Journal des débats (Hansard) of the Committee on Public Finance
Version préliminaire
43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)
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Tuesday, November 25, 2025
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Vol. 48 N° 9
Special consultations and public hearings on Bill 7, An Act to reduce bureaucracy, increase state efficiency and reinforce the accountability of senior public servants
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9 h 30 (version non révisée)
(Neuf heures quarante-sept minutes)
Le Président (M. Laframboise) :
Bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des finances publiques ouverte. Je vous souhaite la bienvenue. Je demande à
toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de
leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin d'entreprendre
les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi
no 7, Loi visant à réduire la bureaucratie, à accroître l'efficacité de
l'État et à renforcer l'imputabilité des hauts fonctionnaires. Mme la
secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. Mme Mallette (Huntingdon) est remplacée par Mme Lachance
(Bellechasse); Mme Setlakwe (Mont-Royal—Outremont) est remplacée par Mme Maccarone
(Westmount—Saint-Louis); et Mme Zaga Mendez (Verdun) est remplacée par M. Fontecilla
(Laurier-Dorion).
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, Mme la secrétaire. Nous débuterons ce matin par les remarques
préliminaires, puis nous entendrons par la suite les organismes suivants :
Transplant Québec, Dr Frédérick D'Aragon en visioconférence et Héma-Québec. J'invite
maintenant la ministre responsable de l'Administration gouvernementale et de l'efficacité
de l'État à faire ses remarques préliminaires. Mme la ministre, vous disposez
de six minutes. La parole est à vous.
Mme Duranceau : Merci, M. le
Président. Alors, bonjour à tous les membres de la commission. Donc, le député
de Laurier-Dorion, un retour avec moi, évidemment députée de Westmount—Saint-Louis,
ça fait plaisir, député d'Arthabaska, qu'on attend sous peu, potentiellement le
député de Saint-Jérôme aussi, je crois. Alors, bref, nous voici réunis aujourd'hui
pour le début des consultations particulières, là... sur le projet de loi sept
qui vise à...
Mme Duranceau : ...à réduire
la bureaucratie, accroître l'efficacité de l'État et renforcer l'imputabilité
des hauts fonctionnaires. Alors, merci à tout le monde d'être là. Le projet de
loi n° 7, je l'ai mentionné, c'est le premier jalon, première étape d'un
grand chantier d'amélioration de l'efficacité de l'État. Puis on veut améliorer
l'efficacité de l'État pour... pour garantir la qualité des services aux
citoyens et l'accès aux services. Et puis ça, bien, ça va passer nécessairement
par la fusion, l'abolition de plusieurs organismes, par... l'élimination de
tâches et de reddition de comptes qui sont redondantes, la simplification de
l'organisation du travail, puis le renforcement de l'imputabilité des
titulaires d'emplois supérieurs. Alors, tel que proposé, le projet de loi
touche plus de 50 lois qui sont... qui sont en vigueur et qui devront être
modifiées. Alors, c'est assez... assez costaud comme projet de loi, certains
règlements qui se rattachent à ça aussi.
Alors, je suis certaine que mes collègues
des oppositions saisissent l'importance du chantier, puis j'espère qu'ils
pourront m'aider aussi à bonifier, puis, s'ils ont d'autres idées, on est
prêtes à les entendre. Puis, bien sûr, bien, on va être à l'écoute des
organismes et des associations qui sont... qui sont présents. Le but de tout
ça, je vous dis, c'est de maintenir les services aux citoyens, de rassurer les
citoyens qu'il n'y aura pas d'enjeu à cet égard là. Et... bien, je nous
souhaite des échanges constructifs dans le but d'améliorer les choses et puis
de rendre notre... notre État encore plus efficace au profit des citoyennes et
citoyens du Québec. Alors, voici, M. le Président, et j'en profite pour saluer
le député d'Arthabaska.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, Mme la ministre, évidemment, et également député de Bertrand. J'invite
maintenant le porte-parole de l'opposition officielle... représentant de
l'opposition officielle, excusez-moi, députée de Westmount—Saint-Louis à faire
ses remarques préliminaires pour une durée de 4 min 30 s. La
parole est à vous.
• (9 h 50) •
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Évidemment, oui, je suis ici en renfort de mon collègue, le député
de Marguerite-Bourgeoys, qui aurait voulu sincèrement est parmi nous
aujourd'hui, mais on sait que c'est aussi une grande journée en ce qui concerne
le budget pour les Québécois. Alors, il est occupé ailleurs. Cela étant dit, il
me fait vraiment plaisir d'être ici, parmi vous tous et toutes, ce matin. C'est
un projet de loi d'une grande importance, j'en suis... j'apprécie les
commentaires de la ministre en ce qui concerne l'ouverture pour des modifications,
parce que, si je pouvais faire un genre d'analogie quand je lis le projet de
loi, et j'ai vraiment hâte entendre les groupes, c'est comme un vaste chantier
de rénovation architecturale. Je le vois vraiment de cette manière, c'est
complexe, c'est multidimensionnel. Ça vise, oui, à moderniser, simplifier le
campus gouvernemental qui est vieillissant. Alors, je pense que les gens peut
être en accord en ce qui concerne la vision. Mais si l'objectif sincère, c'est
d'accroître l'efficacité, moins de bâtiments, des ressources partagées, je
pense qu'on a une responsabilité, comme élus, comme porte-parole, d'avoir une
grande écoute aux experts qui oeuvrent non seulement dans les domaines, mais
qui sont en train d'analyser puis voir cette transition, puis qui nous disent
de, peut être, nous devons faire fi des préoccupations. C'est un sujet très
sensible. Il y a beaucoup de critiques en ce qui concerne cette transformation,
entre autres, quand on perd des dons d'organes.
Alors, je suis vraiment hâte d'entendre le
premier groupe Transplant Québec, qui va nous partager leur expertise puis
leurs préoccupations. Mais je pense qu'on a vraiment, comme j'ai dit, une
responsabilité, comme élus, d'avoir une bonne écoute parce que c'est un projet
de loi perfectible, et l'opposition officielle sera ici pour occuper cet rôle. Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. J'invite maintenant le député
de Laurier... Laurier-Dorion à faire ses remarques préliminaires pour une durée
de 1 min 30 s. La parole est à vous.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bonjour, tout le monde. Bonjour, Mme la ministre. Je salue le
personnel de la commission ainsi que mes collègues députés. Donc, voilà, nous sommes
ici au tout début d'un projet de loi qui est très gros, un projet de loi
mammouth même, là, qui va réorganiser de façon substantielle plusieurs branches
très importantes de l'appareil étatique, là. Il y a, de toute évidence, ici une
volonté de centralisation du pouvoir politique et de diminution d'autonomie de
plusieurs organismes, même de... qui va procéder, dans certains cas, à
dénaturer la mission même de certains... certaines institutions de l'État,
et... dans le début, et nous en sommes là, de diminuer la bureaucratie,
favoriser la flexibilité pour...
M. Fontecilla : ...au problème
de... mais il y a des risques aussi, des risques que... le but avoué, c'est de
réaliser des économies, mais on va peut-être arriver à des économies de bouts de
chandelle, comme on dit, tout en diminuant la qualité de nos... des services
offerts par différentes institutions publiques. Je salue la volonté de la
ministre à entendre les possibles améliorations qu'on pourrait apporter à ce
projet de loi, et nous allons travailler dans ce sens. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Y a-t-il consentement pour permettre au
député d'Arthabaska de faire des remarques préliminaires d'une durée d'une
minute? Consentement, oui. Parfait. Donc, M. le député, la parole est à vous.
M. Boissonneault Merci beaucoup,
M. le Président. Je veux saluer mes estimés collègues, Mme la ministre. Je suis
très content d'être avec vous aujourd'hui. L'idée de rationaliser l'utilisation
des ressources de l'État, procéder à un allègement réglementaire, bien, on
pense que c'est une bonne idée, au Parti québécois. C'est une position qu'on
défend depuis longtemps, donc on est contents de pouvoir participer à cette
démarche-là qui permet d'en donner plus à nos concitoyens pour leur argent, en
donner plus aux contribuables. Donc, on est d'accord avec le principe.
On vous remercie d'ailleurs de permettre
des consultations, parce que ce sera important pour nous d'échanger avec les
différents groupes qui viendront ici, poser des questions. On a évidemment des
interrogations sur ce qui est présenté dans le projet de loi, dont on voudra
discuter, mais sur le principe, le Parti québécois est d'accord et l'a déjà...
a déjà discuté ou fait des propositions en ce sens-là. Donc, pour nous, c'est
important d'être ici. On vous remercie encore une fois pour cette possibilité
d'être... de procéder à des consultations, puis on va travailler le plus
diligemment possible à améliorer les ressources... l'utilisation des ressources
pour nos concitoyens.
Le Président (M. Laframboise) : ...M.
le député, nous allons maintenant débuter les auditions. Je souhaite donc la
bienvenue aux représentants de Transplant Québec. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
commencer votre exposé.
Mme Bouchard (Martine) :
Bonjour. Bonjour, M. le Président, Mme la ministre, mesdames, messieurs membres
de la commission, je suis accompagnée aujourd'hui du docteur Prosanto
Chaudhury, chirurgien transplanteur et responsable du volet transplantation
chez Transplant Québec, et du docteur Matthew Weiss, intensiviste pédiatrique
responsable du volet don d'organes chez Transplant Québec. Je les remercie de
leur présence. Je me présente, Martine Bouchard, PDG de Transplant Québec. Nous
sommes réunis pour examiner une disposition du projet de loi n° 7 qui
aurait des conséquences majeures sur un pilier essentiel de notre système de
santé, la coordination du don et de la transplantation au Québec. Cette mission
repose sur un ingrédient sans lequel rien n'est possible : la confiance
des familles, des donneurs, la confiance des receveurs et des équipes
médicales. Cette confiance est bâtie sur la transparence, sur l'équité et
l'indépendance des décisions. Transplant Québec incarne un modèle où
l'autonomie organisationnelle assure la neutralité morale, notamment dans l'attribution
des organes.
En effet, l'attribution des organes est un
acte éthique majeur qui exige impartialité, transparence et indépendance.
Actuellement, l'autonomie de Transplant Québec garantit l'intégrité du
processus et sa légitimité morale. Son intégration au sein d'une société d'État
pourrait miner ces éléments, et aucune justification éthique ou clinique ne
pourrait soutenir une telle dissolution. Depuis plus d'un demi-siècle,
Transplant Québec n'est pas seulement une structure administrative, c'est une
instance clinique spécialisée qui assure en temps réel la coordination du don
d'organes partout au Québec. Notre équipe d'urgence hautement spécialisée et
expérimentée, intervient au cœur d'un processus où chaque minute compte, où
chaque décision peut sauver ou coûter la vie. Transplant Québec accompagne les
familles endeuillées qui... transforme leur perte en espoir et soutient les
équipes médicales dans le réseau de la santé, et ce, partout au Québec.
Notre travail exige une précision absolue,
une autonomie opérationnelle et une expertise unique, développée au fil des
16 000 vies de Québécois et Québécoises sauvées depuis notre création.
Comme toute organisation qui porte plus de 50 ans d'expertise, Transplant
Québec a bâti ce qu'aucune structure ne peut recréer rapidement : une
mémoire institutionnelle profonde, une culture professionnelle solidifiée par
l'amélioration continue, des pratiques éprouvées, des réflexes opérationnels
affinés et une crédibilité qui est enracinée. Cette expertise, cette indépendance
ne peuvent être diluées ni transférées sans conséquences graves.
Certains avancent qu'une intégration de
Transplant Québec au sein d'Héma-Québec serait logique ou efficiente.
Malheureusement, cela témoigne d'une incompréhension profonde des différences
fondamentales entre nos deux organisations. Je veux le dire clairement :
Héma-Québec, c'est une institution qui est indispensable pour le Québec. Son
rôle dans la gestion du sang, du...
Mme Bouchard (Martine) : ...du
tissu des produits biologiques est vital, mais sa mission repose sur une
réalité logistique et industrielle. Collecte, traitement, conservation et
distribution. Transplant Québec, lui, relève d'une mission qui est entièrement
différente. L'urgence clinique. Notre mission repose sur une réalité qui est
ancrée dans l'humain et qui se constitue et se construit à mesure selon chaque
situation. Et c'est là qu'on ne peut pas confondre le tout. On ne gère pas une
transplantation comme on gère un inventaire. Je vais juste prendre deux minutes,
je vais le répéter. On ne gère pas une transplantation comme on gère un
inventaire. Un organe, ce n'est pas un produit qui peut être entreposé. Un
organe, c'est un tissu qui est vivant, dont la survie se compte en minutes. Un
cœur doit être transplanté en moins de 4 h, un foie en moins de 12 h, les
poumons et les reins ont eux aussi des délais qui sont critiques, impossibles à
étirer. Le moindre retard peut coûter une vie.
À l'inverse, plusieurs produits
biologiques gérés par Héma-Québec peuvent être conservés des jours, des
semaines, voire davantage, parce que leur nature le permet. Ce n'est pas une
question de compétence, c'est une question de biologie fondamentale. Assimiler
la transplantation à une chaîne d'approvisionnement, c'est confondre une urgence
vitale avec une gestion d'inventaire. Ce n'est pas la même temporalité. Ce
n'est pas la même finalité et ce n'est surtout pas la même expertise. Une
structure fusionnée plus lourde, moins agile, ne pourrait pas répondre aux
impératifs cliniques de la transplantation. Ce n'est pas un jugement, c'est un
fait. Les données sont sans appel. 70 % des fusions échouent. Les
recherches du CIRANO montrent que dans 70 % des fusions institutionnelles,
les coûts de transition dépassent largement les économies anticipées.
• (10 heures) •
Dans leur ouvrage The Mergers and
Acquisitions Failure Trap: Why Most Mergers and Acquisitions Fail and How the
Few Succeed publié en novembre 2024, les professeurs Lev et Gu révèlent que de
70 à 75 % de toutes les acquisitions échouent à atteindre leur objectif.
Cette conclusion repose sur une étude exhaustive de 40 000 transactions
réalisées sur quatre décennies. Les causes de ces échecs sont connues. Dilution
des missions, perte d'expertise, résistance des équipes, baisse de performance,
affaiblissement de la confiance du public. Ces ingrédients nous semblent
malheureusement réunis dans ce contexte-ci pour Transplant Québec.
M. le Président, vous avez aujourd'hui
l'occasion de faire ce que les meilleures gouvernances savent faire.
Reconnaître à la lumière des dizaines de milliers d'exemples documentés que
certaines réformes ne produisent pas les effets espérés lorsqu'elles touchent
des missions aussi sensibles que celles de sauver des vies humaines. En
choisissant de préserver l'indépendance de Transplant Québec, vous enverrez un
signal fort, celui d'un État qui privilégie la rigueur, l'efficacité clinique
et la confiance du public. Et si on a besoin de regarder les meilleures
pratiques internationales, alors, elles sont claires. On ne peut plus claires.
Le pays leader mondial du don d'organes, l'Espagne, n'a jamais fusionné sa
coordination de transplantation avec son système de sang. Elle a fait un choix
stratégique, une organisation indépendante, dédiée, spécialisée. C'est grâce à
cette indépendance qu'elle est devenue la référence mondiale. Si nous voulons
que le Québec soit à la hauteur des standards internationaux, nous devons
suivre cette voie. Préserver Transplant Québec dans son rôle unique et
indépendant.
À la lumière des éléments soulevés ici,
des questions fondamentales s'imposent. Comment justifier une dissolution qui
fragilise la confiance des familles et des patients, alors que cette confiance
est le socle même du système? Comment concilier une mission clinique et éthique
où chaque minute peut sauver ou coûter une vie avec une mission industrielle et
logistique où le facteur temps n'a pas la même portée vitale? Quelle
consultation a été menée auprès des experts, des cliniciens, des familles de
donneurs et des patients en attente de transplantation, et pourquoi n'ont-ils
pas été placés au cœur de cette décision? Dans un dossier où les conséquences
se mesurent en vies humaines, le silence face à ces questions ne peut être
accepté.
En terminant, M. le Président, je vous
répète, puisque cela est crucial, la coordination du don d'organes, ce n'est
pas une gestion d'inventaire, c'est une chaîne de solidarité humaine, une
promesse de vie qui transcende les chiffres et les structures. Toucher à
l'indépendance de Transplant Québec, c'est toucher à la confiance des donneurs,
la confiance des receveurs et de leurs familles, la confiance des
professionnels de l'écosystème et, ultimement, la survie des patients. Je vous
demande, donc, de poser trois gestes nécessaires pour assurer la pérennité de
la chaîne de vie. En premier lieu, retirer du projet de loi toutes dispositions
visant la dissolution de Transplant Québec. Deuxièmement, le maintien de
l'autonomie clinique et organisationnelle de Transplant Québec. Troisièmement,
l'adoption d'une loi dédiée au don et à la transplantation d'organes, tel que
recommandé unanimement...
10 h (version non révisée)
Mme Bouchard (Martine) : ...les
membres de la commission en octobre 2024. Ces gestes ne sont pas simples de
choix techniques. Ils sont un engagement envers les patients qui attendent une
seconde chance, envers les familles qui acceptent de donner et envers la
société qui croit que sauver une vie est la plus noble des missions.
Ne réduisons pas le don d'organes à une
logique de gestion, préservons-le comme il est, une chaîne de solidarité
humaine, un acte de confiance et d'amour qui transcende les chiffres et les
structures.
Préservons Transplant Québec, préservons
la confiance, préservons la vie. Je vous remercie.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, Mme Bouchard.
Nous allons maintenant commencer la
période d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, la parole est à vous
pour 16 minutes 30 secondes.
Mme Duranceau : Merci, M. le
Président. Merci, Mme Bouchard.
En fait... l'objectif ici, là, ce n'est
absolument pas de toucher à l'expertise, puis ce n'est absolument pas non plus
l'objectif de toucher au financement qui a trait au don d'organes. Tu sais, ça,
on s'entend tous, là, il faut préserver ça. Ça fait qu'il n'a jamais été
question de ça dans le... le projet de loi. Je tiens à dire qu'aujourd'hui on
est là pour discuter, là. Alors, c'est pour ça que c'est aujourd'hui qu'elles
ont lieu, les... les conversations.
Puis, peut-être d'entrée de jeu, je suis
très sensible à tout ça. J'ai des... des gens autour de moi, proches de... de
ma famille, qui... qui comprennent tout à fait le fonctionnement, tout ça, puis
qui m'ont sensibilisée aux circonstances particulières du... de la
transplantation, là, des... des organes. Mais j'ai une question pour vous.
Parce qu'au niveau... au Canada puis à... à l'international, c'est souvent
le... les tissus puis le... le don d'organes, là, c'est souvent la même entité
qui s'occupe de ça. Alors, pourquoi, là, ici, au Québec, on est absolument
différents, puis que ce n'est pas possible que et les tissus humains et les
organes soient gérés, d'un point de vue administratif seulement, là, par la
même entité?
Mme Bouchard (Martine) : ...un
piton? OK. Merci. Très bonne question. Alors, je vais... je vais débuter puis
je vais laisser mes deux collègues, qui ont participé, dans le fond, avec
Canadian Blood Service, Service de sang canadien, puis qui pourront vous
expliquer davantage.
Effectivement, il y a beaucoup d'organisations
où le sang et... pas le «sang», où les tissus et les organes sont ensemble.
Puis c'est un contexte vraiment particulier pour lequel il y a des décisions
qui avaient été prises beaucoup avant mon arrivée, que je ne peux pas
expliquer, où le... le transfert des tissus a été fait vers Héma-Québec. Dans
le fond, ça, on... on ne remet pas ça en question. Ce qu'on remet en question,
c'est qu'on soit sous le... le chapeau d'Héma-Québec, donc du sang. Et c'est là
où est la nuance majeure. Parce qu'il y a... il y a vraiment un endroit au
monde seulement qui est comme ça, alors on se questionne sur cette
possibilité-là.
Puis là je... j'aimerais passer la parole
à... à Prosanto... à docteur... pardon, Dr Chaudhury et Dr Weiss, qui vont vous
expliquer exactement les nuances à l'international, mais également au Canada,
parce que je pense qu'il y a confusion dans le modèle, où antérieurement, on nous
a... on a entendu que c'était tout ensemble, or ce n'est pas le cas.
M. Chaudhury (Prosanto) : Donc,
pour peut-être... pour commencer, si on regarde le niveau national, Canadian
Blood Services, la Société de sang... de... canadien du sang, oui, ils ont un
rôle dans la coordination de tissus, de sang et de coordination d'échange d'organes,
mais c'est leur seul rôle. Ils ne prodiguent aucun service clinique. Dans
chacun des... des provinces, les... les organismes de don sont séparés
complètement. C'est des organismes indépendants qui gèrent les donneurs et qui
gèrent les listes d'attente. Ce que fait CBS à ce niveau-là. Et Matt et moi,
nous sommes parties de... de leur commission... leur comité de gestion et qui
transitionne vers une nouvelle modèle sur laquelle Mme Bouchard et moi nous
siégeons au niveau fédéral. Et c'est... c'est une gestion de... de politique d'échange,
d'implantation de politique d'échange, de réseau de... d'échange de... de reins
pour des patients hautement sensibilisés, des échanges en cas d'urgence pour
les foies, les cœurs, les poumons. Mais c'est au niveau de gestion d'échange
vraiment que s'implique le... et au développement de... de politiques qui
gouvernent ces échanges. Et, encore une fois, Dr Weiss et moi et Dr D'Aragon,
qui vous allez entendre tantôt, ont participé à plusieurs de ces entreprises.
Si on regarde où les organes...
M. Chaudhury (Prosanto) : ...et
les tissus sont mis ensemble, c'est au niveau de la coordination du
prélèvement. Ce n'est pas le «banking» ou quoi que ce soit, ce qui devient
une... de production, d'inventaire. Mais, pour la coordination du prélèvement,
oui, il y a certaines zones où il y a une complémentarité entre les deux.
Mme Duranceau : ...au niveau
du prélèvement puis de la complémentarité? Tu sais, après ça, comment c'est
conservé, ça, c'est une chose, mais est-ce que cette... est-ce que cette
collaboration-là, elle existe en ce moment, de manière naturelle, entre les
tissus puis les organes?
M. Chaudhury (Prosanto) : Bien,
comme Mme Bouchard vient de vous exposer, il y a une énorme différence
dans la portée et la façon que sont prodigués les prélèvements d'organes et de
tissus. Les tissus peuvent être... les cadavres qui font le don de tissus
peuvent être préservés. Les prélèvements sont centralisés, les prélèvements se
font de jour, pas en milieu de nuit et pas dans tous les coins du Québec.
Tandis que nous, en tant que préleveurs, on sera partout au Québec, à n'importe
quel hôpital, à n'importe quelle heure de la nuit, à Amqui, n'importe où, en
Gaspésie, au nord du Québec. Là où est le donneur, Transplant Québec est là,
est là. Et quand le donneur est disponible, Transplant Québec est là. Peut-être,
Dr Weiss peut renchérir là-dessus.
• (10 h 10) •
M. Weiss (Matthew) : Oui.
Donc, merci, Prosanto. Merci à la commission. Les collaborations qui existent
déjà, c'est que, quand on a un donneur qui est potentiellement un donneur
d'organes et tissus, bien, c'est déjà Transplant Québec qui fait la première
ronde d'approche pour discuter des possibilités de dons de tissus. Donc, ça,
c'est déjà une collaboration qu'on fait avec Transplant Québec, et on fait ça
exactement comme Dr Chaudhury a dit. L'équipe de Héma-Québec n'est pas dispo
dans les hôpitaux les jours non ouvrables. C'est notre expertise d'être là, au
chevet, à n'importe quel moment, à n'importe quel hôpital, mais qui est comme
une grande différence de culture et qui serait un facteur de risque dans la
fusion des deux organismes. Parce qu'avec raison, Héma-Québec, la majorité
vaste de le budget et de leur énergie administrative va être focussée sur le
sang. Le sang, là, c'est critique pour le système de santé, et ça, c'est leur
mission primordiale.
Notre crainte majeure, c'est que nos
inquiétudes, notre réalité, qui est vraiment différente qu'une collecte de sang
qui se fait à Place Laurier, à 3 heures de l'après-midi un mercredi, ce
n'est pas notre réalité. Notre réalité, c'est avec un donneur, un receveur, au
chevet, dans les moments hautement émotifs, et ça prend des ressources,
l'expertise et une administration pour soutenir ça, qui est complètement
différent de la mission primaire de Héma-Québec, qui est le geste de collecte
et de distribution du sang.
Mme Duranceau : Mais sur
l'aspect purement administratif de la chose, là... Parce que moi, l'expertise
clinique, là, on ne touche pas à ça, là, on ne touche pas à ça, c'est préservé.
Puis absolument pas, en tout cas, mon intention de me mêler de cet aspect-là,
là, parce qu'il y a des gens qui connaissent ça puis qui s'en occupent. Mais
les ressources administratives, Transplant Québec, là, c'est 16 millions
par année qui est financé 100 % par le gouvernement du Québec. C'est pour
ça qu'on se pose la question, parce qu'il faut regarder nos structures puis
voir : Bon, bien, est-ce qu'il y a un bien-fondé à avoir ça de manière
distincte, à avoir un conseil d'administration distinct, à avoir une équipe
administrative distincte, avoir des services informatiques distincts. Est-ce
que... est-ce qu'on bénéficierait collectivement, là, du regroupement sur le
plan administratif? Je ne parle pas de l'aspect médical de la chose, là. Ça
fait que ça, expliquez-moi.
Mme Bouchard (Martine) : Alors,
d'abord, on est un organisme privé, OBNL, avec...
Mme Duranceau : Financé à
100 % par le gouvernement du Québec.
Mme Bouchard (Martine) : Comme
beaucoup d'OBNL, tout à fait.
Mme Duranceau : Voilà.
Mme Bouchard (Martine) : On
n'est pas dans la fonction publique et 90 % de notre budget est dévolu à l'activité
clinique. Il y a quatre directeurs seulement, pas de VP, quatre directeurs. On
est accompagné par deux directeurs médicaux qui le font à temps partiel. Donc,
l'économie potentielle, si on cherche une économie, elle est...
Mme Bouchard (Martine) :
...vraiment minuscule. C'est un salaire de directeur d'OBNL, pas un salaire...
un salaire de VP de santé de société d'État. Et dans toutes les figures de
scénario, quand on fusionne les organisations, forcément, vous parlez tantôt de
la notion clinique, mais on ne peut pas avoir juste la notion clinique
administrée par des gens qui ne connaissent pas les dédales de l'ensemble de
transplantations et tout l'écosystème de don et de transplantation. Donc,
forcément, il va y avoir aussi des coûts cachés.
Mme Duranceau : Mais... je
m'excuse de vous interrompre, avez-vous parlé avec Héma-Québec pour, comme,
échanger sur ça puis voir d'un point de vue pratico-pratique, ça marche-tu ou
ça ne marche pas.
Mme Bouchard (Martine) :
Qu'est-ce qui... Excusez, je n'ai pas...
Mme Duranceau : Est-ce que
vous avez parlé avec Héma-Québec, avec la PDG d'Héma-Québec pour dire :
OK, ils nous parlent de ça, là, est-ce que c'est réaliste comme proposition ou
sur le plan administratif, on... ça... on n'est pas capable de se parler?
Est-ce que vous avez eu cette conversation-là?
Mme Bouchard (Martine) : Oui.
On a d'abord eu une rencontre le mardi soir par le sous-ministre qui nous a
annoncé que le projet de loi serait déposé le lendemain. Et mercredi soir, donc
le lendemain, j'ai eu une rencontre téléphonique avec Nathalie Fagnan qui m'a
dit : Martine, on va accueillir tout le monde. Et alors là, je lui ai
dit : Si le but de la loi sept est de diminuer la bureaucratie et de faire
en sorte qu'on ait des économies, où seront-elles? Je ne le vois pas. Si le but
est de créer le chaos, puis faire en sorte que les gens soient très incertains,
que les infirmières à l'intérieur de l'organisation, l'ensemble de l'écosystème
le soient, c'est réussi, dans un premier temps.
Dans un deuxième temps, on a réuni le
conseil d'administration mercredi, également, mercredi matin. Et le but,
c'était de dire : on va se porter en faux contre ce projet de loi 7
là, pour plusieurs raisons, notamment que j'ai exposées dans mon... dans mon
allocution, et on verra par la suite. Mais vous comprenez qu'à ce moment-ci, de
planifier une transition ou de voir qu'est-ce que ça peut avoir l'air, c'est
légèrement prématuré.
Mme Duranceau : Bien, je
comprends. Tu sais, votre position est très claire. Là, vous êtes contre. Mais
il n'y a eu aucun effort de discussion avec Héma-Québec pour voir si c'était
quelque chose de réaliste, là.
Mme Bouchard (Martine) : Il y
a eu une discussion et on s'est dit...
Mme Duranceau : Jour un, puis
on ne s'est pas parlé, alors que madame... que la PDG d'Héma-Québec a
dit : Écoute, nous, on ne touche pas à rien, on vous accueille au complet.
C'est au niveau purement administratif qu'éventuellement il y aura des
changements, là. C'est une entité de 500... 500 employés versus 70 chez vous.
Comme... je ne sais pas, tu sais, il me semble, ça vaut une discussion pour se
dire : écoute, on est-tu capable d'être plus efficaces ensemble ou
vraiment ça ne fonctionnera pas?
Mme Bouchard (Martine) : Oui,
d'abord...
Mme Duranceau : Parce que
c'est sûr, tuer ça dans l'oeuf dès le début, c'est correct, là, le statu quo,
on... c'est toujours plus facile. Mais la question, elle se pose. Puis encore
une fois, je répète, l'aspect clinique, on ne touche pas à ça, là, mais c'est
l'aspect administratif que je... que je challenge. Puis pas tant... les
économies, je comprends, là, ce n'est pas... c'est l'efficacité globale de tout
ça, là.
Mme Bouchard (Martine) : Bien,
moi j'ai toujours eu comme principe... vous savez, là, je suis à bientôt
40 ans de carrière, je suis à ma sixième réforme en termes de santé. Je ne
critique pas les réformes, je n'ai jamais eu... j'ai des opinions divergentes.
Dans ce cas-ci, je crains sincèrement qu'il va y avoir des bris de service.
Parce que même si vous dites : tout le clinique va être transféré, il y a
des infirmières qui forcément ont dit : Si on aurait voulu travailler pour
Héma-Québec, on y aurait été. Il y a une question de mission qui est différente.
Il y a une question de valeur qui est différente. Et nous, ce qu'on dit,
c'est : il faut absolument que les gens soient saisis de ça. Je reviens
toujours au fait qu'on est un OBNL qui fonctionne. On n'est pas déficitaires,
on est performants. Oui, on n'est pas parfait, mais on est performant. Alors,
on se questionne sur les raisons du pourquoi. On n'est pas une société d'État.
Si on n'était pas performant, on était déficitaire et puis qu'on avait un taux
d'encadrement vraiment supérieur, je vous dirais : Bien, peut-être, mais
là, on a quatre directeurs, dont deux directeurs médicaux qui nous accompagnent
à temps partiel. Je vois difficilement comment une fusion administrative peut
se faire sans heurt. C'est ma préoccupation majeure.
Mme Duranceau : Puis bon, on
est là pour discuter, puis c'est dans un projet de loi. Maintenant, le projet
de loi, il n'est pas adopté. Mais s'il devait être adopté dans ses... dans sa
forme actuelle, est-ce qu'on pourrait compter sur Transplant Québec pour que
tout ça se fasse... qu'il y a une transition douce, puis qu'il y a des
conversations avec Héma-Québec, puis qu'on s'assure que le service aux citoyens
soit maintenu?
Mme Bouchard (Martine) : Bien,
d'abord, on a toujours dit que le service, c'était notre priorité à la clientèle.
Puis le but, ce n'était pas de faire peur du tout citoyen. Le but, c'est
vraiment de dire : Écoutez, comment on va... comment on peut réagir à... à
cette notion de projet de loi sept là. Ça fait que c'est clair qu'on ne se...
Mme Bouchard (Martine) : ...pas
contre la population, là. Le but, c'est de maintenir un service qui soit
adéquat. Ce que nous disons, c'est : Ne brisons pas ce qui fonctionne, et
Transplant Québec fonctionne. C'est une organisation qui est agile. De
l'installer à l'intérieur d'une société d'État où les couches de bureaucratie
sont lourdes, on voit difficilement comment on va pouvoir maintenir notre
agilité et faire en sorte que les décisions soient prises au quart de tour, 24
h sur 24, sept jours sur sept.
Mme Duranceau : Puis,
justement, donc, tu sais, quels devraient être les garde-fous, si c'est là
qu'on allait, pour que ça fonctionne, tu sais, sur la... sur le maintien de
l'agilité, entre autres?
Mme Bouchard (Martine) : Bien,
les garde-fous primaires, ça serait de dire : On ne touche pas à
Transplant Québec. Écoutez, ça, c'est ce que je vous dirais.
Mme Duranceau : Plan A.
Mme Bouchard (Martine) : On
maintient l'agilité, on regarde s'il y a des synergies possibles. Puis, je vous
le dis, là, j'ai regardé, là, on a discuté beaucoup avec des possibilités de
synergies.
Je vous lance un exemple. Au niveau de la
communication puis des plans de... des plans de sensibilisation auprès de la
population, si on regarde ce qui est fait à NHS puis si on regarde ce qui est
fait ailleurs, c'est très difficile concrètement d'avoir une campagne de
sensibilisation pour la population du Québec en disant : C'est le temps
d'avoir un prélèvement sanguin, et oh! «by the way», soyez un don d'organes. Ça
ne fonctionne juste pas parce que les missions sont carrément différentes, et
on ne peut pas avoir une synergie à cet égard.
Je pense, Matt veut rajouter quelque
chose.
M. Weiss (Matthew) : Oui.
C'est... Quand on parle d'efficience, c'est sûr que, si on est... on fait
partie d'un organisme qui est focussé principalement sur du sang, mais nous
trois, on va être engagés d'aller dans les réunions d'Héma-Québec... de
direction d'Héma-Québec, où on écoute pendant 50 minutes de l'heure, là, où ils
parlent du sang, et nous, on est là pour le dernier, comme, cinq, 10
minutes : Oh! d'ailleurs, là, il y a des petites choses pour le don
d'organes, mais... Donc, ce n'est pas une utilisation de notre temps et
expertise qui serait efficiente. Actuellement, quand on a une réunion à
Transplant Québec, on est focussés directement sur des enjeux qui nous
touchent. D'être absorbés dans une autre organisation qui... dans laquelle je
n'ai pas d'expertise, je n'ai rien à ajouter à ces réunions qui touchent la
collecte et distribution de sang, ni cliniquement, ni médicalement, ni dans la
recherche, ça n'ajoute pas grand-chose.
• (10 h 20) •
Le Président (M. Laframboise) : ...beaucoup.
Merci, Mme la ministre. Maintenant, je cède la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis
pour 10 minutes 24 secondes.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Merci à vous trois pour votre témoignage, pour votre mémoire et
aussi pour la passion dont vous partagez ici avec les membres de la commission.
J'irai un petit peu plus loin dans les
échanges que vous venez d'avoir. J'aurais trouvé ça curieux que vous aurez déjà
une discussion avec Héma-Québec, étant donné qu'il n'y a rien qui est ancré,
qui est présentement fait. Puis j'apprécie aussi votre évaluation de la
situation, d'essayer même de trouver des synergies, parce que vous comprendrez
que nous serons face à un déficit assez important, historique pour la province.
J'ai l'impression qu'on est comme sur le même chemin que le projet de loi n° 2,
quand on pense à ce type de fusion, parce qu'on va avoir un désengagement, on
le sent, puis on sait que ce que vous apportez, c'est une expertise importante.
Quand vous parlez de ce que vous faites, j'aurais été plus loin. 55 ans
d'expertise, une reconnaissance nationale, internationale, tout ça pour 16
millions de dollars d'économie, qui est 0,0103 %. Je pense que vous
l'avez déjà soulevé. On avait 7 millions de dollars pour les LA Kings. On
avait 710 millions de dollars pour Northvolt. On sait qu'on va avoir 1
milliard, peut-être, pour SAAQclic. Quelle est votre opinion par rapport à
cette transition? 16 millions de dollars. Est-ce que nous allons sauver
des vies avec cette fusion?
Mme Bouchard (Martine) : Merci.
Voulez-vous débuter, messieurs?
Mme Maccarone : Bien, vous
trois, vous pouvez répondre. Je sais que c'est une question large, mais...
Mme Bouchard (Martine) : Bien,
peut-être que je débuterais. Dans le fond, votre question est pertinente.
Effectivement, c'est... ça peut paraître beaucoup, 16 millions, puis c'est
beaucoup, mais, compte tenu de ce que j'avais dit antérieurement, ça représente
une infime portion. On parle de sauver des vies ici. Puis c'est là où est
l'impact puis c'est pourquoi on se lève... on se soulève si fort que ça, en
disant : Écoutez, est-ce que vous réalisez que l'impact de cette
économie-là va sûrement coûter des vies tantôt pour nos Québécois et
Québécoises? Ça représente 550 transplantations annuellement. Et donc, au fil
du temps, je l'ai dit dans mon allocution, c'est autour de 16 000 personnes,
Québécois et Québécoises, qui ont été sauvées. Il ne faut pas négliger non plus
ce que ça représente en termes financiers, d'avoir sauvé des gens, de leur
avoir donné une deuxième vie. Ils contribuent à la société québécoise
davantage. Puis il faut aussi faire référence à, si on donne un exemple... puis
on en a parlé dans le mémoire, l'INESSS avait fait un rapport...
Mme Bouchard (Martine) : ...2013,
et donc en 2013... Vous comprenez que les coûts ont augmenté depuis ce
temps-là. Ce qu'on parle, c'est les coûts d'une dialyse, versus les coûts d'une
transplantation. C'est non négligeable. On parle de plusieurs millions de
dollars qui pourraient être sauvés. Donc, à la limite, quelques
transplantations viennent effacer l'ensemble de l'économie qui est prévue.
Donc, pour nous, c'est hyperpertinent, c'est hyperpertinent de continuer.
On a... Si on se compare avec l'ensemble
de la planète, c'est des organisations qui sont hyperperformantes. Je l'ai dit
au début, on a toujours de l'amélioration, on est en amélioration continue et
puis on cherche toujours à s'améliorer, mais il faut convenir que 90 % du
budget d'une organisation qui est dédié à l'ensemble de l'activité clinique, où
on a un 10 %... puis ce 10 % là, c'est des frais administratifs, bien,
c'est des frais administratifs qui pourraient... qui devraient aussi,
également, être transférés. Quand on parle des fusions d'organisations ou
fusions d'établissements, c'est clair qu'il y a toujours des frais qui sont
cachés, qu'on ne peut pas évaluer à prime abord. Alors, pour nous, ça demeure
superimportant. Puis je passerais peut-être la parole à Dr
M. Chaudhury (Prosanto) : Oui,
bien, juste pour continuer là-dessus, comme Mme Bouchard vient de
mentionner, la greffe rénale, c'est un des rares aspects de notre système de
santé qui sauve de l'argent. Chaque greffe sauve des centaines de milliers de
dollars à partir de la deuxième année après la greffe rénale. Donc, on génère
des économies en faisant plus de transplantations.
Mme Maccarone : Intéressant.
M. Chaudhury (Prosanto) :
C'est important à considérer. Il y a aussi... Si je peux juste retourner sur
l'idée de la combinaison du sang et de la transplantation. Au niveau fédéral,
la gestion du... de la transplantation et du don relevait du provincial Blood
Liaison Committee, jusqu'à cette année, où un comité spécial a été créé au
niveau du Conseil des ministres... députés en Santé pour veiller à le système
de transplantation et de don. Donc, au Canada et mondialement, on sort la
transplantation des groupes de sang et on le met tout seul pour, justement,
bonifier.
Mme Maccarone : Est-ce que
vous, ou peut-être les familles avec qui vous travaillez... est-ce que vous
avez été consultés avant le dépôt de ce projet de loi?
M. Chaudhury (Prosanto) : À
ma connaissance, il n'y a eu aucune consultation avec... ni Transplant Québec
ni nos familles de donneurs.
Mme Maccarone : Bien, il n'y
avait aucune discussion avant le dépôt du projet de loi, pour une telle fusion
qui... On voit, la salle est pleine, on a énormément de revues de presse
là-dessus, ce n'est pas une discussion qui est nouveau, mais aucune
consultation pour quelque chose qui va avoir tellement un impact majeur sur le
coût de la vie? Parce que, là, on est en train de parler d'un coût
d'efficacité, mais, sincèrement, ce que nous sommes vraiment en train d'en
débattre, c'est combien vaut une vie.
Mme Bouchard (Martine) : Tout
à fait, puis j'irais plus loin que ça. En fait, c'est... les signaux étaient complètement
contraires. On a eu une commission parlementaire en janvier 2024. Les
recommandations de la commission parlementaire sont sorties au mois d'octobre
2024, qui, somme toute, avaient repris la quasi-totalité des recommandations
dans notre mémoire, à l'époque, puis qui, justement, incitaient vers une
organisation responsable, donc Transplant Québec, pour être responsable du don
d'organes. On a travaillé pendant... depuis octobre 2024, à déposer un document
qui retrouvait l'ensemble des éléments incontournables qui devraient se
retrouver dans une loi du don d'organes, parce que c'est l'information qu'on
avait, il y a une loi qui a été écrite cet été, qui confirmait justement que
Transplant Québec serait l'organisation responsable du don d'organes.
Et donc vous comprendrez la surprise
lorsqu'on a eu l'appel du sous-ministre nous disant que c'était une autre loi,
qui faisait fi, dans le fond, du travail des parlementaires, où l'ensemble des
députés, également, de la CAQ étaient assis et étaient en accord. C'est ce qui
est important ici, c'est que c'était une recommandation parlementaire
transpartisane. Donc, tous partis confondus étaient d'accord pour soulever les
éléments lors de cette commission parlementaire là. Donc, votre point est bon.
Une grande surprise pour nous, et non, aucune consultation.
Mme Maccarone : Puis
j'aimerais peut-être... Il me reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Laframboise) : 3 min 32 s.
Mme Maccarone : OK, trois
minutes. Moi, ce que... j'aimerais que vous nous renseigniez un peu quand vous
parlez de la neutralité des décisions. Je pense que c'est important que les
gens comprennent qu'est-ce que ça veut dire, c'est quoi, l'impact parce que
c'est gros quand on dit neutralité. Ça fait que, pour le commun des mortels qui
nous écoutent, c'est quoi? Qu'est-ce que ça veut dire?
Mme Bouchard (Martine) : Je
vais laisser Matthew parler.
M. Weiss (Matthew) : Oui.
Ici, là, on parle des décisions cliniques ou des décisions administratives, là,
parce que c'est quand même deux choses. Je vais vous parler de comme... un côté
administratif, là, c'est... parce que je veux parler d'innovation. C'est sûr
que je suis content d'être ici avec vous, la commission, ça me donne l'occasion
de mettre mon habit, là, j'ai rarement cette occasion-là, mais ce que
j'aimerais mieux faire...
M. Weiss (Matthew) : ...faire
c'est parler avec Dr Chaudhury sur le... des nouveaux programmes, de comment
améliorer notre système, notre capacité de faire d'autres types de dons
d'organes, d'offrir même plus de dons d'organes et de transplantation. Mais le
temps consacré à cette commission où la fusion, où la dissolution de Transplamt
Québec possible, c'est le temps où je vais être dans la réunion de savoir
comment changer les logos sur nos politiques et procédures au lieu d'être dans
des... cliniques qui touchent la vie de nos patients. Et ça... et notre
demande, notre développement va être noyé dans les besoins légitimes
d'Héma-Québec, un organisme qui va être comme des ordres de magnitude plus gros
que nous. Donc, ça, c'est une neutralité de décisions cliniques de... mais
aussi... mais je vais laisser Dr Chaudhury parler de peut-être des autres
neutralités de...
Mme Maccarone : Mais j'aurais
peut-être juste une autre question, parce que je sais que le temps file, puis
ce que j'aimerais que vous répondiez, pour moi, c'est l'inverse de la question
de la ministre. Si jamais vos amendements ne sont pas adoptés, ou bien, si on a
de la chance puis c'est le cas, est-ce que vous vous engagez de travailler avec
le gouvernement pour continuer à trouver des synergies puis être plus
performants, innovateurs? Parce que c'est ça qu'on souhaite, c'est de
l'efficacité, ça fait qu'au lieu de dire est-ce que je vais m'engager à prêter
main forte, mais est-ce que vous vous engagez à faire ce qu'il y a de
nécessaire?
• (10 h 30) •
M. Weiss (Matthew) : Moi, je
peux parler personnellement, je peux parler pour mes collègues aussi, là. C'est
sûr qu'on prend tous les aspects de don d'organes et transplantation très au
cœur. On ne va pas arrêter, on va faire de notre mieux pour nos patients, pour
le système de santé, dans toutes les circonstances.
Mme Maccarone : C'est très
clair. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Je cède maintenant la
parole au député de Laurier-Dorion pour 3 minutes 28 secondes.
M. Fontecilla : ...M. le
Président, ce que j'ai compris des propos de la ministre, là, qu'il ne s'agit
nullement, nullement de toucher à l'expertise, mais c'est surtout
administratif, du côté administratif et informatique. Et vous avez fait mention
d'une commission parlementaire qui suit un forum international qui allait dans
le même sens, c'est-à-dire conserver l'expertise dans un seul... dans une
entité dédiée. Et est-ce que vous pensez que les bienfaits supposés de cette
réforme-là, cette fusion-là, et va affecter et sérieusement la capacité à faire
des transplants, ici, au Québec? Ou va dénaturer votre mission?
Mme Bouchard (Martine) : C'est
clair qu'on a parlé à plusieurs personnes, je vous dirais, tant au Canada qu'à
l'étranger. Et beaucoup nous ont dit justement, en termes de garde-fou, oui, ça
va dénaturer la mission. C'est clair qu'une OBNL qui s'insère à l'intérieur
d'une société d'État, par définition, dénature sa mission. Dans une société
d'État qui a un focus qui est complètement différent, ça dénature la mission.
