To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Committee on Institutions

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Committee on Institutions

Version finale

39th Legislature, 1st Session
(January 13, 2009 au February 22, 2011)

Tuesday, March 9, 2010 - Vol. 41 N° 48

General consultation on Bill 78, An Act to amend the Election Act with regard to electoral representation and political party financing rules and to amend other legislative provisions


Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, bonjour à tous. Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Donc, je vais, à tous, donc, vous souhaiter la bienvenue. M. le ministre, vous avez un air resplendissant ce matin. Je vous souhaite la bienvenue. Mme la députée de Hull, M. le député de Huntingdon, bienvenue à notre commission. M. le député de Lac-Saint-Jean, bienvenue. M. le député de Beauce-Nord, bienvenue aussi. Et, M. le député de Mercier, bienvenue. Vous êtes en charmante compagnie.

Donc, je vous salue aussi, vous, Mme David. Je sais que vous étiez dans le comté d'Arthabaska hier.

Mme David (Françoise): Oui. On ne peut rien vous cacher.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. J'ai su ça par mes espions.

Mme David (Françoise): Parfait.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Je n'ai pas eu l'occasion de vous saluer, mais j'étais quand même à Plessisville pour saluer les femmes. Il y avait une activité à Plessisville, une à Victoriaville, et puis, compte tenu que je n'ai pas le pouvoir d'ambiguïté... d'ubiquité...

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): ...d'ubiquité... Ambiguïté, oui, mais ubiquité, moins.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Alors, trêve de plaisanteries, je vous souhait la bienvenue. À vous aussi, monsieur... si j'ai bien lu, M. Lessard, c'est bien ça?

M. Lessard (Stéphane): C'est ça.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): M. Lessard.

Donc, le mandat de la commission est de procéder à des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi électorale concernant la représentation électorale et les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Ouimet (Marquette) est remplacé par M. Billette (Huntingdon); Mme Beaudoin (Rosemont) est remplacée par M. Bédard (Chicoutimi); Mme Hivon (Joliette) est remplacée par M. Marceau (Rousseau); et Mme Roy (Lotbinière) est remplacée par M. Grondin (Beauce-Nord).

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. le secrétaire.

Donc, nous aurons aujourd'hui le plaisir de vous recevoir. Donc, vous êtes... vous avez pris place, que dis-je, Québec solidaire. À 11 heures, l'Action démocratique du Québec. Nous aurons donc une suspension à midi. Et, à 15 heures, Commission de la représentation électorale; 16 heures, municipalité de Saint-Robert de... Bellarmin; 17 heures, le Parti marxiste-léniniste du Québec; à 18 h 30, parti Vision nouvelle; 20 h 30, Culture Montréal, si Dieu nous le permet, compte tenu de l'heure.

J'ai un peu de clérical à faire. Donc, j'ai une lecture de directive, mais un dépôt de documents. Donc, je dépose les documents qu'on avait à déposer à la commission. Ces dépôts-là sont faits. J'ai une décision à lire parce que, je ne sais pas si vous vous rappelez, lors de nos derniers travaux, il y a une pétition qui avait été transmise à la commission, et puis on n'avait pas pu statuer sur la recevabilité de la pétition, etc. Je vais vous lire la décision.

Décision de la présidence concernant
le dépôt de la pétition de la municipalité
de Courcelles du 17 février 2010 portant
sur la révision de la carte électorale

Donc, je vais maintenant rendre, donc, ma décision relativement à la demande de dépôt de la pétition transmise par M. Claude Goulet -- je ne sais pas si vous vous en souvenez -- conseiller de la municipalité de Courcelette lors des auditions du 17 février 2010. À cette occasion, la pétition a été remise au président de la commission mais n'a jamais été déposée, aucune décision n'ayant été rendue sur la... par la présidence quant à sa recevabilité, l'article 162 du règlement précisant qu'aucun document ne peut être déposé en commission sans la permission de son président.

Donc, en ce qui concerne la recevabilité de la pétition, je vous rappelle que toute personne ayant... ou association de personnes peut, par l'intermédiaire d'un député, adresser une pétition à l'Assemblée nationale dans le but d'obtenir le redressement d'un grief qui relève de la compétence de l'État québécois. Une telle pétition doit répondre aux prescriptions des articles 62 et 64 du règlement. Ainsi, seul un député, et c'est là, l'histoire, là, c'est que seul un député peut présenter une pétition, dont la forme et le contenu doivent répondre aux exigences de l'article 63, 63.1 du règlement. Donc, ce n'est seulement qu'un député qui peut déposer ça. Le règlement prévoit également que le député qui présente une pétition doit le faire à l'étape des affaires courantes aussi. Donc, un autre élément. Il faut que ce soit déposé par un député pendant les affaires courantes.

Par ailleurs, le 17 septembre 2009, la présidence de l'Assemblée rendait une décision -- et ça, c'est pour appuyer un peu les éléments que je vous soumets -- rendait une décision dans laquelle elle précisait qu'elle ne saurait permettre qu'un consentement soit demandé par le dépôt indirect d'une pétition. Ça va?

Donc, il ressort donc de ce qui précède que la pétition transmise le 17 février dernier ne peut être déposée en commission -- c'est la conclusion -- puisqu'un tel dépôt doit être fait à l'Assemblée lors de la période des affaires courantes. C'est très long pour dire qu'on ne peut pas accepter la pétition, finalement.

Ceci étant dit... C'est un peu comme s'asseoir dans une auto sport et avoir six coussins gonflables. Mon secrétaire a très bien travaillé là-dessus.

Ceci étant dit, puisque la pétition porte sur le processus de révision de la carte électorale et s'il y a consentement, la commission pourrait la transmettre à la Commission de la représentation électorale. Est-ce que j'ai donc votre consentement là-dessus? Ça vous va?

Documents déposés

Par ailleurs, je vais déposer les autres documents, et c'est déjà fait. La commission transmettra également les documents à la Commission de la représentation électorale. Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Vous avez compris, dans l'essence, mes propos? Ça va.

Donc, je vous rappelle, messieurs mesdames... Puisque c'est vous, Mme David, qui êtes là, je vais vous rappeler les règles, que vous connaissez sûrement. C'est 10 minutes pour la présentation de votre allocution, et il y aura 50 minutes d'échange de part et d'autre. Et bien sûr nous allons donner la chance à votre collègue de vous poser toutes les questions qu'il lui... en fait, si ça rentre dans le temps, toutes les questions qu'il voudra bien vous poser. Il y aura aussi un temps accordé aux gens de la deuxième opposition pour permettre la meilleure compréhension possible de votre exposé.

Auditions (suite)

Donc, sur ce, Mme David, je vous répète que vous êtes la bienvenue ici, vous êtes dans votre maison. À vous la parole.

Québec solidaire (QS)

Mme David (Françoise): Merci beaucoup, M. le Président. Comme, oui, nous n'avons que 10 minutes, j'ai une demande à vous faire. En ajout à notre mémoire, on aurait deux feuilles à distribuer, si ça pouvait être possible, dès maintenant. Ça nous éviterait d'allonger l'allocution. C'est simplement deux petites pages. Est-ce que c'est possible?

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est possible sûrement, bien sûr.

**(10 h 10)**

Mme David (Françoise): Mais je vais quand même commencer dès maintenant. Donc, merci de nous recevoir. Stéphane Lessard est en fait le principal auteur du mémoire sur le projet de loi n° 78. Il est membre de l'exécutif de Québec solidaire et responsable de ce dossier, donc, sur les institutions démocratiques, c'est pourquoi il m'accompagne. Et, bon, donc, je suis Françoise David, présidente et porte-parole de Québec solidaire.

D'entrée de jeu, Québec solidaire tient à affirmer que le projet de loi n° 78, qui a ses mérites, en rapport surtout avec la question du financement des partis politiques, sur le fond des choses, à notre avis, ne répond pas au grave déficit démocratique que nous connaissons au Québec et ne répond par aux interrogations légitimes que la population a depuis déjà un bon bout de temps face au fonctionnement de notre système démocratique.

Pourquoi il n'y répond pas? D'abord, parce qu'il n'accorde aucune place à quelque changement que ce soit au mode de scrutin au Québec, qui est l'un des véritables problèmes démocratiques que nous connaissons. Je ne ferai pas une longue démonstration là-dessus, puisque notre mémoire l'explique, mais notre système électoral, pour nous, c'est clair, produit des distorsions démocratiques injustifiables, permet à un parti politique de prendre le pouvoir avec moins de votes qu'un autre, ne permet pas à l'ensemble des votes de compter, en quelque sorte, dans l'ensemble des circonscriptions, et donc ça décourage un certain nombre d'électeurs de voter. Vous n'êtes pas sans savoir qu'aux dernières élections plus de 40 % des électeurs et électrices du Québec ne sont pas allés voter, ce qui est quand même un problème extrêmement important.

Deuxièmement, depuis plusieurs mois déjà, des allégations de corruption et de collusion ont fait surface. Puis en fait, dès la commission Gomery, on savait qu'il y avait des problèmes de collusion et de corruption, malgré la Loi électorale québécoise, qui est peut-être l'une des plus progressistes au monde. Il y a des gens qui ont vraiment trouvé comment la contourner. Et là il y a quelques mesures, que nous appuyons d'ailleurs, dans le projet de loi, mais, encore là, tant qu'il n'y aura pas d'enquête publique sur ce qui se passe au Québec en ce moment et sur ces allégations de corruption et de collusion, tant que le ménage ne sera pas fait, on n'avancera pas sur le chemin d'une plus grande démocratie.

Il y a donc, à notre avis, un coup de barre à donner. Premièrement, le projet de loi n° 78 doit être scindé. On doit retirer les articles 1 à 7. Ce n'est pas une réforme de la carte électorale, en ce moment, qui va changer quoi que ce soit au déficit démocratique du Québec, c'est une réforme du mode de scrutin. Et, sur l'autre partie, sur la partie du financement des partis politiques, il faut aller de l'avant mais avec les ajouts importants, à notre avis, que nous proposons.

M. Lessard (Stéphane): Je vais poursuivre plus spécifiquement sur la question de la représentation électorale, en fait, pour dire que, selon nous, le projet de loi n° 78 pose deux problèmes majeurs en ce qui a trait à la représentation électorale.

Le premier problème concerne, bien entendu... puis vous en avez entendu parler aussi par les intervenants qui sont passés avant nous, le premier problème porte sur l'égalité du vote et toute la question de la représentativité effective des électeurs et des électrices. Selon nous, le projet de loi n° 78 porte atteinte à l'égalité relative du poids du vote de chaque électeur et électrice. Entre autres, on remarque qu'avec le projet de loi, au lieu que le nombre d'électeurs et d'électrices varie d'une circonscription à l'autre avec un écart maximum de plus ou moins 25 %, on peut remarquer que cet écart-là maintenant serait de moins 60 % à plus 35 %. Je pense qu'on s'écarte beaucoup de ce que l'arrêt Carter, entre autres, de la Cour suprême avait spécifié, que cette limite-là ne devait pas dépasser ou être inférieure à 25 %.

Mais la façon, je pense, la plus éloquente de démontrer que le projet de loi n° 78 porte atteinte à l'égalité relative du poids du vote, c'est quand on regarde l'article 14, en fait, du projet de loi n° 78 puis on le compare au même article qui est contenu dans la Loi électorale actuelle. On voit en fait qu'à la lecture de l'article 14 du projet de loi n° 78 il n'est plus aucunement mention de l'égalité du vote des électeurs, qui doit déterminer en fin de compte la délimitation des circonscriptions. Ça fait en sorte, donc, que le projet de loi n° 78 dilue le principe de représentation effective des électeurs et des électrices, parce que l'égalité du vote en est une condition essentielle.

En fait, en modifiant la règle de 25 %, le projet de loi n° 78 fait en sorte que la moyenne des électeurs, dont il ne faut pas s'écarter de plus ou moins 25 %, est calculée sur une base régionale et non plus nationale. Il fait en sorte aussi, par exemple, que, plutôt que de reconnaître le territoire national, comme c'est le cas présentement, le projet de loi n° 78 dilue de façon inacceptable le caractère d'universalité qui doit empreindre toute législation, selon nous, concernant la représentation électorale.

Le deuxième problème que le projet de loi pose, selon nous, c'est qu'il ne préserve pas le poids politique des régions périphériques. À Québec solidaire, on est les premiers à reconnaître et à déplorer la gravité du marasme qui affecte la survie même de certaines régions, mais nous soutenons que la solution ne passe pas par leur surreprésentation à l'Assemblée nationale au mépris des règles démocratiques fondamentales. Avec les nouveaux critères établissant les régions administratives, les moyennes d'électeurs varieraient aussi d'une région à l'autre. Donc, selon nous, ça créerait peu à peu deux catégories de circonscriptions: d'une part, celles appartenant à des régions en croissance démographique, où là, par exemple, le quotient servant à déterminer le nombre de circonscriptions serait relativement élevé -- dans ce cas, on aurait donc moins de circonscriptions -- et, à l'inverse, on aurait des régions à faible démographie, qui se verraient attribuer un nombre relativement élevé de circonscriptions, à tout le moins plus élevé que la première catégorie. Ces nouvelles règles là augmenteraient donc encore plus les disproportions de représentation entre les régions.

Juste pour donner un exemple, si on prend la moyenne régionale, tel que stipulé dans le projet de loi n° 78, cette moyenne-là, en Abitibi, serait de 21 % inférieure à la moyenne nationale actuelle, alors que de l'autre côté, à Laval par exemple, cette moyenne-là dépasserait du même nombre, soit 21 %, la moyenne nationale telle qu'on la connaît actuellement. Ça fait que, de fait, ce que ça nous amène à conclure, c'est qu'aucune des régions ne respecterait l'un et l'autre des écarts possibles, parce qu'il y en a 10 qui seraient plus basses que le minimum, puis les six autres seraient plus élevées que le maximum permis.

Le projet de loi, donc, ne répond pas adéquatement aux deux préoccupations exprimées, lors des consultations de la Commission de la représentation électorale en 2008, au sujet de cette fameuse représentation, soit les préoccupations exprimées à l'égard de l'égalité du vote et la préoccupation exprimée à l'égard du poids politique des régions. Donc, notre objectif, nous, c'est de trouver un équilibre entre ces deux préoccupations-là, faire en sorte que, dans la nouvelle carte électorale ou à tout le moins dans le système de représentation électorale qu'on adopterait, on trouve un équilibre entre l'égalité du vote et le poids politique des différentes régions.

Puis à ce sujet-là, bien, dans notre mémoire on propose deux solutions: une réforme du mode de scrutin, qui ferait en sorte que notre mode serait mixte et compensatoire, et une politique... une véritable politique de décentralisation démocratique. C'est d'ailleurs pour ça qu'on vous a distribué les deux documents au tout début de notre présentation. Ces deux documents en fait représentent les deux résolutions adoptées par notre dernier congrès, au mois de novembre dernier, concernant le mode de scrutin et la décentralisation vers les régions.

Donc, je n'insisterai pas plus sur ces deux aspects-là, je vous laisserai prendre connaissance de nos résolutions, puis je passerai la parole à Françoise, maintenant, qui va poursuivre sur la question du financement.

Mme David (Françoise): Alors, le projet de loi n° 78 touche aussi la question du financement des partis politiques. Là-dessus, pour aller rapidement, nous avons trois propositions majeures. La première, c'est de diminuer la limite permise pour les contributions citoyennes, là, qu'on peut faire chaque année, donc de la diminuer à 500 $. Et on pense que ça peut avoir un effet important sur les problèmes de corruption et de collusion que nous connaissons, pour une raison très simple: c'est beaucoup plus compliqué d'aller chercher 20, 30 ou 40 personnes, dans une entreprise, qui peuvent payer chacune un maximum de 500 $ que d'aller en chercher seulement 10 qui paient le maximum de 3 000 $. Alors, on pense que l'effet direct d'abaisser la limite permise à 500 $, ce serait de limiter les problèmes de corruption et de collusion.

Par ailleurs, il faut évidemment, à ce moment-là, augmenter le financement public. Et, nous, nous proposons de l'augmenter à 1,50 $ par électrice et électeur. Le 0,82 $ qui est proposé par le gouvernement pourrait être un montant forfaitaire donné à, donc, tous les partis politiques selon le nombre de votes obtenus, mais la différence, et ça, ce serait à peaufiner et à regarder, pourrait être donnée en fonction de critères qui permettraient, par exemple, une plus pleine participation des femmes et des personnes de minorités ethnoculturelles aux partis politiques, dans les candidatures qui sont présentées, etc., donc des incitatifs financiers pour encourager, par exemple, la participation des femmes à la vie politique.

Et la troisième proposition, c'est le gel des dépenses électorales autorisées, parce que là-dessus on constate évidemment qu'il y a beaucoup d'enflure depuis quelques années. Les pancartes sont de plus en plus grosses et très nombreuses. Écologiquement, c'est insoutenable. Donc, on pourrait commencer tout simplement par un gel. C'est écologiquement intéressant et, deuxièmement, si on gèle les dépenses électorales, ça va être une incitation moins grande sur les partis politiques pour essayer d'aller trouver de l'argent et parfois par des moyens qui ne sont peut-être pas toujours ceux qu'on voudrait.

**(10 h 20)**

En conclusion, on aimerait vous rappeler qu'en novembre dernier l'Assemblée nationale a adopté unanimement une motion reconnaissant toute l'importance d'avoir un système politique, au Québec, qui reconnaît le pluralisme politique. Eh bien, nous n'en sommes pas là du tout avec le projet de loi n° 78, qui ne propose aucune réforme du mode de scrutin, je le répète, alors qu'à notre avis c'est la seule réforme possible, qui permet l'expression du pluralisme politique, donc un mode de scrutin qui fait plus de place à la proportionnelle. Nous pensons que le Directeur général des élections doit pouvoir reprendre ses travaux, doit pouvoir présenter un projet sur le mode de scrutin. Et nous pensons que, sur le financement politique, donc le financement des partis politiques, nous pouvons aller plus loin que le projet de loi n° 78. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, Mme David. C'est moi qui vous remercie, Mme David. M. le ministre.

M. Dutil: Merci beaucoup, Mme David, de votre présentation. Il y a un point sur lequel nous nous sommes interrogés dernièrement, qui n'est pas dans le projet de loi, mais qui était perçu comme une problématique, c'est que le crédit d'impôt n'est pas remboursable. Et ça, ça a pour conséquence, comme vous vous en doutez, que 43 % de nos citoyens ne reçoivent aucun crédit d'impôt parce qu'ils ne paient pas d'impôt. Ils paient d'autres taxes, ils sont des citoyens à part entière hormis ça. Alors, une des discussions que nous avons eues, c'est de permettre que ce crédit d'impôt là soit remboursable pour tous les citoyens. Je voudrais savoir votre opinion là-dessus.

Mme David (Françoise): Vous trouverez dans notre mémoire une recommandation à cet effet. Oui, à notre avis, le crédit d'impôt doit être remboursable pour que toutes les personnes qui contribuent au financement des partis politiques puissent quand même y trouver un... en plus du plaisir de financer les partis politiques, puissent quand même y trouver un petit peu, financièrement, leur compte. Parce que c'est sûr que ce n'est pas juste que 60 % des gens bénéficient d'un crédit d'impôt pendant que les autres n'en ont pas.

M. Dutil: Maintenant, dans le débat que nous avons eu, l'opposition mentionnait qu'il fallait peut-être limiter ce crédit d'impôt remboursable là à 100 $. Moi, j'avais certaines réserves à ça, en me disant: Bon, c'est sûr que les gens de moindres revenus et ceux qui ne paient pas d'impôt ont certainement moins de moyens pour donner à un parti politique, et peut-être qu'ils ne donneront jamais 400 $. Moi, j'hésitais à mettre une barrière de ce genre-là parce que je me disais: Bon, finalement, c'est un peu les discriminer encore une fois. On les discrimine déjà, on veut enlever la discrimination, est-ce qu'on doit les discriminer sur le niveau du crédit d'impôt remboursable?

M. Lessard (Stéphane): Bien, je pourrai répondre. En fait, nous, on suggère de diminuer la limite permise à 500 $ par année, par contribution. Donc, dans ce contexte-là, ce qu'on suggère, c'est que les 400 premiers dollars soient déductibles à 85 % puis que le dernier 100 $ soit déductible à 75 %, comme c'est le cas actuellement. Si on reste dans le contexte actuel d'une limite à 3 000 $, on aurait plutôt tendance à dire... à conserver le modèle actuel, soit de permettre 75 % de déduction d'impôt sur les 400 premiers dollars.

M. Dutil: Remboursable pour jusqu'à 400 $ ou...

M. Lessard (Stéphane): Oui, c'est ça.

M. Dutil: D'accord. Donc, vous vous rendriez jusqu'à 400 $.

M. Lessard (Stéphane): Exactement.

M. Dutil: Ça va. Vous avez parlé du gel des dépenses électorales, plus particulièrement des pancartes. J'aimerais que vous élaboriez un petit peu là-dessus. Les pancartes, vous feriez quoi, là? Plus de pancarte du tout?

Mme David (Françoise): Non, non, ce n'est pas ça qu'on dit. Mais ce qu'on dit, c'est qu'on appelle à un gel des dépenses électorales permises. Un gel, en fait, ce que ça veut dire, c'est qu'étant donné que le coût de la vie augmente, donc le coût de toutes les dépenses électorales augmente. Si on gèle, dans les faits on diminue. Et en fait, quand on sait -- nous, bien sûr, on en a fait l'expérience -- que parmi les dépenses électorales il y a toutes les dépenses de publicité, qui sont extrêmement importantes... Bon, c'est sûr qu'il y en a qui peuvent se payer des publicités télévisées ou à la radio, mais les pancartes coûtent extrêmement cher. Notre espoir, c'est qu'en gelant les dépenses électorales il y ait une sorte d'incitatif à peut-être dépenser moins sur ce que les citoyens en fait, en général, commencent à trouver, écologiquement, un petit peu insoutenable, là, puis en plus un petit peu, visuellement, insupportable en période électorale. Mais il ne s'agit pas, pour nous, de dire: On veut juste qu'il n'y ait plus de pancarte, là. Ce sera au choix de chacun des partis politiques de déterminer où est-ce qu'il diminue, dans les faits, ses dépenses électorales. Notre espoir, c'est que ça aille vers ce qui est écologiquement très discutable.

M. Dutil: Vous préférez le faire en gelant les dépenses...

Mme David (Françoise): Oui.

M. Dutil: ...que d'imposer certaines règles au niveau de l'affichage.

Mme David (Françoise): C'est là qu'on en est pour l'instant.

M. Dutil: Oui. Bon, écoutez, pour ce qui est du... Je ne vous parle pas du découpage électoral parce que votre position est très claire, là, très facile à comprendre. On peut être d'accord ou en désaccord, mais on peut comprendre exactement votre point de vue là-dessus. Alors, je laisserais la parole à quelqu'un d'autre, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Huntingdon.

M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président. Mme David, M. Lessard, bienvenue aujourd'hui à cette... ce projet de loi très important pour la démocratie au Québec. J'avais une petite question à M. Lessard, au niveau... Vous avez parlé beaucoup de la représentativité, de la carte électorale, de la réforme électorale. Moi, je viens du comté de Huntingdon, qui est un comté très rural. On parle beaucoup... Vous avez parlé beaucoup du chiffre de 25 %, la représentativité, à ce moment-ci, mais j'aimerais vous entendre beaucoup sur l'accessibilité à un député. Si on prend l'exemple d'un comté comme Huntingdon, ou il y a plusieurs autres comtés, où maintenant... Auparavant, on devait parcourir une heure de voiture pour traverser le comté. On est maintenant rendu à 2 h 30 min de voiture. Donc, l'accessibilité à un député, ou le député à ses citoyens, est de plus en plus difficile. J'aimerais vous entendre sur ce propos-là.

Vous avez parlé beaucoup des chiffres, mais il ne faut pas oublier également qu'on a un processus électoral et par la suite on a un processus où les gens doivent avoir accès au gouvernement ou à leur... un député. Si des gens doivent faire deux heures de voiture pour avoir accès à leur député, donc, il y a des gens, des fois, qui disent: On va peut-être laisser tomber. Donc, j'ai une crainte, à ce moment-là, d'une perte d'accessibilité. Donc, c'est pour ça, ne pas laisser tomber les gens en région, que le projet de loi n° 78 inclut certains paramètres qui facilitent, à ce moment-là, l'accès à un député.

M. Lessard (Stéphane): En fait, la représentation effective, c'est vrai que ce n'est pas juste une question de chiffre, ce n'est pas juste une question de plus ou moins 25 %, puis ce n'est pas juste mathématique. Le DGEQ la définit comme -- je le résume en mes mots, là -- comme la capacité des électeurs, des électrices à avoir accès à leurs députés, puis la capacité aux députés de faire leur job, en fait. Donc, effectivement, la question de superficie ou d'accès, c'est important. Le DGEQ, ou en tout cas, à tout le moins, le groupe de réflexion du DGEQ, dont les trois partis à ce moment-là représentés à l'Assemblée nationale faisaient partie, avait déjà exploré d'autres mesures qui pourraient faciliter l'accès et qui pourraient faciliter le travail des députés sur le terrain, comme par exemple allouer des ressources supplémentaires à des députés qui travaillent dans des circonscriptions de très grande superficie.

Mais, nonobstant ça, je pense qu'avec une réforme du mode de scrutin, qui serait mixte et compensatoire, et pour lequel les sièges de compensation seraient redistribués sur une base régionale, ça ferait en sorte, concrètement, là, que chaque électeur et électrice au Québec aurait son député de comté, comme actuellement, et aurait aussi à sa disposition, entre guillemets, deux, trois, quatre, cinq, six députés de région, selon la grandeur de la région, selon le nombre de sièges de compensation pour chacune des régions, aurait donc accès à deux, trois, quatre, cinq, six députés de liste, qui ne proviendraient pas seulement d'un parti, mais qui pourraient provenir de d'autres partis aussi. Donc, à ce niveau-là, pour le citoyen ou la citoyenne, on lui donne le choix d'un député de comté et de quelques-uns des... et de quelques députés de liste, mais pour ces députés-là, ça leur permet de travailler ensemble dans le même territoire, donc de ne pas être seuls à faire le 2 h 30 min pour traverser le territoire.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): ...question? Oui, M. le député de Lac-Saint-Jean, à vous la parole, si vous le désirez.

M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue à cette commission parlementaire. D'entrée de jeu, je dois vous dire que, comme vous le savez, on partage... on a la même vision, entre autres, en ce qui a trait à votre recommandation n° 1. On croit qu'il est... que le gouvernement aurait dû traiter les deux sujets de manière bien distincte en ce qui a trait au financement des partis politiques et à la réforme de la carte électorale. On trouve malheureuse la façon qui a été... que le gouvernement a utilisée, de procéder dans cette façon de faire, puis on aurait souhaité, comme vous, le dépôt du rapport du DGE et l'appel à la commission... à la commission parlementaire.

