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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Tuesday, April 9, 1974 - Vol. 15 N° 19

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère de la Fonction publique


Journal des débats

 

Commission permanente de la fonction publique

Etude des crédits du ministère de la Fonction publique

Séance du mardi 9 avril 1974

(Dix heures douze minutes)

M. CORNELLIER (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

La commission de la fonction publique reprend, ce matin, ses travaux. Avant de procéder, j'aimerais souligner des changements parmiles membres de la commission: M. Houde (Limoilou) remplace M. Cloutier (L'Acadie); M. Boudreault (Bourget) remplace M. Cournoyer (Robert Baldwin); M. Parent (Prévost) remplace M. Garneau (Jean-Talon) et M. Pilote (Lac-Saint-Jean) remplace M. Pépin (Sherbrooke); du côté de l'Opposition officielle, M. Morin (Sauvé) remplace M. Burns (Maisonneuve)

A l'ajournement hier soir, la parole était au chef de l'Opposition officielle; alors, je lui cède de nouveau la parole.

Employés occasionnels

M. MORIN: M. le Président, permettez-moi de reprendre l'entretien que j'avais avec le ministre de la Fonction publique au sujet de cette fonction publique parallèle que constituent les occasionnels. Nous en étions à tenter de déterminer le nombre d'employés que cela représente. Le ministre nous a dit, hier soir, qu'il n'en avait pas la moindre idée. Pourtant, des journaux ont mentionné — et ces articles semblaient fondés sur des sources de renseignement fiables — des chiffres allant jusqu'à 70,000; un autre journal a mentionné 50,000. Le Protecteur du citoyen, dans son rapport, sur lequel j'aurai l'occasion de revenir plus tard, ce matin, parle d'une multitude d'employés non permanents auxquels les ministères font appel régulièrement. C'est une question sur laquelle, vous vous en souviendrez, le Protecteur du citoyen revient depuis trois ans.

Si le ministre n'a pas de données d'ensemble sur le phénomène — ce que je considère, pour ma part, comme fort étonnant, puisque le ministre nous a annoncé qu'il préparait une réglementation sur la question — je me demande bien comment il peut faire une réglementation intelligente. Mais, enfin, passons et faisons confiance au ministre. Il n'a pas de données d'ensemble; a-t-il, à tout le moins, des données partielles, par ministère? Peut-être que, si on additionnait les ministères, on arriverait à avoir des données d'ensemble.

M. PARENT (Hull): C'est là-dessus, M. le Président, je pense, que je dois souligner que chaque ministère est autonome quand il s'agit des premiers engagements, comme je l'ai mentionné hier soir. Quand il s'agit de renouvellement, à ce moment-là, la demande doit être formulée au Conseil du trésor. Ce que nous pouvons déceler jusqu'ici, dans le domaine des occasionnels, c'est qu'environ, d'une façon régulière, 2,000 personnes seraient sur la liste de paie des occasionnels.

H arrive, à des périodes de pointe, en été en particulier, que le nombre puisse se rendre jusqu'à 35,000, mais ce sont des emplois de nature occasionnelle, particulièrement dans le domaine du transport, dans le domaine du tourisme, de la chasse et de la pêche, qui sont les deux plus gros ministères pourvoyeurs en ce qui concerne les emplois occasionnels ou saisonniers.

Nous sommes à faire la vérification présentement, avec la Commission de la fonction publique, auprès des ministères, pour nous assurer du nombre d'occasionnels réellement en fonction, pour connaître le nombre d'occasionnels qui occupent des postes permanents, pour déterminer la réglementation que nous pourrions apporter ou la législation qui pourrait être apportée afin de corriger l'ensemble de la situation et cesser de croire qu'il y a une fonction publique parallèle.

Nous voulons résoudre ce problème. C'est la raison pour laquelle j'ai souligné hier soir la formation du comité consultatif et politique du personnel. Nous avons toutes les semaines maintenant, autour de la même table, tous ces responsables, justement pour nous permettre d'envisager le règlement de ce problème qui traîne depuis longtemps.

M. CHARRON: M. le Président, est-ce exact de dire que pour une même et unique personne embauchée comme occasionnelle — selon la règle les occasionnels ne durent que quatre mois — réembauchée pour quatre autres mois et finalement quatre autres mois au cours de l'année, tout cela est totalisé comme trois occasionnels?

M. PARENT (Hull): On me dit que la formule que vient de mentionner le député de Saint-Jacques se retrouve particulièrement au ministère des Transports ou à l'occasion d'un emploi qui serait d'une durée de deux semaines. Si un autre employé ou le même employé est réengagé, on le comptabilise comme étant un additionnel.

M. CHARRON: Seulement au ministère des Transports?

M. PARENT (Hull): C'est la formule actuellement. Nous croyons que cette formule existe seulement au ministère des Transports.

M. MORIN: Les 2,000 que vous avez mentionnés, M. le ministre, qui sont en somme, si

j'ai bien compris, des occasionnels permanents, quel est leur statut au juste dans la fonction publique ou est-ce qu'ils ont un statut?

M. PARENT (Hull): Ils n'ont aucun statut si ce n'est qu'actuellement nous avons une demande d'accréditation d'un syndicat pour représenter les occasionnels. Nous ne connaissons pas encore le jugement qui sera rendu. En ce qui concerne...

M. MORIN: C'est le jugement en appel, dont vous parlez...

M. PARENT (Hull): En appel, oui.

M. MORIN: ... parce que déjà l'accréditation a été refusée.

M. PARENT (Hull): Refusée.

M. MORIN: Et votre ministère s'est opposé à l'accréditation, d'ailleurs.

M. PARENT (Hull): Oui, absolument.

M. MORIN: Nous reviendrons là-dessus tout à l'heure. Ces 2,000 personnes qui sont des occasionnels permanents, M. le ministre, est-ce que cela signifie qu'elles sont réengagées de quatre mois en quatre mois?

M. PARENT (Hull): Absolument; pour que ce soit légal, pour que l'engagement ait un effet et qu'elles puissent être payées, il faut absolument qu'il y ait un réengagement.

M. MORIN: Devenant en quelque sorte des permanents, est-ce qu'elles ont certains avantages de la permanence? Est-ce qu'elles ont, par exemple — je ne sais pas — accès au fonds de pension, à l'assurance-maladie?

M. PARENT (Hull): Elles ont une compensation pour les bénéfices marginaux.

M. MORIN: Mais elles n'ont pas accès au fonds de pension?

M. PARENT (Hull): Elles n'ont pas accès au fonds de pension, ni aux congés.

M. MORIN: A votre connaissance ou, enfin, à celle de vos conseillers, cela peut aller jusqu'à combien d'années, ces renouvellement permanents de quatre mois en quatre mois?

M. PARENT (Hull): Je ne crois pas qu'il y en ait, à quelques exceptions près, qui dépassent deux ans, actuellement.

M. CHARRON: Ces occasionnels, vous dites qu'ils ont une compensation. Elle est de quel ordre, cette compensation? De 10 p.c?

M. PARENT (Hull): Elle varie selon les ministères, mais nous avons eu récemment un jugement de la cour des petites créances de Rouyn-Noranda, ordonnant au gouvernement de payer les 4 p.c. de vacances à des employés occasionnels. Mais normalement, quand il y a engagement d'occasionnels, le supplément peut varier de 5 p.c. à 20 p.c. pour tenir compte des bénéfices.

M. CHARRON: Nous reviendrons là-dessus, de toute façon, tout à l'heure mais, parmi les bénéfices marginaux que les occasionnels permanents ne peuvent pas toucher, est-il exact qu'on n'accorde pas aux occasionnels dans ce gouvernement des congés de maladie et des congés, par exemple, lorsque des malheurs peuvent survenir dans leurs familles? Les mêmes droits d'absence n'existent pas pour les occasionnels?

M. PARENT (Hull): Je pense que c'est évident. Quand on dit que c'est un occasionnel, il est engagé à un montant fixe par jour qu'il travaille.

M. CHARRON: Mais quand c'est un occasionnel permanent?

M. PARENT (Hull): II n'y a pas d'occasionnels permanents. Il peut y avoir un occasionnel de nature...

M. CHARRON: Quand c'est un occasionnel qui voit son contrat renouvelé de quatre mois en quatre mois.

M. PARENT (Hull): Il n'a pas la permanence, parce qu'il n'est pas un fonctionnaire au sens de la fonction publique.

M. CHARRON: Mais est-il exact que ce gouvernement social-démocrate n'a pas donné place aux congés de maladie encore pour des employés qui renouvellent des contrats d'occasionnels de quatre mois en quatre mois et qui dans certains cas se trouvent de fait dans la fonction publique depuis plusieurs années?

M. PARENT (Hull): C'est ça, c'est la nature de l'emploi qui agit ainsi. Si les bénéfices marginaux représentent 20 p.c. de plus que le salaire d'un employé régulier, les bénéfices sont compris dans sa solde quotidienne. Ils ne peuvent pas être doublés.

M. MORIN : M. le ministre...

M. PARENT (Hull): On les reçoit sous une autre forme. L'employé qui devrait normalement recevoir $6,000, à cause de la nature de son emploi occasionnel il peut aller jusqu'à 20 p.c. de plus. Cela veut dont dire que son salaire quotidien est établi sur une base de $7,200. Cela inclut les bénéfices, mais il n'est payé que pour les journées où il a effectivement travaillé. S'il prend des congés ou s'il y a un

congé dans la semaine, il n'est pas payé pour cette journée, parce que les 20 p.c. tiennent compte des bénéfices qu'il n'a pas. Mais, s'il était un employé régulier à la fonction publique, son salaire ne serait pas de $7,200, il serait de $6,000.

M. CHARRON: Est-ce que vous croyez que le gouvernement a avantage, lui, comme patron, de son côté, à maintenir ce genre de situation, quitte à donner une compensation de 20 p.c., comme vous venez de le dire?

M. PARENT (Hull): Je pense l'avoir exprimé hier soir et encore ce matin, nous avons la ferme intention de corriger toute cette situation, que nous ne trouvons pas régulière.

M. CHARRON: Cela aussi, ce n'est pas la première fois que vous le dites.

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas pu le dire depuis longtemps, cela fait tout au plus un an que je suis ministre de la Fonction publique.

M. CHARRON: D'accord, vous, c'est exact, mais cela fait quand même quatre ans que votre gouvernement est là.

M. PARENT (Hull): Je peux comprendre que le gouvernement est là depuis quatre ans, c'est un problème qui existe depuis au-delà de 100 ans. Il s'est perpétué avec les années. Aujourd'hui, à cause de la montée fulgurante du nombre des employés, la situation peut paraître encore plus difficile. Cela n'empêche pas que nous sommes à prendre les dispositions pour corriger la situation et déterminer les emplois qui devraient être de nature occasionnelle pour les différencier de la fonction publique, afin de ne porter préjudice à aucun employé de l'Etat.

M. MORIN: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire si le salaire minimum s'applique aux employés occasionnels?

M. PARENT (Hull): Dans le jugement qui vient d'être rendu par la cour des petites créances, dont nous ne pouvions appeler, on a accordé les bénéfices des jours de vacances. Cela veut donc dire que, si ça s'applique pour les jours de vacances, le salaire minimum doit s'appliquer.

M. MORIN: Etes-vous bien sûr que le jugement porte là-dessus?

M. PARENT (Hull): Non, il porte sur les vacances.

M. MORIN : Oui, c'est ça. Moi, je vous parle du salaire minimum maintenant.

M. PARENT (Hull): Le règlement actuel dit: "Pour les fins de classification, de qualification, de la rémunération des heures de travail des titulaires d'un emploi ou fonction d'un caractère occasionnel, il appartient au chef du ministère de les déterminer suivant la nature du travail à accomplir en tenant compte des conditions applicables en l'espèce aux employés réguliers de l'unité administrative à laquelle tel titulaire est assigné".

M. MORIN: Bon.

M. PARENT (Hull): C'est donc dire qu'un employé occasionnel ne peut pas avoir un salaire moindre que pour l'emploi régulier d'un même poste. Cela est fait selon les conventions collectives pour les emplois. Je ne pense pas que nous soyons en dehors des normes du salaire minimum.

M. MORIN: Pourtant, strictement parlant, le salaire minimum ne s'applique pas à ces employés.

M. PARENT (Hull): Le salaire minimum ne s'applique pas. Mais pour les vacances, il s'applique en vertu du jugement qui vient d'être rendu. Mais, comme je l'ai exposé encore il y a quelques minutes, quand nous déterminons le salaire d'un occasionnel, nous donnons un supplément en pourcentage pour tenir compte des bénéfices.

M. CHARRON: Mais est-ce qu'il y a des employés occasionnels du gouvernement, dont le salaire est calculé sur une base hebdomadaire, par exemple, qui se trouveraient à toucher moins que le ridicule $2.10 de l'heure que l'on va offrir à partir du 1er mai prochain, comme salaire minimum?

M. PARENT (Hull): Bien, vous me demandez si le chef d'un ministère en question ne respecte pas le règlement qui est déterminé; je pense que je ne suis pas en mesure de faire une appréciation. Je dis que le règlement existe, que le titulaire d'un ministère ne peut pas retenir les services d'un employé occasionnel à un salaire moindre que pour lequel la fonction est déterminée, selon les barèmes de la Fonction publique et des conventions collectives.

M. CHARRON: M. le Président, le ministre de la Fonction publique nous donne, depuis tout à l'heure, sur chacun des éléments que nous soulevons, la version officielle et légaliste derrière laquelle il se retranche la plupart du temps. Mais il y a suffisamment de témoignages de donnés, depuis que ce problème pourrit sur place et que le gouvernement laisse pourrir sur place, pour savoir que la situation des employés occasionnels n'est pas toujours aussi claire et aussi précise que le voudrait la lettre de n'importe quel règlement qui serait émis par le ministère de la Fonction publique.

Je pense que des témoignages comme ceux qui ont rempli les pages des journaux, en

particulier ceux de la région de la capitale nationale des Québécois, nous donnent souvent des versions contradictoires.

Plusieurs travailleurs occasionnels ont eu à se plaindre du fait que leurs revenus ne totalisaient pas, effectivement, le salaire minimum auquel ils avaient droit. Ils ont alors découvert que le gouvernement agissait en "petit boss", et ont recherché justice, par la suite. C'est à se demander, même, si tous les employés occasionnels devront faire ce qu'un citoyen a cru bon de faire devant la cour des petites créances de Rouyn et attendre après un jugement de la cour avant d'obtenir ce à quoi ils ont droit.

M. le Président, le ministre a même soutenu, tantôt, le plus sérieusement du monde, que, par exemple, l'éligibilité de chaque occasionnel est établie par le chef de chaque ministère, en suivant les normes d'admission fixées par la Commission de la fonction publique. Tout le monde sait qu'en pratique, il en va bien autrement. C'est à se demander même si les situations autres que celles qu'a définies légalement le ministère ne sont pas plus répandues que la légalité même de ce fonctionnement qu'il se plaît à nous décrire comme étant général dans la fonction publique. Tout le monde sait que bien d'autres critères entrent en jeu dans l'embauche des occasionnels, qui n'ont rien à voir avec le strict légalisme où se retranche le ministre ce matin.

Des recherches ont démontré, on ne peut plus clairement, que les normes d'admission applicables, par exemple, aux permanents sont ignorées ou encore contournées subtilement et régulièrement en ce qui a trait aux occasionnels. La même chose quand on calcule le revenu. Après toutes les façons d'éviter d'accorder à un occasionnel sa permanence, même s'il se retrouve dans la fonction publique depuis déjà plusieurs années, cela équivaut, au bout de la ligne, à des droits qui ne sont pas reconnus à des gens qui, à toutes fins pratiques, travaillent et donnent le plus clair de leur temps au service de l'Etat québécois.

La loi ou la réglementation — parce que le ministre ne semble même pas savoir laquelle des deux il nous promet — qui devra toucher ça ne devra pas s'efforcer de contourner le problème, mais devra bien y faire face, à mon avis.

M. MORIN: M. le ministre, j'aimerais tout de même attirer votre attention sur le fait qu'en février 1973, le Protecteur du citoyen constate que le salaire minimum ne s'applique pas dans bien des cas, et il le regrette. Alors, que vous nous donniez la version officielle et ce que disent vos directives ou ce que font officiellement les personnes qui sont responsables de l'embauche de ces permanents, c'est très intéressant, mais si cela ne correspond pas à la réalité, ça ne nous avance guère.

Je vous demande bien carrément: Est-ce que vous êtes au fait que dans beaucoup de cas le salaire minimum ne s'applique pas?

M. PARENT (Hull): En ce qui concerne les salaires, je serais surpris de déceler des anomalies, à savoir que nous ne payons pas le salaire minimum de la convention collective, prévu pour ce genre d'emploi. Ce qui peut varier dans certains ministères, c'est peut-être l'application de la directive en ce qui concerne le paiement d'un pourcentage pour faire face aux bénéfices dont l'employé ne jouit pas.

Je suis persuadé, par ailleurs, et je puis l'affirmer, que dans chacun des ministères, le minimum de la convention collective prévu pour ce genre d'emploi est accordé à l'employé. Je ne puis en dire autant en ce qui concerne la marge de supplément qui est accordé pour tenir compte des congés.

M. MORIN: Alors, le Protecteur du citoyen, en somme, se serait trompé?

M. PARENT (Hull): Moi, je dis que les ministères accordent aux employés occasionnels le minimum de la classe ou le minimum de salaire prévu dans la convention collective pour un emploi de même type, si c'était une fonction régulière.

M. MORIN: Et ça ne tombe pas en dessous du salaire minimum?

M. PARENT (Hull): Bien, je ne pense pas que la convention collective qui existe entre le gouvernement et ses employés soit en deça.

M. MORIN: Je ne le pense pas non plus. Alors, je me demande comment il se fait qu'en février 1973 le Protecteur du citoyen constate et regrette qu'il existe des cas où le salaire minimum n'est pas appliqué, et constate aussi que sur le plan juridique effectivement le salaire minimum ne s'applique pas à Sa Majesté du chef du Québec, pas au gouvernement québécois. Ce qui est une anomalie, bien sûr, je pense que le ministre en conviendra.

M. PARENT (Hull): C'est vrai que la Loi du salaire minimum ne s'applique pas. J'ai dit que dans la directive qui est donnée dans tous les ministères, c'est la convention collective. C'est le salaire prévu à la convention collective pour un travail similaire.

M. MORIN: Je vois qu'on n'ira pas beaucoup plus loin sur la question du salaire minimum. On pourrait peut-être passer aux normes d'embauche de ces occasionnels dont certains sont permanents, dont certains sont occasionnels épisodiques. Est-ce que ces normes d'embauche existent à l'heure actuelle?

M. PARENT (Hull): Je viens de lire le règlement qui existe; ce que le député de Sauvé voudrait peut-être savoir c'est si le règlement est suivi dans les ministères.

M. MORIN: Bien, c'est-à-dire ce sera ma

seconde question. Mais la première c'est : Est-ce que ces normes d'embauche existent?

M. PARENT (Hull): Les normes existent.

M. MORIN: Elles portent sur quoi exactement?

M. PARENT (Hull): Elles portent sur la scolarité, sur l'expérience, suivant la description de l'emploi qui est formulée. Quand il s'agit de retenir un employé, le ministère, en collaboration avec la Commission de la fonction publique, élabore les règles d'admission, pour chacun des emplois. On détermine alors la qualification du candidat, à savoir son degré de scolarité, selon la tâche; si c'est un agent de la paix, il doit avoir au moins cinq pieds sept pouces; toutes ces données sont établies pour déterminer un emploi. Or, est-ce que le ministère les suit, ces règles-là, quand il s'agit d'un emploi occasionnel? Il doit les suivre en vertu du règlement.

M. MORIN: Bon. Maintenant, la seconde question que j'aurais à vous poser m'est suggérée par un extrait du journal Le Soleil en date du samedi, 9 février 1974, — c'est tout récent — et j'extrais le paragraphe suivant: "Des recherches ont toutefois démontré, on ne peut plus clairement, que tel n'est pas le cas et que les normes d'admission applicables aux permanents sont ignorées ou encore contournées subtilement et régulièrement en ce qui a trait aux occasionnels." Est-ce que le ministre était au courant de ces pratiques?

M. PARENT (Hull): On me demande de répondre pour les chefs des autres ministères. J'ai appliqué la Loi du ministère de la fonction publique et la Loi de la Commission de la fonction publique. S'il s'agit d'emplois permanents, je pourrais être responsable de l'application de ce que fait la Commission de la fonction publique dans l'établissement de l'éligibilité des des candidats.

On me demande de porter un jugement sur la gestion d'un chef de ministère qui n'aurait pas suivi les règles édictées par la Commission de la fonction publique...

M. CHARRON: C'est exactement ce que nous vous demandons parce que vous en êtes responsable.

M. PARENT (Hull): ... et c'est là que j'ai dit, en ce qui concerne les occasionnels, que le règlement est clair, que le chef de chaque ministère est responsable de l'emploi des occasionnels et non le ministère de la Fonction publique parce qu'il ne s'agit pas d'emploi permanent.

M. CHARRON: On sait que des dizaines et des centaines, dans certains cas, de témoignages viennent vous dire: Votre réglementation, que vous laissez au bon loisir de chacun des chefs de vos ministères d'appliquer, parce que, dites-vous, "ce n'est pas de mon ressort", on s'en fout comme de l'an quarante, dans chacun des ministères. Chacun des ministères a développé, malgré vos directives, malgré votre réglementation, des normes d'embauche. Chacun procède à sa façon. Il y a des occasionnels protégés. Il y a des occasionnels interdits dans certains ministères. Quand on vient vous dire: Votre réglementation, vous l'avez faite théoriquement, mais elle n'a guère d'application dans aucun domaine, est-ce que vous avez suffisamment le sens des responsabilités pour ne plus vous retrancher derrière cette formule légaliste, en disant: Moi, j'ai fait mon devoir; si elle ne s'applique pas maintenant, ce n'est pas mon problème ou si, comme ministre de la Fonction publique, vous êtes suffisamment responsable pour voir à ce que la lettre du règlement soit effectivement appliquée? Sinon, qu'est-ce que ça vous donne de faire des règlements, quand, après ça, il y a, dans chacun des ministères, peut-être une trentaine d'occasionnels qui vont vous dire que ça n'a pas été du tout le cas lorsqu'ils ont été embauchés?

Saviez-vous que, plusieurs ministères, celui du Revenu, par exemple, que vous nous donniez comme le modèle des embaucheurs d'occasionnels, à certaines périodes de l'année, pratiquent l'engagement d'employés occasionnels de manière tout à fait contraire, je dirais, à la directive que vous vous plaisez à nous répéter? Ce que les députés de l'Opposition vous demandent ce matin, ce n'est pas de nous dire quelle est la directive que vous avez donnée; le minimum de décence, c'était de donner cette directive-là.

Ce que nous vous demandons simplement, c'est: M. le ministre, avez-vous vérifié si c'était appliqué, votre maudite directive, ou si vous vous contentez de dire: Moi, j'ai fait ma part; maintenant, que les gens fassent la leur. Les témoignages d'occasionnels, qui arrivent de partout, qui remplissent les pages des journaux ou qui font l'objet de griefs auprès du Syndicat de la fonction publique, qui, sans les avoir comme syndiqués, doit quand même répondre, à certaines occasions, du traitement qu'ont les occasionnels dans les différents ministères, en êtes-vous conscient? A ce point de vue là, avez-vous vérifié si votre réglementation était effectivement appliquée dans les différents ministères? Ce n'est pas de nous répéter ce qu'est la directive, tout le monde le sait; c'est le minimum que vous pouviez donner, la directive que vous avez faite. Le problème, il dépasse largement l'application théorique d'une réglementation; c'est dans la pratique que ça ne se fait pas. On vous demande ce que vous faites devant ces cas-là.

M. PARENT (Hull): M. le Président, je n'ai pas l'impression qu'à bon escient je me retire derrière des textes légalistes. J'ai bien mention-

né hier soir — et je l'ai même mentionné dans une entrevue avec le journaliste qui a fait le débat, dans le journal, sur la question de la fonction publique parallèle — que je me préparais à formuler des recommandations au conseil des ministres pour assurer qu'il y ait une équité d'établie dans la fonction publique et que nous prenions les dispositions pour ce faire.

J'ai expliqué, hier soir, que le document serait transmis au conseil des ministres et que le projet de loi était même préparé. Il s'agissait de savoir si nous procéderions par législation ou par directive. Je n'ai pas l'impression de me camoufler derrière des textes de loi. J'ai bien l'impression d'assumer la responsabilité. J'ai même présumé, hier soir, qu'il y avait des abus dans certains ministères, qu'il était de notre intention d'intervenir et de le faire de façon à régler le problème des occasionnels.

J'en suis énormément conscient, mais je ne voudrais pas pour autant croire que si tout allait bien, nous n'aurions pas à intervenir. Je dis qu'un malaise existe dans la fonction publique, je l'ai mentionné. Je ne me suis pas retiré derrière des textes, j'ai dit que nous prenions les dispositions pour apporter un remède efficace afin d'empêcher ces présumés abus qui pourraient se commettre dans différents ministères et dont nous n'avons pas le contrôle. Nous avons l'intention de nous prévaloir et de nous servir des moyens à notre disposition pour empêcher que, si des abus ont été commis, ces abus ne se pépètent et pour, en plus, avoir une méthode de contrôle qui pourrait empêcher, à l'avenir, que se répète ce qu'on a pu souligner jusqu'ici.

M. MORIN: Bien. M. le ministre, vous nous dites: Je vais tenter de régler ces problèmes par voie de législation, le projet est prêt. Moi, je vous demande bien simplement si les normes qui existent actuellement sont appliquées. Vous vous enfermez dans un dilemme. D'une part, vous me dites que la réglementation existe et, d'autre part, quand je vous demande si elle est appliquée, vous me dites: Cela ne relève pas de moi, cela relève des divers ministères. J'estime que c'est une réponse pour le moins insatisfaisante.

Est-ce que vous voyez, à l'heure actuelle, à faire appliquer ces normes? C'est votre réglementation, c'est celle de votre ministère.

M. PARENT (Hull): Nous voyons à faire les recommandations d'une façon régulière dans les ministères pour faire appliquer les directives, mais on comprendra facilement qu'il y a toujours des difficultés pour certains gestionnaires quand il s'agit d'appliquer des règlements. Il s'agirait, si on veut arriver au désir exprimé par le chef de l'Opposition, d'organiser un service de police à l'intérieur du ministère de la Fonction publique. Je ne crois pas que ce soit là une façon de régir l'engagement des occasionnels.

M. CHARRON: Ce n'est pas la réponse la plus brillante que vous nous ayez fournie jusqu'ici.

M. MORIN: Non, d'habitude vous êtes plus habile que cela.

M. BOUTIN (Johnson): Posez des questions qui ont du bon sens et on va répondre.

M. MORIN: Vous êtes plus habile que cela, d'habitude, M. le ministre. Il est bien certain qu'un ministre peut faire appliquer la réglementation dont il est responsable sans se servir de la police. On est dans l'absurde, là. Mais, dites-moi, est-ce que vous êtes conscient du fait que dans plusieurs ministères cette absence d'application pratique de la réglementation donne souvent ouverture à des cas de favoritisme, à des cas — pour employer le mot et pour parler ouvertement — de patronage? Est-ce que vous êtes conscient de cela?

Infiltration dans la fonction publique

M. PARENT (Hull): C'est surtout cela qui nous inquiète, à savoir le nombre de partisans péquistes qui s'infiltrent dans la fonction publique...

M. MORIN: Allons, allons!

M. PARENT (Hull): ... et par le biais des occasionnels, vous n'avez pas de moyen de vous infiltrer.

M. CHARRON: Quand on voit arriver le député de Hull dans un dossier, on s'inquiète.

M. PARENT (Hull): Je suis bien plus inquiet de voir les péquistes activistes à l'intérieur de la fonction publique que je suis inquiet d'y voir les occasionnels.

M. MORIN: De toute façon, la question était: Est-ce que le ministre est conscient du fait que cela donne ouverture au favoritisme et au patronage?

M. PARENT (Hull): Si on veut parler de patronage, je pense que je pourrais sûrement discuter de patronage, mais il s'agit de savoir si c'est le patronage des hommes politiques, comme souvent on veut y faire allusion sur la place publique, ou s'il s'agit du patronage de partisans du Parti québécois qui font des recommandations pour faire intégrer leurs membres à l'intérieur de la fonction publique.

M. MORIN: Ah, c'est intéressant, M. le ministre! On va explorer cela !

Il y aurait donc, d'après vous, un patronage péquiste au sein de la fonction publique?

M. PARENT (Hull): Systématique.

M. MORIN: Alors, pourriez-vous nous donner des exemples? Puisque c'est systématique, vous avez certainement des exemples à l'esprit. On va explorer cela un peu.

M. PARENT (Hull): En ce qui me concerne, je n'ai pas l'intention de l'explorer, parce que je pense que le chef de l'Opposition...

M. MORIN: Vous venez de faire une affirmation extrêmement grave.

M. PARENT (Hull): Le chef de l'Opposition est beaucoup plus conscient qu'il ne semble le laisser croire qu'il a ses agents à l'intérieur de la fonction publique et qu'il sait pertinemment la façon dont ça procède. Je pense que je n'ai pas de leçon à lui donner.

M. MORIN: Mais encore!

M. PARENT (Hull): Admettons...

M. MORIN: M. le ministre, admettez que j'ai quelques leçons à recevoir de vous dans le domaine du patronage. Je n'ai pas encore eu tous mes diplômes. Mais passons cela, je ne voudrais pas politiser...

M. PARENT (Hull): ... combat à soulever.

M. MORIN: Je ne voudrais pas politiser à outrance un débat où nous cherchons simplement à sensibiliser le ministre et ses grands commis qui l'entourent à un problème qui est quand même très réel. Le ministre en a convenu. Mais, puisque vous nous avez mis sur une piste dont j'ignorais l'existence, j'aimerais bien aller un peu plus loin.

M. BOUTIN (Johnson): II faut être naiï. Il vous manque des diplômes, c'est certain.

M. MORIN: C'est possible que je sois naïf dans ce domaine, M. le ministre.

M. PARENT (Hull): Oui.

M.MORIN: En tout cas, je n'aurais pas la prétention d'avoir votre expérience. Mais, cela dit, je voudrais bénéficier de cette expérience énorme que vous avez accumulée. Est-ce que vous pourriez nous donner des cas concrets de patronage comme ceux que vous avez mentionnés, il y a un instant, de façon très générale?

