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Version finale

30th Legislature, 4th Session
(March 16, 1976 au October 18, 1976)

Thursday, June 10, 1976 - Vol. 17 N° 89

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Finances


Journal des débats

 

Commission permanente des finances,

des comptes publics et du revenu

Etude des crédits du ministère des Finances

Séance du jeudi 10 juin 1976 (Seize heures vingt minutes)

M. Kennedy (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

Je propose les changements suivants: M. Assad (Papineau) remplace M. Déom (Laporte); M. Tremblay (Iberville) remplace M. Garneau (Jean-Talon) et M. Ciaccia (Mont-Royal) remplace M. Malépart (Sainte-Marie). Je proposerais que M. Boutin soit nommé rapporteur de la commission. Adopté.

La commission des finances, des comptes publics et du revenu étudiera d'abord les programmes 3, 6, 7 et 8 des crédits du ministère des Finances pour l'année financière se terminant le 31 mars 1977. M. le député de Sauvé.

Etats financiers des sociétés d'Etat

M. Morin: M. le Président, au programme 3, il s'agit de la comptabilité gouvernementale, c'est-à-dire des états financiers du gouvernement. Nous avons insisté dans le passé sur la nécessité d'établir des états financiers qui reflètent la valeur aux livres des sociétés d'Etat. Autrement dit, de ne pas indiquer seulement ce qui a été investi dans ces sociétés, mais leur véritable valeur. J'aimerais demander au ministre si des efforts, des études ont été faits en vue de réaliser cet objectif, sinon, pour quelle raison.

M. Berthiaume: Je sais qu'on a étudié cette question lors de la discussion du rapport du Vérificateur général, mais j'essaie de me rappeler la préoccupation peut-être un peu plus précise du député de Sauvé. Est-ce que le député de Sauvé...

M. Morin: Cela n'était pas seulement la mienne, c'était celle du...

M. Berthiaume: On avait parlé d'une certaine société précise...

M. Morin: Je pense à SIDBEC, par exemple, mais ça pourrait... la même question pourrait être posée pour d'autres sociétés d'Etat. Cela n'était pas la préoccupation d'un seul député, je crois que le député de Beauce-Sud avait également posé des questions dans le même sens. Commençons par vous demander quelle est la pratique actuelle exactement, si vous avez examiné la possibilité d'états financiers qui réfléteraient la valeur au livre des entreprises publiques.

M. Berthiaume: M. Breton qui est avec moi, que le député de Sauvé connaît sûrement, pourrait donner les explications à ce sujet.

En fait, on a examiné cette possibilité et, à la suite des études que nous avons faites au niveau nord-américain, tant dans les autres provinces qu'au gouvernement du Canada et dans les Etats américains également, nulle part on ne publie les états financiers des entreprises du gouvernement de ces Etats, ou du pays, à la valeur consolidée. C'est la règle générale, savoir que les investissements dans les sociétés d'Etat sont présentés au coûtant. Il y a eu une étude dans cette optique qui a été faite pour le compte du gouvernement du Canada par quelqu'un d'une firme de Toronto, si je ne m'abuse, de Clarkson and Gordon.

Le résultat de l'étude qui a été communiqué aux vérificateurs généraux, qui étaient en réunion ici à Québec l'an passé — notamment M. Desautels de la firme Clarkson and Gordon — indiquait qu'il n'était pas d'accord avec ça. Cela a été rejeté au gouvernement du Canada parce qu'ils avaient eux-mêmes étudié cette possibilité.

Il y a diverses raisons qui rendent cette chose difficile. Dans certains cas, entre autres, il est difficile de présenter la valeur de certains investissements que peut faire le gouvernement dans des entreprises d'Etat. Si on prenait par exemple des cas que l'on retrouve ici chez nous, on a l'Office des autoroutes, entre autres, qui a un déficit accumulé. Depuis quelques années, il fonctionne à surplus. Alors...

M. Morin: Peut-être aussi par...

M. Berthiaume: Oui, mais, par contre, il y a d'autres sociétés qui fonctionnent à surplus. Si on mettait la valeur aux livres de certaines sociétés, cela représenterait vraiment des problèmes.

Si on prenait simplement la Société des alcools, qui est une société qui rapporte au-delà de $100 millions de profits annuellement, la province de Québec a un investissement de $30 millions dans cette société. Il y a un certain montant de profits, $15 millions ou $17 millions, je crois, de revenus accumulés qui n'ont pas été distribués, qui n'ont pas été déclarés en dividendes.

Si on inscrivait la valeur de la Société des alcools à $47 millions, compte tenu du rendement de cette société, je ne crois pas que cela montrerait vraiment mieux la valeur de la société, compte tenu du rendement.

Par ailleurs, il y a d'autres sociétés, telles que SOQUIP et SOQUEM, qui sont versées dans la recherche, entre autres. C'est difficile à évaluer...

M. Morin: Je pensais surtout aux sociétés d'Etat qui ont des activités de type commercial ou industriel. Je ne pensais pas à l'Office des autoroutes en particulier, mais plutôt à SIDBEC, à la SGF et également à la Société des alcools, puisqu'elle est dans le commerce.

M. Berthiaume: Oui.

M. Morin: II me semble que cela donnerait une idée plus juste de leur valeur réelle si vos états financiers faisaient état de la valeur aux livres plutôt que de ce qui a été investi.

Vous admettrez avec moi qu'il n'y a quelquefois aucune commune mesure entre ce qui est investi et la valeur réelle de l'entreprise.

M. Berthiaume: De la même façon, la valeur aux livres 'n'a pas nécessairement de commune mesure avec la valeur réelle. Dans le cas particulier de la Société des alcools, je pense que c'est un cas flagrant. Elle fait un profit annuel d'à peu près $150 millions, je pense bien que si quelqu'un voulait l'acheter pour $45 millions ou $50 millions, ce serait une aubaine absolument extraordinaire.

M. Morin: Est-ce que, si on tenait compte de tous les actifs de la Société des alcools, on n'arriverait pas à plus de $45 millions? Est-ce que ce montant que vous nous avez donné tout à l'heure comprenait tous les actifs de la Société des alcools?

M. Berthiaume: Oui, cela comprend les actifs, moins la dépréciation. On retrouve cela d'ailleurs dans le bilan de la Société des alcools. Il couvre tous les actifs et les passifs...

M. Morin: A quelle page êtes-vous?

M. Berthiaume: C'est à la page 124, de 1974/75. Cela comprend les actifs, les inventaires, les immeubles et les passifs. Je disais tout à l'heure qu'il y avait des revenus qui n'avaient pas été déclarés en dividendes. Il y a...

M. Morin: C'est peut-être un mauvais exemple. Avant que vous ne vous donniez trop de mal, évidemment, c'est un monopole d'Etat. Prenons le cas de SIDBEC, qui est en concurrence avec d'autres entreprises d'aciéries. Peut-être là aurions-nous un exemple plus juste. Le cas des alcools, c'est un monopole qui fixe les prix comme il l'entend. Donc, ce n'est pas encore à ce type d'entreprise que je pense de manière immédiate, c'est surtout à SIDBEC, par exemple.

M. Berthiaume: Rien ne s'opposerait à cela. En fait, il s'agirait que la décision soit prise en ce sens...

M. Morin: C'est ce que je pense aussi.

M. Berthiaume: ... mais il faut réaliser qu'à ce moment on viendrait à rencontre de ce qui est pratiqué généralement dans toute l'Amérique du Nord.

M. Morin: Oui, qu'est-ce que le Vérificateur général vous a recommandé à ce sujet?

M. Berthiaume: II a recommandé, depuis quelques années... il a déjà recommandé de présenter la valeur de ces actifs à la valeur consolidée.

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: Après cela, il a mentionné la valeur de consolidation. Il y a une différence entre les deux. Cette année, il fait une recommandation encore dans le même sens...

M. Morin: II me semblait.

M. Berthiaume: ... à la page 1-54 de son rapport...

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: ... où il dit ce qui suit: Si cette méthode de la valeur de consolidation, à toutes fins pratiques, n'est pas adoptée, on pourrait à tout le moins fournir les mêmes renseignements, dans une annexe aux états financiers de la province, c'est-à-dire le coût des placements, les profits ou pertes accumulés et la valeur ajustée qui en résulte.

M. Morin: Ce serait déjà une amélioration.

M. Berthiaume: Ce serait déjà une amélioration. Mais la question qu'on se pose, à ce moment, c'est qu'on publie déjà les états financiers des entreprises. Aussitôt que nous avons ceux qui sont publiés normalement, on publie le document. On ne pourrait pas l'introduire beaucoup plus vite dans les comptes publics, parce qu'il nous en manque, il y en a toujours quelques-uns qui tardent à entrer.

S'il y avait un retard, à ce moment, à recevoir certains états financiers, nous serions retardés dans la publication des comptes publics. A ce moment, on donnerait, dans les comptes publics, un peu un sommaire de ce que l'on publie déjà dans le volume des états financiers des entreprises du gouvernement.

M. Morin: Est-ce que...

M. Berthiaume: La raison de ces retards, si le député de Sauvé me le permet, dans bien des cas, c'est que l'année financière de l'entreprise ou des entreprises ne coïncide pas nécessairement avec l'année financière du gouvernement...

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: ...ni entre elles, pour un tas de raisons, selon le secteur dans lequel oeuvre l'entreprise. Il peut y avoir des raisons, que ce soit le 31 décembre ou le 31 mars ou le 30 juin.

M. Morin: Est-ce que, pour que nous ayons une discussion plus serrée sur cette question, le ministre pourrait se pencher sur cette dernière recommandation du Vérificateur général, le faire de façon attentive, explicite et nous donner une déclaration vraiment complète sur l'attitude du gouvernement, parce que je constate que la chose n'a pas été étudiée à fond? J'aimerais que le ministère se penche là-dessus de façon sérieuse et nous apporte des arguments bien alignés selon lesquels il ne croit pas opportun de procéder de la sorte.

M. Berthiaume: Ici, on a fait, en fait, une étude assez exhaustive de cette question. Je n'ai pas ici les documents, les résultats de ces recherches que nous avons faites...

M. Morin: Vraiment, oui.

M. Berthiaume: ...c'est dommage, j'aurais pu vous les donner. J'en ai livré un certain nombre, mais je suis conscient de ne pas les avoir tous donnés. Quant à la recommandation, la dernière recommandation que fait le Vérificateur général à la page 1-54 de son dernier rapport, c'est certainement quelque chose de faisable. On donnerait très sommairement ce que l'on donne dans le volume des entreprises. Maintenant, le problème qui pourrait surgir serait celui de savoir si, pour certaines entreprises, les états financiers ne nous arriveront pas à une date qui occasionnerait un retard dans la publication des comptes publics. Cette partie de l'étude n'a pas été faite. C'est une recommandation toute récente du Vérificateur général. Pour ma part, je ne verrais pas d'inconvénient à le faire, mais, cependant, on donnerait quelques semaines plus tôt, ce qu'on va donner dans le volume des entreprises d'Etat.

M. Morin: Est-ce que je pourrais vous demander, pour que la réponse soit complète, de déposer devant la commission l'étude que vous avez faite sur une partie des propositions du vérificateur, et, éventuellement, sur sa toute dernière proposition que vous venez de commenter.

M. Berthiaume: Là-dessus, ce sont des recherches qui ont été faites auprès... Ce ne sont pas toutes des choses qui sont nécessairement écrites. On a fait des recherches dans les états financiers des diverses provinces du Canada, dans les états financiers du gouvernement du Canada, dans certaines études dont celles de M. Dittenhof-fer, qui est un comptable qui travaille pour le GAO, le Government Accounting Office, de Washington, qui a fait une étude particulière de ces questions. Mais on a résumé ces recherches.

M. Morin: Ce n'est pas un rapport formel.

M. Berthiaume: Ce n'est pas un rapport formel. Cela a été une étude qui a couvert à peu près tous les aspects de la question, mais sans faire l'objet d'un rapport exhaustif. On l'a fait à la suite des observations qu'a faites le Vérificateur général dans ses rapports, et cela peut être résumé sur une page 8 1/2 sur 14.

D'ailleurs, en 1972/73, si je ne m'abuse, dans les comptes publics et sur ce point en particulier, nous avons déjà donné un certain nombre de raisons qui expliquaient ce qui rendait l'application de cette recommandation pas toujours facile.

M. Morin: Bien, M. le Président, je me tourne maintenant vers le discours du budget 1976/77, à la page 17, où le ministre des Finances nous faisait part de son intention d'appliquer une recom- mandation du Vérificateur général et d'inclure, dans les dépenses courantes annuelles, une provision de $130 millions, représentant la part de l'Etat dans le coût actuariel du régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, ce qu'on appelle le RREGOP. C'est à la page 17.

RREGOP

En d'autres termes, même si ces montants, dont le total forme $130 millions, ne sont pas payables immédiatement, ils sont comptabilisés dans les dépenses courantes. Est-ce que vous pourriez nous expliquer exactement comment cela fonctionne?

M. Berthiaume: Le RREGOP est le nouveau régime de retraite des employés du gouvernement. Alors, dans la loi— c'est le chapitre 12 des lois de 1973— il est prévu que les contributions des fonctionnaires, des participants, sont versées à la CARR et transférées à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Par ailleurs, il y a la contribution du gouvernement comme employeur. Il y a d'autres entreprises qui y sont assujetties, mais je les passe parce que ce ne sont pas elles qui sont couvertes par les $130 millions. Elles ne sont pas versées à la CARR généralement; je dis généralement parce qu'il y a un cas d'exception pour les employés qui travaillent dans les programmes de bien-être, mais c'est une petite partie.

Donc, généralement, pour les contributions du gouvernement comme employeur, le montant n'est pas payé, mais il est passé aux opérations de l'année, c'est-à-dire que les employés versent leur cinq douxièmes des contributions et l'employeur doit contribuer pour sept douzièmes. Alors, ces sept douzièmes sont passés aux dépenses d'opération du gouvernement, mais étant donné qu'ils seront payés on ne sait trop quand, on crée, une provision qui apparaît au passif des états financiers du gouvernement. C'est pourquoi, à l'état du passif des derniers comptes publics, vous aviez un montant de $79 millions qui apparaissait et on prévoit que, pour l'année en cours...

M. Morin: Donc, si je comprends bien, le montant en question est comptabilisé, mais il n'est pas versé à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

M. Berthiaume: II n'est pas versé.

M. Morin: La contribution de l'employé est versée?

M. Berthiaume: Elle l'est. Elle est versée à la Caisse de dépôt et placement du Québec par le truchement de la CARR.

M. Morin: Oui. Connaissez-vous la pratique, en Ontario, par exemple, ou au niveau fédéral? Je sais, à tout le moins, qu'ils ont des fonds de pension pour leurs employés.

M. Berthiaume: Je crois qu'en Ontario et qu'au gouvernement du Canada, le montant est effectivement emprunté et payé. Je ne sais pas comment cela fonctionne au gouvernement du Canada, mais, en Ontario, ce qui se fait, à toutes fins pratiques — ceci est dit sous toute réserve, c'est un examen très sommaire, très succinct que j'ai fait de cette question, c'est pour cela que je vous dis que je vous livre ceci sous toute réserve...

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: ... au gouvernement de l'Ontario, on paie le montant à un organisme quelconque et cet organisme achète des titres de la province, avec le résultat qu'au lieu de l'avoir comme nous l'avons au passif avant la dette publique, la province se trouve à devoir le même montant et il est inscrit dans la dette publique parce que le gouvernement a émis des titres pour couvrir le montant qu'il a payé, et qui lui a été remis pour payer les titres qu'il a émis.

