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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Wednesday, June 8, 1983 - Vol. 27 N° 93

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi 8 - Loi concernant l'adoption des chapitres 35 et 45 des lois de 1982 et modifiant certaines conditions de travail dans le secteur public


Journal des débats

 

(Vingt et une heures quarante-trois minutes)

Le Président (M. Laplante): À l'ordre, s'il vous plaît! La commission des finances et des comptes publics se réunit pour étudier article par article le projet de loi 8, Loi concernant l'adoption des chapitres 35 et 45 des lois de 1982 et modifiant certaines conditions de travail dans le secteur public. Les membres de cette commission sont: MM. Blais (Terrebonne), Marquis (Matapédia), Fortier (Outremont), French (Westmount), Gagnon (Champlain), Gauthier (Roberval), Beaumier (Nicolet), Johnson (Vaudreuil-Soulanges), Lachance (Bellechasse), Bérubé (Matane), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), et Ryan. Vous remplacez M. French (Westmount), c'est cela?

M. Ryan: C'est cela.

Le Président (M. Laplante): M. Ryan (Argenteuil) remplace M. French (Westmount).

Les intervenants sont: M. Bisaillon (Sainte-Marie)...

Vous avez sur votre côté M. Fortier (Outremont).

M. Ryan: Pouvez-vous mettre M. Roma Hains à la place de M. Fortier?

Le Président (M. Laplante): M. Hains (Saint-Henri).

M. Bérubé: Est-ce que cela va prendre une motion?

Le Président (M. Laplante): Non.

M. Bérubé: Parfait! J'allais souscrire à cette proposition du député d'Argenteuil qui m'apparaît, en fait, apporter une nette amélioration à la composition de la commission.

M. Ryan: Vous souscrivez quand ce n'est pas le temps.

Le Président (M. Laplante): Vous avez aussi M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges) et vous avez M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Fallu (Groulx), Lafrenière (Ungava), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), Lévesque (Kamouraska-Témiscouata), Lincoln (Nelligan), Polak (Sainte-Anne), Proulx (Saint-Jean), Rochefort (Gouin).

Lorsque nous avions ajourné nos travaux, M. le député d'Argenteuil et M. le député de Sainte-Marie m'avaient demandé de prendre une décision sur les amendements des documents sessionnels. Pour vous remettre dans l'ordre de cette réunion de la commission, je vous rappellerai qu'au ruban 235-B/F, page 2, de la commission, M. Ryan se préparait à proposer un amendement...

M. Bérubé: Suivant la montre informatisée de mon conseiller, c'est plus vite.

Modification de certaines

conditions de travail dans le secteur public (suite)

Le Président (M. Laplante): Je vais lire l'article. C'est M. Ryan qui parle: "Je rappelle, encore une fois, l'ordre de grandeur dont il est question. Je pense qu'au point où nous en sommes arrivés nous allons présenter un amendement. Si celui-là n'est pas accepté, il faudra peut-être en présenter un autre, mais on va en présenter un, en tout cas, qui nous paraît raisonnable." C'est toujours à l'article 11 du projet de loi 8 où nous étions rendus. "L'amendement que je proposerais est le suivant - de M. Ryan -"Que les mots: "malgré le paragraphe qui précède" et allant jusqu'à "aucune compensation forfaitaire" du document sessionnel no 85 soient retranchés". Vous annonciez cette proposition-là, M. le député d'Argenteuil, sans l'avoir donnée formellement, selon la transcription. Vous deviez y revenir sous une forme écrite. Vous ajoutiez aussi, selon le même ruban 236, que j'avais fait des observations sur la recevabilité. Nous l'avons fait en commission parlementaire. Vous disiez que cela pourrait être amendé au document sessionnel 350 par le biais du projet de loi 101. Un peu plus loin, vous ajoutiez - je vous demandais de continuer à expliquer -: "C'est un document qui, en vertu d'une décision rendue par un tribunal pas plus tard qu'il y a deux jours..." en vous référant au document sessionnel.

M. Bisaillon a posé des questions là-dessus. Si vous avez besoin de références, après avoir rendu la décision que je dois rendre, il me fera plaisir de vous les donner. Je vais lire la décision que j'ai à rendre. "On se rappellera que j'ai pris en délibéré le 1er juin dernier une question fort importante. Il s'agissait de savoir si l'on

pouvait dans le cours de nos travaux, modifier par amendements des documents sessionnels qui, dans le cas qui nous préoccupe, tiennent lieu de conventions collectives aux employés du secteur public parce qu'une loi du Parlement en a prescrit ainsi. "Pour le bon accomplissement de notre mandat, il importe de préciser les moyens qui sont à la disposition des membres de cette commission pour modifier des documents de cette nature. "C'est la loi qui a donné quelque effet à ces documents en y référant explicitement. Ce procédé a été initié par le Parlement et c'est encore la seule autorité qui peut y changer quoi que ce soit. On ne peut donc en écarter la teneur que sur habilitation législative expresse. D'ailleurs, la Loi concernant la rémunération dans le secteur public et la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public contiennent une telle habilitation quand elles précisent qu'une entente entre les parties prévaut malgré toute disposition inconciliable d'un tel document. "Deux autres possibilités peuvent être envisagées par le Parlement. Le député de Sainte-Marie a fait référence à l'une d'elles à notre dernière séance. Celle-ci consiste à apporter un amendement au projet de loi présentement à l'étude en y incorporant la modification que l'on voudrait voir adopter pour modifier une disposition d'un document sessionnel. Dans ce cas, la modification doit apparaître en son entier dans l'amendement suggéré au projet de loi. "L'autre possibilité consiste à procéder de la manière prévue aux articles 11 et 12 qu'on donne comme exemples dans le projet de loi. En effet, tout parlementaire, avec le consentement de l'Assemblée, peut déposer un document sessionnel qui sera enregistré sous une cote précise. Ce document pourrait prévoir des modifications au contenu des documents sessionnels tenant lieu de convention collective pour les parties. Pour donner un tel effet à ces documents, il faut à tout prix le spécifier dans le dispositif de la loi en référant précisément audit document sessionnel. "On ne peut procéder autrement car le législateur a donné par l'intermédiaire de la loi un caractère impératif à ces documents. "Je ne peux préjuger du contenu de ces modifications car on n'en a pas encore saisi la commission. Je rappelle toutefois qu'un amendement présenté par un député de l'Opposition qui a un caractère exécutoire et qui a une implication directe sur les dépenses et les revenus de l'État ne peut être reçu."

Ceci voudrait dire, M. le député d'Argenteuil et M. le ministre, qu'on peut amender un document sessionnel en commission parlementaire. On peut l'amender en autant qu'il n'implique pas de dépenses pour l'État. On peut l'amender dans un sens où vous pourriez, à un certain moment, en vous référant aux projets de loi 105 et 70... Dans ces décrets-là, décider tout à coup d'enlever une pause-café qui pourrait être incluse, qui ne nécessite pas une dépense de la part de l'État mais qui serait inscrite à l'intérieur du document. Vous pourriez faire un amendement pour abolir cette pause-café mais, par contre, vous ne pourriez pas ajouter un article, par exemple, pour dire que vous donneriez peut-être cinq minutes additionnelles à une pause-café, ce qui impliquerait une dépense additionnelle pour l'État.

C'est en ce sens-là. À chaque fois que vous apportez des amendements à l'un de ces documents, vous devez nous présenter, avec l'amendement, l'article complet du document parce que le président ne peut être au courant de chacun de ces documents par numéro.

C'est pourquoi, tout en faisant référence au numéro, vous faites aussi copie de l'article que vous voulez modifier pour savoir exactement ce à quoi on se réfère et les décisions qui suivront.

Je vous remercie. Est-ce que vous avez des commentaires?

M. Bérubé: Oui, M. le Président. Il s'agit là d'une question que vous avez tranchée avec beaucoup d'autorité et qui demande une réflexion peut-être plus poussée.

Est-ce que vous nous permettriez de suspendre deux minutes afin d'examiner exactement la nature de votre décision?

Le Président (M. Laplante): Pas de problème. Suspendu. Je vais en faire faire des copies.

M. Bérubé: Pas de problème.

M. Ryan: M. le Président, avant qu'on ajourne, si le Président pouvait faire tirer des copies de sa décision afin qu'on puisse l'examiner texte en main, on n'a peut-être pas tous la propension à procéder par calculatrice dans ces choses-là.

M. Bérubé: Je ne sais pas ce que la référence à une calculatrice peut faire, mais j'ai eu droit, cet après-midi, à un débat avec le député de Louis-Hébert, où il me demandait de me prononcer sur un principe avant d'examiner ma calculatrice, et j'ai commis une erreur, M. le député d'Argenteuil. Alors, M. le Président, veuillez transmettre cette opinion au député d'Argenteuil comme vous l'avez, d'ailleurs, intimé dans un débat précédent.

J'ai commis l'erreur grave d'examiner, au moyen de ma calculatrice, ce que

coûterait cette déclaration de principe nous venant directement du député de Louis-Hébert et j'ai constaté, M. le Président, qu'elle nous coûterait 2 000 000 000 $. J'ai donc décidé de piler sur mes principes.

M. Ryan: M. le Président, est-ce qu'en rentrant...

Le Président (M. Laplante): La séance est suspendue pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 54)

(Reprise de la séance à 21 h 56)

Le Président (M. Laplante): La reprise des débats, M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, il est indéniable que la décision que vous avez rendue s'inspire d'une longue tradition parlementaire. Elle s'inspire notamment de l'article 64 de notre règlement. Je ne peux absolument pas vous critiquer quant à la sagesse de la décision que vous avez rendue. Je pense qu'effectivement c'est la prérogative de l'Exécutif de soumettre à l'Assemblée nationale des propositions, motions ou autres amendements ou projets de loi qui sont de nature à entraîner des dépenses publiques.

De ce fait, M. le Président, il est clair qu'il était possible de modifier les documents sessionnels, d'une façon que vous avez fort bien décrite. Elle consiste à déposer un document sessionnel à l'Assemblée nationale sur consentement de l'Assemblée et de se référer à cedit document par le biais d'un amendement approprié dans le cadre des projets de loi, ce qui a comme conséquence à ce moment-là de modifier les documents sessionnels tels qu'amendés et de faire en sorte d'imprimer à ces documents la volonté de l'Assemblée nationale.

Il est donc clair, M. le Président, que la méthode que vous avez recommandée pour amender les documents sessionnels est valable. Toutefois, elle est évidemment entachée d'une restriction importante que vous avez soulignée et qui est tirée de l'article 64 de notre règlement qui veut qu'un amendement entraînant des dépenses ne puisse être proposé que par le gouvernement. C'est une réalité à laquelle aspire l'Opposition, qu'on peut lui souhaiter dans un avenir pas trop rapproché, après un long purgatoire, je pense, à l'Assemblée nationale, à titre d'Opposition effectuant un bon travail, consciencieux, méthodique, systématique, sur les décisions gouvernementales, mais se contentant de ce rôle de critique et non d'un rôle de gouvernement.

M. le Président, votre décision me paraît on ne peut plus opportune et bien conforme à notre règlement. Je ne peux que louer la sagesse de notre présidence.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil, est-ce que je dois appeler l'article 11?

M. Ryan: Avant cela, je voudrais juste vous demander plus de précision sur la décision que vous avez rendue et au sujet de laquelle je n'ai pas de commentaire à faire, évidemment. Il me semble que c'est une bienséance élémentaire que de ne pas faire de commentaire sur ces décisions.

Je voudrais vous demander une couple d'explications. Je n'ai pas bien compris. Est-ce que vous avez dit que, contrairement au projet de loi, le document sessionnel ne peut souffrir d'amendement que moyennant une intervention qui se fait au niveau de l'Assemblée nationale? (22 heures)

Le Président (M. Laplante): C'est exact. Ce qui veut dire, d'ailleurs, quand il vient en commission parlementaire avec le projet de loi, que vous avez des références qui se font au document sessionnel dans le projet de loi. Donc cela veut dire que l'Assemblée nationale a pris connaissance des amendements à apporter au document sessionnel. Lorsqu'il vient en commission parlementaire vous avez le droit, avec la restriction de l'article 64, de faire des amendements au document sessionnel, aux articles concernés. C'est pourquoi on demande aussi d'apporter à ce moment l'article même, quand vous avez des amendements à apporter, pour que le président puisse juger de la recevabilité et puisse faire une comparaison avec votre amendement et l'article qu'il y aurait dans le document sessionnel.

M. Ryan: Si je comprends bien, on peut, en commission parlementaire, présenter un amendement au document sessionnel comme on peut le faire pour l'ensemble du projet de loi.

Le Président (M. Laplante): Exactement.

M. Ryan: Sauf le respect qu'on doit conserver pour l'article 64.

Le Président (M. Laplante): Exactement.

M. Ryan: II me semble que ce n'est pas tout à fait ce qui est dit au premier paragraphe de la page 2.

Le Président (M. Laplante): Ce qu'il dit, c'est qu'il faut que vous vous référiez... Disons que vous avez ici l'article 11, qu'on prend comme exemple. Vous avez une référence au document no 85 déposé le 5

mai 1983.

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Laplante): Ce sont les dispositions du texte visé dans l'article 3 de la loi concernant les conditions de travail. C'est cet article qu'on pourrait amender, qui fait partie du document sessionnel, pas le document complet. Ce sont des documents de référence que vous avez à l'intérieur de l'article. D'accord?

M. Ryan: Donc, le document sessionnel no 85 peut se prêter à des amendements en commission?

Le Président (M. Laplante): Oui, pour autant qu'il est amendé par des articles. J'ai dit tout à l'heure que, si on lit textuellement les dispositions du texte visé dans l'article 3 de la Loi concernant les conditions de travail dans le secteur public, qui sont modifiées par celles qui apparaissent au document sessionnel 85, déposé le 5 mai, il faut que cela se rapporte à cet article. Vous ne pouvez pas arriver et choisir un article au hasard à l'intérieur du document et dire: C'est celui-là que j'amende. Vous ne pouvez le faire. Il faut que l'article ait une concordance avec l'article du document sessionnel. Cela a été la volonté du législateur d'y toucher,

M. Ryan: Je ne veux pas être byzantin, mais je crois constater que la compréhension de ce que vous avez rendu comme décision est assez différente d'un côté et de l'autre de la table. Est-ce que - c'est seulement une suggestion que je vous fais, je n'en fais même pas l'objet d'une demande - il serait possible, à loisir, que vous développiez cette décision un peu plus? Même si ce n'est pas avant l'ajournement, parce qu'il me semble que c'est une décision très importante qui est rendue et je crains qu'elle ne soit pas suffisamment claire dans la formulation que vous lui avez donnée. C'est très intéressant. C'est une suggestion que je vous ferais. Je ne voudrais pas m'attarder là-dessus indéfiniment ce soir mais il me semble que c'est une question qui implique tellement de répercussions possibles que j'aimerais la soumettre à votre attention.

