Journal des débats (Hansard) of the Committee on Labour and the Economy
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(November 29, 2022 au September 10, 2025)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Tuesday, June 3, 2025
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Vol. 47 N° 112
Clause-by-clause consideration of Bill 101, an Act to improve certain labour laws
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10 h (version non révisée)
(Dix heures une minute)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la session de
la Commission de l'économie et du travail ouverte. Merci de prendre quelques
secondes pour éteindre la sonnerie de vos appareils électroniques. Et je le dis
puis, des fois, j'oublie de le faire, moi-même, ça fait que, là, je vais le
faire.
Donc, la commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet
de loi no 101, Loi visant l'amélioration de certaines lois du travail.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. Mme Cadet (Bourassa-Sauvé) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis); Mme Lakhoyan Olivier (Chomedey) est remplacée par
Mme McGraw (Notre-Dame-de-Grâce); M. Fontecilla (Laurier-Dorion) est
remplacé par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve); M. Paradis
(Jean-Talon) est remplacé par Mme Gentilcore (Terrebonne).
Le Président (M. Allaire) : Merci,
Mme la secrétaire. Et là, avant de poursuivre, vous savez, c'est un dossier qu'on
suit depuis quelques semaines, qui est vraiment le dossier le plus important de
la CET, je vous annonce que la députée de Bourassa-Sauvé a eu une belle petite
fille. Donc, c'est une excellente nouvelle... Merci, Thomas, de nous avoir informés,
d'ailleurs, ce week-end, c'est supergentil, puis on prend le temps de la
féliciter, puis profitez de tous ces moments, là, qui vont être assurément, là,
les plus beaux moments de sa vie, dans les prochaines semaines.
Alors, bienvenue, tout le monde, à la CET.
Ce matin, on reçoit deux groupes. D'abord, la Fédération québécoise des
municipalités. On va enchaîner ensuite en visioconférence avec l'Association
des employeurs et mécaniques industriels du Québec.
Alors, on commence avec vous. Bienvenue.
Alors, je vais vous laisser le soin de vous présenter. Ensuite, vous pouvez
commencer votre allocution, là, de 10 minutes. La parole est à vous.
M. St-Pierre (Guy) : Merci.
Bonjour, tout le monde. M. le ministre, M. le Président, je remercie les membres
de la commission de nous recevoir. Je me présente, je suis Guy St-Pierre, maire
de Manseau, dans le plus beau comté, de Nicolet-de-Bécancour, et je suis membre
du conseil d'administration...
Des voix : ...
M. St-Pierre (Guy) : ...et je
siège aussi au conseil d'administration et à l'exécutif de la Fédération
québécoise des municipalités. Comme vous le savez, la FQM regroupe plus de 1050
municipalités et... de municipalités locales et régionales et l'ensemble des
MRC, et, à ce titre, nous sommes les porte-parole des régions.
Aujourd'hui, je suis accompagné de Mme
Éloïse Desgagnés, directrice des ressources humaines et relations de travail au
niveau de la FQM. D'entrée de jeu, la FQM est en accord avec les objectifs du
projet de loi. Bien que les changements proposés soient intéressants, la FQM
souhaite soulever certaines préoccupations et suggérer des ajustements.
Au niveau de l'arbitrage des griefs, le
projet introduit des délais stricts pour la nomination d'un arbitre, soit six
mois, et la tenue de la première audience dans un an. L'objectif est de réduire
les griefs dormants et d'accélérer le processus, ce que la FQM comprend et
appuie en principe.
Nous pensons toutefois que les délais
proposés sont trop courts et qu'une prolongation de délai par entente écrite
entre les parties devrait être permise. Par ailleurs, en traitant tous les
griefs de la même façon, sans hiérarchisation, il est probable que l'effet
contraire à celui recherché par le ministre se produise. En effet, les
nouvelles exigences prévues à l'article 16 du projet de loi créent un
automatisme, plaçant tous les griefs, peu importe leur nature, sur un même pied
d'égalité quant à leurs délais de traitement. D'ailleurs, ces délais entrent en
vigueur dès l'adoption du projet de loi, et nous estimons qu'une entrée en
vigueur graduelle serait préférable. De plus, aucune conséquence n'est prévue
si l'audition ne débute pas dans les délais déterminés, rendant cette
obligation inefficace. Une sanction devrait être prévue, et l'article 47.2 du
Code du travail ne devrait pas permettre d'y déroger.
Enfin, la FQM salue les mesures favorisant
l'efficacité, comme la divulgation préalable de la preuve, les conférences
préparatoires et la médiation. À ce titre, la formule des propositions pour
donner... à ce titre, elle formule des propositions pour donner une place
accrue à la médiation.
Le montant des pénalités. Dans le cadre de
ce projet de loi, le ministre prévoit une révision à la hausse des montants des
amendes pour les infractions à trois lois du travail. La FQM comprend que le
ministre apporte des ajustements à ces montants, notamment parce qu'ils n'ont
pas été révisés depuis plusieurs années et que ces derniers doivent demeurer
dissuasifs. Toutefois, la FQM éprouve des réserves quant à la hauteur de ces
augmentations. Certaines sont quintuplées, d'autres... voire multipliées par
40. Un tel accroissement de ces pénalités...
M. St-Pierre (Guy) : ...des
sommes importantes autant pour les organisations municipales avec des capacités
budgétaires moindres que pour les travailleurs eux-mêmes.
Au surplus, les articles 23 à 28 et
30 et 31 du projet de loi prévoient des amendes journalières : l'impact
financier en est donc multiplié.
Sous certaines conditions,
l'article 9 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail
prévoit qu'un juge peut ordonner des dommages et intérêts punitifs dans le
cadre d'une plainte portée en vertu du Code du travail. Cette façon de faire
est davantage utilisée que les sanctions pénales. Ainsi, par le versement de
dommages et intérêts punitifs, des sanctions... dissuasives, pardon, peuvent
déjà être imposées aux récalcitrants, répondant ainsi à l'objectif du ministre.
Ainsi, la FQM recommande de revoir les
fourchettes des amendes à la baisse tout en haussant celles qui le sont
actuellement.
Les absences pour raisons de santé
publique ou de sécurité civile. L'article 40 du projet de loi introduit
une disposition permettant à un salarié de s'absenter du travail sans salaire
s'il est dans l'impossibilité de travailler en raison d'une directive ou d'un
événement lié à la santé publique, à la sécurité civile ou à un sinistre
reconnu par la loi.
La FQM comprend la pertinence de cet
article, mais s'inquiète des impacts pour les organisations municipales en cas
de situation d'urgence, par exemple. En effet, les municipalités ne sont pas
des employeurs comme les autres.
Lorsqu'un sinistre survient, les employés
municipaux sont à pied d'oeuvre pour limiter les conséquences pour la
communauté et venir en aide à la population. L'apport de ces employés est
indispensable à l'effort de résilience au sinistre. Il en va de même pour le
coordonnateur municipal de la sécurité civile.
Afin d'éviter des situations
problématiques qui ne peuvent être actuellement anticipées, nous demandons au
gouvernement qu'il analyse l'impact d'une recommandation, d'un ordre, d'une
décision ou d'une ordonnance émise afin de tenir compte des modalités
spécifiques aux organisations municipales, comme cela a d'ailleurs été le cas
pendant la pandémie de COVID-19, le tout afin que les dispositions de
l'article 40 du projet de loi prennent notamment en compte des plans de
sécurité civile des municipalités et des futurs plans régionaux de gestion de
risques des MRC.
La confidentialité du dossier médical. À
l'article 62 du projet de loi, le ministre introduit une mesure afin que
le Tribunal administratif du travail puisse s'assurer du respect de la
confidentialité des dossiers médicaux.
Actuellement, lorsqu'une décision de la
CNESST en santé et sécurité au travail est contestée devant le tribunal et
qu'aucune ordonnance de confidentialité n'a été rendue par ce dernier, le
dossier médical d'un travailleur peut être consulté par toute personne par le
biais d'une demande d'accès à l'information. La FQM comprend que la situation
ne peut pas perdurer.
Pour remédier à cette problématique, le
projet de loi prévoit une seule... que seule une personne autorisée par le
Tribunal peut avoir accès à un tel dossier. Or, nous nous questionnons sur le processus
visant à désigner une personne autorisée. Lorsque le dossier médical présente
un intérêt dans le cadre d'un litige, nous estimons notamment que les parties
concernées et les représentants devraient pouvoir y accéder conformément au
principe de justice naturelle.
La jonction des dossiers au stade de
négociation. L'article 6 du projet de loi prévoit l'adoption d'un
processus de négociation suivant la décision initiale d'admissibilité de la
CNESST d'une réclamation d'un travailleur.
Actuellement, en vertu de la Loi sur les
normes du travail, un salarié peut déposer une plainte pour contester le
harcèlement dont il est victime. Un processus est alors entamé par la division
relations de travail de la CNESST. Parallèlement, ce salarié, à titre de travailleur,
peut déposer une réclamation à la CNESST en lien avec un accident de travail,
soit une lésion psychologique ou résultant des mêmes faits.
Dans un tel cas, la CNESST, par le biais
de divisions différentes, doit traiter deux dossiers avec la même trame
factuelle. Le processus de négociation introduit à l'article 6 du projet
de loi, préalable au recours devant le TAT, ne permettra pas de régler
l'ensemble d'un litige dans de tels dossiers.
• (10 h 10) •
Nous croyons que de permettre la jonction
au stade de processus de négociation permettrait d'optimiser l'efficience du
système, en favorisant une gestion plus cohérente et humaine de situations
complexes, tout en permettant le règlement complet de ce dossier pour les
parties.
Nous sommes maintenant prêts à répondre à
vos questions et vous comprendrez que, compte tenu que c'est une... le projet
de loi touche surtout des questions procédurales, bien, ce sera probablement ma
collègue ici qui sera plus enclin à répondre à vos questions.
Le Président (M. Allaire) : Merci
beaucoup, M. St-Pierre. Alors, on débute la période d'échange. M. le ministre,
la parole est à vous pour 16 min 30 s.
M. Boulet : Oui, merci, M. le
Président. Bien, écoutez, merci, M. St-Pierre, merci...
M. Boulet : ...pour votre
présence, pour votre participation à ces consultations particulières. C'est
toujours extrêmement utile, on va analyser et considérer votre mémoire. On va
regarder aussi vos recommandations puis on verra à s'adapter... Peut-être juste
quelques questions de précision, parce que c'était quand même assez clair, M.
St-Pierre. Pour l'arbitrage, ce que vous nous dites, vous êtes d'accord avec
les délais. On peut peut-être y revenir pour les délais, mais est-ce que vous
êtes aussi d'accord avec la conférence préparatoire et la divulgation de la
preuve?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
tout à fait, là. Ce sont des mesures qui vont, tu sais, aider à améliorer
l'efficacité du processus, là.
M. Boulet : O.K. Très bien.
Les délais... Bien, il y a un délai pour la nomination puis il y a un délai
pour la première journée d'audience. J'aimerais ça que vous m'expliquiez que,
bon, il y a un impact, là, pour le non-respect du délai de six mois pour la
nomination. Ça, est-ce que ça vous va, Me Desgagnés?
Mme Desgagnés (Héloïse) : On
le comprenait bien, mais on ne le voyait pas pour... dans le cas où l'audition
n'était pas commencée après le délai prévu.
M. Boulet : La dernière
journée d'audience...
Mme Desgagnés (Héloïse) :
C'est ça.
M. Boulet : ...c'est ce que
j'ai compris des propos de M. St-Pierre. Quelle suggestion vous feriez et quel
pourrait être l'impact?
Mme Desgagnés (Héloïse) :
Bien, en fait, c'est ça, on proposait la même solution qui avait été élaborée
pour le délai de six mois, donc, de prévoir que... des idées, sauf
impossibilité d'agir, il reste toujours cette exception-là. Parce que, sinon,
d'après moi, il va avoir, tu sais, des procédures détournées pour faire en
sorte qu'on va respecter le premier délai, mais le deuxième ne sera pas
respecté, puis il n'y aura pas de conséquence, là. Donc, c'est sûr que, nous,
on était... on favorisait de mettre un délai de rigueur, là, donc, vraiment un
réel délai. Mais dans ce contexte-là, par contre, nos recommandations, on
proposait des délais quelque peu différents, là, pour... Puis on faisait une
distinction avec les griefs de nature prioritaire et non prioritaire, là.
M. Boulet : Donc, pour les
griefs prioritaires, ça serait plus péremptoire, le délai serait... ou
l'inverse.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Non,
en fait, les mesures pour les délais seraient... Dans le fond, le délai serait
plus long, mais à l'issue, si les délais, ils n'étaient pas respectés, dans les
deux cas, que ça soit un grief prioritaire ou pas, il y aurait réputé
désistement, là.
M. Boulet : Donc, un
désistement réputé et... sauf impossibilité d'agir. Est-ce que, Me Desgagnés,
l'indisponibilité d'un arbitre serait considérée comme une impossibilité
d'agir?
Mme Desgagnés (Héloïse) : C'est
une excellente question, j'imagine que ça va être les arbitres qui vont se
prononcer, là. Hier, M. St-Pierre me demandait ce serait quoi, puis là, dans
les exemples qu'il me donnait, un arbitre qui décède, on s'entend que là, ça en
serait une, je ne pense pas qu'il y aurait débat là-dessus. Après ça, bien, ce
serait à voir au cas par cas, mais c'est sûr que, si vous donnez des délais qui
sont suffisamment longs pour nommer les arbitres puis qu'il y a suffisamment
d'arbitres de nommés, ça devient difficile de plaider l'impossibilité d'agir.
M. Boulet : Tout à fait. Je
comprends. Donc, l'objectif, on le partage, il faut accélérer la procédure
d'arbitrage. C'est d'ailleurs l'intention initiale d'avoir ce processus-là pour
qu'il soit expéditif. Malheureusement, ça s'est transformé souvent en gros
procès, avec énormément de témoins, avec plusieurs journées d'audiences, d'où
la recommandation des parties qui sont au Comité consultatif du travail et de
la main-d'oeuvre d'avoir des délais maximaux. On l'a pour... Puis je trouve ça
intéressant, ce que vous nous partagez, Me Desgagnés, pour la nomination pour
la première journée d'audience, la conférence préparatoire, la divulgation de
la preuve, c'est nos principaux outils. Et pour la première journée d'audience,
réflexion à faire, là, tout à fait, vous n'avez pas tort, parce que ça risque
de perpétuer et de prolonger indûment.
Les amendes, j'aimerais ça que vous
reveniez un peu sur les amendes. Je ne suis pas sûr que j'ai bien saisi. Bon,
évidemment, il y a une harmonisation des... des amendes. On réfère à des
dommages-intérêts punitifs quand il y a une intention, bon, vous connaissez le
raisonnement. Quelle est votre recommandation principale sur le quantum des
amendes?
Mme Desgagnés (Héloïse) : On y
réfléchit, puis on a choisi de faire une recommandation vague, là, parce qu'on
n'était pas en mesure d'établir la mathématique derrière les augmentations qui
étaient proposées actuellement. Puis on avait de la difficulté de le faire, là,
disons, il aurait fallu revoir toute...
Mme Desgagnés (Héloïse) : …pour
les travailleurs. Puis là on s'est dit : Bien, tu sais, on va se laisser…
on va prendre un pas de recul. Mais par contre, c'est sûr que moi, quand je
vois qu'il y a des choses… il y a des amendes qui augmentent fois cinq,
d'autres fois 40, je me questionne sur pourquoi? Tu sais, est-ce qu'il y en a
une qui est... Oui Oui, oui, je… il y en avait, là, qui étaient à… de cet
ordre-là. Donc, vraiment, moi, ça me… je me demande c'est quoi la cohérence derrière
les augmentations. Est-ce que... Bon, il y en avait qui étaient plus… Ça
faisait plus longtemps qu'ils existaient, mais quand on le regardait, on l'a
analysé, vraiment, je ne le voyais pas là.
M. Boulet : O.K. Puis là, on
n'aura pas le temps de toutes les décortiquer, là. Mais c'est sûr que quand on
fait un projet de loi, on s'assure d'harmoniser le montant des amendes. Il y a
des amendes qui datent de plus longtemps, qui requièrent une hausse plus
importante, d'autres qui sont plus récentes, et la hausse est moins importante.
Ce qui est le plus important, Me Desgagnés, c'est de s'assurer de la cohérence
dans le corpus législatif québécois. Et ça, c'est travailler beaucoup avec les
affaires juridiques du ministère de la Justice. Évidemment, ils tiennent compte
de la nature de l'infraction ou des infractions similaires dans d'autres lois
pour préserver cette cohérence-là. Ça fait que c'est essentiellement ce qui
guide. S'il y en a… puis moi, je n'ai pas fait la multiplication que vous nous
partagez. C'est vrai que ça semble étonnant, mais probablement qu'il y a des
amendes qui datent peut-être de 1975 ou… tu sais, que ça fait tellement
longtemps que ça requiert un ajustement qui est plus important. O.K. Ça nous a
permis de se comprendre là-dessus. Puis les dommages et intérêts punitifs,
qu'est-ce que… c'était quoi, votre commentaire à cet égard-là?
Mme Desgagnés (Héloïse) :
Bien, en fait, c'est que, tu sais, la préoccupation qu'on lisait, là, dans le
mémoire au conseil du ministre, là, c'était de dire qu'on voulait qu'elles
soient des... dissuasives, sauf que si on regarde par exemple au Code du
travail, là, c'est peu utilisé, c'est vraiment… il y a quelques amendes qui
sont émises annuellement, là, mais c'est vraiment plutôt en vertu de la LTAT,
là, que les partis vont se… bien, vont s'octroyer, le tribunal d'octroyer des
dommages, là, punitifs quand s'y prête. Donc là, on a vraiment l'effet
dissuasif, puis il y a d'autres dommages qui s'ajoutent également, là, quand il
y a des dommages punitifs, c'est bien rare qu'il n'y a pas d'autres dommages
qui sont associés, là. Donc, moi, je voyais que, notamment, là, pour le Code du
travail, il y avait déjà des dommages qui pouvaient être assez dissuasifs, là.
M. Boulet : O.K., O.K., je
comprends. Donc, ce que vous dites, les amendes puis les dommages ont un effet
dissuasif. Dommages et intérêts punitifs, ça se rajoute. Évidemment, le critère
n'est pas le même, là. On réfère généralement à l'intention malicieuse. Puis,
comme il y est fait état dans la Charte des droits et libertés de la personne.
O.K.
Absence, c'est intéressant qu'on vous
reçoive, hein, vraiment, parce qu'on sait que, suite à une directive de la
santé publique ou de la sécurité civile, vous vous souvenez, on l'a vécu durant
la pandémie, puis le gouvernement agissait par décret pour permettre aux
personnes qui devaient s'absenter, la sécurité civile qui devait souvent
évacuer leur maison suite à une inondation ou un incendie, qu'ils puissent
s'absenter, c'est non rémunéré, pour respecter la directive de la santé
publique ou de la sécurité civile.
Ce que vous me dites, puis ça, ça requiert
une réflexion, c'est que dans les municipalités, il y a des personnes qui
doivent être impliquées pour permettre au Québec ou à la ville de lutter contre
la catastrophe, le cataclysme ou la pandémie ou l'épidémie, peu importe, là.
Mais pour donner suite à une directive de la santé publique. Comment vous voyez
ça? Est-ce que vous vous dites… tu sais, par exemple, si une personne doit
évacuer sa maison parce qu'il y a une inondation, est-ce qu'on peut humainement
dire à la personne : Tu ne peux pas t'absenter parce qu'on a besoin de
toi? J'ai de la misère à saisir comment ça pourrait être appliqué. Me
comprenez-vous, Me Desgagnés?
• (10 h 20) •
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
mais c'est ça, on se disait, c'est vraiment une analyse au cas par cas. Puis
est-ce que c'est… parce que là, il y a quand même une façon, tu sais, c'est…
les gens, ils essaient d'éviter de le prendre. Vous avez quand même mis des
limites. Moi, en même temps, moi, je me dis : Est-ce que… c'est de
coordonner de ne pas permettre que tous les employés de la municipalité,
mettons qu'il y a une inondation dans une municipalité, là, que tout en même
temps ne soit pas au travail. Puis C'est sûr que l'objectif, ce n'est pas
d'empêcher les gens, là, de s'occuper de leur maison, puis de leurs biens, là,
mais c'est aussi de s'assurer que mon coordonnateur de mesures d'urgence, il
soit…
Mme Desgagnés (Héloïse) :
...tu sais, disponible, là, puis qu'il ne soit pas absent toute la période de
crise, là.
M. Boulet : Donc, ce que...
Mme Desgagnés (Héloïse) : Ça
fait que, tu sais, on est... Oui, allez-y. Excusez.
M. Boulet : Non, non. C'est
parfait. Je comprends bien. Dans le fond, vous dites : Oui, il pourrait
s'absenter, mais il faudrait qu'il nous accommode ou qu'il s'assure de
coordonner les opérations pour ne pas nous laisser... Tu sais, dans le fond, ça
aurait potentiellement comme conséquence d'accentuer les dommages, là. Tu sais,
c'est ce que vous vous dites.
Mme Desgagnés (Héloïse) : C'est
ça. Donc, il ne faut pas qu'on perde tous les employés en même temps. Je pense
que ça demande une coordination plus. Pendant la pandémie, il y avait la
notion... je pense que c'étaient les employés nécessaires, là, c'était sur la
nécessité. Tu sais, il y avait eu, justement, là, des décrets, puis on avait
permis aux employés municipaux de travailler, donc, tu sais, de penser à ça.
Puis ce n'est pas toutes les situations qui vont s'y prêter là. Tu sais, quand
ce n'est pas... c'est ça. Tu sais, c'est vraiment juste au cas par cas, se
poser la question pour envisager, parce que, justement, les municipalités,
c'est pas des employeurs comme les autres, là. Ils ont aussi... Ils sont aux
premières loges. En tout cas, ce sont des acteurs de premier plan, là, dans ces
situations-là.
M. Boulet : C'est des
employeurs comme les autres, mais, dans ces circonstances-là, ils ont des
devoirs particuliers.
M. St-Pierre (Guy) : On a à
secourir la population.
M. Boulet : Bien oui.
M. St-Pierre (Guy) : Si notre
personnel ne rentre pas au travail, donc qui va faire le travail? Tu sais,
c'est là-dessus qu'on demande qu'il y ait une analyse qui soit faite de comment
on peut... on pourrait exiger qu'ils rentrent au travail, mais sans... tout en
reconnaissant qu'ils ont une problématique personnelle, là. Tu sais, parce que,
ce monde-là, s'il y a 10 personnes qui s'occupent de la sécurité civile et que
les 10 restent dans la municipalité, les 10 sont inondées, bien là il va
falloir trouver ailleurs, trouver dans d'autres municipalités, trouver
quelqu'un qui va prendre la place, tu sais. Donc... Parce qu'on aime ça, dans
les municipalités, que notre monde travaille... qu'il travaille chez nous, y
demeure aussi. Donc, c'est une question qui pourrait soulever des
problématiques.
M. Boulet : Je comprends bien
cette réalité-là, là, surtout... la qualité de vie est intéressante.
M. St-Pierre (Guy) : ...elle
est assez élevée qu'il n'y aura pas d'inondation. Ça, c'est un problème. Il
peut y avoir des feux... Il peut y avoir des feux de forêt.
M. Boulet : Les incendies
sont plus à risque.
Confidentialité des dossiers médicaux.
Bien, Me Desgagnés, M. St-Pierre, c'est sûr que, dans l'état actuel du droit,
une personne pouvait obtenir des informations confidentielles du Tribunal
administratif du travail, ce qu'on ne trouvait généralement pas approprié, là,
parce qu'il y a des informations sensibles qui peuvent affecter, qui peuvent
causer des dommages à la personne dont les informations sont transférées. Donc,
c'est la raison pour laquelle c'est une personne autorisée. La question que
vous vous posiez : C'est qui, cette personne-là? Dans le fond, c'est une
personne intéressée, déterminée par le Tribunal administratif du travail. C'est
ma compréhension. Est-ce que vous avez la même compréhension,
Me Desgagnées?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Mais,
en fait, on voulait s'assurer que les formalités ne soient pas compliquées.
Puis il y a souvent du roulement de personnel, malheureusement, tu sais,
dans... aux municipalités. Ça fait que peut-être que l'obligation de garder
confidentiel a pu se transférer. Tu sais, si c'est le directeur général qui a
obtenu l'information, qu'il puisse le léguer à son successeur, là, pour éviter
la procédurite, là.
M. Boulet : O.K. Je
comprends. Mais, dans le fond, l'information médicale, on sait qu'en vertu de
la Loi sur les accidents de travail, maladies professionnelles, tu sais, il y a
deux parties, généralement, là, il peut en avoir plus, là, mais... Et ce qui
est accessible, c'est via le médecin désigné par l'employeur. Mais je comprends
que l'employeur peut avoir des informations administratives. Mais le pur
médical, normalement, il est accessible via le médecin désigné. Mais ce que
vous dites, Me Desgagnés, c'est que... que ça puisse ne pas être trop
limitatif, que ce soit simple comme procédure, d'une part, puis, deux, que ce
ne soit pas trop limitatif quant à la possibilité, par exemple, d'un D.G. de
partager l'information. C'est...
Mme Desgagnés (Héloïse) : À
son successeur, là. Tu sais, je ne dis pas : On ne va pas aller en parler
en conseil municipal ou en séance publique, là, ce n'est vraiment pas ça,
l'intention, mais c'est de s'assurer que ça ne soit pas Monique Tremblay
personnellement, mais plutôt la fonction ou, en tout cas, le poste occupé, là,
qui soit désigné.
M. Boulet : O.K. Je comprends
le commentaire. Mais c'est une grande avancée, hein, qu'on fait, hein, pour
éviter que ce soit... Tu sais, il y a des informations tellement sensibles dans
un dossier de lésions professionnelles, là, particulièrement suite à une
violence conjugale, ou à caractère sexuel, ou à une lésion psychologique, ou
autre, là. C'est... C'est vraiment...
M. Boulet : ...peut-être
dernier point, vous dites : Négos, jonction de dossiers. Je voudrais juste
voir le lien que vous... Est-ce que vous référez à la négo qui précède la
révision administrative?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
c'est ça que vous introduisez dans le projet de loi, là, à ce stade-là, les
dossiers sont... ils ne peuvent être pas encore être joints. Tu sais, ils sont
joints au niveau du tribunal administratif du travail quand il y a un dossier
aux normes puis il y a un dossier SST qui sont sur les mêmes faits. Moi, j'ai
toujours... à mon sens, quand on règle des dossiers, on règle l'ensemble des
dossiers, on ne règle pas une partie du dossier.
M. Boulet : Ce qui est
important pour moi, c'est qu'il y a des sujets sur lesquels on peut négocier,
pas l'ensemble des sujets, mais les sujets sur lesquels on peut négocier, dans
la mesure où les questions peuvent être négociées et résolues ensemble, il n'y
a pas de problème à ce que ça puisse se faire. Mais est-ce que là-dessus, ça
va?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
ça va, mais on proposait une amélioration.
M. Boulet : Qu'il y ait un
élargissement des sujets qui pourraient être négociés avant la révision
administrative, c'est votre point?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Bien,
puis en les joignant avec les normes du travail.
M. Boulet : Merci beaucoup.
On me dit qu'il n'y a plus de temps. M. Saint Pierre, Me Desgagnés, merci
énormément de votre présence.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Effectivement, le temps est écoulé pour la partie gouvernementale. On enchaîne
avec l'opposition officielle. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, vous
avez 12 min 23 s.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup. Merci. Bienvenue. Merci pour votre mémoire ainsi que pour votre
témoignage. Je veux revenir un peu sur les points que vous avez discutés avec
le ministre, comme, par exemple, les amendes. Je sais que pour les plus petites
municipalités, on peut avoir un impact important, ça fait que pouvez-vous nous
donner un exemple de comment ça fonctionne aujourd'hui puis, si le projet de
loi n'est pas amendé, l'impact sur vos municipalités dont vous représentez,
juste pour qu'on ait une idée de l'ampleur si jamais on n'a pas une évolution.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
donnez-moi quelques instants, là, je vais regarder.
Mme Maccarone : Oui, oui,
allez-y.
Mme Desgagnés (Héloïse) : J'en
avais des pires, là, excusez, je n'ai pas été fine.
Mme Maccarone : Pas besoin
que ce soit exact. Dans le fond, ce que je souhaite, c'est un portrait pour la
bonne compréhension de tout le monde qui nous écoute. Parce que je sais que ça
peut être vraiment phénoménal pour les plus petites municipalités.
Mme Desgagnés (Héloïse) : J'aimerais
ça vous trouver une amende journalière aussi, là, c'est pour ça, j'ai une
intention derrière la tête, là, mais il y en a plusieurs à choisir,
excusez-moi. Bon, ce ne sera pas une amende journalière. Bon, là, c'est ça,
c'est une nouvelle. Il y avait une amende qui était de 1 200 $ à
6 000 $ pour un employeur qui passe de 2 000 $ à
20 000 $. Tu sais, donc, c'est quand même beaucoup d'argent, puis ça,
ce n'est pas une amende journalière, ceci étant dit, mais il y en a plusieurs
qui sont des amendes journalières aussi. Donc là, vraiment, on vient multiplier
l'effet de l'amende en étant des amendes journalières. Je veux juste voir si je
suis capable de... Ah! parce que, là, je devais être... elles sont comme un
peu...
Mme Maccarone : ...genre de
document que vous seriez à l'aise de déposer pour les membres ici.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Bien,
en fait, ça, c'est la loi, là, tu sais, là, qu'on s'est faite, mais je peux
sans problème...
Mme Maccarone : O.K., bien,
c'est juste pour nous donner une idée.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Non,
mais c'est ça, mais, oui, on pourrait compléter, là, avec un exemple plus
concret. On l'avait calculé, mais je ne l'ai pas à portée dans mes notes, là.
Mme Maccarone : Il n'y a pas
de trouble. Ça fait que si je comprends bien, ça peut être fois 10,
fois 20, fois encore plus que ça.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui,
oui, puis il y en avait aussi que c'était journalier, donc là, ça va durer
combien de temps? Tu sais, avant d'être entendu qu'il y a une décision qui soit
rendue, tu sais, ça devenait quand même des montants élevés rapidement, puis
sur des petits budgets, ça paraît, là. Puis, comme on disait, l'intention n'est
pas nécessaire. Donc, on peut commettre une infraction passible d'une amende de
bonne foi, tu sais, là, sans avoir voulu... Puis, tu sais, ça arrive que c'est
par méconnaissance, là, plus qu'autre chose, donc là, bien, on va être pénalisé
de façon journalière pour cette méconnaissance-là. Ça peut monter rapidement,
là.
• (10 h 30) •
Mme Maccarone : Ça fait que
quelle est la solution? Parce que je sais que le ministre souhaite aborder une
amélioration, ça fait que votre proposition, c'est quoi exactement?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Bien,
en fait, on comprenait qu'il fallait qu'on les augmente parce qu'il y en avait plusieurs
que ça faisait longtemps, là, puis que ce n'était plus... Tu sais, je veux
dire, tu sais, si c'est 100 $, ton amende, tu vas dire : Ah! je vais
continuer, il n'y a pas de problème, ça fait qu'il faut trouver un juste
milieu. Donc, on disait augmentez-les, oui, mais peut-être revoir à la baisse
la fourchette, là.
Mme Maccarone : O.K., merci.
En termes de l'absence par rapport à la directive en lien avec la sécurité
civile, encore une fois, j'ai entendu... moi, je souhaite... ça me prend des
exemples de compréhension parce que, pendant que je vous écoute, je lis le
mémoire...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Maccarone : ...le mémoire
ou les échanges que vous avez. Je suis en train d'imaginer un scénario où il y
a un employé de la ville qui est assujetti, malheureusement, à un feu, une
inondation. La règle, aujourd'hui, il me semble qu'on va essayer d'aider l'employé,
n'est-ce pas? Ça fait que, tu sais, j'essaie de comprendre pourquoi on a besoin
de ça. Est-ce qu'on a eu des plaintes? Est-ce que vous, vous avez besoin de...
Est-ce qu'on a besoin d'avoir une certaine flexibilité parce qu'on a des gens
qui se sont : Aïe! voyons donc, je n'ai pas été libéré par mon employeur
puis j'ai fait face à une urgence? Alors, comment ça fonctionne aujourd'hui?
Puis... Bien, c'est ça, je souhaite peut-être avoir une idée.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Je
n'ai pas l'opinion d'un travailleur, là. Tu sais, nous, on représente plus les
employeurs municipaux, donc je ne le sais pas, là, s'il y a des employés, là,
qui ont... qui n'ont pas été libérés. C'est sûr que ce n'est pas l'intention de
dire : On ne libère personne, mais c'est vraiment de se poser la question
puis d'avoir un... de dire : Je ne peux pas libérer tout le monde en même
temps. Tu sais, c'est vraiment ça, la préoccupation, pour être... jouer le rôle
que les municipalités doivent jouer, ou, sinon, bien, il va peut-être falloir
repenser autrement la coordination de mesures d'urgence. Parce qu'on se fie sur
les employés municipaux pour prendre action puis, s'ils ne sont tous pas
disponibles en même temps, bien, ça peut... ça va certainement créer des
problèmes là.
Mme Maccarone : Oui, ça fait
qu'il me semble que ça, c'est quelque chose que nous devons jouer, peut-être,
sur mesure et pas du mur-à-mur.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Exactement.
Puis C'est ce qu'on prévoit, là, tu sais, c'est vraiment d'avoir une analyse,
tu sais, au moment où survient un événement, là, est-ce que quand le
gouvernement va adopter cet ordre, décret, peu importe, là… Est-ce que… de
penser à la… comment ça va être appliqué dans une municipalité, les
municipalités concernées, quel serait l'impact puis d'y réfléchir à ce moment-là,
ça fait que c'est vraiment ça, la recommandation, ce n'est pas de changer le
projet de loi, c'était juste de lever la main pour dire : Pensez à nous à
ces occasions-là.
Mme Maccarone : Mais les
municipalités ne se sont pas en mesure… exemple, si je pense à le principe de
subsidiarité, ils ne sont pas en mesure eux-mêmes d'adopter une règle pour dire
: Bien, voici comment nous allons procéder dans cas deux? Parce qu'encore une
fois on parle de la FQM, ça fait qu'on parle des plus petites municipalités qui
vont être encore plus affectées. Ça fait que ça, ce n'est pas quelque chose qui
est possible? Tu sais, est-ce qu'on a besoin d'avoir ça dans une loi ou est-ce
qu'on peut vous donner la liberté de prendre les choix pour protéger les
municipalités, mais aussi les employés?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Ça
pourrait. Mais dans le fond, il faudrait que… là, la Loi sur les normes du
travail, ça s'applique à tous les employeurs puis les travailleurs du Québec.
Donc, là, il n'y a pas d'exception pour les municipalités en tant que telles.
Puis je pense que la disposition, elle fait du sens pour les employeurs, tu
sais, du Québec de façon générale. Nous, on a une particularité qui devrait être
prise en compte à ce moment-là, puis ça ne sera pas à toutes les occasions que
la particularité s'appliquerait. Ça fait que c'est vraiment pour les quelques
occasions que ça s'y prêterait de le faire à ce moment-là.
Mme Maccarone : Ça fait qu'on est
surpris qu'on n'a pas eu une analyse d'impact avant. Ce serait bien, je présume,
d'abord, si jamais la loi n'évolue pas. Puis ce n'est pas… cette section n'est
pas amendée, qu'avant la mise en œuvre qu'on a au moins une… Une analyse d'impact,
ça fait que dans les dispositions transitoires, qu'on donne du temps pour faire
ce travail. Ça répondrait un peu à vos préoccupations?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Effectivement.
Mme Maccarone : O.K. Quand on
parle d'avoir l'accès au dossier médical, on sait que c'est un sujet très
sensible. Vous l'avez traité avec beaucoup de doigté. Je sais qu'on a évolué,
puis on avait besoin d'avoir ce changement, mais vous parlez de la personne
autorisée. Qui devrait être la personne autorisée?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Bien
là, on se pose la question parce que, tu sais, ça dit « seule une personne
autorisée », on n'a pas le cadre de comment ça va être appliqué. Ça fait
que là on se pose la question : qui sera cette personne-là? Puis comment
on aura accès à se faire déclarer « personne autorisée », là? Tu
sais, parce que c'est sûr que moi, je vois les parties. Il faut qu'il y ait
quelqu'un de la partie patronale qui soit autorisé, ses représentants. C'est un
minimum, là.
Mme Maccarone : J'essaie de
comprendre la mise en œuvre. Est-ce qu'il y a des cas où des deux côtés qu'on
ne souhaite pas une personne soit nommée comme la personne autorisée pour la
protection de la personne concernée?
Mme Desgagnés (Héloïse) : J'imagine
qu'il pourrait y avoir des cas, là. Tu sais, Je pense justement au harcèlement
psychologique si… le cas où la personne désignée pourrait être le mis en cause.
Là, ça, ça ne serait peut-être pas la bonne façon de procéder, là.
Mme Maccarone : Ça fait qu'encore
une fois, je me demande : est-ce que ça, c'est quelque chose qui devrait
être du sur mesure et non du mur-à-mur pour s'assurer qu'on a… Moi, ma crainte,
c'est qu'on ne respecte pas, dans le fond, la responsabilité locale. Tu sais, je
comprends qu'on a des lois pour protéger la population puis c'est nécessaire,
on a un rôle ici à jouer à l'Assemblée nationale. Mais j'ai des grandes
préoccupations qu'on ne respecte pas le rôle de… le principe de subsidiarité. Tu
sais, je vais le dire souvent parce que souvent, c'est les personnes qui sont
les…
Mme Maccarone : ...plus près
des gens concernés qui devront prendre cette décision. Alors, j'ai des grandes
préoccupations à cet égard, pour s'assurer qu'on a une équité. Parce que je
pense que c'est ça qu'on souhaite. Puis, si je comprends bien, on n'a pas
nécessairement réussi à avoir cette équité avec les articles qui traitent ce
secteur. O.K.
Votre recommandation 10, ça aussi,
j'ai trouvé intéressant parce qu'on dit que tout est dans la terminologie, les
mots. Tu sais, le législateur ne parle pas pour rien. Ça fait qu'est-ce que
vous pouvez nous expliquer l'impact? Parce qu'on dit : «Négociation»
versus «médiation». Ça fait que votre vision là-dessus pour que je comprends
bien?
Mme Desgagnés (Héloïse) : On
a eu des débats à l'interne, là, pour se demander qu'est-ce que ça voulait
dire, la «négociation». Il y a... Tu sais, moi, de prime abord, on voyait ça
quand même être un petit peu plus «hands on», là, si vous me permettez
l'expression, un petit peu plus impliqué. Quand on va voir la définition du
dictionnaire, au contraire, c'est vraiment quelqu'un qui est vraiment plus est
retiré, un «négociateur». Donc là, on se disait : Bon, qu'est-ce que ça va
être, si, finalement, c'est l'équivalent de «médiateur»? Bien là, moi, j'aurais
tendance à donner la même technologie pour ne pas mélanger les gens. Parce
qu'il y a déjà conciliation, médiation, négociation, là, ça commence à faire
beaucoup. Et, ça, c'est tout en droit du travail, là, pour les mêmes
employeurs, travailleurs, là. Il faut s'y retrouver. Donc, si c'est très
similaire à la «médiation», c'est sûr que j'aurais tendance à privilégier
«négociation». Autrement, bien...
Une voix : ...
