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Version finale

33rd Legislature, 2nd Session
(March 8, 1988 au August 9, 1989)

Thursday, March 24, 1988 - Vol. 30 N° 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Examen des orientations, des activités et de la gestion de la Commission des droits de la personne


Journal des débats

 

(Quinze heures quarante minutes)

Le Président (M. Filion): À l'ordre, s'il vous plaît!

La séance de la commission des institutions est maintenant ouverte. Je rappellerai notre mandat qui est d'entendre à nouveau cet après-midi la Commission des droits de la personne dans le cadre du mandat d'examen des orientations, des activités et de la gestion de cet organisme, mandat que nous nous sommes déjà donné.

J'inviterais d'abord les membres de la commission à faire quelques remarques préliminaires s'il y en a. De mon côté, je voudrais simplement souhaiter la plus cordiale des bienvenues à l'équipe de la Commission des droits de la personne ainsi qu'à son président. Depuis notre dernière rencontre, nous avons eu des séances de travail à huis clos si l'on veut - ces séances de travail sont à huis clos généralement - et nous avons déjà discuté entre nous.

Le but de la rencontre de cet après-midi est double: d'une part, vous permettre peut-être de décanter un petit peu toute la période d'audience durant laquelle plusieurs groupes et organismes nous ont fait connaître leurs points de vue et permettre à la commission de réagir avec un certain recul sur les commentaires ou sur les points de vue qui ont été avancés et surtout en ce qui concerne, encore une fois, l'avenir de la commission. D'autre part, on veut permettre aux membres de la commission qui ont, dans bien des cas, certaines préoccupations particulières de discuter avec vous sur ces préoccupations et sur des hypothèses de recommandations qui pourraient être déposées à l'Assemblée nationale et, sait-on jamais, qui courraient être retenues par le ministre de la Justice ou par l'Assemblée nationale dans le cadre d'un projet de loi.

Donc, il y a une double utilité à cette rencontre de l'après-midi. Je vous invite à être tout à fait à l'aise. D'ailleurs, je pense que la salle dans laquelle nous nous trouvons se prête fort bien à des échanges directs, cordiaux et tout simples.

Sans plus tarder, je vous inviterais, M. le président... Je crois comprendre que vous avez certaines remarques préliminaires et je vous invite à présenter, bien sûr, les membres de l'équipe qui vous accompagnent et de bien vouloir nous faire les remarques préliminaires que vous jugez bon de porter à notre attention.

Exposé du président de la Commission des droits de la personne

M. La chapel le (Jacques): M. le Président, je tiens à vous remercier de même que les membres de cette commission de nous recevoir à nouveau. Je pense qu'il s'imposait qu'on revienne devant vous justement après les discussions que nous avons eues la dernière fois, comme vous le mentionnez, parce que effectivement tout cela nous a permis de décanter ce qui a été dit. Il y a, bien sûr, des réflexions que nous avons faites à la commission et je pense que c'est intéressant de revenir devant vous, d'autant plus qu'il y a des sujets qui n'ont pas été abordés. On s'était laissés au dernier instant en disant: il faudrait bien revenir sur telle ou telle question. Je pense qu'il s'impose, avant que vous puissez faire des recommandations, qu'on reprenne à nouveau certaines de ces discussions.

Bien sûr, avant de vous donner quelques remarques et peut-être pour faire le lien avec ce qui a été dit et certaines réflexions qu'on a eues, je voudrais vous présenter les personnes qui m'accompagnent, soit à ma gauche, Mme Nicole Duplé, commissaire à la Commission des droits de la personne, Mme Hector également, commissaire à la Commission des droits de la personne, M. Mayer-Lévy, commissaire, Mme Louise Caron, directrice des programmes d'accès à l'égalité, Mme Sainte-Marie, directrice des communications, M. Normand Dauphin, directeur des bureaux régionaux, Jacques Bergeron qui est en arrière de moi, M. Marc Bilocq, directeur du bureau de Québec et également, Mme Patry-Buisson qui est membre de la Commission des droits de la personne et qui est, entre autres, présidente du syndicat.

Alors, je pense qu'on reprend un peu le débat où on l'avait laissé la dernière fois. Je dois vous dire qu'à la Commission des droits de la personne on a longuement scruté ces mémoires. On s'est sentis interpellés également par les mémoires qui ont été présentés devant vous. On a mis ensemble la réflexion des commissaires, des employés de chacune des directions. Tout le monde a eu l'occasion de prendre connaissance de tous ces mémoires de même que des débats et des échanges qu'on a eus avec vous. Donc, c'est après plusieurs mois de réflexion qu'on vient devant vous avec certaines idées et nous espérons qu'on pourra vous faire connaître de façon assez précise les opinions de la commission, quoique nous soyons aussi, je dois le dire, dans une époque de réflexion. Comme je vous l'ai déjà mentionné, la Commision des droits de la personne a mis en place un processus de planification triennale de ses orientations et, le 15 avril prochain, on doit statuer sur les orientations de la Commission des droits de la personne pour les prochaines années. Donc, les discussions qu'on a actuellement, je dois vous le dire, sont véritablement au coeur de nos préoccupations. Tout au cours de l'année également, comme je vous l'ai déjà mentionné, nous avions mis un effort très

particulier sur la question de l'examen de notre processus d'enquête. Si on n'a pas terminé ces réflexions dans les prochains mois, on devrait arriver avec des recommandations relativement précises qu'on pourrait vous faire. Mais quand même en cours d'année, on a mis en place des processus qui nous permettent d'être plus efficaces en ce qui concerne nos enquêtes. On va revenir quand même sur ces questions tantôt.

Je voudrais reprendre avec vous certains termes qu'on a abordés. Je voudrais vous parler du traitement des plaintes, la collaboration avec les groupes voués à la défense des droits, la régionalisation de la commission, les programmes d'accès à l'égalité et finalement les ressources de la Commission des droits de la personne. L'examen du mécanisme du traitement des plaintes - je pense qu'on en a largement parlé ici - nous a fait voir un nombre important de problèmes reliés, d'une part, à la philosophie d'intervention et aux modalités inscrites dans la charte, et, d'autre part, je pense qu'il faut l'admettre, à certaines questions organisationnel-les qui devraient pouvoir se régler sans probablement de modification à la charte. Je pense que ce n'est un secret pour personne, dès le début de ses activités, la commission a tenté de baliser et de définir le rôle que le législateur lui avait donné. On peut dire que le législateur n'a pas été très bavard sur la façon de remplir notre mandat. On a fait appel d'ailleurs, au cours des années, à de nombreux experts dans le domaine et cela a fait l'objet de plusieurs discussions à la Commission des droits de la personne.

Je pense que, malgré les ambiguïtés qui demeurent toujours, bien sûr, à l'intérieur de la charte - on n'a pas réussi à établir de façon très claire ce mandat - on a quand même établi, au cours des années, que, si le rôle de l'enquête est de découvrir la vérité, de statuer sur le bien-fondé d'une plainte - bien sûr elle n'avait aucun pouvoir exécutoire - la philosophie d'intervention de la commission, même en matière d'enquêtes, devait demeurer un rôle d'éducation et de promotion. Je pense que tout le monde ne voit pas ainsi le rôle de la commission. Plusieurs d'ailleurs l'ont dit ici: La commission devrait avoir plus de dents; ses décisions devraient être exécutoires; elle devrait délaisser la médiation pour être davantage coercitive. Je pense qu'il faudra choisir entre ces deux tendances. D'une part, il va falloir faire des choix, mais nous croyons, quant à nous à la commission, qu'il faut préserver ce rôle de promotion et d'éducation confié à la Commission des droits de la personne et que, si des modifications devaient être apportées, on devrait conserver ce rôle de promotion et que cette mission, pour nous, est primordiale. Je pense qu'une Commission des droits de la personne est un organisme qui vise à établir la paix sociale, qui vise à aider à l'établir, en tout cas, si on n'y arrive pas, mais on doit conserver ce rôle d'éducation et de promo- tion des droits. /

Une fois qu'on a posé ce problème, on peut voir certaines hypothèses, une première qui serait sans modification législative. La Commission des droits de la personne pourrait probablement modifier le rôle qu'elle fait jouer actuellement à ses enquêtes et être davantage, je dirais, inquisitoire, c'est-à-dire abandonner les règles de procédure qu'on connaît actuellement qui sont peut-être davantage une enquête contradictoire et faire des enquêtes inquisitoires. À ce moment-là, je pense qu'il faudrait véritablement modifier la charte légèrement, mais de façon que nos règles de procédure ne soient pas des directives qu'on adresse à nos employés, parce qu'actuelle ment ce n'est que cela, on n'a pas le pouvoir d'émettre des règles de procédure, mais que cela le devienne véritablement, de sorte que ce rôle que la commission se donne de tenir des enquêtes inquisitoires ne soit pas contesté.

On peut voir sommairement quels seraient les avantages de ce sytème. Bien sûr, cela éviterait de remanier la charte. Probablement que ce moyen d'enquête inquisitoire raccourcirait les délais. Je pense que quand même cette forme d'enquête n'offre pas toutes les garanties de respect des règles de justice naturelle qui ont été dans le passé réclamées par un nombre important de groupes, et c'est pour cette raison d'ailleurs qu'on a adopté les règles qu'on connaît actuellement. D'autre part, compte tenu du fait qu'il n'y a pas de pouvoir de délégation des commissaires aux enquêteurs, je pense que le problème resterait peut-être entier sous cet aspect. On continuerait toujours à dire que les personnes ne sont pas entendues par les commissaires.

Une autre hypothèse serait, bien sûr, qu'on amende la charte, comme plusieurs l'ont demandé, pour constituer un tribunal des droits de la personne. Ou encore, une autre hypothèse est que l'on réfère les dossiers de la Commission des droits de la personne aux tribunaux de droit commun. La première hypothèse d'un tribunal des droits de la personne, à première vue, on a l'impression qu'elle viendrait régler une partie des ambiguïtés que l'on connaît présentement. Le processus d'enquête serait sûrement moins formaliste que celui que l'on fait à la commission. Les plaignants continueraient, bien sûr, à bénéficier de l'assistance des procureurs de la commission ensuite devant le tribunal. D'autre part, on considère qu'un tribunal administratif, à cause de sa spécialisation dans le domaine des droits, est probablement plus enclin à innover et à approfondir les dossiers que les tribunaux de droit commun.

Je mentionnais tantôt que l'autre hypothèse pourrait être une référence aux tribunaux de droit commun, une fois que la commission aurait indiqué prima facie qu'il y a suffisamment de preuves pour qu'on aille devant le tribunal; ce serait une autre façon. Ce que l'on sait tout de même des tribunaux de droit commun, c'est que

la procédure à cet endroit est assez formaliste et que les délais y sont relativement longs.

Pour l'instant, nous ne faisons que dégager ces quelques hypothèses. J'imagine qu'on aura l'occasion d'échanger nos points de vue sur ces diverses hypothèses avec les membres de votre commission et de tenter d'en voir ensemble les avantages et les inconvénients de façon plus approfondie. Je l'ai dit tantôt, nous considérons tout de même qu'il ne faudrait probablement pas se lancer dans l'une ou l'autre de ces formules sans des études beaucoup plus précises sur ces questions. Il y a des commissions des droits de la personne dans le pays qui ont, entre autres, des sytèmes de tribunaux administratifs et il serait intéressant d'aller voir, non seulement sur papier et dans les textes de loi ce que cela donne, mais quels sont les résultats concrets. Je pense qu'on devrait revenir sur ces différentes hypothèses.

On a également abordé ici, autour de cette table, le rôle de médiateur enquêteur. Plusieurs intervenants ont fait valoir devant cette commission qu'il y avait une dichotomie dans ces rôles, qu'il y avait risque de conflits. Et on a, tout simplement, peut-être de façon un peu rapide, indiqué qu'en séparant les rôles on viendrait régler le problème. On n'en est pas tout à fait convaincus. On a justement eu l'occasion, à la commission, d'en discuter avec les personnes qui sont les premières impliquées, les enquêteurs et les enquêtrices de la commission qui nous disent: Cela peut être intéressant, cela éviterait le conflit, sauf que, d'autre part, cela nécessite qu'un autre enquêteur soit au courant du dossier - il y a parfois des dossiers extrêmement complexes - et que les parties recommencent à discuter de leurs dossiers avec les enquêteurs et les enquêtrices, ce qui pose des problèmes de délai et aussi peut-être certaines difficultés pour les enquêteurs de reprendre rapidement un autre dossier. Donc, cela nécessite de l'ajout de personnel, à notre avis.

On a pensé de diviser peut-être le processus en trois temps. Un premier temps, c'est la recevabilité des plaintes où l'agent de recevabilité, examinant le dossier, tente de voir s'il y a une possibilité de règlement rapide en intervenant auprès du "mis en cause" et des plaignants. À ce moment-là, s'il constate rapidement qu'il ne peut revenir à la solution et à un règlement, il pourrait référer le dossier à un enquêteur, comme on le fait actuellement. À ce moment-là, l'enquêteur a véritablement son rôle d'enquêteur: il ne doit pas tenter de faire de la médiation, mais se tenir disponible aux parties qui manifesteraient le désir de régler leurs différends. Mais ce rôle devrait être restreint; autant que possible, il ne devrait pas intervenir dans un rôle de médiation, véritablement, comme certains enquêteurs peuvent avoir tendance à le faire actuellement. Dans un troisième temps, celui où la Commission des droits de la personne a statué sur le bien-fondé de la plainte, le véritable rôle de médiateur de l'enquêteur devrait intervenir.

Pour éviter le conflit qui peut exister, on dit que l'enquêteur ne devrait faire la médiation que s'il se sent confortable lui-même. S'il dit: Moi, je suis un peu en conflit avec l'une ou l'autre des parties, il devrait pouvoir se retirer. D'autre part, on devrait permettre également aux parties, sans être obligées de s'expliquer, de dire tout simplement: Moi, je voudrais qu'un autre enquêteur intervienne dans le dossier pour faire la médiation. Il y a de nombreuses personnes qui veulent et qui tiennent à ce que le même enquêteur continue. Ils ne veulent pas commencer à se réexpliquer. Ils savent que l'enquêteur ou l'enquêtrice connaît bien son dossier. Quant à nous, cela nous semble la façon la plus souple de régler ce conflit entre enquêteurs et médiateurs.

On a également fait état, devant cette commission, des règlements de la Commission des droits de la personne et on a souvent utilisé le terme d'entente à rabais. Je dois vous dire que nous croyons que cette assertion est fausse. D'ailleurs, il y a des mots utilisés qui ne sont pas du tout exacts et qui démontrent bien que souvent on ne connaît pas véritablement la nature des règlements. On parle d'amendes, on parle de sanctions de la commission, que la commission impose ou n'impose pas. On sait pertinemment que la commission n'impose pas. Tout ce que l'on fait dans la médiation, c'est qu'on explique aux parties quelles sont les modalités de règlement, quelles sont les possibilités qu'il pourrait y avoir devant un tribunal. Je dois avouer que, si les commissaires n'approuvent pas actuellement les règlements, tous les règlements passent devant la commission. Les comités d'enquête, entre autres, scrutent ces règlements pour bien s'assurer que les parties ont été éclairées sur les possibilités de règlement. Quant à nous, nous ne croyons pas que la commission devrait intervenir autrement, contrairement à ce qui a été indiqué lors des discussions.

On a parlé devant cette commission de la collaboration de la Commission des droits de la personne avec les différents groupes. Je pense que de tout temps la commission s'est largement ouverte aux différents groupes. Entre autres, je me souviens qu'en 1986 nous avions mis dans nos objectifs de structurer davantage les rencontres avec les groupes. On avait fait un petit inventaire et, durant cette année 1986, on avait noté quelque cent rencontres, avec des divers groupes, non pas simplement des rencontres d'information et des rencontres d'éducation, mais bien des rencontres dans le but d'articuler ensemble des projets et de faire avancer des dossiers avec ces groupes.

D'ailleurs, l'année dernière, dans cette perspective, on a créé ce qu'on a appelé le comité sur les relations interethniques et raciales qui regroupe quinze personnes des diverses communautés culturelles dans la région de Montréal avec un groupe de commissaires et d'employés de la commission, justement dans le

but d'entendre leurs points de vue et leurs attentes face à la Commission des droits de la personne.

Je vous ai mentionné que dans les prochaines semaines on devrait fixer des orientations et des objectifs pour la commission. Cela fait partie de nos objectifs d'ouvrir encore davantage la Commission des droits de la personne aux différents groupes avec lesquels nous devons collaborer.

Je vous dis en passant quelques mots sur la régionalisation. Peut-être simplement pour faire le point sur la situation actuelle. Vous savez qu'on a quatre bureaux régionaux actuellement ouverts. Je dois vous indiquer que dans les budgets de cette année, budgets que nous avons reçus mais qui ne sont pas approuvés, bien sûr, ces quatre bureaux dotés de personnel temporaire sont encore là, bien sûr, mais qu'ils seront toujours dotés de personnel temporaire, puisque nous n'avons pas reçu de postes permanents pour ces bureaux. Quant aux quatre autres bureaux que nous aimerions ouvrir dans les autres régions, ils ne sont pas encore dans nos budgets. La situation est à peu près la même, si vous voulez, que l'année dernière.

Un sujet sur lequel nous n'avons pas discuté lors de la dernière rencontre, ce sont les programmes d'accès à l'égalité. Il y avait quelques commentaires de la part des députés et dans certains mémoires concernant le rôle de la Commission des droits de la personne en matière de programmes d'accès à l'égalité. (16 heures)

Je pense qu'il serait important de bien situer ce rôle à partir de ce que nous indique la charte. Dans la charte, on reconnaît trois rôles en matière de programmes d'accès à l'égalité, un rôle-conseil, un rôle d'enquête et un rôle de surveillance. Le rôle-conseil est très bien inscrit dans la charte à l'article 86.2, deuxième paragraphe. Vous vous souviendrez que, quand on a mis en application le chapitre III, on a omis de mettre en vigueur l'article 86.2, premier paragraphe qui disait que la commission devait approuver. Mais on a tenu tout de même à garder ce rôle-conseil de la Commission des droits de la personne en matière de programmes d'accès à l'égalité, pour une raison importante, je pense, parce que cette section dit qu'on doit établir des programmes conformes à la charte. Je pense que, si un organisme peut suggérer ou conseiller les entreprises pour établir des programmes conformes à la charte, c'est bien la Commission des droits de la personne, d'autant plus que, à l'article 86.7, si ma mémoire est bonne, la commission dort conseiller le gouvernement pour l'établissement de programmes d'accès à l'égalité dans les organismes et dans les ministères. Donc, ce rôle-conseil est très bien établi dans la Charte des droits et libertés de la personne.