Je vous soumets également une autre question. Pourriez-vous apporter des précisions là-dessus, fournir des développements plus élaborés? Je vois que, dans votre décision, vous parlez d'un document sessionnel. Je me souviens que, dans nos discussions antérieures, nous avons fait des distinctions entre différentes sortes de documents sessionnels qui ne se prêteraient pas nécessairement au même genre de conclusion.

Je ne sais pas si, dans une élaboration éventuelle que vous feriez là-dessus, vous pourriez examiner cet aspect. Je ne vous demande pas de me répondre ce soir d'ailleurs.

Le Président (M. Laplante): D'accord. J'aurais pu vous répondre en partie...

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Laplante): ...à la suite des discussions qu'on a eues là-dessus. On fait référence toujours, au singulier, au document sessionnel. C'est que cela peut s'appliquer à n'importe quel document qui est adopté, de la même façon que les décrets ont été adoptés et qui peuvent être modifiés à l'Assemblée nationale. On parle de ceux-là ce soir parce que ce sont ceux dont on a à traiter...

M. Ryan: Cela veut dire que c'est...

Le Président (M. Laplante): ...mais ils comportent aussi les restrictions...

M. Ryan: C'est cela.

Le Président (M. Laplante): ...de l'article 64 du règlement.

M. Ryan: Mais la ' seule chose dont je voudrais m'assurer, c'est que cela ne veut pas nécessairement dire dans votre esprit n'importe quelle sorte de document sessionnel. Très bien. Je vous répète ma suggestion sans insister.

M. Bérubé: Je voulais simplement souligner mon appui total à la proposition du député d'Argenteuil, à savoir que vous preniez en considération cette question et que vous puissiez l'approfondir ultérieurement, je l'espère, au cours des travaux de cette commission.

M. Ryan: Seulement pour votre utilité, il est arrivé une décision dans une commission parlementaire où je siégeais, l'automne dernier, qui avait un caractère un peu étonnant et on a demandé au président qui l'avait rendue s'il voulait la mettre par écrit d'une façon précise pour qu'on puisse en voir exactement toutes les implications. Quand il a été rendu à examiner les aboutissements logiques de la décision qui avait été rendue, il a produit une décision contraire, ce qui a étonné les gens. Ce n'est pas cela que j'entends suggérer...

M. Bérubé: Non, absolument pas, M. le Président.

M. Ryan: Très bien.

M. Bérubé: Je suis convaincu que le

député d'Argenteuil n'avait pas cela à l'esprit, ne voulait pas insinuer la moindre idée malveillante quant à votre capacité à...

Le Président (M. Laplante): Je vais prendre la défense de mes collègues présidents. C'est qu'on n'est pas exempt des erreurs non plus. On essaie autant que possible de se servir...

M. Ryan: Dans ce cas, le président était un député de l'Opposition, mais qui était allé consulter la présidence et tout l'appareil juridique. C'est normal.

M. Bérubé: Je pense que les dernières notes et remarques du député d'Argenteuil permettent d'éclairer considérablement les travaux de la commission.

M. Ryan: Je regrette infiniment, mais le président a rappelé une chose très importante, tantôt, c'est qu'il y a une coupure radicale entre la présidence et le gouvernement, nonobstant les apparences qui peuvent parfois exister.

M. Bérubé: M. le Président, c'est un fait.

Le Président (M. Laplante): J'appelle à la section III, l'article 11, auquel on revient. M. le député d'Argenteuil, vous m'aviez annoncé une motion à ce moment.

M. Ryan: Avant d'en venir là, j'aimerais demander si le président du Conseil du trésor...

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Oui, pardon.

M. Bérubé: Vous avez dit que le député d'Argenteuil avait annoncé une motion. Est-ce que c'est vraiment le terme parlementaire parce que, pour moi, "motion" est un terme anglo-saxon qui veut dire mouvement et moi, j'ai de la difficulté à assimiler la notion de mouvement avec l'Opposition libérale.

Le Président (M. Laplante): Motion d'amendement, si vous voulez... Il faudrait revenir à l'étude du projet de loi 8.

M. Ryan: Voulez-vous lui passer un exemplaire du livre des règlements. Il va trouver ce mot à bien des endroits. Je vois qu'il n'est pas familier avec cela. C'est son droit.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voulais simplement demander un point d'information avant d'avancer davantage. Est-ce que le président du Conseil du trésor a eu le temps de faire des vérifications sur les calculs que j'avais portés à son attention l'autre soir concernant le cas des enseignants à temps partiel dans le secteur de l'enseignement aux adultes.

M. Bérubé: En effet, ma calculatrice cet après-midi là était défectueuse, enfin, non pas vraiment défectueuse mais je me suis fait fabriquer par un artisan de mon comté une sorte d'enveloppe qui me permettrait de sortir rapidement ma calculatrice ainsi que quelques plumes lorsque l'Opposition me posait des questions appropriées. Je fus malheureusement pris en défaut et au dépourvu dans la mesure où l'Opposition devait me poser effectivement une question avant que cet étui de cuir, fort somptueux d'ailleurs, comme je le disais, me soit effectivement livré en bonne et due forme. Par conséquent, je me suis retrouvé sans calculatrice, à mon grand dépourvu.

M. Ryan: C'est triste!

M. Bérubé: Je dois dire, avec les questions de l'Opposition, qu'un président du Conseil du trésor, dans ce Parlement, ne peut pas se trouver pris en défaut sans ordinateur de poche, dans la mesure où les propositions les plus saugrenues nous sont émises par l'Opposition à un rythme tellemement rapide qu'il nous faut en général faire les calculs rapidement. Je soulignais d'ailleurs en aparté au député d'Argenteuil que, cet après-midi, c'est le député de Louis-Hébert, un député libéral, qui devait suggérer une attitude beaucoup plus ouverte du gouvernement. Je pense qu'en principe, il n'y a pas de problème, si on veut dire si on veut parler de la sorte vis-à-vis de certains employés du secteur public. Il me suggérait de me prononcer, dans un élan oratoire comme seul, d'ailleurs, le député de Louis-Hébert se le permet. Non, mais je vais donner quand même...

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, j'apprécierais beaucoup d'avoir des discussions sans provocation pour qu'on puisse arriver à...

M. Bérubé: Non, non, M. le Président. C'est absolument ad hoc, dans le cas présent, absolument ad hoc. Donc, on me demandait de me prononcer sur un principe...

M. Ryan: Est-ce le principe de la pertinence maintenant, M. le Président?

M. Bérubé: Non, c'est parfaitement ad hoc. Vous allez voir, M. le Président. Donc, on me demandait de me prononcer sur le principe, sans effectuer de contrôle avec

quelque calculatrice que ce soit, ce qui me semblait quand même un peu dangereux. Mais j'ai pris la peine de vérifier la proposition que me faisait le député de Louis-Hébert, qui, s'il...

M. Ryan: Est-ce qu'on en est encore à la proposition du député de Louis-Hébert, à l'Assemblée nationale, au salon bleu...

M. Bérubé: Non, non.

M. Ryan: ...ou bien si vous parlez de la proposition du député d'Argenteuil?

M. Bérubé: Non, c'est que le député de... Si je comprends bien, M. le Président...

Le Président (M. Laplante): Le député vous a posé une question assez directe, je pense, M. le ministre, pour mériter aussi une réponse directe.

M. Bérubé: Oui, mais, M. le Président, le député d'Argenteuil m'a demandé de me prononcer sur un principe et, subséquemment, je devais rapidement faire quelques calculs. Il m'a demandé d'effectuer les calculs complémentaires. Je l'apprécie aujourd'hui puisque, cet après-midi, on m'a fait exactement le coup inverse. On m'a demandé de me prononcer sur le principe, sans faire appel à ma calculatrice, et de vérifier le coût. Or, cet après-midi, je devais constater que le coût était de 2 000 000 000 $, ce que me demandait le député de l'Opposition.

Évidemment, vous allez me dire qu'un principe vaut plus que 2 000 000 000 $, mais il reste quand même que si j'avais envoyé une facture à l'ensemble de mes concitoyens pour 2 000 000 000 $, ils auraient trouvé le principe un peu lourd à supporter. Ce que le député d'Argenteuil - je l'apprécie - m'a demandé est essentiellement, d'abord, d'examiner le coût avant de me prononcer sur le principe. Je dois louer sa sagesse. Non pas que les principes soient subordonnés au coût de leur application, je pense que ce n'est pas là ce qu'envisage le député d'Argenteuil. Loin de là. Au contraire. Il reste quand même qu'il est bon, parfois, de soupeser le coût de nos principes de manière à découvrir parfois un deuxième principe moins coûteux qui puisse sous-tendre notre décision.

Dans le cas présent, M. le Président, j'ai eu la chance d'être accompagné de gens fort consciencieux qui ont examiné le problème, tel que le soumettait le député d'Argenteuil, ce qui les a amenés à des coûts qui sont légèrement différents de ceux que le député d'Argenteuil soumettait. Mais, en dépit de leur divergence, ils demeurent convergents quant à l'ordre de grandeur général. Je pense qu'il faut féliciter le député d'Argenteuil d'avoir été capable d'évaluer un coût sans faire plus de 300% d'erreurs, alors que, généralement, nous sommes habitués à beaucoup plus que cela de l'Opposition.

Donc, pour en revenir au fond de la question...

M. Ryan: Attendez un peu!

M. Bérubé: ...essentiellement, nous avons, chez les autres personnels rémunérés à plus de 13 $ l'heure, des types d'employés qui relèvent des catégories de professionnels et d'enseignants. Pour les secteurs primaire et secondaire, nous trouvons, au chapitre des professionnels, des enseignants, environ 3000 individus travaillant à temps plein, et une deuxième catégorie, que j'avais malencontreusement prise pour "et caetera", et que j'aurais dû lire "équivalents" à temps complet", pour à peu près...

M. Ryan: Etc.

M. Bérubé: Oui, c'est cela.

M. Ryan: Etc.

M. Bérubé: ...pour, essentiellement, 1000 personnes, soit dans la fonction publique.

M. Ryan: Temps plein.

M. Bérubé: À l'Éducation, ceci me donne environ 21 000 personnes - j'additionne grosso modo - travaillant à temps complet, donc, employés à temps complet, et des équivalents à temps complet, c'est-à-dire des employés à temps partiel, je présume, environ 5000. Aux Affaires sociales, un total d'environ 3000, si j'examine ce que coûterait effectivement l'abolition du plafond de 13 $ l'heure pour l'élimination de cet adoucissement à la loi 70. (22 h 15)

J'obtiendrais chez les professionnels un coût d'à peu près 3 000 000 $, chez les enseignants un autre coût d'environ 3 200 000 $. Si j'intégrais l'ensemble des employés du secteur public, j'obtiendrais un coût total d'environ 8 100 000 $, ce qui, par rapport au calcul approximatif du député d'Argenteuil d'à peu près 2 500 000 $, est finalement du même ordre de grandeur puisqu'en science, lorsqu'on est à l'intérieur des chiffres par un facteur de dix, on estime généralement avoir fait un bon calcul. Effectivement, il s'agit d'un coût toujours approximatif puisque je suis absolument convaincu que si je devais faire vérifier avec plus de détails les prévisions qui sont ainsi faites, il est possible évidemment que l'on trouve moins comme on pourrait trouver plus.

Donc, n'importe quoi entre - je ne

voudrais pas être injurieux pour mes collègues employés du secteur public qui ont effectué ces calculs - entre 5 000 000 $ et 10 000 000 $, j'imagine, devrait être une bonne approximation.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Très bien. Alors, je ne continuerai pas le débat là-dessus parce que les renseignements qui sont apportés me satisfont. Je voudrais seulement souligner que, l'autre soir, on discutait uniquement le cas des enseignants à temps partiel et que, finalement, les calculs auxquels en arrive le ministre sont encore beaucoup plus proches de ceux que j'avais soumis alors.

M. Bérubé: Vous avez parfaitement raison.

M. Ryan: La différence entre les deux pourrait jouer dans un sens ou dans l'autre, selon les répercussions pratiques qu'aura cette mesure, parce que lorsqu'on parle de personnes qui sont des enseignants à temps partiel, il y en a qui peuvent gagner 1000 $ par année, d'autres qui peuvent gagner 8000 $ et d'autres qui peuvent gagner 15 000 $. On n'a pas de données sur lesquelles discuter ce soir. Par conséquent, lorsqu'on parle soit de 2 400 000 $ ou de 3 200 000 $, on est dans l'arbitraire de part et d'autre. Comme vous le dites, on a un ordre de grandeur qui nous permet de discuter raisonnablement. C'est cela que l'on recherchait. Je suis bien content que ces calculs aient été faits. L'autre soir, effectivement, je n'avais pas inclus des catégories qui, si on acceptait ces principes, devraient être considérées sur le même pied que les autres, ce qui augmente inévitablement les estimations que l'on doit faire.

M. Bérubé: M. le Président, est-ce que je pourrais témoigner ma plus profonde admiration pour le député d'Argenteuil qui, je me souviens, en commission parlementaire, avait effectué rapidement un calcul sans calculatrice? Je dois avouer que son talent pour le calcul mental semble nettement supérieur à mon attitude personnelle puisque je suis obligé aujourd'hui de toujours traîner cette espèce de petit appareil. Il demeure que c'est parfaitement exact ce que le député d'Argenteuil dit. Il avait calculé approximativement un chiffre d'à peu près 2 500 000 $ alors que, si je comprends bien les calculs beaucoup plus détaillés qui ont sans doute dû demander de nombreuses heures ou minutes d'ordinateurs très sophistiqués, ils nous ont permis de raffiner le calcul mental du député d'Argenteuil et ont fait en sorte qu'au lieu de 2 500 000 $, c'est 3 100 000 $ pour la catégorie des employés en question. Par conséquent, je dois dire que l'agilité intellectuelle et mentale du député d'Argenteuil est nettement supérieure à nos ordinateurs. Il faudrait peut-être qu'on change de compagnie.

Motions d'amendement

M. Ryan: C'est simplement la docilité devant le réel, pas autre chose. N'importe qui ayant fait trois années d'études peut se rendre à un calcul de 2 000 000 $ s'il met ses zéros à la bonne place.