M. PARENT (Hull): On pourrait vous donner l'objectivité d'un Jean Taillon.

M. MORIN : Expliquez-nous un peu ce que vous voulez dire par ça.

M. CHARRON: Ce patronage d'embauchage par les agents, comme vous avez dit, de la fonction publique qui travaillent pour le Parti québécois et qui embauchent selon les critères du Parti québécois?

M. PARENT (Hull): Je pense qu'il faudrait arrêter de jouer les naifs.

M. CHARRON: Non, j'aimerais...

M.MORIN: Donnez-nous des cas concrets, puis on va en parler.

M. PARENT (Hull): Je pense que vous savez fort bien l'infiltration que vous faites à l'intérieur des rangs. Vous savez fort bien comment procèdent les examens ou les jurys, même s'ils sont faits par la Commission de la fonction publique; ce sont vos individus qui font partie des jurys.

M. CHARRON: Je vous prends à la lettre.

M. PARENT (Hull): Je pense qu'à ce moment il ne faudrait pas pousser à l'extrême.

M. CHARRON: Je vous prends à la lettre, je vous suis, pour un moment je vous donne raison. Disons que le député de Sauvé, le chef de l'Opposition officielle, et moi-même savons cela exactement, comme vous venez de le dire; je suis prêt à vous donner raison là-dessus. Supposons que nous savons exactement comment nous procédons pour nous infiltrer à la fonction publique...

M. PARENT (Hull): Pour avoir des fuites.

M. CHARRON: ... si je prends votre hypothèse. Mais, ce matin, ce n'est pas pour l'information du député de Sauvé et du député de Saint-Jacques que vous devez répondre à nos questions; c'est pour le public qui attend. Le ministre a des révélations importantes à faire. Admettons que vous n'avez pas à nous l'apprendre, que nous le connaîtrions amplement, mais le public, lui certainement ce matin, vient d'en prendre connaissance pour la première fois. La nouvelle ce matin c'est: Le ministre de la Fonction publique révèle une stratégie que le Parti québécois avait organisée pour s'infiltrer. Il serait conscient d'une stratégie organisée par le Parti québécois pour s'infiltrer dans la fonction publique. Le public est en état d'ébriété autour de ces révélations.

M. PARENT (Hull): Le public est au courant. Il se rend compte des fuites régulières qui se commettent.

M. CHARRON: Alors racontez-nous comment le Parti québécois procède puisque le ministre a découvert les trucs du Parti québécois. Dites-nous donc immédiatement comment nous procédons pour nous infiltrer dans la fonction publique. C'est trop important, vous êtes un ministre responsable. Les contribuables

vous donnent $40,000 par année pour faire des affirmations de ce genre. S'il vous plaît, au moins, répondez à la demande du public ce matin. C'est votre devoir de dénoncer la mauvaise conduite de l'Opposition officielle et nous ferons mea culpa lorsque le temps viendra. Mais, je vous en prie, révélez-nous-le, le public est là, il attend. Nous sommes impatients de connaître ce Sherlock Holmes de la fonction publique.

M. MORIN: Tous les détails, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. PARENT (Hull): M. le Président, je n'ai pas l'impression que nous allons avancer dans l'étude des crédits en voulant jouer les naïfs comme le Parti québécois semble vouloir le faire. Il sait fort bien comment il est représenté à l'intérieur des ministères. Il sait fort bien comment se fait le recrutement.

M. CHARRON: Mais le public ne le sait pas.

M. PARENT (Hull): Le public le sait fort bien.

M. CHARRON : Dites-le au public.

M. MORIN: Dites-le.

M. CHARRON: Avec $40,000 par année...

M. PARENT (Hull): II sait fort bien les méthodes que vous employez.

M. BOUDREAULT: Ils les ont mis à la porte.

M. CHARRON: La même chose que toi et ils travaillent plus, à part ça.

UNE VOIX: Cela reste à voir.

M. BELLEMARE: M. le Président, on m'a demandé de remplacer un député ici, aujourd'hui.

M. CHARRON: Bon!

M. BELLEMARE: Je voudrais savoir...

M. CHARRON: La bonne nouvelle!

M. BELLEMARE: ... si je suis ici pour perdre mon temps avec le Parti québécois...

M. CHARRON: Certainement.

M. BELLEMARE: ... ou si on est ici pour travailler, regardant les crédits du ministère.

M. CHARRON: C'est ça.

M. BELLEMARE: Si vous êtes ici pour faire de la politicaillerie, je vais me retirer; vous m'excuserez, M. le Président...

M. MORIN: Vous accusez le ministre de faire de la politicaillerie, maintenant?

M. BELLEMARE: Non! Je vous accuse vous, monsieur. Vous! Vous!

M. MORIN: C'est grave, ça!

M. BELLEMARE: Vous autres, vous autres.

M. CHARRON: Retirez-vous, parce qu'on travaillait quand même en votre absence.

M. BELLEMARE: Si je décide de me retirer, ce n'est pas vous qui allez me le dire, mon cher ami.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs! A l'ordre!

M. BELLEMARE: Le temps me le dira. M. CHARRON: Très bien.

M. BELLEMARE: Votre stupidité me dictera ma conduite.

M. CHARRON: Très bien.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! Pour le bénéfice de tout le monde, disons qu'à une commission parlementaire, on accorde une certaine latitude, et en particulier lorsqu'il s'agit de l'étude des crédits.

M. CHARRON: Et surtout lorsqu'une révélation vient d'être faite.

M. MORIN: Bien, oui! Il faut que le ministre renseigne l'opinion publique.

M. CHARRON: Une déclaration ministérielle, cela a quand même encore du poids dans notre régime, même si le ministre n'a pas tellement de poids. Une déclaration, le ministre peut en avoir à faire. Est-ce que le ministre peut expliciter cette déclaration qu'il vient de faire, qui est certainement importante? Il peut paralyser le travail de l'Etat.

M. PARENT (Hull): II ne le paralyse pas, par exemple.

M. CHARRON: Alors, il fait quoi?

M. MORIN: Cela représente quel pourcentage de vos effectifs?

M. PARENT (Hull): Cela dépend de quel ministère vous voulez parler, à ce moment-là.

M. MORIN: Bien, descendez-nous ça, minis-

tère par ministère. Les pires! Commencez par les pires.

M. CHARRON: Les pires!

M. PARENT (Hull): M. le Président, je pense qu'il n'est pas nécessaire...

M. MORIN: Oh! si, c'est nécessaire.

M. PARENT (Hull): ... à l'étude des crédits, de dévoiler qu'il existe des réseaux établis dans des ministères qui sont à la charge et qui sont des officines du Parti québécois.

M. MORIN: On vous demande des détails, M. le Président. Lesquels? Donnez quelques exemples pour qu'on se fasse une idée, pour que l'opinion publique soit vraiment bien informée de ce que vous venez d'affirmer. Autrement, l'opinion publique pourrait être tentée de croire que vous cachez votre propre patronage en accusant l'Opposition d'en faire à son tour. C'est une tactique bien connue du gouvernement que de toujours retourner les accusations. Alors, on vous demande d'être spécifique, de donner des exemples.

M. CHARRON: Quand je me regarde, je me désole; mais, quand je me compare, je me console.

M. PARENT (Hull): Vous n'avez rien à comparer, c'est cela qu'est l'affaire.

M. MORIN: Bon, allez! Donnez-nous...

M. CHARRON: J'admets que, dans ce domaine, on ne peut pas comparer beaucoup. Vous avez une forte avance. Mais quand même, semble-t-il, on est en train de nous inscrire dans le même réseau. Alors...

M. LACROIX: Certainement, mais les vôtres sont plus hypocrites.

M. CHARRON: Bon, cela y est! Voilà le champion des îles!

M. LACROIX: Certainement, je veux le dire.

M. CHARRON: Alors, faites-nous la révélation que le ministre de la Fonction publique nous a faite.

M. LACROIX: II y a une secrétaire dans un bureau qui se sert des appareils du gouvernement, constamment, c'est-à-dire du téléphone, pour le service du PQ. Vous savez bien que vous avez des informations de même. Même à l'intérieur du service de police, vous avez des dossiers avant que le ministre en prenne connaissance.

M. MORIN: Dites-nous ça! Qui ça? M. LACROIX: Certainement!

M. MORIN: Quand ça?

M. LACROIX: Vous avez des informateurs à l'intérieur de tous les ministères. Vos traîtres, ils sont un peu partout.

M. MORIN: Pouvez-vous nous donner des cas?

M. LACROIX: Ah! On vous les donnera en temps et lieu.

M.MORIN: Non, non, maintenant! C'est la commission.

M. LACROIX: On vous les donnera en temps et lieu.

M. MORIN: C'est la commission...

M. CHARRON: On est à l'endroit où l'on doit les avoir.

M. LACROIX: Vous n'avez pas besoin d'avoir peur. Du moment qu'un gars a sa carte du PQ, il peut entrer dans la Fonction publique facilement.

M. MORIN: Oui? Pouvez-vous nous donner des exemples?

M. CHARRON: Comment ça?

M. LACROIX: Les gars ont tous peur... Si c'était un libéral, ce serait du patronage. Seulement, vous le faites, votre patronage, et regardez donc toutes les bibites que René Lévesque a laissées dans tous les ministères où il est passé.

M. MORIN: A l'époque où il était libéral?

M. LACROIX: Oui, mais seulement il avait déjà commencé sa traîtrise avant d'abandonner.

M. MORIN: De toute façon, M....

M. CHARRON: Mais ce que le député des Iles-de-la-Madeleine vient de dire, c'est qu'une carte de membre du Parti québécois...

M. LACROIX: Ah! Cela ouvre énormément, parce...

M. CHARRON: ... suffit pour rentrer... M. LACROIX: ... dans les ministères...

M. CHARRON: ... malgré la Commission de la fonction publique?

M. LACROIX: Allez donc au ministère des Affaires sociales.

M. CHARRON: Voulez-vous dire...

M. LACROIX: Ne faites donc pas l'hypocrite. Vous le savez.

M. CHARRON: ... que la Commission de la fonction publique ne fait pas son travail et qu'elle laisse place à l'esprit partisan?

M. LACROIX: Qu'est-ce que vous voulez, quand un ministre ne surveille pas son affaire comme il le faut... Le gars qui est là pour les concours, c'est un gars...

M. CHARRON: C'est qui, le ministre...

M. LACROIX: ... qui est favorable aux péquistes.

M. CHARRON: ... qui ne surveille pas son affaire?

M. LACROIX: II y en a plusieurs.

M. CHARRON: Dans votre gouvernement?

M. LACROIX: Oui, et ils ne veulent pas intervenir pour ne pas être accusés de patronage. Mais seulement...

M. CHARRON: Et est-ce que...

M. LACROIX: ... quand vous aidez les séparatistes, ce n'est pas du patronage. Si vous aidez un libéral, cela c'est du patronage.

M. CHARRON: ... c'est proportionnel: Moins un ministre s'occupe de son affaire, plus il y a de PQ dans le gouvernement?

M. LACROIX: Je ne dis pas qu'il ne s'occupe pas de son affaire, je vous dis qu'au point de vue de l'engagement, il laisse faire ses fonctionnaires...

M. CHARRON: Vous venez de porter une attaque...

M. LACROIX: ... dans bien des cas. M. CHARRON: ... à vos collègues là. M. LACROIX: Ah! certainement!

M. CHARRON: Certains de vos collègues, que vous venez d'accuser de nonchalance...

M. LACROIX: Je le leur ai dit, à part ça, d'avance.

M. CHARRON: Oui? Combien y en a-t-il?

M. MORIN: Est-ce que le ministre de la Fonction publique fait partie de ces ministres...

M. LACROIX: Non, non!

M. MORIN: ... qui n'accomplissent pas leur devoir?

M. LACROIX: C'est un gars intelligent, ça.

M. CHARRON: II y en a combien qui ne sont pas intelligents dans le cabinet?

M. LACROIX: Ils sont moins nombreux que l'Opposition officielle.

M. CHARRON: Ils sont moins nombreux que l'Opposition...

M. BELLEMARE: Vous êtes six à l'Assemblée nationale qui n'êtes pas intelligents.

M. CHARRON: II y a au moins six ministres...

M. BELLEMARE: Vous êtes six.

M. CHARRON: ... de cinq à six ministres...

M. BELLEMARE: Vous êtes six, c'est ça.

M. CHARRON: ... si je les compte...

M. LACROIX: Vous n'avez...

M. BELLEMARE: Des péquistes.

M. LACROIX: ... qu'à regarder où sont vos péquistes, d'où viennent les informations. Ce n'est pas compliqué.

M. MORIN: Oui, mais dites-nous quels sont les ministres qui ne remplissent pas leur devoir de surveillance correctement.

M. LACROIX: Pensez-vous qu'un ministre a le temps d'aller fouiller jusqu'au simple petit commis?

M. CHARRON: Oui.

M. LACROIX: Vous, vous n'avez que ça à faire. Vous sortez des nuages, vous sortez de l'université.

M. MORIN: II y en a combien?

M. LACROIX: Vous n'avez jamais su ce que c'était la fonction publique.

M. MORIN: II y en a combien de ministres?

M. LACROIX: Parce que vous verriez que vos traîtres et vos hypocrites, c'est difficile de les contrer.

M. MORIN: II y a combien de ministres qui ne surveillent pas adéquatement leur ministère, comme vous l'avez dit?

M. LACROIX: Si vous étiez ministre — premièrement, vous ne le serez jamais, c'est seulement une hypothèse.

M. MORIN: Répondez donc à nos questions.

M. LACROIX: Si jamais vous étiez ministre, à la tête d'un ministère qui a un budget de $2 milliards, pensez-vous que vous auriez le temps, vous, d'aller vous occuper de l'engagement d'un employé?

M. MORIN : Alors, maintenant, vous dites qu'ils ont des excuses.

M. LACROIX: Vos péquistes, en particulier, dans les ministères, allez aux Affaires sociales, par exemple, allez voir. Là, il y a tout: Les anarchistes, les péquistes. Tout ce qui finit en "iste", vous trouvez ça là!

M. CHARRON: Les rhumatismes!

M. LACROIX: Ah oui! Il y a plusieurs ministères, vous savez, où vous êtes très bien infiltrés.

M. CHARRON: Aux Affaires sociales?

M. LACROIX: Ah oui! Aux Affaires sociales, vous êtes très bien représentés.

M. CHARRON: Alors là, en voilà un!

M. LACROIX: II y a des barbus, là, et des cheveux longs. C'est effrayant! Il y a un paquet de coquerelles là!

M. CHARRON: Le ministre des Affaires sociales en est un qui ne s'occupe pas de ses affaires. Ensuite, est-ce qu'il y a d'autres ministères où le Parti québécois...

M. LACROIX: Ce n'est pas ça que je vous ai dit. Soyez donc honnêtes, une fois! Sortez de l'île Bizard et revenez sur la terre. Comprenez que je vous ai dit qu'un gars qui administre un budget de $2 milliards n'a pas le temps de s'occuper de l'engagement, de l'embauche de tout le personnel.

M. CHARRON: Alors, qui le fait à la place du ministre?

M. LACROIX: A l'intérieur il y a des hauts fonctionnaires qui sont... A part ça, allez donc dans les garages. Vous allez voir tous ces fonctionnaires avec le signe du PQ en arrière de leur auto. Si vous voulez avoir vos noms, allez là. Arrêtez donc de faire l'hypocrite!

M. CHARRON: Je vous donne raison. Disons que le ministre des Affaires sociales, actuellement, député de je ne sais quel comté, n'a pas le temps de s'occuper de l'embauche de chacun.

M. LACROIX: II n'a pas le temps, comme vous, de faire le tour des tavernes à tous les vendredis soirs!

M. CHARRON: Notez bien qu'il y a une

Commission de la fonction publique pour ça. Il y a une Commission de la fonction publique. Ce n'est plus comme dans le bon vieux temps. Vous vous rappelez, vous, cette époque où vous pouviez nommer, aux Iles-de-la-Madeleine, ceux que vous vouliez, faire déplacer des agents de la Sûreté dans le Grand Nord. Vous aviez ce choix, avant! Vous aviez cette possibilité!

M. LACROIX: J'ai dit qu'un agent, s'il ne faisait pas son travail, il était mieux d'aimer le froid parce qu'il irait dans le Grand Nord. Je le maintiens, à part ça. Parce que ces...

M. CHARRON : Mais comment expliquez-vous que la Commission de la fonction publique ait fait des Iles-de-la-Madeleine le dépotoir de la fonction publique?

M. LACROIX: Pas le dépotoir de la fonction publique parce que tous les autres fonctionnaires sont corrects et ils viennent des îles. Il y a seulement vos policiers qui viennent de l'extérieur. C'est là qu'il y a...

M. CHARRON: On prendra ce problème avant. Moi, je vous donne raison pour dire que le ministre des Affaires sociales, qui peut administrer un budget qui frise maintenant les $2 milliards, ne peut pas s'occuper de tout.

M. LACROIX: II ne le frise pas, il le dépasse. Tenez-vous au courant.

M. CHARRON: Ce n'est pas lui qui doit surveiller l'embauche de son ministère, mais il est quand même le gars responsable. Il y a des gens qui vont faire ça à sa place, et ces gens, c'est lui qui les choisit. Si, lui, il choisit des gens du Parti québécois, comme vous dites, des séparatistes, des anarchistes, c'est bien sûr que là il se trouve à ouvrir la porte et que ces gars-là vont aller chercher des semblables. Mais c'est le ministre qui est responsable de choisir les gens qui vont l'aider à diriger le ministère, même s'il ne veut pas le faire.

Là, ce que vous venez de dire, c'est que le ministre des Affaires sociales a mal choisi son monde et c'est ce monde qui, maintenant, ferait infiltrer des gars avec des collants du Parti québécois sur leur coffre d'automobile. C'est ça que vous venez de tout mêler d'un coup. Mais il est irresponsable, votre...

M.LACROIX: Pourquoi jouer à l'hypocrite? Vous le savez fort bien. Vous avez des dossiers qui vous parviennent, des rapports qui arrivent au chef du parti ou au leader parlementaire avant que le ministre en ait même pris connaissance.

M. CHARRON: Dans quel ministère, par exemple?

M. LACROIX: Cela, arrêtez! Voulez-vous, je vais aller fouiller dans vos bureaux, et je vais vous le dire?

M. CHARRON: J'ai la conviction que vous y êtes déjà allé.

M. LACROIX: Non, cela, ce n'est pas vrai.

M. MORIN : Alors comment pouvez-vous affirmer ça?

M. LACROIX: Si vous vous imaginez que j'ai le temps de m'occuper de niaiseux comme vous autres et de vos niaiseries! Mais seulement, par exemple, les péquistes, vous ne viendrez pas me dire quoi faire !

M. MORIN: M. le fouet...

M. LACROIX: M. le petit professeur...

M. BELLEMARE : Soyez poli, s'il vous plaît. Si vous ne connaissez pas la politesse, on va vous l'enseigner, même en dehors de la commission parlementaire.

M. MORIN: ...pour parler français, M. le fouet...

M. BELLEMARE: Toi, sois bien calme, toi!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs!

M. BELLEMARE : Parce que moi, je vais te calmer !

M. MORIN: M. le Président, est-ce que vous avez déjà voulu faire les fouilles dans les bureaux...

M. BELLEMARE: Sois très calme, mon petit "smart". C'est-y correct, ça? Cela fait assez longtemps que tu cries...

M. MORIN: ... de l'Opposition?

M. BELLEMARE: ... et qu'on t'entend crier pour rien !

M. LACROIX: Jamais!

M. MORIN: Alors, sur quelle base...

M. BELLEMARE: Est-ce que vous êtes venus ici pour discuter des crédits ou si vous êtes venus pour faire des stupidités? C'est ce que je veux savoir.

M. MORIN: ... affirmez-vous ce que vous venez de dire?

M. BELLEMARE: Est-ce que vous venez bloquer la commission?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît ! A l'ordre ! ... A l'ordre !

M. MORIN : Je pense que l'opinion publique...

M. BELLEMARE: On est ici, nous autres, pour travailler. On n'est pas ici pour ridiculiser.

M. LACROIX: II pourrait peut-être trouver les quatre ou cinq whips en chef du Parti libéral dans vos bureaux.

M. BELLEMARE: Tu trouves ça drôle, n'est-ce pas? Tu trouves ça drôle? Je vais te donner un joint, tu va trouver ça moins drôle !

M. LACROIX: La nuit, vos barbus et vos sales se promènent dans les corridors, ils enlèvent la plaque sur la porte de mon bureau. Cela ne peut pas être les journalistes. Cela vient seulement des vôtres qui se promènent jour et nuit dans les corridors, vos salauds qui se promènent là.

M. MORIN: C'est une accusation intéressante, ça.

M. CHARRON : Vous êtes en train de nous donner des informations intéressantes !

M. LACROIX: Certainement. Vous envahissez partout !

M. MORIN: Est-ce que vous faites faire des enquêtes régulièrement pour servir de fondement à ce que vous affirmez?

M. LACROIX: Si vous saviez comme vous m'importez peu! Pensez-vous que je vais faire faire des enquêtes sur votre comportement. Pour savoir si un de vos députés se promène la main dans la main avec un petit gars ou si un autre est couché ailleurs? Qu'est-ce que ça me fait, ça, moi?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs! Je crois que nous nous éloignons passablement du débat pour lequel nous sommes réunis ici.

M. CHARRON: Non, M. le Président; il y a eu des affirmations qui sont quand même importantes.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous sommes en train de faire des procès de personnalités. Je ne crois pas que ce soit la place.

M. MORIN: Ce n'est pas nous qui faisons des procès.

M. LACROIX: Devant l'infiltration que vous faites, vous autres mêmes.

M. CHARRON: On est en relation directe avec la Commission de la fonction publique? Je

pense que c'est le système qui prévaut, ce qu'a décrit le député des Iles-de-la-Madeleine. S'il est vraiment efficace et qu'il fonctionne, c'est qu'il y a quelque chose; la Commission de la fonction publique se trouve anéantie dans ses travaux actuellement. C'est ça que vous venez d'affirmer?

M. LACROIX: J'ai dit que dans...

M. CHARRON: Si le favoritisme politique existe encore dans les nominations et dans l'embauchage de fonctionnaires, c'est que tout ce qu'on visait en créant la Commission de la fonction publique, on l'a raté. C'est ça que vous venez d'affirmer. Cette affirmation mérite d'être retenue.

M. LACROIX: Disons qu'on n'a pas atteint les buts, comme on aurait aimé que ce soit atteint. Vous n'étiez pas là quand on a rebâti la Commission de la fonction publique et quand on a aussi permis aux employés de se syndiquer. Si on avait voulu faire le patronage dont vous parlez, que vous supposez qui se faisait avant, le Parti libéral n'aurait pas eu besoin de restructurer la Commission de la fonction publique; il n'aurait pas eu besoin, non plus, de donner aux employés la protection qui a été donnée à tous les fonctionnaires par le syndicalisme.

J'ai été élu en 1962 et c'est une des premières lois que nous avons votées. Si j'avais voulu faire ce que vous voulez dire... Je n'ai jamais déplacé un fonctionnaire aux Iles-de-la-Madeleine et tous ceux qui ont bien fait leur devoir sont restés en poste. Quant aux agents que vous mentionniez tantôt, ce sont eux qui ont commencé; ce n'est pas moi qui ai parti le bal; l'année passée, j'étais à l'hôpital, au mois de janvier, et vos policiers, Gagnon, Montmigny, je crois, et Fontaine, avaient commencé aux Iles avec les fameuses plaques d'immatriculation K et ils ont toujours essayé de faire entrave au travail du député. Mais, cela n'a aucune sorte d'importance.

La vérité éclate au grand jour. La cour a statué. Mais, pour en revenir à la fonction publique comme telle, il y a des ministères, c'est certain, où il y a infiltration de vos membres qui nuisent au fonctionnement du gouvernement.

Et ça, que vous le vouliez ou non, c'est réel, c'est un fait; on s'en rend compte constamment. Quand on a affaire à ces gens, c'est certain que le dossier, quand il n'est pas piloté par quelqu'un qui est persona grata, s'en va en dessous de la pile de dossiers. Il faut courir après.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais maintenant revenir au ministre de la Fonction publique, parce que je vois qu'avec le député des Iles-de-la-Madeleine on lance beaucoup de choses en l'air, mais qu'on n'est pas en mesure de donner des exemples précis.

Je voudrais demander au ministre, qui, lui, est responsable de la Fonction publique, s'il considère que c'est une des fonctions de la commission de filtrer les péquistes ou toute autre personne sur laquelle on pourrait coller une étiquette se terminant en "iste". Est-ce que c'est une des fonctions de cette commission de filtrer ces gens et de les empêcher d'entrer dans la fonction publique?

M. LACROIX: Si vous me le permettez, M. le Président...

M. MORIN: Non, j'ai posé la question au ministre.

M. LACROIX: ... je voudrais spécifier une chose. Je reconnais le droit le plus absolu à tous les fonctionnaires, quels qu'ils soient, d'être Union Nationale, séparatistes, créditistes ou libéraux.

M. MORIN: Ce n'est pas ce que vous avez dit jusqu'ici.

M. LACROIX: II appartient au gouvernement d'établir les politiques...

M. MORIN: J'ai posé la question au ministre.

M. LACROIX: ... et aux fonctionnaires de les exécuter. Lorsque les fonctionnaires essaient de mettre un bois dans les roues, à ce moment, ils ne remplissent pas leur devoir, ils ne sont pas loyaux au gouvernement. Et, quant à moi, si j'étais en charge d'un ministère et qu'un fonctionnaire ne remplissait pas son devoir tel qu'il doit le faire, je lui montrerais qu'il appartient au gouvernement d'établir les politiques et aux fonctionnaires de les exécuter, non vice versa.

M. MORIN: M. le ministre, maintenant, je vous ai posé une question. J'en ai quelques autres à vous poser dans ce domaine extrêmement délicat. Est-ce que vous pourriez répondre à la question que j'ai posée?

M. PARENT (Hull): Disons que la Commission de la fonction publique n'a aucun pouvoir de nomination. La Commission de la fonction publique ne fait que qualifier les candidats, émet des listes d'éligibilité, les transmet au ministère client qui a demandé la tenue d'un concours et c'est le ministère qui procède à l'engagement. La commission comme telle n'engage pas.

M. MORIN: Et la commission n'a pas la mission de s'enquérir des convictions politiques des personnes qui se présentent au concours ou pour obtenir un emploi de la fonction publique.

M. PARENT (Hull): La commission n'a pas de rôle judiciaire ou policier à jouer comme telle. En collaboration avec le ministère, elle définit les normes et les critères d'un emploi,

les qualifications exigées, et, selon ces normes ces critères et les qualifications exigées, elle détermine la qualification des candidats.

M. MORIN: Bon. Est-ce qu'à votre connaissance les affirmations qui ont été faites par le député des Iles-de-la-Madeleine à l'effet que la fonction publique est infiltrée par toutes sortes de personnes qu'on pourrait affubler de vices de diverses sortes sont exactes?

M. PARENT (Hull): Excusez-moi.

M. LACROIX: Je n'ai pas dit que c'était la fonction publique, j'ai dit que c'étaient les ministères.

M. MORIN: Alors, est-ce que les ministères sont infiltrés de la façon qui a été décrite par le député des Des-de-la-Madeleine?

M. PARENT (Hull): Peut-être pas d'une façon aussi élaborée que l'a souligné le député des Iles-de-la-Madeleine, mais il n'y a aucun doute qu'à l'intérieur des différents ministères il y a des infiltrations.

M. MORIN: Quel genre?

M. PARENT (Hull): Bien, il y a des infiltrations; vous avez des activistes qui sont à des postes de commande et qui sont en mesure de faire des recommandations aux ministères pour engager des gens qui sont déjà sur des listes d'éligibilité et qui sont leurs favoris.

M. CHARRON: Est-ce répandu dans l'ensemble des ministères ou si, comme l'a affirmé le député des Iles-de-la-Madeleine, quelques ministres seulement ne s'occupent pas de leurs affaires?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas à porter de jugement sur mes collègues. Je pense que, dans l'ensemble, ils assument leurs responsabilités. Comme dans tout ministère il y a des délégations de pouvoirs, je n'ai pas à faire de service de police pour m'assurer si toutes les décisions sont prises réellement, comme le veut la loi, par le chef du ministère ou par le sous-chef. Je pense que c'est à chacun des ministères de faire le travail qui lui est imparti.

M.MORIN: Jusqu'à quel niveau peuvent aller ces manquements à l'éthique?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas dit que c'étaient des manquements à l'éthique.

M. MORIN: Bien, ces manquements, disons, aux règles de la fonction publique?

M. PARENT (Hull): Cela ne manque pas aux règles de la fonction publique.

M. MORIN: Alors, ça manque à quoi exactement?

M. PARENT (Hull): Bien, c'est que vous avez soulevé une question de patronage. Je dis que ce n'est pas limité au gouvernement en place.

M. MORIN : Ce n'est pas là-dessus que le député des Iles-de-la-Madeleine donnait des renseignements; il nous parlait de traîtres, de personnes qui manquaient à leur mandat et, sans doute, aussi à leur serment, si j'ai bien compris.

M. PARENT (Hull): Des fonctionnaires.

M. MORIN: Des fonctionnaires, oui, c'est ça. Le ministre pourrait-il nous dire jusqu'à quel niveau ça peut monter, ce genre de manquement au serment d'office?

M. PARENT (Hull): Je pense qu'on ne pourrait pas invoquer les déclarations du député des Iles-de-la-Madeleine pour les attribuer au ministre de la Fonction publique; je ne pense pas avoir fait de déclaration de cette nature.

M. MORIN: Non, mais je vous demandais si les déclarations du député des Iles-de-la-Madeleine sont exactes, cependant. Parce que, tout de même, il a mis en cause votre ministère, la surveillance exercée par la Commission de la fonction publique. Il a porté des accusations très graves. Je pense...

M. PARENT (Hull): ... ne les renie pas...

M. MORIN: ... qu'on ne peut pas être indifférent à cela.

M. PARENT (Hull): II n'a pas porté d'accusation contre le ministère de la Fonction publique. J'ai expliqué tout à l'heure que le ministère de la Fonction publique, ou la Commission de la fonction publique ne fait pas d'embauche; nous qualifions les candidats et ce sont les ministères qui retiennent les candidats qui leur sont requis pour leur gestion régulière.

M. MORIN: Bon, mais quelle est la source...

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas à porter de jugement sur la valeur des actes posés par mes collègues.

