To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance

Version préliminaire

43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Tuesday, November 25, 2025 - Vol. 48 N° 9

Special consultations and public hearings on Bill 7, An Act to reduce bureaucracy, increase state efficiency and reinforce the accountability of senior public servants


Aller directement au contenu du Journal des débats


 

Journal des débats

9 h 30 (version non révisée)

(Neuf heures quarante-sept minutes)

Le Président (M. Laframboise) : Bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des finances publiques ouverte. Je vous souhaite la bienvenue. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin d'entreprendre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi no 7, Loi visant à réduire la bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité des hauts fonctionnaires. Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Mallette (Huntingdon) est remplacée par Mme Lachance (Bellechasse); Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont) est remplacée par Mme Maccarone (Westmount—Saint-Louis); et Mme Zaga Mendez (Verdun) est remplacée par M. Fontecilla (Laurier-Dorion).

Le Président (M. Laframboise) : Merci, Mme la secrétaire. Nous débuterons ce matin par les remarques préliminaires, puis nous entendrons par la suite les organismes suivants : Transplant Québec, Dr Frédérick D'Aragon en visioconférence et Héma-Québec. J'invite maintenant la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et de l'efficacité de l'État à faire ses remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez de six minutes. La parole est à vous.

Mme Duranceau : Merci, M. le Président. Alors, bonjour à tous les membres de la commission. Donc, le député de Laurier-Dorion, un retour avec moi, évidemment députée de Westmount—Saint-Louis, ça fait plaisir, député d'Arthabaska, qu'on attend sous peu, potentiellement le député de Saint-Jérôme aussi, je crois. Alors, bref, nous voici réunis aujourd'hui pour le début des consultations particulières, là... sur le projet de loi sept qui vise à...

Mme Duranceau : ...à réduire la bureaucratie, accroître l'efficacité de l'État et renforcer l'imputabilité des hauts fonctionnaires. Alors, merci à tout le monde d'être là. Le projet de loi n° 7, je l'ai mentionné, c'est le premier jalon, première étape d'un grand chantier d'amélioration de l'efficacité de l'État. Puis on veut améliorer l'efficacité de l'État pour... pour garantir la qualité des services aux citoyens et l'accès aux services. Et puis ça, bien, ça va passer nécessairement par la fusion, l'abolition de plusieurs organismes, par... l'élimination de tâches et de reddition de comptes qui sont redondantes, la simplification de l'organisation du travail, puis le renforcement de l'imputabilité des titulaires d'emplois supérieurs. Alors, tel que proposé, le projet de loi touche plus de 50 lois qui sont... qui sont en vigueur et qui devront être modifiées. Alors, c'est assez... assez costaud comme projet de loi, certains règlements qui se rattachent à ça aussi.

Alors, je suis certaine que mes collègues des oppositions saisissent l'importance du chantier, puis j'espère qu'ils pourront m'aider aussi à bonifier, puis, s'ils ont d'autres idées, on est prêtes à les entendre. Puis, bien sûr, bien, on va être à l'écoute des organismes et des associations qui sont... qui sont présents. Le but de tout ça, je vous dis, c'est de maintenir les services aux citoyens, de rassurer les citoyens qu'il n'y aura pas d'enjeu à cet égard là. Et... bien, je nous souhaite des échanges constructifs dans le but d'améliorer les choses et puis de rendre notre... notre État encore plus efficace au profit des citoyennes et citoyens du Québec. Alors, voici, M. le Président, et j'en profite pour saluer le député d'Arthabaska.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, Mme la ministre, évidemment, et également député de Bertrand. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle... représentant de l'opposition officielle, excusez-moi, députée de Westmount—Saint-Louis à faire ses remarques préliminaires pour une durée de 4 min 30 s. La parole est à vous.

• (9 h 50) •

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Évidemment, oui, je suis ici en renfort de mon collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, qui aurait voulu sincèrement est parmi nous aujourd'hui, mais on sait que c'est aussi une grande journée en ce qui concerne le budget pour les Québécois. Alors, il est occupé ailleurs. Cela étant dit, il me fait vraiment plaisir d'être ici, parmi vous tous et toutes, ce matin. C'est un projet de loi d'une grande importance, j'en suis... j'apprécie les commentaires de la ministre en ce qui concerne l'ouverture pour des modifications, parce que, si je pouvais faire un genre d'analogie quand je lis le projet de loi, et j'ai vraiment hâte entendre les groupes, c'est comme un vaste chantier de rénovation architecturale. Je le vois vraiment de cette manière, c'est complexe, c'est multidimensionnel. Ça vise, oui, à moderniser, simplifier le campus gouvernemental qui est vieillissant. Alors, je pense que les gens peut être en accord en ce qui concerne la vision. Mais si l'objectif sincère, c'est d'accroître l'efficacité, moins de bâtiments, des ressources partagées, je pense qu'on a une responsabilité, comme élus, comme porte-parole, d'avoir une grande écoute aux experts qui oeuvrent non seulement dans les domaines, mais qui sont en train d'analyser puis voir cette transition, puis qui nous disent de, peut être, nous devons faire fi des préoccupations. C'est un sujet très sensible. Il y a beaucoup de critiques en ce qui concerne cette transformation, entre autres, quand on perd des dons d'organes.

Alors, je suis vraiment hâte d'entendre le premier groupe Transplant Québec, qui va nous partager leur expertise puis leurs préoccupations. Mais je pense qu'on a vraiment, comme j'ai dit, une responsabilité, comme élus, d'avoir une bonne écoute parce que c'est un projet de loi perfectible, et l'opposition officielle sera ici pour occuper cet rôle. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. J'invite maintenant le député de Laurier... Laurier-Dorion à faire ses remarques préliminaires pour une durée de 1 min 30 s. La parole est à vous.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, tout le monde. Bonjour, Mme la ministre. Je salue le personnel de la commission ainsi que mes collègues députés. Donc, voilà, nous sommes ici au tout début d'un projet de loi qui est très gros, un projet de loi mammouth même, là, qui va réorganiser de façon substantielle plusieurs branches très importantes de l'appareil étatique, là. Il y a, de toute évidence, ici une volonté de centralisation du pouvoir politique et de diminution d'autonomie de plusieurs organismes, même de... qui va procéder, dans certains cas, à dénaturer la mission même de certains... certaines institutions de l'État, et... dans le début, et nous en sommes là, de diminuer la bureaucratie, favoriser la flexibilité pour...

M. Fontecilla : ...au problème de... mais il y a des risques aussi, des risques que... le but avoué, c'est de réaliser des économies, mais on va peut-être arriver à des économies de bouts de chandelle, comme on dit, tout en diminuant la qualité de nos... des services offerts par différentes institutions publiques. Je salue la volonté de la ministre à entendre les possibles améliorations qu'on pourrait apporter à ce projet de loi, et nous allons travailler dans ce sens. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il consentement pour permettre au député d'Arthabaska de faire des remarques préliminaires d'une durée d'une minute? Consentement, oui. Parfait. Donc, M. le député, la parole est à vous.

M. Boissonneault Merci beaucoup, M. le Président. Je veux saluer mes estimés collègues, Mme la ministre. Je suis très content d'être avec vous aujourd'hui. L'idée de rationaliser l'utilisation des ressources de l'État, procéder à un allègement réglementaire, bien, on pense que c'est une bonne idée, au Parti québécois. C'est une position qu'on défend depuis longtemps, donc on est contents de pouvoir participer à cette démarche-là qui permet d'en donner plus à nos concitoyens pour leur argent, en donner plus aux contribuables. Donc, on est d'accord avec le principe.

On vous remercie d'ailleurs de permettre des consultations, parce que ce sera important pour nous d'échanger avec les différents groupes qui viendront ici, poser des questions. On a évidemment des interrogations sur ce qui est présenté dans le projet de loi, dont on voudra discuter, mais sur le principe, le Parti québécois est d'accord et l'a déjà... a déjà discuté ou fait des propositions en ce sens-là. Donc, pour nous, c'est important d'être ici. On vous remercie encore une fois pour cette possibilité d'être... de procéder à des consultations, puis on va travailler le plus diligemment possible à améliorer les ressources... l'utilisation des ressources pour nos concitoyens.

Le Président (M. Laframboise) : ...M. le député, nous allons maintenant débuter les auditions. Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de Transplant Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Bouchard (Martine) : Bonjour. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs membres de la commission, je suis accompagnée aujourd'hui du docteur Prosanto Chaudhury, chirurgien transplanteur et responsable du volet transplantation chez Transplant Québec, et du docteur Matthew Weiss, intensiviste pédiatrique responsable du volet don d'organes chez Transplant Québec. Je les remercie de leur présence. Je me présente, Martine Bouchard, PDG de Transplant Québec.      Nous sommes réunis pour examiner une disposition du projet de loi n° 7 qui aurait des conséquences majeures sur un pilier essentiel de notre système de santé, la coordination du don et de la transplantation au Québec. Cette mission repose sur un ingrédient sans lequel rien n'est possible : la confiance des familles, des donneurs, la confiance des receveurs et des équipes médicales. Cette confiance est bâtie sur la transparence, sur l'équité et l'indépendance des décisions. Transplant Québec incarne un modèle où l'autonomie organisationnelle assure la neutralité morale, notamment dans l'attribution des organes.

En effet, l'attribution des organes est un acte éthique majeur qui exige impartialité, transparence et indépendance. Actuellement, l'autonomie de Transplant Québec garantit l'intégrité du processus et sa légitimité morale. Son intégration au sein d'une société d'État pourrait miner ces éléments, et aucune justification éthique ou clinique ne pourrait soutenir une telle dissolution. Depuis plus d'un demi-siècle, Transplant Québec n'est pas seulement une structure administrative, c'est une instance clinique spécialisée qui assure en temps réel la coordination du don d'organes partout au Québec. Notre équipe d'urgence hautement spécialisée et expérimentée, intervient au cœur d'un processus où chaque minute compte, où chaque décision peut sauver ou coûter la vie. Transplant Québec accompagne les familles endeuillées qui... transforme leur perte en espoir et soutient les équipes médicales dans le réseau de la santé, et ce, partout au Québec.

Notre travail exige une précision absolue, une autonomie opérationnelle et une expertise unique, développée au fil des 16 000 vies de Québécois et Québécoises sauvées depuis notre création. Comme toute organisation qui porte plus de 50 ans d'expertise, Transplant Québec a bâti ce qu'aucune structure ne peut recréer rapidement : une mémoire institutionnelle profonde, une culture professionnelle solidifiée par l'amélioration continue, des pratiques éprouvées, des réflexes opérationnels affinés et une crédibilité qui est enracinée. Cette expertise, cette indépendance ne peuvent être diluées ni transférées sans conséquences graves.

Certains avancent qu'une intégration de Transplant Québec au sein d'Héma-Québec serait logique ou efficiente. Malheureusement, cela témoigne d'une incompréhension profonde des différences fondamentales entre nos deux organisations. Je veux le dire clairement : Héma-Québec, c'est une institution qui est indispensable pour le Québec. Son rôle dans la gestion du sang, du...

Mme Bouchard (Martine) : ...du tissu des produits biologiques est vital, mais sa mission repose sur une réalité logistique et industrielle. Collecte, traitement, conservation et distribution. Transplant Québec, lui, relève d'une mission qui est entièrement différente. L'urgence clinique. Notre mission repose sur une réalité qui est ancrée dans l'humain et qui se constitue et se construit à mesure selon chaque situation. Et c'est là qu'on ne peut pas confondre le tout. On ne gère pas une transplantation comme on gère un inventaire. Je vais juste prendre deux minutes, je vais le répéter. On ne gère pas une transplantation comme on gère un inventaire. Un organe, ce n'est pas un produit qui peut être entreposé. Un organe, c'est un tissu qui est vivant, dont la survie se compte en minutes. Un cœur doit être transplanté en moins de 4 h, un foie en moins de 12 h, les poumons et les reins ont eux aussi des délais qui sont critiques, impossibles à étirer. Le moindre retard peut coûter une vie.

À l'inverse, plusieurs produits biologiques gérés par Héma-Québec peuvent être conservés des jours, des semaines, voire davantage, parce que leur nature le permet. Ce n'est pas une question de compétence, c'est une question de biologie fondamentale. Assimiler la transplantation à une chaîne d'approvisionnement, c'est confondre une urgence vitale avec une gestion d'inventaire. Ce n'est pas la même temporalité. Ce n'est pas la même finalité et ce n'est surtout pas la même expertise. Une structure fusionnée plus lourde, moins agile, ne pourrait pas répondre aux impératifs cliniques de la transplantation. Ce n'est pas un jugement, c'est un fait. Les données sont sans appel. 70 % des fusions échouent. Les recherches du CIRANO montrent que dans 70 % des fusions institutionnelles, les coûts de transition dépassent largement les économies anticipées.

• (10 heures) •

Dans leur ouvrage The Mergers and Acquisitions Failure Trap: Why Most Mergers and Acquisitions Fail and How the Few Succeed publié en novembre 2024, les professeurs Lev et Gu révèlent que de 70 à 75 % de toutes les acquisitions échouent à atteindre leur objectif. Cette conclusion repose sur une étude exhaustive de 40 000 transactions réalisées sur quatre décennies. Les causes de ces échecs sont connues. Dilution des missions, perte d'expertise, résistance des équipes, baisse de performance, affaiblissement de la confiance du public. Ces ingrédients nous semblent malheureusement réunis dans ce contexte-ci pour Transplant Québec.

M. le Président, vous avez aujourd'hui l'occasion de faire ce que les meilleures gouvernances savent faire. Reconnaître à la lumière des dizaines de milliers d'exemples documentés que certaines réformes ne produisent pas les effets espérés lorsqu'elles touchent des missions aussi sensibles que celles de sauver des vies humaines. En choisissant de préserver l'indépendance de Transplant Québec, vous enverrez un signal fort, celui d'un État qui privilégie la rigueur, l'efficacité clinique et la confiance du public. Et si on a besoin de regarder les meilleures pratiques internationales, alors, elles sont claires. On ne peut plus claires. Le pays leader mondial du don d'organes, l'Espagne, n'a jamais fusionné sa coordination de transplantation avec son système de sang. Elle a fait un choix stratégique, une organisation indépendante, dédiée, spécialisée. C'est grâce à cette indépendance qu'elle est devenue la référence mondiale. Si nous voulons que le Québec soit à la hauteur des standards internationaux, nous devons suivre cette voie. Préserver Transplant Québec dans son rôle unique et indépendant.

À la lumière des éléments soulevés ici, des questions fondamentales s'imposent. Comment justifier une dissolution qui fragilise la confiance des familles et des patients, alors que cette confiance est le socle même du système? Comment concilier une mission clinique et éthique où chaque minute peut sauver ou coûter une vie avec une mission industrielle et logistique où le facteur temps n'a pas la même portée vitale? Quelle consultation a été menée auprès des experts, des cliniciens, des familles de donneurs et des patients en attente de transplantation, et pourquoi n'ont-ils pas été placés au cœur de cette décision? Dans un dossier où les conséquences se mesurent en vies humaines, le silence face à ces questions ne peut être accepté.

En terminant, M. le Président, je vous répète, puisque cela est crucial, la coordination du don d'organes, ce n'est pas une gestion d'inventaire, c'est une chaîne de solidarité humaine, une promesse de vie qui transcende les chiffres et les structures. Toucher à l'indépendance de Transplant Québec, c'est toucher à la confiance des donneurs, la confiance des receveurs et de leurs familles, la confiance des professionnels de l'écosystème et, ultimement, la survie des patients. Je vous demande, donc, de poser trois gestes nécessaires pour assurer la pérennité de la chaîne de vie. En premier lieu, retirer du projet de loi toutes dispositions visant la dissolution de Transplant Québec. Deuxièmement, le maintien de l'autonomie clinique et organisationnelle de Transplant Québec. Troisièmement, l'adoption d'une loi dédiée au don et à la transplantation d'organes, tel que recommandé unanimement...


 
 

10 h (version non révisée)

Mme Bouchard (Martine) : ...les membres de la commission en octobre 2024. Ces gestes ne sont pas simples de choix techniques. Ils sont un engagement envers les patients qui attendent une seconde chance, envers les familles qui acceptent de donner et envers la société qui croit que sauver une vie est la plus noble des missions.

Ne réduisons pas le don d'organes à une logique de gestion, préservons-le comme il est, une chaîne de solidarité humaine, un acte de confiance et d'amour qui transcende les chiffres et les structures.

Préservons Transplant Québec, préservons la confiance, préservons la vie. Je vous remercie.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, Mme Bouchard.

Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, la parole est à vous pour 16 minutes 30 secondes.

Mme Duranceau : Merci, M. le Président. Merci, Mme Bouchard.

En fait... l'objectif ici, là, ce n'est absolument pas de toucher à l'expertise, puis ce n'est absolument pas non plus l'objectif de toucher au financement qui a trait au don d'organes. Tu sais, ça, on s'entend tous, là, il faut préserver ça. Ça fait qu'il n'a jamais été question de ça dans le... le projet de loi. Je tiens à dire qu'aujourd'hui on est là pour discuter, là. Alors, c'est pour ça que c'est aujourd'hui qu'elles ont lieu, les... les conversations.

Puis, peut-être d'entrée de jeu, je suis très sensible à tout ça. J'ai des... des gens autour de moi, proches de... de ma famille, qui... qui comprennent tout à fait le fonctionnement, tout ça, puis qui m'ont sensibilisée aux circonstances particulières du... de la transplantation, là, des... des organes. Mais j'ai une question pour vous. Parce qu'au niveau... au Canada puis à... à l'international, c'est souvent le... les tissus puis le... le don d'organes, là, c'est souvent la même entité qui s'occupe de ça. Alors, pourquoi, là, ici, au Québec, on est absolument différents, puis que ce n'est pas possible que et les tissus humains et les organes soient gérés, d'un point de vue administratif seulement, là, par la même entité?

Mme Bouchard (Martine) : ...un piton? OK. Merci. Très bonne question. Alors, je vais... je vais débuter puis je vais laisser mes deux collègues, qui ont participé, dans le fond, avec Canadian Blood Service, Service de sang canadien, puis qui pourront vous expliquer davantage.

Effectivement, il y a beaucoup d'organisations où le sang et... pas le «sang», où les tissus et les organes sont ensemble. Puis c'est un contexte vraiment particulier pour lequel il y a des décisions qui avaient été prises beaucoup avant mon arrivée, que je ne peux pas expliquer, où le... le transfert des tissus a été fait vers Héma-Québec. Dans le fond, ça, on... on ne remet pas ça en question. Ce qu'on remet en question, c'est qu'on soit sous le... le chapeau d'Héma-Québec, donc du sang. Et c'est là où est la nuance majeure. Parce qu'il y a... il y a vraiment un endroit au monde seulement qui est comme ça, alors on se questionne sur cette possibilité-là.

Puis là je... j'aimerais passer la parole à... à Prosanto... à docteur... pardon, Dr Chaudhury et Dr Weiss, qui vont vous expliquer exactement les nuances à l'international, mais également au Canada, parce que je pense qu'il y a confusion dans le modèle, où antérieurement, on nous a... on a entendu que c'était tout ensemble, or ce n'est pas le cas.

M. Chaudhury (Prosanto) : Donc, pour peut-être... pour commencer, si on regarde le niveau national, Canadian Blood Services, la Société de sang... de... canadien du sang, oui, ils ont un rôle dans la coordination de tissus, de sang et de coordination d'échange d'organes, mais c'est leur seul rôle. Ils ne prodiguent aucun service clinique. Dans chacun des... des provinces, les... les organismes de don sont séparés complètement. C'est des organismes indépendants qui gèrent les donneurs et qui gèrent les listes d'attente. Ce que fait CBS à ce niveau-là. Et Matt et moi, nous sommes parties de... de leur commission... leur comité de gestion et qui transitionne vers une nouvelle modèle sur laquelle Mme Bouchard et moi nous siégeons au niveau fédéral. Et c'est... c'est une gestion de... de politique d'échange, d'implantation de politique d'échange, de réseau de... d'échange de... de reins pour des patients hautement sensibilisés, des échanges en cas d'urgence pour les foies, les cœurs, les poumons. Mais c'est au niveau de gestion d'échange vraiment que s'implique le... et au développement de... de politiques qui gouvernent ces échanges. Et, encore une fois, Dr Weiss et moi et Dr D'Aragon, qui vous allez entendre tantôt, ont participé à plusieurs de ces entreprises.

Si on regarde où les organes...

M. Chaudhury (Prosanto) : ...et les tissus sont mis ensemble, c'est au niveau de la coordination du prélèvement. Ce n'est pas le «banking» ou quoi que ce soit, ce qui devient une... de production, d'inventaire. Mais, pour la coordination du prélèvement, oui, il y a certaines zones où il y a une complémentarité entre les deux.

Mme Duranceau : ...au niveau du prélèvement puis de la complémentarité? Tu sais, après ça, comment c'est conservé, ça, c'est une chose, mais est-ce que cette... est-ce que cette collaboration-là, elle existe en ce moment, de manière naturelle, entre les tissus puis les organes?

M. Chaudhury (Prosanto) : Bien, comme Mme Bouchard vient de vous exposer, il y a une énorme différence dans la portée et la façon que sont prodigués les prélèvements d'organes et de tissus. Les tissus peuvent être... les cadavres qui font le don de tissus peuvent être préservés. Les prélèvements sont centralisés, les prélèvements se font de jour, pas en milieu de nuit et pas dans tous les coins du Québec. Tandis que nous, en tant que préleveurs, on sera partout au Québec, à n'importe quel hôpital, à n'importe quelle heure de la nuit, à Amqui, n'importe où, en Gaspésie, au nord du Québec. Là où est le donneur, Transplant Québec est là, est là. Et quand le donneur est disponible, Transplant Québec est là. Peut-être, Dr Weiss peut renchérir là-dessus.

• (10 h 10) •

M. Weiss (Matthew) : Oui. Donc, merci, Prosanto. Merci à la commission. Les collaborations qui existent déjà, c'est que, quand on a un donneur qui est potentiellement un donneur d'organes et tissus, bien, c'est déjà Transplant Québec qui fait la première ronde d'approche pour discuter des possibilités de dons de tissus. Donc, ça, c'est déjà une collaboration qu'on fait avec Transplant Québec, et on fait ça exactement comme Dr Chaudhury a dit. L'équipe de Héma-Québec n'est pas dispo dans les hôpitaux les jours non ouvrables. C'est notre expertise d'être là, au chevet, à n'importe quel moment, à n'importe quel hôpital, mais qui est comme une grande différence de culture et qui serait un facteur de risque dans la fusion des deux organismes. Parce qu'avec raison, Héma-Québec, la majorité vaste de le budget et de leur énergie administrative va être focussée sur le sang. Le sang, là, c'est critique pour le système de santé, et ça, c'est leur mission primordiale.

Notre crainte majeure, c'est que nos inquiétudes, notre réalité, qui est vraiment différente qu'une collecte de sang qui se fait à Place Laurier, à 3 heures de l'après-midi un mercredi, ce n'est pas notre réalité. Notre réalité, c'est avec un donneur, un receveur, au chevet, dans les moments hautement émotifs, et ça prend des ressources, l'expertise et une administration pour soutenir ça, qui est complètement différent de la mission primaire de Héma-Québec, qui est le geste de collecte et de distribution du sang.

Mme Duranceau : Mais sur l'aspect purement administratif de la chose, là... Parce que moi, l'expertise clinique, là, on ne touche pas à ça, là, on ne touche pas à ça, c'est préservé. Puis absolument pas, en tout cas, mon intention de me mêler de cet aspect-là, là, parce qu'il y a des gens qui connaissent ça puis qui s'en occupent. Mais les ressources administratives, Transplant Québec, là, c'est 16 millions par année qui est financé 100 % par le gouvernement du Québec. C'est pour ça qu'on se pose la question, parce qu'il faut regarder nos structures puis voir : Bon, bien, est-ce qu'il y a un bien-fondé à avoir ça de manière distincte, à avoir un conseil d'administration distinct, à avoir une équipe administrative distincte, avoir des services informatiques distincts. Est-ce que... est-ce qu'on bénéficierait collectivement, là, du regroupement sur le plan administratif? Je ne parle pas de l'aspect médical de la chose, là. Ça fait que ça, expliquez-moi.

Mme Bouchard (Martine) : Alors, d'abord, on est un organisme privé, OBNL, avec...

Mme Duranceau : Financé à 100 % par le gouvernement du Québec.

Mme Bouchard (Martine) : Comme beaucoup d'OBNL, tout à fait.

Mme Duranceau : Voilà.

Mme Bouchard (Martine) : On n'est pas dans la fonction publique et 90 % de notre budget est dévolu à l'activité clinique. Il y a quatre directeurs seulement, pas de VP, quatre directeurs. On est accompagné par deux directeurs médicaux qui le font à temps partiel. Donc, l'économie potentielle, si on cherche une économie, elle est...

Mme Bouchard (Martine) : ...vraiment minuscule. C'est un salaire de directeur d'OBNL, pas un salaire... un salaire de VP de santé de société d'État. Et dans toutes les figures de scénario, quand on fusionne les organisations, forcément, vous parlez tantôt de la notion clinique, mais on ne peut pas avoir juste la notion clinique administrée par des gens qui ne connaissent pas les dédales de l'ensemble de transplantations et tout l'écosystème de don et de transplantation. Donc, forcément, il va y avoir aussi des coûts cachés.

Mme Duranceau : Mais... je m'excuse de vous interrompre, avez-vous parlé avec Héma-Québec pour, comme, échanger sur ça puis voir d'un point de vue pratico-pratique, ça marche-tu ou ça ne marche pas.

Mme Bouchard (Martine) : Qu'est-ce qui... Excusez, je n'ai pas...

Mme Duranceau : Est-ce que vous avez parlé avec Héma-Québec, avec la PDG d'Héma-Québec pour dire :  OK, ils nous parlent de ça, là, est-ce que c'est réaliste comme proposition ou sur le plan administratif, on... ça... on n'est pas capable de se parler? Est-ce que vous avez eu cette conversation-là?

Mme Bouchard (Martine) : Oui. On a d'abord eu une rencontre le mardi soir par le sous-ministre qui nous a annoncé que le projet de loi serait déposé le lendemain. Et mercredi soir, donc le lendemain, j'ai eu une rencontre téléphonique avec Nathalie Fagnan qui m'a dit : Martine, on va accueillir tout le monde. Et alors là, je lui ai dit : Si le but de la loi sept est de diminuer la bureaucratie et de faire en sorte qu'on ait des économies, où seront-elles? Je ne le vois pas. Si le but est de créer le chaos, puis faire en sorte que les gens soient très incertains, que les infirmières à l'intérieur de l'organisation, l'ensemble de l'écosystème le soient, c'est réussi, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, on a réuni le conseil d'administration mercredi, également, mercredi matin. Et le but, c'était de dire : on va se porter en faux contre ce projet de loi 7 là, pour plusieurs raisons, notamment que j'ai exposées dans mon... dans mon allocution, et on verra par la suite. Mais vous comprenez qu'à ce moment-ci, de planifier une transition ou de voir qu'est-ce que ça peut avoir l'air, c'est légèrement prématuré.

Mme Duranceau : Bien, je comprends. Tu sais, votre position est très claire. Là, vous êtes contre. Mais il n'y a eu aucun effort de discussion avec Héma-Québec pour voir si c'était quelque chose de réaliste, là.

Mme Bouchard (Martine) : Il y a eu une discussion et on s'est dit...

Mme Duranceau : Jour un, puis on ne s'est pas parlé, alors que madame... que la PDG d'Héma-Québec a dit : Écoute, nous, on ne touche pas à rien, on vous accueille au complet. C'est au niveau purement administratif qu'éventuellement il y aura des changements, là. C'est une entité de 500... 500 employés versus 70 chez vous. Comme... je ne sais pas, tu sais, il me semble, ça vaut une discussion pour se dire : écoute, on est-tu capable d'être plus efficaces ensemble ou vraiment ça ne fonctionnera pas?

Mme Bouchard (Martine) : Oui, d'abord...

Mme Duranceau : Parce que c'est sûr, tuer ça dans l'oeuf dès le début, c'est correct, là, le statu quo, on... c'est toujours plus facile. Mais la question, elle se pose. Puis encore une fois, je répète, l'aspect clinique, on ne touche pas à ça, là, mais c'est l'aspect administratif que je... que je challenge. Puis pas tant... les économies, je comprends, là, ce n'est pas... c'est l'efficacité globale de tout ça, là.

Mme Bouchard (Martine) : Bien, moi j'ai toujours eu comme principe... vous savez, là, je suis à bientôt 40 ans de carrière, je suis à ma sixième réforme en termes de santé. Je ne critique pas les réformes, je n'ai jamais eu... j'ai des opinions divergentes. Dans ce cas-ci, je crains sincèrement qu'il va y avoir des bris de service. Parce que même si vous dites : tout le clinique va être transféré, il y a des infirmières qui forcément ont dit : Si on aurait voulu travailler pour Héma-Québec, on y aurait été. Il y a une question de mission qui est différente. Il y a une question de valeur qui est différente. Et nous, ce qu'on dit, c'est : il faut absolument que les gens soient saisis de ça. Je reviens toujours au fait qu'on est un OBNL qui fonctionne. On n'est pas déficitaires, on est performants. Oui, on n'est pas parfait, mais on est performant. Alors, on se questionne sur les raisons du pourquoi. On n'est pas une société d'État. Si on n'était pas performant, on était déficitaire et puis qu'on avait un taux d'encadrement vraiment supérieur, je vous dirais : Bien, peut-être, mais là, on a quatre directeurs, dont deux directeurs médicaux qui nous accompagnent à temps partiel. Je vois difficilement comment une fusion administrative peut se faire sans heurt. C'est ma préoccupation majeure.

Mme Duranceau : Puis bon, on est là pour discuter, puis c'est dans un projet de loi. Maintenant, le projet de loi, il n'est pas adopté. Mais s'il devait être adopté dans ses... dans sa forme actuelle, est-ce qu'on pourrait compter sur Transplant Québec pour que tout ça se fasse... qu'il y a une transition douce, puis qu'il y a des conversations avec Héma-Québec, puis qu'on s'assure que le service aux citoyens soit maintenu?

Mme Bouchard (Martine) : Bien, d'abord, on a toujours dit que le service, c'était notre priorité à la clientèle. Puis le but, ce n'était pas de faire peur du tout citoyen. Le but, c'est vraiment de dire : Écoutez, comment on va... comment on peut réagir à... à cette notion de projet de loi sept là. Ça fait que c'est clair qu'on ne se...

Mme Bouchard (Martine) :  ...pas contre la population, là. Le but, c'est de maintenir un service qui soit adéquat. Ce que nous disons, c'est : Ne brisons pas ce qui fonctionne, et Transplant Québec fonctionne. C'est une organisation qui est agile. De l'installer à l'intérieur d'une société d'État où les couches de bureaucratie sont lourdes, on voit difficilement comment on va pouvoir maintenir notre agilité et faire en sorte que les décisions soient prises au quart de tour, 24 h sur 24, sept jours sur sept.

Mme Duranceau : Puis, justement, donc, tu sais, quels devraient être les garde-fous, si c'est là qu'on allait, pour que ça fonctionne, tu sais, sur la... sur le maintien de l'agilité, entre autres?

Mme Bouchard (Martine) : Bien, les garde-fous primaires, ça serait de dire : On ne touche pas à Transplant Québec. Écoutez, ça, c'est ce que je vous dirais.

Mme Duranceau : Plan A.

Mme Bouchard (Martine) : On maintient l'agilité, on regarde s'il y a des synergies possibles. Puis, je vous le dis, là, j'ai regardé, là, on a discuté beaucoup avec des possibilités de synergies.

Je vous lance un exemple. Au niveau de la communication puis des plans de... des plans de sensibilisation auprès de la population, si on regarde ce qui est fait à NHS puis si on regarde ce qui est fait ailleurs, c'est très difficile concrètement d'avoir une campagne de sensibilisation pour la population du Québec en disant : C'est le temps d'avoir un prélèvement sanguin, et oh! «by the way», soyez un don d'organes. Ça ne fonctionne juste pas parce que les missions sont carrément différentes, et on ne peut pas avoir une synergie à cet égard.

Je pense, Matt veut rajouter quelque chose.

M. Weiss (Matthew) : Oui. C'est... Quand on parle d'efficience, c'est sûr que, si on est... on fait partie d'un organisme qui est focussé principalement sur du sang, mais nous trois, on va être engagés d'aller dans les réunions d'Héma-Québec... de direction d'Héma-Québec, où on écoute pendant 50 minutes de l'heure, là, où ils parlent du sang, et nous, on est là pour le dernier, comme, cinq, 10 minutes : Oh! d'ailleurs, là, il y a des petites choses pour le don d'organes, mais... Donc, ce n'est pas une utilisation de notre temps et expertise qui serait efficiente. Actuellement, quand on a une réunion à Transplant Québec, on est focussés directement sur des enjeux qui nous touchent. D'être absorbés dans une autre organisation qui... dans laquelle je n'ai pas d'expertise, je n'ai rien à ajouter à ces réunions qui touchent la collecte et distribution de sang, ni cliniquement, ni médicalement, ni dans la recherche, ça n'ajoute pas grand-chose.

• (10 h 20) •

Le Président (M. Laframboise) : ...beaucoup. Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis pour 10 minutes 24 secondes.

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Merci à vous trois pour votre témoignage, pour votre mémoire et aussi pour la passion dont vous partagez ici avec les membres de la commission.

J'irai un petit peu plus loin dans les échanges que vous venez d'avoir. J'aurais trouvé ça curieux que vous aurez déjà une discussion avec Héma-Québec, étant donné qu'il n'y a rien qui est ancré, qui est présentement fait. Puis j'apprécie aussi votre évaluation de la situation, d'essayer même de trouver des synergies, parce que vous comprendrez que nous serons face à un déficit assez important, historique pour la province. J'ai l'impression qu'on est comme sur le même chemin que le projet de loi n° 2, quand on pense à ce type de fusion, parce qu'on va avoir un désengagement, on le sent, puis on sait que ce que vous apportez, c'est une expertise importante. Quand vous parlez de ce que vous faites, j'aurais été plus loin. 55 ans d'expertise, une reconnaissance nationale, internationale, tout ça pour 16 millions de dollars d'économie, qui est 0,0103 %. Je pense que vous l'avez déjà soulevé. On avait 7 millions de dollars pour les LA Kings. On avait 710 millions de dollars pour Northvolt. On sait qu'on va avoir 1 milliard, peut-être, pour SAAQclic. Quelle est votre opinion par rapport à cette transition? 16 millions de dollars. Est-ce que nous allons sauver des vies avec cette fusion?

Mme Bouchard (Martine) : Merci. Voulez-vous débuter, messieurs? 

Mme Maccarone : Bien, vous trois, vous pouvez répondre. Je sais que c'est une question large, mais...

Mme Bouchard (Martine) : Bien, peut-être que je débuterais. Dans le fond, votre question est pertinente. Effectivement, c'est... ça peut paraître beaucoup, 16 millions, puis c'est beaucoup, mais, compte tenu de ce que j'avais dit antérieurement, ça représente une infime portion. On parle de sauver des vies ici. Puis c'est là où est l'impact puis c'est pourquoi on se lève... on se soulève si fort que ça, en disant : Écoutez, est-ce que vous réalisez que l'impact de cette économie-là va sûrement coûter des vies tantôt pour nos Québécois et Québécoises? Ça représente 550 transplantations annuellement. Et donc, au fil du temps, je l'ai dit dans mon allocution, c'est autour de 16 000 personnes, Québécois et Québécoises, qui ont été sauvées. Il ne faut pas négliger non plus ce que ça représente en termes financiers, d'avoir sauvé des gens, de leur avoir donné une deuxième vie. Ils contribuent à la société québécoise davantage. Puis il faut aussi faire référence à, si on donne un exemple... puis on en a parlé dans le mémoire, l'INESSS avait fait un rapport...

Mme Bouchard (Martine) : ...2013, et donc en 2013... Vous comprenez que les coûts ont augmenté depuis ce temps-là. Ce qu'on parle, c'est les coûts d'une dialyse, versus les coûts d'une transplantation. C'est non négligeable. On parle de plusieurs millions de dollars qui pourraient être sauvés. Donc, à la limite, quelques transplantations viennent effacer l'ensemble de l'économie qui est prévue. Donc, pour nous, c'est hyperpertinent, c'est hyperpertinent de continuer.

On a... Si on se compare avec l'ensemble de la planète, c'est des organisations qui sont hyperperformantes. Je l'ai dit au début, on a toujours de l'amélioration, on est en amélioration continue et puis on cherche toujours à s'améliorer, mais il faut convenir que 90 % du budget d'une organisation qui est dédié à l'ensemble de l'activité clinique, où on a un 10 %... puis ce 10 % là, c'est des frais administratifs, bien, c'est des frais administratifs qui pourraient... qui devraient aussi, également, être transférés. Quand on parle des fusions d'organisations ou fusions d'établissements, c'est clair qu'il y a toujours des frais qui sont cachés, qu'on ne peut pas évaluer à prime abord. Alors, pour nous, ça demeure superimportant. Puis je passerais peut-être la parole à Dr

M. Chaudhury (Prosanto) : Oui, bien, juste pour continuer là-dessus, comme Mme Bouchard vient de mentionner, la greffe rénale, c'est un des rares aspects de notre système de santé qui sauve de l'argent. Chaque greffe sauve des centaines de milliers de dollars à partir de la deuxième année après la greffe rénale. Donc, on génère des économies en faisant plus de transplantations.

Mme Maccarone : Intéressant.

M. Chaudhury (Prosanto) : C'est important à considérer. Il y a aussi... Si je peux juste retourner sur l'idée de la combinaison du sang et de la transplantation. Au niveau fédéral, la gestion du... de la transplantation et du don relevait du provincial Blood Liaison Committee, jusqu'à cette année, où un comité spécial a été créé au niveau du Conseil des ministres... députés en Santé pour veiller à le système de transplantation et de don. Donc, au Canada et mondialement, on sort la transplantation des groupes de sang et on le met tout seul pour, justement, bonifier.

Mme Maccarone : Est-ce que vous, ou peut-être les familles avec qui vous travaillez... est-ce que vous avez été consultés avant le dépôt de ce projet de loi?

M. Chaudhury (Prosanto) : À ma connaissance, il n'y a eu aucune consultation avec... ni Transplant Québec ni nos familles de donneurs.

Mme Maccarone : Bien, il n'y avait aucune discussion avant le dépôt du projet de loi, pour une telle fusion qui... On voit, la salle est pleine, on a énormément de revues de presse là-dessus, ce n'est pas une discussion qui est nouveau, mais aucune consultation pour quelque chose qui va avoir tellement un impact majeur sur le coût de la vie? Parce que, là, on est en train de parler d'un coût d'efficacité, mais, sincèrement, ce que nous sommes vraiment en train d'en débattre, c'est combien vaut une vie.

Mme Bouchard (Martine) : Tout à fait, puis j'irais plus loin que ça. En fait, c'est... les signaux étaient complètement contraires. On a eu une commission parlementaire en janvier 2024. Les recommandations de la commission parlementaire sont sorties au mois d'octobre 2024, qui, somme toute, avaient repris la quasi-totalité des recommandations dans notre mémoire, à l'époque, puis qui, justement, incitaient vers une organisation responsable, donc Transplant Québec, pour être responsable du don d'organes. On a travaillé pendant... depuis octobre 2024, à déposer un document qui retrouvait l'ensemble des éléments incontournables qui devraient se retrouver dans une loi du don d'organes, parce que c'est l'information qu'on avait, il y a une loi qui a été écrite cet été, qui confirmait justement que Transplant Québec serait l'organisation responsable du don d'organes.

Et donc vous comprendrez la surprise lorsqu'on a eu l'appel du sous-ministre nous disant que c'était une autre loi, qui faisait fi, dans le fond, du travail des parlementaires, où l'ensemble des députés, également, de la CAQ étaient assis et étaient en accord. C'est ce qui est important ici, c'est que c'était une recommandation parlementaire transpartisane. Donc, tous partis confondus étaient d'accord pour soulever les éléments lors de cette commission parlementaire là. Donc, votre point est bon. Une grande surprise pour nous, et non, aucune consultation.

Mme Maccarone : Puis j'aimerais peut-être... Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Laframboise) : 3 min 32 s.

Mme Maccarone : OK, trois minutes. Moi, ce que... j'aimerais que vous nous renseigniez un peu quand vous parlez de la neutralité des décisions. Je pense que c'est important que les gens comprennent qu'est-ce que ça veut dire, c'est quoi, l'impact parce que c'est gros quand on dit neutralité. Ça fait que, pour le commun des mortels qui nous écoutent, c'est quoi? Qu'est-ce que ça veut dire?

Mme Bouchard (Martine) : Je vais laisser Matthew parler.

M. Weiss (Matthew) : Oui. Ici, là, on parle des décisions cliniques ou des décisions administratives, là, parce que c'est quand même deux choses. Je vais vous parler de comme... un côté administratif, là, c'est... parce que je veux parler d'innovation. C'est sûr que je suis content d'être ici avec vous, la commission, ça me donne l'occasion de mettre mon habit, là, j'ai rarement cette occasion-là, mais ce que j'aimerais mieux faire...

M. Weiss (Matthew) : ...faire c'est parler avec Dr Chaudhury sur le... des nouveaux programmes, de comment améliorer notre système, notre capacité de faire d'autres types de dons d'organes, d'offrir même plus de dons d'organes et de transplantation. Mais le temps consacré à cette commission où la fusion, où la dissolution de Transplamt Québec possible, c'est le temps où je vais être dans la réunion de savoir comment changer les logos sur nos politiques et procédures au lieu d'être dans des... cliniques qui touchent la vie de nos patients. Et ça... et notre demande, notre développement va être noyé dans les besoins légitimes d'Héma-Québec, un organisme qui va être comme des ordres de magnitude plus gros que nous. Donc, ça, c'est une neutralité de décisions cliniques de... mais aussi... mais je vais laisser Dr Chaudhury parler de peut-être des autres neutralités de...

Mme Maccarone : Mais j'aurais peut-être juste une autre question, parce que je sais que le temps file, puis ce que j'aimerais que vous répondiez, pour moi, c'est l'inverse de la question de la ministre. Si jamais vos amendements ne sont pas adoptés, ou bien, si on a de la chance puis c'est le cas, est-ce que vous vous engagez de travailler avec le gouvernement pour continuer à trouver des synergies puis être plus performants, innovateurs? Parce que c'est ça qu'on souhaite, c'est de l'efficacité, ça fait qu'au lieu de dire est-ce que je vais m'engager à prêter main forte, mais est-ce que vous vous engagez à faire ce qu'il y a de nécessaire?

• (10 h 30) •

M. Weiss (Matthew) : Moi, je peux parler personnellement, je peux parler pour mes collègues aussi, là. C'est sûr qu'on prend tous les aspects de don d'organes et transplantation très au cœur. On ne va pas arrêter, on va faire de notre mieux pour nos patients, pour le système de santé, dans toutes les circonstances.

Mme Maccarone : C'est très clair. Merci beaucoup.

Le Président (M. Laframboise) :  Merci. Merci beaucoup, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion pour 3 minutes 28 secondes.

M. Fontecilla : ...M. le Président, ce que j'ai compris des propos de la ministre, là, qu'il ne s'agit nullement, nullement de toucher à l'expertise, mais c'est surtout administratif, du côté administratif et informatique. Et vous avez fait mention d'une commission parlementaire qui suit un forum international qui allait dans le même sens, c'est-à-dire conserver l'expertise dans un seul... dans une entité dédiée. Et est-ce que vous pensez que les bienfaits supposés de cette réforme-là, cette fusion-là, et va affecter et sérieusement la capacité à faire des transplants, ici, au Québec? Ou va dénaturer votre mission?