Devant ces résultats qui parlent quand même, me semble-t-il, en faveur du point de vue que nous avons essayé de soumettre à l'attention du ministre jusqu'à maintenant, je voudrais vous soumettre une motion qui est peut-être téméraire. Je ne voudrais pas encourir vos foudres, M. le Président, mais je vais vous la lire en toute modestie: "Que cette commission émette le voeu que le ministre président du Conseil du trésor considère le dépôt d'un document sessionnel abrogeant l'alinéa 2 de la section V ajouté au document sessionnel 650 par le document sessionnel 85."

Ce n'est pas autre chose qu'un voeu.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil, vous avez vite appris vos leçons.

M. Ryan: J'étais préparé d'avance.

Le Président (M. Laplante): Votre motion est recevable parce qu'elle n'exprime pas un ordre, elle n'exprime pas un amendement, elle n'exprime qu'un voeu au gouvernement.

M. Ryan: Vous voyez, ce n'est pas une motion.

Le Président (M. Laplante): Elle est recevable, M. le député d'Argenteuil. Si vous voulez l'écrire, par exemple.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que je pourrais vous l'expliquer un petit peu?

Le Président (M. Laplante): Oui, allez-y, on va commencer à en discuter.

M. Ryan: Je crois que l'esprit de cette motion est bien simple, c'est que la commission invite le ministre président du Conseil du trésor à examiner la possibilité, à considérer le dépôt d'un document sessionnel etc. Il n'y a pas de décision qui est prise, par conséquent, c'est un voeu qui est émis par la commission.

Le Président (M. Laplante): M. le député, avez-vous l'écrit?

M. Ryan: Oui, je peux vous le passer. Pouvez-vous me permettre une minute de suspension, s'il vous plaît!

Le Président (M. Laplante): Une correction de français?

M. Ryan: Non, j'ai fait une modification en en donnant lecture.

Le Président (M. Laplante): D'accord.

M. Ryan: Je ne me souviens pas de ce qu'est la modification, il faudrait que j'entende ce qui a été dit.

M. Bérubé: Sur la motion d'ajournement, est-ce qu'il y a discussion?

Le Président (M. Laplante): Non, la séance est suspendue pour une minute.

(Suspension de la séance à 22 h 22)

(Reprise de la séance à 22 h 23)

M. Ryan: M. le Président, nous avons déjà discuté très longuement de cette question. Je ne veux pas reprendre tous les arguments de fond qui ont été invoqués l'autre soir. De part et d'autre, les arguments ont été exposés de manière honnête et conscienceuse. Je rappelle simplement que le principe que nous voulons proposer à l'attention de nos collègues de la commission est le suivant: Le gouvernement a fait des coupures de salaire, sur lesquelles nous ne revenons pas, pour les trois premiers mois de l'année 1983. Il a dit, à un moment donné: Pour les salariés touchant moins de 16 000 $ ou de 18 000 $ par année - c'est un autre point sur lequel il y avait un désaccord entre nous l'autre jour; je pense que les textes me donneraient raison facilement pour soutenir que c'était 18 000 $, d'après les textes que le gouvernement nous a donnés - le gouvernement a reconnu qu'il fallait tenir compte du fait que certains salariés à temps partiel ou surnuméraires à temps partiel touchent un montant horaire qui, s'ils travaillaient à temps plein, dépasserait 16 000 $ par année ou 18 000 $ par année. Il a dit, dans le cas de ces employés: Nous allons voir à ce qu'ils ne soient pas soumis aux coupures de salaire qui ont été instituées pour les trois premiers mois de 1983. Excepté que, dans le paragraphe 2 de la deuxième ou la troisième page du document sessionnel no 85, il introduit une restriction. Il dit: Cette exception vaudra seulement pour les employés à temps partiel qui ont un salaire horaire de 13 $ ou moins.

Nous voulons que cette disposition soit étendue à tous les salariés à temps partiel touchant une rémunération inférieure au plancher qui a été établi par le gouvernement lui-même, c'est-à-dire une moyenne de 4500 $ pour les trois premiers mois de l'année. Je pense que la moyenne est bien établie. On a dit 4500 $ pour les trois premiers mois de l'année. On voudrait que cela s'applique à tous. Étant donné les chiffres qu'a donnés le ministre tantôt, si on tient compte qu'une partie de ces montants sera payée en impôt sur le revenu, en fin de compte, la différence de coût qui en résulterait pour le gouvernement serait mineure par rapport à la très grande mesure de redressement dans le sens de la justice qui serait effectuée pour des catégories de travailleurs qui ont droit à toute notre considération.

J'ajoute seulement un dernier argument ici auquel nous devons attacher beaucoup d'importance. Je m'en tiens au secteur de l'éducation des adultes, que je voulais défendre d'une manière plus spéciale sans du tout minimiser l'importance des autres. Dans ce secteur, nous avons bâti un réseau de réserves, un réseau de ressources humaines qui représentent un éventail de qualifications professionnelles très étendu qu'on ne pourrait pas se procurer à des conditions financières semblables si on devait fonctionner seulement avec des enseignants à temps plein. C'est pour cela que j'émettais des réserves sérieuses sur l'application littérale des décrets dans le sens du "bumping" des enseignants à temps partiel. C'est bien facile de dire, en théorie: On va prendre des enseignants de jour qu'on doit mettre en disponibilité, on va les transférer dans l'enseignement des adultes le soir. Je disais qu'il faut faire bien attention avant d'appliquer littéralement ce principe parce que cela pourrait nous conduire à une diminution considérable de la qualité et des qualifications professionnelles dans le secteur de l'éducation des adultes.

Nous avons pris les quinze dernières années à bâtir un réseau qui est un des bons réseaux qu'on ait dans des sociétés qu'on puisse comparer au Québec et je pense qu'on doit le traiter comme la prunelle de nos yeux, avec beaucoup d'attention, avec beaucoup de considération. Une mesure comme celle-ci serait de nature à améliorer énormément - je pense pouvoir vous le dire en connaissance de cause parce que j'ai fait assez de contacts dans ce milieu au cours des derniers mois - le climat qui existe dans le secteur de l'éducation des adultes.

Je soumets à votre attention aussi que d'autres dispositions des décrets sont de nature à entraîner des saignées coûteuses, déplorables dans le personnel de l'éducation des adultes. Si, au moins sur ce plan-ci, on faisait un ajustement comme celui que nous invitons le ministre à faire et dont il peut seul prendre l'initiative d'ailleurs - nous le

reconnaissons volontiers - en vertu de notre règlement, je pense qu'on améliorerait cette partie de tous les régimes nouveaux des relations de travail qu'on a institués ces derniers mois, sans remettre en question les principes qui ont guidé le gouvernement là-dedans.

Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le ministre.

M. Bérubé: M. le Président, je pense que l'argumentation du député d'Argenteuil, dans la mesure où sa position méritait d'être explicitée davantage, compte tenu de l'abondance du débat auquel nous avons assisté lors de notre dernière session entourant cette question, était nécessaire. J'aurais tendance, M. le Président, à invoquer l'article 83 et tout simplement poser la question préalable mais sans m'engager dans un long débat. Je préférerais, plutôt que de m'engager dans un débat de procédure, en vertu de l'article 83, indiquer tout simplement que, de notre côté, nous sommes prêts à voter sur la motion du député d'Argenteuil.

M. le Président, il va de soi que, comme on le suggère autour de moi, je devrai quand même indiquer de quel côté j'irai. Je voterai contre. Certains pourraient suggérer que l'on vote pour la motion simplement pour se débarrasser de la question et dire: Puisqu'il s'agit simplement d'un voeu rien n'empêche le ministre de mettre le voeu à la filière ronde et de ne pas en tenir compte. Toutefois, M. le Président, je pense que les travaux de notre Assemblée sont suffisamment importants pour faire en sorte que l'on n'adopte pas en commission des voeux que le gouvernement ou le ministre responsable n'a pas l'intention de respecter. Cette question que soulève le député d'Argenteuil, je ne prétends pas qu'elle est superflue comme question, puisque je dois reconnaître que nous en avons longuement débattu au sein du gouvernement avant de prendre la décision que nous avons finalement prise. Je dois dire que même si cette question n'est pas superflue, n'est pas inutile, n'est pas absente de validité, il me semble qu'après notre longue réflexion notre idée est faite. (22 h 30)

Nous avons décidé qu'il y aurait un plafond au-dessus duquel nous ne chercherions pas à protéger les employés à temps partiel sur la base du raisonnement que j'ai expliqué à l'Assemblée nationale. Il me semblerait donc dangereux de voter pour une motion comme celle-là en donnant l'impression que notre réflexion n'est pas complète, simplement pour devoir reléguer la proposition du député d'Argenteuil aux oubliettes et accélérer les travaux de notre commission parlementaire. Je pense que ce serait faire injure au député d'Argenteuil que de lui dire que nous allons voter pour sa motion simplement pour mettre la question de côté. Je préférerais tout simplement dire que nous sommes prêts à voter, mais à voter contre, dans la mesure où cette réflexion a été faite. Elle a fait l'objet d'un long débat au sein du comité de coordination des négociations qui incorpore, comme vous le savez, autant des ministres que des députés du caucus ministériel. C'est après un examen assez soigneux des implications que nous avons choisi de finalement faire en sorte que si nous avions 8 000 000 $ à injecter, ce n'est pas là que nous le mettrions. C'est une question de priorité gouvernementale.

Je peux reconnaître que le député d'Argenteuil peut choisir de mettre l'argent là. Finalement, c'est cela. Lorsque vous avez un certain montant à allouer entre diverses dépenses, vous avez des choix à faire. Ces choix traduisent bien l'idéologie politique qui nous guide. Je pense que, en l'occurrence, tout l'argent que nous pouvions avoir, nous l'avons mis dans des programmes de soutien de l'emploi. Nous l'avons mis dans le maintien d'un programme à l'aide sociale qui nous coûte énormément cher en dépit de la croissance de clientèle. Nous l'avons mis dans des dépenses sociales au niveau des groupes de bénévoles, au niveau de la mise en marche d'un certain nombre d'hôpitaux, deux hôpitaux dans la région métropolitaine qui, comme vous le savez, étaient construits, mais ne disposaient pas des budgets voulus pour commencer leurs activités. Nous avons également injecté cette marge de manoeuvre dans des foyers pour personnes âgées dans la région métropolitaine de Montréal également qui avaient été construits et qui étaient non opérationnels, dans plusieurs cas, depuis près d'un an.

En fait, la marge de manoeuvre, M. le Président, dont nous croyions disposer, nous l'avons injectée dans un paquet de dossiers, de demandes sociales, de demandes économiques qui affluent en cette période de crise. C'est à la suite d'un choix conscient et délibéré que nous avons choisi essentiellement de ne pas favoriser plus avant les employés à temps partiel pouvant gagner plus de 13 $ l'heure et de prendre les sommes d'argent dont nous disposions et de les injecter ailleurs.

Je peux comprendre, à ce moment-là, que le député d'Argenteuil ne partage pas ces choix. Je pense qu'il lui appartient d'avoir des opinions quant à la façon de dépenser les sommes mises à la disposition de l'État. Mais il reste que, devant le type de choix que nous avions offert, nous avons pris des décisions. Ces décisions sont coulées dans le béton, M. le Président. Les sommes d'argent, que ce soit 8 000 000 $, 10 000 000 $, 15 000 000 $ ou 3 000 0000 $, n'ont rien à voir avec le

montant, elles sont en rapport avec des choix de priorités que le gouvernement a faits. Ces choix se sont en général portés -je dois le dire - du côté des plus démunis, des plus faiblement rémunérés de notre société, des malades, des assistés sociaux, des gens les plus mal pris dans notre société qui doivent traverser une période difficile de notre histoire québécoise. Ayant fait ce choix, je pense, M. le Président, qu'on ne doit pas y revenir.

Le Président (M. Laplante): Avant de donner la parole au député d'Argenteuil, comme M. le ministre a évoqué l'article 83, j'espère qu'il n'a pas oublié le paragraphe 2. M. le député d'Argenteuil.

M. Bérubé: Mais non, M. le Président, je dois invoquer une question de privilège. Vous venez de m'imputer...

Le Président (M. Laplante): II n'y a pas de question de privilège.

M. Bérubé: Non, vous venez de m'imputer un motif en ce sens que je n'aurais pas examiné le paragraphe 3...

Le Président (M. Laplante): Le paragraphe 2.

M. Bérubé: ...le paragraphe 2 excusez-moi, M. le Président - qui, tel qu'il est rédigé, est fort explicite et donne au président le pouvoir de refuser cette question préalable à laquelle je faisais référence, M. le Président. Si je n'ai pas fait appel au paragraphe 2 de l'article 83, ce n'est pas par manque de respect pour la présidence, mais c'est simplement pour éviter un débat de procédure et pour rester au niveau des idées, des concepts.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voudrais poser une question au ministre président du Conseil du trésor. Est-ce qu'il peut nous dire combien va coûter la modification proposée ici pour les salariés à temps partiel touchant moins de 13 $ l'heure? Est-ce qu'il a des chiffres là-dessus?

M. Bérubé: Oui. De mémoire, c'est 17 000 000 $, mais je pourrais le faire vérifier. On corrige ma mémoire, 18 000 000 $. Je suis presque aussi précis que le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Ça, c'est pour les 13 $ et moins. Vous dites 18 000 000 $. Une autre question: est-ce que le ministre a eu l'occasion de discuter de ces choses avec le ministre de l'Éducation, chiffres en main, ou si cela s'est réglé seulement au niveau des principes? Est-ce qu'on a fait le calcul, dans les discussions que le ministre de l'Éducation a eues avec le président du Conseil du trésor, des implications financières plus précises, plus concrètes que la suggestion qui était faite.

M. Bérubé: Non, M. le Président. Je ne voudrais pas induire cette Chambre en erreur. Vous savez à quel point, même par omission ou autre péché de cette nature, nous pourrions, comme le dit l'Opposition, tenter d'induire cette Chambre en erreur. Je ne voudrais pas être victime d'une telle accusation. Je vous dirai que, lorsque nous avons discuté, en présence du ministre de l'Éducation, au comité de coordination, des négociations, nous avons effectivement examiné le problème des emplois à temps partiel et le niveau de protection que nous devions leur accorder. L'orientation générale il arrive fréquemment d'ailleurs qu'au niveau ministériel on n'examine pas le détail des décisions mais qu'on se prononce sur des objectifs généraux, des orientations générales - prise par le comité de coordination était que si nous acceptions le principe de la protection des employés à bas revenu et plus particulièrement les employés à temps partiel, ce principe ne devait pas s'appliquer à des employés gagnant une rémunération qui, calculée sur une base horaire, représenterait une rémunération qu'on pourrait classer parmi les hautes rémunérations offertes par l'État.

