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Version finale

37th Legislature, 1st Session
(June 4, 2003 au March 10, 2006)

Tuesday, December 7, 2004 - Vol. 38 N° 60

Consultations particulières sur le projet de loi n° 80 - Loi modifiant la Loi sur la police


Étude détaillée du projet de loi n° 80 - Loi modifiant la Loi sur la police


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt-trois minutes)

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 80

La Présidente (Mme Thériault): Puisque nous avons le quorum, nous allons débuter les travaux de la Commission des institutions, et je déclare donc la séance ouverte. J'aimerais rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur la police.

Est-ce qu'il y a des remplacements, M. le secrétaire?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. M. Simard (Richelieu) est remplacé par M. Charbonneau (Borduas).

La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, à l'ordre du jour aujourd'hui, nous débuterons par les remarques préliminaires; qui sera suivi par l'intervention des trois associations: l'Association de policiers et policières provinciaux du Québec, la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec et la Fraternité des policiers et policières de Montréal; par la suite, suspension des travaux à 12 h 30. Nous reprendrons à 15 heures avec la Sûreté du Québec, et ce sera suivi du Commissaire à la déontologie policière, des remarques finales et finalement l'ajournement.

Remarques préliminaires

Donc, sans plus tarder, je vais inviter le ministre à débuter ses remarques préliminaires. M. le ministre.

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Mme la Présidente, vous me permettrez de souhaiter la bienvenue à M. Jean-Guy Dagenais, pour qui c'est une première, c'est-à-dire de venir à nos... pas une première de participer à notre commission parlementaire, mais une première d'y participer à titre de président de son association, le président de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. Alors, je vous souhaite la bienvenue, M. Dagenais.

Et nous avons aussi monsieur... je pense que j'ai vu, bien, Georges Painchaud, qui est ici avec nous, qui est aussi président de la fédération. Et j'ai aussi vu, même s'il n'est pas à la table, M. Denis Côté, que je salue. Je voudrais souhaiter aussi la bienvenue à M. Robert Castiglio, qui est procureur de l'association; M. Jacques Painchaud, qui est aussi avec nous; M. Guy Bélanger; et aussi, bien sûr... je pense avoir à peu près nommé tout le monde, presque. Je veux d'ores et déjà les remercier d'être parmi nous aujourd'hui et d'avoir accepté d'éclairer de par leurs observations les parlementaires membres de la Commission des institutions sur le projet de loi modifiant la Loi sur la police.

Je souhaite également la bienvenue à tous mes collègues de l'Assemblée et les nouveaux collègues en cette commission, et je pense que leur message se sera rapidement répandu, de façon à nous éviter d'avoir de grandes conversations en début de commission pour...

Alors, M. le... Mme la Présidente...

M. Charbonneau: J'ai vu que la raison avait triomphé.

M. Chagnon: Ce n'est pas la raison qui a triomphé, c'est le bon sens.

M. Charbonneau: Bien, c'est la même chose.

M. Chagnon: Pas toujours. M. le... Mme la Présidente, vous me permettrez sans doute de présenter les personnes qui m'accompagnent. Aujourd'hui, j'ai M. Denis Racicot qui est avec moi, qui est sous-ministre associé au ministère de la Sécurité publique; Me Jean Allaire, qui est de notre contentieux; ainsi que Mme Francine La Grenade, qui sont à la Direction des affaires juridiques.

M. Charbonneau: ...homonyme de parent, de petit cousin de l'autre Jean Allaire, de renommée célèbre?

M. Chagnon: Ce sont deux jumeaux presque identiques. Presque identiques. Mais je n'ai pas vu l'autre dernièrement.

Une voix: L'autre est un clone, lui, c'est le vrai.

M. Chagnon: C'est le vrai.

Une voix: ...

M. Chagnon: Clone. Alors, les travaux de la Commission des institutions qui auront lieu aujourd'hui vont marquer à mon avis une nouvelle page dans l'histoire du développement des services policiers au Québec. C'est pourquoi je suis particulièrement heureux et fier de pouvoir participer avec vous à l'accomplissement de cette étape importante dans le processus d'adoption de ce projet de loi. Ce jalon est d'autant plus important que cet amendement législatif aura un impact direct sur le cheminement de la carrière de plusieurs policiers et policières au Québec. Il aurait été impensable de procéder à un changement si important sans entendre les représentants des principaux intéressés, comme on me l'a suggéré. J'ai trouvé que c'était une bonne idée et c'est pour ça que ça a été fait.

Comme je le mentionnais, le 30 novembre dernier, lors de l'adoption du principe par l'Assemblée nationale, deux mesures sont prévues au projet de loi soumis aujourd'hui devant nous, en étude à cette commission. Le premier principe, c'est celui de simplifier et de rendre plus efficace et flexible le mode de nomination de certains officiers de la Sûreté du Québec. Le second principe vise à permettre à un policier ou à une policière sanctionné par le comité de déontologie d'obtenir une réhabilitation. C'était donc tout à fait naturel qu'on puisse bénéficier des observations du Commissaire à la déontologie policière au sujet de la réhabilitation.

Comme vous le savez, les policiers sont investis de pouvoirs extraordinaires alors qu'ils exécutent des devoirs dus à leur charge. Ils peuvent même être appelés à priver, de manière momentanée, un citoyen de son droit fondamental à la liberté alors qu'il procède à son arrestation. Il est même possible que les policiers aient à requérir l'utilisation de la force, qui, dans des cas extrêmes, peut entraîner des blessures graves, voire même le décès d'un citoyen. Il est aisé de comprendre, avec de telles responsabilités et de tels pouvoirs, lorsque le policier ou la policière doit faire face à une situation volatile, qu'il est possible que des erreurs surviennent, que des accidents arrivent, que le jugement des personnes s'exerce avec moins de discernement ou que la pression subie mène à des excès de langage ou à des gestes regrettables. Les policiers et policières doivent, comme toute autre personne, répondre de leurs actes. Mais malgré tout les policiers et policières doivent bénéficier de la confiance indéfectible du public s'ils veulent continuer à servir la société. À cet égard, j'anticipe avec beaucoup d'intérêt les interventions de chacun des représentants, puisque le projet de loi n° 80 permettra à leurs membres d'obtenir ce qui pourrait être qualifié facilement d'une deuxième chance.

Mais, avant d'aller plus loin, vous saurez m'autoriser à revenir sur certains faits historiques qui ont marqué l'évolution des mesures visant le respect et l'éthique chez les policiers et policières du Québec. D'abord, l'adoption d'un code de déontologie des policiers du Québec, qui a été adopté en 1988, alors que l'Assemblée nationale a sanctionné la loi sur l'organisation de police. Cette loi édicte un code de déontologie unique pour tous les policiers et policières au Québec. De plus, elle crée le Comité de déontologie policière ainsi que la fonction de Commissaire à la déontologie.

Le 16 juin 2000, une autre date d'importance dans le développement du système québécois de déontologie. C'est à ce moment que sont fusionnées la Loi de police ainsi que la Loi sur l'organisation policière, donnant ainsi naissance à la Loi sur la police. Cette étape marque un tournant majeur dans le développement des services policiers au Québec et consolide les mesures relatives au respect de l'éthique, aux normes de comportement et concernent évidemment le contrôle externe de l'activité policière. Aujourd'hui, la Loi modifiant la Loi sur la police s'inscrit dans cette évolution de la législation relative aux services policiers et à l'exercice de la profession.

n (11 h 30) n

M. le Président, après ce petit retour en arrière, je souhaite maintenant expliquer davantage en quoi consiste le projet de loi n° 80. Ainsi, concernant la nomination de certains officiers de la Sûreté du Québec, l'objectif est d'accorder au ministre de la Sécurité publique le pouvoir de nommer, sur recommandation du directeur général, les officiers de la Sûreté du Québec autres que le directeur général et les directeurs généraux adjoints. Ces derniers demeureront, tel que le prévoit actuellement la loi, nommés par le gouvernement.

Par ailleurs, la pièce de résistance de ce projet de loi est l'adoption de mesures législatives permettant la réhabilitation déontologique des policiers et des policières du Québec. Cette initiative fait suite à des demandes répétées, depuis de nombreuses années, des associations policières quant aux difficultés, notamment sur le plan du développement de la carrière, que rencontreraient les policiers et les policières aptes à assumer des fonctions supérieures mais qui avaient été sanctionnés par le comité de déontologie. Lors de l'élaboration du projet de loi, nous nous sommes longuement attardés dans le principe qui devrait guider ce processus de réhabilitation. Non seulement ce processus devrait-il permettre au demandeur de voir disparaître les inconvénients liés à l'imposition de la sanction pour laquelle il demandait une réhabilitation, mais le processus devrait aussi veiller à traduire la confiance renouvelée témoignée par la société au policier réhabilité.

Le projet de loi prévoit donc un processus strict venant encadrer la délivrance d'une attestation de réhabilitation. Pour être admissible, la demande d'un policier ou d'une policière devra satisfaire aux neuf critères suivants: premièrement, le délai applicable pour la présentation de la demande a été respecté; deuxième critère, que la demande soit complète et soit accompagnée du montant exigé pour son traitement; troisièmement, que le policier n'ait pas d'antécédent judiciaire; quatrièmement, que le policier ne fasse pas l'objet d'une poursuite pour une infraction criminelle; cinquièmement, qu'aucune plainte concernant le policier ne soit pendante devant le Commissaire; sixièmement, qu'aucune demande de révision d'une décision du Commissaire concernant le policier ne soit pendante devant le comité; septièmement, que le policier ne fasse pas l'objet d'une citation devant le comité; huitièmement, qu'aucun appel d'une décision du comité ne soit pendante devant une cour au Québec, et particulièrement la Cour du Québec; neuvièmement et finalement, que le policier ne soit pas sous le coup d'une autre sanction. Par ailleurs, toutes les demandes seront déposées au greffe du comité de déontologie, le greffier verra à ce que les demandes respectent les critères établis.

Le projet de loi proposé va encore plus loin en mandatant le Comité de déontologie policière afin qu'il apprécie à sa juste valeur chacune des demandes de réhabilitation et qu'il octroie au mérite une attestation de réhabilitation. Le comité pourra alors requérir tout document qu'il juge pertinent à la prise de décision. Il pourra également tenir une séance afin de s'assurer du bien-fondé d'une demande, et ce, dans le respect des règles de preuve, des procédures et des pratiques qui seront élaborées par le comité et approuvées par un règlement du gouvernement. Une fois octroyée, une attestation de réhabilitation n'aura pas pour effet d'effacer les faits passés. Elle rétablira la réputation des individus et permettra de rendre inopposables aux policiers et aux policières des actes dérogatoires pour lesquels ils auront obtenu leur réhabilitation, ce caractère inopposable des sanctions passées qui permettra de voir disparaître les inconvénients vécus par les policiers et les policières, particulièrement lors des concours de promotion.

Mais l'innovation majeure incluse à ce projet de loi est l'émission de l'attestation de réhabilitation. Cette attestation deviendra le symbole de la cessation, pour l'avenir, des effets négatifs d'un comportement passé sanctionné par le Comité de déontologie policière. Toutefois, la réhabilitation déontologique sera révocable, à la demande du Commissaire, s'il est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu, aurait pu justifier une décision différente. La possibilité d'une révocation, surtout dans le cas d'une récidive, est nécessaire afin de préserver la confiance du citoyen dans le processus déontologique.

Mme la Présidente, il nous tarde d'entendre nos invités, alors je terminerai ces remarques préliminaires en réitérant aux membres de la commission et à ceux et à celles qui sont avec nous aujourd'hui que le projet de loi n° 80 vise, en matière de déontologie, à donner aux policiers et aux policières le même droit à la seconde chance dont bénéficient l'ensemble des Québécoises et des Québécois. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. Donc, avant de vous passer la parole, M. le député de Borduas, j'aimerais vous souhaiter la bienvenue parmi nous, puisque vous avez été en congé de maladie. Donc, nous sommes très heureux de vous ravoir dans notre commission. Et, sans plus tarder, je vais vous céder la parole à titre de critique de la sécurité publique.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Mme la Présidente, merci beaucoup de votre agréable bienvenue, mais, comme je suis déjà de retour depuis quelques mois... mais je n'avais pas eu la chance d'être à la Commission des institutions, alors merci encore une fois.

Écoutez, je ne serai pas très long. D'abord, le ministre vient de résumer dans le fond, je dirais, un peu ? les notes préliminaires ? les raisons pour lesquelles on se retrouve devant ce projet de loi à l'Assemblée. Moi, essentiellement, je vais dire les raisons pour lesquelles j'ai demandé ? puis je pense que le ministre a reconnu que c'était à notre demande ? qu'il y ait des auditions particulières avant l'étude détaillée, parce que je croyais... quand j'ai dit au ministre que... Quand il m'en avait parlé, il y a quelques mois, de la possibilité qu'il y ait ce projet de loi là, moi, je ne voyais pas de problème. A priori, je suis plutôt d'accord, je pense que le principe de justice, il doit valoir pour tout le monde. Et, d'autre part, en ce qui concernait la promotion des officiers de la Sûreté du Québec, je trouvais aussi que ça allait de soi. Et, bon, par la suite, il y a eu des questionnements de certains de mes collègues.

Mais, au-delà de ça, c'est surtout quand j'ai rencontré différents leaders syndicaux des associations policières du Québec où je me suis rendu compte que finalement, entre ce qu'on leur avait dit que devait être le projet de loi et ce que le projet de loi s'avérait être dans son écriture... et, même moi, quand je l'ai lu, je me suis dit: il me semble que ce n'est pas tout à fait ce que le ministre m'avait dit. Et j'en ai donc parlé au ministre, et il a accepté correctement qu'on procède à cette étape-ci, d'autant plus qu'on est à une étape législative. Et je suis d'accord ? je suis content de voir que finalement la Sûreté du Québec est revenue sur sa décision, après le débat que j'ai, disons, provoqué la semaine dernière, quant à son premier avis de ne pas venir devant la commission ? je trouve qu'il y a une différence. Quand une commission parlementaire étudie les crédits d'un ministère, bon, c'est l'examen de contrôle, la responsabilité de contrôle du pouvoir législatif sur l'exécutif, puis, à ce moment-là, l'exécutif a la responsabilité de choisir qui parle en son nom, etc., et je n'ai pas de problème avec ça, puis d'ailleurs, à ce moment-là, le ministre peut être témoin.

On est encore dans un système... En fait, bien, on est ici dans un système parlementaire ou une conception du parlementarisme britannique qui est plus anglais que les Anglais ? je vérifie avec mon collègue si mes informations étaient exactes, et elles le sont: à Ottawa, les ministres ne siègent pas en commission parlementaire pour faire les consultations particulières et même faire la législation. On est encore poigné, au Québec, avec cette espèce de tutelle de l'exécutif sur le législatif, qui, j'espère, avant que je quitterai un jour cette enceinte, sera disparue. J'espère qu'on aura fait plus que cette réforme-là d'ici là, mais entre-temps on est pris avec, alors vivons avec.

Mais ce qui était clair à ce moment-là, c'était que le législatif légifère, c'est-à-dire que ce sont les députés qui doivent avoir de première main les informations et pas par gouvernement ou ministre interposé. Et, dans ce contexte-là, je ne m'étendrai pas plus longuement sur le débat qu'on a eu la semaine dernière, et je suis content de voir que finalement la direction de la Sûreté du Québec est revenue sur sa décision, que nous pourrons discuter avec eux, comme nous allons le faire dans quelques minutes avec les représentants des policiers, et je crois que ça va nous permettre finalement de clarifier. Parce que l'objectif, c'est... Bon, le ministre a dit: C'est la... Je vous donne une deuxième chance. L'idée, c'est, dans le fond, d'être juste et de faire en sorte qu'une conséquence à l'acte soit proportionnée à la faute professionnelle ou au manquement déontologique qui a amené une éventuelle sanction. Il ne s'agit pas d'imposer à des policiers une pénalité ou une conséquence plus lourde qu'à d'autres catégories de citoyens.

n (11 h 40) n

Et encore plus, je comprends très bien pourquoi, depuis des années, les policiers demandaient cette modification-là: parce que c'est eux qui sont sur la ligne de front avec nos concitoyens qui passent la frontière de la légalité. Alors, ceux qui choisissent des comportements délinquants, d'une façon professionnelle ou accidentelle, ce sont les policiers qui finalement les côtoient, et on peut... C'est très difficile, j'imagine, que, quand on est policier puis qu'on voit un criminel qu'on a arrêté, condamné, qui a fait son temps puis, quelques années plus tard, a son pardon, se dire: Oui, mais, moi, j'ai un de mes collègues dans l'auto-patrouille, ou au poste, ou dans mon escouade qui a eu un problème, il a été sanctionné, mais, lui, il ne peut pas avoir de pardon, il traîne toujours son dossier. Alors, je peux très bien comprendre que c'était, pour le milieu policier, une espèce d'aberration qui devait un jour ou l'autre être corrigée.

Et l'objectif de la loi, c'est effectivement de corriger ça en s'inspirant de ce qui se fait ailleurs puis en s'inspirant aussi de la volonté qu'on veuille le faire correctement, c'est-à-dire que, si le résultat du projet de loi, c'est de faire les choses à moitié ? comme ça peut donner l'impression que ça l'est, puis on verra à l'étude détaillée puis par rapport aux mémoires puis aux discussions que nous aurons dans quelques minutes ? mais, si la conséquence, c'est qu'on ne va pas au bout de la logique et qu'en bout de piste on laisse... on ne corrige rien et qu'on laisse trace d'une situation qu'on voudrait par ailleurs voir disparaître, bien à un moment donné on se dit: Bon, bien, on veut-u ou on ne veut pas? Si on veut, allons-y, soyons cohérents. Si on ne veut pas, bien disons-le aussi franchement puis ne le faisons pas. Alors...

Et par ailleurs, à l'égard des promotions au niveau de la Sûreté ? on en reparlera avec les dirigeants de la Sûreté du Québec ? la semaine dernière, le ministre et moi avons indiqué à l'Assemblée que nous étions d'accord pour éliminer une étape administrative ou de... ralentir le processus de promotion. La seule chose ? et j'ai hâte de voir qu'est-ce que les dirigeants de la Sûreté du Québec vont dire ? c'est qu'à quelque part, quand on y réfléchit bien, il y avait une espèce de protection, pour le ministre de la Sécurité publique, que les nominations soient, disons, autorisées... ou les promotions soient autorisées par le Conseil des ministres plutôt que par lui-même, ce qui pouvait éviter qu'un jour on puisse dire que le ministre de la Sécurité publique, dans un cas particulier, a fait du favoritisme dans un sens ou dans l'autre. Alors que le Conseil des ministres, bon, c'est une institution, ils sont plusieurs, alors la responsabilité...

Pour le reste, je ne vois pas beaucoup de problèmes, mais il s'agira juste de voir dans quelle mesure, cette crainte que certains avaient d'enlever un mécanisme qui dans le fond était une espèce de mécanisme de protection, est-ce que c'était vraiment une protection ou si dans les faits ce n'en était pas une véritable et que le prix à payer, c'était une lourdeur administrative inutile qu'on voudrait régler.

Alors, Mme la Présidente, je ne veux pas aller plus loin à cette étape-ci des remarques préliminaires. Je pense qu'on a des invités qui ont accepté notre invitation. C'est vrai qu'on n'a pas utilisé le pouvoir qu'on avait de les obliger à venir. Tant mieux. Quand on peut s'entendre à l'amiable et inviter plutôt qu'ordonner, pourquoi pas? Alors, moi, je suis prêt, et mes collègues également, à entendre nos invités.

Auditions

La Présidente (Mme Thériault): Parfait. Merci, M. le député de Borduas. Donc, sans plus tarder, je vais inviter les représentants de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec, la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec ainsi que la Fraternité des policiers et policières du Québec à prendre place. Le temps que vous vous installez, j'aimerais souhaiter la bienvenue ici à M. Jean-Guy Dagenais, qui remplace M. Daniel Langlois ? nouvelle nomination à titre de président ? depuis le mois de novembre, je crois, ainsi qu'à M. Denis Côté, qui a succédé à M. Prud'Homme. Bienvenue parmi nous.

Donc, il nous reste 45 minutes avant de suspendre les travaux, puisqu'il y a une rencontre dans cette même salle ci. Je vais vous demander de décliner votre identité, vous présenter, et vous avez environ 15 minutes pour faire votre présentation. La parole est à vous.

Association des policières et policiers
provinciaux du Québec (APPQ), Fédération
des policiers et policières municipaux
du Québec (FPMQ) et Fraternité des policiers
et policières de Montréal inc. (FPPM)

M. Côté (Denis): Merci, Mme la Présidente. Membres de la commission, si vous me permettez, je vais prendre deux secondes pour... deux, trois secondes pour présenter les gens qui m'accompagnent.

La Présidente (Mme Thériault): Je vous en prie, merci.

M. Côté (Denis): M. Georges Painchaud, président de la Fraternité des policiers et policières de Montréal; Me Guy Bélanger, procureur de la fédération; à mon extrême gauche, Me Robert Castiglio, procureur de l'association; M. Jean-Guy Dagenais, président de l'Association des policières et policiers provinciaux du Québec. Et, dans la salle, il y a aussi M. Lehré, président de la Fraternité des policiers et policières de Québec, ainsi que des représentants de la Fraternité des policiers et policières de Laval.

L'Association des policières et policiers provinciaux du Québec, la Fédération des policiers et policières municipaux du Québec et la Fraternité des policiers et policières de Montréal s'unissent dans la présentation de ce mémoire et remercient la Commission des institutions de leur donner la possibilité d'exprimer leurs opinions sur le projet de loi n° 80. C'est l'ensemble des policiers du Québec qui sont ici représentés par le biais de leur association respective, soit plus de 14 000 policiers qui sont concernés au premier chef par le projet de loi n° 80.

Le projet de loi semble avoir été conçu pour traiter les cas les plus graves. Nous croyons qu'il devrait être repensé pour tenir compte de la très grande majorité des cas, qui n'atteignent pas un tel niveau de gravité pouvant justifier une procédure aussi lourde et contraignante. Nous espérons pouvoir sensibiliser la commission à cet égard et nous souhaitons ardemment que le projet de loi soit modifié en regard de nos commentaires.

Premièrement: la notion de réhabilitation. D'entrée de jeu, nous tenons à nous élever contre la notion de réhabilitation, qui est totalement inappropriée pour désigner le processus de radiation des sanctions déontologiques. Tant en droit canadien qu'en langage populaire, le terme «réhabilitation» est associé à la justice criminelle. Mais, qu'on se le dise, la faute déontologique n'a rien d'un crime, c'est un manquement professionnel dans l'exercice d'un travail difficile et complexe qui ne peut être exempt d'erreur. La notion de réhabilitation a donc par définition une connotation péjorative qui aurait pour effet d'élever la faute déontologique au même niveau d'opprobre que la faute criminelle. Cette notion ne convient définitivement pas à l'objectif recherché en relation avec l'exercice d'une profession. Un dossier disciplinaire ou déontologique n'a pas la même portée qu'un dossier criminel. En la matière, c'est la notion de retrait ou de radiation de sanction qui est généralement utilisée et qui convient le mieux.

Deuxièmement, la notion de radiation de sanction. Avant l'adoption de la Loi sur l'organisation policière, maintenant intégrée à la Loi sur la police, la déontologie policière était traitée en discipline interne par chaque corps de police. Les manquements professionnels étaient donc sanctionnés en discipline et se retrouvaient au dossier disciplinaire du policier fautif. Or, lorsqu'il s'agit d'épurer le dossier disciplinaire d'un policier, il est question de retrait ou de radiation de sanction. Ainsi en est-il de l'article 83 du Règlement sur la discipline et la déontologie des membres de la Sûreté du Québec, qui prévoit que le membre de la Sûreté qui s'est vu imposer une mesure disciplinaire peut demander la radiation de la sanction au directeur général. L'article 54 du Règlement sur la discipline interne des membres du Service de police de Montréal est au même effet. En ce qui concerne les autres services de police municipaux, la plupart des conventions collectives prévoient le retrait, la radiation ou autre forme de péremption automatique d'une sanction disciplinaire après l'écoulement d'une certaine période de temps.

L'article 4 du Règlement sur les archives de la Sûreté du Québec et des corps de police municipaux concernant le personnel policier prévoit que les documents relatifs à une mesure disciplinaire peuvent, à la demande du policier concerné, être retirés du dossier après une période de cinq ans. Le retrait du dossier a le même effet qu'une radiation. Il en est de même dans la législation des autres provinces canadiennes qui traite de radiation et de retrait du dossier. À titre d'exemple, nous avons reproduit en annexe diverses dispositions législatives portant sur cette question; nous y reviendrons plus tard. C'est donc cette notion de retrait ou de radiation qui devrait prévaloir en matière de déontologie policière, et les associations policières recommandent donc au ministre de modifier en conséquence le projet de loi n° 80.

Troisièmement, le processus pour obtenir la radiation d'une sanction déontologique. Nous ne pouvons accepter le processus décrit au projet de loi n° 80, d'une part, parce qu'il confie au Comité de déontologie policière une discrétion complète quant à l'opportunité d'accorder ou non au policier la réhabilitation, quelle que soit la nature de la sanction en cause; d'autre part, le policier se voit confronté à une nouvelle audition publique et à une autre décision du Comité de déontologie policière en regard d'une même affaire, déjà décidée et souvent fortement médiatisée, ce qui risque de le placer à nouveau sur la sellette pour un événement au sujet duquel il a déjà suffisamment subi des conséquence accablantes.

Enfin, nous ne pouvons accepter non plus que le policier ait à assumer les frais de traitement de la demande, comme le suggèrent les articles 255.9 et 255.15 du projet de loi. Bien que nous soyons d'accord avec l'ensemble des critères de recevabilité qui sont énumérés à l'article 255.9 projeté ? sauf celui relatif au montant exigé pour le traitement de la demande ? nous sommes d'avis que la rencontre de tous ces critères devrait conduire à une radiation automatique, du moins lorsqu'il s'agit d'un avertissement, d'une réprimande, d'un blâme ou d'une suspension n'excédant pas 30 jours. Le principe de la radiation de la sanction par simple écoulement du temps est d'ailleurs reconnu par plusieurs législations provinciales concernant la police.

n (11 h 50) n

Le débat concernant la gravité de l'acte dérogatoire a déjà eu lieu au moment de l'imposition de la sanction, tel que l'énonce d'ailleurs l'article 235 de la Loi sur la police: «Dans la détermination d'une sanction, le comité prend en considération la gravité de l'inconduite, compte tenu de toutes les circonstances, ainsi que la teneur de son dossier de déontologie.» Le débat sur la gravité ne devrait pas donc être repris aux fins de la radiation de la sanction. Une suspension qui n'excède pas 30 jours n'atteint certes pas un degré de gravité qui justifierait de s'imposer pareille procédure. La nature même de la sanction permet de tracer une ligne quant au niveau de gravité de l'acte dérogatoire. Comme le Comité de déontologie policière en a déjà décidé au moment de l'imposition de la sanction, il serait malvenu d'y voir une gravité plus importante lorsqu'il doit apprécier une demande de radiation.

Par ailleurs, les cas de suspension de plus de 30 jours ou de rétrogradation ne devraient pas être référés au Comité de déontologie policière de façon automatique mais dans les seuls cas où le Commissaire à la déontologie policière le jugerait approprié, ce qui convient parfaitement à son rôle. Le Comité de déontologie policière se verrait saisi par le Commissaire des cas d'un réel intérêt aux fins d'une demande de radiation, soit ceux d'intérêt public, dans le même sens que celui prévu à l'article 148 de la Loi sur la police, et notamment, en termes d'intérêt public, on parle de celles impliquant la mort ou des blessures graves infligées à une personne, les situations où la confiance du public envers les policiers peut être gravement compromise, des infractions criminelles, des récidives ou autres matières graves. La procédure prévue aux articles 755.11 à 755.16 pour le traitement de la demande par le Comité de déontologie policière nous apparaît acceptable dans la mesure où elle se limiterait aux seuls cas d'intérêt public qui seraient soumis par le Commissaire.

Quatrièmement, le délai de péremption. L'article 255.2 suggère un délai de trois ans pour un avertissement, une réprimande ou un blâme, et de cinq ans pour une suspension ou une rétrogradation. Ces délais nous apparaissent trop longs et nous suggérons que le délai devrait être de deux ans pour l'avertissement, la réprimande ou le blâme, et de trois ans pour une suspension ou une rétrogradation. La sanction déontologique affecte la carrière des policiers et, pour la plupart, constitue même un empêchement à l'avancement dans le service de police qui les emploie, qu'il s'agisse de promotions ou autres. Le but du Code de déontologie des policiers du Québec n'est pas de punir, mais il vise d'abord et avant tout à assurer une meilleure protection des citoyens et citoyennes en développant au sein des services policiers des normes élevées de service à la population, ainsi que l'énonce l'article 3 du Code de déontologie des policiers du Québec. Le policier qui a été sanctionné reçoit un message très clair de s'amender et il subit une sanction proportionnelle à sa faute, il n'est pas nécessaire d'en rajouter.

Le but du délai de péremption, c'est de s'assurer que le policier a compris son erreur, qu'il s'est amendé avant que sa faute soit effacée. Deux ans pour une sanction de nature d'une réprimande, c'est suffisant pour s'en assurer, s'il n'y a pas eu de récidive; il en est de même d'une période de trois ans lorsqu'il s'agit d'une suspension ou d'une rétrogradation. Une péremption de cinq années, sur une carrière de 25 ou 30 ans, est totalement disproportionnée. Dans les faits, il faut même ajouter à cette période de cinq ans une période additionnelle de deux ou trois années pour le traitement de la plainte, depuis son dépôt jusqu'à la sanction finale. Durant toutes ces années, on hypothèque sérieusement la carrière du policier, sans compter que l'on peut priver indûment un service de police de son talent et de son potentiel en l'excluant de toute promotion à cause de son dossier déontologique. On pourrait à tout le moins moduler le délai de péremption en fonction de la durée de la suspension en traitant distinctement celles n'excédant pas 30 jours. Notre proposition se compare très bien avec ce qui se fait dans les autres provinces canadiennes.

Cinquièmement, l'effet de la radiation. La loi devrait prévoir clairement que la radiation d'une sanction déontologique fait en sorte que le policier est présumé ne pas avoir été sanctionné et qu'il ne peut se voir opposer cette sanction ni par son employeur dans le cadre des relations de travail, ni par quelque tribunal que ce soit, y incluant le Comité de déontologie policière. Nous comprenons mal cette mention apparaissant à l'article 255.20 voulant que la réhabilitation n'aurait pas pour effet d'effacer les faits passés. La radiation ne peut et ne doit pas avoir un effet mitigé. Quel est l'objectif de cette réserve et quel en serait l'effet par rapport à la réhabilitation recherchée? La disposition nous apparaît ambiguë et elle comporte un très mauvais message quant à la portée de la réhabilitation.

En conclusion, la révision des différentes lois de police des autres provinces canadiennes et des règlements adoptés en vertu de ces lois démontre que la radiation des sanctions imposées à un agent de police est un processus qui est automatique, soit par le simple écoulement d'une période de temps ou soit par l'écoulement d'une période de temps à l'intérieur de laquelle le policier doit avoir une bonne conduite. Aucune de ces lois n'instaure un processus contradictoire en matière de radiation des sanctions. Il faut se rappeler que le policier qui se voit imposer une sanction déontologique a déjà subi un processus contradictoire au cours duquel le comité a eu à examiner sa conduite et à lui imposer une sanction selon la gravité de l'acte reproché. Les associations estiment qu'il serait totalement inapproprié de recommencer un tel processus au moment d'une éventuelle demande de radiation. Elles estiment également que le délai de péremption proposé par le projet de loi devrait être réduit parce qu'il pénalise indûment le policier. En effet, l'effet de la radiation devrait être d'effacer complètement la sanction du policier, sans réserve aucune quant aux faits passés.

En guise de recommandations, les associations syndicales policières recommandent que le projet de loi soit amendé comme suit: La loi devrait faire référence à une notion de radiation ou de retrait plutôt qu'à la réhabilitation; le délai de péremption devrait être de deux ans pour un avertissement, une réprimande ou un blâme, et de trois ans pour une suspension ou une rétrogradation, du moins en ce qui concerne une suspension n'excédant pas 30 jours; le processus de radiation devrait se dérouler comme suit: la demande de radiation est transmise au greffier du comité; le greffier transmet copie de la demande au directeur du corps de police concerné et au Commissaire à la déontologie policière; le greffier s'assure de la recevabilité de la demande suivant les critères de l'article 255.9 projeté; le Commissaire peut s'opposer à la demande dans un délai de 20 jours dans les cas d'une suspension de plus de 30 jours; dans les cas d'intérêt public, si tous les critères sont satisfaits, le greffier émet une attestation de radiation de sanction dans les cas suivants: i) la sanction est un avertissement, une réprimande, un blâme ou une suspension n'excédant pas 30 jours; ii) la sanction est une rétrogradation ou une suspension excédant 30 jours, mais le Commissaire ne s'est pas objecté à la demande dans le délai prévu; s'il s'agit d'une suspension de plus de 30 jours ou d'une rétrogradation pour laquelle le Commissaire a transmis une objection dans le délai prévu, le greffier soumet la demande au Comité de déontologie policière, qui en dispose suivant les articles 255.11 et 255.12 projetés; le greffier émet une attestation de radiation si le comité fait droit à la demande.

La radiation de sanction devrait avoir pour effet que toute mention inscrite au dossier du policier en lien avec cette radiation est retirée de son dossier. Le policier serait présumé n'avoir jamais été sanctionné et il ne pourrait se voir opposer l'acte dérogatoire pour lequel il a obtenu la radiation. Dans le seul but de bien illustrer notre position, nous avons produit en annexe II le texte du projet de loi auquel nous avons apporté nos propres corrections.

Enfin, nous remercions les membres de cette commission pour leur attention et nous espérons que nos commentaires et recommandations permettront d'apporter au projet de loi des amendements qui le rendraient acceptable aux associations policières que nous représentons. Merci.

La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup, M. Côté. Je ne sais pas s'il y a des gens à côté de vous qui voudraient peut-être ajouter quelque chose, il vous reste 30 secondes.

n (12 heures) n

M. Côté (Denis): Il reste 30 secondes? Peut-être juste passer... Je vais profiter du 30 secondes pour vous amener à l'annexe... vous inviter à prendre l'annexe I, où on reproduit six extraits de loi dont celles en Ontario, au Nouveau-Brunswick, en Saskatchewan, en Alberta, en Nouvelle-Écosse et à Terre-Neuve?Labrador. Vous allez voir... je vais y aller rapidement, vous allez voir qu'on parle souvent de la notion de supprimer le dossier après un écoulement du temps.

Il y a ça en Ontario. Au Nouveau-Brunswick, on parle que la sanction imposée doit être enlevée. On parle également d'un délai de trois ans, au niveau du Nouveau-Brunswick, et d'une année dans le cas de sanctions mineures. Maintenant, en Saskatchewan, on retrouve encore une fois... on parle... je ne sais pas si, le terme, je le prononce bien, en anglais, on parle d'«expunged», donc «retiré», on parle de délai de deux ans. Dans les cas d'offense majeure, encore une fois ça doit être retiré, mais après cinq ans.

Si je prends qu'est-ce qui se fait au niveau de l'Alberta, on parle d'un délai de cinq ans, on parle de retirer le dossier, de retirer l'annotation dans le dossier du policier. On parle d'un délai de trois ans, on parle... dans le cas d'un délai de trois ans, on parle de «retiré» et «détruit» ? dans le cas de l'Alberta, on va plus loin. En Nouvelle-Écosse, la même chose, on parle d'«expunged», encore une fois, et là on a différents délais, là, où on doit retirer le dossier par l'écoulement du temps: on parle de trois ans, de deux ans et d'un an, tout dépendant du type d'infraction. Merci.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Côté. Donc, sans plus tarder, je me tourne du côté ministériel. M. le ministre, vous avez... Il reste exactement une demi-heure, donc il y a 15 minutes qui seront consacrées à la partie ministérielle, 15 minutes aux députés de l'opposition. Et, si jamais il y avait un représentant de l'Action démocratique qui se joindrait à nous, je verrai à lui laisser du temps pour qu'il puisse s'exprimer.

M. Chagnon: ...alors n'y comptons pas trop. Mme la Présidente, c'est intéressant que le débat soit lancé de la façon dont il l'est. Il y a en fait quatre, je dirais, quatre particularités, dans le document qui nous est présenté par la coalition des syndicats policiers: on parle d'abord de la notion de réhabilitation, la notion de radiation de fonction, le processus ? en fait, sur le processus, je dirais qu'il n'y a pas grand-chose qui nous sépare; mais ? le délai de péremption puis l'effet de la radiation. Je dirais que ces quatre points-là sont les points qui nous amènent ici à discuter de la question et qui sont soulevés de la façon suivante.