M. MORIN: Mais vous dites que, dans certaines circonstances, il y a de l'infiltration. J'aimerais savoir comment vous faites pour le savoir. Est-ce que vous avez reçu des plaintes des différents ministères ou des différents ministres, de vos collègues? Parce que vous avez fait une affirmation, j'imagine que vous avez tout ce qu'il faut pour fonder cette affirmation.

M. PARENT (Hull): Je répète encore une fois que le patronage n'est pas le fruit ou l'effet du hasard d'un gouvernement en place quand il y a des délégations de pouvoirs à l'intérieur des ministères. C'est tout ce que j'ai souligné.

M. MORIN: Oui, mais quand vous dites qu'il y a infiltration, je pense que vous citez...

M.LACROIX: ...la liste de vos membres, avec les fonctionnaires et les postes qu'ils occupent; ce n'est pas plus compliqué que ça.

M. MORIN: M. le ministre, je vous posais une question. Vous avez parlé vous-même d'infiltration. Ce n'est même pas le député des Iles-de-la-Madeleine qui a employé cette expression, c'est vous-même.

J'aimerais savoir comment cela parvient à votre connaissance. Est-ce qu'il y a eu des plaintes?

M. PARENT (Hull): C'est justement à cause de l'expérience que j'ai acquise en politique depuis que je suis ici. Connaissant vos membres, dans différents ministères, sachant les postes qu'ils détiennent...

M. CHARRON: Ah! vous les connaissez, à part ça?

M. PARENT (Hull): ... sachant la façon dont les nominations s'effectuent dans les ministères, je dis que le patronage n'est pas un outil unique au gouvernement, mais qu'il sert bien à l'Opposition.

M. MORIN: Pourriez-vous nous donner des exemples de ça, nous dire dans quels ministères ce genre de pratique a lieu?

M. PARENT (Hull): Regardez où sont vos membres — vous les connaissez beaucoup mieux que moi — et vous allez voir dans quels ministères existent des délégations de pouvoirs en faveur de ceux qui ont à faire les nominations et à les présenter à leur sous-chef. Vous verrez, à ce moment-là, de quelle façon se fait le patronage et vous arrêterez de critiquer le gouvernement en disant qu'il fait du patronage ouvertement, quand, dans la pratique quotidienne des nominations, le fonctionnarisme intervient plus qu'à son tour. A ce moment-là, on se sert du paravent ou de textes de loi, comme l'a dit tout à l'heure le député de Saint-Jacques, pour dire: Le gouvernement fait du patronage et favorise ses amis dans l'accès à la fonction publique. Or, dans la pratique, le patronage ne se retrouve pas simplement du côté du gouvernement, mais se retrouve, presque aussi souvent, du côté de l'Opposition officielle.

M. CHARRON: Or, si c'était dénoncé, un ministre responsable dans un ministère, qui s'apercevrait que les personnes en charge, les délégués de pouvoir, qui ont la responsabilité de l'embauchage et de la nomination d'autres fonctionnaires se servent de ce poste pour embaucher des gens qui veulent lutter contre le gouvernement, qui ne veulent pas servir l'Etat québécois malgré leur serment, qu'ils se servent de ce poste, donc, pour faire du patronage au profit de l'Opposition, un tel ministre responsable devrait voir à ce que cette personne-là n'occupe plus le poste qu'il occupe.

Ce que vous faites dans ce genre d'accusations que vous menez sans preuve pour le moment, que vous annoncez comme étant le fruit simplement de votre connaissance...

M. PARENT (Hull): M. le Président, je voudrais bien spécifier une chose...

M. CHARRON: ... de la pratique politique... Laissez-moi terminer. Laissez-moi terminer.

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas porté d'accusation. Si le député de Saint-Jacques veut en porter, qu'il en porte.

M. CHARRON: Laissez-moi terminer. Laissez-moi terminer. Je dis que ce genre d'affirmations que vous faites est en même temps un sérieux blâme — le député des Iles-de-la-Madeleine l'a fait clairement tantôt — à quelques-uns des ministres qui ne s'occupent pas de leurs affaires, comme il l'a dit actuellement. Si cette pratique-là est absolument répandue actuellement...

M. LACROIX: Si vous dites ça, c'est parce que je vous l'ai expliqué très bien.

M. CHARRON: ... pourquoi ne pas intervenir plutôt que de l'affirmer comme ça, puis de dire: Ah! si vous saviez tout ce qu'on sait; si vous saviez tout ce qu'on a entendu dire, puis vous connaissez aussi bien que moi ce dont je parle. Pourquoi parler en cachette comme ça, si ça se produit? Vous avez nommé les Affaires sociales; vous avez dit que le ministre des Affaires sociales était un de ceux qui ne s'occupaient pas de leurs affaires. Alors, où est la responsabilité là-dedans?

M. LACROIX: Je n'ai pas dit que le ministre des Affaires sociales ne s'occupait pas de ses affaires. Je vous ai dit qu'un ministre qui administre un budget de plus de $2 milliards n'a pas le temps de voir personnellement à l'embauche de son personnel.

M. CHARRON: Comment se fait-il qu'un ministre laisse faire du patronage dans les nominations par l'Opposition, comme il le fait là à l'intérieur d'un ministère?

M. LACROIX: C'est vous qui pourriez le mieux répondre à ces questions-là, parce que

vous savez bien ce qui se passe à l'intérieur de votre parti et votre infiltration se retrouve partout dans les ministères.

M. CHARRON: Non, non c'est à un ministre de répondre à ça. Vous êtes là, ce matin, scandalisés du fait que l'Opposition, à votre insu, pratique du patronage dans les ministères que vous contrôlez. Vous dénoncez ça. Vous dites: On est supposés, maintenant qu'on est élus, avoir le monopole du patronage et puis, là, maudit! on est obligés de le partager avec l'Opposition.

M. LACROIX : Je vous ai parlé tantôt de vos hypocrites et de vos traîtres; vous en avez deux qui marchent en pleine lumière.

M. CHARRON: Le monopole du patronage, que vous avez toujours eu de toute votre histoire, que vous vous êtes échangé avec les vieux partis politiques...

M. LACROIX: C'est dans le temps que vous étiez là.

M. CHARRON: ... si maintenant vous ne l'avez plus, ce monopole, mais qu'il se trouve des gens qui le pratiquent dans l'intérêt de l'Opposition dans vos ministères, prenez vos responsabilités, bon Dieu! mais cessez de nous affirmer des principes à cet effet.

M. PARENT (Hull): Cessez de crier à la vertu. Cessez de crier à la vertu.

M. CHARRON: Prenez-les, vos responsabilités.

M. BELLEMARE: Ne jouez pas à la vierge offensée.

M. CHARRON: Non, moi, je vous dis: Prouvez-le, prouvez-le, puis entrez en jeu.

M. LACROIX: S'il fallait mettre à pied tous ceux qui sont péquistes, vous auriez beaucoup de monde à la permanence de votre parti pour les placer.

M. CHARRON: Mais parce que vous ne le prouvez pas, parce que vous n'avez pas pris vos responsabilités...

M. LACROIX: Vos membres ont des gueules pour téter deux vaches en même temps.

M. CHARRON: Le chef de l'Opposition, tout à l'heure, disait: II est beaucoup plus facile de dire: L'Opposition en pratique autant que nous que d'affirmer que le gouvernement ne fait pas de patronage.

Maintenant, ce que vous êtes en train de faire, ce n'est plus affirmer aux Québécois que vous ne faites pas de patronage. Vous savez bien que vous ne les convaincrez pas de cela. Ce que vous êtes en train d'essayer d'affirmer maintenant pour noyer le poisson, c'est: L'Opposition en fait autant que nous. Autrement dit, il ne s'agit pas de dire: On est plus propres qu'eux, mais de dire: Ils sont aussi sales que nous autres. C'est un vieux truc.

M. LACROIX: Je ne pensais pas que vous l'étiez jusqu'à ce point-là.

M. CHARRON: C'est un truc trop facile. Ce matin, prouvez-nous que l'Opposition fait autant de patronage que le Parti libéral.

M. PARENT (Hull): C'est une question de quantum.

M. LACROIX: On va vous emmener dans les ministères et vous allez identifier vos membres.

UNE VOIX: II y a des députés qui en font, ils l'admettent.

M. CHARRON: Non, j'admets que ce n'est pas autant, parce que ça ne peut pas être autant. Vous êtes tellement maîtres dans ce domaine. Je regarde le maître de l'Outaouais qui a nommé à peu près tous ses "chums" dans tous les postes de la fonction publique.

M. PARENT (Hull): Prouvez-le.

M. CHARRON: La Communauté urbaine de l'Outaouais, la Commission de transport de l'Outaouais. Le député de Hull sait de quoi je parle.

M. BELLEMARE: C'est une application facile, cela.

M. LACROIX: II n'y a pas personne qui veut aller voir...

M. CHARRON: Oui, je sais que ça marche. Je sais très bien que ça va bien.

M. LACROIX: II n'y a pas de traître, là.

M. CHARRON: Je sais très bien qu'aux Iles-de-la-Madeleine aussi...

M. LACROIX: Dans le meilleur intérêt de la province de Québec.

M. CHARRON: ... ç'a bien été pendant un bout de temps. Vous aviez le monopole complet. Cela, j'en conviens.

M. LACROIX: Cela va encore bien. Il y a seulement vos fous de Montréal: Beaulne, Beau-det, Langlois et toute cette gang-là, la gang du FLQ, à part de mon révérend père Achille Hubert, le dominicain, défroqué à part cela, ça va bien.

M. BELLEMARE: M. le ministre, je serais curieux de savoir qui a la plus belle maison dans le comté de Saint-Jacques.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs, si vous voulez, nous allons revenir à l'ordre et procéder par des questions et réponses. Il devrait y avoir un seul membre de la commission qui parle. Pour le bon ordre et la bonne marche des travaux, je demanderais votre collaboration.

M. MORIN: M. le Président, est-ce qu'on pourrait reprendre le dialogue que nous avions avec le ministre responsable? Est-ce qu'il entend faire quelque chose pour empêcher le favoritisme et le patronage de quelque source qu'il soit? Je dis: De quelque source qu'il soit. Est-ce qu'il entend faire quelque chose pour mettre fin à cela? Je parle, en particulier, des occasionnels; surtout des occasionnels.

M. PARENT (Hull): Vous ne voulez pas parler du champ d'activité, vous êtes plus mêlé.

M. MORIN: Je veux bien étendre la question aussi à l'ensemble de la fonction publique. Est-ce qu'il a l'intention de faire quelque chose pour mettre fin au patronage? Parce que nous, on pense que c'est une mauvaise chose, de quelque source que cela vienne. Qu'est-ce que vous allez faire?

M. PARENT (Hull): Avant de répondre à la question, j'aurais une question à poser, moi aussi, au député de Sauvé. Qu'est-ce qu'il entend par patronage?

M. MORIN: Je veux dire la nomination d'occasionnels non pas d'après leur qualification, d'après leur expérience ou leur scolarité, mais leur nomination parce que, par exemple, ils ont travaillé pour tel parti plutôt que tel autre. Je pense que le député des Iles-de-la-Madeleine en donnait, tout à l'heure, une assez bonne définition.

M. PARENT (Hull): Mais s'ils ont travaillé pour le Parti québécois, qu'ils deviennent fonctionnaires permanents avec la sécurité d'emploi?

M. MORIN: Le ministre nous a dit tout à l'heure que cela n'avait pas d'importance. J'imagine qu'il entend par là que si quelqu'un remplit bien ses tâches, quelle que soit son allégeance politique, la Commission de la fonction publique n'a pas à s'enquérir de cela. Mais je parle des cas où quelqu'un n'accomplirait pas bien ses tâches, où quelqu'un verrait son activité, en tant que fonctionnaire, colorée par le fait qu'il appartient à tel parti politique en particulier. Dans les cas mentionnés par le député des Iles-de-la-Madeleine, les hypocrites, les traîtres, est-ce que le ministre va faire quelque chose?

J'imagine que le ministre va convenir que c'est grave, cela.

M. PARENT (Hull): Disons que je ne voudrais pas prendre pour moi les paroles qu'a dites le député des Iles-de-la-Madeleine.

M. MORIN: Est-ce que vous iriez jusqu'à les réfuter, M. le ministre?

M. PARENT (Hull): Je sais qu'il est en mesure d'assumer ses responsabilités et je n'ai pas de leçon à lui donner. Je voudrais simplement évoquer...

M. MORIN: Vous n'avez surtout pas à en recevoir, je pense.

M. PARENT (Hull): ... le fait —et je l'ai souligné tout à l'heure — que quand on parle sur la tribune publique, comme le fait régulièrement le Parti québécois en disant qu'il y a du patronage à l'intérieur de la fonction publique, c'est là, je pense, qu'on fausse le débat lui-même.

Je l'ai dit tout à l'heure, quand il s'agit de déterminer le choix d'un candidat, la Commission de la fonction publique ne se préoccupe pas de son affiliation politique. Les ministères retiennent les candidats qui sont susceptibles de remplir ces postes. Il y a des infiltrations, je le répète à nouveau. Je n'ai pas dit que c'étaient des mauvais fonctionnaires.

M. MORIN: Qu'est-ce que vous appelez des infiltrations?

M. PARENT (Hull): Par le Parti québécois, parce qu'on dit toujours, sur la place publique, que le gouvernement fait du patronage, qu'il n'engage que des fonctionnaires qui sont ses partisans. Or, le député de Sauvé sait que cela est faux.

M. MORIN: M. le ministre...

M. PARENT (Hull): Ce ne sont pas simplement des partisans libéraux qui sont employés dans la fonction publique, mais des gens qui appartiennent à toutes les tendances politiques.

M.MORIN: Est-ce qu'ils sont choisis pour leur capacité ou...

M. PARENT (Hull): II n'y a pas de discrimination.

M.MORIN: ...à cause du fait qu'ils appartiennent au Parti québécois?

M. PARENT (Hull): II n'y a pas de discrimination.

M. MORIN : Et c'est de l'infiltration, ça?

M. PARENT (Hull): II n'y en a pas, mais

qu'on aille jouer à la vertu comme vous le faites en prétendant que c'est le gouvernement seul qui fait du patronage et qui n'engage dans la fonction publique que des partisans libéraux, je dis: C'est faux!

M. CHARRON: Est-ce que vous dites que...

M. PARENT (Hull): II y a autant d'employés dans la fonction publique qui représentent différentes tendances politiques qu'il y a de libéraux qui sont dans la fonction publique.

M. CHARRON: J'en conviens...

M. PARENT (Hull): Qu'on cesse les faux débats sur la place publique en prétendant que le gouvernement fait du patronage avec les emplois.

M. CHARRON: M. le Président, ce que l'Opposition a affirmé, je ne laisse pas aller le ministre, parce que là il est en train de noyer le poisson, et ce n'est pas cela. Ce que l'Opposition a affirmé ce n'est pas qu'il existait dans la fonction publique des gens appartenant aux quatre ou cinq formations ou dix formations politiques que peut compter le Québec. C'est bien entendu qu'on va trouver chez les fonctionnaires, dans cette grande catégorie de population, des différences d'opinions qui se retrouvent dans les partis politiques. C'est normal. Le sujet du débat, c'est que le critère d'embauche soit l'appartenance politique. Ce n'est pas le cas quand la Commission de la fonction publique déclare un individu éligible. Vous l'avez dit, et c'est vrai, je l'espère, puis si ça peut noyer les affirmations du député des Iles-de-la-Madeleine, tant mieux. Mais la Commission de la fonction publique, lorsqu'elle déclare quelqu'un eligible à un poste ouvert par un concours dans la fonction publique, se contrefout du parti politique pour lequel ce citoyen a voté ou de son idéologie politique. Ce sont ses qualifications pour remplir un poste. Cela va.

Mais là où est le débat maintenant, c'est quand la liste d'éligibilité arrive sur la table, sur le bureau d'un ministre ou, si le ministre est trop occupé parce qu'il a un trop gros budget et un trop gros ministère, d'un délégué de pouvoir qui a à prendre une décision. Supposons qu'il reçoive, pour un poste ouvert, six ou sept candidats éligibles recommandés par la Commission de la fonction publique, c'est là qu'intervient le patronage. Le délégué de pouvoir va examiner, il est absolument libre de choisir entre les six. La Commission de la fonction publique lui a dit: n'importe lequel des six est apte au point de vue compétence, études universitaires, expérience; ils ont tous les critères normaux pour remplir le poste. Il regarde les noms et, selon ce que vous avez affirmé ce matin, il se trouverait qu'il pourrait vérifier l'appartenance politique d'un de ces individus, et le sachant, par exemple, comme vous l'avez affirmé ce matin, membre du parti de l'Opposition et étant lui-même, ce délégué de pouvoir, membre et sympathisant du parti de l'Opposition, pour cette raison le préférera à n'importe lequel des cinq autres. C'est bien ce que vous avez affirmé ce matin? N'est-ce pas, le député des Iles?

M. LACROIX: Cela arrive.

M. CHARRON: Alors ce que le député de Hull disait c'est qu'il n'y a pas que des libéraux qui choisissent des libéraux, car parmi les délégués de pouvoir se trouvent aussi des membres du Parti québécois qui choisissent des gens appartenant au Parti québécois. C'est là que le choix intervient et que le favoritisme peut intervenir. C'est là qu'il existe. Comme le dit le député de Hull, n'allez pas dire qu'il n'y a que nous autres qui en faisons, on le savait que vous en faisiez, mais ce que vous affirmez ce matin, c'est que l'Opposition aussi s'est infiltrée. C'est ça l'infiltration, pour pratiquer ce genre de choix.

Ce que nous vous demandons, depuis tantôt, c'est où, à quel endroit, quels fonctionnaires ont manqué à leur devoir en faisant ce genre de favoritisme, parce que, semble-t-il, il n'y a que le favoritisme du pouvoir qui soit permis. A quel endroit cela s'est-il produit? Quelles sont les mesures que vous entendez prendre? Est-ce que les ministres vous ont communiqué des problèmes de cet ordre? Est-ce qu'ils ont des difficultés avec des délégués de pouvoir qui, visiblement, travailleraient plus pour le parti de l'Opposition que pour l'Etat? Où? Quand? Comment? Aucun cas n'a encore été déposé sur la table, ce matin, sauf de dire: Vous savez bien qu'il y a des péquistes qui choisissent des péquistes puis on n'a pas besoin de vous les nommer. Vous êtes au courant comme nous autres. Non, non! Supposons, comme je le disais avant que le député des Iles-de-la-Madeleine arrive, parce qu'on avait déjà engagé le débat, que le député de Sauvé et moi-même soyons parfaitement au courant, que ce serait nous qui aurions manigancé nos gars et qu'on les aurait placés partout. Mais ce matin, la responsabilité est différente. Ce n'est pas qu'un débat entre nous, c'est devant le public.

Et, ce matin, le gouvernement annonce qu'il a découvert dans la fonction publique des infiltrés du Parti québécois qui profitent de leur poste pour favoriser des gens du Parti québécois, les embaucher au détriment des autres, alors qu'auparavant il n'y avait que le Parti libéral qui avait ce monopole. Je dis: Les cas, les sanctions, les politiques...

M. PARENT (Hull): Ne soyez pas naif. M. CHARRON: ... c'est ça le débat.

M. PARENT (Hull): Ne soyez pas naif.

M. LACROIX: Ce n'est pas la question de l'embauchage qui est grave, c'est...

M. PARENT (Hull): On ne vient pas de découvrir ça.

M. LACROIX: ... la façon dont on s'acquitte de son travail. Quand on met des entraves à l'administration, c'est...

M. CHARRON: Où ça?

M. LACROIX: ... cela qui est grave.

M. CHARRON: Où, par exemple?

M. LACROIX: Je vous amènerais par la main dans les ministères, mais j'ai peur que vous aimiez trop ça. Mais, à ce moment-là, je pourrais vous en montrer.

M. CHARRON: N'ayez pas peur. Quels ministères? Nommez-en donc!

M. MORIN: M. le Président...

M. LACROIX: Je parlais avec un sous-ministre, la semaine dernière.

M. MORIN: ... le député des îles, depuis tout à l'heure, dit beaucoup de généralités...

M. LACROIX: II me disait: Ici, qu'est-ce que...

M. MORIN: ... qui nous intéressent. Mais il faudrait qu'il soit spécifique.

M. LACROIX: ... tu veux que l'on fasse? On a des anarchistes, on a des communistes, on a des socialistes et on a des péquistes. Tout ce qui finit par "iste", on est pris avec ça, comment veux-tu qu'on marche?

M. MORIN: Qu'est-ce que vous allez faire? Qu'est-ce que le ministre entend faire pour mettre ordre à cette situation très grave? Qu'est-ce que vous allez faire?

M. LACROIX: Vous auriez été mieux de rester à l'université...

M. MORIN: Je vois que le ministre rit.

M. LACROIX: ... vous ne vous débrouillerez jamais ici.

M. MORIN: Je serais tenté aussi de rire...

M. LACROIX: Vous allez vous perdre dans les corridors.

M. MORIN: ... devant des affirmations comme celles-là. Mais elles sont quand même graves. Est-ce que le ministre pourrait nous dire ce qu'il entend faire?

M. PARENT (Hull): M. le Président, je dois dire d'abord que je ne peux pas remplacer mes collègues. Ils sont à leur poste et ils assument leurs responsabilités. C'est à eux de décider à chaque occasion où il y a de l'embauche de personnel à faire.

En ce qui me concerne, je n'ai pas l'intention de prendre des mesures dilatoires, qu'ils soient de tendance péquiste ou qu'ils soient de tendance libérale. Ce que nous recherchons, c'est l'efficacité dans la fonction publique. Ce que nous voulons éviter, c'est que les employés manquent de loyauté. Pour autant que nous sommes concernés, si les employés sont loyaux, quelles que soient leurs tendances, nous n'avons pas l'intention d'intervenir.

M. MORIN: Le ministre a laissé entendre que certains employés n'étaient pas loyaux. Dans ces cas-là, qu'est-ce qu'il entend faire?

M. PARENT (Hull): Bien, je pense que les dispositions sont déjà dans la loi. Si un employé manque de loyauté envers son employeur, les mesures qui s'imposent doivent être prises.

M. MORIN: II y a eu combien de cas de manque de loyauté, admettons, depuis l'année dernière?

M. PARENT (Hull): Cela est un peu plus difficile à définir. Il y a eu des manques de loyauté. Mais il a été presque impossible de pouvoir découvrir quels étaient les auteurs.

M. MORIN: Ah!

M. PARENT (Hull): II y a eu des soupçons.

M. MORIN: Alors, est-ce que vous avez présumé...

M. PARENT (Hull): Mais il n'y a pas eu...

M. MORIN: ... que c'était automatiquement des gens auxquels on pouvait coller des étiquettes en "istes".

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas présumé, M. le Président. Je n'ai fait aucune affirmation là-dessus. J'ai fait une déclaration générale, en ce qui me concerne, à savoir que ceux qui n'ont pas les mêmes tendances politiques que les miennes pouvaient avoir place dans la fonction publique.

M. MORIN: Est-ce que ces manques de loyauté auxquels le ministre se réfère, le ministre peut nous affirmer que ce sont automatiquement des gens comme ceux qu'a décrits le député des îles qui en sont coupables?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas fait de telles affirmations.

M. MORIN: Donc, vous ne savez pas, si je

comprends bien, ou en tout cas vous n'entendez pas faire de déclarations sur qui est l'auteur de ces manques de loyauté?

M. PARENT (Hull): Non.

M. MORIN: Vous ne savez pas qui a manqué de loyauté de la sorte?

M. PARENT (Hull): II y en a qui en ont manqué mais nous n'avons pu les déceler, ou définir exactement, ou obtenir les preuves. A ce moment-là, nous ne pouvons pas agir. Je pense que ce serait manquer à l'étiquette que de vouloir blâmer quelqu'un quand nous n'avons pas les preuves à l'appui pour démontrer que le geste a été posé.

M. MORIN: Mais plus tôt aujourd'hui, le ministre a quand même fait des affirmations sur l'infiltration du Parti québécois ou soi-disant du Parti québécois dans la fonction publique.

M. PARENT (Hull): C'est-à-dire que je n'ai pas fait d'affirmation...

M. MORIN: Quel est le lien entre ces...

M. PARENT (Hull): Je voudrais bien que le député ne se méprenne pas. Le débat a porté sur la question du patronage du gouvernement et j'ai dit que ce n'était pas exclusif au Parti libéral de faire du patronage, si patronage il y a.

M. MORIN: Oui.

M. PARENT (Hull): J'ai dit que dans des ministères, quand je parle d'infiltration, c'est qu'il y a eu des nominations; ce sont des partisans du Parti québécois. Je ne les ai pas blâmés ou je n'ai pas mis en doute leurs compétences. Mais j'ai dit que ce n'était pas exclusif au gouvernement, si tel est le cas, de faire des nominations politiques.

Le parti de l'Opposition également a des candidats qui ont été intégrés à la Fonction publique. Ce sont des partisans de l'Opposition officielle et, pour autant, il n'y a pas eu de discrimination. Mais j'ai dit qu'on doit cesser de prétendre que, automatiquement, le parti au pouvoir est le seul qui fasse du pseudo-patronage dans la question des emplois. J'ai dit et j'ai invoqué le fait que la commission ne qualifie que les candidats, quelles que soient leurs tendances, et que les ministères procèdent à leur engagement.

M. MORIN: Mais qu'est-ce que vous appelez exactement infiltration, M. le ministre, si on pouvait revenir sur cette notion? Si j'ai bien compris, vous n'appliquez pas le mot infiltration à des candidats qui seraient compétents et qui pourraient avoir une affiliation politique quelconque. Ce n'est pas ça que vous entendez?

M. PARENT (Hull): Vous avez dans certains ministères des noyaux de partisans du Parti québécois. Je n'ai pas mis en doute leur compétence dans tout ce que j'ai déclaré ce matin.

M. MORIN: Alors, leur loyauté?

M. PARENT (Hull): Non, je n'ai pas mis leur loyauté en doute, non plus.

M. MORIN: Alors, qu'est-ce que vous mettez en doute? Qu'est-ce que vous appelez l'infiltration, s'ils sont loyaux?

M. PARENT (Hull): Le fait que vous prétendez que, dans la fonction publique, il n'y a que des libéraux qui sont engagés. Je dis que c'est faux.

M. MORIN: Ce n'est pas ça du tout. Attention! Attention! Le patronage, ce n'est pas le fait d'employer quelqu'un; c'est le fait de l'employer pour de mauvaises raisons et en ne tenant pas compte de sa compétence, de son expérience, de sa scolarité, etc.

Là, le ministre est en train de faire dévier le débat sérieusement. Vous me dites que ces gens auxquels vous référez, qui seraient des partisans du Parti québécois, sont loyaux et son compétents. Qu'est-ce que c'est que l'infiltration, alors? Est-ce que ce sont des infiltrés, ces gens-là?

M. LACROIX: Qu'est-ce que vous pensez de la loyauté, par exemple, d'un fonctionnaire qui sort un document qui a servi de base au député de Maisonneuve pour porter des accusations dans l'affaire Laporte? Est-ce que vous croyez que c'est un homme honnête, celui-là?

M. MORIN: Je n'ai pas posé de question...

M. LACROIX: Les dossiers de police qui sortent, là; les autres dossiers, dans les différents ministères, est-ce que c'est honnête, ça?

M. MORIN: Le député fait dévier le débat.

M. LACROIX: Si vous étiez là, vous autres, vous n'accepteriez pas qu'un fonctionnaire agisse de même. Vous le cloueriez au pilori.

M. MORIN: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait maintenant me dire ce qu'il entend par infiltrés? Ce ne sont pas des gens qui sont loyaux, ce ne sont pas des gens qui sont compétents. Alors, qu'est-ce que c'est qu'un infiltré? C'est ce que j'aimerais savoir.

M. PARENT (Hull): C'est la pénétration à l'intérieur de la fonction publique.

M. MORIN: Des gens compétents et des gens loyaux? C'est ça, l'infiltration?

M. PARENT (Hull): Ce n'est pas unique à un parti politique.

M. MORIN: Si je comprends bien, toute personne qui n'a pas des opinions correspondant à celles du Parti libéral est un infiltré dans la fonction publique.

M. PARENT (Hull): Vous prétendez toujours que le gouvernement est dirigé par des libéraux, qu'il ne comporte pas d'autres tendances. Vous invoquez continuellement cela, même dans le domaine des occasionnels, où je pourrais vous donner des endroits où on retrouve, en majorité, de vos partisans.

M. MORIN: Parce qu'ils sont compétents ou parce qu'ils sont péquistes?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas à juger, à ce moment-là. Ce n'est pas moi qui ai à juger.

M. MORIN: Ah! Ah là, on y est!

M. CHARRON: Quand vous parlez d'infiltration...

M. PARENT (Hull): Mais il y a des gestes, il y a des actes qui ont été posés et, à ce moment-là, j'ai des doutes sérieux quant à savoir qui pourrait être en dessous.

M. CHARRON: Ecoutez, si vous voulez dire que, parmi les occasionnels, par exemple, que le ministère du Revenu embauche à ce temps-ci de l'année, il se trouverait un pourcentage de ces employés qui sont peut-être membres ou qui sont sympathisants du Parti québécois ou, disons, ont voté pour le Parti québécois le 29 octobre dernier, je dirais que c'est bien possible. Dans la région de Québec, c'est 35 p.c. Alors, disons que 35 p.c. des citoyens des quinze comtés de la région de Québec ont voté pour le Parti québécois. On peut attendre la même proportion dans les gens qui se présentent pour être embauchés pour un mois. Ce n'est pas la question.

M. PARENT (Hull): II y a seulement les vôtres, au ministère du Revenu, qui sont qualifiés. Seulement les vôtres !

M. CHARRON: Ce n'est pas la question. Si vous dites que l'Opposition a affirmé, depuis le matin, qu'il n'y avait que des libéraux dans la fonction publique, ce n'est pas le cas. Je suis convaincu qu'il n'y a pas que des libéraux dans la fonction publique et c'est bien normal, puisqu'il n'y a pas que des libéraux dans le Québec et à Québec, en particulier. On n'est pas pour revenir là-dessus.

Ce que vous nous avez dit, ce matin, c'est qu'il y avait des gens qui noyautaient — vous avez employé ce mot — qu'il y avait des infiltrés. Donc, je crois, des gens qui ne seraient pas loyaux et qui ne seraient pas compétents. Qu'il y ait des gens libéraux, loyaux et compétents pour l'Etat québécois, tant mieux. Qu'il y ait des créditistes loyaux et compétents au service de l'Etat québécois, tant mieux. A cet effet, la Commission de la fonction publique a parfaitement raison de vous les recommander, indépendamment de leur opinion politique.