Par conséquent, nous nous sommes simplement prononcés sur le principe général qu'il y avait un plafond pour lequel nous pouvions accepter une protection du revenu lorsque la loi 70 s'appliquerait, sans avoir défini ce plafond, cependant, et laissant au président du Conseil du trésor et aux nombreuses personnes qui l'entourent un minimum de latitude pour lui permettre de recommander aux membres du Conseil du trésor un plafond raisonnable. Or, comme vous le savez, un plafond de 13 $ l'heure représente, pour la semaine classique gouvernementale de 37 heures, environ 25 000 $. C'est le plafond qu'il m'est apparu approprié de recommander et qui a été accepté.

M. Ryan: M. le Président, dans les arguments que le ministre nous a soumis jusqu'à maintenant, il y en a un sur lequel je n'ai pas eu l'occasion de revenir. Je voudrais y revenir pour que le dossier soit bien complet et comprenne tout ce qui a été dit là-dessus. Il a indiqué à plusieurs reprises que, selon lui, une personne qui commande une rémunération de 25 $ l'heure dans le secteur de l'enseignement est réputée avoir une mobilité plus grande que celle qui gagne 13 $ dans un autre secteur ou même dans le

secteur de l'éducation. Il y en a un certain nombre, même dans le secteur de l'éducation, qui sont des employés à temps partiel gagnant moins de 13 $ l'heure. Je serais prêt à concéder au ministre qu'il y a du vrai dans cette position-là. Je ne veux pas faire de discussion dogmatique, cela ne donne rien. Il y a du vrai. Je pense que le ministre concédera que, dans la période de chômage où nous sommes, il y a également du faux.

M. Bérubé: Ah! On ne peut rien cacher au député d'Argenteuil.

M. Ryan: La question que je me pose est la suivante...

M. Bérubé: Y-a-t-il plus de vrai que de faux, M. le Président?

M. Ryan: C'est cela le problème. M. Bérubé: Voilà la question.

M. Ryan: La question qui se pose à mon esprit est la suivante et je regarde cela du point de vue de l'individu. Vous en avez un qui a la chance de travailler 1000 heures dans l'année à 13 $ l'heure. Si on veut prendre la période qui est évoquée, disons qu'il a travaillé 250 heures pendant les trois premiers mois de 1983 à 13 $ l'heure. Cela lui fait 3250 $.

M. Bérubé: Je n'oserais contester les chiffres du député d'Argenteuil, M. le Président, compte tenu de l'expérience passée.

M. Ryan: Merci.

M. Bérubé: Vous feriez un excellent président du Conseil du trésor...

M. Ryan: M. le Président, on continue.

M. Bérubé: ...inhumain, glacial et chiffré.

M. Ryan: On n'a pas fini les calculs. Prenez-en un autre qui va enseigner 125 heures à 25 $. Cela va faire à peu près le même montant.

M. Blais:: Non, à peu près 250 $ de moins.

M. Bérubé: M. le Président... M. Ryan: 3175 $ à peu près.

M. Bérubé: ...je n'ai pas de panne de calculatrice mais je n'essaierai pas de suivre.

M. Ryan: Je pense qu'on s'est déjà entendu tantôt; quand on reste dans un ordre de grandeur raisonnable, on ne se chicane pas sur les virgules. Je continue mon exemple. Vous avez une personne qui a eu la chance de travailler 250 heures pendant trois mois à 13 $, cela lui fait 3250 $. Il y en a une autre qui aurait bien voulu travailler 250 heures, mais la commission scolaire lui a dit: On a seulement 125 à vous donner. Le genre de cours qu'elle peut donner, il n'y a pas d'autres personnes qui en veulent. Elle essaie sur le marché et n'en trouve pas d'autre. À la fin elle reçoit 3125 $. C'est le calcul exact.

M. Bérubé: Pour combien de périodes? M. Ryan: Toujours pour trois mois. M. Bérubé: Trois mois.

M. Ryan: C'est la période de trois mois. C'est évident qu'elle a moins d'heures. Elle a deux fois moins d'heures que l'autre et est rémunérée deux fois plus.

M. Bérubé: Cette personne gagnerait 12 000 $ durant son année.

M. Ryan: Oui. Je vous dis qu'elle essaie honnêtement, mais le marché du travail est tel qu'elle ne peut pas trouver autre chose. C'est une personne qui a des compétences souvent exceptionnelles.

M. Bérubé: Combien a-t-elle de personnes à charge, M. le Président?

M. Ryan: II y en a de toutes les sortes. Vous ne les avez pas plus pour l'autre côté. Il y a bien des renseignements qu'on pourrait aller chercher. La question que je veux poser au ministre est la suivante: Du point de vue d'acheter une livre de beurre, de changer d'habit, qu'elle est la différence?

M. Bérubé: M. le Président....

M. Ryan: Je veux juste terminer ma question. Pourquoi, dans un cas, le gouvernement dirait-il qu'on ne lui enlève rien tandis que, dans l'autre cas, il lui enlève à peu près 600 $? Donc, c'est 20%, la réduction, en comptant tous les petits "fringes" qui vont avec cela. On vous avait prouvé que cela faisait 21%, vous vous rappelez, en juin dernier. Admettons que c'est 20%, cela fait 650 $. Pourquoi allez-vous enlever 650 $ à l'une et rien à l'autre? C'est cela que j'essaie de comprendre.

M. Bérubé: M. le Président, je ne ferai pas de démagogie. J'ai à l'esprit une assemblée publique où je rencontrais des gens de condition modeste. Lors de discussions portant sur les conditions de travail dans le

secteur public et autres, un travailleur, par suite de la situation économique qui prévalait, avait vu son revenu diminuer. Il est père d'une famille de trois enfants. Son revenu de 18 000 $ a diminué à 9000 $ par année et il devait évidemment toujours payer son hypothèque, nourrir sa famille. Dans le contexte, il avait de la difficulté à comprendre la véritable nature du débat.

Donc, ce travailleur qui avait vu son salaire passer de 18 000 $ à 9000 $, avec une famille à nourrir, si je lui posais la question... Le député d'Argenteuil a de la difficulté à comprendre comment un enseignant gagnant 12 000 $ par année -puisqu'il m'a donné son chiffre pour trois mois - travaillant le tiers du temps normal pour un enseignant - je prends toujours l'exemple du député d'Argenteuil - peut supporter un fardeau aussi épouvantable que de devoir élever une famille avec 12 000 $ par année? (22 h 45)

II va travailler une heure sur trois, par rapport à ce qu'il devrait normalement travailler, alors que lui, employé du secteur privé, se retrouverait avec 9000 $ pour élever sa famille. Essentiellement, la question du député d'Argenteuil est la suivante: Pourquoi n'accorde-t-on pas une protection ou des conditions de travail plus généreuses à un employé gagnant - je ne sais pas - le tiers, le quart du salaire normal, qui devrait être autour de 30 000 $? Pourquoi ne lui accorde-t-on pas une protection?

Que voulez-vous que je vous dise, M. le Président? J'admets qu'il gagne 12 000 $. À 12 000 $, ce n'est pas un gros salaire. Mais, il ne travaille pas 40 heures par semaine. Il travaille au tiers d'une charge normale. Au lieu de 40 heures, s'il travaille 15 heures par semaine, cette personne hypothétique a du temps de libre à côté. C'est une personne qui bénéficie d'un diplôme universitaire, M. le Président. Comme le disait le député d'Argenteuil, elle a un certain nombre d'atouts pour faire face à la vie, que n'a pas ce père de famille auquel je me référais tantôt qui, lui, est "pogné" avec 9000 $ par année et une famille à faire vivre. Je n'y peux rien, si l'usine où il travaille - l'usine de fabrication de béton, si vous voulez plus de précision, M. le Président, vous ne l'avez pas demandé mais je suis convaincu que cela vous intéresse - ne peut pas lui donner plus de travail que cela et parce que c'est le seul travail qu'elle peut lui donner. La réalité est qu'il est pris avec 9000 $ par année pour faire vivre une famille.

Vous m'avez posé une question à savoir pourquoi on ne donne pas 12 000 $ à un enseignant qui travaillerait - je ne sais pas -10 heures sur 35? C'est une question que l'on peut poser. Je n'ai aucune objection. Mais ce que j'ai été obligé de dire au député d'Argenteuil, et ce n'est pas de la démagogie, c'est que, si j'avais 8 000 000 $, ce n'est pas là que je les mettrais. C'est tout. Je n'y peux rien. Ce n'est pas là que je les mettrais. C'est un choix politique. Je ne les mettrais pas là. J'ai des demandes auxquelles je dis, non, M. le Président, pas parce que je ne veux pas, pas parce que je suis sans-coeur. Quand il y a des jeunes qui viennent me voir et me disent qu'ils ont 144 $ par mois et que cela n'a aucun maudit bon sens, je suis bien obligé de reconnaître que cela n'a pas de bon sens. Moi, le premier, je suis obligé de le reconnaître. Comment voulez-vous qu'un jeune vive avec 144 $, s'il n'est pas capable de se trouver un emploi?

Si j'ai 8 000 000 $, M. le Président, je vais le donner à ce jeune qui est "pogné" avec 144 $ par mois. Lui, cela lui fait 3000 $ par année. C'est tout ce qu'il a. À lui, je vais donner les 8 000 000 $, si je les ai. Je ne les donnerai pas à quelqu'un qui fait 12 000 $ par année, à travailler dix heures par semaine. Ce n'est que cela. Il n'y a pas d'autre raisonnement que cela, M. le Président. Il n'y en a pas d'autre. Entre les deux, mon coeur saigne davantage pour ceux qui sont plus mal pris que pour ceux qui sont moins mal pris. C'est tout. Il n'y a pas d'autre choix. C'est un choix politique profond, auquel je crois. Dans une société mal prise, on commence à penser à ceux qui sont plus mal pris que les autres. C'est tout.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil, êtes-vous prêt à voter sur la motion?

M. Ryan: Avant que l'on vote, j'ai une couple d'observations. Tout d'abord, je voudrais rappeler au ministre que, dans le cas des personnes qui enseignent à temps partiel aux adultes, selon des chiffres que j'ai déjà soumis à l'attention de la commission, il y en 70% qui n'ont pas d'autre source de revenus professionnels que celle-là. Par conséquent, au bout de la ligne, les chiffres sont les mêmes. Que vous ayez un diplôme de l'Université McGill ou même du MIT, si vous avez 12 000 $ par année, cela vous coûte aussi cher de faire vivre votre famille que si c'est le cas d'une personne qui a un autre genre de formation.

J'étais justement dans une université de la région montréalaise, ce matin, pour une cérémonie de collation des grades...

M. Bérubé: Ils se débrouillent un peu plus. C'est tout.

M. Ryan: C'était beau de les voir défiler. Il en a défilé 2000 devant nous, pendant toute la matinée. À un moment donné, il passait des élèves d'une faculté particulière et des parents étaient là. Savez-vous ce qu'ils m'ont dit? Ils ont dit qu'il y

en a 60 qui reçoivent leur diplôme cette année et que seulement deux ont des jobs. Le coeur du ministre saignera peut-être moins pour ceux-là, mais ils vont souffrir autant sur le marché du travail. Ils auront autant de misère. Ce que je n'aime pas là-dedans, c'est curieux, c'est que le ministre contredit ce qu'il nous disait au début de la réunion. Quand il nous fait des considérations sur de grands principes, il dit toujours qu'il fait passer les chiffres avant les principes. C'est mauvais, dans bien des cas. Je suis prêt à le suivre un bon bout de chemin. C'est ce que j'ai essayé de faire. Je veux l'amener sur ce terrain qu'il affectionne. On discute une affaire de trois mois. On ne discute pas l'échelle des salaires. Je ne demande pas cela, pas du tout. On discute juste la période de trois mois. Voyez-vous, je vais être obligé de formuler une autre proposition peut-être, M. le Président. La manière dont elle est formulée est bien simple. On parle d'un coût estimatif de 8 000 000 $. Cela pourrait être un coût estimatif de 4 000 000 $, mais ce que je n'aime pas dans l'attitude du ministre, ce que je déplore même, c'est que c'est zéro ou tout.

Moi, je vous dis que vous n'avez pas le droit de traiter sur le même pied que les salariés à temps complet ces personnes qui sont dans une situation très spéciale et sur lesquelles j'attire votre attention. Là, vous nous servez le raisonnement: C'est tout ou rien. Je les traite comme des personnes comme les autres, comme des salariés à temps complet. Ces 8 000 000 $, je vais mettre cela ailleurs, parlez-moi pas de cela plutôt. Je trouve que vous êtes trop catégorique. Cela avait été bien commencé ce soir. Je vais vous le répéter, je vais même être obligé d'amender un peu la proposition pour qu'on vote exactement comme cela. Je veux savoir exactement quel est le fond de votre philosophie sur cette question. Si 8 000 000 $, c'est trop, il y a une différence de 1 000 000 $, 2 000 000 $, 4 000 000 $, 5 000 000 $. Si j'avais au moins l'indication d'un minimum de souplesse, je n'insisterais pas du tout, je passerais à autre chose volontiers.

M. Bérubé: M. le Président...

M. Ryan: Si je me heurte à un mur, je suis obligé d'insister...

M. Bérubé: M. le Président...

M. Ryan: ...parce que je trouve que ce n'est pas la manière de traiter ces questions.

M. Bérubé: Pour répondre rapidement, parce que je pense que ce n'est pas la peine que le député d'Argenteuil pousse plus loin sa réflexion, si j'avais...

M. Ryan: Vous me permettez, M. le Président.

M. Bérubé: ...à décider la création de dix maisons...

M. Ryan: M. le Président, est-ce que vous permettez que je sois interrompu quand je parle comme cela?

M. Bérubé: ...d'hébergement pour des femmes battues pour 500 000 $...

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, M. le député d'Argenteuil n'a pas fini son intervention. M. le député d'Argenteuil.

M. Bérubé: Je voulais économiser du temps pour le député d'Argenteuil.

Le Président (M. Laplante): Après.

M. Ryan: Non, je crois bien que c'est mieux qu'on termine chacun de notre côté. Je ne vous interromprai pas.

M. Bérubé: Parfait.

M. Ryan: Ce que je veux savoir exactement, c'est si le ministre pousse l'obstination jusqu'à dire c'est "all or nothing", tout ou rien. À ce moment, on saura à quoi s'en tenir, si on est obligé de s'en aller avec cela. C'est tout ou rien. Il nous a dit que c'était rien. On aura la réponse tantôt. On n'est pas pressé. On a d'autres considérations à vous soumettre en attendant.