M. Côté nous parlait, au nom de ses collègues, nous parlait de la notion de réhabilitation, et il voit la réhabilitation comme étant un problème, surtout la qualité du mot, la perception que le mot puisse donner. Et, à cela, je suis obligé de constater deux choses. D'abord, dans un document qui vient d'être publié par l'Association des services de réhabilitation sociale du Québec, on fait part de la réhabilitation et on fait part justement de la réhabilitation dans le sens de ce qu'on a déjà dit publiquement depuis le mois de mai. Quand je disais que ce n'est pas possible que des gens qui ont un casier judiciaire ne puissent pas recevoir un pardon lorsqu'ils font une demande au fédéral pour recevoir ce pardon-là, ce n'est pas possible que des policiers qui soient en situation de problématique déontologique ne puissent pas avoir le même droit. Et de cela découle... de cette discussion-là découle le sujet dont nous parlons aujourd'hui.

Toutefois, j'ai appris récemment, je l'avoue, que selon l'expression de la Loi sur le casier judiciaire, avant 1992, la loi faisait référence à la notion de pardon. On utilise maintenant l'expression... ou on utilise aussi l'expression «personne graciée», mais, depuis 1992, on utilise le mot «réhabilitation». Et j'ai ici un linguiste spécialisé en langage juridique qui pourra nous répondre peut-être à ces questions-là, nous dire pourquoi on utilise le mot «réhabilitation». Moi, ce que l'on me disait, c'était que c'était le mot le plus français. Et je nous verrais mal adopter une approche linguistique moins française que celle utilisée par le gouvernement fédéral. Mais je vais demander peut-être, si vous le jugez à propos, que M. Lagacé ? sauf erreur ? puisse nous informer sur cette question-là.

La Présidente (Mme Thériault): Est-ce que vous pourriez vous identifier clairement, M. Lagacé, votre prénom et votre fonction, s'il vous plaît?

M. Lagacé (Jacques): Oui. Jacques Lagacé, conseiller linguistique au ministère de la Justice du Québec.

La notion de réhabilitation, effectivement, je dirais qu'actuellement elle est effectivement utilisée en matière de droit criminel, en matière de droit pénal, au Canada et ailleurs aussi, mais je crois que le mot a un sens suffisamment large pour pouvoir être appliqué à d'autres matières que les matières criminelles ou pénales. Et je ne pense pas qu'on puisse dire que le fait de l'appliquer à d'autres matières va élever le niveau d'opprobre à celui qui existe en droit criminel. C'est simplement un mot qui a un sens relativement large: il s'agit de rétablir quelqu'un dans ses droits, quelqu'un qui a été l'objet d'une condamnation, et ça ne comporte pas en soi l'idée que l'acte commis est d'ordre criminel.

Ça, c'est un peu comme le mot «amnistie», qui en passant est le mot correct pour «pardon», qui est un anglicisme, en matière de droit pénal, «pardon». C'est «amnistie» qui est le terme correct. L'amnistie peut exister pour des crimes ? je ne suis pas un connaisseur de ça, mais ça peut peut-être aller jusqu'au meurtre ? on peut amnistier certains actes extrêmement graves et on peut aussi amnistier des actes extrêmement bénins, comme des contraventions de stationnement, de circulation. Je pense que c'est en France que ça se passe: lorsqu'il y a un nouveau président de la République, il y a une amnistie générale pour certains types d'infraction.

Donc, je ne pense pas qu'on puisse attacher à un mot en particulier, qui a un sens relativement général, une connotation péjorative. C'est un mot qui peut s'appliquer à différentes matières. Et il semble que ce soit le mot juste. Je pense que personne n'a remis en question le fait que c'était le mot juste en matière pénale. Et c'est défini comme ceci dans le vocabulaire juridique de Gérard Cornu, qui est un spécialiste... qui est jurilinguiste, enfin un grand juriste français dont le lexique est reconnu un peu partout, y compris au Québec.

Donc, la réhabilitation, c'est le «rétablissement d'une personne dans la plénitude de ses droits, intervenant après une peine en tout ou en partie exécutée, pour un motif qui justifie l'effacement des déchéances et interdictions qui y étaient attachées». Alors, j'ai l'impression que c'est exactement ça qu'on vise ici.

Et au fédéral, enfin dans la loi qu'on citait tout à l'heure, la Loi sur le casier judiciaire, on fait une certaine... on fait une légère différence entre «pardon» ? on utilise le mot «pardon», à mon avis à tort; mais entre «pardon» ? et «réhabilitation». Le pardon, c'est une décision qui prononce la radiation ou la suppression d'une condamnation ou d'une peine. Donc, le pardon efface la condamnation. Il peut aussi interrompre la peine ou empêcher la peine d'être exécutée. La réhabilitation, elle, c'est le rétablissement, comme on disait, dans ses droits d'une personne qui en a été privée à la suite d'une condamnation.

Donc, ce qu'on vise ici, ce n'est pas l'effacement de la condamnation, si j'ai bien compris. La condamnation, les faits restent les mêmes. Ce qu'on veut effacer, c'est les déchéances, la perte de droits et de privilèges qui a suivi cette condamnation disciplinaire.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Lagacé.

M. Chagnon: Vous êtes toujours sur mon temps...

M. Charbonneau: Bien, non, non, mais allez-y, c'est vous qui avez décidé de prendre...

M. Chagnon: Bien, je pensais que c'était important. Parce que c'était l'opinion que le Comité de législation a formulée sur cette décision-là et le ministère de la Justice. Alors, j'ai demandé aux linguistes du ministère de la Justice d'être présents parmi nous et pouvoir nous éclairer sur cette question-là parce qu'elle m'apparaît importante. Et elle est importante, entre autres, à tout le moins pour nos invités, parce qu'ils y ressentent... il y a du ressentiment par rapport au vocabulaire.

Tant qu'à la notion de radiation de sanction, c'est une notion qui est un peu curieuse. Une fois que la sanction a été vécue, lorsque la sanction a été... que ce soit une réprimande, ou une journée, ou deux jours, ou enfin, comment dit-on...

Une voix: Une suspension.

M. Chagnon: ...une suspension, bien on ne peut pas radier la sanction, elle a été... la peine a été purgée. Alors, c'est évident qu'on... Cette notion-là m'apparaît un peu curieuse.

Vous, toutefois, dans les éléments que vous venez de nous donner, entre autres parmi les lois de certaines autres provinces, vous faites allusion à ces lois, toutefois, sauf erreur, aucune de ces lois ne retient la question de la déontologie mais retient la question de la discipline. Or, la discipline et la déontologie, c'est deux mondes un peu différents. La discipline, c'est la contravention qui se fait à l'intérieur du corps policier à l'endroit de son policier. La déontologie, c'est l'acte de... la reconnaissance par le public d'un tort qui aurait été fait au public, contrairement à la discipline. Et c'est pour cela qu'on doit l'examiner de deux façons différentes, me semble-t-il. Mais on est ici pour discuter.

Tant qu'au troisième point que vous soulevez, le délai de péremption, ce que vous nous suggérez finalement, ça pourrait être intéressant, on devrait le regarder. Mais, toutefois, pour la... Sans tomber dans des règles de conformité, est-ce qu'il n'y a pas lieu de le regarder de façon... En tout cas, on pourra la regarder, cette question-là: c'est-u deux ans, trois ans ou cinq ans? C'est des questions qui vont être soulevées puis qu'on pourra regarder ultérieurement. Je suis ouvert à essayer de trouver des solutions, à faire en sorte qu'on puisse se reconnaître.

n (12 h 10) n

Tant qu'à l'effet de la radiation... L'effet de la radiation, puisqu'on ne parle pas de la radiation mais bien plutôt de la réhabilitation, l'effet est extrêmement important, c'est l'effet de rendre inopposable... suite à ce certificat de réhabilitation qu'une policière ou un policier aurait, de rendre inopposable toute possibilité de promotion, même rendre inopposable en cour. Un policier, en cour, qui se ferait poser une question par un avocat de la défense pourrait répondre qu'effectivement cette question...

Une voix: Même de la couronne.

M. Chagnon: ...ou de la couronne, pourrait répondre à cette question de façon beaucoup plus facile que ce n'est le cas aujourd'hui, à cause de l'inopposabilité de cette réhabilitation-là. J'ai essayé de raccourcir mes arguments en quelques minutes pour nous permettre d'avoir plus de temps pour en discuter. Pardon?

La Présidente (Mme Thériault): Il vous reste quatre minutes.

M. Chagnon: Alors, je vous les donne.

M. Castiglio (Robert): ...avoir l'opportunité d'intervenir.

M. Chagnon: Oui, oui. C'est ça.

La Présidente (Mme Thériault): Oui, oui. Le ministre a émis des commentaires. Je vous suggérerais d'utiliser les quatre minutes qui restent à son temps pour répondre.

M. Chagnon: Je vous les donne.

M. Castiglio (Robert): Oui. Si vous me permettez, très brièvement, puis je passerai la parole à M. Dagenais par la suite. Vous avez raison de mentionner, M. le ministre, que les autres provinces n'ont pas établi la distinction discipline-déontologie qu'on a au Québec. Mais il faut se souvenir, et M. Côté l'a mentionné tantôt, que jusqu'en 1988 c'était la même chose. On a simplement, depuis 1988, décidé que le même acte qui auparavant était de la discipline interne allait maintenant, depuis 1988, pour une raison de transparence, être jugé par des organismes indépendants des services de police.

Alors, je ne crois pas que ça a pour effet de rendre différente, de par sa nature, la conclusion qu'un policier a commis ou non une faute, qu'elle soit disciplinaire, avant 1988, ou déontologique, depuis 1988, ou même hybride, parce qu'on a encore aujourd'hui des éléments sur lesquels les policiers sont autant cités en déontologie qu'en discipline pour le même événement. Alors, c'est important de le souligner.

Et quant à la question de la réhabilitation, par rapport à l'aspect linguistique, je vous soumets avec respect que c'est peut-être un mot plus français que «pardon», mais la discussion n'est pas de ce niveau-là, à mon point de vue, ce matin. C'est, que, quand on parle de réhabilitation, on parle de quelqu'un qui a été condamné, on parle de quelqu'un qui a été déchu. Et je pense que l'Assemblée nationale doit se préoccuper de l'effet de l'utilisation d'un tel terme quand on parle de policiers.

Je pense qu'il est important que l'Assemblée se penche sur la problématique d'une certaine perte de confiance du public à l'égard des policiers, qui a pu être sanctionnée par le Comité de déontologie. Et, si on parle de réhabilitation, de déchéance de droits, alors qu'on sait que ces termes-là sont utilisés pour décrire le criminel qui demande la réhabilitation, je vous soumets qu'on ne se rend pas service collectivement parlant, et je vous soumets qu'on doit plutôt utiliser les notions qu'on vous recommande dans le mémoire.

M. Dagenais (Jean-Guy): Avec votre permission, Mme la Présidente, je voudrais juste ajouter un mot sur l'effet de la loi sur le processus des promotions à la Sûreté du Québec, en fait un effet sur l'Association des policiers provinciaux.

En fait, l'article 56 de la loi de police stipule que les sous-officiers sont nommés par le directeur général sur approbation du ministre. Donc, on dit: Le projet de loi n° 80 propose des modifications à cet article afin d'éviter que les nominations de la quasi-totalité des officiers requière à chaque fois, comme vous le savez, un décret du gouvernement. Donc, en effet, si le projet de loi est accepté, les nominations des officiers de la Sûreté du Québec, à l'exception bien entendu du directeur général, des directeurs généraux adjoints, seront faites par le ministre sur recommandation du D.G.

Cependant, je porte à votre attention qu'il y a quand même 1 432 emplois, à la Sûreté du Québec, qui sont occupés par des sergents et, de ce nombre, 850 sont des sergents enquêteurs travaillant, la plupart, sur des escouades, dont 500 sont des sergents superviseurs ? exemple: des responsables de relève.

Les membres qui appliquent pour occuper un emploi de sergent doivent réussir des examens écrits, des entrevues, et, une fois ces étapes réussies, les membres sont soumis à un processus qu'on appelle, à la Sûreté du Québec, le tri sécuritaire. En effet, bien avant que le directeur général nomme un sergent, le dossier est étudié par un comité qui est responsable de vérifier les antécédents disciplinaires et déontologiques du candidat, et on vérifie aussi les plaintes pendantes. Si le dossier du candidat contient des éléments d'ordre disciplinaire ou déontologique, le comité va réviser ces éléments, leur gravité, puis la conduite du membre depuis les incidents, et la nature du poste à combler.

C'est sûr qu'à la suite de cette évaluation vous comprendrez que le comité fait une recommandation au directeur général, qui en définitive décide s'il y a lieu d'octroyer ou non la promotion au membre. Encore là, la décision du directeur général n'est pas finale puisqu'elle doit recevoir l'approbation du ministre de la Sécurité publique. Ce dernier fait une révision du dossier et, le cas échéant, approuve la nomination à titre de sergent.

Je porte à votre attention que ce processus est lourd et cause des délais importants. Et souvent un membre qui a réussi les examens écrits et les entrevues voit sa candidature mise de côté en attendant qu'une plainte déontologique soit enquêtée, conciliée ou, dans certains cas, soumises au Comité de déontologie policière. Et on sait que la très grande majorité des plaintes déontologiques sont rejetées par le Commissaire à la déontologie ou encore réglées à la conciliation.

Pourtant, pendant ce temps et malgré les statistiques, un candidat en promotion de sergent voit souvent ses chances d'avancement suspendues dans le temps. Et il en est de même aussi pour sa famille, parce que vous savez que la plupart des promotions, à la Sûreté du Québec, évidemment s'accompagnent d'un transfert, d'un déménagement, et c'est la famille qui doit subir ca.

Donc, l'association, chez nous, on est préoccupés par la lourdeur du processus. Et, depuis plusieurs mois d'ailleurs, des représentations ont été faites à la Sûreté du Québec pour que les membres cessent de subir un préjudice en raison d'antécédents mineurs ou du fait qu'une plainte disciplinaire ou déontologique est pendante.

Donc, l'APPQ estime que le projet de loi n° 80 pourrait contribuer à alléger le processus des promotions en précisant que les nominations des sous-officiers ne requièrent plus l'approbation du ministre. Mais l'association estime en effet que, si un candidat a réussi toutes les étapes prévues au mécanisme de placement et de promotion et a passé avec succès l'étape du comité, du tri sécuritaire, et que le directeur général a finalement approuvé sa nomination comme sergent, ce candidat devrait être promu sans un autre délai.

Donc, on dit que l'étape ultime de l'approbation par le ministre nous apparaît ? pardonnez-moi le mot ? superflue, et l'association est d'avis qu'elle devrait être supprimée. Et conséquemment l'association propose que l'article 56 de la Loi sur la police soit modifié afin de prévoir que les nominations des sous-officiers soient faites par le directeur général de la Sûreté du Québec. Je m'excuse, j'ai été long un petit peu.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, Mme Dagenais. On a dépassé le temps. Je sais que le ministre voulait dire quelque chose. Peut-être un 30 secondes que je vous accorderai après?

M. Charbonneau: Je voudrais juste clarifier une chose, Mme la Présidente, parce que, bon, on arrête à 12 h 30, semble-t-il?

La Présidente (Mme Thériault): Oui.

M. Charbonneau: Bon. Moi, je n'ai aucun problème à ce que nos invités reviennent après-midi. Je comprends que ça peut leur... Écoutez, je veux dire, on a fait ça, là, pour les entendre, pas pour nous entendre, nous autres. On va avoir bien du temps à se parler pour légiférer puis, je veux dire, faire des amendements ou en tout cas... Alors, moi, je n'ai pas de problème, à la limite, si le ministre veut continuer avec eux puis... ou bien si on prend un sujet... C'est parce que là on a abordé deux éléments, puis je comprends que la dynamique nous oblige un peu...

Une voix: ...

M. Charbonneau: Non, non, non. Mais, je veux dire, il y a la question de la déontologie puis il y a la question des promotions.

La Présidente (Mme Thériault): Oui. M. le député, le seul problème que nous avons, c'est qu'il y a des gens qui ont besoin de la salle aussi cet après-midi. Il y a déjà un horaire qui a été donné à d'autres groupes.

M. Charbonneau: Mais, à 15 heures, quand on reprend?

La Présidente (Mme Thériault): Bien, à 15 heures, il y a déjà un autre groupe qui est attendu. Donc, moi, je suggérerais qu'on vous donne votre temps pour que puissiez l'utiliser avec les gens.

M. Charbonneau: Oui, mais à moins qu'on ait consentement pour aller un peu plus loin. Écoutez, on les invite pour nous parler; on n'est pas... S'il faut que ceux qui sont prévus pour 15 heures passent à 15 h 30, ils passeront à 15 h 30. On a fait ça souvent. L'idée, c'est qu'on utilise le maximum de temps qu'on a avec les gens qui sont ici, là.

Je vous dis ça en tout respect mais avec... Le seul argument que je vous mets dans la balance, c'est l'ancienneté et une certaine expérience de comment on fait, là, tu sais? Je vous le dis, là...

La Présidente (Mme Thériault): Je vous entends très bien , M. le député. Par contre, nous avons un ordre du jour. Nous avons débuté nos travaux en retard parce que la Chambre n'avait pas convoqué les travaux. Par la suite, dans les remarques préliminaires, nous avions une demi-heure pour les deux parties; nous avons pris 21 minutes. Et la balance du temps, elle est là. Donc, plutôt que de parler, vous et moi, je pense qu'on devrait peut-être vous laisser parler et poser des questions aux groupes, et que les questions soient courtes et que les réponses soient les plus complètes possible en étant les plus courtes possible.

M. Charbonneau: Un instant, là. Moi...

Une voix: On perd notre temps, là.

M. Charbonneau: Non, non. Je comprends, là, mais il y a une question de principe, là, je veux dire. Il nous reste 10 minutes; si vous me dites qu'après-midi on ne peut pas revenir avec eux autres, on a un petit problème, là.

M. Chagnon: Bien oui, tu perds 10 minutes à discuter! Pourquoi tu n'aurais pas pu prendre 10 minutes pour les entendre? Écoute-le!

M. Charbonneau: Non, mais, Jacques, si tu n'avais pas lu les remarques préliminaires qui étaient déjà dans le projet de loi, on aurait peut-être pu commencer plus vite, là, puis, si on n'avait pas perdu 10 minutes à parler avec un linguiste, là...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Borduas, lorsque vous vous adressez à cette commission, veuillez m'adresser la parole, s'il vous plaît.

M. Charbonneau: Bien, Mme la Présidente, je vais y aller, dans ce cas-là. Mais ça me choque.

La Présidente (Mme Thériault): Allez-y. Et, si je juge que nous puissions dépasser un peu l'heure des travaux...

M. Charbonneau: J'ai demandé des consultations particulières pas pour entendre le ministre, pour entendre du monde qui nous aide à comprendre la portée du projet de loi. Après ça, entre nous, on va débattre.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député, la parole est à vous pour que vous puissiez parler avec nos invités.

M. Charbonneau: Bien. Alors, moi, je vais vous dire d'entrée de jeu que je partage l'approche du mémoire et je suis sensible aussi à la représentation. Puis je vais commencer par là. Je veux juste comprendre.

n (12 h 20) n

Ce que vous dites, c'est que le projet de loi prévoit que dorénavant les officiers de l'état-major, à l'exception... en fait les officiers, sauf ceux de l'état-major, seront nommés ultimement par le ministre plutôt que par le Conseil des ministres. Et ce que vous nous dites, c'est qu'on devrait ajouter une dimension... actuellement le ministre nomme les sous-officiers, et vous dites: Ces sous-officiers-là devraient être nommés par le directeur. C'est ça que vous nous faites comme représentation? C'est ça? Exact?

Une voix: Exact.

M. Charbonneau: Bon. Moi, a priori, ça me semble aussi dans la même logique, là. Et d'autant plus qu'on a aujourd'hui des mécanismes de police professionnelle qui n'ont pas existé à une autre époque, dans l'histoire policière du Québec, où pendant longtemps on a été affligés par des services de police qui étaient aux prises avec de graves problème de déontologie. On a les mécanismes aujourd'hui pour s'assurer que les choses se fassent correctement. Alors, moi, je n'ai pas de problème particulier, à moins que vous ayez un autre argument. Je comprends que finalement, quand il arrive à la nomination des sous-officiers, il y a un délai pour eux comme il y en a un quand leurs supérieurs doivent attendre que le Conseil des ministres se penche sur la question. Bon.

Et j'ai bien compris aussi ? je pense que les collègues également ? la remarque au niveau du langage. On légifère aussi dans un espace public, on légifère dans une société qui donne une signification aux mots. Et, dans ce contexte-là, moi, ce que je comprends, c'est qu'une radiation, c'est un acte. On radie quelque chose, et, après ça, on a une réhabilitation. Dans le fond, la réhabilitation, c'est la conséquence. Mais ce que vous dites: Nous, là, on ne vise pas à avoir la conséquence, on veut que dans les faits on radie et que l'effet soit concret, c'est-à-dire: si on radie, bien, après ça, ça ne reste pas dans le dossier, comme c'est prévu dans le projet de loi, là. C'est ce que je comprends.

M. Côté (Denis): Vous permettez? Merci. Bien du respect pour M. Jacques Lagacé, je ne doute nullement de son expertise et de ses connaissances. Et c'est d'ailleurs... je voudrais justement faire appel à ses connaissances pour qu'il nous trouve un autre terme que le mot «réhabilitation». Le mot «réhabilitation» est peut-être un terme juste, mais c'est inapproprié quand on parle des 14 000 policiers qui accomplissent quotidiennement notre mission. On ne veut pas être associés à la justice criminelle. On l'applique, mais on ne veut pas être associés à un terme qu'on utilise en justice criminelle.

Et, si c'est possible, à 12 h 30, j'inviterais M. Lagacé à descendre dans la rue avec moi, on fera un minisondage auprès des gens qu'on va croiser dans la rue, à savoir si c'est péjoratif ou non, le mot «réhabilitation». On va tout de suite nous associer aux criminels qui obtiennent un pardon. On ne veut pas, les 14 000 policiers et policières au Québec, être associés à la justice criminelle, en termes de réhabilitation.

Maintenant, au niveau de la déontologie, je vais y aller rapidement parce que je sais que le temps coule. Au niveau de la déontologie et de la discipline, on va vous inviter à voir un peu qu'est-ce qui se fait au niveau des provinces, des autres provinces. On ne fait pas la différence, au niveau des autres provinces; on pense qu'on pourrait avoir le même traitement qui existe dans les autres provinces.

Maintenant, concernant l'effet de la radiation. On comprend bien mal, on comprend bien mal que, dans le projet de loi, qu'on y aille avec une réserve et qu'on mentionne expressément que ça n'a pas pour effet d'effacer les faits passés. On ne veut pas de demi-mesures, là. On subit les conséquences, là, d'une sanction; on veut, après avoir épuisé cette sanction-là, après avoir épuisé un certain délai de péremption, qu'on puisse retirer ça du dossier, pour qu'on puisse recommencer, une fois pour toutes, à avoir un dossier vierge.

D'ailleurs, à ce niveau-là, ça nous apparaît un peu un recul, parce qu'à l'article 4 actuellement du règlement sur les archives, c'est prévu que l'annotation est retirée du dossier. Ça fait qu'écoutez, pour nous, c'est un recul. On le retirait auparavant. Si on veut améliorer la situation, qu'on y aille dans le sens où il y avait une latitude, dans le passé, mais qu'on en fasse une obligation qu'elle soit retirée après un certain délai. Je vais céder la parole à mon collègue, M. Painchaud. Georges.

M. Painchaud (Georges): Bon, voici. Je pense que c'est sûr que c'est difficile pour les gens, là, de voir comment ça se fait que les policiers réagissent comme ça, là. Et je vais essayer effectivement de vous amener l'esprit qui va peut-être faire comprendre à tout le monde pourquoi que nous autres, là, on est un peu survoltés, je vais vous le dire, là, on est un peu, là, choqués, pour ne pas dire autre chose, là.

En 1978, il y a eu un arrêté en conseil, ici, et pendant six ans la ville de Montréal a payé le doyen de la Faculté de droit de l'Université de Montréal de l'époque, Me Yves Ouellette, pour créer le premier code de déontologie et de discipline de la province de Québec. Le gouvernement a été tellement fasciné par ça que, les années qui ont suivi, ils ont pris ce code-là puis ils l'ont copié, copie carbone sur un Xerox, puis ils l'ont appliqué à la province de Québec.

Sauf que, quand on a transféré ça... Mais là on a divisé la déontologie et la discipline, contrairement aux autres provinces, et là on a dit: La déontologie, c'est quoi? C'est lorsqu'un citoyen se plaint. Puis la discipline, c'est quoi? C'est lorsque le service de police, ses officiers, se plaignent d'un comportement qui va à l'encontre des politiques du service de police, de l'organisation. Alors, c'était la déontologie pour protéger les citoyens et les citoyennes. Et naturellement on a appliqué ça au Québec. On était les premiers.

Mais, Me Ouellette, lui, là, dans son esprit, puis pour avoir travaillé avec lui à cette époque-là, un code de déontologie, c'était un code qui se devait d'être éducatif. L'objectif, c'était: on apprend de ses erreurs. Il faut permettre à l'organisation policière d'apprendre de ses erreurs. Il faut permettre... L'expression, «l'expérience, c'est le cumul de ses erreurs», c'est grandir des erreurs qu'un service de police peut faire. Ça avait un objectif d'améliorer la qualité d'intervention des forces policières pour donner un plus grand service à la population du Québec.

Ce n'est plus ça. Quand le gouvernement a décidé d'appliquer ça au niveau provincial, c'est devenu punitif. On a trahit la pensée de Me Yves Ouellette, et maintenant c'est punitif. Là, ce qu'on veut, c'est de faire un show dans les journaux, on veut satisfaire la presse, on veut satisfaire les groupes effectivement extrémistes qui s'attaquent continuellement à la police, dont certains d'entre eux cherchent uniquement la notoriété publique, O.K., et on veut satisfaire tout, à part qu'effectivement le véritable objectif: essayer d'avoir les meilleures polices au monde au Québec.

Et ça, ça nous frustre quand on vient nous servir puis nous amener: purger ta peine. Quand tu purges ta peine, tu viens de... c'est pénal, tu es un prisonnier et c'est... Quoi qu'en dise la linguistique, c'est bien, bien clair, ce qui se dit en France puis se dit ici, c'est... Il y a un dictionnaire qui s'appelle le dictionnaire Bélisle, il a été écrit pendant 20 ans, puis, quand tu lis les mots du dictionnaire Bélisle, au Québec, ils ne veulent pas dire du tout, mais du tout la même signification que ceux du Larousse et du Robert. Et c'est ça qu'on ne comprend pas. Et les policiers sont insultés, parce que là on ne dit plus puis on ne reconnaît pas qu'un policier a fait des erreurs. Non. Il a quasiment commis un crime.

Et actuellement où est-ce qu'on est frustrés, c'est que nous, les policiers de Montréal en particulier, quand un policier, par exemple, a un affrontement avec un citoyen puis qu'il a un mot qui est dit de sa part, il insulte un citoyen, on le passe en déonto, on lui donne 20 jours de suspension, à peu près à 275 $ par jour, ce que tu ne verrais en nulle part ailleurs, hein, comme sentence. Puis, cinq ans après, on dit: On va refaire un autre comité pour étudier pour voir si effectivement il va avoir le droit, lui, là, d'annuler sa peine. Quelle peine? Parce que là, ce qui est insultant, c'est qu'on ne reconnaît pas l'erreur de bonne foi d'un policier puis on ne reconnaît pas ce qu'on dit, dans la bouche de tout le monde qu'on entend, que le policier, bien, derrière l'uniforme, il y a un supposé être humain. Bien, je regrette, là, il y a un être humain.

Parce que nous, ce qu'on dit à nos membres, là, c'est que les policiers, ils ont des enfants; il passe une semaine à ne pas dormir parce que ses deux enfants ont eu la picote ou la varicelle, il n'a pas dormi pendant la nuit, il travaille le lendemain matin, et là il a une altercation, parce qu'il est fatigué, parce qu'il est un être humain, et il s'en va dans une audition qui est quasiment un procès juridique, on lui donne 20 jours de suspension pour avoir insulté le citoyen, on lui donne 3 000 $, 4 000 $ d'amende, qu'on ne verra jamais en déontologie du Barreau, ou chez la Chambre des notaires, ou le Collège des médecins, ou nommez-les, jamais on ne voyait ça. C'est des sentences qui n'existent pas en nulle part ailleurs. On nous demande une perfection qui n'existe pas de ce monde, puis là on dit, cinq ans après: Non seulement vous allez pouvoir peut-être le demander, là, mais on n'effacera pas ça automatiquement, comme ça existe dans toutes les autres provinces.

Non. Encore là, ce n'est pas ça. Puis, en plus, bien on va vous charger la facture, parce que pour faire une demande, ça va vous coûter 100 $, 150 $. Alors que les Hell's Angels puis les groupes organisés, quand ils dénoncent la police, ils n'en ont pas, de facture. Alors nous, nos gens, ils disent: Comment ça se fait que, nous autres, on doit payer, que, nous autres, on doit... On n'a aucune garantie qu'après avoir payé effectivement on va avoir le droit.

Vous savez qu'une promotion, dans la vie d'un policier, jusqu'à sa mort, par rapport à son augmentation de salaire, puis par rapport qu'il prend une pension avec ses trois dernières années de salaire, par rapport que, s'il est sergent, seuls les sergents peuvent aller aux examens de lieutenant, seuls les lieutenants peuvent aller aux examens de capitaine, une promotion, dans la vie d'un policier, c'est un minimum de 350 000 $ jusqu'à sa mort. Et là ce policier-là est sur une liste d'attente qui dure deux ans, dans certains groupes, dans d'autres, quatre ans; s'il passe sa date, il est obligé de retourner aux examens; ce policier-là, parce qu'il est bloqué, ça va peut-être lui coûter 350 000 $. C'est de la folie furieuse! Ce qu'on se pose comme question, là: Les fous mènent-u l'asile?

n (12 h 30) n

Alors, voyez-vous qu'on est révoltés puis on est choqués? Parce qu'on ne comprend pas que les gens ne perçoivent pas la frustration qu'on a dans ça. Par contre, le projet de loi qui a été présenté, c'est extraordinaire, parce qu'on pense qu'effectivement, oui... Puis, nous, on n'est pas capables, nous autres, de comprendre comment qu'on va être capables de dire qu'on va négocier un principe. Un principe, tu ne peux pas dire: Je vais négocier la moitié d'un principe, le quart d'un principe, le tiers d'un principe. Un principe, c'est comme un corps humain, tu ne peux pas sectionner ça. Et c'est une question de principe, là-dedans, et on en appelle ici au Parlement. C'est ce que j'avais à vous dire. Merci.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Painchaud. Avant de vous céder la parole, M. le député de Borduas, de consentement, je crois que nous pourrions prolonger de 10 minutes nos travaux, mais pas plus de 10 minutes, s'il vous plaît. Ça va? Il y a consentement?

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député.

M. Charbonneau: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bien, d'abord, merci beaucoup de ce plaidoyer. Je ne peux pas vous blâmer d'avoir cette intensité émotionnelle, ça m'arrive aussi, notamment avec mon vis-à-vis, là, mon bon ami le ministre, sur un autre dossier, remarquez.

Mais, ceci étant, je reviens sur une dimension que vous avez rappelée. Dans le fond, le projet de loi nous dit: On va aller au Commissaire à la déontologie... pas au Commissaire, mais au comité de déontologie, et puis il va y avoir une audition, etc., et par la suite finalement il y aurait une décision, et on garderait encore les traces.

Vous, ce que vous proposez, c'est: Écoutez, soyons clairs, il y a des cas où ça devrait être automatique, et il y a des cas où vous reconnaissez qu'il y a une certaine gravité. Alors, vous dites: Le Commissaire à la déontologie devrait signifier aux personnes concernées et faire en sorte que, s'il juge que ça ne devrait pas se faire automatiquement, qu'il y ait un processus d'examen particulier qui s'enclenche à ce moment-là.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Plus de 30 jours. Et, moi, je vais vous dire, je suis d'accord avec ça, puis mes collègues aussi. En fait, on est d'accord avec la totalité de votre approche, parce que c'est ça: ou bien on fait une correction fondamentale à l'égard du principe ou bien on ne la fait pas; on ne peut pas la faire à moitié. Alors, s'il y a une trace, à notre avis ça reste en contradiction avec le principe même du projet de loi.

Et, bon, on vous a dit qu'on était d'accord sur l'idée même du vocabulaire, mais, au-delà du vocabulaire, il y a aussi cette question, là ? vous venez de le mentionner; on avait passé vite tantôt ? il y a aussi le principe de faire payer, là. Ça, ce n'est pas beaucoup, mais, en quelque part, pourquoi on exigerait des policiers qu'ils demandent, dans le fond, une radiation de la sanction disciplinaire, qu'ils paient en plus, là? Je ne vois pas, là, tu sais? L'État ne fera pas une fortune avec ça, puis je ne vois pas en vertu de quel principe on demanderait à des policiers de payer, plutôt que de ne pas payer. Tu sais, tu as le droit puis, je veux dire, tu utilises ton droit; tu n'as pas besoin de payer pour utiliser un droit que tu as de demander une radiation.

M. Painchaud (Georges): C'est une amende additionnelle.

M. Charbonneau: C'est ça. Et est-ce que vous avez compris aussi que... Parce que, tantôt, ce qui n'était pas clair dans la présentation de M. Côté, c'est que vous avez l'impression, puis on l'a vérifié tantôt, si jamais ça va au comité de déontologie, ça pourrait redevenir une affaire publique, là. Parce qu'à ce moment-là... Et ça, on ne l'a pas beaucoup abordé. Comment vous voyez ça? J'aimerais ça que vous expliquiez un peu la crainte que vous avez par rapport au fait qu'une affaire... Parce que, malheureusement, dans votre métier, souvent les affaires même parfois insignifiantes peuvent faire des manchettes et puis des cas qui sont des affaires publiques. Et est-ce que... Et une fois que c'est réglé, si on revient à la dynamique d'une affaire publique qu'on relance parce que tout à coup on veut radier une faute disciplinaire, on a un problème. Est-ce que vous avez compris que ça pourrait se refaire publiquement?

M. Painchaud (Georges): C'est comme quelqu'un qui a une gale, que la plaie est guérie, tu sais: on rouvre la gale puis on rouvre la plaie. Parce que là-dedans, là, le danger, c'est toujours la même chose, c'est la motivation du policier. On est en train de foutre par terre la motivation des policiers. Je vous le dis, là, d'ici, là, quelques mois, quelques années, vous allez avoir une psychose, dans le service de police, qui est en train de se créer. Ça n'a pas de bon sens. Et les gens ne pourront pas travailler comme ça.

Parce que les plus vieux, ce qu'ils disent, c'est bien clair... On a eu, nous, là, un procédé qui a été amené par Jacques Duchesneau, il disait: À l'avenir... Il a rencontré tous les policiers de Montréal puis il a dit: À l'avenir, on va être un vrai corps de police; c'est oser, risquer et agir. Puis là on va être productifs puis efficaces pour lutter contre la criminalité. Mais là, oser, risquer, agir, là, il n'y a plus un policier qui croit à ça. Parce que, plus tu oses puis plus tu risques, plus tu risques de te faire accuser en déontologie. Donc, quelqu'un qui ne fait rien ne se fait jamais accuser de rien. Alors, on est en train de créer un corps de police inerte.

C'est sûr, ils vont tous avoir les palettes, là, cirées avec de l'huile d'olive puis le «shoeshine» sur les souliers, ils vont être beaux sur la rue. Mais, je vais vous dire bien franchement, vous regarderez le taux de la criminalité. Actuellement, depuis cinq ans à Montréal, baisse dans la criminalité, sur toutes les sphères, à l'exception des violences conjugales. On a des succès. Mais nos gens, là, sont très affectés, les jeunes, de ça, parce que, c'est ça, c'est la motivation: pourquoi s'acharner comme ça?

Puis la presse, eux autres, ils veulent vendre des journaux puis ils sont prêts à réveiller n'importe quoi. Mais là c'est encore une fois l'ouverture, l'ouverture de la plaie. Puis là le gars est obligé de vivre ça, puis sa famille vit ça, puis là les commentateurs des radios: C'est-u normal qu'un policier ait reçu un pardon? Ça va encore partir de plus belle.

M. Charbonneau: D'ailleurs, je vous invite à ce propos, pour alimenter votre réflexion, de lire le livre d'André Pratte. Il en a écrit un sur l'éthique des politiciens, mais un sur l'éthique des journalistes. C'est assez édifiant. Mon collègue voulait poser une question, ici.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier, la parole est à vous.

M. Turp: Moi aussi, je suis sensible à l'impact du mot «réhabilitation», là. On a bien entendu le linguiste, j'ai regardé dans le dictionnaire. Mais c'est qu'il y a cette distinction entre ce qui est l'équivalent du pardon ou de la grâce, hein ? parce que c'est aussi utilisé en France ? et la réhabilitation. Mais ça, c'est d'un autre ordre.