La commission, depuis le temps, a développé, je pense, une expertise extrêmement précieu- se auprès des syndicats et des employés. Je pense qu'on reconnaît tous, effectivement, que ce rôle est joué très adéquatement. Également, la Commission des droits de la personne a joué un rôle de concertation qui nous apparaît très important parce que, si on fait la nomenclature de tous les organismes, de tous les programmes en matière d'accès à l'égalité, ils sont nombreux Les organismes sont nombreux et les programmes sont également nombreux. Au gouvernement du Québec, il y a le Conseil du Trésor, le Sécréta riat à la condition féminine, le Secrétariat aux affaires autochtones. Au gouvernement fédéral, il y a la Commission canadienne des droits de la personne, la Commission de l'emploi et de l'immigration. Il y a la commission ontarienne. Dans cette optique, la Commission des droits de la personne a joué un rôle de concertation important dans l'élaboration des programmes et de manière à arrimer tous ces programmes d'accès à l'égalité. Nous avons également joué un rôle de promotion au cours des deux dernières années. En 1986 et en 1987, à tout le moins, on a rencontré quelque 14 000 personnes au cours de colloques, de rencontres organisées par divers groupes, diverses corporations professionnelles, dans le but d'expliquer ce que c'est, des programmes d'accès à l'égalité.

Nous avons également mentionné, malgré ce qu'on indiquait ici, que la Commission des droits de la personne, continuait à jouer son rôle de faire des enquêtes même si, d'autre part, dans la section d'à côté, aux programmes d'accès à l'égalité, on mettait des programmes volontaires en place. Cela n'empêchait pas la commission de faire des enquêtes. D'ailleurs, il y a cinq ou six dossiers actuellement, dans des entreprises importantes, où la commission conseille des programmes d'accès à l'égalité. D'autre part, il y a une plainte pour la mise en place d'un programme d'accès à l'égalité. Je pense que tout cela s'inscrit dans le rôle que je décrivais au départ, que la Commission des droits de la personne n'est pas un tribunal. La Commission des droits de la personne, bien sûr, a le rôle d'enquêter, mais elle a le rôle d'aider, elle a le rôle d'éduquer. Elle a, entre autres, ce rôle, qu'on a bien inscrit dans la charte, d'aider à mettre en place des programmes d'accès à l'égalité.

Le troisième rôle que je mentionnais tantôt, c'est celui de surveillance. Celui-là est inscrit à l'article 86.4. Quand on lit l'article au complet, on constate que ce rôle de surveillance est intimement associé à la production de rapports par les entreprises. Malheureusement, lorsqu'on a adopté la réglementation sur les programmes d'accès à l'égalité, on n'a pas retenu cette suggestion de la Commission des droits de la personne de forcer les employeurs à remettre un rapport sur la situation des effectifs dans leur entreprise, de manière à pouvoir vérifier si, effectivement, les effectifs étaient représentatifs de l'ensemble des travailleurs sur le marché.

Nous, nous croyons encore que de tels rapports devraient être mis en place, si on veut que la commission joue véritablement ce rôle de surveillance.

En conclusion sur cette question, nous croyons que, si on veut assurer la mise en place de véritables programmes d'accès à l'égalité et l'émergence d'une expertise dans ce domaine, il y a lieu de maintenir cet article de la Charte des droits et libertés de la personne qui vise à procurer conseil et assistance aux entreprises, à ceux qui le requièrent. C'est d'autant plus important que, actuellement, dans ce que l'on connaît en matière de programmes d'accès à l'égalité, ceux qui mettent en place des programmes d'accès a l'égalité, ce sont des grandes entreprises. Sur la cinquantaine d'entreprises qui font affaire actuellement avec la Commission des droits de la personne, ces entreprises regroupent à peu près 160 000 employés. On constate donc, si on fait une petite division, que ce sont des grosses entreprises et des grosses boites. Il faudrait penser que, au Québec, 98 % des entreprises ont moins de 100 employés. Donc, ce sont de petites boîtes qui, probablement, ne peuvent pas se payer le luxe d'aller voir des consultants qui pourraient les aider dans la mise en place de programmes d'accès à l'égalité et, à brève échéance, il va falloir développer une expertise, je dirais très québécoise, parce que chez nous la PME est importante. Et je pense qu'à ce moment-là la Commission des droits de la personne aura encore un rôle extrêmement important à jouer.

Enfin, je termine sur la gestion des ressources humaines. Jusqu'à maintenant, nous n'avons fait qu'effleurer cette question. Pour remplir un mandat aussi vaste, je pense que, dans un premier temps, il faut établir des priorités. C'est ce qu'on a tenté de faire par l'élaboration d'un plan triennal. On comprend facilement qu'on ne peut répondre aux demandes ^e toute la population; la charte est vaste et les ressources sont restreintes. Mais je pense qu'il faut tout de même nous assurer d'un minimum de ressources. Et si on ne peut nous assurer ce minimum de ressources, bien, il y aurait lieu qu'on modifie la charte, qu'on enlève des mandats ou qu'on change quelque chose.

Tout au cours des dernières années, je dois vous dire qu'on a mis un accent particulier pour améliorer l'efficience, les méthodes de travail, la formation des employés, des enquêteurs et des enquêtrices. On a tenté de compresser les délais; on a essayé d'utiliser des meilleurs moyens de gestion et de contrôle de notre organisation. On doit avouer que, malgré ces efforts de rationalisation, actuellement, dans le traitement des plaintes, il est évident que les délais que nous connaissons ne sont pas acceptables. On le constate également en matière de communication: ce n'est pas avec des budgets de quelque 65 000 $ qu'on peut quadriller le Québec et faire connaître à l'ensemble de la population la

Charte des droits et libertés. Je pense que c'est tout à fait ridicule. Ce n'est même pas nécessaire d'aller lire les chiffres qui nous sont suggérés par la firme Optimum.

Au cours des dernières années, nous avons voulu centrer nos efforts sur le service à la clientèle et, par voie de conséquence, sur la qualité de ce service. Nous sommes conscients qu'en améliorant, d'une part, la qualité de vie au travail de nos employés, leur participation à l'élaboration des objectifs, leur formation, la représentativité des diverses couches de la société au sein de la CDP, nous atteindrons cet objectif. D'ailleurs, sur chacun des thèmes, nous avons élaboré des objectifs précis. Avec la collaboration des employés, nous avons préparé un plan de changement organisationnel qui vise à assurer une meilleure qualité de vie au travail au sein de l'organisation et à promouvoir des changements significatifs axés sur la participation des employés.

Il convient également de mentionner que, depuis quelques années, nous avons élaboré, avec la collaboration du syndicat, un plan de formation des employés qui vise à les mettre au courant des plus récents développements en matière de droits et libertés, tout en les sensibilisant aux situations de discrimination que vivent certains groupes et à l'apprentissage de techniques pour mieux remplir leur travail.

En matière de programmes d'accès à l'égalité dont il a déjà été question ici, je crois que nous avons fait le travail préliminaire qui s'imposait afin d'abord de faire une analyse de notre effectif et de faire ensuite le rapport de cette analyse d'effectif sur la population active au Québec, sur ce qu'on appelle la disponibilité de l'employé. Actuellement, à la Commission des droits de la personne, 14 % des employés de la commission sont nés hors du Canada, 65 % sont des femmes, 51 % des professionnels sont des femmes, 3 % répondent à la définition de personnes handicapées et une personne est autochtone. Est-ce que cette situation est acceptable? Je pense qu'il faudra terminer les études de disponibilité pour le savoir. On note toutefois que la Commission des droits de la personne se compare avantageusement avec la fonction publique québécoise pour ce qui est des minorités ethniques puisque la fonction publique en compte 4,3 %. Je pense que ce sont des chiffres qu'on a vu récemment publiés par le Conseil des communautés culturelles.

M. Boulerice: Je crois qu'il y a eu une baisse malheureusement...

M. Lâcha pelle: il y a eu une baisse. Oui, c'est ce que madame Westmoreland mentionnait récemment, effectivement.

Puisque nous sommes au chapitre des ressources humaines, j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est donnée ici de rendre un hommage particulier aux employés de la commis-

sion. Je dois vous dire que tous, nous ressentons vivement les critiques qui ont été adressées à la Commission des droits de la personne. Nous aussi, nous vivons quotidiennement les ambiguïtés et les conflits de notre mandat. Nous savons tous que la vie publique de la Commission des droits de la personne n'est pas facile, qu'elle doit se soumettre à la vie démocratique.

Je dois cependant ajouter, de la part de ceux et celles qui oeuvrent avec toute leur énergie au sein de la commission, que nous aurions effectivement espéré une petite place pour qu'on témoigne du travail méritoire et remarquable de chacun et chacune des employés. À défaut, je me permets de vous signaler leur labeur incessant, leurs préoccupations constantes pour la promotion des droits et libertés, de la part de chacun des employés et de tous les commissaires de la Commission des droits de la personne. Or, c'était, M. le Président, les quelques messages que je voulais vous livrer en préliminaires, de façon à ouvrir le débat.

Si vous me le permettez un instant, si, avant 18 heures, vous nous donniez quelques minutes, je pourrais vous présenter le guide à l'intention des jeunes qu'on a publié récemment. Il serait peut-être intéressant, à titre d'exemple en matière de communication et d'éducation, qu'on vous livre ce document. Ce ne sera pas hors contexte, je pense bien.

Discussion générale

Le Président (M. Filion): D'accord. Je vous remercie, M. le président. En ce qui concerne le guide des jeunes, nous en avons discuté entre nous et nous avons hâte d'en avoir la présentation. Si vous le voulez bien, nous allons tous nous donner la discipline de cesser nos travaux vers 17 h 45 ou 17 h 50 pour laisser quinze minutes pour vous permettre de nous présenter ce document qui, je dois le dire immédiatement, pour les membres de la commission, est extrêmement important. Cela rejoint une clientèle jeune et donc d'avenir.

Je dois malheureusement quitter et, en ce sens-là, le député de Marquette va me remplacer comme président pour quelques minutes pour l'enregistrement d'une petite émission qui ne dure pas longtemps.

Je veux simplement signaler ceci, gardant mes questions et mes commentaires sur le fond des sujets pour tantôt et, je le répète, j'ai eu l'occasion de vous le dire, quant à moi, les critiques des groupes, personnes et intervenants entendus en commission parlementaire ont été jugées peut-être par certains et certaines comme sérieuses et graves. Ce n'est pas mon cas, vous le savez. Comme membres de la commission, nous avons eu l'occasion d'en discuter entre nous. Je dois vous dire que pour nous, si les critiques ont été, dans certains cas, aiguës, c'est parce que les expectatives sont énormes de la part de l'ensemble de la clientèle de la Commission des droits de la personne. On s'en va à la Commission des droits de la personne - les intervenants i nous l'ont dit avec leurs mots - et on s'attend à ' ce qu'il y ait une espèce de justice transcendante, mais la justice transcendante n'existe pas. Félix Leclerc disait même que la justice n'habite pas les palais qu'elle construit. J'ai toujours pensé que la justice est une vertu, qu'elle devrait se retrouver partout.

En ce qui concerne la Commission des droits de la personne, quand vous entrez dans vos bureaux, la plaque est là, les gens s'atten dent à beaucoup. Donc, si leurs critiques ont pu paraître aiguës et parfois négatives, en ce qui concerne les membres de la commission, je dois vous dire que ces critiques ont été vues, au contraire, de façon constructive, et d'aucune façon le travail effectué par vous, vos prédécesseurs, par le personnel de la Commission des droits de la personne n'a pu, à notre avis, avoir été jugé de mauvaise foi ou quoi que ce soit. Chacun fait là-dedans ce qu'il peut, avec les structures et les outils que vous avez.

Ces remarques faites, j'invite maintenant les membres de la commission à aborder les sujets - le président en a rappelé six ou sept - ou les questions qui les préoccupent avec le président et son personnel, s'il juge à propos de donner la parole à quelqu'un d'autre. J'espère bien être de retour dans le plus bref délai.

Je vous remercie. M. le député de Marquette agira comme président.

Le Président (M. Dauphin): Comme le président vous l'a mentionné... D'ailleurs, on aimerait s'excuser pour la semaine dernière. Certains d'entre vous se sont rendus à Québec, je ne dirais pas inutilement parce que Québec a certains avantages par moments, mais...

Une voix: Comment par moments?

Le Président (M. Dauphin): Tout le temps! Ha, ha, ha!

Certains d'entre nous étions au service funèbre du juge en chef de la Cour d'appel, M. Crête. D'ailleurs, certains organismes s'étaient rendus également à Québec la semaine dernière. Alors, on s'excuse.

Sans plus tarder, est-ce que des membres aimeraient commencer la période de discussion? Mme la députée de Groulx. (16 h 15)

Formation du personnel de la commission

Mme Bleau: Je voudrais parier surtout de la formation de votre personnel. Selon certains organismes consultés - cela ne veut pas dire que mon idée est déjà faite - le personnel de votre commission semble mal formé pour traiter certaines plaintes et peu sensibilisé aux diverses formes de discrimination et d'exploitation. Pourriez-vous nous parler un peu de la formation de votre personnel entre autres?

M. Lachapelle: Je dois vous mentionner que depuis trois ans - auparavant, je comprends qu'il existait un plan de formation, je suis mal placé pour vous en parler - nous avons véritablement mis en place un programme de formation annuel. Ce programme de formation est discuté, comme le veut notre convention collective, avec un comité patronal-syndical. Nous nous sommes fixé comme objectif d'y consacrer 1 % du budget total réservé aux salaires, ce qui donne à peu près 35 000 $ par année, cette année, et également trois jours par employé de formation. C'est donc à partir de ces deux paramètres, si vous voulez, qu'on établit un plan de formation à la Commission des droits de la personne.

Ce plan de formation est établi à partir, d'autre part, d'une évaluation des besoins des employés. Les employés font connaître, par l'intermédiaire de leur direction, leurs besoins ou ce dont ils ont besoin pour travailler dans leur secteur d'activité. Ces programmes peuvent être très vastes, c'est-à-dire toucher à la charte. Ils peuvent aussi toucher à des problèmes très particuliers. Récemment, des employés ont demandé des cours pour leur permettre de faire affaire avec ce qu'on a appelé des clients perturbés. Vous savez qu'à la Commission des droits de la personne, bien sûr, c'est souvent le dernier recours. Il y a bien des gens qui viennent chez nous et souvent c'est très difficile de négocier avec eux. De manière à pouvoir les aider, de manière aussi à sécuriser les employés, il y a eu un cours sur ce dossier.

Également, il y a des cours sur la charte qui sont donnés tant par des gens de l'interne que par ceux de l'externe. On a eu des cours ou des sessions de formation sur la sensibilisation aux différents milieux, si vous voulez, concernant les autochtones. Cette année, on va mettre un accent particulier sur le traitement des plaintes. Une firme actuellement est à préparer un rapport. Après avoir fait le tour de tous les enquêteurs de la commission, des commissaires et oes personnes qui s'occupent du domaine de l'enquête, elle nous a remis ou nous remettra dans quelques jours un rapport sur une formation planifiée sur quelques années pour les employés de la Commission des droits de la personne.

Tout cela pour dire et peut-être pour répondre à certains reproches qu'on avait faits. On ne peut pas dire que des employés ne peuvent pas se tromper. Je pense qu'on a droit à l'erreur et, effectivement, il y a des gens qui ont pu se tromper. Il a pu arriver que des plaintes recevables ont été refusées. Que voulez-vous? Je ne peux pas nier cela. Mais il ne faut pas partir de cette question pour dire que les employés de la Commission des droits de la personne ne reçoivent pas de formation. Je pense qu'au contraire les indications que je voijs donne démontrent qu'on a un plan de formation ou un programme et qu'on a bien l'intention de le faire fonctionner jusqu'au bout. C'est le désir de la commission et de tous ses employés.

Cas d'exploitation de personnes

Mme Bleau: Vous dites que certaines plaintes auraient pu être retirées à certains moments ou refusées. Le Comité provincial des malades a fait part que certains agents auraient refusé de prendre des plaintes concernant l'exploitation dont sont victimes les personnes âgées ou handicapées, sous prétexte que ce n'était pas tout à fait le rôle de la commission d'entrer dans ces plaintes. Est-ce que, de ce côté-là, il va y avoir des améliorations? On entend beaucoup dire, de ce temps-ci, que certaines personnes âgées, dans certains centres, subissent des mauvais traitements ou des choses semblables. À ce moment-là, si la plainte vient à votre commission, est-ce que votre commission est capable de regarder cette plainte et de s'en occuper?

M. Lachapelle: Effectivement. D'ailleurs, on a reçu beaucoup de ces plaintes d'exploitation. On en a une qui est actuellement en enquête. Je ne me souviens pas du nom. C'est un cas bien connu parce que, justement, le ministère des Affaires sociales est intervenu. Même si le dossier est réglé en ce qui concerne les Affaires sociales, nous continuons l'enquête dans ce dossier. C'est une plainte d'exploitation. Les plaintes d'exploitation, dans le cas des personnes âgées, je dois vous avouer que ce ne sont pas des dossiers faciles que de démontrer l'exploitation. Il faut que quelqu'un ait tiré profit de... et à cause de son âge. Alors, la démonstration n'est pas facile à faire. Je ne sais pas quel est cet exemple qui a été donné ici. Ce sera peut-être difficile de discuter à partir...

Mme Bleau: il y avait plusieurs exemples.

M. Lachapelle: il y avait plusieurs exemples. Je dois vous dire que, généralement, en tout cas, ils sont acceptés et on a bien l'intention, justement, d'aller rencontrer ces groupes et l'ensemble de tous les groupes qui ont déposé des mémoires justement, pour discuter avec ces personnes véritablement des problèmes qu'ils ont soumis devant vous et qui auraient peut-être dû être adressés à la Commission des droits de la personne. On nous avait déjà soumis l'idée que nous devrions enquêter sur l'ensemble des centres d'accueil du Québec.

Mme Bleau: C'est tout un ouvrage.

M. Lachapelle: Vous savez que c'est toute une entreprise.

Mme Bleau: Bien, je comprends. Je pense qu'à ce moment-là, je ne vois pas très bien votre rôle dans une enquête semblable. Ce serait plutôt le rôle, justement, du ministère de la Santé et des Services sociaux. Mais je parle de plaintes en particulier qui pourraient vous être

acheminées pour une personne donnée ou un groupe de personnes.

