mme Gagnon (Marie-Eve) : Bien, en fait, ça nous...

Mme Gagnon (Marie-Eve) : ...à accélérer les processus de négociation, comme Mme Fortin, de l'UDA, en a parlé ce matin, c'est-à-dire que, si on peut... Par exemple, sur la négociation de bonne foi, ça va accélérer les processus de négociation, qui sont souvent beaucoup trop longs. Dans notre cas, il y a une négociation qui a duré sept ans. Donc, c'est sûr que, si on peut avoir certains outils, donc les nouveaux pouvoirs du Tribunal administratif du travail, bien, ça va pouvoir nous aider à mieux faire notre travail puis à accélérer le processus de négociation.

Mme Roy : Et, pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, entre autres la disposition qui traite de la négociation de bonne foi, qui vient d'apparaître.

Comment est-ce que vous entrevoyez... On a entendu tantôt les éditeurs. Comment est-ce que vous entrevoyez la négociation d'ententes collectives une fois que le p.l. n° 35 sera adopté? Comment vous voyez ça pour la suite des choses?

M. Dubois (Laurent) : Très, très bien. Non, mais c'est vrai, c'est un progrès social. Je veux dire, on ne peut pas imaginer aujourd'hui qu'il y ait encore des secteurs qui ne soient pas obligés de se parler quand ils collaborent. Donc, là, tout à coup, on va pouvoir se parler, on va s'asseoir et on va négocier. Aujourd'hui, on gagne juste ça avec le projet de loi n° 35. Votre projet de loi, il ne contient pas les conditions minimales de nos futures ententes, il ne donne rien de tout ça, et c'est bien normal, c'est à nous de faire ce travail-là, puis on est enfin contents de pouvoir le faire. Donc, on va le faire. On espère pouvoir le faire avec un interlocuteur unique qui acceptera l'idée qu'on pourrait négocier plusieurs ententes collectives différentes pour tenir compte des réalités, parce que, oui, des réalités... entre le milieu de la poésie et le milieu du guide pratique, le «business model», le modèle d'affaires n'est pas le même, mais ça n'en reste pas moins que dans les deux cas on a besoin d'encadrer la pratique.

Et tout à l'heure, j'ai entendu qu'il y avait beaucoup de modèles d'affaires. Oui, mais il y a aussi beaucoup de modèles d'affaires qui méritent d'être encadrés pour ne pas dériver, et donc, nous, on est là. On va prendre notre temps, on va tendre la main, il n'y a pas de... - on a attendu 30 ans, donc on n'est plus à deux semaines près - et on va s'asseoir, et on va parler, et on va progresser, et pour le bien de tout le monde. Et je suis convaincu, Mme la ministre, que si on se reparle, si on a la chance de se reparler, là, tous ensemble dans quelques années, on trouvera que c'était un vrai progrès social pour toute la chaîne du livre. Parce que ça va aider tout le monde à assainir aussi un milieu, et à valoriser les bonnes pratiques, et à mettre de côté les joueurs qui abusent, et c'est toujours les mêmes 15 joueurs qui abusent, c'est les gros joueurs, puis ces joueurs-là, il faut les mettre à l'index, puis on va leur dire que maintenant ils n'ont plus le choix de s'asseoir et de faire la même chose que les petits éditeurs, qui, eux, essayent de faire tout comme il faut.

Mme Roy : Merci. Il y a mon collègue le député de Saint-Jean qui aimerait vous poser une question. Vous le connaissez. Je ne peux pas mentionner son nom, je suis obligée de dire «le député de Saint-Jean», alors... qui est un grand lecteur également.

M. Lemieux : Merci, madame la ministre. Il reste combien de temps, madame?

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, M. le député de Saint-Jean, il vous reste huit minutes.

M. Lemieux : D'accord. Mais j'ai peut-être des collègues qui vont vouloir se lancer, mais j'y vais tout de go.

Mme Gagnon, Mme Aubry, M. Dubois, de toute évidence, c'est un projet de loi qui n'était pas juste inattendu et... très attendu et nécessaire, mais qui va tout changer, de ce que je comprends de votre enthousiasme. Bon. Cela est juste et bon. Tant mieux. Mais il y a quand même... Dans les arguments qui flottent ici et qui vont se répercuter dans la société, il y a quand même des choses qui ont... qui méritent explication et arguments, éventuellement. Entre autres, votre formule est belle, M. Dubois: tous les genres, tu sais. J'oublie votre formule tellement elle était belle, je ne l'ai pas notée, là, mais le genre a frappé. Expliquez-nous ça pour quelqu'un qui nous regarde, là, puis qui dit: Eh! Un guide de réparation de motoneige puis de la littérature puis de la poésie, ça n'a rien à voir, là. Pourquoi on beurre si large, dirait-il?

• (12 h 20) •

M. Dubois (Laurent) : Ça va me prendre 30 secondes pour vous faire la démonstration. Prenons l'UDA, un comédien. Le comédien, quand il est au théâtre, quand il est dans un film, là, il est au meilleur de sa pratique. Il joue, il incarne un personnage, Cyrano, passez-en, il est bon. Quand il fait une pub pour Canadian Tire, la question de la pratique artistique peut peut-être être remise en question, mais son métier, c'est le même, il est comédien, et dans les deux cas il doit être encadré par des minimums, il travaille comme comédien.

Nous, c'est ça qu'on raconte, c'est qu'en réalité, ce qu'on encadre, nous, comme syndicat, ce sont les travailleurs et les travailleuses qu'on représente, qui sont des écrivains. Maintenant, ce qu'ils écrivent, ce n'est pas notre problème. Ils écrivent dans un milieu, dans un contexte, dans un univers, dans un écosystème, et c'est ça qu'on doit encadrer, l'écosystème. Qu'ils écrivent de la poésie - les pauvres, ils ne se mettront pas riches avec ça - ou qu'ils écrivent des best-sellers, ils doivent être accompagnés pareil.

M. Lemieux : Bien, justement... Et, juste pour référence, si jamais vous vous demandez pourquoi j'ai parlé de motoneiges, c'est à cause du député de Mégantic, ici. Bon. Il pourrait en écrire un guide. Mais, justement, les gens...

M. Lemieux : ...sont tellement différents, et les modèles d'affaires qui vont avec aussi. Vous venez de le dire, les pauvres, ils ne se mettront pas riches. Est-ce qu'on n'a pas affaire à deux bêtes complètement différentes?

M. Dubois (Laurent) : On a affaire à des conditions de pratique qui sont vraiment différentes, à des réalités économiques qui sont différentes, et c'est très clair qu'on va en tenir compte, parce que ce serait complètement irresponsable, de notre part, que d'essayer de négocier des ententes sans tenir compte du contexte dans lequel évoluent et le producteur et l'artiste. Et je parlais de la poésie, et, avec tout l'amour qu'on porte pour la poésie... mais c'est vrai que la poésie, ça reste, bien souvent, bien trop souvent, un marché limité. Évidemment qu'on va en tenir compte quand on va négocier. On ne peut pas avoir la même approche, les mêmes exigences, les mêmes demandes que quand on est dans un autre univers, qui va partir à l'international, qui va être traduit, qui va avoir une vie, une adaptation cinématographique.

M. Lemieux : Je m'en doutais bien, en fait, j'en étais certain, mais je croyais qu'il était important de vous l'entendre dire, tout comme la ministre, qui vous a fait dire, tout à l'heure, ou qui vous a demandé de dire comment ça allait se passer, ces négos. Parce qu'on s'est fait dire juste avant : Elle ne sera pas facile, là, là, on change tout, là, là, on va être dans le trouble, là. Alors, l'a priori que vous venez de me donner, il est fondamental, là, parce que, demain matin, la motoneige, voiture qui se vend à un prix de fou, ou qui se vend tellement bien que ça finit par rapporter d'énormes revenus, ce n'est pas la même chose que la poésie, pour revenir à cet exemple-là. Il va falloir non seulement que vous en soyez conscients, mais si vous voulez que tout le monde soit heureux, dans trois ans, quand on va se reparler, comme vous disiez, là, il va falloir que tout le monde soit content, pas juste vous, là.

M. Dubois (Laurent) : C'est notre objectif.

M. Lemieux : D'accord, bon.

Mme Aubry (Suzanne) : On va négocier secteur par secteur, avec pragmatisme et réalisme, comme on l'a toujours fait depuis le début de notre grande bataille.

M. Lemieux : C'est ce que je voulais vous entendre dire, Mme Aubry, merci beaucoup.

Je voudrais aussi que vous parliez de ceux dont vous avez dit... «les gros joueurs». On s'est fait, avec le député, qui va vous poser des questions dans quelques minutes... on a parlé, plus tôt, du fait que, par exemple, dans un salon du livre, une séance de signatures ne rapporte pas nécessairement, puis ce qu'on veut éviter, c'est... comment il a dit ça?... une best-sellarisation des salons du livre, parce qu'on veut que tous les auteurs puissent y aller, mais on n'a pas les moyens de payer tout le monde, bon. Je comprends ce bout-là de l'histoire, comme je comprends que, quand ils vont discuter à une radio, Radio-Canada, pour ne pas la nommer, dans un salon du livre, ils sont payés par la radio aussi, bon. Donc, je comprends tous ces bouts-là.

Mais je voulais voir jusqu'à quel point... quand vous parlez des gros joueurs, toujours les mêmes, avez-vous dit... jusqu'à quel point est-ce que c'était devenu invivable et intenable pour certains d'entre vous. Par exemple, j'ai lu, avant d'arriver ici, dans des notes de préparation, les droits à perpétuité, qui sont exigés dans certains cas, et vous, vous avez soulevé, tout à l'heure, une autre... quelque chose qui ressemble à ça, un droit à être obligé de signer pour toujours avec cet éditeur-là, pas nécessairement les droits à perpétuité. Ça, c'est de l'anecdote ou c'est...

Mme Aubry (Suzanne) : Non, ce n'est pas de l'anecdote, monsieur, c'est vraiment... je l'ai vécu personnellement. Je me suis battu continuellement pour faire... pour enlever la clause de préférence, qui était dans mon premier contrat. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le premier contrat d'une écrivaine, d'un écrivain le suit ensuite très longtemps, et c'est extrêmement difficile de faire enlever une clause qui a été... qui est déjà apparue. Et pour un premier roman, on n'a pas beaucoup de marge de manœuvre, évidemment, on n'a pas de pouvoir de négociation. Et le grand avantage qu'on aurait avec des ententes collectives, c'est qu'on aurait la force du syndicat, qui protégerait aussi les primo-romanciers, qui acceptent souvent des conditions inacceptables, parce qu'ils n'ont pas le choix, à cause de cette fameuse négociation de gré à gré.

Je peux vous donner aussi un exemple, celui qu'on a donné, des intertitres, les paiements intertitres. Je l'ai encore dans mes contrats. C'est inacceptable. Quel risque prend l'éditeur quand il peut se repayer d'une œuvre à l'autre, alors que c'est censé être des contrats individuels? Je pose la question. Je n'ai jamais eu de réponse claire de la part de mon éditeur là-dessus, mais je suis... j'ai réussi à réduire la portée de la clause récemment, mais elle est encore là. Ça va même à l'encontre des lois, ça n'a aucun sens de se repayer d'un titre à l'autre. C'est révoltant, et je le vis depuis que j'écris des romans.

M. Lemieux : Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme IsaBelle) : 1 min 30 s.

M. Lemieux : Tant mieux, parce que je ne voulais pas que Mme Gagnon pense que je l'avais oubliée. Ce que j'apprécie de votre... ce n'est pas un témoignage, mais... oui, c'est un témoignage, dans le fond, c'est une consultation... ce que vous nous avez dit, c'est que vous vivez des deux côtés de la barrière. Bien, vos membres et les gens que vous représentez vivent des deux côtés de la barrière. Donc, on ramène deux lois dans une. Est-ce que tout le monde va être content, ou il y a des gens, de l'autre côté de la barrière, qui ne seront pas nécessairement... ils ne seront nécessairement pas aussi satisfaits...

M. Lemieux : ...ils ont moins de gain ou est-ce que, de ce côté-là, il y a des gains aussi?

Mme Gagnon (Marie-Eve) : Bien, c'est sûr que je ne crois pas qu'ils vont être totalement satisfaits. Mais, en même temps, le secteur du théâtre est très structuré. Il y a déjà des ententes collectives pour tous les métiers, donc que l'auteur se rajoute pour la diffusion des œuvres, je ne pense pas que ça va poser, je dirais, financièrement, quelque chose qui pourrait les mettre en péril. Donc, je crois que c'est quelque chose... qu'on est rendu là, comme disait Mme la ministre, puis je pense qu'il faut briser le paradigme. Et puis je pense qu'eux comprennent qu'on est rendus à ce moment-là de dépasser le paradigme.

M. Lemieux : Madame Gagnon, Mme Aubry, M. Dubois, merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous poursuivons avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Donc, si je comprends bien, madame Aubry, quand vous écrivez un scénario de télévision, par exemple, vous avez votre chapeau SARTEC, et là vous êtes... votre contrat est... En fait, votre négociation est protégée par le contrat SARTEC. Si vous écrivez un livre, vous n'avez pas de protection autre que celle que vous vous êtes négociée vous-même.

Mme Aubry (Suzanne) : Exactement. L'avantage, à la SARTEC, comme scénariste, c'est qu'il y a déjà des clauses minimales qui sont négociées, je n'ai pas à les négocier, c'est déjà acquis. Ce que je peux faire, avec un agent ou moi-même : négocier des conventions supérieures, le cas échéant.

Mme St-Pierre : Alors, ce que... nous disait, tout à l'heure, si j'ai bien compris, c'est qu'on parlait d'être représenté ou d'être assisté, là, donc l'obligation d'être représenté automatiquement par quelqu'un qui vient de l'UNEQ, c'est... Vous, vous voulez négocier touts seuls vos contrats à Radio-Canada. Vous n'avez pas besoin de la SARTEC pour négocier votre contrat.

Mme Aubry (Suzanne) : Bien, ce qu'il faut comprendre, là-dedans, c'est que des ententes collectives qui seraient négociées par l'UNEQ, par exemple, déjà, ça poserait un cadre. Après ça, il pourrait y avoir une négociation individuelle pour augmenter, par exemple, certains montants ou améliorer ce qu'il y aurait à la base.

Mais ça, déjà, j'aimerais... C'est une bonne question, parce que j'aimerais répondre à l'ANEL, à sa préoccupation du fait que ça ajouterait une charge à leur travail. Je pense le contraire. Je pense que le fait d'unir les bonnes pratiques contractuelles, de bonnes ententes collectives feraient un bon ménage. Il y a des éditeurs qui ont de mauvaises pratiques. Il y en a beaucoup qui en ont de bonnes. Et donc le fait qu'on se parle et qu'on puisse identifier les bonnes pratiques, et avoir un encadrement simple, et négocier de bonne foi va énormément changer pour le mieux, en fait, l'écologique du système.

Et ça n'empêchera pas une négociation individuelle. On la fait déjà avec nos éditeurs, ça va continuer, ça. Mais il va y avoir des normes minimales qui vont être établies qui vont énormément simplifier les choses. On ne voit pas ça comme une charge, on voit ça comme une simplification.

Mme St-Pierre : L'article qui prévoit le pouvoir réglementaire, c'est votre, comme, police d'assurance, parce que vous n'avez pas de droit de grève, là, les écrivains ne pourront pas décréter la grève puis aller se promener avec des pancartes, là.

Mme Aubry (Suzanne) : On appuie cette clause-là parce que...

Mme St-Pierre : Mais est-ce que vous ajouteriez à la demande? Comme, ce matin, l'UDA nous disait qu'il faudrait ajouter un élément à cette...

M. Dubois (Laurent) : Oui, évidemment, on aimerait faire la proposition que soit ajoutée une mention pour que ce soit à l'initiative des associations d'artistes, que ce pouvoir réglementaire puisse être sollicité.

Mme St-Pierre : Je pense que l'éléphant dans la pièce, ce sont surtout les géants, là, du monde de l'édition. Je pense qu'on est là, comme éléphant dans la pièce, là. Est-ce que vous avez... comment entrevoyez-vous cette relation-là avec géants-là du monde de l'édition?

• (12 h 30) •

M. Dubois (Laurent) : Bien, idéalement, dans un monde parfait, ces géants-là de l'édition seraient membres d'une association représentative et qui négocierait pour eux, également. Maintenant, est-ce qu'ils vont vouloir ça? Ça, je ne le sais pas, et puis ils sont tellement puissants et lourds dans le milieu de l'édition que leur parole, j'imagine, a du poids, y compris chez nos collègues de l'ANEL, et je le comprends tout à fait.

Eh bien, écoutez, nous, on ira... Soit on est capable de les approcher via un interlocuteur commun soit on les approchera en direct. On sait que ce sera difficile, là on sait que ça va être difficile et long, mais on est déterminés parce que je vais vous lire les pires contrats que je peux lire, c'est de chez eux qu'ils viennent. Il n'y a pas de hasard.

Mme St-Pierre : Bien, c'est ce que je pensais que vous disiez tantôt, là...

M. Dubois (Laurent) : Il n'y a pas de hasard.

Mme St-Pierre : ...quand on lisait entre les lignes. Mais moi, ma crainte, puis je suis d'accord pour qu'on ait une loi, là, n'ayez pas de crainte là-dessus, mais ma crainte, c'est de vous voir embarquer dans un processus où vous allez vous retrouver à devoir négocier à la pièce. Et ça peut prendre des années, des années, des années, et je cherche un peu comment on pourrait...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme St-Pierre : ...amener ce processus-là où on aurait la possibilité d'avoir quelque chose de cadre qui pourrait satisfaire vos membres à l'UNEQ. Mais je ne la vois pas, la solution.

M. Dubois (Laurent) : Bien, la reddition de comptes, dont vous avait déjà entendu parler, en serait une, c'est-à-dire qu'à partir du moment où il y a une entente qui est signée dans un secteur et qu'une maison d'édition, qu'elle soit membre ou non d'une association d'éditeurs, reçoit une subvention, elle pourrait avoir l'obligation d'adhérer à la convention collective qui a été signée. Ce serait une solution. Il existe des pratiques négociées sur lesquelles on s'est entendus, vous recevez de l'argent public, vous êtes en devoir de respecter ces ententes qui ont été négociées. Et voilà. C'est possible, par exemple, d'adhérer à une convention. Moi, je ne m'attends pas à ce que tout le monde vienne négocier directement. D'ailleurs, les petites maisons d'édition, elles vont avoir intérêt à se regrouper auprès de mes collègues de l'ANEL ou ailleurs, mais de se regrouper, parce que ça coûte cher, une négociation, c'est long, c'est fatigant, ça prend des experts. On ne veut pas faire ça à la pièce. On veut faire ça collectivement. C'est tout l'enjeu du projet de loi. C'est justement le mot collectif qui est le plus important, mais on n'a pas toutes les cartes en main, malheureusement, pour décider de comment les producteurs vont réagir.

Mme St-Pierre : Est-ce que votre prochaine négociation est rédigée, déjà?

M. Dubois (Laurent) : Pas mal avancée, je vous dirais. Mais je... voilà.

Mme St-Pierre : Je voudrais parler des salons du livre. Les salons du livre ne sont pas organisés par les éditeurs. Le Salon du livre, c'est organisé par les Salons du livre. Comment vous allez vous assurer que les... ceux qui vont dans les salons, ceux et celles qui vont dans les salons du livre puissent... Est-ce que ça serait une avenue? C'est-à-dire si l'éditeur dit : Bien, c'est que ça va être difficile pour moi de payer l'auteur qui va venir faire 1 heure de signature. Est-ce que ça pourrait être le Salon du livre qui rémunère les auteurs?

M. Dubois (Laurent) : Le salon du livre, c'est un diffuseur, dans cet... au sens noble du terme, là.

Mme St-Pierre : Oui, c'est un diffuseur. Est-ce que vous allez négocier avec les diffuseurs?

M. Dubois (Laurent) : Donc, on va négocier avec eux, évidemment, et on avait déjà commencé, d'ailleurs, il faut être complètement transparents. On avait commencé à avoir des conversations avec l'Association québécoise des salons du livre. Il y a des salons qui étaient très ouverts, il y en a d'autres qui étaient plus fermés. Mais voilà, là, on a... on tient contient quelque chose. Mais oui, c'est un diffuseur. Donc, il faut comprendre que le temps où on invite un écrivain en lui disant : Est-ce que tu n'aurais pas une tante ou un oncle qui ne dort pas trop loin? Parce que ça nous arrangerait bien, puis si tu pouvais venir en voiture ou prendre un bus partagé avec quelqu'un, parce qu'on n'a pas trop de sous, puis, tu sais, au nom de la promotion, si tu pouvais bien être présent 8 heures sur le stand pour signer des autographes, ça nous ferait...  Voilà, il a passé quatre jours, il a dormi chez sa tante, on a beau aimer nos tantes, on n'a pas toujours envie de dormir chez elles.

Mme St-Pierre : Oui, mais si les salons du livre avaient des subventions, avec des redditions de comptes, des subventions plus importantes, pourraient défrayer, pas chez ma tante, mais à l'hôtel.

M. Dubois (Laurent) : Vous avez raison, Mme St-Pierre, si je peux me permettre, en fait, ce qui se passe en ce moment, là, puis on l'a illustré, nous, dans la sphère publique, dans les médias, on est sortis plusieurs fois l'année dernière sur des sujets comme ceux-là. En fait, ce qui se passe, c'est comme ce n'est pas réglementé, la ligne budgétaire qui concerne les écrivains, c'est la première ligne qu'on va faire sauter quand on n'a plus de budget. Vous ne pouvez pas faire sauter la ligne des gens qui vont installer les kiosques dans un salon du livre. Ces gens-là, ils sont payés, c'est un sous-traitant, il doit les payer, il y a un tarif, on ne peut pas le faire sauter. Nous, c'est toujours la ligne qui est optionnelle, dans le fond, puis on a eu le cas avec la Fête nationale de Québec, on a eu le cas avec le Salon du livre de Québec. On a eu des exemples. On est allés dans les médias avec ça. Je comprends...

Mme St-Pierre : La fête nationale?

M. Dubois (Laurent) : Oh! oui, mais c'est normal, c'est la seule ligne qu'ils pouvaient faire sauter une fois que leur budget était déficitaire.

Mme Aubry (Suzanne) : Ce qu'on appelle la ligne : Paie ton auteur.

M. Dubois (Laurent) : C'est ça.

Mme St-Pierre : Sur le mécanisme qui était proposé qu'à tous les cinq ans la loi soit soumise à une révision, est-ce que... je pense que ça, c'est quelque chose sur lequel on devrait plancher puis on devoir l'inclure dans la nouvelle mouture, là?

Mme Aubry (Suzanne) : Moi, je pense que oui. Je crois que ça ne serait pas compliqué à faire, ceci. Les lois sont imparfaites, comme nous tous, et donc ce n'est pas de mauvaise chose de pouvoir revenir. Si, en cinq ans, on peut avoir éprouvé la loi, savoir qu'est-ce qui fonctionne, qu'est-ce qui fonctionne moins bien, puis il pourrait y avoir peut-être des améliorations à apporter. Alors, oui, on ne croit pas que ça serait compliqué à ajouter. Enfin, on l'espère. On espère que ce ne soit pas compliqué parce qu'on veut à tout prix que cette loi passe, comme vous le savez, on l'a répété à de nombreuses reprises, je le redis encore, c'est une loi si importante pour nous.

Mme St-Pierre : Dans le cas de ce qu'on appelle en bon français un "ghostwriter", là, quelqu'un qui... en fait, on avoir une vedette qui va publier un livre, mais tout le monde sait que ce n'est pas les vedettes qui l'a écrit, le livre. Est-ce que cette personne-là serait considérée comme une écrivaine ou un écrivain?

Mme Aubry (Suzanne) : Si on ne la connaît pas, ça serait difficile de la...

Mme St-Pierre : Le "ghostwriter" n'est pas considéré comme écrivain, écrivaine. Comment ça va.. Comment ça fonctionne, dans votre tête?

Mme Aubry (Suzanne) : Le problème de ce qu'on appelle le "ghostwriting", c'est qu'on ne connaît pas l'identité de la personne qui... il y a des pratiques dans d'autres pays où il y a... On dit nommément qu'il y a une personne qui écrit un livre que ce n'est pas la personne...

Mme Aubry (Suzanne) : ...une personne qui signe le livre, mais ce n'est pas des pratiques... On voit ça, moi, j'ai vu ça surtout à la télévision. Mais, dans le domaine du livre, c'est quand même plus rare. Mais c'est une des questions qu'on aura se poser quand on négociera.

M. Dubois (Laurent) : Il va falloir regarder de près. Est-ce que cette personne est salariée par la maison d'édition? Que, si elle est salariée, là, elle tombe dans un autre... un autre cadre de protection du personnel de la maison d'édition, soit les pas salariés. Puis, effectivement, on va regarder de près à pouvoir élargir notre champ de compétence pour pouvoir protéger ces gens-là aussi qui, après tout, écrivent et gagnent leur vie de l'écriture.

Mme St-Pierre : Mais la personne qui ne l'a pas écrit mais qui met son visage sur la couverture.

M. Dubois (Laurent) : Mais cette personne-là, elle est protégée par son contrat d'édition, et là, on parle du contrat d'édition. Elle est protégée et à la fois par la Loi sur le statut de l'artiste ici, par la Loi sur le droit d'auteur au fédéral. Elle devient l'écrivain qui signe le contrat d'édition.

Mme St-Pierre : O.K. Elle est considérée comme l'écrivain qui a signé.

M. Dubois (Laurent) : Oui, oui.

Mme St-Pierre : D'accord. Donc, je pense que pour moi, ça fait le tour. Je veux vous féliciter pour votre détermination. J'espère que ça se fera dans l'harmonie parce que je pense qu'il n'y a personne qui un intérêt, dans ce milieu-là, de chiquer de la guenille, là. Il faut que ça se fasse en harmonie. Puis il faut que ça se fasse en ouverture aussi. Alors, vous avez quand même un temps qui est quand même assez, je dirais, rassembleur. Quand même,  vous avez... vous êtes bien déterminés. Vous avez travaillé très fort. Puis, moi, je vous souhaite beaucoup de succès dans cette entreprise gigantesque que vous allez entreprendre parce que, la loi, c'est une chose, mais, après ça, il faut l'appliquer. Merci beaucoup.

Mme Aubry (Suzanne) : Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors nous poursuivons avec la députée de Taschereau.

Mme Dorion : Merci. Bonjour. Merci pour tout, tout, tout ce que vous avez fait depuis des années.

Moi, je veux être auteure depuis que j'ai cinq ans... autrice, maintenant qu'on dit, depuis que j'ai cinq ans. Je me souviens avoir lu, adolescente dans le journal, qu'un auteur gagnait en moyenne 6 000 $, 8 000 $ par année. Ça fait que ça réoriente quelqu'un. Et combien d'auteurs ne seront jamais devenus des auteurs à cause de ça?

Il y a, c'est vrai, moi, je l'ai expérimenté, mais j'entends aussi beaucoup de témoignages de gens qui m'en parlent face aux gros joueurs, et on avait vraiment une différence à faire en général, là, tu sais. Face aux gros joueurs, il y a des enjeux qu'on ne retrouve jamais ou presque jamais auprès des plus petits. C'est quoi les choses qui sont très fréquentes dans les contrats d'édition ou dans les façons de fonctionner des gros joueurs que vous avez vues souvent et qui, pour vous, doivent absolument prendre le bord dès la première négociation?

