Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance
Version préliminaire
43rd Legislature, 1st Session
(November 29, 2022 au September 10, 2025)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Thursday, June 8, 2023
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Vol. 47 N° 26
Special consultations and public hearings on the report on the application of the Act to facilitate the disclosure of wrongdoings relating to public bodies
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Intervenants par tranches d'heure
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Simard, Jean-François
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Allaire, Simon
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Rizqy, Marwah
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Montigny, Yves
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Labrie, Christine
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Allaire, Simon
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Simard, Jean-François
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Rizqy, Marwah
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Labrie, Christine
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Simard, Jean-François
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Allaire, Simon
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Simard, Jean-François
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Allaire, Simon
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Montigny, Yves
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Rizqy, Marwah
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Rizqy, Marwah
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Simard, Jean-François
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Labrie, Christine
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Allaire, Simon
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Montigny, Yves
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Montigny, Yves
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Simard, Jean-François
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Rizqy, Marwah
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Labrie, Christine
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Simard, Jean-François
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Allaire, Simon
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Montigny, Yves
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Rizqy, Marwah
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Rizqy, Marwah
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Simard, Jean-François
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Labrie, Christine
11 h 30 (version révisée)
(Onze heures cinquante et une minutes)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, à l'ordre, s'il vous plaît! Je constate que nous avons quorum.
Nous sommes en mesure de pouvoir entreprendre nos travaux. Comme vous le savez,
la commission est aujourd'hui réunie afin de poursuivre les consultations
particulières et les auditions publiques sur le rapport sur la mise en œuvre de
la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des
organismes publics. Mme la secrétaire, bonjour. Y aurait-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, M. le
Président. M. Bouazzi (Maurice-Richard) est remplacé par Mme Labrie
(Sherbrooke).
Le Président (M. Simard) : Alors,
pour toutes sortes de raisons, nous avons ce matin commencé légèrement en
retard. Y aurait-il consentement afin que nous puissions, donc, terminer à l'heure
prévue, en retranchant de manière proportionnelle les temps de parole afin que
nous puissions arriver top chrono dans nos temps respectifs?
Des voix : ...
Le Président (M. Simard) : Il
y a consentement? Très bien.
Alors, nous avons l'honneur ce matin de
débuter nos échanges par la présence de représentantes et de représentants de
la Fédération professionnelle des journalistes du Québec. Ils sont par
visioconférence. Alors, Mesdames, Messieurs, bienvenue! Nous avons de légers
problèmes techniques avec lesquels nous allons devoir composer. Auriez-vous d'abord
l'amabilité de vous présenter? Suite à quoi, vous... (Panne de son)... bien
entendu 10 minutes de présentation.
M. Nguyen (Michaël) : Je me
présente. Michaël Nguyen, président de la Fédération professionnelle des
journalistes du Québec et journaliste judiciaire du Journal de... au Journal
de Montréal. Je suis accompagné de M. Éric-Pierre Champagne, vice-président
de la fédération, journaliste et spécialiste en environnement à La Presse,
de Mme Geneviève Michaud, trésorière de la fédération et directrice pour Métro
Média, ainsi que Mme Desjardins, directrice générale de la Fédération des
journalistes du Québec. Est-ce que je continue? Vous me laissez la...
Le Président (M. Simard) : Voilà.
Nous vous écoutons.
M. Nguyen (Michaël) : Donc,
premièrement, M. le Président, Mmes, MM. les députés, d'abord, je tiens à vous
remercier pour l'invitation à cette commission. La Fédération professionnelle
des journalistes du Québec existe depuis 54 ans maintenant. Elle défend la
liberté de presse et le droit du public à l'information. Nous sommes un
organisme sans but lucratif qui rassemble environ 700 journalistes dans
plus de 250 médias écrits et électroniques à travers toute la nation. C'est
ce qui en fait la plus... la principale et la plus représentative organisation
journalistique au Canada. Le sujet de cette rencontre aujourd'hui, évidemment,
c'est la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des
organismes publics. Donc, elle a fait l'objet d'un rapport sur sa mise en œuvre
en février 2020. Pour rappel, la FPJQ, on tient à mettre de l'avant certaines
recommandations et présenter aussi certaines inquiétudes suite au dépôt de ce
rapport.
En février 2016, pour faire un topo
rapide, la FPJQ avait été conviée lors de l'étude du projet de loi n° 87. Et, à l'époque, nous avions émis certaines
recommandations qui n'ont malheureusement pas été appliquées à la mouture
finale de la loi et nous souhaitons justement, bien, profiter de ces
consultations maintenant pour réitérer certaines de ces demandes. C'est certain
que la loi n'est pas liée directement au travail journalistique, mais ça nous
interpelle à travers les fondements démocratiques qu'elle protège, notamment l'éthique
et la transparence de nos institutions ainsi que l'intérêt public.
Donc, bien que la Fédération soit d'avis
qu'il y a des contextes où la divulgation d'informations confidentielles n'est
pas justifiée et qu'il doit y exister des balises, nous tenons quand même à
souligner que les recommandations prévues au rapport risquent de rendre la
décision encore plus complexe pour les sonneurs d'alarme. La loi faisait déjà
reposer le fardeau de la preuve sur leurs épaules et les recommandations
proposées par le rapport vont augmenter cette pression et créer certaines
confusions et surtout accentuer un risque de judiciarisation du processus, ce
qui la rendrait encore plus inaccessible pour un dénonciateur. Donc, pour le
bien de la démocratie, la FPJQ souhaite éviter que cette loi, qui vise à
faciliter la divulgation d'actes répréhensibles dans les organismes publics,
ait une efficacité aussi limitée de la Loi sur l'accès à l'information.
Parce que, je tiens à vous le rappeler, M.
le Président, Mmes, MM. les députés, ça prend du courage pour dénoncer. Un
lanceur d'alerte potentiel, il fait présentement face à un choix :
dénoncer, avec un risque de devoir mettre sa vie sur pause, ou fermer les yeux,
continuer sa vie sans mettre tous les projecteurs sur elle, sans vivre un
stress pour lequel cette personne n'est pas nécessairement préparée ou le
soutien qu'elle pourrait recevoir risque d'être un peu aléatoire, selon les
organismes. Il y a des gens qui décident de se battre, par exemple, vous vous
en souviendrez tous, Claude Robinson l'a fait, il s'est battu, mais<, je
me permets de vous demander...
M. Nguyen (Michaël) :
...qui décident de se battre, par exemple, vous vous en souviendrez
tous, Claude Robinson l'a fait, il s'est battu, mais, >je me permets de
vous demander :à quel prix?
Donc, sans plus tarder, pour économiser le
temps de la commission, je vais laisser la parole à M. Champagne, qui va
vous faire part de nos recommandations plus en détail. Merci.
M. Champagne (Éric-Pierre) : Oui.
Bonjour. Merci, Michaël. Bien, bonjour à tous. Donc, évidemment je vais vous présenter
deux des recommandations que la FPJQ souhaite faire. Ma collègue, Geneviève
Michaud, va s'occuper des deux autres.
Concernant la protection de la
confidentialité des dénonciateurs, on tient à rappeler que la FPJQ, en 2016,
avait relevé le fait qu'il pouvait y avoir un problème à ce que la dénonciation
soit un peu comme jugée, évaluée par l'organisme visé. Donc, pour nous, il y
avait un problème, là, de juge et partie, évidemment. On trouve très
intéressante la recommandation qui a été faite de donner le mandat au Protecteur
du citoyen. Ça peut permettre de faire en sorte que ces dossiers-là, si on
veut, soient évalués par une personne... bien, pas une personne, mais, en tout
cas, un groupe externe. On pense que c'est un pas dans la bonne direction. Ceci
dit, si on ne donne pas les moyens au Protecteur du citoyen de faire ce
travail-là... Parce qu'on peut penser que, si tel était le cas, ça mettrait les
potentiels lanceurs d'alerte en confiance, en tout cas un peu plus en
confiance, donc ça amènerait probablement, fort probablement un peu plus de
travail pour le Protecteur du citoyen. Donc, si on ne lui donne pas les moyens
de faire son travail, c'est un peu comme un coup d'épée dans l'eau, là. Ça
revient, à notre avis, à faire en sorte que ça... on ne corrige pas
véritablement le problème, là. C'est quelque chose qu'on voit notamment avec la
Commission d'accès à l'information, à qui on a confié de nouvelles
responsabilités au cours des dernières années, sans lui donner, par exemple,
plus de budget, plus de moyens pour faire son travail. Je pense que la CAI d'ailleurs
l'a signalé, là, à quelques reprises. Donc, ça, c'est un aspect qui est très
important pour nous.
• (12 heures) •
L'autre aspect, c'est sur la nécessité...
En fait, il y a des lanceurs d'alerte qui finissent par parler au public, aux
journalistes. Là, on soulève un problème parce qu'il y a... En fait, la façon
dont c'est fait actuellement, c'est que, pour pouvoir parler au public et aux
journalistes, il faut cocher beaucoup de cases, et là il y a des cas très, très
précis où on peut accepter que des lanceurs d'alerte parlent au public. Mais
nous, on pense que, là, ça aussi, ça peut poser un problème parce qu'évidemment
il y a... Bon, juste un exemple. On parle par exemple... tu sais, dans un cas
où la sécurité d'une personne ou son environnement est en cause, bien, prenons
l'exemple de la commission Charbonneau, qui a vu le jour grâce notamment à des
lanceurs d'alerte. Est-ce que ce qui était en cause à ce moment-là, c'était
considéré comme un motif raisonnable aux yeux de la loi? Je ne pense pas. Donc,
ça aussi, c'est problématique. Puis je voudrais juste rappeler à quel point
c'est difficile pour les lanceurs d'alertes.
Rappelons-nous Louis Robert. Louis Robert,
ce qu'on sait, c'est qu'il avait passé au travers tout le processus et,
malheureusement, ça n'avait rien donné, en tout cas, lui, c'est ce qu'il avait
estimé. Et il a fait des sorties dans les médias, ça a fait en sorte qu'il a
perdu son emploi puis l'a récupéré par la suite. Alors, voyant ça, là, les
potentiels lanceurs d'alerte au sein des organismes publics, là, est-ce qu'ils
ont envie d'être des futurs Louis Robert? Je pense qu'on peut présumer qu'ils
n'ont peut-être pas envie de vivre ça. Donc, l'idée, c'est de faire en sorte
que les règles facilitent, là... ces gens-là qui, en toute bonne foi, veulent
dénoncer des situations problématiques.
Donc, c'est vraiment les deux... les deux
principaux... les deux premiers aspects qu'on veut porter à votre attention.
Puis je vais laisser ma collègue, Geneviève Michaud, là, vous parler des deux
autres.
Mme Michaud (Geneviève) : Merci,
Éric-Pierre. Bonjour à tous. Écoutez, la notion suivante qui retient notre
attention, là, c'est la protection de la notion d'intérêt public. Dans le
rapport, la recommandation 2 propose de modifier cette notion d'intérêt
public là en la rattachant à l'objet de la divulgation plutôt qu'aux intentions
des personnes qui l'effectuent. Selon nous, cette modification-là accentuerait
encore plus le fardeau de la preuve sur les dénonciateurs parce qu'en plus de
devoir se conformer à l'article 7 ils vont maintenant devoir juger, avant
même de faire leurs dénonciations, de la validité de cette dénonciation-là selon
l'intérêt public. Puis, selon nous, les sonneurs d'alerte devraient pouvoir se
baser plutôt sur leur bonne foi et leurs intentions et ne pas être tenus de
faire l'analyse juridique de la portée de leur dénonciation.
Qui plus est, on pense que, d'entrée de
jeu, les dénonciations devraient... les informations devraient être considérées
comme d'intérêt public...
12 h (version révisée)
Mme Michaud (Geneviève) : ...Qui
plus est, on pense que, d'entrée de jeu, les dénonciations... les informations
devraient être considérées comme d'intérêt public, étant donné qu'elles
concernent des organismes publics, donc que les lanceurs d'alerte ne devraient
pas avoir à se poser cette question-là, mais devraient pouvoir se baser, en
effet, sur leur intention de lancer l'alerte.
Par ailleurs, la FPJQ est d'avis, là, qu'une
révision de la loi tous les cinq ans, ce qui est proposé, est une mesure essentielle
en autant qu'elle soit appliquée. On appuie donc, là, cette partie-là de la
recommandation numéro deux.
Puis, pour terminer, le... ce qui nous...
retient notre attention aussi, c'est la protection des lanceurs d'alerte, et on
est d'avis que la création d'un comité multipartite pour effectuer des travaux
sur le régime de protection contre les représailles est très pertinente. Par
contre, ce qu'on souhaite souligner, c'est que ce comité devrait être lié à un
échéancier pour la production du rapport et à des mécanismes de suivi pour l'application
des recommandations.
Donc, je repasse la parole à notre
président.
M. Champagne (Éric-Pierre) : Michaël,
on ne t'entend pas.
M. Nguyen (Michaël) : Excusez-moi,
j'avais fermé mon micro. Merci, Geneviève. En conclusion, notre travail, comme
journalistes, il consiste à protéger et défendre le droit du public à l'information,
ce qui est tout à fait en phase avec les principes essentiels à une saine
démocratie. Or, dans sa mouture actuelle, on remarque que cette loi est loin de
favoriser ce droit et, alors que la loi d'accès à l'information est
complètement désuète, on juge que l'intérêt public reste menacé pour protéger l'image
des institutions.
Je tiens à vous rappeler que nous sommes
dans une ère de désinformation, de théories du complot. C'est quelque chose
que... vous le savez tous, des gens décident de ne pas faire confiance à l'État,
de ne pas faire confiance aux institutions. Par exemple, les feux de forêt qui
font rage actuellement, on voit passer certaines franges de la population qui
croient, à tort, que c'est le gouvernement qui a allumé ces feux.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Nguyen (Michaël) : Or,
pour regagner la confiance du public, il faut faire preuve de transparence, et
avec une loi forte, une loi qui protège et qui favorise la transparence et la
dénonciation, bien, cette confiance peut être regagnée.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Merci, M. le Président. Alors, nous entamons notre période d'échange.
Pour ce faire, je cède la parole au député de Maskinongé, qui dispose de neuf
minutes.
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre présence. Vous êtes le seul groupe qui
avez un angle qui est vraiment propre à vous. Ça fait que ça nous éclaire
beaucoup, là, sur le travail et le rôle que vous avez à jouer dans le contexte
qui nous réunit aujourd'hui. Vous avez parlé tantôt que vous étiez en faveur,
là, du mandat, là, plus… plus élargi du Protecteur du citoyen, là, si on revoit
la loi. Vous avez parlé de moyens, vous avez parlé de moyens. J'ai compris,
dans votre intervention, que vous parliez davantage de moyens, entre autres,
financiers, probablement, aussi, davantage de moyens au niveau des ressources
humaines. C'était probablement la pertinence de votre intervention. Mais ma
question, c'est : Est-ce que vous parlez aussi de moyens qui seraient
davantage législatifs également?
Le Président (M. Simard) : Alors,
M. le Président.
M. Nguyen (Michaël) : Quand
on parle de moyens législatifs, c'est certain que la refonte... une certaine
refonte des modifications à la loi qui donnerait du pouvoir au protecteur de
citoyen serait accueillie favorablement. Or, on voit, le Protecteur du citoyen
a déjà beaucoup de travail sur ses épaules. Et, évidemment, la question, c'est :
si la loi donne ce pouvoir au Protecteur du citoyen, est-ce qu'il aura les
moyens de mettre en œuvre l'application de la loi? Donc, c'est certain qu'à ce
niveau-là ça va main dans la main. Il faut lui donner du pouvoir, mais aussi
les moyens d'exercer ce pouvoir.
M. Allaire : Et est-ce qu'il
y a des cas qui sont venus à vos oreilles, par exemple, qui feraient en sorte
que, dans le passé, certains traitements de demandes, là, en fait, de plaintes,
par manque d'effectifs, par exemple, ou de moyens, n'auraient pas été traités
adéquatement?
M. Nguyen (Michaël) : À nos
oreilles, non, parce qu'évidemment, dans la formule actuelle, l'accès aux
médias pour les lanceurs d'alerte est excessivement limité. On peut le voir
dans l'article 7 de la loi. Toutefois, dans le rapport qui a été produit,
on peut voir que plusieurs organismes, malheureusement, n'ont pas fait de... n'ont...
ont un suivi qui est assez limité, il y a eu des changements organisationnels
qui fait que le suivi n'a pas été fait. On remarque aussi que certains
organismes n'ont toujours pas désigné de responsable, par exemple, si je ne me
trompe pas, l'Autorité des marchés financiers, ou encore, l'Assemblée
nationale.
M. Allaire : Merci.
M. Champagne (Éric-Pierre) : Si
je peux me… d'ajouter, si vous me le permettez, effectivement, sur le
Protecteur du citoyen, on n'a pas beaucoup d'exemples, mais on... en parallèle,
on peut parler de la Commission d'accès à l'information, qu'on connaît beaucoup
mieux, nous, comme journalistes, puis on le voit bien que la commission n'a pas
toutes les ressources financières et humaines pour faire son <travail…
M. Champagne (Éric-Pierre) :
...puis
on le voit bien que la commission n'a pas toutes les ressources financières et
humaines pour faire son >travail, parce qu'ils ont plus de
responsabilités qu'ils n'en avaient par le passé et ils sont moins en mesure de
répondre à plusieurs choses dans les délais. Donc, nous, c'est le parallèle
qu'on fait et on pense que ça peut avoir une incidence importante s'il y a des
lanceurs d'alerte qui se font dire : Vous devez aller voir le Protecteur
du citoyen. Mais s'ils ne sont pas bien accompagnés, par faute de temps ou de
ressources, ça risque de miner leur confiance dans le processus et de faire en
sorte qu'ils vont s'empêcher de faire des dénonciations.
M. Allaire : Merci. Vous avez
parlé tantôt, là, de toutes les cases à cocher ou de la procédure à suivre, là,
pour faire une dénonciation publique, et vous n'avez pas dit ces mots-là, mais
j'ai compris que c'était… c'était lourd, là, quand même, comme… comme
processus. Vous avez parlé de motifs raisonnables. C'est quoi les motifs
raisonnables, selon vous, là, qui seraient... qui donneraient, en fait, au
dénonciateur un certain «fast track», là, vous allez me pardonner l'anglicisme,
là, mais permettre, là, de faire une dénonciation qui est raisonnable, mais que
ce soit plus léger comme processus?
M. Nguyen (Michaël) : La notion
d'intérêt public serait déjà un pas en avant important, parce qu'actuellement
quand on lit l'article 7 de la loi, je ne suis pas juriste, je ne sais pas s'il
y a des juristes parmi vous, mais ça semble plus quelque chose qui a été
écrit... Une personne anxieuse, un potentiel lanceur d'alerte va le lire, s'il
n'est pas juge, s'il n'est pas avocat, j'ai comme un peu l'impression qu'il
risque d'être un peu confus et qu'il risque de mettre un bâton dans sa volonté
de dénoncer. Donc, en ajoutant la notion d'intérêt public de façon claire, dans
l'article 7, par exemple, bien, ça, ça permettrait, justement, de libérer un
certain fardeau, qui pourrait pousser un lanceur d'alerte potentiel à aller de
l'avant et, justement, mener ce combat en sachant qu'il peut être protégé.
M. Allaire : Parce que ce
qu'on voit aussi… Puis il y a… il y a quand même une notion de danger, à mon
avis, c'est-à-dire que, si on ne met pas des balises, si on ne met pas
différents paramètres très clairs pour être sûrs que la divulgation qui est
faite, elle est fondée, on peut... il peut, au final, y avoir une atteinte à la
réputation, là, puis, tu sais, il faudrait prévoir aussi un mécanisme de
réparation dans un tel contexte. Vous autres, vous voyez ça comment, cet
élément-là, à partir du moment où il y a une dénonciation qui est faite, tout
l'appareil médiatique s'emballe, par exemple, sur un dossier en particulier,
mais là, au final, on se rend compte que c'est plus ou moins fondé, là, ou pas
du tout fondé?
M. Nguyen (Michaël) : On
comprend que, pour qu'il y ait plainte ça commence à l'interne. Ça, on peut
très, très bien le concevoir, idéalement, à travers le Protecteur du citoyen.
Mais on essaie de penser à tous les cas de figure qui sont possibles, parce que
c'est un peu ça, le but de la loi, c'est de prévoir les... tous les cas de
figure possibles. Mettons que ça n'avance pas, pour plein de raisons, que ce soit
par manque de moyens, par manque de ressources, mais que la plainte est fondée,
est-ce que, par exemple, un certain laps de temps... Si une plainte ne peut pas
être traitée dans un certain laps de temps, bien... et que la notion d'intérêt
public est remplie, est-ce que ça pourrait protéger... est-ce qu'un lanceur
d'alerte pourrait être protégé, s'il décide d'aller dans les médias, bien, d'y
aller publiquement? On parle de médias, ça peut, évidemment, être à travers les
réseaux sociaux, à travers des lettres ouvertes, peu importe le format qu'il
utilise, mais c'est...
Il faut se rappeler aussi que le lanceur
d'alerte, s'il veut dénoncer, c'est qu'il a l'intérêt de l'organisme à coeur,
il veut s'assurer qu'à long terme la pérennité de l'organisation continue à
avoir une bonne réputation. Et c'est ça, tout le danger, parce qu'il y a
l'image qu'il faut protéger évidemment, il y a le devoir de loyauté de la
personne, mais, en même temps, il y a l'intérêt public. Parce qu'il faut le
rappeler, la... au final, les fonctionnaires, leur devoir de loyauté est envers
leur organisation, mais, par extension, auprès de la population, auprès des
contribuables qui financent l'organisation.
• (12 h 10) •
M. Allaire : Ça fait que
c'est l'équilibre, il faut tendre vers l'équilibre.
M. Nguyen (Michaël) : C'est...
et ça, c'est la difficulté que vous avez.
M. Allaire : Oui, très beau
défi. Ça va pour moi. M. le Président, je n'ai pas d'autre question, oui.
Le Président (M. Simard) : ...cher
collègue. Alors, je cède la parole à la députée de Saint-Laurent, qui dispose
d'environ 6 min 45 s.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Je vais aller très vite, parce que j'ai très peu de temps. La première fois que
j'ai reçu une enveloppe brune à mon bureau de comté, c'était un individu qui
est rentré en catastrophe et est reparti aussi vite. Il n'y avait pas d'argent
dedans, mais il y avait les plans et la preuve, la démonstration, par exemple,
que les classes de maternelle quatre ans ne coûtaient pas 124 500 $.
C'était écrit, noir sur blanc, que des projets avaient été reportés pour des
agrandissements. Et on apprenait que, finalement, la classe coûtait
1,2 million au Centre de services scolaire des Mille-Îles. Et c'est comme
ça que j'ai pu amener ça ici, à l'Assemblée nationale, et ça a été repris par
les journalistes. Aujourd'hui, j'ai reçu une autre enveloppe brune.
Moi, vous savez, je suis aussi
porte-parole en matière <d'éducation…
Mme Rizqy :
...par
les journalistes. Aujourd'hui, j'ai reçu une autre enveloppe brune.
Moi, vous savez, je suis aussi
porte-parole en matière >d'éducation, et, en éducation, nos yeux et nos
oreilles, c'est le personnel qui est sur le terrain. Le quiz qui… du gros bon
sens. Vrai ou faux : un employé peut commenter ou répondre aux questions
d'un journaliste relativement à une situation dont il a été témoin ou dans
laquelle il a été impliqué dans le cadre de ses fonctions? Faux. Conformément à
la politique relative aux communications, toute demande de commentaire ou
d'entrevue d'un journaliste formulée aux employés et aux intervenants dans le
cadre de leurs fonctions doit être dirigée vers la direction de leur
établissement, service ou réseau, qui se référera ensuite au service de
communication.
Pour asseoir le propos, c'est qu'il est
arrivé dans une école… l'équipe-école a demandé pourquoi que, depuis
septembre, la ressource, qui est une professionnelle de soutien, n'a pas été
remplacée suite à son retrait préventif. On est rendus au mois de mai. Alors,
l'équipe-école a été très fâchée, puis là ils se sont fait dire : Oui,
mais on n'a pas cru bon de remplacer une ressource professionnelle, puis,
l'année prochaine, vu que c'est son congé de maternité, on ne la remplacera pas
plus. Donc, pendant deux ans, il manquera une ressource. Alors, le lendemain
que les employés de l'école étaient mécontents, des pastilles vrai ou faux sur
le droit de commenter ou ne pas commenter ont été distribuées partout, par
magie, ont apparu à l'école. Ça, est-ce que ça aide à la divulgation
d'informations qui sont quand même cruciales, là, ou pas?
M. Nguyen (Michaël) : Je
pense que poser la question, c'est y répondre, et, malheureusement, il y a trop
de situations qui se passent comme ça. Les enseignants, les personnels… le
personnel qui travaille dans les commissions scolaires ont à cœur l'intérêt des
enfants, ils ont à cœur l'intérêt de la population, et, justement, la loi, puis
c'est notre propos, doit favoriser cette divulgation des situations qui sont
malheureuses, qui doivent être réglées, au final, pourquoi? Pour le bien des
étudiants, des élèves.
Et, malheureusement, la loi vient,
justement, mettre un fardeau supplémentaire, vient complexifier la chose, et
c'est pour ça qu'on vous prie justement, de simplifier la loi. Pas pour qu'un
juriste puisse la comprendre, pas pour qu'un juge puisse l'interpréter, mais
pour qu'une personne qui a une dénonciation à faire puisse le faire en apaisant
son esprit au maximum pour, justement, enlever ses craintes. Un enseignant qui
parle, actuellement, prend un risque de perdre son emploi, d'avoir sa vie
complètement chamboulée. Est-ce que, je vous le demande... est-ce que c'est un
contexte, un environnement favorable pour, justement, dénoncer une situation
qui met à mal la population?
Mme Rizqy : Tantôt, vous avez
demandé s'il y avait des juristes dans la place. Bien, ça tombe bien, je suis
avocate, puis l'article 7 se lit ainsi : «Si une personne a des motifs
raisonnables de croire qu'un acte répréhensible commis ou sur le point de
l'être présente un risque grave pour la santé ou la sécurité d'une personne ou
pour l'environnement et qu'elle ne peut, compte tenu de l'urgence de la
situation, s'adresser à l'une des personnes visées à l'article 6, elle peut
divulguer au public les renseignements qu'elle estime raisonnables, nécessaires
pour parer à ce risque et bénéficier d'une protection contre les représailles
prévue au chapitre VII.»
On s'entend qu'une ressource
professionnelle qui n'est pas remplacée depuis maintenant neuf mois et qui ne
sera pas remplacée l'année suivante il n'y a pas ici un acte répréhensible ou
un risque grave pour la santé ou la sécurité, mais les élèves en question, eux,
dans leur réussite éducative, ils sont privés d'une ressource qui est
importante. Est-ce qu'ici on ne devrait pas élargir pour s'assurer que les
enseignants aussi puis le personnel scolaire peuvent quand même continuer à
parler? Parce que, sinon, nous, là... Je vais vous dire très franchement, à
chaque fois que je parle avec des cadres, tout va bien, mais, par la suite,
quand je parle avec les gens qui sont sur le terrain, c'est drôle, je n'ai pas
du tout le même son de cloche.
M. Champagne (Éric-Pierre) :
...
M. Nguyen (Michaël) : ...juste
avant, rapidement, à brûle-pourpoint, si on ajoute la notion de bonne foi… parce
que le motif raisonnable, c'est quelque chose qui est vague, vous êtes juriste,
vous avez peut-être une idée, et, encore là, je dirais que c'est un juge qui
déterminera si c'est un motif raisonnable, mais si on rajoute la notion de
bonne foi et la notion d'intérêt public, est-ce que, par exemple, ça pourrait
être une piste d'avancement pour faciliter, justement, ce genre de
dénonciation?
M. Champagne (Éric-Pierre) : Oui,
je voudrais juste...
Mme Rizqy : Oui, allez-y.
M. Champagne (Éric-Pierre) : Ça
m'apparaît très restrictif, là, justement. Cet article-là, malheureusement,
c'est très, très, très restrictif, donc ça fait en sorte qu'il y a beaucoup de
situations qui ne peuvent pas être dénoncées, et, pour nous, ça, c'est
problématique.
Puis juste ajouter, on comprend l'intérêt
de vouloir protéger la réputation puis la confiance envers les organismes
publics puis les institutions, mais la question que j'ai envie de poser aux
élus, c'est : Si cette confiance-là est basée sur de fausses prémisses,
est-ce que… est-ce qu'on est mieux… est-ce qu'on a réglé, est-ce qu'on a
corrigé vraiment quelque chose, est-ce qu'on est mieux servi? Parce que, quand
c'est basé sur de fausses prémisses, c'est encore pire, après ça, de regagner
la confiance du public, là, c'est encore plus difficile. Alors, aussi, il faut
garder ça en tête, à notre <avis…
M. Champagne (Éric-Pierre) :
...regagner la confiance du public, là, c'est encore plus
difficile. Alors, aussi, il faut garder ça en tête, à notre >avis,
là.
Mme Rizqy : Tantôt, on a
parlé... un député vous a fait mention : Oui, mais il y a un risque de
diffamation. Vous, dans votre travail, lorsque vous avez une personne qui vous
parle, un, vous identifiez votre source, même si vous gardez confidentielle la
source. Mais vous faites un travail d'investigation, là, vous ne prenez pas
pour avéré ce qui est affirmé. Alors, vous aussi, vous avez aussi des patrons
qui, eux, doivent s'assurer qu'il n'y a pas des risques de poursuites.
Évidemment, on n'est jamais à l'abri de poursuites, mais il y a quand même un
travail d'investigation qui est fait, et vous êtes très conscients aussi des
risques de poursuites potentielles. Alors, vous faites... j'imagine, vous
débroussaillez tout ça avant de publier, là?