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui.
Bien oui, «médiation». Puis, autrement, bien, peut-être nous fournir des
documents explicatifs, comme la CNESST le fait, pour expliquer la... tu sais,
sur qu'est-ce que c'est, ça va être quoi, les pouvoirs de cette personne-là, je
pense que ça va être les employés de la CNESST, déjà, là, les agents, là...
bien, bon, en tout cas, qu'en est-il, d'en savoir un peu plus.
Mme Maccarone : Puis, si on
n'a pas ces modifications pour avoir une harmonisation de la compréhension,
quel serait l'impact?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Bien,
c'est sûr que c'est plus difficile pour les gens de s'y trouver. Puis c'est
quand on va... Tu sais, autant les employeurs que les travailleurs, là, quand
ils se retrouvent dans ces situations-là, il y a un stress. Ils veulent... Puis
ils ne sont pas toujours accompagnés. Il y en a plusieurs qui vont l'être, là,
mais, tu sais, de vouloir comprendre comment ça fonctionne puis... tu sais, ça
rajoute des dédales administratifs puis de la terminologie pour, au final... tu
sais, on se demande pourquoi.
Mme Maccarone : Est-ce que ça
peut causer des délais aussi, chose qu'on souhaite éviter?
Mme Desgagnés (Héloïse) : Je
ne pense pas, par exemple, tu sais. Les délais, là, peut-être que ça peut
causer des débats, au début, sur l'interprétation de ça va être quoi, tu sais,
mais au final, une fois que ça va être mis en place, bien, c'est juste une
terminologie additionnelle pour qu'entre juristes on se comprenne puis que les
autres aillent plus de difficulté.
Mme Maccarone : O.K. M. St-Pierre,
vous avez l'air à vouloir interagir.
M. St-Pierre (Guy) : C'est...
Non. C'est juste que, quand je négocie, ce n'est pas la même chose. Une
médiation, il faut que tu arrives à une entente. Quand tu négocies, tu veux
peut-être être plus fort que l'autre. Quand je négocie pour acheter un
tracteur, parce que je suis producteur agricole, ce n'est pas la même chose que
quand je veux m'entendre avec mon voisin sur l'utilisation de quelque chose.
Mme Maccarone : C'est vrai.
C'est une nuance importante. Merci de soulever. Ça me désole que je n'aie pas
été là pour le débat à l'interne. Je présume que ça a été très intéressant. Tu
sais, on parle beaucoup des griefs, les arbitres. Puis, je pense,
majoritairement, les gens disent : Oui, c'est une bonne affaire. Mais,
encore une fois, on souhaite la souplesse. Pouvez-vous nous expliquer un peu
votre vision, il me reste un peu de temps, pour comprendre ce que vous
souhaitez comme modification, amendement, à ce projet de loi, en gardant le
principe qu'on souhaite avoir... puis, ça, c'est une accélération, sauver de
l'argent, sauver du temps.
• (10 h 40) •
Mme Desgagnés (Héloïse) : Oui.
C'est sûr que, dans la... comment on fonctionne actuellement, là, il y a
beaucoup de griefs qui ne vont pas se rendre à l'arbitrage. Puis ça fait partie
de la culture. Puis c'est correct aussi, là. Puis c'est sûr que, si on
change... tu sais, là, on changerait vraiment du tout au tout, bien, il va
falloir avoir un délai pour s'habituer, modifier les pratiques parce que c'est
vraiment une culture, là. Moi, un grief, quand il est déposé, quand on commence
à négocier une convention collective, on va demander à l'employeur :
Transmets-moi les griefs que tu as reçus dans les dernières années. On va
analyser. Ça me donne un angle d'analyse de ta convention collective. C'est un
outil quand même, là. Je... Les griefs, la plupart du temps, sont déposés par
les syndicats, mais on est habitués de fonctionner comme ça. Donc, c'est sûr
que... Mais ce n'est pas tous les griefs qui devraient être entendus par un
arbitre, tu sais. Ça... En tout cas, à mon sens à moi. Ça fait que c'est sûr
que ça va peut-être faire en sorte que certains griefs ne seront pas déposés.
Mais, ceci étant dit, les syndicats ont une obligation de représenter leurs travailleurs.
Il y a des délais qui sont prévus dans les conventions collectives, ça fait
qu'ils ont tout le temps intérêt à conserver les droits de leurs travailleurs,
donc de déposer les griefs. Donc, c'est sûr que, tu sais, la... si la loi entre
en vigueur comme elle est là actuellement, notre façon de pratiquer le droit du
travail va changer, là, tu sais. Cette façon de faire là, dire : Il y a un
grief, on va le laisser de côté, on va le négocier avec la convention
collective, on va modifier la clause sur le temps supplémentaire puis on va
tout régler...
Mme Desgagnés (Héloïse) :
...régler les griefs en même temps, on ne pourra plus faire ça. Ça, c'était
quand même quelque chose de fréquemment utilisé. Ça fait que nous, on proposait
de laisser aux parties de pouvoir faire une entente pour dire : On met de
côté un grief. Puis peut-être aussi... Donc, c'est ça, c'était... à la première
partie, là, c'était de garder la souplesse pour les parties de déterminer quoi
faire puis après ça aussi de dire : Bien, si... Dans tous les cas, je
pense qu'il faut qu'il y ait une entrée qui soit graduelle, à mesure, parce
qu'on vient vraiment changer les pratiques en droit du travail, il faut donner
le temps aux gens de s'habituer, d'adapter, là, leurs façons de travailler puis
aussi de gérer le calendrier, là.
Moi je ne plaide pas, mais je le sais que
les avocats plaideurs sont occupés. Puis ce n'est pas nécessairement par
mauvaise foi, là, qu'il y a des dates éloignées, là, c'est des... Puis aussi,
dans certains dossiers, on parlait de harcèlement psychologique, tantôt, au
bout d'un an, là, ça arrive que le travailleur est toujours en arrêt de
travail, il n'est pas apte à faire un arbitrage de grief. Là, ça dit : Il
faut qu'on prolonge le délai déterminé par l'arbitre. Comment l'arbitre va
déterminer la durée indéterminée de l'absence, tu sais? Ça va venir causer des
problèmes, là, à ce niveau-là.
Mme Maccarone : Puis on a
entendu dire, évidemment : On a une pénurie. Ça fait que ça aussi, ça
cause des délais. Ça fait qu'on a entendu des recommandations pour nous aider à
rejoindre les délais, comme d'avoir des audiences à distance, virtuelles.
Est-ce que ça, c'est des éléments qui sont préoccupants, pour vous, ou ce
serait bienvenu, c'est une transition qui est encore difficile à mettre à
l'œuvre? Quelle est votre opinion là-dessus?
Mme Desgagnés (Héloïse) :
C'est sûr que le droit, c'est souvent... ça bouge lentement, on est quand
même... tendance à être archaïques, là...
Mme Maccarone : ...
Mme Desgagnés (Héloïse) :
Bien, c'est ça. Ça fait que c'est correct de vouloir améliorer puis de
donner... peser sur l'accélérateur. Je pense que ça se prête, dans certains
dossiers, que ça se fasse par visioconférence. Pas toujours. Mais souvent, tu
sais, moi, je fais beaucoup de choses par visioconférence, depuis la pandémie,
qu'on n'aurait jamais faites avant la pandémie, là. On se déplace beaucoup
moins, on couvre le Québec au complet. On s'est habitués. Ils ont des
meilleures installations, là, aussi, pour faire les visioconférences, là.
Mme Maccarone : O.K. Est-ce
qu'il y a des éléments que nous n'avons pas couverts que vous souhaitez
partager avec les membres de la commission? Il me reste
1 min 40 s.
Mme Desgagnés (Héloïse) : Je
pense que ça fait le tour. Je vous remercie.
Mme Maccarone : Bien, merci
beaucoup. Ça a été très intéressant. J'ai beaucoup appris avec vous.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Merci à vous, Mme Desgagné et
M. St-Pierre, de la Fédération québécoise des municipalités, pour votre belle
contribution à cette commission.
Alors, nous allons suspendre les travaux
quelques instants pour permettre de se connecter au prochain groupe qui est en
visioconférence. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 43)
(Reprise à 10 h 47)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
nous allons reprendre les travaux. Nous accueillons notre prochain groupe qui
est en visioconférence avec nous, l'Association des employeurs en mécanique
industrielle du Québec. Donc, vous avons avec nous M. Simard et
M. Thibodeau, qui sont les deux représentants. Bonjour, messieurs.
Alors, je vais vous laisser tout de suite
la parole, peut-être. Je vous laisse le soin de vous présenter à tour de rôle
puis, ensuite, vous pouvez commencer votre exposé de 10 minutes. Il va
s'ensuivre une période d'échange avec les parlementaires. Alors, la parole est
à vous.
M. Simard (Martin) : Parfait,
merci. Bonjour, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour à tous les
membres de la commission parlementaire. Je me présente, Martin Simard. Je suis
le directeur général de l'Association des employeurs en mécanique industrielle
du Québec, l'AEMIQ. Ayant débuté ma carrière comme travailleur de métier, je
suis donc directement issu du domaine de la construction, ce qui m'a permis
d'occuper une majorité des tâches et responsabilités associées à des projets de
construction, des outils jusqu'à la direction de l'entreprise. Je suis
accompagné de mon collègue Éric Thibodeau, qui est avocat et porte-parole de
l'association qui se présentera par la suite. Puis je tiens également à
souligner l'absence malheureuse de notre président d'association, Daniel
Sirois, qui a malheureusement eu un imprévu de dernière minute puis ne pourra pas
être présent avec nous aujourd'hui. Éric, je vais te laisser te présenter
rapidement puis je continuerai avec la présentation.
M. Thibaudeau (Éric) : Oui.
Merci, Martin. Bonjour à tout le monde également. Salutations et remerciements
à M. le Président, M. le ministre et toute la délégation de parlementaires pour
nous inviter aujourd'hui et écouter nos propos, échanger avec nous sur ce sujet
qui est au cœur de nos préoccupations. Éric Thibaudeau, je suis associé en
droit du travail chez BCF Avocats et j'occupe principalement 80 % de ma
pratique dans l'industrie de la construction et/ou les champs afférents comme
le nôtre.
M. Simard (Martin) : Merci.
Tout d'abord, nous tenions à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de
vous présenter à nouveau notre proposition que nous avions initialement
présentée lors des consultations détaillées relatives au p.l. n° 51,
au cours de laquelle nous avons été très heureux de la collaboration et de
l'écoute attentive puis de même que nous avions pris acte également de
l'engagement du ministre à continuer d'examiner l'enjeu du dossier de la
machinerie de production par la consultation des partenaires et l'analyse des
impacts. Puis cela nous a permis de prendre la balle au bond et de poursuivre
nos interventions auprès des nombreux acteurs impliqués afin de pouvoir
présenter les résultats de nos démarches constructives que nous croyons dans le
cadre de cette consultation. Donc, qui est l'AEMIQ? Notre association
patronale, qui est en croissance depuis sa création et même depuis l'année
dernière, lors des précédentes consultations, nous sommes maintenant...
regroupe 13 des principaux entrepreneurs oeuvrant principalement dans le
secteur industriel de la construction au Québec. Nos membres effectuent à la
fois des travaux assujettis à la Loi sur les relations de travail, la gestion
de la formation de la main-d'œuvre dans l'industrie de la construction, la
R-20, ainsi que des travaux qui ne sont pas régis par cette loi, notamment l'installation,
l'entretien, la réparation de machines de production. Nos entreprises
emploient, bon an mal an, près de 3 000, et même souvent plus dans les
écoles actuellement, travailleurs différents par année, dont environ
1 100 employés en permanence. Globalement, nos entreprises génèrent
environ plus 500 millions de dollars de chiffre d'affaires au Québec
seulement.
• (10 h 50) •
Qu'est-ce que le... que ça implique
concrètement, la machine de production? Le secteur de la machine de production
est essentiel dans la réalisation des grands projets stratégiques qui sont au
cœur du développement économique du Québec, dont nombre d'entre eux impliquent
la participation et du gouvernement et, par le fait même, des contribuables
québécois. Nos membres sont vraiment des acteurs clés des projets majeurs qui
oeuvrent dans plusieurs secteurs névralgiques de l'économie québécoise, entre
autres la production d'énergie, les filières batteries, les pâtes et papiers,
le domaine pétrochimique...
M. Simard (Martin : ...domaine
cimentier, minier, métallurgique, maritime, alimentaire, aéronautique, entre
autres. C'est nos principaux secteurs d'activité. Nous sommes par ailleurs
impliqués dans de nombreux projets importants qui sont en cours, actuellement,
ou en développement au Québec. Sachant que la machinerie de production occupe
un rôle crucial et peut représenter jusqu'à 50 % de l'investissement dans
plusieurs cas, selon la nature du projet, il appert essentiel, pour nous, d'en
considérer l'importance et l'impact de ce secteur d'activité sur l'économie, le
contribuable et le consommateur québécois.
Sur ce, je vais passer la parole à mon
collègue M. Thibaudeau qui va pouvoir aborder avec vous les aspects suivants
qui porteront sur l'historique, l'évolution du contexte, la proposition
réglementaire, de même que sur l'adhésion sociale et la cohérence du régime, entre
autres. Merci.
M. Thibaudeau (Éric) : Merci
beaucoup, Martin. Alors, simplement, je ne reprendrai pas tout ce qui a déjà
été exposé en commission parlementaire sur le p.l. n° 51.
Plusieurs des acteurs de la présente commission y étaient présents. Simplement,
pour les nouveaux visages, et mettre tout le monde sur la même page, et qu'on
se comprenne, rappelons en bref la problématique.
Donc, les entreprises que nous
représentons utilisent une main-d'oeuvre exclusivement détentrice de cartes de
compétences qui sont émises par la Commission de la construction du Québec, la
CCQ. Et donc c'est une main-d'oeuvre exclusivement construction qui est
employée par nos entrepreneurs. Le hic ou la problématique survient il y a une
vingtaine d'années, où est-ce qu'une série de décisions des tribunaux sont
venues décréter ou décider que les travaux d'installation et d'entretien,
réparation de machinerie de production n'étaient pas assujettis à la
loi R-20 à cause de l'interprétation qui était faite par le règlement
d'application de cette loi-là.
L'effet concret de ça, 20 ans plus
tard, est le suivant, c'est qu'on a un syndicat, l'AMMQ, Association des
métiers mécaniques du Québec, qui est essentiellement composé de travailleurs
du conseil provincial, de l'inter de l'industrie de la construction, qui a
syndiqué, en vertu du Code du travail, puisque c'est des travaux non assujettis
selon les décisions de tribunaux, en vertu du Code du travail, donc, a obtenu
des requêtes en accréditation auprès des 13 entreprises que nous
représentons, et ils négocient des conventions collectives. Ces conventions
collectives là sont, pour tout ce qui est retraites et avantages sociaux, un copié-collé
de la CCQ. Les travailleurs, exigence de la convention collective et de la
partie syndicale, doivent détenir des cartes de compétences CCQ.
Et comme je disais avec le sourire, que
j'ai promis que je ne ferais pas aujourd'hui, mais je vais le refaire : si
ça a l'air d'un canard, que ça marche comme un canard et ça «quack» comme un
canard, ça doit être un canard. Donc, nous, on prétend que nous sommes des
entrepreneurs de la construction qui utilisent des travailleurs CCQ et donc
que, dans ces circonstances-là, nous devrions être assujettis à la CCQ. Les
conventions collectives, bien qu'elles soient liées à la CCQ au niveau des
avantages, je vais dire, périphériques, sociaux et retraites, les salaires
négociés par le syndicat sont supérieurs, salaires et primes, à ceux de
l'industrie de la construction.
Concrètement, on a réalisé au courant de
la dernière année, et je vais y venir, une étude économique mais qui démontre
que les projets réalisés avec les conditions de travail prévues dans nos
conventions collectives, qui utilisent pourtant la même main-d'oeuvre que
l'industrie de la construction et les mêmes entrepreneurs, coûtent aux donneurs
d'ouvrage, aux investisseurs et au peuple québécois qui subventionne, investit,
supporte ces projets majeurs là, entre 4 % et 12 % plus cher. Et
donc, ce qu'on demande de rectifier par voie réglementaire, c'est de s'assurer
que ces travailleurs-là, les entreprises qui utilisent exclusivement une main-d'oeuvre
CCQ, puissent bénéficier, dans son entièreté, du régime de relations de travail
de la construction.
À noter également qu'en situation de
pénurie de main-d'oeuvre, donc, où la main-d'oeuvre spécialisée se fait rare,
le fait que nos entreprises ne soient pas CCQ... n'a pas accès à la main-d'oeuvre
des quatre autres syndicats de l'industrie de la construction, donc
FTQ-Construction, CSN, CSD et SQC, la main-d'oeuvre référée par l'AMMQ venant
fortement majoritairement, pour ne pas dire exclusivement, dans certains
métiers, de l'international.
Donc... (panne de son) ...problématique en
résumé, qu'on avait déjà présentée aux élus l'an dernier, dans le cadre des
consultations du p.l. n° 51, nous avions bien reçu le
message et avons entendu qu'il restait du travail à faire pour aller chercher
une adhésion au niveau des acteurs économiques et sociaux au Québec...
M. Thibaudeau (Éric) : ...pour
que notre demande, notre projet puisse être réalisé.
C'est pourquoi, depuis les 13,
14 derniers mois, depuis la fin des travaux du p.l. 51, nous avons
entrepris nombreuses démarches de consultation. Nous avons rencontré les plus
grands donneurs d'ouvrage du Québec, autant ceux qui sont basés au Québec que
certains détenus par des intérêts étrangers, nous avons rencontré des
entreprises hors construction qui utilisent une main-d'oeuvre non CCQ pour
comprendre leurs enjeux et obtenir leur adhésion, nous avons rencontré des
associations de donneurs d'ouvrage qui sont pour la plupart membres du Conseil
du patronat du Québec, nous avons également rencontré des acteurs
gouvernementaux ou paragouvernementaux, par exemple, comme les gens de la
Commission de la construction du Québec. On a finalement - toujours dans les
démarches qu'on a compris qui seraient favorables à la compréhension de tous, de
l'acceptabilité de notre demande - fait réaliser une étude par la firme AppEco
sur les coûts additionnels, s'il en était, engendrés par l'application de ces
conventions collectives là et de ce régime de relations de travail, le Code du
travail, qui n'est pas fait pour des projets de construction, qui est fait pour
du travail en usine, en bureau, etc. Et ces imperfections-là, de... font en
sorte qu'il en revient aux donneurs d'ouvrage et aux contribuables de payer
4 % à 12 % de plus.
Nous arrivons donc à l'écoute. Et je
termine avec cela. Le plus important, pour les donneurs d'ouvrage et les
investisseurs, c'est le libre choix des entrepreneurs de pouvoir continuer à
décider s'ils font affaire avec des entreprises, je vais dire, non CCQ ou des
entreprises CCQ. Et c'est pourquoi vous remarquerez, en annexe de notre
mémoire... et si vous comparez avec notre mémoire de l'an dernier, la
proposition réglementaire est dorénavant de dire que, si un employeur utilise
exclusivement une main-d'oeuvre CCQ, il devrait pouvoir, lui et ses
travailleurs, bénéficier du régime entier de la Commission de la construction
du Québec ou, si vous préférez, en termes juridiques plus exacts, de la
loi R-20. Et, ça, c'est primordial. C'est ce que les donneurs d'ouvrage
nous ont dit, les associations. On les a écoutés et on a fait évoluer notre
position pour qu'il en soit ainsi.
Alors, voilà, on pense qu'un projet de loi
omnibus qui vient réparer des problématiques ou solutionner des petites
problématiques dans des lois est le moment parfait pour adopter la proposition
que nous suggérons, qui ne demande, je le rappelle, aucune modification
législative, mais une simple modification réglementaire.
Le Président (M. Allaire) : Parfait.
Merci pour votre exposé. Alors, on débute la période d'échange, M. le ministre.
Vous avez 15 minutes.
M. Boulet : Oui, merci, M. le
Président. Merci, M. Simard. Merci, Me Thibodeau. Content de vous revoir.
Vous parliez, M. Simard, de croissance.
Est-ce que votre pourcentage de représentativité est toujours à peu près à
30 % chez les entrepreneurs de votre secteur, mécanique industrielle?
M. Simard (Martin) : Ça joue
entre 35 % et 40 %, là, environ. Ça dépend toujours justement des
mandats, et de l'implication, et de l'envergure des mandats dans lesquels nos
entreprises sont... sont impliquées, là. Puis, comme je vous mentionnais, ça,
c'est la portion... la portion industrielle de machinerie de production ici. On
oeuvre aussi dans différents secteurs d'activité, là. Mais, bon an, mal an,
oui, c'est autour de 35 %, 40 %, là, de notre représentativité.
M. Boulet : O.K. Bon. Je
comprends quand même l'enjeu. Ce qui me préoccupe, il y a quelques points,
peut-être, un peu plus techniques, là, Me Thibaudeau. Évidemment, on réfère à «installation,
entretien, réparation, machinerie de production». Effectivement, au début des
années 2000, on a dit : Ce n'est pas dans la définition, c'est exclu
de R-20. Vous souhaiteriez une... en fait, une inclusion, comme c'était avant.
Est-ce que c'est en fonction de la nature des travaux et non en fonction de
l'individu qui fait le travail? Est-ce qu'on se comprend bien? Parce que...
• (11 heures) •
M. Thibaudeau (Éric) : En
fait, votre question est excellente, M. le ministre. Et la proposition que notre
association fait versus de vieux débats sociopolitiques qui ont lieu depuis
20 ans, c'est que nous, notre proposition ne va pas en fonction de la
qualification des travaux. La proposition qu'on fait est vraiment basée sur le
type de main-d'œuvre que nous utilisons. En d'autres mots, si j'ai une
entreprise qui n'a aucun ou qu'une partie de travailleurs CCQ, elle ne sera
jamais assujettie à...
11 h (version non révisée)
M. Thibaudeau (Éric) : ...à
la CCQ pour faire ce type de travaux, alors que, nous, la réalité de nos
membres, c'est qu'elle utilise une main-d'œuvre 100 % CCQ. Et donc on
pense que, dans ces cas-là, quand c'est 100 %, nous devrions être
assujettis à la loi.
M. Boulet : O.K., ce n'est
pas tout à fait clair pour moi. Dans le fond, tu sais, puis on le sait, une
accréditation, ça vise des fonctions, ça ne vise pas des individus.
Actuellement, c'est des accréditations détenues essentiellement par le conseil
provincial. Mais est-ce qu'il ne faut pas raisonner en tenant compte plus de la
nature des travaux que la détention ou non d'une carte de compétence de la CCQ?
Parce que peut-être que la majorité ont une carte de compétence de la CCQ, mais,
comme ce n'est pas régi par R-20, les travailleurs, travailleuses n'ont pas
nécessairement les mêmes obligations. J'ai juste un petit peu de difficulté à
comprendre la nuance. Est-ce que ça ne devrait pas être simplement : entretien,
réparations, installation de machinerie de production? Est-ce que...
M. Thibaudeau (Éric) : Alors,
si vous me permettez, je vais vous illustrer la situation et répondre à votre
question avec trois situations concrètes. Alors, nous avons pour... la réalité
du marché la suivante. Premièrement, je vais commencer avec la définition
technique. C'est clair de la loi, article 1f, 2° paragraphe, que les travaux de
machinerie de production, là, ce n'est assujetti à la loi, à moins qu'un règlement
vienne l'assujettir. Donc, règlement d'application.
Dans le règlement d'application, le fait
que ce soit des travaux d'installation, d'entretien ou de réparation de
machinerie de production n'est pas un enjeu juridique. L'enjeu n'est pas là-dessus.
Ce que les décisions sont venues dire il y a une vingtaine d'années — vous
remarquerez, au sixième alinéa, il y a une demande que la main-d'œuvre soit d'une
expertise issue principalement de l'industrie de la construction. Et les
tribunaux sont venus dire: Écoutez, ça peut sembler bizarre, mais,
statistiquement, les tuyauteurs, les monteurs de structure d'acier, les
mécaniciens de chantier et les chaudronniers, il y en a plus qui oeuvrent à l'extérieur
de l'industrie que dans l'industrie. Ce n'est donc pas une main-d'œuvre dont l'expertise
se trouve principalement dans l'industrie de la construction. Et l'effet de ces
jugements-là, M. le ministre, c'est que, bien, la machinerie n'est jamais
assujettie.
M. Boulet : Je comprends.
M. Thibaudeau (Éric) : Donc, ce
n'est pas les travaux, la problématique, c'est cette expertise. Et c'est pour
ça que cet alinéa-là, vous allez le voir, notre proposition, on suggère de l'enlever.
Mes trois exemples concrets. Pour de plus
petits travaux, souvent moins d'une centaine de travailleurs, que ce soit pour
de l'installation ou de la maintenance, les donneurs d'ouvrage vont faire appel
à des entreprises qui utilisent une main-d'œuvre non CCQ, et les donneurs d'ouvrage
pour ces petits projets ou travaux là veulent continuer à avoir le droit d'utiliser
cette main-d'oeuvre-là et ces entrepreneurs-là. Notre proposition dit :
Est-ce que tu utilises exclusivement des travailleurs CCQ? Non, je n'en ai même
pas un. Parfait. Non assujetti.
Deuxième cas de figure, qui est celui,
l'an dernier, quand on a eu l'occasion d'échanger dans le p.l. n° 51,
vous et moi, causait problématique dans certaines régions, je prends, par
exemple, dans le domaine minier en Abitibi, il y a plusieurs entreprises qui
font affaire avec une main-d'œuvre hybride : quelques travailleurs CCQ,
quelques travailleurs non CCQ. Et la proposition qu'on faisait il y a un an
leur causait problème parce que, là, principalement, c'est quoi? 50 % plus
un? 80 %? 40 %? Donc, eux avaient peur que des projets qu'ils
faisaient en mode hybride de main-d'oeuvre deviennent assujettis, ce qu'ils ne
voulaient pas, ni les donneurs d'ouvrages ni les entrepreneurs de la région. On
les a écoutés et on a changé le mot «principalement» par «exclusivement».
Troisième cas de figure, plus simple je
suis rendu à l'autre bout du spectre, nos membres. Nos membres utilisent
exclusivement une main-d'œuvre CCQ, c'est leur créneau de marché. C'est ce que
nos donneurs d'ouvrage nous demandent. Et donc, quand on utilise une main-d'oeuvre
exclusivement CCQ, on devrait pouvoir bénéficier de tous les avantages de la
loi. Je rappelle non pas les avantages qui existaient déjà, mais, en plus, ceux
que vous avez fait mettre en place avec le p.l. n° 51
pour augmenter la productivité dans l'industrie.
M. Simard (Martin) : Et, par
le fait même...
Une voix : ...
M. Simard (Martin) : ...pardon,
par le fait même, ça nous permettait, justement, de répondre aux critères qui
avaient été énumérés l'année passée, qui étaient importants aussi lors des
consultations, etc., de garder le libre-choix qui était primordial pour le côté
des investisseurs, de garder... de protéger...
M. Simard (Martin) : ...et
j'ai aussi des emplois et les entreprises qui ont développé leur créneau de...
je vais l'appeler hors construction, hors CCQ, et de protéger aussi, et de
permettre l'accès à nos entreprises de pouvoir poursuivre dans la même lancée.
De cette façon-là, on regrouperait l'ensemble des...
M. Boulet : Oui. C'est très
clair. Deux questions qui me restent. AppEco. Ça, c'est votre association qui a
demandé à AppEco l'étude, hein? O.K. Je vais me repencher sur cette étude-là,
là. Ça m'a été rapporté, mais je n'en ai pas pris une connaissance fine. Mais
vous dites, maître Thibaudeau, que ça conclut à un écart de 4 % à
12 % des coûts. Parce que les conventions collectives du Conseil
provincial proviennent d'accréditations syndicales émises en vertu du Code du
travail, donc on négocie par accréditations. Puis les taux de rémunération
globalement sont, j'imagine, de 4 % à 12 % supérieurs. Est-ce que
c'est bien ça?
M. Thibaudeau (Éric) : Il y a
deux composantes à ce coût additionnel là. Et...
M. Boulet : Ce 4 % à
12 % là. Oui.
M. Thibaudeau (Éric) : Oui.
Et j'invite les gens qui travaillent avec vous et avec vous personnellement, si
vous avez le temps, à relire notre mémoire du p.l. 51, ou qu'on peut vous
retourner, sur ce volet-là. Il y a les volets qui sont négociés, oui, et
contenus dans la convention collective qui sont plus onéreux. Ça, vous avez
tout à fait raison. Mais il y a aussi, ne l'oublions pas, parce que c'est
important, les obligations légales. Vous étiez avocat en droit du travail,
bien, vous l'êtes encore, bien que vous êtes ministre. Je vous donne un exemple
simple. Dans la loi R-20, il n'y a pas de préavis de fin d'emploi dans...
tu sais, de... en... Dans la loi R-20, il n'y a pas de préavis de fin
d'emploi, comme dans la loi sur les normes, d'une semaine, deux semaines, trois
semaines. C'est un préavis. Alors, vous savez de quels types d'industries nous
avons : on fait rentrer des 500, 600 travailleurs sur un chantier
pour une période d'un mois, ou deux, ou trois, on laisse aller à trois, quatre,
cinq mois, puis là, il faut jongler avec le respect de la loi sur les normes du
travail, qui ne convient pas du tout à ce type d'environnement là.
M. Boulet : C'est... C'est
bien exprimé. Donc, il ne faut pas se limiter au salaire. Parce qu'une question
périphérique que j'allais vous poser, avec les récentes augmentations convenues
dans l'institutionnel, commercial, industriel puis le génie civil, est-ce que
cet écart-là serait le même? Mais il n'y a pas... Vous allez me répondre :
Il n'y a pas que les salaires, il y a toutes les obligations légales qui
découlent notamment de l'application de la loi sur les normes du travail. Puis
là, vous faites référence au préavis. Mais, dans le 4 % à 12 %, quel
est le pourcentage qui découle des salaires? Et quel est l'impact des
augmentations convenues dans l'ICI et génie civil?
M. Thibaudeau (Éric) : Avant
l'augmentation dans l'industrie de la construction, il y a... Puis là, je vais
répondre avec des écarts, M. le ministre, parce qu'on a... à l'intérieur même
de notre groupe d'entrepreneurs, à cause du vote exprimé par les salariés en
assemblée, on a deux conventions type différentes, donc une qui prévoit une
augmentation de salaire de 8 % au mois d'août et va nous ramener à
4 % de salaire au-dessus de ce que la CCQ prévoit, et on a un autre groupe
d'employeurs qui, eux, ont donné 4 % le 1er mai dernier et vont
donner un autre 4 % au 31 décembre prochain, donc le même 8 %,
mais pas à des moments identiques.
M. Boulet : Donc, pour
s'harmoniser avec ce qui a été convenu dans les autres secteurs de la
construction, là, j'entends.
M. Thibaudeau (Éric) : Non.
M. Boulet : Non?
M. Thibaudeau (Éric) : En
fait, non, la charrue et le bœuf sont dans le sens inverse.
M. Boulet : O.K.
M. Thibaudeau (Éric) : C'est
nous, l'an dernier, en janvier 2024, qui avons octroyé une augmentation de
8 % de salaire en 2025.
• (11 h 10) •
M. Boulet : O.K. Donc, ça a
précédé. O.K. Je m'excuse.
M. Thibaudeau (Éric) : Exact,
dont s'est probablement inspiré l'industrie de la construction. Je ne sais pas.
Mais, pour répondre à votre question, M. le ministre, rapidement, là, nous
étions, avant cette signature-là et l'augmentation de 8 %, en moyenne
4 % plus élevés que la construction. Temporairement, jusqu'au mois d'où,
on est égal ou moins cher, même, mais c'est jusqu'au mois d'août. Après ça, on
va repasser au-dessus. Et, ça, c'est juste pour les salaires. Les primes... Nos
primes sont plus chers et d'autres avantages. Comme le kilométrage, et tout ça,
dans notre convention, sont également plus chers que la construction.
M. Boulet : Oui, ça, j'étais
conscient de ça. Peut-être une dernière question, puis je vais vous laisser
compléter là-dessus, Me Thibaudeau. Tu sais, c'est vrai qu'on avait parlé d'un
consensus. Évidemment, ce n'est pas l'objet du projet de loi actuel, là, mais,
tu sais...
M. Boulet : ...mais rien ne
nous empêche, parallèlement, de continuer à cheminer.
Vous référez à un consensus, et là je n'ai
pas... Tu sais, vous avez consulté des donneurs d'ouvrage. Vous avez référé à
des associations patronales comme le Conseil du patronat du Québec. Est-ce que
vous êtes en mesure de confirmer qu'il y a un consensus autour de ce changement
réglementaire potentiel là issu de vos consultations?
M. Thibaudeau (Éric) : Je
vous dirais que oui, et il est de deux niveaux. Parce que j'aime ça... j'aime
ça, être nuancé dans les propos, pas parce je suis avocat de profession, juste
pour vous donner l'heure juste. Dans les associations de donneurs d'ouvrage,
donc vous les connaissez... Je ne veux pas nommer personne ici parce que je ne
veux pas les mettre sur la sellette publique, mais, toutes les associations de
donneurs d'ouvrage en secteur industriel, on les a consultées. On a consulté
aussi beaucoup de donneurs d'ouvrage, directement. Le son de cloche maintenant,
après, je dirais, la tournée des grands ducs, les explications, plusieurs
d'entre eux... on a rencontré à trois reprises, deux reprises, quatre reprises
pour bien s'expliquer, se comprendre. Ils nous sont revenus avec des questions.
Le consensus auquel moi, je réfère actuellement est le suivant : ou ces
donneurs d'ouvrage là et les associations ne s'opposent pas, donc ils ont
dit : Écoutez, on ne déchirera pas notre chemise, on va laisser le
ministre, et le gouvernement, et les élus décider, mais on n'a pas d'objection,
on comprend ce que vous voulez faire, et il y a un autre groupe important qui
appuie notre démarche et qui est d'accord avec ce qu'on essaie de faire pour
tous les bénéfices qu'on décrit, là, dans notre mémoire.
Donc, il y a un consensus, selon nous, des
gens consultés. Et évidemment on n'est pas le gouvernement puis on n'est pas
une grosse association comme celle de la construction, donc on ne peut pas
prétendre avoir consulté tous et chacun au Québec, mais on a vraiment écouté...
en termes de donneurs d'ouvrage, on a dû en consulter plus d'une, je dirais
vite comme ça, à vue d'oeil, plus d'une quinzaine. Puis les associations de
donneurs d'ouvrage, c'est au moins cinq. Et en plus on a interagi avec plusieurs
branches gouvernementales ou paragouvernementales pour être sûr que les idées
qu'on avançait ne créaient pas de problématiques pour d'autres.
M. Simard (Martin) : Puis des
associations représentatives aussi, il y a des donneurs d'ouvrage en
particulier, mais aussi, dans certains cas, des associations qui représentent
des groupes.
M. Boulet : Évidemment, il y
a le syndicat qui est détenteur des accréditations syndicales qui pourrait être
impacté, là, négativement, là, j'imagine, Me Thibaudeau.
M. Thibaudeau (Éric) : Bien,
vous savez...
M. Boulet : Parce que là...
M. Thibaudeau (Éric) : ...je
ne vois pas en quoi il serait impacté négativement, parce que les travailleurs
qu'on utilise, qu'ils ont syndiqués avec l'appellation AMMQ, ce sont
pratiquement tous des travailleurs de l'Inter.
M. Boulet : De l'Inter.
M. Thibaudeau (Éric) : Ça fait
que, demain matin, vous faites droit à notre demande...
M. Boulet : Il y aurait un
transfert.
M. Thibaudeau (Éric) :
...puis ils sont réassujettis R-20, ils vont demeurer membre de l'Inter. Ça
fait que...
Le Président (M. Allaire) :
Merci.
M. Boulet : Merci beaucoup.
On va s'en reparler.
Le Président (M. Allaire) : Merci
beaucoup.
M. Boulet : Merci beaucoup à
vous deux.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le ministre. Ça met fin à l'échange avec la partie gouvernementale.
On enchaîne avec la députée de Westmount—Saint-Louis. Vous avez 16 min
30 s. La parole est à vous.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. Simard. Bonjour, Me Thibaudeau. Merci
beaucoup pour votre témoignage et pour votre mémoire. Vous me permettez de dire
que, comme quelqu'un qui n'est pas issu nécessairement de votre domaine, que je
trouve votre situation excessivement complexe, peut-être un peu différent que
les autres. Alors moi, mes questions vont être pour m'aider à avoir une bonne
compréhension. Je comprends ce que vous recommandez. J'ai demandé à notre
recherchiste : Comment ça se fait qu'ils ne font pas partie déjà? Je ne
comprends pas cette règle.
Ça fait que, pour moi, je souhaite savoir
concrètement comment un employeur démontre-t-il qu'il emploie exclusivement des
salariés de construction pour les travaux visés par votre proposition
réglementaire, par exemple? Puis est-ce que cela signifie la présence d'un seul
salarié non-construction sur un chantier, même pour les tâches accessoires?
Est-ce que ça va exclure automatiquement l'employeur du régime R-20? J'essaie
de comprendre le pratico-pratique.
M. Thibaudeau (Éric) : D'accord.
Alors, commençons par la réalité... si vous me permettez. Les donneurs
d'ouvrage, les les Rio Tinto, Krüger, Valley ou Suncor, toutes les grandes
entreprises industrielles, les grands industriels du Québec, veulent conserver — c'est
ça que nos consultations nous apprennent — le libre-choix de faire
affaire, pour un projet X, avec un entrepreneur qui n'utilise pas une
main-d'oeuvre construction et, pour un projet Y, des entrepreneurs qui
utilisent et appliquent le régime de relation de travail CCQ, donc
construction. Donc, ça, c'est la...
M. Thibaudeau (Éric) : ...alors,
c'est pourquoi je vous parle de ça en premier. Parce que, nous, c'est le besoin
qu'on essaie de remplir et de combler. Donc, on a des clients, et les clients
de nos membres, de notre association... s'adressent à nos entrepreneurs. C'est
pour leur dire : Aïe! J'ai le projet de l'AP60, Rio Tinto, 1,56 milliard,
pour certaines grandes parties du projet, j'ai besoin en quantité d'une main-d'œuvre
très nombreuse et en spécialités de métiers de la construction mécanique qui se
retrouvent spécifiquement dans cette industrie, des électriciens, tuyauteurs,
chaudronniers, etc., donc ce qu'on appelle communément, là, les métiers
mécaniques.
Donc, ils veulent avoir ce choix-là. Et,
quand ils s'adressent... M. le ministre parlait du 40 %, on était plus à
30 %, 35 %, initialement. On est rendus à 40 % de
représentativité environ parce qu'ils ont été syndiqués d'autres entrepreneurs
que nous représentons. Mais nos entreprises oeuvrent sur les plus grands
projets du Québec, ceux les plus... dont nous n'avons être les plus fiers, ceux
qui nécessitent le plus grand montant d'investissement, ceux dans lesquels le
gouvernement du Québec, souvent, investit avec son propre argent, avec des
achats d'actions, avec des garanties, avec des subventions. Vous connaissez ça
mieux que moi, je crois, mais vous comprenez le portrait. Donc, il n'y a pas
juste un... On ne parle pas ici d'un enjeu employeur, employé qui se chicanent
puis qui tirent la couverte, on parle d'un besoin d'une industrie au grand
complet qui requiert des entrepreneurs construction qui utilisent une
main-d'oeuvre construction. Tout le monde veut ça. Nous, on les fournit. Tout
le monde veut payer la construction. Et les seuls qui ne bénéficient pas du
régime construction dans tout ça, c'est nous... exécutons les travaux.