• (12 h 40) •

M. Dubois (Laurent) : Bien, la première, là, c'est... écoutez, c'est les clauses d'exclusivité, c'est-à-dire que, là, un grand groupe qui rassemble plusieurs maisons d'édition que je ne citerai pas, mais qui représente quand même un gros pourcentage du milieu d'édition, a intégré, dans ses clauses récemment, une clause de premier et de dernier refus. Ça veut dire quoi? Ça veut dire que, si vous écrivez un livre et que vous voulez une adaptation de ce livre au théâtre, au cinéma, traduction, etc., eh bien votre éditeur se réserve un premier refus. Vous devez d'abord lui montrer puis, si jamais ça l'intéresse, il va le faire. Si ça ne l'intéresse pas, il va vous dire : O.K. tu peux aller voir avec quelqu'un d'autre. Là, vous allez voir avec quelqu'un d'autre, puis là vous allez trouver un autre éditeur ou Radio-Canada, dire : Je veux faire une version en livres audio, ça marche, voici, etc. Et bien là, vous avez maintenant un droit de dernier refus. Ça veut dire que vous devez revenir devant ce groupe et présenter votre contrat que vous avez réussi à négocier avec Radio-Canada, et le groupe se dit ça me donne une deuxième chance. Ah! finalement, ça me tente, je vais le faire, ça ne coûtait pas si cher. Donc là, on est dans des pratiques qui sont vraiment complètement abusives, qui sont d'ailleurs abusives au sens de 32.01 aujourd'hui. Le seul problème, c'est que 32.01 n'ayant pas de recours, on doit aller dans les tribunaux de droit commun, et personne n'est capable, pour les quelques milliers de dollars que ça représente, d'aller jusqu'en Cour supérieure.

Mme Aubry (Suzanne) : On doit dire que ces clauses-là sont souvent imposées à des primo-romanciers ou romancières qui, comme j'ai dit en amont, c'est extrêmement difficile après d'enlever une clause pareille. Puis même la clause de préférence... de dernier refus, c'est apparu récemment. Tout ça quand on parlait de l'urgence, là, d'adopter la loi, mais ça fait partie de l'urgence, là, parce que c'est des pratiques qui s'insèrent et puis avec lesquelles on doit se battre avec aucun recours. Donc, c'est vital.

Mme Dorion : Et est ce que, que ce soit pour l'univers entier et pour jusqu'à 50 ans après votre mort, ça fait-u partie de ces choses-là?

M. Dubois (Laurent) : Bien, oui, ça n'a pas d'allure, ça n'a pas d'allure. La cession de droits, ça n'a pas d'allure. Un écrivain qui travaille des années sur son roman, qui cède complètement ses droits à quelqu'un d'autre, ça n'a pas de sens. On doit parler d'une licence d'exploitation, une licence d'utilisation qu'on limite dans le temps, cinq, sept, huit, 10 ans, pourquoi pas. Mais, à partir de là, la possession doit quand même rester à l'artiste qui a créé cette œuvre. Je vais dire c'est par principe, c'est la base. Et là... et donc on voit que finalement l'absence d'encadrement fait que même ce qu'on croyait être acquis parce qu'étant la base, le bon sens comme on dit, est complètement...

Mme Aubry (Suzanne) : ...on parle souvent de redevances, de questions monétaires, mais les droits dérivés sont extrêmement importants. Je vais vous donner l'exemple de Margaret Atwood avec La Servante écarlate. Elle a signé une cession complète quand elle a écrit son roman. Personne n'aurait pu prévoir à l'époque que ça serait un tel succès. Alors, quand ça a été présenté à la télévision, elle a touché zéro sous pour son œuvre, son œuvre. Et je donne cet exemple-là parce que quand j'avais lu là-dessus, ça m'avait totalement scandalisé. Et c'est la même chose avec les sessions de droits ici. C'est ce qui arrive. Si notre œuvre connaît un grand succès, on ne peut pas le prévoir, on va être dissocié du succès de son œuvre et c'est insensé. Ça ne devrait jamais arriver. On parlait de... je pense que c'est Mme St-Pierre qui parlait de...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Je dois vous couper, mais probablement que, connaissant le député de Matane-Matapédia, il va vous laisser la parole.

M. Bérubé : Continuez.

Mme Aubry (Suzanne) : Vous parlez de matière première, de la mine, ce que les écrivains et écrivaines vont chercher, cette matière première là. Et ce n'est pas juste de la matière première, elle est transformée en mots sur le papier qui va devenir des livres qui vont être lus par des lectrices et lecteurs. C'est un énorme travail. J'adore ça. Je le fais par passion. Je l'ai fait depuis depuis plusieurs décennies. Je ne m'en lasse pas. Mais je veux juste que les conditions dans lesquelles on le fait soient décentes. C'est tout ce qu'on demande.

M. Bérubé : Bonjour. Bienvenue à l'Assemblée nationale. La question de la reddition de comptes, évidemment, c'est des fonds publics importants. Je voulais qu'on puisse revenir là-dessus, l'importance de bien surveiller ce qui se passe, de s'assurer que les premiers payés, ça devrait être les artisans au début de la chaîne. Le talent d'abord là. Alors, est-ce que vous voulez ajouter quelque chose sur cette importance, sur les mécanismes de reddition de comptes qu'on devrait se doter dans la loi?

Mme Aubry (Suzanne) : Je veux juste parler d'un premier mécanisme de reddition de comptes, puis après ça, je te... On avait discuté avec l'ANEL pendant des années d'un processus de reddition de comptes, les comptes pour les redevances annuelles, là. Et on est arrivé à un assez bon résultat. Mais quand est venu le moment de l'appliquer, évidemment, ce n'était pas obligatoire parce qu'on n'avait pas d'entente collective, et donc il y avait à peu près 6 % à 7 % des éditeurs qui l'appliquaient. La reddition de comptes, c'est très important parce qu'on a beau avoir un bon contrat, si on ne sait pas combien de livres se sont vendus, si les chiffres ne sont pas pris ici, on se retrouve Gros-Jean comme devant. Alors, la reddition de comptes, c'est une des questions, qu'on avait déjà discutée avec l'ANEL, ça s'était bien passé.

Maintenant, avec une négociation d'entente collective, la reddition de comptes va pouvoir être incorporée à une entente et appliquée à tout le monde. Et je pense que ça va faire l'affaire de l'ANEL aussi. Parce que, s'il y a un mauvais payeur, bien, il va être identifié puis on va pouvoir le retracer plus facilement. Mais il y a un autre concept aussi de reddition de comptes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...

M. Dubois (Laurent) : Bien, je pense, M. le député, que vous faisiez allusion à la reddition de comptes de manière... l'argent public qui est donné à des producteurs.

M. Bérubé : Bien, oui, il y en a beaucoup.

M. Dubois (Laurent) : Il y en a énormément. En fait, c'est ça. Moi, ça ne me paraît pas compliqué. Voilà, il y a quelque chose que je n'ai pas compris. Ça ne me paraît pas compliqué de partir du principe que, quand il y a de l'argent public qui est utilisé pour quelque chose, construire une route, écrire un livre, faire un film, peu importe, si c'est de l'argent public, ça doit respecter la loi. Une entente collective, ça fait, ça fait force de loi, ça fait partie de la loi. À partir du moment que c'est négocié entre les parties, c'est ça qui compte. Ce n'est pas compliqué pour un bailleur de fonds d'exiger que l'argent soit utilisé conformément à la loi en vigueur dans le secteur. Moi, ça me paraît très simple. Je dépose ça ici.

M. Bérubé : Je n'ai rien à ajouter, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est parfait.

M. Bérubé : C'était le mot de la fin, c'était très bien comme ça.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, merci, Mme Gagnon, Mme Aubry et M. Dubois pour votre précieuse contribution à la commission.

Alors, compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci. Merci beaucoup. Bon dîner à tous et à toutes.

(Suspension de la séance à 12 h 46)


 
 

15 h 30 (version non révisée)

(Reprise à 15 h 42)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour, tout le monde. La Commission de l'économie et du travail reprend ses travaux. Je...

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 35, Loi visant à harmoniser et à moderniser les règles relatives au statut professionnel de l'artiste.

Cet après-midi, nous entendrons les personnes et les organismes suivants : la professeure Martine D'Amour; la Guilde canadienne des réalisateurs, Conseil du Québec; conjointement avec l'alliance québécoise des techniciennes, techniciens de l'image et du son, section locale 514 IASTE; l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec; conjointement avec la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma; et l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo; conjointement avec l'Association québécoise de la production médiatique.

Alors, madame D'Amours, si vous êtes prête... Vous m'entendez bien?

Mme D'Amours (Martine) : Oui, je vous entends bien.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, madame D'Amours, avant de commencer votre exposé de 10 minutes, je vous demanderais de bien vous présenter puisque maintenant la parole est à vous.

Mme D'Amours (Martine) : Merci, Mme la Présidente. Alors, je suis Martine D'Amours, je suis professeure au Département des relations industrielles de l'Université Laval. Mes intérêts de recherche et d'enseignement portent sur le travail atypique. Alors, en gros, c'est tout ce qui n'est pas à l'emploi salarié permanent pour un seul employeur, et je m'intéresse, en particulier, aux enjeux relatifs à la protection sociale et à la représentation collective de ces travailleurs et travailleuses. Et c'est ce qui m'a amené à étudier différents régimes dérogatoires au Code du travail comme les décrets de conventions collectives, le régime applicable à l'industrie de la construction et les lois sur le statut de l'artiste.

Alors, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, d'abord, je vous remercie de m'avoir invité à vous adresser la parole dans le cadre de ces consultations particulières. Et, avant de parler directement du projet de loi à l'étude, j'aimerais rappeler que les artistes sont des travailleurs et des travailleuses précaires sur trois des quatre caractéristiques de la précarité en emploi, qui ont été initialement énoncés par Rogers, mais qui font l'objet d'un vaste consensus dans le monde de la recherche. Alors, trois des quatre éléments de la précarité, premièrement, l'insécurité du lien d'emploi, deuxièmement, le peu de protection réglementaire, ça veut dire le peu de protection par les lois du travail et les régimes de protection sociale, et finalement, la faiblesse du revenu. Je vous épargne toutes les données là-dessus qu'il y a dans mon mémoire.

Pour tout de suite vous dire qu'en raison de cette précarité, en raison des caractéristiques particulières de leurs activités, c'est-à-dire la courte durée de leurs engagements, leur mobilité à l'intérieur d'un secteur artistique, le fait qu'ils ont plusieurs prestations, soit cumulées ou soit successives, avec plusieurs donneurs d'ouvrage, les artistes font partie de ces groupes de travailleurs, travailleuses pour qui le législateur a prévu des régimes de relations de travail mieux adaptés à cette activité ou à leurs activités. Autrement dit, ces gens-là avaient du mal à accéder à la négociation collective efficace en vertu du Code du travail. Et moi, je trouve que c'est nécessaire d'avoir de tels régimes, mais à la condition que ces régimes aient les mêmes caractéristiques protectrices que le Code du travail. Pour reprendre les termes de Leah Vosko et autres collègues, il est souhaitable d'avoir une pluralité mais aussi une parité des régimes de rapports collectifs de travail.

Alors, selon moi, mon ex-collègue, le regretté professeur Rodrigue Blouin, tout régime de rapports collectifs de travail doit comporter trois piliers. Premier pilier, un mécanisme d'identification des associations représentatives. Deuxième pilier, un processus de négociation et de règlement des conflits. Et troisième pilier, des voies de résolution des litiges au sujet des conditions de travail.

Alors, c'est à l'aune de ces trois piliers que je vais commenter certains éléments du projet de loi n° 35.

Sur le premier pilier, mécanisme d'identification des associations représentatives, le projet de loi n° 35 apporte assez peu de changements, sinon l'ajout de l'obligation de juste représentation, qui est un copier-coller du Code du travail. D'autres intervenants avant moi ont bien mentionné que le libellé du nouvel article nécessiterait des adaptations. En revanche, ce que le projet de loi n° 35 change au premier pilier, et c'est majeur, c'est l'effet de cette reconnaissance pour les associations regroupant les artistes des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature. Et ça, pour moi, ça constitue le changement, l'apport majeur du projet de loi.

En effet, en fusionnant les deux lois, le projet de loi n° 35...

Mme D'Amours (Martine) : ...fournit aux artistes des arts visuels, des métiers d'art et de la littérature un accès autre que volontaire à la négociation d'ententes collectives. En d'autres termes, la reconnaissance d'associations représentatives aura pour eux et elles le même effet que pour les artistes qui sont actuellement couverts par 32.1, à savoir un cadre permettant un accès réel à la négociation de bonne foi des conditions d'exercice de leur travail. Donc, je me réjouis de ce qu'en présentant ce projet de loi la ministre de la Culture et des Communications ait pris en compte divers éléments, dont le plus important est le fait qu'il n'y avait eu aucune entente collective conclue en vertu de 32.01, et cela, depuis l'adoption de la loi en 1988. Ça fait plus de 30 ans. Bon.

Mais, au-delà de ces éléments contextuels, on peut se demander ce qui, plus fondamentalement, fonde le besoin de négociations collectives pour ces catégories d'artistes. Et la réponse réside dans leur dépendance économique à l'égard d'entités qui sont habituellement la partie forte au contrat. Mises à part les vedettes, à qui leur notoriété assure un traitement particulier, les artistes, donc la vaste majorité des artistes, n'ont guère de pouvoir de négociation individuelle. Les conditions qu'on leur offre sont souvent à prendre ou à laisser dans un contexte où l'artiste a besoin que son œuvre soit diffusée non seulement pour des motifs économiques, mais également parce qu'il en va de sa reconnaissance comme artiste professionnel. Bon.

Alors, doter tous les groupes d'artistes, sans égard à la nature de leur contrat, d'un cadre juridique créant l'obligation de négocier avec diligence et bonne foi des conditions minimales d'exercice de leur activité, pour moi, c'est un immense pas en avant. Et je suis convaincue qu'à l'intérieur de ce cadre, les parties vont aménager leurs relations avec les producteurs. Et le résultat serait certainement différent selon les secteurs de négociation. Donc, on peut d'ores et déjà prévoir qu'il y aura plusieurs ententes collectives pour s'adapter aux particularités de chacun des sous-secteurs de négociation.

Sur le deuxième pilier, un processus de négociation et de règlement des conflits. Là, ici, il faut souligner que même si 32.1, donc la LSA, prévoit que la représentation et la négociation collectives s'exercent sur la base d'un secteur au sein duquel les artistes partagent une communauté d'intérêts, ce ne sont pas tous les artistes d'un secteur qui bénéficient des conditions négociées. Je pense que l'intention initiale du législateur, je n'étais pas là en 1987, mais je pense que l'intention initiale du législateur, c'était de créer un véritable régime de négociation par secteur. Mais il faut bien se rendre à l'évidence qu'il n'y a en ce moment aucune contrainte légale pour un producteur ou une productrice de respecter les conditions de travail minimales des artistes s'il n'est pas membre d'une association de producteurs ayant conclu une entente collective ou s'il n'a pas conclu individuellement une entente collective. Je reprends ici, entre guillemets, les termes du mémoire de l'Association des réalisateurs, réalisatrices du Québec.

• (15 h 50) •

Donc, en l'absence de contraintes légales, la multiplicité des entreprises de production, la courte durée des productions, la malléabilité des formes corporatives, on a parlé de voile corporatif, hein, il y a des gens qui sont très imaginatifs pour créer toutes sortes de structures qui font en sorte qu'ils vont échapper à l'application des ententes collectives, ça fait en sorte qu'effectivement, l'artiste, ses conditions varient selon avec qui il ou elle contracte et, dans certains cas, eh bien, il se retrouve ramené à son pouvoir individuel de négociation dont j'ai dit antérieurement qu'il n'était pas important, sauf pour les vedettes.

Alors, cette situation, elle n'est pas souhaitable, quant à moi, pour des motifs d'équité. Elle n'est pas équitable, d'une part, à l'égard des artistes qui, pour certaines productions, travaillent en deçà des minimas prévus aux ententes collectives. Elle n'est pas équitable à l'égard des producteurs qui ont des pratiques contractuelles respectueuses des droits des artistes, lesquels se trouvent désavantagés face à ceux qui ne développent pas de telles pratiques. Et elle n'est pas équitable à l'égard des associations d'artistes qui sont forcées de multiplier les processus de négociation, alors que la majorité d'entre elles ne disposent pas des ressources humaines et financières pour ce faire.

La question est discutée depuis le rapport L'Allier de 2010, et même avant. Si on refuse d'imposer la reconnaissance obligatoire des associations de producteurs, et il semble que la ministre n'ait pas voulu aller dans le sens d'imposer une reconnaissance obligatoire, alors, si on ne va pas dans ce sens-là, il faut trouver un mécanisme permettant d'assurer que les conditions...

Mme D'Amours (Martine) : ...minimales négociées seront appliquées par toutes les entreprises relevant d'un même secteur.

Alors, on possède au Québec un dispositif juridique unique en Amérique du Nord, qui s'appelle la Loi sur les décrets de conventions collectives. Cette loi donne au ministre le pouvoir, à la demande d'une partie à une convention collective, de recommander au gouvernement d'étendre à un métier, une industrie, un commerce ou à une profession les conditions négociées par certaines associations représentatives et certains employeurs. Avant de recommander une telle extension...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Mme D'Amours, en conclusion. 30 secondes.

Mme D'Amours (Martine) : En conclusion, alors je voulais vous dire que dans les secteurs où est ce qu'il y a déjà des ententes collectives, on devrait prévoir un mécanisme d'extension. Dans les secteurs où il n'y en a pas, c'est là qu'on pourrait appliquer le fameux article 60... Excusez, là, bon. L'article qui permet au ministre de décréter des conditions minimales à la demande d'une association d'artistes. Mais s'il y a des conditions négociées, s'il y a une entente collective, on ne voit pas pourquoi il ne serait pas étendu.

Troisièmement, sur le troisième pilier, je veux dire que le fait d'inclure dans le projet de loi ce qui est prévu au Code du travail concernant l'arbitrage de griefs et l'extension des pouvoirs du Tribunal administratif du travail, c'est certainement un moyen de renforcer le troisième pilier de tout régime de rapport collectif de travail. Je m'excuse pour la longueur.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Pas de souci. Merci. Alors nous allons commencer la période d'échanges. Alors Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Roy : ...bonjour, madame D'Amours. Merci d'être là. Merci d'être avec nous. J'ai lu avec attention votre mémoire et quand vous nous parliez de ces trois piliers, j'ai appris beaucoup, on sent le professeur en vous. On le sent aussi, la chercheuse. Dans vos documents, j'ai même compris que vous avez déjà fait un mandat, minimalement, pour le ministère de la Culture. Donc vous êtes une professionnelle, dirons-nous, du milieu du travail, mais des artistes. Et comme vous le dites d'entrée de jeu, des... travail, mais travail atypique et c'est là qu'on est.

La loi, cette loi que nous déposons, ce projet de loi n° 35, et vous l'avez dit à juste titre, c'est un régime d'exception. C'est une loi d'exception. C'est un régime d'exception pour ces travailleurs qui ne sont pas des salariés. Et toute la complexité de trouver un équilibre là-dedans, c'est le fait que ces travailleurs du milieu culturel, ces artistes ne sont pas des salariés au sens de nos fameuses lois sur les normes du travail. Et nous tentons de faire basculer plusieurs des articles de la loi sur les normes du travail dans cette loi, dans ce projet de loi n° 35, pour aider les artistes.

J'aimerais vous entendre, selon votre expertise, votre expérience sur la fusion des deux lois, parce que vous l'avez... et vous avez vraiment mis le doigt dessus, c'est ce qu'on tente de faire, de faire en sorte qu'il n'y ait plus deux classes d'artistes mais une seule. Et selon vous, cette fusion là, dans quelle mesure sera-t-elle bénéfique pour les artistes de la deuxième loi, hein, ceux de la littérature, des arts visuels et des métiers d'art? Selon vous, quels seront les plus... les gains que ces artistes de la deuxième loi feront avec l'adoption de ces dispositions?

Mme D'Amours (Martine) : Bien. Merci pour la question. Donc effectivement, le projet... la loi 32.01 prévoyait la possibilité de négociation d'ententes collectives, qu'on appelait des ententes générales. Il n'y en a pas eu, alors c'était la négociation volontaire. Ça ne fonctionne pas, pas plus qu'avant l'adoption de la loi sur les relations ouvrières, qui est l'ancêtre du Code du travail. Il y avait des lois qui prévoyaient la négociation volontaire, mais ça a donné des gains à partir du moment où on a rendu la négociation obligatoire, à partir du moment où un certain nombre de conditions sont remplies, à savoir des associations représentatives, l'envoi d'avis de négociation, etc. Donc de créer l'obligation de négocier des conditions d'exercice du travail de bonne foi, avec diligence et bonne foi, c'est pour moi une clé pour mettre en œuvre des dispositifs qui vont permettre d'améliorer les conditions de travail et d'emploi. C'est l'élément clé. Jusqu'ici, il y avait une possibilité, mais elle ne s'est jamais concrétisée.

Mme Roy : Vous avez raison. Puis c'est ce qui a mené à nos travaux, justement, le fait qu'il n'y en a jamais eu. On a vu, à l'usage, au terme de ces 30 quelques années, que personne n'avait été là. Et donc c'est le moyen que nous avons trouvé et je pense... jusqu'à présent, je pense que c'est un moyen qui est apprécié et qui est souligné.

À l'égard... vous avez dit quelque chose d'autre aussi puis...

Mme Roy : ...je ne le vois pas dans votre mémoire précisément. Vous avez parlé du fameux voile corporatif, là, le fait de lever le voile corporatif. Il y a les groupes précédemment entendus ce matin, entre autres, la Guilde des musiciens et l'UDA, qui nous disaient : Bien, écoutez, madame, peut-être pourrions nous faire un calque de l'article 154 de la fameuse Loi sur les sociétés par actions pour rendre responsables les administrateurs des sociétés, tout le fameux dossier des coquilles, des fameuses coquilles. Les administrateurs se partent des coquilles, et disparaissent, et ne paient pas, ils repartent sous un autre nom. Donc, des groupes nous ont demandé d'ajouter au projet de loi un amendement qui pourrait être un calque de l'article 154 de la Loi sur les sociétés par actions. Vous en pensez quoi?

Mme D'Amours (Martine) : Écoutez, je n'ai pas étudié cette loi-là en détail, alors j'aurais du mal à me prononcer, mais il me semble que le principe est intéressant, d'étudier la possibilité de dire : Bien, si vous... En fait, c'est de bloquer la possibilité d'échappatoire à la loi, hein? Il y a une norme et puis il y a des gens qui jouent avec la norme, qui trouvent toutes sortes de moyens de contourner la norme. Alors, il faut essayer de bloquer les échappatoires possibles. Une échappatoire, c'est de créer une structure qui va disparaître aussitôt la production terminée. Alors, ça nuit non seulement à régler des... je dirais, des problèmes de sommes dues qui ne sont pas versées aux artistes, mais également pour l'application de l'ensemble... d'un ensemble de clauses des ententes collectives.

Donc, en principe, il y a toutes sortes de débats, là, plus largement sur : est-ce qu'il faut, autrement dit, que les principes du droit du travail soient pris en compte par le droit commercial? Et moi, je dis oui, là, non seulement dans ces questions-là, mais sur les questions de sous-traitance. Et la Loi sur les décrets de convention collective, elle permet ça. Et je vous dirais même... la Loi sur les normes du travail permet... pas exactement ça, mais qui dit : Bon, bien, il faut que le... en cas de sous-traitance, il faut que le donneur d'ordre principal soit tenu responsable. Donc, le principe de responsabilité doit être étendu. Mais je ne suis pas juriste et je ne connais pas suffisamment la loi pour me prononcer, mais je peux vous dire je suis d'accord avec le principe.

• (16 heures) •

Mme Roy : Parfait, merci. J'ai beaucoup appris à l'égard de vos trois piliers. J'ignorais que c'était la façon dont... On parlait d'«un mécanisme d'identification des associations représentatives, un processus de négociation et de règlement des conflits et des voies de résolution des litiges au sujet des conditions de travail».

J'aimerais vous apporter au troisième pilier, les voies de résolution des litiges au sujet des conditions de travail. On en parle, entre autres, pour le bénéfice des collègues, à la page 10 de votre mémoire, le troisième pilier, voies de résolution. On a tenté d'amener le plus possible d'articles de la Loi sur les normes du travail, donc articles de loi qui sont pour des salariés, et de les adapter, de les transposer, de les faire migrer dans le projet de loi 35. Entre autres, et j'aimerais que vous nous en parlez, parce que vous élaborez un peu plus, en ce qui a trait à l'arbitrage de griefs. Si on parle des dispositions des articles 100 à 109 du Code du travail, qui sont maintenant réputées faire partie des ententes collectives et constituer en tout ou en partie la procédure d'arbitrage de griefs. Selon vous, dans quelle mesure c'est une bonne chose et pourquoi? Si vous pouviez un petit peu élaborer à cet égard-là.

Mme D'Amours (Martine) : Au fond, le troisième pilier, là, juste pour expliquer un peu, c'est ce qui... ce sont les outils qu'on donne aux parties pour appliquer ce qu'ils ont négocié. Parce qu'on a beau avoir négocié quelque chose, ça, c'est beau, c'est le deuxième pilier, on ne s'entend pas nécessairement sur la façon d'interpréter ce qu'on a négocié. Et c'est là qu'intervient l'outil de l'arbitrage de griefs. Jusqu'ici, il fallait que les parties la négocient à l'intérieur d'une entente collective. Maintenant... Alors, maintenant, on dit : Ces articles du Code du travail, ils sont réputés... donc sur les pouvoirs de l'arbitre, sur les matières sur lesquels il peut se prononcer, ça va faire partie de chacune des ententes collectives. Donc, on n'a pas à le négocier parce que, jusqu'ici, ça donnait, je dirais, des résultats inégaux. Alors, jusqu'ici, on a dit : Bien, on va... L'outil qui est fort, là, qui a été expérimenté dans le cadre du travail, soit les pouvoirs de l'arbitre de griefs, comment il peut se prononcer, sur quoi il peut se prononcer, etc., on va l'inclure dans toute entente collective. Et vous avez fait la même chose à l'égard de la Loi sur les normes du travail en disant : Les clauses sur le harcèlement...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme D'Amours (Martine) : ...psychogique qui inclut le harcèlement sexuel. On les prend et on présume qu'ils vont faire... en fait, ils vont être considérés comme faisant partie d'emblée de toute entente collective, comme les articles équivalents du code font d'emblée partie de toute convention collective. Alors, bravo pour ça aussi, en passant.

Mme Roy : Est-ce qu'en en travaillant de la sorte, en faisant ces transferts de bonnes portions d'articles de la loi sur les normes vers le p.l. no 35 et donc pour donner des outils supplémentaires aux artistes et naturellement aux associations, est-ce que, selon vous, ça va alléger peut-être le processus de la négociation d'ententes et fournir une protection supérieure pour les artistes ?

Mme D'Amours (Martine) : Bien, ça dépend de quels artistes... de quels articles de la Loi sur les normes du travail vous parlez.

Mme Roy : À l'égard, par exemple, de ceux pour l'arbitrage de griefs. Parce que je pense que ce que vous avez mis le doigt sur quelque chose d'important. Ça devait être négocié dans chaque entente individuelle. Là, ça ne sera plus le cas. Ça va... D'emblée, ça en fera partie. Alors, je... 

Mme D'Amours (Martine) : D'emblée ça en fera partie, ce qui n'empêche pas les parties de négocier au-dessus de ça. Mais ça demeure la base, ça demeure la base. Alors, on va dire, dans le cas de mésentente, etc., c'est un recours possible, et il est présumé faire partie de toute entente collective. Alors, ça va, je pense, faciliter le règlement des mésententes qui surviennent en cas d'entente collective. Et, je dirais, c'est même... Étant donné que, pendant la plainte collective, on ne peut pas exercer de moyens de pression, hein ? La durée de l'entente collective, c'est une période de paix industrielle. Mais même en période de paix, si on ne s'entend pas, il faut trouver un moyen de résoudre les mésententes. Alors, c'est un moyen qui est codifié dans la loi et qui deviendrait partie prenante. Donc, je pense que c'est facilitant et même pour les deux parties, pour les deux parties.