M. Nguyen (Michaël) : Tout à
fait. Et, en plus de consulter, évidemment, des... nos services du contentieux,
on a aussi des obligations déontologiques, donc des obligations de vérification
de faits. Ce serait... ce serait... On ne pourrait pas croire qu'un média
décide... il reçoit une dénonciation anonyme puis décide de la publier telle
quelle, peu importe le média. Nous sommes tout à fait conscients des
responsabilités que les journalistes ont. Et, de façon générale, je pense que
l'histoire le prouve, les journalistes font bien leur travail.
Le Président (M. Montigny) : Alors,
en terminant.
Mme Rizqy : …pour citer le
ministre de l'Éducation, un ministre a autant de pouvoir qu'un journaliste,
qu'un chroniqueur.
Le Président (M. Montigny) : Merci.
Alors, je vous remercie. Je cède maintenant la parole à la députée de
Sherbrooke.
Mme Labrie : Merci, M. le
Président. J'ai seulement 2 min 15 s, donc je vais formuler mes
questions rapidement. La première, dans le… dans le rapport du Trésor puis dans
le mémoire du Protecteur du citoyen, il est question d'ajouter le qualificatif «grave»
pour parler de la contravention à une loi. Est-ce que, d'après vous, c'est une
bonne idée d'ajouter ce qualificatif de «grave» ou est-ce que ça pourrait, en
fait, limiter les gens qui iraient divulguer des situations?
M. Nguyen (Michaël) : Tout
dépend du contexte, parce que «grave», c'est quelque chose qui est très
relatif, donc, évidemment, ça devient difficile de jauger la notion de gravité.
On parle d'un... il pourrait y avoir un préjudice grave à très court terme, un
préjudice grave à très long terme si, par exemple, on parle d'environnement.
Des mesures qui sont prises actuellement pourraient ne pas avoir d'effet avant,
malheureusement… que plusieurs décennies, même, étant donné les changements
climatiques. Donc, nous, ce qu'on privilégie, c'est une formulation la plus
simple possible, parce que la loi doit être destinée aux élus, aux juges qui
doivent trancher les litiges, mais, en première ligne, c'est la personne qui
veut dénoncer qui va aller lire la loi pour voir est-ce qu'elle va être
protégée, est-ce qu'elle va devoir mettre sa vie sur pause, est-ce qu'elle peut
faire face à des représailles.
Un autre exemple, par exemple, c'est si le
responsable est dans... le responsable de l'application de la loi au sein de
l'organisme est un haut dirigeant de l'entreprise. Un des problèmes qu'on voit
venir, c'est, justement, s'il y a une dénonciation qui est faite au responsable,
qu'il décide de ne rien faire, si la personne décide d'aller dans les médias,
après, parce que rien n'a bougé, bien, au sein de son entreprise, elle a déjà
été identifiée, donc les craintes de représailles sont réelles, sont concrètes,
et donc, justement, ça vient étouffer cette personne-là qui connaît une
situation malheureuse, mais qui va décider de se taire pour éviter les
problèmes. Parce qu'au final, les gens, qu'est-ce qu'ils veulent c'est vivre
leur vie, travailler, avoir... s'occuper de leurs enfants, de leur famille, et
pas nécessairement de s'embarquer là-dedans.
Mme Labrie : J'aurais eu une
autre question, mais là on n'aura presque pas de temps. Qu'est-ce que vous
pensez d'ajouter aussi... de couvrir le privé, les dénonciations pour le privé,
comme ça se fait dans certains pays?
M. Nguyen (Michaël) : ...ça
peut être...
Le Président (M. Montigny) : ...très
rapidement, on n'a plus de temps.
M. Nguyen (Michaël) : Tout ce
qui peut permettre à favoriser la démocratie est avantageux.
Le Président (M. Montigny) : Merci,
merci. Je suis désolé de vous couper. Je veux vous remercier, vraiment, pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends maintenant les travaux
quelques… quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre
place. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 12 h 22)
Le Président (M. Montigny) : Alors,
je vous remercie. On reprend les travaux. Alors, je souhaite maintenant la
bienvenue aux représentants de l'Association professionnelle des ingénieurs du
gouvernement du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer
votre exposé.
M. Martin (Marc-André) : M.
le Président de la Commission des finances publiques, Mme la Présidente du
Conseil du trésor, Mmes et MM. les députés, je me présente, Marc-André Martin,
je suis président de l'Association professionnelle des ingénieurs du
gouvernement du Québec. À ma droite, M. Simon Dubé, qui est mon
vice-président, et à ma gauche, M. Andy Guyaz, qui le secrétaire-trésorier
de l'association.
Donc, nous sommes l'Association
professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec, qui représentons plus
de 1 800 ingénieurs à l'emploi des ministères et organismes de l'État
québécois. Nos membres oeuvrent principalement au ministère des Transports,
mais nous avons également une présence significative au sein des ministères de
l'Environnement, de la Cybersécurité et du Numérique, des Affaires municipales
et des Ressources naturelles, où ils sont responsables de la gestion des grands
travaux d'infrastructure. L'ingénieur, au gouvernement, est central, ou devrait
être central, à la prise de décisions éclairées, fondées sur l'état empirique
de nos réseaux et de nos projets. Aujourd'hui, nous souhaitons retrouver le
sens de la rigueur et de la qualité dans la construction et le maintien de nos
infrastructures publiques.
C'est avec grand intérêt que nous déposons
ce mémoire dans le cadre des consultations particulières et auditions publiques
sur le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi facilitant la divulgation
d'actes répréhensibles à l'égard des organismes publics. D'emblée, précisons
que cette loi est importante pour le Québec et névralgique pour la protection
de la probité de nos instances démocratiques.
Rappelons que les ingénieurs du
gouvernement du Québec ont été les premières victimes des pratiques douteuses
mises en lumière par la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des
contrats publics dans l'industrie de la construction. Par le passé, nombreux
sont les membres qui ont été écartés de projets d'envergure ou qui ont vu leur
carrière stagner injustement parce qu'ils ont osé questionner, remettre en
question et s'opposer à des orientations de gestionnaires qui leur semblaient
incohérentes. Un système efficace de divulgation et d'examen des décisions
publiques a toute la légitimité au sein d'organisations publiques, qui
souhaitent récompenser ceux qui choisissent leur intégrité professionnelle
avant leur avancement de carrière.
Maintenant, l'exercice qui s'impose à nous
aujourd'hui, et principalement à vous, les parlementaires, c'est l'évaluation
de la performance de cette loi. Nous sommes d'avis que les données peuvent être
difficiles à apprécier, notamment parce que nous sommes privés des résultats
des années 2020 à aujourd'hui, ce qui limite l'analyse historique.
Néanmoins, nous croyons pouvoir contribuer constructivement à votre évaluation
en tentant de répondre à la question suivante : Est-ce que nos membres, en
parlant de nous, ici, des ingénieurs, est-ce que nos membres sont davantage
protégés qu'ils l'étaient face aux représailles et à la pression de leurs
gestionnaires? Essentiellement, nous croyons qu'il y a des aménagements à faire
pour améliorer l'efficacité de la loi. Nous croyons que le mécanisme de loi
comporte deux failles fondamentales, qui nous laissent croire que la mission
première, qui est de favoriser la divulgation, n'est pas accomplie pleinement.
Nous... laissez-nous vous expliciter ces deux éléments.
Premièrement, nous sommes d'avis que
l'approche qui repose sur un mécanisme interne propre aux ministères et
organismes constitue un vice de fond important. En effet, les organismes
publics sous la juridiction de la loi doivent identifier un responsable du suivi
des divulgations. Celui-ci est souvent un haut fonctionnaire ou un cadre
supérieur. Il a le devoir de faire une vérification diligente des
renseignements qui font l'objet de la divulgation. Toutefois, c'est seulement à
sa discrétion que le dossier sera référé au Protecteur du citoyen pour une
enquête plus formelle. Or, cette façon de faire ne favorise pas et ne favorise
d'aucune façon la divulgation. Au contraire, qu'il faille adresser une
divulgation à un supérieur hiérarchique dans sa propre organisation <décourage…
M. Martin (Marc-André) :
...la divulgation. Au contraire, qu'il faille adresser une
divulgation à un supérieur hiérarchique dans sa propre organisation >décourage
significativement les employés de la fonction publique à dénoncer des actes répréhensibles.
Dans les faits, les employés vont craindre des représailles de leur hiérarchie,
d'autant plus qu'il est souvent facile de reconnaître un employé sur la base du
projet ou des renseignements en question. Cette situation est particulièrement
préjudiciable pour les ingénieurs, qui peuvent compter sur une expertise très
pointue, où il n'y a qu'un ou deux ingénieurs aptes à divulguer une situation.
Dans un tel cas, nos membres vont tout simplement s'abstenir.
De plus, le fait qu'un ministère, a fortiori,
un haut fonctionnaire d'un ministère, effectue le premier examen des faits
répréhensibles rapportés constitue un second problème de fond. Est-ce qu'un
cadre aurait intérêt à s'auto-incriminer ou à discréditer l'organisation qu'il
dirige? Il s'agit d'une question rhétorique. Bien évidemment, nous pouvons
remettre en question cette étape d'examen sommaire effectuée à l'interne.
Donc, notre première recommandation, c'est
pour ces raisons, nous recommandons à la commission de bien vouloir envisager une
abrogation des dispositions sur le responsable interne des suivis de
divulgation et d'habiliter le Protecteur du citoyen à recevoir toutes les
divulgations sans intermédiaire.
Donc, maintenant, le second élément qui
mérite votre attention est relatif au rôle du syndicaliste dans la mission de
la loi sur les divulgateurs. Chaque année, plusieurs de nos membres se tournent
vers nous pour dénoncer des pratiques qui leur semblent douteuses ou contraires
à l'intérêt public. Ils le font parce qu'ils entretiennent envers leur syndicat
un sentiment de confiance et de sécurité. Parfois, ils ne sont qu'à la
recherche de conseils ou d'écoute et l'association est contrainte à un devoir
de confidentialité et de protection de ses membres, sans compromis ou
discrétion. Pour ces raisons, il est souvent plus aisé pour un de nos membres
de nous interpeler que d'intervenir auprès de son ministère. C'est avec les
meilleures intentions que nous accompagnons nos membres dans ce processus de
divulgation, souvent, auprès, ou, préférablement, auprès du Protecteur du
citoyen.
Malheureusement, notre implication dans un
dossier est reçue avec méfiance et scepticisme, et ce, même lorsque les faits
parlent d'eux-mêmes. Dans la quasi-totalité des cas de dénonciation où notre
association fut appelée à s'impliquer en soutien à notre membre, les démarches
furent détournées au profit d'un procès d'intention. On nous reproche de faire
du syndicalisme, de vouloir négocier des conditions d'emploi, de travail ou
d'alimenter un conflit de travail. Bien sûr, le syndicat a pour vocation la
négociation de conventions collectives, et, bien sûr, ces négociations peuvent
impliquer une escalade du rapport de force. Néanmoins, c'est mal connaître les
fondements du syndicalisme que de ne réduire le mouvement syndical qu'à cette
simple composante. Les syndicats jouent un rôle prépondérant dans l'équilibre
social, et leur engagement au bien public est sincère. Tout n'est pas
corporatisme. Nous considérons que l'impossibilité, en pratique, d'accompagner
un membre à travers le processus de divulgation constitue une atteinte à la
mission de la loi.
• (12 h 30) •
Donc, notre deuxième recommandation
aujourd'hui, c'est : Nous demandons aux parlementaires de reconnaître dans
le texte législatif la légitimité des syndicats à effectuer des divulgations au
nom de leurs membres.
En terminant, nous souhaitons remercier la
Commission des finances publiques pour l'invitation qui nous a été accordée...
et partager notre expérience. Si la loi prévoit un mécanisme de reddition de
comptes et d'évaluation, c'est précisément pour permettre le perfectionnement
de la loi. Savoir l'améliorer au gré de son existence est le signe que nous ne
tenons pas pour acquise la probité de nos institutions. Nous espérons
sincèrement que vous pourrez prendre en considération nos deux recommandations
et amender la loi facilitant la divulgation afin de pallier les lacunes que
nous avons exposées aujourd'hui. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Alors,
messieurs, merci à vous pour votre précieuse participation à nos travaux. Je
cède la parole au député de Maskinongé, qui dispose de neuf minutes.
M. Allaire : …merci, M. le
Président. Bonjour à vous, merci d'être présent avec nous aujourd'hui.
J'aimerais... En fait, je comprends bien, là, avec votre intervention, que vous
êtes favorables au travail du Protecteur du citoyen, naturellement, je pense
que c'est clair. Dans la première partie de votre intervention, là, vous avez,
entre autres, parlé, là, de votre première recommandation, qui est... dans mes
mots à moi, là, qui est... qui est… en fait, vous êtes favorables à
l'implantation du guichet unique. Moi, comme je vous dis… je le dis dans mes
mots, là, mais c'est un peu ça. Donc, dans la redéfinition des rôles, c'est de
donner davantage de pouvoirs, là, entre guillemets, là, au Protecteur du
citoyen pour favoriser, là, le traitement des plaintes.
Ça fait que ce que je comprends de ce que
vous vivez puis, probablement, de ce que vos membres vous disent, c'est que,
quand ils sont dans le cheminement de la plainte, et que c'est saisi par le
Protecteur du citoyen, ça se passe généralement bien…
12 h 30 (version révisée)
M. Allaire : ...ça fait que ce
que je comprends de ce que vous vivez puis, probablement, de ce que vos membres
vous disent, c'est que, quand ils sont dans le cheminement de la plainte, et
que c'est saisi par le Protecteur du citoyen, ça se passe généralement bien. C'est
un peu ça?
M. Martin (Marc-André) : ...dans
la très... majorité des cas, en tout cas, d'aller vers le Protecteur du citoyen
en premier lieu plutôt que d'utiliser le comité d'audit interne, etc. Donc,
quand on dit que ça va bien avec le Protecteur du citoyen ou qu'on les réfère
davantage... ça nous met un certain... des certains bâtons dans les roues, et c'est
pour ça, notre deuxième recommandation. C'est-à-dire que, quand les gens
viennent nous voir et qu'on les dirige vers le Protecteur du citoyen, ils s'attendent
à ce qu'on continue de les appuyer puis qu'on continue avec eux dans le
processus, ce qui nous est freiné par le Protecteur du citoyen, pour l'instant,
avec la loi actuelle. Donc, les gens s'attendraient à ce qu'on ait plus de
support du syndicat, ce qu'on souhaite, nous, d'ailleurs.
M. Allaire : Et, au niveau de
la confidentialité de l'information, quand il arrive une situation comme
celle-là, à partir du moment où, justement, le syndicat serait... serait conscient
puis au courant de cette information-là, vous ne pensez pas qu'il y aurait un
problème, une certaine problématique?
M. Martin (Marc-André) : ...problématique.
Les gens, lorsqu'ils déposent un grief, lorsqu'ils déposent des recours avec le
syndicat, on a l'ensemble de la preuve. On est capables, d'un point de vue
juridique, d'obtenir toutes les informations nécessaires. Nous, ce qu'on veut
éviter ici, c'est d'utiliser le tribunal public, populaire. C'est-à-dire qu'on
souhaite que le Protecteur du citoyen soit davantage utilisé et qu'on puisse
amener notre apport, qu'on soit capables d'accompagner le membre, avec eux,
plutôt qu'uniquement les prendre puis les laisser au bas de la porte, dire :
Allez-y, faites ce que vous avez à faire. Les gens souhaitent une protection
supplémentaire, et cette protection-là, elle serait d'un point de vue syndical.
M. Allaire : C'est important,
ce que vous dites, puis là je vois un os potentiel. Je vais le dire comme ça.
Dans ce contexte-là, avec ce que vous venez de dire, faites-moi la différence
entre c'est quoi, pour vous, à vos yeux, comment je pourrais dire, un acte qui
concerne davantage les relations de travail versus un acte qui est
répréhensible?
M. Martin (Marc-André) : Nous,
on travaille... on représente les gens qui travaillent dans les organismes
publics. Donc, nécessairement, si des gens ont connaissance ou veulent
divulguer des actes répréhensibles, c'est nécessairement dans le cadre de leur
travail en très forte probabilité, en très, très forte proportion. Donc,
puisque c'est dans le cadre de leur travail, qu'on est l'unique représentant
des employés, bien, il est tout légitime que le syndicat, comme, soit impliqué
pour éviter que les gens subissent des représailles et qu'ils soient, entre guillemets,
protégés.
M. Allaire : La ligne est
quand même mince parce que votre rôle, il est quand même très clairement défini.
Vous vous occupez quand même des relations de travail. À partir du moment où l'on
tombe dans une zone où il est plus... Au niveau législatif, il est quand même
très clair, là, je trouve qu'il peut y avoir un chevauchement... un
chevauchement des genres qui peut être dangereux, vous ne trouvez pas?
M. Guyaz (Andy) : Si vous me
permettez, j'ai écouté attentivement, hier, le Protecteur du citoyen, et ce qu'ils
semblaient également souligner de leur côté, c'est qu'il y a un manque d'accompagnement.
Donc, de quelle manière on peut mieux les accompagner, dans le cas qui nous
préoccupe, nos membres... pour les accompagner... bien, en tout cas, de quelle
façon on va arriver sans les laisser sur le pas de la porte, bien, nous, c'est
un peu ce qu'on propose actuellement, c'est pourquoi ne pas jouer ce rôle-là?
Oui, la ligne est... Je ne vais pas dire que la ligne est mince, mais plutôt
tout est dans une trame de gris. Donc, les relations de travail sont... je ne
vais pas dire interconnectées, là, mais, tu sais, les relations de travail
versus la divulgation, souvent, c'est un enchâssement entre les deux, là. Donc,
c'est un peu ce qu'on propose présentement, c'est... On a entendu, hier, le
manque d'accompagnement... Donc, il me semble que tout ça pourrait être fait
par le syndicat.
M. Allaire : Ça fait que ce
serait davantage un rôle de relayeur, une approche-conseil, que d'être impliqué
vraiment dans le processus, en étant conscient d'information qui peut être
confidentielle, parce qu'aussi, des fois, ce qu'on voit, c'est que ce n'est pas
nécessairement, là, par exemple, dans votre cas, qui serait le... l'employé en
question qui est concerné ou qui a un préjudice à son égard, à lui, mais qui
est plus témoin d'un événement dans l'organisation, par exemple, qui ne le
touche pas, lui, nécessairement, personnellement, mais qui vaut la peine d'être
divulgué.
M. Martin (Marc-André) : L'important,
pour nous, ce n'est pas de se substituer au Protecteur du citoyen, puis on n'a
pas de pouvoir d'enquête. Nous, on n'est pas là pour faire... jouer aux
enquêteurs puis jouer à la police. On est là pour protéger nos membres et s'assurer
que ceux-ci, s'ils vivent des représailles quelconques... qu'on soit à leur
disposition puis qu'on ait déjà un portrait global de la situation.
M. Allaire : Ça va. Ça va
pour moi, M. le Président, oui, merci.
Le Président (M. Simard) : Cher
collègue, merci. Et je cède la parole à la députée de Saint-Laurent, auquel
nous ajoutons un peu de temps. Alors, c'est une belle surprise, un petit cadeau
de Noël avant le temps.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Vous avez parlé tantôt... Bonjour et bienvenue à l'Assemblée nationale du <Québec,
dans un premier...
Mme Rizqy :
...vous
avez parlé tantôt... Bonjour et bienvenue à l'Assemblée nationale du >Québec,
dans un premier temps.
Les ingénieurs qui travaillent pour le
gouvernement, même s'ils sont syndiqués, ça reste quand même des ingénieurs qui
sont aussi régis par un code de profession puis, évidemment, leur propre code
de déontologie. Lorsqu'un ingénieur décide de parler, c'est parce qu'il pense
sincèrement qu'il y a une urgence ou péril en la demeure, n'est-ce pas?
M. Martin (Marc-André) : C'est
sûr que ça dépend de chacune des situations. Les gens ont chacun un niveau de
tolérance puis de conviction différent, mais on est tous assujettis par les
lois d'ordre public. Puis surtout, de plus, nous, les ingénieurs, a contrario
avec certains employés de la fonction publique, on est assujettis à un code de
déontologie. Puis, vous avez raison, pour aller dénoncer et... entre
guillemets, des fois, ça... la ligne est mince entre le devoir de loyauté
envers l'employeur et la divulgation, et les gens, lorsqu'ils prennent, entre
guillemets, leur courage à deux mains de le faire, c'est qu'ils ont de fortes
convictions et qu'ils sont... et qu'ils croient fermement qu'effectivement il y
a une problématique.
Mme Rizqy : ...que le devoir
de loyauté envers l'employeur... l'employeur ultime, ce sont les Québécois, et
que, lorsqu'une personne, que ce soit vous, les ingénieurs ou tout autre
professionnel qui travaille, réfléchit au devoir de loyauté, c'est la loyauté
envers sa profession, son code de déonto, mais aussi, en définitive, les
Québécois qu'il dessert, parce que nous, on n'est que des locataires du
pouvoir. Je ne fais que passer.
Et on fait souvent, nous, des demandes
pour obtenir des réponses, pour mieux planifier... Plusieurs journalistes aussi
font des demandes d'accès. Ça, c'en est une récente auprès des ingénieurs. J'y...
pas, c'est vraiment vrai, c'est... Vous comprendrez que je peux continuer, là,
mais il y a plus d'encre pour caviarder un rapport d'ingénieur sur une des
infrastructures qui appartient au gouvernement que pour nous expliquer l'état
des lieux. Alors, c'est sûr que, moi, face à ça, vous comprendrez que je vais
essayer de fouiner, là, puis... OK, qu'en est-il? Pourquoi qu'il y a beaucoup
d'encre? Je vais penser... Il y a peut-être quelque chose à cacher, là.
Alors, est-ce qu'il n'y a pas aussi ça,
comme problème que nous avons, au Québec, cette opacité à recevoir de
l'information claire sur l'état des lieux des bâtiments québécois? Puis je
prends même un exemple. Le pont Pierre-Laporte, on l'a su uniquement parce
qu'il y a des ingénieurs qui ont décidé de parler à l'équipe à Enquête,
sinon on n'aurait pas vu l'état des lieux.
• (12 h 40) •
M. Martin (Marc-André) : Honnêtement,
encore une fois, c'est toute une question de sécurité publique. Écoutez, les
gens, lorsqu'ils viennent nous voir... Si, nous, en tant que syndicat, on vient
faire ces deux recommandations-là, c'est parce que, nécessairement, on souhaite
parler au Protecteur du citoyen. On en sait beaucoup plus que la moyenne des
gens ou la moyenne des ingénieurs. Les gens nous appellent au bureau et nous
dévoilent énormément de choses, et nous, on a un devoir de confidentialité,
puis on n'a pas de pouvoir d'enquête, puis ce n'est pas notre rôle,
nécessairement, de faire le procès d'intention de chacune des décisions qui se
prend au gouvernement. Donc, nous, ce qu'on souhaiterait, c'est accompagner
les... d'accompagner le membre, prendre les informations que nous avons et
parler au Protecteur du citoyen sans qu'on ait un procès d'intention, que c'est
uniquement pour du conflit de travail. C'est ça qu'on demande ici présentement.
Mme Rizqy : Comment qu'on
peut bonifier, en ce moment, la loi pour s'assurer que... une plus grande
transparence au niveau de l'information, mais aussi que ça soit moins
restrictif, là, pour les sonneurs d'alerte?
M. Martin (Marc-André) : Présentement,
nous, tu sais, on a voulu cibler uniquement deux recommandations. Dans notre
mémoire, à l'époque, on avait énormément de recommandations, dont un fonds de
défense, un peu comme l'Ordre des ingénieurs avec ses membres. Le Protecteur du
citoyen devrait peut-être avoir un fonds de défense pour ces gens-là, donc,
mais on a voulu vraiment cibler ces deux enjeux-là pour donner, justement,
entre guillemets, plus de transparence, d'avoir une apparence, je dirais,
d'impartialité en allant directement au Protecteur du citoyen plutôt que de
dénoncer à la personne du ministère, et, de plus, si son syndicat peut
l'accompagner et peut l'aider, parce que ça prodigue une certaine protection
syndicale, ça viendrait renforcer le fait que les gens auraient beaucoup moins
peur de parler. Ils se sentiraient protégés encore plus, une deuxième couche de
protection, plus de réconfort, puis un syndicat, ça a plus de moyens qu'une
personne individuelle, que ce soient financiers et autres. Donc, c'est sûr que
la personne va se sentir encouragée à divulguer si elle se sent protégée puis
elle voit qu'il y a des ressources derrière elle pour la protéger.
Mme Rizqy : Je n'ai pas de
chiffre là-dessus, mais plusieurs personnes à qui je parle me disent qu'une
fois qu'ils ont dénoncé et, par exemple, il y a eu des représailles ou qu'ils
ont dû se battre... plusieurs d'entre elles sont parties en arrêt de travail,
parce qu'elles portent un double fardeau, celui d'avoir le sentiment de parler
pour <le bienfait de la population, de la société civile, mais aussi...
Mme Rizqy :
...d'avoir
le sentiment de parler pour >le bienfait de la population, de la société
civile, mais aussi, l'autre fardeau, se défendre, eux, puis ils ont quand même
une famille à nourrir. Est-ce que vous, vous voyez, parmi vos membres, quand
ils tentent de dénoncer, bien, qu'ils se sont... qu'ils sont tellement
vulnérables que, finalement, ils se retrouvent, eux autres même, sur le
carreau?
M. Martin (Marc-André) : Effectivement,
c'est un poids extrêmement lourd à porter pour ces gens-là, qui, après ça, ont
l'impression que tout le monde au bureau les regarde, parce que, comme on le mentionnait
dans notre court mémoire, c'est très facile de savoir qui a divulgué. Les
ingénieurs ont tous leur expertise assez pointue. Donc, lorsque quelque chose
coule dans les médias, ou coule à l'externe, ou coule à des enquêteurs,
nécessairement, ils sont capables de retrouver dans... quasiment dans la minute
qui suit, qui a divulgué. Donc, très rapidement, le bureau et les gens ont un
poids énorme à porter sur leurs épaules. Ça se transforme souvent en arrêt...
ça peut se transformer en arrêt de travail, et c'est là que le syndicat, là, on
les prend en charge, on les aide. On a énormément de gens qui appellent au
bureau puis on leur donne du soutien psychologique, à ces gens-là, même si
notre but premier, à nous, ce n'est pas de donner du soutien psychologique,
mais on est là pour ça. Puis ce que vous mentionnez, c'est, malheureusement,
des choses qui se produisent très souvent.
Mme Rizqy : Parallèlement à
ce que nous étudions présentement au niveau des sonneurs d'alerte, on devrait
peut-être aussi bonifier l'accès à l'information, qui viendrait aussi enlever
ce poids, parce que, si c'était public, vos rapports, on n'aurait pas besoin de
trouver des sonneurs d'alerte. On aurait la capacité de lire les rapports puis
même trouver peut-être des ingénieurs externes pour venir valider de
l'information, qui peuvent nous accompagner. Est-ce que vous pensez que ça
pourrait être aussi une avenue qu'on devrait... s'attarder?
M. Martin (Marc-André) : Écoutez,
personnellement, en tant que citoyen, j'ai une idée très tranchée sur la loi
sur l'accès à l'information, mais, malheureusement, je n'ai pas le mandat,
présentement, du syndicat pour me prononcer sur ça.
Mme Rizqy : ...après autour
d'un café. Bien, merci. Ah non! Bien, je ne veux pas vous mettre dans
l'embarras, mais merci sincèrement puis merci à tous ceux qui travaillent, qui
ont fait le choix de la fonction publique. Merci.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous. Alors, Mme la députée de Sherbrooke, vous disposez de 2 min 23 s.
Mme Labrie : Merci. La
première question que je veux vous poser, c'est par rapport à votre deuxième
recommandation, pour reconnaître la légitimité des syndicats pour effectuer des
divulgations. Est-ce que vous le voyez simplement dans un rôle d'accompagnement
ou vous voudriez que les syndicats puissent être eux-mêmes divulgateurs?
M. Martin (Marc-André) : On a
tenté, nous, d'être divulgateurs à deux reprises et, comme je vous dis, on se
fait porter une espèce de procès d'intention, en nous disant : Écoutez,
c'est sûr que ça émane des conditions de travail. Les gens sont très, très
frileux de s'engager dans cette voie-là justement parce que, souvent, on est en
conflit de travail avec le gouvernement. Tu sais, on le voit, dans les huit
dernières années, je pense qu'on a été sept années en conflit. Donc, les gens,
tout de suite, ils ferment la... tu sais, ils ont une réticence. Ils ne veulent
pas avoir... prendre parti pour un parti ou l'autre.
Mme Labrie : Mais vous
voudriez pouvoir faire les deux, autant accompagner que d'être divulgateurs
vous-mêmes?
M. Martin (Marc-André) : Nous,
on souhaiterait pouvoir... les deux. Bien, lorsqu'on souhaite être
divulgateurs, souvent, ce qui arrive, c'est que c'est moi-même, Marc-André
Martin, qui doit être le divulgateur au nom de l'association, mais ce n'est pas
l'association elle-même pour l'instant.
Mme Labrie : OK. L'autre
question que j'ai pour vous... Vous avez nommé à plusieurs reprises, là, la
question des représailles parce que les expertises sont tellement spécifiques
que c'est facile d'identifier... Dans quelle mesure... même s'il n'y a pas
d'intermédiaire puis que ça va directement au Protecteur du citoyen, pendant
l'enquête, qu'est-ce qu'on peut faire de plus? Est-ce que c'est déjà
suffisamment protégé pour éviter les représailles?
