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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, February 24, 2004 - Vol. 38 N° 27

Consultation générale sur le document intitulé Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque


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Table des matières

Journal des débats

(Neuf heures quarante-quatre minutes)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, bonjour, la Commission des finances publiques est réunie afin d'entreprendre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque.

D'abord, Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Cholette (Hull) est remplacé par M. Blackburn (Roberval) et Mme Beaudoin (Mirabel) est remplacée par M. Boucher (Johnson) pour l'ensemble du mandat.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme la secrétaire. Je comprends aussi, avec consentement, qu'il y a, des deux côtés de la commission, de l'opposition et du côté gouvernemental.. on aura aussi M. Legendre... M. le député de Blainville, pardon, et Mme la députée de Rimouski qui pourront aussi être participants à la commission, ainsi que Mme la députée de Bonaventure qui est ministre déléguée au Développement régional et à la Recherche...

Une voix: Et au Tourisme, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Pardon. Et au Tourisme. Je pourrai demander le vote tout à l'heure. C'est au Tourisme. Et nous avons aussi comme membre de la commission M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. Alors donc, je souhaite la bienvenue à tous les membres de la commission.

Je vais d'abord faire sommairement lecture de l'ordre du jour. Nous allons d'abord procéder à des remarques préliminaires, j'en expliquerai les détails dans un moment, suivi par la suite du témoignage et de la comparution de M. Pierre Brunet, président du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque, qui sera accompagné de deux des membres du comité, du groupe de travail, M. Luc Chabot et Mme Marie-France Poulin. Nous suspendrons vers midi. Et ce sera suivi cet après-midi du début des auditions où nous entendrons les représentants du Réseau Capital, de l'Innovatech Régions ressources, de BIOQuébec et du Centre de recherche du CHUL, ce qui nous mènerait vers la fin de nos travaux à 18 heures, ce soir.

Alors, juste pour expliquer un peu le déroulement de nos travaux donc, nous commençons d'abord, ce matin, par des remarques préliminaires où il y a 30 minutes consacrées aux membres du côté des ministériels et un 30 minutes qui est consacré aux membres du côté de l'opposition. Nous procéderons par alternance, selon le... en commençant d'abord du côté ministériel. Après qu'un intervenant aura terminé ses remarques préliminaires, nous passerons à l'opposition et nous irons en alternance jusqu'à épuisement des temps consacrés à ces remarques préliminaires, dans la limite aussi du respect de répartition des temps, avec un maximum par intervenant de 20 minutes, comme le prévoit le règlement.

Donc, cet après-midi, nous procéderons aux auditions. Alors, les groupes... Il y a des temps de prévus pour chaque groupe qui témoignera. Alors, nous procéderons tout de suite après, après la présentation des gens que nous allons entendre, je remarque, qui est autour d'une période d'une heure. Ça fait 20 minutes maximum. Ce sera suivi par la suite d'échanges avec les membres de la commission par alternance de blocs de 10 minutes du côté ministériel et de l'opposition jusqu'à épuisement du temps consacré aux groupes que nous allons entendre. Alors donc, c'est pour rappeler un peu le temps et la méthode de travail de la commission.

C'est un élément important. Et surtout, à partir de cet après-midi, on a beaucoup de groupes que nous allons entendre lors de ces auditions-là, donc ça va être important effectivement d'être très serré sur la gestion du temps. Alors, je vais être très strict parce que, si on dépasse... Des fois, on pouvait se permettre de dépasser un peu d'un côté et revenir de l'autre, pour 30 secondes, mais je vais être très strict de manière à permettre d'entendre tous les groupes avec le temps qui leur est imparti.

Remarques préliminaires

Alors, je permets maintenant au ministre du Développement économique et régional et de la Recherche de commencer, de débuter les remarques préliminaires. M. le ministre.

M. Michel Audet

M. Audet: Merci, M. le Président. Je voudrais saluer mes collègues députés de l'opposition, mes collègues évidemment du groupe parlementaire du gouvernement, puis nous souhaiter à tous une bonne commission sur un sujet crucial effectivement pour le développement des entreprises et des emplois au Québec, soit le capital de risque.

Donc, nous démarrons aujourd'hui les travaux de la Commission des finances publiques de l'Assemblée nationale qui a pour mandat d'étudier le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque au Québec, rapport que j'ai déposé à l'Assemblée nationale, en décembre dernier.

Ce groupe de travail, présidé par Pierre Brunet, a répondu de manière éclairante et dans les délais prescrits au mandat que je lui avais confié en juillet dernier. M. Brunet sera d'ailleurs le premier invité de la commission. Il présentera les grands constats et les principales recommandations formulées par le groupe de travail.

J'en profite, vous permettrez, pour remercier chaleureusement Pierre Brunet et les autres membres du groupe de travail qui ont produit en cinq mois un rapport d'une qualité exceptionnelle et, je répète, de façon bénévole. M. Brunet, président de l'Institut des comptables agréés ? c'est ce matin ? Luc Chabot, premier vice-président exécutif, Investissement Desjardins, M. Robert Cloutier, président de A. de la Chevrotière, qui avait un empêchement ce matin malheureusement, et Marie-France Poulin, donc vice-présidente de Maax, ont livré dans ce rapport fort bien documenté un bon diagnostic de la situation du capital de risque public et privé au Québec.

Ces membres du groupe de travail ont pu également bénéficier de la collaboration donc de membres qui étaient du comité, ce qu'on appelle les membres ad hoc donc, en la personne de Jean Houde qui est ici aujourd'hui aussi, P.D.G. d'Investissement Québec, d'Henri Roy, P.D.G. par intérim de la Société générale de financement, de Jean Pronovost, sous-ministre au ministère du Développement économique et régional, et aussi, je le signale, des présidents des sociétés Innovatech qui ont été mis à contribution à plusieurs reprises. Aussi, je tiens à souligner l'excellent travail du secrétaire de la commission, Marc Leduc, qui a épaulé le groupe tout au long de ces travaux.

n (9 h 50) n

La publication donc du rapport qu'on appelle maintenant le rapport Brunet a soulevé beaucoup de débats dans le milieu financier, les firmes spécialisées en capital de risque, les universités, les partenaires engagés dans l'incubation et le démarrage d'entreprises, le milieu de la recherche, celui des entreprises de haute technologie et les organismes de développement régional. Des débats forts constructifs se sont engagés. Des échanges ont eu lieu entre les partenaires des divers milieux. Et 76 organismes ou spécialistes ont déposé un mémoire à cette commission parlementaire. Il faut saluer cet intérêt et la maturité du débat en cours. Nous allons prendre le temps d'écouter ces acteurs du développement économique du Québec qui ont des choses à dire sur le capital de risque. Cette commission durera trois semaines. Ce n'est certainement pas, trop compte tenu de l'importance du sujet. Nous sommes en effet au coeur des outils du développement économique, le capital de risque.

Pour naître, croître, se développer, innover, conquérir de nouveaux marchés et créer plus d'emplois, les entreprises ont besoin de capitaux, de fonds d'investissement. Notre système économique repose sur le rendement qu'anticipe un entrepreneur en prenant le risque d'investir. Il faut donc respecter ces notions élémentaires de risque et de profit et voir à ce que les entrepreneurs aient accès au capital de risque, idéalement et dans la plus grande proportion possible, dans le secteur privé.

Mais on me permettra cependant de noter une préoccupation économique importante qui a été celle du comité. Je lis un paragraphe, à la page 15 du rapport, où il est dit clairement: «Il est largement reconnu que l'industrie du capital de risque constitue un des éléments clés de l'innovation et du développement économique. Il s'agit d'un outil essentiel favorisant l'émergence et la croissance des entreprises, notamment celles des secteurs de la haute technologie, qui contribuent significativement à la modernisation de l'économie, à l'amélioration de sa productivité globale et à la création d'emplois.»

Donc, dans ce contexte, il restera toujours une place, une place importante pour l'État dans la longue chaîne de financement des entreprises. L'important, c'est de délimiter soigneusement ce rôle du gouvernement et de faire en sorte qu'il soit là où sa présence est indispensable et qu'il sache se retirer lorsque les entrepreneurs peuvent se débrouiller évidemment sans lui, c'est-à-dire avec la part du secteur privé.

En 2002, et c'est un constat du rapport et de beaucoup d'études qui ont été faites, environ 70 % des montants investis en capital de risque au Québec avaient un caractère public. Je dis bien «un caractère public», puisqu'il y avait des sociétés qui n'étaient pas formellement à caractère public, mais qui étaient appuyées par des crédits de l'impôt public. La proportion équivalente en Ontario est de 30 %. Ce n'est pas nécessaire d'aller aussi loin, effectivement. Certains diront que c'est même... et ça nous a été dit dans certains rapports, que ça peut être contre-productif. Nous avons peut-être là une indication... nous en avons peut-être une indication en regardant la proportion de capital étranger investi en capital de risque. En Ontario, cette proportion est de 40 %. Je dis bien 40 % donc de capital étranger en capital de risque. Elle est de 10 % au Québec. Il y a lieu de se poser des questions et de se demander pourquoi il en est ainsi. Et les facteurs sont multiples. Je ne prétends pas là-dessus qu'il y a une seule réponse, et je pense que ce sera intéressant d'écouter justement les divers avis à ce sujet.

Mais, pas plus tard qu'hier, je relisais un article de Robert Gagné, qui est professeur à l'Institut d'économie appliquée des HEC, à Montréal, et vice-président du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations, CIRANO, qui écrivait, dans La Presse, sur la place de l'État dans l'économie québécoise. Il y a un extrait, je lis un extrait de son intervention: «Encore aujourd'hui ? et je cite encore une fois ? nombreux sont ceux qui croient que l'État peut compenser [...] notre faible productivité en intervenant un peu partout et ainsi "créer de la richesse". Les faits démontrent [...] le contraire. Le Québec est un des États les plus pauvres d'Amérique du Nord. Le taux de chômage y est plus élevé qu'ailleurs. La qualité de nos services publics se dégrade faute d'argent...» Et: «Enfin, pour couronner le tout, la richesse n'est pas "mieux" répartie ici qu'ailleurs.» Je répète, je cite le Pr Gagné. «Dans ces circonstances, pourquoi tant de craintes face à une réforme plus que nécessaire d'un modèle d'intervention qui ne fonctionne plus? Les données des vingt dernières années, peu importe la façon de les regarder, démontrent de manière éloquente que les politiques économiques issues du "fameux modèle québécois" se sont avérées inutiles, voire même nuisibles.» Je signale que c'est le Pr Gagné qui le dit et non pas moi, mais pour vous dire que c'est une opinion quand même qui est présentée, je pense, par quelqu'un qui a une assez bonne crédibilité.

M. le Président, nous prendrons le temps d'écouter donc les spécialistes du capital de risque et les acteurs du développement technologique, économique et régional du Québec. Premièrement, des précisions doivent être apportées au rôle que continueront d'assumer les sociétés d'État dans le capital de risque. Deuxièmement, certaines règles du jeu doivent être clarifiées rapidement à l'intention du secteur privé, des fonds d'investissement et des caisses de retraite. Enfin, il convient de rappeler aux investisseurs que le gouvernement poursuit l'objectif de rendre accessibles, dans toutes les régions du Québec, les capitaux nécessaires au démarrage et à l'expansion des entreprises créatrices de richesse et d'emplois.

Fort de l'éclairage et des conseils reçus ici de la part des organismes et des spécialistes qui défileront devant nous, je saisirai rapidement le gouvernement de mes recommandations quant aux changements qui doivent être apportés afin d'offrir aux entrepreneurs les meilleurs conditions pour développer leurs affaires. Donc, je le répète, nous ne déposons pas aujourd'hui une politique gouvernementale; nous discutons d'un rapport qui présente un diagnostic, qui présente des pistes, et toutes les opinions qui nous seront présentées dans les trois prochaines semaines feront partie du cadre de décision, y compris d'ailleurs les suggestions que pourra nous amener l'opposition, suggestions positives bien sûr.

Il est important de rappeler que, par rapport au reste du pays, le Québec malheureusement accuse un retard important au chapitre des investissements privés. Au cours des 10 dernières années, malgré les interventions financières massives de l'État, malgré la très grande générosité des mesures fiscales, nous n'avons pas réussi à infléchir la tendance à une sorte de sous-investissement privé au Québec. Alors que la population du Québec représente 23,7 % de la population du Canada, notre produit intérieur brut est de 21,3 % du PIB canadien et notre part des investissements réalisés par les entreprises privées fluctue toujours entre 17 % et 19 %. En Ontario, cette proportion est du double, et donc une proportion beaucoup plus élevée que la part de la population de l'Ontario par rapport à celle du Québec.

Vous avez sans doute pu lire, en fin de semaine, un document qui s'appelle Un Québec au travail!, publié dans La Presse et rédigé par un groupe de cinq experts bien connus, dont MM. Jean-Yves Duclos, Joseph Facal, Clément Godbout, Robert Lacroix, Raymond Royer. Et je n'ai pas besoin, je pense, de présenter ces gens. Ce document m'apparaît fort important et particulièrement le diagnostic de ce document, qui fait état de plusieurs constats qui malheureusement caractérisent trop encore le Québec face à ses voisins canadiens et américains. Il ne s'agit pas de faire du pessimisme, mais il faut voir les choses comme elles sont. Et le groupe en question a fait un certain nombre de constats qui sont assez saisissants.

On y lit ? et encore une fois je cite le rapport: «Le Québec est sensiblement moins riche que l'Ontario, son produit intérieur brut par habitant [est] de 32 990 $ contre 39 524 $ pour l'Ontario, un fossé considérable.» On y lit également ? toujours je cite le rapport: «À ce chapitre, Québec arrive au 52e rang parmi tous les États et ? les ? provinces de l'Amérique du Nord, devançant seulement les Maritimes et une poignée d'États américains.

«Au cours des 20 dernières années, l'emploi a crû moins rapidement au Québec que dans le reste du pays.» Donc, au cours des 20 dernières années, l'emploi a crû moins rapidement: 32 % contre 41 %.

«Administrations provinciale, fédérale et municipale combinées, la ponction fiscale imposée aux Québécois représente 39,2 % de leur richesse[...], le niveau le plus élevé au Canada.

«Malgré l'importance des impôts qu'il perçoit, le gouvernement du Québec est de loin le plus endetté parmi les gouvernements provinciaux. La dette totale de l'État québécois équivaut à 44 % du PIB, une proportion deux fois plus élevée qu'en Ontario.»

Et un peu plus loin, M. le Président, on peut lire dans le rapport: «Tous doivent comprendre que le statu quo menace plutôt qu'il ne garantit le maintien des services gouvernementaux et de notre qualité de vie.» Donc, on avait vu d'ailleurs des propos déjà semblables rédigés et écrits par M. Joseph Facal, autrefois président du Conseil du trésor sous le gouvernement précédent.

Une compilation récente des données de Statistique Canada a montré qu'en l'an 2000 le gouvernement du Québec a versé aux entreprises, sous diverses formes, 3,7 milliards de dollars. Cette année-là, qui n'était pourtant pas une année préélectorale, le Québec a accordé, à lui seul, 58,3 % de toute l'aide offerte aux entreprises par les gouvernements provinciaux au Canada. Bref, on n'a pas lésiné sur les moyens.

n(10 heures)n

En regardant les résultats, qui oserait prétendre que les contribuables québécois en ont eu pour leur argent? Il faut de toute évidence rajuster nos stratégies, réviser nos priorités, repenser nos modes d'intervention dans l'économie, moderniser nos façons d'accompagner les entrepreneurs et les entreprises dans leurs projets, leurs initiatives, leurs ambitions.

Vous me permettrez ici de corriger une nouvelle légende urbaine qui est véhiculée largement, je dois dire, par certains collègues de l'opposition qui racontent qu'au plan des investissements le secteur privé au Québec serait présentement dans une sorte d'attentisme, que les entrepreneurs seraient à l'affût de signaux en provenance du gouvernement et qu'en attendant ils retiendraient leur souffle et retarderaient leurs projets.

La réalité est toute autre. Je donne les chiffres de Statistique Canada. En 2003, le secteur privé au Québec ? donc l'année qui vient de s'écouler ? a réalisé des investissements totaux de 31,5 milliards de dollars, en hausse de 9,7 % par rapport à l'année 2002. Donc, je dis bien, 9,7 % d'augmentation. Cette augmentation des investissements privés est quatre fois supérieure à celle enregistrée en Ontario, qui est de 2,4 %. Donc, si le secteur privé est en attente au Québec, le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il demeure très actif au plan des investissements.

Je ne prétends pas non plus que l'économie fonctionne à plein régime. C'est évident, on peut toujours faire mieux et il faut faire mieux. Certains secteurs industriels notamment sont frappés par des phénomènes de conjoncture qui les perturbent beaucoup et qui les obligent à ralentir momentanément leur croissance et même procéder à des mises à pied. C'est le cas dans l'acier, on le sait, dans l'habillement, le textile, le bois d'oeuvre, certains segments de l'industrie agroalimentaire et de certains domaines des ressources, particulièrement dans le secteur minier. On le sait, on vit actuellement des ajustements importants liés notamment au phénomène de la mondialisation.

De même, notre gouvernement n'est pas satisfait du rythme d'investissement dans les régions. Nous cherchons donc à appuyer de manière plus performante l'élan des entrepreneurs, et cette commission parlementaire devrait nous permettre de mieux orienter le rôle de l'État dans l'investissement afin que chaque dollar investi produise le maximum de retombées sur la création d'emplois, et de la création d'emplois de qualité partout au Québec. C'est l'objet de la commission, je le répète.

D'abord, est-il nécessaire de rappeler que tout cet argent, c'est d'abord celui des contribuables? Il s'agit de l'argent de M. et Mme Tout-le-monde, que nous avons la responsabilité d'administrer de façon rigoureuse et prudente. Nous avons l'obligation de voir à ce que cet argent soit investi dans les interventions qui font la différence, qui vont contribuer à rendre le Québec plus compétitif et plus prospère. Et commençons par les sociétés d'État.

D'abord, la Société générale de financement. Le rapport Brunet souligne à juste titre le rôle stratégique que cette institution a joué depuis sa création par le gouvernement libéral en 1962. Il rapporte également la dérive de la SGF dans les années 2000 ? particulièrement de 1998 à 2002 ? et qui s'est traduite par des pertes importantes, on le rappelle, de 88 millions, en 2001, 172 millions, en 2002, et de plus de 500 millions, en 2003.

Aujourd'hui ? et là, je ne voudrais pas qu'on porte une discussion sur les chiffres, je ne fais que citer les chiffres ? il y a un large consensus sur la nécessité de ramener la SGF sur sa mission essentielle et de mettre fin à son éparpillement et revoir sa gouvernance. C'est des suggestions qui... il y a des suggestions qui seront faites à cet égard.

C'est précisément ce que nous avons commencé à faire, en 2003. Nous avons sorti la SGF de sa bulle, changé l'équipe de direction. Nous avons mis fin à certains gaspillages qu'il y avait actuellement dans la gestion, et on a réduit notamment fortement les structures internes qu'il y avait à la SGF. Nous l'avons ramenée à sa mission essentielle et relancé ses activités. Je signale encore une fois ? on en a parlé tantôt ? des investissements privés, mais, en 2003 ? donc au moment où le gouvernement, je le signale, n'a pas rajouté de fonds publics dans la SGF, en 2003 ? malgré ça, la SGF a honoré tous ses engagements. On a démarré de nouveaux projets pour 389 millions dans des entreprises québécoises, donc près de 400 millions d'investissement en 2003. Donc, la SGF continue d'être présente.

Au terme des travaux de cette commission, le gouvernement statuera sur les orientations qui guideront désormais l'action de la SGF, et, je tiens à le dire, la SGF demeurera un levier important pour appuyer des projets structurants d'investissement au Québec, particulièrement dans les régions. Je le répète parce qu'il y a des confusions, encore une fois, qui ont été... il y a des gens qui ont été confus quant à ces orientations. Donc, la SGF est là pour rester; c'est son orientation qui va changer.

Quant à Investissement Québec, conformément aux recommandations du groupe de travail et à moins d'indications contraires de cette commission parlementaire ? encore là, on est à l'écoute ? il doit demeurer un outil important de financement des entreprises, en particulier des PME. Je tiens particulièrement à préciser qu'en 2003 Investissement Québec aura injecté pour une valeur de plus de 1 milliard donc de fonds publics ? d'Investissement Québec, je dis bien ? dans près de 858 entreprises du Québec. Cette présence marquée d'Investissement Québec dans toutes les régions contraste avec certaines affirmations ? encore ? voulant que cette institution soit en attente. Au contraire, Investissement Québec est sollicitée chaque jour par de nombreuses entreprises et y apporte des réponses dans le cadre de sa mission.

Quant aux Innovatech, elles investissent principalement dans le démarrage d'entreprises à haute technologie. Il se dégage un large consensus sur la pertinence d'ajouter des capitaux privés à ce type d'investissement. Comment y arriver? En créant un seul fonds, comme le propose le groupe de travail, c'est une possibilité, ou bien en tenant compte des réalités différentes vécues dans les régions ressources, la région de la Capitale-Nationale, la région de l'Estrie... D'autres suggestions ont été formulées: Faudrait-il prendre appui sur les équipes actuelles de sociétés Innovatech? Par quelles procédures faudrait-il faire appel au secteur privé? Voilà des questions qui sont posées et pour lesquelles nous aurons des propositions.

Nous allons entendre divers points de vue à ce sujet et nous allons être attentifs à ces opinions. Notre objectif est d'accroître le plus rapidement possible la disponibilité en capital de risque. Tout le monde convient que le secteur privé non seulement peut contribuer à cet apport de nouveaux capitaux, mais qu'il souhaite s'y engager davantage.

Alors, examinons comment faire bénéficier le secteur stratégique des entreprises dans la haute technologie d'une contribution accrue du secteur privé du capital de risque et comment situer le rôle du gouvernement dans ce nouveau contexte. J'ajoute, même si c'est une évidence, que les règles usuelles de transparence présideront aux processus par lesquels nous ferons appel au secteur privé dans le capital de risque en association avec les fonds publics comme ceux des Innovatech.

Par nos travaux, nous aborderons également la question fort importante du transfert technologique, c'est-à-dire du passage entre la découverte scientifique dans un laboratoire et la création d'une entreprise qui commercialise ces découvertes. Un de nos éminents chercheurs, le Dr Fernand Labrie, que j'ai aperçu tout à l'heure, que nous entendrons en fin d'après-midi, soutient qu'actuellement plus de 80 % des découvertes ayant un potentiel réel de commercialisation demeurent sur les tablettes des laboratoires et ne vont pas plus loin que dans les publications académiques. Le Québec ne peut se permettre ce qui me semble être une forme de gaspillage. Certes, il y a loin entre l'idée ingénieuse et l'entreprise qui peut l'exploiter, comme il y a loin parfois de la coupe aux lèvres. Nous touchons tout de même là à quelque chose qui est essentiel. Nous serons particulièrement attentifs à cet aspect de nos travaux portant sur la valorisation de la recherche et le transfert technologique. Je signale que c'est une question qui préoccupe beaucoup mon ministère.

Enfin, nous allons examiner avec beaucoup d'attention la préoccupation d'offres de capitaux en région. Actuellement, il y a de nombreux fonds publics, comme on disait, qui sont offerts en région. Certains fonds se concurrencent, nous dit-on, mais, cependant il y en a d'autres qui proposent en ajouter de nouveaux. Alors donc, la commission permettra de voir plus clair et de pouvoir concilier ces perceptions.

Pour notre part, le résultat que nous recherchons, c'est la disponibilité de capitaux dans toutes les régions du Québec afin d'appuyer tout projet valable de développement d'une entreprise privée, coopérative et d'économie sociale. Nous allons chercher les solutions les plus efficaces et les moins coûteuses qui offrent le maximum de garanties à l'égard du résultat recherché.

M. le Président, voilà les remarques préliminaires que je voulais adresser aux membres de la commission parlementaire et aux invités qui ont si généreusement répondu à notre invitation. Nous avons besoin de l'éclairage de tous nos invités. Je ne doute pas que les échanges que nous aurons entre nous et avec nos invités seront marqués au coin de la sérénité parce que les enjeux du capital de risque sont considérables. Notre prospérité repose en effet sur le développement d'entreprises innovantes produisant des biens et services à forte valeur ajoutée. De telles entreprises ont certes besoin du soutien de l'État dans certaines phases critiques de leur développement, mais elles doivent aussi compter sur une solide industrie du capital de risque. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le ministre. Donc, je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'économie et de finances et député de Rousseau. M. le député, vous avez 21 minutes. La prochaine fois, je vais être un peu plus strict pour tout le monde.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Merci, M. le Président. Je voudrais, moi aussi, saluer mes collègues des deux côtés. Je voudrais saluer M. Brunet, M. Chabot, Mme Poulin. Et donc ça me fait plaisir, moi aussi, de venir aujourd'hui démarrer ces travaux sur un sujet qui est important.

On pourra tantôt en discuter. On parle de capital de risque, mais, en fait, on parle de l'aide aussi et du rôle de l'État dans le développement économique.

Et le ministre du Développement économique et régional vient de nous dresser un portrait très noir de l'économie du Québec. Je pense qu'il faut peut-être ramener les pendules un petit peu à l'heure parce que l'économie du Québec a connu des progrès remarquables au cours des dernières années, et c'est vrai qu'il y a toujours un retard avec l'Ontario, mais ce retard a été diminué au cours des dernières années.

n(10 h 10)n

Il faut rappeler qu'entre 1994 et 2002 il s'est créé au Québec 500 000 emplois; que les investissements privés ont augmenté plus rapidement que dans le reste du Canada; que le taux de chômage a baissé plus rapidement que dans le reste du Canada et que l'Ontario; et que la croissance économique, en termes de PIB par habitant, a augmenté plus rapidement que tous les pays de l'OCDE. Donc, il faut être prudent quand on fait un portrait très noir.

C'est certain que, quand on regarde d'où on partait, on peut dire qu'il y a encore du rattrapage à faire. Il y a encore des défis importants, entre autres, au niveau des technologies de l'information, des biotechnologies, du développement économique en région. C'est certain aussi qu'avec la hausse du dollar canadien il y a des défis qui s'ajoutent aux entreprises au Québec. Il y a tout le vieillissement de la main-d'oeuvre aussi auquel il faut faire face.

Mais je pense que le travail qui a été fait par l'État québécois, même s'il doit continuellement être revu, il ne doit pas être dénigré. Et on a vu, depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral du Québec, une nouvelle approche qui a été mise en place par ce gouvernement, où continuellement on souhaite et on voit le retrait de l'État dans l'aide aux entreprises. On l'a vu dans le budget du ministre des Finances, l'année dernière: il y a eu des coupures de plus de 800 millions dans l'aide aux entreprises; on a retiré de l'aide aux régions ressources, à la Gaspésie, à la Zone de commerce international de Mirabel, à la vallée de l'aluminium. On a aussi malheureusement, vu souvent le nouveau premier ministre et certains de ses ministres dénigrer les leviers économiques du Québec, que ce soit la Caisse de dépôt, la SGF, les Innovatech. Et on a vu aussi des coupures. Les coupures en fait les plus importantes dans le dernier budget ont été au ministère du Développement économique et régional. Même, certaines coupures, je pense qu'on les a apprises ensemble, avec le ministre du Développement économique et régional, au salon bleu. Mais, au total, il y a eu plus de 25 % de réduction dans le budget du ministère du Développement économique et régional.

Et je pense qu'évidemment c'est toujours difficile de faire le lien avec les résultats, mais, quand on regarde les résultats, c'est clair que, oui, il y a eu plusieurs projets de développement qui ont été mis sur la glace à la SGF, chez Investissement Québec ou directement au ministère, et ça a eu des impacts. On a vu, entre autres, qu'en 2003 le Québec a créé seulement 27 000 emplois, ce qui est 10 % des emplois créés au Canada, alors qu'en 2002 il y avait eu une création de 167 000 emplois qui étaient 30 % des emplois créés au Canada. Donc, je pense que cette approche de laisser-faire a des impacts négatifs sur le développement économique.

Maintenant, aujourd'hui, on regarde ce rapport sur le capital de risque. D'abord, il y a des prémisses dans le rapport qui sont discutables. D'abord, on nous dit que, au Québec, le capital de risque, c'est 70 % public, et, en Ontario, c'est seulement 30 % qui vient du secteur public. Or, selon une étude qui a été faite par McDonald et associés, on peut voir que les chiffres sont totalement différents. C'est une étude qui a été faite pour l'année 2002. On voit dans cette étude que, au Québec, 60 % du capital de risque est fait par le secteur public, alors qu'en Ontario c'est 52 % qui est fait par le secteur public. Donc, il y a un écart important.

Ce qu'il est important aussi d'ajouter, c'est que c'est au Québec que se fait le plus de capital de risque, entre autres à cause de la présence du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec qui représente une partie importante. En fait, dans le 60 %, c'est 25 % du capital de risque. Donc, de ce côté-là, quand on regarde la présence du capital de risque, on sait que, quand on regarde tous les actifs en capital de risque au Canada, il y en a 50 % qui sont au Québec.

Bon, évidemment qu'il y a une partie importante qui vient du Fonds de solidarité. Le Fonds de solidarité, dans la définition qui est prise par... Ceux qui ont fait le rapport sur le capital de risque les incluent dans le secteur public, puis on pourrait en discuter longuement. Mais ce qu'il est important de dire, là, c'est que l'écart n'est pas aussi grand que ce qu'on dit dans le rapport.

Ensuite, dans ce rapport, on nous dit qu'on souhaite avoir plus de place pour le secteur privé. On est tous d'accord avec ça, mais il ne s'agit pas d'allumer des lampions pour les voir apparaître. Si, demain matin, il y a plus de sociétés privées qui viennent au Québec créer des organismes de capital de risque, on va tous être contents. Mais on peut se demander: si ça n'arrive pas, qu'est-ce qu'on fait? Est-ce qu'il n'y a pas à ce moment-là justement un risque énorme de retirer le secteur public surtout pour le développement économique des régions?

En fait, dans le rapport qu'on a devant nous, on a, comme je le disais tantôt, une approche où ce qu'on souhaite, c'est de retirer, de rapetisser le rôle de l'État sans évaluer les conséquences sur le développement économique. En fait, quand on regarde les objectifs qu'on se donne: de réduire le rôle de la SGF, de resserrer les conditions d'Investissement Québec, de fermer les Innovatech, ce qu'on se dit, c'est qu'on veut réduire les coûts. Mais c'est comme si on était en train d'étudier les résultats d'une entreprise en regardant seulement une des deux colonnes. C'est comme si une entreprise, que ce soit Maax ou n'importe quelle, qui regarde... c'est comme si on avait regardé seulement la colonne des dépenses et qu'on avait comme objectif de réduire les dépenses sans regarder les revenus. On sait très bien que ? et puis, Mme Poulin peut sûrement en témoigner ? qu'il faut être capable d'optimiser le profit, c'est-à-dire les revenus moins les dépenses.

Or, quand on fait de l'aide aux entreprises, les revenus, ce sont les retombées économiques. Là, je ne rentrerai pas dans le détail, mais, quand l'aide aux entreprises fait la différence, permet de créer des emplois, donc des employés qui vont payer des impôts, donc des revenus au gouvernement, bien, il faut tenir compte de ces retombées. Et le seul endroit dans le rapport où on parle des retombées, c'est pour Investissement Québec, pour nous dire qu'on a très bien réussi. En fait, on nous dit que, pour l'année 2002-2003, Investissement Québec a eu des coûts de 245 millions, mais a amené des retombées de 648 millions; donc très bons résultats. Mais ce qu'on prend comme approche, c'est de dire: 245 millions, c'est trop, il faut réduire le coût de 245 millions. Mais là nulle part on nous dit quel impact ça aura sur le 648 millions de retombées. Donc, on a étudié, là, seulement une colonne. C'est comme si une entreprise se disait, là, je le répète: On veut réduire nos dépenses, et puis, même si nos revenus diminuent plus vite que les dépenses qu'on vient de réduire, ce n'est pas grave, on regarde juste les dépenses.

Donc, je pense que c'est une analyse qui est très incomplète, qui est même ? je pense que le mot n'est pas trop fort ? qui est biaisée, qui répond de toute évidence à une commande du gouvernement libéral de réduire encore une fois la présence de l'État dans l'aide aux l'entreprises.

Maintenant, on dit: On va retirer l'État et on va le remplacer par des fonds puis par des partenariats public-privé. Bon, ce qu'il faut comprendre, c'est que l'entreprise privée n'a pas les mêmes objectifs qu'un gouvernement. L'entreprise privée recherche seulement une rentabilité, et, d'une certaine façon, n'est pas préoccupée par les retombées économiques, que ce soient les créations d'emplois, que ce soient les investissements, que ce soient les impôts payés sur les profits par les entreprises qui viennent s'installer au Québec. Et là on mêle tout dans le rapport, parce qu'on parle même du programme FAIRE, qui est un programme important chez Investissement Québec, qui n'est pas du capital de risque. Et c'est peut-être le problème du rapport qu'on a devant nous. En fait, c'est un rapport sur le capital de risque ? c'est ça, le titre du rapport ? alors que ce qu'il faudrait, c'est d'analyser tout l'ensemble de l'aide aux entreprises et du rôle de l'État dans le développement économique.

Et j'irais même plus loin, M. le Président, en disant que le secteur privé est un peu en conflit d'intérêts lorsqu'il analyse le rôle du secteur public, parce que, quand on a une entreprise qui a un projet, qui vient voir une entreprise de capital de risque privée, c'est certain que l'entreprise de capital de risque privée va demander d'avoir le plus grand pourcentage de participation dans le capital- actions, d'avoir le taux de rendement le plus élevé possible. Et, si le secteur privé a face à lui un secteur public qui est un peu moins gourmand parce qu'il tient compte des retombées, bien, ce secteur privé se trouve à être un peu en compétition et ne peut pas exiger des rendements aussi grands et un aussi gros morceau du capital-actions de l'entreprise.

Donc, il faut réaliser, là, le contexte dans lequel on travaille. Le secteur privé a des objectifs différents du secteur public, ne vise que la rentabilité. Et, plus le secteur public est présent et plus le secteur public tient compte aussi, dans sa définition de la rentabilité, des retombées économiques, bien, plus ça déplaît au secteur privé. Donc, il faut garder ça en tête, là, dans tous les mémoires puis les groupes qu'on va recevoir.

n(10 h 20)n

Donc, je conclus en disant que je suis très inquiet, très inquiet de l'approche encore une fois qui est prise par le Parti libéral du Québec. Je pense que ça va faire un tort énorme au développement économique des régions. Je pense que c'est une analyse très incomplète qu'on voit ici. On n'a nulle part dans le rapport, par exemple, analysé les retombées économiques de la SGF et des Innovatech; on a seulement regardé les coûts.

Je pense aussi que c'est une approche, pour ce qui est du partenariat, encore une fois ? on l'a vécu beaucoup au mois de décembre avec la sous-traitance... Bien là on est encore en train de parler de sous-traitance au privé, sauf que le privé n'a pas les mêmes objectifs que le public quand il s'agit de développement économique des régions. Donc, je pense que c'est une approche dogmatique.

Ce qu'on souhaite, au Parti libéral du Québec, c'est de rapetisser l'État québécois à tout prix, sans mesurer les conséquences, surtout pour les régions. Je pense que c'est une vision à courte vue, et je pense que le nouveau premier ministre du Québec, dans ses tournées internationales, que ce soit à New York ou à Davos, va continuer de revenir les mains vides parce qu'il n'a rien à offrir aux entreprises. En fait, tout ce qu'il propose, c'est d'avoir de moins en moins d'outils pour convaincre les entreprises de venir investir au Québec.

Et donc je conclus en disant que je pense qu'on a dans ce rapport une commande du gouvernement Charest de réduire les coûts de l'État sans tenir compte des impacts très négatifs qu'on aura sur les retombées économiques dans les différentes régions du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Bonaventure, ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme. Mme la députée.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je souhaiterais joindre ma voix à celle de mon collègue pour saluer également nos collègues qui nous font l'honneur de leur présence, également nos collègues de l'opposition. Comme à leur habitude, M. le Président, nos collègues sont toujours aussi virulents dans leurs critiques, mais nous souhaitons qu'elles soient constructives quand même tout au cours de nos travaux.

Je souhaiterais également saluer de façon particulière M. Brunet, Mme Poulin, M. Chabot, qui sont nos invités, nos vedettes du jour, si on peut dire.

Écoutez, je pense qu'il y a un certain nombre, M. le Président, là, de correctifs qui doivent être apportés aux propos qui ont été véhiculés... qui sont véhiculés par notre collègue le député de Rousseau. Ce qui est désolant, c'est que l'opposition encore une fois fait preuve d'acharnement idéologique. Et le député de Rousseau, en fait, fait miroiter des scénarios qui sont apocalyptiques, alors que la réalité est tout autre, M. le Président.

Le rapport Brunet nous fait une série de recommandations sur laquelle notre gouvernement et l'ensemble des parlementaires qui seront appelés à faire leurs propositions... Le gouvernement donc va donc statuer sur un certain nombre de recommandations. Il n'est pas question de mettre en oeuvre tous les éléments qui sont contenus dans le rapport Brunet mais bien d'en discuter, d'une part.

D'autre part, pour ce qui est du nombre d'emplois, par exemple, qui ont été créés au Québec, je rappelle au député de Rousseau qu'en 2003 nous avons créé 57 200 nouveaux emplois. C'est donc un chiffre, une moyenne qui est plus importante que la moyenne des 10 dernières années qui était à 55 000 emplois.

De notre côté, M. le Président, du côté gouvernemental, on plaide pour un interventionnisme modulé, c'est-à-dire qui fait en sorte que le gouvernement va être là où c'est nécessaire, va être là pour supporter les entrepreneurs qui en ont réellement besoin. Le Parti québécois a toujours privilégié une approche paternaliste qui en bout de ligne a contribué littéralement à étouffer les entrepreneurs. Et je pense que c'est tout à fait sain et légitime de se questionner sur nos façons de faire, et c'est dans ce sens-là que l'opposition fait preuve d'acharnement idéologique. Il faut quand même avoir le courage de se questionner et remettre les pendules à l'heure et voir comment on peut améliorer nos façons de faire, et je pense que c'est l'ensemble de l'économie du Québec et l'ensemble de nos régions qui vont s'en porter un peu mieux.

Pour ce qui est d'interventionnisme modulé, M. le Président, je vais vous donner des exemples concrets en matière de développement régional et qui ont fait en sorte que notre gouvernement a toujours été au rendez-vous lorsque ça a été nécessaire au cours des 10 derniers mois.

Exemples concrets: Murdochville; Asbestos; Thetford Mines, dernièrement, avec un fonds de 2 millions de dollars pour la relance d'une économie drôlement affectée par toute la question liée à la chrysotile; Québec Cartier Mining, M. le Président; plan de relance de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine. Le député de Rousseau colporte une fausseté, le plan de relance a été bonifié de plus de 1 million de dollars pour l'exercice financier en cours. Près de 87 millions, M. le Président, en mesures de soutien pour les économies des régions dites ressources.

Alors, je pense qu'il faut nuancer, je pense qu'il faut relativiser et certainement rappeler à l'ordre nos collègues de l'opposition sur la question de la présence gouvernementale dans les économies... dans l'ensemble des économies régionales.

Également souligner à juste titre que le gouvernement a entrepris un exercice de recentrer les missions dites essentielles de l'État. Et je pense que les résultats qu'on a connus, par exemple avec la Société générale de financement, et le virage qui a été entrepris est tout à fait salutaire non seulement pour la société d'État, mais également pour l'ensemble des contribuables québécois. Et, comme parlementaires, nous avons la responsabilité de faire en sorte que les deniers des contribuables ne soient pas dilapidés dans des projets finalement qui n'apportent rien sur le plan économique.

Alors, M. le Président, je prendrai quelques instants peut-être pour insister davantage sur le volet régional ou le développement régional en regard des travaux qui vont nous occuper. Vous savez que, des 76 mémoires qui ont été reçus dans le cadre de notre consultation, 26 proviennent de l'ensemble des régions du Québec, donc c'est plus du tiers. L'intérêt qui est démontré aujourd'hui par les régions est éloquent et met en lumière l'importance que revêt toute la question de l'accès au capital de risque pour nos entreprises et en particulier pour celles bien sûr qui sont situées en région.

Pour ceux et celles qui ont assisté au 21e colloque de la Fondation de l'entrepreneurship, la semaine dernière, il y a une étude qui a été révélée par une chercheure du HEC, Mme Nathaly Riverin, qui est assez intéressante et qui confirme que le taux de création d'entreprises, par exemple, au Québec, dans la dernière année, est deux fois moindre que dans l'Ouest, alors que le taux de création de jeunes entreprises, lui, est deux fois plus bas chez nous que chez notre voisin ontarien.

Évidemment, si le développement d'une culture entrepreneuriale ? parce que toute la question doit être abordée dans un angle, dans une vision plus globale ? est une réponse qui nous permettrait d'améliorer notre situation, notre performance, je pense que cette situation est aussi intimement liée à un accès équitable au capital de risque et aux différents programmes qui permettent aux entrepreneurs d'obtenir du financement pour matérialiser leurs projets.

Les conclusions qui se dégageront de nos travaux guideront nos choix en matière de développement économique et régional. Je pense qu'il est urgent, il est nécessaire également de prendre des dispositions afin de réduire les disparités régionales qui subsistent. Et, à cet égard, l'opposition s'est faite silencieuse, M. le Président.

Je vais vous donner un exemple concret. En 2003, le taux de chômage a été de 6,1 % dans la région de Chaudière-Appalaches et de 17,1 % pour la région de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine. C'est plus de 10 points qui séparent ces deux régions. En fait, je pense que c'est... Et, moi, comme députée de région... c'est une situation, c'est un fossé qui est tout à fait inacceptable et qui interpelle le gouvernement et l'Assemblée nationale, et également qui fait appel à des valeurs qui sont fondamentales lorsqu'on parle de développement régional, c'est-à-dire nos valeurs d'équité, de justice et aussi de solidarité.

Notre gouvernement a le devoir et la responsabilité de mettre en place des moyens qui nous permettront de diminuer ces écarts qui sont d'une certaine façon contre-productifs pour l'ensemble de l'économie québécoise. Vous le savez comme moi, l'ensemble des régions du Québec, et, en particulier, les régions dites ressources, ont un potentiel de développement qui n'est pas maximisé, qui n'est pas suffisamment maximisé. Nous avons donc la responsabilité de mettre en place les meilleurs outils sur lesquels s'appuieront nos entrepreneurs en région, et c'est exactement ce qui guide et ce qui guidera les travaux de cette commission au cours des trois prochaines semaines.

Et notre souhait, c'est que nos travaux nous apporteront un nouvel éclairage sur toute la question non seulement du financement des entreprises, mais également sur l'accès à du capital de risque. Par exemple, plusieurs affirment qu'il y a suffisamment de capital de risque en région, d'autres prétendent le contraire. Alors, qui a raison? Je pense que la question est tout à fait légitime, et j'ose espérer qu'on réussira à y répondre.

La prospérité des régions est directement liée à leur capacité d'attirer des projets à fort potentiel de développement. Et des investisseurs acceptent de prendre des risques en finançant différentes initiatives. Le capital de risque permet justement d'atteindre cet objectif. Le développement économique des régions passe nécessairement par l'accès à du financement adéquat et surtout adapté. Et j'insiste beaucoup sur le mot «adapté» parce que, évidemment, notre prétention ce n'est pas de faire dans le mur-à-mur mais bien de faire dans le sur-mesure. Et à cet égard l'ensemble des sociétés d'État sont interpellées à soutenir le gouvernement dans sa volonté donc d'avoir une offre de service modulée et adaptée aux besoins des entrepreneurs.

Un promoteur qui prend lui-même sa part de risque s'attend à ce que le gouvernement développe des outils qui lui permettront de déployer ses ailes. Nous savons, par exemple, que les fonds publics sont importants dans le développement des régions. Il y aura, par exemple, toujours des projets qui nécessitent un fonds de démarrage de 50 000 $. Alors, je fais référence bien sûr aux différents fonds qui existent, les fonds locaux d'investissement, les FLI, les SOLIDE, tous les fonds dont disposent les sociétés d'aide au développement des collectivités. Sur le plan régional entre autres, nous avons les Fonds régionaux de solidarité, le Capital régional et coopératif Desjardins, les Innovatech et, par exemple, la Banque de développement du Canada.

Alors, je pense que les résultats qu'on a connus au cours des dernières années, au cours des cinq dernières années, par exemple au niveau des Fonds locaux d'investissement, également au niveau des SOLIDE, je pense, sont révélateurs donc de la pertinence de ces outils pour les promoteurs ou les plus petits projets d'investissement.

n(10 h 30)n

Mon collègue, dans son allocution, a fait référence à une donnée qui est importante. Au Québec, il existe plus de 400 fonds d'investissement publics, par exemple, 35 uniquement pour le Bas-Saint-Laurent. C'est beaucoup de fonds, évidemment. Et je pense qu'il est tout à fait légitime de se questionner sur la façon d'assurer un meilleur arrimage entre l'ensemble de ces fonds pour éviter les chevauchements et bien sûr obtenir le maximum de résultats eu égard bien sûr aux résultats que nous connaissons sur le plan économique.

Une autre étude qui a été révélée par le Réseau Capital, qui est très intéressante, et là on a un défi bien sûr comme gouvernement et comme parlementaires...

Le Président (M. Paquet): En 20 secondes, s'il vous plaît, Mme la ministre.

Mme Normandeau: Oui. Il y a une étude qui a été révélée et qui confirme que seulement 12 % du capital de risque est dirigé vers les régions. Alors, lorsqu'on parle d'équité et d'accessibilité pour les régions, entre autres au capital de risque, je pense que l'ensemble des parlementaires qui travailleront à formuler des recommandations dans le cadre de cette consultation devront avoir en tête effectivement cette préoccupation pour s'assurer que tous les citoyens, peu importe où ils vivent sur le territoire, aient des chances égales, des chances équitables dans leur développement. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci, Mme la ministre. M. le député de Johnson.

M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. Alors, je salue M. le ministre, Mme la ministre, Mme la députée et MM. les députés du gouvernement, Mme la députée et MM. les députés de l'opposition, M. Brunet, Mme Poulin et M. Chabot. Je suis très heureux d'être là ce matin. C'est ma première expérience comme critique de l'opposition officielle dans l'industrie et commerce et c'est une opportunité en or.

Je viens d'écouter notre collègue ministre qui disait qu'elle souhaitait qu'à la fin de cette commission le Québec soit plus en mesure de procéder à un développement économique global et dans toutes les régions. Or, c'est ça, le problème, on a un rapport qui porte sur le capital de risque, alors que la commission est ici pour évaluer les retombées des programmes du gouvernement dans le développement économique. Donc, c'est faussé dès le départ. Il n'y a pas juste le capital de risque, mon collègue l'a dit, il y a la colonne des revenus. J'écoutais le maire de Trois-Rivières récemment, Yves Lévesque, qui n'est pas de notre parti politique, c'est bien connu, et qui disait: Ce gouvernement ne fait que regarder une des colonnes, la colonne des dépenses, il oublie la colonne des revenus.

La Société Innovatech sud du Québec, chez moi, M. le Président ? et c'est la vice-présidente actuelle qui a eu l'idée de cette société, c'est moi qui l'ai mise en place, avec le GATT, dans la région ? a contribué à créer 45 entreprises, dont 33 sont toujours vivantes, créé 500 emplois. Mais on ne considère pas ça. On a regardé, il y a des pertes là, des pertes importantes. Alors, il y a des pertes, c'est fini, plus de Société Innovatech. On ne regarde pas les revenus, on ne regarde pas l'impact de la Société Innovatech dans le sud du Québec. On ne regarde pas ça. On regarde le capital. Alors, probablement que Marx serait à l'aise dans cette commission plus que moi.

M. le Président, au cours des dernières années, bien des gestes ont été posés par le gouvernement afin de créer un climat propice à l'expansion de l'économie du savoir. Nous n'avons qu'à penser aux carrefours de la nouvelle économie en région, aux CDTI. D'ailleurs, je cite le premier ministre actuel... Jean Charest a rendu hommage à Bernard Landry pour avoir tenu parole et rendu rapidement une réponse pour l'emplacement du Centre de développement des technologies de l'information. Et, maintenant qu'il est premier ministre, il remet tout ça en question, et pourtant il applaudissait lorsque nous avons mis sur pied le CDTI à Sherbrooke. Le ministre des Finances d'ailleurs aurait dû commander un rapport qui aurait porté sur le développement économique, puisqu'il disait en 2001, en mai: «Le gouvernement doit maintenir et renforcer l'aide qu'il apporte au développement économique. Oui à l'intervention de l'État.» Il n'est pas là, le ministre des Finances.

Donc, au cours des dernières années, bien des gestes ont été posés. Par exemple, je pense aux programmes adaptés aux besoins de l'industrie, comme le programme Bio-Levier pour les biotechs, un programme par lequel Québec prête 1 $ aux entreprises de biotechnologie pour chaque dollar qu'elles réussissent à obtenir auprès d'investisseurs privés, à la création de Valorisation-Recherche Québec afin de s'assurer qu'il y ait une bonne transition entre les laboratoires universitaires et le marché, à l'implantation des sites désignés, tels la Cité du multimédia et le Centre national des nouvelles technologies de Québec. Les résultats de ces actions ciblées, M. le Président, ont permis le maintien et la création de près de 18 000 emplois dans des secteurs de pointe, dont 4 500 en région, et ce, malgré l'éclatement de la bulle technologique en 2000.

Vous savez, M. le Président, aux États-Unis, entre 2001 et 2002, le secteur technologique a perdu environ 560 000 emplois. Ce n'est pas au Québec, là, c'est aux États-Unis. L'intervention gouvernementale dans ce secteur a donc donné de bons résultats. En effet, selon une récente étude de Statistique Canada, Montréal est en tête de liste au Canada pour la proportion de travailleurs oeuvrant dans les secteurs des technologies de l'information et des sciences. De plus, selon une autre évaluation de Statistique Canada, Montréal est la ville avec le plus haut taux de diversité industrielle, devant Toronto et Vancouver. Par ailleurs, la fameuse revue Wired classe Montréal au cinquième rang mondial des plaques tournantes des technologies, à égalité avec New York et Seattle et devant Los Angeles, Paris et Tokyo. L'économie du savoir, au Québec, était donc sur une bonne lancée, mais le gouvernement actuel a coupé plusieurs mesures structurantes pour ce secteur d'avenir, et c'est inquiétant.

Depuis l'élection des libéraux, aussi le milieu d'affaires est inquiet. Suzanne Guèvremont, présidente de l'Alliance NumériQC, un regroupement d'entreprises et d'organismes de l'industrie du multimédia et des contenus numériques déclarait: «L'abolition des programmes accordant des avantages fiscaux aux entreprises admissibles qui s'établiront dans des sites désignés [...] aura un impact négatif certain sur le développement de notre industrie.»