Ceci dit, j'ai plusieurs questions en ce qui a trait au financement des partis politiques, et là aussi, comme vous, on partage plusieurs points de vue similaires, entre autres en ce qui a trait à la réduction des contributions maximales de 3 000 $ à 500 $. Comme vous le savez, notre parti politique a pris une position claire à ce sujet-là. On a aussi proposé qu'il y ait une passerelle qui existe entre le DGE et le ministère des Finances. On serait curieux de vous entendre...

Une voix: Du Revenu.

M. Cloutier: Entre le ministère du Revenu, oui, merci. On serait curieux de vous entendre à cet effet-là. Je ne crois pas que vous vous êtes prononcés directement sur cette idée de passerelle.

**(10 h 30)**

M. Lessard (Stéphane): Bien, en fait, même si ce n'est pas explicitement écrit dans notre mémoire, on considère que... et ce serait avantageux pour la transparence de notre système qu'il existe une passerelle ou des moyens de communication entre le DGEQ et le ministère du Revenu, surtout dans le contexte où, actuellement, c'est le ministère du Revenu qui gère toute la question de l'émission des retours d'impôt à cause des contributions à des partis politiques, mais en même temps c'est le DGEQ qui gère cette question-là concrètement avec les représentants officiels des partis. Parce qu'effectivement il y a un trou actuellement dans la loi, puis on serait d'avis, effectivement, qu'il devrait y avoir plus de communication entre le ministère du Revenu et le DGEQ.

M. Cloutier: À votre recommandation n° 15, vous indiquez que, dans une situation où on devait faire le lien entre le financement d'un parti politique par des personnes morales, c'est... une telle façon de faire devrait être considérée comme étant des manoeuvres frauduleuses et entraînant la perte de droits électoraux. Je serais curieux de vous entendre un peu plus longuement là-dessus. Est-ce que vous entendez par là, par exemple, le droit de vote? Vous n'êtes certainement pas sans savoir qu'il y a une décision de la Cour suprême à cet effet-là, je serais curieux de savoir quels sont les droits que vous aviez en tête.

M. Lessard (Stéphane): Bien, en fait, les droits électoraux tels qu'ils sont prescrits par la Loi électorale actuelle. Il y a une série d'actions qui, en ce moment, dans la loi, sont considérées comme des manoeuvres électorales frauduleuses qui entraînent la perte de ces droits-là, mais il y a certaines actions qui ne sont pas considérées comme des manoeuvres électorales frauduleuses. Puis, au même titre que le groupe de réflexion du DGEQ, en 2007, avait fait cette recommandation-là, à la lecture du document puis dans la préparation du mémoire, on a trouvé très pertinente cette recommandation-là du groupe de réflexion et on a décidé, tout simplement, de la reprendre à notre compte pour faire en sorte que les différentes actions qu'on considère comme étant illégales soient considérées comme des manoeuvres électorales frauduleuses qui entraînent la perte des droits. Puis, dans ces droits-là, effectivement, bien il y a toute la question du droit de voter.

M. Cloutier: Alors, je comprends que, pour vous, vous souhaiteriez qu'une personne liée à une personne morale -- là, on fait le lien avec le financement d'un parti politique -- cette personne-là perde son droit de vote. C'est bien ça?

M. Lessard (Stéphane): Si elle a effectué une manoeuvre électorale frauduleuse, oui.

M. Cloutier: O.K. Très bien. En ce qui a trait au gel des dépenses électorales, on regardait tout à l'heure l'article 426 de la Loi électorale qui, essentiellement, dit que c'est 1 $ par... puis je me demandais si cette dépense-là par électeur était soit indexée ou soit augmentée par la loi. Puis, à notre lecture, là, il semble que ce n'est pas le cas, c'est-à-dire que c'est 1 $ tel quel, à moins que la loi soit modifiée. Alors, lorsque vous parlez du gel des dépenses, puisque la loi ne prévoit déjà pas d'indexation ou d'augmentation, est-ce que, dans le fond, ce que vous souhaitez, ce n'est pas ce qui est déjà dans la Loi électorale?

Mme David (Françoise): Oui, mais ça veut dire qu'il n'y aura pas d'indexation, il n'y aura pas d'augmentation si notre recommandation est adoptée. On en reste là.

M. Cloutier: Et, au moment où on se parle, il n'y a pas d'indexation ni d'augmentation qui est prévue et dans le projet de loi et dans la loi actuelle.

Ça m'amène à un lien. Lors des audiences au jury citoyen, il y a eu une proposition de faite de réduction et de financement populaire d'un 20 $, là, qui serait un maximum de la contribution qui serait faite à l'État pour limiter justement le plafond. Lorsque vous parlez du gel des dépenses électorales, est-ce que vous faites référence à cette proposition-là que vous avez faite au jury citoyen?

Mme David (Françoise): Pas du tout. Non, non, on ne fait pas du tout référence à cette proposition-là, qui a été présentée, d'ailleurs, devant le jury citoyen comme une proposition qui était issue d'une initiative individuelle. Et le mémoire que nous présentons aujourd'hui est un mémoire Québec solidaire, approuvé par son comité de coordination nationale. Les recommandations qu'il faut considérer ici, dans cette commission, sont celles qui apparaissent dans le mémoire.

M. Cloutier: Alors, dois-je comprendre que, dans le communiqué du 17 janvier 2010, lorsque vous dites de plafonner la limite maximale des dépenses électorales des partis politiques pour réduire la pression qu'ont ces derniers pour se constituer une caisse électorale, vous faites référence à... Plafonner la limite, donc, je comprends qu'on parle d'un gel tel que la loi le prévoit déjà à l'heure actuelle. C'est bien ça?

Mme David (Françoise): On fait référence à la recommandation 14.

M. Cloutier: O.K. Très bien. Le Parti québécois aussi a suggéré, comme je l'ai dit tout à l'heure, de limiter la contribution maximum à 500 $, comme vous le faites également, parce qu'on croit essentiellement qu'il ne s'agit pas de financement populaire lorsqu'on parle de contributions à 3 000 $ et plus. J'imagine que c'est une constatation que votre formation politique partage avec nous.

Mme David (Françoise): Vous savez, à Québec solidaire, il n'y a pas beaucoup de contributions à 3 000 $.

M. Cloutier: J'imagine.

Mme David (Françoise): Il peut arriver qu'il y en ait, et ça peut être, à un moment donné, un individu, bon, qui est un haut salarié qui décide, une année, de donner ce montant. Donc, ça peut arriver à nous, comme ça peut arriver à d'autres partis politiques, et être tout à fait honnête. Mais, comme il y a tellement de problèmes de collusion, de corruption appréhendée, comme il y a tellement de soupçons dans la population et que tous ces soupçons, pour une bonne part, sont probablement tout à fait fondés, on se dit qu'avec une contribution maximale de 500 $ on est beaucoup plus assurés que le financement soit vraiment un financement citoyen, individuel, que ça appartienne à l'initiative personnelle et que ça ne soit donc pas organisé, si vous voulez, par, dans le fond, une corporation qui s'est arrangée pour que ses cadres -- et on sait que ça existe, là -- donnent le financement maximal, bien sûr parce que l'entreprise espère, plus tard, avoir un retour en attribution de contrats. À 500 $, c'est franchement plus difficile d'y arriver. Donc, on est beaucoup plus, à 500 $, dans l'esprit du financement populaire. Mais, à ce moment-là, le corollaire obligé, c'est qu'évidemment le financement étatique doit augmenter parce que le parti politique doit vivre.

M. Cloutier: Comme c'est prévu dans le projet de loi n° 78, il y a une augmentation qui est prévue...

Mme David (Françoise): Oui, mais c'est, à notre avis, insuffisant.

M. Cloutier: Très bien. Évidemment, ce qu'on souhaite, c'est que le financement se fasse par le plus de personnes possible et que le financement, dans son ensemble, soit le moins possible contrôlé par une poignée d'individus. Ça va être tout, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Juste pour continuer sur le financement, quand on est là-dedans, on se rend compte que, là, mettre un... Mettre ça à 500 $, je me demande, moi... Vous savez, quand on va dans un congrès d'un parti politique, si vous calculez les dépenses... Souvent, comme député, on saute le 500 $, c'est rapide, là, c'est... Si on met un plafond, ça voudrait dire que, si on va dans une ou deux activités politiques dans l'année, à un moment donné on est empêché d'y aller parce qu'on a dépassé le plafond.

M. Lessard (Stéphane): Bien, en fait, je pense qu'il faut distinguer ce qu'on appelle communément les dons anonymes, c'est-à-dire qui ne font pas l'objet d'un reçu. Puis le groupe de réflexion faisait une distinction entre les activités de nature partisane, qui servent à financer nos partis, puis les activités de régie interne, entre guillemets, de nos partis. Je pense qu'il faut faire cette distinction-là. 500 $, c'est vite atteint, mais ça permet aussi d'aller en chercher un plus grand nombre, ce que l'esprit de la loi favorise. Puis, dans le contexte des dons anonymes, bien je pense qu'il faut faire la distinction entre les activités de nature partisane des partis, qui servent à les financer, et des activités de régie interne, leurs congrès, ou leurs conseils nationaux, ou leurs colloques.

M. Grondin: Je comprends ta réponse, mais tu as compris ma question aussi, c'est que...

M. Lessard (Stéphane): Oui, j'ai compris, effectivement, que 500 $, c'est vite atteint, mais ça permettrait aux partis d'aller chercher plus de 500 $ d'un plus grand nombre de personnes.

M. Grondin: Oui, mais, si jamais quelqu'un veut faire deux activités politiques dans l'année, va à un tournoi de golf pour faire du financement, puis, dans la même année, il y a un congrès à son parti, il ne faut quand même pas le limiter, dire: Tu as dépassé ta barre de 500 $, tu n'as même pas le droit, aller là, là.

M. Lessard (Stéphane): Bien, j'aurais quasiment envie de suggérer, d'abord, aux partis de réduire leurs coûts d'entrée pour faire en sorte d'avoir des coûts qui ressemblent à ceux qu'on voit à Québec solidaire, environ 50 $, 60 $ de l'entrée, au gros maximum. Je n'ai jamais vu une activité qui coûtait plus cher que 50 $ ou 60 $ d'entrée.

M. Grondin: O.K. Ma deuxième question, elle serait sur... Dans le projet de loi présentement, là, on... Je pense, si on adopterait le projet de loi tel qu'il est présenté, il faudrait repasser, j'imagine, devant la Cour suprême pour faire accepter les différences entre les comtés parce que vous savez qu'il y a eu la... Vous avez parlé tantôt de l'arrêt Carter qui disait: Plus 25, moins 25. Là, on tomberait avec des comtés qui auraient, des fois, peut-être plus 60, puis d'autres, moins 60. Alors, ce projet de loi là, automatiquement, il devrait se retrouver en cour pour aller chercher une autre approbation pour... Moi, je le comprends comme ça. Vous autres, comment est-ce que vous voyez ça?

M. Lessard (Stéphane): Bien, on le comprend semblable à vous, en fait. Effectivement, le projet de loi n° 78, tel quel, à mon sens, là, mériterait de passer un test au niveau de la constitutionnalité. Et puis, bien, à ce sens-là, j'inviterais le gouvernement à y réfléchir sérieusement.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Merci, M. le député de Beauce-Nord. M. le député de Mercier.

**(10 h 40)**

M. Khadir: Merci, M. le Président. D'abord, de manière officielle, comme député de Québec solidaire, je souhaite exprimer tout, je dirais, mon enthousiasme de voir l'aile extraparlementaire venir ici présenter un mémoire. Je rappelle à Mme David que c'est probablement une de ses dernières expériences là-bas. Bientôt, elle ne pourra plus aller là-bas parce qu'elle sera avec nous. En fait, je le souhaite, le plus rapidement possible.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est intéressant de savoir ça.

M. Khadir: Comment?

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est intéressant de savoir ça.

M. Khadir: Ça pourrait être...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Non, mais vous nous mettez dans la confidence.

M. Khadir: Dans la région de Victoriaville, il n'y a pas de... Alors...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Il y a du travail à faire là, je vous dirais.

M. Khadir: On va faire le travail, oui, oui, c'est sûr. La réforme du mode de scrutin va nous aider à le faire.

J'aimerais que M. Lessard, disons, explique davantage en quoi... Parce qu'on aura compris, donc, que, si 40 % des sièges, suivant la proposition de Québec solidaire, est attribué sur une base de compensation proportionnelle, mais que cette proportionnelle doit inclure un mode de compensation qui tienne compte de la géographie du Québec puis des besoins des régions... Comment exactement ça va marcher? Je veux dire, de quelle manière ça va être calculé? Comment on va savoir quelle région va avoir combien de sièges?

M. Lessard (Stéphane): Bien, tout d'abord, les résultats nationaux des différents partis détermineraient le nombre de sièges de compensation auxquels ils ont droit. Et par la suite, selon leurs résultats dans chacune de ces régions-là, bien leurs sièges de compensation leur seraient attribués. Ce qui ferait en sorte, par exemple, que, si on divise le Québec... Contrairement à l'avant-projet de loi libéral qui divisait le Québec en 26 districts, nous, on suggère de diviser le Québec en moins de régions, disons neuf, pour parler concrètement, ce qui ferait en sorte que chacun de ces regroupements de régions là aurait entre deux et 12 députés de compensation, puis, bien, selon les résultats des partis dans ces régions-là, en fonction du total de sièges de compensation auxquels ils ont droit, les sièges de compensation seraient redistribués. Ça fait que ça ferait en sorte, par exemple, que, dans une région comme, disons, l'Estrie, on aurait toujours quatre, cinq ou six députés de liste, mais on aurait aussi cinq, ou six, ou sept députés de compensation pour l'ensemble de la région de l'Estrie. Ça ferait en sorte, effectivement, que chaque électeur ou électrice se verrait représenté par son député de comté comme actuellement, mais possiblement aussi trois, ou quatre, ou cinq -- dépendamment du découpage qu'on ferait -- députés de compensation.

M. Khadir: Donc -- j'ai encore du temps? -- les craintes que formulaient, par exemple, des acteurs politiques et sociaux dans plusieurs régions -- je pense à la Fédération des municipalités du Québec qui, de manière très, je pense, légitime et sincère, craignait de voir moins de pouvoirs, moins d'accès à la députation avec ce modèle de compensation -- sont dénuées de fondement.

Mme David (Françoise): Je pense qu'avec un modèle de compensation tel que Stéphane vient de le décrire, effectivement ça répond à leurs questions.

Mais je voudrais ajouter qu'il y a une autre proposition de Québec solidaire qui vient répondre aux demandes des régions, et c'est le projet de décentralisation des pouvoirs qui a été adopté à notre dernier congrès. Pour que les régions aient du pouvoir au Québec, ce n'est pas seulement par le biais de l'Assemblée nationale qu'elles peuvent l'obtenir, c'est important. Et on est tout à fait d'accord avec la question de l'accès aux députés, et tout, mais les pouvoirs qu'on va donner aux régions dans différents domaines où on va estimer que les régions... Parfois, les municipalités sont peut-être les mieux placées pour dispenser des services. Avec les ressources nécessaires, bien entendu, on ne fait pas juste se délester de responsabilités sans donner les ressources. Ça, ça a été beaucoup fait dans les années quatre-vingt-dix. Nous, à Québec solidaire, quand nous parlons décentralisation, nous parlons de réels pouvoirs aux régions. Après, il faut faire la discussion jusqu'où, quels pouvoirs, de quelle façon. Mais c'est la façon, pour les régions, d'en prendre, du pouvoir, et de pouvoir davantage maîtriser leur destin économique, politique, social et culturel. Donc, il faut marcher sur deux pattes quand on pense pouvoirs aux régions ou possibilités accrues pour les régions de se développer. Il faut penser mode de scrutin, mais il faut penser aussi décentralisation.

Et j'aimerais terminer là-dessus en disant que ce n'est pas pour rien que Québec solidaire propose cela, nous avons des membres dans toutes les régions du Québec, et, croyez-moi, ces membres-là sont extrêmement attentifs à ce que dit Québec solidaire à propos des régions.

M. Lessard (Stéphane): Peut-être juste ajouter, en fait, rapidement sur le modèle, là, du mode de scrutin. En fait, on n'a pas inventé grand-chose, c'est largement inspiré des études du DGEQ puis c'est... Ça constitue, en fait, une des trois hypothèses que celui-ci a étudiées en 2007.

M. Khadir: Autre point qui m'apparaît... Si M. le Président le permet, sur le financement, disons, public, c'est-à-dire la rente électorale, quelle est votre analyse sur... Quel est le calcul qui a permis d'arriver au 1,50 $ proposé par comparaison au 0,50 $ actuel et au 0,85 $ par électeur, par année, suggéré par le projet de loi?

M. Lessard (Stéphane): Bien, en fait, comme Françoise l'a mentionné tantôt, la partie qui concerne le 0,82 $ serait forfaitaire. Puis on a regardé ce qui se faisait ailleurs au niveau du montant accordé dans d'autres provinces ou encore au fédéral, puis, bien, on sait qu'au fédéral on est rendu presque à 2,00 $ par électeur, électrice, puis il nous semblait que 1,50 $ permettrait, en fait, d'avoir une somme suffisante, qu'on pourrait faire varier afin d'inciter les partis à atteindre différents objectifs. Mais c'est un montant qui a été déterminé en fonction de ce qui se fait ailleurs puis de ce qui semble être acceptable aussi par les citoyens puis les citoyennes du reste du Canada.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va?

Mme David (Françoise): Si je peux me permettre un dernier mot.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Allez-y, madame.

Mme David (Françoise): Très, très rapidement. Et, bon, je veux le dire parce qu'on est au lendemain de la Journée internationale des femmes et qu'il faudrait penser aux femmes pas seulement le 8 mars. Ça fait longtemps que Québec solidaire dit que ça serait intéressant qu'on demande à chacun des partis politiques au Québec d'avoir un plan d'action pour favoriser les candidatures féminines lorsqu'il y a des élections. À Québec solidaire, nous le faisons, c'est pour ça qu'à chaque élection générale nous avons 52 % de candidates.

Et nous pensons qu'il y aurait des moyens à trouver -- ça existe dans d'autres pays -- pour que des incitatifs financiers soient donnés aux partis politiques qui présentent, par exemple, 40 % ou 50 % de femmes et qui font élire aussi un certain nombre de femmes, pour s'assurer ainsi qu'on ne présente pas les femmes dans des comtés où, dans le fond, on est à peu près sûr qu'elles ne gagneront pas. Cette pratique-là a tendance à évoluer beaucoup au Québec dans les 10 dernières années. Je dirais que je suis beaucoup plus optimiste, on présente maintenant beaucoup de femmes dans des comtés gagnants. Ça n'a pas toujours été le cas. Mais il y aurait un équilibre à avoir entre un montant incitatif pour la présentation de candidates, ce qui m'apparaît, moi, le plus important, puis peut-être un montant aussi pour l'élection de candidates. Mais tout ça serait à regarder, à soupeser. Ce qu'on voudrait qui soit adopté, c'est le principe.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, Mme David, merci M. Lessard, de vous être présentés en commission.

Je suspends les travaux quelques instants, le temps que M. Lévesque prenne place, de l'Action démocratique du Québec.

(Suspension de la séance à 10 h 48)

 

(Reprise à 10 h 49)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, nous allons reprendre les travaux. Nous avons donc avec nous M. Christian Lévesque, président de l'Action démocratique du Québec. Bonjour, M. Lévesque. Je vous souhaite la bienvenue au nom de l'ensemble de mes collègues.

Vous avez sûrement été témoin de ce qui s'est passé ce matin, donc il y a... En ce qui a trait aux règles, vous avez 10 minutes pour votre présentation puis 25 minutes d'échange de part et d'autre qui sera distribué, pour un total de 50 minutes. Donc, à votre présentation. Allez-y, M. Lévesque, nous vous écoutons.

Action démocratique du Québec (ADQ)

M. Lévesque (Christian): Merci beaucoup, M. le Président. Mmes et MM. les députés, membres et personnel de cette commission, M. Vachon, avec qui j'ai eu la chance de travailler comme vice-président de la Commission des institutions par le passé, M. le ministre, bonjour.

**(10 h 50)**

Alors, c'est un plaisir pour moi, en tant que président de l'Action démocratique du Québec, de prendre part à cette commission parlementaire sur le projet de loi n° 78, un projet de loi important, qui touche à l'activité de tous les partis politiques québécois. L'ADQ souhaite apporter sa contribution au débat soulevé par bon nombre d'experts, de groupes de la société civile et de citoyens préoccupés par l'état de notre démocratie. Le projet de loi n° 78 est une suite logique à bien des travaux effectués par le Directeur général des élections du Québec, notamment par le rapport du Groupe de réflexion sur le financement des partis politiques.

Comme le projet de loi reprend l'essentiel des recommandations de ce rapport produit en 2007, on ne doit pas se surprendre de l'accueil favorable qu'il a globalement reçu en ce qui a trait au financement des partis politiques. Cependant, ce n'est pas le cas pour la partie traitant de la représentation électorale. Nous annonçons, d'entrée de jeu, notre intention de demander la scission du projet de loi pour que les dispositions relatives à la représentation électorale soient étudiées indépendamment de celles relatives au financement des partis.

Concernant le financement des partis politiques, il faut rappeler que le rapport du Groupe de réflexion sur le financement des partis politiques a inspiré largement la partie du projet de loi portant cette question. Souvenons-nous aussi que le groupe de réflexion avait été mis sur pied dans la foulée de révélations faites lors de la commission d'enquête présidée par le juge John Gomery. Celle-ci remettait en cause certaines règles de financement qui n'auraient pas été respectées et a conduit, entre autres, à un rapport d'enquête de Me Jean Moisan.

Nous devons également nous rappeler le contexte dans lequel a été déposé le projet de loi n° 78. Pendant que les élections municipales se tenaient partout au Québec, des allégations de conflit d'intérêts, de corruption et de malversation touchant des élus municipaux venaient ternir l'image de notre démocratie. Caisses occultes, dons anonymes, liens douteux entre élus et entrepreneurs, irrégularités dans les appels d'offres et l'octroi des contrats, manipulation du processus électoral, tous des éléments pour accroître le cynisme de la population à l'égard de l'ensemble de la classe et de la chose politiques. Le gouvernement n'avait donc plus le choix. Deux ans après le dépôt du groupe de travail mené par le DGE, il devait agir.

Sans passer les mesures visées par le projet de loi une à une... après les autres... toutes les mesures du projet de loi sur le financement du parti politique, je me limiterais à de brefs commentaires sur quelques-uns. Notre position pour chacune d'elles est bien détaillée dans notre mémoire.

L'ADQ est en accord avec les changements concernant le financement public des partis politiques qui impliquent de faire passer l'allocation déterminée par le DGE de 0,50 $ à 0,82 $ par électeur, notamment en enlevant un poste de préposé aux listes électorales au cours d'une élection.

Comme la majorité des experts et des citoyens s'entendent sur la nécessité de cesser la pratique des dons anonymes, nous croyons qu'il devient inévitable de le faire. Les différentes allégations qui ont été entendues lors des dernières élections municipales à ce sujet ont inquiété beaucoup trop de citoyens.

L'ADQ considère tout à fait approprié d'appliquer les règles de financement générales des partis politiques à leurs campagnes à la direction tout comme d'imposer des peines plus sévères aux contrevenants à la Loi électorale et d'interdire à un contrevenant de contracter auprès des gouvernements pour une certaine période de temps.

Mais, pour ce faire, pour que ces mesures soient vraiment applicables, il faut donner au Directeur général des élections plus de moyens, notamment en lui donnant accès à des renseignements que possède Revenu Québec dans le cadre de ses vérifications sur les donateurs.

De plus, l'ADQ est favorable à l'implantation des crédits de reconnaissance à la démocratie, tel que recommandé par le DGEQ.

Réduire les dépenses électorales, entre autres par l'augmentation du financement public. Le but recherché par les actuelles propositions de changement à la Loi électorale est de réduire la pression du financement populaire sur les partis politiques et de mieux lutter contre les contraventions aux règles de financement. Pour ce faire, il faut, bien entendu, regarder les revenus des partis politiques, mais également s'attaquer aux dépenses électorales.

À l'ADQ, nous croyons que les plafonds de dépenses électorales actuellement en vigueur dans la Loi électorale sont beaucoup trop élevés et que ceci crée une pression indue sur les partis politiques pour aller chercher du financement. Nous proposons donc de couper de 50 % le plafond des dépenses électorales afin de diminuer cette pression et de permettre aux partis de concentrer le plus d'efforts possible sur ce qui compte réellement pour la démocratie, les idées et la mobilisation citoyenne. Est-il nécessaire de dépenser 1 $ par électeur dans une circonscription pour bien faire connaître ses idées? Par expérience, nous sommes convaincus que non. Est-il nécessaire, pour un parti politique, de dépenser 0,60 $ par électeur à l'échelle du Québec afin qu'il fasse valoir son programme? Nous croyons aussi que la réponse est non. Ainsi, un candidat pourrait dépenser jusqu'à un maximum de 0,50 $ par électeur dans sa circonscription, et un parti pourrait dépenser 0,30 $ par électeur à l'échelle québécoise.

Cette proposition appelle non seulement à un changement de nos pratiques, mais également à une évolution profonde, en tant qu'acteurs politiques majeurs de la société québécoise, de notre rapport à l'argent. L'exercice de la démocratie ne doit pas seulement se limiter à des campagnes de financement et à des dépenses électorales extravagantes, il doit être centré sur les débats d'idées qui mobilisent les citoyens et qui font avancer le Québec.

Représentation électorale. L'ADQ exige que les dispositions concernant la représentation électorale soient étudiées indépendamment de celles concernant le financement des partis politiques. Nous trouvons indécente l'intention du gouvernement de vouloir traiter les deux questions, qui n'ont pas du tout le même niveau de sensibilité dans la population. Comme nous l'avons déjà dit, les propositions relatives au financement des partis politiques ont reçu un accueil très favorable. C'est tout le contraire de celles relatives à la représentation électorale, où même le DGE a fait connaître ses mécontentements.

D'ailleurs, l'attitude du gouvernement face au travail du DGE est plutôt cavalière. En déposant le projet de loi n° 78, il a rejeté le fruit de 23 jours d'audiences dans 30 villes et la réflexion de 310 intervenants qui ont déposé 288 mémoires lors des travaux tenus par la Commission de la représentation électorale. Le DGE avait déjà accepté de revoir certains éléments de sa proposition de refonte de la carte électorale et il est aujourd'hui disposé à présenter la nouvelle mouture de son projet de carte électorale. Nous croyons qu'il est du devoir de l'Assemblée nationale de l'entendre dans les plus brefs délais, car toute action unilatérale du gouvernement dans ce dossier est un triste désaveu de l'institution que constitue le Directeur général des élections.

Le projet du gouvernement ne tient d'ailleurs pas la route. Les changements proposés ouvrent à une explosion du nombre de circonscriptions. En fixant comme critère un minimum de circonscriptions par région avec la possibilité d'en ajouter suivant l'augmentation de la population, on envoie un très mauvais message à la population du Québec. Pendant qu'elle lui demande de se serrer la ceinture, la classe politique ne jugerait pas bon de faire de même en se permettant d'augmenter le nombre d'élus comme bon lui semble.