Donc, ça, c'est la problématique à
laquelle nous sommes confrontés, nous tentons de régler. Pourquoi? Parce que
les donneurs d'ouvrage nous disent : Bien là, je ne comprends pas. J'ai
regardé les conditions de travail industriel dans la CCQ et je regarde la
convention collective, puis ça va me coûter 4 à 12 % plus cher, comment
ça? Bien là, on est construction, mais on n'est pas construction parce que
là... Puis là il faut leur expliquer le jugement d'il y a 20 ans, qu'il y
a des accréditations syndicales, puis que là... Les clients nous regardent avec
le même air que vous vous faites présentement, ils sont confondus. Ils disent :
Mais je ne comprends pas. Quand je rencontre les syndicats qui vont envoyer de
la main-d'oeuvre, ils nous disent que c'est construction. Construction, ce
n'est pas construction. Bien oui, ça l'est. Mais pourquoi vous n'appliquez pas
les conditions CCQ? Bien...
Donc, ça c'est la problématique qu'on...
Pourquoi je dis ça? Bien, pour mieux expliquer et répondre à votre question,
Mme la députée. Et concrètement, je fais quoi? Bien, mon client, si je suis
l'entrepreneur dans notre association, exige une main-d'œuvre CCQ, il ne veut
pas deux, trois travailleurs pas CCQ, ou une moitié-moitié. Quand il s'adresse
à notre groupe d'entrepreneurs, c'est parce qu'il veut une main-d'oeuvre
exclusivement CCQ, et nos employeurs emploient en chantier une main-d'oeuvre
qui est exclusivement CCQ, qui est déclarée sur une base volontaire à la CCQ
dans les rapports mensuels, pour que sa main-d'oeuvre ait le droit aux
avantages sociaux, aux couvertures d'assurance et aux régimes de retraite CCQ. C'est pour ça que je disais en français de, «famous
expression» : «If it looks like a duck, walks like a duck, quacks like a
duck, it must be a duck.»
Mme Maccarone : J'ai bien
compris, j'ai bien aimé. Merci. Bon, merci, je comprends. J'avoue que je suis
perplexe qu'ils ne font pas partie puis que votre amendement, je trouvais très
juste. Est-ce que ça veut dire que le cadre réglementaire actuel va nuire à
l'attractivité des métiers spécialisés dans la mécanique industrielle, est-ce
qu'il y a cet impact aujourd'hui?
• (11 h 20) •
M. Thibaudeau (Éric) :
Premièrement, je pense, et on l'a vu, cette année, avec l'augmentation de
salaire de l'industrie de la construction à 8 %, là, je ne pense pas que
la construction et CCQ assujetties, là — oublions-nous
30 secondes, là — je ne pense pas qu'il y a un problème
d'attractivité, en tout cas, au niveau des salaires et des conditions. Puis il
y a d'autres enjeux, par ailleurs, juste regarder les gens intéressés et le
référencement de main-d'œuvre, et des choses comme ça.
Donc, moi, je partirais de la base qu'il
n'a pas de problème d'attractivité pour l'industrie de la construction. Il y a
un problème un peu...Puis j'aurais aimé ça qu'on puisse avoir un entrepreneur
qui vous... mais je vais vous donner un cas de figure qui existe sur des
chantiers industriels, actuellement, chez les grands donneurs...
M. Thibaudeau (Éric) : ...quand
on fait des travaux sur un réservoir — on appelle ça un réservoir de
stockage — c'est des chaudronniers qui font des travaux là-dessus. Et
un réservoir, parce que ça abrite des choses, c'est assujetti à la loi R-20, et
c'est des chaudronniers qui font les travaux. Quelques mètres plus loin, il y a
une ligne de production. Il y a un réservoir qui sert à mélanger un produit
puis à l'envoyer ailleurs. Ça, c'est de la machinerie de production. C'est
encore le chaudronnier qui fait le travail sur le réservoir, mais là il n'est
pas assujetti parce que c'est de la machinerie de production et c'est les
conditions AMMQ qui s'appliquent.
Alors, sur un même chantier, on a dans nos
membres... où le chaudronnier dit : Tu vas m'envoyer sur la ligne de
production parce que moi, je veux le salaire plus élevé puis je refuse d'aller
travailler sur la «tank» parce que c'est le salaire CCQ, qui est plus bas. Et
là, notre entrepreneur membre chez nous est obligé de faire quoi? Il est obligé
de payer le salaire AMMQ, qui est 4 à 12 % plus cher, pour prendre le
travailleur de la ligne de production AMMQ, non assujetti, pour l'envoyer 100
mètres à côté travailler sur un réservoir de stockage qui est CCQ, mais il est
obligé de le payer le taux AMMQ, sinon le travailleur ne veut pas y aller.
Ça fait que, oui, ça cause un problème
d'approvisionnement de main-d'oeuvre parce que les travailleurs, au lieu d'être
disponibles à l'ensemble des donneurs d'ouvrage et des entrepreneurs pour
réaliser de beaux et grands projets pour la société québécoise, bien,
commencent à se choisir des chantiers en fonction de celui qui paie le plus.
Mme Maccarone : ...on va
avoir deux régimes qui sont en place en même temps, qu'on doit gérer en même
temps. Comment...
M. Thibaudeau (Éric) : Vous
allez même en avoir trois. Vous en avez trois, pas «on va en avoir trois», on
en a trois. Actuellement, la réalité chantier au Québec, c'est : les
petits travaux sont exécutés par du hors construction et qui n'utilisent pas de
main-d'oeuvre CCQ. Certains entrepreneurs utilisent une main-d'oeuvre CCQ et
paient CCQ et certains entrepreneurs, les nôtres, les plus gros, ont été
assujettis au Code du travail, syndiqués, et paient 4 à 12 % plus cher.
Nos conventions ne se terminent pas en
même temps, nos coûts sont plus élevés puis on est tous sur le même chantier,
là. Ça ne fait... Ça crée des problématiques, et ça, si vous me permettez, ce
n'est pas tout à fait votre question, mais je pense que c'est important pour
l'ensemble des députés, ça crée un manque de prévisibilité sur les projets.
Moi, j'ai appris dans les consultations de la dernière année, je ne savais pas
ça, c'est un donneur d'ouvrage qui m'a expliqué ça... qui me disait. Me
Thibaudeau, quand on fait un projet et qu'il y a un risque de grève, il y a un
coût, il y a littéralement un chiffre de dollars, en millions de dollars,
associé à ça, sur la grève moyenne, combien de temps elle dure, puis on met ça
dans le budget du projet. Je lui ai dit : O.K., mais, je dis, comme nous,
en 2025, il y avait une... là, c'est une discussion qui a eu lieu en 2024 dans
nos consultations, on a un potentiel de grève en mais 2025 dans la construction
industrielle, et nous, l'AEMIQ, nos conventions collectives se terminent le 31
décembre prochain, et ce qu'on se fait dire, c'est : Si on avait su en
temps opportun que, dans la même année, il y avait deux risques de conflit de
travail... il dit, le coût du risque associé dans le projet aurait été assez
élevé pour qu'on décide de ne pas faire l'investissement et de le reporter à 2026‑2027.
Est-ce que c'est ça qu'on veut au Québec?
On est en plein contexte de compétitivité avec les États-Unis... se rendre plus
indépendant, là, plus fort économiquement, au Québec, de manière pancanadienne,
également, et là on se ramasse avec des... au lieu d'être attractif sur les
investissements, on se dit : Oh boy!, c'est compliqué, votre régime de
relations de travail. Vous autres, vous avez trois affaires en même temps sur
le même chantier, avec des risques de deux grèves à des moments différents,
pour les mêmes travailleurs, mais pas sous le même... Puis ça, là, ce n'est pas
moi qui vous invente des histoires ou des épouvantails, c'est ce que... c'est
le fruit de nos consultations qu'on a eu l'occasion de faire depuis le p.l. n° 51.
Mme Maccarone : Je comprends
bien ce que vous évoquez aussi, c'est qu'on va avoir une pression sur les coûts
de construction, ils vont aller probablement à la hausse, mais ça envoie quoi
au... message? Vous avez parlé des États-Unis, de compétitivité, mais ça envoie
quoi au... message aux investisseurs étrangers ou aux donneurs d'ouvrage
québécois?
M. Thibaudeau (Éric) : Bien,
moi, je pense que si on a un régime pour les entreprises qui utilisent
exclusivement une main-d'oeuvre construction, le message qu'on lance,
c'est : Aïe! Au Québec, on a un des régimes de relations de travail les
plus...
M. Thibaudeau (Éric) : ...intéressant,
stable et moderne. Ah oui? Pourquoi? Bien, chez nous, la syndicalisation dans
la loi R-20 est obligatoire. Les conventions collectives sont négociées
pour toute la province, tout le monde applique les mêmes conventions
collectives sur une période de quatre ans. Ça fait que réassujettir nos
entreprises qui utilisent, je le répète parce que c'est important,
exclusivement une main-d'oeuvre CCQ à la loi R-20, bien moi, je pense,
pour utiliser un bon terme québécois français, c'est «winner» pour les investisseurs
étrangers, pour les attirer ici.
Il y a d'autres arguments, me direz-vous.
Je ne suis pas économiste, mais au niveau main-d'oeuvre, spécialisation de la
main-d'oeuvre, qualité de la main-d'oeuvre, avec un régime de relations de
travail prévisible à la grandeur de la province, au lieu d'avoir des
conventions collectives qui diffèrent de la construction... Écoutez, je l'ai
dit au ministre, tantôt dans une réponse, même nous, dans notre groupe de 13
entrepreneurs, on a deux conventions collectives différentes. Ça fait que nous,
on pense que, pour la prévisibilité des projets, des coûts, des relations de
travail...
Tu sais, je vais aussi dire une dernière
chose, si vous permettez, qui répond à votre question — je vais avoir
fait le tour à votre question, c'est une excellente question. On vous
dira : Oui, mais là, si on réassujettit CCQ puis qu'il y a une baisse des
salaires, hein? Bien là, si vous dites : Ça coûte 4 % plus cher, on
les met CCQ, ils vont faire 4 % de moins, bien, on peut tous payer tout le
monde 150 $ de l'heure, là, mais si les investisseurs puis les industriels
ne donnent pas de mandat puis de contrat parce que c'est trop cher, tu sais, tu
vas faire 150 $ de l'heure, mais de zéro heure. Puis zéro fois le chiffre
que vous voulez, ça donne zéro.
On est mieux d'avoir un régime qui est
stable, qui paie bien. Les travailleurs de la construction sont bien encadrés,
ils ont des bons investissements autour d'eux. C'est mieux d'avoir ça, d'être
attractif et d'avoir beaucoup d'heures à travailler, des millions d'heures à
travailler, à cause de notre attractivité pour les investisseurs et ceux qui
sont déjà ici — il ne faut pas les oublier, c'est les plus importants — que
d'avoir, oui, 4 % à 12 % plus cher, mais on perd des projets parce
que ça crée une instabilité, une relation de travail qui fait peur pour les
projets.
Mme Maccarone : Vous proposez
aussi... Merci. Merci beaucoup. Vous proposez aussi de restreindre
l'application de la loi R-20 aux employeurs ayant exclusivement recours à
des salariés de la construction. Pourquoi ce critère vous semble plus juste que
votre ancienne proposition réglementaire qui utilisait le terme
«principalement»?
M. Thibaudeau (Éric) : Oui.
Simplement, nos consultations nous ont permis de comprendre que, dans certaines
régions, par exemple en Abitibi, il y a des travailleurs, par exemple, qui ont
des cartes CCQ, mais qui, pour toutes sortes de raisons, à commencer payer leur
épicerie, leur hypothèque, acceptent de travailler aussi sur des projets sans être
payés CCQ parce que c'est les projets de machinerie de production. Donc, les
entrepreneurs, par exemple, dans cette région-là mais ailleurs au Québec — je
ne veux pas ostraciser l'Abitibi, mais je donne un exemple — les
entrepreneurs vont faire des projets avec une main-d'oeuvre hybride. Donc, ils
vont avoir, par exemple, 30 salariés pour faire un petit projet, il y en a 14
qui vont avoir des cartes CCQ puis... enfin l'inverse, 16 qui ont des cartes
CCQ, 14 qui n'en ont pas. Avec le mot «principalement», ça leur créait une
incertitude : Bien là, j'ai 51 % de mes travailleurs qui ont des
cartes, je deviens-tu assujetti? Alors que ce n'est pas ce qu'on vise.
On veut leur laisser ce libre choix, aux
donneurs d'ouvrage, aux entrepreneurs et même à la main-d'oeuvre, de travailler
dans un système hybride. Alors, on a changé le «principalement» pour
«exclusivement», il n'y a plus aucun doute, ce sont les entreprises
construction, comme nous, qui utilisent exclusivement une main-d'oeuvre
construction, qui bénéficieront, parce que moi, je pense que c'est un bénéfice,
de l'assujettissement à la loi R-20, puis les autres, bien, ils
continueront à faire comme ils font. Puis c'est très correct, c'est sain pour
le marché et pour le choix que les donneurs d'ouvrage veulent conserver.
• (11 h 30) •
Mme Maccarone : Je sais qu'il
ne me reste presque plus de temps. J'aurais voulu vous entendre par rapport à
l'étude d'impact économique d'AppEco. Est-ce que nous, on a une copie de cette
étude d'impact? Puis sinon, est-ce qu'on peut avoir une copie? Parce que je
pense que, quand vous parlez de l'ordre de 4 % à 12 %, là, ce serait
intéressant pour nous de mieux comprendre.
M. Thibaudeau (Éric) : Oui.
Alors, on s'engage à envoyer à la commission, là, copie de l'étude qui sera
distribuée, je présume, à toutes les parties. Puis évidemment on demeure
disponibles, comme on l'est depuis 14, 15 mois, à répondre à vos questions dans
d'autres enceintes et lieux que celle-ci.
Mme Maccarone : Merci à vous
deux. C'était très clair. Merci beaucoup.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Effectivement, lorsque nous
recevrons la documentation, simplement la faire parvenir, d'ailleurs, à
l'adresse de la commission, et on va la rendre disponible à l'ensemble des
parlementaires.
Alors, merci aux deux représentants de
l'Association des employeurs en mécanique industrielle du Québec. M. Simard, M.
Thibaudeau...
11 h 30 (version non révisée)
Le Président (M. Allaire) : …merci
pour votre belle contribution à cette commission. Alors, la commission suspend
ses travaux jusqu'après les affaires courantes. Merci, tout le monde! Bon
dîner.
(Suspension de la séance à 11 h 31)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 15)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend
ses travaux. Merci de prendre quelques secondes, fidèles à nos habitudes, pour
éteindre la sonnerie de vos multiples appareils électroniques. Merci, tout le
monde!
Alors, nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 101, Loi
visant l'amélioration de certaines lois du travail.
Alors, notre ordre du jour pour l'après-midi.
On commence avec la Confédération des syndicats nationaux. On va enchaîner avec
M. Simon Viviers et on termine avec le Conseil du patronat du Québec. Alors, le
premier groupe est avec nous en visioconférence. Alors, on accueille la
Confédération des syndicats nationaux. Salut à vous quatre, bienvenue! Alors,
je vais vous laisser le soin, là, de vous présenter peut-être à tour de rôle et
commencer votre allocution de 10 minutes. Il va s'ensuivre la période d'échange
habituelle. Alors, la parole est à vous.
Mme Senneville (Caroline) : Merci.
Alors, je suis Caroline Senneville, la présidente de la CSN. Je suis
accompagnée de Jean-François Lapointe, qui est conseiller politique auprès du
comité exécutif de la CSN, de Me Vanessa Clermont-Isabelle, conseillère
syndicale et avocate au service juridique de la CSN et de Mireille Pelletier,
conseillère syndicale au sein du service de santé-sécurité environnement de la
CSN.
Alors, on vous remercie de nous accueillir
pour ce projet de loi omnibus qui traite des lois du travail. Évidemment, nous
sommes un syndicat. On trouve ça important, les lois du travail, mais les lois
du travail…
Mme Senneville (Caroline) :
…sont importants pour l'ensemble de la société. Alors, projet de loi omnibus,
je dis déjà d'entrée de jeu que tous les aspects du projet de loi ne seront pas
traités dans ma présentation. Nous n'avons que 10 minutes, mais on va
s'attarder à trois principales… à trois principaux sujets, pardon, sur… qu'on
trouvait les plus importants.
J'aimerais parler en premier lieu de la
déjudiciarisation. Alors, j'aimerais dire que nous sommes 100 % derrière
cet objectif de déjudiciariser le processus d'arbitrage de griefs. Vous savez,
en ce moment, il se passe entre 800 et 900 jours entre le dépôt d'un grief
et l'audition. Pour nous, je vous dirais, c'est une situation qui commence à
ressembler à un déni de droit. Souvenez-vous, les travailleurs, les
travailleuses du Québec ont le droit de grève que quand ils négocient, ils ne peuvent
pas faire le droit de grève sur des griefs. Là, la loi nous dit : Vous
obéissez, vous déposez un grief, et justice sera rendue plus tard. Mais quand
le plus tard s'étend sur presque trois ans, bien, comme je le disais, ça
commence à ressembler à un déni de justice.
Alors, le projet de loi qu'on a sous les
yeux recommande… prévoit, pardon, qu'il ne se passe six mois, plus de
10 jours entre le dépôt du grief et le moment de nommer l'arbitre, et
qu'au total ne se passe pas plus d'un an pour qu'il y ait la première journée
d'audience. Alors, nous, ce qu'on souhaiterait… que, donc, même si on est pour
la déjudiciarisation, on trouve que ces délais-là sont un peu serrés. Nous, ce
qu'on souhaiterait, c'est qu'il se passe une année, 365 jours entre le dépôt
du grief et la nomination de l'arbitre et qu'après un maximum de 180 jours
puisse se dérouler avant qu'il y ait l'audience.
Alors, pourquoi proposons-nous ça? Pas
parce qu'on aime ça, les délais qui sont longs, mais c'est parce que la très
grande majorité de nos conventions collectives, puis celles, je vous dirais,
des autres organisations syndicales aussi, prévoient des clauses d'amnistie en
cas de manquement si on a une mesure disciplinaire, donc, les clauses
d'amnistie qui font en sorte que, s'il n'y a pas eu récidive, au bout d'un an,
bien, la mesure tombe. Si la mesure tombe, bien, à ce moment-là, le grief
tombe. Mais si on doit tout agir en six mois, bien, on va déposer des griefs
qui n'auront pas lieu. Et ça va obliger les syndicats locaux à défrayer des
frais pour dépôt, des frais d'ouverture et de fermeture de dossiers. Et ça,
bien, c'est de l'argent mal dépensé, je vous dirais, parce que ça va empêcher
certains syndicats de défendre d'autres Griefs parce qu'ils vont avoir dépensé
de l'argent pour l'ouverture et la fermeture de dossiers.
Ceci étant dit, même avec 365 jours
de délai que nous, on propose, c'est clair qu'il y a une pénurie d'arbitres et
pour nous, ça va en prendre beaucoup plus qu'il y en a en ce moment si on veut
être capable d'opérer ce qui est pour nous rien de moins qu'un changement de
culture majeur dans l'application de… avec cette nouvelle loi là. Et c'est la
raison pour laquelle on propose aussi un délai de 12 mois avant que ces
mesures-là soient mises en place, donc une période transitoire de 12 mois
donnant… pour que ce changement de culture puisse s'effectuer le plus rondement
possible.
L'autre objectif, un autre sujet dont je
veux vous parler, c'est un objectif avec lequel on est tout à fait d'accord
aussi, c'est celui de la transparence financière des syndicats. Alors, je pense
que ça a été noté par d'autres organisations. Nous avons à la CSN nos états
financiers sur le site Web, là, si ça vous tente, un soir, de regarder ça,
libre à vous. Donc, on est pour ça. Mais là, pour nous, où le bât blesse… on
est tout à fait d'accord avec la présentation des états financiers une fois par
année. Tout à fait d'accord que ce soit en assemblée générale. Tout à fait
d'accord avec le fait que les membres puissent poser des questions. Non
seulement on est d'accord, mais c'est ça qui est prévu et on demande à nos
syndicats de faire ça. Là où le bât blesse, c'est quand on dit « vérifier
selon les principes comptables généralement reconnus ».
Bien, d'abord, on se pose la question
suivante : Pourquoi les syndicats font-ils l'objet d'une attention
particulière, que les associations patronales, par exemple, ou d'autres types
d'association ne seraient pas… ne seraient pas soumis aux mêmes tests? Alors,
c'est à vous… vous nous posez des questions, peut-être que je laisserais
celle-là à vous, voir c'est quoi, la logique derrière tout ça. Et aussi bien le
fait de faire vérifier par un comptable à l'externe, bien là aussi c'est des
frais.
• (15 h 20) •
À la CSN, on a 1 600 syndicats
différents, plus de la moitié de nos syndicats ont moins de 70 membres. Il
y a des syndicats pour qui demander des états financiers vérifiés par une firme
externe les acculerait carrément à la faillite. Puis pour les autres, bien, ça
mettrait à mal leur mission syndicale. Encore une fois, ils vont dépenser de
l'argent pour payer un comptable plutôt que pour défendre des griefs. Alors,
nos statuts et règlements, nous, prévoient que chaque syndicat doit avoir un
comité de surveillance des finances, trois membres élus, et c'est ces
membres-là du comité de surveillance des finances qui sont à même de vérifier
que les dépenses sont faites selon les politiques du syndicat.
Donc, on est d'accord que les
regroupements de syndicats, que ça soit sous forme régionale, sous forme sectorielle
ou des centrales syndicales comme la nôtre, que nous puissions faire vérifier…
Mme Senneville (Caroline) : ...faire
vérifier nos états financiers par un comptable. Ce sont de plus grosses
structures syndicales, mais on aimerait bien que ce ne soit pas nécessairement
les comptables de firmes externes et que les comptables à l'interne puissent
vérifier nos états financiers.
Troisième sujet dont j'aimerais parler,
c'est la santé et sécurité au travail et le régime d'exception qui nous est
proposé pour les travailleurs et les travailleuses de la santé des services
sociaux et de l'éducation. Je vais peut-être faire un retour en arrière, en
2021, quand la LMRSST a été présentée, la loi modernisant le régime de santé et
sécurité au travail. Ce projet de loi là, cette loi-là, une fois qu'elle est
adoptée, donnait à la CNESST le pouvoir réglementaire en matière de prévention.
C'est à nous à déterminer. On avait trois ans pour déterminer les différents
niveaux de prévention que différents milieux de travail allaient avoir besoin.
On y a travaillé très fort pendant trois ans. Il y a eu un comité-conseil qui a
fait des travaux techniques. On en a discuté au conseil d'administration. Tous
ces travaux-là ont été faits en conjonction avec l'Institut Robert-Sauvé en
santé et sécurité, et on a notamment pris en compte les risques propres aux
femmes, comme le demandait le législateur dans l'article 300 de la LMRMSST
dont je vous parlais tout à l'heure.
Mais, pour nous, les dispositions
particulières qui sont proposées pour la santé et services sociaux et
l'éducation, c'est carrément discriminatoire, je vous dirais. Parce qu'on se
pose vraiment la question. Alors qu'il y avait un consensus patronal-syndical
au C.A. de la CNESST, on a travaillé très fort, bien, ce qu'on a mis de l'avant
est tassé pour ce régime d'exception là. On se pose des questions. Parce que
tout le système de santé, services sociaux, au Québec, ça représente
13,6 % des travailleurs de l'ensemble du Québec alors que ça représente
plus du tiers des lésions professionnelles.
En éducation, l'INSPQ, l'Institut national
de santé publique publie en 2025, février 2025, des données inquiétantes. La
moitié du personnel qui œuvre dans les écoles publiques sont en détresse
psychologique élevée ou très élevée. Un quart ont déjà reçu des menaces, un
tiers ont déjà vécu dans l'année précédente au moins une agression physique.
Les données même de la CNESST nous dit qu'une durée moyenne d'indemnisation en
matière de lésions psychologiques en santé et services sociaux et en éducation
totalise 155 jours pour les femmes, 204 jours pour les hommes. Les
lésions attribuables à la violence, toujours en santé et services sociaux, en
éducation, c'est 60 % des lésions attribuables... des lésions pour
violence, de l'ensemble de la CNESST, 60 %, c'est des travailleurs, des
travailleuses des services publics en santé et sécurité et en éducation. Et la
durée de moyenne d'indemnisation en cas de violence, bien, c'est 172 %.
Ça, ça veut dire une moyenne de 172 jours d'absence au travail.
Alors, on le dit, pour nous, c'est
profondément injuste, profondément inéquitable aussi parce que, si vous
travaillez dans une clinique médicale privée, vous allez être protégés au
niveau 4, le plus haut niveau de protection, mais, si vous travaillez dans
une clinique médicale publique ou dans un hôpital public, bien, vous n'êtes
même pas un, deux, trois, vous êtes en bas du 1 parce que... créé par ce régime
d'exception là. Et c'est surtout à courte vue. Parce que la prévention, c'est
payant. C'est ce que le ministre nous disait lui-même lorsqu'il a présenté son
fameux projet de loi qui modifiait les lois sur la santé et sécurité au
travail. Alors, je le disais, ça commence à ressembler à de la discrimination
systémique, et on dénonce fortement ce régime particulier.
On est aussi très déçus de voir que le
projet de loi ne s'appuie pas sur les consensus de la CNESST. Je vous l'ai dit,
on a travaillé fort, paritairement, patronales-syndicales. On pense aussi que
les avis du Comité consultatif du travail et de la main-d'œuvre sur les
améliorations par rapport aux délais et la déjudiciarisation... cet avis-là
aurait dû être rendu public et que ça aurait pu aider les parlementaires, donc
vous, à faire le travail qu'on doit faire en ce moment. Je vous dirais qu'on
est déçu de ça. On n'est peut-être pas surpris parce qu'à la suite du projet de
loi n° 89, malheureusement, on voit que le dialogue social ne semble plus
être au menu, et, à notre avis, ça met à même... Quand on met à mal le dialogue
social, bien, on met à mal la paix industrielle, la paix sociale, je tenais à
le répéter.
Et je termine en vous disant
qu'évidemment, si vous avez lu notre mémoire, on touche à beaucoup d'autres
aspects du projet de loi omnibus qui est devant nous, et, en ce sens...
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Mme Senneville (Caroline) : ...bien,
si vous avez des questions sur ces aspects-là, ça va nous faire plaisir d'y
répondre.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Excellent. Parfait. Donc, on débute, effectivement, la période d'échange. M. le
ministre, vous avez 16 min 30 s.
M. Boulet : Oui. Merci, M. le
Président. Mme Senneville, bonjour, M. Lapointe, Mme Clermont-Isabelle, Mme
Pelletier, merci de votre présence, du temps de préparation de votre mémoire.
Évidemment, c'est un projet de loi...
M. Boulet : ...c'est un projet
de loi qui contient une vingtaine de mesures. Je sais qu'à certains égards,
vous n'avez pas fait de commentaire, mais je vais m'intéresser à vos
commentaires, Mme Senneville, peut-être que d'autres pourront répondre, là,
sentez-vous bien libre de le faire. Je vais y aller avec les trois
éléments : déjudiciarisation, transparence puis santé, sécurité.
Déjudiciarisation, on a la même
compréhension, les délais sont farouchement trop longs, tout à fait
incompatibles avec le but visé par une procédure d'arbitrage, qu'elle soit la
plus expéditive possible. Et je suis d'accord avec vous que trop long, c'est
l'équivalent d'un déni de justice. Maintenant, il y a eu un avis, il y a un
consensus du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, les délais
maximaux, c'est six mois pour la nomination de l'arbitre, 12 mois pour la
première journée d'audience. Je comprends que vous voudriez aller au-delà du
consensus auquel vous avez participé. Est-ce que vous... la CSN était partie de
ce consensus-là? J'ai de la misère à... Je comprends, là, les clauses
d'amnistie, on pourra en parler un peu plus tard. Mais vous passez de six mois
à 365 jours, plus 180 jours pour la première journée d'audience. Est-ce
que c'est ce que je comprends, Mme Senneville, que vous n'êtes finalement plus
d'accord avec le consensus? Peut-être que j'ai mal compris, là, mais allez y.
Mme Senneville (Caroline) :
Je vais laisser M. Lapointe répondre, parce que c'est lui qui est là pour nous.
M. Lapointe (Jean-François) : En
fait, on est toujours d'accord avec le consensus. Le consensus prévoyait pour
la nomination de l'arbitre. Si vous vous souvenez bien, c'est qu'on avait
180 jours pour nommer l'arbitre, et les parties pouvaient prolonger de
185 jours pour nous amener à une année. Alors là, nous, on l'a formulé
autrement, là, dans le mémoire, en parlant, évidemment, de 365 jours pour
nommer l'arbitre. Alors l'objectif, c'est d'avoir une période d'une année pour
nommer l'arbitre, à cause, entre autres choses, puis ça a été discuté
abondamment, là, dans les discussions du CCTM... la question des clauses
d'amnistie. Il ne faudrait pas nommer des arbitres, alors quand on a une
pénurie d'arbitres, il ne faudrait pas les nommer, les noliser dans des griefs,
alors que c'est des griefs qui vont mourir de leur belle mort après que la
clause d'amnistie s'applique après 365 jours.
M. Boulet : O.K. Donc, je
comprends que, pour vous, 365 jours, c'est l'équivalent du consensus à six
mois, plus une prorogation à 365 jours. Est-ce que c'est ce que vous
m'expliquez, M. Lapointe?
Mme Senneville (Caroline) :
On serait d'accord avec ça, on serait tout à fait d'accord avec ça.
M. Boulet : O.K. mais...
Mme Senneville (Caroline) :
Puis là, bien, vous savez, ça fait la différence entre un grief déposé parce
qu'on a pris des toasts sur le travail puis un grief de congédiement. Alors le
grief de congédiement, j'imagine qu'on irait plus rapidement, mais d'autres
griefs, bien, le 185 jours supplémentaires nous permet de gérer ça.
M. Boulet : Donc... Oui, je
comprends bien, mais, dans mon esprit, ce n'est pas l'équivalent du consensus,
là, mais on pourrait en discuter longtemps. Et le 180 jours pour la
première journée d'audience, M. Lapointe, ça, c'est au-delà du 365 jours,
c'est bien ça? O.K. Je vous vois hocher la tête, Mme Senneville.
Les clauses d'amnistie, vous le... Puis ça
aussi, le 380 jours additionnel, comment vous le considérer comme un
équivalent du consensus du Comité consultatif travail et main-d'oeuvre, Mme
Senneville ou M. Lapointe? Ce n'est pas ça que le comité consultatif avait
présenté comme consensus. J'ai juste de la misère à bien suivre. (Panne de son)
...le 180 jours additionnels est l'équivalent du consensus. Ou si vous me
dites : On n'est pas d'accord avec le consensus ou on recommande de quoi
qui est incompatible...
• (15 h 30) •
Mme Senneville (Caroline) :
Bon, on est d'accord avec le consensus. Le consensus, c'est
180 plus 185.
M. Boulet : Donc, pour vous,
365 jours, j'ai compris que c'est l'équivalent du consensus à 180 plus
prorogation. Mais le 180 jours additionnel, comment vous raisonnez pour
dire que c'est l'équivalent du consensus?
M. Lapointe (Jean-François) :
Enfin, le projet de loi n'est pas la représentation du consensus, je ne sais
pas si on est d'accord sur ce principe là, au niveau de l'arbitrage de grief.
M. Boulet : Le 365 jours
pour la première journée d'audience, Jean-François, c'est quoi, l'écart avec le
consensus? Je veux juste bien comprendre. Parce que vous, vous ajoutez
180 jours.
M. Lapointe (Jean-François) :
Bien, oui...
Mme Clermont-Isabelle (Vanessa) :
Ce que je comprends... Pardon. Ce que je comprends du consensus, c'est :
180 jours pour la nomination de l'arbitre, plus une possibilité de
prolongation de...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Clermont-Isabelle (Vanessa) :
...auquel cas il y a... tu sais, on est dans la prolongation, donc, on est
rendu à un an, 180 jours de la nomination de l'arbitre pour la première
journée d'audience.
M. Boulet : 180 jours. O.K.,
c'est parce que je n'étais pas sûr de bien le comprendre. Donc, le 180 jours,
c'est de la nomination de l'arbitre.
Mme Clermont-Isabelle (Vanessa) :
Oui. Pour la première journée, c'est ça.
M. Boulet : Puis les clauses d'amnistie,
évidemment, c'est pour les mesures disciplinaires, on s'entend, c'est un pourcentage
quand même limité à l'égard desquelles les clauses d'amnistie peuvent s'appliquer.
On a vu avec le projet de loi qui portait le numéro 42, qu'un employeur
pourrait ne pas avoir à considérer une clause d'amnistie. Mais ce que vous
dites, c'est, parfois, un grief disciplinaire, on pourrait laisser passer la
clause d'amnistie tenant compte de la pénurie d'arbitres, ça éviterait de
surcharger les arbitres. C'est ce que vous dites, M. Lapointe.
Mme Senneville (Caroline) : Oui,
puis les syndicats aussi. Moi, je vous ai dit, là, la majorité de nos syndicats
ont moins de 70 membres. Alors, comprenez-vous là, des frais pour ouvrir
un dossier qu'on sait qui risque d'être fermé quelques mois plus tard, bien,
ça, c'est de l'argent des membres qui est utilisé pour payer des frais d'arbitre
inutilement plutôt que de prendre de l'argent pour vraiment défendre les
membres.
M. Boulet : Je comprends. La
pénurie d'arbitres, peut-être que vous le savez, mais il y a eu cinq nouveaux
arbitres qui ont été recommandés, nommés. Il y a eu un appel de candidatures
récemment, mais on est tout à fait conscient qu'il y a un déséquilibre entre l'offre
et la demande, justement, qui explique les délais, puis il y a une
concentration des griefs auprès d'une minorité d'arbitres, parce que les
arbitres sont choisis, à défaut d'entente, c'est le ministre qui les nomme. Mais
il y a une minorité d'arbitres qui sont surchargés, dont les délais sont
particulièrement longs, mais c'est un défi que nous avons à relever, là, d'augmenter
le nombre d'arbitres pour répondre à nos besoins.
Transparence, Mme Senneville, je comprends
ce que vous me dites, pourquoi pas les associations patronales? Il y a quand
même une différence de fond, là. Ici, les syndicats bénéficient notamment du
précompte syndical qui est associé, qui fait partie de la formule Rand où les
cotisations déterminées par les syndicats sont retenues à la source par les
employeurs. C'est un des éléments qui justifient qu'il y ait une pratique de
saine gouvernance qui impose aux accréditations syndicales d'être... de faire
preuve de transparence. C'est un des éléments justificatifs, là, parce que vous
nous posiez la question. Maintenant qu'il y ait des assouplissements pour les
plus petites accréditations syndicales, il y en a qui ont établi des seuils de
façon différente, moi, j'ai exprimé une ouverture à cet égard-là, parce qu'on
ne veut pas imposer un fardeau administratif ou financier qui est incompatible
avec la capacité de payer de plus petites accréditations syndicales.
Santé, sécurité, je pense qu'on...
Mme Senneville (Caroline) : Est-ce
que vous mepermettez de répondre, peut-être, quelques petits éléments
sur l'aspect financier.
M. Boulet : Oui,allez-y.
Bien oui, bien sûr.
Mme Senneville (Caroline) : Mais,
vous savez, quand on est patron, on verse aussi, hein, on paie une cotisation à
différentes... Puis je pense que la transparence envers les membres des
associations patronales... ou si j'étais membre d'une association patronale, j'aimerais
bien qu'il y ait une transparence financière. Donc, je dis ça, parce qu'ils
vivent, eux aussi, de cotisations, si vous permettez. Si je suis membre d'une
entreprise, si je suis manufacturier exportateur, bien, je paie une cotisation
à l'Association des manufacturiers exportateurs. Donc, si j'étais membre, j'aimerais
ça avoir une transparence financière.
L'autre chose que je voulais dire, je
comprends, là, des accommodements pour des plus petits syndicats. C'est sûr que
ça serait une amélioration pour... par rapport au projet de loi tel qu'il est
écrit là, mais, nous, vraiment, on se pose vraiment la question sur :
Est-ce qu'on est obligé d'engager des comptables à l'extérieur? Souvent, les syndicats
locaux font vérifier leurs états financiers. Les régions, par exemple, chez
nous, font vérifier les états financiers par un comptable de la CSN. Alors,
pour... C'est la question, là, pour nous, ça pose problème de devoir dépenser
de l'argent des membres pour ça.
M. Boulet : Oui, je le
comprends bien. En même temps, puis je le répète, c'est un état financier
présenté à une assemblée générale annuelle des personnes qui sont membres de l'accréditation
syndicale et qui, donc, ont une obligation, en vertu de la loi, de payer une
cotisation, donc, d'expliquer, de répondre à des questions, d'être...
M. Boulet : …transparent, ce
n'est pas la même dynamique. Vous en parlerez avec les associations patronales,
ce n'est pas la même dynamique, là, c'est le cotisant qui est le salarié qui a
le droit de savoir. Puis je ne rentrerais pas dans les événements, des
événements aussi qui ont justifié cette approche-là. C'est revendiqué, c'est
souhaité aussi par les travailleurs syndiqués qui expriment le souhait de
savoir comment les cotisations sont utilisées. Pour la santé-sécurité…
M. Lapointe (Jean-François) :
Puis peut-être juste pour vous… vous rassurer, tu sais, la pratique à la CSN,
c'est que chacun des syndicats a un comité de vérification qui est composé
minimalement trois membres, qui doit vérifier annuellement les états
financiers. Et ce rapport-là est un rapport distinct des états financiers qui
est présenté annuellement dans l'assemblée générale annuelle des syndicats locaux.
Ça, c'est la pratique courante qui est fait dans nos statuts et règlements.
D'office, tous nos syndicats ont cette procédure-là d'incluse.
M. Boulet : Oui. Puis bravo,
M. Lapointe, hein, puis quand on a intégré des articles sur la transparence
financière, notre but, ce n'était pas de faire une révolution, c'était de
s'assurer que tous respectent les mêmes principes de gouvernance et de
transparence. Mais si, à la CSN, et c'est de connaissance, on pratique cette
gouvernance-là et cette transparence-là, bien, bien vous en soit.
En santé et sécurité, Mme Senneville,
bien, on s'en est déjà parlé. Évidemment, vous me permettrez juste de refaire
un peu d'histoire pour le bénéfice de tout le monde, là, je ne le fais pas
nécessairement pour vous particulièrement, mais, souvenez-vous, puis vous
m'avez entendu souvent le dire, en 1979, il y a eu adoption d'une loi qui
s'intéressait à la prévention santé-sécurité. Et en 1985, il y a eu une loi qui
s'intéressait à l'indemnisation, accidents de travail, maladies
professionnelles, et dans les mécanismes de prévention, participation des
travailleurs, travailleuses, il y avait six secteurs puis les mécanismes ne
s'appliquaient qu'aux secteurs un et deux, à forte prépondérance masculine, en
foresterie, métallurgie et autres. Donc il y avait des programmes de
prévention, des comités paritaires, des… À l'époque, on appelait ça des
représentants à la prévention. Et c'est ça qu'on a voulu moderniser en 2021.