De plus, selon un sondage mené pour le compte de BIOQuébec, l'association québécoise de biotechnologie, la réduction des crédits d'impôt à la recherche annoncée dans le budget du ministre des Finances Yves Séguin a obligé plusieurs petites firmes de biotechnologie à réduire leurs investissements ou à faire des mises à pied.

Jean-Guy Paquet, P.D.G. de l'Institut national d'optique, déclarait également dans Le Soleil, le 4 février 2004: «Dans tout cet exercice de révision des fonctions de l'État, dont au premier plan plusieurs programmes et incitatifs fiscaux visant à appuyer les entreprises innovatrices issues de la R & D, je ne vois aucunement poindre à l'horizon un intérêt soutenu et marqué pour le développement technologique et la R & D. Ce manque de vision apparent est inquiétant pour notre région; il l'est aussi pour l'ensemble du Québec.»

Voilà les résultats après un an de gouvernance libérale. Au cours des prochaines semaines, M. le Président, on va donc discuter de l'offre de capital de risque au Québec, un enjeu majeur pour l'économie du savoir. Mais, là aussi, il y a des inquiétudes majeures. Claude Larose, V.P. du Comité exécutif de la ville de Québec, déclarait dans Le Soleil du 3 février 2004: Le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État dans le capital de risque propose l'abandon d'Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches ainsi que du CLD. Cela est extrêmement inquiétant; ces deux sociétés ont contribué au démarrage de plusieurs entreprises.

J'ose donc espérer qu'à l'issue de cette commission parlementaire les entreprises du Québec seront rassurées et que les solutions retenues par le gouvernement seront adaptées aux besoins des entreprises de l'économie du savoir. Espérons également que les mesures retenues seront implantées rapidement. De nombreux projets sont en attente, quoi qu'en dise le gouvernement, et les besoins sont immédiats, surtout en biotech. En effet, selon Ernst & Young, les quelque 38 % des sociétés canadiennes en biotechnologie qui avaient moins qu'un an de réserves en fonds disponibles doivent conclure des rondes de financement à assez court terme. Et enfin j'espère que le rôle du gouvernement ne sera pas diminué, car, toujours selon une étude de Ernst & Young, le rôle des gouvernements en tant que support à l'industrie des biotechnologies est primordial dans la structure financière actuelle de l'industrie. Bref, j'ose espérer que le gouvernement ne répétera pas ce qu'il fait au cours de sa première année de mandat. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Johnson et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'industrie et commerce. Maintenant, pour le reste du temps de l'opposition, je cède la parole à M. le député de Blainville et porte-parole de l'opposition officielle en matière de régions.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Quand vous parlez du reste du temps, pourriez-vous être un peu plus précis?

Le Président (M. Paquet): Il reste environ...

Une voix: 10 minutes.

Le Président (M. Paquet): 10 minutes.

M. Richard Legendre

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, de saluer M. le ministre, Mme la ministre, chers collègues des deux côtés de l'Assemblée, M. Brunet et chers invités.

Évidemment que, quand on parle du rôle de l'État dans le capital de risque ou même également, comme on en parle dans le rapport Brunet de façon un peu plus précise, dans le financement des entreprises, il va de soi, comme Mme la ministre l'a mentionné, que c'est extrêmement important pour tout ce qui touche le développement régional. Et d'ailleurs c'est pour ça que notre gouvernement avait beaucoup investi dans le développement régional. Et j'ai été un peu surpris d'entendre parler, tout à l'heure, la ministre du fait qu'on avait été silencieux sur ce sujet. Écoutez, en région: Innovatech Régions ressources, fonds de développement régionaux, Fonds locaux d'investissement, fonds d'économie sociale, stratégie justement des régions ressources pour justement répondre aux problèmes de disparité dont la ministre parlait. Alors, on a été tout sauf silencieux. Et on planifiait également une plus grande implication de la Société générale de financement en région, en particulier au niveau des projets ACCORD, dont on n'entend plus beaucoup parler depuis le 14 avril 2003. Alors...

n(10 h 40)n

Et évidemment on a eu des résultats avec ça, à la fois en termes de création d'emplois et également en termes de répartition des investissements en capital de risque. C'est intéressant de noter une statistique: en 2002, plus de 25 % des transactions ont été réalisées, en termes de capital de risque, hors des régions de Montréal et de Québec, hors des grands centres. Et ça, 25 % en région, c'est deux fois plus qu'en Ontario, par exemple. Donc, il y a quelque chose qui avait marché, au cours des dernières années, en investissements régionaux.

Mais le nouveau gouvernement trouve que l'État investit trop et trouve que l'État investit trop en région, J'imagine que c'est la conclusion. La preuve, il y a une réduction du budget des régions. Donc, jusqu'à maintenant, c'est cohérent. Il trouve qu'on investit trop en région. On coupe en région. On coupe également des mesures fiscales en région. Et, au moment où on aurait besoin de parler de développement, on parle de structures. Donc, l'inquiétude est revenue en région. Et je vous dirais, en tout respect, que, quand on lit le rapport Brunet, je pense qu'il y a également de l'inquiétude en région encore plus.

Évidemment que le capital de risque est extrêmement important en région, mais, à la lecture, je vais vous dire, moi, je pense que ce qu'on va retrouver le plus en région, c'est du risque et moins de capital parce qu'il y a carrément une diminution des moyens et des outils en termes de développement économique régional. Et j'en prends pour preuve l'analyse, que je qualifierais de très rapide et voire même discutable, qui a été faite dans le rapport des fonds locaux d'investissement, ce qu'on appelle les FLI, qu'on propose d'écarter et qui ont bien réussi. Et, tous les CLD nous le disent et l'Association des CLD en parle également, les FLI ont été rentables pour l'État et efficaces pour les régions. Avec des investissements de l'ordre d'environ 25 millions par année, on peut multiplier par neuf ces investissements, qui sont des prêts, soit dit en passant, et qui donnent des investissements à travers le Québec neuf fois plus grands tout en créant et en maintenant quelque chose comme 68 000 emplois. Alors, quand le rapport Brunet parle d'approche par levier, de structures légères et simples et de maximiser le rendement, bien c'est exactement, en tout respect, ce que les FLI font dans les 118 CLD du Québec.

Autre inquiétude majeure à la lecture, c'est la diminution considérable des outils et des investissements en région, parce que, là, si j'ai bien compris, on parle de créer un nouveau FIR, un nouveau fonds d'investissement régional pas géré par la Conférence régionale des élus, mais géré par le privé. Alors, la belle théorie de l'imputabilité aux élus, oups! elle est partie. Elle était là pour le projet de loi n° 34, mais elle n'est pas là quand il y a de l'argent à gérer. Alors donc, ce FIR qui, au maximum, représenterait 3 millions par année par région ? et ça, c'est s'il y a 1 million qui vient du privé ? bien, ce FIR, il remplacerait, tenez-vous bien, la liste suivante: les FLI, de 25 millions; les fonds de développement régionaux, les FDER, autour de 20 millions; les Innovatech régions ressources.

C'est intéressant, le rapport dit: C'est vrai, Innovatech Régions ressources, belle performance, un portefeuille positif. Hop, là! ils disparaissent et, après ça, il n'y a pas d'approche à la carte régions ressources dans les nouvelles méthodes envisagées. Financement des projets ACCORD, ça aussi, disparu, sans compter, bien justement, la stratégie des régions ressources. Je vous rappelle, c'était 800 millions, 800 millions sur cinq ans. Alors, ça, je n'appelle pas ça, moi, de la simplification de moyens, j'appelle ça tout simplement de la réduction de moyens pour les régions.

On le dit souvent, la situation est très différente en région, et elle est même très différente d'une région à l'autre. C'est vrai pour le développement social, c'est vrai pour la santé, c'est vrai pour l'éducation, mais c'est aussi vrai pour le développement économique et pour le financement des entreprises en capital de risque et en capital de risque. Et je pense qu'il y a une prémisse, là, qui... en tout cas, avec laquelle on n'est pas d'accord de ce côté-ci, là. Ce n'est pas parce qu'il y a la participation de l'État en région que ça éloigne le financement privé. Je pense que c'est plutôt le contraire qui est arrivé. C'est que l'État s'est senti obligé d'investir de plus en plus dans le financement des entreprises, en particulier dans les régions, où les lois du marché ne sont évidemment pas les mêmes qu'à Montréal et à Québec. Alors donc, l'État s'est impliqué parce que le privé n'y allait pas et parce que les régions ressources réclamaient ça.

Je vais vous dire, moi, je me suis promené un petit peu en région, là, dernièrement, la dernière chose dont les régions se préoccupent, c'est de la superposition de moyens. Ce dont ils ont peur, c'est de l'absence de moyens. Alors, je pense que cette prémisse, elle est fausse, et l'État, comme, par exemple, les fonds locaux d'investissement, peut jouer un rôle essentiellement de catalyseur et de faire en sorte que l'argent privé... et que justement ce ne soit pas la théorie des lampions pour que le financement privé arrive.

Je vous donne un exemple qui va sûrement plaire à Mme la ministre: le secteur récréotouristique qui est extrêmement important pour les régions et qui est une voie d'avenir de plus en plus grande pour les régions. Est-ce que les institutions financières se battent pour investir dans le secteur récréotouristique partout en région? Est-ce que le privé se bat pour investir en récréotouristique dans les régions? Pas du tout. Il y a évidemment un exemple, Tremblant, où, soit dit en passant, l'État aussi a investi, puis que je souhaite fort qu'il va continuer d'investir, mais on n'est plus sûr. Tremblant n'est peut-être pas assez un succès pour continuer d'investir dans ce projet. Alors, en secteur récréotouristique, là, c'en est un, bel exemple. Est-ce que l'absence de l'État a fait que le privé s'est précipité pour investir? Non.

Alors, il faut donc, M. le Président ? et je vous remercie de m'indiquer le temps ? il faut donc que l'État continue d'investir dans l'amélioration de la qualité de vie en région. Et on comprend tous et toutes que ça commence par le développement économique. Et j'étais quand même content, tout à l'heure, d'entendre le ministre, dans sa toute première phrase, faire référence au mot «emploi», développement des entreprises et emploi, parce que, là, on n'est plus trop sûr qu'est-ce qu'on examine, capital de risque où on veut juste de la rentabilité, comme de l'argent qu'on place à la banque, ou si on pense encore aux êtres humains en région, puis aux jobs, puis au développement économique. Et j'espère que c'est ça qu'on va regarder au cours des prochaines semaines pour qu'on arrive avec des mesures positives pour les régions. Parce que, moi, je vais vous dire en terminant que, comme contribuable, là, c'est drôle, je ne suis pas scandalisé de ça, moi, 4,6 milliards d'investissement public en 10 ans. Pas du tout scandalisé de ça. C'est 460 millions par année, ça. Ce n'est pas 1 million... ce n'est pas, pardon, 1 % du budget de l'État pour développer partout au Québec. Alors, qu'est-ce qu'on essaie de réparer? Ce n'est peut-être pas brisé, là, ce qu'on essaie de réparer. Il faut continuer d'investir, continuer d'aller dans la direction où on allait avec les régions, M. le Président.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le député de Blainville. Alors, maintenant, nous accueillons M. Pierre Brunet, qui est président du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque. Et j'accueille aussi... je souhaite la bienvenue à M. Chabot et Mme Poulin.

Alors, je vous rappelle que la commission va consacrer 60 minutes pour l'audition... pas 60 minutes, pardon, je m'excuse, 90 minutes, pardon, pour nos échanges et votre comparution. Donc, vous avez une vingtaine de minutes pour faire votre présentation. Elle sera suivie d'une période d'échange de 35 minutes, chacune respectivement du côté de l'opposition et du côté ministériel, par blocs de 10 minutes avec échanges, comme je vous le mentionnais tout à l'heure.

Alors donc, M. Brunet, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie, au nom de la commission, de venir participer à nos travaux ce matin. M. Brunet.

Exposé du président du groupe
de travail sur le rôle de l'État québécois
dans le capital de risque, M. Pierre Brunet

M. Brunet (Pierre): Alors, merci, M. le Président. Je suis très heureux de votre accueil et je vais tenter de rester au centre de la table. Après avoir entendu les commentaires de chaque côté, je vais essayer d'enligner en fonction du centre et de prendre à peine 10 minutes pour faire le résumé du rapport, parce que, suite aux commentaires que j'ai entendus, j'ai compris que notre rapport avait atteint le sommet et était rendu comme livre de chevet avec... et comme...

Alors, il y a toutes sortes de perceptions qui sortent, et j'aimerais, en commençant, bien indiquer que, mes collègues et moi, quand on s'est réunis pour la première fois et qu'on a lu le mandat, le mandat était en fonction du capital de risque en ce qui concerne la SGF, Investissement-Québec et les Innovatech, point final. C'était ça qu'on devait regarder et pas tout l'ensemble du reste. Ça, c'est le premier point.

n(10 h 50)n

Deuxième point qu'on s'est posé la question: est-ce qu'on doit le regarder en fonction d'une critique du passé ou si on doit faire maison nette et regarder vers l'avenir? Et jamais on n'a regardé à critiquer le passé. Il y a 10 ans d'histoire, il y a 15 ans d'histoire. C'est qu'on s'est dit: On prend une attitude ou on prend un regard plus frais sur la vision. Et, peu importent les perceptions exprimées, je peux vous assurer qu'au nom de mes collègues et dans toutes les discussions que nous avons eues il n'était pas question d'une commande, il était question de faire appel à nos vues professionnelles et de faire les recommandations en conséquence.

Évidemment, quand on regarde l'ensemble de la situation du capital de risque puis qu'on le regarde juste en fonction des 19 sociétés d'État, il y a quatre constatations qu'on a faites: une sur la structure, une sur les fonds, une sur le rôle de l'État et une sur la chaîne de financement. Plusieurs commentaires ont été faits ce matin, mais je vais résumer en gros, premièrement, nos constatations.

Premièrement, l'État, via la SGF et ses 12 filiales, Investissement Québec et ses filiales, les quatre sociétés Innovatech, gère des portefeuilles différents sur le capital de risque avec 19 conseils d'administration, 19 structures indépendantes, avec le même actionnaire dont l'intervention de l'actionnaire est différente. Donc, on a trouvé que cette structure... Le premier commentaire qu'on peut faire, c'est qu'on a trouvé que cette structure était lourde.

La deuxième constatation, c'est sur les fonds. La guerre des chiffres, c'est toujours une chose qu'on peut discuter, mais, en gros, on s'est rendu compte que les montants investis étaient importants en fonction des réalisations. C'est vrai que 4,6 milliards, sur une période de 10 ans, vous pouvez faire... mais en fait 80 % de ces montants-là ont plus été faits dans les cinq dernières années. Donc, la moyenne des derniers 25 ans était beaucoup plus près de 150 à 200 millions.

Troisièmement, une place prépondérante du secteur public. En année 2002, on remarque que 70 % des montants investis en capital de risque avaient un caractère public. Et, quand on compare à l'Ontario, la moyenne sur les derniers 10 ans a toujours été de 30 %, et la moyenne du Québec a toujours été autour de 60 %. Et, comme on le disait tantôt dans les commentaires, c'est que le capital hors Québec était de 10 %, alors que le capital hors Ontario est de 40 %.

Or donc, nous, on a comparé en Ontario, on a comparé aux États autour, où est notre compétition, les États américains et comment ça se passe pour être en mesure de regarder. Et, dans une interview avec un président de Ventures Capital, de capital de risque de Boston, il nous disait... ou il m'avait dit, à ce moment-là, dans une rencontre: C'est fort simple, l'importance du rôle de l'État nous empêche... empêche le marché de jouer... empêche les règles du marché normales de jouer. Donc, on est moins intéressé à venir investir. Et, si vous visitez à l'extérieur du Québec, que ce soit en Ontario ou ailleurs, vous allez entendre ce commentaire très souvent. Avec raison ou à tort. C'est une question de structure, ce n'est pas... C'est une question de décision qu'il faut s'assurer qu'on regarde.

Le quatrième constat qu'on a fait, c'est dans la chaîne de financement. En somme, au Québec, il ne manque pas de capital de risque, sauf à deux endroits. Toutes les analyses, l'analyse de Ernst & Young, l'analyse de McDonald, l'analyse de SECOR, tout se rejoint quand on cherche un peu partout. C'est qu'il ne manque pas de capital de risque, sauf à deux endroits, dans le démarrage... Le démarrage est souvent un problème. Et le deuxième point où il manque du capital de risque, c'est lorsqu'on arrive... Une société qui a fait un développement d'un produit en technologie ou peu importe, après trois ou quatre ans et a besoin de passer à la phase de commercialisation, a besoin des fonds de 10 à 20 millions, il y a une carence également à cet endroit-là. Donc, en analysant tous les rapports que vous avons vus, en interviewant toutes les personnes que nous avons rencontrées, on s'est dit: Il faut trouver les solutions à ces deux carences.

Maintenant, quand on dit de changer, il faut comprendre qu'il ne faut pas mettre la hache dans tout ce qu'on dit. On interprète trop facilement dans le rapport qu'on veut... c'est une coupure drastique. Loin de là. On dit, dans le rapport, qu'il y a beaucoup de bonnes choses qui ont été faites, qu'il faut bâtir sur notre acquis. On a développé des expertises, et maintenant il faut faire une période de transition, et que cette période de transition là doit être lente, constructive et non de démolir. Et, à partir de ce point-là, au lieu d'interpréter qu'on veut annuler absolument tout, on croit que l'intervention de l'État est essentielle.

Et on se fie, dans nos analyses, aux pays auxquels on peut référer au point de vue importance: Nouvelle-Zélande, Israël, Norvège, tout ce qui a été mis... le Sud des États-Unis aussi. Parce qu'il faut comprendre qu'aux États-Unis, même si ce n'est pas écrit dans les budgets américains, c'est peut-être le pays qui aide le plus l'entreprise en technologie et en haute technologie à cause du budget militaire, et à cause du budget de NASA, et la recherche qu'ils mettent dans les universités. Ça paraît moins, mais c'est très important. Donc, il faut... notre compétition est en fonction de ça. Et, en analysant les pays comme la Nouvelle-Zélande, ce qu'on propose, c'est tout des... On ne réinvente pas la roue, on va chercher ce qu'il y a de mieux, ce qui a été fait dans ces pays-là.

Alors, très brièvement, par contre, en ce qui concerne la SGF ? je pense qu'il en a été question ? nous, on dit: La SGF devrait s'en tenir à ses grands financements, mais par contre garder encore son expertise en agroalimentaire, foresterie et mines, continuer ce principe-là et de s'assurer qu'elle devienne autosuffisante. On a constaté que, si on regarde à moyen ou à long terme, il y a peut-être un manque de liquidités de 200 millions, mais par contre, si on s'y attache en fonction de tous les placements, je pense qu'il y a moyen de s'autofinancer, surtout quand on regarde les placements qui sont rendus à maturité.

En ce qui concerne Investissement Québec, c'est de concentrer ses activités sur sa mission principale, de continuer de faire le prêt aux entreprises, à la PME or donc, et de s'assurer qu'elle puisse couvrir ou s'autofinancer en ce qui concerne ses coûts d'exploitation. Ce qu'on veut dire par là, c'est que, des 19 sociétés d'État, il y en a une qui va rester, qui est Investissement Québec, qui s'occupe des prêts et une qui devrait s'occuper du capital-actions avec une structure qui se rapporte à l'actionnaire en fonction des répartitions.

Pour répondre aux carences et pour répondre aux Innovatech, d'abord, en ce qui concerne la haute technologie et le démarrage, de mettre en place un fonds de financement mixte spécialisé en haute technologie pour les entreprises en situation d'amorçage et de démarrage. Quand on dit «mixte» et puis quand on parle de la théorie des lampions, je suis entièrement d'accord avec vous autres, c'est que ce n'est pas en criant: S'il vous plaît, entreprise privée, arrivez! qu'elle va arriver. Ce n'est pas comme ça que ça se passe. On a fait une tradition d'un modèle où l'État était très présent, il faut faire une transition pour amener le privé et le convaincre qu'on est en train de faire un changement dans notre orientation.

Donc, on suggère que, dans les fonds qu'on suggère... que le ministère des Finances s'adresse dans son budget à une façon d'intéresser par des mesures fiscales. Il y en a plusieurs. C'est que tout ce qu'on a vu aux États-Unis, tout ce qu'on a vu dans les pays que je vous mentionnais tantôt, en Irlande, en Israël, Nouvelle-Zélande... ont tous des mesures semblables. Encore une fois, on ne dit pas: Réinventez la roue. Il s'agit de prendre tous ces systèmes-là, d'en faire un modèle québécois, si on veut.

Mais le fonds mixte, par exemple, pourrait... 1 $ du public par rapport à 2 $ du privé, ça, ça se fait en Nouvelle-Zélande, ça se fait en Israël. Et les mesures fiscales ne sont pas nécessairement des mesures fiscales en avant, mais des mesures fiscales qui arrivent vers la fin de l'évolution du projet, au bout de cinq ans, comme un assouplissement, par exemple, sur la taxe sur capital, assouplissement sur le profit du capital. La plupart de ces pays ont fait ça. Mais, à ce moment-là, ça, on n'est pas rentré dans tous les détails, on a dit: S'il y a un moyen de le faire, je pense qu'on pourrait attirer le privé. J'ai fait personnellement des interviews avec des institutions, des fonds de pension qui m'ont confirmé que notre idée pourrait fonctionner à condition qu'il y ait ces mesures-là. Maintenant, en ce qui concerne les... Ça, c'est l'amorçage.

n(11 heures)n

En ce qui concerne la commercialisation, quand on arrive à la cinquième année ou sixième année, pour développer, on pourrait avoir un fonds privé, entièrement privé. Nous avons constaté qu'en faisant l'interview de certaines institutions il y a une possibilité de ce côté-là. Là aussi, ça prendrait certaines mesures fiscales pour faire le virage.

Lorsqu'on arrive aux régions, il y a deux commentaires que le comité... plusieurs commentaires que le comité s'est faits. Nous avons été très conscients du problème des régions. C'est un problème typiquement québécois. Il est excessivement important. On s'est dit: Il y a 17 régions, on pourrait recommander d'avoir 17 Innovatech, on pourrait recommander d'avoir 25 Innovatech. Je pense que ce n'est pas le montant qui est important.

Où on s'est arrêtés, c'est dans les principes de gestion de portefeuilles capital de risque. Bien, capital de risque, des études américaines démontrent que, sur 100 dossiers présentés, il y en a 10 de retenus, et, sur les 10 dossiers retenus, il y en a deux qui connaissent un succès, deux qui font faillite, et les quatre autres disparaissent ou se fusionnent avec les autres. Donc, le capital de risque: beaucoup, beaucoup, beaucoup de dossiers, peu d'élus. Et risque veut dire risque, on se comprend. Donc, si on prend les portefeuilles de capital de risque, peu importe la région d'où ils viennent, qu'on les mette dans un même portefeuille, et c'est beaucoup plus facile à gérer, et, lorsqu'ils arrivent à maturité, de faire la rotation.

En ce qui concerne les régions, d'avoir du monde sur place et d'avoir une Innovatech peut-être sans gestion de fonds, si on veut, il n'y a aucun problème. C'est qu'on peut répartir dans chacune des régions... C'est de faire la différence entre le démarchage et la gestion. Et, quand vous avez un fonds d'Innovatech qui est tout petit, qui est dans une région, il est beaucoup plus difficile à rouler dans le public ou de le vendre que de le faire dans un ensemble.

Alors, c'était tout simplement un principe de gestion, de bien faire la distinction entre gérer... et que l'actionnaire ? l'État ? puisse le faire d'une façon compatible avec les règles du marché, c'est-à-dire un portefeuille bien géré. Mais, par contre, en ce qui concerne la démarche dans les régions, il est sûr qu'on peut organiser ça... on peut laisser même les Innovatech comme elles sont là en point de vue démarchage. Bien comprendre qu'on fait une distinction en ce qui concerne la gestion.

Mais, en plus, se fiant à l'expérience des autres pays que je vous mentionnais tantôt, on favorise la création de fonds d'initiatives régionales. Ça, c'est vrai que c'est un changement de culture. C'est tout à fait différent d'arriver dans une région, puis: «Je vous donne 2 millions puis faites ce que vous voulez» ou «Investissez», ou de dire: «Si la région est prête à mettre 1 million, moi, le gouvernement, je vais en mettre un, prêt», comme ça existe aux États-Unis. Ça existe depuis 1940, et toutes les villes américaines l'ont. Le gouvernement américain arrive puis met 2 millions. Et ce n'est pas parce que c'est remis à l'entreprise privée ou géré d'une façon privée, c'est le fait que, si la région a mis 1 million, qu'elle est responsable des profits et des pertes et que, si elle connaît un succès, elle puisse rembourser, peu importe le montant, le rouler, c'est que la présence de l'État est diminuée, et l'importance de la gestion appartient à la région. Cet exemple-là existe à des milliers d'exemplaires aux États-Unis, a connu d'immenses succès; la même chose en Irlande, la même chose un peu partout. Donc, on devrait se fier à ça. Et ce n'est pas une question de diminuer en ce qui concerne le rôle de l'État, mais c'est de changer le rôle ou la façon de faire ou l'initiative.

Donc, pour ces trois projets de fonds, les fonds d'initiatives régionales, le fonds mixte et les financements privés pour fins de commercialisation, on a recommandé qu'un comité ad hoc soit créé avec le ministère des Finances, un comité ad hoc qui pourrait se réunir pour deux, trois semaines, un mois, et de voir à copier ou à étudier les différentes mesures des pays qu'on a mentionnés tantôt pour arriver avec un programme qui pourrait se tenir.

Alors, en gros, M. le Président, c'est ma présentation.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Brunet. Alors, je cède maintenant la parole à M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. M. le ministre.

M. Audet: Merci. Alors, je pense que, à écouter justement M. Brunet faire une synthèse de son rapport, je pense qu'on n'a pas la même lecture, je pense, de la situation qui était celle qui nous a été véhiculée tantôt par l'opposition, où on pensait de briser, de couper le Québec, de lui enlever l'oxygène dans les fonds, etc. Je pense que M. Brunet a été très clair que, dans ses propositions, il a cherché ? et les membres du comité ont cherché ? à bâtir sur les acquis, à faire des propositions qui impliquent un virage, mais essayer de faire en sorte que ça se fasse à l'intérieur quand même, je dirais, d'objectifs justement de développement économique très clairement identifiés. Et, je le répète, ces propositions-là sont là pour discussion, et c'est le sens justement des questions que je voudrais maintenant poser à M. Brunet et à ses collègues.

Vous avez évoqué dans votre présentation, et on l'a entendue beaucoup ? justement, vous l'avez évoquée à la fin ? la création de fonds régionaux, de fonds... également de grands fonds. Il y a eu des critiques qui ont été formulées un petit peu sur la nature de ces fonds-là en regard des Innovatech, puisqu'il y a déjà les Innovatech qui existent. Et donc il y a un travail à... la question à se poser: est-ce que ça peut se faire parallèlement à ça ou qu'est-ce qui arrive?

Je pense qu'il serait peut-être utile de voir quelle a été la réflexion du comité sur justement les fonds des Innovatech. On sait qu'ils ont investi dans 300 entreprises actuellement. Il y a beaucoup de ces entreprises-là qui ont des perspectives intéressantes d'avenir. Alors, comment est-ce que vous voyez, comment est-ce que vous avez évalué cette situation et comment ça peut être compatible avec précisément les instruments que vous mettez en place? Puis est-ce que vous avez regardé la possibilité, qui a été évoquée par ailleurs, de peut-être que les Innovatech elles-mêmes se transforment pour devenir des fonds justement mixtes? Est-ce que vous avez regardé, au comité, ces scénarios?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Bien, moi, je pense que notre rapport offre toutes ces possibilités-là. C'était beaucoup plus de faire le constat de la façon que c'était géré et comment ça pourrait être géré d'une façon plus efficace en fonction de l'actionnaire, hein, pour que l'actionnaire puisse intervenir de façon efficace. Ça, c'est le premier point.

Le deuxième point. Comme je disais tantôt, il y a plusieurs façons de regarder les régions, et peut-être que l'habitude ? et on a senti ça dans les gens qu'on a rencontrés ? que l'habitude... Même dans des discussions de capital de risque, il y avait des gens qui mélangeaient subventions et capital de risque. Pour eux, c'était la même chose, puis ce n'est pas tout à fait... parce que le capital de risque est beaucoup plus pointu.

Et la raison d'amener le privé ? puis ce ne sera pas facile, parce que ça va prendre des mesures, je le répète, là, il ne faut pas penser qu'on rêve en couleurs ici ? c'est un petit peu de balancer cette chose-là, comme ça existe ailleurs. Et je recommande fortement que vous regardiez les pays qu'on vous mentionne, là ? l'Irlande, la Nouvelle-Zélande, Israël ? comment ils ont réussi à attirer le privé en avant en étant, eux, secondaires et n'étant pas plus que 50 % dans le projet.

Ça, c'est une discussion qui a été difficile au niveau du comité de dire: Est-ce que l'État... Je pose la question: Est-ce que l'État devrait être plus que 50 % dans n'importe quel projet? Quand on étudie dans l'ensemble de tous les autres pays, ça n'arrive jamais. Et le simple fait qu'il y ait plus de 50 % dans un projet, là, les règles du jeu ou les règles du marché se mettent à se modifier, parce que l'État est un excellent acheteur, mais il est un très mauvais vendeur, parce que, quand il vient le temps de faire une transaction, les influences en présence viennent jouer, et ce n'est peut-être pas du tout la même chose. Donc, l'approche qu'on a prise, c'est que, dans tous nos projets qu'on présente, il est important de comprendre que l'État est toujours en bas de 50 %, est toujours minoritaire.

n(11 h 10)n

Dans les commentaires par contre que nous avons reçus suite au rapport, je dois dire que j'ai reçu plusieurs téléphones de personnes que je connaissais et de personnes que je ne connaissais pas en région pour me dire: On n'avait jamais pensé à ça, mais, moi, dans ma région, on est capables de monter un groupe tout de suite pour être capables de faire ça.

Alors, tantôt, je donnais l'exemple, puis je suis sûr qu'on va se comprendre pour... parce qu'on peut être sceptiques devant cette idée-là, puis on a raison d'être sceptiques, puis je vais vous expliquer plutôt comment je pense que ça peut arriver.

Quand je vous disais tantôt que, sur le capital de risque, les analyses américaines démontrent que, sur 100 dossiers, il y en a deux qui réussissent, il faut comprendre que c'est très petit. Alors, si j'enligne 100 personnes sur le mur et je dis: J'ai besoin d'entrepreneurs pour mettre 1 million puis l'État va mettre 2 millions, il y en a trois, quatre qui vont s'avancer, les autres vont rester là. Alors donc, ça va partir lentement, mais c'est ceux qui vont partir, qui vont attirer les autres, et c'est un changement de culture.

Maintenant, ça, c'est à vous à décider ça; c'est notre recommandation. Ce n'est pas notre décision, mais c'est définitivement un changement de culture.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

M. Audet: Oui. Juste une question complémentaire peut-être à M. Chabot. Évidemment, on parle de fonds nouveaux qui pourraient être complémentaires à ce qui existe déjà précisément. Et, sans parler spécifiquement du Fonds Desjardins, il y a déjà, en région, des fonds: le Fonds Desjardins, le Fonds de solidarité, Fondaction. Comment évaluez-vous justement la mise en place de ces fonds-là en regard de la complémentarité que pourraient exercer justement les autres fonds? Parce que le mandat était justement de voir, de bâtir des instruments ou d'amener des propositions qui permettaient d'associer également d'autres... des instruments qui existent, qui sont complémentaires précisément.

M. Chabot (Luc): Effectivement, que ce soit Capital régional, le Fonds de solidarité ou Fondaction, on fait énormément de développement et de démarrage en région, mais on ne peut pas faire que du démarrage. À un moment donné, on a des questions de balancement de portefeuilles, et il faut faire des entreprises qui sont un petit peu plus en amont, là, dans leur croissance et leur développement.

Les fonds d'initiatives régionales qu'on propose seraient des choses très intéressantes pour les joueurs que nous sommes parce qu'il y a beaucoup de discussions en région sur le démarrage d'entreprises et le soutien à ces entreprises-là en région, et ça fait des années qu'on débat ces choses-là. Et les gens sont énormément en demande de soutien dans les régions, et je pense que ce serait intéressant que les gens dans les régions eux-mêmes, que les hommes d'affaires des régions qui commettraient des fonds à ces fonds d'initiatives régionales là puissent être à même d'évaluer la pertinence, la pérennité et le bien-fondé de ces projets-là. Et, ces projets-là, une fois partis, évidemment pourraient être financés, pourraient continuer à être financés par les autres structures qui existent en place déjà, que ce soit le Capital régional, que ce soit le Fonds de solidarité ou BDC, tous les acteurs qui sont déjà présents en région.

On pourrait même, dans certaines régions, si les fonds qui sont constitués sont d'une certaine grosseur ? parce qu'on parlait tout à l'heure d'un maximum de 3 millions, je voudrais corriger que, dans le rapport, on parle plutôt d'un minimum de 3 millions et non pas d'un maximum de 3 millions ? on pourrait même être appelés ? des fonds comme le Fonds de solidarité ou Capital régional ? à investir nous-mêmes dans ces fonds-là pour aider les régions à se développer et à participer à des projets de démarrage.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le ministre?

M. Audet: Ça va.

Le Président (M. Paquet): Ça va? Il reste deux minutes sur le bloc. Donc, on va passer de l'autre côté, à moins que quelqu'un d'autre veuille intervenir pour deux minutes. Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je vais poser, pour les deux minutes, une petite question. Vous avez signalé qu'il y avait un problème au niveau du démarrage, hein, du démarrage actuellement dans la chaîne de financement. Quelle est votre analyse que vous faites des sociétés universitaires qui existent déjà, les sociétés de valorisation? Je pense à Univalor, je pense à Sovar, Valeo, etc. Comment vous les intégrez à l'intérieur du fonds mixte que vous proposez?

Le Président (M. Paquet): M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Les sociétés universitaires sont plus des sociétés d'amorçage d'entreprises et non pas de démarrage. Lorsqu'ils arrivent en phase de démarrage, là, ils vont sur le marché puis ils viennent voir des joueurs comme Desjardins ou le Fonds de solidarité, et tout ça. C'est des acteurs très importants du financement de la chaîne des technologies, et d'ailleurs on a autorisé, chez Capital régional, les coopératives Desjardins, un investissement de 10 millions de dollars, le mois dernier, dans MSBi Capital justement, pour venir en aide à ces sociétés de valorisation là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Donc, vous suggérez qu'elles doivent rester, elles doivent être maintenues.

M. Chabot (Luc): Elles font partie de la chaîne de financement mais au niveau amorçage, là où il y a très, très peu de joueurs.

M. Gautrin: Très bien. Je vous remercie.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Bien, encore, à nouveau, je voudrais remercier M. Brunet, M. Chabot, Mme Poulin pour leur présentation mais aussi pour le travail qui a été fait dans ce rapport.

M. Brunet nous parlait tantôt d'un changement de culture proposé. Et puis, pour reprendre ses paroles, il nous disait: Actuellement, ce qu'on fait, on donne 2 millions par exemple à une région, puis on dit: Faites du développement économique.

Avec ce que vous proposez, vous dites: Le public, le gouvernement donnera de l'argent à condition qu'un partenaire privé mette un certain montant. C'est effectivement un grand changement de culture.

Actuellement, il n'y a rien qui empêche, au Québec, les sociétés privées d'investir dans le capital de risque et puis d'aider les entreprises dans toutes les régions du Québec. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que le secteur public et le secteur privé n'ont pas les mêmes objectifs et n'ont pas la même définition du rendement d'un investissement, et c'est là que je trouve qu'il y a quand même une grande lacune dans le rapport, puis ça vient peut-être... Peut-être, comme vous dites, que ce n'était pas une commande, mais là il faut peut-être se comprendre sur le mandat qui vous a été confié.

Mais une chose qui est certaine, c'est que, quand on regarde le secteur public, lorsqu'il aide une entreprise, on doit tenir compte des retombées. S'il y a des emplois qui sont créés qui n'auraient pas été créés autrement, il y a des impôts qui seront payés par les travailleurs. S'il y a des investissements qui sont faits, là aussi il y a des emplois qui sont créés. Si une entreprise s'installe, alors qu'elle ne se serait pas installée sans l'aide de l'État, il y a des retombées. Donc, on va tous convenir, là... Et tous les États dans le monde aident les entreprises à s'installer chez eux. Même les très capitalistes Américains le font. Dans les États du Québec... Et puis, dans ma vie passée, ça m'est arrivé souvent de regarder pour faire une acquisition dans un autre pays puis découvrir que ces entreprises avaient déjà toutes sortes d'aides de leurs États pour être capables justement de s'assurer que les emplois se développent dans le pays concerné.

Maintenant, vous nous dites tantôt, le mandat que vous avez eu, c'est un mandat de capital de risque. Ce n'est pas un mandat de revoir l'ensemble du portrait du rôle de l'État et de l'aide aux entreprises. C'est peut-être là que vient le problème.

Mais, moi, je voudrais poser une question très claire. Pourquoi vous n'avez pas jugé bon, dans votre rapport, de tenir compte des retombées économiques? Entre autres, il n'y a rien sur les retombées économiques à la SGF, des retombées économiques suite aux investissements des Innovatech. Et, dans le cas d'Investissement Québec, on a des retombées économiques, mais on n'en tient pas compte dans les recommandations et les objectifs qu'on se donne.

Je voudrais savoir, là ? quand je parlais de commandes tantôt ? est-ce que c'est volontaire ou est-ce que c'est un oubli ou... Pourquoi vous n'avez pas tenu compte, dans votre rapport, des retombées économiques, de l'aide de l'État au développement des entreprises?

M. Brunet (Pierre): Avant de...

Le Président (M. Paquet): M. Brunet, oui.

M. Brunet (Pierre): Avant de répondre à votre question, là, dans votre préambule, juste pour qu'on se situe, là... Parce que c'est toujours complexe quand on discute de l'intervention de l'État. Et j'ai saisi, dans votre présentation, que tous les pays, les autres pays aident le démarrage... Puis là, là, on parle subventions à un moment donné. Quand on parle de subventions, là, on n'a pas regardé ça du tout. Puis les subventions, ça, ça doit continuer. Alors, je pense que l'aide de l'État en fonction de tous les plans qui existent doit...

Tantôt, monsieur parlait, par exemple, du FLI. On dit qu'on doit les faire disparaître; le rapport ne dit pas ça du tout. Il fait tout simplement dire: Lorsque le plan vient à échéance, à la lumière des suggestions qu'on a là, est-ce qu'il y aurait lieu de le renouveler ou de l'intégrer en d'autres choses?

Or donc, dans tout l'ensemble, là, de la question, M. Legault, que vous me posez, là, c'est que, nous, on était très, très, très pointus en fonction du capital de risque, en fonction de ces quatre groupes de sociétés là.

Alors, en ce qui concerne les retombées économiques, notre mandat n'était pas en fonction des retombées économiques; notre mandat était en fonction de la gestion de l'État. Il était: Est-ce que je continue comme ça ou je le fais d'une autre façon?

Alors, l'approche qu'on a prise, c'est une approche de 30 000 pieds. C'est que... de regarder ça, comme je l'expliquais au début, et de dire: Si j'avais à proposer une nouvelle structure, si j'avais à gérer ça d'une façon efficace et si j'avais à respecter les régions puis de m'assurer qu'on fait quelque chose avec les régions, voici à peu près ce qu'on propose.

Nous n'avions ni le personnel ? parce que nous étions quatre ? ni le... Nous avions un budget de 25 000 $. Je pense qu'on en a dépensé 12 000 $ à peu près. Alors, nous n'avions ni le personnel ? à quatre ? ni le budget pour faire les analyses de retombées économiques. Je pense qu'il faut bien se comprendre, on était là pour regarder comment peut-on gérer ça, et voici l'opinion du groupe qui s'est rencontré.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Rousseau.

n(11 h 20)n

M. Legault: Oui, M. le Président. M. Brunet, vous nous dites, là, que vous n'avez pas regardé les subventions. Pourtant, à la page 32 de votre rapport, vous nous dites que le programme FAIRE ? hein, le programme FAIRE, on s'entend, c'est des subventions données aux entreprises ? vous dites, là, que «les apports financiers du gouvernement sont, à l'heure actuelle, trop élevés et qu'ils devraient être réduits». Vous parlez du programme FAIRE, là. Donc, vous dites: Le gouvernement donne trop de subventions, il faudrait qu'il en donne moins. Donc, quand vous nous dites que vous ne vous êtes pas occupés des subventions, bien, en tout cas, au moins, quand vous parlez du programme FAIRE, on parle des subventions.

Et je veux revenir, là, sur... Bon. Vous nous dites que vous n'aviez pas le personnel ou l'argent pour examiner les retombées économiques. Mais comment pouvez-vous faire des recommandations? Prenons Investissement Québec, là. Investissement Québec, l'année dernière ? on l'a dans votre rapport à la page 36 ? a eu des retombées de 648 millions. On voit, là, que, depuis cinq ans, les retombées, grâce à l'intervention d'Investissement Québec, sont passées de 411 millions, en 1998-1999, à 648 millions.

La question qu'on a à se poser, c'est: Est-ce que ces retombées-là ont coûté plus ou moins cher que le 648 millions? Or, l'année passée, ça a coûté 245 millions pour avoir des retombées de 648 millions. Sauf que vous partez de là, puis là vous nous donnez, à la page 31 et 32, des objectifs où vous dites: Il faudrait l'autofinancement des coûts d'exploitation; il faudrait réduire les pertes sur prêts. Vous dites, en plus, à la page 32: Vous devriez... On devrait réduire les cibles de contributions du gouvernement pour les pertes sur prêts, pour les coûts d'exploitation. Donc, vous arrivez avec des recommandations, des conclusions, sans tenir compte des impacts sur les retombées.

Disons que, demain matin... On prend toujours l'exemple d'Investissement Québec. Disons qu'Investissement Québec, demain matin, réduit ses coûts de 245 millions, il réduit ça, de 100 millions à 145 millions, mais que, de l'autre côté, les retombées diminuent de 200 millions, Québec serait perdant, on est tous d'accord avec ça. Mais là, vous, vous nous dites: Il faut absolument réduire les coûts, mais on ne le sait pas parce qu'on n'avait pas le personnel pour voir quels seraient les impacts sur les retombées. Mais vous faites quand même des recommandations sur juste une colonne en disant: Il faut réduire les coûts, il faut réduire l'apport du gouvernement. Et on allume des lampions, là, vous dites: Peut-être que les lampions ne marcheraient pas pour que le privé vienne prendre la place.

Écoutez, là, moi, j'ai un problème fondamental, là, avec le fait que le privé, là, les retombées économiques, là, pour avoir été moi-même dans le privé, là, ce n'est pas son objectif premier. L'objectif premier du privé, c'est de faire un rendement, comme on dit dans le jargon du métier, sur le «bottom line». Ça, c'est le profit par action du prochain trimestre.

Mais écoutez, là, ce qui est proposé ici, c'est que le privé remplace en partie le public. Mais je ne vois pas comment puis j'aimerais que vous m'expliquiez comment on va pouvoir convaincre le privé de tenir compte des retombées économiques dans l'évaluation des projets qui sont présentés dans les différentes régions du Québec.

Le Président (M. Paquet): En 1 min 20 s.

M. Brunet (Pierre): Il y a à peu près 32 questions dans ces commentaires, ça fait que la minute va être courte.

En ce qui concerne... Rapidement, d'abord, en ce qui concerne Investissement Québec, dépenses-retombées, nous avons eu des rencontres avec Investissement Québec, on a eu des discussions pendant deux, trois heures. Et, à même les budgets, à même regarder... et leurs propres recommandations, ils se disent capables d'avoir les mêmes retombées économiques avec ces économies-là. Bon. C'est que, à ce moment-là, ça, c'est une chose à vérifier. Vous pouvez poser la question, O.K., en fonction de ça.

C'est que, si on les compare à la Banque fédérale de développement, par exemple, en ce qui concerne les mauvais... pas les mauvais prêts mais les prêts effacés, il y a moyen de changer le pourcentage très élevé par rapport à la moyenne canadienne et la moyenne américaine. Ça, c'est une question de gestion. Est-ce que celui qui a été effacé ne serait pas effacé parce qu'il n'aurait pas été accepté? C'est toute une question de balancer en fonction de ça. Nous croyons, à la lumière des discussions que nous avons eues avec Investissement Québec, que sensiblement les mêmes retombées seraient en fonction de ça. Bon. Ça, c'est... je vous dis d'où ça vient.

Bon, la deuxième question, c'était quoi, là? Non, la huitième, là, c'est...

Le Président (M. Paquet): Le bloc de temps est écoulé à ce moment-ci, on aura la chance de faire un échange tout à l'heure.

M. Brunet (Pierre): Il est écoulé...

Le Président (M. Paquet): Alors, M. le député de Roberval et adjoint parlementaire au ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. M. le député.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. Alors, M. Brunet, M. Chabot, Mme Poulin, bienvenue et merci de prendre le temps d'effectivement venir... pouvoir échanger avec nous. Et bienvenue dans cette enceinte qui nous permet souvent d'entendre des choses qui nous font dresser les cheveux sur la tête.

Vous savez, depuis le début, on a entendu différentes choses de mon collègue de Rousseau, de mon collègue de Blainville. Et effectivement il y a des ajustements qui se doivent d'être apportés, parce que, effectivement, si la méthode dont fonctionne actuellement le gouvernement ou dont fonctionnaient les investissements dans différentes régions du Québec était si bonne que ça, probablement que dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean particulièrement ? parce que je viens de cette région-là ? on n'aurait pas nécessairement les problèmes auxquels nous sommes confrontés au cours des dernières années. Et bien sûr qu'on a le résultat qui nous, je dirais... qui nous pète en plein front depuis quelques mois.

Bien sûr, lorsque j'entends mon collègue de Rousseau mentionner que le programme FAIRE, c'est un programme uniquement de subventions, bien, écoutez, on assiste encore une fois à une certaine, une certaine, je dirais, négligence ou restriction de données d'informations. Bien sûr que, dans le programme FAIRE, il y a des subventions, mais il n'y a pas seulement que des subventions, et les subventions représentent une très petite partie de l'aide qui peut être accordée aux différentes entreprises. Et, dans ce contexte-là, je vous invite puis j'invite les gens qui assistent à cette commission-là de faire un partage assez équitable de ce qui est en train de se dire ici, ce matin.

Vous avez fait un travail, par rapport à un mandat qui vous avait été confié, de réviser le rôle de l'intervention de l'État dans l'économie du Québec par rapport à différents outils qui sont mis à notre disponibilité. Mais comment on peut arriver à augmenter ou à faire davantage avec ce qui est en place actuellement? Bien sûr, ce que j'ai aimé dans votre intervention tout à l'heure, vous mentionniez le fait qu'effectivement... comment peut-on arriver à construire davantage, plus solidement ce qu'on a actuellement entre les mains pour arriver à en faire plus?

Je constate que, du côté de l'opposition, on est resté un peu en arrière. On est dans une... je ne sais pas si on est dans une atmosphère de morosité ou de ne pas vouloir affronter la réalité, les nouvelles perspectives qui s'offrent au Québec, mais je pense qu'il faut effectivement qu'on ait l'occasion... on se doit de se poser ces questions-là.

Il y a des statistiques qui nous font penser qu'on n'a pas le choix de le faire en tant que députés, en tant que dirigeants, concernant, entre autres, les défis qui nous sont confrontés, à nous, pour l'avenir. Il y a deux statistiques qui sont extrêmement importantes.

D'abord, la statistique de la démographie. En 1960, il y avait huit travailleurs pour un retraité. Aujourd'hui, il y en a cinq pour un. Dans 30 ans, ça va être deux travailleurs par retraité. Ça, c'est extrêmement important. Alors, à écouter l'opposition, on va continuer comme ça, comme ça se faisait avant, et on va arriver dans le mur. On va arriver dans le mur, parce que, en quelque part, les statistiques sont là, elles ne se démentent pas.

L'autre statistique qui est extrêmement importante, c'est la dette. Actuellement, au Québec, nous sommes ceux qui avons une dette de 15 000 $ par tête de pipe. Alors, dans ce contexte-là, on peut continuer comme ça effectivement, mais on sait où on va se ramasser.

Et j'aime l'approche qui nous permet, durant cette commission parlementaire là, entre autres, de pouvoir évaluer les manières d'investir, les manières d'intervenir de l'État dans l'économie pour en faire davantage. Et bien sûr que j'ai eu l'occasion de vous mentionner tout à l'heure que je provenais d'une région. Et vos recommandations quant à la formation et à la création de fonds d'initiatives régionales, les FIR... On a eu l'occasion tantôt de débattre de 3 millions maximum-minimum. Je comprends que c'est minimum et je suis tout à fait heureux que vous ayez eu l'occasion de le rectifier. Mais comment on peut arriver à faire une passation, je dirais, ou à faire un virage de manière à maximiser ce qui est déjà en place en prenant compte de ce qui pourrait être mis en place aussi avec des nouveaux fonds d'investissement pour arriver à faire ce que les entrepreneurs au Québec font le mieux, c'est-à-dire créer des emplois?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Bien, en fait, là, c'est que vous avez le choix entre le statu quo puis d'avancer ou de modifier, et chaque solution a ses conséquences.

Une blague qui s'est faite à l'intérieur du comité à un moment donné, c'est qu'on a eu une cinquantaine de mémoires également qui nous ont été présentés, et tous les mémoires qui recommandaient le statu quo ou à peu près le statu quo, si on additionnait toutes les retombées économiques qu'ils nous disaient qu'ils ont faites, on n'avait plus de chômage au Québec. Alors, c'est que les statistiques nous disent des choses, et, la réalité, on la constate d'une autre façon.

n(11 h 30)n

Alors, nous, on s'est dit: Soyons pragmatiques et essayons d'oublier le passé, pas pour l'effacer, pas pour dire que ça a été mauvais, pas pour dire... mais comment on va donner un coup de barre pour que ça puisse donner des résultats. Bon, à la porte, on va avoir toute la panoplie de pensées, à partir du statu quo jusqu'aux sceptiques, ça, c'est sûr, mais c'est tout simplement: Voici les experts qui ont consulté d'autres experts et qui vous disent à peu près quelque chose à faire. C'est votre bon jugement collectif, c'est vous qui gérez, c'est votre bon jugement collectif qui décidera jusqu'où vous voulez aller.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Roberval?

M. Blackburn: Non. Je laisse la chance à mon collègue.

Le Président (M. Paquet): Ça va. O.K. M. le député d'Iberville.