L'ADQ ne cautionnera pas la démarche du gouvernement à cet effet, pas plus que notre parti ne tolérera la politisation d'un enjeu qui ne devrait pas être entre les seules mains des élus. Jumeler dans un même projet de loi deux enjeux différents en prétextant qu'ils font partie de la même loi ne tient pas la route. Afin de nous donner un cadre de travail intelligent, qui respecte ce qui a été accompli par le DGE, nous exigeons la scission du projet de loi.

Un ménage à faire, une démocratie à revitaliser. Finalement, l'ADQ profite de cette occasion pour dire haut et fort qu'il y a un ménage à faire et une démocratie à revitaliser. Il y a une crise de confiance majeure envers nos institutions et un cynisme sans précédent face aux représentants de la classe politique. La dernière élection générale provinciale est d'ailleurs passée à l'histoire comme étant celle du plus bas taux de participation depuis 1927. Les élections municipales de l'automne 2009 ont été marquées par des scandales et des allégations de corruption de toutes sortes, ce qui a jeté une ombre sur l'exercice démocratique. Plus récemment encore, le milieu de la construction a été l'objet d'allégations de collusion, de malversation et de corruption qui ont retenti très fort à l'Assemblée nationale. Tous ces événements minent gravement l'intérêt que les citoyens portent envers leurs institutions démocratiques et suscitent une grogne que les élus doivent entendre.

Le constat que l'ADQ fait est assez évident: notre démocratie est malade. Il est de la responsabilité de tous les élus de travailler afin d'y trouver des remèdes à court, moyen et long terme. Si nous voulons aller au fond des choses et mettre fin à ce qui est le plus dommageable pour la démocratie québécoise, il faut poser un geste fort qui envoie un message clair à la population. C'est pourquoi l'ADQ demande depuis bientôt un an qu'une large commission d'enquête publique soit instituée afin de faire toute la lumière sur les allégations de collusion, de corruption et de malversation dans le domaine de la construction et sur l'octroi de contrats par le gouvernement du Québec et les organismes municipaux. La population réclame la tenue d'une telle enquête pour que le ménage soit fait là où il y a de sérieuses sources de cynisme des citoyens envers l'ensemble de leurs institutions. Nous exigeons que le gouvernement pose ce geste de la plus haute importance non seulement pour faire toute la lumière sur ce que nous entendons depuis des mois, mais également pour que tous les élus du Québec confirment leur rôle de défenseurs de l'intégrité de nos institutions.

En conclusion, l'ADQ réitère la nécessité, avant toute chose, de scinder le projet de loi n° 78. Invoquer que la représentation électorale et le financement des partis politiques font partie de la même loi pour justifier le fait de les étudier ensemble est un manque de respect pour l'intelligence des citoyens. Ayons du respect pour le travail que le Directeur général des élections a accompli jusqu'à maintenant et ne l'excluons pas des travaux qui auront lieu ici. Surtout, laissons la partisanerie de côté et agissons tous ensemble pour le mieux-être de notre démocratie et des citoyens du Québec. Merci beaucoup.

**(11 heures)**

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. Lévesque, pour votre présentation. M. le ministre.

M. Dutil: Merci beaucoup, M. Lévesque, de votre présentation, de la réflexion que vous nous amenez sur plusieurs domaines, entre autres du financement, sur lequel je voudrais revenir d'abord. Sur la question du financement, vous soulevez le plafond, qui est à 1,60 $, et vous suggérez de le baisser de 50 %. Est-ce que vous avez identifié, vous, des dépenses qui pourraient être mieux contrôlées ou diminuées par rapport aux partis? Je vous pose la question. Je l'ai posée à Québec solidaire tout à l'heure qui semblait dire: En mettant un plafond, ça va régler le problème, les partis vont faire ce choix-là de couper certaines dépenses. Mais est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'envisager, dans les dépenses qui sont faites, là, un meilleur contrôle, que ce soit l'affichage, que ce soit la publicité ou autrement?

M. Lévesque (Christian): Effectivement, ça peut avoir un regard autant à l'affichage qu'à la publicité, que le message à distribuer à l'ensemble des citoyens. Si on fonctionne juste en fonction d'un plafond plus élevé pour le financement, on se retrouve avec une situation qu'on envoie un message que... ceux qui ont de l'argent, dépensez tant que vous voulez, il n'y a presque pas de plafond. Parce qu'à 1 $ par citoyen dans un comté, ça représente 55 000 $ pour 30 jours de campagne, et on a pu voir qu'il y a certaines campagnes à la chefferie qui se sont faites avec beaucoup moins de budget que ça et qui ont quand même eu une couverture nationale assez importante dans les dernières années.

Est-ce qu'on doit rattacher la démocratie à l'argent? Est-ce qu'on doit raccrocher toujours notre relation avec le citoyen avec le seul dénominateur qui nous rapproche actuellement, qui est l'argent, à chaque fois qu'on fait une activité de financement? En enlevant la pression financière sur les partis, bien on va pouvoir peut-être amener une meilleure gestion des entrées d'argent au sein de ces mêmes partis là. Alors, de notre vision, si on propose de baisser les dépenses, automatiquement les pressions vont être moins grandes pour la population pour aller chercher de grands montants, tout en laissant le 3 000 $ et le 400 $ qui est déductible d'impôt.

M. Dutil: O.K. Mais vous n'envisagez pas, dans votre mémoire, de cibler des dépenses particulières qui pourraient être éliminées ou diminuées de façon considérable.

M. Lévesque (Christian): Pourquoi cibler des dépenses?

M. Dutil: Je vous pose la question.

M. Lévesque (Christian): Pour la simple et unique raison... C'est que chacune des personnalités, ou des candidats, ou des partis va prendre les décisions qui sont les meilleures elle-même. Elle fera les choix qui est le mieux en campagne. Si elle veut changer pour l'affichage, pour travailler plus sur informatique, développer des blogues, développer d'autres outils qui coûtent moins cher, ce sera à elle de faire le choix. Mais, en ayant des budgets moins élevés, elle va devoir faire ces choix-là et peut-être polluer un petit peu moins par les pancartes un peu partout, et autre chose. Mais ce sera le choix, s'ils veulent mettre tout le budget sur les pancartes, ce sera le choix du parti en temps et lieu.

M. Dutil: D'accord. Maintenant, vous n'envisagez pas une diminution du niveau maximal de dons, là. Le niveau maximal est de 3 000 $, vous êtes d'accord avec ce niveau maximal là et vous ne voyez pas de...

M. Lévesque (Christian): Tout à fait d'accord avec ce...

M. Dutil: En autant qu'il soit encadré dans les règles que l'on ajoute dans le projet de loi.

M. Lévesque (Christian): Tout à fait. Pourquoi? Comme le disait le député de Beauce-Nord un peu plus tôt, à chaque fois qu'on fait une activité... Si quelqu'un participe à trois, quatre activités durant l'année et qu'il se trouve à dépasser... On parlait tantôt de 500 $, on atteint rapidement ces montants-là. Imaginez-vous dans le cas d'un candidat qui veut lui-même remettre un peu de financement dans sa campagne, bien ça lui laisse un peu plus de latitude s'il veut le faire, en mettre une petite partie, lui aussi, alors investir dans sa propre campagne. Je pense qu'il est important de laisser quand même le seuil... C'est en 1978 que ces lois-là ont été votées, puis c'était 3 000 $ dans le temps. Le 3 000 $ de 1978 versus aujourd'hui a une grande différence en termes de valeur. Alors, je ne vois pas pourquoi qu'on devrait baisser ces montants-là.

M. Dutil: D'ailleurs, j'ai vérifié, la différence entre 1977 et aujourd'hui, c'est 365 %. Donc, ça vaut 10 000 $, 11 000 $ aujourd'hui, le 3 000 $ de l'époque.

M. Lévesque (Christian): Effectivement.

M. Dutil: Et une autre question que... le crédit d'impôt n'est pas remboursable, comme vous le savez sans doute. Donc, il y a des citoyens qui donnent, mais sans avoir le retour. Est-ce que vous croyez que ce crédit d'impôt là devrait être remboursable?

M. Lévesque (Christian): Je pense qu'il devrait être remboursable. Mais on n'en parle pas dans notre mémoire, ça va être plus une position personnelle, je crois qu'il devrait être remboursable. Mais la proposition du DGEQ aussi de gérer les dons, qu'il reçoive les dons, qu'il émette lui-même les remboursements, est une proposition extrêmement valable qu'on devrait aussi regarder.

M. Dutil: Oui. Ça ne rend pas le remboursement automatiquement remboursable, il faut le préciser, que ce soit le DGE ou le ministère du Revenu qui le fasse. Il faut le préciser.

M. Lévesque (Christian): Et ce sera une partie du rôle que vous aurez à faire ici, à voir, mais cette position par rapport à ce dossier-là est une position personnelle dans laquelle je crois qu'on devrait la rendre remboursable pour l'ensemble des gens qui participent à la démocratie au Québec.

M. Dutil: Oui, d'accord. En tout cas, je pense qu'il serait utile, si l'ADQ se penchait sur cette question-là et émettait une opinion... Vous vous réunissez régulièrement. Je pense que c'est un point important, là, il y a 43 % de nos citoyens qui n'ont pas accès... Moi, j'ai découvert ça... Ça fait longtemps que je fais du financement politique, et je vous avoue que je n'avais jamais prêté attention à cette question-là, et c'est une personne qui me l'a mentionné dans un repas à 50 $, qui le trouvait cher, en me disant qu'elle, elle ne pouvait pas avoir de crédit d'impôt. Ce n'était pas une personne sans ressources, mais c'était une personne à la retraite qui avait un petit revenu puis, donc, qui ne bénéficiait pas du crédit d'impôt.

M. Lévesque (Christian): Alors, dans les prochaines semaines, avec le comité de direction, l'exécutif et les gens au Parlement, on pourra adresser la question et revenir avec une...

M. Dutil: C'est beau. Quant à vos points sur le découpage électoral, votre position m'apparaît très claire, là. Je ne veux pas dire qu'on est parfaitement d'accord, l'un et l'autre, là-dessus, mais je n'ai pas de question supplémentaire à poser. Alors, je passerais, M. le Président, la parole à quelqu'un d'autre.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, absolument. Est-ce qu'il y a des intervenants? M. le député de Huntingdon.

M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président. M. Lévesque, bienvenue. C'est un plaisir de vous accueillir ici, un retour au Parlement, qu'on pourrait dire. J'avais peut-être deux petites questions pour vous, des questions d'éclaircissement, pousser un petit peu plus loin les propos que vous avez déposés. Vous avez parlé d'augmenter de façon substantielle les amendes pour les contrevenants au niveau de la Loi électorale. Est-ce que vous vous êtes positionnés à savoir jusqu'à quel niveau ou si vous aviez des exemples de dire est-ce que ça doit être des peines pénales, administratives...

M. Lévesque (Christian): Tout est notion de persuasion, qu'est-ce qui fait juger que quelqu'un, en faisant tel acte, va pouvoir recevoir comme persuasion que, si tu l'as fait, bien ça va te coûter cher, ou quelque chose du genre. Pourquoi? Parce que, présentement, le DGE n'a peut-être pas les moyens dans ses coffres pour pouvoir faire toutes les recherches qu'il faut pour s'assurer qu'on respecte toutes les notions. Alors, on doit s'assurer que les budgets vont être là. Puis, en baissant les plafonds, par comté, de 1 $ à 0,50 $, ça génère déjà des fonds pour le DGE qui pourraient être utilisés justement pour s'assurer qu'on encadre bien les dépenses et les revenus au niveau des financements.

M. Billette: O.K. Vous n'avez pas statué du tout sur des montants ou des peines qui pourraient être dissuasives?

M. Lévesque (Christian): Non, mais notre rôle à nous, en tant que parti, est de vous amener les idées. Mais vous avez un rôle en tant que députés, de statuer qu'est-ce qui serait les meilleurs moyens à la suite. Mais on reste dans... La persuasion est importante pour les gens, que, si vous traversez cette ligne-là, bien vous allez en payer les frais, et c'est important de bien statuer sur ces points-là.

M. Billette: Parfait. Un autre point que vous avez entendu, M. le Président, un autre point que vous avez entendu précédemment également, je vis dans un comté de région, et vous avez dit, au niveau de la réforme de la carte électorale, que ça ne tenait pas la route. Je ne reprendrai pas non plus le mémoire, mais j'aurais aimé avoir un petit peu... pousser un petit peu plus votre réflexion, à savoir si vous avez des suggestions. Parce qu'on est devant une ambiguïté à ce moment-là. Est-ce qu'on doit conserver l'égalité du vote ou la représentation des régions à ce moment-là? J'aurais aimé ça vous entendre sur les deux points précis, aussi bien l'égalité du vote, ou la représentation des régions, ou l'accessibilité à un député pour les gens vivant dans ces régions-là.

M. Lévesque (Christian): Je ne répondrai pas tout à fait, au complet, à votre question. Je vais juste dire une chose, c'est que, pour nous, il est important de vraiment scinder ce projet de loi là en deux. Il est important qu'ici, en commission parlementaire, on puisse parler des deux sujets distinctement et que l'on ne les croise pas dans nos discussions. Pourquoi? Parce que c'est deux choses qui n'ont pas de lien commun entre les autres. Et on comprend qu'il y en a une grande partie que tout le monde est vraiment à l'aise, mais, cette partie-là dont vous parlez, nous, ce qu'on dit depuis le début, c'est qu'il y a des propositions du DGE qui doivent être entendues, qui doivent être présentées ici, et nous devons prendre le temps de les entendre. Quand je dis nous, vous devez, en tant que députés, prendre le temps d'entendre ces propositions-là avant de vous lancer dans un projet de loi, comme vous le faites actuellement. Alors, je trouve important de scinder le projet de loi et qu'on puisse peut-être se parler directement juste sur ce sujet-là lors de futures audiences pour la suite.

M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? D'autres interventions du côté du gouvernement? Plus d'intervention. M. le député de Chicoutimi, bienvenue à notre commission.

M. Bédard: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): J'ai cru pendant quelques instants que nous serions privés de votre présence, mais là je suis rassuré de vous voir. À vous la parole, M. le député.

M. Bédard: Il est dommage de constater que vous manquiez vous-même au règlement, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Non, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui? Par quel mot?

**(11 h 10)**

M. Bédard: Mais, ceci dit, je suis tout aussi heureux que vous de vous retrouver ici, à cette commission. Et j'ai profité d'un petit moment de plus chez nous pour, malheureusement, manquer le groupe d'avant, mais je le sais que mon collègue de Lac-Saint-Jean, qui est aussi un compagnon de caucus de la région du Lac-Saint-Jean, m'a bien remplacé pendant cette période, à votre satisfaction, j'espère.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Absolument.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Donc, je salue notre ancien collègue, M. Lévesque, d'être ici, d'avoir exprimé des positions très claires par rapport à ce projet de loi, qui est très important, vous l'avez souligné, par rapport à nos institutions, de constater, comme à peu près tout le monde, sauf une ou deux exceptions, que vous réclamez aussi la scission du projet de loi, que toutes les questions relatives, d'ailleurs, à la représentation électorale vous inquiètent. Vous avez abordé très rapidement le fait sur l'augmentation du nombre de députés, entre autres. Je pense que vous avez une position très claire, à l'effet que vous êtes en défaveur, c'est ça?

M. Lévesque (Christian): Et en défaveur pas parce que je ne crois pas que le rôle est important de député. J'ai été personnellement député, je vois... On parlait du député, tantôt, de Huntingdon, qui disait qu'il a 2 h 30 min de route à faire pour aller d'un secteur à l'autre. On comprend toutes ces réalités-là, mais, à un moment donné, aussi il faut être conscient par rapport aux dépenses et aux investissements que l'on veut démontrer. On va travailler juste un petit peu plus fort. En tant que députés, là, faisons un petit peu plus d'efforts. Je repense ici au député de Beauce-Nord qui, avec sa, je ne sais pas, Coccinelle mobile, ou je ne sais quoi, mais qui fait le tour de chacun de ses comtés, puis à chaque semaine, il n'attend pas que les gens fassent 2 h 30 min de route pour venir le voir, il prend le temps d'aller dans chaque coin de comté à chaque semaine pour rencontrer ses électeurs. Alors, pour moi, c'est juste de changer peut-être notre rôle, mais de démontrer à la population que l'on veut... on est prêt à faire le petit effort de plus pour y arriver.

Puis je prends l'exemple aussi de l'Ontario qui a 107, peut-être que c'est... mais avec 11 millions de population, mais 107 députés. Peut-être que ce n'est pas tout à fait l'idéal, mais il y a un milieu, puis je pense qu'actuellement on pourrait faire un effort dans ce sens-là.

M. Bédard: Il y a un équilibre, effectivement. Puis c'est bien de faire la promotion du député de Beauce-Nord en même temps, je pense que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bédard: Mais je sais que ce n'est pas partisan.

M. Lévesque (Christian): Aucunement.

M. Bédard: Je vois aussi...

M. Lévesque (Christian) C'est parce que je le connais bien.

M. Bédard: Oui. Je vois que vous rejetez, évidemment, le... Bien, vous rejetez... vous êtes plutôt... je ne dirais pas outré, là, c'est peut-être... C'est en préparation à la période des questions, c'est pour ça que j'ai des termes plus forts qui me viennent, là, mais vous êtes contre le fait, finalement, qu'on rejette le travail du DGE, ce qu'il a fait dans la dernière année et demie, donc, et, du revers de la main, de suspendre le processus tel qu'il est actuellement. J'ai cru que vous proposez de passer par... J'ai lu dans votre mémoire que vous souhaitez plutôt passer par une commission spéciale. Qu'est-ce que vous pensez, plutôt comme les... Il y a deux des principaux partis qui réclament effectivement... et même le troisième, même Québec solidaire le réclame aussi, donc, qu'on donne suite au rapport du DGE dans le processus tel qu'il est prévu, soit devant la Commission de l'Assemblée nationale. Vous, je comprends que vous seriez aussi en faveur.

M. Lévesque (Christian): Tout à fait d'accord. Il y a un travail qui a été accompli. L'ensemble des députés de l'ancienne législature -- c'était la 38e -- ont participé aussi à ce travail-là, ont rencontré le DGE dans ce dossier-là, il y a un grand travail qui a été fait. Je pense qu'on se doit de respecter ce travail-là, et ce n'est pas unilatéralement aux députés à prendre une décision en disant: Voici, c'est fait, pour des raisons politiques, on s'en va dans cette direction-là. Alors, je crois qu'il est important, du côté du parti au pouvoir, de réaliser tout le travail qui a été fait et de respecter le travail du DGEQ dans ce dossier-là.

M. Bédard: Merci. J'ai vu que vous étiez aussi en faveur de la proposition -- et vous-mêmes vous le proposez -- d'augmenter le nombre de... bien, plutôt, de créer plus de passerelles entre le Directeur général des élections et le ministère du Revenu, donc, de façon à ce que le DGE ait toutes les informations disponibles à des vérifications, à des enquêtes.

M. Lévesque (Christian): Les outils sont importants, et ces outils-là permettent de vraiment vérifier auprès d'une entreprise est-ce que c'est vraiment des prête-noms, est-ce que... Si quelqu'un a un salaire de 20 000 $ par année comme secrétaire d'une grande corporation puis elle a donné 3 000 $, ça nous permet de faire une vérification diligente auprès du ministère du Revenu et de s'assurer qu'il n'y a pas eu de passe-droit par rapport à la loi actuelle. Moi, je trouve important que l'on outille nos gens pour qu'ils puissent faire un bon contrôle et un suivi du DGEQ. Puis ça va leur donner aussi de la force quand vient le temps, après ça, de valider leurs décisions. Quand ils vont donner une décision, ils vont avoir aussi des preuves qui vont être encore plus tangibles pour ces décisions-là.

M. Bédard: Et même de trouver, c'est ça, les façons de contourner la loi, malheureusement. Une question un peu plus épineuse... Bien, épineuse... ça dépend pour qui, là. Vous savez qu'actuellement le premier ministre reçoit un salaire additionnel de son parti politique. Je sais qu'il y avait une ancienne pratique qui existait, bon, pour des motifs x, peu importe. Est-ce que vous pensez qu'il est normal, en plus dans le contexte qu'on connaît, là... Il faut être face, des fois, face à des événements pour comprendre l'impact de certains choix. Et là je ne vous cacherai pas toute l'histoire autour de la construction, est-ce que vous pensez, maintenant, avec l'expérience des derniers mois, de la dernière année, là, qu'il est normal de maintenir la possibilité pour le premier ministre d'obtenir un salaire additionnel provenant de son parti politique?

M. Lévesque (Christian): Vous comprendrez que, si je prends position dans ce dossier-là, ça ne pourrait pas être par rapport au parti politique que je représente, alors ce serait plus une vision personnelle. Mais je crois que, si on doit revoir le salaire de notre premier ministre ou de nos élus, c'est un dossier qui devrait être appelé au sein de nos organisations. Pourquoi? Parce que, s'il est jugé qu'un premier ministre ne gagne pas assez, qu'on doit lui donner plus, bien peut-être parce que, quelque part, il y a des choses qu'on devrait revoir dans les fonctions ou dans les montants qui sont accordés à nos élus. Mais, pour le reste, je ne prendrai pas position. Mais il y a quelque chose à regarder, c'est certain.

M. Bédard: Dans la loi actuelle, la liste des donateurs de 200 $ et moins n'est pas rendue publique. Je conclus -- et là c'est plus un commentaire, cet aspect-là -- je pense que les gens ont beaucoup d'attentes par rapport à une plus grande transparence de nos institutions, mais aussi, évidemment, de l'application de la Loi électorale. Est-ce que vous pensez qu'il est utile, nécessaire, pertinent de diminuer justement ce montant-là, donc le ramener peut-être... Il y a eu un exemple, à Montréal, d'un parti politique qui l'a ramené à 100 $ de façon à diminuer l'opacité et à augmenter la transparence.

M. Lévesque (Christian): Encore là, ce n'est pas une position du parti en tant que tel que je peux prendre là-dessus, parce qu'on n'a pas statué sur ce dossier-là, mais tout ce qui peut améliorer la notion de transparence et de travail au sein de notre travail en tant que soit députés, ou président de parti, ou quoi que ce soit, je pense qu'il devrait être mis de l'avant. On a avantage à montrer patte blanche. Une des propositions que nous faisons est que les dons anonymes n'existent plus, que chacun des dons soit bien répertorié. Mais de baisser de 200 $ à 100 $, ou quoi que ce soit, me semblerait une bonne ligne à suivre.

M. Bédard: Vous avez une proposition à l'effet de diminuer le plafond de dépenses, je l'ai entendue, et c'était la même que vous aviez proposée lors, d'ailleurs, du forum citoyen. Et c'est un des arguments qui peut être un peu paradoxal, vous dites: Vous savez, il y a trop de dépenses, le plafond est trop élevé, et, si on veut que les campagnes électorales se fassent sur les idées plutôt que sur d'autre chose, on a avantage à baisser les plafonds. Et là je vous livre ma réflexion, pas de l'augmenter, mais le diminuer de 50 %, c'est quand même une part importante. On sait que, parfois, des médias peuvent décider de l'orientation d'une campagne électorale, dans le sens quels sujets qu'ils souhaitent voir traiter, et le seul mécanisme qui reste, finalement, aux partis politiques, c'est par la voie de la publicité, ou des médias alternatifs, ou Internet, ou... parce que le canal de communication, lui, est sur un autre thème. Puis c'est légitime, ils font partie de la société, dans le sens qu'ils ont le droit de se questionner sur des aspects particuliers. Donc, finalement, empêcher les partis politiques de faire la promotion des idées autrement que par le biais des médias, vous ne pensez pas que c'est un peu... il y a un problème de cohérence entre ce débat d'idées que vous souhaitez et la diminution du plafond?

M. Lévesque (Christian): Oui. Il y a une notion qu'on semble avoir oubliée en politique, c'est le bénévolat, l'implication citoyenne, les gens qui y travaillent, qui font des rencontres dans les cuisines, qui rebâtissent le parti. Cette notion-là semble avoir sorti de notre discours. On dirait que, dans la vision politique de la chose, ça prend de l'argent. Ça prend de l'argent pour être à la TV, ça prend de l'argent pour mettre des pancartes, ça prend de l'argent pour être sur des sites Internet. Mais je peux vous dire, pour le voir actuellement, là, tous les gens qu'on a remis au travail au sein de notre organisation, qui s'occupent de l'Internet, qui s'occupent de faire les suivis, qui vont rejoindre nos gens de d'autres façons, si notre vision... Parce que c'est nous qui mettons les règles du jeu en place... Bien, c'est les députés qui mettent, disons, les règles du jeu en place. Et, si c'est les mêmes règles pour tout le monde, bien il y a une certaine innovation au niveau de la politique qui va ressortir.

Mais surtout je ne vois pas, comme le disait Québec solidaire tantôt, qu'on doit redonner encore plus de la part du gouvernement pour financer la démocratie parce qu'on a plus de grands besoins. Moi, je dirais plus: Donnons moins de pression aux partis d'aller chercher du financement. Parce que tout le monde a les règles égales, identiques, bien, de cette façon-là, bien, on va avoir peut-être plus de facilité avec notre relation avec le citoyen parce qu'on ne sera pas toujours en train de quémander pour aller chercher le maximum du financement.

On comprend que les libéraux peuvent faire une campagne avec 8 millions. Vous, vous pourriez peut-être la faire, dans le passé, avec 4 millions. Nous, on le faisait avec 1 million. Entre 8 puis 1 million, là, il y a un milieu. Alors, même à 4 millions au national pour faire une campagne puis, dans les comtés, avec 25 000 $ à 30 000 $ pour faire une campagne, il y a moyen de bien gérer nos dossiers. Puis le DGEQ va sauver parce qu'il y a 50 % moins de dépenses qui vont lui être demandées en retour qu'il va pouvoir investir ailleurs.

**(11 h 20)**

M. Bédard: Si je suis votre prétention, d'abord -- et vous dites que vous n'êtes pas en faveur de la diminution du plafond de 3 000 $ ou même d'un plafond de réception de dons -- à quoi vont servir les dons politiques? Si un parti... Et là je vous fais mon raisonnement, si un... Et là ce n'est pas un secret, c'est public, le Parti libéral, l'an passé, a reçu 10,4 millions de dollars. On lui dit que, pendant la campagne électorale, il peut dépenser pas 4, 5 millions, il peut seulement en dépenser 3 ou 2, il fait quoi avec l'autre 7 millions, il se met à acheter des immeubles?

M. Lévesque (Christian): ...présentement.

M. Bédard: Non, mais, je vous dis, c'est ça. Alors là, on fait quoi? Là, ça devient une machine qui vit par elle-même mais qui n'a plus l'objectif de faire la promotion des idées parce qu'elle ne peut plus...

Une voix: ...aux autres.

M. Bédard: On en donne aux autres, comme le disait le député de Beauce-Nord. Mais vous voyez un peu. Alors, si on agit d'un côté, si on agit sur les extrants, vous ne pensez pas qu'il faut agir aussi sur les intrants? Sinon...