M. Lachapelle: Nous l'avons fait dans plusieurs cas pour des personnes âgées et, très souvent, ce que l'on constate, et je dois vous dire que ce n'est pas facile, les personnes souvent se refusent même à avoir une enquête. Il y a des CLSC qui sont venus chez nous pour nous dire: Telle personne est exploitée. On va voir ces gens dans la crainte de voir qu'un fils qui les exploite va sortir de la maison, mais ils se retranchent. Dans un cas, je dois même vous dire qu'on a pris une injonction pour forcer la personne à sortir. Cela a été la seule façon parce que la personne ne voulait pas collaborer, et on constatait une situation d'exploitation. Je pense qu'on a encore un dossier de ce genre. Mme Duplé aimerait ajouter quelque chose.

Mme Duplé (Nicole): C'est plus généralement que je voudrais parler. Je crois qu'il est important de comprendre quand même que les agents de recevabilité sont enfermés dans un cadre très strict, la charte. La notion de discrimination est une notion fermée, bien cernée par la charte. Souvent, les personnes viennent déposer des plaintes. Elles se prétendent discriminées. Elles sont toutes surprises lorsqu'un agent de recevabilité leur dit: Mais non, vous n'êtes pas victime de discrimination; d'après les faits que vous me rapportez, il n'y a pas de discrimination. La personne se sent bouleversée. Elle dit: Je suis absolument incomprise; moi, je sais que j'ai été discriminée. L'agent de recevabilité aurait peut-être dû lui dire: Écoutez, cela ne rentre pas dans un cas de discrimination. C'est très long. C'est presque donner un cours de droit.

La notion même d'exploitation est une notion qui parie d'elle-même. Il faut que vraiment la personne qui exploite en retire un bénéfice. Des mauvais traitements en soi, cela ne constitue pas de l'exploitation. C'est tout aussi scandaleux, mais cela ne relève pas de la juridiction de la commission.

Il y a bien des dossiers qui probablement sont rejetés par l'agent de recevabilité. Ils ne sont pas acceptés par l'agent de recevabilité parce que les faits qui ont été amenés devant lui ne suffisent pas pour permettre de penser qu'il pourrait y avoir discrimination. Alors, quand un agent de recevabilité dit: Est-ce que vous avez d'autres faits? Non.. On ne peut rien pour l'instant, c'est cela. Parce que des cas d'exploitation, je crois qu'on en a traité un certain nombre. Pour ceux que l'on a traités, je dois le dire, les enquêteurs ont fait un travail parfois absolument incroyable et cela aboutit toujours à quelque chose, enfin.

M. Lachapelle: J'aimerais peut-être ajouter une petite chose. Suivant nos règles de procédure, les employés ne statuent pas sur la recevabilité. À partir du moment où, effectivement, il y a un motif de discrimination où un préjudice est subi, les agents de recevabilité doivent ouvrir un dossier. Évidemment, ce que l'on demande aux agents de recevabilité, c'est de pousser un peu plus loin et de dire: Écoutez, en cas d'exploitation surtout, pouvez-vous quand même nous donner certains éléments qui vous font croire qu'il y a exploitation? Et dans ce cas, il y a quand même des éléments assez précis qu'il faut conjuguer pour s'assurer que, véritablement, on pourra faire enquête.

Il ressort que, lorsqu'on commence à poser des questions, les gens nous disent: Écoutez, vous refusez la plainte. Ce qui n'est pas le cas. Ce qu'on demande, c'est de poser au moins des questions préliminaires et ce n'est pas nécessairement un refus d'une plainte parce qu'on pose certaines questions au moins pour étayer le dossier et orienter ensuite l'enquêteur. Je pense que dans ces cas-là, c'est probablement ce qui est arrivé.

Mme Bleau: Devant la situation qui s'aggrave un peu, est-ce que vous songez à donner, peut-être, des directives spéciales à vos enquêteurs pour vraiment se pencher sur l'exploitation qui peut avoir lieu auprès des personnes âgées? Je pense que ce sont des dossiers un peu spéciaux, et on en entend tellement parler de ce temps-là, d'un côté ou de l'autre, qu'il doit y avoir du vrai quelque part. Je me dis qu'il y a certainement du vrai quelque part. Est-ce que vous avez l'intention de porter une attention spéciale à ces dossiers?

M. Lachapelle: Tout à fait, madame, Et je dois vous dire que, dans la région de Québec, si vous me permettez de vérifier... M. Bilocq m'indique justement qu'ils ont rencontré les D.G. de l'ensemble de la région pour parler de ces questions d'exploitation.

Mme Bleau: Vous comprenez que cela m'intéresse, avec l'âge qui avance.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bleau: Je me sens...

Une voix: C'est vrai pour tout le monde.

Mme Bleau: ...tout à fait concernée par ces problèmes et je vous remercie de vos réponses.

Le Président (M. Dauphin): Merci, Mme la députée de Groulx.

Je vais maintenant reconnaître M. le député de Louis-Hébert et ensuite M. le député de Shefford.

Règlement des plaintes

M. Doyon: Merci, M. le Président. D'abord quelques mots pour souligner que la présentation

qui nous est faite par la commission est extrêmement appréciée. Je dois rendre hommage ici et le faire en même temps pour la commission... Nous nous sommes penchés pendant de nombreuses heures sur tout ce qui concerne la commission. Je suis député depuis un certain nombre d'années et je peux vous dire que le travail accompli par mes collègues est absolument remarquable. Je profite de l'occasion pour vous le dire. Je pense qu'on oublie très souvent cet aspect du travail des députés. C'est souvent négligé et passé sous silence. Mais c'est un travail important et, quand on parle de la Commission des droits de la personne, cela prend une importance particulière.

J'ai eu l'occasion de signaler que j'ai déjà été un utilisateur des services de la Commission des droits de la personne et j'ai pu me rendre compte que les gens qui ont travaillé sur mon cas à ce moment-là l'ont fait avec professionnalisme, avec équité et avec justice en autant qu'ils pouvaient le faire, avec objectivité, avec les moyens dont ils disposaient. Et, dans bien des cas, ces situations sont des situations où le rapport de forces, bien souvent, n'est pas égal. Je pense qu'il faut faire attention d'oublier cet aspect des choses. Dans la plupart des cas que je pourrais identifier, en tout cas, les gens qui ont recours à la Commission des droits de la personne le font dans une situation de faiblesse, alors qu'ils sont assaillis, attaqués, se sentent diminués et disposent de peu de moyens finalement. La commission doit servir jusqu'à un certain point à rétablir l'équilibre et a permettre qu'un rétablissement des choses puisse se faire, et très souvent cela intervient à la toute fin, alors qu'il y a proposition de règlement, acceptation de règlement ou pas. La personne qui se voit proposer un règlement n'est pas toujours aussi bien placée qu'elle le voudrait pour apprécier la valeur de ce règlement, premièrement, et, deuxièmement, même si elle juge qu'il "'est pas suffisant pour demander quelque chose qui serait plus adéquat.

Je me demande si votre commission a réfléchi à cet aspect des choses. On conçoit très bien que les gens soient capables de signer des ententes et qu'ils soient capables d'en accepter les conséquences, mais, très souvent, ils le font dans des circonstances où ils n'ont pas toujours la complète liberté d'agir, même si, légalement, c'est parfaitement correct. Je me demande si la commission se verrait un rôle d'appréciation concernant les règlements qui sont acceptés par les parties. Ou considérez-vous que des parties majeures qui sont en état de contracter et de tester et qui sont, pour la plupart du temps, vaccinées devront tout simplement accepter les conséquences des actes qu'elles posent? Est-ce que vous avez réfléchi à ce dilemme, à cette question?

M. Lachapelle: Ce que nous demandons aux enquêteurs, c'est de présenter à chacune des parties les possibilités de règlement, quelle est, si vous voulez, la jurisprudence des tribunaux de manière à éclairer les gens et à leur dire: Écoutez, ce que vous attendez là, il n'y a pas un tribunal qui va vous l'accorder si jamais on devait aller plus loin en bout de course. Les enquêteurs tentent de faire état de la force ou de la faiblesse de la preuve qu'on a aussi entre les mains parce que c'est quand même important. Et il y a aussi un élément très important. Souvent, les parties, parce qu'elles veulent régler leur dossier, sont prêtes à régler à rabais. Je dois vous dire là-dessus que souvent on intervient pour leur dire: Non, il ne faudrait pas accepter ce règlement; il ne nous semble pas acceptable. C'est un peu le rôle de médiation que l'on joue auprès des parties. (16 h 30)

D'autre part, pour chacun des règlements, on a un comité d'enquête de trois commissaires qui examinent chacun des dossiers et aussi chacun des règlements. On veut s'assurer dans chacun des cas, d'abord, prima facie, si les montants qui sont là ou les ententes qui sont là sont acceptables et, si cela ne nous apparaît pas tout à fait acceptable, on discute du dossier et on demande aux enquêteurs si les parties sont bien informées et connaissent bien l'ensemble du dossier. On intervient même au niveau de la preuve présentée afin de savoir pour quelle raison ce règlement a été accepté et, dans chacun des cas, cela se fait. Il y a des gens qui nous disent carrément: Moi, une lettre d'excuse, cela me suffit; je ne veux pas en savoir davantage. C'est très difficile à apprécier dans chacun des cas quelle est la motivation véritable des gens pour accepter ces règlements. Récemment, un aveugle nous disait: Moi, j'accepte un montant de quelques centaines de dollars, mais je ne le veux même pas pour moi; vous allez le donner à la fondation Mira. Je pense que c'est là un règlement acceptable. On règle des dossiers de harcèlement sexuel pour 500 $ ou 600 $ parce qu'il y a des gens qui disent: Je veux en finir avec ce dossier; ce que je veux, c'est qu'il y ait un montant de payé qui est peut-être symbolique. Par contre, la semaine dernière, il y en a eu un qui a été réglé pour 14 000 $.

Pouvoirs de la commission

M. Doyon: Est-ce qu'il serait concevable dans l'opinion de la commission qu'elle ait un pouvoir qui lui permette d'entériner, de ratifier, de valider des règlements? Est-ce que c'est un pouvoir qui vous paraît bonifier l'action de la commission ou si c'est quelque chose qui vous paraît nettement exorbitant et qui n'est pas, d'après vous, nécessaire ou utile?

Mme Duplé: Si vous me le permettez. Je crois que votre question se situe vraiment au coeur du problème que nous vivons actuellement à la commission. Si la commission recevait le

pouvoir de déterminer, de décider du montant du règlement qui serait adéquat pour qu'il y ait vraiment réparation dans les circonstances, nous nous trouverions à donner à la commission un pouvoir décisionnel. D'accord? Tout ce qui a été enquête de la commission et qui doit aboutir normalement à une recommandation servant de base à la conciliation deviendrait une enquête qui aboutirait à une prise de décision. Alors, ce serait une transformation radicale du rôle de la commission parce que le législateur a envisagé que la commission était avant tout un organisme de promotion des droits, d'éducation par conséquent et également, ce qui est tout à fait dans sa vocation première, dans son prolongement, un organisme de conciliation. C'est pourquoi, lorsqu'on arrive avec une demande de règlement, lorsque la partie qui s'est plainte de discrimination par exemple, demande tel montant, on a assez peu, à la commission, de possibilités pour imposer à l'autre partie un montant supérieur. On peut négocier, et c'est ce qui se fait, une négociation, amener les parties à régler leur problème. Mais on ne peut pas imposer, car la commission n'est pas un organisme avec des pouvoirs coercitifs. C'est cela, le problème.

M. Doyon: Oui. Je suis d'accord avec vous. Tant qu'à y être, la porte est ouverte, on peut y aller, toute l'organisation, la structure. Est-ce que vous voyez une commission qui pourrait se transformer, se métamorphoser en un tribunal et qui se scinderait probablement en deux parties, une partie de promotion, de défense, et qui jouerait un rôle qui ne serait pas un rôle neutre, et, à part cela, probablement un tribunal qui, lui, aurait un pouvoir d'adjudication? Après, on pourrait discuter de toute l'exécution de l'adjudication qui serait accordée par ce tribunal. Je comprends que, là, on entre dans des décisions politiques, à savoir ce qu'on veut faire de la Commission des droits de la personne et comment on veut protéger les droits et libertés de la personne au Québec. Est-ce que vous avez déjà eu l'occasion - cela ne me surprendrait pas trop - de réfléchir à cela et pouvez-nous nous dire quel est le résultat de cette réflexion?

M. Lachapelle: Je veux juste revenir sur la question des règlements pour en terminer. La commission canadienne entérine les règlements. Ce que l'on en sait, c'est qu'à peine 1 % des règlements ne seraient pas acceptes où l'on dit. Bah! cela ne nous semble pas tout à fait assez; vous devriez renégocier. Finalement, le contexte de la commission canadienne est un peu différent parce qu'on fait affaire avec des organismes publics, des organismes fédéraux qui sont peut-être plus en mesure d'offrir des règlements monétaires plus importants.

Je reviens à la question que vous soulevez et qui est, je pense, au coeur des débats. Je pense que nous constatons des lacunes importantes au chapitre du traitement des plaintes, probablement à cause d'une ambiguïté dans la charte qui donne à la commission à la fois un rôle de promotion, un rôle de règlement des plaintes par la médiation, un rôle d'enquête en même temps où on voudrait à la fois jouer un rôle de promotion, mais un rôle d'enquête impartiale et, à la limite, un rôle de tribunal. On attend beaucoup de nous sous cet aspect et, finalement, les groupes nous ont demandé de mettre en place même des règles de procédure assez rigides qui nous donnent l'allure d'un tribunal, ce que nous ne sommes pas. Après un long processus, on arrive devant nous, on agit comme si on était un tribunal et tout à coup on dit: Voici, nous croyons que votre plainte est bien fondée, mais si vous voulez en savoir plus long, allez devant un juge. Effectivement, il va falloir corriger cette situation.

Je dois vous dire que nous en sommes à des réflexions là-dessus et probablement que, pour régler ces ambiguïtés, il faudrait vraisemblablement arriver à une formule, je ne sais pas si cela s'appelle un tribunal, mais à une formule où on consacrerait véritablement le rôle d'éducation de la commission, de promotion, d'enquête de manière à nous permettre d'établir prima facie s'il y a véritablement une situation de discrimination et, ensuite, de porter le dossier soit devant un tribunal de droit commun ou devant un tribunal des droits de la personne. Cela nous semblerait - en tout cas, on n'a pas d'analyse plus poussée, on est en train de le faire - probablement une voie intéressante.

Ailleurs au pays, la commission ontarienne, la commission canadienne a ce genre de tribunal, mais on ne connaît pas le degré de succès, si l'on veut, de ces tribunaux. Mais il nous apparaît, en tout cas à première vue, que sur papier cela pourrait être une formule intéressante. Je ne sais pas si des collègues aimeraient ajouter quelque chose.

Mme Duplé: Je voudrais simplement ajouter que c'est pour assurer le succès du règlement éventuel qu'on a été amenés à judiciariser de plus en plus. Finalement, quand une plainte est déposée devant la commission, immanquablement, il y a une personne qui prétend qu'une autre personne a commis un acte illicite qui lui porte préjudice. Même si la commission ne se prononce pas à l'issue de son enquête par une décision, elle va examiner si vraiment, à son avis, une personne a effectivement posé un acte illicite.

Le succès du règlement éventuel repose sur la conviction de cette personne qui est accusée, entre guillemets, sur la conviction qu'effectivement son cas a été vraiment évalué à son mérite comme un tribunal pourrait le faire éventuellement. Si on a suivi la règle audi alteram partem vraiment dans toute sa splendeur, il est certain qu'on a davantage de chances que le règlement se fasse. Sauf que, quand on a suivi la règle audi alteram partem, cela a été long et compliqué, on s'est bagarré à coup d'avocats et de procédures.

On arrive au moment où le règlement va avoir lieu et la partie mise en cause dit: Ah, non! Moi, cela ne me convient pas. Et là on dit au plaignant: Vous savez, on ne peut rien faire. On a envisagé que la commission soit un organisme qui dispense le citoyen d'aller devant les tribunaux pour qu'ils aient gain de cause finalement sans aller devant un tribunal et là on lui dit: Vous avez dépensé autant d'argent et autant d'énergie que si vous étiez devant le tribunal, et voilà, il va falloir tout recommencer.

Je suis sûre personnellement qu'il y a certainement moyen, en faisant une réflexion évidemment très approfondie, de trouver quelque chose, un moyen pour sauvegarder le rôle de conciliation qui, à mon sens, et je crois que tout le monde à la commission partage cet avis, fait corps avec ce rôle de promotion des droits et que l'on devrait sauvegarder. Il faudrait peut-être aussi donner un peu de dents à la commission si jamais ces pouvoirs de conciliation ne fonctionnaient pas. Cela va être le fruit d'une réflexion peut-être dans quelques jours.

Orientations de la commission

M. Kehoe: Justement, la solution proposée par certains intervenants, c'est la création d'un tribunal. Vous avez mentionné tantôt que l'on fait des études plus approfondies dans les autres provinces du Canada. Je pense que cela existe dans la plupart des autres provinces du Canada et que cela existe au fédéral.

Je me demande si jusqu'à maintenant vous n'avez pas étudié les autres systèmes ou si vous n'êtes pas allés plus loin. Est-ce juste depuis que la commission a été créée et que nous avons commencé nos travaux que vous avez poussé la réflexion du côté de la possibilité de créer un tribunal? Est-ce depuis un certain temps que vous étudiez cette possibilité ou que vous étudiez comment cela fonctionne dans les autres provinces ou les autres endroits au Canada? Où en sont vos réflexions dans ce domaine?

M. Lachapelle: Déjà en 1986, on s'était donné comme objectif de regarder tout le mécanisme de traitement des plaintes à la commission, en étant particulièrement attachés à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Du même souffle, on s'était dit qu'il fallait bien regarder ce qui se fait ailleurs. On a un certain nombre d'évaluations de faites de la commission québécoise. On connaît vraisemblablement où sont nos embûches. Il nous reste à voir exactement comment cela se fait ailleurs dans les autres provinces et quel est le résultat. Évidemment, sur papier, on a bien sûr examiné les législations. Cela apparaît relativement bien. Cela semble être une mécanique qui fonctionne. Reste à aller voir quels sont les résultats concrets.

Mais on a commencé avant. Je dois vous dire que depuis environ dix ans à la commission, c'est la question qui revient continuellement. Au départ, on était dans un système inquisitoire, mais on nous indiquait qu'il y aurait lieu d'appliquer à la Commission des droits de la personne l'article 23 qui indique qu'on doit entendre... Et on nous considérait comme un tribunal. Alors, à ce moment-là, on a mis en place des règles de procédure relativement rigides, on est devenus un peu comme un tribunal. On entend les parties. Chacune des personnes témoigne en présence l'une de l'autre, tant et si bien qu'on utilise également le subpoena. Les tribunaux nous ont dit: Bien sûr, vous êtes quasi judiciaires. Évidemment, d'un événement à l'autre, on s'est donné une espèce d'apparence de tribunal. Ce n'est peut-être pas cela qu'il faudrait faire. Il faudrait peut-être revenir à un système inquisitoire.