Et c'est la même chose pour les clauses qui concernent la précision apportée aux pouvoirs du tribunal du travail, du Tribunal administratif du travail, oui, du TAT. Effectivement, jusqu'ici, sa compétence était relativement limitée. Puis là elle va être étendue à toute une série d'éléments, là, qui sont mentionnés. Je ne veux pas nécessairement tous les redire, mais négociation de mauvaise foi, déclenchement de l'action concertée, reconnaissance, etc. Bon. Alors, ça aussi, pour moi, ça fait partie de... d'un arsenal, là, beaucoup plus solide pour permettre aux parties de résoudre les litiges qui peuvent survenir en cours d'entente collective.

Mme Roy : J'aime beaucoup vous entendre parce que c'est ce qu'on a tenté de faire, d'avoir un projet de loi équilibré qui colmatait des brèches qu'on a vues avec l'usage, avec le temps, mais aussi y apporter des articles, quand vous dites, facilitants pour les deux parties. Et ça, c'est important pour nous, de garder une harmonie, autant pour les artistes que pour ceux qui les emploieront. Donc, le fait qu'il y ait des articles qui plaisent aux deux, c'est... On a beaucoup tenté de trouver des... des chemins d'entente, des chemins pour arriver avec ces nouvelles dispositions. Donc, vous nous dites, un arsenal plus solide. Je suis... je suis... Je le prends en note. J'aime les termes que vous employez. Mme D'Amours, moi, je vous remercie pour votre collaboration. Je vous remercie pour le mémoire. Je sais entre autres que vous êtes une invitée qui a été chaudement recommandée par nos collègues de la deuxième opposition. Alors, moi, je vais céder mon temps de parole. Il y reste peut-être mon collègue de Saint-Jean qui...

Une voix : Joëlle.

Mme Roy : Joëlle ? Ah ! Pardon. Excusez-moi.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah ! Pardon ? Le député de... Parfait. Pas de problème.

Mme Roy : La députée de Jean-Talon. La députée de Jean-Talon, qui aimerait vous poser une question.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ah ! La parole... Députée de Jean-Talon, il vous reste 4 min 20 s

Mme Boutin : Mme D'Amours, merci pour votre mémoire. C'est vraiment très, très intéressant. J'en apprends beaucoup. Puis mon... Nous, on siège sur cette commission-ci. Donc, ce n'est pas le premier projet de loi qui touche justement la sécurité ou les normes du travail de certaines catégories dans la société. Donc, on aime ça toucher un secteur qui est aussi névralgique et, je dirais, émotif au Québec quand même, les artistes. À la page 11 de votre mémoire, vous parlez, bon, que oui, là, le p.l. no 35, là, est susceptible de réduire la précarité socioéconomique des artistes. Puis je pense qu'on répons aussi aux recommandations, là, du rapport de l'UNESCO de 1980, justement, en ce sens-là. J'ai deux petites questions. Je vais vous les dire d'emblée. Premièrement, est-ce que, par rapport à ce qui se fait ailleurs, notamment en France, comment est-ce que vous pourriez comparer, justement, le projet de loi no 35...

Mme Boutin : ...les conditions en France, est-ce qu'il y a une amélioration?

Mme D'Amours (Martine) : Est-ce que vous parlez du régime des intermittents du spectacle?

Mme Boutin : Oui, j'ai lu un peu. Puis je me demandais, justement, est-ce qu'on se démarque au Québec avec ce projet de loi là.

Mme D'Amours (Martine) : Bien, c'est parce que ça ne porte pas sur les mêmes objets. Le régime des intermittents du spectacle, c'est un régime d'assurance chômage, si on veut, adapté aux artistes et, d'ailleurs, aux ouvriers ou aux techniciens. Ce n'est pas seulement les artistes, c'est aussi tous les travailleurs qui sont de près ou de loin associés à la production des œuvres parce qu'ils vivent les mêmes problématiques que les artistes.

Mme Boutin : Bien, d'ailleurs, dans votre mémoire, vous faites un petit peu de recommandations... mais ce n'était pas vraiment ma question, là, au niveau du régime, là, allemand d'assurance sociale, puis de protection sociale, vous faisiez la recommandation d'aller plus vers cette direction-là. Mais moi, ma question, c'est par rapport à l'enjeu de la santé, la sécurité du travail. Vous dites... Moi, ma question, puis je ne suis pas intervenu beaucoup, mais je sais que la plupart des artistes au Québec oeuvrent à titre de travailleur autonome. Puis, bon, bien, pour avoir accès, justement, au régime la CNESST, les gens doivent faire une demande de protection personnelle ou individuelle, mais c'est personnel. Est-ce que vous savez s'il y a des artistes qui vont faire une demande comme ça? Est-ce que vous croyez que le projet de loi, là, 35 est suffisant en ce sens là? Avez-vous des recommandations?

Mme D'Amours (Martine) : C'est très particulier la question de la santé et sécurité du travail, hein. Certains groupes d'artistes, ceux qui correspondent à 32.1, là, certains groupes d'artistes de la scène ont bénéficié d'une couverture SST pour des activités prévues dans le cadre de leur contrat d'engagement. Cependant, pour tous les autres, et toutes les autres situations, ils doivent adhérer individuellement. Autrement dit, l'ensemble des travailleurs québécois... pour l'ensemble des salariés québécois, c'est l'employeur qui paye la cotisation CSST. Et on voudrait nous dire que, ah, bien, si tu ne tombes pas... d'abord, si tu n'es pas salarié, puis si tu ne fais pas partie des catégories d'artistes de la scène qui bénéficient d'une couverture SST dans le cadre de ton contrat d'engagement, par exemple, si tu es comédien, danseur, bon, puis tu te blesses pendant une prestation, tu vas être couvert. Et si tu ne fais pas partie de ces catégories, tu devras cotiser individuellement. Alors, on dit la même chose d'ailleurs aux travailleuses domestiques. Je pense qu'il y a un nombre minime de travailleurs, travailleuses au Québec qui paye elle-même ou lui-même la cotisation, parce que c'est des coûts prohibitifs pour des gens qui sont précaires et qui gagnent des faibles revenus. Donc, ça, pour moi, c'est un vœu pieux, c'est complètement inadéquat. Par ailleurs, la question de la SST, c'est quelque chose de très particulier. Moi, j'hésiterai à dire : Il faut l'intégrer dans la loi à ce moment-ci parce que ça mériterait une étude en profondeur, et de comment on peut prévenir les blessures au travail et comment on peut indemniser les personnes lorsqu'elles sont blessées. C'est ce que je peux vous dire.

La Présidente (Mme IsaBelle) : En 20 secondes... À moins que ça soit terminé déjà.

Mme Boutin : Merci beaucoup, Mme D'Amours. C'est vraiment très, très intéressant.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, nous poursuivons la période d'échange, cette fois-ci avec la députée de l'Acadie.

• (16 h 10) •

Mme St-Pierre : Merci. Merci pour votre présence. C'est effectivement très intéressant. Moi, je regarde votre quatrième principe, là, en page 13, puis vous dites, vous parlez de la multiactivité et des avantages sociaux qui peuvent être payés pour quelqu'un qui pourrait, par exemple, être un concepteur, puis écrire, puis jouer. Donc, on ferait affaire avec trois, peut-être trois conventions collectives différentes. Et on l'avait vu avec AQTIS puis IATSE, à ce moment-là, dans le domaine du cinéma, qu'il y avait... des avantages sociaux ont été fusionnés. Je me souviens plus si on l'avait fait dans la loi ou dans le cadre d'une entente à part, là, on pourrait avoir des gens pour nous éclairer là-dessus, mais ça s'est fait. Là, ça veut dire que quelqu'un qui serait en multiactivité ne serait pas protégé totalement pour l'ensemble de son activité. Est-ce que c'est exact ce que je vous dis là?

Mme D'Amours (Martine) : C'est à dire qu'actuellement, si vous êtes couvert par une entente collective, vous avez droit à des protections. Mais les protections... le niveau de la protection dépend du niveau de revenu que vous avez fait dans cette activité. Alors, si vous avez des activités dans plusieurs champs artistiques, vous allez avoir le minimum. Autrement dit, vous allez avoir cumulé le niveau... le niveau de protection va correspondre au niveau de revenu que vous avez cumulé...

Mme D'Amours (Martine) : ...pour vous donner l'exemple que je trouve inspirant, dans l'industrie de la construction, peu importe que le travailleur de la construction travaille dans le résidentiel, le commercial, l'industriel, sur chaque paie, la cotisation de l'employeur, de l'entrepreneur est prélevée, celle du travailleur est prélevée, ça va tout dans le même fonds, et c'est vrai pour les assurances collectives et c'est vrai pour la retraite, si bien qu'il n'y a pas ce fractionnement selon le type d'activités que vous faites. Et, bien sûr, si on cumule les cotisations à l'échelle du secteur, bien, au bout du compte, hein, si on additionne ça dans un même régime, les bénéfices vont être encore plus grands. Parce que les bénéfices d'un régime de protection sociale, c'est lié à deux caractéristiques, hein, votre niveau de revenu puis la quantité d'activités que vous faites, hein, votre présence sur le marché du travail. Alors, si vous êtes présents la majorité du temps, vous devriez bénéficier des retombées ou des bénéfices qui sont liés à l'ensemble de votre activité et non pas l'avoir fractionnée entre différents régimes. Puis ça, c'est ma conviction.

Mme St-Pierre : J'ouvre peut-être un trop grand chapitre, mais est-ce que c'est quelque chose que l'on devrait prévoir dans la loi, ou si c'est possible, ou si ça veut dire qu'on, vraiment, on ouvrirait quelque chose... prendrait des mois et des mois, ou si on peut suggérer d'en faire, je ne sais pas, un règlement ou... autrement dit, est-ce qu'il y a une voie pour que nous puissions régler cette situation-là?

Mme D'Amours (Martine) : Moi, je ne suggère pas que vous l'intégriez dans la loi, tout simplement parce qu'il n'y a pas eu de discussions avec les partenaires sociaux sur cette question-là. Ça serait la première étape.

Je pense que le chantier de la protection sociale, comme tel, à la fois les programmes de protection que j'appelle privés, c'est-à-dire ceux qui se négocient à l'intérieur des ententes collectives où on prévoit une contribution du travailleur... pardon, et une contribution du donneur d'ordre, et à la fois les programmes publics doivent être repensés, hein, doivent être ou doivent faire l'objet d'un chantier. C'est pour ça que j'avais mis ça dans mon mémoire à la fin, en disant : Bon, bien, c'est un pas en avant le projet de loi, je souhaite son adoption d'ici la fin de la présente législature, mais ça ne fait pas le tour, hein? Ce n'est pas un projet de loi, une loi qui va régler l'ensemble de la problématique de la précarité des artistes, et le dossier de la santé et sécurité, et le dossier général de la protection sociale, dont les programmes publics.

Je me faisais... je me permettais de souhaiter que ça fasse l'objet de projets chantiers gouvernementaux et pas dans 30 ans, là. Parce que dites-vous bien qu'un artiste même, ou un travailleur autonome, en général, même s'il performe très bien, qu'il gagne un bon revenu, il suffit qu'il tombe malade, hein, qui... et actuellement il n'y a pas de protection, alors il peut basculer dans la pauvreté la plus abjecte du jour au lendemain, par défaut de filet suffisant de protection sociale.

Mme St-Pierre : Oui. Alors donc, je comprends qu'il faudrait qu'on se penche là-dessus éventuellement. Ça serait comme un complément puis on viendrait encore donner plus de protection. Mais je me demandais si ça pouvait se faire par une voie réglementaire, c'est-à-dire pas nécessairement le faire, là, dans la loi, mais laisser le champ libre pour une voie réglementaire, mais on en reparlera. Je voudrais vous poser une question sur... J'ai deux autres questions. Entre autres, vous avez parlé d'un mécanisme d'extension, vous avez dit... je ne vous ai peut-être pas bien compris, mais vous avez dit : S'il y a des conventions existantes, il faudrait que ce soit un mécanisme d'extension et qu'il n'y ait pas de négociation nécessairement. Je ne sais pas si je vous ai bien suivi, et... Mais il y a quelqu'un ce matin qui est venu nous dire qu'il y a une convention collective qui est là depuis 20 ans, puis elle devrait être revue, puis le vis-à-vis est complètement barré, puis il ne veut pas. Alors là, avec cette loi-là qu'on va adopter, bien, s'il continue à barrer, là, c'est le règlement qui va entrer puis qui va forcer une renégociation. Qu'est-ce que vous voulez dire par mesure d'extension?

Mme D'Amours (Martine) : O.K. Bien, je dirais qu'il y a trois cas de figure. Premier cas de figure, il y a des ententes collectives dans un secteur, mais il y a toutes sortes de subterfuges qui sont utilisés pour faire en sorte de ne pas l'appliquer. Alors, il y a certains producteurs par... je vous donne un exemple, il va démarrer une entreprise pour une production, il va la fermer ensuite. Alors, on n'a même pas le temps, l'association d'artistes n'a même pas le temps de négocier et d'avoir le rapport... bon. Donc, s'il y a des ententes collectives dans des secteurs, mais que, dans les faits, elles ne s'appliquent pas, un mécanisme d'extension juridique permettrait au gouvernement de dire...

Mme D'Amours (Martine) : ...on va l'étendre à tout le secteur. Quant à moi, c'est un incitatif aux parties à négocier parce que tu dis : Bien, si je ne négocie pas, il va y avoir quelque chose d'autre que peut-être je n'aimerai pas. Alors, ça, c'est une première chose. Deuxième cas de figure, des secteurs où il n'y a pas d'entente collective. Là, je pense qu'à la demande d'une association d'artistes, oui, le ministre, la ministre ou enfin le gouvernement pourrait établir un minimum. Et ce que vous me disiez, c'est le cas de secteurs... Là, je ne sais pas auxquels cas au juste vous faites allusion.

Mme St-Pierre : où les négociations... où il n'y a jamais... où il n'y a plus... il n'y a pas de négociation depuis plusieurs années alors qu'il y a quand même une demande de la partie qui veut négocier vers le vis-à-vis, puis le vis-à-vis, c'est barré depuis 20 ans. C'est ça que je voulais savoir, quand vous parlez de mécanisme d'extension, si vous vouliez dire... On devrait dire : Bien, cette convention-là, elle va se poursuivre, mais ce n'est pas ça que vous vouliez dire.

Mme D'Amours (Martine) : Bien, ce n'est pas ce que je voulais dire, puis ce cas-là, je ne le connais pas, j'aurais du mal à me prononcer dessus... là-dessus.

Mme St-Pierre : C'est dans le cas d'une maison de production qui ouvrirait ses portes pour une production, ferme ses portes, s'en va sur une autre production puis qu'il n'y a pas de lien entre les deux.

Mme D'Amours (Martine) : Bien, en fait, c'est dans tous les cas où les associations n'arrivent pas à négocier avec des producteurs dans des secteurs. Parce que, bon, ils réussissent avec certains à négocier, entre autres, avec l'ADISQ, l'AQPM, mais il y en a d'autres qui ne sont pas membres de ces associations et qui trouvent toutes sortes de moyens d'échapper à la négociation collective. Alors, je dis : Bon, bien, si on ne veut pas rendre obligatoire leur adhésion à une association de producteurs... Ça pourrait être le cas, hein, dans la construction, tous les entrepreneurs sont obligés d'être membres de l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, alors ils sont obligés d'être membres et c'est l'association qui négocie en leur nom le tronc commun des conventions collectives. Puis il y a aussi des associations d'employeurs sectorielles, mais il y a une obligation d'appartenance. Alors, autrement dit, ce qui est négocié dans la construction, ça va automatiquement être appliqué par l'ensemble.

Mme St-Pierre : Je pense que dans un monde idéal, c'est ça qui devrait arriver, là, que le vis-à-vis... En tout cas, dans le domaine du livre.

J'ai une question sur le tribunal... Je n'ai pas... Je ne connais pas beaucoup le volume d'activité du tribunal, mais je présume que c'est un gros volume d'activité. Est-ce que les gens qui siègent au tribunal sont des gens qui vont être équipés, à court terme, pour prendre des dossiers qui vont leur être soumis? Est-ce qu'ils ont l'expertise pour ça? Est-ce que ça prend une expertise particulière pour être capable de gérer une cause qui viendrait devant le tribunal? Parce que peut-être que ça devrait être tribunal spécialisé sur la question des artistes, mais...

Mme D'Amours (Martine) : Mais il y en a déjà, hein? Au départ, là, dans la loi, il y avait la commission de reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs, puis on a, ensuite, transféré... On a aboli cette commission. Donc, ça, c'était un tribunal spécialisé sur les questions des artistes. Alors là, je pense qu'eux on a plutôt trouvé qu'ils manquaient peut-être d'expertise en relations du travail, au contraire, et puis on a confié le mandat à la Commission des relations de travail, qui est aujourd'hui le Tribunal administratif du travail. Je pense que votre question, elle aurait peut-être pu se poser au moment de ce transfert, hein, alors que la Commission des relations du travail n'était pas familière. Mais maintenant, ça fait quand même un certain nombre d'années qu'ils ont cette responsabilité alors je ne serais pas trop inquiète. Est-ce qu'ils ont les ressources? Ça, je pense peut-être qu'il faut leur fournir davantage de ressources pour le faire, je ne suis pas au courant.

Mme St-Pierre : en tout respect, ça va être nouveau pour eux, là, parce que les causes, elles n'allaient pas là, les causes s'en allaient sur les tribunaux réguliers.

• (16 h 20) •

Mme D'Amours (Martine) : Bien, les causes allaient là pour certains éléments, sur toutes les demandes de reconnaissance, et tout ça, donc ils en ont étudié. Moi, j'ai vu de la jurisprudence du Tribunal administratif du travail, sauf qu'ils étaient restreints à certains objets, ils ne pouvaient pas se prononcer sur, par exemple, négociation de mauvaise foi, des choses comme ça, mais ils ont... ils connaissent quand même la problématique des artistes, beaucoup plus qu'au moment où ils ont eu ce mandat.

Mme St-Pierre : ...Netflix, qui produit aussi... est-ce que Netflix échapperait à cette loi-là?

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...secondes.

Mme D'Amours (Martine) : Netflix, ce n'est pas un producteur du Québec, hein?

Mme St-Pierre : Mais il produit, il pourrait acheter des... il pourrait faire de la production pour le Québec.

Mme D'Amours (Martine) : Écoutez, en principe, là, si on avait un vrai régime de... collectif de travail, il s'appliquerait à tout producteur qui exerce... qui fait sa production sur le territoire du Québec. Cependant, je...

Mme D'Amours (Martine) : ...je ne suis pas assez, comment dire, connaissante en droit international et en droit comparé pour vous dire s'il y aurait des compétences partagées, et tout ça. Moi, ce que je note, c'est qu'il me semble que l'intention originale du législateur, c'était un vrai régime sectoriel qui couvre l'ensemble. Et là on s'aperçoit qu'il y a trop d'échappatoires, il y a trop de situations où des artistes ne sont pas couverts par des ententes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Merci, Mme D'Amours. Nous poursuivons, cette fois-ci, avec la députée de Taschereau. Elle ne dispose que de deux minutes 55 secondes, alors il faut être bref dans nos réponses.

Mme Dorion : Merci beaucoup. Merci, Mme D'Amours. Très intéressant, donc, on en retient que là une loi sur le statut de l'artiste, une réforme, mais qu'un jour il va falloir des programmes, et on va les attendre avec beaucoup d'espoir.

Donc, on voit, dans la loi, que ce qui est demandé, c'est que ce qui pourrait avancer, c'est que, bon, là où il n'y a pas de convention collective, là où il n'existe pas de règlement, bien, le ministre ou la ministre pourra déterminer par règlement des conditions.

Et beaucoup d'associations d'artistes sont venues, ils ont dit : Oui, mais c'est important de savoir quel sera le processus, qui peut faire cette demande-là à la ministre. Est-ce que la ministre est obligée de répondre si c'est une organisation d'artistes reconnue qui fait la demande? Bon, c'est des questions importantes, et comme on va avoir en discuter, puis ça ne sera peut-être pas si compliqué à régler, mais on... j'aimerais avoir votre point de vue là-dessus. Comment ça devrait fonctionner? Est-ce que c'est juste des associations d'artistes qui devraient pouvoir faire cette demande-là? Et est-ce que la ministre devrait obligatoirement arriver à mettre les parties ensemble pour les faire s'entendre? Comment ça pourrait fonctionner? Voilà, question large sur le processus.

Mme D'Amours (Martine) : C'est... Tu sais, le diable est dans les détails, là. Alors, j'aurais pu vous dire comme chercheur en relations de travail : Oui, oui, il aurait suffi qu'une des parties demande... Mais j'ai entendu, ce matin, le témoignage des représentants et représentantes de l'UDA et qui disait : Ah! bien, oui, si c'était c'est un producteur qui le demanderait, il pourrait complètement contourner l'esprit de la loi, en se disant on va se contenter de conditions minimales, on ne va pas négocier.

Alors, ce n'est pas ça l'esprit de la loi. L'Esprit de la loi, c'est de dire : On veut favoriser au maximum la conclusion d'ententes collectives. Là où elles sont conclues, on veut qu'elles s'appliquent à tout le monde, hein, à tous les producteurs, à tous les artistes­. Et, bien là, si pour x raisons, après négociations, etc. ou parce que les parties à la relation d'emploi ne sont pas assez constituées en association - tu sais, il y a des domaines plus émergents - alors, à ce moment-là, qu'il y ait, à la demande d'une association d'artistes, une intervention du législateur, je serais favorable. Mais je pense que le premier temps, c'est toujours de favoriser la négociation collective et de mettre à la disposition des parties des outils pour les aider en ce sens, donc l'arbitrage, la première convention, ça fait partie de ça.

Mme Dorion : O.K. Mais quand il y a trop de producteurs différents, par exemple, quand on parlait de conférences ou de colloques, tu sais, on ne peut pas faire des négociations à la pièce avec chaque employeur parce qu'ils sont trop petits et trop nombreux. C'est une occasion ou ça pourrait être une bonne idée qu'il y ait un règlement de la part de la ministre. Mais c'est ça, on se demandait quel processus, quelle forme ça pourrait prendre, s'il y aurait des obligations. Mais là je pense que... À moins que M. le député de Matane-Matapédia...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Je vais vous laisser une minute additionnelle, Mme Daoust, pour répondre... Mme D'Amours - pardon - pour répondre à la question.

Mme D'Amours (Martine) : Bien, ça ne serait pas très long parce que j'ai du mal à vous répondre. J'ai du mal à imaginer quelle serait la procédure exacte, mais qu'à la demande d'une association d'artistes il y ait consultation de la ministre ou du ministre auprès des associations d'artistes et de producteurs pour déterminer des normes minimales, que ce soit donc liant, hein, que ce ne soit pas seulement un vœu pieux. Et là-dessus, bien, le libellé de l'article était peut-être un peu mou. J'essaie de retrouver le libellé. Le gouvernement peut par règlement, après consultation, etc.

Donc, il n'y a pas de déclencheur, autrement dit, pour le moment, il n'y a pas de critère qui dit : Bien, qu'est-ce qui fait qu'à partir du moment où tel et tel critère sont présents qu'il y a, comme, quelque chose qui s'enclenche pour les déterminer, hein, pour faire des consultations, pour faire des études, déterminer, bon, ça serait quoi ces normes-là.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Merci, Mme D'Amours pour votre contribution aux travaux de la commission.

Alors, nous allons suspendre quelques instants. Merci. 

(Suspension de la séance à 16 h 27)

(Reprise à 16 h 29)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, pour le prochain grand bloc ou groupe, si vous voulez, on reçoit deux groupes, la Guilde canadienne des réalisateurs, Conseil du Québec, et l'Alliance québécoise des techniciens et des techniciennes de l'image et du son, section locale 514 IATSE. Alors, nous commençons d'abord par Mme Barrette. Avant de commencer votre exposé de cinq minutes, je vous inviterais à bien vous présenter.

Mme Barrette (Chantal) : Oui, bonjour. Je me présente Chantal Barrette, agente d'affaires pour le Conseil du Québec. Je suis accompagnée de notre avocate, Me Lisane Bertrand.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Alors, vous pouvez commencer votre exposé.

• (16 h 30) •

Mme Barrette (Chantal) : Donc, bonjour, Mme la ministre, Mme Roy, Mme la Présidente et membres de la Commission de l'économie et du travail, merci de nous recevoir aujourd'hui. La Guilde est un syndicat pancanadien de 6 600 membres. Le Conseil du Québec compte quant à lui plus de 800 membres oeuvrant au niveau créatif et de production et logistique, tant en production, cinéma, télévision et nouveaux médias. Nous négocions des ententes collectives avec l'AQPM, avec l'Association des producteurs publicitaires, et des ententes collectives promulguées avec les producteurs américains.

Tout d'abord, parlons des éléments présentés dans le projet de loi n° 35 pour lesquels nous avons des préoccupations. Premièrement, l'article 24.2 sur le devoir de représentation. Nous sommes tout à fait d'accord avec la proposition de l'UDA de ce matin pour les raisons qu'ils ont invoquées. C'est pourquoi le devoir de représentation devrait, selon nous, concerner les artistes qui sont visés par une entente collective. L'article suivant, sur lequel nous désirons attirer votre attention, est l'article 68.6. Pour ce qui est de la Guilde, notre réalité est un peu différente des autres associations qui couvrent des secteurs autres que l'audiovisuel. C'est pourquoi nous ne croyons pas que nous en ayons besoin, d'un tel article, mais nous comprenons que d'autres associations pourraient en avoir besoin. Toutefois, étant donné que cet article serait dans la loi, la proposition, dans son état actuel, nous préoccupe, et nous croyons que celle-ci devrait prévoir des éléments suivants. Tout d'abord, que ce soit sur demande d'une association d'artistes seulement, qu'il y ait une procédure de grief intégrée, que le règlement ait une durée limitée dans le temps, et notre recommandation est de deux ans, et que pendant l'application de la loi, les parties doivent... peuvent négocier une entente collective et faire en sorte que le règlement cesse de s'appliquer si une entente collective est conclue.

Maintenant, permettez-nous de vous parler de ce qui n'est pas dans le projet de loi n° 35 et qui nous préoccupe. En 2009, fin de régler un conflit syndical entre l'artiste et IATSE, le gouvernement a fait les deux principales modifications suivantes. Ils ont brillamment reconnu les 150 fonctions de travail et ils ont mis en place de façon artificielle cinq secteurs de...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

Mme Barrette (Chantal) : ...production selon l'origine du producteur, les secteurs 1 à 4 et le secteur des annonces publicitaires. C'est pourquoi, en 2009, les fonctions de travail suivantes ont été assimilées, à juste titre, à l'artiste. On parle de chauffeur, cantinier, assistant à la réalisation, gréeur, assistant-coiffeur, et j'en passe. Toutefois, certaines personnes n'ont pas eu cette chance. Certaines ont plutôt été nommément exclues de la loi, les privant automatiquement du droit à la syndicalisation. On pense, entre autres, aux comptable et assistant comptable de production. De plus, ces dernières années, de nouvelles fonctions sont apparues ou apparaîtront au fil des transformations technologiques, et parce qu'elles n'existaient pas en 2009, les associations d'artistes devront continuer à faire la preuve que ces formations sont artistiques ou devraient être assimilées à l'artiste.

Vous comprendrez, mesdames et messieurs, qu'il est très difficile de comprendre et encore plus d'expliquer à des membres pourquoi un cantinier, à juste titre, a eu le droit et le privilège d'être assimilé à un artiste, alors qu'une autre personne faisant partie de la même équipe de production ne puisse avoir le même droit. Nous tenons à mentionner que les producteurs américains qui viennent tourner sur notre territoire les reconnaissent volontairement. Ils sont donc couverts par nos ententes collectives avec les producteurs. Toutefois, ce n'est pas le cas avec les producteurs québécois.