M. Lévesque (Christian): ...que la politique se vit seulement en campagne électorale?

M. Bédard: Non, mais je vous...

M. Lévesque (Christian): Est-ce que la politique ne pourrait pas se vivre à toutes les années? Parce qu'il y a des dépenses, je le vois même dans le parti, à chaque année, qui sont pour le renouveau des 125 comtés, les tables régionales, il y a tout un réseau qui demande aussi de l'investissement. Alors, à partir de là, ils peuvent utiliser ailleurs... Mais il y a à peu près juste un parti au Québec actuellement qui peut se targuer d'avoir des aussi gros montants que ça. Est-ce que vous nagez tant que ça dans l'argent, vous, actuellement?

M. Bédard: Pas du tout. Mais ce n'est pas une question de nager... C'est pour ça, je prends votre... j'essaie plutôt de faire du pouce sur votre idée, M. Lévesque. C'est que, si on souhaite baliser les dépenses, je ne suis pas contre, à la limite les diminuer. Si on laisse les partis trouver autant d'argent, à quoi va servir l'argent, à payer des salaires à tout le monde, à donner des salaires supplémentaires à tous les députés d'un parti politique parce qu'on est rendu avec trop d'argent, à devenir le plus grand propriétaire immobilier d'une île quelconque ou... Non, mais...

M. Lévesque (Christian): Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de baliser aussi les montants, à un moment donné, que le parti peut aller... Le but, c'est de lancer une réflexion.

M. Bédard: Alors là, c'est pour ça... Non, mais là je suis votre raisonnement, voilà. Et là je vais le continuer, votre raisonnement. On a proposé de diminuer de 500 $ en sachant que ça va avoir un impact sur, effectivement, la récolte de dons. Ultimement, il va y avoir moins d'argent qui va être recueilli. Ça, c'est le premier bénéfice... Pas le premier bénéfice, mais, je vous dirais, c'est la première adéquation entre l'argent recueilli et la promotion des idées d'un parti politique, qui est -- moi, je suis d'accord avec vous -- basée sur, donc, les convictions, le bénévolat. C'est ça que doit être la base d'un parti politique, l'implication des citoyens, pas strictement le salaire.

Si on diminue à 500 $... ou ça peut être un plafond moindre, à 1 000 $, par exemple, donc on diminue les intrants, mais, en même temps, on se rapproche de l'idée que vous nous avez mentionnée dans votre mémoire et dans votre témoignage à l'effet que ce n'est pas un débat de portefeuille qu'on doit faire, là, c'est un débat d'idées, et que le citoyen moyen, et même le citoyen aisé, n'a pas les moyens de donner 3 000 $, là. Là, on parle d'une classe particulière de la population qui peut donner 3 000 $. Vous me dites: L'exclusion... Si on exclut les députés ou les candidats, par exemple, s'il y avait une règle particulière pour les candidats, si... Ah! bien là, regardez, si, moi, je proposais, par exemple: Les candidats, eux, comme c'est leur campagne électorale, peuvent s'impliquer selon un niveau x, mais les autres citoyens, c'était... est-ce que vous seriez plus sensible à une proposition de cette nature-là?

M. Lévesque (Christian): Il y aurait une notion un peu plus sensible. La seule chose, c'est qu'il y a la notion du candidat. Il y a aussi la famille qui, des fois, veut aider, donner un coup de main. Il y a une ligne qui est difficile, un peu, à tracer dans ce dossier-là. C'est sûr que quelqu'un qui donne un 3 000 $ a une notion de... il veut au moins se faire entendre, il veut quelque chose un peu en retour, mais...

M. Bédard: Je le comprends bien, votre argument. Il est bon, d'ailleurs. Même 3 000 $, quelqu'un qui s'investit, à la limite il donne plus parce que, des fois, il va même renoncer à son salaire pendant une période.

M. Lévesque (Christian): Oh, que oui!

M. Bédard: Alors, dans les faits, ça ne paraît pas, mais il donne même plus parce qu'il va prendre un congé sans solde. Alors, le 3 000 $ devient comme un peu artificiel. Donc là, la famille, bien là ça devient large parce que, là... Et personne ne va reprocher à quelqu'un qui a financé sa propre campagne d'être en conflit d'intérêts. Tu sais, moi, je suis... Par contre, si je vais chercher trois entrepreneurs, ou trois personnes de la même famille d'entrepreneurs, ou cinq, puis ils me donnent 25 000 $, bien là, tu sais, ça commence à résonner différemment pas en termes de conflit d'intérêts, mais en termes de perception de conflit d'intérêts, en termes de... Vous ne pensez pas que c'est le temps, justement, d'avoir des...

M. Lévesque (Christian): Bien, je pense que, premièrement, c'était le temps qu'on se pose les questions, c'est le temps qu'on accepte d'en discuter. La proposition que l'on fait de baisser les dépenses, automatiquement, peut peut-être amener à revoir aussi à la base la perception de ces argents-là. Mais, pour l'instant, c'est qu'on a vu beaucoup d'éléments qui nous amenaient à croire que le 3 000 $ pouvait quand même servir. Quand on regarde la notion légitime de la réception du 3 000 $, il y a plusieurs cas qui nous semblent importants, qu'il faut faire attention de ne pas trop jouer là-dessus parce que c'est... Quand même qu'on aurait 25 000 $ pour une campagne, 3 000 $, ça ne me fait pas mon 25 000 $ pour ma campagne, là. Même si le candidat me donne 3 000 $, mettons que son père donne 3 000 $... Il faut faire attention.

M. Bédard: Mais, où il y a un problème, c'est s'il y a une entreprise, ils sont 10 membres de la famille, puis chacun me donne 3 000 $, je suis rendu à 30 000 $.

M. Lévesque (Christian): Oui. C'est pour ça qu'on doit vérifier aussi...

M. Bédard: C'est un cas vécu, ça.

M. Lévesque (Christian): ...que le DGEQ ait les bras plus longs pour aller vérifier justement est-ce que ce n'est pas la secrétaire qui est allée donner ce 3 000 $ là ou si c'est vraiment...

M. Bédard: À la limite, ça peut être les gens de la famille, mais...

M. Lévesque (Christian): Oui, mais il n'y a pas juste une autre chose, hein...

M. Bédard: Mais, vous voyez, il y a comme.. Si on veut briser... Vous ne pensez pas que l'objectif qu'on doit avoir, de base, c'est de briser... Et je sais que vous avez une bonne partie d'idéalisme, puis c'est important d'en avoir, être idéaliste en politique puis de viser des objectifs, à la limite, qu'on sait qu'on n'atteindra pas complètement, mais qui sont légitimes et qui sont nobles, là, celui de briser l'impression ou la perception populaire entre le financement d'un parti politique et des faveurs politiques, l'obtention de contrats dont... et que, pour briser ça, ça prend des mesures beaucoup plus importantes que celles qui sont proposées actuellement...

M. Lévesque (Christian): Oui, mais, nous, on pensait -- puis on le pense encore -- que le fait de diminuer les pressions financières allait amener justement un peu une vision qui nous oblige moins à quémander, des fois, puis à forcer la main à des gens qui... pour leur dire: Bien là, c'est le temps de financer, ou quoi que ce soit.

M. Bédard: Oui, oui, effectivement. Parce que je ne dis pas que toute personne qui donne 3 000 $ est bien intentionnée, là. Quelqu'un qui vaut très cher...

M. Lévesque (Christian): Bien, il y a des gens qui sont bien intentionnés.

M. Bédard: Alors, ce n'est pas une implication. Mais, quand il y en a 10, par exemple, d'une même entreprise, ou 20, ou 30, bien là ça pose un questionnement qui est plus élevé que la réflexion personnelle ou l'engagement d'un individu envers des idées ou un parti politique.

M. Lévesque (Christian): Puis il y a une autre partie qu'on... il ne faut pas oublier, c'est qu'il y a des gens qui peuvent donner 3 000 $ parce qu'ils trouvent que les intérêts de ce parti-là sont importants, pour qu'il reste au Québec. Alors, il n'y a pas juste la notion pécuniaire derrière chaque chose, c'est qu'il y en a qui veulent que ces idées-là... Puis on l'a vu avec le cas de l'ADQ où il y a plusieurs personnes qui veulent, qui souhaitent que le parti reste au Québec pour continuer à défendre les idées. Bien, ils peuvent avoir un intérêt à donner un petit coup de pouce de cette façon-là. C'est pour ça que ça devient difficile d'enlever cette tendance-là, là, le 3 000 $.

M. Bédard: Mais notre peur d'agir risque... vous ne pensez pas qu'elle risque de ne créer chez le citoyen aucune modification par rapport à sa perception de la politique si on n'agit pas encore de façon plus drastique? Des fois, c'est des événements qui nous commandent justement de... Parce que tout est basé sur la perception du citoyen par rapport à ses institutions.

M. Lévesque (Christian): Oui, je vous suis, mais c'est pour ça qu'à quelque part on veut être assez drastique dans le montant de diminution pour les dépenses. Tout est à revoir, tout se négocie, tout se parle, mais il faut donner un geste dans ce sens-là pour enlever les pressions au niveau gouvernemental.

M. Bédard: En terminant, puis je respecte totalement votre opinion, mais vous dire: J'aimerais peut-être que vous continuiez votre réflexion justement par rapport à... s'il n'y a pas de plafond, s'il n'y a pas de moyen, si on empêche... pas on empêche, mais... Déjà, on est limité. Mais, si on limite encore plus, qu'est-ce que les partis politiques vont faire de l'argent? Et ça, ça m'inquiète encore plus, je vous dirais. Alors, peut-être de poursuivre votre réflexion.

M. Lévesque (Christian): C'est un point de vue important. C'est un point de vue important, puis il va falloir qu'on se pose la question. Mais, comme vous l'avez dit, on a une vision versée vers le meilleur possible, puis il y a des contraintes qui vont se réaliser en appliquant ça. Puis ce serait à débattre, oui, effectivement, je suis tout à fait d'accord.

M. Bédard: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Merci, M. le député. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Lévesque. Écoutez, je pense que l'exercice qu'on fait aujourd'hui et depuis le début de ce projet de loi là, c'est pour essayer, comme on dit, de revitaliser la classe politique et les partis politiques. Je pense que c'est un travail qu'on doit faire tous ensemble, peu importe le parti politique. On est là pour donner nos idées, puis essayer de les enrichir avec les idées des autres, puis essayer d'avoir le meilleur projet de loi possible.

On parle beaucoup des gens qui vont donner 100 $, qui vont donner 200 $, qui vont donner 3 000 $, mais quand... on l'a vu dans la dernière campagne électorale en ville, à Montréal, et tout ça, les pots-de-vin puis les enveloppes brunes, et tout ce que vous voulez, ce n'étaient pas des 100 $ puis des 200 $, je pense. Là, on parle beaucoup de dons de 200 $, et tout ça, mais n'allez pas croire que les compagnies ou les gens qui sont intéressés à donner des pots-de-vin donnent des 100 $, et des 200 $, et même, je dirais, même pas des 3 000 $, moi, ça doit être des pas mal plus gros montants que ça. Alors ça, comment le vérifier puis comment le savoir, on ne le sait pas, à moins qu'il y en ait quelqu'un qui le déclare. Puis ça, on ne le saura jamais, puis je pense que ça s'est toujours fait...

n(11 h 30)**

M. Lévesque (Christian): Il y a quand même moyen de croiser les... avec les données du ministère du Revenu et celles du DGEQ, tout comme la proposition, il y a quand même moyen d'aller chercher l'information en partie.

M. Grondin: En tout cas, moi, ce que j'aimerais qu'on réussisse à faire, c'est de... Qu'est-ce que les citoyens nous demandent, c'est de la transparence, c'est d'arrêter ça. Mais comment est-ce qu'on peut le faire? Alors, je pense que tout le monde se pose la même question.

On va arriver en campagne électorale, tout le monde le sait, les députés le savent tous, comment peut se faire... Il y en a qui se font transporter des voteurs en limousine, qui vont les chercher dans les hôpitaux, en chaise roulante, les amènent voter. Il y a des partis politiques qui peuvent se permettre ça, d'autres partis politiques ne pourront jamais se permettre ça. On a de la misère, des fois, nous autres même, à y aller, alors, même si on a une New Beetle. Mais c'est que c'est toutes des choses qui ne sont pas... Je suis persuadé que la majorité de ces dépenses-là ne sont même pas comptabilisées. Alors, moi, je pense qu'on devrait essayer de trouver une manière de faire un projet de loi qui engloberait tout ça et qui rendrait ça égal pour tout le monde.

Alors, écoutez, moi, mon parti politique -- et vous en êtes le président -- propose de diminuer les dépenses électorales de 50 %. Quand on sait que... Je pense, la majorité des dépenses électorales, là, c'est... il y a 60 % de toutes les dépenses qui s'en vont en pub, publicité, télévision, journaux, et tout ça, et ce n'est pas tous les partis politiques qui peuvent se permettre de mettre des millions en publicité. Si vous avez regardé dans les dernières élections, les grands partis avaient de l'argent en masse pour mettre de la publicité télévisée, d'autres n'en avaient pas du tout. Et, moi, je crois, là, je n'ai pas... je ne suis pas le bon Dieu, mais je pense qu'on aurait tout intérêt...

Une voix: ...

M. Grondin: Ha, ha, ha! On aurait tout intérêt... Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, vous, M. Lévesque, mais on aurait tout intérêt à avoir, il me semble, moi, plusieurs partis politiques, pas juste... Au Québec, depuis les 30 dernières années, on a toujours eu deux partis politiques majeurs. Puis là on a eu proche d'en avoir un troisième, mais on a eu une jambette à la dernière élection. Mais je crois que le Québec serait encore mieux représenté si on avait trois ou quatre partis politiques toujours, on amènerait un débat d'idées énorme. Je ne sais pas, vous, comment est-ce que vous voyez ça.

M. Lévesque (Christian): Bien, la démocratie est importante. Je pense qu'on ne peut pas revenir là-dessus, il est... Bien, on doit revenir là-dessus, il est important que tout l'ensemble des Québécois puissent se faire entendre ici, dans l'enceinte du parlement. Mais un des points que je trouve le plus important dans tout ça, dans tout ce qu'on a pu parler depuis le début, c'est concernant le fait de scinder ce projet de loi en deux. M. le ministre, je vous regarde un peu en vous disant ça, mais je pense qu'il est important que les élus regardent ce dossier-là de plus près. Scindons ce projet de loi en deux, assurons-nous de bien répondre aux questions. On a une partie où l'ensemble des gens s'entendent déjà très bien dans l'ensemble du dossier, et, les parties conflictuelles, travaillons-les avec le DGEQ, assurons-nous qu'on va pouvoir entendre... Parce qu'on parlait de démocratie tantôt puis de faire entendre d'autres partis, ou quoi que ce soit, mais le DGEQ a fait un grand travail dans ce dossier-là, il a été voir nos citoyens, a parlé avec eux, et il est important qu'on puisse l'entendre dans une annexe... dans un autre lieu que... le débat sur ce projet de loi là, en le scindant en deux.

Mais, au niveau de la politique, le projet de loi, en augmentant les budgets de 0,60 $ à 0,82 $ pour les partis est une très belle vision. Ça va permettre d'avoir un peu plus de financement pour les partis sans justement aller en chercher tout le temps auprès des citoyens, et on est tout à fait à l'aise avec ce côté-là. Mais de scinder le projet, ce serait extrêmement bien pour le futur de ce projet de loi là.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Merci, M. Lévesque, de vous être présenté à la commission. Vous êtes toujours le bienvenu ici. Bon retour chez vous. Je vais suspendre les travaux le temps de la période du dîner. Donc, compte tenu de l'heure, je suspends les travaux jusqu'à... les affaires courantes, vers 15 heures. Et vous ne pouvez laisser vos choses ici parce qu'il y a un caucus.

(Suspension de la séance à 11 h 35)

 

(Reprise à 15 h 34)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, nous allons reprendre nos travaux. Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de procéder à des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi électorale concernant la représentation électorale et les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

Nous entendrons, cet après-midi, la Commission de la représentation électorale, qui a déjà pris place -- messieurs, j'aurai l'occasion de vous souhaiter la bienvenue; la municipalité de Saint-Robert de... pas de Bellerin, mais Saint-Robert-Bellarmine...

Une voix: Bellarmin.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): ...Bellarmin, excusez-moi, Bellarmin -- merci, M. le ministre -- et le Parti marxiste-léniniste du Québec.

Donc, sur ce, je veux simplement... Une question technique: Je vois que la députée de Trois-Rivières s'est jointe à nous, est-ce qu'il y a consentement pour que la députée de Trois-Rivières puisse se joindre à nous, messieurs?

M. Bédard: On verra au cas-par-cas.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. Non, non, mais c'est sage comme décision...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Non, non, je ne vous appuie pas, je vous dis que c'est sage, il y a une nuance. Et il y a le député aussi de Baldwin...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah! membre de la commission, donc...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Lui, par contre, malheureusement, vous ne pourrez utiliser votre discrétion sur sa présence, puisqu'il est membre de notre commission.

Donc, sans plus de badineries, messieurs, je veux vous souhaiter la bienvenue à notre commission, vous dire que votre réflexion va nous servir à alimenter notre réflexion, et donc la vôtre sera éventuellement la nôtre.

Donc, sans plus tarder, je vous rappelle les règles, qui sont fort simples, vous les connaissez sûrement, compte tenu de l'expérience que vous avez. Il y a donc 10 minutes pour votre présentation et il y aura un échange de part et d'autre des parlementaires pour permettre de mieux comprendre l'essence même de votre réflexion.

Donc, permettez-moi, M. Blanchet, de vous souhaiter la bienvenue, ainsi qu'aux personnes qui vous accompagnent. Mais, si c'est possible, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent -- et ils sont fort nombreux -- de vous présenter, s'il vous plaît, présenter vos collègues.

Commission de la représentation
électorale du Québec (CRE)

M. Blanchet (Marcel): Alors, merci, M. le Président. Mmes, MM. les députés, M. le Président, c'est avec plaisir qu'à titre de président de la Commission de la représentation électorale je viens, aujourd'hui, vous entretenir des aspects du projet de loi n° 78 concernant la représentation électorale.

Je suis accompagné de MM. les commissaires John Zacharias, à ma gauche, Serge Courville, à ma droite; et M. Denis Fontaine, secrétaire, de la commission, à droite; et de Mme Catherine Lagacé, qui était directrice du Service de la représentation électorale au moment où les travaux de délimitation des circonscriptions électorales ont été effectués. Je souhaite aussi souligner la présence de d'autres membres de mon personnel, à qui je pourrai référer, le cas échéant, si nécessaire.

Le projet de loi n° 78 interpelle directement la Commission de la représentation électorale en modifiant de façon importante les règles de délimitation des circonscriptions et les principes sur lesquels repose le processus.

D'entrée de jeu, la Commission de la représentation électorale, qui a pour mission d'établir la carte électorale du Québec, tient à mentionner qu'il lui apparaît important de s'assurer que les dispositions du projet de loi n° 78 respectent le droit de vote garanti par la Charte canadienne des droits et libertés, notamment au regard de la représentation effective des électeurs. Cette notion de représentation effective a été définie par la Cour suprême dans une cause qui vient de la Cour suprême, encore une fois, c'est l'arrêt Carter, rendu en 1991, qui nous rappelle que la première condition pour assurer la représentation effective, c'est d'assurer l'égalité du vote des électeurs, donc une égalité relative, parce qu'elle nous dit aussi qu'il faut prendre en considération des facteurs tels que les caractéristiques géographiques, l'histoire et les communautés naturelles. Ces éléments-là doivent également être pris en compte pour pouvoir, en fait, établir une carte électorale qui soit équitable. Donc, c'est une combinaison de ces deux facteurs, le critère numérique et les autres critères à caractère géographique, et historique, et de communautés naturelles qui doivent être pris en compte pour assurer la représentation effective des électeurs. Et le critère du plus ou moins 25 % d'électeurs prévu dans la loi pour assurer finalement une équité sert justement à répondre à cette question de la représentation effective.

Nous avons examiné avec grande attention les impacts des dispositions du projet de loi n° 78 concernant la représentation électorale. Le mémoire que nous avons déposé en janvier contient une analyse détaillée, je m'attarderai donc dans ma présentation aux éléments qui nous apparaissent les plus importants.

Un des premiers impacts du projet de loi est que le nombre de circonscriptions électorales est entièrement déterminé par la mécanique d'attribution qui est prévue dans le projet. Selon les données de la liste électorale permanente au 30 novembre 2009, le nombre de députés passerait, dans un premier temps, de 125 à 133. Un document de référence vous a été distribué afin d'illustrer l'impact du projet de loi sur le nombre de députés, il s'agit du tableau 1 du document qui vous a été remis. De plus, afin d'évaluer les effets à plus long terme du projet de loi sur l'augmentation du nombre de députés, des projections démographiques ont été réalisées. Le tableau 2 illustre les résultats obtenus. Ainsi, selon ces projections, le nombre de députés augmenterait à chacune des réformes de la carte électorale. Nous estimons qu'il serait de 134 dès l'année 2010, donc d'ici l'été, de 135 en 2015 et de 137 en 2020.

**(15 h 40)**

De plus, l'application des nouvelles règles de délimitation proposées créerait des inégalités de représentation encore plus importantes que la situation actuelle, ce qui représente un autre impact du projet de loi. Ainsi, ces règles permettraient des écarts à la moyenne provinciale du nombre d'électeurs par circonscription variant de moins 60 % à plus 35 %, comparativement au plus ou moins 25 % qui existe actuellement. Le tableau 3 qui vous a été remis résume cette situation. Selon les modalités du projet de loi, une circonscription de la région de la Gaspésie pourrait respecter le critère numérique prévu, et ce, malgré un nombre d'électeurs aussi faible que 17 000, alors qu'une circonscription de la région de Laval pourrait compter jusqu'à 58 000 électeurs, ce qui représente près de trois fois et demi plus d'électeurs.

Au chapitre du poids politique des régions du Québec, l'impact est aussi important. Tout en maintenant le nombre absolu de députés dans chacune des 17 régions administratives du Québec, le projet de loi aurait pour effet de diminuer le poids politique relatif de la majorité des régions périphériques à court terme, tendance qui s'accentuerait à long terme, comme le démontre le tableau 4. Ainsi, selon le modèle prévu, une région comme l'Abitibi-Témiscamingue perdrait du poids politique. Plutôt que de compter trois circonscriptions sur 125, elle en compterait trois sur 133, ce qui représente une baisse de 6 %.

Par ailleurs, depuis juin 2008, moment où la commission a terminé ses auditions publiques, nous avons poursuivi notre réflexion en vue d'améliorer notre proposition préliminaire. Nos auditions publiques ont été très éclairantes. Ainsi, il nous a été possible de donner suite à un très grand nombre de représentations qui nous ont été faites à l'occasion de ces auditions.

La proposition révisée de la Commission de la représentation électorale permettrait à plusieurs régions éloignées du Québec de bénéficier d'un plus grand poids politique que ce qui est prévu dans le modèle proposé dans le projet de loi n° 78, ce qui est représenté par les colonnes 4 et 3 du tableau 4. En effet, les régions administratives du Saguenay--Lac-Saint-Jean, de la Mauricie, de l'Abitibi-Témiscamingue et de la Côte-Nord gagneraient du poids politique lorsqu'on compare la proposition révisée de la commission au modèle du projet de loi.

De plus, si on analyse la situation à plus long terme, les projections du nombre d'électeurs en 2020 démontrent qu'à l'exception des régions en forte croissance -- des Laurentides, de Lanaudière et de la Montérégie -- toutes les régions administratives du Québec perdraient du poids politique si on applique le modèle du projet de loi, information que vous trouverez aux colonnes 6 et 4 du tableau 4. En effet, l'ajout de nouvelles circonscriptions sera concentré dans les régions en croissance, ce qui aura pour effet de diminuer le poids politique relatif des régions qui maintiennent leur nombre de circonscriptions.

Par ailleurs, lors de la tournée de consultation de la Commission de la représentation, plusieurs intervenants se sont opposés au retrait de trois circonscriptions dans l'Est du Québec. Essentiellement, certaines caractéristiques particulières étaient évoquées par les intervenants pour justifier cette demande. Le tableau 5 présente l'analyse de ces caractéristiques. Il apparaît que les circonscriptions visées ne se démarquent pas véritablement si on les compare aux autres circonscriptions plus septentrionales du Québec. Or, le projet de loi prévoit une surreprésentation des régions de Chaudière-Appalaches et de la Gaspésie. Pourtant, les circonscriptions des régions de la Côte-Nord et de l'Abitibi-Témiscamingue ont des caractéristiques géographiques qui se démarquent davantage par rapport aux autres circonscriptions de la province.

En plus de ces impacts du projet de loi, nous aimerions vous entretenir de certaines considérations en lien avec la représentation électorale.

Le rôle du député a fait l'objet de discussions lors des débats sur la réforme de la carte électorale. La commission reconnaît que les distances à parcourir et l'accessibilité constituent des défis bien réels pour les députés d'une région éloignée. C'est pourquoi elle estime qu'un examen approfondi des moyens mis à la disposition des députés doit être fait et que, dans ce sens, des ressources supplémentaires pourraient être octroyées aux députés de ces régions de façon à faciliter leur travail. L'ajout de bureaux de circonscription ou de ressources humaines de même que de meilleures allocations pour les déplacements sont quelques exemples d'améliorations possibles qui pourraient être mises en place.

En terminant, la Commission de la représentation électorale est d'avis que la décision de modifier le système à la base de la représentation électorale au Québec doit s'appuyer sur une solide réflexion et doit reposer sur le plus large consensus possible. Ainsi, elle formule les recommandations suivantes.

D'abord, la commission propose de mener à terme les travaux qu'elle a entrepris en 2007 avant les prochaines élections générales en utilisant le cadre actuel de la loi. Avant d'appliquer le modèle proposé par le projet de loi n° 78, il faudrait s'assurer que la carte soit établie sur une base plus égalitaire. La carte actuelle comporte trop d'inégalités de représentation pour servir de point de départ au nouveau système qui serait mis en place.

Si le projet de loi conserve le modèle de représentation proposé, la commission recommande de retirer du libellé de la loi toutes les indications selon lesquelles la commission propose un nombre de circonscriptions, étant donné que la mécanique prévue par le projet de loi détermine à elle seule le nombre de circonscriptions. Donc, la commission n'a pas de discrétion à cet égard-là.

La commission demande que le délai prévu pour la tenue des auditions publiques aux articles 24 et 24.1 inclue la tenue de la Commission de l'Assemblée nationale afin de réduire le temps nécessaire à la réforme de la carte électorale. Il s'est écoulé maintenant deux ans depuis le dépôt de notre projet préliminaire, et nous n'avons toujours pas été entendus par la Commission de l'Assemblée nationale.