Mais si on revient à un système inquisitoire, il faudrait peut-être oublier le subpoena à ce moment-là parce qu'à partir du moment où vous utilisez le subpoena et qu'une personne est assignée et doit répondre sous serment, c'est évidemment toute la batterie qui commence. On dit: Bien oui, si vous voulez que je réponde sous serment à l'accusation, entre guillemets, de harcèlement sexuel, vous allez me permettre d'avoir mon avocat. Et je veux entendre la partie adverse aussi. Hé bien! Ça y est. On est devant une audience publique et on vient de lancer le tribunal.

Je remarque qu'à la commission canadienne on ne peut utiliser, sauf erreur, le subpoena et à la commission ontarienne également depuis 1982. À moins que ce soit l'inverse? Non. Depuis 1982, à la commission ontarienne, on a aboli l'utilisation du subpoena justement à cause de ces contraintes parce que, dès qu'on fait cela, on enclenche un processus à tout le moins quasi judiciaire.

M. Kehoe: C'est le débat fondamental qui est de savoir quelle orientation vous allez continuer de prendre. C'est la solution la plus spectaculaire peut-être de suggérer la création d'un tribunal de droit. C'est vraiment là que le débat de fond doit se faire pour savoir quelle orientation prendre.

M. Lachapelle: C'est-à-dire que je pense qu'en fin de compte c'est au législateur à prendre ces orientations. Quant à nous, on veut bien essayer de vous éclairer sur ce que l'on connaît et surtout sur nos difficultés vécues depuis dix ans. Le constat que je faisais tantôt, c'est qu'il y a un changement à faire.

Un changement serait que la commission elle-même décide d'aller vers un système inquisitoire mais, encore une fois, avec la possibilité d'utiliser le subpoena. Je ne vois pas pourquoi on ne l'utiliserait pas s'il est là. On va nous dire: il faudrait faire témoigner le "mis en cause" et il ne veut pas venir. Bien oui, mais utilisez le subpoena. Enfin, on enclenche rapide-

ment... Je ne vois pas pourquoi on ne se servirait pas du pouvoir qui est là.

À ce moment-là, il faudrait assurément faire quelques petites modifications à la charte si on disait qu'on ne crée pas un tribunal, mais qu'on utilise strictement les pouvoirs qui sont là. (16 h 45)

Le Président (M. Filion): La parole a été donnée, je crois, au député de Louis-Hébert. Le député de Chapleau était sur le même sujet. C'est ça, c'était sur le même sujet. Cela va, M. le député de Louis-Hébert? On peut peut-être passer... Il a quitté, de toute façon. Bon!

Une voix: il a dit qu'il quitterait très vite.

Le Président (M. Filion): D'accord. Je vais laisser la parole au député de Shefford.

M. Paré: Si vous ne suiviez pas l'ordre, M. le Président, j'étais pour me plaindre à la Commission des droits de la personne.

M. Boulerice: Comme représentant d'une minorité invisible, je vais me plaindre du traitement qu'on me réserve de me faire passer après le député de Shefford.

M. Paré: Cela dit, sérieusement, c'est vrai que parfois on pense qu'il y a des ententes qui ne semblent pas acceptables ou on en dénonce: l'aveugle, par exemple, qui a une bouteille de Champagne ou un lunch pour régler son problème. Je dois dire: Je comprends cela et j'accepte' cela. Je dois dire que le plus grand gain de l'aveugle au moment où il obtient cela, c'est d'être accepté dans le restaurant et faire accepter le principe par ce restaurateur et les autres restaurateurs. Il n'a pas besoin d'autre chose. Il y a le principe qui est accepté. Si on réussissait à régler tous les cas de cette façon, j'accepterais cela.

Maintenant, juste quelques questions pour permettre à mes collègues d'en poser, ils semblent nombreux à vouloir le faire. Sans vous demander de dévoiler des secrets d'État, vous avez commencé votre intervention en parlant du plan triennal qui va être déposé le 15 avril. Cela veut dire qu'on devra se réunir en commission et finalement étudier le plan qui va être déposé. Je pose quand même une question. Vous n'êtes pas obligés d'y répondre. Est-ce que, dans le plan qui va être déposé, les recommandations, les suggestions pour améliorer finalement le fonctionnement sont faites en fonction des critiques que vous avez entendues lors de l'audition ou sont-elles orientées en fonction des budgets que vous avez et de la loi actuelle, c'est-à-dire à l'intérieur des moyens qui vous sont donnés et qui sont limités?

Faites-vous des recommandations en fonction des structures actuelles, ou en faites-vous en demandant plus de pouvoirs qui pourraient aller jusqu'à un tribunal?

M. Lachapelle: Les orientations qu'on se donne, bien sûr, sont - on espère aussi que cette commission de l'Assemblée nationale fera des suggestions pour améliorer la Commission des droits de la personne - les orientations que l'on prend, pour être très réalistes, seront dans le cadre des pouvoirs que l'on connaît actuellement à la Commission des droits de la personne. Cela ne nous donne pas grand-chose, sachant combien de temps on peut mettre pour modifier les lois, de tenter des orientations au-delà des pouvoirs qu'on a actuellement ou des budgets qu'on a à la Commission des droits de la personne. Il est bien sûr que la commission dans ses recommandations verra sûrement à aller au ministère de la Justice, qui est l'interlocuteur pour demander des effectifs supplémentaires pour nous aider, entre autres, dans le traitement des plaintes. On pense que ce qu'on connaît actuellement n'est pas acceptable.

M. Paré: il y a un rôle fondamental chez vous: l'éducation, l'information à la population. C'est souvent là qu'on exempte beaucoup de problèmes parce qu'on a prévenu les gens. Là où c'est fondamental, je pense, de donner l'information ou l'éducation, c'est d'abord chez les jeunes si on ne veut pas que la société plus tard se retrouve avec beaucoup de problèmes. Donc, c'est au niveau de la jeunesse. La jeunesse, on la rejoint spécialement et de façon directe au niveau du ministère de l'Éducation. On enseigne, et c'est bien aussi, un lot de matières pour que notre jeunesse soit préparée à faire face à toutes les facettes de la vie un peu plus tard. On a décidé comme société que l'éducation était quelque chose de fondamental.

Donc, le jeune, qui est un adulte en devenir, apprend à compter, à calculer, à lire et à écrire; il apprend aussi les règles morales, les règles religieuses, une foule de choses et il va être un consommateur plus tard. Donc, le ministère responsable de la protection du consommateur a réussi à faire inclure une matière intégrée... comme un consommateur. Mais avant d'être un consommateur, moi, je dis que c'est d'abord un citoyen qui doit être accueillant, qui accepte au moins quelque chose de fondamental, la loi fondamentale finalement de la reconnaissance de l'égalité des citoyens entre eux. Avez-vous des contacts au ministère de l'Éducation et seriez-vous favorables à ce qu'il y ait un programme intégré et global pour que notre citoyen, lorsqu'il va sortir de l'école, soit d'abord un citoyen qui respecte les autres citoyens dans la société?

M. Lachapelle: On aura peut-être l'occasion d'en reparler en traitant de ce document "Pour mieux vivre ensemble". Je ne sais pas si vous étiez arrivé à ce moment. On indiquait que tantôt, en dernière minute, on voulait vous

présenter ce document et vous parler en même temps du travail que fait la Commission des droits de la personne. Si vous retenez votre question jusqu'à ce moment, on pourra en parler; si vous voulez que j'y réponde tout de suite, on pourrait le faire et peut-être qu'on pourrait parler immédiatement de ce guide.

Le Président (M. Filion): Je pense que la question du député de Shefford - peut-être que le guide s'inscrit dans cette réponse - porte plus particulièrement sur la possibilité d'inclure une formation de base en matière de droits de la personne, à titre de cours, de matière intégrée à l'enseignement.

M. Lachapelle: De fait, c'est dans ce cadre qu'on a préparé le document, "Pour mieux vivre ensemble", qui est un exposé de la charte axé - je pense que le titre l'indique - sur la vie en société et l'apprentissage des droits et libertés, mais illustré de façon très quotidienne. Actuellement, au ministère de l'Éducation - on me corrigera si on a des informations plus précises - il n'y a pas de temps spécialement consacré à la Charte des droits et libertés de la personne.. Il y a tout de même certaines périodes de cours, des cours de morale, des cours de civisme, où j'ai compris qu'il y avait une heure de consacrée par année - ce n'est pas beaucoup - pour l'exposé de la charte.

On a demandé au ministère de l'Éducation qu'il puisse utiliser ce guide et je dois vous dire que nous avons eu une réponse très favorable de la part du ministre de l'Éducation. Il a écrit - malheureusement, je n'ai pas la lettre, mais on pourra peut-être vous la fournir - à chacun des directeurs généraux des commissions scolaires leur parlant de ce guide et leur demandant de l'utiliser dans les cours. Il n'y a pas de période spéciale qu'on consacre à l'étude de la Charte des droits et libertés, ce qui serait très ' léressant et qui pourrait constituer un cours probablement aussi important que les mathématiques. On pourrait même apprendre la langue avec ces équipements. Pourquoi pas?

Mme Bleau: Ce serait une bonne manière pour les intéresser.

M. Paré: Je pense que l'école, c'est l'endroit où il faut diffuser la charte, à mon avis, et ce n'est pas avec une heure par année qu'on peut faire de bons catholiques, de bons mathématiciens ou autre chose, mais il faut faire avant tout de bons citoyens et, si on respecte la charte, on sera un bon citoyen.

Un autre point avant qu'on me retire la parole...

Le Président (M. Filion): M. le député de Shefford.

Programmes d'accès à l'égalité

M. Paré: Dans un autre dossier que vous avez touché tantôt, les programmes d'accès à l'égalité, vous avez parlé de chacun des rôles que vous aviez: conseil, enquête et surveillance. Vous êtes revenus sur l'un d'eux qui vous semble primordial pour la commission, celui de conseil et assistance. Pour moi, oui, c'est important, c'est de la formation et si on veut que ce grand principe d'accès à l'égalité soit une réalité, il faut que quelqu'un s'en occupe. Mais pensez-vous vraiment que ce rôle d'assistance et de conseil vous revienne? Est-ce que cela ne devrait pas relever du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu ou du ministère du Travail d'implanter ce service ou d'implanter cette nécessité de reconnaître l'accès à l'égalité, alors que votre rôle, ce serait de vérifier et de vous asssurer ensuite... surtout dans les deux autres rôles d'enquêteur et de surveillant? Si vous aviez à choisir entre les deux... Mais je pense que vous ne pouvez pas choisir entre les deux parce que votre rôle, c'est de vous assurer que la charte est respectée. Comme on dit dans la charte que c'est votre rôle de surveiller pour que toutes les facettes de la charte soient respectées et qu'en même temps on a mis un article sur l'accès à l'égalité, est-ce que l'accès ne devrait pas être implanté par les ministères sectoriels responsables pour que vous en ayez la surveillance par la suite?

M. Lachapelle: Je ne dis pas qu'un ministère sectoriel ne pourrait pas le faire. Effectivement, il pourrait le faire, mais il doit y avoir un organisme chargé de la mise en application des programmes d'accès à l'égalité. Il y a une raison primordiale, à mon avis, c'est qu'il faut s'assurer qu'ils sont conformes à la charte, et je dois vous dire que ce n'est pas si simple que cela. J'avais cru au départ que, avec les programmes d'accès à l'égalité, on pouvait tout simplement arriver dans un organiPTime et dire: il y a 15 % de minorités visibles; vous avez 3 % chez vous; 15 % moins 3 %, 12 %; vous devez augmenter cela à 12 %. Ce n'est pas si simple que cela. Mme Caron est ici; elle pourra peut-être nous en parler, si vous voulez, parce que c'est intéressant de connaître la mécanique pour comprendre ensuite comment s'établit véritablement un programme d'accès à l'égalité à partir des analyses de disponibilité, etc.

Je pense donc qu'il faut un organisme qui voit à ce que ce soit véritablement établi suivant des normes précises sans tomber dans une bureaucratie trop lourde. D'autre part, on a enlevé - c'était beaucoup plus pressant comme obligation - l'article 86.2: "Tout programme d'accès à l'égalité doit être approuvé par la commission, à moins qu'il ne soit imposé par le tribunal". Je pense qu'on voyait à ce moment-là, quand on a fait le chapitre III, que c'était complexe, qu'on ne voulait pas avoir de program-

me bidon, qu'on voulait être sûr qu'on respectait également les principes de la charte parce qu'on pourrait faire des programmes d'accès à l'égalité qui, à certains égards, pourraient être à l'en-contre de certaines prescriptions de la charte. Donc, on avait indique alors qu'ils devaient tous être approuvés. Alors, on allait bien plus loin que cela, bien plus loin que strictement la partie conseil. Quand on l'a mise en application, on n'a pas mis le premier paragraphe de l'article 86.2 en vigueur, on n'a laissé que "La commission, lorsqu'elle en est requise, doit prêter son assistance". Nous, nous disons: À tout le moins, en tout cas, on est conformes à la charte, on répond à cette obligation.

Maintenant, est-ce qu'il est opportun et est-ce qu'il ne le serait pas de modifier la charte pour enlever ce rôle à la Commission des droits de la personne? Je dis que non. Je dis que tout cela est dans l'économie et dans la philosophie de la charte. Cela fait partie de la promotion des droits, de la même manière que lorsqu'on va dans une école et qu'ils connaissent un problème de discrimination raciale, d'aller avec les autorités scolaires, peut-être pas pour mettre en place un programme d'accès à l'égalité - peut-être oui, cela pourrait corriger un problème de discrimination - mais pour mettre en place un programme d'éducation antiraciste, par exemple, un programme d'acceptation mutuelle de tous les Québécois qui sont dans cette école. Alors, de la même manière, je pense que ce n'est pas abusif de penser qu'une Commission des droits de la personne, qui doit faire de l'éducation et de la promotion des droits, puisse non seulement parler en l'air de programmes d'éducation et de promotion, puisse arriver avec un programme très spécifique, car c'est ce qu'on fait, finalement, c'est un programme très spécifique, c'est un programme d'accès à l'égalité dans une entreprise. Je pense que ce doit être à la Commission des droits de la personne de le faire; son rôle global l'y amène tout naturellement.

C'est quand on commence à penser que la Commission des droits de la personne est un tribunal qu'on dit que cela ne va plus. C'est là que cela ne va pas. C'est quand on fait de nous un tribunal; on dit: Bien non, on verrait mal les juges de la Cour supérieure aller implanter des programmes d'accès à l'égalité quelque part dans un cégep ou dans une entreprise, à la Reynolds ou ailleurs. Quand on est un organisme de promotion, on comprend plus facilement.

M. Paré: Mais vous allez admettre avec moi que, dans la tête de la plupart des Québécois, la commission est un peu un tribunal. On va à la commission au moment où on a des problèmes, au moment où on pense que la charte n'est pas respectée ou que quelqu'un ne la respecte pas. Donc, dans la tête des gens, c'est cela, c'est pour s'assurer de l'application de la charte, du respect de la charte, alors que dans ce domaine précis du programme d'accès à l'égalité, c'est l'inverse, c'est pour l'implanter.

Qu'est-ce qui justifie que, dans ce seul domaine, vous ayez le rôle de l'implanter par rapport à un ministère qui devrait le faire, alors que pour le respect de la charte, dans le domai ne de l'éducation, dans le domaine - pas du travail parce qu'on n'a pas d'exemple - de l'habitation, dans les autres domaines, il y a des gens responsables pour faire en sorte qu'il y ait des règles, des critères ou quelque chose qui s'applique et vous quand vous êtes appelés, vous intervenez si ce n'est pas fait? Vous faites de l'information aussi, mais pour l'application, vous exercez plutôt les deux autres rôles d'enquêteur et de surveillant, alors que, dans ce domaine précis, vous êtes les gens qui l'implantez et en même temps les gens qui allez devoir enquêter.

Qu'est-ce qui, selon vous, justifie que vous ayez dans ce domaine et ce seul domaine - à moins que vous n'ayez d'autres exemples à me donner - les deux rôles à jouer? (17 heures)

M. Lachapelle: Encore une fois, je pense que c'est son devoir qui est inscrit à l'article 66: "La commission doit promouvoir, par toutes mesures appropriées, les principes contenus dans la présente charte." C'est un rôle de promotion, très appliqué, très précis, mais c'en est un, qui est la mise en place d'une mécanique de programmes d'accès à l'égalité. À mon avis, c'est le seul point de repère qu'on a.

Encore une fois, quand on en vient à la conclusion que la commission est un tribunal et, si dans la tête des gens la commission est un tribunal, bien sûr qu'on a une difficulté là. Il faudrait peut-être corriger cela, cependant. On a mentionné tantôt une certaine façon de faire qui serait de diviser vraisemblablement ce rôle de promotion, de bien le camper, qu'il se fasse par des programmes d'accès à l'égalité, par des enquêtes, par toutes sortes de moyens, sauf bien sûr de statuer à la manière d'un tribunal sur une plainte. Qu'on divise ce rôle-là. Peut-être qu'à ce moment-là on éclaircirait dans l'idée de la population le véritable rôle d'une Commission des droits de la personne.

M. Paré: Vous ne risquez pas, à un moment donné, si quelqu'un dans une grande entreprise va se plaindre du fait que finalement son droit d'accès à l'égalité n'est pas respecté, que la charte est violée, d'avoir de la part de l'employeur la réponse: Avec la commission, je n'ai pas eu toute l'assistance technique, toute lin-formation nécessaire pour l'implantation, on n'est pas encore rendu là.

Le Président (M. Filion): Uniquement pour compléter la question. D'ailleurs, vous avez signalé tantôt qu'il y avait cinq ou six entreprises où vous étiez à la fois conseiller et enquêteur. Dans le sens de mon collègue de Shefford, dans ces entreprises comment pouvez-

vous véritablement enquêter alors que vous êtes i conseiller? C'est cela, la question.