Pendant 40 ans, il y a eu ce que vous
appelez, selon votre prétention, de la discrimination, mais qui était… qui
était beaucoup plus manifeste, parce qu'il n'y avait rien dans les milieux, qui
sont devenus graduellement, de plus en plus à prépondérance féminine.
L'économie s'est tertiarisée pendant 40 ans, mais il y a eu un… il y a eu
des débats, là, on pourra en reparler de façon plus détaillée, là, mais je me
demande tout le temps où on était socialement, où on était au plan législatif,
pour ne pas s'intéresser à cet écart-là qui faisait en sorte que 23 % des
milieux de travail étaient protégés par des mécanismes de prévention et de
participation. Et le reste, il n'y avait absolument rien. Et quand vous vous
référez aux lésions professionnelles, il n'y a pas que les lésions
psychologiques, là, on me le rappelait, il y a les lésions
musculo-squelettiques, mais le nombre de lésions professionnelles s'est accru
et pas que la fréquence, mais aussi la gravité. Et pendant 40 ans, il ne
s'est rien fait.
En 2021, il faut quand même reconnaître
que les efforts ont été consacrés pour que 100 % des milieux de travail
puissent bénéficier de comités, de programmes et de représentants. Dans les
plus petites organisations, c'est des plans d'action et des agents de liaison.
En santé, Éducation, on avait utilisé le mécanisme de multiétablissement pour
s'assurer que ça puisse s'appliquer partout. Et le 6 avril 2022 est quand
même entré en vigueur le régime intérimaire. Pour les raisons que vous
connaissez, ce régime intérimaire, il est une avancée phénoménale, dans tous les
secteurs, notamment en santé puis en éducation, et je tenais quand même à le
rappeler.
• (15 h 40) •
Puis j'aimerais ça attirer votre attention
sur toutes les bonifications qui sont dans le projet de loi n° 101 pour la
santé, éducation, pour éviter de mettre à risque la qualité et la quantité des
services offerts à la population dans ces secteurs-là et pour respecter les
capacités organisationnelles. Et je pense que c'est aussi respectueux du
consensus qui a été établi, le règlement qui a été adopté par le conseil
d'administration où il n'y avait pas de représentant Santé, éducation. On va…
M. Boulet : ...corriger cette
lacune-là en nommant un nouveau membre du C.A. CSQ et représentant les
employeurs en santé, éducation. Ce n'est pas parfait, mais moi, je vois ce
régime-là comme étant évolutif, nous permettant d'intégrer graduellement une
culture de prévention préventive dans tous les secteurs d'activité. Je sais que
vous ne serez pas d'accord, mais c'est respectueux de ce que ces deux secteurs-là
sont en mesure d'intégrer. Puis je le répète, avant 2021, il n'y avait rien, on
a fait des avancées considérables, on va être en mesure de faire de la
prévention avec des comités paritaires, avec des heures de libération puis avec
des représentants en santé, sécurité du travail. Et je voulais simplement le
partager avec vous. Pourquoi tu m'as dit une minute?
Une voix : ...
M. Boulet : Bien oui, mais ce
n'est pas une minute.
Une voix : Mais, M. le
ministre...
Le Président (M. Allaire) :
...
M. Boulet : Ah! O.K.
Une voix : Il nous reste une
minute?
M. Boulet : Non, il reste 15
secondes. Mais je vais en profiter, Caroline Senneville et à vous quatre, pour
vous remercier sincèrement. Puis le dialogue social, il n'est pas mis de
côté...
Le Président (M. Allaire) :
Merci...
M. Boulet : ...on va continuer
de se parler.
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Merci, M. le ministre. Ça met fin à ce bloc d'échange. On poursuit avec
l'opposition officielle. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis, vous avez
12 min 23 s.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci pour votre témoignage ainsi que pour votre
mémoire, très intéressant. Je vais continuer dans le même discours, dans le
fond, que vous avez eu avec le ministre, pour vous donner la chance d'expliquer
de votre point de vue. J'ai entendu dire que, si on poursuit avec un régime
égalitaire, dans le fond, on va mettre la population à risque, la prévention,
ce serait fait avec les comités prioritaires. Est-ce que vous êtes d'accord
avec cette analyse?
Mme Senneville (Caroline) :
Bien, je vais vous dire deux réponses, puis après ça, je sais que M. Lapointe
trépigne d'impatience, parce que c'est comme la potion magique puis Obélix, là,
il est tombé en santé, sécurité quand il était petit. Mais bref, ce n'est pas
parce que le régime est moins discriminatoire de celui de 1979 et 1985 qu'il ne
reste pas des éléments de discrimination. Puis honnêtement ça a été le discours
du ministre, tout le temps, de dire : Il faut agir en prévention. On ne
peut pas... Je veux dire, on est en train de dire, là, que tout notre système
de santé et de services sociaux puis tout notre système d'éducation sont
incapables de fonctionner pour protéger la santé des personnes qui y
travaillent. C'est ça, le message qu'on entend. Ça n'attirera pas beaucoup de
main-d'oeuvre, ça.
M. Lapointe (Jean-François) :
Bien, si je peux continuer, il y a des éléments qui sont passés sous silence.
Le premier élément, c'est le projet de loi n° 59. En
2020, quand le ministre a déposé, sa première intention, c'était de couvrir
tous les milieux de travail. Donc, dès lors, il avait consulté son Conseil des
ministres, ça veut dire le ministère de la Santé et des Services sociaux, le
ministère de l'Éducation, hein? Et ils étaient couverts par les trois niveaux
de risque. Et ce projet de loi initial prévoyait que le niveau de risque élevé,
qui n'était pas le réseau de la santé nécessairement, entrait en vigueur le
1er janvier 2023, et les derniers niveaux de risque, qui était le niveau
de risque faible, c'était le 1er janvier 2025. Alors ça, c'était
l'intention du gouvernement de la CAQ, à l'époque. Alors, c'est quand même très
étonnant qu'aujourd'hui on soit obligés de rétropédaler.
Mieux que ça, le ministre, pendant les
commissions parlementaires qui ont eu lieu, il avait dit, et ça, c'était le
26 août, vous pourrez regarder, allez lire les journaux de débats, il nous
disait qu'il remettait ça entre les mains de la CNESST. Pourquoi? Il disait :
«La vraie expertise au Québec, là, elle est au C.A. de la CNESST. Pourquoi elle
est là, en plus? Parce que c'est du paritarisme. Les personnes, puis je pourrai
vous les nommer...» C'est ce qu'il nous disait. «Il y a un potentiel, un bassin
de talents extraordinaire au C.A. de la CNESST. Le C.A., moi, mon attente, elle
est claire, ils vont réussir à surmonter le défi, ils vont élaborer les tenants
et les aboutissants d'un règlement, ils vont nous permettre, à nous tous, de
dire que l'objectif, un des objectifs principaux de notre projet de loi,
c'est-à-dire s'assurer qu'il y ait de la prévention puis de la participation
partout.» C'est ce qu'il nous disait.
Et mieux que ça, il répondait au député d'Hochelaga-Maisonneuve,
parce que le député d'Hochelaga-Maisonneuve avait des craintes que, trois ans
plus tard, donc aujourd'hui, on arrive puis que ce ne soit pas en vigueur, il
demandait des garanties, et le ministre, à 10 h 10, cette même
journée là, disait : «Oui. Puis on va en discuter au moment des
dispositions transitoires. Et moi, je suis ouvert, mais, oui, je veux que ce
soit perçu comme un impératif, comme un devoir légal. Et il va y avoir un
règlement dont la facture sera déterminée par les syndicats...
M. Lapointe (Jean-François) :
...les patrons, puis on va faire les discussions au moment opportun. Je réponds
clairement oui à votre question.» Ça, c'étaient les mots du ministre pour dire
que la santé-sécurité, ce serait du sérieux. Mieux que ça, ce qu'il faut dire,
c'est que ne pas faire la prévention dans ces milieux-là, ça retire plus de
travailleuses du milieu parce qu'elles continuent à être blessées, continuent à
avoir des lésions, et on perd la capacité d'attraction de ces milieux-là.
Et comme le dit Mme Senneville dans
l'introduction, il y a des secteurs privés qui sont assujettis, alors on vient
créer deux régimes, un régime qui va avoir de l'attraction. Donc, on va
cannibaliser le secteur public pour envoyer des gens au privé dans le secteur
de la santé et des services sociaux. Ce n'est pas le cas pour l'éducation parce
qu'il a été équitable en éducation : la discrimination sera tant dans le
milieu de l'éducation privée que publique, mais bref, il est quand même étrange
qu'aujourdhui on ne veuille pas assujettir ces milieux-là alors qu'ils ont
grand besoin de faire de la prévention, parce que c'est là que la santé
commence, hein, dans le réseau de la santé, en passant, alors il faudrait quand
même s'assurer... Et il y a un coût-bénéfice du moment... puis Mme Pelletier
pourra élaborer là-dessus, là, il y a un coût-bénéfice énorme à investir en
prévention, qui a été démontré par des études.
Mme Maccarone : Ça m'amène à
une autre question, parce qu'on a entendu dire... les excuses de ne pas être en
mesure de poursuivre avec l'application du régime, c'est parce qu'on fait face
à une pénurie de main-d'œuvre, mais d'avoir un régime d'exception... est-ce
qu'on va pouvoir s'attaquer à le problème du pénurie de main-d'œuvre d'ici
2029? Ça fait que je souhaite vous entendre.
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
si vous permettez, je vous l'ai dit, là, hein, les risques psychosociaux, là,
c'est des absences de plus de 150 jours, 200 jours. Puis ça, c'est juste les
réclamations à la CNESST, là, ce n'est pas les gens qui déclarent forfait puis
qui sont sur les assurances collectives. Donc, tu sais, quelques jours de
libération syndicale, par rapport à quelqu'un qui est absent la moitié, les
trois quarts de l'année, bien, il est dans la balance, et c'est un discours que
la CNESST porte dans son entier, y compris la partie patronale, là. C'est de
dire : La prévention, ça paie.
Donc, effectivement, là, pour nous, ça
pose vraiment problème. Puis je vous dirais, bizarrement, les réseaux de la
santé et de l'éducation ont beaucoup de budget, par exemple pour contester les
invalidités devant le Tribunal administratif du travail. Alors, ils ont
beaucoup de ressources pour engager des avocats pour contester, puis là ils
nous disent : Ah non! C'est trop forçant, faire de la prévention.
Mme Maccarone : Puis si le
gouvernement poursuit avec le régime d'exception, est-ce qu'on risque
d'entraîner de la jurisprudence confuse, instable? Est-ce que ça va causer des
difficultés de votre côté?
Mme Senneville (Caroline) : Je
ne sais pas. Ce que ça va causer, comme difficulté, c'est qu'on va être pris à
défendre des personnes qui sont tombées malades. Et comme je disais, là, les
établissements ont beaucoup d'argent pour contester, et donc ça crée des
dommages pour ces personnes-là puis ça crée un problème aussi. Le message qui
est envoyé, là, mettons que le projet de loi était adopté tel quel, là... le
message qui est envoyé, c'est : Bien, le gouvernement se préoccupe de...
beaucoup de santé et de sécurité des travailleurs, sauf des siens, dans le réseau
de la santé et des services sociaux et en éducation, ou moins.
M. Lapointe (Jean-François) : Peut-être
un élément à ajouter sur le régime de prévention. Tu sais, le règlement, ce
qu'il prévoit, là, c'est que les parties peuvent s'entendre au niveau local. Le
règlement, c'est : à défaut de s'entendre, on applique le règlement. Si,
pour des raisons x, y, z, dans un hôpital, on pense qu'on a besoin de tant
d'heures, qui seraient en dessous du règlement, ça, c'est déjà prévu, là. C'est
possible de s'entendre de cette façon-là. Alors là, on vient de dire : On
est certains qu'on ne s'entendra pas, puis ça va être le règlement, puis on a
peur, puis on décide de ne pas appliquer le règlement à ces gens-là.
• (15 h 50) •
Puis plus important, il y a une modification
législative, je pense que c'est l'article 64. Normalement, le gouvernement
approuve les règlements de la commission. Là, ce qu'il vient faire avec la
modification, c'est de dire : Je n'ai plus confiance au règlement de la
commission et je vais pouvoir les modifier selon le gré du temps, quand le
règlement arrivera sur mon bureau. Normalement, on avait donné ça, ce
pouvoir-là, réglementaire à la CNESST. C'est ce qui, entre autres, faisait en
sorte qu'en 2021 le ministre était confiant de dire : La CNESST va être
obligée de s'entendre, puis on va avoir un avis impartial parce que c'est
paritaire, à la CNESST. Et là, bien, le paritarisme est un peu au bord du
gouffre, avec une action comme celle-là, avec la modification...
M. Lapointe (Jean-François) : ...qui
est prévu à l'article 64 du projet de loi.
Mme Senneville (Caroline) : Moi,
je siège au C.A. de la CNESST. On était tellement contents, comme C.A.,
d'adopter ce règlement-là, vraiment, les deux parties. Puis on se disait :
Ouf! tu sais, la côte était haute. Puis quand le ministre nous avait dit :
Moi, je fais confiance à la... On c'était dit... on s'est tous regardé en
disant : Oui, là, c'est dans notre cour, les amis. Et puis, bien, tout ça
pour ça.
Mme Maccarone : Mme Senneville,
vous avez utilisé le mot «discriminatoire» dans vos remarques L'impact sur les
femmes?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
80 % des travailleuses en santé et services sociaux sont... des
travailleurs sont des travailleuses. Puis en éducation, c'est autour de
65 %, quelque chose comme ça, là, j'ai... Donc, c'est majoritairement,
effectivement, majoritairement des femmes. Puis oui, c'est important, mais ce
qu'on a regardé puis les chiffres que je vous ai donnés aussi, c'est des
milieux qui ont besoin de prévention parce que nos gens... puis, tu sais, moi,
c'est ma job, là, comme représentante syndicale, je suis sur le terrain, je
parle. Puis moi, j'ai eu une... quelqu'un en éducation spécialisée, une
technicienne en éducation spécialisée qui a décidé de prendre sa retraite parce
que son médecin lui a dit : Tu as déjà eu trois commotions cérébrales, il
ne faut pas que tu en ailles une quatrième. Et cette personne-là, elle est
partie à la retraite de façon prématurée. Donc, ça, c'est les choses qu'on vit,
là. Ce sont vraiment des milieux où on travaille avec des populations qui sont
souvent vulnérables puis, bien, ça apparaît dans les milieux de travail.
Mme Maccarone : Je pense
qu'on ne pourra jamais vous remercier assez pour tous ces travailleurs dans le
réseau public, pour tout ce que vous faites pour accompagner les Québécois et
Québécoises, peu importe le secteur. On sait que vous travaillez fort puis on
sait qu'on a besoin de vous sur le terrain. Ça fait que ça me désole beaucoup
d'entendre qu'on a des gens qui demandent la retraite au lieu de demander de
l'aide parce qu'on n'a pas une couverture qui les accompagne.
Il me reste peu de temps, mais j'étais
curieuse de vous entendre. Je vais vous poser les deux questions, peut-être en
même temps, puis je vous céderais le reste du temps. Mais les antibriseurs de
grève, je serais curieuse de vous entendre un peu là-dessus parce que vous avez
des recommandations, il y a des éléments qui manquent dans la loi ainsi que le
statut du RSS dans le secteur de la construction. Ça fait que si vous pouvez
nous élaborer un peu, vous avez 1 min 30 s.
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
les milieux de travail ont changé, maintenant on fait du télétravail, on
aimerait ça que ce soit reconnu qu'on ne peut pas engager des scabs qui vont
faire du télétravail, ça, c'est vraiment... c'est une déception.
Après ça, bien oui, des mesures pénales
plus importantes, mais elles sont rarement appliquées. Alors, les gens qui sont
sur des terrains disent : On les... ça prend du temps, il n'y a pas assez
d'enquêteurs pour faire des enquêtes, ils n'ont pas assez de pouvoir quand ils
arrivent pour faire des enquêtes. Puis après ça, même s'il y a un rapport qui
dit qu'il y a eu l'utilisation de briseurs de grève, mais il y a peu ou pas de
conséquences. Je m'arrête ici puis je vais laisser Jean-François sur l'autre
volet de votre question. Votre deuxième question, en fait.
M. Lapointe (Jean-François) : Bien,
peut-être, je vais laisser Mireille et Vanessa compléter.
Mme Pelletier (Mireille) : Je
veux juste faire le petit bout sur les RSS dans le milieu de la construction.
Le problème, c'est que, dans la Loi sur la santé et sécurité du travail, les
RSS sont très bien définis dans le secteur de la construction et ça fonctionne
très bien, mais le pendant n'a pas été fait dans la loi R-20, donc les RSS
ne sont pas reconnus dans la loi R-20. Donc, il faudrait rajouter dans la
définition que le RSS fait partie de la loi R-20, comme ça les deux lois
se parleraient plus là ça pérenniserait les RSS dans le secteur de la
construction. Voilà, c'est ça notre demande.
M. Lapointe (Jean-François) : C'est
au niveau du paiement des salaires, là, puis des avantages sociaux, là. La
personne qui va s'investir pour devenir représentant santé-sécurité dans le
secteur de la construction devient pénalisée parce qu'elle s'implique comme ça.
Et là ça génère des contestations.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Merci. Malheureusement, ça met fin à ce bloc d'échange avec l'opposition
officielle. On poursuit avec le deuxième groupe d'opposition, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
4 min 8 s.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonjour à vous quatre. Je suis content que vous ayez été cherché des
extraits de conversations du ministre et moi de 2021. Je me disais qu'il y
avait sûrement du bon stock, là, dans les archives, puis vous ne nous avez pas
déçus avec ça. Blague à part...
M. Lapointe (Jean-François) :
Il y avait des lutins à l'époque qui vous suivaient.
M. Leduc : Oui, blague à
part, moi, quand je repense à toute cette séquence-là, je ne peux pas
m'empêcher d'être non seulement déçu, mais avoir quand même l'impression qu'on
s'est un peu fait avoir. Est-ce que c'est des termes qui vous rejoignent?
Mme Senneville (Caroline) : Bien,
pas nous personnellement, mais les travailleurs et les travailleuses de la
santé puis de l'éducation, certainement puis les services à la population
aussi, là, parce que quand un prof qui part en burn-out, là, puis qui quitte en
plein milieu de l'année scolaire, là, bien, c'est plate pour toute la classe.
M. Leduc : Concrètement,
qu'est-ce que ça va changer de ne pas avoir le plein régime comme on
l'espérait?
Mme Senneville (Caroline) : Mais
ça empêche les milieux de travail de faire la prévention, ça empêche le fait
qu'il y ait des moyens qui soient donnés aux gens pour faire de la
prévention...
Mme Senneville (Caroline) : …de
dire : Bien, nous, il est arrivé tel accident, il est arrivé tel incident,
on pense que, si on ne veut pas que ça se reproduise à l'avenir, bien, il
faudrait avoir tel mécanisme de prévention, des boutons panique, mettons, dans
les gymnases ou des choses comme ça. Donc, comment qu'on fait…
Je donne un exemple, là, c'est un dossier
de santé et sécurité sur lequel on a travaillé, mais il y a un hôpital où
l'urgence psychiatrique était à côté de l'urgence tout court. Bien là, ça
créait des problèmes parce qu'il y a des gens qui étaient accueillis à l'urgence
psychiatrique, qui agressaient des travailleurs, des travailleuses dans
l'urgence tout court, et aussi la population qui était là, donc. Bien, comment
qu'on fait pour résoudre ces problèmes-là, là? Comment qu'on fait pour
s'assurer que…
Alors, ça, ça prend des gens qui sont
libérés syndicalement pour se pencher sur le problème, pour aller voir ce qui
se fait puis comment qu'on peut agir. Et c'est un dossier qui a été… qui a eu
une belle réussite parce que les gens se sont impliqués, mais ils ne font pas
ça le samedi soir après leur journée d'ouvrage, là.
M. Leduc : Il faut qu'ils
fassent ça avec du temps de libération, nécessairement. Ça, ça va supposément
coûter trop cher à l'État. C'est l'État employeur qui n'est pas capable
d'assumer sa fonction, dans le fond.
M. Lapointe (Jean-François) : Effectivement,
puis l'autre élément, c'est qu'il faut se rappeler qu'en 2021, tu sais, c'est
un équilibre, on n'a pas peut-être bonifié... En tout cas, notre avis, notre
lecture, c'est qu'on n'a pas bonifié les droits des victimes de lésions
professionnelles. On l'a diminué un petit peu, mais on gagnait en prévention.
Alors, c'est comme si le troc qui a été fait en 2021, ce n'est pas du troc,
c'est juste des dons qui ont été faits par les travailleuses et travailleurs.
Puis, pour la question de l'éducation, de
la santé et des services sociaux, c'est toute la question de la marque, entre
guillemets» employeur. Alors, tu sais, nous, au lendemain de l'adoption du
projet de loi n° 59, même si ce n'était pas parfait, on a… on est descendu
dans nos milieux de travail, on a formé nos représentants, on leur a expliqué
c'était quoi qui s'en venait. Quand on a su qu'il y avait un règlement qui
avait été voté le 19 septembre au C.A. de la CNESST, on a informé nos gens.
Alors, ils sont en attente. Ils ont publicisé ça à leurs gens. Là, ils vont
arriver puis ils vont avoir un tire-pois. Alors, c'est quoi, la reconnaissance
de ces travailleuses-là? Alors, ça va… c'est une gifle pour elles, là, tu sais,
c'est clairement ça. Puis là, quand on parle d'attraction puis de conserver des
gens dans des réseaux, bien, ce n'est pas garant que ce projet de loi là ne va
pas nous aider.
M. Leduc : Il nous reste un
peu moins… que quelque 30, 40 secondes. Vous élargissez, dans votre mémoire, à
d'autres enjeux, notamment l'abolition du BEM, l'abolition de la révision administrative.
Voulez-vous nous expliquer pourquoi c'est important?
M. Lapointe (Jean-François) : C'est
important parce que c'est la question des facilitateurs, là, je vais être bien
clair. Tu sais, la question des facilitateurs, là, c'est quelqu'un qui n'est
pas impartial qui va venir transiger, alors, puis là, évidemment, c'était pour
tenter de déjudiciariser puis il y avait déjà des recommandations qui étaient…
qui étaient payantes pour déjudiciariser… l'abolition du BEM, qui génère
énormément de contestations, et la révision administrative, qui filtre toutes
les contestations qui montent au TAT. Ça fait que ce serait déjà une façon
d'alléger le fardeau de contestations dans le régime d'indemnisation.
Mme Senneville (Caroline) :
Et, sur la révision administrative, on n'est pas les seuls à penser comme ça.
M. Leduc : Bien sûr. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Allaire) :
Merci à vous, M. le député d'Hochelaga-Maisonneuve.
Alors, ça met fin à l'ensemble de ce bloc
d'échange. Merci aux quatre représentants de la CSN. Merci pour votre belle
contribution à cette commission.
Alors, nous allons suspendre les travaux
quelques instants pour permettre aux prochains intervenants de s'installer.
Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 59)
16 h (version non révisée)
(Reprise à 16 h 03)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
nous sommes prêts à reprendre les travaux. Alors, nous allons accueillir notre
prochain intervenant. Il s'agit de M. Simon Viviers, professeur titulaire,
directeur de l'École de counselling et d'orientation, Faculté des sciences et
de… et de l'éducation, pardon, de l'Université Laval. Bienvenu avec nous.
Alors, vous avez 10 minutes pour votre exposé. Là, je voulais vous laisser
le temps de vous présenter, mais je ne l'ai pas mal fait, donc vous pouvez déjà
commencer avec votre 10 minutes, puis après ça va s'ensuivre une période d'échange.
La parole est à vous.
M. Viviers (Simon) : Excellent!
Merci beaucoup! Je vais partir mon minuteur pour bien gérer mon temps. Merci
beaucoup à tous et à toutes pour l'accueil dans cette commission. Donc, je
prends quand même le temps de dire que, oui, je suis professeur titulaire à la
faculté des sciences de l'éducation. Mais essentiellement, mon champ d'expertise,
c'est celui de la santé mentale au travail et les liens avec l'organisation du
travail. Donc, lorsqu'il est question de risques psychosociaux, on est
clairement, là, à l'intérieur de mes expériences de recherche. Dans le fond,
depuis 15 ans à peu près, je fais de la recherche avec et pour, je dirais,
le personnel scolaire dans les écoles.
Donc, je vous ai soumis un mémoire, en
fait, qui traduit ma position sur le projet de loi n° 21 et les
recommandations que je fais et l'argumentaire qu'il soutient. Le mémoire, vous
l'avez vu, s'intitule L'école en deuxième vitesse, quand on freine la
prévention, on accélère l'épuisement. Donc, vous aurez bien compris que j'insiste
sur le fait qu'on crée ici pour moi un régime en quelque sorte d'exception pour
la santé et l'éducation. Et je me prononce plus spécifiquement sur le secteur
de l'éducation, étant donné que mes recherches ont porté dans ce secteur-là, et
d'autre part, sur le fait que le projet de loi contribue à freiner justement un
élan qui avait été porté par le projet de loi n° 59 sur la prévention des
risques psychosociaux et des problèmes de santé mentale au travail. Donc, pour
moi, on vient freiner en quelque sorte un élan qui est présent dans le secteur
de l'éducation. Et ce faisant, donc, on risque fort d'accélérer l'épuisement.
Donc, en 2011, on a des données, vous l'avez
vu dans le mémoire que je vous ai déposé, ça fait de nombreuses années qu'il y
a plusieurs intervenants, dont plusieurs chercheurs qui sont préoccupés par les
problèmes de santé mentale au travail du personnel scolaire. Déjà à l'époque,
on sonnait la sonnette de l'alarme, en 2011, lorsque l'enquête québécoise sur
les conditions de travail et de santé-sécurité du travail avait montré que le
secteur de l'enseignement était déjà le plus à risque de détresse
psychologique. Donc, déjà à l'époque, on disait : Bien, il faut investir
plus en prévention.
Et donc aujourd'hui, vous l'avez vu dans
les chiffres, à l'époque, on était déjà donc les plus élevés dans le secteur de
l'éducation, à 20 % du personnel scolaire qui éprouvait de la détresse
psychologique élevée. Et aujourd'hui, une plus… une récente enquête de l'Institut
national de santé publique, qui a été publiée, là, tout récemment, montre qu'on
est rendu à autour de 60 %. Donc, on a triplé en quelque sorte en 15 ans.
Donc, d'une certaine manière, je suis ici
à titre de chercheur, pour vous dire : Bien, avec les dispositions de la
loi, du projet de loi n° 101 qui sont en cours et qui créent une exception
pour l'éducation, bien, on risque plutôt d'accélérer le problème et se
retrouver dans cinq, 10 ans avec une situation qui est empirée. Donc, c'est
l'essentiel de mon propos.
Donc, je vais reprendre quand même
différents éléments de mon mémoire. Peut-être d'abord réitérer le fait que… saluer,
je pense que ça a été fait par les intervenants précédents, et ça a fait l'unanimité.
Le ministre Boulet est arrivé. J'avais déjà d'ailleurs été consulté en amont du
projet de loi n° 59 sur l'importance de prévenir les risques
psychosociaux. Donc, ça a été une avancée, ce projet de loi là, en matière de
prévention et particulièrement en santé et en éducation, qui est le domaine
dans lequel je suis spécialisé. Donc, en éducation, c'est un milieu qui
pâtissait d'une certaine manière depuis de nombreuses...
M. Viviers (Simon) : ...de
nombreuses années par rapport au mécanisme de prévention qui était absent en
termes d'exigence selon la loi. Donc, le projet de loi n° 59 a été
accueilli avec espoir, je dirais, par le secteur de l'éducation parce qu'il
permettait de déployer les mécanismes de participation et de prévention qui
sont reconnus comme étant efficaces pour prévenir les problèmes de santé mentale
au travail.
Autre avancée, au risque de répéter ce
qu'ont dit d'autres intervenants, mais je pense qu'il faut le souligner,
l'intégration justement des dimensions psychiques de la santé un peu partout
dans la loi. Donc, la question de l'intégrité psychique, ça a été une avancée
en termes de reconnaissance.
Et, finalement, évidemment, ce sur quoi
j'ai beaucoup insisté dans le mémoire que je vous ai déposé, la reconnaissance
qu'il existe des risques psychosociaux qui affectent la santé des travailleurs
et des travailleuses et qui sont nécessaires de faire l'objet de mesures de
prévention. Donc, ça, c'est une avancée importante qui a, comme je l'ai dit,
suscité beaucoup d'espoir.
Au risque que d'insister, je pense qu'il
ne faut pas prendre à la légère les risques psychosociaux. Puis je pense que,
M. le ministre, vous êtes venu témoigner dans un colloque à l'Université Laval
qu'on a fait sur la santé mentale du personnel scolaire, où vous l'avez
vous-même reconnu, ce sont des risques importants qui sont, notamment, très
présents dans le secteur de l'éducation, donc des risques qui engendrent de
potentielles atteintes à la santé mentale, détresse psychologique, épuisement,
troubles anxieux, dépressifs, etc., mais aussi des troubles... musculosquelettiques,
excusez-moi, des atteintes à la santé cardiovasculaire également. Donc, je
pense qu'il faut redoubler d'efforts.
Et par ailleurs, la section 4 de mon
mémoire, là où j'insiste, c'est qu'il existe certes des mesures, des mécanismes
de prévention des risques psychosociaux, mais on a moins de savoir-faire
d'expérience dans la prévention des risques psychosociaux, d'où l'intérêt, de
mon point de vue, d'investir dans du temps pour les représentants en santé et
sécurité du travail, pour les comités de santé et sécurité du travail, leur
donner la pleine légitimité d'apprendre à faire leur travail et de faire
véritablement leur travail.
Donc, vous aurez compris que je m'adresse
spécifiquement aux articles 53 et 54 du régime. Donc, c'est ce sur quoi
mon exposé a porté. Donc, je recommande le retrait de l'adoption de... en fait,
le retrait de l'article 54 qui crée un régime particulier pour le secteur
de la santé, des services sociaux et de l'éducation ainsi que l'article 53
qui prolonge le régime intérimaire.
Donc, évidemment, je ne reviendrai pas sur
l'ensemble de vos chiffres. Je pense que les enquêtes de santé publique ont
ceci de bien, qu'elles permettent de chiffrer en quelque sorte des réalités
qu'on documentait depuis des années, j'en ai fait la démonstration dans mon
mémoire. En tout cas, dans le secteur de l'éducation, ça fait de nombreuses
années qu'on documente au plan qualitatif les risques psychosociaux, qu'on
n'appelait pas comme ça à l'époque, mais qui étaient quand même très présents.
Et ce que les chiffres nous ont permis de
montrer, c'est la prévalence, en fait, de la détresse psychologique. Donc, je
ne reviendrai pas sur le fait que la détresse, elle a presque triplé. Donc, on
est dans cette pente-là, là, on est dans cette pente-là, dans la direction
d'une augmentation des problèmes de santé mentale au travail qu'il est
nécessaire d'endiguer.
Je fais également la démonstration dans
mon mémoire que les risques psychosociaux sont particulièrement présents. Là
encore, on a le bénéfice d'avoir des enquêtes de santé publique qui ont mesuré
les risques psychosociaux, qui ont permis de chiffrer en quelque sorte des
réalités qui étaient déjà présentes et déjà documentées dans le secteur de
l'éducation.
• (16 h 10) •
Donc, j'ai bien entendu, M. le ministre,
j'ai écouté une partie des audiences, et l'argument principal, si j'ai bien
compris, vous saurez me corriger tout à l'heure, mais l'argument principal qui
exclut en... qui justifie l'exclusion du secteur de l'éducation, c'est celui de
la pénurie de personnel, or... donc on pourra y revenir tout à l'heure, mais,
essentiellement, c'est les capacités organisationnelles de faire de la
prévention, notamment des risques psychosociaux dans le secteur de la santé,
des services sociaux et de l'éducation.
Essentiellement, pour moi, en allégeant en
quelque sorte le régime pour l'éducation, on vient en quelque sorte amplifier
un problème qu'on cherche spécifiquement à éviter, d'où le titre de la
section 3 de mon mémoire qui est la ritournelle de Chère Élise. Donc, il
faut boucher le seau pour éviter que l'eau coule, donc il faut arriver à
endiguer la fuite en quelque sorte du personnel scolaire du réseau de manière à
pouvoir avoir un système d'éducation qui permet une éducation de qualité.
Je vois le temps qui file. La section
quatre, donc, porte sur la prévention des risques psychosociaux.
Essentiellement, ce que je dis...
M. Viviers (Simon) : ...qu'il
existe, comme je le disais tout à l'heure, des mécanismes de prévention, mais
on doit investir dans de la formation et dans de l'accompagnement. Et, là
encore, je reprends les propos du ministre. Je pense qu'il sera d'accord avec
moi et je pense que le régime... le projet de loi n° 101 risque,
malheureusement, de démobiliser les acteurs qui sont largement impliqués en ce
moment et qui sont motivés. Moi, j'en ai rencontré des RPS qui sont motivés à
prévenir les risques psychosociaux, et je pense que le projet de loi risque
malheureusement d'avoir un effet démobilisant.
Donc, je termine en réitérant, en fait,
les recommandations. Donc, je vous lis les recommandations que je vous ai
faites dans le mémoire. Donc, la recommandation n° 1 :
«Considérant la
présence massive et historique des RPS dans le secteur de l'éducation;
«Considérant les conséquences néfastes de
ces risques documentés par la recherche pour la santé des personnels scolaires;
«Considérant la prévalence très élevée de
détresse psychologique dans le réseau de l'éducation;
«Considérant l'impact négatif des RPS documentés
par la recherche sur la rétention du personnel scolaire et le cercle vicieux
que cette situation génère pour le réseau;
«Considérant, je l'ai dit, la complexité
de la prévention des risques psychosociaux et conséquemment la nécessaire, la
nécessaire... le nécessaire investissement en innovation de ce côté;
«Considérant l'article 54 créerait
juridiquement un régime de prévention à deux vitesses qui risquerait de se
prolonger sur du long terme;
«Considérant le risque... considérant que
le risque de rupture de service présenté comme l'argument principal pour
justifier l'article 54 et susceptible d'être mitigé par une série d'autres
moyens qui créeraient des préjudices à moins grande échelle; et
«Considérant que l'État responsable des
réseaux de la santé, des services sociaux et de l'éducation devrait être un
modèle en matière de prévention de santé, sécurité du travail et non appliquer
des exigences réduites en la matière;
«Je recommande donc le retrait pur et
simple de l'article 54 du projet de loi n° 10.»
Et finalement la recommandation n° 2, que je ne lirai pas au complet...
Le Président (M.
Allaire) : Merci, merci. Malheureusement, ça met fin...
M. Viviers (Simon) : ...c'est
de retirer l'article 53. Voilà.
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Parfait. Alors, on débute la période d'échange. M. le ministre,
16 min 30 s.
M. Boulet : Oui. Merci, M.
Viviers. Merci d'être là. Puis de l'intelligence de votre propos, je pense
qu'il faut le mentionner, on se rejoint à bien, bien, bien des égards. Puis je
pense que vous l'avez souligné devant l'ensemble des membres de la commission
parlementaire, il y a eu des avancées, et là on freine l'avancée. Puis je vais
revenir là-dessus, freiner, parce qu'on n'arrête pas l'avancée. On fait que
continuer à déployer, mais de manière plus progressive. C'est là où il y a une
divergence d'opinions. Mais l'élan du p.l. 59, il ne faut pas l'arrêter.
Puis un des piliers de cette modernisation-là...
Puis, souvenez-vous, M. Viviers, pendant
40 ans, on n'a rien fait. Puis là vous connaissez mon tempérament qui
n'est pas si confrontationnel, c'est quand même une modernisation qui
s'imposait. Il y avait à peu près 400 articles, il n'y a pas que la
prévention, mais, oui, dans les secteurs 1 et 2, où c'était priorisé, ça a
eu des conséquences. Puis j'ai discuté avec des employeurs puis des syndicats
où ils disaient que, tant sur la fréquence, que la gravité des lésions
professionnelles, ça avait engendré des bénéfices, les comités paritaires, les
représentants à la prévention, puis les programmes de prévention. Et le
20 % de détresse psychologique qui s'accroît, selon la dernière étude que
vous soulevez, l'INSPQ, 60 % de détresse psychologique, il y a une
accélération du problème. On le sait, on a eu la pandémie, le contexte
inflationniste, l'incertitude économique, il y a beaucoup de facteurs externes
qui font que ça s'accroît. La pandémie, particulièrement, chez les jeunes et
moins jeunes, travailleurs et travailleuses, il y a eu un impact qui est quand même
significatif.
Mais je retiens l'avancée du p.l. 59
aussi en santé, éducation, parce que vous êtes d'accord avec moi, il n'y avait
rien, il n'y avait rien d'obligatoire, il n'y avait rien d'impératif, c'était
laissé à la liberté de chaque milieu de travail. Donc, c'est pour ça que je
dis, le régime intérimaire qui est entré en vigueur le 6 avril 2022, c'est
une avancée significative. Je sais que c'est déployé de façon asymétrique. Il y
en a qui sont super bons, M. Viviers, puis il y en a que ça prend plus de
temps. Puis ça, il y en a en réalité humaine, à ce qu'on puisse intégrer une
culture de prévention qui s'exprime par des aspects pratiques. J'aime bien
quand vous dites : Oui, on a ajouté l'intégrité psychique, tu sais...
M. Boulet : ...les milieux de
travail doivent se prendre en main, puis les employeurs ont quand même des
obligations générales en vertu de 51 de la loi santé sécurité. Les travailleurs
aussi ont des obligations en vertu de l'article 49 santé, sécurité, mais
qu'on intègre au-delà de l'intégrité psychique... physique, l'intégrité
psychique, c'est une avancée phénoménale. On ne parlait pas, M. Vivier, il n'y
a personne qui me parlait de RPS avant, puis je dis RPS parce que tout le monde
sait c'est quoi. Mais, souvenez-vous quand on a fait l'étude détaillée et dans
les milieux de travail, il n'y a personne... On parlait de risques physiques,
biologiques, chimiques et jamais on ne s'est intéressé à la santé
psychologique, et c'était quand même en croissance importante.
Ça fait que c'est déjà avec 49 et 51 il y
a aussi une avancée qui découle d'une combinaison de l'intégration du concept
d'intégrité psychique et des risques psychosociaux. Il ne faut pas oublier
qu'il n'y a pas que les considérer, il faut les identifier. Après ça, qu'il y
ait des mesures de contrôle et qu'on les élimine parce que la façon de diminuer
la fréquence puis la gravité, c'est par la voie du risque. La prévention, il y
en a qui me disaient c'est théorique, la prévention. Mais je pense que, quand
on va au bout de l'entonnoir, c'est un risque qu'il faut ensemble les parties
identifier pour contrôler et éliminer.
On a souvent dit, puis ça n'a pas été
simple au cœur de la CNSS, c'est quoi les RPS. Vous l'avez vu, c'est la
violence, c'est le harcèlement, c'est les troubles de stress post-traumatique.
Mais la violence, elle peut être conjugale, familiale ou à caractère sexuel, et
ce n'était pas simple. Imaginez M. Vivier en santé éducation, ce n'est pas
simple, imaginez dans une PME de 8, de 14, de 22 ou de 34 personnes, ce
n'est pas simple, puis il y a encore énormément de pédagogie.
