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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Tuesday, November 4, 2014 - Vol. 44 N° 11

Special consultations and public hearings on Bill 15, An Act respecting workforce management and control within government departments, public sector bodies and networks and state-owned enterprises


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Table des matières

Auditions (suite)

Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université (FQPPU)

Secrétariat intersyndical des services publics (SISP)

Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)

Association québécoise d'établissements de santé et de services sociaux (AQESSS)

Université du Québec (UQ)

Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)

Fédération étudiante universitaire du Québec (FEUQ)

Mémoires déposés

Intervenants

M. Raymond Bernier, président

M. Martin Coiteux

M. Alain Therrien

Mme Véronique Hivon

M. André Spénard

M. Claude Surprenant

Mme Manon Massé

M. Dave Turcotte

M. Ghislain Bolduc

M. Nicolas Marceau

M. Saul Polo

*          M. Max Roy, FQPPU

*          M. Michel Umbriaco, idem

*          Mme Lucie Martineau, SISP

*          Mme Louise Chabot, idem

*          M. Richard Perron, SPGQ

*          Mme Diane Lavallée, AQESSS

*          M. Denis Perras, idem

*          M. Luc Bouchard, idem

*          Mme Sylvie Beauchamp, UQ

*          M. Nelson Michaud, idem

*          M. Robert Proulx, idem

*          Mme Nadia Ghazzali, idem

*          M. André G. Roy, idem

*          M. Daniel Coderre, idem

*          M. Pierre Dumouchel, idem

*          Mme Johanne Jean, idem

*          M. Simon Berlin, FTQ

*          Mme Johanne Deschamps, idem

*          M. Maxence Lenoir, FEUQ

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures vingt et une minutes)

Le Président (M. Bernier) : Merci. Alors, bon après-midi à tous. Bienvenue à la Commission des finances publiques. À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 15, Loi sur la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Drainville (Marie-Victorin) est remplacé par Mme Hivon (Joliette); M. Lelièvre (Gaspé) est remplacé par M. Turcotte (Saint-Jean); Mme Samson (Iberville) est remplacée par M. Surprenant (Groulx).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le secrétaire. Voici l'ordre du jour pour cet après-midi : nous entendrons la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université, le Secrétariat intersyndical des services publics, le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec et l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux. Alors, bienvenue à tous les groupes qui vont participer à cette commission.

De consentement, pour... J'ai besoin de votre consentement pour aller au-delà de l'heure prévue, comme nous débutons nos travaux déjà avec une vingtaine de minutes de retard. Consentement? Consentement, du côté de la deuxième? Merci. Donc, consentement.

Donc, sans plus tarder, je souhaite la bienvenue à la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université, en présence de M. Max Roy et M. Michel Umbriaco. Alors, bienvenue, messieurs. Vous avez 10 minutes pour votre présentation.

Fédération québécoise des professeures
et professeurs d'université (FQPPU)

M. Roy (Max) : Merci, M. le Président. Je suis Max Roy, je suis le président de cette fédération, et mon collègue, Michel Umbriaco, qui est professeur à la TELUQ et président du Comité sur le financement des universités qui agit au sein de la FQPPU depuis 2006. Alors, M. le Président, M. le ministre, Mmes, MM. les membres de cette commission, je veux vous remercier de l'opportunité que vous nous offrez d'exprimer à l'égard de ce projet de loi la position et les propositions de notre Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université. Je le rappelle, notre fédération représente les professeurs des universités québécoises, incluant les constituantes du réseau de l'UQ, les universités à charte et toutes les universités anglophones.

D'emblée, je dois dire notre étonnement qu'un tel projet de loi sur la gestion et le contrôle des effectifs des ministères et organismes publics puisse s'étendre au secteur de l'enseignement supérieur et, singulièrement, à l'Université du Québec et à ses constituantes. Envisager un gel parmi les personnels académiques universitaires dans tous les établissements serait, à notre sens, une aberration, puisque les établissements manquent déjà de ressources professorales et que les inscriptions étudiantes sont en hausse constante depuis près de 15 ans, donc cela constituerait même une diminution des ressources eu égard à des besoins qui sont croissants. Les services aux étudiants en souffriraient mais aussi les services à la population en général, notamment à travers la recherche, ses retombées dans la santé, les services sociaux, etc. Et on peut craindre que le développement économique même du Québec en souffrira grandement.

Nous avons fait la démonstration à plusieurs reprises dans le passé du manque de ressources dans les universités québécoises, surtout à l'occasion du Sommet sur l'enseignement supérieur en 2013, où nous avons chiffré avec des données vérifiées et vérifiables un manque d'effectifs professoraux d'un minimum de 813 personnes pour s'en tenir au minimum requis à la même situation. Mais, pour atteindre une véritable qualité d'enseignement, selon les normes qui sont reconnues à l'extérieur et ici même au Canada, il faudrait minimalement 1 600 professeurs supplémentaires. Alors, c'est vous dire que, lorsqu'on parle d'un gel des effectifs, pour nous, c'est très inquiétant. On se dit : Ce n'est pas possible d'imaginer qu'il y aura moins de professeurs pour encadrer le flot important de nouveaux étudiants que nous recevons chaque année. Et il faut s'en féliciter, il faut se féliciter qu'il y ait de plus en plus de diplômés, de gens compétents sur le marché du travail, de gens qui s'activent à notre développement social, culturel et économique, évidemment.

Il faut dire qu'aux cycles supérieurs en particulier l'encadrement des étudiants est très exigeant. On ne peut pas encadrer 12 étudiants à la maîtrise, 12 étudiants au doctorat seul, c'est impossible. Il faut donc se répartir le travail. Si on souhaite véritablement continuer à développer nos universités, il faut de nouvelles ressources.

Les dispositions de la loi nous donnent aussi beaucoup d'inquiétude. Par exemple, il y a les dispositions qui cèdent des pouvoirs importants aux ministres, à chacun des ministres, qui deviennent quasi des responsables des effectifs. Ainsi, la troisième section du projet de loi, les articles 9 à 17, reste, pour nous, la plus inquiétante. On comprend, dans cette section-là, d'après ce qui est écrit, que le conseil souhaite fixer, souhaite déterminer le niveau de l'effectif total et placer la responsabilité de cet effectif sous la responsabilité de chaque ministre, mais la loi prévoit aussi qu'un ministre peut répartir les effectifs entre les organismes publics sous sa responsabilité sans aucune contrainte. Ainsi, on pourrait imaginer une situation où le ministre de l'Enseignement supérieur — c'est notre ministre — déplacerait des effectifs entre les universités ou entre des universités vers les cégeps ou l'inverse sans avoir vraiment besoin de justifier sa décision. Alors, cette possibilité semble irréalisable, ne serait-ce qu'à cause des autres lois, des chartes constitutives, des accréditations syndicales, etc. Aussi, le projet de loi, à l'article 12, prévoit que l'organisme ne peut gérer ses effectifs de façon à diminuer les services offerts à la population. Et pourtant, si on gèle des effectifs académiques, on nuit nécessairement aux services. Donc, il y a une contradiction. Il semble qu'un ministre puisse agir de manière à diminuer les services sans aucune interdiction, rien n'est inscrit dans la loi à cet égard. Il peut même donner n'importe quelle directive concernant la gestion de l'effectif d'une université. On se pose la question : Si l'un des objectifs du gouvernement est de restreindre l'accès à l'université, il nous semblerait plus simple de l'affirmer et d'en débattre éventuellement.

Les contrôles et sanctions qui sont prévus par les sections IV, V et VI du projet de loi permettent à un ministre d'imposer les changements qu'il souhaite s'il juge qu'un organisme public ne rencontre pas les objectifs fixés. De ces sanctions, celles où une partie ou la totalité de la subvention accordée à l'organisme peut être retenue ou annulée, c'est un grand gage d'instabilité future qui crispera les administrations des universités placées sous la coupe du ministre. Les étudiants en seront certainement les premiers touchés.

Il faut comprendre que ce projet de loi aussi, qui, de notre point de vue, est inusité dans les annales de l'administration publique au Québec, transformera chaque ministre en gestionnaire direct des ressources humaines de l'ensemble des organismes publics sous sa responsabilité.

Nous ne voulons pas simplement critiquer le projet de loi, nous voulons aussi dire qu'il doit être retiré. Il faut exclure l'Université du Québec de ce projet de loi, elle ne peut pas répondre aux exigences de ce projet de loi sans sacrifier à sa propre mission. Mais nous voulons aller au-delà. Nous avons déjà émis, dans le passé, des propositions pour limiter certaines dépenses qui n'affectent pas le secteur académique, et on nous a entendus lors du Sommet sur l'enseignement supérieur en 2013, on nous avait entendus souvent dans les médias, on va le répéter aujourd'hui : Il y a des lieux qui sont beaucoup plus importants, où il y a des dépenses majeures, discutables, questionnables, et c'est à cela qu'il faudrait s'attaquer en priorité.

• (15 h 30) •

Notamment, la question de la bureaucratie, la reddition de compte a pris une telle importance, dans les universités, que ça devient dysfonctionnel et ça entraîne l'embauche de dizaines et de centaines de nouveaux gestionnaires. On vous montrera tout à l'heure un tableau représentant la complexité des mécanismes de reddition de comptes dans les universités au Québec. Le projet de loi rajoute une couche supplémentaire de reddition de comptes et exige des rapports supplémentaires. Plus encore, dans un énoncé il est inscrit qu'il doit y avoir un rapport sur le rapport. Alors, c'est démultiplier les opérations, et on pense que c'est du temps perdu. On pense qu'au lieu d'atteindre une meilleure efficacité on va embrouiller les choses et finalement on va perdre beaucoup d'efficacité dans le milieu.

Deuxième point, deuxième élément : les immobilisations. On en a parlé dans le passé, on a dit qu'il y avait beaucoup de transferts de fonds parce que les administrations universitaires ne suffisaient pas... pardon, n'avaient pas les budgets suffisants pour rendre compte des besoins dans les équipements, les besoins en immobilisations pour accueillir les nouvelles populations étudiantes. Ça fait en sorte qu'il y a une partie des fonds de fonctionnement qui est déversée et, on peut dire, détournée vers les immeubles. Alors, ces fonds-là devaient servir à des fins académiques et finalement ils ne servent pas à cela, et c'est une perte importante. Il faut limiter ces transferts de fonds.

Enfin, les coûts de la gestion sont devenus absolument incroyables dans les universités. La masse salariale a augmenté de façon exponentielle. On pourra donner des détails tout à l'heure, on a des chiffres. Vous avez reçu le mémoire, on vous l'a envoyé par voie électronique. Puis il y a des copies. Si c'est nécessaire, on va vous en distribuer. Cette masse salariale, elle est disproportionnée par rapport aux besoins et par rapport à l'augmentation de la masse salariale des personnels d'enseignants. C'est inadmissible et c'est absolument incompréhensible.

Je vais terminer mon exposé, puisque je sais que je dispose d'à peine 10 minutes...

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste une minute, monsieur.

M. Roy (Max) : Pardon? Il m'en reste une?

Le Président (M. Bernier) : Une minute, M. Roy.

M. Roy (Max) : Bon, on va essayer de faire ça correctement. Alors, pour nous, l'actuel projet de loi, il vise à concrétiser de manière radicale des énoncés et des orientations politiques du gouvernement, c'est-à-dire des compressions massives dans le réseau universitaire par le contrôle et la réduction draconienne des organismes publics, dont l'Université du Québec.

D'une part, le projet de loi, il instaure un contrôle démesuré du ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science sur la planification et la gestion des ressources humaines de l'Université du Québec. Même si des contrôles et des redditions de comptes puissent être nécessaires, la conduite de la gestion des ressources humaines à partir du bureau du ministre apparaît comme une pratique d'un autre siècle.

D'autre part, les nouvelles charges qui seront imposées aux établissements dans la production de la multitude de rapports de reddition de comptes nécessiteront assurément de nouvelles ressources qui seront consacrées à une bureaucratie vouée à ne répondre qu'à ces demandes.

Et enfin...

Le Président (M. Bernier) : En terminant, en terminant.

M. Roy (Max) : En terminant, nous proposons au gouvernement d'explorer d'autres voies pour faire des économies. Mais, chose certaine, il ne faut pas diminuer la capacité des universités à rendre des services à la population, des services d'enseignement et de recherche. C'est la mission essentielle de l'université. Je vous remercie.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Roy, merci de votre présentation. Nous allons donc passer du côté ministériel. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Coiteux : Oui. Merci beaucoup, M. Roy, et merci d'être là aussi, M. Umbriaco. Je vais commencer par, peut-être, la question suivante, parce que vous avez fait état de l'explosion de la masse salariale puis vous avez fait la distinction entre au moins deux aspects de la masse salariale, le personnel administratif où vous dites qu'il y a une explosion démesurée par rapport à la masse salariale des enseignants, des professeurs d'université. Et il y a un article ici du projet de loi qui est l'article 4, d'accord, qui dit nommément : «Un organisme public informe périodiquement le ministre dont il relève du niveau de son effectif et de sa répartition par catégories d'emploi.»

Alors, prenons cet article-là. En quoi cet article-là va à l'encontre de ce que vous avez présenté, là, il y a un instant, qui est simplement, finalement, de partager entre nous cette information sur la nature des effectifs à l'intérieur de l'organisme en question ici, l'Université du Québec? Et ça nous permettrait justement de voir là où sont les professeurs, dans les effectifs, puis là où sont les administratifs, puis comment ça évolue dans le temps. Pourquoi ce serait un problème, ça, de partager cette information?

Le Président (M. Bernier) : M. Roy, M. Umbriaco.

M. Roy (Max) : M. Umbriaco va... on va se partager les réponses...

Le Président (M. Bernier) : Il n'y a pas de problème en autant que vous vous identifiiez, que je puisse bien vous enregistrer.

M. Roy (Max) : Très bien. Merci.

M. Umbriaco (Michel) : Michel Umbriaco, président du CFU. Le problème, c'est... Le nombre des étudiants augmente comme ça, on a l'équivalent de trois universités de Montréal, depuis 10 ans, là, qu'on a créé, qu'on a accueilli au Québec. Le nombre d'administrateurs va plus vite que la courbe d'accroissement des étudiants, et le nombre de profs va en baissant. Alors, il y a un paradoxe. Il y a de plus en plus d'étudiants, de plus en plus d'étudiants aux deuxième et troisième cycles, et il y a de plus en plus d'administrateurs et de moins en moins de professeurs.

Le problème est le suivant : la qualité même de l'enseignement et le suivi de l'encadrement des étudiants, surtout aux deuxième et troisième cycles, font que le temps moyen de travail d'un professeur d'université, qui était de l'ordre de 48 à 52 heures selon les rapports dans les dernières années, a monté à 55 et 60 heures. C'est le fun de s'arracher le coeur pour les étudiants, mais ça ne peut pas durer éternellement. Il est là, le problème. Ça, c'est le premier problème.

Partager les informations, on a les informations sur les masses salariales, on a les... Tout ça est déjà disponible. Et, tous les chiffres qu'on vous donne, on les a déjà donnés au ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science, c'est disponible. Est-ce qu'on a besoin d'un projet de loi?

Je n'ai rien contre qu'il y ait un projet de loi qui fasse de la recherche documentaire, et on l'a proposé même au sommet en disant : Ça prendrait un conseil des universités où il y aurait une veille stratégique sur l'ensemble des dépenses, pas juste sur les masses salariales mais sur l'ensemble des dépenses, l'immobilisation et l'ensemble de la planification du réseau universitaire. On n'a rien contre ça. Alors, ce n'est pas l'échange d'information... Et tous nos livres sont ouverts, on peut vous abreuver ad nauseam, là, de nos données... ou le ministère aussi, j'espère, serait capable de le faire, mais... Ces éléments-là ne posent pas problème.

Ce qui pose problème, c'est de dire : Le nombre de profs s'en va en diminuant. Il y a des «quick fixes» continuels des administrations universitaires, qui ne peuvent, plus ou moins, faire autrement, comme ils nous disent. Ces «quick fixes» là reposent sur les chargés de cours, et les chargés de cours commencent à être épuisés, eux autres aussi. On ne peut pas tout faire avec des chargés de cours, surtout aux deuxième et troisième cycles. Donc, à un moment donné, on atteint une zone critique. Et, s'il y a un gel des effectifs ou, encore pire, un gel de l'embauche, là on ne peut pas répondre de rien, on s'en va vers une catastrophe annoncée.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Je vais revenir à ma... Bien, d'abord, peut-être juste un petit préambule : Si l'information nous était transmise dans un délai qui soit raisonnable, notamment dans les réseaux, là... Ce n'est pas un gros enjeu dans l'univers immédiat, qu'on contrôle au gouvernement, mais, dans les réseaux, si l'information nous était transmise dans un temps plus opportun, plus rapide, bien il y a des dispositions de ce projet de loi qui seraient moins nécessaires, on s'entend. Si elles sont là et si cet article 4 est là, c'est parce qu'il y a vraiment un enjeu d'avec quel délai les données nous sont transmises. Alors, je ne remets pas en question ce que vous me dites, cette évolution des courbes, administrateurs, professeurs, employés, mais la vérité des choses, c'est que l'évolution de ça dans le temps, dans un temps qui nous permette de voir s'il y a un problème, actuellement cette information-là, elle ne nous est pas transmise.

Alors, je répète ma question : Est-ce que ça pose un enjeu particulier qu'on demande à ce que cette information-là nous soit transmise de manière périodique par catégories d'emploi, pas seulement pour les professeurs, par catégories d'emploi, pour qu'on puisse, dans le fond, avoir accès à la même information que vous utilisez, pour nous dire qu'il y a un enjeu actuellement d'explosion de la masse salariale des administrateurs puis d'un suivi, finalement, qui n'est pas équivalent du côté des professeurs? Est-ce que c'est un enjeu vraiment, ça?

M. Umbriaco (Michel) : ...de la bureaucratie.

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

• (15 h 40) •

M. Umbriaco (Michel) : Pardon. Michel Umbriaco. L'enjeu est celui de la bureaucratie. On a amené ici, là... C'est parce qu'on a essayé de faire le relevé. Puis on l'a fait avec nos collègues de l'Université du Québec. Ça, en 1990, chacune des lignes, ce sont les rapports que le ministère ou le gouvernement nous demandait pour répondre, justement, aux éléments de l'article 4. En 2012, c'est les 200 et quelques rapports qu'on doit remettre annuellement au ministère. On peut en remettre 10 autres ou 15 autres, rapports, ça ne nous fait rien, mais annuellement c'est le genre de rapports que l'on remet au ministère.

On a posé la question à savoir est-ce que le ministère les lisait, et un des constats qui a été fait, au Sommet sur l'enseignement supérieur, c'est de dire que le ministère de l'Enseignement supérieur ne disposait pas des fonctionnaires ayant la compétence pour lire les rapports ou encore du temps pour répondre aux rapports. On a estimé que, si on abolit l'ensemble... Quand on parle d'abolir de la bureaucratie, c'est ça qu'on veut dire. Si on abolit, je dirais, les deux tiers de ça qui nous apparaissent inutiles, ça ne nous fait rien de répondre à toutes les questions par catégories d'emploi, ces choses-là. Je pense que toutes les universités vont le faire, il n'y a aucun problème là-dessus. Mais, si on abolit les trois quarts de ça, qui est parfaitement inutile, et qu'on a deux, ou trois, ou quatre redditions de comptes trimestrielles par année avec des questions assez simples, répondre à vos questions, on calcule que c'est 45 millions à 60 millions par année qu'on sauve. Et ça, c'est facile, là. L'augmentation des masses salariales des administrateurs, on n'arrête pas de nous la justifier par la reddition de comptes supplémentaire qui est demandée. Si on arrête de faire de la reddition de comptes... Je ne dis pas que la reddition de comptes, ce n'est pas une bonne affaire, là, il faut en faire. Mais on part de ça à ça. À un moment donné, ça devient kafkaïen, là

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : J'aimerais vous rassurer là-dessus, là, il ne s'agira pas d'un rapport complexe qui va nécessiter toute une équipe pour nous dire à combien de personnes et à quelle catégorie correspondent les chèques de paie que vous faites toutes les deux semaines. Alors, ça... Mais ça, je pense que, ça, vous ne nous le transmettez pas comme tel, n'est-ce pas?

M. Umbriaco (Michel) : ...il n'y a pas de problème.

M. Coiteux : Alors, ce ne sera pas très bureaucratique. Ce ne le sera pas du tout, d'ailleurs.

Alors, cette information-là est nécessaire pour qu'on puisse, avec vous, là, suivre l'évolution des effectifs puis voir si ça va au bon endroit. Parce que vous me dites qu'il y a un problème, vous me dites qu'il y a un problème d'explosion de la masse salariale. C'est un problème pour le gouvernement, ça, parce qu'on paie ça, ultimement, une explosion de la masse salariale, puis, dans le contexte actuel, il n'y a pas d'espace pour payer des explosions de masse salariale. Puis, s'il devait y avoir à tout le moins une stabilité temporaire de la masse salariale, parce que c'est de ça qu'on parle ici, on aimerait savoir si on est en train d'embaucher des administrateurs puis de mettre à pied des professeurs, parce que ce n'est pas ça qui est le but.

Alors, il y a l'article 4 puis il y a l'article 12. Quand vous les combinez ensemble, là, partager une information de base qui n'est pas partagée à l'heure actuelle avec nous, je pense que ce n'est pas un enjeu vraiment pour vous, là, finalement, parce que ce n'est pas un rapport complexe qu'on vous demanderait. Mais, d'autre part, l'article 12 dit : «La gestion de l'effectif par un organisme public doit s'effectuer de façon à maintenir les services offerts à la population.» Et, dans une institution d'enseignement, bien, je pense que maintenir les services à la population, en période de contrôle, ce n'est pas de faire une explosion de la masse salariale des administrateurs.

Alors, j'essaie de comprendre. Puis je vous donne la parole tout de suite. J'essaie de comprendre quelle est, dans le fond, l'objection de fond que vous avez à l'égard d'un projet comme celui-là, qui combine deux choses qui semblent vous préoccuper et qui préoccupent le gouvernement.

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

M. Umbriaco (Michel) : S'il y avait seulement l'article 4 et l'article 12, écoutez, on va vous appuyer grandement. Si on nous dit qu'il y a une augmentation cette année de l'ordre de 4 % des étudiants, et cette augmentation-là est surtout aux deuxième et troisième cycles, et qu'il y a un gel d'embauche des professeurs, là, c'est là qu'on ne marche plus.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Ce n'est pas un gel d'embauche qui est envisagé, là, c'est... Il y a deux choses. Il y a la question du dénombrement, puis là je pense qu'on est en train de se mettre d'accord, j'ai cette impression-là, vous me contredirez si j'ai tort. Vous dites : Après tout, là, partager l'information sur à qui on fait des chèques de paie et à quelle catégorie d'employé ça correspond, je pense que c'est... le gouvernement doit connaître, finalement, ce qu'il finance, ultimement. Bon. Ça, je pense qu'il n'y a pas d'enjeu.

Maintenant, l'autre enjeu, c'est de dire... Vous souhaiteriez que les décisions de gestion des effectifs soient, évidemment, pour préserver les services d'enseignement. C'est les étudiants qui sont en croissance, donc vous ne voulez pas que ça aille à l'augmentation des administrateurs. Bien, c'est exactement ce que vise le projet de loi.

Alors, je répète un peu ma question : Pourquoi on n'est pas d'accord, là, on semble ne pas être d'accord complètement sur...

Le Président (M. Bernier) : M. Roy.

M. Roy (Max) : Écoutez, notre inquiétude, là, elle ne date pas d'hier. C'est qu'à chaque fois qu'on nous demande quelque chose de plus, que ça vienne du ministère de l'Enseignement supérieur ou d'un autre ministère, ça affecte le service pédagogique, ça affecte le travail que les professeurs peuvent faire, qu'ils doivent faire. Il n'y a pas que les professeurs, au sein de l'université, il y a aussi tout le soutien académique, et tout cela est affecté. Notamment quand on a réduit les budgets de recherche, bien il y a tout le personnel de recherche. Quand on a modifié les organismes de recherche, donc c'est devenu le Fonds de recherche du Québec, peu importe, ça a modifié également tout le rapport que les professeurs ont aux organismes et avec les étudiants et tout.

Alors, notre inquiétude, elle date de longtemps. Si on avait vu, au cours des dernières années, un redressement de la situation pour améliorer, justement, les services aux étudiants et améliorer la situation des... les effectifs des professeurs, on n'en serait pas là. Or, toutes les redditions de comptes qu'on nous a demandées n'ont servi qu'à créer du contrôle supplémentaire et des réductions. Et, au lieu d'avoir du soutien supplémentaire, tout ce qu'on a, c'est des classes plus populeuses.

Il y a eu des investissements majeurs, au Québec, dans l'enseignement supérieur, on y est allés à coups de milliards. Mais on ne l'a jamais vu dans les classes et dans les laboratoires. Où est allé l'argent? Et c'est ça qu'on a dénoncé, même chose pour les immobilisations, c'est des frais d'infrastructures. Le gouvernement n'a pas pris ses responsabilités à une époque, je n'accable pas le gouvernement actuel ni le précédent, mais à une époque il n'a pas pris ses responsabilités, ce qui fait qu'on a pelleté par en avant, et aujourd'hui on a eu des problèmes que tout le monde a dénoncés. On a vu une multiplication de campus mais qui ne sont pas payés. C'est bien beau, de donner l'accessibilité à tout le monde. Tout le monde est en faveur de ça, et on va être les premiers à défendre l'accessibilité sur tout le territoire. En passant, l'Université du Québec, elle a une mission régionale en plus d'une mission nationale. Et, si on pense à un gel des effectifs, inévitablement ça va affecter les effectifs qui vont venir en soutien aux professeurs, soit dans les laboratoires soit dans les instituts de recherche, etc., et les autres personnels qui ont un lien avec l'académique. Sans compter que, si on gèle les effectifs par principe, nous, comme il y a une augmentation de la fréquentation étudiante, bien il y a nécessairement une disproportion.

Alors, on est déjà en décalage, c'est ça qui nous inquiète. Si on n'était pas déjà en décalage, je vous dirais, bien peut-être qu'on peut s'entendre ensemble sur une progression, une courbe de progression de x pourcentage, mais on est en rattrapage. Il faut commencer par faire le rattrapage avant de penser à une diminution. Et là, pour nous, un gel, quel qu'il soit, c'est une diminution, nécessairement, des services. C'est ça, notre inquiétude.

Alors, la masse salariale, oui, des personnels de direction, ça a augmenté de 154 % ou 157 % en une dizaine d'années. La masse salariale des enseignants, c'est 50 quelques pour cent, 57 %. On est plus nombreux, c'est entendu, mais que cette masse salariale augmente à ce point, ça indique deux choses, c'est qu'il y a une bureaucratie exponentielle et puis il y a aussi des salaires importants. Je ne veux pas commencer à casser du sucre sur le dos des recteurs ou tout ça, là, ce n'est pas ça, notre objectif ici, ce n'est pas ça du tout, mais je ne pense pas que ce mécanisme-là va nous permettre d'atteindre l'objectif que vous visez, je pense qu'au contraire ça va nous en éloigner.

Et ce que je sais aussi, c'est qu'au ministère — là, présentement, ça s'appelle le ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de la Science — eh bien, ils connaissent, ils connaissent les problèmes, et, si on avait pris les responsabilités qu'il était nécessaire il y a plusieurs années, je pense qu'on n'aurait pas le problème qu'on a actuellement. On aurait pu le résorber, ce déficit-là. Alors, il faut donc revenir au ministère. Et c'est pourquoi nous, on a demandé de créer un conseil des universités qui remplacerait la CREPUQ, à laquelle de toute façon le gouvernement consacre des sommes, et les sommes sont tout simplement déversées dans l'autre organisme, un organisme qui soit impartial, qui ne soit pas un lobby de direction d'établissement, et par lequel, grâce auquel on puisse avoir l'heure exacte sur ce qui se passe dans les établissements.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Vous avez 30 secondes, M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, simplement pour dire que vous avez fait référence au fait que, dans le passé, on a pelleté en avant un certain nombre de problèmes. Ce projet de loi vise justement à contribuer à ne pas pelleter en avant davantage de problèmes par rapport au déficit budgétaire.

Je vois certaines inquiétudes sur le long terme, mais le gel des effectifs dont il s'agit ici est une mesure ponctuelle qui se termine le 31 mars 2016. Donc, on n'est pas en train de parler d'un gel de 10 ans, là. On s'attaque au problème maintenant.

Alors, on a eu un bon échange. Je pense que, sur le dénombrement, on est assez d'accord. On poursuivra les discussions sur l'arrimage entre l'article 4 et 12. Mais l'objectif qu'on a ressemble beaucoup au vôtre, c'est ce que je voulais dire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord saluer M. Roy et M. Umbriaco, merci d'être ici; saluer mes collègues aussi, les membres de la commission parlementaire et évidemment saluer le président. Mais je laisserais d'abord la parole à ma collègue de Joliette, qui aurait des questions à poser à nos invités.

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bonjour à vous deux, merci d'être ici.

Vous représentez des professeurs de, donc, l'ensemble des universités. J'aimerais vous entendre... Vous l'avez vraiment juste effleuré, mais, pour vous, est-ce qu'il y a quelque chose qui peut justifier que le réseau de l'Université du Québec soit inclus dans le projet de loi et qu'aucune autre université ne le soit? Comment vous expliquez ça? Puis comment vous pensez que ça se justifie ou non?

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

• (15 h 50) •

M. Umbriaco (Michel) : Oui. Le réseau de l'Université du Québec est dans le projet de loi, mais il y a d'autres articles qui permettraient au gouvernement d'inclure les autres universités, ce qui nous inquiète. Nous, on pense qu'aucune université présentement au Québec, pas plus l'Université du Québec que les autres universités — on ne veut pas faire une fausse bataille des universités dites à charte et du réseau de l'Université du Québec — aucune université présentement, dans l'état des ressources académiques, les professeurs, chargés de cours, etc., dans l'état des ressources académiques actuel, ne peut vivre un gel.

Si on vit un gel, il va arriver trois conséquences, quel qu'il soit, quel que soit le gel. Première conséquence : à un moment donné, il y a des programmes qu'on ne sera plus capables de donner ou des concentrations où il va y avoir des gels de l'accessibilité, on ne sera plus dans l'accessibilité urbi et orbi, ça, c'est clair, parce qu'à un moment donné il y a des limites à ce qu'un prof ou un chargé de cours est capable d'encadrer dans des cours ou des choses...

La deuxième limite, c'est qu'il va y avoir une limite où il va y avoir une dégradation de la recherche. C'est déjà commencé avec d'autres éléments, mais il va y avoir une dégradation de la recherche. Alors, non seulement cette dégradation de la recherche là a des impacts sur la qualité de nos étudiants de deuxième et troisième cycle, mais ça a un impact aussi carrément sur notre compétitivité et, je dirais, notre capacité d'excellence au Canada ou en Amérique.

Troisième élément, c'est toute la question des services à la collectivité. Si on n'est pas capable de vraiment donner notre enseignement et de faire notre recherche, tout ce qu'on fait comme services à la collectivité, que ce soit avec les entreprises, les services communautaires, des collectivités quelles qu'elles soient, ça va se réduire à peau de chagrin, parce qu'on n'aura ni le temps ni l'énergie.

On est déjà en déficit. En 2012, on était en déficit de 813 professeurs. Présentement, cette année, si on se fie aux normes minimales au Canada, on serait une centaine de plus. Si on était dans la norme canadienne — on ne parle même pas des normes américaines, là — si on était dans la norme canadienne, on serait autour... entre 1 600 et 1 800 profs de plus, sans réduire le nombre de chargés de cours, parce que la masse étudiante est là. Quand on dit que c'est l'équivalent de trois universités de Montréal qu'on a engagé, c'est ça que ça veut dire. Il y a beaucoup d'étudiants.

On ne veut pas restreindre l'accessibilité, alors pas plus l'Université du Québec que les autres universités à charte. On pense que c'est une mauvaise querelle, universités à charte et Université du Québec, surtout que la majorité des universités, sauf peut-être McGill — on pourrait toujours faire un long discours sur McGill, sauf peut-être McGill — la majorité des universités, au Québec, dépend essentiellement des subventions de fonctionnement du gouvernement du Québec. McGill, c'est un peu plus bas à cause de toutes sortes d'autres raisons, on pourra toujours faire un cas, là, mais, à part McGill, toutes les autres dépendent... Puis il n'y a pas de différence significative en disant : Il y a les grandes universités, il y a les petites universités, ces choses-là. Nous, on pense qu'il y a 19 universités, au Québec, puis ça vient de finir. Elles ont des missions différentes, mais il y en a 19.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme la députée.

Mme Hivon : Oui. Je pense que vous avez mis le doigt sur quelque chose tantôt aussi en parlant de l'endroit où les investissements se font, dans le fond, puis je pense que vous avez... Vous avez parlé des immobilisations, puis effectivement on voit ça un peu, la multiplication des projets d'immobilisations par rapport à, je dirais, la matière grise et les ressources qui sont vraiment là, le corps professoral, l'enseignement. Donc, ça, je pense que c'est quelque chose qu'on doit avoir à l'esprit.

L'autonomie universitaire, je vous suis parfaitement. Je pense que c'est un enjeu réel, qu'on doit garder à l'esprit quand on étudie le projet de loi. Mais, vous qui êtes vraiment sur le terrain, dans le concret, si ce projet de loi là s'appliquait tel qu'il est, quel impact ça pourrait avoir sur l'autonomie? Est-ce que ça pourrait, par exemple, nuire à ce que des domaines émergents d'études puissent se voir attribuer des effectifs? Parce que le ministre, il va vous dire : Ce n'est pas juste une question de gel. Là, il y a un gel, mais le projet de loi, il n'est pas juste sur le gel, en fait, il est sur le contrôle des effectifs. Donc, il pourrait éventuellement ne plus y avoir de gel mais une volonté du Trésor de pouvoir contrôler les effectifs. Mettons qu'on ne parle plus de gel, qu'on parle du contrôle, est-ce que ça pourrait avoir un impact comme ça, sur la possibilité d'avoir des domaines d'études émergents, d'avoir les effectifs? Est-ce que, par exemple... Ou, si une université — bien, l'Université du Québec, parce que c'est la seule qui est directement touchée — pourrait faire attention à ce qu'elle ferait de son autonomie pour ne pas déplaire au ministre, qui a un pouvoir important sur les effectifs, quelles pourraient être les répercussions?

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

M. Umbriaco (Michel) : Oui. Ça va être assez court : C'est inadmissible. On a gagné la liberté académique au Moyen Âge, il y a plusieurs milliers de personnes qui sont mortes pour préserver la liberté académique. Et, si un gouvernement, quel qu'il soit, par souci de bien faire, par volonté d'atteindre d'autres objectifs, commençait à contrôler le développement académique d'une université, on n'est plus dans des universités, on est en Russie dans les années 20, c'est là qu'on est. Et c'est une des choses qu'on dit carrément, là, dans notre mémoire. Alors, ça, c'est assez clair pour nous. Ça nous inquiète.

Si le projet de loi, tel qu'il est là, est voté, quel impact ça va avoir? Je n'en ai aucune idée. C'est inédit pour nous autres. On ne le sait pas, là. Je vais travailler avec mes données probantes : ce n'est jamais arrivé. Donc, je ne peux pas vous dire : Ça va arriver, puis c'est comme du papier à musique. Je ne le sais pas. Mais ça nous inquiète beaucoup. Donc, ça, c'est la partie claire.

Maintenant, la question des immobilisations, nous, on n'a rien contre qu'il y ait un campus à Drummondville, à Longueuil, à droite puis à gauche. Qu'il y ait des campus, c'est comme ça que les universités se sont développées, pour parler clair. Mais un campus, ça veut dire des professeurs, des étudiants, des laboratoires, ces choses-là. Alors, qu'il y en ait une dizaine de plus, au Québec, ce n'est pas grave. Présentement, on en a 217, il y a 217 lieux d'enseignement, au Québec, dans lesquels on a investi, mais où il n'y a pas beaucoup de professeurs, puis il n'y a pas beaucoup d'étudiants, et ce n'est qu'en compétitivité et en toutes sortes d'autres choses. Et ça, pour nous autres, c'est pour ça qu'on disait : On ne pense pas que ce soit le lieu au gouvernement de gérer ça. On pense que c'est plutôt dans un organisme académique, appelons-le comme on voudra...

Le Président (M. Bernier) : Merci. On va juste permettre au député de Sanguinet de pouvoir poser sa question.

M. Therrien : Écoutez, très, très rapidement, je pense que vous étiez là-dessus... Je pourrais revenir sur un paquet de choses que vous avez mentionnées que j'ai trouvées très intéressantes. Je voudrais peut-être juste... Pour faire du pouce sur ce que vous venez de dire, là, par rapport aux immobilisations, vous disiez, dans votre laïus du départ, qu'on détournait en quelque sorte un montant des immobilisations pour... pardon, du, au contraire, fonctionnement pour l'immobilisation. Vu que vous en parliez, là, j'aurais eu plein de choses à vous poser comme questions. C'était très intéressant, puis ma collègue a fait un bon bout de chemin. Je voudrais vous entendre, pour terminer, là-dessus.

M. Roy (Max) : Ah! je peux dire un mot là-dessus.

Le Président (M. Bernier) : M. Roy, vous avez environ... un peu moins d'une minute. Allez-y.

M. Roy (Max) : Bon, je suis toujours limité à une minute, là, finalement. Alors, je vous dirais que, parce qu'il n'y pas eu des investissements au bon moment, les universités ont puisé... les administrations universitaires ont puisé à même les fonds de fonctionnement pour pouvoir combler les besoins. On peut dire que justement elles n'avaient pas le choix, il y avait plus d'étudiants, il fallait bien les loger quelque part. Ça, c'est la première chose. Mais, au-delà de ça, il y a une compétition qui se fait, justement, et qui, là, est, elle, malsaine, parce qu'on essaie d'avoir... Puisque les universités sont subventionnées par tête de pipe, hein, par le nombre d'étudiants — et ça, nous, on veut absolument réviser cette formule de financement en profondeur — à cause de ça, ça crée une compétition entre les établissements, qui offrent des points de service à gauche, à droite, etc. Je ne dis pas que tout est mal intentionné, mais ça ne fonctionne pas, et il faut, pour réguler ça, justement, qu'il y ait un organisme, qu'il y ait une instance qui puisse voir les choses de façon impartiale, il faut que ce soit impartial absolument. Il ne faut pas que ce soient les directions d'établissement, il ne faut pas que ce soient uniquement les professeurs, il ne faut pas que ce soient uniquement les étudiants, évidemment.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Roy. Nous allons passer du côté du deuxième groupe d'opposition avec le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Alors, merci, M. le Président. M. le ministre, chers confrères et consoeurs, M. Roy et M. Umbriaco. Moi, il y a... Si on avait eu ce projet de loi là voilà 10 ans, peut-être qu'on ne serait pas rendu là aujourd'hui, vous en conviendrez avec moi. Parce qu'il y a des statistiques qui m'ont surpris à l'intérieur de votre mémoire. C'est-à-dire qu'en 10 ans, c'est-à-dire de 1997‑1998 à 2008‑2009, c'est ce qu'on a dans... c'est que les cadres auraient augmenté de 154 %, et les professeurs, de seulement 58,5 %. C'est pour vous dire toute l'utilité de ça, parce que ça n'aurait peut-être pas fait ça si on avait eu ce projet de loi là où est-ce qu'on demandait des redditions de comptes. On aurait peut-être moins laissé... Moi, je trouve que la loi est importante. Peut-être qu'elle est malvenue, mais peut-être que... Moi, je la trouve assez importante.

Vous parlez aussi de la reddition de comptes, puis là vous avez apporté deux tableaux, un petit et un très grand. Est-ce qu'on peut les faire déposer à la commission, ces deux tableaux-là?

Le Président (M. Bernier) : Oui, on peut les faire déposer. Si vous acceptez, vous pouvez les déposer.

M. Spénard : Alors, moi, j'apprécierais que ces tableaux-là soient déposés pour notre gouvernance, en tout cas, pour voir...

Le Président (M. Bernier) : ...version électronique?

M. Roy (Max) : ...pas sur un écran. En tout cas, pas sur un iPhone, hein?

M. Spénard : Alors, j'aimerais ça... Pourriez-vous...

Le Président (M. Bernier) : Bon, bien, écoutez, c'est parce que ça complique un peu... le format complique un peu la chose, là. Je ne sais pas si vous avez d'autres...

M. Roy (Max) : Bien sûr. Ce document-là était officiel, était public, il est dans le rapport Bissonnette-Porter, à la suite du Sommet sur l'enseignement supérieur, le chantier qui s'est ouvert sur la loi-cadre des universités.