M. Lachapelle: Dans les faits, cela ne pose pas de problème. Il y a des dossiers très... On peut les nommer sur la place publique, les autres dossiers étant confidentiels: les dossiers de la STCUM, la Commission de transport où il y a 40 femmes qui viennent porter plainte chez nous à l'embauche et qui disent qu'il y avait des règles discriminatoires qui les ont exclues à l'embauche. La commission enquête sur ces sujets et a conseillé, dans un programme d'accès à l'égalité tout autre, la mise en place d'un programme d'accès à l'égalité. Un programme d'accès à l'égalité, ce n'est pas si mystérieux finalement. C'est une analyse des effectifs, une analyse des disponibilités et une analyse également du système d'embauché pour en venir à des moyens pour redresser la situation de discrimination. L'autre cas est quand même différent. Il faut aller voir si effectivement on peut prouver que cette règle dite discriminatoire, en apparence en tout cas, a créé de la discrimination pour ces employés en particulier. Concrètement, en tout cas, cela ne pose pas de problème. Les deux sont différents de la même manière dans la même entreprise. Il y a même une plainte de discrimination à rebours. Si on reçoit une plainte de la part d'un groupe de femmes qui se disent victimes de discrimination, on ne devrait pas recevoir la plainte d'un homme qui, lui aussi, se dit victime de discrimination à cause d'un plan d'emploi. Pourquoi pas? Cela semble aussi contradictoire. Il y a un homme qui vient nous dire: Si je n'ai pas été embauché à la STCUM, c'est parce qu'il y a là un programme d'accès à l'égalité discriminatoire à mon égard, et vous allez enquêter. On a eu la même chose dans la fonction publique québécoise. Il y avait là un programme d'accès à l'égalité qui ne visait qu'à embaucher des femmes comme géologues ou ~.:eique chose comme cela, et on a eu une plainte de la part d'un homme disant: On m'a exclu. Ce programme d'accès à l'égalité n'était pas acceptable. Il a fallu enquêter sur les deux.

Le Président (M. Filion): Cela va.

M. Lachapelle: C'est sûr qu'il faut être consistant jusqu'au bout. Il ne faut pas que les programmes d'accès à l'égalité soient contradictoires. C'est pour cela qu'ils doivent être établis conformément à la charte aussi.

Le Président (M. Filion): Sur le même sujet, Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: Certains groupes se sont plaints entre autres de la lourdeur du processus imposé par la commission dans le programme d'accès à l'égalité. Une proposition avait été faite par Action-travail des femmes qui aurait aimé que l'on permette l'implantation de ce programme par secteur d'entreprise. Est-ce qu'il serait possible que ce soit fait dans ce genre-là? Cela irait peut-être plus vite à ce moment-là.

M. Lachapelle: Est-ce que vous me permettez de céder la parole à Mme Caron qui pourrait peut-être nous éclairer sur le sujet?

Mme Caron (Louise): C'est tout à fait possible, Mme la députée, et c'est ce que nous faisons avec bien des entreprises. Ce que, d'autre part, nous disons aux entreprises quand elles font l'analyse de leur situation - un programme d'accès à l'égalité est un outil de plus que fournit la charte pour contrer la discrimination; ce n'est pas quelque chose qui se surimpose à quelque chose d'autre; c'est un outil supplémentaire que la charte permet d'utiliser et qui n'est pas discriminatoire - ce que nous disons, d'autre part, aux entreprises, c'est de bien regarder tout l'ensemble de leur système pour être bien sûres qu'elles ne se retrouvent pas aussi à faire des ghettos d'emploi et qu'on regarde bien ce que cela peut vouloir dire dans l'accès à l'égalité. Mais en tout temps nous permettons, pas nous permettons... Je voudrais bien ajouter aussi qu'il faut bien comprendre que l'économie de la partie III de fa charte, ce sont les programmes établis sur une base volontaire. Donc nous disons, d'autre part, aux entreprises: Bien sûr, si vous avez des emplois où il y a effectivement de la sous-représentation ou de la sous-utilisation, soit de femmes ou de groupes visés par la charte, bien sûr que vous pouvez faire des programmes d'accès à l'égalité, nommément pour ces corps d'emplois et de façon, comment dirais-je, non pas ponctuelle, mais spécialement pour ces corps d'emploi, certainement.

Le Président (M. Filion): Cela va? Mme Bleau: Bien, merci.

Le Président (M. Filion): Je vais rester sur le même sujet et très concret, la Société de I transport de la communauté urbaine de Montréal, I le cas que vous avez évoqué tantôt. Dans le mémoire d'Action-travail des femmes, on fait état de ce que vous avez souligné, mais on dit un petit peu plus loin que plusieurs femmes s'étaient adressées à la Commission des droits de la personne avant de faire appel à Action-travail des femmes qui, je pense, est l'espèce de regroupement qui a servi à conseiller ces femmes dans leur demande. On dit ici, je cite le mémoire III, page 6: "Le service d'accueil de la commission a refusé de prendre leur plainte sous prétexte que la STCUM mettait sur pied un programme d'accès à l'égalité en collaboration avec la commission". Bref, ce qu'on semble nous dire, c'est que le rôle-conseil était déjà amorcé. Une ou des plaintes sont arrivées. À ce moment, la commission aurait dit à ce groupe de femmes: Bien, écoutez, on a déjà notre rôle de conseil, alors

on va oublier les plaintes.

M. Lachapelle: Je sais pertinemment que, lors d'un premier appel téléphonique, les agents de recevabilité auraient mentionné que cette plainte n'était pas recevable, mais, à ma connaissance, ce n'est pas sur cette base. Ils ne voyaient peut-être pas le problème de discrimination. Je dois vous dire que dans la même journée, par exemple, j'avais appelé Mme Roy justement pour lui parler de ce problème ou de cette question où on exigeait cinq années d'expérience dans la conduite de camions lourds. J'avais parlé à Mme Roy très tôt le matin et je me souviens qu'elle m'avait annoncé qu'il y avait une panne du métro, vers 9 heures le matin. Alors, on n'a pas retardé beaucoup pour parler à Mme Roy et justement pour redire ensuite aux gens: On est prêts à accepter la plainte. Je me souviens même que quand le groupe était venu porter la plainte - c'était quelque temps plus tard - on avait discuté avec les représentants de ce groupe et on avait dit qu'il n'y avait pas de difficultés, qu'on recevait la plainte et qu'on enquêterait. D'ailleurs, l'enquête achève, je pense. C'est une question de mois avant que le rapport final ne soit...

Effectivement, je ne nierai pas qu'au départ il peut y avoir une ambiguïté sur la recevabilité de la plainte.

Le Président (M. Filion): Mais qui est maintenant réglé au niveau de la commission?

M. Lachapelle: Oui, oui.

Le Président (M. Filion): Ce qui est important dans les programmes d'accès à l'égalité, finalement, c'est que ça marche, qu'il y en ait le plus possible et que cela fonctionne. Vous nous dites cet après-midi: On a l'expertise qui est concentrée à la commission. C'est un sujet qui est excessivement complexe. J'ai déjà eu l'occasion de le signaler publiquement. Ce n'est pas une matière simple. Le président lui-même a donné un exemple tantôt qui est fort évocateur des problèmes cornéliens que pose la femme ou l'homme qui vient après qu'il y a eu un programme d'accès à l'égalité en faveur des femmes. Je sais qu'aux États-Unis ils se sont cassé les cheveux en quatre, même à la Cour suprême.

M. Lachapelle: Cela fait vingt ans et on vient d'avoir les premiers jugements de la Cour suprême.

Le Président (M. Filion): Voilà, alors. Apparemment, pour le jugement aussi, le cheveu est en huit. Ce n'est pas simple à saisir. Mais au Québec, les programmes sont jeunes. Il faut que cela marche en été comme en hiver, puis le plus rapidement possible. Vous nous dites: On a l'expertise, on peut donner conseil. Le rôle de surveillance ne pose pas de problème, je pense.

Vous l'aviez mentionné tantôt au sujet des rapports. |

M. Lachapelle: il n'est pas joué actuellement, parce que justement nous n'avons pas ces rapports. Il est difficile d'aller beaucoup plus loin, à moins évidemment de nous lancer dans des enquêtes de notre propre initiative. Encore une fois, là-dessus, je vous dirais qu'on n'a pas d'objection, sauf qu'on partirait un peu dans le vague, on irait chercher quelle entreprise, au fait? Actuellement, on agit sur plainte. Si on avait ces rapports et qu'on pouvait les examiner, on pourrait peut-être jouer un rôle différent.

Le Président (M. Filion): Mais tout cela finalement est attribuable au fait que tout le mécanisme d'accès à l'égalité est relativement jeune au Québec. Là, on regarde cela. Certains articles sont entrés en vigueur il y a à peine 18 mois, mais lorsque la commission ou lorsque les programmes d'accès à l'égalité auront atteint une vitesse de croisière et quand cela décollera comme train, j'ai l'impression que cela va soulever beaucoup de poussière. Là, vous avez cinq ou six cas, mais quand il y en aura plusieurs, concrètement j'aimerais qu'en terminant vous essayiez de m'expliquer - c'est ce qui me chicote - comment on peut arriver à faire une enquête objective J'allais dire une enquête complète dans un système inquisitoire, alors que vous aurez été partie vous-mêmes par votre rôle-conseil à l'élaboration, à la mise sur pied, à l'implantation, aux discussions, etc. Peut-être que vous allez me dire: Les informations que j'aurai reçues dans mon rôle-conseil vont juste m'aider pour l'enquête.

M. Lachapelle: Ah non! pas du tout.

Le Président (M. Filion): Non? À ce moment-là...

M. Lachapelle: Non. C'est très clair, à ce moment-là, on ne peut négocier aucun contrat avec un employeur qui dira: Vous allez transférer les informations d'un secteur à l'autre. C'est évident qu'avec un employeur on ne se sert pas des informations qu'on a recueillies de la même manière que certaines compagnies ne transfèrent pas des informations à la Commission des droits de la personne, sauf sur subpoena.

Le Président (M. Filion): À ce moment-là, est-ce que la commission ne se retrouve pas dans une espèce de rôle schizophrénique où elle oublie ce que le bras droit a fait pour laisser le bras gauche agir dans tel dossier? Je pose la question. A partir du moment où cela devient étanche dans la transmission d'information, je me pose la question: Comment la commission pourrait véritablement ignorer ce que sa main droite fait? Parce que c'est sa main gauche qui enquête et c'est sa main droite qui conseille. Je ne connais

pas d'exemple semblable.

Mme Duplé: Je crois qu'il y a une réponse vraiment très partielle, c'est que les programmes d'accès à l'égalité, comme madame l'a signalé précédemment, ce sont des programmes volontaires. Si l'employeur ne les met pas en application, c'est peut-être là qu'il y aura des cas de discrimination qui seront signalés à la commission. Cela peut se produire. Si l'employeur les met en application, je dois vous avouer qu'effectivement c'est un cas où la commission aura de la difficulté à dire: Ah oui! c'est tout à fait conforme aux programmes d'accès que la commission a conçus et dont elle a conseillé l'application, mais c'est de la discrimination. Évidemment, c'est difficile. Ce sont deux directions différentes qui font les enquêtes et qui bâtissent les programmes d'accès à l'égalité, mais c'est toujours la commission qui agit. Alors, évidemment, on est dans une situation difficile dans ce cas. Mais est-ce qu'on ne peut pas penser que, si les programmes d'accès à l'égalité aboutissent, s'il y a de la discrimination à la suite de l'implantation d'un programme d'accès à l'égalité, c'est parce que, très probablement, le programme n'a pas été mis en place. Justement, il ne faut jamais perdre de vue qu'un programme d'accès à l'égalité vise à corriger une situation de discrimination passée. En fait, on part d'un constat de discrimination. Il faut partir de ce constat que l'on vise à enrayer, enfin, à supprimer. On vise à le supprimer et à rétablir l'égalité et après on tombe à l'égalité de tous. Cette fois-ci, à partir du moment où tout le monde est égal, il n'y a plus de privilèges donnés à l'un ou à l'autre. C'est fini.

Le Président (M. Filion): Juste un dernier commentaire là-dessus avant de laisser le député de Chapleau et ensuite le député de Marquette. Le problème, ce n'est pas après l'implantation. Je Dense bien que, s'il y a discrimination après i implantation... Cela peut toujours arriver, mais quand même, ce sont des cas plutôt rares. Le problème est plutôt pendant l'implantation, après un premier contact, pendant l'étude qui n'est pas facile et qui est extrêmement longue. Cela prend un inventaire de la main-d'oeuvre, etc. Alors, c'est juste un commentaire.

M. le député de Chapleau. (17 h 15)

Délais dans le traitement des plaintes

M. Kehoe: Donc, étant le quatrième ou cinquième à prendre la parole, plusieurs des sujets ou des questions que j'avais à poser ont déjà été posés, mais il y a deux sujets en particulier que j'aimerais aborder.

Vous avez mentionné, M. le Président, quand vous avez fait votre intervention au commencement, que les délais ne sont pas acceptables. C'est sûr qu'ils ne sont pas acceptables. Je me souviens, qu'il y a quatre ou cinq ans, on avait eu, en Cour supérieure à Montréal, un délai de cinq à sept ans pour des causes qui duraient plus d'une semaine et qu'il y avait un délai jusqu'à deux ou trois ans, pour des causes ordinaires en Cour supérieure; en Cour provinciale, c'était un délai de tout près de deux ans.

Il y a eu un comité formé avec les juges en chef de la Cour supérieure et de la Cour provinciale; il y a eu un travail exceptionnel de fait par les juges et les avocats. Enfin, avec l'incitation du ministre de la Justice, la situation a dramatiquement changé, non seulement à Montréal, mais ailleurs dans les différentes régions, dans les différents districts judiciaires de la province de Québec.

Chez vous, je ne sais pas exactement quels sont les délais et si c'est une question de plusieurs années ou plusieurs mois, surtout dans le cas des problèmes qui relèvent de votre juridiction, que ce soit le harcèlement sexuel ou la plainte d'un malade ou quoi que ce soit - il peut être mort avant qu'il y ait audition de la cause, je pourrais en parler longtemps - mais je veux en venir à vous demander ce que concrètement vous pouvez faire ou faites actuellement pour tenter de régler le problème. Parce que, effectivement, si ce problème n'est pas réglé, vous perdez beaucoup de crédibilité. J'ai eu la plainte, personnellement, dans mon bureau de comté, à maintes reprises, que, au moment où vous étiez prêts à entendre la cause, c'était réglé, les parties étaient mortes, un tas de choses était arrivé. Je pense que c'est un problème sérieux. Et je me demande quelles démarches vous avez prises ou vous allez prendre pour tenter de régler le problème.

M. Lachapelle: Bien, le dossier que vous évoquiez tantôt, celui des délais devant les tribunaux, c'est un dossier que j'ai connu dans une vie antérieure, n'est-ce pas?

M. Kehoe: On a tous vécu cela.

M. Lachapelle: J'ai eu l'occasion de travailler beaucoup et je me souviens, à l'époque, que vous posiez également des questions sur les délais de la Cour supérieure.

Effectivement, le cas que vous soulevez est intéressant comme approche. Ce qu'on a fait à la Cour supérieure, c'est qu'on a émondé les rôles d'un nombre de causes qui, effectivement, bloquaient l'ensemble du système, qui n'étaient pas prêtes à procéder tout simplement et qui ne faisaient que retarder des causes prêtes. Alors, la méthode utilisée en Cour supérieure fut celle-ci. On a dit: Tous ceux qui ne sont pas prêts, s'il vous plaît, laissez votre place. Et il y a eu une espèce de méthode qui était ce qu'on peut appeller un peu la justice sur rendez-vous: J'ai une cause qui est prête; avez-vous un juge pour m'entendre? Je trouve que cette méthode est justement faite de telle sorte que ceux qui

bloquaient le système sont sortis du système et maintenant on n'entend que les causes qui sont prêtes. C'est très profitable et les délais sont passablement raccourcis.

La différence, à la Commission des droits de la personne, je pense, c'est qu'il y a trois façons d'agir. Il faudrait peut-être agir sur l'entrée, justement, des dossiers - je vais reprendre ensuite les trois façons, l'une après l'autre - bien sûr, sur nos méthodes de travail et d'enquête. Quant à la troisième, il faudra peut-être se pencher sur la question des effectifs de la commission.

Sur le premier point, vous savez que toute personne qui a raison de croire... elle vient porter une plainte à la commission, elle dit: Moi, j'ai un des motifs de l'article 10, j'ai subi un préjudice. Vous enquêtez. Parfois, vous savez, les faits qu'on nous énonce sont très minces. On n'a pas beaucoup de choix. On a des règles de procédure qui nous permettent d'émonder un peu, en disant que, si vous n'avez pour raison de croire que le motif et pas d'autre fait d'accroché à cela, ne vous attendez pas à ce que l'on enquête. Sauf qu'il y a des gens qui sont venus ici dire: il devrait même y avoir un droit d'appel de cela. Très souvent, les agents de recevabilité essaient de convaincre: Si vous n'avez pas d'autre fait que strictement la couleur, on ne se rendra pas loin; donnez-nous des dates; dites-nous où; avez-vous un numéro de téléphone? Avez-vous le nom du propriétaire ou du concierge? Avez-vous d'autres éléments? Très souvent, il n'y a rien de cela.

Il reste que la commission enclenche quand même une enquête. Elle a cette obligation de faire enquête. Donc, il faudrait peut-être agir à ce niveau et nous permettre d'émonder un peu, dès le départ. Jusqu'à présent, l'entonnoir était large. Il ne faut pas se demander pourquoi il y a tant de désistements. On amorce une enquête et, au bout de quelque temps, on dit: Vous n'avez rien, regardez ce que vous avez dans votre dossier; on ne peut pas se rendre bien plus loin que cela. Alors, cela crée un certain nombre de désistements, mais il reste qu'en attendant on a tout de même investi du temps dans l'enquête. Donc, je dis que, sur l'entrée, il y aurait peut-être quelque chose à faire. Maintenant, il faudrait amender la charte de façon assez importante. Est-ce qu'on devrait donner à la commission le pouvoir de refuser dans certains cas des enquêtes qui ne nous semblent pas assez consistantes et de nous permettre dans certaines occasions de choisir même les enquêtes? C'est peut-être un peu inquiétant, justement, dans l'optique d'une charte des droits et libertés où justement ce sont des gens qui sont victimes, qu'ils n'ont pas de moyens. Alors, on l'a élargie. Bon, il faut peut-être vivre avec cela et avec les conséquences à savoir qu'il faut investir du temps.

En ce qui concerne les méthodes de travail, cette année on a investi énormément d'énergie.

D'abord, on a informatisé nos activités. C'est important pour pouvoir travailler et faire ce qu'on pourrait appeler du "caseload management" pour pouvoir travailler avec des ensembles de dossier plutôt que des cas particuliers. Cela nous permet, bien sûr, de suivre davantage les dossiers et les délais, de travailler davantage avec les enquêteurs et de travailler aussi à ce qu'on pourrait appeler des délais qui seraient compressibles. Il y en a qui sont incompressibles, mais il y en a d'autres qu'on peut ramasser et qu'on peut couper, des délais entre des placements de dossiers, etc.