M. Rioux: Merci, M. le Président. Donc, je vous salue bien, et je peux vous dire que j'ai lu avec intérêt et, je pourrais dire, même passion votre rapport que je trouvais... parce qu'il est axé sur l'entrepreneurship et basé sur des résultats. J'écoutais le député de Rousseau tout à l'heure qui parlait des impacts économiques, les retombées indirectes s'il y avait moins de subventions qu'on retrouverait. Mais les résultats, je pense, sont assez clairs. On parle qu'on a donné quatre fois plus de subventions qu'en Ontario, sauf qu'on a seulement 17 % des investissements au Québec et pourtant on représente 24 % de la population. On regarde la SGF, des pertes de plus de un demi-milliard, et ça, c'est le citoyen qui l'a payé et il n'a pas eu les jobs.

Et j'aimerais là-dessus, à M. le député de Rousseau, lui lire un petit texte de M. Alain Dubuc, que j'ai entendu, jeudi, à la Fondation de l'entrepreneurship, qui va dans une autre orientation: «Il faut aussi une rupture importante dans notre façon de définir nos grands défis économiques et cesser de faire de la création d'emplois l'objectif principal et la mesure du succès, pas parce que l'emploi n'est pas important, mais parce que cet objectif mal compris peut mener à des effets pervers. La seule façon de s'assurer que nos efforts économiques se traduisent par une amélioration de la productivité, c'est de prendre comme objectif la création de richesse.»

Est-ce que, dans votre plan, où vous nous parlez beaucoup de capitalisation mixte... est-ce qu'on n'arriverait pas à un plus grand encadrement où est-ce qu'on aurait des projets qui sont rentables et efficients? Parce que c'est ça qu'on a vécu. Et je parlais avec des gens d'affaires de l'extérieur du Québec et qui ont des entreprises ici, qui en ont à l'extérieur, et qui me disaient: Au Québec, le problème de capital, ce n'est peut-être pas le plus important, c'est la qualité des projets, qu'on ne prend pas la chance de les encadrer. Est-ce que le capital mixte n'amènerait pas cette partie-là, que le secteur privé étant présent regarderait ces objectifs-là d'efficience, de rentabilité, contrairement à des fois, et on en a connu effectivement, où est-ce que l'aspect politique passait avant la rentabilité de bien gérer les fonds de l'ensemble des citoyens?

Le Président (M. Paquet): M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Vous savez, lorsque dans une région un groupe d'hommes d'affaires ou des entreprises d'une région se mettent ensemble pour investir, créer un FIR, ils vont s'assurer d'investir dans des projets justement qui vont être porteurs, porteurs de développement, créateurs de richesses pour leur région, et ils vont s'assurer aussi de donner l'encadrement à l'entreprise, qu'elle a besoin pour se développer, parce qu'ils y ont mis de leur propre argent, dans ça. Leur argent est à risque, puis, quand des entrepreneurs en région mettent leur argent à risque, ils ne se retourneront pas de bord pour laisser l'entrepreneur ou la jeune entreprise se démerder par elle-même, ils vont la supporter. C'est beaucoup plus porteur d'encadrement des projets en région et c'est une grosse déficience qu'on a et qu'on note depuis des années. D'ailleurs, en 2002, sur le comité de travail sur les fonds de développement régionaux, on n'arrêtait pas de le dire: la priorité numéro un en région, ce n'est pas la disponibilité de capital, le problème numéro un, c'est l'encadrement des hommes d'affaires et des entreprises en démarrage en région. Ça fait que, lorsque les hommes d'affaires dans une région vont mettre leur propre argent, vous pouvez être assurés qu'ils vont prendre les mesures pour encadrer les entreprises, leur donner du support, du parrainage, du mentorat, leur faire bénéficier de leur réseau de contacts pour les faire prospérer et créer de la richesse.

Le Président (M. Paquet): Merci. Il reste une minute si... Sinon, on peut passer de l'autre côté. M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Oui, j'aurais... Disons que... Tout à l'heure, la question a été abordée en ce qui regarde les fonds de développement régional, les fonds d'initiatives régionales. Moi, j'aimerais ça, voir si vous avez regardé, au niveau de la réflexion, jusqu'où vous voyez de quelle façon on peut ramifier ces choses-là. Parce qu'il y a quand même des fonds locaux également qui sont utilisés. Parce que, au niveau régions, on prend la grande région de Québec, qui est une chose, mais autour de ça se greffent également, on pourrait dire, des formes de sous-régions par rapport à des priorités de certains endroits, je pense du côté de Portneuf, je pense du côté de Montmorency et de l'île d'Orléans, ces choses-là. Est-ce qu'il y a des réflexions qui ont été amorcées dans ce sens-là?

Le Président (M. Paquet): Excusez, vous pourrez revenir au prochain bloc parce que le bloc de 10 minutes est éteint à ce moment-ci. Alors, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui, M. le Président. Bon. Écoutez, je voudrais revenir sur les retombées, là, puis peut-être faire une précision aussi, là: on n'a pas l'intention de plaider pour le statu quo. S'il y a des améliorations qui sont proposées qui amènent plus de retombées que les coûts, on est prêts à les regarder, mais on veut avoir des suggestions qui sont complètes, là, qui sont vraiment rentables pour le Québec.

Tantôt, M. Brunet, vous nous avez fait une grande affirmation qu'on ne retrouve pas dans le rapport. Vous nous dites, avec les objectifs qui sont proposés de réduction de coûts chez Investissement Québec, entre autres de viser l'autofinancement, vous dites: Il n'y aura pas de diminution des retombées selon le nouveau président d'Investissement Québec qui vient d'être nommé par le Parti libéral. J'aurais aimé ça peut-être que vous posiez la même question à l'ancien président d'Investissement Québec qui est ici. En tout cas, je serais curieux d'avoir sa réponse, mais j'aimerais avoir votre réponse, à vous. Est-ce que vous pensez qu'avec les objectifs, les recommandations que vous faites, de réduire de façon importante, là, la participation d'Investissement Québec, mais j'aurais le goût d'ajouter aussi de la SGF et des Innovatech, est-ce que vous pensez qu'avec vos recommandations il n'y aura aucun impact négatif sur les retombées économiques en termes de création d'emplois dans les régions du Québec?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Là, là, vous allez me faire dire des choses que je n'ai pas dites. On recommence pour être bien sûrs, pour être bien clairs. Lorsqu'on comparait ou on écoutait la présentation d'Investissement Québec, il y avait une question d'autofinancement: Jusqu'où ça peut aller? L'autofinancement n'est pas en fonction des interventions de prêts, mais l'autofinancement est fait en fonction des dépenses. Point. Ça, c'est le premier point.

Le deuxième point, c'est qu'Investissement Québec avait un taux supérieur à la moyenne nord-américaine d'interventions, d'investissements ou de prêts par rapport à d'autres organismes gouvernementaux à travers le Canada puis les États-Unis, et, si ce taux-là était réduit par rapport à un taux plus normal, est-ce que les retombées générales seraient les mêmes ou à peu près les mêmes? La réponse à cet effet-là a été de dire: Oui, peut-être, parce que l'explication étant que, si vous baissez de 5 % le taux ou de 4 % le taux de non-paiement, c'est peut-être des projets qui ne sont pas venus à maturité, ou qui sont tombés à l'eau après six mois, ou qui n'ont pas eu, si on veut, de retombées économiques. Nous, c'était dans cette atmosphère-là que ça s'est discuté.

Maintenant, là, vous me demandez, M. Legault: Est-ce que, dans l'avenir, si cette chose-là arrive, il n'y a pas de changement dans l'emploi, il n'y a pas de changement dans l'investissement? Ça, je ne peux pas vous donner la réponse précise. Je vous ai donné la réponse discutée autour de. Est-ce que ça répond à votre question?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Juste pour qu'on se comprenne, donc vous êtes en train de nous dire que vous faites des recommandations pour réduire les coûts dans les sociétés de capital de risque du gouvernement, pour resserrer les critères d'admissibilité des dossiers, et vous nous dites: Dans le fond, on ne peut pas vous dire, à cette étape-ci, s'il va y avoir un impact négatif sur les retombées économiques parce qu'on ne l'a pas regardé. On a discuté un peu avec le nouveau président d'Investissement Québec, qui a été nommé par le Parti libéral, lui pense qu'il n'y en aurait pas trop. Mais, dans la SGF, Innovatech... Puis, votre opinion, vous, vous dites: Le comité ne s'est pas fait d'opinion à savoir si, vos recommandations, est-ce qu'elles auront un impact négatif ou non sur les retombées économiques. C'est ça que vous me dites, là, ça n'a pas fait l'objet de votre étude.

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): J'ai répété à plusieurs occasions, là, autant pour les Innovatech, que notre mandat n'était pas de regarder les retombées économiques. Donc, c'est sûr que, le comité, nous n'avons pas toutes les réponses, ce que vous nous demandez sur les retombées économiques, parce que ça ne faisait pas partie de notre mandat.

C'est que, dans un mandat plus large où tantôt vous discutiez, vous disiez, si on regardait tout l'ensemble des subventions du ministère, et tout ça, si toute cette analyse-là était faite, d'accord avec vous, là, il faudrait arriver à une réponse. Je répète très clairement que notre mandat était en fonction de la gestion. Il y a des commentaires qui sont faits dans le rapport à l'effet de dire: Bien, regardons telle chose, telle chose, révisons telles choses, mais fondamentalement c'est fait en fonction de la gestion.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

n(11 h 40)n

M. Legault: Maintenant, pour ce qui est de votre recommandation que je dirais, là, peut-être la plus percutante du rapport, de dire: On devrait faire de la place au privé... Bon, je reviens sur les retombées. Évidemment que, pour le gouvernement, quand il examine la rentabilité de ses interventions, il inclut les retombées économiques. Le privé ne les inclut pas. Comment voyez-vous l'arrimage possible? Comment vous pensez qu'on peut concilier des objectifs différents dans un partenariat public-privé qui remplacerait l'intervention des organismes publics?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Première constatation, là ? puis je vais demander à Luc, qui est absolument impliqué, et ça fait partie d'une de ses idées ? c'est que ce qu'on a constaté, là...

M. Legault: Donc, on est dans les idées de Luc Chabot, là.

M. Brunet (Pierre): Non, non, non, non! Mais une de ses idées qu'on a discutée longtemps... Parce qu'il a dit une chose qui nous a tous frappés, c'est que, au Québec, l'expertise du capital de risque est limitée. Il n'y a pas beaucoup de personnes qui peuvent le faire. Et plus on va faire de l'arrimage entre les deux, plus on va créer. Puis je pense que j'aimerais qu'on développe, quand il y a des dossiers précis, qu'est-ce qui arrive exactement.

Le Président (M. Paquet): M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Mais, plus directement en réponse à votre question ? les retombées économiques ? si les fonds privés investissent dans des projets que les investisseurs privés pensent qu'ils vont être porteurs de développement et qu'ils vont créer de la richesse, il va automatiquement y avoir de la retombée. Il faudrait penser que ces entrepreneurs-là ou ces investisseurs-là vont investir dans des projets à fonds perdus, des projets qui vont tomber pour qu'il n'y ait pas de retombées économiques.

Création de richesse, dans mon livre à moi, ça implique automatiquement des retombées économiques. Je ne vois pas comment est-ce qu'il peut ne pas y avoir de retombées économiques si on investit pour créer de la richesse. Et c'est le but, vous l'avez mentionné tout à l'heure, c'est le but principal des gens dans le privé d'essayer de créer de la richesse, donc automatiquement des retombées.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Mais on va convenir, là, que, dans le calcul ? bon, puis, pour avoir eu la chance d'être ministre de l'Industrie et Commerce pendant un certain temps puis d'avoir travaillé avec Investissement Québec ? il y a une formule qui existe qui évalue ces retombées économiques. Et le calcul qu'on fait, c'est: est-ce que les retombées excèdent le coût de l'intervention? Et je m'excuse, là, mais, dans les retombées, il peut arriver parfois qu'un projet ne soit pas comme tel rentable au niveau de sa profitabilité ou du rendement attendu. Disons qu'un projet offre un rendement de 5 %, puis on juge que c'est insuffisant, mais il crée des centaines d'emplois dans la région qui vont amener des impôts payés par les travailleurs au gouvernement du Québec, donc où le gouvernement est gagnant. Comment pouvez-vous concilier l'appui à des projets comme ceux-là avec la présence du secteur privé qui ne regarde que la partie rentabilité?

Le Président (M. Bertrand): M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Il n'est pas écrit nulle part, de toute façon, qu'un rendement de 5 % n'est pas quelque chose qui intéresse le secteur privé par les temps qui courent, étant donné l'intérêt qu'on a à la banque. Je peux vous dire que, chez Desjardins, des rendements de 5 % et moins en région, on en fait énormément, de dossiers comme ça. Il faut faire attention dans le discours. Il y a des projets en région qui sont plus de la nature... Et il y a une grosse confusion, puis M. Brunet en parlait tout à l'heure, entre la nature des subventions et du capital de risque. Un projet qui a besoin de subventions, il a besoin de subventions, il n'a pas besoin de capital de risque. Il faut bien distinguer ces deux outils de financement là auprès du démarrage d'entreprises ou de l'expansion des entreprises en région. C'est deux choses totalement différentes. Les retombées se calculent différemment, et c'est sûr que les principes sous-jacents à ces interventions-là ne sont pas les mêmes.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le ministre. Il vous reste 1 min 30 s, question-réponse. M. le...

M. Legault: Oui. Bon. Écoutez, je peux comprendre, là, que vous êtes chez Desjardins, que Desjardins souhaiterait avoir plus de place dans les régions pour investir. Mais est-ce que vous êtes en train de me dire que Desjardins pourrait se contenter de rendements moins grands, mais qui permettraient la création d'emplois, donc serait prêt à prendre la place du gouvernement même si ça affectait la rentabilité de son portefeuille?

M. Chabot (Luc): On le fait depuis maintenant plus de 30 ans avec les fonds d'investissement Desjardins régionaux, dont le premier a pris naissance au Bas-Saint-Laurent. Et ce sont des fonds privés de Desjardins qui n'ont eu aucune aide gouvernementale. Et ça fait 30 ans que Desjardins le fait et investit souvent dans les entreprises à très, très peu d'espoir de rendement pour aider le développement économique régional.

M. Legault: Et combien le Mouvement Desjardins est prêt à investir pour remplacer le gouvernement du Québec dans ces dossiers?

M. Chabot (Luc): Desjardins n'a pas remplacé le gouvernement. Desjardins était là depuis le début des années soixante-dix, à la création de ces fonds-là. Je vous ferai remarquer d'ailleurs que Desjardins était actionnaire de la SGF en 1963. Et Desjardins le fait, mais pas en remplaçant le gouvernement, mais pour aider les régions, parce que ? et M. D'Amours viendra en témoigner lors de la présentation du mémoire de Desjardins ? Desjardins a à coeur le développement des régions. Et les caisses en région ont à coeur leur développement de leur territoire et ont investi depuis longtemps des sommes d'argent en capital de risque dans les entreprises à très, très peu de rendement pour aider les régions.

Le Président (M. Bertrand): Merci beaucoup. Je m'excuse pour avoir appelé le député de Rousseau M. le ministre. Vous comprendrez que je le dis avant que vous le disiez, M. le député. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Merci, M. le Président. Alors, on vous pardonne effectivement le petit écart de langage. Alors donc, M. Brunet, je vous remercie de... et M. Chabot et Mme Poulin, de votre présentation.

Lorsqu'on parle de retombées économiques, et là je pense que c'est un élément qui me tient à coeur, de ma propre formation, ma propre analyse à cet égard-là. À entendre l'opposition officielle, M. le député de Rousseau en particulier, on a l'impression que les retombées, que l'argent que le gouvernement met quelque part, ça tombe de la planète Mars. Et là le gouvernement a décidé que, maintenant, bien, il arrête ça.

Alors, ce n'est pas du tout les propos, je pense, qu'on entend ce matin comme réflexion. D'abord, encore une fois, il y a une approche d'ouverture pour examiner différentes avenues pour s'assurer qu'on va garantir des résultats en termes de croissance économique, de croissance de richesse du niveau de vie des Québécois, alors que, dans le passé, on était plus habitué à vouloir comptabiliser non pas les retombées réelles, mais comptabiliser les annonces, comptabiliser les coupures de rubans. Mais ce n'est pas ça qui fait en sorte que le Québec a pu croître en termes de niveau économique, on le voit. On l'a vu en termes de part des investissements privés, qu'il y a un retard à cet égard-là. On le voit aussi en termes de création d'emplois sur 10 ans, quand on regarde globalement, et de création de richesse, si on regarde l'état de la situation.

Le Québec certainement, avec tout ce qui a été fait, et probablement avec les meilleures motivations du monde par l'ancien gouvernement, n'a pas donné de résultat, et ça, c'est les vraies retombées, c'est la réalité, encore une fois, parce que l'argent qui est mis là, il vient d'ailleurs. Quand on regarde les 760 millions qui ont été perdus à la SGF, c'est de l'argent, ça, ce n'est pas une invention, ce n'est pas un aspect factice, c'est la réalité de telles pertes, qui sont là, de 760 millions. Et les Québécois, certainement, et Québécoises réalisent justement tout l'argent qui a été mis là. Il aurait dû y avoir des retombées extraordinaires.

Si on regarde en même temps l'étude qui a été rendue publique la semaine dernière, de KPMG, qui montre qu'effectivement, au Québec, Montréal, Sherbrooke, beaucoup de villes du Québec se situent, en termes de coûts pour les entreprises de s'installer, parmi les plus faibles, alors pourquoi en même temps, le paradoxe, on n'a pas plus de création d'entreprises, plus de création de richesse? Ça, c'est les résultats.

Alors, les fameuses retombées qui étaient supposément annoncées précédemment lorsqu'on faisait beaucoup d'annonces, elles ne se sont jamais matérialisées. Et ce qui est dommage comme ça, on s'est habitué un peu à attendre d'un gouvernement qu'il fasse des annonces pour faire des annonces. Tout à l'heure, le député de Rousseau faisait référence au retour de Davos du premier ministre. Il aurait été facile d'annoncer des intentions d'investissement, parce qu'il y en a, des intentions, mais on a préféré attendre d'annoncer des résultats lorsque ça va être vraiment concret, pas des annonces qui, en bout de piste, après, ne se matérialisent pas. Évidemment, c'est une façon de faire différente de ce à quoi on était habitué. Et donc l'important, ce n'est pas de juger un gouvernement sur le nombre de rubans qu'il va couper, mais sur les effets réels, l'impact réel sur la croissance de l'emploi et la croissance des investissements privés.

Et on voit en 2003... Tout à l'heure, le ministre faisait référence au fait qu'il y a eu plus de croissance des investissements privés ici qu'ailleurs au Canada, Mais on remarque aussi que, par rapport à 2002 ? souvent le chef de l'opposition officielle disait: Oui, mais 2002, ça a été beau pour le Québec ? 2002 était une année d'exception parce qu'il y a beaucoup de rattrapage qui s'est fait. Il y a eu beaucoup d'investissement public de rattrapage aussi qui s'est fait. Évidemment, l'Alberta et Terre-Neuve avaient fait mieux que le Québec aussi, et ce n'était pas à cause des mesures de l'ancien gouvernement du Québec si c'était le cas. Mais la réalité, c'est que, l'an passé, il s'est fait cinq fois... En 2003, malgré un changement de gouvernement, il s'est fait cinq fois plus de croissance d'investissement privé en 2003 qu'en 2002. Alors ça, c'est des résultats qui parlent. Ce sont des vraies retombées dont on parle.

Alors, ma question, lorsqu'on parle donc d'attirer des investissements privées et que... pour venir compléter les investissements d'argents publics qui devront donner des résultats ? c'est ce dont on parle ? vous avez dit, tout à l'heure, que vous avez parlé avec des investisseurs ailleurs, à Boston et ailleurs, qui vous disent: Bien, écoutez, on veut avoir un climat, dans le fond, qui est favorable pour venir investir. Et j'aimerais que vous nous expliquiez un peu comment le fait... Parce que c'est un peu une démonstration qui a besoin d'être faite pour la population et pour l'opposition officielle en particulier. C'est de dire: Bien, écoutez, le fait qu'il y avait autant de capital de risque public ? et ça, la démonstration n'est pas à faire ? pourquoi c'est devenu un barrage et ça a mis des bâtons dans les roues à de l'investissement de capital de risque privé? Parce qu'il y a une déficience, carrément, qui est là. Et, je crois, tout à l'heure même le député de Rousseau l'a admise, qu'on a besoin de plus de capital de risque privé. Là où est-ce qu'on diffère un peu, c'est de dire: Est-ce que ça veut dire qu'il faut un statu quo pour y arriver? La réponse, je pense... les résultats disent non. Mais, maintenant, quelles sont les barrières qui ont pu faire en sorte que l'investissement privé ne s'est pas matérialisé?

Le Président (M. Bertrand): M. Brunet.

n(11 h 50)n

M. Brunet (Pierre): Je pense que ce serait plus facile de répondre à la question par un exemple. Il y a eu plusieurs exemples d'investissements qui se sont faits où une Innovatech, par exemple, avait 15 %, un autre bras du gouvernement avait 20 % et, dans toutes les 19 sociétés que je vous parlais, il y avait peut-être 60 %, 65 % d'investissements du même actionnaire, l'État, mais d'un nom différent. À ce moment-là, c'est le même actionnaire. Alors, j'invite quelqu'un du privé à prendre 25 %, sa réaction, c'est de dire, c'est la réaction de Boston: J'ai 60 % contre moi parce que le gouvernement répond à d'autres critères que les miens, exactement de la même façon que M. Legault l'a expliqué. C'est exactement... Il a raison quand il dit: Le privé a un «thinking» rentabilité. Alors, il dit: Le gouvernement, s'il fait ça le temps de vendre ou de modifier quelque chose, peut-être qu'il ne le fera pas. Donc, je ne veux pas être partenaire avec quelqu'un qui ne suit pas les mêmes règles du jeu, du marché. Alors, c'est tout simplement ça. Alors, on a développé au cours des années cette habitude-là. Si bien que vous allez voir des projets... Ça n'empêche pas le privé d'être impliqué, mais vous allez voir des projets où, là, c'est mieux réparti et puis ça va se faire.

Alors, notre objectif, c'est de dire... C'est comme tourner le fameux pétrolier, ça ne se change pas dans 30 secondes, ça. Ça se change sur le temps. On a besoin d'une période de transition importante. Il faut partir avec les Innovatech et tout ce qu'on a, les amener tranquillement dans cette direction-là et prendre le temps qu'il faut pour y arriver en fonction de ça. Mais ramener les règles du jeu, c'est que, si vous regardez le gouvernement voisin, Vermont, New Hampshire ou Ontario, jamais ils ne seront impliqués dans le capital de risque. Je parle bien de... Je ne parle pas de subventions, là, je parle... dans le capital de risque, à moins... ils seront toujours loin, en bas de 50 %.

Le Président (M. Bertrand): Merci, M. Brunet. Je passe la parole maintenant à M. le député de Montmorency, tout en rappelant, Mme la députée de Bonaventure et Matane, qu'on vient de calculer le temps qui reste, là. On veut être sûrs que vous ayez du temps d'ici la fin de la période. Alors, Monsieur...

M. Bernier: Merci, M. le Président. Donc, j'ai un petit peu plus qu'une minute.

Le Président (M. Bertrand): Mais je prends quand même pour acquis que vous aviez une grosse partie, une grosse partie de votre question qui était posée.

M. Bernier: Qui était posée, oui, c'est ça. Mais je poursuis.

M. Brunet (Pierre): Je me souviens de la question.

M. Bernier: Vous vous souvenez de la question? Donc, c'est en regard justement des fonds d'initiatives régionales, là, la ramification qu'il peut y avoir de façon à faciliter, au niveau des décideurs locaux, de... Parce que plusieurs de ces investissements-là ou de ces fonds-là sont de petites sommes, mais qui sont importantes au niveau d'initiatives de projets dans ces régions-là ou dans ces sous-régions.

Le Président (M. Bertrand): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Dans le modèle américain, il n'y a aucune limite. Si la ville de Beauport veut le faire ou si le village de Sillery veut le faire, ça peut se faire. C'est qu'il n'y a pas de limite au nombre et par région. Alors, je pense que c'est bien important de comprendre que, pour que ça démarre, ça prend une initiative locale. C'est qu'il n'y a pas de départ s'il n'y a pas d'initiative locale, et l'initiative locale peut définir son territoire. Nous autres, on disait: Bien, il y a 17 régions au Québec, administratives, ça peut être 17 régions administratives, mais dans les 17 régions administratives, la région, mettons, du Saguenay va peut-être en avoir six peut-être, s'ils décident. Il n'y a aucune... Aux États-Unis, c'est fantastique, ils ont grandi depuis... ça a commencé en 1946, ce n'est jamais fini, Et, souvent, un petit village américain va s'en créer un pour partir.

Alors, ce n'est pas la région, c'est l'initiative qui décide. Quelqu'un pourrait dire: J'en pars un, puis je le fais à la grandeur de la province, je regarde n'importe quel projet. Mais n'oubliez pas, c'est que c'est géré et qu'ils sont responsables des profits et des pertes, et que le prêt qui est fait, si les gens ont un succès à ce moment-là, bien, tout se rembourse donc.

M. Bernier: Parce que les craintes justement des gens de ces organisations ? je pense au niveau des CLD, dans ce cas-ci, qui m'ont interpellé ? c'est beaucoup plus de dire: Bon, on vient de diversifier le risque par rapport à la région, O.K. Par contre, ça ne veut pas dire qu'on ne laisse pas la disponibilité budgétaire au niveau des fonds dans les initiatives locales qui... comme il en existe actuellement, par rapport au niveau décisionnel. C'est beaucoup plus une vision de répartition du risque sur un plan régional. C'est de cette façon-là dont vous abordez la question?

M. Brunet (Pierre): Bien, c'est-à-dire que les consultations qui ont été faites en fonction de ça nous indiquent que quelqu'un, par exemple de Sherbrooke, pourrait avoir un projet, ramasser une somme locale avec des entrepreneurs et des personnes d'affaires pour ce projet-là puis le partir, comme il pourrait dire: J'en fais pour toutes sortes de raisons. Le modèle américain, il est très éloquent, à cet effet. C'est que ce n'est pas nécessairement une région, c'est une petite région, c'est un projet, c'est deux projets, c'est trois projets. Il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de flexibilité, là.

Le Président (M. Bertrand): Merci, M. Brunet. M. le député de Johnson, et il restera à l'opposition cinq minutes, six minutes pour partager entre Mme la députée de Matane, de Bonaventure et le ministre qui veut conclure... Au gouvernement, je m'excuse. Je vais finir par m'habituer, à mon âge, c'est plus lent un peu. M. le député de Johnson.

M. Boucher: D'abord, une remarque, là, que j'ai faite tout à l'heure, mais que je rappelle: entre votre rapport, qui porte sur le capital de risque, et c'était le mandat que vous avez eu, et les attentes des députés du gouvernement qui parlent de penser le rôle de l'État dans l'économie du Québec... On veut ainsi penser le rôle de l'État dans l'économie du Québec, alors que vous faites un rapport sur le capital de risque. Comme si le développement économique, là, c'était le capital de risque. Là, il y a un problème. En partant, on a un immense problème. Et je pense que le gouvernement sera tout à fait insatisfait de ce rapport, j'espère, parce qu'il ne parle pas du développement économique du Québec dans son ensemble.

Peu importe. J'ai constaté que vous proposez d'abolir les sociétés Innovatech sans connaître les résultats de ces sociétés. Les seules choses que nous savons, ce sont les montants investis et le nombre d'entreprises en portefeuille. On ne connaît pas les retombées économiques en termes d'emplois ou d'investissements totaux. Comment pouvons-nous évaluer la pertinence d'abolir ces sociétés pour les remplacer par des fonds mixtes si nous ne connaissons pas les résultats rencontrés?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Oui. D'abord, dans votre préambule, vous indiquez que notre rapport ne fait pas mention du développement économique dans son ensemble, là. Vous avez raison, ce n'est pas notre mandat, je l'ai répété plusieurs fois. C'est que notre mandat était de la gestion, ça fait que, ça, c'est bien clair.

En ce qui concerne la question sur les sociétés Innovatech, je vous répète que c'était une vision de gestion. Si tous les portefeuilles de toutes les Innovatech sont ensemble, beaucoup plus facile de gérer, et de les rouler, et de les changer en fonction des transactions à faire. Où on s'adresse aux régions, c'est que les régions, c'est excessivement important, ça fait qu'on ne dit pas de démolir la région et de faire disparaître le monde en fonction de la région.

En ce qui concerne le personnel qui pourrait être sur place pour développer ce qu'ils font déjà avec le même personnel, il y a moyen de régler ça. C'est que toutes les avenues sont possibles. On ne fait pas disparaître les Innovatech, on dit: On les modifie pour les gérer d'une façon plus efficace. C'est la même chose que si vous êtes marié puis vous aviez un compte conjoint. Ça n'empêche pas d'avoir un compte conjoint et de prendre des décisions, mais c'est de voir à gérer la chose d'une façon différente. Maintenant, encore une fois, c'est à vous, à la commission parlementaire, de décider, là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Oui. Je veux laisser cinq minutes à mon collègue, là. Alors, vous me le direz, quand... s'il vous plaît.

Le Président (M. Paquet): D'accord.

M. Boucher: Justement, là, vous touchez au coeur du problème. Le parti qui est devant nous, qui gouverne le Québec actuellement, a dit qu'il allait favoriser les régions, décentraliser, régionaliser. Et voici, là, qu'on va centraliser une société Innovatech à Montréal. Parce que c'est visiblement là qu'elle va être centralisée, à Montréal, si le gouvernement prend cette décision-là. En tout cas, ce ne sera pas à Bonaventure, sûrement pas, hein? Alors, comprenez-vous? J'espère que le gouvernement qui est devant nous ne va pas accepter une telle proposition d'enlever encore une fois des instruments aux régions, des instruments de développement économique. Et là votre recommandation, j'espère qu'elle est de vous, que c'est bien la vôtre.

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

n(12 heures)n

M. Brunet (Pierre): Bien, écoutez, là, je suis très heureux de voir l'importance que vous donnez à notre rapport sur l'influence sur le parti qui est assis en face de vous. Vous nous montrez beaucoup de respect. Mais laissez-moi vous dire une chose: C'est que, dans ce rapport-là, c'était une vision de gestion. C'est sûr que la perception, quand on dit: On va le gérer à Montréal, bien, on va mettre le bureau chef à Drummondville puis on règle le problème. Écoutez, là, ce n'est pas l'endroit où c'est géré. C'est que... Ce qui est important, c'est que la région ait l'initiative et du personnel pour aller chercher de nouvelles transactions. Alors, c'est que...

Alors, à partir de là, c'est sûr qu'on peut dire: C'est à Montréal. On peut le mettre à Québec, on peut le mettre à Drummondville, ce n'est pas ça qui est important. Ce qui est important, c'est que le capital de risque ait la chance, dans un fonds total, d'évoluer et... En fait, c'est tout simplement des règles de sagesse et de diversification de portefeuilles. C'est tout simplement ça.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Johnson, ça va, donc? M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui. Merci, M. le Président. En question à M. Brunet ? et une plus générale et une un petit peu plus pointue ? essentiellement, en fonction des régions, est-ce que votre analyse a démontré que c'était la présence de l'État en région qui empêchait le privé d'investir dans le capital de risque?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Je ne pense pas, non. L'addition du privé, c'est d'ajouter des joueurs, d'ajouter des possibilités et de peut-être corriger ce qu'on disait: l'État est à 65 %, 70 %. Je pense que, dans la région, l'État sera toujours excessivement important, puis il ne faut pas diminuer le rôle de l'État pour autant en fonction...

Une voix: ...

M. Brunet (Pierre): Il est majeur en région. Et puis les régions sont préoccupées. Puis c'est vrai qu'il faut leur donner les outils. Mais, à chaque fois qu'on dit... Les exemples que j'aimerais donner, là, en ce qui concerne les 19 sociétés d'État, si on imaginait, soit M. Legault ou moi, qui décidons d'avoir à notre disponibilité quatre... mettons, 300 millions d'argent disponible pour le capital de risque qui est l'argent d'une société qu'on gère, et on le confie, ce 350 millions là, à 19 sociétés avec 19 conseils d'administration puis très peu de possibilités d'intervention... Alors, nous, ce qu'on dit: Écoutez, l'actionnaire qui le donne en haut devrait avoir un droit de regard. Donc, il devrait y avoir un organisme qui suit la gestion des fonds.

En ce qui concerne le développement des affaires, en ce qui concerne le développement dans la région, qui sont excessivement importants, tout ça peut s'organiser d'une façon... Ce n'est pas d'enlever du personnel dans les régions, c'est de s'assurer que la gestion est faite, comme ça devrait être fait, par un actionnaire qui a un droit de regard. C'est tout simplement ça, là, ce n'est pas... Il n'y a rien de sorcier dans ce qu'on dit.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui. Bien, une question peut-être un petit peu plus pointue. Et là, M. Brunet, je reconnais tout à fait, là, que vous étiez quatre bénévoles, avec un budget de 25 000 $, pendant quelques mois, pour étudier le capital de risque au Québec dans tous les bras financiers du gouvernement. Alors, je comprends, là, que... et que vous vous retrouvez aujourd'hui en pleine discussion sur le rôle de l'État dans le développement régional. Alors, je peux comprendre que ce n'est pas simple, de votre côté.

Mais, quand on lit votre rapport et qu'on s'appelle CLD et qu'on gère des fonds locaux d'investissement, c'est dur de ne pas lire qu'on est en voie de disparition. Vous avez dit tout à l'heure que vous ne dites pas... peut-être ce serait renouvelé ou intégré, mais, enfin, quand on le regarde, là... et la réaction, ça a été ça.

Alors, moi, ma question, c'est: quelle analyse et quelles consultations en région vous avez eu le temps de faire pour... justement sur le rendement et l'efficacité des fonds locaux d'investissement? Parce que ces fonds locaux d'investissement, dans bien des cas justement, font en sorte que le privé investit et font en sorte qu'il y a du démarrage, et ainsi de suite, et ont de bons rendements. Alors, c'est étonnant que, un des principaux outils, votre rapport n'ait en tout cas sûrement pas une conclusion positive à cet égard-là.

M. Brunet (Pierre): De la façon...

Le Président (M. Paquet): M. Brunet, 1 min 30 s.

M. Brunet (Pierre): Je vais demander à Luc, là, de préciser là-dessus parce qu'il est plus habilité que... ou plus d'expertise ou d'expérience.

Mais ce qu'on essayait de dire dans notre rapport, c'est que, s'il y a des modifications qui surviennent suite à notre rapport, il faut tenir compte des autres affaires pour être sûrs qu'il n'y ait pas de dédoublement. Et vous avez raison, c'est qu'on n'a pas rentré dans le fond du détail de tout ça. Ça, c'est le premier point.

Par contre, dans des interviews avec les régions, les régions nous ont indiqué d'une façon précise que, s'ils avaient l'initiative de ces choses-là, oui, ils le feraient. Maintenant, entre l'entrepreneur puis la région qui va le faire et puis la décision de dire l'État s'en occupe à 100 % ou j'invite l'entreprise privée, là, vous avez une recommandation, puis c'est la sagesse de la commission parlementaire qui va le décider. Vous allez écouter tous les rapports, vous allez écouter toutes ces personnes-là, puis là vous jugerez ce qu'il faut faire.

Nous, à la lumière de toutes les rencontres ? parce qu'on a eu 58 mémoires, quand même ? ce qu'on nous a exprimé, ce qu'on nous a dit, en voici les conclusions. À tort ou à raison, c'est que vous pouvez les interpréter comme vous voulez, nous pensons que nous mettons le doigt sur l'ensemble des problèmes: où est le problème du démarrage, où est le problème de la commercialisation, où est le problème des régions puis comment impliquer les régions? Alors, on vous donne ça globalement, puis c'est à vous de décider si c'est une proposition valable ou pas.

Le Président (M. Paquet): Merci. On passe...

M. Chabot (Luc): Heureusement, on pense que...

Le Président (M. Paquet): Le temps de réponse est écoulé, à moins qu'évidemment du côté du gouvernement on veut laisser un peu de temps.

Une voix: Peut-être à monsieur...

Le Président (M. Paquet): O.K. Alors, consentement pour laisser une minute à M. Chabot? Il y a consentement. M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Très, très rapidement, écoutez, je veux le répéter comme M. Audet l'a dit, que les FLI n'étaient pas... ce n'était pas dans notre mandat de regarder ça. On est tous conscients que les FLI, les CLD ont fait un excellent travail en région, et on est d'ailleurs partenaires avec beaucoup d'entreprises qui ont été parties par les CLD en région.

Il n'y a rien non plus qui empêche ? je voudrais vous faire remarquer dans notre rapport ? de faire en sorte que ces fonds locaux d'investissement soient les promoteurs des fonds d'initiatives régionales. Il n'y a rien qui interdit ça dans ce qu'on propose.

Le Président (M. Paquet): O.K. Merci. Alors, Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Alors, M. le Président, je crois qu'il est important de remettre les pendules à l'heure quant aux propos de notre collègue député de Rousseau relativement à l'importance des retombées économiques dans le cadre de l'élaboration du rapport préparé par le groupe de travail.

Le député de Rousseau, que je sais très attentif lors de nos débats en commission parlementaire, a été, tout comme moi, présent lorsque nous avions regardé le mandat de surveillance d'Investissement Québec. Et puis, dans le cadre de ce mandat-là, nous avions fait part d'une analyse faite sous l'ancien gouvernement quant à l'exercice demandant l'évaluation des retombées économiques. Et ce n'est pas aussi simple que le député de Rousseau le prétend: l'évaluation des retombées économiques de différents programmes n'est pas chose simple.

Maintenant, ce que nous avons, je pense, et ce que notre gouvernement a considéré en tout état de fait, c'est que le rapport devait d'abord et avant tout voir à une problématique qui est là, bien présente, un constat, que nous savons tous, qui a été confirmé par l'Institut de la statistique canadienne, que le Québec se positionne au 57e rang sur 67 États américains en termes de développement économique. Et une récente analyse de l'Institut Fraser, de novembre 2003, démontre que, malgré que le Québec ait un potentiel économique incroyable, il se retrouve quand même au dernier rang des provinces canadiennes.

Alors, je pense que, sur cette seule base fondamentale, le rapport du groupe de travail était très pertinent. Et les points qui ont été analysés par les membres de ce groupe étaient des points qui étaient ceux qui devaient être analysés et non pas remettre l'importance sur des faits qui malheureusement... sur des retombées économiques qui malheureusement ne font pas le poids dans ce que le Québec a eu comme performance économique dans les dernières années. C'est tout.

Le Président (M. Paquet): Merci. Donc, j'imagine que c'est un commentaire.

Alors, M. le ministre du Développement économique et régional, il reste 3 min 30 s, quatre minutes.

M. Audet: Merci, M. le Président. Alors, écoutez, je voudrais évidemment, avant de remercier particulièrement les membres de leur participation, je voudrais faire deux commentaires, deux, trois commentaires sur justement ce qu'on a entendu ce matin.

Je pense que le travail qui a été fait, que vous avez fait, a pour mérite de nous lancer sur des pistes de réflexion. Mais c'est très clair, ce n'est pas la décision du gouvernement. On l'a dit plusieurs fois: on va réfléchir. Ce qui est clair cependant, c'est que... Et là je prends les déclarations du député de Rousseau qui évidemment semble avoir beaucoup de nostalgie à l'égard de la position ou de ce qui se passait antérieurement et utilise pour ça notamment les retombées économiques que pouvaient avoir évidemment les investissements auparavant.

n(12 h 10)n

Je vais le poser en termes interrogatifs: Est-ce que, pour les finances publiques du Québec, pour les retombées pour les Québécois, c'est une retombée économique satisfaisante que, cette année, hein, on doive mettre dans nos dépenses publiques, hein, 750 millions, hein, de dépenses qui n'ont pas été intégrées pour les pertes qui ont été encourues par la Société générale de financement? Est-ce que c'est des retombées économiques? Si on avait juste tenu compte des retombées économiques, dire: Ce n'est pas grave, ça a eu des impacts économiques... Là, actuellement, ce sont les contribuables et ce sont les gens du Québec qui doivent assumer une partie des coûts des services publics qui sont... que ça découle.

Donc, la révision qui est proposée là ne vise pas à dire que l'État sera plus présent. Il faut dire: Est-ce qu'il y a moyen, pour assumer ces risques-là... Oui, il y a des risques, ce n'est pas juste les... Je ne veux pas mettre en cause le travail qui a été fait par les gestionnaires. Il y a des risques importants qui sont associés lorsque l'État se prend lui-même pour un actionnaire. Donc, ce qui nous est proposé, c'est de dire: Il y a moyen de recentrer le rôle de l'État sur sa mission de base et de faire partager les risques par le secteur privé pour qu'on tienne compte d'autres critères. Et c'est les propositions qui nous sont mises de l'avant. Donc, je pense que les questions de l'opposition visaient visiblement à vouloir discréditer certaines des recommandations qui étaient sur la table, notamment à l'égard des fonds d'investissement, les FLI.

Je vois, à la page 50, par exemple, pour ce qui est du fonds d'investissement ? les FLI ? on ne propose pas d'abolir les FLI, on dit qu'il y a un réexamen de l'approche à l'égard des fonds d'investissement ? les FLI ? conformément à l'échéancier de cinq ans qui était fixé en 1998, puisque les sommes prévues ont maintenant été toutes prêtées aux centres locaux de développement. Ces prêts devront être remboursés à compter de 2005.

Donc, il y a lieu de se poser la question: est-ce qu'il n'y a pas lieu de saisir l'occasion, pour changer la dynamique actuelle, d'adopter une approche, une nouvelle approche, pour justement faire profiter ces fonds-là? Donc, on ne dit pas de les abolir, on dit: est-ce qu'il n'y a pas moyen de les utiliser pour justement susciter des investissements avec le secteur privé? C'est en ces termes-là qu'on doit, je pense, repenser et revoir le mandat et les différentes propositions qui sont là.

Et enfin ? je sais qu'il me reste une minute ? donc, je veux remercier donc les membres de la commission qui nous ont fourni des pistes intéressantes, qui n'ont pas toutes les réponses ? ce n'était pas le but, comme on a dit tantôt. Avec les moyens très limités qu'ils avaient, ils ont fait une réflexion effectivement... Ils n'ont pas attaché chacun des arbres, ils ont regardé la forêt, puis dire: C'est quoi, la position du Québec dans ce domaine-là par rapport à ce qui se passe ailleurs? Est-ce qu'il y a d'autres pistes qu'on peut regarder?

Moi, je pense qu'ils nous ont présenté quelque chose de... certaines perspectives intéressantes, rafraîchissantes et qu'on aura l'occasion de regarder et d'examiner de plus près avec les différents intervenants dans les trois prochaines semaines. Merci beaucoup, mesdames, messieurs.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. le ministre. M. le député de Blainville et porte-parole de l'opposition officielle en matière de région, quatre minutes.

M. Legendre: Oui, M. le Président. Bien, simplement pour une question additionnelle. Mais peut-être avant d'aller à la question à M. Brunet, si je comprends bien la toute dernière intervention de M. Chabot concernant les fonds locaux d'investissement, si j'ai bien compris, qui pourraient donc gérer les fonds d'investissement régionaux... Si j'ai bien compris, c'est ce que vous disiez. En gros, c'est ce que vous disiez?

M. Chabot (Luc): ...interdiction dans le rapport là-dessus.

M. Legendre: Oui. Bien, c'est-à-dire que vous dites: Il n'y a aucune interdiction dans le rapport. Mais, par ailleurs, quand on arrive dans la liste des mesures proposées, le mot «fonds local d'investissement» n'apparaît même pas. Et je vous rappelle que fonds local d'investissement, par définition, c'est local, hein? C'est municipalités, MRC. Et fonds d'investissement régional, c'est régional. Alors, c'est la région, ce n'est plus le local. Alors là, dépendant c'est quoi, vos recommandations, il faut qu'on puisse les comprendre, là.

Vous parlez de la création d'un FIR, mais qui pourrait être géré par les FLI. C'est bien ça?

Le Président (M. Paquet): M. Chabot.

M. Chabot (Luc): Au niveau des FIR, on ne dit pas qu'il doit y en avoir un par région. Comme M. Brunet le disait tout à l'heure, il peut y en avoir plusieurs dans une même région. On ne limite pas à 17 FIR la création de ces FIR là, là, Il peut y en avoir autant qu'il y aura d'initiatives privées. Je pense qu'on avait été clairs tout à l'heure en réponse au député pour la question dans Portneuf, et tout ça, on l'a bien dit.

M. Legendre: Écoutez, juste vous dire là-dessus que...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville, oui.

M. Legendre: ...je pense que ce n'est pas clair, ça. Et, d'ailleurs je pense qu'il y a une mention à un moment donné où vous dites qu'il pourrait peut-être y en avoir plus d'un par région, mais disons que ce n'est pas ça, l'intention qui semble être l'intention première.

Une voix: ...

M. Legendre: Écoutez, quand on parle de fonds d'investissement régionaux ou qu'on parle de conférence régionale des élus, quand on parle de régions, il y en a 17 au Québec, on est portés à comprendre 17. C'est peut-être différent avec le nouveau gouvernement.

Alors, autre... dernière question, par ailleurs. Vous avez parlé d'interviews en région tout à l'heure, M. Brunet. Est-ce que les CLD, est-ce que vous avez eu le temps de... Et je pourrais comprendre que vous n'avez pas eu le temps, là. Parce que, encore une fois, là, on a demandé à un groupe de bénévoles de faire une analyse, dans quelques mois avec moyens limités, du capital de risque au Québec. Alors, que le rapport serait un peu incomplet, je pense qu'on pourrait comprendre, puis ce ne serait pas une critique à votre égard. Mais est-ce que vous avez consulté les CLD en région?

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Non. En fait, là, quand je parle de consultations en région, là, c'étaient des choses sollicitées personnellement en faisant des téléphones à des régions, des chambres de commerce, des milieux d'affaires. C'était tout simplement pour s'informer si c'est une idée comme ça ou... Alors, il n'y a pas eu, là... il n'y a pas eu...

Là, là, vous essayez de ramasser toute l'économie du Québec dans notre rapport quand, nous autres, on regardait la gestion du capital de risque. Alors donc... O.K.?

M. Legendre: Oui.

Le Président (M. Paquet): 1 min 30 s.

M. Legault: Oui. M. le Président...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: ...donc, si j'essaie de conclure un peu l'ensemble des discussions qu'on a eues ce matin, ce que je comprends bien, c'est que votre mandat, c'était de voir comment on peut réduire les coûts dans les sociétés d'État du gouvernement, mais vous n'avez pas eu le temps, ou l'argent, ou la disponibilité pour examiner les retombées économiques dans les régions du Québec.

Donc, moi, je pense que, avant de prendre des décisions, avant de prendre des décisions qui pourraient avoir des dommages importants sur le développement économique des régions, ça mériterait une analyse des retombées économiques. Donc, ce que je comprends, là, c'est peut-être une première étape, ce rapport Brunet, mais que, si on veut prendre des décisions pour toucher au rôle et au mandat de la SGF, des Innovatech et d'Investissement Québec, le moins qu'on puisse dire, c'est que l'analyse qu'on a devant nous n'est pas complète.

Le Président (M. Paquet): M. Brunet.

M. Brunet (Pierre): Je répète: Elle n'est pas complète, elle est complète, mais... Notre rapport est complet, parce que ce n'était pas notre mandat de regarder les retombées économiques. Alors, si vous voulez regarder les retombées économiques, si vous voulez me confier un autre mandat, ça me fera plaisir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): Donc, ça va? M. le député de Rousseau.

M. Legault: Bien, écoutez, juste en conclusion, M. le Président, je pense qu'on vient d'avoir la réponse. On a fait une première étape, on a regardé comment, au niveau gestion, on pouvait simplifier les sociétés d'État et leur mandat, sauf que je supplie le gouvernement et le ministre du Développement économique et régional de ne pas prendre de décision sur la base de ce rapport qui n'a pas analysé les retombées économiques, parce que je suis convaincu que, si on suivait les recommandations qui sont dans le rapport Brunet, on aurait des dommages importants pour le développement économique des régions. Donc, il y aurait une diminution importante des retombées, et je pense qu'avant d'aller plus loin il faut faire une analyse sérieuse des retombées économiques.

Le Président (M. Paquet): Alors, merci. Alors donc, au nom de la Commission parlementaire des finances publiques, il me fait plaisir de vous remercier, M. Brunet, M. Chabot et Mme Poulin, pour votre participation à nos travaux.

Alors, la commission suspend ses travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 18)

 

(Reprise à 14 h 8)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la Commission des finances publiques reprend ses travaux. Nous sommes réunis, aujourd'hui, pour entreprendre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le Rapport du groupe de travail sur le rôle de l'État québécois dans le capital de risque.

Nous avons l'honneur, cet après-midi, de recevoir d'abord les représentants de Réseau Capital, représenté par la présidente, Mme Annie Thabet, ainsi... accompagnée de M. Daniel Denis, qui est membre, et de deux gouverneurs, M. Bernard Hamel et M. Maurice Prud'homme. Au nom de la Commission des finances publiques, je vous souhaite la bienvenue.

La façon dont les travaux vont se dérouler cet après-midi, donc, il y a une période de 60 minutes qui est consacrée à votre audition et à la période d'échange avec les parlementaires. Vous avez donc 20 minutes pour faire une présentation de votre mémoire, et ce sera suivi, par la suite, d'une période d'échange avec nous. Alors, Mme Thabet.

Auditions

Réseau Capital

Mme Thabet (Annie): Merci, M. le Président de la commission. M. le ministre, Mmes et MM. les députés membres de la commission, mesdames et messieurs, c'est un plaisir pour nous, Réseau Capital, d'être ici, aujourd'hui. Puis on vous remercie de nous avoir invités à venir vous présenter notre vision sur l'avenir de l'industrie du capital de risque au Québec. On vous remercie aussi de vous intéresser à cette industrie-là. Je constate que c'est la première fois qu'il y aura un débat de fond sur l'industrie du capital de risque ici, au sein de vos commissions parlementaires. Alors, on est très heureux de ça, puis je pense que c'est un signe aussi que notre industrie est rendue à un tournant et on mérite vraiment d'avoir un débat de fond sur son avenir.

n(14 h 10)n

Ce dont on va vous parler, nous, Réseau Capital, aujourd'hui, ça va être assez différent de ce que vous avez entendu ce matin. J'ai assisté à quelques présentations et discussions. Évidemment, le rapport du groupe de travail sur le rôle des sociétés d'État avait un mandat assez spécifique, comme l'a bien expliqué, je crois, M. Brunet ce matin. C'était vraiment de revoir le rôle de trois sociétés d'État. Nous, notre présentation, aujourd'hui, va porter plus sur l'industrie dans son ensemble, l'industrie du capital de risque au Québec, qu'est-ce que ça prend pour réussir dans notre métier, dans notre industrie.