La notion aussi de perte d'expertise, je comprends qu'on dit que l'ensemble des
gens vont être transférés, mais il n'y a pas personne qui va forcer les
infirmières à aller travailler chez Héma-Québec, là. Vous savez, les
infirmières, puis je prends juste les infirmières, là, c'est des infirmières
qui... ce n'est pas des novices, là, c'est des infirmières qui arrivent de
soins intensifs d'urgence, pour laquelle la période d'orientation chez
Transplant Québec varie entre 6 à 12 mois. Parce qu'il y a toutes sortes de
conditions pour lesquelles elles doivent être formées dans un contexte où elles
doivent discuter régulièrement avec des transplanteurs, s'assurer que
l'organisation du bloc opératoire est au rendez-vous, programmer l'ensemble des
transplantations. Eux, ils valent cher sur le marché. Et eux, peuvent décider
où elles vont aller travailler, ou où ils iront travailler. Et donc, le choix
n'est pas... tu sais, c'est facile de dire : On va transférer l'ensemble
de l'expertise. Mais il n'y a pas une garantie que ces infirmières-là vont
vouloir transférer. Il y a ça aussi. Donc, comment on fait pour maintenir cette
expertise-là? Puis comment on s'assure justement qu'il n'y a pas de bris de
service? Et c'est notre... ça a été beaucoup notre dialogue. Comment on
s'assure qu'il n'y aura pas de bris de service, puis qu'ultimement les gens...
il n'y aura pas de gens qui vont décéder.
M. Fontecilla : Dans votre
mémoire, vous avez fait état d'une seul cas où il y a eu fusion de la fonction
inventaire des stocks sanguins avec la fonction et transplant... Qu'est-ce que
vous retirez de cette fusion-là?
Mme Bouchard (Martine) : Dans
le fond, je vous dirais qu'en termes de chiffres, parce que si on regarde la
performance de l'organisation, il y a eu une certaine augmentation, mais parce
que l'organisation initiale n'était pas comme la nôtre, c'est-à-dire qu'il n'y
avait pas des infirmières qui étaient dédiées à l'organisation, sont aller
chercher des infirmières à l'intérieur des différents centres hospitaliers.
Même chose par rapport aux médecins coordonnateurs. Et donc, ils ont eu une
légère augmentation en termes de nombre de donneurs par milliers de population.
Mais ils n'ont pas dépassé l'Espagne qui, elle, est dans une organisation
singulière, autonome, indépendante. Et donc, ça, c'est la première des choses.
La deuxième, c'est qu'ils ont été confondus dans une mission...
10 h 30 (version non révisée)
Mme Bouchard (Martine) : ...plus
large qu'eux. Et on dit haut et fort : Écoutez, il y a... il y a cette
notion de confusion à l'intérieur de la mission. Et comme Dr Weiss suggéré
tantôt, c'est qu'ils sont assis à des réunions où on parle essentiellement du sang,
parce qu'on comprend que le sang est hyper important puis on n'a pas de sang
dans les hôpitaux, ça ne fonctionne pas. Sauf que quand la majorité des
discussions autour de la table du comité exécutif se concentre sur le sang, bien
là, il faut regarder a contrario qu'est-ce que ça a comme un impact au niveau des...
des gestionnaires par rapport à la transplantation.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup. Nous allons maintenant céder la parole au député d'Arthabaska pour 2 min
38 s.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Pour faire du pouce un peu sur ce que mon collègue disait, de
quelle façon et pourquoi des infirmières, par exemple, de Transplant Québec,
refuseraient de passer à Héma-Québec? Qu'est-ce qui serait si différent qu'ils ne
pourraient pas travailler pour l'autre organisation?
Mme Bouchard (Martine) : Je vous
dirais essentiellement, d'abord, c'est la mission. Deuxièmement, c'est la
notion d'aller travailler dans une organisation qui n'a pas du tout les mêmes
fonctions que Transplant Québec. Héma-Québec, bon, il y a la notion de
prélèvement sanguin. Il y a une notion de travail à la chaîne. Il y a une
notion où le jugement clinique est très peu exploité. Dans un contexte où on
parle de transplantations d'organes, il y a un jugement clinique élevé. C'est
des infirmières qui sont formées, qui sont recherchées, qui valent, comme je
disais tantôt, cher sur le marché, qui accompagnent les familles dans les pires
moments de leur vie mais aussi dans les meilleurs moments de leur vie où ils
retrouvent une seconde chance. Et donc toute la notion de... de jugement
clinique, de portée de famille, d'accompagnement de la famille, mais aussi de
challenge, de discuter avec les différents chirurgiens transmetteurs et l'organisation
au quart de tour 24 heures sur 24, sept jours sur sept contribue, selon
moi, à cette différence majeure.
M. Boissonneault : J'aimerais
ça vous entendre sur des exemples concrets, parce que ce que vous dites est
quand même grave, vous dites que vous craignez la perte de vie humaine si on
fait ce... ce transfert-là, même si on espère maintenir l'expertise. De quelle
façon... Puis vous parlez beaucoup de la différence entre la gestion d'un
inventaire puis la transplantation. De quelle façon, concrètement, sur le
terrain, les choses seront à ce point différentes qu'il pourrait y avoir des
gens qui meurent à la suite d'un... d'un changement d'organisation comme ça?
M. Weiss (Matthew) : Ça, je
peux répondre. Mais, premièrement, l'expertise chez Héma-Québec de faire comme
la collecte de sang, les infirmières mais qui font ça, c'est important, mais,
encore là, ce n'est pas du tout la même chose que d'être envoyé dans un
hôpital, de parler avec une famille en deuil pour en avoir perdu leur proche, on
ne peut pas parler de possibilité de don d'organes. Et si on n'a pas le
personnel pour envoyer quelqu'un dans cette situation de crise avec l'expertise
appropriée, mais on perdre potentiellement ce donneur-là, et les organes ne
sont pas greffés chez quelqu'un en attente. Donc, et on sait tous que le taux
de mortalité sur la liste d'attente, ça varie par organe, mais c'est très
important. Et, chaque jour, sur la liste d'attente, c'est une autre journée où
le risque de mortalité augmente.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
M. Boissonneault : Il ne me
reste plus de temps?
Le Président (M. Laframboise) :
10 secondes.
M. Boissonneault : Ça va
aller. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, Mme Bouchard, M.Chaudhury
et M. Weiss. Je vous remercie de la... pour la contribution de Transplant
Québec aux travaux de notre commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 10 h 37)
(Reprise à 10 h 39)
Le Président (M. Laframboise) : Je
souhaite maintenant la bienvenue au Docteur D'Aragon. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter et à commencer votre exposé.
M. D'Aragon (Frédérick) : Parfait.
Bonjour. Bien, tout d'abord, merci, M. le Président. Vous me permettrez de
commencer en remerciant mes collègues qui ont gentiment accepté de me couvrir,
là, temporairement ce matin afin que je sois... afin que je puisse être avec
vous. Merci aussi à la commission pour cette invitation.
Je me présente. Je suis Frédérick
d'Aragon, je suis intensiviste et anesthésiologiste ainsi que médecin
coordonnateur en don d'organes et tissus au CIUSSS de l'Estrie... CHUS. Je suis
un professeur à l'Université de Sherbrooke et clinicien chercheur du Fonds de
recherche du Québec en santé.
En 2023, j'ai eu le privilège d'être nommé
titulaire de la Chaire de recherche Justin Lefebvre sur le don d'organes de
l'Université de Sherbrooke. Il s'agit de la première chaire au Canada qui est
dédiée sur l'amélioration de... des pratiques cliniques en matière de... de don
d'organes. Je me permettrais de dire qu'elle est chez nous, cette chaire-là, au
Québec. Voilà.
Pendant ma formation, j'ai eu
l'opportunité de compléter une maîtrise en don d'organes et de prélèvements
ainsi qu'un certificat en transplantation de l'Université de Barcelone en
Espagne. Ces formations m'ont permis d'observer les différentes pratiques
entourant le don d'organes dans ce pays reconnu pour ses pratiques exemplaires
dans ce domaine.
Aujourd'hui, je souhaite partager mon
opinion de clinicien à l'égard du projet de loi sept et de son impact sur le
don d'organes et de tissus au Québec. Pour y arriver, permettez-moi de prendre
quelques minutes pour vous décrire les différentes étapes du processus de don
d'organes et de tissus.
Tout d'abord, l'objectif principal du don
d'organes est de sauver la vie des patients souffrant d'une insuffisance
organique terminale grâce à la transplantation d'un foie, coeur, poumon, rein
ou pancréas. Ainsi, un seul donneur d'organes peut sauver jusqu'à huit vies.
Le processus débute par l'identification
d'un patient pouvant devenir un donneur potentiel. L'identification repose sur
des critères bien précis tels qu'une atteinte neurologique sévère, un patient
sous respirateur artificiel et pour lequel nous envisageons des soins de fin de
vie. La quasi-totalité de ces patients sont hospitalisés aux soins intensifs.
Le donneur potentiel est par la suite
référé à Transplant Québec. La référence permet de vérifier l'inscription du
patient au registre et de valider la présence d'une contre-indication absolue
au don d'organes. Une fois la référence acceptée, l'équipe traitante, en
collaboration avec le personnel de Transplant Québec, approche la famille du
donneur afin d'obtenir un consentement au don. D'ailleurs, cette approche
multidisciplinaire est associée à un meilleur taux de consentement.
L'étape de l'évaluation et de la prise en
charge du donneur débute suite à l'obtention du consentement. Pendant cette
étape, une série d'examens paracliniques, donc des tests sanguins, imageries,
biopsies seront réalisés après... afin d'évaluer les qualités... les qualités
du donneur.
Après l'obtention des résultats de
l'ensemble des tests, l'étape d'attribution des organes au programme de
transplantation débute. Chaque organe doit être attribué en suivant une
procédure bien spécifique.
Une fois la... l'attribution terminée,
c'est l'étape du prélèvement qui commence. Une salle d'opération est réservée
et le déplacement des chirurgiens préleveurs est organisé. Immédiatement à la
fin du prélèvement, les organes sont... transportés vers les centres
hospitaliers où les receveurs sont hospitalisés.
Le transport des organes est une étape
cruciale du processus. En effet, l'absence d'apport sanguin cause des dommages
aux organes. En transplantation, nous appelons cette étape l'ischémie froide.
Elle débute au moment du prélèvement et se termine lors de la reperfusion de
l'organe dans le corps du receveur. La durée d'ischémie froide acceptable pour
un... varie : tout au plus 6 h pour un coeur à environ 14 h pour un rein.
L'ensemble de... du processus de don
d'organes que je viens de vous décrire se fait environ sur trois jours et est
souvent fait en heures défavorables. C'est au personnel de Transplant Québec
que revient le rôle de coordonner chacune des étapes de cette chaîne. À ce rôle
de coordination s'ajoute celui de soutien auprès des familles. La littérature a
d'ailleurs démontré que leur présence réduit...
M. D'Aragon (Frédérick) : ...les
conséquences psychologiques tels le deuil compliqué, dépression, choc
post-traumatique des familles de nos donneurs.
De plus... Par ailleurs, l'objectif du don
de tissu, quant à lui, est d'améliorer la qualité des patients via une greffe
de tissu oculaire, cutanée, cardiaque ou musculo-squelettique. Le processus
débute au moment du décès du patient. Ce décès peut survenir dans un centre
d'hébergement, hôpital, maison de soins palliatifs ou maisons funéraires. Au
moment du décès, un professionnel de la santé communique avec Héma-Québec
suivant l'identification et la référence du donneur, du personnel dédié
d'Héma-Québec communique avec un membre de la famille du défunt et obtient une
copie du dossier médical afin d'évaluer l'éligibilité du patient au don de
tissu. Le consentement au don est par la suite obtenu par un coordonnateur
d'Héma-Québec dans les heures qui suivent.
L'étape du prélèvement des tissus sera
réalisée dans les 24 h suivants dans un des centres dédiés de prélèvement
d'Héma-Québec. Ceci peut impliquer un transfert d'un corps d'un établissement
vers un autre. Le prélèvement des tissus est réalisé par des techniciens dûment
formés. Les tissus sont inspectés, préparés et traités, puis mis en quarantaine
jusqu'à l'obtention des résultats de différents tests. Une fois ces résultats
obtenus, les tissus sont entreposés dans une banque dédiée à leur utilisation
ultérieure dans les semaines et mois qui vont suivre.
Comme vous pouvez le constater, la
transplantation d'organes et de greffes de tissus sont deux processus
différents. En particulier, la transplantation d'organes implique plusieurs
étapes qui elles-mêmes impliquent plusieurs individus et où chaque minute
compte. Une expertise de pointe est requise d'autant de la part du personnel dédié
qui s'occupe du donneur et de leur famille que de l'organisme qui a le mandat
de gérer cette activité. La coordination de ces activités, elle est critique.
Une seule erreur peut se traduire par le décès d'un patient sur une liste
d'attente.
Pour bien réaliser sa mission hautement
spécialisée, un organisme de don doit être dirigé par des gestionnaires
possédant aussi cette expertise. Avoir des gestionnaires pleinement dédiés à la
gestion du don favorise l'atteinte de hauts standards de performance et des
normes d'éthique. Concrètement, cela permet de maintenir la confiance du public
envers le système. Un ingrédient essentiel en matière de don d'organes.
D'ailleurs, des expériences antérieures dans d'autres pays ont démontré qu'une
absence de confiance du public est associée à une diminution du nombre de
donneurs. L'expertise des gestionnaires permet aussi d'améliorer les pratiques
et d'innover. Un élément crucial dans un domaine de la médecine qui ne cesse de
se complexifier.
Basé sur mon expérience clinique, je ne
crois pas que le transfert des activités de don d'organe de Transplant Québec
vers Héma-Québec est souhaitable. À court terme, elle pourrait mener au départ
d'employés de Transplant Québec et il... elle représente le maillon de la
chaîne. Cela se traduirait par une perte d'expertise de pointe qui repose sur
55 ans d'existence. Le succès de l'Espagne, leader mondial en don
d'organes, repose en grande partie sur l'ONT, qui est l'équivalent de
Transplant Québec. Cette organisation a un but : réduire le nombre de
patients en attente d'une transplantation. Je doute très fortement qu'une
organisation ayant pour mandat de gérer simultanément le don de sang, tissus et
orgranes... et organes, pardon, puisse accorder autant d'importance à chacun de
ses volets, d'autant plus si l'objectif est de faire des économies au niveau de
la gestion.
Par conséquent, je vous recommande
d'exclure Transplant Québec du projoi... du projet de loi 7 et,
alternativement et en considérant les modèles de gestion, en fait, de don à
travers le monde, vous pourriez transférer les activités de don de tissus à la
responsabilité de Transplant Québec. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci Dr D'Aragon. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme
la ministre et députée de Bertrand, vous avez, vous et vos collègues de
Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson 16 minutes 30 secondes.
Mme Duranceau : OK, merci
beaucoup Dr D'Aragon pour votre temps, puis je sais qu'il est précieux, vous
avez bien d'autres choses à faire, là. Donc merci pour les explications que
vous nous avez données. Puis le but c'est vraiment d'entendre les experts, là.
Il y a, tu sais, il y a un objectif d'efficacité là-dedans, puis ce n'est
absolument pas, là, de couper les vivres ou le financement, c'est de voir
est-ce que, dans l'exécution, on peut être plus efficace, on peut en faire plus
avec les mêmes... avec les mêmes équipes? Puis, bon, j'ai bien compris, là,
votre recommandation, j'aime... sur le projet de loi 7, j'aimerais ça
comprendre mieux... Là, actuellement, vous dites que les dons de tissus, ça,
c'est déjà Héma-Québec qui fait ce volet-là.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Oui.
Mme Duranceau : Donc, donc, il
y a des équipes, disons, qui vont s'occuper d'aller prélever les organes pour
le... la transplantation d'organes, mais, en même temps, tu as une équipe de
Québec qui est là pour le tissu?
M. D'Aragon (Frédérick) : Non,
en fait, le prélèvement de tissus se fait... si on a un donneur qui donne des
organes et des tissus, parce qu'il faut comprendre que des donneurs d'organes
c'est plutôt rare, là, on est 206 Québécois et Québécoises par année, là,
puis des donneurs de tissus on est dans le millier en montant, ou, en tout cas,
pas loin du...
M. D'Aragon (Frédérick) :
...juste, si on avait un donneur d'organes et de tissus simultanés, c'est les
organes qui sont prélevés en premier et dans les heures suivantes, il va y
avoir un prélèvement de tissus qui peut être fait dans un... dans le même sang
hospitalier, exemple, si vous êtes au... si le donneur est au CHU, le
prélèvement des tissus oculaires va se faire dans notre établissement. Mais si
exemple vous êtes... vous êtes à Granby, le prélèvement des tissus pourra être
fait dans un des centres de prélèvement de tissus d'Héma-Québec, là, donc.
C'est pour ça que je disais qu'il y avait un transport du corps, ça fait que ce
n'est pas nécessairement au même endroit et ce n'est surtout pas par les mêmes
personnes.
Mme Duranceau : Puis est-ce
que c'est automatique? Bien, en fait, ça nous prend un donneur, point, qui a
accepté. Puis seulement... Donc, les 206 exemples que vous mentionnez,
puis c'est seulement sur ces 206 personnes là que le prélèvement de tissus
devient possible par Héma-Québec. C'est ça?
M. D'Aragon (Frédérick) :
Bien, en fait, il y a beaucoup plus de donneurs de tissus qu'il y a de donneurs
d'organes, là, je veux juste être bien, bien clair, là, le donneur d'organes
n'est pas nécessairement un donneur de tissus, puis un donneur de tissus n'est
pas nécessairement un donneur d'organes. Il va y arriver des fois où ça va être
les deux. Tu sais donc, si, mettons, on devait mettre des chiffres, là, tu
sais, sur les 206 donneurs d'organes, je ne sais pas, peut-être, vite de
même que les trois quarts auraient aussi donné des tissus. Mais mon point ici,
c'est qu'il y a beaucoup plus de dons de tissus qu'il y a de dons d'organes.
• (10 h 50) •
Mme Duranceau : Puis, oui, en
tout cas, pour augmenter j'imagine... pour augmenter l'occurrence du don
d'organes... là, ça ne passe peut-être pas par là, mais tu sais, qu'est-ce
qu'on pourrait faire pour augmenter l'occurrence? Puis tu sais, 206, c'est très
peu, là, je... ça veut dire qu'il y a plein de monde qui manque des... bien, en
tout cas, il y a des gens qui aimeraient en recevoir, qui n'en reçoivent pas,
là, j'imagine.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Bien, pour les organes effectivement. D'ailleurs, bien, en fait, vous avez fait
une commission parlementaire avec un mandat, là, pour améliorer les pratiques
en dons d'organes, là. Je crois que tout est...
Mme Duranceau : Tout a été
dit.
M. D'Aragon (Frédérick) : Il
y a des belles initiatives, là, à ce niveau-là, effectivement.
Mme Duranceau : OK. Vas-y,
oui. Je vais passer la parole à la...
Le Président (M. Laframboise) :
Mme la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Merci. D'abord,
bonjour à tous les collègues. Merci d'être là, de pouvoir nous enrichir,
enrichir notre pensée ce matin. Là, je veux juste... parce que ça a été très
vite, puis je veux revenir sur ce que vous avez mentionné. Vous avez parlé du
rôle d'Héma-Québec, mais j'ai compris qu'Héma-Québec avait un rôle à jouer
actuellement dans la transplantation. Oui, au niveau des tissus. Mais est-ce
qu'il a un autre rôle à jouer au niveau de la coordination puis de...
Pouvez-vous me réexpliquer ce bout-là, s'il vous plaît?
M. D'Aragon (Frédérick) : Il
n'y a pas de problème. En fait, Héma-Québec ne joue pas de... Héma-Québec joue
un rôle dans le prélèvement des tissus. Mais il faut comprendre que le
prélèvement du tissu, lui, il n'y a pas de... il n'y a pas de processus
d'attribution en temps réel, comme il y a pour le don d'organes, le don de
tissus, en réalité, les techniciens ou les coordonnateurs, là, prélèvent les
tissus après le décès du patient. Là, je m'excuse d'utiliser des termes...
comme à la morgue, littéralement, là, OK, on va mettre un... on va appeler un
chat, un chat.
Mme Lachance : OK, pour
conservation.
M. D'Aragon (Frédérick) :
C'est ça, pour conservation dans une banque et subséquemment, la greffe de
tissus sera faite à des moments x, y dans différents centres où on va greffer
les tissus, mais ce ne sera jamais fait en urgence.
Mme Lachance : Donc la grande
différence, c'est l'urgence entre les deux. Le don d'organes en fait est
synchronisé. Il y a une... Il y a un synchronisme qui doit être mis de l'avant.
Et ça, est-ce que vous croyez que... parce que c'est déjà quand même quelque
chose qui se fait couramment, que l'organisation de cette... de ce travail-là
peut se faire à l'intérieur d'un organisme comme Héma-Québec dont
l'administration serait différenciée, c'est-à-dire... bien évidemment, il y a
tout le volet médical et scientifique, là, de Transplant Québec qui pourrait
s'additionner potentiellement à celui d'Héma-Québec, qui s'occupe de...
évidemment de ce qui est conservation, pour conserver évidemment une
organisation qui soit davantage axée sur la transplantation, et là, la séquence
de cheminement que vous avez décrite tout à l'heure.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Bien, c'est là... c'est là que je ne pense pas que c'est une bonne idée,
justement, parce que je pense que ça prend des dirigeants ou des gestionnaires,
là, bref, des boss qui comprennent la spécificité du don d'organes.
Transplant-Québec est un organisme ultra spécialisé, bien niché. On ne peut pas
demander à des gestionnaires, tu sais, de commencer à faire de la généralité
avec du don d'organes, du don de tissus, puis du don du sang en même temps. Tu
sais, on a parlé de l'attribution des organes, là, mais ça va sur le transport
des organes, ça va sur la qualification. Plein d'enjeux qui dépassent nettement
ce qu'Héma-Québec fait à l'heure actuelle.
Mme Lachance : Donc, il faudrait
avoir une...
Mme Lachance : ...une
évaluation des profils de gestionnaires qui soit, conséquemment, liée à la
mission, entre autres, de Transplant Québec.
Il y a quelque chose que ma collègue
ministre a mentionné tout à l'heure au niveau... au niveau de... du nombre de
transplantations annuelles. Et là, bien, je vous le dis, j'ai déjà vécu la
perte d'un être cher qui conduisait un processus de don d'organes, et, en
l'occurrence, le processus qui m'avait été présenté a fait en sorte que j'ai...
j'ai figé, carrément. Donc, je tiens à ce que vous le sachiez pour ma prochaine
question, parce que, derrière ça, il y a beaucoup d'éducation. Les gens qui
font don de sang sont déjà des gens qui sont sensibilisés à la vie et à
l'importance du don pour la vie. Ne pensez-vous pas que d'utiliser le temps...
parce que... le temps du don d'organes, il n'y a pas une synergie qui pourrait
s'établir, parce que, lorsque... pour faire de l'éducation au don d'organes
dans... justement, dans le rôle des... dans le... dans le bassin des donneurs
de sang actuels? Comprenez-vous ce que je veux dire?
M. D'Aragon (Frédérick) : Bien,
comme si, dans le fond, les donneurs de sang étaient, de facto, un peu plus
sensibilisés que M. et Mme Tout-le-monde à la cause du don par le geste
altruiste?
Mme Lachance : Oui, et si on
pouvait contribuer, justement, par ce travail en synergie là, entre le don de
sang et le don d'organes, contribuer à en profiter pour éduquer les gens, qui
sont, à mon avis, un milieu très propice, parce qu'ils ont déjà une sensibilité
plus grande que, peut-être, d'autres personnes qui ne font pas de dons de sang?
M. D'Aragon (Frédérick) : Excellente
question, je vais commencer de même. Je vous dirais que je ne pense pas, pour
la raison suivante. On sait que 90 % des Québécois sont en faveur du don,
mais, quand vient le temps du consentement, il y en a seulement 60 qui
consentent... 60 %. À la différence du don de sang, le don d'organes, ce
n'est jamais prévu là. J'exclus l'aide médicale à mourir, là, je ne voudrais
pas complexifier la discussion, là. Mais personne ne prévoit avoir un arrêt
cardiaque ou avoir un caillot dans son cerveau qui va mener à une catastrophe
neurologique. Le moment, le choc pour la famille aussi, fait en sorte que c'est
des freins, entre autres, au... à l'obtention du consentement au don d'organes,
d'où le pourquoi, justement, ça prend, entre autres, de l'expertise. Mais mon
point, c'est que ce n'est pas... ce n'est pas parce que tu es plus sensibilisé
dans la vie de tous les jours que tu vas dire oui.
Mme Lachance : Peut-être que
«sensibilisé» n'est pas le bon terme. J'aurais peut-être dû dire «éduqué».
M. D'Aragon (Frédérick) : «Éduqué»...
Je ne sais pas jusqu'à quel point l'éducation va... va percer, là, comme vous
en avez fait mention. C'est quand même un processus qui est... qui est
éprouvant, là, d'avoir un proche aux soins intensifs. Parce que là, on parle du
processus de don, mais, avant, le patient a été aux soins intensifs pendant
trois à cinq jours.
Mme Lachance : Je sais.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Donc, tu sais, c'est un processus qui est éprouvant. Ça fait que je ne suis pas
sûr que le contexte fait en sorte qu'il y a des stratégies d'éducation ou de
l'éducation comme telle, par... de la population de donneurs de sang, va
améliorer, conséquemment, le don d'organes. Mais je dois vous admettre en toute
franchise, aussi, qu'il n'y a aucune étude à ce jour, qui a évalué cet
aspect-là. Donc, c'est vraiment une opinion, là, personnelle que je vous
transmets.
Mme Lachance : Bien, ce
serait, en tout cas, peut-être une suggestion d'étude à faire. Je...
M. D'Aragon (Frédérick) : Clairement
noté. Je ne pensais pas sortir d'ici aujourd'hui avec une idée de recherche.
Mme Lachance : Je vous
partage mon expérience alors. Je continue? Oui? Bon, écoutez, vous savez,
l'objectif est vraiment de pouvoir améliorer, hein, puis... puis, en toute
transparence et en toute humilité, c'est l'objectif qu'on cherche à réaliser.
Et, évidemment, il y a des structures qui sont respectives. J'ai bien entendu
votre sensibilité à la gestion de Santé Québec... pas de Santé Québec, pardon,
de Transplant Québec versus Héma-Québec. Puis j'ai bien entendu aussi votre
sensibilité à ce que des gestionnaires soient issus d'un milieu... puis... et
connaissant en termes «de», et ça, je pense que ça va rester bien, bien noté,
puis qu'on va pouvoir travailler sur cette base-là si d'aventure, ou lorsque
d'aventure, on sera rendus là.
Maintenant, au niveau des équipes, comment
vous verriez un organigramme ou comment vous verriez une synergie de travail
s'organiser? Parce que, vous l'avez dit, c'est extrêmement important de
maintenir en place l'expertise, de maintenir en place la fluidité qui est
déjà... parce que c'est une organisation qui doit bouger rapidement, dans un
moment précis, puis vous avez mentionné lors d'heures défavorables. Donc, ça,
ça doit rester. Comment pourrait... dans le fond...
Mme Lachance : ...ce qui doit
être maintenu à tout prix pour que cette organisation-là puisse fonctionner ou
bien fonctionner.
M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.
En fait, puis sans faire de mauvais jeu de mots, je pense que s'il y a quelque
chose à greffer, là, c'est pour ça que je ne veux pas faire de mauvais jeux de
mots, c'est la contribution... c'est le tissu qui devrait se greffer au don
d'organes pour la raison que, tu sais, on en a parlé tout à l'heure, là c'est
tout l'élément logistique, le temps, les contraintes, etc., qui sont beaucoup
moins complexes avec le don de tissus. Je ne dis pas que ça ne prend pas une
expertise de pointe, je dis juste que, si on n'avait pas le choix de fusionner
quelque chose pour optimiser, je le ferais à l'inverse. Puis en fait, c'est
aussi ce que la littérature démontre, l'ensemble des modèles, la grande
majorité des modèles de don d'organes, non seulement au Canada, mais à travers
le monde, ce sont des organismes qui gèrent du don d'organes et du don de
tissus. Mais j'ai... il y a deux... il y a deux pays à ma connaissance... En
fait, j'ai appris la semaine passée que le Portugal gérait organe, tissus et
sang et il y a aussi l'Angleterre qui gère organes, tissus et sang. Et on ne
peut pas conclure qu'en Angleterre, leur succès, depuis leur fusion au début
des années 2000, repose justement sur une synergie parce que, quand on
regarde les chiffres, leur nombre de donneurs d'organes après décès
neurologique n'a sensiblement pas augmenté. Ce qui a augmenté, c'est la
création d'un programme de don d'organes après décès circulatoire, là, qui existait,
tu sais, et qui était déjà en cours d'implantation. Ça fait que je ne suis
pas... Vous voyez, je pense qu'il y a des facteurs atténuants.
Mme Lachance : Oui.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Voilà, je... Je ne sais pas, j'ai probablement un peu divagué, là, mais
je...Voilà.
Mme Lachance : Non, non, ça
va, ça va. Mais ça m'amène à une autre question. Je ne sais pas si j'ai encore
le temps, M. le Président puis Mme la ministre.
• (11 heures) •
Le Président (M. Laframboise) : Il
vous reste 3 min 22 s.
Mme Lachance : Oui. Pour pour
la suite, parce que c'est intéressant ce que vous dites, vous avez mentionné le
Portugal, l'Angleterre, ont des... ont des... des façons de faire qui font en
sorte que ce sont le sang, les tissus et le don d'organes, donc. Puis c'est
plutôt récent, donc, de ce que je comprends, le Portugal, c'est... c'est dans
un avenir. Maintenant, ici, comment on se voit dans 10 ans? N'est-il pas
pertinent de se poser la question comment on veut voir ça évoluer et comment on
veut voir ça se déployer? Si... si c'est pertinent, est-ce que c'est quelque
chose que, 10 ans, 15 ans, on peut entrevoir?
M. D'Aragon (Frédérick) : Vous
savez, Mme la députée, moi, je crois que, dans 10 ans, où on devrait se
voir, c'est ce qui était dans le mandat, dans les résultats de l'ancienne
commission parlementaire. C'est là où on se voit, parce que, tu sais, à vouloir
essayer de fusionner ou optimiser de la gestion, ma crainte, c'est que ça ait
un impact sur les activités, donc. Puis tu sais, je n'irai pas dans le détail
des finances parce qu'en passant, je ne fais même pas mon propre rapport
d'impôt personnel. Mais je veux dire, le point, c'est que le... on perd un
donneur, ça coûte plus cher à l'État. Ça fait que, tu sais, je ne pense pas que
les économies que vous anticipez vont... vont se transcender.
Mme Lachance : ...vouloir
vous arrêter, je pense qu'il faut voir au-delà de l'optimisation administrative
puis des finances. Il faut vraiment voir le maillage comme un potentiel de
faire évoluer la pratique, puis si je peux utiliser le terme «pratique» pour le
don d'organes, parce que dans les faits, on en a besoin. Et vous le mentionnez.
Donc, l'objectif ultime est vraiment d'avoir une pratique qui soit harmonisée
au... au niveau provincial. Et là, la question que je vous pose, c'est
vraiment : Est-ce que vous voyez ça comme dans un horizon possible, dans
la... la prochaine décennie?
M. D'Aragon (Frédérick) : D'harmoniser,
en fait, mettons, du don de tissus avec du don d'organes, vous me parlez? Je
verrais ça à la condition où c'est l'organisme de don d'organes qui gère le don
de tissus. Puis n'est pas juste pour une raison d'implant. Tu sais, oui pour
la... Je vous ai parlé de la complexité du processus, mais aussi par les
précédents qui existent pour lesquels on peut se rabattre pour faciliter la
transition.
Mme Lachance : …remercie
beaucoup.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, banquette gouvernementale. Maintenant, nous allons... je cède
la parole à la députée de Westmount—Saint-Louis. Vous avez 10 min 24 s.
Mme Maccarone : Merci. Merci
beaucoup, Dr D'Aragon, d'être de retour en commission. Puis juste... je
souhaite rappeler tout le monde que nous sommes présentement dans la Commission
des finances publiques. Alors, on parle beaucoup de cliniques puis santé et
services sociaux, dans le fond, mais c'est la Commission de finances publiques.
Alors, je pense que c'est normal qu'on pense d'administration. Puis ce qu'on
souhaite faire, c'est de couper et sauver de l'argent.
Parce que vous êtes un chercheur réputé,
vous avez beaucoup d'expérience, moi, je souhaite savoir, dans votre
expérience, peut-être dans votre passé, vous avez travaillé aussi en Espagne,
un analyse...
11 h (version non révisée)
Mme Maccarone : ...scientifiques,
cliniques, factuelles qui existent, qui disent que ce type de fusion pourra
porter des fruits, sauver de l'argent à l'État, est-ce que ça existe?
M. D'Aragon (Frédérick) : Pas
à ma connaissance.
Mme Maccarone : OK. Voilà.
Parce que je souhaite que vous continuiez un peu, que j'aurais voulu plus vous
entendre quand vous parlez de perdre un donateur, ça coûte plus cher à l'État.
Je souhaite que vous élaborez un peu là-dessus, parce qu'encore une fois c'est
la Commission de finances publiques, alors nous sommes en train de risquer des
dépenses supplémentaires.
M. D'Aragon (Frédérick) : OK.
Donc, écoutez, on va faire... on va prendre un exemple, là, avec des chiffres
ronds, OK. Un patient qui est sur une... qui est en... qui a une insuffisance
rénale chronique, qui est sur dialyse, OK, ça coûte à l'État environ 50 000 $
par année. Ce même patient là, si on lui fait une transplantation d'organes,
donc d'un rein, ça va coûter environ 25 000 $ à l'État dès la
première année. On peut comprendre que... Et les années subséquentes, dans le
fond, donc à l'année 2 posttransplantation, le coût de 25 000 $,
il n'est plus là parce que le patient a déjà été transplanté. Là, c'est les
coûts des médicaments antirejet, ça fait que... et donc des suivis médicaux, et
là on parle d'un montant d'environ... qui oscille entre 8 000 $ à 10 000 $
par année. En contrepartie, si ce patient-là n'avait pas eu une greffe de rein,
une transplantation rénale, il aurait encore coûté 50 000 $ à l'année 2,
il aurait coûté 50 000 $ à l'année 3, à l'année 4, à l'année 5,
50 000 $ par année. Donc, au bout de cinq ans, bien, le patient qui
est en attente d'une... qui est en... qui est sur une... qui est en dialyse va
avoir coûté 250 000 $ à l'État, alors qu'au bout de cinq ans, le
patient qui aura été transplanté, lui, va coûter 25 000 $ la première
année, puis 10 000 $ pour les quatre autres années subséquentes, donc
40 000 $, 65 000 $. Ça fait que faites 250 000 $ moins... 65 000 $,
là, je... je me perds dans mes calculs, cette différence-là, c'est ce que
vous... c'est ce que l'État va économiser.
À cet effet-là, quand vous m'avez posé la
question par rapport au coût, de l'analyse des fusions, je continue à dire que
ça n'existe pas. En contrepartie, au début des années 2000, l'INESSS a
produit un rapport coût-bénéfice sur la transplantation rénale, que je vous
invite à consulter. Si vous ne l'avez pas, ça va me faire plaisir de vous le
transmettre, là, par courriel à un membre de la commission.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, c'est... c'est très, très clair. Étant donné ce que vous venez d'élaborer,
je souhaite savoir peut-être votre opinion de comment les équipes médicales,
les associations, les... les patients, les familles voient cette intégration de
Transplant Québec avec Héma-Québec.
M. D'Aragon (Frédérick) : Je
ne peux pas parler au nom des... des familles puis des patients parce que j'en...
je n'en ai tout simplement pas discuté. C'est clair que sur le terrain, ça
amène une... une insécurité, une incertitude. Puis je ne dis pas qu'Héma-Québec
fait mal son travail, hein? Il ne faut pas mal interpréter. Au contraire,
Héma-Québec travaille très bien, ils sont excellents dans ce qu'ils font. Mais,
quand on vient le temps de... quand on vient pour le temps du don d'organes, c'est
vraiment sous tension. C'est un moment pas évident pour les familles. Il y a du
stress, hein, dans la gestion du don d'organes. Vous savez, juste avoir une
salle d'opération, là, tu sais, c'est... c'est qui qu'on coupe, là. Tu sais, ça
amène des enjeux, parce qu'on ne peut pas dire : On va aller prélever
le... l'organe dans une semaine. Ça prend du doigté, de la technique, etc.
Donc, c'est sûr que de perdre cette espèce de... d'expertise-là, puis de recommencer
à nouveau, ça amène une insécurité. Puis malheureusement, je suis peut-être
rendu pessimiste, mais à chaque fois que j'entends parler, tu sais, d'optimisation,
on dirait que c'est... c'est au prix d'alourdir un processus qui est déjà
complexe sur le terrain, là.
Mme Maccarone : ...comprends.
Puis surtout ça, après l'adoption sous bâillon du projet de loi n° 2,
alors je présume que ça amène un autre niveau de complexité puis insécurité
dans le réseau.
Pour revenir un peu, les éléments qui distinguent
les systèmes les plus performants, parce que j'étais curieuse quand j'ai lu
votre mémoire. Puis là vous faites une belle exposé du modèle espagnol. Si,
mettons, le gouvernement poursuit avec cette fusion, on va s'éloigner, je
présume, de cette modèle. Mais ce modèle est celui qui est en train d'inspirer
les gens à l'international, dont aussi Transplant Québec. Je présume qu'on a
une harmonie avec la façon qu'eux ils travaillent?
M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.
En fait, bien, je sais que les gens... Moi, je ne travaille pas pour Transplant
Québec, mais je sais que les gens de Transplant Québec sont allés voir comment
qu'ils fonctionnaient pour essayer d'incorporer ça au Québec... Donc, oui,
le... nous, l'Ontario, la Colombie-Britannique, on... on s'inspire de... de l'Espagne,
je veux dire...
M. D'Aragon (Frédérick) : ...ce
n'est pas pour rien qu'ils sont les leaders mondiaux, là.
Mme Maccarone : Est-ce que ce
serait juste de dire qu'un travail a déjà été entamé, des heures puis des heures
ont déjà été investies, probablement de l'argent, pour s'assurer que le système
actuel fonctionne puis est à la hauteur de l'innovation puis de l'efficacité?
M. D'Aragon (Frédérick) : Bien,
je croirais que oui, parce que Transplant Québec est allé là-bas, donc, par
défaut, ils ont probablement dû investir du temps, de l'argent.
Mme Maccarone : Juste une
précision. Aussi, dans votre mémoire, vous avez deux recommandations. Le
premier, très, très clair : exclure Transplant Québec du projet de loi
n° 7. Mais le deuxième, vous dites : alternativement, confier le
mandat de la gestion du don de tissus à Héma-Québec. Est-ce que vous voulez
dire Transplant Québec?
M. D'Aragon (Frédérick) : En
fait, je voulais... confier la gestion du... de la gestion des tissus à
Transplant Québec. Dans un monde idéal, tu sais, les deux organismes pourraient
être distincts. Mais si on me demande, tu sais, littéralement sous pression,
là, si on n'a pas le choix de fusionner quelque chose, moi, je dirais le volet
don de tissu soit fusionné, incorporé au volet don d'organes, pour les raisons
que j'ai mentionnées précédemment.
Mme Maccarone : Ce serait à
corriger dans le mémoire.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Oui.
Mme Maccarone :
Je ne sais pas si vous souhaitez envoyer une
version révisée pour les membres de la commission, parce qu'actuellement, avec
seulement deux recommandations, on mérite d'être clair.
M. D'Aragon (Frédérick) : Merci.
Merci, oui, je vais... je vais le faire. Je vous avoue que... je ne veux pas
lancer des tomates, là, mais j'ai eu... tu sais, j'ai eu comme quatre jours
pour me préparer, dont deux qui sont si j'inclus la fin de semaine, là. Ça fait
que j'ai peut-être oublié des petites affaires.
Mme Maccarone : Vous êtes
pardonné, on ne peut même pas imaginer, puis on remercie encore vos collègues
qui vous ont libéré pour participer à cette commission, qui est très
importante, surtout que c'était à la suite, vous y avez fait référence, à un
mandat d'initiative, où nous avons déjà parlé des recommandations. Il y avait
combien de recommandations? Je ne m'en souviens plus.
• (11 h 10) •
Une voix : ...
Mme Maccarone : 15
recommandations. Mais, de... vous avez participé à cette... dans cette
commission à l'époque... pensez-vous que si nous poursuivons avec les
recommandations, suite à l'étude du mandat d'initiative, nous pourrions
toujours améliorer le processus du don d'organes puis don de tissus?
M. D'Aragon (Frédérick) : Oui.
Mme Maccarone : Excellent.
J'aurais peut-être... Il me reste combien de temps?
Le Président (M. Laframboise) : 2 min 22 s.
Mme Maccarone : OK, ça fait
qu'il me reste du temps peut-être, pour une dernière question. Moi, ce que je
souhaite savoir, c'est : Quels sont les éléments qui distinguent les
systèmes les plus performants de don d'organes? Parce que si nous sommes en
train de penser d'une fusion, on est peut-être en train de penser d'une perte
de ce système d'efficacité. Ça fait que quels sont les risques? Qu'est-ce que
nous pensons qu'on va peut-être perdre avec ce type de fusion? Puis quels sont
vraiment les éléments clés qu'on dit : Ça, là, avec ça, c'est pour ça que
ça fonctionne?
M. D'Aragon (Frédérick) : Écoutez,
réponse assez simple, puis ce n'est pas pour être cliché, l'organisme qui est
mandaté pour... pour gérer le don d'organes. L'OMT, c'est l'exemple frappant,
ils ont eu... ils ont adopté la loi sur le consentement présumé 10 ou 15 ans
avant la création de l'OMT. Il y a eu à peu près zéro progrès en matière de don
d'organes pendant ces 15 années là, puis, deux, trois ans après que l'OMT a été
créée, c'est là que le don d'organes a... a augmenté, puis, même encore
aujourd'hui, ils continuent à augmenter leur nombre de donneurs, année après année.
Mme Maccarone : ...nous
sommes en train de réparer quelque chose qui n'est pas brisé?
M. D'Aragon (Frédérick) : Je
crois que oui.
Mme Maccarone : Merci
beaucoup, c'est très clair. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laframboise) : Merci,
Mme la députée de Laurier-Dorion. Je cède maintenant la parole au député de...
Excusez, Mme la députée de Westmount—Saint-Louis. Je cède la parole au député
de Laurier-Dorion, 3 min 28 s. Merci, excusez.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bien, bonjour, Dr Aragon. Là, écoutez, je me place dans l'hypothèse
que cette fusion-là s'effectue. Qu'est-ce que... est-ce que vous pensez
qu'Héma-Québec pourrait porter... pourrait améliorer, même, la coordination
dans... en matière de transfert d'organes, et mieux supporter les familles dans
le deuil, et mieux... et faire du référencement, et mieux... améliorer
l'évaluation de l'organe, le transport des organes? Est-ce que cette fusion va
améliorer les choses?
M. D'Aragon (Frédérick) : Non,
ça ne va pas améliorer les choses. Pas parce qu'ils ne sont pas gentils, pas parce
qu'ils ne sont pas bons. Parce qu'ils n'ont pas l'expertise, ce n'est pas la
culture, ce n'est pas la... bon, excusez-moi l'anglicisme... ce n'est pas le
«core business» d'Héma-Québec, c'est très niché. Donc, je ne crois pas que ça
va améliorer quoi que ce soit.
M. Fontecilla : OK, merci
pour votre réponse lapidaire. Écoutez, la ministre a mentionné tantôt qu'il
pourrait y avoir des synergies, entre autres, dans le domaine de...
administratif...
M. Fontecilla : ...ou encore
dans le domaine informatique. Est-ce que ça vaut la peine de tout chambouler
Transport... Transplant Québec, là, pour effectuer, ne serait-ce que des
améliorations dans ces deux domaines-là?
M. D'Aragon (Frédérick) : J'en
doute fortement, parce qu'entre autres, le moment où des activités entre le don
d'organes et le don de tissus sont différents, le don d'organes, c'est le jour,
la nuit, la fin de semaine. C'est... alors qu'Héma-Québec, oui, ils travaillent
le soir, mais la nuit, tu sais, si nous, là, il faut envoyer un image d'un scan
concrètement, là, à un chirurgien transplanteur, là, à 22 h 30 le vendredi soir
puis on a un problème pour l'acheminer, ça prend quelqu'un qui est disponible
pour répondre, là. Ça ne peut pas attendre au lendemain ou sur un message sur
une boîte vocale. Et ça, actuellement, Transplant Québec le fait. Je ne crois
pas qu'Héma-Québec a la capacité actuelle de le faire. Ceci étant dit, ils vont
être auditionnés, ils pourront commenter, là, là-dessus, mais mon expérience
terrain avec Héma-Québec, c'est que ça fonctionne bien le jour, la semaine et
les jours de fin de semaine aussi, soit dit en passant. Mais la nuit, il y a
moins... il y a moins de monde.
M. Fontecilla : Dites-moi, si
jamais la ministre décide d'aller quand même de l'avant avec cette fusion-là,
et d'ici un an, deux ans, on décidait d'évaluer le succès de cette
opération-là, quels sont les grands indicateurs, là, qu'on devrait regarder
pour évaluer le succès, ou pas, de cette fusion-là?
M. D'Aragon (Frédérick) : Bien,
il y aurait des indicateurs probablement reliés aux résultats, là,
littéralement le nombre de transplantations d'organes. Mais je pense qu'il y
aurait aussi des indicateurs en lien avec le processus, nommément la durée de
prise en charge d'un donneur. Vous n'êtes pas sans le savoir qu'aujourd'hui
prendre un charge un donneur, donc, du moment du consentement jusqu'au
prélèvement, c'est un processus qui prend à peu près 3 à 4 jours au total. Et
c'est déjà long, c'est déjà même trop long. Si je compare avec justement en
Espagne où on fait ça en dedans de 36-48 h tout au plus, là, et ce qu'on voit
apparaître, là, c'est de tellement de plus en plus long qu'une lourdeur
additionnelle du processus ou de l'adaptation à un nouveau système qui
engendrait des augmentations de délais, bien, pourrait se traduire par des
retraits de consentement des familles au don d'organes. Ça ne demeure pas fréquent
à l'heure actuelle, mais n'importe quelle prolongation met à risque d'avoir
plus de retraits de consentement. Puis honnêtement, je ne blâme pas les
familles, là. Ça fait deux semaines qui sont aux soins intensifs avec leurs
proches, là, à vivre sur la corde raide.