D'ailleurs, au bilan de la province d'Ontario, on voit ce montant au passif dans la dette publique.

M. Morin: La contribution de 7/12 sera versée éventuellement, j'imagine, soit à la caisse de dépôt, soit directement à l'employé au moment où il tombe à sa pension. Expliquez-moi comment cela fonctionne.

M. Berthiaume: C'est au moment où l'employé prendra sa pension que les sommes seront déboursées à même le fonds consolidé du revenu, mais, à ce moment-là, on n'aura pas à prévoir...

M. Morin: Les dépenses.

M. Berthiaume: On aura à prévoir le déboursé, mais on n'aura pas à prévoir la dépense.

M. Morin: Vous n'aurez pas à l'inscrire dans les dépenses courantes.

M. Berthiaume: C'est cela, parce qu'il aura été inscrit aux dépenses peut-être dix, quinze ou vingt ans avant.

M. Morin: Bien. M. le Président, je vous remercie. Au programme 3, je n'ai qu'une observation relative à la baisse des effectifs. Nous passons d'un total d'hommes-années, comme s'exprime le programme, de 1003 en 1975/76 à 948 en 1976/77. Est-ce que vous pourriez nous donner des explications sur cette baisse qui paraît assez dramatique?

M. Berthiaume: C'est à cause des occasionnels, M. le Président. L'an dernier, en 1975/76, il y a eu un recours au fonds de suppléance en cours d'année qui n'est pas inscrit à l'élément 1. Si on avait le montant total dépensé en 1975/76, inscrit au livre des crédits, on verrait la concordance.

M. Morin: Alors, il s'agit d'occasionnels qui...

M. Berthiaume: Si on regarde l'avant-dernière ligne de la page 12-6, on voit qu'en 1975/76, on avait 131 occasionnels.

M. Morin: Oui. Mais ces employés à temps partiel, comme on les désigne ici, se trouvaient dans quel secteur d'activité du ministère?

M. Berthiaume: Pardon?

M. Morin: A quoi étaient employées ces personnes exactement?

M. Berthiaume: Dans les périodes de pointe, en particulier aux services de la comptabilité dans tous les ministères, tous les ans, il y a un nombre d'occasionnels qui sont engagés, en fin d'année financière surtout.

M. Morin: Est-ce que cette baisse de 131 à 42 n'est pas de nature à nuire au travail du ministère?

M. Berthiaume: La réponse de M. Lefaivre est passée au journal des Débats. Allez-y donc.

En cours d'année, on a fait appel au fonds de suppléance et au Conseil du trésor pour augmenter nos occasionnels, pour améliorer notre système mécanisé de comptabilité qu'on appelle le SYGBEC. Aujourd'hui, le système va beaucoup mieux et, l'an prochain, on prévoit réduire sensiblement ces employés occasionnels. C'est pour cela qu'on passe de 131 à 42 pour l'an prochain, parce que le système, aujourd'hui, étant mieux rodé, requiert moins de personnel.

Si on regarde les effectifs permanents, M. le Président, on se rend compte qu'il y a là une augmentation qui correspond à l'augmentation générale des activités gouvernementales.

M. Morin: 906 au lieu de 872. M. Berthiaume: C'est ça. M. Morin: Je constate...

M. Berthiaume: II semble que ce soit l'opération SYGBEC qui ait occasionné en 1975/76 le surcroît d'occasionnels, 131 par rapport à 42 cette année.

M. Morin: Bien, je suis disposé à adopter le programme 3, M. le Président.

Le Président (M. Kennedy): Programme 3. Adopté. Programme 6: Mesures antiinflationnistes. Elément 1...

M. Morin: Programme 6. Elément 1 : Régie des mesures anti-inflationnistes.

Le Président (M. Kennedy): ... Régie des mesures anti-inflationnistes.

M. Berthiaume: Ainsi, je ne sais pas si le député de Sauvé ou d'autres députés ont beaucoup

de questions au programme?. S'il y en avait peu, nous l'étudierions tout de suite pour libérer M. Le-faivre. Si on prévoit plus de questions, je suis disposé à attendre pour discuter de la régie tout d'abord.

M. Morin: M. le Président, je suis en mesure de me rendre au voeu du ministre, parce que je n'ai pas de questions particulières au programme 7.

Le Président (M. Kennedy): Programme 7. Adopté.

M. Morin: Nous pouvons l'adopter immédiatement.

Le Président (M. Kennedy): Adopté. Programme 7.

M. Morin: Bien.

Le Président (M. Kennedy): Programme 6. Le député de Sauvé.

Régie des mesures anti-inflationnistes

M. Morin: Merci M. le Président, peut-être M. De Coster voudrait-il s'asseoir près du ministre au cas où il voudrait répondre aux questions que j'ai à poser.

M. le Président, nous nous interrogeons depuis longtemps sur l'efficacité, la portée de ce programme qui vise à permettre l'administration de la loi concernant les mesures antiinflationnistes. Si je puis me permettre brièvement de rappeler les principales étapes du processus inflationniste, je vous ferai remarquer que cela a commencé avec la hausse des matières premières en 1972, que, par la suite, avec la multiplication des hausses de prix et la croissance vertigineuse des profits en 1974, le problème s'est aggravé rapidement sans que jusque-là les salaires aient contribué de façon substantielle à lancer le mouvement inflationniste. Pendant toute cette période, les prix se sont maintenus à un taux très élevé et ce n'est qu'en 1975 que nous avons été témoins d'un début de rattrapage en matière de salaire. J'ai, à plusieurs reprises, attiré l'attention du gouvernement et du ministre des Finances en particulier lors du débat sur l'adoption du projet de loi sur les mesures anti-inflationnistes, sur le fait que le gouvernement risquait dans le concret d'avoir très peu d'effets directs sur les prix, tandis que le fardeau de ces mesures retomberait avant tout sur les salariés.

J'ai maintes fois rappelé également que pendant la période de croissance sans frein des profits des entreprises, par exemple de 1972 à 1974, nous avons eu une moyenne d'augmentation de l'ordre de 85%, le gouvernement avait successivement refusé un certain nombre de mesures que nous lui avions suggérées à l'époque, comme instituer un impôt spécial sur les hausses de profits excessifs des entreprises; indexer l'impôt sur le revenu des particuliers; accorder des augmentations substantielles du salaire minimum, afin de permettre un certain rattrapage du pouvoir d'achat des personnes qui se trouvent au bas de l'échelle des salaires.

Mais comme on a laissé courir l'inflation pendant qu'elle profitait largement aux entreprises sous forme d'augmentation des profits, le gouvernement est arrivé bien tard avec son intervention, au moment même où les salariés commençaient à peine à récupérer leur pouvoir d'achat.

C'était déjà, à nos yeux, une injustice, laquelle a été accentuée par le fait que les mesures annoncées, qui sont calquées presque en tous points sur les mesures fédérales frappent d'abord les salaires et, de façon beaucoup plus aléatoire, les prix.

En effet, M. le Président, les mesures prévues par le programme de lutte anti-inflationniste sont sûrement efficaces en ce qui concerne les salaires. Nous en avons eu quelques exemples fort malheureux, d'ailleurs, puisqu'il suffit de surveiller quelques centaines de conventions collectives.

Mais elles constituent, dans une large mesure, une leurre au niveau des prix, où l'on se propose d'agir après le fait, sur des milliers de prix qui peuvent varier de jour en jour.

Nous avons demandé au gouvernement de renverser les termes de son programme en instituant d'abord — et c'est la logique de l'inflation qui l'exigeait — un contrôle suffisamment rigoureux des prix. Nous pensions que le gouvernement devrait interdire toute hausse de prix qui n'aurait pas été, au préalable, autorisée par la régie. Et, à nos yeux, un tel contrôle était le seul qui pouvait faire en sorte que le programme gouvernemental cesse de peser, d'abord et avant tout, sur ceux qui sont au bas de l'échelle des salaires mais qui, néanmoins, doivent faire face à l'augmentation continuelle de l'alimentation, du combustible à chauffage, du logement, de l'électricité, du transport en commun, etc.

Autrement dit, M. le Président, à nos yeux, une attitude responsable dans ce dossier aurait nécessité une intervention directe sur les prix et un ajustement, par la suite, des salaires, selon le processus normal de négociation.

La question que nous nous posions — et nous nous la posons encore à l'heure actuelle-est celle-ci. Pourquoi avoir inversé les règles en agissant à priori sur les salaires, sinon pour favoriser indûment ceux qui déjà profitent le plus du système actuel?

Compte tenu de ce préambule, j'aimerais maintenant poser quelques questions au ministre pour nous éclairer sur les activités de la régie, depuis qu'elle est entrée en vigueur.

Est-ce que je pourrais demander, tout d'abord, combien d'enquêtes ou de rapports ont été faits par la régie et transmis au lieutenant-gouverneur en conseil, en matière de prix? Je me réfère à l'article 64, de même qu'aux articles 39 et 40 de la loi.

M. Berthiaume: J'ai indiqué, à l'époque de la

formation de la Régie des mesures antiinflationnistes et à la suite de la signature de l'entente avec le gouvernement du Canada, il a été indiqué, à ce moment-là, que le contrôle des prix, pour être efficace, devait être national. Effectivement, tout ce secteur des prix à la consommation a été confié au gouvernement d'Ottawa, de telle façon que la société québécoise n'a pas eu à statuer sur des prix. Elle n'aurait à statuer que dans le cas d'un certain nombre de sociétés d'Etat. Il n'y a pas eu de cas référé au lieutenant-gouverneur en conseil jusqu'à maintenant.

M. Morin: Si je comprends bien...

M. Berthiaume: ... provenant de l'augmentation de prix dans le secteur des corporations de l'Etat québécois.

M. Morin: L'article 39 de la loi n'en dit pas moins ceci: Que la régie surveille le mouvement des prix, profits, rémunérations et dividendes en fonction des directives gouvernementales ainsi que leur efficacité et utilité générales ou particulières vis-à-vis — on veut dire sûrement à l'égard — de certaines catégories d'entreprises et de personnel et faire rapport au lieutenant-gouverneur en conseil en recommandant d'y apporter les modifications qu'elle juge susceptibles de les rendre plus utiles ou efficaces.

Le Président (M. Kennedy): Je m'excuse auprès du député de Sauvé. Mais est-ce qu'il a un long préambule? Le député d'Abitibi-Ouest avait demandé la parole.

M. Morin: M. le Président, je n'ai pas d'objection à ce que le député...

Le Président (M. Kennedy): Vous m'avez devancé.

M. Morin: ... pose des questions sur le même sujet, mais, d'habitude, c'est l'Opposition qui pose les premières questions. Le député sera le bienvenu, s'il veut compléter les renseignements qu'il désire obtenir.

M. Boutin: C'est cela, je veux compléter.

M. Morin: Mais, pour l'instant, j'aimerais bien poser mes questions tout d'abord.

M. Boutin: C'est parce que je voulais compléter votre affaire.

M. Morin: Bien! Vous êtes le bienvenu, si cela porte sur le même sujet...

M. Boutin: Exactement.

M. Morin: ... il n'y aura aucune espèce d'objection.

M. Boutin: C'est exactement sur le même sujet, M. le Président.

M. Morin: C'est parce que, vous comprenez, l'article 39 donne des pouvoirs à la régie québécoise. Là, on nous dit qu'elle ne les a pas exercés, que tout a été transféré, si je comprends bien, dans ce domaine, au pouvoir fédéral, à la régie fédérale.

M. Berthiaume: Pour être plus précis, il ne faudrait pas dire "tout". En pratique, presque tout, puisque ce que nous avons gardé sous la juridiction de la régie québécoise, ce sont les prix d'un certain nombre de corporations de l'Etat. Les autres prix, par l'entente que nous avons signée avec le gouvernement du Canada, relèvent de la commission Pépin.

M. Morin: Autrement dit...

M. Berthiaume: Ceci n'est pas en contradiction avec l'article 39. La loi en question permettait de signer de telles ententes. C'est dans ce cadre que nous l'avons fait.

M. Morin: Je sais. Si je comprends bien, la régie, dans l'état actuel de ses dossiers, ne surveille pas le mouvement des prix, des profits, etc.

M. Berthiaume: Non, M. le Président.

M. Morin: C'est ce que nous pensions à l'époque, remarquez bien. Nous ne nous faisions pas d'illusion à l'égard de cet article 39, mais on peut tout de même poser la question suivante: Les prix comprennent certainement les tarifs d'électricité, le prix des billets d'autobus. Est-ce que la régie s'est penchée sur cet aspect des prix? Est-ce qu'elle les a surveillés? Est-ce qu'elle a établi des dossiers?

M. Berthiaume: Premièrement, M. le Président, dans le cas des tarifs d'électricité, ils sont complètement exclus de tout contrôle pour des raisons assez évidentes. L'Hydro-Québec étant un des leviers, au point de vue des emprunts, les plus importants du gouvernement, on n'a pas voulu soumettre ce levier extrêmement important à une corporation ou à une régie fédérale ou provinciale.

En ce qui concerne...

M. Morin: L'Hydro est libre d'agir à sa guise.

M. Berthiaume: Ce n'est pas ce que j'ai dit. En ce qui concerne l'augmentation du prix des billets d'autobus, pour prendre le deuxième exemple, de toute façon, la philosophie générale de la loi antiinflationniste est que les prix ne doivent pas excéder une augmentation de coûts. S'il y a une augmentation des prix, cela doit correspondre à une augmentation des coûts.

Dans le cas particulier du transport en commun, déjà l'Etat subventionne des déficits au rythme d'à peu près $70 millions par année. On pourrait, théoriquement, sans enfreindre la Loi des mesures anti-inflationnistes, doubler les tarifs actuels et on serait encore à l'intérieur de la loi. Ce n'est pas souhaitable socialement, tout le monde

en convient, mais strictement sur le plan de l'application de la loi, j'ai l'impression qu'on pourrait doubler le tarif et dire que c'est une augmentation de coûts, parce qu'on ne peut plus assumer les déficits. Il n'y a pas de profits à la CTCUM, à ma connaissance. Il n'y en a pas non plus à la CTCUQ ou dans les autres commissions de transport. C'est sur ce plan que j'argumente.

M. Morin: S'il n'y a pas eu de surveillance ou d'enquête ou de rapport en matière de prix, j'imagine qu'il n'y a pas eu non plus d'ordonnance rendue dans ce domaine par la régie en vertu de l'article 63.

M. Berthiaume: M. le Président, je ne voudrais pas que la commission parlementaire et, par son biais, l'opinion publique, se méprennent. Il n'y en a pas eu par la Régie des mesures antiinflationnistes du Québec. Il y a sûrement eu de telles études, de telles recommandations exécutées par la commission Pépin. On connaît, on a lu dans les media d'information, dans les journaux, les mesures que prenait M. Pépin et Cie pour tenter de contrer ce phénomène de l'augmentation des prix, compte tenu de l'énorme difficulté du fait qu'il y a des milliers et des milliers, des centaines de milliers de produits à surveiller. La commission fédérale a fait appel au citoyen lui-même pour signaler des augmentations qu'il peut observer. Je ne voudrais pas induire le public en erreur en disant qu'il n'y a pas eu d'enquête. Etant donné que le Québec a confié cette matière au fédéral et que le fédéral a effectivement pris des mesures, je pense qu'on doit conclure qu'indirectement, le gouvernement du Québec a agi sur le contrôle des prix.