M. Bérubé: Je pensais accélérer nos travaux en disant que c'était rien tout de suite.

M. Ryan: Pas de cette manière. M. Bérubé: Bon, hélasl

M. Ryan: Je voudrais aussi déplorer que cette question qui affecte la qualité de l'éducation des adultes, à laquelle je tiens comme à la prunelle de mes yeux, n'ait pas fait l'objet d'un examen approfondi par le président du Conseil du trésor et le ministre de l'Éducation. Je voudrais dire au président du Conseil du trésor que, quand on aura voté sur celle-ci, je vais être obligé de vous en présenter une autre.

Le Président (M. Laplante): Avant d'en annoncer une autre, il va falloir disposer de celle-là.

M. Ryan: J'ai terminé les arguments que j'avais fait valoir sur celle-ci.

Le Président (M. Laplante): D'accord. La motion du député d'Argenteuil - M. le ministre - est-elle adoptée?

M. Bérubé: Non, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Sur division. Rejeté sur division.

M. Ryan: Est-ce que vous pouvez prendre le vote de chacun?

Le Président (M. Laplante): Oui. M. Ryan: S'il vous plaît!

Le Président (M. Laplante): M. Blais: (Terrebonne).

M. Blais:: Je vote contre, parce que c'est un voeu.

M. Ryan: On ne donne pas la raison.

Le Président (M. Laplante): M. Marquis (Matapédia). M. Hains (Saint-Henri).

M. Hains: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Ryan (D'Argenteuil).

M. Ryan: Pour.

Le Président (M. Laplante): M. Gagnon (Champlain). M. Gauthier (Roberval). M. Beaumier (Nicolet).

M. Beaumier: Contre.

Le Président (M. Laplante): M.

Lachance (Bellechasse). M. Johnson

(Vaudreuil-Soulanges). M. Bérubé (Matane).

M. Bérubé: Contre.

Le Président (M. Laplante): Trois contre, deux pour. Motion rejetée. J'appelle maintenant l'article 11.

M. Ryan: Je voudrais vous présenter une autre motion, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Voulez-vous la lire, s'il vous plaît?

M. Ryan: Oui. "Que cette commission émette le voeu que le ministre président du Conseil du trésor réexamine avec le ministre de l'Éducation les implications pour l'éducation des adultes du document sessionnel no 85, en particulier dans sa section V".

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Oui.

Le Président (M. Laplante): Je serai obligé à ce moment de me servir de l'article 63 du règlement. Votre première motion, je la motive aussi suivant l'article 66, je crois, dans le sens que vous avez présenté tout à l'heure une motion qui est un voeu, qui avait une portée générale sur la section V du document sessionnel 655 et sur le document sessionnel 85. C'est un voeu qui était en gros que le ministre reconsidère ce que vous aviez explicité d'une façon raisonnable tout au long de votre argumentation pour essayer de la convaincre d'augmenter les sommes en jeu afin de payer ces gens d'une manière plus raisonnable.

Votre deuxième motion revient à la même chose en changeant seulement un mot pour demander une consultation avec le ministre de l'Éducation. C'est ce qu'on appelle une redondance en formulation de motion. C'est pour cette raison qu'elle n'est pas jugée recevable, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Est-ce qu'avant que vous ne rendiez une décision définitive je pourrais soumettre une considération à votre bon jugement?

Le Président (M. Laplante): Je vais vous laisser votre considération, M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: L'article 63, dans son alinéa 1, indique: "Une motion ne doit pas soulever une question identique au fond à une question dont l'Assemblée a décidé pendant la session en cours, à moins qu'elle n'indique des faits nouveaux."

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Ryan: Alors, ici, après que j'eus présenté ma motion précédente, il y a un fait nouveau qui a été porté à mon attention, que je vous dis en toute sincérité n'avoir pas connu avant ce moment: c'est le fait qui a été reconnu par le ministre, dans sa franchise que j'apprécie, à savoir qu'il n'a pas eu...

M. Bérubé: Malhonnête comme cela, est-ce possible? Non pas la franchise, mais l'appréciation, M. le Président.

M. Ryan: ...avant de déposer ce document sessionnel et ce projet de loi, avec son collègue le ministre de l'Éducation, les consultations approfondies qu'il aurait dû avoir sur ce sujet. C'est pour cela que je vous présente cette motion.

Le Président (M. Laplante): Si M. le député d'Argenteuil avait bien compris

l'argumentation que j'ai soutenue, tout à l'heure, j'ai fait mention justement de cette chose nouvelle qui est arrivée, que vous voulez adapter, que vous auriez aimé adapter à votre nouvelle motion, à un voeu nouveau. Cela est, au fond - tel que le dit l'article 63, c'est le fond qui compte - identique à votre motion première. Le ministre a répondu d'une volonté ferme de par sa réplique et de par le vote aussi qui s'est pris à cette assemblée, ce qui fait qu'elle est non recevable aujourd'hui, M. le député d'Argenteuil.

J'appelle maintenant l'article 11.

Est-ce que l'article 11 sera adopté?

M. Bérubé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Adopté, sur division, M. le député d'Argenteuil?

J'appelle maintenant l'article 12. On m'a annoncé un amendement à cet article. Avez-vous copie de l'amendement?

M. Ryan: Pas tout de suite. On va vous l'annoncer plus tard. ...vous parlez du gouvernement?

Le Président (M. Laplante): C'est que le gouvernement a donné...

M. Bérubé: M. le Président, j'aimerais apporter un amendement.

Le Président (M. Laplante): À l'article 12? (23 heures)

M. Bérubé: Oui. Ainsi que nous avons eu l'occasion d'en discuter, j'aimerais modifier l'article 12 en ajoutant à la fin ce qui suit: "...et au document sessionnel no 142 déposé le 25 mai 1983 devant l'Assemblée nationale". C'est pour donner suite à la discussion que nous avons eue au début de cette commission parlementaire lorsque nous avons abordé la question de l'Institut Pinel et plus particulièrement des clauses salariales pertinentes aux conventions collectives de ces employés qui devaient être reconduites non pas sur la base de celles qui prévalent pour l'ensemble des employés du secteur public, mais plutôt sur celles qui prévalent pour les agents de la paix qui, comme on le sait, sont actuellement en négociation et même, dans certains cas, en arbitrage.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil. Est-ce que l'amendement est adopté, pour commencer? L'amendement du ministre est adopté, sans adopter l'article 12. Est-ce qu'on adopte l'amendement du ministre?

M. Ryan: Je crois que le ministre a... Le Président (M. Laplante): Oui, mais il faut l'adopter quand même, parce que c'est une correction à l'article 12.

M. Ryan: Est-ce qu'on est obligé de voter tout de suite? Ne serait-on pas mieux de discuter de l'article un petit peu, au lieu de commencer tout de suite par un amendement?

Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous voulez discuter de son amendement au...

M. Ryan: Non, mais je voulais discuter de l'article 12.

Le Président (M. Laplante): Ah! On pourra le discuter après en entier. Cela n'adopte pas l'article 12. Cela adopte seulement l'amendement. C'est clair, il n'y a pas de tour là-dedans. Amendement apporté par le ministre à l'article 12, adopté?

M. Ryan: Sur division. Sur toute la ligne, parce que...

Le Président (M. Laplante): Sur division. D'accord. Maintenant j'appelle l'article 12, tel qu'amendé par le ministre. M. le député d'Argenteuil.

M. Bérubé: Pour l'article 12, en dépit de l'état de division profonde dans lequel se trouve l'Opposition, je pense que l'article 12 répond aux questions que l'on peut se poser -je pense que je n'ai pas fait de secret - du fait que dans les documents sessionnels qui avaient été déposés, il y avait certaines erreurs techniques. D'ailleurs, elles étaient peu nombreuses, sans doute moins nombreuses que ce que l'on trouve généralement dans les conventions collectives dûment signées et paraphées par les parties. Mais c'est au réseau des affaires sociales que les problèmes les plus importants se sont rencontrés.

Il y a, comme on le sait, dans ce réseau, un très grand nombre de syndicats et le problème en est souvent un de vocabulaire, de termes utilisés, de références à des articles qui faisaient qu'on ne trouvait pas toujours la cohérence; la rédaction n'était pas toujours claire. Après discussion, souvent, avec la partie syndicale, on a dû reconnaître que les rédactions n'étaient pas particulièrement claires et, comme dans certains cas, il n'y a pas d'entente signée avec les parties syndicales, dans ces cas, lorsque c'est absolument clair, nous apportons les corrections à ces erreurs techniques ou coquilles.

Je dois dire également qu'il y a dans le document 86 des éléments qui apparaissent un peu superflus aujourd'hui mais qui ne le sont pas autant qu'on pourrait le penser à prime abord. C'est-à-dire que nous avons des modifications importantes, M. le Président,

aux conditions de travail des employés du collégial qui reposent essentiellement sur les propositions gouvernementales exprimées le 10 février 1983. Soulignons qu'il y a eu - là-dessus j'ai le plaisir d'en informer cette commission - deux ententes, le 31 mai et le 1er juin, il y a donc une semaine, au niveau collégial avec la FEEQ et la FNEEQ, ententes qui ont fait en sorte que, désormais, nous avons, avec ces deux parties syndicales, des conditions de travail qui sont ratifiées par les deux parties et qui font que le document sessionnel 86 s'appliquant au collégial...

M. Ryan: Question de règlement. Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Ryan: Est-ce que vous pourriez demander au ministre de répéter le nom des deux organismes avec lesquels des ententes seraient intervenues?

M. Bérubé: FEQ, F-E-Q. Fédération... Excusez.

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait le nommer au long?

M. Bérubé: F-E-C.

M. Ryan: Est-ce qu'on pourrait les nommer au long, avec l'indication de l'affiliation de chacune pour qu'on sache ce que cela représente?

M. Bérubé: FEEC, la Fédération des enseignants et enseignantes des cégeps, qui relève de la CEQ; et la FNEEQ, la Fédération nationale des enseignants et des enseignantes du Québec, qui relève de la CSN. Donc nous avons eu avec ces deux parties...

M. Ryan: Est-ce que vous pourriez donner les dates auxquelles une entente est intervenue avec chacun de ces deux groupes?

M. Bérubé: Oui. Le 1er juin avec la FNEEQ, et le 2 juin, je dois conclure que c'est avec la FEEC.

Donc nous avons conclu des ententes qui, normalement, devraient rendre caducs les éléments du document sessionnel no 86 portant sur les propositions du 10 février.

Toutefois, M. le Président, ceci ne peut être le cas dans la mesure où ces ententes ont, à plusieurs reprises, fait référence comme telles aux propositions du 10 février, c'est-à-dire que, dans la mesure où les parties connaissaient la nature du document sessionnel no 86, elles ont trouvé plus expéditif de se référer à ce document sessionnel no 86, donc aux conditions du travail qui y étaient inscrites, en les modifiant, le cas échéant, en fonction de la volonté des deux parties.

De ce fait, il est absolument essentiel que nous puissions déposer au bureau du commissaire du travail ce document sessionnel no 86 qui établit la base des conditions du travail, lesquelles conventions collectives - puisque la loi fait de ce document des conventions collectives - sont subséquemment amendées par entente entre les parties, tel que le prévoit la présente loi. Ce qui fait, à ce moment-là, que le document sessionnel no 86 n'est peut-être pas absolument essentiel quant à son contenu, puisque nous n'avons pas, à l'Assemblée nationale, à dicter des conditions du travail sur lesquelles les parties sont d'accord de toute façon. Dans la mesure où l'accord entre les parties fait référence au document sessionnel que nous allons adopter à l'Assemblée nationale, il est donc non seulement préférable, mais absolument nécessaire de déposer le document sessionnel no 86 et de légiférer sur son existence, de telle sorte que les conditions du travail de nos employés enseignant dans les cégeps soient des conditions du travail dûment établies en début de convention.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, j'apprends avec plaisir les ententes qui sont survenues.

II y en a une dont on avait déjà été informé publiquement, celle qui était intervenue avec la Fédération nationale des enseignants et enseignantes affiliés à la CSN. Mais je n'étais pas informé de l'entente qui est survenue avec la Fédération des enseignants et des enseignantes affiliés à la CEQ. Cela pose un problème de méthode pour nous. Nous n'avons pas le texte de ces ententes.

M. Bérubé: Je dois dire, M. le Président, que non seulement il y a entente, mais que, en même temps qu'il y avait entente le 1er juin 1983 - si je ne m'abuse -le gouvernement levait l'application de la loi 111 dans le secteur collégial. De fait, aujourd'hui, la loi 111 ne s'applique à personne.

M. Ryan: Elle sera abrogée incessamment, j'espère?

M. Bérubé: Bof! Le gouvernement n'a pas pris de décision à savoir s'il devait présenter un projet de loi pour abroger la loi 111, mais, une chose est sûre, c'est qu'elle ne s'applique pas.

M. Ryan: Je rappelle au ministre que l'Assemblée nationale a adopté une résolution invitant le gouvernement à voir à l'abrogation de la loi 111 dans les meilleurs

délais. La seule raison qui semblait devoir justifier le maintien de la loi était l'absence d'une entente dans les secteurs dont vous venez de parler. Je voudrais rappeler avec beaucoup d'insistance au ministre que cela a fait l'objet d'une résolution unanime de l'Assemble nationale.

M. Bérubé: M. le Président... M. Ryan: Maintenant...

M. Bérubé: ...je dois dire que nous avions prévu ce cas...

M. Ryan: M. le Président, je n'avais pas fini d'exposer ce que j'étais en train de dire, je ne veux pas...

M. Bérubé: Je m'excuse, M. le Président, j'ai cru deviner...

Le Président (M. Laplante): Je pense que vous vous coupez tous les deux.

M. Ryan: Très bien, je vais accepter cette fois-ci, parce que...

M. Bérubé: M. le Président, c'est sur la question de règlement.

Le Président (M. Laplante): II n'y a pas de question de règlement.

M. Bérubé: J'ai cru comprendre que le député d'Argenteuil avait invoqué le règlement en prétendant qu'il avait été interrompu, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): Avez-vous un complément de réponse?

M. Ryan: J'ai signalé au président...

Le Président (M. Laplante): Si c'est un complément de réponse, faites-le pour que le député d'Argenteuil puisse continuer son intervention.