Je dois vous dire que, sur les délais d'enquête, il y a aussi, bien sûr, le fait que notre système est davantage judiciarisé, bien sûr. La présence des avocats est peut-être un mal nécessaire, mais cela prend un peu plus de temps, n'est-ce pas? Il y a des remises. Les gens ne sont pas toujours disponibles, etc. Alors, il faut comprendre que cet aspect a allongé d'une certaine façon les délais.

Donc, nous travaillons énormément actuellement à compresser ces délais et à nos méthodes d'enquête pour aller beaucoup plus rapidement. On travaille aussi à une autre méthode connue aux Étals-Unis et à la commission canadienne. Il y a quelques études. Je ne sais pas si vous les avez eues ici en commission. On pourrait peut-être vous les fournir. Cela s'appelle "Règlement rapide des plaintes". C'est une méthode de travail - je ne sais pas si c'est à votre disposition - mais on pourra vous fournir cette documentation qui a été faite par la Commission canadienne en collaboration avec d'autres groupes, avec une firme, en tout cas. C'est intéressant et on a tenté...

M. Kehoe: J'aimerais l'avoir.

M. Lâcha pelle: On a tenté, au bureau de Québec, de faire ce travail. Ce que l'on fait, c'est ceci: dès la réception de la plainte, on examine immédiatement, dans les heures qui suivent, les possibilités de règlement, en faisant deux ou trois appels téléphoniques. On constate que, dans un cas, le "mis en cause" ne savait pas. Il a dit: C'est discriminatoire, je ne le savais pas; je suis bien prêt à régler, à discuter. Je dois vous dire qu'on a eu passablement de succès. Dans le document qu'on a présenté à l'époque, il y en a des exemples intéressants.

Je pense qu'il faut investir du temps dans cette forme d'enquête rapide qui nous permet d'intervenir le plus vite possible. On l'essaie, entre autres, dans le cas du logement. On dit aux parties: Vous nous appelez. On n'attend pas trois mois parce que la personne est sur le palier et attend d'avoir un logement. Trois mois ou un an plus tard, c'est trop tard. Ce qu'on essaie de faire, ce sont des téléphones immédiats au propriétaire pour lui dire: Écoutez, vous venez de refuser M. Untel; il semble bien que ce soit discriminatoire; vous avez encore un logement à

louer et on va vous retourner cette personne. On essaie ce genre de règlement. Cela a permis de dégager des cas à Québec, et on devrait appliquer cette méthode à Montréal. Il faut dire que, dans une région métropolitaine, c'est peut-être plus difficile, ce genre de mécanique. Les gens se connaissent moins, alors que dans une petite ville, des endroits comme Sherbrooke et Hull, ces méthodes sont plus faciles.

L'autre élément que je voulais vous mentionner est celui des effectifs. Actuellement, nous avons quelque 1200 dossiers d'enquête. Depuis un certain nombre d'années, nous avons ces 1200 dossiers d'enquête. Si vous divisez cela par quelque 25 enquêteurs, cela donne un ratio de 40 ou 45. C'est beaucoup. Je dois vous dire que le ratio dans les autres commissions, à la commission canadienne et en Ontario, je pense que c'est de 25 ou 30. On règle à peu près 600 à 700 dossiers par année. C'est facile de comprendre que les délais s'étirent à deux ans; ce n'est pas un gros calcul. On pense qu'avec les effectifs qu'on a actuellement, même en contraignant, en ramassant tout cela, on n'y arrivera pas. il ne faut pas se faire d'illusions non plus.

M. Kehoe: Est-ce que la meilleure solution serait d'avoir plus d'effectifs, plus d'enquêteurs, plus de commissaires? Est-ce que c'est l'une des...

M. Lachapelle: Ce n'est probablement pas plus de commissaires. Depuis quelques années, on avait seulement une équipe de commissaires qui travaillait à ce qu'on appelle les enquêtes. Avant d'être présentés en commission, les dossiers sont présentés à un petit comité d'enquête composé de commissaires. Ce comité fait le tour des dossiers, scrute pour être bien sûr que toute la preuve a été ramassée et, ensuite, cela va en commission. Depuis quelque temps, on a trois comités qui siègent. Alors, cela a quand même accéléré passablement et on traite beaucoup plus de dossiers de cette façon.

M. Kehoe: Est-ce que la situation va en s'aggravant ou en s'améliorant dans l'ensemble? Est-ce qu'avec les initiatives que vous avez prises et les différentes procédures que vous avez tenté de mettre en marche...

M. Lachapelle: On ne fera... Si les dossiers continuent à entrer au même rythme, et il y a tout lieu de croire que cela va continuer au même rythme. Même si, en nombre, les plaintes n'ont parfois pas l'air d'augmenter, elles sont de plus en plus complexes. C'est de plus en plus long. La discrimination se fait subtile. Pour aller chercher des éléments de discrimination, il faut fouiller davantage. Ce n'est plus la petite annonce dans le journal où on disait: Homme demandé. Ce n'est pas si simple que cela. Cela allait bien: personne demandée. On ne demande plus personne.

Des voix: Ha. ha. bat

M. Kehoe: il reste une dernière question fapide. C'est la question de la commission en régions. Selon l'expérience que vous avez vécue à. ce jour, quatre bureaux sont déjà établis. Il y a une possibilité de quatre autres dans les différentes régions. Pour ma part, je pense que c'est un besoin absolu. Je sais que dans notre région, l'Outaouais, dans Hull, il y a une personne qui s'en occupe et je vous assure qu'il est débordé. Je lui ai parlé souvent. Il est venu me voir à maintes reprises. À toutes fins utiles, le travail qu'il fait est admirable. Mais il reste que c'est impossible pour lui.

Mais voici où je veux en venir. Je sais que vous avez mentionné votre position, mais, dans l'ensemble, est-ce que vous croyez que, dans l'avenir, cela va continuer? Que vous allez garder les bureaux qui existent actuellement dans les quatre régions et que vous allez en ajouter?

Le Président (M. Filion): On a répondu un peu à cela.

M. Kehoe: Oui.

Le Président (M. Filion): Ceia relève du gouvernement. Le président a mentionné tantôt le fait que, d'abord, on a le livre des crédits qui a été déposé et que, avec les discussions qu'il y a eues on confirme le fait que le budget permettra le maintien de ces quatre personnes dans les quatre bureaux régionaux maintenant existants, mais ne permet pas l'expansion de la présence régionale de la commission.

M. Lachapelle: Et ce sont encore des employés occasionnels.

Le Président (M. Filion): En plus de ceia. M. Jolivet: Pas de permanents!

Le Président (M. Filion): M. le député de Laviolette.

Plaintes au nom d'une tierce personne

M. Jolivet: M. le Président, je suis arrivé en retard, je m'excuse, parce que j'avais justement un cas qui deviendra peut-être un cas de discrimination. À propos des effectifs dont vous avez fait mention tout à l'heure, je vous donne un exemple qui s'est produit. Une personne est venue me voir, car l'Office des personnes handicapées qui est dans notre région lui a dit: Je ne peux plus ouvrir de nouveaux dossiers; avant d'en ouvrir, il faut que je règle tous les dossiers antérieurs au 1er avril 1987 ou 1986. Juste en passant, justement parce que c'est une question d'effectif. J'espère que ce n'est pas le

but recherché de dire: On va d'abord régler tous les dossiers passés avant d'en ouvrir d'autres. Je vous dis que cette formule n'a pas de bon sens. Vous le dites, il y a des dossiers de plus en plus complexes. Cela veut dire que cela prend de plus en plus de temps.

Des formules de règlement rapide de griefs comme on en a connues - moi, je viens du milieu syndical - pour nous aussi, à l'époque des années 1972, c'était épouvantable, cela n'avait pas de bon sens. On s'est donné un moyen rapide de régler des griefs, non pas en faisant de la jurisprudence, mais en regardant ce qui avait été fait dans le passé pour voir si on pouvait régler les autres de cette façon. Cela s'est reproduit ailleurs. On a vu arriver les procédures sommaires qui ont permis d'arriver à des règlements rapides. (17 h 30)

Cependant, quand je regarde la façon dont les gens ont conçu la commission et comment elle est rendue aujourd'hui, entre le moment où les gens disaient: La Commission est peut-être le lieu où je vais aller m'informer de mes droits. Sont-Hs respectés? Et après, je prendrai les moyens nécessaires pour les faire respecter. Ce qu'on a vu, c'est un glissement vers un processus judiciaire selon lequel finalement vous agissez à ce niveau, comme vous le disiez tout à l'heure, en disant rendus au bout: Malheureusement, je ne peux rien pour toi. Mais on a quand même fait un processus judiciaire, avec les avocats, qui viennent s'installer parmi les parties, alors que, normalement, à mon avis, cela aurait dû être séparé de façon à ce que l'enquête indique: Oui, il y a eu par rapport à la Charte des droits et libertés de la personne quelque chose qui n'a pas été correct et là, après cela, tu prendras les procédures qui s'imposent. Si les gens étaient bien conscients de cela, on n'aurait pas les problèmes qu'on a actuellement. Donc, la distinction des deux rôles est importante: l'enquête et la prise de moyens pour régler si vraiment il y a eu un grief correct qui permet d'en arriver finalement à présenter devant les juges une décision qui devrait être prise en vertu de la charte. Ceci est simplement pour faire une entrée en matière.

Sur l'autre partie, je viens vous donner d'autres griefs potentiels. Tout cela pour vous dire que cela va vous occasionner d'autres problèmes parce que cela va être un peu plus, à mon avis, quelque chose de sensible. On a ici une personne qui porte une plainte. Elle doit la porter elle-même. Cette plainte, à part les personnes âgées et les personnes handicapées, à ma connaissance, une tierce personne qui peut être un organisme syndical ou un organisme du milieu, ne peut pas la porter au nom d'une personne qui ne veut pas. Dans nos bureaux de comté, on a des gens qui disent: Penses-tu que je vais aller au bureau des normes du travail? Mon patron va me faire perdre mon emploi. Moi, je lui dis: Écoute, c'est une chose... Le gars ou la fille dit: Je m'en vais. Là, je dis: C'est peut-être le temps de faire ton grief parce que le patron ne pourra pas revenir contre toi. Mais, on apprend, après, que le patron a fait de mauvais rapports à d'autres employeurs qui veulent embaucher cette personne. Là, la personne ne veut plus bouger parce qu'elle dit: Je me suis fait prendre une fois, je ne me ferai pas prendre deux fois. Cela existe dans bien des endroits: dans les restaurants, dans les petites places. J'ai vu un cas dernièrement où on a parlé avec la personne et on réglé le problème. On lui avait dit: Pendant trois mois, tu vas faire ton apprentissage; pendant trois mois, tu ne recevras pas aucun salaire. J'ai dit: Cela n'a pas de bon sens, il y a quelque chose qui ne va pas. En plus de travailler dans un restaurant, il y avait une jeune fille qui lui aidait et qui lui montrait comment faire, et elle recevait les pourboires. On a réglé cela en discutant avec les gens et en leur expliquant ce qu'étaient les normes minimales à ce sujet. Il reste quand même que, en fin de compte, il n'y a personne qui pourrait agir en son nom si elle a peur de porter plainte. Comment voyez-vous cela pour l'avenir? Est-ce que vous voyez qu'une tierce personne pourrait porter, dans le cas d'un système organisé, des plaintes pour et au nom d'une personne?

M. Lachapelle: La charte prévoit à l'article 70: Tout organisme voué à la défense des droits et libertés de la personne ou au bien-être d'un groupe de personnes, qui a raison de croire que s'est commise une atteinte à un droit visé dans l'article 69, peut, également, par écrit, faire une demande d'enquête au nom d'autrui, pourvu que la personne au nom de qui elle est faite y ait consenti par écrit".

M. Jolivet: Oui, c'est cela. C'est la question du consentement qui...

M. Lachapelle: Je comprends que c'est là que vous nous amenez.

M. Jolivet: C'est cela.

M. Lachapelle: Je ne sais pas comment vous avez pu réussir, dans d'autres organismes, à faire des enquêtes lorsqu'on ne peut pas avoir le nom de la personne et comment demander au "mis en cause" d'avoir une défense, je dirais, pleine et entière, si on ne peut identifier une victime et on ne peut lui dire: Bien, c'est face à cette personne. On en a longuement discuté à la commission et je vous avoue qu'on en est venus à la conclusion que c'était...

M. Jolivet: Dans d'autres provinces, on a la possibilité qu'une tierce personne le fasse sans le consentement; dans d'autres, on dit: À moins que la commission n'indique qu'il doit y avoir consentement, cela peut être sans consentement. Je sais que, dans un organisme syndical, on peut

faire des enquêtes souvent à partir du fait que c'est le système qui n'est pas bon et sans nommer personne, et finalement on obtient gain de cause pour l'ensemble. C'est quelque chose qui est plus systémique là. Je ne prends pas un cas particulier.

M. Lachapelle: À ce moment-là, c'est cela. On disait, nous, qu'il n'est peut-être pas nécessaire de modifier l'article 70, mais on pourrait se servir de l'article 73: "La commission peut faire enquête de sa propre initiative". Encore une fois, sur un cas particulier, cela devient compliqué. Comme vous le dites de façon plus globale, si effectivement on peut cerner l'ensemble du problème sans avoir de victime en particulier, c'est probablement possible en nous servant de l'article 73. Il y avait des suggestions visant à faire modifier la charte pour permettre qu'il n'y ait pas cette obligation d'avoir un écrit. Cela ne nous apparaît probablement pas nécessaire. On a eu un cas récemment où c'était une plainte anonyme. Effectivement, on n'avait aucune "poignée" pour enquêter avec cela et même de notre popre initiative, plus globalement, ce n'était pas possible. Alors, que voulez-vous? On est face a une impossibilité.

M. Dauphin: Pour les enquêtes de votre propre initiative, avez-vous des statistiques là-dessus? Avez-vous des chiffres? Combien de fois avez-vous utilisé ce pouvoir?

M. Lachapelle: il n'y a pas beaucoup... M. Dauphin: il n'y a pas beaucoup de cas.

M. Lachapelle: Ça ne prend pas de grandes colonnes.

M. Jolivet: Je peux vous donner un exemple de ce qui arrive...

Une voix: Vous ne manquez pas de travail, d'ailleurs.

M. Lachapelle: C'est cela. C'est un peu ce qui arrive. Écoutez, il y a des cas où on nous dit qu'on devrait intervenir. On parlait des centres d'accueil, tantôt. On a déjà une petite étude à la commission qui démontrait que, effectivement, des personnes âgées étaient exploitées. On devrait intervenir. Est-ce qu'on ne devrait pas intervenir dans les "sweatshops" de la rue Saint-Laurent où il y a là, semble-t-il, du personnel qui est exploité et qui est aussi victime de discrimination? On se dit que oui, il faudrait, mais on ne se sent pas capables d'y aller. Et il y a tellement d'autres secteurs où, effectivement, on devrait intervenir, mais on n'ose pas, étant donné le "caseload" qu'on connaît actuellement.

M. Jolivet: En tout cas, je vous donne juste un exemple qui nous arrive souvent dans nos bureaux de comté. Là, c'est en dehors de vous, mais c'est pour vous indiquer comment on pourrait, nous aussi, déposer des plaintes pour des gens, mais si on n'a pas le pouvoir, cela ne sert à rien. Des gens nous disent: À telle place, il se passe telle chose. Prenons quelqu'un sur l'aide sociale qui travaille, qui gagne de l'argent et, en plus, qui vit avec une femme qui reçoit des prestations d'aide sociale. Personne ne veut déposer la plainte, mais à un moment donné le député a un rôle, un travail à faire, c'est d'avertir le bureau de l'aide sociale de faire la vérification de tel ou tel cas, mais sans nommer la personne qui me l'a dit, parce qu'elle ne veut pas - et moi, je la connais, elle est venue dans mon bureau - que je la nomme; elle ne veut pas avoir de représailles contre elle. Dans ce sens-là, je me dis que, si on avait des cas de discrimination, est-ce que nous, comme responsables dans un milieu donné - je me nomme souvent l'om-budsman du milieu - nous ne devrions pas vous transmettre cette cause et vous dire: Je ne peux pas vous donner les noms des personnes, mais je sais qu'il y a telle ou telle chose; pouvez-vous faire une vérification? Se pourrait-il qu'on fasse cela?

Mme Duplé: Lorsqu'il s'agit d'une situation de discrimination globale qui ne nécessite pas que l'on mette en jeu la situation particulière d'une personne, il suffit de passer par l'article 70, de le signaler à la commission et, si la commission en a les moyens matériels et qu'elle estime qu'effectivement cela vaut la peine de faire une enquête de sa propre initiative, là on a la solution. Mais je répugnerais assez à accepter une solution - ce n'est pas à moi à l'accepter - je ne la trouverais pas tellement acceptable cette solution qui consisterait à prendre le cas particulier d'une personne et, sans son consentement, se servir de ce cas à des fins qu'elle ne souhaite pas finalement. Moi, je trouve que c'est une utilisation de cette personne qui n'est pas très souhaitable dans un contexte comme celui de la charte, peut-être dans d'autres domaines. Mais dans le domaine de la charte, on travaille avec tout ce qui constitue le fondement même de la dignité humaine. C'est vraiment chacun qui détient ce droit à la dignité. On n'a pas à le réclamer pour cette personne sans son consentement. Je ne suis pas sûre que ce soit...

Le Président (M. Filion): Non. Je pense que le député de Laviolette parlait de discrimination systémique, c'est-à-dire une situation....

M. Jolivet: Oui, c'est cela.

Le Président (M. Filion): ...je ne pense pas qu'il voulait intervenir...

M. Jolivet: Cela va.

Le Président (M. Filion): ...au niveau des plaintes individuelles touchant une atteinte individuelle et très particularisée à un droit. Cela va?

M. Jolivet: Cela va pour moi.

Le Président (M. Filion): Oui. Y a-t-il d'autres...? Oui, vous vouliez ajouter quelque chose?

M. Lachapelle: Je voulais seulement ajouter ceci. Vous demandiez dans combien de cas la commission était intervenue de sa propre initiative. Il y a deux cas, à ma connaissance. C'est le cas de la discrimination dans l'industrie du taxi...

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Lachapelle: ...et, actuellement, le cas des relations entre la police et les minorités. Ce sont deux cas où, de notre propre initiative, on fait enquête.