Alors, ça va être... J'aimerais ça aussi peut-être faire la distinction entre ce que, nous, on appelle capital de risque et le développement économique. «Capital de risque», c'est vraiment du capital de risque, c'est-à-dire sans garantie, que l'on fait dans des entreprises pour supporter leur croissance. Et l'objectif, c'est de générer un rendement sur l'investissement. C'est vraiment la performance qui est le nerf de la guerre dans le capital de risque. Et évidemment, si on veut faire du rendement, il faut que les compagnies dans lesquelles on investit fassent, elles aussi, du rendement. O.K.? Alors, si on réussit, nous, en termes de rendement, bien c'est parce que les compagnies ont réussi. Et conséquemment ces compagnies-là auront créé des emplois, fait des ventes à l'exportation, et tout ça, et donc généré des retombées économiques. Mais, quand on parle de capital de risque, pour nous, c'est vraiment l'objectif de rendement, et je le mets un peu en opposition au développement économique pur, qui est peut-être, vous, ce avec quoi vous êtes le plus familiers. Le développement économique est un autre objectif en soi qui n'est pas vraiment ce dont on parle, nous, quand on parle strictement de capital de risque, avec un objectif de performance.

Alors, c'est vrai que notre industrie a atteint une taille importante et, je dirais même, enviable, hein? Vous savez qu'elle compte pour la majorité de l'industrie canadienne. Au Québec, on a 53 % des fonds canadiens qui sont gérés au Québec. Alors, c'est vraiment quelque chose de très fort pour notre industrie. Par contre, notre industrie est encore jeune et vulnérable.

Réseau Capital, ça fait plus d'un an qu'on a entrepris une réflexion stratégique vraiment en profondeur sur où on est aujourd'hui, où il faut aller puis qu'est-ce que ça prend pour y arriver. Et on avait commencé ces travaux-là bien avant que le groupe de travail soit mandaté pour regarder la situation de quelques sociétés d'état. On travaillait déjà là-dessus, on avait déjà des préoccupations et on a fait depuis de multiples consultations dans l'industrie. On a demandé à SECOR de regarder en profondeur la situation, ils nous ont fait des recommandations. Vous l'avez en annexe de notre mémoire. On a parlé aux principaux joueurs au Québec, que ce soient les fonds de travailleurs, les sociétés d'État, les joueurs privés, les fonds privés, pour voir c'était quoi, leurs problèmes. On a rencontré les caisses de retraite pour vraiment saisir les enjeux, mais surtout pour qu'on soit capable de trouver ensemble une solution pour arriver quelque part sur un horizon raisonnable.

Alors, nous, on regardait ça puis on s'est dit: Qu'est-ce... l'objectif, c'est quoi? L'objectif, c'est d'avoir, à moyen terme, une industrie de calibre mondial, une industrie axée sur la performance. C'est ça, le nerf de la guerre, hein, je le répète, c'est ça qu'il faut arriver à faire. Alors, on s'est dit: Pour arriver là, on ne peut pas faire ça demain matin ni l'année prochaine. On s'est donné un objectif de... l'horizon 2010. Donc, ça nous donne sept ans pour y arriver, puis on a développé un plan d'action pour réaliser ça.

Essentiellement, ce plan-là, je vais vous l'expliquer tantôt, mais, essentiellement, on parle de mettre en place un plan d'investissement stratégique pour la capitalisation des fonds spécialisés privés. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire mettre sur pied une douzaine de fonds spécialisés privés qui vont offrir des capitaux tout le long de la chaîne de capital et qui vont agir de concert avec nos joueurs actuels. O.K.? On ne parle pas de remplacer les joueurs actuels, on parle d'ajouter des fonds privés qui vont agir en complément.

Et évidemment la question fondamentale là-dedans, c'était de dire qui va financer ces fonds-là. Bien, c'est beau de dire qu'il va y avoir des fonds privés spécialisés, mais il faut aussi les financer, les capitaliser, et c'est surtout là-dessus qu'on a travaillé pour établir un plan de capitalisation de ces fonds-là. Et vous allez voir qu'on a besoin de la contribution de tous les joueurs de l'industrie, notamment les fonds de travailleurs et coopératifs, le gouvernement du Québec et le gouvernement du Canada pour certaines mesures dont je vous parlerai et...

Parce que l'objectif, c'est d'aller chercher les bailleurs de fonds conventionnels pour les fonds de capital de risque. Ces bailleurs de fonds là, c'est qui? C'est les caisses de retraite. C'est eux qu'il faut aller chercher. Il faut les intéresser à nos fonds. C'est aussi les compagnies d'assurance et ces groupes-là qui typiquement investissent dans les fonds. Évidemment, on ne peut pas réussir ça rapidement, comme je vous disais. Ça nous prend une période de transition, et il faut vraiment avoir un objectif à long terme et bâtir le plan pour atteindre l'objectif.

Alors, maintenant, j'aimerais juste dire quelques mots sur Réseau Capital. Réseau Capital, c'est l'association du capital de risque du Québec. Ça fait 15 ans que l'association a été créée, et il y a le chapitre de Québec qui a été créé en 1997. L'association regroupe environ 500 membres. La moitié des membres représentent les sociétés de capital de risque comme telles comme, par exemple, les fonds de travailleurs et coopératifs, les sociétés d'État, les fonds privés. Et l'autre moitié des membres sont plutôt des membres associés à l'industrie du capital de risque, donc des groupes qui offrent des services à une industrie comme, par exemple, les banques, les institutions, les bureaux de professionnels, comptables, avocats, consultants, et autres.

Les objectifs de Réseau Capital, hein, il y en a trois principaux: favoriser le développement d'un milieu propice au financement d'entreprises avec prise de participation; établir un réseau efficace de relations et d'information parmi les divers intervenants de l'industrie; et promouvoir le financement avec prise de participation comme un moyen de développement des entreprises québécoises.

Alors, quelques chiffres pour vous donner l'ampleur de l'industrie québécoise du capital de risque. On parle, au Québec, d'une industrie qui gère 11,7 milliards de dollars. Je le disais tantôt, c'est 53 % des fonds qui sont gérés au Canada. On investit annuellement entre 600 millions, les moins bonnes années comme 2003, et jusqu'à 1,5 milliard les bonnes années comme, par exemple, l'année 2000.

L'industrie a des retombées économiques importantes, hein, comme je disais tantôt, même si ce n'est pas l'objectif en soi. L'objectif est le rendement, mais, quand on fait du rendement, il va de soi qu'on a des retombées économiques. Il y a un sondage qui a été fait par la firme McDonald & Associates sur demande de la BDC. Et ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont regardé 492 entreprises qui ont reçu du capital de risque comme source de financement. Et ils ont examiné le comportement de ces compagnies-là au cours d'une période de cinq ans, de 1995 à 1999. Et ce qu'ils ont constaté, c'est que ces 492 entreprises là ont créé plus de 23 000 emplois. Elles ont généré plus de 14 milliards de ventes consolidées, dont 5,4 milliards de dollars à l'exportation.

Quand on regarde les taux de croissance des sociétés financées par le capital de risque, ils sont de très loin supérieurs aux moyennes nationales qu'on vit ici. Juste pour vous donner une idée, tous secteurs confondus, la croissance moyenne des ventes était de 39 % annuellement; la croissance de l'emploi, 31 % de croissance moyenne annuelle. Dans les secteurs technologiques, c'est encore plus haut: 54 %, la moyenne de croissance des ventes par année et 50 % de moyenne de croissance de l'emploi. Et, quand on parle de ça, on compare... Les 100 plus importantes compagnies canadiennes, hein, ont une croissance des ventes moyenne de 4 % par année. Alors, c'est phénoménal comme effet motivant pour le développement des compagnies.

Maintenant, j'aimerais vous résumer un peu les constatations qu'on a faites lors de notre réflexion stratégique. Il y en a plusieurs, mais je vais m'attarder seulement sur les principaux aujourd'hui. D'abord, on parle, comme vous le savez, d'une croissance remarquable, là, depuis les années quatre-vingt-dix, donc depuis 10 ans. Et ça, ça a été rendu possible grâce au soutien du gouvernement du Québec. Les investissements moyens annuels, on parle de 1 milliard de dollars par année qui s'investit bon an, mal an. 50 % de ce montant-là est investi dans les technologies de l'information, 30 % dans les biotechnologies et 20 % dans les secteurs traditionnels.

n(14 h 20)n

C'est une industrie qui est encore jeune, hein? Pourquoi? Parce que notre source d'approvisionnement en capitaux n'est pas encore diversifiée, et l'offre de capitaux pour les entrepreneurs est un peu limitée, dans le sens que les entrepreneurs, ils n'ont pas beaucoup de choix, ils n'ont pas beaucoup de joueurs pour aller voir pour se financer. Et notre industrie est vulnérable en ce sens que les bailleurs de fonds conventionnels s'intéressent peu au capital de risque comparativement à ce qui se passe aux États-Unis où ce sont essentiellement ces bailleurs de fonds là qui supportent l'industrie et sa croissance. On estime, nous, que, si nos caisses de retraite allouaient le même pourcentage de leurs actifs aux placements privés, bien on pourrait peut-être aller chercher, sur notre horizon de sept ans, environ 1 milliard de dollars de nouveaux fonds qui seraient réinvestis dans l'industrie.

Une autre caractéristique, au Québec, nos transactions moyennes sont plus petites qu'ailleurs au Canada. On parle d'investissements moyens de moins de 3 millions de dollars par compagnie par rapport à ce qu'ils devraient être: plus de 5 millions de dollars. Évidemment, ça affecte la compétitivité de nos entreprises. Et, comme vous le savez, nos capitaux sont concentrés dans les sociétés d'État, et les fonds qui ont des objectifs multiples, on appelle ça des fonds multiobjectifs. Et, si vous avez votre mémoire devant vous, à la page 8, au tableau 4.1, j'aimerais juste attirer votre attention sur comment ont été répartis les fonds investis en 2002. On peut constater que les fonds privés ont compté pour seulement 9 % de tous les fonds investis au Québec en 2002 par rapport à 23 % en Ontario et 70 % aux États-Unis. Finalement, les rendements financiers, à cause de la notion d'objectifs multiples, sont... nos rendements financiers sont inférieurs à ce qu'ils devraient être ou à ce qu'ils pourraient être si nos fonds étaient uniquement axés sur le rendement.

Une autre... Une dernière constatation sur l'industrie, c'est que, au Québec, nos fonds investissent beaucoup de façon directe dans les entreprises par rapport à ce qui se passe ailleurs où il y a beaucoup plus d'investissement indirect. L'investissement indirect, ça veut dire que, si je suis une société d'État ou un fonds de travailleurs, je peux investir directement dans la compagnie ou investir dans un fonds de capital de risque, et celui-là va investir dans la compagnie. Alors, ça, c'est important parce que ça peut nous aider à avoir plus de fonds privés et surtout à attirer les bailleurs de fonds conventionnels comme les caisses de retraite qui, eux, peuvent s'intéresser à investir dans des fonds ou des fonds de fonds. J'y reviendrai un petit peu plus tard.

Maintenant, pour atteindre notre objectif de performance d'ici 2010, on s'est fixé trois objectifs principaux, mais on s'est dit: Si on réussit ça, sûrement qu'on va avoir amélioré la position de notre industrie. Premièrement, il faut diversifier nos sources d'approvisionnement, c'est-à-dire attirer les nouveaux bailleurs de fonds, les caisses de retraite, et autres. Deuxièmement, il faut augmenter l'investissement moyen par entreprise à plus de 5 millions de dollars pour accroître la compétitivité de nos compagnies. Et, troisièmement, il faut augmenter la proportion des fonds qui seraient investis par des fonds privés. Je l'ai dit tantôt qu'ils sont aujourd'hui de 9 %, on aimerait ça l'augmenter peut-être à 50 % d'ici 2010, ce qui nous permettrait de diversifier l'offre de capital offerte aux entreprises.

Alors, comment arriver à faire ça en sept ans? C'est quand même très ambitieux, sept ans. Ça peut vous paraître long, mais c'est quand même ambitieux. Ce qu'on propose, nous, c'est la mise en place d'un plan d'investissement stratégique pour la capitalisation des fonds privés. On parle de quoi? On parle d'une douzaine de fonds spécialisés privés qui devraient être mis sur pied d'ici 2010. Ces fonds-là seraient actifs tout le long de la chaîne de financement, alors du démarrage jusqu'à l'expansion, tout le long de la chaîne, dans différents secteurs, ces fonds-là gérés en complémentarité avec les fonds actuels. Il ne s'agit pas de les remplacer, il s'agit d'être là en complément et de faire du coinvestissement avec eux. Et ces fonds-là seraient capitalisés au début surtout par les fonds de travailleurs et coopératifs et par le gouvernement. Et ultimement les bailleurs de fonds, les caisses de retraite, et autres, prendraient la relève et pourraient continuer de supporter l'industrie du capital de risque.

Qu'est-ce que ça veut dire, ce plan-là, en termes de dollars? Ça veut dire... Si je vais à la page 18 de votre mémoire, tableau 6.1, ça veut dire que les fonds de travailleurs et coopératifs devraient investir environ 125 millions de dollars par année dans ce programme-là. Le gouvernement du Québec investirait un petit peu plus au début, 150 millions de dollars par année, pour descendre jusqu'à 50 millions de dollars à la fin du plan, pour une moyenne de 90 millions par année. Évidemment, on parle ici de mise de fonds effectuée sur une base d'affaires et qui peut générer du rendement. Et les caisses de retraite et autres groupes pourraient s'impliquer progressivement pour arriver à investir environ 400 millions de dollars par année dans le système. Ça, ça nous permettrait d'atteindre nos objectifs.

Alors, qu'est-ce que ça prend pour faire ça? Ça prend diverses mesures fiscales et légales pour notamment inciter les fonds de travailleurs et coopératifs à en faire, parce que vous le savez, qu'ils ont des obstacles, pour certains, dans leurs lois ou dans leurs budgets, et c'est difficile pour eux d'investir dans des fonds. Ils le font, mais... Ils sont prêts à en mettre plus, d'argent et à appuyer notre programme si les obstacles sont levés. Et on peut aussi penser à des mesures incitatives qui pourraient être développées pour qu'ils en mettent encore plus. Caisses de retraite, même chose, il faut regarder la fiscalité et certains aspects de la légalité pour les inciter à investir dans notre plan. Et les sociétés d'État, on pense que le programme, le 650 millions de dollars qui devrait venir du gouvernement pourrait être géré par une équipe spécialisée en fonds de fonds et qui permettrait de gérer ces argents-là.

Alors, en conclusion ? le temps presse ? notre industrie doit progresser vraiment vers une industrie de calibre mondial axée sur la performance. Il faut attirer les nouveaux bailleurs de fonds, il faut augmenter la taille de nos placements pour accroître la compétitivité de nos compagnies et il faut augmenter la part des investissements qui sont faits par des fonds privés. Puis on pense qu'avec la mise en place de notre plan on va réussir à atteindre ces objectifs-là. Ça prend des contributions financières des joueurs actuels. On pense que c'est les seuls, avec le gouvernement, qui peuvent nous aider à mettre ce plan-là en place, et il faut faire bien attention à la période de transition. Finalement, il faut que tout le monde travaille ensemble, et c'est ce consensus qu'on a commencé à bâtir dans l'industrie, et je peux vous dire que l'industrie est derrière nous ? d'ailleurs, nous sommes le porte-parole de l'industrie au Québec ? et on est prêt à travailler avec le gouvernement du Québec pour le mettre en place et atteindre la performance désirée.

Le Président (M. Paquet): Il vous reste encore 2 min 30 s s'il y avait des choses sur lesquelles vous vouliez...

Mme Thabet (Annie): Je peux peut-être juste faire quelques points sur certaines mesures qui nous ont été mentionnées par les fonds de travailleurs et coopératifs. Comme, par exemple, j'ai mentionné que, pour certains, ils ont des obstacles dans leurs lois. Ça, ça peut être assez... C'est une condition essentielle pour qu'ils puissent vraiment investir dans des fonds. Il y a d'autres incitatifs auxquels on pourrait penser. Comme, par exemple, pour chaque dollar qu'ils investiraient dans un fonds privé, on pourrait penser que 1,50 $ pourrait être alloué à des financements d'entreprises de plus grande taille, parce que vous savez qu'ils ont une limite aussi pour faire des grands investissements. Un autre incitatif pourrait être d'investir 1 $... Pour chaque dollar investi dans un fonds privé, il y aurait peut-être 1,50 $ de reconnu dans la règle du 60 %. Ça fait qu'il y a de multiples mesures comme ça qui sont un peu différentes peut-être de ce qui a été proposé par le groupe de travail. C'est une approche, je dirais, plus globale, parce que vraiment ce qui compte pour nous, c'est la capitalisation des fonds privés, comment on va arriver à attirer des bailleurs de fonds dans nos fonds, et il faut peut-être être créatifs et voir des exemples de comment ça se fait ailleurs pour arriver à réussir cela.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup.

Mme Thabet (Annie): Je vous remercie.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme Thabet. Alors, je cède la parole maintenant à M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche. M. le ministre.

M. Audet: Merci. Merci beaucoup, madame. Aussi, je salue tous vos invités, que je connais individuellement. Alors, je suis très heureux de vous rencontrer aujourd'hui. Vous avez souligné, madame, que c'était la première fois qu'il y avait une discussion effectivement sur le capital de risque. Je pense que c'est quelque chose d'important et je pense que c'est... Ne serait-ce que sur ce plan-là, je pense que si la discussion... au terme de cette réunion, on n'avait que réussi à faire comprendre aux gens, aux Québécois jusqu'à quel point c'est important, n'est-ce pas, de compter sur un capital de risque pour lancer des entreprises, je pense que ce serait déjà un actif important ou une retombée importante de cette commission.

Vos propositions. Évidemment, je voudrais souligner l'intérêt et la pertinence évidemment des objectifs que vous avez retenus évidemment, et particulièrement tendre vers une situation plus mature. Je signale cependant que, pour paraphraser mon collègue de Rousseau ce matin, c'est un virage majeur par rapport aux orientations aussi qui sont celles qu'on vit actuellement. Donc, je pense que ce qui est intéressant, c'est que vous ne vous êtes pas laissés enfermer dans les paradigmes actuels ou même les propositions du rapport Brunet, mais vous avez essayé d'imaginer d'autres choses. Donc, ça implique évidemment une réflexion assez approfondie, et notamment quant aux impacts évidemment fiscaux, les impacts également sur les régimes de retraite.

n(14 h 30)n

À ce sujet-là, j'avais une question peut-être à vous poser, compte tenu de votre connaissance de l'industrie et donc de l'analyse que vous avez faite. J'apprécierais que vous puissiez élaborer davantage sur les raisons qui peuvent expliquer, selon vous, la place moins importante qu'occupent les caisses de retraite dans le capital de risque au Québec comparativement à ce qu'on observe ailleurs au Canada ou aux États-Unis. Quelle est la... Parce que d'autres rapports nous évoquent ça aussi, et puis c'est une question qui revient souvent. Je pense que vous êtes bien placés pour nous donner votre perception de cette situation.

Le Président (M. Paquet): Mme Thabet.

Mme Thabet (Annie): Oui. Effectivement, je dirais que c'est la grande question à laquelle il faut répondre, nous, dans l'industrie, pour vraiment être capables d'aller chercher ces caisses de retraite là. Vous pouvez demander à des gestionnaires privés, ils vont vous dire toutes les questions qu'ils se font poser quand ils se présentent devant les caisses de retraite. Et je dirais que, au Canada et aux États-Unis, tout partout, la question qu'on se fait poser, c'est: C'est quoi, le rendement que vous avez généré, vous, dans votre fonds pendant les 10 dernières années, et c'est quoi, en bon français, votre «track record» de gestionnaires?

D'autre part, les caisses de retraite canadiennes et américaines utilisent beaucoup des conseillers ? on appelle ça des conseillers en allocation d'actifs ? pour se faire diriger vers les meilleurs fonds quand ils veulent faire un investissement dans un fonds privé. Et la majorité de ces conseillers ? là, on les appelle, encore en bon français, les «gatekeepers» ? ils sont situés aux États-Unis. Et, eux, ils évaluent et cotent différents fonds, surtout américains évidemment. Il y a très peu de fonds canadiens qui font partie de ces évaluations-là. Et donc, résultat, c'est une caisse canadienne qui demande à cet expert en allocation d'actifs: Dans quel fonds devrais-je investir? Bien, évidemment, ils vont se faire référer vers des fonds américains.

L'autre chose, c'est que, pour faire un investissement dans un placement privé pour une caisse de retraite que je dirais de taille moyenne... Je ne parle pas évidemment des caisses importantes comme la Caisse de dépôt ou les grosses caisses en Ontario, Teachers' ou OMERS qui, elles, sont très sophistiquées et ont des gros groupes de placement privé. Ils font beaucoup de placements privés. Mais toutes les autres petites, il y en a quelques-unes qui font pas mal de capital de risque. Mais typiquement, pour faire du placement privé, ils ont besoin d'une ressource additionnelle à l'interne pour évaluer les placements privés. Ce n'est pas comme faire un investissement sur les marchés boursiers, les marchés financiers, et ça prend une certaine taille pour arriver à faire ça. C'est pour ça qu'il y a le mécanisme de fonds de fonds.

Un fonds de fonds, c'est un fonds qui a comme mission d'investir dans d'autres fonds, O.K.? Et c'est pour ça que souvent ce mécanisme-là aide beaucoup les caisses de retraite pour venir faire des investissements dans le placement privé quand ils n'ont pas, ces caisses-là, les ressources à l'interne.

On a quelques caisses de retraite au Québec, hein, qui en font, du placement privé, mais il n'y en a vraiment que quelques-unes. Et, pour celles qui le font, ils investissent à peu près 3 % de leur portefeuille dans le placement privé. Si on regarde aux États-Unis, souvent, ils vont mettre entre 6 % et 8 %, ces caisses-là, dans le placement privé. Alors, on a beaucoup de business à aller chercher, si je peux m'exprimer ainsi, et il faut vraiment les travailler, les caisses de retraite.

Il y a beaucoup d'études qui sont faites ces temps-ci à l'échelle nationale pour essayer d'identifier c'est quoi, les problèmes des caisses de retraite, qu'est-ce qu'on peut faire pour aller les chercher. Il va falloir travailler très fort tous ensemble pour les convaincre qu'on a des très bons gestionnaires de fonds au Canada et au Québec, hein? Parce que, en passant, c'est un phénomène canadien ? non pas seulement québécois ? cette situation des caisses de retraite, et on travaille, oui, de concert avec l'Association canadienne du capital de risque pour arriver à les convaincre.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Mme Thabet. M. le ministre.

M. Audet: Dans la présentation que vous faites, vous faites allusion évidemment à la participation beaucoup des mesures fiscales mais des fonds spécialisés, particulièrement les fonds des travailleurs, évidemment le Fonds coopératif. Comment voyez-vous les... Parce que, déjà, ils peuvent le faire. En fait, qu'est-ce qui fait qu'actuellement ils ne s'associent pas à ce type de mécanisme pour créer des fonds de fonds, comme vous dites, là, puis qui ferait... Est-ce que ça prendrait des mesures réglementaires? Quelle serait la décision qu'il faudrait faire là-dessus pour l'amener, ce virage-là, que vous proposez?

Le Président (M. Paquet): M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Maurice): Oui. Bonjour. Écoutez, ils le font déjà. Si on a des fonds spécialisés aujourd'hui, c'est parce que le Fonds de solidarité, dans les années 1990-1991, a, avec la Caisse de dépôt, lancé finalement ce type de fonds au Québec. On a lancé les fonds régionaux aussi, mais parlons des fonds spécialisés privés parce que c'est de ces fonds-là qu'on parle aujourd'hui. Ça se fait. Ça a ses limites aussi en termes de participation. Parce que je me rappelle le premier fonds que le Fonds de solidarité avait fait, c'était 100 % de participation; ce n'est pas ce qu'ils veulent non plus. Donc, si on dit que ça prend une participation maximale d'à peu près 15 % et 20 %, bien là ça prend plus qu'un joueur pour faire un fonds; ça prend aussi la taille des fonds plus importante. Donc, ils le font à l'heure actuelle, il y a certains fonds dans leur législation ? et ça a été débloqué de toute façon, tout à fait récemment ? qui peuvent maintenant faire du fonds de fonds, et il y a aussi la fameuse législation que, dans 60 %, si jamais ce fonds spécialisé là, pour un investissement stratégique, doit aller traverser la frontière, bien là c'est... il y a le miroir corporatif, qu'on appelle, et il décline jusque dans le rapport final. Donc, ça fait des petits emmerdements, je dirais, qui fait que ça demande plus de gymnastique aussi au niveau des fonds privés.

Donc, ils le font déjà, et ce qui est important aussi avec la notion de fonds privés, c'est la notion, je dirais, de développer des équipes, des gestionnaires, des équipes de gestionnaires de capital de risque au Québec qui, eux aussi... Parce que ? j'entendais, ce matin ? il y a les investissements étrangers au Québec où on a un déficit. Bien, si on développe des équipes, de fortes équipes au niveau privé, eux vont être capables d'aller chercher des fonds aussi américains pour être investis au Québec. Parce qu'il y a certains fonds américains qui vont venir investir au Canada, au Québec, mais ils ne le feront pas de façon systématique.

Par contre, s'ils ont confiance dans une équipe de gestion au Québec, ils vont pouvoir finalement nous confier des fonds au Québec pour qu'ils soient investis au Québec. Et ça, je dois vous dire que, si, cette année, au Québec, le seul secteur qui est en hausse, c'est le secteur en biotechnologie ? et c'est seulement au Québec qu'il est en hausse par rapport au reste du Canada ? mais c'est parce que les Américains... Et on a remarqué que c'est surtout les investisseurs privés qui ont continué à investir dans ce secteur-là. Donc, on a des atouts, il faut juste avoir des équipes pour leur vendre nos atouts.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme.

Mme Normandeau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, madame, messieurs, bienvenue. Petite question. À la page v du sommaire de votre mémoire, une affirmation qui me préoccupe parce que je porte le chapeau de responsable du Développement régional.

Ce matin, dans nos échanges avec les représentants du groupe de travail, on a beaucoup insisté sur la notion liée à l'équité et l'accessibilité au capital de risque, notamment pour les entreprises qui sont situées en région. Et vous affirmez, vous me permettrez de vous citer: «Concernant les fonds d'initiatives régionales, nous sommes préoccupés par la faible rentabilité de fonds qui ne disposent pas d'une masse critique adéquate en termes de dollars.»

Alors, évidemment, à partir d'une affirmation comme celle-là et sur la proposition que vous formulez cet après-midi qui est celle, entre autres, d'améliorer tout le portefeuille que le Québec peut disposer au niveau du capital de risque, comment s'assurer effectivement qu'on puisse répondre à cet impératif qu'on a exprimé ce matin, que plusieurs parlementaires ont aussi exprimé par rapport à l'accessibilité, entre autres, du capital de risque en région. Et je vous ai cité, ce matin... Vous faisiez référence tout à l'heure, madame, à une étude ? Mme Thabet ? à une étude du Monitor Associates ? c'est ça, je pense ? concernant le capital de risque qui... il y a seulement 12 % du capital de risque qui s'en va en région. Alors, c'est une étude que votre réseau a publié, je pense, il y a quelques semaines ou quelques mois...

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre.

Mme Normandeau: ...alors, dans ces conditions-là ? oui ? dans ces conditions-là, j'aimerais peut-être un peu... connaître un peu la préoccupation du réseau en regard de cette dimension-là, régionale, qui est importante.

Le Président (M. Paquet): Petit problème technique. Présentement, le premier bloc de 10 minutes est écoulé. Alors, à moins que l'opposition consentirait qu'elle pourrait répondre brièvement? Réponse courte. Est-ce qu'il y a consentement?

M. Legault: En autant qu'on ne perde pas notre temps il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Paquet): Non, non, non. Effectivement, on va le prendre sur le temps de la présidence, si c'est bref, ou prendre le temps du gouvernement. Alors, Mme Thabet, rapidement, s'il vous plaît.

M. Thabet (Annie): Oui.

Le Président (M. Paquet): Oh! M. Prud'homme, pardon.

M. Prud'homme (Maurice): Bon. Concernant la première question et notre préoccupation sur des fonds de 3 millions, de taille de 3 millions, par expérience, rentabiliser un fonds de 3 millions, c'est assez difficile. Elle est là, notre préoccupation. À moins que ce soit géré de façon gratuite. Mais on n'avait pas beaucoup de détails au niveau du rapport. Donc, on a trouvé ça important de souligner que ça pouvait être... Comme experts de l'industrie, un conseil qu'on a à vous donner, c'est que des fonds de 3 millions, gérer un fonds de 3 millions, ça coûte de l'argent et c'est difficilement rentable. C'est notre préoccupation.

n(14 h 40)n

À la lumière des discussions qu'on a, bon, il peut y avoir du bénévolat pour les gérer. Par contre, ça n'assure pas, ces fonds-là, que l'ensemble de la région va pouvoir y avoir accès, hein? Ce que j'ai compris, c'est des fonds d'initiatives. Donc, à partir de là, il pourrait y en avoir cinq, mais les cinq pourraient investir dans la même ville. Donc, en termes, je dirais, d'accessibilité pour la région, moi, je suis de ceux qui doivent... de l'école qui... où on doit offrir un service, mais que le service peut être offert, réalisé de façon différente d'une région à l'autre, selon les besoins.

Quant au 12 %, je vous dirais que... peut-être une réponse plate, mais c'est... je pense que le capital de risque va aller où il y a des demandes puis où il peut investir. Parce que, dans une vie antérieure, j'étais au Fonds de solidarité, on n'a jamais limité le pourcentage d'investissement qui devait aller dans les régions. On a mis des infrastructures en place pour que les entrepreneurs aient accès à du capital. Desjardins le fait aussi et le fait bien. Donc, c'est des joueurs qui le font bien. Fondaction le fait, mais ce n'est pas, je dirais, une vision de l'esprit qu'on bloque l'investissement en région.

Le Président (M. Paquet): Merci.

M. Prud'homme (Maurice): Il y a peut-être un travail de...

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Maurice): Merci.

Le Président (M. Paquet): Alors, la parole maintenant est au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'économie et de finance, M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Mme Thabet, M. Hamel, M. Prud'homme, M. Denis, merci pour votre présentation et... Bien, pour aller rapidement aux questions, quand on regarde le rapport qui est l'objet, là, de la commission aujourd'hui, on voit, quand on additionne ce qui est proposé, autant au niveau de la SGF, des Innovatech, des fonds locaux, qu'on propose de retirer 160 millions de fonds qui viennent du gouvernement et, de l'autre côté, on propose d'ajouter dans différents fonds 67 millions et que le reste, donc 93 millions, soit comblé par le privé.

Je voudrais avoir votre opinion pour savoir le réalisme de cette proposition. Là, on parle d'une période de trois ou quatre ans. Dans le mémoire qui avait été présenté par Réseau Capital à M. Brunet, M. Miron, votre prédécesseur, disait que ce n'était pas réaliste, qu'on ne pouvait... que le Québec, au niveau du privé, était beaucoup trop petit pour combler le vide et que l'impact, si on allait de l'avant, serait dramatique.

Je voudrais savoir, là, votre point de vue. Est-ce que vous pensez que, en l'espace de trois ou quatre ans, c'est réaliste de penser que le secteur privé peut combler tout près de 100 millions de dollars de capital de risque au Québec?

Le Président (M. Paquet): Mme Thabet.

Mme Thabet (Annie): Bien, je pense que c'est là la question encore une fois du financement des fonds privés. Aller chercher 93 millions de dollars dans le privé, c'est très difficile aujourd'hui. C'est qui, les privés qui peuvent investir dans des fonds? Encore une fois, si on exclut le gouvernement, si on exclut les fonds de travailleurs, si on exclut les sociétés d'État, c'est qui, les autres? C'est les caisses de retraite qui sont supposées venir puis... Je pense qu'on vous a expliqué tantôt qu'elles ne sont pas là aujourd'hui. Elles ne peuvent pas injecter rapidement ces sommes-là. Et c'est pour ça que, nous, on a proposé plutôt notre plan qui est sur sept ans et qu'on bâtit tranquillement la confiance des bailleurs de fonds traditionnels. Et on les amène dans le système année après année vraiment en les faisant venir un à un. Et, entre-temps, ce qu'on dit, c'est qu'il faut que nos joueurs actuels ? les fonds de travailleurs coopératifs et le gouvernement ? investissent dans nos fonds.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Dans les propositions que vous faites que... une des propositions importantes, c'est de créer des fonds de fonds, comme vous disiez tantôt, là, entre autres spécialisés, entre autres un, et qu'entre autres le gouvernement et les fonds de travailleurs investissent dans ce fonds de fonds. Bon.

On sait déjà, là, pour avoir lu les mémoires de certains fonds de travailleurs, qu'ils sont en désaccord avec un investissement, là, dans un fonds consolidé. Mais je vais aller plus loin que ça, là. Concernant les objectifs, vous le disiez tantôt vous-même, Mme Thabet, le gouvernement, puis jusqu'à un certain point ? puis je sais que M. Prud'homme connaît ça aussi très bien pour avoir été un des fondateurs du Fonds de solidarité ? même le fonds des travailleurs, entre autres celui de la FTQ, a des préoccupations concernant l'emploi, soit la protection et le développement de l'emploi. Ce n'est pas le cas du côté privé.

Comment vous pensez qu'on peut concilier des objectifs de rendement qui sont définis très différemment, entre autres par le gouvernement puis même les fonds des travailleurs, avec des objectifs strictement de rentabilité des sociétés de capital de risque privées dans un même fonds? Comment vous pensez qu'on peut réconcilier ces objectifs qui sont très différents?

Le Président (M. Paquet): Mme Thabet ou M. Hamel?

M. Hamel (Bernard): Oui. O.K. Bon. Alors... Bon, moi, je fais partie de l'espèce en voie de disparition, donc les fonds spécialisés privés. Et donc comment on concilie rendement et objectifs multiples? Il y a différentes façons.

Ce qu'on parle ici, dans le plan de Réseau Capital, c'est de faire en sorte que les fonds de travailleurs, dans le cadre de leur milliard de dollars qu'ils lèvent à tous les ans dans le public, qu'ils allouent 10 % à 15 % de ce capital-là vers des fonds spécialisés privés. Ces fonds spécialisés privés là, comme disait Mme Thabet, définiront eux-mêmes leur propre mandat, leur propre créneau de spécialité dans la chaîne de financement et évidemment ont un objectif uniquement de rendement.

Le fonds de travailleurs qui, dans le cadre de ce plan stratégique de capitalisation des fonds privés, décide d'investir dans le fonds privé A qui a une spécialité Y dans tel domaine évidemment, par définition, laisse l'équipe de gestion totalement autonome dans ses décisions d'investissement, dans ses plans de suivi des entreprises, et tout ça. Donc, lui, comme fonds de travailleurs, devient un souscripteur comme tout autre souscripteur qui pourrait être une caisse de retraite ou autres et obtient le rendement de ce fonds spécialisé là au même titre que les autres souscripteurs dans ce fonds-là obtiennent si c'est les caisses de retraite ou des banques ou des compagnies d'assurance.

Donc, il n'y a pas, je dirais, de conflit, puisque c'est clair que le fonds spécialisé privé a une cible commerciale, un segment spécialisé, un objectif de rendement, et le Fonds de solidarité, exemple, si c'est l'entité, bien, bénéficie de cette stratégie-là. Et, d'ailleurs, comme disait M. Prud'homme, c'est un phénomène qui est en place depuis plusieurs années parce que le Fonds de solidarité et le Fondaction aussi d'ailleurs ? pas Desjardins ? ont déjà investi dans des fonds spécialisés privés. Donc, c'est une pratique qui existe déjà, mais qui a beaucoup d'embûches. C'est un jeu de chat et la souris, là, d'essayer de trouver des façons de le faire.

Alors, ce qu'on dit, c'est: Il faudrait faire un virage à 180 degrés, de la part du gouvernement, pour dire: Plutôt que d'envoyer un signal de dire que c'est mauvais que les fonds de travailleurs et les fonds coopératifs investissent dans les fonds spécialisés privés, il faudrait changer le vent de bord puis dire: Non, c'est très bon. Allons-y. C'est positif. C'est dans le cadre d'une stratégie à long terme qui va faire en sorte qu'on va avoir une industrie de capital de risque performante qui va réussir à aller chercher le milliard de dollars des caisses de retraite qui actuellement sont sur les tablettes puis qui ne sont pas au travail dans l'industrie.

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. Ce que je comprends, c'est que c'est possible de rejoindre certains objectifs, et puis je pense que personne n'a... Même le gouvernement du Parti québécois qui avait, entre autres, proposé la création de Bio-Levier, était d'accord pour voir des partenariats, sauf qu'on ne pourra jamais remplacer complètement le rôle, entre autres, d'un Investissement Québec qui a besoin, dans certaines régions, d'investir.

Puis ce sera ma dernière question, puis je voudrais peut-être m'adresser à l'ancien président d'Investissement Québec, M. Prud'homme, profiter de sa présence ici pour poser une question sur Investissement Québec. Dans le rapport Brunet, on propose que, sans injection de fonds dans Investissement Québec, donc sans capitalisation d'Investissement Québec, un objectif d'autofinancement d'ici quatre ans... Je voudrais savoir, de la part de M. Prud'homme, si c'est réaliste de viser un autofinancement sans capitaliser Investissement Québec.

Le Président (M. Bertrand): M. Prud'homme, sans vous mettre...

M. Prud'homme (Maurice): Je tiens juste à préciser que je ne suis pas ici comme ancien vice-président...

Le Président (M. Bertrand): ...sans vous mettre dans l'embarras.

M. Prud'homme (Maurice): ...d'Investissement Québec. Mais, écoutez, quand on regarde le modèle, parce que, l'autre modèle, le modèle de référence, c'est le modèle de la BDC, hein? On sait que la BDC, c'est un fonds qui s'autosuffit, qui génère des profits et donc qui a une structure de capital. Le gouvernement fédéral a capitalisé à de nombreuses reprises la BDC, donc fait en sorte que la BDC dispose de son capital propre pour pouvoir prêter, donc ce qui fait en sorte qu'elle génère des profits sur son capital et donc peut... ce qui est tout à fait l'inverse chez Investissement Québec.

Si on regarde le taux de capitalisation chez Investissement Québec ? puis vous avez juste à prendre les états financiers, vous allez le voir ? versus celui de la BDC, ça m'apparaît assez difficile d'arriver à cette gymnastique-là, surtout qu'en plus Investissement Québec joue des rôles de développement économique que la BDC n'a pas.

M. Legault: Ce que je comprends ? puis je termine là-dessus puis je vais passer la parole à mon collègue ? ce que j'en comprends, là, de la réponse de M. Prud'homme, c'est que, sans injecter des centaines de millions dans la capitalisation d'Investissement Québec, c'est impensable de rejoindre l'objectif d'autofinancement d'Investissement Québec.

M. Prud'homme (Maurice): En tout cas, peut-être que mon successeur aura plus d'idées, et je lui souhaite bonne chance.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bertrand): M. le député de Johnson, vous avez un problème: une minute, question et réponse.

M. Boucher: Bien non, ce problème-là, on l'a résolu tout à l'heure pour Mme la ministre déléguée. Alors.

Le Président (M. Bertrand): C'est nous qui faisons la comptabilité.

M. Boucher: Excusez.

n(14 h 50)n

Le Président (M. Bertrand): Posez votre question, et je me charge de la comptabilité.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boucher: À la page v du résumé de votre mémoire, là, vous dites, et je cite: «Concernant les mesures proposées pour le financement en haute technologie...

Une voix: La même chose.

M. Boucher: ...pour les entreprises en situation d'amorçage ou de démarrage, nous pensons qu'elles auraient plus d'impact si elles s'adressaient aux sociétés de valorisation de la recherche universitaire qui interviennent déjà aux toutes premières étapes de l'amorçage.»

Est-ce que je me trompe ou vous faites un clin d'oeil, là, au gouvernement du PQ qui avait mis en place Valorisation-Recherche Québec?

Le Président (M. Bertrand): Mme Thabet.

M. Boucher: Je vous pose la question, Mme Thabet.

Le Président (M. Bertrand): Je m'excuse. Mme Thabet.

Mme Thabet (Annie): Pour une fois, j'attendais qu'on me donne la parole.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boucher: Mais vous prépariez votre réponse, je suppose.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Thabet (Annie): Bien, j'aime ça faire des clins d'oeil aussi, mais...

Le Président (M. Bertrand): On aime ça en recevoir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Thabet (Annie): En fait, nous, on a... Pour nous, pour l'industrie, l'amorçage et le démarrage, c'est très différent, hein? L'amorçage, c'est vraiment ce qui se passe au niveau des technologies qui sont issues des universités, et il y a vraiment une période, là, où c'est... On amorce, on essaie de voir si on a quelque chose à faire avec ça et justement on a déjà plusieurs sociétés de valorisation de la recherche universitaire qui sont là.

Alors, nous, on propose dans le fond de dissocier l'amorçage du démarrage. Et l'amorçage, ce qu'on suggère, plutôt que de faire un fonds mixte pour financer l'amorçage, on dit: Bon, on devrait plutôt... le gouvernement pourrait capitaliser à nouveau ces sociétés-là ou en capitaliser des nouvelles, peu importe. Tu sais, ça pourrait coûter peut-être, je ne sais pas, 50 millions de dollars sur cinq ans pour ces sociétés de valorisation. Le démarrage, on le met à part et on l'inclut dans notre plan global, là, d'investissement stratégique pour la capitalisation des fonds privés.

Le Président (M. Bertrand): Merci, et vous continuerez sur la prochaine période. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Paquet: Merci, M. le Président. Un des éléments importants quand on regarde l'évolution justement du capital de risque de l'industrie ? puis, d'abord, je veux vous féliciter pour le mémoire que vous avez présenté, qui est fouillé, qui est documenté, qui parle de la réalité d'ailleurs, d'où on peut essayer maintenant de tirer des leçons pour le mieux de cette industrie, qui est un élément important de la croissance de l'économie du niveau de vie des Québécois ? c'est qu'on remarque que, dans les années précédentes, par exemple, alors que la part du capital de risque... On a environ... 50 %, bon an mal an, du capital de risque sous gestion au Canada est au Québec. Ça a atteint plus haut que ça certaines années, comme je vous l'ai mentionné, puis ça a déjà été un petit peu plus bas ? 46 %, je crois ? en 2000. Et là c'est 57 %, je crois, le chiffre que vous mentionnez, là, pour l'année passée. Mais, en même temps qu'on a autant de capital de risque sous gestion au Québec, la part de capital de risque investi au Québec, dans l'ensemble canadien, qui était autour de 27 % en 1999, a, malgré toutes les mesures qui ont été poursuivies par le gouvernement précédent dans les dernières années, chuté jusqu'à 21 % en 2000 ? et je ne sais pas le chiffre le plus récent. Vous dites que 2000 était une bonne année: 1,5 milliard, c'est ce que vous disiez dans votre présentation. Il y avait une chute de 27 % à 21 % d'investissements en capital de risque du Québec dans l'ensemble canadien. Alors, on voit qu'il y a quelque chose... il y a une inadéquation très claire, là, entre une partie des résultats et le capital de risque qui est présent.

Il y avait une étude de McKinsey et compagnie, que j'avais citée moi-même, dans un article dans Le Devoir en 2001, qui disait, et, de mémoire, que... Je parlais d'une situation préoccupante qui découlait, d'une part, du fait que trop peu... «trop de capitaux [qui poursuivaient] peu de bonnes occasions» ? ce n'est pas moi qui parle, là, mais c'était l'étude ? de «trop d'entreprises financées avec des valorisations difficiles à justifier», d'une «surabondance de joueurs ? qui étaient ? parfois inexpérimentés» ? ce n'est pas un blâme sur les joueurs, là, c'est une industrie qui est en croissance, en transformation, en maturation, mais c'était quand même le cas ? et de «plusieurs nouveaux investisseurs [qui avaient] des horizons de temps et des attentes ? parfois ? déraisonnables».

Alors, dans ce contexte-là, ma question, c'est comment justement dire: Bien là, étant donné que les résultats n'étaient pas là avec la façon qu'on s'y est pris dans le passé... Vous suggérez certaines pistes dans votre mémoire. Une des préoccupations, je crois, qui en découle aussi, c'est comment faire venir aussi des investisseurs, des gestionnaires expérimentés de l'étranger, en provenance de l'étranger, qui pourraient venir accélérer l'émergence et la maturation... la continuation de la maturation de l'industrie ici, au Québec.

Le Président (M. Bertrand): Mme Thabet.

M. Hamel (Bernard): Bon.

Le Président (M. Bertrand): M. Hamel?

M. Hamel (Bernard): Alors, au niveau des statistiques, là, capital suggestion, capital déboursé, c'est certain qu'il y a toujours un décalage entre la statistique de capital puis la statistique de déboursé. Idéalement, on dirait: L'argent qui rentre dans les fonds une année ressort la même année. Mais il y a des phénomènes où est-ce que parfois le marché fait en sorte qu'on rentre du capital, mais les opportunités ne sont pas là, donc il y a une certaine accumulation de capital qui se produit. Donc, c'est difficile de toujours équilibrer la capitalisation avec le déboursé.

Idéalement, sur un horizon d'à peu près trois à cinq ans, ça s'équilibre, mais, si on prend la statistique, des fois, par année, c'est difficile à équilibrer. Alors, ça, c'est la partie statistique.

Au niveau de, je dirais, de... le fameux débat, est-ce qu'il y a plus de projets d'argent, de projets, etc., à l'échelle canadienne puis à l'échelle québécoise aussi, si on fait abstraction de l'amorçage, au niveau du démarrage, il s'investit en termes relatifs à peu près deux fois, deux fois et demie plus en démarrage au Québec et au Canada qu'aux États-Unis, en termes relatifs. Donc, le marché de l'amorçage est peut-être en panne, là, avec ce qu'on a discuté tantôt au niveau des universités, ces choses-là, mais, au niveau du démarrage, il y a quand même une bonne activité qui est là.

Où le bât blesse, c'est au niveau des plus grandes transactions, puis on parlait des transactions, en moyenne, de moins de 3 millions de dollars dans les entreprises québécoises, alors qu'ailleurs au Canada puis aux États-Unis on parle de transactions de plus de 5 et plus de 10 millions de dollars en moyenne, et c'est là que ça fait un écart. C'est que, si nos transactions moyennes sont plus petites, veux veux pas, le capital sort moins rapidement.

C'est un problème qu'on sous-estime. Selon moi, c'est un orage qui va nous frapper dans quelques années, parce que ça veut dire que les entreprises québécoises globalement sont moins bien capitalisées que leurs compétiteurs, en technologie entre autres, à l'extérieur du Canada ou à l'extérieur du Québec. Et on voit... Actuellement, dans nos statistiques, on ne le voit pas, ça, mais c'est... on met à risque notre potentiel technologique.

Et comment faire pour avoir des plus grosses transactions dans les compagnies québécoises? Bien, c'est d'avoir, un, des fonds plus gros qui servent des créneaux spécialisés, comme on le prétend dans notre plan. Puis, deuxièmement, bien, les fonds de travailleurs, comme on disait, si eux veulent jouer à la balle dans la capitalisation des fonds spécialisés privés, leur donner l'opportunité peut-être de donner un petit peu plus de place pour investir dans des plus grandes entreprises, là ? leur fameuse règle du 20... 50 millions, là ? leur permettre de faire des transactions un petit peu plus grosses. C'est sûr aussi que le rapport Brunet parle de la SGF, de faire des transactions plus grosses. Je pense que ça, ça rentre bien également dans cette dynamique de transactions plus grosses.

Le Président (M. Bertrand): Merci. M. le député de Laval.

M. Paquet: Très rapidement, juste un point par rapport aux statistiques ? c'est plus ce qui me préoccupait ? c'est la tendance de réduction de la part du capital d'investi dans le capital de risque au Québec dans l'ensemble canadien. Ce n'était pas l'adéquation de la même année mais la tendance qui était... en tout cas, sur cinq ans, qui était... elle n'était pas favorable.

Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie, M. le député de Laval. M. le député de Roberval, il vous reste 2 min 30 s, question et réponse.

M. Blackburn: Alors, merci beaucoup...

Le Président (M. Bertrand): ...réponse aussi.

M. Blackburn: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je vais devoir être très bref. D'abord, juste pour... Vous savez que la commission parlementaire nous permet de pouvoir avoir des échanges et certainement de pouvoir amener des faits qui sont véhiculés, qui ne sont pas toujours les faits exacts.

Tantôt ? M. Prud'homme, ma question s'adresse à vous particulièrement ? mon collègue de Rousseau a bien sûr mentionné le fait de l'autofinancement d'Investissement Québec, entre autres ramener ça sur quatre ans. Mais ce que le document ? le rapport Brunet ? mentionne, c'est l'autofinancement des coûts d'exploitation ramené sur une base de quatre ans. Et, dans ce contexte-là, est-ce que le rapport est dans le champ ou il y a quelque chose qui peut être réalisable, en parlant des coûts d'exploitation sur Investissement Québec?

Le Président (M. Bertrand): M. Prud'homme, en deux minutes.

M. Prud'homme (Maurice): Oui. Mais ma réponse s'adressait aux coûts d'exploitation. J'avais lu le rapport, là...

M. Blackburn: C'était juste pour ramener...

M. Prud'homme (Maurice): Oui. Mais c'est parce que, dans le fond, il faut générer... c'est 25 millions de profit qu'il faut faire, là.

M. Blackburn: ...

M. Prud'homme (Maurice): Bon. Écoutez, je ne suis pas là pour faire le plan, là, mais, moi, ça m'apparaît difficile. N'importe quelle entreprise à qui on demande de jouer comme le privé, on doit les capitaliser comme le privé. Donc, une banque, c'est capitalisé, des fonds d'investissement, des... Il y a des... Il existe des fonds privés qui font ? semblables ? le même travail en termes de prêts, des prêts mezzanine, tout ça, comme on fait chez Investissement Québec, mais ils sont capitalisés en conséquence. Donc, je pense, si on veut avoir des règles qui s'appliquent, on joue les mêmes règles du jeu. C'est ce que je veux dire, c'est tout.

M. Blackburn: Mme Thabet, juste pour un dernier petit point d'information par rapport aux fonds privés, aux fonds de retraite. Vous avez certainement dû avoir l'occasion de consulter ces différentes organisations là au cours des derniers mois, des dernières semaines, parce que vous semblez être très certaine que ces fonds-là vont investir. Et une question qui me vient à l'esprit ? lorsqu'on parle de capital de risque, on parle plus de risque justement, donc nécessairement qu'il peut y avoir des pertes, comment concilier la vocation des fonds de retraite qui devraient être normalement plus sécuritaires?