Afin de permettre la reconnaissance et le droit à la syndicalisation de toutes les personnes travaillant au sein d'une équipe de production, nous vous recommandons d'amender l'article 1.2 de la loi afin d'y inclure tous les artistes, les techniciens et les autres personnes dont les services sont retenus à la pige et qui occupent des fonctions permettant à ce qu'une œuvre audiovisuelle puisse voir le jour.

Maintenant, parlons de l'impact de l'implantation des cinq secteurs. Pour un technicien, cela signifiait que s'il désirait travailler à la fois sur les productions québécoises et sur les productions américaines, il devait être membre de deux syndicats différents, même si le travail, les méthodes de travail et les enjeux restaient les mêmes. Or, en janvier 2021, les deux... ont fusionné avec l'AQTIS, réglant une fois pour toutes leurs conflits syndicaux. On les en félicite. Aujourd'hui, en 2022, tout semble réglé entre les syndicats grâce à la fusion. Malheureusement, non, certains membres de la guilde continuent d'être double allégeance car leur fonction est scindée entre nous et l'AQTIS, selon les secteurs. Nous vous invitons d'ailleurs à consulter le tableau de représentation actuel figurant à la page 9 dans notre mémoire.

Nos démarches légales effectuées en 2019 pour les représenter afin qu'ils soient tous réunis sous la guilde se sont soldées par un échec. Ils sont actuellement pris dans un cul-de-sac juridique malgré leur volonté clairement exprimée, comme en témoignent les deux pétitions signées par 239 membres. Ces 239 membres doivent continuer à payer deux cotisations à deux syndicats pour le même travail fait de la même façon, mais avec des employeurs différents. Cette double allégeance comporte plusieurs désavantages, dont un frein à leur carrière. Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d'ajouter l'article 44.1 au projet de loi n° 35 afin d'établir que la guilde représente pleinement ses membres dans tous les secteurs. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, Mme Barrette. Nous poursuivons maintenant avec l'Alliance québécoise des techniciennes et techniciens de son et de l'image. Je vous invite à vous présenter avant de commencer votre exposé de cinq minutes.

M. Lemay (Christian) : Merci, Mme la Présidente. Mon nom est Christian Lemay. Je suis le président du syndicat récemment fusionné, AQTIS 514 IATSE. Je suis accompagné de Me Étienne Lafleur, qui est aussi le directeur des relations de travail de notre syndicat.

Mme la ministre, Mmes et MM. les députés et membres de la commission, l'Association québécoise des techniciens et techniciennes de l'image et du son. AQTIS 514 IATSE, affiliée à la FTQ, tient à vous remercier de votre invitation. Nous représentons 8000 professionnels pigistes qui oeuvrent dans plus de 200 métiers liés à la production audiovisuelle travaillant derrière la caméra. Notre organisation propulse la passion et le talent de ses membres et contribue ainsi au rayonnement de l'industrie ainsi qu'à la vitalité économique de la province.

Nous sommes devant vous aujourd'hui afin de vous présenter notre mémoire commentant le projet de loi n° 35. D'emblée, reconnaissons tout de suite une chose, l'exercice de révision de la LSA était plus que nécessaire, et nous considérons que c'est un début, un début, dans la mesure où ce projet de loi n° 35 propose une avancée importante sur plusieurs aspects. Dorénavant, tous les artistes de la province seront couverts par un seul et unique et plus avantageux régime.

De plus, notre association est heureuse d'avoir constaté que plusieurs de nos propositions de notre mémoire initiale sont retenues dans le projet de loi n° 35, tel que la reconnaissance générale du Tribunal administratif du travail...

M. Lemay (Christian) : ...qu'il soit le seul tribunal compétent afin d'entendre les litiges découlant de la LSA. Bien entendu, l'ajout d'une protection législative contre le harcèlement psychologique et sexuel était plus que nécessaire.

Nous aimerions profiter de notre présence afin de vous indiquer certaines préoccupations, entre autres à l'égard de l'article 22 du projet de loi et qui aura un impact important sur nos membres et les artistes en général si l'article n'est pas modifié. Il était grandement temps que les artistes et artisans couverts par la LSA puissent bénéficier de la même protection que leurs collègues salariés au sens du Code du travail. Toutefois, il est important de vous indiquer, contrairement à l'article 59 du Code du travail et à l'article 32 b de la loi sur le statut de l'artiste fédérale, que le gel des conditions de travail suggéré par le projet de loi est incomplet. Incomplet, car l'article 22 du projet de loi, tel que rédigé, ne contient aucune protection pour nos membres et les artistes en général contre une possible modification unilatérale des conditions d'engagement par un producteur, et ce, durant la période de grande vulnérabilité qu'est celle suivant l'envoi d'un avis de négociation collective et avant qu'une entente collective ne soit conclue. C'est à ce moment que les artistes ont besoin de la protection plus étendue de la loi. Les artistes oeuvrent déjà dans un milieu à grande précarité. Alors, pourquoi rajouter un souci de plus en permettant une potentielle modification unilatérale de leurs conditions de travail?

Une autre préoccupation que nous tenons à vous soumettre aujourd'hui et qui n'apparaît pas dans la mouture actuelle du projet de loi est à l'égard de l'importance de rendre les sociétés liées solidairement responsables les unes envers les autres pour les dettes et obligations découlant d'une entente collective. Il s'agit d'un problème réel pour les associations d'artistes. Trop souvent, nous sommes confrontés à des coquilles vides qui ont tôt fait de disparaître après les productions, rendant ainsi difficile, voire même impossible en quelques situations l'exécution d'obligations qui peuvent notamment découler d'un jugement ou d'une sentence arbitrale.

En guise de conclusion, nous voulons vous indiquer... nous voulons indiquer, pardon, aux membres de la commission que si ce projet de loi n'est pas traité en profondeur par l'Assemblée nationale, il y a lieu de croire que l'objectif d'améliorer les conditions socioéconomiques des techniciennes et techniciens de l'audiovisuel du Québec ne soit pas atteint. Convenons ensemble que le dialogue doit continuer. Le moment est trop important afin de prendre cet exercice à la légère et c'est pour cette raison que nous voulons vous indiquer que nous sommes solidaires des autres associations d'artistes du principe d'une révision de la Loi sur le statut de l'artiste à chaque cinq ans, surtout sachant que de nombreuses transformations technologiques sont à venir dans les prochaines années, qui auront un impact important sur les conditions d'engagement des travailleuses et travailleurs de l'audiovisuel. Merci, Mme la Présidente.

• (16 h 40) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Merci pour vos exposés. Nous allons donc commencer immédiatement la période d'échange avec Mme la ministre. Vous disposez de 10 minutes 30 secondes.

Mme Roy : Hi là là! Merci, tout le monde, d'être là. Je suis contente de vous voir, M. Lemay, entre autres, Maître, Maître, Maître. On a fait des Teams, on a fait des Zoom, on s'est beaucoup parlé. J'apprécie beaucoup votre mémoire. J'apprécie aussi le fait que vous soulignez qu'on a retenu des demandes que vous nous aviez faites. Et je souhaite vivement que ces modifications, qui ouvrent davantage la porte à l'utilisation du Tribunal administratif du travail pour régler vos différends, parce qu'on parle vraiment ici à des syndicats qui sont des experts en la matière, ça va vous aider, c'est le but. Et puis c'est quelque chose qui, je pense... puis la professeure qui était juste avant vous parlait de moyens qui peuvent aider toutes les parties en cause ici. Alors, je suis contente de voir qu'à cet égard-là, vous le soulignez à juste titre, là, on vous a vraiment entendus, on vous a écoutés. Et ne vous inquiétez pas, le travail ne sera pas bâclé. Vous me connaissez un petit peu. On a travaillé fort ensemble et on va continuer le dialogue.

D'ailleurs, d'entrée de jeu, les deux groupes qui sont devant nous avaient les mêmes réticences qu'on entend depuis ce matin. Alors, comprenez que, quand on entend depuis ce matin : Il y a un bobo à un endroit, on va tout faire pour voir dans quelle mesure on peut améliorer la situation. C'est la raison pour laquelle on est ici, pour travailler ensemble puis de façon absolument... dans un seul but : aider les artistes. C'est la loi... c'est une fameuse loi sur le statut des artistes professionnels...

Mme Roy : ...vous accrochez sur l'article 15, vous n'êtes pas les seuls, tous les syndicats ce matin sont venus nous le dire, le fameux devoir de juste représentation. Alors, je pense qu'à cet égard là, il y a des modifications qui pourraient être apportées. J'aimerais que vous élaboriez dans quelle mesure, pour vous, il faut amener un amendement, puis qu'est-ce qui vous ...qu'est-ce qui vous qui vous dérange? Votre vision à cet égard-là, parce que je pense que vous vous faites pratiquement vôtres, les observations qui ont été faites, entre autres, par l'UDA et la guilde à cet égard là. Mais j'aimerais vous entendre un petit peu parler du devoir de juste représentation.

Mme Bertrand (Lisane) : C'est bon, je vais y aller. Alors, oui, en fait, c'est qu'effectivement, comme l'UDA l'a mentionné ce matin, c'est... c'est que pour plusieurs raisons, des fois c'est parce qu'on n'arrive pas à négocier une entente collective dans un secteur ou avec un producteur donné, mais ça fait en sorte que, lorsqu'il n'y a pas d'entente collective qui s'applique, évidemment, bien, les artistes sont un peu... sont laissés à eux-mêmes pour négocier. Si le devoir de représentation s'applique, et on doit représenter aussi ces artistes-là alors qu'il n'y a pas d'entente collective, on vient en quelque sorte obliger les associations d'artistes à représenter et à défendre les intérêts d'un artiste qui a négocié lui-même son contrat avec un producteur alors qu'il n'y a pas d'entente collective, quelque chose qui n'existe pas dans le monde du travail. En vertu du Code du travail, là, il y a vraiment des ententes collectives, et on est liés par les ententes collectives. Donc, la proposition qui était faite par l'UDA, ce matin, bien, nous apparaissait tout à fait pertinente, de dire : Mais ça doit viser, ça doit être ouvert, ce recours-là ou cette protection-là pour le devoir de juste représentation lorsqu'il y a une entente collective applicable aux artistes.

Je donne un exemple, par exemple, le GQGCR - excusez, je dis l'acronyme, là, ça va plus vite - le GQGCR n'a pas d'entente qui couvre l'animation. Et est-ce qu'il pourrait y avoir quelqu'un, un réalisateur en animation qui viendrait dire... déposer une plainte contre le CQGCR en disant : Bien, vous n'avez pas négocié d'entente collective donc vous manquez à votre devoir de représentation. Et on se retrouve devant le tribunal administratif alors qu'il n'y a pas d'entente collective. Alors, ça devient un problème. C'est très difficile à gérer. Lorsqu'il n'y a pas d'entente collective, il y a une multitude de situations qui peuvent se poser. C'est pour ça que c'est nécessaire que le devoir de représentation soit lié à la présence d'une entente collective. Sinon, on se retrouve à devoir défendre. Et je ne vous le dis pas par connaissance de cause parce que je suis impliquée dans un autre dossier qui est maintenant rendu en Cour supérieure, mais où la partie adverse a justement plaidé que, mais indépendamment qu'il y ait une entente collective ou pas, l'association d'artistes doit représenter. C'est elle qui doit déposer des griefs. On n'a pas d'entente collective. Je ne sais pas comment on peut faire ça. Donc, c'est pour ça qu'il doit y avoir... ça doit être lié à une entente collective.

Mme Roy : Alors, si je comprends bien ce que vous dites, c'est que, dans le fond, le libellé de la façon qu'il y est actuellement cet article-là, l'article 15, vient vous faire porter un fardeau trop lourd sur les épaules.

Mme Bertrand (Lisane) : Tout à fait.

Mme Roy : C'est ça. O.K. Il faut que vous sachiez, puis je l'ai dit à d'autres groupes ce matin, mais je pense que c'est bon que je vous le dise pour vous rassurer, il avait été mis là à la demande, entre autres, du ministère du Travail, parce que c'est pertinent. Vous, vous l'avez vu, vous connaissez...

Une voix : ...

Mme Roy : Oui, à la demande du Tribunal administratif du travail qui, lui, relève du ministère du Travail, parce que c'est un calque de l'article 47.2. Vous l'avez vu, mais vous avez aussi vu, puis c'est pour ça que... c'est à ça que ça sert les commissions. Vous avez aussi vu que, oui, c'est un bon article, mais il y a un aménagement qu'il faut faire parce que le fardeau sera trop lourd pour nous. Alors, nous l'avons entendu. Les oppositions l'ont aussi entendue. Alors, on va voir dans quelle mesure on peut travailler cet article-là pour aider, pour nous assurer que le Tribunal administratif du travail y trouve son compte. Mais c'est pour ça que je vous dis, c'est ce n'est pas que de la transposition d'articles du Tribunal administratif du travail ou de la Loi sur les normes que nous faisons, mais nous faisons les adaptations au milieu artistique, au milieu culturel qui est très particulier aux artistes. Donc, merci de le soulever vous aussi. Alors, je pense qu'à force de l'entendre on en est convaincu déjà depuis ce matin, mais on va travailler à cet égard là, ça fait que je voulais vous vous rassurer à cet égard-là.

Vous faites mention- moi, j'ai gardé ça ici, oui - vous nous parlez entre autres... vous parliez des fameuses coquilles pour de nous assurer qu'on en soit capable... vous émettez le souhait qu'on soit capable de retracer les administrateurs des entreprises qui, je pense... puis c'est important de le souligner, là, la majorité du monde, c'est du bon monde, puis ils respectent les ententes, puis ça travaille bien. Vous n'avez pas le choix, vous êtes condamnés à travailler ensemble, que vous avez besoin l'un de l'autre. Mais si arrive d'aventure où il y a certaines personnes qui ne respectent pas...

Mme Roy : ...des ententes, à cet égard-là, ou qui crée des entreprises qui ne respectent pas les contrats signés et puis qui disparaissent, la possibilité de se faire payer devient difficile. Alors, à cet égard-là, qu'est-ce que vous nous demandez pour qu'on puisse les retracer?

Mme Barrette (Chantal) : En fait, je vais juste... à cet égard-là, je vais juste, peut-être, vous relater... On a un dossier... Ce matin, l'UDA vous a dit qu'ils ont une vingtaine de sentences non exécutées. Malheureusement, à la guilde, nous en avons eu une aussi, également. Puis je dois vous dire qu'on a tout fait en notre... on a déposé un grief, le producteur a essayé d'aller en Cour d'appel. Vraiment...

Une voix : ...

Mme Barrette (Chantal) : Pardon?

Une voix : ...

Mme Barrette (Chantal) : On a saisi les... on est allés jusqu'à la limite, qui est de saisir les bobines. Alors, je vous confirme que, durant huit ans de temps, nous avons dû payer ces bobines-là qui étaient, naturellement, en sauvegarde pour tenter de récupérer le paiement dû au réalisateur, qui était la sentence arbitrale. Et, après huit ans de temps, vraiment, là, parce qu'on payait des frais à tous les mois, ça nous a coûté une fortune. Nous avons... J'ai contacté moi-même le producteur pour lui dire : Viens reprendre tes bobines, je vais te les envoyer parce que ça me coûte plus cher de garder les bobines. Et notre réalisateur n'a jamais été payé. Malheureusement, il est mort dans la... vraiment, dans la déchéance. Et c'est vraiment dommage parce qu'on a une sentence arbitrale qui n'a servi absolument à rien. Ce producteur-là, par la suite, a produit une autre production, tu sais.

C'est sûr qu'on ne peut pas dire que les producteurs sont tous comme ça, puis ce n'est pas vrai. Puis, tu sais, moi, vraiment, généralement, il y a un respect qui se fait. Par contre, malheureusement, on a eu la preuve que ça peut arriver. L'UDA en a la preuve aussi que ça peut arriver également qu'on ait des sentences arbitrales qu'on n'est pas capables de faire exécuter. Ça fait qu'est-ce qu'on fait une fois qu'on a saisi les bobines, la compagnie est vidée, il n'y a pas d'actif, il n'y a rien? Que reste-t-il? Que pouvons-nous faire? Puis c'est pour ça que, dans notre mémoire, ce qu'on avait demandé, c'est vraiment les compagnies de... les productions qui bénéficient d'une subvention gouvernementale doivent s'assurer, doivent payer les artistes pour lesquels ils sont engagés. Tu sais, c'est incroyable.

Puis je vous dirais aussi, là, il y a quelqu'un qui a parlé aussi, là, de faire une reddition de comptes. Moi, je vous confirme, là, pour l'avoir fait dans notre cas, malheureusement, autant... on a fait des demandes à Téléfilm, tout ça, dans les comptes, ça ne paraissait pas que le réalisateur n'était pas payé tout simplement parce que le producteur s'était versé lui-même l'argent. Ça fait que, sérieusement, tu sais, il y a du travail à faire, là, à ce niveau-là. Puis ce n'est pas... On en a parlé dans notre chose. Puis je vais laisser notre avocate, peut-être, au niveau légal, mais moi, je peux vous dire, réalistement, c'est ce qui est arrivé à notre membre, malheureusement.

• (16 h 50) •

Mme Bertrand (Lisane) : C'est certain que, ce qui serait utile pour nous, c'est d'avoir un mécanisme, à tout le moins, que, lorsqu'un producteur fasse une demande de financement aux organismes qui financent les productions dans le milieu, bien, qu'il y ait non seulement... qu'ils doivent montrer patte blanche, mais peut-être une vérification soit faite auprès des associations d'artistes. Parce que le producteur peut bien dire, comme dans le cas que Chantal vient de vous expliquer, que, bien, finalement, oui, oui, ça a été payé, puis ça paraît bien, oui, on a fait le budget, voici, tout a été payé, mais, dans les faits, il reste des sentences à exécuter. On en a, il y en a à la guilde, il y en a dans d'autres associations d'artistes. Donc, soit un mécanisme où, les producteurs, qu'ils puissent se retourner et avoir du financement public, alors qu'il y a des dettes et qu'il n'y a pas de vérification qui est faite auprès des associations d'artistes, ça, ça devrait être une première étape.

La deuxième étape, c'est aussi... En fait, l'AQTIS a parlé de productions liées, je pense je vais... des maisons des compagnies liées, je vais leur laisser la balle au bond parce que c'était leur proposition. Mais on serait d'accord avec ça, que la production qui s'ouvre... je vais donner des... excusez, District 31 1, 2, 3, en fonction des saisons, bien, qu'on les lie les unes entre les autres. Je vais laisser l'AQTIS...

M. Lafleur (Étienne) : Toute est une question d'aller rechercher la solidarisation des compagnies, des coquilles avec avec les maisons mères. Donc, manifestement, on peut comprendre que l'écosystème du financement fonctionne de cette manière-là. Mais, au final, il faut que la compagnie mère, peu importe le nombre de coquilles ou le nombre de structures corporatives qu'elle peut mettre en place pour obtenir le financement nécessaire à créer les oeuvres, mais soit ultimement responsable des obligations qui en découlent pour toute et chacune, que ce soit en vertu d'une sentence arbitrale, des obligations en vertu des contrats qui ont été négociés. Donc, pour nous, ça, c'est très important d'aller rechercher cette solidarisation...

M. Lafleur (Étienne) : ...cette solidarité-là entre les mères... entre les sociétés mères et les sociétés filles, c'est un point qu'on a mis beaucoup d'emphase dans notre mémoire déposé en février 2021, qu'on n'a pas nécessairement repris dans le cadre de... en réponse au projet de loi no 35 parce qu'on voulait, disons, prioriser certains points qui avaient été inclus dans le p.l. no 35. Mais, en prenant la balle au bond, je pense que ça serait quelque chose qu'il serait très important de réfléchir à intégrer, d'aller pouvoir retenir la solidarité entre les différentes coquilles pour le financement.

Mme Roy : Et la responsabilité personnelle des administrateurs. Ça, je pense qu'on l'a entendu aussi.

M. Lafleur (Étienne) : Également, aussi, à l'instar des... Je fais miens les propos des autres associations qui ont été mentionnés aujourd'hui.

Mme Roy : Selon vous, parce qu'on en a... une des choses que vous demandiez dans le gros mémoire initial de février dernier, c'était d'ouvrir le Tribunal administratif du travail davantage. Dans quelle mesure, de façon concrète, ça va avantager dans quelle mesure, vos membres lorsque viendra le temps, justement, de régler des litiges ou... Je voulais avoir vraiment le pouls de... S'il est adopté tel qu'il est là, dans quelle mesure ça va aider à l'égard, par exemple, de tout ce qui touche le harcèlement. Parce qu'on a mis des pans de la Loi sur les normes du travail touchant le harcèlement psychologique, le harcèlement sexuel, on l'a adapté et fait transférer dans ce projet de loi, en ce qui a trait à l'arbitrage de griefs, en ce qui a trait aux pouvoirs du Tribunal administratif du travail d'y avoir recours. Dans quelle mesure ça va vous simplifier la vie? Ou pas, on espère que ça vous la simplifie. Avez-vous des exemples à me donner?

M. Lafleur (Étienne) : Bien, ça va simplifier la vie... des artistes. Nous, à l'AQTIS, on a déjà intégré, avec la majorité des associations patronales avec qui qu'on travaille, les dispositions relatives au harcèlement psychologique. Donc, les membres qu'on représente bénéficiaient déjà d'un recours en vertu des ententes collectives. Donc, ils pouvaient déposer ou exercer leur droit de déposer un grief à l'égard des productions x, y, z pour faire valoir leurs droits.

Là où est-ce que ça va changer, c'est que ça va nous permettre d'avoir un tribunal compétent et unique qui va être à même d'entendre les litiges potentiels qui découlent de la LSA, au-delà d'une simple petite proportion qui était prévue avant. Donc, je pense que ça va aider la majorité des artistes qui ne pouvaient pas bénéficier d'avoir inclus... ou notamment, même, de ne pas avoir... de bénéficier de conventions collectives, de pouvoir aller s'adresser à ce tribunal-là, de déposer des plaintes. Donc, ça va certainement leur faciliter la vie pour ces personnes-là. Malheureusement, nous, les membres qu'on représente bénéficiaient déjà de cette protection-là.

Mme Roy : Parfait.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste trois minutes.

Mme Roy : Il me reste trois minutes. Donc, moi, je tiens à vous dire que le dialogue reste ouvert et que nous allons travailler pour voir dans quelle mesure on peut bonifier ce projet de loi. Je vais être très, très transparente et directe avec vous. Je comprends que vous souhaitiez qu'on ouvre davantage... à davantage de professions la loi. Vous comprenez que je n'irai pas jouer dans les amendements qui ont été faits en 2009 par ma collègue de l'Acadie. Je n'ouvre pas ce pan de possibilités, je vais dire comme ça, parce qu'on tentait de régler les problématiques, pallier aux brèches qui sont là, qui sont les plus... qui étaient les plus grandes et les plus... qui couvraient le plus grand nombre d'artistes actuellement pour lesquels il y a des problématiques. Et comprenez-moi bien, c'est à l'égard du fait qu'il s'agit de la Loi sur le statut professionnel des artistes et que, dans mon âme et conscience et dans notre cœur à tous, le comptable, l'assistant comptable n'est pas un artiste, mais je... au même titre où je ne le fais pas pour les journalistes indépendants, un journaliste n'est pas un artiste.

Mais je sais que vous êtes déçus à cet égard-là, que vous vouliez ouvrir bien davantage. Nous n'irons pas là, là, mais tout est possible dans le futur, mais on veut vraiment resserrer cette loi-ci en donnant plus de pouvoir, actuellement, à vos associations, aux syndicats, aux artistes et pour pouvoir travailler d'une façon plus efficace. Mais je suis très transparente et je ne vous fais pas de cachotteries, mais je veux vraiment améliorer des points que vous avez soulevés qu'on pourrait améliorer aussi. Alors, voilà, je tente de trouver un équilibre dans tout ça. Mais je veux vous...

Mme Roy : ...merci pour votre mémoire, et puis le dialogue reste ouvert, et on continue à travailler ensemble. Merci infiniment.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, Mme la ministre. Nous poursuivons l'échange avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. Je pense qu'on est dans un exercice qui est rare, c'est-à-dire celui d'une loi sur le statut d'artiste, qui a été adoptée dans les années 80, qui a été revue dans les années... en 2009, puis là on était rendus en 2022. Alors, on ne fait pas ça tous les jours. Je pense que la ministre doit comprendre qu'il faut aussi peut-être être ouverts à certains aménagements qui sont réclamés. C'est sûr que, quand vous nous parlez des exceptions, comme les comptables et... si ma mémoire est bonne, à l'époque, ça touchait les techniciens d'AQTIS et IATSE, et je pense que les comptables n'étaient pas sous ces deux chapeaux là, ces deux syndicats là. Alors, c'était ça, l'idée. Moi, je serais ouverte à le faire, parce qu'effectivement il peut y avoir une certaine inéquité pour des gens qui travaillent sur les mêmes productions. Et sur la question des journalistes, on en parlera, mais je pense qu'il faut que la ministre soit un peu plus ouverte à cette question-là, parce qu'on ne fait pas ça tous les jours.

Je voudrais avoir... Je voudrais bien comprendre la question de l'article 22, qui a l'air à être un sérieux problème, là. Expliquez-nous exactement qu'est-ce que vous voyez là-dedans, pour qu'on le comprenne bien comme il faut, et quel serait l'amendement qui devrait être apporté, là.

M. Lafleur (Étienne) : Pour nous, c'est sûr et certain que, dès le moment du dépôt de l'avis de négociation, les masques tombent. Donc, on voit qu'il y a une intention réelle de vouloir négocier des conditions de travail. Présentement... Et là c'est sûr qu'on salue l'intégration et l'arrivée d'un gel partiel des conditions de travail au moment où est-ce que les obligations de la convention collective échoient. Sauf que là, nous, ce qu'on dit, et ce qu'on demande, et ce qu'on considère qui est nécessaire pour protéger les artistes, c'est surtout au moment où est-ce qu'on dépose l'avis de négociation, et d'arrimer aussi l'idée derrière la loi avec le droit fédéral. Le droit fédéral, il prévoit déjà aussi... la Loi sur le statut de l'artiste, fédérale, prévoit déjà que, dès le dépôt de l'avis de négociation, les conditions de travail sont gelées, et ne peuvent être modifiées de manière unilatérale par l'employeur. Présentement, la mouture du projet de loi, à l'article 22, ne mentionne pas ça, donc elle ne protège que les artistes a posteriori, et nous, c'est le ab initio qui nous importe, pour que la protection soit complète, et pour qu'on puisse favoriser également la liberté d'association.

On se doit... Parce que la Cour suprême, elle l'a mentionné, Mme la députée, que le gel des conditions de travail est... favorise aussi la négociation collective, favorise aussi le maintien du rapport de force. Donc, pour nous, c'est capital d'apporter cet amendement-là pour protéger les artistes au complet, dès le moment du... bien, dans tout le processus de négociation collective, que ce soit avant, pendant ou après. Donc, elle est là. C'est une courte modification qui, selon nous, ne coûte pas grand-chose, et de juste... de prévoir dès le dépôt de l'avis de négociation, après...

• (17 heures) •

Mme St-Pierre : Je pense que les juristes vont peut-être entendre votre message, ils vont peut-être se mettre sur la rédaction. Mais si vous pouviez nous aider, moi, je suis prête à déposer un amendement et... Si vous pouviez m'aider dans la rédaction, parce que, vous voyez, on a de bien bonnes personnes qui travaillent de notre côté, mais on n'a pas toute une armada d'avocats. Ce serait important de nous faire des suggestions d'amendements.

M. Lafleur (Étienne) : Si vous me permettez, Mme la députée, je peux vous lire la suggestion qu'on a d'incluse dans notre mémoire.