Et là, je vois sur votre dernier point,
c'est le report d'un an. En fait, on a dit jusqu'à un an, c'est pour permettre
que ça s'intègre de façon raisonnable, raisonnée et respectueuse de chaque
milieu de travail. Puis, en 2029, on va quand même faire une évaluation de
l'impact de l'intégration progressive des nouveaux mécanismes issus du régime
intérimaire. Et au CA de la CNSST, vous souvenez, ils ont formé un sous-comité,
puis j'ai nommé une conciliatrice pour les accompagner. Il n'y avait pas
personne qui représentait santé puis éducation, puis ça, c'est une lacune que
moi, j'ai constatée, d'où, vous avez vu dans le p. l. 101, on ajoute un
membre de la CSQ, Éric Gingras m'en avait parlé fréquemment, et je
reconnaissais que votre... le milieu de l'éducation n'était pas suffisamment
représenté. Et santé, éducation, bien vous verrez que dans le respect des
principes du paritarisme, on va nommer une personne qui représente les employeurs
en santé, éducation.
Mais au-delà des risques, j'ai souvent
parlé des facteurs de risque, puis j'en ai parlé à l'Université Laval, il y a
des... il y a des surplus de travail, il y a de l'anxiété, il y a de l'inéquité
organisationnelle. Il y a plein de facteurs qui gravitent autour des trois
risques psychosociaux qui font l'objet d'une commune compréhension des patrons
puis des syndicats, ça fait que... et que ça affecte aussi le
musculosquelettique. Des fois c'est des tendinites, c'est des bursites, des
ténosynovites ou peu importe, puis il y a des problèmes de santé vasculaire,
vous l'avez bien identifié. Moi, je retiens un mot important on manque de
savoir-faire dans l'identification des RPS et donc ce qu'on fait et le respect
de ce savoir-faire-là qu'on intègre graduellement.
• (16 h 20) •
C'est sûr que le ministre Jean Boulet, il
aurait aimé ça avec ses collègues, puis mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve
était présent, que ça s'intègre plus rapidement, mais ça, c'est sans considérer
ce n'est pas que la pénurie, c'est les capacités organisationnelles, les
conséquences que ça pourrait avoir sur la continuité des services à la
population et la représentation que nous aurons dorénavant aussi, de la CNSS
notamment. Puis je ne nie pas la contribution des autres centrales syndicales,
mais en santé puis en éducation, la CSQ, puis on verra qui sera le pendant
patronal, mais c'est important.
Ce savoir-faire-là, M. Vivier, vous le
reconnaissez...
M. Boulet : ...et... et là, je
vois que vous faites un sourire entendu à mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve,
je le respecte. Il voulait que vous... Je respecte ça. Mais je respecte surtout
votre connaissance et votre acuité dans votre compréhension d'un savoir-faire
qui se développe de manière accrue. Puis on n'est pas ici pour se confronter.
Je veux juste que vous compreniez que, la démarche, elle n'est pas
nécessairement de même nature. Une plus petite entreprise, une entreprise dans
un secteur x, un établissement dans un autre secteur, ce n'est pas la même
réalité. Ça fait qu je voulais simplement vous dire : Il ne faut pas que
ça démobilise. Moi, je dis : Il faut que ça convainque d'une mobilisation
progressive. Et là, je sais qu'avec votre sourire entendu, vous voulez vous
exprimer. Je vous laisse. Allez-y. Mais je voulais surtout que vous compreniez
la démarche, qu'elle n'est pas anti-prévention, qu'elle est culture à intégrer
progressivement. Alors, voilà.
M. Viviers (Simon) : Je peux
y aller, M. le Président? Oui. Parfait. Merci.
Vous avez bien compris mon non-verbal.
J'apprécie. Je pense qu'effectivement...
M. Boulet : ...mon collègue
aussi.
M. Viviers (Simon) : Oui.
Bien là, je ne sais pas si on pensait la même chose, mais bon. Je voudrais
quand même réagir à certains de vos propos. Je pense qu'on est d'accord sur le
fait que... puis c'est pour ça, je l'ai souligné dans le mémoire, le fait que
je pense qu'on est... on n'a pas à être convaincus que vous croyez dans la
prévention, puis vous croyez dans la prévention des risques psychosociaux. Ça,
ce n'est pas remis en question. Je pense qu'effectivement, le désaccord, c'est
sur la solution que vous proposez.
Nous, ce qu'on vous... De mon point de
vue, en recherche, selon... j'essaie d'en faire la démonstration, peut-être que
ce n'était pas assez convaincant, mais qu'avec cette exception-là, qu'on crée
pour l'éducation, on risque d'aggraver le problème. On risque de se retrouver
dans quelques années avec la rupture de service que vous craignez. On risque de
se retrouver avec plus... une plus grande probabilité de rupture de service.
Essentiellement, c'est ça, le message. Parce qu'on ne freinera pas... On ne se
donne pas les moyens, avec ce que vous proposez dans le projet de loi n° 101
actuellement, en termes de révision des mandats des comités et des RSS. On ne
se donne pas les moyens de faire de la prévention qui est efficace. Mes
collègues Lampron, Baril-Gingras en ont témoigné ici. Essentiellement, c'est le
propos.
J'aimerais réagir aussi quand même sur le
fait que vous faites une distinction qui, de mon point de vue de chercheur,
est... est discutable entre risques psychosociaux et facteurs de risques
psychosociaux. J'entends bien, dans ce que vous dites, que c'est une
négociation politique, c'est-à-dire que les risques... ce n'est pas une
distinction scientifique. En tout respect, j'entends que c'est une catégorie
politique, puis je comprends qu'il y a des enjeux politiques. Je suis
complètement conscient de ça. Et je pense qu'effectivement il faut respecter le
principe du paritarisme. C'est fondamental. Mais, en même temps, il ne faut pas
laisser penser que les risques psychosociaux que sont charge de travail,
latitude décisionnelle, faible reconnaissance, etc., ce ne sont pas des risques
psychosociaux. Ce sont des risques qui sont très bien documentés dans la
littérature scientifique pour avoir des effets néfastes sur la santé.
Donc, je pense que c'était important à
rectifier, d'un point de vue, excusez-moi, là, académique, là.
M. Boulet : Non. Puis je suis
assez d'accord avec vous. Mais ce n'est pas une négo politique. C'est... puis
je pense que vous le comprenez, c'est le reflet d'une discussion paritaire au
sein de la CNESST.
M. Viviers (Simon) : Exact.
Tout à...
M. Boulet : Puis une... Puis
c'est pour ça que j'ai dit : Ce n'est pas... je n'ai pas dit que c'était
un consensus. J'ai dit que c'était une compréhension commune découlant des
discussions paritaires tenues au C.A. de la CNESST. Et tout le monde adhère à
ça.
Et, moi, ce qui est fondamental pour moi,
encore une fois, c'est que ce soit respectueux des capacités de chaque, chaque
organisation. Puis, freiner, si on va trop vite, on risque de faire dérailler
le caractère efficace du déploiement de ces mécanismes de prévention et de
participation. Je veux juste qu'on se comprenne. Puis vous n'êtes pas... je
sais que vous n'êtes pas d'accord avec moi, mais pour moi, c'est superimportant
que ce déploiement-là soit fait de manière pragmatique et efficace. Et je
demeure convaincu. Puis, déjà, depuis... depuis la modernisation, le taux de
cotisation a baissé. Vous allez me dire : C'est des cotisations versées
par les employeurs, mais il y a quand même eu une baisse de 1,85 à 1,48 du
100 $ de masse salariale assurable. Ça remonte à 1,54. Mais tout le monde
a le même objectif, il faut réduire le nombre et la gravité des accidents de
travail. Je pense qu'il n'y a personne qui se remet en question là-dessus.
C'est juste de s'assurer que ce qu'on avait en tête en 2021 se déploie de
manière réussie. Et je le sais...
M. Boulet : ...que ça freine,
selon votre propos, mais, pour moi, ce frein-là, il est, à quelque part,
bénéfique, parce que compatible, puis je ne dis pas juste avec la pénurie. Mais
c'est le manque de représentation au C.A. de la CNESST, et c'est les capacités
de faire, puis ça s'exprime beaucoup par des heures de libération, parce qu'on
ne fait pas de la prévention. On fait de la prévention avec du temps. Mais je
pense qu'il faut tenir compte de l'incidence sur la qualité et la quantité des
services à la population.
M. Viviers (Simon) : Mais je
me permettrais, dans le fond, de réagir de deux manières. Il me reste combien
de temps, M. le Président?
Le Président (M. Allaire) :
...
M. Viviers (Simon) : Parfait,
merci beaucoup. De mon point de vue à moi, puis là je ne suis pas juriste,
évidemment, mais je pense que, et je le dis dans mon mémoire, c'est une mesure
qui est disproportionnée par rapport aux effets que ça peut avoir. Je pense
personnellement qu'on risque de se retrouver en intégrant à même la Loi sur la
santé et sécurité du travail, une exception, un régime particulier pour la
santé et l'éducation, on risque de pérenniser. Après ça, comment l'enlever,
d'une certaine manière, dans la loi? Quel message on envoie au secteur de la
santé et sécurité? Et quelles garanties donne-t-on aux gens qui travaillent
dans les milieux, et qui font de la prévention, qu'ils pourront éventuellement,
bénéficier de conditions qui sont optimales pour réaliser de la prévention
efficace? Et je pense — encore une fois, je le souligne dans mon
mémoire — que l'État doit être un modèle en matière de santé et
sécurité du travail, et devrait s'appliquer des exigences qui sont très
élevées.
Et, par ailleurs... je me permets de
terminer là-dessus, mais le nombre... et je pense que le nombre d'heures... et
ça a été souligné par ma collègue Marie Gingras... le nombre d'heures est
peut-être... ne justifie pas nécessairement un risque de rupture de services,
de mon point de vue. Donc, je pense qu'il y a un certain nombre d'arguments qui
plaident en faveur du retrait de 54 de manière à adopter, par ailleurs, des
mesures autres, qui permettraient de mitiger les risques de rupture de
services, qui sont, évidemment, présents, de manière inégale, par ailleurs,
dans l'ensemble des réseaux.
M. Boulet : O.K. On ne
s'entendra pas sur la proportionnalité. Puis quand on a mis en place le régime
intérimaire, c'était quand même une avancée considérable, parce qu'on
s'assurait que 100 % des milieux de travail soient protégés par ces
mécanismes là. Mais je veux juste, avant de conclure, vous remercier, parce que
le ton que vous adoptez, le respect que vous démontrez, sauf peut-être... mais
c'est parfait, puis moi, j'aime ces échanges-là. Puis vous reconnaissez les avancées,
et moi, je trouve que c'est tout à votre honneur puis j'aime ça, ces
discussions-là, sincèrement, M. Viviers. Merci beaucoup.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
M. le ministre. On poursuit avec Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Vous
avez 12 min 23 s.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup. Merci, M. Viviers, et vous n'êtes pas seul à être en désaccord avec
le ministre, ça fait que n'inquiétez-vous pas. J'ai beaucoup aimé votre
mémoire, étoffé d'énormément d'informations. Vous insistez sur l'urgence
d'intervenir sur les risques psychosociaux dans le secteur de l'éducation, et
je souhaite avoir des exemples concrets des risques psychosociaux structurels
propres au milieu scolaire, qui, selon vos recherches, sont particulièrement
difficiles à adresser sans les mécanismes de prévention robustes qu'on va avoir
sur l'autre régime. Parce qu'il me semble que c'est ça, aussi, le problème. Ce
n'est pas juste les mesures de protection, mais toutes sortes d'affaires vont
tomber dans les craques.
• (16 h 30) •
M. Viviers (Simon) : ...vous
souhaitez avoir des exemples de risques psychosociaux. J'en nomme un certain
nombre. Comme je vous disais, on a documenté les situations de travail à risque
depuis un certain nombre d'années. Notamment avec ma collègue Marie-France
Maranda, on avait fait des enquêtes qualitatives où, essentiellement, ce qu'on
documentait... Je dirais que ce qui constitue le principal risque
psychosocial... vous l'avez vu dans les données, hein, on est à 71 % pour
ce qui est de la charge de travail, mais pour le personnel scolaire, de manière
générale, qui est sur le terrain, on parle, par exemple, de l'intégration, dans
des classes régulières, d'élèves qui ont des très grandes difficultés, sans,
toutefois, avoir les ressources pour pouvoir y arriver. Donc, évidemment, je
suis complètement conscient, puis je le dis dans le mémoire, qu'il y a des
enjeux derrière ça qui dépassent la... qui dépassent la santé et sécurité du
travail et qui relèvent de conditions de travail. Ça fait que je suis
complètement conscient de ça.
Mais dans les recherches qu'on a faites,
notamment des recherches intervention, on est quand même capables, au-delà du
fait qu'il y a des éléments, certainement...
16 h 30 (version non révisée)
M. Viviers (Simon) : ...conditions
de travail qui sont à améliorer, notamment en termes de soutien, de revoir,
dans le fond, la capacité pour les enseignants de répondre à l'ensemble des
besoins auxquels ils font face, donc en termes de charge de travail, mais on
est capable, dans les milieux, quand on demande aux personnes d'aller
recueillir des situations de travail à risques, d'identifier des problèmes
concrets, de trouver des solutions qui permettent de réduire les risques à l'intérieur
des milieux de travail. Pensons, par exemple, ne serait-ce qu'aux méthodes de
travail. Pensons, par exemple, aux normes et modalités qui peuvent être
adoptées à l'intérieur d'un établissement scolaire, qui permettent, par exemple,
de mieux gérer les absences des élèves pendant un... Je vous donne un exemple
concret, là.
Dans une école, ils ont constaté que, le
fait de courir après les élèves, bien, c'était particulièrement lourd pour les
enseignantes et les enseignants. Bien, ils ont identifié ce risque-là.
Concrètement, dans le milieu de travail, ils ont réfléchi ensemble pour dire :
Bien, O.K., quelles mesures on pourrait prendre, à l'échelle de notre capacité
d'agir et non pas en revoyant les conventions collectives, quelles mesures on
pourrait prendre pour atténuer ce risque-là? Donc c'est un exemple concret que
je vous donne, mais je pourrais le décliner de différentes manières. Mais on
est capable de trouver des mesures quand on prend le temps de le faire.
Mme Maccarone : Bien, je
trouve très intéressant... parce que c'est sûr, comme vous avez dit, vos... conséquences
pratiques directes, ça fait que, tu sais, j'en suis, je suis d'accord avec vous...
l'affaiblissement considérable des rôles. Je souhaite vous entendre par rapport
à le lien de causalité parce qu'on a entendu le ministre, pénurie de main-d'œuvre.
Je comprends qu'on a eu des avancées, mais encore, on a eu des avancées, ça ne
veut pas dire qu'on devrait arrêter parce qu'on a avancé. Mais je suis contente
d'entendre l'histoire régulièrement de comment que nous avons avancé, c'est
très intéressant. Mais moi, je souhaite savoir, selon vous, est-ce que la
pénurie de main-d'oeuvre sera réglée parce qu'on va avoir un régime à deux
vitesses? Est-ce que ça va nous aider à faire du recrutement rétention du
personnel? Le lien, vraiment, de causalité que vous, vous établissez entre,
mettons, les mécanismes de prévention des RPS affaiblis et l'augmentation de
taux d'épuisement ou de désengagement qui contribue ensuite à la pénurie, parce
que... bien, je souhaite vous entendre... l'impact qu'il va y avoir si le
projet de loi reste tel quel.
M. Viviers (Simon) : Bien, en
fait, l'impact, c'est une diminution de la capacité à réduire les risques
psychosociaux. Or, cette diminution-là, on l'a vu, là, on a deux études
récentes qui nous montrent que l'intention de quitter la profession ou le
domaine d'activité dans la prochaine année est clairement liée, d'une part,
faible sens du travail, devoir réaliser souvent un travail qui heurte la
conscience professionnelle, une faible reconnaissance, n'avoir jamais l'impression
d'avoir les moyens de faire un travail de qualité, avoir vécu du harcèlement
psychologique, une charge de travail élevée, un faible soutien social. Ça fait
que ça, évidemment, c'est toujours embêtant pour un chercheur dans notre
domaine d'établir une causalité. Puis ça a été tout le débat autour de la Loi
sur les accidents de travail et les maladies professionnelles. Donc, je n'entrerai
pas sur le principe même de causalité, mais clairement, on a des études qui
nous montrent... qui s'accumulent pour montrer que l'intention de quitter le
milieu, bien, c'est spécifiquement des éléments qu'on peut rattacher
directement aux risques psychosociaux.
Donc, c'est pour ça que j'estime que la
démonstration est suffisamment robuste au plan scientifique, au plan de la
recherche, pour nous inquiéter fortement sur cette restriction-là des mesures
de prévention des risques psychosociaux dans le secteur d'éducation et c'est
sur le risque que ça amène d'aggraver la pénurie de main-d'œuvre. Est-ce que je
réponds bien à votre question?
Mme Maccarone : Oui. Puis
vous proposez une solution, un mécanisme de dispense ponctuelle pour les
établissements aux prises avec une pénurie aiguë. Comment ça fonctionnerait,
ça, les modalités et la mise en œuvre?
M. Viviers (Simon) : Bien,
écoutez, en fait, c'est que je réfléchissais à différentes manières. Moi, je ne
suis pas juriste, comme je vous dis, vous voyez bien mon... mais je peux
imaginer qu'inscrire dans une loi une exception, c'est une exception, donc pour
le secteur d'éducation, d'application, c'est une mesure qui est un peu radicale
ou, en tout cas, disproportionnée par rapport aux risques que ça amène
concrètement. Et, en ce sens-là, je rejoins ma collègue... Gingras, qui en a
fait, elle aussi, la démonstration dans son mémoire.
Donc, l'idée, c'est de dire : Bien,
oui, reconnaissons qu'il y a des capacités organisationnelles. Moi, je
travaille avec les milieux, je le vois, donc les représentants en santé et sécurité
du travail, là, donc j'ai les deux mains en quelque sorte sur le terrain. Donc,
je suis capable de voir qu'il y a des capacités...
M. Viviers (Simon) : ...organisationnel
limité. Je suis tout à fait capable de voir que quand un enseignant s'en va en
épuisement, là, bien, c'est l'autre enseignant qui faut qu'il fasse du temps
supplémentaire pour pouvoir le remplacer et qui risque d'accentuer... Donc,
c'est pour ça que j'insiste beaucoup sur l'idée de cercle vicieux, là. Donc, je
le vois très, très bien. Dans le dispositif qu'on essayait de mettre en place,
on offrait un dispositif clé en main dans les milieux. Bien, ce que nous ont
dit les milieux, c'est : Il est très intéressant, monsieur Viviers, votre
dispositif, mais on n'a pas les capacités organisationnelles.
Ça fait que cet argument-là, je l'entends
constamment. Donc, je suis complètement sensible à l'argument, mais je pense
vraiment que l'inclusion d'une exception dans la loi constitue une mesure
exceptionnelle. Puis pour autant, je reste tout de même à convaincre quant à...
comment dire, à quel point le fait, par exemple, pour les représentants en
santé-sécurité du travail de collaborer à la mise en œuvre du programme...
donc, on exclut, essentiellement, ce qui fait, de mon point de vue, le cœur de
l'activité de RSS... on l'exclut, mais je ne suis pas certain que ça ferait une
si grande différence sur les capacités organisationnelles. Ça fait que c'est
pour ça que je doute du moyen. Ce n'est pas que je doute de la capacité... des
difficultés en termes organisationnels, d'organiser la prévention, ce n'est pas
là-dessus que je doute, c'est sur le moyen qui est utilisé pour y arriver et
l'effet vraiment contre-productif que ça risque d'avoir.
Mme Maccarone : Je sais que
ma collègue, elle a des questions pour vous, mais je voulais juste vous dire
que j'ai beaucoup aimé que vous dites que l'État doit être un modèle à suivre,
puis ça me fait beaucoup réfléchir, le message qu'on envoie aux employés et
aux... du secteur privé.
Ça fait que je ne vous demande pas
nécessairement de passer un commentaire là-dessus, mais... à moins que vous
souhaitez, avant que ma collègue prend la parole, mais j'ai beaucoup aimé cette
réflexion parce que je crois que vous avez raison, puis ça envoie un message un
peu particulier.
M. Viviers (Simon) : Je pense
que, symboliquement, tu sais, vous l'avez vu, là, tu sais, dans les risques
psychosociaux qui sont les plus élevés, notamment pour les travailleurs, les
travailleuses de l'éducation, c'est la question de la reconnaissance. C'est la
question de la reconnaissance où... les enseignantes, les enseignants,
l'ensemble du personnel scolaire pâtissent de ce manque de reconnaissance là.
Et je pense que symboliquement, cette mesure-ci, ajoutée par ailleurs à d'autres,
comme État employeur, risque d'avoir pour effet d'augmenter le sentiment de
non-reconnaissance, malheureusement.
Je pense qu'on doit envoyer un message
très, très fort à notre personnel scolaire, qui tient le système à bout de
bras, à l'effet qu'on les considère, on prend soin d'eux, on a envie qu'ils
restent dans le système et on va prendre les mesures pour pouvoir y arriver,
ça... Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer le message symbolique qu'on
envoie au personnel scolaire.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Madame la députée de Notre-Dame-de-Grâce, 2 min 30 s.
Mme McGraw : Ah mon Dieu!
Écoutez, beaucoup de questions, mais je vais enchaîner sur ma collègue et,
justement, l'exemplarité de l'État avec ce projet de loi. Donc, deux questions,
peut-être, de suite. Donc, c'est ça, donc... la question, c'est : Est-ce
que ce projet de loi démontre bien l'exemplarité de l'État, mais aussi vous
avez parlé, dans votre mémoire, que l'État envoie un signal contradictoire en
excluant... s'excluant lui-même du régime qu'il a adopté. Donc, à part de le
message de manque de reconnaissance, manque de, bon, respect, est-ce qu'il y a
d'autres impacts avec ce geste, avec ces politiques publiques sur la
mobilisation dans les milieux scolaires?
• (16 h 40) •
M. Viviers (Simon) : Bien,
c'est comme... Au risque de me répéter, je pense qu'il y a des gens qui se sont
investis, puis, encore une fois, je pense que le ministre le reconnaît, tu
sais. Il a pris le temps de se déplacer à un colloque à l'Université Laval où
il y avait 250 personnes. Donc, je pense que le ministre le reconnaît,
qu'il y a des gens qui sont investis, qui ont pris à bras-le-corps, vraiment,
le travail de prévention, qui ont mis de l'énergie et qui y croient.
Hier encore, j'étais dans une activité de
formation avec des RSS qui me disaient spécifiquement que, bien, ils étaient en
train d'apprendre, en quelque sorte, à travers ce mandat-là. Et moi, je pense
que, plutôt que de dire : Bien, on va freiner pour y aller plus graduellement,
c'est de dire : Bien, écoutez, on vous encourage, mais il faut le faire en
respect des capacités organisationnelles, mais on va trouver des moyens de
faire en sorte que vous puissiez continuer votre travail... et de plutôt
envoyer le message de donner l'élan. C'est pour ça que je parlais de donner de
l'air, versus couper des ailes. Pour moi, il faut donner de l'air aux personnes
qui s'investissent en santé-sécurité du travail.
Mme McGraw : Petite dernière
question, parce que vous êtes très bien placé, quelle place devraient occuper
les chercheurs et les...
Mme McGraw : ...dans
l'évaluation et la mise en œuvre des politiques en SST.
M. Viviers (Simon) : Merci
beaucoup pour votre question parce que le temps m'a manqué un peu pour pouvoir
compléter cet aspect-là. C'est un aspect que je voulais inscrire dans le
mémoire. Je pense que beaucoup de chercheurs qui sont mobilisés en santé et
sécurité du travail puis dans le domaine des risques psychosociaux qui peuvent
être d'une grande aide pour justement faire face aux défis auxquels les milieux
de travail font face en ce moment en matière de prévention des risques
psychosociaux.
Mme McGraw : ...est-ce que
vous avez été consulté sur ce projet de loi en amont?
M. Viviers (Simon) : Pas sur
ce projet de loi.
Mme McGraw : Merci.
Le Président (M. Allaire) :
Merci à vous, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. On poursuit avec le député
d'Hochelaga-Maisonneuve, 4 min 8 s.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonjour. C'est intéressant. On va suivre un peu la lignée qui est
avancée ici sur le rôle des scientifiques dans ce débat-là parce que je trouve,
malheureusement, qu'il n'est pas mis en valeur puis je m'explique. Vous faites
des recherches, il y a plein d'autres collègues qui font plein de recherches
sur la santé, sécurité au travail. Nous, quand on fait des débats sur des
projets de loi, on essaie de s'inspirer de ça. Mais, à la fin de la journée,
pour reprendre l'expression, qu'est-ce qu'il s'est passé? Pourquoi on a ce
régime-là à rabais? Mais c'est parce que le ministère de l'Éducation ne veut
pas payer. Ce n'est pas plus compliqué que ça. Ça a bloqué au Conseil des
ministres. Le ministre du Travail a amené le règlement qu'il allait négocier au
sein de la CNESST. Les ministères de la Santé et l'Éducation ont dit :
Non, ça coûte trop cher, on ne veut pas payer. Fin de l'histoire.
Est-ce que ce n'est pas décevant de voir
que, malheureusement, la recherche n'a pas une plus grande place dans
l'équilibre des motivations du gouvernement, des élus dans la prise de
décision?
M. Viviers (Simon) : Bien,
écoutez, c'est une frustration que partagent beaucoup de scientifiques, de
manière générale, mais on comprend que... je veux dire, il y a des impératifs
politiques. Mais on fait une partie. Une partie de ce qui nous motive à faire
ce travail-là, c'est d'améliorer, effectivement, la qualité du monde dans
lequel on œuvre, et donc évidemment qu'on veut que nos recherches puissent
avoir des impacts, notamment sur les politiques publiques. Donc, oui, c'est
effectivement frustrant que les recherches se confrontent à ce type d'impératif
là. D'autant que, comme au risque de me répéter, il y a des recherches qui
montrent qu'on risque fort de se diriger dans une situation qui va être plus
catastrophique. Comme je l'ai dit d'entrée de jeu, en 2011, on avait déjà levé
le drapeau pour dire : Écoutez, là, il faut augmenter la prévention des
risques psychosociaux dans le secteur de l'éducation. On se retrouve avec un
niveau de détresse psychologique, 15 ans plus tard, qui est trois fois plus
élevé. Donc, on ne veut pas jouer à la diseuse de bonne aventure, mais, en même
temps, on a des données qui nous montrent qu'on risque fort d'aller dans cette
direction-là. Donc, effectivement, c'est un peu frustrant.
M. Leduc : Beaucoup de gens
qui vous ont précédés ont qualifié le projet de loi de sexiste, de
discriminatoire. C'est les termes qu'on avait entendus lors de la première mouture
du projet de loi n° 59 il y a plus de quatre ans aujourd'hui. Faites-vous la
même analyse?
M. Viviers (Simon) : Bien,
écoutez, je n'ai pas pris cet angle-là, mais j'aurais clairement pu,
évidemment, je le souligne au passage. Mais j'ai bien lu le mémoire de
Geneviève Baril Gingras et son équipe, qui font une démonstration qui est
extrêmement éloquente. Donc... Mais oui, je ferais effectivement... à partir du
moment où on voit bien, et ça a été nommé par l'intervenante précédente, par la
présidente de la CNN... de la CSN, à partir du moment où on constate que ce
sont des milieux à très, très forte majorité féminine, on ne peut pas
s'empêcher, effectivement, de faire une analyse sous l'angle du genre. Donc,
dans le secteur de l'éducation, là, c'est effectivement entre 65 % et
70 % qui sont... qui sont des femmes. Donc, oui, c'est une... c'est
extrêmement préoccupant par rapport à la question de la discrimination.
M. Leduc : D'accord. On n'est
pas en train de se dire qu'un bon matin le ministre s'est levé puis a
dit : Je vais faire un projet de loi sexiste...
M. Viviers (Simon) :
Évidemment.
M. Leduc : ...mais il faut
qu'il réalise que l'impact de son projet de loi est potentiellement
discriminatoire.
M. Viviers (Simon) : Oui,
oui. Tout à fait. Je veux dire, les données sont là pour le montrer.
M. Leduc : ...le temps qu'il
reste, je fais référence à votre mémoire, vous parlez des RSS à la page 3. Vous
dites : «On glisse ainsi d'un rôle actif pivot de la prévention à une
fonction vidée de sa substance, réduite à un simple rôle symbolique.»
Voulez-vous nous parler de ça un peu?
M. Viviers (Simon) : Oui.
Bien, essentiellement, je l'évoqué tout à l'heure, pour moi, le cœur du travail
d'un représentant en santé et sécurité du travail, c'est une très bonne
fonction. Puis, là encore, je pense que le ministre connaît les mécanismes, ce
sont de bons mécanismes qui méritent, par ailleurs, d'être réfléchis sur le
plan des risques psycho sociaux. Mais essentiellement le représentant en santé
et sécurité du travail, il doit faire du travail de terrain, il doit collaborer
à l'activation du programme de prévention et aux mesures. Or, on lui retire,
dans le fond, cette responsabilité-là spécifiquement dans le secteur de
l'éducation, sans compter, puis là j'insiste là-dessus dans mon mémoire, mais
sans compter la question de la prévention et de l'information...
Le Président (M. Allaire) :
Merci.
M. Viviers (Simon) : ...dont
les RSS peuvent disposer.
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Je suis désolé. Ça met fin à l'ensemble des blogs d'échange. M. Viviers,
merci, je pense que l'ensemble des parlementaires l'ont souligné, pour votre
excellent...
Le Président (M. Allaire) :
…contribution à cette commission. Donc, je vais suspendre maintenant les
travaux pour permettre à l'autre groupe de se joindre à nous par
visioconférence. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 46)
(Reprise à 16 h 55)
Le Président (M. Allaire) :
Alors, nous allons reprendre les travaux. On accueille le prochain groupe, le
Conseil du patronat du Québec. Alors, nous avons avec nous Mme Perreault et Me
Dubois, bienvenue. Je vais quand même vous laisser le soin vous présenter, là,
avec votre titre complet, puis je vous cède tout de suite la parole pour votre
allocution de 10 minutes. Merci.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Merci beaucoup. Merci. Alors, Marie-Claude Perreault, présidente et cheffe de
direction par intérim du Conseil du patronat du Québec.
Mme Dubois (Karine) : Me
Karine Dubois, avocate et associée chez Morency, Société d'avocats et
consultante pour le Conseil du patronat.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Alors, M. le Président de la commission, M. le ministre du Travail, Mmes et MM.
les députés, je vous remercie de nous recevoir aujourd'hui au nom du Conseil du
patronat du Québec. Me Karine Dubois, qui m'accompagne, a également siégé
pendant plusieurs années sur certains comités du CCTM, dont celui sur
l'arbitrage de griefs.
Le CPQ, comme vous le savez, représente
plus de 70 000 employeurs de toutes tailles, de tous les secteurs
d'activité, contribuant à la vitalité...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
…vitalité économique du Québec. En tant qu'organisation engagée dans
l'élaboration de politiques publiques favorisant un environnement de travail
sain et durable, nous avons pris connaissance avec intérêt du projet de loi
n° 101 et souhaitons apporter notre contribution au débat en cours.
D'entrée de jeu, nous tenons à souligner
positivement les mesures visant à réduire les délais en arbitrage. Ces
changements sont structurants. Ils favorisent une réduction du coût des
relations de travail, ce qui est essentiel dans le contexte économique actuel.
Notre système d'arbitrage de griefs, nous y tenons au plus haut point et le CPQ
va le défendre avec force et vigueur. Mais je dois vous avouer qu'il était
temps que nous prenions en main… que nous prenions en main le système pour
régler les problèmes de délais qui sont devenus préjudiciables pour les
salariés et les employeurs. Le CPQ se réjouit du consensus patronal-syndical
sur les modifications aux dispositions qui touchent l'arbitrage de griefs et
remercie le gouvernement de faire suite au consensus des parties prenantes.
Nous devons exprimer une première
préoccupation majeure sur un tout autre sujet. Le projet de loi ne traite pas
de la question de l'accès aux employeurs aux dossiers médicaux dans le cadre
des réclamations pour lésion professionnelle. Depuis l'entrée en vigueur du
projet de loi n° 42, qui est venu modifier les articles 38 et 39 de
la loi LATMP, les employeurs se retrouvent maintenant dans une position
délicate, c'est-à-dire qu'ils sont obligés de contester des décisions qu'ils
n'auraient pas contestées en temps normal, uniquement pour avoir accès aux documents
nécessaires à leur défense. Cette dynamique est coûteuse et alourdit
inutilement le système.
Juste pour illustrer mon propos, je vous
indique qu'il y a des firmes qui facturent maintenant entre 600 $ et
800 $... et 1 000 $, pardon, par dossier pour agir à titre de médecin
désigné et procéder aux résumés requis des dossiers médicaux afin de donner
accès aux employeurs, ce qui peut représenter, comme vous pouvez l'imaginer,
des centaines de milliers de dollars par année pour certains employeurs. Il
faut absolument corriger le tir sur cette question. Le CPQ réitère donc sa
demande de modification de la LATMP pour assurer aux employeurs un accès aux
dossiers médicaux approprié et encadré de manière équilibrée et respectueuse
des droits de tous.
Voici ce que nous proposons à ce stade-ci.
Donc, le CPQ propose ce qui suit. La législation récemment adoptée vise à
réduire la charge administrative des médecins. Or, en vertu des dispositions en
vigueur dans la LATMP, seuls les médecins peuvent fournir aux employeurs un
résumé des dossiers médicaux. C'est un peu contre-productif. La solution
pratique et juridique que nous proposons serait d'élargir à d'autres personnes,
régies par un ordre professionnel, la possibilité de faire lesdits résumés. La
loi 25 qui protège l'accès aux informations confidentielles, les règles
déontologiques de ces professionnels et les amendes en cas de contravention
suffisent largement à protéger la vie privée.
Dans le même ordre d'idée, en ce qui
concerne la loi instituant le Tribunal administratif du travail, nous sommes
préoccupés par les nouvelles restrictions d'accès aux dossiers médicaux. Le
flou entourant la notion de personne autorisée pourrait engendrer des délais et
entraver une défense pleine et entière. Une clarification est nécessaire.
Concernant le processus de négociation
préalable à la révision administrative de la CNESST, nous reconnaissons la
volonté de déjudiciariser les dossiers. Toutefois, le mécanisme proposé à
l'article six du projet de loi demeure, selon nous, un ajustement insuffisant.
Le CPQ recommande plutôt, comme il l'a déjà fait par le passé, l'abolition
complète de la révision administrative de la CNESST, qui s'avère être un
processus interne peu utile, redondant et qui ralentit l'aboutissement des dossiers
de les… de traitement des lésions professionnelles. Cette recommandation,
partagée tant par les associations patronales et syndicales, date de 2017 et
n'a rien perdu de sa pertinence. Ce consensus a d'ailleurs été renouvelé en
2025.
• (17 heures) •
Dans notre mémoire, vous pourrez lire aux
pages 5 à 6… nous avons procédé à une analyse des dispositions de la Loi
sur la justice administrative qui nous a permis de conclure que celle-ci
n'empêche pas la suppression de ce palier décisionnel. De plus, nous comprenons
des divers intervenants à la présente commission que ce processus de
négociation préalable à la révision semble soulever plusieurs questionnements
et controverses, ce qui risque d'entraîner des débats contradictoires inutiles.
L'abolition de la révision administrative règle la situation…
17 h (version non révisée)
Mme Perreault (Marie-Claude) :
…le CPQ croit également qu'il est essentiel de clarifier la définition de la
nouvelle catégorie de dirigeants de travailleurs. L'objectif de cette
disposition, nous le comprenons, et l'objectif est louable. Le CPQ l'appuie,
mais recommande que le législateur précise les critères d'application afin d'éviter
des effets imprévus sur les obligations des travailleurs et la gestion des
réclamations, particulièrement dans un contexte… d'un contexte organisationnel
atypique.
Le CPQ souhaite souligner l'importance de
préserver la Loi sur les décrets des conventions collectives. Il n'y a aucune,
mais aucune raison, à ce stade-ci, d'abolir cette loi. Au contraire, il y a des
arguments sérieux qui militent nettement en faveur de son maintien. Au cours
des dernières années, nous avons constaté certains problèmes au niveau de la
gouvernance de certains comités paritaires. Vous avez, M. le ministre, légiféré
et vous avez atteint la cible. Comme vous le dites souvent, tout est
perfectible, mais les décrets de conventions collectives représentent un gage
de protection tant pour les travailleurs que les entreprises qui y sont
soumises. C'est un filet de sécurité important pour la population la santé et
sécurité des travailleurs, l'environnement, la santé publique, l'accès à une
assurance collective et à un régime de retraite, le maintien des conditions de
travail justes et uniformes, au-delà de ce qui est prévu dans la Loi sur les
normes du travail, dans certains milieux où il peut être facile de créer un
marché parallèle, et j'en passe. Il s'agit d'un outil de stabilité essentiel
qui doit absolument être maintenu.
D'ailleurs, le modèle propre au Québec est
actuellement en discussion dans d'autres provinces. Le CPQ constate que le
projet de loi n'aborde pas cette question, mais, si c'était la volonté du gouvernement
de le faire ultérieurement, le CPQ va souhaiter présenter ses commentaires
détaillés sur cette question, mais en temps opportun.
Je cède maintenant la parole à ma collègue,
Me Catherine Dubois, pour la suite.
Mme Dubois (Karine) : Merci, Mme
Perreault. Je poursuis donc avec les autres aspects du projet de loi, à
commencer par les changements proposés au Code du travail.
Le Conseil du patronat accueille
favorablement les mesures qui visent à raccourcir les délais en matière d'arbitrage
de griefs, lesquels découlent d'un consensus patronal-syndical, il faut le dire.
La nomination d'un arbitre dans un délai de six mois et le début de l'audition
dans l'année qui suit le dépôt du grief sont des objectifs pertinents, mais
surtout essentiels à la survie de notre système d'arbitrage de griefs, mais ces
délais ne pourront être rencontrés si l'on ne rend pas les ressources
accessibles aux parties, notamment en région. Le manque d'arbitre de griefs,
déjà préoccupant, risque d'être exacerbé. Le CPQ salue donc le nouvel appel de
candidatures du CCTM pour ajouter des arbitres à la liste officielle.
Concernant maintenant la communication de
la preuve avant l'audience, le CPQ suggère que ce pouvoir soit exercé avec
souplesse par l'arbitre plutôt qu'imposer rigoureusement dans tous les cas, tout
comme il existe déjà dans les règles applicables devant le Tribunal
administratif du travail.
Ensuite, sur les absences liées à la santé
publique ou à un sinistre, nous comprenons la volonté du législateur de
formaliser des situations vécues pendant la pandémie. Toutefois, ces absences
doivent être encadrées de manière stricte : durée, justification, avis à l'employeur.
Il en va de la planification opérationnelle de nos entreprises.
En conclusion, le Conseil du patronat
salue les intentions du projet de loi n° 101, mais, pour que ces
intentions se traduisent en résultats concrets, plusieurs éléments techniques,
opérationnels et réglementaires devraient être ajustés. Nous restons évidemment
à votre disposition pour répondre à vos questions et contribuer à l'élaboration
d'un cadre législatif équilibré, rigoureux et adapté.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
excellent, c'est parfait. On débute la période d'échange. M. le ministre, vous
avez 16 min 30 s. La parole est à vous.
M. Boulet : Oui. Merci au
Conseil du patronat, Marie-Claude Perreault, Karine Dubois, de votre
engagement, de votre temps pour préparer votre mémoire et de votre présence
virtuelle.