Mais quand vous parlez d'infiltration, vous parlez d'autre chose. Le député des Iles-de-la-Madeleine a renchéri là-dessus, en intervenant tout à l'heure.

L'infiltration, cela voudrait dire qu'indépendamment de leur loyauté ou de leur compétence, parfois même malgré leur manque de loyauté — ce qui est inadmissible — ou malgré leur manque de compétence — ce qui est aussi admissible au salaire où on les paie — des gens occupent des postes, des fonctions exclusivement à cause du parti politique auquel ils appartiennent, et vous dites que ça se produit dans les deux cas, aussi bien dans le parti au pouvoir que dans le parti de l'Opposition.

Moi, je vous demande, là, c'est quoi cette infiltration? Comment se produit-elle? Que des gens du Parti québécois, loyaux et compétents, montent, à cause de leur compétence et de leur loyauté, dans l'échelle de la fonction publique, c'est aussi normal qu'un libéral monte, parce que c'est un Québécois. Mais que ce soit pour des raisons politiques qu'ils montent, tout en étant déloyaux et en n'ayant pas la compétence pour obtenir le poste qu'ils ont, qu'ils auraient obtenu simplement à cause de leur affiliation politique, cela est inadmissible, et le chef de l'Opposition a parfaitement raison de vous demander quelles sont les mesures que vous allez prendre.

Je pense que ce qu'on est en train de dire au ministre de la Fonction publique, c'est le sens du mot qu'il a employé depuis l'ouverture de ce débat: infiltration. Infiltration, c'est ça que ça veut dire. Une infiltration, par exemple, c'est quand la police envoie dans le syndicat de la United Aircraft des policiers déguisés en travailleurs pour organiser la manifestation. Cela s'appelle de l'infiltration. Ce ne sont pas des travailleurs. Ils n'ont en aucun temps à travailler avec les gars de la United Aircraft qui sont en grève depuis une douzaine de semaines.

Ils sont là comme travailleurs, ces policiers, ils se déguisent, ils se font passer pour des travailleurs, ils vont chercher de l'information, ils la rapportent au ministre de la Justice. Le ministre de la Justice nous a dit en Chambre, la semaine dernière, que c'est comme ça qu'il avait procédé pour se préparer...

M. LACROIX: Comme un qui était déguisé en prêtre et qui était candidat aux dernières élections.

M. CHARRON: Cela, c'est de l'infiltration. Cela, c'est quelqu'un qui n'est pas loyal aux travailleurs auxquels il va se mêler. Il n'a aucun

intérêt à défendre les travailleurs qui sont en grève. Il est là pour une tout autre raison. Que la grève dure 15 ou 20 semaines, que les gars gagnent $0.05, $0.10, lui, il s'en sacre, il fait son travail de policier, il n'est pas un gars de la United Aircraft. Il est infiltré juste pour aller chercher les renseignements. Il fait semblant d'être avec eux pour pouvoir les siphonner par la suite et les vendre au besoin. Cela, c'est de l'infiltration.

Le ministre de la Fonction publique a dit que le parti de l'Opposition actuellement s'infiltrait dans la fonction publique. Que le parti de l'Opposition ait des membres qui travaillent loyalement et de façon compétente pour l'Etat québécois, c'est bien sûr, il y a 30 p.c. de Québécois qui ont choisi le parti de l'Opposition, et ces gens travaillent, gagnent leur vie partout, aussi bien dans la fonction publique qu'ailleurs.

Ce n'est pas ça le cas et n'essayez pas de noyer le poisson en nous disant ça. Mais quand vous avez affirmé que des gens sont entrés...

M. PARENT (Hull): ... noyer le député de Saint-Jacques.

M. CHARRON: ... dans la fonction publique sans être loyaux à l'Etat québécois, sans être compétents, qu'ils travailleraient à l'intérieur de la fonction publique plus pour le parti de l'Opposition, exactement comme le policier infiltré à la United Aircraft travaillait pour le ministre de la Justice, ça, c'est une affirmation qui est sur la table depuis maintenant presque deux heures. De cela nous demandons non seulement une preuve, mais, si preuve il y a, les mesures qu'entend prendre le ministre de la Fonction publique au lieu d'affirmer qu'il y a infiltration comme ça, sans jamais le prouver.

C'est là qu'on est rendu et on touche le fond, on entame la partie la plus importante de nos discussions.

M. LACROIX: Les policiers qui étaient dans la manifestation l'autre fois ne se sont pas dénoncés et vos fonctionnaires qui font le même travail à l'intérieur de la fonction publique ne montent pas sur la place publique non plus. Mais on voit les effets. Par exemple, je vous ai donné une preuve concrète tantôt que l'Opposition a accès à des dossiers secrets, confidentiels et que vous les avez en main. Ils ne sont pas tombés du ciel, ces documents. Ils sont venus par l'entremise de fonctionnaires. Ce sont des fonctionnaires qui n'ont pas respecté leur serment d'office.

M. MORIN: Là, on a un fait précis. Des dossiers qui seraient passés entre les mains de l'Opposition. Est-ce que le whip peut documenter cette affirmation? S'il juge sur les effets, c'est dangereux, ça.

M. LACROIX: Vous aviez le dossier.

M. MORIN: Le renseignement aurait pu venir aussi bien par les journaux qu'autrement. Mais il a affirmé que les dossiers...

M. LACROIX: Le député de Maisonneuve avait le dossier en main en Chambre.

M. MORIN: Alors, pouvez-vous nous dire dans quelles circonstances? Donnez-nous des exemples.

M. LACROIX: Le député de Maisonneuve avait le dossier de la police dans la supposée affaire Laporte — d'ailleurs, l'enquête n'a donné aucune preuve à l'heure actuelle — le rapport entre la pègre et des membres de la députation.

M. MORIN: Et ça, ça venait de la fonction publique?

M. LACROIX: Certainement, ce n'est pas tombé du ciel. Ce ne sont pas les anges qui communiquent directement avec vous, que je sache.

M. MORIN: Est-ce que vous en avez une preuve ou si vous dites ça parce que ça vous paraît logique ou probable?

M. LACROIX: Moi, la police n'est jamais venue porter de documents chez nous.

M. MORIN: Non, je vous ai posé une question.

M. LACROIX: ... ni les fonctionnaires.

M. MORIN: Est-ce que vous faites cette affirmation...

M. LACROIX: Je n'ai jamais demandé à un fonctionnaire de trahir son serment d'office non plus.

M. MORIN: ...M. le whip, parce que c'est probable ou parce que vous en avez une certitude, vous en avez la preuve?

M. LACROIX: II y a des fuites tous les jours; les journalistes, naturellement, quand ils rapportent des faits, c'est parce qu'ils ont eu des informations quelque part. Il y en a qui ont intérêt à ce que des fuites soient faites.

M. CHARRON: Le gouvernement?

M. LACROIX: Et cela, on peut, en ouvrant... Non, non...

M. CHARRON: Le gouvernement?

M. LACROIX: Ah! oui, le gouvernement, surtout quand les rapports sont défavorables, le gouvernement a beaucoup d'intérêt à les rendre publics! Mais les journalistes font leur travail

— je ne le leur reproche pas — mais seulement, le fonctionnaire qui donne des informations confidentielles manque à son devoir.

M. MORIN: Et vous êtes...

M. LACROIX: Parce que lorsqu'il s'agit de documents confidentiels, il appartient au gouvernement de les rendre publics ou non.

M. MORIN: Et alors...

M. LACROIX: Le journaliste — je ne le lui reproche pas, je le répète — fait son devoir. Je reproche au fonctionnaire de manquer de loyauté et de ne pas remplir son mandat correctement, parce que ce n'est pas à lui à donner des informations.

M. MORIN : Et le député a des preuves que ces fuites ont pour origine des gens qui porteraient des étiquettes en "iste"?

M.LACROIX: S'il y avait possibilité de demander aux journalistes de nous donner leurs sources d'information, peut-être que, pour une fois, vous auriez à rougir. Vous vous apercevriez, à ce moment-là, d'où viennent les fuites; elles ne viennent certainement pas de la deputation libérale.

M. MORIN: M. le ministre, est-ce qu'on peut revenir sur la...

M. LACROIX: Seulement, les secrets professionnels que les journalistes utilisent, et tant que ça n'aura pas été défini, je crois qu'ils ont raison de garder leurs preuves confidentielles. Mais, les informateurs, eux, n'ont pas le droit de fournir des informations confidentielles.

M. MORIN: M. le ministre, dans les cas où il y a eu infiltration et où nous présumons que vous avez quand même en main un certain nombre de preuves — sinon je suis bien sûr que vous ne feriez pas de telles affirmations — qu'est-ce que vous entendez faire, quelles mesures allez-vous prendre pour lutter contre cette infiltration?

M. PARENT (Hull): Je pense qu'il ne s'agit pas de pénaliser, dès le départ; il s'agit, à mon avis, de tenter d'amener le fonctionnaire à être loyal dans l'exécution de ses fonctions. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas donné de noms; nous avons des dossiers sur certains fonctionnaires; de ceux-là, il y en a qui ont été mutés ailleurs et je pense que, dans l'ensemble, il serait faux de prétendre qu'il y a eu, à l'endroit de certains qui se sont infiltrés dans les ministères, manque de loyauté. Mais...

M. MORIN: Vous dites que...

M. PARENT (Hull): ... les actions à prendre, c'est d'éviter qu'il y ait un manque de loyauté. Il ne s'agit pas de pénaliser sans avoir les preuves en main et on peut être convaincu que, quand il y a fuite, quand il y a manque de loyauté, il s'agit de le prouver si on veut que la Commission de la fonction publique puisse agir.

M. MORIN: Est-ce que vous n'estimez pas qu'il faut le prouver aussi quand on fait une affirmation en public à l'effet que la fonction publique est infiltrée massivement de traîtres, d'hypocrites, etc.?

M. PARENT (Hull): Je n'ai jamais fait de telles déclarations.

M. MORIN : Non, ce n'est pas vous qui l'avez fait, c'est le député des Iles-de-la-Madeleine.

M. PARENT (Hull): II ne faudrait pas me prêter les propos.

M. MORIN: Bon, alors ça, c'est déjà plus clair.

M. CHARRON: II est toujours utile quand il est utile, mais quand il est embarrassant le député des Iles-de-la-Madeleine, vous vous en débarrassez.

M. PARENT (Hull): Non, j'ai dit tout à l'heure...

M. LACROIX: Non, non, je n'ai pas demandé au ministre de me couvrir non plus...

M. PARENT (Hull): ...que le député des Iles-de-la-Madeleine...

M. LACROIX: ... seulement...

M. PARENT (Hull): ...pouvait assumer ses responsabilités.

M. LACROIX: Cela, le ministre...

M. CHARRON: Parce qu'il n'est pas capable d'endosser ce que vous avez dit.

M. LACROIX: La déclaration, c'est moi qui l'ai faite. Et je n'ai pas demandé de me couvrir, je l'ai faite en connaissance de cause et en toute conscience, et je la répète. Imaginez-vous que si on voulait mettre des noms, on en mettrait.

M. CHARRON: Oui, le député des Iles-de-la-Madeleine...

M. LACROIX: Seulement, on aime mieux les garder parce qu'ils vont nous conduire... vous savez, des poux ça fait toujours d'autres poux, et comme ça, on peut suivre la ramée.

M. CHARRON: M. le Président, le député des Iles-de-la-Madeleine a fait une déclaration

qu'il est le seul à supporter actuellement. Il a dénoncé une situation, une pratique qui, semble-t-il, serait très répandue. Les poux font des poux, les traîtres font des traîtres, et les hypocrites font des hypocrites et, selon le député des Iles-de-la-Madeleine...

M. LACROIX: Les anarchistes.

M. CHARRON: ...les anarchistes font des anarchistes et, selon le député des Iles-de-la-Madeleine, l'infiltration serait beaucoup plus grande que ne semble l'affirmer le ministre de la Fonction publique qui n'est pas prêt à endosser l'affirmation du député des Iles-de-la-Madeleine; il le laisse se débattre avec ses propres affirmations, ce n'est pas la première fois.

Je veux demander au ministre de la Fonction publique s'il considère que son collègue des Iles-de-la-Madeleine exagère, lorsqu'il décrit la situation de la fonction publique comme étant des poux se multipliant.

M. PARENT (Hull): M. le Président, si on veut faire des guerres entre députés du parti gouvernemental puis de l'Opposition, je laisse chacun libre de les faire. En ce qui me concerne, on m'a posé des questions, je tente d'y répondre au meilleur de ma connaissance.

M. CHARRON: Je viens de vous en poser une.

M. PARENT (Hull): Les députés sont libres de dire ce qu'ils veulent, ils ont la liberté d'action. Je n'ai pas l'intention de donner d'appréciation sur la valeur des arguments qu'ils apportent ou sur les motifs qu'ils invoquent pour participer au débat.

M.MORIN: Ce qui nous inquiète, M. le ministre, c'est que le député des îles semble mieux renseigné que vous.

M. PARENT (Hull): J'ai une charge à assumer, j'essaie de l'assumer. Je pense qu'au moment de l'étude des crédits du ministère ce que le parti de l'Opposition recherche, ce sont des renseignements. Je donne les renseignements qu'il m'est possible de donner. Cela ne veut pas dire pour autant que je n'ai pas d'autres renseignements.

M. CHARRON: M. le Président, est-ce que le ministre considère que l'infiltration et le noyautage dans la fonction publique par le parti de l'Opposition, c'est son affirmation à lui, vont croissant?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas de données là-dessus.

M. MORIN: Est-ce qu'ils vont diminuant? Vous n'avez pas de données là-dessus?

M. LACROIX: Question brillante.

M. CHARRON: C'est parce que j'aimerais savoir si les poux multiplient les poux, comme vous les avez appelés tout à l'heure. C'est parce que je ne pense pas que le ministre de la Fonction publique, du poste qu'il occupe, peut qualifier les citoyens comme vous le faites. Alors, je suis obligé de prendre une formule plus française, de demander si ce phénomène-là va croissant. Traduction pour vous, ça veut dire: Les traîtres se multiplient-ils?

M. LACROIX: Je vais sortir des textes des discours que vous avez prononcés à l'Assemblée nationale, vous allez voir que vous avez tenu des propos qui sont plus graves que ça, vous.

M. CHARRON: A votre égard et à l'égard de politiciens comme vous certainement, mais à l'égard de citoyens...

M. LACROIX: A l'égard de citoyens sapre-ment plus propres que vous l'êtes, vous-même.

M. CHARRON: A l'égard de citoyens du Québec, j'ai demandé au ministre de la Fonction publique qu'il me répondre.

M. LACROIX: Puis plus responsables aussi.

M.MORIN: En somme, M. le Président, je pense qu'il vaut peut-être mieux quitter une querelle qui serait sans fin et qui ne nous fait guère avancer puisque dès que nous tentons d'obtenir des détails, soit sur le degré d'infiltration ou de soi-disant infiltration, soit sur les mesures que le ministre entend prendre...

M. CHARRON: Sur l'infiltration même.

Syndicalisme des employés occasionnels

M. MORIN: ... nous n'aboutissons nulle part.

Alors si vous voulez bien, on va passer à un autre aspect de la fonction publique occasionnelle, qui serait la question de la syndicalisa-tion. Vous n'ignorez sans doute pas, M. le Président, que les occasionnels ont tenté d'obtenir l'accréditation. Le ministère s'y est opposé. Est-ce que je pourrais demander au ministre pourquoi son ministère s'est opposé à cette accréditation?

M. PARENT (Hull): Je pense que c'était élémentaire que nous nous opposions. Il s'agit d'un groupe d'employés à temps limité et, selon le règlement établi au mois d'octobre 1966, d'emplois occasionnels. Comment pouvons-nous accepter qu'il y ait une demande de syndicalisation de la part d'employés qui sont censés occuper des fonctions occasionnelles, pour un temps limité?

M. MORIN: Mais pour ceux qui sont dans la fonction ooccasionnelle-permanente? Vous

avez dit tout à l'heure que ça pouvait aller, il y en avait à peu près 2,000 qui sont en somme perpétués dans des fonctions épisodiques ou occasionnelles. Ceux dont les contrats sont renouvelés constamment. Est-ce que vous estimez qu'ils sont dans la même position du point de vue de l'accréditation?

M. PARENT (Hull): Ils sont dans la même situation, tant et aussi longtemps que la loi et les règlements actuels seront en vigueur. C'est la raison pour laquelle j'ai bien mentionné l'intention que j'avais de présenter au conseil des ministres, d'ici la fin du mois, le projet en. vue de régulariser ces situations et de permettre qu'à l'avenir nous puissions bien définir ce qu'est un emploi occasionnel qui doit servir exclusivement à des fins occasionnelles.

M. MORIN: Le commissaire-enquêteur a débouté les travailleurs occasionnels dans leur demande d'accréditation. Je crois que la cause a été portée en appel. Quelle attitude allez-vous prendre devant les tribunaux d'appel à ce sujet-là?

M. PARENT (Hull): Le jugement, semblet-il, a été rendu par le tribunal du travail. Nous n'avons pas encore le texte en main. Notre conseiller juridique l'a et il doit nous le transmettre aujourd'hui. Le tribunal du travail, semble-t-il, invoquerait le fait que le commissaire-enquêteur aurait dû étudier la demande en accréditation sur les mérites, ce qu'il ne semble pas avoir fait.

M. MORIN: Alors, on renverrait l'affaire au commissaire-enquêteur ou bien on renverserait sa décision? Je viens d'apprendre que probablement la décision a été rendue hier.

M. PARENT (Hull): Hier seulement, oui.

M. MORIN: Est-ce que le ministre pourrait, pour la prochaine séance peut-être, prendre connaissance de ce document? Nous pourrions en discuter à cette occasion-là.

M. PARENT (Hull): Sûrement.

M. MORIN: Je ne veux pas le prendre par surprise. Il nous resterait peut-être seulement à dire deux mots du statut éventuel de ces employés occasionnels. Si j'ai bien compris les interventions du ministre, cette réglementation ou cette législation qu'il a préparée, parce qu'il nous a dit qu'il ne savait pas encore exactement quelle forme définitive cela allait prendre, est-ce que cela porte bien sur le statut de ces employés?

M. PARENT (Hull): C'est sur l'ensemble de la fonction publique et cela a pour effet, également, de clarifier cette question des occasionnels.

M. MORIN: Autrement dit, il y aura une définition donnée du statut de l'occasionnel, des méthodes d'embauche des occasionnels aussi, peut-être?

M. PARENT (Hull): Et de contrôle également.

M. MORIN: Et de contrôle. Est-ce qu'il sera question également de l'obtention de la permanence après un certain nombre de mois ou de contrats dans la fonction publique?

M. PARENT (Hull): Le député de Sauvé me demande de me prononcer avant même que le conseil des ministres se soit prononcé sur l'opportunité de procéder par législation ou par réglementation.

M. MORIN: Non, c'est sur le contenu.

M. PARENT (Hull): Dans mon esprit, il faut convenir que les occasionnels devront occuper des fonctions qui sont occasionnelles. Il nous faudra déterminer ce qui constitue un emploi occasionnel. Il y en a qui sont identifiables. Vous avez le ministère des Transports où c'est facilement identifiable qu'il y a des emplois occasionnels. Le ministère du Tourisme, avec la saison d'été, s'occupe de camps de pêche, de parcs et ainsi de suite; il est évident qu'il s'agit là d'emplois occasionnels. Vous avez le ministère du Revenu avec la période de pointe, pour trois mois; c'est un travail occasionnel.

M. CHARRON: Comme durant les examens au ministère de l'Education, lors de la rentrée des données des examens.

M. PARENT (Hull): II y a des postes facilement identifiables, qui sont comblés par des occasionnels parce que cela a une durée de quelques mois. C'est là qu'il faudra définir si, après huit ou neuf mois, nous devons considérer qu'il doit y avoir intégration à la fonction publique. Nous voulons le définir d'une façon pratique qui ne crée plus d'ambiguïté et qui permette justement de respecter le règlement qui date de 1966. Il convient d'avoir une mise à jour qui permettra de clarifier la situation une fois pour toutes.

M. MORIN: Et qui permettra à la Commission de la fonction publique d'avoir son mot à dire, si je comprends bien, dans l'engagement des occasionnels.

M. PARENT (Hull): Soit la commission, soit le Conseil du trésor, suivant la décision du conseil des ministres.

M.MORIN: Bon. Autrement dit, il est vraiment question de donner un statut plus juste, plus élaboré aux occasionnels.

M. PARENT (Hull): C'est-à-dire d'éviter qu'il y ait des occasionnels permanents.

M. MORIN: Et le cas échéant, de permettre à des occasionnels devenus permanents d'entrer à la fonction publique?

M. PARENT (Hull): II y aura, à ce moment, des règles à suivre pour devenir permanent.

M. MORIN: Oui.

M. PARENT (Hull): On ne peut pas invoquer le fait que, parce qu'un occasionnel est en fonction depuis deux ou trois ans, il aurait accès intégralement à la fonction publique sans se soumettre aux règles...

M. MORIN: Non, je suis d'accord.

M. PARENT (Hull): ... de la fonction publique.

M. MORIN: Non, cela va de soi. Mais ce que je demande au ministre c'est: II me dit qu'il veut éviter qu'il y ait des occasionnels permanents. Il y a deux façons de faire cela. Ou bien on s'arrange pour qu'un occasionnel ne soit pas renouvelé ou bien on s'arrange, après quelque temps, pour que l'occasionnel devienne véritablement permanent, surtout s'il est compétent.

M. PARENT (Hull): C'est ce qui se fait de ce temps-ci, entre autres, au ministère des Transports.

M. MORIN: Une dernière question, peut-être, sur le problème des occasionnels, M. le Président. J'imagine que la Commission de la fonction publique a fait une étude de ce problème. Si vous avez pu faire une réglementation, c'est sans doute à la suite d'études, de rapports de la commission.

M. PARENT (Hull): Je peux dire —je l'ai expliqué tout à l'heure — en vertu du règlement, il y a eu une délégation de pouvoir dans les ministères, le 5 octobre 1966, par la commission. C'est depuis ce moment que la commission n'a pas de contrôle sur l'engagement des occasionnels. Nous avons procédé à l'étude de ce règlement pour être en mesure d'apporter les solutions qui s'imposent à la question des occasionnels qui, dans certains cas, sont devenus des permanents. Mais la délégation de pouvoir qui a été faite n'empêche pas, si l'on veut, que la commission intervienne dans tous les ministères pour s'assurer que les normes et critères ont été respectés dans l'embauchage des employés. Nous nous préparons, d'ici quelques semaines, à faire l'inventaire pour connaître véritablement les données dans chacun des ministères, en regard de la présentation du document que j'aurai à faire au cabinet des ministres.

M. MORIN : Bien, en ce qui me concerne, j'ai terminé. Le député de Saint-Jacques a peut-être d'autres questions.

Négociations d'une nouvelle convention

M. CHARRON: Oui, M. le Président. J'aimerais maintenant aborder un autre aspect du programme 1, de la gestion du personnel. C'est évidemment le rôle essentiel du ministère de la Fonction publique, enfin la fonction pour laquelle il a été créé, c'est celui de négocier au nom de l'Etat québécois, préparer avec l'Etat québécois les négociations dans le secteur public. Je veux demander au ministre si, cette année — contrairement à l'année dernière, où nous étions peut-être trop près encore des événements, nous n'avions pas suffisamment décanté pour pouvoir en faire un bilan — il peut maintenant faire le bilan de la dernière ronde de négociations dans les secteurs public et parapublic, en tant que partie patronale, et les leçons qu'il en tire, tout ça en vue de celles qui doivent s'engager cette année.

M. PARENT (Hull): Si on veut parler de la dernière ronde de négociations, je ne pense pas être le mieux qualifié pour le faire. J'ai suivi, comme bien d'autres, à travers le Conseil du trésor, les péripéties de cette négociation, la formation du Front commun, les négociations à la table centrale et aux tables sectorielles, puisqu'à mon arrivée au ministère, en février 1973, j'ai dû compléter cette ronde de négociations par la signature de plusieurs conventions collectives. Dans l'ensemble, j'ai déjà commencé les consultations en vue de la prochaine ronde des négociations. J'ai souligné, hier soir, à la commission parlementaire, que j'avais déjà fait les premières approches.

Nous avons déjà créé, au ministère, un service de la rémunération pour faire la préparation des cueillettes de données. Nous avons ce comité consultatif des politiques de personnel, qui se réunit hebdomadairement pour des questions quotidiennes et pour la préparation de documents sur la prochaine ronde des négociations. Il y a un document, qui est devant le conseil des ministres, pour définir cette prochaine ronde de négociations. Il y a la loi 46 qui doit être présentée à nouveau devant la Chambre parce qu'elle se termine avec la convention collective le 30 juin 1975, où il y aura à déterminer l'autorité gouvernementale dans la prochaine ronde de négociations. Il y a les contacts, actuellement en cours, avec nos partenaires, l'Association des hôpitaux, la Fédération des commissions scolaires et les CEGEP. Tout le processus est en cours. La politique, comme telle, n'est pas déterminée puisqu'il s'agit d'entrevoir tout le problème. Les consultations que nous poursuivons tant avec nos partenaires qu'avec la partie syndicale vont déterminer, dans les mois qui vont suivre et au moment de la présentation de la loi, l'autorité gouvernementale et la politique que le gouvernement entend suivre dans ses prochaines négociations.

M. CHARRON: De deux choses là-dessus, M. le Président. D'abord, le ministre n'a pas hésité à dire que la représentation de la loi 46 à l'Assemblée nationale, qui devient obligatoire, aura comme but ultime, en fin de compte, la détermination de l'autorité gouvernementale lors des prochaines négociations. Mais je veux savoir — cela fait suite au tout premier débat que nous avions hier soir — s'il est d'ores et déjà prévisible que l'autorité gouvernementale en cette matière sera le ministère de la Fonction publique ou si, comme s'est terminée la dernière la ronde des négociations, ce sera plutôt vers le ministère du Travail que se portera l'ensemble des négociations.

M. PARENT (Hull): Bien, je pense qu'il faudrait bien souligner que la dernière ronde de négociations ne s'est pas terminée au ministère du Travail, puisque le titulaire du ministère du Travail était, en même temps, le titulaire du ministère de la Fonction publique. Il l'a faite à deux titres. C'est ce que le député de Saint-Jacques veut bien souligner. Mais il ne faudrait pas oublier, quand même, que mon collègue, le ministre du Travail, était en même temps le ministre de la Fonction publique et, comme tel, désigné en vertu de la loi 46.

Dans tous les documents, que j'ai déjà préparés et soumis au Conseil du trésor, je fais des recommandations en ce qui regarde la prochaine ronde des négociations, quant à l'autorité, quant aux modalités, quant à la façon de procéder. Nous verrons également, par les projets de loi que nous aurons à déposer, l'orientation que le gouvernement entend donner à sa politique dans la prochaine ronde des négociations. Mais il faut dire, antérieurement à cette présentation de loi, que nous avons déjà une négociation qui va s'ouvrir dès le début de mai pour une convention collective qui est terminée: celle des agents de la paix. La convention se termine le 30 juin 1974. Nous aurons donc une première prise de conscience assez concrète quant à l'orientation des prochaines négociations.

J'ai rencontré moi-même, la semaine dernière, tout l'exécutif du syndicat des agents de la paix. En vertu de leur convention collective actuelle, ils devaient nous soumettre, entre le 120e jour et le 90e jour, les projets de modifications à la convention collective. A la suite de cette rencontre où on m'a déposé le document, nous avons convenu qu'il y aurait des premières rencontres dès la première semaine de mai. Nous allons donc suivre d'assez près l'évolution de ce dossier parce que je pense qu'il est un dossier, en somme, barème sur la prochaine ronde de négociations en 1975.

Alors, dans l'ensemble, nous allons faire part à la Chambre, je pense bien d'ici au mois de mai, avec la décision qui sera prise au conseil des ministres, d'ici la fin d'avril, de l'orientation que le gouvernement veut donner à la fonction publique, à la commission et au Conseil du trésor.

Ce sera peut-être un prélude de ce que devrait être le nouveau bill qui remplacera le bill 46.

M. CHARRON: Justement, je ne peux pas entrer dans les détails du document que le ministre a remis au Conseil du trésor, qui sera ensuite examiné par le conseil des ministres, qui constitue, je crois, ses recommandations pour la prochaine ronde de négociations. Mais est-ce exact de dire — comment appeler ça? — que le contenu de la loi 46, qui marquait la fin des négociations de la dernière ronde, constitue encore aujourd'hui l'attitude gouvernementale lorsqu'on s'engagera dans la prochaine ronde de négociations? Je pense aux questions des tables, table centrale ou tables sectorielles, tout le partage des responsabilités entre l'Etat et ses partenaires face aux syndiqués, de l'autre côté, les syndiqués qu'on invite à la table centrale, ceux qu'on écarte aux tables sectorielles. Est-ce que c'est encore la politique du gouvernement ou si, dans les recommandations que vous avez soumises au Conseil du trésor, on peut dire que le gros de la loi 46 ne sera pas reconduit?

M. PARENT (Hull): Je pense que le député de Saint-Jacques voudrait avoir une présomption. Le bill 46 est encore en existence. Son existence ne prend fin que le 30 juin 1975. Il est évident que la politique du gouvernement est relatée dans le bill 46, tant qu'il n'aura pas été modifié ou abrogé. Mais, comme ce bill prend fin le 30 juin 1975, il s'agit donc de convenir qu'il y aura un énoncé de politiques du gouvernement lors du dépôt de la loi qui devra remplacer le bill 46.

L'attitude que nous devons suivre présentement, c'est celle établie dans le bill 46. En ce qui concerne la stratégie, est-ce qu'il y aura une table centrale à la prochaine ronde de négociations? Je ne suis pas en mesure de parler au nom des centrales syndicales. Si on se rappelle, dans la dernière ronde de négociations...

M. CHARRON: Comme partie patronale, vous pouvez donner votre opinion.

M. PARENT (Hull): Oui. Dans la dernière ronde de négociations, les syndicats ont demandé, à un moment donné, la formation d'une table centrale. Le gouvernement y a acquiescé. Est-ce que maintenant les centrales syndicales...

M. CHARRON: Feront la même demande.

M. PARENT (Hull): ... feront la même demande ou est-ce qu'elles envisagent qu'il y ait encore une table centrale? Je ne sais pas quoi penser. Je sais qu'il y a eu des anomalies à cette table centrale.