M. Fontecilla : Dois-je
comprendre que nous sommes déjà en retard par rapport à des exemples
internationaux, l'Espagne, et que la perte d'autonomie risque d'agrandir ces
retards-là?
M. D'Aragon (Frédérick) : Bien,
clairement que le système est perfectible, là, tu sais. Je demeure... il y a
des choses à améliorer en termes de durée de prise en charge, là. Clairement
que c'est trop long à l'heure actuelle au Québec, puis même au... je dirais
dans d'autres provinces. Il y a de plein de raisons pour ça, mais ça... il faut
quand même, un coup qu'on connaît les raisons, il faut quand même s'activer
pour trouver des solutions pour réduire ces délais-là, parce que sinon ça va
devenir... ça va devenir de plus en plus complexe.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Je cède maintenant la parole au
député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci, Dr Daragon, pour votre présentation. Juste pour être bien
clair, est-ce que vous êtes d'accord avec Transplant Québec lorsqu'ils
affirment que la fusion Transplant Québec à Héma-Québec se fera au prix de la
vie de patients? Il y a des gens qui mourront, sans doute, si cette fusion-là
va de l'avant.
M. D'Aragon (Frédérick) : À
court terme, oui.
M. Boissonneault : Héma-Québec
se dit prêt à faire une fusion comme celle-là, voit positivement la fusion avec
Transplant Québec. Ils disent que ça pourrait amener des avantages en termes de
traçabilité, qualité renforcée grâce à un système intégré. On parle d'une
réactivité en situation de crise améliorée, on parle d'innovation, de recherche
transversale. Comment est-ce que vous expliquez cette confiance-là
d'Héma-Québec dans leur capacité à livrer la marchandise s'il y a une fusion?
Est-ce qu'il peut y avoir...
M. D'Aragon (Frédérick) : ...encore
une fois, j'en doute fortement. Pour répondre au premier volet de votre
question, peut-être que ça repose sur le fait qu'ils ont été capables de
fusionner le don de tissus aux activités de don de sang, jadis. Mais je me
répète, ce n'est pas du tout la même chose quand vient le temps du don
d'organes. On ne demande pas à la garde côtière de faire la job de la marine
canadienne et vice versa, parce que les deux portent des équipements qui
conduisent des bateaux, honnêtement. C'est vraiment, je m'excuse d'utiliser
cette analogie-là, là, mais c'est vraiment, ce n'est pas parce que c'est du don
que c'est la même chose.
M. Boissonneault : Est-ce que
vous voyez aussi un avantage à maintenir le statut d'un organisme sans but
lucratif? Parce qu'il y a quand même des genres différents, là, l'intégration à
une société d'État, on a un organisme, la vocation n'est pas tout à fait la
même. Est-ce qu'il y a un avantage à garder ce statut-là aussi pour Transplant
Québec?
M. D'Aragon (Frédérick) : Oui...
M. D'Aragon (Frédérick) : ...je
trouve qu'il y a un avantage, d'autant plus qu'au Québec on a déjà un espèce de
Réseau québécois de don et de transplantation, le RQDT, sur lequel le ministère
et Santé Québec siège. Ça fait que comme... au niveau de la gouvernance, il y a
comme une espèce de mécanisme où on peut... on est en mesure de savoir ce que
transplant... ce que Transplant Québec fait, même s'ils sont, entre guillemets,
indépendants.
M. Boissonneault : Est-ce que
vous voyez aussi la possibilité que des employés de Transplant Québec,
nommément les infirmières, peut-être des collègues, des gens avec qui vous
travaillez, qui refuseraient de passer à Héma-Québec... je veux dire, de
Transplant Québec qui refuseraient d'aller à transplant... à Héma-Québec,
pardon.
M. D'Aragon (Frédérick) :
Sans vous insulter, c'est la question la plus facile à répondre aujourd'hui,
oui.
M. Boissonneault : Pourquoi?
M. D'Aragon (Frédérick) :
Bien, c'est une question d'engagement, tu sais, c'est... le don d'organes, là,
ils vivent dans la mort au quotidien, le personnel infirmier, mais ils sont
engagés là-dedans puis ils continuent là-dedans parce que, justement, ils le
voient. C'est une... c'est un... c'est une mission, c'est des... Encore une
fois, c'est une charge émotive importante, ça va au-delà de la paie. Tu sais,
il y a une valeur de plus, c'est l'engagement, c'est la motivation intrinsèque.
Ils font des miracles avec... tu sais, avec pas grand-chose, là.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Je vous remercie, Dr D'Aragon, pour votre contribution aux travaux de la
commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux
prochains témoins de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 20)
(Reprise à 11 h 23)
Le Président (M. Laframboise) :
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Héma-Québec et je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé. Merci.
Mme Fagnan (Nathalie) : Merci,
M. le Président. Mon nom est Nathalie Fagnan. Je suis présidente et cheffe de
la direction de Québec depuis bientôt sept ans. Je suis accompagnée de
Dr. Marc Germain...
Mme Fagnan (Nathalie) : ...Marc
Germain, vice-président aux affaires médicales et innovation, qui est également
responsable de tout le secteur des tissus humains comptant 70 employés. Et, à
ma gauche, j'ai Mme Mélanie Dieudé, directrice des opérations de tout le volet
recherche et développement à Héma-Québec. Mélanie est une chercheure renommée
qui a d'ailleurs contribué au développement scientifique du programme de
recherche en dons et transplantation, dont elle a été la directrice générale de
2020 à 2022, juste avant de joindre Héma-Québec.
Alors, M. le Président, mesdames et
Messieurs les membres de la commission, merci de nous donner l'occasion de...
nous exprimer aujourd'hui sur le projet de loi n° 7. Depuis son dépôt à
l'Assemblée nationale, ce projet a suscité de nombreuses réactions, on en
convient, puis c'est compréhensible, particulièrement en ce qui concerne le transfert
de responsabilité de la coordination du processus de dons et de transplantation
d'organes à notre organisation, Héma-Québec. Je pense notamment aux... aux
employés de Transplant Québec qui, avec raison, demandent à être rassurés sur
leur avenir. Je pense aussi aux professionnels de la santé qui ne comptent pas
leurs heures quand il s'agit de... d'intervenir dans une cause aussi cruciale.
Puis il est impossible de passer sous silence les nombreuses personnes
actuellement en attente d'une greffe pour qui il s'agit littéralement d'une
question de vie et de mort... ou de mort.
Je dois vous dire qu'Héma-Québec, nous
sommes extrêmement sensibles à ces inquiétudes qui ont été soulevées par le
projet de loi n° 7. Mais, en même temps, nous gardons la tête froide, comme
l'importance que notre mission nous impose depuis 27 ans. Nous sauvons des vies
tous les jours. Aujourd'hui, au Québec, lorsqu'il est établi qu'une personne
est en mesure de donner des tissus humains comme de la peau, les cornées ainsi
que des organes comme le cœur ou le foie, deux mécanismes distincts
s'enclenchent parallèlement. L'équipe médicale doit contacter deux organismes,
puisque Héma-Québec est responsable des tissus humains et Transplant Québec,
des organes.
Ces deux organismes ont des manières de
faire différentes... des structures différentes, des employés différents. Puis,
si on cite un exemple, un employé de Transplant Québec qui parle à une famille
endeuillée du... du don de tissus, il est moins en... en maîtrise de la chose
parce qu'il connaît davantage le don d'organes. Et c'est normal. Mais, dans
d'autres occasions, la famille endeuillée va recevoir deux appels, l'un de
Transplant Québec et l'autre d'Héma-Québec. Puis jusqu'au prélèvement,
pourtant, toutes ces étapes auraient pu faire... auraient pu être faites par un
seul organisme. Et c'est ce que suggère une certaine logique où on retrouve
plusieurs... dans plusieurs endroits, dans d'autres provinces canadiennes, tout
comme dans d'autres juridictions, où les processus de don d'organes et de
tissus humains sont gérés par un seul et même organisme.
Puis c'est d'ailleurs la conclusion à
laquelle est arrivée la commission sur la santé et justement... qui s'est
penchée l'an dernier sur les moyens facilitant le don d'organes ou de tissus,
qui d'ailleurs, dans sa toute première recommandation, disait qu'«une loi-cadre
sur le don d'organes et de tissus soit présentée et qu'un organisme responsable
soit désigné pour sa mise en application». Ce sont des types de dons qui, bien
sûr, ont des particularités, mais on y voit un avantage à adopter une démarche
unique, plus simple, plus efficiente et davantage humaine pour les familles
endeuillées. Puis, sans surprise, nous confirmons et nous disons que, oui, nous
accueillons favorablement l'intention exprimée, dans le projet de loi n° 7, de confier à Héma-Québec la responsabilité du don
d'organes.
En effet, les échanges qui ont eu lieu, en
2024, lors des travaux de la commission ont fait ressortir un besoin très
clair, celui de rassembler les efforts, celui d'offrir une direction plus
intégrée et de se doter d'un cadre cohérent pour répondre aux besoins des
patients, des familles et du réseau de la santé. L'intégration de Transplant
Québec à Héma-Québec s'inscrit tout à fait dans cette volonté de mieux soutenir
et encadrer l'ensemble des activités entourant le don d'organes au Québec. Le
regroupement des expertises contribuera à simplifier les processus, à réduire
certaines redondances et à renforcer la cohérence des actions sur le terrain.
De plus, le processus de don et de
transplantation d'organes bénéficiera à coup sûr des ressources qui existent à
Héma-Québec. Ce sont des expertises, que ce soit en matière d'analyse de
laboratoire ou de gestion de défis logistiques...
Mme Fagnan (Nathalie) : ...que
nous vivons à travers nos différents secteurs d'activités. Au-delà du sang,
j'entends cellules souches, lait maternel, tissus humains. Surtout, ce
regroupement-là, nous croyons qu'il va créer, oui, des synergies. Lorsque des
équipes travaillent en étroite collaboration et qu'elles partagent les mêmes
infrastructures, les mêmes systèmes d'information, les mêmes pratiques de
qualité, les mêmes mécanismes de traçabilité, elles bénéficient d'un
environnement beaucoup plus propice à l'efficacité, à l'innovation et,
ultimement, à l'augmentation du nombre de personnes qui pourront bénéficier
d'une greffe. N'est-ce pas l'objectif ultime dont on parle? Nous souhaitons
souligner que nous aborderions cette transition avec un profond respect pour le
travail remarquable accompli par Transplant Québec. L'intégration de son
expertise au sein d'Héma-Québec lui offrira un cadre qui permettra de la
maintenir, de la valoriser et de la projeter vers l'avenir. Pour nous, la
continuité des activités critiques et la stabilité pour le personnel, les
équipes médicales et les patients demeurent des impératifs absolus. Ce
transfert s'inscrit aussi naturellement dans la mission que nous portons depuis
près de trois décennies. Héma-Québec est née d'une volonté de mieux répondre
aux besoins de la population québécoise, et pas seulement en sang. La
réalisation de tous les mandats obtenus par Héma-Québec à travers les 27
dernières années requiert une même chose : un geste noble et généreux du
don d'un être humain dans tous nos secteurs d'activités.
• (11 h 30) •
Au fil du temps, nous avons su intégrer de
nouveaux mandats, toujours dans les domaines délicats et pointus de la santé,
et nous les avons développés avec rigueur et fiabilité. Les tissus humains, les
cellules souches, le sang de cordon, le lait maternel, tous, nous les avons
intégrés avec succès. À chaque étape, nous avons démontré notre capacité à
évoluer, à nous adapter et à mettre en place des systèmes efficaces en
partenariat avec le réseau de la santé. Cette expérience, ajoutée aux résultats
concrets que nous avons obtenus dans le domaine des tissus humains, constitue
un gage, à notre avis solide, de notre capacité à accueillir la responsabilité
du don d'organes. Le Québec a aujourd'hui l'occasion de bâtir une structure qui
reflète à la fois ses spécificités, ses forces et son ambition collective en
matière de don et de transplantation. Dans ce contexte, Héma-Québec serait
fière et se dit capable de contribuer à créer un modèle québécois de référence
capable d'unir des expertises qui se renforcent mutuellement et de mettre cette
force au service du but profondément humain : sauver des vies, soutenir
les familles, puis offrir aux patients et patientes des... les meilleures
chances possibles. C'est dans cet esprit que nous sommes prêts à collaborer
étroitement avec Transplant Québec, avec le gouvernement et avec l'ensemble des
partenaires du réseau, sans oublier les patients, les donneurs, leurs familles,
afin d'assurer une transition à la fois rigoureuse, respectueuse et productive.
Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, Mme Fagnan. Nous allons maintenant commencer la période d'échange,
Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Bellechasse,
Fabre, Dubuc et Masson, vous avez une période de 16 min 30 sec.
Mme Duranceau : Oui, merci
beaucoup, merci beaucoup d'être là puis de nous donner... s'il y a une chose
que j'ai apprise en politique, c'est qu'il y a toujours... il y a toujours
trois côtés à une médaille, hein, donc un côté, l'autre côté, puis quelque
chose, quelque part entre les deux, là, qui finit par être le... la solution.
Donc merci de... de donner un autre côté de la médaille. Transplant Québec,
puis le Dr D'Aragon, aussi, ont mentionné que ça prend vraiment une expertise
au niveau de l'administration de l'organisation, une expertise qui est
particulière si on veut être à même de... de poursuivre la mission, là, au
niveau du... des organes en particulier. Alors... puis je peux voir, tu sais,
on voit que c'est très sensible dans le temps puis que c'est une expertise
pointue pour le prélèvement et tout ça. Donc, comment vous répondez à cette...
à cette préoccupation-là, puis comment, dans ce contexte-là, on serait vraiment
capable d'accueillir chez Héma-Québec cette nouvelle expertise-là?
Mme Fagnan (Nathalie) : Je
vous dirais que nous, depuis... depuis qu'on a appris cette... cette... je veux
dire, le contenu de ce projet de loi là et tel que mentionné dans mon...
11 h 30 (version non révisée)
Mme Fagnan (Nathalie) : ...nous
comptons intégrer l'expertise de Transplant Québec. Ce n'est pas une question
de... Nous valorisons l'expertise de Transplant Québec. Alors, pour nous, d'intégrer
cette équipe-là qui continuerait à fonctionner comme elle fonctionne en ce
moment... Et, avec le temps, nous travaillerons à développer des synergies
positives. Mais nous valorisons l'expertise de Transplant Québec, Héma-Québec n'a
jamais eu la prétention que nous prendrions le mandat sans avoir besoin de cette
expertise pointue là. Des vies en dépendent, on comprend ça. Nous sauvons des
vies tous les jours, nous aussi, que ce soit avec des cellules souches, des
produits sanguins ou autres. Alors, je ne sais pas si mes collègues voulaient
ajouter là-dessus.
M. Germain (Marc) : D'abord,
merci pour l'occasion de venir vous parler aujourd'hui. Je rajouterai là-dessus
que, peut être, l'inquiétude vient du fait que, comme l'a exposé le Dr D'Aragon,
nos collègues de Transplant Québec, il est certain que la gestion au quotidien
du don et de la transplantation d'organes, c'est très particulier. On n'a rien
qui se compare à ça présentement à Héma-Québec de façon exacte. Alors, c'est
sûr qu'il faudra adapter nos priorités de gestion, nos... nos façons de gérer cette
nouvelle activité là. En fait, on va essentiellement prendre le modèle qui
existe déjà à Transplant Québec. On nous faisait la remarque que, pour les
tissus, ce n'est pas 24/7, 365, c'est vrai, pour les organes, on ne veut pas se
permettre ça, il faut être là 24/7, 365, Et ça, on va en tenir compte lorsqu'on
mettra en place les... lorsqu'on accueillera les structures de gestion
actuelles qui existent à Transplant Québec et qui fonctionnent très bien. Et ça,
ce sera la base pour, comme l'a dit Mme Fagnan, pour se projeter dans le futur
et tâcher de trouver de meilleures façons de faire, mais tout en tenant compte
d'une réalité qui est très particulière, on le reconnaît.
Le Président (M. Laframboise) :
Mme la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Merci, M. le
Président. Merci d'être là. Merci de vous prêter à répondre à nos questions. J'ai...
Il y a une chose qui m'a touché dans votre élocution et qui m'a rappelé
effectivement deux appels, deux appels à des moments qui sont particulièrement
difficiles pour les familles. C'est... On est dans la confusion. Les gens qui
reçoivent ces appels-là, évidemment, peuvent être... sont particulièrement
émotifs. Et on comprend évidemment que la redondance n'est pas toujours comprise
par les familles des gens qui sont... qui sont des donneurs potentiels, entre
autres choses. Mais, au-delà de ça, il faut quand même s'assurer d'une transition
qu'elle soit, à la fois, bien réalisée, parce que le don d'organes, c'est
essentiel. Et on le dit, on a eu déjà des discussions, on doit... ou il serait
souhaitable de le faire progresser aussi.
J'aimerais ça connaître un peu les
conditions, quelles sont les conditions qui sont essentielles ou qui sont
celles qui devraient être mises en place, les conditions gagnantes pour pouvoir
réaliser cette transition-là. Est-ce qu'il y a des points à identifier?
Mme Fagnan (Nathalie) : C'est
une très belle question. En effet, dans notre mémoire, nous avons mis en
lumière ces quatre conditions-là et justement, toujours dans le respect de l'expertise
de Transplant Québec, pour nous, il est clair que l'équipe doit suivre. L'équipe
doit être intégrée à Héma-Québec, assurément. Ça, c'est une première condition.
La deuxième, c'est que le financement suive aussi, alors, tel que l'a mentionné
tantôt la ministre Duranceau. Alors ça, ce sont les deux premières conditions.
La troisième, c'est que, dépendamment si le projet de loi est adopté, il faudra
quand même se donner un bon 90 jours pour travailler ensemble, orchestrer
certaines choses. Alors, ça, on l'a mis aussi comme une condition gagnante.
Et la dernière, c'est de prendre le temps,
prendre le temps de se connaître, prendre le temps de justement travailler
ensemble, puis de développer ces synergies-là pour justement en faire, oui, un
processus qui sera encore plus performant, et j'y crois vraiment.
Mme Lachance : Merci. Parce
que, vous savez, même si cette loi est dans une commission des finances
publiques, il faut le rappeler, l'objectif principal, c'est aussi de bien s'assurer
des transversales, de bien s'assurer d'une coordination efficace. Un des points
qui revient lorsqu'on... lorsqu'on consulte la littérature en lien avec les
succès, entre autres celui de l'Espagne, c'est le fait que chaque hôpital a un
poste ou, en tout cas, une personne clé qui est à la coordination...
Mme Lachance : ...de la
transplantation, ça vous dit quoi, ça?
Mme Fagnan (Nathalie) : Encore
là, et tu pourras compléter, Marc, mais je... Pour nous, la recette qui
fonctionne présentement à Transplant Québec, c'est ce que nous voudrions
reproduire. Alors, je sais qu'ils ont des coordonnateurs dans les centres
hospitaliers. Alors, il faudrait... il faudrait absolument, et c'est ce qu'on
souhaite, que l'équipe suive, qu'on commence avec la façon telle quelle, le
fonctionnement tel quel de Transplant, et qu'après on travaille ensemble à
trouver des synergies. Alors, c'est ça, notre objectif. Donc, nous on ne veut
rien chambouler au jour un, et, pour plusieurs mois, ce serait cette belle
continuité là qui assure un succès. Il faut que la transition soit réussie, des
vies en dépendent.
Mme Lachance : Pouvez-vous
nous parler un petit peu... Parce que votre organisme est quand même un peu
différent, on l'a mentionné, hein, dans le fond, vous êtes responsable de gérer
un inventaire, en termes de banque de sang, en termes de tissus. Et je vous
entends bien, là, puis c'est très rassurant de vous entendre dire que
l'expertise de Transplant Québec est importante pour vous puis qu'elle doit
être intégrée pour pouvoir faire fructifier la mission. En fait, c'est deux
missions qui devraient trouver preneur dans une mission élargie, mais le fait
qu'il y ait une séquence très rapide, au-delà... au-delà de dire : Bien,
on intègre les ressources, parce qu'évidemment c'est la clé du succès, d'avoir
les bonnes personnes à la bonne place pour pouvoir bien réaliser chacune des
missions de manière efficiente, et c'est ça, la volonté... Donc, dans cette
optique-là, est-ce que pour vous c'est inquiétant, le fait que ce soit
24 heures, sept jours, et puis... Parce que c'est ça, la réalité de la
transplantation, ça arrive dans des moments où on ne choisit pas toujours, en
fait, rarement, voire jamais, mais ça doit se faire.
• (11 h 40) •
Parce qu'il y a une donnée qui est
extrêmement importante. On parlait tout à l'heure d'un délai de 36 à 48 heures
pour organiser et un délai qui bénéficierait à être encore plus raccourci.
Donc, vous voyez ça comment?
Mme Fagnan (Nathalie) : Et
encore là... je vais te laisser après la parole, Mélanie, encore là, on va
partir de la base, de ce qui fonctionne présentement avec Transplant Québec,
mais il faut assurément que... ensemble, il faut trouver des façons de
l'améliorer. On le disait, oui, l'Espagne est un modèle, c'est un regroupement
des tissus et organes. Alors, ces deux groupes-là travailleraient très, très
près, ensemble, pour voir à optimiser et atteindre ces cibles-là que l'Espagne
et que le Portugal ont. Mélanie.
Mme Dieudé (Mélanie) : Oui. Je
pense qu'on est dans un endroit où on peut se permettre de rêver plus grand. Je
pense que la commission parlementaire nous avait enseigné qu'il faut aller plus
loin pour le don d'organes au Québec. Et Héma-Québec est vraiment conscient de
ça et veut épauler cette mission-là pour aller plus loin. On donne beaucoup
l'exemple de l'Espagne, qui est vraiment notre numéro un, mais le Portugal, il
faut le nommer aussi, est quand même le deuxième mondial et unit sang, tissus,
cellules. Donc, il y a des modèles qui existent. Et ils sont bon deuxième, ils
se sont d'ailleurs beaucoup inspirés de l'Espagne. Et donc je pense que de
mettre des conditions gagnantes et de faire levier sur l'infrastructure
efficace d'Héma-Québec tout en conservant l'unicité du don d'organes, mais de
les propulser pour aller plus loin, et de trouver les synergies ensemble, puis
de se donner le temps de les trouver, ça, je pense que c'est une opportunité
pour le don d'organes au Québec.
Mme Duranceau :
...la
parole, revenir sur l'expertise dans l'équipe administrative par rapport au don
d'organes, versus celle qui existe chez Héma-Québec, tu sais, en quoi mon
comptable, puis ma personne des ressources humaines, puis mon PDG doit avoir
une expertise spécifique.
Mme Dieudé (Mélanie) : Bien,
je pense qu'il y a... Tu sais, à Héma-Québec, de la manière que ça fonctionne,
c'est qu'il y a des différentes bulles d'organisation. Et donc il est vrai que
le sang est très particulier et diffère totalement du don d'organes, on est
conscients, mais les tissus aussi, ils ont leur propre... tu sais, leur propre
système informatique de gestion, par exemple, qui est complètement différent.
Pareil pour lait maternel, pareil pour cellules souches. Donc, tu sais, je ne
pense pas qu'il faut dire qu'Héma-Québec va prendre et va infuser comme une
machine, là, au don d'organes, mais va plutôt accueillir l'unicité du don
d'organes et mettre au service les infrastructures pour aller de l'avant, mais
en gardant cette unicité-là et ces expertises-là, en étant guidé par les
leaders en don d'organes au Québec.
Mme Duranceau : C'est bon,
merci...
Le Président (M. Laframboise) : ...Mme
la députée de Bellechasse pour 5 min 15 sec.
Mme Lachance : Merci, M. le
Président. Donc, on a parlé beaucoup, c'est vrai, vous l'avez mentionné, du
modèle de l'Espagne, parce qu'évidemment, l'Espagne est le... est le pays dans
le monde où s'effectue le plus de dons d'organes et c'est très bien.
Évidemment, il y a des conditions en amont qui sont... le don présumé, qui font
en sorte, évidemment, que possiblement, l'accès à un plus grand nombre de
donneurs assez rapidement. On ne traite pas du don d'organes comme on traite du
don de sang, mais encore, lors de notre récente intervention, en fait, de ma
récente intervention avec l'interlocuteur précédent et probablement que vous
étiez en déplacement, vous ne l'avez pas entendu, alors je vais le répéter,
c'est... je me questionne... le fait que vos donneurs de sang soient des gens
qui sont sensibilisés à l'importance de donner, du don de vie que ça
représente, et bien évidemment, je ne fais pas d'amalgame, là, je sais très
bien que le don d'organes est très différent. Néanmoins, je me posais la
question : y a-t-il une opportunité? Vous les voyez, vous les connaissez les
donneurs de sang, et on sait, d'autre part, qu'on doit... on doit, pour
augmenter les donneurs... les donneurs d'organes... augmenter l'éducation
assurément. Je pense que c'est au-delà de la sensibilisation, parce que
lorsqu'on voit des personnes malades pour qui le don de vie passe par un don
d'organes, on est tous conscients. Mais quand arrive le temps de faire le don
d'organes d'un proche, c'est très différent, hein, il y a... tu sais, c'est une
crise, en fait, qu'on gère. Est-ce que vous voyez une opportunité à pouvoir...
utiliser, comment je dirais ça, bénéficier du... de votre accès à une
population qui est déjà sensibilisée pour l'éduquer ou, en fait, pour permettre
de faire connaître et de préciser et de répondre aux questions et tout sur le
don d'organes? Est-ce que c'est quelque chose qui pourrait, selon vous, se
mettre en place et..?
Mme Fagnan (Nathalie) : Je
pense que c'est une... ça serait une option à explorer, je le dirais comme ça.
Par contre, quand on veut sensibiliser pour avoir plus de donneurs d'organes et
de tissus, là, on s'adresse au même groupe. Maintenant, comme vous dites si
bien, un don de sang, ça... on peut quand même faire une sensibilisation pour,
justement, rappeler aux proches l'importance d'offrir, de donner son consentement
et tout. Alors il y a... ce sera, encore là, de beaux défis à explorer en
équipe. Vas-y, Mélanie.
Mme Dieudé (Mélanie) : Bien, je
veux juste rajouter qu'il y a des modèles dans le monde où ils utilisent un peu
des... surtout pour les... les enfants, les jeunes, pour former les gens,
d'enseigner, un peu, une culture du don. Et la culture du don, au-delà du don
lui-même, là, le don de sang, le don de cellules, le don de sang de cordon,
donc, du début à la fin de la vie, la culture du don, l'altruisme, tu sais,
c'est une notion qui peut être combinée, donc il y a, oui, des... des
opportunités de coordination là, là-dessus, au niveau de la sensibilisation et
de l'éducation.
Mme Lachance : Vous avez
mentionné, puis là, je reviens à un niveau un petit peu plus administratif,
vous avez mentionné à ma collègue votre... dans le fond, la structure de votre
organisation au niveau administratif, elle est... elle est solide. On parle
quand même d'expertise, bon, là, je... je parle ici, peut-être, des ressources
humaines, là, tu sais, le volet très très purement administratif, qui n'est pas
lié au volet scientifique. Ça, c'est récurrent, ça va bien, vous avez une belle
organisation et vous êtes satisfaits de là où vous êtes, mais vous avez
mentionné qu'il serait important de bien intégrer le volet scientifique et
médical de Transplant Québec pour pouvoir faire progresser la... la combinaison
d'organismes vers des nouveaux... des nouvelles façons de faire ou, en tout
cas, de la... tout en respectant le mouvement qui est déjà enclenché. Pour le
volet administratif actuel, c'est quelque chose qui peut se faire simplement,
ou vous... vous sentez que ça nécessiterait d'augmenter significativement la
part administrative?
Mme Fagnan (Nathalie) :
Non,
je ne crois pas qu'on aurait ajouté à la... non, la part administrative de
Héma-Québec. Mais, par contre, nos... justement, tous nos services et nos
différents secteurs, pensons à la cybersécurité pour la protection des données,
pensons aux formations qu'on donne, on a des programmes de formation pour
nos...
Mme Fagnan (Nathalie) :
...alors ce qui peut être utile au groupe, tant mieux. Mais assurément que ça
va être plutôt nos ressources qui vont permettre de venir solidifier, je
dirais, parce que justement, lors des... des discussions à la dernière
commission sur la santé, les services sociaux, il y avait quand même des
demandes, oui, une loi-cadre, mais aussi des moyens additionnels et des
ressources. Et c'est ce que... ce que nous offrons par l'intégration de Transplant
Québec à Héma-Québec.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci. Merci. Merci, Mme la ministre, équipe gouvernementale. Maintenant, je
cède la parole de Mme la députée de Westmount—Saint-Louis pour 10 minutes,
24 secondes.
Mme Maccarone : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre témoignage et d'emblée, je souhaite vous
féliciter pour ce que vous faites. C'est vrai que Héma-Québec, vous sauvez des
vies, vous êtes une excellente organisation. Ça reste qu'évidemment nous avons
des préoccupations. Mais je souhaite que vous sachiez que ce n'est aucunement
en lien avec ce que vous faites actuellement, pour lequel j'ai un grand
respect. Même que j'aurai ma propre campagne de dons prochainement pour ceux
qui écoutent, HEC, au centre-ville de Montréal. Alors, bravo pour ce que vous
faites.
Moi, je souhaite savoir : est-ce que
vous avez été consulté avant le dépôt de ce projet de loi?
Mme Fagnan (Nathalie) : Non.
• (11 h 50) •
Mme Maccarone : Pas consulté.
OK. Puis c'est quoi, votre réponse à tout ce que nous avons déjà entendu? Il y
a... à date, puis nous, nous avons parlé avec plusieurs professionnels de la
santé, des médecins. Personne n'est favorable à cette fusion. Pas les médecins,
pas les infirmières. Nous venons d'entendre Docteur D'Aragon qui a dit
qu'évidemment ce n'est pas juste une question de la transition, c'est une
question de... Il va y avoir un désengagement. Alors, comment est-ce que vous
pouvez dire que vous êtes favorable à cette fusion en entendant ces cris de
cœur puis aussi ce que nous attendons, une autre perte pour notre réseau de
santé?
Mme Fagnan (Nathalie) : Est-ce
que tu veux... Parce que j'aurai aussi quelque chose à dire.
M. Germain (Marc) : Bien, je
peux commencer. On est tout à fait conscient que présentement, le message passe
difficilement auprès de nos collègues dans le réseau. On n'a pas eu l'occasion,
je dois dire, de discuter avec eux pour parler des avantages potentiels de ce
qui est sur la table. Je pense que ça, c'est... c'est la prochaine étape. Et
c'est pour ça que dans le plan de transition qu'on envisage, au jour un, on
veut préserver exactement le système tel qu'il existe présentement, préserver
les activités, les expertises, les emplois et bâtir là-dessus. Mais là, tout le
travail reste à faire pour faire la démonstration, avec nos collègues à
Transplant Québec et dans le réseau, de tabler sur les avantages que nous, on
perçoit pour cette fusion-là et, ensemble, travailler à développer le futur
pour arriver à l'objectif ultime. Je le rappelle, là, on l'a dit plusieurs
fois, mais je pense que c'est très important de le rappeler, c'est d'augmenter
le nombre de donneurs d'organes. Ce n'est pas autre chose, là, ce n'est pas de
faire des économies, ce n'est pas de...
Mme Maccarone : ...efficacité,
sauver de l'argent.
M. Germain (Marc) : Oui, je
suis tout à fait... tout à fait d'accord. Mais les économies en termes
d'argent, je pense que le docteur d'Aragon a été très éloquent. J'étais très
heureux d'entendre ce qu'il a dit, parce que de retirer des patients sur la
liste d'attente pour une greffe de rein, ça fait sauver de l'argent au système,
en plus de bénéficier leur santé, améliorer leur qualité de vie.
Mme Maccarone : Et il y aura
un risque, si nous poursuivons avec cette fusion. Ma question, la raison que je
le pose. C'est parce que vous êtes les seuls qui sont favorables à cette
harmonisation. Personne d'autre. Sincèrement, il n'y a personne d'autre qui est
favorable à ceci. On a fait des consultations. Oui, il y avait l'étude sur le
mandat d'initiative. Ça fait que je suis perplexe, parce que, même si vous
faites votre réponse à un besoin exprimé aux recommandations officielles, oui,
vous parlez d'un projet de loi-cadre qui a été déposé par mon collègue le
député de Pontiac. On aimerait beaucoup que le gouvernement appelle pour être
étudié, mais ce que vous parlez ici, c'est que votre proposition est une
réponse aux besoins qui sont exprimés par les recommandations officielles. Mais
les recommandations officielles sont claires, tout le monde a été du même
d'avis que la commission constate... et là je cite le mémoire : «La
commission constate que Transplant Québec est un organisme compétent qui
détient l'expertise et la capacité d'opérationnaliser rapidement le processus
de don d'organes au Québec.» Alors, la recommandation, c'est que c'est
uniquement eux qui s'occupent de ça. Ça fait que je comprends ce que vous êtes
entrain de dire, mais vous ne figure pas dans les recommandations du tout,
Héma-Québec ne fait pas partie de ces recommandations. Alors, c'est quoi votre
réponse à ceci? Vous êtes seul sur votre île.
Mme Dieudé (Mélanie) : Oui,
bien, j'ai... on a parlé quand même... J'ai parlé avec plusieurs collègues et
puis, bon, c'est sûr qu'il y a une inquiétude. Dans la vie... puis je pense que
tout le monde est conscient de ça, le statu quo est toujours plus confortable.
Ça, c'est certain...
Mme Dieudé (Mélanie) : ...et
je pense qu'il faut prendre le temps, un peu comme disait mon collègue
Dr Germain, de bien étudier les synergies pour aller plus loin. Le statu
quo n'est pas non plus acceptable pour Transplant Québec, pour le don d'organes
au Québec. Donc, c'est sûr que je comprends qu'il y a une certaine hésitation.
On a du travail à faire sur rassurer les gens. Mais je peux vous dire une
chose, pour avoir parlé à de nombreux collègues, les gens ont la mission du don
d'organes à cœur, se retroussent les manches et vont s'unir. D'ailleurs, il y a
Sylvain Bédard, un patient partenaire qui a écrit une lettre et qui appelle à
cette union-là des forces pour le don d'organes, pour améliorer le don
d'organes au Québec.
Mme Maccarone : Et avec tout
le respect que j'ai pour cette personne, que je ne connais pas, on a une trâlée
de médecins... d'experts chercheurs, des experts dans le domaine, tous les gens
qui sont venus témoigner, qui ont dit qu'ils ne sont pas d'accord avec votre
lecture. Ça fait que je comprends que vous dites, oui, la transition, ce n'est
peut-être pas facile, mais ce qu'ils disent, c'est que la transition va coûter
des vies. On a bien entendu, Dr D'Aragon nous a dit : Il va avoir des gens
qui vont décéder à cause de ceci. J'ai aussi entendu, lors de votre témoignage,
vous avez dit que, oui, c'est important de rassurer les employés par rapport à
leur avenir. Je pense que vous étiez dans la salle pendant que Transplant
Québec ont témoigné. Moi, ce n'est pas ça que j'ai entendu, moi, ce que j'ai
entendu, ce n'est pas une question de : Je veux être rassuré de garder mon
emploi, c'est parce qu'on n'a pas la même vision, on n'a pas les mêmes
objectifs.
Nous avons une spécialité que nous
souhaitons garder puis cette transition va engendrer des mises au pied. Ce
n'est pas parce qu'ils souhaitent que vous les engagez. Alors, encore une fois,
c'est quoi, la réponse à ceci? Parce que ce n'est vraiment pas ma lecture, et
je crois qu'on a plusieurs infirmières spécialisées qui sont ici, dans la
salle, qui sont en accord avec ça.
Mme Fagnan (Nathalie) : Alors,
il est certain que, et je respecte la position de Transplant Québec, qui
veulent justement un retrait de tout ce... de tous les articles qui concernent
Transplant Québec dans le projet de loi n° 7. Alors, le
discours suit... suit l'intention, et je le comprends, là. Mais j'espère que,
quand les gens aiment leur travail et qu'ils sauvent des vies, et que, comme à
Héma-Québec, on a... l'ensemble de nos employés portent la mission dans leur
cœur, je crois qu'il y a peut-être, oui, une possibilité de les accueillir puis
qu'ils veulent continuer à faire leur travail. Cela dit...
Mme Maccarone : Si nous
poursuivons avec le projet de loi tel quel, évidemment, on n'aura vraiment pas
le choix, parce que là on parle d'une efficacité, mais vous avez vraiment la
nécessité d'engager des fonctionnaires, un minimum de 70 fonctionnaires.
Alors, comment ça se fait qu'on peut voir que ça, c'est une synergie puis une
épargne pour l'État? Puis je reviens à ce que vous avez dit, il y a un terme
de... Oui, on ne devrait pas rester campé, là, les transitions sont difficiles,
il faut innover. Mais pourquoi vous ne pouvez pas innover, trouver des manières
des plus efficaces? Vous, Héma-Québec et Transplant Québec, pourquoi il faut
que ça se fasse ensemble? Parce qu'il va avoir des coûts pour l'État, vous êtes
un organisme de l'État, 70, minimum.
Mme Fagnan (Nathalie) : ...est
un modèle, et l'Espagne, ils ont regroupé. Portugal est un modèle, ils ont
regroupé. Alors, ce n'est pas loufoque. Dans le reste du Canada, c'est
regroupé, dons tissus et organes. On a des modèles éprouvés, là.
Mme Dieudé (Mélanie) :
Peut-être aussi au niveau de la confiance, puis, tu sais, je les salue, ils
sont là, je sais qu'ils sont là, parce qu'ils ont ça à cœur. Puis ça, je
partage ça, je suis encore chercheure en transplantation. J'ai vécu là-dedans,
ça fait plus que 15 ans, et j'ai vraiment le don d'organes à cœur,
personnellement. Je sais que c'est transmis à Héma-Québec.
Mme Maccarone : Mes questions
ne sont pas du tout en lien avec votre...
Mme Dieudé (Mélanie) : Non,
non, je sais. Mais ce que je veux dire, c'est que, malheureusement, pour toutes
sortes de raisons, on n'a pas eu encore la chance de se parler, OK, on a tendu
la main. Et ces discussions-là qui sont absolument nécessaires au lien de
confiance, à créer quelque chose ensemble, bien, on n'a pas eu la chance de les
avoir encore.
Mme Maccarone : Ça, je suis
d'accord avec vous. C'est une discussion que vous aurez dû avoir avant le dépôt
de ce projet de loi, pour savoir comment nous aurons pu travailler ensemble, au
lieu d'avoir un spectacle en commission parlementaire où, encore une fois, je
répète, vous êtes tout seuls sur votre île, il n'y a personne qui est en accord
avec votre position, même pas les membres de la commission. On a des gens qui siègent
ici aujourd'hui, qui ont été membres de cette commission à l'époque. Alors,
c'est comme un changement de vision.
Ça fait que je vous entends, mais j'ai
vraiment de la misère à comprendre. Ce n'est pas parce que vous ne croyez pas
en sauvant des vies ou le don d'organes. Puis quand vous parlez aussi d'une
synergie qui existe déjà à travers le Canada, ce n'est pas le sang et les
organes, c'est ça, la différence. Ça, c'est à part...
Mme Fagnan (Nathalie) : ...au
Portugal, oui.
Mme Maccarone : Au Portugal,
mais vous avez évoqué le Canada, mais ce n'est pas...
Mme Maccarone : ...cas au
Canada, on n'a pas une fusion de sang et organes. Alors, on a des grandes
différences. Ça fait qu'on n'a vraiment pas beaucoup de modèles, à part le Portugal,
qui disent que, ah! oui, mais ça, ça fonctionne. Mais tous les modèles qu'on
évoque, qu'on dit qu'ils sont excellents, c'est l'Espagne, c'est à l'échelle
internationale. Et Transplant Québec sont reconnus nationalement et
internationalement. Ça fait que vous n'avez pas des préoccupations, avec cette
fusion, qu'on va avoir une perte de vies, une perte de synergie, une perte
d'efficacité et plus de coûts?
Mme Dieudé (Mélanie) : Je
peux... Si je peux me permettre, le passé est garant de l'avenir, on le dit
souvent. On dit que sang, ça n'a rien à voir avec don d'organes, on le concède
totalement. Ce qu'on voit dans les autres modèles, c'est organes et tissus qui
sont mis ensemble, on est d'accord. Bien, la... Héma-Québec, sa mission a été
élargie au don de tissus. Et cette mission-là a été fructifiée au point de
devenir la plus grande banque de tissus au Canada. Donc, ce que je veux dire
ici, ce n'est pas que tissus, c'est comme les organes, mais c'est que la
structure d'Héma-Québec permet à d'autres missions qui ont des particularités
de se développer, de s'amplifier puis d'avoir plus d'impact. Ça fait que c'est
là... c'est là que le don d'organes, dans son unicité...
Le Président (M. Laframboise) :
Merci. Merci.
Mme Dieudé (Mélanie) : ...pourrait
aussi bénéficier.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup.
Mme Dieudé (Mélanie) : Merci.
Le Président (M. Laframboise) :
Donc, je cède maintenant la parole au député de Laurier-Dorion, trois minutes
28 secondes.
• (12 heures) •
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Écoutez, on a l'impression ici qu'il y a une tentative de fusion — et
c'est une impression, hein — forcée de deux logiques complètement
différentes, une logique qui est mise de l'avant de façon tout à fait logique,
là, de façon cohérente, là, par Héma-Québec, une logique de production,
d'efficacité des chaînes d'approvisionnement, d'autres intervenants l'ont dit,
de gestion d'inventaires, et la fusion avec une logique de... portée par
Transplant Québec, là, une logique de soin, d'éthique et d'accompagnement des
familles, des milieux, etc., là. Et, pour utiliser la... l'expression du Dr
D'Aragon, on a de la difficulté à voir la possibilité de greffe entre ces deux
logiques-là. Vous, vous nous dites, là, que... et vous l'avez mentionné il y a
quelques minutes, là, qu'Héma-Québec fonctionne beaucoup par bulle, etc. Mais,
à un moment donné, il y a des limites à fonctionner par bulle. Donc,
expliquez-nous cette... ce qui semble une contradiction, là.
Mme Fagnan (Nathalie) : Bien,
moi, je vous dirais que, oui, on opère, pour les tissus humains, avec une
équipe dédiée qui est bien là dans son contact avec les familles endeuillées.
On a des préleveurs, on forme nos préleveurs qui vont prélever... pardon, qui
prélèvent les tissus. Ils ont 24 heures pour le faire. Ce que je veux dire
c'est qu'on s'est adaptés pour rendre ça possible. Et oui, aujourd'hui, on a la
plus grande banque de tissus et on est le distributeur unique de tous les tissus
dans la province de Québec. Alors, oui, on s'organise, on s'adapte, on... on
est agiles.
Ce que je dis, c'est que, si Transplant
Québec veut améliorer, justement, l'augmentation du nombre de donneurs, ils
vont devoir requérir probablement, tel qu'ils demandaient, des ressources
additionnelles. Alors, ça, ça sera... ça sera à la liberté de l'Assemblée
nationale de décider si c'est là qu'il faut aller. Parce que c'est ce qui a été
mentionné à la commission sur la santé : une loi-cadre et des ressources
additionnelles. Ce que je fais juste dire, c'est que nos ressources en
cybersécurité, en gestion de risques, en formation, en autre... elles sont là.
Et, quand on parle de cybersécurité, de la protection des données, c'est
crucial aujourd'hui, on a des attaques tout le temps. Alors, de les munir de
toute cette structure-là qu'on a, ça va coûter très cher à l'État, c'est ce que
je dis.
M. Fontecilla : D'autre part,
on a... on... il se dégage de cette discussion-là qu'il y a... il y a un...
comment dire, une inflexion, un changement brusque de direction, et vous...
parce que vous parlez de la commission parlementaire. Oui, elle a recommandé
une loi-cadre concernant les données à un organisme, mais c'était explicitement
nommé que ça devait être Transplant... Transplant Québec, là. C'était la...
Écoutez, j'ai le texte devant moi, là. C'est écrit : «La commission
constate que Transplant Québec est un organisme compétent qui détient
l'expertise et la capacité opérationnelle rapidement... d'opérationnaliser rapidement
le processus de don d'organes.» Donc, on s'en allait à... il y a juste quelques
mois, là, un an, on s'en allait dans cette direction-là, là on bifurque vers
Héma-Québec, là. Vous avez eu le temps... En réponse à ma collègue, là, vous
avez eu dit... vous avez dit que vous n'avez pas eu le temps de se parler.
Donc, j'ai l'impression que c'est comme... il y a une... c'est un peu
improvisé, tout ça, là. On s'en allait dans une direction et brusquement on
change de direction pour vous donner un mandat qui suscite des questionnements,
là. Est-ce que vous êtes préparés, là?
Mme Fagnan (Nathalie) : J'apprécie...
J'apprécie votre question...
Le Président (M. Laframboise) : ...le
député a pris tout le temps...
12 h (version non révisée)
Le Président (M. Laframboise) : ...pour
sa question... Donc, on va poursuivre avec le député d'Arthabaska pour 2 min 38
s.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci pour votre présentation. Il y a souvent une crainte qui est
exprimée sur le terrain, dans le réseau de la santé en général, ou, en tout cas,
quand je parle à des infirmières, entre autres, qui est... que ce soit une
forme de désincarnation, d'éloignement de la prise de décision du terrain, qu'on
se retrouve avec une structure où la gestion s'éloigne des employés, s'éloigne
de l'expertise. De quelle façon vous pensez qu'on peut mettre des garde-fous
pour s'assurer que ce ne soit pas le cas? Comment vous pourriez rassurer les
infirmières qui peut-être ne voudraient pas faire ce passage-là? Puis on a
entendu des intervenants en parler un peu plus tôt. Comment vous pourriez
rassurer ces gens-là qu'on ne sera pas dans une situation Santé Québec, là?