Mme Bouchard (Martine) : C'est clair qu'on a parlé à plusieurs personnes, je vous dirais, tant au Canada qu'à l'étranger. Et beaucoup nous ont dit justement, en termes de garde-fou, oui, ça va dénaturer la mission. C'est clair qu'une OBNL qui s'insère à l'intérieur d'une société d'État, par définition, dénature sa mission. Dans une société d'État qui a un focus qui est complètement différent, ça dénature la mission. La notion aussi de perte d'expertise, je comprends qu'on dit que l'ensemble des gens vont être transférés, mais il n'y a pas personne qui va forcer les infirmières à aller travailler chez Héma-Québec, là. Vous savez, les infirmières, puis je prends juste les infirmières, là, c'est des infirmières qui... ce n'est pas des novices, là, c'est des infirmières qui arrivent de soins intensifs d'urgence, pour laquelle la période d'orientation chez Transplant Québec varie entre 6 à 12 mois. Parce qu'il y a toutes sortes de conditions pour lesquelles elles doivent être formées dans un contexte où elles doivent discuter régulièrement avec des transplanteurs, s'assurer que l'organisation du bloc opératoire est au rendez-vous, programmer l'ensemble des transplantations. Eux, ils valent cher sur le marché. Et eux, peuvent décider où elles vont aller travailler, ou où ils iront travailler. Et donc, le choix n'est pas... tu sais, c'est facile de dire : On va transférer l'ensemble de l'expertise. Mais il n'y a pas une garantie que ces infirmières-là vont vouloir transférer. Il y a ça aussi. Donc, comment on fait pour maintenir cette expertise-là? Puis comment on s'assure justement qu'il n'y a pas de bris de service? Et c'est notre... ça a été beaucoup notre dialogue. Comment on s'assure qu'il n'y aura pas de bris de service, puis qu'ultimement les gens... il n'y aura pas de gens qui vont décéder.

M. Fontecilla : Dans votre mémoire, vous avez fait état d'une seul cas où il y a eu fusion de la fonction inventaire des stocks sanguins avec la fonction et transplant... Qu'est-ce que vous retirez de cette fusion-là?

Mme Bouchard (Martine) : Dans le fond, je vous dirais qu'en termes de chiffres, parce que si on regarde la performance de l'organisation, il y a eu une certaine augmentation, mais parce que l'organisation initiale n'était pas comme la nôtre, c'est-à-dire qu'il n'y avait pas des infirmières qui étaient dédiées à l'organisation, sont aller chercher des infirmières à l'intérieur des différents centres hospitaliers. Même chose par rapport aux médecins coordonnateurs. Et donc, ils ont eu une légère augmentation en termes de nombre de donneurs par milliers de population. Mais ils n'ont pas dépassé l'Espagne qui, elle, est dans une organisation singulière, autonome, indépendante. Et donc, ça, c'est la première des choses. La deuxième, c'est qu'ils ont été confondus dans une mission...


 
 

10 h 30 (version non révisée)

Mme Bouchard (Martine) : ...plus large qu'eux. Et on dit haut et fort : Écoutez, il y a... il y a cette notion de confusion à l'intérieur de la mission. Et comme Dr Weiss suggéré tantôt, c'est qu'ils sont assis à des réunions où on parle essentiellement du sang, parce qu'on comprend que le sang est hyper important puis on n'a pas de sang dans les hôpitaux, ça ne fonctionne pas. Sauf que quand la majorité des discussions autour de la table du comité exécutif se concentre sur le sang, bien là, il faut regarder a contrario qu'est-ce que ça a comme un impact au niveau des... des gestionnaires par rapport à la transplantation.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup. Nous allons maintenant céder la parole au député d'Arthabaska pour 2 min 38 s.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Pour faire du pouce un peu sur ce que mon collègue disait, de quelle façon et pourquoi des infirmières, par exemple, de Transplant Québec, refuseraient de passer à Héma-Québec? Qu'est-ce qui serait si différent qu'ils ne pourraient pas travailler pour l'autre organisation?

Mme Bouchard (Martine) : Je vous dirais essentiellement, d'abord, c'est la mission. Deuxièmement, c'est la notion d'aller travailler dans une organisation qui n'a pas du tout les mêmes fonctions que Transplant Québec. Héma-Québec, bon, il y a la notion de prélèvement sanguin. Il y a une notion de travail à la chaîne. Il y a une notion où le jugement clinique est très peu exploité. Dans un contexte où on parle de transplantations d'organes, il y a un jugement clinique élevé. C'est des infirmières qui sont formées, qui sont recherchées, qui valent, comme je disais tantôt, cher sur le marché, qui accompagnent les familles dans les pires moments de leur vie mais aussi dans les meilleurs moments de leur vie où ils retrouvent une seconde chance. Et donc toute la notion de... de jugement clinique, de portée de famille, d'accompagnement de la famille, mais aussi de challenge, de discuter avec les différents chirurgiens transmetteurs et l'organisation au quart de tour 24 heures sur 24, sept jours sur sept contribue, selon moi, à cette différence majeure.

M. Boissonneault : J'aimerais ça vous entendre sur des exemples concrets, parce que ce que vous dites est quand même grave, vous dites que vous craignez la perte de vie humaine si on fait ce... ce transfert-là, même si on espère maintenir l'expertise. De quelle façon... Puis vous parlez beaucoup de la différence entre la gestion d'un inventaire puis la transplantation. De quelle façon, concrètement, sur le terrain, les choses seront à ce point différentes qu'il pourrait y avoir des gens qui meurent à la suite d'un... d'un changement d'organisation comme ça?

M. Weiss (Matthew) : Ça, je peux répondre. Mais, premièrement, l'expertise chez Héma-Québec de faire comme la collecte de sang, les infirmières mais qui font ça, c'est important, mais, encore là, ce n'est pas du tout la même chose que d'être envoyé dans un hôpital, de parler avec une famille en deuil pour en avoir perdu leur proche, on ne peut pas parler de possibilité de don d'organes. Et si on n'a pas le personnel pour envoyer quelqu'un dans cette situation de crise avec l'expertise appropriée, mais on perdre potentiellement ce donneur-là, et les organes ne sont pas greffés chez quelqu'un en attente. Donc, et on sait tous que le taux de mortalité sur la liste d'attente, ça varie par organe, mais c'est très important. Et, chaque jour, sur la liste d'attente, c'est une autre journée où le risque de mortalité augmente.

Le Président (M. Laframboise) : Merci.

M. Boissonneault : Il ne me reste plus de temps?

Le Président (M. Laframboise) : 10 secondes.

M. Boissonneault : Ça va aller. Merci beaucoup.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, Mme Bouchard, M.Chaudhury et M. Weiss. Je vous remercie de la... pour la contribution de Transplant Québec aux travaux de notre commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 10 h 37)

(Reprise à 10 h 39)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue au Docteur D'Aragon. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

M. D'Aragon (Frédérick) : Parfait. Bonjour. Bien, tout d'abord, merci, M. le Président. Vous me permettrez de commencer en remerciant mes collègues qui ont gentiment accepté de me couvrir, là, temporairement ce matin afin que je sois... afin que je puisse être avec vous. Merci aussi à la commission pour cette invitation.

Je me présente. Je suis Frédérick d'Aragon, je suis intensiviste et anesthésiologiste ainsi que médecin coordonnateur en don d'organes et tissus au CIUSSS de l'Estrie... CHUS. Je suis un professeur à l'Université de Sherbrooke et clinicien chercheur du Fonds de recherche du Québec en santé.

En 2023, j'ai eu le privilège d'être nommé titulaire de la Chaire de recherche Justin Lefebvre sur le don d'organes de l'Université de Sherbrooke. Il s'agit de la première chaire au Canada qui est dédiée sur l'amélioration de... des pratiques cliniques en matière de... de don d'organes. Je me permettrais de dire qu'elle est chez nous, cette chaire-là, au Québec. Voilà.

Pendant ma formation, j'ai eu l'opportunité de compléter une maîtrise en don d'organes et de prélèvements ainsi qu'un certificat en transplantation de l'Université de Barcelone en Espagne. Ces formations m'ont permis d'observer les différentes pratiques entourant le don d'organes dans ce pays reconnu pour ses pratiques exemplaires dans ce domaine.

Aujourd'hui, je souhaite partager mon opinion de clinicien à l'égard du projet de loi sept et de son impact sur le don d'organes et de tissus au Québec. Pour y arriver, permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous décrire les différentes étapes du processus de don d'organes et de tissus.

Tout d'abord, l'objectif principal du don d'organes est de sauver la vie des patients souffrant d'une insuffisance organique terminale grâce à la transplantation d'un foie, coeur, poumon, rein ou pancréas. Ainsi, un seul donneur d'organes peut sauver jusqu'à huit vies.

Le processus débute par l'identification d'un patient pouvant devenir un donneur potentiel. L'identification repose sur des critères bien précis tels qu'une atteinte neurologique sévère, un patient sous respirateur artificiel et pour lequel nous envisageons des soins de fin de vie. La quasi-totalité de ces patients sont hospitalisés aux soins intensifs.

Le donneur potentiel est par la suite référé à Transplant Québec. La référence permet de vérifier l'inscription du patient au registre et de valider la présence d'une contre-indication absolue au don d'organes. Une fois la référence acceptée, l'équipe traitante, en collaboration avec le personnel de Transplant Québec, approche la famille du donneur afin d'obtenir un consentement au don. D'ailleurs, cette approche multidisciplinaire est associée à un meilleur taux de consentement.

L'étape de l'évaluation et de la prise en charge du donneur débute suite à l'obtention du consentement. Pendant cette étape, une série d'examens paracliniques, donc des tests sanguins, imageries, biopsies seront réalisés après... afin d'évaluer les qualités... les qualités du donneur.

Après l'obtention des résultats de l'ensemble des tests, l'étape d'attribution des organes au programme de transplantation débute. Chaque organe doit être attribué en suivant une procédure bien spécifique.

Une fois la... l'attribution terminée, c'est l'étape du prélèvement qui commence. Une salle d'opération est réservée et le déplacement des chirurgiens préleveurs est organisé. Immédiatement à la fin du prélèvement, les organes sont... transportés vers les centres hospitaliers où les receveurs sont hospitalisés.

Le transport des organes est une étape cruciale du processus. En effet, l'absence d'apport sanguin cause des dommages aux organes. En transplantation, nous appelons cette étape l'ischémie froide. Elle débute au moment du prélèvement et se termine lors de la reperfusion de l'organe dans le corps du receveur. La durée d'ischémie froide acceptable pour un... varie : tout au plus 6 h pour un coeur à environ 14 h pour un rein.

L'ensemble de... du processus de don d'organes que je viens de vous décrire se fait environ sur trois jours et est souvent fait en heures défavorables. C'est au personnel de Transplant Québec que revient le rôle de coordonner chacune des étapes de cette chaîne. À ce rôle de coordination s'ajoute celui de soutien auprès des familles. La littérature a d'ailleurs démontré que leur présence réduit...

M. D'Aragon (Frédérick) : ...les conséquences psychologiques tels le deuil compliqué, dépression, choc post-traumatique des familles de nos donneurs.

De plus... Par ailleurs, l'objectif du don de tissu, quant à lui, est d'améliorer la qualité des patients via une greffe de tissu oculaire, cutanée, cardiaque ou musculo-squelettique. Le processus débute au moment du décès du patient. Ce décès peut survenir dans un centre d'hébergement, hôpital, maison de soins palliatifs ou maisons funéraires. Au moment du décès, un professionnel de la santé communique avec Héma-Québec suivant l'identification et la référence du donneur, du personnel dédié d'Héma-Québec communique avec un membre de la famille du défunt et obtient une copie du dossier médical afin d'évaluer l'éligibilité du patient au don de tissu. Le consentement au don est par la suite obtenu par un coordonnateur d'Héma-Québec dans les heures qui suivent.

L'étape du prélèvement des tissus sera réalisée dans les 24 h suivants dans un des centres dédiés de prélèvement d'Héma-Québec. Ceci peut impliquer un transfert d'un corps d'un établissement vers un autre. Le prélèvement des tissus est réalisé par des techniciens dûment formés. Les tissus sont inspectés, préparés et traités, puis mis en quarantaine jusqu'à l'obtention des résultats de différents tests. Une fois ces résultats obtenus, les tissus sont entreposés dans une banque dédiée à leur utilisation ultérieure dans les semaines et mois qui vont suivre.

Comme vous pouvez le constater, la transplantation d'organes et de greffes de tissus sont deux processus différents. En particulier, la transplantation d'organes implique plusieurs étapes qui elles-mêmes impliquent plusieurs individus et où chaque minute compte. Une expertise de pointe est requise d'autant de la part du personnel dédié qui s'occupe du donneur et de leur famille que de l'organisme qui a le mandat de gérer cette activité. La coordination de ces activités, elle est critique. Une seule erreur peut se traduire par le décès d'un patient sur une liste d'attente.

Pour bien réaliser sa mission hautement spécialisée, un organisme de don doit être dirigé par des gestionnaires possédant aussi cette expertise. Avoir des gestionnaires pleinement dédiés à la gestion du don favorise l'atteinte de hauts standards de performance et des normes d'éthique. Concrètement, cela permet de maintenir la confiance du public envers le système. Un ingrédient essentiel en matière de don d'organes. D'ailleurs, des expériences antérieures dans d'autres pays ont démontré qu'une absence de confiance du public est associée à une diminution du nombre de donneurs. L'expertise des gestionnaires permet aussi d'améliorer les pratiques et d'innover. Un élément crucial dans un domaine de la médecine qui ne cesse de se complexifier.

Basé sur mon expérience clinique, je ne crois pas que le transfert des activités de don d'organe de Transplant Québec vers Héma-Québec est souhaitable. À court terme, elle pourrait mener au départ d'employés de Transplant Québec et il... elle représente le maillon de la chaîne. Cela se traduirait par une perte d'expertise de pointe qui repose sur 55 ans d'existence. Le succès de l'Espagne, leader mondial en don d'organes, repose en grande partie sur l'ONT, qui est l'équivalent de Transplant Québec. Cette organisation a un but : réduire le nombre de patients en attente d'une transplantation. Je doute très fortement qu'une organisation ayant pour mandat de gérer simultanément le don de sang, tissus et orgranes... et organes, pardon, puisse accorder autant d'importance à chacun de ses volets, d'autant plus si l'objectif est de faire des économies au niveau de la gestion.

Par conséquent, je vous recommande d'exclure Transplant Québec du projoi... du projet de loi 7 et, alternativement et en considérant les modèles de gestion, en fait, de don à travers le monde, vous pourriez transférer les activités de don de tissus à la responsabilité de Transplant Québec. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Laframboise) : Merci Dr D'Aragon. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, vous avez, vous et vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson 16 minutes 30 secondes.

Mme Duranceau : OK, merci beaucoup Dr D'Aragon pour votre temps, puis je sais qu'il est précieux, vous avez bien d'autres choses à faire, là. Donc merci pour les explications que vous nous avez données. Puis le but c'est vraiment d'entendre les experts, là. Il y a, tu sais, il y a un objectif d'efficacité là-dedans, puis ce n'est absolument pas, là, de couper les vivres ou le financement, c'est de voir est-ce que, dans l'exécution, on peut être plus efficace, on peut en faire plus avec les mêmes... avec les mêmes équipes? Puis, bon, j'ai bien compris, là, votre recommandation, j'aime... sur le projet de loi 7, j'aimerais ça comprendre mieux... Là, actuellement, vous dites que les dons de tissus, ça, c'est déjà Héma-Québec qui fait ce volet-là.

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.

Mme Duranceau : Donc, donc, il y a des équipes, disons, qui vont s'occuper d'aller prélever les organes pour le... la transplantation d'organes, mais, en même temps, tu as une équipe de Québec qui est là pour le tissu?

M. D'Aragon (Frédérick) : Non, en fait, le prélèvement de tissus se fait... si on a un donneur qui donne des organes et des tissus, parce qu'il faut comprendre que des donneurs d'organes c'est plutôt rare, là, on est 206 Québécois et Québécoises par année, là, puis des donneurs de tissus on est dans le millier en montant, ou, en tout cas, pas loin du...

M. D'Aragon (Frédérick) : ...juste, si on avait un donneur d'organes et de tissus simultanés, c'est les organes qui sont prélevés en premier et dans les heures suivantes, il va y avoir un prélèvement de tissus qui peut être fait dans un... dans le même sang hospitalier, exemple, si vous êtes au... si le donneur est au CHU, le prélèvement des tissus oculaires va se faire dans notre établissement. Mais si exemple vous êtes... vous êtes à Granby, le prélèvement des tissus pourra être fait dans un des centres de prélèvement de tissus d'Héma-Québec, là, donc. C'est pour ça que je disais qu'il y avait un transport du corps, ça fait que ce n'est pas nécessairement au même endroit et ce n'est surtout pas par les mêmes personnes.

Mme Duranceau : Puis est-ce que c'est automatique? Bien, en fait, ça nous prend un donneur, point, qui a accepté. Puis seulement... Donc, les 206 exemples que vous mentionnez, puis c'est seulement sur ces 206 personnes là que le prélèvement de tissus devient possible par Héma-Québec. C'est ça?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, en fait, il y a beaucoup plus de donneurs de tissus qu'il y a de donneurs d'organes, là, je veux juste être bien, bien clair, là, le donneur d'organes n'est pas nécessairement un donneur de tissus, puis un donneur de tissus n'est pas nécessairement un donneur d'organes. Il va y arriver des fois où ça va être les deux. Tu sais donc, si, mettons, on devait mettre des chiffres, là, tu sais, sur les 206 donneurs d'organes, je ne sais pas, peut-être, vite de même que les trois quarts auraient aussi donné des tissus. Mais mon point ici, c'est qu'il y a beaucoup plus de dons de tissus qu'il y a de dons d'organes.

• (10 h 50) •

Mme Duranceau : Puis, oui, en tout cas, pour augmenter j'imagine... pour augmenter l'occurrence du don d'organes... là, ça ne passe peut-être pas par là, mais tu sais, qu'est-ce qu'on pourrait faire pour augmenter l'occurrence? Puis tu sais, 206, c'est très peu, là, je... ça veut dire qu'il y a plein de monde qui manque des... bien, en tout cas, il y a des gens qui aimeraient en recevoir, qui n'en reçoivent pas, là, j'imagine.

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, pour les organes effectivement. D'ailleurs, bien, en fait, vous avez fait une commission parlementaire avec un mandat, là, pour améliorer les pratiques en dons d'organes, là. Je crois que tout est...

Mme Duranceau : Tout a été dit.

M. D'Aragon (Frédérick) : Il y a des belles initiatives, là, à ce niveau-là, effectivement.

Mme Duranceau : OK. Vas-y, oui. Je vais passer la parole à la...

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Merci. D'abord, bonjour à tous les collègues. Merci d'être là, de pouvoir nous enrichir, enrichir notre pensée ce matin. Là, je veux juste... parce que ça a été très vite, puis je veux revenir sur ce que vous avez mentionné. Vous avez parlé du rôle d'Héma-Québec, mais j'ai compris qu'Héma-Québec avait un rôle à jouer actuellement dans la transplantation. Oui, au niveau des tissus. Mais est-ce qu'il a un autre rôle à jouer au niveau de la coordination puis de... Pouvez-vous me réexpliquer ce bout-là, s'il vous plaît?

M. D'Aragon (Frédérick) : Il n'y a pas de problème. En fait, Héma-Québec ne joue pas de... Héma-Québec joue un rôle dans le prélèvement des tissus. Mais il faut comprendre que le prélèvement du tissu, lui, il n'y a pas de... il n'y a pas de processus d'attribution en temps réel, comme il y a pour le don d'organes, le don de tissus, en réalité, les techniciens ou les coordonnateurs, là, prélèvent les tissus après le décès du patient. Là, je m'excuse d'utiliser des termes... comme à la morgue, littéralement, là, OK, on va mettre un... on va appeler un chat, un chat.

Mme Lachance : OK, pour conservation.

M. D'Aragon (Frédérick) : C'est ça, pour conservation dans une banque et subséquemment, la greffe de tissus sera faite à des moments x, y dans différents centres où on va greffer les tissus, mais ce ne sera jamais fait en urgence.

Mme Lachance : Donc la grande différence, c'est l'urgence entre les deux. Le don d'organes en fait est synchronisé. Il y a une... Il y a un synchronisme qui doit être mis de l'avant. Et ça, est-ce que vous croyez que... parce que c'est déjà quand même quelque chose qui se fait couramment, que l'organisation de cette... de ce travail-là peut se faire à l'intérieur d'un organisme comme Héma-Québec dont l'administration serait différenciée, c'est-à-dire... bien évidemment, il y a tout le volet médical et scientifique, là, de Transplant Québec qui pourrait s'additionner potentiellement à celui d'Héma-Québec, qui s'occupe de... évidemment de ce qui est conservation, pour conserver évidemment une organisation qui soit davantage axée sur la transplantation, et là, la séquence de cheminement que vous avez décrite tout à l'heure.

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, c'est là... c'est là que je ne pense pas que c'est une bonne idée, justement, parce que je pense que ça prend des dirigeants ou des gestionnaires, là, bref, des boss qui comprennent la spécificité du don d'organes. Transplant-Québec est un organisme ultra spécialisé, bien niché. On ne peut pas demander à des gestionnaires, tu sais, de commencer à faire de la généralité avec du don d'organes, du don de tissus, puis du don du sang en même temps. Tu sais, on a parlé de l'attribution des organes, là, mais ça va sur le transport des organes, ça va sur la qualification. Plein d'enjeux qui dépassent nettement ce qu'Héma-Québec fait à l'heure actuelle.

Mme Lachance : Donc, il faudrait avoir une...

Mme Lachance : ...une évaluation des profils de gestionnaires qui soit, conséquemment, liée à la mission, entre autres, de Transplant Québec.

Il y a quelque chose que ma collègue ministre a mentionné tout à l'heure au niveau... au niveau de... du nombre de transplantations annuelles. Et là, bien, je vous le dis, j'ai déjà vécu la perte d'un être cher qui conduisait un processus de don d'organes, et, en l'occurrence, le processus qui m'avait été présenté a fait en sorte que j'ai... j'ai figé, carrément. Donc, je tiens à ce que vous le sachiez pour ma prochaine question, parce que, derrière ça, il y a beaucoup d'éducation. Les gens qui font don de sang sont déjà des gens qui sont sensibilisés à la vie et à l'importance du don pour la vie. Ne pensez-vous pas que d'utiliser le temps... parce que... le temps du don d'organes, il n'y a pas une synergie qui pourrait s'établir, parce que, lorsque... pour faire de l'éducation au don d'organes dans... justement, dans le rôle des... dans le... dans le bassin des donneurs de sang actuels? Comprenez-vous ce que je veux dire?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, comme si, dans le fond, les donneurs de sang étaient, de facto, un peu plus sensibilisés que M. et Mme Tout-le-monde à la cause du don par le geste altruiste?

Mme Lachance : Oui, et si on pouvait contribuer, justement, par ce travail en synergie là, entre le don de sang et le don d'organes, contribuer à en profiter pour éduquer les gens, qui sont, à mon avis, un milieu très propice, parce qu'ils ont déjà une sensibilité plus grande que, peut-être, d'autres personnes qui ne font pas de dons de sang?

M. D'Aragon (Frédérick) : Excellente question, je vais commencer de même. Je vous dirais que je ne pense pas, pour la raison suivante. On sait que 90 % des Québécois sont en faveur du don, mais, quand vient le temps du consentement, il y en a seulement 60 qui consentent... 60 %. À la différence du don de sang, le don d'organes, ce n'est jamais prévu là. J'exclus l'aide médicale à mourir, là, je ne voudrais pas complexifier la discussion, là. Mais personne ne prévoit avoir un arrêt cardiaque ou avoir un caillot dans son cerveau qui va mener à une catastrophe neurologique. Le moment, le choc pour la famille aussi, fait en sorte que c'est des freins, entre autres, au... à l'obtention du consentement au don d'organes, d'où le pourquoi, justement, ça prend, entre autres, de l'expertise. Mais mon point, c'est que ce n'est pas... ce n'est pas parce que tu es plus sensibilisé dans la vie de tous les jours que tu vas dire oui.

Mme Lachance : Peut-être que «sensibilisé» n'est pas le bon terme. J'aurais peut-être dû dire «éduqué».

M. D'Aragon (Frédérick) : «Éduqué»... Je ne sais pas jusqu'à quel point l'éducation va... va percer, là, comme vous en avez fait mention. C'est quand même un processus qui est... qui est éprouvant, là, d'avoir un proche aux soins intensifs. Parce que là, on parle du processus de don, mais, avant, le patient a été aux soins intensifs pendant trois à cinq jours.

Mme Lachance : Je sais.

M. D'Aragon (Frédérick) : Donc, tu sais, c'est un processus qui est éprouvant. Ça fait que je ne suis pas sûr que le contexte fait en sorte qu'il y a des stratégies d'éducation ou de l'éducation comme telle, par... de la population de donneurs de sang, va améliorer, conséquemment, le don d'organes. Mais je dois vous admettre en toute franchise, aussi, qu'il n'y a aucune étude à ce jour, qui a évalué cet aspect-là. Donc, c'est vraiment une opinion, là, personnelle que je vous transmets.

Mme Lachance : Bien, ce serait, en tout cas, peut-être une suggestion d'étude à faire. Je...

M. D'Aragon (Frédérick) : Clairement noté. Je ne pensais pas sortir d'ici aujourd'hui avec une idée de recherche.

Mme Lachance : Je vous partage mon expérience alors. Je continue? Oui? Bon, écoutez, vous savez, l'objectif est vraiment de pouvoir améliorer, hein, puis... puis, en toute transparence et en toute humilité, c'est l'objectif qu'on cherche à réaliser. Et, évidemment, il y a des structures qui sont respectives. J'ai bien entendu votre sensibilité à la gestion de Santé Québec... pas de Santé Québec, pardon, de Transplant Québec versus Héma-Québec. Puis j'ai bien entendu aussi votre sensibilité à ce que des gestionnaires soient issus d'un milieu... puis... et connaissant en termes «de», et ça, je pense que ça va rester bien, bien noté, puis qu'on va pouvoir travailler sur cette base-là si d'aventure, ou lorsque d'aventure, on sera rendus là.

Maintenant, au niveau des équipes, comment vous verriez un organigramme ou comment vous verriez une synergie de travail s'organiser? Parce que, vous l'avez dit, c'est extrêmement important de maintenir en place l'expertise, de maintenir en place la fluidité qui est déjà... parce que c'est une organisation qui doit bouger rapidement, dans un moment précis, puis vous avez mentionné lors d'heures défavorables. Donc, ça, ça doit rester. Comment pourrait... dans le fond...

Mme Lachance : ...ce qui doit être maintenu à tout prix pour que cette organisation-là puisse fonctionner ou bien fonctionner.

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui. En fait, puis sans faire de mauvais jeu de mots, je pense que s'il y a quelque chose à greffer, là, c'est pour ça que je ne veux pas faire de mauvais jeux de mots, c'est la contribution... c'est le tissu qui devrait se greffer au don d'organes pour la raison que, tu sais, on en a parlé tout à l'heure, là c'est tout l'élément logistique, le temps, les contraintes, etc., qui sont beaucoup moins complexes avec le don de tissus. Je ne dis pas que ça ne prend pas une expertise de pointe, je dis juste que, si on n'avait pas le choix de fusionner quelque chose pour optimiser, je le ferais à l'inverse. Puis en fait, c'est aussi ce que la littérature démontre, l'ensemble des modèles, la grande majorité des modèles de don d'organes, non seulement au Canada, mais à travers le monde, ce sont des organismes qui gèrent du don d'organes et du don de tissus. Mais j'ai... il y a deux... il y a deux pays à ma connaissance... En fait, j'ai appris la semaine passée que le Portugal gérait organe, tissus et sang et il y a aussi l'Angleterre qui gère organes, tissus et sang. Et on ne peut pas conclure qu'en Angleterre, leur succès, depuis leur fusion au début des années 2000, repose justement sur une synergie parce que, quand on regarde les chiffres, leur nombre de donneurs d'organes après décès neurologique n'a sensiblement pas augmenté. Ce qui a augmenté, c'est la création d'un programme de don d'organes après décès circulatoire, là, qui existait, tu sais, et qui était déjà en cours d'implantation. Ça fait que je ne suis pas... Vous voyez, je pense qu'il y a des facteurs atténuants.

Mme Lachance : Oui.

M. D'Aragon (Frédérick) : Voilà, je... Je ne sais pas, j'ai probablement un peu divagué, là, mais je...Voilà.

Mme Lachance : Non, non, ça va, ça va. Mais ça m'amène à une autre question. Je ne sais pas si j'ai encore le temps, M. le Président puis Mme la ministre.

• (11 heures) •

Le Président (M. Laframboise) : Il vous reste 3 min 22 s.

Mme Lachance : Oui. Pour pour la suite, parce que c'est intéressant ce que vous dites, vous avez mentionné le Portugal, l'Angleterre, ont des... ont des... des façons de faire qui font en sorte que ce sont le sang, les tissus et le don d'organes, donc. Puis c'est plutôt récent, donc, de ce que je comprends, le Portugal, c'est... c'est dans un avenir. Maintenant, ici, comment on se voit dans 10 ans? N'est-il pas pertinent de se poser la question comment on veut voir ça évoluer et comment on veut voir ça se déployer? Si... si c'est pertinent, est-ce que c'est quelque chose que, 10 ans, 15 ans, on peut entrevoir?

M. D'Aragon (Frédérick) : Vous savez, Mme la députée, moi, je crois que, dans 10 ans, où on devrait se voir, c'est ce qui était dans le mandat, dans les résultats de l'ancienne commission parlementaire. C'est là où on se voit, parce que, tu sais, à vouloir essayer de fusionner ou optimiser de la gestion, ma crainte, c'est que ça ait un impact sur les activités, donc. Puis tu sais, je n'irai pas dans le détail des finances parce qu'en passant, je ne fais même pas mon propre rapport d'impôt personnel. Mais je veux dire, le point, c'est que le... on perd un donneur, ça coûte plus cher à l'État. Ça fait que, tu sais, je ne pense pas que les économies que vous anticipez vont... vont se transcender.

Mme Lachance : ...vouloir vous arrêter, je pense qu'il faut voir au-delà de l'optimisation administrative puis des finances. Il faut vraiment voir le maillage comme un potentiel de faire évoluer la pratique, puis si je peux utiliser le terme «pratique» pour le don d'organes, parce que dans les faits, on en a besoin. Et vous le mentionnez. Donc, l'objectif ultime est vraiment d'avoir une pratique qui soit harmonisée au... au niveau provincial. Et là, la question que je vous pose, c'est vraiment : Est-ce que vous voyez ça comme dans un horizon possible, dans la... la prochaine décennie?

M. D'Aragon (Frédérick) : D'harmoniser, en fait, mettons, du don de tissus avec du don d'organes, vous me parlez? Je verrais ça à la condition où c'est l'organisme de don d'organes qui gère le don de tissus. Puis n'est pas juste pour une raison d'implant. Tu sais, oui pour la... Je vous ai parlé de la complexité du processus, mais aussi par les précédents qui existent pour lesquels on peut se rabattre pour faciliter la transition.

Mme Lachance : …remercie beaucoup.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, banquette gouvernementale. Maintenant, nous allons... je cède la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis. Vous avez 10 min 24 s.

Mme Maccarone : Merci. Merci beaucoup, Dr D'Aragon, d'être de retour en commission. Puis juste... je souhaite rappeler tout le monde que nous sommes présentement dans la Commission des finances publiques. Alors, on parle beaucoup de cliniques puis santé et services sociaux, dans le fond, mais c'est la Commission de finances publiques. Alors, je pense que c'est normal qu'on pense d'administration. Puis ce qu'on souhaite faire, c'est de couper et sauver de l'argent.

Parce que vous êtes un chercheur réputé, vous avez beaucoup d'expérience, moi, je souhaite savoir, dans votre expérience, peut-être dans votre passé, vous avez travaillé aussi en Espagne, un analyse...


 
 

11 h (version non révisée)

Mme Maccarone : ...scientifiques, cliniques, factuelles qui existent, qui disent que ce type de fusion pourra porter des fruits, sauver de l'argent à l'État, est-ce que ça existe?

M. D'Aragon (Frédérick) : Pas à ma connaissance.

Mme Maccarone : OK. Voilà. Parce que je souhaite que vous continuiez un peu, que j'aurais voulu plus vous entendre quand vous parlez de perdre un donateur, ça coûte plus cher à l'État. Je souhaite que vous élaborez un peu là-dessus, parce qu'encore une fois c'est la Commission de finances publiques, alors nous sommes en train de risquer des dépenses supplémentaires.

M. D'Aragon (Frédérick) : OK. Donc, écoutez, on va faire... on va prendre un exemple, là, avec des chiffres ronds, OK. Un patient qui est sur une... qui est en... qui a une insuffisance rénale chronique, qui est sur dialyse, OK, ça coûte à l'État environ 50 000 $ par année. Ce même patient là, si on lui fait une transplantation d'organes, donc d'un rein, ça va coûter environ 25 000 $ à l'État dès la première année. On peut comprendre que... Et les années subséquentes, dans le fond, donc à l'année 2 posttransplantation, le coût de 25 000 $, il n'est plus là parce que le patient a déjà été transplanté. Là, c'est les coûts des médicaments antirejet, ça fait que... et donc des suivis médicaux, et là on parle d'un montant d'environ... qui oscille entre 8 000 $ à 10 000 $ par année. En contrepartie, si ce patient-là n'avait pas eu une greffe de rein, une transplantation rénale, il aurait encore coûté 50 000 $ à l'année 2, il aurait coûté 50 000 $ à l'année 3, à l'année 4, à l'année 5, 50 000 $ par année. Donc, au bout de cinq ans, bien, le patient qui est en attente d'une... qui est en... qui est sur une... qui est en dialyse va avoir coûté 250 000 $ à l'État, alors qu'au bout de cinq ans, le patient qui aura été transplanté, lui, va coûter 25 000 $ la première année, puis 10 000 $ pour les quatre autres années subséquentes, donc 40 000 $, 65 000 $. Ça fait que faites 250 000 $ moins... 65 000 $, là, je... je me perds dans mes calculs, cette différence-là, c'est ce que vous... c'est ce que l'État va économiser.

À cet effet-là, quand vous m'avez posé la question par rapport au coût, de l'analyse des fusions, je continue à dire que ça n'existe pas. En contrepartie, au début des années 2000, l'INESSS a produit un rapport coût-bénéfice sur la transplantation rénale, que je vous invite à consulter. Si vous ne l'avez pas, ça va me faire plaisir de vous le transmettre, là, par courriel à un membre de la commission.

Mme Maccarone : Merci beaucoup, c'est... c'est très, très clair. Étant donné ce que vous venez d'élaborer, je souhaite savoir peut-être votre opinion de comment les équipes médicales, les associations, les... les patients, les familles voient cette intégration de Transplant Québec avec Héma-Québec.

M. D'Aragon (Frédérick) : Je ne peux pas parler au nom des... des familles puis des patients parce que j'en... je n'en ai tout simplement pas discuté. C'est clair que sur le terrain, ça amène une... une insécurité, une incertitude. Puis je ne dis pas qu'Héma-Québec fait mal son travail, hein? Il ne faut pas mal interpréter. Au contraire, Héma-Québec travaille très bien, ils sont excellents dans ce qu'ils font. Mais, quand on vient le temps de... quand on vient pour le temps du don d'organes, c'est vraiment sous tension. C'est un moment pas évident pour les familles. Il y a du stress, hein, dans la gestion du don d'organes. Vous savez, juste avoir une salle d'opération, là, tu sais, c'est... c'est qui qu'on coupe, là. Tu sais, ça amène des enjeux, parce qu'on ne peut pas dire : On va aller prélever le... l'organe dans une semaine. Ça prend du doigté, de la technique, etc. Donc, c'est sûr que de perdre cette espèce de... d'expertise-là, puis de recommencer à nouveau, ça amène une insécurité. Puis malheureusement, je suis peut-être rendu pessimiste, mais à chaque fois que j'entends parler, tu sais, d'optimisation, on dirait que c'est... c'est au prix d'alourdir un processus qui est déjà complexe sur le terrain, là.

Mme Maccarone : ...comprends. Puis surtout ça, après l'adoption sous bâillon du projet de loi n° 2, alors je présume que ça amène un autre niveau de complexité puis insécurité dans le réseau.

Pour revenir un peu, les éléments qui distinguent les systèmes les plus performants, parce que j'étais curieuse quand j'ai lu votre mémoire. Puis là vous faites une belle exposé du modèle espagnol. Si, mettons, le gouvernement poursuit avec cette fusion, on va s'éloigner, je présume, de cette modèle. Mais ce modèle est celui qui est en train d'inspirer les gens à l'international, dont aussi Transplant Québec. Je présume qu'on a une harmonie avec la façon qu'eux ils travaillent?

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui. En fait, bien, je sais que les gens... Moi, je ne travaille pas pour Transplant Québec, mais je sais que les gens de Transplant Québec sont allés voir comment qu'ils fonctionnaient pour essayer d'incorporer ça au Québec... Donc, oui, le... nous, l'Ontario, la Colombie-Britannique, on... on s'inspire de... de l'Espagne, je veux dire...

M. D'Aragon (Frédérick) : ...ce n'est pas pour rien qu'ils sont les leaders mondiaux, là.

Mme Maccarone : Est-ce que ce serait juste de dire qu'un travail a déjà été entamé, des heures puis des heures ont déjà été investies, probablement de l'argent, pour s'assurer que le système actuel fonctionne puis est à la hauteur de l'innovation puis de l'efficacité?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, je croirais que oui, parce que Transplant Québec est allé là-bas, donc, par défaut, ils ont probablement dû investir du temps, de l'argent.

Mme Maccarone : Juste une précision. Aussi, dans votre mémoire, vous avez deux recommandations. Le premier, très, très clair : exclure Transplant Québec du projet de loi n° 7. Mais le deuxième, vous dites : alternativement, confier le mandat de la gestion du don de tissus à Héma-Québec. Est-ce que vous voulez dire Transplant Québec?

M. D'Aragon (Frédérick) : En fait, je voulais... confier la gestion du... de la gestion des tissus à Transplant Québec. Dans un monde idéal, tu sais, les deux organismes pourraient être distincts. Mais si on me demande, tu sais, littéralement sous pression, là, si on n'a pas le choix de fusionner quelque chose, moi, je dirais le volet don de tissu soit fusionné, incorporé au volet don d'organes, pour les raisons que j'ai mentionnées précédemment.

Mme Maccarone : Ce serait à corriger dans le mémoire.

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.

Mme Maccarone :

Je ne sais pas si vous souhaitez envoyer une version révisée pour les membres de la commission, parce qu'actuellement, avec seulement deux recommandations, on mérite d'être clair.

M. D'Aragon (Frédérick) : Merci. Merci, oui, je vais... je vais le faire. Je vous avoue que... je ne veux pas lancer des tomates, là, mais j'ai eu... tu sais, j'ai eu comme quatre jours pour me préparer, dont deux qui sont si j'inclus la fin de semaine, là. Ça fait que j'ai peut-être oublié des petites affaires.

Mme Maccarone : Vous êtes pardonné, on ne peut même pas imaginer, puis on remercie encore vos collègues qui vous ont libéré pour participer à cette commission, qui est très importante, surtout que c'était à la suite, vous y avez fait référence, à un mandat d'initiative, où nous avons déjà parlé des recommandations. Il y avait combien de recommandations? Je ne m'en souviens plus.

• (11 h 10) •

Une voix : ...

Mme Maccarone : 15 recommandations. Mais, de... vous avez participé à cette... dans cette commission à l'époque... pensez-vous que si nous poursuivons avec les recommandations, suite à l'étude du mandat d'initiative, nous pourrions toujours améliorer le processus du don d'organes puis don de tissus?

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.

Mme Maccarone : Excellent. J'aurais peut-être... Il me reste combien de temps?

Le Président (M. Laframboise) : 2 min 22 s.

Mme Maccarone : OK, ça fait qu'il me reste du temps peut-être, pour une dernière question. Moi, ce que je souhaite savoir, c'est : Quels sont les éléments qui distinguent les systèmes les plus performants de don d'organes? Parce que si nous sommes en train de penser d'une fusion, on est peut-être en train de penser d'une perte de ce système d'efficacité. Ça fait que quels sont les risques? Qu'est-ce que nous pensons qu'on va peut-être perdre avec ce type de fusion? Puis quels sont vraiment les éléments clés qu'on dit : Ça, là, avec ça, c'est pour ça que ça fonctionne?

M. D'Aragon (Frédérick) : Écoutez, réponse assez simple, puis ce n'est pas pour être cliché, l'organisme qui est mandaté pour... pour gérer le don d'organes. L'OMT, c'est l'exemple frappant, ils ont eu... ils ont adopté la loi sur le consentement présumé 10 ou 15 ans avant la création de l'OMT. Il y a eu à peu près zéro progrès en matière de don d'organes pendant ces 15 années là, puis, deux, trois ans après que l'OMT a été créée, c'est là que le don d'organes a... a augmenté, puis, même encore aujourd'hui, ils continuent à augmenter leur nombre de donneurs, année après année.

Mme Maccarone : ...nous sommes en train de réparer quelque chose qui n'est pas brisé?

M. D'Aragon (Frédérick) : Je crois que oui.

Mme Maccarone : Merci beaucoup, c'est très clair. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, Mme la députée de Laurier-Dorion. Je cède maintenant la parole au député de... Excusez, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Je cède la parole au député de Laurier-Dorion, 3 min 28 s. Merci, excusez.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bien, bonjour, Dr Aragon. Là, écoutez, je me place dans l'hypothèse que cette fusion-là s'effectue. Qu'est-ce que... est-ce que vous pensez qu'Héma-Québec pourrait porter... pourrait améliorer, même, la coordination dans... en matière de transfert d'organes, et mieux supporter les familles dans le deuil, et mieux... et faire du référencement, et mieux... améliorer l'évaluation de l'organe, le transport des organes? Est-ce que cette fusion va améliorer les choses?

M. D'Aragon (Frédérick) : Non, ça ne va pas améliorer les choses. Pas parce qu'ils ne sont pas gentils, pas parce qu'ils ne sont pas bons. Parce qu'ils n'ont pas l'expertise, ce n'est pas la culture, ce n'est pas la... bon, excusez-moi l'anglicisme... ce n'est pas le «core business» d'Héma-Québec, c'est très niché. Donc, je ne crois pas que ça va améliorer quoi que ce soit.

M. Fontecilla : OK, merci pour votre réponse lapidaire. Écoutez, la ministre a mentionné tantôt qu'il pourrait y avoir des synergies, entre autres, dans le domaine de... administratif...

M. Fontecilla : ...ou encore dans le domaine informatique. Est-ce que ça vaut la peine de tout chambouler Transport... Transplant Québec, là, pour effectuer, ne serait-ce que des améliorations dans ces deux domaines-là?

M. D'Aragon (Frédérick) : J'en doute fortement, parce qu'entre autres, le moment où des activités entre le don d'organes et le don de tissus sont différents, le don d'organes, c'est le jour, la nuit, la fin de semaine. C'est... alors qu'Héma-Québec, oui, ils travaillent le soir, mais la nuit, tu sais, si nous, là, il faut envoyer un image d'un scan concrètement, là, à un chirurgien transplanteur, là, à 22 h 30 le vendredi soir puis on a un problème pour l'acheminer, ça prend quelqu'un qui est disponible pour répondre, là. Ça ne peut pas attendre au lendemain ou sur un message sur une boîte vocale. Et ça, actuellement, Transplant Québec le fait. Je ne crois pas qu'Héma-Québec a la capacité actuelle de le faire. Ceci étant dit, ils vont être auditionnés, ils pourront commenter, là, là-dessus, mais mon expérience terrain avec Héma-Québec, c'est que ça fonctionne bien le jour, la semaine et les jours de fin de semaine aussi, soit dit en passant. Mais la nuit, il y a moins... il y a moins de monde.

M. Fontecilla : Dites-moi, si jamais la ministre décide d'aller quand même de l'avant avec cette fusion-là, et d'ici un an, deux ans, on décidait d'évaluer le succès de cette opération-là, quels sont les grands indicateurs, là, qu'on devrait regarder pour évaluer le succès, ou pas, de cette fusion-là?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, il y aurait des indicateurs probablement reliés aux résultats, là, littéralement le nombre de transplantations d'organes. Mais je pense qu'il y aurait aussi des indicateurs en lien avec le processus, nommément la durée de prise en charge d'un donneur. Vous n'êtes pas sans le savoir qu'aujourd'hui prendre un charge un donneur, donc, du moment du consentement jusqu'au prélèvement, c'est un processus qui prend à peu près 3 à 4 jours au total. Et c'est déjà long, c'est déjà même trop long. Si je compare avec justement en Espagne où on fait ça en dedans de 36-48 h tout au plus, là, et ce qu'on voit apparaître, là, c'est de tellement de plus en plus long qu'une lourdeur additionnelle du processus ou de l'adaptation à un nouveau système qui engendrait des augmentations de délais, bien, pourrait se traduire par des retraits de consentement des familles au don d'organes. Ça ne demeure pas fréquent à l'heure actuelle, mais n'importe quelle prolongation met à risque d'avoir plus de retraits de consentement. Puis honnêtement, je ne blâme pas les familles, là. Ça fait deux semaines qui sont aux soins intensifs avec leurs proches, là, à vivre sur la corde raide.