M. Spénard : Maintenant, vous parliez des transferts de fonds de fonctionnement vers les immobilisations. Moi, j'aimerais savoir : Est-ce que vous avez... C'est quoi, le pourcentage qui aurait pu être transféré? Je conçois que ça peut dépendre d'une université à l'autre, là, mais, tu sais, grosso modo, là, c'est quoi, le pourcentage qui peut être transféré dans les fonds de fonctionnement vers les immobilisations?

Le Président (M. Bernier) : M. Roy.

• (16 heures) •

M. Roy (Max) : Le chiffre exact, on... Tu l'as? Alors, Michel va répondre, Michel Umbriaco.

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

M. Umbriaco (Michel) : Bonjour. Essentiellement, il y a eu trois vagues de réinvestissement sur 10 ans dans les universités, et, quand on a fait le calcul — on l'a fait sur 10 ans — tout l'argent réinvesti dans les universités qui devait servir à l'enseignement et à la recherche — et on parle de l'ordre d'à peu près 400 millions, 500 millions — a servi à peu près exclusivement au béton. Alors, c'est aussi simple que ça, là. On a un rapport de 800 pages qui prouve ça par a plus b égale c, là, c'est... On peut le déposer aussi, on l'a déposé ailleurs. Et le problème, c'est que la loi sur les immobilisations universitaires oblige le gouvernement à financer les immobilisations, parce que, quand ça a été créé, cette loi-là, on disait : Les universitaires, c'est des joyeux zéros, ils ne sont pas capables de gérer ça, du béton, on va plutôt gérer ça au ministère, et ils ont payé 100 % de toutes les immobilisations pendant 15, 20 ans.

Quand est arrivé HEC, il n'y avait plus d'argent dans le fonds d'immobilisations, donc là ils ont commencé à faire des montages financiers avec des baux emphytéotiques. Et ça a bien marché pour HEC, là. Ça va bien, HEC, il n'y a pas de problème. Ce n'est pas un scandale, loin de ça. Mais de plus en plus le gouvernement s'est retiré des immobilisations. Ils ont même créé une norme hypothétique, vous allez trouver ça dans les règles de financement, une règle hypothétique, et ils financent à 30 % ou 40 % de leur propre règle hypothétique. Alors, quand il y a des masses d'étudiants qui rentrent, la règle hypothétique ne marche pas, elle n'est pas tout le temps subventionnée. Et il y a eu beaucoup d'aléatoire et d'incompétence au ministère — on est obligés de le dire comme ça, c'est les mots du président du Conseil supérieur de l'éducation — pour la gestion des immobilisations.

Nous, ce qu'on dit : Bon, bien, si le gouvernement n'a pas d'argent pour les immobilisations, qu'il nous le dise... ou, si le gouvernement veut couper dans les universités, qu'il nous le dise, mais qu'il ne nous mette pas 95 000 contrôles. Ils nous diront l'enveloppe, puis on va gérer avec l'enveloppe qu'on aura.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Alors, je vais revenir au tableau duquel mon collègue a fait état tantôt, provenant du rapport Bissonnette-Porter, alors où il est fait état de la kyrielle, là, de mécanismes de surveillance qui est demandée, le «reporting» qu'il y a à effectuer. Alors, ça, c'est un constat à une date fixe, j'imagine. Vous me le confirmez? Bon. Alors, est-ce qu'il y a eu une croissance, au cours des 10 dernières années, des demandes de «reporting», excusez-moi l'anglicisme, là, mais de mécanismes de surveillance?

Le Président (M. Bernier) : M. Umbriaco.

M. Umbriaco (Michel) : ...1990‑2012. De 2012 à 2014, on a eu de plus en plus aussi de nouvelles demandes. On n'a pas refait le tableau parce qu'on aime ça, là, travailler. Et ça, c'est avec les collègues de l'Université du Québec. Vous allez voir l'Université du Québec ce soir, là, je pense. Les collègues de l'Université du Québec, c'est eux autres qui ont développé ce tableau-là. Entre nous, on l'appelle «le Goliath de la reddition de comptes», là, c'est comme ça qu'on l'appelle, mais c'est la... On joue avec ça. Et ça va tout le temps en croissant, mais à chaque fois qu'il y a une ligne, là-dedans, ça veut dire qu'il y a du monde qui remplit des papiers. Chaque fois, ce n'est pas des données compliquées, mais, s'il y en a 200 à faire par année, des données pas compliquées, dans des formats différents... Nous, on dit : Faites un format — ça, je vais être d'accord ça, avec M. le ministre — faites un format quatre fois par année avec des questions simples, 20 à 30 questions, on va y répondre, et parce qu'on répond ad nauseam à toutes les demandes qui nous sont faites à plusieurs ministères : le ministère de la Santé, le ministère de l'Éducation, le ministère de l'Enseignement supérieur. Il n'y a pas de problème, pour nous, de répondre. Et, à chaque fois qu'on nous demande des rapports, à l'université... Je ne sais pas ailleurs, peut-être qu'ailleurs ce n'est pas pareil, mais, à chaque fois qu'on nous demande des réponses, à l'université, en l'espace d'une semaine, ou deux, ou trois on les remet.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Umbriaco. Ces informations-là sont comprises dans le rapport Bissonnette-Porter, annexe 7, pages 86 et 87. Donc, si vous voulez les consulter, vous vous rendez sur ce site-là aux informations que nous avons. Nous allons d'ailleurs rendre cette information disponible sur le site de la commission.

Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, vous avez 2 min 30 s. Allez-y.

Mme Massé : Merci. Bonjour, tout le monde. Je vais faire ça simple, vous comprendrez. Je pense qu'effectivement, étant dans Sainte-Marie—Saint-Jacques, et de voir comment, dans le fond, l'immobilisation peut amputer un budget d'université — et je pense, bien sûr, à l'îlot Voyageur — je comprends que des fois il y a des préoccupations qui devraient être plus à la bonne place.

Vous avez laissé entendre dans votre présentation, M. Roy, que le projet de loi — ou j'ai mal compris, là — avait comme potentiel de restreindre l'accès à l'université. J'aimerais mieux comprendre votre vision. En peu de mots, parce que nous avons peu de temps. Puis j'aurais une autre question.

Le Président (M. Bernier) : M. Roy. En peu de mots.

M. Roy (Max) : Très bien. Ça restreint forcément l'accès à l'université dans la mesure où, si on a moins de professeurs, on ne pourra pas donner les mêmes services. Et, si on ne donne pas les mêmes services, il n'y aura pas autant d'étudiants. On ne pourra pas les admettre, c'est simple. Là, c'est comme si on disait : Bien, il suffit tout simplement de diminuer la fréquentation à l'université pour régler le problème financier de l'université. C'est comme si on disait, vous allez me permettre la comparaison : Cessons d'admettre des malades à l'hôpital, là, puis on va avoir réglé les problèmes dans le réseau de la santé.

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée.

Mme Massé : Merci. C'est sûr que, si on gèle et après ça on contrôle, là, ce que vous nous avez bien expliqué, ça va avoir des impacts, et tout ça. Est-ce que vous ne trouvez pas aussi qu'en termes d'équité intergénérationnelle... c'est-à-dire que les jeunes vont avoir de la misère à devenir profs si on gèle ça puis il n'y a plus de nouvelle ouverture?

Le Président (M. Bernier) : M. Roy.

M. Roy (Max) : Il y a certainement cet aspect-là, il n'est pas négligeable. Pour un président de fédération des professeurs, ce serait certainement un élément important; que je n'ai pas rappelé, merci de le souligner. C'est certain. Et d'ailleurs nous, on forme des nouveaux professeurs, hein, les futurs professeurs, et, pour pouvoir les former, bien il faut avoir les ressources. Et on les forme aux deuxième et troisième cycles, là. Alors, ça, ça demande donc de l'énergie et ça demande des ressources.

Et j'aimerais dire que... Tout à l'heure, on a parlé des dépenses. On a dit : Cette loi-là, bien, elle va permettre d'éviter les dépenses. Mais, les dépenses dont on parle, nous, ce n'est pas par cette loi-là qu'on va pouvoir les contrôler, ce n'est pas le lieu, ce n'est pas ce projet de loi là. Parce qu'effectivement il doit y en avoir, on est prêts à faire notre travail de ce point de vue là, mais il y a des mécanismes qui sont inutiles, puis il y a des mécanismes déjà prévus, qui existent, et il suffit tout simplement d'avoir une meilleure gestion de toutes ces opérations-là. Et on n'a pas besoin d'une loi pour ça. Il y a des accommodements à ce qui existe déjà qui vont permettre de rendre clair ce qui se passe dans les universités.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Roy, M. Umbriaco, de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d'université. Merci de votre participation à cette commission parlementaire.

Je suspends quelques instants afin de permettre au Secrétariat intersyndical des services publics de prendre place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

(Reprise à 16 h 10)

Le Président (M. Bernier) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Alors, je souhaite la bienvenue au Secrétariat intersyndical des services publics, en vous demandant, s'il vous plaît, de vous identifier pour qu'on puisse plus facilement procéder aux enregistrements.

Secrétariat intersyndical des services publics (SISP)

Mme Martineau (Lucie) : Alors, bonjour, M. le Président...

Le Président (M. Bernier) : Non, vous n'avez pas à peser, là, ça fonctionne tout seul.

Mme Martineau (Lucie) : Ah! ça va?

Le Président (M. Bernier) : On a un régisseur qui est là pour s'occuper de tout ça.

Une voix : C'est contrôlé.

Le Président (M. Bernier) : C'est contrôlé. C'est démocratique mais contrôlé.

Mme Martineau (Lucie) : Bonjour, M. le Président. Mmes, MM. les parlementaires. Alors, d'abord, je vais vous présenter les collègues qui m'accompagnent. J'ai Mme Louise Chabot, qui est présidente de la CSQ; M. Francis Lamarre, qui est conseiller à la recherche au SISP; Mme Nadia Lévesque, qui est conseillère politique au SFPQ; et Mme Nathalie Léger, qui est conseillère juridique. Donc, on vous remercie de nous permettre de nous exprimer sur le projet de loi.

Le Secrétariat intersyndical des services publics, en fait, ça représente... ça regroupe trois organisations syndicales qui sont engagées à la défense et la promotion des services publics. Alors, il y a la Centrale des syndicats du Québec — la CSQ — il y a le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec et l'Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux. Ensemble, on représente plus de 270 000 travailleuses et travailleurs qui travaillent dans les réseaux de la santé et des services sociaux, de l'éducation, de la petite enfance et de la fonction publique et parapublique.

Tout comme les autres groupes qui nous ont précédés, nous accueillons avec beaucoup d'appréhension le projet de loi n° 15 qui concerne la gestion et le contrôle des effectifs. Nous estimons que ce projet, bien plus qu'une démarche démocratique ou démarche de transparence pour permettre de dénombrer les effectifs de l'État, est avant tout un exercice comptable visant à centraliser le droit de gérance, en donnant des moyens accrus soit au ministère ou au Conseil du trésor, et continuer à miner l'autonomie des organismes publics.

Il faut bien s'entendre, le Conseil du trésor — et le gouvernement — doit savoir le nombre d'effectifs qui oeuvrent pour lui. Nous craignons des exigences en matière de transmission de renseignements qui se traduisent par un alourdissement de la bureaucratie — je pense que ceux qui nous ont précédés en ont fait part également — d'un dédoublement de tâches administratives. Et en fin de compte le texte de loi comporte d'importantes zones grises qui laissent place à beaucoup d'interprétation.

Globalement, le SISP s'oppose au gel global d'effectif, qui se traduira inévitablement par des impacts négatifs sur la qualité et l'accessibilité des services publics, déjà lourdement affectés par des compressions et des coupures depuis plusieurs années. Aussi, notre analyse des effets de la politique de non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux nous donne un aperçu des conséquences importantes que pourrait entraîner un gel d'effectif en santé et en éducation, parce qu'un gel d'effectif, dans les réseaux de la santé et de l'éducation, ça équivaut à une diminution des effectifs, compte tenu des besoins croissants dans ces deux réseaux, et nos prédécesseurs en ont fait part également.

Le projet de loi est-il nécessaire? La volonté du gouvernement de constituer un portrait plus détaillé, c'est respectable. Déjà, ça pourrait être possible par un décret, par une directive. Avons-nous besoin d'un projet de loi de 38 articles?

Le véritable objectif du projet de loi en est un dans la logique de l'austérité, il s'agit de resserrer encore l'étau sur les travailleuses et travailleurs du secteur public au nom du déficit zéro. Impossible pour nous de ne pas faire de lien avec la commission de révision des programmes, avec la commission sur la fiscalité et avec le projet de loi n° 10 en santé.

Une centralisation renforcée. Concentrer les pouvoirs aux dépens de l'autonomie des organismes publics, privés de souplesse dans l'accomplissement de leur mission et de leurs particularités régionales, cette centralisation s'exprime par la volonté de surveillance, de contre-vérification, de contrôle de la part du Conseil du trésor. Une panoplie de sanctions, également, est prévue au projet de loi, tout ça visant une perte d'autonomie des organismes publics. Par exemple, pour répondre aux besoins des élèves dans une commission scolaire, on doit prendre en compte différents facteurs, dont le contexte socioéconomique et culturel. La commission scolaire qui voudrait avoir plus de soutien aux élèves par une allocation plus importante de ressources professionnelles pourrait même être rappelée à l'ordre par le ministère de l'Éducation ou le Conseil du trésor. Malgré l'article 12 qui prévoit que les organismes doivent maintenir les services offerts à la population, comment les gestionnaires pourront répondre à cette double obligation de maintenir les services publics et de satisfaire les exigences du ministère et du Conseil du trésor? À notre avis, c'est une véritable condamnation à l'endroit des gestionnaires publics, prétendant qu'ils sont incapables de gérer adéquatement leurs ressources humaines. On peut s'attendre à une démobilisation importante puis des conséquences évidentes sur les relations de travail.

Le calcul et le gel des effectifs comportent également des lacunes évidentes. Nous n'avons pas les critères qui vont être retenus pour effectuer le calcul de l'effectif et le niveau de gel de l'effectif. Est-ce qu'on va se baser sur les postes qui sont déjà comblés? Est-ce qu'on va inclure les postes où les tâches sont effectuées par du personnel d'une agence? Comment on va intégrer le fait de calculer les contrats de services professionnels dont on fait mention? Et les activités saisonnières seront-elles prises en compte? Donc, il y a beaucoup de zones grises dans le projet de loi.

Un alourdissement bureaucratique, pour nous, inefficace. On parle d'une planification triennale de la main-d'oeuvre comme si c'était une nouveauté. Ça existe depuis des lunes, et puis c'est évident que chaque organisme le fait, également. On ne parle même pas que ça va être fait en concertation avec les organisations syndicales, on ne parle même pas de les consulter, ce qui se fait actuellement dans les réseaux de la santé et de l'éducation, pas dans la fonction publique. Alors, c'est évident que c'est les travailleuses et travailleurs sur le terrain qui sont les mieux placés pour expliquer le détail de leurs tâches et qu'est-ce qu'ils prévoient comme besoins à venir pour les citoyens et citoyennes au Québec.

Les établissements, actuellement, font déjà un suivi des ressources humaines. Les planifications de main-d'oeuvre, c'est depuis longtemps effectué. Donc, on entrevoit un dédoublement fait par le Conseil du trésor ou par le ministère et de nouvelles frictions, probablement, entre la vision des uns par rapport à la vision des autres. En quoi les compétences du Conseil du trésor pourraient-elles être meilleures que celles des établissements actuels? Nous pensons que le projet de loi, vraiment, rate ici sa cible. Le réel déficit dans les services publics ne va pas nécessairement à la planification des besoins et des ressources mais bien à comment on va faire pour attirer et retenir le personnel nécessaire dans le réseau public, et ce qui suppose un financement adéquat de ces services-là.

Quand on parle de l'article 12, du maintien des services à la population, on a vu d'autres initiatives de ce genre-là dans le secteur public et on sait que ça n'a pas fonctionné. Il n'y a aucune définition de c'est quoi, un service considéré comme touchant à la population. Y a-t-il un mécanisme de contrôle pour les conséquences du gel? Avec les pertes de services en région et Internet, comment on va définir l'accessibilité du service à la population?

Je donne quelques exemples. Un mandataire de la Société d'assurance automobile du Québec a fermé ses portes à Sainte-Anne-des-Monts. Les gens doivent, pour renouveler leur permis de conduire ou leur carte d'assurance maladie, se taper 100 kilomètres de plus pour aller à Matane. Est-ce qu'on a atteint notre cible? Avons-nous maintenu le service à la population?

Dans le secteur de la santé, il y a des services qui sont payants, donnés par le privé. Si à force d'attendre on se dirige vers le service privé et on paie, est-ce que ce sera ça, le maintien du service à la population? Est-ce que ce sera ça, le maintien de l'accessibilité aux services?

Dans la portion du projet de loi concernant l'encadrement des contrats, premièrement, c'est à peu près la seule chose qu'on a vue d'intéressante dans le projet de loi, c'est qu'enfin on pourrait avoir une mesure de contrôle des contrats publics. Sauf que s'agit-il d'une réelle reprise de contrôle? Nous ne le croyons pas. Nous croyons que c'est nettement insuffisant. On ne précise pas comment les contrats de services seront décomptés. On laisse la latitude aux gestionnaires pour autoriser des contrats avant ou après des périodes de gel, donc on peut se préparer. La différence entre le contrat, également, pris pour contourner un gel et un qui ne l'est pas, pris, n'est pas faite non plus.

• (16 h 20) •

Nous saluons l'article 18 qui dit que le sommaire des contrats serait inscrit au rapport annuel, mais le bilan qu'on a de tout ce qui s'est passé dans la fonction publique québécoise depuis la politique de non-renouvellement de la main-d'oeuvre, c'est-à-dire le non-remplacement d'un sur deux, nous porte à croire qu'on rate notre cible. Des économies? Elles seront limitées. Ça ne génère pas beaucoup d'économies. Les dépenses sont transférées en contrats de services, ça prend de plus en plus la forme d'un remplacement progressif en fonction du public vers le privé, et ça demande également aux gestionnaires de faire plus avec moins de ressources à l'interne.

En 2013, nous étions rendus, au gouvernement du Québec, à 9,3 milliards de dollars en contrats de services, ce qui est près du tiers de la masse salariale du gouvernement du Québec. Le Vérificateur général a même déterminé que la pratique d'impartition, juste dans le domaine de l'informatique, augmentait le taux d'une ressource qui passait de 215 $ à 475 $ par jour et le portait à 400 $ à 900 $ par jour.

Maintenir les services à une population en croissance partout sur le territoire du Québec avec moins de personnel, sans recourir aux ressources externes, c'est rêver en couleurs. Au contraire, 10 ans après cette politique dans la fonction publique, nous constatons une perte d'expertise et un gaspillage des fonds publics. Quand la sous-traitance prend trop de place, l'impartition renverse le rapport d'autorité entre le donneur d'ouvrage et la firme externe, il se crée une dépendance de l'État envers les fournisseurs de services, et l'organisme devient incapable de jauger la valeur d'un contrat ou de l'encadrer par la suite. Moi, je suis allée à la commission Charbonneau dernièrement; on disait la même chose.

La réduction des effectifs, est-ce une bonne idée? Contrôler les effectifs sans affecter les services, ça, c'est un mythe. Élargir les mesures en place depuis plusieurs années qui existent dans la fonction publique nous permet de dégager des constats. De manière similaire, au début, on faisait accroire : On ne touchera pas aux services publics. Les gestionnaires, on leur disait : Vous allez remplacer les bons postes, garantir le maintien des services. Le président du Conseil du trésor en 2007, M. Luc Meunier, disait : On ne touchera pas aux services. Mme Courchesne, en 2010, disait : L'intention est de geler la masse salariale 2013‑2014, mais pas fermer les bureaux en région, pas se faire au détriment des services aux citoyens. C'est faux. Nous avons prouvé maintes et maintes fois que les services à la population et l'accessibilité ont bel et bien été effrités au Québec. Après 10 ans, nous avons des garanties que ce qu'on nous avait promis n'a pas été respecté.

Alors là, ce n'est même plus le SFPQ ou le Secrétariat intersyndical qui le dit, on va vous citer des gens qui le disent, des gens qui ne représentent pas les employés. Alors, dans le plan pluriannuel de la main-d'oeuvre du ministère des Transports 2006‑2008, on dit — et on cite : «Les réductions d'effectif que nous subissons depuis maintenant deux ans affectent inévitablement notre capacité à livrer adéquatement nos produits et services.» À plus long terme, ce manque chronique d'effectif a généré une perte d'expertise importante, on a dû même recourir à des firmes externes pour la préparation et la surveillance de ces contrats d'infrastructure.

En 2009, à l'époque, le directeur général Pierre Thomassin, du secteur minier, constatait que le développement était freiné par le manque de ressources : «Il manque de ressources au ministère, ce n'est pas compliqué! On le voit, ils sont en retard dans tout!»

En 2010, le président de la Fédération des cégeps, Gaëtan Boucher, souligne que le manque d'expertise au ministère de l'Éducation, des Loisirs et du Sport par le non-remplacement des départs à la retraite causait une perte de productivité importante pour les cégeps.

En 2010, six ans après le début des mesures d'attrition, le Conseil du trésor lui-même constatait l'efficacité déclinante de la mesure : «Les résultats [...] démontrent qu'il devient de plus en plus difficile d'appliquer le plan de réduction [des effectifs] et que l'approche appliquée depuis six ans a atteint ses limites.» On est quatre ans plus tard, là. «...les économies découlant de la réduction de l'effectif peuvent, dans certains cas, être réduites, voire [...] compensées par l'octroi de contrats professionnels plus coûteux donnés à l'externe», qui pourrait même compromettre l'offre de services gouvernementale en région.

Au-delà de tout ça, nous croyons que l'impact négatif sur le recrutement dans le secteur public est à prendre en compte. Vous savez, on se compare beaucoup à l'Ontario. Alors, le vérificateur général en Ontario, lui, il a dit : «Plusieurs années de réduction des effectifs, combinées aux restrictions de recrutement...» «La prestation des services publics essentiels pourrait être en danger, à moins de mettre en oeuvre dans les meilleurs délais des stratégies visant à recruter des [travailleuses et] travailleurs plus jeunes possédant les compétences nécessaires.» Alors, le gel des effectifs dans les réseaux, comment va-t-on pouvoir maintenir le service à la population? Nous sommes vraiment inquiets.

S'interroger sur les conséquences sur le système de santé. Un centre hospitalier régional — c'est celui de Rimouski — annonçait en février dernier un investissement de 100 millions de dollars, compte tenu de la croissance des demandes. Le nombre de traitements de dialyse était passé de 21 159 à 25 886; les chirurgies d'un jour, de 5 372 à 5 679; le nombre de visites en hémato-oncologie, de 14 270 à 19 390. Donc, on n'est pas en surplus de personnel, on est en pénurie de personnel. Les prétentions qu'on peut ne pas toucher aux services en gelant le nombre d'employés et en faisant des compressions seulement dans la bureaucratie, nous n'y croyons pas.

En plus, ces différentes formes de réforme qui ont été mises dans le réseau de la santé n'ont même pas permis de freiner l'augmentation du nombre de cadres. Au contraire, il a augmenté.

Et qu'en est-il du secteur de l'éducation? Le secteur de l'éducation a subi des compressions et des coupes, on a assisté à la dégradation des conditions de travail des professionnels et des... des enseignants et du personnel de soutien. Dans plusieurs catégories d'emploi, ça s'est traduit par une surcharge de travail, un manque d'effectif tandis que les besoins étaient en croissance. En 2014‑2015, ce sont des coupes de 70 millions de dollars dans les mesures d'appui à la réussite scolaire, 10 millions en adaptation scolaire et, depuis 2010, des compressions budgétaires de l'ordre de 800 millions.

Le nombre d'élèves handicapés, dans le rapport Champoux-Lesage, a augmenté de 50 %, le nombre, également, d'élèves handicapés a doublé — c'est-u ça que j'ai dit? — en difficulté d'adaptation. Mais pire encore : 410 % d'augmentation du nombre d'élèves en troubles envahissants du développement, 252 % pour la déficience langagière et 163 % pour les troubles relevant de la psychopathologie. Le résultat : des délais importants. Nombre de parents s'en vont au privé, et ça, c'est ceux qui sont capables de se le payer. Alors, le gel d'effectif compromet non seulement l'offre de services, mais aussi son accessibilité.

En conclusion, ce projet de loi suscite de vives inquiétudes. Nous nous opposons au gel catégorique des effectifs dans les réseaux, l'ensemble des réseaux. L'expérience négative que nous vivons dans la fonction publique nous fait craindre le pire pour les deux autres réseaux et nous permet de constater qu'on a vraiment affecté la qualité et l'accessibilité des services publics.

Et il faut d'ailleurs aussi s'inquiéter des récentes déclarations du ministre Leitão : «Il n'est pas nécessaire que l'État soit seul à livrer les services à la population, on pourrait transférer une part de ces responsabilités à des organismes communautaires ou privés.» Là est l'enjeu, l'enjeu de la sous-traitance, de la privatisation des services publics. C'est ça qui est soulevé dans ce projet de loi là, et nous recommandons le rejet pur et simple du projet de loi.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Martineau. Vous avez été très, très dans le respect du temps qui vous est accordé. M. le ministre, la parole est à vous, maintenant.

M. Coiteux : Merci beaucoup, Mme Martineau. D'ailleurs, je souligne que ça fait quelques fois qu'on se rencontre, là, depuis l'été dernier, puis c'est toujours intéressant d'avoir l'occasion d'avoir ces discussions-là, parce qu'on a pu discuter à la fois de la révision des programmes, on a pu discuter du contexte des négociations, puis ce soir ça me fait plaisir qu'on puisse échanger autour du projet de loi n° 15.

Je commencerais peut-être par la question suivante, parce que vous avez dressé un portrait comme si le secteur public québécois, depuis de nombreuses années, était en gel des effectifs : Est-ce que vous êtes d'accord ou en désaccord avec moi qu'au cours des dernières années il y a eu, bon an, mal an, une croissance des effectifs dans le secteur public québécois à tous les ans, là, un certain nombre de milliers de personnes additionnelles à chaque année? Est-ce que vous êtes d'accord ou en désaccord avec ce constat-là?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Dans la fonction publique, il y a eu trois vagues de gel et puis la politique de non-renouvellement. Mais, si vous me parlez des 6 000 de plus annuellement qui viennent... Parce qu'on a vu ça passer dans les journaux. Évidemment, depuis 1980, on a rapatrié du fédéral beaucoup d'activités. La gestion de la TPS, la politique de main-d'oeuvre au Québec, c'est quand même 1 000 fonctionnaires fédéraux qui sont passés du fédéral au... Ça, ce n'est pas de l'ajout. Si on veut... Oui, il y a de l'ajout, le centre de la petite enfance qui n'existait pas en 1980. Moi, dire qu'on va... juste des chiffres pour des chiffres, là, non. On va les mettre sur la table, on va s'expliquer pourquoi. Et probablement qu'une fois qu'on aura tout fait nos courbes, là, on va trouver qu'il y a le même nombre d'effectifs par rapport à la population active depuis les 30 dernières années.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (16 h 30) •

M. Coiteux : Donc, on n'est pas en désaccord avec le fait qu'il y a eu croissance des effectifs. Ce que vous dites, c'est que, dans certains cas, ça correspondait à un transfert d'une responsabilité fédérale vers le gouvernement du Québec. Et vous dites : Dans d'autres cas, c'est parce qu'on a développé des nouveaux services.

Mme Martineau (Lucie) : ...le Régime québécois d'assurance parentale. Il y a des nouveaux... Oui.

M. Coiteux : Par exemple. Puis, dans d'autres cas, il y a eu une expansion des effectifs dans les services existants, là, qui n'ont pas été modifiés, dans le secteur de la santé, dans le secteur de l'éducation, dans l'ensemble des secteurs. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Bien, écoutez, oui, si les effectifs augmentent en même temps que les besoins augmentent, pour nous, ce n'est pas une augmentation d'effectif, c'est une stabilité. Alors, c'est pour ça qu'on ne peut pas lancer des chiffres comme ça, il faut vraiment les... Oui, on ne conteste pas qu'il y a 6 000 personnes de plus par année. Mettons-les sur la table, on va les trouver, ils sont où. Parce que, c'est drôle, moi, je trouve qu'on le sait, ils sont où, nous autres, les chiffres.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : ...question suivante, bon : Est-ce que vous pensez que c'est important ou non, pour le gouvernement, de connaître dans quelle catégorie d'emploi cette croissance de 6 250 personnes par année arrive? Est-ce que vous pensez que c'est un objectif légitime que de savoir ça?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : J'ai été la première surprise à penser que le Conseil du trésor ne savait pas ça. Mais ça, ça ne prend pas un projet de loi, faites une directive. Les gens, là, des universités ont passé avant nous, là. Au lieu de leur demander 350 rapports sur 10 000 copies à je ne sais pas combien de ministères — c'est ça, la bureaucratie — faites un décret puis demandez à chaque organisme, quatre fois par année, de vous envoyer le nombre d'effectifs, dans quelle catégorie, où ils sont, puis quels programmes ils administrent. Ça, là, je pense que ça ne prend pas un projet de loi à 38 articles comme ça.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Alors, vous êtes d'accord avec l'aspect dénombrement. C'est qu'il y a différents moyens d'obtenir le dénombrement, mais vous êtes d'accord avec le dénombrement. Vous êtes d'accord avec un dénombrement à une fréquence plus grande, un dénombrement qui nous permet de faire la distinction des effectifs entre les différentes fonctions, les différentes tâches. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?

Le Président (M. Bernier) : Mme Léger.

Mme Chabot (Louise) : Bien, si c'est une question... Si vous nous demandez si on est d'accord à ce que notre gouvernement connaisse les effectifs de l'État, la réponse, c'est oui. Mais, si vous nous demandez spécifiquement de répondre... Ça, c'est l'article 4, je crois, là, périodicité, tout ça. C'est parce qu'on lit le projet de loi dans son ensemble. Ça fait que l'article 4, c'est une chose, mais dans quel objectif, dans quel but vous voulez connaître? Si c'est juste de connaître, je pense que notre collègue l'a dit, d'autres l'ont dit, vous auriez pu faire une directive. Vous pourriez, avec les différentes administrations, regarder comment, écoutez, on est en 2014, là.

Je veux revenir sur quelque chose, par contre, que je trouve majeur, là, sur cette question-là de croissance des effectifs. Ce n'est certainement pas ça non plus qui doit laisser croire que c'est ça qui vient justifier un projet de loi.

Alors, la croissance des effectifs, le 6 200 dont vous avez vous-même parlé, ça se base sur le nombre d'employés du secteur public au Québec sur une population de 1981 à 2012. Donc, c'est une croissance qui est quasi normale. Je ne dirais même pas qu'elle a répondu totalement aux besoins, parce qu'on a vu d'autres occasions où... Actuellement, même, on ne pourrait pas dire que les services, dans la plupart... dans l'Administration puis dans nos services, on répond totalement aux besoins de la population.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Chabot. M. le ministre.

M. Coiteux : Est-ce que vous seriez d'accord avec le fait que la croissance des effectifs de l'ordre de 6 250 par année rend plus difficile le retour à l'équilibre budgétaire?

Le Président (M. Bernier) : Mme Chabot.

Mme Chabot (Louise) : Non, pas du tout, pas du tout, parce qu'il faudrait nous démontrer que cette croissance-là, elle a été excessive, qu'elle est due à de la mauvaise gestion, qu'elle serait due à des écarts qui sont inexplicables, qu'il y aurait une explosion, puis ce n'est pas ça, le constat qu'on fait de la croissance des effectifs, normale sur une période de 20 ans, à notre avis.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Non, mais là je parlerais davantage, là, de... pas des 20 années derrière nous, là. Ça, on hérite du passé. Puis on essaie de prendre des moyens, justement, pour corriger une situation qui s'est créée dans le passé.

Mais, si on regarde devant nous, est-ce qu'on est d'accord avec le fait que cette croissance-là, si on ne la contrôle pas, va exiger des efforts ailleurs et plus forts pour retourner à l'équilibre budgétaire? Est-ce qu'on est d'accord là-dessus?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Moi, là, non. La réponse, c'est non. Je vais vous dire pourquoi : Là, vous avez un projet de loi qui ne concerne que les effectifs, comme s'il n'y avait que ça au gouvernement du Québec. Moi, mettez-en sur l'encadrement des ressources externes, M. Coiteux, puis ça va me faire plaisir de venir vous appuyer. Là, on ne regarde que les personnes humaines qui travaillent pour d'autres personnes humaines, on ne regarde pas tout ce qu'on donne en contrats. Écoutez, le Vérificateur général, il ne travaille toujours bien pas pour le SFPQ ou le Secrétariat intersyndical des services publics, là; il le dit année après année. La Protectrice du citoyen aussi, elle ne travaille pas pour nous.

Alors, si on regarde tout... Vous dites : L'augmentation des effectifs, c'est ça qui va faire en sorte qu'on n'atteindra pas l'équilibre budgétaire. Ah non! On a de belles grandes colonnes, là, de d'autres affaires qu'on peut regarder. Puis inquiétez-vous pas, je ne vous demanderai pas de hausse d'impôt, il y a bien d'autres affaires à regarder. J'en parle à toutes les fois. Je vous en parle à toutes les fois, d'ailleurs.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, j'aimerais vous rassurer sur une chose ou en tout cas le réitérer : Le contrôle des effectifs, ce n'est pas la seule chose qui est dans les cartons pour retourner à l'équilibre budgétaire, ce n'est pas la seule chose. Il y a, on en a discuté ensemble, la révision des programmes.

Mais j'aimerais vous entendre peut-être là-dessus maintenant. C'est-à-dire que, si on laisse augmenter les effectifs de manière rapide au cours des prochaines années, est-ce qu'on n'est pas obligé de faire des efforts encore plus grands du côté de la révision des programmes pour atteindre l'équilibre budgétaire? Autrement dit, est-ce qu'on ne peut pas avoir une approche où on répartit nos efforts de différentes façons, le gouvernement en faisant son effort, le réseau en faisant son effort, la façon de faire dans l'ensemble de nos programmes on fait des efforts tous ensemble? Est-ce que ce n'est pas une approche plus équilibrée, justement, celle-là?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : En indiquant qu'on laisse augmenter les effectifs comme ça, ça présuppose, comme disait ma collègue, que ça a été abusif, que ce n'est pas justifié, que c'est hors contrôle, ce qui n'est totalement pas le cas. Vraiment, quand on regarde dans les 30 dernières années, les 6 000, écoutez, on peut dire où ils sont, puis il y en a beaucoup dans la bureaucratie des 400 rapports que doivent fournir les universités au ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur et de tous les autres rapports qui peuvent être simplifiés. On n'a jamais été...

Et puis en plus on dit : On va regarder les effectifs puis on va regarder les programmes. Il y en a encore plus, M. Coiteux. On va regarder ce qu'on donne en sous-traitance, on va regarder comment qu'on paie pour l'externe. On va regarder peut-être si on centralisait nos achats de médicaments, il y a un beau projet, là, 1 milliard, sur la table.

Mais, écoutez, si on regarde tout, on est toujours prêts à regarder, mais l'ensemble, pas juste dire : On augmente les effectifs, puis, si on augmente les effectifs, on va devoir couper dans les programmes. Ce n'est pas juste ça. On n'a pas deux variables, on en a plus que ça. Mais, à regarder tout, nous, on est ouverts à ça.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, c'est notre approche, de regarder tout, justement. Puis c'est une approche qui n'a pas été trop faite par le passé, donc c'est...

Mais je reviens sur la question de la sous-traitance, parce que vous y accordez beaucoup d'importance, avec raison, tout à fait avec raison, puis c'est la raison pour laquelle, justement, ça fait partie du projet de loi. On a inséré ici une disposition pour éviter, justement, que le gel des effectifs soit contourné par la signature de contrats de services avec des personnes. Alors, ça, c'est un geste, il me semble, que vous devriez accueillir assez favorablement, non?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Bien, c'est marqué dans notre mémoire. C'est marqué, puis je l'ai dit. Mais on a même dit que ce n'était pas assez, parce que, écoutez, on a juste à prendre les deux derniers rapports de la Commission de la fonction publique du Québec : dans ce qu'elle a étudié dans les différents ministères et organismes, il y avait pas mal un assez gros pourcentage, je pense, ça tournait autour de... 40 % des contrats étudiés étaient assimilables à des contrats de travail. Bon, alors, ça, c'est marqué dans notre mémoire, qu'on est d'accord avec ça. On dit même que ça ne va pas assez loin. On dit qu'en laissant la latitude avant et après les périodes de gel on est capable de prévoir le gel qui s'en vient, là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : D'autre part aussi, une autre question que j'aurais... Parce que c'est le groupe qui est venu juste avant vous qui expliquait : Où il y a un problème d'explosion de la masse salariale, c'est juste que l'explosion de la masse salariale n'est pas à la bonne place. C'étaient leurs propos tout à l'heure. Et on a cette préoccupation-là dans l'ensemble du secteur public, de s'assurer que, quand il y a expansion des effectifs, ça soit à la bonne place aussi. Au-delà du contrôle, il y a cette question d'être capable de voir la situation puis de pouvoir intervenir, au besoin.

Est-ce que vous êtes d'accord avec cette vision-là?

Mme Martineau (Lucie) : Bien, ce qu'on voit actuellement...

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

• (16 h 40) •

Mme Martineau (Lucie) : Oui. Ce qu'on voit actuellement, c'est vraiment la coupure du service au citoyen. On ne voit pas, justement, où est-ce qu'on pourrait regarder autrement.

Alors, ce n'est pas compliqué, là, on a juste à prendre les journaux jour après jour, là, hein, c'est la coupure directement aux services aux citoyens; la coupure aux plus démunis également, là, hein, on a vu les services des personnes handicapées. Nous, là, dans la fonction publique, je peux vous faire une liste, là, hein, le 10 ans de gel, là, qu'est-ce qu'on a vu. La Régie du logement, c'est 20 mois d'attente. On a le temps de déménager, maintenant. Ensuite, fermeture des bureaux du ministère, à Roberval, des Ressources naturelles et de la Faune, un palais de justice à Jonquière, CSST à Granby, le bureau régional du MICC à Rouyn-Noranda. L'Office de la protection du consommateur, ils ferment, c'est marqué, en raison du manque d'effectif, là, ça va être fermé du tel juillet au tel juillet, là, c'est sur le site Internet. Aïe! c'est beaucoup d'accessibilité, là, aux citoyens, ça. La Commission de protection du territoire agricole également, le MAPAQ également, le ministère de l'Emploi et Solidarité sociale. Le ministère de la Justice, un kiosque maintenant à Montréal. Le développement régional : abolition des CRE. Ça, c'est ce qu'on voit, là, dans les rumeurs, là, les CRE, les CLD, et tout ça.

Bon, écoutez, on voit vraiment la coupure de services aux citoyens. Alors, si on regarde tout, il faut tout regarder.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Je voyais... À la page 14, en conclusion, il y a une phrase ici qui a attiré mon attention, où on écrit, ici : «En procédant à ce gel, le gouvernement se prive de la possibilité de créer tout nouveau programme...» Est-ce que vous pensez qu'on a la capacité financière actuellement puis au cours de la période visée notamment par le gel des effectifs... Est-ce que vous pensez qu'on a la capacité financière actuellement, au gouvernement du Québec, de créer des nouveaux programmes, alors qu'on a du mal à financer les programmes existants?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : En fait, tout ce financement de programmes là, c'est des choix politiques. Alors, on a des choix à faire... Bien, vous avez des choix à faire beaucoup plus que moi, dans les choix politiques, évidemment. Alors, on ne sait pas ce qui peut arriver dans l'avenir, mais il peut arriver qu'on ait besoin... On n'avait pas prévu... Bien, ça, c'est un peu... On n'avait pas prévu qu'il y a un viaduc qui tomberait, hein, puis qu'on a été obligé de mettre 41 milliards sur les routes du Québec, mais, savez-vous, il y a des choses comme ça. Puis ce qui est bien, bien inquiétant, dans les services publics, c'est qu'on attend, là, d'être rendu à... que ça fasse mal, là, avant de dire : Ah! c'est vrai, on a oublié d'investir à quelques endroits. Alors, je ne peux pas vous dire, moi, qu'il n'y aura pas d'autre besoin, mais je vais vous dire une chose, par exemple : Quand les citoyens vont le réclamer, là, vous allez devoir prendre des choix politiques, c'est sûr.

