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Commission permanente
des finances, des comptes publics
et du revenu
Etude des crédits du ministère des
Finances
Séance du vendredi 24 mai 1974
(Onze heures neuf minutes)
M. CORNELLIER (président de la commission permanente des
finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!
La commission parlementaire des finances, des comptes publics et du
revenu reprend ses travaux sur l'étude des crédits du ministre
des Finances. A la dernière réunion, lors de l'ajournement, nous
en étions au programme 2.
M. MORIN: C'est exact, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. Morin, vous voulez avoir la parole?
Gestion de la caisse et de la dette publique
(suite)
M. MORIN: S'il vous plaît. Nous en étions donc au programme
2 et nous nous entretenions des obligations d'épargne du gouvernement.
Dans son discours sur le budget fédéral, le ministre Turner
annonçait que la première tranche de $1,000 de revenu en
intérêt sur des créances, comme les dépôts
auprès des banques et des sociétés de fiducie, des
hypothèques, des obligations d'épargne du Canada et autres
obligations, serait déductible dans le calcul du revenu imposable des
particuliers. Est-ce que le ministre a l'intention de proposer des mesures
semblables pour encourager le maintien d'un taux d'épargne suffisant au
Québec, même en période d'inflation galopante?
M. GARNEAU : Réellement, M. le Président, je ne suis pas
en mesure de dire qu'une telle mesure pourra ou ne pourra pas être
adoptée au Québec. Chose certaine, si elle devait l'être,
il faudrait qu'elle soit annoncée soit dans un minibudget ou dans le
cadre du budget régulier de l'an prochain. Je ne suis réellement
pas en mesure de me prononcer sur cette question aujourd'hui.
M. MORIN: M. le Président, je m'étonne un peu que le
ministre n'ait pas réfléchi sur les conséquences que
pourrait avoir pour le Québec le discours du budget. Est-ce qu'il a
l'intention de faire examiner tous les aspects du discours du budget
fédéral dans l'hypothèse où celui-ci serait
finalement adopté?
M. GARNEAU: Dans cette hypothèse, oui. Mais ce qui nous place
dans une situation un peu délicate, c'est qu'il n'y a plus de budget
fédéral devant nous. De toute façon, chaque année,
nous faisons analyser, quelquefois sommairement, d'autres fois beaucoup plus en
détail, non seulement certaines des propositions contenues dans le
discours du budget fédéral, mais également dans les
discours des budgets de mes collègues des autres provinces.
Mais la difficulté qui se pose présentement, c'est
justement le fait qu'il n'y a plus de budget devant nous. Même si au
point de départ nous avions mis en marché un mécanisme
d'analyse sommaire, dans un premier temps, des différentes propositions
pour être capable d'en mesurer les répercussions au Québec,
on est placé un peu devant le vide dans le sens qu'on ne sait pas si ces
mêmes mesures seront représentées, que ce soit par le
même gouvernement ou par un autre. C'est évidemment toute une
série de questions hypothétiques qui sont intéressantes,
mais qui m'empêchent de pouvoir me prononcer affirmativement ou
négativement, actuellement.
M. MORIN: Bien. M. le Président, j'aimerais demander au ministre
quelles sont les prévisions d'emprunt d'Hydro-Québec pour les
années 1975/76 à 1980/81?
M. GARNEAU: M. le Président, les chiffres que je pourrais donner
actuellement seraient les mêmes que ceux qui ont déjà
été donnés ici par le président
d'Hydro-Québec à l'occasion de la discussion qui a eu lieu
à la commission parlementaire des richesses naturelles.
Le premier ministre a indiqué en Chambre récemment que,
dès que possible, la commission des richesses naturelles serait
convoquée pour entendre les dirigeants d'Hydro-Québec et de la
Société de la baie James. Je pense qu'il a donné cette
réponse à la suite d'une question qui avait été
posée par un député. Je pense que, compte tenu des effets
mieux connus de l'inflation actuelle et aussi du fait que les travaux ont du
être suspendus à cause des problèmes syndicaux à la
baie James, je préférerais de beaucoup, plutôt que de
répéter des chiffres précis, à ce moment-ci,
attendre la commission parlementaire des richesses naturelles de telle sorte
que les députés, non seulement de la commission des finances,
mais également de l'ensemble de l'Assemblée nationale, et la
population seraient informés des données beaucoup plus
précises qui sont à être complétées
actuellement pour tenir compte des nouveaux facteurs.
M. MORIN: Ces nouveaux facteurs, c'est certainement l'inflation qui est
le...
M. GARNEAU: L'inflation et aussi les problèmes syndicaux.
Exactement comment peuvent avoir fait varier le coût du projet les
problèmes que vous connaissez qui sont survenus à LG-2.
M. MORIN: Si je ne m'abuse, le sommet dans les emprunts se situerait
vers 1980?
M. GARNEAU: C'est 1977, 1978, 1979? C'est 1978 et 1979 qui seraient le
sommet suivant le calendrier qui avait été annoncé ici
à la commission parlementaire.
M. MORIN: Le ministre est-il conscient du fait qu'avec le rythme actuel
de l'inflation, plus les autres petits facteurs auxquels il a fait allusion,
les prévisions pourraient être dépassées
peut-être de $2 milliards et $3 milliards?
M. GARNEAU: Le premier ministre a indiqué également qu'il
y avait une analyse pour accroître le potentiel exploité à
la baie James, et que ce serait sans doute un autre facteur qu'il faudrait
tenir en considération en parlant de la révision des coûts.
Comme les travaux, à ma connaissance, ne sont pas terminés, les
travaux de compilation et de revérification, je me sens un peu mal
à l'aise pour aller plus loin, parce que les données que j'ai
présentement sont les données qui ont été rendues
publiques ici même à la commission.
M. MORIN: Vous voulez parler des derniers crédits, ceux de
l'année dernière?
M. GARNEAU: La dernière fois que la commission parlementaire a
entendu les gens d'Hydro-Québec et de la Société
d'énergie de la baie James.
M. MORIN: Ah oui ! C'est-à-dire le 20 mai 1971?
M. GARNEAU: Non. La commission parlementaire est revenue ici, je crois
que c'est l'an dernier. J'ai assisté à une bonne partie de ses
travaux. Les données ne pourraient pas être
différentes.
M. MORIN: Est-ce que le ministre est au courant de l'opinion
exprimée par le vice-président de la banque First Boston Canada
Limitée, un M. Michael David, selon lequel le Québec doit payer
un peu plus cher que l'Ontario pour ses émissions d'obligations à
New York?
M. GARNEAU: Michael David? C'est Michel David. C'est un Canadien
français comme vous et moi.
M. MORIN: D'après la coupure, le rapport que j'ai trouvé
dans la Presse ici, il s'agissait d'un dénommé Michael David. Je
suis heureux que ce soit Michel David. Le Québec devrait payer plus cher
que l'Ontario pour ses émissions d'obligations à New York parce
qu'il emprunte plus souvent depuis une dizaine d'années, en raison de la
Manic, des chutes Churchill et de la baie James, et d'autant plus qu'il peut
plus difficilement que l'Ontario trouver au Canada des capitaux, etc.
Il semble bien que les emprunts de la baie James surchargent
déjà le crédit de la province, comme l'affirme M. David,
et le ministre sait que c'est une des grosses maisons de courtage
américaines qui s'exprime de la sorte. Est-ce que le ministre ne craint
pas que cela rende très difficiles les emprunts d'Hydro-Québec au
cours des années qui viennent?
M. GARNEAU: C'est évident que financer un projet de l'envergure
de celui de la baie James ne se pas le matin avant le déjeuner, par
hasard. Je pense que c'est l'un des grands projets connus actuellement dans le
monde, au niveau des coûts de réalisation, et c'est évident
que cela demande une connaissance assez approfondie de l'ensemble des
marchés, non seulement canadiens, mais américains et un peu
partout à travers le monde.
Les données que nous avons, les consultations que j'ai eues
personnellement et que les gens d'Hydro-Québec et de mon
ministère ont eues avec les différentes communautés
financières nous portent à croire que ce financement devrait se
faire. Il est possible de le réaliser et il devrait se faire dans des
conditions normales, évidemment, en tenant compte du fait qu'il pourrait
se produire des situations en 1979, 1980, 1981, et serait bien malin celui qui
pourrait les décrire actuellement! Mais toutes choses étant
égales, le financement de ces activités devrait se faire
normalement, mais je pense que la question doit être différente
à mon sens.
Il s'agit de savoir si nous allons combler ou non les besoins en
énergie électrique au Québec et, si nous acceptons
affirmativement la proposition, en disant qu'il nous faut combler ces besoins
en énergie électrique, que cela soit sous une forme ou une autre,
thermique, nucléaire ou hydroélectrique...
M. MORIN: Je suis heureux d'entendre le ministre faire allusion à
d'autres façons peut-être de combler ces besoins.
M. GARNEAU: Mais le problème que soulève le
député de Sauvé est exactement le même et est
probablement pire si l'on prend d'autres solutions que
l'hydroélectricité. Alors, pour produire la quantité
d'énergie électrique dont nous avons besoin, il nous faut faire
des investissements. Les études qui ont été faites par
Hydro-Québec nous ont démontré que l'option hydro
était celle qui était la plus avantageuse sur le plan
économique et la plus avantageuse en termes de coûts.
Alors, il faut bien dire et souligner que si nous avions pris une autre
option, la situation au niveau des emprunts aurait créé des
difficultés du même ordre, sinon plus grandes.
M. MORIN: M. le ministre, si je comprends bien, nous aurons les chiffres
qui permettront de comparer les investissements nécessaires
pour la baie James, pour le complexe La Grande en tout cas, et pour les
autres formes d'énergie électrique, notamment celle qu'on peut
produire avec des centrales nucléaires. Nous aurons ces chiffres, selon
ce que nous a dit le premier ministre, au printemps.
M. GARNEAU: Ils ont été...
M. MORIN: Le printemps, si j'en juge d'après le temps
d'aujourd'hui, est sur le point d'expirer.
M. GARNEAU: Oui, on revient à l'hiver; d'ailleurs, il a
neigé. Ces chiffres ont été donnés, à
l'occasion de réunions en commission parlementaire, par les gens
d'Hydro-Québec, la comparaison entre le coût de
l'électricité produite par l'hydraulique et par le thermique
conventionnel, le thermique nucléaire.
M. MORIN: Ces chiffres sont dépassés, M. le ministre, je
pense que vous en conviendrez.
M. GARNEAU: Mais quand même, le chef de l'Opposition va admettre
une chose. On vit dans un monde où, à un moment donné, il
y a des décisions qui doivent être prises. On ne peut pas
retourner à Adam et Eve tous les jours. La décision d'aller de
l'avant avec l'hydroélectrique dans la baie James est prise. Quand
même le chef de l'Opposition reviendra deux fois, trois fois, cinq fois,
si nous devions actuellement modifier notre décision, tous les
investissements qui ont été faits dans la baie James,
jusqu'à maintenant, seraient tout simplement perdus. Et il faudrait se
lancer...
M. MORIN: On ne vous dit pas de mettre complètement fin aux
travaux de la baie James, on vous dit qu'il y a des limites à
l'expansion que peuvent prendre ces travaux. Puisque le ministre a la
métaphore facile et invoque Adam et Eve, je me demande si aujourd'hui,
l'énergie hydroélectrique par rapport à l'énergie
nucléaire, ce n'est pas précisément Adam et Eve. Je me
demande si ce n'est pas lui qui revient à Adam et Eve.
M. GARNEAU: M. le Président...
M. MORIN: Ou alors laissons les métaphores de côté
et parlons de chiffres.
M. GARNEAU: La preuve... Justement, je ne m'attendais pas de reprendre
ce débat ici aujourd'hui, d'autant plus que le problème m'est
soumis via les emprunts. Sous cet angle, je suis bien prêt à en
discuter. D'ailleurs, je ne me sens pas la compétence, je n'ai pas les
dossiers devant moi pour répondre précisément ou
répéter les réponses qui ont été
données aux parlementaires par les spécialistes
d'Hydro-Québec sur le choix qui devait être fait ou qui a
été fait par la suite, ou les études qui ont
précédé ces choix entre le nucléaire et
l'hydraulique.
M. MORIN: Les problèmes, s'il y en a, c'est vous qui allez rester
pris avec eux.
M. GARNEAU: Oui; si le député de Sauvé veut revenir
à l'origine de sa question, il a apporté cette question par le
biais des emprunts.
M. MORIN: C'est juste.
M. GARNEAU: Je lui réponds que pour combler les besoins en
électricité au Québec, que l'on prenne une formule ou
l'autre, le montant d'emprunt qu'il nous faudra réaliser, est le
même. Les informations qui nous ont été données,
c'est que les emprunts nécessaires auraient été plus
grands du côté du nucléaire que de
l'hydroélectrique.
Alors, si on prend la question suivant la même voie
d'entrée que lui a donnée le chef de l'Opposition, je lui dirai
que si jamais ou si par hasard nous devions en modifier une partie, suivant la
suggestion du chef de l'Opposition, et ne pas augmenter le potentiel
exploité de la baie James pour transformer le programme en centrale
nucléaire, le programme d'emprunt qu'il nous faudrait réaliser
serait encore plus grand.
M. MORIN: Ah non! Là, je conteste M. le Président, s'il
m'est permis de le dire. Tout le monde est d'accord qu'au point de vue de
l'immobilisation, les coûts des centrales nucléaires sont
quasiment la moitié des... Ce n'est pas pour cela que le ministre
emprunte. Le ministre me dit qu'il veut se situer dans le cadre des emprunts,
donc de l'immobilisation.
M. GARNEAU: C'est vous qui avez ouvert la porte de ce
côté-là.