M. Fontecilla : Dois-je comprendre que nous sommes déjà en retard par rapport à des exemples internationaux, l'Espagne, et que la perte d'autonomie risque d'agrandir ces retards-là?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, clairement que le système est perfectible, là, tu sais. Je demeure... il y a des choses à améliorer en termes de durée de prise en charge, là. Clairement que c'est trop long à l'heure actuelle au Québec, puis même au... je dirais dans d'autres provinces. Il y a de plein de raisons pour ça, mais ça... il faut quand même, un coup qu'on connaît les raisons, il faut quand même s'activer pour trouver des solutions pour réduire ces délais-là, parce que sinon ça va devenir... ça va devenir de plus en plus complexe.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Je cède maintenant la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci, Dr Daragon, pour votre présentation. Juste pour être bien clair, est-ce que vous êtes d'accord avec Transplant Québec lorsqu'ils affirment que la fusion Transplant Québec à Héma-Québec se fera au prix de la vie de patients? Il y a des gens qui mourront, sans doute, si cette fusion-là va de l'avant.

M. D'Aragon (Frédérick) : À court terme, oui.

M. Boissonneault : Héma-Québec se dit prêt à faire une fusion comme celle-là, voit positivement la fusion avec Transplant Québec. Ils disent que ça pourrait amener des avantages en termes de traçabilité, qualité renforcée grâce à un système intégré. On parle d'une réactivité en situation de crise améliorée, on parle d'innovation, de recherche transversale. Comment est-ce que vous expliquez cette confiance-là d'Héma-Québec dans leur capacité à livrer la marchandise s'il y a une fusion? Est-ce qu'il peut y avoir...

M. D'Aragon (Frédérick) : ...encore une fois, j'en doute fortement. Pour répondre au premier volet de votre question, peut-être que ça repose sur le fait qu'ils ont été capables de fusionner le don de tissus aux activités de don de sang, jadis. Mais je me répète, ce n'est pas du tout la même chose quand vient le temps du don d'organes. On ne demande pas à la garde côtière de faire la job de la marine canadienne et vice versa, parce que les deux portent des équipements qui conduisent des bateaux, honnêtement. C'est vraiment, je m'excuse d'utiliser cette analogie-là, là, mais c'est vraiment, ce n'est pas parce que c'est du don que c'est la même chose.

M. Boissonneault : Est-ce que vous voyez aussi un avantage à maintenir le statut d'un organisme sans but lucratif? Parce qu'il y a quand même des genres différents, là, l'intégration à une société d'État, on a un organisme, la vocation n'est pas tout à fait la même. Est-ce qu'il y a un avantage à garder ce statut-là aussi pour Transplant Québec?

M. D'Aragon (Frédérick) : Oui...

M. D'Aragon (Frédérick) : ...je trouve qu'il y a un avantage, d'autant plus qu'au Québec on a déjà un espèce de Réseau québécois de don et de transplantation, le RQDT, sur lequel le ministère et Santé Québec siège. Ça fait que comme... au niveau de la gouvernance, il y a comme une espèce de mécanisme où on peut... on est en mesure de savoir ce que transplant... ce que Transplant Québec fait, même s'ils sont, entre guillemets, indépendants.

M. Boissonneault : Est-ce que vous voyez aussi la possibilité que des employés de Transplant Québec, nommément les infirmières, peut-être des collègues, des gens avec qui vous travaillez, qui refuseraient de passer à Héma-Québec... je veux dire, de Transplant Québec qui refuseraient d'aller à transplant... à Héma-Québec, pardon.

M. D'Aragon (Frédérick) : Sans vous insulter, c'est la question la plus facile à répondre aujourd'hui, oui.

M. Boissonneault : Pourquoi?

M. D'Aragon (Frédérick) : Bien, c'est une question d'engagement, tu sais, c'est... le don d'organes, là, ils vivent dans la mort au quotidien, le personnel infirmier, mais ils sont engagés là-dedans puis ils continuent là-dedans parce que, justement, ils le voient. C'est une... c'est un... c'est une mission, c'est des... Encore une fois, c'est une charge émotive importante, ça va au-delà de la paie. Tu sais, il y a une valeur de plus, c'est l'engagement, c'est la motivation intrinsèque. Ils font des miracles avec... tu sais, avec pas grand-chose, là.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Je vous remercie, Dr D'Aragon, pour votre contribution aux travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 20)

(Reprise à 11 h 23)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Héma-Québec et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé. Merci.

Mme Fagnan (Nathalie) : Merci, M. le Président. Mon nom est Nathalie Fagnan. Je suis présidente et cheffe de la direction de Québec depuis bientôt sept ans. Je suis accompagnée de Dr. Marc Germain...

Mme Fagnan (Nathalie) : ...Marc Germain, vice-président aux affaires médicales et innovation, qui est également responsable de tout le secteur des tissus humains comptant 70 employés. Et, à ma gauche, j'ai Mme Mélanie Dieudé, directrice des opérations de tout le volet recherche et développement à Héma-Québec. Mélanie est une chercheure renommée qui a d'ailleurs contribué au développement scientifique du programme de recherche en dons et transplantation, dont elle a été la directrice générale de 2020 à 2022, juste avant de joindre Héma-Québec.

Alors, M. le Président, mesdames et Messieurs les membres de la commission, merci de nous donner l'occasion de... nous exprimer aujourd'hui sur le projet de loi n° 7. Depuis son dépôt à l'Assemblée nationale, ce projet a suscité de nombreuses réactions, on en convient, puis c'est compréhensible, particulièrement en ce qui concerne le transfert de responsabilité de la coordination du processus de dons et de transplantation d'organes à notre organisation, Héma-Québec. Je pense notamment aux... aux employés de Transplant Québec qui, avec raison, demandent à être rassurés sur leur avenir. Je pense aussi aux professionnels de la santé qui ne comptent pas leurs heures quand il s'agit de... d'intervenir dans une cause aussi cruciale. Puis il est impossible de passer sous silence les nombreuses personnes actuellement en attente d'une greffe pour qui il s'agit littéralement d'une question de vie et de mort... ou de mort.

Je dois vous dire qu'Héma-Québec, nous sommes extrêmement sensibles à ces inquiétudes qui ont été soulevées par le projet de loi n° 7. Mais, en même temps, nous gardons la tête froide, comme l'importance que notre mission nous impose depuis 27 ans. Nous sauvons des vies tous les jours. Aujourd'hui, au Québec, lorsqu'il est établi qu'une personne est en mesure de donner des tissus humains comme de la peau, les cornées ainsi que des organes comme le cœur ou le foie, deux mécanismes distincts s'enclenchent parallèlement. L'équipe médicale doit contacter deux organismes, puisque Héma-Québec est responsable des tissus humains et Transplant Québec, des organes.

Ces deux organismes ont des manières de faire différentes... des structures différentes, des employés différents. Puis, si on cite un exemple, un employé de Transplant Québec qui parle à une famille endeuillée du... du don de tissus, il est moins en... en maîtrise de la chose parce qu'il connaît davantage le don d'organes. Et c'est normal. Mais, dans d'autres occasions, la famille endeuillée va recevoir deux appels, l'un de Transplant Québec et l'autre d'Héma-Québec. Puis jusqu'au prélèvement, pourtant, toutes ces étapes auraient pu faire... auraient pu être faites par un seul organisme. Et c'est ce que suggère une certaine logique où on retrouve plusieurs... dans plusieurs endroits, dans d'autres provinces canadiennes, tout comme dans d'autres juridictions, où les processus de don d'organes et de tissus humains sont gérés par un seul et même organisme.

Puis c'est d'ailleurs la conclusion à laquelle est arrivée la commission sur la santé et justement... qui s'est penchée l'an dernier sur les moyens facilitant le don d'organes ou de tissus, qui d'ailleurs, dans sa toute première recommandation, disait qu'«une loi-cadre sur le don d'organes et de tissus soit présentée et qu'un organisme responsable soit désigné pour sa mise en application». Ce sont des types de dons qui, bien sûr, ont des particularités, mais on y voit un avantage à adopter une démarche unique, plus simple, plus efficiente et davantage humaine pour les familles endeuillées. Puis, sans surprise, nous confirmons et nous disons que, oui, nous accueillons favorablement l'intention exprimée, dans le projet de loi n° 7, de confier à Héma-Québec la responsabilité du don d'organes.

En effet, les échanges qui ont eu lieu, en 2024, lors des travaux de la commission ont fait ressortir un besoin très clair, celui de rassembler les efforts, celui d'offrir une direction plus intégrée et de se doter d'un cadre cohérent pour répondre aux besoins des patients, des familles et du réseau de la santé. L'intégration de Transplant Québec à Héma-Québec s'inscrit tout à fait dans cette volonté de mieux soutenir et encadrer l'ensemble des activités entourant le don d'organes au Québec. Le regroupement des expertises contribuera à simplifier les processus, à réduire certaines redondances et à renforcer la cohérence des actions sur le terrain.

De plus, le processus de don et de transplantation d'organes bénéficiera à coup sûr des ressources qui existent à Héma-Québec. Ce sont des expertises, que ce soit en matière d'analyse de laboratoire ou de gestion de défis logistiques...

Mme Fagnan (Nathalie) : ...que nous vivons à travers nos différents secteurs d'activités. Au-delà du sang, j'entends cellules souches, lait maternel, tissus humains. Surtout, ce regroupement-là, nous croyons qu'il va créer, oui, des synergies. Lorsque des équipes travaillent en étroite collaboration et qu'elles partagent les mêmes infrastructures, les mêmes systèmes d'information, les mêmes pratiques de qualité, les mêmes mécanismes de traçabilité, elles bénéficient d'un environnement beaucoup plus propice à l'efficacité, à l'innovation et, ultimement, à l'augmentation du nombre de personnes qui pourront bénéficier d'une greffe. N'est-ce pas l'objectif ultime dont on parle? Nous souhaitons souligner que nous aborderions cette transition avec un profond respect pour le travail remarquable accompli par Transplant Québec. L'intégration de son expertise au sein d'Héma-Québec lui offrira un cadre qui permettra de la maintenir, de la valoriser et de la projeter vers l'avenir. Pour nous, la continuité des activités critiques et la stabilité pour le personnel, les équipes médicales et les patients demeurent des impératifs absolus. Ce transfert s'inscrit aussi naturellement dans la mission que nous portons depuis près de trois décennies. Héma-Québec est née d'une volonté de mieux répondre aux besoins de la population québécoise, et pas seulement en sang. La réalisation de tous les mandats obtenus par Héma-Québec à travers les 27 dernières années requiert une même chose : un geste noble et généreux du don d'un être humain dans tous nos secteurs d'activités.

• (11 h 30) •

Au fil du temps, nous avons su intégrer de nouveaux mandats, toujours dans les domaines délicats et pointus de la santé, et nous les avons développés avec rigueur et fiabilité. Les tissus humains, les cellules souches, le sang de cordon, le lait maternel, tous, nous les avons intégrés avec succès. À chaque étape, nous avons démontré notre capacité à évoluer, à nous adapter et à mettre en place des systèmes efficaces en partenariat avec le réseau de la santé. Cette expérience, ajoutée aux résultats concrets que nous avons obtenus dans le domaine des tissus humains, constitue un gage, à notre avis solide, de notre capacité à accueillir la responsabilité du don d'organes. Le Québec a aujourd'hui l'occasion de bâtir une structure qui reflète à la fois ses spécificités, ses forces et son ambition collective en matière de don et de transplantation. Dans ce contexte, Héma-Québec serait fière et se dit capable de contribuer à créer un modèle québécois de référence capable d'unir des expertises qui se renforcent mutuellement et de mettre cette force au service du but profondément humain : sauver des vies, soutenir les familles, puis offrir aux patients et patientes des... les meilleures chances possibles. C'est dans cet esprit que nous sommes prêts à collaborer étroitement avec Transplant Québec, avec le gouvernement et avec l'ensemble des partenaires du réseau, sans oublier les patients, les donneurs, leurs familles, afin d'assurer une transition à la fois rigoureuse, respectueuse et productive. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, Mme Fagnan. Nous allons maintenant commencer la période d'échange, Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, vous avez une période de 16 min 30 sec.

Mme Duranceau : Oui, merci beaucoup, merci beaucoup d'être là puis de nous donner... s'il y a une chose que j'ai apprise en politique, c'est qu'il y a toujours... il y a toujours trois côtés à une médaille, hein, donc un côté, l'autre côté, puis quelque chose, quelque part entre les deux, là, qui finit par être le... la solution. Donc merci de... de donner un autre côté de la médaille. Transplant Québec, puis le Dr D'Aragon, aussi, ont mentionné que ça prend vraiment une expertise au niveau de l'administration de l'organisation, une expertise qui est particulière si on veut être à même de... de poursuivre la mission, là, au niveau du... des organes en particulier. Alors... puis je peux voir, tu sais, on voit que c'est très sensible dans le temps puis que c'est une expertise pointue pour le prélèvement et tout ça. Donc, comment vous répondez à cette... à cette préoccupation-là, puis comment, dans ce contexte-là, on serait vraiment capable d'accueillir chez Héma-Québec cette nouvelle expertise-là?

Mme Fagnan (Nathalie) : Je vous dirais que nous, depuis... depuis qu'on a appris cette... cette... je veux dire, le contenu de ce projet de loi là et tel que mentionné dans mon...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

Mme Fagnan (Nathalie) : ...nous comptons intégrer l'expertise de Transplant Québec. Ce n'est pas une question de... Nous valorisons l'expertise de Transplant Québec. Alors, pour nous, d'intégrer cette équipe-là qui continuerait à fonctionner comme elle fonctionne en ce moment... Et, avec le temps, nous travaillerons à développer des synergies positives. Mais nous valorisons l'expertise de Transplant Québec, Héma-Québec n'a jamais eu la prétention que nous prendrions le mandat sans avoir besoin de cette expertise pointue là. Des vies en dépendent, on comprend ça. Nous sauvons des vies tous les jours, nous aussi, que ce soit avec des cellules souches, des produits sanguins ou autres. Alors, je ne sais pas si mes collègues voulaient ajouter là-dessus.

M. Germain (Marc) : D'abord, merci pour l'occasion de venir vous parler aujourd'hui. Je rajouterai là-dessus que, peut être, l'inquiétude vient du fait que, comme l'a exposé le Dr D'Aragon, nos collègues de Transplant Québec, il est certain que la gestion au quotidien du don et de la transplantation d'organes, c'est très particulier. On n'a rien qui se compare à ça présentement à Héma-Québec de façon exacte. Alors, c'est sûr qu'il faudra adapter nos priorités de gestion, nos... nos façons de gérer cette nouvelle activité là. En fait, on va essentiellement prendre le modèle qui existe déjà à Transplant Québec. On nous faisait la remarque que, pour les tissus, ce n'est pas 24/7, 365, c'est vrai, pour les organes, on ne veut pas se permettre ça, il faut être là 24/7, 365, Et ça, on va en tenir compte lorsqu'on mettra en place les... lorsqu'on accueillera les structures de gestion actuelles qui existent à Transplant Québec et qui fonctionnent très bien. Et ça, ce sera la base pour, comme l'a dit Mme Fagnan, pour se projeter dans le futur et tâcher de trouver de meilleures façons de faire, mais tout en tenant compte d'une réalité qui est très particulière, on le reconnaît.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Merci d'être là. Merci de vous prêter à répondre à nos questions. J'ai... Il y a une chose qui m'a touché dans votre élocution et qui m'a rappelé effectivement deux appels, deux appels à des moments qui sont particulièrement difficiles pour les familles. C'est... On est dans la confusion. Les gens qui reçoivent ces appels-là, évidemment, peuvent être... sont particulièrement émotifs. Et on comprend évidemment que la redondance n'est pas toujours comprise par les familles des gens qui sont... qui sont des donneurs potentiels, entre autres choses. Mais, au-delà de ça, il faut quand même s'assurer d'une transition qu'elle soit, à la fois, bien réalisée, parce que le don d'organes, c'est essentiel. Et on le dit, on a eu déjà des discussions, on doit... ou il serait souhaitable de le faire progresser aussi.

J'aimerais ça connaître un peu les conditions, quelles sont les conditions qui sont essentielles ou qui sont celles qui devraient être mises en place, les conditions gagnantes pour pouvoir réaliser cette transition-là. Est-ce qu'il y a des points à identifier?

Mme Fagnan (Nathalie) : C'est une très belle question. En effet, dans notre mémoire, nous avons mis en lumière ces quatre conditions-là et justement, toujours dans le respect de l'expertise de Transplant Québec, pour nous, il est clair que l'équipe doit suivre. L'équipe doit être intégrée à Héma-Québec, assurément. Ça, c'est une première condition. La deuxième, c'est que le financement suive aussi, alors, tel que l'a mentionné tantôt la ministre Duranceau. Alors ça, ce sont les deux premières conditions. La troisième, c'est que, dépendamment si le projet de loi est adopté, il faudra quand même se donner un bon 90 jours pour travailler ensemble, orchestrer certaines choses. Alors, ça, on l'a mis aussi comme une condition gagnante.

Et la dernière, c'est de prendre le temps, prendre le temps de se connaître, prendre le temps de justement travailler ensemble, puis de développer ces synergies-là pour justement en faire, oui, un processus qui sera encore plus performant, et j'y crois vraiment.

Mme Lachance : Merci. Parce que, vous savez, même si cette loi est dans une commission des finances publiques, il faut le rappeler, l'objectif principal, c'est aussi de bien s'assurer des transversales, de bien s'assurer d'une coordination efficace. Un des points qui revient lorsqu'on... lorsqu'on consulte la littérature en lien avec les succès, entre autres celui de l'Espagne, c'est le fait que chaque hôpital a un poste ou, en tout cas, une personne clé qui est à la coordination...

Mme Lachance : ...de la transplantation, ça vous dit quoi, ça?

Mme Fagnan (Nathalie) : Encore là, et tu pourras compléter, Marc, mais je... Pour nous, la recette qui fonctionne présentement à Transplant Québec, c'est ce que nous voudrions reproduire. Alors, je sais qu'ils ont des coordonnateurs dans les centres hospitaliers. Alors, il faudrait... il faudrait absolument, et c'est ce qu'on souhaite, que l'équipe suive, qu'on commence avec la façon telle quelle, le fonctionnement tel quel de Transplant, et qu'après on travaille ensemble à trouver des synergies. Alors, c'est ça, notre objectif. Donc, nous on ne veut rien chambouler au jour un, et, pour plusieurs mois, ce serait cette belle continuité là qui assure un succès. Il faut que la transition soit réussie, des vies en dépendent.

Mme Lachance : Pouvez-vous nous parler un petit peu... Parce que votre organisme est quand même un peu différent, on l'a mentionné, hein, dans le fond, vous êtes responsable de gérer un inventaire, en termes de banque de sang, en termes de tissus. Et je vous entends bien, là, puis c'est très rassurant de vous entendre dire que l'expertise de Transplant Québec est importante pour vous puis qu'elle doit être intégrée pour pouvoir faire fructifier la mission. En fait, c'est deux missions qui devraient trouver preneur dans une mission élargie, mais le fait qu'il y ait une séquence très rapide, au-delà... au-delà de dire : Bien, on intègre les ressources, parce qu'évidemment c'est la clé du succès, d'avoir les bonnes personnes à la bonne place pour pouvoir bien réaliser chacune des missions de manière efficiente, et c'est ça, la volonté... Donc, dans cette optique-là, est-ce que pour vous c'est inquiétant, le fait que ce soit 24 heures, sept jours, et puis... Parce que c'est ça, la réalité de la transplantation, ça arrive dans des moments où on ne choisit pas toujours, en fait, rarement, voire jamais, mais ça doit se faire.

• (11 h 40) •

Parce qu'il y a une donnée qui est extrêmement importante. On parlait tout à l'heure d'un délai de 36 à 48 heures pour organiser et un délai qui bénéficierait à être encore plus raccourci. Donc, vous voyez ça comment?

Mme Fagnan (Nathalie) : Et encore là... je vais te laisser après la parole, Mélanie, encore là, on va partir de la base, de ce qui fonctionne présentement avec Transplant Québec, mais il faut assurément que... ensemble, il faut trouver des façons de l'améliorer. On le disait, oui, l'Espagne est un modèle, c'est un regroupement des tissus et organes. Alors, ces deux groupes-là travailleraient très, très près, ensemble, pour voir à optimiser et atteindre ces cibles-là que l'Espagne et que le Portugal ont. Mélanie.

Mme Dieudé (Mélanie) : Oui. Je pense qu'on est dans un endroit où on peut se permettre de rêver plus grand. Je pense que la commission parlementaire nous avait enseigné qu'il faut aller plus loin pour le don d'organes au Québec. Et Héma-Québec est vraiment conscient de ça et veut épauler cette mission-là pour aller plus loin.    On donne beaucoup l'exemple de l'Espagne, qui est vraiment notre numéro un, mais le Portugal, il faut le nommer aussi, est quand même le deuxième mondial et unit sang, tissus, cellules. Donc, il y a des modèles qui existent. Et ils sont bon deuxième, ils se sont d'ailleurs beaucoup inspirés de l'Espagne. Et donc je pense que de mettre des conditions gagnantes et de faire levier sur l'infrastructure efficace d'Héma-Québec tout en conservant l'unicité du don d'organes, mais de les propulser pour aller plus loin, et de trouver les synergies ensemble, puis de se donner le temps de les trouver, ça, je pense que c'est une opportunité pour le don d'organes au Québec.

Mme Duranceau : ...la parole, revenir sur l'expertise dans l'équipe administrative par rapport au don d'organes, versus celle qui existe chez Héma-Québec, tu sais, en quoi mon comptable, puis ma personne des ressources humaines, puis mon PDG doit avoir une expertise spécifique.

Mme Dieudé (Mélanie) : Bien, je pense qu'il y a... Tu sais, à Héma-Québec, de la manière que ça fonctionne, c'est qu'il y a des différentes bulles d'organisation. Et donc il est vrai que le sang est très particulier et diffère totalement du don d'organes, on est conscients, mais les tissus aussi, ils ont leur propre... tu sais, leur propre système informatique de gestion, par exemple, qui est complètement différent. Pareil pour lait maternel, pareil pour cellules souches. Donc, tu sais, je ne pense pas qu'il faut dire qu'Héma-Québec va prendre et va infuser comme une machine, là, au don d'organes, mais va plutôt accueillir l'unicité du don d'organes et mettre au service les infrastructures pour aller de l'avant, mais en gardant cette unicité-là et ces expertises-là, en étant guidé par les leaders en don d'organes au Québec.

Mme Duranceau : C'est bon, merci...

Le Président (M. Laframboise) : ...Mme la députée de Bellechasse pour 5 min 15 sec.

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Donc, on a parlé beaucoup, c'est vrai, vous l'avez mentionné, du modèle de l'Espagne, parce qu'évidemment, l'Espagne est le... est le pays dans le monde où s'effectue le plus de dons d'organes et c'est très bien. Évidemment, il y a des conditions en amont qui sont... le don présumé, qui font en sorte, évidemment, que possiblement, l'accès à un plus grand nombre de donneurs assez rapidement. On ne traite pas du don d'organes comme on traite du don de sang, mais encore, lors de notre récente intervention, en fait, de ma récente intervention avec l'interlocuteur précédent et probablement que vous étiez en déplacement, vous ne l'avez pas entendu, alors je vais le répéter, c'est... je me questionne... le fait que vos donneurs de sang soient des gens qui sont sensibilisés à l'importance de donner, du don de vie que ça représente, et bien évidemment, je ne fais pas d'amalgame, là, je sais très bien que le don d'organes est très différent. Néanmoins, je me posais la question : y a-t-il une opportunité? Vous les voyez, vous les connaissez les donneurs de sang, et on sait, d'autre part, qu'on doit... on doit, pour augmenter les donneurs... les donneurs d'organes... augmenter l'éducation assurément. Je pense que c'est au-delà de la sensibilisation, parce que lorsqu'on voit des personnes malades pour qui le don de vie passe par un don d'organes, on est tous conscients. Mais quand arrive le temps de faire le don d'organes d'un proche, c'est très différent, hein, il y a... tu sais, c'est une crise, en fait, qu'on gère. Est-ce que vous voyez une opportunité à pouvoir... utiliser, comment je dirais ça, bénéficier du... de votre accès à une population qui est déjà sensibilisée pour l'éduquer ou, en fait, pour permettre de faire connaître et de préciser et de répondre aux questions et tout sur le don d'organes? Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait, selon vous, se mettre en place et..?

Mme Fagnan (Nathalie) : Je pense que c'est une... ça serait une option à explorer, je le dirais comme ça. Par contre, quand on veut sensibiliser pour avoir plus de donneurs d'organes et de tissus, là, on s'adresse au même groupe. Maintenant, comme vous dites si bien, un don de sang, ça... on peut quand même faire une sensibilisation pour, justement, rappeler aux proches l'importance d'offrir, de donner son consentement et tout. Alors il y a... ce sera, encore là, de beaux défis à explorer en équipe. Vas-y, Mélanie.

Mme Dieudé (Mélanie) : Bien, je veux juste rajouter qu'il y a des modèles dans le monde où ils utilisent un peu des... surtout pour les... les enfants, les jeunes, pour former les gens, d'enseigner, un peu, une culture du don. Et la culture du don, au-delà du don lui-même, là, le don de sang, le don de cellules, le don de sang de cordon, donc, du début à la fin de la vie, la culture du don, l'altruisme, tu sais, c'est une notion qui peut être combinée, donc il y a, oui, des... des opportunités de coordination là, là-dessus, au niveau de la sensibilisation et de l'éducation.

Mme Lachance : Vous avez mentionné, puis là, je reviens à un niveau un petit peu plus administratif, vous avez mentionné à ma collègue votre... dans le fond, la structure de votre organisation au niveau administratif, elle est... elle est solide. On parle quand même d'expertise, bon, là, je... je parle ici, peut-être, des ressources humaines, là, tu sais, le volet très très purement administratif, qui n'est pas lié au volet scientifique. Ça, c'est récurrent, ça va bien, vous avez une belle organisation et vous êtes satisfaits de là où vous êtes, mais vous avez mentionné qu'il serait important de bien intégrer le volet scientifique et médical de Transplant Québec pour pouvoir faire progresser la... la combinaison d'organismes vers des nouveaux... des nouvelles façons de faire ou, en tout cas, de la... tout en respectant le mouvement qui est déjà enclenché. Pour le volet administratif actuel, c'est quelque chose qui peut se faire simplement, ou vous... vous sentez que ça nécessiterait d'augmenter significativement la part administrative?

Mme Fagnan (Nathalie) :  Non, je ne crois pas qu'on aurait ajouté à la... non, la part administrative de Héma-Québec. Mais, par contre, nos... justement, tous nos services et nos différents secteurs, pensons à la cybersécurité pour la protection des données, pensons aux formations qu'on donne, on a des programmes de formation pour nos...

Mme Fagnan (Nathalie) : ...alors ce qui peut être utile au groupe, tant mieux. Mais assurément que ça va être plutôt nos ressources qui vont permettre de venir solidifier, je dirais, parce que justement, lors des... des discussions à la dernière commission sur la santé, les services sociaux, il y avait quand même des demandes, oui, une loi-cadre, mais aussi des moyens additionnels et des ressources. Et c'est ce que... ce que nous offrons par l'intégration de Transplant Québec à Héma-Québec.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci. Merci, Mme la ministre, équipe gouvernementale. Maintenant, je cède la parole de Mme la députée de Westmount—Saint-Louis pour 10 minutes, 24 secondes.

Mme Maccarone : Merci, M. le Président. Merci beaucoup pour votre témoignage et d'emblée, je souhaite vous féliciter pour ce que vous faites. C'est vrai que Héma-Québec, vous sauvez des vies, vous êtes une excellente organisation. Ça reste qu'évidemment nous avons des préoccupations. Mais je souhaite que vous sachiez que ce n'est aucunement en lien avec ce que vous faites actuellement, pour lequel j'ai un grand respect. Même que j'aurai ma propre campagne de dons prochainement pour ceux qui écoutent, HEC, au centre-ville de Montréal. Alors, bravo pour ce que vous faites.

Moi, je souhaite savoir : est-ce que vous avez été consulté avant le dépôt de ce projet de loi?

Mme Fagnan (Nathalie) : Non.

• (11 h 50) •

Mme Maccarone : Pas consulté. OK. Puis c'est quoi, votre réponse à tout ce que nous avons déjà entendu? Il y a... à date, puis nous, nous avons parlé avec plusieurs professionnels de la santé, des médecins. Personne n'est favorable à cette fusion. Pas les médecins, pas les infirmières. Nous venons d'entendre Docteur D'Aragon qui a dit qu'évidemment ce n'est pas juste une question de la transition, c'est une question de... Il va y avoir un désengagement. Alors, comment est-ce que vous pouvez dire que vous êtes favorable à cette fusion en entendant ces cris de cœur puis aussi ce que nous attendons, une autre perte pour notre réseau de santé?

Mme Fagnan (Nathalie) : Est-ce que tu veux... Parce que j'aurai aussi quelque chose à dire.

M. Germain (Marc) : Bien, je peux commencer. On est tout à fait conscient que présentement, le message passe difficilement auprès de nos collègues dans le réseau. On n'a pas eu l'occasion, je dois dire, de discuter avec eux pour parler des avantages potentiels de ce qui est sur la table. Je pense que ça, c'est... c'est la prochaine étape. Et c'est pour ça que dans le plan de transition qu'on envisage, au jour un, on veut préserver exactement le système tel qu'il existe présentement, préserver les activités, les expertises, les emplois et bâtir là-dessus. Mais là, tout le travail reste à faire pour faire la démonstration, avec nos collègues à Transplant Québec et dans le réseau, de tabler sur les avantages que nous, on perçoit pour cette fusion-là et, ensemble, travailler à développer le futur pour arriver à l'objectif ultime. Je le rappelle, là, on l'a dit plusieurs fois, mais je pense que c'est très important de le rappeler, c'est d'augmenter le nombre de donneurs d'organes. Ce n'est pas autre chose, là, ce n'est pas de faire des économies, ce n'est pas de...

Mme Maccarone : ...efficacité, sauver de l'argent.

M. Germain (Marc) : Oui, je suis tout à fait... tout à fait d'accord. Mais les économies en termes d'argent, je pense que le docteur d'Aragon a été très éloquent. J'étais très heureux d'entendre ce qu'il a dit, parce que de retirer des patients sur la liste d'attente pour une greffe de rein, ça fait sauver de l'argent au système, en plus de bénéficier leur santé, améliorer leur qualité de vie.

Mme Maccarone : Et il y aura un risque, si nous poursuivons avec cette fusion. Ma question, la raison que je le pose. C'est parce que vous êtes les seuls qui sont favorables à cette harmonisation. Personne d'autre. Sincèrement, il n'y a personne d'autre qui est favorable à ceci. On a fait des consultations. Oui, il y avait l'étude sur le mandat d'initiative. Ça fait que je suis perplexe, parce que, même si vous faites votre réponse à un besoin exprimé aux recommandations officielles, oui, vous parlez d'un projet de loi-cadre qui a été déposé par mon collègue le député de Pontiac. On aimerait beaucoup que le gouvernement appelle pour être étudié, mais ce que vous parlez ici, c'est que votre proposition est une réponse aux besoins qui sont exprimés par les recommandations officielles. Mais les recommandations officielles sont claires, tout le monde a été du même d'avis que la commission constate... et là je cite le mémoire : «La commission constate que Transplant Québec est un organisme compétent qui détient l'expertise et la capacité d'opérationnaliser rapidement le processus de don d'organes au Québec.» Alors, la recommandation, c'est que c'est uniquement eux qui s'occupent de ça. Ça fait que je comprends ce que vous êtes entrain de dire, mais vous ne figure pas dans les recommandations du tout, Héma-Québec ne fait pas partie de ces recommandations. Alors, c'est quoi votre réponse à ceci? Vous êtes seul sur votre île.

Mme Dieudé (Mélanie) : Oui, bien, j'ai... on a parlé quand même... J'ai parlé avec plusieurs collègues et puis, bon, c'est sûr qu'il y a une inquiétude. Dans la vie... puis je pense que tout le monde est conscient de ça, le statu quo est toujours plus confortable. Ça, c'est certain...

Mme Dieudé (Mélanie) : ...et je pense qu'il faut prendre le temps, un peu comme disait mon collègue Dr Germain, de bien étudier les synergies pour aller plus loin. Le statu quo n'est pas non plus acceptable pour Transplant Québec, pour le don d'organes au Québec. Donc, c'est sûr que je comprends qu'il y a une certaine hésitation. On a du travail à faire sur rassurer les gens. Mais je peux vous dire une chose, pour avoir parlé à de nombreux collègues, les gens ont la mission du don d'organes à cœur, se retroussent les manches et vont s'unir. D'ailleurs, il y a Sylvain Bédard, un patient partenaire qui a écrit une lettre et qui appelle à cette union-là des forces pour le don d'organes, pour améliorer le don d'organes au Québec.

Mme Maccarone : Et avec tout le respect que j'ai pour cette personne, que je ne connais pas, on a une trâlée de médecins... d'experts chercheurs, des experts dans le domaine, tous les gens qui sont venus témoigner, qui ont dit qu'ils ne sont pas d'accord avec votre lecture. Ça fait que je comprends que vous dites, oui, la transition, ce n'est peut-être pas facile, mais ce qu'ils disent, c'est que la transition va coûter des vies. On a bien entendu, Dr D'Aragon nous a dit : Il va avoir des gens qui vont décéder à cause de ceci. J'ai aussi entendu, lors de votre témoignage, vous avez dit que, oui, c'est important de rassurer les employés par rapport à leur avenir. Je pense que vous étiez dans la salle pendant que Transplant Québec ont témoigné. Moi, ce n'est pas ça que j'ai entendu, moi, ce que j'ai entendu, ce n'est pas une question de : Je veux être rassuré de garder mon emploi, c'est parce qu'on n'a pas la même vision, on n'a pas les mêmes objectifs.

Nous avons une spécialité que nous souhaitons garder puis cette transition va engendrer des mises au pied. Ce n'est pas parce qu'ils souhaitent que vous les engagez. Alors, encore une fois, c'est quoi, la réponse à ceci? Parce que ce n'est vraiment pas ma lecture, et je crois qu'on a plusieurs infirmières spécialisées qui sont ici, dans la salle, qui sont en accord avec ça.

Mme Fagnan (Nathalie) : Alors, il est certain que, et je respecte la position de Transplant Québec, qui veulent justement un retrait de tout ce... de tous les articles qui concernent Transplant Québec dans le projet de loi n° 7. Alors, le discours suit... suit l'intention, et je le comprends, là. Mais j'espère que, quand les gens aiment leur travail et qu'ils sauvent des vies, et que, comme à Héma-Québec, on a... l'ensemble de nos employés portent la mission dans leur cœur, je crois qu'il y a peut-être, oui, une possibilité de les accueillir puis qu'ils veulent continuer à faire leur travail. Cela dit...

Mme Maccarone : Si nous poursuivons avec le projet de loi tel quel, évidemment, on n'aura vraiment pas le choix, parce que là on parle d'une efficacité, mais vous avez vraiment la nécessité d'engager des fonctionnaires, un minimum de 70 fonctionnaires. Alors, comment ça se fait qu'on peut voir que ça, c'est une synergie puis une épargne pour l'État? Puis je reviens à ce que vous avez dit, il y a un terme de... Oui, on ne devrait pas rester campé, là, les transitions sont difficiles, il faut innover. Mais pourquoi vous ne pouvez pas innover, trouver des manières des plus efficaces? Vous, Héma-Québec et Transplant Québec, pourquoi il faut que ça se fasse ensemble? Parce qu'il va avoir des coûts pour l'État, vous êtes un organisme de l'État, 70, minimum. 

Mme Fagnan (Nathalie) : ...est un modèle, et l'Espagne, ils ont regroupé. Portugal est un modèle, ils ont regroupé. Alors, ce n'est pas loufoque. Dans le reste du Canada, c'est regroupé, dons tissus et organes. On a des modèles éprouvés, là.

Mme Dieudé (Mélanie) : Peut-être aussi au niveau de la confiance, puis, tu sais, je les salue, ils sont là, je sais qu'ils sont là, parce qu'ils ont ça à cœur. Puis ça, je partage ça, je suis encore chercheure en transplantation. J'ai vécu là-dedans, ça fait plus que 15 ans, et j'ai vraiment le don d'organes à cœur, personnellement. Je sais que c'est transmis à Héma-Québec. 

Mme Maccarone : Mes questions ne sont pas du tout en lien avec votre...

Mme Dieudé (Mélanie) : Non, non, je sais. Mais ce que je veux dire, c'est que, malheureusement, pour toutes sortes de raisons, on n'a pas eu encore la chance de se parler, OK, on a tendu la main. Et ces discussions-là qui sont absolument nécessaires au lien de confiance, à créer quelque chose ensemble, bien, on n'a pas eu la chance de les avoir encore.

Mme Maccarone : Ça, je suis d'accord avec vous. C'est une discussion que vous aurez dû avoir avant le dépôt de ce projet de loi, pour savoir comment nous aurons pu travailler ensemble, au lieu d'avoir un spectacle en commission parlementaire où, encore une fois, je répète, vous êtes tout seuls sur votre île, il n'y a personne qui est en accord avec votre position, même pas les membres de la commission. On a des gens qui siègent ici aujourd'hui, qui ont été membres de cette commission à l'époque. Alors, c'est comme un changement de vision.

Ça fait que je vous entends, mais j'ai vraiment de la misère à comprendre. Ce n'est pas parce que vous ne croyez pas en sauvant des vies ou le don d'organes. Puis quand vous parlez aussi d'une synergie qui existe déjà à travers le Canada, ce n'est pas le sang et les organes, c'est ça, la différence. Ça, c'est à part...

Mme Fagnan (Nathalie) : ...au Portugal, oui.

Mme Maccarone : Au Portugal, mais vous avez évoqué le Canada, mais ce n'est pas...

Mme Maccarone : ...cas au Canada, on n'a pas une fusion de sang et organes. Alors, on a des grandes différences. Ça fait qu'on n'a vraiment pas beaucoup de modèles, à part le Portugal, qui disent que, ah! oui, mais ça, ça fonctionne. Mais tous les modèles qu'on évoque, qu'on dit qu'ils sont excellents, c'est l'Espagne, c'est à l'échelle internationale. Et Transplant Québec sont reconnus nationalement et internationalement. Ça fait que vous n'avez pas des préoccupations, avec cette fusion, qu'on va avoir une perte de vies, une perte de synergie, une perte d'efficacité et plus de coûts?

Mme Dieudé (Mélanie) : Je peux... Si je peux me permettre, le passé est garant de l'avenir, on le dit souvent. On dit que sang, ça n'a rien à voir avec don d'organes, on le concède totalement. Ce qu'on voit dans les autres modèles, c'est organes et tissus qui sont mis ensemble, on est d'accord. Bien, la... Héma-Québec, sa mission a été élargie au don de tissus. Et cette mission-là a été fructifiée au point de devenir la plus grande banque de tissus au Canada. Donc, ce que je veux dire ici, ce n'est pas que tissus, c'est comme les organes, mais c'est que la structure d'Héma-Québec permet à d'autres missions qui ont des particularités de se développer, de s'amplifier puis d'avoir plus d'impact. Ça fait que c'est là... c'est là que le don d'organes, dans son unicité...

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci.

Mme Dieudé (Mélanie) : ...pourrait aussi bénéficier.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup.

Mme Dieudé (Mélanie) : Merci.

Le Président (M. Laframboise) : Donc, je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, trois minutes 28 secondes.

• (12 heures) •

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Écoutez, on a l'impression ici qu'il y a une tentative de fusion — et c'est une impression, hein — forcée de deux logiques complètement différentes, une logique qui est mise de l'avant de façon tout à fait logique, là, de façon cohérente, là, par Héma-Québec, une logique de production, d'efficacité des chaînes d'approvisionnement, d'autres intervenants l'ont dit, de gestion d'inventaires, et la fusion avec une logique de... portée par Transplant Québec, là, une logique de soin, d'éthique et d'accompagnement des familles, des milieux, etc., là. Et, pour utiliser la... l'expression du Dr D'Aragon, on a de la difficulté à voir la possibilité de greffe entre ces deux logiques-là. Vous, vous nous dites, là, que... et vous l'avez mentionné il y a quelques minutes, là, qu'Héma-Québec fonctionne beaucoup par bulle, etc. Mais, à un moment donné, il y a des limites à fonctionner par bulle. Donc, expliquez-nous cette... ce qui semble une contradiction, là.

Mme Fagnan (Nathalie) : Bien, moi, je vous dirais que, oui, on opère, pour les tissus humains, avec une équipe dédiée qui est bien là dans son contact avec les familles endeuillées. On a des préleveurs, on forme nos préleveurs qui vont prélever... pardon, qui prélèvent les tissus. Ils ont 24 heures pour le faire. Ce que je veux dire c'est qu'on s'est adaptés pour rendre ça possible. Et oui, aujourd'hui, on a la plus grande banque de tissus et on est le distributeur unique de tous les tissus dans la province de Québec. Alors, oui, on s'organise, on s'adapte, on... on est agiles.

Ce que je dis, c'est que, si Transplant Québec veut améliorer, justement, l'augmentation du nombre de donneurs, ils vont devoir requérir probablement, tel qu'ils demandaient, des ressources additionnelles. Alors, ça, ça sera... ça sera à la liberté de l'Assemblée nationale de décider si c'est là qu'il faut aller. Parce que c'est ce qui a été mentionné à la commission sur la santé : une loi-cadre et des ressources additionnelles. Ce que je fais juste dire, c'est que nos ressources en cybersécurité, en gestion de risques, en formation, en autre... elles sont là. Et, quand on parle de cybersécurité, de la protection des données, c'est crucial aujourd'hui, on a des attaques tout le temps. Alors, de les munir de toute cette structure-là qu'on a, ça va coûter très cher à l'État, c'est ce que je dis.

M. Fontecilla : D'autre part, on a... on... il se dégage de cette discussion-là qu'il y a... il y a un... comment dire, une inflexion, un changement brusque de direction, et vous... parce que vous parlez de la commission parlementaire. Oui, elle a recommandé une loi-cadre concernant les données à un organisme, mais c'était explicitement nommé que ça devait être Transplant... Transplant Québec, là. C'était la... Écoutez, j'ai le texte devant moi, là. C'est écrit : «La commission constate que Transplant Québec est un organisme compétent qui détient l'expertise et la capacité opérationnelle rapidement... d'opérationnaliser rapidement le processus de don d'organes.» Donc, on s'en allait à... il y a juste quelques mois, là, un an, on s'en allait dans cette direction-là, là on bifurque vers Héma-Québec, là. Vous avez eu le temps... En réponse à ma collègue, là, vous avez eu dit... vous avez dit que vous n'avez pas eu le temps de se parler. Donc, j'ai l'impression que c'est comme... il y a une... c'est un peu improvisé, tout ça, là. On s'en allait dans une direction et brusquement on change de direction pour vous donner un mandat qui suscite des questionnements, là. Est-ce que vous êtes préparés, là?

Mme Fagnan (Nathalie) : J'apprécie... J'apprécie votre question...

Le Président (M. Laframboise) : ...le député a pris tout le temps...


 
 

12 h (version non révisée)

Le Président (M. Laframboise) : ...pour sa question... Donc, on va poursuivre avec le député d'Arthabaska pour 2 min 38 s.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Il y a souvent une crainte qui est exprimée sur le terrain, dans le réseau de la santé en général, ou, en tout cas, quand je parle à des infirmières, entre autres, qui est... que ce soit une forme de désincarnation, d'éloignement de la prise de décision du terrain, qu'on se retrouve avec une structure où la gestion s'éloigne des employés, s'éloigne de l'expertise. De quelle façon vous pensez qu'on peut mettre des garde-fous pour s'assurer que ce ne soit pas le cas? Comment vous pourriez rassurer les infirmières qui peut-être ne voudraient pas faire ce passage-là? Puis on a entendu des intervenants en parler un peu plus tôt. Comment vous pourriez rassurer ces gens-là qu'on ne sera pas dans une situation Santé Québec, là?