Le Président (M. Bernier) : 30 secondes, M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, 30 secondes, je dirais que justement un choix politique important qu'on a pris, c'est de contrôler la dette par l'élimination du déficit, parce que justement on sait très bien ce qui va arriver si on ne le fait pas et on va payer une facture plus grande. Ça, c'est un instrument par lequel on va essayer d'atteindre les objectifs. Puis à court terme l'objectif de déficit, celui-là, il est ferme. Maintenant, l'objectif à long terme, c'est justement de faire de l'espace pour être capable de financer les nouveaux besoins.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle avec M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je voudrais saluer Mme Martineau, Mme Chabot, M. Lamarre, Mme Léger et Mme Lévesque. Je n'ai pas oublié personne, hein, je pense. Non? Ça va? Alors donc, bienvenue.

Alors, écoutez, je vais un peu réagir à ce que j'ai entendu. Il me semble que j'aurais 1 million de questions à vous poser, c'était très intéressant. Faire des efforts, le ministre vous demande de faire des efforts. Est-ce que vous l'avez déjà entendue, celle-là? Et qu'est-ce que ça a donné?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Moi, ça fait 25 ans que je milite professionnellement au syndicat, ça fait 34 ans que je suis dans la fonction publique du Québec, et puis je pense que c'était ça en 1980 quand je suis rentrée. C'est toujours ça. Je pense que les employés des secteurs public et parapublic ont fait beaucoup d'efforts, on a travaillé une dizaine d'années à réorganiser, en organisation du travail. Malheureusement, ça ne donne pas les résultats qu'on souhaitait et puis... Mais c'est sûr qu'on n'a jamais dit non à faire des efforts puis on n'a jamais dit non à regarder comment on peut être plus efficace, comment on peut donner de meilleurs services. Mais là ce n'est pas ça qu'on voit, c'est des services directs coupés.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Vous parlez de dénombrement. J'ai bien apprécié votre propos par rapport à dire : On n'a pas besoin d'un projet de loi pour ça, parce que nous, on n'est pas contre l'idée non plus, on trouve ça intéressant de dénombrer le nombre de personnes qui travaillent pour l'État, et donc j'ai bien apprécié votre proposition de dire : On n'a pas besoin d'aller aussi loin. Et vous parliez d'une zone grise dans le projet de loi, puis il y a ça un peu, hein, une zone grise. Au début, vous disiez : Bien, tu sais, avec le dénombrement des effectifs puis ensuite le contrôle des effectifs... Puis là le ministre nous dit : Bien, avec ce contrôle des effectifs là... Il nous le justifie en disant : Bien, on va éliminer le déficit grâce à ce contrôle d'effectif là. Nous, on pense qu'il y a plusieurs façons d'éliminer le déficit, on n'est pas obligé de couper de cette façon-là.

Mais moi, je voudrais revenir sur la conception. Dites-moi ce que vous en pensez, de ce que j'ai de cette lecture du projet de loi. Habituellement, tu as les services, hein, puis les conventions collectives, souvent c'est comme ça, il y a les services, et on va faire en sorte que les services soient bien comblés, soient bien donnés à la population à partir des besoins qu'on a, et c'est toujours à peu près comme ça qu'on fonctionne. Selon les besoins, on essaie de coller les services qui correspondent aux besoins qu'on a. Quand les besoins augmentent, on essaie de suivre la cadence. Des fois, c'est difficile, mais on essaie de le suivre. Là, c'est l'inverse, là, on se dit : On va déterminer les effectifs nonobstant ce qui se passe au niveau des services. C'est complètement le contraire de ce qu'on a toujours vécu. C'est vraiment innovateur, là, moi, je n'avais vu ça. C'est de dire : Peu importe ce qui se passe, hein, au niveau de la population, au niveau des services qu'on peut donner à partir des besoins qu'on a, nous, on va déterminer les effectifs, puis, à partir des effectifs, bien, vous donnerez les services que vous pourrez.

Comment vous trouvez ça, cette façon de voir les choses? C'est innovateur, hein, c'est nouveau.

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : C'est nouveau pour le secteur de la santé et de l'éducation mais pas pour la fonction publique, parce que ça existe depuis mai 2004 et ça s'appelle la politique de non-renouvellement des fonctionnaires un sur deux. Puis un sur deux, là, ce n'est pas un sur deux partout. Des fois, c'est même un sur 10, ça dépend. Et on voit ça également avec les enveloppes fermées puis les ETC, les équivalents temps complet. Et puis je vous dis que, quand il n'y a plus d'argent... C'est le Conseil du trésor qui le décide, en fait, c'est l'expansion de ça, là, O.K., sauf que nous, en plus d'un gel d'effectif, on a un gel d'embauche. Mais le Conseil du trésor dit : Tu as une enveloppe de tant, puis, quand tu n'en as plus, tu n'en as plus, ce qui fait en sorte que, durant la période de la chasse, les agents de la faune, ils restent au bureau.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : Je reviendrais avec les idées que vous avez, là, d'économiser, en tout cas de faire en sorte que l'État soit moins gourmand, là, en termes de dépenses financières. Puis vous en avez parlé, des solutions que vous proposiez. Vous dites qu'il n'y a pas juste le paramètre de dire... regarder le paramètre des effectifs, il y a d'autre chose qu'on peut regarder. Et c'est souvent ce qu'on va remarquer quand on écoute les gens sur le terrain. Quand on écoute les gens sur le terrain, des fois, on a des saprées bonnes idées, dire : Peut-être si on coupait là, là, on pourrait avoir de l'argent de plus, puis les services ne s'en trouveraient pas trop amochés, au contraire. Vous avez proposé des choses tantôt.

Mais ça, ce n'est pas un peu les conséquences d'une centralisation comme propose le projet de loi, c'est de dire... de se détacher de ce qui se passe dans la réalité puis de se priver de bonnes idées qu'on pourrait avoir pour justement dire : Aïe! il y a peut-être d'autres solutions, écoutez-nous, puis on va vous en proposer? Et, dans la santé, avec le projet de loi n° 10, tu as une centralisation au carré. Moi, je voudrais vous entendre là-dessus, sur l'idée que la centralisation peut nuire à l'efficacité de notre gouvernement.

Le Président (M. Bernier) : Mme Chabot.

• (16 h 50) •

Mme Chabot (Louise) : Bien, vous aurez l'occasion de nous entendre sur le projet de loi n° 10, où effectivement on va dénoncer cette grande demande de contrôle et de centralisation. Ça fait qu'en arrivant ici comme SISP au niveau du projet de loi n° 15, je me suis dit, moi-même : Coudon, c'est une maladie! Je ne sais pas si c'est très novateur, mais effectivement il y a quelque chose qui est pris à l'envers.

En santé puis en éducation, c'est parce qu'en même temps, le projet de loi n° 15, là, on est déçus mais pas surpris. Tu sais, au dernier budget, on nous a parlé de gel d'embauche dans la fonction publique, gel d'effectif en santé et en éducation, qu'il y a un gel d'effectif en santé et en éducation. Puis, sur la base de la période que vous donnez, là, ça veut dire qu'effectivement, là, on ne calcule plus les besoins, là.

Je vais prendre un chiffre simple, j'ai 100 personnes, puis c'est tout confondu, là, hein, enseignantes, enseignants, professionnels ou personnel de soutien. Bien, je dois rester à 100 pour une période, ça fait que ça, c'est indépendamment des besoins. On sait déjà qu'en éducation, bien, on a certaines règles dans les conventions collectives par rapport aux enseignants. Ça veut dire que, si ça dépasse parce qu'il y a un nouveau besoin, bien, «just too bad», c'est 100, puis on coupe.

Bien, c'est ça, l'objet du projet de loi. Tu sais, là, on nous questionne. L'objet du projet de loi est de dénombrer les effectifs mais dans quel but? Un, de contrôler au Conseil du trésor puis de dire aux administrations publiques quoi faire, alors qu'on pense qu'il y a déjà des règles, la loi n° 100 en est une qui est assez contraignante, la Loi sur l'équilibre budgétaire, à notre avis, qui permet un contrôle. Alors, on est capables de chiffrer une demande salariale, actuellement, dans le réseau de la santé et de l'éducation, de la fonction publique, c'est parce qu'on a une idée des effectifs. On nous plaide ce projet de loi là parce que les effectifs seraient hors contrôle, ce qui n'est pas le cas en éducation, en santé, puis encore moins dans la fonction publique. Ça fait qu'il y a une trame de fond qui suppose que ce projet de loi est nécessaire non pas pour seulement connaître nos effectifs mais pour les contrôler et les geler, et les geler au nom d'une politique d'austérité budgétaire et de déficit. C'est ça. C'est pour ça qu'on s'y oppose. Ça fait qu'on a essayé de trouver des vertus à ça, là, mais il n'y en a pas, de vertu. Puis c'est une vue de l'esprit, l'article 12, parce que ce n'est plus vrai.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Saint-Jean.

M. Turcotte : Je voudrais... Dans votre longue liste que vous avez faite de services qui sont coupés à la population avec les choix politiques du gouvernement actuel, sûrement un oubli, vous n'avez pas mentionné les carrefours jeunesse-emploi. Moi, j'aimerais vous entendre sur l'impact pour Emploi-Québec avec la fin du modèle des carrefours jeunesse-emploi. Déjà qu'on voit qu'il y a des fermetures de centres locaux d'emploi un peu partout au Québec, hein, Saint-Rémi, Contrecoeur ont fermé, on voit aussi qu'il y a une centralisation des dossiers des citoyens dans des grands centres comme à Longueuil, par exemple, puis les autres bureaux, donc les gens doivent se déplacer, avec la fin du modèle des carrefours jeunesse-emploi tout jeune devra passer par Emploi-Québec et remplir un formulaire puis une bureaucratie supplémentaire. Donc, déjà, les agents, qui sont déjà surchargés, à Emploi-Québec, vont devoir en faire encore plus. Avec le projet de loi actuel, comment les gens d'Emploi-Québec vont pouvoir répondre à cette surcharge de tâches et de citoyens à rencontrer?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau, 30 secondes.

Mme Martineau (Lucie) : Oui. Alors, écoutez, actuellement on a des rumeurs de fermeture de 66 centres locaux d'emploi, mais depuis trois, quatre ans on a déjà centralisé, en région. On ne rencontre même plus les gens qui font une demande d'aide sociale. Moi, c'était mon travail, là, au gouvernement du Québec, ça, alors, tu sais... On traite les besoins spéciaux, on traite les personnes incapables de travailler dans un CLE. Écoutez, quand on s'en va sur la Côte-Nord, là, c'est parce qu'il y a 200 kilomètres entre un et l'autre, là, alors, le service, la proximité du service, là, elle n'est déjà plus là. Alors, si on ferme encore 70 centres locaux d'emploi, que les gens des centres locaux d'emploi reprennent des fonctions qu'il reste, bien c'est comme le retour du balancier, parce qu'anciennement on avait la politique jeunesse qui était déjà dans le réseau. Sauf que, si on n'ajoute pas de personnel...

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Martineau. Nous allons passer du côté du deuxième groupe d'opposition. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Merci, M. le Président. Je vais d'abord mentionner une chose. Au niveau du projet de loi, on parle d'une loi sur la gestion et le contrôle des effectifs, mais on parle souvent de gel des effectifs, dû à des énoncés qui ont été effectués, et en fait je pense qu'on devrait plus parler du contrôle des effectifs et de la gestion, parce qu'à mon avis il y a peut-être de l'efficience à aller chercher, et puis donc on peut sauver autant en gérant mieux et en contrôlant, sans nécessairement peut-être geler, en tant que tel. Donc, le sens des mots a son importance.

Alors, vous faites état dans votre mémoire à la page 5, au niveau des effectifs : Est-ce que le niveau des effectifs inclura des postes ou des tâches qui sont actuellement accomplies par du personnel provenant d'agences? Alors, on est conscients qu'au niveau de la santé, au cours des dernières années, en fait même des 10, 15, 20 dernières années, il y a des agences qui se sont créées. Il y a peut-être eu de l'épuisement puis des gens qui voulaient une qualité de vie, qui sont allés dans des agences pour pouvoir mieux contrôler leurs horaires. Donc, ça a un impact au niveau des soins de santé en particulier, alors... Mais ça peut être un cercle, tout ça, un peu.

Est-ce que, d'une part, il peut y avoir peut-être une gestion déficiente de la part des dirigeants des milieux hospitaliers pour offrir une qualité de vie aux gens ou est-ce qu'il y aurait... D'où partirait, selon vous, là, la solution à ça?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Je vais peut-être répondre pour fonction publique, mais je vais laisser ma collègue pour la santé. Écoutez, les gestionnaires, quand ils sont soumis à dire : Tu as une enveloppe de tant d'ETC puis tu as un budget... Puis, chez nous, dans la fonction publique, tu ne passes pas de budget de sous-traitance à budget de fonctionnement, là, tu n'as pas le droit de faire ça, c'est déjà assez contrôlé. Bien, ils font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont, c'est ça qu'ils font.

Alors, c'est déjà actif dans la fonction publique, mais on peut présupposer que c'est ce qui va se passer dans les deux autres réseaux aussi.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Surprenant : Est-ce qu'il y aurait déjà eu des discussions qui auraient pu être faites concernant le nombre d'heures supplémentaires qui est travaillé, et les coûts reliés à ça, et le nombre de ressources que ça représente, et puis de s'asseoir puis de dire : Écoutez, si on engageait tant de personnes de plus, ça coûterait beaucoup moins cher, on réglerait le problème et puis on aurait une qualité, puis on serait plus attrayant? Y a-tu déjà eu, dans l'histoire récente, des discussions puis des tentatives de rapprochement à ce niveau-là?

Le Président (M. Bernier) : Mme Chabot.

Mme Chabot (Louise) : Bien oui, tout à fait. Puis, avec respect, on n'a pas besoin du projet de loi pour régler ces questions-là, hein? Ça, c'est de la planification de la main-d'oeuvre. Justement, dans le nombre d'effectifs, tout ce qui est agence, au niveau des soins infirmiers, puis qui est particulièrement plus en région urbaine, mais quand même, là, ça... est-ce qu'on les dénombre dans les effectifs? Ils peuvent faire de l'occasionnel, ils peuvent faire de la permanence. Les heures supplémentaires obligatoires, si on additionne ça au terme d'une année, est-ce que ça fait 15, 20, 25, 30 postes de plus dans le réseau? Comment qu'on règle ça? C'est ça, c'est toute la question de la planification de la main-d'oeuvre en lien avec l'attraction, la rétention, en lien avec la pénurie, en lien avec les besoins. Et c'est ça qu'on dit exactement dans notre mémoire, que, ces exercices-là, on les fait déjà, c'est un souci. Ça fait que, oui, il y a des lieux de parole, il y a des lieux de discussion qui concernent les acteurs au premier chef concernés, donc le personnel puis les administrations, puis ça, le projet de loi, là, ne contrôlera pas mieux ça avec ce projet de loi là, là, au contraire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Mais, si ces discussions-là ont déjà eu lieu, il me semble que ça fait du sens. Alors, vous n'en êtes pas arrivés à des consensus? Il n'y a pas pu y avoir de décision de prise disant : Écoutez, on va sauver de l'argent, alors embauchons puis réglons le problème? Il n'y a pas eu de...

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Moi, je vais vous dire, on avait deux lettres d'entente, dans la dernière convention collective, concernant la sous-traitance, une pour le ministère des Transports puis une pour l'informatique. On a fait des travaux paritaires avec trois syndicats de la fonction publique et le Conseil du trésor. Bien, le Conseil du trésor a mis fin aux travaux, puis la sous-ministre des Transports ne veut pas signer le rapport. Ça fait que c'est bon.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Mme Chabot.

Mme Chabot (Louise) : ...à votre question précise, oui, il y a eu des gains de ces exercices-là. Oui, il y a eu certains contrôles. Parfois, ça a pris des batailles juridiques, mais d'autres fois c'est par des ententes, des ententes qui voulaient aussi limiter ça. Puis ça, aux dernières conventions...

Ça fait que, oui, il y a certains résultats. Est-ce que c'est la totale? Non, ce n'est pas la totale, parce qu'effectivement on manque d'effectifs dans nos réseaux de santé et d'éducation, il y a un manque criant. Puis tous ces moyens-là viennent le combler, puis, nous, ce qu'on veut, c'est de le régler par de la stabilité, en répondant aux besoins.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député, il vous reste environ 1 min 30 s.

M. Surprenant : Mon collègue va...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Oui. Bon, bien, à mon tour de vous saluer, Mme Martineau, ainsi que votre confrère et vos consoeurs. Moi, ça m'attriste un peu, parce que votre position est claire — et je comprends votre position très bien — que tout service donné à la population se doit d'être public. Et ça, quand on part avec une prémisse de base comme ça...

Moi, je me suis toujours dit — puis, il me semble, c'est le gros bon sens : S'il y a du monde qui vont au privé en santé, bien ça libère les listes d'attente au public. S'ils veulent payer, bien qu'ils paient. Qu'est-ce que c'est que vous voulez que je vous dise, moi? C'est fait comme ça. Dans l'éducation, il y en a qui veulent payer pour aller au réseau d'écoles privées ou... les Juifs ou n'importe quoi, les écoles juives hassidiques, là, que M. Bolduc a acceptées. S'ils veulent payer puis s'organiser avec leurs affaires, bien, qu'ils paient, en autant, comme dans la santé, qu'ils aient des affaires.

Mais, moi, ce que je vois à travers votre rapport, c'est : Il faut tout que ce soit public, il faut tout que ce soit l'État, puis c'est comme ça. Mais, à un moment donné, l'État n'aura plus les moyens.

Alors, on est rendus au mur économique. Alors, qu'est-ce que vous proposez concrètement? Parce que moi, je n'ai pas vu de concret, j'ai juste vu : Bien, on a été coupés, ça 20 ans qu'on est coupés, c'est fini.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Je dois vous interrompre.

Des voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Je dois vous interrompre, je dois vous interrompre. Vous aurez l'occasion d'échanger. Nous allons passer maintenant à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques, je dois lui donner l'opportunité de vous poser des questions. Allez-y, Mme la députée.

• (17 heures) •

Mme Massé : Tellement à dire et en même temps... Services publics, services à la population. Partir du besoin, partir du chiffre comptable. Votre position est claire, très appréciable. On sait qu'il y a des choix politiques, des choix de société qui nous amènent à faire en sorte qu'on va encore... — vous l'avez bien démontré, après 10 ans de coupe il y en a plein, d'impacts — qu'il va encore y avoir des impacts et, bien sûr, des impacts particulièrement sur les femmes et les régions, vous ne l'avez pas mentionné, mais je sais qu'on le sait. Donc, c'est très inquiétant.

On le sait — et j'ai envie de vous entendre là-dessus — que c'est un choix politique, dans le sens où on met le TGV du déficit zéro en avant, ce qui fait en sorte que ça fait pression sur nos services publics. Et en plus c'est que, quand, dans un an, on aura atteint l'équilibre, selon le plan de M. Coiteux et de son équipe, ce qui va ressortir de là, c'est un surplus qui, lui, va être investi au Fonds des générations. Alors, j'ai besoin que vous me parliez de c'est quoi, l'équité intergénérationnelle. Et est-ce que vous, vous en aviez d'autres, solutions?

Le Président (M. Bernier) : Mme Martineau.

Mme Martineau (Lucie) : Bon, alors, oui, vous avez raison, femmes, régions, jeunes aussi. Vraiment, là, ça... Oui. Et, d'autres solutions, oui, à toutes les fois qu'on se prépare pour aller à la préconsultation budgétaire on amène des solutions, ça fait des années que les organisations syndicales proposent différentes solutions. Puis là je ne veux pas entendre : Vous voulez que les impôts augmentent. On veut que les impôts, ils soient progressistes, selon le revenu de chaque personne et de chaque personne morale aussi. Alors, ce n'est pas plus que ça, que chaque personne et chaque personne morale paie sa juste part, parce que, si je bénéficie... En tant que personne puis en tant qu'entreprise, au Québec, je bénéficie des services publics qu'on a voulus gratuits pour tous, dont la santé, ce qui n'est pas le cas aux États-Unis. Bon, alors, ça, tout le monde en bénéficie, qu'on soit citoyen ou qu'on soit une personne morale, une entreprise. Tu n'as pas à donner un programme d'assurance à tes employés, il y en a, au Québec, un programme d'assurance, tandis que, si tu négocies aux États-Unis, tu dois commencer par demander une police d'assurance pour tes employés, en organisation syndicale, c'est ça que tu fais, parce qu'il n'y en a pas.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez environ 15 secondes, madame...

Mme Massé : Bien, j'ai été très préoccupée... Vous avez soulevé un enjeu qu'on appelle l'autonomie des institutions, qui est déjà assez cadré, hein, avec des lois, bon, tout ça. Vous avez envoyé des pistes très intéressantes sur... peut-être pas besoin d'un projet de loi si on veut dénombrer. Et je vous remercie beaucoup de votre participation.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme la députée. Donc, Mme Martineau, Mme Chabot, Mme Léger, Mme Lévesque, M. Lamarre, merci de votre participation à la Commission des finances publiques sur le projet de loi n° 15.

Nous allons maintenant suspendre quelques instants afin de permettre au Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 3)

(Reprise à 17  h 5)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous souhaitons la bienvenue aux représentants du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, en l'occurrence M. Richard Perron et M. Pierre Riopel. Bienvenue à la Commission des finances publiques. Nous allons procéder dans un premier temps à une présentation, vous avez une période de 10 minutes. Donc, la parole est à M. Riopel, M. Perron? Bon, alors, M. Perron, allez-y. Vous avez 10 minutes.

Syndicat de professionnelles et professionnels
du gouvernement du Québec (SPGQ)

M. Perron (Richard) : Oui, bonjour. Bien, merci pour cette invitation à venir présenter notre mémoire au nom des 25 000 professionnels du gouvernement du Québec que nous représentons.

Le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec s'oppose au projet de loi n° 15 parce qu'il exacerbera le contrôle du Conseil du trésor sur les ministères et organismes, alors que le gouvernement devrait d'abord s'attaquer au trou noir de la sous-traitance abusive. Les ministères et organismes devront rendre davantage compte de tout ce qu'ils font pour les effectifs. Jamais le Conseil du trésor n'était allé aussi loin en s'octroyant de tels pouvoirs de surveillance et de vérification pour s'assurer du respect du gel des effectifs, allant même jusqu'à une mise sous tutelle. En centralisant tout et en demandant plus de surveillance et de contrôle, le Conseil du trésor tend vers une hyperbureaucratisation qui induira moins de marge de manoeuvre pour les ministères et organismes. Ces derniers sont pourtant les mieux placés pour connaître les besoins de leurs clientèles, tant en région qu'en zone urbaine.

Cette limitation vient d'ailleurs en contradiction avec l'article 12 du projet de loi n° 15, qui spécifie que «la gestion de l'effectif par un organisme public doit s'effectuer de façon à maintenir les services offerts à la population». De plus, mentionnons que certains de ces organismes s'autofinancent, raison pour laquelle la Commission de la construction du Québec veut se soustraire à l'application du projet de loi. Le financement nécessaire pour réaliser son mandat provient à 96 % de l'industrie, et c'est la même chose à peu près dans le cas de la CSST et de la Société d'assurance automobile du Québec.

Ce projet de loi contribue directement à accroître la perte d'expertise des ministères et organismes, comme il a été mentionné au cours des audiences de la commission Charbonneau en ce qui concerne plus particulièrement le ministère des Transports du Québec. D'importants investissements pour l'embauche de ressources supplémentaires et pour la formation sont pourtant primordiaux pour la reconstruction de l'expertise interne. En tant qu'employeur, le gouvernement du Québec ne prend pas les moyens adéquats pour rendre sa fonction publique attractive. Il doit cesser de projeter une image négative d'employeur sans le sou. Pour le SPGQ, l'embauche de ressources supplémentaires pour la reconstruction de son expertise est fondamentale, car le coût de ces ressources est nettement moindre que celles du privé, comme on l'a démontré.

Bon, d'abord, le premier volet, celui du recensement des effectifs. Il est d'abord légitime de se demander si le gouvernement avait vraiment besoin d'une loi pour réclamer et pour vérifier l'état des effectifs. Un mandat accordé au Vérificateur général aurait probablement été suffisant... ou même à l'interne.

Nous avons ensuite de sérieux doutes sur l'obtention des résultats à court terme et même en ce qui concerne le plan triennal. Quel en sera le coût? Va-t-on allouer de nouveaux effectifs aux ministères et organismes et au Conseil du trésor pour réaliser ces mandats?

Un peu plus tard, vous aurez le directeur de l'ENAP qui viendra vous dire, ce soir, qu'il va devoir, lui, gérer toute dépense de plus de 25 000 $. Embauche de réceptionniste, toute dépense, dans son école, va devoir passer par son bureau. J'ai demandé : Mais est-ce qu'on va te permettre d'embaucher une ressource, au moins, pour gérer tout ça? Il dit : Non, même pas.

• (17 h 10) •

Par ailleurs, le SPGQ estime que le Conseil du trésor devrait utiliser ces mécanismes de dénombrement et de planification afin de recenser les nombreux consultants, sous-traitants et l'ensemble de la main-d'oeuvre indépendante travaillant quotidiennement dans les secteurs public et parapublic. Nous ne connaissons pas le nombre de sous-traitants, mais nous connaissons en partie la valeur totale de ces contrats de services. En 2010, nous avons consulté nos délégués présents sur le terrain et constaté que près de 2 562 sous-traitants côtoyaient les 9 863 membres du personnel interne des ministères et organismes. C'est beaucoup trop.

Le projet de loi n° 15 stipule, dans un deuxième volet, que le gouvernement du Québec doit se doter d'un outil de gestion, de contrôle et d'encadrement de ses effectifs. La dérive centralisatrice qu'engendrera la mise en oeuvre du projet de loi n° 15 implique que les dirigeants de chaque organisme public visé auront «la responsabilité de recueillir divers renseignements et de répartir les effectifs attribués par le Conseil du trésor ainsi qu'en lui conférant des pouvoirs de vérification et de sanction». Ils devront ensuite rendre des comptes au président du Conseil du trésor, c'est-à-dire qu'ils seront imputables de la gestion de leurs effectifs.

L'objectif du projet de loi n° 15 n'est pas clairement indiqué, bien qu'on puisse deviner qu'il consiste dans une forme de gel des effectifs. Puis, le traitement réservé aux renseignements obtenus de la part des ministères et organismes n'est pas non plus expliqué de manière limpide. De quelle façon va-t-on procéder à une forme de gel des effectifs?

De plus, le projet de loi comprend des exceptions et des dérogations dont la portée peut être particulièrement large. Pourquoi alors autant de dérogations, si l'objectif consiste à contrôler?

Le Conseil du trésor se donne des pouvoirs importants qui auront des répercussions majeures dans l'ensemble du gouvernement du Québec et de sa fonction publique. Il se donne le beau rôle en décrétant le seuil nécessaire des effectifs. Par ailleurs — et ça, c'est important — il décline toute responsabilité en laissant aux ministères et organismes l'odieux d'en gérer les conséquences et la violation de l'article 12, services non rendus à la population.

Le Conseil du trésor va exiger une planification triennale de la main-d'oeuvre aux ministères et organismes. Lorsqu'il aura en main l'ensemble des nombreux renseignements fournis par les ministères et organismes, qui ne suggéreront sûrement pas d'emblée eux-mêmes de réduire leurs propres effectifs, dans un contexte actuel et prévisible, comment va-t-il procéder pour la rationalisation des effectifs? Le projet de loi ne répond pas à ces questions.

Dans son troisième volet, le projet de loi instaure des mesures particulières applicables aux contrats de services qu'un organisme public entend conclure pendant les périodes soumises à des mesures de contrôle de l'effectif. Bon, nous venons de suggérer au Conseil du trésor de dénombrer les consultants et sous-traitants oeuvrant quotidiennement dans les secteurs public et parapublic. La mise en perspective de ces données constitue un enjeu prédominant dans la mise en oeuvre du troisième volet du projet de loi.

Bien que la mise en oeuvre de ce troisième volet représente un des rares points positifs de ce projet de loi, les dérogations seront sûrement nombreuses, surtout dans le domaine des ressources informationnelles. Comment estimer le sérieux de ce projet de loi qui défend de contourner les règles du gel d'embauche en recrutant par contrat des employés de l'État, des professionnels et surtout des gestionnaires retraités parfois après seulement quelques jours de retraite?

Le gouvernement du Québec veut limiter la sous-traitance, ce qui est fort bien, et on vous le dit, c'est bien, mais le personnel va manquer en raison du gel des effectifs. Ce gel créera forcément un manque réel de personnel. Contrairement au discours alarmiste du gouvernement, il n'y a pas trop de personnel, il en manque. C'est ce que l'on constate, nous, sur le terrain. Si le gouvernement enregistre une croissance d'environ 6 000 employés à temps complet par année, c'est parce qu'il y a une véritable demande. Les besoins de services à la population ne cessent de croître, surtout dans les réseaux de la santé et de l'éducation, on en convient.

Par la mise en oeuvre du projet de loi n° 15, on se dirige sûrement vers une vague de coupes dans le personnel d'environ 6 000 postes, ce qui ne manquera pas d'ouvrir la porte à la privatisation. L'instauration de nouveaux PPP — les partenariats public-privé — dans le réseau de la santé et ailleurs pourrait alors constituer une avenue que retiendra probablement le gouvernement pour répondre à la demande.

Éliminer une partie de la sous-traitance abusive est très bien, mais rien ne dit que le gouvernement n'ira pas vers une privatisation de la livraison des services, tel que l'a récemment mentionné le ministre des Finances, Carlos Leitão, lors d'une allocution devant l'Association des économistes québécois. Heureusement, le premier ministre a rapidement contredit son ministre des Finances sur cette question. On peut quand même se poser la question suivante : Assiste-t-on à un retour de la vieille nouvelle gestion publique, «new public management», qui a sévi dans plusieurs administrations publiques au cours des dernières décennies, provoquant d'importantes pertes de contrôle et d'expertise de l'État? C'est en effet la réingénierie inspirée de cette nouvelle gestion publique qui a engendré et qui semble vouloir continuer à accentuer l'atrophie des effectifs, des salaires et des savoir-faire de la fonction publique québécoise, provoquant ainsi de graves problèmes d'attraction et de rétention de talents, qui ont d'ailleurs été mis en lumière par la commission Charbonneau.

Par son projet de loi n° 15, le gouvernement du Québec prend les moyens pour contrôler la taille du secteur public. Ce projet de loi est donc en phase avec son idéologie d'austérité, qui se traduit concrètement par son objectif de comprimer 3,2 milliards de dollars afin de parvenir à l'équilibre budgétaire dès 2015. Ce retour à l'équilibre budgétaire en 2015, nous l'estimons beaucoup trop rapide. Et nous ne sommes pas les seuls à le dire. À l'instar de l'économiste Pierre Fortin, nommé meilleur économiste de la décennie par l'Association des économistes québécois, signataire du manifeste des lucides avec Lucien Bouchard, qu'on ne peut donc pas accuser d'économiste de gauche, le SPGQ ne partage pas les mêmes constats économiques que le gouvernement, qui prêche par une austérité excessive et qui sème l'alarmisme sur son passage. Certes, comme l'indique Pierre Fortin, il convient de rééquilibrer les finances publiques du Québec, mais encore plus d'examiner les façons de gérer l'État avec intelligence et sans fracas inutile.

Le SPGQ considère que le recours à des coupes abusives des effectifs du gouvernement, c'est-à-dire dans son expertise — du moins dans ce qu'il lui reste — ainsi que les services publics, comme l'éducation, la culture, la réinsertion sociale ou l'aide à la famille, éloigne le Québec de l'idéal de croissance inclusive prêché par l'OCDE elle-même. Nous sommes pleinement en faveur de la lutte au gaspillage et à la malversation, tout en encourageant un émondage ciblé des programmes, on vous l'a déjà dit. En conclusion, cependant, nous pourfendons les coupes exagérées et improvisées dans les effectifs et dans les programmes qui contribuent à humaniser notre société et à la rendre plus juste.

Finalement, ce qui caractérise le plus les interventions du gouvernement du Québec qu'il compte mettre de l'avant pour réduire sa dette consiste dans le fait qu'il désire agir rapidement. En réalité, le gouvernement dispose de 11 ans pour parvenir à son objectif de 45 % du ratio dette-PIB. Nous croyons qu'en visant une hypercentralisation bureaucratique — et ce seront mes derniers mots pour la présentation — le gouvernement établit mal la priorité de ses cibles. C'est au gaspillage de fonds publics lié au trou noir de la sous-traitance, provoqué par le manque d'expertise interne, qu'il devrait d'abord s'attaquer. Merci.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Vous m'avez fait peur en me disant que c'étaient vos derniers mots. M. le ministre, ce sont vos premiers mots, allez-y.

M. Coiteux : Ce sont mes premiers mots. Alors, d'abord et avant tout, merci beaucoup, M. Perron. Puis merci également, M. Riopel, d'être là ce soir.

Je vais commencer par le principe du dénombrement, si on est d'accord, parce que, dans le mémoire puis dans les propos que vous avez tenus, vous avez dit : Écoutez, ça, c'est des informations qu'on a déjà. Le problème, c'est que, ces informations-là, on les a avec un décalage important dans certains cas. Dans les réseaux, ça peut être un décalage qui peut aller aussi loin que deux ans. Et il peut se passer beaucoup de choses, là, pendant deux années, et en particulier la croissance des effectifs, elle peut aller au mauvais endroit aussi.

Est-ce que vous êtes d'accord avec le principe d'un dénombrement plus fréquent, plus ciblé, sur le nombre de chèques de paie, ultimement, qui va être émis puis en fonction des catégories d'emploi? Est-ce que vous avez un problème philosophique avec au moins cette partie-là du projet de loi?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Mais non, évidemment pas. Écoutez, moi-même, comme président de syndicat, je suis un gestionnaire. On a 47 employés, je connais nos effectifs. D'ailleurs, on est contraints aux quotas imposés par le Conseil du trésor pour servir nos membres et dégager nos effectifs, libérer nos effectifs. Tout gestionnaire responsable devrait effectivement être conscient des effectifs qu'il a.

Maintenant, le gouvernement du Québec a fait le choix d'une gestion déléguée, d'une responsabilisation puis d'une autonomisation des différentes institutions qui ont été mises en place pour gérer et pour contrôler les effectifs. Maintenant, de savoir, pour le gouvernement, l'ensemble des employés qui reçoivent un chèque de paie, qui vient de la poche des contribuables, c'est tout à fait légitime. Tout ce qu'on dit, c'est qu'on n'avait quand même pas besoin de créer un projet de loi à incidence aussi centralisatrice et qui multiplie les redditions de compte.

Quand je vous ai vu, là, sur la commission avec Mme Robillard, la commission de révision des programmes, je vous ai dit qu'il y avait des économies à faire dans les processus bureaucratiques, dans l'hyperbureaucratisation, dans la multiplication de la reddition de comptes inutile. Bien là, ce qu'on fait, avec le projet de loi, c'est qu'on en crée, justement.

Puis on n'avait pas besoin de ce projet de loi là pour aller dénombrer les effectifs. Un simple mandat... Le monde dit «au Vérificateur général», mais un simple mandat donné à vos fonctionnaires, à nos professionnels aurait pu très facilement aller dénombrer... Chaque personne qui va passer ici devant vous ou représentant est capable de dire dans quelle direction... Chaque dirigeant d'organisme est capable de vous dire combien il y a de monde sur son chèque de paie, chaque responsable de ministère, secrétaire de ministère ou d'organisme est capable de vous le dire également. Donc, on n'avait pas besoin du projet de loi, même si c'est tout à fait louable de vouloir connaître l'étendue des effectifs.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

• (17 h 20) •

M. Coiteux : L'un des problèmes que j'aimerais souligner, c'est qu'il y a quand même une différence entre ce qu'on est capable d'accomplir au sein des ministères et des organismes, là, où on a un contrôle direct, par rapport aux réseaux, où c'est extrêmement décentralisé, où la fluidité de cette information-là sur les effectifs, elle n'existe pas à l'heure actuelle. Donc, il y a derrière le projet de loi ce but-là aussi de permettre cette fluidité-là, parce qu'ultimement c'est l'État québécois, c'est le gouvernement qui assume la facture. Donc, c'est un peu normal, comme gestionnaires ultimes de l'ensemble de l'appareil, qu'on connaisse cette situation-là.

Maintenant, ceci étant dit, là, je sais qu'il y a un aspect de votre présentation puis votre mémoire qui conteste la vitesse avec laquelle on retourne à l'équilibre budgétaire. Ça, j'ai noté ça.

Bon, mettons que je fais fi de ça pour l'instant, là, cette question de la vitesse, est-ce que vous êtes quand même d'accord avec le fait, peu importe à quelle date on veut mettre le retour à l'équilibre budgétaire, qu'une gestion des effectifs de l'ensemble du secteur public, ça doit forcément faire partie de la stratégie de retour à l'équilibre budgétaire, puisque c'est déjà 60 % des dépenses de programmes, la rémunération? Est-ce que vous êtes d'accord... Peu importe la date, là. Vous dites : Peut-être que la date pourrait être un peu plus tard. On pourra discuter ensuite combien plus tard dans votre esprit. Mais, une fois qu'on a dit ça, que ce soit un an, que ce soit deux ans ou cinq ans, est-ce que vous n'êtes pas d'accord avec le fait que la gestion des effectifs fait partie de la stratégie?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Évidemment, la gestion des effectifs doit être au coeur de toute stratégie de bonne gestion, des finances publiques notamment. Puis, nous, ce qu'on dit... Et ma prédécesseure, Mme Martineau, vous a parlé, là, d'une lettre d'entente qu'on avait pour créer des hauts comités sur la sous-traitance, dont un sur l'informatique. Vous vous êtes scandalisé de ne même pas savoir quelles dépenses on faisait annuellement en informatique, je partageais votre sentiment. Mais on avait pu identifier... Et donc on a tiré sur la plug, pour parler en québécois, là, de ces comités-là, et il n'y a rien qui a été rendu public, fait normalement, mais on avait quand même évalué à plus de 1 200 l'embauche d'effectif nécessaire pour renverser la vapeur et se remettre à contrôler un tant soit peu la gestion de nos dépenses en ressources informatiques.

Donc, oui, la gestion des effectifs est au coeur de la stratégie, mais, quand François Legault — on a des membres de la CAQ ici, là — disait en pleine campagne électorale : Il faut investir des millions de dollars au ministère des Transports pour lui redonner son expertise, de cette façon-là elle va sauver des milliards aux contribuables québécois, bien on parle de gestion des effectifs mais pas dans le même sens que des coupures et d'un calcul arithmétique et simple. On ne se demande même pas si ces effectifs-là sont des investissements qui rapportent à l'économie québécoise. On les considère simplement comme des dépenses qu'on peut tout simplement évacuer, peu importent les conséquences qu'on aura.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Bon, je vais quand même revenir, parce que je pense que c'est un point qui est important. Actuellement, on n'est pas en équilibre budgétaire, on ne l'est pas. Les dépenses de rémunération, c'est une partie importante de l'équation, ça représente 60 % des dépenses de programmes, et les effectifs augmentent bon an, mal an, globalement, là — c'est un estimé, hein, on va avoir un estimé plus précis une fois qu'on aura mis en place le dénombrement, qui est un aspect du projet de loi — bon an, mal an de 6 250 personnes... ETC par année, ETC, bon. Alors, c'est clair que cette croissance-là, en soi, elle nous éloigne de l'équilibre budgétaire. Est-ce qu'on est d'accord avec ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Non, je ne partage pas, parce que je sais qu'embaucher des ressources à l'interne... Et je vous donne l'exemple des ressources informatiques. Embaucher quelqu'un qui coûte deux fois moins cher que la même ressource qui travaille pour une firme externe pour faire le même travail... Et la présidente de la Commission de la fonction publique l'a révélé : dans 41 % des cas, ce sont des travaux qui devraient être faits à l'interne qui sont des contrats de services. Donc, il faut embaucher des gens mais au bon endroit.

Quand le premier ministre vous a nommé président du Conseil du trésor, M. Coiteux, j'étais là, ici, à l'Assemblée nationale, et je l'ai bien entendu dire : Vous serez chargé de préserver l'expertise du gouvernement du Québec dans les secteurs stratégiques. Bien, l'expertise du gouvernement du Québec dans les secteurs stratégiques, elle a été mise à mal par des politiques de rémunération inadéquates, par des politiques de non-remplacement d'un départ sur deux à la retraite qui ont perduré de gouvernement en gouvernement, peu importe le parti au pouvoir. L'expertise du gouvernement du Québec, elle a été mise à mal au point où on a eu besoin d'une commission Charbonneau, où il y a des anciens ministres, des anciens ministres de tous les partis confondus qui sont venus dire : On a complètement déshabillé le ministère des Transports de son expertise, on s'est livré pieds et poings liés au secteur privé, qui a pris le contrôle et qui s'est servi dans le plat de bonbons.