Le Président (M. Bertrand): En 25 secondes.

n(15 heures)n

Mme Thabet (Annie): Bien, je pense que le mandat des gestionnaires de caisses de retraite est uniquement de faire du rendement. Je peux vous donner des exemples. Vous avez vu les rendements de la Caisse de dépôt, la semaine dernière, à 15 %. Vous avez vu le rendement de Teachers', qui a une très grande proportion investie dans le placement privé, 18 %, les caisses qui se démarquent souvent sont celles qui font du placement privé, et ce n'est pas incompatible avec leur objectif.

Le Président (M. Bertrand): Je vous remercie. M. le député de Blainville.

M. Legendre: Oui, merci, M. le Président. Alors, à mon tour de saluer Mme Thabet et nos invités. Vous avez dit, d'entrée de jeu, Mme Thabet: L'objectif, quand on parle ici aujourd'hui, dans votre cas, de capital de risque, c'est le rendement sur investissement. Et même... vous avez même dit que c'est même peut-être quasiment un petit peu en opposition à développement économique pur. Et, plus tard, vous avez dit: Bien, on a trois objectifs. Il faut faire en sorte qu'on attire de nouveaux bailleurs de fonds, qu'on augmente les investissements qu'ils font et puis qu'il y ait plus de privé. Et là, bien, d'un point de vue région, d'un point de vue développement régional, capital de risque, j'essaie de me dire: bon, comment on applique ça en région?

Tout à l'heure, M. Prud'homme mentionnait: Dans le fond, il n'y a rien qui empêche le capital de risque d'aller en région. Le capital de risque va aller là où dans le fond ça va marcher, là où ça va être rentable. Vous disiez également que vous avez vos réserves sur ce qui a été prévu dans le rapport Brunet d'arriver avec un fonds d'investissement régional de l'ordre de 3 millions par région, dont 1 million du privé. Alors, la question qui me vient à l'esprit, au bout de tout ça, et suite à votre présentation: comment on fait? Comment on fait pour que capital de risque, augmenté avec tous les objectifs que vous avez là, comment on fait pour que capital de risque il y ait de plus en plus en région?

Le Président (M. Paquet): Mme Thabet ou M. Prud'homme.

M. Prud'homme (Maurice): Écoutez, le capital de risque, il est en région à l'heure actuelle. Desjardins, Investissement Québec... Investissement Québec est là, mais Desjardins, le Fonds de solidarité sont en région, offrent des capitaux. Et je n'ai jamais vu, chez Desjardins ou chez le Fonds de solidarité, des barrières, là, à avoir. C'est sûr qu'il n'y a pas une diversité, là, de l'offre. Mais, si on développe des équipes spécialisées au Québec ? ça ne veut pas dire qu'il faut les... que chaque région ait son fonds spécialisé, là... Mais, si on développe des équipes spécialisées, ce n'est pas juste pour desservir un petit territoire, là, dans notre esprit, là, ils desservent le Québec.

Mais ce qui est important, pour nous, chez Réseau Capital, c'est que toute la chaîne d'investissement soit... qu'il y ait quelqu'un qui offre... qu'elle soit toute couverte par une offre. Et, à l'heure actuelle, on pense que, avec la structure qu'il y a en région, je pense, que l'offre est quand même assez bien servie.

M. Legendre: Est-ce que vous pouvez un petit...

Le Président (M. Paquet): Oui, M. le député de Blainville.

M. Legendre: Pardon, monsieur... Est-ce que vous pouvez élaborer un petit peu sur cette notion d'équipe spécialisée? Ça veut dire quoi, dans le fond, les fonds spécialisés, là?

M. Prud'homme (Maurice): Bon, je vais laisser parler mon collègue.

M. Hamel (Bernard): Si on parle de région, je dirais que, au-delà de ce que M. Prud'homme parlait, des fonds de solidarité régionaux, et tout ça, il y a une composante qui manque. Si vous regardez aux États-Unis, 60 % des transactions que les capitaux de risque américains font, dans 60 % des compagnies qu'ils investissent, il y a ce qu'on appelle des «angels», des individus fortunés qui ont investi dans l'entreprise, dans son démarrage, puis là, un peu plus tard, le fonds... le capital de risque arrive. Au Canada puis au Québec, c'est 10 %. Ça, ça veut dire quoi? C'est que, dans notre chaîne, les «angels», au Canada, au Québec, sont peu présents. Alors, c'est certain que, si on avait, quand on parle, exemple, d'une région, des mesures qui feraient en sorte que les individus fortunés dans ces régions-là, les gens d'affaires puissent être, entre guillemets, motivés, encouragés à faire du «angel investment» et qui feraient en sorte que ces entreprises-là sont amorcées, sont lancées, bien déjà ce serait une amélioration dans la chaîne de valeur de financement. Puis, comme disait M. Prud'homme, il y a déjà des fonds en place, là, les fonds régionaux, tout ça, qui pourraient prendre la relève. Alors, ça, je dirais qu'il y a cet aspect-là qui serait à améliorer, la présence des investisseurs providentiels, en français, ou «angel investors» dans la... que ce soit en région ou en centre urbain, là, c'est la même dynamique.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Blainville.

M. Legendre: Question un peu simpliste: est-ce qu'il ne se pourrait pas qu'on ait un peu moins d'anges au Québec qu'aux États-Unis, là?

M. Hamel (Bernard): Ah, définitivement, mais ça...

Des voix: ...

M. Hamel (Bernard): ...mais est-ce que c'est de dire que c'est à 60 %, je ne le sais pas, là, mais...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Johnson.

M. Boucher: Vous avez fait un autre constat, Mme Thabet. Vous avez dit qu'il y avait peu d'investisseurs étrangers. Et, dans le journal La Presse du 18 février, vous disiez ceci,  et je vous cite: «Entre-temps, Réseau Capital affirme que le milieu a encore besoin des fonds publics pour assurer une "saine transition". Dans cette optique, on souhaite que le gouvernement Charest se branche au plus tôt sur son rôle et celui des sociétés d'État, comme la Société générale de financement ou Innovatech. "Le climat actuel crée de l'incertitude, c'est pas bon"», déploriez-vous à ce moment-là.

Alors, ma question: Pouvez-vous être plus précise? Depuis combien de temps sentez-vous ce climat d'incertitude sur le terrain? Et quels sont les impacts directs et indirects sur l'économie du Québec?

Le Président (M. Paquet): Mme Thabet.

Une voix: ...

Mme Thabet (Annie): Question intéressante. Bien, écoutez, on a fait le constat dans l'industrie que notre industrie est très concentrée dans les mains de quelques joueurs seulement. Principalement, là, 90 % des fonds sont dans les mains de quelques institutions. Quand on parle de remettre en question l'avenir de deux de ces institutions-là ? puis je compte Innovatech et SGF, puis Innovatech, on sait qu'il y a plus qu'une Innovatech, là ? c'est sûr que ça paraît pour les entrepreneurs, parce que, là, il y a déjà deux joueurs importants vers qui ils peuvent difficilement se tourner.

D'autre part, il y a des compagnies qui ont été financées par ces sociétés d'État là, et ces compagnies-là nous disent qu'elles sont un peu inquiètes à savoir: Est-ce que leurs actionnaires vont continuer de les supporter? Et quand est-ce que la table va être mise et qu'on saura exactement à quoi s'en tenir?

Le Président (M. Paquet): 2 min 30 s, M. le député de Johnson.

M. Boucher: Vous disiez d'ailleurs, en parlant des investisseurs étrangers, qu'ils ne reconnaissent pas, au Québec, l'environnement usuel auquel ils sont habitués, que, dans le mémoire présenté au groupe de travail, il est mentionné: «Bien qu'en soi l'objectif économique des joueurs traditionnels québécois ne cause pas le problème, cet objectif est différent du leur.» Mais un objectif différent n'est pas nécessairement incompatible avec rendement, n'est-ce pas? VIMAC, cette société de capital de risque de Boston qui s'est installée à Montréal, investit dans plusieurs projets avec des sociétés comme Innovatech et le Fonds de solidarité. Il y a donc de bons projets avec les sociétés gouvernementales et institutionnelles.

Alors, ma question, rapidement: Vous ne pensez pas qu'il y aurait lieu de faire plus de promotion et de démarchage auprès des VC américains afin de leur expliquer la réalité et les avantages d'investir au Québec au lieu de changer des structures?

Le Président (M. Paquet): M. Hamel.

M. Hamel (Bernard): La promotion, ça ne fait jamais de tort, mais je ne pense pas que ça change beaucoup de choses. J'ai personnellement eu de l'expérience à lever de l'argent aux États-Unis, en Allemagne, en France, en Espagne. Je vais vous dire franchement, c'est rare que je suis arrivé dans le bureau d'un investisseur, puis ils m'ont dit: M. Hamel, je suis donc content de vous voir; ça fait à peu près six mois que j'essaie de trouver la manière de mettre de l'argent dans le capital de risque au Québec, puis là, bien, vous arrivez; c'est un miracle. Ça ne marche pas.

Il faut commencer évidemment par expliquer toute l'affaire. Mais ce que les investisseurs étrangers sophistiqués font, c'est que, premièrement, ils décident à quel endroit dans le monde on va mettre le capital. Donc, ils font une première analyse macroéconomique puis ils disent: O.K., le Canada. Ils regardent toutes sortes de données économiques, puis là ils regardent la structure, la structure de l'industrie, puis ils disent: Woups! Au Canada, 90 % du capital de risque est, disons, géré par des sociétés d'État publiques ou des structures qu'on ne comprend pas trop, qu'il y a des crédits d'impôt, et tout ça. Et là, à tort ou à raison, ils ne prennent pas nécessairement le temps d'aller faire l'analyse détaillée, mais ils disent: Écoute, on ne connaît pas ça, ce terrain-là, nous, on est habitués à des terrains où est-ce que ce n'est pas compliqué, les fonds. Ils ont un objectif de rendement. C'est clair puis... Donc, ils disent: Bon, Canada, peut-être un jour, mais là je vais aller ailleurs, parce que, pour l'instant...

Donc, la dynamique des investisseurs étrangers, elle n'est pas facile. La promotion va aider, mais, je veux dire, la structure de notre industrie a un impact majeur sur leur décision de s'investir, autant en temps, en expertise qu'en argent. Alors, ça, c'est une dynamique qui est... Et puis, moi, je l'ai vécue, parce que ce n'est pas facile de lever de l'argent au Canada, au Québec, puis ce n'est pas facile non plus à l'étranger.

Le Président (M. Paquet): Je vous remercie beaucoup. Ça écoule maintenant le temps que nous avions pour...

M. Audet: ...à New York ensemble récemment d'ailleurs.

Le Président (M. Paquet): O.K. Alors donc, au nom de la commission et des membres de la commission, nous vous remercions, Mme Thabet, M. Hamel, M. Denis, M. Prud'homme, pour votre participation à nos travaux. Merci.

Nous suspendons pour une minute et nous reprendrons rapidement parce qu'on doit continuer par la suite. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 10)

 

(Reprise à 15 h 14)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, s'il vous plaît, nous recommençons nos travaux.

Alors, au nom de la commission, je souhaite la bienvenue ? merci... Alors, je souhaite la bienvenue à la Société Innovatech Régions ressources. Alors, nous allons commencer maintenant.

Donc, la présentation va être faite par M. Ghislain Blanchet, président d'Innovatech Régions ressources. Plaisir de le revoir aussi. C'est un ancien collègue de classe à l'université au premier cycle en économique. Donc, plaisir de vous revoir. Veuillez vous présentiez, s'il vous plaît, aussi les gens qui vous accompagnent, et vous avez 20 minutes pour faire votre présentation. Alors, M. Blanchet.

Société Innovatech Régions ressources

M. Blanchet (Ghislain): Merci beaucoup. Je vous salue à mon tour et je vous remercie. Je remercie la commission de nous donner l'occasion de nous entendre.

Je vous présente, à ma gauche, M. Yvon Lévesque, qui est président du conseil d'administration de la Société Innovatech Régions ressources. Il est également président de Lar Machinerie, de Métabetchouan et il est également président du CLD du Lac-Saint-Jean et, par le fait même, vice-président du FLI. Alors, il y a beaucoup d'éléments sur lesquels on pourra discuter davantage à la demande de la commission. Et il est aussi vice-président de la Société de valorisation de l'aluminium. Et, à ma droite, M. Eugène Bouchard, qui est administrateur à la Société Innovatech Régions ressources, qui y représente la Gaspésie?Îles-de-la-Madeleine. Il est également président du SADC Rocher-Percé. Donc, on couvre une bonne partie de l'intervention en région en termes de financement pour la PME.

La présentation, j'aimerais vous la faire sous deux aspects. D'abord, présenter c'est quoi, Innovatech Régions ressources, parce que, suite au dépôt du rapport Brunet ? c'est comme ça qu'on vient de l'appeler ? il semble y avoir une petite incompréhension sur le mandat, du moins à la lecture qu'on en fait de la Société Innovatech Régions ressources. C'est peut-être pour ça que la recommandation principale à l'égard de la société, c'est la liquidation de son portefeuille. D'abord, ça nous a fait une petite fleur, dans le sens qu'il trouvait que notre portefeuille était bon et qu'on pouvait le vendre, mais par ailleurs on ne trouvait pas que c'était une bonne nouvelle pour les régions.

Donc, qui nous sommes? On est une société... Vous savez, on est une société d'État. On a été créés en novembre 1998, mais on est opérationnels depuis 1999, mai 1999. En vertu de la loi, on a un capital souscrit, autorisé de 100 millions, mais il y a eu 50 millions de déboursés à date. Comme vous le savez, on n'a pas la chance, comme d'autres sociétés, d'avoir beaucoup d'argent en banque, alors on gère serré. On a toujours des fonds pour rencontrer nos besoins et gérer la boîte, comme on dit. Depuis juillet 1999, on a un moratoire sur les nouveaux investissements. On réinvestit uniquement dans les entreprises en portefeuille.

Pourquoi Innovatech Régions ressources a été créée à l'époque, en 1999 ou en 1998? C'était d'abord pour supporter la création des entreprises, le développement des entreprises innovantes sur le territoire. Le diagnostic qui avait été porté à l'époque était que le secteur privé limitait beaucoup ses investissements dans ce créneau-là qui était le démarrage dans les entreprises, des entreprises innovantes et les projets d'innovation en général sur le secteur, sur le territoire des régions ressources particulièrement. Donc, la création d'Innovatech ne devait pas en partie prendre la place de d'autres intervenants, puisque, selon le diagnostic qui a été fait à l'époque ? ce n'est pas moi qui l'avais fait ? il n'y avait pas d'autres intervenants, sauf en de rares exceptions où il se faisait des investissements.

Innovatech, c'est géré par un conseil d'administration qui vient de gens du milieu. Tous les administrateurs de la société proviennent du territoire qui est desservi par la société. Ça, c'est très important dans le fonctionnement de la société parce que ça permet d'avoir une très forte connaissance du territoire. Puis, comme vous le savez, les régions, c'est souvent tricoté serré. On a une bonne connaissance des individus et des personnes avec qui on fait affaire, ce qui nous permet à la fois d'être connus rapidement et de dénicher de bons projets également. Et, vous le savez, la société a pleine autonomie dans le cadre de sa loi, c'est-à-dire, qui permet des investissements jusqu'à hauteur de 5 millions. Elle est en mesure d'en faire.

Le territoire qu'on dessert, il est immense. Ce sont les régions ressources et 32 MRC, plus les territoires du nord. C'est le Nord-du-Québec, c'est l'Abitibi-Témiscamingue, c'est le Saguenay?Lac-Saint-Jean, c'est la Côte-Nord, Bas-Saint-Laurent?Gaspésie, en plus de quelques MRC qui se joignent à ces territoires. Ils ont pour caractéristique... vous le savez, c'est l'économie sur les ressources naturelles. Notre mandat par... investir dans des projets d'innovation, c'est en grande partie de diversifier cette économie-là ou à tout le moins donner de la valeur aux richesses qui sont sur ce territoire-là. Ces régions-là sont privilégiées, elles ont des ressources naturelles de grande valeur, mais, comme elles ne sont pas inépuisables, il faut s'assurer qu'on a un plein rendement économique sur ces ressources-là.

Là, on va se vanter un peu si vous nous le permettez. Pourquoi Innovatech Régions ressources a réussi, je dirais, à performer relativement bien malgré le contexte particulier des régions ressources? Je pense que la principale caractéristique, c'est: les administrateurs, d'entrée de jeu, ont informé la permanence qu'ils voulaient qu'Innovatech devienne un outil pour les régions et non pas, comme ça se fait pour une société de financement de capital de risque traditionnel, à aller chercher le meilleur projet à meilleur rendement. Je m'explique.

Il y a des projets en émergence dans les régions, mais ils ne sont pas nécessairement prêts à être présentés à une société de capital de risque pur. Il faut intervenir auprès des promoteurs, il faut les accompagner, il faut bonifier les projets. On a bâti une expertise à l'interne dans le but de bonifier ces projets-là dans des secteurs reliés aux ressources naturelles. Je pense que le rapport Brunet passe de manière importante cet aspect-là. C'est en bonifiant les projets qu'on les amène à une étape qui...et par la suite vont intéresser des sociétés de capital de risque. C'est le mandat qu'on s'est donné.

n(15 h 20)n

L'autre point, c'est qu'on collabore beaucoup avec le milieu. Il n'y a pas un projet qui lève en région ressource sans qu'Innovatech soit au courant de diverses manières. Ça, on en est fiers, puis c'est important d'être très près du milieu. La permanence passe toujours trois à quatre jours par semaine dans les régions. Il faut être très présent sur le territoire pour connaître les projets, puis pour les bonifier, puis pour bien accompagner le promoteur. C'est une caractéristique très différente des investisseurs de plus grande ampleur qui investissent dans l'innovation technologique. Souvent, c'est des équipes centralisées qui font une analyse au central mais qui ne sont pas intéressés à se déplacer plus qu'une heure ou 1 h 30 min de leurs investissements. L'obligation d'investir sur le territoire, bien, ça nous force à être très imaginatifs, parce que, si on n'investit pas, on n'est pas en mesure de générer des rendements. C'est trivial ce qu'on dit là, mais c'est fondamental d'être très présents sur le territoire alors.

L'autre aspect, c'est qu'on a priorisé des projets qui avaient un impact immédiat sur l'emploi, c'est-à-dire cibler des produits à forte valeur ajoutée dans les régions. Chaque dollar de l'État investi, pour nous, doit avoir un impact économique important. C'est ce qu'on s'est donnés comme mission. On n'a pas priorisé des projets qui avaient de longues, très, très longues périodes de maturation, qu'on parle de cinq à sept ans. On visait toujours un horizon de 24 mois maximum avant d'arriver aux marchés et par la suite générer des ventes, puis générer des profits. Donc, tout cet aspect-là, c'est une question de culture à l'interne qu'on a réussi à implanter, ce qui fait une différence entre aller conquérir un marché, comme une société de capital de risque puisse... veut faire, et développer un marché, comme on a essayé de faire.

Le rapport Brunet nous indique qu'Innovatech Régions ressources investit dans la modernisation des entreprises. Nous, on n'est pas d'accord avec cette affirmation-là. En aucun cas, on n'investit dans de l'achat d'équipements ou de la modernisation en tant que telle d'une entreprise, à moins qu'on ne comprenne bien le mot. Nous, ce qu'on a priorisé, c'est des dossiers dans le secteur forestier qui visaient la mise en valeur des ressources naturelles ou le développement d'équipements, des nouveaux procédés de fabrication.

Dans le secteur manufacturier relié aux mines et au secteur manufacturier en général, développer... de faire... des sous-traitants devraient fabriquer... à manufacturier maintenant pour générer de l'emploi dans les régions. Dans le secteur métallurgie, on a priorisé le développement de transformation de l'aluminium au Saguenay?Lac-Saint-Jean à partir de très petites entreprises qui ont acquis des technologies à l'étranger et qui essaient de les implanter maintenant au Québec. Et bien sûr l'ensemble des nouveaux secteurs émergents, qui est notre créneau, qui est fortement en croissance chez nous et qui l'était: tout le secteur éolien de la Gaspésie, le secteur des biomasses marines dans le Bas-Saint-Laurent, les produits de santé naturels, tout ce secteur en émergence dans les régions ressources.

C'est vrai que le timing de notre arrivée était bon. Il y avait des projets qui sortaient des universités ou qui sortaient de certaines entreprises qui étaient prêts à être investis. Je vous laisse rapidement quelques exemples: Eocycle, à Gaspé, dans le secteur de l'industrie éolienne, une entreprise qui va performer très bien; Forage Long Trou CMAC, à Val-d'Or, des nouveaux équipements dans le secteur minier; Gyro-Trac, à Forestville, des équipements de débroussaillage, qui est maintenant un des fournisseurs de l'armée américaine; Aqua-Biokem, à Matane, qui... développement d'extraction de protéines de carapaces de crevettes. Tous ces projets-là ont nécessité des travaux de développement de plus de 24 mois. C'est pour ça qu'on dit que les intervenants actuels dans les régions, non pas qu'ils ne sont pas de bonne volonté, au contraire, ils sont très dynamiques dans leurs créneaux, mais ce type d'investissement là ne les intéresse pas parce que, avant que ça génère un rendement significatif, ça va prendre plus de temps que ce à quoi ils sont prêts à attendre, et ils vont attendre qu'il y ait des ventes avant d'investir dans ces projets de cette nature-là.

Malgré le créneau qu'on a ? on est quand même à risque, on appelle ça vraiment un créneau à risque ? on a réussi quand même à investir dans 48 entreprises depuis les débuts de la création de la société puis on a réussi à maintenir, à date, un bénéfice positif. Bon. Je ne cache pas que la réalité actuelle est assez difficile, mais je dirais que ce qu'on est le plus fiers à date, c'est de démontrer qu'il y a des projets d'innovation de grande qualité dans les régions ressources, et ça, ça permet d'ouvrir les lieux à d'autres investisseurs. Bon. Nos investissements sont assez le reflet, je dirais, du niveau de population de chacune des régions. C'est environ près de la moitié dans le Saguenay?Lac-Saint-Jean. Le reste, c'est assez uniforme, mais on est présents sur tout le territoire.

Le rapport Brunet indique qu'Innovatech Régions ressources investit peu dans les entreprises de haute technologie en situation d'amorçage et de démarrage. Je suis prêt à concéder qu'on n'a pas beaucoup d'investissements dans la haute technologie, mais l'essentiel de nos investissements, c'est dans le démarrage et l'amorçage. C'est peut-être un peu moins glamour, mais ça a l'avantage d'être très terre-à-terre et de générer des revenus rapidement dans les régions ressources. 73 % de nos engagements sont dans des démarrages ou prédémarrages pour des nouveaux produits ou nouveaux procédés de fabrication. On est le seul investisseur dans 78 % de nos entreprises lors de la première ronde, mais ça tombe à 50 % lors de la deuxième ronde. Donc, on réussit à attirer de nouveaux investisseurs. C'est un des mandats qui nous ont été fixés.

Le rapport Brunet indique qu'on concentre nos activités dans les domaines où le secteur privé assure déjà une présence significative. Regardons donc c'est qui, les joueurs présentement dans les régions ressources. Il y a les fonds régionaux de solidarité. Les fonds régionaux de solidarité avaient auparavant 16 directions générales; c'est tombé à huit. Il se positionne puis il élargit son intervention dans des créneaux moins risqués. Peu d'investissements au cours de la dernière année dans les régions ressources. Desjardins Capital de risque, il commence en région, il se positionne, mais il y a encore moins de 5 % de ses investissements qui sont dans les régions ressources. Et toute la stratégie à l'égard de l'innovation technologique qui est notre créneau, ça va devenir une stratégie de gestion de portefeuille. Ça veut dire 10 %, peut-être 15 % maximum de l'ensemble de leurs investissements. La Caisse de dépôt a vendu son portefeuille d'Accès Capital à la BDC et a fermé ses bureaux régionaux. FondAction, pas véritablement de mandat régional, c'est les dossiers ad hoc, pratiquement plus de démarrage.

Donc, les intervenants en région, c'est vrai qu'il y en a, c'est vrai qu'ils ont accès à des capitaux importants, mais ce qu'on remarque, c'est que le secteur de l'innovation puis des nouveaux créneaux puis certains en émergence de l'économie, ils ne sont pas intéressés présentement à y aller. Ils ont eu des mauvaises expériences, ils se retirent puis il y a une concentration du pouvoir décisionnel à l'égard de ces fonds-là vers les centres décisionnels centraux. Nous, ce qu'on pense, le retrait d'Innovatech aura un impact très négatif sur les régions ressources, et particulièrement comme effet de levier auprès de ces fonds-là.

Est-ce qu'Innovatech Régions ressources a pris la place d'autres dans les investissements? À titre illustratif, je vous ai fourni un tableau de quelques exemples d'investissements qu'on a faits. Vous remarquerez que, dans 80 % de ces dossiers-là, ils ont été refusés auprès des autres fonds à qui on avait offert le portefeuille de l'investissement en première ronde d'investissement. Pourquoi? Projet risque, projet nouveau créneau, pas de vente encore. Maintenant que le portefeuille est à maturité, le portefeuille est soudainement devenu très intéressant pour ces fonds-là.

En conclusion, lors du dernier Rendez-vous des régions, il y avait une étude du ministère des Finances du Québec qui indiquait qu'il y avait moins de 7 % du capital de risque qui était investi dans les régions, alors que la population représentait 14 % de la population du Québec dans les régions ressources. Il y a peu d'intervenants présentement qui interviennent dans les projets structurants dans les nouveaux créneaux, ce n'est pas leur mandat. Ce n'est pas de la mauvaise volonté, ce n'est pas leur mandat. On pense que la recommandation de liquider Innovatech Régions ressources viendrait donc à l'encontre de l'objectif d'accroître l'enveloppe de capital de risque dans les régions.

Présentement, on ne fait plus de nouveaux dossiers depuis juillet dernier. On recevait, en moyenne, deux nouveaux dossiers par semaine pour analyse. On a eu de la difficulté à respecter nos engagements, mais, au-delà des difficultés financières, c'est le contexte de support qu'on avait à ce projet-là qui commence à faire mal. Nous, on pense qu'on aurait pu atteindre une certaine autonomie financière aux alentours de 2007, 2008, selon nos prévisions financières. Maintenant, c'est sûr que, dans le contexte actuel, on ne sait pas trop si on va être en mesure d'atteindre cet objectif-là. Mais est-ce qu'en liquidant Innovatech Régions ressources, qui représente moins de 1 % de l'investissement gouvernemental dans l'aide à l'entreprise, est-ce qu'on vise la bonne cible? C'est une question qu'on s'est posée à l'interne. Qui va prendre notre place si Innovatech Régions ressources est liquidée? Bon. Sur cet aspect-là, je pense que le rapport Brunet dresse un portrait assez incomplet de la réalité du financement dans les régions ressources.

Ceci étant dit, on n'est pas en désaccord par ailleurs avec plusieurs des recommandations du rapport. Je pense que c'est important ? puis c'est dans la volonté de l'actionnaire, on ne s'en cache pas ? d'avoir une plus grande contribution du secteur privé au capital de risque dans les régions ressources également. On a entendu des intervenants, ce matin et cet après-midi, qui disaient que c'était difficile d'attirer des capitaux privés dans les régions de Montréal et de Québec, alors il ne faut pas se leurrer que ça va être encore beaucoup plus difficile dans les régions ressources. Malgré ça, on pense que ça peut se faire, mais ça doit se faire de manière progressive. Si on le fait rapidement, oubliez ça, non seulement on va avoir un impact négatif sur notre portefeuille, mais il n'y a pas de projets qui vont lever dans les régions.

n(15 h 30)n

On vise ? notre recommandation ? à concilier à la fois l'objectif du gouvernement puis la volonté d'avoir une présence plus accrue du secteur privé, puis aussi de conserver un outil de développement régional qui est investissement... Innovatech Régions ressources. Ce qu'on recommande, c'est de privatiser de manière progressive Innovatech Régions ressources de manière à ce que son mandat de développement demeure. Mais il ne faut pas se cacher que plus il va y avoir du secteur privé dans Innovatech Régions ressources, plus l'appariement entre l'objectif de développement et de rentabilité va être dur à faire. Ça va être... Comme on dit en langage du capital de risque, c'est: «Money talks.» C'est celui qui va mettre de l'argent qui va décider quel objectif de rendement il veut avoir.

Nous, ce qu'on propose, c'est, plutôt que de liquider le portefeuille, d'utiliser la valeur du portefeuille pour intéresser des actionnaires à se joindre à la société. C'est un objectif ambitieux. Il est réaliste, mais ce ne sera pas facile. On propose de transformer Innovatech Régions ressources en société en commandite entièrement autonome dans laquelle le portefeuille, comme on l'indiquait, serait la contribution du gouvernement du Québec. L'actionnaire ? qui est le gouvernement du Québec ? pourrait approcher un ou deux investisseurs ou commanditaires à titre de commanditaires dans la nouvelle société. On recommande que ce soient les investisseurs institutionnels qui lèvent présentement beaucoup de capitaux sur le marché.

Pourquoi on recommande ceux-là? C'est parce que, il faut être réaliste, si on approchait des investisseurs privés des régions, un, il n'y a pas la capacité financière, à notre avis, pour lever des montant substantiels de l'ordre de 50 à 100 millions. Puis l'argent est là, il est disponible, ils reçoivent des crédits d'impôt pour faire des investissements dans les régions, puis il semble que les objectifs, ils ne les atteignent pas. S'ils se joignent à une organisation ? on peut dire qu'on est un fonds spécialisé ? spécialisée dans l'aide au démarrage, spécialisée dans l'analyse de projets d'innovation technologique puis spécialisée dans l'analyse, je dirais, de tout l'ensemble de l'économie des ressources naturelles, puis, comme ces fonds-là ont des fonds disponibles, la transition pourrait se faire relativement rapidement, ce qui nous permettrait de relancer les investissements qu'on faisait dans les régions ressources.

Cette contribution-là, toutefois, elle devrait être significative de manière à assurer une permanence et un cycle complet d'investissement. Il n'y a rien de pire que faire un dossier quand on s'associe à des investisseurs... que d'être incertain quant à l'avenir du partenaire qui se joint à nous. Il faut être sûr que le partenaire est en mesure de réinvestir puis il va être là pendant nombre d'années.

Bien sûr, ce sera les nouveaux commanditaires, s'il y a lieu, si ce projet-là se met en marche, qui détermineront le maintien ou la modification du territoire qu'on dessert. Nous, on n'a pas objection à élargir le territoire. On est spécialisé dans ce qui touche les ressources naturelles. S'il y a certains territoires qui ne sont pas... qu'on ne couvre pas puis qui ont des économies de cette nature-là, on est spécialisé dans le démarrage, on peut également... dans les technologies industrielles, on peut également élargir le territoire pour desservir ce type de projets là à d'autres régions du Québec.

Conclusion, on pense que c'est important de préserver un outil comme Innovatech Régions ressources, sinon il n'y a à peu près pas de joueur qui va toucher aux nouveaux créneaux de l'économie de la région ressource.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. Blanchet. Alors, M. ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Alors, merci beaucoup, M. Blanchet. Je pense que votre présentation est en même temps, je pense, une défense et illustration du travail que vous avez fait et qu'a fait Innovatech Régions ressources au cours des dernières années et en même temps évidemment qui offre une perspective effectivement et certaines pistes intéressantes pour voir comment on peut tenter d'intégrer davantage ou d'insérer davantage de capital privé dans la société. On a...

Je vous entendais évidemment, dans l'analyse, parler effectivement qu'il y a, depuis juillet dernier... Il n'y a pas de nouveaux projets. Cependant, évidemment, je pense que vous savez qu'on a souscrit 9 millions additionnels donc sur votre participation. C'est quand même considérable. On a rajouté 9 millions pour justement vous permettre de faire face à vos obligations. J'aurais apprécié que vous le mentionniez quand même, parce que ce n'est quand même pas négligeable pour vous permettre justement de continuer à soutenir des entreprises en région au cours de la dernière année.

Deuxièmement, vous avez également beaucoup, je pense, actuellement de travail qui se fait avec d'autres partenaires. Et, comme vous indiquez, la question que vous posez, je pense, elle est pertinente: Est-ce qu'on ne pourrait pas imaginer... Et, je vous dis, le scénario, il est ouvert. Donc, il n'y a personne... le gouvernement ne s'est pas positionné fermement. Est-ce que c'est possible de créer une société en commandite qui sera autonome dans laquelle effectivement le gouvernement dirait: Ma dote, c'est le 50 millions qui a déjà été souscrit? Est-ce qu'il y a une participation additionnelle pour générer des fonds additionnels et réinvestir dans les régions? C'est un... Je pense, c'est un scénario qui peut être regardé. Absolument. Je pense qu'il peut être examiné, et c'est l'intérêt justement d'avoir cette commission parlementaire.

Donc, je le signale au bénéfice de tout le monde et de l'opposition: il n'y a pas de scénario d'exclu, y compris celui-là, parce que l'objectif justement, c'est... ça permettrait, cette approche, cette proposition qui est là, de ne pas être les seuls.

Et, en même temps, ça me permet d'expliquer un petit peu l'intérêt. Vous mentionnez que ça va donner des contraintes. Oui, mais, en même temps, ça explique aussi pourquoi on pose cette question-là d'avoir éventuellement d'autres partenaires.

Lorsque le gouvernement est le seul à souscrire, tôt ou tard, on va aboutir au bout de la souscription. Dans certains Innovatech, on est rendus au bout de la souscription. Et, quand le gouvernement est le seul à mettre du capital, à rajouter du capital, évidemment ça pose la question... Nous, on n'est pas capables de dire: Ça va être celui-là ou celui-là, ce sont les sociétés qui le font. Et là ce qu'on a fait d'ailleurs, l'année dernière, est un bel exemple. Au lieu de regarder au cas pas cas, on a dit: Voici un montant global qui représente, semble-t-il, vos besoins pour réinvestir. Voici, vous êtes les mieux placés pour le faire, et c'est vous autres qui devez le faire. Ce serait intéressant que, mettons, ce partenariat-là puisse être fait dans le secteur privé et utilisé.

Là-dessus, je retiens ce que vous dites: ce que vous faites particulièrement de mieux, c'est effectivement ? puis c'est le cas dans d'autres Innovatech ? d'accompagner les entreprises que vous avez. C'est très important de les suivre, de les supporter, mais en même temps de les guider dans le travail, parce que c'est ça, l'important que vous avez comme entreprise de portefeuille. Alors, je fais ce préambule-là pour vous dire que cette option, ce que vous amenez, est intéressante, et cette idée-là est intéressante, et on va l'explorer. Je pense que c'est ça, le but de la discussion.

Moi, j'ouvrirais peut-être le débat en vous disant: est-ce que vous avez vous-mêmes essayé d'approcher des partenaires potentiels qui pourraient être intéressés à cette option-là et ? plutôt que de vendre un portefeuille qui effectivement est un portefeuille dans lequel il y a des bonnes participations ? qui seraient prêts à réinvestir dans la société pour faire en sorte qu'il y ait plus de capital disponible aux régions? Comme vous ouvrez cette option-là, je vous relance la balle. Est-ce que vous pensez qu'il y a des partenaires potentiels qui pourraient être intéressés à cette option-là?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Effectivement, M. le ministre, la précision est importante à l'égard de la souscription à Innovatech Régions Ressources, ce qui va nous permettre encore une fois de bonifier notre portefeuille et attirer davantage des actionnaires, des nouveaux commanditaires.

Mais, oui, on a commencé à faire des approches, je dirais, de l'ordre plus d'apprendre à se connaître. Quoiqu'on se connaît bien. Mais il faut aussi, pour attirer des nouveaux investisseurs... il faut avoir, je dirais, une vision future semblable. On a approché le Fonds de solidarité, Desjardins et autres, plus du privé. L'intérêt est là, je pense, de manière importante, sauf que c'est toujours la question: Où va se situer la ligne entre le développement économique et la rentabilité? Et ça, ce n'est pas toujours évident quand on met ça sur la table. Je pense, ces organismes-là... Surtout quand on touche les régions ressources, il n'y a pas un nombre infini de projets ou d'entreprises en croissance dans ces secteurs-là. Donc, il faut donc qu'ils y aient accès à un bassin d'entreprises en émergence, les nouvelles entreprises qui naissent qui éventuellement vont être des sources... des demandeurs de fonds pour les capitaux plus importants.

Donc, il faut s'assurer qu'il y ait un organisme qui génère, qui crée des nouvelles entreprises, je pense, c'est... Et avec un organisme spécialisé comme le nôtre, c'est là qu'est leur intérêt. On va devenir, je dirais, une pouponnière à entreprises pour eux autres. Sauf qu'il y a quand même des contraintes à ce que ça se fasse. D'abord, est-ce que ces organismes-là peuvent investir dans une société d'État? Il y a quand même... Ils ont des règles à suivre. Il y en a qui ne peuvent pas investir dans de nouveaux fonds. Il y en a qui ne peuvent pas... Toute cette table-là doit être d'abord clarifiée.

Puis il y a l'aspect, je dirais, que le gouvernement du Québec a une poignée importante, c'est toutes les mesures fiscales qu'il offre. Quand le gouvernement permet à ces organismes-là de lever près de 1 milliard par année, est-ce qu'il s'est toujours posé la question: est-ce qu'il en a pour son argent sur les crédits d'impôt sous lesquels il offre? Et est-ce que ce ne serait pas une façon d'inciter ces organismes-là à prendre un peu plus de risques, puisqu'on offre, avouons-le, du capital subventionné pour ces organismes-là? Ce serait peut-être le temps de se poser cette question-là.

Et c'est sûr qu'on n'a jamais... Et Innovatech Régions ressources a quand même... désire faire de l'argent. C'est ça, notre objectif aussi, faire de l'argent tout en faisant du développement. La ligne qu'on s'était tracée à l'interne, c'est de faire du développement à coûts nuls, c'est-à-dire... ou, à tout le moins, rendre le capital souscrit à l'actionnaire à terme. C'est l'objectif qu'on s'était fixé. C'est un objectif que... vous me direz que c'est minimal, mais, dans le créneau où on est, ce n'est pas si évident que ça.

Les chiffres qui ont été donnés tout à l'heure, que, sur 10 projets, il y en a deux qui réussissent, deux qui plantent, comme on dit, puis le reste qui est roulé ailleurs, c'est la situation dans laquelle on vit. Mais on sait que nos «winners», ils vont générer pas mal. Alors, sur cette base-là, oui, on a eu des approches, mais on est encore au stade, je dirais, préliminaire parce qu'on ne contrôle pas. Si on avait le mandat de le faire, peut-être qu'on accélérerait ça, oui.

n(15 h 40)n

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le ministre, ça va?

M. Audet: Oui, ça va. Je vais garder mon temps pour la fin.

Le Président (M. Paquet): D'accord. Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Oui. J'ai une question relativement au modèle que vous proposez, c'est-à-dire le modèle de la société en commandite. Est-ce que vous le voyez comme étant la structure idéale pour, par exemple, permettre la transition de crédits d'impôt qui favoriseraient ou qui inciteraient certaines institutions financières à s'impliquer aux projets? Est-ce que vous le voyez comme étant un véhicule qui permettrait la transition des pertes éventuelles dans les premières années? Quel est le fondement du choix de la société en commandite comme structure de départ?

Le Président (M. Paquet): M. Lévesque.

M. Lévesque (Yvon): La société en commandite, c'est tout simplement parce que c'est un conduit fiscal. Le gouvernement, mettons qu'on réussit à verser 100 millions de capitaux, avec nos résultats actuels, on a déjà des profits à court terme de prévisibles puis on a une stabilité à long terme. Pourquoi la société en commandite? C'est parce que je ne crois pas que le gouvernement apprécierait payer des impôts sur sa portion de profit. C'est simplement ça, c'est tout simplement un conduit. Ça pourrait être une société de capital-actions, mais la société en commandite permet ça. Et ce serait la même société d'État qui deviendrait une société en commandite avec l'expertise conservée à l'intérieur par la permanence, les dossiers, la prospection. Tout ça resterait dans la nouvelle société, dans la société qui est continuée, à laquelle s'ajouteraient deux commanditaires. Mais, c'est juste une question d'efficacité à très court terme, là, il n'y a pas de grande philosophie, là, société en commandite versus capital-actions. C'est tout simplement pour ne pas payer d'impôts.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Matane, ça va?

Mme Charest (Matane): Oui, ça va.

Le Président (M. Paquet): Il reste une minute qu'on peut reporter plus tard si vous souhaitez. O.K.? M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui. D'abord, M. Blanchet, M. Lévesque, M. Bouchard, merci pour votre présentation puis votre témoignage. Et j'espère que le ministre du Développement économique et régional vous a bien écouté, parce que je pense qu'on a un témoignage de gens qui travaillent sur le terrain, dans les régions. Et puis j'ai bien aimé vos propos au début, quand vous avez dit que ce qui est proposé, de liquider le portefeuille d'Innovatech Régions ressources, ça rapporte peut-être des liquidités à court terme, mais c'est une très mauvaise nouvelle pour les régions à moyen terme. Et c'est un petit peu le reflet de l'approche libérale depuis qu'ils sont au pouvoir de dire: On sacrifie le long terme pour essayer de régler les problèmes courants. Donc, c'est un petit peu comme si on disait qu'on a des problèmes de liquidité puis on vend l'usine.

Donc, ce qui est important aussi, puis j'espère que le ministre a bien écouté... Parce que, ce matin, le ministre du Développement économique et régional nous disait: Il n'y a aucun projet nulle part qui est en attente, tout roule comme à l'habitude. Or, vous dites clairement, dans votre mémoire, que vous n'analysez plus aucun dossier depuis le mois de juillet dernier. Bon, bien, écoutez, j'espère que le ministre écoute bien, là. Donc, de ce côté-là, c'est clair que, et de un, comme on dit, là, une démonstration comme quoi, oui, il y a des dossiers qui sont retardés.

Vous nous dites aussi, dans votre document, à la page 1, que, lorsque vous avez essayé d'intéresser des intervenants du privé dans la plupart de vos dossiers, ils n'étaient pas intéressés parce que ça ne répondait pas à leurs objectifs d'investissement. Donc, ça veut dire que, si on n'avait pas eu Innovatech Régions ressources, il y aurait eu une quarantaine d'entreprises qui n'auraient pas vu le jour puis qui n'auraient pas pu se développer dans des régions qui en ont bien besoin. Bon.

Je comprends, là, que vous montrez une certaine ouverture à dire: On pourrait peut-être voir si on ne peut pas peut-être intéresser des acteurs privés, mais sauf qu'il y a un problème. Comme vous disiez, il n'y a pas les mêmes objectifs. Plus il y aura du privé qui investira chez vous, bien plus l'objectif de développement économique passera en deuxième et plus l'objectif de rentabilité pure à court terme en avant. C'est là qu'est le problème fondamental dans l'approche qui est prise par le ministre du Développement économique et régional.

Moi, j'ai une question très simple à vous poser: est-ce que vous pensez que... Si vous aviez le choix, là, est-ce que vous pensez qu'on devrait garder la structure actuelle ou si vous pensez vraiment qu'on doit faire des partenariats, des fonds mixtes public-privé? Qu'est-ce qui est le mieux pour le développement économique de nos régions ressources?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. C'est une très bonne question que vous posez là. Effectivement, l'appariement va devoir se faire. Par ailleurs, je ne suis pas... je suis loin d'être convaincu que ça doit venir uniquement des fonds publics. Il y a une limite, je pense... Moi, je pense que l'idée, c'était qu'Innovatech fasse ses preuves. Puis, comme on dit, c'est de démontrer qu'il y en a, des projets dans les régions. Ça, c'est un obstacle qui est franchi, je dirais, en grande partie maintenant.

Avant, on déposait un fonds dans les biotechs marines, au Fonds de solidarité, ils ne voulaient rien savoir. Maintenant, ils écoutent puis ils sont intéressés à le faire parce qu'il y a des barrières qui sont franchies. C'était le cas dans le secteur manufacturier aussi. Puis je pense qu'il y a une limite à une société d'État à avoir un portefeuille de 100 entreprises puis de le gérer, puis on n'a jamais... Veux veux pas, t'as toujours une contrainte sociale qui est attachée à ça, puis il faut qu'il y ait une démarcation qui se fasse.

Moi, je pense qu'il y a un appariement qui peut se faire, parce que, dans la mesure où le gouvernement offre des crédits d'impôt pour qu'ils prennent plus de risques, bien qu'ils prennent plus de risques. S'ils font des pertes, il y a eu des crédits d'impôt pour compenser et ils doivent en être bien conscients.

Capital Desjardins a été créé avec l'obligation d'investir 20 % de son portefeuille dans les régions ressources. Bien, il faut qu'ils le fassent, puis je pense que le gouvernement est en droit d'attendre de ce qu'ils le fassent. Qu'ils utilisent un nouveau véhicule spécialisé, je pense que c'est une façon de le faire, mais ce n'est pas, à mon avis, toujours au gouvernement à repomper puis à repomper. Il y a des limites à ça, je pense. C'est pour ça que je vous dis que la formule fonds mixte apparaît intéressante pour ça, parce qu'elle rejoint en grande partie les objectifs d'investissement du secteur privé et les objectifs de développement économique. Mais c'est sûr qu'on n'aura pas de rendement pur. Mais tout le monde le sait, d'entrée de jeu, que ce ne sera pas notre mandat.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, j'ai quatre personnes à gauche qui m'ont signalé que la députée de Rimouski voudrait la parole. Ça me fait plaisir de lui donner.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs d'Innovatech Régions ressources. Merci d'être là, de nous avoir fourni un mémoire d'une qualité assez particulière, excellente, parce que... Je dis cela parce que je me retrouve, moi, comme députée de région qui exerce depuis 10 ans du soutien auprès des entreprises innovantes dans l'économie du savoir, et je m'aperçois que vous reflétez, en tout cas, la région du Bas-Saint-Laurent de façon exemplaire. Et je suis persuadée que, dans notre région, là, les gens sont en accord avec les principaux éléments que vous ressortez de ce que veulent dire les investissements en capital de risque ou en capital de développement pour une région ressource comme la nôtre.

Ceci étant dit, je dois vous dire que, depuis juillet, vous avez un moratoire. Et des entreprises qui comptaient sur Innovatech Régions ressources pour inciter aussi d'autres partenaires financiers à aller avec vous prendre des risques et les aider... Je pense à Océanova, que vous connaissez bien, qui est un dossier qui est en difficulté parce que, si Innovatech n'y va pas... Il y en a d'autres, hein? Je pourrais les nommer, vous les connaissez. Enfin, il faut faire attention, là, mais il y a quand même des entreprises qui sont en attente de savoir qu'est-ce qui va se passer avec Innovatech Régions ressources. Et je vous dirais aussi que le ralentissement, là, dans l'analyse des dossiers met en péril des projets, là, qui sont déjà en attente que les investissements se fassent ou se poursuivent dans certains cas.

Ce commentaire étant fait, je voudrais revenir sur la question de l'offre de capitaux. Vous nous dites que les principaux joueurs... Entre 1999 et 1994, là, la situation s'est détériorée de beaucoup. Vous faites un portrait quand même assez sévère de la situation et qu'il y a un bon nombre de joueurs qui, de plus en plus, ont décidé de se retirer: Fonds de solidarité, FTQ, tout le monde sait ça, Fonds Desjardins aussi. Enfin, il y en a d'autres. Pourquoi cette baisse d'intérêt de la part des investisseurs? Vous l'expliquez comment? Et est-ce que les sociétés de capitaux privés, de capital de risque privé ont cette même tendance et est-ce qu'ils font à peu près le même geste de se retirer des projets de plus en plus en région?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Je voudrais d'abord faire une mise au point. Pour ce qui est des dossiers en portefeuille, il n'y a pas de problème, on y réinvestit puis ça fonctionne normalement. C'est vrai qu'à l'égard des nouveaux dossiers on n'investit pas, mais je ne pense pas qu'il y ait des dossiers en péril à ce moment-ici, là, à cause de ça. Je pense, c'est important de le dire.

Pour ce qui est de votre question, pourquoi ils investissent moins ou qu'ils se retirent? Je dirais que c'est un effet cascade suite à la bulle technologique, qui a eu des conséquences importantes sur le capital de risque pur, sur des projets dans des grands centres, et des projets extrêmement prometteurs, là, dans les technologies de l'information, les biotechs, la haute technologie en tant que telle, ce qui a amené ces gestionnaires de fonds là à être plus prudents à l'égard de ces dossiers-là. Mais ce n'est pas... Et je dirais que l'effet en cascade s'est fait.

n(15 h 50)n

C'est que, comme les dossiers en région avaient déjà de la difficulté à se financer, quand on parle de l'innovation technologique, parce qu'ils étaient mis, je dirais, en concurrence par rapport à d'autres dossiers... Puis là ce n'est pas de la mauvaise foi. Si, par exemple, un fonds fait cinq dossiers dans les biotechs au cours de la prochaine année puis que vous avez un dossier de Rimouski qui est déposé, il est en compétition avec tout. Il n'y a pas de régionalisation, il n'y a pas... c'est en compétition. Alors, s'ils décident de réduire à deux, bien c'est sûr que le dossier de Rimouski ne se fait pas parce qu'il n'y a pas, je dirais, de régionalisation d'investissements sur une base géographique, ça n'aurait pas de sens.

Mais, quand vous avez un fonds qui investit directement dans la région, bien, lui, il le regarde, le dossier, s'il fait du sens, s'il ne fait pas de sens. Puis, avec toutes les difficultés qu'a eues le secteur technologique, je pense que ça a eu un effet en cascade également dans les régions ressources, de sorte que tout le secteur... Parce que, moi, j'insiste sur... je parle des dossiers en innovation technologique, il y a eu une baisse dans les grands centres et il y a effectivement une baisse dans les régions ressources, mais c'est un effet cascade. Donc, ce n'est pas...

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Je reviendrais sur une autre question. J'étais heureuse de vous entendre dire aussi que le capital privé, ce n'est pas le capital public qui l'a chassé des régions, parce qu'il n'était pas présent et que vous êtes venus en complémentarité. Parce que, moi, j'ai vécu ça avec tous les dossiers que j'ai eus au cours des 10 dernières années, là, à travailler avec les PME et les entreprises dans différents secteurs, autant industriels qu'innovation technologique, etc., là. Et c'est bien de le mentionner parce que je pense que le rapport Brunet là-dessus a fait vraiment fausse route en laissant... En tout cas, à la lecture. À moins que je lise mal, mais la lecture nous fait croire que le public a pris toute la place puis on a chassé le privé, alors que c'est le contraire. Le privé n'était pas présent. On n'avait pas le sentiment qu'il était intéressé à y être. Et le public a dû venir combler un manque qui existait. Et ça, je pense que c'est important de le répéter.