Mme Fagnan (Nathalie) : Et c'est pour ça que nous, quand on a pensé... qu'on a travaillé sur notre mémoire, on s'est dit : Il faut que l'équipe rejoigne et dans un fonctionnement tel quel pour le moment. Alors, on ne veut pas brusquer, on ne veut pas tout... tout vouloir changer, on veut être dans le respect du fonctionnement actuel. Alors, le fonctionnement actuel, on le dit, ça fonctionne. Après ça, on verra à... à amener nos synergies. Mais, encore là, on veut sauver des vies. On sait s'adapter. La réalité de Transplant Québec, on va... on va la connaître et on va... on va la vivre avec eux. Puis, ensemble, on va trouver des façons d'améliorer. Ça ne sera pas de... de déraciner ou d'imposer, ce n'est pas comme ça qu'on fonctionne à Héma-Québec. Regardez, le don de cellules souches, là, on transporte les cellules souches, on a des gens qui attendent, imaginez quand il y a eu la pandémie puis que les... les frontières étaient fermées, là, puis on avait le donneur de cellules souches qu'on ne pouvait pas amener en quarantaine parce que tous les... tous les... tous les voyageurs qui arrivaient devaient être en quarantaine, c'est des situations où on se revire comme sur un 10 sous puis on fait arriver les choses parce qu'il y a une question de vie. Alors, c'est... pour nous, ce n'est pas... ce n'est pas si différent, ce n'est pas si loin, mais on reconnaît qu'on veut apprendre aussi puis... puis projeter, oui, faire... faire mieux avec eux, ce n'est pas... ce n'est pas juste nous, c'est avec eux.

M. Boissonneault : Mais parlant de vie, si je peux me permettre, ce matin, on a entendu Transplant Québec, le Dr D'Aragon parler de pertes de vies humaines, là. S'il devait y avoir fusion, il y a des gens qui vont mourir. Comment vous vous sentez par rapport à ça?

Mme Fagnan (Nathalie) : Mais ça, c'est... Le risque, je le dis, le risque, c'est si les équipes ne... ne sont pas intégrées. C'est pour ça que, dans nos conditions gagnantes, j'ai dit : La première condition gagnante, c'est que les équipes transfèrent. Exact. Parce qu'on n'en veut pas, des pertes de vies. C'est... c'est... Il n'y a personne qui veut ça, ni le gouvernement ni nous. Alors, il faut... C'est une condition gagnante et ça fait partie des quatre conditions gagnantes inscrites dans notre mémoire.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup. Merci, Mme Fagnan, Dr Germain, Mme Dieudé. Je vous remercie pour la contribution d'Héma-Québec aux travaux de la commission.

La commission suspend ces travaux jusqu'après les avis touchant les travaux des commissions. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 12 h 06)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 25)

Le Président (M. Laframboise) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des finances publiques reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et l'audition publique sur le projet de loi n° 7, Loi visant à réduire la bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité des hauts fonctionnaires. Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants. Médicaments novateurs Canada, l'Association des collèges privés du Québec, l'Institut national de santé publique du Québec, le Réseau pour un Québec Famille et le Syndicat de la fonction publique et parapublique.

Je souhaite donc la bienvenue aux représentants de Médicaments novateurs Canada. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Mme Hamelin (Bettina) : Mme la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres de la commission, bonjour. Merci de nous donner l'occasion de participer à ces consultations sur le projet de loi n° 7. Je m'appelle Bettina Hamelin, je suis la présidente et cheffe de la direction de Médicaments novateurs Canada, ou MNC. Je suis accompagnée aujourd'hui par Mme Christine Lennon, vice-présidente et directrice générale Incyte Biosciences Canada et membre de MNC, M. Olivier Jerome, directeur relations gouvernementales Québec et alliances stratégiques MNC et aussi le président du comité Québec de MNC, et M. Denis Laflamme, gestionnaire principal aux relations gouvernementales et affaires externes, Takeda Canada, et vice-président du comité Québec de MNC.

MNC représente plus de 47 compagnies qui découvrent et développent des médicaments et vaccins innovants. Notre secteur soutient plus de 110 000 emplois de qualité au pays, investit 3,2 milliards de dollars en R&D chaque année et contribue 18,4 milliards de dollars au PIB canadien.

L'accès aux médicaments innovants est un défi mondial. Le Canada, incluant le Québec, se classe 19e sur 20 pays de l'OCDE et dernier du G7 pour la rapidité d'accès aux nouveaux médicaments. Cette performance limite l'arrivée de nouvelles thérapies et nuit à la capacité du Québec d'attirer des investissements en recherche. Les pressions internationales, dont la politique américaine de Most Favored Nation, on l'appelle MFN, accentuent l'importance d'avoir des processus plus efficaces et plus compétitifs. Dans plusieurs juridictions performantes, les gouvernements ont choisi des modèles plus modernes et des partenariats structurés pour faciliter un accès plus rapide.

Nous reconnaissons les objectifs généraux du projet de loi n° 7, qui visent à améliorer l'efficacité de l'État et à réduire la bureaucratie. Ces objectifs sont légitimes, surtout dans un contexte où la compétitivité du Québec est essentielle pour retenir et pour attirer l'innovation. L'INESSS occupe un rôle central dans cet écosystème. Son mandat scientifique indépendant et son expertise en évaluation des médicaments et des technologies de la santé sont largement reconnus. Ces forces doivent être protégées intégralement dans le cadre de la fusion envisagée.

Le Québec est l'une des rares juridictions en Amérique du Nord à avoir son...

Mme Hamelin (Bettina) : ...propre organisme d'évaluation. C'est un avantage stratégique important, à condition de maintenir un institut fort agile et bien doté. Contrairement à l'Agence des médicaments du Canada où l'AMC, l'INESSS possède un mandat beaucoup plus large qui dépasse l'évaluation du médicament. La fusion proposée crée donc certains risques que nous souhaitons soulever. Premièrement, il faut absolument préserver les expertises et la capacité d'évaluation. Nous craignons que la fonction d'évaluation puisse être diluée au sein d'une structure plus vaste et non dédiée exclusivement à cette mission essentielle. L'INESSS fait déjà face à un arriéré important dans le traitement des évaluations, ces retards créent des écarts avec les processus pancanadiens et entraînent des délais additionnels pour les patients québécois. La fusion soulève aussi des questions concernant l'évaluation des vaccins actuellement assurés par le... relevant de l'INSPQ. Il est donc essentiel que le projet de loi et les futurs règlements garantissent la mission propre et l'indépendance de l'INESSS pour le médicament. La mission propre, l'indépendance de l'INSPQ pour le vaccin et des équipes en effectifs suffisants pour réaliser les évaluations nécessaires sans retard supplémentaire. Deuxièmement, il faut renforcer et non affaiblir la direction de l'évaluation des médicaments et technologies. Cette direction est l'élément central de l'accès aux... aux innovations thérapeutiques au Québec. La nouvelle entité doit absolument consolider sa capacité en assurant la présence d'une expertise en médicaments dans les fonctions clés de direction et au conseil d'administration, en augmentant les ressources spécialisées dédiées aux évaluations et en modernisant les méthodes, en s'inspirant des meilleures pratiques de l'AMC et d'autres juridictions internationales. La fusion représente, à nos yeux, une occasion de réduire les délais, simplifier les processus et accroître l'efficacité si, et seulement si, les expertises sont renforcées.

• (15 h 30) •

Mme Lennon (Christine) : Il est aussi important de rappeler que l'industrie contribue directement au financement des activités d'évaluation. Chaque année, environ 6 millions de dollars proviennent des frais versés par les manufacturiers sur un budget total d'environ 40 millions. De plus, MNC entretient une relation de travail structurée et constructive avec la haute direction de l'INESSS à travers des rencontres statutaires. Ces échanges permettent de cibler les obstacles et d'identifier des solutions. Cette collaboration doit être maintenue et renforcée dans le nouveau modèle de gouvernance.

Mme Hamelin (Bettina) : En conclusion, nous croyons que la réforme proposée doit servir un objectif clair pour la population : accélérer l'accès aux traitements dont les patients en besoin. Aujourd'hui, au Québec, il faut parfois plus de deux ans entre l'approbation de Santé Canada et l'inscription finale d'un médicament à la RAMQ. C'est beaucoup trop long pour les médicaments, les cliniciens et pour le système lui-même. Le Québec pourrait s'inspirer de certaines initiatives ailleurs au pays. L'Ontario, par exemple, vient de lancer un projet pilote d'accès accéléré pour certains médicaments en oncologie. Le projet FAST, une solution similaire basée sur la publication des avis de l'INESSS, avait déjà été proposée ici, au Québec. Nous souhaitons poursuivre nos discussions avec le MSSS. La population du Québec mérite un accès rapide, équitable et fondé sur la meilleure science. Le projet de loi 7 représente une réelle occasion d'améliorer les choses. Nous sommes prêts à collaborer pleinement pour y parvenir. Je vous remercie.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, merci beaucoup. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Fabre, Dubuc et Masson, vous avez 16 min 30 sec.

Mme Duranceau : Merci, merci d'avoir pris le temps, là, de nous parler aujourd'hui puis de nous faire part de...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

Mme Duranceau : ...de vos commentaires. Donc, écoutez, je ne perçois pas de réticence outre mesure de votre part, là, à un regroupement de l'INESSS puis l'INSPQ. Je pense que vous avez fait part de mises en garde. Toutefois, pour être sûr qu'on va, bon, s'interroger sur les délais, sur les processus puis s'assurer d'optimiser ça, alors... Tu sais, peut-être j'aurais le goût de vous le demander, de manière très succincte, là, ou structurée, les conditions gagnantes pour que cette fusion-là soit réussie puis qu'effectivement elle ait des répercussions favorables, nonobstant l'aspect efficacité de l'état, là, de la chose, que ça se fasse sentir sur les services aux citoyens, notamment avec la disponibilité de médicaments, par exemple, qui seraient disponibles plus... plus rapidement, là.  Ça fait que, concrètement... concrètement, qu'est-ce que ça prend pour que ça fonctionne comme il faut?

Mme Hamelin (Bettina) : Ce que ça prend pour que ça fonctionne comme il faut, c'est un peu ce qu'on a... ce qu'on vient de présenter, c'est que l'INESSS a un rôle très important à jouer dans l'évaluation des médicaments, si demain on a besoin de l'avis de l'INESSS pour pouvoir lister les médicaments pour que les Québécois puissent avoir accès. Alors, ce qu'on vous propose, c'est que, pour que ça fonctionne, il faut que l'INESSS soit équipé, doté pour exercer cette fonction-là et aussi que le... puisse exercer ces fonctions-là pour les vaccins.

Mme Duranceau : Bien dites-moi, à l'heure actuelle, tu sais, si on exclut la fusion, là, pour... deux minutes, l'INESSS est équipé pour livrer ou pas, considérant les délais que vous mentionnez?

M. Laflamme (Denis) : Je dirais que...

Mme Hamelin (Bettina) : Denis? Denis, vas-y, oui.

M. Laflamme (Denis) : Oui, si c'est possible. Je dirais qu'il n'est pas équipé adéquatement au moment où on se parle. Ce matin, je regardais le plan de travail de l'INESSS, et il y a, je crois, 146 médicaments qui sont sur le plan de travail de l'INESSS, et, là-dessus, il y a 29 dossiers qui ont été considérés recevables, mais dont l'évaluation n'a pas été commencée. C'est du, à peu près, jamais vu depuis que je suis dans l'industrie. Ça fait une vingtaine d'années que je suis dans l'industrie. Et ça, qu'est-ce que ça l'a comme impact? C'est qu'effectivement, ces médicaments-là, dont on attend le début de l'évaluation, bien, on ne sait pas quand est-ce qu'ils vont commencer et quand est-ce qu'ils vont devenir disponibles par la suite pour les patients québécois. Donc, quand on parle de... L'expertise est là, mais je crois qu'il y a peut-être un manque de ressources actuellement. Donc, notre questionnement, c'est... Avec la fusion de deux organismes comme ceux-là, non seulement il faudrait que ces postes-là soient comblés, mais s'assurer que la nouvelle entité soit capable de faire face aux demandes, parce qu'il y a de plus en plus de... il y a de plus en plus d'innovations qu'on veut amener sur le marché et donc il y a de plus en plus de dossiers qui sont soumis à l'INESSS.

Mme Duranceau : Maintenant, je comprends votre impatience à mots couverts pour que les choses... les choses avancent plus rapidement. Je pense, c'est...

M. Laflamme (Denis) : C'est notre impatience pour les patients québécois, parce que c'est eux autres, en bout de ligne, qu'ils reçoivent ou non le médicament.

Mme Duranceau : Tout à fait. C'est ça. Ça fait que je pense que cette problématique-là, elle existe, là, nonobstant la notion de fusion. C'est sûr qu'il ne faut pas venir empirer la situation avec un regroupement. Il faut que, dans un contexte de regroupement qui devrait dégager des efficacités au niveau administratif ou, en tout cas, des... on va parler des ETC, là, donc des postes qui peuvent se libérer, parce qu'il y a des doublons, bien, on va se dégager une capacité peut-être d'aller chercher les ressources dont on a besoin pour des choses plus techniques, si l'administratif est regroupé, là. C'est ça, l'objectif. Ce n'est pas de faire tomber les missions de l'un ou de l'autre, mais plutôt de regrouper sur le plan administratif pour aller chercher des synergies de ce côté-là, un meilleur partage des responsabilités aussi, là. Je pense que, pendant la pandémie, il y avait eu... il y avait eu des enjeux... ou qui s'occupe de quoi, là, alors que ça, ça pourrait être... ça pourrait être plus clair. OK. Bien, écoutez, moi, je comprends bien, là, ce que vous... ce que vous mentionnez à cet égard-là. Est-ce que...Tu sais, au niveau international, là, avez-vous... avez-vous des comparables ou... tu sais, si vous travaillez avec d'autres juridictions, des comparables qui pourraient nous être utiles, là, dans l'exercice qu'on essaie de faire?

Mme Hamelin (Bettina) : Je peux... je peux vous décrire. Tu sais, dans l'international, il y a des juridictions qui...

Mme Hamelin (Bettina) : ...qui sont vraiment capables d'offrir des médicaments dès que l'organisation réglementaire donne leurs approbations. Si on parle d'Allemagne, France, on parle aussi des États-Unis, mais tu sais, ici au Québec, il y a quand même plusieurs étapes. Et comme mon collègue a mentionné, il y a des arriérés importants qu'il faudrait, tu sais, il faudrait s'attaquer à ça. Mais ces juridictions-là ont trouvé des façons à donner accès aux médicaments pendant que l'administratif se passe pour, par exemple, négocier les prix. Tandis qu'ici, on attend à tout fin l'évaluation en négociation des prix avant qu'on puisse donner accès aux médicaments. Donc, on peut s'inspirer de l'Ontario ici, parce qu'on a basé un modèle sur l'Allemagne, mais aussi l'Allemagne, la France et d'autres pays qui ont de l'avance, tu sais. On est les derniers au G7. Comme ma collègue a mentionné, on est les derniers au Government. Les G7... donc, il y a au moins six juridictions qui sont mieux que nous. En fait, il y en a plus parce qu'on est 19ᵉ sur 20 des pays, donc.

Mme Duranceau : Bien, moi, ce que j'entends, c'est qu'il y a des processus qu'il faut qu'ils soient revus, fusions ou pas, là, tu sais, que ça, c'est très long. Évidemment, l'idée n'est pas de lancer la balle au fédéral, là, mais je pense qu'il y a un... il y a un partage fédéral-provincial là-dedans dont il faut tenir compte. OK... puis écoutez, ça va... là, évidemment, ces commentaires-là, ils ne sont pas de nature législative, là, si on veut. Je ne sais pas, est-ce qu'il y a des éléments au-delà de ce que vous avez mentionné, purement législatifs ou pour améliorer notre projet de loi, là, sur cet élément-là qui valent la peine d'être mentionnés?

• (15 h 40) •

M. Jerome (Olivier) : Bien, écoutez, je pourrais répondre d'emblée de façon un peu complémentaire à ce qui a été dit. On a parlé de la capacité de traitement, donc, la capacité de traiter en nombre dans des délais qui correspondent aux standards qu'on peut voir dans d'autres juridictions. Mais il y a également toute la notion de qualité puis d'expertise qui doivent être absolument conservée. C'est des fonctions hautement spécialisées qui requièrent des mois, des années de formation pour bien conduire ces études-là. C'est vrai pour l'INESSS au point de vue d'évaluation des médicaments, des technologies de la santé, c'est également vrai pour le vaccin, du côté du CIC. Du côté de l'INSPQ, c'est des fonctions clés essentielles qui s'inscrivent dans la chaîne, justement, des étapes qui mènent à un accès pour la population. Il y a un risque de voir ces expertises-là potentiellement diminuées ou réduites s'ils ne sont pas pleinement saisis de l'importance puis de la spécialité qu'elles représentent.

Et ça, ça se passe aussi à haut niveau. Je crois que ma collègue en a parlé durant son allocution. Il faut que cette compréhension de cette spécialité-là se reflète à haut niveau de l'institut... dans le nouvel institut qui serait créé, c'est-à-dire au niveau du rôle du PDG, puis de la composition du CA. Il faut qu'il y ait une capacité de pouvoir piloter les activités du nouvel institut en tenant compte de la haute spécialité et de l'importance critique que représentent les travaux d'évaluation des deux entités qui seraient appelées à fusionner. Donc, ça fait partie des conditions gagnantes pour faire de cette fusion-là quelque chose qui met les bases de peut-être d'une amélioration plus grande, mais qui préserverait les risques anticipés.

M. Laflamme (Denis) : Et sauf erreur, si je peux rajouter sur ce qu'Olivier vient de mentionner, le législateur propose des profils pour le conseil d'administration de la future entité du futur institut. Et sauf erreur, il n'y a pas personne avec un profil médicament comme tel. Bien sûr, ce profil-là pourrait se retrouver au niveau de la PDG ou du PDG, mais il y a différents profils qui sont énumérés, 14 je crois, en tout et partout, et je ne voyais pas un profil médicament, là, écrit en noir et blanc.

Mme Duranceau : OK. Donc, ça, ça serait souhaitable de valider cet aspect-là, à ce moment-là, OK. Ce qu'on me dit aussi sur les délais d'approbation et tout, pas tant les délais, mais chaque fois qu'on approuve quelque chose, on va se dire les vraies affaires, il y a des coûts pour le système. C'est des nouveaux médicaments qui deviennent disponibles, puis évidemment, qui coûtent quelque chose. Évidemment, ils rendent un service à la population, mais j'imagine qu'on a ces considérations-là d'un point de vue de l'ensemble de l'État, là, pour être capable d'arriver à payer tout ce qu'on a à payer...

M. Laflamme (Denis) : ...si vous connaissez un peu le cycle des médicaments novateurs, c'est qu'une fois qu'on a perdu notre brevet, on peut être copiés par des compagnies de médicaments génériques qui arrivent à un bien plus faible coût. Et ces économies-là que le gouvernement peut faire avec l'arrivée des médicaments génériques, on suppose qu'ils peuvent servir à supporter l'innovation. Donc, il y a un peu un vase communicant puis il y a même des politiques que le gouvernement a mises de l'avant, notamment au niveau des biosimilaires qui sont l'équivalent des génériques pour des produits biologiques, ou effectivement, ça a fait en sorte que ça crée des économies au ministère de la Santé, mais qui permettent idéalement pour... de notre... de notre position, puissent être réinvestis dans l'innovation, parce qu'il n'y a pas de générique sans qu'il y ait d'innovateur.

Mme Duranceau : Non, non, c'est bon, c'est un bon argument. Merci. Je pense que j'ai un collègue qui a une question pour vous.

Le Président (M. Laframboise) : M. le député de Masson.

M. Lemay : Oui. Bonjour. Alors, moi, j'aimerais ça va revenir parce que vous reconnaissez quand même la pertinence puis les objectifs généraux du projet de lo 7, en soulignant qu'un État plus simple, plus agile et plus efficace est essentiel pour améliorer l'accès aux traitements et favoriser l'innovation en... Santé Québec. Puis vous avez... vous l'avez dit tantôt dans votre allocution de départ, là, que vous soulignez aussi le rôle central de l'INESSS dans l'écosystème d'accès aux technologies de santé, particulièrement pour les médicaments innovants.

Puis là, j'aimerais ça vous entendre clairement, là, dans la mesure où que le gouvernement met en place les garanties que vous proposez pour préserver et renforcer le leadership de l'expertise médicament au sein du nouvel Institut. Est-ce que vous pouvez me confirmer que votre organisation appuie l'orientation générale de ce projet de loi? Puis, selon vous, ça serait quoi les deux, trois éléments les plus importants à intégrer pour que cette fusion soit un succès au point de vue de l'accès aux médicaments innovants? Puis là, je fais référence à votre section sur la fusion INSPQ-INESSS, dans votre document que vous nous avez transmis.

Mme Hamelin (Bettina) : Oui. Alors, écoutez, c'est... C'est que... c'est qu'on est tout à fait en support à gagner de l'efficacité, d'agilité d'assigner les ressources nécessaires pour évaluer les médicaments et les vaccins de façon très efficace. Et comme... comme on a décrit, ce que... ce qui est nécessaire, c'est que l'expertise est maintenue, que les ressources sont en place et que les temps de décision et d'approbation des décisions finales et des recommandations finales n'auraient pas plus des délais que... qu'on a déjà. Donc, il faudrait vraiment qu'on prend avantage de cette réorganisation, si vous voulez, pour rendre les processus plus efficaces. Parce que les Québécois attendent trop longtemps pour leurs médicaments.

M. Jerome (Olivier) : J'ajouterais, Bettina, l'efficacité organisationnelle, oui. Tout ce qu'on peut obtenir découlant de la mutualisation de ressources qui sont fusionnables, oui, certainement. Mais tout ça ouvre la porte à peut-être une modernisation puis des meilleurs arrimages avec les meilleures pratiques, n'importe quoi qui va pouvoir s'inscrire dans un grand changement qui pourrait découler de cette réorganisation-là, là, miserait juste.

M. Lemay : OK. Merci pour les précisions. Puis, si on va à votre section plus des enjeux mondiaux et canadiens d'accès aux médicaments innovants, tu sais, vous rappelez, dans cette section-là, que le Canada puis le Québec, on figure parmi les plus lents de l'OCDE puis du G7 pour l'accès aux nouvelles thérapies innovantes, puis là, dans un contexte international de pression sur les prix, là, vous insistez que la fusion, elle ne nuise pas à un accès rapide, équitable aux innovations puis, au contraire, qu'elle améliore la capacité, l'efficacité des processus d'évaluation.

Là, si je fais un lien avec votre... la précédente question que j'ai posée, dans le fond, j'aimerais savoir... tu sais, puisque l'intention du gouvernement avec le projet de loi, c'est précisément d'améliorer l'efficacité de l'État puis de rendre nos processus plus performants et plus compétitifs, bien, selon vous, tu sais, comment est-ce que cette fusion-là entre l'INSPQ puis l'INESSS pourrait devenir un levier concret pour accélérer l'accès aux médicaments puis les vaccins innovants au Québec plutôt qu'un frein? Puis, tu sais, si aussi, vous pouvez me donner les bonnes balises, là, si on met des bonnes balises en place, bien, est-ce qu'on considère que la réforme peut contribuer positivement à la compétitivité du Québec pour attirer les investissements en R&D?

Mme Hamelin (Bettina) : C'est une grosse question. Très bonne question. Alors, je fais appel au projet FAST, au... en Ontario. Donc, il y a des façons, il y a des méthodologies qui sont... ou des approches qui donnent accès aux médicaments plus rapidement. Donc, justement, pour contrebalancer les longues...

Mme Hamelin (Bettina) : ...délai qu'on a au Canada à donner l'accès dès que... en Ontario, c'est : dès que l'AMC a donné un avis positif, le médicament est listé et des négociations sur les prix débutent et puis il y a une réconciliation par après. On pourrait faire une approche très similaire au Québec. Et puis la nouvelle... la nouvelle... La fusion pourrait avoir comme mandat d'accélérer et de regarder, d'examiner d'autres approches pour accélérer l'accès aux médicaments.

Je pense qu'il faut aussi reconnaître qu'aujourd'hui on se trouve dans des contextes géopolitiques qui mettent beaucoup de pression sur l'industrie, beaucoup de pression sur la capacité de l'industrie d'amener les médicaments au Québec et ailleurs au Canada. Et, si les délais sont trop longs, bien, il y a des décisions qui se font au global qui mettent... qui donnent un avantage à une autre juridiction qui est plus rapide pour donner accès aux médicaments. Donc, la compétition qu'on a aujourd'hui est très différente que la compétition qu'on a vécue il y a quelques années et...

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, madame, le temps du gouvernement est écoulé. Donc, maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys pour 10 min 24 s.

M. Beauchemin : Merci, M. le Président. Bien, peut-être un peu continuer dans la direction que vous aviez prise, madame. Vous aviez mentionné, en entrée de jeu, que c'était peut-être important de préserver l'expertise. Ma question pour vous, en fait, c'est, dans la fusion, vous voyez donc un risque que cette expertise-là puisse être diluée parce qu'on a une plus grosse entité, puis c'est... donc ça va se perdre, là, entre les chaises? C'est ça que vous comprenez? J'essaie... Peut-être m'expliquer un petit peu plus, là, votre point de vue là-dessus, s'il vous plaît.

• (15 h 50) •

Mme Hamelin (Bettina) : Oui, absolument. Bien, on connaît... on ne connaît pas les détails, hein, c'est... donc on assume, quand il y a une fusion, bien, il y a une répartition différente des ressources, et puis on pourrait s'imaginer un contexte où il y aurait moins de ressources pour l'évaluation des médicaments et des vaccins. Et ça, ça nous inquiète parce que, comme on a dit, bien, il y a déjà un arriéré, tu sais, parce qu'il y a un manque de ressources. Alors, s'il y a encore plus de pression sur les ressources, bien, ce qui nous inquiète, c'est que ça prend encore plus de temps, et puis, bien, à la fin, il y a un patient qui attend son médicament contre le cancer, etc. Donc, oui, c'est ça qui nous inquiète.

M. Beauchemin : Donc, si je comprends bien, ce que vous me dites, finalement, c'est que vous, ce que vous percevez, c'est peut-être une lenteur additionnelle, là, pour l'approbation de nouvelles innovations médicales. Si je comprends bien, là.

Mme Hamelin (Bettina) : Bien, écoutez, là, on voudrait que ça fonctionne.

M. Beauchemin : Oui, je comprends. OK.

Mme Hamelin (Bettina) : Je pense, il y a une proposition sur la table, on voudrait que ça fonctionne, mais on s'inquiète, et c'est ça, les risques qu'on a décrits.

M. Beauchemin : En fait, j'ai... Merci. J'ai une question pour M. Laflamme. Vous l'avez dit tantôt, il y a 28 médicaments, là, qui sont en attente d'approbation. C'est-tu une première dans votre jeune carrière, là, dans l'industrie? Je fais ça avec un sourire.

M. Laflamme (Denis) : Bien, c'est une première pour ce mois-ci. En fait, c'est un des plus gros mois qu'on a... ça, parce qu'on suit ça de façon régulière. Et, il n'y a pas si longtemps, c'étaient 20 médicaments, c'étaient 15. Il y a eu... il y a eu, un moment donné, il faut quand même rendre à César ce qui est à César... il n'y avait aucun arriéré, il y a... si on recule il y a quelques années, mais ce qu'on a appelé le backlog est revenu récemment, et j'ai constaté ce matin qu'il n'a jamais été aussi élevé que ça.

M. Beauchemin : ...selon vous, c'est le cas... Parce que, là, l'objectif, si je comprends bien... On est 19e sur 20 dans l'OCDE. On prend un risque ici en fusionnant, donc, de faire en sorte que, peut-être, le processus... va-t-il être plus efficace? En tout cas, certainement, il y a une période d'adaptation, donc les chances de retard vont s'ajouter. Je vous pose la question, là. Vous, vous voyez que 28 médicaments, là, c'est un record. Qu'est-ce que vous comprenez de ce retard-là? Ça vous dit quoi sur la situation actuelle, avant même la fusion, là? Ça vous dit quoi?

M. Laflamme (Denis) : Bien, la situation actuelle, c'est qu'il manque des ressources à l'INESSS pour effectuer les évaluations dans un temps requis et...

Mme Hamelin (Bettina) : Si je peux ajouter aussi, Denis, M. Beauchemin, moi, je suis PDG, je suis la première employée...

Mme Lennon (Christine) : ...pour la filiale Insight, nous sommes maintenant presque 50 employés au Canada, on a investi 73 millions de dollars. Notre première percée, qui est pour une maladie rare en cancer, a été approuvée par Santé Canada en 2021. Et puis c'est juste là, actuellement, qu'on commence à lister au Québec et à travers le Canada. Ça n'a... ça n'a pas pris deux ans — c'est en moyenne, deux ans — ça nous a pris quatre ans. Et la Bulgarie a listé même avant le Canada. Alors, quand je me présente devant le PDG pour une compagnie mondiale, que ce soit moi-même ou mes collègues, et j'essaie d'aller chercher un autre 73 millions de dollars et plus par année comme investissement en recherche et développement, il me pose la question : Mais pourquoi je donne... je fais ça au Canada quand je pourrais faire ça en Bulgarie, Bulgarie et ailleurs?

M. Beauchemin : Je comprends. Je comprends.

Mme Lennon (Christine) : Alors, c'est ça, la crainte qu'on a, c'est que là il faut améliorer, mais il y a des craintes que ça peut détériorer.

M. Beauchemin : Donc, on voit donc que vous percevez actuellement, peut-être pas, pourrais-je le dire, un... vous percevez actuellement dans le système actuel, avant même la fusion, une situation qui fait en sorte que c'est difficile d'attirer des investissements où est-ce qu'il y a beaucoup de paperasse, probablement, là, pour... pour s'y rendre. Donc, en... en fait, en bout de piste, ici, on parle de peut-être un manque de leadership.

Là, on pense faire une fusion. Ma question, c'est... Bon, bien, là, on va avoir une nouvelle gouvernance pour l'entité fusionnée. Quels sont, selon vous, là, les... les indications qui devraient être envoyées à cette nouvelle entité pour pouvoir faire en sorte que, justement, on puisse être au minimum aussi efficace que le Canada pour l'approbation, là, de nouveaux médicaments, par exemple?

Mme Hamelin (Bettina) : Moi, je dirais que les indications qu'on devrait leur envoyer, c'est : Regardez les résultats et les délais, disons, aux États-Unis, en Allemagne, en France, par rapport à ce qui se passe dans certaines provinces, le Québec n'est la seule province. Mais le Québec est en train de perdre un peu sa place de leadership. Et il faut faire le lien entre les investissements dont Christine a fait référence. Tu sais, les investissements que l'industrie fait au Canada, et Insight n'est pas... pas la seule compagnie, il y a beaucoup d'investissements qui se font, et le Québec est un leader en sciences de la vie. Puis j'ai enseigné longtemps à l'Université Laval en pharmacie, je connais un peu l'écosystème, et puis le risque c'est que, si on ne peut pas accélérer et être plus efficace, bien, le Québec va encore plus tomber en arrière.

M. Beauchemin : Mais moi, ce que je comprends, M. le Président, quand je les entends, c'est que, dans le fond, ici, on a une opportunité pour améliorer le modèle d'affaires de cette industrie-là, qui ici parle donc de propriété intellectuelle, d'innovation, de jobs qui sont créés ici au Québec. Puis là, actuellement, on fait face à une situation où est-ce que la présente machine n'est peut-être pas optimale en termes de compétitivité par rapport à ce qui se passe à travers le monde. Puis là on arrive avec l'idée de vouloir faire une fusion avec deux entités, finalement, les fusionner ensemble, où est-ce que ça comporte tout le temps, là, évidemment, là, des risques, là, de... de nouvelles cultures. Donc, je perçois que vous souhaiteriez que ça fonctionne bien, mais, si je vous entends bien, vous êtes craintifs par rapport à la situation dans laquelle vous êtes actuellement. Puis la réalité, c'est que vous voyez probablement plus de chances que ce soit problématique que positif, si je comprends bien, là. J'essaie de mettre des mots dans votre bouche, finalement, là, mais c'est un peu ça, là, que j'essaie de... de déterminer, là.

Mme Lennon (Christine) : Mais, dans le court terme, oui, il y a des risques, c'est clair. Tu sais, on a... on a tous bâti des compagnies et/ou investi dans des compagnies, ou fusionné des compagnies, alors les premières années, ça été... souvent avant que ça puisse accélérer. Alors, il y a toujours ces risques-là, oui.

M. Beauchemin : ...dans le fond, si je comprends... Oui?

M. Jerome (Olivier) : À court terme, il y a des risques. À long terme, il y a des opportunités de mieux faire. C'est ce qu'on voit avec le projet de loi. Puis les opportunités, quand elles passent, il faut les saisir. Puis ça, c'est des retombées...

M. Jerome (Olivier) : ...qui peuvent créer... créer un... un précédent dans la compétitivité du Québec justement pour s'inscrire comme une destination de choix à la fois du côté de l'investissement en recherche et développement, qui va faire naître des innovations thérapeutiques qui vont se rendre le plus rapidement possible au... au chevet des... de la population québécoise qui en a besoin.

M. Beauchemin : Je sais que... ça arrive de temps en temps, puis c'est normal, là, des fois, on peut porter des... d'autres sortes de lentilles, là, puis je... je respecte ma collègue, là, dans... dans son rôle quand elle dit ça, mais... mais je vois... je vois quand même une opportunité d'investissement. Je vois quand même une opportunité pour faire en sorte qu'on puisse tirer notre épingle du jeu.

Ça fait que vous aviez tantôt mentionné que pour qu'on puisse améliorer le processus, il faut qu'on regarde la performance. Donc, si je comprends bien, là, pour guider le projet de loi dans la direction pour améliorer, nonobstant le fait qu'on fait une fusion entre les deux entités, là, mais améliorer le processus pour vous, on doit donc essayer de trouver une façon de limiter les étapes et ou de les optimiser pour faire en sorte qu'elles s'exécutent plus rapidement, puis de se baser aussi sur ce qui est fait ailleurs pour essayer de comprendre, bien, si c'est approuvé là, pourquoi vous ne l'approuvez pas. Un peu genre de benchmarking, là, si je comprends bien.

• (16 heures) •

Mme Hamelin (Bettina) : Oui, oui, je pense, c'est très bien dit, l'imputabilité est très important. Certainement, quand il y a des changements, c'est très important de... de se mesurer et puis de... de revoir de temps à autre comment ça marche.

M. Jerome (Olivier) : Ce que l'Allemagne et la France ont très bien fait, et ce que l'Ontario... Oh!

M. Beauchemin : Combien de temps...

Le Président (M. Laframboise) : 24 secondes...

M. Beauchemin : 24 secondes. Bien, c'est correct, écoutez, il me reste 24 secondes, ça fait que vous pouvez finir votre pensée.

M. Jerome (Olivier) : Donc, oui, c'est que les étapes peuvent être séquentielles, mais elles peuvent aussi être en parallèle. Et ce que... c'est ce que l'Ontario a fait avec le modèle FAST, où l'accès est donné à la reconnaissance de la valeur thérapeutique à la population, et ça en découle ensuite la série d'étapes qui normalement a cours. Donc, on ne vient pas interférer avec les processus, on vient de donner accès à la population, d'emblée.

Le Président (M. Laframboise) : Merci...

M. Beauchemin : ...ce qui se passe en Ontario, on... on se compare souvent avec l'Ontario...

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.  On poursuit avec le député de Laurier-Dorion pour trois minutes 28 secondes.

M. Fontecilla : Bonjour, Mesdames, Messieurs. Merci beaucoup d'être ici avec nous.

Écoutez, nous, en tant que législateurs, on doit, à la fin, lorsqu'on va étudier en détail, on doit étudier la pertinence ou pas de la fusion de ces deux instances là. J'entends votre... votre discours et, de votre point de vue, qui est celui de la... comment dire, l'approbation de médicaments, c'est votre... c'est votre point... point central, je crains... je sens que vous craignez qu'une fusion peut... en tout cas ne peut... pourrait ne pas aider à accélérer l'approbation des... des médicaments, là. Donc, c'est le message que je reçois, là, aujourd'hui, là. Et il a été mentionné tantôt qu'on pourrait... bien qu'il faut conserver les... l'expertise et la qualité. Concrètement, là, ça veut dire quoi, ça, là? Par exemple, au CA, il n'y a même pas un membre expert en médicaments, là. Donc, qu'est-ce qui pourrait...Doit-on se prononcer en faveur ou contre? Parce que nous, on ne sert pas dans les opérations, là.

Mme Hamelin (Bettina) : Oui. Bien, écoutez, ça... ça dépend comment la gouvernance est... est organisée. Mais comme mon collègue a... a mentionné, ça prend vraiment quelqu'un sur... sur la gouvernance de ce nouveau institut qui connaît les médicaments, qui connaît les vaccins et qui connaît l'évaluation des médicaments. Parce que c'est un... c'est un étape essentielle dans le cheminement du médicament entre le manufacturier et le patient. Donc... Donc, c'est important de... de bien organiser la gouvernance pour avoir l'expertise nécessaire.

M. Fontecilla : Écoutez, encore une fois, nous, on ne sera pas dans les opérations. Est-ce que vous pensez que d'un point de vue législatif, on devrait inclure une notion comme dans le sens d'inclure l'expertise de médicaments dans le conseil d'administration, par exemple?

Mme Hamelin (Bettina) : Oui, oui, je dirais que oui. Oui. Présentement, ce n'est pas là. Je dirais que oui.

M. Fontecilla : Bien là... on a... on a déjà un premier amendement.

Une voix : ...

M. Fontecilla : Ah! ça, oui, ça, oui. Je vous remercie, Mme.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci pour la présentation.

J'aimerais voir de quelle façon le gouvernement fédéral intervient dans les affaires du Québec ou la relation qu'il y a entre l'INESSS puis l'Agence des médicaments du Canada. Est-ce qu'il y a un arrimage nécessaire entre ce qui se passe au Québec et dans les autres provinces? Quelle est la relation avec l'agence puis de quelle façon on peut bonifier cette relation-là?...


 
 

16 h (version non révisée)

Mme Hamelin (Bettina) : ...moi, je peux... je peux commencer, peut-être, mes collègues, ils ont des commentaires à faire là-dessus. Il y a certainement un arrimage entre les deux organisations, en fait, nous, en termes de... d'association de l'industrie, on... on crée comme un pont entre les deux, il y a les... il y a des choses que l'AMC fait très bien, il y a des choses que l'INESSS fait très bien, et puis on veut que les deux organisations apprennent l'un de l'autre. Donc il y a... il y  comme un arrimage naturel qui se fait entre les deux organisations et ça se passe, ça se passe naturellement. Mais il y a des choses qui sont vraiment très spécifiques au Québec, parce que le système du Québec est différent du système dans les autres provinces. Et puis l'INESSS, avec l'INESSS, on reconnaît que l'évaluation doit prendre en considération ces différences-là.

M. Boissonneault : Est-ce que vous estimez que l'INESSS permet de donner au Québec une agilité qui, peut-être, peut nous rendre plus compétitifs à l'échelle internationale?

Mme Hamelin (Bettina) : Une agilité, vous avez dit?

M. Boissonneault : Oui. Une flexibilité...

Mme Hamelin (Bettina) :  Oui, oui. Une flexibilité? Oui, oui. Écoutez, moi, je pense que c'est la flexibilité, l'agilité, ça vient avec un mandat, ça vient avec les ressources qui sont disponibles à vraiment régler les choses. Et écoutez, nous, on est là, on est là pour collaborer, et je pense, nous, on a des idées pour aider à trouver des efficiences. On a beaucoup d'expérience, on a de l'expérience globalement et puis on est là pour... pour collaborer avec l'INESSS. Denis a parlé de la... l'organisme, tu sais, des échanges qui se font entre le... notre équipe du Québec et l'INESSS, ça, il faut continuer. Et puis là, on ne sait pas avec la fusion, c'est quoi les possibilités, mais tout reste dans la gouvernance. Mais... oui, il y a toujours l'opportunité d'apprendre d'autres juridictions, et puis on est là pour aider.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, votre temps est écoulé. Mme Hamelin, Mme Lennon, M. Jerome, M. Laflamme, je vous remercie pour la contribution de Médicaments novateurs Canada aux travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci beaucoup, Messieurs-dames.

(Suspension de la séance à 16 h 06)

(Reprise à 16 h 07)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des collèges privés du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à l'échange... à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à présenter les personnes qui vous accompagnent, puis à commencer votre exposé. Merci.

M. Caron (Patrick) : M. le Président de la commission des finances publiques, Mme la ministre, Mesdames, Messieurs les députés, je me présente, Patrick Caron, président de l'Association des collèges privés du Québec et directeur général du Collège André-Grasset. Je suis accompagné de M. Patrick Bérubé, Directeur général de notre association. Nous vous remercions sincèrement de nous entendre aujourd'hui dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi 7. L'ACPQ représente 21 collèges subventionnés, tous des organismes sans but lucratif présents dans plusieurs régions du Québec. Ensemble, ils accueillent chaque année plus de 20 000 étudiantes et étudiants. Nous ne sommes pas en concurrence avec les cégeps, nous formons avec eux un réseau collégial québécois diversifié où chacun joue son rôle. Notre mission commune est claire : offrir une formation de qualité et contribuer à la réussite du plus grand nombre d'étudiants. Permettez-moi de situer, d'entrée de jeu, la contribution de notre réseau du point de vue... des finances publiques, puisque c'est le cœur de notre mandat... de votre mandat. Une étude menée par l'économiste Pierre Fortin à partir des...

M. Caron (Patrick) : ...données les plus récentes sur le financement des établissements collégiaux montrent que les collèges privés subventionnés permettent de réduire chaque année les dépenses du Trésor québécois pour l'enseignement collégial d'un montant qui se situe entre 50 et 70 millions de dollars. Les collèges privés subventionnés ne sont pas un coût additionnel pour l'État, ils sont un facteur d'économies structurelles.

La même étude établit que, compte tenu de la performance de nos étudiantes et étudiants, la contribution des collèges privés subventionnés aux revenus annuels des Québécoises et des Québécois peut se chiffrer à plus de 486 millions de dollars.

Selon d'autres études, le taux d'obtention des diplômes dans un même établissement et dans la durée prescrite sont supérieurs à 19,2 % dans notre réseau par rapport aux cégeps. Les collèges privés subventionnés contribuent aussi de façon mesurable à réduire la sous-scolarisation des garçons, et ce, sans diminuer la scolarisation des filles. Ce constat est important pour comprendre l'angle sous lequel nous abordons le projet de loi n° 7.

D'un côté, le gouvernement du Québec doit réaliser des efforts budgétaires significatifs, et nos collèges y prennent pleinement leur part. De l'autre, depuis une vingtaine d'années, les exigences administratives sont multipliées : formulaires, validations, délais pour les permis, redditions de comptes, qui portent parfois sur les mêmes éléments, à des moments différents, pour des interlocuteurs différents. Chaque heure consacrée à ces exigences est une heure en moins pour l'enseignement, pour l'encadrement et pour le soutien aux étudiantes et aux étudiants.

• (16 h 10) •

Le projet de loi n° 7 vise justement à réduire cette bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité. L'ACPQ appuie clairement ces objectifs. Nous saluons la volonté du gouvernement de recentrer les ressources sur les services à la population et d'éliminer la lourdeur à faible valeur ajoutée. Notre propos d'aujourd'hui est simple : nous voulons contribuer à ce que les intentions du projet de loi se traduisent concrètement sur le terrain des collèges.