Nous estimons que des choix cruciaux doivent être faits pour préserver le nombre de circonscriptions dans les régions de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent et de Chaudière-Appalaches. Il faut soit accepter de plus grandes inégalités de représentation, soit augmenter substantiellement le nombre de circonscriptions au Québec. Dans son mémoire, la commission fait part de son analyse de plusieurs propositions qui avaient été avancées par les intervenants en auditions publiques. Nous pensons que l'ajout de seulement quelques circonscriptions ne saurait permettre de préserver le nombre de circonscriptions dans ces régions. Il en faudrait beaucoup plus et il n'en résulterait pas nécessairement une plus grande équité de représentation. En outre, la mise en oeuvre de ce modèle se traduirait par une perte du poids politique de plusieurs régions du Québec. Cette préoccupation liée à la préservation des circonscriptions dans certaines régions éloignées traduit, en fait, un débat de principe: Quelle importance souhaitons-nous accorder à l'égalité du vote des électeurs?

Pour notre part, nous continuons de croire en la valeur intrinsèque de la loi telle qu'elle existe actuellement. L'article 15 de cette loi prévoit déjà que la commission doit tenir compte des communautés naturelles et des considérations d'ordre démographique, géographique et sociologique. Nous accordons à chacun de ces facteurs le poids qu'ils méritent de manière à créer des circonscriptions qui représentent des entités cohérentes et qui respectent l'égalité relative du vote des électeurs.

La loi permet en outre de tenir des auditions publiques sur les propositions de délimitation afin de prendre en considération l'opinion des acteurs concernés. Dans notre proposition révisée, aucune circonscription n'était retirée des régions les plus septentrionales du Québec, dont les circonscriptions d'immense territoire. Aussi, en vertu du pouvoir de dérogation que la loi lui accorde, la Commission de la représentation électorale était prête à faire des exceptions en ce qui concerne le Nord-du-Québec, l'Abitibi-Témiscamingue, la Gaspésie et la Côte-Nord.

Alors, maintenant, nous sommes disposés à répondre à vos questions.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. Blanchet, pour votre présentation. M. le ministre.

M. Dutil: Merci, M. le Président. Évidemment, tant et aussi longtemps que la population du Québec a augmenté dans toutes les régions du Québec, ce problème-là ne se posait pas. Et je m'explique. Moi, j'ai vu la Beauce être scindée en deux. Il y avait seulement une Beauce à l'époque, dans les années soixante-dix, et on s'est retrouvés avec deux Beauce. Puis ça n'a pas été unique à Chaudière-Appalaches, ça a été le cas dans bien d'autres endroits. Toutefois, ça n'empêchait pas ces régions-là de perdre un poids politique parce que les villes grossissaient davantage. Et ça ne créait pas d'opposition. En tout cas, ça ne créait pas dans la population l'espèce de friction que ça cause actuellement. Et ça me fait conclure la chose suivante: Ce n'est pas le poids relatif qui agace le plus les régions -- je ne dis pas que ça ne les agace pas -- ce n'est pas le poids relatif qui agace le plus les régions, c'est de perdre un nombre de représentants qui fait le travail auprès du gouvernement, là. Et je ne vous dis pas que j'ai une solution là-dedans, sur cette question.

Sous-jacent au mémoire qu'on nous présente, on nous parle de la proportionnelle, qui n'a rien à voir avec la question du découpage et qui n'a pas rien à voir non plus avec votre découpage. Votre découpage ne règle pas la question de la représentation des idées, il règle la question de l'égalité du nombre d'électeurs par circonscription. D'ailleurs, je me suis permis un petit exercice -- qui est inutile, mais je vous le mentionne quand même -- qui est de vérifier qu'est-ce que ça aurait fait si les députés avaient eu un droit de vote qui était proportionnel à leur population en Chambre depuis 1970, et je suis arrivé au chiffre très exact que ça n'aurait rien changé parce que la plupart des partis ont des petites circonscriptions et en ont des grandes, et que, donc, le calcul fait que, depuis 1970, depuis la réforme qui avait éliminé les comtés protégés, cette question-là ne se présentait pas. Avant, lors des comtés protégés, parce qu'il y avait, je pense, à l'époque, là... Je n'étais pas très vieux, mais ce que j'ai pu constater, c'est qu'à l'époque, à l'époque des comtés protégés, il y avait une concentration de votes pour un parti dans les comtés protégés et il y avait une concentration de votes pour un autre parti dans les comtés qui étaient beaucoup trop nombreux.

**(15 h 50)**

Oublions cette période-là. Je pense que 1970, la réforme des années soixante-dix, qui a éliminé les comtés protégés, a réglé la plus grande partie de cette question-là. Ma question, c'est: Comment on va finir par résoudre le problème que vivent les régions? Et vous avez regardé les extrapolations de la population dans les régions d'ici une certaine période, on sait qu'on a des projections jusqu'en 2050, projections tout à fait exactes... Il n'y a rien de plus exact que la science démographique. Si tu es né, tu es né, puis tu vis jusqu'à 80 ans, en moyenne. Puis, si tu n'es pas né, tu n'es pas là puis tu ne comptes pas. Alors ça, on peut savoir exactement. C'est ce que vous avez fait d'ailleurs, là, vous avez fait des tableaux à partir de ce qui allait se passer sur le plan démographique, à votre avis, avec la seule difficulté qui est la migration. On ne sait pas s'il va y avoir un solde positif ou négatif migratoire dans les régions, mais on sait qu'il y a moins d'enfants qu'il y avait puis, donc, il y a des bonnes chances que les régions continuent à perdre de la population, continuent à perdre des députés et continuent à être extrêmement frustrées de ça.

Ça fait une longue réflexion. J'aimerais avoir votre point de vue sur l'aspect de la proportionnelle, l'aspect de la représentation des régions et l'aspect de... Parce que je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous sur le poids relatif des régions. Les régions, ce n'est pas tant leur poids relatif -- je parle du populo, là, je parle des gens eux-mêmes -- qui les inquiète que de perdre un représentant à l'Assemblée nationale pour leur circonscription.

M. Blanchet (Marcel): Alors, très bien, M. le ministre. M. le Président, vous vous souviendrez que mon institution, du Directeur général des élections, avait produit un rapport sur un système proportionnel mixte suite à la commission parlementaire qui avait eu lieu sur un avant-projet de loi qui proposait un changement de mode de scrutin. Évidemment, cette nouvelle façon de définir le territoire à des fins électorales permettait une plus grande représentation des plus petits partis mais ne réglerait pas le problème du nombre de députés dans les régions.

Il faut bien s'entendre que, cette nouvelle méthode de calculer, en fait, le nombre d'électeurs par circonscription ou la façon de diviser le territoire, il y aurait eu, suivant les modèles qui avaient été proposés, 77 députés élus suivant la base uninominale à un tour, comme on a présentement, et une cinquantaine de députés sur une base proportionnelle. Les députés auraient été quand même dans les mêmes régions. Ça n'aurait pas augmenté le nombre de députés dans les régions. Donc, ce n'était pas la solution à ce problème-là. C'était une solution, ça, à assurer une meilleure représentation des élus à l'Assemblée nationale, comme vous l'avez mentionné plus tôt.

Évidemment, ce qu'il faut savoir, c'est qu'une carte électorale -- et c'est reconnu partout dans les démocraties modernes -- ça sert à diviser les territoires pour assurer une équité entre chacune des circonscriptions, d'avoir un nombre d'électeurs comparable d'une circonscription à l'autre pour que les députés qui les représentent aient une voix qui, en fait, soit semblable les uns par rapport aux autres. Alors, c'est ça, le système qui existe présentement. Et ce n'est pas uniquement ici, c'est le même, encore une fois, dans toutes les sociétés modernes occidentales où il y a une démocratie.

Alors, nous, on a une marge de manoeuvre de plus ou moins 25 %, là, quand on parle de représentation effective, c'est justement pour nous permettre de tenir compte de considérations géographiques, en fait de communautés naturelles. C'est pour ça qu'on peut aller plus ou moins 25 % par rapport à la moyenne. Mais, encore une fois, il faut essayer d'atteindre la moyenne, hein? Les États-Unis, c'est 5 %. Ici, au Québec, on va jusqu'à plus ou moins 25 %, et ça, quand on regarde... Vous avez vu, dans notre mémoire, aussi les différentes provinces canadiennes, on est parmi les plus élevées. Le Canada va jusqu'à plus ou moins 25 % aussi, mais, encore une fois, c'est la limite, ils ne se rendent jamais là. Nous, on se rend jusque-là. Et même on est prêts, dans notre prochain rapport, si jamais on avait l'occasion, finalement, de compléter nos travaux, à créer des exceptions pour aller au-delà du plus ou moins 25 %. Mais une carte électorale, encore une fois, ça sert à représenter des électeurs.

D'autres pays ont trouvé d'autres solutions. Les États-Unis, par exemple, on peut avoir un État comme, je ne sais pas, le Maine où il y a très peu de population, ils ont deux sénateurs. La même chose pour la Californie, ils en ont seulement que deux aussi. Alors, à ce moment-là, c'est leur façon, eux autres, de représenter les régions. Ce n'est pas que je veux suggérer de recréer une nouvelle chambre haute ici, au Québec, mais c'est une façon qui a été trouvée ailleurs d'assurer cette représentation des régions.

Mais, tant qu'on a le système uninominal à un tour qu'on a là et qu'on veut s'assurer que les députés ont tous une voix qui est comparable lorsqu'ils votent des lois au nom des électeurs qu'ils représentent, alors on n'a pas bien, bien d'autre choix que de constater que, malheureusement, les régions éloignées continuent de se dépeupler au profit des villes et des municipalités rurales qui entourent immédiatement les villes. Écoutez, dans les Basses-Laurentides-- Lanaudière, depuis 2001, il y a eu plus de 100 000 personnes. S'il y en avait eu quelques-uns en Gaspésie, ça aurait aidé. Mais ce n'est pas le cas. Au contraire, malheureusement, dans la région de la Gaspésie, la population a continué à diminuer. Alors, je ne sais pas si ça répond à votre question.

M. Dutil: Bien, oui. Bien, en fait, c'est parce que l'exemple américain nous revient souvent, là. Il faut quand même se rappeler que ça a été fait d'un seul coup au moment où ils refaisaient l'ensemble de leur système politique, et donc il y avait un levier. C'est beaucoup plus difficile de changer un système qui est déjà en place par une nouvelle façon que de rebâtir, et on bâtit de zéro, là. Et ils ont pu obtenir ce qu'ils appellent la Chambre des régions, les sénateurs, mais ce n'est pas une vraie chambre des régions, c'est une chambre des États, finalement. Il y a des États qui sont plus petits, mais très populeux, très denses et où la croissance de la population continue à se faire, bon, ils ont deux sénateurs. C'est leur formule. Elle a des avantages et des inconvénients, mais je ne peux pas voir comment on ferait un copier-coller, là.

M. Blanchet (Marcel): C'est un modèle.

M. Dutil: Je ne peux pas voir, là. C'est pas mal plus compliqué que ça, changer les choses. Mais vous n'avez pas dans vos cartons une solution pour régler le problème de la représentation versus le problème d'égalité des idées? Le problème de la représentation, moi... La proportionnelle mixte que vous proposez réglerait le problème des idées, sauf que ça diminue le nombre de députés élus par la population directement, et non pas sur les listes, à 77.

Je n'étais pas là quand ça s'est passé, mais j'essaie de m'imaginer ce qui a dû se passer dans les caucus de chacun des groupes politiques. Puis ça n'a pas dû être facile parce que tu agrandis les comtés de ces députés-là qui ont déjà un surcroît de travail, et je ne pense pas que la réponse, ce soit de dire que les députés de liste vont faire cette job-là à leur place. Eux autres sont choisis sur une liste, et donc vont se concentrer probablement plus sur le travail des idées et sur le travail de vote à l'Assemblée nationale. Alors, on pourrait partir un concours, celui qui va trouver la solution pour que les gens se sentent représentés par un nombre suffisant de députés et qu'il y ait une égalité des votes. Est-ce que c'est la quadrature du cercle?

M. Blanchet (Marcel): La principale...

M. Dutil: On cherche.

M. Blanchet (Marcel): Excusez-moi, M. le ministre. La principale difficulté, on le voit, c'est les distances, hein? On sait, effectivement, que les députés ont parfois beaucoup de difficultés à remplir adéquatement le rôle de représentant de la population, d'être à l'écoute de leurs électeurs dans les régions plus éloignées où il y a une très grande distance à parcourir, et, là-dessus, je pense que c'est intéressant ce qu'on a produit dans notre mémoire. C'est qu'il y a des régions qui sont pas mal plus étendues, des circonscriptions pas mal plus étendues que celles qui sont affectées par notre nouvelle proposition. La région de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent ou Chaudière-Appalaches, ce n'est pas les régions les plus étendues. Quand on pense, par exemple, à l'Abitibi, quand on pense à la Côte-Nord, il y a des députés là-bas, là, qui ont tout un trajet à parcourir pour réussir à rencontrer leurs électeurs, et là-dessus, encore une fois, la solution, possiblement, encore une fois, de leur accorder des ressources additionnelles pour leur permettre d'exercer adéquatement et convenablement leurs fonctions.

Parce que c'est une réalité, c'est un problème, et à laquelle il peut y avoir des solutions. Mais, de là à déséquilibrer, finalement, de façon importante la représentation à l'Assemblée nationale, encore une fois il faut faire attention. Il y a déjà l'arrêt Carter qui, en 1991, a traité de cette question. Et il faudrait se rappeler qu'en Saskatchewan il était prévu une marge de manoeuvre de plus ou moins 15 %, et là le Parlement de la Saskatchewan a voulu monter ça à plus ou moins 25 %, et c'est là que c'est allé devant les tribunaux. La Cour suprême a considéré qu'on pouvait accepter, finalement, d'aller jusqu'à plus ou moins 25 % dans des circonstances bien spéciales, qu'il fallait justifier. Mais c'était une décision partagée en plus, il y a six juges qui étaient en accord avec cette décision puis il y en avait trois, quand même, qui étaient dissidents. Il y a eu d'autres causes aussi, à l'Île-du-Prince-Édouard et dans les Territoires du Nord-Ouest, sur cette question, effectivement, où on voulait avoir des marges de manoeuvre qui allaient au-delà des limites acceptables, et les législations en question ont été cassées. Alors, il faut faire très attention à ça.

Là-dessus, si jamais on va trop loin, on peut penser... Écoutez, je ne suis pas constitutionnaliste, mais on peut penser que d'aucuns pourraient attaquer la nouvelle loi, et peut-être même avec succès, si, effectivement, on s'écarterait trop du plus ou moins 25 %. Et je vous disais tantôt que ça pourrait aller jusqu'à moins 60 % et à plus 35 %, c'est... à mon avis, c'est dangereux sur le plan juridique.

M. Dutil: Oui. À votre avis, si on voulait mettre en place le système proportionnel mixte que vous proposez, est-ce que la population serait d'accord avec ça? Quelle serait l'opinion de la population, à votre avis?

M. Blanchet (Marcel): D'une part, une petite mise au point, ce n'est pas vraiment une proposition que, nous, nous avions faite. On nous avait demandé d'analyser la situation, et effectivement, quand on regarde le mémoire que nous avions produit il y a deux ans, manifestement il y avait un modèle qui ressortait davantage pour assurer une meilleure représentation de la population, donc des idées de la population, les plus petits partis auraient eu davantage droit au chapitre, compte tenu du nombre d'électeurs qui votent pour eux. Mais, effectivement, la population, on a cru comprendre, effectivement, qu'il y avait quand même un mouvement, qui existe encore d'ailleurs, qui favorisait la mise en place d'un système comme celui-là. Ça, c'est un débat public, politique et populaire qui doit avoir lieu pour s'assurer effectivement que, si jamais c'est mis en place, il y aurait un consensus large sur cette question-là.

Vous savez que c'est un système qui existe dans bien des endroits. L'Allemagne, ça fait depuis l'après-guerre qu'ils ont un système comme ça. Il y a plusieurs pays qui l'ont adopté encore assez récemment. On pense à la Nouvelle-Zélande, on pense à des États comme l'Écosse, en Royaume-Uni, qui ont adopté un système semblable, d'autres endroits qui ont trouvé que c'était une meilleure façon d'assurer une meilleure représentation à leur Parlement.

M. Dutil: La réputation que ça avait au début, de ces systèmes-là, c'est que ça rendait les gouvernements instables, mais on se rend compte aujourd'hui que, dans ces pays-là, ils ont des gouvernements stables de coalition qui ont l'air de fonctionner correctement sans...

**(16 heures)**

M. Blanchet (Marcel): À tout événement, en Allemagne, ça fonctionne depuis longtemps. On comprend, finalement, quand il y a une élection, des fois ça prend quelques jours d'ajustement. Mais, encore une fois, une fois que le gouvernement est en place, ça m'a tout l'air que ça fonctionne très bien.

M. Dutil: O.K.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va, M. le ministre?

M. Dutil: M. le Président, merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui. Merci, M. le Président. M. le ministre, chers collègues. M. Blanchet et les gens qui vous accompagnent, bienvenue, puis merci d'être avec nous aujourd'hui.

Moi, je trouve, votre travail n'est vraiment pas facile, en tout cas. Tantôt, vous nous avez parlé de... Je ne sais pas si c'est des principes ou des critères, mais le premier étant l'égalité des votes à travers les électeurs. Vous nous avez aussi parlé du poids relatif des régions, que vous essayez, en tout cas, de contenir à l'intérieur d'un nouveau dessin de la carte. Évidemment, vous devez appliquer la loi en plus. Lorsque vous faites une carte électorale, c'est lequel de ces critères-là qui est le plus important parce qu'un critère vient en compétition un peu avec l'autre, le poids relatif d'une région par rapport au nombre d'électeurs dans cette même région? Alors, j'aimerais ça vous entendre là-dessus.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, là-dessus, c'est intéressant parce que la loi, telle qu'elle existe actuellement, prévoit que le critère numérique est le critère fondamental, il faut assurer d'abord une représentation équitable sur le plan numérique de la population. Et c'est là qu'est arrivée finalement la fameuse cause Carter, là, qui est allée jusqu'en Cour suprême, qui nous a dit: Bien là, il faut que vous teniez compte aussi de d'autres facteurs, la géographie, l'histoire, en fait, les communautés naturelles, pour pouvoir, en fait, assurer une représentation équitable de la population. Et, là-dessus, la cour a reconnu qu'en allant à plus ou moins 25 % de la moyenne de la province on pourrait rencontrer ce deuxième objectif. Donc, premier critère, le critère numérique, qui est fondamental pour assurer une équité, et on nous donne une marge de manoeuvre de plus ou moins 25 % pour tenir compte justement de ces autres éléments que sont, en fait, l'histoire, la géographie particulière des lieux et, encore une fois, les autres facteurs humains, là, qui peuvent entrer en ligne de compte, notamment les communautés naturelles. Alors, c'est comme ça que c'est fait.

Puis, encore une fois, le critère numérique est toujours le premier critère à considérer parce qu'on veut assurer une représentation équitable des électeurs par leurs députés pour ne pas qu'un député, en fait, représente très peu de population, alors qu'un autre en représente beaucoup puis a quand même uniquement un droit de vote. Alors, c'est ça qu'il faut prendre en considération.

M. Marsan: Et, avec votre permission, M. le Président, le 25 %... plus ou moins 25 % qui est par rapport... d'un comté par rapport à un autre, c'est ça, est-ce que c'est un plancher ou si c'est un maximum pour vous? Est-ce que ça peut aller plus loin ou est-ce qu'il faudrait peut-être diminuer ce pourcentage-là?

M. Blanchet (Marcel): Compte tenu du territoire du Québec, qui est très étendu et qui contient des régions très peu éloignées, je demeure convaincu que, quant à moi, la marge de manoeuvre de plus ou moins 25 % est acceptable et serait entérinée, je pense, positivement par un tribunal si jamais un tribunal avait à en décider. On peut même aller au-delà, et on y est allé. On se souviendra, effectivement, lors de la carte de 2001, il y a une circonscription... au-delà de celle des Îles-de-la-Madeleine, qui, comme on le sait, est protégée par la loi, mais on reconnaît depuis longtemps la circonscription d'Ungava comme étant une circonscription pouvant faire l'objet d'une exception qui va bien au-delà du 25 %. Et on se souviendra que, la carte 2001 aussi, on en avait créé quatre, les quatre circonscriptions de la Gaspésie allaient au-delà du moins 25 %, et, là-dessus, on était à l'aise à ce moment-là pour les reconnaître.

Cette fois-ci, si jamais on avait la chance de produire notre nouvelle proposition, qui fait suite aux auditions publiques qu'on a eues, on serait même prêts à en créer six encore une fois, il y en aurait six. Il y aurait les Îles-de-la-Madeleine. Il y aurait effectivement l'Ungava, ça va de soi. Il y aurait, en fait, Gaspé. Il y aurait Abitibi-Est et Abitibi-Ouest. Et il y aurait René-Lévesque. Alors, c'est les circonscriptions qu'on serait prêts à reconnaître comme étant des circonscriptions d'exception si jamais on avait la possibilité de compléter nos travaux, et ces circonscriptions vont toutes au-delà du moins 25 %.

M. Marsan: O.K. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? D'autres questions, messieurs?

M. Blanchet, une petite question simple. Dans les critères que la commission Carter a donnés, vous a permis d'évaluer, comme l'historique, l'étalement du territoire, expliquez-moi comment ça se fait qu'à la lecture, souvent, d'une proposition que vous faites sur la carte électorale les gens sont surpris de cette lecture-là? Il y a des gens qui sont venus témoigner en commission parlementaire qui étaient surpris des résultats. Deux éléments là-dessus, l'effet domino, souvent, qu'il y a d'une circonscription à l'autre, ce qui crée une réalité différente que les gens s'attendraient par rapport à la proposition que vous mettez en place... Donc, j'aimerais quelques commentaires là-dessus.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, l'effet domino est très présent, hein? Lorsqu'on est dans des régions où il peut y avoir des circonscriptions plus populeuses et d'autres, à côté, moins populeuses, ça va assez bien, on prend des électeurs dans la circonscription plus populeuse, et on les amène dans celle qui l'est moins, et on équilibre le tout. Mais, quand on est dans des régions où, partout, ça diminue... C'est ce qui s'est passé, là, lors de la dernière période de révision de la carte, c'est qu'on est parti... Finalement, si on passe de la région de Beauce-Appalaches en descendant jusqu'en Gaspésie, dans toutes ces régions-là la population a diminué. Alors, ce n'était pas possible de dire: Bon, on va en prendre dans la circonscription d'à côté pour compléter, finalement, le manque d'électeurs qu'il y a dans une autre circonscription, ça a diminué partout.

Alors, c'est pour ça qu'il a fallu se résoudre, et vraiment tristement, là, ce n'est pas de gaieté de coeur qu'on fait ça, là... il a fallu réaliser qu'on n'avait pas d'autre choix que d'enlever des circonscriptions dans les régions qui se dépeuplaient pour les mettre dans des régions où ça augmentait d'une façon fulgurante, la Montérégie, Basses-Laurentides, Lanaudière, où, là, ça explose. Puis le maximum est de 125, alors, là-dessus, l'autre hypothèse... Ce n'est pas en augmentant de trois, ou quatre, ou cinq circonscriptions qu'on viendrait régler le problème, là. Par exemple, pour régler le problème de la Gaspésie, pour amener la Gaspésie à autour du moins 24 %, là, il faudrait monter à 150 circonscriptions, puis on serait à la limite encore, là. Alors, ce n'est pas une solution.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va. Merci, M. Blanchet. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Merci, M. Blanchet ainsi que les commissaires qui vous accompagnent, que j'ai eu la chance de voir à Chicoutimi lors de vos consultations. Donc, c'est un plaisir de vous revoir ici, à Québec.

Je trouve étonnant qu'on parle de 2050, sur des projections démographiques qui ont d'ailleurs été modifiées au moment où on se parle. Je le sais parce que je les ai vues encore dernièrement. On a un plan d'urbanisme à Chicoutimi, il y a des... À Saguenay, il y a des courbes qui avaient été prévues en termes de diminution qui ne se sont pas représentées. La Gaspésie vient d'annoncer d'ailleurs que, pour la première fois, en 2008, elle a vu le nombre de citoyens augmenter -- c'était la première fois, pas de façon importante -- alors que les analystes, les statisticiens, plutôt, prévoyaient une diminution continuelle.

Ceci dit, ce que je comprends de ce que vous nous mentionnez sur le nouveau rapport, donc celui que vous avez fait suite aux consultations, c'est que vous régleriez la plupart des problèmes en termes de représentation. Et là le ministre vous oppose à ça un point de vue théorique qui est celui: Qu'est-ce qu'on va faire en 2050? Est-ce que vous ne pensez pas qu'il serait beaucoup plus utile justement, ici, d'avoir le rapport en question -- et vous en énoncez, là, des conclusions très claires tant sur la Côte-Nord que sur la Gaspésie et l'Abitibi -- et, à ce moment-là, de parler autour du concret, réellement quels seront les impacts de l'application de la nouvelle carte électorale?

M. Blanchet (Marcel): M. le Président, M. le député, effectivement, vous comprendrez que, depuis nos auditions publiques, qui se sont terminées en juin 2008, nous avons continué de travailler et nous avons, bien sûr, entre les mains ce que j'appellerais un document de travail. Ça ne peut pas être notre nouveau rapport qui pourrait, en fait, faire l'objet du débat de cinq heures dans les cinq jours du dépôt, là, parce que la Commission de l'Assemblée nationale, qui devait traiter de notre rapport préliminaire, n'a jamais eu lieu. Donc, dans un premier temps, pour pouvoir compléter les travaux, pour pouvoir suivre l'ordre normal des travaux, il faudrait que la Commission de l'Assemblée nationale invite la Commission de la représentation pour qu'on puisse discuter du rapport préliminaire du mois de mars 2008. Après cette étape, la Commission de la représentation pourrait produire son nouveau rapport qui, celui-là, devrait faire l'objet d'un débat de cinq heures dans les cinq jours du dépôt et, ensuite, être adopté comme rapport final dans les 10 jours qui suivent.

Mais bien sûr que nous avons aussi entre les mains un document de travail qui reflète l'état de notre réflexion à ce moment-ci, là. Encore une fois, le document de travail que nous avons pourrait être modifié suite à l'audition...

M. Bédard: Le débat de cinq heures.

M. Blanchet (Marcel): ...de la Commission de l'Assemblée nationale qui n'a toujours pas eu lieu.

M. Bédard: Parfait.

M. Blanchet (Marcel): Mais nous avons ce document.

M. Bédard: Donc, comme vous l'avez, M. le Président, et de consentement, en tenant compte du fait que la loi serait respectée quand même, est-ce que vous...

M. Blanchet (Marcel): Assurément, c'est un document de travail.

M. Bédard: Est-ce que vous pourriez, de consentement, déposer ce document pour que nous ayons, là... qu'on ne parle plus de façon théorique, mais qu'on ait réellement la situation telle que vous l'avez réglée à la lumière des représentations qui vous ont été faites à la grandeur du Québec? Seriez-vous disposé à le faire?

M. Blanchet (Marcel): Tout à fait. Écoutez, ce qu'on vous remettrait, ce n'est pas notre deuxième rapport dans sa version légale...