M. Morin: A voir certains prix, on se demande vraiment si le pouvoir fédéral est en mesure de surveiller des milliers et des milliers de prix sur un territoire aussi vaste que le territoire canadien. Il me semble que le Québec aurait eu un rôle à jouer dans la surveillance des prix sur son propre terri-toire.

M. Berthiaume: Je ne partage pas...

M. Morin: II est anormal qu'après avoir inclus cela dans la loi— ou était-ce seulement pour donner le change?— on ne l'applique pas ou on s'en décharge sur quelqu'un d'autre.

M. Berthiaume: Je ne partage pas l'avis du député de Sauvé que le gouvernement du Québec, par la régie, doit instituer des contrôles doublant ceux du fédéral, contribuant ainsi à une inefficacité; une diminution de productivité serait elle-même inflationniste. C'est complètement contraire au programme. Qu'il y ait un effort unifié, surtout compte tenu du fait qu'un grand nombre d'entreprises qui produisent des biens de consommation fonctionnent non seulement au Québec, mais dans d'autres provinces et bien souvent dans d'autres pays également, il serait peut-être trop facile pour ces en- treprises de contourner la loi ou de contourner les objectifs de la loi. Je pense que tout le monde reconnaît la difficulté énorme de contrôler les prix, à cause du grand nombre de produits, comme je l'ai indiqué tantôt, et des tas de façons qu'on peut employer pour camoufler les prix. Qu'il y ait augmentation de prix dans divers domaines depuis quelques mois, c'est indéniable. Est-ce que ces prix ont augmenté sans qu'il y ait augmentation correspondante des coûts de production ou des coûts de distribution ou des coûts de mise en marché? Je crois que ni le député de Sauvé, ni moi-même ne sommes en mesure d'en juger. C'est pour cela qu'il y a une commission. Si le député de Sauvé, comme il l'a dit, a vu les prix grimper en flèche, son devoir de citoyen serait de le signaler à la commission Pépin.

M. Morin: De le signaler au gouvernement aussi, ce que nous faisons à l'occasion, sans grand effet naturellement. La question que je me pose devant ce constat de non-responsabilité de la régie en matière de prix, est celle-ci: Pourquoi, a-t-on mis dans la loi cet article 39 qui est un des plus importants, qui est celui qui détermine les pouvoirs de la régie en matière de surveillance des prix, de mouvement réel ou envisagé des prix, profits, rémunération, dividendes, etc. Est-ce que c'était seulement pour donner le change? Parce qu'en fait, si vous abdiquez vos responsabilités, la surveillance des prix sur le territoire québécois, si vous abdiquez cela à l'organisme fédéral, au fond, il doit y avoir dans ce projet de loi une centaine d'articles de trop, se ce n'est pas davantage.

M. Berthiaume: M. le Président, comme on le sait, une entente a été signée. Il est quand même possible qu'entre l'adoption de la loi et la conclusion d'une entente... c'est-à-dire que, s'il n'y avait pas eu d'entente, si, pour une raison ou pour une autre, les négociations que nous avons eues avec le gouvernement du Canada avaient échoué, à ce moment, nous avions quand même les pouvoirs d'agir.

Il était essentiel également, en adoptant la loi en question, de protéger la juridiction québécoise. C'est ce que nous avons fait. Si nous en sommes venus à une entente avec le gouvernement du Canada par la suite, c'est dans ce désir d'efficacité et par une meilleure coordination de l'effort total que nous pouvions réussir dans cette lutte extrêmement difficile contre l'inflation.

M. Morin: Passons aux salaires pour voir si la réponse sera la même.

Combien d'enquêtes ou de rapports ont-ils été faits par la régie et transmis au lieutenant-gouverneur en conseil, en matière de salaires? Peut-être allez-vous être plus efficaces sur ce chapitre.

M. Berthiaume: Avant de répondre à cette question, le président me donne l'évolution de l'indice des prix à la consommation depuis le début de 1976, à toutes fins pratiques, au début du

programme. Au premier trimestre de 1976, l'augmentation des prix à la consommation a été de 2,5%. Annualisé, ça donne 5,2%. Si on compare ça au dernier trimestre de 1975, avant les mesures, le taux annualisé était de 13,6%. Maintenant...

M. Morin: Le ministre sait qu'avec ou sans régie, les prix de gros avaient commencé à baisser à ce moment-là.

M. Berthiaume: C'est fort possible. J'ai déjà indiqué qu'il y avait peut-être des facteurs extérieurs à la mesure, sauf qu'il faut quand même reconnaître, indépendamment de ça, que le phénomène qu'on essaie de combattre s'est résorbé un peu, et on ne peut pas dire que les prix à la consommation ont monté en flèche d'une façon absolument extraordinaire par rapport au trimestre qui a précédé la mise en application des mesures...

M. Morin: On note, par exemple, une reprise des prix de gros...

M. Berthiaume: J'essaie simplement de rétablir...

M. Morin: C'est parce qu'on note une reprise, récemment, de l'augmentation des prix de gros, et pendant ce temps, aux Etats-Unis, l'inflation a baissé de façon très substantielle, alors qu'ici, je ne crois pas qu'on puisse vraiment crier victoire, surtout dans la perspective d'une reprise des prix du gros.

M. Berthiaume: Je suis très prudent. Je ne crie pas victoire non plus. J'essaie simplement de rétablir certains faits en ce qui concerne les derniers mois, parce que le programme en question, sûrement pour réussir — en tout cas, c'est l'opinion partagée par à peu près tout le monde qui s'y connaît à l'heure actuelle — va prendre probablement les trois ans en question. Il y a toute une psychose à modifier, et c'est peut-être ça, en fait. Le premier effet a peut-être été plus psychologique qu'autre chose.

Maintenant, en ce qui concerne...

M. Morin: Si vous parlez de la psychose inflationniste, cela peut durer effectivement très longtemps avant d'en venir à bout.

M. Berthiaume: C'est possible, mais il semble que...

M. Morin: Là encore, faut-il savoir à quoi on doit s'attaquer d'abord, et...

M. Berthiaume: Sur la question des salaires...

M. Morin: ... à notre avis, les prix, dans la logique des choses, devaient venir avant les salaires.

Mais parlez-nous maintenant, justement, des salaires.

Le Président (M. Kennedy): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: M. le Président, je voudrais revenir peut-être au point soulevé dès le début par le chef de l'Opposition, quant à l'augmentation des profits de 85%. Je crois qu'on peut faire dire aux chiffres ce qu'on veut, et son affirmation, au point de vue comptable, est totalement erronée et fausse.

M. Morin: Cela vient du Bureau fédéral de la statistique.

M. Boutin: L'augmentation de 85% est par rapport à quoi? Lorsqu'on parle d'augmentation exagérée de profits, c'est par rapport au capital investi, c'est par rapport à un rendement. L'augmentation de 85% des profits, c'est simplement une analyse horizontale, strictement comparative de chiffres de vente et de chiffres de profit, mais ça ne veut rien dire. C'est le rendement qui, en technique comptable et en technique administrative, est le seul lien qui puisse permettre de faire des comparaisons économiques sensées. Si on peut déterminer qu'il y a eu une augmentation exagérée du rendement moyen des entreprises dans la province de Québec, je crois que c'est la seule façon qu'on peut voir et dire que là, il faudrait contrôler les prix en premier.

Lorsqu'on parle du contrôle des salaires, c'est parce qu'on l'impute directement au contrôle des coûts à l'intérieur de l'entreprise et lorsqu'on regarde les dernières années où l'augmentation des salaires a été plus forte que l'augmentation de la productivité moyenne de la province de Québec et du Canada, on s'aperçoit d'ailleurs que celle-ci a un effet directement inflationniste et qu'à l'intérieur des coûts de production, c'est la seule façon de pouvoir en arriver à savoir exactement ce qu'il en est dans ce contrôle inflationniste.

On parle d'une réduction de l'inflation aux Etats-Unis. Il faut toujours quand même remarquer que les syndicats américains ont quand même accepté des ententes avec le gouvernement américain pour pouvoir négocier des contrats à des taux de salaire plus bas que la moyenne, justement pour réussir à faire ce rattrapage et cette augmentation de productivité qui pourra permettre, par la suite, l'augmentation des salaires.

Il ne peut y avoir d'augmentation de salaire sensée sans une augmentation de la productivité.

Le Président (M. Kennedy): Le député de Sauvé.

M. Morin: Je ne veux pas lancer un long débat, mais je suis obligé de constater — le député n'a d'ailleurs pas mis mes chiffres en doute puisqu'ils viennent du Bureau fédéral de la statistique, de toute façon — que l'augmentation des profits de l'année 1974, par rapport à l'année 1972, a été de 85%.

M. Boutin: Cela ne veut rien dire.

M. Morin: Cela veut dire quelque chose... M. Boutin: Cela ne veut rien dire.

M. Morin: ...pour les entreprises en question et cela veut dire quelque chose pour ceux qui ont à payer aussi pour ces profits.

M. Boutin: Le rendement est moyen.

M. Morin: Quand on voit les profits augmenter de 10% par année, donc de 20% sur deux ans, on peut dire: Bien, le caractère raisonnable ne peut vraiment pas être mis en doute, mais quand on voit des augmentations de profit de l'ordre de 85% en deux ans, il faut se poser des questions et, à notre avis, c'est là qu'a commencé l'inflation. Ce n'est pas dans les salaires. La logique du processus inflationniste est là, mais, comme je l'ai dit, je ne veux pas lancer un long débat à moins que le député d'Abitibi-Ouest n'y tienne...

M. Boutin: Je suis prêt.

M. Morin: ...mais je voudrais revenir maintenant à la question des salaires puisqu'il semble que, dans ce domaine, la régie ait été plus efficace.

M. Berthiaume: D'abord faudrait-il dire que, dans toute cette question des prix et des salaires, y a une question de productivité également qui peut provoquer des augmentations de prix.

Pour répondre à la question du député de Sauvé, en matière de rémunération, la régie a prix 40 décisions en matière de salaire et on m'informe que, sur ces 40, 25 cas n'enfreignaient ni la loi, ni les directives ou les lignes directrices.

M. Morin: Ces décisions ont-elles été communiquées par la régie au lieutenant-gouverneur en conseil ou ont-elles été communiquées directement au public? S'agit-il de l'application des articles 64 ou 39 et 40?

M. Berthiaume: Je vais peut-être laisser le président, M. De Coster, répondre à cette question.

Les décisions sont transmises directement aux parties concernées, tel que le demande la loi.

M. Morin: Et, jusqu'ici, vous n'avez pas jugé opportun de procéder à des enquêtes et de faire rapport au lieutenant-gouverneur en conseil, comme la loi vous y autorise lorsque vous estimez que c'est nécessaire.

M. Berthiaume: La loi ne nous autorise pas à faire rapport au lieutenant-gouverneur en conseil ou ne nous oblige pas à faire rapport au lieutenant-gouverneur en conseil.

M. Morin: Elle ne vous oblige pas, mais elle vous y autorise.

M. Berthiaume: Elle ne nous y autorise pas non plus. L'article 40 permet à la régie de faire enquête si te lieutenant-gouverneur en conseil le lui demande, pour déterminer si des groupes ou des catégories de personnes qui ne sont pas assujetties, devraient l'être pour des fins de lutte à l'inflation.

M. Morin: Vous n'avez reçu aucune demande?

M. Berthiaume: Nous avons eu une demande du lieutenant-gouverneur en conseil en ce qui concerne les baux industriels et commerciaux.

M. Morin: Les baux.

M. Berthiaume: Les baux industriels et commerciaux.

M. Morin: Est-ce que vous avez déjà communiqué votre réponse sur ce sujet?

M. Berthiaume: La réponse a été communiquée au lieutenant-gouverneur en conseil.

M. Morin: C'est ce que je vous demandais, s'il y en avait qui avaient été de la sorte transmis au lieutenant-gouverneur en conseil.

M. Berthiaume: Ce n'est pas relié à une décision.

Ce n'est pas relié à une décision concernant des cas d'augmentation.

M. Morin: Non, je comprends.

M. Berthiaume: Une étude a été confiée à la régie. L'étude a été faite par la régie et transmise au lieutenant-gouverneur en conseil.

M. Morin: Est-ce que ce document peut-être rendu public ou si c'est un document confidentiel?

M. Berthiaume: Je n'ai pas d'objection de principe, M. le Président, à rendre la décision publique, bien au contraire, en fait. Je voudrais m'enquérir auprès de collègues du cabinet pour savoir si cela a été discuté au Conseil des ministres. Cela peut paraître bizarre, mais j'ai été absent pendant un certain temps et je crois que c'est pendant mon absence que la question a été référée au cabinet. A part cette réserve...

M. Morin: Je suis disposé à attendre. Il n'y a pas de péril en la matière.

M. Berthiaume: Le texte ou l'opinion devrait être rendu public, étant donné qu'on a dit publiquement qu'on demandait à la régie de faire cette étude.

M. Morin: II n'y a pas de péril en la demeure, mais si vous pouviez...

M. Berthiaume: Pourvu que la loi l'exige. Pardon?

M. Morin: Si vous pouviez le déposer en Chambre.

Mi Berthiaume: Peut-être demain, si je peux l'obtenir rapidement. Je pourrai le faire demain.

M. Morin: Bien. Cela me satisfait.

M. Oe Coster a mentionné une quarantaine de décisions qui ont été rendues. Là-dessus, 25 comportaient, en quelque sorte, des nolle prose-qui, c'est-à-dire que vous vous êtes rendu compte qu'il n'y avait pas eu infraction. Est-ce que vous êtes en mesure de déposer tout d'abord une liste de vos décisions?

M. Berthiaume: Dans deux ou trois cas, M. le Président, les parties n'ont pas encore été informées de la décision de la régie, étant donné qu'elle est toute récente. Si on me permet d'enlever de la liste ces deux ou trois cas, je pourrais la déposer immédiatement. Le service de photocopie pourrait peut-être, si je lui indiquais lesquels, les enlever et je pourrais déposer...

M. Morin: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, quoique le document pourrait être réservé aux fins de la commission.

M. Berthiaume: M. De Coster me dit qu'il y a seulement un cas.

Il y a seulement celui-ci.

Je pourrais le rayer et faire distribuer le texte que j'ai ici.

M. Morin: Bien! Est-ce qu'il existe une sorte de compendium des décisions où vous avez réduit des augmentations de salaire, une sorte de jurisprudence à laquelle on pourrait se référer? J'imagine que vous avez toutes ces décisions dans vos dossiers, mais avez-vous songé à les réunir pour l'usage public?

M. Berthiaume: Ces décisions sont rendues publiques individuellement et la liste en est transmise régulièrement aussi aux media d'information.

M. Morin: Je sais qu'elles sont rendues publiques l'une après l'autre, mais le sens de ma question est celui-ci: Y a-t-il un compendium de toutes ces décisions?

M. Berthiaume: Avec 40 cas seulement jusqu'à maintenant et des cas assez diversifiés, ce sont des municipalités d'une part, des entreprises privées de l'autre, la fonction publique ailleurs, il nous est bien difficile d'établir, avec 40 cas aussi diversifiés, une jurisprudence qui pourrait être utile présentement. On vise à ça, c'est évident.

M. Morin: Ces documents sont-ils publics, j'imagine qu'ils le sont, vos décisions, une fois rendues, sont publiques?

M. Berthiaume: Les décisions sont publiques, oui.

M. Morin: Compte tenu du fait que les journaux donnent quelquefois des indications très sommaires des motifs de vos décisions, est-il possible de déposer devant cette commission vos décisions lorsqu'elles ont pour effet de bloquer une augmentation de salaire.