M. Martin (Marc-André) : Bien,
comme je vous dis, c'est pour ça qu'on a deux recommandations. La première vise
plus de transparence. Puis, écoutez, ce qu'on a vécu, nous, puis ce qu'on a vu
au bureau, c'est que les gens, des fois, qui font une première divulgation à
l'interne se voient comme rencontrés, puis on pose des questions, puis on tente
de les convaincre, de dire : Ce n'est peut-être... tu n'a peut-être pas la
bonne approche, tu as peut-être mal compris certains enjeux. Donc, il y a déjà
comme une première étape qui est difficile pour eux, et, pour s'assurer qu'ils
aient comme toute la protection nécessaire puis qu'ils n'aient pas peur de
divulguer, c'est pour ça que le syndicat doit les accompagner, et on a déjà tenté,
par le passé, d'entrer certaines dispositions pour la protection des
divulgateurs dans nos conventions collectives, et ça n'a pas fonctionné. Ça
viendrait rajouter encore une troisième couche supplémentaire. Écoutez, là, si
les gens pouvaient compter sur le syndicat pour les défendre en cas de
divulgation, ça serait, pour nous, tout un...
Mme Labrie : Ça fait que ça, ce
serait un outil, de l'intégrer aux conventions collectives.
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Martin (Marc-André) : Ce
serait tout un outil.
Le Président (M. Simard) : Alors,
sur ce, messieurs, quelques mots afin de vous remercier pour votre précieuse
contribution à nos travaux.
Compte tenu de l'heure, nous ajournons...
non, nous suspendons, plutôt. On se retrouve à 14 h 45. À plus tard.
(Suspension de la séance à 12 h 46)
14 h 30 (version révisée)
(Reprise à 14 h 46)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, bon retour à toutes et à tous. Je constate que nous avons
quorum. Nous sommes en mesure de reprendre nos travaux.
Et, cet après-midi et d'ici la clôture de
nos auditions, nous aurons l'occasion de discuter avec trois groupes. Et nous
commençons bien sûr avec le Syndicat des professionnels du gouvernement du
Québec.
Alors, messieurs, soyez les bienvenus
parmi nous. Auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il vous plaît, de vous présenter?
M. Bouvrette (Guillaume) : Alors,
bonjour. Mon nom est Guillaume Bouvrette, je suis président du Syndicat de
professionnels du gouvernement du Québec.
M. Dean (Marc) :Marc Dean, conseiller politique et à la recherche du Syndicat
des professionnels du <gouvernement du Québec...
M. Dean (Marc) :
...à la recherche du Syndicat des professionnels du >gouvernement
du Québec.
M. Desjardins (Philippe) : Bonjour.
Philippe Desjardins, conseiller aux communications.
Le Président (M. Simard) : Alors,
messieurs, vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre
intervention.
M. Bouvrette (Guillaume) : Merci,
M. le Président. Mmes, MM. les Députés, membres de la Commission des finances
publiques, Mme la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et
présidente du Conseil du trésor, bonjour. Je suis donc Guillaume Bouvrette,
président du Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec. Je suis
accompagné de M. Marc Dean, conseiller à la recherche, et de M. Philippe
Desjardins, conseiller aux communications.
Nous représentons le SPGQ, le plus grand
syndicat de personnel professionnel du Québec. Il représente plus de
33 500 spécialistes, dont environ 24 000 dans la fonction
publique, 6 000 à Revenu Québec et un peu plus de 3 000 en santé, en
éducation supérieure et dans diverses sociétés d'État.
Nous remercions d'abord les membres de la
commission de nous inviter à nous exprimer sur le rapport portant sur la mise
en œuvre de la Loi facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard
des organismes publics, que je nommerai plus simplement la loi au cours de
cette présentation.
Le SPGQ réclamait depuis longtemps la mise
en place de mécanismes de divulgation d'actes répréhensibles et de protection
des divulgateurs pour protéger ses membres. Il a d'ailleurs publié, à travers
les années, quelques mémoires et fait plusieurs sorties publiques sur le sujet.
Les membres du SPGQ sont détenteurs de l'expertise de l'État, stratégiquement
placés pour permettre au gouvernement d'accomplir sa mission et peuvent être
témoins d'actes répréhensibles dans l'exercice de leurs fonctions. Aussi, ils
s'exposent à des représailles s'ils osent divulguer des gestes condamnables. À
cet égard, le SPGQ estime que la loi doit protéger de façon optimale les
divulgateurs d'actes répréhensibles. Elle doit permettre aux professionnels de
jouer leur rôle de véritables gardiens de l'intégrité des services publics. Il
en va de la sauvegarde d'une fonction publique intègre, indépendante, au
service des citoyens.
Existe-t-il une contradiction entre le
sacro-saint devoir de loyauté d'un employé envers son employeur par rapport aux
obligations de protection de la société québécoise inhérente aux serviteurs
publics que sont les employés de l'État? Bien, la question se pose et la
réponse, elle n'est pas simple. Dans son document de réflexion publié en 2014...
alors ça date un peu, à travers les années, on est toujours à la même place, ce
document était intitulé La protection des divulgateurs : Une nécessité
pour un État intègre, le SPGQ recommandait au gouvernement de l'époque de
légiférer en matière de protection des dénonciateurs. Le SPGQ faisait alors
14 recommandations au gouvernement, dont l'essentiel figurait dans le
projet de loi n° 87, adopté en décembre 2016.
À ce moment, le SPGQ entretenait des
réserves concernant les mécanismes internes à un ministère ou à un organisme
gouvernemental sur les mécanismes de divulgation d'un acte répréhensible. Nous
soulignions alors que la loi devrait prévoir et encourager la mise en place de
mécanismes simples, sécuritaires et surtout indépendants de signalement d'actes
répréhensibles. Cette instance interne et indépendante serait habilitée à mener
des enquêtes promptes et à faire les suivis appropriés avec l'assurance que le
divulgateur dispose de garanties de confidentialité. Les procédures devraient
être conçues pour qu'une organisation publique ou privée puisse corriger les
dysfonctionnements et aussi apporter des solutions avant que le problème ne
prenne de l'ampleur.
• (14 h 50) •
Cependant, l'expérience vécue par nos
membres dans les ministères et organismes québécois démontre une tout autre
réalité. Lorsque des plaintes sont faites pour des cas de harcèlement
psychologique, par exemple, il arrive que l'organisation mise en cause se
referme comme une huître et tente de noyer le poisson. Elle adopte une attitude
de déni, et, parfois, la victime devient l'agresseur.
Pour mettre en place une procédure interne
de divulgation, il faudrait donc s'assurer qu'elle soit indépendante du pouvoir
administratif et politique et qu'elle donne des résultats rapides. Dans l'état
actuel des choses, le SPGQ croit cependant que l'on doit plutôt miser sur une
procédure de divulgation à l'externe afin d'éviter les risques de représailles.
La divulgation pourrait se faire notamment auprès d'une autorité indépendante,
comme le Protecteur du citoyen ou le Vérificateur général, auprès du
législateur, du ministre responsable, du système de justice, de la police, des
médias ou des organismes de la société civile québécoise spécialisés dans
l'accompagnement et dans le conseil aux divulgateurs. Des options, il y en a.
Le divulgateur devrait pouvoir contribuer
et être mis au courant des suivis liés à sa plainte dans des délais
raisonnables. Il doit aussi pouvoir compter sur des services-conseils et
d'accompagnement. Le secteur privé devrait également être encouragé ou même
obligé par la loi à mettre en place des mécanismes de divulgation d'actes
répréhensibles. Favoriser la possibilité pour le divulgateur de recourir à
plusieurs canaux protégés de divulgation s'avère donc fondamental, et ce, afin
d'éviter que tout repose sur une seule autorité, même si elle se veut
indépendante. En effet, il n'est jamais exclu qu'un dirigeant d'organisme
puisse être l'objet de pressions externes indues qui interféreraient dans
l'objectivité de ses décisions. D'ailleurs, le rapport sur lequel on se penche
aujourd'hui, donc sur la mise en œuvre de la loi, dénonce que plusieurs hauts
dirigeants d'organismes ont été désignés comme responsables du suivi des
divulgations. Par ailleurs, le processus de divulgation devrait être expéditif
des mécanismes de suivi rigoureux pour inciter les gens à rompre le silence. Le
nerf de la guerre d'une procédure efficace repose sur la confiance que <les
éventuels divulgateurs...
M. Bouvrette (Guillaume) :
...mécanismes
de suivi rigoureux pour inciter les gens à rompre le silence. Le nerf de la
guerre d'une procédure efficace repose sur la confiance que >les
éventuels divulgateurs auront dans le système mis en place.
Je reviens en 2017. Louis Robert,
agronome, conseiller expert dans le secteur des grains, membre du SPGQ, au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, le
MAPAQ, avait osé alors dénoncer, il l'avait dénoncé à l'interne, l'ingérence du
privé dans la recherche publique sur l'utilisation des pesticides. Insatisfait
de l'écoute de ses supérieurs, M. Robert s'était tourné vers Radio-Canada.
Ce professionnel avait partagé en toute confidentialité des documents
accablants. En janvier 2019, le MAPAQ a congédié M. Robert. Deux de ses
collègues ont été suspendus. Ces représailles ont suscité des questions sur la
protection des lanceurs... d'alerte, dis-je. Le licenciement de Louis Robert a
été très médiatisé à l'époque. Il a ébranlé la confiance d'éventuels
divulgateurs d'actes répréhensibles dans le système de plaintes. Un message
clair était ainsi lancé par l'appareil gouvernemental à l'ensemble de ses
employés : Si vous osez dénoncer, vous en subirez les conséquences.
En juin 2019, en conclusion d'un rapport
spécial concernant l'application de la Loi favorisant la divulgation d'actes
répréhensibles, le Protecteur du citoyen dénonçait des manquements majeurs de
la part du MAPAQ dans le processus. Ces manquements étaient l'interprétation
erronée de la recevabilité de la divulgation et l'absence de transfert de cette
dernière au Protecteur du citoyen. Le protecteur mentionne aussi comme
manquement la violation de la confidentialité, l'identité du divulgateur et le
suivi interne effectué au terme des vérifications. Il le juge alors non
conforme à la loi, tant auprès du divulgateur que de la personne ayant la plus
haute autorité administrative.
Toujours selon le protecteur, le MAPAQ ne
pouvait alors ignorer que le divulgateur serait facilement identifié par son
implication connue dans le milieu. Le MAPAQ ne s'est pas approprié avec rigueur
la nouvelle loi qu'il était chargé d'appliquer, d'où la séquence de
manquements. Le protecteur recommandait donc au Secrétariat du Conseil du
trésor de revoir le rôle et l'encadrement législatif des responsables du suivi
des divulgations. Il voulait ainsi assurer un accompagnement adéquat des
lanceurs d'alerte, la confidentialité complète et un traitement des
divulgations dépourvu de conflit de loyauté.
Dès mai 2017, le SPGQ recommandait à ses
membres de faire appel au Protecteur du citoyen et non au responsable du suivi
des divulgations à l'intérieur des ministères et organismes du gouvernement. Le
SPGQ estimait que le système de plaintes à l'interne mis en place dans les
ministères et organismes n'allait servir qu'à débusquer et à mettre de la
pression sur les divulgateurs en leur faisant valoir leur nécessaire loyauté
envers l'employeur.
Le SPGQ mettait également en garde ses
membres concernant la divulgation publique d'un acte répréhensible ou par
l'intermédiaire d'un média. Pourquoi? Bien, parce que la loi ne protège pas
contre les représailles, sauf dans les cas d'un acte présentant un risque grave
pour la santé ou la sécurité d'une personne ou de l'environnement. Encore
faudra-t-il le prouver par la suite. Une personne pouvait toujours divulguer
des actes répréhensibles à un média, mais elle prenait le risque d'être victime
de représailles si son identité était découverte, et c'est ce qui est arrivé à
Louis Robert.
La procédure de divulgation de la loi
prévoit un mécanisme interne de dénonciation en la personne du responsable du
suivi des divulgations. Et, pour que celui-ci fonctionne, il doit être fondé
sur des changements de culture organisationnelle profonds destinés à développer
les communications internes, régler des situations problématiques plutôt que de
les masquer. Dans les ministères et organismes du Québec, les responsables de
l'éthique ou du suivi des divulgations sont plutôt là pour rappeler à nos
membres leur devoir de réserve et de loyauté envers l'employeur.
Le rapport sur lequel on se penche
aujourd'hui, déposé par le Secrétariat du Conseil du trésor, prend la balle au
bond, on le souligne. Il propose de revoir le rôle et les responsabilités des
acteurs sollicités dans l'application de la loi. Il recommande, entre autres,
de confier au Protecteur du citoyen le mandat exclusif de recevoir les
divulgations du personnel des organismes publics. Il suggère aussi de retirer à
la personne responsable du suivi des divulgations la responsabilité de recevoir
et traiter les divulgations qui émanent du personnel de son organisme public.
Et le SPGQ se réjouit de cette recommandation.
Le SPGQ recommande qu'une campagne de
promotion de la loi soit menée afin de changer la culture des organisations.
Elle devrait se donner comme objectif d'apporter plus de transparence, briser
la loi du silence. D'ailleurs, le rapport du Secrétariat du Conseil du trésor recommande
de rappeler aux dirigeants d'organismes l'importance de leur rôle quant à la
promotion d'une culture d'éthique et d'intégrité. En outre, le SPGQ juge
important que le divulgateur puisse recourir à plusieurs canaux protégés de
divulgation afin d'éviter que tout repose sur une seule autorité. Toutefois, le
SPGQ ne recommande pas de créer de nouvelles instances responsables de
s'assurer du respect des droits de certains groupes. Le Protecteur du citoyen a
déjà compétence sur un grand nombre d'instances qui offrent des services au
public. Enfin, on croit qu'un processus de divulgation devrait être expéditif,
doté de mécanismes de suivi rigoureux pour inciter les gens à rompre le
silence.
J'aimerais d'ailleurs conclure cette
intervention en rappelant les mots de Louis Robert dans l'entrevue qu'il a
accordée à Radio-Canada en avril 2022. Il disait qu'il regrette l'apathie des
fonctionnaires qui n'osent pas dénoncer des irrégularités. Ça nous ramène à la
question posée plus tôt : À qui va la loyauté des serviteurs de l'État?
Quand tu ne dis rien, disait Louis Robert, tu deviens complice <des
situations problématiques...
M. Bouvrette (Guillaume) :
...des
serviteurs de l'État? Quand tu ne dis rien, disait Louis Robert, tu deviens
complice >des situations problématiques. Quand ils se taisent et
choisissent leur camp, ils permettent à la situation de perdurer. Merci de
votre attention.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci beaucoup. Nous entamons nos échanges. M. le député de Maskinongé, vous
disposez de 16 min 30 s.
M. Allaire : Merci beaucoup,
M. le Président. Salutations à vous. Merci pour la présentation. Vous
représentez quand même beaucoup, beaucoup de monde, là, jusqu'à 30 000 professionnels.
Ce n'est pas rien, c'est un bon échantillon pour nous permettre, là, de bien
comprendre les différents enjeux. Ils vous disent quoi, vos membres, par
rapport au processus? Tu sais, je veux un peu de qualitatif, là. C'est quoi,
les commentaires qu'ils vous font sur le processus auquel ils sont confrontés
quand ils font une plainte, là? Puis, même, je dirais même peut-être préalable
à ça, est-ce que, la plupart du temps, ils ne savent pas trop où cogner? Est-ce
qu'ils ont eu la bonne information? Vous l'avez évoqué tantôt un peu, mais
allez un peu plus dans le détail.
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui.
Les échos qu'on a sont présents dans nos commentaires et notre mémoire.
D'abord, ils craignent que la confidentialité ne soit pas protégée. Et c'est,
on le réitère, à la base du processus. Et je pense que... je pense que tout le
monde est d'accord avec ça, que ce n'est pas un enjeu, là, ce n'est pas un
enjeu à débat. Il doit y avoir une protection de l'identité des divulgateurs
qui, lorsqu'ils font cette divulgation-là, le font, présumons-le, de bonne foi,
hein? Qu'à la fin, la divulgation soit jugée recevable ou non, ça ne devrait
pas avoir d'impact sur la protection de leur confidentialité... de leur
identité, dis-je, pardon, et des mécanismes qui sont en place pour les
protéger.
Maintenant, ce qu'on comprend, c'est que
l'historique amène des craintes. Les gens ont peur de dénoncer, ne savent pas à
qui dénoncer parce qu'au sein de leur ministère ou organisme, si une personne
est désignée, ils craignent qu'il y ait des fuites d'information, d'où notre
appui à la recommandation de centraliser tout ça auprès du Protecteur du
citoyen pour les ministères et organismes publics, qui est un organisme externe
indépendant avec une expertise reconnue dans le domaine.
M. Allaire : D'autres groupes
l'ont évoqué tantôt, et vous en avez fait allusion, puis je veux être sûr que
j'ai bien compris. Vous proposez aussi de mieux accompagner vos membres, c'est
comme ça que je le comprends, dans le processus. Est-ce que vous proposez aussi
de les défendre dans ce même processus-là, c'est-à-dire que vous seriez aussi,
en quelque sorte, une partie prenante de celui qui fait la plainte, donc que
vous l'accompagnez vraiment, mais vous plaidez avec lui, là? Est-ce que c'est
ce que j'ai compris ou c'est plus un accompagnement vraiment de façon plus
informelle pour être sûr qu'il franchit les bonnes étapes jusqu'au Protecteur
du citoyen puis de la prise en charge?
M. Bouvrette (Guillaume) : On
n'a pas analysé la question à savoir si on devait être partie prenante au
processus, là. Ça n'a pas fait partie de nos travaux. Par contre, là où on
insiste, c'est qu'il y a lieu de mieux diffuser l'information sur les processus
qui existent de divulgation des plaintes, sur les mécanismes de protection de
l'identité et, on le disait tout à l'heure, sur le suivi qui sera fait en temps
opportun des plaintes qui sont déposées. Mais non, on n'est pas allé jusqu'à
demander à ce qu'on accompagne, à ce qu'on soit partie prenante aux plaintes.
M. Allaire : Donc, ce que
vous souhaitez, c'est d'avoir encore plus d'outils pour bien diffuser le
processus à vos membres. C'est un peu ça aussi?
M. Bouvrette (Guillaume) : Encore
là, je ne pense pas qu'on a analysé la question de cette manière-là, mais, oui,
on doit mieux le comprendre. Mais la responsabilité de diffuser les processus
en place de divulgation des plaintes, je ne pense pas qu'ils appartiennent à la
partie syndicale, ils relèvent de l'employeur, et donc des différents
ministères et organismes, là, dans le cas qui nous préoccupe ici.
• (15 heures) •
M. Allaire : OK. Merci pour
la distinction. Vous n'avez pas, finalement, la même position que l'autre
groupe de tantôt. Là, je la comprends mieux.
M. Bouvrette (Guillaume) : Si
vous permettez, mon collègue souhaiterait faire un complément.
M. Allaire : Oui, oui,
allez-y.
M. Dean (Marc) :En fait, j'ajouterais que c'est arrivé dans le passé que le
Protecteur du citoyen nous a approchés, par exemple, pour mettre un lien sur
notre site Web. Ça fait que ça, déjà, comme nous, on recommandait à nos membres
d'aller voir le Protecteur du citoyen, bien, de voir qu'il y avait cette
possibilité-là directement partir d'un site Web, ça... il y avait une partie
qui était... ou il y avait une orientation pour aller vers ça. Puis, ce qui est
dommage, par exemple dans le cas de Louis Robert, c'est que, des fois, nous,
comme syndicat, on a à intervenir, mais au moment où il y a un congédiement. Parce
que, veux veux pas, là, c'est la loi... c'est le Code du travail qui s'applique
puis qu'on doit défendre notre membre. Mais c'est sûr que, si on avait un petit
rôle à jouer... bien, en fait, le Protecteur du citoyen doit jouer son rôle de
diffuser les procédures.
M. Allaire : Oui. Je
comprends que vous êtes favorable vraiment au fameux guichet unique, là, qui
serait implanté, là, une forme de centralisation. Il y a aussi, dans les
recommandations, d'implanter des gens qui vont être au sein des différentes
organisations publiques, qui vont jouer leur rôle de bien informer. Justement,
on en a parlé un peu tantôt, là, toute l'information, tout le processus à
suivre pour se rendre jusqu'au Protecteur du citoyen pour que la plainte, elle
soit conforme...
15 h (version non révisée)
M. Allaire : ...Le processus à
suivre pour se rendre jusqu'au Protecteur du citoyen, pour que, la plainte,
elle soit conforme puis qu'elle... après, elle passe les bonnes étapes au bon
moment, ça, vous êtes favorable à ça aussi?
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui.
M. Allaire : O.K. C'est bon.
Vous avez aussi parlé... Parce que, tantôt, vous avez parlé de harcèlement
psychologique, puis je veux être sûr qu'on différencie bien ce qui est
problématique au niveau des relations de travail puis un acte répréhensible.
Est-ce que c'était simplement un exemple que vous donniez de quelqu'un, dans le
fond, qui fait une plainte puis qui est susceptible d'avoir du harcèlement de
son gestionnaire et qui devient, ultimement, cet élément-là bien précis, un
contexte de relations de travail qui... Indépendamment de la plainte qu'il va
faire comme lanceur d'alerte?
M. Bouvrette (Guillaume) : En
fait, le parallèle, je vous dirais, qu'on cherche à illustrer, c'est surtout
sur la protection de la confidentialité des intervenants, autant le plaignant
que les personnes visées par des allégations. Et, oui, dans le cas d'allégations
de harcèlement psychologique, tout le monde est affecté, et ce n'est pas
nécessairement différent dans le cas d'une divulgation d'actes répréhensibles.
La personne visée par l'allégation, si la plainte n'est pas traitée de manière
confidentielle et qu'il y a des fuites, peut subir aussi des impacts de ça, là,
d'où notre insistance si marquée sur la protection de la confidentialité.
M. Allaire : Justement, on va
pousser ça un petit peu plus loin, les représailles en lien avec des plaintes
qui sont faites puis de la façon qu'elles sont gérées. Est-ce que vous pensez
qu'on devrait le baliser davantage? Est-ce que les gestionnaires qui agissent
de façon déraisonnable, par exemple, là, puis je pèse mes mots, là, mais vous
comprenez ce que je veux dire, est-ce qu'ils devraient avoir des sanctions plus
plus graves dans des contextes comme comme ceux-là?
M. Bouvrette (Guillaume) : Je
ne suis pas certain de bien comprendre la question, parce que, dans la mesure
où on arriverait à un processus où la confidentialité du plaignant et des
personnes visées par les allégations est protégée, et c'est 100 % étanche,
c'est un défi en soi, là, mais il n'y a pas de possibilité de représailles, si
la plainte est traitée de manière 100 % confidentielle et par un organisme
externe.
M. Allaire : Puis, la
présidente du Conseil du trésor a raison, là, dans le fond, je vais vous
répéter ce qu'elle m'a dit, mais je trouve que ça fait bien du sens.
M. Bouvrette (Guillaume) : C'est
enregistré, hein?, tout ça?
M. Allaire : C'est que, ça,
vous... Tu sais, dans le fond, vous parlez dans un monde idéal, là.
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui.
M. Allaire : Mais ce n'est
pas tout le temps comme ça, la réalité, là. Ça fait que c'était plus dans ce
contexte-là, ma question, là.
M. Bouvrette (Guillaume) : On
ne l'a pas analysé sous ce contexte-là, mais évidemment que, s'il y avait fuite,
il devrait y avoir des protections contre les représailles. Mais de la...
Voilà. Je...
Des voix : ...
M. Allaire : Oui. Puis vous
pourrez nous le communiquer après, mais, s'il y aurait des conséquences à
prévoir, des suspensions, des sans solde, avec solde, c'est des choses que vous
n'avez pas pensées? Mais je vous soumets la réflexion et je ne veux pas... je n'essaie
pas de vous pousser, peinturer dans le coin.
M. Bouvrette (Guillaume) : Non,
mais évidemment je comprends la réflexion, puis on sera disposés à avoir des
échanges, mais chaque cas étant clairement un cas d'espèce. Mais L'exemple le
plus marquant, puis on l'a souligné, de Monsieur Louis Robert, qui a été
congédié, mais là, il a été réintégré par la suite, là, il a été réintégré et
ça a été réglé pour lui. Par contre, le message qui est envoyé, la crainte chez
ses collègues de dénoncer, ça, c'est demeuré. Et je pense que c'est ça, la
volonté du gouvernement, qui est énoncée, là, de mettre fin à ça puis de mettre
en place cette loi-là, là. Il y a une volonté réelle, on le sent, là, de la
faire vivre.
M. Allaire : Parce que, les
conséquences d'un bris de confidentialité, c'est vrai que c'est grave puis ça a
des conséquences après sur les futurs divulgateurs, c'est... Puis c'est... Il
ne faut pas négliger cet élément-là, parce que, c'est ça, après ça, qui peut
être un frein ou pas. Ça va. Merci beaucoup. Merci, M. le... Ah! mon collègue,
peut-être, une question?
Le Président (M. Simard) : Oui.
M. le député de René-Lévesque, je vous en prie, il vous reste à peu près huit
minutes.
M. Montigny : simplement vous
dire que, moi, j'ai été un président d'un syndicat de professionnels en
éducation, et puis il y avait une nuance qu'on tenait compte, tu sais, puis j'aimerais
ça vous entendre là-dessus. Entre un collègue qui, pour toutes sortes de
raisons qui lui appartiennent, va volontairement mentionner des choses, qu'elles
soient vraies ou non, et on perçoit qu'il y a une volonté de faire mal, de
nuire, alors j'aimerais vous entendre sur cette nuance-là.
M. Bouvrette (Guillaume) : Bien,
je pense que j'y ai touché, mais la protection de la confidentialité de la
plainte, des personnes visées, de la personne qui a déposé la plainte, du
plaignant, limite ces dommages-là. C'est... On ne nuit à personne, si la
plainte est, demeure confidentielle, et c'est un réel défi.
Des voix : ...
M. Montigny : C'est très
clair pour moi. Je vous remercie...
Le Président (M. Simard) : Y
aurait-il d'autres remarques du côté de la partie gouvernementale? Ça va? Mme
la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Merci beaucoup,
M. le Président. Bonjour et bienvenue à l'Assemblée nationale du Québec. Merci
de participer à nos travaux. Vous représentez plusieurs membres de la fonction
publique, dont 2800 membres en santé, en enseignement supérieur, dans d'autres
sociétés d'État, mais aussi Revenu Québec. Je vais prendre Revenu Québec parce
que je le comprends mieux, puis disons que... mon ancien passé de fiscaliste.
Tantôt, on a eu un groupe qui est venu
nous dire, bien, au niveau des ingénieurs, il y a des équipes qui sont
tellement petites que, dès qu'une personne va parler, on sait c'est qui. Chez
Revenu Québec, il y a des équipes ultrapetites, et c'est compartimenté, alors,
si un de vos membres chez Revenu Québec parle, c'est ultrafacile d'identifier
la personne qui a divulgué l'information, là. Et vous parliez tantôt de M.
Robert. Oui, il est réintégré, mais ses chances d'avancement, sur une échelle
de 10, sont de combien?
M. Bouvrette (Guillaume) : Il
a pris sa retraite aujourd'hui, alors zéro, mais ceci dit...
Mme Rizqy : On le salue, par
contre.
M. Bouvrette (Guillaume) : ...je
comprends que ça amène un statut particulier et ça laisse des traces par la
suite.
Mme Rizqy : Parce que moi, je
ne me rappelle pas d'avoir vu des gens... Dans le cas de Monsieur Robert, oui,
il a été congédié et a été réintégré. Là, il prend sa retraite, peut-être qu'il
a jugé que ses chances d'avancement étaient... oscillaient autour de zéro, mais
je ne me rappelle pas, lorsqu'il y a eu des divulgations, puis pour parler avec
pas mal de monde dans différents secteurs... même si on ne pointe pas
directement, on sait, admettons, dans les cadres, qui a parlé. Généralement,
ces gens-là sont sur une voie d'accotement, est-ce que je me trompe je?
M. Bouvrette (Guillaume) : Je
n'ai pas d'exemple en tête précis de ça. J'en profite quand même pour poser la
question : Est-ce que Monsieur Robert aurait été réintégré, n'eût été la
pression de l'opinion publique et de l'attention médiatique qui a été donnée à
son cas, là? La question se pose. Mais, par rapport à la question d'équipes,
bien, plus spécialisées, encore là, difficile de protéger à 100 % les
gens. Par contre, et le pourquoi on est en accord avec la recommandation
première du rapport, c'est que, lorsque la plainte, elle est faite à
l'organisme externe, on diminue ces risques-là d'identification, plutôt que de
le faire à l'interne, avec toute la bonne volonté du monde, là, qu'un organisme
de la taille et de la réputation de Revenu Québec pourrait vouloir y mettre,
être à l'indépendance de l'organisme qui reçoit les plaintes. Ces risques-là
sont minimisés lorsqu'on dépose ces plaintes-là à l'externe.
Mme Rizqy : À la page 8 de
votre mémoire, Louis Robert croit que, et je cite : «Quand tu ne dis rien,
tu deviens complice des situations problématiques. Quand ils se taisent, ils
choisissent leur camp, ils permettent à la situation de perdurer.» Ici, vos
membres, là, lorsqu'ils décident de parler, généralement, c'est parce qu'ils
ont essayé dans un premier temps à parler avec leur supérieur immédiat et
qu'ils ont probablement vu une situation qui est hautement problématique, qui
n'a pas été résolue à l'interne. Dans une équipe, lorsque ce type de situation
arrive, le climat de travail, entre 0 à 10, ça va bien, ça va bien aller ou ça
ne va pas super bien?
• (15 h 10) •
M. Bouvrette (Guillaume) : Il
y a certainement un impact sur le climat de travail, mais surtout, je vous
dirais, sur la motivation des gens. Il faut comprendre la dynamique,
normalement, des professionnels qu'on représente. Ce sont des gens avec un haut
niveau d'expertise qui ont à cœur la mission de l'État, du ministère, de
l'organisme, de l'agence pour lequel ils travaillent. Ces gens-là sont dévoués
à la cause, et, lorsqu'ils adressent... c'est un anglicisme, je m'excuse...
Mme Rizqy : ...