Je voudrais aussi revenir sur le fait que...

Le Président (M. Paquet): ...Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Le maintien de la Société Innovatech Régions ressources, là.... Vous dites que partie, ça va créer un fonds béant et que le rapport Brunet, avec ce qu'il propose... Est-ce que vous pensez que ça va vraiment combler ce fonds béant là? Est-ce qu'il va répondre adéquatement, la proposition Brunet, là-dessus, au fait que vous disparaîtriez, là, des régions ressources?

Le Président (M. Paquet): Sur le temps de l'opposition, on a déjà passé le 10 minutes. Mais, si on peut peut-être... si vous voulez compléter rapidement une réponse, s'il vous plaît, M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Bien, le rapport propose quand même un certain nombre de choses. On parle de la création de deux fonds qui prendraient la place des Innovatech. Effectivement, le problème, je dirais, du rapport Brunet, c'est que, quand il parle des Innovatech, il parle de la haute technologie, technologies de l'information, des biotechs particulièrement. Quand vient le temps de parler des technologies industrielles, il n'en fait pas vraiment référence. Donc, on ne peut pas... Ce n'est pas un reproche au rapport. Je pense que c'est juste une question d'analyse d'importance puis, je dirais, de connaissance régionale qui n'a pas ressorti.

Mais, pour ce qui est des autres recommandations au niveau des fonds d'initiatives régionales, nous, on n'a pas vraiment poussé l'analyse là-dessus. Il y a déjà... il est bien possible qu'il va en démarrer dans plusieurs municipalités, sauf que ça ne se fera pas du jour au lendemain, là. Il y a déjà certains organismes dans plusieurs régions, des organismes un peu plus solidaires, un peu plus intervenants dans leurs milieux de gens d'affaires qui seraient en mesure de lever des fonds, mais, nous, on pense que ces fonds-là devraient se joindre à ceux déjà en place et non pas agir de manière parallèle, là.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Merci, M. le Président. M. Blanchet, M. Lévesque, M. Bouchard, merci d'être ici. M. Blanchet, tantôt, vous avez eu l'occasion de rectifier certains faits qui avaient été allégués par l'opposition. Et c'est malheureusement ce qu'on fait depuis le matin, sinon on laisserait aller certaines pistes un peu faussement. J'inviterais le député de Rousseau à venir faire un tour dans la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean, qui a été sous le régime péquiste pendant les neuf dernières années, et je vous avouerais que le régime péquiste a fait ses marques, et pas à peu près, et on est en train d'en vivre encore des soubresauts.

J'aimerais... Parce que la commission parlementaire que nous sommes en train de faire ce matin... cet après-midi va nous permettre d'évaluer qu'est-ce qui se passe actuellement dans les interventions. Je trouve que votre mémoire est tout à fait... très intéressant. Les propositions qui y sont apportées sont intéressantes. Comment peut-on arriver pour faire ça différemment puis l'améliorer? La solution que vous proposez, les alternatives qui sont mises de l'avant, je pense qu'elles méritent d'être regardées.

Tantôt, vous avez eu l'occasion de pousser un peu plus loin par rapport à vos partenaires financiers, là. Vous avez mentionné quelques-uns de ces partenaires-là qui pourraient faire partie de votre nouvelle société en commandite. D'abord, vous avez fait des approches. Est-ce que vous avez d'autres approches vraiment ciblées pour vous permettre de dire: Oui, on va aller chercher 50 ou 100 millions assez rapidement? Et, dans cette perspective-là, tantôt vous avez un peu abordé le sujet, mais est-ce que vous pourriez élaborer davantage par rapport à, là, maintenant, comment est-ce qu'on va faire pour la démarcation entre le développement économique et l'intérêt du rendement qui sera peut-être privilégié par ces différents partenaires là?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Alors, c'est un peu comme je disais, la démarcation, ça va être les nouveaux commanditaires qui vont la déterminer. S'il y a uniquement de la nouvelle argent qui vient d'un nouveau fonds, ça va être eux autres qui vont, je dirais, avoir le plus grand droit de parole là-dessus. Mais ils sont également bien conscients que, dans le créneau dans lequel on opère, c'est un créneau plus à risque. Il ne faut pas s'attendre à générer des rendements astronomiques non plus. Si on veut développer des nouveaux secteurs dans les régions ressources, démarrer de nouvelles entreprises, il faut accepter de prendre des risques. Mais, à tout le moins, je pense qu'on peut générer un rendement acceptable. C'est sûr qu'on va être plus sélectif, encore plus sélectif, mais, je dirais, la notion clé là-dedans, c'est l'accompagnement qu'on fournit aux promoteurs. Ça, ça veut dire moins de dossiers par individu puis être très présent dans les entreprises. Donc, ça, ça entraîne généralement un coût de suivi plus élevé, mais c'est le prix de la réussite. Puis ça, je pense que les nouveaux commanditaires devraient en être conscients avant de...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Roberval.

M. Blackburn: La conversion, M. Blanchet, de ce que vous proposez, là, de votre société en société en commandite en allant chercher des nouveaux partenaires, est-ce que vous avez établi un certain échéancier dans lequel ça pourrait se réaliser? Et, si oui, le fait que vous convertissiez votre portefeuille... Ce serait votre mise de fonds, le temps que ça va prendre pour ces nouveaux partenaires là de venir s'investir dans votre nouvelle société pour pouvoir investir dans des nouveaux projets. Est-ce que vous avez établi un échéancier qui nous permettrait d'avoir un horizon, là, à plus ou moins long terme?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui, mais, d'abord, il faut s'assurer qu'il y en a, des partenaires qui vont embarquer. Dans la mesure où on a une volonté, oui, on embarque, je pense que ça peut se faire très rapidement. Moi, je pense que, même d'ici l'été, ça pourrait être fait, là. Ça pourrait se faire quand même assez rapidement, là, s'il y a une volonté. Mais c'est sûr qu'il doit y avoir des modifications législatives, mais c'est relativement mineur. C'est relativement mineur, là. Pour ce qui est du fonctionnement, l'équipe est déjà en place, les ressources sont toujours là, le territoire, c'est toujours le même pour fonctionner, on a déjà un portefeuille qu'on suit. Alors, la transition pourrait se faire relativement rapidement.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Roberval.

M. Blackburn: Ce qu'on peut comprendre, d'après les différentes interventions qui ont eu lieu au cours de la journée, ce n'est pas un problème de capital. De l'argent, il y en a. À ce moment-là, quelles mesures pourraient être mises de l'avant pour pouvoir inciter justement ceux qui ont du capital à être intéressés à investir dans des sociétés comme la vôtre pour faire du capital de risque dans les régions?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Bien, c'est bien simple, c'est de reconnaître cet investissement-là comme... Si je donne, par exemple... Si le Fonds de solidarité investissait dans Innovatech Régions ressources, c'est reconnaître ce placement-là comme un placement dans la PME dans leur règle du 60-40 selon laquelle ils doivent investir. Donc, ce serait déjà pour eux un placement admissible en vertu des levées de fonds qu'ils doivent faire. Même chose pour Desjardins. Si c'était le cas, c'est un placement qui pourrait être reconnu à titre d'un investissement dans les régions ressources. Donc, ça rencontre une partie de leurs obligations en vertu de la loi. Donc, ça, ce serait relativement simple à faire et ce serait un incitatif pour eux autres à le faire.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Roberval, ça va?

M. Blackburn: Non, c'est beau.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre déléguée au Développement régional et au Tourisme.

Mme Normandeau: Oui. Merci, M. le Président. Merci de votre contribution. Vous me permettrez de saluer de façon particulière Eugène Bouchard, qui est un digne représentant de la Gaspésie très impliqué dans le développement économique chez nous.

Écoutez, votre présentation est assez éloquente, là, des résultats, là, d'Innovatech Régions ressources: 48 placements pour des déboursés bruts de 48 millions, avec un valeur de projets de 160 millions. Donc, il y a un effet de levier, là, qui parle de lui-même.

Deux petites questions plus pointues. Je pense que vous y avez fait référence à la question de mon collègue par rapport au taux de rendement. Quel est le taux de rendement moyen ? je ne sais pas si c'est possible de nous donner une indication là-dessus ? sur les placements que vous effectuez?

Et, deuxièmement, dans vos recommandations, vous faites référence à la création d'une société en commandite, et tout ça, bien sûr, de manière à assurer que cette société pourra compléter un cycle complet d'investissement. Est-ce que c'est possible de nous donner davantage de précisions là-dessus? Parce que, ce matin, les gens qu'on a reçus du groupe de travail ont fait référence peut-être à une lacune, là, concernant, entre autres, le démarrage et, si ma mémoire m'est fidèle, au niveau de l'expansion dans des sociétés en haute technologie. Alors, est-ce que c'est possible de nous donner davantage de précisions là-dessus?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Pour un cycle complet d'investissement, c'est au moins sept ans, c'est-à-dire que... un portefeuille qui amène à maturité... que l'ensemble de ses entreprises ont au moins sept ans d'existence pour commencer à désinvestir par la suite. O.K.?

n(16 heures)n

Pour ce qui est de votre question à l'égard du rendement, c'est prématuré de donner un rendement à Innovatech Régions ressources. Bon, nous, on pense qu'on n'a pas de rendement, mais, au moins, la valeur du capital est sauvegardée à ce moment-ci. Mais on a un portefeuille d'entreprises de moyenne d'âge de moins de trois ans, donc on n'est pas encore dans le cycle... l'essentiel... Plus de la moitié de nos entreprises sont encore en développement, l'autre moitié a des ventes. Sauf que, même si elles ont de ventes, elles n'ont pas encore, je dirais, atteint le stade où c'est intéressant de vendre, de se départir de ce portefeuille-là. Pour certaines de ces entreprises-là, elles pourraient être vendues relativement rapidement, mais je pense que c'est important de préserver ce portefeuille-là, de lui donner de la valeur et de le vendre par la suite. Donc, on ne peut pas dire qu'on a du rendement à date.

Le Président (M. Paquet): Mme la ministre?

Mme Normandeau: Ça va.

Le Président (M. Paquet): Ça va. Est-ce qu'il y a d'autres questions? Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Oui. M. Blanchet, j'ai une autre... M. le Président, merci. J'ai une autre question relativement aux différents dossiers dont vous traitez dans votre rapport. Ce sont des dossiers qui ont bénéficié de l'aide d'Innovatech Régions ressources et, comme vous le disiez tout à l'heure, il y a près de trois ans que ces dossiers sont maintenant en marche.

Quelles sont, à votre avis, les chances pour certaines ou pour la totalité de ces entreprises-là de percer un marché et de voir la progression de leur technologie faire en sorte qu'elles deviennent des entreprises rentables? Est-ce que vous croyez qu'il y a un stade additionnel qui doit être... ou une aide additionnelle qui doit leur être fournie pour, par exemple, promouvoir la mise en marché, pour s'assurer que ces efforts, que vous déployez, vont porter finalement à la réalisation d'entreprises rentables et viables? En région, l'économie durable est une chose importante. Comment vous voyez cette seconde phase?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet, une minute.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Si je parle par expérience de ce qu'on a présentement en portefeuille, on sait que l'ensemble des dossiers, ça prend trois rondes de financement, donc environ au moins pratiquement entre un an et deux ans pour chacune des rondes: des petites rondes au début et des rondes de plus en plus substantielles.

Nous, l'objectif qu'on s'est visé, oui, on va prendre le risque la première ronde, mais, à tout le moins pour la deuxième ronde, d'attirer au moins un partenaire avec nous de manière à minimiser le risque, et, par la suite, en troisième ronde, on souhaite que ce soit d'autres joueurs qui prennent la place.

Donc, pour ce qui est du portefeuille à date, là, on peut dire que la moitié des entreprises en portefeuille ont de très bonnes chances de passer au travers parce qu'ils sont rendus à un stade. Les autres, c'est encore prématuré de le dire, mais je pense que le taux de perte, en termes de nombre d'entreprises, il ne sera pas si élevé que ça. Mais il y a des créneaux que c'est vraiment plus difficile, des créneaux des technologies de l'information comme de l'ensemble du secteur, ce n'est pas facile, Mais, quand on touche aux créneaux davantage des technologies industrielles où, je dirais, notre expertise est meilleure, je pense que notre score est assez bon là-dessus.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. M. Blanchet, M. Bouchard, monsieur ? excusez-moi si j'ai oublié votre nom ? M. Lévesque.

M. Blanchet, moi, je suis député de Gaspé. Vous êtes intervenu certainement dans certains dossiers, puisque j'ai reçu des mémoires, entre autres celui du Groupe Ohméga. J'ai reçu des correspondances d'Éocycle qui ont travaillé sur des projets de recherche et de développement... le CRCD également de la Gaspésie qui parle de votre contribution au plan de relance de la Gaspésie qui était indispensable. Et les deux entreprises que j'ai mentionnées précédemment me disent... nous disent, à la commission, que, sans la participation d'Innovatech Régions ressources, jamais ces projets n'auraient vu le jour, entre autres Éocycle, parce que personne ne voulait y aller, parce qu'ils voulaient un rendement très, très, très rapidement et un bon rendement. Et ce qui est remarquable ? c'est dans le mémoire qu'on a reçu du Groupe Ohméga ? c'est une croissance phénoménale en l'espace de peu de temps de l'entreprise, le développement des marchés internationaux.

Quel est l'impact de la présence d'Innovatech Régions ressources lorsque vous avez à travailler dans ces dossiers, tant au niveau de... à l'échelle nationale ou internationale? Parce que, eux, ils en font mention, de cette présence, là, comme quoi ça renforce l'entreprise, ça donne une crédibilité, votre réseau. Est-ce que vous pouvez, à ce moment-là, positionner des entreprises sur le marché international facilement?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): Oui. Facilement, c'est un bien grand mot.

M. Lelièvre: Facilement ou avec des efforts des entreprises, là, oui.

M. Blanchet (Ghislain): Moi, je dirais que le principal apport au début, c'est la validation de la technologie. Une fois que ça, c'est fait, c'est déjà un bon pas de fait au niveau de l'attrait éventuel d'investisseurs. Quand on a bien mesuré d'entrée de jeu l'échéancier puis quand la technologie va être prête et quel est le marché potentiel de ça, on vient déjà à bout d'intéresser certains investisseurs parfois.

L'autre aspect, c'est qu'effectivement, si vous pensez vendre des éoliennes à partir de Gaspé, il faut rapidement et immédiatement, lorsque vous lancez le projet, intéresser les partenaires. Je pense que, là, je dirais qu'un des aspects le plus important qu'on a à date, c'est déjà, sans amener des partenaires dans l'entreprise immédiatement, faire connaître que cette entreprise-là existe et leur permettre de rencontrer des gens qui opèrent dans ce domaine-là. Ça, je dirais qu'on a une certaine facilité là-dedans de par le réseau de contacts qu'on développe dans différents domaines. Ça, c'est un apport non négligeable. Je dirais que c'est plus important que l'argent en tant que tel dans le dossier.

M. Lelièvre: Quand on parle du plan de relance de la Gaspésie, quelle a été votre participation à cette opération?

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): C'est-à-dire, on n'est pas impliqués directement dans le plan de relance. C'est-à-dire, on est un intervenant pour regarder les projets en tant que tels. C'est qu'on s'est quand même associés de près aux dossiers qui sont issus, là, de... qui étaient mis en valeur dans la région pour apporter une contribution, là, comme au niveau de l'analyse ou des investissements lorsque ça faisait partie de notre créneau en tant que tel qui est l'innovation technologique.

M. Lelièvre: Et, avant votre...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui, une dernière question, M. le Président. Avant votre venue, avant la création d'Innovatech Régions ressources, est-ce que le champ a été occupé? Est-ce que vous avez fait une analyse de marché à ce moment-là pour savoir quel était le potentiel de la région ou des régions, entre autres pour la Gaspésie?

M. Blanchet (Ghislain): Bien, c'est-à-dire, nous... Moi, je suis arrivé là, le Fonds était déjà... c'est-à-dire l'idée de créer la société était en présence. Mais ce qu'on a fait, d'entrée de jeu, à la fois dans chacune des régions qu'on dessert, ça a été de rencontrer les intervenants, qu'ils soient des ministères, particulièrement les plans de développement des CRCD ou des organismes, pour voir quels étaient les secteurs en émergence qu'eux autres souhaitaient mettre en valeur, et on s'est un peu collés à ça pour connaître quels sont les projets qui lèvent dans ces milieux-là.

Je pense que l'orientation de la société s'est faite, comme je disais, pour devenir un outil de développement et non pas arriver pour aller chercher des entreprises déjà existantes où, là, les fonds déjà présents, c'était leur créneau d'investir dans ces entreprises-là. Alors, je pense qu'on a essayé de coller le rôle de la société sur les secteurs en émergeant à partir des plans de développement de ces régions-là.

M. Lelièvre: Merci. Je vais céder la parole à mon collègue.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Blainville, 3 min 30 s.

M. Legendre: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous saluer, chers amis, M. Blanchet, M. Lévesque, M. Bouchard, et vous dire, d'entrée de jeu, M. Blanchet, que je veux souligner votre très grande politesse quand vous avez dit au tout début qu'une petite incompréhension de votre mandat faisait qu'il y avait une recommandation que vous disparaissiez.

Alors, je pense qu'il faut reprendre un peu votre conclusion qui est importante. Vous dites: «Le retrait d'Innovatech Régions ressources laissera un trou béant parmi les instruments de développement des régions ressources.» Alors, je pense qu'il n'y a personne autour de la table, ici, qui souhaite qu'on se retrouve avec un trou béant parmi les instruments de développement des régions ressources. Et je vais y aller de façon un petit peu plus pointue.

Vous parlez dans votre rapport justement de la «création de «petits fonds régionaux», je vous cite. C'est la suggestion du rapport Brunet, là, des FIR, des fonds d'investissement régionaux, que vous qualifiez de «petits fonds régionaux», et je pense que vous avez le bon terme. Et je cite à nouveau votre rapport. Vous dites: «À notre avis, cette initiative ne répond en rien aux besoins des régions[...]. Cette initiative [...] est vouée à un échec.» Et, un peu plus loin, vous dites: «Il serait plus simple de permettre aux CLD ? et j'aimerais bien entendre M. Lévesque nous en parler un petit peu, de ce que vous pensez des CLD ? d'augmenter le niveau de leur intervention. Les CLD ont déjà une structure décisionnelle très décentralisée et à laquelle participent les intervenants du milieu.»

Alors, j'ai essentiellement deux questions, parce que vous avez quand même laissé entendre tout à l'heure aussi que vous pouviez être à l'aise avec cette notion de fonds mixtes où le privé s'impliquerait dans le fonds Innovation, si on peut l'appeler ainsi, où je rappelle qu'il faudrait que le privé s'implique à 2 $ pour qu'il y ait 1 $ de l'État. Et, par ailleurs, vous nous avez dit que, dans une proportion de 80 %, le secteur privé refusait de s'impliquer dans les différents projets.

Alors, pourquoi le privé, qui refuse à 80 % de s'impliquer dans les projets qu'il connaît, accepterait de s'impliquer dans un fonds de projets qu'il ne connaît pas, d'une part? Première question. Et, deuxième question: Justement, quel rôle vous voyez aux CLD? J'imagine, de la façon dont vous en parlez dans votre rapport, potentiellement en complémentarité avec ce qu'Innovatech Régions ressources faisait déjà et probablement qu'il aurait continué à souhaiter à faire. Est-ce que, dans votre proposition, là, votre proposition, elle est motivée surtout par un instinct de survie ou est-ce que c'est vraiment ça que vous pensez qu'il faut qu'on fasse?

n(16 h 10)n

Le Président (M. Paquet): M. Blanchet.

M. Blanchet (Ghislain): À l'égard de la question sur les CLD, je ne sais pas si vous voulez répondre, M. Lévesque.

Le Président (M. Paquet): M. Lévesque.

M. Lévesque (Yvon): Oui. Sur les fonds... les FIR, là, les fonds d'investissement régionaux, effectivement dans le mémoire, on soumet que la proposition, c'est de faire un fonds minimum de 3 millions: 1 million par le privé, 2 millions par le gouvernement, au coût des fonds.

On soumet que ce ne sera jamais rentable, parce que, je veux dire, ce 3 millions là, avec un fonds... avec un investissement maximum de 300 000 $ par projet, vous avez déjà un coût des fonds, mettons, de 5 % sur 2 millions, et ça vous prend une structure pour administrer ces fonds-là. Quel est l'intérêt pour le privé d'investir dans un tel fonds, à moins d'avoir des crédits d'impôt qui coûteraient assez cher, merci, pour qu'il puisse retrouver son profit?

On dit que, dans... il y a déjà une structure qui s'appelle les CLD et les fonds locaux d'investissement. En passant, je ne suis pas président du CLD, je suis vice-président du CLD et président du Fonds local d'investissement.

Les fonds locaux d'investissement, ça a été créé en même temps que les CLD. Et, dans certains CLD ? je ne dis pas partout ? il s'est développé une expertise et une compétence interne régionale et locale. Ces gens-là sont capables de faire le travail des fonds d'investissement régionaux. Évidemment qu'il y a beaucoup de CLD, donc il y a beaucoup de fonds locaux d'investissement. Ce que je dis, c'est que peut-être qu'on n'est pas obligé de donner des mandats à tous ces fonds locaux d'investissement, mais, si on veut augmenter la mise dans ces fonds-là, peut-être qu'on a déjà des expertises dans certaines régions de développées. Ce n'est pas égal, il y en a qui sont meilleurs, il y en a qui sont moins bons. Peut-être sélectionner puis dire: Eux, on va leur donner un mandat régional, puis développer plus ce secteur-là pour les petits projets.

Pourquoi partir une structure à côté que ça va prendre au moins quatre, cinq ans à faire ses preuves si ça marche? Ça, c'est pour le FIR.

Le Président (M. Paquet): Merci. Le temps est présentement écoulé. Donc, je cède la parole maintenant au ministre du Développement économique et régional.

M. Audet: Merci.

Le Président (M. Paquet): Pour deux minutes.

M. Audet: Oui. Quelques mots pour d'abord remercier M. Blanchet, M. Lévesque, M. Bouchard de leur présence, de leur participation. Peut-être faire quelques mises au point importantes, parce que le député de Rousseau et le député de Blainville, je pense, ont lancé, à mon avis, des accusations un peu gratuites. D'abord, sur le fait qu'on ne versait pas... J'ai mentionné...

Je vais juste vous donner un chiffre, M. le député de Rousseau: les régions ressources ont eu, comme contribution au capital, en 2002-2003, 8 millions; l'année dernière, elles ont eu 9 millions. Donc, pour vous dire qu'elles n'ont pas été... Il y a quand même eu une contribution pour leur permettre de maintenir les projets.

Ceci dit, il y a effectivement une réévaluation. Et, moi, j'ai déjà dit: Ce n'est pas la position du gouvernement, le rapport; c'est des suggestions, des pistes qui sont proposées. Et, dans les pistes qui sont proposées, il y a même une phrase qui dit: «Le groupe de travail considère [...] qu'une analyse plus approfondie est nécessaire avant de statuer de manière définitive sur toute cette question» des Innovatech. Donc, le sujet est ouvert, il y a des pistes qui sont proposées parce qu'il y a d'autres fonds, et j'ai mentionné tantôt qu'on était ouverts aux propositions qui ont été amenées.

Une chose, cependant, que je trouve un peu spéciale de la part de quelqu'un qui vient du secteur privé: vous avez l'air à vous révolter parce que, à quelques occasions, on demande que des organismes comme ça finalement tentent de faire leurs frais, visent l'objectif à faire leurs frais. C'est même une proposition... Je ne comprends pas pourquoi on s'y objecte, puisque c'est ce qu'ils ont réussi à faire au cours des cinq dernières années. Le rapport le mentionne à la page 38: L'association financière d'Innovatech Régions ressources est particulière, puisqu'ils ont réussi... ils se distinguent des autres, ils ont réussi à faire des légers surplus d'exercice donc dans leur portefeuille année après année.

Donc, tout ça pour vous dire qu'il n'y a pas de contradiction entre le fait que la société fasse des placements, fasse des investissements et réussisse quand même à faire ses frais. Donc, c'est ce que je pense qu'on devrait chercher. Je pense que c'est un peu facile de dire: Parce qu'ils vont faire leurs frais, ils ne pourront pas contribuer au développement économique. Je pense qu'il faut s'attendre à un peu plus de rigueur, de l'autre côté de la Chambre.

Alors, je remercie les participants et je vous remercie de votre contribution. Vous pouvez compter sur nous pour travailler à développer un scénario ensemble pour les régions ressources. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Au nom de la commission, je remercie donc les représentants d'Innovatech Régions ressources, M. le président et ceux qui vous accompagnent.

Je suspends les travaux pour une minute seulement, parce que nous devrons dépasser le temps de 6 heures, avec consentement, au point où on en est rendus.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

 

(Reprise à 16 h 17)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, merci. Alors, la commission reprend ses travaux. Nous allons maintenant... Nous allons accueillir... S'il vous plaît!

Nous allons accueillir les représentants de BIOQuébec, M. Perry Niro, directeur général et chef de la direction de BIOQuébec, ainsi que M. Élie Farah, chef de la direction de Biophage Pharma et président du conseil d'administration de BIOQuébec. Alors, il me fait plaisir de vous recevoir aujourd'hui, au nom de la commission. Sans plus tarder, je cède la parole, je crois, à M. Farah.

BIOQuébec

M. Farah (Élie): C'est bien ça. Alors, M. le Président de la commission, M. le ministre, Mmes et MM. les membres de la commission, mesdames et messieurs, je voudrais, dans un premier temps, vous remercier de nous donner l'opportunité de vous présenter les opinions de BIOQuébec. Je vous dirais aussi, à titre personnel, que je suis en biotechnologie depuis plus de 12 ans, mes premières années en tant que développeur économique et, ensuite, comme chef d'entreprise dans le secteur des services à aujourd'hui dans le domaine thérapeutique. Donc, j'amène un peu un point de vue assez global qui a aussi vécu l'évolution de l'industrie au Québec.

BIOQuébec a été fondée en 1991. Elle regroupe aujourd'hui 240 membres, dont une centaine d'entreprises industrielles particulièrement dans le secteur de la santé et du secteur agroalimentaire. Le mandat de BIOQuébec est de promouvoir les intérêts de ses membres. Il est très important pour nous, parce que l'industrie de la biotechnologie a un modèle d'affaire qui est très différent de ce que vous avez probablement vu ou un modèle avec lequel vous êtes moins familier, et vous allez me permettre de prendre quelques minutes de vous expliquer le modèle d'affaire de la biotechnologie, et je vous invite à vous placer un peu dans ce contexte-là.

Ce que nous faisons en biotechnologie, c'est que nous développons de nouveaux médicaments dans le cadre d'un processus qui est hautement réglementé, que ce soit au Canada, par Santé Canada, ou bien aux États-Unis, par la FDA. C'est un processus qui s'étale sur une période de sept à 10 ans et qui requiert des investissements généralement entre 20 et 50 millions pour amener une nouvelle drogue sur le marché.

La très grande majorité des entreprises de biotechnologie ne génèrent pas de revenus. Alors, la question, c'est: comment est-ce qu'on fait pour continuer nos opérations? Bien, on fait deux choses: on vend des positions d'équité aux firmes de capital de risque et on récupère une partie de nos dépenses grâce aux crédits d'impôt.

n(16 h 20)n

Le principal actif d'une compagnie de biotechnologie, c'est son portefeuille de propriété intellectuelle, et les entreprises de biotech commencent à faire de l'argent lorsqu'elles prennent des molécules à un stade très précoce dans leur développement, dépensent une grosse partie de ces millions de dollars que j'ai mentionnés et les amènent à un seuil où elles peuvent donner une licence à une plus grosse compagnie pharmaceutique qui a la capacité d'amener ces produits-là sur le marché et de les commercialiser. Donc, la très grande majorité des compagnies de biotechnologie ne vont jamais commercialiser elles-mêmes les drogues qu'elles développent, mais plutôt avoir recours à des accords de licence avec des compagnies pharmaceutiques. D'accord?

Le risque est inhérent à ce que l'on fait. Si vous prenez... Et permettez-moi peut-être d'expliquer d'abord le processus du développement d'une nouvelle drogue. On part d'un laboratoire où on a découvert une molécule dans un contexte que je vais appeler in vitro, en général dans le verre, et là on s'en va tester l'efficacité de ce produit-là chez des animaux, dans des modèles animaux. On s'assure que ces produits-là ne sont pas toxiques et on obtient une permission réglementaire qui nous permet d'aller tester ces produits-là chez l'humain.

Et vous avez probablement entendu des références à des compagnies de biotechnologie où on vous dit: La compagnie est en phase 1, phase 2, phase 3. Donc, il y a trois phases cliniques suite auxquelles on fait une application au gouvernement pour approbation, et, ensuite, on fait des études postapprobation, postmarketing, pour s'assurer qu'il n'y a pas de cancer ou d'autres maladies qui sont développés à long terme.

Si on prend un produit qui est au stade préclinique, donc chez l'animal, il a en théorie 5 % de chance de se rendre sur le marché. Si on prend un produit qui est en phase 2, clinique, il a 15 % de chance de se rendre au marché. Si on prend un produit pour lequel une application d'approbation a été soumise à la FDA, il y a encore 17 % de chance que ce produit-là ne se rende jamais sur le marché. Donc, le risque est énorme. Par contre, le risque baisse au fur et à mesure que le produit se développe. Et, dans l'argumentation que je ferai un peu plus tard, n'oubliez pas ce risque, si vous voulez, qui baisse avec le développement, parce que nous voyons beaucoup plus le rôle de l'État au début, là où le risque est le plus élevé, et ce rôle de l'État qui baisse au fur et à mesure que le risque baisse.

Si on regarde notre industrie au Québec, elle a connu un développement très rapide depuis 1991. Je me souviens que, quand, moi-même, j'ai commencé au début de 1992, il y avait un seul fonds de capital de risque en biotechnologie au Québec, qui était Biocapital inc., qui était doté de 10 millions de dollars. Je vous avoue que, dans ce temps-là, on se sentait riches. Aujourd'hui, on parle de fonds de 150, 250, 300 millions de dollars, juste pour vous dire comment les choses ont grandi avec le temps.

On avait, en 1991, 17 entreprises en biotechnologie de la santé; on en avait 90 en l'an 2000. On avait 250 emplois directement reliés à l'industrie en 1991; on en a 2 500 aujourd'hui. Si on prend une définition plus large de biopharmaceutique qui inclut les compagnies pharmaceutiques et les centres de recherche, on arrive à 170 entreprises qui emploient 17 000 personnes qui ont des postes de savoir élevé et qui retournent, de par leurs taxes, une part importante aux gouvernements ? au pluriel.

Pourquoi est-ce qu'on a connu une croissance aussi rapide de notre industrie au Québec? C'est parce que, foncièrement, nous avons été privilégiés et sages d'avoir chez nous les cinq piliers qui permettent l'essor de cette industrie. Le premier pilier de l'industrie de la biotechnologie, c'est le savoir. Si vous essayez d'installer une industrie de la biotechnologie dans une région où il n'y a pas d'innovation, il n'y a pas de savoir, vous n'allez nulle part. Vous allez en importer un peu, mais jamais en bâtir une. Donc, nous sommes chanceux d'avoir un certain nombre d'universités qui produisent du savoir.

Nous avons, dans un deuxième temps, du personnel qualifié, de haut niveau, qui sont capables de travailler dans ces entreprises-là de savoir.

Troisièmement, nous avons toutes les infrastructures nécessaires à Montréal pour amener une nouvelle drogue de la recherche à la commercialisation. Et il y a peu de villes dans le monde où on retrouve toutes les compagnies de services, toute l'infrastructure nécessaires pour amener une nouvelle drogue sur le marché.

Quatrièmement, nous avons eu le capital de risque. Et, cinquièmement, nous avons les crédits d'impôt, des crédits d'impôt uniques qui ont toujours incité les compagnies à se localiser au Québec. Et cet environnement, ces cinq piliers là ont permis un essor extraordinaire de l'industrie dans les années quatre-vingt-dix et nous ont permis d'attirer à Montréal plusieurs entreprises étrangères qui ont déménagé, que ce soit du Massachusetts ou de la Californie, pour venir s'installer à Montréal.

Si on se place en l'an 2000, mars 2000, c'est le «peak», c'est les meilleures conditions du marché boursier. Au fait, tout le monde cherchait des projets de biotech pour investir là-dedans. Puis on a l'éclatement de la bulle boursière, dont le premier impact a été quasiment l'élimination financière des anges, les anges qui supportent, si vous voulez... ma compagnie à moi, on a levé 4 millions et demi d'anges dans cette période-là. Aujourd'hui, essayez de trouver un ange qui veut risquer 250 000 $, vous n'en trouverez presque pas.

Donc, on s'est retrouvés sans ange. On s'est retrouvés avec des investisseurs frileux qui cherchaient à investir dans les compagnies les plus avancées, donc celles qui ont un risque le plus bas. On constate aussi une vague, qui semble prendre de l'importance, de fusions-acquisitions. Et on remarque surtout que les durées de financement en ce moment sont beaucoup plus longues. Donc, on parle de financement qui s'étale ou de... pour clôturer sur des périodes de 12 à 18 mois, alors qu'on était capables, avant ça, de faire des rondes entre six et neuf mois. Nous remarquons aussi, depuis le début de 2003, une amélioration sur le marché des États-Unis, mais qui ne s'est pas vraiment transigée sur le marché du Québec.

En préparation aux représentations que BIOQuébec a faites à la commission Brunet au début du mois d'octobre, nous avons voulu conduire un sondage auprès de nos entreprises pour qu'on puisse arriver avec des chiffres réels. Et le fruit de ce sondage-là ou les résultats de ce sondage-là étaient les suivants: on avait 50 % des entreprises qui avaient moins d'un an de liquidité; on avait 56 % de nos entreprises qui avaient réduit leurs dépenses dans les derniers mois avant le sondage, et on avait 61 % des entreprises qui visaient des levées de fonds entre 1 et 10 millions de dollars.

Si on regarde les recommandations du rapport Brunet et la position de BIOQuébec, en ce qui a trait à la SGF, nous n'avons vraiment... nous appuyons, au fait, ce que le rapport Brunet dit. C'est qu'il faudrait mettre le focus, à la SGF, sur les projets de 100 millions dans lesquels la SGF investirait entre 20 % et 30 %, 20 millions au départ. Si on regarde le portefeuille actuel de la SGF Santé, il y a juste un investissement qui est fait, qui est DSM Biologics qui se qualifie sous ce créneau-là.

Donc, nous, notre principale interrogation par rapport à cette recommandation-là, c'est: qu'est-ce qui va arriver avec le portefeuille actuel de la SGF Santé pour les autres compagnies à part DSM Biologics? Et nous allons vous proposer une solution dans les minutes qui suivent.

Si on regarde Investissement Québec où le rapport Brunet dit: Gardons le focus sur prêts et garantie de prêts, je vous avoue que, BIOQuébec, nous appuyons aussi cette notion-là, mais nous invitons la direction d'Investissement Québec à alléger ses structures. Quand on regarde le temps que ça a pris pour implanter Bio-Levier, quand on parle actuellement d'une situation dans l'industrie de la biotechnologie où le 50 % d'entreprises qui avait moins d'un an de liquidité au début du mois d'octobre, il y en a à peu près une ou deux qui ont levé un ou 2 millions de transition en ce moment... Donc, il y a urgence au niveau de la biotechnologie, et nous avons recommandé au ministre Séguin des mesures spécifiques que je vais me permettre de qualifier d'urgence, et il va falloir qu'Investissement Québec puisse répondre à cette urgence-là.

La troisième recommandation du rapport Brunet sur les Innovatech. Foncièrement, le rapport Brunet parle de dissolution des Innovatech. Il prône la création de fonds mixtes public-privé, dont un fonds spécialisé en amorçage, démarrage d'entreprises, où on dit: Le gouvernement investit 33 millions par année puis on «leverage» avec 66 millions du privé pour 100 millions de dollars. Et on crée un fonds d'expansion pour des rondes de 20 millions et plus. Et on qualifie ces rondes-là, ces produits à ce moment-là d'être proches du marché, et on finance cet argent-là à partir du secteur privé seulement. On indique aussi que les Innovatech auront besoin de 80 millions de dollars sur trois ans pour fins de réinvestissement dans les projets qui sont dans leurs portefeuilles.

Permettez-nous d'avoir une opinion d'abord différente du comité Brunet sur que veut dire valorisation, amorçage, démarrage, intermédiaire et expansion. Mme Thabet, tantôt, a soulevé cette question-là. Permettez-moi de vous dire que nous voyons amorçage et valorisation comme étant 1 million et moins; démarrage, entre 1 et 5 millions; intermédiaire et croissance, entre 5 et 20 millions, et, expansion, en haut de 20 millions de dollars.

n(16 h 30)n

Donc, nous, ce que nous suggérons, c'est de prendre les portefeuilles biotechnologiques des trois Innovatech qui ont investi dans la biotechnologie, soit Grand Montréal, Sherbrooke et Québec, et de les consolider dans une Innovatech bio avec le portefeuille de la SGF Santé. Donc, on vient créer un fonds dédié à la biotechnologie avec toute l'expertise pour lancer ce fonds, et on règle, permettez-moi de dire, la situation avec le portefeuille de la SGF Santé en l'intégrant dans cette structure-là. Et on prend cette structure-là et on l'utilise comme base de départ pour créer le fonds mixte privé-public où l'argent qui est investi dans ces Innovatech-là, par effet de levier, on va chercher le privé pour investir 2 $ pour chaque dollar que le gouvernement mettra dans Innovatech bio pour aller allégrement vers ce fonds privé-public mixte.

Je veux aussi mettre l'emphase sur le fait qu'en consolidant les trois Innovatech au niveau biotechnologique nous ne sommes pas en train de dire qu'il ne faut pas qu'elles aient des antennes régionales. Nous croyons fermement que Sherbrooke et Québec ont des universités qui produisent de superbes technologies, que les représentants des deux Innovatech en région font un travail extraordinaire, mais, en même temps, nous disons: nous fonctionnons dans un marché global, et les capacités d'analyse, les capacités de connaissance des marchés, les capacités de positionnement d'entreprises ou de secteurs ou de priorités de marché, etc., on ne peut pas se permettre de les avoir dans trois régions. Il faut consolider ces activités, si vous me permettez, dans un siège social quelque part, et tout en maintenant les capacités régionales d'identification d'opportunités et de parrainage de ces opportunités-là au niveau de la maison mère, si je peux me permettre.

Nous sommes aussi... Si on regarde la recommandation concernant le fonds intermédiaire et de croissance, nous suggérons d'aller en appel d'offres. Les commentaires que j'ai faits à date, c'était pour un fonds de démarrage. Là, on parle maintenant d'intermédiaire et de croissance, donc on parle de placements entre 5 et 20 millions de dollars. Et, nous, on aimerait suggérer le modèle de Foragen Technologies. Foragen Technologies, c'est un co-investissement entre la SGF Soquia et la Banque Royale, donc un bel exemple actuel de fonds mixte public-privé. Et on vous suggère de prendre ce modèle-là, d'aller en appel d'offres puis d'aller chercher des investisseurs privés qui aideraient à mettre en place ce type de fonds.

Le comité Brunet recommande aussi la création d'un comité ad hoc pour parler d'incitatifs qui pourraient être accordés aux investisseurs privés pour les inciter à venir s'installer au Québec et à investir. Je suis tout à fait d'accord avec les commentaires qui ont été faits un peu plus tôt sur la priorité qu'accorde l'investisseur privé au rendement. Ça, on est tous d'accord là-dessus, mais je pense qu'un tel comité devrait aussi se pencher sur une couple d'autres facteurs qui jouent beaucoup dans la décision d'un investisseur de se localiser ici ou non. Quand un investisseur met de l'argent quelque part, la minute où il met son argent, il pense à sa porte de sortie, comment est-ce qu'éventuellement je vais faire mon «exit». Et, actuellement, le gros problème que nous avons, au Canada et au Québec, c'est que les compagnies qui sont listées en Bourse ont très peu de liquidités. Donc, l'investisseur regarde ça puis il dit: Bon, bien, une porte de sortie traditionnelle, c'est d'aller faire un premier appel public à l'épargne, mais, si je fais ça puis je vois les volumes qui se transigent en actions, mes chances de pouvoir liquider mon portefeuille rapidement sont plutôt minces.

La deuxième chose, c'est que nous avons, au Québec, des conventions d'actionnaires qui sont aussi contraignantes. L'investisseur privé qui veut avoir la flexibilité de dire: Demain matin, j'ai une opportunité pour faire une fusion-acquisition avec une compagnie qui est basée au Massachusetts ou quelque part d'autre aux États-Unis ou en Europe, etc., il ne veut pas se retrouver avec une convention d'actionnaires qui dit: Le siège social de cette entreprise-là doit être basé au Québec et ne peut être basé ailleurs qu'au Québec, etc. Donc, moi, j'inviterais le comité ad hoc non seulement à se pencher sur les incitatifs financiers et fiscaux qui pourraient être accordés aux investisseurs privés, mais à regarder aussi la notion un peu plus large de l'environnement et du «exit» pour ces investisseurs-là.

Un commentaire bref sur les fonds d'initiatives régionales où on parle d'investissement de 300 000 $. Je vous avoue qu'on n'a pas vraiment l'impression que c'est pertinent à la biotechnologie.

BIOQuébec a aussi recommandé un certain nombre d'autres mesures. Le crédit d'impôt pour fonds de travailleurs, on propose de l'étendre à d'autres regroupements privés, ce qui les inciterait à se localiser au Québec. Et on incite aussi la permission de pouvoir transférer les fonds d'un fonds à l'autre. En ce moment, on trouve que les fonds ne sont pas vraiment en compétition l'un à l'autre et si, je ne sais pas, moi, j'ai un investissement dans le Fondaction et que je trouvais que le Fonds de solidarité était mieux géré ou moins bien géré que Fondaction, etc., j'aimerais avoir la capacité de dire: Je reste dans le créneau des fonds des travailleurs, je ne perds pas mes incitatifs fiscaux et je déménage d'un fonds à l'autre.

Les REA, il faut absolument réinstaurer les REA pour les compagnies de biotechnologie de petite capitalisation, et là on recommande pour les compagnies qui ont moins de 100 millions de capitalisation.

On incite de regarder de nouveau le modèle des SPEQ. Dans l'environnement actuel, les compagnies de biotechnologie regardent tous les moyens de pouvoir lever de l'argent. Les SPEQ, c'est un moyen intéressant, mais un moyen qui est très lourd, donc on vous invite à y repenser.

Et, juste pour terminer, nous avons proposé au ministre Séguin la création d'un crédit d'impôt à la propriété intellectuelle. Comme je disais un peu plus tôt, la propriété intellectuelle, c'est le principal actif d'une compagnie de biotechnologie, et nous avons proposé, BIOQuébec, un crédit d'impôt qui est pas mal calqué sur le crédit d'impôt aux communications financières qui serait donné aux compagnies technologiques pour qu'elles développent leurs portefeuilles de propriétés intellectuelles.

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, M. Farah. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Merci. Alors, M. Farah, M. Niro, c'est un plaisir de vous rencontrer. J'ai eu le plaisir d'ailleurs récemment d'aller rencontrer votre conseil d'administration et les représentants de beaucoup de vos entreprises pour discuter avec eux justement des problèmes, mais en même temps des perspectives de votre secteur. Je pense que votre mémoire en fait état, c'est un secteur qui est extrêmement important pour la vitalité du secteur du développement non seulement des biotechnologies, mais également du pharmaceutique, parce qu'on voit de plus en plus maintenant le secteur pharmaceutique s'appuyer évidemment sur des petites entreprises de biotechnologie pour acheter, au fond, des idées, de meilleures idées pour développer par la suite leurs produits. Donc, il y a... Donc, pour le Québec, compte tenu de l'importance de cette industrie-là au Québec, je pense que vous comprendrez que vous trouverez une oreille très attentive de notre part à vos suggestions.

Je voudrais cependant vous poser une question sur justement votre proposition qui peut être intéressante, mais qui va un petit peu... prend une autre approche du prédécesseur qui parlait de transformer, au fond, d'utiliser le panier en quelque sorte des Innovatech Régions ressources puis d'essayer d'attirer des investisseurs privés. Là, vous prenez une autre approche en disant: On devrait regrouper au sein d'une Innovatech biotech l'ensemble des placements pour peut-être y faire un autre type de panier qui pourrait être intéressant sur ce plan-là. Évidemment, ça voudrait dire par contre que, dans le panier actuel des Innovatech, qu'il s'agisse de celui de Montréal, de Québec, du sud ou de régions ressources, s'il y en a, évidemment il y aurait d'autres regroupements à prévoir pour les technologies de l'information puis peut-être, là...

C'est à ça peut-être que vous voulez en venir? Est-ce que votre suggestion va jusque-là, c'est-à-dire de revoir l'approche qui est proposée dans le rapport Brunet puis d'y aller plutôt par fonds spécialisés, incluant donc une révision même de faire des fonds pour les technologies de l'information ou d'autres fonds spécialisés à partir des paniers actuels pour tenter soit de faire en quelque sorte... d'attirer des investisseurs privés dans ce domaine-là ou d'autres façons d'aller chercher du capital? Est-ce que vous allez aussi loin que ça dans votre proposition? Et, sinon, bien, comment voyez-vous que votre proposition peut être conciliable avec le fait qu'on tente effectivement de rendre les Innovatech actuellement intéressantes aux marchés privés ou aux investisseurs privés pour les intéresser à y mettre du capital, à y mettre une part plus importante de fonds pour qu'on puisse développer cette industrie?

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

n(16 h 40)n

M. Farah (Élie): Au fait, l'opinion qu'on défend, c'est que, pour bien investir en biotechnologie, pour bien défendre un portefeuille de biotechnologie, il faut connaître la biotechnologie, il faut du vécu, il faut avoir travaillé longtemps parce que c'est une industrie qui sort du modèle traditionnel.

Donc, nous, on croit que, si on consolidait les Innovatech, si on gardait l'expertise actuellement dans les équipes de biotech des trois Innovatech, et qu'on les mettait ensemble, et qu'on utilisait ce noyau comme étant la base de départ... Au fait, on a une situation où le rapport Brunet dit: On s'en va vers une dissolution des Innovatech sur une période de trois ans. Et en même temps on dit: On veut partir des fonds privés, etc. Nous, on dit: On veut une transition qui est smooth, si vous me permettez le terme, puis on la fait à partir des Innovatech actuelles en mettant le focus sur la biotechnologie.

Puis je suis bien d'accord avec vous de vous dire... Les particularités, par exemple, du secteur des télécommunications ou des technologies de l'information sont très différentes. Et un exemple flagrant, c'est toute l'importance qu'a pour nous le portefeuille de propriété intellectuelle, alors que, si on parle de technologie de l'information, le temps qu'il dépose une application de brevet, la technologie est déjà obsolète. Donc, les priorités sont très différentes.

Et je pense que notre suggestion a du mérite parce qu'elle met l'emphase, si vous voulez, sur l'expertise pointue dans ces secteurs-là. Et, comme je l'ai dit plus tôt, on ne vise pas du tout à consolider ça à Montréal, à sortir les régions de là-dedans, pas du tout. On me dit qu'il y a une excellente expertise en région dans le domaine, mais on veut valoriser cette expertise-là en allant chercher une expertise additionnelle au niveau des marchés, du contexte réglementaire, etc.

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

M. Audet: Dans votre présentation, vous évoquez également l'importance des crédits d'impôt remboursables qui sont très importants effectivement au Québec, malgré les ajustements qui ont eu lieu. Et vous avez fait des propositions là-dessus pour modifier justement... Pouvez-vous... juste pour voir un peu comment est-ce que vous voyez ces propositions-là, dans quelle mesure elles seraient susceptibles de permettre à cette industrie de se développer. Parce qu'on parle d'incitatifs fiscaux. Le but ici... On n'est pas une commission de la fiscalité, mais je comprends que vous l'intégrez quand même dans vos propositions. Peut-être nous expliquer un petit peu ce que vous aviez en tête dans les mesures fiscales auxquelles vous aviez... auxquelles vous faites allusion.

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Merci. Comme je vous l'ai dit plus tôt, on se finance, en biotechnologie, dans la très grande majorité des cas, par des levées de fonds et par les retours de crédits d'impôt à la recherche-développement. Les très grandes dépenses que nous faisons sont toutes en recherche-développement. L'industrie de la biotechnologie n'est pas une industrie de briques et de mortiers. Nos investisseurs verraient d'un très mauvais oeil qu'on dépense l'argent qu'ils nous donnent pour faire de l'investissement en infrastructures. Le plus d'argent qu'on peut dépenser en recherche-développement, le mieux on se... ou le plus rapidement on se rapproche des marchés, donc de la valeur sur la base de laquelle ils investissent.

La coupure de 12,5 % qui s'est faite au mois de juin peut paraître, si vous voulez, banale comme telle, mais au fait, elle ne l'est pas, si vous me permettez, parce que... elle ne l'était pas parce qu'elle n'était pas... discriminatoire envers les petites entreprises. Et ce sont les plus petites entreprises qui souffrent parce que, pour elles, c'est une part très importante. Si vous prenez une compagnie qui a dépensé 1 million de recherche-développement, bien, six mois après la fin de son année fiscale, il y a 400 000 $ qui reviennent dans le pot, c'est très significatif. Alors, nous avons recommandé au ministre Séguin de ramener les crédits d'impôt au niveau antérieur mais pour les compagnies de technologie qui ont un maximum de 200 employés.

Donc, ce qu'on dit, c'est qu'on comprend les contraintes de l'État, mais on dit aussi: Comprenez les contraintes des plus petites entreprises. Puis c'est une mesure budgétaire qu'on propose, qui, dans le cas des entreprises de biotechnologie, a un impact de 3 millions de dollars sur le budget de la province. Merci.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun et adjoint parlementaire au premier ministre.

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Si je comprends bien votre plaidoyer, M. Farah, c'est que vous nous dites: Le secteur des biotechnologies est différent des autres secteurs. Vous nous dites à l'heure actuelle essentiellement que le retour sur l'investissement va venir tardivement, c'est-à-dire qu'il faut faire la phase I, la phase II, où on est en période de recherche, et le retour sur l'investissement viendra de la commercialisation éventuelle du brevet, c'est-à-dire de la possibilité que vous aurez de vendre des brevets que vous avez établis à des compagnies plus grosses qui à ce moment-là mettront sur le marché des molécules que vous avez découvertes. Est-ce que je comprends bien que vous nous dites à l'heure actuelle que vous avez une situation bien particulière? Quel temps à l'heure actuelle entre un dollar qui est investi chez vous puis le moment où on peut avoir une chance de retour sur l'investissement, là? Il y a la vente du brevet. Ça prend à peu près combien de temps?