Mme Fagnan (Nathalie) : Et c'est
pour ça que nous, quand on a pensé... qu'on a travaillé sur notre mémoire, on s'est
dit : Il faut que l'équipe rejoigne et dans un fonctionnement tel quel
pour le moment. Alors, on ne veut pas brusquer, on ne veut pas tout... tout
vouloir changer, on veut être dans le respect du fonctionnement actuel. Alors, le
fonctionnement actuel, on le dit, ça fonctionne. Après ça, on verra à... à
amener nos synergies. Mais, encore là, on veut sauver des vies. On sait s'adapter.
La réalité de Transplant Québec, on va... on va la connaître et on va... on va la
vivre avec eux. Puis, ensemble, on va trouver des façons d'améliorer. Ça ne
sera pas de... de déraciner ou d'imposer, ce n'est pas comme ça qu'on
fonctionne à Héma-Québec. Regardez, le don de cellules souches, là, on
transporte les cellules souches, on a des gens qui attendent, imaginez quand il
y a eu la pandémie puis que les... les frontières étaient fermées, là, puis on
avait le donneur de cellules souches qu'on ne pouvait pas amener en quarantaine
parce que tous les... tous les... tous les voyageurs qui arrivaient devaient
être en quarantaine, c'est des situations où on se revire comme sur un 10 sous
puis on fait arriver les choses parce qu'il y a une question de vie. Alors, c'est...
pour nous, ce n'est pas... ce n'est pas si différent, ce n'est pas si loin,
mais on reconnaît qu'on veut apprendre aussi puis... puis projeter, oui, faire...
faire mieux avec eux, ce n'est pas... ce n'est pas juste nous, c'est avec eux.
M. Boissonneault : Mais
parlant de vie, si je peux me permettre, ce matin, on a entendu Transplant
Québec, le Dr D'Aragon parler de pertes de vies humaines, là. S'il devait y
avoir fusion, il y a des gens qui vont mourir. Comment vous vous sentez par
rapport à ça?
Mme Fagnan (Nathalie) : Mais
ça, c'est... Le risque, je le dis, le risque, c'est si les équipes ne... ne
sont pas intégrées. C'est pour ça que, dans nos conditions gagnantes, j'ai dit :
La première condition gagnante, c'est que les équipes transfèrent. Exact. Parce
qu'on n'en veut pas, des pertes de vies. C'est... c'est... Il n'y a personne
qui veut ça, ni le gouvernement ni nous. Alors, il faut... C'est une condition
gagnante et ça fait partie des quatre conditions gagnantes inscrites dans notre
mémoire.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup. Merci, Mme Fagnan, Dr Germain, Mme Dieudé. Je vous
remercie pour la contribution d'Héma-Québec aux travaux de la commission.
La commission suspend ces travaux jusqu'après
les avis touchant les travaux des commissions. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 06)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 25)
Le Président (M. Laframboise) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des finances publiques reprend ses
travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et l'audition publique sur le projet de loi n° 7, Loi visant
à réduire la bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer l'imputabilité
des hauts fonctionnaires. Cet après-midi, nous entendrons les témoins suivants.
Médicaments novateurs Canada, l'Association des collèges privés du Québec, l'Institut
national de santé publique du Québec, le Réseau pour un Québec Famille et le
Syndicat de la fonction publique et parapublique.
Je souhaite donc la bienvenue aux
représentants de Médicaments novateurs Canada. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
commencer votre exposé.
Mme Hamelin (Bettina) : Mme
la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres de la commission, bonjour.
Merci de nous donner l'occasion de participer à ces consultations sur le projet
de loi n° 7. Je m'appelle Bettina Hamelin, je suis la présidente et cheffe
de la direction de Médicaments novateurs Canada, ou MNC. Je suis accompagnée
aujourd'hui par Mme Christine Lennon, vice-présidente et directrice générale Incyte
Biosciences Canada et membre de MNC, M. Olivier Jerome, directeur relations
gouvernementales Québec et alliances stratégiques MNC et aussi le président du comité
Québec de MNC, et M. Denis Laflamme, gestionnaire principal aux relations
gouvernementales et affaires externes, Takeda Canada, et vice-président du comité
Québec de MNC.
MNC représente plus de 47 compagnies qui
découvrent et développent des médicaments et vaccins innovants. Notre secteur
soutient plus de 110 000 emplois de qualité au pays, investit 3,2
milliards de dollars en R&D chaque année et contribue 18,4
milliards de dollars au PIB canadien.
L'accès aux médicaments innovants est un
défi mondial. Le Canada, incluant le Québec, se classe 19e sur 20 pays de l'OCDE
et dernier du G7 pour la rapidité d'accès aux nouveaux médicaments. Cette
performance limite l'arrivée de nouvelles thérapies et nuit à la capacité du Québec
d'attirer des investissements en recherche. Les pressions internationales, dont
la politique américaine de Most Favored Nation, on l'appelle MFN, accentuent l'importance
d'avoir des processus plus efficaces et plus compétitifs. Dans plusieurs
juridictions performantes, les gouvernements ont choisi des modèles plus
modernes et des partenariats structurés pour faciliter un accès plus rapide.
Nous reconnaissons les objectifs généraux
du projet de loi n° 7, qui visent à améliorer l'efficacité de l'État et à
réduire la bureaucratie. Ces objectifs sont légitimes, surtout dans un contexte
où la compétitivité du Québec est essentielle pour retenir et pour attirer l'innovation.
L'INESSS occupe un rôle central dans cet écosystème. Son mandat scientifique
indépendant et son expertise en évaluation des médicaments et des technologies
de la santé sont largement reconnus. Ces forces doivent être protégées
intégralement dans le cadre de la fusion envisagée.
Le Québec est l'une des rares juridictions
en Amérique du Nord à avoir son...
Mme Hamelin (Bettina) : ...propre
organisme d'évaluation. C'est un avantage stratégique important, à condition de
maintenir un institut fort agile et bien doté. Contrairement à l'Agence des
médicaments du Canada où l'AMC, l'INESSS possède un mandat beaucoup plus large
qui dépasse l'évaluation du médicament. La fusion proposée crée donc certains
risques que nous souhaitons soulever. Premièrement, il faut absolument
préserver les expertises et la capacité d'évaluation. Nous craignons que la
fonction d'évaluation puisse être diluée au sein d'une structure plus vaste et
non dédiée exclusivement à cette mission essentielle. L'INESSS fait déjà face à
un arriéré important dans le traitement des évaluations, ces retards créent des
écarts avec les processus pancanadiens et entraînent des délais additionnels
pour les patients québécois. La fusion soulève aussi des questions concernant
l'évaluation des vaccins actuellement assurés par le... relevant de l'INSPQ. Il
est donc essentiel que le projet de loi et les futurs règlements garantissent
la mission propre et l'indépendance de l'INESSS pour le médicament. La mission
propre, l'indépendance de l'INSPQ pour le vaccin et des équipes en effectifs
suffisants pour réaliser les évaluations nécessaires sans retard
supplémentaire. Deuxièmement, il faut renforcer et non affaiblir la
direction de l'évaluation des médicaments et technologies. Cette direction est
l'élément central de l'accès aux... aux innovations thérapeutiques au Québec.
La nouvelle entité doit absolument consolider sa capacité en assurant la
présence d'une expertise en médicaments dans les fonctions clés de direction et
au conseil d'administration, en augmentant les ressources spécialisées dédiées
aux évaluations et en modernisant les méthodes, en s'inspirant des meilleures
pratiques de l'AMC et d'autres juridictions internationales. La fusion
représente, à nos yeux, une occasion de réduire les délais, simplifier les
processus et accroître l'efficacité si, et seulement si, les expertises sont
renforcées.
• (15 h 30) •
Mme Lennon (Christine) : Il
est aussi important de rappeler que l'industrie contribue directement au
financement des activités d'évaluation. Chaque année, environ 6
millions de dollars proviennent des frais versés par les manufacturiers
sur un budget total d'environ 40 millions. De plus, MNC entretient une relation
de travail structurée et constructive avec la haute direction de l'INESSS à travers
des rencontres statutaires. Ces échanges permettent de cibler les obstacles et
d'identifier des solutions. Cette collaboration doit être maintenue et
renforcée dans le nouveau modèle de gouvernance.
Mme Hamelin (Bettina) : En
conclusion, nous croyons que la réforme proposée doit servir un objectif clair
pour la population : accélérer l'accès aux traitements dont les patients
en besoin. Aujourd'hui, au Québec, il faut parfois plus de deux ans entre
l'approbation de Santé Canada et l'inscription finale d'un médicament à la
RAMQ. C'est beaucoup trop long pour les médicaments, les cliniciens et pour le
système lui-même. Le Québec pourrait s'inspirer de certaines initiatives
ailleurs au pays. L'Ontario, par exemple, vient de lancer un projet pilote
d'accès accéléré pour certains médicaments en oncologie. Le projet FAST, une
solution similaire basée sur la publication des avis de l'INESSS, avait déjà
été proposée ici, au Québec. Nous souhaitons poursuivre nos discussions avec le
MSSS. La population du Québec mérite un accès rapide, équitable et fondé sur la
meilleure science. Le projet de loi 7 représente une réelle occasion
d'améliorer les choses. Nous sommes prêts à collaborer pleinement pour y
parvenir. Je vous remercie.
Le Président (M. Laframboise) : Merci,
merci beaucoup. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la
ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Fabre, Dubuc et Masson,
vous avez 16 min 30 sec.
Mme Duranceau : Merci, merci
d'avoir pris le temps, là, de nous parler aujourd'hui puis de nous faire part
de...
15 h 30 (version non révisée)
Mme Duranceau : ...de vos
commentaires. Donc, écoutez, je ne perçois pas de réticence outre mesure de
votre part, là, à un regroupement de l'INESSS puis l'INSPQ. Je pense que vous
avez fait part de mises en garde. Toutefois, pour être sûr qu'on va, bon, s'interroger
sur les délais, sur les processus puis s'assurer d'optimiser ça, alors... Tu
sais, peut-être j'aurais le goût de vous le demander, de manière très succincte,
là, ou structurée, les conditions gagnantes pour que cette fusion-là soit réussie
puis qu'effectivement elle ait des répercussions favorables, nonobstant l'aspect
efficacité de l'état, là, de la chose, que ça se fasse sentir sur les services
aux citoyens, notamment avec la disponibilité de médicaments, par exemple, qui
seraient disponibles plus... plus rapidement, là. Ça fait que, concrètement...
concrètement, qu'est-ce que ça prend pour que ça fonctionne comme il faut?
Mme Hamelin (Bettina) : Ce
que ça prend pour que ça fonctionne comme il faut, c'est un peu ce qu'on a...
ce qu'on vient de présenter, c'est que l'INESSS a un rôle très important à
jouer dans l'évaluation des médicaments, si demain on a besoin de l'avis de l'INESSS
pour pouvoir lister les médicaments pour que les Québécois puissent avoir
accès. Alors, ce qu'on vous propose, c'est que, pour que ça fonctionne, il faut
que l'INESSS soit équipé, doté pour exercer cette fonction-là et aussi que
le... puisse exercer ces fonctions-là pour les vaccins.
Mme Duranceau : Bien
dites-moi, à l'heure actuelle, tu sais, si on exclut la fusion, là, pour...
deux minutes, l'INESSS est équipé pour livrer ou pas, considérant les délais
que vous mentionnez?
M. Laflamme (Denis) : Je
dirais que...
Mme Hamelin
(Bettina) :
Denis?
Denis, vas-y, oui.
M. Laflamme (Denis) : Oui, si
c'est possible. Je dirais qu'il n'est pas équipé adéquatement au moment où on
se parle. Ce matin, je regardais le plan de travail de l'INESSS, et il y a, je
crois, 146 médicaments qui sont sur le plan de travail de l'INESSS, et,
là-dessus, il y a 29 dossiers qui ont été considérés recevables, mais dont
l'évaluation n'a pas été commencée. C'est du, à peu près, jamais vu depuis que
je suis dans l'industrie. Ça fait une vingtaine d'années que je suis dans l'industrie.
Et ça, qu'est-ce que ça l'a comme impact? C'est qu'effectivement, ces
médicaments-là, dont on attend le début de l'évaluation, bien, on ne sait pas
quand est-ce qu'ils vont commencer et quand est-ce qu'ils vont devenir
disponibles par la suite pour les patients québécois. Donc, quand on parle de...
L'expertise est là, mais je crois qu'il y a peut-être un manque de ressources
actuellement. Donc, notre questionnement, c'est... Avec la fusion de deux
organismes comme ceux-là, non seulement il faudrait que ces postes-là soient
comblés, mais s'assurer que la nouvelle entité soit capable de faire face aux
demandes, parce qu'il y a de plus en plus de... il y a de plus en plus d'innovations
qu'on veut amener sur le marché et donc il y a de plus en plus de dossiers qui
sont soumis à l'INESSS.
Mme Duranceau : Maintenant,
je comprends votre impatience à mots couverts pour que les choses... les choses
avancent plus rapidement. Je pense, c'est...
M. Laflamme (Denis) : C'est
notre impatience pour les patients québécois, parce que c'est eux autres, en
bout de ligne, qu'ils reçoivent ou non le médicament.
Mme Duranceau : Tout à fait.
C'est ça. Ça fait que je pense que cette problématique-là, elle existe, là,
nonobstant la notion de fusion. C'est sûr qu'il ne faut pas venir empirer la
situation avec un regroupement. Il faut que, dans un contexte de regroupement
qui devrait dégager des efficacités au niveau administratif ou, en tout cas,
des... on va parler des ETC, là, donc des postes qui peuvent se libérer, parce
qu'il y a des doublons, bien, on va se dégager une capacité peut-être d'aller
chercher les ressources dont on a besoin pour des choses plus techniques, si l'administratif
est regroupé, là. C'est ça, l'objectif. Ce n'est pas de faire tomber les
missions de l'un ou de l'autre, mais plutôt de regrouper sur le plan
administratif pour aller chercher des synergies de ce côté-là, un meilleur
partage des responsabilités aussi, là. Je pense que, pendant la pandémie, il y
avait eu... il y avait eu des enjeux... ou qui s'occupe de quoi, là, alors que
ça, ça pourrait être... ça pourrait être plus clair. OK. Bien, écoutez, moi, je
comprends bien, là, ce que vous... ce que vous mentionnez à cet égard-là.
Est-ce que...Tu sais, au niveau international, là, avez-vous... avez-vous des
comparables ou... tu sais, si vous travaillez avec d'autres juridictions, des
comparables qui pourraient nous être utiles, là, dans l'exercice qu'on essaie
de faire?
Mme Hamelin (Bettina) : Je
peux... je peux vous décrire. Tu sais, dans l'international, il y a des juridictions
qui...
Mme Hamelin (Bettina) : ...qui
sont vraiment capables d'offrir des médicaments dès que l'organisation
réglementaire donne leurs approbations. Si on parle d'Allemagne, France, on
parle aussi des États-Unis, mais tu sais, ici au Québec, il y a quand même
plusieurs étapes. Et comme mon collègue a mentionné, il y a des arriérés
importants qu'il faudrait, tu sais, il faudrait s'attaquer à ça. Mais ces
juridictions-là ont trouvé des façons à donner accès aux médicaments pendant
que l'administratif se passe pour, par exemple, négocier les prix. Tandis
qu'ici, on attend à tout fin l'évaluation en négociation des prix avant qu'on
puisse donner accès aux médicaments. Donc, on peut s'inspirer de l'Ontario ici,
parce qu'on a basé un modèle sur l'Allemagne, mais aussi l'Allemagne, la France
et d'autres pays qui ont de l'avance, tu sais. On est les derniers au G7. Comme
ma collègue a mentionné, on est les derniers au Government. Les G7... donc, il
y a au moins six juridictions qui sont mieux que nous. En fait, il y en a plus
parce qu'on est 19ᵉ sur 20 des pays, donc.
Mme Duranceau : Bien, moi, ce
que j'entends, c'est qu'il y a des processus qu'il faut qu'ils soient revus,
fusions ou pas, là, tu sais, que ça, c'est très long. Évidemment, l'idée n'est
pas de lancer la balle au fédéral, là, mais je pense qu'il y a un... il y a un
partage fédéral-provincial là-dedans dont il faut tenir compte. OK... puis
écoutez, ça va... là, évidemment, ces commentaires-là, ils ne sont pas de nature
législative, là, si on veut. Je ne sais pas, est-ce qu'il y a des éléments
au-delà de ce que vous avez mentionné, purement législatifs ou pour améliorer
notre projet de loi, là, sur cet élément-là qui valent la peine d'être
mentionnés?
• (15 h 40) •
M. Jerome (Olivier) : Bien,
écoutez, je pourrais répondre d'emblée de façon un peu complémentaire à ce qui
a été dit. On a parlé de la capacité de traitement, donc, la capacité de
traiter en nombre dans des délais qui correspondent aux standards qu'on peut voir
dans d'autres juridictions. Mais il y a également toute la notion de qualité
puis d'expertise qui doivent être absolument conservée. C'est des fonctions
hautement spécialisées qui requièrent des mois, des années de formation pour
bien conduire ces études-là. C'est vrai pour l'INESSS au point de vue
d'évaluation des médicaments, des technologies de la santé, c'est également
vrai pour le vaccin, du côté du CIC. Du côté de l'INSPQ, c'est des fonctions
clés essentielles qui s'inscrivent dans la chaîne, justement, des étapes qui
mènent à un accès pour la population. Il y a un risque de voir ces
expertises-là potentiellement diminuées ou réduites s'ils ne sont pas
pleinement saisis de l'importance puis de la spécialité qu'elles représentent.
Et ça, ça se passe aussi à haut niveau. Je
crois que ma collègue en a parlé durant son allocution. Il faut que cette
compréhension de cette spécialité-là se reflète à haut niveau de l'institut...
dans le nouvel institut qui serait créé, c'est-à-dire au niveau du rôle du PDG,
puis de la composition du CA. Il faut qu'il y ait une capacité de pouvoir
piloter les activités du nouvel institut en tenant compte de la haute
spécialité et de l'importance critique que représentent les travaux
d'évaluation des deux entités qui seraient appelées à fusionner. Donc, ça fait
partie des conditions gagnantes pour faire de cette fusion-là quelque chose qui
met les bases de peut-être d'une amélioration plus grande, mais qui
préserverait les risques anticipés.
M. Laflamme (Denis) : Et sauf
erreur, si je peux rajouter sur ce qu'Olivier vient de mentionner, le
législateur propose des profils pour le conseil d'administration de la future
entité du futur institut. Et sauf erreur, il n'y a pas personne avec un profil
médicament comme tel. Bien sûr, ce profil-là pourrait se retrouver au niveau de
la PDG ou du PDG, mais il y a différents profils qui sont énumérés, 14 je
crois, en tout et partout, et je ne voyais pas un profil médicament, là, écrit
en noir et blanc.
Mme Duranceau : OK. Donc, ça,
ça serait souhaitable de valider cet aspect-là, à ce moment-là, OK. Ce qu'on me
dit aussi sur les délais d'approbation et tout, pas tant les délais, mais
chaque fois qu'on approuve quelque chose, on va se dire les vraies affaires, il
y a des coûts pour le système. C'est des nouveaux médicaments qui deviennent
disponibles, puis évidemment, qui coûtent quelque chose. Évidemment, ils
rendent un service à la population, mais j'imagine qu'on a ces
considérations-là d'un point de vue de l'ensemble de l'État, là, pour être
capable d'arriver à payer tout ce qu'on a à payer...
M. Laflamme (Denis) : ...si
vous connaissez un peu le cycle des médicaments novateurs, c'est qu'une fois
qu'on a perdu notre brevet, on peut être copiés par des compagnies de médicaments
génériques qui arrivent à un bien plus faible coût. Et ces économies-là que le
gouvernement peut faire avec l'arrivée des médicaments génériques, on suppose
qu'ils peuvent servir à supporter l'innovation. Donc, il y a un peu un vase
communicant puis il y a même des politiques que le gouvernement a mises de
l'avant, notamment au niveau des biosimilaires qui sont l'équivalent des
génériques pour des produits biologiques, ou effectivement, ça a fait en sorte
que ça crée des économies au ministère de la Santé, mais qui permettent
idéalement pour... de notre... de notre position, puissent être réinvestis dans
l'innovation, parce qu'il n'y a pas de générique sans qu'il y ait d'innovateur.
Mme Duranceau : Non, non,
c'est bon, c'est un bon argument. Merci. Je pense que j'ai un collègue qui a
une question pour vous.
Le Président (M. Laframboise) :
M. le député de Masson.
M. Lemay : Oui. Bonjour.
Alors, moi, j'aimerais ça va revenir parce que vous reconnaissez quand même la
pertinence puis les objectifs généraux du projet de lo 7, en soulignant qu'un
État plus simple, plus agile et plus efficace est essentiel pour améliorer
l'accès aux traitements et favoriser l'innovation en... Santé Québec. Puis vous
avez... vous l'avez dit tantôt dans votre allocution de départ, là, que vous
soulignez aussi le rôle central de l'INESSS dans l'écosystème d'accès aux
technologies de santé, particulièrement pour les médicaments innovants.
Puis là, j'aimerais ça vous entendre
clairement, là, dans la mesure où que le gouvernement met en place les
garanties que vous proposez pour préserver et renforcer le leadership de
l'expertise médicament au sein du nouvel Institut. Est-ce que vous pouvez me
confirmer que votre organisation appuie l'orientation générale de ce projet de
loi? Puis, selon vous, ça serait quoi les deux, trois éléments les plus
importants à intégrer pour que cette fusion soit un succès au point de vue de
l'accès aux médicaments innovants? Puis là, je fais référence à votre section
sur la fusion INSPQ-INESSS, dans votre document que vous nous avez transmis.
Mme Hamelin (Bettina) : Oui.
Alors, écoutez, c'est... C'est que... c'est qu'on est tout à fait en support à
gagner de l'efficacité, d'agilité d'assigner les ressources nécessaires pour
évaluer les médicaments et les vaccins de façon très efficace. Et comme...
comme on a décrit, ce que... ce qui est nécessaire, c'est que l'expertise est
maintenue, que les ressources sont en place et que les temps de décision et
d'approbation des décisions finales et des recommandations finales n'auraient
pas plus des délais que... qu'on a déjà. Donc, il faudrait vraiment qu'on prend
avantage de cette réorganisation, si vous voulez, pour rendre les processus
plus efficaces. Parce que les Québécois attendent trop longtemps pour leurs
médicaments.
M. Jerome (Olivier) :
J'ajouterais, Bettina, l'efficacité organisationnelle, oui. Tout ce qu'on peut
obtenir découlant de la mutualisation de ressources qui sont fusionnables, oui,
certainement. Mais tout ça ouvre la porte à peut-être une modernisation puis
des meilleurs arrimages avec les meilleures pratiques, n'importe quoi qui va
pouvoir s'inscrire dans un grand changement qui pourrait découler de cette
réorganisation-là, là, miserait juste.
M. Lemay : OK. Merci pour les
précisions. Puis, si on va à votre section plus des enjeux mondiaux et
canadiens d'accès aux médicaments innovants, tu sais, vous rappelez, dans cette
section-là, que le Canada puis le Québec, on figure parmi les plus lents de
l'OCDE puis du G7 pour l'accès aux nouvelles thérapies innovantes, puis là,
dans un contexte international de pression sur les prix, là, vous insistez que
la fusion, elle ne nuise pas à un accès rapide, équitable aux innovations puis,
au contraire, qu'elle améliore la capacité, l'efficacité des processus
d'évaluation.
Là, si je fais un lien avec votre... la
précédente question que j'ai posée, dans le fond, j'aimerais savoir... tu sais,
puisque l'intention du gouvernement avec le projet de loi, c'est précisément d'améliorer
l'efficacité de l'État puis de rendre nos processus plus performants et plus
compétitifs, bien, selon vous, tu sais, comment est-ce que cette fusion-là
entre l'INSPQ puis l'INESSS pourrait devenir un levier concret pour accélérer
l'accès aux médicaments puis les vaccins innovants au Québec plutôt qu'un
frein? Puis, tu sais, si aussi, vous pouvez me donner les bonnes balises, là,
si on met des bonnes balises en place, bien, est-ce qu'on considère que la
réforme peut contribuer positivement à la compétitivité du Québec pour attirer
les investissements en R&D?
Mme Hamelin (Bettina) : C'est
une grosse question. Très bonne question. Alors, je fais appel au projet FAST,
au... en Ontario. Donc, il y a des façons, il y a des méthodologies qui sont...
ou des approches qui donnent accès aux médicaments plus rapidement. Donc,
justement, pour contrebalancer les longues...
Mme Hamelin (Bettina) : ...délai
qu'on a au Canada à donner l'accès dès que... en Ontario, c'est : dès que
l'AMC a donné un avis positif, le médicament est listé et des négociations sur
les prix débutent et puis il y a une réconciliation par après. On pourrait
faire une approche très similaire au Québec. Et puis la nouvelle... la
nouvelle... La fusion pourrait avoir comme mandat d'accélérer et de regarder,
d'examiner d'autres approches pour accélérer l'accès aux médicaments.
Je pense qu'il faut aussi reconnaître
qu'aujourd'hui on se trouve dans des contextes géopolitiques qui mettent
beaucoup de pression sur l'industrie, beaucoup de pression sur la capacité de
l'industrie d'amener les médicaments au Québec et ailleurs au Canada. Et, si
les délais sont trop longs, bien, il y a des décisions qui se font au global
qui mettent... qui donnent un avantage à une autre juridiction qui est plus
rapide pour donner accès aux médicaments. Donc, la compétition qu'on a
aujourd'hui est très différente que la compétition qu'on a vécue il y a
quelques années et...
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, madame, le temps du gouvernement est écoulé. Donc, maintenant, je
cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys pour
10 min 24 s.
M. Beauchemin : Merci, M. le
Président. Bien, peut-être un peu continuer dans la direction que vous aviez
prise, madame. Vous aviez mentionné, en entrée de jeu, que c'était peut-être
important de préserver l'expertise. Ma question pour vous, en fait, c'est, dans
la fusion, vous voyez donc un risque que cette expertise-là puisse être diluée
parce qu'on a une plus grosse entité, puis c'est... donc ça va se perdre, là,
entre les chaises? C'est ça que vous comprenez? J'essaie... Peut-être
m'expliquer un petit peu plus, là, votre point de vue là-dessus, s'il vous
plaît.
• (15 h 50) •
Mme Hamelin (Bettina) : Oui,
absolument. Bien, on connaît... on ne connaît pas les détails, hein, c'est...
donc on assume, quand il y a une fusion, bien, il y a une répartition
différente des ressources, et puis on pourrait s'imaginer un contexte où il y
aurait moins de ressources pour l'évaluation des médicaments et des vaccins. Et
ça, ça nous inquiète parce que, comme on a dit, bien, il y a déjà un arriéré,
tu sais, parce qu'il y a un manque de ressources. Alors, s'il y a encore plus
de pression sur les ressources, bien, ce qui nous inquiète, c'est que ça prend
encore plus de temps, et puis, bien, à la fin, il y a un patient qui attend son
médicament contre le cancer, etc. Donc, oui, c'est ça qui nous inquiète.
M. Beauchemin : Donc, si je
comprends bien, ce que vous me dites, finalement, c'est que vous, ce que vous
percevez, c'est peut-être une lenteur additionnelle, là, pour l'approbation de
nouvelles innovations médicales. Si je comprends bien, là.
Mme Hamelin (Bettina) : Bien,
écoutez, là, on voudrait que ça fonctionne.
M. Beauchemin : Oui, je
comprends. OK.
Mme Hamelin (Bettina) : Je
pense, il y a une proposition sur la table, on voudrait que ça fonctionne, mais
on s'inquiète, et c'est ça, les risques qu'on a décrits.
M. Beauchemin : En fait,
j'ai... Merci. J'ai une question pour M. Laflamme. Vous l'avez dit tantôt, il y
a 28 médicaments, là, qui sont en attente d'approbation. C'est-tu une première
dans votre jeune carrière, là, dans l'industrie? Je fais ça avec un sourire.
M. Laflamme (Denis) : Bien,
c'est une première pour ce mois-ci. En fait, c'est un des plus gros mois qu'on
a... ça, parce qu'on suit ça de façon régulière. Et, il n'y a pas si longtemps,
c'étaient 20 médicaments, c'étaient 15. Il y a eu... il y a eu, un moment
donné, il faut quand même rendre à César ce qui est à César... il n'y avait
aucun arriéré, il y a... si on recule il y a quelques années, mais ce qu'on a
appelé le backlog est revenu récemment, et j'ai constaté ce matin qu'il n'a
jamais été aussi élevé que ça.
M. Beauchemin : ...selon
vous, c'est le cas... Parce que, là, l'objectif, si je comprends bien... On est
19e sur 20 dans l'OCDE. On prend un risque ici en fusionnant, donc, de faire en
sorte que, peut-être, le processus... va-t-il être plus efficace? En tout cas, certainement,
il y a une période d'adaptation, donc les chances de retard vont s'ajouter. Je
vous pose la question, là. Vous, vous voyez que 28 médicaments, là, c'est un
record. Qu'est-ce que vous comprenez de ce retard-là? Ça vous dit quoi sur la
situation actuelle, avant même la fusion, là? Ça vous dit quoi?
M. Laflamme (Denis) : Bien,
la situation actuelle, c'est qu'il manque des ressources à l'INESSS pour
effectuer les évaluations dans un temps requis et...
Mme Hamelin (Bettina) : Si je
peux ajouter aussi, Denis, M. Beauchemin, moi, je suis PDG, je suis la première
employée...
Mme Lennon (Christine) : ...pour
la filiale Insight, nous sommes maintenant presque 50 employés au Canada,
on a investi 73 millions de dollars. Notre première percée, qui est
pour une maladie rare en cancer, a été approuvée par Santé Canada en 2021. Et
puis c'est juste là, actuellement, qu'on commence à lister au Québec et à
travers le Canada. Ça n'a... ça n'a pas pris deux ans — c'est en
moyenne, deux ans — ça nous a pris quatre ans. Et la Bulgarie a listé
même avant le Canada. Alors, quand je me présente devant le PDG pour une
compagnie mondiale, que ce soit moi-même ou mes collègues, et j'essaie d'aller
chercher un autre 73 millions de dollars et plus par année comme investissement
en recherche et développement, il me pose la question : Mais pourquoi je
donne... je fais ça au Canada quand je pourrais faire ça en Bulgarie, Bulgarie
et ailleurs?
M. Beauchemin : Je comprends.
Je comprends.
Mme Lennon (Christine) : Alors,
c'est ça, la crainte qu'on a, c'est que là il faut améliorer, mais il y a des
craintes que ça peut détériorer.
M. Beauchemin : Donc, on voit
donc que vous percevez actuellement, peut-être pas, pourrais-je le dire, un...
vous percevez actuellement dans le système actuel, avant même la fusion, une
situation qui fait en sorte que c'est difficile d'attirer des investissements
où est-ce qu'il y a beaucoup de paperasse, probablement, là, pour... pour s'y
rendre. Donc, en... en fait, en bout de piste, ici, on parle de peut-être un
manque de leadership.
Là, on pense faire une fusion. Ma
question, c'est... Bon, bien, là, on va avoir une nouvelle gouvernance pour
l'entité fusionnée. Quels sont, selon vous, là, les... les indications qui
devraient être envoyées à cette nouvelle entité pour pouvoir faire en sorte
que, justement, on puisse être au minimum aussi efficace que le Canada pour
l'approbation, là, de nouveaux médicaments, par exemple?
Mme Hamelin (Bettina) : Moi,
je dirais que les indications qu'on devrait leur envoyer, c'est : Regardez
les résultats et les délais, disons, aux États-Unis, en Allemagne, en France,
par rapport à ce qui se passe dans certaines provinces, le Québec n'est la
seule province. Mais le Québec est en train de perdre un peu sa place de
leadership. Et il faut faire le lien entre les investissements dont Christine a
fait référence. Tu sais, les investissements que l'industrie fait au Canada, et
Insight n'est pas... pas la seule compagnie, il y a beaucoup d'investissements qui
se font, et le Québec est un leader en sciences de la vie. Puis j'ai enseigné
longtemps à l'Université Laval en pharmacie, je connais un peu l'écosystème, et
puis le risque c'est que, si on ne peut pas accélérer et être plus efficace,
bien, le Québec va encore plus tomber en arrière.
M. Beauchemin : Mais moi, ce
que je comprends, M. le Président, quand je les entends, c'est que, dans le
fond, ici, on a une opportunité pour améliorer le modèle d'affaires de cette
industrie-là, qui ici parle donc de propriété intellectuelle, d'innovation, de
jobs qui sont créés ici au Québec. Puis là, actuellement, on fait face à une
situation où est-ce que la présente machine n'est peut-être pas optimale en
termes de compétitivité par rapport à ce qui se passe à travers le monde. Puis
là on arrive avec l'idée de vouloir faire une fusion avec deux entités,
finalement, les fusionner ensemble, où est-ce que ça comporte tout le temps,
là, évidemment, là, des risques, là, de... de nouvelles cultures. Donc, je
perçois que vous souhaiteriez que ça fonctionne bien, mais, si je vous entends
bien, vous êtes craintifs par rapport à la situation dans laquelle vous êtes
actuellement. Puis la réalité, c'est que vous voyez probablement plus de
chances que ce soit problématique que positif, si je comprends bien, là.
J'essaie de mettre des mots dans votre bouche, finalement, là, mais c'est un
peu ça, là, que j'essaie de... de déterminer, là.
Mme Lennon (Christine) : Mais,
dans le court terme, oui, il y a des risques, c'est clair. Tu sais, on a... on
a tous bâti des compagnies et/ou investi dans des compagnies, ou fusionné des
compagnies, alors les premières années, ça été... souvent avant que ça puisse
accélérer. Alors, il y a toujours ces risques-là, oui.
M. Beauchemin : ...dans le
fond, si je comprends... Oui?
M. Jerome (Olivier) : À court
terme, il y a des risques. À long terme, il y a des opportunités de mieux
faire. C'est ce qu'on voit avec le projet de loi. Puis les opportunités, quand
elles passent, il faut les saisir. Puis ça, c'est des retombées...
M. Jerome (Olivier) : ...qui
peuvent créer... créer un... un précédent dans la compétitivité du Québec
justement pour s'inscrire comme une destination de choix à la fois du côté de
l'investissement en recherche et développement, qui va faire naître des
innovations thérapeutiques qui vont se rendre le plus rapidement possible au...
au chevet des... de la population québécoise qui en a besoin.
M. Beauchemin : Je sais
que... ça arrive de temps en temps, puis c'est normal, là, des fois, on peut
porter des... d'autres sortes de lentilles, là, puis je... je respecte ma
collègue, là, dans... dans son rôle quand elle dit ça, mais... mais je vois...
je vois quand même une opportunité d'investissement. Je vois quand même une
opportunité pour faire en sorte qu'on puisse tirer notre épingle du jeu.
Ça fait que vous aviez tantôt mentionné
que pour qu'on puisse améliorer le processus, il faut qu'on regarde la
performance. Donc, si je comprends bien, là, pour guider le projet de loi dans
la direction pour améliorer, nonobstant le fait qu'on fait une fusion entre les
deux entités, là, mais améliorer le processus pour vous, on doit donc essayer
de trouver une façon de limiter les étapes et ou de les optimiser pour faire en
sorte qu'elles s'exécutent plus rapidement, puis de se baser aussi sur ce qui
est fait ailleurs pour essayer de comprendre, bien, si c'est approuvé là,
pourquoi vous ne l'approuvez pas. Un peu genre de benchmarking, là, si je
comprends bien.
• (16 heures) •
Mme Hamelin (Bettina) : Oui,
oui, je pense, c'est très bien dit, l'imputabilité est très important.
Certainement, quand il y a des changements, c'est très important de... de se
mesurer et puis de... de revoir de temps à autre comment ça marche.
M. Jerome (Olivier) : Ce que
l'Allemagne et la France ont très bien fait, et ce que l'Ontario... Oh!
M. Beauchemin : Combien de
temps...
Le Président (M. Laframboise) : 24 secondes...
M. Beauchemin : 24 secondes.
Bien, c'est correct, écoutez, il me reste 24 secondes, ça fait que vous
pouvez finir votre pensée.
M. Jerome (Olivier) : Donc,
oui, c'est que les étapes peuvent être séquentielles, mais elles peuvent aussi
être en parallèle. Et ce que... c'est ce que l'Ontario a fait avec le modèle
FAST, où l'accès est donné à la reconnaissance de la valeur thérapeutique à la
population, et ça en découle ensuite la série d'étapes qui normalement a cours.
Donc, on ne vient pas interférer avec les processus, on vient de donner accès à
la population, d'emblée.
Le Président (M. Laframboise) : Merci...
M. Beauchemin : ...ce qui se
passe en Ontario, on... on se compare souvent avec l'Ontario...
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. On poursuit avec le député de
Laurier-Dorion pour trois minutes 28 secondes.
M. Fontecilla : Bonjour,
Mesdames, Messieurs. Merci beaucoup d'être ici avec nous.
Écoutez, nous, en tant que législateurs,
on doit, à la fin, lorsqu'on va étudier en détail, on doit étudier la
pertinence ou pas de la fusion de ces deux instances là. J'entends votre...
votre discours et, de votre point de vue, qui est celui de la... comment dire,
l'approbation de médicaments, c'est votre... c'est votre point... point
central, je crains... je sens que vous craignez qu'une fusion peut... en tout
cas ne peut... pourrait ne pas aider à accélérer l'approbation des... des
médicaments, là. Donc, c'est le message que je reçois, là, aujourd'hui, là. Et
il a été mentionné tantôt qu'on pourrait... bien qu'il faut conserver les...
l'expertise et la qualité. Concrètement, là, ça veut dire quoi, ça, là? Par
exemple, au CA, il n'y a même pas un membre expert en médicaments, là. Donc,
qu'est-ce qui pourrait...Doit-on se prononcer en faveur ou contre? Parce que
nous, on ne sert pas dans les opérations, là.
Mme Hamelin (Bettina) : Oui.
Bien, écoutez, ça... ça dépend comment la gouvernance est... est organisée.
Mais comme mon collègue a... a mentionné, ça prend vraiment quelqu'un sur...
sur la gouvernance de ce nouveau institut qui connaît les médicaments, qui
connaît les vaccins et qui connaît l'évaluation des médicaments. Parce que
c'est un... c'est un étape essentielle dans le cheminement du médicament entre
le manufacturier et le patient. Donc... Donc, c'est important de... de bien
organiser la gouvernance pour avoir l'expertise nécessaire.
M. Fontecilla : Écoutez,
encore une fois, nous, on ne sera pas dans les opérations. Est-ce que vous
pensez que d'un point de vue législatif, on devrait inclure une notion comme
dans le sens d'inclure l'expertise de médicaments dans le conseil
d'administration, par exemple?
Mme Hamelin (Bettina) : Oui,
oui, je dirais que oui. Oui. Présentement, ce n'est pas là. Je dirais que oui.
M. Fontecilla : Bien là... on
a... on a déjà un premier amendement.
Une voix : ...
M. Fontecilla : Ah! ça, oui,
ça, oui. Je vous remercie, Mme.
Le Président (M. Laframboise) : Merci,
M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je cède la parole au député
d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci pour la présentation.
J'aimerais voir de quelle façon le
gouvernement fédéral intervient dans les affaires du Québec ou la relation
qu'il y a entre l'INESSS puis l'Agence des médicaments du Canada. Est-ce qu'il
y a un arrimage nécessaire entre ce qui se passe au Québec et dans les autres
provinces? Quelle est la relation avec l'agence puis de quelle façon on peut
bonifier cette relation-là?...
16 h (version non révisée)
Mme Hamelin (Bettina) : ...moi,
je peux... je peux commencer, peut-être, mes collègues, ils ont des
commentaires à faire là-dessus. Il y a certainement un arrimage entre les deux
organisations, en fait, nous, en termes de... d'association de l'industrie, on...
on crée comme un pont entre les deux, il y a les... il y a des choses que l'AMC
fait très bien, il y a des choses que l'INESSS fait très bien, et puis on veut
que les deux organisations apprennent l'un de l'autre. Donc il y a... il y comme
un arrimage naturel qui se fait entre les deux organisations et ça se passe, ça
se passe naturellement. Mais il y a des choses qui sont vraiment très
spécifiques au Québec, parce que le système du Québec est différent du système
dans les autres provinces. Et puis l'INESSS, avec l'INESSS, on reconnaît que l'évaluation
doit prendre en considération ces différences-là.
M. Boissonneault : Est-ce que
vous estimez que l'INESSS permet de donner au Québec une agilité qui, peut-être,
peut nous rendre plus compétitifs à l'échelle internationale?
Mme Hamelin (Bettina) : Une
agilité, vous avez dit?
M. Boissonneault : Oui. Une
flexibilité...
Mme Hamelin (Bettina) : Oui,
oui. Une flexibilité? Oui, oui. Écoutez, moi, je pense que c'est la flexibilité,
l'agilité, ça vient avec un mandat, ça vient avec les ressources qui sont
disponibles à vraiment régler les choses. Et écoutez, nous, on est là, on est
là pour collaborer, et je pense, nous, on a des idées pour aider à trouver des
efficiences. On a beaucoup d'expérience, on a de l'expérience globalement et
puis on est là pour... pour collaborer avec l'INESSS. Denis a parlé de la...
l'organisme, tu sais, des échanges qui se font entre le... notre équipe du
Québec et l'INESSS, ça, il faut continuer. Et puis là, on ne sait pas avec la
fusion, c'est quoi les possibilités, mais tout reste dans la gouvernance. Mais...
oui, il y a toujours l'opportunité d'apprendre d'autres juridictions, et puis
on est là pour aider.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, votre temps est écoulé. Mme Hamelin, Mme Lennon, M. Jerome, M.
Laflamme, je vous remercie pour la contribution de Médicaments novateurs Canada
aux travaux de la commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de
permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci beaucoup, Messieurs-dames.
(Suspension de la séance à 16 h 06)
(Reprise à 16 h 07)
Le Président (M. Laframboise) :
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Association des
collèges privés du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à l'échange... à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter et à
présenter les personnes qui vous accompagnent, puis à commencer votre exposé.
Merci.
M. Caron (Patrick) : M. le
Président de la commission des finances publiques, Mme la ministre, Mesdames,
Messieurs les députés, je me présente, Patrick Caron, président de l'Association
des collèges privés du Québec et directeur général du Collège André-Grasset. Je
suis accompagné de M. Patrick Bérubé, Directeur général de notre association.
Nous vous remercions sincèrement de nous entendre aujourd'hui dans le cadre des
consultations particulières sur le projet de loi 7. L'ACPQ représente 21
collèges subventionnés, tous des organismes sans but lucratif présents dans
plusieurs régions du Québec. Ensemble, ils accueillent chaque année plus de
20 000 étudiantes et étudiants. Nous ne sommes pas en concurrence avec les
cégeps, nous formons avec eux un réseau collégial québécois diversifié où
chacun joue son rôle. Notre mission commune est claire : offrir une
formation de qualité et contribuer à la réussite du plus grand nombre d'étudiants.
Permettez-moi de situer, d'entrée de jeu, la contribution de notre réseau du
point de vue... des finances publiques, puisque c'est le cœur de notre mandat...
de votre mandat. Une étude menée par l'économiste Pierre Fortin à partir des...
M. Caron (Patrick) : ...données
les plus récentes sur le financement des établissements collégiaux montrent que
les collèges privés subventionnés permettent de réduire chaque année les
dépenses du Trésor québécois pour l'enseignement collégial d'un montant qui se
situe entre 50 et 70 millions de dollars. Les collèges privés
subventionnés ne sont pas un coût additionnel pour l'État, ils sont un facteur
d'économies structurelles.
La même étude établit que, compte tenu de
la performance de nos étudiantes et étudiants, la contribution des collèges
privés subventionnés aux revenus annuels des Québécoises et des Québécois peut
se chiffrer à plus de 486 millions de dollars.
Selon d'autres études, le taux d'obtention
des diplômes dans un même établissement et dans la durée prescrite sont
supérieurs à 19,2 % dans notre réseau par rapport aux cégeps. Les collèges
privés subventionnés contribuent aussi de façon mesurable à réduire la
sous-scolarisation des garçons, et ce, sans diminuer la scolarisation des
filles. Ce constat est important pour comprendre l'angle sous lequel nous
abordons le projet de loi n° 7.
D'un côté, le gouvernement du Québec doit
réaliser des efforts budgétaires significatifs, et nos collèges y prennent
pleinement leur part. De l'autre, depuis une vingtaine d'années, les exigences
administratives sont multipliées : formulaires, validations, délais pour
les permis, redditions de comptes, qui portent parfois sur les mêmes éléments,
à des moments différents, pour des interlocuteurs différents. Chaque heure
consacrée à ces exigences est une heure en moins pour l'enseignement, pour
l'encadrement et pour le soutien aux étudiantes et aux étudiants.
• (16 h 10) •
Le projet de loi n° 7 vise justement à
réduire cette bureaucratie, à accroître l'efficacité de l'État et à renforcer
l'imputabilité. L'ACPQ appuie clairement ces objectifs. Nous saluons la volonté
du gouvernement de recentrer les ressources sur les services à la population et
d'éliminer la lourdeur à faible valeur ajoutée. Notre propos d'aujourd'hui est
simple : nous voulons contribuer à ce que les intentions du projet de loi
se traduisent concrètement sur le terrain des collèges.