Je vais peut-être y aller par thématique,
là, puis là c'est un peu les deux, là. Pour l'arbitrage, on le sait…
M. Boulet : ...tous et toutes
que c'est une procédure qui se veut expéditive. Puis, quand les délais sont
trop longs, c'est presque l'équivalent d'une négation de l'exercice de droit.
Et les délais qu'on a constatés dans les dernières années sont atrocement
élevés, là, si je peux m'exprimer ainsi.
Et, pour la conférence... bien, en fait,
pour la nomination de l'arbitre, pour la première journée d'audience, pour la
conférence préparatoire, pour la divulgation de preuve, ça, j'ai bien compris
l'argument, là, maître Dubois, là, de faire preuve de souplesse.
Puis, les ressources arbitrales, vous
n'êtes pas les premiers à faire référence à la répartition inéquitable entre
régions. Mais là, il y en a cinq nouveaux qui ont été nommés. Puis merci de
souligner l'appel de candidatures pour ajouter des arbitres. C'est un
déséquilibre entre l'offre et la demande. On le sait, les besoins sont grands,
les arbitrages sont de plus en plus longs et complexes. Et il y a, parce que
les arbitres sont choisis par les parties, une concentration des mandats auprès
d'un nombre plus petit d'arbitres, là, qui ont des délais parfois qui sont hyperimportants.
Ça fait que merci, moi, ça me va pour les
commentaires pour l'arbitrage.
Confidentialité et accès. On en a déjà
discuté. Vous avez vu qu'on a remis le montant des amendes, comme ce que vous
nous aviez fait comme représentation lors de la présentation du p.l. 42, là.
Les amendes sont plus élevées pour les violations à la confidentialité des
informations dans des dossiers de violence à caractère sexuel. C'était
d'ailleurs l'objet du projet de loi. Et on a profité du projet de loi n° 101
pour corriger ce qui pouvait être considéré comme un irritant. Le montant des
amendes tient compte de la nature et de l'accent qu'on avait mis sur les
violences à caractère sexuel dans le projet de loi n° 42.
Ceci dit, pour le reste, s'il n'y a pas de
changement par rapport à ce qu'on appelle le statu quo ante. Pour moi, ça a
toujours été clair, le libellé est dans une forme plus négative qu'il l'était
avant. Mais, les informations de nature médicale, c'est le médecin désigné par
l'employeur qui y a accès. Je comprends bien, Me Perreault, ce que vous
souhaiteriez, c'est qu'on élargisse ce concept-là et que d'autres personnes que
le médecin désigné puissent y avoir accès pour, non seulement diminuer les
coûts, mais atteindre le même objectif, c'est-à-dire que l'employeur ait une
information qui soit digérée par un professionnel de la santé avant de les
obtenir. Est-ce que je vous ai bien compris, Me Perreault... Marie-Claude,
là-dessus?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Oui.
En fait, merci pour la question. Oui, c'est une solution que nous apportons
aujourd'hui, une solution pratique et évidemment juridique qui permettrait aux
employeurs d'avoir plus de professionnels encadrés par un code de déontologie
pour avoir accès à ces résumés de dossiers. Parce que là, c'est concentré, un
peu comme dans un entonnoir. C'est très difficile. Et puis les médecins sont
débordés, vous le savez, là, je n'apprends rien à personne. Et puis les coûts
augmentent. Alors, c'est très, très difficile en ce moment d'avoir accès aux
dossiers médicaux.
• (17 h 10) •
M. Boulet : On pourrait
dire : Les problèmes de santé mentale augmentent, effectivement, c'est
une... c'est une idée intéressante, puis on va certainement la considérer.
Personne autorisée. Bon. Vous savez,
avant, puis c'est un peu asymétrique, là, mais au Tribunal administratif du
travail, à peu près n'importe qui pouvait avoir accès à des dossiers, alors que
là, on essaie de limiter parce qu'il y a tellement d'informations sensibles qui
doivent demeurer confidentielles sur les personnes concernées par une lésion
professionnelle. On a utilisé le concept de personne autorisée. En fait, dans
mon esprit, c'est une personne qui a un intérêt. Mais vous sentez le besoin que
ce soit clarifié, hein, Marie-Claude?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Oui.
Parce que, ce qui arrive, c'est que déjà il y a beaucoup de travail au tribunal
administratif, il y a des délais importants. Et, en disant «personne
autorisée», est-ce qu'on aura le nombre suffisant de personnes? Il ne faudrait
pas que ça retarde le processus. En fait, l'objet...
M. Boulet : Allez-y,
Marie-Claude.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Non.
Ça va. Ça va. L'objectif visé, c'est... c'est... on le comprend très bien,
c'est parfait, on veut assurer la...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
...d'un bout à l'autre, il y a une logique. Mais il ne faudrait pas que ça
retarde le processus en disant «seulement une personne autorisée, la quantité
qui», pour nous, c'était flou, et ça, ça soulève une préoccupation, en fait, je
vais vous le dire comme ça.
M. Boulet : C'est à dire
que...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Bien, une...
M. Boulet : Oui, allez-y.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
En termes de noms, bien, qui va être autorisé à le faire aux dates... qui?
M. Boulet : O.K. Négociation,
prédirection de la révision administrative, donc, vous demandez l'abolition.
Vous n'êtes pas les premiers, on en avait parlé, souvenez-vous, en 2021, dans
le cadre d'un autre projet de loi. Souvenez-vous qu'on avait pris la direction
de la possibilité d'opter pour aller dans certaines matières directement au
Tribunal administratif du travail. Si je vous demandais à
brûle-pourpoint : Est ce que vous constatez que ça, cette option-là, elle
est comprise et utilisée? Je vous demande ça à brûle-pourpoint.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bien,
selon ma pratique puis mon expérience, oui, et puis ça nous démontre qu'on a la
capacité de le faire, puis ça va désengorger. Et si on n'a pas de révision
administrative, bien, les dossiers, on va connaître le chemin pour s'en aller
directement au TAT, plus facilement, on aura accès à la conciliation, règlement
des différends à l'avance, discussions sans qu'il y ait le problème de :
Est-ce qu'on a la capacité de négocier une entente avant la révision
administrative?
M. Boulet : Je comprends.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Il me semble que c'est plus compliqué que ça devrait l'être. On est en train de
se compliquer la vie si on va vers ça versus un processus allégé, mon opinion.
M. Boulet : Je suis porté à
être assez d'accord avec ça, puis surtout qu'en révision administrative via les
dernières données que j'ai obtenues, je pense que c'est 82 ou 83 % des
décisions de première instance rendues par les agents qui sont confirmés, là.
Ça fait que c'est un processus où on émet des observations écrites, là, et donc
ça donne un résultat qui est plus ou moins efficace. Mais souvenez-vous qu'on
avait été contraint de considérer la Loi sur la justice administrative, là,
puis il y avait une affaire d'équité procédurale puis d'équité avec les autres
procédures, dans le cas où il y avait des décisions de première instance, là,
qui sont quasi judiciaires, qui affectent les droits des parties. Ça fait que
c'est sûr que c'était un enjeu. Je trouvais qu'on avait quand même trouvé une
voie de passage intéressante avec l'option, mais on va voir comment on peut...
Vous n'êtes pas les premiers à nous demander de l'éliminer.
Juste faire une petite vérification
donc...
Des voix : ...
M. Boulet : O.K. c'est bon.
Chauffeur inc., Marie-Claude, je veux juste qu'on se comprenne bien, là. Tu
sais, dans la LATMP, à l'article 2, des définitions, on dit «le
travailleur — on le définit, la personne physique, vous connaissez la
définition — qui travaille pour un employeur, moyennant rémunération,
en vertu d'un contrat de travail, à l'exclusion de» puis là on exclut «le
dirigeant». Et c'est là que l'Association du camionnage nous disait : Ce
dirigeant-là, il est couvert par son incorporation puis, fondamentalement, ce
n'est pas un dirigeant. Et la difficulté, c'était de soulever le voile
corporatif puis... Donc, on est venus, nous, intégrer une définition, puis
peut-être qu'elle n'est pas totalement claire, mais qui dit que «2. ne peut
avoir pour effet d'empêcher de qualifier le dirigeant de travailleur», il faut
le lire ensemble. Donc, ça ne nous empêche pas, malgré l'exclusion qu'il y
a à l'article 2 de la LATMP, de qualifier le dirigeant tel que, par
ailleurs, défini aussi à l'article 2 d'être un travailleur, en tenant
compte de sa réalité factuelle. Est-ce qu'on vous le comprenez de la même
manière?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Oui, bien, je comprends très bien l'objectif puis, quand on s'explique comme
ça, on est probablement sur la même longueur d'onde.
M. Boulet : Bien oui.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Je pense, c'est peut-être le texte qui mérite peut-être une... Dans la note
explicative du projet de loi, je l'ai relue à plusieurs reprises, la première
ligne, je pense que ça mérite clarification, parce que l'objectif, on le saisit
très bien puis on sait exactement quelle situation on veut rétablir avec...
Mme Perreault (Marie-Claude) : ...ça,
ce qui s'est produit. Alors, je pense qu'il faut juste revoir le texte pour
s'assurer d'une compréhension uniforme.
M. Boulet : On est vraiment
sur la même longueur d'onde. Et je vais m'assurer de dissiper cette petite
problématique d'interprétation parce qu'un autre groupe l'a soulevée, là,
notamment l'Association du camionnage, et quand on leur a expliqué, il
comprenait bien, mais à la lecture, puis je me souviens qu'il y avait... il
était un groupe quand même, il n'était pas convaincu, là, de la signification
de notre amendement.
Mme Perreault (Marie-Claude) : C'est
ça.Ça mérite une petite clarification.
M. Boulet : Oui.
Marie-Claude, dernier point, Loi sur les décrets de conventions collectives de
travail.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Oui,
oui.
M. Boulet : Bon. Pour ceux...
on va tous se mettre à jour : les décrets, c'est comme des conventions
collectives de travail, c'est des normes minimales, là, parce qu'on peut aller
au-delà de ça, qui sont adoptés par secteur d'activité et par territoire
géographique. Donc, on réfère souvent à l'entretien des édifices publics à
Montréal. Il y a un groupe patronal qui nous demande de l'abroger depuis des
années. Je vois mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve qui fait un peu la moue,
là, mais on peut se taquiner parfois. Mais là, puis souvenez-vous, j'ai eu des
discussions avec les groupes patronaux. Vous, votre problématique, c'est de
dire : il y a des enjeux de formation puis d'avantages sociaux. C'est ce
qui vous préoccupe, hein, dans votre plaidoirie, à l'effet de ne pas abroger la
LDCC.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Ah,
ça va plus loin que ça, ça va vraiment plus loin que ça.
M. Boulet : Aller plus loin.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Parfait.
Je suis un peu étonné d'en parler dans le cadre de ce projet de loi là, vu qu'il
y avait absence de dispositions. Alors, moi, je tenais pour acquis qu'on ne
touche pas à ça puis on pourra en reparler peut-être dans un autre cadre. Mais
c'est sûr qu'à ce point de vue là ça protège les milieux syndiqués, non
syndiqués, ça assure des conditions de travail beaucoup plus justes, au-delà de
ce que la Loi sur les normes du travail prévoit. Les comités paritaires qui
agissent avec vigilance, qui font preuve de beaucoup... il y a beaucoup
d'enquêtes, de surveillance. Il y avait eu un problème à cet égard là, comme je
l'ai dit d'emblée, d'entrée de jeu, vous l'avez réglé. On a adressé le
problème. Alors, c'est une question de surveillance.
Il y a une question pour les enlèvements
d'ordures ménagères, c'est il y a une question de santé publique aussi,
d'environnement, de santé, sécurité, ça normalise, là, l'ensemble des
conditions de travail. La concurrence déloyale, c'est un sujet qui mérite, si
vous souhaitez qu'on ait cette discussion-là, beaucoup plus que quatre minutes,
trois minutes. Il y a des arguments sérieux à faire valoir, mais il ne faut pas
toucher à la Loi sur les décrets des conventions collectives dans le cadre du
projet omnibus. Permettez-nous d'avoir cette discussion-là dans un autre forum,
au besoin.
M. Boulet : Tout à fait.
Totalement d'accord. On pourra approfondir la discussion, mais je tenais quand
même à vous laisser vous exprimer parce que vous l'aviez, dans votre mémoire,
soulevé, parce qu'il y a tellement d'enjeux là-dedans, hein? Tu sais, puis moi,
je pense que les régimes d'avantages sociaux, les régimes de retraite, mais il
faut tenir compte du fardeau administratif, là, les prélèvements sur le
salaire, les rapports mensuels pour les PME, c'est quand même un fardeau
imposant, ça fait qu'il y a plusieurs éléments quand même à analyser, là,
dans... Puis évidemment ce n'est pas tout à fait respectueux des principes de
base d'une économie de marché, mais, dépendamment de la grosseur de
l'entreprise, il y a plus ou moins de satisfaction à ce que nous fassions cette
discussion-là.
• (17 h 20) •
Mme Perreault (Marie-Claude) : Mais
si vous me permettez d'ajouter parce que j'ai fait mes devoirs, j'ai consulté
énormément de membres du CPQ qui sont régis par des décrets dans différents
secteurs et puis même les plus petites entreprises, ça va quand même assez
bien, la gestion de ça en regard des prélèvements, mais je suis contente
d'apprendre qu'il n'y aura pas de dispositions dans le projet de loi concernant
la Loi sur les décrets des conventions collectives.
M. Boulet : Pas dans le
projet de loi n° 101.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Merci.
M. Boulet : On continue quand
même d'analyser puis on pourra en discuter dans le contexte d'un autre forum.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Très bien.
M. Boulet : O.K. Mais je veux
simplement, Marie-Claude, Karine, vous remercier beaucoup de votre présence et
de vos propos, c'est... ça nous éclaircit. Puis si jamais on a des discussions
postérieures à avoir, on n'hésitera pas à communiquer avec vous deux. Merci
beaucoup.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Mais
je l'espère bien. Merci à vous, M. le ministre.
Le Président (M. Allaire) :
Merci, M. le ministre...
Le Président (M. Allaire) :
...on enchaîne avec Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce,
12 min 23 s. La parole est à vous.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président, et merci, Mme... mesdames, je devrais dire, pour votre présence en
virtuel, mais aussi votre mémoire très détaillé. Peut-être, je vais enchaîner sur
les questions du ministre portant sur les décrets. Est-ce que vous pensez qu'un
secteur devrait s'ajouter au décret ou un secteur qui n'est plus couvert qui
devrait le revenir? Et sinon... donc, si oui, pourquoi? Sinon, pourquoi? Et en
quoi c'est différent au décret actuel?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Bon, alors...
Mme McGraw : Donc, plusieurs
questions en une.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Oui,
non, je pense que je saisis bien. Mais, en fait, c'est... d'ajouter un secteur
d'activités ou d'enlever un secteur d'activités, ça nécessite une analyse en
profondeur de l'activité en question, de l'impact économique, du marché, des
conditions de travail. C'est certain, Mme la députée, qu'en dedans de quelques
minutes, on ne peut pas régler cette question-là. Est-ce qu'on peut se la
poser? Absolument. Mais ça nécessite... je serais... ce serait trop facile pour
moi de dire : Oui et non, tel secteur, un autre secteur, mais ce ne serait
pas basé sur une analyse en profondeur de la situation.
Mme McGraw : Parfait. Et donc
ça serait quoi, la différence au degré actuel? Juste pour bien comprendre.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bien,
la Loi sur les décrets de conventions collectives, peut-être pour vous
l'expliquer un peu, c'est une loi générale, puis il y a différents secteurs qui
sont visés avec des décrets différents. Alors, si je vais dans votre question,
si on ajoute un certain secteur d'activités, bien, il y aura un décret en
lien... si c'est un nouveau secteur d'activités, il y aura un décret en lien
avec ce secteur d'activités là. Je me souviens à l'époque... là, j'y vais
vraiment... j'y vais de mémoire, mais il me semble que, dans l'Outaouais, il y
avait un décret pour les coiffeurs à un moment donné qui avait été aboli, parce
qu'il y a des décrets aussi par régions, là, sans faire un cours bien détaillé
sur l'application des décrets, donc, il a été possible d'enlever ce secteur-là
d'activités pour des raisons x,y, z qui font suite à une analyse, c'est une
décision organisationnelle, politique, financière, sociale. Il y a plusieurs
questions, là, qui sont soulevées avec cette question-là.
Mme McGraw : Autre question
en vue de l'analyse, est-ce que vous recommandez un suivi réglementaire
obligatoire de la mise en œuvre du projet loi n° 101
avec des indicateurs de performance?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bien,
obligatoires, j'ai toujours un petit peu de difficulté à dire obligatoire parce
qu'il y a beaucoup de choses dans notre assiette, dans votre assiette aussi,
sur le suivi de ça. On aime bien être capable de mesurer l'impact d'une loi ou
d'un règlement. Ce que nos entreprises ont besoin, c'est de la prévisibilité.
Vous le savez, c'est dans tout. On veut savoir où est-ce qu'on s'en va. Donc,
c'est certain que, quand on a des indicateurs de performance, ça nous permet
d'objectiver l'application ou l'impact. Maintenant, de dire régulièrement, à
telle fréquence, je ne suis pas en mesure de vous dire si oui ou non ça
mériterait une analyse plus en détail, mais on aime être capable de mesurer
l'impact de ce qui nous est obligé ou à quoi nous sommes soumis.
Mme McGraw : Ça a du bon
sens. Puis, si je comprends bien, la fréquence, c'est à voir, mais elle n'est
pas nécessairement obligatoire. Mais vous pensez que ce soit une bonne idée,
mais pas nécessairement obligatoire, si je comprends bien?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Exactement,
oui.
Mme McGraw : De façon
générale, une question que je pose à tous les groupes, les syndicats, etc.,
est-ce que vous avez été consultés? Là, vous êtes aujourd'hui aux consultations
particulières, mais est-ce que vous avez été consultés en amont sur ce projet
de loi? Et, de façon générale, est-ce que vous pensez que les employeurs ont
été consultés pour rédiger ce... à votre connaissance, rédiger ce projet de
loi?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bien,
c'est-à-dire qu'on n'est jamais consultés pour la rédaction du projet de loi,
c'est un privilège, là, que...
Mme McGraw : Avant de...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Avant de le rédiger, O.K.
Mme McGraw : Pardon. Avant la
rédaction, oui, oui, tout à fait.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
C'est parfait. Mais vous savez qu'on a des discussions en continu. On a le
CCTM, qui est un organisme auquel je participe personnellement à l'ensemble des
comités et des sous-comités. On a des discussions de groupe avec le ministre,
les représentants des employeurs. Donc, c'est certain qu'on a eu des échanges.
La communication, c'est essentiel, puis nous la sollicitons, nous sommes
sollicités. Alors, oui, il y a eu des discussions sur le contenu...
Mme McGraw : ...et, en vue de
ces discussions-là, est-ce que vous pensez que le projet présentement est tant
équilibré entre la protection des travailleurs et la compétitivité des
entreprises?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Oui.
Comme on a indiqué dans le mémoire, le CPQ salue le projet de loi, qui est
essentiel, à certains égards, pour la compétitivité des entreprises, dans la
mesure où on est en mesure de faire la gestion de nos dossiers de réclamation
et avoir accès aux dossiers médicaux. Vous avez compris que c'est un point
très, très important pour nous. Nous sommes d'avis qu'il y a un équilibre dans
le projet de loi. Et je salue le fait qu'il y a beaucoup de dispositions du
projet de loi qui émanent du consensus patronal-syndical que nous avons eu,
notamment par rapport à l'arbitrage de griefs.
Mme McGraw : En ce qui
concerne les contraintes administratives pour les employeurs, est-ce que vous
pensez que le projet de loi répond à cet objectif d'allègement?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bien,
je n'ai pas saisi que ce projet de loi là visait l'allègement, nécessairement.
Il y a un comité d'allègement réglementaire, qui va au-delà d'un certain projet
de loi, qui vient corriger, là... on l'appelle, nous, le bill omnibus, qui
vient corriger certains détails dans nos lois du travail qui causaient un
irritant. C'est certain, puis je l'ai dit, je vais le redire, les employeurs au
Québec ont un lourd fardeau administratif sur les épaules, de plus en plus et
de façon grandissante. Et puis nous devons travailler à aider nos entreprises
pour demeurer concurrentes, surtout dans le contexte économique actuel, d'avoir
une diminution de la charge fiscale, mais... pas charge «fiscale», mais
administrative, pardon. Et, la charge administrative, ce n'est pas seulement de
remplir des formulaires. Ça va au-delà de ça. Et je pense que le comité sur
l'allègement réglementaire auquel on participe pourrait même avoir un mandat
encore plus élargi pour nous permettre d'atteindre cet objectif-là.
Mme McGraw : Donc, en parlant
du fardeau administratif, vous mentionnez dans votre mémoire que les employeurs
doivent parfois débourser des centaines de milliers de dollars pour obtenir un
accès partiel à un dossier médical. Est-ce qu'un tel niveau de dépenses dans un
système public est compatible avec le discours gouvernemental sur la réduction,
justement, du fardeau administratif?
Mme Perreault (Marie-Claude) : Bon.
Alors, je... de, moi, là, me prononcer, si c'est compatible avec la position du
gouvernement, c'est une chose. Mais, ce que je peux vous dire, par ailleurs,
c'est qu'avec la disposition telle que rédigée, si on ne l'amende pas, ça fait
en sorte que l'accès aux dossiers médicaux par les employeurs est tellement
difficile.
Et il y a une incompréhension. Parce qu'il
y a eu des modifications à la loi. Et on dit toujours que le législateur ne
parle pas pour ne rien dire. Alors, on a tenu pour acquis que les modifications
voulaient dire autre chose que ce qui était avant. Alors, il y a eu une espèce
de mauvaise compréhension, un resserrement tellement important. Je veux juste
illustrer mon propos. Pour faire de l'assignation temporaire avec nos
travailleurs qui sont des accidentés, des fois, on veut savoir c'est quoi, le
diagnostic, est-ce qu'il y a encore des traitements de physio, est-ce qu'il y a
des limitations fonctionnelles. On se fait dire que c'est confidentiel puis il
faut aller par le médecin désigné pour avoir le minimum de ces informations-là
pour être capables de faire de l'assignation temporaire. Ce n'est pas ça que le
projet de loi voulait dire à la base, mais c'est comme ça qu'il est compris,
qu'il est... qu'il est appliqué. Parce que les amendes ont été augmentées, ça
crée une crainte, il y a eu comme tout un brouhaha. Alors, ce qui fait en sorte
qu'à l'heure actuelle cette impossibilité d'avoir un accès aux dossiers
médicaux, comme on devrait l'avoir... On ne demande pas plus que ce qu'on doit
avoir. Mais, en ce moment, on n'a pas le minimum requis.
• (17 h 30) •
Si j'ai encore deux instants, je peux encore
illustrer mon propos. La CNESST, par exemple, envoie - c'est correct - le
dossier médical à l'adresse du médecin désigné par l'employeur. L'adresse, des
fois, c'est le centre hospitalier du médecin parce qu'il pratique en centre
hospitalier. Mais ce n'est pas là qu'il agit comme médecin désigné. C'est dans
une clinique. Mais, les dossiers, vu que c'est... c'est très... les gens
craignent les gens, les gens veulent... veulent se conformer, bien, tous les
dossiers sont envoyés au centre hospitalier, où est-ce que le médecin pratique.
Mais ce n'est pas là qu'il agit comme médecin désigné.
Ce ne sont que des exemples pour illustrer
mon propos qu'il y a une grande mais mauvaise compréhension à l'heure actuelle
et puis une grande difficulté pour nos entreprises d'assurer la gestion
efficace, pas juste des réclamations d'accidents de...
17 h 30 (version non révisée)
Mme Perreault (Marie-Claude) :
...le travail, mais du retour au travail, aussi, de nos employés, que ce soit
en assignation temporaire ou à leur emploi... C'est une préoccupation, puis
vous m'entendez le dire, puis je prends chaque minute pour le dire, c'est... à
l'heure actuelle, il faut qu'on agisse sur cette disposition-là. On voit
concrètement un gros problème pour nos entreprises.
Mme McGraw : Donc, selon
vous, de façon générale, le projet de loi est assez équilibré, mais voilà un
exemple où, si je comprends bien, c'est moins équilibré, vous voulez voir un
amendement? C'est bien ça?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Oui. C'est un amendement qui, pour moi, est un incontournable si on veut
continuer à faire une gestion efficace du retour au travail de nos accidentés.
Mme McGraw : Juste pour
revenir à ma première question, je voulais venir sur les décrets, je voulais
revenir sur, justement, le secteur automobile, est-ce que vous pouvez nous
expliquer pourquoi le secteur automobile n'a pas une couverture dans toutes les
régions et pourquoi les régions n'ont pas... non... n'en ont pas... qui ne sont
pas couvertes, n'en ont pas?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Il y a un historique à ça, et puis je ne suis vraiment pas préparée. Je connais
l'historique, mais j'aurais peur de vous induire en erreur. Comme je vous ai
parlé tantôt, il y a un historique aussi par rapport au décret des coiffeurs, il
y a eu... Dans la région de Gatineau, ils ne sont plus couverts, ils le sont
dans d'autres régions. Alors, il y a un historique à ça qu'on pourrait étudier,
éventuellement, si toutefois on... le gouvernement sent le besoin de légiférer
sur la Loi sur les décrets de convention collective. C'est un des exemples que
nous pourrions faire comme analyse pour en arriver à une décision et une
conclusion éclairées.
Mme McGraw : Peut-être en
conclusion, avec le temps qu'il me reste, peut-être deux minutes, j'aimerais
vous céder la parole. Si vous avez des enjeux que vous voulez souligner,
quelque chose que vous voulez élaborer ou souligner, je vous laisse le temps,
le soin de le faire.
Le Président (M. Allaire) :
...
Mme McGraw : Ah! 20 secondes!
Bien, ce n'est même pas beaucoup de temps. Désolée, je pensais que c'était deux
minutes.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Bien, 20 secondes, je vais le prendre quand même puisque vous me l'offrez.
Merci beaucoup. Donc, c'est certain que, pour nous, l'arbitrage de grief, il
faut absolument faire un sauvetage de notre système, il faut adopter les modifications,
il faut réduire les délais. J'invite, en fait, toutes les parties prenantes à
agir aussi en conséquence.
Le Président (M. Allaire) :
Merci...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Les dossiers...
Le Président (M. Allaire) : Merci,
merci.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Parfait.
Le Président (M. Allaire) : Malheureusement,
ça met fin à ce bloc d'échange. On poursuit avec le député d'Hochelaga-Maisonneuve,
4 min 8 s.
M. Leduc : Merci. Bien, voulez-vous
terminer? Vous étiez en train de...
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Non, allez-y. J'allais faire comme une plaideuse, là...
M. Leduc : La liste d'épicerie!
Mme Perreault (Marie-Claude) :
...j'allais continuer jusqu'à tant qu'on m'arrête. Alors, allez-y.
M. Leduc : La liste d'épicerie
était partie. C'est bien parfait. Bien content de vous voir. Toujours appréciée,
votre contribution ici. Sur la loi... Je veux vraiment saluer que c'est
rafraîchissant, votre discours sur la Loi sur les décrets, parce qu'en effet on
entendait plus, je pense que c'est entre autres la FCEI qui est archicontre,
là, qui la voit dans sa soupe, je pense, la Loi sur les décrets. Puis je pense
que le seul consensus qu'il y a, dans tous tout ce monde-là, c'est qu'il faut
faire de quoi, il faut faire une réforme. Mais je pense qu'eux, ils veulent
juste l'abolir. Vous, vous dites : Il faut qu'on la dépoussière, mais il
faut qu'on... il ne faut pas qu'on la jette, si j'ai bien compris. En tout cas,
ce sera un autre débat pour un autre moment, peut-être, parce qu'en effet ce
n'est pas dans le projet de loi n° 101.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Merci. Parfait. Merci de m'assurer de ça, c'est déjà un point atteint. Merci
beaucoup.
M. Leduc : Merveilleux! Vous
faites référence, dans votre mémoire, à l'abolition de la direction de la
révision administrative. C'est une position qui, elle aussi, est très
consensuelle, patronal, syndical. Très rares sont les organisations qui disent :
Oui, oui, quelle belle mesure, la DRA, qui ne sert, dans les faits, à rien, parce
que je pense c'est 95 % du temps... confirme la décision déjà prise.
Pourquoi on ne le fait pas? Si tout le monde est d'accord pour la faire sauter,
la DRA, qu'est-ce qui bloque?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Bien là, je ne sais pas, je ne sais pas ce qui bloque, en fait. On en parle
parce que c'est là. Parce qu'on a eu des discussions, comme vous savez peut-être,
au sous-comité... au CCTM, on a discuté beaucoup, ça fait... Tu sais, on a
échangé, on a regardé ça d'un côté et de l'autre, et là je pense que ça fait
consensus, à tout le moins, selon ma compréhension, ça fait consensus. Donc, je
ne vois rien qui bloque.
Ce qui était l'argument, à l'époque, que
j'ai parlé tout à l'heure, la Loi sur la justice administrative, là, et puis on
l'a traité dans notre mémoire, nous, on pense que ce n'est pas un enjeu par
rapport à ça. D'ailleurs, on a aboli la révision administrative pour certains
des sujets, comme on a dit tout à l'heure, pour lesquels on peut aller directement
au TAT. Alors moi, je ne vois pas ce qui peut bloquer, ni juridiquement. Opérationnellement,
je peux comprendre qu'au niveau de la CSST... CNESST, pardon — ça
trahit mon âge — qu'il pourrait y avoir une réorganisation, qu'il
devra...
Mme Perreault (Marie-Claude) : …une
réorganisation, mais on a des gens exceptionnels, des gestionnaires de qualité,
à la CNESST, qui sauront comment réallouer les ressources.
M. Leduc : Il ne manque pas
d'ouvrage à la CNESST. Ils vont pouvoir faire autre chose, là. Parfait.
Mme Perreault (Marie-Claude) : Non.
Bien oui, puis je ne veux pas m'improviser gestionnaire, là. Je siège, je pense
que vous le savez, au conseil d'administration de la CNESST. J'ai confiance en
la présidente et ses gestionnaires pour atteindre cet objectif.
M. Leduc : Il me reste une
minute pour une dernière question rapide. Est-ce qu'il n'y a pas une forme de
frustration chez vous, qui représentez le secteur privé, de voir que l'État,
qui devrait avoir un rôle d'exemplarité comme employeur, se fait son propre
petit régime à rabais pour le santé… le secteur de la santé et de l'éducation,
mais que les acteurs du secteur privé, eux autres, il va falloir qu'ils aient
le régime complet. Il n'y a pas une forme de déception à ce niveau-là?
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Bien, frustration, là, je pense que… En fait, je reviens au départ. La LMRSST,
c'est un méga-avancement sur ce qu'on avait avant. On va s'entendre là-dessus.
Quand les nouvelles dispositions sont arrivées en place et qu'il y a eu toute
la réforme, on est d'accord, pas d'accord sur certaines dispositions, mais,
au-delà de ça, c'est un… ce sont des avancées importantes. On est déjà ailleurs
versus où l'on était dans les dernières années. Il y a une… Ma compréhension,
il y a une question de capacité aussi de l'organisation à faire suite, parce
que, vous savez, des mesures de prévention, si on n'est pas capables de les
mettre en place parce qu'on a une difficulté opérationnelle de le faire, bien,
ça puis rien, c'est un peu pareil. Alors, c'est ça, ma compréhension, c'est une
question de capacité d'y faire suite, compte tenu de divers facteurs, mais ce
n'est pas un recul, ce n'est pas de, tu sais…
Le Président (M. Allaire) : Merci,
merci.
Mme Perreault (Marie-Claude) :
Merci beaucoup.
Le Président (M. Allaire) :
Malheureusement, ça met fin à ce dernier bloc d'échange. Alors, Mme Perreault,
Me Dubois, du Conseil du patronat du Québec, merci pour votre contribution à
cette commission.
Alors, la commission suspend ses travaux
jusqu'à 19 heures. Bon souper à tous.
(Suspension de la séance à 17 h 38)
19 h (version non révisée)
(Reprise à 19 h 02)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
à l'ordre, s'il vous plaît! La Commission de l'économie et du travail reprend
ses travaux. Donc, prenez encore une fois quelques secondes pour éteindre vos
sonneries de vos appareils électroniques, s'il vous plaît.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 101, Loi
visant l'amélioration de certaines lois du travail.
Alors, ce soir, deux groupes. On débute
avec la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec. Et nous allons
ensuite enchaîner avec le Syndicat de la fonction publique et parapublique du
Québec. Donc, comme je viens de mentionner, on commence avec notre premier groupe,
on accueille la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec. Bienvenue!
Bienvenue à vous deux. Alors, je vais vous céder la parole tout de suite. Peut-être
prendre le soin de vous présenter à tour de rôle et après vous pourrez
commencer votre allocution de 10 minutes. La parole est à vous.
M. Côté (Eric) : Merci, M. le
Président. Je suis Eric Côté, je suis président-directeur général de la
Corporation des entrepreneurs généraux et je suis accompagné de M. Julien
Lessard, qui est président du conseil d'administration et qui est aussi un
entrepreneur général et vice-président exécutif de l'entreprise Beaudoin Canada
dans la région de Gatineau.
Alors, sans plus attendre, nous allons
commencer. Nous vous remercions pour l'invitation à participer à cette
consultation particulière et souhaitons profiter de l'occasion parce que le projet
de loi n° 101 vient modifier plusieurs lois importantes pour l'industrie
de la construction et nous trouvions important de pouvoir faire des
contributions à cet effet-là.
La corporation est née en 1996. Elle a
pour mission de défendre les intérêts des entrepreneurs généraux de… et ceux de
l'industrie de la construction pour sa contribution tant au niveau du
développement économique que durable. Elle est la seule association vouée
exclusivement à la promotion des intérêts collectifs des entrepreneurs
généraux. Ses membres réalisent près de 85 % des projets dans le secteur
institutionnel, commercial et industriel. Et avant d'aller plus loin. M. le
Président, je laisserais la parole à notre président du conseil d'administration
qui, lui-même entrepreneur général, pourra vous parler un peu plus qu'est-ce… en
quoi consiste le rôle d'entrepreneur général pour bien cerner l'ensemble de nos
recommandations. Alors, Julien, je te laisse la parole.
M. T.-Lessard (Julien) : Merci,
Eric. M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, comme
entrepreneurs généraux, nous sommes des véritables chefs d'orchestre sur les
chantiers. Nous sommes responsables de la gestion globale des projets de
construction. Nous planifions l'ensemble des travaux, nous engageons, nous
gérons les entrepreneurs spécialisés, nous veillons au respect de l'échéancier
et du budget et nous assurons que les projets respectent les normes et
réglementations en vigueur au Québec. Nous assurons de ce fait la maîtrise d'oeuvre
en santé et en sécurité au travail sur les chantiers. Finalement, nous veillons
à la satisfaction de toutes les parties prenantes, du donneur d'ouvrage jusqu'aux
travailleuses et travailleurs.
Ceci étant dit, nous sommes d'avis que le projet
de loi n° 101 visant l'amélioration de certaines lois du travail offre une
occasion aux entrepreneurs généraux du Québec de poursuivre leur objectif d'améliorer
la productivité et l'efficacité de l'industrie de la construction. C'est
pourquoi nous sommes reconnaissants d'être entendus et de pouvoir vous livrer
nos recommandations. Donc, je repasse la parole à Eric. Merci.
M. Côté (Eric) : Merci, M.
Lessard. Comme Julien le mentionnait, l'efficacité pour notre industrie, c'est
quelque chose qui est important. On est dans un processus d'amélioration
continue. Et les recommandations qu'on vous présente aujourd'hui dans le fond
prennent racine sur des demandes que nous avons depuis plusieurs années. Et
elles ne sont pas les plus spectaculaires ou les plus révolutionnaires, mais
elles ont le mérite, selon nous, de contribuer à améliorer le travail des
entrepreneurs généraux et de l'industrie en général, dont la société québécoise
pourra bénéficier.
Au-delà de la productivité, il y a la
question des coûts aussi qui s'ajoutent et au fil du temps, ces différentes
réglementations là puis que l'on a identifiées ici, se sont accumulées de
couches additionnelles et ont rendu… ont créé une forme de lourdeur
administrative, dans certains cas, particulièrement pour les entrepreneurs
généraux, qui ont pris de plus en plus de responsabilités. À titre d'exemple,
et je mentionnerais, là, une importante, c'est l'article 54 de la loi r-20
qui confie la responsabilité aux entrepreneurs généraux d'être solidaires de
toutes les sommes...
M. Côté (Eric) : ...les sommes
de tous leurs sous-traitants. Donc, c'est un exemple où l'entrepreneur général
porte une responsabilité additionnelle par rapport aux autres entrepreneurs.
Et, à cet égard-là, on voudrait mettre en lumière que le projet de loi
no 12 a mis en lumière l'adoption d'une loi sur les paiements rapides et
qu'un règlement est sur le point d'être adopté. Et on voit l'opportunité,
justement, de mettre à jour l'article 54 pour responsabiliser les
entreprises, qui vont avoir accès à de l'argent plus rapidement. Les paiements
vont se faire plus rapidement, notamment dans les contrats publics, et bientôt
aussi les contrats municipaux.
Alors, à notre avis, ce manque de
liquidités là, qui faisait en sorte qu'il privait certains entrepreneurs, n'est
pas un vestige du passé, on ne s'attend à ce que ça s'améliore immédiatement,
mais c'est un exemple où il faudrait, justement, modifier l'article 54.
Nous l'avions demandé lors de l'étude détaillée sur le projet de loi
no 51, et je pense que le ministre s'en rappelle, mais ici, on amène une
dimension additionnelle avec la question des paiements rapides, qui va voir le
jour, selon nous, au cours de l'année 2026.
Un autre exemple plus contemporain aussi,
c'est sur le... concernant le projet de loi no 59. Ici, on ne veut pas
modifier ou s'attaquer au principe du projet de loi no 59 de renforcer la
santé-sécurité sur les chantiers. Toutefois, on s'est rendu compte, au fil du
temps, que le représentant en santé-sécurité, il n'y avait pas rien qui avait
été déterminé, à savoir quand la fin... à quelle période le représentant
santé-sécurité devait terminer son travail sur le chantier. Nous nous sommes
rendu compte que, finalement, la commission proposait... la CNESST proposait de
le faire à la fin du chantier. C'était une question d'interprétation, sauf
qu'on s'est rendu compte que, dans la plupart des cas, les fins de travaux se
font de manière assez ponctuelle et il y a très peu de travailleurs qui sont
sur le chantier en même temps. Alors, on proposait au gouvernement de mettre un
terme : à partir qu'il y a 10 employés ou moins en fin de travaux.
Alors, bien souvent, il n'y a presque plus personne qui vient sur le chantier,
c'est un défilement de différentes spécialités qui se fait. Alors, ça, c'est un
autre élément sur lequel nous voulions attirer l'attention de la commission.