Vous, ce que vous demandez, comme dans les autres lois que vous nous avez mises en annexe, c'est comme la radiation des entrées, de dispositions qui font partie de dossiers. Puis, quand on lit les lois des autres provinces, c'est plutôt ça qu'on a retenu, ce n'est pas l'idée de réhabiliter, ou de pardonner, ou de gracier, mais c'est d'éliminer, dans un dossier, des entrées. Alors, c'est ça, le débat qu'on devra avoir plus tard, c'est entre est-ce qu'on devrait choisir l'une et l'autre de ces options ou juste une, comme dans les autres lois.

Mais je vous ferais remarquer par ailleurs que, dans votre propre projet de loi tel qu'annoté ou modifié, vous avez retenu le mot «réhabilitation», à l'article 255.9, paragraphe 3°, là. Est-ce qu'il y a une explication qui fait que vous utilisez le mot «réhabilitation» là? Parce que, s'il est utilisé là dans son rapport avec les antécédents judiciaires, c'est qu'il ne devrait pas être utilisé ailleurs, dans sa relation avec les questions dont il est débattu ici aujourd'hui. Alors donc, j'aimerais avoir une explication sur 255.9.3° dans votre projet.

La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. Côté.

M. Côté (Denis): Oui. Justement. Question... commentaire très pertinent. À 255.9.3°, ici, on parle d'antécédents judiciaires, et c'est justement le fond de ce que c'est qu'on soulève puis qu'on dénonce depuis le début: c'est que là vous associez le terme «réhabilitation» à un processus criminel. Et là ce n'est peut-être pas très linguistique, mais je vais le dire: Les 14 000 policières et policiers ne veulent rien savoir du mot «réhabilitation». Ce n'est peut-être pas linguistique, mais c'est le fond de notre pensée.

Et je voudrais peut-être juste aussi nuancer, tantôt, un propos de M. le ministre à l'effet que notre mémoire n'était pas si loin, qu'on était assez près de la position ministérielle. Je pense qu'il faut le nuancer, il y a quand même une distinction de fond, là. Nous, on parle vraiment de radiation automatique. Et, tantôt, M. le député de Borduas me disait que je n'avais pas été nécessairement clair; je vais prendre deux minutes pour essayer de clarifier.

Dans le rapport annuel de gestion 2003-2004 du Comité de déontologie policière, on reprend une disposition de la loi et on parle bien: «Dans la détermination de la sanction, le comité prend en considération la gravité de l'inconduite, compte tenu de toutes les circonstances, ainsi que [de] la teneur du dossier de déontologie du policier en cause.»

Qu'est-ce qu'on dit là? Quand on nous a sanctionnés, on a regardé toutes les circonstances puis on a déterminé une sanction en fonction de la faute. Cinq ans plus tard, là, lâchez-nous les baskets, ne reprenez pas encore une fois, là, l'audience... l'audition puis de revenir encore tout brasser l'affaire. Il a été sanctionné, il a eu une épée de Damoclès pendant cinq ans au-dessus de sa tête; aujourd'hui, il a un comportement exemplaire, il s'est amendé, lâchez-le.

Moi, avant d'arriver ici, le seul terme que je connais, c'était le harcèlement thérapeutique; là, je vois qu'il y a de l'acharnement déontologique. Qu'on arrête! Le membre s'est amendé, il a purgé sa peine, il a purgé sa faute, on l'a sanctionné, on a eu compte de tous les éléments, qu'on le lâche, après cinq ans.

La Présidente (Mme Thériault): Merci.

M. Charbonneau: ...vous dites en plus que, s'il y a un problème, bien c'est au Commissaire à la déontologie à faire son travail puis à signaler... qu'au lieu que ce soit automatique, comme ça devrait être normalement, que là on se penche un peu plus sérieusement.

M. Côté (Denis): Pour toutes les suspensions de plus de 30 jours ? là on parle de vraiment des cas graves, là ? à ce moment-là, il pourrait y avoir audition, si le Commissaire juge. Mais, nous, on parle de radiation automatique pour tous les blâmes, toutes les sanctions, toutes les réprimandes en dedans de 30 jours.

M. Charbonneau: Si je comprends bien ce que vous dites, c'est que, si le Commissaire... même pour ceux de 30 jours et plus, si le Commissaire juge qu'il n'y a pas de raison de ne pas accorder la radiation, bien que ça se fasse aussi automatiquement que d'autres.

n(12 h 40)n

M. Côté (Denis): Il y aura une audition à ce moment-là.

La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, étant donné que, sur les 10 minutes que j'ai ajoutées, vous en avez pris neuf, je vais laisser la dernière minute au ministre, avec les intervenants.

M. Charbonneau: ...

La Présidente (Mme Thériault): Non, malheureusement, on n'a... Le consentement était pour environ 10 minutes. M. le ministre.

M. Chagnon: Oui, une chose, je voudrais revenir aux propos soulevés par monsieur...

Une voix: Castiglio.

M. Chagnon: ...Castiglio, Castiglio, et c'était tout simplement ceci. Tu sais, il nous remontait à 1988; en 1988, M. Castiglio se souviendra qu'il n'y a pas de cause déontologique antérieure à 1988. Et, lorsqu'on mélange discipline et déontologie, à partir de 1988, le législateur a voulu qu'après 1988 on fasse en sorte de décider que les arguments disciplinaires étaient des arguments d'ordre administratif, réglés à l'intérieur d'un corps de police, et que les arguments d'ordre déontologique étaient des arguments qui avaient une valeur quasi judiciaire, traités par un tribunal quasi judiciaire, parce qu'ils font la relation entre le public et les policiers. Et c'est là ce que nous cherchons à régler aujourd'hui, ce sont les questions d'ordre déontologique, qu'on cherche à régler aujourd'hui.

Alors, c'est pour cela qu'inévitablement les questions d'ordre déontologique qui découlent d'une décision quasi judiciaire ne peuvent pas faire l'objet d'une attention qui soit toute différente que celle que nous suggérons. On ne peut pas annoncer d'avance qu'on va radier une sanction qui a été déjà purgée. On ne peut pas imaginer...

Puis on pourrait bien passer, là, encore deux heures, trois heures sur le terme «réhabilitation» ou «pas réhabilitation»; le problème que l'on a, c'est que, lorsque que l'on fait, en droit... et qu'on essaie de s'exprimer clairement en droit, on essaie de s'exprimer avec le vocabulaire qui est le plus justement et généralement compris pour l'objet qu'on cherche à régler. Et, dans ce cas-là, si, après tout, il n'y a pas d'intérêt de la part des associations policières à avoir un type de projet de loi comme celui-là, on peut facilement le laisser aller, pas de problème.

M. Charbonneau: ...

M. Chagnon: Bien, peut-être éventuellement, oui. Mais il y a une autre chose peut-être que je voudrais dire, c'est qu'on mentionne, dans le règlement sur les archives... on a mentionné du règlement des archives, à l'article 4... Bon. Là, tout d'un coup, on nous fait des demandes de modifier, puis je suis prêt à regarder ça, puis... modifier les temps de préemption, comme vous le soulignez. Je vous rappelle qu'en ce qui concerne les dossiers de discipline, c'est après une période de cinq ans de l'imposition d'une mesure disciplinaire que le dossier est repris, cinq ans.

La Présidente (Mme Thériault): Je vous laisse 30 secondes pour le mot de la fin.

M. Castiglio (Robert): Mme la Présidente, si vous... Oui. Je vous remercie. Juste une petite précision, M. le ministre. En matière disciplinaire, vous savez que les employés, policiers ou autres, peuvent contester par grief des mesures disciplinaires. Et des tribunaux quasi judiciaires se penchent sur les mesures disciplinaires et, dans certaines circonstances, les approuvent, les modifient, imposent des suspensions. Et ces suspensions-là imposées par un tribunal d'arbitrage quasi judiciaire vont quand même être radiées des dossiers des employés et des policiers.

Alors, je ne pense pas, avec respect, qu'on puisse dire: Bien, parce que c'est un tribunal quasi judiciaire, il ne peut pas y avoir de radiation. C'est tout à fait commun dans l'ensemble des conventions collectives, et pourtant les tribunaux quasi judiciaires, les arbitres, interviennent dans ce domaine-là, mais leurs décisions, même approuvant une suspension, sont quand même radiées des dossiers des employés, de par l'écoulement d'une période de temps. Alors, je pense qu'il ne faut pas faire d'équation, de dire: Il y a un tribunal quasi judiciaire, il ne peut donc pas y avoir de radiation automatique. Je ne pense pas que ce soit tout à fait exact, avec respect.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Castiglio, M. Dagenais, M. Côté, MM. Painchaud et Bélanger...

M. Charbonneau: Mme la Présidente. Juste une petite dernière, si le ministre permet. Entre ça et le retrait du projet de loi, comme le ministre l'a laissé entendre, plutôt que de vous donner raison, qu'est-ce que vous aimeriez... qu'est-ce que choisiriez?

Une voix: Jamais le retrait.

M. Côté (Denis): Il ne faudrait pas perdre l'origine du projet, là: les policiers subissaient des préjudices; on est là pour améliorer, mettre un terme à cette situation-là. Donc, c'est évident qu'on s'objecte au retrait du dossier... du projet de loi.

M. Charbonneau: On va essayer d'apporter tous les amendements que la majorité ministérielle acceptera.

M. Côté (Denis): L'annexe II est là.

La Présidente (Mme Thériault): Merci beaucoup. Donc, sur ce, je suspends les travaux jusqu'à 15 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 45)

(Reprise à 15 h 18)

La Présidente (Mme Thériault): À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît, messieurs! Puisque nous avons quorum, nous allons continuer les consultations particulières pour le projet de loi n° 80. Et, sans plus tarder, je salue les gens de la Sûreté du Québec. Monsieur, la parole est à vous. Nous avons 45 minutes au total: 15 minutes pour vous, pour nous présenter votre mémoire, après ça il y aura 15 minutes d'échange avec les parlementaires du côté ministériel, 15 minutes d'échange avec les parlementaires de l'opposition.

Sûreté du Québec (SQ)

M. Proulx (Normand): Parfait. Alors, merci beaucoup. Alors, je vous remercie de nous accueillir aujourd'hui pour les discussions sur le projet de loi n° 80. Alors, même si nous avions décliné l'offre ou l'invitation, j'ai compris que certains membres de la commission avaient besoin de précisions sur certains points du projet de loi, alors nous sommes au rendez-vous.

Le 16 juin 2000, l'Assemblée nationale sanctionnait la Loi sur la police. Cette législation-cadre régissant tout le domaine de l'activité policière répondait à de nombreuses recommandations qui avaient été adressées au gouvernement du Québec en regard du rehaussement de la formation policière, du raffermissement des règles d'éthique à observer dans ce milieu et du redressement de l'encadrement général de la pratique policière. Bien que ces changements aient permis à la communauté policière de professionnaliser substantiellement leur pratique, une seconde modification législative venait, en juin 2001, réviser le volet de l'organisation policière afin d'assurer un meilleur partage des responsabilités entre les organisations, une adéquation optimale entre le niveau de service offert et les besoins identifiés en la matière.

n(15 h 20)n

Depuis, le ministre de la Sécurité publique a reçu à maintes reprises, d'une part, plusieurs demandes en provenance des milieux policiers afin de revoir l'application de certains mécanismes en regard des normes et des comportements, plus particulièrement la possibilité de réhabiliter un policier sanctionné par le Comité de déontologie policière, et, d'autre part, par la Sûreté du Québec afin de réduire la lourdeur administrative du processus de nomination des officiers de la Sûreté du Québec. Le 11 novembre dernier, M. Jacques Chagnon, ministre de la Sécurité publique, présentait au Conseil des ministres le projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur la police. La Sûreté du Québec tient donc à informer la Commission des institutions de son appui à la réforme proposée, tout en suggérant certaines modifications ou précisions ayant pour but de mieux atteindre les objectifs visés et de faciliter la mise en oeuvre de la Loi modifiant la Loi sur la police.

Concernant les nominations des officiers à la Sûreté du Québec, actuellement l'article 56 de la Loi de police prévoit que le directeur général de la Sûreté du Québec est nommé par décret du gouvernement. Les directeurs généraux adjoints ainsi que les autres officiers sont, quant à eux, nommés par le gouvernement sur recommandation du directeur général, en vertu du deuxième alinéa de ce même article. Enfin, les sous-officiers ainsi que les agents et les agents auxiliaires sont nommés par le directeur général sur approbation du ministre.

En effet, l'adoption du projet de loi par l'Assemblée nationale impliquerait une modification du processus de nomination des officiers à la Sûreté du Québec. Ce sont les grades d'inspecteur-chef, inspecteur, capitaine et lieutenant qui seraient nommés par le ministre de la Sécurité publique plutôt que par le Conseil des ministres. Ceci réduirait le nombre de décrets, allégerait le traitement des dossiers et accélérerait le processus de nomination. Quant au directeur général, celui-ci serait toujours nommé par le Conseil des ministres. Il en serait de même pour les directeurs généraux adjoints qui, après avoir été recommandés par le directeur général, seraient nommés par le Conseil des ministres.

Quelques commentaires et recommandations, particulièrement sur l'article 56. La Sûreté du Québec compte présentement plus de 400 officiers, et le remplacement de l'un d'entre eux entraîne en moyenne trois autres changements à des niveaux inférieurs de la hiérarchie. Alors, effectivement nous sommes rendus à 27 inspecteurs-chefs, 53 inspecteurs, 107 capitaines, 221 lieutenants, pour un total de 408. Il faut comprendre que, quand un inspecteur-chef prend sa retraite, il y a toute une série de nominations qui se fait en cascade. Alors, pour remplacer un inspecteur-chef, ça prend un inspecteur, et un capitaine, et un lieutenant, et ainsi de suite. Pour un inspecteur-chef, ça commande cinq décrets de nomination, de promotion auprès du Conseil des ministres. Depuis 2002, nous avons procédé à 363 affectations d'officiers, dont 199 nominations nécessitant un décret. La procédure actuelle de nomination nécessitant l'adoption de décrets des gouvernements entraîne des coûts pour le traitement administratif des dossiers, en plus des délais importants. À titre d'exemple, depuis la mi-juin, près de 30 nominations d'officiers sont en attente de décret.

Les traitements d'un dossier impliquent actuellement plusieurs instances, dont la Sûreté du Québec, le ministère de la Sécurité publique, le Conseil exécutif et le Conseil des ministres. Historiquement, tous les décrets de nomination recommandés au Conseil des ministres par le ministre de la Sécurité publique ont été approuvés. Ainsi l'évaluation préliminaire à la présentation des dossiers s'avère généralement adéquate. En vertu de la Loi sur la fonction publique, les sous-ministres ont le pouvoir de nommer les cadres sous leur responsabilité. Bien que la nomination des membres policiers de la Sûreté du Québec soit régie par la Loi sur la police, les postes d'officiers se comparent à certains postes de cadres dans la fonction publique.

Le délai moyen de traitement d'un dossier de promotion d'un officier, à la Sûreté du Québec, est d'environ un mois et demi à deux mois, soit l'affichage, l'appréciation par simulation, l'entrevue de sélection, la recommandation et l'approbation. Ensuite, il faut ajouter à ce délai un autre délai supplémentaire, moyen, de quatre à six mois avant que les nominations officielles soient entérinées par le Conseil des ministres. Finalement, si on ajoute la période de relocalisation du membre policier, qui peut aller jusqu'à 120 jours, le délai moyen d'affectation d'un nouvel officier peut s'échelonner sur une année. Dans certains cas, le membre policier pourrait être affecté temporairement dans sa nouvelle fonction jusqu'à la promulgation de son décret de nomination ? vous devez comprendre que, dans ces délais-là, se vit, de façon personnelle, professionnelle et familiale, une insécurité, une insécurité personnelle, familiale, au niveau des enfants, les changements d'école, la vente de la maison, le transfert et l'éloignement familial, quand il y a une assignation au préalable de sa nomination permanente.

Par ailleurs, un sondage interne récent quant à la perspective des départs à la retraite des officiers actuellement en poste prévoit que d'ici 2010, soit dans cinq ans, près de 42 % de ceux-ci auront pris leur retraite; ça représente environ 160 officiers à remplacer. Dépendamment du grade qu'ils auront à l'heure de leur retraite, on peut parler, d'ici cinq ans, d'environ 600 promotions par décret.

Nous sommes d'avis que l'adoption de ce projet de loi, en modifiant le processus de nomination des officiers de la Sûreté du Québec, réduirait significativement le nombre de décrets transmis au Conseil des ministres. Ceci permettrait également de réduire les coûts de traitement des dossiers et les importants délais, sans compter la facilitation de l'administration des opérations. En effet, la modification du processus de nomination des officiers répondrait à un besoin opérationnel important de l'organisation, étant donné le grand nombre d'officiers et de nombreuses possibilités de promotion s'offrant à eux. Évidemment, ça s'inscrit dans le cadre de l'allégement du processus administratif demandé par l'instance gouvernementale.

En ce qui concerne la réhabilitation des policiers, d'entrée de jeu nous appuyons de façon générale les nouvelles dispositions du projet de loi concernant le processus de réhabilitation, car celui-ci permet de lever un obstacle à la carrière du policier sans pour autant avoir les effets d'un acquittement. De plus, cette mesure nécessite une demande au Comité de déontologie policière et ne serait pas accordée automatiquement. Finalement, le policier ne devrait pas avoir d'antécédents judiciaires et de cause pendante au criminel ou en déontologie. Cela signifie que cette mesure concernerait surtout les manquements les moins sérieux, tout en permettant de rétablir la réputation du policier, comme dans tout autre corps professionnel.

Concernant le terme «réhabilitation», nous sommes d'avis que celui-ci doit être remplacé par le terme «radiation du dossier déontologique» ou «rétablissement de la réputation du membre policier», et ce, afin de ne pas créer une confusion avec la réhabilitation en matière criminelle. Nous sommes d'accord à l'effet que le terme «réhabilitation» est le meilleur mot français pour désigner ce que la loi veut faire, mais, dans le milieu policier, dans le sens commun du terme, ça a un effet extrêmement péjoratif en ce qui concerne le milieu policier, et je ne crois pas qu'on devrait associer ou que les policiers s'associent, au niveau de la réhabilitation, en termes de sanction en déontologie, à un volet criminel.

Aux articles 3 et 4, afin de lever toute ambiguïté, nous recommandons également de modifier la partie du texte qui est «pour un acte dérogatoire au code de déontologie qui lui a été reproché» par «dont la conduite a été déclarée dérogatoire au code de déontologie», vu que la réhabilitation envisagée ne vise que les membres sanctionnés.

À l'article 255.1, cet article nous apprend d'abord que la procédure concerne la déontologie, nécessite une demande et détermine les catégories de personnes pouvant s'en prévaloir. Il énonce qu'il faut satisfaire des critères de recevabilité. À ce titre, suivant l'article 255.9, auquel réfère l'article 255.1, le policier ne doit pas avoir d'antécédents judiciaires ni de cause pendante au criminel ou en déontologie. Ensuite, vu qu'elle ne concerne que la déontologie, la question reste à savoir comment il faudra traiter le dossier disciplinaire lorsque le policier a fait l'objet à la fois d'une sanction en déontologie et en discipline pour un même comportement, dans le cas des dossiers antérieurs à l'an 2000. On se souvient qu'avant l'an 2000 il y avait l'effet miroir, et un policier pouvait être trouvé coupable d'une double sanction, et en déontologie et en discipline, ce qui n'est plus possible depuis 2000, depuis l'an 2000. Donc, est-ce que la radiation serait un automatisme avec la discipline? Il restera à approfondir ce volet-là. Il va sans dire toutefois que, si le comportement sanctionné en déontologie était sérieux, le comité a la discrétion de refuser d'accorder une réhabilitation.

Aux articles 255.2 et .3, ces articles ont trait aux délais applicables pour la présentation d'une demande. Ceux-ci varient en fonction de la gravité de la sanction imposée ou de celle qui est la plus grave, si plusieurs ont été imposées simultanément: trois ans après un avertissement, une réprimande ou un blâme; cinq ans après une suspension ou une rétrogradation; cinq ans après une déclaration d'inhabilité ? ceux qui avaient déjà pris leur retraite ou avaient démissionné avant la sanction.

Toutefois, nous croyons qu'une harmonisation des processus déontologique et disciplinaire est souhaitable. Ainsi l'article 83 du Règlement de la déontologie et de la discipline des membres de la Sûreté du Québec prévoit qu'une demande de radiation de sanction ne peut être faite que cinq ans après l'imposition de la sanction. Ces règlements policiers devront s'harmoniser en conséquence sur le processus déontologique. D'ailleurs, dans le projet de nouveaux règlements disciplinaires que nous avons à la Sûreté du Québec, nous discutons présentement pour des radiations automatiques, selon différentes strates de sanction. Alors, on parle, pour certains niveaux, de 18 mois, de 24 mois, 36 mois, etc. Donc, on est déjà en discussion là-dessus pour ne pas geler ou dégeler le bloc de cinq ans.

n(15 h 30)n

L'article 255.7. À la suite du dépôt d'une demande, le greffier du comité de déontologie en transmet une copie au corps de police qui a procédé à l'imposition de la sanction, afin qu'il procède à une vérification d'antécédents judiciaires et de causes pendantes au criminel. Le corps de police transmet sa vérification par écrit au greffier au plus tard 20 jours après la date du dépôt de la demande de réhabilitation. Cette disposition du projet de loi nous apparaît trop astreignante et amènera inévitablement des demandes d'extension dans un traitement de dossier. En conséquence, nous croyons qu'il serait plus approprié de voir ce délai s'étendre à 30 jours, et ce, à partir de la demande du greffier au corps de police plutôt que du membre au comité.

L'article 255.9. Le greffier du comité s'assure des conditions de recevabilité d'une demande. En ce qui concerne la présence d'antécédents judiciaires, il reste à voir quel effet le greffier donnera à une réhabilitation ? entre guillemets un pardon ? accordée suite à une demande ou par le simple effet de la loi sur les casiers judiciaires. Nous croyons opportun, pour clarifier le troisième alinéa, d'ajouter, à la suite ? j'ouvre les guillemets ? d'«antécédents judiciaires», ce qui suit: «ou a obtenu une réhabilitation en vertu de la loi sur les casiers judiciaires», de façon à préciser la définition d'antécédents judiciaires et harmoniser les différents systèmes de réhabilitation de la réputation.

De même, nous suggérons d'ajouter, à la fin de l'alinéa 4°: «et n'est pas, au moment de la demande, sous engagement de ne pas troubler l'ordre public», une mesure imposée en vertu des articles 810 du Code criminel lorsqu'il existe des motifs raisonnables de craindre que la personne causera des lésions corporelles ou endommagera la propriété. De toute façon, il n'est pas utile de nous avancer plus loin sur cette question; il pourrait toutefois être utile de recommander au ministre de préciser ces aspects dans le projet de loi.

Une autre condition, celle de l'alinéa 9°, réfère au fait que le policier ne doit pas être sous le coup d'une autre sanction. Il faut comprendre qu'il s'agit d'une sanction imposée par le comité en vertu de la Loi sur la police et que l'on vise des sanctions qui sont continues, comme la suspension ou la déclaration d'inhabileté. Il est donc recommandé de préciser cette interprétation en remplaçant les mots «autre sanction» par «suspension, rétrogradation ou déclaration d'inhabileté imposée en vertu de la Loi sur la police».

Aux articles 255.12, .13 et .14, cet article permet au comité d'inviter le policier, le directeur du corps de police ainsi que le Commissaire à faire valoir leurs observations par écrit ou en personne, et il en avise les personnes concernées. L'impact de cet article peut imposer au directeur de police, lorsque requis par le comité, la tâche supplémentaire de demander un compte rendu de la conduite du policier depuis. Il peut aussi être invité à être entendu. À notre avis, le projet de loi devrait prévoir que tout directeur du corps de police puisse être représenté à ces fins par une personne qu'il aura au préalable identifiée. Ainsi nous pensons que cette délégation de pouvoir assurerait un bon déroulement des activités du comité, qui autrement pourrait voir ses travaux paralysés par une indisponibilité des directeurs de police à venir témoigner devant le comité.

En conclusion, la Sûreté du Québec appuie le ministre de la Sécurité publique et souhaite que l'Assemblée nationale donne suite aux modifications apportées par celui-ci. Les commentaires et les recommandations formulés au présent document visent à faciliter la mise en oeuvre du projet de loi et à en améliorer les chances de succès. Merci.

Le Président (M. Brodeur): Merci, M. Proulx, M. Deschesnes. M. le ministre.

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Brodeur): J'ai beaucoup changé depuis le début de l'après-midi.

M. Chagnon: Oui, mais vous ne vous êtes pas embelli.

Le Président (M. Brodeur): Je vais donner la parole au porte-parole de l'opposition.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Brodeur): Allez-y, M. le ministre.

M. Chagnon: M. le Président, je voudrais remercier les autorités de la Sûreté du Québec d'avoir bien voulu ? un peu à la dernière minute ? venir nous présenter un mémoire sur les deux sujets qui nous importent dans le projet de loi n° 80.

Concernant d'abord le premier dossier, c'est-à-dire l'aspect qui touche directement la nomination des officiers de la Sûreté du Québec, je comprends que vous estimez qu'il est... c'est une façon plus moderne de faire en sorte de s'organiser pour que les nominations soient faites le plus rapidement possible puis évidemment en faisant en sorte de diminuer l'aspect réglementaire de l'organisation de ces nominations ? et j'ai eu une expérience, on s'en souviendra, au début de mon mandat, où des nominations puis des promotions, pour des raisons que je ne veux pas juger, mais il y avait un retard d'un an et demi dans les promotions qui devaient être faites... qui devaient être signées par le ministre, donc qui n'étaient pas encore présentées au cabinet, et ça a amené évidemment des problématiques assez particulières dans l'organisation du travail, pour les cadres à la Sûreté du Québec. Évidemment, le problème ne serait pas complètement réglé, mais je pense encore qu'il est préférable que le ministre soit mis au fait et je pense que le ministre doit signer, aussi, les avis de promotions suggérées par la direction générale, plus particulièrement par le directeur général de la Sûreté. C'est comme ça que je dois comprendre votre point de vue?

M. Proulx (Normand): Oui, tout à fait. D'ailleurs, c'est tout à votre honneur, je le souligne, Mme la Présidente, c'est tout à l'honneur du ministre que les nominations ou les actes de nomination présentement sont traités assez rapidement. Maintenant, je suis membre de l'état-major depuis plus de huit ans, et c'est depuis votre nomination, M. le ministre, que ça roule rondement. Effectivement, quand vous avez pris poste, on avait des nominations d'officiers qui n'étaient pas signées depuis plus d'un an, un an et demi. Alors, conséquemment, dans une organisation paramilitaire et opérationnelle comme la Sûreté du Québec, ça retarde l'encadrement et ça retarde la dotation des postes.

Alors, on s'entend qu'il y a certaines problématiques, dans le sens qu'advenant le cas où la nomination n'était pas entérinée, et on ne peut pas présumer de la résultante du Conseil des ministres, si elle n'est pas entérinée, donc on met les gens par intérim. Et quelqu'un par intérim, ce n'est jamais quelqu'un qui est pleins pouvoirs. Je dis des fois à la blague, si vous me le permettez: Quand on prend un gros chat jaune, si vous lui mettez des barres noires sur le dos, vous n'en faites jamais un tigre du Bengale; ça, on s'entend là-dessus. Quelqu'un qui est par intérim va garder le fort, va tenir la barque, mais, bon, ne fera pas les changements en profondeur, puis etc., puis il n'est pas pleins pouvoirs, on s'entend là-dessus. Et, quand quelqu'un assume l'intérim, ça veut dire qu'à quelque part il assume souvent deux postes, donc on est en processus d'adaptation qui prend énormément de temps. Et, dans une organisation paramilitaire comme la nôtre, c'est crucial que ces nominations-là soient faites rapidement.

M. Chagnon: Est-ce qu'à votre connaissance il y a déjà eu... puis vous prétendez que non là-dessus, mais est-ce que vous avez fait une recherche assez approfondie pour déterminer si jamais il y avait eu une nomination qui aurait été refusée par le cabinet, une suggestion contresignée par un ministre, quel qu'il soit, dans l'histoire de la Sûreté, ou plus loin on peut aller dans l'histoire de la Sûreté?

M. Proulx (Normand): Dans les deux cas, de mémoire d'homme et de mémoire institutionnelle, on n'a pas trouvé de cas de refus, ou de non-signature, ou de non-entérinement par le Conseil des ministres.

M. Chagnon: Merci beaucoup. Alors, j'ai un deuxième point, concernant la réhabilitation, parce que c'est à mon avis un aspect important du projet de loi, peut-être définitivement le plus important du projet de loi, à mon sens. Vous revenez avec une suggestion qui est la radiation du dossier déontologique. Les gens qui vous ont précédés ce matin, les représentants des organisations syndicales ont fait cette suggestion-là aussi. La problématique que je soulevais à ce moment-là, c'est: Comment on fait pour radier une sanction qui a déjà été purgée?

M. Proulx (Normand): Il faut tout simplement l'extraire du dossier. Mais, je vous dis, le bon terme, c'est vraiment «réhabilitation», c'est le terme qui est employé, mais, dans le milieu policier, ça a une connotation extrêmement péjorative, étant associé typiquement au milieu criminel, et dans le sens commun des gens aussi, c'est-à-dire que, même si on dit à quelqu'un qu'il a été réhabilité, dans le sens commun, c'est quelqu'un qui a été trouvé coupable d'un acte relativement grave.

Et on a des statistiques, à tout le moins on a des dossiers où est-ce que, bon, il y a eu un acte dérogatoire ? et on le comprend, mais somme toute ce n'est pas la fin du monde ? vous savez, entre 1999 et 2002, soit en trois ans, on a eu 1 500 membres qui ont fait l'objet de plaintes à la déontologie: 90 ont été cités et 33 ont été trouvés coupables. Alors donc, c'est... il faut faire attention à la connotation du mot.

M. Chagnon: Tout à fait, je suis tout à fait d'accord avec vous. Il y a 85 % des plaintes annuellement, et on aura... après votre passage, on aura le plaisir d'avoir le Commissaire à la déontologie qui viendra confirmer que, dans son dernier rapport comme ses précédents, 85 % des plaintes en déontologie sont réglées au niveau de la conciliation, à son niveau. Alors, vous partez de 1 500 plaintes, et on descend à 33, ou une trentaine de personnes, dans votre service, qui finalement sont jugées coupables d'un acte déontologique. On parle encore d'un nombre assez marginal.

Présumons que, si le projet de loi était adopté, le projet de loi n° 80, on pourrait s'attendre à ce qu'il y ait une demande, plusieurs demandes de... je suis obligé d'utiliser le terme «réhabilitation», parce que...

M. Proulx (Normand): Vous alliez presque dire «radiation».

M. Chagnon: Bien, j'allais dire «réhabilitation», parce que mon premier terme, c'était «pardon», mon premier terme, c'était «pardon». Le terme qui me passait par la tête, c'était le «pardon», c'était comme une graciation, un pardon, la grâce. Et je pensais, entre autres, que... ? vous m'avez fait perdre mon idée, là, vous; ça va revenir...

n(15 h 40)n

Alors, mon premier terme, c'était «pardon», avant d'utiliser «réhabilitation». Et, si j'ai utilisé «réhabilitation», je n'avais aucune... je comprends, puis je l'ai compris parce que les policiers, les présidents des associations syndicales m'ont fait part de la compréhension du mot «réhabilitation» chez les policiers. Mais notre problème, c'est que, quand on écrit les textes de loi, on essaie de les écrire en français, en fonction de ce que ça veut dire en français et non pas en fonction de l'interprétation du français qu'on veut bien y faire voir ou y faire croire. Et le ministère de la Justice est, là-dessus, intraitable, c'est un dossier qui doit s'appeler «réhabilitation», c'est une réhabilitation.

Alors, on est pris un peu avec ce genre de discussion là, et d'autant plus que la réhabilitation ne fait pas disparaître... on s'en souviendra dans le cas du juge Therrien qui, lui, avait reçu un pardon de son casier judiciaire. Vous me direz que c'était un casier judiciaire, mais c'est un pardon, puisqu'il avait reçu son pardon avant 1992 et que la loi a été changée après 1992, au fédéral, pour franciser le terme «pardon» et le rendre plus satisfaisant sur le plan de langue... linguistique. Alors, il a demandé son pardon, et vous vous souviendrez que ça a fait une cause, hein, qui est allée jusqu'à la Cour suprême. Et le reproche qu'on a fait à l'ancien juge Therrien, c'était de ne pas avoir avisé qu'il avait reçu un pardon.

Parce que, dans le fond, que ce soit le pardon ou la réhabilitation, ou quoi que ce soit, on ne peut jamais effacer la faute qui a été sanctionnée: la sanction a eu lieu. On ne peut pas dire: La sanction n'a pas eu lieu, ça n'existe pas, par génération spontanée, l'effet est disparu. Toutefois, ce qu'on peut dire une fois qu'on est réhabilité: Nous sommes ou nous devenons inopposables, inopposables quant à vous qui avez à faire une suggestion pour une promotion et inopposables quant à n'importe qui qui pourrait, en cour, suggérer que le policier Charbonneau pourrait être un policier dont on pourrait miner la crédibilité, tentant de l'affecter avec un cas de déontologie antérieur. S'il avait été... s'il avait reçu son certificat de réhabilitation, il serait évidemment inopposable quant à cette situation-là. Et c'est ça, l'objet recherché.

M. Proulx (Normand): Je n'ai pas de meilleur terme, mais je vous dis seulement qu'il a un sens commun...

M. Chagnon: Non, mais vous me faites part... puis je...

M. Proulx (Normand): Vous avez tout à fait raison, au niveau linguiste, c'est le terme approprié, tout à fait.

M. Chagnon: Je comprends que vous venez... puis j'ai compris aussi vos collègues policiers qui sont venus antérieurement puis qui nous ont dit: Aïe, chez nous, «réhabilitation», là, notre monde va mal comprendre ça. Puis vous venez nous dire, venez confirmer, cette approche, sur le plan psychologique, qu'il y a un problème là. Sauf que je suis pris avec un problème de français aussi ou d'organisation de la langue.

M. Charbonneau: Ce n'est pas tellement le français.

M. Turp: C'est un problème de fond, d'approche.

M. Charbonneau: On en reparlera.

M. Chagnon: Bien, je vous remercie. Ça va.

La Présidente (Mme Thériault): Est-ce qu'on passe au côté de l'opposition? Oui. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Je vais commencer par où le ministre a laissé puis je reviendrai à la question des promotions. Dans le fond, là où il y a un désaccord, c'est que ce n'est pas la radiation de la sanction, c'est la radiation de la trace dans le dossier. On radie une trace, c'est-à-dire: le dossier comprend un certain nombre d'éléments, puis on radie la trace. On ne radie pas la sanction. Il y a eu une sanction, on ne la fait pas disparaître. On radie la trace, et c'est parce qu'il n'y a plus de trace dans le dossier que ça devient inopposable. Ce n'est pas parce qu'on a fait effacer par magie une sanction qui a été subie que ça fait nécessairement une radiation dans... Je pense que l'objectif, c'est de radier la trace dans le dossier. C'est ça qui est demandé, c'est ce avec quoi on est d'accord. On s'entend sur l'objectif; l'objectif, c'est que ça devienne inopposable. Mais, pour que ça devienne inopposable, l'idée, c'est qu'on a radié la trace dans le dossier. C'est aussi simple que ça.

Et à quelque part je veux bien comprendre que le ministère de la Justice puisse avoir sa façon de voir les choses, mais le législateur, c'est lui qui légifère, ce n'est pas le gouvernement puis ce n'est pas le ministère, c'est le législateur, puis, le législateur, son objectif, c'est aussi de faire en sorte que les lois soient comprises par les citoyens puis qu'il n'y ait pas un effet négatif d'un texte de loi qui soit pervers simplement parce qu'on utilise un langage qui dans le sens commun n'a pas la même signification. Ceci étant, ce que je comprends, c'est que néanmoins... si j'ai bien compris votre intervention, c'est qu'au-delà du problème de vocabulaire vous êtes aussi d'accord avec le fait que normalement ça devrait être automatique et que, dans certaines situations, il devrait y avoir vérification plus approfondie.

M. Proulx (Normand): Au niveau de l'automatisme, je ne mettrai pas de quantum, mais, sur le principe, oui, on est en train de le regarder, nous, en déontologie, effectivement donc, pour... en discipline plutôt, effectivement, sur les sanctions mineures, une réprimande. Bon. Il a même fait une concordance en termes de mois. Alors donc, on est en train de le regarder. Donc, sur le principe, on est d'accord, sur le quantum, on laissera les gens... le législateur décider. Mais, oui...

M. Charbonneau: Dans le fond, ça vous apparaîtrait correct qu'indépendamment du quantum, à un moment donné, celui qui est chargé de faire la vérification pour les citoyens, dans le fond, le Commissaire à la déontologie allume une lumière rouge, parce qu'il dit: Dans ce cas-là, même, je pense qu'il faut aller plus loin puis il faut faire des vérification, tout ça, mais que...