M. CHARRON: Sur cette question, par

exemple, de la table centrale — je ne signale pas ça inutilement, M. le Président — je me souviens que lors de la précédente négociation, en 1972, nous avions demandé, bien avant l'ouverture de la négociation et avant même que ça se réchauffe, que le patron fasse connaître d'avance son attitude sur certains points devant conduire à la négociation. Ce n'est pas pour rien que je repose cette question. Je sais très bien qu'on est encore sous l'empire de la loi 46 mais, comme le ministre l'a annoncé lui-même, il devra ou bien demander simplement à l'Assemblée de reconduire la loi 46 qui doit expirer le 30 juin 1975 ou alors de la modifier sensiblement.

Ce que j'essaie de savoir, sans entrer dans les détails, bien sûr, parce que ce n'est pas l'endroit pour le faire, c'est si, dans l'ensemble, vous seriez plutôt favorable à représenter une loi 46, modifiée je l'admets, ou si vous croyez qu'on doit se préparer à la prochaine ronde de négociations dans un autre esprit, c'est-à-dire avec une autre perception.

J'admets que le ministre de la Fonction publique respecte et doit attendre les mouvements des syndicats en face de lui. Feront-ils front commun, comme la dernière fois? Exigeront-ils d'abord une table centrale pour ensuite étudier les modalités aux tables sectorielles ou l'inverse? Je sais que c'est une décision qu'ils ont à prendre. Ce n'est pas au ministre de la prendre mais le patron, lui, peut prévoir. Est-ce que pour vous, par exemple, l'expérience de la table centrale des dernières négociations contenue dans la loi 46 vous parait comme une modalité à reconduire pour la prochaine ronde de négociations? L'expérience vous a-t-elle paru profitable?

M. PARENT (Hull): Vous me demandez une appréciation. A ce moment-là, je puis dire que, pour le gouvernement, cela a été assez convenable.

Mais, si on regarde de l'autre côté la partie qui négocie avec nous, je pense que la centrale de l'enseignement a été négligée, semble-t-il, d'après les dires du président de la CEQ. Est-ce qu'eux, devant le succès mitigé remporté par une table centrale, vont continuer à exiger qu'il y ait une table centrale ou s'ils exigeront des tables sectorielles pour régler leurs problèmes individuels et ne pas se retrouver devant un décret nouveau?

M. CHARRON: Mais ce qu'on veut savoir ce matin, c'est si le gouvernement, le patron dans ce cas, serait d'accord pour retourner à une table centrale. Reste à savoir si de l'autre côté, comme vous le signalez, il y a pareille envie, qui existait en 1973. Mais du côté gouvernemental on n'a pas objection à une table centrale en principe?

M. PARENT (Hull): Je préfère réserver toute opinion pour avoir beaucoup plus de flexibilité quand arrivera le moment, si c'est celui qui vous parle qui est appelé à diriger les négociations.

M. CHARRON: Abandonnant cette modalité des tables de négociations pour une autre, quand l'offre patronale, en ce qui concerne la masse salariale, sera-t-elle connue?

M. PARENT (Hull): Ou est-ce que ce sera le syndicat qui formulera ses demandes le premier?

M. CHARRON: Quand...

M. PARENT (Hull): Si je suis l'exemple que je viens d'avoir du Syndicat des agents de la paix, on vient de me soumettre la proposition, sans demander quelle était la position du gouvernement.

M. CHARRON: Je reformule ma question...

M. PARENT (Hull): Vous voulez savoir la stratégie que le gouvernement va suivre dans l'élaboration de sa prochaine ronde de négociations.

M. CHARRON: Mais c'est important parce que là...

M. PARENT (Hull): Je sais que c'est important, mais ce n'est pas l'endroit pour en discuter.

M. CHARRON: C'est l'endroit, il n'y a pas d'autre endroit. Je ne vous demande pas de me dire quelle sera la masse salariale. Je suis même d'avis que vous ne le savez même pas actuellement. Je ne vous demande pas de la déposer ici sans la présence de vos partenaires. Je veux simplement vous rappeler ceci. C'est que lors de la précédente ronde de négociations, les premières interventions du Parti québécois en cette matière étaient au moment où votre "préprédécesseur" à la Fonction publique, le député de Deux-Montagnes, faisait part à la Chambre de certaines nouvelles concernant l'ouverture des négociations, annonçant comment elles se dérouleraient.

Le député de Maisonneuve, qui est notre porte-parole en cette matière, revenait continuellement à la charge en disant: Est-ce que le montant global de la masse salariale du gouvernement est, premièrement, déterminé par le gouvernement, deuxièmement, connu des partenaires syndicaux et, troisièmement, connu du public éventuellement?

Et il nous semble important — la question de stratégie, c'est quand on la met sur la table, je suis bien d'accord — de savoir si on attend — comme dans le cas des agents de la paix — que la démarche vienne de la partie syndicale pour répondre par une... Mais est-ce que le gouvernement, lui, saura, dès l'ouverture des négociations, la masse salariale dont il dispose?

Maintenant, stratégiquement...

M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: ... il pourra éventuellement... Oui, bon. Et est-ce que cette masse salariale sera négociable?

M. PARENT (Hull): Non.

M. CHARRON: D'avance, on sait qu'on se trouve dans la même situation qu'en 1972. La masse salariale que le gouvernement fixera ne sera pas négociable.

M. PARENT (Hull): Pas la masse salariale.

M. CHARRON: Que pensez-vous — ce n'est pas à vous de me le dire et vous ne me le direz certainement pas — devant cette position, cette attitude patronale de départ? Vous pouvez imaginer comme moi quelle sera la réaction syndicale en apprenant que la masse salariale n'est pas négociable.

En même temps, que vous les invitez à faire leur demande avant que vous déposiez votre offre, vous créez déjà un climat de négociation bien précis.

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas dit qu'ils devaient déposer leur offre.

M. CHARRON: Non, vous n'avez pas dit, d'accord, j'admets que vous ne l'avez pas dit. Mais, je n'ai pas l'impression que c'est vous qui allez faire la première démarche. Bien, on verra...

M. PARENT (Hull): Le député de Saint-Jacques serait surpris de savoir que je les ai commencées.

M. CHARRON: Oui, d'accord, les démarches de négociation; bien, j'espère.

M. PARENT (Hull): Très bien.

M. CHARRON: J'espère, c'est votre responsabilité première, ce n'est pas ça que je veux dire. Je veux dire, pour la négociation du secteur public et parapublic qui doit reprendre, je pense, au cours de l'année financière actuelle dont nous étudions les crédits, actuellement, c'est au cours de cette année financière que nous devrons connaître, du gouvernement la masse salariale dont il entend disposer pour la prochaine convention collective. Ce sera sa stratégie à lui de la déposer ou de l'ouvrir à 80 p.c. en se gardant 20 p.c. de jeu pour les dernières concessions utiles, comme c'est à peu près l'habitude, ailleurs. Mais ça, j'admets que ce sera sa stratégie. Mais il est important de savoir immédiatement que le gouvernement disposera de tous les outils dont il a besoin dès la présente année financière, et que ça dépendra des manoeuvres syndicales, d'un côté, pour que le gouvernement laisse aller un morceau plus ou moins gros, selon les cas; enfin, nous verrons bien.

Maintenant, — dernière question dans ce domaine de la prochaine négociation — le ministre a signalé, j'allais le signaler mais il l'a fait lui-même, le fait que, dès le mois de mai prochain, les négociations avec les agents de la paix constituent une ouverture de la nouvelle négociation pour l'ensemble du secteur public et parapublic. Vous avez reçu les demandes; quand entendez-vous déposer votre offre ou est-ce fait?

M. PARENT (Hull): II n'y a pas eu d'offre de déposée, les négociations seront entreprises dès le début de mai sur les questions de principe. On a invoqué, lors de la présentation du document, qu'il ne s'agissait pas purement et simplement de questions salariales mais de questions de principe. Si les questions de principe étaient admises, la discussion serait passablement courte.

M. CHARRON: Les principes portent sur quoi, la discussion sur les principes?

M. PARENT (Hull): Le statut particulier des agents de la paix, l'exclusivité de l'exercice de la fonction; ce sont les deux points majeurs.

M. CHARRON: Mais ces choses-là n'étaient pas contenues à la précédente convention collective, ou s'ils veulent des améliorations sur ces principes en particulier?

M. PARENT (Hull): Ce sont des améliorations qu'ils recherchent; ils nous ont présenté, je pense, 51 amendements.

M. CHARRON : De la convention collective? Etes-vous en mesure, ce matin, de donner une première réponse à ces demandes? Vous semblent-elles exagérées ou sont-elles raisonnables?

M. PARENT (Hull): Je pense que ce n'est pas l'endroit propice pour discuter d'une convention collective et des conditions qui sont énumérées dans les demandes. Je pense que, dans l'ensemble, si nous voulons garder assez de flexibilité, c'est autour de la table de négociation que nous pouvons apporter des éléments de solution. Ce que je puis dire, c'est que j'ai reçu les membres de l'exécutif du Syndicat des agents de la paix.

Nous avons passé deux heures ensemble. J'ai écouté attentivement leurs revendications, leurs principaux points, comme je viens de le souligner, et j'ai demandé que le climat serein auquel nous avons été tenus durant cette réunion puisse se poursuivre dans les négociations.

J'ai souligné au Syndicat des agents de la paix qu'au moment où les officiers du ministère seraient à la table de négociation ils auraient un mandat précis, mais flexible quand même. Si nous sommes en négociation, je pense que nous ne pouvons pas avoir de restrictions trop larges.

Les officiers auront un mandat assez clair pour leur permettre d'envisager d'aller de l'avant avec l'étude de la convention collective.

M. CHARRON: La dernière ronde de négociation, aux dires du ministre, l'année dernière, aura coûté au ministère en honoraires pour ses négociateurs, en fait toute la conduite des négociations aurait coûté $275,000. C'est encore le chiffre que vous maintenez et c'est ce que vous aviez affirmé l'année dernière.

M. PARENT (Hull): Vous parlez du montant que le ministère a payé...

M. CHARRON: Oui.

M. PARENT (Hull): Nos partenaires ont payé également aussi pour...

M. CHARRON: Oui, oui que l'Etat, que le gouvernement québécois a payé.

M. PARENT (Hull): $15,149.59; Yves Gué-rard, $117,837.49; Raynold Langlois, $28,571; Réjean Larouche, $92,838; Claude Lefebvre, $23,310; Robert Delisle...

M. CHARRON: $29,026.30. M. PARENT (Hull): C'est ça.

M. CHARRON: Ces gens-là sont embauchés selon un tarif horaire?

M. PARENT (Hull): Horaire. M. CHARRON: De combien?

M. PARENT (Hull): Cela variait de $35 à $45 l'heure.

M. CHARRON: M. Guérard, c'est un actuaire?

M. PARENT (Hull): Oui, c'est lui qui était le principal négociateur du gouvernement. Pas M. Guérard, c'était M. Larouche.

M. CHARRON: Réjean Larouche.

M. PARENT (Hull): C'était l'adjoint de M. Larouche. M. Belisle, lui, représentait les commissions scolaires.

M. CHARRON: D'accord.

M. PARENT (Hull): Je pense qu'il appartenait à la commission scolaire de Chambly.

M. CHARRON: A la Fédération des commissions scolaires, c'est cela. $29.026, c'est bien payé, c'est presque $50 l'heure. Est-ce qu'il est obligatoire de recourir à des gens de l'extérieur du ministère pour ce genre de négociation?

M. PARENT (Hull): Bien, c'est nécessaire... Je pense que dans les circonstances que le gouvernement a vécues à ce moment-là... Je pense bien que la prochaine ronde de négociation sera dans la même veine. Je pense que les fonctionnaires que nous avons, par exemple, à la Direction générale des relations de travail sont en mesure de préparer les mandats, de voir à la gestion quotidienne, parce que les conventions collectives nécessitent énormément de travail après coup également...

M. CHARRON: Et avant coup également aussi, pour les offres.

M. PARENT (Hull): Avant coup également. Au moment de la négociation il est préférable, à mon sens, d'avoir des représentants patronaux qui siègent à la table exclusivement pour les fins de négociation.

M. CHARRON: Le directeur général des relations de travail de votre ministère, c'est qui, actuellement?

M. PARENT (Hull): Gaston Lefebvre.

M. CHARRON: M. Lefebvre a quel salaire, actuellement?

M. PARENT (Hull): $28,000, maintenant.

M. CHARRON: $28,000. Le sous-ministre de la Fonction publique a combien, actuellement?

M. PARENT (Hull): $35,500.

M. CHARRON: Quand les négociateurs de l'extérieur entrent-ils en fonction? Doivent-ils entrer en fonction simplement à la négociation ou s'ils doivent travailler avec M. Lefebvre, actuellement?

M. PARENT (Hull): Là-dessus, il n'y a aucune décision de prise actuellement. Si on regarde le dossier, par exemple, du Syndicat des agents de la paix, il sera négocié par mes fonctionnaires.

M. CHARRON: Uniquement? M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: Est-ce qu'il est possible d'étendre cette pratique à d'autres domaines également?

M. PARENT (Hull): Les employés du ministère, déjà, sont dans tous les ministères, tous les ministères clients.

M. CHARRON : Je comprends, mais je veux dire, par exemple, dans le domaine des agents de la paix, c'est exclusivement des gens du

ministère. On ne fait pas appel, à ce moment, à des négociateurs de l'extérieur. Est-ce que cette pratique ne peut pas être élargie?

M. PARENT (Hull): Oui, nous avons, par ailleurs, des gens qui sont retenus dans le cas des agents de la paix, par exemple, Richard Drouin va agir comme conseiller à l'équipe et sera le porte-parole du gouvernement.

M. CHARRON: Drouin, vous dites?

M. PARENT (Hull): Richard Drouin, c'est lui qui était dans la négociation du Syndicat des agents de la paix.

M. CHARRON: J'essaie de le retrouver, là. M. PARENT (Hull): C'est un nouveau. M. CHARRON: C'est un nouveau.

M. PARENT (Hull): C'est en 1971, par exemple.

M. CHARRON: 1971/72. Je l'ai ici, aux comptes publics. Alors, $14,180.

M. PARENT (Hull): Pour les agents de la paix, on se rappellera que les négociations ne se sont pas terminées par la voie normale. Il y a eu un arbitrage et la sentence arbitrale a été rendue en décembre 1973.

M. CHARRON: Richard Drouin sera reconvié à quel tarif?

M. PARENT (Hull): Tout ce que nous avons fait, c'est que nous avons retenu ses services, mais les tarifs n'ont pas été déterminés, ni le mandat.

M. CHARRON : Ni le tarif, ni le mandat.

M. PARENT (Hull): Non, nous avons retenu ses services.

M. CHARRON: Est-ce que vous avez l'intention de retenir les services de la plupart des gens qui avaient été embauchés à tarif horaire de $45, lors de la dernière ronde, c'est-à-dire, Réjean Larouche et Guérard?

M. PARENT (Hull): Réjean Larouche est maintenant sous-ministre adjoint aux Affaires sociales.

M. CHARRON: Alors, il est impossible que Réjean Larouche revienne pour les négociations de la fonction publique ou, s'il revient, ce sera comme fonctionnaire.

M. PARENT (Hull): Pas à honoraires, en tout cas.

M. CHARRON: Pas à honoraires. Yves Guérard?

M. PARENT (Hull): Yves Guérard est un homme disponible, si nous en avons besoin.

M. CHARRON: Est-ce que le ministère en est satisfait au point de lui redemander...

M. PARENT (Hull): II fait actuellement du travail d'actuariat pour les Affaires sociales dans la préparation des dossiers.

M. CHARRON: Est-ce qu'il y a d'autres personnes en vue pour ces négociations, à tarif horaire?

M. PARENT (Hull): II faudrait savoir d'abord qui sera le porte-parole gouvernemental pour que des premières suggestions soient faites.

M. CHARRON: Cela est vrai, c'est une première chose à clarifier. En fin de compte, nous ne sommes pas étroits d'esprit au point de dire qu'aucune personne de l'extérieur ne devrait être embauchée, mais nous avons pris comme coutume, lors de l'étude des crédits de n'importe quel ministère, de celui-là ou d'un autre — je sais que pour ma part, je m'occupe plus activement des questions d'éducation et des affaires culturelles— d'avoir comme principe, dans l'administration de la fonction publique, que le moins possible on ait recours à l'extérieur quand des personnes de l'intérieur de la fonction publique peuvent suffire.

D'autant plus que ces personnes requièrent souvent de gros salaires. Par exemple, je regarde Yves Guérard. Si on fait un calcul, 47 heures par semaine, à $50 l'heure, cela fait un bon salaire. Il est peut-être très compétent. Je ne le connais pas. Je ne suis même pas en mesure d'examiner son travail. Mais il me semble que, dans la fonction publique, on peut trouver des gens qui, pas dans l'ensemble, mais à plusieurs endroits, pourraient suffire sans qu'on ait nécessairement à faire appel à l'extérieur.

Je pense qu'on pourrait conclure, puisqu'il est midi et demi, sur le programme 1, en me réservant le droit, sur le programme 2, qui traite de la rémunération, de discuter avec le ministre des frais de transport d'automobile des fonctionnaires, plutôt qu'au programme 1 puisque cela va à la rémunération, si vous le voulez. Alors je suis prêt à adopter le programme 1.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le programme 1, composé de trois éléments, est-il adopté?

UNE VOIX: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté.

Alors la commission ajourne sine die. Elle attendra l'ordre de la Chambre pour reprendre ses séances.

(Fin de la séance à 12 h 30)

Reprise de la séance à 16 h 40

M. CORNELLIER (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

A la suspension des travaux, à l'heure du déjeuner, nous avions adopté le programme 1. Nous passerons maintenant au programme 2, mais auparavant j'aimerais signaler quelques changements chez les membres de la commission: M. Tremblay, d'Iberville, remplace M. Cloutier, de L'Acadie; M. Parent, de Prévost, remplace M. Garneau, de Jean-Talon; M. Mercier, de Bellechasse, remplace M. Pépin, de Sherbrooke.

Nous passons donc maintenant au programme 2. Est-ce que le ministre a des commentaires à faire?

M. PARENT (Hull): Non.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Saint-Jacques.

Recherche sur la rémunération

M. CHARRON: M. le Président, le programme 2 nous invite à discuter de la recherche sur la rémunération et à aborder le sujet de la rémunération dans la fonction publique. Pour enchaîner sans coupure avec les travaux de ce matin, vous savez que nous avons terminé l'étude du programme 1 avec une annonce ou une déclaration du ministre qui n'est pas sans intérêt.

Le ministre nous a annoncé que, dès maintenant, il refusera de négocier la masse salariale des employés de la fonction publique et du secteur parapublic. J'aimerais lui dire tout de suite, puisque nous en sommes à la rémunération, que ce programme est fondamental dans une négociation des secteurs public et parapublic, qu'à notre avis le gouvernement s'engage dans le même cul-de-sac qu'en 1972, cul-de-sac qui — vous vous le rappelez, M. le Président — a mené à la grève du Front commun.

Je rappelais ce matin aussi au ministre que, deux ans avant cette négociation de 1972, les députés du Parti québécois et en particulier le député de Maisonneuve avaient multiplié les avertissements au gouvernement, mais en vain. Nous aurions cru qu'après l'expérience de 1972, le gouvernement adopterait une attitude plus ouverte, plus prudente, d'autant plus que la présente inflation, que cautionne le gouvernement, annonce déjà une négociation plus serrée encore, si c'est possible, qu'en 1972.

Les déclarations du ministre de la Fonction publique de ce matin nous laissent croire que ce gouvernement ne se laisse guère instruire par l'expérience. Je me sens donc dans l'obligation, au moment où nous abordons l'étude de ce programme, de renouveler nos avertissements de la dernière ronde au ministre. En s'engageant dans les mêmes ornières qu'en 1972, le gouvernement, à mon avis, fait courir au Québec les mêmes risques que ceux que nous avons dû traverser péniblement. Il lui appartient dès maintenant, je crois, de s'engager dans une voie nouvelle, susceptible de mener, par la négociation, à une solution juste et équitable. Nous lui demandons instamment d'entamer, dans les meilleurs délais, une prénégociation portant sur la politique salariale, avant que celle-ci ne soit fixée dans le prochain budget. Je crois qu'il est temps que le gouvernement cesse de considérer le budget du Québec comme une chose qui lui appartient et qui ne concerne que lui.

Le budget d'un Etat moderne, ce n'est plus une vache sacrée. Aux sommes astronomiques que l'on investit dans chacun des secteurs de l'activité gouvernementale maintenant, je crois qu'une préronde de négociations, au moins, avant que ne soit gelée la position gouvernementale — d'ailleurs, une masse salariale — et que le gouvernement ne renvoie la balle dans le camp syndical en opposant une fin de non-rece-voir à toute demande de modification de la masse salariale constitue, à mon avis et à notre avis, un bien mauvais départ dans une négociation. Comme je vous le disais tout à l'heure, c'est un secret de polichinelle, ce sera beaucoup plus serré, si c'est possible, qu'en 1972, précisément à cause de l'inflation actuelle.

Je crois que, peut-être sans le vouloir, le ministre s'est trouvé à faire ce matin une déclaration importante qui se trouvera à déclencher une série de réactions qui n'aideront en rien au climat qui doit prévaloir, au moins, sereinement, ne serait-ce qu'au départ, des négociations qu'il aura à mener au cours de la présente année financière.

Je ne vois pas pourquoi, puisque le ministre nous a dit qu'il a déjà établi des contacts avec les présidents de centrales syndicales et avec le président du Syndicat des fonctionnaires, ces contacts plus ou moins formels ne prendraient pas un caractère de formalité plus grand. On aborderait franchement, dans une première, j'ai appelé cela tout à l'heure, c'est peut-être un néologisme, une préronde de négociations, l'ensemble d'une politique salariale, les critères qui peuvent avoir une politique salariale, avant que le patron ne se referme sur des offres qu'il aura à négocier avec le syndicat.

Mais quand, dès le départ, on annonce: C'est cela, cela n'ira pas plus loin que cela, débrouillez-vous entre vous, ce que les enseignants iront chercher, les fonctionnaires ne l'auront pas, ce que les employés d'hôpitaux iront chercher, les gardes-chasse vont le perdre, etc., renvoyer une balle dans un camp à l'ouverture des négociations nous paraît très risqué pour le gouvernement, d'une part, ainsi que pour le Québec et son climat social en même temps.

Je ne sais pas si le ministre veut ajouter des commentaires à sa déclaration de ce matin. Je suis convaincu que, s'il ne veut pas le faire immédiatement, il sera certainement appelé à le

faire très bientôt, parce que cela constitue l'ouverture des prochaines négociations des conventions collectives et, je dirais tragiquement, pareille ouverture à celle de 1972 qui, sans nous lancer dans des extrapolations inutiles, nous permet quand même de dire que si l'ouverture est semblable à celle de 1972, il y a bien des raisons de croire que la fin sera semblable à celle de 1972. Je ne crois pas que ce soit dans l'intérêt des Québécois que nous connaissions pareil développement social, pareil climat d'affrontement qui risque inutilement de diviser la société québécoise.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le ministre, si vous me permettez, avant que vous' donniez la réponse, j'aimerais mentionner une erreur que j'ai commise tantôt, un oubli plutôt, dans la liste des changements des membres de la commission: M. Carpentier (Laviolette) remplace M. Sylvain (Beauce-Nord). Vous pouvez procéder, M. le ministre.

M. PARENT (Hull): M. le Président, je pense qu'il n'y a pas d'individu mieux placé que moi, si on veut, devant la situation des négociations qui ont prévalu à la dernière ronde des négociations, à l'endroit des discussions qui se poursuivent depuis mon arrivée au ministère avec nos partenaires et les centrales syndicales. Même si j'ai mentionné que la masse salariale n'était pas négociable, il n'en demeure pas moins qu'aujourd'hui la masse salariale n'est pas encore déterminée, que notre bureau de recherche sur la rémunération est à faire les compilations, à faire la cueillette des données, à contacter nos partenaires des niveaux des secteurs de l'Education, des Affaires sociales, pour qu'au moment où nous serons en mesure de prendre une décision, nous connaissions toutes les données nécessaires pour nous permettre de le faire sur la question de la valeur de la masse salariale.

L'expérience de la dernière ronde de négociations a valu qu'à un moment donné une demande a été faite par les centrales syndicales pour négocier, d'une part, la masse salariale, d'autre part, avec cette masse salariale, établir elle-même, la partie syndicale, les échelles de salaires, de traitements pour les fonctionnaires, ce que l'Etat ne peut accepter.

Je pense que nous recherchons un climat serein. C'est la raison pour laquelle j'ai poursuivi personnellement des discussions avec les chefs des centrales syndicales. C'est la raison pour laquelle je me rends à la demande des représentants des syndicats chaque fois que l'occasion m'est donnée de les rencontrer pour tenter d'établir ce climat serein, d'éviter qu'il y ait des affrontements. Je ne demeure pas convaincu cependant que, déterminant une masse salariale, cela va engendrer un affrontement entre le gouvernement et les centrales syndicales.

Nous voulons demeurer flexibles. Comme je l'ai indiqué, la masse salariale n'est pas détermi- née et les méthodes qui serviront à la déterminer ne sont pas encore établies. Nous poursuivons concurremment les discussions de part et d'autre avec tous ceux qui y sont impliqués et ce n'est qu'au moment opportun que nous ferons valoir la position du gouvernement. J'ai dit et je le répète encore: la masse salariale ne sera pas négociable.

Nous allons tenir compte de tous les facteurs qui doivent entrer en ligne de compte quand il s'agit de déterminer la rémunération, tenant compte des facteurs de l'inflation, de la productivité, du produit national brut, de l'entreprise privée, de ce qui se fait, puisque nous avons des équipes actuellement qui sont à faire les recherches au niveau du Québec, au niveau du Canada, au niveau des Etats-Unis. Au moment où nous serons en mesure de prendre position, nous déterminerons la politique salariale du gouvernement, en tenant compte de tous ces facteurs.

C'est pourquoi je dis que nous sommes disposés à négocier, à l'intérieur de cette masse salariale, à l'intérieur des accommodements sur les avantages sociaux, nous serons prêts, sûrement, à faire face à cette négociation, prochaine ronde, et nous tenterons, par tous les moyens, de garder la plus grande sérénité dans ces discussions qui doivent s'établir de part et d'autre.

M. CHARRON: M. le Président, quand le ministre de la Fonction publique affirme que le gouvernement entend tenir compte de tous les facteurs, avant l'établissement de sa politique salariale, est-ce qu'il ne croit pas que la partie syndicale, le partenaire syndical, pour employer un euphémisme, n'est pas, lui, en mesure de lui indiquer, également, certains de ces facteurs qu'il serait utile au gouvernement de prendre en considération avant de se fixer dans une masse salariale globale?

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas dit que je n'en tiendrais pas compte. Si je fais des consultations de part et d'autre avec nos partenaires, j'en fais également avec la partie syndicale. Je suis préoccupé de cette partie qui va négocier avec nous, pas simplement avec nos partenaires des réseaux de l'Education et des Affaires sociales. Je suis préoccupé également par la contribution que peuvent nous apporter les centrales syndicales. Avant la préparation d'une politique salariale, j'ai dit que je tiendrais compte de tous ces éléments.

M. CHARRON: On entre dans les distinctions; quelle sera la part effective de consultation ou de participation de la partie syndicale dans l'établissement d'une politique salariale? Vous pouvez fort bien les convoquer toutes les trois l'une après l'autre à votre bureau, avoir une réunion, en quelque sorte, mondaine, puis cela vient de s'éteindre; comme on peut également mener une véritable négociation où les

critères devant être appliqués pour fixer une politique salariale seront, l'un après l'autre, débattus. On peut négocier également et discuter d'une forme très rigide des principes, des critères qui vont valoir à l'établissement d'une politique salariale, ou d'une masse salariale en argent par la suite. Il ne suffit pas de demander à la CSN, à la FTQ ou à la CEQ de faire valoir un mémoire sur... Ce qui doit être inclus dans l'établissement d'une politique salariale et ce qui ne doit pas être inclus cela se négocie, cela aussi.

Quand le Parti québécois vous invitait, la dernière fois, comme je le fais au nom du Parti québécois cet après-midi, à tenir cette préronde de négociations, je ne veux pas simplement dire consultations à l'amiable. Je veux dire de négocier ce qui, dans l'Etat moderne du Québec, tiendra lieu de critères pour l'établissement d'une politique salariale. A partir de cela, le gouvernement ou le patron, en l'occurrence, pourra se fixer une masse salariale, mais il faut, à mon avis, absolument discuter de l'application auparavant, avant de renvoyer la balle dans le camp syndical en disant: Voilà, nous, c'est cela. Maintenant, séparez-vous-la de la façon que vous voudrez. Ce que vous obtiendrez là, il y en a d'autres qui vont le perdre ailleurs.

C'est le danger qu'on n'a pas su éviter en 1972 à notre avis, celui-là et bien d'autres, mais celui-là en particulier. La position actuelle du ministre ne nous rassure guère là-dessus. Je suis convaincu qu'en 1972 il y avait eu ce genre de consultation que vous annoncez actuellement ici. Elle avait été carrément insatisfaisante, pour une part comme pour l'autre, parce qu'à un moment donné, de lui-même, le gouvernement avait dû se retrancher derrière une masse salariale en même temps qu'il annonçait qu'elle était gelée. Il l'annonçait même dans la présentation de son budget. Cela a mené — il y a autre chose, mais cela, entre autres très certainement — à l'affrontement qu'on a connu en mai 1972. Notre question ce matin, c'est d'éviter ce genre de consultation à l'amiable, mais de plutôt négocier dans une préronde, avant d'entrer dans le partage de cette masse salariale entre les syndiqués, de négocier sérieusement ce qui doit conduire à l'établissement d'une masse salariale par le patron.

Je le rappelle parce que, pour nous, c'est l'avantage d'avoir une position claire et fixe depuis 1971 à peu près en ce domaine et nous croyons toujours, surtout après l'expérience de 1972, que c'est la méthode la plus valable de procéder. Cela n'est peut-être pas l'opinion du ministre. Il aime peut-être mieux fonctionner d'une autre façon.

M. le Président, nous nous étions entendus ce matin pour que la question du transport automobile pour les fonctionnaires soit débattue à ce programme, puisque nous avions accepté d'inclure, sous la catégorie de la rémunération, le transport pour nous faciliter l'adoption du programme 1.