Évidemment, je pourrais passer en revue
d'autres éléments, mais je reprendrais un élément sur lequel... qui est
important, qui est aussi un élément fondateur, c'est la question du plus bas
soumissionnaire. C'est une question qui est débattue, les modes de réalisation,
le gouvernement a fait beaucoup d'efforts de ce côté-là. Toutefois, il y a un
élément indéniable, le plus bas soumissionnaire, ça se fait aussi dans le choix
de nos sous-traitants à cause de l'organisme qui s'appelle le Bureau des
soumissions déposées du Québec. Pourquoi on vous parle de ça ce soir? Bien, cet
organisme-là voit le jour grâce à deux dispositions dans la loi des maîtres
électriciens et de la loi des maîtres tuyauteurs. Et nous aimerions porter à
l'attention de la commission que de plus en plus de contrats privés échappent à
cet organisme-là. Et, dans le fond, on se dit qu'il y a seulement 15 % des
contrats privés qui se font par l'organisme BSDQ. Nous souhaiterons donner le
libre choix à ce 15 % d'entrepreneurs du secteur privé, par rapport à ça,
pour se libérer de cette lourdeur administrative qui, dans bien des cas, ne
représente plus un portrait de la réalité. Le secteur privé fait les choses
beaucoup différemment du côté du secteur public, dans les travaux de
construction. Alors, on souhaiterait, dans le fond, avoir un peu plus de
liberté, du côté des entrepreneurs pour le secteur privé, parce qu'il y a
d'autres mécanismes qui sont en place pour le choix.
Alors, cet élément-là, quand on fait le
calcul du plus bas soumissionnaire, c'est un exemple où, justement, une grande
partie des prix des soumissions des... est composé des prix des entrepreneurs
spécialisés. Et, à cet égard-là, le BSDQ... un facteur déterminant dans le
choix des sous-traitants.
• (19 h 10) •
Alors, c'est très simple, c'est la loi sur
les maîtres électriciens et la loi sur les maîtres mécaniciens. Il y a un
article 30 qui donne des exemptions. Alors, nous souhaiterons que le
secteur privé de construction soit exclu, au même titre que les mines ou
d'autres secteurs qui sont déjà nommés dans la loi de ce côté-là.
Écoutez, nous aurions beaucoup d'autres
recommandations. Nous sommes limités à cinq, et je vous dirais que ça résume,
pour l'ensemble, là, de nos recommandations à cet effet-là. Et on sera
disponible pour répondre aux questions des parlementaires.
Le Président (M. Allaire) : Parfait.
Effectivement, on va débuter la période d'échange. M. le ministre, vous avez
16 min 30 s La parole est à vous.
M. Boulet : Oui. Content de
vous revoir, M. Côté, M. Lessard, Eric et Julien. Merci de votre mémoire, merci
de votre présence. C'est bien, bien apprécié et c'est des recommandations
relativement nouvelles, là, évidemment, qui peuvent s'inscrire dans le temps...
(Interruption)
M. Boulet : Excusez-moi. J'ai
entendu une autre voix, mais elle s'est éteinte. Mais je...
M. Boulet : ...j'aimerais
vous entendre, peut-être M. Côté ou M. Lessard, là, quand même assez
rapidement, je vais essayer d'être succinct. Quand vous dites «les RSS», vous
dites : Bon, son mandat se termine à la fin du chantier, et là vous
souhaiteriez que le RSS n'ait plus juridiction ou compétence à partir du moment
où on est à la fin des travaux, il y a moins de 10 personnes,
10 travailleurs qui sont sur le chantier, donc le mandat du RSS serait
complété à ce moment-là. Est-ce que... je pense que j'ai compris ça. Puis,
Eric, vous pouvez poursuivre là-dessus. Et comment ce serait appliqué?
M. Côté (Eric) : Il y a des
étapes charnières, puis je vais laisser Julien y entrer dans le détail, mais,
dans le fond, la fin des travaux, c'est quand le chantier est fermé
définitivement. Mais il y a une période où on corrige toutes les déficiences,
où on fait, dans le fond, tous les petits éléments, et ce ne sont plus des
travaux qui sont de nature risquée ou importante. Et, bien souvent, il va y
avoir peut-être quelques travailleurs, il n'y aura presque plus... C'est très
rare qu'on va se retrouver avec 10 travailleurs dans les corrections de
déficiences. Ça va être chacune des équipes spécialisées qui va venir faire sa
partie travaux, comme on dit. Et, à ce moment-là, il n'y a vraiment plus grand
monde sur le chantier, et le rôle du RSS, à ce moment-là, est assez limité et,
dans le fond, son activité est... Et on l'a... on l'a vu sur plusieurs
chantiers, là, ce n'est pas... c'est un équipement qui est là. Mais Julien peut
rentrer un peu dans ses phases de travaux là. Lui-même étant entrepreneur, il
peut vous dire que ce n'est pas le moment le plus occupé pour même le
contremaître du chantier, là.
M. T.-Lessard (Julien) : Exactement,
c'est... quand on arrive à la fin des projets, souvent, c'est la partie
déficience, nettoyage, tu sais, on se prépare, on est en mode livraison du
chantier du bâtiment, je parle d'un bâtiment dans mon cas, là. À ce moment-là,
souvent, quand on est en mode déficience, les entrepreneurs spécialisés vont
venir au besoin corriger leurs déficiences. Ils ne sont pas en tout temps sur
le chantier, ça va être du «in–and–out». Donc, c'est là qu'on voit peut-être
une opportunité de préciser c'est quand, la fin du mandat du représentant en
santé et sécurité, parce que, comme Eric l'expliquait, c'est des travaux qui
sont moins risqués, donc, si on parle de déficiences et peut-être de refaire de
la peinture sur un mur, corriger de la quincaillerie de porte, des choses comme
ça qui sont des menus travaux dans lesquels on ne croit pas qu'il y a un risque
au niveau de la santé et sécurité des travailleurs. Donc, c'était une
suggestion qu'on faisait pour préciser la fin parce que... Même des fois, à la
fin d'un projet, il y a toujours l'étape d'acceptation substantielle, où est-ce
qu'on a livré l'ouvrage au client ou donneur d'ouvrage. À ce moment-là, même,
ils prennent possession du bâtiment, puis il y a encore quelques travaux de
construction, des déficiences qui viennent de finir. Donc, déjà, quand on dit
que le bâtiment devient occupé par le propriétaire, bien, on voit que,
peut-être au niveau de la santé et sécurité chantier, on l'a passé, cette
étape-là, de toute façon.
M. Boulet : O.K. Je comprends
bien. C'est une idée qui mérite d'être analysée.
La recommandation deux, 54. Eric, Julien,
j'aimerais ça que vous me donniez plus de détails pratiques. Là, je comprends
que vous voudriez avoir un accès rapide à des paiements puis que ce soit une
responsabilisation de toute la chaîne, là, de sous-traitance, en fait, ceux qui
déclarent des heures à la Commission de la construction du Québec. Juste nous
expliquer au plan pratique comment ça fonctionne.
M. Côté (Eric) : La plupart,
dans la chaîne de réalisation des travaux, on doit engager des entrepreneurs
spécialisés qui vont avoir la main-d'œuvre qui vont faire les travaux. Dans des
situations fâcheuses, ces gens-là ne seront pas payés au bon montant et la
Commission de la construction va faire la vigilance sur ces éléments-là. Il
peut arriver que l'entreprise sous-traitante soit aussi en difficulté
financière et qu'elle n'ait pas assuré toutes ces obligations. Dans ces cas-là,
c'est... il y a des mécanismes qui sont prévus pour que l'entrepreneur général
puisse savoir s'il est à risque d'avoir un de ses sous-traitants qui ne fait...
ne remplit pas ses obligations. Ce sont lettres d'état de situation. Il y a
même un règlement à cet effet-là. Toutefois, la portée de ces lettres-là est
très limitée, donc c'est un peu... c'est un peu... On est un peu laissé au
hasard à savoir si notre entrepreneur spécialisé a... montre patte blanche
qu'il a fait toutes ces choses-là. Et on se dit qu'il faut responsabiliser les
entrepreneurs spécialisées à cet égard-là et que ce n'est pas à l'endroit
général de porter ce fardeau-là, et on pourrait faire des contrôles de ce
côté-là. Avant, on pouvait dire : Peut-être que l'entrepreneur générale
n'avait pas payé l'entrepreneur spécialisé, qu'il manquait de liquidités, qu'il
ne pouvait pas acquérir ces éléments-là, mais, une fois que ces éléments-là de
paiement sont réalisés, bien, on va s'attaquer essentiellement aux gens qui
travaillent au noir et qui font ces choses-là, et là, à ce moment-là, on peut
faire ça. Mais, si une entreprise dans un autre chantier est en situation...
M. Côté (Eric) : ...financière
difficile, qu'elle pourrait tomber en faillite, bien, l'entrepreneur général
qui n'aura pas vérifié sur son chantier va être obligé de payer les salaires et
les éléments... Et il pourrait même les avoir payés deux fois. L'entrepreneur
général pourrait avoir payé l'entrepreneur spécialisé, mais l'entrepreneur
spécialisé n'a pas fait suivre l'argent dans les poches des travailleurs.
Alors, cet argent-là, on va la payer, nous, deux fois, et, bien, à ce côté-là,
c'est un peu... c'est un peu injuste. Je dis qu'on va la payer deux fois parce
qu'on va se la faire réclamer par la Commission de la construction du Québec quand
on va avoir... au bout de l'enquête. Alors, nous, l'idée, c'est de ne pas avoir
à payer ça deux fois, c'est ça qui est important, et qu'on responsabilise les
gens. Je ne sais pas si Julien voulait ajouter quelque chose?
M. T.-Lessard (Julien) : Je
pourrais ajouter un peu dans la... les étapes d'un paiement, tu sais. C'est sûr
que ce qu'on recommande présentement, c'est en anticipation d'un processus de
paiement rapide. Nous, de notre côté, on fait aussi des travaux en Ontario, où
est-ce qu'il y a le plan de Payment Act, dans lequel on doit suivre une cédule
de paiement assez rigoureuse mais dans lequel on n'a pas une couche
supplémentaire avec, comme qu'on disait, les lettres d'état de situation, des
attestations de Revenu Québec. On doit faire des vérifications ponctuelles pendant
le projet avant de libérer un paiement.
Donc là, c'était plus de démontrer que, si
on libère un paiement... disons qu'on libère le paiement parce qu'on y est
forcés ou parce que la loi sur les paiements rapides nous dit qu'on doit le
remettre mais qu'on n'a pas pu faire les vérifications dans le temps, bien là,
il y a un enjeu où est ce que l'argent, elle a peut-être été vers
l'entrepreneur spécialisé, mais il n'y a pas eu de vérification. Ça fait que je
pense que ça va être, encore une fois, une petite réflexion à faire, une
coordination avec un éventuel processus de paiement rapide, là.
M. Boulet : O.K., merci. La
recommandation 3, tu sais, quand vous référez à un guichet unique ou un service
centralisé qui serait mis en place en collaboration avec tous les organismes
qui s'impliquent dans l'industrie de la construction... là, vous les nommez,
RBQ, CCQ, ARQ, AMP, CNESST... ce serait pour assurer quels services ou... un
guichet unique qui servirait à quoi exactement, s'il vous plaît?
M. Côté (Eric) : Julien
l'expliquait un peu, M. le ministre, là. Dans le fond, nous sommes devant une
situation où, quand on choisit un entrepreneur spécialisé, et qu'on est passés probablement,
par un organisme, qui est le BSDQ... donc, on a pris le plus bas prix... on
doit vérifier si cette personne-là doit de l'argent à Revenu Québec, si elle a
déjà des comptes en souffrance auprès de la CCQ, de la CNESST, si elle a payé
ses fournisseurs, parce qu'on se porte garants de cette personne-là ultimement,
parce qu'on va assumer des responsabilités solidaires. Donc, quand on choisit
cette personne-là, de savoir si cette personne là, à défaut de l'empêcher de
soumissionner...
Ce qui serait intéressant, c'est d'avoir
un voyant vert pour chacune des agences, qui nous dit : Cette
entreprise-là n'est pas en situation problématique avec les agences
gouvernementales, si vous la choisissez. On a... Alors, en ce moment, il faut
le faire séparément auprès de chacune des agences gouvernementales, auprès de
Revenu Québec, auprès de la CNESST. On se dit : Toute cette information-là
est colligée dans des moyens communs. Il y a le comité ACCES pour... contre
l'évasion fiscale, qui travaille déjà à croiser des données. On se dit :
Est-ce qu'il y a une partie de cette information-là qui pourrait... tout en
protégeant le secret fiscal, évidemment... qui pourrait être accessible aux
entrepreneurs pour dire : C'est vert ou c'est rouge, puis qu'est ce qu'on
fait à ce moment-là? C'est un moyen, aussi, pour choisir les gens, puis ça, ça
ferait en sorte que les gens qui n'ont pas fait leurs obligations, bien,
n'auraient pas, au marché... n'auraient pas accès au marché et devraient régler
leurs obligations en premier, ou, en tout cas, prendre les moyens nécessaires
ou des engagements auprès des agences.
• (19 h 20) •
M. Boulet : O.K. Ça, j'avais
quand même bien compris. Mais j'ouvrais un peu la porte à un aspect un peu
différent. Par exemple, la RBQ, la CCQ, la CNESST, ils ont des services
d'inspection, ils ont à faire des interventions en application de lois
différentes. Une, c'est la CNESST... c'est la loi santé et sécurité, l'autre,
qualité des travaux, sécurité du public puis, évidemment, le respect des... de
la formation, les relations de travail, pour la CCQ. Est-ce qu'il y a des idées
que vous aimeriez partager, Eric, sur une collaboration potentielle de ces
trois organismes là, soit l'inspection ou autres choses, ou que vous aimeriez
qu'on en discute lors d'un autre forum, qui pourraient constituer des irritants
pour les entrepreneurs?
M. Côté (Eric) : Moi, je
pense que c'est même une économie, pour le gouvernement, d'avoir à envoyer cinq
inspecteurs différents pour surveiller un chantier de construction. Il pourrait
y avoir une collaboration où les gens sont habilités à identifier des
problématiques en santé et sécurité. Il y a...
M. Côté (Eric) : ...peut-être
un enjeu en relations de travail. Il y a sûrement moyen de partager, ou je ne
voudrais pas rendre les inspecteurs polyvalents, aller jusque là, mais je pense
qu'il y a moyen de faire une économie d'échelle avec des certaines spécialités
puis qu'on puisse avancer et de voir justement des ponts qui peuvent être
tracés entre les différentes agences. Ça nous donnerait l'occasion d'avoir
peut-être des équipes plus générales qui puissent visiter les chantiers et si
au besoin, il y a des besoins plus spécialisés qui sont nécessaires, on peut le
faire. Mais je pense que du côté gouvernemental, il y aurait une économie
d'échelle parce que si on additionne toutes les gens qui font des enquêtes et
des inspections dans l'industrie de la construction, ça fait beaucoup de monde.
Et est-ce que le résultat, le retour sur l'investissement est bon pour le
gouvernement? Mais probablement que ça pourrait être organisé autrement, avec
une collaboration entre les agences. Il y en a déjà une, mais on pourrait aller
plus loin selon moi.
M. Boulet : Ah! tout à fait,
oui, oui. Puis il y a des travaux en cours, incluant aussi l'AMP puis l'ARQ,
là. Ça fait qu'on va certainement avoir l'occasion d'en reparler, puis je ne
vous retiens pas, en ce qui me concerne, plus longtemps, ça va compléter. Merci
beaucoup Eric, merci Julien, au plaisir de vous rencontrer en personne bientôt.
Merci. Bonne soirée.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
M. le ministre. On poursuit avec l'opposition officielle. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce
vous avez 12 min 23 s. La parole est à vous.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Juste calculer pour ne pas... Donc, merci beaucoup pour la
présentation, messieurs. Merci de votre présence bien en virtuel effectivement.
Beaucoup de questions. Peut être une première, c'est : Comment
pourrons-nous... pourrait-on mieux soutenir les entrepreneurs généraux dans la
transition vers un encadrement plus moderne et harmonisé de façon générale?
M. Côté (Eric) : Je pense que
l'idée d'un guichet unique qui ferait en sorte qu'on n'aurait pas cinq
formulaires à remplir, mais que ça pourrait être un formulaire qui serait
unique ou, en tout cas, avec un croisement de données qui serait intéressant
parce que tous les entrepreneurs au Québec doivent avoir une licence de la
Régie du bâtiment. Il n'y a pas de travaux sans licence. Alors, il y a un point
commun qui est là. Il y a des travaux qui sont assujettis à la loi R-20 et
ils sont là, mais il y a un tronc commun que ça prend, une licence
d'entrepreneur et, à notre avis, il y a quelque chose à faire de ce côté-là
pour faciliter les démarches administratives.
Quelqu'un qui veut ouvrir une entreprise,
et Julien pour en témoigner parce qu'il travaille dans les deux provinces, la
paperasse à remplir au Québec versus celle à remplir... puis même dans
l'exécution des chantiers est différente. Julien, je ne sais pas si tu veux
compléter, là, mais...
M. T.-Lessard (Julien) : Bien
oui, c'est un peu ça, on en parle quand même souvent aussi, là, c'est une
lourdeur administrative que je crois qu'on peut améliorer grandement qui va
rendre l'industrie beaucoup plus efficace. Je crois que la fonction publique
aussi peut gagner en efficacité à ce niveau-là. Il y a beaucoup d'agences. Il y
a une façon, je pense, de centraliser les... Ce qu'on demande aux entrepreneurs
au Québec, c'est unique, il y a beaucoup de choses. Je pense qu'on est capable
de ramener ça à un tronc commun tout en servant les différents besoins qu'on a
qui sont uniques et spéciaux.
Mme McGraw : Dans votre
mémoire, vous insistez sur l'importance d'adapter les exigences réglementaires
à la réalité évolutive des chantiers, d'être vraiment sur le terrain. Quelles
seraient, disons, les conditions gagnantes d'une telle adaptation?
M. Côté (Eric) : Mais juste
au niveau de la modernisation des outils qu'on utilise, là, par rapport à l'âge
de ces lois-là qu'on a adoptées, il y a quelque chose. On utilise des outils
beaucoup plus puissants. Il y a des moyens pour... technologiques pour
faciliter l'organisation du travail. On a des outils pour être plus
performants, et je pense que, dans le fond, on fait... il y a beaucoup
d'efforts qui sont faits de la part des entrepreneurs pour s'améliorer de ce
côté-là, mais je pense qu'on pourrait... On ne veut pas abolir les règlements,
là, je pense que ce n'est pas là, là, mais il y a sûrement moyen de faire des
efforts. Il y a beaucoup d'efforts pour soutenir les entrepreneurs qui veulent
améliorer leurs pratiques et il faut... il faut encourager encore plus
l'utilisation des nouvelles technologies, faire de place à l'innovation, et ça,
c'est inévitable. En ce moment, on est dans un système où c'est assez, comment dire,
classique, c'est le plus bas soumissionnaire et là... alors que là on a de la
place pour innover, faire les choses différemment. Il y a des gens qui, dans le
secteur privé, peuvent se permettre des choses, expérimenter, innover, avoir
développé des nouveaux outils internes. Au-delà des incitatifs fiscaux, il faut
que ça soit encouragé dans la pratique de l'industrie aussi, et là, ça, je
pense qu'il y a des belles opportunités, mais il n'y a pas d'incitatifs qui
sont là à l'encourager parce qu'on est au plus bas soumissionnaire. Il n'y a
pas de place pour innover, là, nécessairement toujours. Il y en a, mais il
devrait s'en multiplier plus d'occasions comme ça où la place à l'innovation
serait plus grande, et tout le monde en profiterait aussi...
Mme McGraw : donc... parce
que notre recommandation clé, c'est de donner aux clients privés le choix de
recourir ou non au Bureau des soumissions déposées du Québec pour la sélection
des sous-traitants. Donc, cet... ce devoir, effectivement, d'aller vers les
plus basses soumissions, selon vous, ça nuit à l'innovation? Autres... Est-ce
que vous avez d'autres commentaires là-dessus?
M. Côté (Eric) : Je ne sais
pas si, Julien, tu peux... en innovation, mais...
M. T.-Lessard (Julien) : Oui. Ce
que je pourrais dire, c'est que ce n'est pas nécessairement le plus bas
soumissionnaire qui est le meilleur qualifié pour faire le travail. Quand on
veut innover, on a besoin des bons collaborateurs, on a besoin des
entrepreneurs qui pensent peut-être différemment, qui sont ouverts à des
nouvelles méthodes. Puis parfois on peut se retrouver avec un soumissionnaire
qu'on ne connaît pas du tout, qu'on n'a pas de relation d'affaires. On ne sait
pas c'est quoi, sa capacité à exécuter des projets, tout ça, puis ça peut
causer un dommage dans la réalisation du projet. Donc, tu sais, c'est pour ça
aussi qu'au privé on on est plus... on a des modes contractuels qui sont plus
ouverts à la collaboration, dans lesquels on peut travailler avec des
sous-traitants, travailler avec des nouvelles méthodes, les écouter sur ce
qu'ils ont à proposer aussi, donc ouvrir la collaboration, faire, plusieurs
entreprises, une équipe pour un projet, tu sais, et non pas 20 équipes autour
d'un projet qui ont tous des intérêts divergents.
Mme McGraw : Ça que, là, si
je comprends bien, ça serait vraiment pour les clients privés. Quel
pourcentage, de façon générale, clients privés versus publics au niveau
institutionnel?
M. Côté (Eric) : La... Bien,
en fait, on...
M. T.-Lessard (Julien) :
Vas-y, Eric. Vas-y.
M. Côté (Eric) : Oui. Bien,
quand on examine le rapport d'activité du Bureau des soumissions déposées, il y
a seulement 15 % des projets privés qui passent par le BSDQ, alors que,
dans la réalité, 15 %, ce n'est pas le poids des projets en ce moment. Là,
c'est le nombre de projets, mais le nombre de projets du secteur privé est
beaucoup plus important. On parle de 40 %. Alors, il y a déjà plein de
gens qui échappent au système du BSDQ. Ceux qui ne le font pas, c'est parce qu'il
y a des documents, des engagements contractuels, mais qui pourraient faire
place à l'innovation de ce côté-là. Et, ça, le client n'a pas le bénéfice de ce
côté-là. Et parfois, moins cher, ça ne veut pas dire que ça va être mieux,
comme Julien l'a dit. Parfois, on veut écouter les solutions des entrepreneurs spécialisés,
qui disent : On pourrait le faire autrement que comme ça. Et là tout le
monde est... Au lieu de travailler en silo, on le fait en travail autour de
l'équipe, ensemble, avec les concepteurs, et on cherche des solutions. L'idée,
c'est que le client profite aussi de cette recherche-là, de solutions. L'idée,
ce n'est pas de charger juste plus cher, c'est de trouver la meilleure
solution. Et ça, bien, dans un système où on choisit juste le plus bas, bien,
on écarte toutes ces possibilités-là, d'innover. Il faut soit qu'on se met en
mode collaboration puis qu'on cherche l'innovation ou qu'on cherche juste le
plus bas prix. Mais, quand on se met dans une... dans une posture, on écarte
éventuellement celle-là.
Alors, laisser le libre-choix au secteur
privé, pour nous, ça nous apparaît une solution. Mais je pourrais vous parler
des contrats publics, on a fait beaucoup de travail de ce côté-là, mais je
pense que le secteur privé, lui, pourrait bénéficier d'une plus grande
souplesse de ce côté-là. À travers le Canada, il y a des bureaux de soumissions
déposées qui ont finalement tous disparu parce que le secteur privé a mis la
pression nécessaire pour dire : On veut de l'innovation, on veut des
nouveaux moyens, et il ne reste qu'au Québec, hein, vraiment, qu'il y en a un
encore, et c'est un foyer de résistance pour l'innovation, à notre avis. Et il
faut que ça soit modifié. On ne veut pas l'abolir. On veut l'améliorer, le
rendre plus souple, et c'est ça qu'on veut depuis plusieurs années.
• (19 h 30) •
Mme McGraw : Si je comprends
bien, donc, les autres provinces, c'est juste le Québec qui n'a pas cette
approche plus souple. Donc, il y a des meilleures pratiques, des bonnes
pratiques qu'on pourrait regarder ailleurs, et ça facilite l'innovation et la
compétitivité. D'autres conditions gagnantes que vous voulez souligner?
M. Côté (Eric) : Bien, je
pense qu'il y a... il y a de l'inquiétude de la part de certains entrepreneurs,
que, s'il n'y avait pas un bureau de soumissions, que ça serait un peu le
laisser-aller. Il y a des codes de conduite pour que les gens se comportent et
qu'ils aient des bonnes pratiques commerciales. Mais ce qui me préoccupe, c'est
que des BSDQ à travers le Canada, il n'y en a plus. Ils sont tous disparus au
fil du temps parce que leur désuétude du plus bas soumissionnaire s'est
démarquée. Il faut... Il faut trouver des moyens, soit que le BSDQ se modernise
ou qu'il laisse la place à l'innovation. Mais, dans le secteur privé, qu'on
libère les gens de cette obligation-là, de passer là. Si l'État souhaite de
passer par ces organismes-là, c'est son choix, et, bien, on a fait nos
recommandations, mais, ici, on parle de deux lois des corpos. C'est une loi qui
dépend du ministre du Travail et, à notre avis, c'est l'opportunité de la
modifier pour justement laisser cette liberté-là, je ne dis pas de l'abolir, de
laisser le libre-choix au client. Et, si le client, il pense qu'il va être
gagnant là-dessus puis qu'il veut que son entrepreneur général aille chercher
les plus bas prix, soit, qui l'aura, mais le client aura le choix de dire: Moi,
je ne veux pas aller au plus bas soumissionnaire, je veux aller chercher les...
19 h 30 (version non révisée)
M. Côté (Eric) : ...meilleure
proposition. Et, si c'est ça, je veux faire, bien, en ce moment, le BSDQ ne le
permet pas, pour le secteur privé, pour tous les projets.
Mme McGraw : Pourtant, vous
avez le BCS... pardon, BSDQ, ils ont fait des recommandations, un groupe de
travail qui a fait des recommandations. Il y a eu des consultations, si je
comprends bien, pendant 18 mois. Si je comprends bien, elles n'ont pas
encore été... ces recommandations n'ont pas encore été rendues publiques. C'est
une des demandes que vous faites. Est-ce que... Est-ce que j'ai bien compris?
M. Côté (Eric) : Bien, le
document... En fait, c'est un comité interministériel qui s'est réuni à la
suite de la commission Charbonneau, parce qu'on a... on offrait que le BSDQ
soit soumis à l'Autorité des marchés publics. Il y avait une complexité
juridique à ce moment-là. On a référé au comité pour faire des recommandations.
Et c'est les recommandations qui a accouché d'un comité interministériel. C'est
le gouvernement qui a accouché de ces recommandations-là. Et, nous, on
souhaiterait qu'elles soient étudiées.
Une de celles-là, c'est justement de s'adresser
au secteur privé. Les autres recommandations, c'est sur l'encadrement de l'organisation
de cet organisme-là. C'est très difficile de réformer ça. Nous, comme
entrepreneurs généraux, nous ne sont pas pris partie au fonctionnement de cet
organisme-là. C'est d'autres associations qui le contrôlent. Alors, si on n'a
pas... on n'a pas voix au chapitre à cet égard-là, nos suggestions peuvent être
entendues, mais on n'a aucun moyen de savoir si elles vont être retenues ou
pas, ou de faire valoir notre point. Mais tout ça est encadré par le
gouvernement. Et, à notre avis, le gouvernement devrait avoir son mot à dire et
appliquer ces recommandations-là pour améliorer le BSDQ et le rendre plus
intéressant pour les marchés privés et publics aussi.
Mme McGraw : Mais, avant de
les appliquer, si je comprends bien, ils ne sont pas encore rendus publics. Ça
fait que c'est dans un premier temps.
M. Côté (Eric) : Bien, nous
avons... nous avons... les organismes visés ont reçu copie. Mais, si vous
cherchez sur Internet, sur le site du gouvernement du Québec, vous ne le
trouverez pas. Nous les avons. Nous avons dû, nous, les joindre à notre mémoire
en... il y a quatre ans. Et c'est comme ça que ces recommandations-là ont revu
le jour, ont refait surface. Donc, les gens dans l'industrie de la construction
sont au courant, mais je pense que les gens ne connaissent pas les conséquences
de tout ça. Et là, à notre avis, avec un dévoilement bien officiel par le
comité interministériel ou par un des organismes, soit le ministère du Travail,
le Conseil du trésor, la SQI, ces organismes-là devraient rendre public le
document bien officiellement et d'adopter ce plan d'action là, qui a été
développé notamment par des gens du Conseil du trésor, qui surveillent les
marchés, notamment par les gens du ministère du Travail. Mais, écoutez, ça fait
plusieurs années qu'on attend ça. Et, bien, il y a toujours quelque chose de
plus urgent. Il y avait la commission Charbonneau, il y avait la pandémie, il y
a toujours quelque chose. Mais, à notre avis, quand on commence à questionner
la loi du plus bas soumissionnaire, dans l'ensemble de nos activités, la première
chose qu'il faudrait regarder, c'est le bureau des soumissions déposées. À
notre avis, il y a des solutions qui existent là qui sont à portée de main et
accessibles et qui ne vont pas abolir l'organisme, mais qui vont lui donner de
la souplesse, dont tout le marché de la construction a besoin.
Mme McGraw : Merci. Donc, le
point, je pense, qui est très, très clair, qu'il faut rendre publiques ces
recommandations suite à... ça fait des années, après 18 mois de
consultations.
Peut-être une dernière petite question.
Le Président (M. Allaire) : ...
Mme McGraw : Pardon?
Le Président (M. Allaire) : 30 secondes.
Mme McGraw : Ah! Bien,
écoutez, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter que vous n'avez pas eu la
chance de mettre de l'avant?
M. Côté (Eric) : Bien,
écoutez, juste de pouvoir parler en détail du BSDQ, c'est une opportunité
intéressante, puis d'avoir un regard neuf sur cette situation-là. Il commence à
s'époussiérer un peu malheureusement, ce rapport-là, mais on va travailler pour
continuer pour que ça s'améliore.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce. Je cède la parole au député d'Hochelaga-Maisonneuve
pour quatre minutes huit secondes.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonsoir à vous deux. Bonsoir. On est rendus le soir. Merci d'être
là.
Je veux parler d'abord de la
recommandation un, là. Quand vous dites, vous l'avez évoqué tantôt, je pense,
avec M. le ministre, quand on est en fin de chantier, c'est moins essentiel d'avoir
un représentant de santé et sécurité. Je comprends l'argument. Mais est-ce que
vous avez des chiffres ou des statistiques qui nous laisseraient croire qu'en
effet on peut lever la pédale de la prévention à ce moment-là? Parce que,
souvent, la prévention, le but, c'est qu'il n'y ait pas d'accident. À part,
mettons, de constater peut-être que c'est moins nécessaire, qu'est-ce que vous
avez comme arguments peut-être un peu plus statistiques pour soutenir votre
proposition?
M. Côté (Eric) : En fait, la
chose qu'il faut regarder, c'est qu'en fin de travaux, quand on est en
correction d'efficience, il arrive qu'il n'y a pas de travailleurs sur le
chantier. Mais, la présence du RSS, elle est requise. Alors, la seule personne
qui peut se blesser sur le chantier, c'est le RSS parce que les équipes ne sont
pas encore à faire les travaux. Alors, nous, on dit : À quoi ça sert d'avoir
un RSS quand il n'y a pas de travailleurs sur le chantier mais que la fin des
travaux n'est pas prononcée? On ne veut pas que cette personne-là soit
disponible ou pas selon les... Il faut trouver un mécanisme clair pour dire :
Bien, après cette partie-là de phase de travaux, on...
M. Côté (Eric) : …mais ça
pourrait être un seuil plus bas, qu'on puisse faire les choses. Ce n'est pas
parce que les travaux ne sont pas dangereux, mais parce que la présence des
travailleurs sur le chantier est assez ponctuelle et variée, et parfois il
arrive que, très souvent, pendant plusieurs jours, il n'y aura pas… l'équipe
des plombiers est passée puis on attend les plâtriers, mais, entre les deux,
les équipes ne seront pas là, mais le RSS doit être là, et, à notre avis, à un
moment donné, je pense que même le contremaître ou le surintendant ne sont même
plus sur les chantiers. Alors, la seule personne qui reste, c'est le RSS.
Pour nous, il y a un non-sens dans ce
sens-là. Puis, pour l'expérience des RSS à qui… on a pu avoir des témoignages
de… bien, c'est un peu… bien, de peut… de payer quelqu'un à rien faire, ce
n'est pas le meilleur moyen de le valoriser dans son rôle. Il y a probablement
des chantiers qui en ont besoin d'un à ce moment-là, c'est dans ce sens-là, ce
n'est pas de limiter, ce n'est pas d'enlever les risques, mais c'est vraiment,
je pense, de regarder la possibilité de mettre des RSS à des endroits où ils
sont plus nécessaires qu'à d'autres… qu'à ces endroits-là où le chantier est
quasiment terminé.
M. Leduc : Je me fais
l'avocat du diable, mais, même s'il n'y a pas de travailleur sur un chantier, le
chantier peut se faire inspecter quand même. Le but de la prévention, c'est de
faire une tournée pour voir si tous les bons mécanismes de prévention sont en
place. Ça fait qu'il y ait des travailleurs qui sont en train de travailler,
tant mieux, mais c'est vraiment essentiel qu'ils soient là pour qu'on puisse
faire une inspection du chantier?
M. Côté (Eric) : Bien,
l'inspection, elle est faite lorsqu'il y a des équipes, des choses comme ça,
mais, moi, comme je vous dis, s'il n'y a pas de travail sur le chantier, le
rôle du RSS, dans mon avis, si on regarde les neuf tâches, il y a plusieurs des
neuf tâches qu'il ne peut même pas accomplir. Alors, à mon avis, c'est pour ça
qu'il faut…
M. Leduc : Comme quoi, par
exemple?
M. Côté (Eric) : Bien, l'inspection
du matin, si elle a été faite la veille puis il n'y a pas d'autres travaux qui
ont été faits, il n'y a rien qui a changé sur le chantier. Alors, le travail du
RSS, d'inspection, il est assez sommaire. Déjà, si l'état des… si le chantier
n'a pas changé, je ne vois pas à… qu'est-ce qu'il va faire après ça. Il va...
Il ne pourra pas sensibiliser des travailleurs qui ne sont pas sur place parce
qu'il n'y en a pas, de travailleurs sur place. Peut-être il va y en avoir un
dans l'après-midi ou deux jours plus tard. Bien là, encore là, malheureusement,
c'est… l'idée, c'est qu'on paie un RSS à ne rien faire, à ne pas pouvoir
accomplir son rôle, parce qu'on n'est pas contre l'idée des RSS, mais l'idée
c'est qu'il faut marquer une fin quelque part pour que… dire : Le RSS
n'est plus requis. Puis on peut organiser les travaux en fonction aussi…
c'est-à-dire, bien, on va accélérer la séquence pour qu'on puisse dire :
Bien, le RSS termine là, on va faire les travaux, là… mais on puisse se
coordonner, mais là, à ce moment-ci, dans le fond, le RSS est la dernière
personne qui quitte le chantier, puis même, souvent, le client est là.
Je ne sais pas si Julien voulait rajouter
quelque chose…
M. T.-Lessard (Julien) :
Bien,
je pourrais, tu sais, faire un exemple, là. Je parlais tantôt…
Le Président (M. Allaire) : Malheureusement…
Je suis désolé. Malheureusement, je dois vous couper, c'est tout le temps qu'on
a. Merci messieurs, pour votre contribution à cette commission. Donc, vous
étiez les deux représentants de la Corporation des entrepreneurs généraux du
Québec. Un gros merci.
Je vais suspendre les travaux quelques
instants. Merci.
(Suspension de la séance à 19 h 39)
(Reprise à 19 h 43)
Le Président (M. Allaire) : Alors,
nous allons reprendre les travaux. Nous sommes avec les... le dernier groupe de
l'ensemble des auditions qu'on a eues pendant trois jours. Donc, vous êtes les
chanceux, vous allez clore les auditions. C'est un plaisir de vous recevoir ici
avec nous. Donc, je vais vous laisser le soin de vous présenter et débuter
votre allocution de 10 minutes. Puis, ensuite, va s'en suivre une période
d'échange comme à l'habitude, vous êtes habitués quand même. Allez-y.
M. Daigle
(Christian) :Parfait. Merci. Donc,
Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique et
parapublique du Québec. Je suis accompagné du conseiller politique au bureau de
la présidence, M. Pierre-Alexandre Caron, et du conseiller à la recherche,
M. Isaïe-Nicolas Dubois-Sénéchal.
Donc, M. le Président, M. le ministre,
Mmes et MM. les députés, le Syndicat de la fonction publique du Québec est un
syndicat indépendant qui regroupe environ 43 000 membres dans les
40 accréditations syndicales, dont près de 32 000 travaillent dans la
fonction publique du Québec, les 11 000 autres sont regroupés à
travers les unités parapubliques que nous représentons.
La mission du SFPQ à l'égard de tous ses
membres consiste à défendre leurs conditions de travail, à défendre les
intérêts économiques, politiques et sociaux nécessaires à l'amélioration de
leurs conditions de vie. Cette mission s'élargit également à l'ensemble de la
société québécoise, puisque le SFPQ soutient un projet de société axé sur la
démocratie, le partage, l'équité et la solidarité.
Lorsqu'il est question de fournir notre
analyse du projet de loi n° 101, on ne peut pas outrepasser le contexte
dans lequel celui-ci a été déposé. Ce que nous appelons le printemps
antisyndical bat son plein. L'adoption du projet de loi n° 89, un projet
de loi allant à l'encontre de l'intérêt des travailleuses et des travailleurs
se superpose à une vague de mépris contre l'exercice des droits fondamentaux
des syndiqués dans les médias d'opinion et à l'intensification des politiques
austéritaires du gouvernement. On doit aussi regretter l'absence de
consultation d'un grand nombre de groupes incontournables la FIQ, l'UTTAM, la
FAE, le Front de défense des non-syndiqués. Dans ce contexte-là, nous restons
déjà sur notre faim quant aux promesses de dialogue social qui sont clamées
haut et fort par le gouvernement.
Malgré ce contexte, nous nous sommes
efforcés de faire une analyse objective du projet de loi n° 101 pour
lesquels nous soumettons 35 recommandations. Je me permettrai donc de n'en
nommer que quelques-unes dans mes remarques introductives. Je me limiterai
aussi à ce qui pourrait être amélioré dans le projet de loi. Les parlementaires
auront le loisir de lire notre mémoire pour connaître les articles avec
lesquels nous sommes en accord. J'aborderai nos considérations dans l'ordre de
loi modifié par le projet de loi n° 101, soit la LATMP, le Code du
travail, la LNT, puis les questions de santé-sécurité au travail.
Le projet de loi n° 101 soulève trois
enjeux qui nous semblent importants d'aborder en ce qui a trait à la Loi sur
les accidents de travail et les maladies professionnelles.
Premièrement, nous pensons qu'il s'agit
d'un oubli, les articles 2 à 4 utilisent un vocabulaire portant à
confusion, le remplacement de «revenu brut» par «revenu brut annuel d'emploi»
laisse planer un doute sur la part des revenus qui seront revalorisés. Nous
pensons qu'il est important que le projet de loi précise son intention en
modifiant l'article 117 afin minimalement de clarifier le fait que tout
revenu peut être inclus pour établir un revenu brut plus élevé et assimilable à
un revenu d'emploi.
Nous constatons également que le projet de
loi ne répond pas à une de nos revendications historiques, soit que
l'indemnisation soit à 100 % du revenu net. C'est aberrant qu'en 2025, une
personne qui ne peut plus travailler à cause d'une lésion perde du revenu et de
la protection sociale. Pour nous, cela s'apparente à de la stigmatisation basée
sur la condition sociale. On recommande donc l'article 45 de la LATMP remplace
90 % par 100 %.