M. Bérubé: Merci, M. le Président. La loi 111 prévoit que, sur conclusion d'une entente jugée satisfaisante par le gouvernement entre la partie syndicale et la partie gouvernementale, le gouvernement peut essentiellement suspendre l'application de la loi 111 et faire en sorte qu'elle ne s'applique plus. Or, de fait, M. le Président, la loi 111 ne s'applique plus en ce sens que le gouvernement ne peut pas, demain, décider de réintroduire l'application de la loi 111. Une fois qu'elle est suspendue, elle est suspendue. Par conséquent, M. le Président, tel que le dit l'article 23 de la loi 111, la présente loi cesse de s'appliquer.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, d'abord, le fait de la loi 111 est un peu extrinsèque à ce qu'on discute aujourd'hui. Je rappelle au ministre que l'argument qu'il vient de soumettre avait été présenté par des porte-parole du gouvernement lors du débat qui a précédé l'adoption de la motion à l'Assemblée nationale. Une réponse fut apportée à l'époque à cet argument. Finalement, la motion fut adoptée, sauf un amendement mineur apporté par le gouvernement, dans son intégralité. Elle demandait beaucoup plus qu'un décret gouvernemental. Elle disait même, du moins du côté de ceux qui l'avaient proposée, qu'il y avait une méfiance profonde à l'endroit de tout ce qui s'appelle décret dans ces choses et qu'on voulait effacer toute trace de décret, même bienveillant. Les décrets, quand ils sont bienveillants, n'en sont pas moins odieux dans bien des cas. Alors, c'est une abrogation de la loi, mais ce n'est pas l'objet du débat de ce soir et je ne cherche pas à gagner du temps, remarquez bien.

Je voudrais en venir à l'autre question qui est plus directement reliée à notre débat. Nous n'avons pas le texte de ces ententes qui ont été signées avec les deux organismes syndicaux. Il s'agit évidemment de textes qui sont différents du document sessionnel no 86, qu'on nous a soumis comme document sessionnel annexé à la loi. Pour juger du bien-fondé de ce qu'a dit le ministre tantôt, j'ai compris l'argument du ministre qui nous dit: II faut que cela reste là parce que, dans les ententes, il y a des allusions au document 86. On ne le sait pas, on a eu une affirmation, on n'a pas de preuve, on n'a pas de document, rien. Je crois que, si vous voulez que l'on fasse un travail sérieux, il faudrait au moins que vous nous communiquiez le texte de ces ententes pour qu'on puisse l'examiner pendant une journée et revenir là-dessus pour dire: II n'y a pas de problème, on comprend très bien le joint.

Je ne veux pas faire de difficulté, mais je vous demande de vous mettre à notre place. On ne peut vraiment pas intervenir sur une affaire comme celle-là. Même si on nous apporte les textes ce soir, je pense que vous allez comprendre qu'on ne peut pas examiner tout ce qu'il y a dans 86 ici avec les textes des ententes à côté et voir ce que cela veut dire et tout. On ne pourra pas vous être utiles, honnêtement parlant... Pardon?

Une voix: On pourrait vous l'expliquer.

M. Ryan: Je suis prêt à entendre toutes les explications qu'on veut nous donner. Je n'ai pas d'objection du tout, mais ce que je vous dis, c'est qu'on a déjà, à l'Assemblée

nationale, adopté des choses globalement, à la vapeur, et on a vu que cela conduit parfois à des impasses très sérieuses et qui obligent à recommencer le travail.

Comme législateur consciencieux, je vous dis que je serais justifié de demander qu'on nous fournisse ce service qui, il me semble, fait partie de la bonne information que le gouvernement doit mettre à la disposition des parlementaires.

M. Bérubé: M. le Président, il n'y a pas de problème, nous aurons les textes de ces ententes. Il nous fera plaisir de les déposer à la commission parlementaire. Enfin, on ne peut pas déposer tous les textes en commission parlementaire. Néanmoins, il nous fera plaisir, non pas de distribuer ou de déposer, mais de confier sous le sceau, non pas de la plus grande confidentialité, mais de la plus grande amitié le texte des ententes entre les parties syndicale et patronale concernant les collèges.

M. Ryan: Cela ne répond pas à la difficulté que j'ai soulevée. Je suis content. D'ailleurs, même si le ministre n'avait pas voulu nous donner les textes, on les aurait eus quand même. Je veux qu'il sache qu'il ne fait pas de faveur spéciale, n'est-ce pas? Mais on ne les a pas ce soir, c'est là qu'est le problème.

La question que je me pose est la suivante: Le ministre entend-il exiger qu'on vote sur ce point-là ce soir? Encore une fois, j'aimerais bien gros qu'on soit libéré de tout cela dès ce soir. Je ne voudrais pas me réveiller dans deux mois en me disant: Tu étais là ce soir-là, à 11 h 30, et tu étais pressé de finir la "job". Tu n'as pas eu le temps de regarder les textes. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on procède assez vite pour le reste du projet de loi. Ce n'est pas du tout dans une pensée d'obstruction.

Le Président (M. Laplante): II y a une seule solution qui peut vous aider...

M. Bérubé: M. le Président. (23 h 15)

Le Président (M. Laplante): ...M. le député d'Argenteuil. On fait l'adoption d'un article de loi sous réserve à ce moment-là, ou par un refus avec une réserve expliquée, ce qui fait que souvent cela vous dégage de la responsabilité quant à l'article si vous avez pressenti un manque d'information.

M. Bérubé: M. le Président, sur le point soulevé par le député d'Argenteuil, j'aimerais souligner qu'il est possible de répondre de façon satisfaisante à sa réflexion non à l'article 12, mais 19, dans la mesure où le document sessionnel no 86 est immatériel en ce qui a trait aux conditions de travail pour les professeurs du cégep puisque, en vertu même de l'article 19, le contenu du document no 86 peut être amendé de toutes les façons imaginables par entente entre les parties. Par conséquent, les arguments qu'invoque le député d'Argenteuil font référence à l'article 19, c'est-à-dire à la capacité pour les parties de modifier le document no 86 mais non au document no 86, puisqu'il n'a rien à voir avec les ententes ultérieurement sont signées.

Je prétends donc, M. le Président, que l'intervention du député d'Argenteuil, bien que fondée en ce qui a trait à la discussion de l'article 19, n'est pas appropriée quant à l'article 12. Je suggérerais que nous adoptions l'article 12 et que, si le député d'Argenteuil veut soulever la question concernant les ententes à être conclues entre la partie syndicale et la partie patronale, ceci soit couvert par l'article 19, qui porte sur de telles ententes, et non pas par l'article 12, qui ne couvre pas de telles ententes.

Le Président (M. Laplante): II y a aussi un autre moyen, M. le député d'Argenteuil. Dès la troisième lecture, après le rapport, vous pouvez aussi, sur réception des documents que vous avez demandés, présentés une motion d'amendement.

M. Ryan: M. le Président, il y a deux choses que je voudrais souligner. J'ai noté ce que vous avez dit. D'abord, avec le libellé qu'on a ici, il pourrait très bien arriver, avec la politique énoncée par le gouvernement, qui défend le trésor public au point de refuser des choses élémentaires comme celles dont on a parlé plus tôt que, à la faveur d'une entente intervenue à 3 heures du matin, avec l'intervention du chef de cabinet du premier ministre, on adopte des principes s'éloignant considérablement de toutes les théories énoncées depuis six mois. Il n'y a absolument rien qui empêche le gouvernement de faire tout cela. On se rendra compte de cela en lisant les conventions dans un an. Une fois les échéances passées, là, vous savez comme moi qu'on passe à autre chose, qu'on ne passe pas son temps à écheniller ces conventions jusqu'à 4 heures du matin.

M. Bérubé: Le document sessionnel no 86 a été déposé à l'Assemblée nationale.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que je peux compléter mon intervention? Je soulignais simplement que le texte des ententes dont nous parlons n'a pas été déposé. C'est cela qui nous intéresse.

M. Bérubé: Mais c'est l'article 19, ce n'est pas l'article 12 qui est couvert.

M. Ryan: M. le Président, je continue

mon intervention. Je pense que le point que j'ai signalé est parfaitement clair et il n'est l'objet d'aucune réfutation que je connaisse en tout cas. Si le ministre est capable de réfuter cet argument-là, il pourra le réfuter tantôt. Je l'écouterai avec respect. Deuxièmement, quand nous adoptons l'article 12, nous ne savons pas ce qui est dans l'article 19, nous ne savons pas ce qui a été adopté et les développements qui ont pu surgir à propos de celui-là, nous adoptons l'article 12. C'est normal qu'on nous donne toutes les explications dont on a besoin. Le moins que je pourrais faire - encore une fois, je n'ai pas d'objection - lorsqu'on regarde les articles 12 et 19 ensemble - il y en a qui peuvent rire là-bas, j'entends des bruits, mais, pour le genre de contribution qu'ils ont apportée jusqu'à maintenant, les bruits n'ajoutent rien non plus. Il y a franchement une limite.

M. Blais:: Est-ce que c'est à moi que vous faites allusion, M. le député d'Argenteuil?

M. Ryan: J'ai cru entendre des bruits moqueurs.

M. Blais: Pas du tout, j'ai soufflé mon allumette. Cependant, je pourrais m'en faire... Une minute, M. le Président. Le document no 86 a été déposé. Vous l'avez donc connu autant que nous. Dans l'article 12, cela n'a rien à voir avec des changements éventuels sur 86. Cela passerait à l'article 19. Même à l'article 19, si un document n'était pas signé avec les syndicats - il peut y avoir d'autres amendements - ce n'est pas nécessaire d'en connaître le contenu pour adopter cette loi-là.

M. Ryan: Je souligne que l'intervention du député est antiréglementaire parce qu'il est intervenu sur un point de règlement et il est intervenu sur le fond. S'il veut intervenir après, il sera le bienvenu, mais je pense que, à ce moment-ci, il est préférable que je continue mon intervention.

M. Bérubé: M. le Président, je partage entièrement l'argument, sur cette question de règlement, du député d'Argenteuil. Il est absolument clair que le député d'Argenteuil n'est pas intéressé par quelque opinion que ce soit. Il voudrait continuer son intervention, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Ce que nous voulons soumettre à votre attention, M. le Président, est bien élémentaire. J'ai fait valoir un premier point qui n'a pas été compris de toute évidence de l'autre côté. Il est dans les propos enregistrés qu'on a tenus; ceux qui sont intéressés pourront le lire.

Deuxième point que je me demande honnêtement, je le soumets à l'attention de tous les députés de l'autre côté, si on n'a pas besoin dans la loi de l'article 12, ne le mettons pas. S'il ne signifie rien, s'il n'a pas de validité, si c'est l'article 19 qui compte, pourquoi on ne le met pas là. Le ministre nous dit qu'il y a un lien entre 86 et des ententes qui sont survenues. Je lui dis: Si je n'ai pas les ententes, j'ai de la misère à comprendre. C'est cela que je veux me faire expliquer ici clairement. Il y en a qui comprennent par la foi. Dans ces choses, l'analyse est un meilleur guide que la foi. C'est ce qu'on essaie de faire, un travail d'analyse honnête, objectif et consciencieux.

J'aimerais à ce moment-ci à tout le moins qu'on nous donne un résumé - je pense qu'il y a un conseiller du ministre qui a laissé entendre tantôt que ce serait possible - des changements qui sont intervenus entre ce qu'il y a dans le document sessionnel 86 et ce qui est contenu dans les ententes signées avec les deux centrales syndicales. Cela me semble l'élémentaire bon sens qu'on nous donne cette information.

M. le Président, il ne faut pas oublier une chose, c'est la seule occasion que nous allons avoir de discuter de ces questions d'ici peut-être trois ans. Je pense que c'est notre devoir d'essayer d'en savoir le plus possible avant que les décisions soient prises.

Le Président (M. Laplante): M. le ministre, avez-vous des compléments de réponse?

M. Bérubé: Je ne sais pas exactement où veut en venir le député d'Argenteuil. Je tiens à lui témoigner toute ma coopération pour répondre à ses questions, le temps qu'il le voudra.

Évidemment, j'admets que j'ai un vilain défaut: en général, lorsque l'hypocrisie devient trop évidente, j'ai tendance à me choquer et je dois prendre sur moi, M. le Président.

Je n'ai pas d'objection à ce que le député d'Argenteuil trouve toutes sortes de simagrées pour faire en sorte qu'on prolonge les travaux de la commission parlementaire. Si, dans la stratégie de l'Opposition libérale, on a décidé de faire traîner les travaux de la commission, je n'ai pas d'objection. Déjà, pendant des heures et des heures - j'ai même assisté à un moment donné à un débat tenu par l'Opposition sur les mérites du député que nous allions nommer comme rapporteur de la commission. On a louange ce député pendant des heures pour souligner tous ses talents, pour bien montrer qu'il ferait un excellent rapporteur de commission alors que le rôle d'un rapporteur de commission, comme on le sait, c'est de

déposer à l'Assemblée nationale le rapport de la commission, point à la ligne. Il ne faut pas beaucoup de talent pour le faire. De toute façon, il faut le faire pour répondre à notre règlement. Nous avions eu droit pendant des heures à un débat sur les talents de notre rapporteur à l'Assemblée nationale.

Donc, M. le Président, j'ai avec le temps découvert le vide que pouvaient parfois représenter les travaux parlementaires dans la mesure où il arrive que, pour des raisons stratégiques, l'Opposition décide de remplir ce vacuum par des propos décousus, qui n'ont rien à voir avec le contenu, qui nous amènent à consacrer beaucoup de temps, je dois dire en pure perte, dans la mesure où les interventions de l'Opposition n'ont pas comme objectif de faire progresser, de faire avancer la discussion. Elles ont purement et simplement comme objectif de faire perdre du temps, de retarder les travaux.

M. le Président, cet article vise essentiellement à donner force de loi à un document sessionnel composé de deux types de contenu: Premièrement, apporter certaines corrections à des erreurs techniques ou des coquilles dans les conventions essentiellement, du réseau des affaires sociales essentiellement. À-t-on des questions là-dessus, oui ou non? Deuxièmement, alléger les conditions de travail des professeurs du secteur collégial en leur octroyant des conditions de travail qui sont contenues dans l'offre patronale du 10 février 1983. Ce document sessionnel a été déposé à l'Assemblée nationale et l'Opposition en a pris connaissance.

J'ai pris la peine, pour être bien certain que l'on comprendrait clairement la nature de l'article que nous déposions ici, d'indiquer toutefois que ces clauses portant sur les conditions de travail des professeurs du secteur collégial avaient relativement peu d'importance dans la mesure où l'article 19 prévoit des modifications à ces conditions de travail. Or, de fait, il y a eu des ententes, comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer, qui font en sorte que ces conditions de travail prévues au document 86 sont désormais remplacées par une entente entre les parties, laquelle entente, doit-on le souligner, n'a pas à être ratifiée par l'Assemblée nationale. Elle relève directement de l'Exécutif, d'une part. D'autre part, le document sessionnel, à ce moment-là, n'est qu'un document de référence sur la base duquel les parties décident d'amender un texte dans un sens positif ou négatif, de manière à respecter leurs objectifs et leurs intentions. Or, il est donc clair que, à cet égard, le contenu comme tel du document 86 n'a pas véritablement de valeur, si ce n'est que pour constituer une référence à partir de laquelle les parties ont conclu une entente.