Le Président (M. Filion): Bien que, dans le deuxième cas, le ministère de la Justice, le ministre, le gouvernement et l'actualité constituent de belles impulsions.

M. Lachapelle: il est bien évident que, s'il n'y avait pas eu de problème, on n'aurait pas enquêté. Mais on ne peut pas dire qu'on n'a pas été incités non plus.

Le Président (M. Filion): Oui. Cela va, M. le député de Laviolette?

M. Jolivet: Oui.

Le Président (M. Filion): Je vous remercie. Je vais reconnaître maintenant, M. le député de Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le président, pour reprendre un peu votre idée de tantôt et sans refaire la fable de la Lafontaine, je vais vous dire que ce mal que le ciel envoya pour punir les animaux de la terre ne m'a pas atteint. Donc, je ne vous poserai pas une question d'avocat, je n'en suis pas un, je vais plutôt vous poser une question de quelqu'un qui est beaucoup plus relié à la psychologie qu'au droit, sans vouloir dénigrer la compétence de mes collègues qui sont avocats. Je vois votre plan annuel de formation ici, dans le document qui m'est remis et que j'ai devant moi, et selon les groupes qui sont intervenus et selon les discussions que j'ai eues avec les personnes qui fournissent les groupes, on a souvent fait état, d'après eux, d'un manque de connaissances sociologiques des groupes ou des individus qui sont les plus susceptibles d'être victimes de discrimination en disant: On ne comprend pas nos comportements, nos habitudes, nos attitudes. On a le sentiment de ne pas être compris. Donc, il peut exister, non pas délibérément mais de fait, un certain préjugé à notre égard parce qu'il n'y a pas cette intimité de connaissances qui existe entre le groupe auquel j'appartiens et la personne avec qui je traite à la commission.

Tantôt, vous avez fait allusion aux "sweatshops", comme on dit en latin, de la rue Saint-Laurent où, effectivement, il y a énormément de femmes immigrantes. Ce dossier me préoccupe puisque c'est un dossier dont j'ai la responsabilité. On sait fort bien qu'il y a une psychologie de la femme immigrante, une sociologie dans ses comportements et son attitude, etc. Donc, dans le plan formation que vous avez, est-ce que c'est un plan pour améliorer les connaissances dites juridiques des membres de la commission ou bien avez-vous l'intention d'aller dans le sens que je vous indique par ma question?

M. Lachapelle: Effectivement, jusqu'à maintenant, il y a eu quelques sessions, appelons-les des sessions de sensibilisation, plus que d'information. Il y a eu quelques sessions de sensibilisation, entre autres sur la problématique autochtone. Il y a également à la commission des rencontres, peut-être un peu sporadiques, avec des personnes particulièrement impliquées dans leur milieu, qui viennent nous donner des conférences ou des exposés de situation.

Dans le plan de formation, pour l'année prochaine, nous prévoyons de telles sessions de sensibilisation des employés à diverses problématiques que des groupes victimes de discrimination peuvent vivre. Ce n'était pas, jusqu'à ce jour, systématique, mais nous voulons, dans les années à venir, rattraper ce retard et donner de telles sessions de sensibilisation.

Le Président (M. Filion): Est-ce que vous avez d'autres questions?

M. Boulerice: Non, cela va.

Le Président (M. Filion): ...M. le député de Saint-Jacques? Cela va. Mme la députée de Groulx.

Mme Bleau: J'ai hâte...

M. Boulerice: Vous avez bien fait, d'ailleurs, cela.

Une voix: Oui.

M. Boulerice: On pourrait être quêteux et vous en demander plusieurs. Cela mérite d'être distribué.

M. Lachapelle: On va les vendre.

Mme Bleau: Est-ce que tout cela a été préparé par un groupe, par une personne ou par...

M. Lachapelle: Cela a été préparé par... Je ne sais pas si c'est le moment de parler de ce document.

Le Président (M. Filion): Non.

M. Lachapelle: On a eu l'impression...

Le Président (M. Filion): Je pense que le député de Marquette et moi avons peut-être d'autres questions.

M. Lachapelle: D'accord.

Le Président (M. Filion): Je me suis réservé pour la fin. M. le député de Marquette.

Droit d'appel dans l'hypothèse de la création d'un tribunal

M. Dauphin: Merci, M. le Président. C'est vrai que le temps passe rapidement et on pourrait passer plusieurs heures ensemble. Sans présumer de l'orientation des recommandations que prendra la commission des institutions - si recommandations il y a, puisque le règlement de l'Assemblée nationale n'oblige aucunement la commission à faire des recommandations, sauf qu'on peut présumer qu'on va en faire - on parlait tantôt de la séparation des juridictions en créant un tribunal administratif avec pouvoir exécutoire.

J'ai eu l'occasion d'en parler avec plusieurs personnes dans mon coin. La question suivante se posait souvent. En ce qui concerne un droit d'appel, disons que le tribunal des droits et libertés de la personne décide de condamner une entreprise à 200 000 $ d'amende, la victime, qui depuis un an, par exemple, n'a pas son emploi, est-ce que ce ne serait pas la "préjudicier" que de permettre un droit d'appel et entraîner d'autres délais qui, évidemment, entraînent d'autres préjudices, présumons-le? Par contre, il y a des entreprises - les PME, par exemple - pour qui être condamnées à 250 000 $ d'amende, c'est quand même considérable. Il peut y avoir des répercussions énormes sur leur situation.

J'aimerais avoir votre son de cloche là-dessus, avoir votre opinion dans l'éventualité où, effectivement, il y aurait une séparation des juridictions avec les modifications législatives qu'il peut y avoir. Deuxièmement, comment verriez-vous le rôle des commissaires avec une séparation des juridictions puisque, à ce moment-là, évidemment, la commission continuerait de faire enquête? Peut-être qu'un bureau de commissaires pourrait décider si, effectivement, on saisit le tribunal en question. J'aimerais vous entendre là-dessus. (17 h 45)

M. Lachapelle: Votre première question essaie de situer s'il devrait y avoir appel?

M. Dauphin: Oui, tout en sachant également qu'il est toujours question de brefs d'évocation dans ces cas.

M. Lachapelle: Oui.

M. Dauphin: Mais est-ce que, de droit, il devrait y avoir un appel à la Cour supérieure, par exemple?

M. Lachapelle: J'ai l'impression que vous avez avec vous des batteries d'experts qui vont vous éclairer sur toutes ces questions. Quant à moi, il me semble qu'il devrait y avoir un droit d'appel et j'ai l'impression, que s'il n'y en avait pas, on aurait probablement des problèmes de droit administratif à conclure qu'il ne devrait pas y avoir de droit d'appel en telle matière ou même à bloquer l'évocation, ce qui m'apparaîtrait quasi impossible, à première vue.

Je pense que ce sont des sujets éminemment importants avec des répercussions importantes et qu'on ne peut pas bloquer cela comme un tribunal des petites créances, pensant bien qu'on va en rester là. À mon avis, il devrait y avoir un droit d'appel. Je ne sais pas si Mme Duplé peut ajouter quelque chose.

Mme Duplé: il y a peut-être une autre solution. C'est de ne pas prévoir d'appel comme tel, mais de ne pas prévoir non plus de clauses privatives, c'est-à-dire qu'on ouvre l'évocation avec tous les cas d'ouverture possibles ou envisageables. Je crois que, dans le contexte dans lequel travaille la commission, on n'a pas pensé au droit d'appel dans ces termes, mais je ne suis pas sûre que je trouve ça très bien, parce que, finalement, cela entraîne, comme vous l'avez signalé, des délais, etc.

Si, finalement, il y a un mécanisme adéquat pour permettre à la Cour supérieure de vérifier qu'il n'y ait pas d'excès de juridiction ou qu'on n'ait pas erré en droit, il me semble que la procédure est plus expéditive; elle est discrétionnaire. Donc, il me semble que ce serait peut-être le procédé adéquat. Si on transforme la commission en tribunal administratif, c'est bien parce qu'on a en tête l'idée qu'il faut une juridiction spécialisée, que vraiment la commission a tous les outils ou s'est donné tous les outils dans le passé et qu'elle est peut-être la plus à même de porter le jugement le plus adéquat sur une situation de discrimination.

Refaire tout le travail en Cour d'appel, vraiment, à ce moment-là, cela ne change rien avec ce qui se passe à l'heure actuelle. On n'a qu'à aller directement en Cour supérieure. Je ne sais pas, c'est une question de choix.

Le Président (M. Filion): Oui, c'est le comité Ouellet qui étudie également la question du droit d'appel. Il y a également le fait que le pouvoir de surveillance et de contrôle de la Cour supérieure, sauf erreur, s'exerce avec ou sans

clause privative, c'est-à-dire que...

Mme Duplé: Oui, mais quand il y a une clause privative, ça bloque...

Le Président (M. Filion): C'est un peu plus restreint, oui.

Mme Duplé: Oui, cela restreint le pouvoir au contrôle de la compétence, grosso modo, disons.

Le Président (M. Filion): Oui, voilà. Mais qui a été élargi au fil des ans.

Mme Duplé: Mais, le contrôle de la compétence, de toute façon, il restera toujours.

M. Lachapelle: il y avait peut-être l'autre question que vous aviez soulevé tantôt...

M. Dauphin: Oui.

M. Lachapelle: Quel serait maintenant le nouveau rôle des commissaires.

M. Dauphin: J'aimerais avoir votre son de cloche là-dessus.

M. Lachapelle: Oui, mon impression est la même que celle que vous mentionnez. Votre question contenait quasiment la réponse, vos réflexions, à tout le moins. Effectivement, je pense que le rôle des commissaires viserait probablement plus simplement à examiner prima facie s'il y a suffisamment d'éléments pour qu'on aille devant un tribunal, et le rôle du contentieux serait le même, c'est-à-dire assister les parties, c'est-à-dire le plaignant devant le tribunal de droit commun ou le tribunal administratif.

Quant à moi, j'ai l'impression que ce serait là un rôle beaucoup plus restreint pour les commissaires.

Mme Duplé: Je me demande même si ça changerait beaucoup le rôle que nous jouons. Au lieu de rendre une recommandation, on rendrait une décision. Finalement...

Le Président (M. Filion): Mais cela déjudi-ciariserait un processus antérieur à la prise de décision.

Mme Duplé: Cela le judiciariserait...

Le Président (M. Filion): Cela le déjudicia-riserait dans l'hypothèse d'un tribunal.

Mme Duplé: Ah oui! du tribunal?

Le Président (M. Filion): Oui, d'un tribunal.

Mme Duplé: C'est ça. Vous permettrez...

M. Lachapelle: J'allais dire: Je comprends qu'à la commission canadienne les commissaires ne font qu'une évaluation beaucoup plus sommaire que la nôtre, c'est-à-dire beaucoup plus en termes suivants: E:st-ce qu'il y a suffisamment d'éléments pour qu'on puisse continuer la cause devant un tribunal, alors que, nous, nous allons vraiment jusque dans l'évaluation très précise des faits?

Le Président (M. Filion): D'accord. Toujours dans cette hypothèse de la création d'un tribunal spécialisé des droits de la personne, où la commission avancerait les dossiers, est-ce qu'à votre avis on devrait maintenir la possibilité pour la victime de recourir aux tribunaux de droit commun?

M. Lachapelle: Ou en faire une juridiction exclusive d'un tribunal.

Le Président (M. Filion): ...ou en faire une juridiction exclusive. Le choix serait entre ces deux branches de l'alternative.

M. Lachapelle: Je dois vous avouer que, sur cette question, je n'ai pas d'idée.

Le Président (M. Filion): Avez-vous des statistiques sur le nombre de dossiers ou de plaintes...

Une voix: ...qui vont directement...

Le Président (M. Filion): ...oui qui vont aux tribunaux de droit commun? Il n'y a pas un inventaire qui aurait été fait?

M. Lachapelle: Non. On pourrait peut-être en obtenir à partir des ordinateurs du ministère. Mais ce serait très difficile de voir parce que ce sont souvent des cas jumelés avec d'autres où on invoque la charte, où on invoque la discrimination et où on plaide en même temps d'autres choses. Alors, ce serait très difficile de le savoir.

Le Président (M. Filion): À votre avis, M. le président, toujours dans l'hypothèse de la création d'un tribunal administratif, est-ce que cela pourrait permettre à la commission de jouer à 150 % son rôle, si on veut, d'ouvrir les soupapes, d'ouvrir la vapeur sur son rôle de promotion évidemment, sous réserve des problèmes budgétaires, des problèmes d'effectifs, etc.? Mais est-ce que, à votre avis, uniquement en termes de vie intérieure de la commission, cela permettrait à la commission de lever le voile carrément sur son rôle de promotion et sur son rôle d'enquête, bien sûr? C'est déjà dans mon esprit avec ce que vous avez dit plus tôt, mais dans son rôle de promotion, est-ce que cela donnerait une marge de manoeuvre plus grande à la commission?

M. Lachapelle: Effectivement, je pense que le conflit qu'on connaît actuellement serait moins contraignant parce que, actuellement, on sent que, lorsqu'on est dans un processus d'enquête qui souvent dure beaucoup de temps, on évite d'intervenir à l'intérieur d'un dossier où effectivement on est en processus d'enquête. On ne se prononce pas publiquement. On n'ose pas, je dirais même, faire de pressions dans certains dossiers, donc de faire cette promotion qui est une des missions importantes de la commission. D'autre part, je pense qu'avec les moyens que nous connaissons, nous avons joué ce rôle de promotion des droits d'éducation et d'information. C'est peut-être l'intervention ponctuelle qui nous serait ouverte davantage si ce rôle était plus démarqué.

Le Président (M. Filion): Oui, d'accord.

M. Lachapelle: Mais, quant à la promotion, il me semble que cela ne nous empêche pas actuellement de faire ce rôle d'éducation et d'information.

M. le Président, je ne sais pas si... Vous aviez posé une question.

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Lachapelle: Mme Duplé avait peut-être un élément de réponse sur votre première question.

Mme Duplé: Je ne me souviens plus de la question...

Le Président (M. Filion): La dernière question?

M. Lachapelle: L'autre avant, c'était sur...

Le Président (M. Filion): L'hypothèse d'un tribunal, le recours aux tribunaux communs.

M. Lachapelle: Oui, c'est cela. Sur le recours aux tribunaux communs, vous avez dit: J'aurais peut-être un élément de réponse.

Mme Duplé: Oui, je crois que les cas de discrimination sont vraiment très difficiles. La preuve à faire sur ces cas de discrimination devient quelquefois extrêmement complexe. Je ne dirais pas que cela requiert des connaissances, par exemple, aussi spécialisées que les personnes qui siègent à la Commission des affaires sociales. Dans certains secteurs, elles doivent avoir une connaissance technique des données en présence qui peut-être ne sont pas exigées d'une personne qui siégerait à un tribunal des droits de la personne. Mais on a, par exemple, des cas de maux de des, de handicaps qui sont quelquefois vraiment très complexes. Est-ce que c'est vraiment la tâche d'un tribunal, d'une Cour supérieure, par exemple, d'entendre toute cette preuve? Je pense qu'un tribunal spécialisé serait peut-être plus adéquat avec une juridiction exclusive.

Le Président (M. Filion): D'accord.

Mme Duplé: Mais cela peut être vu autrement aussi avec d'autres arguments.

Médiation

Le Président (M. Filion): En ce qui concerne le volet enquête et médiation, j'ai eu l'occasion également de relire le mémoire de la commission à ce sujet, de lire une partie de votre entrevue. Cela a l'air intéressant. On va diviser cela, mais est-ce qu'il va falloir recommencer? Je ne sais pas, mais je vous soumets cela à brûle-pourpoint. J'ai vécu une expérience au ministère du Travail où, dans certains cas, on avait un service de médiation. On y faisait appel dans certains cas. Dans d'autres cas, on prenait celui qui avait enquêté sur le dossier et on le transformait en médiateur. En deux mots, il y avait une certaine souplesse, mais une souplesse au niveau du choix, des moyens qui impliquait quand même une boîte très spécifique de médiation à laquelle on avait recours. Des fois, cela dépendait des parties, des fois, cela dépendait d'un jugement qui était posé, etc. Est-ce qu'une formule souple, mais où on retrouve de façon distincte l'existence d'un service de médiation différent, vous apparaît peut-être envisageable ou pratique selon votre expérience?

M. Lachapelle: On a soumis quelques accommodements tantôt et il m'apparaîtrait que cela devrait être très souple dans le sens qu'on devrait laisser énormément de liberté à l'enquêteur qui ne se sentirait peut-être pas à l'aise. Parfois, cela nous arrive. Il y a des enquêteurs qui disent: Moi, je ne voudrais pas faire la médiation. Écoutez, c'est comme cela. Allons-y. C'est à vous à faire la médiation. Je pense qu'il faudrait être très souple. L'enquêteur qui dirait: Moi, je ne veux pas intervenir dans ce dossier, je ne me sens pas capable d'arriver à une médiation entre les parties, on devrait... De la même manière, une des parties qui viendrait nous dire sans raison: Écoutez, je pense qu'on devrait changer. Cela devrait être clair au départ. Je pense que cela apporterait peut-être cette souplesse dont vous parlez. Actuellement, je dois vous dire qu'on est un peu rigides sur les questions de médiation et de séparation entre médiateur et enquêteur. Effectivement, celui qui a fait l'enquête continue. À mon avis, il faudrait apporter cette souplesse. Quant à aller mettre sur pied une équipe de médiateurs comme cela existe d'ailleurs à la commission canadienne... À la commission canadienne, les rôles sont véritablement divisés. Celui qui fait l'enquête ne fait

pas la médiation. M. Carrier, qui, malheureusement, n'est pas avec nous et qui est un nouveau commissaire à la Commission des droits de la personne, avait une expérience comme médiateur. Il a été enquêteur et il est devenu par la suite médiateur. Cela aurait été intéressant. Il aurait pu nous parler de son expérience. Quant à lui, c'était une expérience heureuse que de diviser carrément ce rôle.

Procédure pénale

M. Dauphin: J'aimerais vous entretenir sur l'utilisation de la procédure pénale. On nous a indiqué que, depuis cinq ans, cela n'a jamais été utilisé par la commission.

M. Lachapelle: Non, cela a été utilisé. M. Dauphin: Cela a été utilisé?

M. Lachapelle: Oui, dans le cas d'enquêtes sur le taxi, je pense. Il y en a eu quelques-unes. C'est peu nombreux, mais effectivement, il y en a eu quelques-unes.

M. Dauphin: Alors, je me demandais dans le cas - je sais que c'est toujours subjectif - de violation extrêmement grave, si ne verriez pas d'un bon oeil d'utiliser cette formule de plainte au pénal peut-être plus fréquemment parce que cela vous est permis de par la législation.