Le second enjeu majeur en ce qui a trait à
la LATMP, c'est l'introduction d'une nouvelle procédure de négociation en
révision. Nous nous y opposons fermement. Cette procédure contrevient au
principe d'universalité de l'application...
M. Daigle
(Christian) :...loi et dans le rapport
entre les parties. On doit aussi convenir du fait que, malgré la nécessité d'un
consentement pour procéder à la négociation, le rapport de force est
fondamentalement asymétrique. Un grand nombre de personnes non syndiquées,
ainsi que plusieurs personnes syndiquées font leurs démarches auprès de la
CNESST sans représentant. L'application de la loi ne doit pas se faire de
manière à varier en fonction d'une négociation plus ou moins bien menée par les
travailleurs.
Nous sommes d'avis que le processus
proposé est mal encadré et doit au minimum avoir un mécanisme de représentation
obligatoire du travailleur. Nous recommandons donc l'abandon des dispositions
liées à la négociation de litiges en révision. Si cette recommandation-là n'est
pas prise en compte, on demande un ensemble de modifications qui limiteraient
les dégâts, dont, entre autres, la création d'un bureau de défense pour les
personnes non syndiquées et une meilleure communication avec les syndicats lors
des contestations.
Le dernier élément en matière de LATMP est
lié à la confidentialité. La diminution des amendes prévues à l'article 13
du projet de loi est inacceptable. Elle affaiblit la protection des
renseignements personnels, alors même que ceux-ci devraient être mieux
protégés. Nous recommandons fortement d'éviter toute diminution des amendes
prévues lorsque les employeurs contreviennent à la loi. Pourquoi les amendes
augmenteraient partout ailleurs, sauf ici où elles diminueraient?
Nous avons également un ensemble
d'inquiétudes par rapport aux modifications apportées au Code du travail. La
plus grande de ces inquiétudes concerne le traitement des griefs. Nous
comprenons que le ministre cherche à accélérer ce processus, c'est un objectif
qu'on partage également. Néanmoins, les dispositions prévues par le projet de
loi ne nous semblent pas être les bonnes pour répondre adéquatement aux enjeux
actuels. Il faut tout d'abord rappeler qu'un nombre important de griefs ne se
retrouveront jamais en arbitrage. Souvent, on en négocie l'issue avec
l'employeur. Si c'est vrai que plusieurs employeurs font traîner délibérément
le règlement des griefs, on pense tout de même que d'imposer des délais pour
rapporter rapidement les griefs à l'arbitrage risque de surjudiciariser
plusieurs dossiers.
Pour nous, au niveau des délais, ça coince
dans trois endroits qui ne sont pas abordés dans le projet de loi.
Premièrement, il n'y a pas assez de ressources. C'est beau de dire qu'on doit
traiter les griefs au TAT dans un délai d'un an, mais si TAT ne fournit déjà
pas, nous ne sommes pas bien avancés. Deuxièmement, comme je le disais, on
convient parfois avec l'employeur de prolonger les délais pour éviter une
judiciarisation du dossier. Enfin, le fait que l'employeur n'a souvent pas
intérêt à faire preuve de diligence dans les dossiers peut fondamentalement
retarder le processus de traitement. On est donc face à une situation où le
projet de loi accélère la course des griefs vers l'arbitrage de manière
systématique. Nous avons ainsi des questions sur le maintien des droits de nos
membres qui déposent des griefs dans la mesure où le manque d'arbitres
disponibles ferait dépasser ces mêmes délais.
Ici, je concéderai un point : il faut
un processus pour être capable de dire à l'employeur : Là, ça va faire, on
envoie le grief en arbitrage parce que ça niaise trop.
Pour la nomination de l'arbitre, on
propose donc de modifier le premier alinéa de l'article 100.0.0.0.1 pour
que la désignation de l'arbitre soit faite par le ministre à la demande de la
partie déposante lorsque le délai de six mois est expiré. On recommande aussi
que cet article-là vienne préciser qu'il n'y a pas pour effet d'éteindre les
droits liés au grief si l'audition n'est pas tenue dans les délais prescrits.
Outre la question des griefs, deux
modifications au code sont aussi problématiques. Premièrement, le projet de loi
applique un deux poids deux mesures en matière d'amendes. Alors que les amendes
maximales pour le recours aux briseurs de grève sont augmentées de
2 500 %, celles données aux personnes faisant une grève que le code
ne prévoit pas sont augmentées de 10 000 %. Dans un contexte où le
ministre limite simultanément le droit de grève avec l'adoption de son projet
de loi n° 89, ces changements nous font tomber en bas
de notre chaise.
• (19 h 50) •
L'autre notion que nous nous expliquons
mal est rattachée à la modification de 47.1. Nous remettons déjà nos états
financiers audités à une assemblée annuelle, mais on pense qu'il s'agit d'une
question de démocratie syndicale qui ne devrait pas être régie par le code.
L'article 14 du projet de loi représente pour nous une ingérence mal
avisée dans le monde syndical. En proposant cet article, le ministre pave la
voie à plus d'ingérence dans le futur. En refusant d'aborder l'obligation
équivalente pour l'employeur de donner ses états financiers à un syndicat
détenant un certificat d'accréditation dans l'un de ces établissements, le
ministre nous rappelle... la démocratie s'arrête aux portes de l'entreprise. Si
la modification proposée sous le couvert du plus de démocratie, il faut
rappeler que, dans chaque syndicat, les membres sont libres de modifier les
statuts pour demander la transparence financière qu'ils désirent. Nous
recommandons donc le retrait définitif des articles 14 et 24. Pour
ce qui est de la Loi sur les normes du travail, on accueille bien entendu la
modification prévue par le projet de loi pour les absences sans salaire pour
les catastrophes naturelles. Par contre, on considère que le ministre manque
une occasion d'amender la LNT pour y intégrer une revendication de longue date.
Cela fait des années que nous demandons plus de protection envers les personnes
victimes de violence conjugale. Vous comprendrez que cette recommandation est
centrale pour nous...
M. Daigle
(Christian) : …pour nous. On invite donc les parlementaires ici
présents à intégrer notre recommandation numéro 26, soit de mettre en
place 10 jours de congés rémunérés pour toutes les personnes victimes de
violence conjugale, familiale ou sexuelle.
En matière de santé et sécurité, nous
désirons souligner deux enjeux. D'abord, on trouve inacceptable de créer un
régime d'exception pour les secteurs de la santé et de l'éducation.
L'invocation du manque de personnel que le gouvernement lui-même crée en
recourant à l'austérité n'est pas un argument recevable pour défendre la
création d'une seconde classe de travailleurs et surtout de travailleuses. On
voit aussi un enjeu dans le report de l'application des mesures permanentes.
Là-dessus, nous recommandons simplement l'abrogation de l'article 64 du
projet de loi.
Enfin, pour ce qui est de la réaffectation
des travailleuses et travailleurs à d'autres tâches, nous pensons que c'est
nécessaire de faire mieux. On recommande donc l'inclusion dans le projet de loi
du principe selon lequel l'employeur doit, a, obligatoirement prioriser
l'affectation plutôt que le retrait préventif lorsque possible, b, respecter le
plus possible le contrat de travail habituel et, c, offrir des tâches de complexité
équivalente, en cohérence avec les compétences et les connaissances de la
personne affectée.
En conclusion, le projet de loi
n° 101 nous apparaît comme étant malheureusement un peu bâclé. En plus de
toutes les autres recommandations législatives que nous avons soumises, je
tiens à rappeler des recommandations fondamentales. Premièrement, il faut que
la ministre dote la CNESST de toutes les ressources dont elle a besoin pour
s'acquitter de ses mandats. Il est impensable de prétendre à une meilleure
application de la loi dans la mesure où la CNESST a perdu plus de 6 % de
nos membres dans la dernière année, soit 146 personnes. Là-dessus, nous
recommandons donc aussi que le principe d'équité des modes d'accès aux services
soit mis en place à la CNESST. Enfin, considérant les graves lacunes en matière
d'analyse féministe, nous recommandons donc fortement le ministre… que le
ministre puisse, conformément aux bonnes pratiques…
Le Président (M. Allaire) :
Merci. Merci. Malheureusement, ça met fin à la période d'échange… pas la
période d'échange, on commence la période d'échange, mais ça met fin à votre
allocution. M. le ministre, seize minutes, 30 secondes, la parole est à
vous.
M. Boulet : Oui, merci, M. le
Président. Merci, M. Daigle. Merci à votre équipe pour votre présence, la
préparation du mémoire. Je comprends bien les orientations. Je vais peut-être
juste échanger avec vous sur quelques points, peut-être pour éclaircir.
D'abord, le revenu brut annuel d'emploi, vous référez aux articles 2 à 4,
faire la correspondance appropriée à l'article 67. Je vais m'assurer, là,
qu'il n'y ait pas de problème d'harmonisation parce qu'il n'y avait pas de
mauvaise intention des juristes, là, ce n'est vraiment pas… Et évidemment, on
va considérer, là, ce n'est pas la première fois que vous m'en parlez, là, le
100 % du revenu net retenu. Ça, ça me va pour ça.
La négociation avant la direction de la
révision administrative, évidemment, il y a des groupes pour, il y a des
groupes contre. Il y a plusieurs groupes qui nous ont demandé l'abolition pure
et simple de la révision administrative parce que, comme je le précisais,
83 %, à peu près, des décisions sont entérinées par la révision
administrative. Mais on avait eu un enjeu en vertu de la loi sur la justice
administrative, là, dès qu'une décision administrative de première instance est
rendue, qui affecte les droits d'une personne, il faut qu'il y ait un processus
qui soit équitable. Puis C'est une question de cohésion dans le… avec d'autres
lois de même nature. Mais on avait créé, souvenez-vous, en 2021, la possibilité
d'opter dans certaines matières pour éviter d'aller devant la révision
administrative et d'aller directement au tribunal administratif du travail.
Puis les parties me confirment que c'est quand même assez utilisé, là, ça
permet de passer à côté de la voie qui nous mène à la révision administrative
et d'aller directement au tribunal.
Je comprends l'élément que vous soulevez,
rapport de force. Il y a des syndicats qui étaient pour, il y a des
associations patronales qui étaient pour, d'autres contre. Mais c'est certain
que la volonté que nous avions, c'était qu'une personne de la CNESST, qui n'est
pas l'agent d'indemnisation qui rend la décision initiale, accompagne. Ce n'est
pas… Je comprends qu'il peut y avoir un déséquilibre de rapport de force, mais
c'est plus un accompagnateur si les deux parties consentent pour explorer des
voies de solutions, mais si c'est trop complexe, ce n'est pas une priorité pour
nous, là, M. Daigle, là. Ça fait que je vais certainement tenir compte de votre
opinion. En fait, votre recommandation, c'est de l'abandonner.
Sur la diminution des amendes,
souvenez-vous qu'avant le projet de loi n° 42, qui s'intéressait au
harcèlement puis les violences à caractère sexuel…
M. Boulet : ...on avait monté
toutes les amendes, puis les groupes nous on dit: Le but de ce projet de loi
là, c'était de combattre notamment les violences à caractère sexuel en milieu
de travail. Puis c'est là que le comité d'expertes... Laflamme puis Cox nous
avait demandé de les hausser pour les violences à caractère sexuel. Donc, on ne
les a pas diminuées, on les a ramenées au même niveau qu'avant le projet de loi
n° 82... n° 42, sauf pour
les violences à caractère sexuel, où on les a maintenues plus élevées. Ça fait
que je pense que c'était une précision qui était intéressante à partager avec
vous.
Sur les griefs, l'arbitrage, c'est sûr que
les délais maximaux pour la nomination de l'arbitre, la première journée
d'audience... après ça, le concept de conférence préparatoire puis le concept
de divulgation de la preuve, sauf le dernier, là, de divulgation de la preuve,
les autres, c'est un consensus entre les centrales syndicales et les
associations patronales, qui sont toutes réunis au Comité consultatif du
travail et de la main-d'oeuvre, et on essaie de respecter ce consensus-là qui a
été établi, puis un rapport qu'on va éventuellement rendre public,
incessamment, qui va vous confirmer. En fait, les patrons puis les syndicats,
ce qu'ils me demandaient, c'était de s'assurer que la procédure d'arbitrage
soit expéditive. Souvenez-vous, M. Daigle, les tribunaux le souhaitaient,
que ce soit... et puis là c'est devenu complexe, long et coûteux pour les
parties qui partagent généralement les frais et les honoraires. Ça fait que les
délais maximaux, c'était vraiment vu comme un grand bénéfice et une grande
avancée pour permettre un arbitrage plus respectueux des parties.
Parce que je comprends votre argument de
surjudiciarisation, mais, en même temps, c'est souvent l'opportunité pour une
personne d'être entendue devant un arbitre. Ça fait que je veux juste trouver
un bon équilibre, là. Puis en relations de travail, je m'excuse, là, mais on ne
travaille pas pour bâcler, on travaille beaucoup, beaucoup avec des
partenaires, puis pas nécessairement tous les partenaires, mais on consulte
énormément puis on essaie de trouver le meilleur équilibre possible, puis ce
n'est jamais blanc, ce n'est jamais noir. Puis, en arbitrage, cependant,
c'est... toutes les parties, généralement, sont favorables à ce qu'il y ait des
délais maximum, mais je suis conscient de... cependant, du manque de
ressources, puis on vient d'en ajouter cinq, arbitres, et le Comité consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre... j'ai approuvé un nouvel appel de
candidatures. Il y a un déséquilibre entre l'offre et la demande, puis c'est
sûr qu'il faut en rajouter, des arbitres. Si vous en connaissez qui veulent
appliquer, l'appel de candidatures est lancé puis vous pouvez communiquer avec
M. Lamoureux, là, du Comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.
Autre élément, les amendes, briseurs de
grève, ça a augmenté, là, je ne me souviens pas, 2 500 % puis, les
autres, de 10 000 %. Ça, là-dessus, c'est le ministère de la Justice
qui s'assure d'une harmonie dans le corpus législatif québécois entre le
montant des amendes.
• (20 heures) •
Et ça, c'est des spécialistes en droit qui
voient la nature de l'infraction puis qui voient le montant des amendes dans
des lois aussi similaires et qui s'assurent que ce soit le plus respectueux
possible. Puis, des fois, Monsieur Daigle, il y a des lois qui ne sont pas
réouvertes depuis longtemps. Santé-sécurité, accidents de travail, maladies
professionnelles, ça fait près de 40 ans, je m'excuse de le répéter, mais,
dans les cas présents, soyez assuré que s'il y a un manque d'harmonie, ce n'est
certainement pas un manque d'harmonie qui est profond, parce qu'ils sont
plusieurs juristes qui analysent puis qui s'assurent de la plus grande harmonie
possible.
La transparence, simplement vous
informer... bon, quand vous dites: Ça n'a pas d'affaire dans le code, mais il y
en avait déjà un, article sur les états financiers. Je vois votre collègue
hocher de la tête. Il y en avait un. 47.1 du Code du travail référait déjà aux
états financiers qui devaient être divulgués, puis d'en remettre une copie aux
membres.
Ce qu'on ajoute ici, c'est des états
financiers annuels, selon les normes comptables généralement reconnues...
20 h (version non révisée)
M. Boulet : ...et présenté en
assemblée générale annuelle, et, je vous dirais, pas à mon étonnement, mais les
centrales syndicales qui sont venues ici sont toutes à l'aise avec ça, avec
cette transparence-là. C'est un principe de saine gouvernance.
Ils m'ont demandé des assouplissements
pour les plus petites accréditations syndicales, et j'ai démontré mon
ouverture. On va s'assurer de respecter les plus petites accréditations
syndicales pour éviter le fardeau administratif et financier additionnel, là,
parce que c'est des CPA, puis je suis tout à fait conscient de cette réalité-là.
Mais on est ici, ce n'est pas l'équivalent pour les associations patronales,
mais il faut tenir compte ici qu'il y a un précompte syndical, il y a une
formule Rand, puis il y a une cotisation syndicale qui est obligatoirement
déduite à la source sur le salaire du salarié, et il y a une demande de
beaucoup de syndiqués d'être informés de l'utilisation des cotisations
syndicales. Et on n'est pas tellement allé loin, je me suis limité à de la
transparence simplement, puis, je le répète, les centrales syndicales ont
toutes exprimé une aisance avec cette mesure-là.
Dernier point, puis je vais terminer après
ça. Le régime de santé et sécurité, je ne sais pas si vous m'avez entendu avec
d'autres grands groupes, là, mais depuis 40 ans, en 2021, on a fait un
grand bond en avant dans tous les secteurs, il y avait à peine plus que
20 %, 23 % des milieux de travail qui étaient protégés par des
mécanismes de prévention puis de participation des travailleurs et
travailleuses, puis on est à 100 %. Puis le régime intérimaire bonifié en
santé, éducation, c'est des avancées significatives. Et, pour que ce soit
déployé avec efficacité puis succès, ça prend énormément d'accompagnement, de
formation et c'est ce qu'on fait dans tous les milieux de travail. Il y en a
des établissements qui sont plus avancés que d'autres, et on a repoussé d'une
année au maximum, parce qu'on réalise, puis je le répète, c'est très
asymétrique, là, comme intégration d'une culture de prévention durable. Mais
je veux juste vous rappeler, je ne ferai pas le tour de cette modernisation-là,
mais la santé psychologique, les RPS, les risques psychosociaux, l'intégrité
psychique, on n'en parlait pas avant, maintenant, les RPS, tout le monde sait c'est
quoi dans les milieux de travail. Il y a encore beaucoup d'éducation à faire
pour les identifier. Puis vous avez vu, même via le paritarisme, les patrons
puis les syndicats se sont entendus sur trois grands risques. Il y a des
facteurs de risque, on pourrait en discuter longtemps, mais, après ça, comment...
et mettre en place des mécanismes de contrôle et d'élimination de ces risques
psychosociaux là. Il n'y a pas qu'en santé, éducation, là, où les capacités
organisationnelles sont limitées, dans les PME et dans beaucoup de secteurs d'activité.
Moi, je suis un fervent croyant encore à l'importance
de faire de la prévention. Le but que nous avions, c'était de diminuer la
fréquence puis la gravité des lésions professionnelles puis, à date, ça va
relativement bien. Mais je ne nie pas le fait que, pour la santé psychologique,
avec la pandémie puis les événements exceptionnels que nous avons vécus, autant
au niveau climatique et autres, qu'il y a des secousses, il y a un nombre de
lésions psychologiques qui est en augmentation, mais il y a beaucoup de milieux
de travail qui se prennent en main. Puis avec leur règlement que la CNESST, le
C.A. a adopté, que nous avons l'intention d'adopter, et le règlement intérimaire
bonifié, particulièrement bonifié, je suis convaincu qu'au Québec, encore une
fois, on va être quand même extrêmement bien placés dans le peloton de tête. Alors,
en gros, c'est ce que je voulais partager avec vous. Merci beaucoup de votre
participation.
Le Président (M. Allaire) : Merci,
M. le ministre. On enchaîne avec la députée de Notre-Dame-de-Grâce. La parole
est à vous pour 12 min 23 s.
Mme McGraw : Merci, M. le
Président. Donc, dans un premier temps, bien, merci, messieurs, d'être là. On
est là surtout en consultations particulières, pour écouter, pour apprendre.
Donc, j'aimerais céder la première partie de mon temps pour répondre au
ministre.
M. Daigle
(Christian) : Bien, merci beaucoup. On est contents d'apprendre
justement que c'est peut-être une difficulté qu'il y a au niveau des articles 2
à 4, donc, de s'assurer...
M. Daigle
(Christian) :...c'est bien le revenu
d'emploi qui est... qui comprend tous les aspects, donc les aspects... qu'ils
ont des revenus de non-emplois également, qui ont pu faire... de prestations
qui ont été versées et qui vont... contenu à travers tout le... tout le tour,
là, qui va s'assurer que c'est vraiment un revenu complet qui est fait, comme
c'était le cas avant, donc, qu'il n'y ait pas d'échappatoire, je dirais, à
travers cet article-là. Ça fait que je remercie M. le ministre d'avoir regardé
le tout.
Au niveau des renseignements personnels,
c'est ça qui est la difficulté dans la diminution des amendes. La diminution
des amendes va pour les entreprises qui laisseraient divulguer des
renseignements personnels sur les gens. Donc, c'est là-dessus qu'on veut que
les amendes soient augmentées. On voit partout les difficultés où est-ce que
des renseignements personnels fuient et que ça nuit aux gens. Donc, on ne veut
pas justement avoir une facilité pour l'entreprise de ne payer qu'une amende
qui est moins grande. On voit partout des augmentations des amendes, bien, on
veut que ce soit la même chose de ce côté-là également. Bien que les amendes
ont peut être changé un petit peu à travers le temps, mais il faut augmenter
celles-ci pour éviter justement les cas où est-ce que les entreprises
tarderaient à prendre les mesures nécessaires pour la protection des
renseignements personnels.
Du côté du consensus au niveau des griefs,
qu'il y aurait eu une entente. Oui, on le souhaite, effectivement, qu'on
s'entende plus vite, les griefs, mais on ne veut pas faire perdre de droits aux
gens qui ont déposé des griefs. On sait qu'il y a très peu d'arbitres de disponibles.
On a même un cas, dans une unité parapublique, où est-ce qu'on a identifié
différents arbitres, et un arbitre nous a donné les renseignements,
dernièrement, ses disponibilités, et la première date disponible était en 2027.
Donc, on ne réussirait même pas, avec cet arbitre-là, à pouvoir avoir des
auditions dans les délais précités à travers le projet de loi. C'est la
difficulté que nous avons principalement. Donc, on n'est pas contre qu'il y ait
un délai, qu'on puisse mettre en place des méthodes pour justement amener des
griefs en arbitrage et ne pas laisser traîner les choses.
L'autre difficulté ou l'autre... bien,
difficulté ou l'autre, plutôt, je dirais, ambivalence qu'on voit dans le projet
de loi, c'est si les deux parties doivent demander l'arbitrage. La difficulté
qu'on voit, c'est qu'il n'y a pas de précision là-dessus. Si les deux parties
doivent demander l'arbitrage, et que l'employeur attend, attend, attend pour
laisser passer ou attend à la dernière pour laisser aller les délais, c'est là
qu'il peut y avoir des pertes de droits. On veut s'assurer - puis c'est pour ça
qu'on a fait la demande à travers notre recommandation - que ce soit la partie
déposante du grief qui puisse demander l'arbitrage. Soit que les deux parties
ont échangé immédiatement, et se rendent compte qu'elles sont diamétralement
opposées à travers leurs positions respectives, et qu'il n'y aura pas de
changement à ce niveau-là, donc on va tout de suite en arbitrage plutôt que
d'attendre le délai précité. Ou, à ce moment-là, on peut poursuivre les
discussions. On peut même convenir d'un délai plus long. Parce que, des fois,
il y a des cas vraiment lourds au niveau des griefs. Plusieurs griefs peuvent
s'amalgamer en même temps aussi. Des fois, il y a une suspension d'un jour, suspension
de cinq jours qui se fait sur une longue période, et lorsqu'on vient pour
étudier ces griefs-là, certains griefs vont passer le délai, alors que d'autres
seront tout récents. Donc, de pouvoir mettre l'ensemble des griefs dans un même
«bundle», en bon français, excusez-moi, mais dans un même groupe et qu'on
puisse à ce moment-là étudier le tout ensemble souvent va permettre de
trouver... aux deux parties de trouver une solution globale à l'ensemble de ces
griefs sans judiciariser la cause. Donc, c'est ce qu'on veut pouvoir faire et
pouvoir s'assurer que le projet de loi permet également aussi. Donc, c'est pour
ça qu'il faut regarder le tout à travers ça.
Au niveau également du 47.1, si je peux me
permettre, ce qu'on veut, c'est s'assurer que les états financiers ne soient
pas audités. Présentement, oui, on doit remettre, au niveau des états
financiers, le tout, on doit présenter le tout, mais il ne faut pas que ce soit
audité. On a des accréditations, chez nous, qui sont indépendantes, qui ont une
offre de service avec nous, mais qui représentent 40, 25 personnes
environ. On ne veut pas amener un fardeau supplémentaire à ces
accréditations-là de faire auditer. Puis je suis certain que l'accréditation,
lorsqu'elle reçoit ses cotisations, bien, annuellement, elle rend compte de ça.
Puis ces gens-là ne sont pas des gens qui sont libérés à temps plein, comme je
peux l'être, avec une équipe d'une centaine de personnes qui travaillent pour
le syndicat. Donc, il faut y avoir un peu de latitude à travers tout ça et ne
pas mettre, je dirais, trop de restrictions sur le principe de déposer les
informations nécessaires auprès des membres. Si les membres en font la demande,
bien, il y aura, à ce moment-là, des ajouts qui peuvent se faire et qui se font
déjà par les statuts. À chaque... que nous avons à tous les quatre ans, il y a
déjà des modifications qui se font via nos statuts pour s'assurer qu'on
représente bien la volonté des membres. Parce que c'est les membres qui
apportent ces recommandations-là, ce sont nos sections syndicales. Dans les
petits syndicats, bien, il faut qu'on laisse cette liberté syndicale là, comme
chez nous également, on réussit à le faire à travers de nos instances.
• (20 h 10) •
Mme McGraw : Juste sur ce
dernier organisme. Donc, si je comprends bien, c'est facultatif, à la demande
des membres, mais pas nécessairement audité. Il y a un groupe - j'oublie le nom
- qui ont suggéré que le niveau de rigueur, on va dire, c'est... c'est selon
les... un 250 000, je pense. Comment est-ce que vous recevez cette
recommandation-là, qui...
Mme McGraw : ...s'appliquer
aux syndicats.
M. Daigle
(Christian) : Bien, ça pourrait être une bonne avenue, je
crois, mais il faut surtout s'assurer que les syndicats ont la libre marge de
manœuvre pour le faire. D'arriver puis de forcer la note avec des principes
très précis va amener des obligations, puis que, si les syndicats ne
remplissent pas les obligations, là, bien, automatiquement, on se retrouve en
47.2 potentiel devant le ministère du Travail également. Donc, chaque syndiqué
va pouvoir amener... puis déjà c'est le cas, où est-ce qu'on a des syndiqués,
chez nous, qui nous poursuivent pour des pacotilles ou des choses qui ne
passent pas, même, la barre, de dire que c'est quelque chose que le syndicat a
mal fait ou est mal représenté... ou a mal représenté la personne. Donc, on va
ajouter des recours des membres qui n'auraient pas lieu d'être à ce moment-là.
Donc, on pense qu'il y a une manière interne de pouvoir gérer ces choses là.
Mme McGraw : À l'interne.
O.K. Alors, juste pour d'autres questions, certaines dispositions du projet
ressentent le pouvoir réglementaire au ministère. Comment concilier efficacité
administrative et respect de l'autonomie des institutions comme la CNESST?
M. Daigle
(Christian) :Là-dessus, je vais passer la
parole à mon confrère Isaïe. Il va pouvoir en dire un peu plus. Puis d'abord il
m'accompagne aussi justement par ses connaissances, ça fait que je vais laisser...
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Si vous me permettez, pouvez-vous me faire mention
de l'article spécifique?
Mme McGraw : ...générale,
mais, dans vos... Bien, c'est une question générale. C'est des dispositions du
projet qui recentre le pouvoir réglementaire aux ministères. De façon générale,
il n'y a pas nécessairement un article en particulier. Mais, si vous n'avez pas
de réponse... Mais peut-être la question plus générale, c'est une question de
trouver l'équilibre entre l'efficacité administrative et le respect de
l'autonomie des institutions comme la CNESST.
M. Daigle
(Christian) : Je n'ai pas été du bon bord. C'est mon confrère
Caron qui va vous... qui va pouvoir vous répondre.
M. Caron (Pierre-Alexandre) : Mais,
écoutez, on ne s'est pas penchés, là, de manière très, très précise sur cet
enjeu-là, mais c'est clair que, quand on parle de recentraliser davantage le
pouvoir au sein du ministère, puis qu'on met de côté des organismes qui sont
compétents, puis qui ont des opinions, puis qu'on doit prendre en considération
leur... ce qu'ils ont à nous dire, finalement, bien, c'est sûr que c'est... ça
peut être inquiétant. Ce qui est souhaitable, là, c'est quand on consulte le
plus largement possible puis qu'on laisse surtout du pouvoir dans les
institutions qu'on a créées pour... pour qu'elles... pour qu'elles jouent leur
rôle, finalement.
Mme McGraw : Merci. Ensuite,
vous évoquez, dans votre mémoire, l'importance d'actualiser la gouvernance en
CSST. Selon vous, quelles seraient les conditions minimales pour maintenir la
confiance des milieux de travail?
M. Daigle
(Christian) : Pour deux éléments. Tout d'abord, au niveau de la
CNESST, comme je l'ai dit dans mon discours d'ouverture, il faut qu'on puisse
avoir le nombre d'effectifs nécessaires et surtout qu'on réouvre certains
points de services qui ont été fermés avec le temps, qu'on puisse avoir un
service sur l'ensemble du territoire québécois. Maintenant, quant à avoir plus
de particularités, je vais laisser mon confrère Isaïe vous répondre.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Oui, c'est ça. On mentionnait, là, juste pour
compléter, en fait, il y a plusieurs bureaux de la CNESST, en ce moment, dans
lesquels c'est impossible de se rendre à moins qu'on ne soit convoqué. Donc,
justement, cette notion-là, de confiance, à partir du moment où est-ce qu'on
détruit la notion d'universalité, d'accès puis d'équité d'accès, c'est un enjeu
majeur. Donc, ne serait-ce que cet élément-là, qu'il ne s'agit pas de
gouvernance, spécifiquement... de mode de délivrance des services publics,
d'avoir une équité d'accès entre les modes d'accès aux services publics, ça
nous apparaît comme étant prioritaire.
Un autre élément qui ne s'arrime pas
directement, forcément, à la CNESST, mais qui, à notre avis, bonifierait ce
champ des services publics qu'est la défense des droits des travailleuses, des
travailleurs, puis le respect de ces droits-là, c'est la création d'un bureau
de défense des non-syndiqués. On sait que c'est une revendication qui a été
également avancée par plusieurs autres groupes qui sont passés ici et on y
adhère, en fait, ce principe-là, selon lequel le bureau de défense des
non-syndiqués aurait comme un office de protecteur du citoyen, si on veut un
mandat d'accompagnement, de suivi pour s'assurer que, mais non seulement la
CNESST puisse faire son travail en toute autonomie, en toute impartialité telle
qu'elle le fait en ce moment, mais s'assurer que, tu sais... On est par
ailleurs la seule province au Canada qui n'a pas ce genre d'institution là,
mais de s'assurer que les travailleurs, les travailleuses non syndiqués, qui
représentent quand même à peu près 60 % des travailleuses et travailleurs
au Québec, soient en mesure d'interagir avec la CNESST. En connaissant leurs droits
avec quelqu'un qui vient les défendre, ça nous apparaît comme étant
particulièrement pertinent.
Mme McGraw : Merci.
Peut-être, de façon plus générale, vous qualifiez le projet de loi comme un
recul, une occasion manquée. Vous parlez même d'un... le ton est presque, bien,
frontalement opposé au projet de loi, qu'on a qualifié de prolongement du
printemps antisyndical. Donc, vraiment, c'est des mots forts. Plusieurs groupes
ont... disent que la loi, c'est... ou le projet de loi aurait un impact, même si
ce n'est pas l'intention, aurait un impact discriminatoire sur certaines...
Mme McGraw : ...professions,
surtout qui sont... on va dire... représentées par des femmes à 80 %.
Donc, on prévoit un report d'un an de la mise en œuvre du régime de prévention
complet issu de la LMRSST. À vos yeux, quelles conséquences, de façon vraiment
concrète, ce rapport pourrait-il avoir sur les milieux de travail public et
parapublic? Concrètement.
M. Daigle
(Christian) :Bien, au niveau des milieux
parapublics, tout ce qui s'est passé au niveau des griefs nous impacte
directement. Donc, une quarantaine d'accréditations, hormis celle des
fonctionnaires et des ouvriers, auraient un impact négatif pour nous, au niveau
des griefs.
On parlait également au niveau des milieux
de travail surtout représentés par des femmes. Donc, on pensait... puis à
travers mon 10 minutes que je n'ai pas pu terminer mon discours, là, on
aurait pu demander... On aimerait qu'il y ait une analyse différenciée selon
les sexes et intersectionnelle... qui aurait dû être faite dans ce projet de
loi là. On sait qu'on le demande à chaque fois, mais on pense que, surtout sur
ce projet de loi là, c'est quelque chose qui aurait dû être appliqué pour
démontrer, justement, la... je ne dirais pas... les manquements qu'il y a plus
vers les femmes à travers des professions dont elle sont visées à travers le
projet de loi qu'envers les hommes à ce moment-ci.
Mme McGraw : Bien, justement,
je pense qu'il me reste peu de temps, donc, pour le temps qu'il me reste.
Est-ce qu'il y a des enjeux que vous auriez voulu souligner, soulever, des
points que vous voulez ramener en conclusion?
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : ...je peux me permettre, là, un petit retour à la
LATMP puis la notion du 90 %, 100 %. Déjà, pour des personnes qui
auraient eu des prestations d'assurance-emploi de RQAP, on a 90 % de
55 % de prestations d'assurance-emploi. Donc, il y a déjà une forme de
pénalité. L'objectif de la LATMP, c'est de remplacer le potentiel de gain, ce
n'est pas forcément de remplacer le gain sur une période assurable. Donc, de
s'assurer que la LATMP soit modifiée en conséquence pour qu'elle respecte
vraiment l'origine puis l'idée dans laquelle elle a été écrite.
Le Président (M. Allaire) : Excellent.
Merci. Ça met fin à cette période d'échange avec l'opposition officielle. M. le
député d'Hochelaga-Maisonneuve, quatre minutes huit secondes.
M. Leduc : Merci, M. le
Président. Bonsoir à vous trois. Les derniers qui finissent, vous finissez en
force. Printemps syndical, j'aime ça. Bien, je n'aime pas qu'il y ait eu un
printemps syndical, bien sûr, mais j'aime l'expression et l'audace de le dire
ici.
Sur santé et sécurité, je trouve ça
intéressant que vous rameniez l'idée d'un bureau de défense des non-syndiqués.
Ça a été quand même rappelé à quelques occasions. Qu'est-ce que ça vient de
changer concrètement, ça, dans l'ordre des choses?
M. Daigle (Christian) :Le bureau va permettre aux gens non syndiqués d'être
accompagnés, de pouvoir recevoir des conseils, de pouvoir se présenter avec la
capacité d'avoir quelqu'un qui va pouvoir l'amener à comprendre la situation.
Souvent, les gens se présentent seuls devant la CNESST et ils ne sont pas
capables, des fois, de voir l'ensemble des droits qu'ils peuvent avoir. Déjà,
pour représenter des gens dans certains ministères, même dans les centres
d'appel, ces gens-là ne sont pas autorisés à donner toute l'information parce
qu'ils ont un temps précis pour répondre aux gens. Donc, ce bureau-là
permettrait de dissocier la CNESST à travers le travail qu'elles ont... qu'elle
a à faire et de permettre à ce bureau-là d'accompagner les gens pour leur
donner tous les renseignements nécessaires et pertinents à la défense de leurs
droits, de leur souligner les délais, de souligner qu'ils peuvent accepter ou
pas, mettons, d'aller avec l'employeur pour regarder la négociation possible
une fois que la première sentence est rendue, et ainsi de suite. Donc, il y a
tout un dédale là-dedans que, même moi, comme président de syndicat, je ne
connaîtrais pas si j'arrivais seul devant la CNESST. Donc, ce bureau-là permet
cet accompagnement-là et cette connaissance approfondie qui manque aux
travailleurs non syndiqués minimalement.
• (20 h 20) •
M. Leduc : Intéressant.
D'autres organisations sont venues plaider pour l'abolition de la division de
la révision administrative, aussi pour l'abolition du BEM, le Bureau
d'évaluation médicale. Avez-vous la même position?
M. Caron (Pierre-Alexandre) : Je
vais laisser mon confrère Isaïe.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : On n'est pas allés jusque là, bien entendu. Ça reste
néanmoins que, dans le processus de révision, il y a des éléments qui méritent
amélioration. Là, en l'occurrence, dans le projet de loi, ce qu'on voit, c'est
un recul potentiel au niveau de l'instauration de la négociation. Ça nous
apparaît que ce n'est pas encadré de manière efficace en ce moment. On n'est
pas allés jusqu'au retrait, l'abolition de... du BEM à l'heure actuelle.
M. Leduc : Merci. Sur les
états financiers dits vérifiés ou audités, selon le terme, je pense, justes, il
y a d'autres groupes qui sont venus nous proposer des... une espèce de catégorie,
là. En bas de 250 000, il n'y aurait pas d'exigences. Au niveau des
exigences, beaucoup plus faibles. Ils faisaient comme trois catégories pour
arriver, finalement, aux états audités, qui sont très dispendieux. Vous, vous
avez plutôt, si j'ai bien compris, proposé juste le retrait complètement de cet
article-là, donc de revenir à la mouture originale. Mais est-ce que... Dans une
perspective de dialogue social, que le ministre aime beaucoup, une proposition
de ce genre-là, avec des catégories puis des types de revenus, de grosseurs de
syndicats, dans le fond, est-ce qu'il y aurait là une espèce de compromis qu'on
pourrait essayer d'attacher avec le ministre?
M. Daigle
(Christian) :Bien, ça pourrait être un
compromis, oui. Si c'est pour passer tel quel, on l'a mis pour le compromis
d'avoir des strates, qui va permettre justement de changer les choses. Mais, à
la base même, on pense que...
M. Daigle
(Christian) :…c'est de respecter le droit
des membres de demander ce qu'ils souhaitent à travers leurs instances
syndicales. Donc, si on a des strates, on va vivre avec, puis c'est mieux que
ce qui est là présentement, mais on aimerait ça… Puis la contrepartie serait
aussi que, lorsqu'on arrive en négociation… nous disait tout le temps : Je
n'ai pas d'argent, je n'ai pas d'argent, bien, parfait, qu'on puisse avoir le
droit de leur demander leurs états financiers également aussi, qu'ils nous les
déposent et qu'ils soient, à ce moment-là, à la même table que nous, avec les
mêmes informations que nous, si c'est le cas.
M. Leduc : Dans les 30
secondes qu'il me reste, j'aime toujours faire cet exercice-là vers la fin,
vous avez un mémoire très généreux, une trentaine de recommandations, c'est
quoi, les trois ou quatre prioritaires que vous voudriez vraiment voir être
appliquées? Vous en avez une de chaque, mettons, là…
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Bien, nous sommes en période d'austérité. Nous avons
fait l'exercice de regarder une première période de paie, de mai 2024, première
période de paie… de mai 2025, dans l'ensemble de la fonction publique,
6,5 % de cotisants de moins, c'est de l'austérité. On ne peut pas dire que
ce n'est pas ça et c'est à peu près les mêmes chiffres à la CNESST,
spécifiquement pour ces deux périodes de paie là, en l'espace d'un an. Investir
pour qu'on soit capables de s'acquitter de notre mission, minimalement.
Le Président (M. Allaire) : Merci.
Ça met fin à l'ensemble du bloc d'échange que nous avons eu ce soir. Alors,
merci aux trois représentants du Syndicat de la fonction publique et
parapublique du Québec. Merci pour votre contribution à cette commission.
Alors, avant de conclure cette audition,
je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas
été entendus lors des auditions publiques.
Alors, la commission, ayant accompli son
mandat, ajourne ses travaux sine die. Bonne fin de soirée, tout le monde.
(Fin de la séance à 20 h 23)