Un bon exemple, c'est l'abolition de la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Pendant plus de 30 ans, la CEEC a contribué à implanter, dans l'ensemble du réseau collégial, une véritable culture d'assurance qualité. Aujourd'hui, cette culture est bien vivante. Les politiques d'évaluation des apprentissages sont robustes, les mécanismes d'assurance qualité fonctionnent et les conseils d'administration se sont approprié ces enjeux. La CEEC a, en ce sens, rempli son mandat en favorisant la mise en place d'une structure et d'une culture d'assurance qualité dans les collèges.        Notre crainte serait que l'on recrée au ministère de l'Enseignement supérieur une CEEC interne encore plus lourde et plus éloignée du terrain. Nous proposons, au contraire, de reconnaître un dispositif d'assurance qualité porté sur les collèges et le réseau dans un cadre léger et reconnu par l'État. Ce dispositif repose sur quatre piliers : un référentiel commun d'assurance de qualité, une autoévaluation institutionnelle intégrée aux outils existants, des revues par les pairs organisées par et pour les collèges et un dialogue structuré mais léger avec le ministère. Dans un tel modèle, l'État n'a pas besoin d'un nouvel organisme central, il doit plutôt reconnaître ce cadre, s'assurer qu'il dispose de l'information essentielle et intervenir de façon ciblée lorsque le risque est clairement identifié. C'est, à notre avis, la meilleure façon de conjuguer réduction de la bureaucratie et haut niveau d'imputabilité.

Le deuxième bloc de nos recommandations concerne la Loi sur l'enseignement privé. Le projet de loi n° 7 ouvre une fenêtre pour revoir certains mécanismes alourdissant la gestion des permis sans améliorer la protection du public. Nous proposons trois ajustements très concrets qui sans... qui sont cohérents avec les objectifs du projet de loi et qui ne génèrent pas de coût additionnel pour l'État.

Premièrement, nous proposons d'allonger la durée des permis des collèges privés subventionnés. Aujourd'hui, le renouvellement des permis est une opération lourde qui mobilise énormément de ressources, et ce, tant au ministère que dans nos établissements. Pourtant, plusieurs de nos collèges sont centenaires et obtiennent des résultats plus que solides en matière de réussite éducative. Il serait cohérent que les permis soient délivrés pour une première durée de six ans puis renouvelés pour 10... pour 10 ans, tant en laissant à la ministre la possibilité de fixer une durée plus courte lorsqu'un risque spécifique le justifie.

Deuxièmement, nous recommandons de créer une voie rapide pour certaines attestations d'études collégiales. Lorsqu'une AEC est directement rattachée à un programme de DEC déjà autorisé au permis du collège, il n'est pas nécessaire de...

M. Caron (Patrick) : ...mettre systématiquement le dossier à la Commission consultative de l'enseignement privé. Une procédure allégée au ministère permettrait d'autoriser plus rapidement ces AEC, qui sont un outil essentiel pour répondre aux besoins de main-d'œuvre du Québec et à la requalification des travailleurs. Et troisièmement, nous proposons d'encadrer le nombre maximal d'élèves admis, le NMEA, comme une mesure exceptionnelle fondée sur la capacité d'accueil réelle et de retirer le seuil minimal d'élèves résidents du Québec introduit l'année dernière. Les mécanismes qui encadrent aujourd'hui l'accueil des étudiantes et des étudiants internationaux existent déjà dans d'autres lois et règlements. Recentrer le NMEA sur la capacité d'accueil et sur les risques réels va dans le sens d'une meilleure gestion et d'une plus grande équité entre réseaux.

Au-delà des textes de loi, une partie importante de la lourdeur vient aussi des pratiques administratives. Nous invitons le Bureau de la conformité à appliquer une gestion différenciée des risques, davantage de vérifications lorsque la situation l'exige, mais moins de visites et de demandes ad hoc pour les établissements historiques solides et bien gérés. Nous suggérons également de recourir pleinement aux possibilités déjà prévues à la loi afin d'éviter de solliciter systématiquement la CCEP pour des dossiers à très faible risque. Ces gestes permettraient de concentrer l'énergie de tout le monde là où elle est vraiment nécessaire.

En résumé, nous venons pour défendre... Nous ne venons pas pour défendre le statu quo bureaucratique, nous venons vous proposer un partenariat concret pour un État plus efficace et plus proche du terrain. Ce partenariat repose sur trois leviers : reconnaître un dispositif d'assurance qualité porté par les collèges, moderniser de façon ciblée la Loi sur l'enseignement privé et appliquer une véritable gestion des risques dans les pratiques de conformité. En adoptant ces ajustements, vous enverrez un message clair, la réduction de la bureaucratie permettra d'améliorer les services aux étudiants en libérant plus de temps consacré à la mission éducative et en démontrant que l'État fait confiance aux établissements qui ont fait leurs preuves, tout en maintenant des attentes élevées en matière de résultats.

L'ACPQ, ses collègues membres, sont prêts à travailler avec vous, avec le ministère de l'Enseignement supérieur et avec le Conseil du trésor pour que le projet de loi n° 7 devienne, pour le réseau collégial, un véritable levier d'efficacité et de réussite. Je vous remercie de votre attention. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, M. Caron. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, vous, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, vous disposez d'une période de 16 min 30 s. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Merci. Merci pour vos commentaires. Alors... bien, le projet de loi n° 7, tu sais, c'est une des pierres de... pour placer l'amélioration de l'efficacité de l'État. Ça, c'est les éléments qui sont de nature législative, là, qui se retrouvent là-dedans. Mais, mais toutes les autres suggestions et pistes d'amélioration, vous avez mentionné beaucoup de tâches administratives, là, qui pouvaient peut-être être redirigées vers de l'enseignement plutôt que de la paperasse, parce qu'il y a de la reddition de comptes qui en découle. Ça, évidemment, je suis intéressée à plus de détails sur ça. Pouvez-vous juste me rappeler, vous avez dit : Les économies annuelles au Trésor du fait que vous êtes privé, en partie, là, c'est quoi, le chiffre?

M. Bérubé (Patrick) : Oui, les économies annuelles sont d'environ... entre 50 et 70 millions de dollars, essentiellement parce que nos collèges, contrairement aux cégeps, sont financés à 60 %...

Mme Duranceau : Et c'est le 40 % qui...

M. Bérubé (Patrick) : ...et le reste fait partie... vient des frais de scolarité ou de revenus autonomes des collèges ou d'apport des fondations de ces derniers.

Mme Duranceau : OK, parfait. Donc ça, on aime ça comme ça. OK. Donc, vous, ce que vous proposez, c'est trois ajouts, dans le fond, vous êtes d'accord avec ce qu'on fait, au niveau de la commission, là, qu'on abolit. Mais il y a trois ajouts, notamment, bon, les permis, renouvellement des permis. Si vous avez à les catégoriser, vos trois ajouts, là, du plus important... tu sais, du plus prioritaire au moins prioritaire, d'une part, donc ça, dans un premier temps, vous iriez... Si on ne peut pas réaliser tous vos rêves, là, ça va être quoi, le premier à réaliser?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, nos... nos propositions sont déjà un ordre de priorité dans le mémoire, donc, la première serait vraiment ce qui aurait un impact le plus majeur, tant pour les collèges, que le ministère de l'Enseignement supérieur et de l'État québécois, ce serait de venir d'étendre la période de validité du permis, de passer de trois à cinq ans, jusqu'à six à 10 ans. Et pour...

M. Bérubé (Patrick) : ...tout simplement parce qu'on peut s'imaginer que si les collèges renouvellent leur permis sur une plus longue période, on pourrait imaginer environ une réduction de 50 % des équivalents temps complet nécessaire à la direction de l'enseignement privé pour faire cesdites évaluations-là. Donc ça, c'est le premier. Et pour nous, ce constat-là est important que ça vienne via la... via une modification à la loi parce que, en poussant des travaux de nature administrative avec le ministère, avec les fonctionnaires de l'enseignement supérieur, on s'est rendu compte que finalement il y avait des limites à ce qu'on pouvait faire de manière administrative et que souvent la réponse qu'on avait, bien, on doit continuer à procéder de la même façon parce que la loi et les règlements sont ainsi. Donc, pour nous, ces limites-là nous montrent que c'est crucial de modifier la loi pour assurer une diminution pérenne de la bureaucratie et non pas qu'elle revienne lorsqu'il y aura, par exemple, une embellie budgétaire.

Mme Duranceau : OK, parfait. Puis, bon, là... ça fait que vous ne voyez pas dans des nouveaux collèges, je ne sais pas jusqu'à quel point il y en a fréquemment, là, des nouveaux collèges, des nouveaux cégeps privés, la notion de passer de 3 à 6 quand tu es un nouvel établissement, vous ne voyez pas une problématique, là, à cet égard-là.

• (16 h 20) •

M. Bérubé (Patrick) : En fait, nous ce qu'on... la plupart de nos collèges sont effectivement centenaires. Le collège... le collège le plus récent qu'on a dans notre réseau date d'il y a environ huit ans si on exclut un collège qui a été modifié récemment dans les dernières deux ou trois années, donc, pour nous, on ne voit pas d'enjeu à ce point-là, et ce qu'on irait même jusqu'à proposer, c'est un mécanisme de permis probatoire fondé sur le risque. Donc, évidemment, s'il y avait de nouveaux collèges, de nouveaux permis octroyés à des collèges, en particulier si c'était des collèges non subventionnés, on serait d'accord, à l'image des permis de conduire, qu'il y ait un permis probatoire d'une durée plus courte, parce qu'on pourrait être en mesure d'imaginer que le risque est plus élevé pour un nouveau collège qu'un collège qui a 100 ans d'existence, par exemple.

Mme Duranceau : Non, tout à fait. Ça, la gestion du risque, je pense qu'il faut sortir du risque zéro, là, ça fait que j'aime ça ce que vous proposez. Puis, dites-moi, bon, là, la commission d'évaluation de l'enseignement collégial, OK, on enlèverait ça, mais qu'est-ce qu'on devrait conserver pour maintenir la qualité des services? Parce qu'il y avait quand même un rôle, là, qui était joué à cet égard-là. Ça fait que qu'est ce que vous suggérez?

M. Bérubé (Patrick) : Effectivement, on est tout à fait en accord avec votre proposition dans le projet de loi sept, qui vise à abolir la commission d'évaluation de l'enseignement collégial, et on désire aller plus loin. Cependant, comme l'expression le dit, on ne souhaite pas jeter le bébé avec l'eau du bain et on reconnaît dans notre mémoire l'apport de la commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Donc, en ce sens-là, ce qu'on souhaite, c'est de préserver ces pratiques-là à l'interne de nos... de nos établissements. Donc, quand on parle d'un référentiel commun d'assurance-qualité, il a déjà été développé par la Commission d'évaluation collégiale en partenariat avec les directions des études des collèges, donc on souhaite se le réapproprier, mais, surtout, de le mettre en œuvre de manière beaucoup plus souple, beaucoup plus efficace et sans avoir à fournir des papiers, remplir des formulaires et ainsi de suite. Donc... et on souhaite aussi garder une revue par les pairs, parce que ce mécanisme-là existait aussi, existe à la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, qui se base beaucoup, lors de visites d'évaluation, sur l'expertise des directions des collèges qui vont visiter d'autres collèges. Donc, déjà, à l'intérieur de la CPQ, ce que l'on propose... aux directions des études, c'est de mettre ces mécanismes-là en place de manière autonome et autogérée pour s'assurer qu'on puisse continuer de le faire et d'avoir un dialogue beaucoup plus léger avec le ministère à cet égard-là, sans toute la lourdeur administrative qui vient avec la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial.

M. Caron (Patrick) : Si vous me permettez, Mme la ministre, aussi, comme directeur d'établissement, vous savez, la réussite éducative, c'est la mission même d'un collège, donc, de travailler en ce sens-là, s'assurer que la qualité des formations, la qualité de l'enseignement, je veux dire, c'est primordial. Donc, on le fait déjà de façon très intense et c'est important de maintenir ça.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Merci d'être là, sincèrement. J'ai pris connaissance de votre mémoire, c'est très complet. Il y a beaucoup d'idées à l'intérieur à exploiter, à réfléchir et peut-être à mettre en place et j'aimerais vous entendre sur... parce que vous avez parlé de la multitude de dispositifs de contrôle qui sont déjà en place, entre autres choses, pour la...

Mme Lachance : ...validation des AEC. Moi, je veux que vous développiez ça puis que vous m'expliquiez ce que vous faites maintenant et comment vous verriez ça pour l'avenir.

M. Caron (Patrick) : OK. Prenons un exemple simple. Nous offrons un DEC en informatique par l'Institut Grasset pour le volet plus enseignement aux adultes et là on est en processus pour obtenir une AEC en infonuagique. On a déjà le DEC, donc on a des laboratoires, on a des enseignants compétents, on a toutes les infrastructures nécessaires pour offrir cette formation-là. Par contre, il faut faire une demande qui est lourde, qui est complexe, qui prend presque autant de temps que de refaire, de revalider tout le processus de permis, ce qui ajoute des délais entre 18 et 24 mois pour faire tout l'exercice... l'exercice au complet. Donc, on se veut de réduire ces délais-là, le simplifier. On n'a pas à tout refaire les mécanismes, on a déjà les infrastructures, ça devrait être simple et efficace.

Juste pour vous donner une autre idée. Vous savez, le collège André-Grasset, c'est centenaire, on va fêter ça en maintenant en... en 2027. Avec le bureau de la conformité, l'année dernière, on a eu plusieurs va-et-vient sur le nom de l'institution. Ça a toujours été le collège André-Grasset, sauf qu'avec la fin des Sulpiciens dans les années 60 le collège a dû avoir un nouveau nom de corporation, qui est devenu le collège André-Grasset 1973. Donc là, le bureau de conformité nous demandait d'utiliser collège André-Grasset 1973. Pourtant, depuis presque 100 ans, on n'avait jamais utilisé ce nom-là. Donc, ça, ce sont des exemples simples où est-ce qu'on doit donner un peu de laisse ou de souplesse là-dedans et d'éviter, justement, de faire ce va-et-vient-là, de faire des rencontres de travail avec les gens pour arriver à une finalité qui... on va continuer à utiliser le nom collège André-Grasset, tout simplement, là.

M. Bérubé (Patrick) : Parce qu'au-delà des allers-retours administratifs et bureaucratiques avec ça, tout ça a forcé notre collègue à faire une modification au Registraire des entreprises pour pouvoir ajouter collège André-Grasset dans sa dénomination, sinon il se retrouvait fautif de pouvoir faire de la publicité trompeuse à cause qu'il utilisait le nom sans utiliser 1973. C'est en ce sens-là qu'il y a certains non-sens qu'il faudrait vraiment enlever.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la ministre.

Mme Duranceau : Oui, mais fautifs en vertu de quoi, là? Parce que ça, ça m'apparaît...

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, en vertu des lois et règlements, ce qu'on dira, c'est que, la publicité, il y a eu des modifications réglementaires qui disaient que la publicité ne doit pas être trompeuse et que ça pourrait être... d'utiliser avec 1973 pourrait être... sans 1 973 pourrait être considéré comme trompeur. Donc, c'est le genre de débats auxquels nos collèges doivent faire face avec le bureau de la conformité qui rajoute des heures et des heures supplémentaires, de sorte qu'un processus de ce type-là peut prendre, pour le collège, une centaine d'heures. Donc, vous comprenez maintenant pourquoi, au final, on souhaite que ces permis-là soient émis pour 6 à 10 ans, parce qu'à 100 heures la fois les collèges ont d'autres choses à faire que d'argumenter sur le nom d'un collège ou la taille d'une classe.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Mais là, dans le fond, nonobstant le fait que vous avez plusieurs validations à faire et plusieurs actions à poser pour s'assurer de la justesse des termes utilisés, lorsque vous redéposez annuellement, j'imagine que c'est un copier-coller de l'année d'avant.

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, c'est plus que ça parce que l'information déposée doit être à jour. Donc, ce qu'on va demander aussi, puis ça fait partie des raisons pour lesquelles on veut moins de bureaucratie, c'est que souvent, même, on va aller jusqu'à un point... dans le cas, par exemple, où on demande un nouveau programme, on va demander à ce que les collèges déposent des curriculum vitae des enseignants pressentis. Mais le processus est tellement long, il peut prendre de 18 à 24 mois, quand le... Entre le moment où on dépose le CV d'un enseignant pressenti et le moment où le cours débute, il y a des fortes chances que les enseignants pressentis ne sont pas ceux qui vont être dans la classe, mais, malgré tout, on doit le faire. Et ceci, là, même, aussi nous questionne sur des éléments de confidentialité, en lien avec la loi 25, de fournir l'information des curriculum vitae de gens pressentis alors qu'ils ne seront peut-être... ce ne seront peut-être pas ceux qui seront dans la classe au final.

Mme Lachance : Je comprends, je comprends. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Bon...

Mme Duranceau : ...je suis découragée, mais on va essayer de vous aider, là. Mais c'est parfait, c'est le genre de chose qu'il faut qu'on entende. Tu sais, bon, peut-être qu'il y a des éléments que c'est dans la loi, là. L'autre chose, c'est les interlocuteurs que vous avez, là. Tu sais, il faut qu'on soit tous en mode efficacité de l'État, là. Alors, on va s'assurer que tout le monde a le mémo.

Mme Lachance : Est-ce qu'il reste du temps, M. le Président?

Le Président (M. Laframboise) : 3 min 55 s.

Mme Duranceau : Allez-y, oui.

Mme Lachance : Bien, je trouve ça intéressant, parce que quand vous dites abolition de la... moderniser et reconnaître la maturité des collèges, bien évidemment, on comprend qu'il y a des collèges qui sont plus nouveaux. Vous m'avez parlé de collèges qui sont tous plus... plus... moins nouveaux, plus...

M. Caron (Patrick) : Plus vieux.

Mme Lachance : ...plus vieux, effectivement, plus matures, comme on pourrait dire. Donc, dans le contexte, il faudrait quand même voir à avoir une certaine gradation des collèges, je présume, et ça, ça nous amène à avoir, à garder une certaine cohérence pour viser... Parce que les processus sont souvent là pour nous mettre... pour assurer une certaine qualité ou une certaine cohérence. Donc, si on diminue les processus, entre autres, au niveau du AEC... Puis là je ne suis pas en train de dire qu'on va le faire mais je trouve ça intéressant de pouvoir en parler, parce qu'on est dans un projet de loi sur l'efficacité puis ça me parle.

Mais dans un contexte comme ça, votre AEC, à titre d'exemple, comment on peut s'assurer de la, je ne sais pas, de la synergie avec un autre AEC qui serait dans un autre milieu, pour qu'il y ait une certaine conformité? Puis quand on dit : J'ai un AEC en... je ne sais pas, en... comment vous avez mentionné...

• (16 h 30) •

M. Caron (Patrick) : En infonuagique.

Mme Lachance : ...en infonuagique, tout à fait... mais pour s'assurer qu'il y a une concordance entre les AEC en infonuagique?

M. Caron (Patrick) : Tout à fait. On est à la même place. Là, le but c'est d'être le plus efficace, mais il faut juste éviter de faire du mur-à-mur à la grandeur puis de l'appliquer de façon... sans distinction, dans le fond, de l'expérience ou de l'expertise des collèges, tout simplement, là.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup. Donc, merci à Mme la ministre et à l'équipe gouvernementale. Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys, pour 10 min 24 s.

M. Beauchemin : Merci, M. le Président. Donc, dans votre mémoire, là, le CEEC, là, clairement, là, c'est une réussite, si on comprend, là, votre historique, là, vous le dites, vous le mentionnez. Je comprends ce que vous dites, là, que vous aviez... vous avez, donc, absorbé les meilleures pratiques, puis ça semble être uniformisé dans tous les collèges, là. Mais, justement, si on prend l'exemple des AEC tantôt, je veux dire, si, supposons, qu'on décide d'en faire un sur, je ne sais pas moi, l'intelligence artificielle, il y a peut-être une compétition qui va vouloir se faire entre deux institutions pour attirer plus que l'autre, possible, ça fait que là, les standards vont être différents, il va y avoir des programmes qui vont être différents.

Ma question, elle revient à savoir, là, comme : Ce n'est pas un peu hasardeux, un peu, d'une certaine façon, selon vous, de l'abolir, le CEEC? Dans le sens que c'était le garant, justement, que, justement, c'était bel et bien respecté tout partout, puis là on l'enlèverait, puis là on pourrait ouvrir la porte pour plus de compétition entre... Je n'ai aucun enjeu à ce qu'il y ait de la compétition. C'est juste que la qualité du programme, peut-être, elle peut varier, c'est...

M. Caron (Patrick) : Oui, mais c'est tout notre intérêt, comme institution, d'offrir un programme de qualité. Un, c'est qu'on crée des partenariats. Exemple, l'infonuagique, c'est qu'on va chercher des entreprises qui vont collaborer avec nous puis qui, en bout de ligne, vont engager, embaucher ces étudiants-là. Donc, le but de notre travail, c'est d'offrir cette formation là de qualité, avec des infrastructures de qualité et des enseignants de qualité.

Dans l'année, on est redevables aussi à notre conseil d'administration. On doit présenter nos taux de réussite, nos taux de placement des étudiants, leur suivi universitaire. Ce sont toutes des balises. Comme institution, on se doit de le valider, de s'assurer de la conformité, puis, en bout de ligne, c'est le CA qui va dire : Ça a du bon sens, votre travail, ou pas. Puis le ministère aussi possède toutes ces informations-là. Le ministère a nos états financiers, a nos taux de réussite. Donc, l'information, elle est là, il faut juste bien l'utiliser maintenant.

M. Beauchemin : Je comprends, mais, encore une fois, on enlève le CEEC, là, de l'équation, chacun va de son côté, a ses redevances à faire envers leur... les CA de chacune de ces institutions-là, chacun commence à porter des lentilles qui lui sont propres, d'une certaine façon. Ça n'enlève aucunement le risque que c'est possible que, dans la machine, il y ait quelque chose qui va se créer et qui va reprendre un peu, là, le CEEC. Ça fait que ma question, ça... elle reste entière, dans le sens que : Vous ne voyez pas qu'il y a un risque justement, de l'enlever?

M. Bérubé (Patrick) : En fait, ce que je peux vous dire, c'est qu'après 30 ans de mise en œuvre de la...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Bérubé (Patrick) : ...d'évaluation de l'enseignement collégial, nos... les collèges ont intégré ces processus, là, d'assurance qualité, et ils sont vivants. La preuve en est, comme je le disais d'entrée de jeu : nos directions des études sont prêtes à les reprendre à l'interne, ces processus-là, et les mettre de l'avant. Et, au final, on ne voit pas aucun risque à ce niveau-là. Ce qu'on va faire, c'est qu'on va enlever la double bureaucratie.

Je vous donne un exemple. Le ministère de l'Enseignement supérieur nous demandait, et nous demande encore, les plans de réussite des collèges, et pourtant, en même temps, la Commission d'évaluation... de l'enseignement collégial demande aussi les plans de... les plans de réussite des collèges. Donc, on a une double... on a une double évaluation, et, des fois, même une triple, parce que la direction qui va s'occuper de la validation financière, des fois, pourra demander aussi les plans de réussite.

Donc, ce qu'on... ce qu'on demande, en fait, c'est de limiter les duplications, même des fois en triple... ces redditions de comptes, parce que les collèges ont intégré ces mécanismes-là, vont pouvoir... ont atteint le niveau de maturité aussi pour y arriver. On n'y voit pas de risque.

Et aussi je veux faire la distinction importante entre ce que la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial va faire et toute la question des AEC, qui est du ressort du ministère de l'Enseignement supérieur. Donc, la commission ne se prononce pas sur l'octroi ou la compétition qu'il pourrait y avoir entre les collèges sur les... l'octroi de programmes d'études. Bien, au contraire, la commission vise seulement l'évaluation des processus d'assurance qualité dans les collèges, et, comme on le dit, ils sont vraiment très bien implantés depuis des années. Et c'est ce qu'on propose, de garder ce référentiel-là commun en place, et d'y travailler à l'interne, et d'avoir des revues par les pairs, comme il se fait déjà, mais de manière beaucoup plus simple, beaucoup plus souple.

M. Beauchemin : Ça fait que c'est un peu ce que vous dites, dans le sens... ce que vous voulez, c'est que les meilleures exigences que... s'étaient créées, là, avec le CEEC, redeviennent les vôtres de façon autonome.

M. Bérubé (Patrick) : Exactement.

M. Beauchemin : OK. Puis, en agissant de la sorte, qu'est-ce que... qu'est-ce que vous pouvez dire qui pourrait nous laisser croire que ça va être assuré que, ad vitam aeternam, ça va toujours être ça, à part le fait que, je comprends, là, on doit parler à notre conseil d'administration, là, mais... Vous savez, des fois, ça peut arriver, là, que ça ne marche pas bien dans un CA, là. Ça fait que...

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait...

M. Beauchemin : Quoi d'autre que vous voyez comme police d'assurance, là?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, c'est que déjà la raison pour laquelle les collèges vont être incités à garder ces mécanismes-là... les collèges ont avantage à mettre en place des mécanismes d'assurance qualité pour la simple et bonne raison qu'ils ont besoin d'avoir des programmes d'études de qualité pour s'assurer d'offrir un enseignement de qualité et aussi d'attirer les étudiants avec ces programmes de qualité là aussi et, au final, de faire graduer les étudiants, comme on le fait si bien dans notre réseau. Ça fait que les collèges ont tous avantage... la mission des collèges est d'offrir des programmes d'études... ont tous avantage à offrir des bons programmes et de mettre en place des mécanismes d'assurance qualité que l'on veut beaucoup plus simples, beaucoup plus légers à mettre en place, tout simplement.

M. Beauchemin : Là, j'en ai une petite facile, là, je pense, mais j'essaie de comprendre, parce que, moi, ça me fait toujours rire quand je vois des paramètres qui sont modifiés, qui m'apparaissent... je ne vois pas la logique, je ne comprends pas pourquoi, là, on passerait, là, de trois ans, cinq ans à six ans, 10 ans. Ça vient d'où, là, six ans, 10 ans? On l'a établi comment, ça?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, on l'établit tout simplement en se disant qu'en faisant de la sorte, vu que ça prend des centaines d'heures, justement, pour faire une demande de permis et que, souvent, si on veut rajouter un seul nouveau programme au permis, il faut refaire une demande complète, donc on repart de zéro... Donc, c'est pour ça qu'on dit : En établissant sur une période de 6 à 10 ans, c'est gagnant pour les collèges, parce que les collèges vont passer moins de temps sur la bureaucratie, plus de temps sur la réussite, c'est gagnant pour le ministère aussi, qui est en perte d'effectifs aussi et qui doit faire plus avec moins, donc, en réduisant ça, c'est gagnant pour le ministère, et, au final, c'est gagnant pour l'État québécois, qui va se retrouver à sauver sur des ETC ou qui va pouvoir les redéployer dans d'autres directions du ministère où il y aura des besoins... des besoins supplémentaires, tout simplement.

M. Beauchemin : OK. Ça fait que, là,je suis en train d'apprendre quelque chose, là. Ça fait que quelqu'un... un collège qui veut mettre en place un nouveau programme doit redemander un nouveau permis dans l'ensemble de ses opérations?

M. Bérubé (Patrick) : Exactement. Et refaire la démonstration qu'il a toutes les ressources...

M. Beauchemin : Pour l'ensemble?

M. Bérubé (Patrick) : ...humaines, financières et matérielles pour offrir ce nouveau programme là, même si...

M. Bérubé (Patrick) : ...Il a par exemple le DEC en informatique et tous les enseignants et qui demande un programme plus court comme une AEC pour l'offrir. Donc, vous comprenez que c'est... c'est en tout cas un non-sens d'avoir à refaire tout ce processus-là. Même dans le cadre des travaux qu'on fait avec le ministère présentement, les gens du ministère nous disent même : Ça pourrait être bien d'avoir un processus accéléré dans ces cas-là, pour ne pas que les collèges aient à refaire toute une demande. Mais ça, on ne peut pas le faire tant et aussi longtemps que la loi n'est pas changée parce que ce qu'on nous dit c'est : Désolé, nous sommes menottés. La loi est ainsi. Désolé. Remplissez l'ensemble du formulaire.

M. Beauchemin : Je comprends. Je comprends et je ressens votre... votre frustration, là. C'est... Ça semble assez évident. Je me pose la question, pourquoi qu'on n'est pas juste capable de faire approuver le programme nouveau à la marge puis de faire un avenant au permis pour que ça puisse... Ça n'aurait pas été une piste de solution, là?

M. Bérubé (Patrick) : Ce que l'on nous dit, c'est quand on... on est dans nos travaux pour les... pour essayer de faire des allègements de manière administrative, on nous dit que la loi et les règlements font en sorte que c'est impossible de le faire. Donc, c'est pour ça qu'on juge que c'est crucial qu'il y ait des modifications à la loi, qui amènera aussi, par ricochet, des modifications à certains règlements qui y sont rattachés pour que, finalement, comme vous le dites, on puisse arriver à avoir... à changer les processus, parce que sinon... Et puis on a beaucoup de respect pour les gens au ministère, mais ces gens-là ne sont pas en place pour interpréter la loi et les règlements, ils sont là pour l'appliquer, et on respecte ça, et on respecte les règles du jeu. Donc, si on veut vraiment avoir une réduction pérenne de la bureaucratie puis de ces demandes-là, ça passe par des modifications à la loi et ultimement aussi aux règlements.

• (16 h 40) •

M. Beauchemin : Combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Laframboise) : 40 secondes.

M. Beauchemin : Bon, bien, je comprends. Donc, ma question, elle revient, là. C'est dans le sens que, bon, on a un nouveau programme, on doit refaire la demande au grand complet. Là, au lieu de passer par un exercice qui se ferait aux trois à cinq ans, il faudrait le faire aux six à 10 ans. Mais supposons que l'année prochaine on a un nouveau programme...

M. Bérubé (Patrick) : Bien, c'est là qu'on en demanderait justement des processus allégés pour l'ajout de programmes, justement, qui feraient en sorte qu'au lieu de faire une demande complète, il puisse y avoir un processus accéléré pour faire les modifications pour un seul programme. Donc, ne pas avoir à faire une demande complète de renouvellement de permis pour l'ajout d'un seul programme, ce qui est impossible présentement, malheureusement.

M. Beauchemin : Merci.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup. Donc, merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Je cède maintenant la parole au député de Laurier... De Laurier-Dorion, 3 min 28 s.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs... avec nous. Écoutez, j'ai devant moi les mémoires de la commission, qui nous disent fondamentalement que, c'est ce qu'ils nous disent, c'est que quand même le travail va devoir être fait soit par la commission ou soit par vous. Donc, en termes de travail, de... d'heures investies, il n'y a pas tant de différence. Qu'est-ce que vous pourriez répondre à ça?

M. Caron (Patrick) : Il y a une différence.

M. Fontecilla : Oui?

M. Caron (Patrick) : OK. Donc, le mécanisme d'autoévaluation, on le fait. Par la suite, c'est de rendre toutes les redditions de comptes nombreuses à la commission pour un certain temps. Ce sont des visites, des rencontres, des tableaux, des données, des documents à produire. Donc, il y a beaucoup d'informations.

M. Fontecilla : Très bien. Mais vous allez... Votre... L'opération que vous allez... que vous allez effectuer, vous allez la consigner quelque part quand même. Ce n'est pas... Il y a un niveau de qualité, là, que vous devez atteindre. Souvent, ça se passe sur un papier ou en informatique, enfin...

M. Caron (Patrick) : Tout à fait, mais peut-être pas aussi avec des niveaux de complexité aussi grande et d'échange avec les gens de la commission. Donc, on va s'autoévaluer puis on va prendre des mesures pour justement s'assurer de la qualité de l'enseignement.

M. Fontecilla : Très bien. Tout ça découle d'une, comment dire, d'une exigence de confiance dans le diplôme.

M. Caron (Patrick) : Oui.

M. Fontecilla : Et je comprends très bien les étapes que vous avez nommées, assurance qualité... interne, etc., là. Mais vous savez, on en a déjà vu maintes fois dans toutes sortes de domaines qu'il y a dans les meilleures organisations, il y a des dérives à travers les temps, etc., des façons de faire qui s'installent. Et là il y a un scandale et puis, voilà, l'État arrive pour dire : Je vais installer un comité pour surveiller, fondamentalement. Comment prévenir ces dérives-là avec l'État, là, tout doucement, là?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, ce qu'on... Ce qu'on propose justement pour prévenir ces dérives-là, c'est que le ministère a déjà une série d'indicateurs et d'informations sur les collèges, par exemple, les taux de réussite, par exemple...

M. Bérubé (Patrick) : ...le taux de placement dans différents programmes aussi. Le ministère a aussi déjà toute l'information financière sur les collèges. Donc, il peut voir aussi d'un point de vue la performance financière. Le ministère a une série d'informations qu'il détient, que les collèges n'ont pas besoin de fournir à nouveau. Ce qu'on propose, c'est un tableau de bord qui permettrait avec des voyants de couleur, si un tel collège est vert, jaune ou rouge, et d'autres indicateurs pourraient être à l'effet, par exemple, un nombre de plaintes reçues par le ministère pour un collège donné. Donc, avec l'ensemble de ces indicateurs-là, qui seraient collectés de manière très simple, le ministère pourrait voir rapidement quels collèges sont dans le vert, quels collèges sont argent et quels sont dans le rouge, et venir après porter un jugement et mettre son énergie où le problème est réellement, et non pas y aller de manière mur à mur.

M. Fontecilla : Si les indicateurs sont au rouge, quelle instance du ministère de l'Éducation viendrait surveiller, là, viendrait tirer la sonnette de l'alarme? Parce qu'il y a quelqu'un, il y a un employé quelque part qui va...

M. Bérubé (Patrick) : Tout à fait. Bien, dans notre cas, ce serait la direction de l'enseignement privé qui viendrait le faire. Mais le ministère a aussi une direction des enquêtes et je vous dirais que la ministre de l'Enseignement supérieur a déjà tous les pouvoirs pour agir. Par exemple, lorsqu'il y a eu le scandale avec les étudiants qui provenaient de l'Inde dans certains collèges privés non subventionnés, bien, la ministre à l'époque a mis en place un plan d'action sans avoir à recourir à des nouvelles lois et règlements. Elle a mis un plan d'action en place et ça lui a permis de régler la situation. Ces collèges-là sont passés de 20 000 à 1000 étudiants, donc ça montre vraiment que la ministre a tous les pouvoirs.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup. Donc, je cède maintenant la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je continuerais un peu dans le même ordre d'idée. Donc, si je comprends bien, l'évaluation indépendante, l'intervention indépendante passerait par le ministère. Parce que là, on parle d'une autoévaluation de vos fonctions. Quelle est la... est-ce qu'il y aurait une évaluation, une intervention indépendante qui passerait par un autre organisme, sinon le ministère?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, ça pourrait passer par le ministère, oui, mais de façon très légère. Ça pourrait faire partie d'une discussion sur l'assurance qualité qui intègre aussi une série d'indicateurs, comme on l'a présenté tout à l'heure. Parce qu'on parlait du plan d'action qui a été mis en place, mais vous le savez aussi, dernièrement, la ministre de l'Enseignement supérieur a dû faire des enquêtes dans des cégeps aussi. Donc, la direction des enquêtes du ministère aussi peut mener ces enquêtes-là. Donc, on voit que les pouvoirs de la ministre, combinés à des indicateurs de résultats qui ne demandent pas d'efforts supplémentaires au collège pour remplir de la paperasse, permet quand même de porter un jugement qui est nuancé, qui est juste, sans rajouter de fardeau au collège.

M. Boissonneault : Mais ça ne vous laisserait pas dans une position de juge et partie, là, où vous ne feriez que vous autoévaluer, il y aurait quand même une intervention potentielle externe?

M. Bérubé (Patrick) : Exact, parce que de toute façon, lorsqu'un collège renouvelle son permis, dans notre cas, il doit faire une série de démonstrations aussi de toute façon. Donc, ça pourrait faire partie de cette démonstration-là aussi qui se fait selon la période qu'on propose, qui fera en sorte que tant les élèves... les élèves en auraient plus, auraient plus de soutien, parce que les collèges, nos collèges, reçoivent autant d'élèves en difficulté que les cégeps, toute proportion gardée. Donc, ils font déjà des choix difficiles en raison des compressions budgétaires. Donc, les collèges pourraient mettre davantage d'énergie vers la réussite des élèves et moins vers la bureaucratie, tout simplement.

M. Boissonneault : J'aimerais ça vous entendre rapidement sur le nombre maximal d'élèves annuels, puis sur le retrait du nombre minimal d'élèves résidents pour le nombre maximal d'élèves annuels. Où est-ce qu'on veut aller?

M. Bérubé (Patrick) : Bien, en fait, nous, ce qu'on voit, c'est que les différentes mesures qui ont été mises en place par le gouvernement du Québec, suite au projet de loi 80... 74, notamment les quotas sur les analyses de CAQ, combinées aux mesures du gouvernement fédéral aussi, donnent une panoplie d'outils, sans compter les pouvoirs de la ministre de l'Enseignement supérieur pour pouvoir venir encadrer tout ça. Donc, c'est à notre avis cet ajout-là qui a été fait, l'année dernière, dans le cadre du PL74, est un peu superflu à la lumière de toutes les nouvelles mesures qui ont été mises en place, et aussi de ce qui découle de la planification annuelle de l'immigration.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci. Messieurs Caron et Bérubé, je vous remercie pour la contribution de l'Association des collèges privés du Québec aux travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

(Reprise à 16 h 52)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Institut national de la santé publique du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec des membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, et à présenter les personnes qui vous accompagnent, puis à commencer votre exposé. Merci.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Merci beaucoup, Monsieur le Président. Bon après-midi à toutes et à tous. Merci évidemment de... de nous recevoir. Je m'appelle Pierre-Gerlier Forest, je suis le PDG de l'Institut national de santé publique. J'occupe cette fonction depuis 2022, après une longue carrière au Canada et à l'étranger. Je suis accompagné aujourd'hui par deux collègues médecins. Le Dr Éric Litvak à ma droite, qui est vice-président aux affaires scientifiques de l'institut. Éric, ça vous intéressera peut-être pour la période de questions tout à l'heure, une particularité dans sa carrière, c'est qu'il a travaillé à l'INESSS et au ministère de la Santé avant de trouver sa voie à l'Institut national de... de santé publique. Et puis, à ma gauche, le Dr Judith Fafard, qui est la directrice médicale du laboratoire...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...de Santé publique du Québec, c'est une microbiologiste de grande réputation. Et là une des choses qui est intéressante, dans la carrière de Judith, c'est qu'elle a conservé une pratique clinique et que ça peut être intéressant si vous voulez explorer les différences qui existent entre le système de soins et la santé publique. Elle en a une expérience personnelle directe à travers sa pratique.

Le projet de loi n° 7 il a été déposé à l'Assemblée nationale, vous le savez, il y a 20 jours à peine. C'est dire que notre réaction aujourd'hui est encore teintée d'émotion. La sidération, d'abord, puisque nous n'avions pas été consultés sur cette initiative, qui a été une surprise. L'inquiétude, ensuite, pour ne pas dire la consternation, quand nous nous sommes rendu compte que ce n'était pas seulement l'institut qui était... qui était rayé d'un trait dans le projet de loi, l'article 1, mais que la Santé publique avait elle aussi été oblitérée.

Un exemple hautement symbolique, mais, si vous regardez le projet de loi avec attention, comme je suis sûr que vous l'avez fait, vous avez remarqué que le mot «santé publique» n'apparaît jamais, sauf lorsqu'il s'agit de désigner des fonctions existantes ou des organisations existantes, le Comité d'éthique de santé publique, la Directrice nationale de santé publique, et ainsi de suite, mais que jamais on ne nomme ni un domaine ni une pratique.

Il y aurait beaucoup à dire sur l'INSPQ et sa contribution à la société québécoise au cours de ses 28 années d'existence. Nous jouissons d'une reconnaissance internationale dans plusieurs domaines. D'autres instituts de santé publique, parmi les 128 que compte le monde, ont été modelés sur l'INSPQ. Alors, un exemple proche de nous, c'est l'Agence canadienne de santé publique, qui a d'abord été, au moment de sa fondation, un calque identique de l'INSPQ, jusqu'à la manière très organique dont l'agence intègre en son sein le Laboratoire national de microbiologie. J'ai fait partie de l'équipe qui a mis en place l'ASPC après avoir participé, au début de ma carrière, j'étais beaucoup plus jeune, à la création de l'INSPQ, et je parle donc en connaissance de cause.

Pourquoi... pourquoi tous ces instituts? Probablement parce qu'il n'y a pas de problème simple en santé publique, peu de questions peuvent être résolues par un oui ou par un non. Et les instituts se sont multipliés à travers le monde parce qu'il s'agit d'une bonne solution organisationnelle lorsque vous voulez faire travailler ensemble des gens qui possèdent des expertises très pointues et très différentes, parfois pour de très longues périodes de temps et parfois pour de brèves rencontres stratégiques. C'est aussi une manière commode de garder à portée de main des compétences techniques qui sont rares mais qui sont indispensables et que vous ne trouverez ni dans les universités ni dans le réseau de la santé. Je vais vous donner un exemple concret : il nous a seulement fallu trois jours pour répondre au ministre Carmant quand il s'est inquiété de la distance qui existait entre les sites d'injection et les services de garde. C'est un travail qui exige des capacités uniques en géolocalisation, en analyse spatiale des données.

Et je ne veux pas avoir l'air cynique, j'ai passé une grande partie de ma carrière dans des institutions de recherche, mais je vous assure qu'un projet universitaire sur un sujet comme celui-là en serait encore à l'étape de l'approbation éthique. On a été capables de répondre en trois jours.

Il va falloir beaucoup d'attention aux détails pour intégrer l'INSPQ dans une autre organisation sans briser toutes les chaînes de valeurs qui ont été soigneusement construites au fil des ans dans une foule de domaines. Ce n'est pas une tâche insurmontable, ce n'est pas ça, le sens de mon message, mais ça va demander des soins et ça va demander une véritable intelligence des enjeux de santé publique. P

Pour y parvenir, une des toutes premières choses à faire, c'est de s'assurer que les fonctions principales de santé publique et que les missions essentielles qui en découlent soient bien protégées dans la loi. C'est le sens des amendements constructifs. Vous savez, en anglais, on parle de «friendly amendments», que nous mettons de l'avant. Nous suggérons d'affirmer clairement et de manière explicite le mandat de santé publique de ce nouvel institut, l'IQSSS, en lui faisant d'abord l'obligation de soutenir par son expertise les quatre fonctions reconnues au Québec dans la Loi de santé publique, c'est-à-dire : la surveillance, la protection, la prévention et la promotion de la santé. Puis, si vous avez des questions sur ces fonctions, évidemment, Éric sera très heureux de vous répondre. Nous suggérons aussi de nommer, encore une fois de manière explicite, un peu comme, dans la Loi de l'INESSS, qui sert de cadre pour cette nouvelle loi, on identifie clairement les objets sur lesquels on doit travailler l'INESSS, bien, nous proposons que l'on nomme clairement les grandes missions qui mobilisent les experts de santé publique depuis que la discipline existe, la fin du XIXe siècle, la lutte contre les maladies infectieuses, la protection contre les contaminants et les effets néfastes des catastrophes naturelles, la santé au travail et puis les activités de prévention au cours du cycle de vie. Il faut que l'IQSSS ait l'obligation d'allouer des ressources financières à ces différents...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...il faut s'assurer que ces équipes sont à la pointe des connaissances de manière à diminuer les risques pour la population du Québec, puis c'est un engagement qui l'amènera aussi à développer les outils nécessaires des données de santé aux méthodes de communication.

Autre aspect qui nous paraît primordial, toujours dans cet esprit constructif de proposer des amendements pour mettre de l'avant les fonctions de santé publique de l'Institut, maintenir au sein des deux grands laboratoires de santé publique ultra spécialisés que sont le Laboratoire de santé publique du Québec et le Centre de toxicologie du Québec leur fonction de santé publique, qui, à l'heure actuelle, représente jusqu'à 75 % de leur activité. Sans mention explicite dans la loi, le risque évident avec une intégration à Santé Québec, c'est que ces fonctions soient reléguées au second plan parce que nous aurons à arbitrer tous les jours les pressions qui viennent du système de soins.