Un bon exemple, c'est l'abolition de la
Commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Pendant plus de 30 ans, la
CEEC a contribué à implanter, dans l'ensemble du réseau collégial, une
véritable culture d'assurance qualité. Aujourd'hui, cette culture est bien
vivante. Les politiques d'évaluation des apprentissages sont robustes, les
mécanismes d'assurance qualité fonctionnent et les conseils d'administration se
sont approprié ces enjeux. La CEEC a, en ce sens, rempli son mandat en
favorisant la mise en place d'une structure et d'une culture d'assurance
qualité dans les collèges. Notre crainte serait que l'on recrée au
ministère de l'Enseignement supérieur une CEEC interne encore plus lourde et
plus éloignée du terrain. Nous proposons, au contraire, de reconnaître un
dispositif d'assurance qualité porté sur les collèges et le réseau dans un
cadre léger et reconnu par l'État. Ce dispositif repose sur quatre
piliers : un référentiel commun d'assurance de qualité, une autoévaluation
institutionnelle intégrée aux outils existants, des revues par les pairs
organisées par et pour les collèges et un dialogue structuré mais léger avec le
ministère. Dans un tel modèle, l'État n'a pas besoin d'un nouvel organisme
central, il doit plutôt reconnaître ce cadre, s'assurer qu'il dispose de
l'information essentielle et intervenir de façon ciblée lorsque le risque est
clairement identifié. C'est, à notre avis, la meilleure façon de conjuguer
réduction de la bureaucratie et haut niveau d'imputabilité.
Le deuxième bloc de nos recommandations
concerne la Loi sur l'enseignement privé. Le projet de loi n° 7 ouvre une
fenêtre pour revoir certains mécanismes alourdissant la gestion des permis sans
améliorer la protection du public. Nous proposons trois ajustements très
concrets qui sans... qui sont cohérents avec les objectifs du projet de loi et
qui ne génèrent pas de coût additionnel pour l'État.
Premièrement, nous proposons d'allonger la
durée des permis des collèges privés subventionnés. Aujourd'hui, le
renouvellement des permis est une opération lourde qui mobilise énormément de
ressources, et ce, tant au ministère que dans nos établissements. Pourtant,
plusieurs de nos collèges sont centenaires et obtiennent des résultats plus que
solides en matière de réussite éducative. Il serait cohérent que les permis
soient délivrés pour une première durée de six ans puis renouvelés pour 10...
pour 10 ans, tant en laissant à la ministre la possibilité de fixer une durée
plus courte lorsqu'un risque spécifique le justifie.
Deuxièmement, nous recommandons de créer
une voie rapide pour certaines attestations d'études collégiales. Lorsqu'une
AEC est directement rattachée à un programme de DEC déjà autorisé au permis du
collège, il n'est pas nécessaire de...
M. Caron (Patrick) : ...mettre
systématiquement le dossier à la Commission consultative de l'enseignement
privé. Une procédure allégée au ministère permettrait d'autoriser plus
rapidement ces AEC, qui sont un outil essentiel pour répondre aux besoins de
main-d'œuvre du Québec et à la requalification des travailleurs. Et
troisièmement, nous proposons d'encadrer le nombre maximal d'élèves admis, le NMEA,
comme une mesure exceptionnelle fondée sur la capacité d'accueil réelle et de
retirer le seuil minimal d'élèves résidents du Québec introduit l'année
dernière. Les mécanismes qui encadrent aujourd'hui l'accueil des étudiantes et
des étudiants internationaux existent déjà dans d'autres lois et règlements.
Recentrer le NMEA sur la capacité d'accueil et sur les risques réels va dans le
sens d'une meilleure gestion et d'une plus grande équité entre réseaux.
Au-delà des textes de loi, une partie
importante de la lourdeur vient aussi des pratiques administratives. Nous
invitons le Bureau de la conformité à appliquer une gestion différenciée des
risques, davantage de vérifications lorsque la situation l'exige, mais moins de
visites et de demandes ad hoc pour les établissements historiques solides et
bien gérés. Nous suggérons également de recourir pleinement aux possibilités
déjà prévues à la loi afin d'éviter de solliciter systématiquement la CCEP pour
des dossiers à très faible risque. Ces gestes permettraient de concentrer
l'énergie de tout le monde là où elle est vraiment nécessaire.
En résumé, nous venons pour défendre...
Nous ne venons pas pour défendre le statu quo bureaucratique, nous venons vous
proposer un partenariat concret pour un État plus efficace et plus proche du
terrain. Ce partenariat repose sur trois leviers : reconnaître un
dispositif d'assurance qualité porté par les collèges, moderniser de façon
ciblée la Loi sur l'enseignement privé et appliquer une véritable gestion des
risques dans les pratiques de conformité. En adoptant ces ajustements, vous
enverrez un message clair, la réduction de la bureaucratie permettra
d'améliorer les services aux étudiants en libérant plus de temps consacré à la
mission éducative et en démontrant que l'État fait confiance aux établissements
qui ont fait leurs preuves, tout en maintenant des attentes élevées en matière
de résultats.
L'ACPQ, ses collègues membres, sont prêts
à travailler avec vous, avec le ministère de l'Enseignement supérieur et avec
le Conseil du trésor pour que le projet de loi n° 7
devienne, pour le réseau collégial, un véritable levier d'efficacité et de
réussite. Je vous remercie de votre attention. Nous serons heureux de répondre
à vos questions.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, M. Caron. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la
ministre et députée de Bertrand, vous, avec vos collègues de Bellechasse,
Fabre, Dubuc et Masson, vous disposez d'une période de
16 min 30 s. Mme la ministre.
Mme Duranceau : Merci. Merci
pour vos commentaires. Alors... bien, le projet de loi n° 7,
tu sais, c'est une des pierres de... pour placer l'amélioration de
l'efficacité de l'État. Ça, c'est les éléments qui sont de nature législative,
là, qui se retrouvent là-dedans. Mais, mais toutes les autres suggestions et
pistes d'amélioration, vous avez mentionné beaucoup de tâches administratives,
là, qui pouvaient peut-être être redirigées vers de l'enseignement plutôt que
de la paperasse, parce qu'il y a de la reddition de comptes qui en découle. Ça,
évidemment, je suis intéressée à plus de détails sur ça. Pouvez-vous juste me
rappeler, vous avez dit : Les économies annuelles au Trésor du fait que
vous êtes privé, en partie, là, c'est quoi, le chiffre?
M. Bérubé (Patrick) : Oui,
les économies annuelles sont d'environ... entre 50 et 70 millions de
dollars, essentiellement parce que nos collèges, contrairement aux cégeps, sont
financés à 60 %...
Mme Duranceau : Et c'est le
40 % qui...
M. Bérubé (Patrick) : ...et
le reste fait partie... vient des frais de scolarité ou de revenus autonomes
des collèges ou d'apport des fondations de ces derniers.
Mme Duranceau : OK, parfait.
Donc ça, on aime ça comme ça. OK. Donc, vous, ce que vous proposez, c'est trois
ajouts, dans le fond, vous êtes d'accord avec ce qu'on fait, au niveau de la
commission, là, qu'on abolit. Mais il y a trois ajouts, notamment, bon, les
permis, renouvellement des permis. Si vous avez à les catégoriser, vos trois
ajouts, là, du plus important... tu sais, du plus prioritaire au moins
prioritaire, d'une part, donc ça, dans un premier temps, vous iriez... Si on ne
peut pas réaliser tous vos rêves, là, ça va être quoi, le premier à réaliser?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
en fait, nos... nos propositions sont déjà un ordre de priorité dans le
mémoire, donc, la première serait vraiment ce qui aurait un impact le plus
majeur, tant pour les collèges, que le ministère de l'Enseignement supérieur et
de l'État québécois, ce serait de venir d'étendre la période de validité du
permis, de passer de trois à cinq ans, jusqu'à six à 10 ans. Et pour...
M. Bérubé (Patrick) : ...tout
simplement parce qu'on peut s'imaginer que si les collèges renouvellent leur
permis sur une plus longue période, on pourrait imaginer environ une réduction
de 50 % des équivalents temps complet nécessaire à la direction de
l'enseignement privé pour faire cesdites évaluations-là. Donc ça, c'est le
premier. Et pour nous, ce constat-là est important que ça vienne via la... via
une modification à la loi parce que, en poussant des travaux de nature
administrative avec le ministère, avec les fonctionnaires de l'enseignement
supérieur, on s'est rendu compte que finalement il y avait des limites à ce
qu'on pouvait faire de manière administrative et que souvent la réponse qu'on
avait, bien, on doit continuer à procéder de la même façon parce que la loi et
les règlements sont ainsi. Donc, pour nous, ces limites-là nous montrent que
c'est crucial de modifier la loi pour assurer une diminution pérenne de la
bureaucratie et non pas qu'elle revienne lorsqu'il y aura, par exemple, une
embellie budgétaire.
Mme Duranceau : OK, parfait.
Puis, bon, là... ça fait que vous ne voyez pas dans des nouveaux collèges, je
ne sais pas jusqu'à quel point il y en a fréquemment, là, des nouveaux
collèges, des nouveaux cégeps privés, la notion de passer de 3 à 6 quand tu es
un nouvel établissement, vous ne voyez pas une problématique, là, à cet
égard-là.
• (16 h 20) •
M. Bérubé (Patrick) : En fait,
nous ce qu'on... la plupart de nos collèges sont effectivement centenaires. Le
collège... le collège le plus récent qu'on a dans notre réseau date d'il y a
environ huit ans si on exclut un collège qui a été modifié récemment dans les
dernières deux ou trois années, donc, pour nous, on ne voit pas d'enjeu à ce
point-là, et ce qu'on irait même jusqu'à proposer, c'est un mécanisme de permis
probatoire fondé sur le risque. Donc, évidemment, s'il y avait de nouveaux
collèges, de nouveaux permis octroyés à des collèges, en particulier si c'était
des collèges non subventionnés, on serait d'accord, à l'image des permis de
conduire, qu'il y ait un permis probatoire d'une durée plus courte, parce qu'on
pourrait être en mesure d'imaginer que le risque est plus élevé pour un nouveau
collège qu'un collège qui a 100 ans d'existence, par exemple.
Mme Duranceau : Non, tout à
fait. Ça, la gestion du risque, je pense qu'il faut sortir du risque zéro, là,
ça fait que j'aime ça ce que vous proposez. Puis, dites-moi, bon, là, la
commission d'évaluation de l'enseignement collégial, OK, on enlèverait ça, mais
qu'est-ce qu'on devrait conserver pour maintenir la qualité des services? Parce
qu'il y avait quand même un rôle, là, qui était joué à cet égard-là. Ça fait
que qu'est ce que vous suggérez?
M. Bérubé (Patrick) : Effectivement,
on est tout à fait en accord avec votre proposition dans le projet de loi sept,
qui vise à abolir la commission d'évaluation de l'enseignement collégial, et on
désire aller plus loin. Cependant, comme l'expression le dit, on ne souhaite
pas jeter le bébé avec l'eau du bain et on reconnaît dans notre mémoire
l'apport de la commission d'évaluation de l'enseignement collégial. Donc, en ce
sens-là, ce qu'on souhaite, c'est de préserver ces pratiques-là à l'interne de
nos... de nos établissements. Donc, quand on parle d'un référentiel commun
d'assurance-qualité, il a déjà été développé par la Commission d'évaluation
collégiale en partenariat avec les directions des études des collèges, donc on
souhaite se le réapproprier, mais, surtout, de le mettre en œuvre de manière
beaucoup plus souple, beaucoup plus efficace et sans avoir à fournir des
papiers, remplir des formulaires et ainsi de suite. Donc... et on souhaite
aussi garder une revue par les pairs, parce que ce mécanisme-là existait aussi,
existe à la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial, qui se base
beaucoup, lors de visites d'évaluation, sur l'expertise des directions des
collèges qui vont visiter d'autres collèges. Donc, déjà, à l'intérieur de la
CPQ, ce que l'on propose... aux directions des études, c'est de mettre ces
mécanismes-là en place de manière autonome et autogérée pour s'assurer qu'on
puisse continuer de le faire et d'avoir un dialogue beaucoup plus léger avec le
ministère à cet égard-là, sans toute la lourdeur administrative qui vient avec
la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial.
M. Caron (Patrick) : Si vous
me permettez, Mme la ministre, aussi, comme directeur d'établissement, vous
savez, la réussite éducative, c'est la mission même d'un collège, donc, de
travailler en ce sens-là, s'assurer que la qualité des formations, la qualité
de l'enseignement, je veux dire, c'est primordial. Donc, on le fait déjà de
façon très intense et c'est important de maintenir ça.
Le Président (M. Laframboise) : Mme
la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Merci, M. le
Président. Merci d'être là, sincèrement. J'ai pris connaissance de votre
mémoire, c'est très complet. Il y a beaucoup d'idées à l'intérieur à exploiter,
à réfléchir et peut-être à mettre en place et j'aimerais vous entendre sur...
parce que vous avez parlé de la multitude de dispositifs de contrôle qui sont
déjà en place, entre autres choses, pour la...
Mme Lachance : ...validation
des AEC. Moi, je veux que vous développiez ça puis que vous m'expliquiez ce que
vous faites maintenant et comment vous verriez ça pour l'avenir.
M. Caron (Patrick) : OK.
Prenons un exemple simple. Nous offrons un DEC en informatique par l'Institut
Grasset pour le volet plus enseignement aux adultes et là on est en processus
pour obtenir une AEC en infonuagique. On a déjà le DEC, donc on a des
laboratoires, on a des enseignants compétents, on a toutes les infrastructures
nécessaires pour offrir cette formation-là. Par contre, il faut faire une
demande qui est lourde, qui est complexe, qui prend presque autant de temps que
de refaire, de revalider tout le processus de permis, ce qui ajoute des délais
entre 18 et 24 mois pour faire tout l'exercice... l'exercice au complet.
Donc, on se veut de réduire ces délais-là, le simplifier. On n'a pas à tout
refaire les mécanismes, on a déjà les infrastructures, ça devrait être simple
et efficace.
Juste pour vous donner une autre idée.
Vous savez, le collège André-Grasset, c'est centenaire, on va fêter ça en
maintenant en... en 2027. Avec le bureau de la conformité, l'année dernière, on
a eu plusieurs va-et-vient sur le nom de l'institution. Ça a toujours été le
collège André-Grasset, sauf qu'avec la fin des Sulpiciens dans les
années 60 le collège a dû avoir un nouveau nom de corporation, qui est
devenu le collège André-Grasset 1973. Donc là, le bureau de conformité
nous demandait d'utiliser collège André-Grasset 1973. Pourtant, depuis
presque 100 ans, on n'avait jamais utilisé ce nom-là. Donc, ça, ce sont
des exemples simples où est-ce qu'on doit donner un peu de laisse ou de
souplesse là-dedans et d'éviter, justement, de faire ce va-et-vient-là, de
faire des rencontres de travail avec les gens pour arriver à une finalité
qui... on va continuer à utiliser le nom collège André-Grasset, tout
simplement, là.
M. Bérubé (Patrick) : Parce
qu'au-delà des allers-retours administratifs et bureaucratiques avec ça, tout
ça a forcé notre collègue à faire une modification au Registraire des
entreprises pour pouvoir ajouter collège André-Grasset dans sa dénomination,
sinon il se retrouvait fautif de pouvoir faire de la publicité trompeuse à
cause qu'il utilisait le nom sans utiliser 1973. C'est en ce sens-là qu'il y a
certains non-sens qu'il faudrait vraiment enlever.
Le Président (M. Laframboise) : Mme
la ministre.
Mme Duranceau : Oui, mais
fautifs en vertu de quoi, là? Parce que ça, ça m'apparaît...
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
en fait, en vertu des lois et règlements, ce qu'on dira, c'est que, la
publicité, il y a eu des modifications réglementaires qui disaient que la
publicité ne doit pas être trompeuse et que ça pourrait être... d'utiliser avec
1973 pourrait être... sans 1 973 pourrait être considéré comme trompeur. Donc,
c'est le genre de débats auxquels nos collèges doivent faire face avec le
bureau de la conformité qui rajoute des heures et des heures supplémentaires,
de sorte qu'un processus de ce type-là peut prendre, pour le collège, une
centaine d'heures. Donc, vous comprenez maintenant pourquoi, au final, on
souhaite que ces permis-là soient émis pour 6 à 10 ans, parce qu'à
100 heures la fois les collèges ont d'autres choses à faire que
d'argumenter sur le nom d'un collège ou la taille d'une classe.
Le Président (M. Laframboise) : Mme
la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Mais là, dans
le fond, nonobstant le fait que vous avez plusieurs validations à faire et
plusieurs actions à poser pour s'assurer de la justesse des termes utilisés,
lorsque vous redéposez annuellement, j'imagine que c'est un copier-coller de
l'année d'avant.
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
en fait, c'est plus que ça parce que l'information déposée doit être à jour.
Donc, ce qu'on va demander aussi, puis ça fait partie des raisons pour
lesquelles on veut moins de bureaucratie, c'est que souvent, même, on va aller
jusqu'à un point... dans le cas, par exemple, où on demande un nouveau
programme, on va demander à ce que les collèges déposent des curriculum vitae
des enseignants pressentis. Mais le processus est tellement long, il peut
prendre de 18 à 24 mois, quand le... Entre le moment où on dépose le CV
d'un enseignant pressenti et le moment où le cours débute, il y a des fortes
chances que les enseignants pressentis ne sont pas ceux qui vont être dans la
classe, mais, malgré tout, on doit le faire. Et ceci, là, même, aussi nous
questionne sur des éléments de confidentialité, en lien avec la loi 25, de
fournir l'information des curriculum vitae de gens pressentis alors qu'ils ne
seront peut-être... ce ne seront peut-être pas ceux qui seront dans la classe
au final.
Mme Lachance : Je comprends,
je comprends. Mme la ministre.
Mme Duranceau : Bon...
Mme Duranceau : ...je suis
découragée, mais on va essayer de vous aider, là. Mais c'est parfait, c'est le
genre de chose qu'il faut qu'on entende. Tu sais, bon, peut-être qu'il y a des
éléments que c'est dans la loi, là. L'autre chose, c'est les interlocuteurs que
vous avez, là. Tu sais, il faut qu'on soit tous en mode efficacité de l'État,
là. Alors, on va s'assurer que tout le monde a le mémo.
Mme Lachance : Est-ce qu'il
reste du temps, M. le Président?
Le Président (M. Laframboise) : 3 min 55 s.
Mme Duranceau : Allez-y, oui.
Mme Lachance : Bien, je trouve
ça intéressant, parce que quand vous dites abolition de la... moderniser et
reconnaître la maturité des collèges, bien évidemment, on comprend qu'il y a
des collèges qui sont plus nouveaux. Vous m'avez parlé de collèges qui sont
tous plus... plus... moins nouveaux, plus...
M. Caron (Patrick) : Plus
vieux.
Mme Lachance : ...plus vieux, effectivement,
plus matures, comme on pourrait dire. Donc, dans le contexte, il faudrait quand
même voir à avoir une certaine gradation des collèges, je présume, et ça, ça
nous amène à avoir, à garder une certaine cohérence pour viser... Parce que les
processus sont souvent là pour nous mettre... pour assurer une certaine qualité
ou une certaine cohérence. Donc, si on diminue les processus, entre autres, au
niveau du AEC... Puis là je ne suis pas en train de dire qu'on va le faire mais
je trouve ça intéressant de pouvoir en parler, parce qu'on est dans un projet
de loi sur l'efficacité puis ça me parle.
Mais dans un contexte comme ça, votre AEC,
à titre d'exemple, comment on peut s'assurer de la, je ne sais pas, de la
synergie avec un autre AEC qui serait dans un autre milieu, pour qu'il y ait
une certaine conformité? Puis quand on dit : J'ai un AEC en... je ne sais
pas, en... comment vous avez mentionné...
• (16 h 30) •
M. Caron (Patrick) : En
infonuagique.
Mme Lachance : ...en
infonuagique, tout à fait... mais pour s'assurer qu'il y a une concordance
entre les AEC en infonuagique?
M. Caron (Patrick) : Tout à fait.
On est à la même place. Là, le but c'est d'être le plus efficace, mais il faut
juste éviter de faire du mur-à-mur à la grandeur puis de l'appliquer de
façon... sans distinction, dans le fond, de l'expérience ou de l'expertise des
collèges, tout simplement, là.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup. Donc, merci à Mme la ministre et à l'équipe gouvernementale.
Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys, pour
10 min 24 s.
M. Beauchemin : Merci, M. le
Président. Donc, dans votre mémoire, là, le CEEC, là, clairement, là, c'est une
réussite, si on comprend, là, votre historique, là, vous le dites, vous le
mentionnez. Je comprends ce que vous dites, là, que vous aviez... vous avez,
donc, absorbé les meilleures pratiques, puis ça semble être uniformisé dans
tous les collèges, là. Mais, justement, si on prend l'exemple des AEC tantôt,
je veux dire, si, supposons, qu'on décide d'en faire un sur, je ne sais pas
moi, l'intelligence artificielle, il y a peut-être une compétition qui va
vouloir se faire entre deux institutions pour attirer plus que l'autre,
possible, ça fait que là, les standards vont être différents, il va y avoir des
programmes qui vont être différents.
Ma question, elle revient à savoir, là,
comme : Ce n'est pas un peu hasardeux, un peu, d'une certaine façon, selon
vous, de l'abolir, le CEEC? Dans le sens que c'était le garant, justement, que,
justement, c'était bel et bien respecté tout partout, puis là on l'enlèverait,
puis là on pourrait ouvrir la porte pour plus de compétition entre... Je n'ai
aucun enjeu à ce qu'il y ait de la compétition. C'est juste que la qualité du
programme, peut-être, elle peut varier, c'est...
M. Caron (Patrick) : Oui,
mais c'est tout notre intérêt, comme institution, d'offrir un programme de
qualité. Un, c'est qu'on crée des partenariats. Exemple, l'infonuagique, c'est
qu'on va chercher des entreprises qui vont collaborer avec nous puis qui, en
bout de ligne, vont engager, embaucher ces étudiants-là. Donc, le but de notre
travail, c'est d'offrir cette formation là de qualité, avec des infrastructures
de qualité et des enseignants de qualité.
Dans l'année, on est redevables aussi à
notre conseil d'administration. On doit présenter nos taux de réussite, nos
taux de placement des étudiants, leur suivi universitaire. Ce sont toutes des
balises. Comme institution, on se doit de le valider, de s'assurer de la
conformité, puis, en bout de ligne, c'est le CA qui va dire : Ça a du bon
sens, votre travail, ou pas. Puis le ministère aussi possède toutes ces
informations-là. Le ministère a nos états financiers, a nos taux de réussite.
Donc, l'information, elle est là, il faut juste bien l'utiliser maintenant.
M. Beauchemin : Je comprends,
mais, encore une fois, on enlève le CEEC, là, de l'équation, chacun va de son
côté, a ses redevances à faire envers leur... les CA de chacune de ces
institutions-là, chacun commence à porter des lentilles qui lui sont propres,
d'une certaine façon. Ça n'enlève aucunement le risque que c'est possible que,
dans la machine, il y ait quelque chose qui va se créer et qui va reprendre un
peu, là, le CEEC. Ça fait que ma question, ça... elle reste entière, dans le
sens que : Vous ne voyez pas qu'il y a un risque justement, de l'enlever?
M. Bérubé (Patrick) : En
fait, ce que je peux vous dire, c'est qu'après 30 ans de mise en œuvre de la...
16 h 30 (version non révisée)
M. Bérubé (Patrick) : ...d'évaluation
de l'enseignement collégial, nos... les collèges ont intégré ces processus, là,
d'assurance qualité, et ils sont vivants. La preuve en est, comme je le disais
d'entrée de jeu : nos directions des études sont prêtes à les reprendre à
l'interne, ces processus-là, et les mettre de l'avant. Et, au final, on ne voit
pas aucun risque à ce niveau-là. Ce qu'on va faire, c'est qu'on va enlever la
double bureaucratie.
Je vous donne un exemple. Le ministère de l'Enseignement
supérieur nous demandait, et nous demande encore, les plans de réussite des
collèges, et pourtant, en même temps, la Commission d'évaluation... de l'enseignement
collégial demande aussi les plans de... les plans de réussite des collèges.
Donc, on a une double... on a une double évaluation, et, des fois, même une
triple, parce que la direction qui va s'occuper de la validation financière,
des fois, pourra demander aussi les plans de réussite.
Donc, ce qu'on... ce qu'on demande, en
fait, c'est de limiter les duplications, même des fois en triple... ces
redditions de comptes, parce que les collèges ont intégré ces mécanismes-là,
vont pouvoir... ont atteint le niveau de maturité aussi pour y arriver. On n'y
voit pas de risque.
Et aussi je veux faire la distinction
importante entre ce que la Commission d'évaluation de l'enseignement collégial
va faire et toute la question des AEC, qui est du ressort du ministère de l'Enseignement
supérieur. Donc, la commission ne se prononce pas sur l'octroi ou la
compétition qu'il pourrait y avoir entre les collèges sur les... l'octroi de
programmes d'études. Bien, au contraire, la commission vise seulement l'évaluation
des processus d'assurance qualité dans les collèges, et, comme on le dit, ils
sont vraiment très bien implantés depuis des années. Et c'est ce qu'on propose,
de garder ce référentiel-là commun en place, et d'y travailler à l'interne, et
d'avoir des revues par les pairs, comme il se fait déjà, mais de manière
beaucoup plus simple, beaucoup plus souple.
M. Beauchemin : Ça fait que c'est
un peu ce que vous dites, dans le sens... ce que vous voulez, c'est que les
meilleures exigences que... s'étaient créées, là, avec le CEEC, redeviennent
les vôtres de façon autonome.
M. Bérubé (Patrick) : Exactement.
M. Beauchemin : OK. Puis, en
agissant de la sorte, qu'est-ce que... qu'est-ce que vous pouvez dire qui
pourrait nous laisser croire que ça va être assuré que, ad vitam aeternam, ça
va toujours être ça, à part le fait que, je comprends, là, on doit parler à
notre conseil d'administration, là, mais... Vous savez, des fois, ça peut
arriver, là, que ça ne marche pas bien dans un CA, là. Ça fait que...
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
en fait...
M. Beauchemin : Quoi d'autre
que vous voyez comme police d'assurance, là?
M. Bérubé (Patrick) : Bien, en
fait, c'est que déjà la raison pour laquelle les collèges vont être incités à
garder ces mécanismes-là... les collèges ont avantage à mettre en place des
mécanismes d'assurance qualité pour la simple et bonne raison qu'ils ont besoin
d'avoir des programmes d'études de qualité pour s'assurer d'offrir un
enseignement de qualité et aussi d'attirer les étudiants avec ces programmes de
qualité là aussi et, au final, de faire graduer les étudiants, comme on le fait
si bien dans notre réseau. Ça fait que les collèges ont tous avantage... la
mission des collèges est d'offrir des programmes d'études... ont tous avantage
à offrir des bons programmes et de mettre en place des mécanismes d'assurance
qualité que l'on veut beaucoup plus simples, beaucoup plus légers à mettre en
place, tout simplement.
M. Beauchemin : Là, j'en ai
une petite facile, là, je pense, mais j'essaie de comprendre, parce que, moi,
ça me fait toujours rire quand je vois des paramètres qui sont modifiés, qui m'apparaissent...
je ne vois pas la logique, je ne comprends pas pourquoi, là, on passerait, là, de
trois ans, cinq ans à six ans, 10 ans. Ça vient d'où, là, six ans, 10 ans? On l'a
établi comment, ça?
M. Bérubé (Patrick) : Bien, en
fait, on l'établit tout simplement en se disant qu'en faisant de la sorte, vu que
ça prend des centaines d'heures, justement, pour faire une demande de permis et
que, souvent, si on veut rajouter un seul nouveau programme au permis, il faut
refaire une demande complète, donc on repart de zéro... Donc, c'est pour ça qu'on
dit : En établissant sur une période de 6 à 10 ans, c'est gagnant pour les
collèges, parce que les collèges vont passer moins de temps sur la
bureaucratie, plus de temps sur la réussite, c'est gagnant pour le ministère
aussi, qui est en perte d'effectifs aussi et qui doit faire plus avec moins, donc,
en réduisant ça, c'est gagnant pour le ministère, et, au final, c'est gagnant
pour l'État québécois, qui va se retrouver à sauver sur des ETC ou qui va
pouvoir les redéployer dans d'autres directions du ministère où il y aura des
besoins... des besoins supplémentaires, tout simplement.
M. Beauchemin : OK. Ça fait
que, là,je suis en train d'apprendre quelque chose, là. Ça fait que quelqu'un...
un collège qui veut mettre en place un nouveau programme doit redemander un
nouveau permis dans l'ensemble de ses opérations?
M. Bérubé (Patrick) : Exactement.
Et refaire la démonstration qu'il a toutes les ressources...
M. Beauchemin : Pour
l'ensemble?
M. Bérubé (Patrick) : ...humaines,
financières et matérielles pour offrir ce nouveau programme là, même si...
M. Bérubé (Patrick) :
...Il a par exemple le DEC en informatique et tous les enseignants et qui
demande un programme plus court comme une AEC pour l'offrir. Donc, vous
comprenez que c'est... c'est en tout cas un non-sens d'avoir à refaire tout ce
processus-là. Même dans le cadre des travaux qu'on fait avec le ministère
présentement, les gens du ministère nous disent même : Ça pourrait être
bien d'avoir un processus accéléré dans ces cas-là, pour ne pas que les
collèges aient à refaire toute une demande. Mais ça, on ne peut pas le faire
tant et aussi longtemps que la loi n'est pas changée parce que ce qu'on nous
dit c'est : Désolé, nous sommes menottés. La loi est ainsi. Désolé.
Remplissez l'ensemble du formulaire.
M. Beauchemin : Je
comprends. Je comprends et je ressens votre... votre frustration, là. C'est...
Ça semble assez évident. Je me pose la question, pourquoi qu'on n'est pas juste
capable de faire approuver le programme nouveau à la marge puis de faire un
avenant au permis pour que ça puisse... Ça n'aurait pas été une piste de
solution, là?
M. Bérubé (Patrick) : Ce
que l'on nous dit, c'est quand on... on est dans nos travaux pour les... pour
essayer de faire des allègements de manière administrative, on nous dit que la
loi et les règlements font en sorte que c'est impossible de le faire. Donc,
c'est pour ça qu'on juge que c'est crucial qu'il y ait des modifications à la
loi, qui amènera aussi, par ricochet, des modifications à certains règlements
qui y sont rattachés pour que, finalement, comme vous le dites, on puisse
arriver à avoir... à changer les processus, parce que sinon... Et puis on a
beaucoup de respect pour les gens au ministère, mais ces gens-là ne sont pas en
place pour interpréter la loi et les règlements, ils sont là pour l'appliquer,
et on respecte ça, et on respecte les règles du jeu. Donc, si on veut vraiment
avoir une réduction pérenne de la bureaucratie puis de ces demandes-là, ça
passe par des modifications à la loi et ultimement aussi aux règlements.
• (16 h 40) •
M. Beauchemin : Combien
de temps, M. le Président?
Le Président
(M. Laframboise) : 40 secondes.
M. Beauchemin : Bon,
bien, je comprends. Donc, ma question, elle revient, là. C'est dans le sens
que, bon, on a un nouveau programme, on doit refaire la demande au grand
complet. Là, au lieu de passer par un exercice qui se ferait aux trois à cinq
ans, il faudrait le faire aux six à 10 ans. Mais supposons que l'année
prochaine on a un nouveau programme...
M. Bérubé (Patrick) :
Bien, c'est là qu'on en demanderait justement des processus allégés pour
l'ajout de programmes, justement, qui feraient en sorte qu'au lieu de faire une
demande complète, il puisse y avoir un processus accéléré pour faire les
modifications pour un seul programme. Donc, ne pas avoir à faire une demande
complète de renouvellement de permis pour l'ajout d'un seul programme, ce qui
est impossible présentement, malheureusement.
M. Beauchemin : Merci.
Le Président
(M. Laframboise) : Merci beaucoup. Donc, merci, M. le député de
Marguerite-Bourgeoys. Je cède maintenant la parole au député de Laurier... De Laurier-Dorion,
3 min 28 s.
M. Fontecilla : Merci, M.
le Président. Bonjour, messieurs... avec nous. Écoutez, j'ai devant moi les
mémoires de la commission, qui nous disent fondamentalement que, c'est ce
qu'ils nous disent, c'est que quand même le travail va devoir être fait soit
par la commission ou soit par vous. Donc, en termes de travail, de... d'heures
investies, il n'y a pas tant de différence. Qu'est-ce que vous pourriez
répondre à ça?
M. Caron (Patrick) : Il y
a une différence.
M. Fontecilla : Oui?
M. Caron (Patrick) : OK.
Donc, le mécanisme d'autoévaluation, on le fait. Par la suite, c'est de rendre
toutes les redditions de comptes nombreuses à la commission pour un certain
temps. Ce sont des visites, des rencontres, des tableaux, des données, des
documents à produire. Donc, il y a beaucoup d'informations.
M. Fontecilla : Très bien.
Mais vous allez... Votre... L'opération que vous allez... que vous allez
effectuer, vous allez la consigner quelque part quand même. Ce n'est pas... Il
y a un niveau de qualité, là, que vous devez atteindre. Souvent, ça se passe
sur un papier ou en informatique, enfin...
M. Caron (Patrick) : Tout
à fait, mais peut-être pas aussi avec des niveaux de complexité aussi grande et
d'échange avec les gens de la commission. Donc, on va s'autoévaluer puis on va
prendre des mesures pour justement s'assurer de la qualité de l'enseignement.
M. Fontecilla : Très
bien. Tout ça découle d'une, comment dire, d'une exigence de confiance dans le
diplôme.
M. Caron (Patrick) : Oui.
M. Fontecilla : Et je
comprends très bien les étapes que vous avez nommées, assurance qualité...
interne, etc., là. Mais vous savez, on en a déjà vu maintes fois dans toutes
sortes de domaines qu'il y a dans les meilleures organisations, il y a des
dérives à travers les temps, etc., des façons de faire qui s'installent. Et là
il y a un scandale et puis, voilà, l'État arrive pour dire : Je vais
installer un comité pour surveiller, fondamentalement. Comment prévenir ces
dérives-là avec l'État, là, tout doucement, là?
M. Bérubé (Patrick) :
Bien, ce qu'on... Ce qu'on propose justement pour prévenir ces dérives-là,
c'est que le ministère a déjà une série d'indicateurs et d'informations sur les
collèges, par exemple, les taux de réussite, par exemple...
M. Bérubé (Patrick) : ...le
taux de placement dans différents programmes aussi. Le ministère a aussi déjà
toute l'information financière sur les collèges. Donc, il peut voir aussi d'un
point de vue la performance financière. Le ministère a une série d'informations
qu'il détient, que les collèges n'ont pas besoin de fournir à nouveau. Ce qu'on
propose, c'est un tableau de bord qui permettrait avec des voyants de couleur,
si un tel collège est vert, jaune ou rouge, et d'autres indicateurs pourraient
être à l'effet, par exemple, un nombre de plaintes reçues par le ministère pour
un collège donné. Donc, avec l'ensemble de ces indicateurs-là, qui seraient
collectés de manière très simple, le ministère pourrait voir rapidement quels
collèges sont dans le vert, quels collèges sont argent et quels sont dans le
rouge, et venir après porter un jugement et mettre son énergie où le problème
est réellement, et non pas y aller de manière mur à mur.
M. Fontecilla : Si les
indicateurs sont au rouge, quelle instance du ministère de l'Éducation
viendrait surveiller, là, viendrait tirer la sonnette de l'alarme? Parce qu'il
y a quelqu'un, il y a un employé quelque part qui va...
M. Bérubé (Patrick) : Tout à
fait. Bien, dans notre cas, ce serait la direction de l'enseignement privé qui
viendrait le faire. Mais le ministère a aussi une direction des enquêtes et je
vous dirais que la ministre de l'Enseignement supérieur a déjà tous les
pouvoirs pour agir. Par exemple, lorsqu'il y a eu le scandale avec les
étudiants qui provenaient de l'Inde dans certains collèges privés non
subventionnés, bien, la ministre à l'époque a mis en place un plan d'action
sans avoir à recourir à des nouvelles lois et règlements. Elle a mis un plan
d'action en place et ça lui a permis de régler la situation. Ces collèges-là
sont passés de 20 000 à 1000 étudiants, donc ça montre vraiment que la ministre
a tous les pouvoirs.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci beaucoup. Donc, je cède maintenant la parole au député d'Arthabaska pour
2 minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci pour votre présentation. Je continuerais un peu dans le
même ordre d'idée. Donc, si je comprends bien, l'évaluation indépendante,
l'intervention indépendante passerait par le ministère. Parce que là, on parle
d'une autoévaluation de vos fonctions. Quelle est la... est-ce qu'il y aurait
une évaluation, une intervention indépendante qui passerait par un autre
organisme, sinon le ministère?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
ça pourrait passer par le ministère, oui, mais de façon très légère. Ça
pourrait faire partie d'une discussion sur l'assurance qualité qui intègre
aussi une série d'indicateurs, comme on l'a présenté tout à l'heure. Parce
qu'on parlait du plan d'action qui a été mis en place, mais vous le savez
aussi, dernièrement, la ministre de l'Enseignement supérieur a dû faire des
enquêtes dans des cégeps aussi. Donc, la direction des enquêtes du ministère
aussi peut mener ces enquêtes-là. Donc, on voit que les pouvoirs de la
ministre, combinés à des indicateurs de résultats qui ne demandent pas
d'efforts supplémentaires au collège pour remplir de la paperasse, permet quand
même de porter un jugement qui est nuancé, qui est juste, sans rajouter de
fardeau au collège.
M. Boissonneault : Mais ça ne
vous laisserait pas dans une position de juge et partie, là, où vous ne feriez
que vous autoévaluer, il y aurait quand même une intervention potentielle
externe?
M. Bérubé (Patrick) : Exact,
parce que de toute façon, lorsqu'un collège renouvelle son permis, dans notre
cas, il doit faire une série de démonstrations aussi de toute façon. Donc, ça
pourrait faire partie de cette démonstration-là aussi qui se fait selon la
période qu'on propose, qui fera en sorte que tant les élèves... les élèves en
auraient plus, auraient plus de soutien, parce que les collèges, nos collèges,
reçoivent autant d'élèves en difficulté que les cégeps, toute proportion
gardée. Donc, ils font déjà des choix difficiles en raison des compressions
budgétaires. Donc, les collèges pourraient mettre davantage d'énergie vers la
réussite des élèves et moins vers la bureaucratie, tout simplement.
M. Boissonneault : J'aimerais
ça vous entendre rapidement sur le nombre maximal d'élèves annuels, puis sur le
retrait du nombre minimal d'élèves résidents pour le nombre maximal d'élèves
annuels. Où est-ce qu'on veut aller?
M. Bérubé (Patrick) : Bien,
en fait, nous, ce qu'on voit, c'est que les différentes mesures qui ont été
mises en place par le gouvernement du Québec, suite au projet de loi 80... 74,
notamment les quotas sur les analyses de CAQ, combinées aux mesures du
gouvernement fédéral aussi, donnent une panoplie d'outils, sans compter les
pouvoirs de la ministre de l'Enseignement supérieur pour pouvoir venir encadrer
tout ça. Donc, c'est à notre avis cet ajout-là qui a été fait, l'année
dernière, dans le cadre du PL74, est un peu superflu à la lumière de toutes les
nouvelles mesures qui ont été mises en place, et aussi de ce qui découle de la
planification annuelle de l'immigration.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci. Messieurs Caron et Bérubé, je vous remercie pour la contribution de
l'Association des collèges privés du Québec aux travaux de la commission. Je
suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux prochains témoins
de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 49)
(Reprise à 16 h 52)
Le Président (M. Laframboise) : Je
souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de l'Institut national de la
santé publique du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec des
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter, et à présenter
les personnes qui vous accompagnent, puis à commencer votre exposé. Merci.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Merci
beaucoup, Monsieur le Président. Bon après-midi à toutes et à tous. Merci
évidemment de... de nous recevoir. Je m'appelle Pierre-Gerlier Forest, je suis
le PDG de l'Institut national de santé publique. J'occupe cette fonction depuis
2022, après une longue carrière au Canada et à l'étranger. Je suis accompagné
aujourd'hui par deux collègues médecins. Le Dr Éric Litvak à ma droite, qui est
vice-président aux affaires scientifiques de l'institut. Éric, ça vous
intéressera peut-être pour la période de questions tout à l'heure, une
particularité dans sa carrière, c'est qu'il a travaillé à l'INESSS et au
ministère de la Santé avant de trouver sa voie à l'Institut national de... de
santé publique. Et puis, à ma gauche, le Dr Judith Fafard, qui est la
directrice médicale du laboratoire...
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...de
Santé publique du Québec, c'est une microbiologiste de grande réputation. Et là
une des choses qui est intéressante, dans la carrière de Judith, c'est qu'elle
a conservé une pratique clinique et que ça peut être intéressant si vous voulez
explorer les différences qui existent entre le système de soins et la santé publique.
Elle en a une expérience personnelle directe à travers sa pratique.
Le projet de loi n° 7 il a été déposé
à l'Assemblée nationale, vous le savez, il y a 20 jours à peine. C'est dire que
notre réaction aujourd'hui est encore teintée d'émotion. La sidération,
d'abord, puisque nous n'avions pas été consultés sur cette initiative, qui a
été une surprise. L'inquiétude, ensuite, pour ne pas dire la consternation,
quand nous nous sommes rendu compte que ce n'était pas seulement l'institut qui
était... qui était rayé d'un trait dans le projet de loi, l'article 1, mais que
la Santé publique avait elle aussi été oblitérée.
Un exemple hautement symbolique, mais, si
vous regardez le projet de loi avec attention, comme je suis sûr que vous
l'avez fait, vous avez remarqué que le mot «santé publique» n'apparaît jamais,
sauf lorsqu'il s'agit de désigner des fonctions existantes ou des organisations
existantes, le Comité d'éthique de santé publique, la Directrice nationale de
santé publique, et ainsi de suite, mais que jamais on ne nomme ni un domaine ni
une pratique.
Il y aurait beaucoup à dire sur l'INSPQ et
sa contribution à la société québécoise au cours de ses 28 années d'existence.
Nous jouissons d'une reconnaissance internationale dans plusieurs domaines.
D'autres instituts de santé publique, parmi les 128 que compte le monde, ont
été modelés sur l'INSPQ. Alors, un exemple proche de nous, c'est l'Agence
canadienne de santé publique, qui a d'abord été, au moment de sa fondation, un
calque identique de l'INSPQ, jusqu'à la manière très organique dont l'agence
intègre en son sein le Laboratoire national de microbiologie. J'ai fait partie
de l'équipe qui a mis en place l'ASPC après avoir participé, au début de ma
carrière, j'étais beaucoup plus jeune, à la création de l'INSPQ, et je parle
donc en connaissance de cause.
Pourquoi... pourquoi tous ces instituts?
Probablement parce qu'il n'y a pas de problème simple en santé publique, peu de
questions peuvent être résolues par un oui ou par un non. Et les instituts se
sont multipliés à travers le monde parce qu'il s'agit d'une bonne solution
organisationnelle lorsque vous voulez faire travailler ensemble des gens qui
possèdent des expertises très pointues et très différentes, parfois pour de
très longues périodes de temps et parfois pour de brèves rencontres
stratégiques. C'est aussi une manière commode de garder à portée de main des
compétences techniques qui sont rares mais qui sont indispensables et que vous
ne trouverez ni dans les universités ni dans le réseau de la santé. Je vais
vous donner un exemple concret : il nous a seulement fallu trois jours pour
répondre au ministre Carmant quand il s'est inquiété de la distance qui
existait entre les sites d'injection et les services de garde. C'est un travail
qui exige des capacités uniques en géolocalisation, en analyse spatiale des
données.
Et je ne veux pas avoir l'air cynique,
j'ai passé une grande partie de ma carrière dans des institutions de recherche,
mais je vous assure qu'un projet universitaire sur un sujet comme celui-là en
serait encore à l'étape de l'approbation éthique. On a été capables de répondre
en trois jours.
Il va falloir beaucoup d'attention aux
détails pour intégrer l'INSPQ dans une autre organisation sans briser toutes
les chaînes de valeurs qui ont été soigneusement construites au fil des ans
dans une foule de domaines. Ce n'est pas une tâche insurmontable, ce n'est pas
ça, le sens de mon message, mais ça va demander des soins et ça va demander une
véritable intelligence des enjeux de santé publique. P
Pour y parvenir, une des toutes premières
choses à faire, c'est de s'assurer que les fonctions principales de santé
publique et que les missions essentielles qui en découlent soient bien
protégées dans la loi. C'est le sens des amendements constructifs. Vous savez,
en anglais, on parle de «friendly amendments», que nous mettons de l'avant.
Nous suggérons d'affirmer clairement et de manière explicite le mandat de santé
publique de ce nouvel institut, l'IQSSS, en lui faisant d'abord l'obligation de
soutenir par son expertise les quatre fonctions reconnues au Québec dans la Loi
de santé publique, c'est-à-dire : la surveillance, la protection, la
prévention et la promotion de la santé. Puis, si vous avez des questions sur
ces fonctions, évidemment, Éric sera très heureux de vous répondre. Nous
suggérons aussi de nommer, encore une fois de manière explicite, un peu comme,
dans la Loi de l'INESSS, qui sert de cadre pour cette nouvelle loi, on
identifie clairement les objets sur lesquels on doit travailler l'INESSS, bien,
nous proposons que l'on nomme clairement les grandes missions qui mobilisent
les experts de santé publique depuis que la discipline existe, la fin du XIXe
siècle, la lutte contre les maladies infectieuses, la protection contre les
contaminants et les effets néfastes des catastrophes naturelles, la santé au
travail et puis les activités de prévention au cours du cycle de vie. Il faut
que l'IQSSS ait l'obligation d'allouer des ressources financières à ces
différents...
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...il
faut s'assurer que ces équipes sont à la pointe des connaissances de manière à
diminuer les risques pour la population du Québec, puis c'est un engagement qui
l'amènera aussi à développer les outils nécessaires des données de santé aux
méthodes de communication.
Autre aspect qui nous paraît primordial,
toujours dans cet esprit constructif de proposer des amendements pour mettre de
l'avant les fonctions de santé publique de l'Institut, maintenir au sein des
deux grands laboratoires de santé publique ultra spécialisés que sont le
Laboratoire de santé publique du Québec et le Centre de toxicologie du Québec
leur fonction de santé publique, qui, à l'heure actuelle, représente jusqu'à
75 % de leur activité. Sans mention explicite dans la loi, le risque
évident avec une intégration à Santé Québec, c'est que ces fonctions soient
reléguées au second plan parce que nous aurons à arbitrer tous les jours les
pressions qui viennent du système de soins.