Donc, oui, le contrôle des effectifs peut servir à économiser des sommes importantes à l'État si on gère intelligemment, et qu'on va embaucher l'expertise dont on a besoin, et qu'on se donne les conditions pour embaucher l'expertise dont on a besoin, comme M. Caillé l'a fait valoir quand il a témoigné à la commission Charbonneau à titre de dernier témoin, et on lui a demandé : Comment ça se fait que ça va bien, que vous n'avez pas de gaspillage, de collusion et de corruption? Il a dit : Nous, nos experts, on les paie, et l'expertise, c'est ça qui vaut de l'argent.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Par contre, le gouvernement n'embauche pas que des informaticiens, là, si c'étaient strictement les contrats de services en informatique, employés à l'interne en informatique. Le secteur public est beaucoup plus vaste que ça. Puis il y a certains groupes qui ont présenté un mémoire aujourd'hui qui nous ont dit qu'il y a eu une explosion de la masse salariale du côté de l'administration dans les réseaux au cours des dernières années. On a notamment parlé de l'enseignement universitaire.

Est-ce que vous ne pensez pas que ça aussi, ça devrait être quelque chose qui devrait attirer notre attention puis sur lequel on devrait se pencher si on veut à la fois faire deux choses : retourner à l'équilibre budgétaire puis s'assurer que les ressources soient mises au bon endroit puis que les services publics soient maintenus?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : À la commission Charbonneau, quand le commissaire Lachance nous a demandé si on avait d'autres exemples que l'informatique, au ministère des Transports, de recours abusif à la sous-traitance, on lui a justement donné l'exemple de la ressource... c'est-à-dire de la sous-traitance en gestion, en matière de gestion et d'administration. Le gouvernement, maintenant, est en position où il sous-traite la gestion de ses effectifs. Et c'est inscrit dans notre mémoire, je vais demander à notre conseiller de retrouver les chiffres exacts. Mais, là aussi, si on embauchait et qu'on formait des bons gestionnaires à l'interne, on s'exposerait moins à du gaspillage de fonds publics lié à la sous-traitance en matière de gestion.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Perron (Richard) : Si c'est ce que vous vouliez dire, je suis d'accord avec vous.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Comme le coeur de votre argumentation semble tourner autour des contrats de services, et du coût des contrats de services, puis le fait que les contrats de services parfois se substituent à des contrats de travail en bonne et due forme, donc l'emploi d'un... l'embauche d'un employé de l'État ou d'un fonctionnaire, dans le cas de la fonction publique, vous devez accueillir quand même favorablement au moins l'aspect du projet de loi qui vise à éviter qu'en période de contrôle des effectifs on contourne les choses en recourant à des contrats de services. Est-ce que vous ne voyez pas là justement une avancée importante par rapport aux préoccupations que vous avez?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Oui, bien je l'ai dit tout à l'heure, hein, c'est, pour nous, un point positif du projet de loi. On ne peut pas demander le contrôle, de fermer le robinet de la sous-traitance 364 jours par année puis venir ici aujourd'hui puis vous dire le contraire, hein? C'est évident que, pour nous, un meilleur contrôle de la sous-traitance, de fermer le robinet de la sous-traitance, de se réapproprier les ressources, l'expertise qui va être rendue disponible par la fermeture de ce robinet-là à l'externe et de se le réapproprier à l'interne pour se redonner l'expertise, c'est ce que l'on doit faire.

Maintenant, le projet de loi évoque plusieurs possibilités de dérogation, et ça, ça nous inquiète. Ça nous inquiète parce que le gestionnaire qui va être en position... Vous savez, là, tous les contrats de sous-traitance qui passent dans les mains de nos délégués professionnels qui sont dans les comités ministériels et qui ont le droit de voir les contrats de sous-traitance, à 95 % des cas, la raison pour aller en sous-traitance, c'est manque d'effectif, manque d'expertise à l'interne. Et donc ces raisons-là vont subsister, parce qu'ils auront, en vertu de l'article 12, encore la responsabilité de donner des services à la population. Donc, au besoin, bien, les gestionnaires iront recourir... Et donc on pense qu'il y a trop de trous, si on veut, dans cet aspect-là de la loi.

Et nous, on ne veut pas nécessairement couper la sous-traitance et que ça finit là. On veut la couper pour se réapproprier l'expertise à l'interne, pour pouvoir donner les mêmes services ou même de meilleurs services à moindre coût, pour que tout le monde y gagne.

Donc, c'est deux bras du même corps, là. Oui, c'est bien, de vouloir contrer et contrôler la sous-traitance abusive pour dégager des ressources qui vont nous permettre de bonifier les conditions, qui vont nous permettre aussi d'engager des ressources à l'interne, mais l'un ne va pas sans l'autre.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

• (17 h 30) •

M. Coiteux : Je vais juste changer un petit peu l'angle, là, maintenant, de nos échanges ou de mes questions.

C'est une grande organisation, l'État, c'est une très, très grande organisation, puis on a comme particularité d'être actifs dans différentes sphères. On fait de l'éducation, on fait de la santé, on administre la chose publique à travers la fonction publique. On intervient dans plusieurs domaines. On a des sociétés d'État, on est dans le commerce de détail. On est dans tout, on est dans plusieurs choses.

C'est sûr que c'est un petit peu plus simple pour une entreprise qui a juste une fonction, mais néanmoins, néanmoins on a des difficultés financières, je pense que tout le monde en convient. Je pense que tout le monde doit convenir du fait que l'État québécois a des graves difficultés financières.

Il y a des divergences d'opinions quant à la vitesse avec laquelle on doit résoudre, là, les termes de l'équation. Nous, on est absolument convaincus que le déficit doit être éliminé. On a déjà reporté la date à partir de laquelle on doit atteindre l'équilibre budgétaire, ça a déjà été fait, reporter, donc on pense que ça serait une grave erreur que de la reporter à nouveau, donc on ne le fera pas. Mais je pense qu'on va être d'accord sur le fait qu'on a des graves difficultés financières puis qu'on doit les résoudre.

Une organisation qui a des difficultés financières, elle va toujours chercher à voir comment est-ce qu'elle peut, à travers la réaffectation de ses effectifs, le contrôle de ses effectifs, livrer la marchandise à l'intérieur de ses paramètres financiers. Autrement dit, elle va chercher à s'organiser pour faire mieux avec les ressources qu'elle a plutôt que demander davantage de ressources, elle va faire des efforts de productivité. Est-ce que c'est trop demander, dans le contexte des difficultés budgétaires qu'on a actuellement, que de demander à nos réseaux de faire un effort particulier, d'améliorer davantage leur productivité au cours de la prochaine année et demie pour contribuer au retour à l'équilibre budgétaire en réaffectant les ressources de manière correcte, sans qu'on puisse leur accorder une expansion des effectifs comme on a eu au cours des dernières années? Est-ce que c'est trop demander?

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste 30 secondes pour répondre, M. Perron.

M. Perron (Richard) : Écoutez, nous, on est plutôt d'accord avec l'économiste Pierre Fortin quand il dit qu'à trop se presser pour faire des coupures rapidement et dégager la marge de manoeuvre pour se préparer pour la prochaine élection on risque de mettre à mal, par ces gestes d'austérité, la capacité du Québec de développer sa création d'emplois, dont il a cruellement besoin.

Le gouvernement fédéral a reporté deux fois son équilibre budgétaire, il va nager dans les surplus prochainement. Est-ce qu'il y a eu des menaces de décote là-dessus? Non, il n'y a pas de menace de décote. On n'est pas dans la même situation que les années 90 ou les années 80.

Le Président (M. Bernier) : Merci. On va passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet, la parole est à vous.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je souhaite la bienvenue à M. Perron et à M. Riopel. Écoutez, très intéressant. On dirait que je dis toujours ça, mais c'est toujours le cas, c'est toujours intéressant. Donc, vous poursuivez dans la lignée des gens qui vous ont précédés, on apprend beaucoup. Il y a des choses... Bon, quand vous avez dit : On n'a peut-être pas besoin d'un projet de loi pour dénombrer, vous êtes pour le dénombrement, je trouve ça intéressant.

J'aurais peut-être des petites questions de précision, parce que vous êtes très clairs, hein? Moi, en tout cas... Quand on vous écoute, on voit où est-ce que vous voulez aller, c'est très clair. Mais je vais quand même vous poser des questions pour vous permettre d'élaborer sur certains points où est-ce que je voudrais avoir plus d'information.

Par rapport à la centralisation, dans la situation de la loi n° 15 et la loi n° 10 où est-ce qu'on a un accroissement de la centralisation, vous dites que ça pose des problèmes. Je voudrais vous entendre un peu, très rapidement là-dessus, là. C'est quoi, les conséquences, selon vous, d'une centralisation comme le propose le projet de loi n° 15 sur l'efficacité gouvernementale que l'on a actuellement?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : C'est une lourdeur administrative, une multiplication de redditions de comptes inutile, une hyperbureaucratisation qui aura des coûts, qui aura des coûts, évidemment, et ça, le projet de loi n'en parle pas.

Mais je vais vous donner un exemple concret, là, qu'on a vu, là, concrètement, dont j'ai entendu parler. Ce même phénomène de centralisation s'est fait à travers le projet de loi n° 10, hein, mes prédécesseurs l'ont mentionné. Bon. Donc, on dit : Nous, on va décréter tes budgets, tes effectifs, ce que tu dois avoir, et tu t'arranges avec ça, et les CSSS, dans le cas de Laval, par exemple, bien ils ont coupé des effectifs à un niveau tel que c'était en deçà des services essentiels, de ce qui est convenu aux services essentiels pour l'urgence de l'hôpital à Laval. Donc, on a pu contester ça devant le Conseil des services essentiels, qui ont donné raison aux syndicats et qui se sont dit : Bien, la coupure d'effectif, elle va en deçà de ce qui est exigé par le Conseil des services essentiels quand ils font la grève.

Sur la Rive-Sud de Montréal, ils ont coupé des postes de pédopsychiatre, des postes de pédopsychologue. Ce sont les services directement, en matière de santé mentale, de nos jeunes, et Dieu sait que les besoins sont criants et se développent à ce niveau-là. J'ai des amis, des gens que je connais très bien qui se sont fait dire, alors qu'ils avaient finalement, après trois ans de lutte, trouvé des services pour une thérapie urgente, besoin pour leur enfant de neuf ans, qui se sont fait dire, le jour où ils allaient pour leur premier rendez-vous : Désolé, le poste a été coupé hier.

Et c'est ça que ça fait, de l'hypercentralisation. C'est qu'on décrète comme ça : Vous devez rendre des services, vous aurez tel carré de sable, droit à tant d'effectifs ou à tant de budget, puis arrangez-vous pour que ça rentre dans le cadre, et ce qui arrive, c'est une coupure de services directement. Même si on a dit : Il n'y aura pas de coupure de services à la population, concrètement on voit qu'il y a des coupures de services à la population.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Oui. Ça concorde avec ce que vous aviez dit à la page 13, là, quand vous parliez de l'article 12. Vous dites que ça ne permet plus de rendre les services essentiels à la population, là, ce qu'on propose dans le projet de loi.

Moi, écoutez, je vous mets dans la peau du président du Conseil du trésor quelques minutes. Et vous m'avez allumé sur un questionnement, là, quand vous avez dit : Comment va-t-il rationaliser les effectifs? Là, vous êtes dans la peau du président du Conseil du trésor.

Comment on peut évaluer les effectifs qui vont être attribués à chaque ministère... ou en tout cas qui va faire en sorte, là, d'en mettre un peu plus ici ou un peu moins là? Comment vous pensez qu'il peut arriver à ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Bien, en engageant une armée de personnel et d'experts qui vont aller s'enquérir de la situation réelle par rapport à la livraison de services et l'équation avec les effectifs dans chacun des ministères et organismes puis dans chacune des organisations du réseau de la santé et de l'éducation. Il y a même un haut fonctionnaire hier qui m'a dit : Mais c'est impossible, ça ne peut pas se faire, et surtout si on n'embauche pas du personnel supplémentaire.

Donc, vous me mettez dans la peau du président du Conseil du trésor. Mon premier geste, ce ne serait pas de réfléchir à ça. Ce serait d'abord de faire adopter une loi pour protéger les divulgateurs d'actes répréhensibles, pour que ceux, dans nos professionnels, qui voient vraiment où il y a du gaspillage éhonté de fonds publics puissent le dire, et qu'on puisse corriger le tir. Et, deuxièmement, ce serait de mettre en place un plan d'action pour redonner l'expertise dont le gouvernement du Québec a besoin pour reprendre le contrôle de ses dépenses publiques.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Donc, vous dites que le président du Conseil du trésor, s'il veut réaliser cet objectif-là, devra augmenter ses effectifs pour contrôler les autres effectifs. Étant donné qu'on est dans un gel d'effectif, ça veut dire que les effectifs qu'il va engager devraient être coupés ailleurs dans la distribution de services, c'est ce que je comprends, là.

M. Perron (Richard) : Bien, il y a des dérogations. Je ne sais pas si, par exemple, le cas de M. Dicaire, là, qui a été engagé à un contrat d'abord de gré à gré de 52 000 $ — c'est un contrat de services, ça, là — 52 000 $, après l'élection, puis un autre contrat en septembre de 72 500 $... Donc, ça fait 124 500 $ de contrats de services à un ancien secrétaire général du gouvernement pour qu'il coache le nouveau secrétaire général du gouvernement, qui, lui, est payé 310 000 $ par année. Est-ce que ça fait partie des exceptions et des dérogations multiples qui vont aller de soi? Je ne sais pas, mais en tout cas c'est une pratique concrète qu'on vient de constater.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : Bien, j'avais posé, d'ailleurs, la question en Chambre au président du Conseil du trésor. Je trouvais que c'était pertinent de le soulever, en effet

Écoutez, sous-traitance, vous dites qu'il y a une augmentation de la sous-traitance, vous le mentionnez dans votre document. Moi, je vous dirais, il n'y a pas des gains à faire de la sous-traitance? Il doit y a voir une raison pourquoi on a sous-traité nos... ou que le gouvernement augmente sa sous-traitance. Il doit y avoir des gains, des gains en argent. J'imagine que ça coûte moins cher, sous-traiter, que d'engager des effectifs au sein des...

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Therrien : Je vous pose la question. Je ne vous dis pas que c'est ça, la réponse, je vous pose la question. J'ai l'air de dire une affirmation, mais je vous pose la question, là : Est-ce que c'est avantageux de sous-traiter? Je devrais dire ça, parce que, là, je vous ai vu le visage, là, je ne suis pas sûr que j'ai bien posé la question. Là, je vous pose la question : Est-ce que c'est avantageux de sous-traiter? Ça doit, parce qu'il y a eu une augmentation de la sous-traitance. Est-ce qu'il y a un gain à avoir à sous-traiter?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Bien, je ne suis pas d'accord avec votre conclusion, mais je vous dirais que, oui, dans certains cas il faut utiliser la sous-traitance, de façon intelligente, lorsqu'une intervention particulière et pointue est nécessaire. Par exemple, les entreprises à Lac-Mégantic qui ont été embauchées par nos professionnels au ministère de l'Environnement pour faire le nettoyage des citernes qui étaient au centre-ville, on n'a pas besoin d'avoir ça à l'emploi du ministère de l'Environnement 12 mois par année, tout ce personnel-là, là. Il faut être capable d'utiliser la sous-traitance de façon intelligente. On le fait même nous, au syndicat. On n'embauche pas du personnel pour faire un travail qui est pointu, qui est précis, qui nécessite une expertise particulière ou qui est temporaire dans le temps.

Le problème, c'est que la sous-traitance est devenue maintenant une avenue pour corriger le manque d'effectif, le manque d'expertise dans les ministères, pour faire du travail qui devrait être fait à l'interne à moindres coûts, et c'est là le problème. C'est un cercle vicieux. Les ministères engagent des firmes privées parce qu'ils n'ont pas l'expertise nécessaire. Ils ne peuvent pas avoir l'expertise nécessaire, parce que l'expertise, elle est à l'embauche des firmes privées, qui les paient plus cher. Donc, c'est un cercle vicieux dans lequel on est pris. Il faut briser ce cercle vicieux là, tel que le demandait même M. Legault en campagne électorale.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député, environ une minute.

• (17 h 40) •

M. Therrien : Oui. Pour terminer, vous avez beaucoup insisté sur la perte d'expertise, les conséquences que ça avait eu au MTQ et ce qu'on avait vu déborder, là, en commission Charbonneau. Ça, vous l'avez très bien mentionné.

Est-ce qu'il y a d'autres domaines que le MTQ où est-ce qu'on a vraiment noté, là, une perte d'expertise qui met en péril, si on veut, là, la gestion efficace des ressources publiques?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Bien, écoutez, on vient de donner l'exemple, là, de la gestion. Quand on regarde, par exemple, il y a des ministères aussi régaliens que le ministère de la Justice qui recourent, dans certains domaines, à 62 % de sous-traitants. Il y a de quoi être inquiet, il y a de quoi être inquiet. Et il y en a de multiples, domaines comme ça où on recourt à la sous-traitance : en matière de soutien à l'orientation par exemple, en matière de gestion, par exemple, de nos immigrants, d'intégration de nos immigrants. On vient de fermer, d'ailleurs, les directions régionales du ministère de l'Immigration, alors que c'est le contraire qu'il faudrait faire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Perron. Nous allons donc passer du côté de la deuxième opposition. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : M. le Président, merci. M. Perron, vous avez mentionné tantôt certaines choses, puis je voudrais faire des calculs, des règles de trois, puis vous me direz si j'arrive à un chiffre qui correspond à ce que vous avez en tête.

Alors, d'abord, dans votre mémoire à la page 6, dans le bas, vous disiez que la valeur des contrats de services en sous-traitance dans les ressources informationnelles de l'ensemble des MO de la fonction publique québécoise a grimpé de 218 millions de dollars à 778 millions de dollars, donc un bond spectaculaire, évidemment. Donc, on parle de 778 millions dans l'année la plus récente que vous avez.

Dans le dernier paragraphe de la page 7, vous dites, dans la troisième ligne : «Nous savons toutefois qu'il en coûte environ 2,5 fois plus cher au gouvernement pour embaucher du personnel contractuel, qu'il s'agisse d'individus ou d'équipes.» Vous avez également mentionné tantôt que 41 % de l'ouvrage pourrait se faire à l'interne.

Alors, si je fais un calcul, en fait, le 778 millions qui coûte 2,5 fois plus cher, donc, il y aurait environ 600 millions de ça qui est «over» payé, en bon français. 41 % de ça, donc, c'est 250 millions de dollars en valeur qui pourrait se faire à l'interne. Donc, il y a énormément d'argent qui pourrait être sauvé, là, si je comprends bien. Je vous ai bien compris en citant ces chiffres-là?

M. Perron (Richard) : Oui, oui, oui, vous êtes tout à fait, là, en phase avec nos constats. Il y a beaucoup d'argent à aller sauver, là, en matière de sous-traitance, et c'est pour ça que votre chef le disait en campagne électorale, même si ça peut paraître un petit peu surprenant de la part de quelqu'un qui a plutôt tendance à vouloir couper ou réduire la taille de la fonction publique ou l'expertise. Il avait compris qu'il y a des sommes importantes à aller économiser en matière de sous-traitance.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Surprenant : O.K. Donc, on s'entend donc sur le principe que ce n'est pas nécessairement un gel. C'est de déplacer l'emploi d'une case à l'autre pour la rendre moins coûteuse puis plus efficace et conserver l'expertise, c'est aussi simple que ça.

M. Perron (Richard) : Exactement. Regardez, Mme Courchesne, prédécesseure, Mme Courchesne avait décidé de prendre 120 millions de dollars de contrats au ministère du Transport, d'entretien de route, et de les faire faire à l'interne, décision intelligente que l'on a saluée et qu'on salue encore. Il y a des bons gestes, il faut les saluer. Et, dès la première année, on a constaté que les coûts d'entretien de ces routes-là avaient diminué, avaient coûté 59 millions de dollars, donc on avait économisé plus de 50 % de la facture en faisant faire les travaux à l'interne. Cet exemple-là, on devrait le multiplier partout, M. Coiteux, pour faire économiser des sommes importantes aux contribuables, et tout le monde vous en remercierait.

Le Président (M. Bernier) : Oui, M. le député de Beauce-Nord.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste environ quatre minutes.

M. Spénard : O.K. Moi, monsieur... Bonjour. Bienvenue, M. Perron et M. Riopel. On parle beaucoup d'emplois, on parle beaucoup... Puis là je ne veux pas m'adresser juste à vous, mais je veux savoir si vous avez une idée, une idée quelconque là-dessus, parce qu'il n'y a pas un groupe qui nous est arrivé et qui nous a parlé de ça, puis, moi, ça m'interpelle un peu. Parce qu'on parle tout le temps d'ETC, d'équivalents temps complet, du nombre, etc., mais on n'a jamais parlé de la productivité. À travers tous les mémoires qu'on a reçus, je n'ai pas vu un seul mémoire qui nous a parlé de productivité.

Est-ce que vous avez des études sur la productivité à l'intérieur de l'appareil gouvernemental, ministères ou organismes, et à l'extérieur? Y a-tu des études? Moi, je ne sais pas, je vous pose juste la question. Puis je ne veux pas dire que c'est vous, là, mais il n'y a pas un groupe qui nous est arrivé avec ça. Y a-tu des études de faites sur la productivité à l'intérieur et à l'extérieur?

Le Président (M. Bernier) : M. Perron.

M. Perron (Richard) : Bien, écoutez, on n'a pas le budget du gouvernement, on n'a pas les effectifs nécessaires pour faire ce genre d'étude là de productivité de la très grande panoplie des ministères et organismes. Mais ce que je peux vous dire... Ça ne fait pas si longtemps que ça que je suis dans la fonction publique, mais j'ai été embauché il y a quand même une vingtaine d'années et j'ai toujours entendu, depuis 20 ans, qu'il fallait faire plus avec moins, qu'il fallait faire plus avec moins, qu'il fallait faire plus avec moins. Et la Protectrice du citoyen a affirmé, il y a environ un an, que, dans l'état actuel des effectifs, couper dans les budgets des ministères et organismes, ce n'est plus couper dans le gras, c'est couper dans les services à la population directement. Donc, je pense qu'à travers toutes ces années, depuis 30 années de resserrement, de contrôle, de diminution des budgets, si on veut, des effectifs par rapport à la tâche, je ne vous dis pas de façon absolue mais de façon proportionnelle, des effectifs dans certains secteurs, moi, je pense que la corde... l'élastique de la productivité, il est pas mal étiré, il est pas mal étiré, de ce que j'ai pu constater, moi, dans mon ministère d'origine et qui avait une vue d'ensemble sur plusieurs ministères également.

D'ailleurs, c'est pour ça que, quand Jean Charest a démissionné, il a tenu à rendre hommage et dire à la population qu'on était chanceux, au Québec, d'avoir une fonction publique d'aussi grande qualité, parce que ça, ça compte dans le développement et la prospérité d'une société. Bien, si le plus haut placé est capable d'en constater les vertus, c'est certainement qu'il a constaté une certaine productivité.

Le Président (M. Bernier) : 30 secondes, M. le député.

M. Spénard : ...à l'intérieur des différentes redditions de comptes que vous avez à faire à différents ministères, avez-vous une solution pour les réduire ou les simplifier? Y a-tu des solutions d'amenées à différentes tables, à différents ministères pour dire : Écoutez, là, cette reddition de comptes là, on n'en a réellement pas de besoin, pas aussi souvent? Est-ce que ça a été avancé à quelque table que ce soit?

Le Président (M. Bernier) : Je vous laisse 30 secondes pour répondre si...

M. Perron (Richard) : Je sais que le Vérificateur général en a parlé. Si on pouvait, là... Nous, on serait tout à fait disposés, puis on vous l'a dit, M. Coiteux, lors de la commission avec Mme Robillard sur la révision des programmes, on serait tout à fait disposés à s'asseoir et à voir quelles économies on peut faire dans certains cheminements ou processus administratifs qui n'ont pas lieu d'être en 2014.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Perron, M. Riopel. Merci de votre participation à cette commission parlementaire.

Donc, sans plus tarder, avant de suspendre les travaux, pour permettre au groupe de l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux de prendre place, je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 48)

(Reprise à 17 h 50)

Le Président (M. Bernier) : Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous recevons l'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux, représentée par Mme Diane Lavallée, directrice générale — Mme Lavallée — M. Luc Bouchard et M. Denis Perras. Donc, bienvenue à cette Commission parlementaire des finances publiques. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, la parole est à vous.

Association québécoise d'établissements de
santé et de services sociaux (AQESSS)

Mme Lavallée (Diane) : Merci. M. le Président, Mmes et MM. les membres de la commission, je tiens à vous remercier de nous avoir invités à participer aux consultations portant sur ce projet de loi.

Nos membres, qui emploient environ la moitié des effectifs de l'État, sont tout à fait conscients qu'il est justifié que le gouvernement puisse connaître le niveau des effectifs dans les organismes publics qu'il finance. Ils comprennent aussi qu'une reddition de comptes en matière de dénombrement des effectifs est essentielle et qu'ils doivent faire preuve de transparence dans la gestion des fonds publics. D'ailleurs, comme il sera mentionné plus loin, ils s'y consacrent déjà.

Il importe que les établissements conservent une marge de manoeuvre quand même suffisante à l'égard de leurs ressources humaines pour pouvoir répondre aux besoins grandissants de la population et pour faire face à toute situation de crise qui pourrait menacer la santé de la population, par exemple une épidémie. Nos commentaires, qui se veulent constructifs, s'inscrivent donc dans le sens de cette préoccupation.

Sur le dénombrement des effectifs, nous tenons à rassurer le ministre ainsi que les membres de cette commission que de nombreuses données concernant l'état de la main-d'oeuvre des établissements sont déjà transmises à l'appareil gouvernemental. En effet, le ministère de la Santé et des Services sociaux dispose de la banque R25, qui recèle une foule d'informations concernant les employés du réseau et qui tire ses informations à partir des données des systèmes de paie. Cette banque de données avec 75 variables permet, entre autres, de connaître l'état des effectifs en nombre de personnes et en équivalents temps complet, ainsi que le nombre d'heures rémunérées. Elle permet de connaître le nombre d'employés d'un titre d'emploi particulier, situé même à un échelon précis, ainsi que le type de prime dont ils bénéficient. D'ailleurs, dans le cadre de la négociation des conventions collectives, le Conseil du trésor utilise ces informations pour évaluer les coûts d'une mesure qui aurait un effet sur la rémunération.

Sur le plan de la détermination et de la répartition des effectifs, nous désirons exprimer certaines préoccupations. Comment le Conseil du trésor s'y prendra-t-il pour déterminer les effectifs dans le domaine de la santé et des services sociaux? Nous souhaitons grandement que le ministre puisse nous informer et nous fournir l'éclairage à ce niveau. Édictera-t-il que le ministère de la Santé et des Services sociaux dispose, à titre d'exemple, de 250 000 employés? Comment procédera-t-il pour faire une adéquation entre un nombre d'effectifs et les services de santé et de services sociaux à donner à la population? De son côté, comment le ministre de la Santé et des Services sociaux s'y prendra-t-il pour répartir les effectifs entre les différents établissements et organismes sous sa gouvernance? Et comment, toujours, l'adéquation entre cette répartition d'effectif et les besoins sera déterminée? Qu'arrivera-t-il si l'évaluation faite par le Conseil du trésor s'avère erronée ou si la répartition faite par le ministre de la Santé ne cadre pas avec les besoins de la population des différentes régions du Québec? Cela pourrait causer un préjudice grave sur la santé des populations. C'est pourquoi nous sommes profondément convaincus que ce sont les établissements qui, localement, sont davantage en mesure de déterminer le nombre et la nature des effectifs requis pour répondre aux besoins grandissants de la population.

Ceci étant dit, nous sommes quand même soulagés de constater que l'article 11 n'exige pas que cette répartition s'effectue sur des bases compartimentées, par exemple par type d'emploi ou par catégorie d'emploi. Nous saluons donc cette approche retenue par le ministre. Nous partageons également l'objectif énoncé à l'article 12 en matière de protection des services offerts à la population, et nous exprimons toutefois le souhait qu'il ne s'agisse pas là d'un voeu pieux et que les établissements disposent des ressources suffisantes pour assurer le maintien de leurs services, et ce, indépendamment des nouvelles formules de calcul qui découleront éventuellement du projet de loi n° 10 et ses modalités, s'il est adopté.

Le réseau doit composer avec des réductions budgétaires qui se sont chiffrées à 850 millions au cours des quatre dernières années. De plus, la loi n° 100 a contraint les établissements à réduire de façon significative leurs effectifs de nature administrative, soit une réduction de 10 % du personnel administratif, donc il y a une limite à leur capacité d'agir aussi à cet égard. Aussi, afin de se conformer à des objectifs de réduction budgétaire, certains établissements ont diminué, dans le passé, le nombre de postes dans le secteur de l'hygiène et de la salubrité afin de ne pas toucher aux postes cliniques. Nous avons alors assisté à une prolifération des infections nosocomiales. Quand on sait que chaque patient atteint de C. difficile coûte environ 50 000 $, on peut constater l'importance de maintenir des effectifs adéquats dans ce domaine, même s'il ne s'agit pas de personnel clinique.

Quant au contrôle des effectifs, les autorités ministérielles devront faire preuve de flexibilité pour tenir compte des budgets de développement et des situations particulières des établissements qui sont aux prises, pendant une période de référence, avec une pénurie de personnel notamment. Il faudra prendre en compte le fait que le volume d'activité est aussi variable dans le temps, que ce soit au cours d'une même année ou d'une année à l'autre. De plus, certaines situations imprévues peuvent amener une augmentation des heures travaillées ou rémunérées, notamment en cas de crise, comme nous l'avons vécu pendant l'épisode H1N1.

En somme, les établissements ne contrôlent aucunement la demande de services. Celle-ci peut évoluer selon la croissance des besoins, notamment en raison de l'augmentation des maladies chroniques et des problématiques reliées à la santé mentale, qui sont en augmentation. D'autres facteurs influencent l'offre de services, dont l'augmentation du vieillissement de la population. Et enfin, et non le moindre, les établissements sont tributaires d'orientations ministérielles, qu'on nous demande d'intensifier les soins à domicile ou une plus grande gestion des maladies chroniques. Donc, comment le projet de loi nous assure-t-il que ces facteurs seront pris en considération dans le contrôle de l'évolution des effectifs des établissements?

Nous venons d'illustrer les difficultés que soulève le projet de loi pour les établissements, et c'est pourquoi nous en questionnons la nécessité. Si le gouvernement estime que la banque R25 doit être actualisée afin d'améliorer la validité des informations qu'elle contient ou la périodicité de leur transmission, nul n'est besoin de procéder par voie législative, il suffit d'améliorer les outils et les processus actuels déjà existants.

Qu'est-ce qui est le plus important pour contrôler les dépenses publiques, le respect du cadre budgétaire ou celui du niveau des effectifs déterminé par le Conseil du trésor? Lorsqu'un établissement se voit octroyer un budget et qu'il le respecte, en quoi le nombre de personnes utilisées pour accomplir sa mission est-il important au regard de l'atteinte de l'équilibre des finances publiques?

À compter du 1er avril 2015, si le projet de loi est adopté tel quel, les ressources budgétaires allouées aux établissements le seront par programme-service. De plus, la mise en place annoncée d'un financement axé sur les patients aura un impact certain sur le niveau des effectifs des établissements. Nous voyons mal comment les mesures contenues au projet de loi n° 15, particulièrement celles ayant trait à la détermination et au contrôle des effectifs, pourront s'harmoniser avec cette nouvelle façon de faire, et la référence à l'année 2014 devient donc obsolète.

Enfin, a-t-on bien évalué les coûts reliés à la gestion et au contrôle des effectifs qui découleront du projet de loi, en termes notamment de ressources humaines et financières?

Toutes ces questions nous amènent à inviter le ministre à maintenir une approche de contrôle budgétaire plutôt qu'à procéder selon la manière prévue au projet de loi. Toutefois, si le projet de loi devait être adopté, nous demandons alors que les établissements bénéficient de l'exemption prévue à l'article 3 pendant une période d'au moins deux ans. En effet, le ministre et les membres de cette commission n'ignorent sûrement pas que le projet de loi n° 10 actuellement à l'étude pourrait amener une transformation majeure du réseau de la santé et des services sociaux et son financement. Les nouveaux établissements évolueront dans un environnement très différent de celui en place au moment de l'éventuelle adoption du projet de loi n° 15. Ils devront définir une nouvelle offre de services, une nouvelle structure de postes et une nouvelle organisation du travail. Les énergies des gestionnaires seront consacrées principalement à réussir cette transformation pendant les années à venir.

Donc, en conclusion, si la mouture finale du projet de loi devait demeurer sensiblement la même, il est impératif que certains paramètres soient respectés : éviter d'alourdir le fardeau administratif des établissements en utilisant au maximum les informations qu'ils transmettent déjà; laisser aux établissements la plus grande marge de manoeuvre possible eu égard à la gestion de leurs ressources humaines afin qu'ils puissent conserver leur capacité de s'adapter aussi aux besoins de leur population; éviter d'adopter une approche par silo — par titre d'emploi, par catégorie d'emploi ou par champ d'activité — car l'organisation du travail et la détermination de la structure de postes doivent continuer de relever des établissements. Donc, il faut éviter, bien sûr, de tomber dans de la microgestion.

Donc, merci, M. le Président. Et ça va nous faire plaisir de répondre aux questions des membres de la commission.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Lavallée. Merci de votre présentation. M. le ministre.

M. Coiteux : Merci, Mme Lavallée. Je vais commencer par la question sur les données actuelles, parce que vous avez parlé de la banque de données R25. Quels sont les enjeux avec l'augmentation de la fréquence de transmission des données notamment, là, sur les effectifs, par exemple données par heures rémunérées, par catégories d'emploi? Quels seraient les enjeux?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

• (18 heures) •

Mme Lavallée (Diane) : Bien, en fin de compte, les transmissions d'information, elles sont transmises à toutes les périodes de paie, hein? Il y en a donc 26 fois par année. Pour ça, il n'y a pas de contrainte, les établissements fournissent déjà l'information en grande partie, j'imagine, qui vous permet d'avoir un portrait assez fidèle du nombre d'employés dans le réseau de la santé, les catégories d'emploi, etc.

Par contre, ce qu'on nous dit, le traitement de cette information-là, ce serait peut-être plus pertinent, pour avoir une meilleure vue d'ensemble puis des périodes de référence plus valables, de pouvoir la fournir aux trois mois plutôt que d'en faire des analyses de façon plus régulière, ce qui permettrait de faire une analyse sur une plus grande période qui serait plus significative et plus représentative d'une réalité.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Vous disiez aussi, Mme Lavallée, qu'il y a des fluctuations notamment dans les heures travaillées en cours d'année qui sont normales. Donc, il y a quelques économistes ici, je pense, des deux côtés de la table. Donc, on va reconnaître l'existence de, excusez le terme anglais, un pattern saisonnier, donc, on est capables de capter tout ça. Donc, il y a moyen de trouver une cible d'effectif qui tient compte, là, d'une certaine fluctuation saisonnière.

Est-ce que ça, ça pose des enjeux particuliers pour vous?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Nous, on pense que les cibles d'effectif, ce n'est pas ce qui est le plus important, parce que, je vous dirais, chaque établissement, en fonction de, souvent, l'endroit où il se situe, peut avoir plus d'effectif mais rentre pareil dans leur budget.

Je vous donne des exemples. Dans certaines régions du Québec, il y a des pénuries de main-d'oeuvre plus spécialisées, comme des infirmières bachelières notamment. Ils vont embaucher peut-être plus de ressources qu'un établissement de même taille parce qu'ils vont faire faire du travail davantage par d'autres types de personnel, ça peut être des infirmières auxiliaires, des infirmières avec un niveau collégial. Certains établissements font faire plus de tâches administratives à du personnel administratif pour dégager des infirmières de leurs tâches administratives, pour les consacrer dans ce qu'ils font de mieux, des tâches cliniques.

Donc, cette marge de manoeuvre là peut faire en sorte que, oui, il peut y avoir plus d'effectif à certains endroits, dû à une réorganisation du travail qui tient compte d'une pénurie de catégorie d'effectif dans une région, mais ça n'a pas pour autant amené une augmentation des coûts de gestion des ressources humaines ou du budget de l'établissement.

Donc, nous, on pense que la marge de manoeuvre des gestionnaires des établissements doit demeurer, et les mieux placés pour déterminer le nombre d'effectifs qu'ils ont besoin et la catégorie d'emploi aussi doit être le plus près possible de l'offre de services, donc des établissements, des gestionnaires des établissements, et d'avoir un contrôle des budgets, bien sûr, puis de vous permettre d'avoir aussi le nombre d'effectifs qu'il y a dans le réseau de la santé. On est tout à fait d'accord avec ça, que l'État doit le savoir, et les outils actuels permettent aussi de le faire.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Dites-moi si je me trompe, mais la situation que vous décrivez ici, c'est des réaffectations d'heures travaillées d'un secteur vers un autre secteur. Alors, ils ont fait moins d'heures dans tel domaine, ils ont fait plus d'heures dans tel domaine, mais ça ne doit pas nécessairement s'accompagner d'un volume global d'heures travaillées en croissance constamment, non? C'est plus une réaffectation. Dans le fond, vous voulez la flexibilité de réaffecter à l'intérieur d'une enveloppe globale qui tient compte notamment de la saisonnalité.

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Bon, il y a la saisonnalité, mais il y a aussi les besoins de la population, il reste qu'il y a eu des besoins croissants de la population du Québec. Selon toutes les données, il y a une augmentation, hein, le vieillissement de la population, une augmentation des maladies chroniques, une augmentation des problématiques en santé mentale. Ça peut amener et ça amène, justement, une augmentation, souvent, des effectifs pour répondre à ces besoins-là, hein? Ce sont des humains qui ont besoin de services et dont les services de santé sont offerts par du personnel.

Donc, oui, ça peut expliquer une augmentation aussi des besoins des effectifs dans le secteur de la santé, si on veut répondre aux besoins grandissants de la population. Sinon, ça va se traduire par une diminution des services à la population. Si les besoins augmentent puis on reste avec le même nombre d'effectifs, vous comprendrez qu'il va falloir avoir une coupure à quelque part des services à la population.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : M. Perras.

M. Perras (Denis) : Peut-être un complément, M. le ministre, pour vous expliquer que, oui, des fois on peut avoir des heures travaillées en plus grand nombre par une main-d'oeuvre qui est moins rémunérée. Alors, quand on parlait tantôt, là, des gestes de nature administrative qui sont confiés à du personnel administratif, donc qu'on dégage les infirmières et qu'elles peuvent se consacrer, à ce moment-là, davantage à donner des soins, ce que la population attend, mais il y a aussi des exercices de réorganisation du travail qui font en sorte qu'on peut abolir dans un service, mettons, deux postes d'infirmière, parce que les infirmières ne faisaient pas juste des tâches d'infirmière, et de dire : Bien, avec les heures qui étaient travaillées, mettons une moyenne de 70 heures pour les deux, bien on peut mettre plus de préposés aux bénéficiaires, qui commande une rémunération nettement inférieure. Donc, on pourrait avoir trois préposés aux bénéficiaires dont le nombre d'heures, finalement, va correspondre à 105 heures, mais on va avoir fait des économies en plus.

Donc, c'est pour ça que, la question des heures travaillées, des heures rémunérées, du nombre d'effectifs, on dit : Ça ne va pas. Ce qui est important, c'est plus de contrôler le budget. Quand on vise un objectif d'équilibre budgétaire, c'est sur le budget qu'on devrait davantage consacrer... le respect du budget qu'on devrait consacrer nos énergies.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. Bouchard.

M. Bouchard (Luc) : ...M. le ministre, la période de référence dont on fait référence ici, à l'article 36, où on dit du 1er janvier au 31 mars, pose un problème dans le sens que, dans certaines organisations, les saisons... On prend l'exemple des Îles-de-la-Madeleine ou Magog, etc., où la population double durant le mois de juin au mois de septembre. Ça poserait certains problèmes, parce que le saisonnier, il varie d'une région à l'autre, O.K.?