M. Proulx (Normand): Oui, tout à fait, parce que, bon, des fois il y a des gestes qui sont posés ou des actes qui sont trouvés dérogatoires, bon, qui commandent quand même une appréciation subséquente. Nous, dans le processus de nomination d'officiers ou de sous-officiers, on fait ces vérifications-là. Et même, dans le processus disciplinaire actuellement, même si le membre peut demander, après cinq ans, la radiation de son dossier, c'est examiné par un comité, et j'entérine ou pas. Alors...

Puis je donne un exemple concret. Un policier qui aurait été trouvé coupable d'un acte dérogatoire il y a 10 ans pourrait demander le pardon ou la radiation de ce volet-là dans son dossier. Mais, si, il y a trois ans, il a été trouvé coupable d'un autre acte dérogatoire similaire, moi, j'ai de la difficulté avec le continuum. Alors, il est possible que ce ne soit pas radié de son dossier, même si ça fait cinq ans, sept ans, huit ans ou 10 ans, parce qu'il y a un acte similaire qui s'est reproduit, bon, puis ça, je veux qu'on en tienne compte dans les sanctions subséquentes, et, s'il y en a un troisième, je veux qu'on en tienne compte. Il redemandera un peu plus tard. Donc, il y a des trucs qu'il faut évaluer à la pièce.

M. Chagnon: Si le dernier élément est disparu, on en fait pour... Si le premier élément disparaissait, première réhabilitation, appelons ça comme on voudra, là, d'un cas de déontologie, pourquoi on en tiendrait compte au deuxième, s'il est disparu au premier?

M. Proulx (Normand): Je parlais principalement quand la personne n'a pas fait la demande après le premier. C'est courant, en passant.

M. Charbonneau: Si on revient maintenant... Ah oui! au niveau des promotions, bon, vous avez parlé ? on est tous d'accord avec ça ? que, bon, une police d'État ou même une police au niveau municipal, c'est un corps paramilitaire. Bon. Inévitablement, c'est une force, donc c'est une force de maintien de l'ordre, et il y a donc un fonctionnement... disons que la démocratie ne prévaut pas tout à fait, dans la façon dont le commandement et l'organisation se fait. Bon. On convient qu'il y a comme parfois des nécessités.

M. Proulx (Normand): Mais on convient que c'est quand même fait de façon démocrate?

M. Charbonneau: Oui, oui, ce n'est pas ça que je veux dire. Mais ce que je veux savoir, c'est: Est-ce que vous avez des informations, des indications comment ça se fait au niveau de la police fédérale, dans l'armée, ou même au niveau des polices municipales? Est-ce que les conseils municipaux ou le cabinet fédéral, soit pour la GRC soit pour l'armée, approuvent les promotions des officiers?

M. Proulx (Normand): Je ne peux pas dire pour les conseils municipaux ou autres. Celui du SPVM, Service de police de la ville de Montréal, où est-ce que j'ai parlé avec M. Sarrazin hier, lui, il entérine et signe lui-même les promotions d'officiers jusqu'à son niveau, évidemment, et celui qui est immédiatement inférieur à lui qui est entériné par le conseil exécutif de la municipalité.

En ce qui concerne la GRC, les officiers sous-commissaires, donc on comprend que le commissaire étant le grand patron de la GRC, sous-commissaires, commissaires adjoints, surintendants principaux, surintendants et inspecteurs sont désignés par le gouverneur en conseil.

M. Charbonneau: Par le gouvernement.

M. Proulx (Normand): C'est ça, par le gouvernement, et ils ont une commission qu'ils appellent, et ensuite...

M. Charbonneau: Ça, c'est les membres de l'état-major.

M. Proulx (Normand): Ça, ce sont les officiers, O.K.? Mais, par contre, le Commissaire peut nommer les membres qui ne sont pas officiers, O.K.?: «Par voie de promotion, nommer un membre qui n'est pas officier à un grade ou [à un] échelon supérieur pour lequel il existe une vacance». Donc, tous ceux qui ne sont pas officiers, c'est la signature du Commissaire lui-même qui fait foi de sa promotion. Donc, ça veut dire caporal, sergent, je crois qu'ils ont sergent d'état-major également, qui ne sont pas dans les grades d'officier.

M. Charbonneau: O.K. Dans le fond, si je comprends bien ce que vous nous dites, c'est qu'au niveau fédéral, pour la police fédérale, il y a la même disposition qu'actuellement, c'est-à-dire: c'est le gouvernement... c'est le Conseil des ministres qui ratifie les promotions des officiers.

n(15 h 50)n

M. Proulx (Normand): Oui, tout à fait. Mais je veux juste préciser votre énoncé, si vous me permettez. Le gouvernement nomme les officiers, et le Commissaire nomme les sous-officiers. Alors...

M. Charbonneau: Oui, je comprends, mais la proposition actuellement que vous faites puis que le gouvernement est prêt à entériner, c'est de ne pas conserver cette approche-là. C'est-à-dire qu'actuellement c'est l'approche que nous avons aussi pour la police de l'État, ici.

M. Proulx (Normand): Si vous me permettez, je vais juste expliquer la nuance que je veux faire. Le gouvernement fédéral nomme les officiers de la GRC. Ici, au Québec, le gouvernement nomme les officiers de la Sûreté du Québec. Au fédéral, le commissaire nomme les sous-officiers. Ici, au Québec, le ministre entérine. C'est ça, la nuance.

M. Charbonneau: Oui, c'est ça. Bien là vous me devancez à la deuxième question que je voulais vous poser, parce que le syndicat, ce matin, nous a proposé que les sous-officiers, ça se fasse comme au niveau de la police fédérale, c'est-à-dire que, par exemple, les promotions au niveau de sergent soient faites par vous en l'occurrence, parce que vous occupez la fonction, donc par le directeur plutôt que par le ministre. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. Proulx (Normand): Écoutez, évidemment, c'est dans le cadre de l'allégement du processus administratif, pour nous...

M. Charbonneau: Ce serait encore plus logique, c'est-à-dire...

M. Proulx (Normand): Ce serait encore plus facile, ce serait encore plus logique. Je réitère par contre que, depuis la nomination de M. Chagnon comme ministre...

M. Charbonneau: On a bien compris ça.

M. Proulx (Normand): ...on n'a aucun problème, mais, avant, il y en a eu certains, et, l'avenir, bien on ne le sait pas.

M. Charbonneau: Écoutez, moi, je ne sais pas pourquoi avant ça a pris tant de temps. Je pense que ça n'avait pas de bon sens de toute façon, mais il peut y avoir de bonnes raisons, mais je n'étais pas ministre de la Sécurité publique. Mais c'est clair qu'un an et demi à attendre après une réponse, à quelque part ça n'a pas d'allure. Bon.

Ceci étant, le fait est que... moi, je suis plutôt d'accord avec le fait que ce soit le ministre et non le Conseil des ministres, donc qu'on allège la procédure québécoise pour faire en sorte que, par rapport au fédéral, ce ne soit pas le cabinet encore, mais le ministre. Bien, je pense que j'irais, dans le fond, dans la même logique, à ce moment-là, je ferais en sorte que le ministre n'ait pas à approuver aussi les promotions des sous-officiers, que ça puisse relever directement du directeur de la police, mais là on verra au niveau des amendements. Mais, moi, je pense qu'il a raison... que vous avez raison.

Et vous disiez qu'au niveau municipal... je n'ai pas... pour Montréal en tout cas, c'est...

M. Proulx (Normand): Bon, pour Montréal, j'ai la réponse, mais, pour les autres municipalités, je n'ai pas la...

M. Charbonneau: Mais, pour Montréal, c'est... je n'ai pas saisi.

M. Proulx (Normand): Bon, pour Montréal, c'est le directeur du service de police qui nomme les officiers, pour son poste à lui évidemment, et, immédiatement en dessous, c'est une nomination du Conseil exécutif.

M. Charbonneau: Autrement dit, pour le chef de police et son adjoint...

M. Proulx (Normand): Oui, et ses adjoints immédiats.

M. Charbonneau: ...et ses adjoints, ce qu'on pourrait considérer comme le haut état-major...

M. Proulx (Normand): Oui, exact.

M. Charbonneau: ...alors ça, c'est nominations, disons, de l'autorité politique, et tout le reste, officiers, sous-officiers qui ne sont pas dans l'état-major supérieur, c'est fait par le directeur.

M. Proulx (Normand): Par le directeur. C'est ma compréhension de la conversation que j'ai eue hier avec M. Sarrazin.

M. Charbonneau: Et si on appliquait la même logique au Québec. La Sûreté du Québec, là, par exemple, bon, quand on parle des officiers, ce que vous considérez être l'état-major, par rapport à l'ensemble des officiers... bon, les inspecteurs ne sont pas membres de l'état-major...

M. Proulx (Normand): Non, les inspecteurs-chefs non plus. L'état-major de la Sûreté est composé du directeur général et de quatre directeurs-généraux adjoints, cinq personnes.

M. Charbonneau: Est-ce que vous considéreriez que, tout compte fait, l'autorité politique devrait s'en limiter à ça et que, pour le reste, ça devrait être la responsabilité du directeur du service de la force, là, qui s'occupe des nominations par son processus interne, là?

M. Proulx (Normand): Évidemment, au niveau de la Sûreté, tout allégement administratif est fort apprécié, et on peut appeler ça aussi de l'imputabilité ou de la responsabilité, tout simplement. Mais je comprends que le gouvernement a un certain droit de regard dans certaines nominations. Qu'elle garde cette prérogative-là, moi, je n'ai pas de problème. J'en ai sur les délais administratifs. Alors, nous, on a fait un exercice de façon à diminuer énormément les délais administratifs en termes de traitement de dossiers, chez nous, d'analyse, de dotation, et autres. Et, si on est capables de réduire celui des nominations, bien ça va répondre à un besoin, tout à fait. Que la nomination soit ou non faite par le Conseil des ministres, ce qui m'importe, moi, c'est que ce soit fait relativement rapidement et d'alléger le système pour qu'on puisse doter rapidement.

Il faut comprendre, comme je disais tout à l'heure: quand on a un inspecteur-chef qui prend sa retraite, en cascade on a cinq nominations, mais chacune d'entre elles est retardée par le délai de nomination du grade supérieur. Donc, si on prend un an à nommer l'inspecteur-chef, je ne relance pas mon concours ou à tout le moins je ne le conclus pas avant cette année-là pour l'inspecteur, et un autre six mois pour l'inspecteur. Finalement, je dote mon dernier poste trois ans plus tard.

M. Charbonneau: Alors, il y a un effet domino pervers, là...

M. Proulx (Normand): Tout à fait.

M. Charbonneau: ...à la fois pour l'organisation puis pour les individus puis leurs familles qui... Et, si j'ai bien compris l'information que vous avez communiquée au ministre ? on posait la question ? c'est que finalement il n'y a jamais eu, dans l'histoire, dans le fond, une utilité apparente de faire en sorte que le Conseil des ministres soit l'instance de nomination des officiers, puisque dans le fond le Conseil des ministres a toujours entériné la proposition qui lui était faite, avec parfois beaucoup de retard.

M. Proulx (Normand): Je ne me prononcerai pas sur le mot «utilité», mais je dirais tout simplement que le Conseil des ministres n'a pas exercé son pouvoir de refus...

M. Charbonneau: Jamais.

M. Proulx (Normand): ...sur aucune nomination, à ma connaissance.

M. Charbonneau: C'est bien.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier.

M. Turp: J'aimerais revenir sur la question et le choix de parler de réhabilitation. En fait, ce que je constate, c'est qu'on veut suivre une approche analogue à celle de la Loi sur le casier judiciaire. La Loi sur le casier judiciaire, là, elle se présente avec des dispositions sur la demande de réhabilitation, la procédure et les effets de la réhabilitation, et c'est l'équivalent... Il y a, aux articles 3 à 5 de cette loi, l'équivalent de ce qu'il y aurait dans la sous-section 4, Réhabilitation, aux articles 255.1 à 255.20. Donc, c'est une approche très analogue à ce qu'il y a pour la Loi sur le casier judiciaire.

Ce que je comprends, dans les lois provinciales qui ont été évoquées par ceux qui vous ont précédés ici, c'est qu'on ne choisit pas cette approche où on parle de réhabilitation, on ne fait que parler des effets d'une procédure qui vise à, comme vous le souhaitez, radier des éléments d'un dossier d'un policier qui a été condamné pour des violations d'un code de déontologie.

Alors, est-ce que je comprends que ce que vous souhaitez, là, et pour assurer, comment dire, la bonne réputation ou en tout cas la capacité des policiers de maintenir leur réputation, là, c'est qu'on ne choisisse pas cette approche? Parce que c'est vrai que, si on choisit une approche et des mots qui sont dans la Loi sur le casier judiciaire, on peut, par analogie, là, tu sais, rapprocher l'acte criminel qu'on reproche aux gens de la violation d'un code de déontologie, parce qu'on utilise le même mot, la même notion. Et, de toute évidence, dans les lois des autres provinces, on n'a pas choisi de donner de l'importance à la réhabilitation. Alors, est-ce que... C'est ça que je comprends, vous ne voulez pas qu'on choisisse une approche analogue à celle de la Loi sur le casier judiciaire et qu'on se limite à parler des effets de ce qu'on appelle, pour les fins du casier judiciaire, la réhabilitation?

La Présidente (Mme Thériault): ...reste 30 secondes pour répondre à la question du député.

M. Proulx (Normand): Je vais y répondre en 28. Si vous me permettez, effectivement ce qu'on ne souhaite pas, c'est que, dans le sens commun du terme ou du processus, ce soit associé à un volet criminel. Si vous me permettez une remarque... Et je ne veux pas être péjoratif, vous avez employé vous-même le mot «condamnation» tout à l'heure, alors qu'une condamnation se fait au Code criminel; et, en discipline et en déontologie, on ne condamne pas personne, on les sanctionne. Alors, voyez-vous, dans le sens commun, le mot «condamnation»...

M. Charbonneau: Pour une faute et non pas pour un crime.

M. Proulx (Normand): ...«condamnation» a été employé, c'est péjoratif. 28 secondes, madame?

M. Charbonneau: C'est ça, on ne condamne pas...

M. Proulx (Normand): On sanctionne.

M. Charbonneau: On sanctionne pour une faute et non un crime.

M. Proulx (Normand): Voilà.

M. Turp: D'ailleurs, le mot... Vous savez que le mot «réhabilitation», dans la Loi sur le casier judiciaire, c'est «pardon».

M. Chagnon: Ah non, non, non! Justement, ça a changé en 1992.

M. Turp: Dans la version que j'ai, là, c'est «pardon». «Réhabilitation», en anglais, c'est «pardon».

M. Chagnon: En anglais, oui?

M. Turp: Mais on voit... Pardon, c'est quoi, là, pardon? Dans l'imaginaire, là, c'est quoi, un pardon? C'est très lié...

M. Chagnon: Peut-être, mais c'est l'anglicisme.

M. Charbonneau: Oui, mais il y a l'anglicisme puis il y a le sens des mots aussi. À un moment donné, les...

M. Chagnon: Justement, est-ce qu'on veut avoir... est-ce qu'on va faire de la législation en français ou en franglais?

M. Charbonneau: Ce n'est pas juste de faire de la législation en français ou en anglais, c'est aussi de faire en sorte...

M. Chagnon: En franglais.

n(16 heures)n

M. Charbonneau: Ce que mon collègue dit, c'est qu'il y a une définition du mot différente, mais, je veux dire, le sens dans... On vit dans un environnement aussi, on donne un sens, et le terme «réhabilitation», c'est clair, quand le commun dénominateur... En tout cas, on en parlera dans article par article, là, ou au moment où on fera des amendements, mais c'est clair qu'il y a un problème de compréhension dans l'opinion publique, et les représentations à la fois des syndicats puis de la direction, c'est de dire: Prenez note, là, qu'on vit dans un environnement social puis que, si vous utilisez ce type de vocabulaire là, bien on va avoir, nous, je veux dire, un problème de crédibilité qui finalement, un dans l'autre, c'est plus grave, les conséquences de ça, que de savoir si on va être puriste à ce point-là au niveau linguistique.

La Présidente (Mme Thériault): Merci.

M. Turp: Mais le débat de fond...

La Présidente (Mme Thériault): Merci, monsieur. Je m'excuse, messieurs.

M. Turp: ...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier...

M. Turp: ...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier, je m'excuse, vous avez dépassé largement, d'au moins trois minutes, le temps qui vous était imparti...

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Thériault): ...et j'ai le député de Trois-Rivières qui voudrait aussi intervenir.

Une voix: Consentement.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Trois-Rivières.

M. Charbonneau: Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Thériault): Oui, après.

M. Charbonneau: ...le ministre était d'accord, de consentement.

La Présidente (Mme Thériault): Ah! bien...

M. Charbonneau: Puis, je veux dire, le député de Trois-Rivières aura tout le temps qu'il veut.

La Présidente (Mme Thériault): Je m'excuse, mais...

M. Gabias: Est-ce que ça prend un consentement pour que je puisse poser une question?

M. Charbonneau: Non, non, non, non.

La Présidente (Mme Thériault): Non, vous avez la parole.

M. Charbonneau: On va consentir aussi longtemps que vous voulez.

La Présidente (Mme Thériault): Vous avez la parole.

M. Gabias: O.K. Non, non, non, non, je n'exagérerai pas, vous allez voir.

Bien, merci, Mme la Présidente. M. Proulx, j'ai bien entendu, ce matin, et compris les représentations des représentants des fraternités, puis également je comprends très bien vos représentations. Il ne faut pas se surprendre qu'il y ait une crainte importante quant à la définition de «réhabilitation», quand on s'adresse et quand on entend des gens qui sont constamment dans un milieu policier. C'est bien évident que le terme «réhabilitation» prend la connotation qu'ils connaissent dans le travail qu'ils font.

Mais, moi, je n'ai pas de... Honnêtement, je préfère «réhabilitation» à «radiation», parce que ça a un tout autre sens, «radiation», c'est que ça n'a jamais existé, ce qui n'est pas le cas. Et, moi, j'essaie toujours de... Quand je regarde cette question-là ou quand on parle d'un manquement déontologique qui amène une sanction déontologique, on n'est pas en matière disciplinaire, c'est autre chose. Et, si nous sommes en matière déontologique, c'est parce qu'il y a un aspect de protection du public, et l'objectif poursuivi par le projet de loi, c'est d'atténuer ou du moins éliminer possiblement les effets négatifs de sanctions déontologiques lorsqu'il est question d'une promotion. Il faut toujours avoir, je pense, une idée de protection du public; elle doit demeurer, cette idée-là. Autrement dit, de s'assurer que la promotion est accordée à un policier qui mérite une promotion et qu'un dossier déontologique viendrait dire: Non, ce ne serait pas une bonne nomination.

Ceci étant dit, on peut bien discuter très longuement de la définition qu'on voudra donner à «réhabilitation», et là c'est ma question: Ne pensez-vous pas... Vous proposez de modifier «réhabilitation» plutôt et de dire «radiation du dossier déontologique». Si, au lieu de rattacher «réhabilitation» au policier, comme on le fait jusqu'à maintenant, là ? et c'est clair que, lorsqu'on fait ça, on touche à quelque chose de sensible ? si on parlait plutôt de «réhabilitation du dossier déontologique», est-ce que ça ne viendrait pas régler le problème? Parce que ce qu'on souhaite, c'est réhabiliter le dossier déontologique du policier de façon à ce qu'il puisse avoir accès à une promotion, qu'il ne soit pas pénalisé par ça.

La Présidente (Mme Thériault): M. Proulx.

M. Proulx (Normand): Écoutez, je n'ai pas de problème avec ça, mais je vous dis seulement et je le répète, je m'excuse, mais le mot «réhabilitation», il y a une connotation péjorative, mais je n'en ai pas un meilleur à vous suggérer autre que celui de «radiation».

M. Gabias: Non, mais, si on associe plutôt au dossier plutôt qu'au policier. Parce que c'est clair, quand on dit de réhabiliter le policier, là...

M. Proulx (Normand): Ça peut être un compromis, mais indéniablement le mot «réhabilitation» va être attaché au dossier et à la personne qui est avec, on s'entend.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Proulx. M. le ministre.

M. Chagnon: ...d'essayer de nous éclairer conjointement, parce que je sens qu'on cherche la même chose. On sait qu'on fait face à un problème qui est plus psychologique que d'autre chose, mais il me semble quand même qu'on doit, comme c'est notre devoir comme législateurs d'essayer d'utiliser les termes les plus justes, les plus français dans notre législation, on doit essayer d'assumer la qualité de notre langue, dans la langue dans laquelle nous légiférons. Or, «réhabilitation»? on pourra se chicaner avec notre ami, M. Painchaud, qui voulait avoir quatre définitions du dictionnaire différentes... Je n'ai même pas regardé le dictionnaire que j'ai. C'est un Robert. Alors, «réhabilitation: Fait de rétablir dans une situation juridique antérieure.» C'est ça qu'on cherche à faire.

M. Charbonneau: Radier, c'est quoi?

M. Chagnon: Radier?

Une voix:«Radier», c'est: «Faire disparaître.»

M. Turp: Mais c'est le policier qu'on réhabilite.

M. Charbonneau: Bien, c'est ça, qu'on fait disparaître la trace.

M. Turp: C'est le policier qu'on réhabilite. Même dans les notes, là..

M. Chagnon: Je ne veux pas faire radier un policier, là.

M. Charbonneau: Non, vous ne pouvez pas radier un policier.

M. Turp: ...la réputation du policier ainsi réhabilité est rétablie. La réputation du policier ainsi réhabilité est établie. C'est votre note à l'article 9.

M. Chagnon:«Radier: Faire disparaître.»

M. Charbonneau: Faire disparaître. Qu'est-ce que vous faites disparaître? Vous ne faites pas disparaître le fait qu'il y a eu, disons, un manquement déontologique et vous ne faites pas disparaître le fait qu'il y ait eu une sanction à ce manquement. Vous faites disparaître la trace dans le dossier, c'est ça, la radiation.

M. Chagnon: En fait, ce qu'on cherche à faire, c'est de rétablir la situation juridique antérieure d'une personne.

M. Charbonneau: Ce qu'on cherche à faire, c'est de radier pour qu'il soit ce que vous souhaitez faire puis que, nous, on veuille, c'est-à-dire que ce soit inopposable. Et on veut que ça se fasse de telle sorte qu'on protège aussi la crédibilité puis la réputation des officiers qui sont concernés, les officiers de la paix qui sont concernés.

La Présidente (Mme Thériault): Merci.

M. Turp: Est-ce que vous permettez?

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier, je vais vous permettre une dernière remarque de 30 secondes, parce que nous avons largement dépassé le temps qui nous était imparti pour ce groupe-là.

M. Charbonneau: Mme la Présidente, je voudrais juste plaider, là, sur... En commission parlementaire, j'ai vu ça souvent, dans la mesure qu'il y a consentement, on peut dépasser le temps, là. Je ne veux pas qu'on soit à cheval sur les principes.

La Présidente (Mme Thériault): Oui, mais je vous ferais remarquer, M. le député de Borduas, que nous avons un autre groupe qui nous attend aussi, et, par égard pour nos invités...

M. Chagnon: Quand nous n'aurons plus d'invités, on pourra s'amuser ensemble, mais pour l'instant nous avons des invités.

M. Charbonneau: On a des invités justement qui peuvent réagir.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier, vous avez la parole, 30 secondes.

M. Turp: Vous savez, quand on arrive aux effets de la réhabilitation, dans la Loi sur le casier judiciaire, c'est l'effet sur la réputation, là, mais l'effet sur le dossier. La réhabilitation entraîne le classement du dossier ou du relevé de la condamnation à part des autres dossiers judiciaires. Donc, c'est, comme le disait mon collègue, c'est surtout sur le dossier qu'on a une préoccupation, et c'est de créer la... la notion de «réhabilitation» met l'accent sur ce qu'on fait à l'égard du policier et non pas à l'égard du dossier du policier.

Une voix: ...

La Présidente (Mme Thériault): Sur vos remarques, M. le député de Mercier, nous allons suspendre nos travaux quelques instants. M. Proulx, M. Deschesnes, merci beaucoup de votre participation aux travaux de la commission. Et je demanderai à l'autre groupe de prendre place, s'il vous plaît. Merci. Nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

 

(Reprise à 16 h 9)

La Présidente (Mme Thériault): Nous reprenons donc les travaux de la commission. Et je souhaite la bienvenue au Commissaire à la déontologie policière, M. Paul Monty, qui est accompagné de M. Michel Maurice. La parole est à vous. Vous avez 15 minutes pour nous expliquer votre mémoire, et par la suite vous entreprendrez des échanges avec les membres de la commission.

Commissaire à la déontologie policière

M. Monty (Paul): Alors, merci, Mme la Présidente. Ça me fait plaisir de venir ici, à la Commission des institutions. Mon document est très court. D'abord, je ne reprendrai pas la présentation de l'institution du Commissaire. Je vais me contenter des commentaires que j'ai sur le projet de loi n° 80. Et, quand je parle de commentaires, je m'intéresse particulièrement à la partie «réhabilitation» qui est contenue au projet.

n(16 h 10)n

En fait, le Commissaire appuie les principes contenus au projet de loi. Le Commissaire est en effet favorable à la mise en place d'un mécanisme offrant aux policières et policiers la possibilité de ne plus voir entraver leur carrière par une sanction déontologique datant de quelques années.

Il est également favorable à l'instauration de paramètres pour qu'une policière ou un policier puisse obtenir cette réhabilitation. Ces paramètres assureront l'employeur ou toute autre autorité que la policière ou le policier ainsi réhabilité a les qualités déontologiques requises pour obtenir soit une promotion soit un avantage.

Le tribunal déontologique saisi d'une demande de réhabilitation peut, si nécessaire, requérir les commentaires des directions policières et du Commissaire, assurant ainsi la transparence de la procédure. Pour le Commissaire, effectivement, la sanction ayant été appliquée par un tribunal, il revient à ce tribunal de s'assurer que, les raisons assurant la réhabilitation, il en soit saisi.

Il convient de remarquer que la procédure sera particulièrement utile aux policières ou aux policiers qui ont été cités en déontologie avant que la procédure de conciliation devienne la norme pour un manquement déontologique allégué avant les amendements promulgués en 1997. À l'annexe de mon document, on remarquera que les citations avant les années 1999-2000 étaient la norme, c'est-à-dire qu'on sanctionnait en déontologie par un manquement dérogatoire, un manquement dérogatoire, alors qu'après la promulgation des amendements de 1997 on réglait ces cas-là en conciliation sans laisser de trace. Donc, il est évident que les policiers qui ont eu des problèmes en déontologie sont traités plus justement aujourd'hui qu'ils l'étaient anciennement. C'étaient les positions de l'époque.

Les demandes potentielles, et c'est ce qu'il m'apparaissait intéressant d'apporter à la commission, pouvant être soumises au projet de loi. Nous avons retrouvé dans nos livres 902 sanctions ordonnées par le Comité de déontologie, et qui ont été répertoriées de mars 1992 au 31 octobre 2004. C'est donc la clientèle potentielle du projet de loi. Les sanctions imposées par le Comité de déontologie policière et maintenues ou modifiées par les tribunaux se répartissent selon sept degrés de sanction: 90 avertissements, 156 réprimandes, 45 blâmes, 557 suspensions sans traitement, une rétrogradation, cinq destitutions et 48 inhabilités.

Alors, brièvement, le syndic, pour ainsi dire, des corps policiers du Québec appuie le projet de loi et pense que cela va dans un bon sens, de permettre à des officiers de police qui ont été sanctionnés il y a quelques années de pouvoir affirmer qu'ils sont toujours d'excellents policiers. Alors, ce sont des représentations, et je les voulais courtes de façon à être disponible pour toute question que la commission voudra me poser.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. Monty. Donc, M. le ministre.

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. Monty. Vous avez assisté à notre débat réhabilitation versus radiation de sanction, versus... on a parlé de... pas de graciation, on a parlé de grâce, on a parlé de... on a fait une autre suggestion à un moment donné...

Des voix: De pardon.

M. Chagnon: De pardon. Et, vous qui êtes un juriste et qui êtes associé à ces questions-là depuis longtemps, qui avez regardé ces questions-là, vous en pensez quoi?

M. Monty (Paul): Je me suis intéressé à la question et je dois dire que j'ai même discuté de la question avec d'autres juristes. La radiation s'entend beaucoup plus dans le domaine que j'appellerais syndical, dans le droit syndical: on radie, on fait disparaître la lettre de réprimande. En droit pénal et criminel, parce qu'on doit étendre jusqu'au droit pénal, on a parlé de pardon, qui est devenu depuis quelques années «réhabilitation» mais qui demeure toujours issu de la grâce royale, là, puis je vous... J'oublierai de vous parler... je sais qu'il y a des constitutionnalistes, ici, de grande valeur...

M. Charbonneau: Au Québec, on n'est pas encore dans une république, alors, le pouvoir absolu, c'est le monarque et non le peuple.

M. Monty (Paul): Oui, mais, même dans la République française, le président donne encore sa grâce.

Ceci étant dit, pour moi, il s'agit d'une question terminologique, et je n'ai pas véritablement de parti pris pour le mot «radiation» ou le mot «réhabilitation». Les deux me conviennent parce que le but recherché est le même. Alors, écoutez, je sais... Il faut tenir compte de ceci, que la déontologie se situe effectivement entre le droit disciplinaire puis le droit pénal.

M. Chagnon: Alors, on se retrouverait où?

M. Monty (Paul): C'est ça. Finalement, c'est pour ça que, moi, là, après... j'avais discuté avec des juristes, on s'est posé la même question puis on a dit: Bien, écoutez, s'il n'y a pas d'autre... meilleur terme que le mot «réhabilitation», pourquoi pas? Parce que le mot «radiation» s'emploie plus souvent en droit syndical. Puis on n'est pas dans du droit syndical, ce n'est pas négocié entre les parties. Le code, c'est une loi, qui n'est pas criminelle mais qui est de nature obligatoire. Elle est au-dessus du droit syndical.

La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.

M. Chagnon: Alors, votre premier choix, si j'ai bien compris vos derniers propos, ce serait le mot «réhabilitation»?

M. Monty (Paul): En tout cas, moi, M. le ministre, je...

M. Chagnon: Enfin, je ne parle pas d'une... Je ne veux pas en faire une question de choix, parce que...

M. Monty (Paul): Non, non, mais...

M. Chagnon: La logique...

M. Monty (Paul): En tout cas, je peux vous dire que «réhabilitation», c'est assurer la population que, ce policier-là, il est excellent puis il peut obtenir une promotion. N'est-ce pas là une forme de réhabilitation? Moi, je vis très bien avec le mot «réhabilitation».

M. Chagnon: Ça va aller. Oh! peut-être...

La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le ministre.

M. Chagnon: Peut-être une dernière question. On avait mentionné, le groupe précédent... le groupe de ce matin, l'association intersyndicale avait mentionné qu'on devrait avoir une approche automatique de graciation ou de réhabilitation, d'une part pour tous les cas en bas de 30 jours, 30 jours d'une habileté à exercer ses fonctions. 30 jours, c'est-à-dire 30 jours... 30 jours sans traitement... suspension sans traitement, plutôt. Ça veut dire quoi? Qu'est-ce qu'on a fait pour 30 jours ou 31 jours, qu'on n'a pas fait à 19, dans votre... dans le catalogue de vos...

M. Monty (Paul): Dans mon catalogue... écoutez, j'ai regardé toutes les sanctions qui ont été imposées dans les dernières années, et, si on prenait le terme de 30 jours, ce serait à peu près une quarantaine de dossiers qu'on aurait soumis à la décision du Comité de déontologie, tous les autres seraient automatiques.

M. Chagnon: Sur les 902, il en resterait 40.

M. Monty (Paul): Il y en a à peu près une quarantaine puis un peu plus, mais pas beaucoup plus. Alors donc, je ne sais pas pourquoi on vous a parlé de 30 jours ce matin. J'en ai discuté avec les officiers syndicaux. Est-ce que ça peut être cinq, ça peut être 10? Pourquoi 40? Mais je sais ceci, c'est que, si on parle de sanction en termes de... je vous ai donné le chiffre de 557, ce sont des suspensions. Il y en a d'autres qui sont moins que des suspensions, c'est des blâmes, des réprimandes ou des avertissements. Ce qu'on me dit, et je n'ai pas malheureusement fait d'étude... de la jurisprudence, mais c'est beaucoup plus près de cinq ou 10 jours, où le nombre, la jurisprudence fait la différence entre un acte qui lui apparaît beaucoup plus grave qu'un acte qui lui apparaît beaucoup moins grave.

M. Chagnon: Est-ce que vous trouvez logique qu'on fasse une demande pour demander éventuellement une réhabilitation?

M. Monty (Paul): Si je trouve?

M. Chagnon: Est-ce que vous trouvez logique la démarche, la mécanique que le projet de loi prévoit, c'est-à-dire faire en sorte que la personne qui veut avoir une réhabilitation en fasse la démarche?

M. Monty (Paul): Personnellement, je pense que oui. Parce que, d'abord, elle a pris conscience qu'elle a commis... Parce que je dois dire que certains cas, mais c'est toujours des cas rares, parce que là, d'abord, il y avait... il y a des policiers qui malheureusement, et je le dis bien... malgré la sanction, n'acceptent pas le fait qu'ils ont été punis.

M. Chagnon: Qu'ils ont été sanctionnés.

M. Monty (Paul): Voilà. Donc, s'ils font une démarche positive, c'est qu'ils ont pris conscience, à mon avis, qu'il faut passer à côté de ça. Si vous ne leur faites pas, ils auront toujours dans l'esprit qu'ils ont été injustement condamnés. Donc, je trouve qu'une démarche positive est intéressante.

Deuxième chose aussi, c'est qu'il y a beaucoup... dans les 902 cas, il y a beaucoup de gens pour qui ça n'a plus aucun intérêt parce qu'ils ne sont plus dans la police, ils sont dans d'autres fonctions.

M. Chagnon: Ils ont pris leur retraite.

n(16 h 20)n

M. Monty (Paul): Ils ont pris leur retraite, exactement. Donc, je pense qu'ils doivent en faire la demande. Il faut tenir compte aussi que, depuis 1997 puis pour les années futures, puis on légifère pour les années futures, il y aura de moins en moins de gens qui nous la demanderont, puisqu'il y a de moins en moins de gens qui sont sanctionnés en déontologie. On a des approches plus souples qui sont intéressantes. Parce que la population nous suit, ils déposent plus de plaintes.

M. Chagnon: Comme celle que je mentionnais, concernant la conciliation que vous faites depuis 1997.

M. Monty (Paul): Exactement. Ça règle la... Écoutez, 85 % des dossiers ne vont pas en enquête.

M. Chagnon: Je reviendrai peut-être plus tard, je vais arrêter là. Merci.

M. Moreau: 85 %.

M. Monty (Paul): 85 % des dossiers qui sont soumis au Commissaire ne sont pas sujets à une enquête, c'est-à-dire que soit ils sont rejetés à sa face même soit qu'ils sont soumis à la conciliation, et ça se règle à ce niveau-là. Le citoyen et le policier trouvent un arrangement, puis ils sont satisfaits des discussions qu'ils ont eues.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va? M. le député de Marguerite-D'Youville, ça va? Oui?

M. Moreau: Oui.

La Présidente (Mme Thériault): Parfait. Merci. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Bien, d'une certaine façon, ça confirme l'idée que ça ne vaut pas la peine de stigmatiser ceux qui vont rester, en utilisant un terme qui, dans l'opinion publique, est un terme justement plus associé à la justice criminelle qu'à un processus administratif ou de sanction. Mais ça, c'est une question d'opinion. Vous pouvez avoir... le Commissaire, qui a accepté avec plaisir de venir à la commission, peut, s'il le veut, répondre, mais je pense qu'effectivement il y a une appréciation d'opinion.

M. Monty (Paul): Il y a un choix à faire.

M. Charbonneau: Il y a un choix à faire, puis je pense qu'il va falloir qu'on le fasse comme législateurs. Au-delà de ça, qu'il y ait demande ou pas, dans le fond, c'est... à savoir: Est-ce qu'il y a réponse automatique? C'est-à-dire qu'actuellement le projet de loi prévoit un processus qui à chaque fois... puis on le voit, là, même dans le terme que vous avez utilisé dans votre présentation de l'institution du Commissaire, c'est un tribunal; ça veut dire qu'on va retourner au tribunal pour faire vérifier si finalement on mérite ou non d'avoir son dossier nettoyé, radié, puis en conséquence d'être réhabilité. Moi...

Une voix: ...

M. Charbonneau: Non, j'ai dit «en conséquence être réhabilité». La conséquence, c'est une réhabilitation. Mais, je veux dire, le fait est qu'on... on se reprendra tantôt, à l'étude détaillée, vous allez voir qu'on va sortir nos dictionnaires. Mais, au-delà de ça, qu'est-ce que vous pensez plutôt de l'approche qui fait que c'est vous qui êtes investi de la responsabilité de protéger le public? Dans le fond, vous avez utilisé l'analogie de syndic, à quelque part, des policiers, donc de la profession policière, même si elle n'est pas inscrite dans la loi des professions de...

Une voix: Dans les 41.