M. MORIN: Oui, mais, M. le ministre, attention! Parce que c'est vous qui
êtes en train de glisser sur autre chose.
M. GARNEAU: Je ne glisse pas du tout. C'est que, le problème des
emprunts, on ne peut pas l'analyser séparément de la
rentabilité des équipements que nous voulons financer par des
emprunts. Si j'emprunte $1,000 pour m'acheter une voiture qui va m'occasionner
des dépenses, ce n'est pas la même rentabilité que si
j'emprunte $1,000 pour les investir dans un commerce qui va me rapporter 20
p.c. ou 25 p.c. de rendement. Il y a une différence assez grande que le
chef de l'Opposition doit comprendre.
M. MORIN : Je vais poser la question au ministre d'une autre
façon. Pour le même nombre de kilowatts-heures, est-ce qu'il ne
coûte plus cher en immobilisations et donc en
nécessité d'emprunt, est-ce qu'il en coûte plus cher
avec le complexe de la baie James ou avec l'électricité d'origine
nucléaire? Je dis bien au kilowatt-heure.
M. GARNEAU: En termes d'emprunt, en termes de référence au
kilowatt-heure, je ne suis pas en mesure de répondre maintenant à
cette question.
M. MORIN: Vous devriez, M. le ministre.
M. BOUTIN (Johnson): II ne faut pas charrier.
M. GARNEAU: J'ai l'impression...
M. MORIN: C'est le ministre qui emprunte.
M. BOUTIN (Johnson): Oui, mais cela ne fait rien, on va...
M. MERCIER: Vous avez trouvé cela dans vos papiers ce matin, je
suppose?
M. MORIN: Dans tout le dossier, si cela vous intéresse. Je vois
que le député ne connaît pas le dossier.
M. MERCIER: II s'est réveillé ce matin avec cela.
M. MORIN: Le ministre devrait le connaître et j'ai l'impression
que le ministre le connaît mais que les chiffres pourraient être
embarrassants. J'aimerais bien qu'il s'explique.
M. BOUTIN (Johnson): Ce sont vos prétentions.
M. GARNEAU: Ce qui m'embarrasse le plus, c'est l'attitude du chef de
l'Opposition.
M. MORIN : J'en conviens.
M. BOUTIN (Johnson): II revient toujours avec la même chose.
M. GARNEAU: C'est cet acharnement...
M. MERCIER: II va retourner au budget de l'an l.
M. GARNEAU: ... à vouloir faire indéfiniment le
débat sur le choix de l'hydroélectrique face au
nucléaire.
A chaque fois qu'il arrive une question, qu'il y a une rivière
qui déborde quelque part ou qu'il y a un égout qui se bouche
quelque part, on nous revient perpétuellement avec le problème de
la pollution.
M. MORIN: Pas la pollution encore. Laissez ça au premier
ministre.
M. GARNEAU: On nous revient avec ça régulièrement,
alors que si on optait pour les centrales nucléaires... Je pourrais
donner au chef de l'Opposition, s'il me laissait le temps de mettre la main sur
ces pages d'annonces payées par des groupes de citoyens aux Etats-Unis
où on faisait des pressions auprès des gouvernements pour qu'ils
ne construisent pas de centrales nucléaires à proximité
des centres urbains; on demandait que ce soit éloigné, en pleine
forêt pour éliminer la pollution... Le chef de l'Opposition et son
parti, qui font continuellement des débats là-dessus...
M. MORIN: Vous ne faites pas dévier le débat, M. le
ministre.
M. MERCIER: Lui non plus.
M. BOUTIN (Johnson): Vous avez introduit le débat, laissez-le
répondre.
M. GARNEAU: Vous nous revenez avec le choix entre le nucléaire et
l'hydroélectrique.
M. MERCIER: II est en train tout simplement d'expliquer votre
attitude.
M. MORIN: Je vous ai posé une question d'ordre financier.
M. BOUTIN (Johnson): Vous n'êtes pas si mal, laissez-le
répondre.
M. GARNEAU: C'est cette attitude du chef de l'Opposition qui veut
revenir toujours... On dirait qu'ils se sentent mal à l'aise d'avoir eu
des chiffres aussi éloquents d'Hydro-Québec démontrant
l'avantage pour le Québec de développer la baie James sans le
nucléaire et ils ne sont pas capables... il me semble qu'ils devraient,
à un moment donné, en gens sérieux, en hommes
sérieux, regarder les dossiers, les piles de documents qui ont
été déposés ici, les argumentations des
spécialistes qui ont été données et accepter qu'ils
ont peut-être eu tort...
M. BOUTIN (Johnson): Ils n'accepteront jamais ça, ah non!
M. GARNEAU: ... et ils ne veulent pas l'accepter. Si vous me parlez
d'emprunt, dans ce cadre, je vous dis que je n'ai pas devant moi, les chiffres
qui me donneraient le montant d'emprunt par kilowatt-heure dans un secteur ou
dans l'autre, j'imagine bien qu'Hydro-Québec pourrait donner ces
chiffres, mais ce que vous voulez dire...
M. MORIN: Cela vous intéresserait tout de même.
M. GARNEAU: ... ce qui m'a intéressé, c'est la
rentabilité globale du projet là où j'ai discuté
avec les gens d'Hydro-Québec. D'ailleurs, quand ils sont venus ici
à la commission, j'ai posé des questions aux responsables
d'Hydro-Québec et
non seulement sur le plan technique mais sur le plan financier, ce qui
m'intéressait à ce moment, c'était de comparer la
rentabilité des deux projets. Comme ministre des Finances, responsable
de l'ensemble des emprunts d'Hydro-Québec, parce que nous les
garantissons, je peux vous dire qu'il est plus facile de faire des emprunts
à bon compte dans des meilleures conditions avec un projet dont la
rentabilité est démontrée clairement plutôt que de
le faire par une option dont la rentabilité est connue comme
étant moindre que l'option hydroélectrique. Alors, je pense bien
que si on se place dans le domaine des emprunts, c'est le fond de
l'histoire.
M. MORIN: Reprenons la chose par la base.
Est-ce que le ministre est au fait que du point de vue des
immobilisations, les centrales nucléaires, pour le même rendement
en kilowatts-heures, coûtent moins cher que les aménagements
hydroélectriques. Est-ce que le ministre sait cela?
M. GARNEAU: M. le Président, je ne suis pas le chef de
l'Opposition sur la voie sur laquelle il s'oriente, parce que c'est une voie
qui est complètement fausse, parce que l'emprunt en lui-même n'a
de valeur que s'il s'applique à un projet dont la rentabilité est
évidente et meilleure que s'il s'applique à un autre projet dont
la rentabilité est moindre, dont le coût d'opération est
plus élevé, dont les profits d'opération, à la fin
de l'exercice, sont plus bas. Je ne peux pas me raisonner sur la voie, ou
discuter sur la voie que le chef de l'Opposition veut donner au débat,
parce que ce serait un faux débat.
M. MORIN: Qui vous conduirait à des conclusions que vous
connaissez...
M. GARNEAU: Non, parce que c'est un faux débat.
M. MORIN: ... et qui vous embêtent.
M. GARNEAU: C'est un faux débat, et le chef de l'Opposition le
sait aussi. Tout simplement, c'est cet entêtement à vouloir rester
les deux pieds dans le ciment, accrochés à une décision
qu'ils savent ne pas être dans les meilleurs intérêts du
Québec. Mais politiquement, vous êtes pris avec et vous êtes
obligés de la soutenir et de continuer à la défendre.
M. MORIN: Vous allez être pris vous-mêmes, dans quelques
années, à mettre le paquet sur le nucléaire...
M. BOUTIN (Johnson): On verra, on verra.
M. MORIN: C'est peut-être le ministre qui fera les emprunts. On en
reparlera.
M. BOUTIN (Johnson): En temps et lieu.
M. MORIN: Deuxième question que je voudrais poser au ministre. Du
point de vue des emprunts qui est le cadre à l'intérieur
duquel je l'interroge en ce moment est-ce qu'il est conscient du fait
qu'avec la tournure actuelle des événements à la baie
James, il pourrait être pris pour emprunter entre $1 milliard et $2
milliards en 1979/80?
M. GARNEAU: Je crois que c'est dans l'ordre des possibilités. Si
ma mémoire m'est fidèle, me reportant aux chiffres qui avaient
été donnés ici même à la commission, le
sommet devrait nous porter vers ces années-là et était de
l'ordre d'un milliard... entre $1 milliard et $1,200 millions. S'il y a un
changement dans le rythme de réalisation des travaux ou encore un
changement dans l'ampleur de l'énergie qui sera mise en valeur, c'est
évident que cela pourrait être un peu plus, mais est-ce que ce
sera en 1977, en 1978, en 1979? Ces variations me seront connues un peu plus
tard.
M. MORIN : Maintenant, sur la base des témoignages
d'Hydro-Québec, il était démontré que les centrales
nucléaires feraient beaucoup moins appel à la capacité
d'emprunt du Québec, qui est déjà saturée, comme on
vient de le voir, du moins aux yeux de certaines sociétés
étrangères, sociétés de finance
étrangères. Est-ce que le ministre reverrait son jugement
à ce moment-là? Est-ce qu'il est assez ouvert pour cela?
M. GARNEAU: M. le Président, ce sont les spécialistes
d'Hydro-Québec qui ont conseillé le gouvernement dans l'option de
l'hydroélectrique au lieu du nucléaire.
M. BURNS: Vous leur avez tordu un peu le bras.
M. GARNEAU : M. le Président, par les documents qui nous ont
été déposés par les spécialistes
d'Hydro-Québec, je ne vois pas comment un ministre peut tordre le bras
pour faire produire des documents semblables. Je ne vois pas du tout quel
aurait été l'intérêt du Québec de poser de
tels gestes. Je ne sache pas que les gens qui sont venus témoigner
à la commission parlementaire des richesses naturelles, lors de la
décision de l'implantation du projet de la baie James, l'on fait
à la pointe du révolver. Ils ont témoigné
très librement et ici, je me rappelle les questions posées par
l'Opposition à ce temps-là, en particulier par l'Opposition
péquiste. Chacune des questions qu'elle a posées a
été démolie en fait, chacune des propositions ou des
options qu'elle a faites a été démolie par les
spécialistes d'Hydro-Québec. Le député de
Sauvé peut bien lancer cela comme un ballon d'essai, mais cela n'a rien
à voir avec la réalité.
M. MORIN: Ce sont des chiffres, M. le Président.
M. GARNEAU: Les chiffres ont été donnés. Si vous
vous fiez aux chiffres, prenez-les.
M.MORIN: Dès 1972, d'après les chiffres mêmes
d'Hydro-Québec, le ministre le sait, pour les projets de la baie James
et les projets nucléaires, du point de vue de la rentabilité au
mil, c'était à peu près égal dans les deux cas.
Avec l'augmentation des coûts de la baie James...
M. GARNEAU: II a été démontré à cette
commission-ci que l'option hydroélectrique économisait, si ma
mémoire m'est fidèle, $250 millions par année aux
consommateurs d'électricité du Québec. Je ne vois pas
comment le chef de l'Opposition, le député de Sauvé, peut
dire cela clairement.
M. MORIN: Ce n'est pas cela qui avait été
démontré. Ce qui avait été démontré,
c'est que la différence était minime. C'était à
peine un à deux mils le kilowatt-heure.
M. GARNEAU: Je réfère le député de
Sauvé aux débats qui sont enregistrés, qui ont eu lieu
ici.
M. MORIN: Je les ai lus, je les connais très bien.
M. GARNEAU: Si vous les avez lus, c'est cela qui a été
confirmé et reconnu.
M. MORIN: La rentabilité était grosso modo la même,
surtout au point de vue des immobilisations.
M. GARNEAU: C'était $250 millions par année pour les
consommateurs d'électricité québécois.
C'était $250 millions par année qui étaient sauvés
par cette option en plus de développer tout un secteur du territoire
québécois qui était complètement désert et
dont les richesses n'étaient absolument pas exploitées.
M. MORIN: Je voudrais dire au ministre, plus sous forme de question,
parce que je vois que cela ne mène nulle part, qu'avec l'augmentation
des coûts et...
M. GARNEAU: ... le débat ne mène nulle part.
M. MORIN: ... si, de surcroît, vous êtes obligés de
payer 10 p.c, 11 p.c. ou 12 p.c. sur les emprunts que vous allez avoir à
faire pour financer ce projet, je suis prêt à parier, on en
parlera certainement dans les années qui viennent, que le ministre va
être obligé de resonger sérieusement à ces
programmes d'emprunt, parce qu'il n'est pas sorti du bois.
M. GARNEAU: Le député de Sauvé ne devrait pas
parier d'une façon trop élevée, parce qu'il pourrait se
ramasser avec une faillite sur les bras.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Avant de passer la parole au
député de Beauce-Sud, j'aimerais, pour les fins du journal des
Débats, noter les changements des membres de la commission pour ce
matin. M. Boutin, de Johnson, remplace M. Boutin, d'Abitibi-Ouest; M.
Larivière, de Pontiac-Témiscamingue, remplace M. Harvey, de
Jonquière; M. Shanks, de Saint-Henri, remplace M. Lévesque, de
Bonaventure et M. Giasson, de Montmagny-L'Islet, remplace M. Parent, de Hull.
M. le député de Beauce-Sud.
M. ROY: M. le Président, puisqu'on parle un peu du financement
d'Hydro-Québec, étant donné les hausses de coûts qui
sont dues à l'inflation et possiblement aux hausses de coûts qui
vont être occasionnées par le fait des retards, suite aux
événements survenus dans l'aménagement de tout ce secteur
de la baie James, le ministre pourrait-il nous dire à ce moment-ci si,
dans l'ordre de grandeur des emprunts globaux qui doivent être consentis
pour financer cet immense projet on avait parlé de $6 milliards
on prévoit maintenant que ce montant pourra être
augmenté? Je me réfère un peu aux propos qu'a tenus le
premier ministre il n'y a pas tellement longtemps selon lesquels il se
pourrait, à un moment donné, que ce soit même
nécessaire d'emprunter jusqu'à $8 milliards. J'aimerais que le
ministre des Finances nous dise...