M. Bédard: Non, non, exactement, le document de travail.

M. Blanchet (Marcel): ...c'est un document de travail qui fait état de notre réflexion. Bien sûr qu'on a ça. Je suis tout à fait disposé à vous le déposer s'il y a consentement.

M. Bédard: Parfait. Bien, je demanderais, effectivement, le dépôt, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Est-ce qu'il y a consentement?

M. Dutil: ...une réflexion. M. le Président, est-ce que c'est possible? J'aimerais consulter deux minutes, là.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Je peux... Écoutez...

M. Bédard: On peut suspendre deux minutes.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Je peux suspendre quelques instants, là, vous donner le temps de réflexion, là. Il faut comprendre que, lorsque vous consentez... Vous connaissez tous les tenants et les aboutissants, lorsque vous consentez au dépôt du document, le document va devenir public. Par contre, le document peut être distribué à l'intérieur de la commission s'il n'y a pas consentement. Il y a dépôt à la commission, mais vous auriez le loisir aussi de le consulter. Donc, ça va? Donc, nous allons suspendre les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 10)

 

(Reprise à 16 h 13)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, nous allons reprendre nos travaux. Donc, je vous rappelle qu'il y avait eu demande de dépôt de document et j'ai demandé s'il y avait le consentement de l'Assemblée. M. le ministre, est-ce qu'il y a consentement?

M. Dutil: Alors, M. le Président, je voudrais retarder cette position-là à plus tard. Il faudrait que je puisse analyser davantage avec d'autres personnes. Alors, je refuserais le consentement pour l'instant, tout en n'étant pas fermé -- on a encore plusieurs jours de discussion ici, en commission parlementaire -- à donner une décision définitive plus tard.

M. Bédard: ...M. le Président...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui.

M. Bédard: ...moi, j'aimerais bien travailler sur ce document-là. Je ne comprends pas l'idée qu'on peut repousser. Le ministre n'aura pas plus accès au document que moi -- en tout cas, j'espère -- d'ici ce temps-là, donc... C'est un document de travail. Ce n'est pas la décision finale de la commission, c'est un document de travail. Je ne comprends pas pourquoi on repousserait le dépôt d'un document, là. Moi, c'est la première fois que je vois ça dans l'Assemblée, là, refuser le dépôt d'un document à une instance, là, encore plus le DGE. Moi, je peux vous dire, je n'ai jamais vu ça, là. À l'Assemblée, il n'y a jamais personne qui a refusé le dépôt d'un document.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): M. le député de Chicoutimi, je comprends votre argumentaire, là. Ce que je veux que vous compreniez bien, c'est qu'il y a possibilité que le DGE, par sa propre initiative, décide de passer les documents aux gens sans qu'ils soient déposés à la commission. Ça veut dire que la seule distinction qu'il faut en faire, c'est que le document est distribué aux députés comme n'importe quel document, mais il n'est pas déposé, donc il n'est pas public, et on ne peut pas aller sur le site Internet pour le consulter, etc. Mais le document peut être distribué.

M. Bédard: ...d'accord avec ça?

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Bien là...

M. Bédard: Il n'a pas le choix, c'est le règlement.

M. Dutil: Ce que je comprends, c'est que c'est le règlement. Si le DGE décide de le faire de cette façon-là et que c'est sa prérogative de le faire, je n'ai pas à intervenir.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): ...suspendre quelques instants sur ce point-là pour être sûr.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

 

(Reprise à 16 h 16)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, je vais reprendre les travaux. Donc, je vous rappelle ce que je vous expliquais avant même qu'on n'ait suspendu les travaux à deux reprises, les tenants et les aboutissants de la chose. Je vais vous dire, M. le Directeur général des élections, si vous prenez l'initiative de déposer les documents en cette commission, vous avez le droit de le faire. Je veux que vous compreniez bien que, maintenant, à partir de ce moment-là, compte tenu que le ministre a dit qu'il n'était pas d'accord avec le fait de... le fait qu'il soit... qu'il y ait consentement pour que le document soit déposé, ça ne veut pas dire que les parlementaires n'ont pas accès à ce document-là. Ça veut dire que, au niveau public, il ne sera pas sur le site Internet de la commission parce qu'il ne sera pas déposé à la commission, mais les parlementaires vont... Est-ce que vous voyez la distinction? Donc, comme le dit si bien le député de Chicoutimi -- pour éclairer ma décision, bien, effectivement, on en a discuté, là -- on ne peut pas empêcher personne de déposer des documents pour éclairer le jugement des parlementaires qui sont ici présents. Ça va?

M. Bédard: Plus simplement, je... pas plus simplement, mais, pour compléter, tout ce qu'on vous demande finalement, c'est de remettre une copie du document à ceux qui voudront le prendre, tout simplement. Et il ne sera pas sur le site Internet du chose... je n'ai pas de problème, mais on va pouvoir en parler de façon moins publique, là.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. Toujours... Je vais permettre à M. Blanchet d'intervenir, là, puis je vais...

M. Blanchet (Marcel): Oui, M. le Président. Évidemment que je n'ai pas du tout d'objection à déposer ce document de travail, qui est le résultat de notre réflexion à date, et bien sûr qu'il s'agit là d'un document qui pourra éclairer les parlementaires sur la suite des choses. Alors, on en a des copies en nombre suffisant.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): J'avais présumé ça, M. Blanchet. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Oui. Écoutez, je suis content de la tournure des événements parce que je pense que, si on veut faire un projet de loi le plus représentatif, si vous voulez, des électeurs du Québec, bien je pense qu'il faut se servir de tout ce que... les travaux que vous avez faits. Vous avez des employés qui ont travaillé là-dessus pendant nombre d'années, vous avez sûrement des pistes de solution qu'on ne voit... Si on n'a pas ces documents-là, on ne les verra jamais. Alors, quelle sorte de projet de loi qu'on va faire? Moi, je pense qu'il faut se servir de toute l'expérience que vous avez mise là-dedans pour essayer de faire un bon projet de loi.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. Merci, M. le député de Beauce-Nord. Donc, je vais demander au page, s'il vous plaît, de distribuer les documents. Uniquement aux parlementaires, s'il vous plaît.

Donc, nous étions à la période... en fait, à l'opposition. M. le député de Chicoutimi.

M. Bédard: Merci, M. le Président. Donc, je pense qu'il va être profitable aux membres de la commission et à tout le monde, finalement, qu'on parle moins de façon théorique et que ce soit clairement, je vous dirais, dans le traitement de la loi actuelle, quelles sont les réflexions suite à ce que des milliers de personnes, il faut le dire, ont représenté au Directeur général des élections. Et, d'ailleurs, je pense que l'ensemble des gens qui sont venus ici ont demandé le dépôt de ce rapport. Donc, on est bien heureux, maintenant, d'avoir le document de travail. Ce qu'on souhaite maintenant, comme la plupart des groupes, c'est qu'on passe à l'autre étude, qui est celle en commission parlementaire.

Maintenant, je fais le souhait, M. le Président, et je pense qu'au niveau démocratique que ce voeu-là sera respecté par le gouvernement... Plus spécifiquement, M. le Président, sur l'arrêt Carter. Est-ce que vous avez des services juridiques au sein du Directeur général des élections?

M. Blanchet (Marcel): Vous posez la question à savoir si on a un service juridique?

M. Bédard: Oui, si vous avez un service juridique.

**(16 h 20)**

M. Blanchet (Marcel): Bien sûr, oui. Certainement, oui.

M. Bédard: Lorsqu'il y a contestation de la Loi électorale, est-ce que c'est vous, à l'interne, qui faites les représentations ou vous donnez des mandats?

M. Blanchet (Marcel): C'est le ministère de la Justice du Québec qui défend les lois adoptées par le Parlement devant les tribunaux. Donc, en pareille matière, quand la Loi électorale est attaquée -- et c'est arrivé notamment, on le sait, en matière de financement particulièrement -- alors c'est le Procureur général du Québec qui, en fait, défend la validité de la loi devant les tribunaux. Mais on les soutient, ça va de soi.

M. Bédard: O.K. Donc, vous avez un soutien, un service juridique qui...

M. Blanchet (Marcel): Absolument.

M. Bédard: Parce que j'ai lu votre rapport, j'ai lu aussi l'arrêt Carter, j'ai vu les balises qui y sont données et les cas limitatifs, et, sans jouer à l'apprenti juge, là, un jugement à six contre trois sur une balise de plus ou moins 25 %, en tenant compte de la réalité de la Saskatchewan, alors que, nous... Et là ça exclut les comtés, je vous dirais, exceptions, là. Donc, dans les comtés qui seraient applicables de façon générale à la loi, on se retrouverait avec un moins 60 % et un plus 35 %, et pas dans seulement un cas en plus. Bien, évidemment, là, plus 35 %, moins 60 %, mais il y a même plusieurs comtés qui seraient touchés par ces réalités-là. C'en fait une règle de trois particulière. Mais on parle ici d'un principe constitutionnel qui est un des fondements de la démocratie, je pense que nos chances ne sont pas très bonnes. Est-ce que vous avez évalué les conséquences -- elles sont même quasiment nulles, pour tout dire, là -- est-ce que vous avez évalué les conséquences suite à une décision de la Cour suprême de rendre inconstitutionnelle notre Loi électorale? Quelles sont les conséquences pour vous et pour la démocratie?

M. Blanchet (Marcel): M. le Président, ça obligerait effectivement la Commission de la représentation électorale de reprendre ses travaux très rapidement sur la base des critères qui pourraient être déclarés par le jugement de la cour. On n'aurait pas d'autre choix à ce moment-là, comme c'est arrivé dans le passé à propos de d'autres décisions à caractère constitutionnel, d'ajuster la loi en conséquence et de donner le rôle à la Commission de la représentation électorale de refaire ses devoirs en appliquant les règles qui ont été établies par la cour.

M. Bédard: Est-ce que la cour pourrait aller jusqu'à donner une limite de temps quant à se conformer à son jugement, comme il l'a fait souvent d'ailleurs, il donne un temps au gouvernement pour se conformer à son jugement, donc...

M. Blanchet (Marcel): On peut penser que c'est la solution qui serait proposée, hein? C'est parce que, du jour au lendemain, de déclarer inconstitutionnelle une loi comme la Loi électorale sur ces matières-là... En fait, ça prend quand même un certain temps avant de se retourner de bord et d'adopter des mesures correctrices pour donner suite au jugement et assurer sa validité constitutionnelle, pour ensuite procéder, évidemment, à un découpage du Québec à des fins électorales qui soit conforme à ces nouvelles règles.

M. Bédard: Je comprends aussi, M. le Président... M. le Directeur général des élections... M. le Président, pardon -- j'avais le bon réflexe -- vous avez fait une étude, évidemment, des conséquences de la loi actuelle sans parti pris, avec l'indépendance que vous avez, et ce que je constate très clairement, c'est que le poids de beaucoup de régions serait amoindri dans l'application de la loi actuelle. Et je vous citerais comme exemple, par exemple, le Saguenay--Lac-Saint-Jean. La Côte-Nord aussi verrait son poids amoindri, l'Abitibi. Donc, ces régions importantes, si on laisse la loi s'appliquer, va voir son poids relatif diminuer par rapport à la situation actuelle. Alors, on arriverait au résultat inverse que ce qu'on dit dans le projet de loi.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, M. le Président, M. le député, ce qui arriverait effectivement, c'est que, si on a... Actuellement, on a 125 circonscriptions. La région de la Gaspésie... Prenons l'Abitibi, il y a trois circonscriptions. Alors, c'est trois sur 125, alors que, là, ça serait trois sur 133, 134, 137. Alors, le poids, évidemment, politique de la région diminuerait au fur et à mesure où on augmenterait le nombre de députés, ça va de soi. Parce que, ces nouveaux députés, on s'entend qu'ils ne seraient pas dans ces régions, ils seraient plutôt dans les régions à très forte croissance démographique que sont Lanaudière, la Montérégie et les Basses-Laurentides.

M. Bédard: Donc -- et là je vais finir ma liste -- ce que vous dites à la page 26, le Saguenay--Lac-Saint-Jean, la Mauricie, l'Estrie, Montréal, l'Abitibi-Témiscamingue, la Côte-Nord, Laval, Lanaudière et la Montérégie verraient leur poids diminuer dans la proposition actuelle de la loi.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, ça diminuerait là où il y aurait... Le nombre de députés demeurerait stable dans ces régions où il y a très faible croissance, où même il y a décroissance, il augmenterait dans les régions où il y a une forte croissance. Donc, nécessairement, en fait, le poids politique des régions qui ne bougeraient pas, dans lesquelles il n'y aurait pas augmentation du nombre de députés... verraient leur poids diminuer.

M. Bédard: Avec les chiffres que vous avez, je comprends aussi... M. le Président, je comprends, à la page 17 de votre rapport, qu'à la prochaine élection le nombre de députés à l'Assemblée nationale augmenterait de neuf, à 134 de façon automatique, à moins qu'il y ait une poussée démographique formidable, là, qui pourrait l'amener à 135. Mais, disons, ce que vous avez comme chiffres actuellement, vous arrivez à la conclusion mathématique -- parce que c'est purement mathématique -- qu'il y aura 134 députés, donc neuf députés de plus, à la prochaine législature.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, M. le Président, M. le député, si jamais, effectivement, le projet de loi n° 78 était adopté tel quel, actuellement il y aurait... on passerait de 125 à 134 députés. 133 au moment où on se parle, mais, d'ici la fin du printemps, on serait à 134.

M. Bédard: M. le Président, vous faites mention dans votre mémoire, à la page 29, que l'ajout des critères qui est proposé dans le projet de loi en termes de délimitation de la carte électorale aurait des effets néfastes... pas néfastes, disons non souhaitables, par exemple, et on a un cas précis, parce qu'on veut ajouter les délimitations des MRC, la délimitation... donc principalement les MRC et commissions scolaires, mais MRC est peut-être celui où ça fait le plus problème, mais, je veux dire, à la limite même les commissions scolaires. Je vous fais le raisonnement suivant. Les commissions scolaires et les MRC peuvent être changées au gré du gouvernement. Donc, un gouvernement mal intentionné pourrait, à la limite, exclure une municipalité d'une MRC, donc avoir un impact sur ce que vous avez à déterminer en termes de limitation d'un comté. Est-ce que je fais une lecture juridiquement correcte de la proposition actuelle du projet de loi?

M. Blanchet (Marcel): M. le Président, M. le député, ce qui est prévu dans le projet de loi n° 78, c'est que la division du territoire à des fins électorales serait faite à partir des régions administratives. Il y en a 17 actuellement, et les régions administratives, ce n'est pas campé dans la loi, c'est une décision, un décret du gouvernement qui peut être changé suivant des considérations qui appartiennent au gouvernement. Donc, si on change les limites d'une région administrative, manifestement cette décision-là aura un impact sur la carte électorale parce qu'il faut s'assurer que les circonscriptions sont toutes dans la même région administrative. Alors, c'est un impact majeur.

En ce qui concerne les MRC, encore une fois, là aussi, hein, ce sont des créatures qui peuvent varier, dont les frontières peuvent varier dépendamment de décisions gouvernementales, et les commissions scolaires également. Mais, encore une fois, le projet de loi, à cet égard-là, pose certaines difficultés parce que c'est difficile, c'est même impossible de respecter à la fois les régions administratives, les commissions scolaires, les municipalités, les MRC parce que ces entités géographiques là ne correspondent pas, ne se superposent pas exactement non plus.

M. Bédard: Bien, on a eu un exemple concret d'une municipalité en début... un peu après que vous soyez venu témoigner une première fois, qui n'est pas dans la bonne MRC, mais qui veut rester dans la MRC, mais qui veut se retrouver dans l'autre comté, et je lui ai demandé effectivement... À ce moment-là, vous, à l'intérieur des critères de la loi tels qu'ils sont actuellement, vous tenez compte de ces réalités-là et vous avez une proposition qui, grosso modo, tient compte des liens naturels, finalement, sans vous empêtrer dans des situations qui sont d'autre nature.

M. Blanchet (Marcel): Effectivement, M. le député, il y a des endroits où on nous a fait valoir que c'était très important de respecter les limites des MRC. Dans d'autres endroits, on nous a dit que c'étaient d'autres considérations que celle des limites des MRC qui devaient prendre le dessus, et vous allez certainement entendre des témoignages ici, en commission parlementaire, à cet égard-là. Alors, la commission, lorsqu'elle tient ses auditions publiques, tient compte de ça. Bien sûr, on essaie de respecter le plus possible les municipalités locales, et les MRC, et, dans une certaine mesure, les commissions scolaires lorsque c'est possible. Mais, encore une fois, il peut y avoir des cas d'espèce, des situations particulières qui ont amené jusqu'à maintenant la commission à passer outre à la demande même des personnes concernées par notre proposition. Donc, on a une marge de manoeuvre actuellement qui ne serait plus la même avec le projet de loi.

M. Bédard: Dans les lois électorales -- et je reviens sur l'arrêt Carter -- dans les lois électorales des autres provinces, est-ce que vous avez... est-ce que certains ont tenté d'augmenter cet écart-là de plus ou moins 25 %?

M. Blanchet (Marcel): C'est vraiment le cas de la Saskatchewan, hein? En 1991, ils ont voulu augmenter, et, là-dessus, il y a des gens qui n'étaient pas contents qui sont allés jusqu'en Cour suprême. On voulait passer de plus ou moins 15 % à plus ou moins 25 %, la Cour suprême a reconnu que c'était valable.

M. Bédard: Mais plus que 25 %... plus ou moins 25 %...

**(16 h 30)**

M. Blanchet (Marcel): Oui. Vous avez effectivement dans le mémoire, à la page 56, les critères numériques de chacune des provinces. Le Québec, on dit, c'est plus ou moins à 25 %. C'est la même chose en Alberta, en Colombie-Britannique, à l'Île-du-Prince-Édouard, en Nouvelle-Écosse et en Ontario. Manitoba, c'est plus ou moins 10 %. Nouveau-Brunswick, c'est plus ou moins 10 %, Terre-Neuve-et-Labrador aussi. Puis Saskatchewan, c'est maintenant plus ou moins 5 %.

M. Bédard: Donc, évidemment, à moins 60 %, plus 35 %, on est pas mal dans une catégorie à part, là, qui est du moins... On n'a aucune décision juridique à ce niveau-là, mais il est évident qu'effectivement on serait dans une catégorie, je pense, où personne ne s'est risqué à aller.

Ce que je souhaiterais, M. le Président, de la part du Directeur général des élections, sur les possibilités de la loi actuelle de, je vous dirais, de consacrer des exceptions... Ce que je comprends du projet que vous avez actuellement en préparation, vous avez la possibilité d'utiliser ce pouvoir exceptionnel de créer des exceptions. Est-ce qu'il est utile d'ajouter des critères à ce pouvoir pour s'assurer, finalement, que nous respectons les cadres fixés par la Cour suprême ou la loi, telle qu'elle est actuellement, vous donne cette latitude nécessaire pour créer les exceptions telles que vous souhaitez les faire?

M. Blanchet (Marcel): La loi actuelle prévoit la possibilité d'avoir des exceptions au-delà du plus ou moins 25 % depuis fort longtemps, et cet aspect-là n'a jamais été attaqué par les tribunaux. La loi, par ailleurs, précise qu'il faut que la commission justifie les exceptions. Ce n'est pas pour rien, finalement, que, lorsqu'on a déposé notre rapport préliminaire, il y avait l'exception de l'Ungava, que tout le monde reconnaît, il y a celle des Îles-de-la-Madeleine, qui est consacrée par la loi, mais il n'y en avait pas d'autre. On ne pouvait pas commencer... présenter un projet préliminaire, une carte préliminaire en prévoyant d'avance des exceptions. Pour ça, il faut argumenter, il faut donner des motifs par écrit dans notre décision finale pour pouvoir justifier des exceptions, et, ces motifs, on les a à la suite des auditions publiques. Les auditions publiques, ça sert à ça.

Écoutez, on donne l'exemple... je vous parlais de l'Abitibi. L'Abitibi, c'est trop grand, puis, en même temps, il n'y a pas assez de monde pour avoir, en fait, trois circonscriptions, mais il y en a trop pour en avoir deux. Alors là, en fait, on ne peut pas... On comprend les distances qu'il peut y avoir entre les municipalités principales de l'Abitibi et les régions plus au sud. Donc, ça nous apparaît évident qu'une région comme celle-là... En fait, on peut justifier qu'Abitibi-Est et Abitibi-Ouest soient exceptions, étant donné l'immensité du territoire à couvrir et le peu d'électeurs qu'on y retrouve. Une solution aurait été de prendre Rouyn-Noranda, la circonscription de Rouyn-Noranda, pour prendre là des électeurs pour équilibrer Abitibi-Est et Abitibi-Ouest. Ça n'avait pas de bon sens, on aurait été obligé d'entrer dans le centre-ville de Rouyn-Noranda pour pouvoir faire ça.

Donc, la marge de manoeuvre qu'on a, c'est notre pouvoir d'exception qui est reconnu à la commission par la loi. Et ça n'a pas encore été attaqué, et je pense que, si ça l'était, on aurait des bonnes chances de s'en sortir, étant donné que c'est pour des motifs vraiment exceptionnels, comme celui que je viens de vous décrire, qui nous justifient, finalement, de faire des exceptions.

M. Bédard: Et j'ajouterais même... Vous me permettrez de dire que ça ajouterait le fait que ce soit pris par une autorité indépendante. Je suis convaincu qu'aussi ça pourrait avoir un impact sur la décision.

Est-ce que c'est déjà arrivé, à votre connaissance, que le rapport du Directeur général des élections, pour son dépôt, soit retardé aussi longtemps?

M. Blanchet (Marcel): C'est la première expérience que j'ai, moi. Et, si je regarde le passé, effectivement c'est la première fois que le processus est bloqué aussi longtemps. Il y a eu dans le passé des législations adoptées pour prévoir que la commission ne pouvait pas commencer ses travaux avant une date précise. Notamment, après l'élection de 1998, normalement il devait y avoir dans l'année qui suit le dépôt d'une proposition préliminaire de carte électorale. Il y a eu une loi d'adoptée qui avait reporté d'un an le dépôt d'un tel rapport préliminaire, le début des travaux. Lorsque je suis arrivé en fonction, en 2000 -- c'était le premier mandat que j'ai eu à exercer en tant que président de la Commission de la représentation électorale -- le délai d'un an de suspension par l'Assemblée nationale, par loi, venait de se terminer. Donc là, avec mes collègues commissaires de l'époque, on avait commencé à élaborer un projet de carte électorale qui a été rendu public l'année d'après, en 2001, et qui a finalement abouti à la carte qui est encore actuellement en vigueur.

Mais d'être retardé dans le processus comme tel parce qu'on n'a toujours pas eu audition devant la Commission de l'Assemblée nationale, ça, c'est la première fois qu'on vit une situation comme celle-là.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): ...député de Chicoutimi. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. J'ai le goût de vous poser la question qui tue -- on entend ça des fois. C'est pour quelle raison que le gouvernement ou le président de l'Assemblée nationale n'a jamais appelé votre rapport? Est-ce que quelqu'un... est-ce qu'il y a eu des fuites, et puis qu'ils ont pris connaissance du rapport, et qu'il n'était pas intéressant, ils n'ont pas voulu l'appeler? C'est pour quelle raison?

M. Blanchet (Marcel): J'aimerais beaucoup pouvoir répondre à cette question-là, M. le député, je ne le sais pas. Écoutez, encore une fois, j'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de chacun des partis politiques l'été dernier pour leur expliquer en gros les orientations que prenait la commission en ce qui concerne l'éventualité du dépôt d'un second rapport et j'avais finalement l'espérance que j'avais convaincu les parlementaires d'enfin nous inviter en Commission de l'Assemblée nationale pour qu'on puisse discuter du rapport préliminaire du mois de mars 2008, pour qu'on puisse ensuite continuer nos travaux, et malheureusement ce n'est pas ce qui est arrivé. Alors, je ne sais pas pourquoi.

M. Grondin: O.K. Alors, moi, j'ai... Admettons, le projet de loi n° 78, de la manière qu'on le voit, il n'y a pas grand chances qu'il soit légalement acceptable. Si on se fie, mettons, à... Quand on parle de l'arrêt Carter, qu'un autre, à un moment donné, a été bloqué, là, à plus ou moins 25 %, dans ce projet de loi là, on va avoir des plus 60 %, des moins 20 % ou l'inverse, ça veut dire que, ce projet de loi là, dans le fond, on travaille puis on est quasiment sûrs qu'il ne passera jamais l'aspect légal. Est-ce que vous voyez la même chose qu'on voit ou s'il va falloir changer les lois fédérales? Parce que ce n'est pas une loi... c'est une loi fédérale, c'est la Cour suprême.

M. Blanchet (Marcel): C'est une décision de la Cour suprême du Canada qui s'appuie sur la Charte canadienne des droits et libertés, qui consacre le droit de vote. Alors, écoutez, personnellement, je ne suis pas constitutionnaliste, et éventuellement ce serait au Procureur général du Québec de défendre la validité de la loi en question si jamais elle était adoptée avec les critères qu'on y retrouve présentement. Et je ne peux pas présumer de la décision que la cour rendrait, mais, à la lumière des décisions passées, on peut penser qu'il y a un risque.

M. Grondin: O.K. Bon, on n'a pas parlé beaucoup de financement. J'imagine que vous devez avoir regardé ça un peu. Parce qu'ici, dans la commission, on a rencontré plusieurs organismes qui parlent de financement politique, est-ce qu'on devrait tenir ça à 3 000 $ maximum, est-ce qu'on devrait baisser à 500 $, est-ce qu'on devrait baisser les dépenses électorales. Est-ce que vous avez travaillé dans ce sens-là?

M. Blanchet (Marcel): Certainement, M. le Président, M. le député. J'ai comparu à titre de Directeur général des élections, il y a deux semaines, pour justement la question du financement électoral, donc la partie du projet de loi qui traite du financement. Aujourd'hui, je rappelle que je suis ici à titre de président de la Commission de la représentation électorale pour traiter de la partie du projet de loi qui traite de la représentation électorale, mais évidemment, en tant que Directeur général des élections, oui, c'est bien sûr que nous sommes préoccupés par les règles de financement. Et, l'essentiel des mesures prévues dans le projet de loi n° 78 en ce qui concerne les règles de financement, nous sommes entièrement d'accord. Alors, un bon nombre de ces mesures, ce sont des mesures que nous avons nous-même recommandées. On en voudrait même plus et, effectivement, on espère bien que cette partie du projet de loi pourra être adoptée pour qu'on puisse avoir des règles encore plus rigoureuses en matière de financement politique.

M. Grondin: Et puis les délais? Je regardais dans le... à la page 35, vous parlez des délais. Admettons que le projet de loi, là... les étapes, il serait adopté ici, à l'Assemblée, s'il ne serait pas contesté à nulle part, est-ce que le délai pour l'appliquer serait valable pour les prochaines élections, si les élections auraient lieu en 2012, ou s'il serait trop tard pour ça?