Mme St-Pierre : O.K., allez-y.

M. Lafleur (Étienne) : Donc, on propose de modifier 36.1, à l'article 22 du p.l. n° 35, de la manière suivante : «À compter du dépôt, par une association d'artistes, d'une demande de reconnaissance, et tant que le droit énoncé à l'article 34 n'est pas exercé ou qu'une décision arbitrale suivant l'article 33 n'est pas intervenue, un producteur ne doit pas modifier les conditions de travail des artistes dont il retient les services sans le consentement écrit de l'association.» Alinéa 2° : «Il en est de même à compter de l'expiration de l'entente collective, et tant qu'une nouvelle entente collective n'a pas été conclue ou qu'une décision arbitrale suivant l'article 33 n'est pas intervenue.» Alors, voilà.

Mme St-Pierre : Parfait, donc c'est bien noté. On va essayer de faire le changement.

Sur la question des coquilles, est-ce...


 
 

17 h (version non révisée)

Mme St-Pierre : ...est-ce que c'est possible... par exemple, une maison de production qui s'appellerait les productions CSP pourrait avoir une mégaproduction et contracter certains éléments de la mégaproduction à d'autres petites maisons de production, mais qu'il n'y a pas de lien... c'est-à-dire il n'y a pas de responsabilité de la grande maison de production par rapport à ces petites maisons de production là qui pourraient se sauver une fois le produit fini. Est-ce que c'est... une fois la production faite, c'est-u ça?

M. Lemay (Christian) : Je peux vous donner un peu le sens de ce que vous décrivez. Ça existe déjà, malheureusement.

Mme St-Pierre : Oui, bien, c'est parce que c'est ce que j'avais compris, là.

M. Lemay (Christian) : Ça existe déjà, surtout en postproduction. Il y a de nombreuses entreprises qui font de la sous-traitance en postproduction, c'est monnaie courante dans l'audiovisuel. On en a parlé dans notre mémoire initial de février 2021.

Mme St-Pierre : Alors, quel serait le remède, là, approprié dans la loi qu'on est en train de... sur laquelle on est en train de travailler?

M. Lemay (Christian) : Une seule suggestion, c'est d'abolir la sous-traitance, c'est aussi simple que ça.

Mme St-Pierre : Mais, sans abolir sous-traitance, on pourrait exiger une responsabilité, un lien, parce que ce n'est pas possible, là, d'abolir la sous-traitance, là.

M. Lemay (Christian) : Effectivement, non, garder le lien de subordination du producteur employeur à l'égard de tous les aspects de la production.

Mme St-Pierre : O.K. Mon autre question, c'est la reddition de comptes. La question peut être à l'un ou l'une de vous. La reddition de comptes, on la comprend quand on reçoit... si le producteur reçoit des subventions du gouvernement, qu'il y a une reddition de comptes, mais il y a d'autres types de productions qui ne reçoivent pas de subvention mais qui ont des crédits d'impôt. Est-ce qu'on pourrait appliquer la reddition de comptes aux crédits d'impôt?

Mme Bertrand (Lisane) : En fait, ça fonctionne... en tout cas, pour la guilde, là, je vais parler vraiment pour la guilde, ça fonctionne un peu différemment avec les productions américaines. Généralement, on demande le dépôt en garantie avec les employeurs américains. Donc, un producteur américain qui viendra à Montréal, automatiquement, nous, on va demander un dépôt en garantie ou, si jamais il fait partie d'un studio, une lettre du studio confirmant qu'ils vont absorber en cas de difficulté, qu'ils vont payer les sommes dues. Donc, généralement, le problème n'est pas nécessairement là. C'est arrivé. Je ne dis pas que ce n'est jamais arrivé, là, qu'un producteur américain indépendant de bas budgets, qui vienne, puis qui parle, puis qui ne paie pas, oui, mais c'est plus rare. En tout cas, pour la guilde, c'est moins un problème récurrent. On le voit plus avec les producteurs d'ici où est-ce qu'ils ont des petits budgets, ils n'ont pas beaucoup de moyens, ils veulent produire à tout prix : Peu importe, je veux le faire pareil, alors... puis, bon, malheureusement, il arrive ce qui arrive, là., tu sais. Mais au niveau des productions américaines, ce n'est jamais un enjeu.

Mme St-Pierre : Mais on ne pourrait pas avoir de dépôt... on ne pourrait pas exiger dépôt en garantie ici aussi Parce que, si le producteur reçoit une subvention, il n'est pas dans un état précaire, là.

Mme Bertrand (Lisane) : Certaines dispositions des ententes collectives qu'on a à la guilde prévoient qu'on peut dans certaines circonstances demander des dépôts en garantie. Généralement, des permissionnaires, des producteurs qui ne produisent pas souvent, oui, c'est possible de pouvoir le faire. Tu sais, bon, des fois, ça va arriver qu'un producteur va nous dire... qui est très inquiétant, là, à quelque part, qui va nous dire : Bien, désolé, je n'ai pas d'argent pour te donner un dépôt de garantie, je n'ai pas assez de liquidité. Déjà, moi, ça nous donne un drôle de signal d'alarme. Généralement, on informe nos membres dans des cas comme ça, parce que… bon, que voulez-vous faire, là, on a averti les gens qu'on ne peut pas avoir de dépôt de garantie, mais que nos membres décident de rester sur la production, on comprend que, s'il arrive un pépin, on va pouvoir peut-être faire un grief. Mais, tu sais, ça va être difficile de récupérer cet argent-là, là. C'est toujours le problème de la production, les gens veulent collaborer, les artistes veulent travailler, ils comprennent le projet, sont intéressés, donc c'est difficile des fois d'arrêter la machine, de dire : Bien, O.K., on vous demande de vous retirer. Généralement, là, c'est difficile à faire auprès des membres, là. Je ne sais pas si M. Lemay a quelque chose à ajouter là-dessus.

M. Lemay (Christian) : Je voudrais peut-être juste ajouter, pour vous donner un peu la mesure... et je suis tout à fait d'accord avec ma consœur de la… mais sachez que les dépôts en garantie, sur certaines productions, pour les membres qu'on représente, sont très volumineux, là, on parle de 250 000 $, 300 000 $. Alors, pour certains producteurs québécois, ça pourrait... on peut envisager que c'est... difficile à faire...

M. Lemay (Christian) : ...de dépôt-là. La première réflexion qui m'est venue lorsqu'on a entendu ou discuté avec la ministre à ce sujet là dans une consultation, c'est peut-être, et vous saurez mieux m'indiquer, en tant que parlementaires, si c'est une piste de solution, mais la loi sur le financement public, il y a des règles qui s'appliquent à ceux qui touchent du financement, là, que ça soit dans le milieu de la construction ou autre. Alors, il y aurait peut-être une mesure ou des mesures qui pourraient inspirer un peu une pratique similaire, via le financement de la SODEC, par exemple. Mais je crois que la solution devrait être équitable pour tous et toutes les producteurs, productrices, et non pas de trouver des solutions mitoyennes. Je crois qu'on est rendus, à ce stade-ci, dans des mesures qui doivent être vraiment très sérieuses.

M. Lafleur (Étienne) : Si je puis me permettre, Mme la députée, juste de compléter la réponse de mon collègue Christian par rapport à la question de la sous-traitante. Mais c'est sûr qu'une solution serait de rendre solidaires le producteur et le sous-traitant des obligations. Donc ça, pour moi, c'est manifeste. Ça s'inscrit dans la même logique de la solidarisation entre les compagnies-mères et les compagnies coquilles ou les compagnies... Donc, pour nous, c'est un petit peu la même mécanique qui existe encore. On s'est grandement inspirés, là, vous avez pu entendre, là, aujourd'hui, de l'industrie de la construction et de la réalité des sous-traitants. Et sans vouloir simplement importer mais plutôt, peut-être, avec les adaptations qui s'imposent, on considère que de solidariser les obligations serait très importantes entre le producteur et les sous-traitants, notamment pour ce qui est des salaires qui sont dus aux artistes qui travaillent.

Mme St-Pierre : Donc, ça serait possible de le faire, d'avoir un amendement dans cette loi, dans cette loi-ci, pour les rendre responsables, là, imputables.

M. Lemay (Christian) : Je le considère, je le considère. Là, je n'en ai pas à vous suggérer, là, à brûle-pourpoint, comme ça, mais...

Mme St-Pierre : C'est faisable. O.K. Mais on va vous demander votre aide. On va travailler fort, vous allez voir. Sur la question... rafraîchissez-moi la mémoire sur la question des avantages sociaux, là, qui avaient été fusionnés, comment... c'était, quoi le mécanisme, là? Parce que l'intervenante, auparavant, avait soulevé ça dans son mémoire.

M. Lemay (Christian) : On en a discuté quand on vous a entendue. Je vais laisser Chantal, qui a eu la mémoire plus alerte que moi.

Mme St-Pierre : Meilleure que la mienne.

Mme Barrette (Chantal) : En fait, j'étais auparavant...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Un instant, là. Je vais vous inviter à conclure parce qu'on est déjà dans le rouge, comme je dirais, là. Allez-y rapidement.

Mme Barrette (Chantal) : Parfait. Très brièvement. J'ai déjà... avant, j'ai auparavant travaillé à AQTIS 514, donc j'étais personnellement impliquée au niveau du plan du régime d'assurance. Effectivement, il y avait une entente qui avait été signée, que les participants tenteraient, l'AQTIS 514... tenterait de faire un seul et unique plan d'assurance. Malheureusement, ça n'a pas fonctionné. Toutefois, on a trouvé une autre solution. On a été créatifs. On a des ententes de réciprocité entre les syndicats. Donc entre nous, la Guilde et l'AQTIS, lATSE, il y a des ententes de réciprocité, ça fait que donc un membre travaille sous l'une ou l'autre des juridictions. Il peut choisir. Il peut choisir d'envoyer les contributions à l'un endroit ou l'autre, ce qui fait que, donc, nos plans d'assurance... et il y a des plans d'assurance. Tantôt, il a quelqu'un qui parlait, là, Mme D'Amours, je crois, qui parlait, au niveau... si quelqu'un est malade. Mais je vous rassure. En milieu d'audiovisuel, en tout cas, pour la Guilde, on a des couvertures d'assurance qui existent pour les membres dans certaines circonstances.

• (17 h 10) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors nous poursuivons. Nous poursuivons avec la députée de Taschereau.

Mme Dorion : Oui. Bien, c'est très intéressant et très éclairant. Merci pour vos mémoires, pour vos présentations. Moi, j'aimerais ça juste avoir des exemples qui vont marquer l'imaginaire, de qu'est-ce qui est possible en ce moment, pour les travailleurs que vous représentez, qui n'a pas d'allure, puis qui va pouvoir être réglé grâce à cette loi-là si vos deux principales revendications, là, sont incluses aussi? C'est quoi les situations que vous voyez arriver, que vos membres vous rapportent, que vous faites, comme, mon Dieu! ça, ça arrive tout le temps puis ça n'a pas de bon sens?

M. Lemay (Christian) : Ce n'est pas une question facile à répondre parce qu'on voit souvent le négatif, hein, dans ces choses-là. Je crois, ce qui fait le plus mal à l'heure actuelle, et on attend avec impatience la possibilité d'un amendement à cette loi là, c'est la question de la sous-traitante. Il y a des travailleurs pigistes concentrés, je dirais, en grande partie en postproduction, mais aussi des photographes de plateau, dont les diffuseurs oublient totalement que c'est des postes qu'on représente sur des plateaux de tournage. Et ces gens-là sont engagés par un diffuseur et/ou un producteur qui fait...

M. Lemay (Christian) : ...de la sous-traitance en postproduction où le pigiste monteur, par exemple, sonore ou image, est engagé par une maison de postproduction en sous-traitance pour un projet qui a été financé par la SODEC ou... Alors, c'est... si cet amendement-là est honoré, c'est sûr que ça sera un gain en capital pour nous. Mais à l'heure actuelle, je pense que l'élargissement du Tribunal administratif du travail, c'est un excellent ajout. Ça va nous permettre que les... puis je crois que l'expertise d'ailleurs au tribunal est de plus en plus fort et l'exercice du droit au tribunal aussi se fait de plus en plus rapidement. Alors, ça, c'est des gains importants. Je pense que vous avez parlé aussi de programmes, hein? Ça prendrait des programmes. Bien, je crois que ça, c'est une lancée, que le tribunal soit appuyé pour écouter les causes qui découlent de la LSA, c'est certain que ça va aider toute la communauté.

Mme Dorion : Par exemple, en sous-traitent, ce qui arrive, c'est que... ou quand c'est des filiales puis qu'ils contournent un peu les ententes, ce qui arrive, c'est qu'il n'y a juste pas de conditions minimales, c'est comme... si ce n'est pas toi, ça va être un autre, ça fait que prend le chèque, puis c'est tout?

M. Lemay (Christian) : Je dirais, en réponse à ça, que le plus dramatique, c'est la perte des avantages sociaux. Ces gens-là ont un demi-filet social, et là plus ça va, moins ils en ont. Alors, sachez que les organisations syndicales, pour la grande majorité, dans l'industrie, font la gestion des régimes d'assurance collective et de REER. Et je dirais qu'à la lueur de ce que la députée St-Pierre posait comme question avec la fusion de... on est en train de faire une réforme de tous les régimes d'assurance collective et de REER. Alors, on a trouvé des solutions, malgré la rivalité et la nouvelle fusion suite à 2009.

Mme Dorion : O.K.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est tout?

Mme Dorion : Oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : C'est bien. Alors, merci, Mme Barrette, Mme Bertrand, M. Lafleur, M. Lemay, merci pour votre contribution aux travaux de la commission. Nous allons suspendre quelques instants. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 14)

(Reprise à 17 h 23)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, bonjour. Pour le prochain bloc, nous allons entendre la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma et l'Association des réalisateurs et des réalisatrices du Québec. Nous commençons d'abord par la société des auteurs avec Mme Cadieux. Je vous invite, avant de commencer votre exposé, à bien vous présenter, les deux personnes de la société.

Mme Cadieux (Chantal) : Merci. Alors, bonjour. Je suis Chantal Cadieux, présidente de la SARTEC. Au cours de ma carrière, j'ai écrit des romans jeunesse ainsi que des oeuvres pour le théâtre, la télévision et le cinéma. Je suis accompagnée de notre directrice générale, Me Stéphanie Hénault.

La SARTEC regroupe les auteurs et recherchistes francophones de la radio, de la télévision, du cinéma et du doublage. En général, la Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma a produit des résultats très positifs en audiovisuel, permettant aux auteurs de négocier des ententes collectives couvrant la recherche, l'écriture et l'adaptation, que ce soit en fiction, un documentaire ou en variété. Si ces négociations ont parfois été laborieuses, les mécanismes de la loi se sont révélés fort utiles, mais ils sont insuffisants pour en atteindre pleinement les objectifs, ce que peut corriger le projet de loi n° 35 déposé par la ministre de la Culture et des Communications, Mme Nathalie Roy.

Le projet de loi n° 35 considère enfin tous les auteurs de la littérature comme des artistes à part entière, bénéficiant du droit fondamental à la négociation collective. Comme lorsqu'ils écrivent pour le cinéma ou la télévision, ils auront enfin droit à des conditions minimales d'exercice de leur métier, une nécessité pour assurer leur protection. La SARTEC applaudit donc cette avancée et se réjouit également que le projet de loi n° 35 introduise des dispositions pour contrer le harcèlement psychologique et sexuel et confère des pouvoirs plus importants au Tribunal administratif du travail...

Mme Cadieux (Chantal) : ...au nom de la SARTEC, nous demandons aux parlementaires d'adopter le projet de loi no 35 en y apportant toutefois huit points d'amélioration, et ce, dans l'intérêt des artistes, des gens oeuvrant dans le milieu culturel et du public québécois.

Premier point. Investir plus judicieusement l'argent public en culture. Comme indiqué dans notre mémoire déposé le 1ᵉʳ février 2021, disponible en ligne, les programmes de la Société de développement des entreprises culturelles, SODEC, échouent parfois encore à soutenir nos auteurs malgré l'aide publique leur étant destinée via des entreprises de productions non engagées envers la SARTEC ou irrespectueuses de leur engagement envers la SARTEC. La seule façon de nous assurer que l'argent public investi le soit de façon régulière et responsable envers les auteurs en audiovisuel est d'engager le producteur à respecter les normes minimales dont la SARTEC est la gardienne, en développement comme en production d'une œuvre. Il conviendrait donc d'apporter cette précision dans la loi comme suit : «Les organismes publics subventionnaires du milieu culturel doivent exiger des producteurs, avant de leur octroyer du financement, qu'ils respectent des conditions contractuelles minimales avec l'association d'artistes reconnus ainsi que des conditions négociées par l'artiste».

Notre deuxième point. Encadrer la responsabilité des administrateurs d'une entreprise de production. Même lorsqu'un producteur est lié par une entente collective, il arrive que la SARTEC ne parvienne pas à obtenir l'exécution de ses obligations en raison du paravent de sa personne morale. Des administrateurs mettent leur compagnie en faillite ou constituent d'autres compagnies en dépouillant leur compagnie débitrice de ses biens pour ne pas payer les auteurs, sans toutefois être tenus responsables des cachets impayés. Il y a donc lieu d'introduire dans la loi des dispositions afin de solliciter la responsabilité personnelle des administrateurs lorsque des sommes dues aux auteurs demeurent impayées. Nous suggérons donc l'introduction d'un nouvel article dans la loi qui irait comme suit : «Les sociétés liées sont solidairement responsables les unes envers les autres des dettes dues par l'une d'elles découlant d'une entente collective ou d'un contrat d'artiste. De plus, ses administrateurs sont solidairement responsables avec leur société de ces dettes».

Troisième point. Améliorer les pouvoirs du Tribunal administratif du travail en ajoutant au troisième paragraphe de l'article 56 de la loi l'article 7 concernant la liberté d'association des artistes.

Quatrième point. Adapter au milieu culturel le juste devoir de représentation de l'article 24.2, en précisant qu'il vise les artistes assujettis à une entente collective.

Cinquième point. Préciser le pouvoir réglementaire de l'article 68.6, en ajoutant qu'il devrait découler d'une demande d'une association reconnue d'artiste. Il faudrait aussi préciser que le règlement adopté en vertu du présent article tient lieu d'entente collective et lie les producteurs du secteur en cause et les artistes qu'ils engagent.

Sixième point. Ajuster le libellé de la définition d'artiste... de l'artiste, 1.1, afin de le simplifier en omettant la répétition des termes «professionnel» et «professionnellement».

Point 7. Ajuster l'article 8 sur le droit à la négociation individuelle en enlevant les termes «sous réserve des dispositions de la présente loi».

Et le huitième point. Uniformiser la terminologie de «contrat d'engagement» par «conditions contractuelles».

En conclusion, la SARTEC vous demande respectueusement d'adopter le projet de loi no 35 en y apportant ces quelques améliorations. Nous vous remercions de nous avoir entendus, et il nous fera plaisir, à Me Hénault et moi, de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, Mme Cadieux. Nous poursuivons avec le deuxième groupe de l'Association des réalisateurs et des réalisatrices du Québec. M. Pelletier, à vous la parole. Et bien vous présenter avant de commencer votre exposé.

M. Pelletier (Gabriel) : Merci. Bien, tout d'abord, permettez-moi de vous remercier, Mme la ministre et Mme la Présidente, ainsi que les membres de la Commission de l'Économie et du Travail, de nous donner l'opportunité de nous exprimer devant vous aujourd'hui. Mon nom est Gabriel Pelletier. Je suis président de l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec. Ainsi, je suis aussi réalisateur. L'ARRQ est une association d'artistes et un syndicat professionnel qui a légalement été accrédité et reconnu en vertu de la Loi sur le statut des artistes (S-32.1) pour représenter et défendre les intérêts de tous les réalisateurs et réalisatrices qui oeuvrent au Québec, en français ou en toute autre langue que l'anglais, dans les domaines du cinéma, de la télévision, du web et de l'animation. Notre association compte plus de 850 membres. L'ARRQ attend depuis plusieurs années des modifications à cette loi puisque dans...

M. Pelletier (Gabriel) : ...son état actuel, elle a atteint ses limites. Il est essentiel d'adopter, avant la fin de la session parlementaire, ce projet de loi avec les modifications proposées afin qu'elle atteigne son but premier, soit d'améliorer les conditions d'engagement des artistes.

Je vais maintenant céder la parole à madame Mylène Cyr, directrice générale de l'Association, qui vous fera état de dispositions qui, selon nous, méritent quelques modifications et celles que nous aimerions également inclure.

Mme Cyr (Mylène) : Merci. Alors, je confirme, mon nom est Mylène Cyr, et je suis la directrice générale de l'ARRQ. Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, messieurs et mesdames les députés et membres de la Commission, je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui. C'est un moment que l'on attendait avec beaucoup d'anxiété et de joie, et ça nous fait extrêmement plaisir d'être là aujourd'hui.

Alors, il est essentiel pour nous de bonifier les droits des artistes et de rétablir une équité entre les fardeaux de la loi imposés aux associations d'artistes en comparaison à ceux des associations de producteurs. Nous saluons ainsi les avancées du projet de loi quant aux dispositions visant le harcèlement, l'élargissement des pouvoirs du Tribunal administratif du travail ainsi que ceux de l'arbitre. Cependant, certaines dispositions du projet de loi méritent, selon nous, des modifications afin de leur donner plein effet.

Le pouvoir réglementaire de l'article 68.6. La première négociation de l'entente collective avec l'APFTQ pour la télévision a duré 15 ans. Sur près de 30 ans, l'ARRQ n'a eu que deux ententes collectives. Deux nouvelles ententes se sont ajoutées dernièrement, dont une qui a nécessité près de cinq ans de négociation. Face à la difficulté de négocier de façon globale pour un secteur, l'ARRQ proposait notamment de rendre obligatoire la reconnaissance des associations de producteurs. Le gouvernement a plutôt prévu, à l'article 68.6, de se doter d'un pouvoir réglementaire lui permettant de fixer les conditions minimales dans les secteurs où il n'y a pas d'entente collective. Nous saluons toutefois cette initiative qui semble répondre en partie aux préoccupations soulevées et espérons qu'elle saura faire une différence quant à cette partie de l'industrie culturelle qui n'est toujours pas sous entente collective.

L'ARRQ suggère donc d'apporter certaines précisions à l'article 68.6 afin que celui-ci atteigne les objectifs souhaités. Au premier alinéa de l'article 68.6, il nous apparaît important de faire en sorte que cette demande soit limitée aux associations d'artistes reconnues. Le libellé actuel de l'article 68.6 ne donne pas de précision sur la façon d'assurer le respect des conditions édictées. Nous croyons donc essentiel de prévoir qu'une procédure d'arbitrage devra obligatoirement faire partie intégrante du règlement. De plus, malgré l'application du règlement, nous sommes d'avis que les parties devraient toujours être en mesure de convenir d'une entente collective entre elles.

• (17 h 30) •

Le devoir de juste représentation. La rédaction actuelle de l'article 24.2 ne tient pas compte des spécificités des relations de travail dans le domaine culturel et ne fait qu'alourdir le fardeau des associations d'artistes. Le devoir de représentation est le corollaire du monopole de représentation qu'ont les syndicats envers les salariés qu'ils représentent. Or, la loi ne confère pas aux associations d'artistes le même monopole. Contrairement à ce qui est applicable en droit du travail selon la formule Rand, des cotisations syndicales ne sont pas retenues sur l'ensemble des rémunérations reçues par les artistes, mais seulement lorsqu'une entente collective couvre leur prestation de service. L'ARRQ reconnaît le bien-fondé du devoir de juste représentation, mais suggère de limiter la portée seulement lorsqu'il y a une entente collective qui s'applique.

Le financement conditionnel et la reddition de comptes. Les conditions socioéconomiques précaires des artistes, depuis toujours préoccupantes, ont été exacerbées par la pandémie. Des données recueillies en 2013 par les associations d'artistes démontraient que près de 50 % des productions subventionnées par les institutions gouvernementales n'avaient pas déposé de contrat auprès des associations d'artistes. Rien ne nous laisse croire aujourd'hui que cette situation est différente. Cela crée des injustices flagrantes tant chez les artistes que chez les producteurs. Nous proposons que l'aide gouvernementale soit conditionnelle à l'obligation d'appliquer des conditions de travail minimales découlant d'ententes collectives et également une reddition de comptes. L'application de cette solution ne nécessite aucun coût et pourrait faire une énorme différence pour assurer des conditions décentes et un filet social à la presque majorité des artistes.

Certaines dispositions applicables en matière de santé et sécurité au travail. Afin que les artistes bénéficient des mêmes protections que les salariés au Québec, l'ARRQ estime que les dispositions encadrant le droit de refus de travailler lorsqu'il y a danger ou encore le retrait préventif de la femme enceinte devraient être incorporées au projet de loi.

Nous vous remercions de votre intérêt et nous sommes disposés à répondre...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

Une voix : ...à vos Questions. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, merci pour vos exposés. Nous allons commencer la période d'échange avec Mme la ministre.

Mme Roy : Merci. Merci à vous, à distance, merci à vous tous d'être ici. Merci pour vos deux mémoires. Je suis très contente de vous voir en personne, ça fait du bien. Vous avez travaillé fort et là on peut... on recueille les fruits de votre réflexion sur ce projet de loi pour lequel... De notre côté, on a tenté de colmater le plus de brèches qui sont apparues au fil des années et puis de donner à vos associations, aux syndicats le plus d'outils possibles et, également, aux parties patronales pour régler des différends, pour avancer dans leurs négociations, puis pour permettre de la négociation pour ouvrir davantage.

Vous saluiez le fait, tout à l'heure, madame Cadieux, que nos artistes de la deuxième loi entrent maintenant dans la première. Alors, on parle ici de nos artistes en littérature et ça me fait chaud au cœur que vous le souligniez parce que je pense que c'est important qu'il n'y ait plus deux catégories d'artistes, mais bien une seule, au Québec, je crois qu'on est rendus là.

Vous disiez quelque chose, puis là, je vais juste me permettre une petite précision, une petite information. Vous parliez de l'argent, j'ai trouvé ça intéressant : «Investir plus judicieusement l'argent public en culture», ce que vous avez mentionné à votre point numéro un dans la mémoire de la SARTEC. Je voulais juste vous mettre au courant qu'à cet égard-là - parce que, là, on parle pour les auteurs, là, naturellement, là - que j'ai commandé à la SODEC, qui est une de ces sociétés d'État sous ma responsabilité, de créer un programme pour nous assurer que les œuvres audiovisuelles issues de la littérature québécoise, bien, soient soutenues; j'ai vraiment spécifié ici la littérature québécoise, ce qui fait qu'on aura plus de productions audiovisuelles qui parlent de nos romans, de nos histoires. Alors, je veux juste souligner qu'un des privilèges d'être ministre de la Culture c'est aussi de demander des programmes spécifiques pour voir dans quelle mesure on peut soutenir davantage notre milieu et nous assurer que les œuvres québécoises brillent. Alors, je voulais... C'est juste une petite parenthèse, là. Mais je comprends ce que vous disiez, ce que vous disiez va plus loin que ça.

Et puis on y travaille, je tiens à tous vous le dire, là, on y travaille. Puis on l'a vu - puis quelqu'un l'a mentionné ce matin dans les audiences... Oui, ce matin - à l'égard de l'argent qui doit ruisseler, puis nous assurer que le donneur d'ouvrage paie ses artistes. Ça, c'est une... À la suite d'une discussion que j'ai eue durant la pandémie, entre autres, avec madame Prégent, de l'UDA, qui nous disait qu'il faut que l'argent ruisselle. Au CALQ, on l'a mis dans les programmes pour nous assurer que la mesure à la billetterie, par exemple... Bien, pour nous assurer qu'avant que le producteur ait tout l'argent qu'il réclame en fonction du programme auquel il a droit à des subventions, de faire la démonstration que les artistes, les artisans sont payés. Alors, je pense qu'on s'en va vers cette façon d'agir, vers cette réflexion dans nos programmes. Alors, ce n'est pas parce que ce n'est pas nécessairement dans le projet de loi là qu'on n'agit pas. Il y a... et je le disais à tous les groupes auxquels j'ai parlé durant l'hiver, c'est qu'on a des solutions qui ne seront pas nécessairement dans la loi, mais qui vont nous permettre d'avancer puis d'atteindre le même objectif.