M. GARNEAU: Je ne sais pas si le député de Beauce-Sud
était là, parce que je viens tout juste de répondre
à cette question. Peut-être n'était-il pas entré
à ce moment?
M. ROY: Je n'étais pas entré. Je m'excuse.
M. GARNEAU: La question a été posée d'une
façon identique par le chef de l'Opposition. Peut-être que le
député de Beauce-Sud, en relisant les débats, va...
M. ROY: Pour répondre brièvement, est-ce que vous
prévoyez...
M. GARNEAU: J'ai indiqué que je n'étais pas en mesure,
à ce moment, de le faire, et ceci en accord avec la déclaration
que le premier ministre a faite en Chambre lorsqu'il a indiqué que, soit
à la fin de mai ou au début de juin, la commission parlementaire
des richesses naturelles siégerait pour entendre les
représentants d'Hydro-Québec et de la Société de la
baie James. Elle siégerait pour donner toutes les réponses aux
questions qui peuvent être posées non seulement du
côté de l'Opposition, mais également du côté
des ministériels, sur l'évolution du projet de la baie James,
quant aux coûts du programme tels qu'ils avaient été
annoncés,
également concernant les changements qui pourraient être
apportés suite à une décision qui pourrait être
prise d'accroître le potentiel exploité des chutes d'eau, des
rivières qui se déversent dans la baie James.
M. ROY: Supposant que le montant nécessaire soit de l'ordre de $6
milliards je pense bien que tout le monde sera d'accord pour dire que $6
milliards, c'est devenu un chiffre minimum, ce n'est même plus un
maximum et compte tenu également du coût de
l'intérêt, si on fait un calcul assez rapide, M. le
Président, avec les frais d'émission d'obligations et
l'administration du service de la dette, on peut facilement en venir à
un coût de 10 p.c, parce que l'emprunt qui vient d'être consenti
aux Etats-Unis a été consenti en dollars américains. On
sait qu'Hydro-Québec emprunte majoritairement aux Etats-Unis, sur le
marché américain. Il y a quand même des risques de ce
côté, compte tenu des fluctuations possibles de la monnaie
américaine, par rapport au dollar canadien. Il faut quand même
admettre, je pense, qu'il en coûterait quelque $600 millions
d'intérêt annuellement pour financer ce projet. Est-ce que le
ministre veut dire, compte tenu que les revenus globaux d'Hydro-Québec
se chiffrent par $450 millions environ je n'ai pas le bilan devant moi;
ils se chiffrent par $450 millions ou $500 millions environ qu'il nous
faudrait envisager dès maintenant que le taux de
l'électricité serait doublé d'ici 1980?
M. GARNEAU: Le député de Beauce-Sud sait que les
intérêts qui s'appliquent aux emprunts qui sont nécessaires
pour réaliser l'aménagement de la baie James, comme d'ailleurs
d'autres projets de cette nature, sont capitalisés. Ils font partie
intégrale du coût de construction ou de l'ensemble de
l'investissement qui est réalisé. Que ce soit pour la baie James
ou encore les centrales nucléaires qui se construisent à
Gentilly, les charges d'intérêt pendant la construction sont
capitalisées de telle sorte qu'on ne peut pas faire le lien direct entre
les ventes de l'électricité et le coût de la vente de
l'électricité pour les activités régulières
d'Hydro-Québec à partir des centrales déjà en
exploitation, que ce soient les centrales thermiques, nucléaires ou
hydrauliques. Il y a quand même, je pense, une distinction qu'il faut
faire.
Deuxièmement, les réalisations de ces travaux ne se feront
que sur une période donnée. Actuellement, peut-être que
pour le programme d'emprunt de 1974, les taux d'intérêt sont plus
élevés qu'il serait souhaitable, mais je suis réellement
dans l'impossibilité... Je connais peu de monde qui pourrait dire quels
seront les taux d'intérêt sur les emprunts qui seront faits en
1975, 1976 ou 1977. Dans ce genre d'évaluation, on essaie de prendre une
moyenne, et il peut y avoir des hauts et des bas. C'est la même chose du
côté des taux de change.
Comme il y a des émissions qui s'échelonnent sur plusieurs
années et qui se rapportent à des emprunts antérieurs, des
emprunts qui seront faits dans l'avenir, les variations dans les taux de change
pourront apporter des plus et des moins, selon les années où les
emprunts ont été faits, le taux de change qui existait à
ce moment et les taux de change qui existeront au moment du remboursement. Le
risque est moins grand lorsque nous avons un portefeuille qui
s'échelonne ainsi sur plusieurs années, de telle sorte que, sur
une longue période, les plus et les moins s'annulent et on peut arriver,
à moins de situations véritablement catastrophiques, à une
évaluation moyenne qui soit conforme et qui soit assez réaliste
dans le coût véritable de construction ou de réalisation de
ces projets.
Si nous n'avions qu'une seule émission de faite, qu'elle venait
à échéance à une seule année et que
c'était le seul élément du portefeuille, ou des dettes
à long terme d'Hydro-Québec, le risque je suis d'accord
avec le député de Beauce serait plus grand, mais telle
n'est pas la situation.
M. ROY: Telle n'est pas la situation, j'en conviens bien, mais il
demeure un fait. Si on se réfère et qu'on regarde un peu
l'analyse de l'évolution des taux d'intérêt depuis 1960, il
y a peut-être eu des baisses périodiques, mais on peut dire que,
dans l'ensemble, les taux d'intérêt ont augmenté
continuellement. Alors, il ne semble y avoir aucune indication non plus sur le
marché financier, sur le plan international, selon laquelle il y aurait
une baisse éventuelle des taux d'intérêt d'ici quelques
années.
Il est évident que c'est une question purement
hypothétique et nous serions les premiers à souhaiter qu'il y ait
une baisse des taux d'intérêt. Mais, compte tenu que les taux
d'intérêt sont influencés par la loi de l'offre et de la
demande et, comme on le signalait tout à l'heure, que ces besoins
d'emprunt sont extrêmement grands parce que nous avons le
développement économique de la province qui requiert des sommes
d'argent fantastiques et, compte tenu que nous sommes obligés de nous
contenter, à l'heure actuelle, de la législation et de la
tradition en matière d'administration et de gestion financière...
Parce qu'on ne semble pas, du moins c'est ce que j'en ai déduit des
déclarations du ministre hier, s'en aller vers des solutions qui
pourraient permettre de corriger ce qui pourrait et ce qui doit être
corrigé.
C'est la raison pour laquelle j'ai posé ma question au ministre
dans ce sens. Si les tendances actuelles se maintiennent, il ne fait aucun
doute que, si nous sommes obligés d'emprunter $6 milliards, à
partir du moment où les constructions seront finies et où on
commencera à produire de l'électricité, les
intérêts ne seront plus capitalisés. Je suis bien d'accord
que c'est un principe comptable et que
c'est un principe d'affaire que les intérêts soient
capitalisés pendant le coût de la construction, mais, une fois que
cela sera en marche, le coût des intérêts sera inclus dans
le budget annuel.
Or, si nous devons payer de $600 millions à $700 millions par
année d'intérêt, une fois que l'aménagement de ce
complexe hydroélectrique sera terminé, il faudra bien, je pense,
et le ministre en conviendra également, que le gouvernement ou encore
Hydro-Québec ou encore le gouvernement, étant donné qu'on
peut examiner, non pas prendre de décision au niveau
d'Hydro-Québec, mais on peut interroger Hydro-Québec lorsqu'elle
décide d'augmenter ses taux d'électricité... On n'aura pas
d'autre choix que de subir l'augmentation des taux d'électricité
au double d'ici quelques années, je serais même porté
à dire d'ici 1980, parce qu'en 1980, il y aura quand même une
certaine forme d'exploitation qui débutera. Du moins, selon les
échéances qu'on nous a données.
M. GARNEAU: II y a quand même une chose qu'il faut souligner, et
cela fait ressortir l'avantage de l'hydroélectrique sur d'autres types
de production d'électricité. D'abord, dans un premier temps, tout
le coût de construction est amorti sur une période d'une
cinquantaine d'années. Donc, l'amortissement étant pris sur une
période de 50 ans au lieu de 20 ans ou de 25 ans dans le
nucléaire, cela permet d'étaler les charges sur une
période beaucoup plus longue et de répartir les charges sur une
couple de générations, alors que, dans l'autre cas, il aurait
fallu passer à une seule génération tout le coût de
cet équipement.
On me signale le cas du barrage de Beauharnois, qui a été
payé et remboursé et qui produit encore de
l'électricité, alors qu'il a un coût d'exploitation
très faible. C'est l'avantage des centrales hydroélectriques, si
on les compare aux centrales thermiques, qui ont une vie beaucoup plus longue,
où l'amortissement peut être fait sur une période beaucoup
plus longue et où, en somme, on peut avoir par le volume
d'électricité consommé dans le temps, une charge plus
mince, donc des taux d'électricité plus bas. L'avantage
également des centrales nucléaires, me référant
toujours au sens de la question qu'a posée le député de
Beauce-Sud, l'avantage d'une centrale, je corrige hydroélectrique, c'est
qu'une fois que les travaux sont réalisés, les coûts
d'exploitation ne subissent plus l'influence, l'augmentation du coût de
la vie, parce que, évidemment, c'est de l'eau qui coule et les turbines,
comme je l'ai indiqué, sont dépréciées sur une vie
très longue, de telle sorte que le coût n'est plus
influencé ou pratiquement plus par l'inflation. C'est difficile de dire
quelles seront les augmentations qui pourront avoir lieu dans la vente
d'électricité en 1980. Je regarde l'Ontario, par exemple,
où, dans la consommation directe, il y a une augmentation de 10 p.c. en
1974. Il y en a une de 10 p.c. en 1973. Il y en avait eu une de 9 p.c. en 1971,
indépendamment des types de consommateurs, mais c'est évident que
l'Ontario a sa production d'électricité à partir de
centrales nucléaires et de centrales thermiques. Evidemment, quand vous
produisez de l'électricité avec le pétrole, imaginez-vous
ce que cela peut avoir grimpé comme coût de production. L'Ontario
est obligé de le faire porter par les consommateurs. On a l'avantage au
Québec de ne pas connaître cette situation. C'est pourquoi nous
avons, avec des rapports d'Hydro-Québec en ce sens opté pour
l'énergie hydroélectrique plutôt qu'une autre forme
d'énergie, parce que, du moment qu'on part du principe qu'il faut
produire l'électricité et que cela va coûter de l'argent
pour la réaliser, la meilleure façon que l'impact soit le moins
grand sur le consommateur, c'est l'option hydraulique.
M. ROY: C'est que justement il n'y a pas d'inflation dans les
rivières et les cours d'eau.
M. GARNEAU: C'est cela.
M. ROY: Ce qui prouve que ce n'est pas le Créateur qui a
créé l'inflation.
M. BACON: Est-ce que vous iriez dire cela aux gens qui sont
inondés de ce temps-là?
M. ROY: On a l'impression quand on parle de l'inflation...
M. BACON: Iriez-vous dire cela aux gens qui sont inondés de ce
temps-là?
M. ROY: On a l'impression, quand on parle de l'inflation devant une
commission parlementaire ou encore à l'Assemblée nationale, que
c'est une chose qui fait partie de la création. J'ai bien aimé
l'exposé du ministre, parce qu'il vient de nous prouver qu'une
inflation, c'est un problème humain.
M. GARNEAU: La question fondamentale est de savoir si Dieu est
inflationniste.
M. ROY: C'est un problème humain. C'est le ministre qui vient de
le dire, c'est pour cela que j'ai aimé cela et que j'ai
écouté religieusement le ministre. L'inflation n'est pas dans les
lacs, dans les rivières, l'inflation est dans le système. Le
ministre est très au courant que l'Agence canadienne de
développement, dans son grand programme d'aide aux pays en voie de
développement...
M. GARNEAU: C'est juste.
M. ROY: ... et le Québec, la région de la baie James,
c'est une région en voie de développement... On sait très
bien que...
M. GARNEAU: Vous êtes en train de faire un syllogisme.
M. BACON: C'est pour cela qu'on est content quand on vous voit arriver
en commission.
M. ROY: C'est une région en voie de développement. On sait
très bien que l'Agence canadienne de développement,...
M. GARNEAU: Donc!
M. ROY: ... donc, a consenti, soit aux Indes, à différents
pays, des prêts sans intérêt le ministre est au
courant de cela remboursables sur des périodes de 50 ans, avec
dix ans de grâce. Il y en a pour quelque $300 millions de consentis,
uniquement sur des questions d'aménagement hydroélectrique. Le
ministre est au courant de cela? Est-ce que le ministre est au courant de
cela?
M. GARNEAU: Oui, je sais bien que...
M. ROY: 50 ans de grâce?
M. GARNEAU: ... de donner. Le ministre...
M. ROY: Si la même possibilité vous était offerte,
est-ce que vous l'accepteriez?
M. GARNEAU: Certainement.
M. ROY: Est-ce que vous avez fait des démarches pour l'avoir?
M. GARNEAU: M. le Président... Je pense que l'éclat de
rire autour de la table est la meilleure réponse que je peux donner au
député de Beauce-Sud.
M. MORIN: Ce n'est pas une réponse, M. le ministre, parce que ce
sont des libéraux, des partisans.