L'autre aspect de cette question, c'est d'assurer ce que Jean Rochon appelait les circuits courts entre les laboratoires et les autres acteurs du système de santé publique, de faire en sorte qu'il y ait une communication immédiate, sans intermédiaire entre les IQSS ou la Directrice nationale de santé publique et les personnels des laboratoires quand cette communication est requise. Les laboratoires ne jouent pas seulement un rôle opérationnel, c'est des intervenants cruciaux lors d'urgence sanitaire ou quand un problème inédit apparaît. Il ne faudrait jamais avoir à demander l'autorisation ou passer à travers des processus de validation pour pouvoir s'adresser aux experts des laboratoires.

• (17 heures) •

Un dernier point, un centre de référence et d'expertise ne peut pas se couper de ses relations avec le milieu universitaire et les lieux d'innovation qui sont fondés sur le savoir. Pour rester à la fine pointe des connaissances, il est essentiel de pouvoir participer de plain-pied aux activités de recherche et de formation dans les différents domaines de santé publique, c'est un rôle que l'Institut joue depuis sa création. Le transfert de ces responsabilités au ministère de la Santé et des Services sociaux ne nous apparaît pas avoir été mûrement réfléchi dans les circonstances.

L'objectif d'améliorer l'efficience et de réduire la bureaucratie est louable. Il est compréhensible dans le contexte actuel. Nous le partageons. Toutefois, le projet de fusion entre le INSPQ et l'INESSS et le transfert des laboratoires à Santé Québec pourrait avoir des impacts majeurs sur la capacité de répondre... sur la capacité de réponse, pardon, aux menaces de santé publique. Nous vous invitons donc, si c'est possible, de prendre le temps nécessaire pour que la vision qui anime le projet de loi n° 7 puisse être pleinement réalisée et que tous les bénéfices anticipés soient atteints. Merci de votre attention.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, M. Forest. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, vous avez, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, 16 minutes, 30 secondes. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Oui, merci. Bien, écoutez, je... je comprends vos préoccupations. D'abord, ce regroupement-là, ce n'est absolument pas pour perdre quelque expertise que ce soit en matière de santé publique, puis on a bien entendu déjà vos suggestions à cet égard-là, que ce soit clair dans la mission, dans le titre, dans tout ce qui vient avec, là, donc ça, ça a été bien entendu. Puis il n'y a pas, en tout cas de notre point de vue, il n'y a pas d'urgence non plus à ce que l'exécution de tout ça se fasse en catastrophe, là. Tu sais, on se donne le temps de faire les choses comme il faut, mais il faut qu'à terme, il en découle des économies, puis de l'efficacité, là, plus de l'efficacité que des économies, là, en fait. Donc, c'est ça l'objectif, alors je pense qu'on va prendre le temps de bien faire les choses, puis de garder les bonnes personnes pour pour cette transition-là. Peut-être, justement, vous avez... vous avez mentionné à quelques reprises l'idée de nous instruire, je pense que ça serait pour le bénéfice de tout le monde, je pense ça peut être intéressant. Donc, tu sais, vous connaissez un peu l'INESSS, j'imagine, vous connaissez vos opérations, ça fait que si on s'élève un peu, là, dans la discussion, est-ce que vous voyez sur le plan scientifique, sur le plan opérationnel, tout de même, des synergies à regrouper... à regrouper les deux entités?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : C'est une question compliquée parce que... je vous ai dit, la santé publique on a beaucoup de difficulté à répondre par oui et non à vos questions. D'abord, l'INESSS et l'INSPQ collaborent déjà. Donc, une partie de la réponse c'est oui parce que ça se fait déjà, il y a déjà des projets qui sont faits en commun, il y a des projets qui sont coordonnés, vous avez peut-être remarqué, il y a quelques semaines, les deux organisations ont publié le même jour, à la suite d'une requête du ministre Dubé portant sur l'extension des mammographies pour les femmes de plus de 40 ans, les deux organismes ont publié le même jour un rapport portant sur des aspects différents de cette question-là, mais ils ont travaillé la main dans la...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...la main tout au cours du processus pour être sûr, d'une part, qu'il n'y ait pas de duplication ou de contradiction, mais aussi pour être certain de couvrir l'ensemble des problèmes et de la question. Donc, il y a... il y a une... il y a des possibilités de collaboration qui existent et qui sont déjà en place. Au moment où le ministre préparait sa stratégie de prévention, les comités d'éthique de l'INSPQ, de l'INESSS et, à ma demande, de la Commissaire à la Santé et au bien-être ont publié un avis commun sur les aspects éthiques de la stratégie de prévention, pas trois avis en même temps, mais un avis commun, ils ont travaillé ensemble. Donc, vous voyez que ces synergies-là, elles existent déjà dans beaucoup de domaines. On a des mandats différents. Il est possible que, si ce projet d'institut fonctionne dans l'avenir, oui, je peux voir des domaines dans lesquels la collaboration pourrait être plus importante. Il y a des choses qui font... que je trouve très intéressantes évidemment. Mais, pour le moment, ce qui m'embête beaucoup, c'est que je n'ai pas une étude qui me montre exactement combien ça pourrait marcher. Et, pour moi, un des problèmes actuels, c'est celui-là, c'est-à-dire, c'est l'absence de données probantes qui me montrent exactement comment on va mettre ensemble les deux organisations. Éric, tu veux commenter davantage?

M. Litvak (Éric) : Bien, j'ajouterais peut-être quelques éléments. Je pense, c'est une chose qu'il faut vraiment comprendre, c'est le fait que la mission des deux instituts, elle est quand même assez distincte. Il y a peu de chevauchements. Il n'y a pas vraiment de duplication entre ce que nous faisons, mais il y a des points de jonction, des fois, puis il y a des dossiers dans lesquels on va être appelés à se concerter puis à collaborer. Puis, comme Forrest l'a dit, c'est quelque chose qu'on fait déjà. Donc, on est deux organisations qui gèrent de la science, qui essaient de synthétiser la science au bénéfice des décisions. Du côté de l'INESSS, c'est des décisions dans le système de soins et de services, donc des décisions qui visent la prise en charge des patients individuels par des professionnels de la santé, qui visent aussi les décideurs et les gestionnaires des établissements. Puis, de notre côté, bien, ce sont des décisions qui visent le bien-être et la protection de la santé de toute la population, donc qui vont toucher... On parlait des grandes fonctions de santé publique. Dans le fond, nous, on cherche beaucoup non pas à dire comment on peut bien soigner les gens une fois qu'ils sont malades, mais comment on peut les empêcher de devenir malades. Puis ça, bien, ça fait appel à des facteurs qui ne sont pas dans le système de soins uniquement, OK, qui sont un peu partout, dans tous les secteurs de la société. Donc, on s'intéresse au développement humain, aux conditions dans lesquelles, tout au long du parcours de vie, les enfants, les jeunes à l'école, les adultes, les aînés doivent se retrouver pour avoir le plus de chance de rester en santé. On s'intéresse à prévenir des maladies, par exemple avec des programmes de vaccination. Puis on s'intéresse aussi beaucoup, c'est un de nos mandats à protéger la santé quand il y a des dangers imminents, nous, ce qu'on appelle des menaces qui nous guettent. Donc, ça, ça peut être un virus qui est à risque de se propager ici, au Québec, ça peut être des contaminants qu'on retrouve dans l'air ou dans le sol qui peuvent poser un risque à la population.

Ça fait que nos missions sont fondamentalement différentes puis donc les sujets qu'on traite sont vraiment assez différents. Cependant, c'est sûr que, du point de vue des méthodes qu'on utilise, parce qu'on traite aussi tous les deux de la science, il y a certaines ressemblances. Toutes les organisations, en fait, qui ont à synthétiser des connaissances scientifiques pour un sujet donné font appel au même genre de méthodes. Que ce soit en environnement, en éducation, en santé, il y a toujours un dénominateur commun. Et puis on a déjà un partage entre les deux instituts, des fois pour mettre à profit les travaux qu'on fait en lien avec nos méthodes, par exemple, puis pour apprendre les uns des autres. Ça fait qu'il y a déjà une part de ces bénéfices-là, je dirais, qui sont réalisés à l'heure actuelle. Mais, après ça, il faut vraiment voir que, dans le quotidien, les dossiers qu'on traite vont rester distincts et largement séparés, et puis aussi s'appuyer sur des expertises qui ne sont pas les mêmes, qui sont différentes. Ça fait qu'on peut, je pense, imaginer certains bénéfices, mais il faut quand même se dire qu'ils sont somme toute assez modestes, probablement, par rapport au volume d'activités puis à tous les produits qu'on réalise à chaque année. Puis c'est le cas des deux instituts, hein, qui ont une production importante mais très spécialisée dans leurs domaines respectifs. Puis je pense que leurs deux missions respectives sont vraiment très importantes.

Mme Duranceau : OK. Je vais avoir des questions sur les laboratoires, mais, tu sais, si on retourne au contexte de la pandémie, justement, comment ça s'est matérialisé ou concrétisé, votre collaboration avec l'INESSS, avec le ministère de la Santé? Comment fluide tout ça était, du fait qu'on avait trois organisations, là, impliquées?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...à cette époque-là.

Mme Duranceau : Ah oui! Bon, ça ne devait pas être mieux.

M. Litvak (Éric) : Et puis moi, pendant, en fait, une bonne partie de cette période-là, je n'étais pas à l'INSPQ, j'ai été au ministère comme conseiller médical stratégique avec...

M. Litvak (Éric) : ...Dr Arruda, donc dans ce rôle-là, j'ai eu à transiger autant avec l'INSPQ qu'avec l'INESSS, et puis surtout, avec un très très grand nombre de partenaires, donc tous les ministères, pleins de représentants de la société civile, donc, il faut se mettre dans le contexte où la pandémie a été une situation exceptionnelle, où on a vécu des défis d'une très grande complexité, puis il n'y a rien de ça qu'on pouvait traiter ou résoudre sans travailler en dehors de nos frontières habituelles, OK, donc c'est vraiment une période, je pense, où pour toutes les organisations, il y avait des besoins de collaboration puis de mise en commun qui, évidemment, dans l'urgence dans laquelle on travaillait, n'était pas simple. Mais... mais pour ma part, je pense quand même que la distinction et la différence entre les deux missions étaient bien claires. Dans le cas de la pandémie, l'INSPQ s'est intéressé, bien, en fait, se penchait beaucoup sur la dynamique de transmission dans la population. Qu'est-ce qui fait que l'épidémie progresse? Comment on peut essayer de la contrôler, de la ralentir, puis on sait que la transmission était largement communautaire dans la société. Donc, sur toutes les mesures qu'il fallait mettre en place dans les différents milieux, sur les impacts que ça avait, parce qu'on a regardé, évidemment, des dimensions de santé, mais aussi des dimensions sociales, l'isolement des personnes, des dimensions économiques qui étaient très importantes pour le gouvernement là-dedans, donc la santé publique, on avait, de concert avec tous les partenaires, à essayer de traiter toutes ces questions. L'INESSS était davantage sur les conséquences sur le système de soins, qui était aussi très importantes, puis, évidemment, qui ne sont pas... ils sont reliés les unes aux autres, plus le virus progresse dans la société, bien, plus il y a des gens qui se retrouvent malades, qui sont hospitalisés, plus il y a une surcharge sur les hôpitaux. Ça fait que l'INESSS était davantage sur cette question de la charge hospitalière, les conséquences sur les milieux de soins, puis, évidemment, on avait à partager des données, puis à partager des perspectives, ce qu'on faisait durant la pandémie à chaque semaine autour de la cellule de crise qu'il y avait au conseil exécutif... Ça fait que pour moi, il y a eu un... une synergie qui n'a pas été toujours simple parce qu'elle ne l'était pas non plus avec aucun des autres acteurs avec qui on avait à mettre en commun, mais qui a été très fonctionnelle, puis je pense qu'on a très bien fait durant la pandémie, au Québec, quand on se compare.

• (17 h 10) •

Mme Fafard (Judith) : Oui, même pendant la pandémie, c'est... bon, c'est certain que les laboratoires ne sont pas destinés, pour l'instant, à être fusionnés avec l'INESSS, mais lors de la surveillance des variants de la COVID, on faisait ça, nous, principalement pour l'efficacité vaccinale, essayer d'anticiper les nouvelles vagues de pandémie, faire de la modélisation, mais aussitôt, pour vous donner un exemple, qu'on a... qu'on a vu poindre des variants qui résistaient aux anticorps monoclonaux, nous, on n'a pas attendu d'avoir un mandat ou que quelqu'un nous pose la question, on est allé interpeller directement les responsables de l'INESSS aux médicaments pour les avertir que les anticorps monoclonaux qui avaient été approuvés au Québec pouvaient devenir inefficaces puis... et on a continué, jusqu'à la fin de ce programme de surveillance là, à alimenter les gens qui étaient responsables de l'approbation des anticorps monoclonaux à l'INESSS.

Mme Duranceau : Merci, puis pour... J'ai tu encore du temps, oui?

Le Président (M. Laframboise) : Oui, 6 minutes.

Mme Duranceau : Bon, bien... opérationnellement, là, justement, les... les laboratoires... Parce que là, ce qui est prévu, c'est qu'il y ait un regroupement avec ceux de Santé Québec. Là, je vous entends bien sur la notion de fluidité qui doit demeurer. Mais pouvez-vous nous dire comment, opérationnellement, tu sais, ça se passe pour vous du point de vue des laboratoires? Puis qu'est-ce que ça... qu'est ce que ça va impliquer, ce regroupement-là, ou les conséquences que ça peut avoir pour vous?

Mme Fafard (Judith) :  Bien, en fait, c'est sûr qu'il y a énormément d'incertitudes, en ce moment, dans le projet de loi, parce que là, tout ce que le projet de loi dit, c'est que l'... fait principalement des analyses en toxicologie, le LSPQ fait principalement des analyses en microbiologie, alors que les mandats de ces deux laboratoires-là sont beaucoup plus larges. On fait partie d'un réseau de laboratoires de santé publique au Canada et à l'international où est ce qu'il y a des fonctions qui sont entendues par les organismes internationaux. On est chargés de faire de la surveillance de maladies infectieuses, répondre à en cas d'épidémie, d'éclosion. On fait de la santé environnementale, de la salubrité alimentaire, là, les éclosions de salmonelle dans les pistaches, bien, c'est le LSPQ qui a trouvé ça puis qui a sonné l'alarme. On fait des tests de référence, on améliore la qualité des analyses en laboratoire, on fait de l'enseignement, aussi, au niveau du... des professionnels qui sont... qui vont oeuvrer dans les laboratoires du réseau. On fait des évaluations de politiques publiques comme les campagnes de vaccination qui... qui sont faites à l'Institut, on travaille avec les équipes de l'Institut, nous, pour réévaluer ces programmes...

Mme Fafard (Judith) : ...là, voir si, par exemple, le vaccin pour le pneumocoque, si les souches de pneumocoque qui circulent sont les mêmes qu'il y a cinq ans, s'il faut réajuster les campagnes vaccinales. Et on fait de la recherche et développement pour faire des nouvelles technologies. Il faut qu'on voie les menaces venir avant que nos décideurs réalisent qu'il y a une urgence. Pour vous donner un exemple, mais la pandémie de COVID qui a marqué tout le monde, nous, on a travaillé à partir du 5 janvier d'arrache-pied, bien avant que sonne... qu'on ait l'urgence sanitaire qui a été décrétée le 12 mars. La Chine avait publié la séquence du nouveau virus le 11 janvier, on avait un test de laboratoire prêt pour le Québec le 17 janvier. Donc, l'inquiétude qu'on a, nous, c'est que toutes ces missions-là ne soient pas explicitement reconnues lors d'un transfert vers Santé Québec. Et aussi, étant donné que Santé Québec est davantage opérationnelle, qu'il y a une compétition entre les priorités pour la santé publique, pour la santé de la population et les besoins de soins aigus, les besoins cliniques.

Aussi, on est très intégrés dans tous ces programmes-là de surveillance, de vigie d'intervention d'éclosion. On est très, très, très intégrés avec les autres directions de l'institut, avec les autres intervenants de santé publique. Donc, comment va s'effectuer cette... cette communication-là avec la directrice nationale de santé publique, avec le ministère, avec les autres directions de l'institut pour continuer à faire des programmes qui... qui sont, je vous dirais, bonifiés si on se compare à... à d'autres juridictions? Il y a d'autres laboratoires de santé publique au Canada qui envient nos programmes de surveillance parce qu'on est capables de joindre les données de laboratoire et l'épidémiologie. Donc, on fait des très beaux produits. Puis là il y a peut-être une menace que cette espèce de... cette espèce de synergie là soit perdue.

Et aussi, mais il y a... il y a un problème... bien, un problème, une question très matérielle qui est, bien là, nos serveurs, pour faire fonctionner le laboratoire, ils sont à l'institut. Tous nos actifs informatifs... informatiques qui fonctionnent en passant sont à l'Institut national de santé publique. Donc, si le laboratoire transfère à Santé Québec, comment est ce qu'on va continuer à faire rouler... Comment on va avoir accès à nos bases de données? Comment est-ce qu'on va avoir accès à nos pipelines bioinformatiques pour faire la surveillance?

Mme Duranceau : OK. Bien, je pense, c'est des questions qui sont légitimes, là, ce n'est pas insurmontable, ceci dit, sur l'aspect informatique. Ce qu'on me dit, c'est qu'il demeure que la mission des laboratoires nationaux, là, c'est un copié-collé de ce qui existe déjà, là, dans... dans la loi, ça fait que la mission ne changerait pas, là.

Mme Fafard (Judith) : Si je peux me permettre.

Mme Duranceau : Oui, oui, oui.

Mme Fafard (Judith) : C'est que, dans le projet de loi, ça dit que le laboratoire de santé publique fait essentiellement des analyses en microbiologie. Moi, je ne comprends pas qu'est-ce qui est différent par rapport à un laboratoire d'hôpitaux dans ce libellé-là. Même chose pour le Centre de toxicologie de Québec, qui fait essentiellement des analyses en intoxications. Il va falloir qu'on m'explique, par rapport à la recherche de drogue dans l'urine qu'un laboratoire de biochimie d'hôpital est capable de faire, où est la différence ici?

Mme Duranceau : OK. Bon, mais il y a peut-être des nuances qu'il faut apporter pour... Parce que, tu sais, il n'y a absolument pas un objectif d'amoindrir le rôle ou de... de le diminuer, de le diluer. Ce n'est pas ça. Je pense qu'il y a un objectif de synergie, clairement, nécessairement au niveau administratif. Puis après ça dans les pratiques, bien, vous les connaissez mieux que moi, là, les synergies possibles ou déjà en cours peut-être, de... de ce que vous avez dit.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Je m'excuse?

Mme Duranceau : Non, non, non. Je dis les synergies, vous avez mentionné qu'il y avait déjà une collaboration entre les... entre les organisations, là, qui étaient... qui étaient existantes.

Le Président (M. Laframboise) : ...

Mme Duranceau : Bon, bien, écoutez, 30 secondes, je vais les... je vais les laisser aller.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je cède la parole maintenant au député de Marguerite-Bourgeoys pour 10 min 24 s, que vous pourrez partager avec votre collègue de Westmount—Saint-Louis.

M. Beauchemin : Merci, M. le Président. Donc, d'entrée de jeu, tantôt, quand vous avez commencé votre allocution, vous avez dit que vous n'avez pas été consulté, c'est ça?

Une voix : ...

M. Beauchemin : OK.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : L'annonce a été faite, j'imagine, comme pour tout le monde, au moment du dépôt du projet de loi. La veille, le sous-ministre nous a informés qu'il y aurait un projet de loi qui serait déposé le lendemain.

M. Beauchemin : Moi, je ne suis pas un expert, là, en santé publique, là, «full disclosure», mais je comprends quand même qu'il y a une différence significative entre le rôle que vous, vous avez puis le rôle de Santé Québec. Je pense que vous, vous êtes, puis je pourrais la résumer simplement, là, plus dans la prévention puis Santé Québec, c'est plus comme dans soigner le patient, là, si je comprends bien, là. Je la résume grossièrement.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...de surveillance, hein, de regarder... C'est pour ça les grandes fonctions de santé publique. C'est la raison pour laquelle on pense... on pense que ce serait intéressant de les voir apparaître dans la loi. Elles sont déjà reconnues dans la loi de santé publique...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...du Québec et des fonctions de surveillance, regarder ce qu'il va se passer, des fonctions de protection, c'est-à-dire de... lorsqu'il y a vraiment une menace, il y a une catastrophe naturelle, des feux de forêt, des inondations et ainsi de suite, des fonctions de prévention, de faire en sorte que ces choses là n'arrivent pas, et puis les fonctions de promotion, aider les gens continuellement à rester en santé puis, si possible, à améliorer leur santé. C'est ça qui fait la santé publique, c'est ça qui la différencie. Mon ancienne institution aux États-Unis disait : Nous, on soigne les gens, mais 1 million de personnes à la fois. C'est ce que fait la santé publique.

M. Beauchemin : Puis le fait que les laboratoires, comme vous avez mentionné, ont été définis beaucoup plus simplement qu'ils le sont dans la réalité, dans vos opérations, quel message que vous percevez dans ça? Il y a-tu... il y a-tu un message?

Mme Fafard (Judith) : Mais... Bien, en fait, c'est qu'on peut toujours... je suis sûre que tout le monde est de bonne volonté, là, par rapport à préserver la mission du laboratoire de santé publique, mais, des fois, on peut avoir des impératifs budgétaires. Les administrateurs peuvent changer et parfois les gens peuvent oublier quelle est la fonction fondamentale des laboratoires nationaux. Puis, il est toujours préférable d'inscrire dans le système, de façon explicite, quelles sont les fonctions de ces laboratoires-là plutôt que de le sous-entendre en simplifiant un peu la définition.

• (17 h 20) •

M. Beauchemin : Ça serait un très bon amendement à suggérer. Quand vous regardez ça, quand vous regardez le projet en tant que tel, là, est-ce que ça vous surprend qu'il n'y ait pas le concept d'une analyse d'impact qui avait été fait pour essayer de comprendre où sont les fameuses efficacités opérationnelles qu'on peut aller chercher? Parce que vous en avez adressé quelques-unes, là, en termes de coopération avec Santé Québec, là, mais, en tout et partout, là, si vous aviez à estimer une étude d'impact, là, pourquoi pensez-vous que ça n'a pas été fait?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Évidemment, je ne peux pas répondre à cette question-là. Ce que je veux dire, c'est que, ce que nous souhaitons, et c'est le souhait que j'ai exprimé à la fin de mon intervention, c'est qu'on prenne le temps de regarder ça de façon détaillée, qu'il y ait un tel examen, une telle étude, de façon à ce que la PDG ou le PDG de l'IQSSS soit trouvé dans une... se trouve dans une situation où il a un plan de mise en œuvre, il sait comment faire pour faire continuer à vivre les deux missions des deux organismes, et puis, progressivement, de construire les synergies que nous évoquions tout à l'heure.

En 2017-2018, la ministre fédérale de la Santé m'a chargée... moi et une collègue directrice du département de médecine familiale de l'Université de Toronto, la Dre Danielle Martin, nous avons été chargés de faire une enquête sur les agences fédérales de santé. Il y en a neuf et on nous a demandé d'en examiner huit de ces agences. Elle était pressée, et je la comprends, elle avait des priorités, elle nous a donné un mandat très court, mais on a quand même pris une dizaine de mois. Et, à la fin, on a recommandé les fusions, on a recommandé les abolitions. On a aussi recommandé dans certains cas d'élargir les mandats, oui, mais toujours à partir d'études, de consultations, d'un examen très précis de ce que faisaient ces organisations, bien ou mal. Et c'est sûr que ce travail-là, s'il n'a pas été fait en amont, il faudra le faire en aval maintenant.

M. Beauchemin : INSPQ, là, a un peu la réputation d'être l'enfant pauvre du système de santé dans son ensemble, là, un peu, au Québec, là. Est-ce que vous avez des craintes, à savoir lorsque... bon, par exemple, on parle de la fusion ici, là, ça va un peu réduire ce que vous faites, là, plus vers la santé curative, point final, puis on ne veut pas vraiment aller trop de l'avant sur, justement, faire ces analyses d'impact pour des grands programmes, à prendre soin de... comme vous avez dit tout à l'heure, de plusieurs centaines de Québécois à la fois en prévention?

M. Litvak (Éric) : On sait historiquement qu'à travers les périodes de crise... parce que c'est souvent des cycles, quand il y a des crises, il y a beaucoup d'investissements en santé publique puis en prévention, puis, entre les crises, il y a des désinvestissements. Puis ce n'est pas particulièrement seulement ici, au Québec, je devrais dire, c'est partout dans le monde qu'on observe ça. Et puis on sait aussi que la prévention puis ce qu'on fait en santé publique, c'est des choses qui rapportent sur le moyen, long terme. Donc, le rendement, il n'est pas immédiat, mais ça prend un investissement constant pour générer des rendements à terme. Ça fait que c'est très différent des pressions qu'il y a quotidiennement...

M. Litvak (Éric) : ...sur l'accessibilité, c'est sur les soins, et puis que quand on met ces deux choses là ensemble puis que ça devient un vase communicant, là, bien, il y a toujours un risque de dérive vers le curatif pour qu'on mette nos ressources, nos énergies, nos efforts, nos expertises là-dessus, parce qu'au quotidien, c'est... c'est là que sont les... les problèmes et les préoccupations. Ça fait que je... je dirais que c'est... c'est sûr que c'est une menace qui... qui semble vraiment... qui est réelle. Quand on combine des fonctions qui sont liées au curatif puis aux soins puis d'autres qui sont liées à la prévention, il faut vraiment qu'on... on ait un mécanisme pour protéger ce qu'on consacre à la prévention. Et probablement que le meilleur mécanisme qu'on puisse avoir, c'est de... de dissocier ou de séparer les budgets et les ressources qu'on consacre à chacun.

M. Beauchemin : ...manqué le... j'ai manqué la dernière partie de votre...

M. Litvak (Éric) : Je... Je disais que le meilleur mécanisme qu'on peut imaginer pour éviter cette dérive-là, bien, c'est d'avoir des... des budgets, et des équipes, et des ressources qui sont dédiés, et qu'on protège, puis on dit : Vous, votre travail, c'est la prévention, puis vous êtes à l'abri.

M. Beauchemin : Donc, un peu... je ne me souviens pas si c'était vous qui avez mentionné... ça en entrée de jeu, mais d'un peu... de faire référence, là, au... aux motivations de base, là, de... de votre institut, puis de santé publique, puis dire : Voici mes motivations, voici ce que je dois faire, voici mon budget.

M. Litvak (Éric) : Je pense, c'est... c'est pour ça que ce qui est dit, c'est que pour qu'on s'assure qu'il n'y ait pas cette dérive-là, puis qu'il n'y ait pas un... un désinvestissement graduel en prévention, il faut absolument qu'on précise très clairement qu'il y a une mission de santé publique dans un futur institut. Donc, tous les amendements, là, qui... qui sont proposés dans le mémoire visent précisément à faire ça : s'assurer que c'est quelque chose qui va... qui va rester là, avec toutes ses capacités, toutes ses expertises.

M. Beauchemin : Je pense... Pardon?

Une voix : ...

M. Beauchemin : Je ne pense pas qu'on peut y aller de... avec des généralités, là, parce que je vois que c'est vraiment une bibitte avec plusieurs pattes, là, OK. Mais il y a-tu, selon vous, une... une... on peut mélanger les rôles entre ce que vous, vous faites puis ce que la santé... Santé Québec fait? Dans le sens que, bon, par exemple, on veut aller dans... dans le laboratoire, ce n'est pas tout à fait le même concept qu'un laboratoire d'hôpital, on... on va s'entendre, OK, donc là, à ce moment-là, si ce n'est pas clairement, clairement, clairement défini, là, il y a-tu un risque que justement l'ensemble des opérations de laboratoire de la Santé publique soit trop simplifié par rapport à ce qui serait normalement plus dans la prévention versus le curatif?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Il faut le penser en termes de... de compétition au... au quotidien, hein? Moi, ça fait un certain nombre d'années que je dirige des organisations, quand on fait un budget, on alloue d'abord les ressources aux choses qui sont obligées soit par le cadre légal, soit par les règlements, soit par les politiques de l'organisation où vous vous trouvez.

D'ailleurs, dans le cas de l'INESSS, quand la Loi de l'INESSS est... est venue plus tard, en 2010, que... la Loi de l'INSPQ date de 1998... quand la Loi de l'INESSS a été faite, on a tenu à protéger les missions des organismes qui avaient été fusionnés pour créer l'INESSS pour être sûrs qu'on allait continuer à faire travailler un comité qui s'occupe de l'évaluation du médicament, un comité qui s'occupe de l'évaluation des technologies, des organismes qui... qui préexistaient à l'INESSS et qui fonctionnaient très bien. On voulait être sûrs que ces missions-là soient protégées, on les a donc inscrites dans la loi.

Et ce qu'on propose de faire aujourd'hui, c'est le même... le même raisonnement, c'est-à-dire de protéger les missions essentielles pour qu'il continue à y avoir des équipes qui travaillent sur les maladies infectieuses, pour qu'il continue à y avoir des équipes qui travaillent sur les... les contaminants, etc., de façon à ce que... le PDG ou la PDG de l'organisation sache, en préparant son budget, qu'il ou qu'elle doit allouer des budgets et protéger des équipes dans ces domaines, comme ce qui a permis à l'INESSS d'exister malgré le fait que l'organisation était elle-même le résultat d'une fusion.

M. Beauchemin : Je vous écoute puis je me pose la question. OK, on va avoir... chacun va avoir une définition de tâche très spécifique, chacun va avoir son carré de sable, chacun va avoir ses budgets, puis ça, ce serait la façon la plus optimale, là, de... de permettre justement le mode préventif de pouvoir continuer puis le mode de prendre soin du patient aussi de... de continuer. Ça fait que je me pose la question...

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup. Votre temps est écoulé. Merci. Donc, je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion... Laurier-Dorion pour trois minutes 28 secondes.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Je vais y aller avec une question très... très simple : En ce moment, au-delà des questions d'efficacité un peu ou de... ou budgétaires, etc., là, dans les... dans les missions qui sont les vôtres, voyez-vous la nécessité d'une... d'une fusion avec l'INESSS?

Une voix : ...pas...

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...je suis obligé de vous répondre que je ne le sais... Je ne le sais pas. Pour le savoir, il faudrait voir quelles vont être les règles du jeu et les règles d'engagement de cette fusion. Donc, je ne dis pas... je ne dis pas non, je ne dis pas oui, je reste... suis obligé... en toute honnêteté, hein, c'est... Donc, c'est mon devoir de vous dire : Je ne le sais pas.

M. Fontecilla : Les acteurs sur le terrain qui ont l'expertise ne sont pas capables de dire au gouvernement : Allez dans cette voie-là.

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Ils seraient peut-être capables de le dire, mais, pour le moment, la question ne se pose pas vraiment sous cette forme-là.

M. Fontecilla : Très bien. Et Dr Litvak, vous avez dit tantôt, là, qu'il y a des collaborations, mais il n'y en a pas tellement entre les deux organisations, et j'ai l'impression qu'on va procéder à une... à une fusion entre deux... On va mettre deux édifices ensemble, mais qui vont continuer à être deux édifices ensemble. Peut-être qu'on va faire des couloirs communs, etc., mais il n'y a... je n'ai pas eu l'impression de votre témoignage qu'il y a des gains d'efficience substantiels.

M. Litvak (Éric) : Bon, je veux bien préciser. Bien, en fait, oui effectivement, il y en a des collaborations, elles sont très précises, ciblées sur certains dossiers. Je ne dirais pas qu'elles sont omniprésentes dans le quotidien de notre organisation. Et puis comme ces collaborations-là ont déjà lieu, je vous disais, c'est peut-être un peu plus difficile d'entrevoir quel gain additionnel qui peuvent être faits d'un point de vue de notre production scientifique. Donc, effectivement, je pense que votre lecture, elle est bonne. Quand... c'est intéressant qu'on regarde aussi ailleurs dans le monde, dans plusieurs pays, il y a, à l'instar du Québec, des Instituts nationaux de santé publique. M. Forest disait plutôt, il y a une association internationale, il y en a, 128 instituts qui ont un modèle semblable au nôtre. Il y a aussi dans plusieurs pays, des agences d'évaluation des technologies. C'est comme ça qu'ils s'appellent, qui ont leur propre association. Et puis c'est très rare qu'on a regroupé dans un même institut ou une même organisation, ces fonctions-là. On a quelques exemples de ça où l'évaluation des technologies est une direction à l'intérieur d'un institut de santé publique, par exemple. Mais ce n'est pas du tout un modèle dominant.

• (17 h 30) •

M. Fontecilla : On a connu une pandémie. Si, demain matin, on rencontre une autre situation catastrophique, une nouvelle pandémie et on fait... on travaille et on fait face avec une une entité fusionnée, est-ce que vous pensez que ça va apporter des gains, là, dans le traitement d'une situation très problématique?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : C'est très difficile de répondre à une question hypothétique comme celle-là, vous vous en doutez bien. Ce... Ça dépendra de la capacité de préserver les missions de l'organisation, ça dépendra de l'expertise qui... si on regarde l'histoire du Québec, va probablement être une expertise de pointe, hein, il faut aussi se faire confiance collectivement. Notre performance pendant la pandémie a été plutôt dans le haut du panier que vers le bas, hein, par après... Un peu de difficulté au début. Et je vous le dis, j'étais à l'extérieur du Québec à l'époque, là, j'ai eu une expérience de première main de la façon dont ça s'est passé ailleurs. On est quand même capables, collectivement, de résoudre ces problèmes-là.

L'important, c'est d'être sûr que cette capacité, elle existe encore, qu'on a les réserves à la fois humaines, les capacités, les connaissances pour le faire et qu'on va occuper ce champ de compétence comme on l'a fait depuis les débuts. Une autre crainte qu'on n'a pas mentionnée, mais qui me préoccupe, c'est que, dans les autres provinces, pourquoi ils ne font pas exactement la même chose qu'au Québec? C'est parce que, dans les autres provinces, ils acceptent que l'Agence fédérale et l'agence de... supplétive en cas de crise. Et au Québec, nous n'avons jamais accepté ce point de vue, mais c'est l'une des raisons.

Le Président (M. Laframboise) : Parfait. Merci. Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci à vous pour votre présentation. M. Forest, je pense qu'on s'est déjà... On a déjà discuté à une époque, quand vous étiez en Alberta, justement, puis j'aimerais ça continuer sur... dans cette veine-là, à savoir le modèle québécois s'inspire de quel autre modèle? Tu sais, si on... Dans l'optique de pas toujours réinventer la roue, là, qu'est-ce qui se fait bien ailleurs? Qu'est-ce qui devrait peut-être nous servir d'inspiration? Puis où est-ce qu'on se situe à l'heure actuelle avec ce qu'on a à travers l'INSPQ ou l'INESSS?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...pour ce qui est de l'INSPQ, c'est un modèle innovant, c'est-à-dire que c'est un modèle qui a été un des premiers modèles d'institut du genre. On appartient à la première génération des instituts de santé publique. Comme je vous l'ai dit, on a inspiré des exemples à l'étranger. On a des partenaires à l'étranger avec lesquels on travaille beaucoup parce qu'ils nous ressemblent beaucoup. L'Institut suédois, par exemple, de santé publique, c'est un institut qui ressemble beaucoup à l'INSPQ. C'est vrai aussi de l'Institut de santé publique des Pays-Bas ou du Pays de Galles. Donc, on entretient avec ces instituts et on n'est pas seulement demandeur. Ce sont des gens qui viennent nous voir aussi. Par exemple, Éric a dirigé une initiative pour développer le programme scientifique de l'Institut. Mais il y a plusieurs instituts dans le monde qui sont venus nous voir pour nous dire : comment vous avez fait? Est-ce qu'on peut... pouvez-vous partager...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...votre méthode, votre expérience. Donc, le Québec est aussi une source d'inspiration dans ce domaine. Et au Canada, il est évident qu'on domine très largement la scène et que l'agence fédérale nous considère comme des partenaires d'égal à égal, ce qui n'est... ce qui n'est pas mal du tout.

M. Boissonneault : Pourquoi ce n'est pas mal?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : Bien, parce que ça montre un niveau de compétences qui correspond assez bien à ce qu'a été la position du Québec dans ces domaines.

M. Boissonneault : Donc, et si je comprends bien, il n'y a pas beaucoup de modèles qui rassemble les fonctions de l'INSPQ et de l'INESSS? Est-ce que... ça, ça se voit peu, ça? Est-ce que vous voyez, vous, dans la fusion des deux instituts, dans une nouvelle organisation, une agilité, une économie, une optimisation des ressources potentielles, là où on en est à l'heure actuelle, est-ce qu'il y aurait... est-ce qu'on peut faire de l'argent avec ça? Est-ce qu'on peut être plus efficace?

M. Forest (Pierre-Gerlier) : De l'argent, non. Est-ce que... comme j'ai répondu tout à l'heure, à terme, il est possible qu'on voit apparaître des choses intéressantes. Moi, je voudrais faire plus d'analyses économiques à l'Institut depuis que je suis arrivé. C'est une de mes préoccupations, L'INESSS, en fait. Alors, je suis sûr qu'à terme on arrivera... ils ne sont pas le même genre d'économistes que ceux dont j'aurai besoin. Mais ça veut dire qu'on serait probablement capables de construire autour de leurs expériences de travail avec des économistes pour développer des capacités comme ça. Donc, oui, il y a un avenir possible. C'est... justement, je n'essaie pas de noircir le portrait de ce que serait un futur commun. Il faut simplement se poser des questions, comment préserver dans les deux cas la capacité de travail d'analyse de façon à protéger la population adéquatement?

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, M. Forest, Dr Litvak, Dre Fafard. Je vous remercie de la contribution de l'Institut national de santé publique du Québec aux travaux de la Commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 36)

(Reprise à 17 h 40)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Réseau pour un Québec Famille. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à présenter les personnes qui vous accompagnent puis à commencer votre exposé. Merci.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bonjour, Mme la ministre, M. le Président, Mmes, MM. députés membres de la commission. Merci de nous recevoir aujourd'hui. Je me présente, je suis Corinne Vachon Croteau, directrice générale du Réseau pour un Québec Famille. Je suis aujourd'hui avec M. Raymond Villeneuve, qui est vice-président du Réseau pour un Québec Famille et directeur général du Regroupement pour la valorisation de la paternité.

Le Réseau pour un Québec Famille, on est un organisme provincial d'influence, de concertation puis de renforcement de capacités. On regroupe 25 réseaux nationaux, associations, regroupements de secteurs variés qui ont tous pour intérêt le bien-être des familles du Québec. Notre mission, c'est de favoriser l'implantation de mesures, de politiques, de conditions qui vont favoriser le bien-être puis l'épanouissement de tous les membres de la famille.        Si on intervient aujourd'hui, c'est précisément sur une partie du projet de loi n° 7, celui qui nomme l'abolition du Conseil de gestion de l'assurance parentale, puisque cette abolition touche à un pilier fondamental de la politique familiale québécoise, qui est le Régime québécois d'assurance parentale.

Le régime, pour nous, ce n'est pas seulement un programme administratif parmi d'autres, ce n'est pas seulement le versement d'une prestation, c'est un réel levier de transformation sociale qui positionne le Québec parmi les leaders. C'est un levier qui soutient l'arrivée d'un enfant, le développement de celui-ci, qui favorise l'engagement des pères, qui induit à lui-même une meilleure... un meilleur partage des responsabilités parentales, qui influence même la santé mentale des parents, la vitalité économique du Québec, la stabilité en emploi, l'égalité entre les genres. Donc, c'est un véritable moteur pour le Québec.

Depuis près de 20 ans, le Conseil de gestion de l'assurance parentale joue un rôle qui est déterminant dans cette trajectoire-là, puis ses travaux ont permis de nombreuses améliorations au régime qui ont eu des impacts concrets sur une transformation de normes sociales au Québec. Le réseau a eu la chance de collaborer avec le conseil de gestion à plusieurs reprises, puis on a eu l'opportunité de mesurer concrètement la valeur ajoutée d'avoir une instance qui est spécialisée, dédiée puis proche des acteurs du terrain.

L'abolition du conseil de gestion puis le transfert de l'administration du RQAP au... à Retraite Québec, tel que proposé dans le projet de loi n° 7, soulèvent pour nous une grande inquiétude sur l'avenir du régime, puis cette préoccupation-là est partagée par de nombreux acteurs. En seulement sept jours, le Réseau pour un Québec Famille a obtenu plus de 145 appuis au mémoire qui vous a été déposé. D'ailleurs, s'il est possible de le faire, nous avons la liste de ces 146 signataires avec nous, ce qui démontre toute l'importance des propos qu'on tiendra aujourd'hui.

On a le devoir de s'assurer que l'évolution du régime va demeurer alignée sur les besoins réels des familles pour que les...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...dispositifs sociaux qui sont en arrière du régime puisse continuer d'évoluer avec le temps.

Il y a cinq enjeux qui nous préoccupent particulièrement en lien avec l'abolition du conseil de gestion. D'abord, la préservation de l'expertise. Le conseil de gestion, c'est beaucoup plus qu'un gestionnaire de programmes, il détient une expertise qui repose sur trois éléments essentiels à notre avis. D'abord, l'équipe spécialisée regroupée qui suit l'utilisation du régime en temps réel, qui est connecté aux réalités évolutives des familles, mais aussi des milieux de travail, tout en se concertant avec les acteurs du terrain. Deuxièmement, le Conseil a un mandat explicite qui vise une amélioration continue du régime qui lui permet de faire des propositions d'amélioration, d'ajustement, puis d'assurer aussi une veille à l'international pour s'assurer qu'on mette en place au Québec les meilleures pratiques pour soutenir les parents. Puis finalement, il y a aussi une reconnaissance institutionnelle du rôle du régime, où les décisions administratives doivent s'arrimer avec les objectifs sociaux. Et à ce jour, dans le projet de loi, il n'y a aucune garantie qu'ils vont nous assurer que ces trois fondements vont toujours pouvoir être maintenus au sein de Retraite Québec et on pense que sans balises claires on peut perdre une force qu'on a avec le régime : sa capacité d'adaptation, sa cohérence et sa pertinence sociale.

Le deuxième enjeu repose sur la représentativité des cotisants, puis la légitimité d'un régime qui est contributif. Le RQAP repose sur un principe fondamental : ceux qui cotisent doivent avoir voix au chapitre dans les décisions, dans les orientations qui le concernent. Puis le CGAP incarne cette légitimité grâce à la composition de sa gouvernance. Dans le cadre du projet de loi n° 7, il n'y a pas de mécanisme équivalent qui prévoit cette représentativité-là au sein de Retraite Québec. Puis pour un régime qui est contributif, on est d'avis que c'est un angle mort qui est important. Sans structure, la confiance, qui n'est évidemment pas acquise dans un régime contributif, pourrait s'éroder avec le temps.

Troisièmement, on est inquiet de l'intégrité du fonds d'assurance parentale, puis de la gouvernance des surplus. Le fonds d'assurance parentale, c'est assurément la colonne vertébrale de ce régime-là, c'est ce qui fait qu'il peut continuer à vivre, d'être autonome, puis de garantir aux futurs parents qu'ils auront accès, eux aussi, à un congé. Il doit être géré, dédié exclusivement à la raison pour laquelle il a été bâti. C'est important d'avoir des protections légales qui vont être suffisamment robustes pour empêcher des possibilités de réaffectation progressives ou d'arbitrages budgétaires futurs. À ça s'ajoute une préoccupation importante sur l'utilisation des surplus du Fonds qui peuvent, selon la loi, être utilisés soit pour diminuer les cotisations ou pour bonifier les prestations. Jusqu'ici, ces décisions-là pouvaient être éclairées par le conseil de gestion. Avec son abolition, il n'y a rien qui nous garantit que les choix par défaut ne vont pas s'orienter par des baisses de cotisations plutôt que de l'amélioration du régime. Présentement, le Fonds a des surplus importants, d'ailleurs on vient d'annoncer aujourd'hui une baisse encore des cotisations plutôt qu'une bonification du régime, c'est quelque chose de notre côté qui nous préoccupe parce qu'on pense qu'on fait bien, mais qu'on peut certainement faire mieux pour soutenir les parents dans ce moment crucial-là. Donc, il nous apparaît important de continuer à réfléchir c'est quoi les balises qui seront mises en place pour mieux utiliser les surplus au bénéfice des parents.