M. Bouvrette (Guillaume) : Lorsqu'ils
dénoncent des situations qu'ils jugent problématiques à leurs supérieurs, parce
que c'est, en général, ce que les gens font dans l'exercice de leur emploi, et
qu'ils ont une réponse qui minimise les impacts, qui ne prend pas au sérieux la
dénonciation, eh bien, ils ne savent pas actuellement vers qui se tourner, et
aller vers les médias, ils s'exposent à des représailles, ils le savent, et je
ne pense pas que c'est la voie qui est souhaitable. Alors, d'où l'importance de
réitérer dans des communications claires que la loi encourage la divulgation
d'actes répréhensibles et protège la confidentialité du processus.
Mme Rizqy : Dites-moi,
toujours en page 8, «la communication entre journalistes et fonctionnaires est
devenue plus difficile». Pouvez-vous élaborer?
M. Bouvrette (Guillaume) : M.
Robert faisait état à cette époque-là de permission, systématiquement, à
demander à son employeur avant de faire des interventions dans des médias ou
dans des publications spécialisées propres à son domaine d'expertise, lui,
comme agronome. D'autres professionnels de l'État, experts dans leur domaine,
qui parfois sont très, très spécialisés, pourraient être appelés à intervenir.
Et ce qu'on a constaté, c'est que, dans le passé, c'était plus facile? Il y
avait, je dirais, une certaine valorisation de l'expertise des professionnels
de l'État. Et, dans les années, il y a eu un contrôle plus serré qui s'est fait
des communications vers l'externe de la part des...
M. Bouvrette (Guillaume) : ...employeurs.
Mme Rizqy : Mais pourquoi ce
désir de contrôle?
M. Bouvrette (Guillaume) :
Bien, il faudra poser la question aux employeurs, mais...
Mme Rizqy : Oui, oui, mais
vous, à l'interne, vous devez en jaser, non?
M. Bouvrette (Guillaume) : Effectivement.
Pour nous, il y a une valeur ajoutée à faire valoir toute l'expertise des
employés de l'État dans leur domaine, et il y a une valeur pour l'État à faire
mettre, sur la place publique, la qualité de son personnel, en fait, parce que
c'est aussi ça.
Mme Rizqy : Moi, je note
aussi... on parle des journalistes, mais nous... Pardon, je vais...
(Interruption)
M. Bouvrette (Guillaume) : À
vos souhaits.
Mme Rizqy : Merci. J'ai
beaucoup de souhaits, en fait. Un à la fois, par contre. Nous, les élus, on
reçoit des appels, et puis on le sent, au bout du fil, une détresse. Les gens
qui nous parlent, un, ont peur, ils ont peur pour leur emploi, mais aussi c'est
parce que, quand qu'ils nous appellent, c'est parce qu'ils sentent sincèrement
qu'ils font la bonne chose, qu'ils veulent aider puis que c'est pour améliorer
quelque chose, là. Lorsqu'ils décident de finalement appeler un élu, là, c'est
quand même sérieux, là. Est-ce que ça... Est-ce que vos membres vous en ont
parlé dernièrement?
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui,
non, oui? Mon collègue souhaite faire un complément. Vous voyez mon hésitation,
je n'ai pas d'écho, d'information précise là-dessus. M. Desjardins.
M. Desjardins (Philippe) : Vous
dites que, des fois, certaines personnes peuvent vous interpeller comme de quoi
qu'il y a de la détresse. Nous aussi, on a un service de l'accueil au SPGQ où
on entend souvent des gens qui sont en détresse. Ils aimeraient parfois
s'adresser directement aux médias pour révéler ce qu'ils vivent ou ce qu'ils
savent, mais, évidemment, au SPGQ, on ne leur recommande jamais de faire ça
pour... aussi un peu pour les raisons que vous avez déjà évoquées. Ça serait,
dans certains cas, très facile de les identifier, et ensuite ils pourraient en
subir des stigmates pour le reste de leur carrière et aussi peut-être des... se
voir refuser des possibilités d'avancement. Alors, on préfère que le SPGQ soit
le paratonnerre pour ces gens-là et que ces gens-là ne s'adressent pas
directement sur la place publique.
Mme Rizqy : Merci. Si vous
étiez législateurs, comment vous modifieriez, là, la première chose que vous
voudriez changer dans la loi?
M. Bouvrette (Guillaume) : Ça
n'arrive pas souvent, mais on l'a dit, on est d'accord avec la principale
recommandation du rapport déposé par le Conseil du trésor, c'est-à-dire, pour
les organismes publics, de centraliser la dénonciation des actes répréhensibles
auprès du Protecteur du citoyen, un organisme externe indépendant spécialisé,
pour traiter avec tout le sérieux que ça demande et surtout d'assurer la
confidentialité du processus.
Mme Rizqy : Ça... Oui, mais
c'est déjà, je vais dire, presque un acquis, là, alors, mais sans présumer de
quoi que ce soit, évidemment. Mais, au niveau d'actes répréhensibles, pour
vous, ça veut dire quoi, un acte répréhensible? Parce qu'en ce moment c'est
assez flou.
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui,
et je pense que ça le demeurera dans la mesure où la personne qui le dénonce de
bonne foi croit sincèrement que l'acte en soi est répréhensible et qu'il
devrait... qu'il devrait être traité comme tel. D'où la nécessité de protéger
dans le processus pour protéger les gens. Parce qu'en bout de piste, si, par
une entité externe tierce, l'acte, il est jugé, je veux dire, acceptable dans
les paramètres qui sont les nôtres, la personne qui a fait la divulgation ne
devrait pas en subir les conséquences.
Ce qu'on... Une autre piste de solution,
c'est qu'on a avancé qu'il devrait pouvoir y avoir plusieurs canaux de
divulgation, toujours sans crainte de représailles, mais, oui, on y revient,
là, à une autorité indépendante, mais on pourrait devoir... on devrait pouvoir,
dis-je, divulguer au législateur auprès du ministre responsable directement...
du système de justice, par exemple. La multiplicité des canaux peut assurer le
fait que la plainte soit traitée et ne tombe... ne tombe pas. Voilà.
Mme Rizqy : Parfait. Tantôt,
j'ai posé la question, je me permets de la poser à vous aussi. J'ai
l'impression qu'en ce moment, oui, on me parle des sonneurs d'alerte, mais,
quand qu'on fait plusieurs demandes d'accès à l'information, les documents
qu'on reçoit sont hautement caviardés. Et là, évidemment, ce que ça frustre le
travail soit des journalistes mais même pour nous, les élus, parce que
l'objectif d'une demande d'accès à l'information, c'est de savoir ce qui se
passe. Et c'est là qu'à ce stade-là on doit essayer d'avoir des sources, à
l'interne, qui viennent nous dire, bien, qu'est-ce qui se cache derrière cette
encre noire. Il me semble qu'on devrait aussi travailler parallèlement à
s'assurer une véritable accessibilité à l'information, là.
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui,
je comprends votre enjeu puis je pense que vous l'avez dénoncé à plusieurs
reprises. On le fait nous aussi également...
M. Bouvrette (Guillaume) : ...et
d'abord comme intervenant dans l'appareil public, comme interlocuteur, représentant
du personnel professionnel de l'État, on déplore, par moments, de devoir avoir
recours à des demandes d'accès à l'information simplement pour qu'on nous
partage des données tout à fait normales, publiques dans notre société de
droit. Et, lorsqu'on les reçoit, si elles sont incomplètes, elles ne nous sont
d'aucune utilité. On se positionne comme partenaire de l'État québécois, un
représentant de son personnel professionnel et on apprécie lorsque
l'information est disponible et qu'on peut ensemble trouver des solutions.
Mme Rizqy : Puis même entre
les différents organismes, il me semble que, quand l'information est claire et
distribuée, c'est que ça permet même, des fois, de nourrir la réflexion dans un
autre organisme.
M. Bouvrette (Guillaume) : Définitivement.
Mme Rizqy : Parfait. Merci
beaucoup. Dernière question, au niveau de l'accompagnement, on parle aussi
d'accompagnement au niveau juridique, j'imagine, au sonneur d'alerte, de
l'outiller, parce que sinon, c'est le combat de David contre Goliath. C'est ce
que vous... Est-ce que vous avec des...
M. Bouvrette (Guillaume) : La
question a été posée tout à l'heure. Je pense qu'on n'est pas allés jusqu'à se
poser la question : Est-ce qu'on souhaite être intervenants, accompagner le
plaignant formellement?
Mme Rizqy : Non, je parle
vraiment pour vos membres. Est-ce qu'il serait souhaitable d'avoir un fonds
dédié pour vraiment aider le lanceur d'alerte si jamais, malheureusement, il y
a une poursuite, ou quoi que ce soit? Parce que c'est sûr que, s'il se
représente devant l'État, c'est rare que... à moins que lui-même soit, par
exemple, un nouveau fonctionnaire qui soit avocat, puis il va se représenter
peut-être tout seul. Mais sinon les frais juridiques, tu sais, on blague, là,
mais c'est facturé à la minute, hein?
M. Bouvrette (Guillaume) : Définitivement.
On est des habitués.
M. Dean (Marc) :Il y a des expériences dans d'autres pays sur ce que vous
avancez. Si je me souviens bien, parce que j'ai beaucoup travaillé dans le
dossier, les États-Unis ont cette possibilité-là, quand une plainte est fondée,
que l'État peut payer les frais de représentation d'un professionnel ou d'un
fonctionnaire qui aurait à aller devant la justice pour... dans un cas de
dénonciation d'actes répréhensibles.
Est-ce qu'on peut appliquer ça au Québec?
Bien, c'est à vous, comme législateurs, de regarder si on pourrait l'appliquer.
Déjà, le Protecteur du citoyen, ce que j'ai vu, c'est qu'il offre du conseil
juridique, mais, une fois qu'on a conseillé quelqu'un, si l'étape suivante,
c'est la cour, bien, vous avez raison, les frais de justice sont extrêmement
élevés.
Le Président (M. Simard) : Très
bien.
M. Bouvrette (Guillaume) : Vous
me direz que je suis un optimiste...
Le Président (M. Simard) : Très
bien. En conclusion. On vous laisse finir? Oui.
M. Bouvrette (Guillaume) : Merci.
...je suis un optimiste, mais, si la plainte est faite à un organisme externe
et que la confidentialité est assurée, le plaignant n'aura pas à se défendre de
poursuites éventuelles.
Le Président (M. Simard) : Très
bien.
M. Bouvrette (Guillaume) : Mais
peut-être que je devrais enlever mes lunettes roses, là.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Gardez-les. Alors, Mme la députée de Sherbrooke, vous disposez de
quatre minutes.
Mme Labrie : Merci. Je vais
vous demander de les enlever quelques instants parce que, bien, vous nous
l'avez fait valoir, ma collègue aussi, d'autres de vos collègues, les
ingénieurs, qui sont passés avant vous, parfois, il y a une expertise vraiment
pointue, puis, bon, malgré tous les efforts pour maintenir la confidentialité,
parfois, dans le processus d'enquête, quand même ça va se savoir, là, que
quelqu'un a... est allé dire quelque chose. Comment on peut faire pour éviter
les représailles à ce moment-là? Comment on peut équiper les gens pour éviter
des représailles ou se battre contre ces représailles?
M. Bouvrette (Guillaume) : Peut-être
qu'une piste de solution, elle a été évoquée plus tôt par le gouvernement dans
ses questions, c'est de prévoir des mesures, des sanctions contre les gens qui
exerceraient des représailles, parce que non, effectivement, on ne pourra pas
toujours toutes les éviter. Mais, s'il y a sanction, on envoie un message très
clair qu'on n'exerce pas de représailles à l'endroit de gens qui, de toute
bonne foi, ont dénoncé des actes répréhensibles, comme c'est le cas dans le
monde syndical. Lorsqu'une personne dépose un grief, là, elle est protégée par
le Code du travail à ne pas faire l'objet de représailles d'un employeur parce
qu'elle a exercé un droit. Et c'est la même chose ici, c'est un droit prévu par
la loi.
• (15 h 20) •
Mme Labrie : O.K. Vous
avez... Dans votre recommandation 7, vous parlez de processus qui doit être
expéditif. Vous parlez d'efficacité souvent aussi. Est-ce que, pour vous, il y
a une question de délai là-dedans?
M. Bouvrette (Guillaume) : Oui.
Mme Labrie : Quel type de
délai serait efficace?
M. Bouvrette (Guillaume) : Bien,
clairement, je pense qu'il y a du cas par cas, dépendant de la complexité de la
plainte, là, mais...
Mme Labrie : Mais est-ce que
ça devrait être inscrit dans la loi, certains délais pour certaines étapes?
M. Bouvrette (Guillaume) : Ça
devient difficile, je crois, à baliser, mais il appartiendra peut-être au
législateur de se poser la question. Mais on comprend que, lorsqu'un... le
divulgateur d'une plainte reste sans réponse pendant, je vais prendre un
exemple, mais plus de trois mois, sans aucun suivi, bien, évidemment qu'il se
questionne : Est-ce que c'est tombé entre deux chaises? Est-ce qu'on
traite ma plainte? Est-ce qu'on prend au sérieux ce que j'ai dénoncé de toute bonne
foi? Et, lorsqu'on fait une dénonciation, ce n'est pas... certainement pas de
gaieté de cœur. C'est un acte, je veux dire, lourd, là, au sens où les gens
adhèrent à la mission de l'État et de l'organisme qu'ils desservent. Avant
d'arriver à cette étape-là, ils ont eu, je crois, une mûre réflexion. Ils
s'attendent à ce que ça soit traité avec tout le sérieux que ça mérite. Ce
n'est pas leur quotidien, là.
Mme Labrie : Donc, une
certaine forme de délai, là, pour le suivi...
Mme Labrie : ...serait indiqué
dans le projet de loi. Vous, si j'ai bien compris ce que vous avez dit, vous
n'avez pas statué à savoir si vous voudriez que la loi reconnaisse la
légitimité des syndicats d'effectuer eux-mêmes des divulgations au nom de leurs
membres, ce que nous a donc demandé, là, des collègues à vous qui se sont
passés tout à l'heure, vous dites aussi, par contre, que vous voulez jouer le
rôle de paratonnerre pour protéger vos membres, est-ce que vous seriez en
mesure d'y réfléchir d'ici au dépôt d'un projet de loi, votre position
là-dessus, ou bien c'est plus clair, là?
M. Bouvrette (Guillaume) : Définitivement,
mon réflexe, c'est de vous dire, c'est une avenue qui est intéressante, qui
rejoint l'objectif de protection de nos membres lorsqu'ils ne se sentent pas
outillés pour le faire par eux-mêmes.
Mme Labrie : O.K. Donc, vous
seriez favorable à une disposition comme celle-là?
M. Bouvrette (Guillaume) : À
première vue, j'ai envie de vous dire que oui, mais, tu sais, qu'on n'a pas
fait ces travaux-là chez nous, mais on peut très bien pousser cette réflexion.
Mme Labrie : Puis vous avez
mentionné que c'était plus serré, là, au niveau de la surveillance, des
demandes de permissions de vos membres, là, depuis un certain temps, est-ce que
vous avez remarqué depuis quand? Est-ce que c'est quelque chose en particulier
qui a été un déclencheur de ce resserrement-là?
M. Bouvrette (Guillaume) : Je
vais me tourne vers mes collègues, est-ce qu'on a un exemple particulier?
M. Desjardins (Philippe) : Je
crois que c'est assez difficile de vous pointer un déclencheur. Si vous me
permettez de vous parler de mon expérience personnelle comme communicateur,
j'ai travaillé dans un ministère à une certaine époque, et un journaliste communique
avec moi pour me dire : M. Desjardins, pouvez-vous m'indiquer combien
il y a d'emplacements de stationnement à tel centre carcéral au Québec? Mais la
réponse, je la connaissais, imaginez, par exemple, que c'est 750. Je n'avais
pas le droit de lui dire que c'était ça, 750. Je devais me tourner vers mon
supérieur qui lui remontait jusqu'au sous-ministre, et ensuite la réponse
redescendait et, parfois, ça pouvait prendre jusqu'à trois jours. Le
journaliste était vraiment en colère après moi, il dit : Oui, mais M.
Desjardins, la réponse, vous la connaissez. J'ai dit : Absolument, je la
connaissais, mais je n'avais pas le droit de vous la donner. Ça devait faire
l'objet... Cette information-là, votre question devait remonter dans la machine
et ensuite redescendre.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, merci. Désolé, c'est le temps dont nous disposions. Hein, ça passe
très rapidement. Alors, merci beaucoup d'avoir participé à nos travaux et
d'avoir enrichi ce faisant notre réflexion.
Compte tenu de l'heure, nous allons
suspendre momentanément nos travaux afin de faire place à notre prochain invité
qui se trouve en France.
(Suspension de la séance à 15 h 24)
(Reprise à 15 h 27)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, bienvenue à tous. Nous sommes en mesure de reprendre nos
travaux. Chers professeurs, vous vous retrouvez en France en ce moment. Merci
d'accepter notre invitation. Auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il vous plaît,
de vous présenter?
M. Seassaud (Eric) : Bien
sûr. Bonsoir, M. le Président. Bonsoir, Mmes et MM les députés. Bien, je vous
remercie de prêter attention à ces quelques réflexions et retours d'expériences
que je souhaite... que j'aurai plaisir à partager avec vous. Je vais commencer
par une brève présentation.
Je suis... en fait, je suis un juriste
avec une expérience professionnelle de 25 années. J'ai travaillé en
entreprise, en cabinet, les deux à la fois. J'ai été directeur juridique,
éthique et conformité... une entreprise française active dans le secteur de
l'énergie... J'ai le plaisir de présider la Commission française de l'Afnor,
compliance et gouvernance des organisations et, à ce titre, j'ai eu l'occasion
de m'occuper particulièrement de la norme ISO 37 001 sur l'anticorruption.
Dans ma profession d'avocat, j'ai l'habitude de conseiller des entreprises, des
organisations sur des sujets d'éthique et de conformité globaux en ce qui
concerne la mise en place de politiques, de programmes, de dispositifs de
conformité et puis aussi spécifiques sur des transactions particulières.
En parallèle, j'enseigne l'éthique à la
compliance à la Sorbonne avec un focus particulier pour moi en ce qui concerne
l'anticorruption et l'éthique des affaires, et également les sanctions internationales,
les problèmes d'embargo et le contrôle des exportations. Voilà en résumé mon
parcours.
• (15 h 30) •
J'essaie de résumer mes principales
réflexions par rapport à mon retour de pratique en France, alors je les ai
fondées sur plusieurs textes, s'agissant des lanceurs d'alertes et des alertes
qui, je crois, comprend le sujet qui est l'objet de vos travaux. Alors,
j'aurais aimé partager ces réflexions, ces retours d'expérience avec vous. Nous
avons en France plusieurs textes qui ont concerné les lanceurs d'alerte. Alors,
ces textes sont quand même relativement récents, hein, on commence avec la loi
Sapin 2 en 2016. Tout ça vient, je dirais... a été... ce mouvement
législatif a été impulsé depuis les conventions OCDE. La loi Sapin 2 du ministre...
du ministre éponyme, prévoit deux volets s'agissant des lanceurs d'alerte, un
dispositif général qui va concerner le secteur public et le secteur privé, et
des organisations dès le seuil de 50 salariés, donc une couverture assez
large. Ça, c'est assez novateur. Et donc ça, ce dispositif, il va concerner...
Alors, le législateur a une énumération un peu pédagogique. Il aurait pu se
contenter de dire des illégalités. Il les a nommées, il a parlé de violation de
la loi, du règlement,de crimes, de délits. Il a aussi parlé de manquement aux
engagements internationaux de la France et également d'un sujet plus complexe à
appréhender pour un lanceur d'alerte, ça l'est déjà pour un juriste, mais le
concept de manquement à l'intérêt général. Ça, c'est le volet général.
Et ensuite, on a un volet spécifique qui,
lui, concerne les entreprises privées et certaines entreprises...
15 h 30 (version révisée)
M. Seassaud (Eric) : ...publiques,
les entreprises publiques qui sont contrôlées par des capitaux publics ou les
établissements publics industriels et commerciaux qui sont des... eux, des...
elles, des personnes morales de droit public, qui emploient plus de 500
salariés et totalisent un chiffre d'affaires consolidé de plus de 100 millions
d'euros. Et, pour cette deuxième catégorie, les sujets traités sont beaucoup
plus limités, on ne parle que de corruption et de trafic d'influence. Donc,
deux niveaux sur les alertes. Le premier niveau : les articles 6-16
de la loi Sapin II sur les illégalités, les crimes, les délits, les
manquements à l'intérêt général et aux engagements internationaux de la France,
un volet spécifique qui concerne la corruption et le trafic d'influence, qui,
lui, ne touche que les entreprises les plus importantes, plus de 100 millions
d'euros de chiffre d'affaires consolidé et employant plus de 500 salariés.
Les... Ces lanceurs d'alerte bénéficient d'une
protection, d'une protection renforcée depuis la transposition de la directive
européenne sur les lanceurs d'alerte, qui a été transposée, en France, l'an
dernier, avec la loi Waserman et un décret de fin d'année. On trouve... Les
innovations majeures de cette transposition, c'est un renforcement du statut
des lanceurs d'alerte avec une protection particulière contre les procédures-bâillons,
une amende civile d'un montant limité, mais qui a le mérite d'exister, de 60 000
euros. On trouve aussi des provisions pour frais de justice pour les lanceurs d'alerte
qui sont... qui n'ont pas la... comment dirais-je, les facultés personnelles d'initier,
d'engager par eux-mêmes des procédures en raison de leur coût matériel. On
trouve également des éléments de soutien psychologique pour les plus faibles d'entre
eux... enfin, les plus vulnérables, plus exactement.
Et on a également un volet d'accompagnement
qui a fait énormément de débats en France, qui concerne les facilitateurs. Dans
les facilitateurs, on a les ONG, on a les syndicats, on a aussi des collègues
et on a aussi des proches. Le but, c'était de pouvoir être en mesure d'aider
les lanceurs d'alerte. Alors, certaines organisations souhaitaient que les ONG,
les syndicats puissent être eux-mêmes qualifiés de lanceurs d'alerte. Ça n'est
pas... Ça n'a pas été la solution qui a été retenue par le législateur, mais,
en revanche, le législateur a donné à ces personnes, à ces facilitateurs le
même bénéfice en termes de protection que les lanceurs d'alerte. Voilà sur la loi
Sapin II.
Je rajouterais un dernier élément, pour ne
pas être trop long, qu'il existe aussi un deuxième volet de... d'alerte sous
le... sous l'égide de la loi sur le devoir de vigilance, alors devoir de
vigilance qui n'est pas, en revanche, en cohérence de seuil avec la loi Sapin II,
puisque le devoir de vigilance concerne, en France, les entreprises françaises
de plus de 5 000 salariés et les entreprises... les entreprises ayant leurs
sièges en France, employeurs en France ou à l'étranger... et/ou à l'étranger,
10 000 salariés. Donc, on voit que les seuils ne sont pas... ne sont pas cohérents
entre les deux textes. Ça a été un des sujets discutés devant le... devant le
Parlement au moment de l'adoption de ce texte. Et on a aussi la possibilité,
sur le fondement de ce texte, de lancer des alertes en ce qui concerne les
droits fondamentaux, ça, c'est vraiment intéressant, les atteintes à l'environnement
et les atteintes à la santé-sécurité. Alors, comme ces éléments sont des
éléments législatifs, eh bien, ils peuvent, s'il se... si le lanceur d'alerte
se qualifie dans le cadre du dispositif Sapin II, bénéficier indirectement
de la... de cette protection de lanceur d'alerte. Mais on a là, effectivement,
un problème d'articulation des textes qui avait été soulevé, donc quelque chose
qui avance mais avec des éléments à parfaire.
Et, enfin, il reste le grand sujet, qui
est les cas majeurs, alors, qui sont, Dieu merci, epsilon dans les situations
que l'on rencontre mais qui peuvent être dramatiques. Alors, évidemment, on a
cette protection accrue, la confidentialité garantie, la possibilité, pour le
lanceur d'alerte, de ne plus passer par l'entreprise ou l'organisation avant de
saisir la justice ou les administrations, ce qui oblige les entreprises et les
organisations à être convaincantes si elles veulent avoir la chance de traiter,
en interne, leurs alertes. Mais, dans certains cas marginaux qui ont été
discutés, venait sur la table le débat : Faut-il ou pas permettre aux
lanceurs d'alerte de bénéficier d'une partie des amendes <infligées...
M. Seassaud (Eric) :
...qui
ont été discutés, venait sur la table le débat : Faut-il ou pas permettre aux
lanceurs d'alerte de bénéficier d'une partie des amendes >infligées aux
organisations, aux entreprises qui sont reconnues coupables sous l'empire de
ces textes, un peu à l'instar de ce que font les Américains? La tradition
juridique française et la tradition juridique anglaise n'y étaient pas
favorables. Ce n'est pas une solution dans laquelle le législateur français
s'est engagé, mais, en revanche, un certain nombre de faits d'actualité peuvent
effectivement soulever cette question, qui n'est pas sans pertinence, quand on
regarde des situations particulières où des gens qui ont agi au nom de
l'intérêt général se retrouvent confrontés un petit peu à une situation de mort
sociale du fait de leurs actions.
Voilà. J'espère ne pas avoir été trop long
et d'avoir résumé le plus possible.
Le Président (M. Simard) : Pas
du tout, cher professeur. Et, du reste, vous êtes parfaitement dans les temps.
Alors, nous allons entreprendre une période d'échange, et je vous laisse entre
les mains de mon collègue le député de Maskinongé, qui représente la partie
gouvernementale et qui est l'adjoint parlementaire de la ministre. M. le
député.
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Merci, M. le professeur. En fait, ma première question, pour être
sûr que je comprends bien : Suite à l'instauration des deux lois, là, que
vous avez nommées tantôt, je comprends bien que ça s'adresse autant au secteur
public que privé?
• (15 h 40) •
M. Seassaud (Eric) : Alors,
s'agissant de la loi Sapin II, oui, ça s'adresse au secteur public et au
secteur privé. Dans le secteur privé, on a les administrations étatiques, les
communes de plus de 10 000 habitants, les départements, les régions,
les syndicats de coopération intercommunaux et les personnes morales de droit
public employant plus de 50 agents.
Sur le deuxième sujet, sur la loi sur le
devoir de vigilance, c'est différent. La couverture est beaucoup moins large
puisque, notamment, échappe à la loi sur le devoir de vigilance l'essentiel des...
de l'action... ce qu'on appelle l'action économique de l'État, en tout cas
l'action économique de la puissance publique, et c'est une des critiques
majeures qui avaient été adressées à ce texte. Au moment des débats
parlementaires, certains avaient estimé qu'environ peut-être
200 entreprises... 200 entreprises seraient touchées, effectivement,
par ce texte. Donc, le deuxième texte... le deuxième texte souffre un peu aussi
d'une... comment dirais-je, des conditions dans lesquelles il a été adopté.
C'est une proposition de loi d'initiative parlementaire qui a été adoptée dans
le cadre d'un calendrier d'élection présidentielle assez serré, les... il a été
adopté un petit peu rapidement, et les questions de cohérence de textes, de
seuils, d'application, le sujet que vous soulevez, M. le député, typiquement,
ont été, malheureusement, insuffisamment traitées par le législateur. C'est
un... Ça fait partie des points qui ont été soulevés par les commentateurs sur
ce deuxième texte, qui est beaucoup moins abouti que la loi Sapin II.
M. Allaire : Merci pour la
précision. Je vais revenir avec le secteur public dans une prochaine question,
mais je suis un peu curieux par rapport au secteur privé. Quelle a été la
réaction des entreprises suite à la mise en vigueur de cette loi-là? Est-ce
qu'ils... Est-ce qu'ils étaient favorables? Est-ce qu'ils étaient plutôt
défavorables?
M. Seassaud (Eric) : Bien, je
vais vous répondre très directement, M. le député. Ça n'a pas suscité un
enthousiasme absolu, oserais-je dire. Alors, en fait, on avait deux situations
assez... assez mitigées. On avait, d'une part, les grandes entreprises
internationales, qui avaient déjà mis en place un programme de conformité parce
qu'ils étaient assujettis au UKBA, au Bribery Act anglais de 2010. Donc,
beaucoup d'entreprises françaises internationales ayant des activités en
Grande-Bretagne ont dimensionné... ont mis en place un programme de conformité
en le dimensionnant sur le UKBA. Et donc, bon, quand la loi Sapin II est
venue... Eh bien, en fait, il y a une convergence assez forte des textes. Les
six principes du UKBA sont très convergents avec les huit piliers de la loi
Sapin II, et on a... on a des formulations qui sont différentes, mais on
retrouve, effectivement, les... comment dirais-je, la même volonté et on
retrouve, dans les deux textes, le défaut de prévention de la corruption
incriminé par la... par les textes anglais et par les textes français. On
trouve aussi l'apparition, avec la loi Sapin II, de la justice
transactionnelle, qui a été un débat très significatif en France, là encore, en
s'arc-boutant sur notre tradition juridique, pour finalement avoir un avis du Conseil
d'État nous disant que, bon, effectivement, ce n'est pas très conforme avec la
tradition juridique, mais, en revanche, s'agissant de pratiques <internationales...
M. Seassaud (Eric) :
...nous
disant que, bon, effectivement, ce n'est pas très conforme avec la tradition
juridique, mais, en revanche, s'agissant de pratiques >internationales,
on pouvait l'accepter. Je résume à grands traits un avis assez complexe, mais
c'est un petit peu ça, ce que les commentateurs en avaient... en avaient
retiré.
Donc, un accueil très mitigé, plus détendu
pour les grandes entreprises qui avaient déjà mis en place un programme de
conformité, beaucoup plus réservé pour les entreprises de taille plus moyenne
qui n'avaient jamais entendu parler de compliance autrement que par les clauses
FCPA qu'on leur faisait signer dans des accords internationaux, sans très bien
en comprendre la portée, les enjeux et les conséquences potentielles pour
elles-mêmes, des clauses qui étaient passées dans la chaîne contractuelle par
des grands donneurs d'ordres ayant une... comment dirais-je, un élément de
connexité d'US NEXUS avec la juridiction américaine, où ces clauses-là étaient
imposées. Donc, on avait vraiment un fossé entre les PME françaises et les
grandes entreprises qui étaient familiarisées à ce sujet. Un accueil
globalement plutôt... plutôt frais, plutôt frais.