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Sept à 10 ans.

M. Gautrin: Sept à 10 ans.

M. Farah (Élie): Mais à la différence près que vous mettez 1 $ aujourd'hui et que vous allez récupérer 7 $ si j'ai réussi dans ce temps-là.

M. Gautrin: Si vous avez... Avec le risque, si j'ai bien compris... Le 5 %, le risque de 10 %, c'est un risque extrêmement risqué à l'heure actuelle et que vous financez, comme vous venez de l'expliquer au ministre, actuellement par rapport aux crédits d'impôt pour les petites entreprises qui vous permettent de maintenir le cash-flow à l'intérieur de votre entreprise. C'est bien ce que je comprends?

M. Farah (Élie): Oui.

M. Gautrin: Et là vous nous dites aujourd'hui: Les mécanismes que le rapport Brunet vous propose sont des mécanismes qui étaient des mécanismes conçus pour l'ensemble des secteurs technologiques mais non adaptés à la réalité du secteur technologique des biotechs qui est le nôtre. Parce que, contrairement aux technologies de l'information, par exemple, où la rentabilité est beaucoup plus rapide, vous nous dites à l'heure actuelle: Dans notre secteur, on a une particularité qui fait qu'on souhaiterait que les fonds d'investissement soient identifiés biotechs plutôt que d'être mêlés à l'ensemble du fonds mixte d'investissement. Est-ce que je comprends que c'est ça, votre position?

M. Farah (Élie): Oui.

M. Gautrin: Autrement dit, vous nous dites à l'heure actuelle que vous êtes d'accord avec le principe de participation du privé, d'un fonds mixte privé-public. Éventuellement, vous avez une suggestion. Vous dites comment le structurer, mais vous dites: De grâce, tenez compte de notre spécificité lorsque vous établissez ces fonds et faites en sorte que notre spécificité du secteur biotechnologique soit prise en cause et qu'on ait un fonds propre biotech compte tenu du temps de rentabilité sur investissement et du risque important que l'on doit couvrir sur les investissements.

M. Farah (Élie): Absolument. Si vous me permettez un commentaire...

M. Gautrin: Allez-y.

Le Président (M. Paquet): Très, très rapidement parce que le bloc est presque fini. On est à 10 secondes près.

M. Farah (Élie): Oui, très rapidement. Quand la valeur est là en biotech, elle est vraiment là. Il n'y a probablement personne qui a remarqué la chose suivante, là, mais BioChem Pharma, qui a été créée en 1986, vendue en 2001, a été vendue pour à peu près 80 % du prix qu'Alcan a payé pour Pechiney. Je ne sais pas si personne a remarqué ça, mais, quand ça va, en biotech, ça va fort.

M. Gautrin: Autrement dit, quand vous investissez, c'est comme...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: ...c'est comme le 7/49, c'est payant, hein, quand on gagne.

Le Président (M. Paquet): Alors, maintenant, Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Oui, merci. Je voudrais laisser mon porte-parole officiel avant et je viendrai immédiatement après.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le député de Rousseau.

M. Legault: Oui, merci. Je voudrais saluer M. Niro, M. Farah, les remercier pour leur présentation. Je pense qu'évidemment, quand on parle de biopharmaceutique au Québec, on est très fiers de cette industrie. On a réussi, je pense, avec tous les efforts qui ont été faits par tous les partenaires, incluant évidemment le gouvernement, de créer une industrie où on est de façon, là, très claire les premiers au Canada. Puis je dirais qu'on est, selon les experts, là, parmi les 10 plus grands centres en Amérique du Nord. Donc, c'est une industrie qui, d'une certaine façon, est mature. On a développé une expertise. Et c'est peut-être un exemple justement où il y a des ajustements à apporter dans les façons d'aider les entreprises.

Sauf que vous nous dites évidemment que, quand ça rapporte, ça rapporte gros, mais il y a souvent beaucoup de recherche et développement à faire pendant un certain temps. Et je pense qu'il y a des partenaires, incluant le privé ? je parle dans le cas des biotechnologies ? qui sont prêts à investir, mais qui veulent quand même avoir un accompagnement au niveau des impôts. Et là je pense que... je comprends qu'on ne veut pas trancher en saucisson, là, l'aide aux entreprises, mais il reste que, dans votre dossier, c'est vraiment les crédits d'impôt à la recherche-développement qui sont, entre autres, très importants.

n(16 h 50)n

Et je voyais... Dans votre rapport, vous disiez que, suite aux mesures qui ont été prises dans le dernier budget du ministre des Finances, c'est-à-dire qu'on a coupé en partie les crédits d'impôt en recherche-développement, selon votre étude, 20 % des entreprises ont dû procéder à des mises à pied à cause du budget et 56 % ont réduit leur investissement en recherche. Je voudrais vous entendre un peu sur les crédits d'impôt à la recherche, étant donné qu'on est à trois semaines du deuxième budget de M. Séguin. Si vous aviez, là, à faire des recommandations très concrètes à M. Séguin sur les crédits d'impôt à la recherche, qu'est-ce que vous proposeriez?

M. Farah (Élie): Quand vous êtes un gestionnaire d'une...

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Merci. Quand vous êtes un gestionnaire d'une entreprise de biotechnologie, votre préoccupation quotidienne, c'est de gérer le cash-flow. Et, quand vous voyez que la prochaine ronde est dans six mois, 12 mois, 18 mois, bien, il faut que vous preniez les mesures nécessaires pour que le cash-flow que vous avez dure aussi longtemps que possible. Et malheureusement, dans une compagnie manufacturière, c'est le marketing qui écope; dans une compagnie de recherche-développement, c'est la recherche-développement qui écope, parce que c'est quelque chose qu'on peut décaler dans le temps, qu'on... Même si on essaie d'éviter, je vous avoue, comme la peste de laisser partir nos scientifiques, parce qu'il y a d'autres compagnies, qui sont plus riches que nous, qui risquent de s'approprier ces gens-là puis de les récupérer ensuite, c'est très difficile.

Donc, si on part du principe que chaque dollar que vous économisez est un dollar que vous n'êtes pas obligé de lever... d'où l'importance des crédits d'impôt. Parce que, dans le fond, c'est un automatisme: si vous avez respecté la définition de ce qu'est la recherche scientifique et le développement, vous êtes à peu près assurés de ravoir cet argent-là six mois après et vous pouvez même financer ces crédits d'impôt là avec Investissement Québec. Donc, ces crédits sont très importants.

Et, quand la mesure a pris place au mois de juin et qu'on a vu que les REA étaient fermés, etc., il s'est instauré un certain vent ? excusez-moi ? de nervosité dans l'industrie, puis les gens on dit: Bon, mais, écoute, ça va prendre probablement beaucoup plus de temps qu'on avait anticipé, voyez-vous. Et les gens ont pris des mesures probablement défensives qui, aujourd'hui, s'avèrent des mesures plutôt permanentes, parce que ce processus-là, je vous avoue, on ne s'attend pas à ce que les conclusions du gouvernement, la mise en place de certaines mesures, etc., arrivent avant l'été ou au début de l'automne. Donc, nous, pour nous, le 12 mois où 50 % des entreprises avaient des liquidités pour l'année, bien, il n'y a à peu près plus rien, là. Alors, effectivement, les gens sont nerveux et se sentent vulnérables.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Merci, messieurs, de venir nous entretenir de vos préoccupations et de vos besoins. Je crois que c'est important qu'on sache ce que veut le réseau des biotechnologies au Québec. Vous dites, dès le départ, dans votre mémoire, que vous regroupez 250 membres, des entreprises québécoises de biotechnologie. Combien de ces membres viennent des régions autres que Montréal, Québec, Sherbrooke? Est-ce que vous avez des membres, des entreprises ailleurs que dans ces trois régions que je viens de mentionner?

Le Président (M. Paquet): M. Niro.

M. Niro (Perry): Dans le domaine de la biotechnologie, 80 % des efforts de recherche se font dans le domaine de la santé et se sont concentrés dans trois régions: Montréal, Sherbrooke et Québec. Et pourquoi? Parce qu'il y a trois hôpitaux universitaires essentiellement et, en région, c'est très rare. À part le volet biotechnologie environnementale ou biotechnologie et ressources ou foresterie, bien, on parle peut-être de trois, quatre sociétés.

Mme Charest (Rimouski): Il y a des biotechnologies marines qui sont en ébullition, entre autres, dans les régions maritimes du Québec: Bas-Saint-Laurent, Gaspésie, Îles-de-la-Madeleine et la Côte-Nord. Il y a quand même plusieurs entreprises en émergence qui sont... qui voient le jour ou qui ont vu le jour et qui existent. Et je remarquais que votre présentation faisait référence surtout à la santé humaine et animale, je le comprends, je connais un peu l'historique aussi, là. Mais, quand même, je pense qu'il ne faut pas oublier ce qui est en train d'émerger depuis les cinq, 10 dernières années au Québec et qui se retrouve près de la ressource première dans les régions. Et je voulais attirer votre attention surtout sur les biotechnologies marines, qui sont très importantes.

Et c'est ce qui m'amène à vous poser une question, parce que vous dites que c'est complexe, hein? Bon, il y a la complexité scientifique et il y a toute la question spéculative et financière de financer des entreprises en biotechnologie, surtout dans le domaine des sciences de la vie et dans d'autres secteurs. Et vous déclarez qu'il n'est pas approprié de créer des structures régionales autonomes. Moi, je me suis dit: Pourquoi? Parce que le gouvernement actuel, il fait de la régionalisation son cheval de bataille, en tout cas, en campagne électorale, c'est ce qu'on entend. Et, vous de Biotech Québec, à partir de ce que j'ai lu dans votre mémoire, vous proposez plutôt de centraliser les outils de développement, les outils financiers, en regard des biotechs. Et j'aimerais vous entendre là-dessus parce que je suis persuadée que les petites entreprises de biotechnologie, surtout les biotechnologies marines de ma région, vont se poser des questions par rapport à ça et j'aimerais ça que vous nous expliquiez le fond de votre cheminement par rapport à ça.

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Quand vous lancez une entreprise de biotechnologie, le but, c'est d'arriver avec des produits sur le marché. Notre but n'est pas de faire de la recherche pour faire de la recherche, mais bien pour en arriver à un produit qui est commercialisé. Ce produit commercialisé là, il faut le positionner dans l'ensemble du marché. On ne peut pas juste le regarder dans le cadre d'un marché régional ou dans le marché...

Mme Charest (Rimouski): Je m'excuse...

M. Farah (Élie): Non, non, je n'ai pas... Laissez-moi terminer, s'il vous plaît.

Le Président (M. Paquet): Oui, M. Farah.

M. Farah (Élie): Et ce que je...

Mme Charest (Rimouski): Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Farah (Élie): Non, c'est correct. Mais je ne critique pas non plus. Mais ce qu'on dit, nous, c'est que, au niveau régional, de par les moyens plus restreints qu'il y a dans les différentes régions, on n'a pas toujours cette capacité d'avoir les moyens de payer des consultants, d'avoir la vision absolument globale du marché de la biotechnologie.

En fait, toutes les compagnies de biotechs visent en bout de ligne d'accorder des accords de licence. Si vous êtes capable d'aller chercher Pfizer, bien, c'est... ou Glaxo, c'est BioChem ou... etc. Donc, dans le fond, que vous soyez une compagnie de biotech en Gaspésie, en Allemagne, en France, aux États-Unis, tout ça se ramasse à un moment donné vers une pointe de pyramide qui est un nombre relativement limité d'entreprises pharmaceutiques capables de licencer ces technologies.

Juste pour faire une parenthèse, la FDA américaine a approuvé, cette année, 25 nouveaux produits de biotechnologie. Elle n'en a pas approuvé 200, elle en a approuvé 25; c'était 17 l'année passée.

Alors, nous, tout ce qu'on dit, c'est que, en consolidant les activités centrales au niveau des connaissances globales du secteur à Montréal, tout en gardant des antennes régionales ? puis je l'ai dit au début ? qui protègent, qui amènent, si vous voulez, toute la connaissance régionale, la... ce qui existe là au central pour le développer dans une perspective globale... à mon avis, ne peut que bénéficier les compagnies régionales. Si les compagnies régionales devaient se retrouver dans un contexte où on limitait nos connaissances à rien... à moins que le marché global, à un moment donné, dans leur développement, elles vont arriver à un moment donné où elles vont être confrontées à ce marché global. Donc, le plus tôt elles peuvent savoir dans quel contexte elles fonctionnent, le mieux elles vont pouvoir adapter leurs plans d'affaires pour rencontrer les réalités de ce marché-là.

Mme Charest (Rimouski): Merci de votre réponse. Je pense qu'on pourrait avoir de longs débats parce que, moi, je suis persuadée qu'à partir des régions on peut faire ça aussi parce qu'il se fait de la recherche et du développement également. Il y a des chercheurs dans nos universités qui, d'un point de vue mondial, sont reconnus dans leurs créneaux, surtout dans certains créneaux d'excellence. Et je pense qu'on pourrait avoir de nombreux débats parce que ce n'est pas nécessaire d'être nécessairement en milieu urbain pour avoir cette vision globale dont vous parlez. Mais, ceci étant dit...

Le Président (M. Paquet): Le bloc de 10 minutes est terminé maintenant. On a même dépassé un petit peu. Alors, vous pourrez revenir peut-être au prochain tour, si vous permettez.

Mme Charest (Rimouski): Ah! J'avais une autre question. Oui, je reviendrai sur un autre élément.

Le Président (M. Paquet): Alors, maintenant, Mme la députée de Matane. Non, M. le député de Montmorency ? pardon, excusez-moi ? auparavant. M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Merci, M. le Président. M. Farah, bonjour. Regardez, j'ai bien reçu, là, vos commentaires en ce qui regarde la création d'une Innovatech en bio d'une façon qu'on veut centraliser, hein? Mais, comme vous savez, au niveau de... si on regarde au niveau de la région de Québec, Innovatech a largement investi dans ce domaine-là. Et, avec l'Université Laval, on possède quand même d'excellents chercheurs et, à ce moment-là, je pense qu'il y a quand même eu des investissements fort importants.

Il y a aussi l'élément diversification. Vous avez mentionné tout à l'heure l'aspect difficulté à rentabiliser à court terme les investissements dans le domaine de la biotechnologie. Le fait d'avoir un portefeuille diversifié dans ces différentes Innovatech là permet d'amoindrir le coût, O.K., le coût financier de certains projets qui sont moins rentables. J'aimerais vous entendre là-dessus.

n(17 heures)n

Vous ne pensez pas que l'élément que vous mentionnez à ce moment-là peut peut-être créer plus de problèmes que de solutions? Parce que, quand on sait que les régions se sont quand même dotées de chercheurs, d'équipements, d'investissements, et je pense que c'est quand même des grands pas qui se sont faits dans ce sens-là... et le fait également que, sur le plan financier, quand on parle capital de risque, on vient quand même diversifier nos investissements avec d'autres investissements qui sont plus rentables. Tant mieux si, à un moment donné, le 7/49 sort, mais ce n'est pas toujours comme ça. J'aimerais vous entendre sur ça.

Le Président (M. Paquet): M. Niro.

M. Niro (Perry): Je pense qu'il faut... ce qu'on veut signaler ici, c'est qu'on veut réduire le «red tape». Si on a des gens qui sont en mesure à l'échelle internationale de représenter l'ensemble du Québec et qu'ils connaissent, par exemple, que Medicago est à Québec puis que, lui, ça va lui prendre des champs pour produire sa luzerne transgénique, ce n'est pas au centre-ville de Montréal ni au centre-ville de Québec que ça va être fait, ça va être en région.

Et j'aimerais profiter de l'occasion pour répondre à Mme la députée également. Une entreprise comme Biocéan, à Rimouski, bénéficie des contacts internationaux que l'on y établit. Et, dans ce cas précis là, j'avais mis en contact, dans le cadre d'un voyage en Suisse, des investisseurs avec des gens du Québec. Et c'est ce qu'on veut vous mentionner: c'est qu'on ait une capacité de compétitionner avec nos vis-à-vis internationaux, qu'on ait les mêmes moyens pour permettre à nos investisseurs d'ici de rencontrer les gens de la Suisse, les gens de New York, les gens de Munich et de leur dire: Bien, au Québec, on a des bonnes technologies et on voudrait vous les faire connaître, vous les faire rencontrer, et ce qui n'est pas le cas actuellement.

Et une autre anecdote: voilà deux ans, dans le cadre d'une conférence Montréal-Boston, nous avions amené des investisseurs du Québec à Boston rencontrer d'autres investisseurs de la région de Boston, et on a été surpris d'apprendre que ce sont les entrepreneurs qui connaissaient l'investisseur bostonnais et non pas nos VC, et ça, c'est un problème. Nous, on demande aux investisseurs institutionnels et privés du Québec d'accompagner nos entrepreneurs pour aller chercher des ententes de financement. Et c'est là, quand... Notre proposition par rapport aux Innovatech se situe seulement à ce niveau-là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Et, dans le cadre de... En tout cas, si on regarde les liens de communication qui existent présentement et les échanges versus les grands centres qu'on connaît au niveau du Québec ? Québec, Montréal, Sherbrooke ? je pense que ces gens-là voyagent régulièrement et se rencontrent régulièrement. Puis, si on regarde au niveau du siège administratif au niveau de la grande région de Québec, je pense que c'est important d'avoir quand même des visions... Et, du côté de Sherbrooke aussi, il se fait des bonnes choses, et, à ce moment-là, ça permet aux autres régions...

Vous parliez tout à l'heure de satellites ? je pense que ça l'est, le satellite, là ? de liens de communications, là, qui pourraient être priorisés par rapport à une vision plus régionale des activités dans le domaine de la biotechnologie. Ça, c'est en ce qui concerne ce point-là.

L'autre point que vous avez mentionné, et j'aimerais vous entendre aussi: dans votre mémoire, vous parlez de crédits d'impôt pour les fonds de travailleurs qui pourraient être étendus à d'autres fins, à d'autres fonds. J'aimerais vous entendre sur ça. Qu'est-ce que vous voulez mentionner là-dessus?

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Je vous donne un exemple. Il y a un fonds en Ontario, qui s'appelle Canadian Medical Discoveries Fund, qui a dit: On est prêts à venir investir dans le secteur de la santé au Québec, à la condition qu'on nous donne les mêmes avantages fiscaux que ceux qui sont donnés aux fonds des travailleurs.

Parce qu'il faut aussi regarder que, si vous êtes un investisseur hors Québec et vous venez investir au Québec, vous regardez le Fonds de solidarité, vous regardez Fondaction ou Desjardins, vous dites: Ces gens-là ont un avantage qui les rend plus compétitifs que moi, c'est-à-dire que les gens vont être portés à aller mettre leur argent chez Fondaction ou à la FTQ plutôt que d'investir chez CMDF parce qu'il n'y a pas l'avantage fiscal chez CMDF pour quelqu'un qui a mis son argent chez CMDF.

Donc, nous, ce qu'on vous dit, c'est qu'il faudrait étendre cet avantage fiscal là à d'autres joueurs pour les inciter à venir occuper la place en partenariat avec les fonds des travailleurs et enrichir l'offre de fonds privés qui pourraient investir dans les entreprises de biotechnologie au Québec.

M. Bernier: O.K.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Montmorency.

M. Bernier: Dans le moment, rien n'empêche les fonds de travailleurs qui existent, qu'on connaît bien ? la FTQ et la CSN ? d'investir dans le domaine des biotechnologies.

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Ils investissent, sauf qu'ils vous disent à un moment donné: Notre part relative de notre portefeuille de biotechnologie dans le cadre de notre portefeuille global devient trop importante.

Si vous regardez les chiffres que Mme Thabet a présentés tantôt et le Réseau Capital, on dit que la part de la biotechnologie est passée à 54 %, alors qu'elle était de 39 %, je pense, l'année d'avant. Pourquoi ça s'est fait comme ça? C'est parce que les compagnies de biotechnologie ont gardé de leur valeur ou ont monté en valeur, alors que les compagnies de technologie de l'information ou d'autres secteurs technologiques ont baissé plus.

Donc, si on prend le portefeuille du Fonds de solidarité qui avait, par exemple il y a un an, 15,5 % ou 16 % de ses placements en biotechnologie, tout d'un coup, comme la valeur du portefeuille technologie monte et que les autres placements baissent, tout d'un coup ils regardent leur portefeuille et se retrouvent avec 20 % ou 18 % ou 19 % investis en biotechnologie. Puis là le signal d'alarme part et on dit: On est trop à risque en biotechnologie parce qu'on est lourds du côté de biotechnologie. Donc, on arrête d'investir, ou on investit moins, ou on vend pour amener notre portefeuille de biotechnologie à un seuil qui est le seuil équilibré qu'ils visent.

M. Bernier: O.K., merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le député de Verdun, 1 min 30 s.

M. Gautrin: Ah! Bon dieu! Alors, c'est pour une toute petite question à ce moment-là. Vous avez abordé quelque chose que je ne connais pas. Alors, je vous donne la chance de me l'expliquer.

Vous voulez... souhaitez avoir des crédits d'impôt à la propriété intellectuelle, ça été votre demande, que vous avez faite, pour le prochain budget. Qu'est-ce que c'est que des crédits d'impôt à la propriété intellectuelle, compte tenu que la propriété intellectuelle, c'est là-dessus que vous avez de la rentabilité sur votre investissement?

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Entre le moment où on soumet une application de brevet et le moment où ce brevet est émis, en moyenne, ça coûte 100 000 $ par brevet émis. Donc, on se retrouve, en ce moment, dans cet environnement où, parce que l'argent est plutôt rare... Et il y a beaucoup de compagnies, dont la mienne d'ailleurs, qui avons déposé des applications de brevets qui sont rendues aux phases nationales où, pour défendre ces budgets-là dans les différentes nations... Là, on ne parle plus de 10 000 $ pour soumettre l'application mais plutôt de 50 000 $, 60 000 $. Et les compagnies sont en train d'abandonner des applications de brevets qu'on a tout simplement parce qu'elles ne veulent pas encourir le coût additionnel pour les défendre.

Donc, nous, ce qu'on dit, c'est que, comme la valeur intrinsèque d'une compagnie de biotechnologie, c'est son portefeuille de propriété intellectuelle, on aimerait voir créer un crédit d'impôt à la propriété intellectuelle qui couvrirait les coûts de rédaction, dépôt et défense et qui serait calqué sur le modèle du crédit d'impôt aux communications financières qui, lui, couvre 40 % sur un maximum de 100 000 $ éligibles.

Le Président (M. Paquet): O.K. Merci beaucoup...

M. Gautrin: Laissez-moi une minute, ça... Vous nous dites, à l'heure actuelle: Il est important que vous teniez compte de la possibilité du coût des brevets, et un moyen d'en tenir compte, c'est des crédits d'impôt sur la propriété intellectuelle. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci.

M. Farah (Élie): Merci.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Alors, je reviendrais à la page 7 de votre mémoire, dans lequel vous soulignez que le groupe de travail Brunet a fait une évaluation plus ou moins exacte dans la carence de la chaîne de financement, là, en ce qui vous concerne, les entreprises de biotechnologie. Eux parlent de difficulté dans l'amorçage, le démarrage et l'expansion, et vous ne semblez pas d'accord avec leur évaluation. Expliquez-moi tout ça, s'il vous plaît.

M. Farah (Élie): Nous ne sommes pas nécessairement d'accord avec les définitions des différentes étapes, si vous voulez. Nous voyons une phase amorçage, valorisation, où on a un placement d'à peu près 1 million de dollars; on voit une phase démarrage qui est entre 1 et 5 millions de dollars; on voit une phase intermédiaire et de croissance de 5 à 20 millions de dollars; on voit une phase d'expansion au-delà de 20 millions de dollars.

Quand on parle d'un placement de 20 millions de dollars, etc., ce sont des compagnies qui sont vraiment en recherche clinique, qui sont en phase II de recherche clinique. Si on regarde ce que le rapport Brunet recommande pour la SGF, des projets de 100 millions de dollars en biotechnologie, il faut que ce soit vraiment du manufacturier, avec une infrastructure, O.K.? À moins qu'une compagnie arrive et mette cinq produits ensemble puis... Même ça reste une compagnie de recherche-développement. Donc, la notion du rapport Brunet sur la croissance à 20 millions plus n'est pas la nôtre. Pour nous, là, le créneau 5 à 20 millions n'est pas couvert, alors que le rapport Brunet semble dire que ce créneau-là est couvert.

Puis je vais vous donner l'exemple, là, réel. Si on prend les chiffres de Réseau Capital qui ont été publiés il y a deux jours, où on dit qu'il y a eu 212 investissements en biotechnologie... Non, excusez-moi... 159, c'est ça?

Une voix: ...

M. Farah (Élie): Excusez-moi, je l'ai là. O.K. 212 millions de dollars dans 59 entreprises puis qu'on réalise qu'il y a neuf entreprises qui ont ramassé 112 millions de dollars, ça vous laisse 50 entreprises qui ont ramassé 100 millions de dollars, donc la moyenne est encore de cette grandeur-là. Donc, le créneau suivant, qui est celui du 5 à 20 millions, est très peu couvert, en ce moment.

Mme Charest (Rimouski): O.K. Une autre question dans un autre ordre d'idées.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

n(17 h 10)n

Mme Charest (Rimouski): Oui, merci, M. le Président. Vous faites une recommandation pour étendre le crédit d'impôt, là, au Fonds de solidarité ? d'ailleurs, vous venez d'en parler ? à d'autres fonds privés de capital de risque. Est-ce que vous croyez vraiment qu'on pourrait aller chercher des capitaux privés à l'extérieur du Québec et du Canada plus facilement? Et, dans quelle proportion, on pourrait en attirer plus? Et ce serait quoi, les avantages ou les coûts, là, de ce que vous proposez comme mesure, là? Est-ce que vous l'avez calculé? Est-ce que vous avez une idée? Est-ce que...

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Merci. Il y a beaucoup plus d'argent de disponible aujourd'hui que d'argent investi. Le truc, c'est d'avoir l'environnement propice. Il y a deux ans, nous avons fait des représentations, à BIOQuébec, avec les gens de Boston. On est allés les rencontrer. On les a fait venir chez nous, l'année passée. Puis foncièrement on leur a dit: Mais pourquoi est-ce que vous n'investissez pas plus au Québec? Puis ils ont dit: Bien, on ne se reconnaît pas dans les critères de décision de la majorité des investisseurs au Québec parce que, nous, on regarde foncièrement sur la base de rendement, de stratégie de sortie, alors qu'on ne regarde pas les données, si vous voulez, socioéconomiques. Mais, l'argent, il est là, et, si on est capables de créer au Québec l'environnement adéquat pour attirer cet argent, il n'y a aucune raison pour que cet argent-là ne vienne pas au Québec. Il faut...

Si on regarde, du point de vue plus large, sur les fondamentaux de l'industrie de la biotechnologie, le fondateur d'Oracle, la semaine dernière, disait que la biotech va être ce que les technologies de l'information ont été dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix. La population vieillit. Il y a bien des maladies qui ne sont pas, aujourd'hui... n'ont pas de traitement. Tous les fondamentaux de la biotechnologie sont toujours là et assurent qu'à long terme il y ait un marché pour cette industrie-là. Donc, je ne vois pas de raison personnelle, si l'environnement est propice, pour laquelle ces gens-là ne viendraient pas investir au Québec.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Quand vous parlez d'environnement propice, vous parlez de crédit d'impôt, vous parlez...

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Bien, excusez-moi... Ce qui arrive, c'est qu'on part d'un environnement où les gens ont une perception négative. Il y a du progrès qui est fait. On est au courant de fonds privés qui sont en train d'être mis sur pied, que ce soit le fonds VIMAC, qui a été rendu public, ou le fonds Biomundis, qui est en train d'être mis sur pied, et d'autres fonds dont on entend des rumeurs, mais on est encore loin d'avoir une masse critique. Et je pense qu'au début il va falloir montrer... poser des gestes qui vont démontrer que l'environnement d'affaires change au Québec.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Le premier geste à poser, c'est quoi, selon vous?

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Moi, je pense que c'est la création de fonds mixtes public-privé dont la gestion est dans les mains du privé et auxquels on n'impose pas de critères de rendement socioéconomique.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Donc, ça rejoint le fond du débat que nous avons aujourd'hui, en commission, depuis le début, c'est-à-dire: jusqu'où la ligne entre le capital qui est consacré strictement à du capital de risque pur, donc rendement, versus développement économique avec des objectifs de création d'emplois, de diversification économique? Et c'est ça, l'enjeu, si je comprends bien ce que vous venez de me dire, qui est présent chez vos investisseurs privés, que vous voulez voir venir investir dans les biotechnologies.

Le Président (M. Paquet): M. Farah.

M. Farah (Élie): Mais la réponse...

Mme Charest (Rimouski): Je vous ai bien compris ou mal compris?

M. Farah (Élie): Non, non, mais écoutez, la réponse à votre commentaire est la suivante. L'État doit supporter les compagnies de biotechnologie dans leur première phase de développement. L'État reste maître de ces outils de développement économique pour mettre sur pied des compagnies. Et, nous, ce qu'on dit à l'État, c'est que, au fur et à mesure que le risque ? puis une fois que ces compagnies se développent, que le risque ? baisse, devenez un catalyseur pour amener le privé à investir dans ces compagnies-là. Si... Donc, on n'est pas en train d'abandonner, si vous voulez, nos priorités, prérogatives de développement économique en laissant tout au privé. On garde le contrôle des stades de valorisation, des stades de démarrage d'entreprises, etc., et, par contre, on transmet au privé les compagnies, comme un incubateur ou une garderie, à un moment donné où ils sont arrivés à l'âge de voler de leurs propres ailes, mais on garde le contrôle sur notre développement économique.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. Farah.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, il reste 2 min 30 s. D'autres interventions?

M. Lelièvre: Bien, un bref commentaire.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: Oui, un bref commentaire, M. Farah. Moi, je suis dans la circonscription de Gaspé. Il y a de la recherche qui se fait chez nous, Marinard Biotech, je ne sais pas si ça vous dit quelque chose. Bon. Probablement qu'il est membre de Biotech Québec... BIOQuébec. Mais je dois vous dire que, oui, il y a de la recherche qui se fait. Il y a des Ph.D., il y a des comités scientifiques qui valident la recherche, tout ça. Tout ça pour vous dire que c'est possible de faire de la recherche dans les régions.

Moi, ce qui m'inquiète, c'est que, dans le fond, on voudrait dépouiller les régions des ressources qu'elles ont, entre autres, Innovatech Régions ressources, qui est dans des créneaux, on parle, industriels aussi, là.

Alors, quand vous parlez de la fusion ? parce que M. Blanchet était ici aujourd'hui... vous parlez de la fusion des Innovatech avec Montréal, Québec, Sherbrooke et Régions ressources, moi, je pense qu'il faut essayer de trouver une solution pour régler les problèmes que vous avez sans nécessairement déshabiller Pierre pour habiller Jean.

Alors, c'est un commentaire que je voudrais vous faire, parce que je suis très sympathique à vos représentations, mais, de là à se déshabiller pour en habiller un autre, c'est une autre paire de manches.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Paquet): M. Farah...

M. Farah (Élie): Si vous me permettez le commentaire suivant...

Le Président (M. Paquet): ...une minute.

M. Farah (Élie): ...si on veut avoir une industrie forte, il faut la visionner dans un environnement global. Votre compagnie à Gaspé, si elle veut un jour vendre, elle va probablement vendre à quelqu'un qui n'est pas en Gaspésie, probablement quelqu'un qui est...

M. Lelièvre: ...à vendre...

M. Farah (Élie): ...oui, oui. Mais donc, moi, ce que je dis, c'est que tout ce que l'on fait, qu'on le fasse dans une perspective de marché global parce qu'il y a un tel marché au niveau global. Je n'ai jamais dit: On ne met plus de compagnies de biotechnologie en Gaspésie, ou à Québec, ou à Sherbrooke, mais ce que je dis, c'est qu'il faut que leur plan d'affaires, il faut que la vision derrière ces entreprises-là soit une qui soit dans le contexte global mondial parce que le but, c'est de ne pas s'assurer que telle compagnie existe pour les deux prochaines années, mais bien qu'elle existe pour les 10 prochaines années, qu'elle amène des produits sur le marché, qu'elle soit florissante, qu'elle n'ait plus besoin de capital de risque et qu'elle soit cash-flow «positive».

M. Lelièvre: Qu'elle apporte des dividendes à l'État.

M. Farah (Élie): Absolument.

Mme Charest (Rimouski): ...la même chose.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche, 1 min 30 s.

M. Audet: Alors, je voudrais remercier, d'abord, évidemment M. Farah, M. Niro et également l'association et tout le groupe des industries des biotechnologies, de leur présentation.

Trois brefs commentaires: en premier lieu, je pense que votre diagnostic est très bien posé, très intéressant. Il rejoint, à beaucoup d'égards effectivement, certains éléments qu'on a entendus ce matin de la part du rapport Brunet, d'autres en sont différents. Vous avez présenté d'autres pistes, je pense, qui méritent d'être regardées également. Mais il y a un aspect sur lequel je veux mentionner, parce que ça a été repris, tout à l'heure dans une intervention précédente, par le député de Gaspé: l'aspect de la promotion.

Ce que vous avez parlé à propos... ce que vous avez mentionné à propos de la perception du Québec vue de New York, j'ai eu l'occasion de le vivre avec Bernard Hamel, qui a tantôt justement fait une autre intervention pour Réseau Capital, et c'est ce qu'on entend. Effectivement, il y a... Et, moi, je pense que je leur ai dit: Vous avez... Il y a des entreprises de biotechnologie que vous auriez avantage à connaître effectivement, et cette perception-là, vous avez...

Mais le problème... Malheureusement, la perception, c'est la réalité pour ces entreprises-là. Ils sont en contact avec des entreprises de capital de risque au Québec, mais ils ne connaissent pas nécessairement les entreprises du secteur, d'où, effectivement, l'invitation qu'on leur a faite de venir au Québec. Ils seront à Québec et à Montréal prochainement, je pense que j'ai invité avec... d'ailleurs Réseau Capital, et ils auront l'occasion de rencontrer à la fois des entreprises de capital de risque et des entreprises de biotechnologie précisément. Donc, à la fin du mois de mars ? le 30 mars, je crois ? ils seront ici, au Québec, et j'ai invité d'ailleurs toute l'industrie des biotechnologies et celles du capital de risque, à ce moment-là, à profiter de l'occasion pour rencontrer ces investisseurs américains qui ont effectivement les poches profondes, qui ont des exigences, mais ils ont des capacités de lever des fonds importants. Et je pense qu'il suffit de quelques «success stories» et probablement que la perception va changer. Alors, pour vous dire que votre voeu a été déjà anticipé lorsque je suis allé à New York avec le premier ministre l'automne dernier. On a fait cette démarche, et elle va avoir un retour d'ascenseur dès la fin du mois de mars, à Québec et à Montréal.

Le Président (M. Paquet): Merci.

M. Audet: Merci de votre participation, messieurs.

Le Président (M. Paquet): Merci, M. le ministre. Alors, merci au président de BIOQuébec, M. Niro, M. Farah, merci de votre participation à nos travaux.

Je suspends les travaux pour une minute, et nous reprenons avec le Dr Fernand Labrie. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 19)

 

(Reprise à 17 h 24)

Le Président (M. Paquet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, la commission reprend ses travaux.

Nous avons maintenant la possibilité d'entendre les représentants du Centre de recherche du CHUL ou du CHUQ. Le Dr Labrie, M. Simard, M. Bourassa, M. Lanoë, je vous souhaite la bienvenue, au nom de la commission.

Alors, sans plus tarder, je vous cède la parole pour une période de 20 minutes pour votre présentation.

Centre de recherche du CHUL (CHUQ)

M. Labrie (Fernand): M. le Président, M. le ministre, chères dames députées et députés. Ah oui! le ministre, oui. Il y a les ministres puis il y a les anciens ministres, alors... J'ai quand même démêlé ça, là, il n'y a pas de... pas vraiment de problème.

Ce dont j'aimerais vous entretenir aujourd'hui... Je vous remercie beaucoup de me donner la chance de discuter avec vous. Et j'aimerais m'entretenir d'un problème qui est bien spécifique ? je vais essayer d'être aussi clair que possible ? et c'est le transfert de technologie.

On en a parlé beaucoup, et j'aimerais vous indiquer quels sont les problèmes qui existent, là, qui sont vus par plusieurs et quels sont les remèdes qu'il y a dans le domaine de la santé. Bien, c'est des remèdes pour améliorer ceci.

Donc, d'abord, j'aimerais, comme on a parlé d'argent beaucoup aujourd'hui... enfin, on a entendu parlé beaucoup de retour économique. Ici, c'est le Centre de recherche du CHUL, pour ceux qui le connaissent moins, enfin, ceux de Montréal et d'autres régions. Si on regarde ici, au cours des années, c'est un budget à peu près de 55 millions par année. C'est le plus grand centre de recherche en santé au Canada, à Québec. Et, sur le 55 millions qui est là, il y à peu près la moitié qui sont des contrats du privé. Donc, les activités, 55 millions, il y a le ministère du Revenu au Québec et au Canada aussi qui calcule... enfin, fiscalité et parafiscalité, ça fait en sorte que, pour un investissement de ? la somme des deux gouvernements est de l'ordre de 3 millions par année... il y a quelque chose comme 20 millions qui entrent d'argent étranger.

Donc ça... Tout ça pour vous indiquer, parce qu'il y a un budget qui va être décidé assez prochainement... c'est que, même au stade de la recherche, ça peut être payant pour le gouvernement parce qu'on parle de retour sur cet investissement-là. Moi, je parle, là, uniquement du Centre de recherche du CHUL, sans tenir compte des compagnies dérivées qui ont découlé des activités ou des découvertes des chercheurs du Centre de recherche du CHUL, dont je suis le directeur depuis un très... trop grand nombre d'années que je ne vous dirai pas. Donc, ça, c'est un aspect très important.

Mais ce qui m'inquiète beaucoup, c'est que, au point de vue économie, on a dit, ce matin ? puis je n'y reviendrai pas, là, et M. Leduc... Dubuc, pardon, dans Le Soleil, a une série d'articles sur le sujet: Il faut améliorer notre économie. Donc ça, il ne faut pas... Faut voir la réalité telle qu'elle est. Et une façon de l'améliorer, c'est évidemment d'exporter. Ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre non plus que, pour s'enrichir... ce n'est pas en faisant des coupures budgétaires où on distribue de façon différente l'argent entre nous qu'on s'enrichit comme société, comme patrimoine.

Donc, il s'agit d'exporter à l'extérieur, et, pour exporter, par définition, bien, il faut avoir des produits ou des services qui sont compétitifs à l'échelle du monde, meilleurs que ce qui se fait ailleurs. Je ne rappellerai pas les horreurs, un peu, de tous les emplois qui sont perdus dans le domaine manufacturier, 44 000 l'année dernière, parce qu'on va faire fabriquer dans d'autres pays qui sont la Chine, et d'autres. Donc, il faut compenser pour ça, et il faut baser notre exportation sur nos forces.

Évidemment, on a un système universitaire qui est devenu compétitif au cours des années. Et c'est à partir des découvertes universitaires qu'il faut avoir plus de transferts technologiques et de pouvoir exporter à l'étranger. Et c'est reconnu au Québec et c'est maintenant reconnu au niveau canadien que l'exportation ou le... est une faiblesse importante et on n'est pas les seuls à le réaliser. M. Schröder, qui est le chancelier d'Allemagne, il n'y a pas plus longtemps que deux semaines, là ? je l'ai mis dans mon rapport... En Europe, ils ont besoin de 270 000 nouveaux chercheurs pour être capables d'être compétitifs pour une économie et pour se payer ce qu'ils veulent avoir au point de vue santé et au point de vue autres avantages sociaux. Et, au Canada, M. Fontana, qui vient d'être nommé secrétaire parlementaire à la science auprès de M. Martin, lui, il a calculé et évalué à 100 000. Donc, ça, il a dit ça jeudi dernier. Donc, c'est des chiffres assez importants, d'ici 2010 également, donc comme par hasard.

Donc, on a beaucoup à faire au point de vue recherche fondamentale, mais, aujourd'hui, je ne suis pas ici pour ça, là, et, si on veut être le cinquième meilleur pays en recherche au monde, comme c'est une des priorités de M. Martin pour 2010, donc également, là aussi, on a beaucoup de choses à faire.

Ceci étant dit, on a un problème du transfert technologique qui est reconnu au Québec, qui est reconnu au Canada, mais qui n'est pas... reconnu et pas reconnu. Donc, M. Fontana, jeudi dernier, il a utilisé les mêmes mots que j'avais mis dans mon mémoire. Donc, je les ai reproduits, là... dans la nouvelle version que vous avez, je les ai mis là. Donc, il y a un problème très sérieux au niveau canadien de transfert technologique.

Et, en 2001, par exemple, les redevances qui sont revenues aux universités, c'était de 44,4 millions en 2001, ce qui n'est pas beaucoup. Et, si on prend l'exemple des États américains qui sont les plus performants en technologie ou transfert technologique... On va prendre la Californie, là. En Californie, c'est un peu une mecque de l'industrie, la biotechnologie, San Diego étant l'exemple le plus parfait de ça. Il y avait toute une section de Nature, il y a trois semaines à peu près, sur San Diego, qui est très intéressante à lire et qui est une motivation, un exemple qu'on peut prendre pour Québec aussi. Il y a moins de soleil, mais on a plus de neige qu'eux autres. Donc, au point de vue qualité de vie, il y a peut-être moyen de balancer les choses. Et le Connecticut également.

n(17 h 30)n

Donc, ce sont des exemples qu'il faut prendre pour les établir au Québec. Et le groupe d'experts du Conseil consultatif ? il y a deux ou trois ans ? du Canada, a dit qu'il y avait trois fois moins de retombées et d'emplois dans les universités canadiennes qui découlent du transfert de technologie qu'il y en a dans les universités américaines. Donc, on a réellement un problème de transfert de technologie. Évidemment, on a un problème aussi d'habitude à long terme. Donc, il faut ancrer ça chez nous, mais il y a des mouvements qu'il faut faire de façon urgente.

Quelles sont les causes majeures de ce problème de transfert technologique qu'il faut reconnaître? Donc, je vais vous amener ici dans... Vous avez eu le rapport, vous l'avez vu, donc ce ne sera pas une surprise. Notre problème, qui n'a pas, je dois dire... Le rapport Brunet, il y a plusieurs choses intéressantes. Enfin, ça nous oblige certainement à réfléchir sur ce problème-là de transfert technologique, d'investissement et d'enrichissement de notre société, mais il y a un point ici, une étape qui a été complètement oubliée, complètement, et ça s'appelle l'étape preuve de concept. Et vous allez comprendre facilement, et ça, ça a amené des vices, dans le système, qui sont majeurs.

En d'autres termes, on a un niveau de recherche, au niveau du Québec, ici, toutes sources confondues, qui peut ressembler à 1 milliard de dollars par année, ce qui commence à être intéressant. Ce n'est pas parce que c'est trop, mais, à partir de ça, le transfert technologique est très, très faible. Et une des principales raisons ? il y en a trois, je vais vous les dire toutes les trois, celles qu'on a vues comme chercheurs et comme entrepreneurs ici, au bout de la table ? c'est que les idées que les chercheurs ont, une découverte qu'ils font en laboratoire, idée qu'ils pensent intéressante, bien ça peut être intéressant pour le chercheur, mais ce n'est pas évident que le secteur privé va la trouver aussi intéressante. Donc, le secteur privé, lui, il va investir ? puis ça a été dit à plusieurs reprises au cours de la journée ? il va investir quand il voit de la rentabilité pour son entreprise. Sinon, il va faire faillite. Donc, ça ne l'intéresse pas non plus. Il est là pour faire de l'argent, et le ministère du Revenu du Québec est là aussi pour s'en occuper s'il fait de l'argent. Donc, ça, tout est bien contrôlé.

Mais, ici, ça n'a pas été vu comme problème, et aucune organisation au Québec l'a fait à date, zéro point zéro, ce qui est très, très surprenant. Mais M. Fontana, lui, la semaine dernière, dit exactement la même chose: On a un problème, et je vais vous dire tout à l'heure qui doit subventionner cette partie-là.

Donc, il y a une partie ici qui est tout à fait inexistante, et la seule organisation qui l'a fait un peu, c'est Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches. Moi, je ne ferai pas une fusion des trois Innovatech, là, je peux le dire tout de suite, étant de la Capitale, qui est une région, à mon avis, comme toutes les autres villes en sont des régions. Donc, Innovatech Québec et Chaudière-Appalaches a investi un programme qui s'appelle... pour la valorisation de la recherche, PVR, programme de valorisation de la recherche, 4,8 millions. Il y a eu 27 entreprises qui ont été financées dont sept produits ont été commercialisés. Mais c'était un tout petit budget, et je vous dirai tout à l'heure un peu quel montant ça devrait être. Donc, c'est un petit filet, ça, et qui, à l'extérieur de Québec, n'a même pas existé, mais qui a démontré que ça peut se faire et c'est rentable de le faire. Donc, l'idée, c'est que...

Une voix: ...

M. Labrie (Fernand): L'idée, c'est un peu ça. Donc, il va en avant de mes idées, mais il n'y a pas de problème.

Ce que ça a entraîné aussi comme malheur au point de vue investissement, c'est, comme on a la source universitaire, la preuve de concept n'existant à peu près pas, donc on a des projets trop immatures, et les compagnies à capital de risque, les sociétés de valorisation et tout le monde qui s'occupe de... et même des Innovatech aussi, au lieu d'attendre que l'idée soit assez avancée pour investir, ils ont investi plus tôt parce qu'il n'y avait rien d'autre à faire. Et évidemment ça a marché dans certains cas, mais ça a conduit à beaucoup de défauts de succès également et ça a conduit surtout à alourdir le système de façon éhontée et presque invivable. C'est de mettre sur le dos de l'âne une charge de quatre, là. On demande au chercheur qui a une idée qui a probablement du sens de se créer une compagnie, d'avoir un conseil d'administration, de voir les aspects juridiques, et tout, alors que l'idée qu'il a entre les mains, les chances de réussir sont très, très faibles. Donc, c'est du gaspillage à tout point de vue, ce qui fait en sorte que, à travers la preuve de concept, ça n'a pas fonctionné. Et il s'agit tout simplement de faire avancer la recherche une étape de plus, qui n'est pas beaucoup, en fait, mais, à ce moment-là, la question se pose: rôle de l'État et rôle du privé.

Donc, évidemment, tout ce qui est recherche universitaire... Puis il faut encore en donner encore plus. Il y a une autre commission parlementaire qui parle de ça, mais ici également la preuve de concept, c'est une responsabilité de l'État à 100 % parce qu'il n'y a pas d'entreprise privée raisonnable qui va investir à ce niveau-là. Et, au niveau canadien, ils disent exactement la même chose. Donc, ça aussi, ça me console un peu, là, j'ai vérifié auprès de plusieurs personnes aussi. Donc, ça, c'est le rôle de l'État.

Et, dans mes... ce que vous avez reçu, moi, je pense ? puis M. le ministre l'a mentionné ce matin ? qu'actuellement on a peut-être 80 % des bonnes idées qui ne se rendent pas à la commercialisation ou qui ne seraient même pas vérifiées au point de vue possibilité de se rendre à la commercialisation parce qu'elles ne sont pas avancées suffisamment dans la preuve de concept pour intéresser le privé ou pour intéresser qui que ce soit. Donc, il y a un creux ici très important, et cette partie-là est une responsabilité de l'État comme est exactement le financement de la recherche universitaire.

Il y a plusieurs raisons pour ça. D'abord, c'est trop risqué, ce qui est le point important pour le privé. Deuxièmement, pour l'État, c'est très important que l'investissement majeur qu'il a fait en recherche fondamentale profite le plus possible à l'économie, et, dans le futur, c'est de là que ça va venir. Il y a peut-être d'autres petites sources, mais le projet important, ça va être de la haute technologie. On peut avoir des brevets, on peut vendre à travers le monde, et le même coût de recherche, avec un brevet, on peut vendre 20 fois ou 30, 50 fois plus qu'on vendrait seulement au Québec ou au Canada, et c'est tout à l'avantage du gouvernement d'investir à ce niveau-là, complètement.

Maintenant, par la suite, comment on continue? Donc, c'est là que le privé intervient. Et, vous ne l'avez pas entendu aujourd'hui, ça, tu sais, la preuve de concept, il faut la passer. Ce n'est pas dans le rapport non plus, et nous, c'est notre très, très vieille expérience qui nous dit que c'est comme ça que ça se passe. Parce qu'on a vécu ces affaires-là, et moi, comme directeur du Centre de recherche du CHUL, on a eu beaucoup de transferts. Il y a des médicaments qui se vendent 3 milliards à travers le monde, tu sais, mais... On est passé à travers tout ça, mais, récemment, ça marche moins, et il y a un problème. Donc, je vais expliquer les causes.

Et, par la suite, ici, c'est là qu'intervient le secteur privé, et c'est là qu'on a besoin de discussion ensemble, laquelle proposition, comme vous avez pu voir, étant une variante de ce qui est proposé dans le rapport Brunet. Et la base est la suivante. La base est que le privé, lui, si on veut l'intéresser, il va investir cas par cas et il va s'assurer qu'il investit dans les choses auxquelles il croit. Le privé, il ne mettra pas les sommes dont on a besoin dans un fonds qui devient un fonds global où c'est les autres qui décident pour lui. Donc, je pense qu'on peut en discuter plus longtemps, mais l'idée est relativement simple. Et je dois vous dire que Québec?Chaudière-Appalaches... avec tout ce qu'on a pu dire sur les Innovatech, que Québec?Chaudière-Appalaches a été un succès dans la région.

Si on prend 2000-2003, le rapport McDonald, pour 1 $ investi dans Québec?Chaudière-Appalaches, il y a eu 4,2 $ qui est venu d'autres sources. Maintenant, avant qu'une question vienne, je vais vous dire tout de suite qu'il y a 50 % du privé dans ce 4,2 fois là. Donc, ça veut dire que, dans la vraie vie, pour 1 $ de Chaudière-Appalaches du gouvernement, il y a eu 2,1 $ qui sont venus du privé. Et, dans le rapport Brunet, correctement, on demande que le privé s'investisse pour rapport deux pour un.

Donc, ce que je veux dire, comme système, le système le plus motivateur, le plus emballant et le plus attrayant pour le privé et pour le gouvernement, effectivement qui va avoir les retombées économiques qui en découlent, c'est de continuer à bien investir au niveau universitaire. Ça, je pense, personne... La société du savoir, ce n'est pas juste un rêve, c'est une réalité qu'on est obligé de vivre effectivement ? ce qui est très intéressant d'ailleurs, c'est mieux savoir que ne pas savoir ? mais il faut investir aussi par la suite dans la preuve de concept. Et un chiffre que j'ai mis, moi, c'est 5 % de l'investissement en recherche universitaire. Donc, au Québec, s'il y a 1 milliard, toutes sources confondues, ça équivaut à 50 millions.