M. GARNEAU: J'espère que le député de
Sauvé...
M. BACON: Avez-vous suivi comme il faut au moins?
M. MORIN: J'ai suivi le débat avec intérêt.
M. GARNEAU: Non, il parle sans intérêt, monsieur le
député de Sauvé.
M. ROY: On peut suivre le débat avec intérêt parce
qu'en réalité c'est de l'intérêt intellectuel, si
vous voulez, il n'y a pas d'inflation là-dessus.
M. BACON: II n'y a certainement pas d'inflation dans ce
domaine-là.
M. GARNEAU: Une inflation verbale.
M. ROY: Avec l'esprit du député de Trois-Rivières,
il n'y en a pas non plus.
M. MORIN: Le député de Trois-Rivières... je
pourrais lui expliquer, mais je pense qu'il ne serait pas content de la
réponse.
M. ROY: C'est plutôt un cas d'inflation...
M. GARNEAU: Cela a pris trop de temps à venir; elle ne serait pas
réelle, votre réponse.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!
M. GARNEAU: Parce que dans le processus intellectuel du
député de Beauce-Sud...
M. ROY: Non, je ne veux pas, M. le Président... Je ne voudrais
pas être tenté de faire une analyse du processus intellectuel du
ministre.
M. GARNEAU: Laissez-moi finir.
M. ROY: J'aimerais qu'il s'en tienne à ma question. J'ai
posé une question. Vous avez répondu tout à l'heure que si
la même possibilité vous était offerte...
M. GARNEAU: Est-ce que j'ai dit des bêtises au
député de Beauce-Sud?
M. ROY: Non, mais quand vous vous orientez de ce
côté-là...
M. GARNEAU: Loin de moi l'idée de...
M. ROY: Je me connais et je serais tenté, M. le Président,
d'entrer dans le même débat.
M. GARNEAU: Ce n'est réellement pas mon intention. Si je suis le
processus intellectuel du député de Beauce-Sud, il a posé
ses hypothèses de départ, il a considéré la baie
James au même titre que les pays en voie de développement et il a
dit : Donc, il devrait y avoir, etc. Pourquoi me pose-t-il cette série
de questions? Je peux prétendre que c'est parce que c'est
rattaché à sa philosophie des prêts sans
intérêt. Je dirais au député de Beauce-Sud...
M. ROY: Cela se fait, des prêts sans intérêt.
M. GARNEAU: Attendez un peu. Il y a quelqu'un qui paie. Ceux qui paient
ce sont les contribuables canadiens qui empruntent de l'argent, qui paient le
service de la dette et cet argent est prêté de nouveau sans
intérêt. C'est en quelque sorte une subvention qui est offerte par
les Canadiens pour venir en aide au pays en voie de développement.
M. ROY: On parlera de la Banque d'expansion industrielle
tantôt.
M. GARNEAU: Je ne parle pas de la Banque d'expansion industrielle, je
parle du processus de l'ACDI que vous avez développé et je vous
dis que le principe justement, le sens de votre
question, c'est le prêt sans intérêt; c'est normal,
je pense que c'est normal. C'est la thèse que vous soutenez, en tout cas
que votre parti politique soutient. Je vous dis que le prêt sans
intérêt, dans ce cas, ce n'est pas une création de
crédit sans intérêt, c'est tout simplement une façon
d'aider des pays qui sont en voie de développement à financer des
projets d'expansion. Mais il reste que les Canadiens, par leur taxation, par
les prélèvements qui se font par la taxation, paient de
l'intérêt sur cet argent emprunté qui est ensuite
reprêté sans intérêt. C'est donc une subvention
indirecte, ce n'est pas une formation de crédit qui est mis à la
disposition et dont personne ne supporterait le coût en termes de
location d'argent. Je peux bien dire au député de Beauce-Sud que
c'est évident que n'importe quel organisme qui m'offrirait actuellement
ou qui offrirait au député de Beauce-Sud ou à n'importe
quel membre autour de cette table un prêt sans intérêt... Il
serait bien imbécile celui qui dirait: Non, je ne veux pas le prendre,
parce que même s'il n'en a pas besoin, il se retourne et le place en
dépôt à court terme à la banque actuellement
à 10 p.c, 10 1/4 p.c, 10 1/2 p.c.
M. ROY: Le ministre ne fait pas encore de distinction ce matin. Je ne
voudrais pas analyser le processus intellectuel du ministre, mais il ne fait
pas de distinction et je pense que nous en avons discuté
suffisamment longtemps hier soir pour dire qu'il y a une nuance à
apporter lorsqu'il s'agit du capital public et du capital privé, du
crédit public et du crédit privé, du crédit de la
société ou du crédit privé. Alors, il est
évident que si on veut mélanger tout cela, on n'est pas sur la
même longueur d'ondes pour discuter de la question. C'est évident
et cela ne sert à rien de continuer le débat de ce
côté-là parce qu'on n'est absolument pas sur la même
longueur d'ondes.
Lorsqu'on parle du crédit privé et qu'on parle du
crédit public, le crédit de la société, on ne parle
pas de la même chose. De toute façon, j'ai bien aimé que le
ministre nous dise qu'il serait heureux d'en profiter, mais je regrette
autrement dit qu'on ne semble pas vouloir faire de démarche de ce
côté, de façon à utiliser les institutions qui sont
chez nous pour faire des réformes. Il est évident qu'à
partir de ce moment, ce sont les contribuables qui paient. On paie une
servitude, on paie des droits de passage pour pouvoir utiliser notre propre
crédit. C'est sûr.
M. GARNEAU: Est-ce que je peux poser une question au
député de Beauce-Sud? Est-ce qu'il est réellement
sérieux lorsqu'il me fait la suggestion, en tant que ministre des
Finances, d'aller rencontrer M. Paul Gérin-Lajoie de l'ACDI pour lui
demander s'il serait prêt à faire un prêt sans
intérêt pour le développement de la baie James? Il est
réellement sérieux en me faisant cette suggestion?
M. ROY: M. le Président, je vous ai demandé si vous
étiez prêt à faire des démarches de façon
à pouvoir utiliser le crédit canadien, le crédit de la
société québécoise afin d'utiliser...
M. GARNEAU: Vous avez parlé de l'ACDI, c'est pour ça
que...
M. ROY: Oui, je vous en ai parlé parce que ça se fait
présentement et, lorsque le ministre dit que nous payons des taxes de ce
côté, je lui dirai que je lui donnerai raison, mais je ne lui
donnerai raison que partiellement. Parce que le ministre est très au
courant que toute la comptabilité des comptes internationaux entre en
ligne de compte, et ce n'est pas toujours vrai que le gouvernement
fédéral est obligé d'emprunter, est obligé de
souscrire à des emprunts publics pour financer tout le montant qui,
ainsi constitué, pourrait venir en aide aux pays en voie de
développement. Ce n'est vrai que partiellement, mais si c'est possible
partiellement parce que si c'est vrai partiellement, c'est faux
partiellement il y aurait peut-être lieu d'examiner cette
question.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Sauvé.
M. MORIN: M. le Président, j'aimerais passer à la question
suivante. Combien le ministre prévoit-il vendre de nouvelles obligations
d'épargne au cours de la présente année
financière.
M. GARNEAU: J'ai indiqué hier que, suivant les renseignements que
nous avions, l'ordre de grandeur que nous escomptons retirer de notre
série d'obligations d'épargne qui est actuellement en vente
était de l'ordre de $50 millions à $60 millions.
M. MORIN: En plus de ce qui est déjà vendu.
M. GARNEAU: C'est-à-dire que nous sommes actuellement dans la
période de vente qui se terminera le 31 mai et, en tout et partout, cela
atteindra entre $50 millions et $60 millions.
M. MORIN: Dans un article paru en novembre 1973, à propos de la
vente des obligations d'épargne du Canada et le ministre sait
qu'il s'en est vendu pour un peu plus de $1 milliard le ministre des
Finances, M. Turner, avait indiqué que plus du tiers des obligations
vendues à cette époque l'avaient été selon le mode
d'épargne sur le salaire et que cela avait été un
procédé extrêmement avantageux. Il s'en était vendu
pour $371 millions de cette façon. Est-ce que le ministre a songé
à utiliser cette méthode pour accroître les ventes
d'obligations québécoises?
M. GARNEAU: Le député de Sauvé se
réfère à un article de journal et...
M. MORIN: C'est un communiqué du gouvernement.
M. GARNEAU: Cela me surprend beaucoup parce que, lorsque nous avons
étudié cette possibilité d'étendre la vente
d'obligations d'épargne par retenue sur le salaire, nous avions
vérifié, avec les responsables de l'administration de ces ventes
d'obligations d'épargne à la Banque du Canada... En fait, le
responsable était M. Jacques Bussières, qui a cette
responsabilité à la Banque du Canada. Je parle de mémoire,
je ne voudrais pas induire la commission en erreur, il faudrait
référer aux réponses que j'ai données l'an dernier
lors de la discussion des crédits de mon ministère où
j'avais devant moi les chiffres qui nous avaient été transmis. Si
ma mémoire me sert bien, c'était de l'ordre de 8 p.c. qui
s'étaient vendues par retenue sur le salaire, ce qui ne serait pas
conforme à ce que rapporte l'article du journal. C'est pourquoi je ne
veux pas mettre en doute le communiqué, mais cela ne m'apparaît
pas en conformité avec les informations qui nous avaient
été transmises.
M. MORIN: C'est postérieur aux crédits de l'année
dernière.
M. GARNEAU: Cela aurait été un changement d'attitude
fondamental avec l'expérience accumulée au cours des
années antérieures dans la vente d'émissions d'obligations
d'épargne, en termes de volume. Deux autres types d'arguments nous
incitaient à ne pas le faire. C'est que la durée de vie de ces
titres achetés par retenue sur le salaire était relativement
courte pour la plupart des gens qui achètent ces choses, c'est une
façon d'épargner pour eux et ils achètent une obligation
d'épargne du Canada par retenue sur le salaire en vue de financer les
prochaines vacances ou encore d'acheter une voiture dans X mois ou au terme
d'une année ou d'une année et demie.
Alors, c'était le deuxième facteur qui nous avait
empêchés d'entrer dans la vente via ce mécanisme. Le
troisième était le coût administratif assez
élevé que cela comporte. C'est évidemment un
mécanisme administratif assez complexe que de vendre une émission
de $100, $200 ou $500 par retenues sur le salaire hebdomadaire ou bimensuel ou
mensuel, de telle sorte qu'au terme de l'analyse, cela faisait de l'argent qui
était emprunté à un taux d'intérêt
passablement élevé.
C'étaient les trois raisons qui nous avaient amenés
à ne pas offrir nos obligations d'épargne par ce véhicule.
Le premier, c'était que l'expérience qu'on nous avait
donnée à la Banque du Canada était que les montants
étaient relativement faibles par rapport à l'ensemble des titres
vendus; le deuxième, que la longueur de vie était plus courte et,
le troisième, c'était le coût administratif.
M. MORIN: Bien. Il semble que l'article précité ait
émané, à l'époque, d'un communiqué du
ministère des Finances. Je vais citer deux courts paragraphes. Le
montant total des obligations d'épargne du Canada vendues pour
l'émission 1973/74 atteint la somme de $1 milliard, indique un
communiqué du ministère des Finances. Le ministre des Finances,
M. John Turner, signale que les ventes brutes incluant les achats records de
$371 millions faits selon le mode d'épargne sur le salaire
étaient à peu près conformes aux objectifs de vente
initiaux. A moins que le ministre ait des chiffres pour démentir cela,
je serais prêt à accorder une certaine crédibilité
à un tel communiqué. La question que je voudrais poser au
ministre est la suivante: Dans l'hypothèse où plus du tiers des
obligations fédérales s'est vendu de cette façon,
même avec les autres réserves qu'il a exprimées sur les
titres à court terme et tout cela, est-ce qu'il ne serait pas
intéressant d'en faire l'expérience?
M. GARNEAU: Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, je ne
veux pas entrer en contradiction avec les propos que tient le chef de
l'Opposition, d'autant plus qu'il me lit un communiqué, mais j'aimerais
avoir bénéfice d'inventaire avant de souscrire à cette
ligne de pensée, parce que cela ne m'apparait pas en conformité
avec les informations qui nous avaient été transmises dans le
temps.
M. MORIN: D'accord. Sous bénéfice d'inventaire. ..
M. GARNEAU: II y a un autre point aussi que me souligne mon
sous-ministre. C'est que, d'une année par rapport à l'autre, le
volume, semble-t-il, qui est acheté par retenues sur le salaire est
relativement identique et, selon l'ampleur de l'émission, le pourcentage
peut varier. Mais la somme qui est perçue par cette voie... Evidemment,
il y a une clientèle pour cela et elle est assez stable. Mais sans
vouloir mettre de côté complètement cette option, je
voudrai certainement revoir l'expérience, s'il y a eu des changements
pour des raisons que j'ignore, revoir cette expérience de la Banque du
Canada avant de modifier notre attitude.
M. MORIN: Oui.
M. GARNEAU: Mais il reste quand même que le coût
d'administration d'un tel système est assez élevé.
M. MORIN: Alors, sous bénéfice d'inventaire, M. le
Président, si je comprends bien, le ministre va faire examiner cette
question par ses spécialistes. Le ministre a l'intention de faire
examiner ce...
M. GARNEAU: Je vais certainement revoir l'exactitude des chiffres que
nous donne le chef de l'Opposition, voir s'il y a eu des modifications dans les
us et coutumes des épargnants canadiens vis-à-vis de l'achat
d'obligations d'épargne par retenues sur le salaire, voir quel a
été l'impact au Québec et essayer de donner des
statistiques sur les sommes qui ont été achetées au
Québec. Peut-être qu'il y a eu une modification pour des raisons
qui n'ont pas été portées à ma connaissance, mais
je n'ai pas d'objection à faire la revue de cette situation.