M. Allaire : Suite à
l'implantation de la loi, est-ce que... est-ce qu'il n'y a pas un mécanisme de
mise en place de statistiques, là? Est-ce que... Est-ce que vous êtes en mesure
de mesurer l'impact de l'implantation de la loi en France?
M. Seassaud (Eric) : Alors,
c'est assez difficile. On a... Il y a des travaux qui sont en cours, avec une
volonté d'essayer de quantifier l'impact de la loi. La... On l'a... L'AFA, l'Agence
française anticorruption, qui a été créée par ce... par cette loi, a mis en
avant, essentiellement, le nombre de transactions qui ont été réalisées. Et
effectivement on voit que, depuis le début, les transactions conclues par l'AFA
augmentent en quantité et également en matière de montants transigés. Les... Il
y a un certain nombre de... L'AFA procède à un certain nombre de contrôles et
se fonde en cela sur le modèle de l'Autorité de la concurrence, c'est-à-dire
que l'AFA, comme, a commencé une segmentation de marché et a lancé différents
contrôles de grandes entreprises. Ceux qui auraient pu vraiment mesurer
l'impact de la loi, c'eût été la commission des sanctions, car ils la... sans
trop entrer dans le détail, mais la loi prévoit la possibilité pour l'AFA de
déférer, après un contrôle sur pièces et sur place, des dossiers à la
commission des sanctions. Mais, depuis une décision qui avait été très attendue
en France, la décision Sonepar, la commission des sanctions a dit qu'on... elle
ne jugeait qu'au moment où le dossier lui était présenté. Comme, en général, il
se découle un délai d'un an, un peu plus d'un an, entre le moment où... même,
oui, plutôt deux ans, d'ailleurs, entre le moment où l'AFA fait son contrôle,
fait ses observations et arrive... et, le cas échéant, le dossier arrive à la
commission des sanctions, en un an une entreprise a normalement le temps de se
mettre au niveau, et c'est ce qui s'est produit, ce qui fait que la commission
des sanctions ne fonctionne pas beaucoup.
Alors, certains objectent le fait que,
bien, du coup, le dispositif est peu efficace. D'autres, plus optimistes — j'avoue
que je suis assez convaincu par ça — croient à la vertu du... comment
dirais-je, de persuasion du dispositif. Et, dès lors que, finalement,
l'entreprise se met en conformité, bien, l'objectif me semble... me semble
atteint. Donc, on a... et c'est ce qu'a mis... c'est ce qu'a mis en avant l'AFA
en disant : Bon, effectivement, on n'a pas prononcé de sanctions
significatives, mais les entreprises qui ont été identifiées dans le cadre de
contrôles sur place et sur pièces, eh bien, finalement, se sont mises en
conformité à bref délai. Et c'est finalement ça, c'est finalement une des
missions essentielles qui a été confiée par le législateur à l'agence. C'est
comme ça que la chose a été perçue. Voilà.
M. Allaire : Dans votre
préparation pour votre présence ici, aujourd'hui, avec nous, est-ce que vous
avez pris le temps d'analyser la loi actuellement au Québec et d'être capable
de dresser des distinctions par rapport à ce qui se passe chez vous pour être
capable de voir un peu vraiment comment... comment que vous vous distinguez ou
comment qu'on se distingue avec la loi qui existe actuellement?
M. Seassaud (Eric) : Alors,
j'avoue que j'ai lu le rapport, mais je ne suis pas rentré dans le détail, parce
qu'on m'a dit que ce qui était intéressant, c'était surtout mon retour
d'expérience sur le texte français. Cela étant, si ça vous intéresse, je
peux... je serais ravi, d'ailleurs, de vous adresser une note complémentaire en
vous disant, sur le fondement d'une lecture <attentive...
M. Seassaud (Eric) :
...si
ça vous intéresse, je peux... je serais ravi, d'ailleurs, de vous adresser une
note complémentaire en vous disant, sur le fondement d'une lecture >attentive
du texte québécois, les différences significatives que moi, je peux relever par
rapport au texte français, vous faire un élément... comment dirais-je, une
comparaison.
M. Allaire : Si vous nous
envoyez votre note, ça va nous faire plaisir d'en prendre connaissance et de
s'en inspirer, assurément.
M. Seassaud (Eric) : Eh bien,
je le ferai avec joie.
M. Allaire : Dans mon cas,
j'aurai peut-être une dernière question. J'aimerais savoir comment vous avez
géré la confidentialité chez vous pour assurer la protection du divulgateur ou
du lanceur d'alerte, parce qu'on le sait, c'est un des principaux enjeux si on
veut assurer une confiance envers le système.
M. Seassaud (Eric) : Vous
avez raison, tout à fait, vous avez entièrement raison. C'est l'enjeu majeur,
que vous soulevez. Écoutez, c'est d'ailleurs une des raisons pour laquelle la
loi Waserman a supprimé ce qui existait sous l'empire de la loi Sapin II,
l'échelle entre le niveau interne préalable qu'imposait initialement la loi de
2016, avant d'aller saisir les juridictions, les administrations, le défenseur
des droits. Ça, quand on se retrouve dans un dispositif interne qui ne présente
pas de garantie d'indépendance et de confidentialité, bien, c'est extrêmement
dissuasif pour le lanceur d'alerte, il faut... il faut quand même le dire très
clairement.
Je crois que, pour avoir un dispositif
efficace, il faut une indépendance garantie, il faut des sanctions pénales pour
la violation. Le fait de... Encore... C'est curieux, moi, je suis un privatiste
à la base, mais je dois reconnaître que c'est le pénal qui fait bouger les
lignes. En France, on a bougé parce que le droit pénal s'en est... s'en est
mêlé. En France, on a changé les comportements parce que les seuils que je vous
ai indiqués, les obligations de l'article 17.2 en matière de corruption et de
trafic d'influence, c'est une obligation qui pèse sur les chefs d'entreprise.
Et donc c'est le droit pénal et les incriminations pénales qui ont fait... ont
fait bouger les lignes. Et, actuellement, si quelqu'un commettait, en France,
une violation de la confidentialité du lanceur d'alerte, il pourrait... il
pourrait être pénalement poursuivi, ce qui fait que c'est quelque chose qui est
quand même significatif. Mais je crois aussi qu'il y a une question de... du
choix du dispositif lui-même, est-ce que c'est un dispositif interne, sous le
contrôle de la direction générale de l'entreprise, ou pas. Donc, ça, c'est un
premier élément de... je dirais, de confiance pour les collaborateurs et les
parties prenantes de l'organisation concernée. Et également est-ce que cette...
l'entité qui est en charge du recueil des alertes est astreinte elle-même à des
obligations particulières de confidentialité, que ça soit contractuel, que ça
soit déontologique pour les avocats, les professions réglementées, bref qu'il y
ait des mesures qui garantissent, effectivement, l'indépendance et qu'il n'y
ait pas la possibilité d'exercer les pressions pour que telle personne au sein
d'une organisation soit contrainte ou que l'on tente de la contraindre de
révéler des sujets. Alors, évidemment, ça ne se pose toujours que sur des cas
epsilon. Ça va toucher un pour 1 000 des cas d'alertes qui nous
concernent, mais ça ne va... ça va toucher les cas importants.
• (15 h 50) •
Et ce qui serait vraiment dommage, c'est
de concevoir un dispositif qui arrête le moustique et qui laisse passer le
mammouth. Et c'est un peu... c'est un peu le problème, aujourd'hui, de ces
sujets-là, parce que, dans un certain nombre de cas, vous avez... vous arrivez
avec des éléments d'information qui sont si spécifiques que quelqu'un qui
connaît le dossier sait vous identifier... enfin, sait identifier d'où ça
vient. Quand vous êtes au sein d'une organisation, il y a des éléments de
dossier, vous savez qu'il faut un certain... de toute façon il n'y a pas
beaucoup de gens qui sont au courant de ça, vous savez d'où ça vient et vous
avez un faisceau d'indices. Donc, il faut avoir un système de recueil des
alertes qui garantisse une véritable indépendance vis-à-vis de la direction
générale de l'entreprise. Je pense, c'est une question de gouvernance. Il faut
qu'il y ait aussi la possibilité d'aller directement devant le conseil
d'administration, et pas simplement devant l'exécutif, parce que le conseil
d'administration, c'est l'organe de gouvernance, c'est lui qui donne une certaine
garantie à l'organisation, et je pense que c'est... ce sont des pistes qui
peuvent être utilement explorées. En tout cas, c'est des débats qui tournent
autour de ces idées qui nous occupent aujourd'hui.
M. Allaire : Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci. Je cède maintenant la parole à mon collègue de René-Lévesque, qui
dispose de 2 min 45 s.
M. Montigny : Alors, bonjour.
Simplement une question qui va me permettre de mieux comprendre votre
intervention cet après-midi, en ce qui nous concerne, d'abord, <l'enjeu...
Le Président (M. Simard) :
...45 s.
M. Montigny :
Alors, bonjour. Simplement une question qui va me permettre de mieux comprendre
votre intervention cet après-midi, en ce qui nous concerne. D'abord, >l'enjeu
que vous avez parlé sur les entreprises versus les organismes gouvernementaux,
les organisations gouvernementales en fait, d'après vous, l'intention de départ
du législateur, d'agir au niveau des entreprises privées... est-ce que vous
pouvez m'en... me l'expliquer davantage? J'aurai une autre question là-dessus
après.
M. Seassaud (Eric) : Voulez-vous
dire l'intention du législateur d'agir principalement envers les entreprises
privées? C'est...
M. Montigny : Bien, vous avez
beaucoup parlé des entreprises. J'aimerais vous entendre sur l'intention
qu'avait le législateur...
M. Seassaud (Eric) : Alors...
Mais vous avez... vous avez raison. Alors, j'ai beaucoup parlé d'entreprises
parce que j'ai beaucoup conseillé d'entreprises, mais ça s'applique aussi au
secteur public. Alors, on... je vais... En tout cas, la loi Sapin II, ça
s'applique clairement au secteur public. Je vais le... Je vais vous le dire
très directement, le niveau de maturité n'est pas le même dans le secteur privé
et dans le secteur public. Ça, c'est clair.
D'abord, il y a des sujets d'ordre
culturel, parce que les organismes publics sont au service de l'intérêt général,
et beaucoup d'entre eux pensaient n'être pas véritablement concernés par les
thématiques sous-jacentes de ces différents textes. Donc, il y a ce premier
élément culturel qui est à prendre en compte.
Ensuite, il y a une diffusion moindre,
mais qui est en train de se résorber, de cette information au sein des
organismes publics. Bien, aujourd'hui, les organismes publics, par exemple, se
mettent à réaliser à grande vitesse les cartographies des risques qui sont
requises par la loi Sapin II, alors qu'elles étaient assez en retard sur
le sujet, réalisent des audits, mettent en place des dispositifs d'alertes
internes. Donc, ça, c'est aujourd'hui... c'est aujourd'hui quelque chose qui
est... qui est assez... Alors, on a... on a, effectivement, l'Union européenne qui
réfléchit sur un comité d'éthique, mais on a aussi... on a aussi ces réflexions
de comité d'éthique au sein des forces armées. Donc, le sujet... voyez-vous, le
sujet... le sujet se développe...
Le Président (M. Simard) : Très
bien.
M. Seassaud (Eric) : ...avec
une maturité différente, il est clair...
Le Président (M. Simard) : Très
bien.
M. Seassaud (Eric) : ...et un
temps d'avance plus... plus manifeste pour les entreprises...
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M. Seassaud (Eric) : ...notamment
lié à l'apparition de la loi Sapin II...
Le Président (M. Simard) :
Merci.
M. Seassaud (Eric) : ...pardon,
au UKBA, pardonnez-moi.
Le Président (M. Simard) : Alors,
j'agis en gardien du temps. Ce que vous dites est très intéressant, mais je
dois maintenant céder la parole à ma collègue, qui, elle-même, a fréquenté très
longtemps les milieux universitaires, pour y avoir notamment enseigné, ma
collègue de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Alors, bienvenue parmi nous à distance et merci beaucoup pour votre mémoire
fort détaillé.
J'aimerais aller à la page 11 de
votre mémoire. Vous parlez du contexte français, vous parlez de «...tout
d'abord la difficulté de l'administration de la preuve. Alors qu'un
renversement de la charge de preuve à l'encontre de l'entreprise fut initialement
envisagé, un régime de partage de la charge de la preuve lui fut finalement
préféré, à l'instar de l'évolution du texte sur le harcèlement moral».
Pouvez-vous nous expliquer, s'il vous
plaît, en ce moment, là, chez vous, comment... à qui appartient le fardeau de
preuve, comment qu'on peut aussi apprendre de comment vous avez évolué entre le
avant et le maintenant?
M. Seassaud (Eric) : Oui,
bien sûr. Alors, en fait, la charge de la preuve, c'est un sujet qui a été... qui
a été évoqué parce qu'on s'était rendu compte qu'il était très difficile...
c'est la question de déséquilibre... c'est la formule de Lacordaire entre le
faible et le fort, c'est... c'est la liberté qui opprime et la loi qui
affranchit. C'est un peu cette idée-là qui a... qui a présidé aux discussions
sur le renversement de la charge de la preuve.
Donc, on s'était dit... bien, enfin,
certains... certains commentateurs, certains... certains, comment dirais-je,
éléments en doctrine et puis des politiques aussi s'étaient dit qu'en fait on
devrait plutôt demander à l'entreprise de faire la preuve qu'elle a mis en
place les éléments nécessaires plutôt que de demander au lanceur d'alerte de le
faire. C'est un débat qu'on avait eu en matière de harcèlement moral. Pourquoi?
Parce que le harcèlement moral est assez difficile à prouver pour la personne
qui est concernée, parce qu'elle nécessite de la répétition, parce qu'elle
nécessite un faisceau d'indices, parce que rapporter la preuve de tout ça, ce n'est
pas évident et parce qu'aussi il y a un élément de fragilité psychologique de
la personne qui est victime du harcèlement <moral...
M. Seassaud (Eric) :
...n'est
pas évident et parce qu'aussi il y a un élément de fragilité psychologique de
la personne qui est victime du harcèlement >moral. Mais, ensuite, le
législateur a compris ce besoin de... comment dirais-je, de rééquilibrer les
rapports de force dans l'administration de la preuve mais a écarté le
renversement, c'est-à-dire, à l'entreprise de montrer, au fond, qu'elle n'était
pas coupable, pour dire : Bien, nous allons avoir un système de
collaboration, de partage de la preuve où chacune des parties sera invitée à
apporter les éléments de preuve de faits. C'est... C'est dans ce contexte que
cette évolution est intervenue.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Permettez-moi de prêter ma voix à la députée de Vaudreuil, qui, en fait, avait
demandé votre présence, mais elle a un petit souci de santé, donc elle ne peut
pas être présente aujourd'hui. Alors, j'ai les questions de la députée de
Vaudreuil.
Vous permettez aux syndicats d'agir à
titre de facilitateurs. Y a-t-il des mesures à considérer?
M. Seassaud (Eric) : Alors,
c'est déjà... c'est une... c'est un compromis. Le facilitateur, c'est un
compromis, parce que l'idée, au départ, c'était de permettre aux syndicats, aux
ONG d'agir comme des lanceurs d'alerte. Pourquoi? Parce que, bien, dans
certains cas, c'étaient eux qui lançaient les alertes, en réalité. En tout cas,
c'étaient eux qui avaient la capacité de. On avait un deuxième élément, c'est
que, dans certaines situations particulières, comme je l'ai indiqué tout à
l'heure, ou quelles que soient les mesures de protection mises en place, le
fait de révéler des choses, pour quelqu'un qui est en interne dans
l'entreprise, va forcément vous situer, donc on arrive à savoir d'où ça vient. Le
fait de passer par un tiers, un syndicat, une organisation non gouvernementale,
c'est quand même un élément protecteur.
Alors, le... finalement, le législateur
n'a pas... C'est... C'est une des dispositions qui a fait l'objet... de
réactions les plus... les plus épidermiques et les plus... les plus hostiles
parmi les gens qui n'étaient pas en faveur de ce texte. Et le législateur a eu
cette solution équilibrée, qui consistait à dire : Bon, je ne vous donne
pas le qualificatif de lanceurs d'alerte, mais je vous donne le qualificatif de
facilitateurs. Et, en réalité, c'est sémantique, mais, en fait, beaucoup de
choses sont sémantiques, comme le choix du terme «lanceur d'alerte» plutôt que
«divulgateur», «dénonciateur», parce que les termes ont une connotation et
renvoient à une perception dans l'inconscient collectif. Et le fait d'avoir
parlé de facilitateur, ça a désamorcé... du moins, ça a désamorcé certaines...
certaines postures de principe sur le fait qu'un syndicat, une ONG ne pouvait
pas être... être lanceur d'alerte, parce qu'il n'était pas, lui, le témoin des
faits, ça lui était rapporté, mais le législateur a donné le même bénéfice de
protection à ces organisations... pas nécessairement besoin, mais, en tout cas,
il l'a... il l'a accordé.
Et, par la même occasion, il a... il a apporté,
pour être cohérent, une petite modification. Sous l'empire de la loi Sapin II
initiale, en 2016, on exigeait des lanceurs d'alerte qu'ils fussent les témoins
des faits qu'ils rapportaient. Ce n'est plus le cas aujourd'hui, ce qui permet,
par exemple, à un collègue qui voit la situation d'un de ses collègues se
détériorer, qui le sent en situation difficile, parfois pouvant craindre pour
sa santé et même... et même sa vie, eh bien, d'aller saisir les... le
dispositif compétent pour dire : Attention, on a un élément de fragilité,
on a quelqu'un en situation de grande fragilité, on a un sujet, et d'avoir le
bénéfice du statut protecteur des lanceurs d'alerte.
• (16 heures) •
Mme Rizqy : Donc, vous, votre
loi, présentement, en France, elle couvre non seulement le secteur public, mais
aussi le secteur privé. Pourquoi vous êtes venus à cette conclusion d'aussi
donner le bénéfice au secteur privé?
M. Seassaud (Eric) : C'est-à-dire,
le bénéfice?
Mme Rizqy : De la protection
des sonneurs d'alerte. Parce que, nous, en ce moment, on vise le public.
M. Seassaud (Eric) : Bien,
parce que le lanceur d'alerte, peu importe qu'il travaille ou qu'il soit une
partie prenante du secteur public ou du secteur privé... Si vous voulez, quand
vous voyez... quand une personne est témoin d'un acte de corruption, peu
importe qu'il soit dans le secteur public ou dans le secteur privé, on doit le
traiter de manière... il doit être protégé de la même manière. Ça n'est pas
parce que vous êtes agent public que vous êtes... vous avez peut-être un statut
de la fonction publique qui vous protège contre les licenciements, mais ça ne
vous protège pas contre le harcèlement moral, ça ne vous protège pas contre la
mise au placard, ça ne vous protège pas contre la destruction morale, qui peut...
qui peut, comment dirais-je, être la conséquence de certaines attitudes
hostiles et d'exclusion. Vous voyez, on... oui, je... on a... on peut avoir
cette protection... cette protection contre le licenciement attachée au statut
de la fonction publique en France...
16 h (version révisée)
M. Seassaud (Eric) : ...et d'exclusion.
Voyez, on... Oui, je... on a ce... on peut avoir cette protection, cette
protection contre le licenciement attachée au statut de la fonction publique en
France, mais ça ne fait pas tout. Et donc l'idée du législateur, ça a été
vraiment, effectivement, de traiter... s'agissant encore une fois de la loi
Sapin II. Il en va différemment de la loi sur le devoir de vigilance, mais,
s'agissant de la loi de... de Sapin II, d'avoir une couverture vraiment
large qui touche à la fois le secteur public et le secteur privé et une
protection égale que l'on soit un lanceur d'alerte dans le secteur public ou
dans le secteur privé.
Mme Rizqy : Aux États-Unis,
par exemple, lorsqu'il y a une dénonciation qui est faite et qui ramène de l'argent
dans le Trésor, le dénonciateur obtient 30 %. Est-ce que c'est quelque
chose qui existe en France?
M. Seassaud (Eric) : Alors,
non, et j'allais vous dire : Malheureusement non, qui est une opinion
personnelle. Pourquoi? J'ai complètement changé d'avis, j'ai... sur ce sujet.
Notre culture juridique, comme la culture juridique anglaise... En Angleterre,
on vous demande d'être... d'agir dans l'intérêt public. En France, on...
comment dirais-je, on a cette notion aussi d'action dans l'intérêt général, et
c'est ancré dans notre... dans nos traditions juridiques. On ne fait pas ça
pour gagner de l'argent. Mais ce n'est pas le but, en fait, en réalité. Ça,
cette fraction qui est allouée à un lanceur d'alerte aux États-Unis... Et je
préfère ce terme de lanceur d'alerte parce que, précisément, ce terme de
lanceur d'alerte renvoie à la défense de l'intérêt général et pas à la...
comment dirais-je, à la connotation judéo-chrétienne que l'on peut avoir, nous,
avec... on parle de ça, on pense... on pense à la figure de Judas, en France on
pense à Vichy, à la collaboration. Enfin, voyez, ça... Le terme, il est... il
est, en fait, très, très, très connoté. Donc, c'est pour ça que, nous, notre
premier débat, notre premier... notre premier enjeu, il a été sémantique, en
réalité. Et pourquoi... pourquoi... pourquoi cette protection? Bien, parce que,
quand vous êtes dans une situation...
Je prends l'exemple, moi, j'avais écouté
Stéphanie Gibaud, à la Sorbonne, en 2016, quand elle parlait du scandale de l'UBS,
eh bien, voilà un lanceur d'alerte qui a... qui a agi au nom de l'intérêt
général qui se trouvait dans une situation extrêmement précaire. Et je me dis
que, dans des situations qui sont aussi graves... Évidemment, on parle de l'epsilon,
hein, encore une fois, mais c'est sur l'epsilon qu'on juge de la force, en
réalité, d'un dispositif aussi, pas seulement, mais aussi. Si vous avez... Si
vous allouez une somme d'argent comme ça à un lanceur d'alerte, vous le mettez
à l'abri jusqu'à la fin de ses jours et donc vous compensez un peu la mort
sociale à laquelle il s'expose. Parce que, quand vous réalisez des... quand
vous lancez des alertes d'un niveau pareil, eh bien, ensuite, il est très
difficile de... en fait, de retrouver à exercer une activité professionnelle
dans le domaine de ses compétences. C'est une réalité. Et donc cette amende-là,
ça permet de... eh bien, en disant : Bon, bien, écoutez, vous vous êtes
sacrifié au nom de l'intérêt général, voilà une... voilà une compensation pour
les conséquences que vous subissez du fait de votre action en faveur de l'intérêt
général. Ça, c'est... c'est vraiment, moi, une opinion que j'ai... que j'ai
acquise en ayant écouté cette personne. J'avais une vision très classique
avant... une tradition en ligne avec ma tradition juridique. Quand je l'ai
entendue, je me suis dit : Ah oui! Mais, effectivement, qu'est-ce qu'on
fait pour des gens comme elle?
Mme Rizqy : ...votre
réflexion, elle a évolué? Je me posais la question. Si on prend, justement, l'exemple
du scandale UBS, dans ce cas-là, M. Bradley Birkenfeld avait quand même fait 40 mois
de prison, parce qu'il avait participé à l'infraction de fraude fiscale, et par
la suite avait reçu son chèque en sortant de prison, une semaine après avoir
sorti, était allé encaisser un peu plus de 100 millions de dollars
parce qu'il a quand même fait revenir dans les coffres du Trésor des milliards
de dollars. Est-ce que la personne qui participe quand même à une infraction,
même s'il devient sonneur d'alerte, devrait quand même faire face, un peu comme
dans l'affaire UBS, ou devrait avoir une amnistie?
M. Seassaud (Eric) : Bien... Bien
non, c'est... Là, pour le coup, c'est vraiment du terrain de l'opinion personnelle.
Moi, je pense que... Encore une fois, j'en reviens... j'en reviens sur le
fondement des... enfin, sur les principes. Quand vous lancez une alerte, vous
vous exposez. Quand vous commettez des actes répréhensibles, eh bien, ensuite,
vous assumez les conséquences de vos actes répréhensibles. On ne peut pas
mettre dans une... C'est une opinion personnelle, mais qui est fondée sur une
situation juridique. On ne traite pas... on n'a pas... on n'est pas dans une
situation juridique identique selon qu'on lance une alerte pour dénoncer des
faits que l'on a... que l'on a observés <soi-même...
M. Seassaud (Eric) :
...servir
>soi-même et des ordres qu'on a refusés d'exécuter soi-même parce qu'ils
étaient illégaux à... avec d'autres situations où on a soi-même participé à la
commission de tels faits. Moi, je crois que, s'agissant de deniers publics, il
faut réserver les deniers publics à la compensation des gens qui...
Le Président (M. Simard) : Très
bien.
M. Seassaud (Eric) : ...voilà,
quiont défendu l'intérêt général. C'est une opinion évidemment
personnelle.
Mme Rizqy : ...merci.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Alors, nous poursuivons, cher professeur. Je cède maintenant la parole au
député de Sherbrooke, qui dispose de quatre minutes.
Mme Labrie : Merci, M. le
Président. D'abord, je dois dire à quel point je trouve ça intéressant que ce
soit si évident pour vous qu'il faille couvrir le secteur privé avec la loi sur
les lanceurs d'alerte. Ça n'a pas été évident au Québec lors de la précédente
loi, ce l'est pour ma part. En ce moment, j'espère qu'on pourra s'inspirer de
ce que vous avez fait. D'ailleurs, il y a d'autres éléments très inspirants de
la façon dont vous fonctionnez, notamment la question des facilitateurs. Moi,
j'aimerais vous demander : Est-ce que la majorité des divulgations qui
sont faites en France sont... passe par des facilitateurs ou pas? Est-ce que
vous avez un portrait de la situation?
M. Seassaud (Eric) : C'est
très récent. Donc, c'est la loi Waserman, elle date de la fin de l'année
dernière. Donc, on n'a pas aujourd'hui de visibilité pour... pour vous
répondre. Je ne saurais pas vous dire si on utilise les facilitateurs ou pas.
Mais je pense que, d'ici un an, je pourrais... si nous avons une
discussion similaire, je pense que je pourrais probablement vous répondre oui.
Pourquoi? Parce que, dans un certain nombre de cas, beaucoup de personnes vous
disent : Moi, je ne prendrai pas le risque parce que je n'ai pas confiance
dans le système, parce que c'est un système interne à l'entreprise ou à
l'organisation et que cette personne est rattachée à untel, untel. Et donc je
ne suis pas sûr que mon anonymat sera respecté. En revanche, si je peux aller
saisir une ONG, un syndicat et leur dire : Voilà ce qui se passe chez moi,
bien, ça, c'est complètement différent. Donc, je crois que c'est un des
éléments clés pour moi du renforcement du statut de lanceur d'alerte. Donc, je
crois que, d'ici un an, je pense que je pourrais vous répondre oui.
Mme Labrie : Je conçois bien
pourquoi. J'ai le goût de vous demander... Là, l'adoption de cette loi-là,
donc, est toute récente, vous n'en connaissez pas encore les retombées, mais on
en devine quelques-unes. De toute évidence, il y a un niveau d'avancement sur
ce dossier-là, plus important en France qu'ici, mais j'ai quand même le goût de
vous demander, vous, pour aller plus loin par rapport à toutes les dispositions
que vous avez déjà dans vos lois en France pour protéger les lanceurs d'alerte
et faciliter les divulgations : Qu'est-ce que vous auriez souhaité de plus
des lois qui existent en France actuellement? Comment en France vous pourriez
aller plus loin, disons, si on voulait s'en inspirer aussi?
• (16 h 10) •
M. Seassaud (Eric) : Alors,
je dirais trois choses. La première, c'est aligner la loi sur le devoir de
vigilance, sur la loi Sapin II, pour les raisons dont j'ai parlé tout à
l'heure. Il y a des incohérences de champ, de seuils, de protection. Donc, ça, il
faudrait qu'on mette en cohérence les deux textes.
Le deuxième, c'est que je crois qu'il faut...
pour les cas significatifs, il faut qu'on soit en mesure d'allouer une fraction
des amendes prononcées aux lanceurs d'alerte qui vont se retrouver dans une
situation de mort sociale. On ne peut pas durablement demander à quelqu'un de
prendre ses responsabilités et, ensuite, de lui dire : Bien, écoutez, vous
avez agi au nom de l'intérêt général, vous avez la reconnaissance de la nation
et vous pouvez, comme Cincinnatus, retourner à vos champs le coeur heureux de
la vertu qui vous a animé. Sauf que Cincinnatus avait encore des champs à
labourer et le lanceur d'alerte, eh bien, dans ce type de situation, n'a plus
rien à labourer parce qu'il n'a plus rien du tout.
Donc, pour des gens qui ont... qui sont en
charge, qui ont une famille, des enfants, c'est quand même une décision qui est
lourde de sens. Et moi, je pense à l'aspect humain. Je crois que, pour ces gens-là,
il faut qu'on les mette à l'abri du besoin, parce que leur sanction, c'est la
mort sociale et il faut qu'on les préserve. Ça, je le crois, mais fortement. Et
enfin...
Le Président (M. Simard) : En
conclusion.
M. Seassaud (Eric) : ...je
renforcerais le statut... En conclusion, je renforcerais le statut de
l'indépendance des dispositifs de lancement d'alerte, avec notamment un
rattachement au conseil d'administration des... du dispositif, que ce soit
quelque chose qui ne dépende pas de l'exécutif, mais du conseil d'administration.
Le Président (M. Simard) : Très
bien. Alors, cher professeur, cela met un terme à nos échanges, mais je voulais
<d'abord...