Alors, ce qu'on dit, c'est qu'il ne faut pas prendre une période de référence fixe de trois mois pour déterminer, en 2015, quel va être le nombre d'effectifs comparé à 2014, parce que la fenêtre n'est pas égale de région en région, d'établissement à établissement ou de situation de santé à situation de santé aussi. Alors, la période de référence ici, en la limitant à trois mois comme dit dans le projet de loi, peut causer un problème dans certaines régions. C'est une fluctuation saisonnale qui change d'une région à l'autre du Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, là où je peux... Puis c'est l'esprit du projet de loi. Puis, dans ses modalités d'application administratives, on va certainement tenir compte de tout ça, là. C'est une enveloppe que le ministre va devoir distribuer en tenant compte des aspects que vous mentionnez, là, justement pour que ça se fasse de façon cohérente avec comment ça fonctionne en pratique, là, vos besoins dans le secteur de la santé. Ça ne sera jamais une règle mathématique pure qui ne tient pas compte de ces réalités-là. Donc, ça, c'est simplement pour, dans le fond, vous rassurer par rapport à cette question-là.

Et vous avez mentionné qu'il y a deux façons, là... Bien, il y a une façon que vous avez mentionnée, d'atteindre des cibles budgétaires, là. Supposons qu'on trouvait un équivalent — puis il y a certainement possibilité de le faire si on connaît l'évolution des effectifs à chaque année — un équivalent budgétaire d'un gel des effectifs, compte tenu de la répartition actuelle des effectifs dans les différentes catégories. Vous dites : On peut confier une tâche à une personne qui a un niveau de rémunération différent et qui a toutes les qualifications pour le faire. Bon, j'imagine que vous avez certaines entraves aussi en pratique pour faire ça, peut-être des règles, peut-être des conventions collectives. Est-ce qu'il y a des choses qui vous empêchent de faire ça à l'heure actuelle?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavalllée.

Mme Lavallée (Diane) : Il y a quand même de la marge, mais il reste qu'il y a des tâches qui sont réservées exclusivement à certains professionnels, puis il faut le respecter. Puis ça relève aussi d'une qualité de services à la population puis de la sécurité des services.

On peut le faire, mais je vous dirais que, par le passé, il y a eu beaucoup, beaucoup de réorganisation sur le plan administratif pour faire en sorte qu'on libère le personnel clinique de tâches administratives qui faisaient... Beaucoup d'infirmières dans les soins à domicile, des psychologues, des travailleurs sociaux avaient de nombreux documents administratifs à remplir. Il y a eu des changements dans l'organisation du travail, qui fait qu'on a confié ces tâches-là davantage à du personnel administratif pour les confier... pour les consacrer exclusivement à leurs tâches cliniques. Donc, je pense, c'est cette marge de manoeuvre là que les établissements doivent continuer à avoir pour améliorer l'efficience, continuer à offrir des soins de meilleure qualité et contrôler les coûts.

Puis, dans le contrôle des coûts, je vous dirais que la province est celle qui dépense le moins per capita au Canada, dans le réseau de la santé. Je pense qu'on peut conclure qu'il y a de l'efficience là puis il y a de l'efficacité et que les gestionnaires, qui, depuis les dernières années, ont fait des redressements de l'ordre de 850 millions de dollars tout en offrant des services de qualité à la population du Québec, ont largement revu l'organisation du travail pour permettre de maintenir des services de qualité à la population du Québec. Bien qu'il y ait toujours des améliorations possibles, et puis on est très ouverts à ça, bien je pense qu'il faut se rappeler que, si le Québec dépense moins que l'ensemble des autres provinces per capita dans le secteur de la santé, avec les services qu'on offre, il y a de l'efficience dans notre système.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Je n'en doute pas, mais la question que... puis toutes les organisations se la posent toujours : Il y a peut-être de l'efficience, mais est-ce qu'il peut y en avoir encore plus? Il y a de l'efficience, mais est-ce qu'on peut encore l'améliorer, cette efficience? J'imagine que ça peut encore se faire.

Puis est-ce qu'on est capable de livrer des services en portant une attention particulière non seulement à qui fait quoi dans le réseau, c'est-à-dire je libère quelqu'un de faire certaines tâches pour qu'il fasse une autre tâche, mais est-ce qu'on est capable de faire ça, ce genre d'exercice là, dans une période de contrôle, sans augmenter globalement les effectifs? Est-ce qu'il y a un espace, autrement dit, pour être encore un peu plus efficace?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavalllée.

• (18 h 10) •

Mme Lavallée (Diane) : Il y a de la marge, il y a de la marge. Mais, quand on parle de contrôle des coûts, je pense qu'il faut regarder dans tous les secteurs, hein? On est sortis dernièrement avec l'Association médicale du Québec pour démontrer que, dans le réseau de la santé, il pouvait y avoir de l'efficience améliorée et des coûts... en tout cas des coûts puis des marges de manoeuvre importantes si on s'attaquait au surdiagnostic et la non-pertinence de certains actes. Des radiologies, des choses qui sont prescrites inutilement, il peut y en avoir, selon l'Association médicale du Québec, entre 2,5 à 5 milliards par année. Donc, nous, on invite fortement le gouvernement à regarder aussi dans cette direction-là, comment on peut s'assurer... Quand on cherche des milliards puis à raison il faut atteindre des équilibres budgétaires, bien il faut aussi regarder du côté de la non-pertinence et de l'inefficacité pour justement se dégager des marges de manoeuvre.

Moi, je pense que, de ce côté-là, ce serait prometteur qu'on s'y attarde, au Québec, comme dans d'autres juridictions ils l'ont fait. Et il y a là un espace important pour dégager des marges de manoeuvre pour le gouvernement et permettre au réseau de la santé d'investir davantage là où on en a besoin, dans les soins à domicile, une amélioration des services, l'accès aux services en première ligne, et à travers même la masse budgétaire existante, parce qu'on comprend bien qu'à 49 % du budget de l'État en santé... qu'il n'y en aura pas plus. Puis on n'en demande pas plus, et c'est réaliste de le faire. Par contre, à travers ce budget-là, il y a moyen de faire mieux et d'avoir plus d'efficience, puis il faut qu'on regarde aussi de ce côté-là. Ce n'est pas que l'affaire des gestionnaires, d'accroître l'efficience du réseau de la santé et des services sociaux.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Vous faites référence au fait que vous avez, au cours des quatre dernières années, absorbé 850 millions de compressions. Est-ce que vous pourriez détailler un petit peu plus comment vous vous y êtes pris pour les absorber en maintenant les services?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Chacun des établissements a dû mettre en place des plans de redressement, hein, ils ont sûrement été différents à Montréal. Les gestionnaires, avec leurs conseils d'administration, ont pris des décisions pour atteindre ces objectifs-là. Il y a eu sûrement de la réorganisation du travail qui a été regardée. Il y a eu toutes sortes de mesures, des projets «lean» pour accroître la performance.

Donc, il y a eu beaucoup d'améliorations qui ont été faites, et c'est dans ce sens-là que les gestionnaires ont toujours travaillé avec leurs conseils d'administration depuis les quatre dernières années. Les budgets étaient déjà amputés, donc il fallait qu'ils rentrent dans l'enveloppe budgétaire. Et il y a la loi qui prévoit qu'il y a impossibilité de faire des déficits dans le réseau de la santé. Donc, il y a eu des mesures différentes, je vous dirais, d'un établissement à l'autre, d'une région à l'autre pour permettre de tenter de maintenir des services à la population de grande qualité tout en réduisant.

Il y a eu des fusions aussi. Il y a eu des mises en commun d'achats, des regroupements. Ce n'est pas d'hier que les gens se parlent, dans les régions, pour mettre en commun des services, justement, pour réduire les coûts. Il y a des services de paie qui ont été mis en commun, des services d'achats regroupés, on regarde, là, les services d'informatique.

Donc, il y a eu beaucoup de travail de façon... sur une base régionale, mais il y a eu aussi des choix qui ont été faits dans chacun des établissements, chacun des CSSS pour diminuer les coûts, puis répondre aux besoins du gouvernement, et d'être solidaire, en fin de compte, avec les objectifs du gouvernement d'atteindre un équilibre budgétaire.

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste une minute.

M. Coiteux : Mon collègue aurait une question, de Mégantic.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez une minute.

M. Bolduc (Mégantic) : Une minute? Oh mon Dieu! Seigneur! Merci, M. le Président.

Vous avez une expérience très large et vous semblez nous donner beaucoup d'indications sur la qualité ou... les opportunités qui se sont matérialisées au cours des dernières années. Si vous aviez un conseil ou une façon de voir qui pourrait être utile au ministre dans l'élaboration de notre projet de loi, quel serait-il?

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le député de Mégantic. Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Si on avait... Bien, c'est de laisser, moi, je vous dirais, la marge de manoeuvre aux établissements pour déterminer comment organiser les ressources humaines de la façon la plus efficace possible. Et, moi, le conseil que j'aurais, si je peux me permettre ainsi, c'est vraiment de s'assurer de demander au ministère de la Santé, au ministre, de vous fournir toute l'information qu'il détient à l'heure actuelle, et qui vous permettrait sans doute d'atteindre vos objectifs d'une meilleure connaissance du nombre d'effectifs par catégories d'emploi. La rémunération, le service de paie aux 15 jours permet d'avoir toutes ces informations-là. Et, si jamais vous en aviez besoin d'autres pour satisfaire les besoins du Conseil du trésor, de le faire sans alourdir les tâches administratives, qu'on tente, bien sûr, de diminuer de plus en plus pour se consacrer, dans le réseau de la santé, aux services à la population.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Lavallée. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je souhaite la bienvenue à M. Perras, M. Bouchard et Mme Lavallée. Alors, je suis très content d'être avec vous aujourd'hui.

Écoutez, je vais revenir sur quelques aspects, parce que vous avez quand même bien élaboré. D'abord, une première réflexion, vous parlez des bouleversements que la loi n° 15, si elle est adoptée comme telle, pourrait causer chez vous en termes de changement au niveau de la gestion. Moi, je vous poserais la question, là : On vous envoie la loi n° 10 et la loi n° 15 d'ici Noël, mettons, ou en tout cas très rapidement, là. C'est quoi, les conséquences d'avoir ces deux projets de loi, là, qui sont assez costauds, qui vont changer votre façon de gérer la santé, là? C'est quoi, les problèmes aussi? Qu'est-ce qu'il va y avoir comme conséquences?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Écoutez, encore faut-il croire qu'ils vont être adoptés tels quels, là. On présume que les commissions parlementaires donnent la possibilité aux gens de s'exprimer et peut-être d'en modifier certains aspects.

On n'est pas contre, comme on vous le dit, là, le contrôle des effectifs par le biais du Conseil du trésor puis le gouvernement du Québec. C'est sûr que c'est deux gros projets de loi qui viennent changer beaucoup dans la marge de manoeuvre qui est laissée aux administrateurs pour gérer, d'être responsables de leur gestion dans le réseau. Moi, je veux dire, si on a peut-être une indication à donner, un conseil, c'est de tenter de donner le plus de marge de manoeuvre aux gestionnaires et les rendre imputables des décisions qu'ils ont à prendre, qu'on fonctionne avec des objectifs de résultat plutôt que des contrôles, mais de donner aux gestionnaires du réseau des objectifs de résultat à atteindre quant à... des objectifs budgétaires mais aussi des objectifs de santé populationnelle, et de les laisser travailler à organiser l'offre de services pour répondre aux besoins de leur population. Je pense que, peu importent les projets de loi, s'il y a un message à transmettre, c'est de laisser de la marge de manoeuvre aux gestionnaires qui offrent les services, le plus près possible des besoins de la population, et de s'assurer qu'ils rendent des comptes sur ces objectifs-là de santé, notamment, de la population sur leurs territoires.

Le Président (M. Bernier) : Merci, madame. M. le député.

M. Therrien : Oui. Vous avez dit que vous n'étiez pas contre le contrôle des effectifs par le projet de loi n° 15, c'est ce que vous venez de dire. Est-ce que ça...

Mme Lavallée (Diane) : ...dénombrement des effectifs.

M. Therrien : Le dénombrement. O.K. Je voulais m'assurer, là, que j'avais bien...

Mme Lavallée (Diane) : Pas contre le dénombrement. Le contrôle, moi, je pense qu'il faut laisser la marge de manoeuvre aux établissements, mais, qu'on dénombre, qu'on sache combien il y a d'employés, combien on les paie, tout ça, je pense que c'est normal. Puis d'ailleurs cette information-là est disponible.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : O.K. Je voulais juste... C'est parce que vous m'avez dit ça, ça fait que, là, j'ai dit...

Mme Lavallée (Diane) : En contrôle? Oui, possible.

M. Therrien : Mais c'est correct, hein? C'est peut-être un mot que vous avez échappé, puis je peux comprendre.

Mme Lavallée (Diane) : Ça se peut que ça m'ait échappé, oui.

M. Therrien : Oui, absolument. Moi, en tout cas, ça m'arrive souvent. Alors, il y a...

Une voix : ...un petit manque de contrôle.

M. Therrien : Oui, c'est ça. Écoutez, ce que j'ai trouvé intéressant, entre autres, dans votre mémoire — on essaie de trouver des particularités des mémoires, de chaque mémoire, là — c'est de dire : Écoutez, on ne pense pas que le contrôle des effectifs puisse nous amener dans une amélioration de l'efficacité de l'État; dans notre domaine à nous, c'est plus un contrôle budgétaire qui pourrait nous le permettre. Moi, j'ai trouvé ça intéressant.

Puis ensuite le ministre vous a dit : On a éliminé... baissé de 850 millions, là, la gestion, vous avez diminué la facture de la gestion, là, de vos services de 800 millions sur quelques années. Et après ça... avant ça vous avez parlé, là, d'une possibilité d'enlever, là, des milliards de dollars par rapport aux diagnostics, là, les diagnostics en doublon, ou en tout cas la lourdeur de toute la façon qu'on fait la santé au Québec.

Qu'est-ce que ça prendrait pour qu'on réussisse ce que vous nous avez dit? Qu'est-ce que ça prendrait? Puis est-ce que le projet de loi n° 15 va vous aider à y arriver?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

• (18 h 20) •

Mme Lavallée (Diane) : Non, parce que, pour s'attaquer au problème de surdiagnostic ou de la non-pertinence, il faut aussi travailler en collaboration avec les médecins, parce que ce sont les médecins qui prescrivent les examens de laboratoire, de radiologie qui, dans certains cas, ne seraient pas considérés optimaux ou efficaces et pertinents.

Ceci étant dit, on ne veut pas enlever la marge de manoeuvre de la responsabilité médicale des médecins d'établir les diagnostics puis de trouver le bon traitement pour les gens. Par contre, il existe des études probantes, scientifiques qui démontrent clairement... Et ces études-là sont faites avec des scientifiques, dans des équipes de scientifiques dans lesquelles se retrouvent des médecins, et qui sont capables de vous dire que, sur l'ensemble, là, des examens qui sont prescrits pour des problèmes colorectaux ou des dépistages du cancer du côlon chez les femmes, tel et tel examen qui est utilisé à tel rythme ne sont pas efficaces et pertinents et peuvent engendrer même des problèmes.

Donc, on dit : Si ça existe, ces études-là, il faudrait en prendre acte et s'assurer que l'INESSS, l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux, puisse avoir la responsabilité de faire ces études-là, le faire en collaboration avec nos chercheurs, nos médecins. Et, à partir du moment où, avec des données probantes, on constate qu'une répétition abusive de tel et tel examen ne devrait pas se faire au Québec, bien, que ça sorte du panier de services et que ce soit interdit, tout simplement. Et, dans ce sens-là, l'État n'aurait pas à payer pour des examens inutiles.

Donc, il y a des juridictions qui l'ont fait. Je regarde en Angleterre notamment, il y a un institut qui s'attaque à ces éléments-là et dont les recommandations sont exécutives. Donc, ça évite de politiser le débat autour de ce qui devrait être dans le panier de services, dans le type d'examen qui devrait être fait, le nombre d'examens qui devraient être faits pour telle problématique, y compris tel médicament. Cet institut-là décide qu'avec les données probantes tel type de médicament, notamment, oncologique, très coûteux, qui n'améliore pas nécessairement la qualité et la durée de vie des personnes, ne devrait pas être dans le panier de services payé par le public, parce que c'est très coûteux puis ça n'a pas les objectifs... on n'en a pas nécessairement pour notre argent. Donc, ça évite qu'il y ait des pressions politiques ou de lobby qui se fassent auprès des ministres et des élus, c'est un institut de chercheurs neutre qui décide et recommande ce qui devrait être dans un panier de services ou pas selon des données probantes. Et ça, ça serait une voie qui serait à explorer, selon nous, au Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Oui. Vous avez parlé aussi des soins à domicile, de favoriser les soins à domicile, c'est beaucoup moins coûteux. Pourquoi je vous pose ces questions-là, c'est que vous... bien la santé accapare à peu près la moitié du budget du gouvernement, donc, puis c'est en augmentant, les besoins sont en augmentation. Alors là, ce que je comprends de vos propos, c'est que, si on veut faire en sorte d'améliorer l'efficacité du réseau de la santé, il faut y aller de solutions comme ça au niveau de l'innovation dans notre approche des services de santé — puis j'inclus là-dedans les soins à domicile — et c'est de cette façon-là qu'on va réellement améliorer, hein, la santé budgétaire du gouvernement, à travers ce que vous allez faire comme offre de services. C'est ce que je comprends.

Ça fat que des solutions comme le projet de loi n° 15 ne nous amènent pas dans une situation comme ça. Ça veut dire qu'il faudrait proposer comme des soins à domicile ou des façons innovantes de produire des services dans votre domaine, c'est ce que je comprends.

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : C'est qu'avec aussi la main-d'oeuvre disponible, bien, je pense que c'est important aussi de voir qu'on devrait accentuer le nombre de soins à domicile. Ça peut demander à court et à moyen terme une augmentation des ressources dans ce secteur-là, mais en bout de piste on va économiser, parce que, de maintenir les gens à domicile, toutes les études démontrent que ça peut coûter presque trois fois moindre que les héberger en CHSLD, pour les personnes en perte d'autonomie. Donc, il y a peut-être un investissement à faire mais qui en bout de piste va s'avérer une économie, à plus ou moins long terme. Et ce sont des approches de ce type-là, nous, qu'on privilégie, effectivement.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Et ça va dans le sens de ce que vous disiez : Oui au contrôle budgétaire, non au contrôle d'effectif. Là, vous en avez un exemple criant, une évidence, là, qui vient nous prouver qu'à quelque part, là, si on veut améliorer l'efficacité de l'État, il faut y aller vraiment avec une approche budgétaire.

Dernière question que j'aurais, j'aimerais revenir sur la distribution des effectifs à travers... je sais que le ministre est revenu là-dessus, mais par rapport aux régions, par rapport au fait que les régions peuvent se trouver sous... en tout cas garnies de façon insuffisante en effectifs. Comment ça pourrait se corriger à l'intérieur du réseau? Si, mettons, le ministre dit : On vous donne tant d'effectifs, mais on s'aperçoit que, dans les régions, là, il y a comme une inéquation, là, qui fait en sorte qu'on ne remplit pas assez de services dans un coin en particulier, comment ça pourrait se gérer à l'intérieur du projet de loi n° 15?

Le Président (M. Bernier) : Je vous donne 30 secondes, Mme Lavallée. Après ça, on...

Mme Lavallée (Diane) : Ça peut difficilement se gérer du central. Et même le ministre de la Santé... Comment le ministre de la Santé peut déterminer que, sur la Côte-Nord, il y a un besoin de tant d'effectifs; à Montréal, c'est tant d'effectifs?

Présentement, les budgets, c'est à travers... Les budgets, présentement, les budgets sont faits sur une base historique, et le projet de loi n° 10 et ce qui s'ensuit, selon ce que le ministre nous dit, va changer complètement la donne quant au financement des établissements. Premièrement, il n'y en aura plus 125, il risque d'y en avoir une vingtaine. Ça va être un financement axé sur le patient, selon les programmes-services.

Donc, toute la budgétisation du réseau va changer, et c'est pour ça qu'on dit : Si vous allez de l'avant, bien, attention, dans les deux, trois prochaines années il y aura tout un bouleversement dans le réseau de la santé. Et attendons de voir pour revoir... Il y aura de la réorganisation des services qui va être faite, on va être dans des fusions de services, des fusions d'établissements; fusion des ressources humaines, fusion des unités d'accréditation. La cour est pleine.

Le Président (M. Bernier) : Merci, madame. M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Alors, merci, M. le Président. Alors, bienvenue, Mme Lavallée, MM. Bouchard et Perras. J'ai bien aimé votre mémoire, je l'avais lu en diagonale avant, puis j'aime bien votre intervention. Et je pense qu'en ayant diminué de 800 millions en quatre ans les services de santé...

Je ne suis pas sûr que tout ce que vous amenez, par exemple, s'adresse au projet de loi n° 15. Il y en a beaucoup qui vont être réglés par le projet de loi n° 10, je pense, réglés ou en phase de l'être. On parle de... Évidemment, d'avoir un contrôle des effectifs, on ne peut pas se soustraire à ça. C'est-à-dire qu'il faut savoir comment qu'on paie de monde à l'intérieur du réseau. Ça, on n'a pas le choix. Et j'aimerais vous préciser que c'est par catégories de personnel, par exemple. Lorsque vous m'avez apporté : Deux infirmières remplacées par trois infirmières auxiliaires, ça coûte moins cher, bien ça, ce n'est pas la même catégorie de personnel. En tout cas, j'imagine. Je ne sais pas comment ça va se passer.

Moi, j'ai passé six ans de temps vice-président du conseil d'administration d'un CSSS, et, quand tu es bénévole à l'intérieur de ça, tu arrives avec ton tableau de bord à tous les mois qui a à peu près 300 pages. Je trouve qu'il y a une reddition de comptes... Je trouve que la machine s'est alourdie elle-même pour des redditions de comptes que, bien souvent, on n'avait même pas besoin de voir ça. On n'avait même pas besoin de savoir ça. Ça ne nous donnait absolument rien, puis il n'y a pas un chat qui posait une question là-dessus, même pas le ministère.

Qu'est-ce que vous feriez, vous, en termes de reddition de comptes, pour essayer d'alléger la machine administrative? Parce qu'à un moment donné on ne comprenait plus rien.

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Bien, il faut de la reddition de comptes. Les établissements gèrent 17 milliards en fonds publics, donc c'est tout à fait normal qu'il y ait une reddition de comptes.

Par contre, il y a des contrôles qui sont... Il y en a beaucoup, puis ça a demandé beaucoup de personnel administratif, hein? On cible beaucoup les établissements qui devraient réduire le personnel administratif, et les nombreux contrôles et les demandes de rapport se font par le personnel administratif. Donc, il y a 112 rapports différents qui sont demandés par le ministère. Il y en a 10 qui ne portent que sur les ressources humaines.

Il y a eu un travail qui a été fait avec le ministère et les agences pour regarder l'ensemble des documents, justement, là, de reddition de comptes pour tenter de l'alléger. Malheureusement, pour le moment, on n'a pas vu les résultats. Et puis là on se retrouve avec le projet de loi n° 10 qui diminue le nombre de paliers décisionnels. Peut-être que ça va réduire les nombreux rapports de reddition de comptes, parce qu'il en faut, il en faut sur nos budgets, il en faut sur les ressources, il en faut sur les ressources informationnelles, et tout ça, mais effectivement il y a un travail à faire pour alléger et faire en sorte qu'on n'alourdisse pas davantage. Et on souhaite que le projet de loi n° 10 ne vienne pas non plus alourdir davantage. Même si on enlève un palier, qu'on dit, les agences, il reste que ça va sembler, à ce jour, être encore assez lourd, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup de demandes de reddition de comptes qui vont devoir se faire au ministère. Et nous, on souhaite que ça puisse être allégé, effectivement, là, et on est très ouverts à travailler avec le ministère à regarder qu'est-ce qui est essentiel pour eux sans alourdir sur le plan administratif, surtout que, là, vous savez, indépendamment du projet de loi n° 10, déjà à partir du mois de juillet dernier, les établissements avaient reçu comme indication de réduire de 1 300 le personnel cadre d'ici les trois prochaines années, de réduire... Ça s'ajoute au projet de loi n° 100 qui avait prévu une diminution de 10 % du personnel administratif. Donc, il y a de moins en moins de gens, sur le plan administratif, capables de remplir tous ces rapports-là. Ce qu'on veut, dans le réseau de la santé, c'est d'avoir du temps pour soigner les personnes et pas pour remplir de la paperasse. Donc, on est très ouverts à regarder avec le ministère comment alléger ces contrôles-là.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Combien de temps...

Le Président (M. Bernier) : Environ deux, trois... Trois minutes, tiens.

M. Surprenant : Excellent. Alors, Mme Lavallée, dans votre mémoire à la page 11, il est question, dans le haut, que «les établissements ont procédé au cours des dernières années à des exercices de réorganisation du travail. Plusieurs de ces derniers visaient à dégager les intervenants cliniques — ce qu'on apprécie et puis donc... — de certaines tâches administratives afin qu'ils se consacrent à ce qu'ils font de mieux : donner des services de santé et des services sociaux à la population. [Par contre, cela a] mené à la création de postes de soutien administratif.»

Alors, je voudrais que vous m'expliquiez en 30 secondes, une minute, là, quel a été l'impact au niveau de l'efficience des services donnés à la population? Pour nous, c'est très important d'essayer de réduire la taille du système pour qu'il y ait le plus de services possible. Quel a été l'impact de cette mesure-là, s'il vous plaît?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

• (18 h 30) •

Mme Lavallée (Diane) : ...des exemples, je pourrais donner l'exemple que, dans certains établissements, le fait d'avoir libéré des infirmières et des travailleurs sociaux, notamment, de tâches administratives parce qu'on les a confiées à du personnel administratif, ça a permis à ces cliniciens-là de voir beaucoup plus de personnes. Donc, la population en a bénéficié, il a pu y avoir une augmentation du nombre de cas suivis par ces infirmières-là en soins à domicile ou des travailleurs sociaux. Certains ont pu voir doubler et même tripler le nombre de personnes qu'ils pouvaient suivre par semaine parce qu'on les a dégagés de tâches administratives. Ça, c'est de la bonne gestion.

Et puis, oui, ça a pu augmenter quand même le nombre de personnel administratif, mais, si ça a pu dégager du personnel clinique pour voir plus de patients, en bout de piste, ça n'a pas coûté plus cher puis ça a augmenté le nombre de services à la population. C'est ce type de choix là ou de marge de manoeuvre là dont disposent les gestionnaires qu'on souhaite pouvoir conserver.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Surprenant : Une dernière question. Plus bas, dans le deuxième... le même paragraphe de la même page, vous dites : «Tout récemment encore, le ministère de la Santé et des Services sociaux a émis une directive en matière de cadres-conseils et de nomination de cadres supérieurs.» Alors, vous dites que c'est «une démarche de microgestion, et nous souhaitons ardemment qu'il fasse preuve de retenue en la matière».

Alors, par contre, dans ce cas-ci, là, j'aimerais ça que vous me disiez : Est-ce que ça a eu un impact sur les services, sur le fonctionnement ou en fait on a gagné, encore là, en efficience?

Le Président (M. Bernier) : Mme Lavallée.

Mme Lavallée (Diane) : Bien, écoutez, pour le moment, toutes les directives, là, puis les gels d'embauche de cadres supérieurs, bien, je pense, c'était prévu, on attendait le projet de loi n° 10. Donc, c'est clair qu'il ne peut pas y avoir des augmentations de cadres quand on prévoit une fusion puis une diminution du nombre d'établissements. Et puis, les 1 300 cadres qui seront coupés dans les trois prochaines années, là, je ne suis pas en mesure de vous dire quel sera l'impact, puis ça va se faire dans le cadre de la réorganisation de tout le réseau. Donc, ce sera à moyen et long terme qu'on sera en mesure de voir l'impact, là, de toutes ces réductions-là de personnel d'encadrement.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, Mme Lavallée. Merci, M. Bouchard. Merci, M. Perras, d'avoir participé à cette commission parlementaire.

Avant de suspendre, je peux vous informer que vous pouvez laisser vos choses sur les tables, les portes seront barrées.

Et vous aviser que nous reprendrons... Je suspends jusqu'à 19 h 30. Et je vous prie d'être à l'heure, s'il vous plaît, pour que nous puissions rencontrer le groupe suivant. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 32)

(Reprise à 19 h 30)

Le Président (M. Bernier) : Alors, bonsoir à vous tous. Bienvenue à la Commission parlementaire des finances publiques sur l'étude... les consultations sur le projet de loi n° 15.

La commission, voici l'ordre du jour pour ce soir. Nous entendrons tout d'abord l'Université du Québec — bienvenue, les gens de l'Université du Québec, on aura l'occasion d'échanger ensemble tout à l'heure — la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec et la Fédération étudiante universitaire du Québec.

Je souhaite la bienvenue à nos invités. Pour les fins d'enregistrement, comme je vous l'ai mentionné, je vous demande de bien vouloir vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez d'un total de 10 minutes pour faire votre exposé — je vais vous faire un petit signe à la fin, quand il restera une minute, de façon à conclure — et nous allons passer par la suite aux échanges avec les parlementaires. Donc, si tout ça est bien compris, je vais vous donner la parole immédiatement. Allez-y, Mme Proulx... Mme Beauchamp, Beauchamp.

Université du Québec (UQ)

Mme Beauchamp (Sylvie) : Beauchamp, c'est ça. Alors, bonsoir, tout le monde et surtout les parlementaires. Alors, je me présente : Sylvie Beauchamp. Je suis la présidente du réseau de l'Université du Québec. M'accompagnent ce soir pour discuter avec vous M. Daniel Coderre, qui est le chef d'établissement à l'Institut national de recherche scientifique; Mme Johanne Jean, la rectrice à l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue; M. Robert Proulx, le recteur de l'Université du Québec à Montréal; Mme Nadia Ghazzali, la rectrice de l'Université du Québec à Trois-Rivières; M. Nelson Michaud, qui est le directeur général de l'École nationale d'administration publique. Et, avec nous également et qui pourra également intervenir, M. Pierre Dumouchel, qui est derrière nous, qui est le directeur général de l'École de technologie supérieure.

Alors, je vais essayer d'être brève pour nous laisser le temps d'échanger sur cet enjeu majeur pour le réseau de l'Université du Québec. Alors, on s'exprime tous au nom des 10 établissements, et ces 10 établissements sont donc des universités autonomes, dotées de leurs propres instances, conseil d'administration, commission des études, donc instances de gouvernance. Je répète pour le bénéfice de tous les membres de la commission que le réseau est formé de l'Université du Québec à Montréal, de l'Université du Québec à Trois-Rivières, de l'Université du Québec à Chicoutimi — qui ne pouvaient pas être présents ce soir — de l'Université du Québec à Rimouski — qui n'est pas ici ce soir non plus — de l'Université du Québec en Outaouais; on l'a dit, de l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, de l'ENAP, de l'INRS, de l'École de technologie supérieure et de la Télé-université, qui ne nous accompagne pas mais qui est de tout coeur avec nous. Alors, c'est un...

Le Président (M. Bernier) : ...

Mme Beauchamp (Sylvie) : Pardon?

Le Président (M. Bernier) : Le Québec au complet.

Mme Beauchamp (Sylvie) : Oui, voilà. Alors, c'est un réseau qui est implanté, comme vous venez de le dire, M. le Président, sur tout le territoire québécois, en région rurale, en région urbaine, fortement ancré dans les milieux professionnel, industriel, socioéconomique et d'affaires. Ce sont des établissements qui se sont développés au cours des 50 dernières années et qui ont développé des créneaux d'excellence en formation et en recherche. Ces créneaux sont reconnus sur la scène nationale et sur la scène internationale. Ensemble, ces établissements représentent 96 000 étudiants, 600 000 diplômes décernés, 11 000 employés réguliers, dont 7 000 professeurs et chargés de cours.

Les établissements de l'Université du Québec estiment que leur inclusion dans le champ d'application de la loi représente une pression administrative qui n'a pas de valeur ajoutée pour l'État. Cette loi risque d'entraver leur capacité à fournir des services universitaires de haute qualité à l'ensemble des citoyens et, encore une fois, sur tout le territoire québécois. Les chefs d'établissement et leurs communautés craignent que cette décision ne contribue à l'idée d'un système universitaire à deux vitesses, ce que le Québec et le gouvernement du Québec se sont toujours efforcés d'éviter jusqu'à présent. Une telle situation aurait de lourdes conséquences pour le développement du Québec, notamment dans ses régions mais également en région métropolitaine.

Les questions que nous soulève ce projet de loi : Quel est le gain, pour le gouvernement, de l'inclusion de l'Université du Québec dans le champ d'application de ce projet de loi et pas les autres? Pourquoi hypothéquer le développement de la moitié des universités québécoises présentes, encore une fois, sur tout le territoire?

Le projet est un obstacle au développement de la moitié des universités québécoises, encore une fois, sans que nous croyions qu'il y ait une valeur ajoutée. Et la question est : Pourquoi?

D'abord, le dénombrement des effectifs des universités au gouvernement est déjà fait, en ce qui nous concerne, une fois par année en vertu de la Loi sur l'Université du Québec, avec le dépôt des budgets, qui sont accompagnés aussi des plans d'effectifs. Alors, nous transmettons annuellement ces informations.

Ensuite, parce que le financement qui contrôle les embauches et le financement de fonctionnement, ce financement est normé en fonction de critères qui sont bien établis et qui sont prévus dans les règles budgétaires qui s'appliquent à toutes les universités. Le véritable enjeu, pour les établissements de l'Université du Québec, c'est bien davantage l'embauche de spécialistes, de professeurs, de chercheurs de haut calibre et en nombre suffisant. Or, le projet de loi crée déjà une incertitude sur nos communautés qui pourrait entraîner des mouvements dans le milieu de la recherche notamment.

Le projet de loi risque de nuire à la réputation des établissements du réseau de l'Université du Québec et à leur capacité à obtenir des financements de recherche et à attirer les meilleures ressources. Pour, donc, attirer ces meilleurs professeurs, chercheurs et étudiants, il faut que les étudiants... il faut que les universités puissent leur offrir des perspectives d'avenir, il faut qu'ils puissent choisir et saisir des occasions de recrutement, de financement et de partenariat en fonction d'une vision à long terme.

Le projet de loi, malheureusement, n'est pas adapté à un milieu universitaire. Premièrement, il vient encadrer le droit d'engager à contrat. Les chargés de cours sont engagés à contrat. Qu'est-ce qu'on fait des chargés de cours?

Deuxièmement, le contrôle des effectifs, dans la moitié des universités, et en respectant les conventions collectives, introduit des déséquilibres entre les corps d'emploi en raison des dispositions de certaines conventions collectives en regard des planchers d'emploi et entre les établissements, parce que certains établissements ont des planchers d'emploi, d'autres n'en ont pas. Alors, on aura à composer avec des contraintes qui sont différentes sur le contrôle des effectifs.

Qu'est-ce qu'on fait des professeurs, des responsables de recherche engagés à partir des subventions ou des contrats de recherche obtenus par les chercheurs? C'est comptabilisé dans un autre fonds que le fonds de fonctionnement. Il y a là une entrave importante au développement de la recherche, qui est massivement subventionnée, on le sait, par le gouvernement fédéral, et donc c'est une contrainte additionnelle.

La recherche se fait beaucoup en partenariat, et les partenariats de recherche deviendront asymétriques en raison du contrôle des effectifs dans certains établissements seulement. Il faut comprendre qu'on ne travaille pas seulement entre nous, mais qu'on travaille aussi avec les autres établissements, les autres universités qui ne sont pas concernées par la loi. L'inclusion de l'Université du Québec et de ses établissements dans le champ d'application de la loi menace des créneaux de recherche d'importance pour le Québec : la stratégie maritime, le Plan Nord, les ressources naturelles comme les mines, la mer et la forêt boréale.

En conséquence, MM. les parlementaires, les chefs d'établissement de l'Université du Québec recommandent d'exclure l'Université du Québec du champ d'application de la loi, d'exclure aussi l'Université du Québec du périmètre comptable du gouvernement et d'alléger la reddition de comptes, qui est déjà très lourde.

Est-ce que j'ai respecté mon temps, M. le Président?

Le Président (M. Bernier) : Vous l'avez très bien respecté. Merci infiniment de votre présentation. Donc, sans plus tarder, nous allons passer du côté ministériel avec M. le ministre. La parole est à vous.

M. Coiteux : Merci beaucoup, madame... — excusez-moi, c'est parce que j'ai les noms ici, là — Mme Beauchamp. Merci beaucoup, donc, Mme Beauchamp. Puis je remercie en même temps toutes les autres personnes qui vous accompagnent ce soir.

Il y a deux aspects ici, parce que, dans vos recommandations, il y a la question de l'application de la loi elle-même, mais vous allez un petit peu plus loin en disant : On ne devrait pas faire partie du périmètre comptable du gouvernement. Sur quelle base vous diriez : On ne fait pas partie, on ne devrait pas faire partie du périmètre comptable du gouvernement?

Mme Beauchamp (Sylvie) : Bien, en fait, écoutez...

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp, oui.

Mme Beauchamp (Sylvie) : Pardon. Excusez-moi.

Le Président (M. Bernier) : Ce n'est pas grave. Je vous l'ai dit tout à l'heure, je vais simplement citer votre nom, et vous prenez la parole, pour fins d'enregistrement. Allez-y.

• (19 h 40) •

Mme Beauchamp (Sylvie) : Écoutez, on fait partie du périmètre comptable depuis 2007, sur des bases qui, justement, ne sont que... — c'est important pour vous, j'en conviens — qui sont des recommandations de l'institut canadien sur la comptabilité. C'est ça, MM. les comptables? Alors...

Une voix : ...

Mme Beauchamp (Sylvie) : Les financiers et les comptables. Mais c'est basé essentiellement sur le fait que l'Université du Québec est créée à partir d'une loi publique. Or, nous sommes subventionnés de la même façon que toutes les autres universités.

Et le gouvernement nomme les chefs d'établissement mais à la suite d'un long processus. Les critères qui ont été utilisés, à notre avis, ne sont pas pertinents dans le cadre d'une mission universitaire.

Peut-être que mes collègues veulent ajouter. Peut-être... Excusez-moi. Peut-être M. Michaud.

Le Président (M. Bernier) : M. Michaud.

M. Michaud (Nelson) : Merci beaucoup. En fait, ça ajoute une couche de plus de reddition de comptes qui est soit répétitive avec d'autres éléments qui existent... Ne serait-ce qu'en termes d'états financiers, on est obligés de donner des états financiers qui sont... là ils devront être trimestriels, alors que dans le monde universitaire, par exemple, les choses sont relativement prévisibles : on dépose un budget à notre conseil d'administration, il y a un budget révisé qui est déposé six mois plus tard, approuvé par le conseil d'administration, et il y a les états financiers qui sont vérifiés par une firme une fois l'année terminée. Et on doit avoir différents... Il y a les livres bleus, les livres blancs, les livres rouges. Enfin, il y a toute une série de redditions de comptes qui existe. Et cette reddition de comptes, vous avez tous vu l'espèce de graphique monstre qui a été préparé, cette reddition de comptes s'est complexifiée par sédimentation. Et cette décision de 2007 est une couche sédimentaire supplémentaire qui ajoute une reddition de comptes pour des éléments qui sont souvent fournis, par ailleurs.

Ce n'est pas qu'on s'oppose à la reddition de comptes, au contraire, je pense qu'en tant qu'organisme public nous sommes extrêmement soucieux de rendre compte de ce que nous faisons avec les deniers publics. Mais, ceci étant dit, le dire à répétition... Et surtout plusieurs de ces éléments de reddition de comptes tombent un peu dans une zone vide, parce que les ministères n'ont pas toujours les ressources pour les traiter, nous donner une rétroaction qui nous permettrait d'agir. Alors, on se dit : On est mieux d'avoir une reddition de comptes plus ciblée, plus adéquate et à partir de laquelle on pourra améliorer notre gestion, plutôt qu'une série de redditions de comptes qui est moins efficace et efficiente.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Vous dites que vous avez des planchers d'emploi dans certaines unités de l'Université du Québec et pas dans d'autres. C'est en vertu des conventions collectives qui sont différentes d'un établissement à l'autre, c'est ça?

Mme Beauchamp (Sylvie) : Exactement. M. Proulx, peut-être.

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp. Mme Beauchamp, oui.

M. Proulx (Robert) : ...nous, on...

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Pardon. Oui? Ça va?

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Oui. Nous, on en a au niveau de la convention collective avec notre corps professoral, qui détermine un plancher d'emploi en fonction du nombre d'étudiants, tout ceci pour appliquer des règles souhaitables en termes de taille des groupes-cours, et ainsi de suite. Donc, ça veut dire que, chez nous, si nos étudiants augmentent, le budget augmente, les postes de professeur augmentent par le même fait, c'est dans la convention collective. Dans d'autres universités, ce n'est pas le cas.