Maintenant, pour ce qui est des demandes spécifiques que vous nous faites, là, il y en a qui sont intéressantes. Vous soulevez ici des petites coquilles aussi de rédaction. On n'en a pas parlé, mais le fait qu'on parle d'artistes ou artistes professionnels, des fois, professionnels, des fois, pas professionnels, ça, je pense qu'on va corriger ça, là, pour avoir la même terminologie d'un bout à l'autre du projet de loi. Je pense que ce n'est pas une problématique, là, c'est plutôt une coquille de notre part.

Vous, cependant, avez des... À peu près, et c'est ça qui est fascinant, les mêmes demandes ou modifications que les autres groupes, entre autres, que l'UDA à l'égard, entre autres, du devoir de juste représentation. Puis on se l'est fait expliquer aussi. J'ai posé la question aux groupes, précédemment, entre autres, la Guilde canadienne des réalisateurs puis l'Alliance québécoise des techniciennes, des techniciens... Bien, on va le dire, là, l'AQTIS, ça va plus vite, et j'ai posé la question à l'égard de ce devoir de juste représentation. Vous nous dites, dans le mémoire... C'est l'article 15 du projet de loi, mais qui porte le numéro 24.2, en tout cas, il y a bien des numéros, là, mais on parle du 15 du projet de loi ici. Et ils nous ont dit, les groupes précédents, qu'en quelque part de la façon dont c'est libellé, ça ne faisait qu'alourdir le fardeau des associations. Et c'est à ça que ça sert, les audiences puis j'aimerais vous entendre parler de ce devoir de juste représentation parce que vous nous dites : oui, c'est un article qui est important puis vous avez compris que c'était un calque de ce qui existe déjà dans la...

Mme Roy : ...loi sur les normes. Alors, on est là pour ajuster, donc dans quelle mesure il faudrait l'ajuster pour vous puis pourquoi c'est important de l'ajuster?

Mme Cyr (Mylène) : Oui, bien, je peux y aller. Oui, alors juste représentation, effectivement, et d'emblée, je vous ai dit qu'une préoccupation majeure, pour nous, c'était en fait justement le fardeau qui n'était pas équitable au niveau des associations d'artistes, versus les associations de producteurs. Je vous ai aussi dit la peine qu'on a eue à avoir des ententes collectives dans notre secteur. Donc, il y a beaucoup de secteurs qui ne sont pas couverts par des ententes collectives. Et je vous ai aussi parlé des durées de négociations, dont une qui a duré 15 ans, cinq ans, etc. Donc, vous avez compris qu'on n'a pas les ressources nécessaires pour arriver à couvrir tous ces gens avec des ententes collectives.

Donc, c'est sûr que, pour nous, tel que libellé, ça fait en sorte que l'association d'artistes a le devoir de défendre un artiste qui négocierait un contrat avec un producteur qui n'est pas sous entente collective, alors... Et là je pense que, d'ailleurs, la... vous en a donné un exemple concret, où elle a dit : Bien, on nous demande de faire un grief, mais il n'y a pas de grief applicable parce qu'il n'y a pas d'entente collective. Donc, on est soumis à aller devant les tribunaux de juridiction commune. Donc, dans ce sens-là, je pense que vous l'avez souligné.

En fait, vous avez entendu nos collègues ce matin, cet après-midi, vous dire qu'il faudrait, en fait... Oui, on a aussi souligné que c'était un calque qui venait du Code du travail et qu'il faut donc l'adapter à notre réalité. Et notre réalité, c'est qu'on travaille avec... on est capable de faire cette juste représentation lorsque les artistes sont sous entente collective. Et donc oui... Et d'ailleurs on est tout à fait pour la juste représentation. Bien sûr, ça fait partie des devoirs des syndicats. Mais je pense que, si on faisait cet amendement à l'article 24.2 de façon à ce que ça soit seulement dans les cas où il y a des ententes collectives applicables, je pense que ça répondrait tout à fait à l'objectif.

Mme Roy : Parfait. Si on y va très concrètement l'adoption du projet de loi n° 35 changerait concrètement quoi dans la vie de vos membres?

Alors, écoutez, je pense que, de façon générale, vous avez compris qu'on accueille favorablement le projet de loi parce qu'il y a des avancées importantes là-dedans. Alors, je vous dirais que c'est à deux niveaux, donc : qu'est-ce que ça changerait pour nos artistes et pour nous, les associations. Donc, pour les artistes, donc, vous avez intégré les dispositions sur le harcèlement, et ça, on s'entend que, dorénavant, donc, un artiste qui n'est pas sous entente collective est maintenant couvert par ces dispositions. Alors, ça, ça fait une énorme différence.

• (17 h 40) •

Par rapport aux associations d'artistes, bien que, dans certaines ententes collectives, on avait déjà adopté des dispositions par rapport au harcèlement, une politique contre le harcèlement, bien sûr, chaque fois que nous devons négocier une nouvelle entente, on doit renégocier cette partie-là. Donc, c'est sûr que, pour nous, chaque fois que des dispositions s'appliquent d'emblée, ça allège notre fardeau, et on a moins de temps passer en négociation, et on peut arriver à une entente plus vite. Donc, c'est sûr, la même chose au niveau, donc, au pouvoir... tribunal du travail, c'est la même chose. Donc, on va être devant un tribunal, donc au niveau des associations d'artistes, un tribunal spécialisé qui pourra entendre, en fait, toutes les causes qui découlent des obligations de la loi plutôt que de se retrouver, sur certaines parties, devant le TAT, et d'autres devant les tribunaux de droit commun. Alors, je pense que c'est... Dans ce sens-là, c'est une grande avancée qui va faciliter la vie des associations et, par ricochet, la vie de nos artistes, puisqu'ils auront des ententes collectives plus rapidement.

M. Pelletier (Gabriel) : Si je peux ajouter, en fonde beaucoup d'espoir dans le 68.6, c'est-à-dire qu'on aurait aimé une reconnaissance des associations de producteurs. Mais, pour nous, on l'a mentionné, on est une relativement petite association dans le domaine de l'audiovisuel, le fait qu'on puisse représenter des membres, actuellement, qui ne sont pas sous entente collective, c'est une énorme avancée. On a des membres qui peuvent travailler, par exemple, en télévision et qui sont donc couverts par une entente collective, avec les protections que ça amène. Mais quand ils travaillent...

M. Pelletier (Gabriel) : ...qui travaillent sur le Web, par exemple, jusqu'à dernièrement, il n'y avait pas d'entente collective, et à ce moment-là, le temps qu'ils consacraient là et les efforts, ils n'avaient pas de protection telle que des assurances collectives, telle qu'un REER, et donc ils n'avaient pas ces protections-là. Concrètement, donc pour eux 68.6, et ça, dépendamment des modalités que vous allez amener, et c'est pour ça que ça nous intéresse de savoir comment fonctionnerait ce processus-là, mais c'est une capacité d'aller chercher des domaines où est ce qu'on n'a pas d'entente collective encore, et ça existe en publicité, par exemple, en corporatif jusqu'à dernièrement, donc dans les productions numériques.

Mme Roy : Merci. Votre réponse claire. J'aimerais vous entendre parler des dispositions maintenant relativement à l'arbitrage de griefs, parce qu'ici le but était recherché, c'était de simplifier la vie et de vos membres et de tout le monde finalement, de toutes les parties impliquées, parce que je pense que c'est... c'est l'objectif de ce projet de loi là améliorer les conditions puis aussi simplifier la vie de tout le monde. Alors, je voulais vous entendre à l'égard des dispositions sur l'arbitrage de griefs.

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, ça découle un peu de ce que je disais, c'est-à-dire que, quand on a des négociations, disons, de mauvaise foi ou, en tout cas, qu'il y a énormément de résistances qui durent quinze ans, de pouvoir se fier à l'arbitrage, c'est déjà une façon d'accélérer le processus. C'est de justement de ramener les parties pour qu'il y ait une négociation de bonne foi. Veux-tu ajouter?

Mme Roy : Et on ajoute aussi, dans le projet de loi, ces articles de la Loi sur les normes concernant la négociation de bonne foi. Alors là, on l'inclut, là. Donc on souhaite que les gens s'assoient ensemble et discutent pour arriver à des ententes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Mme la ministre, je ne sais pas si Mme Cadieux voudrait intervenir.

Mme Roy : Oui.

La Présidente (Mme IsaBelle) : On l'oublie peut-être. Mme Cadieux, je ne sais pas si, des fois, vous aviez...

Mme Cadieux (Chantal) : Non, non, ça va.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Ça va.

Mme Cadieux (Chantal) : Non, non, j'approuve, là, je suis comme ça.

Des voix : ...

Mme Cadieux (Chantal) : Vous êtes vraiment intéressante. Écoute, Gabriel parle, on dirait qu'il parle en mon nom. Là, je blague. Mais Me Hénault pourra parler peut-être à ce moment-là, plus précisément, là. Allez.

Mme Hénault (Stéphanie) : Je suis d'accord avec mes... on est d'accord avec nos collègues de l'ARRQ,

Mme Roy : C'est bien. Merci. Je regarde vos mémoires, mais je constate aussi que plusieurs des recommandations que vous formulez, puis je pense... je parle du mémoire de la SARTEC, entre autres, ressemble beaucoup, beaucoup au mémoire de l'UDA, entre autres. Je pense qu'il y a ici une communion d'idées. Et comme je vous disais, entre autres, à votre... là, je pense, je parle à la SARTEC, votre recommandation 6 : Ajuster le libellé, la définition de l'artiste artiste, artiste professionnel. Je pense qu'ensemble on va être capable d'ajuster ça compte tenu du fait que c'est... que ce sont deux lois, comme vous avez compris, que nous avons amalgamées. Nous avons pris le meilleur de chacune pour... et nous avons ajouté plusieurs dispositions. Donc, on va le corriger facilement. Donc, tout de suite, vous pouvez dire que c'est... déjà, il y a des choses qui vont se régler facilement, qu'on pourra ajouter.

C'est précis. En fait, ce que vous dites est très précis, et ça correspond à ce qu'on a entendu depuis... depuis ce matin. Juste vérifier mes notes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Mme la ministre, il vous reste 2 min 30 s, est-ce que vous voulez laisser la parole au député de Saint-Jean ou...

M. Lemieux : Si la ministre a d'autres questions, je la laisser aller, là.

Mme Roy : Bien, je ne veux pas être redondante. Alors, vous avez sûrement une idée différente, une façon différente de l'amener.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, en 2 min 15 s.

M. Lemieux : Merci, Mme la Présidente. J'espère ne pas vous décevoir, Mme la ministre. Bonjour, messieurs, dames.

Une voix : Bonjour.

M. Lemieux : Il y a par rapport... D'abord félicitations, vous avez dû jaser beaucoup, beaucoup, beaucoup dans l'industrie parce que vous êtes arrivé avec des choses qui se ressemblent, en fait qui sont pareilles. Ça nous force à bien comprendre où vous allez. Mais ne serait-ce que pour ça, je pense qu'on a gagné parce qu'il y a une certaine unicité de pensée, là-dedans, là, par rapport au 68.6. Je suis curieux parce que ça revient tout le temps. Comment vous voyez la négo maintenant qu'il y aura cette possibilité de décréter des conditions minimums? Forcément, c'est comme un levier si vous le demandez si vous l'obtenez. Mais la négo, elle, considérant ce nouveau, ce nouvel outil là, vous la voyez comment? J'ai posé la question plus tôt, puis aux auteurs qui disaient...

M. Lemieux : Ah mon Dieu! Ça va être la belle vie, bon, mais dans la vraie vie, là?

M. Pelletier (Gabriel) : En fait, ça n'affecte pas tant la négo que d'aller chercher des secteurs où il n'y en a un pas encore, c'est-à-dire que, pour une petite association comme nous, d'aller chercher individuellement chacun des producteurs, c'est beaucoup trop lourd.

M. Lemieux : ...pas vous interrompre, mais je vais le faire parce qu'il me reste juste 30 secondes. Vous avez dit que ça a pris 15 ans dans un cas, cinq ans dans un autre. Avec cette loi-là, ça va aller plus vite.

M. Pelletier (Gabriel) : Bien oui, justement, avec le pouvoir d'un règlement. Alors, c'est très bon.

M. Lemieux : C'est ça je voulais savoir. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Il vous reste une minute, si vous voulez, là, 50 secondes. Allez-y si vous avez autre chose à ajouter à la question.

M. Lemieux : Oui, parce que je vous ai interrompu, désolé.

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, en fait, c'est...

Mme Cyr (Mylène) : Bien, en fait...

M. Pelletier (Gabriel) : Vas-y, Mylène.

Mme Cyr (Mylène) : Si vous permettez. Certainement que ça va changer notre façon de voir la négociation, parce que j'ai dit que, pendant longtemps, on n'avait eu que deux parce qu'on est obligés de prioriser compte tenu des ressources limitées qu'on a. Alors là, on va pouvoir aller dans des secteurs où il y a de multiples producteurs, où on n'est pas capables d'aller, et même, je vous dirais, dans des secteurs où on a une entente collective avec une association de producteurs, mais où il y a d'autres producteurs qui ne sont pas membres de cette association-là. Alors, ça vient combler une faille importante. Comme le disait M. Pelletier, pour nous, c'est vraiment important, ce pouvoir réglementaire. Je pense que, si on l'applique et que ça va de l'avant, ça va faire une différence pour nous, oui.

M. Lemieux : Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait, merci beaucoup. Nous poursuivons l'échange avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci, Mme la Présidente. Merci à nos invités. Merci, Mme Cadieux, pour votre votre témoignage, qui est fort important puis qui... évidemment, qui concorde avec ce qu'on a entendu ce matin et au cours de la journée. On revient sur les mêmes éléments, puis je pense que ça, c'est très, très important, puis la reddition de comptes est importante aussi. Il faut s'assurer qu'on retrouve, dans l'argent qui est donné par nos gouvernements, qu'on retrouve une certaine transparence et une véritable reddition de comptes.

Je voudrais savoir: Les réalisateurs, on les retrouve où dans la loi initiale? Est-ce qu'ils sont à l'article 1.2? Moi, je pense que l'article 1.2, ça touche plus les techniciens. Les réalisateurs... Parce qu'on parle... Ah! les fonctions... Non, «fonctions liées à la réalisation de montages, d'enchaînements sur les plans sonore et visuel». Vous vous retrouvez dans l'article 1.2, les réalisateurs. Est-ce que c'est là que vous êtes?

Mme Cyr (Mylène) : Non, pas 1.2, En fait, nous on est à 1, là, dans... oui, dans le film. Et c'est parce qu'ils sont des auteurs, ce sont des créateurs, donc ce sont des artistes, là.

M. Pelletier (Gabriel) : Ce ne sont pas des techniciens, mais des artistes.

M. Lemieux : OK. Mais, quand vous voulez... vous dites que vous voulez, évidemment, puis je le comprends très bien, là, négocier avec... Vous êtes une petite association, vous voulez négocier avec des producteurs. Les producteurs peuvent être des gros géants, là. Puis 68 va protéger, dans une certaine mesure, cette volonté-là d'arriver à quelque chose, à une entente. Mais, dans un premier temps, vous allez devoir faire une tentative de négociation.

Une voix : Absolument.

Mme St-Pierre : Qui vont être... ou qui va être votre vis-à-vis? Vous allez commencer par qui?

• (17 h 50) •

Mme Cyr (Mylène) : Ça sera une question de... comme je disais tantôt, de priorisation, je... En fait, ce qu'on comprend, c'est que cette demande pourra être adressée au ministre, en fait, pour couvrir un secteur, et il y aura des consultations. Et ce qu'on comprend, c'est qu'il n'y a pas nécessairement de négociation dès le départ. Cette demande pourra être faite, selon ce qu'on en comprend, dans des secteurs où il y a une multitude de producteurs. Alors, avec la consultation, ce qu'on nous a expliqué, c'est qu'il y aura, à ce moment-là, du côté du ministère, des consultations qui seront faites, évidemment, au niveau de l'association d'artistes qui dépose la demande et du secteur, en fait, des producteurs qui seront visés par le règlement. Alors, je pense que c'est ça, l'idée ici.

Mme St-Pierre : Mais là vous parlez du règlement, mais, avant l'étape du règlement, il faut qu'il y ait une certaine tentative de faite. Est-ce que c'est... vous...

M. Pelletier (Gabriel) : Il faut qu'il y ait une association qui existe. Et donc c'est sûr que, d'abord, la... Pour nous, on priorise des représentants d'associations de producteurs, mais, dans certains cas, il y a des producteurs qui ne sont pas membres d'associations, et c'est là qu'il faut aller...

M. Pelletier (Gabriel) : ...aller les chercher. Et même certains secteurs... Tu sais, je parlais du numérique tantôt. Ce secteur-là n'était pas organisé au départ, et il y a donc des compagnies de production qui se sont créées et qui n'avaient pas, donc, de... Il n'y avait pas d'entente, il n'y avait pas de standard, même au niveau du financement, on était... on partait de zéro finalement. Et donc il faut qu'il y ait une certaine structure pour qu'on puisse négocier.

Mme St-Pierre : Mais la structure, vous comptez sur le ministère pour vous...

Mme Cyr (Mylène) : En fait, ce qu'on nous a expliqué, c'est que...

Mme St-Pierre : Qui ça «on nous a expliqué»?

Mme Cyr (Mylène) : Ce qu'on comprend de 68.6, en fait, c'est que notre demande de règlement devrait viser, par exemple, des producteurs dans tel secteur qui ne sont pas membres. Dans notre secteur à nous, nous avons une entente avec l'AQPM, mais le règlement pourrait, à ce moment-là, prévoir des conditions minimales dans ce secteur pour les producteurs non membres de l'AQPM parce que ça répond à ce besoin où est-ce qu'on est totalement dans l'impossibilité d'envoyer... Pour toutes les raisons que vous avez entendues aujourd'hui, particulièrement dans le secteur de l'audiovisuel, on n'est pas en mesure d'envoyer des avis à tous ces producteurs de façon individuelle, on n'a pas les ressources.

Et deuxièmement, particulièrement en audiovisuel, ce sont des structures, donc, légales, qui naissent souvent le temps d'une production. Donc, envoyer un avis de négociation, c'est physiquement impossible d'arriver à finir la négociation avant la fin de la production. Donc, vous avez entendu plusieurs associations faire état du fait qu'ils obtiennent une sentence arbitrale puis que c'est impossible, en fait, de passer à l'exécution parce que cette coquille est vide ou n'existe plus.

Donc, je pense que ça peut être une façon, en fait, d'aller chercher des producteurs d'un secteur, mais qui ne sont pas membres, par exemple, d'une association de producteurs.

Mme St-Pierre : Oui. Peut-être qu'on comprend mal la procédure, mais, moi, dans mon esprit, ce que je comprends, c'est que, dans un premier temps - puis je l'ai dit tantôt - dans un premier temps, vous avez comme une... la loi vous donne la poignée pour aller voir des producteurs. Mais si vous avez 30 producteurs à voir, qui sont des producteurs qui ne sont pas au sein d'une association, ça va être gros pour votre association à vous, parce que vous l'avez dit vous-même, vous l'avez dit à quelques reprises, vous êtes une petite association.

Mme Cyr (Mylène) : Oui, tout à fait.

Mme St-Pierre : C'est là que je ne vois pas comment il va y avoir une certaine rapidité pour y arriver.

Mme Cyr (Mylène) : Bien, en fait, moi, je comprends ça un peu comme la Loi sur les décrets de convention collective finalement où on a une entente collective qui est élargie à un secteur. Alors, je pense que l'idée en arrière de ça, c'est un peu la même chose, c'est d'être capable... parce que sinon ce n'est pas possible, et on...

Mme St-Pierre : Donc, c'est le règlement qui va faire le job.

Mme Cyr (Mylène) : Oui, qui va édicter les conditions minimales.

Mme St-Pierre : Donc, dans votre esprit, vous ne faites pas la... vous ne vous dites pas : On va faire la démarche en premier, puis, si ça accroche puis ça ne bouge pas, là on va demander au gouvernement d'intervenir. Autrement dit, vous demandez au gouvernement d'intervenir, dès l'adoption du projet de loi...

Mme Cyr (Mylène) : Oui.

Mme St-Pierre : ...pour régler un secteur, certains secteurs qui seraient peut-être des secteurs un peu... bien, enfin, il y en a beaucoup, là.

Mme Cyr (Mylène) : Oui.

Mme St-Pierre : Mais ça, on ne l'avait pas... Je vous avoue que, moi, je ne l'avais pas compris comme ça, puis c'est important, là, cette précision-là que vous faites. Parce que, moi, je n'avais pas compris comme ça, j'avais compris que... Puis on n'a pas aussi, dans 68, «à la demande de».

Donc, dès que la loi va être adoptée, vous allez demander au ministère de réglementer. C'est ça?

Mme Cyr (Mylène) : On pourrait le faire. On pourrait le faire?

M. Pelletier (Gabriel) : Oui.

Mme St-Pierre : O.K.

M. Pelletier (Gabriel) : Et il y a quand même des normes, certaines normes établies, c'est-à-dire que dans un secteur où est-ce qu'on a déjà des ententes, par exemple avec l'AQPM, il y a quand même des normes minimales qui ont déjà été négociées.

Alors, on peut demander un règlement pour des producteurs qui ne seraient pas membres de l'AQPM.

Mme Cyr (Mylène) : Tout à fait.

M. Pelletier (Gabriel) : Donc, il y a des... Et c'est ce qu'on fait, je veux dire, on documente des conditions de travail aussi. Même dans un secteur où il n'y a pas d'entente collective, on est capables d'aller voir aussi, auprès de nos membres, les contrats qui sont signés et certaines normes, donc, des contrats de travail qui sont existants. Il y a quand même une documentation des contrats de travail qui existe, et on peut se baser, donc, sur ces normes-là pour appliquer, donc, un règlement, là, faire une demande de règlement.

Mme St-Pierre : Je fais un peu un parallèle avec l'UNEQ ce matin. Parce que l'UNEQ vis-à-vis l'ANEL - l'ANEL représente plein d'éditeurs - l'ANEL ne se voit pas manifestement comme étant...

Mme St-Pierre : ...la partie en face, là. Ça veut dire que l'UNEQ pourrait faire la même chose, dire au gouvernement : Passons immédiatement à l'étape du règlement, sans essayer de faire des négociations.

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, il y a déjà, quand même, une association qui existe. L'ANEL est là, et donc ils peuvent, oui, entamer des négociations avec l'ANEL. Et après, si là ça achoppe, là, c'est autre chose, là, mais...

Mme St-Pierre : Mais, vous, de votre côté, en face, vous en avez qui ne sont pas membres d'une association.

M. Pelletier (Gabriel) : Exactement.

Mme St-Pierre : Mais c'est la même chose chez les éditeurs.

M. Pelletier (Gabriel) : C'est ça.

Mme St-Pierre : Ils ne sont pas tous de l'ANEL.

M. Pelletier (Gabriel) : Ils ne sont pas tous membres. Mais c'est, en fait, de trouver des intervenants crédibles, dans un premier temps, puis d'établir des normes. Je veux dire, pour nous, on négocie avec l'AQPM prioritairement. On considère que c'est des bons citoyens corporatifs, si vous voulez. Et on négocie des normes considérées minimales. Alors, ce qu'on irait chercher avec un règlement, c'est d'étendre ces normes minimales là chez des producteurs qui ne sont pas membres.

Mme Cyr (Mylène) : 68.6, moi, je le vois vraiment comme un levier supplémentaire.

Mme St-Pierre : Est-ce qu'il faut absolument mettre le mot «à la demande»?

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, oui, ça devrait être à la demande des associations d'artistes.

Mme St-Pierre : Il faut qu'il y ait cet amendement-là. Ça, vous le demandez. Vous n'êtes pas les premiers à le demander, là, mais il faut absolument que ça se retrouve là.

M. Pelletier (Gabriel) : Tout à fait, oui. Et on le fait en coeur avec certains autres de nos collègues que vous avez entendus.

Mme St-Pierre : Ça, ça veut dire que, si ce n'est pas là, ce changement-là, il y a comme un flou artistique.

M. Pelletier (Gabriel) : C'est certain que, là, il y a un flou. Tu sais, on discute, entre nous, déjà, des modalités puis de ce qu'on comprend et on l'interprète comme on le comprend. Mais effectivement il y a un flou à combler, c'est-à-dire au niveau des modalités puis de comment ce processus-là s'entamerait et de l'obligation d'arriver au bout du processus.

Mme St-Pierre : Parfait. Bien, moi, je n'ai pas d'autre question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfait. Merci. Alors, nous allons poursuivre avec la députée de Taschereau.

Mme Dorion : Merci. Je n'ai pas beaucoup de temps, ça fait que je vais y aller vraiment vite. On a...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Vous avez plus de temps parce qu'effectivement elle peut vous donner... elle vous donne une minute, et on peut prendre quelques minutes de votre collègue.

Mme Dorion : Ça fait plus 33 % de temps. C'est ça, là, on discute beaucoup, depuis ce matin, de cette fameuse... de ce règlement que la ministre pourrait faire pour réglementer, effectivement, toutes ces espèces de zones où il y a une pléthore de producteurs différents. C'est impossible, pour les associations, d'y aller comme ça. Puis... Donc là, on se demande quel processus devrait, tu sais... Parce que, bon, «à la demande des associations d'artistes», ça, on est avec vous. Après, comment ça se fait? Tu sais, est-ce que c'est comme un arbitrage? Est-ce que c'est... Tu sais, dans votre monde idéal, ce serait comment?

Puis une question un petit peu plus précise, sous-question : Est-ce que c'est... On pourrait dire : Bon, bien, allons-y avec tous les producteurs qui ne sont pas dans les ententes collectives déjà, donc comme le sac final pour tous ceux qui ne rentrent pas dans les ententes collectives. Où est-ce que vous aimeriez y aller mieux comme avec tel type, tel type, tel type puis vous-mêmes les diviser en sorte de producteurs?

M. Pelletier (Gabriel) : Bien, c'est certain que nos ententes sont divisées par type. Je veux dire, en réalisation, nous, on représente autant de la fiction, du documentaire, du magazine, etc. Et donc, oui, il faut s'adresser à certains sites de production, là. Donc, ça ne peut pas être...

• (18 heures) •

Mme Dorion : Tout ce qui reste, O.K. Ça serait par type. Puis c'est ça, est-ce que ça serait... Un processus qui vous paraîtrait bien, là, ce serait quoi?

Mme Cyr (Mylène) : Bien, on est d'accord avec une consultation. Je pense que, dans la demande, je pense que, ce qu'on va faire, c'est qu'on va, en fait, indiquer qui est visé et quelles sont, en fait, les conditions qu'on aimerait voir appliquer. Et donc je pense qu'à partir de là, effectivement, il y aura... il pourra y avoir des consultations et voir dans quelle mesure c'est applicable. Puis comme je disais tantôt, l'exemple du secteur où on a déjà une entente collective puis qu'on veut aller chercher les producteurs de ce secteur qui ne sont pas membres et qui ne sont pas liés par cette entente collective, donc c'est une façon de le faire. Et donc, la consultation, à ce moment-là, il y a déjà quelque chose qui s'applique dans le secteur. Donc, pour nous, ça devrait s'appliquer, là, facilement au reste du secteur.