Quatrième enjeu, bien, le maintien d'une finalité famille. Il y a plusieurs entités qui ont été abolies au fil des années qui avaient vraiment un focus sur la famille, puis le conseil de gestion, si on l'abolit, bien, c'est une des dernières entités avec cette entité famille là qu'on vient abolir. Une transition vers Retraite Québec, une organisation qui n'est pas spécialisée, hein, en matière de parentalité, peut laisser croire qu'éventuellement tranquillement pourrait glisser vers une logique davantage d'administration, de gestion de prestations plutôt que d'être axée sur les besoins des familles. L'enjeu, ce n'est pas donc de savoir seulement où sera géré le régime, mais plutôt avec quelle intention le régime sera géré.

Le cinquième et dernier enjeu, bien, évidemment, c'est quoi les impacts concrets pour les familles? Ça nous préoccupe, évidemment. Le RQAP, on l'a dit, arrive à un moment fondateur dans les transitions de vie. Si l'expertise, la représentativité, l'intégrité du Fonds puis la finalité familles ne sont plus protégées, bien on est inquiet que tranquillement il y a des impacts qui s'installent, des impacts probablement silencieux, mais durables dans le temps, qui pourrait avoir pour effet d'avoir une adaptation moins efficace du régime aux nouvelles réalités familiales, un ralentissement des avancées en matière de partage de responsabilités familiales avec des effets à long terme, bien, sur l'égalité...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...entre les gens, notamment. Donc, il s'agit de préserver un modèle social où l'accueil d'un enfant est traité comme une responsabilité qui est partagée, qui est soutenue puis reconnue... collectivement, pardon.

On arrive au moment des recommandations, maintenant qu'on a parlé des enjeux. Bien, il est évident que le Réseau pour un Québec Famille recommande le maintien du conseil de gestion dans sa forme actuelle. D'ailleurs, c'est important pour nous de mentionner que le conseil de gestion n'est pas financé par l'État, mais bien à même le fonds, donc il n'y a pas d'économie directe à son abolition puis ça n'affecte pas les finances publiques.      Par contre, si le gouvernement décidait tout de même de poursuivre dans cette voie-là, avec l'abolition du conseil de gestion, on a trois recommandations à inscrire dans la loi pour garantir des protections : d'abord, la création d'une direction RQAP qui serait dédiée au sein de Retraite Québec, avec l'équipe regroupée, des ressources suffisantes, un mandat clair d'amélioration continue tout en maintenant les liens avec la société civile; la création également d'un comité statutaire du RQAP qui relèverait du conseil d'administration. Ce comité-là devrait être à même de pouvoir assurer la représentativité des cotisants, d'émettre des avis publics sur les orientations du régime puis devrait être aussi obligatoirement consulté quant aux changements de modalités du régime, notamment pour l'utilisation des surplus; puis, finalement, on pense qu'il est important d'avoir une protection légale du Donds d'assurance parentale en incluant une interdiction explicite de réaffectation, une reddition de comptes qui est distincte puis des balises claires sur l'utilisation des surplus, afin que celle-ci demeure alignée avec les besoins des familles.

• (17 h 50) •

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, Mme Vachon Croteau. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, vous avez 16 in 30 s. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Oui. Bien, merci pour vos commentaires. Alors donc, ce transfert-là à Retraite Québec, en fait, tu sais, on ne touche pas du tout à l'objectif, là, le RQAP, il est là pour rester, c'est l'aspect administratif de la chose qu'on intègre dans Retraite Québec, qui, aux niveaux financier puis administratif, a déjà les ressources pour gérer un régime comme celui-là, là, du moins, sur le plan financier. Ça fait que, ça, je veux rassurer tout le monde, là, il n'est aucunement question de mettre fin au régime. Ce n'est pas ça du tout, l'objectif.

Ça fait que vous avez des recommandations. Je serais peut-être intéressée à les... à ce que vous élaboriez un peu davantage sur chacune de vos... de vos trois recommandations. Parce qu'il y avait plusieurs questions, dans votre mémoire, ça fait que... vous y répondez partiellement, là, avec les recommandations si on devait aller de l'avant avec la proposition actuelle. Je voudrais vous entendre.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : On est tout à fait... on est tout à fait d'accord, d'ailleurs, que le projet de loi ne vise pas à abolir le régime, là, ça, on le comprend bien, soyez rassurée, mais ce qui nous inquiète, quand même, c'est une perte d'expertise dans une grosse machine qui est Retraite Québec, qui n'est pas spécialisée.

Donc, ce qui nous intéresse, c'est de voir, bien, quels mécanismes peuvent être mis en place pour s'assurer que le développement, notamment du régime, demeure une priorité dans une très grosse entité. Puis d'ailleurs, quand on lit le mandat qui est donné à Retraite Québec pour la gestion de l'assurance... du Régime québécois d'assurance parentale dans le projet de loi, on est vraiment dans des éléments plus techniques, administratifs, qui ne mettent pas de l'avant nécessairement le développement du régime. Donc, ça, ça nous apparaît... Oui?

Mme Duranceau : ...régime, là, parce que les gens cotisent, l'argent s'en va dans le régime, puis ça sert à payer des prestations. Ça fait que, là, comment l'expertise... de quelle expertise vous parlez, puis comment on fait pour ne pas la perdre, quelles sont vos suggestions? Puis c'est ça.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, l'expertise a permis... Je ne sais pas si, Raymond, tu veux aller dans cette zone-là, d'améliorer le régime?

M. Villeneuve (Raymond) : Bien, on peut vous donner des exemples très... Donc, on peut vous donner des exemples concrets. Par exemple, le congé de paternité, en 2006, il était de cinq semaines. On est 20 ans plus tard, puis il est encore de cinq semaines. Pourquoi ne pas l'améliorer? Ce qu'on voit, c'est qu'en France, en Espagne, dans plein de pays au monde, les gens améliorent le congé de paternité, parce qu'on sait que c'est une mesure qui rejoint majoritairement les pères. Alors, si on pense... Si notre seul objectif, c'est de réduire les cotisations, on pourrait se priver d'amélioration, comme ça. On pourrait aussi, ce qui revient dans l'actualité périodiquement, prévoir des congés pour les pères lors du deuil périnatal. Et souvent c'est les mères qui le réclament. Les mères disent : Je ne veux pas vivre mon deuil périnatal seule, c'est important que le père soit avec moi. Et ça, avec les surplus qu'on a eus, on aurait pu faire des modifications comme ça. On pourrait s'intéresser aussi au sort des parents les plus vulnérables, parce que comme c'est...

M. Villeneuve (Raymond) : ...les régimes d'assurance, les cotisations, c'est un pourcentage de nos revenus. Donc, les parents avec les plus petits salaires, quand ils se retrouvent, avec 75... ou 50 %, 55 % de leurs revenus, se retrouvent souvent à des seuils misérables. Donc il y a un paquet d'améliorations qui pourrait être fait. Et notre inquiétude, c'est vraiment que cette fonction-là se perde, de dire : Comment est-ce qu'on peut améliorer le régime? Et c'est sûr que la coupure de 8 % qui a été faite en juin et la nouvelle coupure de 5 % qui a été faite aujourd'hui nous inquiètent vraiment, parce que la fonction d'amélioration du régime devrait vraiment être préservée selon nous, pour nous, c'est vraiment un enjeu central.

Mme Duranceau : Mais je ne vois pas comment on pourrait nécessairement perdre l'expertise en intégrant ça à Retraite Québec. Donc, qu'est-ce que vous suggérez pour qu'on ne la perde pas, l'expertise... l'expertise ou... tu sais, c'est un lobby, là, par rapport à ça, non?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, la perte d'expertise, à notre avis, peut avoir lieu si, par exemple, l'équipe est dispersée au sein de la grosse structure de Retraite Québec. Présentement, il y a 14 employés qui travaillent pour le conseil de gestion. Bien, si, l'équipe se retrouve fragmentée dans des directions différentes, avec peu de liens ensemble, c'est là où on pense qu'il peut y avoir une perte d'expertise, parce que l'équipe en place fait la vigie sur ce qui se passe à l'international, mais étudie aussi les comportements des parents, comment ils utilisent le régime, puis tout ça. Puis donc il faut que ça se parle pour pouvoir proposer des améliorations.

Donc, ce qu'on propose, c'est vraiment de créer, par exemple, au sein de Retraite Québec, une direction RQAP, qui serait dédiée pour le maintien de l'expertise. On pense que ce serait une solution qui pourrait être gagnante, mais surtout de préciser le mandat d'amélioration qui n'est pas présent, présentement, dans le projet de loi. Dans le projet de loi, on dit qu'on veut «assurer le financement, assurer le paiement des prestations, administrer en qualité de fiduciaire le fonds et réaliser tout autre mandat que le gouvernement lui confie». Donc, on pense que d'inscrire à la loi qu'il y a... que Retraite Québec a également un mandat de veille et d'amélioration, comme il l'a fait pour ce qui concerne les dossiers de la retraite, il y a un mandat explicite de veille et d'amélioration des pratiques. On pense que ça devait se retrouver également sur le dossier de l'assurance parentale.

Mme Duranceau : En tout cas, moi, je veux juste vous rassurer que les employés sont transférés à Retraite Québec. Alors, l'expertise des employés, dont vous me parlez, n'est pas perdue parce qu'elle va suivre.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Mais encore faut-il savoir comment ils vont être gérés, ces employés-là, regroupés ou pas? Comment ça va fonctionner pour s'assurer que l'expertise on l'utilise encore?

Mme Duranceau : Je pense que c'est des questions qui sont légitimes. Mais à partir du moment où Retraite Québec a deux chapeaux par rapport à ces deux régimes, bien, ils sont obligés d'en tenir compte, puis il faut qu'au niveau administratif ça fasse partie des nouvelles opérations à surveiller, là, puis...

M. Villeneuve (Raymond) : Bien, c'est sûr que nous, on trouvait intéressant l'idée du conseil d'administration indépendant qui pouvait donner une petite distance. Au niveau de la gouvernance, on trouvait ça vraiment intéressant, conseil d'administration indépendant dans lequel il y a des employeurs, il y a des employés, il y a des représentants de la société civile. Et on pensait que, dans le processus de réflexion, c'était vraiment intéressant, l'idée du conseil d'administration indépendant, on pensait que c'était vraiment un plus de ce côté-là.

Mme Duranceau : Quand vous dites conseil d'administration, vous référez à l'existence du conseil de gestion d'assurance parentale.

M. Villeneuve (Raymond) : C'est ça, c'est ça, pour ne pas perdre cette spécificité-là puis ce mandat là d'innovation spéciale, parce que, pour nous, c'est vraiment le fleuron québécois, hein, le Régime québécois d'assurance parentale, puis l'idée, c'est comment est-ce qu'on peut aller plus loin, comment est-ce qu'on peut l'améliorer.

Mme Duranceau : Ça ne veut pas dire qu'au niveau du conseil d'administration, éventuellement, de Retraite Québec, il n'y a pas quelqu'un qui a un chapeau plus comme celui que vous décrivez. Tu sais, à partir du moment où tes opérations évoluent puis qu'il faut que tu aies l'expertise pour... pour couvrir l'ensemble des opérations, je pense que ce serait logique de retrouver ça d'une certaine façon.

M. Villeneuve (Raymond) : Oui, bien, la préoccupation, c'est, pour nous, il faut vraiment que ce soit explicité, que ce soit clair, net et précis, parce que... il y a une inquiétude du terrain, à cet égard-là, qui est vraiment sincère. Puis les familles aiment le Régime québécois d'assurance parentale, les pères, les mères, et tout ça. Donc, c'est un joyau, il faut vraiment en prendre soin.

Mme Duranceau : Bien, on les rassure qu'on préserve ça intégralement. Maintenant, l'expertise, je comprends. Après ça, comme...  tu sais, ce n'est pas une entreprise, là, c'est Retraite Québec. Mais n'importe quelle société qui a un conseil d'administration, il faut qu'elle ait des gens qui sont compétents en lien avec les opérations qu'elle a. Donc, je pense que ça pourrait être logique qu'il y ait un lien qui se fasse de ce côté-là.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Mais peut-être aussi que, dans la Loi de Retraite Québec, on prévoit les différents sièges au conseil d'administration. D'ailleurs, il y a une voix... si vous me laissez reprendre ma feuille de notes, laquelle est-elle...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...il y a une voix pour les... je pense que je l'ai ici... il y a une voix, notamment, pour les personnes retraitées, il y a un siège qui est réservé. Est-ce qu'on pourrait revoir la composition déjà, du conseil d'administration, comme elle est dans la loi de Retraite Québec, pour s'assurer d'avoir une meilleure représentativité du côté des parents? Parce que là, tout est vraiment axé, puis c'est défini dans la loi sur le régime... les différents régimes de retraite.

Mme Duranceau : Bien là, je... là, on va le regarder, là. Comme je vous dis, moi... il y a une logique...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Absolument. Je comprends.

Mme Duranceau : ...à ce que l'expertise soit représentée, là. Ça fait que, de mon point de vue, ça va. Donc, c'est ça, ça fait que, dans vos recommandations, c'était principalement ça. Mais il y en avait d'autres. Vous avez énuméré trois choses, là.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, oui, on parlait de l'expertise, de la création, justement, d'un comité statutaire rattaché au CA, puis, également, une protection légale du fonds d'assurance parentale, en étant plus explicites sur une interdiction de réaffectation du fonds, puis comment, également, on va s'assurer d'utiliser les surplus au bénéfice des familles également.

Mme Duranceau : Oui. On n'est pas dans complexifier les choses, là, ces jours-ci, mais on entend bien ce que vous proposez.

• (18 heures) •

M. Villeneuve (Raymond) : Bien, c'est ça, parce que la... quand les employeurs et les employés cotisent, c'est pour un objet très défini, qui est de l'assurance parentale...

Mme Duranceau : C'est ça.

M. Villeneuve (Raymond) : ...donc on veut s'assurer de cela, et c'est vraiment ça qui est l'essentiel, tout ça.

Mme Duranceau : OK. Ma compréhension, c'est que ça ne change pas, là, ça. C'est l'objectif, puis ça va le demeurer...

M. Villeneuve (Raymond) : En tout cas...

Mme Duranceau : ...au même titre que tu cotises à l'assurance-emploi, c'est une affaire, puis au RRQ, c'est une autre affaire. Donc là, c'est le RQAP.

M. Villeneuve (Raymond) : C'est ça. Mais, en tout cas, notre souhait, c'est qu'il y ait vraiment... que tout ça soit vraiment explicité, pour ne pas perdre notre fleuron québécois, là. Mais on a l'impression qu'il y a un petit peu de flou dans le projet de loi.

Mme Duranceau : Mais, écoutez, à valider, là. Mais, moi, il n'y a pas trop de flou dans ma tête.

Le Président (M. Laframboise) : D'autres interventions? Mme la députée de Bellechasse. Allez-y, madame.

Mme Lachance : ...combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Laframboise) : Oui, vous avez six minutes.

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Bonjour, merci d'être là avec nous pour répondre à nos questions, et nous éclairer sur le travail que vous réalisez, et sur le processus qui pourrait être celui de la fusion. J'aimerais vous entendre d'abord sur votre modèle d'affaires actuel, parce que je vois que vous avez des partenaires. J'aimerais ça que vous me décriviez un peu le rôle de chacun de ces partenaires-là dans votre mission actuelle.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Au Réseau pour un Québec Famille?

Mme Lachance : Oui.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, le Réseau pour un Québec Famille regroupe des organisations qui ont à cœur l'amélioration de la qualité de vie des familles, et donc, ensemble, on... je dirais qu'on partage nos préoccupations, on choisit des dossiers sur lesquels on désire travailler collectivement, ensemble. Je dirais qu'on voit les... les enjeux qui nous regroupent tous pour avoir une voix collective plus forte. Est-ce que ça répond bien à votre question?

Mme Lachance : Oui, ça répond à ma question. Concrètement, vous êtes... Bon, vous avez mentionné qu'il y avait 14 employés. Ce n'est... ce n'est pas un amalgame, j'imagine, qui est homogène, chacun a ses rôles et responsabilités. Comment ça se définit? Dans le fond, le sens de ma question, c'est de voir... Parce que là, vous avez mentionné, bon, le siège au niveau du conseil d'administration, qui est une spécificité, bien évidemment, là, au niveau du conseil d'administration, mais au niveau des employés, vous avez mentionné d'avoir une vigilance, puis comment ça va se faire, ça vous inquiétait. Actuellement, comment vous travaillez?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Je veux juste préciser. Nous, nous ne sommes pas le Conseil de gestion de l'assurance parentale.

Mme Lachance : Non, non, non.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Ça fait que, donc, les 14 employés, ce ne sont pas des 14 employés à nous, ce sont les employés du Conseil de gestion de l'assurance parentale, juste pour pouvoir bien répondre à la question. Puis dans leur fonctionnement, dans ma compréhension, si c'est ça, la question, bien, ils ont chacun des spécialités. Il y a des employés qui sont spécialisés, justement, dans la veille, il y a des actuaires, il y a une équipe de recherche. Donc, je... est-ce que c'était ça, le sens de votre question?

Mme Lachance : Oui, oui, c'est exactement ça. Parce que vous avez mentionné, il y a quelques minutes, d'avoir une vigilance à l'intégration de ces employés-là.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Oui, effectivement.

Mme Lachance : Donc, la question, je l'inverse : Quelle vigilance? Et sur quel... sur la nature de quel poste?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, je dirais, la vigilance, c'est : pas de... pas de... de s'assurer que les employés ne se retrouvent pas gobés dans une très grosse structure, où, par exemple, on perdrait cette possibilité, pour eux, d'échanger, de travailler ensemble dans un but commun, qui est l'amélioration du régime. Retraite Québec, c'est immense, il y en a, des équipes d'actuaires, il y en a, des équipes qui font de la recherche. Donc, comment on s'assure de garder cette spécificité-là qui est au niveau de l'assurance parentale. Les gens qui font de la recherche vont, par exemple, vraiment faire de la veille sur l'utilisation...


 
 

18 h (version non révisée)

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...du régime par les parents, puis ça a pu permettre de voir, par exemple, qu'il y avait un enjeu sur les parents adoptants puis permettre de faire des interventions auprès de populations cibles pour un meilleur accès au régime. Donc, c'est de toute cette expertise-là dont on parle.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la ministre.

M. Villeneuve (Raymond) : Il y a également une veille internationale qui est extrêmement intéressante sur les meilleures pratiques, notamment dans les pays scandinaves.

Mme Duranceau : OK. Vous me parlez beaucoup des surplus, là. Est-ce qu'à votre avis les balises actuellement... Parce qu'on ne touche pas à ça, là, l'utilisation des surplus. Ça fait que les balises qui existent sur l'utilisation des surplus, actuellement, vous semblent-elles insuffisantes?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, je pense qu'on pourrait, effectivement, aller plus loin pour s'assurer que la finalité famille se retrouve au cœur des décisions puis des préoccupations.

Mme Duranceau : ...ça, on n'en parlerait pas, là.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Effectivement, mais là on touche au projet de loi, donc je pense que c'est une belle opportunité pour faire cette réflexion-là.

Le Président (M. Laframboise) : Merci.

M. Villeneuve (Raymond) : Puis d'ailleurs, lors de... quand la coupure des cotisations de 8 % a été annoncée en juin dernier, il y a plusieurs groupes sociaux qui ont écrit au Conseil de gestion de l'assurance parentale pour le tenir... pour leur tenir foncièrement le même discours qu'on tient aujourd'hui, de dire qu'on aurait pu aussi prendre une partie des surplus pour bonifier le régime. Parce que, dans le fond, c'est qu'en 2006 on était en avant puis là, à mesure que le temps passe, on recule dans le classement mondial. C'est quand même assez triste. Hein, le Québec, on est fier de nos politiques sociales, on est fier dans notre politique famille. Et ça serait chouette de pouvoir dire qu'on demeure dans le peloton de tête, et là on est en train de se faire dépasser, ce qui est malheureux, parce que c'est un des leviers les plus importants pour l'égalité entre les hommes et les femmes. On dit toujours, les scientifiques nous disent : Le premier prédicteur de l'engagement paternel à long terme, c'est l'engagement paternel précoce. Le premier prédicteur d'une bonne coparentalité à long terme, c'est une bonne coparentalité précoce. C'est déterminant, ces périodes-là, parce que c'est là, que les rôles parentaux se figent souvent, dans les premiers mois. Et donc, si on part avec des déséquilibres, c'est très difficile à rattraper. Donc, tout ce qu'on peut faire là, c'est vraiment tout bénéfice pour les pères, pour les mères, pour les enfants, pour la société québécoise. Je m'emporte, mais c'est mon... c'est mon mandat dans la vie de parler des pères, alors je le fais.

Mme Duranceau : Bien non, c'est bon. C'est bon, c'est bon. C'était votre pitch, votre envolée finale. C'est bon.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Ça va? Donc, merci beaucoup, Mme la ministre, et à l'équipe gouvernementale. Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys, 10 min 24 s que vous pouvez partager avec votre collègue de Westmount Saint-Louis.

M. Beauchemin : Merci, M. le Président. Je partage votre inquiétude pour les surplus parce qu'en fait, aujourd'hui, on a vu quand même qu'il y a eu un réflexe qui n'était pas lié au projet de loi sept, mais de prendre les surplus pour réduire les cotisations des contribuables de... générales sur leur chèque de paie. Donc, c'est une utilisation des surplus indirectement qui est faite de cette façon-là. Je comprends, je partage entièrement votre point de vue là-dessus. Et puis c'est drôle parce que c'est quelque chose qui est totalement parallèle à l'activité gouvernementale. C'est comme si c'était un fonds additionnel qui pourrait être utilisé quand le gouvernement décidera de faire ce qu'on fait, comme par exemple aujourd'hui.

Sur ce que vous dites à propos du fleuron, je suis entièrement d'accord avec vous pour la raison suivante. Puis moi, je suis un gars de finance, ça fait que j'ai passé ma vie loin de ce que vous dites, j'ai... au moyen âge, et je n'ai pas... je n'ai pas passé de temps avec mes enfants quand ils sont venus, là. Mais la réalité c'est que c'était un avantage compétitif pour le Québec d'avoir ça parce que ça permet, justement, un, un meilleur développement des enfants, meilleure relation, comme vous venez juste d'expliquer. Mais c'est que c'est quelque chose qui fait en sorte que c'est attrayant de vouloir avoir donc une famille, avoir ce support-là, puis on en a de besoin, là, parce qu'on a un enjeu, là, de natalité, là, au Québec, là. Ça fait que c'est sûr que ça, c'est un avantage positif.

Donc, moi, ma question, c'est... Quand on regarde ça de façon vraiment macro, là, on est dans un régime qui est là pour aider les jeunes familles. On veut mélanger ça avec le Régime des rentes du Québec, qui a un mandat totalement différent, pour qu'on puisse continuer à avoir une certaine... peut-être pas le bon terme, là, mais compétitivité dans un régime parental puis d'être à l'affût des meilleures pratiques. Il faudrait absolument qu'à l'intérieur du Régime des rentes du Québec on ait, là, tout le modus operandi actuel qui est conservé à la lettre puis, en fait, devrait être amélioré. Puis des décisions de... justement, améliorer le régime permettrait de pouvoir rendre ce régime-là plus compétitif et donc.

M. Beauchemin : ...aider le Québec dans son ensemble, au nivellement de la natalité, puis d'avoir des enfants. Ça fait que, ma question, à part cette expertise-là, là, qui est fondamentale, selon moi, quelle autre expertise voyez-vous qui serait à risque avec cette fusion-là?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, je dirais que c'est vraiment surtout le focus sur les familles. Ça prend une expertise de pointe pour bien connaître l'évolution du besoin des familles, puis quand on parlait des impacts du régime pendant la pandémie, il y a eu une certaine chute de la natalité, ce qui a généré des surplus, mais, au Québec, la chute a été moins grande qu'ailleurs. Puis je pense que nos politiques sociales, dont le RQAP, dont les mesures de conciliation famille-travail qui sont en place chez les employeurs, il y a quand même une bonne base qu'on continue à travailler pour que ça soit amélioré, mais quand même. Donc, je pense que c'est d'où l'importance justement de continuer ce travail-là puis de maintenir l'expertise précise que ça demande. Il ne faut pas être généraliste pour être en mesure de suivre l'évolution de ce régime-là, je pense que ça prend vraiment une spécialité pour le faire.

M. Beauchemin : Puis, quand on fait ce qui est proposé dans le projet de loi puis qu'on regarde le surplus actuel du régime qui est là, si je ne m'abuse, est de 766 millions de dollars, quelque chose comme ça, là, est-ce que ça va juste se mélanger, selon vous, dans le pot complet, là, du RRQ, puis là, bon, on ne pourra plus vraiment distinguer s'il y a un surplus spécifique au régime parental ou pas?

• (18 h 10) •

M. Villeneuve (Raymond) : Ce qu'on comprend, c'est que les cotisations vont être réduites. Donc, il va y avoir moins d'entrées dans le régime. Donc, le fonds disponible va être moins important. Et, si je ne m'abuse, il y a déjà eu, dans le passé, juste avant 2020, des coupures de 4 %, après ça, 6 %. Il y a eu 8 %, il y a eu 5 %. Si on additionne tout ça, on n'est pas loin de 23 %. On comprend que la natalité a baissé, ça a généré des surplus importants, mais il y a comme un levier extraordinaire. Et, pour vraiment faire les choix stratégiques, il faut vraiment avoir l'expertise.

Je vais vous donner un exemple. Dans la réforme de 2020, il y a une très belle mesure, qui est le bonus du congé parental. Quand les deux parents prennent au moins huit semaines, il y a un bonus de quatre semaines additionnel dans la banque de congé parental du couple. Donc, c'est pour inciter les familles à partager davantage. C'est une belle mesure, mais c'est qu'elle est seulement utilisée par 30 % des parents. Donc, ce n'est pas une mesure universelle. Les deux tiers des parents ne l'utilisent pas. Donc, c'est bien, puis, ce que ça fait, c'est que les parents qui partageaient déjà partagent encore plus. Donc, les parents les plus égalitaires le sont encore plus. Mais la majorité des parents, notamment les parents les plus vulnérables, n'utilisent pas cette mesure-là. Donc, ça atteint des objectifs, la mesure est bonne, mais la majorité des familles n'en profitent pas.

Donc, vous voyez, ça, c'est une expertise très pointue, très fine, et, si on veut rejoindre tout le monde, bien, notamment le congé de paternité pourrait être allongé. Ajouter, si je ne m'abuse... je ne suis pas une actuaire, mais je pense qu'ajouter une semaine de congé de paternité, c'est 40 millions. On vient d'en couper 760. Ça fait qu'on pourrait ajouter facilement des semaines à même ces surplus-là, en gardant quand même de la marge de manœuvre. Donc, il y a moyen de faire... d'atteindre plusieurs objectifs et de faire vraiment une différence.

Parce que le congé parental, c'est un créateur de normes sociales, hein? Ça a changé la pratique en 2006. Quand on est arrivé avec le congé de paternité, on a dit à tous les pères et à tous les couples : L'engagement des pères dès le départ, c'est fondamental et c'est rentré dans l'esprit des pères, v'est rentré dans l'esprit des employeurs aussi. Tout le monde a dit : Bien, dorénavant, c'est ça. Donc, si on va encore plus loin, on va transformer la société, les pratiques vont s'adapter et ça va être vraiment tout bénéfice. Mais pour faire ça, il faut le suivre de proche, il faut faire l'analyse des mesures, quelle clientèle on vise, quel genre de parent on rejoint, et tout ça? Et c'est un très bon exemple de la finesse des mesures et de la finesse de l'analyse, il nous semble.

M. Beauchemin : M. le Président, je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Maccarone : Merci. Je veux juste corriger. Le Conseil de gestion de l'assurance parentale, ce n'est aucunement un lobby, c'est une instance paragouvernementale avec les nominations par décret par les membres du gouvernement. Alors, moi, j'ai une crainte, je ne sais pas si vous partagez la crainte parce que j'entends ce que... la vision, c'est : on va transférer ces employés, mais est-ce qu'on va perdre aussi l'indépendance de l'instance?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : C'est une bonne question...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...Effectivement, on parlait tantôt de représentativité des cotisants, s'assurer que les cotisants ont une voix. C'est une question qui est légitime à se poser dans le cadre d'un transfert, à savoir comment on va être en mesure d'influencer les décisions qui nous concernent. Tout à fait.

Mme Maccarone : Parfait. Ça fait que ça confirme un peu ma lecture, parce que selon vous, le Conseil de gestion font un bon travail...

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Absolument.

Mme Maccarone : ...ça fait que c'est ça. Puis je vous entends, j'adore votre plaidoyer, j'adore votre passion, puis aussi, je devrais vous remercier pour Réseau pour un Québec Famille. Ça fait longtemps depuis que je vous connais, je porte le dossier famille pour ma formation politique et j'ai énormément de respect pour ce que vous faites. J'ai hâte à lire la liste de 145 noms, parce que si on regarde les membres, vous avez quand même un liste impressionnant. Olo, AQCPE... tu sais, c'est vraiment important. Ça fait que moi, je souhaite aussi vous entendre par rapport... j'essaie de comprendre le pourquoi. Parce qu'encore une fois, je répète, on est dans la Commission des finances publiques, c'est le but... est, je présume, protéger les finances, parce qu'on fait face à un déficit important. Ça fait que je comprends, on essaie de trouver des synergies. Mais vous avez tellement bien dit, on n'aura pas de synergie. Ça fait que c'est comme une illusion économique. Alors, comment... c'est quoi votre lecture de ça? Pourquoi qu'on fait ceci? C'est qui qui sera gagnant? Est-ce que vous, vous serez gagnant? Est-ce que les parents, les familles vont être gagnants de cet transfert de personnes?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, j'avoue que dans la lecture qu'on en a fait, on ne comprenait pas la raison. D'autant plus que le Conseil de gestion n'est pas financé par l'État, mais vraiment financé par le fonds. Donc, les 14 employés ne touchent pas au budget de l'État. Il y a une personne qui perd son travail, c'est la PDG, donc ce n'est pas des économies qui sont substantielles. Puis même là, ça concerne le fonds qui a des surplus, donc je n'identifie pas moi non plus où est l'économie dans cette... dans cette... le gain d'efficacité.

Mme Maccarone : Surtout qu'ils travaillent très bien. Vous l'avez dit, les gens ont un grand respect pour le Conseil de gestion d'assurance parentale, parce qu'il y a quand même... c'est quand même une réussite que nous avons, ça fait que ce serait une perte d'expertise. Je souhaite vous entendre un peu parce que là, j'ai écrit tout ce que vous dites : dilution de la mission sociale... créateurs de normes sociales, j'adore, parce que c'est sûr, je pense qu'on oublie que dans cette mesure économique, il y a des familles autour de ça. Ça fait que c'est très humain. Ce n'est pas juste l'argent, c'est très humain. Par rapport à la spécialisation qu'il nous offre, parce que vous avez évoqué qu'il y a quand même une transition, peut-être juste avec le temps qu'il nous reste, parler des histoires. On a parlé peut-être des cas d'adoption. Moi, je suis très préoccupé par des cas des enfants en situation de handicap. J'aimerais vous entendre là-dessus par rapport le rôle qu'ils ont joué.

Le Président (M. Laframboise) : 8 secondes. Donc, rapidement.

Mme Maccarone : Ah, mon Dieu.

M. Villeneuve (Raymond) : On se reprendra.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Donc, maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.

Des voix : ...

Le Président (M. Laframboise) : Excusez, excusez. Excusez-moi. M. le député de Laurier-Dorion pour 3 minutes 28 secondes. Excusez-moi.

M. Fontecilla : Vous avez... vous avez marqué un point avec la notion de création de normes et sociales. Est-ce que vous croyez que la réforme proposée... comment dire, tient compte ou comprend cette notion-là?

M. Villeneuve (Raymond) : Je ne suis pas un avocat, mais dans ce qu'on lit, on ne l'aperçoit pas. Ce n'est pas du tout évident, d'où notre inquiétude.

M. Fontecilla : Très bien. Vous avez parlé des... des éléments constitutifs d'un régime contributif, là, c'est la participation. Et dans le scénario où la fonction est adoptée, est-ce que vous voyez une... comment qu'on pourrait conserver cette fonction-là des participations des cotisants?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, on pense qu'il pourrait y avoir un comité. C'est notre deuxième recommandation, un comité spécial relevant du Conseil d'administration qui pourra être créé, représentatif des cotisants pour s'assurer de maintenir cette représentativité-là. Puis on pourrait lui donner des mandats précis d'avis, de recommandations pour s'assurer, justement, que cette voix reste encore entendue quand il est temps de prendre des décisions qui concernent le régime.

M. Fontecilla : Vous avez également dans votre mémoire parlé des protections légales du fonds d'assurance parentale. Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Qui pourraient s'inscrire dans une... dans la loi, là? Si je comprends bien.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Oui, effectivement, la loi mentionne déjà une protection minimale, c'est-à-dire que le fonds doit être utilisé pour verser des prestations ou couvrir, dans le cas actuel, là, les frais reliés aux opérations du Conseil de gestion. Par contre, on pense qu'on pourrait aller plus loin en ayant des interdictions...

Mme Vachon Croteau (Corinne) :  ...réaffectation, même temporaire, on ne pense pas que Retraite Québec est mal intentionnée, loin de... loin de notre idée, mais est-ce qu'éventuellement il peut y avoir des petits glissements temporaires de dire : Bon, bien, il y a des liquidités ici, temporairement on en a besoin, on les remboursera? Est-ce que ça pourrait éventuellement aller là? Donc, on pense que des balises claires avec une interdiction de réaffectation permettraient d'avoir quelque chose d'encore plus fort, là, pour éviter à plus long terme des glissements possibles.

M. Fontecilla : Je vous remercie. Je n'aurai pas d'autre question...

Le Président (M. Laframboise) : Ça va? Merci beaucoup.

M. Villeneuve (Raymond) : Puis, dans le fond, ce qui est essentiel, c'est de rassurer les parents, les employeurs qui cotisent, les syndicats, les employés pour leur dire que l'argent qu'ils mettent, il va où il est... où il doit aller, tout simplement.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci. Merci d'être là pour nous parler. J'aime bien, moi, nous situer un peu à l'échelle internationale puis peut-être même à l'intérieur du... de la fédération canadienne, voir où on se trouve, où on se place avec le conseil de gestion indépendant, avec le RQAP. Est-ce qu'on fait les choses différemment? Est-ce qu'on s'inspire de ce qui s'est fait ailleurs? Peut-être nous dire un peu de quoi il s'agit, là.

• (18 h 20) •

M. Villeneuve (Raymond) : ...on est les meilleurs en Amérique du Nord. Au Canada, aux États-Unis, Mexique, on est vraiment les meilleurs, de loin. Au niveau mondial, comme je vous expliquais, quand on regarde le classement au niveau des pays de l'OCDE, on recule. Avant, il y avait les pays scandinaves, il y avait nous, puis là ce qu'on voit, c'est que la France a un congé à peu près similaire dans le cas du congé de paternité, notamment, de cinq semaines, l'Espagne est rendue comme à huit semaines, certains pays scandinaves, donc, ont encore plus de semaines. Donc, c'est comme si, dans le... on descend tranquillement dans le classement. Puis ça, c'est vraiment malheureux, à ce niveau-là.

M. Boissonneault : Mais, dans la gestion, dans notre façon de gérer notre régime, dans la façon de... dans cette indépendance-là qu'on s'assure d'avoir, dans l'expertise qu'on s'assure de transmettre, est-ce qu'on gère les choses ici de la même façon que dans les pays scandinaves, par exemple?

M. Villeneuve (Raymond) : Je ne sais pas si tu as une réponse.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...malheureusement pas en mesure de répondre à cette question-là.

M. Villeneuve (Raymond) : Mais onpourrait aller chercher la réponse et la transmettre... On connaît plusieurs chercheurs, chercheuses qui ont l'expertise, mais nous, on ne l'a pas, on est désolés.

M. Boissonneault : Vous avez dit que vous voulez maintenir, évidemment, le conseil de gestion. Si on l'abolit, vous recommandez la création d'une direction RQAP dédiée au sein de Retraite Québec. Qu'est-ce qu'on perd si on passe par cette option-là, si on abolit le conseil de gestion mais qu'on crée quand même une direction dédiée au sein de Retraite Québec?

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien, moi... je pense qu'on se met des bâtons dans les roues. C'est-à-dire que, là, on a une instance qui fonctionne bien. Donc, pourquoi aller vers un autre modèle? Où sont les gains réels? Moi, c'est la question que je me pose. C'est sûr que c'est possible de le faire quand même, mais est-ce que ça va être facile? La réponse, c'est : Probablement pas.

M. Boissonneault : Et le... la direction RQAP dont vous parlez serait essentiellement un conseil de gestion. Ça, on reviendrait à peu près au même.

Mme Vachon Croteau (Corinne) : Une petite équipe interne.

M. Boissonneault : OK.Avec à peu près le même résultat. Très bien. Merci beaucoup.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Donc, merci, Mme Vachon Croteau, M. Villeneuve. Je vous remercie pour la contribution du Réseau Québec Famille aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 22)

(Reprise à 18 h 24)

Le Président (M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à présenter les personnes qui vous accompagnent, puis à commencer votre exposé. Merci.

M. Daigle (Christian) :Merci, M. le Président. Donc, Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique du Québec. Je suis accompagné à ma droite de M. Isaïe Dubois Sénéchal, qui est conseiller à la recherche, ainsi qu'à ma gauche de M. Pierre-Alexandre Caron, conseiller politique au bureau de la présidence générale.

Mme la ministre, M. le Président, Mmes et MM. les députés, le SFPQ est un syndicat indépendant qui regroupe environ 43 000 membres répartis dans près de 40 accréditations, plus de 32 000 d'entre eux sont issus de la fonction publique québécoise, et les autres proviennent du secteur parapublic. La mission du SFPQ consiste à défendre les conditions de travail, les intérêts de ses membres. Le SFPQ défend aussi plus largement un projet de société axé sur la démocratie, la protection et la défense de l'environnement, le partage, l'équité, la solidarité et le progrès. Et c'est ce que nous aurions défendu aussi si nous avions été invités à la commission du projet de loi n° 3, mais nous avons été les seuls syndicats omis de cette commission.

Si nous ne nous opposons pas ici au projet de loi n° 7, plusieurs de ses dispositions ont de quoi inquiéter et devraient, à notre avis, être modifiées, voire retirées. Par ailleurs, il est apparent que... il est aberrant que le projet de loi puisse prétendre, jusque dans son titre, d'améliorer l'efficacité gouvernementale dans le contexte d'austérité actuel. En effet, en poursuivant une politique néolibérale de démantèlement, en persévérant dans les mises à pied de milliers de travailleuses et des travailleurs dans le gel d'embauche, la recentralisation technocratique de certains organismes, nous peinons à comprendre comment se justifie la prétention d'efficacité du gouvernement. Le contexte austéritaire colore toutes les dispositions du projet de loi, limite leurs effets positifs éventuels et risque même d'en amplifier les impacts négatifs.

Depuis près d'un an, le Québec traverse une crise des services publics et ils subissent une série de coupes d'une ampleur sans précédent. Dans les seules accréditations que nous représentons, ce sont plus de 2 000 personnes qui ont disparu en un an. C'est l'équivalent de 6,1 % de l'effectif de la fonction publique. Et pourtant, le gouvernement continue de justifier cette trajectoire en affirmant vouloir être... accroître l'efficacité de l'État. Mais l'efficacité ne peut émerger du vide. Et elle ne peut se construire sur la disparition du personnel, sur des centres d'appels saturés, sur des dossiers qui s'empilent à la CNESST, à l'IVAC, au MESS, faute de bras pour les traiter. Les coupes arrivent alors que le ratio dette PIB demeure sous le seuil des 45 % et que le poids du service de la dette sur le budget est à un creux record.

Le choix de l'austérité est donc politique. Cette austérité a des effets concrets et graves. Elle touche disproportionnellement les femmes. Elle s'attaque aux régions qui perdent pour certaines jusqu'à 11 % de leurs effectifs. Elle touche l'ensemble de la population qui voit les services se dégrader chaque jour. Elle touche aussi notre identité collective. Le Québec s'est construit autour de la force de ses services publics... la Révolution tranquille. S'en prendre à ces services de manière aussi désinvolte, c'est s'en prendre à l'idée même que nous nous faisons de notre identité. Les premières... Les premières recommandations de notre mémoire portent donc sur la nécessité pour le gouvernement de mettre fin à ces pratiques austéritaires actuelles.

Le projet de loi propose également une série de réorganisations structurelles, dont la fusion de l'INESSS et de l'INSPQ au sein d'un nouvel Institut québécois en santé et services sociaux, les prêts de personnel du Tribunal administratif du Québec au Tribunal administratif des marchés financiers ainsi que l'intégration de la fonction publique des Offices Québec-Monde pour la jeunesse. Pour ces cas, rappelons simplement que, sur le terrain, la fusion simultanée d'organisations sous pression comporte de réels risques de perte d'expertise, de dilution des missions et d'instabilité pour les équipes en place présentement.

Le projet de loi introduit aussi une transformation majeure du Régime québécois d'assurance parentale, la disparition du Conseil de gestion de l'assurance parentale est particulièrement préoccupante. Le CGAP constitue le cœur de l'expertise du régime. Une instance capable d'analyser les.

M. Daigle (Christian) :...de proposer des améliorations, de corriger les failles au fil du temps. Le supprimer revient à affaiblir un régime qui fonctionne et, qui plus est, sans faire d'économies réelles. Le financement du CGAP provient en effet du fonds d'assurance parentale.

La modification de l'article 115 de la Loi sur l'assurance parentale qui retire la possibilité d'utiliser les surplus pour améliorer les prestations ou réduire les cotisations soulève aussi des questions fondamentales. Pourquoi réduire ainsi les marges de manœuvre d'un régime financé par eux-mêmes? Nous invitons les parlementaires à rejeter les modifications que le projet de loi apporte au régime.

Le projet de loi se distingue également par l'abolition de la Commission de la fonction publique et le transfert de ses mandats, tantôt au Tribunal administratif du travail, tantôt au Conseil du trésor. Cette abolition suscite de vives inquiétudes pour nous. L'expérience nous démontre que les abolitions et les fusions de ce genre mènent trop souvent à une diminution des budgets. Si le projet de loi fait passer les activités de surveillance de la CFP au Tribunal administratif du travail, nous croyons comprendre que les activités de vérification pourraient être effectuées par le Conseil du trésor. Si c'est le cas, le potentiel de conflit d'intérêts devrait suffire pour convaincre de retirer les articles à cet effet.

Enfin, alors qu'on fête en 2025 les 60 ans d'existence de cette institution neutre et impartiale, l'abolition de la CFP nous semble être dangereuse dans la mesure où le niveau d'indépendance dont jouit la commission pourrait faire défaut. Nous recommandons donc, entre autres, que le projet de loi soit modifié de manière que la Commission de la fonction publique continue d'exister et conserve son mandat dans les activités de surveillance, d'enquête et de vérification.

• (18 h 30) •

Le projet de loi introduit une mesure positive : obliger le ministre des Finances à présenter un cadre financier pour la lutte aux changements climatiques, mais cette avancée est malheureusement éclipsée par plusieurs reculs significatifs.

D'abord, la possibilité de retirer les surplus du Fonds d'électrification et de lutte aux changements climatiques pour les rediriger vers le Fonds des générations ouvre une brèche dangereuse permettant au gouvernement d'en détourner les sommes destinées à l'action gouvernementale.

Ensuite, l'élimination du bilan annuel sur les... les mesures mises en œuvre pour la réduction des GES réduit l'imputabilité du ministre dans l'environnement alors même que le projet de loi prétend augmenter l'imputabilité.

Enfin, le passage du rapport de la Commissaire au développement durable d'un rythme annuel à un rythme quinquennal diminue considérablement la capacité de suivi des actions gouvernementales en la matière.

Ces reculs sont intolérables pour nous. C'est pourquoi nous recommandons le retrait des articles 141, 145 et 146.

Le projet de loi modifie également le régime d'autorisation de contracter en retirant l'obligation de renouvellement périodique. Si cela peut sembler être une simplification administrative, on risque d'affaiblir un mécanisme essentiel de vérification et de contrôle. Nous craignons en effet que le nouveau système d'autorisation de contracter soit adjoint d'une diminution des moyens donnés à l'Autorité des marchés publics. Si le renouvellement des autorisations peut représenter un irritant mineur pour quelques entreprises, ce processus est toutefois essentiel afin de mener adéquatement les vérifications qui s'imposent pour assurer la plus grande transparence possible dans l'attribution des contrats gouvernementaux.