M. Blanchet (Marcel): Alors, M. le Président, M. le député, ça prend deux ans pour faire une carte électorale. Donc, dans la mesure où, effectivement, on pourrait espérer avoir une nouvelle carte électorale avec les nouvelles règles prescrites dans le projet de loi n° 78, il faudrait que les travaux commencent dès cet été pour que, dès l'été 2012, on ait une carte qui soit finalisée et... Parce qu'il faut comprendre que la carte ne peut pas entrer en vigueur avant l'expiration d'un délai de trois mois de sa publication à la Gazette officielle. Donc, si on ajoute trois mois aux mois de l'été, mettons août, septembre, octobre, novembre, on est rendu à quelque part à la fin de l'automne 2012. Et là, à la fin de l'automne 2012, ça, c'est quatre ans après la dernière élection générale. Alors là, là-dessus, comme vous le savez, on n'a pas ici, au Québec, contrairement à plusieurs provinces, des élections à date fixe. Alors, on est à la merci, effectivement, d'une décision du premier ministre à cet égard-là, et ce n'est pas sûr que, si jamais on ne commence pas les travaux cet été, on pourrait avoir une nouvelle carte électorale, avec les nouvelles règles, pour des élections qui auraient lieu avant l'automne 2012.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va, M. le député de Beauce-Nord?

M. Grondin: Ça va. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, Mme Lagacé, M. Zacharias. M. Blanchet, merci infiniment. M. Courville et M. Fontaine, merci de vous être présentés en commission. Bon retour chez vous.

Je vais suspendre les travaux quelques instants, le temps que la municipalité de Saint-Robert-Bellarmin prenne place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 16 h 40)

 

(Reprise à 16 h 45)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Nous allons reprendre nos travaux. Donc, permettez-moi, messieurs mesdames, de saluer les représentants de la municipalité de Saint-Robert-Bellarmin. M. Lachance, vous êtes maire?

M. Lachance (Jeannot): ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Bienvenue. C'est toujours un plaisir de recevoir des maires à notre commission. Et M. Robert Jolin, qui est conseiller municipal, c'est bien ça?

M. Jolin (Robert): Oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Est-ce qu'il y a des femmes dans votre conseil?

M. Jolin (Robert): Non.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah non?

M. Lachance (Jeannot): On a une directrice générale, mais elle ne pouvait pas se présenter aujourd'hui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah! non, non, mais ce n'est pas un reproche, loin de là. C'était simplement un...

M. Lachance (Jeannot): Notre conseil est formé d'hommes uniquement.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Je veux vous saluer et vous dire que vous êtes les bienvenus à notre commission. Puis je suis convaincu que vous allez éclairer par vos propos l'ensemble des parlementaires qui sont ici.

Donc, je vous rappelle les règles, qui sont fort simples. Vous avez 10 minutes pour la présentation de votre mémoire, et, après la présentation, il y aura, du côté de l'opposition et du côté aussi ministériel, des questions qui nous permettront de mieux comprendre vos propos. Donc, sur ce, je vous invite à vous exprimer. Vous avez 10 minutes pour le faire.

Municipalité de Saint-Robert-Bellarmin

M. Lachance (Jeannot): Bonjour, M. le Président, MM., Mmes les commissaires. Dans le fond, tantôt, vous avez dit Saint-Robert-Bellarmine. Si on recule dans le temps, c'était Sainte-Ruffine. On aime quand même mieux Saint-Robert-Bellarmin que Sainte-Ruffine, ça fait qu'on apprécie quand même notre nom.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah! mais vous êtes trop bon. Merci.

M. Lachance (Jeannot): Bon. Je suis heureux d'être devant vous aujourd'hui pour faire valoir le point de vue de la municipalité de Saint-Robert-Bellarmin et de sa population face au redécoupage de la carte électorale. Par des motifs d'ordre historique, géographique, religieux, social, économique, j'essaierai de vous convaincre qu'il faut que notre municipalité reste dans la Beauce.

Au plan historique. Fondée en 1944, son territoire a été détaché de la paroisse de Saint-Gédéon de Beauce, c'est-à-dire de la partie sud des rangs 8 et 9. Cette paroisse, la municipalité de Saint-Gédéon, avait été fondée par des familles venant de Saint-Martin, de Saint-Honoré de Beauce, de Saint-Georges, de Beauceville. Donc, vraiment, la parenté de nos liens sont vers la Beauce. Bien, quand on dit nos liens, même parentaux.

Vous comprendrez, M. le Président, qu'il soit difficile pour des citoyens de Saint-Robert-Bellarmin d'admettre qu'il puisse exister une frontière entre le territoire de notre municipalité et celui de la municipalité de Saint-Gédéon de Beauce, puisque ce sont les mêmes rangs des mêmes cantons qui se continuent. On part de Saint-Gédéon dans le rang 9, on monte à Saint-Robert dans le même canton, dans le même rang, on arrive à Saint-Robert, on est encore dans le rang 9. Ça fait que c'est des choses que notre population accepterait difficilement qu'on soit détachés.

Cet attachement à la Beauce, à la région de la Beauce, se manifeste de diverses façons, mais surtout dans notre façon de parler -- vous voyez probablement notre manière de parler, en tout cas, on se fait décrire comme Beaucerons assez facilement -- notre façon de réagir face aux grandes questions qui se rapportent aux domaines de la politique, du social, du culturel et de l'économie.

Au plan géographique, là, notre municipalité est située à quelques kilomètres seulement de la rivière Chaudière. Nos principales voies de circulation sont parallèles à cette rivière. Elles nous conduisent naturellement vers Saint-Georges de Beauce ou Québec.

Aux plans religieux et social, notre paroisse fait partie du diocèse de Québec. C'est un lien important qui nous rattache toujours à la région de Québec... de la ville de Québec.

Dans le domaine de l'éducation, notre municipalité est toujours dotée d'une école primaire. On a une école polyvalente à Saint-Martin de Beauce, qui est située à 25 km, un petit peu plus loin, à Saint-Martin. Ces deux écoles relèvent de la commission scolaire de la Beauce-Etchemin dont le bureau est établi à Saint-Georges de Beauce. Fait important à noter, la distance séparant la polyvalente de Saint-Martin est de 25 km, et celle séparant Saint-Robert de la polyvalente Montignac, de Lac-Mégantic, est de 50 km. Quand on parle de d'autres comtés, si on s'en va vers Mégantic-Compton, on a peur aussi que les... Tantôt, j'entendais monsieur le DGE dire des commissions scolaires puis... Bien, ça voudrait dire que, nous autres, nos jeunes ont 25 km par jour de plus à parcourir pour aller et 25 pour le retour, pour revenir. C'est 50 km supplémentaires dans une journée.

Pour le niveau collégial, c'est le cégep Beauce-Appalaches, de Saint-Georges de Beauce, qui dispense l'enseignement. Enfin, si nous ajoutons le partenariat de l'Université du Québec à Trois-Rivières et l'Université Laval, qui offrent des services universitaires au Centre universitaire des Appalaches, à Saint-Georges de Beauce, nous sommes forcés de conclure que toutes nos structures scolaires sont établies en fonction de notre appartenance très forte à la région de la Beauce.

Le Centre hospitalier de Saint-Georges de Beauce est muni d'équipements modernes pouvant desservir la population de notre région. Il ne faut pas oublier que la plupart des gens de Saint-Robert-Bellarmin fréquentent aussi la Clinique médicale de Saint-Gédéon ou la Clinique sans rendez-vous de Saint-Georges de Beauce.

Au plan économique, le service postal nous est assuré par le bureau de poste de Saint-Gédéon de Beauce. Notre caisse populaire, fusionnée le 1er septembre 2000 avec la Caisse populaire de Saint-Gédéon, fait partie de la Fédération des caisses populaires Desjardins de Lévis. L'intégration future de l'électricité fournie par le poste éolien -- on l'espère -- de chez nous se fera au poste Bolduc de Saint-Martin.

**(16 h 50)**

Le service téléphonique nous est fourni par la compagnie TELUS, et nous possédons les mêmes six premiers numéros que Saint-Gédéon, soit le 418 582. Quand on parle de Saint-Gédéon, c'est tout le temps dans la Beauce, là, hein? Nous pouvons faire des appels sans frais vers Saint-Martin, Saint-Théophile, Saint-Georges, alors que, la municipalité voisine, du comté où on veut nous envoyer, on paie des frais d'interurbain pour Saint-Hubert d'Audet.

Nos travailleurs, nos travailleuses sont en très grande majorité des entreprises... ils travaillent dans des entreprises beauceronnes: La Chemise Perfection, à Saint-Gédéon; Les Aciers Canam; Manac, à Saint-Georges; Wilfrid Paquet & Fils, à Saint-Théophile; DFA, BCH Unique, de Saint-Martin, entre autres. Donc, je connais très peu de gens de Saint-Robert... En tout cas, je n'en connais pas qui travaillent en dehors de la Beauce, ils se ramassent tout le temps...

Avec quatre autres municipalités beauceronnes, nous sommes propriétaires des ambulances Marlow inc., qui desservent la population. Notre service d'incendie a des ententes d'entraide avec les municipalités de Saint-Gédéon, Saint-Ludger, Saint-Théophile, Saint-Martin. Cette dernière nous offre aussi le service des pinces de désincarcération. Le service 9-1-1... à Saint-Georges de Beauce.

Les gens de Saint-Robert-Bellarmin ont pris l'habitude depuis longtemps de se diriger vers la ville de Saint-Georges afin de se procurer les biens et services qu'ils ne peuvent trouver dans leur municipalité. Cela s'explique facilement si nous tenons compte du fait que cette ville est reconnue comme un centre industriel et commercial aussi important que dynamique et qu'il n'y ait que 50 km à parcourir pour s'y rendre.

De plus, nos producteurs agricoles sont de l'UPA des Coteaux, encore de la Beauce.

Attends un petit peu, là. O.K. Par contre, un des critères pour... Ça, c'est très, très, très important, tantôt, j'écoutais ce que vous disiez, vous disiez MRC, vous disiez région administrative, vous disiez territoire d'une commission scolaire. Ça devrait peut-être être ça qui servirait pour déterminer une circonscription électorale. Bien, nous, si des critères semblables arrivaient, vous devriez, je pense, nous permettre de changer de MRC ou changer de territoire administratif. Vous ne devriez pas rien que nous permettre, mais je pense que vous devriez nous aider, nous soutenir dans nos démarches. Parce que ce n'est pas évident qu'une MRC comme Le Granit nous laisserait partir facilement. Puis ce n'est pas évident de négocier non plus parce qu'à un moment donné, là, on a des liens, il y a des personnes qu'on connaît, puis qu'on respecte, puis qu'on veut bien, là... Mais, je veux dire, si... rendus à ce point-là, on ferait vraiment le «move» pour essayer de changer de MRC ou de région administrative où on pourrait... On pourrait se retrouver dans un comté qui... vraiment que notre sentiment d'appartenance serait reconnu.

Car, quand les... Il faut dire aussi que, quand les MRC ont été mises en place, les dirigeants municipaux du temps, ils s'étaient fait dire: C'est pour l'aménagement du territoire. Ils ne voyaient pas bien, bien d'autre chose. Ça fait qu'à partir du moment où... Puis ça a passé un petit peu comme du beurre dans la poêle, nous autres. On s'est retrouvés dans la MRC du Granit, puis personne n'a contesté, puis personne n'a réagi face à tout ça. Mais, aujourd'hui, on déplore encore... Avoir su, c'est certain qu'il y a du monde qui se seraient élevés, puis ils auraient dit: Non, on ne va pas de ce côté-là. Mais parce qu'il y avait... de l'ordre démographique, le nombre de la population était moins gros là-bas... On est à la limite, on va dire. Tantôt, on parlait d'effet domino, mais on est au bout. Ça fait que l'effet domino fait qu'on retombe de l'autre bord à chaque fois. Puis ça devient un petit peu fatigant parce qu'à tous les deux, trois, quatre ans ça recommence. On est encore en train de, tout le temps, de dire: Bien, on va-tu encore... Bien oui, c'est encore la même histoire, on va voir le DGE, puis on... Autrement dit, vous savez, ça devient un petit peu éreintant.

À un moment donné, on est des Beaucerons, on l'est aujourd'hui, on l'était hier puis on espère l'être demain aussi. Ça fait qu'on tient à ce que... notre titre de Beauceron, on tient à le garder. Ici, je ne dis pas que nous ne pouvons pas travailler avec la MRC du Granit, mais il faudrait, à tout le moins, que le statu quo soit maintenu. On peut travailler avec la MRC du Granit. La preuve, c'est qu'on l'a fait depuis plusieurs années, on a avancé des choses, puis je pense qu'on a fait un bon travail. Pour une petite MRC, on a été innovateurs dans bien des choses. Mais, si le fait de rester dans la MRC là-bas fait qu'on va perdre notre titre de Beaucerons, on veut vraiment changer.

En conclusion, M. le Président, nous croyons que les faits que je viens de vous exposer sont plus que suffisants pour justifier le maintien de notre municipalité dans le comté de Beauce-Sud. Le nombre d'électeurs résidents inscrits sur notre liste électorale pour l'année 2005 s'établit à 508. Et, comme rien n'indique qu'il y aura une croissance rapide de notre population pour les prochaines années, nous croyons que cela ne constituerait pas un changement majeur au nombre d'électeurs prévus dans la circonscription électorale de Beauce-Sud.

Nous comprenons que, contrairement à celle de Beauce-Sud, la circonscription électorale de Mégantic-Compton a une faible densité de population. Cela explique sans doute que, pour former le chiffre le plus près de 45 000 électeurs, monsieur le DGE a dû lui attribuer un vaste territoire. En effet, en suivant les routes principales, il faut parcourir un kilométrage très élevé pour la traverser dans le sens de la longueur. Tantôt, je l'entendais dire qu'il y a des comtés qui sont beaucoup plus vastes, mais, en région, ici, on considère que c'est vraiment très gros... très grandes, les distances à parcourir. Cela explique aussi que nous ayons l'impression que notre inclusion dans cette circonscription électorale peut répondre à des exigences pour augmenter le nombre d'électeurs de l'autre côté. Humblement, nous admettons qu'un groupe de 508 électeurs peut paraître de peu d'importance en regard de l'ensemble des électeurs d'une circonscription électorale.

Cependant, il arrive souvent que chacun de nous éprouvions toujours une certaine fierté à nous prévaloir de notre titre de Beaucerons. Nous serions amèrement déçus si, en appliquant la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales de façon rigoureuse, vous nous excluez de cette grande famille de la Beauce, d'autant plus qu'on est Beaucerons aussi du côté fédéral. Ça fait qu'on a... des deux côtés, là, on est Beaucerons. On veut garder notre titre sur les deux bords.

M. le Président, je vous remercie de nous avoir donné l'opportunité d'intervenir dans ce dossier très important pour notre futur. J'aimerais profiter de l'occasion... Ici, j'ai une pétition qui avait été faite en 2008. 99 % des répondants disent qu'ils veulent rester en Beauce. Elle n'avait pas été déposée au DGE dans le temps, puis je l'ai amenée ici.

Et j'ai des lettres d'appui de divers organismes, qui sont la commission scolaire Beauce-Etchemin, le conseil d'établissement du Sud-de-la-Beauce, qui regroupe la commission des écoles de Saint-Robert-Bellarmin, Saint-Ludger, Saint-Gédéon, Saint-Théophile, puis le syndicat des agriculteurs des Coteaux, qui représente nos producteurs agricoles. Vous savez... Puis, en plus, on a eu une résolution d'appui qui dit à la MRC du Granit que, si on... Ils nous appuient dans notre demande de rester en Beauce, même si on est au Granit, là-bas, là.

Donc, en résumé, moi, ce que je souhaite, c'est qu'on reste en Beauce, un. Deux, si jamais des territoires de MRC, de régions administratives ou de commissions scolaires venaient à faire que... on veut que le gouvernement nous permette, même nous aide pour tâcher qu'on puisse faire le transfert puis qu'on le fasse de façon correcte. En tout cas, je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est moi qui vous remercie, M. Lachance. M. le maire, vous êtes maire depuis combien d'années de votre municipalité?

M. Lachance (Jeannot): Moi, j'ai été maire 12 ans, je suis parti quatre ans -- bien, je me suis fait battre -- puis je suis revenu quatre ans après. Là, je suis dans mon quatrième terme.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah, bien, félicitations! On en connaît, des comme ça, qui sont partis puis qui sont revenus, finalement.

M. Lachance (Jeannot): Ça arrive de temps en temps, ça, hein?

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Félicitations!

M. Lachance (Jeannot): Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, M. Lachance, j'ai cru comprendre que vous souhaiteriez distribuer les documents que vous avez en main?

M. Lachance (Jeannot): Oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ce qu'on va faire, je vais demander le consentement pour qu'ils soient acheminés. Vous souhaiteriez qu'ils soient acheminés à la Commission de représentation électorale?

M. Lachance (Jeannot): Oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, est-ce qu'il y a consentement pour que ces documents-là soient acheminés...

Une voix: Consentement, monsieur...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui? M. le ministre?

M. Dutil: Oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, à vous, M. le ministre, pour la période d'échange.

M. Dutil: Alors, merci, M. le Président. Il y a une curieuse de situation. Vous savez que... Si vous ne le savez pas, je vous l'apprends, Saint-Robert-Bellarmin fait partie de ma circonscription électorale de Beauce-Sud. Et d'ailleurs je dois vous rappeler que monsieur le maire a eu un parcours un peu similaire au mien: il est parti, il est revenu, il est parti, il est revenu. Donc, c'est bien important de voir des gens qui veulent se dévouer pour leur municipalité. Ce n'est pas toujours facile dans les petites municipalités. Je comptais que, dans la mienne, j'ai 24 municipalités. Il y en a 10 qui ont moins de 1 000 de population, ce qui est le cas de Saint-Robert. Ce n'est pas toujours facile.

Le débat sur le territoire est là depuis le début. On a eu un découpage en 1989, après la première élection. Il y a eu encore la même circonstance. Je n'ai pas suivi par la suite, il a dû y avoir un autre découpage plus tard où vous avez dû faire les mêmes démarches que vous faites présentement et que vous...

M. Lachance (Jeannot): À chaque fois, oui.

**(17 heures)**

M. Dutil: À chaque occasion. Et c'est très désagréable, je le conçois. J'étais là à l'époque où le découpage des MRC a été fait. J'étais maire de Saint-Georges à l'époque où le découpage des MRC a été fait et je me rappelle avoir dit: On dit que ce n'est que pour l'aménagement du territoire, mais un découpage peut servir à bien d'autres choses, et ça pourrait devenir le réceptacle de bien d'autres affaires. Et j'avais malheureusement raison, c'est ce qui est arrivé. Donc, il aurait fallu que les gens prennent une décision à long terme en considérant que ça pouvait être le réceptacle de plusieurs autres pouvoirs.

Vous avez expliqué tout à l'heure que la MRC du Granit aurait de la difficulté à vous laisser partir. Le point est le suivant, M. le Président, qu'il faut bien comprendre, c'est que la MRC du Granit n'est pas très populeuse, et le départ d'une seule de ses municipalités est une grande difficulté pour leur propre survie. Je pense qu'il y a 20 000 de population, si je me rappelle bien, dans...

M. Lachance (Jeannot): 22 000. 22 000.

M. Dutil: 22 000 dans la MRC du Granit, et ça, ça pose un problème majeur.

Donc, pour moi, votre message, je le comprends très bien, puisque je l'ai reçu en allant faire ma tournée municipale, ça a été le premier sujet à l'ordre du jour: Qu'est-ce qu'on fait avec la question du découpage? Est-ce qu'il faut recommencer les mêmes démarches que nous avons déjà faites? J'avais dit: Je pense que c'est en exprimant votre opinion partout où elle peut être entendue que ce sera le mieux, et vous vous retrouvez par hasard devant moi, ici, aujourd'hui. Parce que, comme vous le savez, je remplace mon collègue de Kamouraska, Kamouraska-Témiscouata, qui est le ministre responsable et qui est en convalescence actuellement. Alors, pour ma part, la situation de votre position est très claire, et je la comprends très bien. Donc, je vais laisser la parole à d'autres intervenants pour des questions.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Est-ce qu'il y a d'autres questions, chers collègues? Ça va? Donc, je vais simplement...

M. Dutil: Le maire veut intervenir.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, M. le maire, allez-y.

M. Lachance (Jeannot): ...quand les MRC ont été formées, le maire du temps, le conseil municipal du temps, le maire siégeait au conseil de comté qui était le comté de Lac-Mégantic, donc n'a pas vu... n'a pas eu peur non plus de dire: On va quand même aller là. On était des Beaucerons, puis ils pouvaient l'essayer là-bas, il n'y avait pas de problème. Là, c'est devenu beaucoup plus gros, puis l'enveloppe s'est... Nos problèmes sont arrivés après ça. Mais, au départ, on ne peut pas blâmer ceux qui étaient là, ils siégeaient déjà au conseil de comté puis ils ont... dans leur esprit, ils continuaient, c'était une continuité qu'ils faisaient.

Documents déposés

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Alors, merci, M. le maire. Je vais déposer, tels vos voeux que vous avez exprimés, puis les documents vont être acheminés à la Commission de représentation électorale. M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Oui, merci. Chers collègues... Merci, M. Lachance. Merci, M. Jolin. Bien, vous n'êtes pas sans savoir que le projet de loi n° 78 qui est devant nous aujourd'hui contient deux portions. Il y a une première portion qui est carte électorale puis il y a une deuxième portion qui est financement des partis politiques. Nous et beaucoup d'autres groupes ont demandé que le projet de loi soit scindé parce que, dans la partie carte électorale, il y avait des problèmes -- je reviens là-dessus dans quelques instants -- puis il y a une partie financement qui, elle, comporte des améliorations par rapport au système actuel. Il y a des choses à bonifier, il y a des choses à arranger, mais, bon, nous... Donc, on a demandé à ce que ça soit séparé. Et on a demandé ça, entre autres, parce que le Directeur général des élections, à travers la Commission de la représentation électorale, avait déjà entrepris le travail de réviser la carte électorale et avait déjà fait, donc, une première version de la carte, avait entendu vos commentaires et les commentaires de tout le monde, puis avait déjà sous la main un deuxième rapport et...

Bien, écoutez, je vous annonce que, dans la deuxième mouture de la carte électorale qui a été déposée cet après-midi, le comté de Beauce-Sud demeure tel qu'il était, donc dans celui de... Les représentations que vous aviez faites à l'époque ont, de toute évidence, été entendues par le Directeur général, puisqu'il a conclu que la circonscription de Beauce-Sud devait demeurer telle quelle et, donc, que votre municipalité devait continuer à y appartenir, ce qui fait que...

Bien, écoutez, moi, je vous invite, je vous invite... Et, puisque vous avez eu gain de cause, dans le fond, dans la mouture du Directeur général et puis que, là, le projet de loi n° 78 contient des... Enfin, il faut tout refaire, là, dans le fond, là, si on accepte d'embarquer dans le projet de loi n° 78. Moi, je vous invite, là, à demander au gouvernement de procéder avec ce que le directeur... enfin, avec le travail déjà entrepris par le Directeur général des élections, d'autant plus que le Directeur général des élections vient de nous dire qu'il y a des problèmes sérieux, là, avec le projet de loi n° 78. Entre autres choses, il y a un arrêt Carter, là, de la Cour suprême qui exige que les circonscriptions ne dépassent pas la moyenne, là, de plus que 25 %, et il semble que le projet de loi permettrait des dépassements importants et, donc, contreviendrait à une décision de la Cour suprême.

Tout ça pour dire que, si vous demandez... si vous allez dans le même sens que plusieurs groupes, là, vous ne seriez pas les seuls qui demandez que ce soit scindé, et que le Directeur général des élections poursuive le travail entrepris, je crois que vous aurez plus de chances d'être satisfaits puis d'obtenir gain de cause. Voilà, ce serait mon commentaire.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres questions? Oui, M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, je vous comprends, je vous comprends très bien de vouloir rester dans la Beauce. On l'a démontré, nous aussi, lors justement du travail du Directeur général des élections, qu'on voulait demeurer dans nos comtés, on a... Des fois, on trouve un peu bizarre, tu sais, on veut rendre des bâtisses patrimoniales, on veut... On s'occupe des bâtisses, mais on ne s'occupe pas des citoyens. Les citoyens ont une identité, ils sont identifiés à la Beauce depuis des générations et ils tiennent à ça. Alors, moi, je pense qu'on ne devrait pas juste regarder, des fois, les murs de pierre et de brique, on devrait regarder le citoyen. Et je vous comprends, je vous supporte, et puis je suis content de voir que le DGE l'avait compris, lui aussi, dans son deuxième projet. Qu'est-ce qui va arriver dans l'avenir? Bien là, on va le savoir en même temps que vous, mais on va essayer de faire le meilleur travail possible.

M. Lachance (Jeannot): En tout cas...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, M. le maire, allez-y.

M. Lachance (Jeannot): ...je peux dire que ça a été un plaisir de vous rencontrer, de donner mon point de vue puis notre point de vue de notre municipalité, de notre population. Parce que je me sens responsable un petit peu du sort futur. C'est ce qui est un petit peu plus énervant, c'est de dire: Si on manque notre coup... Là, on voit, monsieur le DGE a dit oui. Mais, si, pour les années futures, on manque notre coup, c'est nos enfants, nos arrière-petits-enfants qui vont en souffrir, puis ça, je déplorerais être celui qui était en poste quand ces choses-là sont arrivées. Ça serait bien déplaisant.

L'autre affaire que je voulais dire aussi, à Saint-Robert on a une câblodistribution, on a un poste communautaire, mais on dessert une partie de Saint-Gédéon dans le rang neuf, qu'on envoie la fibre optique, puis l'Internet est desservi par Saint-Robert. Puis en plus on donne la câblodistribution à une bonne partie du coin de Saint-Gédéon, ça fait que, vous savez, on est... C'est sur les deux bords, je pense, on peut apporter aussi puis on aime recevoir aussi, c'est bien certain. Merci beaucoup.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est bien louable, M. Lachance. Donc, M. le maire, M. le conseiller, merci de vous être présentés en commission. Bon retour dans votre Beauce natale, messieurs.

Et je vais suspendre quelques instants, le temps que le Parti marxiste-léniniste du Québec prenne position.

(Suspension de la séance à 17 h 7)

 

(Reprise à 17 h 9)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Nous allons reprendre nos travaux. Donc, le Parti marxiste-léniniste du Québec, Mme Christine Dandenault.

Mme Dandenault (Christine): Oui, c'est moi.

**(17 h 10)**

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. Bonjour, Mme Dandenault et Mme Royer. Bienvenue à la Commission des institutions. Vous êtes les bienvenues chez vous, à votre Assemblée nationale.

Je vous rappelle les règles. Je sais que vous étiez là, mais je vous les rappelle quand même. C'est 10 minutes pour la présentation que vous allez nous faire, puis il va y avoir questions de part et d'autre. Il y a 25 minutes de chaque côté qui est alloué. Donc, sans plus tarder, à vous la parole, mesdames.