C'est donc de cette question que je voudrais maintenant entretenir le ministre et la commission. Il y a déjà quelque temps, le leader de l'Opposition à l'Assemblée nationale a rappelé au gouvernement qu'il s'était engagé, en vertu de l'article 42.11 de la convention collective, à effectuer, avant le 1er janvier 1974, une étude sur le coût réel de fonctionnement des automobiles.

Or, s'il faut en croire les déclarations mêmes du ministre faites en Chambre, cette étude est terminée depuis le 12 décembre et le Conseil du trésor en est saisi depuis au moins cette date.

Ce que nous demandions était s'il fallait conclure que la décision n'avait pas été prise ou bien croire que le Conseil du trésor a refusé d'augmenter le taux, tout en se gardant bien de l'annoncer publiquement, ou si les concessions annoncées par le ministre des Finances constituent la dernière étape de cette question et que nous allons donc avoir à subir, pendant un certain temps — je n'emploie peut-être pas l'expression la plus heureuse — cette grève du zèle que certains fonctionnaires ont entreprise quant à l'utilisation de leur automobile. Où en sommes-nous dans ce dossier?

Frais de voyage

M. PARENT (Hull): En vertu de la convention collective, nous devions entreprendre une étude pour déterminer des nouveaux taux qui pourraient être en vigueur à compter du 1er janvier 1974. L'étude a été complétée. Selon la convention collective, dès que l'étude a été complétée, il y a eu début de consultations avec le Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec et le Syndicat des professionnels. J'ai fait des représentations auprès du Conseil du trésor pour apporter des amendements au régime des frais de voyage, des frais de repas et des frais d'hôtel. Après les consultations prévues par la convention collective, je serai en mesure, demain matin, de soumettre au Conseil du trésor les recommandations du ministre de la Fonction publique en ce qui concerne les taux d'indemnisation pour les frais de voyage. Je me suis permis de rencontrer, mercredi dernier, le président du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec, M. Harguindeguy, qui a demandé de me rencontrer, j'ai accepté et les discussions se sont poursuivies encore vendredi dernier, et hier, avait lieu la rencontre avec le Syndicat de professionnels.

Nous avons un accord tacite du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec sur les taux que nous allons proposer demain, mais nous n'avons pas d'accord tacite du Syndicat de professionnels.

M. CHARRON: C'est donc là qu'on en est aujourd'hui.

M. PARENT (Hull): Demain, parce que la

convention collective nous demandait de la consultation, nous proposerons au Conseil du trésor les nouveaux taux qui entreront en vigueur à compter du 1er avril 1974 et qui, en même temps, prévoient une rétroactivité au 1er avril 1973 qui n'était pas prévue dans la convention collective, mais nous avons accepté la demande du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec et nous allons également faire les recommandations en ce qui concerne les frais de logement et les frais de repas.

M. CHARRON: Je voudrais dire que c'est une bonne nouvelle.

La décision de donner un effet rétroactif au 1er avril 1973, est-ce qu'elle a été prise à la suite de représentations de la partie syndicale?

M. PARENT (Hull): C'est le Syndicat des fonctionnaires qui m'a fait la demande et je l'ai agréée.

M. CHARRON: Le ministre peut-il nous dire de quelle somme, simplement pour la partie rétroactive, cela affecte le budget québécois? On extrapole, là, parce que le Conseil du trésor n'a pas pris sa décision, mais, si le Conseil du trésor devait donner une réponse favorable demain, cela veut dire quelle somme, simplement pour la rétroactivité d'avril 1973 à avril 74?

M. PARENT (Hull): Je ne voudrais pas donner une mauvaise information au député de Saint-Jacques sur le montant qu'il va en coûter à la province. Je pense que les estimations sont d'environ 50 millions de milles parcourus. La rétroactivité qui affectera les milles parcourus est de $0.01. Cela pourrait vouloir dire $500,000.

M. CHARRON: Je comprends. Le montant payé, pour ce qui est de la rétroactivité, n'est pas le même que celui qui sera en vigueur à compter du 1er avril. D'accord.

M. PARENT (Hull): C'est une compensation pour l'augmentation des coûts déjà encourus.

M. CHARRON: Survenue au cours de 1973.

M. PARENT (Hull): C'est cela. C'est parce que cela fait partie d'un ensemble de choses que nous avons discutées.

M. CHARRON: Autrement dit, si je reprends les tarifs en vigueur, pour ce qui est de la partie rétroactive, ce sera $0.15 le mille pour les premiers 10,000 milles et $0.11 le mille pour les milles additionnels. C'est exact? Puisque l'échelle actuelle est $0.14?

M. PARENT (Hull): $0.14 et $0.10.

M. CHARRON: Oui, c'est-à-dire $0.15 et $0.11. C'est exact?

M. PARENT (Hull): Pour la rétroactivité.

M. CHARRON: Pour ce qui est rétroactif. Pour ce qui est de la nouvelle partie, le ministre des Finances a déjà annoncé, le mardi, 29 janvier 1974, qu'à partir du 1er avril les tarifs seront les suivants: $0.16 le mille pour les 8,000 premiers milles; $0.12 le mille, de 8,000 à 16,000 milles;$0.16 le mille au-delà de 16,000 milles.

Est-ce que l'entente — si elle n'est pas encore survenue avec le Syndicat de professionnels, elle l'est avec les fonctionnaires — est supérieure à cette proposition qu'annonçait le ministre des Finances?

M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: De quel ordre?

M. PARENT (Hull): Vous me demandez de présumer avant la décision. Je fais la recommandation demain matin au Conseil du trésor, tel que le voulaient la convention collective et la lettre que M. Garneau avait fait parvenir au président du Syndicat des fonctionnaires que, s'il y avait des représentations à faire, il devait les faire au ministre de la Fonction publique, ce que j'ai accepté. J'ai une proposition à faire au Conseil du trésor, proposition qui a été montrée au président du Syndicat des fonctionnaires, tel que l'entente est intervenue. Maintenant, il reste que cette entente doit être ratifiée par le Conseil du trésor et le conseil des ministres. Je pense qu'il serait prématuré d'annoncer à ce stade-ci l'entente qui est intervenue à la suite des consultations que nous avons eues. Je ne veux pas dire qu'il s'agit de négociations, mais bien de consultations. On a bien voulu tenu-compte des recommandations que faisait le Syndicat des fonctionnaires quant à l'élaboration de la formule. Elle est différente de celle qui a été annoncée par le ministre des Finances, pour le coût, dans la proposition que je transmets. Elle est un peu plus dispendieuse, mais je pense qu'elle satisfait, en somme, aux exigences de ceux qui doivent se servir de leur automobile d'une façon quotidienne. C'est la raison pour laquelle j'ai dit au député de Saint-Jacques, tout à l'heure, que nous essayons d'entretenir des relations de cordialité et de négocier de façon sereine avec les syndicats. C'est pourquoi je les consulte, tel que convenu entre nous, pour tenter une entente, non pas l'imposer. Même si la convention collective disait que le gouvernement devait faire une étude et déterminer par la suite s'il y avait lieu de modifier le taux, il n'y avait aucune obligation pour le gouvernement de modifier le taux d'indemnisation pour les frais de voyage.

M. CHARRON: Il y avait obligation de consultation dans la convention collective.

M. PARENT (Hull): Non. C'était une entente intervenue entre le ministre des Finances, moi-même et le président du Syndicat des fonctionnaires. Selon la convention collective, nous devions faire, s'il y avait lieu de majorer les chiffres, que cela ait effet à compter du 1er janvier 1974. Il y avait également entente que nous devions revoir à la suite d'une étude, s'il y avait lieu de changer ou de modifier les taux pour les frais de logement, les frais de repas. Nous allons intervenir dans les deux domaines à compter du 1er avril 1974 pour autant que le Conseil du trésor acceptera les recommandations du ministre de la Fonction publique et nous allons donner des avantages aux fonctionnaires, même si la convention collective ne nous y oblige pas.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: M. le Président, est-ce que le ministre pourrait nous dire si cette rétroactivité va couvrir également les fonctionnaires qui étaient à l'emploi du gouvernement le 1er avril 1973, mais qui ont quitté depuis?

M. PARENT (Hull): A ma connaissance, cela devrait les couvrir, puisque nous parlons de milles parcourus. Je n'ai pas l'impression que, dans le texte que je présente demain matin, nous faisons de la restriction à savoir que, pour en bénéficier, il faut être encore employé. Cela veut donc dire que sur les milles parcourus, comme il s'agit d'une rétroactivité, cela s'applique à tous ceux qui ont fait le "millage" en question.

M. CHARRON: M. le Président, est-ce que le ministre accepterait de rendre publique l'étude que l'article 42.11 de la convention collective l'obligeait à faire et qui a certainement été utilisée pour que le ministre présente demain au Conseil du trésor de nouvelles propositions quant au remboursement?

M. PARENT (Hull): A ce que je sache, jusqu'ici, il y a une question au feuilleton de la Chambre. Nous n'avons pas répondu jusqu'ici. Nous n'avons pas donné de réponse à savoir si nous allions le déposer ou ne pas le déposer. C'est bien mon intention, dès que le règlement sera intervenu, de déposer les documents.

M. CHARRON: Très bien. Autre question. Vous avez signalé tout à l'heure que vous aviez obtenu l'entente tacite, avez-vous dit, du Syndicat des fonctionnaires, mais que ce n'était pas le cas pour le Syndicat de professionnels à l'emploi du gouvernement.

Est-ce qu'on peut savoir, je sais bien qu'ils l'exprimeront eux-mêmes lorsque l'entente sera connue publiquement, à la commission parlementaire, cet après-midi, du ministre, où les difficultés sont survenues, avec les professionnels, dans l'entente que le Syndicat des fonctionnaires a acceptée?

M. PARENT (Hull): II faudrait bien faire la distinction entre entente et consultation. Je ne voudrais pas me méprendre sur les termes. Il s'agit bien d'une consultation et, au cours de cette consultation, des représentations m'ont été faites, par le président du Syndicat des fonctionnaires qu'en partie, j'ai acceptées. Il y a eu une rencontre, par la suite, qui s'est terminée à six heures vendredi soir, et l'exécutif du Syndicat des fonctionnaires a dit, à ce moment-là, que, même si ça ne satisfait pas à leurs demandes originales, on trouvait que c'était une amélioration très sensible qui était apportée aux conditions des fonctionnaires. Si on constate que le gouvernement n'avait aucune obligation de modifier les taux, on constate, par ailleurs, que nous avons tenu compte de la demande du Syndicat des fonctionnaires, d'une part, et d'autre part, de celle du Syndicat des professionnels. L'écart est grand entre la demande du Syndicat des fonctionnaires et celle du Syndicat de professionnels. Le Syndicat des fonctionnaires demandait, de 0 à 3,000 milles, $0.21 plus $0.03 pour l'assurance-affaires, c'est donc dire $0.24 les 3,000 premiers milles, à comparer à $0.14; de 3,000 à 8,000 milles, $0.18 le mille; de 8,000 à 16,000 milles, $0.12 le mille; 16,000 milles et plus, $0.10; de 8,000 milles jusqu'à 16,000 milles et plus, c'était la même proposition que nous avions faite.

Nous avons donc dû consulter sur les 8,000 premiers milles. Le Syndicat de professionnels demandait, de 0 à 500 milles, $0.27; de 500 milles à 1,000 milles, $0.26; de 1,000 milles à 3,000 milles, $0.24; de 4,000 milles à 9,000 milles, $0.15; de 10,000 milles à 13,000 milles, $0.13; de 13,000 milles à 25,000 milles, $0.10.

M. CHARRON: Cela, c'est pour les professionnels et les premiers que vous avez donnés, c'étaient les demandes du Syndicat des fonctionnaires. Ce qui vous fait dire, puisque la demande des professionnels était plus élevée que la demande des fonctionnaires, c'est que, si le Conseil du trésor est d'accord demain, ce que le gouvernement apporte de nouveau dans le moulin va avoir plus facilement l'acquiescement des fonctionnaires qui en demandaient moins, qu'il n'aura l'acquiescement des professionnels. C'est à partir de ça que vous le prévoyez, si je le comprends bien.

M. PARENT (Hull): II y a un ensemble de choses à la suite des consultations. Je pense que le Syndicat de professionnels n'a pas voulu démordre de sa position, mais, dans l'ensemble, nous avons tenu compte de différents facteurs. Nous avons tenu compte, en particulier, d'une demande qui n'est pas faite par le Syndicat des

fonctionnaires. Quand on regarde la demande du Syndicat de professionnels où on voit que, pour les premiers 500 milles, on demande $0.27, dans la proposition que j'ai l'intention de soumettre au Conseil du trésor, nous proposerons un montant per diem minimum. Même si l'employé ne fait que 10 milles, il aura un minimum pour se servir de sa voiture. C'était une demande qui n'était pas incluse, mais comme on constate que le Syndicat de professionnels, pour les premiers 500 milles dans une année, demande $0.27 le mille, je pense que c'était pour tenir compte d'une utilisation très minimale d'une automobile. Or, la formule à laquelle j'ai pensé, qui pouvait couvrir cette anomalie, était plutôt d'avoir un montant minimum par jour d'utilisation.

M. CHARRON: Mais, à votre avis, l'introduction du per diem, dans cette rémunération, couvrirait ce que le Syndicat de professionnels cherchait en demandant $0.27 pour les 500 premiers milles?

M. PARENT (Hull): Cela peut en tenir compte.

Si on constate, par ailleurs, que dans les frais de logement, on demandait $17; dans les frais de repas, on demandait $9, il y a tout un ensemble de choses. On demandait, par exemple, pour le transport de personnes et d'équipement, qu'il y ait $0.03 additionnels le mille. Si c'étaient des routes de forêt ou de troisième ordre, qu'il y ait $0.02 additionnels le mille.

On ne peut pas discuter d'un ensemble de problèmes comme celui-là pour un aspect particulier. Le ministre des Finances a déjà souligné $0.16 le mille, au lieu de $0.14. La proposition que j'ai à faire est plus élevée que celle-là. Mais il faut tenir compte de l'ensemble du problème en lui-même, qui couvre d'autres aspects qui ont cours.

M. CHARRON: Vous avez mentionné tout à l'heure que, parmi les demandes du Syndicat des fonctionnaires, il y avait ces $0.03 supplémentaires pour couvrir les frais d'assurance-affaires. Cela me fait penser à une proposition qui a déjà existé et qui est sur la table, d'un dénommé Daniel Higgins, qui proposait l'indexation de ces coûts aux coûts totaux d'utilisation d'une automobile, c'est-à-dire l'essence, l'huile à moteur, l'assurance, l'entretien et même les pièces d'automobile. Cette formule, évidemment, n'a pas été évaluée en dollars et en cents, mais est-ce que le ministre a fait faire par ses bureaux de recherche la rémunération ou, par d'autres services de son ministère, une évaluation de ce processus?

M. PARENT (Hull): Nous avons tenu compte, dans l'étude, des régimes de compensation qui existent au gouvernement fédéral, en Ontario, dans l'entreprise privée. Nous avons tenu compte des documents qui ont été publiés par le Club automobile de Québec et par le Club automobile du Canada. Nous avons tenu compte des taux de compensation qui sont payés par des organismes gouvernementaux pour en arriver à faire des recommandations; nous avons tenu compte de tous ces aspects.

M. CHARRON: Cette proposition, qui peut devenir demain une décision gouvernementale, si elle a l'acquiescement du Conseil du trésor et du conseil des ministres, fixerait pour combien de temps le nouveau taux? Jusqu'à la prochaine convention collective?

M. PARENT (Hull): Oui, jusqu'au 30 juin 1975. Comme on nous a demandé l'indexation, que j'ai refusée, il s'agit de comprendre que, suite à la dernière conférence fédérale-provinciale sur la question du pétrole, il y aura un prix protégé pour la période de douze à quinze mois et que même s'il n'y avait pas eu d'entente, l'augmentation du taux de compensation pouvait varier d'un demi-cent pour chaque augmentation de $0.07 le gallon d'essence.

Or, le syndicat n'a pas insisté plus qu'il ne faut, sachant que l'accord avait été conclu entre les provinces et le gouvernement du Canada sur un taux protectionniste pour une période de douze mois; on a laissé entendre à ce moment-là, selon les discussions que j'ai eues avec le président, que l'application irait jusqu'au 30 juin 1975.

LE PRESIDENT (M. CorneUier): Le député de Laviolette avait demandé la parole.

M. CARPENTIER: M. le ministre, lorsque vous mentionnez que vous avez l'intention de suggérer un per diem, est-ce que cette nouvelle formule s'appliquerait pour tous?

M. PARENT (Hull): Ce n'est pas un per diem comme tel, c'est un montant minimum par jour pour l'utilisation de l'automobile.

M. CARPENTIER: Mais ceux qui ont beaucoup affaire, disons, dans les chemins forestiers, par exemple, les chemins de gravier?

M. PARENT (Hull): Pour ça, il y a des allocations supplémentaires au tarif régulier qui sera proposé.

M. CARPENTIER: Pour ceux qui ont très peu d'utilisation pour leur voiture comparativement à ceux qui font beaucoup de route même ceux, à ce moment-là, qui font...

M. PARENT (Hull): Sur une échelle.

M. CARPENTIER: II y aura une échelle? D'accord.

LE PRESIDENT (M. CorneUier): Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: Je demanderais au ministre si des provisions sont retenues pour d'autres catégories de véhicules, en dehors des véhicules de promenade proprement dits, pour ceux qui utilisent, par exemple, des roulottes ou peut-être, dans certains cas, des motoneiges ou des camions, des camionnettes. Je pense aux employés de voirie, entre autres, parfois, les surveillants ou les chefs d'équipe.

M. PARENT (Hull): La convention collective, à ma connaissance, prévoit ces questions d'utilisation de ces équipements. Alors il s'agit ici de l'indemnisation pour les automobiles. Et la convention collective...

M. MERCIER: Est-ce qu'elles sont proportionnelles au barème déjà établi ou déjà en place?

M. PARENT (Hull): Oui. M. MERCIER: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. le député de Saint-Jacques, vous vouliez prendre la parole tantôt.

M. CHARRON: Oui, M. le Président. Je veux exprimer l'opinion de satisfaction de voir que cette question est pour le moins réglée du côté gouvernemental. On attendra de voir les réactions de l'autre côté. Mais, pour notre satisfaction, je voudrais juste demander : Cette décision de donner un effet rétroactif à $0.01 le mille pour l'année financière 1973/74, quand est-ce que ce sera remboursé, quand est-ce que cela aura des conséquences financières dans la poche des fonctionnaires?

M. PARENT (Hull): On me dit que dans environ un mois à cinq semaines, nous serons en mesure...

M. CHARRON: A compter d'aujourd'hui? M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: D'ici un mois à cinq semaines.

M. PARENT (Hull): A partir du moment de l'adoption...

Coût de la vie

M. CHARRON: Par le Conseil du trésor. D'accord! Un mois à cinq semaines.

Bon. Sur un autre sujet, j'ai très peu de questions quand même, mais je crois que c'est encore l'endroit avant d'adopter le programme 2. Si vous me le permettez, c'est sur l'autre question qui a soulevé l'attention du public et qui a occupé le ministre vraisemblablement au cours des dernières semaines, cette demande à laquelle, je dois dire, le ministre n'a pas opposé une fin de non-recevoir, du Syndicat des fonctionnaires de se voir versé, sur un autre calendrier que celui prévu à la convention collective, c'est-à-dire quelques mois après la fin d'une année salariale, le montant forfaitaire auquel ils ont droit en vertu des clauses d'indexation au coût de la vie, ce qui est prévu dans la convention collective.

Le ministre a affirmé en Chambre que cela allait créer des difficultés. Il ne posait pas une fin de non-recevoir. Est-ce qu'il y a eu des suites à cette déclaration que vous aviez faite en Chambre?

M. PARENT (Hull): Cela peut être la surprise pour le député de Saint-Jacques, mais il y a eu sûrement des suites parce que je ne pense pas avoir lancé des paroles en l'air, en Chambre, quand j'ai fait la déclaration. J'ai même discuté de cette question avec le président du Syndicat des fonctionnaires. La question est à l'ordre du jour, demain, au Conseil du trésor.

M. CHARRON: Alors, il se peut donc qu'un premier versement ait lieu avant la date prévue à la convention collective pour permettre aux fonctionnaires de faire face à la hausse du coût de la vie.

M. PARENT (Hull): C'est possible.

M. CHARRON: C'est possible. Alors, c'est une façon...

M. PARENT (Hull): Ce n'est pas un si mauvais gouvernement.

M. CHARRON: ... du gouvernement de s'excuser du laisser-faire...

M. PARENT (Hull): Pas de s'excuser parce que...

M. CHARRON: Du laisser-faire...

M. PARENT (Hull): ... s'il n'en tenait qu'à la convention collective...

M. CHARRON: ... et dont il profite comme on le fait dans à peu près n'importe quelle vulgaire compagnie privée.

M. PARENT (Hull): Le gouvernement a signé une convention collective avec ses employés. Les termes n'ont pas été définis simplement par le gouvernement, mais également par la partie syndicale. La partie syndicale a même exigé dans la convention collective qu'il soit dit au paragraphe 6 de l'article en question que ce montant d'augmentation du coût de la vie est payable aux employés qui sont en fonction le 30 juin de chaque année. C'est une convention collective établie de part et d'autre.

M. CHARRON: Autrement dit...

M. PARENT (Hull): Mais j'ai dit que j'avais donné une fin de non-recevoir et c'est vrai. Nous prenons actuellement des dispositions pour tenter de remédier à la situation parce que nous sommes conscients qu'il y a des difficultés qui se présentent pour beaucoup de fonctionnaires. Nous en sommes très conscients. C'est la raison pour laquelle, après ma rencontre avec le président du syndicat, mercredi soir dernier, j'ai accepté de préparer un document qui doit être soumis dès demain matin au Conseil du trésor et que, malgré la convention qui est intervenue, malgré le fait que le gouvernement ne soit pas dans l'obligation de verser l'augmentation du coût de la vie avant les trois mois à la suite de la publication de l'indice du coût de la vie du mois de juin par Statistique Canada, nous allons tenter de remédier à la situation et d'atténuer le coût de l'inflation que doivent subir les fonctionnaires.

Cadres et gérance intermédiaire

M. CHARRON: Alors, nous attendrons la décision du Conseil du trésor.

L'année dernière, le ministre nous a dit que le service de recherche sur la rémunération travaillait à définir des conditions de travail et de rémunération des cadres et de la gérance intermédiaire. Est-ce que ces études sont terminées et est-ce qu'il y a eu des décisions de prises à la suite de ces études?

M. PARENT (Hull): II ne faudrait pas comprendre qu'un travail de cette nature se fait dans un laps de temps très court. M. Fernand Gauthier, qui a été nommé directeur du service de la recherche et de la rémunération, n'est entré en fonction qu'en novembre dernier. Ce recrutement n'a pas été facile. Nous avons publié, je pense, à trois reprises des avis pour obtenir un directeur de la recherche sur la rémunération. Nous avons également eu de la difficulté à trouver un assistant. Les deux maintenant sont en fonction. M. Gauthier dépend directement du ministre de la Fonction publique, à la suite de la création de ce bureau de recherche sur la rémunération qui a été créé par l'arrêté en conseil 2773 du 25 juillet.

Il a comme fonction: Obtenir pour les employeurs des secteurs public, parapublic et péripublic, les renseignements statistiques appropriés concernant les traitements, les bénéfices marginaux et les autres conditions de travail, de la main-d'oeuvre dans les autres secteurs de l'économie, aux fins de la détermination des conditions de travail de leurs propres employés; remplir les fonctions de recherche et d'analyse requises à cette fin; être au service des secteurs de l'éducation, des affaires sociales, de la fonction péripublique et de la fonction publique.

C'est un travail d'ensemble, comme j'ai expliqué, ce matin, et hier soir, que nous poursuivons actuellement dans la cueillette des données qui nous sont nécessaires, pour pouvoir répondre aux responsabilités confiées au bureau de recherche sur la rémunération.

Mais le bureau n'a été créé que le 25 juillet dernier et ses fonctionnaires ne sont entrés en fonction qu'en novembre, c'est donc dire qu'actuellement nous sommes en pleine période d'activité, pour nous permettre de répondre au mandat qui nous a été confié.

M. CHARRON: Alors, nous attendrons plus longtemps avant de voir les suites de cette étude. M. le Président, pour ce qui est du programme 2, l'Opposition est prête à l'accepter.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors le programme 2 est adopté. Programme 3: Régimes de retraite et autres contributions à titre d'employeur et de mandataire.

M. CHARRON: M. le Président, le 1er juillet 1973, les fonctionnaires avaient le choix entre conserver l'ancien régime de retraite ou opter pour le nouveau. Je vais demander au ministre, aujourd'hui, combien ont opté pour le nouveau régime de retraite, et quel pourcentage repré-sente-t-il en fin de compte des retraités actuels du gouvernement?

M. PARENT (Hull): Ce n'est pas terminé. Nous avons, par la loi 4, étendu le délai jusqu'au 31 décembre 1974. Mais actuellement, très peu...

M. CHARRON: Je n'ai pas entendu la première réponse.

M. PARENT (Hull): Bon, le délai a été étendu jusqu'au 31 décembre 1974 à la suite de la loi qui a formé le bureau d'organisation. Nous avons étendu la période, avec le bill 4, jusqu'au 31 décembre 1974. Mais, jusqu'ici, ceux qui ont opté pour le régime de retraite universel, c'est très peu, il n'y en a même pas une centaine.

M. CHARRON: Même pas une centaine?

M. PARENT (Hull): Je pense que c'est assez évident, si on comprend un peu le régime de retraite actuel des fonctionnaires. Pour ceux qui étaient en fonction avant le 30 juin, le coût de ce régime a été établi, lors de la dernière convention collective, à environ 21 p.c. L'employé ne payait que 5 p.c, donc l'Etat assumait 16 p.c. Le régime de retraite universel, il est contributoire et participant à 5 p.c-12 p.c, 7 p.c-12 p.c. et les cotisations dans le régime de retraite universel sont de 7.5 p.c. Tous les employés qui sont entrés en fonction après le 1er juillet tombent automatiquement sous le

régime de retraite universel. Ceux qui étaient en fonction avant le 30 juin pouvaient opter pour le nouveau régime. Le coût du régime de retraite universel est de 13 p.c. Alors, je pense qu'il est assez évident que l'employé qui est déjà dans le régime de retraite des fonctionnaires ou dans le régime de retraite des enseignants n'a pas avantage à opter pour le régime de retraite universel.

Mais le régime de retraite universel est en vigueur et en fonction depuis le 1er juillet pour tous les nouveaux employés.

M. CHARRON: Le régime est indexé comme le régime de rentes?

M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: Qu'est-ce qui arrive de l'ancien dans ce cas-là, sous le chapitre de l'indexation?

M. PARENT (Hull): Ils sont indexés sous l'ancien régime, sous le régime de retraite des fonctionnaires.

M. CHARRON: Au même taux ou à un taux différent du nouveau?

M. PARENT (Hull): Au même taux. M. CHARRON: Au même taux?

M. PARENT (Hull): Oui, oui, c'est un taux uniforme. Mais on comprendra que, lors de la présentation du bill 31, nous avons élevé le salaire minimum, pour fins de retraite, à $5,000 pour les anciens retraités, enseignants et fonctionnaires. Il y a donc eu, en plus de l'indexation, cette augmentation de base. Si l'employé, enseignant ou fonctionnaire, s'est retiré il y a dix ans avec un salaire moyen de $3,000 sur lequel on a calculé sa pension, automatiquement, avec le bill 31, son minimum a été élevé à $5,000 pour les fins du calcul. Et, au 1er janvier, il y a eu l'indexation sur le nouveau taux de pension.

M. CHARRON: De toute façon, nous avons eu ce débat et on connaît notre opinion là-dessus; ce sont plutôt des questions d'information maintenant. Le régime de retraite des employés de la fonction publique touche combien de bénéficiaires actuellement?

M. PARENT (Hull): De retraités, vous voulez dire?

M. CHARRON: Retraités de la fonction publique. Il y en a combien au Québec qui, sous un chapitre ou un autre, reçoivent une pension comme anciens fonctionnaires? Il doit y en avoir pas mal.

M. PARENT (Hull): 10,620.

M. CHARRON: Et d'anciens enseignants?

M. PARENT (Hull): $27 millions; des enseignants, il y en a 8,540 pour $34,120,000.

M. CHARRON: Maintenant, quel est le montant total du régime de retraite des anciens députés, ministres et conseillers législatifs de cette noble province?

UNE VOIX: Le Journal de Québec le donne.

M. CHARRON: Le Journal de Québec, ce matin, ne publiait pas un chiffre officiel émanant du ministère de la Fonction publique. C'était le fruit de la recherche d'un journaliste.

Moi, je veux avoir le chiffre officiel du ministre de la Fonction publique.

M. PARENT (Hull): Je voudrais que la question soit posée lors de l'étude du budget de l'Assemblée nationale, parce que je ne suis pas responsable encore du régime de retraite des députés et des anciens conseillers législatifs.

M. CHARRON: C'est la responsabilité...

M. PARENT (Hull): La loi a prévu que le ministre de la Fonction publique pouvait en être responsable, mais il y a un arrêté en conseil. Je pense que la loi nous demandait d'adopter cela. Je vais trouver l'article. Mais nous n'assumons pas encore la responsabilité de la gestion du régime de retraite des anciens députés et des anciens conseillers législatifs. C'est à l'Assemblée nationale encore.

M. CHARRON: Alors, si nous voulons obtenir la liste officielle et ce qu'il en coûte au Québec, ce qu'il en coûte est peut-être une expression négative parce qu'on oublie souvent que c'est un régime contributoire...

M. PARENT (Hull): Mais ici, c'est la loi...

M. CHARRON: Qu'est-ce que ça représente actuellement?

M. PARENT (Hull): ... 4, article 14: "La commission a pour objet d'administrer le présent régime et tout régime de retraite ou d'assurance dont une loi lui confie l'administration ou dont le lieutenant-gouverneur en conseil lui confie l'administration".

Nous avons actuellement comme responsabilité le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le régime de retraite universel, la Loi du régime de retraite des fonctionnaires, la Loi du régime de retraite des enseignants.

M. CHARRON: Et le reste relève du président de l'Assemblée nationale.

M. PARENT (Hull): Oui.

M. CHARRON: Bon, c'est donc à lui que nous devons nous adresser pour avoir cette information.

Pour ce qui est du régime de retraite, ça va.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le programme 3 est adopté. Programme 4, Commission de la fonction publique.