Et aussi un des problèmes que ça cause, c'est que, ceux-ci étant conventionnés, bien ce n'est pas le cas dans le cas des employés de soutien et ce n'est pas le cas dans d'autres corps d'emploi, ce qui veut dire qu'à un moment donné, pour appliquer certaines règles plutôt arbitraires, qui n'ont rien à voir avec notre fonctionnement, bien on se retrouverait avec des déficits, des capacités de... On ne pourrait pas compléter par le personnel de soutien, puisqu'il faudrait suivre la convention collective pour les embauches de profs, et ça ne suivrait pas au niveau des employés de soutien, s'il y avait, par exemple, des règles qui feraient qu'on serait tenu à ne pas augmenter le nombre de ressources, les effectifs, et ainsi de suite.

Alors, ça, c'est un exemple d'où s'applique un plancher d'emploi. Ailleurs, ça pourrait ne pas s'appliquer, dans une autre université, qui se trouverait par le même fait favorisée, et ainsi de suite. Alors, il y a des problèmes d'application au niveau des... en respectant les conventions collectives.

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp, vous voulez ajouter?

Mme Beauchamp (Sylvie) : M. Coiteux, est-ce que je peux ajouter un exemple qui peut-être va illustrer comment ça fonctionne, le périmètre comptable? Le Vérificateur général fait l'audit de l'UQAM. Les états financiers du réseau de l'Université du Québec sont consolidés pour l'ensemble du réseau, j'ai donc un auditeur indépendant qui vérifie le consolidé. Ensuite, donc, mon auditeur indépendant me dit : L'UQAM est vérifiée par le Vérificateur général, c'est une entité importante, donc, moi, auditeur indépendant, d'après mes règles, il faut que je vérifie l'UQAM qui a été vérifiée par le Vérificateur général. Là, quand j'entre dans le périmètre comptable, le Vérificateur général me dit : Ah! bien là vous êtes un élément du périmètre comptable, alors le Vérificateur général va vérifier mon auditeur indépendant qui a vérifié le Vérificateur général à l'UQAM. Alors, c'est compliqué.

Le Président (M. Bernier) : Mme Ghazzali, vous vouliez ajouter?

Mme Ghazzali (Nadia) : Oui, je voulais juste revenir un peu sur le plancher d'emploi. Donc, sans rentrer dans les spécificités, ce qu'a dit mon collègue Robert Proulx, c'est que ça crée une iniquité à l'intérieur même de l'établissement en plus de créer une iniquité entre les établissements, dans le sens... Moi, par exemple, les profs sont... on a un plancher d'emploi qui est fonction du nombre d'ETP. Si les 30 ETP... je suis obligée d'ouvrir un poste de professeur. Et je ne l'ai pas pour les autres corps de métier. Alors, qu'est-ce qui va se passer? Ce qui va se passer, c'est que je suis obligée en vertu de la convention collective, et d'après le projet de loi, l'article 33, de respecter la convention collective, et auquel cas, bien, je ne pourrai pas embaucher des employés de soutien ou des professionnels, parce qu'ils ne sont pas régis par un plancher d'emploi.

Donc, vous comprenez, on ne peut pas, dans une université, n'avoir que des professeurs, vous le comprenez très bien. Il faut du personnel de soutien. Il faut les professionnels, les techniciens. Donc, ça nous met dans une situation intenable, entre autres l'article 33.

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Oui. Bien, pour terminer, sur le périmètre comptable aussi... Je ne répéterai pas ce que mon collègue M. Michaud a dit, mais simplement pour vous expliquer aussi une autre réalité. L'UQAM, qui est 50 % du réseau de l'Université du Québec, est une université métropolitaine, à Montréal. Elle a été créée pour satisfaire un besoin de démocratisation du savoir et elle a fait sa job. La preuve, c'est que, dans les derniers temps, on a eu le colloque... on a eu les prix de l'ACFAS : sur sept prix, quatre l'étaient à l'UQAM, puis le huitième qui était au cégep, l'autre, travaillait avec les gens de l'UQAM. Donc, on est présents.

Et j'insiste beaucoup, dans le développement de mon université, sur la collaboration interuniversitaire montréalaise, parce qu'on veut lancer Montréal comme métropole canadienne, comme l'est Boston, au niveau du rayonnement par les universités, à travers les universités. Alors, vous comprendrez que, quand on est dans le milieu montréalais, bien je travaille avec des... j'ai des programmes conjoints avec McGill, j'en ai avec Concordia, j'en ai avec l'Université de Montréal, on a des centres de recherche partagés, en commun, et tout ça nous amène à réaffecter nos ressources de façon collective. Et, s'il se retrouve, à un moment donné, que nous, à cause qu'on est soumis à des procédures particulières, compte tenu qu'on est dans le périmètre comptable, compte tenu qu'on est sous le couvert d'une loi, auxquelles les autres universités ne sont pas, bien, à ce moment-là, ça va détruire ce processus-là. Et il y a tout intérêt, à Montréal — j'insiste toujours là-dessus — à ce qu'on parle en termes de pôle universitaire et non pas en termes d'universités chacune dans son coin. Et ces contraintes-là qui ne devraient pas exister parce qu'elles n'existent pas pour la moitié des universités, elles existent juste pour l'autre moitié, bien, nous forcent à ne pas être capables de travailler en collaboration avec nos partenaires montréalais, qui, d'autre part...

Souvent, je pense au Geotop chez nous. Bien, c'est nous qui avons créé le centre. Je pense à toutes sortes d'initiatives en recherche qui ont été lancées par l'Université du Québec à Montréal, auxquelles s'est joint McGill et Montréal, puis à un moment donné on se retrouve dans une situation où, à cause d'une série de règles de reddition de comptes, et de façons de faire, et des capacités qu'on a ou qu'on n'a pas d'allouer nos ressources, tout en rendant des comptes de façon très, très, très claire, de la même façon que les autres universités, bien on se retrouve à s'exclure de ce pôle-là et à ne pas faire profiter l'ensemble du réseau de l'Université du Québec de tout ce qu'on pourrait développer dans la métropole.

Alors, dans ce sens-là, ça ne fait pas de sens qu'on soit dans le périmètre comptable, pour la même raison que ça ne fait pas de sens pour les autres universités, et ça ne fait pas de sens qu'on soit soumis à la loi sur les effectifs qui est ici présente. C'est pour ça qu'on vous dit qu'on veut, les deux...

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : J'imagine que vous avez des... Les données dont vous disposez, vous avez combien de professeurs, vous avez combien de chargés de cours, vous avez combien d'employés de soutien, vous avez combien de gens qui travaillent dans la partie administrative, ça, ces données-là, vous les avez dans l'ensemble du réseau de façon très détaillée?

Mme Beauchamp (Sylvie) : On vous les transmet annuellement.

M. Coiteux : Oui. Comment ça a évolué globalement pour ces différentes catégories là au cours des dernières années?

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp.

Mme Beauchamp (Sylvie) : Mme Boucher, est-ce que vous voulez répondre à ça? Ou madame... M. Roy? Je vais demander à M. Roy de se joindre à nous si...

• (19 h 50) •

Le Président (M. Bernier) : Bon, bien, regardez, M. Roy peut se joindre à... Il y a une chaise de libre avec un micro, si vous voulez prendre place. Ça va faciliter les choses.

M. Roy (André G.) : Alors, bonsoir.

Le Président (M. Bernier) : Bonsoir, M. Roy.

M. Roy (André G.) : André Roy, secrétaire général de l'Université du Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Allez-y.

M. Roy (André G.) : Alors, dans le cadre du mémoire, on vous a fourni certaines données qui portent sur les années 2008 à 2013. Donc, vous voyez que, pour l'ensemble des employés, la hausse se situe à 11,6 %; pour ce qui est des professeurs, 12,4 %; et le personnel non académique, 11,2 %. Ça, donc, c'est pour les cinq dernières années. Et ça, on a des données qui vous sont fournies annuellement depuis que la loi de l'Université du Québec existe, près de 50 ans.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Suivant les courbes que j'ai ici à la figure 2, là, les 12,4 %, 11,6 %, 11,2 %, ça, c'est cumulatif sur la période, c'est ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Roy.

M. Roy (André G.) : Oui, exactement. Ça reflète l'augmentation.

M. Coiteux : O.K. Donc, grosso modo...

M. Roy (André G.) : ...à partir de 2008.

M. Coiteux : Selon les catégories, là, il y a un 2 % de croissance par année des différentes catégories, grosso modo, là, si on...

M. Roy (André G.) : Grosso modo. Et vous pouvez constater, un petit peu comme le disaient les recteurs, les chefs d'établissement, que la croissance se fait en fonction du corps professoral, selon les effectifs étudiants. Vous avez également les données qui ont été soumises à l'intérieur du mémoire, mais on voit également que le personnel de soutien, professionnels, techniciens et autres ont dû également voir leur courbe augmenter pour pouvoir répondre aux besoins des étudiants.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Roy. M. le ministre. Lequel des collègues veut prendre la parole?

Une voix : ...

Le Président (M. Bernier) : Oh! Allez-y, M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Oui, juste un petit renseignement au passage, parce que nous aussi, on a toutes nos données sur les employés. Exemple, dans les dernières années, la croissance du corps professoral, on était dans le contexte de la loi n° 100, alors on a été obligés d'embaucher, je pense que nos surnuméraires ont monté d'à peu près 20 %, 30 % d'un seul coup parce qu'on n'était pas capables d'aller plus loin, ce qui étaient des postes parfaitement justifiés et qui étaient parfaitement comptabilisés, il n'y avait aucun problème, là. Le problème, c'est que, comme je disais tout à l'heure, quand on est en collaboration avec d'autres universités qui ont des ressources stables, et ainsi de suite, bien nous, on a des surnuméraires, nos surnuméraires disparaissent quand ils ont un poste ailleurs, et ainsi de suite, et on se trouve défavorisés par l'application. C'est un exemple précis, ça, de résultat dû uniquement au fait qu'on est inscrit dans le périmètre comptable gouvernemental.

Le Président (M. Bernier) : M. Coderre.

M. Coderre (Daniel) : Je ne veux pas allonger inutilement la réponse, mais je pense qu'il y a un autre volet qui est important. Vous savez que, dans les universités, il y a deux missions essentielles, celui de la formation mais aussi celui de la recherche, et l'augmentation de plusieurs... En tout cas, chez nous, à l'INRS, c'est très clair, l'augmentation de nos personnels est fonction de nos succès, de nos succès évalués par les pairs dans les subventions de recherche que nous obtenons, dans les contrats de recherche que nous avons avec l'industrie. Et, dans ce sens-là, il y a une évolution, effectivement, qui se fait, mais qui se fait avec l'excellence que l'on peut développer dans les universités. Et je pense que, pour le réseau de l'Université du Québec, cette croissance-là du côté de la recherche a été très grande, et ça explique une partie des augmentations de personnel que nous avons, et qui sont financées non pas sur le budget de fonctionnement classique de l'université mais sur celui des financements de recherche que nous obtenons au mérite.

Le Président (M. Bernier) : Oui, Mme Beauchamp.

Mme Beauchamp (Sylvie) : Je voudrais juste préciser ad hoc sur la hausse des effectifs employés, parce que, dans notre vocabulaire, les effectifs, aussi, c'est les effectifs étudiants. Alors, si vous calculez peut-être une augmentation de 2 %, la hausse du nombre d'étudiants est beaucoup plus élevée que 2 % par année, donc on fait déjà beaucoup à l'intérieur des budgets qui nous sont alloués. Et, vous le savez, on a les mêmes contraintes que tout le monde, des budgets qui sont réduits par rapport aux capacités de l'État.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Oui, monsieur. En vous identifiant.

M. Dumouchel (Pierre) : Pierre Dumouchel. Je suis le directeur général de l'École de technologie supérieure. Puis on est une école monofacultaire en génie, et nous, on a connu une croissance assez phénoménale au cours des dernières années. L'année dernière, on a eu une croissance de 9,3 % du nombre d'ETP. Et on a de la difficulté à suivre la croissance des étudiants, notre effectif ne suit pas cette croissance des étudiants, on est en manque de professeurs. Actuellement, je suis à 68 % de chargés de cours dans mon école. Et la demande... la croissance est encore là, parce que la meilleure métrique que j'ai pour évaluer cette croissance-là, la possibilité de croissance là, c'est le ratio du nombre de stages offerts par les industries et nos stagiaires, et, dans des domaines comme le génie logiciel, j'ai trois fois plus de stages qui est offert par les industries que d'étudiants que je peux placer, en électrique c'est 3,5 fois plus de stages offerts et, dans le domaine manufacturier, c'est 7,5 fois plus, en génie de la production automatisée.

Donc, il y a une place à la croissance, mais il faut que j'aie la possibilité d'engager les meilleurs professeurs. Et ça, on est dans un milieu hypercompétitif, et il faut qu'on soit très rapides pour aller chercher le meilleur professeur. Même dans nos processus internes, il faut être très rapides, parce qu'on peut perdre l'embauche d'un bon professeur.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre, vous avez une trentaine de secondes pour terminer.

M. Coiteux : Une trentaine de secondes pour terminer? Oh!

Qu'est-ce qui s'est passé en 2013 pour qu'il y ait un bond aussi spectaculaire du nombre de professeurs? Parce que, là, c'était comme une très petite augmentation cumulative, jusque-là, on était rendu à 3,2 % en 2012, puis subitement on passe à 12,4 %.

Une voix : Les conventions collectives.

M. Proulx (Robert) : Nous, on a eu un boom au niveau des professeurs parce que...

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx, oui. Allez-y, M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Oui. Nous, on a eu une croissance très importante du corps professoral parce que, dans le passé, les quelques années qui avaient précédé, on avait gelé complètement les postes de prof, et donc on s'est retrouvé avec un problème énorme au niveau de répondre à la demande. Et je pense qu'on a embauché... À un moment donné, on a embauché au rythme d'une centaine de profs par année. Alors, c'est probablement... Ça, c'est les données de l'ensemble du...

M. Coiteux : ...période de gel, et là... Bon, vous avez déjà vécu des périodes comme ça.

M. Proulx (Robert) : Oui. Oui, une longue période de gel. À cause des budgets qui ne suivaient pas puis... Oui.

M. Coiteux : O.K. Merci.

Le Président : Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Je vous souhaite bienvenue à tous, très content de vous voir ici. Très rapidement, je vais poser quelques questions. Ensuite, je laisserai la parole à mes collègues, qui ont des questions également.

À la page 10, vous parlez de concurrence, que le projet de loi n° 5 vous met en situation difficile par rapport à la concurrence. Entre autres par rapport au dénombrement, ça va vous amener des lourdeurs administratives qui vont augmenter les coûts du traitement des dossiers, ainsi de suite. Mais qu'en est-il du contrôle des effectifs? On est plus ou moins au courant, là, actuellement, de ce qui va arriver avec les contrôles, on sait que probablement qu'il y aura un gel. Qu'est-ce qui peut arriver au niveau de votre compétitivité par rapport aux autres universités si on arrive avec un contrôle des effectifs?

Le Président (M. Bernier) : M. Coderre.

M. Coderre (Daniel) : En tout cas, en ce qui concerne le volet recherche, il est évident qu'on est dans une situation de compétition, c'est vrai, mais aussi de performance. Dans le réseau de l'Université du Québec, mon université particulièrement, on est classé premier ou deuxième au Canada année après année en termes d'intensité de recherche. Il est évident que, si des contraintes comme celles-là nous sont données, ça veut dire que nous, on manque des opportunités où on aurait des financements, où on aurait des financements de chaire de recherche, par exemple, ou de chaire industrielle en partenariat avec l'industrie et où on serait contraints de dire non.

Je vais vous donner un exemple très simple, là. On vient de recruter un jeune chercheur qui est dans le laboratoire d'un prix Nobel en Californie. Si j'avais eu ce projet de loi, si j'avais eu cette contrainte des effectifs, j'aurais été obligé de dire à cette personne : Désolé, tu ne viendras pas à l'INRS cette année. Et ce chercheur est venu chez nous parce qu'on avait une infrastructure, on a gagné un financement d'une grande infrastructure de recherche de 20 millions de dollars, financée par le gouvernement fédéral mais par le gouvernement du Québec, et on aurait dit : Désolé, mais tu ne viendras pas.

Pour nous, là, la réalité, en tout cas dans le secteur de la recherche, de ce type de contrainte nous rend très fragiles. Et cette fragilité, elle est constante. Moi, chez moi, je n'ai pas perdu de professeur, j'ai perdu un ou deux professeurs en six ans, mais ce qui est en train de se comprendre actuellement, c'est qu'au Québec ce n'est peut-être pas le meilleur endroit pour faire une carrière scientifique de haut niveau. Et, moi, ça m'inquiète beaucoup. Ce n'est pas simplement ce projet de loi, bien évidemment, mais ce sont une série de messages qui sont envoyés, qui sont très bien perçus, pour des chercheurs qui peuvent être partout dans le monde et qui ont choisi le Québec.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. Proulx, vous vouliez...

• (20 heures) •

M. Proulx (Robert) : Oui, bien je vais renchérir sur ce qu'il vient de dire, exactement la même chose au niveau de l'UQAM. Puis il y a une conséquence supplémentaire aussi : j'ai des départements qui, actuellement, comme on ne peut... Si on ne peut pas donner plus de postes ou embaucher des gens lorsque ça s'applique, à ce moment-là les gens vont ailleurs. Quand ils vont ailleurs, les collègues partent de chez nous puis ils s'en vont ailleurs. Puis rajoutez... Ça, c'est du côté de la recherche. Du côté de l'enseignement et du côté de la formation, c'est exactement la même chose, nos clientèles étudiantes sont en croissance. Et, même si effectivement on a des baisses démographiques, on a des étudiants internationaux. On travaille fort et on peut quand même penser que nos clientèles étudiantes vont continuer d'être en croissance. Et, à ce moment-là, si on n'est pas capables de suivre avec les ressources parce qu'on est gelés au niveau des effectifs, bien ils vont aller ailleurs, et là c'est l'université au complet qui va perdre sa capacité.

Quand on parlait de concurrence sur le terrain, ce n'est pas vraiment de la compétition interuniversitaire, mais, à un moment donné, l'inéquité est telle qu'on se retrouve dans une situation où nous, on dit non, et alors les gens vont ailleurs. Et, si les gens vont ailleurs, les autres se développent, puis on disparaît. Alors, c'est... Et pourtant on...

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : ...je céderais la parole à mes collègues.

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Alors, bonsoir à vous tous. Merci beaucoup pour votre présentation.

J'aimerais savoir quel impact... Je pense qu'on vous entend très bien sur toute la question du recrutement, de la rétention, de la compétitivité, sur, je dirais, l'ensemble de l'oeuvre, du fait que vous êtes dans le périmètre comptable, mais, concrètement, que vous soyez compris dans ce projet de loi là sur le dénombrement et, je dirais, le contrôle, par rapport aux autres universités, est-ce qu'il y a d'autres impacts? Par exemple, bon, la fédération des professeurs nous a fait un plaidoyer très, très fort sur l'indépendance, évidemment, académique et qu'eux seraient assujettis donc à certaines entraves à l'indépendance, ce qui ne serait pas le cas des universités à charte. Donc, j'aimerais ça vous entendre sur ces deux aspects-là, je vous dirais : vous par rapport aux autres et, deux, toute la question de l'indépendance.

Le Président (M. Bernier) : Alors, monsieur... O.K. Mme Jean.

Mme Jean (Johanne) : Nous, par rapport aux autres, je vais vous donner... Tantôt, Robert et Daniel ont donné des exemples un peu plus urbains. Moi, c'est une université située en région, je vais vous donner un exemple bien simple de ce qu'on risque d'avoir comme obstacles.

On a un institut de recherche sur les mines et l'environnement qui existe, on est en partenariat avec l'École polytechnique. On vient de signer une programmation de recherche qui a une valeur entre 15 à 20 millions. Mon principal partenaire, c'est l'École polytechnique de Montréal. L'École polytechnique est mon partenaire, lui, pour pouvoir engager, et moi, qui est l'Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue, je vais avoir un frein au niveau de l'embauche à la fois du corps professoral, à la fois de professionnels de recherche ou de tout autre personnel en soutien au niveau du développement de la recherche. À quelque part, il y a là une inéquité, là, qui est très «basic», là, et qui est très opérationnelle, pour une institution comme la nôtre, et ça, on peut le répéter dans beaucoup de domaines. Dans chacune des institutions, on peut avoir un exemple semblable qu'on peut vous servir.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Madame... Oui, M. Proulx, vous voulez ajouter?

M. Proulx (Robert) : À l'autre partie de la question, qui était la question de l'autonomie, vous savez, les universités sont fondées sur l'autonomie universitaire. On a dû vous dire ça, à la FQPPU. Et c'est normal et c'est partout dans le monde comme ça.

La capacité... D'être capable de faire progresser la société à partir de l'innovation, ça prend des gens qui disposent de liberté académique, et la liberté académique, pour l'avoir, ça prend des universités qui sont autonomes, c'est-à-dire qu'elles sont capables de définir elles-mêmes les plans pour arriver à atteindre leurs objectifs académiques. Et, dès que certaines universités ne sont pas soumises aux mêmes règles que d'autres — dans le cas présent, c'est qu'on se retrouverait avec des règles supplémentaires qui font qu'on pourrait entraver — bien, à ce moment-là, vous avez moins d'attrait au niveau de cette université-là, tant pour le corps professoral, tant pour les étudiants, et puis vous créez un système à deux vitesses, où il y a deux types d'université et où, à un moment donné, les universités qui ne disposent pas de cette autonomie — et c'est le cas si on est dans le périmètre gouvernemental comptable et si on est soumis aux exigences de la loi — bien, à ce moment-là, on se retrouve dans une situation où on est beaucoup moins attrayant parce que pas capable de mettre en oeuvre l'autonomie universitaire nécessaire à créer des universités innovantes, et ainsi de suite. Alors, dans ce sens-là...

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée.

Mme Hivon : Je pense que Mme la rectrice voulait ajouter quelque chose.

Le Président (M. Bernier) : Mme Jean, allez-y.

Mme Jean (Johanne) : On a créé ce réseau-là, on a créé le réseau de l'Université du Québec il y a plus de 40... presque 45 ans, et on a toujours eu accès aux mêmes outils, aux mêmes moyens, quelle que soit l'université, quel que soit son nom, quel que soit son lieu, quelle que soit sa situation. Actuellement, le projet de loi n° 15, tel qu'il est, comme Robert l'a dit, crée vraiment deux classes d'université. Là, on n'aura plus accès aux mêmes moyens, aux mêmes outils pour pouvoir se développer. Quand on fait référence... Au niveau de la recherche, on a besoin d'être bons, d'être bons, pour obtenir des subventions puis par la suite réussir à recruter du personnel hautement qualifié et à former ce personnel-là. Avec le projet de loi, tel qu'il est là actuellement, on n'a pas accès aux mêmes outils puis aux mêmes moyens pour pouvoir continuer à se développer. Donc, c'est vraiment une cassure importante.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Oui, M. Dumouchel.

M. Dumouchel (Pierre) : Oui. Quant à moi, j'ai un taux de placement de mes étudiants de 100 %. Puis tantôt je parlais que j'avais un potentiel de croissance. Ce projet de loi là va faire en sorte que je vais réussir à avoir un potentiel de... un taux de placement de 100 %, mais je pourrais doubler ma clientèle étudiante et avoir toujours un taux de placement de 100 % de mes étudiants, pour les besoins socioéconomiques du Québec, et ça, on va rater cette opportunité-là aussi.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Rousseau.

M. Marceau : Oui, bonjour. Bonsoir, en fait. Question très simple et concrète. Vous avez évoqué le fait que le fait d'appartenir au périmètre comptable du gouvernement, ça implique une lourdeur administrative supplémentaire. Avez-vous déjà tenté de mesurer combien de personnes ça représente, qui travaillent à faire cette reddition de comptes? Puis, si vous avez la réponse, j'aimerais bien l'entendre, s'il vous plaît.

Le Président (M. Bernier) : Bon. Qui prend la parole? Mme Ghazzali.

Mme Ghazzali (Nadia) : ...on ne les a pas comptés, mais c'est parce que le problème...

            M. Proulx (Robert) : Chez nous, on les a comptés puis...

Mme Ghazzali (Nadia) : Ah! tu voulais... Vas-y.

M. Proulx (Robert) : Non, non. Vas-y, vas-y.

Mme Ghazzali (Nadia) : Bien, moi, je n'ai pas le chiffre exact...

Le Président (M. Bernier) : Chicanez-vous pas, je vais arbitrer. Mme Ghazzali.

Mme Ghazzali (Nadia) : Je ne l'ai pas chiffré exactement, mais je peux vous dire qu'il y a quand même énormément d'efforts qui sont faits pour faire la reddition de comptes. Et nous, on ne remet pas ça en question. C'est la pertinence, le nombre incalculable de redditions de comptes qui est à revoir.

Et, quand ces gens-là sont concentrés à faire des rapports, et comme l'a dit... je ne sais plus qui l'a dit, qu'on n'a pas de feed-back par la suite, on ne sait même pas ce qu'il en est alors qu'on a envoyé une quantité de rapports phénoménale, bien ils ne se consacrent pas à autre chose, à la mission première. Donc, c'est ça, notre problème.

M. Proulx (Robert) : ...30 % de plus dans les services des finances chez nous, à l'UQAM, plus...

Une voix : 30 %?

M. Proulx (Robert) : ...30 %, oui, pour satisfaire... Parce qu'en plus il faut en faire à plusieurs endroits, puis elles n'ont pas les mêmes exigences, il faut tout rechanger nos comptabilités. Après ça, il faut un cadre, il faut un cadre dans des services comme le service de recherche. Et là on est loin, là, on n'embauche pas des profs et des choses de même. Il faut un cadre parce qu'il faut recalculer les questions de recherche pour que nos services des finances comprennent qu'est-ce qu'ils vont mettre dans les rapports financiers, pour qu'on puisse transmettre au niveau des demandes qui nous sont faites, généralement par le gouvernement. Et ça, ça arrive pour la recherche. Ça, ça arrive pour les services aux collectivités. Ça arrive pour deux services dans la... Donc, on parle de postes, là, on parle de postes de personnes dédiées à ça, uniquement à ça. Ça, ça veut dire... Et on n'a pas le choix parce qu'on est soumis à des règles, et donc on ne peut pas les éviter.

Alors, ça, là, il y aurait une diminution énorme de dépenses si on était dans un mode où on serait capable de faire les mêmes démonstrations... On passe à tous les ans. Moi, j'aime ça quand je viens ici. Et je dis : Je suis content que l'Assemblée nationale reçoive le rapport de l'Université du Québec à Montréal, parce qu'on est capable de dire ce qu'on fait avec l'argent qu'on a, et c'est parfaitement justifié. Et on n'a pas besoin de ces complications qui sont changer le formulaire untel pour l'autre formulaire untel, et ainsi de suite, qui nous coûte énormément d'argent.

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup. Nous allons continuer avec la deuxième opposition. M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Je suis bien content de vous rencontrer.

On était rendus au... Bien là, je reviens à qu'est-ce que mon confrère le député de Rousseau disait. 30 % des personnes sont dédiées... Je ne veux pas... mais je veux être sûr d'avoir bien compris. 30 % des personnes sont dédiées à la reddition de comptes?

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx.

M. Proulx (Robert) : Dans le service des finances, dans le...

M. Spénard : Dans le service des finances.

M. Proulx (Robert) : Oui, c'est ça. Mais ça cause le reste aussi.

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp.

Mme Beauchamp (Sylvie) : M. le député, si vous voulez un autre exemple, quand on fait des états financiers — les spécialistes en comptabilité vont corroborer ça — maintenant on fait les états financiers... Avant ça, on le faisait selon les règles du ministère. Maintenant, on les fait PCGR, mais il faut les traduire dans la comptabilité gouvernementale. Ça n'a pas de valeur autre. Puis la façon de le présenter n'est pas la même. Ça fait qu'il faut qu'on reprenne nos états financiers puis on les traduise dans un autre langage comptable.

Et, même à cet égard-là, par rapport à la comparabilité des établissements, on a comme une exception qui nous est donnée par le ministère, parce que normalement on devrait appliquer d'autres normes comptables, parce qu'on est dans le périmètre comptable, qui seraient en fonction des organismes à but non lucratif du secteur privé... du secteur public, pardon. Mais là, si on faisait ça, le gouvernement ne serait plus capable de comparer les états financiers des établissements, alors ça...

Puis là, maintenant, on va devoir le faire aux trois mois pour le périmètre comptable, pas parce que c'est plus intéressant ou parce que c'est plus parlant. Puis je ne vous parlerai pas des régimes de retraite.

Le Président (M. Bernier) : Merci, madame...

Une voix : ...

Mme Beauchamp (Sylvie) : Non, mais les calculs actuariels basés sur les régimes de retraite. C'est une autre affaire, là.

Le Président (M. Bernier) : C'est une autre commission. M. le député de Beauce-Nord.

• (20 h 10) •

M. Spénard : ...on est juste au niveau municipal, là, présentement.

Mme Beauchamp (Sylvie) : ...ça, je peux vous répondre, mais...

M. Spénard : Non, non. Je ne veux pas... Moi, il y a une autre chose qui m'a éveillé un peu. Vous dites que vous faites de la recherche. J'aimerais ça savoir le pourcentage de recherche par rapport au pourcentage d'enseignement comme tel. Je ne sais pas si vous avez fait des corrélations là-dessus. Et la recherche est-elle appliquée ou recherche pure, la majorité du temps?

Le Président (M. Bernier) : M. Proulx, Mme Ghazzali.

M. Proulx (Robert) : Ça ne se fait pas comme ça dans les universités. L'enseignement, la recherche, ça... Pensez, par exemple, les gens qui se forment aux cycles supérieurs, troisième cycle, des doctorats. Je veux dire, pour avoir un doctorat, on suit des cours, mais il faut faire la démonstration qu'on est un chercheur autonome et contribuer à l'avancement du savoir. Donc, au niveau des universités, la recherche, si on dit que la formation, elle est universitaire, c'est qu'elle se fait dans un environnement de développement des connaissances. Et, s'il n'y a plus de recherche, dans une université, il n'y a plus de formation universitaire non plus, même au premier cycle.

Et, pour le reste, si on veut quand même faire des classes, bien on peut comparer nos populations de premier cycle par rapport à nos populations de cycles supérieurs, d'étudiants. Notre nombre de centres de recherche, et tout ça, on a toutes ces statistiques-là, je pourrais vous fournir ça. Mais là c'est extrêmement compliqué, mais ça dit exactement tout ce qu'on fait en termes de recherche, de formation.

Et n'oubliez pas non plus les services aux collectivités, là, qui, elles, sont l'ancrage dans la société, c'est-à-dire comment ces résultats-là, ces découvertes-là, ces avancements-là, en plus d'être enseignés aux gens, sont transférés au niveau de... pour l'utilisation par la société directement. Et ça, je peux vous donner tous les détails là-dessus, on a des rapports annuels qui disent exactement tout ce qu'on fait, recherche et...

Ce que je peux vous dire, c'est que toutes les universités du Québec, quelles qu'elles soient, réseau de l'UQ ou pas, sont toutes des universités de recherche avec les mêmes façons de faire et produisent à peu près les mêmes choses que les...

Le Président (M. Bernier) : Oui, vous aviez une question, M. le député? Oui, M. le député de Groulx, vous avez une autre question? Allez-y, M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Alors, merci, M. le Président. Dans votre mémoire, vous mentionnez que 80 % des dépenses de fonctionnement sont majoritairement dédiées au personnel enseignant et que vos coûts administratifs totaux représentent 14 % des budgets de fonctionnement, contre 18 % dans l'ensemble des autres universités québécoises. D'abord, félicitations pour ça! Maintenant, je voudrais mieux connaître un peu qu'est-ce qui engendre ce succès-là, si on peut dire.

Donc, vous dites que vous avez une structure unique en réseau, à l'Université du Québec, par la mise en commun de certains actifs, expertises ou activités. Pouvez-vous m'expliquer un petit peu, au niveau d'expertises et activités, comment vous réussissez à mettre ça en commun?

Le Président (M. Bernier) : Mme Beauchamp.

Mme Beauchamp (Sylvie) : Il y a plusieurs éléments qu'on peut faire ressortir, tout ce qui concerne, je dirais, l'expertise en évaluation de programme, où on peut amener les différents établissements à des processus plus rapides. Le fait de travailler ensemble donne une cohésion qui est plus grande. On a une série de services, y compris des services informatiques, des services administratifs, des services de ressources humaines, d'assurance collective — on l'a dit tantôt, on a un seul régime de retraite. Donc, on essaie, nous, en réseau, d'avoir une approche, comme le soulignait M. Proulx, qui est collaborative, où est-ce que c'est qu'on se renforce mutuellement, où est-ce que c'est qu'on a des programmes. L'Université du Québec s'est vraiment développée en collaborant. Les programmes conjoints, à l'Université du Québec, ça représente... Entre les établissements de l'Université du Québec, c'est 50 % des programmes, mais on représente 75 % des programmes conjoints dans l'ensemble des programmes du réseau universitaire québécois. Donc, on a développé cette façon, je dirais, de mettre en commun des ressources, de soutenir, de déployer, de conjuguer, avec des valeurs communes sur l'accessibilité, sur l'innovation, sur la qualité, l'excellence. Et on se met ensemble pour essayer, donc, de diminuer nos coûts mais aussi de développer des projets en enseignement, en recherche. Et ça nous permet donc d'être plus performants sur le plan administratif.

Le Président (M. Bernier) : Je vous donne 30 secondes, M. Proulx, puis après ça on va clore.

M. Proulx (Robert) : 30 secondes. Bien, elle vous a parlé de l'administratif; je vais vous parler de l'académique. Il y a un prof, par exemple, qui est chez elle, en Abitibi, M. Bergeron, qui est un prof qui travaille à l'UQAM, moitié-moitié, il se promène entre les deux et il travaille... on a un lac, qu'on se partage, en foresterie, juste un salaire payé. Cette personne-là met en lien les gens de biologie chez nous, qui, eux, travaillent avec les pays scandinaves, qui, eux, amènent à travers l'international, via l'UQAM, direct en Abitibi-Témiscamingue. Puis ça va jusque dans le cégep, parce qu'on a des ententes avec le cégep. C'est ça, travailler en collaboration puis en réseau.

Le Président (M. Bernier) : M. Michaud, je vous donne 15 secondes.

M. Michaud (Nelson) : 15 secondes. Je veux laisser trois chiffres, je pense, qui illustrent bien notre propos. On a démontré la dimension d'inéquité. Le côté de l'efficacité du réseau sans la loi, à l'heure actuelle, si vous regardez les tableaux, 18 % de croissance des ETP, 11 % de croissance du personnel, 12 % si on prend le corps professoral. Et, M. le député, vous avez souligné notre performance en termes de dépenses administratives qui est plus basse que l'ensemble des autres universités.

Donc, malgré une demande accrue, on a su contrôler par nous-mêmes la croissance du personnel avec des dépenses administratives minimum. Alors, non seulement il y a une question d'inéquité, mais il y a aussi le fait que c'est une loi qui ne nous apporterait pratiquement pas grand-chose en termes de saine gestion, parce que c'est déjà présent chez nous.

Le Président (M. Bernier) : Merci beaucoup aux représentants de l'Université du Québec. Merci de votre discipline universitaire. Merci d'être venus à la Commission des finances publiques.

Je vais suspendre quelques instants afin de permettre aux représentants de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec de prendre place. Je suspends.

(Suspension de la séance à 20 h 16)

(Reprise à 20 h 19)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, nous allons reprendre nos travaux. Nous avons le plaisir de recevoir la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec. Donc, bienvenue à la Commission des finances publiques, merci d'être ici ce soir. Vous avez une période de 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite nous passerons aux échanges avec les parlementaires. Allez-y.

Fédération des travailleurs et
travailleuses du Québec (FTQ)

M. Berlin (Simon) : Merci. Bonjour. Nous voudrions d'abord remercier les membres de la Commission des finances publiques de nous recevoir afin de faire valoir notre point de vue sur le projet de loi n° 15, Loi sur la gestion et le contrôle des effectifs des ministères, des organismes et des réseaux du secteur public...

Le Président (M. Bernier) : Je vous arrête 30 secondes juste pour permettre une identification. Pouvez-vous...

M. Berlin (Simon) : Oui, j'allais...

Le Président (M. Bernier) : O.K., allez-y.

M. Berlin (Simon) : ...des réseaux du secteur public ainsi que des sociétés d'État. Je me présente — alors, je l'avais — ...

Le Président (M. Bernier) : C'est parce que c'est plus facile pour fins d'enregistrement à ce moment-là.

• (20 h 20) •

M. Berlin (Simon) : D'accord. Je me présente : Simon Berlin, directeur exécutif du Syndicat des employées et employés professionnel-le-s et de bureau Québec, SEPB Québec, et vice-président de la FTQ. Je suis accompagné de Johanne Deschamps, conseillère politique à la FTQ, ainsi que de Colin L'Ériger, conseiller au Service de la recherche de la FTQ. Ça va?

La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec représente plus de 600 000 travailleurs et travailleuses qui oeuvrent dans toutes les régions du Québec et dans tous les secteurs de l'économie. Le projet de loi n° 15 aura un impact important sur plusieurs de nos syndicats affiliés présents dans les réseaux de la santé et des services sociaux, de l'éducation, dans les sociétés d'État, etc. Il est tout à fait raisonnable que le gouvernement se donne les moyens de dresser un portrait des effectifs, là n'est pas le problème. C'est plutôt le gel des effectifs qui nous inquiète au plus haut point. Comme envisagé par le gouvernement, ce gel porte atteinte à la qualité et à l'accessibilité des services publics, en plus de détériorer les conditions de travail de ceux et celles qui oeuvrent dans ces organisations. C'est pourquoi nous recommandons le retrait du projet de loi. Celui-ci comporte trop d'effets pervers pour être acceptable.

D'abord, le raisonnement qui sous-tend le projet de loi est hautement problématique. Le gouvernement a indiqué à plusieurs reprises que le gel des effectifs n'est qu'une des mesures visant à rétablir l'équilibre budgétaire. Oui, la dette est préoccupante, mais nous sommes loin de la catastrophe annoncée par le gouvernement. Oui, l'équilibre budgétaire est souhaitable, mais ne sacrifions pas nos services publics et la reprise économique en voulant procéder trop rapidement. À cet égard, nous ne pouvons que constater un profond désaccord entre notre position et celle du gouvernement.

Centralisation. Passons maintenant au contenu du projet de loi. Nous ne voyons pas l'élargissement du rôle du Conseil du trésor et des ministres d'un bon oeil. Leur intervention constitue en effet un désaveu du modèle de gouvernance des sociétés d'État et de plusieurs institutions ainsi que du réseau de l'éducation et de celui de la santé et des services sociaux. Est-ce que ce projet de loi signifie que le gouvernement retire sa confiance à l'ensemble des conseils d'administration? Si une organisation estime qu'elle doit procéder à des embauches afin d'accomplir sa mission, comment serait-il possible de réconcilier cette orientation avec les directives du Conseil du trésor?

Sur le maintien des services, le projet de loi prévoit aussi que les services devront être maintenus, et ce, malgré un gel des effectifs. Jeudi dernier, le ministre Coiteux a affirmé que le gel des effectifs constituait une occasion unique de moderniser l'État québécois et de faire preuve d'innovation. Malheureusement, nous ne partageons pas cet optimisme. Dans un contexte de vieillissement et de croissance de la population, comment serait-il possible de maintenir les services? Au lieu de mesures structurantes, le gouvernement propose le sempiternel «faire plus avec moins». Avec le projet de loi n° 15, on gèle les effectifs en espérant que les services à la population soient maintenus. Au lieu de procéder ainsi, le gouvernement devrait d'abord identifier les besoins, faire des choix de société et identifier les ressources fiscales nécessaires pour ensuite laisser les organisations gérer leurs ressources humaines en fonction des besoins.

Sur la portée du projet de loi, la décision d'inclure ou non certaines organisations nous laisse perplexes. Par exemple, comment le gouvernement justifie-t-il le traitement inéquitable du réseau de l'Université du Québec — que vous venez juste d'entendre — par rapport aux autres universités québécoises, alors qu'elles dépendent toutes d'un fonds de fonctionnement où le financement étatique est majoritaire? Le gel des effectifs dans les cégeps et les universités du réseau de l'UQ aura des effets dévastateurs sur l'accès à l'éducation postsecondaire, la mission de recherche et d'enseignement des établissements, mais aussi sur le développement socioéconomique et le développement régional.