Le Président (M. Simard) :
...je
voulais >d'abord vous dire merci, notamment pour votre oeuvre pédagogique.
Vous m'avez appris aujourd'hui un nouveau mot, le mot «privatiste». Ce n'est
pas un terme qui est très, très courant de ce côté-ci de l'Atlantique. Alors,
merci d'avoir enrichi comme vous l'avez fait à mon vocabulaire. Alors, vous
étiez en direct de la Sorbonne, Paris 1. Merci beaucoup d'avoir participé
à nos travaux.
M. Seassaud (Eric) : Merci
beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Au
plaisir!
Sur ce, nous allons suspendre
momentanément. À nouveau, merci.
(Suspension de la séance à 16 h 12)
(Reprise à 16 h 14)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers amis, nous sommes en mesure de poursuivre nos travaux, et nous sommes en
compagnie de représentants de la Centrale des syndicats du Québec. Nous sommes
par visioconférence.
Messieurs, bienvenue parmi nous. Merci
d'avoir accepté notre invitation. Auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il vous
plaît, de vous présenter?
M. Beauchemin (Mario) : Oui,
certainement. Je m'appelle Mario Beauchemin, je suis troisième vice-président à
la Centrale des syndicats du Québec et je suis accompagné de Marc Daoud, qui
est conseiller syndical et juridique à la centrale aussi.
Le Président (M. Simard) : Bienvenue
parmi nous, messieurs, et vous disposez de 10 minutes pour faire votre
présentation.
M. Beauchemin (Mario) : Parfait.
Alors, merci beaucoup pour cette invitation. Ça me fait vraiment plaisir d'être
ici. Notre présentation comporte trois parties. Après une brève
introduction, on va s'attarder plus particulièrement aux principaux constats
contenus dans le rapport pour ensuite commenter les trois recommandations
qu'on y retrouve et finalement terminer, ce qui fait une quatrième partie
finalement, avec une brève conclusion.
D'abord, vous dire que, la CSQ, ça fait
longtemps que la CSQ se préoccupe de la protection des lanceurs d'alerte. Ça
fait plusieurs années. D'ailleurs, nous avions déposé un mémoire à la Commission
des finances publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi n° 87 et
nous avions été aussi entendus en commission parlementaire en février 2016.
Et, à cette occasion, nous avions proposé 10 recommandations qui
critiquaient, entre autres choses, et je pense que c'est important de le
rappeler, l'exclusion de la loi du divulgation portant uniquement sur des
conditions de travail ou qui mettait en cause le bien-fondé des politiques et
objectifs du gouvernement. Pour nous, il est important de laisser au Protecteur
du citoyen une marge de manoeuvre afin de trancher dans ces questions-là. Bref,
pour la CSQ, à ce moment-là, il s'agissait d'un pas dans la bonne direction
dans la mesure où le Protecteur du citoyen pouvait bénéficier de ressources
humaines et financières suffisantes.
J'en arrive maintenant aux principaux
constats. On en a retenu cinq. On a remarqué que 31 organismes sur
360... 354, pardon, n'avaient pas désigné de responsable de suivi et qu'il y
avait eu de nombreux changements en ce qui concerne les responsables du suivi
en la question. Troisième constat qu'on... qui a retenu notre attention, c'est
que le mandat de la personne responsable du suivi des divulgations a été
souvent donné à des hauts dirigeants ou à des hautes dirigeantes, ce qui peut
avoir, et c'est <mentionné...
M. Beauchemin (Mario) :
...et
c'est >mentionné dans le rapport, là, pour conséquence de remettre en
cause l'indépendance et l'impartialité du traitement des plaintes et peut-être
aussi de décourager la divulgation interne. Aussi, le rapport... Dans le rapport,
on constate que les responsables n'ont pas eu vraiment l'occasion de bonifier
leur expertise ou de maîtriser leur rôle adéquatement. Enfin, ce qui est aussi
assez surprenant, c'est qu'on constate un faible volume de divulgation.
En ce qui concerne maintenant les
recommandations, la première recommandation, qui donne le mandat exclusif au
Protecteur du citoyen de recevoir les divulgations, à la CSQ, nous sommes
d'accord avec cette recommandation. Mais on tient quand même à souligner
l'importance que les rôles et responsabilités résiduaires des responsables du
suivi soient nommés dans la loi. Comme le suggère d'ailleurs le Protecteur du
citoyen, elles ou ils auraient les responsabilités suivantes, et je vais les
lire : d'une part, renseigner les membres du personnel des organismes
publics sur la Loi facilitant la divulgation et réaliser des activités
d'information et de sensibilisation; encourager et développer une culture
d'ouverture au sein des organismes publics relativement à la divulgation d'actes
répréhensibles; informer et assister les divulgateurs, notamment quant à la
procédure à suivre, aux protections prévues à la loi ainsi qu'à leurs limites,
diriger le traitement des dénonciations d'actes répréhensibles vers le
Protecteur du citoyen ou vers tout autre organisme compétent; et enfin agir
comme agent de liaison en cas de vérification ou d'enquête du Protecteur du
citoyen ou d'un autre organisme compétent. Ça, c'est pour la première
recommandation.
On a un petit peu plus de difficulté avec la
deuxième recommandation, là, qui veut accroître l'efficience de la loi en
ajoutant le qualificatif «grave» à l'acte répréhensible. Pas vraiment en accord
avec cet ajout. Pour nous, ça restreint la portée de la loi. Comme c'est
mentionné dans le rapport et dans les constats, de toute façon, le nombre de
divulgations est faible, ça pourrait peut-être restreindre encore davantage le
nombre de divulgations. Et on croit que, dans le doute, la définition doit
quand même amener une personne à faire la divulgation, et, dans ce cas-ci,
pourquoi ne pas laisser la marge de manoeuvre au Protecteur du citoyen?
En ce qui concerne la troisième
recommandation maintenant, c'est-à-dire la création d'un comité tripartite
comprenant le ministère du Travail et de l'Emploi et de la Solidarité sociale,
le Protecteur du citoyen et le Secrétariat du Conseil du... du Trésor, pardon,
à la CSQ, nous sommes en accord avec cette recommandation, mais on tient quand
même à ajouter qu'il est important d'impliquer des personnes salariées et leurs
associations lorsqu'il est question tout particulièrement d'améliorer le régime
de protection contre les représailles. On pense que, là, là, il pourrait y
avoir une bonification de cette recommandation.
Enfin, ce n'est pas contenu dans le rapport,
mais je pense que... et mon collègue me corrigera si je me trompe, mais c'était
dans... suggéré par le Protecteur du citoyen, on pense qu'il est important
d'améliorer aussi la gestion des plaintes pour pratique interdite à la CNESST.
En conclusion maintenant, bien, merci
encore pour cette invitation. Et on doit vous dire que la CSQ accueillera donc
favorablement toute modification à venir qui permettra de faciliter les
divulgations et non pas de les restreindre, ainsi que celles permettant de
consolider le régime de protection contre les représailles. On demeurera donc
présents et prêts à collaborer aux futurs travaux, comités et consultations qui
visent à atteindre ces objectifs. Merci.
Le Président (M. Simard) : Alors,
merci à vous. Nous entreprenons notre période d'échange. Je cède la parole au
député de Maskinongé, qui dispose de 16 min 30 s
• (16 h 20) •
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Merci à vous deux pour votre présence puis de la participation à nos
travaux. C'est très, très, très important et très apprécié.
Ma première question, puis je l'ai posée à
un autre groupe tantôt, est plus qualitative. Vous représentez quand même
beaucoup de monde, c'est 200 000 personnes, c'est sûr que vous
entendez beaucoup de choses, vous avez entendu beaucoup de choses sur le
processus ou la loi qui a été mise en place. C'est quoi, les commentaires qui
reviennent le plus souvent sur le processus, que vos membres font face, là,
quand qu'ils veulent procéder à une divulgation?
M. Beauchemin (Mario) : Est-ce
que tu veux y aller, Marc, ou je commence?
Le Président (M. Simard) : ...
M. Daoud (Marc) : J'espère
qu'il n'y a pas d'écho?
Le Président (M. Simard) : Non,
il n'y a pas...
M. Daoud (Marc) : OK. En
termes de... Bien, il y a beaucoup d'interrogations sur la portée de la loi.
C'est sûr que les gens, dans les dossiers... Puis, évidemment, ce n'est pas une
réponse exhaustive, je n'ai pas connaissance de toutes... de chaque... de tous
les dossiers que chacun des syndicats de la CSQ aurait pu avoir, mais il y a
beaucoup de... Souvent, on est beaucoup interpelés à informer ou à répondre aux
diverses interrogations sur comment faire... comment faire une divulgation ou
est-ce que c'est opportun de la faire. Il y a beaucoup de craintes, il y a
beaucoup de craintes. Les gens <craignent...
M. Daoud (Marc) :
...Les
gens >craignent des représailles. Ça, on a souvent entendu ça, que ce
soient des enseignantes, ou des professionnels, ou même au niveau des CPE, même
s'il n'y a pas eu... à ma connaissance, il n'y a pas eu de signalement ou de
divulgation qui a été faite. Les gens craignent d'être... ou ne se sentent pas en...
assez en confiance pour faire une divulgation. Donc, la menace de la représaille
est toujours là, même si la loi, elle est là, même si la loi garantit une forme
de protection. C'est comme si les gens n'avaient pas assez confiance ou ne... craignaient
quand même des représailles qui étaient peut-être plus subtiles, ou que leur
nom soit divulgué, ou que la confidentialité ne soit pas respectée. Est-ce que
c'est fondé ou pas, difficile à dire, mais c'est quelque chose qui revient
souvent, quand même.
M. Beauchemin (Mario) : Puis
j'ajouterais peut-être, pour compléter un peu, que, souvent, il y a comme une
confrontation entre ce désir de divulgation et aussi le devoir de loyauté
envers l'employeur, qui occupe une place importante, peut-être, là, dans l'idée
de se restreindre à vouloir faire des divulgations aussi.
M. Allaire : Ça se... ça peut
se traduire... Là, j'entends ce que vous dites, là, puis ça me dit qu'il y a
peut-être un effort supplémentaire à faire au niveau de l'information qu'on
transmet, là, à l'ensemble des fonctionnaires qui travaillent dans notre
secteur. C'est ce que je comprends. Puis, en même temps, tout ce qu'on peut
mettre en place pour renforcir la confidentialité qui... de ce que j'ai
entendu, là, qui est un commentaire qui revient beaucoup, là, c'est-à-dire
qu'ils ont une certaine crainte, là, que, justement, cet élément soit un peu...
soit rompu, en quelque sorte, là. Ça fait que je... c'est... Ma lecture, elle
est bonne?
Une voix : Tout à fait.
M. Allaire : Et justement, au
niveau de la confidentialité, de quelle façon, selon votre point de vue, qu'on
peut... qu'on peut la renforcir?
M. Daoud (Marc) : Je vais y
aller, Mario?
M. Beauchemin (Mario) : Oui,
vas-y. C'est une très bonne question.
M. Daoud (Marc) : Oui, puis,
en fait, la première recommandation, la recommandation qui consiste aussi à
laisser ou à donner... ou, en fait, à donner l'exclusivité au Protecteur du
citoyen de recevoir les divulgations aussi, concentrer son expertise,
évidemment, dans notre secteur, dans nos secteurs, que ce soient les centres de
services scolaires, les commissions scolaires au nord, les CISSS, etc., c'est
probablement quelque chose qui serait bienvenu puis qui renforcerait aussi la
confiance du monde de savoir qu'il y a une personne qui a vraiment... qui
possède une expertise, mais qui possède aussi... Je veux dire, la confiance en...
au Protecteur du citoyen, elle est quand même là, le monde savent que, s'ils
font une dénonciation, une divulgation auprès du protecteur, la confidentialité
va être garantie. C'est quelque chose qui va clairement augmenter la confiance
de nos membres.
M. Beauchemin (Mario) : Et
non pas donner le mandat à des hauts dirigeants, par exemple.
M. Allaire : Et, à partir du
moment où il y a une divulgation qui est faite, c'est sûr que la personne qui
l'a faite a toujours une certaine crainte d'avoir des représailles. Jusqu'à
quel point qu'on peut mettre en place des balises qui sont... qui vont être
facilitantes, dans un contexte où on souhaite qu'il n'y en ait pas,
naturellement, des représailles? Donc, de votre point de vue, vous voyez ça
comment pour qu'on puisse limiter les représailles?
M. Beauchemin (Mario) : Tu
peux y aller, Marc?
M. Daoud (Marc) : Oui. Bien,
en fait, c'est une question qui est toujours... toujours d'actualité. C'est
quelque chose, la protection contre les représailles, que ce soit dans le Code
du travail, dans la gestion ou les affaires courantes en milieu de travail,
c'est toujours là. C'est toujours quelque chose qu'on doit regarder et chercher
à améliorer, c'est sûr. On a regardé les recommandations du rapport. Le
Protecteur du citoyen, c'est toujours... ça semble être une bonne piste,
vraiment, de réfléchir avec la commission tripartite aussi, qui serait mise en
place aussi, des consultations éventuelles qui seraient faites aussi avec les
syndicats, le cas échéant, ou les autres organisations aussi, à savoir comment
l'améliorer, mais... Mais aussi, puis ça, j'essaie de retrouver la mention qui
avait été faite dans le rapport, c'est que... c'est que la CNESST ne semblait
pas aussi être assez bien outillée pour répondre adéquatement aux plaintes de
représailles. Il y avait quelques dossiers qui semblaient... où est-ce que les
gens ont été mal conseillés ou que... même, que leurs plaintes avaient été
refusées pour motif qu'ils étaient syndiqués. Donc, évidemment, tout le côté de
s'assurer aussi que les organismes administratifs qui sont liés ou qui peuvent
être liés ou mis en cause dans ces dossiers-là puissent avoir tous les outils
nécessaires aussi pour répondre adéquatement.
M. Allaire : Ça va. M. le
Président, je pense que mon collègue souhaite continuer.
Le Président (M. Simard) : Oui.
Le député de René-Lévesque, oui, qui dispose d'environ <10 minutes...
Le Président (M. Simard) :
...d'environ
>10 minutes.
M. Montigny : Alors, bonjour.
Yves Montigny, député de René-Lévesque. J'ai été président d'un syndicat CSQ
des professionnels de l'éducation en Haute-Côte-Nord. Je vous amène sur un
élément particulier qui est en lien avec le devoir de loyauté envers
l'employeur et l'information, là, qu'une personne pourrait transmettre,
pourrait vouloir signifier dans le contexte de ce qui est proposé aujourd'hui,
là.
Vous avez parlé de cette crainte-là ou de
cette réflexion-là, qui amène l'individu... ou un doute entre son devoir de
loyauté envers l'employeur, mais qui pourrait se demander si... En fait, ils le
mettent en opposition avec son vouloir de le transmettre pour assurer, je
dirais, le bien de la société en général, ou le bien des enfants, ou le bien
de... des personnes avec qui... avec qui il travaille. J'aimerais ça vous
entendre là-dessus parce que j'ai l'impression que... Vous avez dit : si
on a un guichet unique Protecteur du citoyen, c'est pas mal mieux. Alors, j'ai
envie de vous entendre là-dessus. Parce que je pense que ce qu'on propose
pourrait régler ça, si ce n'est pas le cas, j'aimerais ça vous entendre.
Pourquoi est-ce qu'on ne proposerait pas tout ça? Parce que mon impression,
moi, c'est qu'on allait régler ça avec ce qu'on propose.
Le Président (M. Simard) : Alors,
messieurs, à vous la parole.
M. Beauchemin (Mario) : Oui.
Marc?
M. Daoud (Marc) : Bien, en
fait, on est d'accord que c'est un pas dans la bonne direction. Et c'est pour
ça que, dans la proposition qui est faite, non seulement on est d'accord avec
la proposition, mais il faudrait aussi, quant à nous, la bonifier. Parce que ce
n'est pas juste une question de donner une expertise puis une apparence... une
apparence forte de confiance envers le Protecteur du citoyen, mais c'est aussi
au niveau des responsables du suivi des divulgations, qui resteraient dans les...
dans les organismes, que ces personnes-là soient... que leur rôle soit défini
dans la loi, qu'on comprenne très bien aussi les activités qu'elles font, la
sensibilisation qu'elles peuvent faire, le lien qu'elles peuvent faire aussi
entre... entre une enquête, par exemple, du Protecteur du citoyen avec leur
organisme et de donner... c'est ça, de donner l'information nécessaire, la
formation nécessaire au personnel des divers organismes.
Donc là, la question demeure aussi sur les
craintes au niveau de l'obligation de loyauté. Est-ce qu'il faudrait aller
jusqu'à la restreindre ou dire que l'obligation de loyauté, dans la loi, ne...
elle peut être mise de côté? Peut-être que c'est une option à envisager, à
étudier, mais, clairement, c'est un pas dans la bonne direction et ça risque,
effectivement, d'améliorer la confiance des gens. Puis de ne pas craindre non
plus qu'ils doivent arbitrer leur devoir de loyauté avec... avec le sentiment
de respecter les... des objectifs de la société ou les biens ou les deniers
publics, etc., tout dépendant de la divulgation qui est faite, là.
• (16 h 30) •
M. Montigny : J'aimerais vous
poser une autre question. Je comprends, là, les nuances que vous avez
apportées, mais j'aimerais ça vous poser une autre question sur la notion de «c'est
grave ou ce n'est pas grave». Qu'est-ce qui, pour vous... Qu'est-ce que ça veut
dire, pour vous, quelque chose qui n'est pas grave?
M. Beauchemin (Mario) : Oui.
Je vais y aller. Bien, juste revenir sur votre première question, là, pour
faire suite à ce que mon collègue a dit, peut-être que le Protecteur du citoyen
pourrait aussi se pencher sur la notion de devoir de loyauté puis peut-être
l'encadrer, la baliser davantage pour en restreindre son application, de son
utilisation. Ça pourrait peut-être aider les gens davantage à faire des
divulgations.
Qu'est-ce qui est grave, qu'est-ce qui
n'est pas grave? On s'est posé exactement la même question. Est-ce que c'est
grave, si une salariée dénonce les conditions de travail dans son CPE? Est-ce
que c'est grave, si une préposée aux bénéficiaires dénonce le fait que ses
patients n'ont pas eu deux bains par jour? C'est une notion qui est très,
très floue, et c'est pour ça que nous, on croit que cette notion-là vient
restreindre énormément le pouvoir de divulgation et qu'il faudrait laisser le
Protecteur du citoyen trancher.
M. Montigny : Mais, en fait,
une sous-question, juste vous entendre sur le fait que... qu'est-ce que
j'aurais comme intérêt si j'étais témoin de quelque chose qui n'est pas grave...
16 h 30 (version révisée)
M. Montigny : ...témoin de
quelque chose qui n'est pas grave, à vouloir le dénoncer au Protecteur du
citoyen, si je pense que ce n'est pas grave?
M. Daoud (Marc) : Tu permets,
Mario?
M. Beauchemin (Mario) : Oui,
bien sûr.
M. Daoud (Marc) : Bien, en
fait, un des constats du rapport, c'est qu'il n'y a pas tant de divulgations
que ça. Donc, on sait que les gens n'utilisent pas la loi pour se venger, ou
faire de la quérulence, ou embêter un employeur. Donc, l'objectif, ce n'est
pas... de notre point de vue, il n'y a pas une nécessité d'aller restreindre
encore plus la définition d'un acte répréhensible ou la sous-définition d'un
acte répréhensible.
On ne veut pas non plus que le mot «grave»
que maintenant, évidemment... Puis j'ai même regardé au niveau de la
jurisprudence, essayé de définir le mot «grave», qu'est-ce que ça voulait dire.
C'est très... ça va dépendre de beaucoup de circonstances, puis ça pourrait
restreindre indûment la définition, et ça pourrait même faire peur à des gens,
où est-ce que les gens pensent qu'ils sont en présence d'un acte qui mérite d'être
dénoncé, mais, en voyant le mot «grave», est-ce que c'est une atteinte grave à
une loi du Québec? Puis là ils disent : OK, bien, je ne prendrai pas de
chance, je ne ferai pas ma dénonciation, parce que le Protecteur du citoyen va
tout simplement la rejeter. Donc, on ne veut pas se retrouver dans cette
situation-là.
Sachant que ce n'est pas un problème à l'heure
actuelle, laissons les gens faire leurs divulgations, et le Protecteur du
citoyen va être le mieux placé à juger ou non si, à ce moment-là, ça constitue
quelque chose qui est admissible au sens... un acte répréhensible admissible au
sens de la loi. Donc...
M. Montigny : Juste une
sous-question, là : Est-ce que le fait que le mot «grave» soit là, ça
enlève au Protecteur du citoyen cette réflexion-là? Pour moi, non. En fait, ça
amène le citoyen à se poser la question, mais le Protecteur du citoyen, lui,
après ça, il va le déterminer. Ça fait que, moi, ce que je veux dire, c'est,
quand ce n'est pas grave dans la tête du citoyen, il ne dénonce pas ça, ce n'est
pas grave. Alors, je ne vois pas en quoi le mot «grave» empêcherait le
Protecteur du citoyen de faire sa job, en quoi ça empêcherait les citoyens de
la référer quand même. Le Protecteur du citoyen, il fera son analyse. Mais, je
ne sais pas, je ne le vois pas, là, ce que vous dites, là, je ne le vois pas. Parce
que quelque chose qui n'est pas grave, bien, pourquoi je dénoncerais ça, ce n'est
pas grave?
M. Beauchemin (Mario) : Bien,
nous, notre crainte, c'est vraiment, puis Marc l'a souligné, c'est vraiment en
amont, là, c'est que ça pourrait restreindre, ça pourrait empêcher les
personnes de divulguer des actes répréhensibles. C'est uniquement ça qu'on dit,
là.
M. Montigny : Je vous entends
bien. C'est bon. M. le Président, j'ai à peu près combien de temps?
Le Président (M. Simard) : Deux
minutes, cher collègue.
M. Montigny : Bien, il me
reste simplement... sur la question de la CSST, hein, vous avez parlé, là...
Puis là je l'ai oublié, comment vous l'avez dit exactement, mais vous avez
parlé du processus de plainte en lien avec la CSST. Ma question est simple :
Qu'est-ce qui ne va pas, selon vous?
M. Beauchemin (Mario) : Je te
laisse la parole, Marc.
M. Daoud (Marc) : Oui. Bien,
en fait, c'est une bonne question, puis nous, on va tout simplement se rabattre
sur ce que le Protecteur du citoyen disait, c'est un constat, c'est un constat
que, probablement, au niveau administratif, les gens, les agents qui sont
formés ne sont pas... ne semblent pas connaître très bien la loi, donc
peut-être un manque de formation qui est fait à ce niveau-là. C'est plus sous l'angle
administratif que l'angle législatif. Donc, la loi semble assez être claire,
mais les gens, peut-être les agents de la CNESST ne semblent pas assez outillés
au point où est-ce qu'il y a du monde qui se font dire que leur plainte n'est
tout simplement pas recevable parce qu'ils sont syndiqués. Donc, il y a un
travail à faire, mais à l'interne.
M. Montigny : Donc, au niveau
législatif, comme législateur, moi, ici, aujourd'hui, je n'ai pas à intervenir
là-dedans, mais c'est un message quand même que vous voulez passer pour la partie
administrative du gouvernement, c'est ça?
M. Beauchemin (Mario) : Exact.
M. Montigny : OK. Je vous
entends bien. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, cher collègue. Je cède la parole à la députée de Saint-Laurent.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Merci beaucoup. Vous aviez des membres, ce matin aussi, devant l'Assemblée
nationale du Québec, alors on est passé leur dire un petit bonjour. Ils sont
toujours bien visibles. Présentement, dans votre mémoire, à la page 2,
vous dites que ça vaut la peine d'être reproduit intégralement. Vous parlez de
l'indépendance et de l'impartialité du traitement à l'interne et que ça pouvait
même décourager la divulgation à l'interne. Et vous ajoutez aussi que les gens
qui reçoivent l'information, évidemment, sont des cadres, ce sont des cadres
qui sont occupés, qui peuvent même parfois déléguer leurs responsabilités.
Honnêtement, je suis vraiment surprise
parce que c'est tellement très difficile, dans un <premier...
Mme Rizqy :
...déléguer
leurs responsabilités.
Honnêtement, je suis vraiment surprise
parce que c'est tellement très difficile, dans un >premier temps,
dénoncer une situation. Ça demande beaucoup de courage. Mais des cadres qui
délèguent cette responsabilité à une autre personne, pour moi, ça dénote ici un
manque de sensibilité dans le caractère très confidentiel d'une dénonciation,
là. Est-ce que ça, c'est une pratique qui est quand même courante ou c'est
quand même limité?
M. Beauchemin (Mario) : Bien,
si on se fie au rapport et puis à la stat... si on se fie au rapport et aussi
à... et au passage qu'on a reproduit, c'est marqué : «Un bon nombre de
responsables du suivi des divulgations occupent un poste de haute direction.»
Un bon nombre, donc, oui, c'est assez inquiétant en ce qui concerne la
confidentialité puis le désir pour certaines personnes de faire une divulgation
à l'interne aussi, là. Et peut-être que je pourrais laisser mon collègue
compléter.
M. Daoud (Marc) : En fait,
c'est exactement ça, c'est un constat qui a été fait dans le rapport tout
simplement. Donc, on n'a pas plus de faits ou de causes, mais nous, on se rabat
aussi sur le rapport, le rapport qui a été produit, puis ça ne nous surprend
pas non plus. C'est logique aussi que d'arriver à ce constat-là.
Mme Rizqy : Est-ce que vous
avez sondé vos membres à cet effet?
M. Beauchemin (Mario) : On
n'a pas eu vraiment le temps, non.
Mme Rizqy : Je comprends,
vous êtes quand même assez occupés, puis en plus vous avez les tables de négo,
ça vous tient occupés, hein?
M. Beauchemin (Mario) : Oui.
Mme Rizqy : J'aimerais
revenir sur le devoir de loyauté, loyauté envers l'employeur. Qui est le
véritable employeur?
M. Daoud (Marc) : Bien, en
fait, dans quel contexte? On parle de quel groupe? On parle de...
Mme Rizqy : ...avec celui que...
pour qui j'ai une affection toute particulière, parlons du réseau de
l'éducation.
M. Beauchemin (Mario) : Bien,
l'employeur est à plusieurs niveaux. Je pense que... Je pense comprendre votre
question, en fait, l'employeur, c'est la population, c'est la population, et
puis les salariés et salariées travaillent pour le bien commun, pour les
enfants. Mais, dans les faits, l'employeur, c'est le directeur d'école, c'est
le directeur d'établissement puis, au bout de la ligne, c'est le ministère de
l'Éducation.
Mme Rizqy : Bien, écoutez, je
vais vous donner un exemple tout à fait récent. Alors, dans une école, début
septembre, une professionnelle de soutien est retirée, c'est un retrait
préventif, et elle aura l'année prochaine son congé de maternité. La direction
dit : Oui, oui, elle sera remplacée. Fin avril, l'équipe-école se dit :
Bien, écoutez, ça fait des mois que vous nous dites qu'elle va être remplacée,
elle n'est toujours pas remplacée. Puis on s'entend, à l'école, une
professionnelle de soutien, c'est quand même assez névralgique dans la réussite
éducative.
Alors, le lendemain, disons, de cet
échange entre la direction et l'équipe-école, des pastilles sont apparues pour
leur dire sur ces pastilles : Vrai ou faux, est-ce que parler aux
journalistes, vous avez le droit? Faux, vous n'avez pas le droit de parler aux
journalistes pour dénoncer une situation, vous devez vous rapporter à votre
supérieur immédiat ou les référer aux équipes de communication.
Des gens m'ont envoyé ça dans une belle
enveloppe, les pastilles. J'étais même étonnée qu'on ait de l'argent à
gaspiller pour faire des pastilles sur ces affaires-là, alors qu'on manque
d'argent pour des professionnels et d'autres choses. Mais ça, c'est un
commentaire éditorial de ma part.
Mais ma question, c'est la suivante :
Ici, est-ce que c'est assez grave, selon vous, lorsqu'une professionnelle n'est
pas remplacée tout au long de cette année et qui ne sera pas remplacée l'année
suivante, pour justifier que, par exemple, un membre ou des membres de
l'équipe-école parlent à une élue pour dénoncer cette situation, pour dire :
Heille! Il faudrait peut-être que l'argent qui a été débloqué par le
gouvernement... Parce que l'argent est là pour la ressource, mais on a décidé
de l'allouer à autre chose, mais on ne dit pas à quoi qu'on va l'allouer.
• (16 h 40) •
M. Beauchemin (Mario) : Pour
moi, c'est grave. Et, pour moi, ça devrait être l'objet d'une divulgation au
Protecteur du citoyen, puis peut-être pas sortir sur la place publique tout de
suite parce qu'effectivement on abuse du principe du devoir de loyauté, et
cette personne-là risquerait de perdre son emploi.
Mme Rizqy : Je peux vous dire,
la pastille fait aussi mention de quand est-ce qu'ils peuvent perdre leur
emploi. En fait, moi, je trouvais qu'il y avait là-dedans, là, non seulement
une façon de museler le monde, mais j'avais même l'impression que c'était
pratiquement de l'intimidation.
M. Beauchemin (Mario) : ...c'est
ce que j'allais dire.
Mme Rizqy : On est sur la
même longueur d'onde. J'aime ça.
M. Beauchemin (Mario) : Tout
à fait.
Mme Rizqy : Si on change
maintenant de réseau. En santé, il y a eu des articles, prenons dans l'ouest de
l'île de Montréal, Aaron Derfel, où est-ce qu'il a sorti des articles que
personne n'était au courant, mais si on écoutait la direction, le CIUSSS, les
dirigeants, tout allait bien, et c'est... En fait, c'est parce qu'il y avait des
gens, notamment des syndicats... Parce que c'est souvent comme ça que ça
fonctionne, disons qu'un membre de l'équipe de l'hôpital voit quelque chose, a
peur, va se tourner vers son délégué <syndical...