M. Lachapelle: Oui. Jusqu'à maintenant, la commission, se voyant un rôle plutôt éducatif, n'a pas utilisé cette méthode, sauf dans les quelques cas qu'on a mentionnés tantôt. Effectivement, il y aurait peut-être lieu maintenant, après un certain nombre d'années... Je pense par exemple aux cas de discrimination dans les annonces, dans les journaux. Cela fait assez longtemps que c'est connu maintenant. Je pense qu'il n'est plus le temps de téléphoner ou d'appeler comme on le fait encore ou d'écrire pour dire: Vous savez, vous avez mis une petite annonce, il faudrait peut-être la corriger. Cela a du succès, cela corrige. Mais lisez les journaux et vous allez en voir encore. Il y aurait peut-être lieu dans ces cas d'intervenir au moyen de poursuites pénales et de leur dire: Maintenant, c'est fini. Vous avez compris. Cela fait dix ans que c'est écrit là. Il y aurait peut-être lieu qu'une amende soit imposée. Il y a probablement des cas comme cela où...

M. Dauphin: Où cela pourrait être plus utilisé.

M. Lachapelle: Oui. Récemment, on avait un cas flagrant où les commissaires discutaient de la possibilité justement de porter une plainte pénale. L'enquêteur au dossier nous dit: Si vous faites cela, on aura peut-être des problèmes à avoir un règlement négocié, car là on vient de braquer les parties, on les amène devant une autre cour et on recommence.

M. Dauphin: À ce moment-là, il n'y a presque pas de règlement possible à moins de retirer la plainte.

M. Lachapelle: Bien oui, c'est cela. Mais il ne faut pas faire ce jeu non plus de retirer une plainte. Il appartiendra au Procureur général ensuite... Mais on comprend fort bien que pour la personne qui irait négocier un règlement et ensuite le poursuivre au pénal, je pense que ce serait un peu malhabile, vous l'admettrez avec moi.

M. Dauphin: Je pense qu'on s'entend sur le fait de cas, comme vous le disiez tantôt.

M. Lachapelle: Oui. C'est peut-être dans ces...

Le Président (M. Filion): Juste un commentaire là-dessus. Je pense que j'ai déjà eu l'occasion de vous sensibiliser à ce que je croyais être l'effet éducatif colossal qu'entraîne à l'occasion un recours pénal et une condamnation devant un tribunal.

M. Lachapelle: Oui.

Représentativité de la commission

Le Président (M. Filion): Évidemment, il y a des choix à faire, etc. Je pense qu'il y a beaucoup... La charte est connue un peu. On était civilisés avant et on l'est encore plus. Mais il y a des cas de discrimination qu'on lit dans les rapports annuels et qui font littéralement bondir les parlementaires et les gens en général. (18 heures)

Un autre commentaire sur le caractère de représentativité du personnel, à savoir si les minorités sont bien représentées ou non. Vous avez, à très juste titre, signalé tantôt à ce sujet que le dossier de la commission n'était pas ni plus blanc ni plus noir que celui de la fonction publique en général. Cependant, il demeure qu'à cause de sa vocation la commission est probablement un peu plus la cible de demandes des groupes pour faire en sorte que le caractère de représentativité soit présent à tous les niveaux. Je pense qu'au niveau des commissaires on ne peut pas faire de miracle. Il y en a qui voudrait avoir un commissaire de telle minorité, pour telle région. Cela donne lieu à beaucoup de blagues que vous connaissez fort bien. Cela n'a pas de sens, si on a à choisir six, huit ou dix personnes, d'arriver avec un tableau absolument parfait. Il demeure, cependant, qu'au niveau du personnel, je vous le signale...

M. Lachapelle: Je n'accepte pas votre comparaison.

Le Président (M. Filion): Ah!

M. Lachapelle: Vous disiez: Dans la fonction publique actuellement...

Le Président (M. Filion): C'est vous-même. J'ai cru comprendre cela de vos propos tantôt.

M. Lachapelle: Non, non.

Le Président (M. Filion): Peut-être avais-je mal saisi. Allez-y.

M. Lachapelle: Peut-être que je l'ai mal exprimé aussi. Je vous donne les chiffres. Actuellement, 3, 6 % dans la fonction publique représentent les diverses communautés culturelles à la commission, 14 %.

Le Président (M. Filion): Ah, bon! J'avais compris 4 %.

M. Lachapelle: Je pense qu'on est très représentatifs du milieu de la main-d'oeuvre.

Une voix: Moi aussi, j'avais compris comme vous.

Le Président (M. Filion): Je vous avoue, il y a un malentendu que vous dissipez fort bien.

M. Lachapelle: Quant au sexe, 65 % des femmes et 51 % sont des professionnelles. Chez les cadres...

Une voix: C'est trop. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lachapelle: Oui, c'est trop. Chez les cadres, il y en a 40 %; je pense que c'est presque la moitié des femmes; 9 % sont des minorités ou des groupes ethniques.

M. Jolivet: Ce qui est arrivé, c'est que vous aviez dit 14 %, mais vous avez dit 4, 6 % à la fonction publique et M. Boulerice vous a dit 3, 6 %.

M. Lachapelle: C'est cela. Vous avez dit 3, 6 %. C'est pour cela que...

M. Jolivet: C'est pour cela qu'il y a eu confusion.

Le Président (M. Filion): il y a eu un malentendu qui est bien dissipé. Donc, cela va. Mais, pendant qu'on est sur le personnel, j'ai lu les documents que vous avez remis. J'ai cru noter que le personnel recevait une formation vous me corrigerez encore une fois - de trois jours par année. J'ai l'impression que cela veut dire qu'une personne a trois jours de recyclage, si l'on veut, ou de formation. Ce n'est pas beaucoup, à mon avis.

M. Lachapelle: J'aimerais avoir des exemples dans la fonction publique québécoise et savoir combien. Je ne suis pas sûr. Cela dépend des endroits.

Le Président (M. Filion): Je suis convaincu que vous avez raison, sauf que le sujet évolue rapidement et que les dossiers sont complexes. J'ai étudié également le programme de formation. Il y a une bonne dose de psychologie qui entre en ligne de compte pour le personnel de la commission qui est énorme. Ce n'est pas facile. C'est une remarque, tout simplement.

M. Lachapelle: C'est une remarque que j'accepte tout à fait. Évidemment, dans les circonstances, vous savez que ce n'est pas facile de dire aux gens qui appellent à la commission: Vous savez, nos employés sont en formation, on ne peut pas entendre votre plainte...

Le Président (M. Filion): On retombe un peu dans le problème d'effectif que vous avez bien soulevé.

M. Lachapelle:... revenez dans trois jours.

Le Président (M. Filion): C'est cela. Votre comparaison avec l'Ontario au sujet du problème d'effectif est intéressante. D'autant plus que lorsqu'on regarde les délais de soumission des dossiers en Ontario, on a un autre critère. En somme, cela prend du monde pour faire marcher la meilleure structure au monde.

Dernière question - parce qu'il est déjà 18 heures - avant de prendre quelques minutes sur le guide qu'on a eu l'occasion de feuilleter, je pense. Vous avez dit que la plupart des règlements passent entre les mains des commissaires - un groupe de commissaires?

M. Lachapelle: Oui. Ils passent les deux étapes.

Le Président (M. Filion): lis passent les deux étapes.

M. Lachapelle: il faut dire que rendus en commission, quand les trois commissaires ont regardé attentivement les dossiers, évidemment...

Le Président (M. Filion): Est-ce qu'il est déjà arrivé que les commissaires retournent un règlement qui s'amorçait ou qui était plus qu'amorcé entre deux parties?

M. Lachapelle: On en discute largement. Qu'on ait demandé de reprendre un règlement... La difficulté qu'on a c'est qu'on n'a pas de

pouvoir d'intervention ou d'entériner les règlements. Mais souvent, lors de l'enquête, quand on donne un mandat de médiation, les commissaires insistent pour dire: Écoutez, dans ce cas-là, il nous apparaît que les dommages sont très importants, il faudrait bien les quantifier et vous assurer que le règlement va avoir pour base... Normalement, quand les commissaires disent que la plainte est fondée, on n'indique pas de montant. Souvent, on demande au service du contentieux et aux enquêteurs de nous indiquer quels sont les montants, pour être bien sûrs que les montants vont être clairement établis et que les parties vont savoir autour de quel montant cela devrait se négocier.

Guide "Pour mieux vivre ensemble"

Le Président (M. Filion): C'est bien. Est-ce qu'il y a d'autres interventions de la part des membres de la commission? J'ai l'impression qu'on aurait aimé passer une heure de plus avec vous. Je vous laisse.

On a distribué le guide Tour mieux vivre ensemble".

M. Lachapeile: Ce n'était pas pour vous distraire, si on vous l'a distribué avant...

Une voix: C'est très bien fait.

Le Président (M. Filion): Est-ce que la charte est reproduite?

M. Lachapeile: Oui.

Le Président (M. Filion): À quelle page?

M. Lachapeile: À la fin.

Une voix: Non, c'est la déclaration.

M. Lachapeile: il y a la déclaration et la charte aussi à la fin.

Le Président (M. Filion): il y a la charte, vous avez raison.

M. Lachapeile: Oui, à la page 139 ou 138. On voit que des étudiants ont fait des graffitis avec cela, une présentation pédagogique du...

M. Boulerice: il aurait peut-être été intéressant que la charte ait le même traitement photographique et graphique que celui-ci. D'ailleurs je serais partisan que tous les Québécois reçoivent une copie de la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Lachapeile: À l'époque, il y avait eu une vaste distribution de la charte.

M. Boulerice: Comme il y a de nouveaux Québécois, heureusement, ce serait peut-être un cadeau de bienvenue à leur remettre.

Le Président (M. Filion): Cela est une bonne idée.

M. Lachapeile: Peut-être.

M. Boulerice: Parce que la déclaration appuie la charte et le fondement.

M. Lachapeile: Ce document, seulement pour prendre quelques instants... Vous ne savez peut-être pas. À l'époque, on avait préparé un document qui s'appelait "Jeunes égaux et responsables". Un document qui a été distribué dans les écoles à quelque 300 000 à 400 000 exemplaires, pendant plusieurs années et qui - vous vous en souviendrez peut-être - à l'origine avait créé certains petits problèmes, parce qu'il n'avait pas été accepté dans toutes les écoles, dans toutes les commissions scolaires. Comme il y avait eu beaucoup de critiques publiques, cela avait grandement aidé à la distribution, car ensuite tout le monde se l'arrachait pour voir ce qu'il pouvait y avoir de si scabreux dans ce document sur la Charte des droits et libertés de la personne. Cela avait fait beaucoup parler. Il faut dire, tout de même, que dans ce document, à l'époque, il y avait probablement une certaine présentation de la charte qui était axée davantage - et c'était le reproche qu'on faisait - sur les droits et on oubliait peut-être de parler des responsabilités.

Je pense que le titre du document est très évocateur. "Pour mieux vivre ensemble" est axé davantage sur les relations entre les individus, entre les groupes, et beaucoup plus axé sur un contrat de vie en société qu'est la Charte des droits et libertés. C'est de cette façon qu'on a voulu le présenter. On a voulu le présenter également de façon quotidienne de sorte que les gens puissent se retrouver. Cela s'adresse particulièrement aux étudiants avec des situations très précises dans la vie des étudiants. En l'axant, au départ - ce n'est peut-être pas comme cela que les chartes sont construites -sur des besoins fondamentaux pour ensuite déboucher vers des droits. C'est beaucoup plus facile pour les étudiants de comprendre ensuite ce que c'est qu'un droit. Je parlais...

Mme Bleau: Est-ce que chaque étudiant va avoir le droit d'avoir son livre ou est-ce que c'est seulement le professeur?

M. Lachapeile: Le premier document avait été distribué à 400 000 exemplaires. Malheureusement, on ne peut pas donner celui-ci et le fournir à chacun des élèves. Il est vendu à un prix vraiment minime, qui est de 8 $. Pour les éditeurs, c'était vraiment primordial, on avait fixé un prix. On avait dit: il ne faut pas que cela se vende plus que 8 $, et 6 $ aux commissions scolaires. Ce n'est pas gratuit, bien sûr,

mais je pense que les commissions scolaires ont suffisamment de budget pour le matériel pédagogique. Payer 8 $ pour un document semblable, je pense...

M. Jolivet: Ce n'est pas certain non plus. M. Lachapelle: Pardon?

M. Jolivet: il peuvent s'être fait couper, eux aussi.

M. Lachapelle: il peuvent peut-être s'être fait couper.

Nous pensions qu'on pouvait investir au Québec quelque 8 $ pour un document semblable - il y a des revues qui se vendent pas mal plus cher que cela - si on voulait justement lui donner une présentation le moindrement acceptable. L'autre document était terne, n'était pas agréable, n'était pas attirant pour les élèves. Je pense que celui-ci est beaucoup plus imagé, beaucoup plus facile, communique davantage le message que l'ancien document. Dans sa facture visuelle, il est beaucoup plus agréable.

On a fait affaire avec un certain nombre d'éditeurs, entre autres, l'Éditeur officiel qui n'était pas capable de concurrencer notre éditeur. On pense que ce montant n'est pas un montant exorbitant. Les commissions scolaires et les enseignants nous disent que c'est un document qu'ils vont voir à obtenir. Je dois vous dire qu'à ce jour on a vraiment de la part de... J'ai participé à quelques lancements, Mme Duplé également, je pense aussi, et le document est très bien reçu de la part des enseignants. Pour une chose, entre autres, c'est qu'ils n'ont rien entre les mains pour étudier, pour enseigner, pour éduquer au civisme et à la morale. J'ai vu entre les mains de mes enfants quelques documents épouvantables reproduits à bras et avec des textes incompréhensibles. Je pense que ce document est bienvenu et on devrait faire rapidement le tour du Québec pour en assurer la promotion. Je vous mentionnais tantôt que le ministre de l'Éducation avait écrit à chacun des directeurs généraux pour leur indiquer qu'il connaissait ce document et qu'il les encourageait fortement à l'utiliser.

Il resterait peut-être bien sûr que dans les écoles, on puisse, non seulement enseigner, mais éduquer également à la charte. C'est peut-être le voeu qu'on pourrait formuler.

M. Boulerice: On va le promouvoir et, à la deuxième édition, on réaménagera la première page. Sans aucun doute que les bureaux des députés en achèteront pour remettre comme prix à certains élèves méritants.

Le Président (M. Filion): Je pense qu'on n'a pas besoin de manger tout un oeuf pour savoir qu'il est bon.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Filion): Je viens de feuilleter ce guide et j'ai lu rapidement les pages 124 et suivantes en particulier et je trouve cela extraordinaire. J'ai vu la table des matières et la façon dont cela est présenté. Or, je pense que c'est une bonne ponte. Les auteurs sont mentionnés, etc. Je pense qu'on n'a pas besoin de manger tout un oeuf pour savoir qu'il est bon. Je félicite les pondeurs de ce coco.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lachapelle: Effectivement, il a été produit par des employés de la commission avec évidemment beaucoup de consultations, je dois vous le dire....

Le Président (M. Filion): J'ai vu des...

M. Lachapelle: ...et beaucoup de transpiration aussi.

Le Président (M. Filion): Sûrement.

M. Lachapelle: Les commissaires ont approuvé chacune des pages de ce document...

Le Président (M. Filion): Oui.

M. Lachapelle: ...et chacun des mots. Cela a été même laborieux parce que ce n'est pas facile de présenter la charte. Cela prend les gens aux tripes dans chacune de ces phrases, on le sait bien. On n'a qu'à regarder les exemples, on n'a qu'à regarder les photos, etc.

Le Président (M. Filion): Une remarque cependant et cela ne change pas... À la page 136, vous avez reproduit la déclaration du gouvernement du Québec qui a été faite sur les relations interethniques et interraciales. On sait que c'est l'Assemblée nationale qui a voté la charte. On sait aussi - on me corrigera d'un côté ou de l'autre - mais il me semble qu'à l'Assemblée nationale on a voté la déclaration. Or, je me demande pourquoi on retrouve ici la déclaration, non pas de l'Assemblée nationale, mais du gouvernement du Québec. Les gouvernements passent, l'Assemblée nationale demeure, espèrons-le. Je m'interroge.

M. Lachapelle: C'était le texte imprimé qui était distribué.

Le Président (M. Filion): Pardon?

M. Lachapelle: C'était le texte qui était imprimé et distribué.

Le Président (M. Filion): Mais, à l'Assemblée nationale, on a eu l'occasion de... Ce n'est pas uniquement une déclaration gouver-

nementale, c'est une déclaration de l'Assemblée nationale. Peut-être qu'à une deuxième édition...

M. Doyon: M. le Président, il y a un précédent. Quand la Charte des droits et libertés de la personne a été distribuée dans les foyers, elle était signée par le premier ministre de l'époque.

Le Président (M. Filion): Oui, mais je vous ferai remarquer, sans faire de politique, M. le député de Louis-Hébert que...

M. Doyon: Non, non, je ne fais pas de politique. Je signale la chose.

Le Président (M. Filion): ...dans la copie actuelle de la charte, n'apparaît aucune inscription de temporel, quel premier ministre, etc. Dans les premières copies, c'est vrai. C'est pour cela que je le disais. Ce n'est pas un reproche que je fais. Mais lors d'une deuxième édition - espérons qu'il y aura plusieurs éditions à ce bouquin - ou lors d'éditions ultérieures, il serait bon de vérifier parce que tous les députés ensemble, nous avons voté à l'Assemblée nationale, sans aucune espèce de partisanerie quelle qu'elle soit, une déclaration qui reprend essentiellement le document qui avait été soumis au gouvernement du Québec. J'attire tout simplement votre attention là-dessus.

En terminant, j'invite toutes les personnes autour de cette table et toute votre équipe à se joindre à nous. Étant donné qu'on s'en va au salon du président, je pense que la Chambre est fermée...

M. Kehoe: Non, on peut faire le tour.

Le Président (M. Filion): Oui, on va faire te tour du corridor pour se rendre à l'endroit où nous attend un modeste buffet.

Juste avant de lever la séance, j'effectue le dépôt du mémoire de la CSN. Est-ce que vous l'avez reçu?

M. Lachapelle: Oui, on l'a reçu.

Le Président (M. Filion): C'est sous la cote 15M.

Nos travaux sont ajournés sine die.

M. Lachapelle: J'aimerais remercier à mon tour les députés pour leur grande disponibilité, leur réceptivité à notre égard et la sérénité avec laquelle vous avez abordé ces questions.

Le Président (M. Filion): Merci de votre présence.

(Fin de la séance à 18 h 15)

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