M. Berthiaume: Le motif est invoqué, mais les détails du motif ne le sont pas. On dira, par exemple, comme motif: Nous avons accepté des liens historiques que nous a fait valoir la municipalité, par exemple. Mais nous ne produisons pas tout le détail des liens historiques qui ont été invoqués. Ce n'est pas comme une décision de la cour.

Si, par ailleurs, la partie concernée ou une des deux parties concernées n'est pas d'accord avec la décision de la régie, il y a l'autre processus qui est prévu, celui du commissaire et du tribunal d'appel où les documents seront de nouveau examinés, étudiés et remis en cause.

M. Morin: II est possible que vous déposiez devant la commission vos décisions? Je ne demande pas toutes les 40...

M. Berthiaume: C'est le document dont on discutait tantôt...

M. Morin: Je pensais que cela n'était qu'une liste.

M. Berthiaume: Non, j'ai toutes les indications, le pourcentage accordé, la raison, etc.

M. Morin: Mais pour chacune de vos décisions, est-ce que la régie rédige un texte, une sorte d'arrêt?

M. Berthiaume: Une résolution...

M. Morin: Ou une résolution, si vous le voulez.

M. Berthiaume: Une résolution de la régie, oui.

M. Morin: C'est ce que j'avais à l'esprit, en plus de la liste qui donne des indications sommaires, j'aurais aimé voir le fonctionnement interne de la régie lorsqu'elle prend une décision comme celle-là.

M. Berthiaume: La nature ou le contenu de la résolution n'est pas autre chose que ce que je vais vous donner. C'est très bref et ce n'est pas une décision comme rend un tribunal, motivé, in extenso; c'est simplement le résultat des discussions et des décisions. Maintenant, par contre, dans les communiqués qui sont émis par la régie, que je reçois aussi, les communiqués de presse qui indiquent leurs décisions, il y a quelques explications qui pourraient être utiles à un auditoire plus large. On pourrait faire parvenir aux chefs parlementaires des divers partis de l'Assemblée nationale ces renseignements en même temps qu'on les reçoit. A ce moment-là...

M. Morin: II serait utile que nous les recevions; parce que nous ne les recevons pas.

M. Berthiaume: Les media les reçoivent. Ils sont envoyés aux media.

Si je peux vous expliquer très brièvement le processus. Nous demandons aux parties concernées, à l'employeur, puisque le mécanisme vise l'employeur, de nous remplir un formulaire qui contient des formules mathématiques qui viennent à déterminer quel est le pourcentage d'augmentation permis. Une fois cette formule remplie, si les parties se sont entendues pour une augmentation qui dépasse les normes, elles doivent faire valoir à la régie les motifs de dépassement. Ces motifs sont peu nombreux, le motif le plus fréquent est celui d'un lien historique; par exemple, le lien historique d'un corps de pompiers ou de policiers d'une municipalité par rapport à une autre municipalité. Les parties nous font valoir le motif, nous expliquent elles-mêmes lés liens qu'elles invoquent. La régie décide si oui ou non elle accepte le fait du lien historique et, s'il y a lieu, quel est le pourcentage qu'elle accorde.

M. Morin: Cela, je le comprends très bien, mais le sens de ma question est le suivant: Pourriez-vous déposer devant cette commission les résolutions, la quinzaine de résolutions par lesquelles vous avez décidé de ne pas accorder l'augmentation qui avait été négociée ou qui était demandée? Est-ce que c'est possible?

M. Berthiaume: C'est possible de dire que nous n'accordons pas... Si la demande ne contrevient pas ou si l'entente ne contrevient pas aux normes, nous disons tout simplement que cela ne contrevient pas aux normes.

Si cela contrevient aux normes et que nous accordons un montant supérieur à la limite permise, nous allons dire: Vous avez demandé quatorze, nous vous accordons douze, sur la foi des liens historiques.

M. Morin: Je comprends.

M. Berthiaume: C'est une décision un peu arbitraire de la régie, ce n'est pas une décision mathématique à ce moment-là. La décision mathématique est pour déterminer quel est le maximum. Nous pourrions nous limiter strictement au maximum permis, mais il nous est aussi permis d'ajouter un pourcentage, ce qui est pure décision arbitraire de la régie.

M. Morin: J'ai compris qu'il y a là-dedans une part d'arbitraire, bien sûr, également. Mais serait-il possible que vous déposiez devant cette commission les résolutions adoptées par la régie?

M. Berthiaume: Les résolutions, c'est dans la forme du document que vous allez avoir. C'est aussi succint que cela, parce que c'est basé sur une documentation qui est le dossier lui-même.

M. Morin: Et vous voulez dire que tout ce que vous avez est une sorte de liste sur laquelle on voit apparaître le nom de l'entreprise, par exemple, et les montants, les pourcentages d'augmentation.

M. Berthiaume: Comme résolution de la régie, oui. C'est une résolution qui dit que nous avons examiné le cas du groupe des policiers de Drummondville, par exemple, que la demande était de l'ordre de 14%, que le maximum permis était de 10,21% et qu'en raison des liens historiques qui sont invoqués, et qui sont contenus dans le dossier, nous avons accordé 12%. C'est ce que vous trouvez là.

M. Morin: D'accord, mais j'ai fréquenté quelques régies, autrefois. Une régie procède par voie de décision, de résolution ou de recommandation, selon le cas.

Voulez-vous dire que vous n'avez pas un registre dans lequel vous entrez chacune de vos décisions, les unes après les autres?

M. Berthiaume: C'est bien sûr.

M. Morin: C'est ce que je vous demande.

M. Berthiaume: J'ai l'impression de communiquer au député de Sauvé exactement le même contenu, mais dans une forme différente. Ce n'est pas le registre que je lui communique. C'est une liste fabriquée à partir de ce registre et qui contient exactement les mêmes données.

M. Morin: Oui, mais je serais intéressé à étudier le fonctionnement de la régie, et, à moins que ce ne soit hautement secret, j'aimerais avoir des exemplaires des décisions, en bonne et due forme, telles qu'elles sont entrées au registre de la régie, et portant, à tout le moins, sur les quinze cas où il y a eu décision de la régie de bloquer une augmentation.

M. Berthiaume: Je comprends que le député de Sauvé veut voir la forme que cela prend.

M. Morin: Notamment la forme.

M. Berthiaume: Je n'ai pas d'objection à cela. Je croyais qu'il voulait connaître les données, et c'est ce que je lui transmets.

M. Morin: La liste que vous avez déposée me donnera certainement des éléments déjà importants, mais la forme et l'exposé des motifs m'intéressent également. Si je comprends bien, c'est possible que vous déposiez cela?

M. Berthiaume: Oui, si on peut en trouver un exemplaire.

Le Président (M. Kennedy): Je pense qu'il va falloir attendre à ce soir, parce qu'on me dit que le service de la photocopie est fermé.

Une Voix: Est-ce qu'on va en avoir?

M. Berthiaume: Cela va bien.

Le Président (M. Kennedy): II faut aller dans un autre service.

M. Berthiaume: D'accord. Ce soir, je pourrais fournir au député de Sauvé deux pages du registre auquel on a fait allusion, qui va lui donner une idée comment c'est inscrit.

Le Président (M. Kennedy): Si vous voulez nous remettre les exemplaires, pendant la suspension, on pourra les faire photocopier.

M. Morin: Maintenant, s'il n'y a que quelques pages, je n'aurais pas d'objection à ce que vous déposiez les quarante décisions, s'il n'y a que quelques pages.

M. Berthiaume: Les quarante décisions ne sont pas encore inscrites dans un registre. Ce sont les résolutions que j'ai ici, ce n'est pas le registre lui-même. Ce sont les résolutions, ce sont les procès verbaux des réunions de la régie.

Si je comprends bien, il y a deux choses, il y a la forme et il y a le contenu. Le contenu, je le livre par un moyen, la forme, par l'autre. L'on peut bien faire des photocopies, je n'y ai pas d'objection de principe, mais j'ai l'impression que le député de Sauvé va recevoir tout ce qu'il peut recevoir.

M. Morin: Non, mais cela m'intéresse tout de même de voir un peu comment tout cela est tenu et comment cela se présente.

M. Berthiaume: Mais oui, c'est ce que...

M. Morin: ...parce qu'on parlait tout à l'heure d'arbitraire, mais cela se mesure quelquefois mieux quand on a sous les yeux les textes, la façon de procéder. Je voudrais savoir dans quelle mesure cela est arbitraire et dans quelle mesure cela ne l'est pas.

Je n'ai pas d'objection à attendre jusqu'à ce soir.

M. Berthiaume: Vous avez des dossiers de deux ou trois pouces d'épais. Ce n'est certainement pas ce genre de chose que vous voulez voir. Si vous voulez comprendre le dossier ou le fonctionnement d'un dossier, vous allez avoir un dossier de deux ou trois pouces d'épais.

M. Morin: Ces dossiers...

M. Berthiaume: C'est traduit par une résolution bien courte.

M. Morin: Oui, mais M. De Coster, les dossiers sont confidentiels, si je ne m'abuse?

M. Berthiaume: Oui, c'est évident.

M. Morin: Donc, tout ce qui est public, c'est votre décision?

M. Berthiaume: C'est cela.

M. Morin: Mais j'aimerais voir justement, à tout le moins, comment cela se présente. Passons à un cas particulièrement flagrant d'injustice pour les travailleurs québécois dans l'absence de présence du Québec à l'égard des prix. Je pense en particulier aux 10 000 travailleurs québécois des pâtes et papiers qui ont fait l'objet d'une décision de la commission Pépin, laquelle décision me paraît passablement aberrante, compte tenu du type d'industrie et compte tenu du fait que presque toute la production de ces industries de pâtes et papiers est destinée à l'étranger et que, de contrôler les prix, dans ce cas, ce n'était pas de nature à avantager les travailleurs qui avaient réussi à obtenir un règlement négocié qui leur était favorable.

Ce jugement rendu par la commission Pépin sur les hausses salariales maximales dans l'industrie des pâtes et papiers fera vraisemblablement, d'après ce qu'on nous a rapporté, une dizaine de milliers de victimes au Québec. Pour ces travailleurs, l'intervention gouvernementale aura constitué un appui, littéralement un appui unilatéral et foncièrement injuste à cause des entreprises papetières qui sont également des entreprises majoritairement étrangères.

Cela a été une intervention tardive d'ailleurs, qui s'est fait attendre, dans le cas de la Société Irving Pulp and Paper, qui non seulement a retardé indûment le règlement du conflit pour les travailleurs québécois, mais les a privés de salaires pendant plusieurs semaines et, en outre, a eu comme conséquence de dresser un modèle de règlement nettement défavorable aux travailleurs et aux travailleurs québécois en particulier, compte tenu de l'importance des pâtes et papiers ici.

M. le Président, c'est peut-être là qu'on va se rendre compte qu'il eût été utile que le gouvernement ne décide pas de littéralement abandonner ses responsabilités en matière de prix au gouvernement fédéral, lorsqu'on constate que, dans une entreprise, dans une industrie majoritairement contrôlée par des étrangers et où plus de 80% de la production est exportée, l'intervention de la commission Pépin a eu pour effet d'empêcher les travailleurs de bénéficier des avantages pécuniaires que leur vaut cette richesse naturelle québécoise.

M. Berthiaume: Les prix à l'exportation ne sont pas contrôlés.

M. Morin: Non, mais les salaires; je vous parle, évidemment...

M. Berthiaume: Je mentionne ceci parce que la base de l'argumentation du député de Sauvé semble être fondée sur cette question d'exportation. Il insiste sur le fait que 80% ou 90%...

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: Alors, le prix de l'exportation n'est pas contrôlé.

M. Morin: Justement. Alors? Donc, les compagnies sont libres d'augmenter leur prix à l'exportation...

M. Berthiaume: C'est cela.

M. Morin: ... mais les salaires, eux, sont bloqués. Donc, on ne fait pas bénéficier les travailleurs de l'augmentation éventuelle des prix à l'exportation. Ce que dit le ministre renforce exactement le type d'argument que j'étais en train de développer. Je pense qu'il s'en rend compte.

M. Berthiaume: Oui, je comprends son argumentation.

Le Président (M. Kennedy): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: M. le Président, je crois qu'il faut reporter chacune des choses dans son contexte. Lorsqu'on regarde principalement l'industrie des pâtes et papiers et qu'on remarque que la moyenne des salaires actuellement est plus forte au Canada qu'aux Etats-Unis, avec un rendement horaire moyen par travailleur plus faible que celui aux Etats-Unis, je crois que la décision de la commission Pépin dans ce cas était bien sage, justement pour protéger le travailleur, justement pour que le marché canadien demeure compétitif sur le marché international et pour garder des emplois pour les travailleurs. Alors, ce sont des choses que le chef de l'Opposition ne dit pas, mais qu'il devrait mentionner, s'il veut être honnête, pour garder les choses dans leur contexte global.

M. Morin: Ce que le député ne dit pas, c'est que c'est un cartel et qu'il n'y a guère de concurrence dans le domaine des pâtes et papiers, en particulier dans le domaine du papier journal. J'ai hâte de voir le député aller s'expliquer devant les travailleurs de sa région, leur expliquer qu'ils n'ont pas droit à des augmentations.

M. Boutin: Oui, c'est justement cela. Je suis bien content que vous disiez cela. C'est pour cela que les moulins à papier vont fermer deux mois et trois mois cette année, justement à cause de cette perte de production sur le marché international, parce que leurs prix sont trop élevés.

M. Morin: M. le Président, j'ai l'impression...

M. Boutin: C'est pour cela qu'on en arrive à du chômage.

M. Morin: ... qu'il ne faut pas confondre l'excès de production dont on a été témoin, surtout par certaines compagnies qui ont stocké de façon considérable pour faire face souvent à des lockout, des possibilités de lock-out, il ne faut pas confondre cela avec la question des prix et la question des salaires. Dans le cas de Irving Pulp and Paper, je tiens à attirer l'attention du ministre et de ta régie sur le fait que c'eût été utile que ce soit la régie québécoise qui se prononce sur ce cas en particulier. Je crois que, peut-être, on aurait eu une décision plus équitable.

M. Berthiaume: M. le Président, ce n'est pas possible. On ne peut pas sauver la chèvre et le chou dans ce domaine. Si le programme devrait être efficace, il devrait être national. S'il est national, il n'est pas provincial. Il ne peut pas être les deux en même temps; d'autant plus qu'en matière d'exportation, jusqu'à nouvel ordre, la juridiction est fédérale. De toute façon, le Québec n'a pas les outils pour pouvoir faire un travail efficace dans le domaine particulier qui est mis en cause. Alors, tout le bon sens indique que cela devrait être donné à Ottawa pour que le programme puisse être efficace. Le député de Sauvé peut bien sourire en croche. Ce sont les faits, c'est la réalité économique de tout l'environnement nord-américain.

M. Morin: C'est la réalité économique parce que vous la voulez telle et parce que vous ne prenez pas vos responsabilités. Vous vous inclinez un peu trop facilement, à mon avis, devant le système mis en place par le gouvernement fédéral. Vous auriez pu, là...