Mme Rizqy :
...fonctionne,
disons qu'un membre de l'équipe de l'hôpital voit quelque chose, a peur, va se
tourner vers son délégué >syndical pour dire : Écoute, moi, telle
ou telle affaire, ça me met inconfortable. Et souvent c'est vous, pour protéger
votre membre, qui sortez pour raconter, mettons, à un journaliste, la
situation. Vous êtes, au fond, le pare-feu pour l'employé, là, n'est-ce pas?
M. Beauchemin (Mario) : Tout
à fait, oui, ça arrive souvent.
Mme Rizqy : Mais même si vous
êtes le pare-feu de l'employé, puis disons qu'on est encore dans le monde
médical, à l'hôpital, si on parle de telle unité, ça demeure quand même assez
facile pour l'employeur de dire : Ah! Ha! On est, disons, à... j'invente
quelque chose, en obstétrique, l'équipe est très réduite cette journée-là, ils
sont capables quand même d'essayer d'identifier l'employé qui aurait parlé au
syndicat et que par la suite le syndicat ait divulgué l'information. J'ai
l'impression qu'au lieu de s'attarder à l'enjeu urgent qui est dénoncé, on met
beaucoup de temps et d'énergie à trouver la personne qui a osé dénoncer.
M. Beauchemin (Mario) : Oui,
puis il y a eu des causes devant le Tribunal administratif du travail récemment
là-dessus aussi, puis il y a une jurisprudence qui est en train de se
construire graduellement.
Mme Rizqy : Parlez-nous donc
de ces causes-là. Nous... J'aime ça, les faits puis les histoires, j'adore ça,
en fait.
M. Beauchemin (Mario) : Écoutez,
je ne suis pas au courant dans les trucs précis, là, mais, si vous voulez, on
pourrait vous faire parvenir des résumés en question. J'étais à une réunion ce
matin où il en était d'ailleurs question.
Mme Rizqy : OK.
M. Daoud (Marc) : Si vous
permettez, juste pour renchérir et tenter aussi de répondre à la question,
c'est qu'on a... évidemment, on vient de voir le mémoire de l'association des
ingénieurs, on ne l'a pas feuilleté au complet, nous, on a pris l'angle de
commenter tout simplement les recommandations qui étaient dans le rapport. Par
contre, il y a une des recommandations que l'association des ingénieurs suggère,
qui attire notre attention aussi puis qui peut-être aussi peut venir aussi
améliorer le régime de protection, ils demandent, en fait, aux parlementaires
de reconnaître, dans le texte législatif, la légitimité des syndicats à
effectuer des divulgations au nom de leurs membres. C'est extrêmement
intéressant. Et ce qui a été soulevé, le fait que les gens utilisent le syndicat
comme pare-feu, comme parapluie, c'est effectivement le cas, ça, on le sait et
même, des fois, on leur conseille aussi, pour éviter des représailles, de
parler avec leur syndicat puis de tenter d'être ou de laisser le syndicat
parler à leur place. Et ce serait quand même une recommandation éventuelle qui
serait en harmonie ou qui améliorerait aussi le régime de protection, le fait
de reconnaître aussi que la partie syndicale peut être une partie, pourrait
déposer directement ou agir au nom de leurs membres.
Mme Rizqy : Absolument, puis
je pense que c'est une excellente suggestion. Permettez-moi d'aller plus loin.
Disons que vous êtes le pare-feu. Donc, nous avons un employé qui trouve qu'il
y a une situation très problématique, se dirige vers vous, vous dénoncez, ça
tombe dans le Protecteur du citoyen, mais disons qu'après ça, ah, c'est venu,
disons, dans l'oreille publique. Et là, évidemment, part la chasse aux
sorcières pour trouver qui est la personne qui a dénoncé. Et souvent, comment
c'est compartimenté dans certains milieux de travail, si une équipe est très
réduite, et c'est ce que les ingénieurs nous ont dit ce matin, bien, dans une
équipe réduite, c'est assez facile de trouver la personne.
Même si on dit qu'il n'y aura pas de
représailles à proprement parler, même si on ne sait pas qui a divulgué
réellement, parce que c'est le syndicat qui le fait, bien, il pourrait y avoir,
par exemple, des représailles qui soient faites par l'employeur, réorganisation
des postes et, oups, comme par magie, le poste de la personne qu'on croit...
avoir dénoncé est aboli pour x raisons. Alors là, l'employé doit, à ce
moment-là, se battre devant les tribunaux, et là, essentiellement, c'est le
combat de David contre Goliath.
Est-ce qu'on devrait avoir vraiment un
fonds pour accompagner, d'un point de vue juridique, devant les tribunaux,
d'avoir vraiment un fonds pour la représentation juridique mais aussi, j'ose le
dire, là, un soutien psychologique? Parce que c'est très, très pénible, j'en
sais quelque chose, aller au tribunal, souvent, les gens vont vous dire... ça a
été la pire expérience de leur vie.
M. Daoud (Marc) : Oui, puis
même pour en rajouter aussi, à ce moment-là, c'est que, oui, il y a des
présomptions qui sont déjà disponibles ou qui sont déjà énumérées dans la loi,
mais il y aurait matière, si vous allez... si la législature allait de l'avant
avec la reconnaissance des organisations syndicales ou autres, là, comme
parties, de bonifier aussi la présomption puis de s'assurer aussi... Ce n'est
pas uniquement contre la personne qui <dépose...
M. Daoud (Marc) :
...aussi
la présomption puis de s'assurer aussi... Ce n'est pas uniquement contre la
personne qui >dépose ou qui passe à travers son syndicat pour déposer
une divulgation, mais toute personne qui pourrait vraiment être liée à la
divulgation, ce que... à ce moment-là, ça pourrait être vu comme une... en
fait, l'employeur serait présumé effectuer des représailles à l'égard de ces
personnes-là ou de l'ensemble du groupe.
Mme Rizqy : Parfait. Bien,
merci beaucoup pour vos commentaires et suggestions. C'est bien noté.
Le Président (M. Simard) : Alors,
en lien avec le dernier bloc d'intervention, si vous souhaitez transmettre au
secrétariat quelque document que ce soit, on pourra les retransmettre, bien
sûr, à l'ensemble des membres de la commission.
Je cède maintenant la parole à la députée
de Sherbrooke, qui dispose de quatre minutes.
Mme Labrie : Merci, M. le
Président. Je suis... je suis assez contente d'entendre votre intérêt pour une
disposition qui viendrait permettre aux syndicats d'être eux-mêmes
divulgateurs. Je trouve ça intéressant, puis on a vu avec un autre intervenant
qu'en France c'est le cas, notamment, donc c'est assez inspirant. Moi, ça m'est
arrivé quand même souvent d'avoir des personnes, notamment du réseau de
l'éducation, là, qui me contactaient pour me parler d'enjeux puis que je les
réfère à leur syndicat. Je me demandais comment vous gérez actuellement la
situation. Est-ce que ça vous est arrivé de tenter de faire une divulgation ou
d'accompagner quelqu'un là-dedans?
M. Beauchemin (Mario) : On
n'a pas fait vraiment de recensement. On n'a pas non plus consulté nos
syndicats affiliés pour avoir des données récentes là-dessus. Je ne sais pas
si, en tant que conseiller juridique et syndical, Marc en a entendu davantage
parler, mais pour ma part, moi, non.
M. Daoud (Marc) : Non, on n'a
pas eu à agir directement. Pour l'instant, ça s'est limité aussi à donner de
l'information, à transmettre, à tenter de conseiller, mais ça se passe plus au
local. C'est le genre de cas qui se passe dans les syndicats locaux, puis on
n'a pas fait la recension.
Mme Labrie : Je comprends.
Une des avenues qu'on regarde aussi, c'est celle de s'attendre que le
gouvernement inclue le privé, là, dans la couverture de la loi. J'aimerais vous
entendre sur ce que vous pensez de ça, de couvrir également le secteur privé.
M. Beauchemin (Mario) : Vas-y,
Marc.
M. Daoud (Marc) : Bien,
évidemment, on représente... la vaste majorité des employeurs de nos unités de
négociation, c'est des employeurs du secteur public ou parapublic. C'est sûr
qu'on entend... On a quelques groupes où l'employeur est un employeur privé. Évidemment,
bonifier un régime, le rendre universel, c'est toujours bienvenu. C'est
toujours des dossiers qui vont être liés aux relations de travail. Même pour le
personnel qui n'est pas syndiqué, le privé est souvent non syndiqué, donc si
vous offrez des mesures... en fait, une protection de... encourager le monde à
faire des divulgations et aussi à les protéger contre les représailles,
évidemment que c'est bienvenu.
Mme Labrie : Parfait. Bien,
je vous remercie.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, chère collègue. Messieurs, un énorme merci pour votre participation à
cette commission, vous avez enrichi notre réflexion. Alors, au plaisir de vous
retrouver subséquemment.
Ceci étant dit, compte tenu de l'heure,
nous allons suspendre momentanément nos travaux.
(Suspension de la séance à 16 h 50)
17 h (version révisée)
(Reprise à 17 h 03)
Le Président (M. Simard) : Alors,
chers collègues, nous sommes en mesure de reprendre nos travaux. Nous avons,
bien sûr, quorum pour le faire. Et nous avons l'honneur de recevoir nos
derniers invités afin de clore cette consultation particulière, et nous
recevons des représentants du Syndicat de la fonction publique et parapublique
du Québec. Chers collègues, bienvenue! Auriez-vous d'abord l'amabilité, s'il
vous plaît, de vous présenter?
M. Daigle (Christian) :Oui. Alors, bonjour. Je me présente, Christian Daigle,
président général du Syndicat de la fonction publique et parapublique du
Québec. Je suis accompagné, à ma gauche, de M. Pierre-Alexandre Caron,
conseiller au... à la recherche à la défense du service public du SFPQ, et, à
ma droite, de M. Gabriel Arruda, qui est conseiller politique au bureau de la
présidence générale.
Le Président (M. Simard) : Alors,
comme vous le savez, vous disposez de 10 minutes afin de faire votre
présentation.
M. Daigle (Christian) :Merci. M. le Président, Mmes et MM. les députés, merci de
nous recevoir. Merci à la Commission des finances publiques pour les
consultations particulières sur le rapport sur la mise en œuvre de la Loi
facilitant la divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des organismes
publics. Bien que nous ayons dû décliner l'invitation initiale parce que le
délai de préparation était trop court, nous sommes heureux de pouvoir vous
faire part de nos recommandations et commentaires aujourd'hui.
Pour débuter, je crois important de
présenter le SFPQ. Nous sommes un syndicat indépendant qui regroupe environ
40 000 membres répartis dans plus de 35 accréditations québécoises.
Quelque 30 000 d'entre eux sont issus de la fonction publique québécoise
et répartis comme suit : 26 000 employées et employés de bureau,
techniciennes et techniciens, auxquels s'ajoutent quelque 3 500 ouvriers,
ouvrières travaillant au sein de différents ministères et organismes. Nos
membres sont donc parmi les premiers concernés par la Loi facilitant la
divulgation d'actes répréhensibles à l'égard des organismes publics.
L'adoption, en 2016, de la loi a constitué
une avancée importante en matière de protection des lanceurs d'alerte, même si
elle pourrait... pouvait être améliorée. Depuis aussi tôt que de 1970 et plus
formellement depuis 1994, le SFPQ a milité en faveur de telles protections,
avec un seul objectif en tête : la défense de l'intérêt public. Lorsque
les divulgatrices et divulgateurs sont mieux protégés de toute forme de
représailles, nous croyons que l'intérêt public est mieux servi parce que
davantage d'actes répréhensibles pourront être dénoncés ou même prévenus.
Les lanceurs d'alerte participent ainsi à
préserver la transparence des institutions publiques et à prévenir leur
corruption, comme l'a souligné le Conseil de l'Europe, l'OCDE et d'autres
organisations internationales. Ce sont ultimement les fondements de notre
démocratie qui sont solidifiés en protégeant les divulgatrices et divulgateurs.
Dans le cadre des présentes consultations,
trois ans après le dépôt du rapport, et en regard de notre expérience des six
années passées depuis l'entrée en vigueur de la loi, nous formulerons plusieurs
recommandations, dont certaines datent des consultations sur le projet de loi
de 2016, car elles demeurent pertinentes encore aujourd'hui. Nous souhaitons qu'un
projet de loi soit déposé dans les plus brefs délais afin de modifier la loi en
tenant compte des recommandations du SCT et des nôtres également.
À la suite d'un processus de reddition de
comptes demandé par le SCT aux organismes publics sous sa responsabilité, on a
émis trois recommandations dans le rapport, pour lesquelles nous avons des
commentaires et des recommandations à faire. Concernant la recommandation n° 1,
qui touche les rôles et responsabilités des acteurs sollicités par la loi, le
SFPQ est, dans son ensemble, favorable à la distribution des rôles et
responsabilités dévolues respectivement au Protecteur du citoyen et au
responsable du suivi des divulgations. La modification la plus importante est
celle qui consacre le Protecteur du citoyen comme le canal unique pour toute
personne voulant faire une divulgation. La confidentialité des divulgations est
fondamentale à la protection des personnes <divulgatrices...
M. Daigle (Christian) :
...La confidentialité des divulgations est
fondamentale à la protection des personnes >divulgatrices. Il était donc
rétrospectivement hasardeux de confier la responsabilité d'une procédure aussi
sensible à autant de personnes différentes qui reçoivent très peu de
divulgations. Soulignons que le Protecteur du citoyen continue de bénéficier de
notre soutien comme principale institution responsable de recevoir les
divulgations.
L'autre proposition importante est de transférer
des responsabilités, de veiller à la bonne administration de la loi au
Protecteur du citoyen. Le SFPQ affiche une réserve quant à cette proposition,
puisque le rôle du Protecteur est déjà très important et qu'il détient aussi
déjà de grands pouvoirs discrétionnaires dans l'application de la loi.
Toutefois, si cette modification ne vient pas amoindrir la responsabilité
ministérielle de la présidente du Conseil du trésor à l'égard de la loi, et que
le Protecteur du citoyen se voit obligé de produire un rapport sur
l'administration de celle-ci tous les trois ou cinq ans, le SFPQ pourrait se
rallier à cette proposition.
Enfin, le SFPQ souhaiterait ajouter une
obligation au rôle des responsables du suivi des divulgations dans les divers
organismes publics. Celles-ci devraient avoir l'obligation d'informer les
personnes employées de leur organisme. Si l'objectif du législateur est
réellement de faciliter la divulgation d'actes répréhensibles, il doit prévoir
la formation des personnes les plus susceptibles de disposer d'informations
pertinentes, c'est-à-dire les personnes employées des organismes publics. À
notre connaissance, aucune formation n'a été systématiquement donnée au
personnel embauché après l'entrée en vigueur de la loi en 2017.
Nous avons donc deux recommandations :
confier exclusivement au Protecteur du citoyen le mandat de recevoir les
divulgations du personnel des organismes publics, comme première recommandation;
donner l'obligation au responsable du suivi des divulgations de former le personnel
des organismes publics comme seconde recommandation.
La seconde recommandation du rapport fait
état de différentes propositions pour faciliter l'application de la loi et la
clarifier. D'abord, la suggestion de rattacher la notion «d'intérêt public» à
l'objet de la divulgation plutôt qu'aux intentions de la personne divulgatrice
est une bonne idée. Actuellement, la loi semble opposer la notion «d'intérêt
public» à la notion de «fins personnelles». Il faudrait dissocier les deux
notions en évaluant d'abord si l'objet de la divulgation est d'intérêt public.
S'il l'est, il n'y a pas lieu de rejeter une divulgation, même si celle-ci
pourrait avoir un impact personnel positif sur la personne divulgatrice et donc
d'avoir l'apparence d'avoir été faite à des fins personnelles. Ainsi, selon
nous, il n'y a pas nécessairement d'opposition entre «intérêts public» et «fins
personnelles».
Quant à la suggestion de prévoir un
mécanisme de révision de la loi à tous les cinq ans, le SFPQ la juge également
à propos. Il est souhaitable de réfléchir périodiquement à l'opportunité de
réviser la loi.
Finalement, la proposition visant à
ajouter le mot «grave» pour qualifier une contravention à une loi du Québec, à
une loi fédérale applicable au Québec ou à un règlement pris en application
d'une telle loi est à notre avis inopportune, toute restriction à la définition
de ce qui peut être considéré comme un acte répréhensible au sens de la loi
pourrait avoir comme conséquence de diminuer le nombre de divulgations, car les
personnes divulgatrices pourraient se retenir de partager de l'information
qu'elles pourraient croire insuffisamment importante ou grave, alors qu'elle le
serait dans les faits. Ces réflexions nous amènent à proposer deux autres
recommandations, soient les recommandations nos 3 et 4 de notre rapport.
• (17 h 10) •
Le SFPQ est d'accord avec la
recommandation de créer un comité multipartie qui serait chargé d'analyser le
processus de protection contre les représailles et de trouver des avenues pour
en améliorer l'efficience. Toutefois, étant donné que la formation de ce comité
ne requiert pas expressément une modification de la loi, le SFPQ souhaite
savoir si ces... si des travaux ont débuté à cet effet depuis la publication du
rapport en mars 2020. Si la réponse est négative, et bien que nous soyons
conscients de l'impact de la crise sanitaire des dernières années, nous nous
demandons pourquoi et voudrions des explications.
Comme mentionné d'entrée de jeu, le SFPQ
souhaite mettre de l'avant d'autres recommandations datant des consultations
sur le projet de loi de 2016. Nous ne pouvons pas toutes les décliner ici, mais
nous vous invitons... mais nous invitons les personnes intéressées à consulter
notre présent mémoire et celui de 2016 pour en avoir tous les détails.
Les personnes syndiquées ne peuvent se
prévaloir des services de consultation juridique rendus disponibles par le Protecteur
du citoyen. Elles devraient néanmoins pouvoir obtenir le soutien de leurs
organisations syndicales dans le cadre de toute procédure liée à la présente
loi. La loi canadienne le permet, il serait important que la loi québécoise le
permette également. Les personnes... la personne syndiquée dans le secteur
public pourrait, par exemple, obtenir des conseils auprès de son syndicat, non
seulement en cas de représailles liées à une divulgation, mais aussi pour
connaître les conditions selon lesquelles une divulgation d'actes
répréhensibles peut être réalisée. Nous recommandons donc que la loi prévoie
une disposition reconnaissant pleinement le droit à la représentation syndicale
dans le cas d'une divulgation.
Ensuite, reconnaissant l'importance
démocratique du signalement des actes répréhensibles par la divulgation
publique, même si ce canal de signalement doit être plus balisé que la
divulgation au Protecteur du citoyen, le SFPQ <recommande...
M. Daigle (Christian) :
...que la divulgation au Protecteur du citoyen, le
SFPQ >recommande aussi que la protection des sources journalistiques
fasse l'objet d'une disposition dans la loi, tout comme la divulgation des... à
des parlementaires. Soulignons que l'expérience du SFPQ en matière
d'accompagnement de lanceurs d'alerte nous permet de croire que, par le passé,
des fonctionnaires et des ouvriers ont subi des représailles après avoir
divulgué des informations à un parlementaire ou un journaliste.
Finalement, nous croyons aussi que des
mesures devraient être prévues à la loi pour que les personnes divulgatrices
soient mieux protégées en cas de représailles ou de mesures disciplinaires, tel
que le proposent les organisations internationales et européennes. De telles
mesures sont importantes afin de garantir la confiance des personnes
divulgatrices envers les mécanismes de la loi qui les protègent à la suite
d'une dénonciation leur ayant souvent demandé beaucoup de courage. Il peut
effectivement s'avérer très difficile pour un lanceur d'alerte, sur le plan
financier notamment, d'attendre l'issue de procédures judiciaires ou quasi
judiciaires. Il faut savoir qu'actuellement le temps moyen pour entendre un
grief pour congédiement d'un travailleur ou d'une travailleuse de notre
organisation est de plus de 18 mois.
En conclusion, le SFPQ souhaite que le
présent exercice de consultation permette d'aboutir rapidement à un projet de
loi qui permettra de bonifier la Loi facilitant la divulgation d'actes
répréhensibles à l'égard des organismes publics. La prise en compte de nos
commentaires et recommandations rendrait meilleure la protection des personnes
divulgatrices, une préoccupation qui doit être au cœur des discussions sur la divulgation
d'actes répréhensibles. Sans protection suffisante, moins de dénonciations sont
réalisées, et l'intérêt public en pâtit. Merci beaucoup de votre attention.
Le Président (M. Simard) : Merci
à vous, M. le président. Je cède la parole au député de Maskinongé et adjoint
parlementaire.
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Salutations messieurs! Je suis content qu'on ait... qu'on ait trouvé
une plage horaire, là, qui vous convenait davantage. Merci de participer à nos
travaux. Je pense que c'est... c'est au bénéfice de tous.
C'est le fun quand je lis, dans le fond,
le résumé de vos... de vos recommandations, là, somme toute, là, vous êtes
d'accord avec l'ensemble des recommandations qui sont proposées dans le
rapport. Je vous amène à la recommandation n° 5, là : prévoir
explicitement, là — la recommandation que vous faites — là,
prévoir explicitement à la loi des mesures correctrices à l'égard des victimes
de représailles. Il y en... il y en a trois éléments, là, qui sont... qui sont évoqués,
là : le remboursement des frais juridiques, pardon, prévoir des dommages
et intérêts et également prévoir la possibilité de mutation vers un poste
équivalent. Ce que je comprends, c'est que ce sont des mesures que vous
proposez. Et est-ce qu'il y en aurait d'autres que vous n'avez pas évoquées,
qui ne sont... qui ne sont pas écrites dans le rapport, là? Qu'est-ce qu'on
peut mettre en place pour... pour bonifier les mesures correctrices, là?
M. Daigle (Christian) :Bien, minimalement, d'avoir... minimalement, d'avoir ces
trois mesures-là serait déjà un bon pas à l'avant, parce que, lorsqu'un
fonctionnaire ou une fonctionnaire veut dénoncer quelque chose, si c'est de son
propre ministère, elle peut subir des représailles. Et souvent même le fait de
déplacer cette personne-là va pouvoir lui permettre de mieux travailler par la
suite, de ne pas être la cible, peut-être, de... de visées de la part de
collègues ou de supérieurs, et ainsi de suite. Donc, pour nous d'avoir ces
trois mesures-là à la base serait la moindre des choses. Parce que nous avions
fait également ces recommandations-là en 2016, mais elles n'avaient pas été
tenues en compte à ce moment-là. Donc, on pense qu'on doit ajouter le tout.
Lorsque vous avez fait mention au début
que nous sommes d'accord avec l'entièreté, c'est juste qu'il y avait une petite
chose quand on parle du mot «grave», où là ça nous pose problème, parce que ça
vient baliser un petit peu ou ça vient donner une emphase sur quelque chose qui
pourrait être une dénonciation peut-être pas considérée comme grave, mais qui
viendrait quand même demander d'analyser un peu plus les choses. Ça fait que
nous, il y avait juste ce petit bout-là qu'on voulait justement faire attention
ou rayer, je dirais, du projet de loi. Mais pour le reste, effectivement, vous
avez tout à fait raison qu'on est d'accord avec les modifications proposées, si
on peut en plus bonifier le tout avec nos mesures ici. Merci.
M. Allaire : L'élément que
vous amenez avec le terme «grave», si vous me permettez, M. le Président, je
passerai la parole à mon collègue, qui a été tantôt très éloquent avec un autre
groupe en particulier avec cet élément-là. M. le député, je vous laisse la
parole.
Le Président (M. Simard) : Alors,
M. le député de René-Lévesque.
M. Montigny : Merci.
Le Président (M. Simard) : Il
vous reste 12 min 22 s.
M. Montigny : Peut-être qu'on
se repassera la parole mutuellement, évidemment.
Sur l'enjeu du terme «grave», j'aimerais
ça vous entendre sur le fait que quelque chose n'est pas grave. Admettons que
je considère que ce n'est pas grave, bien, je ne le dénoncerai pas, je n'en
tiendrai pas nécessairement grande attention, là, je considère ça pas grave.
J'ai besoin de comprendre un peu quelque chose sur votre opposition à ça. Je
vous amène... J'ai été président d'un syndicat de la CSQ, là, en éducation,
puis je vous amène juste à un élément que je connaissais à ce moment-là, puis
que ça m'a ramené à une expression qu'on connaît bien, dans un 47.2, là, on <appelle...
M. Montigny :
...puis
que ça m'a ramené à une expression qu'on connaît bien, dans un 47.2, là, on >appelle
ça une «négligence grave». Dans... C'est un mot qui est utilisé régulièrement
pour... pour bien mentionner de porter attention à quelque chose, on met le
terme «grave». Moi, là, je regarde ça, puis le citoyen qui se dit : Ce
n'est pas grave. Donc, comme ce n'est pas grave, bien, il ne sera pas porté à
dénoncer. Alors, je ne sais pas pourquoi le fait qu'on mette «grave», ça pose
problème, parce qu'en réalité il va regarder ça puis il va se dire : Bien,
moi, je considère que ça peut être grave, je vais... ou pas, ou peu importe,
puis je vais amener ça au Protecteur du citoyen, puis le Protecteur du citoyen
va décider. Alors, ce n'est pas un frein parce que, pour vrai, s'il trouvait ça
pas grave, bien, il ne ferait rien avec ça. J'ai envie de vous entendre
là-dessus.
M. Daigle (Christian) :Merci. Je vais débuter la réponse puis je passerai
peut-être la parole à un de mes collègues par la suite. Au niveau du mot
«grave», on comprend que, dans le cadre d'un 47.2, ça vient baliser l'espace de
la cour également pour avoir à juger d'une chose. Donc, il y a trois séries de
choses, puis là je ne veux pas embarquer de ce côté-là, on a... le temps est
compté. Donc... la négligence grave vient baliser, et après ça la jurisprudence
vient également amener différentes choses qui peuvent être prouvées, pas
prouvées, et ainsi de suite, et analysées.
Le mot «grave» vient aussi donner un côté
plus, je dirais, arbitraire à la personne qui voudrait dénoncer quelque chose,
puis elle dit : Bien, ce n'est peut-être pas si grave, mais je ne le
dénoncerai peut-être pas. Pour nous, c'est important que la personne puisse le
faire initialement parce que peut-être qu'elle juge que ce n'est pas
nécessairement grave à ses yeux à elle mais que ça pourrait mettre en lumière
quelque chose qui va l'être et qui est... c'est juste la pointe de l'iceberg
qu'elle voit. Elle peut voir juste 10 % mais qu'il y a 90 % qui est
caché puis qu'on va découvrir un filon où est-ce qu'il y a quelque chose qui
aurait dû être dénoncé depuis fort longtemps, qui ne l'a pas été, mais elle a
trouvé qu'est-ce qu'elle devait... ou a trouvé quelque chose qu'elle pense
qu'elle devrait dénoncer, mais que ce n'est pas nécessairement grave à ses
yeux, mais ça devrait être dénoncé et, ce faisant, on va ouvrir la boîte puis,
à ce moment-là, on va trouver énormément de choses par la suite qui devraient
être corrigées. Si elle... on s'attend à ce que la personne... seulement que ça
soit quelque chose de grave, est-ce que la personne va pouvoir après ça être
réprimandée? Parce que ce n'est pas...
M. Montigny : Oui, mais, en
fait, ma question, c'est : Expliquez-moi quelque chose qui n'est pas grave
pour vous.
M. Daigle (Christian) :Bien, quelque chose qui n'est pas grave pour moi va
peut-être être grave pour vous, puis quelque chose qui n'est pas grave pour...
M. Montigny : Mais en quoi ça
m'empêcherait parce qu'il y a le mot «grave»?
M. Daigle (Christian) :OK. Je vais vous donner un exemple.
M. Montigny : Parce qu'en
fait c'est le Protecteur du citoyen qui va analyser après ce que moi, je vais
avoir fait. Puis, comme c'est relatif, bien, je ne vois pas ça comme un frein à
le faire. Alors qu'on l'utilise à plein d'autres places, en quoi c'est un si
grand frein, là, honnêtement?
M. Daigle (Christian) :
OK.
M. Montigny : Je pense qu'on
a peur d'avoir peur, honnêtement, là. Je le regarde comme législateur, là, puis
c'est un peu comment je le vois.
• (17 h 20) •
M. Daigle (Christian) :Je vais vous donner un exemple, puis je vais prendre mon
organisation pour ne pas peinturer quoi que ce soit ou dépeindre quelque chose
qui ne se produit peut-être pas.
Chez nous, on fait des comptes de dépenses
lorsqu'on a à se déplacer. On a un comité national de surveillance qui doit
analyser les choses. Il se rend compte qu'à un moment donné Christian Daigle,
le président général, réclame un dîner puis qu'il n'y a pas droit, peut-être,
selon la réglementation. Ce n'est pas si grave que ça, un dîner, selon moi.
Mais il va peut-être le déclarer à ce moment-là pour dénoncer la situation.
Mais, en faisant ça, le comité chargé de l'analyse va peut-être, lui, décider
de dire : Bien, on va regarder si les autres l'appliquent également, et se
rendre compte que l'ensemble des dirigeants du syndicat l'applique, parce que
le président général le fait, et que ça nous coûte des centaines de milliers de
dollars par année, alors qu'on ne devrait pas l'avoir déclaré. Alors, au
départ, ce n'est peut-être pas quelque chose qui est grave, mais ça vient
mettre en lumière quelque chose qui est beaucoup plus grave et qui amène un
impact financier majeur sur les finances de l'organisation.
Alors, en mettant le mot «grave», la
personne initialement n'aurait peut-être pas dénoncé cette situation-là. Bien,
c'est juste un dîner, ce n'est pas grave. Mais, le faisant, on vient de mettre
en lumière une pratique qui n'aurait pas dû se faire et qui coûte au syndicat,
donc aux membres, si je fais le parallèle au ministère, aux citoyens, des
centaines de milliers de dollars annuellement, pour ne pas dire des millions
peut-être au niveau du gouvernement.