M. MORIN: Je n'en demande pas plus, pour l'instant. Je voudrais
maintenant demander au ministre s'il prévoit d'autres émissions
d'obligations d'ici la fin de l'année?
M. GARNEAU: Des obligations d'épargne? M. MORIN: Oui. M. GARNEAU:
Non. M. MORIN: Aucune?
M. GARNEAU: Aucune, non. On peut difficilement faire plus qu'une
série par année.
M. MORIN: Bien.
M. ROY: Etant donné que cette émission d'obligations,
l'année dernière, est similaire, comme on l'a dit hier, et
qu'elle était de l'ordre de $136 millions, si ma mémoire est
bonne...
M. GARNEAU: $133 millions.
M. ROY: $133 millions. Cette année, il y a une énorme
différence, le ministre devra procéder à d'autres emprunts
pour combler la différence, ce que j'estime et, selon les
déclarations qui avaient été faites, ce qu'on estimait,
grosso modo, pouvoir être à peu près du même montant
pour cette année, comparativement à celui de l'année
dernière.
M. GARNEAU: Voyons...
M. ROY: Est-ce que cela veut dire que le ministre sera obligé de
se tourner vers le marché canadien ou si le ministre compte aller sur le
marché international pour combler cette différence?
M. GARNEAU: M. le Président, à moins que le
député de Beauce-Sud me suggère de diminuer mon programme
d'investissements, je devrai certainement avoir recours au marché
régulier, si le marché des obligations d'épargne ne nous
rapporte pas le montant escompté.
Ce qui veut dire, d'après les indications que nous avons, que ce
serait entre $40 millions et $50 millions, nous devrions probablement aller sur
les marchés réguliers au lieu du marché d'obligations
d'épargne.
M. ROY: M. le Président, je remercie le ministre d'être
revenu sur ce sujet. Hier soir, j'avais omis de commenter une réponse
que le ministre avait donnée. Je n'ai jamais, en aucun moment et
que le ministre se réfère à n'importe quelle de mes
déclarations parlé d'une diminution du budget des
investissements dans la province. Je n'ai jamais fait de recommandation dans ce
sens et je n'ai fait aucune demande au ministre. Jamais. Ce n'est jamais de
cette chose dont nous avons parlé, nous avons parlé du
financement du budget des investissements.
Je sais que le ministre a parlé hier soir de l'autoroute de la
Beauce. On a parlé de l'autoroute de la Beauce. Je n'ai jamais
critiqué le ministre, ni le gouvernement, de procéder à
des projets de construction d'autoroutes, de projets de l'immobilisation
nécessités et exigés pour les besoins du Québec. Ce
n'est jamais de cela dont j'ai parlé. Le ministre est venu même
colporter cette nouvelle dans mon comté au cours de l'été
dernier,
M. GARNEAU: Non, je ne suis pas allé dans le comté de
Beauce-Sud durant ma dernière tournée.
M. ROY: M. le Président, le ministre était venu avant les
élections et il avait rencontré un groupe de personnes.
M. GARNEAU: Non.
M. ROY: Avant les élections, pas durant la campagne
électorale, avant la campagne électorale.
M. GARNEAU: Ce n'est pas que je n'aurais pas aimé me rendre dans
le comté de Beauce-Sud, rencontrer les gens de cette jolie région
de la province, mais mon ordre du jour ne m'a pas tout simplement permis de m'y
rendre, ni avant ni pendant les élections et, malheureusement, pas
depuis non plus. Par contre, si le député de Beauce-Sud m'y
incite fortement, je pourrais aller faire un tour, suivant le slogan
publicitaire de la banque de Nouvelle-Ecosse.
M. ROY: M. le Président, je voudrais...
Je viens d'avoir encore la preuve qu'on ne peut jamais se fier aux
libéraux. C'est un organisateur libéral qui m'avait dit que le
ministre des Finances était allé rencontrer un petit groupe dans
le comté de Beauce-Sud et, encore là...
M. GARNEAU: Je suis allé dans le comté de Beauce-Nord.
M. ROY: ... j'ai été induit en erreur. On ne peut jamais
se fier aux organisateurs libéraux.
M. BACON: Nous autres, on s'y fie et cela va bien, vous savez. Il me
semble que cela va mal chez vous.
M. ROY: Pardon, cela va bien.
M. BACON: A deux, cela s'organise.
M. ROY : Cela va bien chez nous.
M. BACON: Vous ne savez pas si vous êtes dans le PP ou dans
l'autre.
M. ROY: Cela va très bien chez nous, M. le Président.
D'ailleurs, cela n'a rien à voir, que cela aille bien ou que cela aille
moins bien...
M. BACON: Le PP Party.
M. ROY: ... ou que cela aille mieux, avec les
délibérations qui sont en cours.
M. GARNEAU: Pour être bien précis, je... M. ROY: J'aimerais
bien quelque chose...
M. GARNEAU: ... suis allé dans le comté de Beauce-Nord,
quand même, durant la campagne électorale. C'est peut-être
à cet endroit, où des citoyens de Beauce-Sud étaient
présents, et avec lesquels j'ai parlé. Je suis allé dans
Bellechasse, dans Dorchester. Non, Bellechasse et Dorchester sont maintenant
réunis. Je suis allé à Montmagny-L'Islet.
M. ROY: La Beauce, c'est plus qu'un comté, M. le
Président, c'est une région.
M. GARNEAU: C'est un pays, la Beauce.
M. ROY : Je reviens un peu là-dessus, parce que je pense que
c'est quand même important qu'on n'aille pas dire, qu'on n'aille pas
colporter que j'ai fait des reproches au ministre des Finances, à un
moment donné, concernant les emprunts qu'il fait, concernant les
investissements.
M. GARNEAU: Et là, vous m'indiquez un programme qui n'est pas
réaliste.
M. ROY: M. le Président, je regrette, mais je veux quand
même qu'on me permette, étant donné que j'ai la parole, de
le dire et de le signaler à l'attention du ministre de façon
qu'il le sache une fois pour toutes. En aucun moment et d'aucune façon
je n'ai fait de reproches et je n'ai l'intention de faire des reproches au
gouvernement, à moins qu'on fasse de mauvais investissements, sur les
politiques d'investissement du gouvernement. C'est sur le mode de financement
que j'ai fait de nombreuses interventions et je veux bien rassurer le ministre
tout de suite que je n'ai pas l'intention de cesser, j'ai bien l'intention de
continuer à en faire.
M. GARNEAU: M. le Président, dans la même veine que le
député de Beauce-Sud vient d'indiquer, c'est bien beau nous dire
de réaliser des projets d'investissements, mais quand on arrive au
financement, il nous propose une façon d'atteindre ce financement qui
n'est absolument pas réaliste. Je suis bien obligé de lui dire
que lorsqu'il me demande de modifier notre système d'emprunt, la seule
façon que je vois de le faire, c'est de diminuer nos investissements,
parce que je ne vois pas d'autres solutions. Je n'en vois pas d'autres.
M. ROY: II y en a d'autres d'ailleurs, et M. le Président me
permettra de donner...
M. GARNEAU: Elles ne sont pas réalistes.
M. ROY: II y a toute la question de la mise en valeur des richesses
naturelles. Le chef de l'Opposition vous a donné des suggestions hier
soir de façon que le trésor provincial puisse avoir des revenus
à même l'exploitation des richesses naturelles au
Québec.
M. GARNEAU: J'ai indiqué que c'était l'attitude du
Québec.
M. ROY: Cela en est un moyen. C'est un moyen qui a été
utilisé en Alberta. C'est un moyen qui a été
utilisé en Colombie-Britannique...
M. BACON: On en a plus qu'eux autres!
M. ROY: ... et cela a même permis au gouvernement de la
Colombie-Britannique de faire un prêt à l'Office des autoroutes du
Québec !
M. GARNEAU: M. le Président...
M. ROY: Cela a même permis au gouvernement de la
Colombie-Britannique de faire un prêt à l'Office des autoroutes du
Québec...
UNE VOIX: Sans intérêt...
M. ROY: ... avec un taux d'intérêt très...
M. GARNEAU: M. le Président, nous avons discuté hier soir
je ne sais pas si le député de Beauce-Sud y était
ou n'y était pas de la question des droits miniers au
Québec par rapport à ce qui se fait ailleurs, comparativement
à la valeur de la production minière. Je ne veux pas reprendre ce
débat. Je lui dirai ceci: Même si nous multiplions ces droits
miniers par deux, on pourrait à peine financer le premier viaduc ou le
premier trèfle sur le tronçon de la route de la Beauce.
M. ROY: Ce qui veut dire que nos richesses naturelles ne rapportent pas
au trésor provincial. Je suis entièrement d'accord avec le
ministre!
M. GARNEAU: Si le député de Beauce-Sud suggère que
nous multiplions par dix, même, encore là, cela paierait à
peu près la construction de la route, j'imagine.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de
Sauvé.
M. MORIN: M. le premier ministre, M. le Président, dis-je...
M. GARNEAU: Le député de Saint-Hyacinthe a
été...
M. MORIN: M. le Président, après toutes ces invitations au
voyage, est-ce qu'on pourrait revenir à nos moutons?
M. ROY: M. le Président, je m'excuse auprès du chef de
l'Opposition. On sait très bien que le ministre des Finances...
M. MORIN: Ambitionne.
M. ROY: ... a des ambitions de ce côté. Je me permettrais
de signaler...
M. MORIN: Je ne le savais pas. Est-ce vrai, M. le ministre?
M. ROY: ... c'est la raison pour laquelle le lapsus était
très à point !
M. GARNEAU: Le député de Sauvé s'adressait à
la présidence...
M. BOUTIN (Johnson): Oui, c'est cela, alors le député de
Saint-Hyacinthe...
M. GARNEAU: C'est pour cela que j'indiquais que le député
de Saint-Hyacinthe...
M. GIASSON: On a de la réserve comme nul parti au Québec
!
M. GARNEAU: Le député de Saint-Hyacinthe est un homme
compétent.
M. MORIN: Messieurs, après cette parenthèse, est-ce que je
pourrais demander au ministre quels sont les résultats de l'analyse
qu'il a fait entreprendre, je crois, depuis déjà deux ans, sur la
distribution régionale des obligations québécoises, des
ventes d'obligations québécoises? Est-ce que la compilation a
été faite pour l'année dernière?
M. GARNEAU: Oui.
M. MORIN: Vous l'aviez déjà faite pour 1972 et 1973?
M. GARNEAU: L'année dernière, 1972? Pour 1971, 1972, 1973.
Pour l'année 1973...
M. MORIN: Est-ce que je pourrais terminer ma question, M. le
ministre?
M. GARNEAU: Oui.
M. MORIN: Vous aviez constaté, à la suite des
années 1972, 1973, je crois, qu'en ce qui concerne le emprunts sur le
marché canadien, à toutes fins pratiques, il se vend fort peu
d'obligations du Québec à l'extérieur. Vous avez
même, si je puis...
M. GARNEAU: Vous n'avez certainement pas donné les chiffres de
1973. Je ne crois pas, parce qu'on ne les avait pas. Cela ne fait pas tellement
longtemps qu'on a eu les derniers rapports de distribution.
M. MORIN: Vous y avez fait allusion, je crois, en réponse
à une de mes questions en Chambre, et peut-être...
M. GARNEAU: A ce moment, je n'avais pas les statistiques
complètes pour 1973, certainement pas!
M. MORIN: Vous allez sans doute pouvoir nous donner les proportions pour
1973. Mais je voudrais évoquer ce que vous disiez, lors d'une
conférence prononcée, je crois, à Montréal, en
décembre 1973, il y a quelques mois. Vous disiez que: "For other
financial institutions, more powerful foreign and international institutions
with their headquarters in Montreal, could help Quebec more than their Canadian
counterparts based in Toronto". Et l'article ajoute: "In his speech, Garneau
said", est-ce que je prononce bien votre nom en anglais, M. le ministre?
M. GARNEAU: Garneau! Oui.
M. MORIN: "Garneau said that being part of Canada"...
M. GARNEAU: Vous êtes très bon en anglais. D'ailleurs, je
ne vois pas pourquoi vous ne voulez pas que les autres l'apprennent !
M. MORIN: Au contraire! UNE VOIX: C'est bien placé !
M. MORIN: Je ne voudrais pas me laisser entraîner...
M. BOUTIN (Johnson): Est-ce assez fort!
M. MORIN: ... dans un nouveau débat sur la langue dans cette
commission.
M. BOUTIN (Johnson): C'est très bon!
M. MORIN: Mais le ministre, qui est intelligent, sûrement...
M. GARNEAU: D'ailleurs, il parle beaucoup mieux anglais que je ne peux
le faire.
M. MORIN: M. le ministre, qui est bien renseigné...
M. GARNEAU: Je lui rends ce témoignage, un diplômé
de McGill!
M. MORIN: ... sait fort bien que le Parti québécois n'a
jamais été contre la langue anglaise et a toujours...
M. GARNEAU: Cela ne paraît pas!
M. MORIN: ... au contraire, préconisé...
M. BOUTIN (Johnson): C'est une déclaration de principe.
M. MORIN: ... qu'on l'apprenne correctement dans les écoles
françaises, ce qui n'est pas le cas, à l'heure actuelle, sous
l'empire du gouvernement libéral.
M. BOUTIN (Johnson): Si les professeurs enseignaient comme il
faut...
M. GARNEAU: J'aimerais que le député de... Il y a des
journalistes ici.
UNE VOIX: Oui.
M. GARNEAU: J'espère qu'ils vont avoir bien compris le sens des
propos du député de Sauvé...