M. Berthiaume: Nous avons toujours dit que le programme, pour être efficace, devait être national. Quand le député de Sauvé ou ses collègues du Parti québécois à l'Assemblée nationale posaient des questions au premier ministre sur le sujet, on disait, à ce moment, que ce devait être un effort coordonné dans tout le Canada. D'ailleurs, dès que le premier ministre Trudeau a annoncé au mois d'octobre 1975 le programme fédéral, le gouvernement du Québec s'est prononcé immédiatement, de façon à poursuivre dans le même sens, pour avoir un effort coordonné avec les autres provinces, compte tenu de la concurrence, compte tenu de la position concurrentielle du Québec, compte tenu de tous ces facteurs, en fait. La protection du travailleur, comme l'a indiqué le député de la région de l'Abitibi tantôt, ce n'est pas strictement une question du salaire. C'est beaucoup plus complexe que cela. Je suis persuadé que le député de Sauvé le comprend.

M. Morin: M. le Président, on ne peut pas exclure la possibilité de...

M. Berthiaume: On peut bien donner les salaires les plus élevés au monde à une industrie québécoise si, ensuite, cette industrie est incapable de concurrencer à cause des salaires élevés et l'effet sur les prix, à ce moment-là, l'employé perd son travail. Il n'est pas plus avancé.

M. Morin: M. le Président, le fait que la régie québécoise aurait pu être compétente pour ce qui est au moins des pâtes et papiers québécois, n'aurait pas exclu éventuellement la concertation et la coordination avec ce qui se passe dans les autres provinces. Je pense bien que la régie aurait eu suf-

fisamment d'intelligence pour y voir, mais d'avoir abdiqué ses responsabilités de la sorte, je crois que c'e9t au détriment des travailleurs des pâtes et papiers du Québec.

M. Berthiaume: Le député de Sauvé fait la preuve de ce que je viens de dire, le besoin de coordination.

M. Tremblay: M. le Président, le chef de l'Opposition pourrait peut-être se référer aux pages financières du journal La Presse, qui, par l'entreprise de Ann Bower, du Financial Post, fait état d'un reportage intéressant sur les plus récentes statistiques, les plus récentes compilations de Statistique Canada. On peut y lire cet article qui est titré de la façon suivante: "Les salaires ont grimpé plus vite que les profits avec les contrôles." On dit ensuite: "Les dirigeants syndicaux— et je pourrais dire: Le chef de l'Opposition du Québec— "s'opposent au contrôle des prix et des revenus principalement parce qu'ils estiment que l'application de cette mesure pénalise davantage les revenus que les bénéfices et les prix. "Ce qui s'est passé dans les autres pays où on a appliqué un contrôle des prix et des salaires tend d'ailleurs à leur donner raison. Pourtant, les résultats relevés au cours des premiers mois de la mise en oeuvre du programme de contrôle indiquent qu'ils ont tort. Le fait est que le revenu moyen continue d'augmenter à un rythme très raisonnable et en valeur réelle après avoir tenu compte de l'inflation, il s'accroît davantage que l'an dernier. En revanche, les bénéfices n'augmentent pratiquement pas. Un examen des plus récentes compilations sur les revenus et les bénéfices faites par Statistique Canada le confirme. L'indice composé des salaires hebdomadaires moyens dans l'industrie a atteint le montant désaisonnalisé de $221.73 en mars 1976, d'après les données préliminaires de Statistique Canada. Alors, cela correspond à une augmentation de 13,5% par rapport à il y a un an, soit environ 1% de moins que l'augmentation annuelle enregistrée au printemps de 1975."

Et, un peu plus loin, on peut relever cet extrait, ici, qui dit, par exemple qu'une augmentation du revenu hebdomadaire moyen de 16,1% en Al-berta s'est traduite par un gain réel, après avoir tenu compte de l'inflation, de près de 6%. Ce qui nous intéresse justement...

M. Morin: Est-ce que le député me permettrait une question? Est-ce qu'il s'agit, dans cet article, d'un indice fondé seulement sur les salaires des syndiqués ou de l'ensemble des salaires, parce que j'ai l'impression que c'est fondé sur un indicateur biaisé...

M. Tremblay: C'est Statistique Canada qui fait une analyse...

M. Morin: Bien oui, je sais que c'est Statistique Canada...

M. Tremblay: ... du rendement de la loi sur les contrôles...

M. Morin: Je vous demande de quel indice il s'agit. S'agit-il d'un indice sur l'ensemble des salaires, ou seulement de certains salaires de syndiqués, parce que ce n'est pas la même chose?

M. Tremblay: Cela doit être, sans doute... Parce que Statistique Canada est certainement honnête avec ses statistiques. Elle analyse sans doute les contrôles appliqués aux endroits où les contrôles doivent l'être.

M. Morin: C'est-à-dire les grandes entreprises, la plupart du temps syndiquées. Bon! Alors, écoutez! Mettez des nuances dans vos propos.

M. Tremblay: Mais on dit également que les prix n'ont pas augmenté. Ecoutez bien. On a dit qu'en Alberta, ils ont eu une augmentation du revenu hebdomadaire de 16,1% traduite par un gain réel. Les Québécois sont également privilégiés. Leur revenu en mars 1976 a augmenté de 13,5% en moyenne par rapport à il y a un an...

M. Morin: Qui ça?

M. Tremblay: Les Québécois.

M. Morin: Quels Québécois?

M. Tremblay:... mais les hausses des prix à la consommation ont été les plus faibles dans le Québec, comme par exemple, les 7,9% à Montréal.

M. Morin: De quels Québécois s'agit-il? On dit: Les Québécois, mais est-ce que...

M. Tremblay: Les Québécois, dont les emplois sont soumis, sans doute, au contrôle.

M. Morin: C'est ce que je vous disais tout à l'heure. C'est un indice fondé sur les emplois syndiqués, donc un indice très biaisé et qui ne nous donne certainement pas la hausse réelle des revenus des Québécois. C'est bien certain.

M. Tremblay: De toute façon, il est inutile de le mentionner.

Le Président (M. Kennedy): Le député d'Abitibi-Ouest.

M. Boutin: C'est simplement pour faire une autre mise au point sur une autre fausseté que le chef de l'Opposition a émise tout à l'heure, à l'effet que justement le prix du papier était dû à du "surstockage". C'est pour cela qu'il ne se vendait pas sur le marché international. C'est complètement faux. Lorsqu'on vient de terminer une grève de six mois qui a placé tout le monde dans un marasme économique assez important dans le domaine des opérations forestières, des petits pro-

ducteurs de bois de pulpe, des moulins à scie et toutes ces choses, on n'avait pas de surplus de papier. On a été obligé de fermer. C'est à cause du problème des prix.

M. Morin: II y a eu un ralentissement de la consommation américaine qui a eu cet effet. Maintenant, apparemment cela recommence. La consommation recommence...

M. Boutin: Ils vont refaire la même chose.

M. Morin: ... et en attendant, ce n'est certainement pas une façon de justifier ce qui s'est passé dans le cas d'Irving Paper. On a privé les Québécois d'une augmentation de revenu à laquelle ils avaient droit comme travailleurs spécialisés.

Je voudrais maintenant passer à un autre secteur, celui des primes d'assurance. La régie québécoise s'est-elle occupée de contrôler, de surveiller les hausses de prix qui se dissimulent dans l'augmentation des primes d'assurance?

J'imagine que vous avez dû avoir un certain nombre de plaintes ou que le gouvernement se sentant responsable, a dû vous demander de surveiller ce dossier en particulier.

M. Berthiaume: Etant donné qu'il s'agit de l'entreprise privée, dans l'entente que nous avons signée... Et c'est bien connu. Je ne sais pas pourquoi le député de Sauvé soulève cette question aujourd'hui. Les prix, dans ce domaine, sont contrôlés par la commission fédérale.

M. Morin: Je vais vous dire pourquoi je la soulève. Je vous l'ai déjà dit d'ailleurs la raison pour laquelle je soulève cette question. C'est qu'en fin de compte, tout ce que vous faites est de contrôler certains salaires, mais pour ce qui est des prix qui touchent durement les Québécois, les primes d'assurance, les tarifs d'électricité, le gaz, les loyers, qu'est-ce que vous faites? C'est cela le sens de ma question.

Je ne sache pas, à moins que vous ne me détrompiez, que la régie québécoise se soit occupée de gaz, de billets d'autobus, d'électricité, de loyers ou de primes d'assurance et on ne viendra pas me dire que cela ne contribue pas largement à l'augmentation du coût de la vie des Québécois.

M. Berthiaume: J'ai l'impression d'avoir détrompé le député de Sauvé quand j'ai dit que le gouvernement du Québec lorsqu'il a agi, n'a pas agi simplement par la Régie des mesures antiinflationnistes, mais a agi aussi en signant une entente avec le gouvernement du Canada de façon que l'effort total soit bien coordonné dans tout le pays. Si on avait pu en signer avec Washington, cela aurait été encore mieux.

M. Morin: Mais les loyers?

M. Berthiaume: Les loyers sont déjà contrôlés.

M. Morin: La régie s'est-elle penchée là-dessus ou n'y a-t-elle pas touché?

M. Boutin: Comment ça, la Régie des loyers?

M. Berthiaume: Cela a été confié à la Régie des loyers. Cela a été maintenu. La Régie des loyers a sa loi.

M. Boutin: ... maudit qu'il est menteur!

M. Morin:... un rôle d'arbitre...

M. Berthiaume: Non.

M. Morin: Vous n'avez rien à voir dans ce dossier. La loi ne vous autorise pas à vous pencher là-dessus.

M. Berthiaume: C'est-à-dire que le lieutenant-gouverneur en conseil ne nous a pas confié ce champ d'application.

M. Mercier: M. le Président, sur cette question de l'augmentation des coûts de primes d'assurance, est-ce que la régie a reçu des plaintes, la régie québécoise, j'entends?

M. Berthiaume: Oui. La régie québécoise reçoit des plaintes régulièrement sur toutes sortes de choses, sur les taxes, sur les assurances, sur les loyers, sur l'augmentation du billet de stationnement et sur l'augmentation de la crème glacée aussi.

M. Mercier: Concernant les primes d'assurance, est-ce que vous en avez référé à la commission Pépin ou si...

M. Berthiaume: Evidemment, nous le faisons chaque fois.

M. Mercier: Ce qui veut dire que la commission Pépin étudie actuellement le dossier des primes d'assurance.

M. Berthiaume: Dans les questions qui sont de compétence fédérale, nous référons à la commission fédérale les plaintes que nous recevons. Dans les autres cas, s'il s'agit, par exemple, d'une accumulation de plaintes sur les taxes municipales, on les fait parvenir au ministre responsable de façon qu'il soit informé du contexte.

M. Mercier: Merci.

M. Morin; Est-ce que vous pourriez nous donner une idée du nombre de plaintes que vous avez reçues par exemple au sujet des assurances parce qu'il y a eu des augmentations dans certains cas de l'ordre de 30% l'année dernière?

M. Berthiaume: Je ne peux pas vous dire de mémoire le nombre de plaintes, M. Morin. Ce qu'on peut vous dire, c'est qu'il y a eu un nombre plus grand de plaintes récemment. Pendant un bout de temps, on avait 50% des plaintes qui portaient sur les taxes municipales. Aujourd'hui, je vous dirais un peu intuitivement que cela se divise

en un tiers pour les assurances, un tiers pour les taxes et un tiers pour les autres.

M. Morin: Est-ce que vous n'avez pas tout de même un rôle à jouer devant ces augmentations dans tous ces domaines ou est-ce que, systématiquement, vous envoyez cela à la commission Pépin?

M. Berthiaume: II manque une autorité là-dessus. Le rôle n'est pas relié à une autorité.

M. Morin: C'est-à-dire que l'entente vous a finalement enlevé, pour ainsi dire, toute l'autorité que la loi aurait pu vous conférer. Vous avez un rôle de surveillance, d'après l'article 39. Vous ne l'exercez pas, parce qu'on l'a transféré à la commission Pépin.

M. Berthiaume: II s'agit de savoir, M. le Président, si surveillance il y a. Il est là, l'intérêt des Québécois, et surveillance il y a. Quant à savoir si c'est la régie québécoise, ou la commission fédérale, je pense qu'il s'agit de trouver le moyen le plus efficace et je pense que tout le monde convient que celui qui a été choisi est le moyen le plus efficace.

M. Morin: Vous ne trouvez pas que c'eût été utile que la régie, qui semble être moins occupée que la commission Pépin...

M. Berthiaume: Elle a moins de monde aussi.

M. Morin: ... se penche sur la question des augmentations des primes d'assurance. Il me semble que cela aurait été dans l'intérêt direct des Québécois avec ce qu'on a vu récemment.

M. Berthiaume: M. le Président, je vais essayer de convaincre le député de Sauvé, non, ce n'est pas possible, je vais tenter plutôt d'expliquer le problème tel que je le vois d'une autre façon. Il y a au Canada, dans le domaine de l'assurance-automobile, une vingtaine de compagnies, parmi les grosses, les plus importantes, il ne doit pas y en avoir plus qu'une vingtaine. Si chaque province doit engager cinq personnes pour surveiller 20 compagnies qui opèrent d'une façon similaire dans tout le Canada, cela va faire 50 personnes. Si la commission fédérale en engage cinq pour faire le même travail, cela va en faire 45 de moins. Cela me paraît pas mal plus efficace, pas mal plus logique, pas mal plus productif.

M. Morin: Nous allons nous mettre d'accord pour être en désaccord sur la façon efficace de régler ces problèmes d'augmentation de prime, d'augmentation de prix. Est-ce que je pourrais maintenant me tourner vers la position de la régie dans le conflit de la société de sidérurgie du Québec, SIDBEC et principalement sur la question du rattrapage par rapport aux aciéries ontariennes? Est-ce qu'il y a eu une décision là-dessus, est-ce que la régie s'est penchée sur le problème, est-ce qu'elle a un dossier devant elle?

M. Berthiaume: La régie ne peut évidemment pas se pencher sur le problème tant que la convention collective ne sera pas intervenue entre les parties. La régie n'est pas arbitre, elle n'a pas de rôle de négociateur et nous ne pouvons examiner le cas que lorsque la convention est signée.

M. Morin: Vous n'avez aucun dossier donc sur SIDBEC.

M. Berthiaume: Non, absolument pas. Il n'y a rien qui nous permet de demander des renseignements avant que les conventions soient signées.

M. Morin: Mais, sur le principe du rattrapage par rapport aux aciéries ontariennes, est-ce que la régie a une attitude?

M. Berthiaume: D'abord, le mot rattrapage en soit n'existe pas dans notre vocabulaire. Ce qui existe, c'est la possibilité d'établissement, l'autorisation d'un dépassement en raison de liens historiques. S'il est prouvé qu'il y a eu, avant le 14 octobre, des liens historiques avec d'autres aciéries, à ce moment-là, la régie sera justifiée d'autoriser un dépassement et d'autoriser le dépassement qui, à son avis, serait un dépassement qui rejoindrait les objectifs du programme.

M. Morin: Ce serait tout de même paradoxal, si, dans le cas des pâtes et papiers, l'intervention de la commission Pépin, sous prétexte d'uniformiser les salaires dans cette industrie, avait pour effet de frustrer les travailleurs québécois, tandis que, dans le dossier SIDBEC, l'intervention, cette fois, de la régie québécoise pouvait avoir comme effet d'offrir, de déterminer, pour les travailleurs québécois, des salaires qui seraient inférieurs à ceux des industries ontariennes.

M. Berthiaume: II faut dire que, dans la décision du fédéral en ce qui concerne Irving Pulp and Paper, il y a un dépassement autorisé, de 14%.