Les conditions de travail. Le ministre Coiteux estime que 6 250 nouvelles personnes sont embauchées par l'État chaque année, la majorité dans le secteur de la santé et des services sociaux et en éducation. Ces nouvelles embauches, ce sont des travailleurs et des travailleuses qui offrent des services à la population. Quels moyens le gouvernement a-t-il envisagés pour éviter que le gel des effectifs ne vienne alourdir la charge de travail de ceux et celles qui oeuvrent déjà dans les organisations visées? Rien ne semble avoir été prévu. Les travailleurs et travailleuses feront donc les frais de l'obsession du gouvernement pour l'équilibre budgétaire. Avec le gel des effectifs, le gouvernement s'expose à une multiplication des cas d'épuisement professionnel.

Je vais passer la parole à Johanne.

Le Président (M. Bernier) : Mme Deschamps.

Mme Deschamps (Johanne) : Alors, il nous reste un bon cinq minutes, oui?

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste quatre minutes.

Mme Deschamps (Johanne) : Quatre minutes. C'est bon, merci.

Alors, le projet de loi prévoit que les conventions collectives seront respectées, un principe qui est, pour nous, essentiel. Toutefois, le respect des conventions collectives, le gel des effectifs et le maintien des services semblent constituer des objectifs trop souvent mutuellement exclusifs. En effet, il existe des dispositions concernant la charge de travail, soit par des clauses de ratio, par exemple, chez les enseignants ou les professeurs, mais aussi des clauses d'évaluation de charge de travail. S'il est impossible d'augmenter le personnel pour respecter la convention collective, il faudra inévitablement couper des services. Les organisations soumises aux règles du projet de loi devront consacrer d'importantes énergies à résoudre les problèmes insolubles. S'agit-il d'une utilisation optimale des ressources humaines?

En gelant les effectifs, le président du Conseil du trésor souhaite que l'État se modernise et devienne plus performant. Dans les faits, le projet de loi n° 15 empêche l'État de proposer de véritables innovations et de rendre les services publics plus efficaces. Voici deux exemples très concrets, à notre avis.

D'abord, presque tous les pays industrialisés ont mis sur pied un régime public et universel d'assurance médicaments. Au Québec, nous avons plutôt opté pour un régime hybride qui est à moitié privé et à moitié public. Ce programme est inefficace, coûteux, inéquitable et peu performant comparativement à ce qui se fait ailleurs. Selon certaines estimations, le gouvernement du Québec pourrait économiser entre 828 millions et 3,3 milliards de dollars s'il en mettait un sur pied. De telles économies justifient quelques embauches. Même le C.D. Howe Institute, qui n'est pas un repaire de gauchistes, recommande la mise en place d'un régime public et universel d'assurance médicaments.

Ensuite, autre exemple, un gel des effectifs pourrait entraver le développement économique du Québec. En limitant la capacité de croître d'Hydro-Québec, on risque de l'empêcher de développe une autre filière énergétique, d'électrifier les transports, de mettre en place des mesures d'efficacité énergétique ou de réaliser tout projet visant à sécuriser l'approvisionnement en électricité. Le même argument s'applique également à la Caisse de dépôt et de placement.

En ce qui a trait à la sous-traitance, enfin, nous ne sommes pas en mesure de bien apprécier les impacts du projet de loi. Il semble que les contrats de services seront davantage contrôlés grâce à une meilleure reddition de comptes. Toutefois, nous nous inquiétons du rôle que pourrait jouer le Conseil du trésor. Pourrait-il, par exemple, recommander à certains ministères d'avoir davantage recours à la sous-traitance dans une perspective de redressement budgétaire? Si c'est le cas, on peut s'attendre à des pertes d'emploi et à une précarisation éventuellement plus grande du marché du travail québécois.

Ensuite, nous ne sommes pas certains que le projet de loi permette au gouvernement de ramener à l'interne certains travaux qui étaient auparavant confiés à des sous-traitants. Par exemple, pour les ressources informatiques, le gouvernement aurait tout intérêt à bâtir une expertise à l'interne. Les nombreux dérapages des projets informatiques et les dépassements de coûts démontrent que la sous-traitance est très coûteuse et qu'un État qui procède à de nouvelles embauches ne prend pas nécessairement une mauvaise décision.

Plusieurs questions subsistent quant à l'application du projet de loi. D'abord, qu'est-ce que le Conseil du trésor entend calculer, des postes ou des personnes? Des effectifs en termes d'équivalent temps complet ou des personnes réelles?

Le Président (M. Bernier) : 30 secondes, madame.

Mme Deschamps (Johanne) : Ensuite, a-t-on évalué les besoins de main-d'oeuvre par rapport à ces nouvelles exigences en matière de reddition de comptes? Est-ce que le Conseil du trésor, les ministères et les différentes organisations sont en mesure d'assumer ces nouvelles responsabilités avec des effectifs maintenus au même niveau qu'en 2014?

Enfin, le projet de loi prévoit que le Conseil du trésor détermine combien de temps une organisation devra fonctionner avec un niveau prédéterminé d'effectif. Il s'agit d'une situation problématique, puisque les besoins peuvent évoluer rapidement. Ainsi, la planification triennale de la main-d'oeuvre qui pourrait servir de base à la poursuite du gel des effectifs s'apparente davantage à une camisole de force qu'à un véritable outil de gestion.

Alors, pour l'ensemble de ces raisons, la FTQ estime que le gouvernement devrait retirer le projet de loi n° 15. Il fragilise davantage les services publics, qui subissent depuis des années les contrecoups des compressions budgétaires. Il mène directement à une détérioration des conditions de travail de tous ceux et celles qui oeuvrent dans le secteur public.

Au lieu d'une cure d'austérité, la FTQ propose un autre traitement. D'abord, il faut reporter l'atteinte de l'équilibre budgétaire et cesser de verser l'argent au Fonds des générations. Ensuite, le gouvernement doit impérativement augmenter ses revenus. Il ne peut prétendre qu'il n'a d'autre choix que de couper, puisque ce ne sont pas les solutions qui manquent.

Le Président (M. Bernier) : Merci, Mme Deschamps. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires. M. le ministre.

• (20 h 30) •

M. Coiteux : Oui. Alors, merci beaucoup, M. Berlin, Mme Deschamps. Et puis j'ai deux noms ici, mais c'est M. L'Ériger. Donc, merci d'être là ce soir.

Comme vous avez terminé sur la question de l'équilibre budgétaire, je commencerais peut-être là-dessus. Quand vous dites : Reporter à plus tard l'équilibre budgétaire, quelle date vous avez en tête?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : On n'a pas de date, comme tel, en tête, mais ce qu'on dit, c'est que ce qu'on devrait faire, c'est d'abord s'attaquer aux besoins qu'on a, combler les besoins, livrer les services à la population, maintenir des services en santé, en éducation, des services sociaux, on ne devrait pas être fixé ou viser uniquement sur l'équilibre budgétaire à une date fixe. On est d'accord que l'atteinte de l'équilibre budgétaire est très souhaitable et on devrait essayer d'en arriver, on devrait regarder ça comme objectif, mais on n'a pas de date, comme tel, en vue. Il faut regarder... D'abord, pour nous, c'est regarder d'abord les besoins de la population, maintenir les services qui est le plus important.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : En général, quand on dit que c'est un objectif, vous me dites : C'est un objectif, normalement on met une date là-dessus. Si on veut atteindre un objectif, on se donne un horizon. C'est pour ça que je repose cette question-là, parce qu'on a déjà reporté l'atteinte de l'équilibre budgétaire. Donc, dans le fond, vous dites, là : Peut-être qu'il faudrait le reporter à nouveau. Vous le reporteriez à quand?

M. Berlin (Simon) : Comme j'ai dit, on n'a pas précisé...

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Oui, merci. On n'a pas précisé de date. La question de l'équilibre budgétaire, pour nous, c'est que question d'un objectif qui est souhaitable, mais il faut le conjuguer avec les besoins qu'on a, avec l'économie, avec la croissance de l'économie, permettre la croissance de l'économie, permettre de livrer les services pour lesquels l'État a la responsabilité. C'est ça qui est important. L'important, c'est la croissance. L'important, c'est les services publics. L'important, c'est l'éducation de nos enfants. L'important, c'est tous les régimes qu'on a au Québec, c'est le modèle québécois qu'on a établi depuis de longues années. Si on se fixe uniquement sur une notion d'équilibre budgétaire dans une perspective d'austérité, on va fixer là-dessus, et toute l'autre va prendre le bord. Et c'est ça, la difficulté qu'on voit avec ce projet de loi.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Est-ce que vous êtes d'accord avec le fait que plus on reporte l'atteinte de l'équilibre budgétaire, plus les intérêts sur la dette prennent la place des services à la population, prennent de l'espace budgétaire qui n'est pas disponible pour les services à la population? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Ce que je vous dis, c'est qu'avec une croissance économique, avec la livraison de services adéquats, avec l'instauration, par exemple, de programmes comme l'assurance médicale universelle, on va créer des emplois, on va remplir les coffres du gouvernement beaucoup plus rapidement que si on coupe puis on a moins d'argent qui rentre, et donc on fixe uniquement sur l'équilibre budgétaire.

Donc, c'est un cercle, il faut voir l'ensemble. Comme j'ai dit, si on focusse uniquement sur l'équilibre budgétaire, bien, à ce moment-là, ça vous permet de couper des emplois, de geler les effectifs, de faire tout dans une vision d'équilibre budgétaire. Et nous, on dit : L'équilibre budgétaire, oui, on va y arriver. Mais on va y arriver comment? En créant des emplois, en livrant des services. En éduquant notre population, nos jeunes. En livrant des services de santé, en s'occupant d'une population vieillissante. Il y a une foule de facteurs. On est convaincus que ce n'est pas en mettant moins d'argent dans l'économie qu'on va avancer plus rapidement, c'est le contraire.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Néanmoins, pour être capable de financer les services publics, il faut avoir les marges de manoeuvre nécessaires, et on réduit notre marge de manoeuvre quand on laisse aller le déficit, lorsqu'on laisse aller la dette.

Donc, la question du report, pour moi, ce n'est pas une question tout à fait innocente. C'est parce que derrière le... Le message que je décode, dans le fond, c'est : Oui, c'est un objectif, mais on n'y met de date. Puis, dans le fond, ce n'est pas vraiment un objectif, il y en a d'autres qui ont préséance sur tout le reste. Mais ça, ça voudrait dire, concrètement, qu'on financerait les services publics à crédit, on ne les financerait pas par les recettes fiscales, et donc on reporterait à d'autres la facture que nous, on devrait payer aujourd'hui, parce que c'est les services qu'on utilise aujourd'hui. Alors, pourquoi on va refiler la facture à ceux qui suivent? Vous comprenez le raisonnement?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Je m'excuse, là, mais, pour nous, ce n'est pas refiler la facture, comme vous dites. En créant des emplois, on crée des revenus, on a des nouveaux revenus qui rentrent dans l'État.

J'ai un certain âge, je n'ai jamais vu une situation où l'austérité fonctionne. Ça ne fonctionne pas en Europe, ça n'a pas fonctionné en Europe. Je ne vois pas comment on coupe les emplois, on a moins de revenus qui rentrent et on avance comme société. Je ne vois pas comment on crée des emplois en ayant moins de revenus. Je ne vois pas comment on peut atteindre un équilibre budgétaire quand on s'assure qu'il y a moins de revenus qui rentrent. C'est le contraire qu'on doit faire. On doit regarder nos besoins, les besoins de la société, les besoins de la population, les besoins... des services dont on a besoin. On doit créer les emplois même, s'il le faut, où c'est nécessaire.

L'exemple qu'on vous avait donné, c'est un programme d'assurance médicaments universel comme dans les pays en Europe, qui existe partout en Europe. Ça n'existe uniquement pas ici ou aux États-Unis, qui n'est pas un modèle à suivre, à notre avis. Ça n'existe pas ici, mais ça existe dans d'autres pays. On vous démontre ça avec des chiffres, que ça permet de renflouer les coffres du gouvernement avec des centaines et des centaines de millions de dollars. Ça peut créer des emplois et ça peut renflouer encore plus.

Moi, je ne comprends pas comment on peut prétendre qu'en coupant des emplois, en ayant moins de revenus, bien, comme ça, on va être capable d'atteindre un équilibre budgétaire puis on va être capable d'avoir une croissance économique comme vous avez promis.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Je pense que mon collègue de Laval-des-Rapides aimerait poser une question.

Le Président (M. Bernier) : Oui. Bien, ça me ferait plaisir de lui donner la parole. M. le député de Laval-des-Rapides, je vous la donne. Allez-y.

M. Polo : Merci. J'aimerais savoir, M. le Président : La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec compte combien de membres, combien de cotisants?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : 600 000 membres.

M. Polo : 600 000 membres. La taille... Donc, on s'entend que les cotisations, M. le Président, sont gérées par le bras financier de la FTQ, là, le fonds des travailleurs, le fonds de la FTQ. C'est bien ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Non. Bien, c'est parce que je ne suis pas sûr de votre question. La...

M. Polo : Non, non, mais j'essaie de faire un lien. Vous allez comprendre, vous allez comprendre.

M. Berlin (Simon) : O.K. Allez-y, allez-y. Je m'excuse.

M. Polo : J'essaie de faire un lien parce que, je veux dire, une partie de vos cotisations sont gérées par, quand même, le fonds de la FTQ.

M. Berlin (Simon) : Non.

M. Polo : Pas du tout?

M. Berlin (Simon) : Non.

M. Polo : O.K. Le fonds de la FTQ est quand même relié à votre institution et gère tout près de 9 milliards de dollars.

M. Berlin (Simon) : Là, vous parlez du Fonds de solidarité?

M. Polo : Fonds de solidarité, pardon, oui, oui.

M. Berlin (Simon) : O.K. Parce que la FTQ, c'est une fédération de travailleurs et travailleuses du Québec. Le Fonds de solidarité, c'est un fonds d'investissement. Ce n'est pas là même chose.

M. Polo : Oui, mais ma question et mon raisonnement, c'est...

M. Berlin (Simon) : Et nos cotisations ne vont pas au Fonds de solidarité.

M. Polo : Non, non. O.K. Pardon. Ma question, c'est dans un esprit... je fais un parallèle avec les cotisations de vos membres. Vous vous attendez à un certain rendement, O.K., vos membres s'attendent à un certain rendement des cotisations...

M. Berlin (Simon) : Non, non, pas du tout, pas du tout. Non. Je peux vous répondre?

Le Président (M. Bernier) : Oui, allez-y, M. Berlin, si vous voulez donner des explications, là.

M. Berlin (Simon) : Bien, pensez au Fonds de solidarité comme un fonds d'investissement, comme une banque, comme une institution financière. Il y a de nos membres qui contribuent de leur argent dans une forme de REER au Fonds de solidarité. Au lieu de mettre l'argent, par exemple, à la Banque Nationale, ils mettent l'argent au Fonds de solidarité. C'est leur argent, ce n'est pas nos cotisations. Les cotisations que nos membres paient...

D'abord, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec est une fédération composée de plus que 30 syndicats affiliés, 36 ou 37 syndicats affiliés. Chaque syndicat affilié... Moi, je suis directeur exécutif de mon syndicat, c'est le syndicat des employés professionnels et de bureau. On a autour de 15 000 membres qui paient des cotisations à nous pour des services qu'on leur fournit comme membres du syndicat, services de négociation, de défense, d'éducation, tous les services qu'on leur fournit, et nos sections locales sont affiliées à la FTQ et paient une petite cotisation à la FTQ pour l'affiliation FTQ. Il n'y a pas d'argent qui va de là au Fonds de solidarité, il n'y a aucun lien entre les deux.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

• (20 h 40) •

M. Coiteux : Oui. Moi, je reviendrais à la question des effectifs un petit peu plus directement, mais vous avez parlé de modèle de développement en disant : L'expansion des services publics, l'augmentation des budgets de l'État, les dépenses publiques, finalement, la croissance par les dépenses publiques, puis vous avez cité l'Europe notamment. Ça ne fonctionne pas nécessairement partout, on peut avoir des débats là-dessus.

Moi, j'aimerais amener les choses sur l'angle suivant : une bonne partie de la croissance économique, là, c'est la croissance de la productivité, hein? Puis il y a le secteur privé qui travaille très fort là-dessus, puis il doit innover puis il doit contrôler ses effectifs pour aller chercher la meilleure valeur ajoutée, en faisant attention que ses coûts n'augmentent pas plus rapidement que les revenus qu'il est capable de générer, mais le secteur public aussi, le secteur public aussi peut contribuer à la productivité. Et c'est dans ce contexte-là que, dans une perspective où vous dites : Ça prend des revenus pour financer les services publics... Et je suis d'accord avec vous, il y a un rôle à jouer, là, d'accroître la capacité de l'État de livrer des services sans nécessairement augmenter ses coûts plus vite que ses revenus. Et le contrôle des effectifs, bien c'est un outil aussi pour gagner plus de productivité dans le secteur public.

Qu'est-ce que vous pensez? Est-ce que vous êtes d'accord avec ça ou vous voyez ça complètement autrement?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : ...productivité, la question de réallocation des ressources, la question d'être plus efficace, pour nous, ce n'est pas la même chose qu'un gel des effectifs puis une réduction de services. Si la question porte sur la question de comment est-ce que dans certaines organisations, dans certains organismes on peut mieux faire le travail, on peut s'assurer que les bonnes personnes — on va le dire comme ça — sont à la bonne place, ça, c'est une autre chose. Ça, c'est une question d'essayer de mieux livrer les services avec le personnel qu'on a, et ça, ça appartient, quant à nous, pas au Conseil du trésor, mais ça appartient aux organisations, aux organismes de faire ce travail-là. Puis on a déjà eu des projets pilotes, comme dans la santé, où les syndicats dans la santé ont coopéré dans les projets pilotes sur la question, je vais appeler ça, d'efficacité des opérations. Ça, c'est une chose, mais c'est tout à fait différent que l'autre partie qui est ce que vous proposez dans ce projet de loi : le gel d'effectif, faire un exercice comptable et, à partir d'un exercice comptable d'en haut, geler les effectifs en bas. C'est deux choses, pour nous, complètement différentes. À moins que j'aie mal compris votre question.

Le Président (M. Bernier) : M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, c'est parce que, bon, c'est sûr que, si on n'est pas d'accord sur l'équilibre budgétaire, on n'est pas d'accord sur le but. Mais c'est un objectif ferme. Et d'ailleurs même l'Assemblée nationale a voté en faveur du retour à l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Donc, c'est dans cette direction qu'on va aller.

Donc, vous me dites que vous avez souvent participé, aidé, collaboré à des exercices comme celui-là, puis il y a deux exercices... Il y en a plus que deux, en réalité, mais il y a la révision des programmes, d'une part, qui n'est pas un exercice de réduction des services, c'est un exercice d'adéquation de ce qu'on fait par rapport à notre capacité de payer. C'est ça qu'on fait. Ce n'est pas réduction de services, c'est de revoir comment on fait les choses. Et puis il y a aussi, pour nous aider, chercher un peu plus de performance dans la prochaine année et demie en imposant un contrôle plus strict sur les effectifs.

Alors, il y a une possibilité de collaborer ici. Jusqu'où vous seriez prêts à collaborer dans un exercice comme ça?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Comme je vous avais dit, on ne comprend pas, on ne voit pas comment un gel des effectifs peut être égal... ne pas vouloir dire une réduction de services. Je donne un exemple. Avec le vieillissement de la population, si on ne regarde pas nos besoins, les besoins de la société en termes de services de santé, par exemple, ou de services sociaux, pour combler nos besoins pour une population vieillissante, on fait fausse route. Si on garde d'abord un exercice comptable, on gèle les effectifs et on dit : Avec ce gel-là, mettons, en date de 2014, ou peu importe la date qu'on choisit, et on va travailler avec ça, on ne tient pas compte de nos besoins, on ne tient pas compte, par exemple, du vieillissement de la population, on ne tient pas compte des besoins en éducation, on ne tient pas compte des besoins du système des universités du Québec, on ne tient pas compte des commissions scolaires, par exemple, dans le secteur public d'éducation, qui sont rendues à je ne sais pas quelle ronde de coupures comme dans la santé... Ça ne commence pas ici, il y a des coupures depuis des années, des années et des années. Et là on dit : En plus de ces coupures-là, on veut livrer les mêmes services, mais on a coupé, on a coupé, on a coupé.

Et là on va geler, puis peu importe ce qui arrive demain, peu importent nos besoins, peu importent les besoins de la population, on va geler les effectifs, mais on ne réduirait pas les services. On ne comprend pas cette équation. On n'y croit pas, on ne voit pas comment on peut faire ça. Si on ne regarde pas d'abord nos besoins et ensuite les effectifs, on ne comprend pas comment un gel d'effectif comme vous proposez ne veut pas dire une réduction de services, on ne le voit pas. Je ne sais pas, dans un an, dans deux ans, dans cinq ans, où on va être rendus en termes de nos besoins en éducation, on peut faire des estimés, mais, de dire qu'on va faire tout ça avec les effectifs qu'on avait l'année passée, ça dépend, il faut voir.

Mais on ne met pas en cause la question de l'équilibre budgétaire. C'est souhaitable, on est d'accord à avoir ça comme objectif. On n'est pas en désaccord.

Le Président (M. Bernier) : Il vous reste une minute, M. le ministre.

M. Coiteux : Bien, je pense que... Peut-être c'est la question que je ne vous ai pas posée. J'essaie de voir s'il y a au moins un aspect avec lequel on...

Bon, l'équilibre budgétaire, on s'entend, vous, la date est sine die, disons, donc c'est un objectif lointain. Nous, c'est un objectif plus court terme, nécessaire, selon nous, et on pense qu'il y a lieu de demander un effort particulier à l'ensemble du secteur public, notamment par une gestion plus rigoureuse des effectifs. Puis ensuite c'est que ça va nous permettre de connaître les choses.

Ne serait-ce que le dénombrement puis la connaissance fine des données, est-ce que, ça, vous trouvez que c'est une bonne idée?

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 30 secondes.

M. Berlin (Simon) : Oui, merci. Au niveau du dénombrement, on n'a aucun problème de savoir c'est quoi, les effectifs, de compter sans que ça devienne une tâche administrative trop lourde, sans qu'on prenne des ressources pour ne faire que du comptage, que des exercices comptables au lieu de faire... de livrer les services à la population. En autant que c'est fait dans une perspective de savoir, puis de comprendre, puis de peut-être mieux gérer, c'est une chose. Mais ce qu'on comprend, avec le projet de loi, c'est que vous faites ce dénombrement-là pour pouvoir geler les effectifs et en même temps dire qu'il n'y a pas de réduction de services. C'est impossible.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Berlin. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Sanguinet.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Alors, je souhaite la bienvenue à nos invités, M. Berlin, Mme Deschamps, M. L'Ériger. Bienvenue chez nous.

Alors, écoutez, je vous ai écoutés avec grand intérêt. Je reviens un petit peu sur ce que le ministre a dit. Oui, on a voté à l'Assemblée nationale pour rétablir l'équilibre budgétaire, on a le même objectif. Les moyens sont différents. Nous, on pense que c'est par la prospérité économique qu'on peut arriver à cet objectif-là, on ne s'entend pas là-dessus. Mais, bon, écoutez, on ne fera pas de débat là-dessus, là, en ce moment, mais, nous, c'est plus cette façon de procéder qu'on favorise.

Autre chose, j'ai bien aimé quand vous avez mentionné qu'à l'étape où on est rendu, si on coupe, ça va aller directement dans les services. On est rendu à une étape où, là, couper dans le gras, comme on disait, là, à l'époque, là, ça devient de plus en plus difficile. Et même le Conseil du patronat, quand ils sont venus nous visiter, je pense que c'est jeudi ou vendredi, nous disaient : Écoutez, on est rendu à l'étape que, quand on coupe, ça va aller dans les services. On est rendu là ou à peu près, là. Je veux dire, il y a peut-être des économies de fond de tiroir qu'on peut faire, là, mais en tout cas on est pas mal rendu à cette étape-là.

Moi, où est-ce que je voudrais en venir avec vous, c'est... À la page 7, vous parlez du respect des conventions collectives. Là, on a un problème parce que, selon l'étude qu'on fait de la situation actuelle, pour diverses raisons, on s'aperçoit que les besoins sont augmentation. Si on veut geler les effectifs, si les besoins augmentent avec les mêmes effectifs, ça veut dire qu'on sera obligé de rouvrir les conventions collectives et de, entre guillemets, surcharger le travailleur.

Qu'est-ce que vous pensez de ma logique? Est-ce qu'elle est bonne?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin, oui, allez-y.

• (20 h 50) •

M. Berlin (Simon) : Bien, ce n'est pas la première fois que vous entendez que la question de rouvrir les conventions collectives, ce n'est pas une approche qui nous plaît, mais d'aucune façon. Quand il y a une convention collective signée, c'est signé par les deux parties et c'est signé pour un certain nombre d'années. Je peux uniquement faire référence au projet de loi n° 3. On ne retourne pas en arrière, on a des ententes signées. Et il me semble que, quand on signe une convention collective, on prévoit le mieux qu'on peut l'avenir, côté patronal et côté syndical.

Moi, ça fait plus que 30 ans que je fais ce travail-là. Je n'ai jamais, jamais une fois... Dans toutes les centaines de négociations que j'ai faites dans le secteur public, dans le secteur privé, jamais une fois que j'ai vu un employeur revenir nous voir pour dire : Vous savez, le syndicat, ça va mieux qu'on pensait quand on a négocié, on va vous donner plus. On va ouvrir la convention, on va vous donner plus. Jamais que je n'ai vu ça. Puis je vous défie, tout le monde ici, de me trouver un exemple.

Alors, ce que je dis : On a signé une convention collective. On a mis de l'eau dans notre vin, comme on a dit. Si vous regardez les conventions collectives du secteur public, là, ce n'est pas des grosses augmentations, c'est un niveau salarial, un niveau de rémunération plus bas que le secteur privé et plus bas qu'ailleurs au Canada, on le sait, plus bas que la moyenne canadienne. Alors, on a fait des sacrifices. Il y a eu des gels de salaire. Il y a eu des années difficiles, des années plus difficiles que d'autres. On a négocié les conventions collectives; on s'attend à ce que les conventions collectives soient respectées.

Et la prochaine négociation, ça, c'est une autre question, mais des conventions collectives signées, je m'excuse, mais il me semble qu'il y a des notions même juridiques qui encadrent la question des conventions collectives. Et donc, dans certaines conventions collectives, oui, il y a des dispositions, justement, pour protéger les membres du syndicat, les travailleuses, les travailleurs, pour protéger les gens pour qu'ils ne soient pas en épuisement de travail, pour qu'il n'y ait pas de coûts additionnels pour la société parce qu'il y a des gens qui ne sont plus capables, parce qu'avec toutes les coupures de poste qu'on a eues année après année, après année, dans le secteur public...

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Berlin (Simon) : Tu sais, on ne peut plus. Il n'y en a plus, de tiroir à gratter.

M. Therrien : Vous mentionniez tantôt, au niveau de la sous-traitance, que c'était en augmentation et probablement qu'on verrait peut-être augmenter le phénomène de sous-traitance avec un gel des effectifs.

M. Berlin (Simon) : ...question qu'on pose.

M. Therrien : C'est ce que vous aviez mentionné tantôt. Alors, ce qu'on assisterait, si le projet de loi est adopté comme ça, avec les conventions, supposons que le gouvernement respecte ses conventions collectives, bien, après, quand il y aura les négociations, avec la sous-traitance, on va s'apercevoir qu'il y aura une précarisation de la qualité des emplois disponibles, et puis ça va amener, justement, chez le travailleur que vous représentez, là, un phénomène très problématique, c'est que ces gens-là vont se retrouver avec un effritement de leur qualité de leur rémunération globale. Est-ce que vous pensez que c'est ce qui pourrait arriver?

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Bien, écoutez, la problématique, si j'ai bien compris la question, là, c'est qu'on a des conventions collectives à respecter, on a des... On est conscients des difficultés économiques, mais je reviens encore à dire : C'est la croissance, c'est la seule façon... Comme vous avez dit, comme vous avez mentionné il y a quelques minutes, c'est par la croissance qu'on va arriver à l'équilibre budgétaire, je veux bien dire la même chose. Je ne sais pas si...

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : Merci, M. le Président. C'est juste qu'évidemment, si tu arrives avec des besoins qui augmentent puis tu plafonnes le nombre d'emplois disponibles, à quelque part, les gens, comme vous l'avez mentionné, il y aura un phénomène de surmenage, il y aura des problèmes, là, qui seront liés, justement, à la qualité de vie des travailleurs dans le milieu de travail. Ça, c'est évident, tu sais, c'est... En tout cas, d'après ce que vous m'avez dit puis ce que j'ai lu aussi, là, c'est ce qu'on peut constater.

J'aurais des questions, une réflexion, puis je voudrais avoir votre réflexion par rapport à ça. Quand on parle d'Hydro-Québec ou de la Caisse de dépôt et de placement, on parle de gel d'effectif dans l'ensemble du public, péripublic, parapublic, là, ça, ça veut dire qu'Hydro-Québec, qui est profitable, s'ils veulent avoir une création d'emplois — parce que j'imagine qu'il y a une rentabilisation de la création d'emplois — si on fait un gel d'effectif dans ces endroits-là comme Hydro-Québec ou la Caisse de dépôt et de placement, ça veut dire qu'on renoncerait à des profits et à des gains évidents qui rentreraient dans les coffres de l'État, si on a un gel d'effectif à, par exemple, Hydro-Québec. C'est à l'encontre de ce qu'on voudrait.

Ça, c'est ma logique. Je ne sais pas si vous êtes d'accord avec ça.

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Tout à fait. Tout à fait d'accord avec ça. Hydro-Québec, c'est un bon exemple, avec tous les projets qu'on peut avoir en termes d'électrification, de transport en commun, de toutes sortes d'autres choses... ou d'autres projets qu'on n'a même pas encore imaginés puis qui s'en viennent. Si on a un gel d'effectif, on ne peut pas le faire. On ne peut pas compétitionner, on ne peut pas offrir ça peut-être à d'autres pays ou ailleurs. On ne peut pas.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Therrien : Oui. Bien, écoutez, dans un autre ordre d'idées, vous parliez tantôt des possibilités, là, par exemple l'assurance médicaments, entre autres, là, mais j'imagine que vos travailleurs, les gens que vous représentez, qui sont sur le terrain, qui sont à combler les besoins à la population à partir des services qu'ils vont offrir... j'imagine que ces gens-là, dans les régions, vont être à l'affût des besoins de la communauté et, à partir de la gestion, là, qui est décentralisée, vont être plus à savoir qu'est-ce qu'on doit faire dans le milieu pour améliorer la performance des services. Et, dans ce projet de loi là, ce qu'on fait, c'est qu'on va éloigner la prise de décision, du fait qu'on va faire en sorte que le président du Conseil du trésor et les ministres responsables vont se trouver à prendre des décisions qui vont avoir des effets sur le terrain.

Si on veut arriver à des économies ou à une meilleure gestion, plus efficace... Comme vous avez parlé de l'assurance médicaments. Il faut avoir le nez dans la cuisine pour avoir des idées comme ça. Alors, est-ce que vous trouvez que l'idée de laisser entre les mains d'un ministre qui est le président du Conseil du trésor et le ministre responsable la prise de décision liée à ça fait en sorte d'affaiblir l'efficacité de l'État?

Le Président (M. Bernier) : Vous avez 30 secondes.

M. Berlin (Simon) : Je suis tout à fait d'accord. On est tout à fait d'accord, la FTQ, que c'est le contraire, là, qu'on n'enlève pas la responsabilité aux organismes qui offrent les services puis le mettre dans une situation bureaucratique très loin puis très haute qui va être un exercice comptable. Ce n'est pas comme ça, et surtout dans les régions. Je suis... On est tout à fait d'accord que c'est ces gens-là qui connaissent leurs besoins, qui sont capables de repérer leurs besoins. Tout à fait.

Le Président (M. Bernier) : Nous allons passer du côté de la deuxième opposition. M. le député de Beauce-Nord.

M. Spénard : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue, M. Berlin, Mme Deschamps et M. L'Ériger.

Moi, j'ai pour mon dire... Je vous entends, je vous entends très bien, vous avez fait un très beau mémoire, mais moi, j'ai pour mon dire, en tout cas, dans ma tête à moi, que le statu quo monétaire est devenu intenable. J'ai entendu... Bien, mon confrère de Rousseau est parti, là, mais j'aurais aimé ça le réentendre. Le déficit, au Québec, je ne suis pas sûr qu'il est conjecturel, je pense qu'il est structurel. Et, quand on parle d'un déficit structurel au Québec, bien on n'a pas bien, bien le choix, il va falloir s'attaquer aux structures à un moment donné.

Ceci étant dit, vous proposez trois choix, trois éléments de solution que vous avez proposés : reporter l'équilibre budgétaire, ne pas verser au Fonds des générations et augmenter les revenus. C'est les trois solutions que vous avez apportées, madame, si je ne m'abuse. Alors, moi, j'aimerais ça vous entendre sur l'équité intergénérationnelle, sur la dette qu'on va laisser à nos enfants, parce qu'on va payer 11 milliards juste en frais d'intérêts cette année — les taux d'intérêt sont très bas, une chance. Et vous n'avez pas parlé du tout d'une organisation de travail qui pourrait être différente pour assumer les services adéquats à la population. Vous partez des besoins, puis, regarde, on va engager du monde, ça va faire des revenus pour l'État. Il reste que le payeur, c'est l'État, puis l'État n'a plus les moyens de payer. Alors, c'est quoi... Avez-vous d'autres éléments de solution que vous pourriez m'éclairer, moi, considérant que le déficit est structurel.

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin.

• (21 heures) •

M. Berlin (Simon) : Oui. Bien, dans un premier temps, je vais dire que, oui, j'ai répondu à une question où, oui, justement, j'ai dit qu'il y a même eu des projets pilotes pour avoir des milieux de travail plus efficaces, revoir l'organisation de travail. Oui, on a fait ça. Oui, on fait ça dans certaines circonstances. Donc, pour répondre à cette question, oui, c'est des choses qu'on a faites, c'est des choses qu'on pourrait regarder, mais pas dans un contexte où vous commencez avec un exercice comptable, un gel des effectifs, et maintenant on va procéder à l'autre partie. Ce qu'on dit, c'est qu'on fait ça à l'envers.

S'il y a un problème de déficit structurel, comme vous dites, si on a un problème, au Québec, où il n'y a pas assez d'argent — je pense que c'est comme ça qu'on peut le dire — s'il y a un problème comme ça, ce n'est pas une question intergénérationnelle, c'est toutes les générations. S'il y a un problème, il faut s'attaquer à ces problèmes-là. Puis comment? En créant de l'emploi, en rentrant plus de revenus dans l'État. En essayant d'atteindre un équilibre budgétaire, justement, en ayant plus de revenus d'État.

Et, oui, on vous avait donné quelques pistes de solution. Je peux vous dire qu'on a eu... En passant, on a eu très, très, très peu de temps d'étudier ce projet de loi, qui vient dans une foulée de toutes sortes d'autres projets de loi dans une mentalité et un esprit d'austérité. Celui-là a passé quasiment en dessous des radars, est arrivé il y a trois semaines. Là, on a demandé... on a fait un mémoire, on vous avance de pistes de solution, mais ce n'est pas des pistes de solution dans un encadrement d'austérité, c'est des pistes de solution dans un esprit de croissance, dans un esprit de livrer les services à la population. Dans un esprit intergénérationnel, oui, ça va toucher toutes sortes de monde, si on prend votre approche. Il va y a voir des jeunes qui n'auront pas d'emploi parce qu'il y a un gel d'effectif. Il y a aura moins d'accès aux universités parce qu'il y a moins d'argent pour l'Université du Québec, l'Université du Québec ne peut pas compétitionner. Il va y avoir moins d'argent pour traiter une population vieillissante. Il va y avoir des employés âgés, plus âgés et plus anciens qui vont souffrir d'épuisement professionnel. Oui, il y a des problèmes.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député.

M. Spénard : Il faut bien vous dire qu'en économie... Moi, je ne veux pas vous faire de dessin, là, mais, en économie, là, ce n'est pas l'État qui relance l'économie, d'habitude. C'est l'industrie privée qui relance l'économie, d'habitude. 50 % des emplois sont dans l'industrie privée, et 70 % des nouveaux emplois, à venir, s'en vont dans l'industrie privée. Et ce sont eux qui créent de la richesse, pas l'État. L'État redistribue la richesse. C'est différent de votre schème de pensée.

Alors, moi, tu sais, engager, engager pour les... c'est ça que je ne comprends pas, parce que j'ai toujours su, moi, que deux plus deux, ça faisait quatre, là. Ça ne peut pas faire cinq, puis ça ne peut pas faire six dans trois mois, puis ça ne peut pas faire 10 dans 10 ans puis... Deux plus deux, ça fait quatre, et c'est ça qu'on a. Puis chanceux, avec la structure qu'on a, qu'on n'ait pas encore été décoté par les maisons de cotation à New York, parce que ça nous coûterait pas mal plus cher. Moi, en tout cas, je ne sais pas qu'est-ce que le ministre des Finances a fait, là, mais moi, je m'attendais à une décote bientôt.

Alors, je ne sais pas, moi, je n'ai pas d'autre question. Claude, si tu veux...

Le Président (M. Bernier) : Une courte question. Vous avez à peu près 30 secondes, M. le député de Groulx.

M. Surprenant : Je fais un rapide... À votre mémoire, M. le Président, à votre mémoire à la page 6, peut-être que vous avez trouvé la solution miracle tant recherchée, vous parlez de mesures qui permettraient d'économiser entre 828 millions et 3 345 000 000 $. On en cherche juste 3,2, alors peut-être qu'un seul item pourrait tout régler d'un...

Alors, pouvez-vous m'expliquer un peu comment vous arrivez à ces chiffres-là, au niveau de doter le Québec d'un régime public et universel d'assurance médicaments et nous permettre d'économiser autant? Pouvez-vous nous expliquer un peu comment on arrive à ça?

Le Président (M. Bernier) : Mme Deschamps. 30 secondes.

Mme Deschamps (Johanne) : Vous demanderez... Là, le projet, écoutez, il y a plusieurs variables là-dedans, mais je pense que Québec solidaire l'avait déjà déposé, alors je vous réfère à vos propres collègues.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Justement, nous allons aller du côté de Québec solidaire. Mme la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques.

Mme Massé : Merci, M. le Président. Merci. Bonjour. Bonsoir, en fait. Non, je ne répondrai pas, parce que je n'ai pas assez de temps, je veux aller au coeur des questions, mais on pourra en rediscuter avec grand plaisir parce que ça fait sept ans qu'on en parle.

J'ai l'impression, quand je vous entends... Quand vous dites, bon : Il faut partir des besoins, c'est parce que, dans le fond, c'est ça, notre job, les services publics, hein, c'est de s'occuper de notre monde, c'est de s'assurer qu'au niveau de la population on puisse répondre à leurs besoins. Donc, ce n'est pas un impératif économique, c'est un impératif humain, je pense que vous insistez beaucoup là-dessus. Qui nous amène à penser que, dans le fond, ce qui est difficile dans l'exercice, actuellement, c'est qu'on voudrait gérer nos services publics comme on gère une entreprise privée, puis ça, bien ce n'est pas toujours le chemin à suivre.

Vous avez commencé à parler de la question de l'équité intergénérationnelle, que j'aimerais bien vous parler, parce qu'il semble y avoir un certain mythe autour de la question de l'équilibre budgétaire, et, je pense qu'ils vous l'ont tous dit, Québec solidaire est le seul qui s'oppose à cette atteinte de l'équilibre budgétaire en 2015‑2016. Nous, on parle de le reporter d'un an, mais ça, c'est nous. Et pourquoi on parle de ça? C'est parce qu'à partir du moment où on atteint en 2015‑2016, dans la perspective qui est la nôtre actuellement, puisque la majorité, elle est là, c'est que ce n'est pas l'équilibre budgétaire qu'on va atteindre, c'est un surplus budgétaire, un surplus — et vous l'avez nommé aussi dans votre mémoire — qu'on va verser, donc, au Fonds des générations et non pas qu'on va retourner en redistribution de richesse aux services publics.

Alors, vous avez commencé à l'aborder à la question de l'équité intergénérationnelle. J'aimerais que vous continuiez à nous aider à réfléchir sur cette notion-là.

Le Président (M. Bernier) : Vous avez une minute pour nous aider à réfléchir. Allez-y, M. Berlin.