M. BOUTIN (Johnson): On va les transmettre...
M. GARNEAU: C'est une déclaration qui mérite d'être
soulignée et qu'il entendra de nouveau à plusieurs reprises dans
ma bouche lorsqu'il sera en Chambre...
UNE VOIX: Ah oui!
M. GARNEAU: ... lors de l'analyse de notre projet de loi no 22.
M. MORIN: Bien sûr! Depuis quand le ministre peut-il faire dire au
Parti québécois qu'il est contre la langue anglaise? Il suffit
qu'elle ait sa juste place au Québec, c'est tout.
M. MARCHAND: Ce sont tous des bilingues qui prêchent
l'unilinguisme !
M. MORIN: Je penserais plutôt que, dans votre cas, M. le
député de je ne sais plus trop où...
M. BOUTIN (Johnson): Si vous ne le savez pas...
M. GARNEAU: Demandez cela à M. Lévesque, il le sait...
M. BOUTIN (Johnson): ... vous allez l'apprendre !
M. MORIN: Je croirais plutôt que, dans votre cas, c'est un cas
d'unilingue prêchant le bilinguisme, ce qui est encore plus
paradoxal.
M. GARNEAU: C'est qu'il est assez réaliste...
M. MORIN: Est-ce qu'on peut revenir à nos moutons, M. le
Président?
M. GARNEAU: C'est que, vous savez, il y a des gens qui sont en haut de
la pyramide et qui veulent garder le monopole pour eux seuls.
M. MORIN: M. le Président, est-ce qu'on peut revenir à nos
moutons? "In his speech, Garneau said that being part of Canada was a very
little help to Quebec as far as public financing is concerned. There has been
an improvement since the beginning of 1973, Garneau said, but for Quebec's
public financing, the Canadian capital market is in fact the province's capital
market". Et je pourrais ajouter encore d'autres passages qui sont très
clairs, dont celui-ci, par exemple: "The minister said he did not think Quebec
was selling a fair share of his bonds in Canada outside". J'aimerais demander
au ministre si les chiffres les plus récents confirment cette mauvaise
distribution des obligations.
M. GARNEAU: Les statistiques de 1973 indiquent qu'au Canada, à
l'extérieur du Québec, il a été
écoulé durant la période de distribution 16 p.c. de nos
titres vendus et à l'extérieur du Canada, pour des
émissions en devises canadiennes, en 1973, il y avait eu 4 p.c. Ceci
fait 20 p.c. de vendus à l'extérieur du Québec, 4 p.c.
à l'étranger, c'est-à-dire aux Etats-Unis, en Europe
où des institutions veulent se porter acquéreurs de titres en
devise canadienne et 16 p.c. détenus par des institutions ou des
individus canadiens à l'extérieur du Québec.
M. MORIN: Le chiffre que vous aviez mentionné en décembre
semble être de 19 p.c. pour le Canada.
M. GARNEAU: En 1972, cela était 11 p.c. au Canada et en 1973,
cela a été 16 p.c.
M. MORIN: Et l'article continue. J'aimerais savoir si vous avez
changé d'idée sur ce point.
M. GARNEAU: Je n'ai pas changé d'idée.
M. MORIN: Non, mais l'article continue. "Garneau, however admitted later
that both
figures..." y compris les 19 p.c. que vous donniez à ce
moment "... were based on the primary distribution of the bonds but do
not take into account whether or not the bonds are so back to Quebec
institutions like to Quebec deposit and investment funds".
Si on tient compte de ce retour aux institutions
québécoises, votre évaluation est-elle la même?
Est-ce que cela reste 16 p.c?
M. GARNEAU: Je ne peux pas le dire, non pas que je n'aimerais pas le
dire. Personnellement, j'aimerais le savoir, mais il est impossible de
connaître quelle est la circulation des titres de la province ou
d'Hydro-Québec une fois que la période de distribution est
terminée parce qu'une institution financière ontarienne peut
acheter des titres sur le marché secondaire ultérieurement,
après la période de distribution, peut en revendre pour des
questions de rentabilité de son portefeuille, comme des institutions du
Québec peuvent en acheter ou en vendre. On ne peut pas avoir de
statistiques là-dessus d'une façon précise, à
savoir qui achète et qui vend, pour quelle raison on a acheté ou
vendu. Cela peut être uniquement pour des raisons de portefeuille, de
variations de taux d'intérêt ou encore de modifications dans la
politique de placement d'entreprises qui optent, par exemple, pendant un
certain temps pour l'hypothèque plutôt que pour les obligations.
Ce domaine étant assez complexe, je n'ai pas de statistique
là-dessus. Tout ce que je peux dire au député de
Sauvé, c'est que les propos sans prendre le libellé, le
mot à mot de l'article de journal à l'intérieur du
texte de la conférence que j'avais prononcée à ce moment,
sont conformes à ce que je pense de la situation. C'est pourquoi nous
avions, au début de 1973, modifié le groupe bancaire pour donner
préséance à des maisons dont le siège social
était à Montréal ou au Québec et il semble bien que
les statistiques de 1973 nous montrent quand même une amélioration
de 5 p.c. sur la distribution des titres à l'extérieur du
Québec pour nos émissions canadiennes. Il y a encore beaucoup de
place pour l'amélioration.
M.MORIN: Est-ce que le ministre pourrait porter à notre
connaissance les chiffres, j'entends déposer les documents?
M. GARNEAU: Le résumé des chiffres est là. Je ne
crois pas qu'il soit d'intérêt de déposer le rapport de
chaque maison parce que ce sont des documents qui nous sont transmis à
titre confidentiel; même les maisons, une par rapport à l'autre,
ne les connaissent pas et il s'agit, en fait, de la concurrence qui existe
entre ces maisons sur le marché de vente. Ce que nous faisons par
contre, c'est qu'une fois le rapport de distribution entré et
après une période d'un an, au moment où on reprend une
autre année financière, nous visitons les maisons qui n'ont pas,
à notre point de vue, apporté un effort suffisant, pour
connaître les raisons pour lesquelles elles n'ont pas atteint les
objectifs qu'elles s'étaient fixés et sur lesquels nous nous
étions entendus.
Dans certains cas, il y a soit des diminutions dans leur participation
pour celles qui n'ont pas atteint leurs objectifs ou augmentation dans d'autres
cas, là où l'effort de distribution a été vraiment
important et plus fort que les objectifs qui leur avaient été
donnés.
C'est pourquoi je dis que les décisions que nous avons prises
sont basées sur l'efficacité des maisons. Nous comptons
poursuivre dans cette voie.
M. MORIN: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au
ministre de façon rétrospective combien d'obligations ont
été achetées âr la Caisse de dépôt et
placement du Québec, depuis deux ou trois ans? J'entends non pas les
montants, mais le pourcentage.
M. GARNEAU: Dans le rapport annuel de la Caisse de dépôt et
placement du Québec, je pense que...
M. MORIN: Non, bien sûr, mais ce ne sera pas le pourcentage, ce
sera le montant acheté par la Caisse de dépôt et de
placement du Québec. Ce qui m'intéresse de savoir, c'est le
pourcentage des émissions achetées par la Caisse de
dépôt et de placement du Québec.
M. GARNEAU: C'est sur 210 d'émissions sur le marché
canadien en 1973/74.
M. MORIN: 35 sur 210?
M. GARNEAU: Non, 105 sur 210. M. MORIN: La moitié.
M. GARNEAU: C'est cela.
M. MORIN: En 1972? M. GARNEAU: En 1973.
M. MORIN: En 1973. Bien.
M. GARNEAU: Excusez, durant l'exercice financier 1973/74 du
Québec. Vous avez parlé de la province?
Est-ce que le programme no 2 est adopté?
M. MORIN: Pas encore.
M. GARNEAU: J'attends des questions.
M. MORIN: Je vous l'avais demandé pour les deux ou trois
dernières années, en rétrospective.
M. GARNEAU: Ah bon!
M. MORIN: Je m'excuse. Il y a eu un malentendu, j'attendais vos
réponses.
M. GARNEAU: Les chiffres que j'ai sont pour la province et pour
Hydro.
M. MORIN: Pour voir si cela s'améliore.
M. GARNEAU: Je les donnerai pour la province et Hydro, parce que je n'ai
pas les chiffres des achats de la Caisse de dépôt et de placement
du Québec, séparément pour les années
antérieures à 1973. On pourrait les obtenir, mais je ne les ai
pas devant moi. En 1968, la Caisse de dépôt et placement du
Québec avait acheté des titres de la province et d'Hydro pour
$158 millions; en 1969, pour $143 millions; en 1970, pour $173 millions; en
1971, pour $171 millions; en 1972, pour $205 millions; en 1973, pour $229
millions. Est-ce que vous voulez connaître les programmes d'emprunt de
ces années pour la province et Hydro?
M. MORIN: C'est en partie pour pouvoir établir une
proportion.
M. GARNEAU: Je ne pourrais pas vous donner les chiffres. Il faudrait les
copier, je ne pourrais pas vous les donner par coeur.
M. MORIN: Bon.
M. GARNEAU: C'est l'année civile. D'ailleurs ces statistiques, on
peut les retrouver dans les rapports annuels de la Caisse de dépôt
et placement du Québec, mais comme l'année financière de
la Caisse de dépôt est une année civile et que la
nôtre est une année allant du 1er avril au 31 mars, les
comparaisons sont difficiles à faire, indépendamment des dates.
On peut, une année, faire un emprunt en décembre et
l'année suivante, le faire en janvier. Il faudrait être prudent,
si on veut faire des comparaisons, et tenir compte de ces facteurs.
M. ROY: L'an dernier, il y avait eu un programme canadien de prêts
aux municipalités de l'ordre de $100 millions, dont...
M. GARNEAU: Vous parlez du programme fédéral?
M. ROY: Je parle du programme fédéral, et le Québec
a reçu $30 millions pour sa part. Est-ce que vous pouvez donner les
informations et nous dire si ce programme sera renouvelé cette
année? Est-ce que des discussions ont eu lieu entre le gouvernement
provincial et le gouvernement fédéral à ce sujet?
M. GARNEAU : Le programme était réparti sur deux ans pour
les années 1973/74 et 1974/75. Une partie des prêts ont
été faits l'an dernier et le reste est fait cette année.
Je ne sais pas si les crédits du ministère des Affaires
municipales sont complétés, mais...
M. ROY: C'est complété aujourd'hui, je pense.
M. GARNEAU: C'est ce ministère, actuellement, qui administre ce
programme. Ce que je peux répondre au député, c'est que
cette année c'est la fin du programme de deux ans qui avait
été annoncé. A ma connaissance, il n'y a pas de programme
additionnel dans ce secteur pour ces objectifs en 1974/75 et cela se comprendra
avec l'inflation que nous avons. Nous ne sommes pas dans une période de
manque d'activité économique actuellement et ces programmes sont
venus contrecarrer la situation économique. On appelle cela des mesures
contracycliques et elles ont été mises en application, mais le
programme se terminera cette année.
M. ROY: Le programme se terminera cette année, mais ce n'est pas
un programme de $5 millions par année, c'est un programme global de $5
millions. Un seul programme de $5 millions réparti sur deux ans.
M. GARNEAU: C'est cela.
M. ROY: Est-ce qu'il y a d'autres programmes d'emprunt relativement
à des travaux avec différents ministères, mais des
programmes d'emprunt qui sont négociés ou qui seront
négociés avec le fédéral au cours de cette
année?
M. GARNEAU: Oui. Tous les programmes d'investissement dans le cadre des
zones spéciales réalisés dans le cadre du programme ODEQ,
les zones spéciales, ARDA, et le programme plus que spécial de la
construction de l'autoroute qui doit relier l'aéroport internationnal de
Mirabel à celui de Dorval.
M. ROY: Est-ce exact que, de ce côté, il y aura un
prêt de $30 millions qui sera fait par le fédéral?
M. GARNEAU : Je pense que le montant est exact.
M. ROY: Est-ce que les ententes sont définitives ou est-ce
négocié présentement ou en voie de négociation?
M. GARNEAU: C'est négocié, d'ailleurs les travaux sont
commencés.
M. ROY: Je sais que les travaux sont commencés, mais il arrive
souvent que les travaux sont commencés...
M. GARNEAU: Est-ce que le document final a été
signé? L'impression que j'ai, c'est oui, parce que, de mémoire,
il y a eu une conférence de presse qui avait été
donnée dans le temps avec le ministre de la Voirie du temps, M.
Pinard et M. Marchand, lors de l'annonce officielle de la construction
de cette route et au cours de laquelle on a annoncé de quelle
façon cela allait être financé.
M. ROY: On a annoncé le principe...
M. GARNEAU: Oui, mais les deux gouvernements étaient
représentés pour souligner leur accord.
M. ROY: Est-ce que vous pourriez nous dire à quelles conditions
ce prêt a été consenti par le fédéral?
M. GARNEAU: Ils sont toujours consentis au taux d'intérêt
que le gouvernement fédéral donne aux sociétés de
la couronne, c'est environ 1 p.c. de moins que ce que nous payons sur les
marchés réguliers lorsque nous empruntons.
M. ROY: Mais, dans ce cas précis, vous n'avez pas le taux.
M. GARNEAU: Ceux qui sont versés sur l'emprunt comportent un taux
d'intérêt qui peut varier d'une tranche à l'autre, compte
tenu qu'au moment où la tranche est versée, le taux
d'intérêt est fixé suivant le principe que je vous ai dit,
celui qui est fait aux sociétés de la couronne.
M. ROY: Quelle est la durée de ce prêt? M. GARNEAU: C'est
20 ans.
M. ROY: Est-ce que c'est une remise totale ou s'il y a un montant
partiel qui pourrait être donné au Québec.