M. Charbonneau: C'est ça, dans les 41 professions. Ça veut dire que dans le fond, si ce qu'on propose du côté des associations policières, puis je pense que la direction de la Sûreté n'a pas l'air nécessairement contre ça non plus... C'est que, si, à un moment donné, quand ce n'est pas automatique, même s'il y a demande, puis qu'il y a réponse automatique, quand, dans certaines situations, le Commissaire doit faire une appréciation, alors c'est lui qui fait l'appréciation. De deux choses l'une: vous appréciez qu'il n'y a pas matière à refuser, à ce moment-là vous émettez, puis finalement la réponse arrive par la suite, ou bien là vous jugez que la situation est suffisamment sérieuse pour, là, qu'on puisse se pencher sur la situation.

Alors, de deux choses l'une: ça peut être vous ou ça peut être le Comité de déontologie qui se penche. Mais pourquoi ouvrir la possibilité que chaque cas soit soumis à ce tribunal administratif de déontologie policière si dans les faits on a déjà un protecteur du citoyen en matière de conduite policière et qu'on lui donnerait la responsabilité ou la possibilité de faire ce qui doit être fait, puis de temps en temps dire: Bon, bien, là, ça mérite d'aller plus loin? Pourquoi dans le fond on ne laisserait pas au Commissaire le soin justement de ne pas faire en sorte que tout le monde soit placé dans la même situation de devoir comparaître devant un tribunal de déontologie, mais que comparaîtront ceux pour qui celui qui est responsable devant les citoyens et devant l'Assemblée nationale de s'occuper de la protection publique juge qu'on doit le faire?

M. Monty (Paul): Ce que je comprends de votre idée, c'est que ne seraient amenés devant le tribunal que ceux sur lesquels je déciderais d'approcher le tribunal, je dirais: Ce cas-là, là, je ne suis pas prêt à lui donner un blanc-seing...

M. Charbonneau: Exact.

M. Monty (Paul): ...je voudrais qu'il soit déposé.

M. Charbonneau: C'est ce que nous proposent les trois associations policières.

M. Monty (Paul): Écoutez, moi, je n'ai pas réfléchi véritablement à cette question. Il est évident que la situation actuelle, telle qu'elle a été présentée, c'est que, ayant été sanctionné par le comité, on revient devant le comité pour avoir l'autorisation ou sa bénédiction, si on peut s'exprimer ainsi. Je vous dirais que c'est évident que la proposition, à l'heure actuelle, a des valeurs de transparence, comme je l'ai écrit dans mon texte, mais elle va être un peu plus coûteuse.

M. Charbonneau: Excusez, je n'ai pas...

M. Monty (Paul): Elle va être un peu plus coûteuse parce que ça va être plus lourd.

M. Charbonneau: Bien oui, c'est sûr.

M. Monty (Paul): Mais elle a des valeurs de transparence. Mais je n'ai pas réfléchi, on ne m'a jamais posé la question, puis j'en prends note, là.

M. Charbonneau: Mais par ailleurs, par rapport à la transparence, on a accepté depuis plusieurs années, depuis que finalement le nouveau mécanisme est en marche, que, un dans l'autre, à partir du moment où il y a des instances de protection du public, que, si on peut arriver à une entente à l'amiable ou à un règlement entre l'intérêt du citoyen et l'intérêt du policier qui, après tout, n'aurait pas commis un crime ? parce que, si, de toute façon, il a commis un crime, il devrait être poursuivi en vertu du Code criminel... Mais, si ce n'est pas un crime, on a accepté comme société que ça se règle à l'amiable. Puis ça ne se règle pas de façon transparente, à l'amiable, ça se règle finalement entre les parties, à huis clos. Et, dans ce contexte-là, pourquoi stigmatiser ? ce qui irait à mon avis à l'encontre de la philosophie qu'on a instaurée ? pourquoi stigmatiser tout le monde en les obligeant de retourner devant un tribunal qui d'ailleurs... En ce qui concerne un criminel, ce n'est pas le tribunal qui a sanctionné qui accorde le pardon. Je veux dire... autrement dit...

M. Monty (Paul): Non. Je sais qu'au Canada puis dans d'autres juridictions c'est le tribunal qui accorde la libération ou autre chose, le suivi des sentences. Mais, au Canada, effectivement, ce n'est pas la même juridiction. Comme je vous l'ai dit, surtout pour les cas... je serais, moi, personnellement favorable, surtout pour les cas avant 1997, qui vont représenter la majorité. Parce que les autres cas sont des cas beaucoup plus ciblés, beaucoup plus graves, le Commissaire ayant décidé de porter une accusation, malgré la volonté souvent des parties de régler le tout en déontologie. Mais, ceux-là, oui, ça pourrait être une approche, surtout pour les dossiers d'avant 1997, qui représentent le gros volume, ça pourrait être une approche.

M. Charbonneau: Moins stigmatisante et qui...

M. Monty (Paul): Plus simple.

M. Charbonneau: Plus simple et moins coûteuse aussi. Bien, écoutez, Mme la Présidente, en ce qui me concerne, ça... Je ne sais pas si mon collègue de Mercier...

M. Turp: Ce serait quoi...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier.

M. Turp: ... ? merci, madame ? l'analogie, là... Si on choisit une formule de réhabilitation qui est analogue à celle qu'on retrouve dans la Loi sur le casier judiciaire, on devrait en toute logique choisir une formule qui fait que c'est l'équivalent de la Commission des libérations conditionnelles qui octroie la réhabilitation. Est-ce que c'est ça qui doit être envisagé ou bien est-ce qu'il y a des... parce qu'on est dans un cas beaucoup... on n'est pas dans un cas tout à fait similaire à la réhabilitation... que ça ne devrait pas être ça qui soit appliqué comme modèle.

M. Monty (Paul): Il est évident que... Là, écoutez, là, je ne connais pas les procédures, parce que la loi laisse une marge au comité pour se doter d'une procédure, et, dans ce cas-là, le comité pourrait obliger que ce soit un autre membre que celui qui a sanctionné le policier qui entendrait. Donc, le comité posséderait les deux juridictions. Mais, écoutez, on n'est pas pour créer... personnellement, je ne verrais pas de créer une troisième partie pour s'occuper du dossier. Il y a déjà le comité puis le Commissaire. Si on était pour avoir un autre organisme comme au fédéral... parce qu'au fédéral évidemment on a déjà une commission des libérations conditionnelles qui s'occupe de d'autres choses, qui est un tribunal comme les Français ont, un tribunal des peines, qu'on n'a pas, nous autres, ici, chez nous.

M. Turp: Alors, finalement, qu'est-ce que vous recommandez? Quelle devrait être l'institution ou la personne à qui la compétence serait conférée d'octroyer pour l'instant, là, la réhabilitation?

M. Monty (Paul): Moi, comme je vous l'ai dit, la démarche la plus transparente, c'est le tribunal déontologique, parce que, même si je suis indépendant, le tribunal déontologique te garantit une indépendance encore plus grandes que la mienne.

M. Charbonneau: Je n'ai pas compris ça, je m'excuse.

n(16 h 30)n

M. Monty (Paul): Le tribunal déontologique, le comité a des... est un tribunal quasi judiciaire, tandis que, moi, je suis à la fois une fonction administrative et judiciaire. Là, écoutez, là, vous le savez, on arrive dans des questions juridiques qui ne sont pas toujours même très claires, puis malgré mes 35 ans de Barreau.

M. Charbonneau: Est-ce que je comprends bien? Ce que vous dites dans le fond à mon collègue, c'est que, en bout de piste, peut-être qu'on pourrait avoir la responsabilité, comme certains le proposent, d'allumer la lumière rouge quand c'est nécessaire, mais ce n'est pas nécessaire que ce soit moi qui fasse l'audition des cas...

M. Monty (Paul): Exactement.

M. Charbonneau: ...que, moi, je jugerais important de soumettre à un examen plus approfondi?

M. Monty (Paul): Écoutez, si on a un comité puis on a jugé bon, il y a plusieurs années, de scinder la fonction... Anciennement, c'était la Commission de police qui avait les deux responsabilités.

M. Charbonneau: Oui.

M. Monty (Paul): On a scindé entre les deux. C'est évident que, s'il faut aller en audition de nature publique, il faut que ça aille devant un autre que le Commissaire, sinon revenons à l'ancienne Commission de police qui fait toutes les fonctions.

M. Charbonneau: Et juste une chose que vous venez de dire que je ne suis pas encore familier avec... Ça veut dire qu'à chaque fois que le Comité de déontologie siège, il siège en public.

M. Turp: Voilà, c'est ça.

M. Monty (Paul): Il siège en public, oui.

M. Charbonneau: Ça, ça veut dire que, si on ne modifie pas le projet de loi, tous les cas de policiers, pour toutes sortes de situations qui devraient... petites comme moyennes... devraient passer par le processus d'auditions publiques.

M. Monty (Paul): Et, oui, effectivement, parce que la Cour supérieure a dit récemment, dans des décisions, que le comité siège... est tenu par les règles de justice naturelle comme un tribunal. Donc, il est prévu, à moins qu'elle prévoie dans ses règles de procédure que ce soit une caméra, c'est public.

M. Charbonneau: Raison de plus dans ce cas-là pour qu'on limite ça aux cas que vous jugeriez importants, et pas à toutes les situations où un policier demanderait une radiation des traces de faute professionnelle.

M. Turp: Si je peux me permettre?

La Présidente (Mme Thériault): Oui, M. le député de Mercier, la parole est à vous.

M. Turp: Est-ce que vous trouvez souhaitable qu'une procédure de réhabilitation, entre guillemets, là, soit publique, et sinon pourquoi, puis, si oui, laquelle?

M. Monty (Paul): Écoutez, si... puis là je fais une distinction avant 1997 puis après 1997. Les causes avant 1997 ont été conduites sur la place publique, les quelque 70 causes qu'on a par année. Est-ce que ce n'est pas mauvais de régler par la suite, dans ces cas souvent plus graves et, je dirais dans un bon français, «behind closed doors», des choses qui ont été décidées sur la place publique? C'est ma préoccupation. Je pense donc que, dans les cas les plus graves, on doit aller devant un tribunal puis que l'audition se fasse en public, pour qu'on le fasse, parce que le but de ça, c'est que la personne a été condamnée puis qu'on doit savoir qu'elle ne sera plus condamnée. Il ne faut pas que ça se fasse privément.

M. Turp: C'est la gravité de l'atteinte au code qui déterminerait...

M. Monty (Paul): Ou la gravité de l'atteinte ou ce que je dirais... parce que dans certains cas ce n'est pas simplement la gravité, c'est parce que c'est un policier qui a eu plusieurs petits délits. Parce qu'on ne juge pas, en déontologie, simplement en fonction de l'atteinte, mais également dans le comportement général.

M. Turp: Le nombre d'atteintes.

M. Monty (Paul): Bien oui. Si c'est un policier qui est rendu à sa, disons... une exagération, parce que je n'en ai pas vu à l'heure actuelle, là, mais, à sa 10e sanction, à un moment donné, il va falloir qu'on prenne une décision plus grave. Mais, disons, il y a des policiers que... comme je dis souvent, il y a des policiers dont je me souviens le nom. Ça, c'est des policiers qui sont...

M. Turp: C'est mauvais signe.

M. Monty (Paul): Oui, un peu plus rares.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: De toute façon, si je comprends bien, dépendamment de nos divergences d'opinions pour le moment sur la façon dont on va faire les choses, si je comprends bien l'intention du ministre, c'est que... L'objectif, c'est que ce soit inopposable. Ça veut dire que, quelqu'un qui en aurait eu six de suite puis qu'à chaque fois aurait demandé une radiation ou une réhabilitation, entre guillemets, et qui l'aurait obtenue, d'une fois à l'autre on ne peut pas invoquer l'accumulation.

M. Monty (Paul): Ce que je comprends du projet de loi, et ça, c'est intéressant, si jamais le Commissaire juge bon, il peut demander la réouverture de la réhabilitation, et ça, ça m'apparaît intéressant.

M. Charbonneau: Ce que j'avais compris, c'est que c'était pour des faits nouveaux concernant la même... disons, la même faute professionnelle. Parce que de deux choses l'une: ou bien c'est inopposable ou bien ça l'est. Alors, si c'est inopposable, on ne peut pas, d'une fois à l'autre, accumuler un dossier, dire: Écoute, on t'a pardonné cinq fois pour le même genre de faute, puis là, cette fois-ci, ça vient de s'éteindre, tu passes au cash. Ce que je comprends, puis je pense que le ministre est d'accord avec moi sur l'interprétation, c'est que, si c'est inopposable, il y a une faute professionnelle, elle a été sanctionnée, il y a une demande, et on accepte la demande, et par la suite on ne peut plus utiliser le dossier et la sanction antérieure pour une nouvelle sanction, à moins que des faits nouveaux sur la...

M. Chagnon: ...là-dessus, c'est 255.13:

«Le policier qui s'est vu refuser la réhabilitation peut faire une nouvelle demande relativement au même acte lorsqu'un fait nouveau pourrait justifier une révision de la décision initiale du comité.

«De même, le Commissaire peut demander la révocation de la réhabilitation accordée à un policier lorsqu'est découvert un fait nouveau qui, s'il avait été connu en temps utile, aurait pu justifier une décision différente.»

Dans ce sens-là, je pense qu'effectivement, si vous aviez su telle ou telle chose dans le dossier de Mme ou de M. Untel pour qui vous avez donné une réhabilitation, si vous l'aviez su, vous ne l'auriez pas donnée, la réhabilitation. C'est ça que ça vient dire, 255.13. Donc, on peut révoquer la réhabilitation.

M. Monty (Paul): Je comprends, mais...

La Présidente (Mme Thériault): M. Monty.

M. Monty (Paul): Ce qu'il faut bien voir, c'est que, si on prenait un policier qui a six condamnations, six fois trois ans, 18 ans, ça commence à... ce serait quelqu'un qui... qu'on aurait beaucoup de difficultés, on l'aurait vu avant.

M. Chagnon: Vous avez des chances de connaître son nom.

M. Monty (Paul): Oui.

M. Charbonneau: En tout cas, je pense que, dans l'opinion publique, on s'en rappellerait un peu, là.

M. Monty (Paul): Oui. Non, écoutez, je pense que c'est plus théorique que pratique, parce que... Ce qu'on voit, c'est des policiers qui dans un court laps de temps, de quelques années... La période de deux ou trois ans m'apparaît suffisante pour la majorité, parce que, écoutez, si on regarde... Un policier qui ferait plusieurs petits manquements puis qui arrêterait... qui serait sage pendant trois ans, là, je serais surpris qu'il revienne après.

M. Charbonneau: Oui, c'est ça, mais c'était juste pour qu'on se comprenne bien, pour la compréhension mutuelle, parce que...

M. Monty (Paul): Oui, je pense que... Parfait.

M. Charbonneau: Bon. Mais juste... En tout cas, pour être sûr qu'on se comprend très bien, c'est que dans le fond vous trouveriez que finalement ce serait préférable que, comme mécanisme, pour ne pas mettre tout le monde dans le même paquet, qu'il y ait un mécanisme qui fasse en sorte qu'une fois qu'il y a une demande de faite, qu'il y ait une réponse automatique, à moins... et sauf dans des cas plus graves, où là vous avez, vous, une obligation ou une responsabilité de vérification. Et, si votre vérification vous amène à conclure qu'il faudrait aller plus loin, à ce moment-là on passerait la responsabilité au Comité de déontologie qui entendrait publiquement le dossier.

M. Monty (Paul): Ce n'est pas tout à fait ce que j'ai dit. J'ai dit que je pourrais vivre avec les deux situations, puis comme je peux vivre avec la situation actuelle.

M. Charbonneau: Non, non, ça, je comprends.

M. Monty (Paul): Je n'ai pas d'idée particulière. J'ai une préoccupation du volume de dossiers, par rapport à ceux qui datent de plus que 1997, mais après...

M. Charbonneau: Mais j'avais cru comprendre que vous aviez aussi une préoccupation de justice, dans le sens... pour les cas avant 1997...

M. Monty (Paul): Oui, ça, j'ai une préoccupation.

M. Charbonneau: ...et qui ont déjà vécu l'opprobre public, puis qui n'ont pas eu la chance d'avoir un mécanisme de conciliation...

M. Monty (Paul): Exactement.

M. Charbonneau: ...de les obliger à nouveau à faire une comparution publique devant une instance, tu sais, quasi judiciaire, qui est un tribunal, en tout cas si on utilise votre expression.

M. Monty (Paul): Bien que la loi prévoit que c'est à demande qu'il peut tenir une audition, le comité, si j'ai bien lu.

M. Chagnon: Oui, vous avez bien compris.

M. Monty (Paul): Donc, le comité peut donner, pour ces dossiers-là, presque automatiquement...

M. Chagnon: La mécanique du projet de loi prévoit en fait que, lorsque quelqu'un fait une demande... puis je partage avec tout le monde ici l'idée que les cas de 1997 vont être très différents à juger que les cas de post-1997. Mais, dans les cas... lorsqu'il y aura une demande de faite, le comité pourra, sur le banc, à partir du moment où il reçoit la demande de M. Charbonneau... c'est: Ah oui! M. Charbonneau...

M. Charbonneau: C'est un cas moins grave que le cas de M. Chagnon, par exemple.

M. Chagnon: ...c'est un cas, et envoie ? peut-être, possiblement ? envoie le certificat de réhabilitation, sans plus, point. Ce ne sera pas plus compliqué que ça. Dans un cas où M. Charbonneau a un problème plus grave un peu et que le comité dit: Je ne suis pas certain que je devrais donner le certificat de réhabilitation ? sans entendre M. Charbonneau ? donc il fait une demande à M. Charbonneau: Vous nous avez fait une demande, est-ce qu'on peut vous entendre maintenant pour nous dire exactement ce qu'il en était? Et j'ajoute...

n(16 h 40)n

M. Charbonneau: À partir du moment où il y a audition, c'est une audition publique.

M. Chagnon: Et j'ajoute... De toute façon, je présume que ce n'est pas... Ce ne sera pas aussi couru qu'un spectacle de Céline Dion, mais c'est... L'autre aspect, c'est qu'en cas de récidive, en cas... lorsqu'une personne, lorsque le policier Charbonneau est dans sa deuxième situation, dans une deuxième situation de problème déontologique, à ce moment-là le comité le recevra automatiquement.

La Présidente (Mme Thériault): Merci.

M. Charbonneau: Je ne suis pas policier, même si j'ai déjà eu le fantasme quand j'étais plus jeune, et le désir, mais j'avais juste 5 pi 4 po. Est-ce qu'on pourrait s'entendre sur un cas concret? Je ne sais pas, moi, il y a le fils de votre collègue Mulcair qui est policier.

M. Chagnon: On n'est pas encore... On fait de la plongée sous-marine, là.

La Présidente (Mme Thériault): ...aussi le député de Marguerite-D'Youville qui avait une intervention aussi. M. le député, la parole est à vous.

M. Moreau: Je suis le seul qui demande la parole, je pense, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Thériault): Bien, vous l'avez.

M. Moreau: ...hein, ici, dans cette commission?

La Présidente (Mme Thériault): Vous respectez les règles.

M. Moreau: Alors, M. Monty, je voulais comprendre, parce que... Je comprends que c'est le rôle de l'opposition de scruter à la loupe les projets de loi, mais je veux juste m'assurer qu'on n'est pas en train de commettre une exagération au niveau de la procédure. Et dites-moi si je fais erreur.

Vous avez dit d'abord que, à partir du moment où il y a une plainte, de toutes les plaintes qui sont reçues en termes de déontologie... Alors, moi, je suis arrêté par un policier, je ne suis pas satisfait de la façon dont... des circonstances de l'arrestation, j'estime que le policier a été, par exemple, impoli ou m'a bousculé, je peux faire une plainte. Là, vous me dites que, du total des plaintes, le premier mécanisme, c'est la conciliation, dans la mesure où 85 % ? c'est ce que vous nous disiez tantôt ? des plaintes sont réglées au niveau de la conciliation. Bon. Il en reste 15 %. De ces 15 % là, en sanction déontologique... Alors là, on ne s'est pas entendus en conciliation. Vous semblez avoir fait beaucoup de statistiques; il y en a combien du 15 % restant qui est confirmé dans le sens où il y a une sanction déontologique?

M. Monty (Paul): Du 15 % qui est envoyé en enquête, on va arriver à à peu près 50 citations par année, ce qui veut dire à peu près 33 % des dossiers qui vont être amenés en citation devant le comité, et, de ça, les policiers vont être exonérés ou sanctionnés dans 50 % des cas à peu près. C'est-à-dire, dans 50 % des cas, le comité...

M. Moreau: ...du 15 %.

M. Monty (Paul): C'est-à-dire que finalement, là, ce qu'on a calculé, puis j'ai fait des statistiques pancanadiennes: À peu près 2 % à 3 % des policiers sur lesquels on reçoit des plaintes sont sanctionnés ultimement.

M. Moreau: 3 %, vous dites?

M. Monty (Paul): Oui.

M. Moreau: Bon. De ce 3 % là, il y en a qui... bon, à l'heure actuelle, il n'y a pas de réhabilitation possible, qu'on aime... je ne discute pas du terme, je sais qu'il y en a qui ne l'aiment pas, il y en a qui l'aiment. De ce 3 % là, vous estimez à combien le nombre de démarches en réhabilitation?

M. Monty (Paul): C'est là toute la problématique. Ça dépend de... si on reprend tous les anciens policiers qui ont été sanctionnés, il y a 902 cas de sanctions qui ont été accordées. Alors, ceux-là, ce que j'ai donné comme... on n'a pas, je n'ai pas de boule de cristal pour regarder dedans, mais, admettant la possibilité qu'on ait 50 % de policiers, de cas qui soient présentés, on arriverait à à peu près 400... Moi, j'ai calculé que, dans les premières années... Parce que plus on va aller dans le temps, moins il va y en avoir, parce qu'il y a de moins en moins de sanctions. Pour le passé, on aurait probablement entre 300 ou 400 demandes.

M. Moreau: 300 ou 400 demandes par année ou au début?

M. Monty (Paul): Non, non, au début.

M. Moreau: Au début.

M. Monty (Paul): Ce serait le maximum, puis, après, bien ça irait, si on a 70, donc 35 condamnations, là-dessus, on aurait une possibilité de 35 dossiers en demande de réhabilitation par année, après les premières années.

M. Moreau: Maintenant, dites-moi si je comprends bien. J'ai examiné rapidement la loi. Les pouvoirs du Commissaire, la Loi de police, sont prévus à l'article 128, ce sont des fonctions qui sont très particulières mais qui ne sont pas juridictionnelles. C'est-à-dire que ce n'est pas vous qui sanctionnez un policier, ça relève du comité.

M. Monty (Paul): Exactement.

M. Moreau: Et c'est le comité seul, au sens de la loi, qui exerce des fonctions juridictionnelles. C'est exact?

M. Monty (Paul): Exact, mais il est... ses décisions sont appelables devant la Cour du Québec.

M. Moreau: O.K. Maintenant, à partir du moment où la loi, si cette loi-là, le projet de loi n° 80 devait devenir loi, les mêmes dispositions, parce que j'ai vu que ce n'était pas amendé, notamment l'article 229 indique le principe: les auditions sont publiques, mais le comité a un pouvoir d'office ou sur demande de décréter un huis clos.

M. Monty (Paul): Exact.

M. Moreau: Et une des raisons pour lesquelles il peut demander un huis clos, c'est pour assurer la protection de la vie privée ou la réputation d'une personne. C'est exact?

M. Monty (Paul): Exact.

M. Moreau: Alors, on pourrait penser que, quand il est en rétablissement de la réputation d'un policier, il aurait toute la juridiction nécessaire dans la loi actuelle pour demander... ordonner le huis clos, même proprio motu. C'est exact?

M. Monty (Paul): Exact.

M. Moreau: O.K. Merci.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va?

M. Charbonneau: Est-ce que...

M. Turp: ...le député de Marguerite-D'Youville, c'est quel article?

M. Moreau: 229.

M. Turp: La Loi sur la police?

M. Moreau: Oui.

La Présidente (Mme Thériault): Je vais vous laisser le mot de la fin, M. le député de Borduas, rapidement.

M. Charbonneau: Oh! ce ne sera pas nécessairement le mot de la fin, c'est juste pour clarifier. Ça veut dire qu'il pourrait le faire, mais, comme ce serait aussi de...

M. Moreau: De lui-même ou sur demande.

M. Charbonneau: C'est ça, mais, comme ce serait de connaissance publique par ailleurs, un organisme pourrait prendre ombrage de la décision du Comité de déontologie de le faire en privé, à ce moment-là, si on n'a pas...

M. Moreau: Bien, il pourrait peut-être prendre ombrage, mais ça n'enlèverait pas la juridiction...

M. Charbonneau: Non, non, je comprends, mais...

M. Moreau: ...au comité de décréter le huis clos. Comme un juge de la Cour supérieure doit ordonner le huis clos en matière familiale, puis, même si toute l'Association professionnelle des journalistes est fâchée, ils restent dans le corridor pareil. Ce n'est pas grave, ça.

La Présidente (Mme Thériault): Rapidement, M. le député de Mercier.

M. Turp: Alors, je veux bien comprendre la portée de cette dernière discussion. Alors, si je lis bien l'article 255.12 qui est proposé, c'est: Le comité qui va décider du sort de la demande de, entre guillemets, réhabilitation, et il peut effectivement décider sur la base d'observations par écrit ou le faire dans le cadre d'une séance qui va donc être publique. Donc, il pourrait ne pas y avoir de séance publique, et c'est le souci des gens qu'on a entendus, qu'il n'y ait pas de séance publique en général.

Vous, vous nous dites qu'il devrait y avoir des séances publiques dans certaines circonstances seulement, soit la gravité ou le nombre répété de violations du code. Est-ce que je comprends aussi que vous pensez que ce n'est pas seulement le comité qui devrait statuer sur les demandes de réhabilitation, mais que, dans les cas qui sont peut-être moins graves, ça devrait être le Commissaire, qu'on devrait avoir deux autorités, et que, lorsqu'il s'agira de cas moins préoccupants, ça devrait être plutôt le Commissaire que le comité?

M. Monty (Paul): Non, je n'ai pas... je n'ai pas dit ça, mais c'est une possibilité, mais je ne l'ai pas dit. Ce que je veux dire par là, c'est que... ce que j'ai affirmé, c'est que le Commissaire va pouvoir faire des représentations dans les cas les plus importants, que le comité va déterminer que c'est un cas important et va demander au Commissaire de faire des représentations. Le Commissaire fera des représentations à sa demande. Ce que M. Charbonneau me disait: Mais ça aurait pu vous être laissé, à vous, de faire cette démarche-là, au lieu d'être au comité. J'ai dit oui, mais le projet de loi dit que c'est au comité, puis, moi, je ne m'en offusque pas.

M. Charbonneau: C'est ça, mais, comme on est...

M. Monty (Paul): C'est un choix.

M. Charbonneau: C'est ça. On fait des auditions particulières justement, et les associations policières ont proposé justement l'autre approche qui vous laisserait la responsabilité de signaler les situations où le comité devrait se pencher. On verra, là, par la suite, mais...

M. Monty (Paul): Mais, moi, comme je vous le dis...

M. Charbonneau: Vous, vous allez vivre de toute façon avec les deux.

M. Monty (Paul): Le Commissaire est né de la loi, il va vivre avec la loi.

M. Charbonneau: Au moins vous êtes né à quelque part et de quelque part.

La Présidente (Mme Thériault): Donc, sur ces bonnes paroles, M. Monty, je vais vous remercier, M. Maurice également. Nous allons suspendre les travaux quelques instants pour nous permettre d'aller vous saluer et, après, nous reprendrons pour les remarques finales. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 49)

 

(Reprise à 16 h 50)

Document déposé

La Présidente (Mme Thériault): Donc, nous reprenons nos travaux. Avant de céder la parole au ministre pour ses remarques finales, j'aimerais déposer le document, la lettre qui nous est envoyée par le Protecteur du citoyen. Donc, c'est une lettre datée du 2 décembre concernant l'invitation. Donc, c'est le dépôt officiel.

Remarques finales

M. le ministre, je vous inviterais à faire vos remarques finales.

M. Chagnon: Oui, Mme la Présidente, d'abord, je voudrais vous remercier pour la qualité de nos échanges. On a reçu trois groupes aujourd'hui qui, disons, ont permis d'éclairer notre lanterne sur le projet de loi. Je pense que nous avons communément l'intention de faire quelque chose et que nous avons un peu de problèmes à trouver la source linguistique pour y arriver dans certains cas. Mais je sens que nos travaux, lorsque nous passerons à la période de l'étude article par article, pourront s'enrichir de la continuité de nos discussions que nous avons commencé à avoir à ce moment-ci. Et, sur ce, je vous remercie encore, Mme la Présidente, et je remercie les membres de la commission.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le ministre. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Bien, Mme la Présidente, les remarques finales, j'ai l'impression qu'on va passer éventuellement à l'article par article, ça ne sert à rien de se redire les mêmes choses, on va avoir à discuter longuement, pas juste sur une question de vocabulaire, mais sur une approche aussi. Je pense qu'on est d'accord sur la finalité, c'est sur les modalités pour en arriver. Alors, s'il y a de la souplesse, je pense qu'on va avancer rapidement. S'il y en a moins, on prendra le temps qu'il faut pour faire les choses correctement.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Oui, bien sûr, et je sais qu'on a convenu... Mme la Présidente, on a convenu, le ministre et moi, qu'on reprendrait peut-être vers 8 h 20, parce qu'on doit, chacun, intervenir à des moments différents entre maintenant et 8 h 20 dans le haut lieu.

M. Chagnon: ...différentes places. Alors, nous pourrions commencer l'étude article par article, Mme la Présidente, si vous le jugez à propos, après 8 heures, donc à 8 h 20, on serait...

M. Charbonneau: Disons 8 h 30 pour simplifier, si on peut...

La Présidente (Mme Thériault): Je vais demander aux parlementaires quand même, parce que... Bon, je comprends que vous avez une obligation en Chambre, c'est correct, je n'y vois pas réellement de problème. Mais je vais demander aux autres parlementaires d'être ici vers 8 h 20 pour pouvoir débuter les travaux du moment que, vous, vous arriverez, puisque l'ordre de la Chambre a été donné pour 20 heures.

M. Chagnon: Pour 20 heures. Ça fait qu'on pourrait le faire le plus vite possible. En fait, quand le député de Borduas arrivera, on commencera.

La Présidente (Mme Thériault): Parfait. Donc, M. le ministre, MM. les députés, M. le porte-parole de l'opposition officielle, merci beaucoup. Et, sur ce, j'ajourne les travaux sine die.

(Suspension de la séance à 16 h 53)

 

(Reprise à 20 h 33)

Étude détaillée du projet de loi n° 80

La Présidente (Mme Thériault): Bon, puisque nous avons le quorum, je déclare la séance ouverte. Et j'aimerais rappeler le mandat de la commission qui est de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 80, Loi modifiant la Loi sur la police.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente, M. Simard (Richelieu) est remplacé par M. Charbonneau (Borduas).

La Présidente (Mme Thériault): Merci. Donc, j'inviterais sans plus tarder le ministre à faire ses remarques préliminaires, par la suite le représentant de l'opposition officielle. M. le ministre.

M. Chagnon: Alors, nous venons de passer à travers l'étape où nous avons rencontré les différents groupes qui étaient intéressés par cette question-là. Alors, je suis tout à fait prêt à commencer l'étude article par article, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Borduas, avez-vous des remarques préliminaires? Le ministre nous a mentionné que nous venons d'en faire.

M. Charbonneau: Moi, je pense qu'on en a fait pas mal, là, Mme la Présidente. La seule chose que je voudrais dire au ministre, c'est la suivante. Je vais jouer cartes sur table, là. On a entendu des groupes, cet après-midi et cet avant-midi aussi, un peu, là, et, moi, ma position, c'est la suivante. C'est que je suis d'accord avec le principe, je l'ai dit, je n'ai pas changé d'idée, mais je crois que les propositions de modification qui nous ont été soumises, en particulier par les associations policières, devraient être prises en considération. Alors, on a bien l'intention de faire en sorte que le projet de loi soit modifié en conséquence et on peut prendre le temps pour le faire. J'ai dit au ministre qu'on ne ferait pas ce qu'on appelle, dans le langage du parlementarisme britannique, un filibuster, mais on va prendre le temps de faire les choses correctement. C'est clair que, si on a des ententes sur des modifications, des amendements, bien ça va aller plus vite, mais sinon, bien, je veux dire, on va prendre le temps de faire les choses puis d'essayer de débattre. C'est ce que je peux simplement dire, à cette étape-ci, peut-être en remarques préliminaires, pour que les choses soient claires pour le ministre et les collègues de chaque côté de cette table.

Organisation policière

Corps de police

La Présidente (Mme Thériault): Merci. Merci, M. le député de Borduas. Donc, sans plus tarder, M. le ministre, je vous laisse lire les articles ainsi que les commentaires. Donc, M. le ministre, à l'article 1.

M. Chagnon: Alors, l'article... Est-ce que vous voulez que je les lise? Est-ce que c'est, pour vous, nécessaire que je les lise? C'est à votre goût, ça ne me fait rien.

M. Charbonneau: Bien, dans le fond, moi, ça ne me dérange pas, hein?

La Présidente (Mme Thériault): Bien, on peut les lire, oui.

M. Charbonneau: L'article 56, là...

La Présidente (Mme Thériault): Moi, je les lirais pour la compréhension des gens qui nous écoutent.

M. Chagnon: Bon. Alors, l'article 1: L'article 56 de la Loi sur la police est modifié par la suppression, dans le deuxième alinéa, de «, ainsi que les autres officiers,». Deuxième alinéa, par l'insertion, après le deuxième alinéa, de l'alinéa suivant:

«Les autres officiers sont nommés par le ministre sur recommandation du directeur général.»

Ça, ça implique que tous les officiers, outre, hein... enfin, outre les directeurs généraux adjoints et les directeurs généraux, seront nommés non pas par le cabinet, mais par le directeur général et le ministre.

M. Charbonneau: C'est ça. Donc, le directeur général est nommé par le Conseil des ministres, et les directeurs généraux adjoints sont nommés également par le gouvernement sur recommandation du directeur puis également, je présume, du ministre.

M. Chagnon: Oui, bien sûr.

M. Charbonneau: Et puis, bon, les autres officiers sont nommés par le ministre sur recommandation du directeur général.

Moi, je voudrais poser une question au ministre. On a entendu, dans les discussions, deux éléments. On a pris l'exemple de la police de Montréal, qui faisait en sorte que finalement l'autorité politique nommait le directeur et son adjoint, officier... À la Sûreté du Québec, il y a plus qu'un adjoint et... Pourquoi on n'utiliserait pas la même approche, c'est-à-dire qu'outre les membres de l'état-major, haut état-major, si on veut, du service de la Sûreté du Québec, là, que les autres officiers soient nommés par le directeur? Qu'est-ce qui justifie...

M. Chagnon: Bien, ils sont nommés... ils sont nommés par le directeur.

M. Charbonneau: Oui, ils sont nommés par le directeur, mais c'est le ministre qui va continuer... Autrement dit, il va y avoir une instance politique ? ce ne sera pas le gouvernement, mais ça va continuer d'être une instance politique ? qui nomme des officiers de la Sûreté...

M. Chagnon: Ce n'est pas une mauvaise chose, ça. Ce n'est pas une mauvaise chose, dans le sens où... En tout cas, pour moi, j'y trouve un intérêt un peu particulier, parce que j'ai d'ailleurs, il y a un an et demi, demandé à avoir des précisions sur des curriculums vitae... qui m'amènent à trouver des qualités que l'on ne trouvait même pas, il y a quelques années, sur les curriculums vitae des futurs officiers de la Sûreté du Québec. Alors, non, moi, ça m'intéresse, sur le plan intellectuel, de savoir quel genre de monde on a un peu partout. Je n'ai jamais suggéré qu'on ne devrait pas nommer une des personnes qu'on m'a suggérées, mais je trouve ça correct que le ministre cosigne ces nominations-là.

M. Charbonneau: Oui, mais à la limite c'est plus que cosigner. C'est-à-dire que, bon, il y a une recommandation, mais c'est le ministre qui donne, qui accorde la promotion ou qui ne l'accorde pas, là.

M. Chagnon: Absolument. L'expérience que je vous ai soulignée...

M. Charbonneau: Et, moi, je trouve que, quand il n'y a pas à y avoir une intervention politique, pourquoi il devrait y en avoir une?

M. Chagnon: Ah bien, parce que l'article 50 de la Loi de police dit ceci: C'est le ministre de la Sécurité publique qui est responsable de la Sûreté du Québec.

M. Charbonneau: Moi, je suis d'accord à ce que le ministre soit...

M. Chagnon: Et, moi, je suis tout à fait d'avis qu'un ministre doit être responsable de quelque chose.

M. Charbonneau: Bien, si le ministre est responsable, dans le fond, il a le directeur, l'état-major supérieur qui... Dans l'armée, finalement, le ministre ne va pas nommer tous les officiers de l'armée. Je veux dire, dans le fond, c'est les dirigeants de l'armée qui finalement rendent des comptes.