Nous recommandons donc que la section portant sur le retrait de l'obligation de renouvellement de l'autorisation soit retirée du projet de loi.

Parallèlement, l'État continue d'augmenter sa dépendance à la sous-traitance avec certaines de ces entreprises qui coûtent de plus en plus cher. Si les dépenses de contrats de service représentaient 4.4 % du budget du gouvernement en 2018... 2019, elles atteignaient 7.4 % en 2023-2024. Cette trajectoire de la sous-traitance... Cette trajectoire fait de la sous-traitance un moteur d'inefficacité et de coûts supplémentaires, alors que le discours public prétend rechercher l'économie.

Avant de réformer les pratiques de l'Autorité des marchés publics, nous invitons la ministre à forcer ces ministères et organismes à diminuer la sous-traitance, particulièrement dans le contexte d'austérité actuel. Rappelons à cet effet que l'article 15 de la Loi sur la gestion et le contrôle des effectifs... qui stipule que nul ne peut aller en sous-traitance pour contourner des gels d'embauche. Actuellement, plusieurs ministères se défilent face à cette obligation et font augmenter la facture sur le budget du Québec tout en mettant des centaines d'occasionnels à la porte.

Le projet de loi propose enfin l'abolition ou la réduction d'un ensemble de rapports gouvernementaux. Même si certains ajustements peuvent moderniser la reddition de comptes, le retrait de rapports essentiels, notamment dans les domaines financier et réglementaire, diminue la capacité des parlementaires et du public à suivre l'évolution des lois, des programmes et de la gestion gouvernementale. La transparence n'est jamais un luxe, elle est la condition du bon fonctionnement de la démocratie. Tout comme pour votre collègue le ministre Boulet qui le dit avec le projet de loi trois envers les syndicats....


 
 

18 h 30 (version non révisée)

M. Daigle (Christian) :...pourquoi feriez-vous le contraire? Réduire la fréquence, la qualité ou l'obligation de ces rapports crée un angle mort dans la gouvernance de l'État. Nous émettons donc également dans notre mémoire des recommandations afin d'assurer que l'élimination des rapports ne soit pas le corollaire d'une diminution des capacités réactives du gouvernement.

En conclusion, plusieurs dispositions du projet de loi intensifient les dynamiques mises en place par l'austérité gouvernementale. À la lecture du projet, il est facile d'anticiper l'augmentation de la perte d'expertise, la diminution de l'imputabilité gouvernementale et un ensemble de reculs environnementaux. Le projet de loi mine également les capacités réflexives du gouvernement par l'abrogation de certains rapports, fait peser un danger sur les services publics aussi essentiels que le régime québécois d'assurance parentale et supprime un chien de garde comme la Commission de la fonction publique. Si nous ne recommandons pas le retrait total du projet de loi, nous invitons toutefois les parlementaires à faire un examen attentif des 18 recommandations transmises dans notre mémoire, celles-ci nous apparaissent essentielles afin d'éviter un recul supplémentaire. Merci de votre attention, nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, M. Daigle, nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, vous disposez de 16 minutes 30 secondes. Mme la ministre.

Mme Duranceau : Écoutez, merci pour vos commentaires. Oui, évidemment, on n'a pas des positions, je pense, qui sont similaires, mais ça va être intéressant de discuter. Puis, peut-être juste avant de commencer, je pense qu'on... on n'est pas en train de parler d'austérité, là, nous autres. Quand il y a une croissance des dépenses, pour nous, ce n'est pas de l'austérité, je voudrais juste préciser ça. L'autre chose, vous avez parlé de l'autorisation du renouvellement d'autorité de contracter, ça, ce qui était une autorisation qui était demandée aux cinq ans et là il y a une mise à jour annuelle qui est faite, alors les marchés publics au sein du secrétariat du Conseil du trésor nous disent : Bien, écoute, comme il y a une mise à jour annuelle, ça ne donne rien de redemander une autorisation aux cinq ans. Donc on vient réduire la bureaucratie de ce point de vue là. Puis, tu sais, de faire un lien entre la sous-traitance, puis l'autorité de contracter, je pense qu'il y a des raccourcis, là, qui se font à cet égard-là.

Mais, tu sais, à part de me dire, là, qu'on ne devrait pas toucher à rien là, parce que... j'aimerais ça vous entendre, est-ce que vous considérez que tout va parfaitement, qu'on est efficace comme on pourrait, tu sais, maximum d'efficacité qu'on peut avoir, que les services aux citoyens n'ont pas besoin d'être améliorés, que vos impôts, là, font tout le chemin qu'ils doivent faire? Parce que je vous écoute, puis, bien, je suis peut-être mieux de m'en aller chez nous, là, parce qu'il n'y a rien à faire, là. Ça fait que moi, j'aimerais ça vous entendre, ça ne se peut pas que vous ne voyez pas des pistes d'amélioration, là.

M. Daigle (Christian) :On a beaucoup de pistes d'amélioration, mais pour ça il faudrait qu'on maintienne les postes pour les personnes qui donnent du service à la population. Présentement...

Mme Duranceau : Ça, c'est ce qu'on a demandé, là.

M. Daigle (Christian) : ...il y a des coupures qui s'effectue à travers la CNESST, à travers l'IVAC, à travers les centres d'appels du gouvernement du Québec un peu partout dans les ministères. Et ça, ça met à mal les services publics, ça l'empêche les gens de pouvoir avoir accès à ces services-là, ça augmente les délais de traitement des dossiers. On est passé en dedans de huit mois, je pense, de 5000 dossiers de plus à l'IVAC en passant de 16 000 à 21 000 dossiers en attente. Les dossiers de la CNESST, c'est le même principe également, les délais augmentent aussi. Donc à travers les coupures qui s'effectuent présentement, il y a une augmentation des délais et de tout le traitement de ces dossiers-là qui s'effectuent, qui sont pour les citoyens et les citoyennes dans un premier lieu. Alors, effectivement, les services publics sont mis à mal présentement et, oui, il y aurait du travail à faire pour redorer le tout.

Mme Duranceau : Bien, écoutez, soyez assurés que nous, on a demandé à ce qu'il n'y a pas de coupures qui affectent les services aux citoyens, il y a le concept d'imputabilité aussi des hauts fonctionnaires et des dirigeants qui est important, ça fait que ça, c'est important que les décisions soient prises en respect de la directive gouvernementale, puis, surtout, en respect, de vouloir bien servir les citoyens. Mais au-delà de demander, d'ajouter des effectifs, ça, c'est la façon facile de régler les problèmes, hein? On rajoute du monde, puis ça va, ça va régler tous nos enjeux. Y a-tu des suggestions que vous pouvez nous faire pour améliorer l'efficacité de l'État dans les façons de travailler au niveau de la bureaucratie, l'intelligence artificielle, tout le monde nous parle de ça, c'est une façon d'être plus efficace, puis de produire plus rapidement des résultats. J'aimerais ça entendre votre perspective là-dessus.

M. Daigle (Christian) :Sur les différentes pistes de solutions qu'on pourrait apporter, ça nous ferait plaisir de vous en jaser, peut-être pas ici en commission parlementaire, mais nous avons envoyé, il y a quelques semaines déjà, une lettre afin de pouvoir vous rencontrer, puis on n'a pas eu d'accusé de réception ou de retour de cette lettre-là. Alors ça va nous faire plaisir de faire cette rencontre éventuellement, puis de vous vous amener des pistes de solutions. On pourra y travailler entre temps. Quant à...

Mme Duranceau : Bien, je veuxjuste préciser qu'on a...

Mme Duranceau : ...on a répondu, vous avez eu un accusé de réception, on me le confirme. Puis évidemment, on va vous rencontrer en temps et lieu, là, j'ai eu des semaines un peu compliquées, là, comme vous le savez, mais encore là, on jase, là, des pistes d'amélioration autres que d'augmenter, parce que ça, moi je l'ai... je... c'est la façon facile de régler le problème, c'est de dire : je rajoute du monde, mais ça ne veut pas dire que je revoie mes façons de faire, ça ne veut pas dire que je revoie le nombre de rapports, leur pertinence, leur fréquence. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Je veux dire, je suis sûre que vous avez des idées, vous êtes là depuis longtemps, plus que moi.

M. Daigle (Christian) :Ah, tout à fait, puis là-dessus, j'ai mon collègue, là, qui se démange de vouloir vous répondre. Je vais le laisser un petit peu, puis je reprendrai le dessus.

M. Dubois-Sénéchal (Isaïe-Nicolas) : Premièrement, en matière d'efficacité, on parle de sous-traitante, donc on parlait, depuis l'arrivée du présent gouvernement en 2018-2019, 4.4 % des dépenses budgétaires étaient de la sous-traitance en services, c'est rendu 7.4 %. Il y a un enjeu, actuellement, au niveau de l'application de la loi sur la gestion des effectifs, l'article 15, qui dit que lorsqu'il y a des mesures de contrôle de gestion des effectifs, les ministères et organismes ne peuvent aller en sous-contractant pour éluder ces mesures-là. Là, ce qu'on voit en ce moment, c'est qu'on n'est pas dans cette situation-là, je vous donne un exemple : en ce moment, au ministère de L'Emploi et de la Solidarité sociale, alors qu'on a perdu une quinzaine de personnes dans un centre d'appels à Québec dans la dernière année suite au non-renouvellement des contrats occasionnels suite au gel d'embauche, on a eu, et on a vu ça dans le SEAO, c'est sorti il n'y a pas longtemps, un contrat de 2 millions de dollars pour les appels que le MESS n'est pas en mesure de prendre, et le MESS prend de moins en moins d'appels en proportion. Donc en ce moment, si on veut faire de l'efficacité, mais peut-être ne pas couper ça pour aller, à la place, mettre encore plus d'argent dans les entreprises privées. Donc, il y a cet enjeu-là, de la sous-traitance, il y a cet enjeu là de l'effectif qui, réellement, ne donne... donne moins de services et on est obligés d'aller en sous-traitance pour le faire. C'est, par ailleurs, ce qu'on avait recommandé lors de la commission Gallant également. Également, dans le mémoire, on vous indique qu'il y a d'autres manières de sauver certains coûts. On propose, par exemple, la fermeture du Bureau du Québec en Israël, qui représente plusieurs coûts et qui va à l'encontre des valeurs qui sont défendues par le Québec à l'international, des valeurs de solidarité, des valeurs de droits, de respect des droits humains, des valeurs de non-collaboration avec des États génocidaires.

• (18 h 40) •

M. Daigle (Christian) :D'un autre côté, également, vous avez parlé d'intelligence artificielle. Nous n'aurions aucun problème à vouloir en discuter avec vous, mais dans un premier temps, il faudrait peut-être réglementer et encadrer l'utilisation de l'intelligence artificielle à travers les différents ministères et organismes, ce qui ne s'est pas encore fait au niveau du Québec. Nous avons réclamé depuis fort longtemps, depuis bien des années, d'avoir un encadrement afin de savoir comment on peut utiliser, comment on peut regarder à travers l'intelligence artificielle pour améliorer les choses. Mais ce n'est pas le cas encore aujourd'hui. Alors est ce qu'il y a des pistes d'amélioration? Peut-être à ce niveau-là, oui, effectivement, pour, justement, éviter d'avoir à faire des rapports sur des rapports, on n'a aucun problème de ce côté-là, mais ne pas diminuer les services à la population de la même manière, également.

Mme Duranceau : Je vais passer la parole à ma collègue.

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Bellechasse.

Mme Lachance : Merci, M. le Président. Merci beaucoup de votre présence. On sent que vous en avez long à dire. Vous avez mentionné quelque chose il y a quelques minutes, puis, évidemment, j'ai lu votre mémoire et c'est... il y a énormément de contenu. Par contre, je ne vois pas beaucoup de pistes de solutions, je vous ai entendu mentionner quelques exemples qui... qui me paraissent potentiels, mais peut-être pas si concrets que cela. Mais j'aurais aimé discuter avec vous parce que vous avez mentionné une donnée, le 6.1 % des effectifs diminués dans la dernière année. Est-ce que vous avez fait le compte, aussi, de la hausse des effectifs depuis 2018?

M. Daigle (Christian) :C'est que la hausse des effectifs ne nous touche pas, nous, au SFPQ, nous qui sommes pour donner des services à la population. Elle a été faite au niveau des cadres des... de la haute fonction publique, peut-être au niveau de certains postes de niveau professionnel également. Mais au niveau du SFPQ, nos données n'ont pas changé. Nous n'avons eu aucune augmentation du nombre... du nombre d'effectifs que nous avions. À ce moment-là, c'est des services à la population que nous rendons directement et ce n'est pas nous qui avons été touchés par ça, tandis que les coupures d'effectifs nous ont touchés directement dans un premier temps.

Mme Lachance : Si on parle de service à la population, vous avez mentionné, là, les centres d'appels et tout. Il y a des choses qu'on fait dans l'État, puis je pense que vous êtes bien placé pour le savoir, et qu'on fait de manière répétitive, année après année. On parlait, tout à l'heure, des rapports, entre autres choses, un allègement des rapports. Est-ce qu'il y a des mesures qui vous apparaissent plus porteuses que d'autres dans les tâches qui sont répétitives et qui pourraient, peut-être, générer de l'espace-temps pour les équipes qui travaillent dans les organisations?

M. Daigle (Christian) :Bien, il y a peut-être, effectivement, des tâches qui sont répétitives et à ce moment-là, il n'y a aucun problème si on veut les éliminer. Mais souvent, ces tâches-là, qui sont répétitives, sont à la demande des hauts fonctionnaires ou des hauts gestionnaires. Alors, si on veut regarder les tâches qui sont effectuées répétitivement, bien, il faudrait peut-être regarder sur les commandes qui sont passées par ces hauts fonctionnaires-là, ou ces hauts gestionnaires-là, qui sont normalement imputables de ces décisions-là, si on veut éliminer quelque chose ou gagner...

M. Daigle (Christian) :...du temps de travail. On pourrait regarder de ce côté-là aussi. Puis mon collègue va peut-être vouloir en ajouter un petit peu aussi.

M. Dubois-Sénéchal (Isaïe-Nicolas) : De manière très concrète, on parlait des centres d'appels tantôt, une majorité des centres d'appels au gouvernement du Québec en ce moment ont des objectifs de réponse, de... de finir un appel en trois minutes. Quand on a des enjeux complexes, par exemple au MESS, au RQAP, des fois, ça prend plus que trois minutes, mais les agents sont poussés par cette recherche de résultats là, pour s'assurer que leurs statistiques ne soient pas influencées négativement, sont poussés à raccrocher le plus vite possible et donc à donner le moins d'information possible, quitte à ce que le citoyen rappelle. Donc, en ce moment, on a un manque d'efficacité qui est associé à cette gestion par statistique là, qui est associée à ces directives-là qu'on voit dans la majorité des centres d'appels du Québec. Donc, ça, par exemple, ça nous permet d'avoir plus de temps, ça nous permet d'avoir un meilleur service et plus d'efficacité.

M. Daigle (Christian) :...ce type de rapport là est inutile, selon nous, parce qu'on doit donner un bon service à la population. Et d'avoir une personne assistée sociale qui répète quatre fois son histoire à quatre personnes différentes, on pense que oui, il y a une perte de... une perte de temps qui s'effectue dans ce temps-là.

Mme Lachance : Je m'excuse. Je veux revenir sur ce que vous venez de mentionner. Trois minutes, trois, quatre minutes par appel, un centre d'appels, travail à la chaîne, on doit en traiter énormément des appels en quantité.

M. Daigle (Christian) :...mais il y en reste encore énormément qui ne sont pas traités, parce que, souvent, suite aux changements qui ont été effectués au niveau du ministère Emploi et Solidarité sociale, ce qui est amené, c'est le fait que ce n'est plus un agent qui s'occupe du même dossier du début jusqu'à la fin, mais le dossier est chamboulé et est... rebondit d'un agent à l'autre. Donc, la personne qui doit appeler doit toujours recommencer son histoire et doit répéter la même histoire, alors que si on avait gardé le même principe que nous avions avant, c'est la même personne qui aurait répondu, qui aurait déjà connu le dossier, et nous aurions économisé temps et argent à ce moment-là en le faisant.

Mme Duranceau : je ne suis pas sûre que ce que vous décrivez opérationnellement, ça fonctionne, là.

M. Daigle (Christian) :Bien oui, ça fonctionnait avant comme ça. Je viens du MESS, du ministère, en plus, Emploi et Solidarité sociale, je suis agent d'aide socioéconomique, alors je commence à avoir une bonne connaissance un petit peu de... du fonctionnement au niveau du ministère. Et c'est certain qu'en ayant changé la... la méthode, la façon de travailler au niveau du ministère avec les agents d'aide socioéconomique, on a changé automatiquement le délai de traitement aussi des dossiers.

Mme Lachance : ...mais je n'entends pas... Sincèrement, là, je n'entends pas de... Je n'ai pas le sentiment que vous êtes favorables au changement.

M. Daigle (Christian) :Ah, on est tout à fait favorables au changement. Il n'y a aucun problème là-dessus. Le problème, c'est qu'en venant couper à travers les différents organismes on va économiser environ 35 millions, admettons 40 millions dans le maximum, alors qu'il y aurait beaucoup d'autres mesures qui seraient beaucoup plus porteuses de... d'économies pour l'État.

Mme Lachance : Quand on parle de fusion puis de réorganisation des organismes, il y a aussi des transversales qui vont se maximiser. Il y a une complémentarité entre les organismes. On n'a pas... ce n'est pas le fruit du hasard, là, qui est... qui est devant nous dans le projet de loi. Est-ce que vous êtes d'accord que la complémentarité puis le travail d'équipe, c'est important dans plusieurs des missions de l'État?

M. Daigle (Christian) :Ah, le travail d'équipe est toujours important, effectivement. Par contre, à travers les mesures qui sont là, qui... les coupures qui sont amenées également aussi, la possibilité de perte d'expertise qu'on a à travers les personnes qui ne seront pas renouvelées ou qui ne seront pas amenées à travers ces changements-là, bien, automatiquement, pour nous, il va y avoir des difficultés par la suite. Le travail d'équipe va être perturbé, c'est certain aussi, à ce niveau-là. Puis je peux laisser mon collègue continuer s'il le désire.

Mme Duranceau : ...qui normalement devrait vous intéresser. Il y a des mesures dans le projet de loi sur l'imputabilité de la haute fonction publique, donc... Puis l'imputabilité des... des gestionnaires, tout ça, est ce que c'est quelque chose qui vous intéresse ou tout est... tout est convenable?

M. Daigle (Christian) :On n'a tout à fait... on n'est pas contre l'imputabilité. Si nos gens sont imputables du travail qu'ils font, il est tout à fait normal que les hauts gestionnaires et que les directeurs soient également imputables des décisions qu'ils prennent et de la suite des décisions qu'ils... qu'ils mettent en place. Et si ça ne fonctionne pas, bien, à ce moment-là, qu'ils portent les conséquences également des choix qu'ils auront faits. Parce que, trop souvent, on a vu des hauts... des hauts fonctionnaires être tablettés ou seulement être changés d'endroit alors que des fautes étaient commises, et beaucoup plus graves que ce qui a coûté le poste à des gens que je représente. Alors, ça, sur l'imputabilité des hauts fonctionnaires, on n'a aucun problème de ce côté-là.

Mme Duranceau : Bon, merci de... C'est bon de l'entendre dire. Alors, bien, écoute, on est toujours un peu sur notre faim quant à des propositions d'amélioration de l'efficacité de l'État, peut-être que ça viendra dans des conversations en privé, mais je m'attends à ça, là, parce qu'à un moment donné d'être en vase clos puis de se dire : On ajoute des ressources, puis c'est ça, notre solution à l'efficacité à tout prix, je ne pense plus qu'on est là. On a... on a des objectifs de pérennité des services pour la population. Les besoins sont immenses. Il y a nécessité d'un retour à l'équilibre budgétaire en vertu de la loi. Ce n'est pas vrai que si on répète la même recette encore une fois, on va améliorer les résultats. Alors, il faut changer...

Mme Duranceau : ...nos façons de faire. On a plein d'opportunités de le faire, que ce soit avec les nouvelles technologies, que ce soit en se questionnant sur des... des pratiques qui ont cours depuis très longtemps, puis de dire : Je peux-tu faire les choses différemment? Moi, les gens que je côtoie, je vous dirais, au sein du Secrétariat du Conseil du trésor, là, sont très emballés du projet d'améliorer l'efficacité de l'État. Puis pour beaucoup se disent : Aïe! C'est... Ça fait longtemps qu'on aurait dû faire ça. Oui, des fois, ça passe par une réduction d'ETC, mais d'autres fois, ça passe par des réductions de rapports qui vont permettre de libérer du temps pour que les gens puissent travailler sur d'autres choses, où là les services aux citoyens vont être mis de l'avant. Alors, moi je suis dans cette perspective-là. Et je ne me lève pas le matin en disant : On coupe des ETC. Je me lève le matin en disant : Comment on est capables de faire mieux avec les ressources qu'on a? Alors...

M. Daigle (Christian) :Je suis content que vous précisiez cet aspect-là. Mais je tiens à vous préciser qu'on n'a jamais demandé d'ajouter des effectifs. Si maintenant on avait juste maintenu les effectifs sans les couper depuis ce qui se fait depuis un an, on n'aurait pas été à la même place. Si on avait pu libérer les listes d'attente qu'il y avait, il n'y aurait pas eu de problème de ce côté-là. Mais on n'a jamais demandé d'ajouter des effectifs par rapport à ce qui a été coupé... juste de maintenir ce qui a été coupé aurait été déjà une bonne amélioration.

Et, sur les pistes d'amélioration, ça nous fera plaisir de pouvoir vous en soumettre, surtout si, par la suite, vous nous dites que vous allez les étudier puis vous allez les considérer aussi, ce qui n'a pas été fait par vos prédécesseurs.

• (18 h 50) •

Mme Duranceau : ...les analyser, là, après ça, je vais voir ce que j'en pense. Mais ce que je veux vous dire aussi, c'est que je... Puis c'est correct, tu sais, vous me parlez de votre point de vue. Mais les Québécois, là, quand ils nous entendent parler, là, bien, ce qu'ils ont entendu, là, c'est qu'il y a une augmentation du nombre d'effectifs dans l'État. Ça fait que ce n'est peut-être pas dans votre syndicat, c'est peut-être dans les autres, mais à un moment donné, les Québécois, ce à quoi ils s'attendent, c'est que les services soient rendus, qu'ils soient... rendus efficacement, qu'il y ait une imputabilité puis qu'on livre. Alors, peu importe, c'est sous quel syndicat, ce qu'ils veulent, c'est que ça livre efficacement. Ça fait que ça, il faut garder ça en tête aussi, je pense, dans nos discussions.

M. Daigle (Christian) :Bien, effectivement. Puis on est tous des fonctionnaires, hein? Ça fait que le terme «fonctionnaire», malheureusement, est galvaudé. Et à cet effet-là, on serait contents aussi de pouvoir vous soumettre où ces fonctionnaires-là ont été embauchés, ces 15 000 personnes là de plus. Parce que nous, notre effectif n'a pas changé à travers le temps. Donc, ça, ça a un impact aussi sur les services à la population.

Et, quand on explique aux gens qu'avec les effectifs qu'on a, qu'ils n'ont pas changé, et où sont les problèmes dans les services publics, et là qu'on coupe de plus et qu'il y a moins de personnes pour répondre à leurs besoins, les Québécois ne sont pas plus contents d'entendre ces situations-là. Les gens veulent avoir des réponses à leurs questions, veulent pouvoir parler avec quelqu'un, pas juste à une machine. Et, à ce moment-là, ils s'attendent à avoir des services à la population aussi.

Le Président (M. Laframboise) : Merci beaucoup, Mme la ministre et l'équipe gouvernementale. Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys 10 minutes 24 secondes qu'il pourra partager avec sa collègue de Westmount-Saint-Louis.

M. Beauchemin : ...beaucoup, M. le Président. Bien, d'entrée de jeu, j'ai noté que vous... vous l'avez dit, puis c'est normal, là, vous ne représentez que vos membres, puis c'est correct. J'ai une question en ce qui a trait à leur perspective, en fait, dans le contexte de la fusion entre l'INESSS puis l'INSPQ : Vous avez des membres, donc, dans les deux organisations, ils voient ça comment, eux autres?

M. Daigle (Christian) :...dans un organisation, c'est l'INESSS. L'INSPQ n'est pas représenté par le SFPQ. Donc, c'est sûr que présentement, il y a une certaine, je ne dirais pas une... mais un certain flottement qui se fait. On ne sait pas trop à quoi s'attendre de cette fusion-là. On ne sait pas quelle sera la nouvelle entité, comment elle sera organisée, comment le... le mariage entre les deux organisations va s'effectuer. C'est pour ça que dans les recommandations, nous avons une recommandation aussi de nous amener à travers ce travail-là pour s'assurer que les conditions de travail soient respectées de part et d'autre, qu'il n'y ait pas une partie qui prenne le dessus sur l'autre partie également, et qu'on puisse amalgamer cette fusion-là ou ce mariage-là de la meilleure façon possible entre les organisations.

M. Beauchemin : Puis ça, vous le voyez comment? C'est comme... Vous n'avez pas été consultés, là, vous l'avez dit d'entrée de jeu tantôt, là. Comment vous... Comment voyez-vous pouvoir contribuer, là, au débat dans ce cas-là spécifiquement?

M. Daigle (Christian) :Bien, quand on en saura un petit peu plus sur la manière dont les... les organisations vont se regrouper à travers la nouvelle institut, bien, ça nous fera plaisir de pouvoir s'asseoir avec les parties et de pouvoir discuter justement de la mise en place, de s'assurer que les... que les conditions vont être là, comme on a fait dans le passé également. Lorsque les fonctionnaires de la ville de Montréal ont intégré la fonction publique... Parce qu'avant l'aide sociale de la ville de Montréal était gérée par la ville elle-même. Et, lorsqu'il y a eu une... lorsqu'ils ont cédé les fonctionnaires qui étaient des temporaires ou des occasionnels à l'État québécois, bien, on s'est assis avec le syndicat qui les représentait ainsi qu'avec le gouvernement pour voir à la meilleure transition possible, vu que nous accueillons ces nouvelles personnes là dans la fonction publique, et s'assurer que leurs conditions de travail comme leurs conditions... bien, leurs conditions de travail, mais pas juste convention collective, là, mais leurs conditions de travail au quotidien soient respectées à travers tout ça et qu'il n'y ait pas d'animosité ni d'un...

M. Daigle (Christian) :...ni d'une part ni de l'autre à travers cette arrivée-là de nouveaux fonctionnaires.

M. Beauchemin : OK. Puis, dans la fusion du RQAP, là, puis du RQ, c'est un petit peu le même genre de scénario, là, vous avez de vos membres, j'imagine, dans les deux côtés de ça?

M. Daigle (Christian) :Effectivement, on représente les gens au niveau du RQAP, entre autres.

M. Beauchemin : Bon. Comment qu'ils voient ça, eux autres, la fusion?

M. Daigle (Christian) :Bien, encore là, il y a beaucoup d'anxiété sur comment vont s'effectuer les choses et est-ce que ces fusions-là vont amener une réduction de services? De par le passé, c'est arrivé souvent qu'en fusionnant deux organisations, il y ait des coupures de budgets qui soient effectuées, et ce qui résulte également en des coupures de postes en bout de ligne. Si les coupures sont là pour uniquement couper qu'est-ce qui ce n'est pas essentiel, mais que le service à la population demeure et que les gens continuent d'être aussi nombreux à donner ce service-là, on n'est pas réfractaires à ça. Si, par contre, cette fusion-là amène une diminution des services à la population, c'est là qu'on va s'inscrire en faux. C'est là que nos membres ne voudront pas participer à ce travail-là de réduction du travail envers la population, du service à la population qui va être effectué à travers ça.

M. Beauchemin : OK. Vous avez entendu parler aujourd'hui de ce qui se passe avec les surplus, là, sur le Fonds vert, qui vont être redistribués, là, vers le Fonds des générations. Vous en pensez quoi, de ça, vous?

M. Daigle (Christian) :Là-dessus... Mon collègue en a parlé un petit peu avant. Je vais le laisser reprendre les mêmes propos.

M. Dubois-Sénéchal (Isaïe-Nicolas) : C'est une très mauvaise idée. De manière... de manière succincte, c'est une très mauvaise idée. C'est-à-dire qu'on a un enjeu, en ce moment, d'une action gouvernementale en matière environnementale. Là, on vient, dans ce projet de loi là, permettre justement de dérober ces sommes-là au Fonds d'électrification, de lutte aux changements climatiques pour le mettre vers le Fonds des générations, alors que c'est immédiatement qu'il faut agir en matière environnementale si on ne veut pas avoir une dette environnementale encore plus grande demain. Donc, de retirer cet argent-là pour le mettre peut-être pour plus tard, pour un enjeu de gestion de la dette alors qu'on a un enjeu de gestion de crise climatique, là, maintenant, qui est urgent, ça nous apparaît comme étant une très mauvaise idée.

M. Beauchemin : Puis, tout à l'heure, vous avez parlé que, bon... Bien, en fait, on a eu un échange, là, pour entendre vos propositions concrètes, là, pour faire en sorte qu'on puisse améliorer l'efficacité, là, de l'État. Vous avez abordé le sujet, là, de la sous-traitance. Je ne comprends pas, en fait, l'argumentaire comme quoi que la sous-traitance, ce n'est pas bon pour l'efficacité de l'État. Je voudrais juste... peut-être me le réexpliquer encore.

M. Daigle (Christian) :Bien, la sous-traitance, c'est les activités gouvernementales qui étaient faites par des employés de l'État qui ont été cédées à des sous-traitants par coupes d'effectifs, par manque de matériel, également, aussi. Alors, maintenant on paie plus cher pour du travail qui se faisait à l'interne pour moins cher. Donc, cette efficacité-là est perdue et cet argent-là est perdu, également, aussi. Si on prend minimalement le déneigement des routes, le déneigement des routes a été même repris par la ville de Québec à l'interne, plutôt que d'utiliser des sous-traitants. Ils ont économisé des dizaines de millions de dollars. L'État, la province devrait faire la même chose et reprendre à l'interne, et on économiserait des centaines de millions de dollars. C'est une des mesures.

Sur les autres mesures d'efficacité, nous avons fait l'an dernier les états généraux de la fonction publique, qui est un grand sommet que nous avons effectué nous-mêmes avec différents groupes, différentes organisations, pour voir justement comment est-ce qu'on pourrait transformer l'État, comment est-ce qu'on pourrait... redonner ses lettres de noblesse à l'État québécois. Et nous avons une multitude de recommandations. Nous avons sorti... nous allons sortir le livre blanc, justement, des états généraux, nous le ferons parvenir et dedans il y a une série de mesures qui pourraient être mises en place pour amener une plus grande efficacité de l'État.

M. Beauchemin : Combien de temps qu'il me reste, M. le Président?

Le Président (M. Laframboise) : ...4 min 25 s.

Des voix : ...

Le Président (M. Laframboise) : Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.

Mme Maccarone : Oui. Merci beaucoup. Avec très peu de temps, je veux parler de la Commission de la fonction publique. On sait qu'il y avait un rapport qui a été déposé dernièrement en lien avec le Conseil du trésor, dans lequel il y avait pas mal de critiques. Là, par la suite, on a vu une baisse d'ETC, on a vu une baisse de budget et maintenant on voit l'abolition du CFP. Votre lecture de ceci, puis c'est quoi le résultat de l'abolition de la Commission de la fonction publique?

M. Daigle (Christian) :Bien, nous, on voit d'un très mauvais oeil l'abolition de la Commission de la fonction publique. Je l'ai dit, d'ailleurs, dans mon introduction d'ouverture. On fête cette année les 60 ans de la commission, qui est un organisme qui est neutre, qui est impartial, qui est extérieur au gouvernement et qui, souvent, a à critiquer certaines décisions qui sont prises ou qui sont faites par le gouvernement. Alors, pour nous, on trouve essentiel que ce tribunal-là demeure ou que cette instance-là demeure externe au gouvernement du Québec, qu'elle ne soit pas fusionnée d'une manière ou d'une autre, ou qu'elle soit scindée et remise dans les mains du Conseil du trésor, en partie, et du Tribunal administratif du travail de l'autre côté.

Mme Maccarone : Ça fait que leur rôle est fondamental. Est-ce que c'est un mesure de représailles envers eux...

Mme Maccarone : ...nous sommes en train de parler de l'abolition.

M. Daigle (Christian) : Bien, ça, les gens qui ont amené ça pourraient le dire, ce n'est pas à moi de répondre à leur place, malheureusement.

Mme Maccarone : Puis, en ce qui concerne la perte du CFP, là, vous avez évoqué, dans votre mémoire, perte d'indépendance, compromet la neutralité, l'impartialité. Avec le temps qu'il nous reste, peut-être, vous pouvez juste nous élaborer là-dessus, les craintes que vous avez.

M. Daigle (Christian) :Bien, c'est d'être juge et jury, juge et partie à ce moment-là. C'est la difficulté qu'il va y avoir, par la suite, de pouvoir avoir une instance qui va être neutre et impartiale, alors que des personnes font appel à ça contre leur employeur. Donc, comment est-ce qu'on peut, comme employeur, après ça, donner un rapport neutre et se dire... avoir une neutralité certaine à travers tout ça? Donc, pour nous, c'est impensable d'avoir le Conseil du trésor qui va régir une partie des travaux qui était faite par la Commission de la fonction publique, sans avoir justement cette... cette ombre-là, justement, de partialité qui va s'effectuer dans les travaux à venir et dans les redditions de comptes qui étaient demandées à travers la Commission de la fonction publique sur les actions gouvernementales et les différentes décisions qui étaient prises.

• (19 heures) •

Mme Maccarone : Merci beaucoup.

M. Daigle (Christian) : Merci.

Le Président (M. Laframboise) : Ça va? Donc, merci beaucoup. Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Maintenant, je cède la parole au député de Laurier-Dorion pour 3 min 28 s.

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Bonjour, messieurs. Merci beaucoup d'être là. Écoutez, en commençant votre mémoire, vous faites mention d'une perte d'emploi, d'une diminution d'effectifs de 2000... 2000 postes, 2000 équivalents temps plein seulement dans votre syndicat... dans votre unité syndicale?

M. Dubois-Sénéchal (Isaïe-Nicolas) : Oui, en fait, la manière dont on calcule ça, parce qu'on n'a pas les équivalents temps plein de semaine en semaine, on comprend, c'est par les données de cotisation. Donc, c'est les données mêmes qui nous sont envoyées, là, par le gouvernement sur les données de cotisations. Ces données de cotisation là, en comparant la période de paie 2024-20, c'est-à-dire début octobre 2024, et 2025-20, c'est-à-dire début octobre 2025, on a une diminution d'à peu près 2 003 personnes qui ont cotisé à ces périodes-là, et on voit la diminution à chaque période de paie, depuis octobre 2024, qui va en diminution constante à ce moment-là.

Donc, 6,1 % de personnes en moins dans les gens qu'on représente, dans les accréditations fonction publique. Partout au Québec, de manière encore plus forte dans les régions, moins 11 % au Saguenay—Lac-Saint-Jean, en Abitibi, des diminutions monstrueuses également, au Centre-du-Québec également, donc partout.

M. Fontecilla : Et donc c'est du dégraissage accéléré, et est-ce qu'on améliore le service?

M. Daigle (Christian) : Bien, pas en coupant les postes sans changer la façon de faire. Si on veut améliorer la façon de faire pour être plus efficace, il faut, en premier, changer cette façon de faire là, résorber le retard qui avait été accumulé et, par la suite, cette nouvelle méthode là, qui serait mise en place, pourrait démontrer son efficacité et amener peut-être une réduction de postes sur certains emplois en les transformant en d'autres emplois où est-ce qu'il y aura des surplus de tâches à effectuer, où est-ce qu'il y a déjà du retard d'accumulé également aussi. On n'a aucun problème, si on améliore l'efficacité, à avoir moins de personnes sur un poste en particulier, puis à les mettre ailleurs pour justement résorber les autres retards qui peut s'effectuer ailleurs. Mais tant et aussi longtemps qu'on n'est pas capable de résorber, pourquoi couper immédiatement sans changer les façons de faire? C'est ce qui est présentement le cas dans les différents ministères et organismes.

M. Fontecilla : Vous avez mentionné que... en tout cas, dans le champ de l'aide sociale, il y avait... il y a une nouvelle méthode. Et est-ce que l'État a pris le soin d'appliquer... cette nouvelle méthode a été appliquée, d'évaluer l'efficacité de cette méthode-là, le temps d'appel, la satisfaction de l'usager, etc.

M. Daigle (Christian) : On n'a eu aucune étude qui nous a été mise devant nous, par rapport à ça, cette nouvelle méthode là qui a été utilisée ou qui est mise en place depuis quelques mois ou depuis la dernière année. Donc, il n'y a eu aucun... aucune évaluation à notre niveau, à notre connaissance, qui a été produite suite à ça. Ce qu'on sait, par contre, des agents que nous représentons, c'est que ça demande beaucoup plus de temps de travail pour les personnes qui sont en poste, parce que les personnes qui sont en poste n'ont pas la connaissance de chacun de leurs dossiers, doivent donc reprendre le dossier depuis le début, reposer les mêmes questions, fois après fois, pour avoir une information et pouvoir donner un suivi si ça n'a pas été fait ou si ça a été fait sur les personnes qui parlent.

M. Fontecilla : À la suite de cette diminution générale du personnel, est-ce que vous pensez que... Je crois comprendre qu'il y a, selon vous, il y a une détérioration du service. Quelle est l'opinion des gens de la population, en général, face à cette situation-là?

M. Daigle (Christian) : Bien, les gens sont découragés, c'est certain, lorsqu'on leur dit que la ligne coupe et qu'on n'est pas capable de leur répondre, lorsqu'ils n'ont même pas la possibilité de se faire entendre, lorsqu'on leur demande de rappeler une nouvelle fois, lorsqu'on leur dit que leur dossier est toujours sur la pile, ces gens-là sont découragés, c'est certain. Ces gens-là attendent d'avoir, mettons, on prend les gens de l'IVAC, l'indemnisation des victimes d'actes criminels, ces gens-là attendent d'avoir un suivi, des gens de la CNESST, les dossiers augmentent également aussi, le nombre de dossiers qu'ils ont à traiter augmente de mois en mois. Donc, c'est sûr qu'il y a un impact négatif sur la population.

M. Fontecilla : ...la légitimité de l'action de l'État?.

M. Daigle (Christian) : C'est sûr qu'au niveau de l'action de l'État, c'est de moins en...


 
 

19 h (version non révisée)

M. Daigle (Christian) :...moins intéressant pour les employés d'y travailler, mais il y en a pour la population de s'y référer parce que, à ce moment-là, il y a justement, je dirais, un vent négatif envers les... envers les services à la population qui sont donnés, vu que ça prend de plus en plus de temps à obtenir des réponses.

Le Président (M. Laframboise) : Merci. Merci beaucoup, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.

M. Boissonneault : Merci, M. le Président. Merci pour votre présentation. Je ne suis pas sûr de comprendre la logique. Vous dites : Il faut, il faut en finir, disons, avec les arrérages dans les tâches qu'on a présentement avant de changer notre façon de faire. C'est ça?

M. Daigle (Christian) :Bien, minimalement, il faut au moins, si on a une nouvelle façon de faire, il faut au moins rattraper le retard avec ces nouvelles façons de faire là qui vont être permises. Et ce n'est pas ce qui se passe présentement. Les coupures d'effectifs ne font qu'allonger les délais, ne font qu'allonger le temps de réponse nécessaire pour chacun des dossiers qui est demandé, donc on n'a pas la bonne méthode.

M. Boissonneault : C'est ça, donc on ne trouve pas la bonne méthode pour changer la façon de faire, mais ce n'est pas comme si on disait, par exemple, on construit des maisons, on n'arrive pas à combler la demande, donc on va attendre de combler la demande avant de changer notre façon de faire des maisons pour les faire plus rapidement, vous voyez ce que je veux dire?

M. Daigle (Christian) :Oui, bien, c'est sûr que si on peut changer la façon de faire, puis après ça que permet d'aller encore plus vite pour résorber le retard cumulé, il n'y a aucun problème de ce côté-là, mais il faudrait minimalement qu'on amène cette efficacité-là et qu'on la démontre à travers les travaux qui sont a effectués. Si on n'a pas cette nouvelle façon de faire là, ou si on n'a pas une connotation positive à travers l'efficacité qui est amenée, c'est qu'il n'y a rien qui a changé, si on ne fait juste que couper des postes, c'est sûr qu'en ne change rien qu'il n'y aura pas plus de réponses qui vont être données.

M. Boissonneault : Mais vous êtes d'accord que cette révision-là des pratiques, cette amélioration-là se fait en temps réel, là, au moment où on fait le travail aussi.

M. Daigle (Christian) :Elle peut se faire en temps réel, mais il faudrait mettre la collaboration des syndicats également là-dedans. Il faudrait qu'on puisse s'asseoir, ce sont nous qui donnons la prestation de service, il faudrait qu'on puisse avoir vent au chapitre qu'on puisse pouvoir faire valoir notre voix légalement là-dedans et qu'on puisse à ce moment-là apporter... parce qu'on en a des solutions à travers les membres que nous représentons, à travers les comités de relations de travail aussi, de pouvoir justement avoir voix au chapitre.

M. Boissonneault : Vous avez souligné la surcharge bureaucratique qui affecte vos membres aussi. J'aimerais ça peut-être vous entendre là-dessus, à savoir qu'est-ce que l'État pourrait faire de mieux pour faciliter la vie de vos membres, si on parle de fardeau administratif, fardeau bureaucratique parce que vous le subissez vous aussi, là?

M. Daigle (Christian) :Oui, juste avant de passer la parole à mon collègue, ce que je peux vous dire à ce niveau-là, d'avoir des redditions de comptes à donner sur plusieurs... d'avoir des... d'avoir des cibles à atteindre, ce n'est pas une bonne façon de donner un service à la population. Quand on travaille chez Mastercard, chez Visa, on peut donner le service différemment, quand on travaille à l'épicerie, on peut faire donner le service différemment, on est des clients. Là, on traite pour des citoyens, des citoyens qui ont des demandes, puis des besoins qui sont nécessaires, donc il faut qu'on puisse avoir cette latitude-là de le faire sans avoir à répondre à un questionnaire ou à répondre dans trois minutes, on en 2 minutes 30. Je vais laisser mon collègue poursuivre.

M. Dubois-Sénéchal (Isaïe-Nicolas) : Je reviens sur la question des trois minutes. Par exemple, au RQAP, en ce moment, s'il faut qu'on aille aux toilettes puis que ça dure plus de trois minutes, on a un code d'absence dans SAGIR. Ce qui veut dire qu'il y a toute une manipulation au niveau des ressources humaines qui fait en sorte qu'il y a des gens qui perdent 30 secondes par ci, 30 secondes par là chaque fois que quelqu'un fait ça parce qu'il y a un code d'absence, parce qu'on contrôle le travail à outrance. Et, bien entendu, il y a des... il y a des manières de réformer le travail dans la fonction publique pour assurer une meilleure efficacité, mais cette surveillance à outrance, par exemple, les manières de fonctionner qui font en sorte qu'on doit rappeler à plusieurs reprises parce que le travail a été morcelé par une espèce de taylorisation 2.0 dans les dossiers à l'aide sociale à la CNESST, ce genre de fonctionnement-là, c'est un fonctionnement dont on n'a pas de besoin, c'est un fonctionnement dont on pourrait simplement l'oublier, le mettre aux vidanges. Et ça pourrait nous permettre d'être beaucoup plus efficaces et de se recentrer sur le service à la population.

Le Président (M. Laframboise) : Merci, merci, MM. Daigle, Caron, Dubois-Sénéchal. Je vous remercie pour la contribution du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec aux travaux de notre commission. La Commission ajourne ses travaux à demain, après les avis touchant les travaux des commissions. Merci.

(Fin de la séance à 19 h 08)  


 
 

Document(s) related to the sitting