Mais je vous ai dit tout à l'heure, sans passer de secret, là, à personne... c'est que le fédéral pense exactement ça. Et M. Fontana dit: Ma job ? parce qu'il parle en anglais ? c'est de trouver justement... de défendre cette partie-là et d'augmenter la commercialisation. Les preuves de concept ? il emploie exactement les mêmes mots qui ont été inventés aux États-Unis il y a un certain temps... Et ça décrit ce que ça décrit. «Valorisation», il faut oublier ça, là, c'est un terme qui est tellement vague que ça ne veut plus rien dire. Mais «preuve de concept», ça permet de passer de ça à ça. Et il dit exactement que c'est une responsabilité du gouvernement à laquelle il doit trouver les moyens de mettre ça en action.

n(17 h 40)n

Donc, maintenant, quelle structure proposer? C'est une structure qui ne détruit pas ce qui fonctionne. Je pense que ça, c'est important. Je ne dis pas que c'est exactement Innovatech, mais il y a quelques principes qu'il faut maintenir. Et les erreurs qui ont été faites dans le passé, c'est d'avoir trop d'organisations ? et ça a été dit avant moi, aujourd'hui ? trop d'organisations qui n'ont pas l'expertise pour s'occuper de tout.

Donc, on avait les BLEU d'université, on a créé d'autres organisations, pour ne pas toutes les nommer, puis finalement on avait comme ça de gens qui s'occupaient de transfert technologique. Et on devrait, dans chaque région... Il faut que ça demeure dans chaque région. J'ai donné l'exemple de Québec?Chaudière-Appalaches où ça a été un succès. Ça aurait pu être mieux, mais s'il y avait eu plus de preuve de concept. Mais ça a quand même été très intéressant. 81 % des investissements dans la région de Québec sont passés par Innovatech. Donc, c'est quand même beaucoup. Mais on ne peut pas supporter plus de projets qu'il n'y en a non plus. Donc, il faut débloquer le fameux pont, là, qui est un fil, en fait, entre l'université et la commercialisation, donc une organisation autonome dans les régions universitaires. Moi, je ne m'occupe pas des autres, SGF ou Investissement Québec, que je ne connais pas, là, mais uniquement ça. Donc... Mais des Innovatech qui regrouperaient ce qui existe d'autre dans les régions parce que... Et, même là, dans les régions, on n'aura pas toute l'expertise partout. Ça, c'est vrai aussi.

Donc, ce que je recommanderais, après avoir discuté avec beaucoup de gens, là, dont des gens qui sont dans la salle, c'est d'avoir, au-dessus de ces centres d'innovation ou fonds régionaux, un conseil provincial. Et je vais vous dire pourquoi. C'est pour que les règles dont on a discuté soient à peu près les mêmes partout, mais que les gens puissent décider localement. Mais qu'il y ait des règles...

Parce que, sans se cacher rien, il y a eu trois Innovatech ou quatre, et les règles ne sont pas les mêmes partout. Je ne veux pas les comparer, mais je connais celle à laquelle je fais partie depuis 10 ans et qui a donné des très bons résultats. Donc, il faut l'améliorer en y regroupant en une organisation ? je ne dis pas autour d'Innovatech, là ? en une organisation locale qui est près de l'université, parce que les sources d'idées vont venir de l'université, il ne faut pas se le cacher. Et il se crée des climats de confiance entre les gens aussi. Donc, la façon d'être efficace, c'est de se connaître. Des fois, ça prend des années, surtout en affaires, c'est un peu comme... Ça peut prendre cinq minutes, mais ça peut prendre plus de temps aussi. Mais il y a une façon de procéder qui devrait être la même au niveau du Québec. Et, on parle de plus en plus de réseau, ça devrait un peu... sous forme de réseau. Donc, c'est aussi loin que je pouvais aller dans ça, donc... Mais une autonomie des régions est très, très importante.

Il y a d'autres points qui sont mentionnés dans ça, mais qui sont moins importants. Propriété intellectuelle, je pense que c'est en train de se régler. Ça a été, ça, le troisième problème au transfert de technologie. Il y a eu des écueils, il y a eu des... Ça a frappé des écueils à plusieurs niveaux, là, et le bas de la ligne, le problème fondamental, c'est qu'on n'accorde pas assez d'importance aux chercheurs. Tu as découvert. Salut, on va s'occuper de tes affaires. Toi, c'est passé, retourne chercher. Mais ça, ce n'est pas vraiment la façon de procéder. Il faut qu'il soit impliqué tout le long. Il faut qu'on lui donne l'importance et le mérite qu'il a aussi, et, de cette façon-là, ça va bien fonctionner. Mais je pense que ça, c'était un problème très, très sérieux, mais qui est en train de se régler.

Donc, c'est un peu ça donc, ce que je voulais vous donner, un résumé. C'est qu'il y a un trou qui a été... un vide dans la chaîne de transfert qui a été complètement oublié. Et, de l'aveu de plusieurs, de la compréhension de plusieurs maintenant, c'est là qu'il faut augmenter. Il faut grossir la rivière un peu, là, à partir de la source. Et, basé sur les investissements importants qui sont déjà faits en recherche fondamentale, il faut en mettre un peu à ce niveau-là pour grossir l'apport. Et, par la suite, le privé va être intéressé, cas par cas, à investir. Il l'a démontré dans le passé, et c'est de cette façon-là que le privé va investir: donc, des projets un par un, qui sont dans une société qui regroupe toutes les expertises dans une région. Et, Innovation Québec?Chaudière-Appalaches l'a démontré, pour 1 $ investi, 2,10 $ du privé sans avoir des règles qui obligeaient à faire ça. Donc, c'est un peu l'idée qu'on voulait vous proposer. On y croit beaucoup et on pense que c'est la meilleure façon de faire profiter l'argent des Québécois, avec des retours qui sont immédiats. Donc...

Le Président (M. Paquet): Merci beaucoup, Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): ...c'est important, mais encore plus à long terme. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paquet): Merci, Dr Labrie. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche, vous avez la parole.

M. Audet: Alors, merci, Dr Labrie, de votre présentation et de vos illustrations qui nous permettent bien de comprendre le message que vous vouliez livrer. Et ma question est en même temps... s'accompagnera d'un commentaire, parce que, en même temps, ce que vous dites est tellement évident, la preuve de concept, évidemment, ça part de là. Et il se pose la question que je pose souvent quand on fait... On finance, au Québec, dans la recherche directement du ministère, à peu près 250 millions par année. Si on ajoute ce que fait Ottawa, vous avez dit que c'est 1 milliard. Et j'avais, l'autre jour, une discussion avec des universitaires. J'ai dit: Écoutez, est-ce que finalement on en a pour notre argent? En d'autres termes, est-ce que le passage au niveau du développement et du niveau industriel est à la hauteur des attentes qu'on devrait avoir? Au fond, vous apportez un peu la réponse.

Ce qui m'étonne cependant, c'est qu'on a mis en place... Et le gouvernement précédent particulièrement a mis beaucoup de ressources dans Valorisation-Recherche Québec, les quatre sociétés de valorisation, le Centre québécois de valorisation des biotechnologies. Le jugement que vous portez est en même temps très sévère sur le travail qui a été fait. Vous dites que finalement il y a des sociétés de valorisation, mais qu'on ne s'est pas préoccupé de la question fondamentale, de la preuve de concept, en quelque sorte, avant d'aller de l'avant, ou on est allé trop vite à la commercialisation, ou qu'on cherche plus à commercialiser et, avant de vérifier ça... C'est là que j'ai...

Ma question, vous la voyez venir, c'est: Comment évaluez-vous, à ce moment-là, le travail qui a été fait et les centaines de millions de dollars qu'on a mis, je dois dire, dans la Valorisation-Recherche Québec et les sociétés de valorisation que les universités ont maintenant mises en place?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): M. le ministre, je ne suis pas un confesseur, hein? Je ne veux pas retourner trop en arrière, c'est clair, mais, moi, j'ai essayé d'exprimer les faits tels qu'ils sont. Le bout preuve de concept, ça a été manqué par tout le monde, mais c'est devenu évident. Donc, c'est comme n'importe quoi dans la vie, à un moment donné, c'est évident. On ne peut pas reprocher aux gens de ne pas l'avoir vu. Ils ne sont pas les seuls à ne pas l'avoir vu; les autres non plus ne l'ont pas vu. Mais, maintenant, c'est devenu quelque chose d'évident, et, je pense, ce qu'on peut faire de mieux, c'est, à partir de cette expérience-là, pour le futur, bien, en tenir compte. Et, moi, je pense qu'on peut multiplier par cinq la grosseur de la petite route qu'il y a entre l'université puis la commercialisation, et c'est la façon de s'enrichir.

Ils ont investi au niveau preuve de concept, mais ils ont investi en y donnant des structures lourdes comme des compagnies, en prenant beaucoup d'équité. Quand ça arrive en deuxième ronde, c'était compliqué à faire. Vous savez, si c'était à refaire aujourd'hui... Je pense qu'ils l'ont vu, parce que j'ai vu quelques-uns des autres mémoires, puis on en parle maintenant, là. Mais le passé est passé, hein?

Le Président (M. Paquet): M. le ministre.

M. Audet: Mais la question, c'est que, maintenant, vous savez que votre question est d'actualité parce que ces fonds-là sont pratiquement épuisés. Valorisation-Recherche Québec a pratiquement épuisé ce qui était prévu dans la société qui avait été créée par le gouvernement précédent. Les sociétés elles-mêmes se sont bâti en quelque sorte des missions pour valoriser. Et là, maintenant, au fond, ce que vous nous dites, c'est qu'au fond, avant d'aller à une autre étape, il faudrait recentrer leur action pour d'abord vérifier puis d'abord investir dans la preuve de concept avant de continuer à travailler sur... faire des investissements sur la valorisation. Est-ce que c'est... J'essaie de déduire ce que vous nous dites, là.

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Tout à fait, pour ce qui est de l'argent lui-même. Au point de vue structures, vous savez, il ne faut pas avoir trop de structures différentes non plus. C'est pour ça que, nous, au meilleur de notre connaissance, on aimerait que, dans chaque région ? c'est vrai à Montréal aussi, on n'en connaît jamais trop ? tous les experts soient ensemble pour évaluer les projets. Comme à Innovatech, par exemple, il y avait un groupe qui évaluait les biotechnologies, un groupe, les technologies de l'information, un autre, d'autres secteurs. Et on doit aller à l'extérieur pour avoir des arbitres externes aussi. Donc, il faut très bien évaluer tous les projets, même au niveau de la preuve de concept.

Donc, notre recommandation à nous, c'est de mettre tout ce monde-là ensemble localement, régionalement et, en plus, au niveau du Québec parce que, maintenant, les réseaux, ça fonctionne très, très bien avec toutes les communications faciles qui existent et ça permet aux gens... Toute l'expertise du Québec, peu importe où elle se situe, devrait être disponible à n'importe qui n'importe où, au Québec. Et c'est un peu ça, mais ça prend des décisions autonomes aussi dans chaque région. Mais il ne faut pas en avoir sept, huit qui décident au sujet des mêmes choses, hein, il faut que ce soit mis ensemble ...un problème qui évidemment est devenu plus évident avec le temps, là. Aujourd'hui, c'est facile à voir, mais ce n'était pas facile à voir antérieurement, là.

Le Président (M. Paquet): Merci. Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Alors, avec la permission de tout le monde...

Le Président (M. Paquet): Oui, s'il y a consentement. Ça va? Il y a consentement.

n(17 h 50)n

Mme Delisle: ...si vous permettez, j'aurais une petite question à poser. Bonjour, Dr Labrie. J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre mémoire. Sur la proposition que vous faites du Conseil de l'innovation du Québec, avec des centres innovation, là, qui seraient dans chacune des régions déjà existantes, là, au niveau de cette structure-là, moi, il me vient une question assez rapidement à l'esprit: en quoi cette structure-là serait-elle plus performante, moins lourde au niveau bureaucratique, au point de vue paperasse? Parce que, en fait, on entend beaucoup de commentaires à l'effet que les gens se perdent dans les dédales évidemment de... je vais appeler ça de la bureaucratie, là. J'ai cru comprendre aussi que vous trouviez, des fois, que ça ne va pas assez vite.

Et j'aurais une sous-question qui est: où se trouve, dans cette structure, votre module ? je vais appeler ça un module, là, ce n'est peut-être pas le bon terme ? preuve de concept? Vous l'insérez où, là-dedans?

M. Labrie (Fernand): D'abord, je pense qu'il faut, dans chaque région, réunir toute l'expertise qui existe. Ça veut dire Innovatech, ça veut dire sociétés de valorisation, ça veut dire universités, ça veut dire groupes de développement économique, dans la région de Québec, pôles, par exemple, donc tous ces gens-là ensemble. Et, j'ai parlé de l'université, c'est des choses qui sont... c'est raisonnable, hein? Il faut mettre tout le monde ensemble, on n'est jamais trop bon.

À ce moment-là, ça simplifie les structures, et les réponses viennent plus vite si tout le monde est ensemble. Et, si c'est connecté par un réseau provincial, bien les questions qu'on ne connaît pas, bien on peut quand même les poser ailleurs, ce qui est facile à faire.

Maintenant, preuve de concept. Ici, au début, c'est important qu'autour de cette table-là ce soient des gens d'affaires qui soient là ? un peu comme Innovatech, c'était un peu le cas, là ? que ça se décide sur une base d'affaires et que ce soient les mêmes personnes qui... Évidemment, il y a des conseillers puis il y a des expertises qui sont demandées de façon pointue pour chacun des projets, là, mais, quand c'est preuve de concept, bien là c'est de l'argent... On ne demande pas au privé de s'impliquer, là, mais on veut tout simplement grossir le pipeline ici, là, qu'il apporte plus de projets, et, par la suite, le privé vient. Mais c'est les mêmes gens qu'il y a autour de la table, donc qui voient à avancer leurs projets, et là bien c'est du deux pour un ou du trois pour un en fait au point de vue investissement.

Et, par la suite, plus loin, ici, c'est entièrement privé, parce que, si les projets sont très intéressants, le privé va s'impliquer entièrement. Moi, j'en ai des exemples, là, dans la région de Québec où le public est sorti à un moment donné. Évidemment, il y a toujours les crédits d'impôt qui sont importants, là, mais argent public directement, à un moment donné, ça disparaît, ça, après une certaine période.

Donc, ça rend quelque chose, au point de vue administration, qui est relativement simple. Ce n'est pas compliqué, là, il y a un endroit dans chaque région, pas trois ou quatre, toute l'expertise est là. Et ça, ça a été le gros, gros du problème, l'expertise; elle n'était pas là. Et, moi, je connais des chercheurs qui, à force de cogner à des portes, se sont tannés parce qu'ils n'avaient pas les réponses auxquelles ils s'attendaient. Donc, il faut qu'ils aient des réponses aussi parce qu'ils ont d'autres choses à faire, là. Il faut qu'ils demandent des subventions... pour faire d'autres recherches. Donc, il faut rendre ça plus efficace, et on ne peut pas se permettre d'avoir des structures comme ça, là, dans une province aussi petite où ça demande tellement de compétences, et régionalement aussi.

Mme Delisle: Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, Mme la députée de Matane, il reste deux minutes pour votre question et réponse.

Mme Charest (Matane): Alors, je vous félicite pour votre rapport, M. Labrie. J'ai pris connaissance avec un très grand intérêt... Et, il y a un point qui, au-delà de la preuve de concept, me laisse un peu sur mes interrogations, c'est que vous mentionnez dans votre rapport qu'il y a beaucoup de découvertes qui sont effectuées en laboratoire, mais qui demeurent sur le comptoir et qui ne sont pas portées à terme. Vous précisez également que l'apport de nos chercheurs, dans tout le processus de la recherche ? ils sont la source et aussi la réalisation de bien des découvertes ? est aussi un peu peut-être laissé de côté.

Comment vous voyez, dans la structure... Si, par exemple, on dépassait l'étape de la preuve de concept et qu'on arrive à déterminer qu'une recherche, qu'une des nombreuses sur le comptoir peut donner lieu à des produits sur le marché, est-ce que vous trouvez que la structure actuelle qui existe est suffisamment bien attachée pour permettre aux chercheurs de pouvoir continuer et motiver à travailler à trouver d'autres sources?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Je l'ai mentionné un peu tout à l'heure, là, je pense, c'est un problème qui est en train d'être résolu. C'est compris, ça, à plusieurs niveaux, là. Ça comprend les universités, ça comprend d'autres niveaux aussi. Celui qui est en meilleure position pour défendre une idée qu'il a découverte, c'est bien le chercheur. Et, si, en cours de route, on ne valorise pas sa présence ou sa contribution, on lui dit: Regarde, la propriété intellectuelle appartient 100 % à l'institution, là, comme ça a été dit dans un plan d'action, bien qu'est-ce qu'il fait là, lui? Tu sais, là, regarde, si ce n'est même plus à moi, là, et on me dit que je ne connais pas ça, les affaires, c'est un autre qui va s'en occuper, c'est sûr qu'il y en a d'autres qui connaissent les affaires, mais ça ne veut pas dire que, lui, il n'est pas capable de penser affaires non plus. Et, au point de vue scientifique, il faut qu'il reste impliqué. Donc, il faut l'impliquer tout le long dans le processus.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, la parole est maintenant au député de Charlevoix, vice-président de la commission et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'institutions financières.

M. Bertrand: Merci, M. le Président. Messieurs, bonjour. Je me permettrais, M. le Président, avec votre accord, de faire une première constatation qui me frappe. Je pense qu'on réalise déjà, après quelques heures de débat, qu'on a tous tout un défi dans les mains.

Pour moi, le gouvernement, c'est tous partis confondus, ce sont les députés qui, alentour d'une table, ont à entendre et à faire des recommandations au ministre. Et je vois déjà apparaître que l'idée de centraliser un fonds ou de centraliser des organismes... Je vois déjà apparaître que, si on veut garder la diversité territoriale, si on veut garder la diversité des secteurs... Parce qu'on s'est aperçu, déjà après seulement quatre groupes, qu'il y a une différence assez marquée dans les... non seulement territoriale, mais aussi des secteurs. On a tout un défi, tout un défi dans les mains et évidemment toujours pour le bien de la population. Toujours, c'est ce qui doit nous guider.

Ma première question, Dr Labrie, j'aurais aimé que vous... De façon particulière pour la région de Québec encore une fois ? et puis je suis en accord avec ce que le député de Montmorency disait tout à l'heure au groupe de BIOQuébec ? j'aurais aimé que, très, très rapidement, vous nous brossiez un tableau. Dans la région de Québec, ça touche combien d'emplois à peu près ? Parce je sais que vous êtes très, très impliqué ? les argents, etc.? Et, quand on parle de valorisation, dans une vie, non pas... pas tellement lointaine, j'étais impliqué là-dedans, et ça me semblait extrêmement important pour chacun et chacune d'entre vous lorsque vous demandiez des fonds. Alors, j'aimerais ça que vous élaboriez sur... dans la région particulièrement de Québec, en emplois et en argent ou en investissements. Puis vous m'avez déjà parlé que vous aviez vous-même cherché des fonds à l'extérieur. Je ne veux pas la révélation des fonds, mais ça me semblait intéressant et... Parce que, après ça, je vais revenir sur la question évidemment des mesures fiscales.

M. Labrie (Fernand): Vous savez, si on regarde le rapport...

Le Président (M. Paquet): M. Labrie.

M. Labrie (Fernand): Pardon, excusez. Si on regarde... Je ne suis pas habitué...

Le Président (M. Paquet): Ce n'est pas grave.

M. Labrie (Fernand): Si on regarde le rapport McDonald pour 2000-2003, dans la région de Québec, il s'est investi 552 millions et, là-dessus, qui est passé par Innovatech, 448. Donc, 81 % qui ont été... où Innovatech a été impliquée. Au point de vue emplois, là, je l'ai déjà su, je dois confesser que... Donc, c'est beaucoup. Et, dans le domaine des biotechnologies, c'est très important. Vous savez aussi que, dans le domaine de la photonique, c'est très important. Donc, la région de Québec... En 2003, 28 % des investissements au Québec ont été faits dans la région de Québec. Donc, on était en train un peu de sortir de nos problèmes, là.

Et, c'est ce que je disais tout à l'heure, au point de vue argent de l'extérieur, dans le Centre de recherche du CHUQ, ce que je vous montrais tout à l'heure, là, vous savez, le 20 millions par année, c'est de l'argent de l'extérieur, ça. C'est de l'argent qui vient des États-Unis ou des royautés, qui vient d'à travers le monde. Et c'est ça qu'il faut avoir. Donc, il faut passer à travers notre... Et, ici, c'est un facteur cinq ou six. À la Bourse, de ce temps-ci... Ça, c'est pas mal meilleur qu'à la Bourse, ça. Et c'est de l'argent qui rentre tout de suite en fiscalité puis en fiscalité du gouvernement. Donc, haute qualité de recherche, retour important, investissement de l'étranger dans les programmes de recherche chez nous. Donc, c'est tout à fait possible. Et la courbe que je vous montrais, qui est celle-ci ? donc, lui, il prévoit tout ? regardez, ici, il faut investir pendant un certain temps, mais, après ça, quand les projets sont intéressants, c'est l'étranger qui va investir.

Le Président (M. Paquet): Étant donné qu'il est 18 heures, est-ce que je demande le consentement pour qu'on puisse poursuivre? Il y a consentement? M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Juste pour les gens qui ? parce qu'il y en a quelques-uns qui regardent les travaux des commissions... comprennent bien, le groupe avant vous nous a parlé... BIOQuébec qui nous a parlé propriété intellectuelle. Puis, si je comprends bien, je ne suis pas bien, bien compétent là-dedans, mais, entre preuve de concept et propriété intellectuelle, bien est-ce que c'est proche l'un de l'autre ou si ça n'a aucun rapport?

Le Président (M. Paquet): M. Labrie.

M. Labrie (Fernand): Ça, c'est indiqué dans mon rapport, mais, pour qu'un projet qui est une idée au niveau de l'université soit financé, le programme dont on parle, preuve de concept, d'abord il faut que ce soit brevetable. Donc, brevetable, ça veut dire que c'est nouveau. Donc, ça, c'est très important. Et évidemment l'argent qui va être attribué à ça va être payé là, hein?

Deuxièmement, c'est quelque chose qui est compétitif au niveau... à l'échelle mondiale, en dehors du Québec, parce qu'on veut s'enrichir. Et ça veut dire que c'est exportable, donc commercialisable.

n(18 heures)n

Donc, brevetable, nouveau, commercialisable et exportable. Donc, ça, c'est les trois critères principaux qui dicteraient, là, ce pourquoi on attribue de l'argent de la part du gouvernement pour faire avancer l'idée à quelque chose qui va être vendable au niveau du privé. Et le montant qui est demandé là évidemment, c'est une fraction de ce qui a été investi à l'étape antérieure, là. Puis, tout à l'heure... Vous avez tout à fait raison, actuellement, il n'y en a pas assez.

Donc, on est content de ce qui est fait. Ça ne veut pas dire que ce qui a été fait, ce n'est pas bon, là, mais on a maintenant un défi très important: dans l'économie globale, il faut être capable de compétitionner partout. Et ces découvertes-là, qui découlent des universités, il faut qu'il en sorte de plus en plus. Et, moi, j'ai mis un facteur cinq, il faut quand même avoir des objectifs. Quatre, c'est quand même pas trop mal, là, mais il faut faire beaucoup mieux que ce qu'on fait là.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Tout à l'heure, et je reviendrai, mais, tout à l'heure, l'autre groupe, quand ils ont parlé d'Innovatech ? et le député de Montmorency est intervenu là-dessus ? pour les trois Innovatech, là, Québec, Montréal, Sherbrooke, j'ai cru comprendre qu'il ne se faisait pas beaucoup de concertation entre les milieux ou en tout cas dans... pour arriver avec une proposition comme on a entendue tout à l'heure. J'ai cru comprendre... Moi, mon interprétation, c'est qu'on ne se parle pas bien, bien fort. Est-ce qu'on serait rendu même à ce niveau-là intellectuellement si élevé qu'il faut arriver à une grande centralisation au lieu de... On n'est pas capable de se parler ou quoi?

Le Président (M. Paquet): M. Labrie.

M. Labrie (Fernand): Non, la centralisation, à mon avis, ce serait une très grave erreur, parce que, à ce moment-là, tout se passerait à Montréal. Je n'ai rien contre Montréal, là, mais il y a des choses qui se font à Québec, hein? Le plus grand centre de recherche au Canada est à Québec. Il y a d'autres choses à Québec. Le Parlement est à Québec aussi. Donc, il y a quand même des choses qui peuvent se faire à Québec, et on est capable de décider à Québec aussi. Il y en a des hommes d'affaires capables de décider, Innovatech Québec?Chaudière-Appalaches l'a démontré.

Donc, il n'est pas question, à notre avis, là, de regrouper ensemble... Une fusion, un centre de décision, la réponse, c'est non, mais, par contre, qu'il y ait des communications entre ces trois groupes-là, ou quatre, dépendant de ce qui va être décidé, et que les règles soient communes. Parce que, là, actuellement, bien, chacun décide selon les règles qu'il pense être les meilleures, là. Ce n'est peut-être pas la meilleure idée non plus. Donc, ça permet une collaboration de tout le monde et de se servir de tout le monde. Tout le monde, régionalement, sont ensemble. Et, au niveau du Québec, bien, tout le monde se parle pour profiter des expertises qui existent ailleurs sur le territoire, incluant Montréal.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Sur votre tableau, quand vous parlez du conseil d'innovation, Montréal, Sherbrooke, Québec, mais est-ce que ce conseil-là d'innovation, dans votre esprit... Parce qu'on disait tout à l'heure... tout le monde s'entendait pour dire qu'il y en a ailleurs, de la recherche, il y a d'autres endroits où ça se fait. Est-ce que ce conseil-là inclut tout ce qui touche les domaines? On ne se limite pas à Québec, Sherbrooke, Montréal?

Le Président (M. Paquet): M. Labrie.

M. Labrie (Fernand): Moi, regardez... Ce n'est quand même pas complet, ce que je suggère là. C'est une idée. Évidemment, ça a pris un certain temps d'être capables de décider ? on a eu plusieurs discussions ? de mettre ça là. Je pense que c'est une bonne approche. Mais ça peut être plus, là. Ça peut être plus. Mais décision autonome dans les régions, ça reste important. Critères communs à tout le monde, c'est très important. Accès de toutes les expertises par tout le monde au Québec, c'est très important aussi.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix.

M. Bertrand: Ça m'amenait à vous demander: qui pourrait le composer, le financer, tout en s'assurant évidemment que chacune des régions y trouve son compte? Parce que, moi, ma crainte, dans ce que j'ai entendu à quelques reprises aujourd'hui, c'est justement... c'est qu'on... il ne faut pas une structure compliquée qui fait que les régions ne sont pas... n'ont pas droit de parole, où c'est des batailles épouvantables. On ne veut plus revivre ça, j'imagine, là. Ce n'est pas ça, votre objectif.

M. Labrie (Fernand): Non, non. Moi, vous savez...

M. Bertrand: Donc, qui serait là? Qui composerait ça?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Il y a trois fonds régionaux, si on veut, ou quatre, trois ou quatre, avec des conseils autonomes, sur lesquels siégeraient des gens d'affaires en majorité ? ce qui était le cas de Québec?Chaudière-Appalaches ? et les décisions se prendraient là.

Maintenant, l'argent, d'où il vient? Pour la preuve de concept, c'est le gouvernement à 100 %. Par la suite, c'est du un par trois. Et M. le ministre probablement va le dire aussi: Plus il va en sortir, mieux ça va être. Parce que, pour 1 $ qui va être investi par ces sociétés-là ? Innovatech Québec, c'est ce qu'elle fait ? bien, il va en venir 3 $ du privé. Il est où, le problème? Et pour chaque dollar investi, en parafiscalité et fiscalité, il en rentre deux aujourd'hui. Donc, ce qu'il faut... Moi, la seule chose qu'il faut retenir, c'est qu'il faut grossir, élargir la preuve de concept. Il faut augmenter ce qui vient des universités. Il ne faut pas en rester là.

Et il y a eu toutes sortes d'obstacles, j'ai mentionné lesquels, là. Il y en a trois. Mais il faut arrêter ça. Et, à ce moment-là, bien, il va y en avoir cinq fois plus qui vont passer à travers. Ça va coûter cinq fois plus au gouvernement, mais, d'un autre côté, ça va lui apporter cinq fois plus aussi. Et on va être compétitif pour l'exportation à travers le monde. Ça va lui coûter... Mais ça ne coûte pas, c'est de l'investissement. Ce n'est pas des coûts, ça. C'est très différent, là.

Le Président (M. Paquet): Le bloc de temps de 10 minutes est terminé. Je crois que M. Bourassa voulait ajouter quelque chose, sur le temps de l'opposition. M. Bourassa.

M. Bourassa (Raynald): Seulement un complément d'information. Dr Labrie a un quatrième point qui touche le concept de brevet, c'est la notion de publication. Plus tôt la preuve de concept va être insérée dans le côté recherche universitaire, plus tôt la propriété intellectuelle va être protégée; et plus facile la preuve de concept va être faite, et plus tôt on va intéresser les investisseurs également.

L'autre élément, c'est que la preuve de concept devrait devenir la source, c'est-à-dire l'obligation de résultat de la recherche universitaire. C'est-à-dire qu'on transforme l'intangible, la recherche, en tangible commercialement et qu'on crée une valeur. C'est la recherche de valeur qu'on veut donner à cette action-là, à toutes fins pratiques.

Identifier sur les contrats de performance avec les universités l'obligation de résultat et de hausser radicalement le transfert d'expertise vers la preuve de concept permettrait, je pense, au Québec d'accroître radicalement sa richesse, permettrait également aux universités en région, pas seulement Québec, Sherbrooke ou Montréal... mais permettrait l'implantation d'unités de recherche très spécialisées dans des filières où les régions sont fortes. Et là on établirait, je pense, une cohésion économique, une cohésion de recherche, et une cohésion également de financement, et un peu plus tard de capital de risque dans des zones de financement beaucoup plus lourdes.

M. Bertrand: M. le Président?

Le Président (M. Paquet): M. le député de Charlevoix, il y a consentement sur votre temps.

M. Bertrand: Compte tenu que je dois quitter pour aller dans Charlevoix, un des plus beaux comtés, je vais me contenter de poser la question, et M. Labrie pourra répondre soit tout de suite ou un petit peu plus tard.

Encore une fois, pour que les gens comprennent bien... Parce que le groupe avant vous et vous, vous dites: L'État, parce que trop risqué. Puis, moi, à chaque fois que j'entends ça, «l'État, parce que trop risqué», surtout à un moment aussi critique par rapport à la situation financière du Québec... J'aimerais que vous expliquiez le plus précis possible, pour que tout le monde comprenne bien, pourquoi ça mérite d'être fait pareil. C'est quoi, l'expression «l'État, parce que trop risqué»?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Je vais le prendre autrement. Si l'État n'investit pas plus à cette étape-là, on va rester dans les situations dans lesquelles on est aujourd'hui. Est-ce qu'on veut ça? Non. Et j'ai démontré tout à l'heure que, même à l'étape de recherche, quand c'est bien fait, ça rapporte de l'argent à l'État. C'est rentable, comme M. Legault le disait aujourd'hui. Il y a la rentabilité au point de vue... Il y a les retours économiques qui sont très importants, et la rentabilité du privé, c'est une autre affaire.

Donc, même pour l'État, c'est important. Et la façon de s'enrichir: il faut agrandir la route. On a une espèce de petite route de campagne, là, alors que ça prend une autoroute entre l'université, ici, et le privé. Et plus il va passer d'autos là, bien, plus le privé va les acheter. Mais, si on continue à en passer une de temps en temps, on va rester... on va s'appauvrir parce qu'on s'en va vers une économie où c'est la haute technologie qui va nous enrichir.

Le Président (M. Paquet): Merci. M. le ministre du Développement économique et régional.

M. Audet: Oui. Une question justement reliée à la question précédente. Lorsqu'on fait des concepts, des projets de recherche universitaire, de plus en plus, je pense ? et c'est quelque chose qui a été amorcé d'ailleurs par le gouvernement précédent puis qu'on s'efforce de poursuivre maintenant ? on force les chercheurs à se regrouper pour faire un... justement pour essayer de faire une masse critique entre eux, quelle que soit la région d'où ils sont, pour bâtir justement une masse critique. Et ça, c'est un prérequis maintenant dans beaucoup de projets. La génomique en est un bel exemple précisément, du travail qui est fait ensemble.

Ce qu'on fait aussi, ce qu'on essaie de faire, c'est d'associer à l'étape assez tôt les gens du secteur privé pour que précisément cette preuve de concept, on puisse la faire apparaître. Ce qui me frappe, c'est que, dans votre graphique Recherche universitaire, normalement, dans un certain nombre de projets, il doit y avoir déjà des projets du secteur privé qui y soient associés. Comment se fait-il que, assez tôt, on n'insiste pas davantage sur cette preuve de concept avant justement de continuer à dépenser?

Vous voyez, c'est ça. Je me dis: est-ce que ce n'est pas un peu... Est-ce que ça ne devrait pas... l'association du secteur privé ne devrait pas, à ce moment-là, se faire un peu plus tôt dans le secteur universitaire? Vous êtes là-dedans depuis longtemps, puis je sais que vous avez travaillé à toutes les étapes. Quelle est votre perception là-dessus?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Vous savez, pour la recherche purement universitaire, là... Moi, je parle de la recherche qui est subventionnée par les organismes subventionnaires, soit canadiens ou soit québécois. Ça, c'est la recherche fondamentale sans but de commercialisation. Ça en prend beaucoup, là. Mais, de temps à autre, le plus souvent possible, il y a une idée merveilleuse, ou intéressante, ou prometteuse qui survient, mais là ce n'est pas assez convaincant pour le privé pour venir. Le privé, lui, il y a de la rentabilité, sinon il ferme les portes. Donc, il faut que le gouvernement rende cette idée-là en investissant 20 fois moins qu'il investit dans le vraiment fondamental pour la rendre acceptable, attrayante, achetable, en d'autres termes, par le privé. C'est ce bout-là qu'il reste à faire.

n(18 h 10)n

Le privé, lui, comme au CHUL, il y a 25 millions qu'il investit par année, mais il investit sur des preuves de concept faites, là. C'est parce que l'expertise est au CHUL. Puis il donne des contrats, puis c'est ça qui fait en sorte ? puis ça vient de l'étranger, ça ...c'est ce qui fait en sorte que l'argent rentre. Mais là, moi, je parle de la nouvelle recherche pure, pas touchée, vous savez, qui vient de naître, a fait des nouvelles fleurs, et ça, le privé, il ne peut pas être là.

Le Président (M. Paquet): M. Simard, je pense, voudrait ajouter quelque chose. Brièvement, oui.

M. Simard (Jacques): Oui, un complément d'information. Il ne faut pas oublier que la notion de risque inclut aussi la période dans laquelle on peut avoir le retour sur l'investissement, et ça, c'est très important. On peut parler d'une période risquée si on veut avoir un retour ou un rendement à l'intérieur de quatre, cinq ans. Et la preuve de concept habituellement, surtout dans le domaine qui nous intéresse au Centre de recherche du CHUL, dans le domaine des biotechnologies ou de la santé, ça peut prendre beaucoup plus longtemps. Et ça, je pense que c'est une notion qu'il ne faut pas perdre de vue, cette notion-là de risque en fonction du temps.

Et aussi n'oublions pas que, dans la preuve de concept, plus le chercheur va avoir l'opportunité de se consacrer à une recherche et non pas, comme c'est bien mentionné dans le dossier, de structurer un conseil d'administration et apprendre ce nouveau langage là ? c'est une profession, les affaires ? plus il risque de pouvoir non seulement faire d'autres découvertes, mais faire en sorte que cette découverte-là va être transférée dans le milieu de la santé aussi. Et ce transfert-là peut être au niveau de l'éducation des médecins de première ligne ou des métiers spécialisés. Et ça, c'est un retour sur l'investissement de la recherche pure aussi, il ne faut pas oublier, parce qu'il y a un budget, une enveloppe importante au niveau de la santé. Et chaque fois que le chercheur peut se consacrer à améliorer les soins de santé dans la province, c'est un impact socioéconomique qui n'est pas toujours... ce n'est pas le but du document, mais cette preuve de concept là va permettre de libérer le chercheur un peu et... permettre d'avoir sa double fonction.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane... M. le ministre, ça va? Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Alors, M. le Président, je voudrais avoir une précision du Dr Labrie à l'égard de cette fameuse période, là, preuve de concept. Vous mentionnez dans votre rapport que l'aide gouvernementale qui a trait à cette partie-là de la recherche doit être limitée aux projets de recherche qui ont un potentiel économique. Si on exclut toute participation du privé dans le processus et que c'est financé par l'État intégralement, comment vous voyez cette évaluation du potentiel économique? Est-ce que ce serait...

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Il y a trois critères. D'abord, ça prend une idée qui est brevetable. Donc, à ce moment-là, on s'assure que c'est une idée qui est nouvelle à travers le monde. Deuxièmement, c'est commercialisable. Donc, il y a un marché pour cette idée-là. Et, troisièmement, c'est exportable aussi. Donc, ça, c'est les critères de départ. Et, par la suite... Bien, moi, j'ai mis des règles qui peuvent être changées, mais, dans le meilleur de mes connaissances, c'est une subvention, ça, c'est un peu le type de subvention pour deux ans, renouvelable une fois. Une preuve de concept, il faut que ça accouche, là. On ne donne pas de l'argent à quelqu'un pour qu'il continue à chercher d'autre chose. C'est qu'il a une idée, il faut qu'il démontre que cette idée-là est intéressante au point de vue commercial, puis ça, c'est un temps qui est court, là, ça peut être deux ans, ça peut être quatre ans. Et, après ça, le privé va venir.

Mme Charest (Matane): Mais cette évaluation-là justement...

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Matane.

Mme Charest (Matane): Cette évaluation-là, elle serait effectuée par l'université, par...

M. Labrie (Fernand): Par... vous savez... non.

Mme Charest (Matane): ...un forum indépendant?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): On a de la misère avec les règles. C'est évalué, d'abord, au niveau de l'organisation, là. Prenons Innovatech, il y avait des experts dans chacun des domaines, mais ce n'est pas suffisant. Donc, il faut l'envoyer à l'extérieur par deux, trois arbitres, dans le domaine commercial, scientifique, et qui nous donnent leur évaluation. Et, sur une base d'évaluation par les pairs, c'est jugé bon ou pas. Et, avant de redonner le deuxième deux ans, bien, il faut évaluer que le progrès a été suffisant et que c'est encore sur la bonne voie.

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Je vous remercie. J'ai un petit problème avec ce que vous nous proposez. Lorsqu'on a créé et on a favorisé les sociétés de valorisation de la recherche qui sont, par exemple, à Laval, je sais, SOVAR, il y a les Univalor, des choses comme ça, je croyais, moi, que, quand on créait ces SOVAR, elles avaient justement cette responsabilité de financer les éléments de la preuve de concept. Alors, si ce n'est pas... Je comprends de votre intervention que ce n'est pas le cas. Alors, si ce n'est pas le cas, est-ce que ça devrait être le cas? Est-ce que, ces sociétés de valorisation, ce n'est pas leur première fonction justement d'aller essayer de faire la preuve de concept?

Pour moi, lorsqu'on a eu les débats ? et j'ai participé, moi, à l'époque, dans ces débats-là ? c'était, à mon sens, la fonction première des sociétés de valorisation universitaires, et ce n'est pas le cas actuellement.

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Bien, ce n'est pas... ce n'est jamais... la vérité, ce n'est jamais 100 %, là, mais ce n'est sûrement pas au niveau où ça aurait dû être. Et on a imposé la formation de compagnies, enfin que j'ai mentionnée tout à l'heure, qui est une lourdeur non utile. Et, pour répéter encore notre proposition, nous, c'est de mettre ensemble, dans chaque région, tout ce qui est expertise dans le domaine du transfert de technologie. Et, entre vous et moi, de l'expertise, on n'en aura pas trop.

M. Gautrin: Ça, je sais ça, mais ça pourrait être aussi au niveau d'une université ou...

M. Labrie (Fernand): Non.

Le Président (M. Paquet): M. Labrie.

M. Labrie (Fernand): Je pense que l'université a ses responsabilités, et c'est d'enseigner puis de supporter la recherche. Mais, quand vient le transfert de technologie...

Le Président (M. Paquet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: La société de valorisation dépend des universités.

M. Labrie (Fernand): Oui, mais, regardez, si on dit qu'on met tout le monde ensemble, ça dépend de l'université, mais ça ne doit pas être contrôlé non plus, là. Ça doit être quelque chose qui est jugé selon les critères scientifiques, de commerce et du marché des affaires. L'université, c'est une chose, et la valorisation, c'est une autre affaire ? valorisation, je n'aime pas le terme; tout à l'heure, je l'ai échappé ? mais le transfert de technologie, c'est une autre affaire dans laquelle le privé, le secteur privé doit être impliqué de façon majeure. Merci.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, ça termine ce bloc à ce moment-ci. Donc, je sais qu'on répète les règles souvent. L'idée, ce n'est pas de vous interrompre, mais c'est de permettre aussi aux gens de pouvoir prendre en note les noms des intervenants pour... puisque tous les propos d'aujourd'hui sont colligés. Alors, parfois, ça peut paraître agaçant pour les auditeurs, mais ça fait partie du travail qu'on a à faire. Merci.

Alors donc, Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs, et merci d'être là. Je voudrais revenir sur toute la question de la gestion de la propriété intellectuelle. Aujourd'hui, on a eu des intervenants qui ont proposé des crédits d'impôt en regard de la gestion de la propriété intellectuelle. J'aimerais savoir qu'est-ce que vous en pensez.

Et en même temps je voudrais vérifier avec vous toute votre gestion de concept, là. En quoi on va protéger l'autonomie des chercheurs s'il y a un financement, qu'il soit public ou privé? Parce que l'autonomie des chercheurs, c'est important. Je n'ai pas à vous répéter ça, je suis persuadée que vous savez ça. Mais, vous savez, est-ce qu'il n'y a pas un risque, là, d'avoir aussi une influence sur ce qu'on finance ou ce qu'on ne finance pas? Et ça, ça ne pourrait pas toucher, là, aux types de recherches qui seraient retenues plutôt qu'abandonnées, même si on répond à vos critères d'exportation, de commercialisation, de brevet, etc., là?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Donc, pour ce qui est de l'autonomie, vous savez, un chercheur, au point de vue autonomie, s'il découvre quelque chose puis qu'il veut publier, on ne peut pas l'empêcher.

Mme Charest (Rimouski): Non.

M. Labrie (Fernand): Mais, par contre, il a une responsabilité sociale de ne pas faire ça tout le temps, hein! Et, moi, je pense que la très grande majorité des chercheurs ont le souci que leurs découvertes, leurs travaux effectivement servent à quelque chose dans la société. Donc, ce n'est pas vraiment un problème, sauf que théoriquement ça peut en être un. Donc, le chercheur a choisi de développer son idée et de la rendre d'intérêt commercial. Donc, son autonomie, c'est un libre choix. On est toujours libre de faire ce qu'on veut dans la société, mais on a quand même des responsabilités que l'argent investi en recherche serve au point de vue économique.

Maintenant, au point de vue propriété intellectuelle, brevet, tout à l'heure... vous savez, pour que l'idée qui est choisie comme étant supportée par l'argent nouveau, là, pour preuve de concept... il faut d'abord que ce soit brevetable. Donc...

Mme Charest (Rimouski): J'ai compris tout ça.

M. Labrie (Fernand): Et donc l'argent vient avec ça. Donc, l'argent qui est donné à preuve de concept... Vous savez, une société qui fait de la recherche, elle a des crédits d'impôt et elle peut avoir des brevets dans ce qu'elle fait pour crédits d'impôt. Donc, ça en fait partie également. Mais, preuve de concept, l'argent doit venir, ici, d'une «Innovatech like» ou une société qui peut lui ressembler, qui, elle, donnera un montant d'argent qui comprendra les brevets, qui comprend du personnel, qui comprend les dépenses de recherche et qui va permettre au projet d'avancer tout en étant protégé par un brevet.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Et la question que je vous avais posée au départ: qu'est-ce que vous pensiez de la suggestion d'un... Je pense que c'est Capital... Comment ça s'appelait?

Une voix: Réseau Capital.

Mme Charest (Rimouski): Réseau Capital, là, qui faisait la promotion d'un crédit d'impôt sur la propriété intellectuelle, une mesure fiscale, là. Il y avait...

M. Labrie (Fernand): Bien, ce n'est pas...

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

n(18 h 20)n

M. Labrie (Fernand): Une société qui fait de la recherche puis qui prend des brevets, il y a des crédits d'impôt là-dessus, là. Donc, ce n'est pas... À mon avis, et je ne suis pas un fiscaliste, là, mais, d'après ce que j'ai vu passer, ça fait partie des dépenses de recherche pour lesquelles il y a des crédits d'impôt.

Mme Charest (Rimouski): O.K. Dites-moi...

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Oui, merci, M. le Président. Vous parlez que, pour devenir un chef de file en science et en technologie, la motivation n'est pas suffisamment présente dans les universités. Qu'est-ce qui peut stimuler cette motivation et le maintien de cette motivation à devenir des chefs de file, là? Si vous étiez le responsable ultime qui avez à mettre quelque chose en place pour cette motivation, qu'est-ce que vous feriez?

Le Président (M. Paquet): Dr Labrie.

M. Labrie (Fernand): Bien, ça me fait plaisir que vous me posiez cette question-là, j'y tiens beaucoup, sauf que je n'avais pas pris le temps pour le faire, là. Mais il faut... C'est au niveau du secondaire... primaire, secondaire. L'importance de la science dans les écoles ? je sais que le gouvernement le fait puis l'autre gouvernement le fait aussi ? c'est très, très important. Il faut démontrer aux jeunes aussi que la façon de supporter l'économie et leur bien-être, leur qualité de vie va dépendre de ce qu'ils vont faire aussi. Donc, ça veut dire aller à l'école, il faut étudier, puis il faut être bon autant que possible, puis... Donc, ce n'est pas mauvais d'être bon à l'école, là, et par la suite y rester assez longtemps aussi, parce que le nombre de Ph.D., je l'ai indiqué, est peut-être deux fois moins qu'il l'est aux États-Unis. Et les États-Unis, en plus, ils importent. Vous savez, ils paient leurs Ph.D. ? pour ne pas révéler de secret ? 60 000 $ par année pour des postdocs, pour qu'ils viennent chez eux pour faire de la recherche.

Donc, il faut que nos concitoyens voient l'importance des sciences, voient quelque chose comme étant une base essentielle, je dirais, de l'économie du futur à laquelle ils vont participer, et c'est intéressant de le faire, et qu'il y en ait plus dans les universités, et ceux qui le peuvent, qui ont le talent, bien, qu'ils fassent non seulement une maîtrise, mais qu'ils fassent un Ph.D., qu'ils fassent un postdoctorat à l'étranger, puis qu'ils reviennent, puis qu'ils... Il y a des gens autour de moi, ici, ils ont fait tout ça et, quand ils reviennent, bien, ça donne des emplois à beaucoup de monde. Donc, il faut valoriser ça, c'est un peu ce que je dis dans ça.

Et ceux qui font des découvertes qui sont exportées, eh bien, que ce soit dit, ça. Parce que s'enrichir aujourd'hui, c'est exporter. Donc, ça, c'est très, très important, là.

Le Président (M. Paquet): Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest (Rimouski): Je ferais juste un commentaire en terminant. Venant de vous, Dr Labrie, je pense que ça a tout son poids. Vous avez redit que l'augmentation de la richesse collective du Québec passe par la recherche et le développement et également la commercialisation de la connaissance scientifique. Alors, je pense que c'est important que vous l'ayez dit ici. Tout ça est enregistré et... Non, mais je pense qu'il faut que ce soit un discours qui soit repris par l'ensemble des partenaires et nous, comme des élus, dans chacun de nos comtés. Le fait qu'un chercheur de votre calibre nous le redise aujourd'hui, je trouve que c'est un plus pour que l'idée fasse son chemin et qu'on prenne au sérieux la recherche et le développement pas seulement dans les grands centres urbains, mais également en région. Je vous remercie beaucoup de votre participation.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, M. le ministre du Développement économique et régional et de la Recherche.

M. Audet: Alors, merci beaucoup. Je veux remercier le Dr Labrie et ses collègues de cette présentation que je trouve magistrale, pour employer un terme universitaire. Je retiens trois, quatre idées importantes. Premièrement, effectivement, l'importance de la science et de la technologie comme moteur du développement économique. Je pense que vous le soulignez très fortement dans votre présentation.

L'importance de la valorisation de la recherche, et je comprends même la création de trois prix. En fait, proposer une sorte de Mercuriades de la recherche universitaire, ce serait une bonne idée, ou des Fidéides de la recherche universitaire, si on est à Québec. Je pense que c'est une excellente suggestion et en tout cas je pense qu'il y a lieu de passer le message à nos collègues qui font les Prix du Québec. Peut-être qu'on devrait mettre l'accent davantage là-dessus.

Et, troisième élément, évidemment, cette idée que je trouve effectivement... cette preuve de concept qui est une chose qu'on prenait pour acquis, hein, soit dit en passant, mais qui effectivement... dont on se rend compte qu'elle est une sorte de chaînon manquant, là, un peu, dans toute l'opération. Et je comprends même que, s'il n'y a pas de ressources, au fond, suffisantes, je comprends qu'il vaudrait mieux couper un petit peu dans la recherche, dans le fonds subventionnaire lui-même, pour permettre de valider la recherche qu'on fait plutôt que de continuer...

Une voix: ...

M. Audet: C'est ça. Je ne vous fais pas dire ça, mais c'est tellement important, ce 5 % là, qu'au fond vous dites: Oui, on l'ajoute. Mais, si on ne l'a pas, il faut s'assurer qu'il soit... que cet exercice-là soit mis en oeuvre, que ce chaînon-là soit établi.

Donc, je retiens votre présentation et je vous remercie, vous tous, pour cette présentation. Je pense que les collègues des deux côtés ont beaucoup apprécié votre expérience. Et, encore une fois, je dois dire que vous avez fait une présentation universitaire qui était très pédagogique. Merci beaucoup.

Le Président (M. Paquet): Merci. Alors, au nom de la commission, je joins ma voix à celle des collègues pour remercier le Dr Labrie, les Drs Simard, Bourassa et Lanoë pour votre participation à nos travaux. Et j'ajourne les travaux de la commission au jeudi 26 février, à 9 h 30.

(Fin de la séance à 18 h 25)


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