Et puis, je pense que le plus de latitude on peut avoir, plus ça va être facilitant pour nous, c'est-à-dire qu'on puisse agir par...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Cyr (Mylène) : ...secteur, qu'on puisse agir par tous les non-membres. C'est ce qui va nous aider. Et c'était vraiment à la base de nos demandes à nous. Je pense que le plaidoyer qu'on a fait pendant toutes ces années-là, c'est de dire : Écoutez, il faut nous donner des outils pour qu'on arrive à faire ce pour quoi on a été créé, et c'est-à-dire négocier des ententes collectives. Et c'est... quand on regarde ça après 30 ans, c'est trop peu d'ententes collectives et trop peu d'artistes. Moi, je vous ai parlé des 50 % des productions subventionnées qui n'avaient pas déposé. C'est énorme et c'est de l'argent public. Et c'est en 2013 qu'on a fait cet examen exhaustif. Et je vous dirais que quand on a préparé le mémoire, on est allés dans nos données internes. Et il n'y a rien qui me laisse sous-entendre que cette situation-là s'est améliorée avec le temps. C'est moins de 50 % de nos membres qui ont accès aux REER et aux assurances collectives.

Mme Dorion : Donc, ça serait dans l'idéal, par exemple, une des associations d'artistes reconnues fait une demande de règlement, puis la ministre serait liée. Donc, ça ne serait pas genre «on va regarder ça», ça serait presque la loi... obligerait finalement.

M. Pelletier (Gabriel) : Ou une obligation que le processus arrive à terme, à un moment donné.

Mme Dorion : O.K., dans un certain délai.

M. Pelletier (Gabriel) : Oui.

Mme Hénault (Stéphanie) : Si je peux compléter. La SARTEC, il arrive que notre interlocuteur, l'association de producteurs refuse de négocier pour certains types de productions. Donc, on se retrouve sans interlocuteur. Alors, c'est certainement un mécanisme, cette disposition-là de la loi, qu'on pourrait utiliser, par exemple, pour négocier dans un secteur où on n'a pas pu négocier avec notre interlocuteur.

Mme Dorion : Parfait. Très intéressant.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Intéressant. Merci. Alors, merci, Mme Cadieux, Mme Hénault, M. Pelletier et Mme Cyr pour votre contribution à l'avancement des travaux de la commission. Merci beaucoup d'être venus.

Une voix : Merci à vous.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

(Reprise à 18 h 13)

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, pour notre dernier bloc de la journée, nous avons deux groupes, deux associations : l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, ainsi que l'Association québécoise de la production médiatique. Nous commençons donc par la première association avec Mme Bouchard. Je vous invite à vous présenter et ensuite commencer votre exposé pour cinq minutes.

Mme Bouchard (Lyette) : Merci. Alors, je suis Lyette Bouchard, directrice générale adjointe de l'ADISQ, et je suis accompagnée de ma collègue Me Stéphanie... Sophie...

Mme Hébert (Sophie) : Un relan du passé.

Mme Bouchard (Lyette) : Un relan du passé. Sophie Hubert, Directrice des relations de travail, donc, à l'ADISQ, avec moi. Mme la ministre, Mmes et MM. députés, nous vous remercions de l'invitation qui nous est faite aujourd'hui de participer aux travaux de cette commission.

Notre association, qui représente non moins de 150 entrepreneurs de la musique du Québec, a pour mission de protéger, de faire grandir et d'outiller les entreprises de la musique d'ici pour qu'elle rayonne au Québec et au-delà de nos frontières. La mission d'outiller et de professionnaliser notre secteur passe notamment par l'éducation des producteurs et des artistes au régime de relations de travail découlant de la Loi sur le statut de l'artiste. Nos membres producteurs connaissent ce régime et sont tenus d'appliquer, depuis plus de 30 ans, des conventions collectives négociées par l'ADISQ pour la production de spectacles, d'enregistrements sonores, de vidéoclips et de captations de spectacles. La loi, mieux connue sous le vocable de loi 32.1, a eu ses effets dans notre secteur, en ce sens que des ententes collectives ont été négociées et le sont encore. Par contre, les chamboulements importants connus par l'industrie de la musique, dans les deux dernières décennies, auront notamment eu comme conséquence le développement de modèles d'affaires se distinguant du modèle de production traditionnel. Le phénomène de l'autoproduction a connu un essor important de façon encore plus marquée dans la production d'enregistrements sonores. Nous constatons toutefois que cette autoproduction se fait en grande partie en marge de la Loi sur le statut de l'artiste, créant ainsi un déséquilibre entre les producteurs membres de l'ADISQ qui appliquent des ententes collectives, et tout l'administratif qui en découle, et les autoproducteurs non membres de l'ADISQ qui ne sont soumis à aucun régime.

Encore une fois, je le répète, l'ADISQ est pour la professionnalisation du secteur de la musique et la mise en place d'un meilleur filet social pour ses artistes et artisans. Et en ce sens, l'ADISQ est d'avis que la Loi sur le statut de l'artiste devrait s'appliquer à toutes les productions musicales professionnelles. Nous croyons d'ailleurs comprendre que cela aurait... que cela pourrait aussi être un des objectifs visés par le nouvel article 68.6 proposé par le projet de loi. Nous sommes toutefois d'avis que d'importantes précisions quant au cadre d'application de cet article devraient être apportées à même la loi, comme nous le précisons dans notre mémoire.

À noter que nous abordons dans notre mémoire quatre autres sujets à l'égard desquels nous soulevons certaines préoccupations, à savoir le pouvoir de réglementation de l'article 68.5, qui nous apparaît trop large et non avenu... En troisième lieu, donc, la définition d'artiste de l'artiste 1.1, qui, dans sa mouture actuelle, laisse place à une ambiguïté qu'il serait important de dissiper dès maintenant pour éviter des débats absolument non nécessaires. Mais je comprends, Mme la ministre, vous avez indiqué tout à l'heure que, déjà, c'est noté, et qu'il y aurait des modifications.

Quatrième point, la représentativité d'une association au sens de l'article 9 à l'égard de laquelle le critère du plus grand nombre représenté nous apparaît beaucoup trop vague. Finalement, en ce qui concerne... ce qui nous semble être l'introduction de l'article 24.1, le pouvoir de représentation individuel des associations, par opposition à leur pouvoir de représentation collective, nous apparaît donc un élément important. Et nous le soulevons dans le mémoire.

Il nous fera évidemment plaisir de répondre à vos questions sur ces cinq préoccupations que nous avons soulevées dans notre mémoire durant la période d'échange qui suivra. Nous avons d'ailleurs soumis des pistes de solution dans notre mémoire, qui se veulent pragmatiques et qui, selon nous, répondront aux besoins et intérêts de la majorité des parties prenantes. Cela étant dit, les discussions entourant le projet de loi n° 35 s'inscrivent dans une grande réflexion collective sur l'état de notre industrie de la musique et de ses acteurs. Les besoins sont criants, et c'est encore plus vrai en cette période pandémique et postpandémique. L'état d'urgence en musique, il est encore bien présent. Pénurie de main-d'oeuvre...

Mme Bouchard (Lyette) : ...de santé psychologique plus précaire que jamais, revenu instable et fragile, et tout cela pour tous les acteurs de la chaîne industrielle. Mais on persiste et signe, notre musique, elle est belle. Notre musique, nous en sommes fiers. Notre musique, c'est notre identité et on ne doit pas la laisser tomber. Selon nous, les discussions entourant la Loi sur le statut de l'artiste devraient être l'occasion de rallier les forces de tous les partenaires du milieu de la musique, incluant le gouvernement, bien évidemment, pour bâtir une structure pérenne de professionnalisation et de protection au bénéfice de tous les acteurs de la chaîne.

Ensemble, agissons notamment pour des mesures de financement adéquates, pour un développement professionnel porteur, pour des droits d'auteur signifiants, pour une fiscalité encore plus efficace, car quiconque comprend bien le carré de sable d'application de la Loi sur le statut de l'artiste comprend qu'on ne réglera pas tout par cette loi. Mais c'est l'occasion ou jamais de poursuivre notre réflexion collective et de mettre en place des mesures complémentaires à la loi qui sauront appuyer l'ensemble d'une industrie qui se veut des plus fondamentales pour notre société. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous poursuivons avec la deuxième association. Je vous invite à prendre la parole, mais avant, de bien vous présenter.

Mme Leduc (Geneviève) : Oui, bonjour. Geneviève Leduc, je suis directrice des relations de travail et des affaires juridiques à l'AQPM et je suis accompagnée de Me Frédéric Massé, qui est associé chez BLG.

Alors, l'Association québécoise de la production médiatique vous remercie de l'invitation dans le cadre des consultations du projet de loi n° 35. L'AQPM conseille bon an mal an 160 entreprises de production en audiovisuel dans le domaine cinéma, télévision, Web. Donc, quand vous regardez la télé, que ce soit émissions jeunesse, documentaire ou fiction, souvent vous regardez des productions produites par des producteurs membres de l'AQPM, qui démarre le projet du développement jusqu'à l'exploitation ultime de l'œuvre. Donc, c'est des gens très passionnés souvent par leur métier.

L'AQPM, c'est l'association de producteurs qui a négocié le plus d'ententes collectives depuis l'histoire de l'entrée en vigueur de la loi. Présentement, on a 17 ententes collectives en vigueur et on négocie avec sept associations d'artistes reconnus. Nous investissons énormément de temps et d'énergie quotidiennement pour négocier des conditions d'engagement pour les artistes... entre les producteurs et les artistes. L'AQPM est aussi l'association qui a eu peut-être le plus grand nombre de litiges fondés sur la Loi sur le statut de l'artiste.

En somme, l'AQPM et ses membres sont l'association qui vit peut-être le plus et compose le plus avec la Loi sur le statut professionnel des artistes, et ce, depuis des années. Il faut savoir que, même avant l'adoption de la loi, l'AQPM avant l'autre acronyme, l'APFTQ, avait négocié déjà des ententes collectives, et ce, avant même l'adoption de la loi.

Dans le domaine de l'audiovisuel, la loi fonctionne donc relativement bien. Elle a porté ses fruits. On est donc heureux de constater que le gouvernement ne propose pas de changements majeurs pour le domaine de l'audiovisuel. Le projet de loi compose néanmoins quelques modifications qui préoccupent l'AQPM et on va en identifier trois. Je vous dirais que certains articles vont être une redite et un terme pour la journée, mais je commencerais brièvement sur l'article 24.1.

• (18 h 20) •

Le gouvernement semble donner aux associations d'artistes la prérogative de négocier des contrats individuels d'engagement. Or, la loi est une loi de rapports collectifs de travail, donc l'essence même, la mission même des associations d'artistes. Ils négocient avec des associations de producteurs ou des producteurs des conditions de manière globale, dans un cadre de rapports collectifs, et non pas comme un agent d'artistes de manière individuelle. Ça me semble donc un facteur qui peut compliquer les négociations ou entre la capacité de négocier collectivement, qui est un minimum d'entente collective, et celui individuellement, qui est souvent le rôle, comme je disais, soit de l'artiste, le fait seul ou par le biais d'un agent d'artistes.

Le deuxième article qui nous préoccupe, c'est l'article 68.5 du projet de loi qui permet au gouvernement d'intervenir par règlement pour modifier soit les notions ou les définitions qui pourraient être celles d'artistes ou de producteurs. Je pense qu'un constat aujourd'hui, c'est des notions sensibles qui sont fondamentales dans l'application de la Loi sur le statut de l'artiste. Donc, ce qu'on suggère plutôt, c'est de rayer cet artiste qui et de garder la faculté de faire des modifications dans le cadre d'une révision subséquente de la loi. Il a été mentionné que la possibilité que la loi soit révisée aux cinq ans...

Mme Leduc (Geneviève) : ...s'apprêtent, à ce moment-là, une bonne opportunité de faire cette révision-là, si c'est le souhait du gouvernement.

En terminant, puis... pas tout à fait. Avant, juste concernant l'article 68.6 qui donne au gouvernement le pouvoir de fixer les conditions minimales d'engagement, parce que c'est ce qui est prévu dans l'article 68.6, seulement être conscients que c'est le travail aussi des associations de producteurs de négocier des conditions d'engagement avec les associations d'artistes.

Ne pas sous-estimer la difficulté de fixer des conditions minimales d'engagement dans des secteurs qui prend en considération les besoins d'une variété de producteurs. Que ce soit, comme je disais, le documentaire ou la jeunesse, il y a des réalités différentes auxquelles les associations doivent composer quand ils fixent les minimums d'engagement. Donc, pour ce domaine-là, ce pouvoir-là, ce qu'on propose, et je crois que c'est bien détaillé dans notre mémoire, c'est vraiment de l'utiliser seulement quand c'est des domaines où il y a absence de conditions d'engagement et non pas comme un concurrent à la l'AQPM ou une autre association comme l'ADISQ, qui a comme mission de négocier des conditions minimales d'engagement avec ses partenaires. Parce que nous, on les voit comme les partenaires, les associations d'artistes.

Ici, par exemple, en audiovisuel, le gouvernement émettait des règlements concurrents à celles négociées par l'AQPM. La question que je me pose, c'est : Pourquoi que les membres de l'AQPM resteraient chez nous? Parce qu'à ce moment-là il y a un règlement qui viendrait régir vraiment les relations de travail et notre raison d'être serait questionnable.

En terminant le cinq minutes, s'il m'en reste au moins une, je céderais la parole à... bon, c'est parfait, à Me Frédéric Massé, concernant deux autres points sur...

M. Massé (Frédéric) : En fait, Mme la Présidente, je comprends qu'il me reste peu de temps. Simplement, on m'avait demandé de rétroagir par rapport à plusieurs commentaires qui ont été faits par d'autres associations précédemment. Et je mentionnerai que, si des questions sont posées, il y a des commentaires qui ont été faits, qui nous apparaissent très particuliers sur trois notions.

La question de la responsabilité des tiers où il y a beaucoup de commentaires qui ont été faits, il y a été mention de peut-être faire des amendements. On aurait des observations, parce que ce qui a été dit nous apparaît curieux.

Toute la discussion sur le gel relatif, l'article 36.1. Suite aux commentaires qui ont été faits par... nous aurions aussi des commentaires à vous faire, parce que ce qui a été mentionné nous apparaît un peu curieux.

Et peut-être une brève note sur le devoir de juste représentation, car on a semblé vouloir distinguer beaucoup, beaucoup le Code du travail de la loi sur le statut de l'artiste. Or, ma foi, ce n'est pas assez différent. Donc, on aurait peut-être une observation à faire sur ce point-là. Merci.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Alors, merci pour vos exposés. Nous allons commencer la période d'échanges. Mme la ministre.

Mme Roy : Oui. Bien, allez-y. Bonjour. Bonjour, tout le monde. Allez-y

M. Massé (Frédéric) : Très brièvement sur c'est sur ces trois thèmes-là, Mme la ministre. D'abord, la responsabilité des tiers. D'abord, je veux souligner qu'on a parlé très vite de trois choses complètement différentes : la question des sociétés liées, la question de la sous-traitance et la question des administrateurs. C'est complètement différent.

La responsabilité des administrateurs, c'est une chose. Il y a beaucoup de législation en droit du travail qui responsabilise les administrateurs. Vous l'avez mentionné, l'article 154 de la Loi sur les sociétés par actions prévoit une mécanique de cette nature-là. A priori, ce n'est pas choquant. C'est curieux, mais ce n'est pas une modification qui serait choquante. C'est quelque chose qu'on voit ailleurs.

Les deux autres notions, elles, soit de responsabilité... les sociétés liées, et d'interdire, ou d'empêcher, ou de responsabiliser les sous-traitants, ça serait très, très, très déstructurant pour l'industrie, à tout le moins l'industrie de l'audiovisuel.

La notion des sociétés liées, si on devait les responsabiliser non seulement ça poserait des questions immenses pour des producteurs étrangers, ça poserait aussi énormément de questions dans le financement même des sociétés québécoises, leur fonctionnement. Il y a plusieurs règles de la SODEC ou d'autres organismes qui ne permettent pas d'utiliser des sommes d'une société X pour une société Y. Donc, ça contreviendrait à plusieurs notions.

Et la question de la sous-traitance, comme vous l'avez dit vous-même, Mme la ministre, d'interdire la sous-traitance dans notre industrie, c'est à toutes fins pratiques impossible de punir des sous-traitants ou de responsabilité des gens entre eux parmi les sous-traitants. Ça pose des enjeux très conséquents et ça pourrait, je dirais, faire disparaître un certain nombre d'entreprises. Donc, ça aussi, c'est un enjeu très majeur.

Donc, de ces trois approches là, administrateurs, probablement la plus simple, les deux autres nous apparaissent très, très difficiles à atteindre.

La question du gel relatif. Donc, pour ceux d'entre vous qui ne fait pas régulièrement du droit du travail, il faut comprendre que la notion de gel relatif, donc le maintien des relations de travail... des conditions de travail, il y a trois principes, il y en a...

M. Massé (Frédéric) : ...il y a un gel partiel, il y a un gel complet. La loi actuelle ne prévoit rien, O.K., elle prévoit que les parties peuvent négocier quelque chose, mais elle n'impose pas un gel relatif. Le projet de loi imposerait un gel relatif, partiel, mais pas complet, O.K. L'AQPM est d'accord avec ça, ça ne pose pas d'enjeu dominant, nos ententes prévoient toutes, déjà, ces clauses-là, de toute façon.

Un gel complet, c'est quoi la différence? Ce qu'il faut comprendre, c'est quand c'est un gel partiel, si on déclenche une grève, par la suite, il n'y a plus d'entente. Donc, il y a une liberté qui est réacquise, O.K. Il y a une espèce de rapport de force qui se refait. Si on a un gel complet et qu'il y a une grève, on appelle ça des grèves perlées, O.K., qui se déclenchent, le lendemain de cette grève perlée là, les producteurs sont encore tenus par les ententes collectives. Sans autre moyen de contrer ce pouvoir de force là, ça débalance complètement les négociations.

Je donne un exemple. On a un gros show, il vaut 10 millions. C'est un immense show. Disons, c'est la finale de Star Académie. Un syndicat manifeste sur ce show-là, un soir. Le rapport de force qu'il obtient en faisant ça est immense. En théorie, s'il fait ça dans le contexte actuel des ententes collectives, le lendemain, l'AQPM peut faire des recommandations de modification de conditions d'engagement et se donner un rapport de force réciproque, O.K. Si on avait un gel complet, on ne pourrait pas faire ça. Le rapport de force serait complètement déséquilibré.

Dans l'éventualité ou le gouvernement envisagerait de faire un amendement de cette nature-là, et ça nous apparaît être un immense amendement à faire à la vitesse à laquelle on procède actuellement, il serait impératif selon nous, à tout le moins, de considérer de faire l'amendement que nous proposions à l'article 23 du projet de loi, c'est-à-dire de préciser c'est quoi, les moyens de pression dans notre industrie. L'AQPM avait fait des représentations par rapport à ce point-là dans son mémoire initial, il y a déjà de cela un an et demi, et elles n'ont pas été retenues. Ça ne nous posait pas d'inconvénient majeur parce que, par ailleurs, on ne voulait pas changer l'exercice du droit de grève, mais si on voulait changer l'exercice du droit de grève, pour nous, ça redeviendrait d'actualité de façon très importante de considérer cette réalité-là. On avait d'ailleurs fait une proposition dans notre mémoire très, très récent, pour un autre texte sur l'article 35.1, qui est la contrepartie, donc l'article 23 du projet de loi, et on vous inviterait à la considérer très sérieusement.

Pour ce qui est du devoir de représentation, un très court... une très courte note. Même sous le Code du travail, tu n'es pas obligé de négocier pour tout le monde. Ce n'est pas une réalité, là, tu peux négocier seulement pour certaines personnes. Et en vertu de la LSA, tu peux demander d'avoir des cotisations syndicales de n'importe qui. Il suffit juste que tu envoies un avis de négociation. Donc, les réalités ne sont pas si différentes.

J'ajouterai que les syndicats définissent ce qu'ils veulent représenter, O.K. C'est l'UDA, à titre d'exemple, qui a demandé de représenter les interprètes dans tous les domaines artistiques. C'est l'ARC qui a demandé de représenter les réalisateurs dans tous les domaines. À partir du moment où l'Arc représente les réalisateurs dans tous les domaines, aucune autre association ne peut le faire. Ce que ça veut dire, c'est que si l'Arc, à titre d'exemple, n'a pas envoyé d'avis de négociation pour les producteurs de publicité pendant quinze ans, personne d'autre ne pouvait le faire à la place. Et si l'Arc n'avait pas de bonnes raisons de ne pas envoyer d'avis de négociation, les gens qui étaient dans ce sous-groupe-là étaient dépourvus de tout droit. Donc, il est utile, quant à nous, qu'il y ait un devoir de juste représentation. Ça ne veut pas dire que l'Arc serait obligé de négocier pour tout le monde, mais ça voudrait dire qu'il justifie.

• (18 h 30) •

La même chose en danse, pour l'UDA. L'UDA, pendant de très, très, très nombreuses années, a tenté par à-coups, je vais dire ça comme ça, de négocier des ententes collectives. Mais pendant qu'elles le faisaient, aucune autre association de danseurs ne pouvait demander à être reconnue. Et si un jour certains danseurs avaient voulu dire : Faites en plus pour nous, vous avez demandé à être... à nous représenter, c'est vous qui avez fait ce choix-là, faites-en plus pour nous. Ils n'avaient pas ce pouvoir-là. Le projet de loi, dans sa facture actuelle, permettrait d'avoir ce débat-là, cette discussion-là qui nous apparaît saine pour un mouvement syndical, et conséquemment, le texte, tel que proposé, pour nous, il n'est pas choquant, il n'est pas dérangeant. Il correspond à une réalité qui est adaptée à notre milieu.

Mme Roy : Merci, c'est très éclairant vous entendre, puis c'est intéressant pour le bénéfice des gens qui nous écoutent. C'est que l'ADISQ et l'AQPM, c'est l'autre côté de la médaille, c'est les employeurs, c'est les patrons et c'est pour ça que c'est important d'avoir tout le monde autour d'une table.

Vous disiez quelque chose... je vais juste me permettre quelques petits apartés, là. Vous avez dit quelque chose, madame Bouchard, d'intéressant, vous dites : Ce projet de loi là ne réglera pas tout, puis on s'en était parlé. Ça ne réglera pas tout, mais on a aussi travaillé d'autres...


 
 

18 h 30 (version non révisée)

Mme Roy : ...d'autres moyens, d'autres mesures, des mesures complémentaires. Je vais vous donner un exemple. Vous l'avez sûrement vu passer. Le gouvernement, donc, nous avons décidé d'augmenter les cachets des artistes, les artistes qui vont se produire dans les écoles. On a fait passer les cachets pour les artistes qui sont reconnus par le répertoire la culture à l'école, on a fait passer leur cachet de 325$ à 515$, et c'est indexé. Donc, ça va monter tout, tout, tout au fil des années qui viennent. Donc, c'est pour vous dire qu'on tente aussi par différents mécanismes d'aider... d'aider le milieu. Donc, je voulais juste le souligner parce que je pense que c'est à mon droit de dire que c'est... Ça ne règle pas tout, mais il y a aussi la possibilité de mettre des mesures dans d'autres... dans d'autres outils. Voilà!

Maintenant, il y a quelque chose d'intéressant que j'ai lu dans votre mémoire et que j'aimerais... Puis il y a des petites corrections qu'on apportera, on en a parlé. J'aimerais revenir. Vous nous parlez... Là, je parle l'ADISQ. Vous nous parlez dans votre mémoire du deuxième paragraphe de l'article 27 qui établit les facteurs à considérer lors d'une négociation. Nous, on nous a expliqué qu'il fallait considérer la hauteur d'un budget de production plutôt que la taille de l'entreprise. Donc, on a modifié paragraphe en conséquence. Conditions économiques qui caractérisent les divers types de production. Vous, vous nous dites : Attention. Alors, j'aimerais que vous nous expliquiez pourquoi vous souhaitez que nous réintégrions dans ce paragraphe les petites entreprises de production comme facteur à considérer. En d'autres mots, si je vulgarise, tu peux être petite et avoir un bien gros budget de production. Ça fait que c'est pour ça que, nous, on a voulu axer sur la grosseur du budget et pas la grosseur de l'entreprise. Puis vous, vous me dites : Non, Mme la ministre, il faut que ça soit la grosseur de l'entreprise. Expliquez-moi pourquoi.

Mme Bouchard (Lyette) : Je pense que ça peut être tout ça. Ça peut être tout ça. C'est-à-dire qu'on peut aussi être une petite entreprise et avoir de très petits budgets aussi.

Mme Roy : Totalement.

Mme Bouchard (Lyette) : Donc, c'est ça l'objectif. Dans notre... Au sein de notre association, la grande majorité des entreprises ont deux employés ou moins. Ce sont souvent de petites productions aussi. Donc, c'est pour ça que, pour nous, il est important dans le cas des négociations de s'assurer qu'on tienne compte aussi des petites entreprises de production. Alors, on voulait le ramener, l'ajouter aux critères que vous avez amenés, donc d'émergence et autres critères.

Mme Hébert (Sophie) : S'il y a un point à ajouter là-dessus, c'est que dans notre secteur, un point extrêmement soulevé par l'ensemble des producteurs que nous représentons et des producteurs que nous ne représentons pas, mais qu'on peut leur parler aussi, c'est tout l'administratif qui découle des applications des ententes collectives. Vous le savez, on a eu du papier carbone, on en a encore. Ça va partir. Merci. On est... On est vers la sortie du papier carbone, mais c'est ce qui est décrié le plus fortement, tout l'administratif qui découle. Le fait d'appliquer des ententes collectives exige l'embauche d'une personne supplémentaire en comptabilité. Et c'est majeur pour les petites entreprises de production qui ne comptent que deux personnes ou moins, incluant le propriétaire ou la propriétaire de la boîte, là. Donc, c'est pour ça. Puis on a consulté aussi, on a parlé à d'autres associations soeurs, notamment dans le théâtre, et ils ont le même problème, le même problème, la même réalité. Et pour nous tous, après discussion, on a considéré que c'était important de ramener ce concept-là de la petite entreprise de production. On se le disait entre nous, on est tous des... majoritairement, on représente tous des petites entreprises de production. Mais il y a un corollaire extrêmement important qu'on ne doit pas garder... qu'on doit garder en concertation, c'est le fait qu'il n'y a pas beaucoup de gens pour appliquer les ententes collectives et l'administratif qui en découle.

Mme Roy : O.K. Je vous entends. Puis nous, on avait enlevé la grosseur de l'entreprise parce qu'on se disait, dans le fond, ce qui compte, c'est la grosseur du budget. Il arrive... Que tu sois gros ou que tu sois petit, combien d'argent est-ce qu'on consacre à la réalisation du projet?

Mme Hébert (Sophie) : Il peut y avoir des projets avec un très gros budget, mais avec deux personnes dans l'entreprise pour faire tout ce qui en découle. Donc, c'est pour cette raison-là qu'on a considéré que c'était important de réintégrer la notion de petite entreprise de production parce que, oui, on prend en considération les conditions économiques, mais c'est inclus là-dedans le fait que la main-d'oeuvre est très mince à l'intérieur de l'entreprise. Donc, c'est important pour nous de ramener le concept de petite entreprise de production.

Mme Roy : Je vous entends. Maintenant, je vais poser la même question à chacun des groupes, à l'ADISQ puis à l'AQPM. Le projet de loi, tel que rédigé, selon vous, quelles seraient les plus importantes avancées pour justement vos membres?

Mme Bouchard (Lyette) : Elle est à nous la question.

Mme Roy : Oui, chacun votre tour.

Mme Bouchard (Lyette) : Le projet de loi... bien, c'est sûr que le 68.6 est un article important. Je l'ai dit tantôt, hein, nous, on souhaite que les conventions collectives s'appliquent le plus largement possible. Le phénomène de l'autoproduction fait en sorte qu'il y a un nombre important de petites entreprises de production qui passent sous le radar et qui ne respectent pas les conventions collectives que nous avons négociées dans notre secteur...