M. Berlin (Simon) : Comme j'ai commencé à dire... Et je suis tout à fait d'accord avec ce que vous venez de dire, que la livraison de services publics auxquels la population a droit n'est pas un exercice comptable. Il faut regarder les besoins de la population, c'est quoi, la mission, le rôle du gouvernement.

Au niveau d'équilibre intergénérationnel ou d'équité intergénérationnelle, comme j'ai commencé à dire, on applique ce genre de logique, la logique du gouvernement. Ça veut dire... Bon, qu'est-ce qui arrive pour les jeunes? Les jeunes, bon, ce n'est même pas une question... L'équité intergénérationnelle, les jeunes vont perdre en termes d'embauche, ils vont perdre en termes d'accès à l'éducation, ils vont perdre en termes d'expérience. Le Québec va perdre en termes d'expérience, parce que les jeunes, ils ne resteront pas ici, ils vont aller ailleurs travailler. Il faut qu'ils gagnent leur vie, il faut qu'ils paient le loyer, il faut qu'ils mangent. Alors, peut-être ils vont aller ailleurs, on va perdre une expertise.

Au niveau des travailleurs et travailleuses, bien là ça va être une population de travailleurs et travailleuses vieillissants. Il y a les questions d'épuisement. Il y a des questions de coûts qui peuvent augmenter, surtout s'il n'y a pas...

Le Président (M. Bernier) : M. Berlin, je vous remercie. Merci beaucoup de votre présentation et de votre participation. Mme Deschamps, monsieur...

M. Berlin (Simon) : Je n'ai pas aidé beaucoup dans la réflexion, je pense.

Le Président (M. Bernier) : C'est le défi qu'on a comme parlementaires, de rentrer dans des temps aussi courts.

Donc, je vais suspendre quelques instants afin de permettre à la Fédération étudiante universitaire du Québec de prendre place.

(Suspension de la séance à 21 h 6)

(Reprise à 21 h 8)

Le Président (M. Bernier) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux.

Avant de poursuivre, j'ai besoin d'un consentement pour aller au-delà de l'heure prévue, donc jusqu'à 9 h 45. Est-ce que j'ai consentement pour aller jusqu'à 9 h 45? Consentement. Merci.

Bienvenue à la Fédération étudiante universitaire du Québec. M. Maxence Lenoir, M. Philippe Poirier-Monette, on vous souhaite la bienvenue. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, et par la suite suivront les échanges avec les parlementaires. La parole est à vous, en vous identifiant.

Fédération étudiante universitaire
du Québec (FEUQ)

M. Lenoir (Maxence) : Parfait. Alors, bonsoir, M. le Président. Bonsoir, M. le ministre, Mmes, MM. les députés. Donc, mon nom est Maxence Lenoir. Je suis étudiant en génie électrique à l'École polytechnique et également vice-président aux affaires universitaires de la Fédération étudiante universitaire du Québec. Et Philippe Poirier-Monette, ici, qui est notre attaché politique à la fédération.

Donc, pour vous rappeler, la fédération représente 13 associations étudiantes réparties au Québec, 125 000 étudiants. Et ce qui nous intéresse ici pour l'étude du projet de loi n° 15, c'est, bien sûr, l'implication de l'Université du Québec dans le projet de loi qui a été déposé par le gouvernement.

Donc, dans le fond, on s'est intéressés un peu à l'implication qu'avait le projet de loi sur le réseau de l'Université du Québec. Je dirais que, dans l'ensemble, on a relevé plusieurs problématiques qui nous permettent de vous demander aujourd'hui de retirer l'application du projet de loi au réseau de l'UQ. Et on va s'attarder, là, dans les prochaines minutes, à essayer de vous expliquer pourquoi on souhaite le retirer.

• (21 h 10) •

La première des choses qu'on a remarquée, en fait, c'est clairement l'iniquité, en fait, qui est créée dans les universités. On met d'un côté les universités à charte et on met de l'autre les universités du réseau de l'UQ, comme si c'était un réseau séparé. On considère, à la FEUQ, que le réseau de l'université, au Québec, est un réseau qui fait un tout. Il n'y a pas deux types, les universités à charte et les universités du réseau de l'UQ d'un côté. Donc, le fait d'avoir impliqué juste une partie du réseau crée clairement une iniquité au sein des universités

On s'inquiète aussi de la perte d'autonomie des universités, c'est-à-dire qu'avec le projet de loi, tel qu'il est présenté, on va se mêler vraiment de l'effectif géré par les universités, alors que, dans les années passées, on donnait en fait une subvention gouvernementale aux universités, qui étaient chargées, en fonction des objectifs que fixait le ministre de l'Enseignement supérieur, de faire des dépenses, donc, que ce soit en effectif, que ce soit dans du matériel, que ce soit dans des bâtiments.

Par la suite, au niveau de la responsabilité de l'application de la loi, on a, comment dire, un peu de mal à concevoir que le Conseil du trésor va pouvoir déterminer, en fait, le nombre que ce soit de professeurs, que ce soit d'agents de soutien, que ce soit... l'effectif, en fait, qui va être présent au sein des universités, alors que la compétence est normalement auprès du ministre de l'Enseignement supérieur. Donc, on voit là, en fait, encore une fois, un transfert de compétence qui vient jouer dans l'autonomie des universités. Cette autonomie, nous, on la définit comme le contenu des cours, comme la nature des programmes, et qui permet, en fait, d'assurer la mission des universités qui est, bien sûr, au Québec, la formation supérieure de la population québécoise.

Un de nos attachements, également, c'est le travail étudiant, qui est un gros questionnement au coeur de ce projet de loi. On voit que ça va clairement affecter la capacité des universités à recruter, à recruter du personnel étudiant. Vous n'êtes pas sans savoir que la réalité financière des étudiants est précaire et qu'ils ont besoin de travailler, en fait, pendant leurs études, pour subvenir à leurs besoins. On notait, lors de l'année 2013, que 14,3 % des étudiants travaillaient au sein des universités et qu'ils occupaient en fait divers emplois, que ce soient des charges de cours, de la correction d'examen, de la surveillance, des emplois divers, ponctuels ou permanents, des assistants de recherche, du remplacement également; que ces étudiants, en fait, pouvaient cumuler également plusieurs emplois au sein même des universités et qu'ils travaillaient en moyenne 14 heures par semaine. Ces emplois au sein des universités, ces étudiants-là, c'étaient 35,2 % de leurs revenus qui venaient du travail au sein des universités, et, avec ce projet de loi, on se demande si on ne vient pas attaquer en premier lieu ces étudiants, qui ne sont pas, le plus souvent des cas, protégés par des conventions collectives.

Par la suite, j'aimerais parler, en fait, du renouvellement du corps enseignant. On considère, à la FEUQ, que la mission des universités nécessite d'avoir une capacité d'accueil et d'attraction des meilleurs professeurs, que ce soit au niveau de la province, que ce soit au niveau du pays, du Canada, mais également du monde. Avec l'adoption de cette loi, on craint que cette capacité d'attraction de nos universités pour avoir un enseignement de qualité au sein de nos universités va être réduite.

Par exemple, on a également les conventions collectives qui font partie des termes du projet de loi, donc le projet de loi va s'appliquer sous réserve, en fait, des dispositions des conventions collectives. Or, au sein du réseau de l'Université du Québec, vous n'êtes pas sans savoir qu'en fonction des différentes institutions, des différentes écoles et des différentes universités les conventions collectives ne sont pas les mêmes. Donc, on va encore créer une deuxième iniquité, cette fois-ci au sein même du réseau de l'UQ, où l'application de la loi, l'application du projet de loi, tel que présenté, ne va pas être la même.

Je continuerais, en fait, avec les services aux étudiants, qui est une préoccupation perpétuelle de la fédération, qui servent, en fait, à s'assurer que les étudiants, lors de leur parcours universitaire, ils puissent bénéficier, en fait, du soutien, que ce soit académique, moral mais aussi de vie universitaire, le meilleur possible. Ce qu'on note, avec ce projet de loi qui va impliquer un gel d'embauche au sein des universités, notre première crainte, en fait, c'est que les services aux étudiants vont être coupés. C'est la porte facile pour les universités, si on leur oblige, en fait, à faire des restrictions budgétaires, à faire des gels d'embauche, de couper dans les services aux étudiants. C'est les services, malheureusement, qui sont là en première ligne, qui sont là en soutien aux étudiants qui sont dans des cas très difficiles, que ce soit psychologiquement, que ce soit moralement, que ce soit au niveau académique, et encore une fois on pense — et on le perçoit déjà à l'heure actuelle — que les universités seraient tentées de couper dans ces services-là en premier.

Je terminerais, en fait, ma présentation de notre mémoire par la reddition de comptes. À l'heure actuelle, il y a tout un ensemble de redditions de comptes que sont amenées à faire les universités, que ce soit en vertu des règles budgétaires, que ce soit en vertu des lois qui les composent. Avec ce projet de loi, on demande un effort supplémentaire de reddition de comptes au réseau de l'UQ qui est déjà présent, qui est déjà présent dans les règles budgétaires, qui est déjà présent dans la loi qui le compose. De dénombrer l'effectif qui est compris dans le réseau de l'UQ, c'est déjà fait, c'est déjà fait chaque année, le rapport est déposé auprès du ministre de l'Enseignement supérieur, qui est ensuite déposé à l'Assemblée nationale. On vient donc dédoubler un travail de reddition de comptes qui est déjà effectué et qui est déjà présenté à vous, Mmes, MM. les députés.

On ne dit pas que les mécanismes de reddition de comptes ne doivent pas s'appliquer, les universités sont financées en majeure partie par des fonds publics. Par contre, ça nécessite d'avoir une cohésion au sein de la reddition de comptes, et c'est pourquoi depuis plusieurs années la fédération demande la création d'un conseil national des universités afin de gérer l'ensemble du réseau et de s'assurer de la cohésion dans le réseau.

Finalement, je terminerais sur une autre note au niveau universitaire, qui est le rapport du chantier sur le financement, qui n'est pas forcément lié directement avec le projet de loi n° 15 mais qui permettra de déterminer les problématiques de financement actuelles dans notre réseau, et qu'on pourra mandater en fait par la suite ce conseil national des universités à produire des propositions, que ce soit en matière de politique de financement mais aussi de reddition de comptes, pour qu'on puisse atteindre les objectifs que le gouvernement a fixés.

Donc, je pense que ça conclurait ma présentation du mémoire qu'on vous a soumis. Dans le fond, pour terminer, c'est un projet de loi qui, à nos yeux, n'est pas applicable pour le réseau de l'UQ, pour les raisons qu'on vient d'évoquer, que ce soit l'iniquité qu'il crée au sein du réseau pour la double reddition de comptes qu'il vient mettre en place et pour l'implication que ça va avoir, que ce soit sur le travail étudiant mais aussi sur les services qui sont donnés aux étudiants.

Le Président (M. Bernier) : Merci de votre présentation, M. Lenoir. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Coiteux : Merci beaucoup. Alors, merci, M. Lenoir, puis merci aussi, M. Poirier-Monette, d'être ici ce soir. Écoutez, vous avez été trois groupes, aujourd'hui, à être venus nous parler de l'Université du Québec, alors, chacun avec une perspective un petit peu différente, mais néanmoins en insistant sur l'inégalité de traitement qui consisterait à appliquer le projet à l'Université du Québec et pas aux universités à charte. Juste pour les fins de la discussion, là, pour les fins de la discussion, si on soumettait toutes les universités, est-ce que ça réglerait le problème... ou vous auriez encore des objections?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir, oui.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, comme j'ai présenté, en fait, dans mon introduction, oui, ça crée une iniquité, mais, au-delà des problématiques, que ce soit en termes de perte d'autonomie des universités, qui est essentielle pour le moteur du Québec... Les universités ont besoin de cette autonomie, d'être indépendantes les unes des autres, de pouvoir utiliser l'argent qu'elles reçoivent pour avoir un professeur dans tel domaine ou alors avoir plus de soutien, parce qu'elles ont des réalités différentes. Également, je pense que... C'est ça. Les universités sont vraiment, réellement différentes, et ce n'est pas en les appliquant à toutes les universités qu'on va régler le problème.

De plus, comme je le disais, la reddition de comptes, on demande à ce qu'il y ait le dénombrement. Les universités le font déjà, le gouvernement a déjà les données. Ça fait qu'on ne voit pas pourquoi on devrait appliquer ce projet de loi à l'ensemble des universités.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

• (21 h 20) •

M. Coiteux : Bien, juste un point ici : C'est parce que le dénombrement arrive avec un retard. Alors, si, pour... D'abord, il y a des fins de connaissance, là. Comment évolue la situation dans l'ensemble de nos réseaux, ça, je pense qu'on a besoin de données qui sont plus fréquentes que sur une base annuelle. Puis, dans certains cas, certains éléments du réseau, même, les données annuelles nous arrivent avec une année de retard. Donc, lorsqu'on les a, on est très, très, très après coup, et donc, s'il y avait eu des choses, des gestes à poser, on ne serait pas en mesure de le faire.

Donc, de ce point de vue là, l'objectif ici est toujours que l'État, comme n'importe quelle organisation, par ailleurs, qui finance, vous l'avez bien dit, qui finance toutes ces activités-là, dans la vaste majorité, a besoin de cette connaissance-là. Donc, ce n'est pas un excès de demande sur les réseaux que de leur demander à qui ils font des chèques de paie, en d'autres termes, puis à quelle catégorie d'emploi ça correspond. Donc, ce n'est pas des rapports très complexes qu'on demanderait dans ce contexte-là.

Alors, est-ce qu'un dénombrement plus fréquent, vous, vous le voyez comme un problème?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Vous avez évoqué une problématique, je dirais, au niveau de l'échéancier, c'est-à-dire qu'on reçoit en retard l'effectif étudiant. Je tiens à rappeler également à Mmes, MM. les députés que le gouvernement finance avec l'effectif étudiant deux ans en arrière, c'est-à-dire que les universités reçoivent pour l'année 2014‑2015 qui s'en vient avec l'effectif étudiant qu'elles ont eu deux ans auparavant. Donc, si on veut aussi avoir des universités qui donnent des effectifs étudiants beaucoup plus récents, pourquoi ne pas financer avec l'effectif étudiant de l'année précédente, qui serait un portrait beaucoup plus juste de la subvention qu'octroie le gouvernement auprès des universités?

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Je faisais référence, tout à l'heure, au fait qu'il y a eu trois groupes qui sont venus nous parler de l'Université du Québec ce soir, puis le premier nous avait dit : Il y a eu une explosion de la masse salariale du côté administratif. Vous, vous êtes des étudiants. Vous êtes ceux pour qui les universités existent, là, dans la fonction de service public, là, vous permettent d'accéder à un savoir universitaire, vous former, éventuellement aussi devenir des chercheurs, certains d'entre vous, là, si vous poursuivez en maîtrise ou au doctorat. Donc, vous êtes les personnes pour lesquelles on crée et on finance ces institutions-là. Est-ce que, dans votre expérience de ce que vous vivez dans le réseau universitaire, et notamment l'Université du Québec, vous trouvez que les effectifs augmentent au bon endroit... ou vous pensez que l'augmentation des effectifs, actuellement, n'est pas à la bonne place?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Quand on parle de l'effectif, c'est sûr qu'il y a l'administration mais aussi le côté enseignement, et nous, on s'attarde beaucoup plus au côté enseignement. C'est sûr qu'on aimerait qu'il y ait un professeur pour 10 étudiants. Malheureusement, la réalité budgétaire est autre.

Par contre, je vais revenir sur la question de l'autonomie, qui est, pour nous, essentielle. C'est-à-dire que, si des universités décident de mettre beaucoup plus, comment dire, de fonds dans de l'administration parce qu'elles considèrent que c'est bénéfique pour l'institution, et que ça respecte, bien sûr, les objectifs qu'a fixés le ministre de l'Enseignement supérieur, on ne peut pas être contre. S'il y a des universités — et c'est le cas notamment en région — qui décident de miser plus sur les services aux étudiants parce qu'ils ont une réalité qui est que c'est des étudiants de première génération en majorité, que c'est des retours aux études en majorité, des mères monoparentales qui retournent aux études, on considère également que c'est une bonne chose de vouloir diminuer cette administration au profit des services aux étudiants. Encore une fois, c'est une question d'autonomie des universités. C'est un choix qu'elles doivent faire en fonction de leur réalité propre et en fonction des différents objectifs que le ministre a donnés aux universités.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : Vous savez que le contexte budgétaire n'est pas facile, hein, il n'est pas simple, la situation financière est difficile. Donc, il y a toutes sortes de décisions qui doivent se prendre pour nous ramener à l'équilibre, éviter d'augmenter davantage la dette, qui ultimement nuit aux services et va vous nuire en particulier, parce qu'il y aura moins de marge de manoeuvre pour financer quelque programme que ce soit au fur et à mesure qu'on va avancer dans le temps. Donc, on prend des gestes, là, pour contrôler la situation.

Comment vous pensez, dans ce contexte-là... Parce que je sais que vous avez des attentes en disant : Il faudrait financer davantage, il faudrait diminuer les ratios professeurs-étudiants. Vous savez que, dans le contexte actuel, ce n'est pas possible encore. Au contraire, on doit faire des efforts accrus. Comment vous pensez que les universités peuvent contribuer concrètement selon... leur part, qu'elles puissent faire leur part pour aider à faire atterrir les finances publiques sur un sentier qui est plus soutenable, au Québec?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, je pense qu'il y a deux volets à cette question-là. Je pense que les universités contribuent déjà beaucoup à la société de par le fait des diplômés. J'entendais tout à l'heure qu'on parlait que l'économie se créait par l'entreprise privée. Bien, l'entreprise privée a besoin de diplômés, de diplômés universitaires. Et, pour que ces diplômés-là puissent un jour travailler, il y a besoin d'une université de qualité, accessible et qui va leur permettre par la suite, donc, d'aller travailler dans le privé.

Pour les questions de coupures ou, comment dire, de meilleure gestion des fonds publics dans les universités, je ne pense pas que je vais être le mieux placé pour répondre à cette question, il faudrait voir les gestionnaires des universités pour cela. Encore une fois, de notre côté, on considère que l'université a besoin de fonds. C'est rentable pour le gouvernement de financer l'université. Oui, il y a un aspect de rentabilité privé, mais il y a aussi un aspect de rentabilité public à la fin, in étudiant universitaire va coûter moins cher à l'État, va redonner beaucoup plus en impôt, et on pense que c'est comme ça qu'on devrait voir la question des universités.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le ministre.

M. Coiteux : C'est parce que... Puis je vais partager ça avec vous. Ma préoccupation, c'est la suivante. C'est que forcément on doit demander des efforts à beaucoup de gens, à beaucoup de groupes pour y arriver. On parle de plusieurs milliards de dollars, là, pour atteindre les objectifs budgétaires, parce que, quand on dit : Trouver 3,2 milliards puis ensuite s'assurer de maintenir l'équilibre budgétaire — puis ça, c'est en partant d'une situation où même cette année on aurait peut-être eu un déficit de 5 milliards — bon, la marche est très haute, hein, pour ramener l'équilibre. Donc, ça prend des décisions qui sont difficiles, puis en partie ça veut dire qu'il faut regarder nos programmes puis qu'est-ce qu'on va faire avec les programmes. Est-ce qu'on les finance exactement de la même façon? Est-ce qu'on fait les mêmes choix? On est obligés de revoir l'ensemble des façons de faire.

Ma préoccupation, moi, c'est que l'effort soit partagé par tous. Et donc chaque fois que j'ai un groupe qui dit : Non, nous, on ne veut pas participer à cet effort-là parce qu'on est très différents, on est très spécifiques puis on a des raisons que les autres n'ont pas pour nous soustraire à l'effort, je veux bien, mais je suis toujours un petit peu inquiet.

Puis c'est pour ça que je reviens encore avec ma question. Je comprends, j'ai été universitaire moi-même, là; étudiant, bien sûr, mais j'ai été professeur d'université pendant des années. Je le sais, ce que ça veut dire, la contribution des universités à la société, c'est sûr qu'il y a une contribution majeure des universités à la société. Mais néanmoins c'est financé par l'argent des contribuables, les taxes, les impôts. Les revenus fiscaux, ils n'augmentent plus. L'époque où c'était 5 %, 6 % par année, ça fait longtemps que c'est terminé, ça, puis même avec la croissance économique qui peut s'accélérer on ne va pas retourner à cette période-là. Donc, on ne peut pas avoir des dépenses qui vont croître comme à une époque où on avait des recettes fiscales qui croissaient à des taux qui ne vont pas revenir.

Alors, dans ce contexte-là, est-ce qu'on peut vraiment dire à un pan entier du secteur public, notamment les universités et l'Université du Québec : Non, non, vous, vous allez être juste en phase de croissance, et puis on va vous transférer toutes les sommes d'argent dont vous avez besoin pour croître, alors que, dans le reste du secteur public, on doit imposer des efforts? Alors, est-ce qu'il n'y a pas une contribution possible du réseau universitaire à l'effort de retour à l'équilibre budgétaire?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Vous avez parlé de la croissance des universités. Les universités croissent aussi en fonction de l'effectif étudiant, et ça, c'est quelque chose qu'elles ne gèrent pas d'elles-mêmes, c'est la démographie, en fait, du Québec qui le gère. S'il y a des chiffres du ministère de l'Enseignement supérieur qui le donnent, si on voit une évolution du nombre d'étudiants dans les années futures, c'est normal que le financement des universités augmente pour s'assurer que l'ensemble de nos jeunes puissent être formés au niveau du premier, deuxième et troisième cycle dans le futur.

Actuellement, il y a déjà eu plusieurs coupures, dans les dernières années, dans les universités. On les a dénoncées, les universités ont déjà des graves déficits. Il y a des problèmes dans les services aux étudiants, comme j'ai dit, il y a déjà des problèmes dans la gestion académique. Si on demande un effort supplémentaire...

Puis là on demande un effort supplémentaire seulement à l'Université du Québec. Je veux dire, c'est complètement inéquitable envers toutes les universités. Et, je vais le rappeler encore une fois — et c'est notre principal argument sur la question — de l'appliquer à l'ensemble des universités, il y a un problème d'autonomie. On va fixer un nombre d'effectifs on ne sait pas trop comment, c'est le ministre qui va décider. Est-ce qu'il va y avoir du lobbyisme de la part des grandes universités pour avoir plus d'effectif? Est-ce qu'on va connaître la mort du réseau de l'UQ en région? Nous, c'est la question qu'on se pose.

Le Président (M. Bernier) : ...un petit peu moins qu'une minute.

• (21 h 30) •

M. Coiteux : Un petit peu moins qu'une minute. Écoutez, donc, je ne vous poserai pas une question, je vais simplement... parce que c'est les derniers mots que je peux prononcer ce soir. Écoutez, on a eu un court échange. J'ai apprécié tous les échanges qu'on a eus, autant aujourd'hui comme la semaine dernière. Je suis venu ici, moi, pour écouter, lire les mémoires attentivement, bien sûr, et écouter, échanger avec les gens.

L'esprit du projet de loi, pourquoi on fait ça? D'abord, avoir la connaissance. Ce n'était pas normal que l'État n'ait pas la connaissance de ses effectifs dans les réseaux. Donc, il y a l'aspect dénombrement. Mais, comme 60 % de nos dépenses de programmes, c'est les dépenses de rémunération, il faut vraiment qu'on fasse attention à la croissance des effectifs au cours des prochaines années. Puis on doit se donner les outils pour réussir ça.

Ceci étant, il y a des arguments qui ont été avancés. Il y aura sans doute... Sans doute, là, on va considérer des amendements possibles. Je suis sensible à ce que j'ai entendu ce soir, on va discuter de ça pour la suite des choses, mais tout de suite je peux déjà dire au moins une chose : Il y aura un amendement qui va exclure au moins deux entités qu'on a entendues... ou qu'on a reçu un mémoire aussi. Étant donné la situation très spécifique, là, d'organisme essentiellement, mais essentiellement fiduciaire, dont les employés ne sont pas nommés en fonction de la Loi de la fonction publique, on va exclure la Caisse de dépôt et la Commission de la construction. Ça, je pense qu'on s'est déjà pas mal entendus là-dessus, là, que c'était nécessaire. Pour le reste, on va continuer notre réflexion.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. le ministre. M. le député de Sanguinet, porte-parole de l'opposition officielle.

M. Therrien : Merci, M. le Président. Merci, et bienvenue, M. Lenoir et M. Poirier-Monette, d'être ici avec nous.

Écoutez, j'aurais peut-être deux questions rapides, ensuite je vais passer la parole à ma collègue. Je vais juste réagir, là, rapidement. Quand on parle de diminuer les dépenses, contrôler les dépenses au niveau des universités, au niveau de l'éducation, il y a des effets négatifs à long terme quand on fait ça. Le ministre de l'Économie, la semaine passée ou voilà deux semaines, disait en réponse à une question, au salon bleu, qu'il y avait plus de 50 000 emplois, actuellement, qui étaient disponibles, des postes disponibles qui n'étaient pas comblés parce que souvent c'est un manque de formation qui fait en sorte que ces gens-là ne peuvent pas remplir ces postes-là, combler ces postes-là. Et donc investir en éducation, c'est la clé du succès pour une croissance à long terme, soutenue. Moi, je suis de cette école-là, alors, avant de poursuivre, je tenais à vous dire ça.

Les conventions collectives, j'en ai parlé tantôt. J'ai toujours le même laïus, mais, dans ce cas-là, c'est important... puis c'est important dans les autres cas aussi, là, mais c'est parce que les besoins sont en augmentation, effectif qui est maintenu constant. Dans ce cas-là, les universités du Québec se retrouvent dans une situation où il y aura une dégradation des conditions de travail des professeurs et des gens qui vont travailler dans les universités du Québec.

Quel sera l'impact que ça va avoir, cette dégradation-là, sur la communauté des universités du Québec?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, le premier impact, c'est sur les étudiants, malheureusement, c'est les premiers touchés. En fait, dès qu'on commence à couper, que ce soit dans les professeurs, dans les chargés de cours, dans les services aux étudiants, malheureusement, les premiers touchés, ça va être les étudiants. Ça va être des étudiants qui vont décrocher, ça va être des étudiants qui vont retarder leur diplomation. Ça va être des étudiants qui vont peut-être abandonner l'université puis qui ne vont jamais y retourner.

Sur la question... Vous parliez des conventions collectives, j'aimerais y revenir. C'est, pour nous, important, ce sujet-là. Chaque université a sa propre réalité, a signé des conventions collectives avec les groupes qui la composent, et que ce soit au sein de l'Université du Québec... L'Université du Québec n'a pas une convention collective pour l'ensemble de son personnel. Il y en a dont l'engagement de professeurs est en fonction de l'augmentation des effectifs étudiants; d'autres, non. Donc, avec ce projet de loi qui dit vouloir respecter les conventions collectives qui sont déjà en place, si des universités n'ont pas les moyens, en fait, d'augmenter leurs effectifs de personnel enseignant, puisqu'elles ont reçu une commande de gel de la part du ministre de l'Enseignement supérieur, et que les dispositions, en fait, de leurs conventions collectives ne leur permettent pas d'augmenter et d'accroître, en fait, leur personnel enseignant, on va vers un problème. On va vers des salles de cours qui vont être multipliées. On va avoir des problèmes académiques réels, et ça va déteindre ensuite sur les étudiants.

Le Président (M. Bernier) : M. le député.

M. Therrien : O.K., merci. Ensuite, le groupe qui vous a précédés... non, le groupe avant, le deuxième groupe avant vous mentionnait que la recherche dans les universités du Québec... on verrait une diminution de la recherche dans les universités du Québec, il y aurait moins de dynamisme à ce niveau-là. Qu'est-ce que ça a comme impact chez les étudiants, d'après vous?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, si on diminue la recherche dans les universités, c'est sûr qu'on aura moins d'étudiants qui vont, bien sûr, vouloir aller au deuxième, au troisième cycle, qui vont vouloir créer de la richesse, que ce soit par des articles scientifiques qui vont être publiés partout dans le monde, que ce soit par des inventions, par des dépôts de brevet, que ce soit par l'écriture de livres, dans le domaine littéraire. S'il y a un impact sur la recherche, encore une fois, les premiers concernés, c'est les étudiants, malheureusement. On est au sein des universités. Les premiers impactés dès qu'on touche le financement universitaire, c'est les étudiants.

Le Président (M. Bernier) : Merci.

M. Therrien : ...céder la parole...

Le Président (M. Bernier) : Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui, merci, M. le Président. Alors, bonsoir. Heureuse de vous entendre. Je ne pense pas qu'on peut dire, en ce moment, que les universités, et donc, par ricochet, les étudiants, ne font pas leur part, parce qu'on fait face à des coupes records dans le réseau universitaire, et puis je pense qu'il faut être conscient que ça a des impacts, ce n'est pas sans impact. Et d'ailleurs le gouvernement... Évidemment, le ministre n'était pas là à l'époque, mais celui qui occupait mon poste, qui est maintenant le ministre des Ressources naturelles, disait à quel point il était important de réinvestir, donc, il y a de ça une année. Donc, on ne parlait pas de coupe, on parlait de réinvestissement. Donc, ça devait être parce que c'était une bonne idée de s'occuper de notre réseau universitaire, donc je pense que ça le demeure très certainement aujourd'hui. Donc, il faut garder ça à l'esprit quand on aborde un projet de loi comme celui-là.

Si je résume un peu vos inquiétudes, puis vous me corrigerez, puis ça rejoint en partie les deux autres groupes qu'on a entendus, donc la fédération des professeurs et le réseau de l'UQ, il y a toute la question de l'autonomie, donc de l'indépendance des universités qui serait entravée significativement, selon vos arguments, avec un tel projet de loi. Là, le ministre est arrivé avec sa suggestion : Que diriez-vous si on embarquait toutes les universités, donc, dans le projet de loi? Je n'ai pas l'impression, mais on ne le sait pas, mais que c'est l'hypothèse vers laquelle il se dirige, parce qu'il n'y aurait pas juste l'UQ qui, donc, s'insurgerait, mais il y aurait toutes les autres universités, donc, qui ne font pas partie du périmètre comptable. Donc, je ne sais pas, peut-être qu'il cherche à avoir plus de représentations en ce sens, je ne peux pas lire dans sa pensée, mais en tout cas il y a tout un aspect par rapport à l'autonomie, je pense, qui a été bien amené aujourd'hui.

Puis il y a la question du deux vitesses. Et puis, compte tenu qu'effectivement, en ce moment, il y a juste l'UQ qui est concernée par le projet de loi... Les autres nous ont donné des exemples concrets, mais, vous, est-ce que vous avez des exemples concrets sur les impacts négatifs? Parce que je sens que le ministre est quand même à l'écoute, il nous a déjà fait part de modifications qu'il apporterait au projet de loi. Moi, je salue toujours ça, parce que je pense qu'un projet de loi, c'est toujours perfectible, puis un exercice, pour qu'il soit louable, de consultation publique, il faut entendre correctement. Donc, je pense que, votre plaidoirie, peut-être qu'elle peut...

Le Président (M. Bernier) : ...une minute pour répondre, M. Lenoir.

Mme Hivon : Oui. Donc, je vous demanderais des impacts concrets.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, les impacts du projet de loi, comme je l'ai dit, là, ça va être vraiment sur la réalité étudiante. Puis, encore une fois, là, c'est les étudiants qui vont écoper. Si le projet de loi vient fixer un quota d'effectif et que les étudiants... les universités se retrouvent avec ce quota-là dans les mains, bien les premiers qui vont être impactés, là, c'est les travailleurs étudiants au sein des universités. Et, je le rappelle, c'est, pour ceux-ci, 35 % de leurs revenus, c'est-à-dire qu'on va leur couper 35 % de leurs revenus annuels, puisqu'ils n'auront pas accès à leur travail au sein des universités. Que ce soit en tant que chargés de cours, que ce soit en tant que correcteurs d'examen, que ce soit en tant que surveillants d'examen, les premiers impactés, c'est ces étudiants-là, qui n'ont pas tous des conventions collectives et qu'il est très facile de couper par les universités.

Si on vient couper ces emplois étudiants, il faut bien que quelqu'un le fasse, le travail. Ça va être sur le travail des professeurs, qui vont devoir prendre de leur temps, que ce soit en termes d'encadrement des étudiants de cycle supérieur, pour pouvoir corriger des examens qui...

Le Président (M. Bernier) : Excusez-moi. Je vous remercie. On doit passer au deuxième groupe d'opposition et on est très, très serrés dans le temps. M. le député de Beauce-Nord.

• (21 h 40) •

M. Spénard : Merci, M. le Président. À mon tour, M. le président du Conseil du trésor disait que vous êtes les troisièmes qui venez nous parler des universités du Québec comme telles, etc., et je conçois avec lui et je conçois aussi avec vous qu'il y a une espèce de séparation, que je m'explique difficilement, là. Pourquoi juste l'Université du Québec et non pas les autres universités à charte? En tout cas, ça, on pourrait en discuter plus profondément.

Mais, moi, il y a quelque chose qui m'est revenu encore dans ce rapport-là et qui est revenu beaucoup plus souvent que trois fois, c'est l'importance de la reddition de comptes, qui est rendue exponentielle en termes de frais. Et, tout à l'heure, je pense que le recteur de l'UQAM nous mentionnait que 30 % de sa direction financière travaille uniquement à la reddition de comptes pour différents ministères au gouvernement.

Vous, êtes-vous en mesure, parce que vous en avez parlé un peu ici, que ça donnait une surcharge, mais... «...les informations demandées par ce projet de loi sont déjà fournies au ministère par [...] la règle 6.6 des règles [...] du ministère...» Ça, vous avez vraiment l'impression que c'est un travail qui va se faire en double malgré...

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir, oui.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, en fait, tout à fait. Comme je le disais, le travail qu'on demande avec ce projet de loi, c'est de détailler l'effectif du personnel dans les universités, et ça, on le demande déjà pour le réseau de l'UQ à au moins deux places que j'ai répertoriées, c'est-à-dire dans les règles budgétaires qu'on doit transmettre avec un système informatique, chaque année les universités doivent donner quel est l'effectif de leur personnel, et, en plus, dans le rapport annuel qui est déposé à l'Assemblée nationale, le réseau de l'Université du Québec détaille pour chacune de ses composantes, donc chaque université, chaque institut, chaque école, quel est le nombre de personnel qui est dans ses rangs. Donc, l'exercice existe déjà en double, puis on le rajoute encore une fois dans ce projet de loi, pour une troisième fois. L'université va juste créer des rapports pour créer des rapports, c'est ça qu'on voit.

Le Président (M. Bernier) : Merci. M. le député de Groulx.

M. Surprenant : M. le Président, merci. Alors, personnellement, moi, j'ai deux garçons de 25 et 23 ans. Les deux fréquentent l'université. Un est professeur aussi en même temps, puis l'autre a été chargé de cours, alors je comprends un petit peu, là, ce que vous vivez. Mais j'ai mes deux cas à moi, mais j'aimerais avoir un peu plus d'explications sur l'ensemble, un peu sur le portrait plus global, alors donc j'aurai des questions dans ce sens-là.

Je considère également que c'est très important, l'innovation, au Québec. Et, dans le mémoire que nous a déposé tantôt l'Université du Québec, ils faisaient état que «l'enjeu en matière de ressources se trouve dans le renforcement de [la] capacité [de l'Université du Québec] à attirer et à recruter des professeurs-chercheurs de haut niveau afin d'offrir la meilleure formation possible aux étudiants, de diriger des projets à la fine pointe des connaissances et de continuer d'agir comme catalyseur d'innovation au Québec». C'est très important.

Alors, vous avez cité dans votre document les différentes charges de travail qui sont remplies par les étudiants, et puis, entre autres, il y aurait un mot que j'aimerais ça que vous me précisiez. Un répétiteur, qu'est-ce que c'est?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Bien, un répétiteur, en fait, dans les universités, c'est souvent une personne qui accompagne un chargé de laboratoire. Donc, il y a deux ou trois personnes, dans un laboratoire, pour aider les étudiants à faire le laboratoire.

M. Surprenant : ...donc, au niveau de catalyseurs d'innovation. Je vois que, dans les cours, dans les travaux que vous avez, c'est «charge de laboratoire» et «assistant de recherche», entre autres. Alors, j'aimerais ça que vous m'expliquiez un peu quelle est l'importance que ces deux items-là ont prise par rapport aux autres emplois au cours des dernières années? Est-ce qu'il y a une forte croissance? Et est-ce que, donc, les perspectives sont intéressantes pour vous autres à ce niveau-là? C'est quoi, le...

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Je n'ai pas de chiffre sur l'évolution en tant que telle de la charge de cours ou des assistants de recherche pour les étudiants sur les dernières années. Ce que je peux vous dire puis qu'on a mis dans le rapport qu'on vous présente, c'est que le travail étudiant au sein des universités est très important. On a vu, donc, qu'il y a 14 % des étudiants qui travaillent au sein de nos universités, au Québec, et qui ont besoin, en fait, de ce travail-là pour subvenir à leurs besoins. Ça correspond à 6 100 $ de revenus annuellement. Ce 6 100 $, c'est 35 % de leurs revenus. Comme je le disais tantôt, si on commence à couper ces postes-là, qui sont les plus faciles à couper par les universités, c'est cet argent que les étudiants auront en moins. C'est cet argent que les étudiants soit devront s'endetter, qui est en fait, malheureusement, la chose la plus simple à faire, ou sinon aller sur le marché du travail privé en essayant de trouver du travail à l'extérieur de l'université.

Le Président (M. Bernier) : Merci, M. Lenoir. Je donne la parole à la députée de Sainte-Marie—Saint-Jacques. Vous avez deux minutes pour votre question.

Mme Massé : Merci beaucoup. Merci d'être là. Bonsoir. C'est sûr que, dans les préoccupations qui sont amenées ici, on parle beaucoup de l'importance de l'effort, qu'on doit, tout le monde, partager collectivement cet effort-là pour améliorer les recettes fiscales.

Ma collègue disait : Vous avez déjà... ou le milieu universitaire a déjà contribué. Est-ce que vous avez le sentiment que, dans les 10 dernières années, il y a eu vraiment un effort qui a été fait, de votre côté?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Un effort de la part du gouvernement dans les universités?

Mme Massé : Du côté des universités pour mieux contrôler leurs coûts, leurs dépenses, etc.

M. Lenoir (Maxence) : O.K. Bien, je dirais que, dans les dernières années, là, il y a quand même eu plusieurs coupures qui ont été demandées aux universités, donc notamment cette année, avec une grosse coupure qui est venue vraiment affecter les universités. Donc, je pense que les universités, année après année, font leur part. Année après année, la subvention par étudiant, donc, par étudiant qui est octroyée par le gouvernement, c'est la première fois qu'elle diminue, cette année. C'est quand même une première dans les 10 dernières années.

Le Président (M. Bernier) : Une dernière question, oui.

Mme Massé : Oui. Alors, dans ce sens-là, je vais revenir sur une de mes préoccupations qui s'appelle l'équité intergénérationnelle. Ce que je comprends, c'est que vous allez donc avoir, comme jeunes, moins accès à des services, vous allez payer plus de taxes. Il va y avoir moins d'embauche, à tout le moins cette année, mais on peut imaginer que ça va se perpétuer.

Est-ce que vous sentez qu'il y a là un acte d'équité intergénérationnelle?

Le Président (M. Bernier) : M. Lenoir.

M. Lenoir (Maxence) : Pour l'équité intergénérationnelle, je vous dirais qu'on est très préoccupés. On parle beaucoup : Bien, c'est pour nos jeunes dans le futur. Malheureusement, les jeunes n'ont pas été consultés. On attend encore une politique d'action jeunesse, on attend encore la stratégie, et malheureusement ce n'est pas sur les rangs. On parle beaucoup des jeunes, mais on ne leur a pas demandé leur avis, finalement.

Le Président (M. Bernier) : Merci. Merci, M. Lenoir, M. Poirier-Monette. Merci de votre participation à la Commission des finances publiques.

Mémoires déposés

Avant de terminer, je dépose les mémoires des personnes et organismes qui n'ont pas été entendus lors de ces auditions, soit l'Association des pharmaciens en établissements de santé et la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Merci aux parlementaires qui ont participé à cette commission. Merci à M. le ministre, M. le porte-parole officiel, le député de Sanguinet, et M. le député de Beauce-Nord, et M. le député de Groulx, et à tous les autres membres, collègues parlementaires. Merci au personnel de l'Assemblée nationale, du Secrétariat du Conseil du trésor, du personnel à l'enregistrement également de nos débats, et merci à la population qui nous a écoutés.

Je lève donc la séance de la commission, ayant accompli son mandat, et ajourne ses travaux sine die. Bonsoir à tous. Merci de votre participation.

(Fin de la séance à 21 h 47)

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