M. Chagnon: Je n'ai jamais encore dirigé l'armée, mais, si vous me suggérez de le faire, je pourrais penser à ça.

M. Charbonneau: Bien, là, écoutez, on pourra peut-être s'entendre quand vous serez d'accord pour qu'on ait une armée. Il y a un préalable à ça, là, mais ce n'est pas sûr qu'on est d'accord sur le préalable, là. Ça fait que...

M. Chagnon: Non, non. Non, non. Je serai peut-être obligé de changer de Parlement, tu sais.

M. Charbonneau: Ou de parti. Ce serait moins compliqué.

M. Chagnon: Ou de parti.

M. Turp: Je ne vous le conseille pas.

M. Charbonneau: Non, mais... Bon, il y a deux choses, là.

M. Chagnon: Je vais écouter la suggestion du député de Mercier.

n(20 h 40)n

M. Charbonneau: Non, il y a deux choses. Il y a cette idée que peut-être que dans le fond le niveau politique devrait, pour des forces de l'ordre, se réserver la responsabilité de nommer le commandant en chef de la force en question et peut-être ses adjoints immédiats, qui par la suite...

M. Chagnon: ...même pas la question sur ce que vous venez d'exposer, là.

M. Charbonneau: Je ne comprends pas.

M. Chagnon: Vous dites: Peut-être que. Il m'apparaît que c'est fondamental que le ministre suggère au cabinet le nom du directeur général...

M. Charbonneau: Ah oui, non, mais ça... ça, c'est... Je ne sais pas quelle interprétation vous avez faite de mon «peut-être»...

M. Chagnon: Non, j'avais...

M. Charbonneau: ...mais ce n'est pas sur ça, hein?

M. Chagnon: Ah, O.K. Parce que j'avais l'impression que vous disiez: Peut-être que ça devrait... que...

M. Charbonneau: Non, non. Non, non, non. Non, non.

M. Chagnon: Mais ce n'est pas peut-être, c'est...

M. Charbonneau: C'est clair que l'officier responsable de la Sûreté du Québec, le directeur de la Sûreté du Québec, il doit être nommé par le gouvernement. Qui c'est qui le nommerait, autrement?

M. Chagnon: Il y a un point, il y a un point qui a été soulevé par tant... bien, particulièrement d'ailleurs par M. Dagenais et aussi par M. Proulx, un peu plus tôt, concernant les nominations qui sont faites pour les agents auxiliaires puis les agents. En fait, c'est ça qu'il suggérait.

M. Charbonneau: Non, il y a deux choses qui étaient suggérées.

M. Chagnon: C'est la seule chose qui était suggérée.

M. Charbonneau: C'est-à-dire, eux suggéraient que les officiers subalternes ne soient pas, eux, nommés par le ministre aussi, mais par le directeur directement.

M. Chagnon: Oui, oui, par le ministre. Et ça, je serais prêt... Honnêtement, là, je serais prêt à regarder ça à visière ouverte, et...

M. Charbonneau: C'était mon deuxième point.

M. Chagnon: Oui, mais sauf que je ne peux pas le faire dans ce projet de loi là, pour des raisons qui sont assez faciles à comprendre. Il faudrait que je revienne au cabinet, au conseil de législation. On ne serait pas prêts pour la fin de la semaine prochaine. Mais une chose est certaine. Je vous dis très honnêtement ? comme M. Dagenais est avec nous, je le lui dis en même temps ? que je serais tout à fait ouvert à regarder ça dans la prochaine ouverture où on aurait une modification à faire à la Loi de police.

Par contre, je pense que... Personnellement, je crois profondément au fait que le ministre doit être cosignataire avec le directeur général de la Sûreté pour les mandats de promotion à l'intérieur de la Sûreté. Il y a des questions qui doivent se poser, et qui requièrent une réflexion, dans ce dossier-là, et qui font en sorte que le ministre peut aussi refuser certaines nominations dans certains cas. Oui, oui.

M. Côté: C'est... C'est... Madame, je...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Dubuc.

M. Côté: Oui, c'était la question que j'allais vous poser. Lorsque vous parlez que les officiers sont nommés par le ministre sur recommandation du directeur général, quelle est à peu près la... Est-ce que ça arrive souvent que le ministre refuse la recommandation du directeur?

M. Chagnon: Ça peut arriver. Ça m'est arrivé. Et ça arrive rarement, mais ça arrive. Mais généralement c'est sur des cas de dossiers qui relèvent de déontologie ou des cas problèmes qui relèvent de ça. Généralement, on...

Puis, quand les gens qu'on a vus ce matin, cet après-midi, c'est-à-dire ce matin, ce matin... nous dire que la déontologie peut avoir un effet sur le plan de carrière d'un policier, je suis obligé de dire que c'est vrai. Et, la plupart des cas, ce qui arrive, c'est qu'on fait des suggestions de promotion puis, dans la première phrase qu'on vous dit: Ils ne sont pas... Personne, dans ces gens-là, n'a un dossier déontologique, ou quoi que ce soit. Par la suite, un peu plus tard, on va vous fournir des noms de gens qui ont des problèmes ou qui ont eu des problèmes d'ordre déontologique.

Et un ministre qui à mon... En tout cas, à mon humble avis, le rôle du ministre, c'est d'étudier et de regarder de façon très circonspecte chacun des éléments et chaque jugement qui a été porté sur chaque personne dans leurs dossiers déontologiques. Et, dans ces cas-là, je dois dire que probablement que, dans 90 % des cas, j'ai adhéré aux suggestions du directeur de la Sûreté à l'effet de donner une promotion à quelqu'un qui avait un passé déontologique. Le directeur général de la Sûreté a eu un passé déontologique, ce n'est pas un secret pour personne, là. Il a été reconnu... Son passé déontologique a été nettoyé, entre autres par la Cour du Québec. La Cour du Québec l'a réhabilité sur l'acte déontologique pour lequel on l'avait sanctionné. Puis, pour moi, c'est important de le dire, je le dis comme ça puis ce n'est pas un secret, ce n'est pas un secret, l'acte déontologique ne doit pas être un frein éternel dans une carrière. Il y a certains actes déontologiques, par contre, qui peuvent l'être.

M. Charbonneau: Mais là on parle de promotion, on ne parle pas de...

M. Chagnon: On parle de promotion, mais, quand tu nommes quelqu'un directeur général de la Sûreté, je vais te dire une affaire, c'est le genre de chose que tu cherches.

M. Charbonneau: Ah, bien oui, mais, je veux dire, ça, c'est la responsabilité du gouvernement, ça.

M. Chagnon: Et du ministre.

M. Charbonneau: Je n'ai pas de problème avec ça. Et du ministre, ça, c'est...

M. Chagnon: Mais c'est vrai aussi, c'est vrai aussi pour n'importe quelle nomination qui se fait dans un cas de promotion à la Sûreté.

M. Charbonneau: Bien, écoutez, moi, il y a deux thèses, hein? Les deux thèses se défendent. Moi, je n'aime pas tellement l'idée qu'il y ait une intervention politique. Pourtant, s'il y a quelqu'un qui valorise la fonction politique et qui l'a fait pendant sa carrière, c'est bien moi, là. Mais, malgré ça, il y a le fait que...

M. Chagnon: Oui, mais méfions-nous. On ne parle pas d'un... Quand vous parlez d'une intervention politique, là, je veux bien qu'on s'entende, il ne s'agit pas d'une intervention partisane.

M. Charbonneau: Non, non, non, on se comprend, mais, je veux dire...

M. Chagnon: Il s'agit d'une intervention d'un élu qui regarde un dossier avec le gros bon sens puis il se dit: Dans ce cas-là, là, non. Non. Non, parce que je pense, moi, comme individu, qu'à la suite de ce que je lis, de ce que j'ai lu, de l'incident qui est survenu il y a peut-être cinq, six ans, cette personne-là a fait tellement une grande erreur de jugement que, même aujourd'hui, je ne me sens pas capable de dire qu'elle pourrait être promue.

M. Charbonneau: Mais le problème dans ça, c'est que c'est beaucoup les individus, mais c'est aléatoire justement, à l'individu.

M. Chagnon: Tout à fait.

M. Charbonneau: Ça veut dire qu'un ministre peut très bien avoir une éthique morale personnelle qui l'amène à avoir un jugement ou une appréciation d'une situation qu'un autre n'aurait pas.

M. Chagnon: Mais c'est pour ça qu'on est élus.

M. Charbonneau: Et on a beau vouloir...

M. Chagnon: C'est pour ça qu'on est élus, M. le député de... pas le député de Boudria, M. le député de...

M. Charbonneau: Borduas.

M. Chagnon: ...Borduas. C'est pour ça qu'on a été élus. On a été élus pour émettre des jugements sur ce qu'on considère comme étant des choses que nos concitoyens pourraient aimer, ou ne pas aimer, ou enfin... On est élus pour représenter nos concitoyens et leur jugement global. Alors, je présume qu'on est élus aussi pour qu'on se fie sur notre gros bon sens et notre jugement, qui est notre gros bon sens...

M. Charbonneau: C'est-à-dire... Oui, mais attention. Je veux dire, les gens élisent des députés, dans notre système politique. Des députés deviennent ministres, pour toutes sortes de raisons. Mais ils n'élisent pas d'abord des ministres, ils élisent des députés.

M. Chagnon: Exact.

M. Charbonneau: Puis, la responsabilité politique... Tu sais, moi, je me rappelle, parce que j'ai fait des recherches, quand j'étais jeune journaliste sur les dossiers, je veux dire, je me rappelle d'une époque, pendant longtemps, qui a existé au Québec où finalement le tripotage politique, dans les fonctions policières, dans les nominations, c'était monnaie courante. Alors...

M. Chagnon: C'est encore le cas dans certains milieux...

M. Charbonneau: Oui, mais je veux dire...

M. Chagnon: ...amérindiens.

M. Charbonneau: Bon, bien, ça, on ne parle pas de... Je parle de la Sûreté du Québec, de la police de Montréal, des grands corps policiers.

M. Chagnon: C'est fini, ça.

M. Charbonneau: Et justement il y a une distance qu'on a voulue entre justement la responsabilité politique et la direction finalement d'un service paramilitaire, comme une police d'État, même un corps policier municipal important. Je vous le dis, là, je vous dis: Il y a les deux thèses, il y a les pour et les contre, mais, moi, je crois que ce qui se passe... En tout cas, ce qui se passe comme approche à la police de Montréal n'est pas non plus une mauvaise approche, c'est-à-dire que le niveau politique se réserve la responsabilité de nommer le directeur, son adjoint. Le reste... Bien, je veux dire, ils ont choisi quelqu'un pour diriger, il dirige. S'il est en tutelle, pour même ses officiers, on a un problème.

M. Chagnon: Oui, mais ça ne se compare pas. Vous parlez d'un conseil municipal puis de l'État du Québec.

M. Charbonneau: Non, non, mais on parle de la ville de Montréal, et que ce n'est pas une bourgade, là. C'est...

M. Chagnon: Ce n'est pas une bourgade, mais alors c'est qui...

M. Charbonneau: Montréal est aussi grosse que certains États fédérés du Canada.

M. Chagnon: Alors, nommez-moi c'est qui, le ministre de la Sécurité publique, à Montréal.

M. Charbonneau: Bon, il y a un conseil municipal, il y a les élus...

M. Chagnon: C'est qui le ministre de la Sécurité publique, à Montréal, qui a un rôle direct sur la...

M. Charbonneau: La question n'est pas là. Il y a une autorité politique. Le Conseil nomme le directeur et son adjoint. Et je pense que par la suite on accorde la responsabilité et on accepte que la responsabilité des promotions soit le lot et la fonction du directeur du service, à qui on peut demander des comptes, comme instance politique. Bon. Vous, vous dites: On va l'enlever, «du gouvernement», puis on va garder le ministre. Moi, quand j'ai entendu, aujourd'hui, l'exemple de la police de Montréal, je trouvais que finalement ça, c'est... il y a quelque chose, là, qui... Puis à l'évidence je comprends que vous ne voulez pas vous rendre jusque-là.

n(20 h 50)n

M. Chagnon: Non, non, au contraire, moi, je privilégie des ministres qui sont responsables et qui ont une autorité. Alors, c'est un point de vue qui semble divergent chez vous, mais je pense que le ministre doit être responsable, et ça fait partie de sa responsabilité que de nommer les... suite à une suggestion du directeur général, de signer les promotions à la Sûreté du Québec. Ça prend un ministre qui est ouvert, par exemple, puis qui est allumé. Encore une fois, je vous rappelle ce que je vous ai dit ce matin: quand je suis arrivé en poste, il y avait du monde, ça faisait un an... pour plusieurs, les nominations, d'un an et demi en retard. Ça, ce n'est pas la faute du système, c'est la faute du ministre.

M. Charbonneau: Du ministre ou du système, au niveau du Conseil des ministres.

M. Chagnon: Du ministre. Remarquez que...

M. Charbonneau: Mais, peu importe, je vous ai dit que je trouvais ça exagéré, moi aussi, là. On ne fera pas le procès de mes anciens collègues, là.

M. Chagnon: Je ne veux pas faire...

M. Charbonneau: La question, c'est que... C'est clair qu'on s'entend sur le fait qu'un an et demi pour...

M. Chagnon: Je ne veux pas faire ce procès-là.

M. Charbonneau: ...avant qu'on puisse avoir une réponse sur une promotion, ça n'a pas de bon sens.

M. Chagnon: Je ne veux pas faire ce procès-là, parce que, dans l'an et demi dont on parle, il y a eu trois fois des changements de ministre, là, O.K.?

M. Charbonneau: Bon, en plus.

M. Chagnon: Alors, c'est pour ça que je ne cherche pas... Mais, je vous dis, quand tu es policier, quand tu es policier, là, puis que tu as eu une promotion comme lieutenant, puis qu'on te dit: Demain matin, tu pars pour Clermont, c'est un peu tannant de penser que tu peux avoir une promotion qui peut disparaître.

M. Charbonneau: Mais je vais reprendre l'exemple que vous venez de donner. Parce que vous dites: Dans le fond, c'était de la responsabilité du ministre, puis vous dites: Bon, il y en a trois. Je veux dire, la nouvelle mécanique ne va pas empêcher ça, hein? Le premier ministre, demain matin, vous remplace par quelqu'un d'autre puis, dans six mois ou dans un an, il remplace votre successeur par quelqu'un d'autre encore, puis il n'y a aucune garantie que le problème dont vous avez parlé ne se reproduira pas.

M. Chagnon: Exact.

M. Charbonneau: Parce que, dans un cas comme dans l'autre, dans le fond, on l'a vu ce matin, l'instance du gouvernement qui approuvait, à quelque part, c'était...

M. Chagnon: Exact. Exact, mais...

M. Charbonneau: ...un processus d'estampille. C'est le ministre qui dans le fond entérine la recommandation du directeur puis qui l'apporte au Conseil ou qui ne l'apporte pas.

M. Chagnon: Sauf ceci: c'est que ça n'a pas pris un an et demi puis ça n'a pas pris six mois pour que je traverse ces dossiers-là.

M. Charbonneau: La question n'est pas là, là. Ce n'est pas l'individu devant moi qui est en cause, c'est qu'on fait une loi pas juste pour savoir si Jacques Chagnon va toujours être...

M. Chagnon: Non, non, mais...

M. Charbonneau: ...ministre de la Sécurité publique, si c'est un bon gars ou pas. La question, c'est...

M. Chagnon: Ça serait trop facile à répondre.

M. Charbonneau: Bon. Bien, écoutez, ça, vous avez votre réponse, j'ai la mienne, alors... Mais la question, c'est: Est-ce qu'on a un système qui dans le fond... Si on veut vraiment enlever toute lenteur administrative inutile, moi, je crois qu'à quelque part j'aime mieux qu'il n'y ait pas une intervention politique et un jugement politique sur le choix de promotion. Je préfère, comme responsable politique, poser des questions au directeur du service de police en question et à son état-major supérieur, puis à la limite de le questionner solidement. Mais, de là à nécessairement penser que c'est une bonne chose de se conserver la possibilité d'autoriser des promotions ou pas...

Vous avez dit que vous aviez en fait refusé certaines des recommandations qui vous étaient faites ? bon, puis je ne veux pas aller dans le détail ? puis que vous avez porté un jugement, puis vous considériez que, dans ces cas-là... Mais reconnaissez que quelqu'un d'autre aurait pu porter un jugement différent, et il n'y a rien qui nous garantit que quelqu'un d'autre aurait porté un jugement selon les mêmes critères moraux, et je présume que vous avez pris une bonne décision, que votre analyse a été éthique. Mais il n'y a rien qui présume que tout le monde l'est, puis qu'il l'a été, puis qu'il va l'être dans l'avenir. Et c'est pour ça que dans le fond, au-delà des individus, on met en place des mécanismes législatifs qui vont être une barrière ou un mécanisme qui va pouvoir fonctionner au-delà du temps puis des individus, là.

M. Chagnon: Oui, sauf que ce raisonnement-là est un raisonnement qui ? votre raisonnement, entre autres, M. le député, est un raisonnement ? qui nous amène, à moyen ou long terme, à une défoliation du rôle d'un ministre dans une société. Et je pense qu'un ministre doit être responsable et doit prendre des décisions. Et, parmi les décisions qu'il doit prendre, c'en est une dans ce cas-ci précisément. Les historiens jugeront le ministre sur son oeuvre et l'ensemble de son oeuvre, et ça peut être une partie de son oeuvre, c'est tout. Mais je pense qu'un ministre doit être responsable, et ça fait partie des responsabilités qu'un ministre doit avoir.

Je suis tout à fait prêt à regarder, je le répète, comme ça a été dit ici aujourd'hui, regarder si c'est absolument nécessaire que le ministre signe les agents auxiliaires et les agents. Je suis moins certain. Je pense que votre raisonnement serait plus approprié dans ces cadres-là et je le dis parce qu'il y a deux groupes, tant la direction générale de la Sûreté que le syndicat, qui me l'ont soulevé. Puis, je vous le dis comme ça, lorsqu'on aura regardé encore la Loi de police ? parce que c'est le genre de loi qui devra être regardée de temps en temps ? je serais porté à suggérer un amendement là-dessus.

M. Charbonneau: Mais, moi, je ne comprends pas que... Écoutez, je n'ai peut-être pas été ministre assez longtemps, mais... Ou heureusement que je n'ai l'ai pas été assez. Je ne sais pas, on verra ça aussi, c'est un jugement qu'on peut...

M. Chagnon: Moi, je vous ai toujours beaucoup apprécié comme président, vous le savez.

M. Charbonneau: Moi, j'ai toujours aimé cette fonction de président. J'ai des bons souvenirs. Et, au-delà de ça, la question, c'est: Pourquoi, si vous êtes plutôt favorable, on ne s'entend pas? Parce qu'au-delà du compte c'est le législateur qui fait la loi, ce n'est pas le gouvernement.

M. Chagnon: Ah, bien, c'est... Qu'est-ce que vous...

M. Charbonneau: Et, si on se retrouvait à Ottawa, le ministre ne serait même pas à la table pour défendre son projet de loi.

M. Chagnon: Oui, sauf qu'il y aurait un projet de loi. Et le projet de loi est passé à travers des éléments de tamisage dont vous seriez probablement surpris. Vous avez, comme vous dites, été ministre pendant un an de temps et vous n'avez pas eu de projet de loi à déposer. Si vous aviez eu des projets de loi à déposer, vous comprendriez probablement mieux la mécanique de l'organisation d'un projet de loi.

M. Charbonneau: Je comprends, mais je m'oppose aussi à cette approche qui fait que... Je veux bien qu'un parlement ne puisse pas obliger un ministre à dépenser plus que... Bon, tu sais, il y a des limites. Mais, je veux dire, le législateur, ce n'est pas le gouvernement, c'est le Parlement. Puis, si finalement, comme législateur, ici, on s'entendait sur le fait que dans le fond cette règle de conduite devrait être instaurée maintenant, je ne vois pas pourquoi on devrait retourner au Conseil des ministres pour avoir cette petite autorisation là. Autrement, à quoi on sert, ici, finalement?

M. Chagnon: Bien, en tout cas, je pense qu'après 23 ans de services, de très honorables services, le député de Borduas n'a peut-être pas eu la chance de le voir ou de le faire de plus près, mais le Conseil des ministres est l'endroit où, entre autres, on fait justement une présentation devant ses collègues des contenus et des principes que les projets de loi doivent évoquer. Et, lorsqu'on arrive avec un nouveau principe, fût-il excellent, en commission parlementaire, fût-il excellent, inévitablement on se doit de le ramener devant ses pairs.

M. Charbonneau: Mais la question, M. le ministre, justement, je suis d'accord, il y a un nouveau principe, mais là on ne parle pas d'un nouveau principe. On parle d'un principe sur lequel on est d'accord et...

M. Chagnon: Bien oui. Non, non, il s'agit d'un nouveau principe. Vous ne l'avez pas vu dans ce projet de loi, là.

M. Charbonneau: Bien, le principe, c'est que finalement il y a une nomination qui puisse se faire ailleurs que par le gouvernement.

M. Chagnon: C'est ça, mais c'est un principe nouveau. C'est curieux, il ne s'agit pas d'un cas qui est soulevé devant le Conseil des ministres, il s'agit de nominations qui sont faites entre le directeur général et le ministre, qui ne vont pas au Conseil des ministres ? troisième principe, par rapport aux deux que nous avons dans notre projet de loi. Alors, ça implique effectivement de passer devant les comités ministériels, le Conseil des ministres, le Comité de législation. Bonne chance! Merci beaucoup! Si on veut adopter ce projet de loi ci dans cette session-ci, il faut oublier ça. Moi, ce que je vous dis, je vous dis ceci. Honnêtement, je vous dis: C'est un dossier qui est intéressant qui a été soulevé. S'il vous intéresse, il m'intéresse aussi. Lorsqu'on verra à remodifier la Loi de police, je ferai la démarche qu'il faut faire pour faire en sorte que nous en discutions.

M. Charbonneau: Bien, moi, je vais faire... Alors, faisons une entente plus simple. C'est-à-dire que, si on s'entend que ça devrait se faire, puis que vous dites qu'il faut que vous alliez au Conseil des ministres, moi, je pense qu'on peut se donner rendez-vous pour qu'il y ait une loi additionnelle, qui peut... qui n'est pas obligée d'être très longue, qui serait adoptée. Si on attend qu'à nouveau on rouvre la Loi de police, on peut attendre dans cinq ans aussi, hein, avant qu'on aborde cette question-là.

M. Chagnon: Oui, mais si...

M. Charbonneau: Puis entre-temps les problèmes dont nous a parlé le directeur de la Sûreté du Québec, autant que le syndicat de la Sûreté, des officiers, vont continuer.

Tu sais, de deux choses l'une. On est sérieux, là, on va dire: Oui, on pense qu'il y a un problème, on devrait s'entendre. Moi, il faut que je retourne au Conseil des ministres. Je dis: O.K., allez-y. Mais pourquoi attendre deux, trois ans? Revenons au mois de mars ou avril, puis vous aurez une réponse. Si le conseil ne vous autorise pas, vous nous le direz. S'il vous autorise, bien pourquoi on ne le ferait pas? Un projet de loi, ce n'est pas obligé d'avoir 50 pages, hein?

M. Chagnon: C'est bien évident. Maintenant, si vous étiez ministre de la Sécurité publique et que vous aviez à ouvrir la Loi de police, vous seriez probablement plus à même de constater quels sont exactement les risques politiques et...

M. Charbonneau: Non, non, arrêtez ça, là.

M. Chagnon: Ah non? Ah bien, je vois que vous êtes d'une naïveté qui me dépasse.

M. Charbonneau: Non, non, je ne suis pas d'une naïveté, mais je vois...

M. Chagnon: Vous êtes d'une naïveté qui me dépasse.

M. Charbonneau: Je vois depuis des années, je veux dire, des ministres qui ont autant de responsabilités que le ministre de la Sécurité publique, dont le ministre des Affaires municipales qui à chaque session nous amène à rouvrir des lois fondamentales sur l'organisation municipale au Québec.

M. Chagnon: Justement.

M. Charbonneau: Alors ne venez pas me dire que le ministre de la Sécurité pourrait...

M. Chagnon: Justement.

M. Charbonneau: ...mettrait en cause toute l'architecture de la Loi de police s'il nous arrivait, au printemps, avec un amendement à la Loi de police uniquement sur le problème dont on parle actuellement, là.

M. Chagnon: Ah! Ah! Ah, justement.

n(21 heures)n

M. Charbonneau: Qu'est-ce qui vous oblige à inclure dans une éventuelle loi toutes sortes d'autres problématiques? À moins que vous les jugiez tellement importantes que... À ce moment-là, on parlera de plus qu'une question, comme on le fait actuellement.

M. Chagnon: Bien, c'est vous-même qui l'avez soulevée. Le monde municipal a certainement une volonté de changer, entre autres les niveaux de police, et, la journée où vous allez annoncer que, dans six mois, vous allez ouvrir votre Loi de police, vous risquez d'avoir tout un lobby qui va vous amener vers là où vous ne voulez pas nécessairement aller.

M. Charbonneau: Mais vous l'avez pareil, le lobby. C'est-à-dire qu'à un moment donné le gouvernement a à faire des choix, c'est-à-dire: Est-ce que vous acceptez, je veux dire, les demandes du monde municipal dans tel ou tel domaine? Si vous dites que vous n'êtes pas prêt à le faire, vous allez jouer franc jeu... vous devriez, en tout cas, jouer franc jeu avec le monde municipal et leur dire: On ne veut pas le faire, pour telle ou telle raison. Mais entre-temps pourquoi on paralyserait ou on empêcherait une modification sur laquelle dans le fond vous êtes plutôt sympathique?

M. Chagnon: Ce que je vous dis, c'est que, la prochaine fois que j'aurai à rouvrir la Loi de police, ce dossier-là sera réétudié. Je vous promets ceci: je vous donnerai une réponse, qui sera positive ou négative, mais dans les deux cas elle sera documentée.

M. Charbonneau: Mais... En tout cas, je n'ai pas... Notre système fonctionne que, même si je ne suis pas d'accord, je ne vous ferai pas changer d'idée, malheureusement. Mais je pense que...

M. Chagnon: Non, non. Il y a peu de...

M. Charbonneau: Écoutez, vous le dites devant témoins, là!

M. Chagnon: En tout cas.

M. Charbonneau: Si, dans trois ans, ce n'est pas encore fait, bien, je veux dire, tout le monde saura pourquoi ce n'est pas encore fait, c'est-à-dire que dans le fond, quand on est d'accord à ce qu'une modification se fasse sur une question, on n'est pas obligé d'attendre de réouvrir une loi pour régler toutes sortes d'autres problèmes. Ça, moi, je veux dire, ça fait assez longtemps aussi que... C'est tout une question de volonté politique. Des fois, on l'ouvre pour pas grand-chose, une loi, puis des fois on ne l'ouvre pas, justement pour toutes sortes d'autres bonnes raisons ou mauvaises raisons. En tout cas.

M. Chagnon: Je ne veux pas tourner un fer dans des plaies, mais c'était quand, la dernière fois que vous avez apporté une loi devant l'Assemblée nationale?

M. Charbonneau: C'était... Oui, j'ai proposé une loi à l'Assemblée comme ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, puis j'ai réouvert, à ce moment-là, la loi du Conseil exécutif, qui n'est pas une petite loi. Bon. Alors, écoutez, je veux dire, ne jouez pas cette carte de dire que, toi, tu connais plus ça que moi, parce que j'en ai fait trois de plus que toi, là, des projets de loi...

M. Chagnon: Non...

M. Charbonneau: Non, mais, je veux dire, la question, c'est...

M. Chagnon: Non, non, écoutez, là, on peut passer la nuit là-dessus, là...

M. Charbonneau: On dit à des gens: On a un problème, on est d'accord avec le problème.

M. Chagnon: C'est non. C'est-u clair? Bon.

M. Charbonneau: Très bien. Alors, si c'est clair, ce qui est contradictoire, c'est que ce soit non, comme ça, alors que dans le fond vous venez de nous dire que, sur cette question-là, on devrait peut-être regarder ça positivement. Je vais vous dire: Je ne comprends pas. Vous pouvez continuer à vous entêter, mais, je veux dire, je ne comprends pas.

M. Chagnon: Parfait. Prochain point.

La Présidente (Mme Thériault): J'ai le député de Dubuc qui veut intervenir et j'ai le député de Trois-Rivières. Dubuc.

M. Côté: M. le ministre, je voulais... Merci, Mme la Présidente. Je voulais revenir un petit peu à ce que je vous ai parlé tout à l'heure. Vous m'avez dit que dans quelques cas vous pouviez refuser une recommandation de votre directeur général. Donc, cela veut dire que vous étudiez puis que vous regardez les C.V. des gens qui vous sont proposés. Comme ministre responsable, vous devez faire ça. Et je regarde les statistiques de la Sûreté du Québec, là, 2003-2004: 408 promotions concernant seulement les inspecteurs-chefs ou l'inspecteur capitaine-lieutenant, et ça, ça ne comprend pas les sous-officiers puis les agents auxiliaires, et ça, c'est seulement qu'un corps de police. Tout ensemble, ça fait quoi, là? Vous en avez combien? Vous devez passer votre journée à lire des C.V.

M. Chagnon: Non, non, non. Je ne lis pas... D'abord, un, ce n'est pas tous la même semaine. Ce n'est pas si pire. Et, deuxièmement, c'est étalé évidemment sur quelques années, ces nominations-là.

M. Côté: 2003-2004.

M. Chagnon: Oui, c'est ça. Alors, c'est étalé sur un an et demi.

M. Côté: Une année financière.

M. Chagnon: J'ai dû en voir à peu près peut-être 200, 250, là-dessus, 300. Mais ces nominations-là sont vues relativement rapidement, quand il n'y a pas de problème, comme je le soulignais au député de Borduas. Quand il n'y a pas de problèmes dits déontologiques, ou quoi que ce soit, là. C'est un placet, hein? Je vérifie des choses pour le plaisir, pour être capable de saisir des choses comme... Je me promène parce que j'ai... En tout cas, depuis un an et demi, j'ai visité 40 stations de la Sûreté du Québec, un peu partout sur le territoire, et je réussis à être capable de remettre des visages sur des noms que j'ai vus passer auparavant. Mais c'est surtout... Le plan de lecture est plus important lorsqu'il y a un problème. Mais, quand il y a un problème qui est soulevé, là, je lis... Je lis tout de toute façon, mais, dans ce cas-là, je vais lire de A à Z ce qu'on peut soulever. Et même parfois il peut y avoir des jugements qui nous amènent jusqu'à la Cour du Québec, alors je lis les jugements puis les dossiers.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va, M. le député de Dubuc?

M. Côté: Oui.

La Présidente (Mme Thériault): Oui? M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Non, ça va.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va? M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Ça va.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va? L'article 1 est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Normes de comportement

Déontologie

La Présidente (Mme Thériault): Sur division. Article 2, M. le ministre.

M. Chagnon: Alors: L'article 126 de cette loi, modifié par l'article 76 du chapitre 2 des lois de 2004, est de nouveau modifié par l'ajout de l'alinéa suivant:

«Les dispositions concernant le directeur d'un corps de police s'appliquent de la même manière à l'employeur d'un constable spécial ainsi qu'à celui d'un contrôleur routier et d'une personne ayant autorité sur ce dernier, compte tenu des adaptations nécessaires.»

Alors, je peux vous faire la lecture des commentaires ou... Si vous voulez.

La Présidente (Mme Thériault): Oui, s'il vous plaît.

M. Chagnon: Alors, la modification apportée à l'article 76 de la Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions avait pour objet d'assujettir les contrôleurs routiers ainsi que toute personne ayant autorité sur eux au code de déontologie policière, de la même manière qu'il s'applique aux policiers et aux constables spéciaux. En deux mots, le Commissaire à la déontologie va avoir non seulement les policiers, mais aura désormais aussi les contrôleurs routiers.

La présente modification proposée a pour objet de rendre applicables à l'employeur des constables spéciaux ainsi que des contrôleurs routiers, des personnes qui sont en autorité sur ceux-ci, les mêmes dispositions que celles qui s'appliquent à un directeur d'un corps de police. Cette disposition n'est pas de droit nouveau. Elle est déjà existante. La modification en est davantage une de simple commodité rédactionnelle en ce qu'elle évite de répéter dans chacune des dispositions concernées la référence à l'employeur des différents groupes visés. Ainsi, les articles 5 et 6 du présent projet de loi se proposent-ils de modifier respectivement, par concordance, les articles 236 et 239 de la loi.

Alors, vous aurez compris qu'on a un texte qui a à peu près huit ou 10 articles. Alors, ce n'est pas... ce n'est pas trop...

La Présidente (Mme Thériault): Merci. M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Je voudrais juste être sûr de bien saisir la portée de... D'abord, je remercie le ministre de nous avoir transmis le cahier qui...

M. Chagnon: Le ministre considère que l'opposition fait partie du gouvernement.

Une voix: Ah oui?

M. Chagnon: Du gouvernement.

M. Charbonneau: Moi, je considère que le Parlement et le gouvernement, c'est deux choses. S'il y a une collaboration entre l'exécutif puis le législatif, tant mieux. On ne recommencera pas cette discussion-là. Mais...

M. Chagnon: ...l'organisation gouvernementale, l'opposition a une place privilégiée.

Une voix: Pas dans le gouvernemental.

M. Chagnon: Oui. Oui. Oui.

M. Charbonneau: On n'a pas la même... on n'a pas la même compréhension de notre système politique, hein?

Une voix: Non.

M. Charbonneau: Je pense que... On n'est pas dans un système politique où les deux pouvoirs d'abord sont séparés puis peuvent cogouverner. Ici, ils sont interreliés, et puis il y en a un qui a mis l'autre en tutelle depuis déjà un sacré bout de temps. C'est ce qui fait que vous êtes ici, à la table, ce soir.

M. Chagnon: Vous l'avez été longtemps.

M. Charbonneau: Oui, mais ce n'est pas parce que je trouvais que c'était la place que j'aurais dû avoir.

M. Chagnon: C'était à vous d'y penser dans ce temps-là puis de changer de place.

M. Charbonneau: J'y ai pensé, mais je n'ai pas été assez longtemps ministre de la Réforme des institutions démocratiques pour pouvoir faire en sorte que ce ne soit plus le cas.

Ceci étant, ce que je voudrais comprendre par rapport à cet article-là, c'est que ça n'a pas du tout de rapport avec le principe, là, des promotions sur... à la Sûreté, là. Une petite affaire que, dans le fond, on n'avait pas discutée vraiment, là.

M. Gabias: Ils ne sont pas dans...

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Trois-Rivières.

M. Gabias: Ils ne sont pas dans la liste de 56.

M. Charbonneau: C'est ça. Autrement dit, là, honnêtement, celui-là, je ne l'avais pas vu venir, et on a un projet de loi omnibus, là.

M. Chagnon: C'est un projet de loi omnibus. C'est bien clair, il y a plus qu'un principe dedans.

M. Charbonneau: Non, mais il y en avait deux. Là, on en a un troisième, dont on n'avait pas parlé, là.

M. Gabias: On parle de déontologie.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Oui, mais c'est pour ça qu'on veut avoir des explications.

M. Gabias: On parle de déontologie.

M. Charbonneau: Oui, mais là on ne parle pas de déontologie, dans ce cas-là, là.

M. Chagnon: C'est-à-dire que oui. Bien oui. C'est que...

M. Charbonneau: O.K. Ce que vous dites... C'est ça que je veux savoir, là. Ce que vous dites, c'est...

M. Chagnon: Ce n'est pas compliqué. C'est qu'un type, là, qui est un constable spécial ou un type qui travaille à la SAAQ, lui aussi, il est pris dans le même carcan déontologique que les policiers.

M. Charbonneau: O.K. Donc, vous dites...

M. Chagnon: Alors, en fait, on l'assimile à un policier. Il pourrait, lui aussi, faire une demande pour avoir une réhabilitation.

M. Charbonneau: O.K. Bon, ça, c'est ça qui est... Dans le fond, ça, c'est clair.

M. Chagnon: Merci.

M. Charbonneau: Il n'y a pas de quoi.

M. Chagnon: Bien, moi, je vous l'ai lu. Puis, après ça, si ce n'est pas clair...

M. Charbonneau: Bien, c'est ça. C'est parce que... Je sais comment ça fonctionne, aussi. Je ne veux pas blâmer ceux qui ont préparé vos notes explicatives, mais dans le fond ce que vous dites, c'est que, pour couvrir ceux...

M. Chagnon: Si c'est plus clair de même, je veux bien, mais...

M. Charbonneau: C'est ça. Mais, qu'est-ce que tu veux, moi, je suis un ancien journaliste puis je veux que les choses soient simples et compréhensibles, O.K.? Bon, on s'entend. C'est-à-dire que vous faites en sorte que toute la dimension déontologique qui est introduite par le projet de loi couvre également les...