M. GARNEAU: Vous voulez dire une partie subvention, une partie
prêt?
M. ROY: Oui.
M. GARNEAU: II y a une partie de subvention et une partie de prêt,
mais dans le cadre des $30 millions, je pense que c'est la partie de
prêt, les $30 millions, en plus de cela, il y a une subvention, mais je
n'ai pas les informations précises. C'est le ministre des Transports,
lors de l'étude des crédits, qui pourrait vous les donner.
M. ROY: Est-ce qu'il vous serait possible de prendre note et de nous
faire remettre une copie de cette entente intervenue concernant ce
prêt?
M. GARNEAU: Je vais demander à mon collègue des
Transports. Il l'a peut-être déjà fait à d'autres
commissions. Sinon, nous transmettrons au député de Beauce-Sud
ces informations.
M. ROY: D'accord, M. le Président.
LE PRESIDENT (M.Cornellier): Est-ce que le programme 2 est
adopté?
M. MORIN: Non, pas encore, M. le Président, il y a encore
quelques questions.
La publication des comptes nationaux dans les circonstances qu'on sait,
M. le Président, la publication officieuse des comptes nationaux nous a
permis de constater que le Québec était autosuffisant en
matière d'épargne et même exportait de
l'épargne.
M. GARNEAU: II y a eu des propos là-dessus lors de l'étude
des crédits du ministère de l'Industrie et du Commerce. Ici je
laisse parler le député de Sauvé, mais je vais le
référer aux réponses qu'a donné le ministre de
l'Industrie et du Commerce.
M. MORIN: Etant donné qu'on a déjà eu un
débat sur la question, si le ministre veut en parler, je suis tout
à fait disposé à l'écouter. Mais je voulais surtout
lui demander quand il va lui-même rendre publics les comptes
nationaux.
M. GARNEAU: Je vais donner la même réponse que le ministre
de l'Industrie et du Commerce avait donnée parce que c'est un travail
qui a été fait conjointement. Il a été lancé
par la section de recherche au ministère de l'Industrie et du Commerce
auquel collaborent des gens de la section économique et fiscale. La
réponse que vous a donnée le ministre de l'Industrie et du
Commerce, que j'ai lue dans les Débats de l'Assemblée
nationale...
M. MORIN: Elle était embrouillée.
M. GARNEAU: ... sur les galées, était conforme à la
vérité que je connais. C'est-à-dire que les travaux se
poursuivent pour bien établir la méthodologie. Parce qu'il y
avait des situations d'ailleurs, c'est la raison pour laquelle ça
n'avait pas été publié fort cocasses qui
déterminaient que si vous additionniez la situation dans chacune des
provinces, vous arriviez à une contradiction avec les chiffres totaux.
Donc la méthodologie suivie incitait certainement à avoir des
erreurs parce que c'était une contradiction avec les chiffres totaux.
Lorsque la méthodologie aura été acceptée, de sorte
que ces chiffres puissent être véritablement comparables, les
travaux se poursuivront pour les mettre à jour. Mais quant au moment
où ils seront rendus publics, le ministre de l'Industrie et du Commerce
sera en mesure de le dire parce que c'est un travail qui est
réalisé par les sections de recherche de son
ministère.
M. MORIN : Dois-je comprendre que le ministre n'accorde aucun
crédit aux chiffres qui ont été portés à son
attention?
M. GARNEAU: En termes de tendances, si on parle de l'épargne, je
ne voudrais pas porter de jugement trop précis. Je voudrais revoir
les
chiffres. Mais si on parle d'une façon générale,
par exemple, du flux d'argent entre le Québec et les autres provinces,
les tendances étaient justes, c'est le niveau qui apparaissait
contradictoire avec d'autres données qui existaient. La conclusion,
c'est que la méthodologie qui avait été suivie, avait
certainement des failles qu'il nous fallait vérifier. D'ailleurs les
spécialistes en comptabilité nationale ont tenu un certain nombre
de réunions avec des spécialistes du Québec, des autres
provinces et du gouvernement fédéral pour en arriver à
l'établissement d'une méthodologie semblable.
M.MORIN: M. le Président, nous nous tournons maintenant vers la
Caisse de dépôt et placement. Je voudrais tout d'abord demander au
ministre s'il existe toujours des problèmes de recrutement de
main-d'oeuvre semblables à ceux qu'il a signalés l'année
dernière lors de l'étude des crédits de son
ministère?
M. GARNEAU: Le président directeur général de la
Caisse de dépôt et placement m'a soumis ses difficultés.
Suite à la consultation que j'ai eue avec mes collègues, au
conseil des ministres, il a été convenu que la caisse de
dépôt préparerait certains amendements à sa charte
de façon à lui donner les pouvoirs d'exercer une plus grande
souplesse dans la classification et le recrutement des employés de la
caisse. Compte tenu de l'aspect extrêmement spécialisé de
ses activités et aussi d'une assez grande rotation dans le personnel qui
oeuvre dans ce secteur, c'est-à-dire surtout les Québécois
francophones dans ce secteur, qui atteignent une certaine
notoriété, ils se voient rapidement offrir des postes
intéressants ailleurs. Il faut donc donner une plus grande souplesse, un
plus grand champ d'action à la Caisse de dépôt.
Je n'ai pas encore reçu les propositions d'amendements des
dernières conversations que j'ai eues avec le président de la
Caisse de dépôt. Le tout était presque
complété et dès que ce sera terminé, il
communiquera avec moi pour une rencontre de telle sorte que j'aie un texte
précis à soumettre à l'attention du conseil des ministres
pour obtenir son approbation. S'il y a consentement ou s'il y a
conformité entre les principes qui avaient été
adoptés et le texte de loi, il y aura une loi qui sera
présentée pour modifier la charte de la caisse dans ce sens.
M. MORIN: Si j'ai bien compris, il y a eu des discussions entre la
caisse et la Commission de la fonction publique?
M. GARNEAU: Entre la caisse et le ministre des Finances, parce que si on
donne à la Caisse de dépôt une plus grande facilité
d'action, cela veut dire, en d'autres termes, que l'on va soustraire la Caisse
de dépôt des formalités de la Commission de la fonction
publique. En fait, ce serait placer la Caisse de dépôt sur le
même pied que la Société des alcools ou SIDBEC qui peuvent
effectuer, dans leur secteur respectif, le recrutement à partir d'une
réglementation établie et approuvée par le
lieutenant-gouverneur en conseil, mais qui n'est pas reliée directement
à la Commission de la fonction publique.
M. ROY: On parle un peu de la Caisse de dépôt; à
moins que le chef de l'Opposition ait d'autres questions à poser sur la
Caisse de dépôt...
M. MORIN: On va y revenir peut-être à la fin, lorsqu'on se
penchera sur les sociétés d'Etat. Peut-être pourra-t-on,
à ce moment-là, examiner la Caisse de dépôt en
détail. C'était seulement le problème de main-d'oeuvre que
je voulais souligner à ce moment-ci des débats. Une
dernière question et ensuite je passe la parole à...
M. ROY: Moi, c'était uniquement sur la Caisse de
dépôt que j'avais quelque chose à demander au ministre. A
moins...
M. MORIN: Est-ce que je peux simplement lui poser une petite question et
je vous cède la parole après?
La question est la suivante: Combien y a-t-il de postes vacants qu'on
n'arrive pas à combler en ce moment à la Caisse de
dépôt?
M. GARNEAU: Réellement, je ne pourrais par répondre
à cette question sans vérifier avec le président de la
caisse. Je ne veux pas induire la commission en erreur et je ne m'attendais pas
à de tels types de questions puisque ce n'est pas le budget de la Caisse
de dépôt que nous analysons aujourd'hui, mais je n'ai pas
d'objection à donner les informations, pour autant qu'on accepte que je
les cite de mémoire et qu'il peut y avoir certaines imprécisions
dans mes réponses. Si ma mémoire m'est fidèle, le
problème de recrutement n'existait pas au niveau du professionnel.
Lorsque le type sort de l'université et qu'il sollicite un emploi
auprès de la Caisse de dépôt, il n'y avait pas de
problème de recrutement à ce niveau-là. Le problème
se posait plus au moment où, après trois ou quatre ans
d'expérience, le professionnel en question se voyait offrir des
positions avec des augmentations de traitement plus rapides ou qui tenaient
plus directement compte de son rendement. Par exemple, s'il s'avère
qu'un employé démontre des aptitudes tout à fait
particulières et d'une rare compétence, les
réglementations de la Commission de la fonction publique permettent
d'avoir des augmentations accélérées d'échelons,
mais ne répondent pas toujours à l'administration quotidienne de
la caisse. Il faudra poser des gestes plus importants en termes de promotion,
alors que le plan de carrière de la Commission de la fonction publique
n'a pas cette souplesse, compte tenu du genre d'activité de la caisse.
Le problème ne se posait pas au niveau du recrutement au sortir de
l'université,
mais plutôt du recrutement de cadres intermédiaires qui ont
quatre, cinq ou six ans d'expérience ou encore de la rotation du
personnel qui a atteint ce niveau d'expérience.
M. ROY: Pour la question de la Caisse de dépôt, est-ce que
le ministre compte faire comparaître les dirigeants de la Caisse de
dépôt devant une commission parlementaire spéciale à
ce sujet?
M. GARNEAU: Si...
M. ROY: Ceci, pour les fins suivantes: D'abord, il s'agit de
l'administration d'un portefeuille qui est de plus en plus important. Au
rapport qu'on nous a remis le 31 décembre 1973, il y avait un
portefeuille de $2 milliards et demi. Il y a toute la politique des placements,
la nature des placements comme tels, les rendements de ces placements, la
vocation qu'on veut donner ou qu'on a donnée à la Caisse de
dépôt, l'orientation qu'on pourrait lui donner, le rôle
qu'on pourrait lui faire jouer. Je pense qu'il serait tout simplement normal
qu'annuellement, lorsque les dirigeants d'une entreprise comme celle-là,
une entreprise para-gouvernementale... Il ne serait que normal que ces
gens-là comparaissent devant une commission parlementaire pour
répondre aux questions qu'on pourrait leur poser. En ce qui nous
concerne, M. le Président, on a énormément de questions
à leur poser et j'ai peur que si nous retardons, à la fin de la
commission parlementaire, pour étudier les questions des
sociétés paragouvernementales... D'ailleurs notre période
de dix heures est sans doute presque complétée actuellement,
sinon elle sera complétée au cours de la prochaine séance.
C'est dire que le gouvernement n'est pas tenu de revenir devant la commission
parlementaire pour étudier le reste des crédits.
Je sais que dans différents ministères, on a pu prolonger
jusqu'à 15 heures, 17 heures, même 19 heures à un
ministère en particulier, l'étude des crédits, mais j'ai
bien peur, étant donné que nous avons beaucoup d'autres questions
à poser sur d'autres éléments qui concernent la gestion du
ministère des Finances, qu'on ne puisse pas, mais j'aimerais que le
ministre à ce moment-ci...
M. GARNEAU: II reste le Conseil du trésor.
M. ROY: On n'a pas encore abordé le Conseil du trésor...
nous donne l'assurance au moins qu'on puisse interroger les dirigeants de la
Caisse de dépôt à l'occasion d'une commission parlementaire
sur les rapports annuels qui nous ont été remis. Il faut que ces
gens rendent des comptes. Il faut que cela aille plus loin que rendre des
comptes au ministre responsable, il faut rendre des comptes devant
l'Assemblée nationale.
M. GARNEAU: Je n'ai pas d'objection de principe à la suggestion
du député de Beauce-Sud. Je peux lui dire que si des amendements
à la charte de la Caisse de dépôt sont
présentés, comme je le crois et comme je viens de le dire au chef
de l'Opposition, ce sera certainement une excellente occasion pour les
officiers de la Caisse de dépôt de répondre en même
temps à des questions que pourraient avoir à poser des membres de
la commission des finances, du revenu et des comptes publics. C'est la
même chose pour SIDBEC, le député y a
référé, je pense que c'est hier, dans son débat.
Comme le député le sait, la charte de SIDBEC devra être
amendée pour tenir compte des propositions contenues dans mon discours
sur le budget. A cette occasion, aussi, les administrateurs et les dirigeants
de SIDBEC comparaîtront et pourront répondre aux questions des
membres de la commission. Dans les deux cas, cela va être certainement
possible.
En principe, d'une façon générale, pour autant
qu'il y a moyen de trouver, à l'intérieur de nos sessions
parlementaires extrêmement occupées, des périodes de temps
pour de telles rencontres, je n'y vois absolument pas d'objection.
M. ROY: Je suis bien content des déclarations que le ministre
nous fait de ce côté, parce qu'il arrive parfois que, lorsqu'on
convoque les membres ou les dirigeants d'une société
para-gouvernementale, nous soyons conditionnés en quelque sorte par un
ordre du jour de la commission et parfois on discute un sujet ou deux sujets
auxquels j'aimerais qu'on attache une attention particulière. Je suis
bien content que le ministre nous dise ce matin qu'il n'a aucune espèce
d'objection à ce que nous puissions interroger les dirigeants de la
Caisse de dépôt sur la gestion de la caisse comme telle et sur la
nature de ses placements.
Je prends bonne note des remarques du ministre...
M. GARNEAU: D'ailleurs, dans le rapport annuel de la Caisse de
dépôt, dans le message du président, il y a toujours une
référence à la politique qui a été suivie,
la politique de placement. Par contre, je ne crois pas qu'à l'occasion
de telles séances de la commission, il serait souhaitable que la Caisse
de dépôt indique en détail quels ont été les
achats d'actions, d'hypothèques ou d'obligations dont elle s'est
portée acquéreur; cela pourrait avoir des influences sur le
marché.