Je veux bien que le député d'Argenteuil, dans le cadre d'une stratégie dont j'ignore la portée et le sens, veuille soulever toutes sortes de questions. Cela cadre sans doute avec un objectif politique qu'il a, dont j'ignore le contenu. Je ne lui demande pas de le dévoiler, M. le Président. Je dois dire que, autant j'apprécie les interventions claires, souvent rigoureuses, du député d'Argenteuil, qui, au sein de l'Opposition, s'efforce de fournir un travail intellectuel de haut calibre, qui nous permet de faire progresser les travaux parlementaires et, souvent, de les amener à un niveau intellectuellement stimulant, autant, lorsque le député d'Argenteuil choisit la voie un peu plus mesquine de l'ergoterie parlementaire un peu plus traditionnelle, à laquelle, malheureusement, la population du Québec est en voie de s'habituer, ce qui est dommage, autant, dans ces conditions, j'ai de la difficulté à jouer le jeu. Je dois lui dire que j'ai de la difficulté à jouer le jeu et que, à ce moment-là, je préfère l'écouter, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: On a écouté le ministre ergoter pendant dix minutes pour littéralement ne rien dire sinon imiter son chef qui se spécialise dans l'art d'envoyer des injures à tout le monde. Je ne vois pas du tout ce que viennent faire les propos qu'on a entendus. Tout le monde est témoin ici qu'on n'est jamais allé en dehors de la question et qu'on reste sur le sujet que l'on discute. C'est un sujet très important.

Tout ce qu'on demande - le ministre n'a aucunement répondu à ma question - est qu'on nous fournisse une bonne information sur les différences qu'il y a entre le document sessionnel 86 et l'entente qui est intervenue. Il est vrai que l'entente intervenue ne relève pas de l'approbation du Parlement, mais elle nous intéresse au plus haut point. C'est un acte gouvernemental qui se rattache directement au sujet dont on discute ce soir. Il me semble que, à défaut de nous avoir soumis les textes de ces ententes, par courtoisie, vu que l'on discute de cela ici, M. le ministre, vous auriez pu, ces jours derniers, nous envoyer le texte de ces ententes. Il y en a une qui est signée depuis huit jours. Depuis le 30 mai, avez-vous dit? L'autre est signée depuis le 1er juin. Si le texte avait été envoyé à mon bureau, comme cela aurait été d'élémentaire courtoisie, on en aurait fait l'examen et on ne serait pas venu vous poser des questions ce soir. Là, vous nous apprenez une chose que nous ne savions même pas, qu'une entente a été signée le 1er juin. L'autre, nous l'avons apprise par un communiqué qui nous a été envoyé par la centrale syndicale concernée. Autrement, nous ne l'aurions pas

su. Je vous demande de nous donner au moins les changements qui sont intervenus entre la position qui est énoncée dans le document 86 et ces ententes. Il me semble que ce sont des choses qui ne méritent aucunement les épithètes négatives qu'on a entendu circuler, à mots à peine voilés, dans les propos du ministre. (23 h 30)

M. Bérubé: Lorsque le député d'Argenteuil dit que, par courtoisie, je devrais lui soumettre le contenu de telles ententes, non seulement par courtoisie, mais également par respect à l'égard du travail important que doit accomplir l'Opposition, je suis absolument d'accord pour fournir au député d'Argenteuil - je lui ai indiqué dans mon intervention précédente - non pas à déposer - pour respecter le règlement qui nous interdit de déposer de tels documents -mais à lui fournir en main propre copie de telles ententes, de telle sorte qu'il puisse en prendre connaissance. Cela m'apparaît absolument évident et fondamental dans notre système parlementaire. J'ai eu l'occasion de discuter avec un journaliste français, au cours du dîner de ce soir, des pratiques parlementaires comparées entre la France et le Québec. Celui-ci me soulignait que, très fréquemment, l'Opposition n'avait pas toujours en France, autrefois comme maintenant - il ne s'agit pas d'un jugement de valeur à porter sur l'actuel gouvernement français -, selon la tradition parlementaire, accès à des documents absolument essentiels lui permettant d'orienter sa réflexion et de pouvoir mieux critiquer le gouvernement. Je pense que, à cet égard, notre système parlementaire est peut-être plus ouvert et permet - non seulement permet, mais favorise - de par une longue tradition, la divulgation de l'information. Je pense que c'est à l'actuel gouvernement que l'on doit cette loi d'accès à l'information, qui rend les documents gouvernementaux publics, et nous en sommes fiers.

Nous l'avons fait, d'ailleurs, avec l'appui de l'Opposition en plein esprit d'ouverture. Je pense que, dans la mesure où nous débattons du fond, dans la mesure où nous débattons le contenu, je serai toujours disponible pour répondre aux questions. Je reconnais que j'exagère peut-être. J'ai de la difficulté à me prêter à de la "procédurite" parlementaire où le fond des questions est parfois escamoté par des objectifs politiques, il faut le reconnaître. Ce n'est pas un reproche que j'adresse spécifiquement à l'Opposition. Sans doute que, lorsque nous étions dans l'Opposition, nous souffrions du même défaut. C'est un reproche que nous avons fait au parlementarisme québécois, cette "procédurite" parlementaire qui fait en sorte que, à des fins politiques, on escamote le fond des débats pour s'engager dans des débats un peu stériles qui déçoivent beaucoup de nos concitoyens qui ont l'occasion de lire le journal des Débats ou de nous regarder à la télévision et qui ont de la difficulté à comprendre comment ils ont fait pour élire des concitoyens pour effectuer ce genre de travail.

C'est uniquement cela, M. le Président, que j'essayais de souligner en toute humilité au député d'Argenteuil que, dans la mesure où il voudra aborder les questions de fond, je serai ouvert. Mais, dans la mesure où il voudra faire de la procédure, tout le monde sait que j'ai un vif plaisir au débat parlementaire, je me restreindrai dans ce vif plaisir et je me contenterai d'écouter, si on fait de la procédure.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Cela ne paraît pas qu'il semble vouloir se disposer à écouter plutôt qu'à parler, mais cela ne fait rien. On verra la suite. Tantôt, j'ai demandé une chose. Tout notre débat, depuis 20 minutes, gravite autour de l'information que nous avons demandée sur les changements intervenus entre le contenu du document sessionnel 86 et les ententes survenues le 30 mai et le 1er juin. On m'a transmis à l'instant même une copie de quatre ententes différentes dont chacune comporte de 20 à 30 pages. Je ne peux pas faire l'examen de cela ce soir, je pense que tout le monde va comprendre cela facilement. Je dis au ministre: Est-ce qu'on pourrait au moins nous mesurer les principaux changements survenus entre le moment où on a déposé ce document sessionnel - cela ne fait pas plus que trois semaines, un mois - et le moment où on a signé ces ententes. Si je dois constater que le gouvernement est passé d'une position à une autre absolument contraire, ce qui est tout à fait possible dans l'ordre des hypothèses, à ce moment, cela me permet de former un jugement plus solide sur la valeur de ce document 86 sur lequel je vais être appelé à voter.

Je pense que le ministre va convenir avec moi qu'il y a un lien évident entre les deux et qu'on ne peut pas réduire le débat sur l'article 12 seulement à dire: Adoptez cela, cela ne compte plus, cela ne vaut rien. Ce n'est que pour des fins de référence. C'est à nous de juger. On n'a de leçon à recevoir de personne, là-dessus. Nous vous disons que nous cherchons le lien. Cela va nous permettre de disposer aussi de l'article 19, un peu plus tard.

Il me semble que vous devriez au moins pouvoir nous dire les changements. Je prends seulement un exemple. Par une lecture rapide des documents qu'on vient tout juste de me remettre, même pas une lecture, un survol rapide de quelques pages, je regarde l'article qui traite des chefs de service, des

coordonnateurs de service, et je crois constater un déplacement de position très important de la part du gouvernement par rapport aux thèses qu'on nous a soutenues quand on a tenu la commission parlementaire de l'éducation, en mars dernier, au sujet du mode de nomination du coordonnateur des services. À présent, je crois constater qu'il y a eu un déplacement de terrain très important.

Sur ce point précis, j'aimerais savoir quelle est la différence entre les dispositions qui sont dans le document sessionnel no 86 et celles qu'on retrouve dans les ententes dont on nous remet le texte à l'instant.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Laplante): M. le député de Terrebonne.

M. Blais: Est-ce que les questions sur les ententes qui sont intervenues sont recevables? Je vais m'expliquer, si vous voulez.

Le Président (M. Laplante): Vous voulez vous expliquer là-dessus?

M. Blais: Si vous voulez des explications, je vous en donnerai.

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Blais: Je crois qu'elles sont irrecevables.

Le Président (M. Laplante): À mon avis, elles sont recevables.

M. Blais: Elles sont recevables?

Le Président (M. Laplante): Parce qu'elles font partie du projet de loi.

M. Blais: Pas du tout.

Le Président (M. Laplante): Du document sessionnel no 86 sur...

M. Blais: Non. Non. M. le Président, je voudrais m'expliquer.

Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord.

M. Blais: Si ces ententes n'étaient pas signées aujourd'hui, on ne pourrait pas en discuter. Quand la loi a été déposée, elle ne faisait aucune allusion aux ententes qui ont été signées, mais à d'éventuelles ententes qui seraient signées. Donc, les éventuelles ententes qui seraient signées sont irrecevables parce qu'on n'étudie pas les ententes qui seraient signées par cette loi, mais la permission d'avoir des ententes à signer. Je dis que les questions sur tout ce qui est entente signée, entre le dépôt de cette loi et les ententes signées, sont irrecevables devant cette loi.

Le Président (M. Laplante): II y a autre chose. Il faut aussi considérer, M. le député de Terrebonne, que, pour le document sessionnel no 86, le ministre lui-même avoue qu'à la suite d'une entente, il y a eu un amendement de ce document par un nouveau document.

M. Bérubé: Question de règlement, M. le Président et même question de privilège.

Le Président (M. Laplante): Oui, non pas question de privilège mais question de...

M. Bérubé: II est rare, M. le Président, qu'un membre de l'Assemblée nationale doive invoquer un privilège violé par un président de l'Assemblée nationale. Mais lorsque vous avez dit que "j'avouais", M. le Président, pour moi, l'aveu implique une notion de culpabilité. Malheureusement, en aucun moment je ne me suis senti coupable d'avoir conclu une entente avec la partie syndicale. Au contraire! J'en suis plutôt fier. S'il était possible de modifier le terme "avoue" par "se félicite", M. le Président, je pourrais concourir à vos propos.

Le Président (M. Laplante): Oui. S'il fallait chercher la sémantique partout, j'aurais pu reprendre tout à l'heure une intervention - cela aurait peut-être fait un petit peu plus mal - quant aux rapporteurs des commissions, sur le peu du rôle que vous avez voulu leur faire porter, ce que je n'ai d'ailleurs pas apprécié, monsieur, parce que le rôle du rapporteur est un peu plus que celui que vous avez détaillé tout à l'heure.

Dans mon esprit, le document sessionnel no 86 - étant déposé, il y a des questions qui se rattachent aussi aux conventions collectives. Vous avez commencé à en parler dans vos discussions et vous avez continué là-dessus. Le député d'Argenteuil, pour ce que j'appelle la bonne marche des travaux et pour la compréhension personnelle qu'il voudrait avoir du document sessionnel no 86 et des ententes survenues, que vous avez reliées à l'article 19, facilitera, je crois, l'adoption des autres articles qui suivront, pour autant qu'il puisse en avoir l'information. Forcément, c'est un projet de loi très technique, alors, ne me demandez pas de débroussailler toutes ces choses là-dedans. C'est impossible. Je ne suis pas Dieu le père. J'essaie pourtant de diriger les travaux de façon que tout le monde puisse y trouver l'eau et le pain. C'est la raison pour laquelle je suis obligé de considérer que les questions sont recevables, parce qu'on parle

toujours des décrets depuis le commencement de l'étude du projet de loi. Quand on relie tout cela ensemble, les questions peuvent être très larges. C'est pourquoi les questions sont recevables sur ce sujet.

M. Blais: M. le Président, est-ce que je peux vous demander d'autres explications, s'il vous plaît?

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Blais: Sur le document sessionnel no 86, je croirais que les questions sont recevables. Mais, sur les amendements faits sur le document 86 que la loi, à l'article 19, prévoit, je crois que les questions sont irrecevables. C'est un hasard que nous ayons ces documents signés. Il peut arriver qu'ils ne soient pas signés. Les amendements ne font pas partie de cette loi. La loi nous permet de faire des amendements aux ententes.

Le Président (M. Laplante): Mais le parlementaire...

M. Blais: Si on n'avait pas signé d'entente, M. le Président, on ne pourrait pas en discuter. Je voudrais finir, si vous me permettez, juste une seconde.

Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord. Allez-y!

M. Blais: Si nous n'avions pas signé d'entente, nous ne pourrions pas en discuter. Donc, ces amendements qui ont été faits depuis que nous avons déposé la loi, on ne pouvait pas les connaître. C'est comme aux engagements financiers; si on étudie ce mois-ci, au mois de juin, un engagement financier du mois de février et qu'on pose la question: Est-ce que le rapport est fait? On dit: On a étudié les engagements du mois de février. On ne peut pas demander si le rapport est déjà fait, rendu en juin, parce qu'on se replace au mois de février pour étudier les engagements.

La même chose pour cette loi. À l'article 19, on nous permet de faire des ententes avec d'autres parties, mais les ententes qui ont été signées depuis le dépôt, toutes les questions d'après moi sur cela sont irrecevables.

Le Président (M. Laplante): II faut aller dans la coutume parlementaire aussi et beaucoup plus loin, M. le député de Terrebonne. C'est le moment propice, pour un député de l'Opposition, de prévenir les coups aussi. Étant conscient du document no 86 et sachant aussi qu'il y avait des négociations avec d'autres syndicats sur l'application, précisément, des conventions collectives, il est en droit de s'informer vis- à-vis de ces articles s'il y a eu progrès dans le dossier. La réponse a été oui. Cela appelle souvent des questions d'information qui sont reliées au document 86. La réponse du ministre a été oui, et le ministre a ajouté aussi que l'article 19, par exemple, conférait un droit dans ces conventions collectives.

M. le ministre.

M. Bérubé: Merci, M. le Président. Je désespérais un jour d'attirer votre attention.

Le Président (M. Laplante): Vous avez le même effet que moi.

M. Bérubé: M. le Président, je voudrais dire que je partage intégralement la position du député de Terrebonne.

M. Ryan: M. le Président, une question de règlement.

M. Bérubé: M. le Président, sur la question de règlement, j'intervenais sur la question...

Le Président (M. Laplante): Oui. M. le député, je reviendrai à votre question. M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voudrais vérifier si vous aviez rendu une décision sur cela...