Ce n'est pas une décision qui a affecté toutes les papeteries, sauf que cela a établi un pattern, cela a établi un niveau. Mais cela n'a pas été une décision sur l'industrie; cela a été une décision pour Irving Pulp and Paper qui a influencé les règlements subséquents. Il est possible que ce soit le même jeu qui se fasse dans l'aciérie.

M. Morin: M. le Président, j'aimerais demander au ministre s'il a l'intention, si le gouvernement a l'intention de maintenir en vigueur, jusqu'au 31 décembre 1978, la loi, ses règlements, et l'entente avec le gouvernement fédéral.

M. Berthiaume: II est difficile de répondre à cette question, M. le Président, par un oui ou par un non. Il est certain que l'on doive apprécier, d'une façon régulière, l'efficacité du programme, l'opportunité de l'entente, etc.

Certainement, dans notre esprit, lorsque l'entente a été signée, lorsque la loi a été adoptée, c'était pour trois ans. Maintenant, on s'apprête à évaluer, pour une première fois, les gestes qui ont

été posés de part et d'autre, dans les prochaines semaines avec le représentant du Conseil du trésor, du Conseil exécutif, du ministère du Travail, etc., un peu pour faire le point et voir s'il n'y aurait pas d'aménagements à faire au niveau de la réglementation, peut-être même au niveau de la loi elle-même.

Je ne suis pas en mesure de me prononcer à ce stade-ci. Mais, de toute façon, c'est bien notre intention d'évaluer régulièrement le fonctionnement de tout le système parce qu'il n'est pas certain que nous soyons tombés pile dès le premier coup; il n'est pas certain que nous soyons tombés à côté non plus.

Cela mérite d'être évalué d'une façon régulière.

M. Morin: Est-ce que cette réévaluation pourrait aller jusqu'à remettre en question la délégation que vous avez faite au pouvoir fédéral, en ce qui concerne les prix, l'ensemble des prix, parce que certains...

M. Berthiaume: Je voulais faire une vérification. Il peut y avoir des changements à l'entente. L'entente est signée pour la même durée que la loi, mais nos relations avec les autres provinces et avec le gouvernement du Canada sont telles que, si on notait des faiblesses sérieuses dans l'application ou dans les modalités de fonctionnement, on pourrait modifier l'entente.

Dans notre esprit, au niveau des conversations qu'on a pu avoir, on voulait tenter les lignes directrices du fédéral telles quelles pour une période initiale de 18 mois, à partir de la date de l'entente.

M. De Coster me fait part que le gouvernement fédéral s'est engagé à réviser avec nous, après 18 mois, le fonctionnement du programme.

M. Morin: J'ai encore une ou deux petites questions, M. le Président.

M. Berthiaume: J'insiste quand même...

M. Morin: Je pense qu'on pourrait finir ce programme 6 avant l'ajournement du dîner, si vous n'y voyez pas d'objection. Cela dispenserait les fonctionnaires de revenir ce soir.

Le Président (M. Kennedy): Le programme 8, aussi.

M. Morin: Ce soir, nous ferions le programme 8, la curatelle. J'en aurais peut-être pour trois quarts d'heure, une heure.

Le Président (M. Kennedy): Parfait.

M. Morin: Si vous voulez bien, on peut terminer maintenant le programme 6...

Le Président (M. Kennedy): Très bien.

M. Morin: ... même en excédant de quelques minutes, si le ministre n'a pas d'objection.

C'est la semaine dernière et peut-être encore cette semaine que le député de Chicoutimi a posé des questions en Chambre au sujet des commissaires aux services essentiels. Le ministre du Travail a affirmé qu'avant de procéder à l'augmentation de $125 à $200 par jour, à l'endroit de ces commissaires, le président de la Régie des mesures anti-inflationnistes, M. De Coster, a été consulté. Est-ce que je pourrais demander au ministre, ou puisque M. De Coster est là, lui demander s'il se souvient de cette consultation? Je crois qu'il a déclaré publiquement qu'il ne s'en souvenait pas. J'aimerais savoir si la mémoire lui est revenue dans l'intervalle, et qu'il nous dise si vraiment il a autorisé ou donné un assentiment quelconque à cette augmentation.

M. Berthiaume: M. le Président, M. De Coster, dit qu'il ne se souvient pas d'une consultation précise sur le sujet qui a été discuté à l'Assemblée nationale. Par contre, j'ai aussi avec moi, un conseiller spécial qui me rappelle des discussions que nous avons eues, justement avant la signature de l'entente avec le fédéral, sur toute la question des décrets, le sous-ministre du Travail, à l'époque. J'avais eu des conversations moi-même avec lui, à ce moment, sur l'ensemble de ces questions, mais sans vouloir donner une interprétation juridique, parce que je n'en serais pas certain, d'autant plus que je ne suis pas avocat, je serais porté à croire, encore une fois, étant donné qu'il s'agit d'honoraires professionnels, que l'ensemble de la question relèverait de la commission Pépin.

M. De Coster m'informe — alors je me sens encore plus sûr en disant cela — qu'il a examiné la question, que la régie a examiné la question. Ils sont arrivés à la même conclusion puisqu'il s'agit d'honoraires professionnels.

M. Morin: Une fois de plus, cela tombe sous la compétence de l'organisme fédéral.

M. Berthiaume: Exactement.

M. Morin: Cela ne sert à rien de vous demander quelles seraient les sanctions, parce que, naturellement, ce n'est pas vous qui allez les imposer. C'est votre interprétation de la loi qui vous conduit à cette conclusion? Est-ce que vous pourriez nous en faire la démonstration rapide?

M. Berthiaume: II s'agit, si je comprends bien le problème, d'honoraires qui sont payés à l'acte et, conséquemment, nous n'avons pas vu de relations d'employeur...

M. Morin: Par jour, je m'excuse. M. Berthiaume: C'est par jour, oui. M. Morin: ... honoraires.

M. Berthiaume: II n'y a pas de relation réelle d'employeur à employé. C'est plutôt l'Etat qui prend avantage de services de professionnels, comme l'Etat engage un ingénieur pour telle fonc-

tion ou un conseiller en administration pour telle autre.

'M. Morin: Oui, mais ce ne sont pas, à vrai dire, des gens qui appartiennent à la profession de commissaires aux services essentiels. Ce sont des gens qui sont choisis dans plusieurs professions.

M. Berthiaume: Oui, ils sont choisis individuellement.

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: Dans l'entente fédérale, on parle d'honoraires professionnels.

M. Morin: Vous considérez cela comme des honoraires...

M. Berthiaume: Des honoraires professionnels.

M. Morin: ... et non pas comme un salaire. M. Berthiaume: C'est cela.

M. Morin: M. le Président, j'aurais tout simplement, peut-être, une dernière question. Je l'adresse soit au ministre, soit à M. De Coster. Est-il satisfait du fonctionnement du système de contrôle des prix et des salaires jusqu'ici?

M. Berthiaume: M. le Président, il faudrait que je vous donne la même réponse que celle que je vous ai donnée tantôt. Je ne voudrais pas répondre à ce stade-ci, à ce moment, par un oui ou par un non, étant donné qu'on s'apprête, dans les prochains jours — la date n'a pas été encore fixée, mais sûrement avant la fin de juin — on s'apprête à faire une réévaluation de l'ensemble, une mesure et une évaluation du programme. On peut citer des chiffres qui ont une éloquence relative, je le reconnais. On a parlé un peu tantôt d'une certaine psychose, d'effets assez surprenants, immédiatement après la mise en vigueur du programme, sur le taux d'inflation, des effets tellement rapides que tous ont reconnu, à ce moment, que cela ne pouvait pas être à cause du programme. Dès le premier mois d'ailleurs, Statistique Canada a rapporté une baisse assez extraordinaire du taux d'inflation. Alors, c'est soit pour des raisons...

M. Morin: Bien, c'est...

M. Berthiaume: ...extérieures au programme ou pour des raisons psychologiques, c'est-à-dire qu'il y a une certaine réticence à agir de part et d'autre dans l'économie. Mais c'est assez difficile à apprécier. Mais maintenant, après cinq ou six mois de fonctionnement, je pense qu'on peut se mettre à table et étudier la question. Mais le gouvernement ne s'est pas encore prononcé, parce qu'on s'apprête à le faire.

M. Morin: Je pense que les économistes fédéraux avaient prévu que les prix de gros commenceraient à fléchir. C'était d'ailleurs officiel, de sorte que l'entrée en vigueur de la loi survenait à point nommé pour renforcer la position de ceux qui avaient proposé le système.

Est-ce que je pourrais vous interroger sur deux aspects concrets du programme 3 et, ensuite, nous pourrons passer à l'approbation...

M. Berthiaume: Le programme 6.

M. Morin: Le programme 6, M. le Président, excusez-moi.

Combien de postes sont actuellement comblés à la régie sur les effectifs autorisés pour 1974?

M. Berthiaume: C'est 51 sur 53.

M. Morin: 51 sur 53. Bon! Y a-t-il eu des difficultés de recrutement ou est-ce que la régie a trouvé facilement les gens qu'elle recherchait?

M. Berthiaume: Le recrutement a été laborieux, parce que, d'abord, le programme était un programme temporaire. C'était un programme qui était fort peu connu. C'était un programme qui n'était pas nécessairement le plus populaire, et je pense que les fonctionnaires n'ont pas nécessairement trop l'esprit d'aventure. Il nous fallait un certain nombre de spécialistes qu'on a eu de la difficulté à trouver.

Nous avons, à l'heure actuelle, à peu près 50% de notre personnel qui vient de la Fonction publique et 50% qui vient de l'extérieur.

M. Morin: M. le Président, nous ne nous opposons pas à ce que les crédits soient adoptés au programme 6.

M. Berthiaume: Vous n'osez pas dire que vous êtes satisfait.

Le Président (M. Kennedy): Programme 6, adopté.

Messieurs, au plaisir de vous revoir tous à la reprise des travaux à 20 h 15.

M. Morin: M. le Président, puis-je suggérer, étant donné que nous avons excédé un peu l'heure de clôture, que nous nous réunissions à 20 h 30 ferme?

Le Président (M. Kennedy): Entièrement d'accord! Alors, raison de plus de vous vouloir vous revoir tous à 20 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 7)

Reprise de la séance à 20 h 35

M. Kennedy (président de la commission permanente des finances, des comptes publics et du revenu): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente des Finances, des comptes publics et du revenu continue l'étude des crédits budgétaires du ministère des Finances, en l'occurrence, le programme 8: Curatelle publique.

Le député de Sauvé.

Curatelle publique

M. Morin: M. le Président, je voudrais commencer par un certain nombre de questions quasi rituelles avant d'aborder un certain nombre de problèmes plus fondamentaux.

Le ministre pourrait-il tout d'abord nous présenter l'état des actifs de la Curatelle publique et nous dire le nombre de dossiers directement sous la responsabilité du Curateur public.

Je lui rappelle qu'en 1973 les actifs étaient de l'ordre de $29 millions et quelques centaines de milliers de dollars. En 1974, ils étaient de $37 millions. Je ne sais pas s'il a un rapport du Curateur public à déposer pour l'année 1975. Nous aimerions connaître les chiffres de cette année.

M. Berthiaume: Le chef de l'Opposition officielle comprendra mon sourire parce que, avant qu'il ne commence sa question, je discutais avec le Curateur qui me montrait les états financiers. Il dit: Croyez-vous qu'il va nous poser des questions là-dessus? Et aussitôt dit, aussitôt fait.

M. Morin: Pensé.

M. Berthiaume: Oui. Aussitôt pensé, aussitôt dit.

M. Morin: C'est presqu'un rituel parce que cela fait maintenant trois ans...

M. Berthiaume: Pour moi, c'est la première fois. Pour Me Lussier, cela ne l'est pas. Alors, je vais demander à Me Lussier de répondre au chef de l'Opposition.

L'actif au 31 décembre 1975 se chiffrait par $45 500 000, à comparer avec l'an dernier où nous avions $37 500 000, ce qui fait une augmentation de $8 millions.

M. Morin: En somme, une augmentation de l'ordre de près de 30%.

M. Berthiaume: 30%. Oui.

M. Morin: Comme l'année dernière.

M. Berthiaume: C'est cela. Si la proportion est moins forte cette année... C'est toujours le même montant, environ $8 millions, plus ou moins, mesure anglaise.

M. Morin: Cela signifie-t-il que vous avez ré- colté un très grand nombre de nouveaux dossiers cette année?

M. Berthiaume: C'est la même proportion que les années passées. Les dossiers sortent, les dossiers dont les patients sont déclarés capables d'administrer leurs biens et nous avons de nouveaux administrés.

Vous savez, c'est assez difficile à établir. Notre patron, à ce point de vue, est toujours le psychiatre. Lorsqu'un patient entre à l'hôpital pour raison de maladie mentale, il est, à son entrée, examiné par un psychiatre qui recommande l'incapacité d'administrer ses biens s'il y a lieu et cela doit être attesté par le directeur des services professionnels. On fait beaucoup d'expériences et cela fluctue selon les expériences. On a une science extrêmement difficile. Il n'y a rien de palpable. On fait beaucoup d'essais. Ce que nous savons, habituellement, ce sont les mauvais coups. Pour chaque mauvais coup, il y a toujours à peu près 100 réussites, mais de cela on ne parle jamais. Alors, ce qui est arrivé exactement, on ne le sait pas.

M. Morin: Est-ce qu'il y a...

M. Berthiaume: On est à leur merci, parce que le dossier nous arrive comme il nous est enlevé.

M. Morin: Est-ce qu'il vous revient des fois? M. Berthiaume: Des fois, trois fois par année.

M. Morin: Vous voulez dire que le dossier d'un pupille vous revient.

M. Berthiaume: Au bout de deux mois, on déclare un malade mental guéri. C'est bon. Cela dépend de son origine. C'est peut-être une question de drogue, c'est peut-être une question de boisson. Lorsqu'il entre à l'hôpital, on l'éloigne de ses causes de chutes. Il revient à la santé. On émet un certificat de capacité. Le type retourne dans son milieu habituel, retombe dans la boisson et revient. Cela arrive, ce sont des cas. Vous avez là une personne qui peut entrer trois fois, qu'est-ce que cela veut dire? Nous n'avons pas une organisation assez sophistiquée pour être capable de surveiller chacune des entrées, d'autant plus que nous pouvons recevoir des patients de 240 centres hospitaliers. C'est assez difficile à suivre à ce stade-ci. Nous comptons bien que, dans un bref avenir, nous saurons surmonter...

Il y a autre chose. Il y a des questions de communication. La communication elle-même. Le psychiatre, lorsqu'il est dans son édifice, dans son hôpital, a tendance à oublier la Curatelle publique parce que c'est une question d'administration de biens et non pas une question de soigner la maladie. Alors, vous voyez que c'est assez difficile.

M. Morin: Oui. Tout de même, vous vous souviendrez que l'année dernière, lors de l'étude des crédits de la Curatelle publique, le ministre responsable à l'époque, M. Parent, avait dressé une sorte de bilan de la Curatelle publique en 1974.

II nous décrivait la situation au 24 avril 1975. Ce que je voudrais vous demander, c'est que nous reprenions les catégories de l'année dernière et que nous voyions s'il y a eu progrès ou régression dans le nombre de tuteurs et de curateurs, d'inventaires reçus, de fausses adresses, d'inventaires à recevoir, etc.