Mme Bouchard (Lyette) : ...nous, ce qu'on souhaite, c'est que ces petites entreprises-là appliquent aussi les conventions collectives. Quand une ou un artiste autoproducteur gère sa propre compagnie, fait sa propre production, engage des choristes, il engage des musiciens, on souhaite qu'il/elle applique les conventions collectives que nos membres, petites entreprises, appliquent également. Pour nous, c'est important pour notre secteur que ces entreprises-là qui passent sous le radar, bien, agissent dans le... sont dans le même carré de sable, qu'ils appliquent les mêmes règles que nos membres. Et il y a des producteurs qui ne sont pas des artistes autoproducteurs, qui ne sont pas au sein de l'ADISQ et n'appliquent pas les conventions collectives. On souhaite évidemment que ces entreprises-là appliquent aussi les conventions collectives. Et pourquoi ils ne rejoignent pas les rangs de l'ADISQ? Justement parce qu'ils ne veulent pas appliquer de convention collective.

Alors, nous, ce qu'on dit 68.6 est important pour justement faire en sorte qu'il y ait un régime qui s'applique de façon large, uniforme, avec des règles qui sont en lien, en phase avec l'écosystème d'aujourd'hui, qui puissent accueillir. Nous, ce qu'on rêve, c'est que la convention soit tellement attrayante, qu'on ait envie de venir la respecter. C'est ça qu'on souhaite, et c'est ce qu'on s'attelle à faire en ce moment justement avec l'Union des artistes et à la Guilde, notamment dans le domaine du phonogramme.

Mme Roy : Merci. Et l'AQPM?

Mme Leduc (Geneviève) : Donc, sur l'apport... Oui, je comprends la question, c'est l'apport des modifications dans notre domaine ou l'ajout.

Mme Roy : Oui, exact.

Mme Leduc (Geneviève) : Je dirais que... Je vais mettre la AQPM un peu comme avant-gardiste parce qu'il y a beaucoup de choses qu'on avait déjà dans les ententes collectives. Donc, au niveau du harcèlement, au niveau de beaucoup de dispositions qui étaient déjà prévues dans le projet de loi, sont déjà intégrées dans les ententes collectives négociées par l'AQPM depuis 2018, 2019.

Par ailleurs, il y a des dispositions comme le pouvoir du tribunal qui est un plus, négociation de mauvaise foi également. Je vous dirais que je rejoins ma collègue sur une grande préoccupation, par exemple, sur notre capacité de négocier des ententes collectives. Et là, on revient à ce moment-là à l'article 68.6.

Donc, comme je vous disais, on a une très grande variété de types de production. On a eu l'occasion d'échanger sur le fait que c'est des fois des très petits budgets, court métrage de 15 000 $ qui n'est pas la même réalité d'un long métrage de 15 millions de dollars. Et c'est sûr que c'est un défi. C'est un défi pour les producteurs, c'est un défi pour l'AQPM elle-même. Donc, c'est sûr que 68.6 il est tout de même une source de préoccupation.

Mme Roy : Puis je vais poursuivre dans la foulée. Puis je pense que tout le monde ici autour de la table puis les artistes, mais il n'en reste plus beaucoup dans la salle, mais il y en a quand même, devront, je le souhaite ardemment, s'asseoir autour de la table parce qu'effectivement, on ne peut pas commander les mêmes conditions à un producteur qui aurait une toute petite production avec un tout petit budget. Et de toute évidence, il ne peut pas payer les mêmes salaires qui sont payés sur les grosses productions de plusieurs millions. Je pense qu'il faut vraiment assimiler cette réalité-là. Alors, je souhaite que dans les négociations, on le prenne vraiment en considération. Il y a une grande différence à cet égard pour qu'il y ait ce partage des ressources entre tous. Puis ce qu'on veut, c'est autant faire grandir les petites entreprises que continuer à faire briller les grandes. Ça fait que je pense que ça, c'est... en tout cas, c'est mon souhait le plus cher que tous puissent s'asseoir à la table et prendre en considération la taille et le budget des entreprises pour en ce qui a trait au respect des obligations, des obligations qui peuvent être différentes aussi. Je veux vous remercier pour votre... Il me reste-tu du temps?

• (18 h 40) •

La Présidente (Mme IsaBelle) : 1 min 40 s

Mme Roy : Hi, là, là. Aussi bien dire qu'il reste très peu de temps.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Pour les remerciements.

Mme Roy : Pour les remerciements. Écoutez, oui, puis ça permettra à la collègue de l'opposition officielle de poursuivre. Mais je veux vraiment vous remercier pour votre disponibilité et votre mémoire, les lumières que vous nous avez apportées à l'égard de l'application. Puis on est vraiment là-dedans, là, depuis ce matin, là, de voir dans quelle mesure on peut peaufiner, aider. Il y aura des amendements, pas tout comme je dis depuis le début, ce sera... on tente de colmater des brèches et puis réunir davantage de gens. On ne pourra pas tout accepter comme modifications parce qu'il y a des règles de droit qu'il faut appliquer, là, mais on va essayer d'améliorer de belle façon. Alors, je vous remercie beaucoup pour vos travaux. Merci pour votre participation.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci. Alors, nous poursuivons la période d'échange avec la députée de l'Acadie.

Mme St-Pierre : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Ça a été une très longue journée, mais très, très, très enrichissante. Vous avez dû un peu sursauter lorsque vous avez... tous ceux et celles qui sont venus nous dire qu'il faut que la demande de règlement... en fait, que le règlement soit à la demande...

Mme St-Pierre : ...vous allez plus loin. En fait, vous allez plus loin... Vous allez complètement dans l'autre sens. C'est l'article 68.5, qui est comme, pour vous, quelque chose qui va être catastrophique, si je comprends bien.

Mme Hébert (Sophie) : 68.5 ou 68.6?

Mme St-Pierre : Bien, il y a les deux, là.

Mme Hébert (Sophie) : Le 68.5, c'est de réglementer...

Mme St-Pierre : Il y a 68.5, il y a 68.6.

Mme Hébert (Sophie) : Bien, pour nous, ce sont deux choses différentes, là, ce sont deux pouvoirs de réglementation, le 68.5 étant de réglementer sur notamment des définitions. On considère que le travail est en train de se faire et sera complété.

Mme St-Pierre : O.K. C'est celui-là que vous demandez qu'on enlève.

Mme Hébert (Sophie) : Exactement. Le 68.6, du côté de l'ADISQ, on ne demande pas de l'enlever, mais, comme les associations d'artistes l'ont fait, nous demandons aussi qu'il soit davantage structuré et encadré, parce qu'effectivement il ne faudrait pas que 68.6 soit utilisé comme une manière de court-circuiter un processus de négociation dûment entamé. C'est un peu comme une loi spéciale. On ne sort pas la loi spéciale dès la première approche, là.

Mme St-Pierre : Bien, en fait, vous avez entendu ceux qui sont venus plutôt dire : Nous, nous sommes des réalisateurs, nous sommes une petite association. Moi, ce que j'ai compris, c'est que ça ne sera pas long qu'ils vont demander au gouvernement de faire la job à leur place parce qu'ils sont trop petits puis ils n'ont pas les moyens d'aller voir tout le monde. Et ça, c'est pour ça, la notion de «à la demande». Ils vont le demander rapidement. C'est ce que j'ai compris, moi.

Mme Hébert (Sophie) : Oui, bien, c'est ce qu'on comprend aussi puis... Allez-y, allez-y. Bien sûr, allez-y.

Mme St-Pierre : Puis vous, vous voyez une compétition. Vous voyez une compétition entre ces...

M. Massé (Frédéric) : Le danger, Mme la députée...

Mme St-Pierre : Oui, c'est ça que j'essaie de...

M. Massé (Frédéric) : ...puis il faut bien le comprendre, là, parce que c'est ça qu'il faut voir, là, c'est que le règlement établirait des conditions minimales. Les ententes font la même chose. Il faut voir que, dans notre milieu, la raison de devenir membre d'une association de producteurs, c'est d'avoir accès à des pools de main-d'œuvre, O.K.? La seule façon normalement d'avoir du talent syndiqué, tu sais, «go union», c'est d'être membre d'une association parce que ça me donne accès à l'entente collective.

Mme St-Pierre : Mais ce n'est pas obligatoire d'être membre.

M. Massé (Frédéric) : Vous avez tout à fait raison. Si, pour une raison ou une autre, il y a un règlement qui établit des conditions minimales d'engagement qui est adopté, les associations de producteurs comme l'AQPM et l'ADISQ n'ont à toutes fins pratiques plus de raison d'être. Parce que vous allez établir des planchers qui vont permettre aux gens d'avoir accès à ces conditions-là.

Or, je peux vous assurer, Mme la députée, que la meilleure façon d'augmenter les conditions d'engagement des artistes, c'est plutôt d'avoir plus d'associations de producteurs. Parce que l'AQPM, avant même qu'il y ait une loi, elle négociait des conditions d'engagement qui étaient très avantageuses. La plupart des éléments que vous mettez dans la loi présentement, ce sont des choses que l'AQPM a insérées dans ses ententes collectives il y a dix ans. Nous, on n'en a plus, de débat sur le harcèlement psychologique, c'est réglé depuis longtemps.

Le danger, c'est que les règlements deviendraient la voie facile pour tout milieu où il y a une potentialité que ça soit adopté, que les producteurs se disent : Moi, je n'investirai pas de l'argent, ça coûte une fortune négocier une entente collective, là, moi, je n'investirai pas de l'argent, des ressources, des cotisations dans des associations de producteurs pour qu'ils viennent négocier plus, je le sais que, dans trois ans ou dans cinq ans, le gouvernement va faire le travail pour nous. Parce que c'est très différent, à titre d'exemple, d'un décret de conventions collectives. Un décret de conventions collectives, c'est un minimum. Une convention collective, c'est «above». Mais les associations de producteurs, ils négocient des minimums. Donc, ça serait exactement des compétiteurs.

Et, dans ce contexte-là, c'est pour ça que l'AQPM, ce qu'ils disent, c'est : Il y a certainement des milieux qui ne sont pas assez structurés, O.K., où est-ce que, pour tout un paquet de raisons, il n'y a pas assez d'argent, il n'y a pas assez de profits, ça ne vaut pas la peine de se constituer des grosses associations de producteurs. Dans ces milieux-là où il n'y en a pas d'ententes collectives, là, ça vaut la peine que le gouvernement agisse parce que, là, vous pourriez avoir une valeur ajoutée, vous ne feriez pas double usage avec des ententes prénégociées. Mais, si vous vous servez du pouvoir réglementaire pour patcher des trous, il y a un domaine, disons, l'audiovisuel, 80 % ou 75 % des productions sont couvertes par une entente collective, si vous adoptez un règlement pour couvrir le 25 % qui manque, un, ça va être très, très, très compliqué. Au départ, là, je pense qu'on sous-estime la difficulté, tu sais, il n'y en a pas d'autre modèle, au Québec, qui fait ça, là. Le décret de convention collective, vous prenez une convention qui existe déjà puis vous l'appliquez à tout le monde. S'il fallait que vous...

Mme St-Pierre : Bien, il pourrait faire un copier-coller de votre entente?

M. Massé (Frédéric) : Et là vous feriez disparaître 25 %. J'assume que la raison pour laquelle le gouvernement n'a pas mis de l'avant le fait de nous rendre obligatoires ou de décréter nos ententes, c'est parce qu'on accepte le fait qu'il y a un certain nombre de productions qui, pour tout un paquet de bonnes ou mauvaises raisons, ne peuvent pas se faire avec nos conditions, on est trop chers. Donc, pour que ces choses-là subsistent, soit ils sont dans une «union»... mais là, si vous mettez des règlements...

M. Massé (Frédéric) : ...nous, nos ententes, c'est... Vos règlements vont être des minimums. Nos ententes, c'est des minimums. Prochaine négociation, on va s'asseoir puis on va dire : Très bien. On sait c'est quoi, le minimum, c'est ça. Puis, rapidement, les associations... sur un horizon de cinq à 10 ans, les associations de producteurs vont perdre de leur utilité.

Donc, ce que, nous, on propose - puis on répond, je pense, à toutes les préoccupations qui ont été mises de l'avant autant par l'UDA que par l'AQTIS, puis un peu aussi à une question que vous avez posée - nous, ce qu'on dit, c'est : Il faut que ça soit à la demande d'une association d'artistes reconnue. On est tout à fait d'accord avec ça. Nous, on répond à la question que vous aviez posée à l'AQTIS, vous leur demandiez combien de temps... C'est à l'UDA, excusez-moi, que vous demandiez cette question-là.

Mme St-Pierre : Oui, ce matin, oui.

M. Massé (Frédéric) : Nous, on dit : Minimum, trois ans, il faut que tu aies essayé pendant 3 ans.

Mme St-Pierre : O.K.

M. Massé (Frédéric) : Et c'est court. Soyons honnêtes, là, on aurait pu mettre cinq ans, parce que c'est...

Mme St-Pierre : C'est court?

M. Massé (Frédéric) : ...long, le processus, mais on comprend que dans certains domaines il y a une forme de préoccupation rapide, là, puis vous les avez entendus : en danse, peut-être dans l'événementiel, quoique dans l'événementiel, je n'aimerais pas être le législateur qui adopte un règlement, parce que le minimum, ça risque d'être difficile à écrire, mais je comprends qu'il pourrait y avoir une intervention. Mais, dans ces domaines-là, où ils ne sont pas structurés, ça peut être utile. Alors, nous, ce qu'on ajoute comme critère, c'est : ça pourrait être fait à la demande après que le Tribunal administratif du travail ait attesté -  puis ça peut se faire très vite, c'est un exercice qu'on fait souvent devant le Tribunal administratif du travail - qu'il n'y a pas d'entente, entre parenthèses, dominante dans ce domaine-là.

Donc, à titre d'exemple, nous, en audiovisuel, ce qu'on dit, c'est : Ce n'est pas un domaine où cette espèce de juxtaposition entre un règlement probablement plus bas que ce qu'on offrirait puis nos ententes est susceptible d'être efficace. Alors, on les pousse vers les domaines où est-ce qu'il n'y a pas d'entente collective. Et ça correspond à l'essentiel des domaines où est-ce qu'historiquement les associations d'artistes ont dit : On n'est pas capables d'avoir des conditions de travail minimalement décentes. Parce que ce n'est pas un argument que vous entendrez beaucoup, à titre d'exemple, de l'audiovisuel. En audiovisuel, souvent, les gens vont avoir l'impression qu'ils viennent en audiovisuel pour augmenter leur rémunération.

Mais le but, nous, de ce qu'on dit, c'est : les secteurs où la loi a bien fonctionné, laissons-là fonctionner. Vous avez ajouté la plainte de négociation de mauvaise foi, qui va faire d'immenses différences, là, ça va vraiment changer significativement la dynamique entre les parties, ça risque d'être coûteux, là, mais ça va beaucoup, beaucoup changer la dynamique entre les parties. Voyons comment ça, ça fonctionne. Puis, dans les domaines où il n'y a pas d'association de producteurs, donc, de toute évidence, il ne peut pas vraiment y avoir de plainte de négociation de mauvaise foi, là, on ne négocie pas, dans ces domaines-là, un règlement peut être...

Mme St-Pierre : O.K.. Donc, dans votre esprit, il faudrait ajouter une notion de temps.

M. Massé (Frédéric) : Notre proposition est à cet effet-là, Mme la députée.

Mme St-Pierre : C'est ce que c'est la question que je posais ce matin, comme vous l'avez dit, il y a une notion de temps. Puis, tout à l'heure, on a vu le contraire en disant : Aussitôt que la loi est adoptée, nous autres...

M. Massé (Frédéric) : Cette approche-là, Mme la députée, nous terrorise et, bien honnêtement, va scléroser nos négociations. Parce que, soyons candides, les secteurs, à titre d'exemple, pour prendre cet exemple-là, l'ARRQ vous parlait de la publicité. Et je sais pour un fait que l'ARRQ, pendant, justement, une quinzaine d'années, depuis qu'ils sont reconnus, n'ont jamais tenté de négocier dans ce secteur-là, O.K.? Là, mettons que vous leur dites : Oui, sur demande, on va... Là, je sais qu'ils viennent, il y a deux semaines, d'envoyer un avis de négociation, O.K.? Là, disons qu'eux savent, puis les producteurs aussi vont le savoir, qu'il est possible que vous émettiez un règlement sur demande dans trois mois. Il est à peu près certain que les producteurs publicitaires vont dire : Très bien, je vais attendre le règlement, le gouvernement va faire le travail à ma place.

Mme St-Pierre : Oui. Mais la crainte, ça peut être aussi l'inverse. La crainte, ça peut être, s'il n'y a pas «à la demande» et que le gouvernement s'assoit puis dise : Bien, ils nous ont demandé un règlement, mais on le fera bien quand on voudra, notre règlement, là.

• (18 h 50) •

M. Massé (Frédéric) : Ah! ça, c'est possible. Mais ça, rendu-là, ça devient une décision...

Mme St-Pierre : Mais c'était ça, leur crainte, tantôt, là. S'il n'y avait pas...

M. Massé (Frédéric) : Eux, je comprends qu'ils voudraient vous y contraindre, ils voudraient changer le mot «peut» par le mot «doit». Mais je serais surpris que le gouvernement accepte de devenir la créature des parties.

Mme St-Pierre : J'en viens, je voudrais parler des autoproducteurs. Parce que les autoproducteurs, ce que je comprends, pourquoi ils deviennent autoproducteurs, c'est parce qu'ils ne sont pas... ils ne sentent pas qu'ils ont le service qu'ils méritent avec les grands producteurs. Et...

Mme Hébert (Sophie) : Il y a différentes raisons. En fait...

Mme St-Pierre : Attendez un petit peu.

Mme Hébert (Sophie) : Pardon. Excusez.

Mme St-Pierre : Puis les technologies ont changé. Tu n'as plus besoin d'un immense studio à la Morin Heights pour, maintenant, faire des productions de disques, hein? Et ils n'ont pas accès aux subventions de la SODEC. Alors, si vous voulez faire en sorte que les autoproducteurs soient traités différemment, enfin, soient dans...

Mme Hébert (Sophie) : Dans le giron.

Mme St-Pierre : ...dans la gang, il faut qu'ils aient les mêmes avantages que les grandes maisons de production, ce qu'ils n'ont pas présentement. Il faut qu'ils aillent faire une génuflexion au CALQ pour avoir un peu d'argent puis prouver qu'ils ont peut-être un petit projet de...

Mme St-Pierre : ...faire un petit disque?

Mme Bouchard (Lyette) : Bon, maintenant, ils ont déjà... ils ont eu de l'argent, les autoproducteurs...

Mme St-Pierre : Par le CALQ.

Mme Bouchard (Lyette) : Et par la SODEC, par la SODEC également. Il y a 1 million de dollars qui a été donné aux autoproducteurs, par année, pour les trois prochaines années. Maintenant, c'est à nous, en négociation, de nous assurer que nos conditions soient suffisamment attrayantes pour attirer l'autoproduction, pour que les conditions minimales soient des conditions d'application générale, et ainsi, faire en sorte que ces autoproducteurs-là, qui, des fois, le sont, autoproducteurs, parce qu'ils ont envie, des fois, parce qu'il n'y a pas d'autres maisons de disques qui ont voulu les produire, des fois, parce qu'ils sont autoproducteurs de leurs bandes maîtresses, détenteurs des droits sur leurs bandes maîtresses, mais pas vraiment des autoproducteurs, parce qu'après ils font du «label servicing», donc ils vont faire appel à une maison de disque pour commercialisation, un agent de promo pour la promotion radio, etc., et un distributeur, donc ils vont faire ce qu'on appelle des ententes de services, mais ils vont détenir leurs bandes maîtresses.

Donc, il y a toutes sortes de modèles, la SODEC est en train d'étudier tout ça. Donc, c'est ça qu'on vise. Nous, on se dit : Ces gens-là, ils veulent avoir accès à du financement parfait, il faut aussi qu'ils jouent avec des règles syndicales, comme nos petites entreprises de production, au quotidien, avec toute la paperasse qui s'ensuit. Donc, c'est, pour nous, essentiel qu'ils aient... Nos producteurs paient 9 %, 10 %, 11 %, 15 % de frais producteurs, en vertu des conventions collectives, ce qui passe sous le radar quand il s'agit d'autoproduction. Alors, il n'y a pas ces frais-là qui sont versés au fonds vacances, au fonds... aux REER, à toutes sortes de fonds, donc, qui sont versés aux syndicats. Nous, on dit : Bien, ça doit s'appliquer à tout le monde. Et qu'il y a du financement, bravo, oui, on n'est pas contre ça, et... mais c'est les conventions collectives aussi.

Mme St-Pierre : ...par rapport à ce que l'ADISQ reçoit, que les grands producteurs reçoivent, c'est... on n'est pas...

Mme Bouchard (Lyette) : Non, je suis d'accord, je suis d'accord, mais on ne parle pas des mêmes niveaux...

Mme St-Pierre : ...on n'est pas dans le trèfle à quatre feuilles, là.

Mme Bouchard (Lyette) : Non, mais on ne parle pas des mêmes niveaux de production non plus. Une grande entreprise de production va avoir combien de productions dans son année, ne va pas produire... L'autoproducteur, il se produit lui-même, il n'investit pas dans la carrière d'autres artistes, alors que des grandes entreprises... nos producteurs indépendants vont investir dans la carrière de plusieurs artistes et vont miser, investir sur de la relève et de l'émergence.

Mme St-Pierre : Donc, comment les contraint, dans la loi qu'on a devant nous, pour...

Mme Hébert (Sophie) : Bien, selon nous, c'est un peu ce qu'on voyait dans 68.6. Quand on a lu cet article-là, première lecture, on s'est dit : Peut-être que ça vise notre phénomène de l'autoproduction. On ne pouvait pas se mettre la main dans le feu. On n'avait pas la réponse, mais c'est de cette façon-là qu'on l'a vu. Et de ce qu'on comprend des autoproducteurs, encore une fois, ce n'est pas un problème de cachets, par exemple, ça ne serait pas les cachets dans nos ententes collectives qui pourraient les rebuter. Premier point important, la loi sur le statut de l'artiste, sur le terrain, dans le milieu de la musique, elle est méconnue. Quand on parle de mesures complémentaires à la loi sur le statut de l'artiste qui pourraient grandement aider le milieu de la musique, c'est de l'aide à la formation. Dans le milieu de la musique, ce sont des gens qui deviennent entrepreneurs un peu sans s'en rendre compte, qu'on ne se le cache pas, c'est souvent ce qui arrive. La ligne, elle est ténue entre l'amateur et le professionnel. Celui qu'on pourrait croire amateur dans son sous-sol peut connaître un succès fulgurant du jour au lendemain et devenir un professionnel. Ils ne savaient même pas qu'il devait appliquer une entente collective, ou, même s'il était membre d'une association d'artistes ou non, il ne sait même pas qu'il y a des ententes collectives négociées par l'Association d'artistes. On part de là là, dans notre secteur.

On a entendu des artistes autoproducteurs avec de forts succès nous avouer ne même pas savoir qu'il y avait des ententes collectives applicables dans notre secteur. Et ce n'est pas par manque d'efforts de la part des associations d'artistes ou de la part de l'association de producteurs, mais il y a clairement des efforts encore plus grands qui devront être faits en matière de formation. C'est notamment à ça qu'on faisait référence en matière de mesures complémentaires. Donc, on est conscients que les associations d'artistes se trouvent dans une situation un peu difficile, à savoir envoyer des avis de négo à leurs propres membres.

Mme St-Pierre : ...avis légaux... à lui-même, l'autoproducteur?

Mme Hébert (Sophie) : Bien, il va retenir les services de d'autres personnes, donc nécessairement, en retenant les services d'artistes... Puis, encore une fois, comme on vous dit, ce n'est pas nécessairement une question de cachet, le problème, c'est soit que c'est méconnu ou ils ont peur de l'administratif qui peut en découler. Il en revient à nous maintenant de négocier des ententes qui seront faciles d'application puis intéressantes pour tout le monde. Mais... et c'est d'ailleurs ce qu'on a écrit dans notre mémoire. Si on allait vers cette avenue-là, il ne faudrait certainement pas que le règlement vienne enlever... on rejoint l'AQPM là-dessus, là, que ce soit une iniquité concurrentielle totale. Puis on serait d'accord à ce que les ententes collectives qui sont négociées dans notre secteur actuellement puissent s'appliquer au plus grand nombre possible.

Mme St-Pierre : Donc, selon vous, il faut vraiment qu'il y ait...

Mme St-Pierre : ...à la demande de, il faut qu'il y ait eu un processus avant d'engager?

M. Massé (Frédéric) : Mme la députée, je veux juste mettre une chose bien au clair, c'est parce qu'on parle de deux dynamiques, je pense, totalement différentes, O.K.? Ce qui existe, puis Mme D'Amours, si elle était encore là, nous le dirait, là, dans le monde des pigistes, là, il existe trois façons, il n'y en a 150 000, trois façons d'élargir les ententes collectives. On peut forcer l'adhésion à des associations de producteurs ou à des associations d'employeurs, là, on peut forcer... eux vont avoir des conventions, donc les conventions deviennent applicables automatiquement, O.K.? Ça peut être vu comme anticoncurrentiel, ça pose plein de problèmes, là, mais ça peut être fait. L'autre façon, c'est des décrets. Puis on en a eu, au Québec, ce n'est pas superefficace, c'est cher, il faut créer des comités d'application.

Mme St-Pierre : On connaît ça, les décrets, ici.

M. Massé (Frédéric) : Voilà. Il y a une troisième façon que tout le monde sait, c'est qu'on peut rendre conditionnel à l'application d'une... Ou d'une entente ou d'un ensemble de règles du financement public, O.K. L'AQPM, quand on a lu le projet de loi, ce qu'on a retenu, c'est que le gouvernement, quant à nous, à bon droit, n'avait pas retenu l'option un car problématique, n'avait pas retenu l'option deux car aussi problématique pour d'autres raisons, O.K. restait l'option trois. Vous demandez : Qu'est-ce qu'on pouvait faire dans la loi? O.K. L'option trois, elle n'est pas dans la loi, l'option trois, c'est dans les règles de financement, c'est dans les politiques de la SODEC. Et, pour nous, cette option-là, elle a l'avantage d'être excessivement facile à manier avec beaucoup de finesse. C'est-à-dire qu'aujourd'hui en commission parlementaire, en cinq minutes, on ne peut pas vous donner tous les exemples qu'on pourrait vous donner, mais il y a des cas où ce n'est pas parfait, d'appliquer une entente collective, pour tout un paquet de bonnes ou mauvaises raisons. Mais ça, la SODEC ou d'autres organismes de financement pourraient jouer avec ça puis rencontrer à 100 % les objectifs de l'ADISQ sans miner le travail, je pense, très utile des associations de producteurs pour faire monter les conditions d'engagement des artistes.

La Présidente (Mme IsaBelle) : Parfrait. Merci.

M. Massé (Frédéric) : Donc, ce modèle-là...

La Présidente (Mme IsaBelle) : Merci, merci, merci, vous êtes déjà dans le rouge...

M. Massé (Frédéric) : ...Fonctionne mieux, mais n'est pas dans la loi.

La Présidente (Mme IsaBelle) : ...de beaucoup, beaucoup, beaucoup. Et alors, si on veut pouvoir sortir de la salle, il faut en finir à un moment donné. Merci beaucoup, très intéressant.  Alors, merci, madame Bouchard, madame Hébert, madame Leduc et monsieur Massé, merci pour votre contribution à l'avancement des travaux de la commission.

Avant d'ajourner les travaux, je dépose les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été entendus.

Compte tenu de l'heure, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci beaucoup et bonne soirée à tous et à toutes.

(Fin de la séance à 19 heures)


 
 

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