M. Gabias: Ça l'était déjà.

M. Charbonneau: Oui, mais... Je sais, mais ce que je veux dire, c'est que là il y a une disposition qui fait en sorte qu'ils sont...

n(21 h 10)n

M. Chagnon: Ce qu'il y a de nouveau, là, ce n'est pas que les... Comment est-ce qu'on appelle ça? Les officiers de la SAAQ?

Une voix: Contrôleurs routiers.

M. Chagnon: Les contrôleurs routiers. Ce qu'il y a de nouveau, là, ce n'est pas que les contrôleurs routiers sont intégrés dans le dossier de l'organisation déontologique...

M. Charbonneau: Non, non, mais c'est qu'ils vont devoir suivre le même processus.

M. Chagnon: On va leur donner les mêmes droits.

M. Charbonneau: C'est ça. Non, je n'ai pas de problème avec ça.

La Présidente (Mme Thériault): Donc...

M. Charbonneau: Ça va.

La Présidente (Mme Thériault): Ça va pour l'article 2?

Une voix: Adopté.

La Présidente (Mme Thériault): Adopté. Merci. M. le ministre, à l'article 3.

M. Chagnon: L'article 3, j'ai un papillon. Est-ce que le papillon est distribué?

Une voix: On va le distribuer, monsieur...

M. Chagnon: O.K. C'est des papillons frais et neufs, là.

Une voix: Avez-vous changé votre mot «réhabilitation»?

M. Chagnon: Pardon?

M. Côté: Le mot «réhabilitation».

M. Chagnon: Pas encore. On n'est pas rendus là, là.

M. Côté: On va vous trouver quelque chose. On va vous proposer quelque chose.

M. Chagnon: C'est beau. Je suis ouvert. Alors: L'article 128 de cette loi est modifié par l'insertion, après le deuxième alinéa, de l'alinéa suivant:

«Il exerce aussi les fonctions que lui attribue la présente loi en matière de réhabilitation d'un policier pour un acte dérogatoire au Code de déontologie ? alors c'est ce bout-là qui va changer ? qui lui a été reproché et en matière de révocation d'une telle réhabilitation.»... par les mots... donc, «pour un acte dérogatoire» changé par... Je vais vous le répéter, tiens:

Il exerce aussi les fonctions que lui attribue la présente loi en matière de réhabilitation d'un policier dont la conduite a constitué un acte dérogatoire au Code de déontologie et en matière de révocation d'une telle réhabilitation.

(Consultation)

M. Chagnon: Je répète: dont la conduite a constitué un acte dérogatoire au Code de déontologie. Mieux écrit.

M. Charbonneau: Donc, ce n'est pas le fond qui est changé, c'est la formulation linguistique.

Une voix: Ça rend mieux. Ça rend mieux.

M. Charbonneau: Oui. Moi, je me fie à des légistes de formation, ici, à ma gauche. J'ai un notaire et un avocat à ma disposition.

M. Chagnon: Ah oui, vous êtes équipé, vraiment équipé. Mais je vous ai soumis plus tôt, M. le député de Borduas, mon intérêt à la qualité de la langue en matière de législation.

M. Charbonneau: Faites ça. J'admire ça, pour l'essentiel.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Mercier. Monsieur.

M. Turp: Est-ce que, M. le ministre, c'est ici que vous souhaiteriez qu'on fasse le débat sur le mot «réhabilitation» ou c'est plus loin?

M. Chagnon: C'est ici.

M. Turp: Parce que c'est...

M. Chagnon: Moi, je pense qu'on devrait le faire ici.

M. Turp: Puis, si c'est la première occurrence du mot «réhabilitation» et si on devait l'adopter ici, on ne pourrait pas remettre en question...

M. Chagnon: Moi, je pense que c'est ici qu'il faut le faire effectivement. Je pense que c'est là où il faut faire le débat. Et par la suite on fera... On aura accepté ce point-là ou on ne l'aura pas accepté, mais on le retrouvera par la suite partout. Vous avez tout à fait raison de vouloir faire le débat ici. Moi, je...

La Présidente (Mme Thériault): Par contre, moi, je crois qu'on devrait débattre de l'amendement, adopter l'amendement, et après, lorsqu'on reviendra sur l'article tel qu'amendé, on pourra proposer d'autre chose.

M. Chagnon: Oui, oui. Oui, oui. Je pense que l'amendement... il n'y aura pas de problème pour l'adoption de l'amendement.

La Présidente (Mme Thériault): Merci.

M. Turp: Non, ça améliore le texte, cet amendement.

M. Chagnon: Oui, ça améliore le texte.

M. Charbonneau: Alors, pour l'amendement, ça va, Mme la Présidente.

M. Chagnon: Alors, revenons à «réhabilitation», si on...

La Présidente (Mme Thériault): Donc, l'amendement est adopté? L'amendement est adopté. Donc, l'article 3 se lit maintenant:

«Il exerce aussi les fonctions que lui attribue la présente loi en matière de réhabilitation d'un policier dont la conduite a constitué un acte dérogatoire au Code de déontologie et en matière de révocation d'une telle réhabilitation.» Donc, M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Bien, écoutez, je crois qu'on a eu une bonne discussion avec les gens qui ont accepté de venir nous rencontrer. On a commencé à discuter avec le ministre. Dans le fond, essentiellement, c'est: est-ce qu'on veut reconnaître, comme législateur, le problème qui nous a été posé par des policiers, autant leur direction que leur syndicat, qui disent: Écoutez, dans la société, si vous utilisez ce terme-là, que vous le vouliez ou non, ça va nous créer un tort et un ostracisme additionnels. On va être associés, que vous le vouliez ou non, à une catégorie de personnes qui ont été condamnées en vertu du Code criminel. Ça, c'est la compréhension. Et, moi, je crois... Je ne sais pas... Parce que je ne veux pas faire un grand plaidoyer. Si le ministre, après réflexion, nous dit: Écoutez, je pense que, moi aussi, j'ai entendu les gens, puis je suis prêt à accepter...

Parce que l'objectif, c'est quoi? C'est de faire en sorte que les gens, les policiers ne soient pas victimes plus que nécessaire. Dans le fond, j'imagine que vous voulez ça aussi. Je ne peux pas penser que le ministre de la Sécurité publique, une fois qu'il s'est fait dire ça, va continuer à finalement privilégier une expression au détriment de la réputation des services qu'il a la responsabilité de coordonner, de diriger dans l'objectif de la protection publique. Là, ce n'est pas un... Dans le fond, là, on fait beaucoup de tapage pour quelque chose qui dans le fond est une question linguistique, par rapport à une perception. On veut bien, là... Tu sais, on pourrait sortir tous les dictionnaires qu'on veut pour en arriver à la conclusion que l'expression que vous avez utilisée est plus adéquate au plan linguistique; le fait est que ce n'est pas comme ça que les gens vont le percevoir, ce n'est pas comme ça que les policiers le perçoivent, ce n'est même pas comme ça que leur direction le perçoit.

Encore une fois, Mme la Présidente, je peux prendre mon 20 minutes, là, puis on peut tous prendre nos 20 minutes pour plaider... Avant de continuer, si le ministre est prêt à faire un bout, partons du bout qu'il serait prêt à faire. S'il n'est pas prêt à en faire, bien là on va faire notre bataille et puis, qu'est-ce que vous voulez...

La Présidente (Mme Thériault): Je vais...

M. Chagnon: Bien, moi, je vous suggère d'abord d'entendre Mme Lagarde.

La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre, il y a aussi le député de Mercier qui serait prêt à vous faire une proposition.

M. Chagnon: O.K. Excusez-moi.

M. Charbonneau: Mais vous proposez quoi, là, avant, vous?

M. Chagnon: Qu'on entende Mme Lagarde qui va venir nous... Mme Lagarde... La Grenade, madame... Me La Grenade, qui regarde ces dossiers-là, du côté du ministère de la Justice, et qui va nous expliquer pourquoi on utilise ce terme-là plutôt qu'un autre.

M. Charbonneau: Bien, écoutez, moi, je n'ai pas de problème. Qu'on l'entende, puis je pense que mon collègue, après ça, va pouvoir être encore plus en mesure de situer ses recherches par rapport aux propos...

Une voix: Venez nous voir.

M. Turp: On a déjà une...

Des voix: ...

M. Charbonneau: Il ne vous en sera pas tenu compte lors du...

Une voix: Tenu rigueur.

M. Charbonneau: ...tenu rigueur lors du jugement dernier... s'il y a jugement.

La Présidente (Mme Thériault): Donc, Mme La Grenade, nous allons vous demander de décliner votre identité complète ainsi que vos fonctions.

Mme La Grenade (Francine): Francine La Grenade, en deux mots.

La Présidente (Mme Thériault): Merci. Et vos fonctions au sein du ministère?

Mme La Grenade (Francine): Avocate au ministère de la Sécurité publique, rattachée à la Justice aussi.

La Présidente (Mme Thériault): Parfait.

Mme La Grenade (Francine): Bon. On comprend fort bien toutes les doléances, tout ce qui a été dit ici, puis on peut vous dire qu'on a regardé ça depuis un bon moment déjà. On a fait tout le tour de la question, on a cherché, on a fouillé, on a voulu satisfaire... ? parce qu'on s'attendait aussi à vos réactions ? puis on n'a pas trouvé d'équivalent ou de terme plus juste que celui-là. On a regardé aussi dans toute la législation étrangère, on n'a pas trouvé mieux non plus. Alors, moi, je comprends M. Chagnon. On comprend les critiques qui ont été faites ici, mais il n'y a personne qui a apporté une solution, et ce n'est pas un caprice de notre part, là. On est là pour vous servir, et on n'a pas non plus trouvé mieux que ce terme-là pour se rapprocher le plus possible de ce qu'on cherchait comme objectif. Et je dirais...

M. Charbonneau: Quand on vous disait, ce matin...

Mme La Grenade (Francine): Excusez-moi, si je peux terminer... En dernier lieu ou dans le fond, l'essentiel de tout ça, c'est d'atteindre l'objectif qui est recherché, pour effectivement que les policiers puissent retrouver tous leurs privilèges ou avoir droit aux mêmes droits que tous les autres au même niveau, bon, qu'il ne leur soit plus tenu compte ou rigueur finalement des actes dérogatoires du passé. Et je pense que c'est ça, l'essentiel de tout ça, au-delà des mots. Je comprends que les termes et les mots sont importants aussi, mais à défaut, là, comme je vous dis, de...

M. Charbonneau: Je comprends. Mais, vous, vous êtes l'avocate, vous êtes spécialiste dans un domaine particulier, vous conseillez le gouvernement. Nous, notre responsabilité comme législateur, c'est de tenir compte de ce que vous dites, mais c'est aussi de tenir compte de l'impact de la législation sur les citoyens. Et en l'occurrence cet impact, ce qu'on nous dit, c'est que les policiers sur le terrain ? puis pas juste dans le corps policier, là, tous les policiers municipaux, puis là on vient d'ajouter même les autres qui vont avoir aussi à pouvoir bénéficier du même processus, y compris leurs directions; ce n'est pas juste les syndicats, là, c'est aussi... ? nous soulèvent ce problème-là.

n(21 h 20)n

Quand on disait, ce matin... Ce matin puis un peu plus tard cet après-midi, le terme qui était utilisé par eux, c'était «radiation». On radie la trace. Dans le fond, qu'est-ce que le projet de loi fait? Il y a, dans le dossier, une trace. Il y a une faute professionnelle qui a été sanctionnée, donc il y a une trace de cette faute et de la sanction. Et dans le fond l'objectif du projet de loi, c'est d'enlever cette trace dans le dossier. Alors, on radie la trace. On ne réhabilite pas l'infraction, là, on... La conséquence va peut-être être une réhabilitation dans le sens que vous le dites, mais l'expression qu'on devrait utiliser, je pense que c'est «radiation». Parce que qu'est-ce qu'on fait? On radie non pas l'infraction, on radie la trace dans le dossier déontologique. C'est ça qu'on fait. Je ne comprends pas pourquoi...

Mme La Grenade (Francine): On recherche la réhabilitation de la personne, parce que ça ne se rattache pas à un dossier. C'est la personne qui a eu une inconduite, un acte dérogatoire. Alors, c'est dans ce sens-là. On réhabilite la personne pour une inconduite du passé. Puis, comme on l'a dit, effectivement, même si vous avez... appelez-le «pardon», là, le terme anglais, ou «réhabilitation», en français, on ne peut pas, comme on le dit si bien, on ne peut pas non plus effacer le passé. Il y a eu une inconduite, il y a eu un acte dérogatoire et il y a eu une sanction qui a été elle-même exécutée. On ne peut pas effacer ça des dossiers, ne serait-ce que du comité de déontologie.

C'est comme un tribunal. Donc, les dossiers, le greffe du tribunal, sont là. Vous avez les recueils de jurisprudence, que vous connaissez sûrement, les décisions sont répertoriées là-dedans. On ne peut pas effacer la sanction. Même si vous l'enleviez ou si on réussissait à l'enlever dans un dossier quelconque, il resterait... ne serait-ce qu'à la cour ou dans les répertoires jurisprudentiels, et tout ce qui resterait au dossier, tout ce qui resterait en preuve, si je peux m'exprimer ainsi, c'est le fait que la personne ait effectivement été sanctionnée pour un acte dérogatoire, alors qu'il n'apparaîtrait pas nulle part physiquement le fait qu'elle ait une confirmation, une attestation voulant qu'elle ait été réhabilitée. Parce que c'est... C'est sûr que, là, j'empiète un peu plus loin sur le projet, mais, vous allez voir, vers la fin, il y a une attestation de réhabilitation qui est donnée au directeur, que possède le policier. Donc, en tout temps, il pourra dire: J'ai une réhabilitation, donc vous ne pouvez pas m'opposer quelconque inconduite que j'ai pu avoir par le passé. Et il est réintégré aussi dans tous ses privilèges ou droits pour l'avenir. C'est ce qu'on a essayé de faire.

M. Charbonneau: Mais, ça, on est d'accord. Bon. Au-delà des modalités, dont on parlera plus tard, le problème qu'on a, c'est un problème d'impact d'un mot. Je veux dire, on ne parle pas, là, des médecins, on ne parle pas de d'autres types de professions, on parle des gens qui à tous les jours travaillent avec la clientèle délinquante de notre société, avec nos compatriotes qui commettent des actes délinquants et qui sont condamnés puis qui, à cause de ça, bien sont catalogués comme criminels, puis, après ça, ils sont réhabilités. Alors, le mot «réhabilitation»... Moi, écoutez, j'étais étudiant en criminologie, là, jadis, puis, quand on parlait de la réhabilitation, bien on parlait toujours... Puis, dans l'esprit populaire, on parle de la réhabilitation des détenus puis on parle de la réhabilitation des criminels. On ne parle pas de la... Ce mot-là est consacré pour la justice pénale, dans notre société, et, de vouloir nier ça... Parce que c'est ça qu'on fait, là. Le résultat, c'est qu'en voulant absolument utiliser ce mot-là qui a une portée particulière dans notre société, pour toutes sortes de raisons, je veux dire, on fait qu'il y a une conséquence négative. C'est ça qu'on...

Mme La Grenade (Francine): On ne veut pas utiliser, là, nécessairement et obligatoirement ce terme-là. Comme je vous dis, on a essayé d'en trouver un qui serait moins péjoratif pour certains. Bon. Peut-être aussi... il y a le problème qu'on est aussi entourés dans un milieu anglophone, là. C'est parce que le mot «réhabilitation», en français, a bien le sens qu'il a. Mais «rehabilitation», en anglais, a le sens de réinsertion sociale. C'est peut-être de là que vient plutôt le malaise.

M. Charbonneau: Qu'est-ce que vous voulez, on vit... On n'est pas en France, on est au Québec, en Amérique du Nord, dans un contexte où, tu sais, on n'est pas beaucoup de francophones dans cette mer...

Mme La Grenade (Francine): Non, je vous parle que, pour les anglophones, le mot «rehabilitation» a un sens de réinsertion sociale. C'est juste ça.

M. Charbonneau: Oui, mais, dans la tête des Québécois aussi, à cause l'interpénétration culturelle, la réalité, c'est que... Ce n'est pas pour rien que les gens associent le concept de réhabilitation aux criminels et non pas, comme vous le souhaitez... Parce que dans le fond, si on veut les réhabiliter, c'est parce qu'à un moment donné ils sont devenus inhabiles.

Mme La Grenade (Francine): Juste un ajout ? c'est parce que je n'ai pas la Loi sur le casier judiciaire sous les yeux, je l'avais tantôt, mais ? quand vous favorisez l'expression «radiation de sanction», vous me dites que vous ne voulez pas vous rapprocher du casier judiciaire, mais allez voir qu'est-ce qui est inscrit dans le casier judiciaire. C'est exactement ça. C'est à peu près ça qu'ils font: radiation de l'imposition de la peine ou de l'infraction. Alors, on ne le distance pas davantage en utilisant cette expression-là.

M. Charbonneau: Mais, dans l'esprit du monde, la radiation, là... Dans l'esprit des gens, là, les criminels ont droit à un pardon, et puis ils auront la possibilité d'être réhabilités. Puis, aujourd'hui, dans nos sociétés modernes, en général c'est ce qu'on vise. On n'essaie pas juste d'avoir une approche répressive et punitive, mais aussi d'avoir une approche de réhabilitation. Mais, à chaque fois qu'on parle de ça dans le monde, là, ordinaire... Moi, j'étais journaliste avant. Pensez-vous que les journalistes utilisent un autre mot? Ils utilisent ce mot-là, «réhabilitation», pour parler de cette réalité-là, pas pour parler de...

Mme La Grenade (Francine): Il y a aussi... Bon, il y a une fausse interprétation, application du mot «pardon», là, par les gens. Ils s'imaginent que tout est effacé, que plus rien n'existe. Ça, c'est une fausse perception aussi qu'il ne faudrait pas maintenir, non plus. Ce n'est pas vrai que le pardon efface le passé, efface tous les actes. Il y a eu une sanction, elle est exécutée. Il y a eu un acte, une inconduite, elle est là. On ne peut pas la rayer de sa vie.

Une voix: ...mon collègue a fait des recherches additionnelles, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Thériault): Bien, c'est ça, je voulais céder la parole au député de Mercier, qui a une proposition à nous faire au niveau du terme. M. le député.

M. Turp: Bon. Alors, quand on s'est quittés, tout à l'heure, j'ai eu une bonne discussion avec les fonctionnaires du ministre pour bien comprendre la portée de la réhabilitation, entre guillemets, la différence avec le pardon, la réhabilitation. Puis j'ai fait un petit peu de travail, là, depuis.

Alors, d'abord, je pense qu'il y a un argument valide et légitime de la part de ceux qui sont venus nous parler cet après-midi, lorsqu'ils disent: Le mot «réhabilitation» ne devrait pas être utilisé dans le contexte où on veut l'utiliser. D'abord, parce qu'en parcourant plusieurs documents, surtout ici, au Québec, il est vrai que le mot «réhabilitation», il est lié avec ce qui est criminel et avec ce qui relève de la délinquance. Par exemple, dans les documents de cette Association des services de réhabilitation sociale que vous avez évoquée, dont Mme Vallée est une des directrices... Je suis très fier de cela, par exemple, parce que c'est dans ma circonscription que se retrouve... Le siège est sur le boulevard Saint-Joseph. Lorsqu'on lit les documents de cette association et lorsqu'elle parle de la réhabilitation sociale, c'est lié très intimement avec le système pénal et souvent utilisé dans un rapport avec le mot «délinquance», par exemple. Je l'ai retrouvé à plusieurs reprises. Et donc, c'est quelque chose dont on peut comprendre qu'on voudrait ne pas retrouver dans une loi comme celle qu'on étudie.

La deuxième chose, c'est: après discussion avec les collègues du ministère de la Justice, le mot «réhabilitation», là, ce serait la première fois qu'il apparaîtrait dans une loi québécoise dans ce sens-là. Parce que, comme l'a signalé votre collègue qui vient de nous parler, le mot «réhabilitation» apparaît dans des lois québécoises et dans des règlements québécois, mais seulement lorsqu'il est pris dans le sens de la Loi sur le casier judiciaire. Les références, dans nos lois et nos règlements, au mot «réhabilitation» sont une référence à la notion que l'on retrouve dans des lois qui concernent finalement un aspect pénal et criminel. Alors donc, c'est une nouvelle notion de réhabilitation qu'on nous propose, là. On me l'a confirmé, c'est nouveau, c'est innovateur, mais, dans l'innovation, là, on crée quelque chose qui dérange.

n(21 h 30)n

Alors là, j'ai regardé, là... Parce que vous m'avez indiqué que vous aviez beaucoup travaillé puis essayé de trouver un autre mot, là. Alors, j'ai bien lu, là, tout le projet de loi, puis les 255.1 à 255.20, puis toutes les occurrences, le mot est utilisé... c'est le mot «réhabilitation», «réhabiliter», à l'infinitif et au passé, qui est utilisé. Et, quand on... C'est quoi, la réhabilitation?

Puis une des choses qui peut peut-être nous permettre de trouver un autre mot, là, c'est ce que ça veut dire, et on l'a évoqué tout à l'heure, quelqu'un a lu la définition: «Fait de rétablir». Rétablir. D'ailleurs, le mot «rétablir» est utilisé à 255.20: «La réhabilitation a pour objet de rétablir», rétablir la réputation du policier, ici. Et un autre effet, c'est la cessation des effets. Qu'est-ce qu'on veut ici? Si j'ai bien compris, c'est que cessent les effets de ce qui s'est produit, là, donc une sanction pour un acte dérogatoire. Alors, si je comprends bien, là, c'est ça qui est recherché, je crois, de la part des policiers, des forces policières et du ministre, que l'on trouve une façon, dans notre loi, de faire cesser les effets résultant d'une sanction.

Alors, deux possibilités: soit de trouver un moyen d'utiliser le mot «rétablissement», le mot «rétablissement», ou soit utiliser le mot «cessation». Le mot «rétablissement» est plus près du mot «réhabilitation», et le mot «cessation» n'a pas le même impact, là, le même... On se situe à un autre niveau. Alors, est-ce qu'on peut trouver... est-ce que le mot «rétablissement» pourrait être utilisé? Alors, regardons comment il peut être conjugué, là. Ce n'est pas évident, mais il aurait comme avantage de nous éloigner, de prendre une distance du mot «réhabilitation», que ne souhaite pas... et je pense qu'il n'est pas souhaitable d'utiliser. C'est pour ça que ça vaut la peine à mon avis de faire un effort pour trouver un autre mot.

Alors, tu sais, si on prend l'exemple de 255.1: «Un policier en exercice, démissionnaire ou retraité peut demander [son rétablissement] pour un acte dérogatoire», ça ne se dit pas très bien, j'en conviens. Mais est-ce qu'on peut trouver une autre formule qui, par exemple, réfère à l'idée qu'il peut demander un rétablissement, «un rétablissement», pour quelque chose, là? Alors donc, je pense qu'il y a une piste, là, pour trouver une solution, mais qui n'est pas... qui obligerait peut-être à formuler un peu différemment l'article, là. Ça pourrait être intitulé «Rétablissement». Je pense que ça, ça tient compte de l'objet et du but, là, de rétablir. Mais on peut mettre le mot «rétablissement» ? mais il faut trouver une formulation ? puis «peut demander un rétablissement à l'égard d'actes dérogatoires». Alors, ça pourrait être une formule, le rétablissement à l'égard de quelque chose.

Une voix: ...

M. Charbonneau: Madame, ça ne me dérange pas que vous interveniez pour nous donner des conseils, mais il faudrait le faire au micro.

Une voix: Oui, parce que ce n'est pas enregistré.

M. Turp: Alors, écoutez, M. le ministre, je vous lance une piste. Je ne sais pas si on peut trouver une façon, mais il me semble que le mot «rétablissement» nous met sur une piste, nous met sur une piste, et...

M. Chagnon: ...ce que Me Lagarde va nous dire sur le sujet... La Grenade. Lagarde? Pourquoi je vous appelle toujours Lagarde? C'est un grand vin.

M. Turp: On n'est pas obligé de multiplier à l'infini le mot «rétablissement», là, il est... plusieurs fois, ou «réhabilitation», parce qu'il est surtout utilisé dans son rapport avec la demande, et on peut tout simplement utiliser «la demande», si on ne veut pas abuser d'un mot qui n'est peut-être pas parfait, là. Mais, moi, je lance ça pour essayer de tenir compte des objections, qui à mon avis sont tout à fait légitimes, et trouver une formule qui n'assimile pas la réhabilitation, dans le contexte que l'on connaît, à la réhabilitation au plan pénal.

La Présidente (Mme Thériault): Donc, Mme La Grenade, vous pouvez intervenir, et, après ça, j'ai le député de Trois-Rivières et le député de Groulx qui veulent aussi faire des interventions. Mme La Grenade.

Mme La Grenade (Francine): La seule réplique à laquelle je voulais... que je voulais faire: je ne pense pas qu'on puisse parler de rétablissement tout court, il faut rétablir quelque chose. Alors, c'est la conduite qui... ou la réputation, pardon, qui est rétablie. Je ne pense pas que le policier puisse demander sa...

M. Charbonneau: ...Mme La Grenade, c'est qu'on rétablit quelque chose effectivement, on rétablit...

Mme La Grenade (Francine): Mais on ne peut pas dire comme: le policier demande son rétablissement.

M. Turp: C'est comme «un» rétablissement. Tu sais, c'est ça, c'est vrai qu'il faut changer la façon de le voir, parce que c'est vrai que, dans l'état actuel, c'est «sa» réhabilitation, ça concerne «sa» personne. Mais on pourrait changer la façon de penser cela, c'est un rétablissement de «quelque chose». Donc, c'est beaucoup moins lié à la personne que plutôt à ce que l'on veut faire par cette loi. On veut rétablir dans les faits... D'ailleurs, la définition, là, de «réhabilitation» parle de rétablir des faits, pas seulement une réputation, là.

Mme La Grenade (Francine): C'est ça, on pourrait dire... mais ce serait très long, très lourd, là. Autrement dit, le policier pourrait demander que sa réputation soit rétablie. Là, il faudrait traîner ça comme ça pas mal.

M. Charbonneau: Mais la question, là, au-delà de ce qui va être écrit dans la loi, c'est ce que finalement les policiers vont traîner à tous les jours ou régulièrement, dans l'opinion publique, par rapport à cette situation-là. Alors, en bout de piste, l'objectif, ça devrait être quoi, de part et d'autre? C'est: on est d'accord... nous sommes d'accord pour qu'une conduite qui n'était pas éthique, qui était à l'encontre du code de déontologie soit sanctionnée; elle l'a été, puis on pense qu'après un certain temps ça ne doit plus servir contre le policier par rapport à son travail policier, sa carrière professionnelle. Alors ça, on s'entend tous sur ça.

Puis, si on peut s'entendre aussi sur le fait que le mot que vous suggérez est un mot qui a une connotation particulière dans notre société, le reste, écoutez, il me semble que la langue française est assez vaste, et subtile, et riche pour qu'on puisse trouver une expression. Dans le fond, c'est ça, l'objectif. Moi, je... On ne peut pas... L'idée, ce n'est pas de s'entêter pour s'entêter, là. J'imagine qu'à quelque part on s'entend sur l'objectif.

Écoutez, si on vous dit, là... Moi, si j'étais ministre, je vous dirais: Trouvez-moi n'importe quel mot, mais pas celui-là. Vous seriez bien obligé de m'en trouver un. C'est ça, la commande qu'on vous passe, là. Tu sais, dans le fond le législateur vous dit: Trouvez n'importe quel mot, pas celui-là, parce que celui-là, dans le contexte québécois, il a une connotation. Jamais je ne croirai que nos dictionnaires puis le français ne sont pas assez riches pour ne pas trouver une autre expression. Puis, s'il faut que ce soit un peu plus détaillé dans le projet de loi, là... Ce n'est pas le projet de loi qu'en bout de piste, bon, les gens vont se faire mettre sur le nez, c'est la réalité. C'est juste ça. C'est aussi simple que ça.

La Présidente (Mme Thériault): Avant de redonner la parole au député de Mercier, il y a le député de Groulx qui voudrait faire une intervention par rapport à ce qui se disait.

n(21 h 40)n

M. Descoteaux: Oui, merci, Mme la Présidente. C'est assez rare d'ailleurs que... On a entendu trois associations syndicales: la fraternité, la fédération et l'association des policiers, et, malgré l'unanimité qu'ils avaient, que ces associations-là avaient entre elles, il y avait aussi unanimité vis-à-vis l'état-major, qu'on a entendu, de la Sûreté du Québec, et je vous dirais qu'en termes de débat c'est assez rare que l'employeur est d'accord avec le syndicat, et vice versa.

J'avais soulevé le mot «rétablissement» cet après-midi avec M. le ministre, et effectivement le problème de la réhabilitation, je vois très mal, un jour, l'ex-récidiviste donner un coup de coude dans les côtes à un policier en lui disant: Toi aussi, t'es réhabilité, tout comme moi. Donc, je conçois facilement que le terme comme tel, «réhabilitation», cause un problème, cause un problème dans notre société. La preuve, c'est qu'on a eu un éminent linguiste qui est venu nous parler du terme «réhabilitation», et, pour étayer son argument, il a dû faire référence à un jurilinguiste de France pour arriver à une définition. Malheureusement, entre la définition d'un jurilinguiste en France, celle d'un éminent linguiste au Québec et celle du commun des mortels, il semble y avoir une marge. Et c'est pour ça que je suis notre collègue lorsqu'il soulève le terme «rétablissement».

Il y aurait deux points que je voudrais soulever sur le terme «rétablissement», c'est qu'effectivement on ne rétablit pas un individu, comme on réhabilite un individu, mais, si on regardait en termes de solutions ? parce que je rejoins un peu notre collègue qui dit: Trouvez-moi n'importe quel autre mot ? on rétablit un dossier.

En termes de droit du travail ? et là je déplace la problématique des relations déontologiques aux relations de travail, mais c'est la même chose, c'est quand même un tribunal quasi judiciaire, l'arbitre ou le conseil d'arbitrage qui rend une décision ? c'est un tribunal quasi judiciaire qui rend une décision, et, à ce moment-là, je me dis que, lorsqu'on parle de rétablissement du dossier, un tribunal d'arbitrage dirait: Bien, on rétablit le dossier, c'est-à-dire qu'on retire, et je pense que, si je me fie aux différentes annexes qui nous ont été données comme aide-mémoire, des autres provinces, on voit qu'on supprime le dossier, on retire du dossier la connotation déontologique ou la charge qui avait été retenue, ou... à toutes fins pratiques, ce n'est pas une charge, c'est une faute, tout simplement. Et la faute, sous cet angle-là, il ne faut pas oublier que la déontologie comprend et la faute, qui pourrait être intentionnelle ou maladroite, et l'erreur comme telle.

Donc, si on parlait de rétablissement et on glissait du dossier disciplinaire, de rétablissement du dossier à un rétablissement du dossier déontologique, je crois que peut-être on arriverait pas loin à une solution à notre problématique. Parce que ce que j'ai bien compris, c'est qu'on voulait à tout prix éviter le terme «réhabilitation».

Des voix: ...

M. Descoteaux: On va être équipés.

M. Charbonneau: Mme la Présidente, juste un commentaire bref.

La Présidente (Mme Thériault): Oui.

M. Charbonneau: Je salue l'intervention de notre collègue de l'autre côté puis je trouve que finalement c'est comme ça qu'on devrait légiférer, je veux dire, au-delà des esprits de... des lignes de parti; à des moments donnés, tu sais, il y a la responsabilité du législateur. Puis là, bien, je veux dire, on est dans une dynamique positive et intéressante. Et je ne fais pas ça pour embêter le député, mais je trouve que c'est comme ça qu'on devrait agir. J'ai déjà fait ça de l'autre côté, puis je trouve que c'est bien qu'on puisse le faire. J'espère que vous serez imité plus souvent.

M. Descoteaux: Bien, c'est parce qu'on recherche une solution à une problématique...

M. Charbonneau: Bien, voilà.

M. Descoteaux: ...qui est linguistique ou qui est de forme plus que de fond, parce qu'on s'entend sur le fond. À ce moment-là, je pense que, si on parlait d'un rétablissement du dossier déontologique ou l'équivalent, on ne serait pas loin d'une solution.

M. Charbonneau: Non, d'autant plus que le ministre l'a reconnu. Je veux dire, on légifère actuellement à la demande des policiers, qui vivent ce problème-là depuis des années. Le ministre correctement a dit lors de leur congrès, au mois de mai: Écoutez, moi, j'ai compris votre anxiété, votre problème, à la limite, je dirais même ? je prendrais la façon dont le président de la Fraternité des policiers de Montréal a témoigné ce matin: votre colère ou votre frustration ressentie depuis longtemps. Bon. Mais, maintenant, je veux dire, une fois qu'on l'aura compris, il faut tout au moins tenir compte de ce qu'ils nous disent.

La Présidente (Mme Thériault): Avant de retourner la parole au député de Mercier, je vais la passer au député de Trois-Rivières. Ça fait très longtemps qu'il attend. M. le député.

M. Gabias: Merci, Mme la Présidente, j'apprécie. Je débute en disant... D'abord, moi, je trouve le terme «réhabilitation» tout à fait approprié, je vous explique pourquoi. J'ai entendu les gens de la fraternité... Et je vous dis, en passant, que, pendant plusieurs années, dans mon comté, un centre qui est aujourd'hui de réadaptation s'appelait un centre de réhabilitation. Et le terme «réhabilitation» existe en termes de quelqu'un qui recouvre la santé. C'est dit. Je comprends très bien ce qui a été exprimé par les gens des fraternités. Par contre, à mon avis, ce n'est pas parce qu'une opinion erronée est répétée 1 000 fois qu'elle devient vérité. Si le sens qu'ils comprennent est le mauvais sens, je ne pense pas qu'il faille confirmer que ça a un mauvais sens.

Moi, j'ai entendu Me La Grenade qui a expliqué, après... Et là, moi, je vous dis, je pense: il faut être prudent comme législateur. On ne peut pas se substituer aux gens du ministère qui nous disent avoir fait des vérifications très sérieuses. On ne recommencera pas à passer les dictionnaires, alors qu'ils l'ont fait mieux que nous...

Une voix: ...

M. Gabias: Si je peux terminer, collègue, moi, je pense qu'il faut être extrêmement prudents. On cherche un terme, à mon avis, actuellement, là, qui va être plus imprécis, fort probablement incorrect, et je ne crois pas que c'est notre rôle de faire ça. Le terme «réhabilitation», à mon avis, est tout à fait le bon terme. Il s'agit de lui donner le sens qu'il a et non pas de le dénaturer. J'ai entendu, moi, des journalistes dire et écrire, et j'ai lu des journalistes qui ont écrit qu'un député était réhabilité, il réintégrait le Conseil des ministres parce qu'il était réhabilité, il réintégrait le caucus parce qu'il était réhabilité, et ça n'en faisait pas un criminel pour autant. Alors, moi, je ne pense pas qu'il faille donner un mauvais sens à «réhabilitation», comme on le suggère actuellement, et de chercher un terme qui serait à mon avis inapproprié. On se torture les méninges pour trouver un terme puis on n'arrive pas à un terme meilleur que celui-là. Et, moi, j'ai bien écouté Me La Grenade et, moi, je pense que c'était tout à fait indiqué, ce qu'elle a dit.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Trois-Rivières. M. le député de Mercier, la parole est à vous.

M. Turp: Écoutez, moi, je pense que ça vaut la peine, cher collègue de Trois-Rivières, de se torturer les méninges. Ça vaut vraiment le coup de prendre du temps dans cette commission parlementaire, en présence des experts du ministère et du ministre, là, pour essayer d'utiliser notre langue et ses mots pour éviter une confusion, qui n'est pas née du nouvel usage du mot «réhabilitation» qu'on a fait dans la législation fédérale, et qu'on a importé dans notre législation québécoise, et qu'on veut maintenant importer ou utiliser dans un autre contexte que celui dans lequel il est utilisé. Je pense qu'il faut bien comprendre ça, là, que ce qu'on nous propose aujourd'hui comme usage du terme «réhabilitation» est peut-être un usage correct au plan de la langue, mais c'est un usage nouveau pour un contexte différent, mais dont on va difficilement faire la différence d'avec le contexte où il a été utilisé, surtout maintenant, qui est le contexte pénal et un contexte intimement lié à la question de la délinquance.

Et je crois que les policiers nous ont fait la démonstration que, même si... et j'en parlais aux fonctionnaires, qu'il y a peut-être des rapprochements à faire entre un acte dérogatoire et un acte de nature criminelle. Il semble qu'on pourrait même assimiler un acte dérogatoire à un acte criminel, parce qu'il peut y avoir des accusations pour un acte criminel et une sanction demandée pour un acte dérogatoire pour le même fait, le même geste, par exemple, posé par un policer. Je crois qu'il ne faut pas utiliser ce terme dans ce contexte et donner un nouveau sens à «réhabilitation» dans nos lois. Alors, dès lors, essayons de trouver une formule.

Alors, je crois qu'il y a quelque chose à faire avec le mot «rétablissement», mais là il s'agit de savoir dans quel sens. Il y a deux sens possibles, parce que, dans la définition, là... et peut-être Me La Grenade pourrait nous être utile. Il y a le sens de la définition. La définition de rétablissement... de réhabilitation, c'est de rétablir dans, «dans», une situation juridique...