M. Berthiaume: Nous parlons du deuxième élément.

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: Au premier élément, pour répondre plus précisément, je peux vous dire que le chiffre de l'année précédente révèle que 1210 nouveaux dossiers de malades mentaux avaient été ouverts comparativement à 1242 au cours de l'année se terminant le 31 décembre 1975; 768 dossiers de succession vacante et de biens sans maître ont été ouverts en 1975 comparativement à 770 au cours de l'année précédente. Comme vous voyez...

M. Morin: C'est constant.

M. Berthiaume: ...c'est constant. Mais nous remarquons également que les successions vacantes augmentent de plus en plus. C'est tout simplement une question de publicité; lorsque les conseillers juridiques connaîtront plus l'existence de la Curatelle publique, ils feront davantage appel à nos services, ce qui est tout à fait normal d'ailleurs. Parce qu'à l'université, la Curatelle publique n'est pas connue. On s'en souvient, on n'a jamais eu de cours sur la Curatelle publique.

M. Morin: On sait que ça existe vaguement, mais ...

M. Berthiaume: C'est lorsque je suis devenu Curateur que j'ai appris ce que la Curatelle publique faisait.

M. Morin: Vous ne me rassurez pas entièrement en disant cela.

M. Berthiaume: Après huit ans, je suis devenu compétent, ou du moins, je le prétends.

Maintenant, question des tuteurs, des curateurs. Il y a eu des changements cette année au point de vue de l'administration. Vous savez que la loi, au 1er juin 1972, a imposé une nouvelle responsabilité au Curateur public, la fameuse administration des biens sous administration de tuteurs et curateurs.

M. Morin: C'est une sorte de surveillance que vous exercez.

M. Berthiaume: C'est ça. Alors nous avons cette juridiction à compter du 1er juin 1972. A ce moment-là, nous ne prenions pas les tuteurs nommés après le 1er juin 1972, mais tous ceux qui étaient nommés et ceux à venir.

La conclusion est que les nominations antérieures au 1er juin 1972, il y avait 3403 curateurs privés, 14 503 tuteurs pour un total de 17 906 curateurs et tuteurs nommés avant le 1er juin 1972.

M. Morin: Cela, c'était l'an dernier, ce sont les chiffres de l'an dernier.

M. Berthiaume: Oui.

M. Morin: Est-ce qu'il y a eu une évolution?

M. Berthiaume: Vous avez aussi les nominations. Oui, il y a évolution. Les nominations depuis le 1er juin 1972: Curateurs privés, 729; tuteurs, 8284 pour un total de 9013 nommés après le 1er juin, pour un grand total de 26 919 dossiers.

M. Morin: C'est une évolution importante.

M. Berthiaume: Oui, mais l'année passée, vous aviez ces chiffres-là. Nous avions 26 000 dossiers l'année passée.

M. Morin: C'est juste, 26 919. Oui. Si on compte les fausses adresses et les inventaires à recevoir.

M. Berthiaume: C'est cela, à tout le monde. Voici ce qui est arrivé. Nous avons un total de 12 905 dossiers, soit: Pour les nominations antérieures au 1er juin 1972, 3862 dossiers. Depuis le 1er juin, nous avons 9043 tuteurs et curateurs, pour un total de 12 905. Qu'est-il arrivé pour diminuer cela de 26 919 à 12 905?

M. Morin: C'est la question que j'allais vous poser. Vous anticipez.

M. Berthiaume: Nous sommes habitués, après plusieurs années. On se connaît maintenant. C'est donc dire qu'au cours de la dernière année, nous avons fermé 18 000 dossiers, pour les raisons suivantes: 8406 dossiers dont la valeur de l'administration est inférieure à $2000; 6553 dossiers antérieurs au 1er juin 1972 et dont l'adresse était fausse; 3093 dossiers antérieurs au 1er juin 1972 et pour lesquels nous n'avions absolument aucune information.

Pour tous les dossiers, lorsqu'un tuteur fait parvenir son inventaire et que nous nous rendons compte, après vérification, qu'il a une administration inférieure à $2000, nous fermons le dossier, nous retournons les honoraires que nous avons perçus, les honoraires de $15, et nous ne demandons plus de rapport annuel. On ne demande pas de rapport annuel pour un montant de $2000, cela ne vaut pas la peine. L'argent qui serait dépensé, on présume qu'il est dépensé pour le bien de la famille. Dieu paie tout le monde. 6553 dossiers dont l'adresse était fausse, c'étaient des gens qui étaient nommés avant le 1er juin 1972. Vous vous rendez compte? Trouver ce monde-là? Impossible. Prendre nos employés...

M. Morin: Vraiment absolument impossible?

Est-ce qu'il n'y a pas tout de même des montants d'argent considérables qui pourraient être en cause?

M. Berthiaume: Oui, mais, à ce moment-là, il faut se placer devant une situation. Il faut être logique, à un moment donné. Vous savez que ce sont des gens qui ont été nommés avant le 1er juin 1972. Vous savez que nous avons une maladie commune au Québec — ailleurs aussi — on appelle cela la déménagite. Tout le monde déménage. Nous avons également, à ce moment-là, des jugements qui étaient rendus de telle façon qu'on ne savait même pas qui était le tuteur de qui, quel âge il avait et où il demeurait. C'est vraiment la confusion.

Allons-nous prendre des fonctionnaires, qui sont payés quand même le bon prix, pour les faire travailler sur des choses qui ne donneraient à peu près rien.

Nous avons calculé qu'il était plus utile de se concentrer sur les tuteurs qui étaient nommés depuis le 1er juin 1972, parce que ces derniers savent ou doivent savoir l'existence du Curateur public et des obligations envers le Curateur public.

M. Morin: Lorsqu'ils sont nommés, est-ce qu'on les met au fait de l'existence du Curateur public et de la surveillance qu'il exerce?

M. Berthiaume: Ils doivent l'être d'abord par le notaire ou le protonotaire. Ils sont mis au courant par les professionnels, au moment de la formation de la tutelle et le protonotaire souvent en fait mention. D'ailleurs, dès l'instant du jugement, nous recevons une copie du jugement nommant le tuteur ou le curateur et, immédiatement, nous envoyons un avis de trente jours, à l'effet que le tuteur a trente jours, de sa nomination, pour nous faire part de son inventaire notarié, ce qui est une grave difficulté, comme vous le savez, en plus d'un dépliant expliquant les rôles du Curateur public.

M. Morin: En plus de la garantie dont on parlera tout à l'heure. Bon. D'accord. Maintenant les inventaires à recevoir, les avez-vous laissé tomber?

M. Berthiaume: Non monsieur, nous ne pouvons pas les laisser tomber. Les inventaires, c'est la grande pierre d'achoppement. Il faut dire actuellement que nous avons 3857 dossiers parmi les 12 905 où les tuteurs sont en instance judiciaire. Evidemment, cela diminue le nombre des inventaires, parce que tant et aussi longtemps qu'ils n'ont pas d'inventaire, donc que" le jugement n'est pas rendu ou que l'ordre de la cour n'est pas rendu, ils n'ont rien à administrer. Donc, ils n'ont rien à donner. Leur faire comprendre un procès-verbal de carence, c'est à peu près une impossibilité.

Nous attendons que ces messieurs se prononcent. Les inventaires, nous nous rendons compte qu'après un ou deux rappels, nous avons de plus en plus les réponses. Je peux dire que le résultat est de 30% meilleur que l'année passée dans la production des inventaires. Donc, si...

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume.: ... on se met après eux, le moindrement, ils vont finir par répondre, d'autant plus que le courant est moins fort maintenant. Nous sommes en contre-courant. Nous avons mécontenté tout le monde, les notaires, les avocats, les comptables, les tuteurs, les curateurs. Tout le monde était contre nous autres: qu'est-ce que le Curateur public venait faire dans cette galère?

Aujourd'hui, on comprend beaucoup mieux le rôle du Curateur public et la collaboration est de plus en plus acquise des gens. C'est pour cela que nous avons de meilleurs résultats. Les inventaires entrent. Les rapports annuels sont plus complets. C'est bien.

M. Morin: Les inventaires à recevoir pour les tuteurs et curateurs nommés après le 1er juin 1972, pouvez-vous me préciser le chiffre encore?

M. Berthiaume: Nous avons fait parvenir 3348 demandes d'inventaire. Actuellement, nous avons vérifié, nous avons reçu 1883 inventaires de ce montant.

M. Morin: Donc, il en reste combien, en gros, parce que l'année dernière, il y en avait 5196 à recevoir. Je dois en déduire 1883...

M. Berthiaume: de 3348.

M. Morin: Ah! Qu'est-ce qui est arrivé?

M. Berthiaume: II faut dire que l'année passée, il y a eu plusieurs inventaires qui ont été complétés.

M. Morin: Dans le courant de l'année dernière? Bon, très bien.

M. Berthiaume: On voit que c'est une augmentation, une amélioration.

M. Morin: Une amélioration.

M. Berthiaume: Vous savez, cette chose, il ne faut pas s'illusionner et dire qu'il y a 26 000 tuteurs et curateurs dans une année quand tout est vérifié et en bonne forme. C'est impossible.

M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: II faut les prendre l'un après l'autre. Nous avons nos moyens, nos ressources. Graduellement, nous allons tous les avoir.

M. Morin: Bon.

M. Berthiaume: Nous sommes en train de les rejoindre tous.

M. Morin: Tout à l'heure, nous disions que vous aviez maintenant environ $45 millions et quelques centaines de milliers de dollars sous administration directe. Pourriez-vous me dire maintenant la valeur des actifs que vous surveillez et qui se trouvent entre les mains de curateurs ou tuteurs privés?

M. Berthiaume: Actuellement, nous avons rejoint $90 millions.

M. Morin: L'année dernière, ce montant était de combien? Je ne me souviens pas que le ministre l'ait mentionné l'année dernière.

M. Berthiaume: $86 millions. M. Morin: $86 millions.

M. Berthiaume: II faut dire qu'encore une fois, il y a le jeu des mineurs qui deviennent majeurs, des incapables, des interdits qui ont repris leur liberté. Maintenant, nous avons fermé beaucoup de dossiers. Evidemment, les $2000 et tout cela...

M. Morin: Oui, on peut présumer que dans les...

M. Berthiaume: On fait maison nette. M. Morin: Oui.

M. Berthiaume: Là, on les prend, on y va méthodiquement et solidement. Nous avons quatre ans d'expérience et nous avons nos cas de jurisprudence aussi. Alors, cela nous permet d'y aller davantage à fond de train.

M. Morin: Vous avez une bonne coopération des protonotaires, des notaires, des tribunaux. Vous disiez tout à l'heure que...

M. Berthiaume: La Chambre des notaires, c'est excellent, a collaboré avec nous à la préparation d'un formulaire, à l'inventaire notarié avec toutes les clauses de droit s'appliquant, les articles et tout ça. Cela a été préparé par notre directeur du service juridique, le notaire Pierre Beau-doin, qui a fait cela en collaboration avec la Chambre des notaires. Chaque notaire en a reçu une copie. La collaboration a été complète.

M. Morin: L'an dernier, le ministre avait affirmé — c'est à la page 6 de son exposé — que le problème du manque de garantie allait en s'aggra-vant. Vous vous souviendrez que la garantie hypothécaire paraissait tout à fait illusoire. Est-ce toujours le cas? Je me permets d'ajouter deux ou trois phrases tirées de ce que disait le ministre. "Dans bien des cas, la caution ou garantie contre l'administration du tuteur ou du curateur n'existe pas. Le problème s'aggrave avec le temps puisque, chaque année, un nombre grandissant de tuteurs et de curateurs sont nommés." Est-ce que la situation s'est améliorée?

M. Berthiaume: La situation est toujours la même. Je dirais même que cela a peut-être empiré. Notre rôle est d'appliquer la loi. Nous nous rendons compte que l'hypothèque légale n'est jamais enregistrée. Nous demandons aux tuteurs d'enregistrer une hypothèque légale sur leur immeuble. Là, ça complique la vie de tout le monde.

Les notaires nous disent: Ecoutez! Cela n'a pas de sens si le tuteur, pour administrer les biens de son enfant, gèle ses propres biens. Oui, d'accord! Mais la loi a prévu cette hypothèque légale pour protéger le pupille contre l'administration du tuteur. Alors, si on n'a pas l'hypothèque légale, le jeune n'est pas protégé, et si on la met, on bloque le tuteur. Aujourd'hui, hypothéquer inutilement un immeuble, vous savez jusqu'où ça peut aller. En 1867, ce système était bon, mais aujourd'hui, il n'est plus bon. Or, là, vous avez quoi? Les notaires vont s'organiser pour nommer un tuteur qui n'aura pas d'immeuble. C'est fin, n'est-ce pas? Mais c'est ça.

M. Morin: Mais vous savez qu'on s'était penché longuement là-dessus l'année dernière déjà, et nous avions convenu que ce système n'était pas efficace. De toute façon, quand il y a déjà des hypothèques sur un immeuble...

M. Berthiaume: Habituellement, c'est en deuxième hypothèque.

M. Morin: En deuxième ou en troisième hypothèque.

M. Berthiaume: Lorsque le monsieur a une maison...

M. Morin: C'est ça, lorsqu'il a une maison.

M. Berthiaume: Ce qui est environ...

M. Morin: De sorte que, de toute façon, la garantie peut être fort illusoire. Mais avez-vous procédé à l'étude des méthodes appliquées dans les autres provinces? S'est-il dégagé des conclusions de cela, parce que je sais que le ministre nous disait l'année dernière, et je me permets de le citer: "Bien que les méthodes de protection semblent différentes d'une province à l'autre et que chacune des formules comporte des avantages et des inconvénients, nous nous proposons au cours des prochains mois de nous inspirer de ces différentes législations en vue d'assurer une meilleure protection des biens appartenant à des mineurs et à des incapables".

Pourriez-vous me dire si, effectivement, cette étude a été faite et dans quelle mesure vous allez vous inspirer des législations non québécoises?

M. Berthiaume: L'an dernier, j'ai fait des visites, des recherches dans l'ouest du pays pour comparer le système qui y prévaut avec le nôtre. J'ai préparé certains mémoires, mais, avant d'aller plus loin, vous savez que l'Office de révision du Code civil a présenté un mémoire sur le chapitre de la famille, le livre 2, et nous avons collaboré, à la Curatelle, de façon très étroite à cette étude.

D'ailleurs, le rapport mentionne mes deux collaborateurs ici, M. Forgues et M. Desjardins, et également le notaire Beaudoin, le directeur du service juridique. Tous les quatre avons collaboré intimement.

Maintenant, il y a des recommandations qui sont faites par l'Office de révision du Code civil. Alors, avant d'agir trop vite, il est bon d'entendre les commentaires qui seront donnés à l'Office de révision du Code civil, avec lequel nous sommes en étroite collaboration et vous avez sûrement pris connaissance du rapport 2 sur la famille...

M. Morin: Je vais vous le dire franchement, je l'ai peut-être reçu, mais je ne l'ai pas lu.

M. Berthiaume: Cela prendrait trois mois ou trois mois et demi, à l'oeil.

M. Morin: Je ne l'ai pas lu.

M. Berthiaume: C'est un rapport qui présente quelque chose de très solide. Ce n'est pas une surveillance a priori où on nommerait le Curateur public tuteur, le "legal guardian", pour prendre le terme de l'Ontario, mais c'est entouré de tellement de précautions que le système a posteriori qui est suggéré équivaut ni plus ni moins à un système a priori.