D'ailleurs, moi-même, j'ai eu l'occasion de le dire, même si
je suis comptable devant l'Assemblée nationale des actions de la Caisse
de dépôt, la caisse a une très grande autonomie du
côté de sa gestion. Je ne suis jamais intervenu dans les
décisions prises par le conseil d'administration. Je crois qu'on
pourrait discuter des politiques, des orientations ou des gestes administratifs
concernant son administration interne, mais il serait difficile de penser qu'au
cours d'une séance d'une telle commission on
puisse entrer dans les détails des placements, que la -caisse
puisse dire qu'elle a acheté à telle date tant de centaines
d'actions de telle institution, qu'elle les a revendues à telle autre
date. Je ne le sais pas, n'ai jamais voulu poser cette question. Cela a
été la ligne de conduite que semblent avoir suivi tous les
ministres des Finances depuis la création de la caisse pour laisser
à la caisse et au conseil d'administration entière liberté
de manoeuvre. D'ailleurs, elle a ce pouvoir de par sa charte même pour
éviter des interventions de nature politique dans les décisions
qu'elle doit prendre.
M. ROY: Je suis bien d'accord qu'il faut que les décisions ne
soient pas influencées par des considérations politiques. Je suis
bien d'accord là-dessus, mais je trouve qu'il y a quand même une
lacune à la Caisse de dépôt et de placement et je me
permets de la signaler à ce moment-ci c'est que, dans le rapport
annuel qu'on nous donne, on nous donne, par exemple, la répartition du
portefeuille par secteur alors que toutes les compagnies de fonds mutuels, je
dis bien toutes les compagnies de fonds mutuels, publient leur portefeuille en
détail pour nous dire quelles compagnies et quelles entreprises ont
placé de l'argent, acheté des actions. Je ne peux pas m'expliquer
pourquoi on ne devrait pas, étant donné qu'on parle d'amender la
charte de la Caisse de dépôt et placement, obliger la Caisse de
dépôt et de placement à rendre public son portefeuille pour
ce qui a trait aux institutions ou aux entreprises pour lesquelles elle se
porte acquéreur d'actions.
Elle peut acheter des actions. Je dis cela parce que c'est
extrêmement important, parce que la Caisse de dépôt et
placement est une institution entièrement québécoise qui a
pour fonction de gérer surtout son plus gros portefeuille. Or, on sait
que c'est le portefeuille de la Régie des rentes du Québec, qui a
plusieurs millions, pour ne pas dire quelques milliards présentement. Il
y a également, suite aux amendements apportés à la Loi de
la Commission des accidents de travail, le nouveau portefeuille de la
Commission des accidents de travail, qui est géré par la Caisse
de dépôt. Autrement dit, il y a un grand nombre d'entreprises
paragouvernementales, et, de plus en plus, qui confient leur portefeuille
à la Caisse de dépôt et placement. C'est une bonne chose.
Je ne discute pas du principe de confier à la Caisse de
dépôt et de placement leur administration. Mais quand je vois, par
exemple, dans le portefeuille de la Caisse de dépôt et placement,
que le gouvernement canadien a vendu des obligations de l'ordre de $59,370,000,
autrement dit, $60 millions, à un taux de 6.67 p.c, et que, pendant la
même période, notre gouvernement provincial en emprunte pour
$1,321 millions, et qu'il est tenu de payer 8.16 p.c., soit 1 1/2 p.c. de plus
que la Caisse de dépôt et placement reçoit du gouvernement
provincial que du gouvernement fédéral, cela veut dire qu'on a
fait en quelque sorte, au gouvernement fédéral un cadeau de 11/2
p.c. d'intérêt sur la somme de $60 millions. Je comprends qu'il y
a... On me parlera probablement de la diversification des placements.
M. GARNEAU: C'est une question. Les titres fédéraux
détenus par la caisse sont en grande partie des titres pour fins de
liquidité, c'est-à-dire des titres qui peuvent se liquider
rapidement, qu'ils soient des bons du Trésor ou d'autres titres qui
arrivent à échéance et dont la Caisse se sert comme
liquidité en attendant de faire des placements à plus long terme
dans d'autres secteurs. Son portefeuille de titres canadiens se situe
plutôt à ce niveau. Ce ne sont pas des placements à 20 ans
ou 25 ans, mais cela peut être des placements à six mois, huit
mois, des titres relativement de courte durée ou des titres encore qui
sont très liquides. Elle peut ainsi, au lieu de garder, par exemple, en
dépôt à la banque un taux d'intérêt beaucoup
plus bas, avoir des taux quand même moyens d'intérêt de
cette ordre de grandeur, tout en assurant à la Caisse une
liquidité pour faire face à des placements qu'elle prévoit
faire dans deux mois, trois mois, cinq mois. Mais, entre-temps, elle retire un
intérêt intéressant.
M. ROY: Je comprends bien ce que le ministre vient de me dire. Il y a
une distinction quand même qui s'impose entre un placement à
très court terme, liquide, et un placement à moyen ou à
long terme. Il est bien question, ici dans le rapport, je me
réfère au rapport qu'on nous a soumis, d'obligations, il ne
s'agit pas de bons du Trésor. Il y aurait peut-être lieu
d'examiner les besoins de financement à court terme de la province,
d'examiner cette question de plus près je pense que le ministre
des Finances sera entièrement d'accord avec moi d'examiner cette
possibilité de façon à utiliser nos capitaux pour nos
besoins.
Si nous pouvons récupérer ou économiser 11/2 p.c.
d'intérêt, je pense que ce serait plutôt au gouvernement de
la province d'en bénéficier, quitte à modifier sa
structure financière, quitte à faire quelques changements.
J'aimerais encore aller plus loin pour démontrer au ministre
l'importance de discuter de la question du portefeuille. Dans la valeur des
actions convertibles, le pourcentage du portefeuille de la Caisse de
dépôt et placement du Québec sont de 18.94 p.c. et il y a
une somme de $491 millions de placée, un demi-milliard souscrit par les
Québécois qui rapporte un taux moyen je dis bien un taux
moyen de 3.72 p.c.
Il ne serait que normal que nous interrogions les dirigeants de la
Caisse de dépôt et placement du Québec sur ce fait pour
voir si justement c'est la façon de placer de l'argent dans certains
secteurs. Nous parlions des banques hier, mais les banques et les compagnies de
finance ont quand même reçu $64 millions de la Caisse de
depot et placement du Québec à un rendement
pondéré moyen de 5.45 p.c. Je n'interprète pas les
chiffres, je prends les chiffres de la commission. Je comprends qu'il peut
peut-être y avoir des nuances, mais si on prend le bilan actuel de la
Caisse de dépôt et placement du Québec, et si on le regarde
comme tel, on se rend compte qu'il semble y avoir des lacunes assez importantes
que nous devrons examiner avec toute l'attention possible.
Je trouve tout simplement qu'il ne serait pas normal, par exemple, que
dans le secteur du pétrole et du gaz, dans lequel la Caisse de
dépôt et placement du Québec a investi $72 millions, il y
ait un rendement pondéré moyen de 1.41 p.c. sur des placements de
l'ordre de $72 millions qui ont été consentis, autrement dit des
placements, des achats d'action que la Caisse de dépôt et
placement du Québec a faits auprès des entreprises
pétrolières.
Je veux bien savoir, à ce moment, si la Caisse de
dépôt et placement du Québec est une institution au service
des trusts ou si c'est une institution au service de la province de
Québec et de ses citoyens. Je parle de toutes ces choses, pour illustrer
la situation. Je veux convaincre le ministre, et je pense que le ministre sera
d'accord avec moi, qu'il commence à être important qu'une
commission parlementaire se penche sur cette question et qu'on interroge les
administrateurs de la Caisse de dépôt et placement du
Québec, parce que les contribuables du Québec se posent
énormément de questions là-dessus.
M. GARNEAU: J'ai dit oui au député de Beauce. Je veux bien
continuer, mais je lui ai dit que je n'avais pas d'objection.
M. BOY: C'est à cause de la réserve que vous avez mise
tout à l'heure à l'effet qu'on ne devrait pas trop trop examiner
le portefeuille et la façon dont il est géré. C'est sur
cette réserve que j'ai voulu apporter ces observations pour convaincre
le ministre qu'on devrait justement...
M. GARNEAU: D'une façon générale, je veux quand
même dire au député de Beauce-Sud qu'il me paraît
porter un jugement extrêmement sévère et injuste à
l'endroit de l'administration de la Caisse de dépôt et placement
du Québec. Il y a une étude faite par des groupes
indépendants pour mesurer la différence du taux de rendement
entre les placements effectués par la Caisse de dépôt et
placement du Québec à l'intérieur du régime
québécois de rentes et le rendement des placements
effectués par le Canada Pension Fund qui administre les épargnes
accumulées dans le régime canadien des rentes pour les autres
provinces. La différence qui a été mesurée, d'une
façon précise, d'ailleurs, par une étude effectuée
par un groupe de spécialistes en la matière, donne une
différence de 4.4 p.c. à l'avantage de la Caisse de
dépôt et placement du Québec comparative- ment aux
placements effectués à l'intérieur d'un régime
similaire, c'est-à-dire le régime de pension du Canada.
C'est de 4.4 p.c. à l'avantage de la Caisse de dépôt
et placement du Québec. C'est donc dire que l'administration de la
caisse a été extrêmement efficace et s'est effectuée
sur une base d'affaires en faisant appel certainement à des hommes
compétents, puisque les chiffres sont là pour prouver que le
rendement moyen sur les capitaux investis par la caisse dépassent le
rendement moyen de ceux investis par le régime de pension du Canada de
4.4 p.c. Voilà une preuve très intéressante qui
démontre, je pense, d'une façon générale, que
l'administration de la caisse est extrêmement bonne.
M. ROY: II y a plus de 50 p.c. du portefeuille qui est placé dans
des obligations du Québec et garanti par le Québec. C'est la
province, ce sont les contribuables du Québec qui assurent le rendement
de la Caisse de dépôt et placement du Québec.
M. GARNEAU: Oui, comme les obligations...
M. ROY: Alors de ce côté...
M. GARNEAU: Comme les autres provinces font des placements en
obligations auprès du Canada Pension Fund.
M. ROY: Les obligations simplement... Tout le monde admettra,
malgré que ce n'est pas une chose que je recommanderais, que si la
Caisse de dépôt avait acheté peut-être pour $300
millions de plus d'obligations d'épargne du Québec, obligations
émises par la province, le rendement de la Caisse de dépôt
et placement du Québec serait encore meilleur. J'aimerais savoir une
autre chose de plus. Ce serait meilleur parce qu'il s'agit tout simplement de
faire le parallèle avec les pourcentages.
M. GARNEAU: Le rendement sur les actions québécoises.
M. ROY: Les pourcentages ne sont pas les mêmes.
M. GARNEAU: En 1972, le rendement moyen sur les actions détenues
par la caisse, était de 27.28 p.c, tenant compte des plus-values des
actions qui étaient détenues par la Caisse de dépôt
et placement du Québec.
M. ROY: En 1972?
M. GARNEAU: En 1972, oui.
M. ROY: Le rapport au 31 décembre 1973 donne le rendement
pondéré moyen...
M. GARNEAU: Parce que c'est le rendement uniquement du dividende
payé qui ne tient pas
compte de la plus-value des actions. Une action peut rapporter des
dividendes, mais aussi, si l'entreprise progresse et qu'elle a un meilleur
niveau de profits, l'action qui a été achetée
peut-être à $10, peut valoir $13 ou $14. Il faut tenir compte de
ces deux aspects, soit du rendement des actions et des chiffres qui sont
donnés", cela donnerait alors un rendement de 27.28 p.c. sur le stock,
ce qui est beaucoup plus élevé évidemment que le rendement
moyen sur les obligations. La moyenne des actions de 1967 à 1972 est de
14.2 p.c. C'est donc dire que c'est plus élevé que le rendement
moyen sur les obligations détenues par la caisse.
M. ROY: Ce n'est pas un rendement réalisé, c'est un
rendement comptable.
M. GARNEAU: C'est un rendement qui a été
réalisé dans le temps, mais, quand vous fermez vos livres, vous
faites un bilan à une date, il faut bien que vous le fassiez à
cette date. Vous ne pouvez pas les avoir en portefeuille et les avoir vendues
en même temps. Il faut bien les fixer à une date
précise.
M. ROY: Ce sont toutes des choses qui mériteraient qu'on les
étudie de façon qu'on puisse...
M. GARNEAU: Vous aurez tout le loisir, lorsque les gens de la Caisse de
dépôt viendront, de poser ces questions. Je suis convaincu que la
direction de la caisse va se faire un plaisir de vous répondre.
M. ROY: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Sauvé.
Il reste quelques minutes avant l'ajournement.
M. MORIN: Je suis prêt à entamer un autre aspect du
programme 2, une autre question, je ne sais pas si on a vraiment le temps de la
vider maintenant.
M. GARNEAU: On va vous donner le temps pour trois ou quatre minutes.
M. MORIN: Cela ne vaut peut-être pas la peine de le faire. Au
fond, je préfère la garder pour mardi.
M. GARNEAU: Ce ne sera peut-être pas mardi.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Ce ne sera peut-être pas mardi.
M. MORIN: Quand nous nous réunirons.
M. GARNEAU: Parce que le leader parlementaire, avec l'accord des autres
partis et compte tenu du fait qu'on ne savait pas si une commission ou l'autre
aurait terminé mardi matin et afin que ce soit clair, a indiqué
que ce serait la commission de l'Immigration, je pense. Il a donné le
nom des commissions et nous poursuivrons plus tard l'étude des
crédits du ministère des Finances et du Conseil du trésor.
Alors, je propose l'ajournement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): La commission ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 12 h 57)