L'autre aspect de cette question, c'est
d'assurer ce que Jean Rochon appelait les circuits courts entre les
laboratoires et les autres acteurs du système de santé publique, de faire en
sorte qu'il y ait une communication immédiate, sans intermédiaire entre les
IQSS ou la Directrice nationale de santé publique et les personnels des
laboratoires quand cette communication est requise. Les laboratoires ne jouent
pas seulement un rôle opérationnel, c'est des intervenants cruciaux lors
d'urgence sanitaire ou quand un problème inédit apparaît. Il ne faudrait jamais
avoir à demander l'autorisation ou passer à travers des processus de validation
pour pouvoir s'adresser aux experts des laboratoires.
• (17 heures) •
Un dernier point, un centre de référence
et d'expertise ne peut pas se couper de ses relations avec le milieu
universitaire et les lieux d'innovation qui sont fondés sur le savoir. Pour
rester à la fine pointe des connaissances, il est essentiel de pouvoir
participer de plain-pied aux activités de recherche et de formation dans les
différents domaines de santé publique, c'est un rôle que l'Institut joue depuis
sa création. Le transfert de ces responsabilités au ministère de la Santé et
des Services sociaux ne nous apparaît pas avoir été mûrement réfléchi dans les
circonstances.
L'objectif d'améliorer l'efficience et de
réduire la bureaucratie est louable. Il est compréhensible dans le contexte
actuel. Nous le partageons. Toutefois, le projet de fusion entre le INSPQ et
l'INESSS et le transfert des laboratoires à Santé Québec pourrait avoir des
impacts majeurs sur la capacité de répondre... sur la capacité de réponse,
pardon, aux menaces de santé publique. Nous vous invitons donc, si c'est
possible, de prendre le temps nécessaire pour que la vision qui anime le projet
de loi n° 7 puisse être pleinement réalisée et que tous les bénéfices
anticipés soient atteints. Merci de votre attention.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, M. Forest. Nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme
la ministre et députée de Bertrand, vous avez, avec vos collègues de
Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, 16 minutes, 30 secondes. Mme la
ministre.
Mme Duranceau : Oui, merci.
Bien, écoutez, je... je comprends vos préoccupations. D'abord, ce
regroupement-là, ce n'est absolument pas pour perdre quelque expertise que ce
soit en matière de santé publique, puis on a bien entendu déjà vos suggestions
à cet égard-là, que ce soit clair dans la mission, dans le titre, dans tout ce
qui vient avec, là, donc ça, ça a été bien entendu. Puis il n'y a pas, en tout
cas de notre point de vue, il n'y a pas d'urgence non plus à ce que l'exécution
de tout ça se fasse en catastrophe, là. Tu sais, on se donne le temps de faire
les choses comme il faut, mais il faut qu'à terme, il en découle des économies,
puis de l'efficacité, là, plus de l'efficacité que des économies, là, en fait.
Donc, c'est ça l'objectif, alors je pense qu'on va prendre le temps de bien
faire les choses, puis de garder les bonnes personnes pour pour cette
transition-là. Peut-être, justement, vous avez... vous avez mentionné à
quelques reprises l'idée de nous instruire, je pense que ça serait pour le
bénéfice de tout le monde, je pense ça peut être intéressant. Donc, tu sais,
vous connaissez un peu l'INESSS, j'imagine, vous connaissez vos opérations, ça
fait que si on s'élève un peu, là, dans la discussion, est-ce que vous voyez
sur le plan scientifique, sur le plan opérationnel, tout de même, des synergies
à regrouper... à regrouper les deux entités?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : C'est
une question compliquée parce que... je vous ai dit, la santé publique on a
beaucoup de difficulté à répondre par oui et non à vos questions. D'abord,
l'INESSS et l'INSPQ collaborent déjà. Donc, une partie de la réponse c'est oui
parce que ça se fait déjà, il y a déjà des projets qui sont faits en commun, il
y a des projets qui sont coordonnés, vous avez peut-être remarqué, il y a
quelques semaines, les deux organisations ont publié le même jour, à la suite
d'une requête du ministre Dubé portant sur l'extension des mammographies pour
les femmes de plus de 40 ans, les deux organismes ont publié le même jour
un rapport portant sur des aspects différents de cette question-là, mais ils
ont travaillé la main dans la...
17 h (version non révisée)
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...la
main tout au cours du processus pour être sûr, d'une part, qu'il n'y ait pas de
duplication ou de contradiction, mais aussi pour être certain de couvrir l'ensemble
des problèmes et de la question. Donc, il y a... il y a une... il y a des
possibilités de collaboration qui existent et qui sont déjà en place. Au moment
où le ministre préparait sa stratégie de prévention, les comités d'éthique de l'INSPQ,
de l'INESSS et, à ma demande, de la Commissaire à la Santé et au bien-être ont
publié un avis commun sur les aspects éthiques de la stratégie de prévention,
pas trois avis en même temps, mais un avis commun, ils ont travaillé ensemble.
Donc, vous voyez que ces synergies-là, elles existent déjà dans beaucoup de
domaines. On a des mandats différents. Il est possible que, si ce projet d'institut
fonctionne dans l'avenir, oui, je peux voir des domaines dans lesquels la
collaboration pourrait être plus importante. Il y a des choses qui font... que
je trouve très intéressantes évidemment. Mais, pour le moment, ce qui m'embête
beaucoup, c'est que je n'ai pas une étude qui me montre exactement combien ça
pourrait marcher. Et, pour moi, un des problèmes actuels, c'est celui-là, c'est-à-dire,
c'est l'absence de données probantes qui me montrent exactement comment on va
mettre ensemble les deux organisations. Éric, tu veux commenter davantage?
M. Litvak (Éric) : Bien, j'ajouterais
peut-être quelques éléments. Je pense, c'est une chose qu'il faut vraiment
comprendre, c'est le fait que la mission des deux instituts, elle est quand
même assez distincte. Il y a peu de chevauchements. Il n'y a pas vraiment de
duplication entre ce que nous faisons, mais il y a des points de jonction, des
fois, puis il y a des dossiers dans lesquels on va être appelés à se concerter
puis à collaborer. Puis, comme Forrest l'a dit, c'est quelque chose qu'on fait
déjà. Donc, on est deux organisations qui gèrent de la science, qui essaient de
synthétiser la science au bénéfice des décisions. Du côté de l'INESSS, c'est
des décisions dans le système de soins et de services, donc des décisions qui
visent la prise en charge des patients individuels par des professionnels de la
santé, qui visent aussi les décideurs et les gestionnaires des établissements.
Puis, de notre côté, bien, ce sont des décisions qui visent le bien-être et la
protection de la santé de toute la population, donc qui vont toucher... On
parlait des grandes fonctions de santé publique. Dans le fond, nous, on cherche
beaucoup non pas à dire comment on peut bien soigner les gens une fois qu'ils
sont malades, mais comment on peut les empêcher de devenir malades. Puis ça,
bien, ça fait appel à des facteurs qui ne sont pas dans le système de soins
uniquement, OK, qui sont un peu partout, dans tous les secteurs de la société.
Donc, on s'intéresse au développement humain, aux conditions dans lesquelles,
tout au long du parcours de vie, les enfants, les jeunes à l'école, les
adultes, les aînés doivent se retrouver pour avoir le plus de chance de rester
en santé. On s'intéresse à prévenir des maladies, par exemple avec des
programmes de vaccination. Puis on s'intéresse aussi beaucoup, c'est un de nos
mandats à protéger la santé quand il y a des dangers imminents, nous, ce qu'on
appelle des menaces qui nous guettent. Donc, ça, ça peut être un virus qui est
à risque de se propager ici, au Québec, ça peut être des contaminants qu'on
retrouve dans l'air ou dans le sol qui peuvent poser un risque à la population.
Ça fait que nos missions sont
fondamentalement différentes puis donc les sujets qu'on traite sont vraiment
assez différents. Cependant, c'est sûr que, du point de vue des méthodes qu'on
utilise, parce qu'on traite aussi tous les deux de la science, il y a certaines
ressemblances. Toutes les organisations, en fait, qui ont à synthétiser des
connaissances scientifiques pour un sujet donné font appel au même genre de
méthodes. Que ce soit en environnement, en éducation, en santé, il y a toujours
un dénominateur commun. Et puis on a déjà un partage entre les deux instituts,
des fois pour mettre à profit les travaux qu'on fait en lien avec nos méthodes,
par exemple, puis pour apprendre les uns des autres. Ça fait qu'il y a déjà une
part de ces bénéfices-là, je dirais, qui sont réalisés à l'heure actuelle. Mais,
après ça, il faut vraiment voir que, dans le quotidien, les dossiers qu'on
traite vont rester distincts et largement séparés, et puis aussi s'appuyer sur
des expertises qui ne sont pas les mêmes, qui sont différentes. Ça fait qu'on
peut, je pense, imaginer certains bénéfices, mais il faut quand même se dire qu'ils
sont somme toute assez modestes, probablement, par rapport au volume d'activités
puis à tous les produits qu'on réalise à chaque année. Puis c'est le cas des
deux instituts, hein, qui ont une production importante mais très spécialisée
dans leurs domaines respectifs. Puis je pense que leurs deux missions
respectives sont vraiment très importantes.
Mme Duranceau : OK. Je vais
avoir des questions sur les laboratoires, mais, tu sais, si on retourne au
contexte de la pandémie, justement, comment ça s'est matérialisé ou concrétisé,
votre collaboration avec l'INESSS, avec le ministère de la Santé? Comment
fluide tout ça était, du fait qu'on avait trois organisations, là, impliquées?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...à
cette époque-là.
Mme Duranceau : Ah oui! Bon,
ça ne devait pas être mieux.
M. Litvak (Éric) : Et puis
moi, pendant, en fait, une bonne partie de cette période-là, je n'étais pas à l'INSPQ,
j'ai été au ministère comme conseiller médical stratégique avec...
M. Litvak (Éric) : ...Dr
Arruda, donc dans ce rôle-là, j'ai eu à transiger autant avec l'INSPQ qu'avec
l'INESSS, et puis surtout, avec un très très grand nombre de partenaires, donc
tous les ministères, pleins de représentants de la société civile, donc, il
faut se mettre dans le contexte où la pandémie a été une situation
exceptionnelle, où on a vécu des défis d'une très grande complexité, puis il
n'y a rien de ça qu'on pouvait traiter ou résoudre sans travailler en dehors de
nos frontières habituelles, OK, donc c'est vraiment une période, je pense, où
pour toutes les organisations, il y avait des besoins de collaboration puis de
mise en commun qui, évidemment, dans l'urgence dans laquelle on travaillait,
n'était pas simple. Mais... mais pour ma part, je pense quand même que la
distinction et la différence entre les deux missions étaient bien claires. Dans
le cas de la pandémie, l'INSPQ s'est intéressé, bien, en fait, se penchait
beaucoup sur la dynamique de transmission dans la population. Qu'est-ce qui
fait que l'épidémie progresse? Comment on peut essayer de la contrôler, de la
ralentir, puis on sait que la transmission était largement communautaire dans
la société. Donc, sur toutes les mesures qu'il fallait mettre en place dans les
différents milieux, sur les impacts que ça avait, parce qu'on a regardé,
évidemment, des dimensions de santé, mais aussi des dimensions sociales,
l'isolement des personnes, des dimensions économiques qui étaient très importantes
pour le gouvernement là-dedans, donc la santé publique, on avait, de concert
avec tous les partenaires, à essayer de traiter toutes ces questions. L'INESSS
était davantage sur les conséquences sur le système de soins, qui était aussi
très importantes, puis, évidemment, qui ne sont pas... ils sont reliés les unes
aux autres, plus le virus progresse dans la société, bien, plus il y a des gens
qui se retrouvent malades, qui sont hospitalisés, plus il y a une surcharge sur
les hôpitaux. Ça fait que l'INESSS était davantage sur cette question de la
charge hospitalière, les conséquences sur les milieux de soins, puis,
évidemment, on avait à partager des données, puis à partager des perspectives,
ce qu'on faisait durant la pandémie à chaque semaine autour de la cellule de
crise qu'il y avait au conseil exécutif... Ça fait que pour moi, il y a eu
un... une synergie qui n'a pas été toujours simple parce qu'elle ne l'était pas
non plus avec aucun des autres acteurs avec qui on avait à mettre en commun,
mais qui a été très fonctionnelle, puis je pense qu'on a très bien fait durant
la pandémie, au Québec, quand on se compare.
• (17 h 10) •
Mme Fafard (Judith) : Oui,
même pendant la pandémie, c'est... bon, c'est certain que les laboratoires ne
sont pas destinés, pour l'instant, à être fusionnés avec l'INESSS, mais lors de
la surveillance des variants de la COVID, on faisait ça, nous, principalement
pour l'efficacité vaccinale, essayer d'anticiper les nouvelles vagues de
pandémie, faire de la modélisation, mais aussitôt, pour vous donner un exemple,
qu'on a... qu'on a vu poindre des variants qui résistaient aux anticorps
monoclonaux, nous, on n'a pas attendu d'avoir un mandat ou que quelqu'un nous
pose la question, on est allé interpeller directement les responsables de
l'INESSS aux médicaments pour les avertir que les anticorps monoclonaux qui
avaient été approuvés au Québec pouvaient devenir inefficaces puis... et on a
continué, jusqu'à la fin de ce programme de surveillance là, à alimenter les
gens qui étaient responsables de l'approbation des anticorps monoclonaux à
l'INESSS.
Mme Duranceau : Merci, puis
pour... J'ai tu encore du temps, oui?
Le Président (M. Laframboise) : Oui,
6 minutes.
Mme Duranceau : Bon, bien...
opérationnellement, là, justement, les... les laboratoires... Parce que là, ce
qui est prévu, c'est qu'il y ait un regroupement avec ceux de Santé Québec. Là,
je vous entends bien sur la notion de fluidité qui doit demeurer. Mais
pouvez-vous nous dire comment, opérationnellement, tu sais, ça se passe pour
vous du point de vue des laboratoires? Puis qu'est-ce que ça... qu'est ce que
ça va impliquer, ce regroupement-là, ou les conséquences que ça peut avoir pour
vous?
Mme Fafard (Judith) :
Bien,
en fait, c'est sûr qu'il y a énormément d'incertitudes, en ce moment, dans le
projet de loi, parce que là, tout ce que le projet de loi dit, c'est que l'...
fait principalement des analyses en toxicologie, le LSPQ fait principalement
des analyses en microbiologie, alors que les mandats de ces deux
laboratoires-là sont beaucoup plus larges. On fait partie d'un réseau de
laboratoires de santé publique au Canada et à l'international où est ce qu'il y
a des fonctions qui sont entendues par les organismes internationaux. On est
chargés de faire de la surveillance de maladies infectieuses, répondre à en cas
d'épidémie, d'éclosion. On fait de la santé environnementale, de la salubrité
alimentaire, là, les éclosions de salmonelle dans les pistaches, bien, c'est le
LSPQ qui a trouvé ça puis qui a sonné l'alarme. On fait des tests de référence,
on améliore la qualité des analyses en laboratoire, on fait de l'enseignement,
aussi, au niveau du... des professionnels qui sont... qui vont oeuvrer dans les
laboratoires du réseau. On fait des évaluations de politiques publiques comme
les campagnes de vaccination qui... qui sont faites à l'Institut, on travaille
avec les équipes de l'Institut, nous, pour réévaluer ces programmes...
Mme Fafard (Judith) : ...là,
voir si, par exemple, le vaccin pour le pneumocoque, si les souches de
pneumocoque qui circulent sont les mêmes qu'il y a cinq ans, s'il faut
réajuster les campagnes vaccinales. Et on fait de la recherche et développement
pour faire des nouvelles technologies. Il faut qu'on voie les menaces venir
avant que nos décideurs réalisent qu'il y a une urgence. Pour vous donner un
exemple, mais la pandémie de COVID qui a marqué tout le monde, nous, on a
travaillé à partir du 5 janvier d'arrache-pied, bien avant que sonne...
qu'on ait l'urgence sanitaire qui a été décrétée le 12 mars. La Chine
avait publié la séquence du nouveau virus le 11 janvier, on avait un test
de laboratoire prêt pour le Québec le 17 janvier. Donc, l'inquiétude qu'on
a, nous, c'est que toutes ces missions-là ne soient pas explicitement reconnues
lors d'un transfert vers Santé Québec. Et aussi, étant donné que Santé Québec
est davantage opérationnelle, qu'il y a une compétition entre les priorités
pour la santé publique, pour la santé de la population et les besoins de soins
aigus, les besoins cliniques.
Aussi, on est très intégrés dans tous ces
programmes-là de surveillance, de vigie d'intervention d'éclosion. On est très,
très, très intégrés avec les autres directions de l'institut, avec les autres
intervenants de santé publique. Donc, comment va s'effectuer cette... cette
communication-là avec la directrice nationale de santé publique, avec le
ministère, avec les autres directions de l'institut pour continuer à faire des
programmes qui... qui sont, je vous dirais, bonifiés si on se compare à... à
d'autres juridictions? Il y a d'autres laboratoires de santé publique au Canada
qui envient nos programmes de surveillance parce qu'on est capables de joindre
les données de laboratoire et l'épidémiologie. Donc, on fait des très beaux
produits. Puis là il y a peut-être une menace que cette espèce de... cette
espèce de synergie là soit perdue.
Et aussi, mais il y a... il y a un
problème... bien, un problème, une question très matérielle qui est, bien là,
nos serveurs, pour faire fonctionner le laboratoire, ils sont à l'institut.
Tous nos actifs informatifs... informatiques qui fonctionnent en passant sont à
l'Institut national de santé publique. Donc, si le laboratoire transfère à
Santé Québec, comment est ce qu'on va continuer à faire rouler... Comment on va
avoir accès à nos bases de données? Comment est-ce qu'on va avoir accès à nos
pipelines bioinformatiques pour faire la surveillance?
Mme Duranceau : OK. Bien, je
pense, c'est des questions qui sont légitimes, là, ce n'est pas insurmontable,
ceci dit, sur l'aspect informatique. Ce qu'on me dit, c'est qu'il demeure que
la mission des laboratoires nationaux, là, c'est un copié-collé de ce qui
existe déjà, là, dans... dans la loi, ça fait que la mission ne changerait pas,
là.
Mme Fafard (Judith) : Si je
peux me permettre.
Mme Duranceau : Oui, oui, oui.
Mme Fafard (Judith) : C'est
que, dans le projet de loi, ça dit que le laboratoire de santé publique fait
essentiellement des analyses en microbiologie. Moi, je ne comprends pas
qu'est-ce qui est différent par rapport à un laboratoire d'hôpitaux dans ce
libellé-là. Même chose pour le Centre de toxicologie de Québec, qui fait
essentiellement des analyses en intoxications. Il va falloir qu'on m'explique,
par rapport à la recherche de drogue dans l'urine qu'un laboratoire de
biochimie d'hôpital est capable de faire, où est la différence ici?
Mme Duranceau : OK. Bon, mais
il y a peut-être des nuances qu'il faut apporter pour... Parce que, tu sais, il
n'y a absolument pas un objectif d'amoindrir le rôle ou de... de le diminuer,
de le diluer. Ce n'est pas ça. Je pense qu'il y a un objectif de synergie,
clairement, nécessairement au niveau administratif. Puis après ça dans les
pratiques, bien, vous les connaissez mieux que moi, là, les synergies possibles
ou déjà en cours peut-être, de... de ce que vous avez dit.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Je
m'excuse?
Mme Duranceau : Non, non,
non. Je dis les synergies, vous avez mentionné qu'il y avait déjà une
collaboration entre les... entre les organisations, là, qui étaient... qui
étaient existantes.
Le Président (M. Laframboise) : ...
Mme Duranceau : Bon, bien,
écoutez, 30 secondes, je vais les... je vais les laisser aller.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, Mme la ministre. Donc, je cède la parole maintenant au député
de Marguerite-Bourgeoys pour 10 min 24 s, que vous pourrez
partager avec votre collègue de Westmount—Saint-Louis.
M. Beauchemin : Merci, M. le
Président. Donc, d'entrée de jeu, tantôt, quand vous avez commencé votre
allocution, vous avez dit que vous n'avez pas été consulté, c'est ça?
Une voix : ...
M. Beauchemin : OK.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : L'annonce
a été faite, j'imagine, comme pour tout le monde, au moment du dépôt du projet
de loi. La veille, le sous-ministre nous a informés qu'il y aurait un projet de
loi qui serait déposé le lendemain.
M. Beauchemin : Moi, je ne
suis pas un expert, là, en santé publique, là, «full disclosure», mais je
comprends quand même qu'il y a une différence significative entre le rôle que
vous, vous avez puis le rôle de Santé Québec. Je pense que vous, vous êtes,
puis je pourrais la résumer simplement, là, plus dans la prévention puis Santé
Québec, c'est plus comme dans soigner le patient, là, si je comprends bien, là.
Je la résume grossièrement.
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...de
surveillance, hein, de regarder... C'est pour ça les grandes fonctions de santé
publique. C'est la raison pour laquelle on pense... on pense que ce serait
intéressant de les voir apparaître dans la loi. Elles sont déjà reconnues dans
la loi de santé publique...
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
...du Québec et des fonctions de surveillance, regarder ce qu'il va se passer,
des fonctions de protection, c'est-à-dire de... lorsqu'il y a vraiment une
menace, il y a une catastrophe naturelle, des feux de forêt, des inondations et
ainsi de suite, des fonctions de prévention, de faire en sorte que ces choses
là n'arrivent pas, et puis les fonctions de promotion, aider les gens
continuellement à rester en santé puis, si possible, à améliorer leur santé.
C'est ça qui fait la santé publique, c'est ça qui la différencie. Mon ancienne
institution aux États-Unis disait : Nous, on soigne les gens, mais
1 million de personnes à la fois. C'est ce que fait la santé publique.
M. Beauchemin : Puis le fait
que les laboratoires, comme vous avez mentionné, ont été définis beaucoup plus
simplement qu'ils le sont dans la réalité, dans vos opérations, quel message
que vous percevez dans ça? Il y a-tu... il y a-tu un message?
Mme Fafard (Judith) : Mais...
Bien, en fait, c'est qu'on peut toujours... je suis sûre que tout le monde est
de bonne volonté, là, par rapport à préserver la mission du laboratoire de
santé publique, mais, des fois, on peut avoir des impératifs budgétaires. Les
administrateurs peuvent changer et parfois les gens peuvent oublier quelle est
la fonction fondamentale des laboratoires nationaux. Puis, il est toujours
préférable d'inscrire dans le système, de façon explicite, quelles sont les
fonctions de ces laboratoires-là plutôt que de le sous-entendre en simplifiant
un peu la définition.
• (17 h 20) •
M. Beauchemin : Ça serait un
très bon amendement à suggérer. Quand vous regardez ça, quand vous regardez le
projet en tant que tel, là, est-ce que ça vous surprend qu'il n'y ait pas le
concept d'une analyse d'impact qui avait été fait pour essayer de comprendre où
sont les fameuses efficacités opérationnelles qu'on peut aller chercher? Parce
que vous en avez adressé quelques-unes, là, en termes de coopération avec Santé
Québec, là, mais, en tout et partout, là, si vous aviez à estimer une étude
d'impact, là, pourquoi pensez-vous que ça n'a pas été fait?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Évidemment,
je ne peux pas répondre à cette question-là. Ce que je veux dire, c'est que, ce
que nous souhaitons, et c'est le souhait que j'ai exprimé à la fin de mon
intervention, c'est qu'on prenne le temps de regarder ça de façon détaillée,
qu'il y ait un tel examen, une telle étude, de façon à ce que la PDG ou le PDG
de l'IQSSS soit trouvé dans une... se trouve dans une situation où il a un plan
de mise en œuvre, il sait comment faire pour faire continuer à vivre les deux
missions des deux organismes, et puis, progressivement, de construire les
synergies que nous évoquions tout à l'heure.
En 2017-2018, la ministre fédérale de la
Santé m'a chargée... moi et une collègue directrice du département de médecine
familiale de l'Université de Toronto, la Dre Danielle Martin, nous avons été
chargés de faire une enquête sur les agences fédérales de santé. Il y en a neuf
et on nous a demandé d'en examiner huit de ces agences. Elle était pressée, et
je la comprends, elle avait des priorités, elle nous a donné un mandat très
court, mais on a quand même pris une dizaine de mois. Et, à la fin, on a
recommandé les fusions, on a recommandé les abolitions. On a aussi recommandé
dans certains cas d'élargir les mandats, oui, mais toujours à partir d'études,
de consultations, d'un examen très précis de ce que faisaient ces
organisations, bien ou mal. Et c'est sûr que ce travail-là, s'il n'a pas été
fait en amont, il faudra le faire en aval maintenant.
M. Beauchemin : INSPQ, là, a
un peu la réputation d'être l'enfant pauvre du système de santé dans son
ensemble, là, un peu, au Québec, là. Est-ce que vous avez des craintes, à
savoir lorsque... bon, par exemple, on parle de la fusion ici, là, ça va un peu
réduire ce que vous faites, là, plus vers la santé curative, point final, puis
on ne veut pas vraiment aller trop de l'avant sur, justement, faire ces
analyses d'impact pour des grands programmes, à prendre soin de... comme vous
avez dit tout à l'heure, de plusieurs centaines de Québécois à la fois en
prévention?
M. Litvak (Éric) : On sait
historiquement qu'à travers les périodes de crise... parce que c'est souvent
des cycles, quand il y a des crises, il y a beaucoup d'investissements en santé
publique puis en prévention, puis, entre les crises, il y a des
désinvestissements. Puis ce n'est pas particulièrement seulement ici, au
Québec, je devrais dire, c'est partout dans le monde qu'on observe ça. Et puis
on sait aussi que la prévention puis ce qu'on fait en santé publique, c'est des
choses qui rapportent sur le moyen, long terme. Donc, le rendement, il n'est
pas immédiat, mais ça prend un investissement constant pour générer des
rendements à terme. Ça fait que c'est très différent des pressions qu'il y a quotidiennement...
M. Litvak (Éric) : ...sur
l'accessibilité, c'est sur les soins, et puis que quand on met ces deux choses
là ensemble puis que ça devient un vase communicant, là, bien, il y a toujours
un risque de dérive vers le curatif pour qu'on mette nos ressources, nos
énergies, nos efforts, nos expertises là-dessus, parce qu'au quotidien,
c'est... c'est là que sont les... les problèmes et les préoccupations. Ça fait
que je... je dirais que c'est... c'est sûr que c'est une menace qui... qui
semble vraiment... qui est réelle. Quand on combine des fonctions qui sont
liées au curatif puis aux soins puis d'autres qui sont liées à la prévention,
il faut vraiment qu'on... on ait un mécanisme pour protéger ce qu'on consacre à
la prévention. Et probablement que le meilleur mécanisme qu'on puisse avoir,
c'est de... de dissocier ou de séparer les budgets et les ressources qu'on
consacre à chacun.
M. Beauchemin : ...manqué
le... j'ai manqué la dernière partie de votre...
M. Litvak (Éric) : Je... Je
disais que le meilleur mécanisme qu'on peut imaginer pour éviter cette
dérive-là, bien, c'est d'avoir des... des budgets, et des équipes, et des
ressources qui sont dédiés, et qu'on protège, puis on dit : Vous, votre
travail, c'est la prévention, puis vous êtes à l'abri.
M. Beauchemin : Donc, un
peu... je ne me souviens pas si c'était vous qui avez mentionné... ça en entrée
de jeu, mais d'un peu... de faire référence, là, au... aux motivations de base,
là, de... de votre institut, puis de santé publique, puis dire : Voici mes
motivations, voici ce que je dois faire, voici mon budget.
M. Litvak (Éric) : Je pense,
c'est... c'est pour ça que ce qui est dit, c'est que pour qu'on s'assure qu'il
n'y ait pas cette dérive-là, puis qu'il n'y ait pas un... un désinvestissement
graduel en prévention, il faut absolument qu'on précise très clairement qu'il y
a une mission de santé publique dans un futur institut. Donc, tous les
amendements, là, qui... qui sont proposés dans le mémoire visent précisément à
faire ça : s'assurer que c'est quelque chose qui va... qui va rester là,
avec toutes ses capacités, toutes ses expertises.
M. Beauchemin : Je pense...
Pardon?
Une voix : ...
M. Beauchemin : Je ne pense
pas qu'on peut y aller de... avec des généralités, là, parce que je vois que
c'est vraiment une bibitte avec plusieurs pattes, là, OK. Mais il y a-tu, selon
vous, une... une... on peut mélanger les rôles entre ce que vous, vous faites
puis ce que la santé... Santé Québec fait? Dans le sens que, bon, par exemple,
on veut aller dans... dans le laboratoire, ce n'est pas tout à fait le même
concept qu'un laboratoire d'hôpital, on... on va s'entendre, OK, donc là, à ce
moment-là, si ce n'est pas clairement, clairement, clairement défini, là, il y
a-tu un risque que justement l'ensemble des opérations de laboratoire de la
Santé publique soit trop simplifié par rapport à ce qui serait normalement plus
dans la prévention versus le curatif?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Il
faut le penser en termes de... de compétition au... au quotidien, hein? Moi, ça
fait un certain nombre d'années que je dirige des organisations, quand on fait
un budget, on alloue d'abord les ressources aux choses qui sont obligées soit
par le cadre légal, soit par les règlements, soit par les politiques de l'organisation
où vous vous trouvez.
D'ailleurs, dans le cas de l'INESSS, quand
la Loi de l'INESSS est... est venue plus tard, en 2010, que... la Loi de
l'INSPQ date de 1998... quand la Loi de l'INESSS a été faite, on a tenu à
protéger les missions des organismes qui avaient été fusionnés pour créer
l'INESSS pour être sûrs qu'on allait continuer à faire travailler un comité qui
s'occupe de l'évaluation du médicament, un comité qui s'occupe de l'évaluation
des technologies, des organismes qui... qui préexistaient à l'INESSS et qui
fonctionnaient très bien. On voulait être sûrs que ces missions-là soient
protégées, on les a donc inscrites dans la loi.
Et ce qu'on propose de faire aujourd'hui,
c'est le même... le même raisonnement, c'est-à-dire de protéger les missions
essentielles pour qu'il continue à y avoir des équipes qui travaillent sur les
maladies infectieuses, pour qu'il continue à y avoir des équipes qui
travaillent sur les... les contaminants, etc., de façon à ce que... le PDG ou
la PDG de l'organisation sache, en préparant son budget, qu'il ou qu'elle doit
allouer des budgets et protéger des équipes dans ces domaines, comme ce qui a
permis à l'INESSS d'exister malgré le fait que l'organisation était elle-même
le résultat d'une fusion.
M. Beauchemin : Je vous
écoute puis je me pose la question. OK, on va avoir... chacun va avoir une
définition de tâche très spécifique, chacun va avoir son carré de sable, chacun
va avoir ses budgets, puis ça, ce serait la façon la plus optimale, là, de...
de permettre justement le mode préventif de pouvoir continuer puis le mode de
prendre soin du patient aussi de... de continuer. Ça fait que je me pose la
question...
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup. Votre temps est écoulé. Merci. Donc, je cède maintenant la
parole au député de Laurier-Dorion... Laurier-Dorion pour trois minutes 28
secondes.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Je vais y aller avec une question très... très simple : En ce
moment, au-delà des questions d'efficacité un peu ou de... ou budgétaires,
etc., là, dans les... dans les missions qui sont les vôtres, voyez-vous la
nécessité d'une... d'une fusion avec l'INESSS?
Une voix : ...pas...
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
...je suis obligé de vous répondre que je ne le sais... Je ne le sais pas. Pour
le savoir, il faudrait voir quelles vont être les règles du jeu et les règles
d'engagement de cette fusion. Donc, je ne dis pas... je ne dis pas non, je ne
dis pas oui, je reste... suis obligé... en toute honnêteté, hein, c'est...
Donc, c'est mon devoir de vous dire : Je ne le sais pas.
M. Fontecilla : Les acteurs
sur le terrain qui ont l'expertise ne sont pas capables de dire au
gouvernement : Allez dans cette voie-là.
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
Ils seraient peut-être capables de le dire, mais, pour le moment, la question
ne se pose pas vraiment sous cette forme-là.
M. Fontecilla : Très bien. Et
Dr Litvak, vous avez dit tantôt, là, qu'il y a des collaborations, mais il n'y
en a pas tellement entre les deux organisations, et j'ai l'impression qu'on va
procéder à une... à une fusion entre deux... On va mettre deux édifices
ensemble, mais qui vont continuer à être deux édifices ensemble. Peut-être
qu'on va faire des couloirs communs, etc., mais il n'y a... je n'ai pas eu
l'impression de votre témoignage qu'il y a des gains d'efficience substantiels.
M. Litvak (Éric) : Bon, je
veux bien préciser. Bien, en fait, oui effectivement, il y en a des
collaborations, elles sont très précises, ciblées sur certains dossiers. Je ne
dirais pas qu'elles sont omniprésentes dans le quotidien de notre organisation.
Et puis comme ces collaborations-là ont déjà lieu, je vous disais, c'est
peut-être un peu plus difficile d'entrevoir quel gain additionnel qui peuvent être
faits d'un point de vue de notre production scientifique. Donc, effectivement,
je pense que votre lecture, elle est bonne. Quand... c'est intéressant qu'on
regarde aussi ailleurs dans le monde, dans plusieurs pays, il y a, à l'instar
du Québec, des Instituts nationaux de santé publique. M. Forest disait plutôt,
il y a une association internationale, il y en a, 128 instituts qui ont un
modèle semblable au nôtre. Il y a aussi dans plusieurs pays, des agences
d'évaluation des technologies. C'est comme ça qu'ils s'appellent, qui ont leur
propre association. Et puis c'est très rare qu'on a regroupé dans un même
institut ou une même organisation, ces fonctions-là. On a quelques exemples de
ça où l'évaluation des technologies est une direction à l'intérieur d'un
institut de santé publique, par exemple. Mais ce n'est pas du tout un modèle
dominant.
• (17 h 30) •
M. Fontecilla : On a connu une
pandémie. Si, demain matin, on rencontre une autre situation catastrophique,
une nouvelle pandémie et on fait... on travaille et on fait face avec une une
entité fusionnée, est-ce que vous pensez que ça va apporter des gains, là, dans
le traitement d'une situation très problématique?
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
C'est très difficile de répondre à une question hypothétique comme celle-là,
vous vous en doutez bien. Ce... Ça dépendra de la capacité de préserver les
missions de l'organisation, ça dépendra de l'expertise qui... si on regarde
l'histoire du Québec, va probablement être une expertise de pointe, hein, il faut
aussi se faire confiance collectivement. Notre performance pendant la pandémie
a été plutôt dans le haut du panier que vers le bas, hein, par après... Un peu
de difficulté au début. Et je vous le dis, j'étais à l'extérieur du Québec à
l'époque, là, j'ai eu une expérience de première main de la façon dont ça s'est
passé ailleurs. On est quand même capables, collectivement, de résoudre ces
problèmes-là.
L'important, c'est d'être sûr que cette
capacité, elle existe encore, qu'on a les réserves à la fois humaines, les
capacités, les connaissances pour le faire et qu'on va occuper ce champ de
compétence comme on l'a fait depuis les débuts. Une autre crainte qu'on n'a pas
mentionnée, mais qui me préoccupe, c'est que, dans les autres provinces,
pourquoi ils ne font pas exactement la même chose qu'au Québec? C'est parce
que, dans les autres provinces, ils acceptent que l'Agence fédérale et l'agence
de... supplétive en cas de crise. Et au Québec, nous n'avons jamais accepté ce
point de vue, mais c'est l'une des raisons.
Le Président (M. Laframboise) :
Parfait. Merci. Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je
cède la parole au député d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci à vous pour votre présentation. M. Forest, je pense qu'on
s'est déjà... On a déjà discuté à une époque, quand vous étiez en Alberta,
justement, puis j'aimerais ça continuer sur... dans cette veine-là, à savoir le
modèle québécois s'inspire de quel autre modèle? Tu sais, si on... Dans
l'optique de pas toujours réinventer la roue, là, qu'est-ce qui se fait bien
ailleurs? Qu'est-ce qui devrait peut-être nous servir d'inspiration? Puis où
est-ce qu'on se situe à l'heure actuelle avec ce qu'on a à travers l'INSPQ ou
l'INESSS?
M. Forest (Pierre-Gerlier) :
...pour ce qui est de l'INSPQ, c'est un modèle innovant, c'est-à-dire que c'est
un modèle qui a été un des premiers modèles d'institut du genre. On appartient
à la première génération des instituts de santé publique. Comme je vous l'ai
dit, on a inspiré des exemples à l'étranger. On a des partenaires à l'étranger
avec lesquels on travaille beaucoup parce qu'ils nous ressemblent beaucoup.
L'Institut suédois, par exemple, de santé publique, c'est un institut qui ressemble
beaucoup à l'INSPQ. C'est vrai aussi de l'Institut de santé publique des
Pays-Bas ou du Pays de Galles. Donc, on entretient avec ces instituts et on
n'est pas seulement demandeur. Ce sont des gens qui viennent nous voir aussi.
Par exemple, Éric a dirigé une initiative pour développer le programme
scientifique de l'Institut. Mais il y a plusieurs instituts dans le monde qui
sont venus nous voir pour nous dire : comment vous avez fait? Est-ce qu'on
peut... pouvez-vous partager...
17 h 30 (version non révisée)
M. Forest (Pierre-Gerlier) : ...votre
méthode, votre expérience. Donc, le Québec est aussi une source d'inspiration
dans ce domaine. Et au Canada, il est évident qu'on domine très largement la
scène et que l'agence fédérale nous considère comme des partenaires d'égal à
égal, ce qui n'est... ce qui n'est pas mal du tout.
M. Boissonneault : Pourquoi ce
n'est pas mal?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : Bien,
parce que ça montre un niveau de compétences qui correspond assez bien à ce qu'a
été la position du Québec dans ces domaines.
M. Boissonneault : Donc, et
si je comprends bien, il n'y a pas beaucoup de modèles qui rassemble les
fonctions de l'INSPQ et de l'INESSS? Est-ce que... ça, ça se voit peu, ça? Est-ce
que vous voyez, vous, dans la fusion des deux instituts, dans une nouvelle
organisation, une agilité, une économie, une optimisation des ressources
potentielles, là où on en est à l'heure actuelle, est-ce qu'il y aurait... est-ce
qu'on peut faire de l'argent avec ça? Est-ce qu'on peut être plus efficace?
M. Forest (Pierre-Gerlier) : De
l'argent, non. Est-ce que... comme j'ai répondu tout à l'heure, à terme, il est
possible qu'on voit apparaître des choses intéressantes. Moi, je voudrais faire
plus d'analyses économiques à l'Institut depuis que je suis arrivé. C'est une
de mes préoccupations, L'INESSS, en fait. Alors, je suis sûr qu'à terme on
arrivera... ils ne sont pas le même genre d'économistes que ceux dont j'aurai
besoin. Mais ça veut dire qu'on serait probablement capables de construire
autour de leurs expériences de travail avec des économistes pour développer des
capacités comme ça. Donc, oui, il y a un avenir possible. C'est... justement,
je n'essaie pas de noircir le portrait de ce que serait un futur commun. Il
faut simplement se poser des questions, comment préserver dans les deux cas la
capacité de travail d'analyse de façon à protéger la population adéquatement?
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, M. Forest, Dr Litvak, Dre Fafard. Je vous remercie de la
contribution de l'Institut national de santé publique du Québec aux travaux de
la Commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre aux
prochains témoins de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 17 h 36)
(Reprise à 17 h 40)
Le Président (M. Laframboise) :
Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants du Réseau pour un Québec
Famille. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé,
puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter et à présenter les personnes qui vous
accompagnent puis à commencer votre exposé. Merci.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bonjour,
Mme la ministre, M. le Président, Mmes, MM. députés membres de la commission.
Merci de nous recevoir aujourd'hui. Je me présente, je suis Corinne Vachon
Croteau, directrice générale du Réseau pour un Québec Famille. Je suis
aujourd'hui avec M. Raymond Villeneuve, qui est vice-président du Réseau pour un
Québec Famille et directeur général du Regroupement pour la valorisation de la
paternité.
Le Réseau pour un Québec Famille, on est
un organisme provincial d'influence, de concertation puis de renforcement de
capacités. On regroupe 25 réseaux nationaux, associations, regroupements de
secteurs variés qui ont tous pour intérêt le bien-être des familles du Québec.
Notre mission, c'est de favoriser l'implantation de mesures, de politiques, de
conditions qui vont favoriser le bien-être puis l'épanouissement de tous les
membres de la famille. Si on intervient aujourd'hui, c'est précisément
sur une partie du projet de loi n° 7, celui qui nomme l'abolition du Conseil de
gestion de l'assurance parentale, puisque cette abolition touche à un pilier
fondamental de la politique familiale québécoise, qui est le Régime québécois
d'assurance parentale.
Le régime, pour nous, ce n'est pas
seulement un programme administratif parmi d'autres, ce n'est pas seulement le
versement d'une prestation, c'est un réel levier de transformation sociale qui
positionne le Québec parmi les leaders. C'est un levier qui soutient l'arrivée
d'un enfant, le développement de celui-ci, qui favorise l'engagement des pères,
qui induit à lui-même une meilleure... un meilleur partage des responsabilités
parentales, qui influence même la santé mentale des parents, la vitalité
économique du Québec, la stabilité en emploi, l'égalité entre les genres. Donc,
c'est un véritable moteur pour le Québec.
Depuis près de 20 ans, le Conseil de
gestion de l'assurance parentale joue un rôle qui est déterminant dans cette
trajectoire-là, puis ses travaux ont permis de nombreuses améliorations au
régime qui ont eu des impacts concrets sur une transformation de normes
sociales au Québec. Le réseau a eu la chance de collaborer avec le conseil de
gestion à plusieurs reprises, puis on a eu l'opportunité de mesurer
concrètement la valeur ajoutée d'avoir une instance qui est spécialisée, dédiée
puis proche des acteurs du terrain.
L'abolition du conseil de gestion puis le
transfert de l'administration du RQAP au... à Retraite Québec, tel que proposé
dans le projet de loi n° 7, soulèvent pour nous une grande inquiétude sur
l'avenir du régime, puis cette préoccupation-là est partagée par de nombreux
acteurs. En seulement sept jours, le Réseau pour un Québec Famille a obtenu
plus de 145 appuis au mémoire qui vous a été déposé. D'ailleurs, s'il est
possible de le faire, nous avons la liste de ces 146 signataires avec nous, ce
qui démontre toute l'importance des propos qu'on tiendra aujourd'hui.
On a le devoir de s'assurer que
l'évolution du régime va demeurer alignée sur les besoins réels des familles
pour que les...
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...dispositifs
sociaux qui sont en arrière du régime puisse continuer d'évoluer avec le temps.
Il y a cinq enjeux qui nous préoccupent
particulièrement en lien avec l'abolition du conseil de gestion. D'abord, la
préservation de l'expertise. Le conseil de gestion, c'est beaucoup plus qu'un
gestionnaire de programmes, il détient une expertise qui repose sur trois
éléments essentiels à notre avis. D'abord, l'équipe spécialisée regroupée qui
suit l'utilisation du régime en temps réel, qui est connecté aux réalités
évolutives des familles, mais aussi des milieux de travail, tout en se
concertant avec les acteurs du terrain. Deuxièmement, le Conseil a un mandat
explicite qui vise une amélioration continue du régime qui lui permet de faire
des propositions d'amélioration, d'ajustement, puis d'assurer aussi une veille
à l'international pour s'assurer qu'on mette en place au Québec les meilleures
pratiques pour soutenir les parents. Puis finalement, il y a aussi une
reconnaissance institutionnelle du rôle du régime, où les décisions
administratives doivent s'arrimer avec les objectifs sociaux. Et à ce jour,
dans le projet de loi, il n'y a aucune garantie qu'ils vont nous assurer que
ces trois fondements vont toujours pouvoir être maintenus au sein de Retraite
Québec et on pense que sans balises claires on peut perdre une force qu'on a avec
le régime : sa capacité d'adaptation, sa cohérence et sa pertinence
sociale.
Le deuxième enjeu repose sur la
représentativité des cotisants, puis la légitimité d'un régime qui est
contributif. Le RQAP repose sur un principe fondamental : ceux qui cotisent
doivent avoir voix au chapitre dans les décisions, dans les orientations qui le
concernent. Puis le CGAP incarne cette légitimité grâce à la composition de sa
gouvernance. Dans le cadre du projet de loi n° 7, il n'y a pas de
mécanisme équivalent qui prévoit cette représentativité-là au sein de Retraite
Québec. Puis pour un régime qui est contributif, on est d'avis que c'est un
angle mort qui est important. Sans structure, la confiance, qui n'est
évidemment pas acquise dans un régime contributif, pourrait s'éroder avec le
temps.
Troisièmement, on est inquiet de
l'intégrité du fonds d'assurance parentale, puis de la gouvernance des surplus.
Le fonds d'assurance parentale, c'est assurément la colonne vertébrale de ce
régime-là, c'est ce qui fait qu'il peut continuer à vivre, d'être autonome,
puis de garantir aux futurs parents qu'ils auront accès, eux aussi, à un congé.
Il doit être géré, dédié exclusivement à la raison pour laquelle il a été bâti.
C'est important d'avoir des protections légales qui vont être suffisamment
robustes pour empêcher des possibilités de réaffectation progressives ou
d'arbitrages budgétaires futurs. À ça s'ajoute une préoccupation importante sur
l'utilisation des surplus du Fonds qui peuvent, selon la loi, être utilisés
soit pour diminuer les cotisations ou pour bonifier les prestations. Jusqu'ici,
ces décisions-là pouvaient être éclairées par le conseil de gestion. Avec son
abolition, il n'y a rien qui nous garantit que les choix par défaut ne vont pas
s'orienter par des baisses de cotisations plutôt que de l'amélioration du
régime. Présentement, le Fonds a des surplus importants, d'ailleurs on vient
d'annoncer aujourd'hui une baisse encore des cotisations plutôt qu'une
bonification du régime, c'est quelque chose de notre côté qui nous préoccupe
parce qu'on pense qu'on fait bien, mais qu'on peut certainement faire mieux
pour soutenir les parents dans ce moment crucial-là. Donc, il nous apparaît
important de continuer à réfléchir c'est quoi les balises qui seront mises en
place pour mieux utiliser les surplus au bénéfice des parents.