Par exemple, avant de débourser un montant d'argent à la suite d'une décision, d'un jugement où une compagnie d'assurance devrait payer $100 000 en indemnité à un jeune qui a été blessé, avant de verser les $100 000, elle devra demander la permission du Curateur public parce qu'entre-temps, le Curateur public aura demandé au tuteur une caution. Si le tuteur ne peut pas produire la caution, l'argent reviendra à la Curatelle publique et le Curateur sera, avec le tuteur, le gardien, le possesseur.

M. Morin: Les sommes d'argent.

M. Berthiaume: Cela rejoint, M. le chef de l'Opposition, ce que vous avanciez l'an dernier, et qui est consigné au journal des Débats. Cela rejoint assez la même chose.

Mais nous attendons les critiques, les commentaires parce que ces documents ont été envoyés partout pour avoir des commentaires et c'est un domaine qui est très peu connu, la tutelle et le Curateur. Les rapports prennent beaucoup de temps avant d'entrer.

Mais vous savez, c'est bon. Cela vaut la peine d'attendre, parce que nous avons quand même l'organisation de Me Crépeau, à l'Office de révision du Code civil, qui est extraordinaire et qui arrive avec un programme, quelque chose de bien défini, et c'est soumis à la population.

Moi, à la Curatelle, j'ai le mien et c'est basé sur mon expérience et mes contacts avec les autres provinces et nous avons, dans la province de Québec... la Curatelle publique, qui est le seul organisme qui peut parler de l'impact occasionné par les tuteurs et les curateurs, l'impact physique, vraiment ce qui en est.

C'est préférable d'attendre un peu plus plutôt que de précipiter et poser un faux geste. On peut être obligé de tout recommencer après.

M. Morin: Je suis du même avis qu'il vaut mieux penser à ces choses étant donné qu'elles auront des conséquences considérables. Avant de les mettre en vigueur, il faut bien y penser. Mais est-ce que vous inclinez vous-même, personnellement, cela n'engage pas l'organisme, vers ce type de solution qui confierait à la Curatelle publique les montants d'argent, l'administration des montants d'argent des tuteurs, des curateurs, ce qui aurait pour effet de faire du tuteur, non plus un administrateur au sens strict des biens, mais une sorte de personne qui s'occuperait de la personne sous tutelle ou curatelle, qui serait beaucoup plus occupée à protéger la personne qu'à administrer des biens?

M. Berthiaume: Vous demandez au Curateur public d'être le tuteur de la personne, de s'occuper de la personne.

M. Morin: Non.

M. Berthiaume: C'est impensable, s'occuper de l'argent. La situation actuelle est la suivante. Vous avez une personne qui devient administrateur d'une somme d'argent par le simple fait qu'elle a engendré un enfant qui a eu la malchance de se faire blesser. Cela ne rend pas cet homme administrateur. Cela le rend peut-être le père d'un enfant riche, mais c'est tout. Cela n'en fait pas un homme d'affaires, encore moins un administrateur. Là, vous avez le jeune qui est blessé. Si on lui donne $100 000, c'est que la blessure est grave. C'est une compensation.

M. Morin: Qui est censée lui servir toute sa vie.

M. Berthiaume: Lui servir et au moins faire une équation pour lui permettre de se réchapper et de continuer à faire quelque chose de bien. Il arrive à 21 ans. L'administrateur dont la qualité, c'est d'avoir engendré un enfant, va-t-il administrer correctement? Je crois que ce n'est pas une question d'ingérence du gouvernement, mais je crois que les jeunes ont besoin d'un protecteur, d'un administrateur et les tuteurs et les curateurs ont besoin que quelqu'un prenne leur charge, parce qu'en prenant la charge d'administrateur, ils doivent donner une garantie contre leur administration. Aujourd'hui, les garanties... Cela va trop vite. Alors, là, les deux sont mal pris. Il reste quoi? Ou il reste qui? Dans les autres provinces, nous avons créé une institution, un personnage qui s'appelle le "legal guardian". Cela peut être le Curateur public, mais ce n'est certainement pas, à ce moment-là, une ingérence du gouvernement. Au contraire, cela devrait être une protection qui devrait être apportée.

M. Morin: C'est bien ce que je pense aussi, c'est ce dont nous avons parlé longuement l'année dernière. Cela aurait un autre avantage qui est le suivant. Nous sommes souvent témoins de querelles entre un ancien pupille et son tuteur, le pupille accusant le tuteur d'avoir dilapidé les biens ou d'avoir pris de mauvaises décisions d'investis-

sement, etc. Cela aurait l'avantage de faire disparaître toute l'acrimonie qui peut être engendrée par ce genre de situation. Le tuteur serait de la sorte débarrassé des accusations qui peuvent toujours peser contre lui et Dieu sait que, connaissant la nature humaine, ce n'est pas au Curateur public que je vais apprendre cela. Il se trouve des gens pour poser des questions et soulever des soupçons jusque dans la parenté souvent, et sinon surtout, comme vous dites, M. le Président. Je trouve que ce serait un avantage considérable, mais je ne vous demande pas nécessairement ce que vous en pensez; je vous dis ce que moi, j'en pense.

M. Berthiaume: La situation est la suivante. Je l'ai expliquée. A l'occasion, justement, de la révision du Code civil, je crois qu'une décision devrait être prise à ce niveau. J'aimerais avoir l'opinion, d'autres personnes là-dedans.

M. Morin: En d'autres termes, la législation que le ministre évoquait l'année dernière viendra au cours de l'année qui vient.

M. Berthiaume: Je ne voudrais pas promettre, M. le Président, que cela va être au cours de l'année 1976.

J'ai un avocat à mon cabinet qui est chargé d'analyser ce qui nous est envoyé par l'Office de révision du Code civil, en particulier en ce qui concerne la Curatelle. Ce n'est pas à moi de dire si les propositions que je pourrais faire au gouvernement seraient acceptées, avant d'en parler au cabinet. Je ne peux pas le dire à l'Assemblée nationale avant d'en parler au Conseil des ministres, autrement dit. Comme l'a dit Me Lussier, il y a beaucoup de ces choses qui méritent une réflexion sérieuse, est-ce que les commentaires que nous pouvons recevoir de la population en général vont être complets dans les prochains mois? C'est difficile à dire, encore là.

Tout ce à quoi ça pourrait, sans me compromettre, donner des indications, c'est que la question est prise au sérieux par celui qui vous parle, dans ce sens que j'ai pris la peine d'assigner, malgré tous les autres domaines d'acitivité, une personne spécifiquement à ce dossier qui nous vient de l'Office de révision du Code civil. Je ne voudrais pas me compromettre davantage par ce que j'ai pu en comprendre. Remarquez bien, en homme de la rue jusqu'à un certain point, n'ayant pas de formation juridique, ce que j'ai pu comprendre, de ce que j'ai lu, c'est un domaine d'exploration dans le sens qu'on parle de choses non pas révolutionnaires, mais très nouvelles en cette matière, soit ce qui nous a été présenté sur toute cette question de la famille dont le notaire Lussier a parlé tantôt.

Je désire, pour cette raison, agir avec assez de prudence. Il est certain qu'avant longtemps on pourra proposer des amendements au cabinet et après ça, je pourrai me compromettre de façon plus définitive en ce qui concerne l'Assemblée nationale.

M. Morin: Votre...

M. Berthiaume: Autrement dit, j'aime mieux prendre un engagement d'orientation plutôt que quelque chose de très spécifique en voulant dire au député de Sauvé: En 1976, on va avoir des amendements à la Loi de la Curatelle; je pense que j'excéderais de beaucoup en m'engageant de cette façon.

M. Morin: L'année dernière, M. le Président, le rapport annuel du Curateur public pour l'année terminée le 31 décembre 1974 nous avait été remis en mai 1975. Il est daté de mai 1975, à l'intérieur, à la page 3, au-dessus de votre signature. Est-ce que le rapport, pour l'exercice se terminant le 31 décembre 1975, va bientôt être rendu public?

M. Berthiaume: II me sera remis, me dit-on, avant le 30 juin 1976.

M. Morin: II aurait été utile de l'avoir.

M. Berthiaume: Je me suis informé au Curateur et il m'indique qu'il a jusqu'au 30 juin. Je lui demande: Est-ce que vous allez satisfaire à cette échéance. Il me répond affirmativement.

M. Morin: Oui. Est-ce que ce ne serait pas une bonne idée, quoique puisse en dire la loi, pour les années subséquentes, d'essayer de le produire, de le rendre public quelques jours avant la séance de la commission parlementaire?

Est-ce que Me Rémi Lussier peut nous assurer qu'il va essayer, pour l'année prochaine, de tenter de faire en sorte que nous l'ayons à ce moment-là?

M. Berthiaume: Oui, assurément. En fait, c'est un souci d'un bon administrateur de voir à ce que ses états financiers soient vérifiés dans le plus bref délai possible et présentés à qui de droit. Egalement dans le même délai. Je tends à ça, mais ce n'est pas toujours facile.

M. Morin: Parce que cela nous permettrait de poser les questions de façon beaucoup plus précise. Cela nous permettrait aussi de poser peut-être moins de questions parce que les réponses se trouvent souvent dans le rapport.

M. Bacon: ...

M. Morin: Le député de Trois-Rivières le sait, nous voulons aller au fond des choses.

Si nous pouvions maintenant poser quelques questions sur l'effectif de la Curatelle publique. J'aimerais savoir combien de postes sont vacants. J'ai noté que le nombre de postes est réduit de 183 à 164. Je m'interrogeais sur cette réduction, compte tenu du fait que le nombre des dossiers, surtout les actifs, qui sont administrés directement par le Curateur public, augmente sans cesse.

M. Berthiaume: Nous avons eu une révision des postes qui a été faite au cours de l'année et le nombre, actuellement, est de 158. De ce nombre, 20 postes ont été gelés au mois de novembre et 5 postes sont vacants.

M. Morin: Gelés en raison des mesures d'austérité?

M. Berthiaume: C'est cela.

M. Bacon: Ils ne sont pas gelés aujourd'hui.

M. Berthiaume: Pires que jamais.

M. Morin: Mais est-ce que vous êtes en mesure, avec 138 postes— si on enlève les 20 postes qui ont été gelés du total de 158, vous avez un maximum de 138, si je comprends bien— d'administrer convenablement les sommes qui sont sous votre administration, avec un personnel qui ne semble pas augmenter au même rythme que vos responsabilités?

M. Berthiaume: II est évident que nous voulons toujours avoir plus d'effectifs que nous en avons, prétendant que nous allons atteindre notre objectif. Mais nous avons perdu vingt postes. Cela ne sert à rien de lancer des jérémiades et de se plaindre qu'on ne sera pas capable d'arriver. La seule chose qu'il nous reste à faire, c'est de repenser nos procédures, les aérer et, avec les 20 postes gelés, nous allons continuer à remplir nos obligations.

M. Morin: En ce moment, vous avez 138 postes dont cinq vacants. Donc, vous avez 133 personnes qui sont effectivement à votre service? C'est bien le cas? L'an dernier, combien en aviez-vous effectivement au service de la Curatelle?

M. Berthiaume: Les années passées, nous avons toujours fonctionné à peu près avec ce nombre-là.

M. Morin: Avec le même nombre?

M. Berthiaume: Comme le disent les notaires, mesure anglaise, plus ou moins.

M. Morin: De ce nombre, combien de personnes sont affectées à la surveillance des dossiers privés?

M. Berthiaume: Parlez-vous de la surveillance ou de l'administration des biens?

M. Morin: Prenons les deux. Mais je vous parle des dossiers privés.

M. Berthiaume: Des dossiers privés. Nous avons actuellement 34 postes, 2 postes vacants et cinq postes gelés, pour un total de 41 postes.

M. Morin: Vous en avez effectivement, au travail, 32?

M. Berthiaume: 34.

M. Morin: 34, mais vous me dites...

M. Berthiaume: 2 postes vacants.

M. Morin: Oui, alors, cela fait 32 postes. M. Berthiaume: Oui.

M. Morin: Cela, c'est pour la surveillance et pour l'administration?

M. Berthiaume: II y a 34 personnes en poste, deux postes vacants et cinq postes gelés.

M. Morin: Cela, c'est surveillance et administration?

M. Berthiaume: C'est la tutelle; la direction de la surveillance; de l'administration des curateurs privés et tuteurs. 41 postes au complet, dont cinq postes gelés, deux postes vacants et 34 postes occupés.

M. Morin: D'accord. Par rapport à l'année dernière, est-ce que les chiffres sont comparables?

M. Berthiaume: II n'y a pas de modification majeure.

M. Morin: Bon. Une dernière question peut-être. Quel a été le rendement sur les placements au cours de l'année? Vous voyez, cela serait utile d'avoir votre rapport.

M. Berthiaume: Nous sommes très heureux de vous annoncer cette année que le rendement, au 31 décembre 1975, notre portefeuille, se chiffre au montant de $36 millions et de 9,191.

Une Voix: II est meilleur que mon fiduciaire. M. Morin: En effet, M. le Président.

M. Berthiaume: Je dois vous dire que les taux de rendements est excellent et il se compare avantageusement avec celui d'autres organismes.

M. Morin: Oui, je le constate.

M. Berthiaume: Je suis très fier, vous savez.

M. Boutin: Le président de la commission sait ce que cela veut dire, rendement?

M. Morin: Pourquoi cette question?

M. Boutin: Je reviens à votre exposé du début.

M. Morin: La petite querelle que nous avons eue cet après-midi?

M. Boutin: Le beau rendement, qu'est-ce que cela veut dire?

M. Morin: C'était dans un autre contexte. Oui, je comprends.

Le Président (M. Kennedy): Autre chose sur la Curatelle?

M. Morin: M. le Président, à moins que Me Lussier ou le ministre ait quelque chose à ajouter, je suis satisfait. J'ai terminé mon interrogatoire. Nous sommes disposés à adopter les crédits.

Le Président (M. Kennedy): Un instant! Le député d'Iberville.

M. Tremblay: M. le Président, ce serait peut-être intéressant d'entendre le Curateur nous parler un peu de la façon dont il place les biens de ses administrés. Avec un aussi bon rendement, nous aurions peut-être quelques bons tuyaux.

M. Berthiaume: Secret professionnel. M. Tremblay: Non, c'est public, cela.

M. Berthiaume: II a assez peur que la Caisse de dépôt l'apprenne quand même.

M. le Président, si je pouvais simplement remercier tous ceux qui m'ont assisté, depuis 16 h 30, cet après-midi, je pense au contrôleur des Finances, Marcel Lefaivre, au président de la Régie des mesures anti-inflationnistes, Robert De Cos- ter, ainsi qu'au Curateur, Me Rémi Lussier, étant donné que ces dossiers sont quand même passablement techniques, à la fin, il n'est pas possible—je pense que le député de Sauvé va le reconnaître— pour un ministre de connaître tous les détails de ce genre d'organismes. Cela exige, de la part du ministre responsable, une très grande confiance en ces personnes, en celles que je viens de mentionner et d'autres également.

J'aimerais au moins, pour le journal des Débats, dire qu'effectivement ces personnes ont ma confiance. C'est pour cette raison qu'avec autant de facilité je les laisse répondre en mon nom.

M. Morin: M. le Président, j'admire la confiance que le ministre a dans ses adjoints. Je la partage personnellement. Mais il faut tout de même qu'il demeure responsable de ces secteurs dans l'Assemblée nationale, qu'il fasse ses classes.

Le Président (M. Kennedy): Le programme 8, adopté. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 18)

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