Commission de la fonction publique

M. CHARRON: Est-ce que le président de la Commission de la fonction publique est ici?

M. PARENT (Hull): Le président est absent; nous avons ici M. Raymond Gérin, qui est président par intérim de la Commission de la fonction publique jusqu'au retour de M. Sain-don.

M. CHARRON: M. le Président, il y a une information qui a circulé dans les journaux qui voulait que la Commission de la fonction publique ait, à un moment donné, au cours de la dernière année financière, préparé un projet de réglementation ou de la loi devant définir le statut des occasionnels. On en a parlé ce matin à un autre chapitre. Je voudrais savoir de la Commission de la fonction publique si cette information est exacte.

M. PARENT (Hull): Je pense l'avoir répété à plusieurs reprises depuis hier. Il y a un projet de loi qui est en préparation. J'ai fait les recommandations appropriées devant le conseil des ministres et ce projet doit être approuvé d'ici la fin du mois.

M. CHARRON: Ce que vous m'avez dit, c'est exactement ce que vous venez de répéter; ça ne répond pas à ma question. Que le ministère de la Fonction publique ait préparé un projet de loi ou de réglementation qui est sur la table du conseil des ministres pour adoption, vous me l'avez dit et vous me l'avez répété pour la sixième fois, je pense. Moi, je demande, avant que vous ne le fassiez au sein du ministère de la Fonction publique, quelle est la somme de travail fait à la commission même qui vous a servi, à vous, pour préparer votre projet de réglementation.

Qu'est-ce que la commission a fait là-dedans?

M. PARENT (Hull): Je puis aller jusqu'à dire que l'avant-projet de loi m'a été préparé par la Commission de la fonction publique.

Il m'a été soumis, je l'ai étudié avec certains de mes collègues, je l'ai même présenté, avec mes collègues, à une séance du Conseil du trésor, et c'est à la suite de cette séance du Conseil du trésor que nous avons convenu de le présenter au conseil des ministres. Mais il provient de la Commission de la fonction publique. Il a été élargi pour incorporer également, comme je l'ai dit ce matin, le ministère de la Fonction publique et la Loi de l'administration financière.

M. CHARRON: Depuis combien de temps le projet émanant de la Commission de la fonction publique est-il prêt? Le travail de la Commission de la fonction publique sur cette question des occasionnels, sur son avis, sur un projet de réglementation devant concerner les occasionnels est terminé depuis quand?

M. PARENT (Hull): Le document sur les occasionnels m'a été transmis, je pense, quelques semaines avant les élections, le document qui devait faire l'objet de l'approbation par le Conseil du trésor. C'est après les élections que, après discussion avec le président de la Commission de la fonction publique, nous avons convenu qu'il était préférable de le modifier et de préparer un projet de loi, projet qui a été préparé sous l'égide du président de la Commission de la fonction publique et qui m'a été remis il y a environ trois ou quatre semaines.

M. CHARRON: II y a donc eu un intervalle de cinq à six mois entre la fin des travaux de la Commission de la fonction publique sur cette question et aujourd'hui. Or, on ne sait toujours pas quand le projet de loi arrivera sur la table de l'Assemblée nationale. Est-ce qu'on peut avoir l'assurance qu'il arrivera avant l'ajournement de l'été?

M. PARENT (Hull): S'il n'en tient qu'à celui qui vous parle, dès qu'il aura reçu l'approbation du conseil des ministres, il sera transmis au comité de législation, et je n'ai aucun doute, en ce qui me concerne, que le bill devrait être adopté ou tout au moins être présenté à la Chambre au mois de juin.

Concours

M. CHARRON: Combien de demandes et de concours à la fonction publique a-t-on eu à ouvrir et à tenir au cours de la dernière année financière?

M. PARENT (Hull): Pour l'année 1973, emplois supérieurs, 314 concours de recrutement annoncés; professionnels, 294; personnel de bureau et autres, 353, pour un total de 961.

M. CHARRON: C'est plus ou moins que l'année précédente?

M. PARENT (Hull): En 1972, il y en avait, pour les mêmes catégories: 124, 227, 201, pour un total de 552.

M. CHARRON: Ces concours, la Fonction publique les tient dans différentes régions administratives du Québec?

M. PARENT (Hull): Dans toutes les régions administratives.

M. CHARRON: Selon le cas.

M. PARENT (Hull): Principalement à Québec et Montréal.

M. CHARRON: Bon, il y a un vote à six heures moins quart. Nous reviendrons après, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous allons suspendre les travaux et la commission se réunira de nouveau à vingt heures quinze.

(Suspension de la séance à 17 h 42)

Reprise de la séance à 20 h 29

M. CORNELLIER (président de la commission permanente de la fonction publique): A l'ordre, messieurs!

La commission de la fonction publique reprend ses travaux. Vous excuserez le président d'avoir été en retard de quelques minutes. Des circonstances absolument indépendantes de ma volonté m'ont empêché d'être ici à 20 h 15. Je sais que je peux compter sur votre indulgence. Nous reprenons nos travaux et, pour les fins du journal des Débats, j'aimerais tout de même souligner la liste des membres qui participeront ce soir à la commission de la fonction publique: M. Houde (Limoilou) remplace M. Cloutier (L'Acadie); M. Parent (Prévost) remplace M. Cournoyer (Robert Baldwin); M. Mercier (Bellechasse) remplace M. Pagé (Portneuf); M. Car-pentier (Laviolette) remplace M. Sylvain (Beauce-Nord). M. Lachance est membre régulier de la commission.

Lorsque nous avons suspendu les travaux à 5 h 45, cet après-midi, nous venions d'adopter le programme 3 des crédits du ministère de la Fonction publique et nous en sommes maintenant au programme 4.

M. le député de Saint-Jacques, avez-vous des commentaires sur le programme 4?

Protecteur du citoyen

M. CHARRON: Le programme 4, la Commission de la fonction publique. Il me reste quelques questions à poser au ministre ou, par-dessus le ministre, si vous me le permettez, pour respecter l'intégrité et la neutralité de la Commission de la fonction publique, à son représentant qui est avec nous, ce soir. Il me reste deux séries de questions. Je me souviens d'avoir lu le rapport du Protecteur du citoyen, l'année dernière. Dans ce rapport, le Protecteur du citoyen — je dois dire dans son style mitigé, comme on le connaît depuis trois ou quatre ans — ne semble quand même pas ménager ses mots à l'égard de la Commission de la fonction publique.

Entre autres choses, les critiques ou, si vous voulez, les reproches à ce secteur de l'administration gouvernementale de la Commission de la fonction publique... Je parle de mémoire parce que je n'ai aucun dossier en main, mais si je me rappelle bien, l'article 253 de son rapport signale que la Commission de la fonction publique devrait corriger, à son avis, sa façon de rendre ses sentences ou, si vous voulez, ses jugements à la suite des concours, comme ceux dont nous avons parlé avant la suspension pour le souper.

On dit là-dedans que plusieurs des plaintes que le Protecteur du citoyen a reçues émanaient de citoyens qui disaient avoir participé à un concours de la fonction publique, en bonne et due forme, dans une des capitales régionales du

Québec, mais qui, d'une façon très abrupte, sans explication réelle, avec la formule la plus froide et la plus bureaucratique qu'on puisse imaginer, ont reçu une espèce de fin de non-re-cevoir dans ce genre: Cher monsieur, nous avons le regret de vous annoncer que votre participation au concours n'a pas connu le résultat positif que vous espériez. Nous vous souhaitons bonne chance la prochaine fois. Bonjour, Merci beaucoup.

Certains citoyens se sont plaints de cette situation en disant: II faudrait qu'au moins la Commission de la fonction publique me dise pourquoi j'ai échoué à tel concours. Est-ce à cause de la qualité de mon français, par exemple, dans le test écrit? Allant de là, jusqu'à: Est-ce parce que je suis carrément incompétent? Ce qui arrive à ces citoyens, c'est qu'ils ne savent pas pourquoi ils sont défaits à un concours. Bien sûr, on dira du côté ministériel que c'était parce qu'ils étaient indépendantistes, mais je ne crois pas que l'étroitesse d'esprit dont on fait preuve du côté ministériel soit celle de la Commission de la fonction publique.

Je crois effectivement que la Commission de la fonction publique est beaucoup plus intelligente que ne l'est le raisonnement du côté ministériel. Ce n'est pas la question.

M. PARENT (Hull): Vous pourriez ajouter "intègre" dessus.

M. CHARRON: ... et effectivement, beaucoup plus intègre qu'on ne l'est du côté ministériel. Il s'agit de savoir...

M.MERCIER: Ce sont des informations gratuites, c'est seulement cela que...

M. CHARRON: Non, je crois que la Commission de la fonction publique a vraiment ce caractère de neutralité et d'intégrité.

M. MERCIER: On ne parle pas de la commission, on parle du dernier commentaire que vous avez fait.

M. CHARRON: Oui, mais ce que je suis en train de dire, c'est que je crois que la Commission de la fonction publique a ce caractère de neutralité et d'intégrité que jamais le Parti libéral n'aura.

M. MERCIER: Cela dépend du point de vue où l'on se place.

M. LACHANCE: C'est gratuit.

M. CHARRON: Mais je fais cette affirmation. Des citoyens, par exemple, qui se verraient dire par le Parti libéral: Vous n'êtes pas acceptés, cela vient de s'éteindre, admettraient bien que ce genre de jugement vienne du Parti libéral.

Mais que cela vienne de la Commission de la fonction publique, dont tout le monde respecte l'intégrité et la neutralité, certains s'en étonnent, au point d'écrire au Protecteur du citoyen. Je pense qu'un député ministériel enverrait braire un citoyen que personne ne s'en plaindrait, parce qu'on s'en tiendrait au député en question. Mais que ce soit la Commission de la fonction publique, cela va dans les droits du citoyen effectivement et, au fond, le Protecteur du citoyen dans son rapport reconnaît que des gens ont le droit de se plaindre, parce qu'ils ne savent pas pourquoi ils ont échoué. On leur annonce leur échec, mais ils ne savent pas pourquoi. C'est le droit du citoyen, à un autre concours de la Fonction publique, d'aller se représenter et, s'il sait pourquoi il a échoué, le temps lui a été donné de se corriger, de se perfectionner peut-être dans certains domaines et, cette fois-là, de briguer la candidature.

Or, ces reproches — maintenant que j'ai mon dossier je vais peut-être le retrouver — c'est effectivement 253. Le reproche, vous me permettrez de le citer, M. le Président. Le Protecteur du citoyen dit ceci "On ne peut que regretter que la Commission ne se soucie pas mieux d'informer les intéressés des motifs de ses décisions, depuis celle, plus courante, rejetant une candidature à un concours parce que certaines conditions d'admissibilité ne sont pas remplies, jusqu'à celle, plus exceptionnelle, approuvant une suspension ou recommandant une révocation d'un fonctionnaire. Peu importe le rôle — et le Protecteur du citoyen dit entre parenthèses, d'ailleurs — si étonnant, que la loi attribue au Conseil des ministres dans une telle hypothèse, il est inadmissible qu'une employée qui occupait un poste de confiance dans la fonction publique depuis nombres d'années puisse être congédiée par une décision qui se contente de mentionner comme motif: Insubordination, absence sans autorisation pour une période prolongée, alors qu'en fait la preuve démontre qu'il s'agit d'une employée qui s'était opposée à un transfert qu'elle considérait injuste".

Or, ce cas que relève le Protecteur du citoyen, il le dit lui-même au chapitre deuxième de son rapport, il l'a pris parmi un nombre considérable de rappels qu'il a eus. S'il a pris la peine de signaler, c'est qu'il le juge important. Si je le signale ce soir à la Commission, c'est pour trouver exactement et pour demander aux représentants de la Commission de la fonction publique si ce genre d'avertissement — c'est le pouvoir du Protecteur du citoyen de donner des avertissements — a eu des suites ou des conséquences.

Le rapport que je mentionne et que je lis ici n'est quand même pas le dernier du Protecteur du citoyen. Est-ce que cela a donné lieu au sein de la Commission de la fonction publique à un rajustement de la façon de répondre aux citoyens qui ont participé à des concours?

M. PARENT (Hull): Je pense qu'il y a plu-

sieurs volets à l'exposé que vient de faire le député de Saint-Jacques. Je dirai, pour la gouverne de la commission parlementaire, qu'il est vrai que, antérieurement, la Commission de la fonction publique émettait peut-être une lettre assez froide prévenant un candidat de son insuccès.

Par ailleurs, si le candidat en faisait la demande, il pouvait obtenir les motifs pour lesquels sa candidature n'avait pas été retenue. Depuis deux mois, suite au rapport du Protecteur du citoyen, la Commission de la fonction publique s'est plié à la directive et maintenant que nous avons un système intégré à la Commission de la fonction publique, toutes les demandes de candidature sont maintenant insérées à l'informatique.

Depuis deux mois, dis-je, nous transmettons à chaque candidat les motifs de son insuccès à l'examen, sans même qu'il en fasse la demande. Cela avait pour but de répondre à cet argument qu'a soulevé le député de Saint-Jacques selon lequel que la lettre était assez brève et souvent assez froide malgré que le candidat eût le droit d'exiger de la Commission de la fonction publique les motifs de son refus d'accéder à une liste d'admissibilité ou à être déclaré admissible.

Il n'en demeure pas moins que depuis que nous avons complété l'intégration au système de l'informatique, tout cela se fait.

L'autre volet qu'a soulevé le député de Saint-Jacques est la question de la révocation. Je ne peux pas parler d'un cas particulier que je ne connais pas mais il n'en demeure pas moins que, sur une question de révocation, la Commission de la fonction publique se prononce, après audition de la cause, même après s'être prononcée une première fois. Il y avait un droit d'appel que la personne en cause pouvait invoquer. Si elle ne l'a pas fait, elle n'a pas bénéficié de tous les droits qu'elle avait en vertu de la loi, mais c'est le privilège de l'employé qui était ainsi révoqué de faire la demande, de faire un appel à cet avis de révocation après audition.

Tous les dossiers qu'il m'a été donné de voir, avant de demander au conseil des ministres de ratifier les révocations, c'est celui qui vous parle qui est dans l'obligation de les signer. Les dossiers qui me sont fournis avant de faire la recommandation de révocation au conseil des ministres sont toujours complets. Dans certains cas, l'employé n'a pas jugé opportun d'en appeler, dans d'autres cas, il a jugé opportun d'en appeler. Il en dépend du jugement qui a été rendu dans la cause à chaque fois. Mais l'employée avait des droits, je comprends qu'elle ait fait appel au Protecteur du citoyen. Je ne sais pas au juste quels sont les motifs qui ont été invoqués pour la révocation, mais je sais pertinemment que toutes les précautions sont prises dans chaque cas de révocation, puisqu'il n'existe pas beaucoup, au cours d'une année de révocations d'employés de la fonction publique.

Il n'en demeure pas moins que, si nous pouvions prendre connaissance du dossier, nous pourrions sûrement connaître les vrais motifs qui ont empêché possiblement l'employée de recourir à tous les recours de la loi.

M. CHARRON: M. le Président, j'admets que le processus de révocation des employés de la fonction publique est plutôt, comme je le dis d'ailleurs, et je l'ai dit au crédit du Protecteur du citoyen, exceptionnel. Il l'a dit lui-même. La décision qu'il dit plus courante est celle qui rejette des candidatures, jusqu'à la décision, dit-il, plus exceptionnelle qui approuve une suspension ou qui recommande une révocation. Dans le cas qui a retenu l'attention du Protecteur du citoyen, il s'en prenait au fait, disait-il, à la façon dont la décision est communiquée à la personne révoquée, en admettant que c'est plus exceptionnel que n'importe quelle autre. Il disait: Peu importe le rôle d'ailleurs si étonnant que la loi attribue au conseil des ministres, il est inadmissible qu'une employée qui occupait un poste de confiance dans la fonction publique, puisse être congédiée par une décision qui se contente de mentionner insubordination comme motif. Ce qu'on craint simplement, c'est que ce mot passe-partout, "insubordination", accolé à n'importe quelle attitude de l'employé, puisse être la clef de passe, si vous voulez, et simplement une liquidation politique. Un jour ou l'autre, on apprend que l'employé en question a favorisé tel parti politique plutôt que tel autre, à l'élection.

Je ne dis pas que c'est une pratique répandue, mais il se peut que pour cette simple et unique raison, avec ce passe-partout qu'est l'insubordination — allez donc définir insubordination — on accuse la personne — le ministre disait d'ailleurs lui-même, ce matin, qu'elle pouvait être compétente et loyale tout en appartenant à un parti d'Opposition — et qu'elle soit révoquée de son poste.

Mais, M. le Président, s'il faut que j'aille dans les détails, j'y vais plus carrément. Certains ministres dans ce gouvernement, depuis quatre ans, ont manifesté dans leur ministère une attitude beaucoup plus large. Tout en étant informés un jour ou l'autre du fait que tel haut fonctionnaire ou directeur général ou sous-chef de direction, vraisemblablement, partageait les idées d'un parti d'Opposition plutôt que celui qui est au gouvernement, mais puisqu'il offrait à l'Etat un service — lje reprends les mots du ministre ce matin — loyal et compétent et qu'il ne faisait pas entrer en conflit avec sa fonction son appartenance politique et son droit de citoyen de voter et d'avoir une opinion politique, certains ministres ont manifestement appuyé ces fonctionnaires, n'ont pas hésité à leur donner des postes de confiance parce que là où ils leur faisaient confiance, jamais la confiance qu'ils avaient en eux n'avait été trahie.

Je peux le dire, en toute simplicité, je crois que c'était le cas de l'ancien ministre des Affaires sociales, M. Castonguay qui, au ministère des Affaires sociales, était dans des postes

de direction, surtout pour la réforme qu'il avait à entreprendre et qu'il a entreprise et qu'il a partiellement réalisée avec le gouvernement actuel. Il a réalisé des réformes appuyé par des gens qui, dans le secret de l'urne et dans le secret du bureau de scrutin peut-être, n'appuyaient pas le parti auquel M. Castonguay appartenait. Mais puisque ces personnes lui offraient, là où il leur demandait, loyauté et compétence, M. Castonguay les gardait. C'est tout à son honneur, c'est ce que je suis en train de dire ici.

Par contre, il s'est trouvé d'autre ministres et je nommerai l'honorable juge Tessier, à qui, en arrivant à un ministère, il suffisait de découvrir l'appartenance politique d'un fonctionnaire, quelle que soit sa loyauté et sa compétence, pour immédiatement entreprendre à l'égard de ce fonctionnaire des mesures de révocation.

C'est alors que le mot passe-partout "insubordination" devenait, à ce genre de fanatisme, qui s'emparait d'un ministère, qui pratiquait des purges nocives, je crois, au bien-être de l'Etat québécois, une porte de sortie facile. Ce que le Protecteur du citoyen, dans cet article 253 de son rapport, soulève, c'est ce danger d'utiliser le mot "insubordination" à tout escient et pour n'importe quelle raison. C'est un mot passe-partout. C'est un peu comme, si vous me permettez l'expression, M. le Président, dans nos vieux collèges classiques. Il suffisait que le préfet de discipline dise mauvaise conduite pour qu'immédiatement l'élève soit mal coté, ait des difficultés à faire son entrée dans des classes supérieures et devienne le mouton noir. Les mots "mauvaise conduite" s'appliquaient à toute conduite. Il suffisait qu'un caporal, quelque part dans la hiérarchie, déclare mauvaise la conduite d'un étudiant pour qu'immédiatement, sans aucune raison, on regroupe toutes sortes de conduites sous cette seule étiquette. C'est dangereux et c'est ce que rappelle le Protecteur du citoyen. Je n'invente rien, je base mon intervention à partir d'un rappel très précis d'un homme que, je crois, tous les députés de cette Chambre respectent, le Protecteur du citoyen. Ce qu'il craint, il le dit: II me semble inadmissible qu'une personne qui occupait un poste de confiance dans la fonction publique depuis nombre d'années puisse être congédiée par une décision qui se contente de mentionner pour motif: insubordination.

Au fond, ce que demande le Protecteur du citoyen, c'est que, là où il y a insubordination, donc motif de révocation... Ce que je défends est parfaitement fondé, une insubordination bien définie et bien comprise est certainement un motif de révocation. Comme je le disais ce matin, si vraiment il y a infiltration et si on s'aperçoit qu'un fonctionnaire travaille plus pour un parti d'Opposition que pour le gouvernement, c'est un motif valable de révocation. Je l'ai affirmé ce matin et j'ai dit au ministre: Plutôt que de dire que la fonction publique est infiltrée de membres travaillant pour l'Opposi- tion, plutôt que de lancer des rumeurs et des canards de ce genre, prenez vos responsabilités. La loi attribue au conseil des ministres une possibilité de révoquer. Au lieu de laisser planer un doute qui affecte l'ensemble de la fonction publique québécoise, identifiez donc les responsables si vous en êtes conscients et si vous êtes convaincus que ces gens sont insubordonnés et qu'effectivement ils travaillent plus pour un parti d'opposition que pour le gouvernement. Congédiez-les! C'est votre responsabilité. Je n'ai pas terminé.

M. PARENT (Hull): Je ne voudrais pas être désagréable au député de Saint-Jacques, mais il est en train de monter une pièce de théâtre. Quand on sait qu'au cours de l'année 1973, il n'y a eu que deux révocations, je pense qu'il s'agit là de cas d'espèce.

Sur 56,000 fonctionnaires, que l'on prenne un cas d'espèce, même si c'est le Protecteur du citoyen qui l'a fait, il n'en demeure pas moins que deux cas en l'année 1973, et le député de Saint-Jacques veut monter cela en épingle...

M. CHARRON: Non.

M. PARENT (Hull): Comme étant un régime qui existe, que nous congédions, nous révoquons des employés pour insubordination.

M. CHARRON: Non.

M. PARENT (Hull): Je pense que le député est rendu pas mal loin.

DES VOIX: II charrie.

M. PARENT (Hull): II est en train de monter une pièce de théâtre façonnée à la manière du Parti québécois pour monter en épingle une chose qui n'existe pas.

M. CHARRON: Non.

M. PARENT (Hull): Si on veut parler de la Commission de la Fonction publique, je dirai d'abord que ce n'est pas la Commission de la fonction publique... Si le député de Saint-Jacques veut apporter le sujet, il n'a qu'à regarder la Loi de la fonction publique, article 59, il s'apercevra que ce n'est pas la commission qui est en cause, et ce n'est pas ici que l'on devrait faire le débat s'il y a un débat à faire. "Toute suspension doit être immédiatement portée à la connaissance de la commission par rapport écrit exposant les motifs de cette suspension et la durée n'en doit pas excéder deux mois sans l'assentiment de la commission".

Il faut donc que le cas soit rapporté à la commission mais ce n'est pas la commission qui prend l'initiative.

M. CHARRON: Non, c'est le conseil des ministres.

M. PARENT (Hull): Ni le conseil des ministres.

M. CHARRON: Certainement.

M. PARENT (Hull): Non. C'est le chef du ministère, c'est chaque ministère. Si le député de Saint-Jacques a un cas particulier, comme il le dit, qu'il veut souligner et monter cela en épingle, qu'il s'adresse au ministère intéressé pour soulever le cas. Le cas est soumis à la Commission de la fonction publique par le ministre et la loi le dit bien à l'article 59 : II doit invoquer les raisons de cette suspension et cela, par écrit.

Je voudrais bien que l'on discute sur des choses fondées, mais quand, à la Fonction publique, il y a 56,000 fonctionnaires et qu'en l'année 1973, il n'y a eu que deux révocations, je pense que c'est là monter un débat sans raison.

M. CHARRON: Ce n'est pas ce que j'étais en train de faire. Je vais vous laisser aller. Si vous n'avez pas fini, je peux vous laisser aller.

M. PARENT (Hull): Je vais vous laisser aller parce que je connais vos antithèses.

M. CHARRON : Vous connaissez mes antithèses. Allez-y donc !

M. PARENT (Hull): Je vous laisse aller. Faites-en un débat sur des choses qui n'existent pas, sur des cas d'espèces. Vous avez du temps à perdre, perdez-en du temps, on va vous endurer.

M. LACHANCE: On vous écoute. M. MERCIER: On n'est pas pressé.

M. CHARRON: Vous allez trouver cela "platte".

M. LACHANCE: On vous écoute. Ce n'est pas intéressant, mais on est obligé.

M. CHARRON: Vous avez un bon salaire pour m'écouter. Vous avez seulement cela à faire. Vous êtes payés seulement $22,000 par année pour vous asseoir là.

UNE VOIX: Pas pour perdre du temps parce que...

M. CHARRON: Pour ne pas dire un maudit mot. Vous écoutez les débats. $22,000 par année pour faire cela.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs! Revenons-en, si vous vous le voulez bien, au sujet qui doit nous intéresser à cette commission.

M. CHARRON: Je vais reprendre.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le ministre vient de faire une intervention. Il a cédé son droit de parole au député de Saint-Jacques. J'inviterais le député de Saint-Jacques à poursuivre, à son tour, les commentaires qu'il avait entrepris.

M. CHARRON: M. le Président, je n'étais pas en train de monter en épingle un phénomène que j'ai moi-même signalé, le premier, comme étant exceptionnel. A moins de vivre vraiment dans un régime qui serait sous l'empire du député des Iles-de-la-Madeleine, le système de révocation ne fonctionne pas de façon quotidienne.

Le ministre lui-même me signale que cela s'est passé deux fois au cours de l'année 1973. Je ne vous monte pas en épingle ce phénomène. Le Protecteur du citoyen l'a peut-être monté en épingle. C'est peut-être votre opinion. Vous la lui direz, mais en tout cas, il a pris la peine de le signaler à l'article 253 de son rapport sur la Commission de la fonction publique. Que cela se soit produit deux fois ou trois fois, il a dit: Ce serait malheureux que le mot "insubordination" devienne un passe-partout pour n'importe quoi.

Mais, M. le Président, je liais ce débat à celui que nous avons eu ce matin, parce que, ce matin, on nous a parlé de fonctionnaires insubordonnés, de traîtres, de poux, d'hypocrites et de toutes les épithètes qu'ont utilisées les députés ministériels au cours de ce débat, ce matin, à l'égard de fonctionnaires qu'ils disent travailler plus pour le parti de l'Opposition que pour le gouvernement.

Encore, quand j'ai fait cette mention, tout à l'heure, il s'est trouvé quelques députés d'arrière-ban qui participent à nos travaux, ce soir, pour dire: C'est vrai, c'est de même que cela se passe. Je ne parle pas dans les airs. Je dis au ministre de la Fonction publique: Si c'est répandu de cette façon, il existe un processus bien simple, le conseil des ministres, d'ailleurs, comme le dit le Protecteur du citoyen, a ce rôle si étonnant de pouvoir entamer des procédures de destitution de ces fonctionnaires, de révocation. Ce n'est pas monnaie courante, cela s'est produit deux fois, l'année dernière. Mais, qu'est-ce que vous attendez pour le faire de façon plus fréquente, si vraiment ce nombre de fonctionnaires, trahissant l'Etat québécois et le gouvernement pour lequel ils ont prêté serment de travailler, à l'emploi duquel leur serment les oblige à travailler plutôt que de salir l'ensemble de la fonction publique en disant: L'ensemble des ministères est infecté, noyauté, comme le disait le ministre de la Fonction publique, ce matin, par des fonctionnaires péquistes? Au lieu de salir tout le monde, vous avez ce pouvoir d'ailleurs si étonnant, comme le dit le Protecteur du citoyen, de les révoquer s'ils sont insubordonnés envers l'Etat québécois.

M. PARENT (Hull): ... que le député de Saint-Jacques sache que...

M. CHARRON: Laissez-moi terminer!

M. PARENT (Hull): Je n'ai pas sali, quand j'ai dit "noyauté". Si le député de Saint-Jacques...

M. CHARRON: Depuis que vous avez...

M. PARENT (Hull): ... prend le mot "noyauté" pour salir, ce sont ses paroles et non les miennes.

M. CHARRON: Je dis que vous avez laissé planer un doute sur l'ensemble de la fonction publique.

M. PARENT (Hull): Si c'est un doute, je vous le laisse. Je ne l'ai pas dit.

M. CHARRON: D'accord! Je dis que vos avez laissé faire, vous l'avez laissé planer sur l'ensemble de la fonction publique en présentant, comme un marasme et un fléau...

M. PARENT (Hull): Vous êtes en train de le faire.

M. CHARRON: ... dans le gouvernement...

M. PARENT (Hull): ... quand cela n'existait pas.

M. CHARRON: Le député des Iles-de-la-Madeleine, ce matin, nous a présenté cette infiltration péquiste — et ce sont vos mots, M. le ministre — comme étant généralisée. Il nous a parlé des anarchistes, des poux, des traîtres, des hypocrites qui s'étaient infiltrés dans la fonction publique, qui travaillaient pour le...

M. PARENT (Hull): Est-ce que vous vous êtes reconnu?

M. CHARRON: Non, je ne suis pas dans la fonction publique. Vous pouvez penser de moi que je suis un anarchiste, un traître, un pou ou un hypocrite, je m'en "contresacre" de votre opinion, M. le ministre. Si vous saviez comment elle peut me passer par-dessus la tête! Mais, que vous, plutôt que d'avoir le courage de dire: Tel, tel ou tel fonctionnaire mériterait la révocation, parce qu'il travaille plus pour un parti de l'Opposition que pour le gouvernement, malgré son serment, vous avez laissé dire: Nous sommes au courant de ceci et nous sommes au courant de cela. Vous savez très bien ceci, vous savez très bien cela. Au point que les hommes qui sont derrière vous, ce soir, ne savent pas si ce n'est pas d'eux que vous étiez en train de parler. Comme les gens des Affaires sociales ne savent pas si ce n'est pas d'eux que vous étiez en train de parler.

Le député des Iles-de-la-Madeleine, le roitelet du Parti libéral, a mentionné les Affaires sociales, ce matin. Voilà donc un endroit où l'on sent qu'il y a infiltration péquiste. Mais plutôt que de laisser planer le doute sur l'ensemble des fonctionnaires, il aurait été beaucoup mieux de les identifier et, par la suite, d'utiliser ce pouvoir de révocation que vous avez à l'égard de la fonction publique; par la suite, c'est là qu'entre en jeu le rapport du Protecteur du citoyen. Par la suite, le Protecteur du citoyen vous a donné l'avertissement de ne pas utiliser le mot "insubordination" comme passe-partout. Si vous avez l'intention, dans certains ministères, comme, par exemple, l'ancien ministre des Affaires municipales que, j'imagine, personne ne regrette, mais qui était là et qui, à son arrivée au ministère des Affaires municipales en 1970 a érigé en système son étroitesse d'esprit et s'est empressé de pratiquer, à l'intérieur de son ministère certaines mutations, certaines mises aux tablettes — ce vocabulaire propre à la fonction publique — cet écart des responsabilités de certaines personnes dont ont été victimes des fonctionnaires loyaux et compétents à l'emploi de l'Etat québécois...