Quatrième enjeu, bien, le maintien d'une
finalité famille. Il y a plusieurs entités qui ont été abolies au fil des
années qui avaient vraiment un focus sur la famille, puis le conseil de
gestion, si on l'abolit, bien, c'est une des dernières entités avec cette
entité famille là qu'on vient abolir. Une transition vers Retraite Québec, une
organisation qui n'est pas spécialisée, hein, en matière de parentalité, peut
laisser croire qu'éventuellement tranquillement pourrait glisser vers une
logique davantage d'administration, de gestion de prestations plutôt que d'être
axée sur les besoins des familles. L'enjeu, ce n'est pas donc de savoir
seulement où sera géré le régime, mais plutôt avec quelle intention le régime
sera géré.
Le cinquième et dernier enjeu, bien,
évidemment, c'est quoi les impacts concrets pour les familles? Ça nous
préoccupe, évidemment. Le RQAP, on l'a dit, arrive à un moment fondateur dans
les transitions de vie. Si l'expertise, la représentativité, l'intégrité du
Fonds puis la finalité familles ne sont plus protégées, bien on est inquiet que
tranquillement il y a des impacts qui s'installent, des impacts probablement
silencieux, mais durables dans le temps, qui pourrait avoir pour effet d'avoir
une adaptation moins efficace du régime aux nouvelles réalités familiales, un
ralentissement des avancées en matière de partage de responsabilités familiales
avec des effets à long terme, bien, sur l'égalité...
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...entre
les gens, notamment. Donc, il s'agit de préserver un modèle social où l'accueil
d'un enfant est traité comme une responsabilité qui est partagée, qui est
soutenue puis reconnue... collectivement, pardon.
On arrive au moment des recommandations,
maintenant qu'on a parlé des enjeux. Bien, il est évident que le Réseau pour un
Québec Famille recommande le maintien du conseil de gestion dans sa forme
actuelle. D'ailleurs, c'est important pour nous de mentionner que le conseil de
gestion n'est pas financé par l'État, mais bien à même le fonds, donc il n'y a
pas d'économie directe à son abolition puis ça n'affecte pas les finances
publiques. Par contre, si le gouvernement décidait tout de même de
poursuivre dans cette voie-là, avec l'abolition du conseil de gestion, on a
trois recommandations à inscrire dans la loi pour garantir des
protections : d'abord, la création d'une direction RQAP qui serait dédiée
au sein de Retraite Québec, avec l'équipe regroupée, des ressources
suffisantes, un mandat clair d'amélioration continue tout en maintenant les
liens avec la société civile; la création également d'un comité statutaire du
RQAP qui relèverait du conseil d'administration. Ce comité-là devrait être à
même de pouvoir assurer la représentativité des cotisants, d'émettre des avis
publics sur les orientations du régime puis devrait être aussi obligatoirement
consulté quant aux changements de modalités du régime, notamment pour
l'utilisation des surplus; puis, finalement, on pense qu'il est important
d'avoir une protection légale du Donds d'assurance parentale en incluant une
interdiction explicite de réaffectation, une reddition de comptes qui est
distincte puis des balises claires sur l'utilisation des surplus, afin que
celle-ci demeure alignée avec les besoins des familles.
• (17 h 50) •
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, Mme Vachon Croteau. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange. Mme la ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de
Bellechasse, Fabre, Dubuc et Masson, vous avez 16 in 30 s. Mme
la ministre.
Mme Duranceau : Oui. Bien,
merci pour vos commentaires. Alors donc, ce transfert-là à Retraite Québec, en
fait, tu sais, on ne touche pas du tout à l'objectif, là, le RQAP, il est là
pour rester, c'est l'aspect administratif de la chose qu'on intègre dans
Retraite Québec, qui, aux niveaux financier puis administratif, a déjà les
ressources pour gérer un régime comme celui-là, là, du moins, sur le plan
financier. Ça fait que, ça, je veux rassurer tout le monde, là, il n'est
aucunement question de mettre fin au régime. Ce n'est pas ça du tout,
l'objectif.
Ça fait que vous avez des recommandations.
Je serais peut-être intéressée à les... à ce que vous élaboriez un peu
davantage sur chacune de vos... de vos trois recommandations. Parce qu'il y
avait plusieurs questions, dans votre mémoire, ça fait que... vous y répondez
partiellement, là, avec les recommandations si on devait aller de l'avant avec
la proposition actuelle. Je voudrais vous entendre.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : On
est tout à fait... on est tout à fait d'accord, d'ailleurs, que le projet de
loi ne vise pas à abolir le régime, là, ça, on le comprend bien, soyez
rassurée, mais ce qui nous inquiète, quand même, c'est une perte d'expertise
dans une grosse machine qui est Retraite Québec, qui n'est pas spécialisée.
Donc, ce qui nous intéresse, c'est de
voir, bien, quels mécanismes peuvent être mis en place pour s'assurer que le
développement, notamment du régime, demeure une priorité dans une très grosse
entité. Puis d'ailleurs, quand on lit le mandat qui est donné à Retraite Québec
pour la gestion de l'assurance... du Régime québécois d'assurance parentale
dans le projet de loi, on est vraiment dans des éléments plus techniques,
administratifs, qui ne mettent pas de l'avant nécessairement le développement
du régime. Donc, ça, ça nous apparaît... Oui?
Mme Duranceau : ...régime,
là, parce que les gens cotisent, l'argent s'en va dans le régime, puis ça sert
à payer des prestations. Ça fait que, là, comment l'expertise... de quelle
expertise vous parlez, puis comment on fait pour ne pas la perdre, quelles sont
vos suggestions? Puis c'est ça.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
l'expertise a permis... Je ne sais pas si, Raymond, tu veux aller dans cette
zone-là, d'améliorer le régime?
M. Villeneuve (Raymond) : Bien,
on peut vous donner des exemples très... Donc, on peut vous donner des exemples
concrets. Par exemple, le congé de paternité, en 2006, il était de cinq
semaines. On est 20 ans plus tard, puis il est encore de cinq semaines.
Pourquoi ne pas l'améliorer? Ce qu'on voit, c'est qu'en France, en Espagne,
dans plein de pays au monde, les gens améliorent le congé de paternité, parce
qu'on sait que c'est une mesure qui rejoint majoritairement les pères. Alors,
si on pense... Si notre seul objectif, c'est de réduire les cotisations, on
pourrait se priver d'amélioration, comme ça. On pourrait aussi, ce qui revient
dans l'actualité périodiquement, prévoir des congés pour les pères lors du
deuil périnatal. Et souvent c'est les mères qui le réclament. Les mères
disent : Je ne veux pas vivre mon deuil périnatal seule, c'est important
que le père soit avec moi. Et ça, avec les surplus qu'on a eus, on aurait pu
faire des modifications comme ça. On pourrait s'intéresser aussi au sort des
parents les plus vulnérables, parce que comme c'est...
M. Villeneuve (Raymond) :
...les régimes d'assurance, les cotisations, c'est un pourcentage de nos
revenus. Donc, les parents avec les plus petits salaires, quand ils se
retrouvent, avec 75... ou 50 %, 55 % de leurs revenus, se retrouvent
souvent à des seuils misérables. Donc il y a un paquet d'améliorations qui
pourrait être fait. Et notre inquiétude, c'est vraiment que cette fonction-là
se perde, de dire : Comment est-ce qu'on peut améliorer le régime? Et
c'est sûr que la coupure de 8 % qui a été faite en juin et la nouvelle
coupure de 5 % qui a été faite aujourd'hui nous inquiètent vraiment, parce
que la fonction d'amélioration du régime devrait vraiment être préservée selon
nous, pour nous, c'est vraiment un enjeu central.
Mme Duranceau : Mais je ne
vois pas comment on pourrait nécessairement perdre l'expertise en intégrant ça
à Retraite Québec. Donc, qu'est-ce que vous suggérez pour qu'on ne la perde
pas, l'expertise... l'expertise ou... tu sais, c'est un lobby, là, par rapport
à ça, non?
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Bien, la perte d'expertise, à notre avis, peut avoir lieu si, par exemple,
l'équipe est dispersée au sein de la grosse structure de Retraite Québec.
Présentement, il y a 14 employés qui travaillent pour le conseil de
gestion. Bien, si, l'équipe se retrouve fragmentée dans des directions
différentes, avec peu de liens ensemble, c'est là où on pense qu'il peut y
avoir une perte d'expertise, parce que l'équipe en place fait la vigie sur ce
qui se passe à l'international, mais étudie aussi les comportements des
parents, comment ils utilisent le régime, puis tout ça. Puis donc il faut que
ça se parle pour pouvoir proposer des améliorations.
Donc, ce qu'on propose, c'est vraiment de
créer, par exemple, au sein de Retraite Québec, une direction RQAP, qui serait
dédiée pour le maintien de l'expertise. On pense que ce serait une solution qui
pourrait être gagnante, mais surtout de préciser le mandat d'amélioration qui
n'est pas présent, présentement, dans le projet de loi. Dans le projet de loi,
on dit qu'on veut «assurer le financement, assurer le paiement des prestations,
administrer en qualité de fiduciaire le fonds et réaliser tout autre mandat que
le gouvernement lui confie». Donc, on pense que d'inscrire à la loi qu'il y a...
que Retraite Québec a également un mandat de veille et d'amélioration, comme il
l'a fait pour ce qui concerne les dossiers de la retraite, il y a un mandat
explicite de veille et d'amélioration des pratiques. On pense que ça devait se
retrouver également sur le dossier de l'assurance parentale.
Mme Duranceau : En tout cas,
moi, je veux juste vous rassurer que les employés sont transférés à Retraite
Québec. Alors, l'expertise des employés, dont vous me parlez, n'est pas perdue
parce qu'elle va suivre.
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Mais encore faut-il savoir comment ils vont être gérés, ces employés-là,
regroupés ou pas? Comment ça va fonctionner pour s'assurer que l'expertise on
l'utilise encore?
Mme Duranceau : Je pense que
c'est des questions qui sont légitimes. Mais à partir du moment où Retraite
Québec a deux chapeaux par rapport à ces deux régimes, bien, ils sont obligés
d'en tenir compte, puis il faut qu'au niveau administratif ça fasse partie des
nouvelles opérations à surveiller, là, puis...
M. Villeneuve (Raymond) :
Bien, c'est sûr que nous, on trouvait intéressant l'idée du conseil d'administration
indépendant qui pouvait donner une petite distance. Au niveau de la
gouvernance, on trouvait ça vraiment intéressant, conseil d'administration
indépendant dans lequel il y a des employeurs, il y a des employés, il y a des
représentants de la société civile. Et on pensait que, dans le processus de
réflexion, c'était vraiment intéressant, l'idée du conseil d'administration
indépendant, on pensait que c'était vraiment un plus de ce côté-là.
Mme Duranceau : Quand vous
dites conseil d'administration, vous référez à l'existence du conseil de
gestion d'assurance parentale.
M. Villeneuve (Raymond) :
C'est ça, c'est ça, pour ne pas perdre cette spécificité-là puis ce mandat là
d'innovation spéciale, parce que, pour nous, c'est vraiment le fleuron québécois,
hein, le Régime québécois d'assurance parentale, puis l'idée, c'est comment
est-ce qu'on peut aller plus loin, comment est-ce qu'on peut l'améliorer.
Mme Duranceau : Ça ne veut pas
dire qu'au niveau du conseil d'administration, éventuellement, de Retraite
Québec, il n'y a pas quelqu'un qui a un chapeau plus comme celui que vous
décrivez. Tu sais, à partir du moment où tes opérations évoluent puis qu'il
faut que tu aies l'expertise pour... pour couvrir l'ensemble des opérations, je
pense que ce serait logique de retrouver ça d'une certaine façon.
M. Villeneuve (Raymond) : Oui,
bien, la préoccupation, c'est, pour nous, il faut vraiment que ce soit
explicité, que ce soit clair, net et précis, parce que... il y a une inquiétude
du terrain, à cet égard-là, qui est vraiment sincère. Puis les familles aiment
le Régime québécois d'assurance parentale, les pères, les mères, et tout ça.
Donc, c'est un joyau, il faut vraiment en prendre soin.
Mme Duranceau : Bien, on les
rassure qu'on préserve ça intégralement. Maintenant, l'expertise, je comprends.
Après ça, comme... tu sais, ce n'est pas une entreprise, là, c'est Retraite
Québec. Mais n'importe quelle société qui a un conseil d'administration, il
faut qu'elle ait des gens qui sont compétents en lien avec les opérations
qu'elle a. Donc, je pense que ça pourrait être logique qu'il y ait un lien qui
se fasse de ce côté-là.
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Mais peut-être aussi que, dans la Loi de Retraite Québec, on prévoit les
différents sièges au conseil d'administration. D'ailleurs, il y a une voix...
si vous me laissez reprendre ma feuille de notes, laquelle est-elle...
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...il
y a une voix pour les... je pense que je l'ai ici... il y a une voix, notamment,
pour les personnes retraitées, il y a un siège qui est réservé. Est-ce qu'on
pourrait revoir la composition déjà, du conseil d'administration, comme elle
est dans la loi de Retraite Québec, pour s'assurer d'avoir une meilleure
représentativité du côté des parents? Parce que là, tout est vraiment axé, puis
c'est défini dans la loi sur le régime... les différents régimes de retraite.
Mme Duranceau : Bien là,
je... là, on va le regarder, là. Comme je vous dis, moi... il y a une
logique...
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Absolument. Je comprends.
Mme Duranceau : ...à ce que
l'expertise soit représentée, là. Ça fait que, de mon point de vue, ça va.
Donc, c'est ça, ça fait que, dans vos recommandations, c'était principalement
ça. Mais il y en avait d'autres. Vous avez énuméré trois choses, là.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
oui, on parlait de l'expertise, de la création, justement, d'un comité
statutaire rattaché au CA, puis, également, une protection légale du fonds
d'assurance parentale, en étant plus explicites sur une interdiction de
réaffectation du fonds, puis comment, également, on va s'assurer d'utiliser les
surplus au bénéfice des familles également.
Mme Duranceau : Oui. On n'est
pas dans complexifier les choses, là, ces jours-ci, mais on entend bien ce que
vous proposez.
• (18 heures) •
M. Villeneuve (Raymond) : Bien,
c'est ça, parce que la... quand les employeurs et les employés cotisent, c'est
pour un objet très défini, qui est de l'assurance parentale...
Mme Duranceau : C'est ça.
M. Villeneuve (Raymond) :
...donc on veut s'assurer de cela, et c'est vraiment ça qui est l'essentiel,
tout ça.
Mme Duranceau : OK. Ma
compréhension, c'est que ça ne change pas, là, ça. C'est l'objectif, puis ça va
le demeurer...
M. Villeneuve (Raymond) : En
tout cas...
Mme Duranceau : ...au même
titre que tu cotises à l'assurance-emploi, c'est une affaire, puis au RRQ,
c'est une autre affaire. Donc là, c'est le RQAP.
M. Villeneuve (Raymond) : C'est
ça. Mais, en tout cas, notre souhait, c'est qu'il y ait vraiment... que tout ça
soit vraiment explicité, pour ne pas perdre notre fleuron québécois, là. Mais
on a l'impression qu'il y a un petit peu de flou dans le projet de loi.
Mme Duranceau : Mais,
écoutez, à valider, là. Mais, moi, il n'y a pas trop de flou dans ma tête.
Le Président (M. Laframboise) : D'autres
interventions? Mme la députée de Bellechasse. Allez-y, madame.
Mme Lachance : ...combien de
temps, M. le Président?
Le Président (M. Laframboise) :
Oui, vous avez six minutes.
Mme Lachance : Merci, M. le
Président. Bonjour, merci d'être là avec nous pour répondre à nos questions, et
nous éclairer sur le travail que vous réalisez, et sur le processus qui pourrait
être celui de la fusion. J'aimerais vous entendre d'abord sur votre modèle
d'affaires actuel, parce que je vois que vous avez des partenaires. J'aimerais
ça que vous me décriviez un peu le rôle de chacun de ces partenaires-là dans
votre mission actuelle.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Au
Réseau pour un Québec Famille?
Mme Lachance : Oui.
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Bien, le Réseau pour un Québec Famille regroupe des organisations qui ont à
cœur l'amélioration de la qualité de vie des familles, et donc, ensemble, on...
je dirais qu'on partage nos préoccupations, on choisit des dossiers sur
lesquels on désire travailler collectivement, ensemble. Je dirais qu'on voit
les... les enjeux qui nous regroupent tous pour avoir une voix collective plus
forte. Est-ce que ça répond bien à votre question?
Mme Lachance : Oui, ça répond
à ma question. Concrètement, vous êtes... Bon, vous avez mentionné qu'il y
avait 14 employés. Ce n'est... ce n'est pas un amalgame, j'imagine, qui est
homogène, chacun a ses rôles et responsabilités. Comment ça se définit? Dans le
fond, le sens de ma question, c'est de voir... Parce que là, vous avez
mentionné, bon, le siège au niveau du conseil d'administration, qui est une
spécificité, bien évidemment, là, au niveau du conseil d'administration, mais
au niveau des employés, vous avez mentionné d'avoir une vigilance, puis comment
ça va se faire, ça vous inquiétait. Actuellement, comment vous travaillez?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Je
veux juste préciser. Nous, nous ne sommes pas le Conseil de gestion de
l'assurance parentale.
Mme Lachance : Non, non, non.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Ça
fait que, donc, les 14 employés, ce ne sont pas des 14 employés à nous, ce sont
les employés du Conseil de gestion de l'assurance parentale, juste pour pouvoir
bien répondre à la question. Puis dans leur fonctionnement, dans ma
compréhension, si c'est ça, la question, bien, ils ont chacun des spécialités.
Il y a des employés qui sont spécialisés, justement, dans la veille, il y a des
actuaires, il y a une équipe de recherche. Donc, je... est-ce que c'était ça,
le sens de votre question?
Mme Lachance : Oui, oui,
c'est exactement ça. Parce que vous avez mentionné, il y a quelques minutes,
d'avoir une vigilance à l'intégration de ces employés-là.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Oui,
effectivement.
Mme Lachance : Donc, la
question, je l'inverse : Quelle vigilance? Et sur quel... sur la nature de
quel poste?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
je dirais, la vigilance, c'est : pas de... pas de... de s'assurer que les
employés ne se retrouvent pas gobés dans une très grosse structure, où, par
exemple, on perdrait cette possibilité, pour eux, d'échanger, de travailler
ensemble dans un but commun, qui est l'amélioration du régime. Retraite Québec,
c'est immense, il y en a, des équipes d'actuaires, il y en a, des équipes qui
font de la recherche. Donc, comment on s'assure de garder cette spécificité-là
qui est au niveau de l'assurance parentale. Les gens qui font de la recherche
vont, par exemple, vraiment faire de la veille sur l'utilisation...
18 h (version non révisée)
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...du
régime par les parents, puis ça a pu permettre de voir, par exemple, qu'il y
avait un enjeu sur les parents adoptants puis permettre de faire des
interventions auprès de populations cibles pour un meilleur accès au régime.
Donc, c'est de toute cette expertise-là dont on parle.
Le Président (M. Laframboise) : Mme
la ministre.
M. Villeneuve (Raymond) : Il
y a également une veille internationale qui est extrêmement intéressante sur
les meilleures pratiques, notamment dans les pays scandinaves.
Mme Duranceau : OK. Vous me
parlez beaucoup des surplus, là. Est-ce qu'à votre avis les balises
actuellement... Parce qu'on ne touche pas à ça, là, l'utilisation des surplus.
Ça fait que les balises qui existent sur l'utilisation des surplus,
actuellement, vous semblent-elles insuffisantes?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
je pense qu'on pourrait, effectivement, aller plus loin pour s'assurer que la
finalité famille se retrouve au cœur des décisions puis des préoccupations.
Mme Duranceau : ...ça, on n'en
parlerait pas, là.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Effectivement,
mais là on touche au projet de loi, donc je pense que c'est une belle
opportunité pour faire cette réflexion-là.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
M. Villeneuve (Raymond) : Puis
d'ailleurs, lors de... quand la coupure des cotisations de 8 % a été
annoncée en juin dernier, il y a plusieurs groupes sociaux qui ont écrit au
Conseil de gestion de l'assurance parentale pour le tenir... pour leur tenir
foncièrement le même discours qu'on tient aujourd'hui, de dire qu'on aurait pu
aussi prendre une partie des surplus pour bonifier le régime. Parce que, dans
le fond, c'est qu'en 2006 on était en avant puis là, à mesure que le temps
passe, on recule dans le classement mondial. C'est quand même assez triste.
Hein, le Québec, on est fier de nos politiques sociales, on est fier dans notre
politique famille. Et ça serait chouette de pouvoir dire qu'on demeure dans le
peloton de tête, et là on est en train de se faire dépasser, ce qui est
malheureux, parce que c'est un des leviers les plus importants pour l'égalité
entre les hommes et les femmes. On dit toujours, les scientifiques nous disent :
Le premier prédicteur de l'engagement paternel à long terme, c'est l'engagement
paternel précoce. Le premier prédicteur d'une bonne coparentalité à long terme,
c'est une bonne coparentalité précoce. C'est déterminant, ces périodes-là,
parce que c'est là, que les rôles parentaux se figent souvent, dans les
premiers mois. Et donc, si on part avec des déséquilibres, c'est très difficile
à rattraper. Donc, tout ce qu'on peut faire là, c'est vraiment tout bénéfice
pour les pères, pour les mères, pour les enfants, pour la société québécoise.
Je m'emporte, mais c'est mon... c'est mon mandat dans la vie de parler des
pères, alors je le fais.
Mme Duranceau : Bien non, c'est
bon. C'est bon, c'est bon. C'était votre pitch, votre envolée finale. C'est
bon.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Ça va? Donc, merci beaucoup, Mme la ministre, et à l'équipe gouvernementale.
Maintenant, je cède la parole au député de Marguerite-Bourgeoys, 10 min 24 s
que vous pouvez partager avec votre collègue de Westmount Saint-Louis.
M. Beauchemin : Merci, M. le
Président. Je partage votre inquiétude pour les surplus parce qu'en fait,
aujourd'hui, on a vu quand même qu'il y a eu un réflexe qui n'était pas lié au
projet de loi sept, mais de prendre les surplus pour réduire les cotisations
des contribuables de... générales sur leur chèque de paie. Donc, c'est une
utilisation des surplus indirectement qui est faite de cette façon-là. Je
comprends, je partage entièrement votre point de vue là-dessus. Et puis c'est
drôle parce que c'est quelque chose qui est totalement parallèle à l'activité
gouvernementale. C'est comme si c'était un fonds additionnel qui pourrait être
utilisé quand le gouvernement décidera de faire ce qu'on fait, comme par
exemple aujourd'hui.
Sur ce que vous dites à propos du fleuron,
je suis entièrement d'accord avec vous pour la raison suivante. Puis moi, je
suis un gars de finance, ça fait que j'ai passé ma vie loin de ce que vous
dites, j'ai... au moyen âge, et je n'ai pas... je n'ai pas passé de temps avec
mes enfants quand ils sont venus, là. Mais la réalité c'est que c'était un
avantage compétitif pour le Québec d'avoir ça parce que ça permet, justement,
un, un meilleur développement des enfants, meilleure relation, comme vous venez
juste d'expliquer. Mais c'est que c'est quelque chose qui fait en sorte que c'est
attrayant de vouloir avoir donc une famille, avoir ce support-là, puis on en a
de besoin, là, parce qu'on a un enjeu, là, de natalité, là, au Québec, là. Ça
fait que c'est sûr que ça, c'est un avantage positif.
Donc, moi, ma question, c'est... Quand on
regarde ça de façon vraiment macro, là, on est dans un régime qui est là pour
aider les jeunes familles. On veut mélanger ça avec le Régime des rentes du
Québec, qui a un mandat totalement différent, pour qu'on puisse continuer à
avoir une certaine... peut-être pas le bon terme, là, mais compétitivité dans
un régime parental puis d'être à l'affût des meilleures pratiques. Il faudrait
absolument qu'à l'intérieur du Régime des rentes du Québec on ait, là, tout le
modus operandi actuel qui est conservé à la lettre puis, en fait, devrait être
amélioré. Puis des décisions de... justement, améliorer le régime permettrait
de pouvoir rendre ce régime-là plus compétitif et donc.
M. Beauchemin : ...aider le
Québec dans son ensemble, au nivellement de la natalité, puis d'avoir des
enfants. Ça fait que, ma question, à part cette expertise-là, là, qui est
fondamentale, selon moi, quelle autre expertise voyez-vous qui serait à risque
avec cette fusion-là?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
je dirais que c'est vraiment surtout le focus sur les familles. Ça prend une
expertise de pointe pour bien connaître l'évolution du besoin des familles,
puis quand on parlait des impacts du régime pendant la pandémie, il y a eu une
certaine chute de la natalité, ce qui a généré des surplus, mais, au Québec, la
chute a été moins grande qu'ailleurs. Puis je pense que nos politiques
sociales, dont le RQAP, dont les mesures de conciliation famille-travail qui
sont en place chez les employeurs, il y a quand même une bonne base qu'on
continue à travailler pour que ça soit amélioré, mais quand même. Donc, je
pense que c'est d'où l'importance justement de continuer ce travail-là puis de
maintenir l'expertise précise que ça demande. Il ne faut pas être généraliste
pour être en mesure de suivre l'évolution de ce régime-là, je pense que ça
prend vraiment une spécialité pour le faire.
M. Beauchemin : Puis, quand
on fait ce qui est proposé dans le projet de loi puis qu'on regarde le surplus actuel
du régime qui est là, si je ne m'abuse, est de 766 millions de
dollars, quelque chose comme ça, là, est-ce que ça va juste se mélanger, selon
vous, dans le pot complet, là, du RRQ, puis là, bon, on ne pourra plus vraiment
distinguer s'il y a un surplus spécifique au régime parental ou pas?
• (18 h 10) •
M. Villeneuve (Raymond) : Ce
qu'on comprend, c'est que les cotisations vont être réduites. Donc, il va y
avoir moins d'entrées dans le régime. Donc, le fonds disponible va être moins
important. Et, si je ne m'abuse, il y a déjà eu, dans le passé, juste avant
2020, des coupures de 4 %, après ça, 6 %. Il y a eu 8 %, il y a
eu 5 %. Si on additionne tout ça, on n'est pas loin de 23 %. On
comprend que la natalité a baissé, ça a généré des surplus importants, mais il
y a comme un levier extraordinaire. Et, pour vraiment faire les choix
stratégiques, il faut vraiment avoir l'expertise.
Je vais vous donner un exemple. Dans la
réforme de 2020, il y a une très belle mesure, qui est le bonus du congé
parental. Quand les deux parents prennent au moins huit semaines, il y a un
bonus de quatre semaines additionnel dans la banque de congé parental du
couple. Donc, c'est pour inciter les familles à partager davantage. C'est une
belle mesure, mais c'est qu'elle est seulement utilisée par 30 % des
parents. Donc, ce n'est pas une mesure universelle. Les deux tiers des parents
ne l'utilisent pas. Donc, c'est bien, puis, ce que ça fait, c'est que les
parents qui partageaient déjà partagent encore plus. Donc, les parents les plus
égalitaires le sont encore plus. Mais la majorité des parents, notamment les
parents les plus vulnérables, n'utilisent pas cette mesure-là. Donc, ça atteint
des objectifs, la mesure est bonne, mais la majorité des familles n'en
profitent pas.
Donc, vous voyez, ça, c'est une expertise
très pointue, très fine, et, si on veut rejoindre tout le monde, bien,
notamment le congé de paternité pourrait être allongé. Ajouter, si je ne
m'abuse... je ne suis pas une actuaire, mais je pense qu'ajouter une semaine de
congé de paternité, c'est 40 millions. On vient d'en couper 760. Ça fait
qu'on pourrait ajouter facilement des semaines à même ces surplus-là, en
gardant quand même de la marge de manœuvre. Donc, il y a moyen de faire...
d'atteindre plusieurs objectifs et de faire vraiment une différence.
Parce que le congé parental, c'est un
créateur de normes sociales, hein? Ça a changé la pratique en 2006. Quand on
est arrivé avec le congé de paternité, on a dit à tous les pères et à tous les
couples : L'engagement des pères dès le départ, c'est fondamental et c'est
rentré dans l'esprit des pères, v'est rentré dans l'esprit des employeurs
aussi. Tout le monde a dit : Bien, dorénavant, c'est ça. Donc, si on va
encore plus loin, on va transformer la société, les pratiques vont s'adapter et
ça va être vraiment tout bénéfice. Mais pour faire ça, il faut le suivre de
proche, il faut faire l'analyse des mesures, quelle clientèle on vise, quel
genre de parent on rejoint, et tout ça? Et c'est un très bon exemple de la finesse
des mesures et de la finesse de l'analyse, il nous semble.
M. Beauchemin : M. le
Président, je vais passer la parole à ma collègue.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci. Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Merci. Je
veux juste corriger. Le Conseil de gestion de l'assurance parentale, ce n'est
aucunement un lobby, c'est une instance paragouvernementale avec les
nominations par décret par les membres du gouvernement. Alors, moi, j'ai une
crainte, je ne sais pas si vous partagez la crainte parce que j'entends ce
que... la vision, c'est : on va transférer ces employés, mais est-ce qu'on
va perdre aussi l'indépendance de l'instance?
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
C'est une bonne question...
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...Effectivement,
on parlait tantôt de représentativité des cotisants, s'assurer que les
cotisants ont une voix. C'est une question qui est légitime à se poser dans le
cadre d'un transfert, à savoir comment on va être en mesure d'influencer les
décisions qui nous concernent. Tout à fait.
Mme Maccarone : Parfait. Ça
fait que ça confirme un peu ma lecture, parce que selon vous, le Conseil de
gestion font un bon travail...
Mme Vachon Croteau (Corinne) :
Absolument.
Mme Maccarone : ...ça fait que
c'est ça. Puis je vous entends, j'adore votre plaidoyer, j'adore votre passion,
puis aussi, je devrais vous remercier pour Réseau pour un Québec Famille. Ça
fait longtemps depuis que je vous connais, je porte le dossier famille pour ma
formation politique et j'ai énormément de respect pour ce que vous faites. J'ai
hâte à lire la liste de 145 noms, parce que si on regarde les membres, vous
avez quand même un liste impressionnant. Olo, AQCPE... tu sais, c'est vraiment
important. Ça fait que moi, je souhaite aussi vous entendre par rapport...
j'essaie de comprendre le pourquoi. Parce qu'encore une fois, je répète, on est
dans la Commission des finances publiques, c'est le but... est, je présume,
protéger les finances, parce qu'on fait face à un déficit important. Ça fait
que je comprends, on essaie de trouver des synergies. Mais vous avez tellement
bien dit, on n'aura pas de synergie. Ça fait que c'est comme une illusion
économique. Alors, comment... c'est quoi votre lecture de ça? Pourquoi qu'on
fait ceci? C'est qui qui sera gagnant? Est-ce que vous, vous serez gagnant?
Est-ce que les parents, les familles vont être gagnants de cet transfert de
personnes?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
j'avoue que dans la lecture qu'on en a fait, on ne comprenait pas la raison.
D'autant plus que le Conseil de gestion n'est pas financé par l'État, mais
vraiment financé par le fonds. Donc, les 14 employés ne touchent pas au budget
de l'État. Il y a une personne qui perd son travail, c'est la PDG, donc ce
n'est pas des économies qui sont substantielles. Puis même là, ça concerne le
fonds qui a des surplus, donc je n'identifie pas moi non plus où est l'économie
dans cette... dans cette... le gain d'efficacité.
Mme Maccarone : Surtout
qu'ils travaillent très bien. Vous l'avez dit, les gens ont un grand respect
pour le Conseil de gestion d'assurance parentale, parce qu'il y a quand même...
c'est quand même une réussite que nous avons, ça fait que ce serait une perte
d'expertise. Je souhaite vous entendre un peu parce que là, j'ai écrit tout ce
que vous dites : dilution de la mission sociale... créateurs de normes
sociales, j'adore, parce que c'est sûr, je pense qu'on oublie que dans cette
mesure économique, il y a des familles autour de ça. Ça fait que c'est très
humain. Ce n'est pas juste l'argent, c'est très humain. Par rapport à la
spécialisation qu'il nous offre, parce que vous avez évoqué qu'il y a quand
même une transition, peut-être juste avec le temps qu'il nous reste, parler des
histoires. On a parlé peut-être des cas d'adoption. Moi, je suis très préoccupé
par des cas des enfants en situation de handicap. J'aimerais vous entendre
là-dessus par rapport le rôle qu'ils ont joué.
Le Président (M. Laframboise) : 8
secondes. Donc, rapidement.
Mme Maccarone : Ah, mon Dieu.
M. Villeneuve (Raymond) : On
se reprendra.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Donc, maintenant, je cède la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38
secondes.
Des voix : ...
Le Président (M. Laframboise) :
Excusez, excusez. Excusez-moi. M. le député de Laurier-Dorion pour 3 minutes 28
secondes. Excusez-moi.
M. Fontecilla : Vous avez...
vous avez marqué un point avec la notion de création de normes et sociales. Est-ce
que vous croyez que la réforme proposée... comment dire, tient compte ou
comprend cette notion-là?
M. Villeneuve (Raymond) : Je
ne suis pas un avocat, mais dans ce qu'on lit, on ne l'aperçoit pas. Ce n'est
pas du tout évident, d'où notre inquiétude.
M. Fontecilla : Très bien.
Vous avez parlé des... des éléments constitutifs d'un régime contributif, là,
c'est la participation. Et dans le scénario où la fonction est adoptée, est-ce
que vous voyez une... comment qu'on pourrait conserver cette fonction-là des
participations des cotisants?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
on pense qu'il pourrait y avoir un comité. C'est notre deuxième recommandation,
un comité spécial relevant du Conseil d'administration qui pourra être créé,
représentatif des cotisants pour s'assurer de maintenir cette
représentativité-là. Puis on pourrait lui donner des mandats précis d'avis, de
recommandations pour s'assurer, justement, que cette voix reste encore entendue
quand il est temps de prendre des décisions qui concernent le régime.
M. Fontecilla : Vous avez
également dans votre mémoire parlé des protections légales du fonds d'assurance
parentale. Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Qui pourraient s'inscrire
dans une... dans la loi, là? Si je comprends bien.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Oui,
effectivement, la loi mentionne déjà une protection minimale, c'est-à-dire que
le fonds doit être utilisé pour verser des prestations ou couvrir, dans le cas
actuel, là, les frais reliés aux opérations du Conseil de gestion. Par contre,
on pense qu'on pourrait aller plus loin en ayant des interdictions...
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...réaffectation,
même temporaire, on ne pense pas que Retraite Québec est mal intentionnée, loin
de... loin de notre idée, mais est-ce qu'éventuellement il peut y avoir des
petits glissements temporaires de dire : Bon, bien, il y a des liquidités
ici, temporairement on en a besoin, on les remboursera? Est-ce que ça pourrait
éventuellement aller là? Donc, on pense que des balises claires avec une
interdiction de réaffectation permettraient d'avoir quelque chose d'encore plus
fort, là, pour éviter à plus long terme des glissements possibles.
M. Fontecilla : Je vous
remercie. Je n'aurai pas d'autre question...
Le Président (M. Laframboise) :
Ça va? Merci beaucoup.
M. Villeneuve (Raymond) :
Puis, dans le fond, ce qui est essentiel, c'est de rassurer les parents, les
employeurs qui cotisent, les syndicats, les employés pour leur dire que l'argent
qu'ils mettent, il va où il est... où il doit aller, tout simplement.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Maintenant, je cède la parole
au député d'Arthabaska pour deux minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci.
Merci d'être là pour nous parler. J'aime bien, moi, nous situer un peu à
l'échelle internationale puis peut-être même à l'intérieur du... de la
fédération canadienne, voir où on se trouve, où on se place avec le conseil de
gestion indépendant, avec le RQAP. Est-ce qu'on fait les choses différemment?
Est-ce qu'on s'inspire de ce qui s'est fait ailleurs? Peut-être nous dire un
peu de quoi il s'agit, là.
• (18 h 20) •
M. Villeneuve (Raymond) : ...on
est les meilleurs en Amérique du Nord. Au Canada, aux États-Unis, Mexique, on
est vraiment les meilleurs, de loin. Au niveau mondial, comme je vous
expliquais, quand on regarde le classement au niveau des pays de l'OCDE, on
recule. Avant, il y avait les pays scandinaves, il y avait nous, puis là ce
qu'on voit, c'est que la France a un congé à peu près similaire dans le cas du
congé de paternité, notamment, de cinq semaines, l'Espagne est rendue comme à
huit semaines, certains pays scandinaves, donc, ont encore plus de semaines.
Donc, c'est comme si, dans le... on descend tranquillement dans le classement.
Puis ça, c'est vraiment malheureux, à ce niveau-là.
M. Boissonneault : Mais, dans
la gestion, dans notre façon de gérer notre régime, dans la façon de... dans
cette indépendance-là qu'on s'assure d'avoir, dans l'expertise qu'on s'assure
de transmettre, est-ce qu'on gère les choses ici de la même façon que dans les
pays scandinaves, par exemple?
M. Villeneuve (Raymond) : Je
ne sais pas si tu as une réponse.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : ...malheureusement
pas en mesure de répondre à cette question-là.
M. Villeneuve (Raymond) : Mais
onpourrait aller chercher la réponse et la transmettre... On connaît
plusieurs chercheurs, chercheuses qui ont l'expertise, mais nous, on ne l'a
pas, on est désolés.
M. Boissonneault : Vous avez
dit que vous voulez maintenir, évidemment, le conseil de gestion. Si on
l'abolit, vous recommandez la création d'une direction RQAP dédiée au sein de
Retraite Québec. Qu'est-ce qu'on perd si on passe par cette option-là, si on
abolit le conseil de gestion mais qu'on crée quand même une direction dédiée au
sein de Retraite Québec?
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Bien,
moi... je pense qu'on se met des bâtons dans les roues. C'est-à-dire que, là,
on a une instance qui fonctionne bien. Donc, pourquoi aller vers un autre
modèle? Où sont les gains réels? Moi, c'est la question que je me pose. C'est
sûr que c'est possible de le faire quand même, mais est-ce que ça va être
facile? La réponse, c'est : Probablement pas.
M. Boissonneault : Et le...
la direction RQAP dont vous parlez serait essentiellement un conseil de
gestion. Ça, on reviendrait à peu près au même.
Mme Vachon Croteau (Corinne) : Une
petite équipe interne.
M. Boissonneault : OK.Avec
à peu près le même résultat. Très bien. Merci beaucoup.
Le Président (M. Laframboise) : Merci.
Donc, merci, Mme Vachon Croteau, M. Villeneuve. Je vous remercie pour la contribution
du Réseau Québec Famille aux travaux de la commission.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre aux prochains témoins de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 18 h 22)
(Reprise à 18 h 24)
Le Président
(M. Laframboise) : Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite donc à vous présenter et à présenter les personnes qui vous
accompagnent, puis à commencer votre exposé. Merci.
M. Daigle
(Christian) :Merci, M. le Président.
Donc, Christian Daigle, président général du Syndicat de la fonction publique
du Québec. Je suis accompagné à ma droite de M. Isaïe Dubois Sénéchal, qui
est conseiller à la recherche, ainsi qu'à ma gauche de M. Pierre-Alexandre
Caron, conseiller politique au bureau de la présidence générale.
Mme la ministre, M. le Président, Mmes et
MM. les députés, le SFPQ est un syndicat indépendant qui regroupe environ
43 000 membres répartis dans près de 40 accréditations, plus de
32 000 d'entre eux sont issus de la fonction publique québécoise, et les
autres proviennent du secteur parapublic. La mission du SFPQ consiste à
défendre les conditions de travail, les intérêts de ses membres. Le SFPQ défend
aussi plus largement un projet de société axé sur la démocratie, la protection
et la défense de l'environnement, le partage, l'équité, la solidarité et le
progrès. Et c'est ce que nous aurions défendu aussi si nous avions été invités
à la commission du projet de loi n° 3, mais nous
avons été les seuls syndicats omis de cette commission.
Si nous ne nous opposons pas ici au projet
de loi n° 7, plusieurs de ses
dispositions ont de quoi inquiéter et devraient, à notre avis, être modifiées,
voire retirées. Par ailleurs, il est apparent que... il est aberrant que le
projet de loi puisse prétendre, jusque dans son titre, d'améliorer l'efficacité
gouvernementale dans le contexte d'austérité actuel. En effet, en poursuivant
une politique néolibérale de démantèlement, en persévérant dans les mises à
pied de milliers de travailleuses et des travailleurs dans le gel d'embauche,
la recentralisation technocratique de certains organismes, nous peinons à
comprendre comment se justifie la prétention d'efficacité du gouvernement. Le
contexte austéritaire colore toutes les dispositions du projet de loi, limite
leurs effets positifs éventuels et risque même d'en amplifier les impacts
négatifs.
Depuis près d'un an, le Québec traverse
une crise des services publics et ils subissent une série de coupes d'une
ampleur sans précédent. Dans les seules accréditations que nous représentons,
ce sont plus de 2 000 personnes qui ont disparu en un an. C'est
l'équivalent de 6,1 % de l'effectif de la fonction publique. Et pourtant,
le gouvernement continue de justifier cette trajectoire en affirmant vouloir
être... accroître l'efficacité de l'État. Mais l'efficacité ne peut émerger du
vide. Et elle ne peut se construire sur la disparition du personnel, sur des
centres d'appels saturés, sur des dossiers qui s'empilent à la CNESST, à
l'IVAC, au MESS, faute de bras pour les traiter. Les coupes arrivent alors que
le ratio dette PIB demeure sous le seuil des 45 % et que le poids du
service de la dette sur le budget est à un creux record.
Le choix de l'austérité est donc
politique. Cette austérité a des effets concrets et graves. Elle touche
disproportionnellement les femmes. Elle s'attaque aux régions qui perdent pour
certaines jusqu'à 11 % de leurs effectifs. Elle touche l'ensemble de la
population qui voit les services se dégrader chaque jour. Elle touche aussi
notre identité collective. Le Québec s'est construit autour de la force de ses
services publics... la Révolution tranquille. S'en prendre à ces services de
manière aussi désinvolte, c'est s'en prendre à l'idée même que nous nous
faisons de notre identité. Les premières... Les premières recommandations de notre
mémoire portent donc sur la nécessité pour le gouvernement de mettre fin à ces
pratiques austéritaires actuelles.
Le projet de loi propose également une
série de réorganisations structurelles, dont la fusion de l'INESSS et de
l'INSPQ au sein d'un nouvel Institut québécois en santé et services sociaux,
les prêts de personnel du Tribunal administratif du Québec au Tribunal
administratif des marchés financiers ainsi que l'intégration de la fonction
publique des Offices Québec-Monde pour la jeunesse. Pour ces cas, rappelons
simplement que, sur le terrain, la fusion simultanée d'organisations sous
pression comporte de réels risques de perte d'expertise, de dilution des
missions et d'instabilité pour les équipes en place présentement.
Le projet de loi introduit aussi une
transformation majeure du Régime québécois d'assurance parentale, la
disparition du Conseil de gestion de l'assurance parentale est particulièrement
préoccupante. Le CGAP constitue le cœur de l'expertise du régime. Une instance
capable d'analyser les.
M. Daigle
(Christian) :...de proposer des
améliorations, de corriger les failles au fil du temps. Le supprimer revient à
affaiblir un régime qui fonctionne et, qui plus est, sans faire d'économies
réelles. Le financement du CGAP provient en effet du fonds d'assurance
parentale.
La modification de l'article 115 de la Loi
sur l'assurance parentale qui retire la possibilité d'utiliser les surplus pour
améliorer les prestations ou réduire les cotisations soulève aussi des
questions fondamentales. Pourquoi réduire ainsi les marges de manœuvre d'un
régime financé par eux-mêmes? Nous invitons les parlementaires à rejeter les
modifications que le projet de loi apporte au régime.
Le projet de loi se distingue également
par l'abolition de la Commission de la fonction publique et le transfert de ses
mandats, tantôt au Tribunal administratif du travail, tantôt au Conseil du
trésor. Cette abolition suscite de vives inquiétudes pour nous. L'expérience
nous démontre que les abolitions et les fusions de ce genre mènent trop souvent
à une diminution des budgets. Si le projet de loi fait passer les activités de
surveillance de la CFP au Tribunal administratif du travail, nous croyons
comprendre que les activités de vérification pourraient être effectuées par le
Conseil du trésor. Si c'est le cas, le potentiel de conflit d'intérêts devrait
suffire pour convaincre de retirer les articles à cet effet.
Enfin, alors qu'on fête en 2025 les 60 ans
d'existence de cette institution neutre et impartiale, l'abolition de la CFP
nous semble être dangereuse dans la mesure où le niveau d'indépendance dont
jouit la commission pourrait faire défaut. Nous recommandons donc, entre
autres, que le projet de loi soit modifié de manière que la Commission de la
fonction publique continue d'exister et conserve son mandat dans les activités
de surveillance, d'enquête et de vérification.
• (18 h 30) •
Le projet de loi introduit une mesure
positive : obliger le ministre des Finances à présenter un cadre financier
pour la lutte aux changements climatiques, mais cette avancée est
malheureusement éclipsée par plusieurs reculs significatifs.
D'abord, la possibilité de retirer les
surplus du Fonds d'électrification et de lutte aux changements climatiques pour
les rediriger vers le Fonds des générations ouvre une brèche dangereuse
permettant au gouvernement d'en détourner les sommes destinées à l'action
gouvernementale.
Ensuite, l'élimination du bilan annuel sur
les... les mesures mises en œuvre pour la réduction des GES réduit l'imputabilité
du ministre dans l'environnement alors même que le projet de loi prétend
augmenter l'imputabilité.
Enfin, le passage du rapport de la
Commissaire au développement durable d'un rythme annuel à un rythme quinquennal
diminue considérablement la capacité de suivi des actions gouvernementales en
la matière.
Ces reculs sont intolérables pour nous.
C'est pourquoi nous recommandons le retrait des articles 141, 145 et 146.