M. Charbonneau: Un instant...

Le Président (M. Brodeur): Oui, M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Je n'ai pas de problème à ce que le ministre consulte son expert, on peut lui donner tout le temps qu'il veut. Mais c'est parce que, si on parle pour le convaincre ? parce que c'est lui qui n'a pas l'air à être encore convaincu ? on serait mieux de parler quand il nous écoute. Moi, je n'ai pas de problème, là, je veux dire, je comprends que le ministre puisse vouloir en référer, mais la seule chose, c'est qu'on le fasse, puis, après ça, le député de Mercier va continuer. Je veux juste...

Écoutez, je pense qu'on doit s'entendre, là, on veut faire... tu sais, on ne peut pas... on ne parle pas pour parler, là, on parle pour essayer de trouver un consensus, et c'est clair qu'à partir du moment où, dans notre système, le ministre va être d'accord pour trouver un autre mot bien tout va débouler, là. Je veux dire, à partir du moment où il va y avoir une volonté de trouver une autre expression, alors là ça vaut la peine à ce moment-là de parler. Mais, si, je veux dire, on parle, on ne nous écoute pas parce que, je veux dire, on veut consulter, qu'on consulte puis, après ça, on va continuer, c'est tout. C'est juste ce que je voulais dire, parce que là mon collègue, bien j'avais l'impression qu'il parlait pour rien.

Le Président (M. Brodeur): Donc, je constate que le ministre est tout ouïe depuis déjà un bon moment.

M. Charbonneau: Quelques instants.

Le Président (M. Brodeur): Depuis un bon moment. M. le député de Mercier.

M. Chagnon: À la grande satisfaction de son collègue de Mercier ? qui n'a pas besoin de la protection du grand frère de Borduas ? nous étions en train de discuter exactement de la question que soulevait le député de Mercier, alors, avec Mme La Grenade.

Le Président (M. Brodeur): M. le député de Mercier.

n(21 h 50)n

M. Turp: Alors donc... puis de deux choses l'une: on prend le terme «rétablissement» dans le sens de la définition de réhabilitation, qui est «rétablir dans une situation juridique antérieure», donc, dans une situation juridique antérieure, ça voudrait dire que le projet de loi devrait être libellé comme le rétablissement dans quelque chose ou ? et c'est peut-être là où Me La Grenade peut nous éclairer, là ? rétablissement dans son rapport avec le dossier... Mais ça, si j'ai bien compris, ce n'est pas évident, là, à la suite des discussions qu'on a eues, ce n'est peut-être pas l'approche à suivre, parce que c'est peut-être dans le sens du rétablissement dans une situation antérieure plutôt que le rétablissement dans un dossier, qui est l'approche qui pourrait être l'alternative à la réhabilitation. Alors, peut-être qu'on pourrait entendre, avec la permission du ministre, Me La Grenade là-dessus, avec l'espoir qu'on va trouver une solution, là.

Mme La Grenade (Francine): Vous dites de rétablir le policier dans une situation juridique antérieure. Il faut faire attention. Mettons que le policier a été suspendu ou rétrogradé, on ne le replace pas dans sa situation antérieure. Il est reconduit dans ses privilèges et dans ses droits, mais pour l'avenir seulement. Il faut faire attention à ça.

M. Charbonneau: Bien, à ce moment-là, si je vous entends bien, vous dites: On peut rétablir ses droits et privilèges pour l'avenir.

Mme La Grenade (Francine): Exact.

M. Charbonneau: Alors, c'est plus clair que de la réhabilitation. À la limite, disons-le comme ça. C'est-à-dire, si l'objectif, c'est de rétablir un policier qui a eu une sanction au code de déontologie dans ses droits et privilèges pour l'avenir, disons-le, si ça prend quatre mois au lieu d'un, je veux dire, les choses sont claires.

Mme La Grenade (Francine): On parle toujours d'effet quand on fait ça.

M. Charbonneau: Oui, oui, mais c'est correct.

Mme La Grenade (Francine): Non, on n'est pas dans un processus où... On le qualifie comment par la suite?

M. Charbonneau: Qui? Le policier?

M. Turp: La personne... La question à se poser, c'est: Est-ce qu'il faut nécessairement qualifier la personne? C'est ça, le choix que le législateur peut faire, c'est: Est-ce qu'on devrait choisir cette voie-là de qualifier la personne, donc d'utiliser à l'occasion le mot «réhabilité» ? accent aigu, là ? parce qu'on l'utilise parfois, mais là on pointe du doigt, là, «réhabilité», comme l'a dit notre collègue tout à l'heure, là.

Et, regardez, juste pour essayer de réfléchir comment on pourrait utiliser la formule, 255.20, il se lit comme suit: «La réhabilitation a pour objet de rétablir la réputation du policier, sans avoir cependant pour effet d'effacer les faits passés.» Si on passe à l'utilisation du mot «rétablissement», alors là on pourrait utiliser «le rétablissement», il faudrait trouver son objet, là, ou son effet. Alors, c'est quoi, l'effet ou l'objet? Le rétablissement a pour objet de...

Mme La Grenade (Francine): De rétablir la réputation du policier. Voyez-vous, on est dans...

M. Turp: Oui, mais il y a probablement un moyen de trouver une autre expression, à «rétablir», là.

M. Charbonneau: Écoutez, «de rétablir», on l'a dit tantôt, c'est de rétablir ses droits et privilèges pour l'avenir, c'est-à-dire, c'est de faire en sorte que le rétablissement de ses droits et privilèges fasse en sorte qu'il ne puisse pas... les sanctions antérieures ne puissent pas être utilisées contre lui. Le ministre avait une expression...

Une voix: Inopposable.

M. Charbonneau: Pardon?

M. Chagnon: Inopposable.

M. Charbonneau: Inapposable.

M. Chagnon: Inopposable.

M. Charbonneau: Inopposable. Alors, dans le fond, c'est ça, l'objectif, c'est qu'on veut rétablir le policier dans ses droits et privilèges pour l'avenir afin que sa sanction antérieure lui soit inopposable.

M. Turp: Voilà. Ça peut être cet effet-là ou, si on veut absolument utiliser le mot «réputation», parce que c'est vrai, c'est aussi ça, ou «l'estime publique»... J'ai lu dans d'autres...

Mme La Grenade (Francine): La «confiance», c'est le bon mot.

M. Turp: La confiance. Regardez la loi fédérale, ce qu'elle utilise comme formule, elle dit: «La réhabilitation a les effets suivants:

«a) d'une part, elle sert de preuve des faits suivants:

«ii) dans le cas de toute réhabilitation, la condamnation en cause ne devrait plus ternir la réputation du demandeur.»

Alors, si on ne veut pas la répétition «le rétablissement a pour objet de rétablir», alors on pourrait trouver une formule qui fait que, par exemple dans notre cas, la sanction en cause ne devrait plus ternir la réputation du demandeur.

Mme La Grenade (Francine): Oui, je vous suis parfaitement, mais ça, ça ne vaut que pour l'article point 20, dans le fond, le 255.20. Ça, c'est l'effet effectivement de la réhabilitation, ou peu importe comment on le qualifie. Ça n'arrange pas tout le texte, par ailleurs.

M. Turp: Bien, ça arrange...

Mme La Grenade (Francine): Parce qu'on ne peut pas répéter «les effets» tout le temps, tout le temps, là...

M. Turp: Oui, mais regardez...

Mme La Grenade (Francine): Il faut trouver un terme, là.

M. Turp: Oui, regardez, le terme «rétablissement» me paraît pouvoir être utile. Les deux choses qu'il faut changer, c'est l'article 255.1 et 255.20, parce que tous les autres articles, c'est «la demande» et «la réhabilitation». Alors, ça peut être seulement «la demande» ou «la demande de rétablissement». Alors, il faut trouver une solution pour 255.1, parce que là aussi, là: «Un policier en exercice, démissionnaire ou retraité peut demander sa réhabilitation pour un acte dérogatoire au code de déontologie». Donc, il faut trouver une formule, pour 255.1, qui parle du rétablissement, qui a les effets dont on parle dans 255.20. La demande, c'est pourquoi, là? C'est pour le rétablissement dans les droits dans quelque chose, là. Dans 255.1, c'est le rétablissement dans quelque chose, puis, dans 255.20, là on présente les effets.

M. Charbonneau: Mais je voudrais ajouter quelque chose à ce que mon collègue de Mercier indique, c'est que l'objectif, c'est de rétablir la situation par rapport à un dossier. Un policier arrive en fonction, jeune policier, est assermenté, il a un dossier déontologique vierge, un dossier disciplinaire vierge. Il arrive, il fait une petite... ou une bavure plus ou moins importante, il a une sanction, et, après un certain nombre d'années, l'idée, c'est de rétablir la situation qui prévalait avant cette sanction-là, c'est-à-dire la capacité de poursuivre sa carrière sans qu'on puisse invoquer ce problème-là. Alors, ce n'est pas la réhabilitation de l'individu qu'on cherche. On cherche à faire en sorte que le dossier qui a été entaché par une faute professionnelle soit à quelque part rétabli dans sa virginité par rapport à la suite des choses pour sa carrière. C'est ça qu'on cherche.

Mme La Grenade (Francine): Justement parce que sa réputation est rétablie, à cause des effets, bien il peut, après, avoir d'autres avancements, et ainsi de suite, là.

M. Charbonneau: Ce n'est pas la... Écoutez, la réputation, là, à quelque part, il y a quelque chose d'intangible. Il y a des gens qui n'ont aucune faute professionnelle dans leur dossier déontologique puis ils n'ont pas nécessairement une si grande réputation que ça. Et donc ce n'est pas d'abord la réputation. Ce qui bloque un policier actuellement, c'est que dans son dossier il y a une inscription, il y a une marque, et dans le fond on peut actuellement utiliser une sanction antérieure pour lui opposer une promotion ou une évolution dans sa carrière, qui autrement ne lui aurait pas été opposée.

Alors, on ne cherche pas à réhabiliter un individu, ce n'est pas un criminel, on cherche à faire en sorte que son dossier, qui avait été entaché par une faute professionnelle, soit rétabli, dans une certaine mesure, dans sa virginité à l'égard de la suite de sa carrière. On ne fait pas disparaître l'événement; l'événement a existé, il a eu lieu. Alors, ce qu'on fait, c'est qu'on rétablit le dossier dans son caractère qui permet à un policier de poursuivre sa carrière sans être handicapé par une faute professionnelle. C'est ça qu'on fait. Donc, on ne réhabilite pas quelqu'un, on rétablit le dossier dans une façon qui par la suite va pouvoir permettre à un policier de...

Mme La Grenade (Francine): ...la réputation à la personne. On ne peut pas rétablir un dossier. Je ne pense pas que ce soit juste, ça non plus.

M. Charbonneau: Ce n'est pas la réputation qu'on rétablit, c'est qu'on fait en sorte que les autorités ne puissent plus invoquer une faute professionnelle pour bloquer la suite des choses.

Mme La Grenade (Francine): Mais votre collègue me parlait de rétablir la réputation. C'était vraiment l'effet, là, qui était recherché aussi.

M. Turp: Mais j'ai une question, parce que...

M. Charbonneau: Mais, moi, c'est parce qu'on vient aussi de parler aux policiers, puis je pense que ce qu'ils nous disent aussi, c'est qu'il faut faire la distinction. À partir du moment où on parle de réhabiliter un policier ou de rétablir sa réputation, je veux dire, c'est comme si l'individu était, là, ostracisé d'une telle façon qu'il était associé à un criminel. L'idée, c'est qu'on convient qu'il y a eu une faute professionnelle, puis que c'est marqué dans son dossier, puis que, parce que c'est inscrit dans son dossier, on l'utilise contre lui pour la suite. Et ce qu'on veut, c'est de retirer cette capacité, dans son dossier, de cette sanction-là, pour qu'elle ne puisse plus être invoquée pour la suite des choses. Alors, on ne réhabilite pas un policier, on agit sur sa situation de dossier parce qu'il a un dossier. C'est ça, la réalité.

Mme La Grenade (Francine): Je comprends fort bien ce que vous nous dites, puis vous comprendrez que ce n'est absolument pas non plus notre objectif de les ostraciser, comme vous dites...

n(22 heures)n

M. Charbonneau: Bien, non, je comprends, mais, à ce moment-là, moi, je pense...

Mme La Grenade (Francine): Puis, on ne veut pas bucker, on est ouverts, mais seulement, comme je vous dis, on n'a pas nécessairement la solution, puis je pense que personne... tous ceux qu'on a entendus aujourd'hui n'avaient de solution en main non plus.

M. Charbonneau: O.K. Mais, s'il n'y a pas de solution parfaite ? et c'est ce que je dis au ministre, parce que, vous, vous n'avez pas, à ce moment-là, de pouvoir de décision, c'est nous qui avons la responsabilité; alors, si on n'a pas de solution parfaite ? prenons le moindre mal, et le moindre mal actuellement, c'est de ne pas ostraciser des officiers de police, dans un contexte où on utiliserait un vocabulaire qui les pénaliserait par rapport à la réalité de leur vie. Puis, leur vie, c'est d'être... de travailler dans un contexte où ils ont à négocier, à affronter une réalité de délinquance. C'est ça, c'est tout.

Mme La Grenade (Francine): Mais je présume aussi qu'avec les explications qui sont données ils peuvent comprendre aussi le contexte, que ce n'est pas du tout le sens de ce qu'on essaie de faire ici.

M. Charbonneau: Mais personne... Écoutez, personne ne dit que le ministre ou que ses conseillers avaient des mauvaises intentions, tu sais. Je suis convaincu que personne ne pense, là, que le ministre de la Sécurité publique cherche sciemment à embêter les policiers puis à ne pas leur... puis à faire en sorte qu'ils aient plus de problèmes qu'ils en avaient avant. Sauf qu'on les a entendus, ils nous disent qu'ils ont un problème; ce n'est pas juste les syndicats, tu sais, l'état-major, le directeur de la police... la Sûreté du Québec nous dit la même chose. Alors, reconnaissons qu'il y a un problème puis ne faisons pas exprès pour s'entêter à vouloir leur créer le problème dont ils nous disent qu'ils sont déjà victimes. C'est tout. Puis, au bout du compte, ça part d'une volonté.

Tu sais, si notre collègue de Westmount?Saint-Louis dit: O.K., on trouvera un autre mot, puis, si on n'est pas capables de le trouver ce soir, on le trouvera demain, mais l'idée, c'est qu'on s'entend-u pour dire qu'on utilise une autre expression? C'est tout, là. Je veux dire, à un moment donné, il y a quelqu'un qui faut qui décide qu'on ne l'utilise pas, cette expression-là. Nous autres, on n'a pas la majorité ici.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Borduas. Là, j'ai le député de Mercier qui a une question à poser, après ça, je vais passer la parole au ministre.

M. Turp: M. le ministre, moi, je sens que vous voulez faire un bout de chemin, là, avec nous, là, là-dessus, puis je pense qu'il y a une question à laquelle j'aimerais que vous répondiez, peut-être par la voix de votre conseillère, et ça a été soulevé par le député de Groulx, et je pense que ça suscite les préoccupations de nos collègues, là: la question du dossier, le rétablissement ou non du dossier, et je pense que ce serait important que Me La Grenade écoute, là, pour ? si on fait cette suspension qui pourrait être utile, je pense, là, pour discuter, là ? qu'on puisse avoir entendu cela avant de commencer à discuter et pour le bénéfice de tout le monde. Est-ce que je pourrais faire appel à votre conseillère?

M. Chagnon: Je vous écoute, elle vous écoute, nous vous écoutons. Nous sommes tout ouïe.

M. Turp: O.K. Donc, si on utilise le mot «rétablissement», ma question, c'est: Est-ce qu'il pourrait être utilisé dans le contexte d'un dossier... d'un dossier, on en a parlé tout à l'heure, puis nos collègues ici, là, réfèrent notamment au Règlement sur les archives de la Sûreté du Québec et des corps de police municipaux concernant le personnel policier, je comprends qu'il s'agit du domaine disciplinaire et non pas du domaine déontologique, et peut-être que vous pourriez, sur cette question-là d'abord, parler de la différence. Mais il est vrai que, dans ce règlement, il est question de retrait de document. Et en quoi, dans la situation qui est visée par ce projet de loi, on ne pourrait pas procéder de cette façon-là et procéder de cette façon-là en parlant du rétablissement sous la forme du retrait de document? Alors, c'est la question que je voudrais voir éclaircie pour qu'on puisse continuer la discussion sur la notion de rétablissement.

M. Charbonneau: ...j'ajouterais à ce que vient de dire mon collègue de Mercier, c'est que dans le fond il y a plus d'analogies entre la problématique disciplinaire dont il fait référence et la problématique de déontologie ? d'ailleurs, à une époque, il n'y en avait pas ? qu'entre la problématique déontologique et la problématique de la criminalité, c'est-à-dire qu'à la limite, je veux dire, mieux vaut utiliser le vocabulaire qui est déjà utilisé par rapport à la problématique de la discipline que d'utiliser un vocabulaire qui finalement va associer les problématiques déontologiques avec un acte criminel, puis tout ce que ça veut dire, là.

La Présidente (Mme Thériault): M. le ministre.

M. Chagnon: Notre collègue de Borduas a oublié rapidement que le spécialiste de ces questions-là, qui est peut-être le premier spécialiste que nous avons entendu, est le Commissaire à la déontologie, qui quant à lui préférait, de toutes les suggestions que vous avez faites et que nous avons faites, encore le mot «réhabilitation», en l'associant à ce que l'on retrouve dans le dictionnaire, fait de réhabilitation: «Fait de rétablir dans une situation juridique antérieure».

Maintenant, pour les besoins de la cause qui nous attire tous ici et qui nous fait palpiter ici, je suggérerais qu'on prenne peut-être une quinzaine de minutes de suspension de façon à ce qu'on regarde les hypothèses qui ont été soulevées, qu'on puisse examiner comment elles pourraient se conjuguer avec les différents articles que nous avons devant nous, et, si ça se peut, bien on regardera ce qu'on peut faire. Moi, j'ai toujours regardé ces questions-là avec ouverture d'esprit, mais il y a peut-être des limites que vous n'avez pas encore vues et auxquelles nous seront astreints. Alors, dans ce cas-là, si...

M. Charbonneau: ...au ministre, la limite, dans le fond, c'est que ce projet de loi, c'est à la demande des gens qui vivent une situation. Ils sont venus nous dire que finalement la réponse que vous leur avez donnée cause des problèmes. Alors, allons au bout de la logique. Vous voulez les aider? Bien, écoutez-les, puis on va trouver ensemble. Je suis d'accord, on va prendre 15 minutes puis on va essayer de regarder ça. Mais il y a une limite, c'est celle, dans le fond, de répondre aux aspirations de gens qui nous ont posé une problématique. C'est pour ça qu'on légifère, parce qu'il y a un problème.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Borduas. Donc, à la suggestion du ministre, nous allons suspendre les travaux pour 15 minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 22 h 7)

 

(Reprise à 22 h 34)

La Présidente (Mme Thériault): Nous allons donc reprendre nos travaux. M. le député de Mercier, avez-vous une suggestion pour la poursuite des travaux de la commission?

M. Turp: Oui, Mme la Présidente. Alors, M. le ministre, on a regardé tous les articles qui devraient être changés, là ? puis je pense que ce n'est pas majeur, là, c'est un peu pour vous rassurer ? mais regardé quelle pourrait avoir l'allure des articles 255.1 à 255.20. Il y a deux changements plus importants, à 255.1 et 255.20, et il y a des changements mineurs à 255.2, .14, .17 et .19, pour respecter l'idée que l'accent n'est pas mis sur l'individu réhabilité. Alors, je vous les lis les uns après les autres.

Alors, je pense que le titre de la sous-section 4 pourrait donc être «Rétablissement», remplaçant donc «Réhabilitation» par «Rétablissement». Donc, ça, ce serait un premier amendement.

Alors, 255.1 pourrait se lire comme suit: «Un policier en exercice, démissionnaire ou retraité peut présenter ? peut présenter ? une demande de rétablissement à l'égard d'un acte dérogatoire au Code de déontologie ? peut présenter une demande de rétablissement à l'égard d'un acte dérogatoire au Code de déontologie ? si les critères de recevabilité, énoncés à l'article 255.9, sont satisfaits.» Alors donc, premier changement, ce premier alinéa.

Dans le deuxième alinéa, il faudrait aussi faire un petit changement, parce qu'on ne demande pas une réhabilitation, là. Il se lirait donc comme suit: «Le policier destitué ou congédié pour un acte dérogatoire ne peut formuler ? ne peut formuler ? une telle demande de rétablissement.» Donc, plutôt que «ne peut demander sa réhabilitation», «ne peut formuler une telle demande de rétablissement». Ça, c'est, je pense, un des changements les plus importants.

Alors, à 255.2, dans le dernier alinéa, donc le troisième alinéa, qui commence par: «La demande de réhabilitation...»

Une voix: ...

M. Turp: 255.2, là, le nouvel article, troisième alinéa, alors, puisque le mot «réhabilité» se retrouve là, «déjà été réhabilité», alors il faut faire un changement, et le changement serait le suivant: «La demande de réhabilitation pour un nouvel acte dérogatoire commis par un policier dont le dossier a déjà fait l'objet d'une décision de rétablissement...» Alors, on remplacerait le «ayant déjà été réhabilité» par «dont le dossier a déjà fait l'objet d'une décision de rétablissement». Alors là, l'accent est mis sur la décision de rétablissement. Alors ça, ce serait donc le deuxième changement à 255.2.

Le changement suivant serait à 250.14, parce que je vous ferais remarquer que tous les autres articles... Bien, il faudrait changer, dans tous les autres articles, le mot «réhabilitation» par «rétablissement». Ça devient «la demande de rétablissement». Dans certains cas, le mot «demande» est utilisé seul, donc on n'a pas besoin de faire un changement puis on pourrait, pour alléger le texte, juste mettre «la demande» un peu partout plutôt que «la demande de réhabilitation».

Et l'autre petit changement serait à 255.14. Pourquoi? Parce qu'on utilise à nouveau le mot «réhabilité». Alors, à 255.14, comme c'était le cas à 255.2, troisième alinéa, il s'agirait de remplacer les mots «déjà réhabilité», dans la deuxième ligne, là, par «de celle du policier dont le dossier a déjà fait l'objet d'une décision de rétablissement». Donc, pour remplacer les mots «déjà réhabilité», on utilise les mots «dont le dossier a déjà fait l'objet d'une décision de rétablissement». Donc, 255.14.

n(22 h 40)n

255.17, où on utilise à nouveau le mot «réhabiliter le policier», à la première ligne, alors, pour l'éviter, cette formule, il s'agirait tout simplement de remplacer cette première ligne, avant la virgule, qui se lit: «Lorsque le comité décide de réhabiliter le policier», par «lorsque le comité rend sa décision». «Lorsque le comité rend sa décision, le greffier...» Je pense qu'il faudrait mettre «le greffier» plutôt que «il lui», parce que je crois que c'est le greffier, n'est-ce pas? Non? C'est qui? Le comité. Alors donc, ce serait: «Lorsque le comité rend sa décision, il lui délivre...» Alors donc, il n'y aurait pas besoin de changer le «il lui». «Il lui délivre...

Une voix: ...une attestation de rétablissement.»

M. Turp:«Il lui délivre une attestation de rétablissement.» Donc, le mot «réhabilitation» devrait aussi être changé ici.

Alors, 255.19, deuxième alinéa: «Le dossier du policier réhabilité fait mention de sa réhabilitation». Donc, là, il faut trouver un moyen d'enlever le mot «réhabilité». Alors là, ça pourrait être remplacé tout simplement par: «L'attestation de rétablissement est versée au dossier du policier.» Alors donc, plutôt que de lire: «Le dossier du policier réhabilité fait mention de sa réhabilitation», donc «le dossier du policier réhabilité fait mention de sa réhabilitation», alors là il y a plutôt: «L'attestation de rétablissement est versée au dossier au policier.» Je pense que ça permet d'atteindre le même objectif.

Et là la disposition plus importante, là, 255.20, pourrait être remplacée par quelque chose de plus simple et qui semble répondre aux préoccupations des policiers. Alors, elle pourrait se lire comme suit: «Le rétablissement ? donc le rétablissement ? a pour objet de rendre inopposable l'acte dérogatoire à l'égard duquel ? donc le rétablissement a pour objet de rendre inopposable l'acte dérogatoire à l'égard duquel ? le policier a fait l'objet d'une sanction.» Point. Alors, c'est vrai, ça exclut la notion de rétablir la réputation. Ça ne réfère pas non plus à effacer les faits passés, ce qui semble causer des irritants.

M. Chagnon: ...255.20, s'il vous plaît.

M. Turp: .20? «Le rétablissement a pour objet de rendre inopposable l'acte dérogatoire à l'égard duquel le policier a fait l'objet d'une sanction.» Vous voyez, c'est la deuxième partie de la phrase, là, qui est utilisée, qui se lisait «ne peut se voir opposer l'acte dérogatoire pour lequel il a obtenu sa réhabilitation». Alors là, peut-être qu'il faut aussi mettre «sauf dans le cas de révocation». Je ne sais pas si ce serait de celle-ci alors, mais il faudrait ajouter à la dernière phrase. Mais, vous voyez, ça a comme effet d'enlever la référence à «réputation», à «faits passés» et de dire clairement quel est l'objet du rétablissement ou de la décision de rétablissement, de rendre inopposable l'acte dérogatoire.

Alors, j'espère que ça peut être un départ pour les fins de nos discussions et pour tenir compte des objections et des souhaits de nos amis les policiers.

La Présidente (Mme Thériault): Merci, M. le député de Mercier. M. le ministre.

M. Chagnon: Bien, je trouve ça intéressant, mais je suis plutôt porté à penser qu'on devrait aller réfléchir sur la question, parce qu'il y a quand même du matériel à regarder. Il faut regarder les concordances, il faut regarder comment chacun de ces articles-là peut se conjuguer avec les autres. Mais il y a quand même des éléments intéressants là-dedans.

La Présidente (Mme Thériault): M. le député de Borduas.

M. Charbonneau: Moi, j'aurais une suggestion additionnelle, compte tenu de ce que le ministre vient de dire. Moi, je ferais la suggestion suivante au ministre. Compte tenu de là où on en est puis du fait qu'il pense devoir regarder ça plus en détail, moi, ce que je crois qui devrait être fait, c'est que finalement le ministère avec les associations policières et les états-majors se réunissent ensemble, puis finalement vous allez arriver... Parce que là on va régler... Je pense que mon collègue de Mercier a fait un travail législatif très positif pour aider la commission et pas pour embêter le ministre, là. Mais, une fois qu'on aurait réglé ça, faisons l'hypothèse que vous acceptez, puis, bon, on s'entend, il y a aussi toute la question du processus qui a été signalée et qui, elle aussi, est importante.

Toute cette question-là, on nous l'a dit, c'est: Est-ce qu'on veut avoir un processus lourd ou est-ce que finalement on pourrait très bien s'en tenir à un processus plus simple, plus léger et qui atteindrait les objectifs que le ministre veut atteindre et qu'on veut tous atteindre, c'est-à-dire faire en sorte que finalement, dans des situations particulières où, là, il y a un élément délicat ? puis je pense que le ministre a tenté de baliser justement l'approche ? que, dans ces cas-là, finalement on utilise le Commissaire, qui allume une lumière rouge, et là le comité de déontologie.

Et, écoutez, il y a deux attitudes, hein? Je veux dire, on peut penser que finalement on va le faire seul ou on peut penser qu'on va le faire en partenariat avec les organisations, puis les individus, puis les citoyens qui sont concernés. Moi, je pense que de deux choses l'une: on peut le faire ensemble, puis là ça va prendre plus de temps, ou vous pouvez peut-être reprendre l'exercice avec les associations policières, puis qu'on revienne, puis que finalement on trouve un modus operandi.

Parce qu'en bout de piste, là, on est d'accord sur quoi? On est d'accord... Puis, tantôt, on a réglé la question, là, des promotions, là, de la Sûreté, là. On n'a pas fait d'amendement, puis tout ça, finalement, on a essayé de plaider puis on s'est rendu à l'argumentation du ministre, mais, sur toute la question de la déontologie, je pense qu'il y a moyen de trouver une façon d'atteindre les objectifs qu'on a tous, de telle sorte qu'on aurait une législation qui serait plus conforme. Si c'est nécessaire, pour ça... Je veux dire, on n'est pas obligé d'abandonner l'autre dimension, c'est-à-dire on pourrait très bien, le ministre pourrait très bien retirer les articles du projet de loi qui concernent la question de la déontologie, puis on va se limiter à la question des promotions, puis, une fois que le travail sera fait, on pourrait s'entendre pour revenir. Nous autres, on vous offre notre collaboration, là.

M. Chagnon: Mme la Présidente, je comprends qu'il n'y a pas lieu de poursuivre sur l'étude du texte de projet que nous avons. Enfin, ce que nous recherchions, ce n'est pas bien, bien compliqué, c'était de régler quelques détails, là, dans l'organisation de la Loi de police, particulièrement concernant les promotions, et d'autre part de satisfaire à ce que nous considérions comme une demande tout à fait justifiée de la part des organisations policières, concernant leur capacité d'être reconnu... ce qu'on appelait le pardon, qui est devenu la réhabilitation, selon le terme qu'on nous a présenté comme étant le plus français dans ce domaine-là. Nous constatons qu'il y a un problème et qu'on ne trouve pas de solution plus adéquate. On a des suggestions, là, qu'on pourra regarder plus longuement éventuellement, mais, comme on n'a pas, je dirais, satisfait la demande policière à l'égard du projet, bien il faudra le regarder à partir des suggestions qu'on a faites un peu partout. On a eu des suggestions du député de Viau, on a des suggestions de tout le monde ici, on a des suggestions du comité. On le regardera plus tard et on verra.

M. Charbonneau: Si vous voulez dire: Bon, on retire le projet de loi, moi, je vous offre la possibilité...

M. Chagnon: Non, je ne retire pas le projet de loi comme tel, là. On va le regarder, on va continuer à l'étudier. Maintenant, les...

M. Charbonneau: Il vous reste encore un certain nombre de jours. S'il y avait une entente, c'est-à-dire... Écoutez, parlons-nous franchement, là.

M. Chagnon: Oui, sauf que...

M. Charbonneau: Si le ministre, et nous, et finalement les intéressés, on arrivait à une écriture qui lui convienne et qui nous convienne, on peut...

M. Chagnon: On a des suggestions, on va les regarder, et puis on va faire en sorte de voir si on...

M. Charbonneau: Mais je vous le dis tout de suite: Faisons l'hypothèse que vous acceptez la proposition de rédaction. On l'a validée, je pense que les gens vivraient avec ça sans problème.

M. Chagnon: Oui, mais ça...

M. Charbonneau: Faisons cette hypothèse que vous acceptez rapidement, après réflexion; bon, je vous le dis, là, il y a l'autre problème du processus. Et je pense que, si, encore là, on veut s'asseoir autour de la table, ici ou autrement, on peut très bien arriver rapidement et avant Noël à faire en sorte qu'on légifère correctement. Puis, moi, je vous ai offert ma collaboration, vous l'avez encore.

Entre-temps, je vous le dis: Si, par ailleurs, pour la question des promotions... Parce que, sur l'autre, vous considériez que ça va prendre plus de temps pour arriver à consensus. Je vous le dis, vous n'êtes pas obligé de laisser tomber la question des promotions. Ça, ce sera votre choix, là.

n(22 h 50)n

M. Chagnon: Non, on ne fera pas ça comme ça, là. Ce n'est pas notre choix, là, c'est un choix qui est gouvernemental, qui a été de faire un projet de loi avec ces éléments là-dedans. De toute façon, on n'en mourra pas. Ça m'apparaît plus difficile, je ne dis pas impossible, ça m'apparaît plus difficile devoir, au cours de cette session-ci... pouvoir passer à travers ce projet de loi là, compte tenu du temps qu'il nous reste à la fin de la session. Je ne dis pas que c'est impossible. Mais on va prendre le temps qu'il faut pour regarder les suggestions qui nous sont faites et, dans ce cadre-là, on verra...

M. Charbonneau: Moi, je peux vous dire que, pour avoir parlé aux gens que nous avons rencontrés, qui sont ici d'ailleurs encore, ils sont disposés à collaborer avec votre équipe.

M. Chagnon: Ça, je n'en doute pas. Nous, on a fait une proposition de bonne foi qui cherchait à faire en sorte d'aider les corps policiers, d'aider les policières et policiers du Québec à éliminer d'eux toute possibilité d'opposabilité quant à leur avenir sur le plan de leurs promotions ou quant à leurs problèmes en cour. Et, bon, il semble que les termes que nous avons choisis sont ceux qui fassent déclencher une certaine forme d'urticaire. Alors, on va essayer de regarder ce qu'on peut faire de mieux. Il y a d'autres suggestions qui nous ont été faites, on les regardera.

M. Charbonneau: Mais, encore une fois, je veux que ce soit clair, Mme la Présidente. Il y a la question du vocabulaire, c'est une chose. Je pense que le député de Mercier a proposé à tout le monde... et il propose une formulation, mais il reste l'autre problème du processus. Et, encore là, dans le fond la question, c'est... On s'entend sur le principe puis la finalité. Alors, moi, je pense qu'il n'y a pas une guerre de religion. Si vous acceptez, dans le fond, de réviser le processus que vous proposez ou qui vous a été proposé pour regarder de bonne foi la proposition qu'on nous a faite aujourd'hui... À vous et à nous, parce qu'on ne l'avait pas eu, le mémoire, là, nous autres aussi, là.

M. Chagnon: Il ne peut pas y avoir plus de bonne foi que celle que j'ai voulu accorder dans ce dossier-là, comme dans tous les autres dossiers d'ailleurs. J'ai fait, à la demande des associations policières... j'ai essayé d'y répondre, et puis il semble qu'il y a des questionnements qui ne sont pas surmontables ce soir; nous sommes en fin de session, et puis nous verrons à regarder ce dossier-là plus tard.

Maintenant, il y a des suggestions qui ont été faites. Le dossier a été préparé en fonction de la meilleure qualité législative rédactionnelle possible. Il semble que cela ne satisfasse pas les gens, la majorité des gens pour qui nous le faisions. Bon, mais, dans ce cadre-là évidemment, on va faire en sorte de... Cent fois sur le métier remettez votre ouvrage.

M. Charbonneau: Il n'y a pas de honte à refaire les choses puis à constater qu'à un moment donné notre proposition, en termes de modalité, n'est pas ce qui convient.

M. Chagnon: Remarquez que, si c'était possible, si on pouvait trouver du temps d'ici la fin de la session puis qu'on trouvait la clé de la solution que nous recherchons, ça me ferait plaisir de revenir.

M. Charbonneau: Mais, moi, je vais vous dire, je vous garantis, et mes collègues, on en a parlé... Je vous ai déjà donné ma parole que vous n'auriez pas de problème, on ne fera pas de filibuster, sauf que, quand je vous ai dit ça, on n'avait pas entendu les gens. Et aujourd'hui on nous propose des pistes de modifications qui, à la réflexion, devraient vous être acceptables, parce qu'en bout de piste vous allez arriver... Parce qu'on est là pourquoi? Pour légiférer pour le bien commun, puis il y a un problème de bien commun qui nous a été posé.

M. Chagnon: Il semble que vous ayez quelque difficultés à comprendre qu'il y a une mécanique dans le processus de législation qui fait en sorte que c'est un petit peu plus complexe que ce que vous suggérez. Alors, qu'on aime...

M. Charbonneau: Bien, à ce moment-là, il aurait fallu dès le départ mettre dans le coup les intéressés.

La Présidente (Mme Thériault): Là, j'ai le député de Mercier qui veut faire une intervention.

M. Turp: M. le ministre, je veux juste savoir qu'est-ce qui donne lieu à ce moment, là, de découragement ou d'un certain retrait, là. Parce que je crois que...

M. Chagnon: Je n'ai aucun découragement. La qualité des suggestions que vous nous faites mérite une attention particulière. Il faut y...

M. Turp: Mais qu'est-ce qui fait que vous semblez ne plus souhaiter faire adopter cette loi avant la fin de la session? Je veux bien comprendre, là.

M. Chagnon: Eh bien, généralement ce qui est la plus grande... Vous avez lu les auteurs aussi, la meilleure qualité d'une loi, c'est son acceptabilité. Il semble que là n'est pas le cas, dans ce cas précis. Et, si ce n'est pas le cas, bien on la rendra acceptable plus tard, et, quand elle sera acceptable, eh bien, elle sera adoptée. Alors, ce n'est pas plus compliqué que cela.

M. Charbonneau: Alors, je pense juste qu'elle pourrait être acceptable rapidement si le nécessaire est fait pour que la communication s'établisse avec les intéressés.

M. Chagnon: Oui. Aucun problème de ce côté-là.

La Présidente (Mme Thériault): Donc, sur ce, je remercie les parlementaires de leur collaboration et j'ajourne les travaux.

(Fin de la séance à 22 h 55)


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