Le Protecteur du citoyen vous dit: Ce n'est pas parce que la loi vous permet, de façon d'ailleurs si étonnante, de révoquer des fonctionnaires pour insubordination que vous allez vous servir de cela pour écarter des gens avec lesquels vous ne seriez pas d'accord sur leur opinion politique, malgré le fait qu'ils soient loyaux et compétents pour l'Etat québécois. Voilà donc l'avertissement qui est porté à l'article 253 du rapport du Protecteur du citoyen. C'est seulement pour cela que je le signale ce soir, non parce que c'est une pratique courante; bien sûr, il le signale lui-même, je l'ai signalé moi-même. C'est un procédé plutôt exceptionnel. Mais puisque vous êtes maintenant dans cette chasse aux sorcières à l'intérieur des ministères, que vous recherchez ces infiltrés et ces noyautés à l'intérieur des ministères, plutôt que de laisser planer un doute sur l'ensemble de la fonction publique, ayez donc le courage de procéder à ce que vous avez le devoir de faire, la révocation des fonctionnaires qui trahissent le serment qu'ils ont fait, plutôt que de faire, comme ce matin, la séance ridicule à laquelle nous avons assisté.

M. le Président, le Protecteur du citoyen dit également à l'article 254 de son rapport — et je le cite à l'intention du ministre pour qu'il m'écoute et qu'il ne reprenne pas le débat au début — il dit : "II est d'autre part malheureux que la Commission de la fonction publique ne soit pas en mesure de mieux contrôler le déroulement des multiples concours devant présider à l'avancement du personnel au sein des diverses unités administratives." Alors, j'explique au ministre que ce dont on est en train de parler, dans cet article 254, ce ne sont pas des concours d'admissibilité, mais bien de la promotion des fonctionnaires une fois entrés au sein de la fonction publique. Si le ministre veut me suivre, je continue le texte du Protecteur du citoyen. "La délégation quasi totale dont elle

doit se satisfaire actuellement, tant au niveau de la préparation et de la correction des questionnaires qu'à la composition des jurys et à la tenue des épreuves, ouvre la porte toute grande aux risques de concours maisons" — c'est son expression et tout le monde comprendra ce que cela veut dire à moins que je ne sois obligé de l'expliquer — organisés strictement en vue d'entériner des choix préétablis, ce que la Loi de la fonction publique voulait justement éviter".

Or, si je peux expliquer ce que le Protecteur du citoyen dénonce dans cet article 254, M. le Président, c'est ceci: II craint que tous ces concours, ces jurys, ces épreuves que les fonctionnaires ont à affronter avant d'obtenir un poste plus haut dans la fonction publique, que ce soit en responsabilité comme en traitement d'ailleurs, au point de vue du revenu financier personnel, ne soient en fin de compte qu'une prime, qu'un "frame-up", pour employer un vocabulaire que tout le monde comprendra et qu'à l'avance le choix ait déjà été fait pour des raisons politiques.

M. le Président, si cette affirmation venait d'un député de l'Opposition purement et simplement, vous diriez: C'est encore un député de l'Opposition qui cherche des poux, comme dirait le député des Iles-de-la-Madeleine, là où il n'y en a pas.

Si cette affirmation venait d'un journaliste, vous diriez: C'est encore un journaliste péquiste qui travaille pour le Parti québécois et qu'on devrait congédier.

Si cette affirmation venait d'un fonctionnaire qui a attendu pendant des années une promotion et qui s'est vu doubler par un parvenu de la dernière minute à un poste qu'il croyait mériter, vous me diriez: C'est un frustré qui était incompétent et que, de toute façon, nous n'avions pas à promouvoir dans la fonction publique.

Or, le texte que je viens de vous lire, M. le Président, vient d'un homme que chacun d'entre nous doit respecter à moins que nous ne respections pas l'ensemble du système démocratique dans lequel nous vivons et il s'appelle le Protecteur du citoyen.

La plupart des affirmations de cet homme ou de son bureau, dois-je dire, puisque cela ne repose pas sur un seul homme, méritent à mon avis une considération et ne sont pas faites à la légère. Il est bien facile du côté ministériel de se gargariser en disant: II exagère, il charrie, cela n'existe pas, ces affaires arrivent une fois par année.

Si M. Marceau — puisque c'est son nom — a quand même jugé bon, dans un rapport qui pourrait être volumineux mais qu'il s'est lui-même contraint à réduire à quelques pages, de signaler ce phénomène, c'est qu'il le juge important et qu'il le juge dangereux.

Effectivement, c'est le Parti libéral qui, en 1961 et en 1962, à cette époque où il incarnait le renouveau au Québec, a créé le ministère de la Fonction publique. Il l'a créé dans toute cette époque de l'enquête Salvas sur l'administration de la défunte Union Nationale, tout ce système de favoritisme à l'intérieur de la fonction publique, c'est le Parti libéral qui nous a appris à être vigilants en ce domaine, à écarter ces nominations incroyables qui existaient dans la fonction publique.

C'est lui qui nous a donné le goût d'une fonction publique qui ne soit basée que sur la compétence et sur la loyauté et c'est donc de lui qu'aujourd'hui, à partir de cette contribution qu'il a apportée au Québec au début des années soixante et qui est devenu celui des Québécois parce que cela a été le choix des Québécois à une certaine époque, le Protecteur du citoyen parle aujourd'hui et dit: Messieurs du Parti libéral, vous qui nous avez convaincus qu'une fonction publique devait être loyale et compétente et uniquement loyale et compétente et qu'il fallait s'efforcer d'écarter de la fonction publique tout ce favoritisme, ces passe-droits trop dégoûtants que nous avons connus à l'époque de l'Union Nationale, je vous rappelle qu'ils existent encore dans la fonction publique québécoise parce que, dit-il, ils nous ont trop souvent semblé ouvrir la porte toute grande.

Je cite: "Au risque de concours maisons organisés strictement en vue d'entériner des choix préétablis, ce que la loi voulait justement contrer".

M. le Président, les interventions que je fais actuellement ne sont pas inutiles. Comme chaque député de l'Opposition, je pourrais vous déposer sur la table le volumineux courrier que nous recevons, simplement sur cette affaire, vous faire part du nombre de fonctionnaires qui nous écrivent en nous disant: M. le député de l'Opposition, nous vous prions de soulever à l'Assemblée nationale ou ailleurs que je crois avoir été victime d'une injustice incroyable. Le concours était "paqueté" d'avance.

M. PARENT (Hull): C'est sûrement un péquiste.

M. CHARRON: J'aurais pu vous dire d'avance qui était le choix préétabli. Le ministre me dit que ce doit être sûrement un péquiste. C'est possible.

M. PARENT (Hull): Qui s'est plaint.

M. CHARRON: M. le Président, voyez, c'est ce dont le Protecteur du citoyen était en train de parler. S'il était ici,...

M. PARENT (Hull) : J'espère qu'il ne s'est pas fait représenter par vous.

M. CHARRON: Ne vous inquiétez pas. S'il entendait la réflexion du ministre de la Fonction publique et des "backbenchers" qui l'accompagnent, il aurait tout probablement tout un chapitre de son prochain rapport à écrire

immédiatement ce soir. Le Protecteur du citoyen dénonce quelque chose de fondé. Vous n'avez qu'à écouter la réaction de l'autre côté de la table pour savoir que cette chasse aux sorcières existe véritablement et que des choix préétablis dans la fonction publique existent également, quels que soient les concours maisons que la Commission de la fonction publique organise, puisque c'est son devoir de les organiser en fonction de la loi qui l'a créée. C'est ce danger qu'a signalé le Protecteur| du citoyen. Je dois dire ce soir, quelle que soit la réponse que le ministre va me fournir, si cela lui tente de m'en fournir une, si cela ne lui tente pas, c'est libre à lui, que je considère que seulement l'attitude que nous avons eu l'occasion de vérifier au cours de ce débat donne raison aux articles 253 et 254 du rapport du Protecteur du citoyen.

C'est vrai, M. le ministre de la Fonction publique, que des concours maisons préfabriqués, où vous pourriez nous dire à l'avance qui va être le gagnant du concours, sont organisés dans la fonction publique. Ce qui est malheureux, déclare le Protecteur du citoyen, c'est que la commission ne soit pas en mesure de contrôler le déroulement des multiples concours. Il est vrai que la commission n'a pas à corriger, ce n'est pas en son pouvoir, ce n'est pas sur la commission que je porte le blâme actuellement. La commission a pour fonction d'organiser un concours. Elle organise le concours. Elle reçoit tous les gens qui viennent au concours, même si quelqu'un venait lui dire auparavant: Ecoute, de tous les concurrents qui sont là, je peux te dire que c'est lui qui va recevoir l'approbation du ministre lorsque viendra le temps d'avoir le poste.

M. PARENT (Hull): II ne faudrait pas se fourvoyer, par exemple. Vous voulez dire qu'à ce moment-ci, le candidat est choisi par le ministre. Or, j'ai bien souligné ce matin qu'il y a beaucoup de fonctionnaires qui...

M. CHARRON: II n'y a pas une embauche dans la fonction publique qui se fasse sans la signature du ministre.

M. PARENT (Hull): Oui, monsieur. UNE VOIX: Les recommandations. M. CHARRON: Lesquelles?

M. PARENT (Hull): II y a des délégations de pouvoirs, j'ai parlé de cela, ce matin.

M. CHARRON: Ces délégués de pouvoirs...

M. PARENT (Hull): Le député de Saint-Jacques en a beaucoup à apprendre sur la question...

M. CHARRON: Ces délégués de pouvoirs reçoivent leurs pouvoirs de qui?

M. PARENT (Hull): Délégation générale de pouvoirs.

M. CHARRON: Ces délégués de pouvoirs, ils les reçoivent de qui?

M. PARENT (Hull): Du Conseil du trésor.

M. CHARRON: Non. Du ministre, à l'intérieur du ministère dans lequel ils se trouvent.

M. PARENT (Hull): Sur recommandation du ministre par le Conseil du trésor.

M. CHARRON: Oui. Mais le ministre est toujours en droit de révoquer ces délégués de pouvoirs...

M. PARENT (Hull): Absolument.

M. CHARRON: Voilà donc la question. Les délégués de pouvoir au sein...

M. PARENT (Hull): ... à votre ancien candidat...

M. CHARRON: ... de la fonction publique, au sein des ministères, sont des hommes choisis par les ministres. SI le ministre fait un mauvais choix — et le député des Iles-de-la-Madeleine a été d'une franchise exemplaire ce matin, il y a des ministres qui ne s'occupent pas de leur ministère, nous a-t-il dit ce matin, qui ne surveillent pas leurs délégués de pouvoir — vous pouvez toujours me dire que le ministre ne peut pas contrôler l'ensemble de l'activité de son ministère, cela va de soi, mais ceux en qui il remet une partie de sa confiance, c'est lui qui les a choisis. Si ces hommes prennent de mauvaises décisions, si ces hommes profitent de leur poste pour engager des gens qui partagent leur opinion politique comme vous l'avez gratuitement avancé ce matin, sans aucune preuve, c'est lui qui en est le responsable. Il n'avait qu'à ne pas nommer ces gens-là.

Autrement dit, si un péquiste, pour reprendre vos expressions, ou un anarchiste ou n'importe quel "iste" comme disait le député des Iles-de-la-Madeleine, ce matin, est un homme en situation de délégation de pouvoirs au sein d'un ministère et qu'il peut engager des gens, c'est le ministre qui l'a nommé à ce poste et le ministre peut, à n'importe quel temps, pour insubordination, le révoquer. Ne faites pas porter le blâme sur ces fonctionnaires. Ils ont été engagés par des ministres du Parti libéral. C'est parce qu'ils avaient la confiance du ministre du Parti libéral et à n'importe quel temps le ministre du Parti libéral peut dire à ce fonctionnaire: Tu utilises ton poste pour favoriser des gens de ton opinion politique, je te révoque pour manque de loyauté et manque de compétence et personne à cette table, pas plus celui qui vous parle que les députés ministériels, ne blâmera le ministre de révoquer un fonctionnaire qui manque de loyauté et de compétence envers

l'Etat. Ne faites pas porter le blâme sur l'ensemble de la fonction publique. S'il y a des gens qui profitent de leur poste pour faire du favoritisme politique à l'égard de l'Opposition, comme vous l'avez gratuitement avancé ce matin, c'est que ce sont des gens qui sont à ces postes et qui ont été nommés à ces postes par des ministres du Parti libéral. Si les ministres du Parti libéral ne sont plus contents de ce que font ces fonctionnaires, ils n'ont qu'à les révoquer.

Ce qui est malheureux, de dire le rapport du Protecteur du citoyen, c'est que la commission soit, en quelque sorte, obligée de cautionner tout ce genre de manoeuvres parce que, que voulez-vous, la loi l'oblige à organiser des concours quand un poste s'ouvre. C'est un peu, M. le Président, comme organiser des éliminatoires entre des gens dont vous savez à l'avance qui va être le gagnant et qui va être le perdant. Le rôle de la fonction publique est d'organiser les éliminatoires, c'est de faire que les équipes se rencontrent sur la glace, de fournir les arbitres, de fournir les juges de but et de faire semblant que c'est au meilleur de l'emporter. Mais il se trouve des gens — et le Protecteur du citoyen les identifie au conseil des ministres, rôle d'ailleurs si étonnant, signale-t-il — qui d'avance peuvent vous dire qui va être le gagnant de certains concours.

Par exemple, un poste de conseiller agricole va s'ouvrir au ministère de l'Agriculture. Différents candidats vont poser leur candidature. La Commission de la fonction publique a pour objet d'ouvrir un poste de conseiller pour le ministère de l'Agriculture, $20,000 par année environ. N'importe qui, n'importe quel citoyen est admissible, le rôle de la Commission de la fonction publique est de faire que n'importe quel citoyen se présente à ce concours. Parmi les candidats, un ancien député de l'Union Nationale. Cela, ce n'est pas l'affaire de la Commission de la fonction publique. La Commission de la fonction publique fait passer un test à cet ancien député de l'Union Nationale comme à n'importe qui d'autre. S'il sait écrire, tant mieux, il peut remplir le test. S'il ne le sait pas, on lui fournira le souffleur occasionnel. Peu importe. Admissibilité remplie, huit candidats peuvent remplir le poste, personne ne savait et ce n'est pas l'affaire de la Commission de la fonction publique que d'affirmer à l'avance qui allait gagner. Le rôle de la Commission de la fonction publique est d'arriver auprès du député de Champlain, ministre de l'Agriculture, et de dire: Voici. Vous avez ouvert un poste de conseiller agricole.

A la suite d'un concours, nous croyons que M. X, Y, Z et quelques autres peuvent remplir cette fonction. Le ministre se penche, étudie les qualités fondamentales de chacun des candidats, vérifie les connaissances en matière agricole de chacun des candidats...

M. PARENT (Hull): C'est beau la vertu!

M. CHARRON: ... et se penche vers l'ancien député de l'Union Nationale, directeur général de l'Union Nationale au cours de la dernière campagne. S'ouvre un poste comme conseiller du ministre des Affaires culturelles. On a besoin de quelqu'un comme conseiller des Affaires culturelles, n'importe qui, et c'est le rôle de la Commission de la fonction publique, peut devenir le conseiller.

M. PARENT (Hull): Non, non. C'est un contractuel.

M. CHARRON: C'est un contractuel, l'hypocrisie est allée plus loin et le danger de surveillance est allé plus loin.

M. PARENT (Hull): La vertu va de nos jours, c'est la semaine sainte.

M. CHARRON: C'est la semaine sainte, le gouvernement a senti que nommer la vipère de Chicoutimi à travers une commission de la fonction publique, c'était vraiment dépasser les bornes.

M. PARENT (Hull): ... il y a un volume...

M. CHARRON: II se peut que d'autres postes, par exemple, commissaire-enquêteur au ministère du Travail, c'est un poste courant dans la fonction publique. Dieu sait qu'on n'en a pas assez sur les chantiers de travail pour la sécurité des travailleurs. Il y en a 44 qui travaillent actuellement dans la fonction publique québécoise à ce chapitre, c'est pour ça qu'il y a 52 gars par année qui se tuent sur les chantiers de construction d'ailleurs, mais peu importe. Poste ouvert, commissaire-enquêteur à la sécurité sur les chantiers de construction. N'importe qui peut se présenter. Le rôle de la Commission de la fonction publique est d'organiser, dans chacune des régions administratives du Québec, ce concours. Se présente le brillant Alfred Croisetière, ancien député de l'Union Nationale, qui brigue un poste. O surprise! Alfred Croisetière remporte, après avoir reçu son admissibilité, parce qu'il savait écrire son nom et son adresse, le concours, devient le choix du ministre du Travail. Autre exemple, s'ouvre un poste au ministère des Transports. On a besoin d'un enquêteur au ministère des Transports. La Commission de la fonction publique, selon la loi, organise le concours. Se présente René Lavoie, ancien député de l'Union Nationale, de Wolfe.

M. PARENT (Hull): Vous pouvez faire exception, M. Croisetière n'a pas passé par la Commission de la fonction publique.

M. CHARRON: M. Croisetière n'a pas passé par la Commission de la fonction publique. Par quel canal l'avez-vous fait passer, celui-là?

M. PARENT (Hull): Contractuel.

M. CHARRON: Se présente le cas d'un commissaire-évaluateur aux Affaires municipales. N'importe qui peut se présenter au poste de commissaire-évaluateur aux Affaires municipales.

M. PARENT (Hull): O vertu, quand tu nous tiens!

M. CHARRON: N'importe qui, n'importe quel imbécile peut se présenter. C'est alors qu'effectivement, devant cette ouverture, l'ancien candidat de l'Union Nationale aux élections partielles de Gatineau, Harold Kelly, se présente au poste de commissaire-évaluateur et est choisi.

M. PARENT (Hull): Non, M. le Président, encore là, le député de Saint-Jacques fait fausse route. M. Harold Kelly est engagé par le conseil de comté du comté de Gatineau. Cela a été fait par demande de soumissions publiques de candidatures.

M. CHARRON: C'est exact.

M. PARENT (Hull): Par le conseil de comté qui n'est pas un organisme du gouvernement.

M. CHARRON: C'est exact.

M. PARENT (Hull): Troisième fois en erreur.

M. CHARRON: Non, ce n'est pas la troisième fois.

M. PARENT (Hull): O vertu!

M. CHARRON: Je dois dire que, dans ce domaine, c'est le député de Gatineau lui-même qui m'a informé de la situation dont j'étais parfaitement au courant avant. Mais je n'ai pas parlé...

M. PARENT (Hull): Vous n'avez pas d'autre mouche encore?

M. CHARRON: Non. Je ne connais pas tous les patroneux du Parti libéral dans chacun des comtés.

M. BOUTIN (Johnson): Vous connaissez les vôtres, c'est assez.

M. CHARRON: Tout ceux qui, à la suite d'une promesse du député libéral de chacun des comtés, que ce soit pour l'obtention d'un permis d'alcool ou pour n'importe quoi d'autre, se sont trouvés assurés à l'avance par le député libéral de la place que l'épreuve de la Commission de la fonction publique n'était, en fin de compte, qu'une formalité...

M. PARENT (Hull): Vous avez dit tout à l'heure que la commission était intègre?

M. CHARRON: Elle fait son rôle, elle est intègre, la commission.

M. PARENT (Hull): Mais pas ses gestes. M. CHARRON: Non, ses gestes...

M. PARENT (Hull): Ses gestes sont plus ou moins honnêtes.

M. CHARRON: M. le Président, je relis l'article 254: "II est d'autre part malheureux que la Commission ne soit pas en mesure de mieux contrôler le déroulement des multiples concours.

La commission n'a que pour fonction d'organiser ce concours, de le faire et elle est intègre dans ce cas. Je ne dis pas que la commission recommande au ministre et dit: M. le ministre, des huit admissibles, je trouve que vous devriez prendre celui-là parce qu'il est du Parti libéral. Jamais! Je ne dis pas et je n'affirmerai jamais, avant d'en avoir la preuve très nette que la Commission de la fonction publique procède de cette façon...

M. PARENT (Hull): M. le Président... M. CHARRON: Je n'ai pas fini.

M. PARENT (Hull): ... qu'est-ce que le député de Saint-Jacques aurait à dire si je lui disais qu'en 1973...

M. CHARRON: Ce n'est pas le cas. M. le Président, je n'ai pas fini mon intervention.

M. PARENT (Hull): C'est parce que vous êtes encore parti dans les nuages.

M. CHARRON: Je n'ai pas fini mon intervention. Vous me répondrez après.

M. PARENT (Hull): Je voudrais vous ramener un peu à la réalité.

M. CHARRON: Je n'ai pas dit que la Commission de la fonction publique manquait d'intégrité, au contraire!

M. PARENT (Hull): Non, mais vous mettez en doute sa gestion.

M. CHARRON: Je dis que le rôle de la Commission de la fonction publique, quant à l'admissibilité d'un candidat à un poste, se tient là. Le ministre, lui-même, nous a rappelé ce matin, que la décision de choisir tel candidat plutôt que tel autre parmi tous les admissibles — le rapport du Protecteur du citoyen nous le rappelle également en disant que c'est malheureux — demeure toujours et pour toujours le soin du ministre.

M. PARENT (Hull): Si le député de Saint-Jacques a des cas d'espèce, comme il l'a

mentionné, ce matin, je lui ferai la demande à son tour: Est-ce qu'il a des cas d'espèce à me rapporter? J'ai ici le rapport de l'année 1973. Sur 1,760 candidats à des examens de changement de grade du personnel de bureau, techniciens et assimilés, 1,637 ont obtenu leur changement de grade pour un pourcentage de 93 p.c. Pour les professionnels, concours d'avancement de la classe 3 à la classe 2, sur 208 candidats, 188 ont eu la promotion. Est-ce que le député de Saint-Jacques a des cas d'espèce ou s'il veut invoquer que c'est la coutume générale? Même s'il se sert du Protecteur du citoyen, c'est bien dommage, moi j'ai des faits concrets. Si vous avez des cas d'espèce, comme tout à l'heure, dans votre évocation, donnez-les".

M. CHARRON: Que voulez-vous que j'aie contre cela?

M. PARENT (Hull): Si vous avez des cas d'espèce, donnez-les! A 93 p.c, si on veut prétendre qu'il y a du favoritisme, je pense qu'il y en a eu à 93 p.c.

Si c'est 7 p.c. que l'on conteste... Si on prétend que ce sont des péquistes qui n'ont pas passé, qu'on le dise!

M. CHARRON: M. le Président, si le ministre essaye de triturer mes propos au point que je sois en train d'affirmer que la Commission de la fonction publique ne procède pas de façon intègre et honnête dans ce qu'elle a à faire dans les concours qu'elle ouvre et dans les facilités qu'elle peut offrir aux fonctionnaires de promotion, il se trompe. Ce n'est pas ce que j'ai affirmé.

Ce que j'affirme, dans les exemples que j'ai donnés, et dans ce que j'ai avancé, c'est que l'existence d'une Commission de la fonction publique qui joue son rôle de façon intègre, efficace, mais aussi limité qu'il soit par la loi, n'écarte pas la possibilité de privilèges et de favoritisme politiques par les autorités en place. C'est ce que je veux dire.

M. PARENT (Hull): Vous changez vos propos. Tout à l'heure, vous avez dit qu'il y avait des postes, dans des concours d'avancement, qui étaient déjà destinés à un tel candidat. Je vous amène des faits précis sur l'année 1973 et là, vous voulez maintenant bifurquer en prétendant que c'est une coutume générale.

M. CHARRON: Non.

M. PARENT (Hull): C'est ce que vous avez évoqué tout à l'heure.

M. CHARRON: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. PARENT (Hull): Vous avez évoqué que les candidats étaient choisis d'avance dans des concours d'avancement. Je vous dis que 93 p.c, l'an dernier, ont eu leur promotion. Si vous avez des cas d'espèce, c'est différent, mais encore là, cela devient un cas d'espèce et non de généralité.

M. CHARRON: Tout ce que j'ai affirmé, M. le Président, et c'est à partir des affirmations mêmes que me faisait, ce matin, le ministre de la Fonction publique, avant même que nous ne soyons sur ce programme 4 de nos crédits de la Commission de la fonction publique, que tout ce qu'a à faire la Commission de la fonction publique — et je crois qu'elle le fait de façon intègre et efficace actuellement — est de déterminer les admissibles. C'est son rôle et après cela, elle peut s'en laver les mains. Donc, cela n'écarte pas l'existence, comme le signale le Protecteur du citoyen, de choix préétablis. Il suffit qu'une autorité politique en place ait choisi un candidat, que ce candidat traverse l'épreuve relativement facile de la Fonction publique pour qu'il devienne admissible pour avoir ensuite l'assurance d'être choisi.

C'est certain que je me répète, l'honorable député de je ne sais pas trop où, parce que...

M. BOUTIN (Johnson): D'après la liste...

M. CHARRON: ... le ministre de la Fonction publique ne comprenait pas la différence. Ce que la Commission de la fonction publique a à faire, c'est de choisir les admissibles. Ce que le ministre a à faire, c'est de choisir les élus.

M. BOUTIN (Johnson): Ce n'est pas plus compliqué que cela.

M. CHARRON: C'est toute la différence du monde...

J'ai donné l'exemple de l'ancien député de Saint-Maurice. Ce dernier peut très certainement être admissible au poste qu'il a. L'ancien député de Saint-Maurice a eu l'expérience parlementaire, l'expérience de ce genre d'épreuve. Or, probablement qu'au cours de son mandat parlementaire entre 1966 et 1973, il a eu à travailler avec des gens qui cherchent... Il est familier avec ce genre d'épreuve.

M. HOUDE (Fabre): II est également médecin en médecine vétérinaire.

M. CHARRON: Voilà donc une autre possibilité qui s'avançait dans son domaine. J'admets que si le Dr Philippe Demers avait été nommé conseiller culturel et que Jean-Noël Tremblay soit nommé conseiller agricole, vous auriez poussé le ridicule au bout. Le fait de les mettre chacun dans leur domaine, évidemment, facilitait le pas. Je dis que pour Philippe Demers, c'était très facile de passer l'examen d'admissibilité. Il est probablement admissible.

M. LACHANCE: II a droit...

M. BOUTIN (Johnson): II a droit...

M. CHARRON: Là n'est pas la question. La Commission de la fonction publique a rempli son rôle. Elle ne pouvait pas refuser Philippe Deniers. Il avait droit de se présenter.

M. BOUTIN (Johnson): Puis après... M. OSTIGUY: Est-ce que je pourrais... UNE VOIX: II n'est pas péquiste.

M. CHARRON: Ce qui est ridicule pour les autres, je ne sais pas combien, peut-être pour-rais-je m'informer — non, ce n'est pas qu'il n'est pas péquiste, ce qui est ridicule, c'est que d'autres personnes se sont rendues en même temps que Philippe Demers pour passer ce concours de conseiller agricole.

M. LACHANCE: C'est son droit.

M. CHARRON: Certainement. Ce qui est ridicule, c'est que ces personnes auraient dû savoir ou ont dû se douter en voyant arriver Philippe Demers que, quelle que soit leur admissibilité, elles ne seraient pas choisies. C'est cela la différence.

M. OSTIGUY: Est-ce que le député de Saint-Jacques aimerait qu'on lui rappelle les souvenirs de 1970? Moi, je me souviens d'un nommé Jean Godin, qui a été candidat défait du Parti québécois dans Verchères et qui a passé un concours à la fonction publique et qui est maintenant rendu avec SATRA à Sainte-Scholastique pour l'aéroport de Mirabel. Est-ce que je pourrais lui nommer André Tétreault, qui était président du Parti québécois dans Rouville, qui a passé un concours, qui a été accepté sur une liste d'admissibilité et qui est devenu haut fonctionnaire au ministère du Travail.

M. CHARRON: Mais j'imagine...

M. OSTIGUY: On pourrait vous en nommer comme cela, nous aussi...

M. CHARRON: Mais certainement. M. OSTIGUY: Vous avez le front...

M. CHARRON: Allez-vous me dire, vous, qu'André Tétreault que vous avez mentionné, et que Jean Godin, étaient des choix préétablis avant le concours d'admissibilité?

M. OSTIGUY: Tout comme les autres, ils ont tout simplement passé leur concours. Ils ont été choisis, comme ceux que vous avez mentionnés tantôt.

M. CARPENTIER: Qu'est-ce qui vous prouve que les autres ont été choisis d'avance?

M. PARENT (Hull): M. le Président, je voudrais dire au député de Saint-Jacques, pour sa propre information, que la Commission de la fonction publique a lancé six concours pour trouver des vétérinaires et, après six concours, elle a réussi à trouver deux candidats et qu'actuellement, si on veut en avoir d'autres pour combler des postes vacants, il va falloir aller les chercher à l'extérieur du Québec.

M. CHARRON: Autrement dit, quand le...

M. PARENT (Hull): II n'a pas pris la place d'un péquiste.

M. CHARRON: Quand le Protecteur du citoyen dit que cela ouvre la porte toute grande au risque de concours maisons organisés strictement en vue d'entériner des choix préétablis, ce que la loi voulait justement contrer, il divague? C'est probablement un péquiste lui aussi.

M. PARENT (Hull): Je lui laisse, à lui, de faire sa propre appréciation parce qu'il n'est pas dans l'administration et la gestion quotidienne. Il est là pour faire l'appréciation après coup.

M. CHARRON: D'accord. Le Protecteur du citoyen fait des affirmations gratuites.

M. PARENT (Hull): Cela, c'est l'opinion du député de Saint-Jacques, parce que je n'ai pas dit cela.

M. CHARRON: Moi, je n'ai pas dit cela, non plus. Moi, je dis que ce que le Protecteur du citoyen a jugé bon de mettre dans son rapport annuel, c'est qu'il était convaincu que ce phénomène existait et que la présente administration gouvernementale n'écarte certainement pas le doute à cet effet.

M. le Président, je suis prêt à adopter les crédits de la commission de la fonction publique.

M. PARENT (Hull): Très bien.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le programme 4 est adopté. Les crédits de la Fonction publique dans leur ensemble sont adoptés. Messieurs, je vous remercie de votre collaboration et de votre participation.

La commission de la fonction publique ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 21 h 31 )

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