Le projet de loi modifie également le
régime d'autorisation de contracter en retirant l'obligation de renouvellement
périodique. Si cela peut sembler être une simplification administrative, on
risque d'affaiblir un mécanisme essentiel de vérification et de contrôle. Nous
craignons en effet que le nouveau système d'autorisation de contracter soit
adjoint d'une diminution des moyens donnés à l'Autorité des marchés publics. Si
le renouvellement des autorisations peut représenter un irritant mineur pour
quelques entreprises, ce processus est toutefois essentiel afin de mener
adéquatement les vérifications qui s'imposent pour assurer la plus grande
transparence possible dans l'attribution des contrats gouvernementaux.
Nous recommandons donc que la section
portant sur le retrait de l'obligation de renouvellement de l'autorisation soit
retirée du projet de loi.
Parallèlement, l'État continue d'augmenter
sa dépendance à la sous-traitance avec certaines de ces entreprises qui coûtent
de plus en plus cher. Si les dépenses de contrats de service représentaient
4.4 % du budget du gouvernement en 2018... 2019, elles atteignaient
7.4 % en 2023-2024. Cette trajectoire de la sous-traitance... Cette
trajectoire fait de la sous-traitance un moteur d'inefficacité et de coûts
supplémentaires, alors que le discours public prétend rechercher l'économie.
Avant de réformer les pratiques de
l'Autorité des marchés publics, nous invitons la ministre à forcer ces
ministères et organismes à diminuer la sous-traitance, particulièrement dans le
contexte d'austérité actuel. Rappelons à cet effet que l'article 15 de la Loi
sur la gestion et le contrôle des effectifs... qui stipule que nul ne peut
aller en sous-traitance pour contourner des gels d'embauche. Actuellement,
plusieurs ministères se défilent face à cette obligation et font augmenter la
facture sur le budget du Québec tout en mettant des centaines d'occasionnels à
la porte.
Le projet de loi propose enfin l'abolition
ou la réduction d'un ensemble de rapports gouvernementaux. Même si certains
ajustements peuvent moderniser la reddition de comptes, le retrait de rapports
essentiels, notamment dans les domaines financier et réglementaire, diminue la
capacité des parlementaires et du public à suivre l'évolution des lois, des
programmes et de la gestion gouvernementale. La transparence n'est jamais un
luxe, elle est la condition du bon fonctionnement de la démocratie. Tout comme
pour votre collègue le ministre Boulet qui le dit avec le projet de loi trois
envers les syndicats....
18 h 30 (version non révisée)
M. Daigle
(Christian) :...pourquoi feriez-vous le
contraire? Réduire la fréquence, la qualité ou l'obligation de ces rapports
crée un angle mort dans la gouvernance de l'État. Nous émettons donc également
dans notre mémoire des recommandations afin d'assurer que l'élimination des
rapports ne soit pas le corollaire d'une diminution des capacités réactives du
gouvernement.
En conclusion, plusieurs dispositions du
projet de loi intensifient les dynamiques mises en place par l'austérité
gouvernementale. À la lecture du projet, il est facile d'anticiper l'augmentation
de la perte d'expertise, la diminution de l'imputabilité gouvernementale et un
ensemble de reculs environnementaux. Le projet de loi mine également les
capacités réflexives du gouvernement par l'abrogation de certains rapports,
fait peser un danger sur les services publics aussi essentiels que le régime
québécois d'assurance parentale et supprime un chien de garde comme la
Commission de la fonction publique. Si nous ne recommandons pas le retrait
total du projet de loi, nous invitons toutefois les parlementaires à faire un
examen attentif des 18 recommandations transmises dans notre mémoire, celles-ci
nous apparaissent essentielles afin d'éviter un recul supplémentaire. Merci de
votre attention, nous sommes maintenant disposés à répondre à vos questions.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci, M. Daigle, nous allons maintenant commencer la période d'échange. Mme la
ministre et députée de Bertrand, avec vos collègues de Bellechasse, Fabre,
Dubuc et Masson, vous disposez de 16 minutes 30 secondes. Mme la
ministre.
Mme Duranceau : Écoutez, merci
pour vos commentaires. Oui, évidemment, on n'a pas des positions, je pense, qui
sont similaires, mais ça va être intéressant de discuter. Puis, peut-être juste
avant de commencer, je pense qu'on... on n'est pas en train de parler d'austérité,
là, nous autres. Quand il y a une croissance des dépenses, pour nous, ce n'est
pas de l'austérité, je voudrais juste préciser ça. L'autre chose, vous avez
parlé de l'autorisation du renouvellement d'autorité de contracter, ça, ce qui
était une autorisation qui était demandée aux cinq ans et là il y a une mise à
jour annuelle qui est faite, alors les marchés publics au sein du secrétariat
du Conseil du trésor nous disent : Bien, écoute, comme il y a une mise à
jour annuelle, ça ne donne rien de redemander une autorisation aux cinq ans.
Donc on vient réduire la bureaucratie de ce point de vue là. Puis, tu sais, de
faire un lien entre la sous-traitance, puis l'autorité de contracter, je pense
qu'il y a des raccourcis, là, qui se font à cet égard-là.
Mais, tu sais, à part de me dire, là, qu'on
ne devrait pas toucher à rien là, parce que... j'aimerais ça vous entendre, est-ce
que vous considérez que tout va parfaitement, qu'on est efficace comme on
pourrait, tu sais, maximum d'efficacité qu'on peut avoir, que les services aux
citoyens n'ont pas besoin d'être améliorés, que vos impôts, là, font tout le
chemin qu'ils doivent faire? Parce que je vous écoute, puis, bien, je suis peut-être
mieux de m'en aller chez nous, là, parce qu'il n'y a rien à faire, là. Ça fait
que moi, j'aimerais ça vous entendre, ça ne se peut pas que vous ne voyez pas
des pistes d'amélioration, là.
M. Daigle
(Christian) :On a beaucoup de pistes d'amélioration,
mais pour ça il faudrait qu'on maintienne les postes pour les personnes qui
donnent du service à la population. Présentement...
Mme Duranceau : Ça, c'est ce
qu'on a demandé, là.
M. Daigle
(Christian) : ...il y a des coupures qui s'effectue à travers
la CNESST, à travers l'IVAC, à travers les centres d'appels du gouvernement du
Québec un peu partout dans les ministères. Et ça, ça met à mal les services
publics, ça l'empêche les gens de pouvoir avoir accès à ces services-là, ça
augmente les délais de traitement des dossiers. On est passé en dedans de huit
mois, je pense, de 5000 dossiers de plus à l'IVAC en passant de 16 000
à 21 000 dossiers en attente. Les dossiers de la CNESST, c'est le
même principe également, les délais augmentent aussi. Donc à travers les
coupures qui s'effectuent présentement, il y a une augmentation des délais et
de tout le traitement de ces dossiers-là qui s'effectuent, qui sont pour les
citoyens et les citoyennes dans un premier lieu. Alors, effectivement, les
services publics sont mis à mal présentement et, oui, il y aurait du travail à
faire pour redorer le tout.
Mme Duranceau : Bien, écoutez,
soyez assurés que nous, on a demandé à ce qu'il n'y a pas de coupures qui
affectent les services aux citoyens, il y a le concept d'imputabilité aussi des
hauts fonctionnaires et des dirigeants qui est important, ça fait que ça, c'est
important que les décisions soient prises en respect de la directive
gouvernementale, puis, surtout, en respect, de vouloir bien servir les
citoyens. Mais au-delà de demander, d'ajouter des effectifs, ça, c'est la façon
facile de régler les problèmes, hein? On rajoute du monde, puis ça va, ça va
régler tous nos enjeux. Y a-tu des suggestions que vous pouvez nous faire pour améliorer
l'efficacité de l'État dans les façons de travailler au niveau de la
bureaucratie, l'intelligence artificielle, tout le monde nous parle de ça, c'est
une façon d'être plus efficace, puis de produire plus rapidement des résultats.
J'aimerais ça entendre votre perspective là-dessus.
M. Daigle
(Christian) :Sur les différentes pistes
de solutions qu'on pourrait apporter, ça nous ferait plaisir de vous en jaser,
peut-être pas ici en commission parlementaire, mais nous avons envoyé, il y a
quelques semaines déjà, une lettre afin de pouvoir vous rencontrer, puis on n'a
pas eu d'accusé de réception ou de retour de cette lettre-là. Alors ça va nous
faire plaisir de faire cette rencontre éventuellement, puis de vous vous amener
des pistes de solutions. On pourra y travailler entre temps. Quant à...
Mme Duranceau : Bien, je veuxjuste préciser qu'on a...
Mme Duranceau : ...on a
répondu, vous avez eu un accusé de réception, on me le confirme. Puis
évidemment, on va vous rencontrer en temps et lieu, là, j'ai eu des semaines un
peu compliquées, là, comme vous le savez, mais encore là, on jase, là, des
pistes d'amélioration autres que d'augmenter, parce que ça, moi je l'ai...
je... c'est la façon facile de régler le problème, c'est de dire : je
rajoute du monde, mais ça ne veut pas dire que je revoie mes façons de faire,
ça ne veut pas dire que je revoie le nombre de rapports, leur pertinence, leur
fréquence. Qu'est-ce que vous pensez de ça? Je veux dire, je suis sûre que vous
avez des idées, vous êtes là depuis longtemps, plus que moi.
M. Daigle
(Christian) :Ah, tout à fait, puis
là-dessus, j'ai mon collègue, là, qui se démange de vouloir vous répondre. Je
vais le laisser un petit peu, puis je reprendrai le dessus.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Premièrement, en matière d'efficacité, on parle de
sous-traitante, donc on parlait, depuis l'arrivée du présent gouvernement en
2018-2019, 4.4 % des dépenses budgétaires étaient de la sous-traitance en
services, c'est rendu 7.4 %. Il y a un enjeu, actuellement, au niveau de
l'application de la loi sur la gestion des effectifs, l'article 15, qui dit que
lorsqu'il y a des mesures de contrôle de gestion des effectifs, les ministères
et organismes ne peuvent aller en sous-contractant pour éluder ces mesures-là.
Là, ce qu'on voit en ce moment, c'est qu'on n'est pas dans cette situation-là,
je vous donne un exemple : en ce moment, au ministère de L'Emploi et de la
Solidarité sociale, alors qu'on a perdu une quinzaine de personnes dans un
centre d'appels à Québec dans la dernière année suite au non-renouvellement des
contrats occasionnels suite au gel d'embauche, on a eu, et on a vu ça dans le
SEAO, c'est sorti il n'y a pas longtemps, un contrat de 2 millions de
dollars pour les appels que le MESS n'est pas en mesure de prendre, et le MESS
prend de moins en moins d'appels en proportion. Donc en ce moment, si on veut
faire de l'efficacité, mais peut-être ne pas couper ça pour aller, à la place,
mettre encore plus d'argent dans les entreprises privées. Donc, il y a cet
enjeu-là, de la sous-traitance, il y a cet enjeu là de l'effectif qui,
réellement, ne donne... donne moins de services et on est obligés d'aller en
sous-traitance pour le faire. C'est, par ailleurs, ce qu'on avait recommandé
lors de la commission Gallant également. Également, dans le mémoire, on vous
indique qu'il y a d'autres manières de sauver certains coûts. On propose, par
exemple, la fermeture du Bureau du Québec en Israël, qui représente plusieurs
coûts et qui va à l'encontre des valeurs qui sont défendues par le Québec à
l'international, des valeurs de solidarité, des valeurs de droits, de respect
des droits humains, des valeurs de non-collaboration avec des États
génocidaires.
• (18 h 40) •
M. Daigle
(Christian) :D'un autre côté, également,
vous avez parlé d'intelligence artificielle. Nous n'aurions aucun problème à
vouloir en discuter avec vous, mais dans un premier temps, il faudrait
peut-être réglementer et encadrer l'utilisation de l'intelligence artificielle
à travers les différents ministères et organismes, ce qui ne s'est pas encore
fait au niveau du Québec. Nous avons réclamé depuis fort longtemps, depuis bien
des années, d'avoir un encadrement afin de savoir comment on peut utiliser,
comment on peut regarder à travers l'intelligence artificielle pour améliorer
les choses. Mais ce n'est pas le cas encore aujourd'hui. Alors est ce qu'il y a
des pistes d'amélioration? Peut-être à ce niveau-là, oui, effectivement, pour,
justement, éviter d'avoir à faire des rapports sur des rapports, on n'a aucun
problème de ce côté-là, mais ne pas diminuer les services à la population de la
même manière, également.
Mme Duranceau : Je vais
passer la parole à ma collègue.
Le Président (M. Laframboise) : Mme
la députée de Bellechasse.
Mme Lachance : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup de votre présence. On sent que vous en avez long à
dire. Vous avez mentionné quelque chose il y a quelques minutes, puis,
évidemment, j'ai lu votre mémoire et c'est... il y a énormément de contenu. Par
contre, je ne vois pas beaucoup de pistes de solutions, je vous ai entendu
mentionner quelques exemples qui... qui me paraissent potentiels, mais
peut-être pas si concrets que cela. Mais j'aurais aimé discuter avec vous parce
que vous avez mentionné une donnée, le 6.1 % des effectifs diminués dans
la dernière année. Est-ce que vous avez fait le compte, aussi, de la hausse des
effectifs depuis 2018?
M. Daigle (Christian) :C'est que la hausse des effectifs ne nous touche pas, nous,
au SFPQ, nous qui sommes pour donner des services à la population. Elle a été
faite au niveau des cadres des... de la haute fonction publique, peut-être au
niveau de certains postes de niveau professionnel également. Mais au niveau du
SFPQ, nos données n'ont pas changé. Nous n'avons eu aucune augmentation du
nombre... du nombre d'effectifs que nous avions. À ce moment-là, c'est des
services à la population que nous rendons directement et ce n'est pas nous qui
avons été touchés par ça, tandis que les coupures d'effectifs nous ont touchés
directement dans un premier temps.
Mme Lachance : Si on parle de
service à la population, vous avez mentionné, là, les centres d'appels et tout.
Il y a des choses qu'on fait dans l'État, puis je pense que vous êtes bien
placé pour le savoir, et qu'on fait de manière répétitive, année après année.
On parlait, tout à l'heure, des rapports, entre autres choses, un allègement
des rapports. Est-ce qu'il y a des mesures qui vous apparaissent plus porteuses
que d'autres dans les tâches qui sont répétitives et qui pourraient, peut-être,
générer de l'espace-temps pour les équipes qui travaillent dans les
organisations?
M. Daigle
(Christian) :Bien, il y a peut-être,
effectivement, des tâches qui sont répétitives et à ce moment-là, il n'y a
aucun problème si on veut les éliminer. Mais souvent, ces tâches-là, qui sont
répétitives, sont à la demande des hauts fonctionnaires ou des hauts
gestionnaires. Alors, si on veut regarder les tâches qui sont effectuées
répétitivement, bien, il faudrait peut-être regarder sur les commandes qui sont
passées par ces hauts fonctionnaires-là, ou ces hauts gestionnaires-là, qui
sont normalement imputables de ces décisions-là, si on veut éliminer quelque
chose ou gagner...
M. Daigle
(Christian) :...du temps de travail. On
pourrait regarder de ce côté-là aussi. Puis mon collègue va peut-être vouloir
en ajouter un petit peu aussi.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : De manière très concrète, on parlait des centres
d'appels tantôt, une majorité des centres d'appels au gouvernement du Québec en
ce moment ont des objectifs de réponse, de... de finir un appel en trois
minutes. Quand on a des enjeux complexes, par exemple au MESS, au RQAP, des
fois, ça prend plus que trois minutes, mais les agents sont poussés par cette
recherche de résultats là, pour s'assurer que leurs statistiques ne soient pas
influencées négativement, sont poussés à raccrocher le plus vite possible et donc
à donner le moins d'information possible, quitte à ce que le citoyen rappelle.
Donc, en ce moment, on a un manque d'efficacité qui est associé à cette gestion
par statistique là, qui est associée à ces directives-là qu'on voit dans la
majorité des centres d'appels du Québec. Donc, ça, par exemple, ça nous permet
d'avoir plus de temps, ça nous permet d'avoir un meilleur service et plus
d'efficacité.
M. Daigle
(Christian) :...ce type de rapport là est
inutile, selon nous, parce qu'on doit donner un bon service à la population. Et
d'avoir une personne assistée sociale qui répète quatre fois son histoire à
quatre personnes différentes, on pense que oui, il y a une perte de... une
perte de temps qui s'effectue dans ce temps-là.
Mme Lachance : Je m'excuse.
Je veux revenir sur ce que vous venez de mentionner. Trois minutes, trois,
quatre minutes par appel, un centre d'appels, travail à la chaîne, on doit en
traiter énormément des appels en quantité.
M. Daigle
(Christian) :...mais il y en reste encore
énormément qui ne sont pas traités, parce que, souvent, suite aux changements
qui ont été effectués au niveau du ministère Emploi et Solidarité sociale, ce
qui est amené, c'est le fait que ce n'est plus un agent qui s'occupe du même
dossier du début jusqu'à la fin, mais le dossier est chamboulé et est...
rebondit d'un agent à l'autre. Donc, la personne qui doit appeler doit toujours
recommencer son histoire et doit répéter la même histoire, alors que si on
avait gardé le même principe que nous avions avant, c'est la même personne qui
aurait répondu, qui aurait déjà connu le dossier, et nous aurions économisé
temps et argent à ce moment-là en le faisant.
Mme Duranceau : je ne suis pas
sûre que ce que vous décrivez opérationnellement, ça fonctionne, là.
M. Daigle
(Christian) :Bien oui, ça fonctionnait
avant comme ça. Je viens du MESS, du ministère, en plus, Emploi et Solidarité
sociale, je suis agent d'aide socioéconomique, alors je commence à avoir une
bonne connaissance un petit peu de... du fonctionnement au niveau du ministère.
Et c'est certain qu'en ayant changé la... la méthode, la façon de travailler au
niveau du ministère avec les agents d'aide socioéconomique, on a changé
automatiquement le délai de traitement aussi des dossiers.
Mme Lachance : ...mais je
n'entends pas... Sincèrement, là, je n'entends pas de... Je n'ai pas le
sentiment que vous êtes favorables au changement.
M. Daigle
(Christian) :Ah, on est tout à fait
favorables au changement. Il n'y a aucun problème là-dessus. Le problème, c'est
qu'en venant couper à travers les différents organismes on va économiser
environ 35 millions, admettons 40 millions dans le maximum, alors
qu'il y aurait beaucoup d'autres mesures qui seraient beaucoup plus porteuses
de... d'économies pour l'État.
Mme Lachance : Quand on parle
de fusion puis de réorganisation des organismes, il y a aussi des transversales
qui vont se maximiser. Il y a une complémentarité entre les organismes. On n'a
pas... ce n'est pas le fruit du hasard, là, qui est... qui est devant nous dans
le projet de loi. Est-ce que vous êtes d'accord que la complémentarité puis le
travail d'équipe, c'est important dans plusieurs des missions de l'État?
M. Daigle
(Christian) :Ah, le travail d'équipe est
toujours important, effectivement. Par contre, à travers les mesures qui sont
là, qui... les coupures qui sont amenées également aussi, la possibilité de
perte d'expertise qu'on a à travers les personnes qui ne seront pas renouvelées
ou qui ne seront pas amenées à travers ces changements-là, bien,
automatiquement, pour nous, il va y avoir des difficultés par la suite. Le
travail d'équipe va être perturbé, c'est certain aussi, à ce niveau-là. Puis je
peux laisser mon collègue continuer s'il le désire.
Mme Duranceau : ...qui
normalement devrait vous intéresser. Il y a des mesures dans le projet de loi
sur l'imputabilité de la haute fonction publique, donc... Puis l'imputabilité
des... des gestionnaires, tout ça, est ce que c'est quelque chose qui vous
intéresse ou tout est... tout est convenable?
M. Daigle
(Christian) :On n'a tout à fait... on
n'est pas contre l'imputabilité. Si nos gens sont imputables du travail qu'ils
font, il est tout à fait normal que les hauts gestionnaires et que les
directeurs soient également imputables des décisions qu'ils prennent et de la
suite des décisions qu'ils... qu'ils mettent en place. Et si ça ne fonctionne
pas, bien, à ce moment-là, qu'ils portent les conséquences également des choix
qu'ils auront faits. Parce que, trop souvent, on a vu des hauts... des hauts
fonctionnaires être tablettés ou seulement être changés d'endroit alors que des
fautes étaient commises, et beaucoup plus graves que ce qui a coûté le poste à
des gens que je représente. Alors, ça, sur l'imputabilité des hauts
fonctionnaires, on n'a aucun problème de ce côté-là.
Mme Duranceau : Bon, merci
de... C'est bon de l'entendre dire. Alors, bien, écoute, on est toujours un peu
sur notre faim quant à des propositions d'amélioration de l'efficacité de
l'État, peut-être que ça viendra dans des conversations en privé, mais je
m'attends à ça, là, parce qu'à un moment donné d'être en vase clos puis de se
dire : On ajoute des ressources, puis c'est ça, notre solution à
l'efficacité à tout prix, je ne pense plus qu'on est là. On a... on a des
objectifs de pérennité des services pour la population. Les besoins sont
immenses. Il y a nécessité d'un retour à l'équilibre budgétaire en vertu de la
loi. Ce n'est pas vrai que si on répète la même recette encore une fois, on va
améliorer les résultats. Alors, il faut changer...
Mme Duranceau : ...nos façons
de faire. On a plein d'opportunités de le faire, que ce soit avec les nouvelles
technologies, que ce soit en se questionnant sur des... des pratiques qui ont
cours depuis très longtemps, puis de dire : Je peux-tu faire les choses
différemment? Moi, les gens que je côtoie, je vous dirais, au sein du
Secrétariat du Conseil du trésor, là, sont très emballés du projet d'améliorer
l'efficacité de l'État. Puis pour beaucoup se disent : Aïe! C'est... Ça
fait longtemps qu'on aurait dû faire ça. Oui, des fois, ça passe par une
réduction d'ETC, mais d'autres fois, ça passe par des réductions de rapports
qui vont permettre de libérer du temps pour que les gens puissent travailler
sur d'autres choses, où là les services aux citoyens vont être mis de l'avant.
Alors, moi je suis dans cette perspective-là. Et je ne me lève pas le matin en
disant : On coupe des ETC. Je me lève le matin en disant : Comment on
est capables de faire mieux avec les ressources qu'on a? Alors...
M. Daigle
(Christian) :Je suis content que vous
précisiez cet aspect-là. Mais je tiens à vous préciser qu'on n'a jamais demandé
d'ajouter des effectifs. Si maintenant on avait juste maintenu les effectifs
sans les couper depuis ce qui se fait depuis un an, on n'aurait pas été à la
même place. Si on avait pu libérer les listes d'attente qu'il y avait, il n'y
aurait pas eu de problème de ce côté-là. Mais on n'a jamais demandé d'ajouter des
effectifs par rapport à ce qui a été coupé... juste de maintenir ce qui a été
coupé aurait été déjà une bonne amélioration.
Et, sur les pistes d'amélioration, ça nous
fera plaisir de pouvoir vous en soumettre, surtout si, par la suite, vous nous
dites que vous allez les étudier puis vous allez les considérer aussi, ce qui
n'a pas été fait par vos prédécesseurs.
• (18 h 50) •
Mme Duranceau : ...les
analyser, là, après ça, je vais voir ce que j'en pense. Mais ce que je veux
vous dire aussi, c'est que je... Puis c'est correct, tu sais, vous me parlez de
votre point de vue. Mais les Québécois, là, quand ils nous entendent parler,
là, bien, ce qu'ils ont entendu, là, c'est qu'il y a une augmentation du nombre
d'effectifs dans l'État. Ça fait que ce n'est peut-être pas dans votre
syndicat, c'est peut-être dans les autres, mais à un moment donné, les
Québécois, ce à quoi ils s'attendent, c'est que les services soient rendus,
qu'ils soient... rendus efficacement, qu'il y ait une imputabilité puis qu'on livre.
Alors, peu importe, c'est sous quel syndicat, ce qu'ils veulent, c'est que ça
livre efficacement. Ça fait que ça, il faut garder ça en tête aussi, je pense,
dans nos discussions.
M. Daigle
(Christian) :Bien, effectivement. Puis on
est tous des fonctionnaires, hein? Ça fait que le terme «fonctionnaire»,
malheureusement, est galvaudé. Et à cet effet-là, on serait contents aussi de
pouvoir vous soumettre où ces fonctionnaires-là ont été embauchés, ces 15 000
personnes là de plus. Parce que nous, notre effectif n'a pas changé à travers
le temps. Donc, ça, ça a un impact aussi sur les services à la population.
Et, quand on explique aux gens qu'avec les
effectifs qu'on a, qu'ils n'ont pas changé, et où sont les problèmes dans les
services publics, et là qu'on coupe de plus et qu'il y a moins de personnes
pour répondre à leurs besoins, les Québécois ne sont pas plus contents
d'entendre ces situations-là. Les gens veulent avoir des réponses à leurs
questions, veulent pouvoir parler avec quelqu'un, pas juste à une machine. Et,
à ce moment-là, ils s'attendent à avoir des services à la population aussi.
Le Président (M. Laframboise) : Merci
beaucoup, Mme la ministre et l'équipe gouvernementale. Maintenant, je cède la
parole au député de Marguerite-Bourgeoys 10 minutes 24 secondes qu'il pourra
partager avec sa collègue de Westmount-Saint-Louis.
M. Beauchemin : ...beaucoup,
M. le Président. Bien, d'entrée de jeu, j'ai noté que vous... vous l'avez dit,
puis c'est normal, là, vous ne représentez que vos membres, puis c'est correct.
J'ai une question en ce qui a trait à leur perspective, en fait, dans le
contexte de la fusion entre l'INESSS puis l'INSPQ : Vous avez des membres,
donc, dans les deux organisations, ils voient ça comment, eux autres?
M. Daigle
(Christian) :...dans un organisation,
c'est l'INESSS. L'INSPQ n'est pas représenté par le SFPQ. Donc, c'est sûr que
présentement, il y a une certaine, je ne dirais pas une... mais un certain
flottement qui se fait. On ne sait pas trop à quoi s'attendre de cette
fusion-là. On ne sait pas quelle sera la nouvelle entité, comment elle sera
organisée, comment le... le mariage entre les deux organisations va
s'effectuer. C'est pour ça que dans les recommandations, nous avons une
recommandation aussi de nous amener à travers ce travail-là pour s'assurer que
les conditions de travail soient respectées de part et d'autre, qu'il n'y ait
pas une partie qui prenne le dessus sur l'autre partie également, et qu'on
puisse amalgamer cette fusion-là ou ce mariage-là de la meilleure façon
possible entre les organisations.
M. Beauchemin : Puis ça, vous
le voyez comment? C'est comme... Vous n'avez pas été consultés, là, vous l'avez
dit d'entrée de jeu tantôt, là. Comment vous... Comment voyez-vous pouvoir contribuer,
là, au débat dans ce cas-là spécifiquement?
M. Daigle
(Christian) :Bien, quand on en saura un
petit peu plus sur la manière dont les... les organisations vont se regrouper à
travers la nouvelle institut, bien, ça nous fera plaisir de pouvoir s'asseoir
avec les parties et de pouvoir discuter justement de la mise en place, de
s'assurer que les... que les conditions vont être là, comme on a fait dans le
passé également. Lorsque les fonctionnaires de la ville de Montréal ont intégré
la fonction publique... Parce qu'avant l'aide sociale de la ville de Montréal
était gérée par la ville elle-même. Et, lorsqu'il y a eu une... lorsqu'ils ont
cédé les fonctionnaires qui étaient des temporaires ou des occasionnels à
l'État québécois, bien, on s'est assis avec le syndicat qui les représentait
ainsi qu'avec le gouvernement pour voir à la meilleure transition possible, vu
que nous accueillons ces nouvelles personnes là dans la fonction publique, et
s'assurer que leurs conditions de travail comme leurs conditions... bien, leurs
conditions de travail, mais pas juste convention collective, là, mais leurs
conditions de travail au quotidien soient respectées à travers tout ça et qu'il
n'y ait pas d'animosité ni d'un...
M. Daigle
(Christian) :...ni d'une part ni de
l'autre à travers cette arrivée-là de nouveaux fonctionnaires.
M. Beauchemin : OK. Puis,
dans la fusion du RQAP, là, puis du RQ, c'est un petit peu le même genre de
scénario, là, vous avez de vos membres, j'imagine, dans les deux côtés de ça?
M. Daigle
(Christian) :Effectivement, on représente
les gens au niveau du RQAP, entre autres.
M. Beauchemin : Bon. Comment
qu'ils voient ça, eux autres, la fusion?
M. Daigle
(Christian) :Bien, encore là, il y a
beaucoup d'anxiété sur comment vont s'effectuer les choses et est-ce que ces
fusions-là vont amener une réduction de services? De par le passé, c'est arrivé
souvent qu'en fusionnant deux organisations, il y ait des coupures de budgets
qui soient effectuées, et ce qui résulte également en des coupures de postes en
bout de ligne. Si les coupures sont là pour uniquement couper qu'est-ce qui ce
n'est pas essentiel, mais que le service à la population demeure et que les
gens continuent d'être aussi nombreux à donner ce service-là, on n'est pas
réfractaires à ça. Si, par contre, cette fusion-là amène une diminution des
services à la population, c'est là qu'on va s'inscrire en faux. C'est là que
nos membres ne voudront pas participer à ce travail-là de réduction du travail
envers la population, du service à la population qui va être effectué à travers
ça.
M. Beauchemin : OK. Vous avez
entendu parler aujourd'hui de ce qui se passe avec les surplus, là, sur le
Fonds vert, qui vont être redistribués, là, vers le Fonds des générations. Vous
en pensez quoi, de ça, vous?
M. Daigle
(Christian) :Là-dessus... Mon collègue en
a parlé un petit peu avant. Je vais le laisser reprendre les mêmes propos.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : C'est une très mauvaise idée. De manière... de manière
succincte, c'est une très mauvaise idée. C'est-à-dire qu'on a un enjeu, en ce
moment, d'une action gouvernementale en matière environnementale. Là, on vient,
dans ce projet de loi là, permettre justement de dérober ces sommes-là au Fonds
d'électrification, de lutte aux changements climatiques pour le mettre vers le
Fonds des générations, alors que c'est immédiatement qu'il faut agir en matière
environnementale si on ne veut pas avoir une dette environnementale encore plus
grande demain. Donc, de retirer cet argent-là pour le mettre peut-être pour
plus tard, pour un enjeu de gestion de la dette alors qu'on a un enjeu de
gestion de crise climatique, là, maintenant, qui est urgent, ça nous apparaît
comme étant une très mauvaise idée.
M. Beauchemin : Puis, tout à
l'heure, vous avez parlé que, bon... Bien, en fait, on a eu un échange, là,
pour entendre vos propositions concrètes, là, pour faire en sorte qu'on puisse
améliorer l'efficacité, là, de l'État. Vous avez abordé le sujet, là, de la
sous-traitance. Je ne comprends pas, en fait, l'argumentaire comme quoi que la
sous-traitance, ce n'est pas bon pour l'efficacité de l'État. Je voudrais
juste... peut-être me le réexpliquer encore.
M. Daigle
(Christian) :Bien, la sous-traitance, c'est
les activités gouvernementales qui étaient faites par des employés de l'État
qui ont été cédées à des sous-traitants par coupes d'effectifs, par manque de
matériel, également, aussi. Alors, maintenant on paie plus cher pour du travail
qui se faisait à l'interne pour moins cher. Donc, cette efficacité-là est
perdue et cet argent-là est perdu, également, aussi. Si on prend minimalement
le déneigement des routes, le déneigement des routes a été même repris par la
ville de Québec à l'interne, plutôt que d'utiliser des sous-traitants. Ils ont
économisé des dizaines de millions de dollars. L'État, la province devrait
faire la même chose et reprendre à l'interne, et on économiserait des centaines
de millions de dollars. C'est une des mesures.
Sur les autres mesures d'efficacité, nous
avons fait l'an dernier les états généraux de la fonction publique, qui est un
grand sommet que nous avons effectué nous-mêmes avec différents groupes,
différentes organisations, pour voir justement comment est-ce qu'on pourrait transformer
l'État, comment est-ce qu'on pourrait... redonner ses lettres de noblesse à
l'État québécois. Et nous avons une multitude de recommandations. Nous avons
sorti... nous allons sortir le livre blanc, justement, des états généraux, nous
le ferons parvenir et dedans il y a une série de mesures qui pourraient être
mises en place pour amener une plus grande efficacité de l'État.
M. Beauchemin : Combien de
temps qu'il me reste, M. le Président?
Le Président (M. Laframboise) : ...4 min 25 s.
Des voix : ...
Le Président (M. Laframboise) :
Mme la députée de Westmount—Saint-Louis.
Mme Maccarone : Oui. Merci
beaucoup. Avec très peu de temps, je veux parler de la Commission de la
fonction publique. On sait qu'il y avait un rapport qui a été déposé
dernièrement en lien avec le Conseil du trésor, dans lequel il y avait pas mal
de critiques. Là, par la suite, on a vu une baisse d'ETC, on a vu une baisse de
budget et maintenant on voit l'abolition du CFP. Votre lecture de ceci, puis
c'est quoi le résultat de l'abolition de la Commission de la fonction publique?
M. Daigle
(Christian) :Bien, nous, on voit d'un
très mauvais oeil l'abolition de la Commission de la fonction publique. Je l'ai
dit, d'ailleurs, dans mon introduction d'ouverture. On fête cette année les 60
ans de la commission, qui est un organisme qui est neutre, qui est impartial,
qui est extérieur au gouvernement et qui, souvent, a à critiquer certaines
décisions qui sont prises ou qui sont faites par le gouvernement. Alors, pour
nous, on trouve essentiel que ce tribunal-là demeure ou que cette instance-là
demeure externe au gouvernement du Québec, qu'elle ne soit pas fusionnée d'une
manière ou d'une autre, ou qu'elle soit scindée et remise dans les mains du
Conseil du trésor, en partie, et du Tribunal administratif du travail de
l'autre côté.
Mme Maccarone : Ça fait que
leur rôle est fondamental. Est-ce que c'est un mesure de représailles envers
eux...
Mme Maccarone : ...nous sommes
en train de parler de l'abolition.
M. Daigle
(Christian) : Bien, ça, les gens qui ont amené ça pourraient le
dire, ce n'est pas à moi de répondre à leur place, malheureusement.
Mme Maccarone : Puis, en ce
qui concerne la perte du CFP, là, vous avez évoqué, dans votre mémoire, perte
d'indépendance, compromet la neutralité, l'impartialité. Avec le temps qu'il
nous reste, peut-être, vous pouvez juste nous élaborer là-dessus, les craintes
que vous avez.
M. Daigle
(Christian) :Bien, c'est d'être juge et
jury, juge et partie à ce moment-là. C'est la difficulté qu'il va y avoir, par
la suite, de pouvoir avoir une instance qui va être neutre et impartiale, alors
que des personnes font appel à ça contre leur employeur. Donc, comment est-ce
qu'on peut, comme employeur, après ça, donner un rapport neutre et se dire...
avoir une neutralité certaine à travers tout ça? Donc, pour nous, c'est
impensable d'avoir le Conseil du trésor qui va régir une partie des travaux qui
était faite par la Commission de la fonction publique, sans avoir justement
cette... cette ombre-là, justement, de partialité qui va s'effectuer dans les
travaux à venir et dans les redditions de comptes qui étaient demandées à
travers la Commission de la fonction publique sur les actions gouvernementales
et les différentes décisions qui étaient prises.
• (19 heures) •
Mme Maccarone : Merci
beaucoup.
M. Daigle
(Christian) : Merci.
Le Président (M. Laframboise) :
Ça va? Donc, merci beaucoup. Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, Mme
la députée de Westmount—Saint-Louis. Maintenant, je cède la parole au député de
Laurier-Dorion pour 3 min 28 s.
M. Fontecilla : Merci, M. le
Président. Bonjour, messieurs. Merci beaucoup d'être là. Écoutez, en commençant
votre mémoire, vous faites mention d'une perte d'emploi, d'une diminution
d'effectifs de 2000... 2000 postes, 2000 équivalents temps plein seulement dans
votre syndicat... dans votre unité syndicale?
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Oui, en fait, la manière dont on calcule ça, parce
qu'on n'a pas les équivalents temps plein de semaine en semaine, on comprend,
c'est par les données de cotisation. Donc, c'est les données mêmes qui nous
sont envoyées, là, par le gouvernement sur les données de cotisations. Ces
données de cotisation là, en comparant la période de paie 2024-20, c'est-à-dire
début octobre 2024, et 2025-20, c'est-à-dire début octobre 2025, on a une
diminution d'à peu près 2 003 personnes qui ont cotisé à ces
périodes-là, et on voit la diminution à chaque période de paie, depuis octobre
2024, qui va en diminution constante à ce moment-là.
Donc, 6,1 % de personnes en moins
dans les gens qu'on représente, dans les accréditations fonction publique.
Partout au Québec, de manière encore plus forte dans les régions, moins
11 % au Saguenay—Lac-Saint-Jean, en Abitibi, des diminutions monstrueuses
également, au Centre-du-Québec également, donc partout.
M. Fontecilla : Et donc c'est
du dégraissage accéléré, et est-ce qu'on améliore le service?
M. Daigle (Christian) :
Bien, pas en coupant les postes sans changer la façon de faire. Si on veut
améliorer la façon de faire pour être plus efficace, il faut, en premier,
changer cette façon de faire là, résorber le retard qui avait été accumulé et,
par la suite, cette nouvelle méthode là, qui serait mise en place, pourrait
démontrer son efficacité et amener peut-être une réduction de postes sur
certains emplois en les transformant en d'autres emplois où est-ce qu'il y aura
des surplus de tâches à effectuer, où est-ce qu'il y a déjà du retard
d'accumulé également aussi. On n'a aucun problème, si on améliore l'efficacité,
à avoir moins de personnes sur un poste en particulier, puis à les mettre
ailleurs pour justement résorber les autres retards qui peut s'effectuer ailleurs.
Mais tant et aussi longtemps qu'on n'est pas capable de résorber, pourquoi
couper immédiatement sans changer les façons de faire? C'est ce qui est
présentement le cas dans les différents ministères et organismes.
M. Fontecilla : Vous avez
mentionné que... en tout cas, dans le champ de l'aide sociale, il y avait... il
y a une nouvelle méthode. Et est-ce que l'État a pris le soin d'appliquer...
cette nouvelle méthode a été appliquée, d'évaluer l'efficacité de cette
méthode-là, le temps d'appel, la satisfaction de l'usager, etc.
M. Daigle
(Christian) : On n'a eu aucune étude qui nous a été mise devant
nous, par rapport à ça, cette nouvelle méthode là qui a été utilisée ou qui est
mise en place depuis quelques mois ou depuis la dernière année. Donc, il n'y a
eu aucun... aucune évaluation à notre niveau, à notre connaissance, qui a été
produite suite à ça. Ce qu'on sait, par contre, des agents que nous
représentons, c'est que ça demande beaucoup plus de temps de travail pour les
personnes qui sont en poste, parce que les personnes qui sont en poste n'ont
pas la connaissance de chacun de leurs dossiers, doivent donc reprendre le
dossier depuis le début, reposer les mêmes questions, fois après fois, pour
avoir une information et pouvoir donner un suivi si ça n'a pas été fait ou si
ça a été fait sur les personnes qui parlent.
M. Fontecilla : À la suite de
cette diminution générale du personnel, est-ce que vous pensez que... Je crois
comprendre qu'il y a, selon vous, il y a une détérioration du service. Quelle
est l'opinion des gens de la population, en général, face à cette situation-là?
M. Daigle
(Christian) : Bien, les gens sont découragés, c'est certain,
lorsqu'on leur dit que la ligne coupe et qu'on n'est pas capable de leur
répondre, lorsqu'ils n'ont même pas la possibilité de se faire entendre,
lorsqu'on leur demande de rappeler une nouvelle fois, lorsqu'on leur dit que
leur dossier est toujours sur la pile, ces gens-là sont découragés, c'est
certain. Ces gens-là attendent d'avoir, mettons, on prend les gens de l'IVAC,
l'indemnisation des victimes d'actes criminels, ces gens-là attendent d'avoir
un suivi, des gens de la CNESST, les dossiers augmentent également aussi, le
nombre de dossiers qu'ils ont à traiter augmente de mois en mois. Donc, c'est
sûr qu'il y a un impact négatif sur la population.
M. Fontecilla : ...la
légitimité de l'action de l'État?.
M. Daigle
(Christian) : C'est sûr qu'au niveau de l'action de l'État,
c'est de moins en...
19 h (version non révisée)
M. Daigle
(Christian) :...moins intéressant pour
les employés d'y travailler, mais il y en a pour la population de s'y référer
parce que, à ce moment-là, il y a justement, je dirais, un vent négatif envers
les... envers les services à la population qui sont donnés, vu que ça prend de
plus en plus de temps à obtenir des réponses.
Le Président (M. Laframboise) :
Merci. Merci beaucoup, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Maintenant, je
cède la parole au député d'Arthabaska pour 2 minutes 38 secondes.
M. Boissonneault : Merci, M.
le Président. Merci pour votre présentation. Je ne suis pas sûr de comprendre
la logique. Vous dites : Il faut, il faut en finir, disons, avec les
arrérages dans les tâches qu'on a présentement avant de changer notre façon de
faire. C'est ça?
M. Daigle
(Christian) :Bien, minimalement, il faut
au moins, si on a une nouvelle façon de faire, il faut au moins rattraper le
retard avec ces nouvelles façons de faire là qui vont être permises. Et ce n'est
pas ce qui se passe présentement. Les coupures d'effectifs ne font qu'allonger
les délais, ne font qu'allonger le temps de réponse nécessaire pour chacun des
dossiers qui est demandé, donc on n'a pas la bonne méthode.
M. Boissonneault : C'est ça,
donc on ne trouve pas la bonne méthode pour changer la façon de faire, mais ce
n'est pas comme si on disait, par exemple, on construit des maisons, on n'arrive
pas à combler la demande, donc on va attendre de combler la demande avant de
changer notre façon de faire des maisons pour les faire plus rapidement, vous
voyez ce que je veux dire?
M. Daigle
(Christian) :Oui, bien, c'est sûr que si
on peut changer la façon de faire, puis après ça que permet d'aller encore plus
vite pour résorber le retard cumulé, il n'y a aucun problème de ce côté-là,
mais il faudrait minimalement qu'on amène cette efficacité-là et qu'on la
démontre à travers les travaux qui sont a effectués. Si on n'a pas cette
nouvelle façon de faire là, ou si on n'a pas une connotation positive à travers
l'efficacité qui est amenée, c'est qu'il n'y a rien qui a changé, si on ne fait
juste que couper des postes, c'est sûr qu'en ne change rien qu'il n'y aura pas
plus de réponses qui vont être données.
M. Boissonneault : Mais vous
êtes d'accord que cette révision-là des pratiques, cette amélioration-là se
fait en temps réel, là, au moment où on fait le travail aussi.
M. Daigle
(Christian) :Elle peut se faire en temps
réel, mais il faudrait mettre la collaboration des syndicats également là-dedans.
Il faudrait qu'on puisse s'asseoir, ce sont nous qui donnons la prestation de
service, il faudrait qu'on puisse avoir vent au chapitre qu'on puisse pouvoir
faire valoir notre voix légalement là-dedans et qu'on puisse à ce moment-là
apporter... parce qu'on en a des solutions à travers les membres que nous
représentons, à travers les comités de relations de travail aussi, de pouvoir
justement avoir voix au chapitre.
M. Boissonneault : Vous avez
souligné la surcharge bureaucratique qui affecte vos membres aussi. J'aimerais
ça peut-être vous entendre là-dessus, à savoir qu'est-ce que l'État pourrait
faire de mieux pour faciliter la vie de vos membres, si on parle de fardeau
administratif, fardeau bureaucratique parce que vous le subissez vous aussi, là?
M. Daigle
(Christian) :Oui, juste avant de passer
la parole à mon collègue, ce que je peux vous dire à ce niveau-là, d'avoir des
redditions de comptes à donner sur plusieurs... d'avoir des... d'avoir des
cibles à atteindre, ce n'est pas une bonne façon de donner un service à la
population. Quand on travaille chez Mastercard, chez Visa, on peut donner le
service différemment, quand on travaille à l'épicerie, on peut faire donner le service
différemment, on est des clients. Là, on traite pour des citoyens, des citoyens
qui ont des demandes, puis des besoins qui sont nécessaires, donc il faut qu'on
puisse avoir cette latitude-là de le faire sans avoir à répondre à un
questionnaire ou à répondre dans trois minutes, on en 2 minutes 30. Je
vais laisser mon collègue poursuivre.
M. Dubois-Sénéchal
(Isaïe-Nicolas) : Je reviens sur la question des trois minutes. Par
exemple, au RQAP, en ce moment, s'il faut qu'on aille aux toilettes puis que ça
dure plus de trois minutes, on a un code d'absence dans SAGIR. Ce qui veut dire
qu'il y a toute une manipulation au niveau des ressources humaines qui fait en
sorte qu'il y a des gens qui perdent 30 secondes par ci, 30 secondes
par là chaque fois que quelqu'un fait ça parce qu'il y a un code d'absence,
parce qu'on contrôle le travail à outrance. Et, bien entendu, il y a des... il
y a des manières de réformer le travail dans la fonction publique pour assurer
une meilleure efficacité, mais cette surveillance à outrance, par exemple, les
manières de fonctionner qui font en sorte qu'on doit rappeler à plusieurs
reprises parce que le travail a été morcelé par une espèce de taylorisation 2.0
dans les dossiers à l'aide sociale à la CNESST, ce genre de fonctionnement-là,
c'est un fonctionnement dont on n'a pas de besoin, c'est un fonctionnement dont
on pourrait simplement l'oublier, le mettre aux vidanges. Et ça pourrait nous
permettre d'être beaucoup plus efficaces et de se recentrer sur le service à la
population.
Le Président (M. Laframboise) : Merci,
merci, MM. Daigle, Caron, Dubois-Sénéchal. Je vous remercie pour la
contribution du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec aux
travaux de notre commission. La Commission ajourne ses travaux à demain, après
les avis touchant les travaux des commissions. Merci.
(Fin de la séance à 19 h 08)