Le Président (M. Laplante): Non, non.

M. Ryan: ...ou si vous étiez au stade où vous écoutez les représentations.

Le Président (M. Laplante): Non, j'ai donné une décision au député de Terrebonne.

M. Ryan: M. le Président...

Le Président (M. Laplante): D'accord, M. le député.

M. Ryan: ...je voudrais simplement vous soumettre que, si vous avez rendu une décision, il me semble qu'on ne doit pas continuer à la discuter.

Le Président (M. Laplante): Non, je ne la laisserai pas discuter non plus. Vous avez couru au devant des coups.

M. Bérubé: M. le Président, est-ce que vous me permettez à ce moment de vous indiquer l'attitude que je compte prendre concernant l'article 12?

Le Président (M. Laplante): Absolument, c'est votre droit, mais pour autant que ma décision n'est pas remise en cause.

M. Bérubé: Allons, M. le Président.

Vous savez le grand respect que j'ai pour les présidents de commission, et peut-être avez-vous raison, devrais-je avoir un respect plus grand pour les rapporteurs de commission dont l'importance de la tâche émane directement de l'importance de la présidence, sans doute. Je m'excuse des propos de tantôt qui auraient pu paraître antiparlementaires et injurieux à l'égard de la fonction fort importante que jouent nos collègues comme rapporteurs de commission.

Mais ce que j'essayais d'expliquer, c'est que je partage entièrement le point de vue du député de Terrebonne concernant des ententes encore à venir, sans aucun doute, puisque, effectivement, de telles ententes peuvent encore être conclues; donc, des ententes qui seraient amenées à modifier les conditions de travail des employés du secteur public. Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il ne faut pas confondre de telles ententes à venir avec le document 86 qui fixe des conditions de travail. De telles ententes sont couvertes au paragraphe 19 qui stipule très clairement que des ententes pouvant intervenir essentiellement prévaudront sur les documents sessionnels que nous déposons présentement. (23 h 45)

Toutefois - et c'est le coeur de mon intervention - bien que partageant entièrement le point de vue du député de Terrebonne, je me rends à la sagesse de votre décision car, bien qu'elle permette de débattre cette décision d'ententes qui ne sont pas couvertes par l'article 12 donc, élargissant très largement l'interprétation que l'on doit donner à la pertinence de nos débats... En tout égard pour la sagesse de la présidence, il me semble qu'effectivement, si nous abordions le fond de la question maintenant sur l'article 12, on peut espérer que, sur l'article 19, nous pourrons aller plus rapidement. Je relie surtout votre décision à votre grande sagesse concernant la façon de diriger le déroulement de nos débats pour arriver plus rapidement aux objectifs que nous poursuivons plutôt que par une adhésion trop rigoureuse à la définition de la pertinence du débat. En ce cas, je suis absolument d'accord pour élargir le débat entourant l'article 12 au contenu d'ententes. Peut-être que nous pourrions pendant quelques minutes permettre une intervention portant sur le contenu de ces ententes par opposition au contenu du document no 86.

M. Ryan: M. le Président, est-ce que je pourrais ajouter une suggestion?

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Ryan: C'est par comparaison plutôt que par opposition, j'aimerais mieux cela. Si on nous parle des ententes, j'aimerais qu'on nous dise en quoi elles diffèrent du contenu du document sessionnel no 86. C'est l'objet de la question que je pose depuis le début.

M. Bérubé: C'est ce que nous allons essayer de fournir au député d'Argenteuil et aux membres de cette commission.

Le Président (M. Laplante): II y a des questions qui ont été posées par le député d'Argenteuil, avez-vous des réponses?

M. Bérubé: Sur la question du département?

M. Ryan: Est-ce que vous pourriez identifier le collaborateur du ministre, s'il vous plaît?

M. Bérubé: C'est le ministre qui parle toujours, semble-t-il, suivant le journal des Débats, mais il m'apparaîtrait néanmoins approprié que ce puits de science ne soit peut-être pas attribuable au ministre, mais bien à la personne qui en est à l'origine.

Je suis Jacques Lanoue, coordonnateur des négociations dans le secteur collégial.

M. Ryan: Au Conseil du trésor?

M. Bérubé: Non, au Comité patronal de négociation des collèges.

M. Ryan: Est-ce que M. Lanoue est rattaché au ministère de l'Éducation ou au Conseil du trésor?

M. Bérubé: Ni à l'un, ni à l'autre.

M. Ryan: À quel ministère est-il rattaché?

M. Bérubé: À aucun, je suis à mon compte. Je suis contractuel avec le comité patronal de négociation des collèges.

M. Ryan: Très bien.

M. Bérubé: Pour ce qui est de votre question par rapport au département, dans le document no 86, sauf des erreurs techniques, il n'en était pas question. Les modifications qui sont faites sont de trois ordres. D'abord, on a enlevé des mots à la clause 4.3.04 du décret parce qu'il y était question d'un mandat de trois ans. Le mandat est devenu un mandat d'un an renouvelable et cela a été inscrit à la clause 4.3.07. Le mandat du coordonnateur était de trois ans dans le décret. Il est devenu d'un an renouvelable avec la clause 4.3.07. Le dernier changement porte sur une formulation différente. En introduction de la clause 4.3.10 on dit maintenant: Le coordonnateur du département rend compte aux collèges des activités départementales suivantes. C'est une modification du texte qu'il y a eu.

M. Ryan: Est-ce qu'on peut m'expliquer la signification de ce changement qui est intervenu? C'est un des plus importants, je crois.

M. Bérubé: Essentiellement, c'est une écriture différente qui semblait satisfaire les syndicats mais qui, au fond, quand on regarde les mots, correspond essentiellement au même fond. On a apporté une précision. Quand on disait au texte, à 4.3.10; les activités suivantes, on a précisé que c'étaient les activités départementales suivantes. Alors, cela c'est une précision.

Quand on disait au niveau du décret "répond au collège", on a changé cela pour "rend compte au collège". Cela signifie finalement la même chose, mais c'est une précision du type d'activités.

M. Ryan: Je pense que ce n'est pas téméraire de présumer que la partie syndicale a une compréhension différente de ce changement de terminologie. Ce sont des problèmes qui, éventuellement, pourront se régler à l'arbitrage.

M. Bérubé: Je n'en suis pas sûr.

M. Ryan: C'est dire que cela aurait été simplement un "face saver"?

M. Bérubé: Pour qui? Sur la question, M. le Président, du...

M. Ryan: Continuez, continuez.

M. Bérubé: ...député d'Argenteuil, je dois dire qu'une certaine expérience de la négociation m'a enseigné qu'il était parfois avantageux de coucher des termes d'entente d'une façon suffisamment générale pour que les parties puissent clamer victoire. Ceci permet souvent des règlements. L'interprétation que voudra bien en donner la partie syndicale, je pense, reste sa propriété la plus totale, mais il y a entente.

M. Ryan: Voulez-vous nous donner des explications sur d'autres points? Cela, c'est un exemple que j'avais puisé au hasard dans les textes.

M. Bérubé: Essentiellement, les ententes qui sont intervenues avec la FNEEQ et avec la FEEC reprennent les éléments contenus dans le rapport du conciliateur, M. Normand Gauthier. II y a un point qui n'en fait pas partie mais qui devrait faire partie d'une prochaine lettre d'entente à intervenir dans les semaines à venir, parce qu'il y avait beaucoup de questions d'ordre technique qu'il fallait régler. Les rencontres se poursuivent sur ce point-là en particulier, mais, de l'accord des deux parties, on n'a pas bloqué une entente générale sur le reste des autres points du rapport du conciliateur. On a mis cela de côté et on va y revenir.

Par rapport au document 86, il y a trois choses qui sont dans le document 86 et qu'on reprend dans les ententes qui sont là parce que ces points étaient contenus dans le rapport du conciliateur. Les points qui sont dans le document 86 et qui ne sont pas contenus dans le rapport du conciliateur ne sont pas repris.

Le Président (M. Laplante): M. le député d'Argenteuil, est-ce que cela va? Je ne voudrais pas non plus qu'on profite d'une ouverture entre membres d'une commission pour étudier toutes les clauses d'une convention collective, ce qui ne serait pas admissible au moment de l'étude d'un projet de loi. Il y a une information générale qui peut aller aussi sur des choses très spécifiques. C'est seulement de cela que je voudrais vous mettre en garde à l'avenir sur le projet de loi.

L'article 12 est-il adopté?

M. Ryan: J'ai un autre aspect, si vous voulez attendre.

M. Bérubé: Très rapidement, si vous le permettez, M. le Président, les trois choses touchent la rémunération des employés à temps partiel sur la base du calcul à 80 unités, la reconnaissance pour une mise en disponibilité d'un traitement lorsqu'il atteint 80 unités et les avantages sociaux, tels les assurances et les congés de maternité pour les mises en disponibilité. Ces trois choses que vous retrouvez dans le document 86 sont dans les ententes.

M. Ryan: Est-ce qu'elles étaient dans le rapport Gauthier?

M. Bérubé: Oui, oui.

M. Ryan: Alors, par conséquent, vous nous dites que l'entente s'en tient à peu près strictement aux éléments qui étaient contenus dans le rapport Gauthier et que, dans la mesure où le rapport Gauthier n'était pas la même chose que le document sessionnel no 86, le document sessionnel no 86 est annulé par l'entente.

M. Bérubé: Oui. C'est cela.

M. Ryan: Vous nous assurez qu'il n'y a pas de résidu entre les deux pouvant donner lieu à des problèmes.

M. Bérubé: Je pense qu'il était important ... Devrais-je en faire part à cette commission? On me dit qu'on a pris bien soin d'assurer la rédaction d'un article, d'ailleurs parafé par les parties, d'après ce que je peux voir: "Les parties aux présentes

reconnaissent la primauté de la présente entente lorsque les clauses des dispositions constituant des conventions collectives qui y sont modifiées sont elles-mêmes modifiées par le document sessionnel no 86 prévu par l'article 12 du projet de loi no 8 de 1983, Loi concernant l'adoption des chapitres 35 et 45 des lois de 1982 et modifiant certaines conditions du travail dans le secteur public." En d'autres termes, les termes de cette entente font explicitement référence au document sessionnel no 86.

M. Ryan: Ce sont les points que nous devions établir avec clarté, M. le Président. Il est dommage que le député qui s'impatientait soit parti. Il aurait compris le sens de la démarche qui est parfaitement valable. Je vous remercie des explications apportées, je pense que cela complète l'examen sur cet aspect de l'article.

Je soulèverai maintenant un autre aspect dont je vous avais déjà prévenu. Un problème se présentait à nous: avant les informations qu'on a communiquées, ce soir, au sujet des ententes intervenues dans le secteur des cégeps, on était placé, à l'égard du projet de loi 8, dans une situation qui créait une inégalité de conditions entre les employés du secteur des affaires sociales et les employés du secteur de l'éducation. Les employés du secteur des affaires sociales s'étaient vu offrir par le gouvernement, en janvier, des améliorations à certaines clauses des décrets qui n'étaient nécessairement pas toutes à incidence pécuniaire. Nous nous étonnions de constater que, dans le projet de loi, il n'était pas question du tout d'incorporer ces propositions gouvernementales, alors qu'on le faisait pour les travailleurs des cégeps.

M. Bérubé: Ni pour les professionnels du gouvernement, je dois le dire.

M. Ryan: M. le Président, on pourra compléter cela tantôt. J'essaie d'amener une argumentation rigoureuse qui demande une assez grande précision; je ne voudrais pas ouvrir d'autres avenues tout de suite, je les écouterai volontiers après.

Je disais que nous nous étonnions de constater cela. Ce soir, une situation différente est créée. Comme cette inégalité de conditions n'existe plus, on tombe sous l'empire d'ententes que pourraient également signer de leur côté les employés des Affaires sociales, et étant donné qu'en supposant que les décrets s'appliquant à eux contiennent le même genre de dispositions prévoyant que le décret peut être modifié par une entente survenant entre les deux parties, les objections que nous avions sur ce point particulier, cet aspect de l'article 12, sont maintenant une source d'interrogation pour moi, maintenant que je sais qu'il n'y aura pas d'inégalités de conditions entre les employés des cégeps et eux.

Je pense qu'on comprend mon point? Je vais vous l'expliquer.

M. le Président, je m'aperçois qu'on n'a pas compris de l'autre côté, c'est sans doute parce que l'exposé est...

M. Bérubé: Oui, cela va.

M. Ryan: Pardon?

M. Bérubé: Oui, cela va.

M. Ryan: Cela va? Très bien. (minuit)

II reste quand même un problème, me souffle-t-on à l'oreille, parce que, même si les conditions sont modifiées par les nouvelles qu'on a confirmées ou complétées ce soir, il reste que, dans la rédaction du projet de loi, le gouvernement, selon nous, se montrait disposé à donner aux enseignants des cégeps des concessions qu'il n'était pas prêt à faire aux salariés des affaires sociales, c'est-à-dire à améliorer unilatéralement, par voie législative spéciale, des conditions qui avaient été inscrites dans des décrets, alors que, pour les employés du secteur des affaires sociales, on disait: On ne touche à rien de cela. Ce sont uniquement des ententes, ils n'auront rien de cela. Alors, on trouvait qu'il y avait une disparité de conditions. Je voudrais demander au ministre s'il serait disposé à considérer la possibilité d'améliorations législatives aux conditions créées par les décrets dans le secteur des affaires sociales, moyennant que de telles améliorations n'auraient pas d'incidence financière directe et verifiable.

M. Bérubé: Non.

M. Ryan: M. le Président, je soulève une question de règlement. Il est rendu minuit. Vous alliez soulever ce point, sans doute.

Le Président (M. Laplante): Oui.

M. Ryan: Je ne sais pas quelles sont vos intentions.

Le Président (M. Laplante): Mes intentions sont d'ajourner.

M. Ryan: C'est d'ajourner.

M. Bérubé: M. le Président, sur le consentement de la commission, évidemment, je n'aurais aucune objection à prolonger la discussion de manière à pouvoir terminer l'étude de ce projet de loi, article article, si le député d'Argenteuil y consent.

Le Président (M. Laplante): Pour ma

part, avec la lourdeur des travaux que j'ai demain - j'ai une autre commission à présider demain matin, à bonne heure et jusqu'à minuit demain soir, et j'ai déjà des engagements pour vendredi aussi - j'aimerais bien récupérer moi-même, sachant le travail que j'ai pendant une semaine, les heures que cela prendra. Sur ce, les travaux sont ajournés sine die.

(Fin de la séance à 00 h 02)

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