M. Montigny : Je ne veux pas
mobiliser trop de temps, là. Je vais repasser la... à mon collègue.
Le Président (M. Simard) : Je
vous en prie, cher collègue.
M. Allaire : Merci, M. le
Président. Merci, cher collègue. Votre recommandation n° 6 où vous
évoquez... où vous souhaitez la représentation syndicale des gens qui font des
divulgations, vous ne trouvez pas que la ligne peut être mince? Parce que vous
n'êtes pas le seul groupe, là, à l'avoir mis de l'avant, vous ne trouvez pas
que la ligne peut être mince entre une problématique de relation de travail qui
est soulevée versus un acte répréhensible?
M. Daigle (Christian) :La ligne peut être mince, mais initialement, ce qu'on vise,
ce n'est pas une problématique de relation de travail. Si c'est ça, bien, déjà,
le syndicat va être mis au fait, parce qu'éventuellement un grief patronal
pourrait être déposé si l'employeur pense qu'on a <abusé...
M. Daigle (Christian) :
...un grief patronal pourrait être déposé si
l'employeur pense qu'on a abusé> de la situation en faisant une telle
déclaration, ou le syndiqué va pouvoir se plaindre si jamais il est victime de
représailles par la suite, et le syndicat serait également au courant de ce qui
s'est passé. En ne permettant pas l'accompagnement syndical lors des
divulgations, on empêche la connaissance du fait par le syndicat, ou d'aller
plus loin en étant accompagné par le syndicat à ce moment-là. Donc, nous, on
pense que c'est un bénéfice que le syndicat soit déjà informé de ça.
Si la situation vraiment était un problème
de relations de travail, était un conflit, mettons, entre le gestionnaire et un
employé, si je peux me permettre, bien, le syndicat pourra émettre des réserves
quant à la dénonciation par l'employé envers le Protecteur du citoyen et déjà,
à ce moment-là, allumer une petite lumière rouge à l'employé en disant :
Tu n'es peut-être pas devant la bonne tribune en faisant ça. En ne permettant
pas l'accompagnement syndical, bien, automatiquement, des gens vont dire :
Bien, le syndicat ne peut pas m'accompagner, je vais y aller tout seul. Et là
peut-être vont aller au-devant de situations qui ne devraient pas être devant
le Protecteur du citoyen.
Alors, pour nous, on pense qu'il y a une
possibilité d'accompagner le membre, de bien le faire, parce qu'en plus de ça,
le Protecteur du citoyen ne permet pas, justement, la consultation parce que
nous sommes... il y a... parce que nous sommes le représentant de la personne
déjà à ce moment-là. Donc, pour nous, il y a un manque de représentation à ce
niveau-là.
Le Président (M. Simard) : M.
le député de René-Lévesque.
M. Montigny : Bien, heille! ça
me... Il y a quelque chose qui m'apparaît, là! Imaginez, puis je reviens sur ce
que je parlais du 47.2 tantôt, là. Imaginez que, pour toutes sortes de raisons,
la personne n'est pas satisfaite, quelque chose qui ne va pas dans votre rôle
que vous revendiquez là, là, pour l'accompagner, il pourrait-tu dire que vous
avez mal fait, vous amener en 47.2, etc., ou...
M. Daigle (Christian) :Bien, il pourrait toujours nous amener en 47.2, et
là-dessus, notre taux de succès, je vous invite à aller consulter, je pense
qu'il est très bon. Ceci étant dit, je vais prendre une expression où est-ce
qu'on se fait souvent dire : Le syndicat couche avec l'employeur. Arriver
dans un cas où est-ce qu'on dirait : Bien, c'est ça, vous ne voulez pas
que j'aille devant le Protecteur parce que vous couchez avec l'employeur puis
vous voulez le protéger là-dedans. Bien, ils nous feront un 47.2, puis on aura
démontré qu'on a voulu faire pour protéger la personne, comme nous faisons
également aussi, de signer des ententes pour régler des griefs à l'encontre de
l'aviz du travailleur dans le but de le protéger également aussi.
M. Montigny : Une dernière
question. Après ça, je vous laisse le temps. Qu'est-ce qui fait vraiment que
vous allez être... comment je dirais, que le membre en question, là, l'employé
de la fonction publique va être meilleur pour dénoncer quelque chose que lui
vit, que lui connaît, pas vous, que lui connaît parce qu'il a été témoin, lui?
Qu'est-ce qu'il a de plus, honnêtement, à vous faire accompagner par vous?
C'est lui qui l'a vécu, il donne des faits, ce n'est pas une question de
stratégie puis de trouver... c'est vraiment juste des faits, là, qui sont
relatés.
M. Daigle (Christian) :Vous avez tout à fait raison là-dessus, ce n'est pas nous
qui allons témoigner pour la personne, puis on ne lui dira pas quoi dire, mais
on va pouvoir l'accompagner à travers le processus, pour le conseiller
également aussi. Si la personne, elle constate quelque chose, un manquement de
la part d'un ministère, d'un organisme puis qu'elle veut le dénoncer, mais
qu'elle veut en profiter, justement, pour parler de relations de travail puis
comment que ça va mal avec son boss en plus, on va peut-être la recadrer pour
dire : Regarde, reste dans la dénonciation pour ne pas nuire à ton
dossier, pour ne pas ajouter puis noyer le poisson à ce moment-là. Donc, on va
pouvoir aider la personne à bien cibler. On peut également aider la personne à
bien cadrer ce qu'elle veut dénoncer, encadrer le tout pour s'assurer qu'elle
reste avec les bons termes puis de la bonne façon. Puis, vous savez, les gens
qu'on représente des fois n'ont pas la possibilité de parler devant une tribune
au quotidien, donc de les aider à formuler un discours, à formuler ce qu'ils
veulent dénoncer de la bonne façon peut les aider à ce niveau-là.
M. Allaire : Et dans un
contexte hypothétique, là, où ça se réaliserait, par exemple, le niveau de
confidentialité, jusqu'à quel point vous seriez capable d'en assurer, là, sa
pleine et entière protection pour le divulgateur?
M. Daigle (Christian) :Bien, nous avons présentement des accompagnements qui se
font à différents niveaux, et on assure déjà la confidentialité à travers bon
nombre de dossiers, de griefs, de dénonciations que des gens viennent nous voir,
qui ne se réalisent peut-être pas, parce que la personne, finalement, décide de
ne pas porter plainte ou quoi que ce soit, et on a un bon niveau de
confidentialité à ce niveau-là. Mais ça demeure toujours du choix de la
personne aussi, ça ne sera pas une obligation d'être accompagné par le syndicat.
La personne qui voudrait faire cavalier seul pourra toujours la faire quand
même, nous, on va offrir notre soutien. Si c'est ajouté au projet de loi, on va
offrir notre soutien, notre accompagnement aux gens qui le désireront à ce
moment-là. Ça n'empêchera pas les personnes de vouloir le faire par elles-mêmes
si elles le souhaitent, comme présentement, une personne peut déposer un grief
par elle-même aussi sans venir chercher l'avis du syndicat.
M. Allaire : Et on ne
risquerait pas... Une dernière question, on ne risquerait pas de se retrouver
dans une situation assez particulière lorsqu'une personne, par exemple, veut
faire une divulgation, vous demande de <l'accompagner...
M. Allaire :
...par
exemple, veut faire une divulgation, vous demande de l'accompagner>,
mais qu'au final ce n'est pas lui qui est concerné, là. Il est témoin de, mais
ce n'est pas lui qui est concerné du tout. Et là votre rôle, vous, dans le
fond, fondamentalement, c'est d'accompagner les personnes syndiquées puis de
défendre le membre. Là, on se retrouve dans une situation où ce n'est pas lui
qui a vécu un préjudice nécessairement.
M. Daigle (Christian) :Effectivement. Puis présentement nous avons des situations
où est-ce qu'on doit représenter deux personnes à l'opposé. Je prends les cas
de harcèlement sexuel, harcèlement psychologique qui peut viser un employé
syndiqué versus un autre employé syndiqué. Nous avons déjà des méthodes qui
sont mises en place pour éviter, justement, la contamination par une même
personne qui représenterait les deux. Donc, il y a deux personnes séparées qui
vont les représenter. Même principe que notre bureau de procureur qui va
assigner deux procureurs différents aux différents dossiers pour s'assurer,
justement, qu'on... ce qu'on appelle «la muraille de Chine» soit respecté, à ce
moment-là, et qu'il n'y ait pas de difficulté pour le syndicat de pouvoir faire
son travail correctement, tant pour accompagner la personne qui veut dénoncer
quelque chose que pour la personne qui est visée par les allégations à ce
moment-là.
M. Allaire : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Simard) : Merci
beaucoup. Je cède la parole à la députée de Saint-Laurent qui dispose de
12 min 20 s.
Mme Rizqy : Merci beaucoup.
Désolée, moi, je n'ai jamais fait du droit du travail, j'étais en fiscalité. Mais,
pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, 47.2, lorsqu'on parle... Parce que
tantôt on isolait le mot «grave», mais ma compréhension, c'est que le mot
«grave» était avec un autre mot, «négligence grave», et qu'on devait
interpréter le «grave» et la jurisprudence avec la connotation de «négligence
grave». N'est-ce pas?
M. Daigle (Christian) :Tout à fait, vous avez tout à fait raison là-dessus.
Mme Rizqy : OK. Et juste pour
terminer la discussion, parce que je trouvais ça un petit peu surréaliste, là.
Quand qu'on demande à vous c'est quoi, votre définition de «grave», ce n'est
pas une démonstration évidente que vous pouvez avoir une définition, je peux avoir
une définition, et par conséquent ça devient subjectif?
M. Daigle (Christian) :C'est ce que j'ai essayé d'indiquer également tout à
l'heure. Le niveau du mot «grave» peut changer d'une personne à l'autre. Si je
suis un chasseur, je suis un pêcheur, je me ramasse dans le bois puis je n'ai
plus de signal cellulaire, ce n'est pas grave pour moi. Pour quelqu'un qui n'a
jamais sorti de la ville, ça peut être très grave à ce moment-là.
Mme Rizqy : Ah! surtout si
elle porte des talons hauts comme moi. Donc, la preuve qu'évidemment, si ça
devient subjectif, ça peut même faire un frein, parce qu'une personne, si on
lui ajoute, dans son esprit, la notion de «grave», elle va devoir se dire :
Est-ce que c'est grave ou pas? Peut-être qu'on va perdre une dénonciation qui
peut être très utile parce qu'on a ajouté une définition qui n'est peut-être
pas nécessaire et qui est de toute évidence subjective.
M. Daigle (Christian) :Vous avez tout à fait raison à ce niveau-là, et c'est ce
que nous essayons de démontrer avec notre mémoire et avec mon allocution de
départ également aussi.
Mme Rizqy : Mais, M. le Président,
même si je ne suis pas une avocate en droit du travail, je tiens à vous dire
que j'ai finalement compris et je partage la même opinion. Je pense que c'est
tellement évident que c'est subjectif que ça devrait peut-être être retiré. On
fera, à ce moment-là, les représentations pour cela.
• (17 h 30) •
Je vous amène à la page 8 de votre
mémoire. Au niveau des mesures correctrices, pour les victimes de représailles,
devraient inclure le remboursement des frais juridiques. Je vais être très
honnête avec vous, vous me surprenez, parce que moi, j'aurais été plus
généreuse. L'enjeu que j'ai, c'est que, souvent, le remboursement, c'est le après,
mais, quand qu'on est devant le tribunal, c'est maintenant que les avocats
veulent être payés généralement, puis les factures entrent au poste et les
litiges peuvent durer des années. On a première instance, on peut s'aventurer,
par la suite, en Cour d'appel et même se retrouver en Cour suprême. Et là les
gens peuvent penser que j'exagère, mais ça peut prendre, des fois, 10 ans,
un litige. Et, pendant ce temps-là, l'employé doit quand même payer ses frais
juridiques, à moins qu'il y ait vraiment un avocat qui est capable d'attendre à
la fin, fin, fin du litige pour envoyer sa facture juridique. Mais il me semble
qu'au contraire on ne devrait pas avoir un fonds qui permet que, durant
l'instance ou les instances, de permettre à l'employé de pouvoir payer ses
frais juridiques? Parce que sinon, il y en a même qui réhypothèquent leurs
maisons pour faire face aux frais juridiques.
M. Daigle (Christian) :Effectivement, puis là-dessus, je vais laisser mon
collègue, Pierre-Alexandre, pouvoir vous adresser là-dessus, mais je tiens
juste à préciser que c'est quelque chose qu'on a ramené de notre rapport de
2016 également aussi. Donc, d'adopter ça, ce serait un bon pas, mais, pour la
suite, je vais laisser mon collègue répondre.
Mme Rizqy : Parfait.
M. Caron (Pierre-Alexandre) : Mais,
écoutez, dans notre mémoire précise qu'on devrait inclure le remboursement des frais
juridiques. On n'a pas précisé la fréquence à laquelle peut-être ces
remboursements-là pourraient... pourraient arriver. Donc...
Mme Rizqy : Oui.
M. Caron (Pierre-Alexandre) :
Donc, je ne pense pas qu'il y ait d'opposition entre votre vision et la... et
la nôtre dans notre mémoire. Je pense qu'on partage la même préoccupation puis
qu'on partage aussi votre constat du fait que c'est très cher, des démarches...
des démarches juridiques. Donc, on ne... je ne pense pas qu'on ait une opinion
forte sur la provenance de ces sommes-là, mais en autant qu'il y ait un
remboursement qui soit fait dans des délais raisonnables puis que le fardeau ne
soit pas trop important, là, pour la... pour la personne financière, ça nous
conviendrait très bien. Donc là, je pense qu'on partage... on partage votre
avis.
Mme Rizqy : Ravie de vous
l'entendre dire. «Ainsi que la possibilité de mutation vers un poste
équivalent»...
17 h 30 (version révisée)
Mme Rizqy : ...ravie de vous
l'entendre dire, «ainsi que la possibilité de mutation vers un poste
équivalent», ça, pour moi, c'est vraiment important, parce qu'une des
conséquences qui arrive lorsqu'une personne dénonce, c'est de se sentir ostracisée,
et rester dans ce milieu de travail... Quand vous représentez différentes
équipes, vous avez plusieurs... des milliers d'employés à représenter, mais il
y a des équipes de travail plus petites, et là ça peut devenir carrément
toxique pour l'employé de rester... un poste équivalent dans n'importe quel
autre, j'imagine, ministère aussi puis organisme.
M. Daigle (Christian) :Oui, bien, on veut rester dans les mêmes... dans les mêmes
paramètres de la même convention collective, tant du côté des ouvriers que du
côté des fonctionnaires. Nous savons que la mobilité du personnel est plus
facile aussi, de part et d'autre, parce qu'il y a des postes équivalents qui
peuvent avoir des opportunités dans d'autres ministères, puis, à ce moment-là,
ça permettrait de transférer une personne sans que ses nouveaux collègues de
travail sachent pourquoi elle a été transférée, parce qu'il en arrive
régulièrement, des transferts, puis il arrive régulièrement que des gens
changent d'emploi, pour différentes raisons, se rapprocher de la maison, les
enfants, peu importe.
Mais, à ce moment-là, ça permettrait
justement de sortir la personne d'un milieu, parce que, dans le milieu,
souvent, c'est des personnes qui vont être en opposition avec la personne, qui
vont faire valoir leur opinion à cette personne-là, alors que les personnes qui
pourraient l'appuyer vont rester plus silencieuses. Donc, on le voit un peu
dans tous les domaines de la société. Donc, pour nous, ce serait important de
permettre cette mutation-là ou ce transfert-là d'un employé vers un autre
ministère.
Mme Rizqy : Lorsque ce n'est
pas possible, disons, qu'il a une expertise vraiment très pointue, ça arrive,
notamment, particulièrement, chez vos membres en informatique, il y en a qui
sont ultraspécialisés, je pointe eux, mais il y en a d'autres, évidemment, à ce
moment-là, est-ce qu'il devrait y avoir une autre forme de compensation où
est-ce qu'on ne peut pas muter, mais que rester en emploi nuit à sa santé
mentale? Permettez-moi l'expression, d'avoir, au fond, dans les dommages-intérêts,
peut-être, une somme forfaitaire globale si la personne désire, à ce moment-là,
quitter puis se dire : Moi, à ce stade-ci, il n'y a aucun autre poste
équivalent dans la fonction publique, versus rester et nuire à sa santé
mentale.
M. Daigle (Christian) :Bien, ce serait peut-être quelque chose à évaluer. Nous, on
pense que, même dans certains domaines où, mettons... Puis là je prends un
exemple, mettons, un agent de bureau, on sait qu'il y en a plusieurs dans
plusieurs ministères, pas de problème. Si on prend un poste plus spécialisé
comme quelqu'un qui serait à la morgue, mettons, à ce moment-là, bien, c'est
plus difficile, mais il peut y avoir des équivalences quand même où la personne
peut quand même se réaliser avec un rangement équivalent, donc, elle ne perd
pas au niveau monétaire. Elle ne fera peut-être pas les tâches qu'elle faisait
auparavant, elle va peut-être aller dans un autre domaine. Si jamais on ne peut
pas faire ça, il y a toujours le reclassement qui pourrait se faire, mais là, à
ce moment-là, oui, il devrait y avoir une compensation peut-être monétaire pour
que la personne qui ne peut pas garder un poste de niveau équivalent puisse avoir
un travail, mais qu'elle ne perde pas au niveau monétaire là-dessus.
Mme Rizqy : Puis là,
excusez-moi, pardonnez-moi pour mon ignorance là-dessus, je pense qu'il n'y a
pas de mécanisme de suivi pour les représailles à savoir si, oui ou non, une
personne qui a dénoncé, par la suite, n'a pas eu d'avancement professionnel.
Est-ce que c'est quelque chose qu'on... un, je ne sais pas si ça existe, mais,
si ça n'existe pas, est-ce qu'on devrait avoir, justement, cet instrument de
mesure, de voir, OK, est-ce que les gens qui dénoncent, est-ce que, par la
suite, ils sont vraiment sur la voie d'accotement, puis ils doivent attendre,
puis s'ils appliquent à des postes, ils savent qu'ils ne l'auront pas, là?
M. Daigle (Christian) :Bien, c'est certain, puis je vais passer la parole à mon
collègue pour finir la réponse, là, mais c'est certain, dans un premier temps,
comme on n'était pas accompagnateur ou accompagnatrice des personnes
divulgatrices dans un premier temps, c'est difficile pour nous d'avoir pu
garder la trace des dénonciations qui ont pu être faites dans le passé, mais je
pense que ça pourrait être une bonne avenue. Puis je vais laisser mon collègue
Pierre-Alexandre, peut-être, compléter la réponse.
M. Caron (Pierre-Alexandre) : Bien,
ça pourrait être une avenue certainement intéressante. À notre connaissance,
non, il n'y a pas de tels mécanismes, là, qui sont prévus actuellement. Est-ce
que c'est un travail qui serait facile à faire? Je pense que ce ne serait pas
évident de savoir est-ce que la personne a eu de l'avancement ou pas, mais c'est
avec un grand nombre de données qu'on serait peut-être capable de dégager des
tendances. Donc, oui, si le Protecteur du citoyen ou, actuellement, le Secrétariat
du Conseil du trésor, là, qui est responsable de la mise en œuvre, là, pouvait
faire cette analyse-là, ce serait fort intéressant pour nous, là, je n'en doute
pas.
Mme Rizqy : Bien, moi, je
trouve que ce serait même intéressant, même pour nous autres, d'avoir un portrait
beaucoup plus global. Tantôt, on parlait que, justement, le syndicat pourrait
être agent facilitateur, le pare-feu pour les employés, mais aussi, il me
semble que ça permettrait pour vous d'avoir une vue très globale de tout ce qui
se passe, mais aussi des conséquences, des conséquences pour l'employé, mais, j'ose
dire même, de l'équipe de travail, l'unité, parce que ce n'est pas juste l'employé
qui est visé, lorsqu'il y a des représailles, ça affecte l'unité de travail au
complet, là.
M. Daigle (Christian) :Tout à fait. Puis, avec un mécanisme de révision à tous les
trois ou cinq ans, ça permettrait de pouvoir revenir périodiquement sur la
situation et de faire les constats nécessaires, à ce moment-là, en temps et
lieu, de manière périodique, justement, puis de voir la tendance qui peut se
dessiner à travers ces évaluations-là du projet qui va se faire.
Mme Rizqy : OK. Bien,
parfait. Bien, merci beaucoup.
M. Daigle (Christian) :Merci à vous.
Le Président (M. Simard) : Merci.
Je cède la parole à la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie : Merci. J'ai
quatre minutes, je vais <y aller rapidement...
RLe Président (M. Simard) :
...merci.
Je cède la parole à la députée de Sherbrooke.
Mme Labrie :
Merci.
J'ai quatre minutes, je vais >y aller rapidement.
Une voix : ...
Le Président (M. Simard) : Ah!
non, pardon, on vous en ajoute. On vous en ajoute. On va faire le calcul.
Alors, commencez, je vous informerai.
Mme Labrie : Bien, pouvez-vous
me dire combien?
Le Président (M. Simard) : À
peu près 7 min 34 s...
Mme Labrie : Ah mon Dieu! OK.
Le Président (M. Simard) : ...à
peu près.
Mme Labrie : Parfait. Je n'ai
jamais eu autant de temps. Ça fait que je vais avoir plusieurs questions. Une
d'entre elles, vous parlez d'un comité multipartite pour analyser le processus
de protection contre les représailles. Vous mentionnez un comité qui
regrouperait le syndicat... pas le syndicat, le Secrétariat du Conseil du
trésor, le Protecteur du citoyen et le ministère du Travail, mais vous ne
proposez pas qu'il y ait des représentants syndicaux sur ce comité. Je me
questionne à ce sujet-là. Pourquoi?
M. Daigle (Christian) :Je vais laisser la parole à un de mes collègues, peut-être
Gabriel ou Pierre-Alexandre.
M. Caron (Pierre-Alexandre) : Mais,
écoutez, c'était difficile pour nous d'évaluer la pertinence d'être présent sur
ce comité-là. Parce que, bien, premièrement, on ne sait pas... on ne sait pas
encore s'il va exister, ce comité-là, c'était une simple proposition. On croit
qu'en tous les cas il y aurait déjà eu l'opportunité, là, pour les parties, là,
mentionnées dans ce comité-là, qui est la recommandation, finalement, du SCT,
d'avoir déjà eu l'opportunité de se regrouper. Peut-être que, si on avait un
rôle, là, qui était plus prépondérant, là, dans la loi, il y aurait une
pertinence pour nous de pouvoir s'y asseoir. En tous les cas, si on est invités
à y siéger, je serais surpris qu'on refuse.
Mme Labrie : C'est bien noté.
D'ailleurs, vous venez d'en discuter avec ma collègue, puis vous revendiquez le
droit d'être... de représenter un de vos membres dans un processus de
divulgation. En France, le syndicat peut lui-même être divulgateur, d'autres
nous ont soulevé de l'intérêt pour ça. Est-ce que c'est un intérêt que vous
auriez aussi de pouvoir agir comme divulgateurs? Parce que, par exemple, en
France, un... quelqu'un qui n'est pas témoin direct, mais qui est un tiers peut
être divulgateur. Est-ce que c'est quelque chose qui est intéressant pour votre
syndicat?
M. Daigle (Christian) :Ça pourrait être quelque chose d'intéressant. Par contre,
nous, on prend pour acquis que les personnes, dans un premier temps, devraient
s'avancer par elles-mêmes dans le même principe qu'un grief. Quelqu'un qui
constate que sa convention ou qui pense que sa convention n'est pas respectée
se doit de faire le grief elle-même. Ce n'est pas au syndicat d'aller porter la
cause, à moins que ce soit un ensemble de travailleurs qui y soient, puis là
c'est un grief syndical qui est déposé. Mais lorsque la personne vit quelque
chose de personnel, tout comme les personnes qui constatent quelque chose de
personnel, on pense que la personne devrait, normalement, elle-même faire les
démarches pour dénoncer la situation parce que c'est la témoin principale et
c'est la témoin oculaire, je pourrais dire, c'est de visu, mais c'est la
personne qui a constaté la chose.
Donc, y aller par une tierce partie, pour
nous, ça viendrait avoir plus de difficultés parfois sur certains aspects.
Mais, dans des cas peut-être plus graves, on pourrait regarder, oui,
effectivement, parce que la personne qui constaterait quelque chose de vraiment
majeur pourrait, à ce moment-là, peut-être avoir peur pour son bien-être ou son
intégrité peut-être.
Mme Labrie : Exact. Ça
pourrait faciliter la protection contre les représailles.
M. Daigle (Christian) :Effectivement.
Mme Labrie : OK. Une question
qu'on a posée à plusieurs groupes, c'est celle du privé, là, on a une loi qui
protège seulement la divulgation pour les organismes publics. Dans beaucoup de
pays d'Europe, il y a également une protection pour les divulgateurs dans le
milieu privé. Donc, je vais vous demander ce que vous en pensez. Mais là, avec
l'exemple que vous avez donné à mon collègue de la partie gouvernementale, tout
à l'heure, sur un exemple de mauvaise utilisation de fonds syndicaux, c'est
clair que, si on élargit la portée de la loi pour couvrir les organismes
privés, ça couvrirait également les syndicats. Donc, je vous pose la question :
Seriez-vous à l'aise que la portée de la loi couvre l'ensemble des
organisations, pas seulement le secteur public, mais également le privé?
• (17 h 40) •
M. Daigle (Christian) :Bien, on n'a aucun problème à ce niveau-là, parce qu'il
peut y avoir des actes répréhensibles à tous les niveaux, et de pouvoir
justement ajouter des organismes, ajouter des groupes à travers ça, on pense
que l'ensemble de la société en serait protégé. Parce que, bien que les
ministères et organismes représentent l'intérêt public ou travaillent pour
l'intérêt public, il y a beaucoup de compagnies privées qui ont également un
impact sur l'intérêt public. Alors, nous croyons que, oui, les groupes privés
devraient à ce moment-là. Mais, ce faisant, il faudrait ajouter des ressources
au niveau du Protecteur du citoyen si on voulait aller dans cette mouvance-là,
parce qu'il y aurait peut-être beaucoup plus de dénonciations qui pourraient se
faire et, ce faisant, amener beaucoup de travail au Protecteur du citoyen.
Donc, il aurait besoin d'avoir un regard sur peut-être les effectifs en place
pour effectuer de tels suivis.
Mme Labrie : Bien entendu. Puis,
de toute façon, assurément, si on améliore la loi puis la protection contre les
représailles, il y aura assurément plus de divulgation, donc, ça impliquait
nécessairement davantage de ressources.
J'aurais peut-être une dernière question.
Vous nous parlez de mesures correctrices à l'égard des victimes de représailles,
vous parlez de remboursements de frais juridiques, etc. En France, ils ont
aussi inclus le soutien psychologique pour les divulgateurs. Est-ce que c'est
quelque chose pour lequel vous avez de l'intérêt?
M. Daigle
(Christian) :Oui, certainement, il
pourrait y avoir de l'intérêt. Déjà, on a des programmes, le PAE qu'on appelle,
Programme d'assistance aux employés. Donc, il y a un intérêt, justement, <de
pouvoir utiliser ça...
M. Daigle (Christian) :
...oui, certainement, il pourrait y avoir de
l'intérêt. Déjà, on a des programmes, le PAE qu'on appelle, Programme
d'assistance aux employés. Donc, il y a un intérêt, justement, >de
pouvoir utiliser ça parce qu'il y a une partie qui est payée par l'employeur à
ce niveau-là. Mais, s'il peut y avoir d'autres mécanismes qui peuvent être
ajoutés pour aider la personne, justement, qui subirait des représailles à
pouvoir reprendre le bon chemin, à ce moment-là, pour être efficace puis
reprendre ses tâches, bien, on n'a pas de problème à ce niveau-là pour ajouter
des protections, ajouter des... ajouter des — mon Dieu, il faut que
j'aie un blanc de mémoire à ce moment-ci, là — mais ajouter un... des
bonifications, je dirais, au projet de loi pour permettre aux gens, justement,
de pouvoir avoir toutes les ressources nécessaires.
Mme Labrie : Puis j'imagine
que vous le voyez aussi auprès de vos membres qui sont témoins de situations
répréhensibles, que ça doit générer une certaine... une certaine anxiété ou des
craintes d'avoir été témoin ou d'avoir connaissance de ça puis de ne pas trop
savoir comment gérer la situation.
M. Daigle (Christian) :Oui, a posteriori, pour avoir entendu des personnes qui ont
été dénoncer ou qui ont voulu aller dénoncer des choses, le niveau de stress
est très élevé, tant lorsque vient le temps de dénoncer que pour la suite des
événements également aussi. Même lorsque le dossier est terminé et que le
dossier est clos, ils vivent encore du stress à certains niveaux, et, à ce
moment-là, on pense que, oui, un support pourrait être bénéfique pour les gens.
Mme Labrie : OK. Puis donc
même après que le dossier soit clos, c'est intéressant que vous le nommiez,
oui.
M. Daigle (Christian) :Bien, oui, parce que, dans le milieu de travail, s'il y a
quelque chose qui a été dénoncé, qui a été amené, bien, automatiquement, comme
tantôt ça a été mentionné, il peut y avoir des répercussions dans le milieu de
travail aussi. Donc, la personne peut vivre un certain stress à ce niveau-là
également, mais les gens peuvent vivre le stress de différentes façons, mais ça
peut être quelque chose qui peut avoir eu lieu.
Mme Labrie : Parfait. Ça fait
le tour de mes questions, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Simard) : Bien,
merci à vous, chère collègue. Merci, chers intervenants, pour cette précieuse
participation à nos travaux. Avant de conclure, je dépose les mémoires des
organisations qui n'ont pas été entendues.
Et, comme notre commission vient
d'accomplir son mandat, j'ajourne nos travaux sine die. À bientôt!
(Fin de la séance à 17 h 43)