Parti marxiste-léniniste
du Québec (PMLQ)

Mme Dandenault (Christine): Bonjour à tous les membres de la commission. Alors, au nom du Parti marxiste-léniniste, je voudrais présenter brièvement l'essence du mémoire qu'on a déposé sur la demande de financer le processus, et non les partis.

Alors, le gouvernement prétend renforcer les institutions démocratiques en s'attaquant au problème de corruption dans le financement des partis, mais les mesures qu'il propose en augmentant le financement public des partis politiques ne vont pas régler le problème à la base de la crise du système politique qui est que le peuple est marginalisé et n'a aucun contrôle sur les affaires qui le concernent. Augmenter le financement public des partis politiques ne contribuera pas à solidifier la démocratie. Au contraire, au problème soulevé de corruption, on propose un mécanisme qui est, à notre avis, tout aussi corrompu. L'État finance actuellement à 60 % les partis politiques, et cela n'a pas résolu le problème de corruption. Pourquoi l'État veut-il financer davantage les partis politiques si seulement 2 % de la population est membre des partis politiques? Si seulement 2 % de la population est membre, pourquoi la conclusion est d'augmenter le financement public des partis? Pourquoi la logique n'est pas de dire que l'État doit financer 100 % le processus qui va servir à 100 % de la population?

Les partis politiques défendent des intérêts privés, spéciaux, particuliers, mais ils mènent leur travail sur la scène politique. Pourtant, cela ne veut pas dire automatiquement qu'il faut les financer. À notre avis, c'est hypocrite d'agir ainsi. Beaucoup de gens sont choqués de voir que le gouvernement veut augmenter le financement public des partis, ce qui veut dire que leur argent, le trésor public, va servir à financer des partis pour lesquels ils ne sont pas du tout d'accord et même qu'ils détestent à cause de leurs programmes, parfois, et de leurs activités.

En plus, c'est une atteinte à leur droit de conscience et leur droit d'association. Si quelqu'un veut joindre un parti politique plutôt qu'un autre, c'est leur affaire. Ils décident en toute conscience de le faire, c'est une affaire privée. Mais, si l'État arrive par la suite et dit qu'il veut financer tous les partis et qu'en plus il veut savoir qui finance tel ou tel parti, alors ça ne fait pas de sens. Cela ne va pas du tout renforcer les institutions démocratiques, cela va uniquement favoriser les partis. Et c'est très intéressant, le système politique qui, par souci d'éviter la corruption du système électoral, a créé le suffrage secret pour éliminer la possibilité de coercition et l'achat de votes crée maintenant une situation où n'importe qui pourra aller sur Internet pour savoir qui une personne soutient.

Les partis politiques doivent se financer par leurs membres et leurs activités parce que ce sont des organisations privées. Si elles ont une raison d'être, alors ils vont pouvoir mener leurs activités et se financer par leurs membres, mener leur travail, développer leurs programmes. Le financement d'un parti ou de toute autre organisation privée est la responsabilité des membres qui ont à coeur les intérêts de l'organisation qu'ils ont décidé de joindre.

On parle beaucoup du fait que les élections coûtent beaucoup plus cher et, donc, que les partis ont besoin de plus d'argent. Pourquoi? Pourquoi les élections coûtent plus cher? Parce qu'elles deviennent de plus en plus une grosse machine électorale qui dépense énormément de sous pour poser des pancartes, faire la sollicitation téléphonique, les annonces, etc., et qui coûte cher pour payer les agences aussi de marketing et de publicité, maintenant, que les partis sollicitent. Alors, pourquoi l'État financerait ces campagnes? C'est choquant, et les gens sont dégoûtés par ce genre de campagnes qui coûtent des millions, qui écartent toute discussion sur leurs problèmes, qui maintiennent les gens hors de la discussion et les réduisent à un rôle de masse votante qu'on courtise pour un vote.

À notre avis, l'État ne doit, en aucune circonstance, financer des intérêts privés, il doit financer uniquement des projets publics. Une élection a une fonction officielle et est un projet public. Les lois électorales doivent être réformées pour renforcer ce projet public. Les fonds de l'État devraient être utilisés pour financer le processus électoral de sorte que les électeurs puissent poser un geste informé. Les fonds publics devraient servir à créer ainsi l'égalité des chances, à diffuser l'information sur tous les candidats, leurs programmes et à faire respecter les droits de tous. Toute réforme qui veut contribuer au renouveau politique doit aller dans le sens d'investir le peuple du pouvoir souverain et s'adresser à ce problème-là aujourd'hui. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, Mme Dandenault. M. le ministre.

M. Dutil: Oui. Mme Dandenault, dans votre mémoire, vous parlez de la question, que je pense très importante, du secret du suffrage versus le dévoilement des dons. Et on a un débat ici où certains préconisent qu'on diminue le montant pour le dévoilement des noms, alors que vous allez dans la direction contraire et que vous dites que le fait de dévoiler le suffrage... Parce que c'est l'équivalent de dévoiler le suffrage de donner la liste des donateurs de... Là, c'est 200 $ et plus, mais, si on descendait ça à 100 $, c'est l'équivalent de dévoiler le... pour qui les gens vont voter. Vous semblez dire que, vous autres, ça peut avoir un impact très négatif pour un parti comme le vôtre. J'aimerais que vous élaboriez un petit peu là-dessus.

Mme Royer (Geneviève): Bien, en fait, c'est pour n'importe quel parti. Le point principal auquel le mémoire s'adresse, c'est que c'est les membres eux-mêmes qui doivent financer l'organisation avec laquelle ils sont associés. Et, compte tenu que c'est une organisation privée, un parti politique, à ce moment-là, comme n'importe quelle autre organisation, les membres qui joignent ne souhaitent pas nécessairement voir leurs noms associés sur la place publique. Le point central n'est pas la question d'à partir de quel montant est-ce qu'on devrait le dévoiler ou pas, c'est qu'à notre avis aucun montant ne devrait être dévoilé, puisque appartenir à une organisation comporte des responsabilités, dont les contributions, et c'est les membres qui s'y engagent, et ça ne doit pas être connu publiquement.

Mme Dandenault (Christine): L'autre élément aussi, je pense, qui est très important, c'est toute la question du droit de conscience et du droit d'association. Que ce soit dans n'importe quelle organisation privée que quelqu'un veut joindre, c'est une question personnelle, une question privée de décider que je veux joindre cette organisation. Et je ne veux pas nécessairement que ce soit connu par Pierre, Jean, Jacques, c'est ma décision, je veux joindre cette organisation avec les droits et les devoirs que ça implique. Et donc ça ne devrait pas être quelque chose de public, c'est quelque chose qui appartient au parti politique, comme quelqu'un qui... une autre organisation qu'on voudrait joindre.

M. Dutil: D'accord. Et, dans la question de l'organisation des élections, vous dites quand même que l'État devrait mettre à la disposition des partis de façon égale, là, des moyens de diffuser leurs programmes, là, que ce soit par, par exemple, des périodes à la télévision, j'imagine, ou de la divulgation sur Internet qui pourrait être faite par le DGE. C'est un peu un financement public, là, mais qui serait fait directement par l'État. Est-ce que je comprends bien quand vous dites ça?

Mme Dandenault (Christine): La question de financer le processus, effectivement, c'est la question... Par exemple, une élection est un projet public, c'est la responsabilité de l'État de s'assurer que l'élection se fait en assurant aux électeurs, aux corps politiques l'offre du droit à un vote informé. Ça implique, à ce moment-là, que l'État a la responsabilité de s'assurer que tout le monde connaît qui se présente, quels candidats, leurs programmes, assure que le point de vue soit diffusé de façon égale pour tous les membres, ce qui n'est pas le cas en ce moment, ce qui dépend finalement de... le budget d'un parti versus un autre parti qui a plus de fonds pour faire une campagne, versus un autre parti qui a moins de fonds. On pense que c'est la responsabilité de l'État d'assurer le financement du processus pour l'ensemble des citoyens et donc que les fonds devraient servir à 100 % à la population et non aux partis politiques.

M. Dutil: O.K. Et, de votre point de vue, dans l'entre-période, entre les élections, là, c'est au parti, c'est aux membres du parti à eux-mêmes soutenir leur propre parti et non pas à l'État de le faire.

Mme Dandenault (Christine): Exact.

M. Dutil: C'est votre position. Au niveau du découpage électoral ou de la forme de votation, vous n'êtes pas intervenus dans votre mémoire là-dessus, mais est-ce que vous auriez une opinion à émettre? Parce qu'il y a deux parties dans le projet de loi, là. Il y a toute la partie dont vous avez suivi les débats tout à l'heure, sur le découpage de la carte électorale, l'égalité des votes, la représentation des idées plutôt que des électeurs, entre autres choses... plutôt que des circonscriptions électorales, je veux dire, excusez-moi.

Mme Royer (Geneviève): ...comme vous l'avez souligné, on s'est adressés davantage à la question du financement, qui rejoint toute la question de comment le corps politique va s'investir du pouvoir de décider de ses propres affaires. Bien sûr, la question, ensuite, du découpage ou de comment tout le processus, même dans la partie géographique, si je peux me permettre, la circonscription... le découpage va se faire, on ne s'y est pas posés, étant donné que notre première préoccupation, c'est comment est-ce que le corps politique va davantage être engagé dans toutes les discussions politiques sur les décisions qui le concernent, que ce soit le processus électoral, la sélection des candidats, etc.

M. Dutil: C'est beau. Ça va, M. le Président.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): D'autres questions, messieurs et mesdames? M. le député de Rousseau.

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah! excusez, Mme la députée de Gatineau, je vous avais...

**(17 h 20)**

Mme Vallée: Ça va. Alors, bonjour, mesdames. J'essaie de comprendre un petit peu votre argumentation ou le raisonnement quant au financement des partis politiques. On parle d'un financement public, un financement qui proviendrait du gouvernement, de l'État. J'aimerais, dans un premier temps, savoir, bon, de quelle façon ce financement-là pourrait s'organiser concrètement, là. Si on prend le modèle actuel, on va chercher les fonds à partir de quels barèmes, quels critères? Parce que, j'imagine, il va falloir établir des critères objectifs pour aller de l'avant.

Puis, dans un deuxième temps, je veux juste que peut-être que vous m'indiquiez ou me clarifiiez une situation. C'est dans votre réponse tout à l'heure à la question du ministre, vous avez mentionné qu'il n'était pas question qu'il y ait une espèce de registre public ou qu'on rende publics les dons faits à un parti politique. Donc, si je comprends bien votre argumentaire, vous n'excluez pas nécessairement des contributions personnelles de membres aux partis. Donc, vous n'excluez pas le financement privé en sus du financement public.

Mme Royer (Geneviève): En fait, il n'y a pas de financement... Ce que le mémoire souligne, c'est que l'État ne devrait, en aucun temps, financer les partis politiques, que les partis politiques devraient être financés par les membres, par ceux qui supportent leurs activités, leur travail, leurs programmes.

Maintenant, en ce qui concerne le... c'est au niveau des ressources financières qui seraient nécessaires, par exemple, pour la question de financer le processus, pas les partis. C'est sûr qu'à l'heure actuelle la réalité, c'est qu'au niveau du financement, c'est 0,50 $ par vote, par électeur inscrit. Ensuite, chaque parti reçoit proportionnellement au nombre d'électeurs qui ont voté, dont les votes étaient valides, et ce sont des millions de dollars qui sont distribués ainsi aux différents partis politiques, quatre principalement. Le point de réflexion que soulève le mémoire, c'est que ces argents-là, au lieu qu'ils servent des institutions, bien, oui, privées que sont les partis politiques, même s'ils agissent sur la place publique, servent le processus qu'on a un tant soit peu décrit tantôt qui est la question de droit à un vote informé pour tous les électeurs, donc, par tous les moyens. On en a nommé quelques-uns tantôt: Internet, faire connaître les programmes, tous les candidats qui se présentent.

Mme Vallée: O.K. Et, à ce moment-là, votre financement privé, le financement par les membres, serait encadré de quelle façon? Vous ne croyez pas qu'il doit y avoir un encadrement quelconque du financement des partis politiques?

Mme Dandenault (Christine): Les partis politiques... Comment on peut expliquer ça? Il y a 2 % de la population qui sont membres des partis, et la discussion sur le membership, sur les cotisations, sur qu'est-ce que les gens peuvent donner, les dons qu'ils peuvent faire, ça appartient à la discussion qu'il y a au sein de chaque parti. C'est leur propre discussion qui appartient aux membres. Je ne pense pas que l'État a à s'ingérer dans une organisation qui décide de... Par exemple, un parti politique pourrait avoir un projet, par exemple, d'avoir une institution d'éducation durant l'année en dehors des élections et, sur cette base-là, demander à leurs membres de financer ou de donner une contribution plus forte pour assurer le succès du programme. La Loi électorale poserait des problèmes à cause des montants qui sont donnés, mais on pense que ça, ça appartient aux partis politiques et c'est... Les partis politiques sont redevables envers leurs membres et non envers l'État. Mais, avec la modification... ou le fait, par exemple, que tu as 60 % de l'État qui finance les partis politiques fait aussi en sorte que les partis politiques ont plus de comptes à rendre à l'État, finalement, qu'à leurs membres. Et ça, c'est un énorme problème parce que même tu as certains partis qui ont surtout besoin de fonds pour les agences de télémarketing et non activer leurs membres pour résoudre ou avancer leurs programmes. On pense que le...

Quand on soulève le point principal: Pourquoi l'État financerait des partis politiques dans lesquels seulement 2 % de la population est membre?, ça, c'est l'essence de ce qu'on trouve qui est honteux ou qui est corrompu dans le mécanisme qui est proposé. Ça ne va pas renforcer les institutions démocratiques, au contraire. Parce que l'argent de l'État devrait servir à toute la population et devrait assurer que, par exemple, ce projet-là public qui est une élection, l'argent que l'État donne... doit s'assurer que ça serve à tous les citoyens et non remis à un parti politique qui va décider de l'utiliser comme bon lui semble, etc., en rendant des comptes, là, comme il est fait en ce moment par certains rapports. Et on pense que l'argent du public doit servir au public.

Mme Vallée: Mais, si je comprends bien votre argumentaire, les sommes publiques serviraient surtout à un processus d'éducation, un processus de sensibilisation populaire, de...

Mme Dandenault (Christine): Prenez, par exemple, une élection, tu as beaucoup de... est-ce que tous les citoyens savent le programme de tous les candidats? C'est laissé à la discrétion des médias, qui vont couvrir tel ou tel parti, tel ou tel candidat, etc. Mais ce n'est pas un droit à un vote informé qui est assuré à tout le monde, que chaque citoyen, chez lui, va recevoir le programme, exemple. Ça, c'est un mécanisme de s'assurer que, voici, vous avez tant de candidats, voici le programme de chacun, et non une interprétation qui est faite par XYZ, comme arrive parfois que ce que tu as dit, c'est complètement le contraire de ce qui est publié. En tout cas, je donne des exemples, je pense que ça colle à une certaine réalité.

L'électeur, le corps politique, si on veut l'amener... amener la participation davantage du corps politique, on doit... L'État a la responsabilité d'assurer sa participation plus active, d'assurer qu'il a son droit à un vote informé, donc que ça soit garanti, ce qui n'est pas le cas en ce moment, ce qui est critiqué par beaucoup de... On n'est pas le premier parti. J'ai regardé certains mémoires, les gens soulèvent cette problématique-là, que le rôle d'un parti, oui, a un rôle... Un parti peut décider x, y, z avec ses membres, quelles activités il veut mener, ça leur appartient, comme, nous, on a notre propre programme, on a nos propres activités. Mais l'État a une responsabilité énorme envers le corps politique. Et, en ce moment, en ayant ce financement-là à des partis politiques et non au processus, c'est corrompu.

Mme Vallée: Merci pour vos éclaircissements.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Merci, Mme la députée. M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Merci. Bonjour, Mme Dandenault. Bonjour, Mme Royer. Deux questions. Est-ce que vous êtes favorables au financement des partis politiques par des personnes morales, par des entreprises? C'est une première question que je vous pose.

Mme Dandenault (Christine): Et l'autre?

M. Marceau: Ah! je peux vous poser la deuxième, en fait...

Mme Dandenault (Christine): On prend les deux.

M. Marceau: ...tant qu'à faire. À la page 5, à la fin de votre mémoire, vous suggérez que la loi sur le financement soit amendée pour permettre aussi aux résidents en bonne et due forme de contribuer à un parti politique de leur choix, et je ne suis pas certain de bien comprendre ce que vous entendez par «résidents» là-dedans. Est-ce que vous parlez de gens qui n'ont pas de droit de vote mais qui, par ailleurs, résident au Québec? Donc, une précision là-dessus, s'il vous plaît.

Mme Royer (Geneviève): La question pour les résidents, c'est que, donc, ceux qui ont le statut de résident, puisqu'ils vivent ici, ils ont les mêmes obligations envers la société québécoise que tout le reste du corps politique, et donc, à ce moment-là, les mesures politiques qui seront adoptées par le gouvernement, par l'État, les touchent directement. Donc, à ce moment-là, ils devraient avoir un droit de vote aussi informé, comme on le soulevait plus tôt, par rapport à... pour exercer leur choix aussi, comme ils vivent avec les conséquences des mesures qui sont décidées. En ce qui...

Mme Dandenault (Christine): Bien, je peux répondre, puis tu peux compléter.

Mme Royer (Geneviève): Vas-y.

Mme Dandenault (Christine): Sur la question du financement des partis politiques, comme on l'a expliqué tantôt, les partis politiques sont financés par leurs membres, mais c'est aux membres qu'ils doivent rendre des comptes sur comment... Si un parti... Comment je pourrais dire? Vous dites: Est-ce que vous êtes d'accord ou pas que les personnes morales financent un parti politique? Je n'ai pas à répondre de pour ou contre, dans le sens que chaque parti a responsabilité envers leurs membres. C'est les membres qui doivent s'emparer de cette discussion-là et décider sur ces questions-là, je ne pense pas... ce n'est pas... c'est des questions qui concernent le membership d'un parti.

Nous, ce qu'on dit, qui est qu'on doit s'assurer que le financement de l'État... que l'État finance le public et non des partis politiques et que... Et, dans ce sens-là, on n'est pas d'accord non plus, comme on disait, que soit publié le nom des donateurs, dans le sens que ça, ça porte atteinte à ton droit d'association, à ton droit de conscience comme citoyen. Ça met le nom public de n'importe qui sur Internet, et je pense qu'il y a des gens qui ne sont pas intéressés à ce que, pour x raisons, pour des raisons personnelles, pour des raisons d'implication, de position... Il y a des exemples qui pourraient être donnés, mais on pense que ça, ça concerne les partis politiques. Ça répond à votre question?

M. Marceau: Oui, bien, je pense que...

Mme Dandenault (Christine): Bien, en tout cas, c'est l'approche... c'est l'approche...

M. Marceau: Ce que je comprends, c'est que vous n'êtes pas favorables à l'interdiction actuelle de la loi. Enfin, la loi, actuellement, interdit aux personnes morales de financer. Vous trouvez que ce n'est pas une bonne idée, dans le fond. C'est ce que vous nous dites.

Une voix: Que c'est une discussion qui appartient aux partis politiques.

M. Marceau: Vous trouvez que ça relève des partis politiques de décider de ce qu'ils font. O.K. Merci. Je comprends mieux votre position.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Oui. Merci, M. le Président. Alors, vous parlez beaucoup qu'il y a 2 % des membres qui sont membres de partis politiques, mais le financement, je croirais, moi, à 90 %, ne vient même pas des membres.

Mme Dandenault (Christine): Il y a un problème.

Mme Royer (Geneviève): C'est un problème, puisqu'effectivement c'est environ à 60 % que les partis politiques sont financés par l'État selon des... si on parle au niveau des remboursements des droits de vote, selon le nombre de votes obtenus, les dépenses électorales, etc.

M. Grondin: ...vous parlez des votes. Être membre d'un parti, c'est d'acheter une carte de membre.

Mme Royer (Geneviève): C'est ça. C'est ça.

**(17 h 30)**

M. Grondin: O.K. Dites-vous qu'il y a plusieurs personnes qui financent les partis politiques qui ne sont membres d'aucun parti politique. L'argent ne vient pas nécessairement des membres, elle vient beaucoup quand il y a une activité politique. Comme c'est le cas présentement quand on parle de tout ce qui se passe à Montréal avec l'industrie de la construction, il y a beaucoup d'argent qui vient aux partis politiques mais qui ne vient pas des membres.

Mme Royer (Geneviève): Ils sont financés par les activités que les membres... les activités qu'un parti mène.

M. Grondin: Quand on fait une activité politique, ce n'est pas nécessairement les membres qui viennent, c'est... On invite le public, tout le monde...

Mme Royer (Geneviève): Ceux qui veulent se joindre à l'activité, oui.

M. Grondin: Alors, le financement ne vient pas nécessairement juste des membres, il vient souvent d'en dehors.

Une voix: Des activités.

M. Grondin: Même, je vous dirais, qu'il vient plus que 80 % des non-membres qui ne veulent pas voir... Écoutez, on peut prendre n'importe quel cas. On peut prendre mon cas, je ne tiens pas nécessairement, avant d'être dans la politique, à être membre d'un parti politique, je voulais être libre. Alors, plusieurs citoyens pensent la même chose que moi. Alors, il ne faut pas attribuer seulement... Quand vous dites qu'il y a 2 % des... qui sont membres d'un parti politique, alors on ne devrait pas... ils devraient s'organiser avec leur parti, le financement ne vient pas nécessairement des membres, c'est un financement, on dit, public, là, et qui vient de plusieurs citoyens. Mais remarquez que votre approche, là, concernant la... je dirais, pour faire connaître les partis politiques, que ça soit financé par le public, j'aime bien ça, ce petit bout là.

Mme Royer (Geneviève): Nous autres aussi.

M. Grondin: Ça rendrait équitable tout le monde.

Mme Dandenault (Christine): C'est la question du droit à un vote informé, là, comment on aborde le problème du corps politique, comment on respecte le corps politique.

M. Grondin: Oui. Parce que plusieurs partis politiques ont des très bonnes idées, ils n'ont pas les moyens de les faire connaître sur la place publique. Ça coûte cher, les médias. On le disait, là, dans cette étude-là, 60 % de toutes les dépenses d'une élection va à l'appareil médiatique, va dans les journaux, télévision. Les partis qui n'ont pas les moyens de se payer ça, bien, souvent, ils ont des très bonnes idées, mais ils ne sont pas connus. Alors, c'est bien. Je vous remercie.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Des choses à rajouter, Mme Dandenault, Mme Royer? Non? Ça va?

Une voix: Ça va.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Et, moi, je vous remercie de vous être présentées en commission puis je vous souhaite un bon retour chez vous. Donc, je vous remercie à tous et à toutes pour votre participation.

Et, compte tenu de l'heure, je vais suspendre nos travaux jusqu'à 19 h 30. Vous devez ramasser vos choses parce qu'il y a un caucus.

(Suspension de la séance à 17 h 32)

 

(Reprise à 19 h 37)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, nous allons reprendre nos travaux. Donc, bonsoir à tous. Et je veux, d'emblée, saluer tout de suite le parti Vision nouvelle, qui sont présents. Il y a madame... ah! Mme Lavoie, peut-être pas, M. Bindley...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Bien, oui, parce que vous avez des barbes. Pas tous. Mme André Leblond...

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): M. André Leblond et M. Louis-Philippe Thibault. Non, mais c'est l'heure, à notre défense et à la mienne. Donc, je veux vous souhaiter, messieurs, la bienvenue à notre commission. Je sais que vos propos sauront nous éclairer sur notre réflexion et pendant cette réflexion.

Donc, nous allons reprendre nos travaux. Je vous rappelle que nous sommes réunis afin de procéder à des auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le projet de loi n° 78, Loi modifiant la Loi électorale concernant la représentation électorale et les règles de financement des partis politiques et modifiant d'autres dispositions législatives.

Nous allons donc, ce soir, vous entendre, messieurs, parti Vision nouvelle et la Culture Montréal. Je vous rappelle les règles, qui sont fort simples. Vous avez 10 minutes pour votre présentation, et il y aura aussi un 50 minutes d'échange de part et d'autre, du côté de l'opposition et du côté ministériel. Donc, sur ce, messieurs, je vous resouhaite la bienvenue. À vous la parole.

Vision nouvelle

M. Bindley (Daniel): Merci. Avant de commencer, on aimerait, au nom de Mme Aline Lavoie, s'excuser pour ce soir parce qu'elle n'a pas pu être présente, des événements incontrôlables l'ont retenue à Chicoutimi.

Avant de commencer, aussi je veux vous présenter... Daniel Bindley, je suis vice-président du parti Vision nouvelle; M. Louis-Philippe Thibault, qui est secrétaire du parti Vision nouvelle; et M. André Leblond, qui est trésorier et aussi agent officiel du parti Vision nouvelle.

M. le Président, mesdames messieurs, nous désirons, en premier lieu, remercier votre commission de nous donner la possibilité de faire part de nos commentaires concernant le projet de loi n° 78. Notre présente intervention portera exclusivement sur le financement des partis politiques. Ainsi, nous attirons d'abord votre attention sur deux constats que nous considérons comme discriminatoires pour les partis politiques municipaux en région, c'est-à-dire l'iniquité du financement de base et l'abolition des dons anonymes sans compensation. Enfin, nous formulerons deux recommandations pour corriger cette situation telle que décrite dans la loi n° 78.

**(19 h 40)**

Qui sommes-nous? Notre parti politique, le parti Vision nouvelle, a été créé et autorisé par le Directeur général des élections du Québec le 13 décembre 2004 pour exercer ses activités dans la municipalité de Saguenay. Ville de Saguenay venait tout juste d'être créée suite à la fusion de sept municipalités de notre région. Notre ville regroupe aujourd'hui près de 150 000 habitants, dont plus de 114 000 électeurs inscrits lors des dernières élections municipales. Il faut dire que la fusion des sept grandes villes de tailles différentes, au vécu différent, socioéconomique très varié ne va pas de soi. En effet, l'adoption d'un texte de loi ne permet pas, du jour au lendemain, de passer d'une culture de compétition entre les villes à un esprit de collaboration entre les villes. O.K.?

De plus, notre ville occupe un vaste territoire, 1 166 kilomètres carrés, étendu sur un axe d'environ 70 kilomètres de long. Pour vous faire une image, c'est plus grand que la surface du lac Saint-Jean et c'est 2,3 fois plus grand que la ville de Montréal. Donc, ça fait un grand, grand territoire dans lequel on retrouve des communautés quelquefois un peu différentes. Les distances à parcourir d'un district électoral à l'autre sont donc importantes, et la taille de la nouvelle ville engendre une multitude de dossiers de plus en plus complexes, d'où le développement d'une vision commune et la planification d'un avenir harmonieux et prospère doivent être soutenus et accélérés pour le bien de notre collectivité. Dans un tel contexte, vous comprendrez qu'il est important que la vie municipale puisse compter sur des organisations politiques comme notre parti afin de permettre aux citoyens de s'impliquer et de s'organiser efficacement, facilitant autant la vie démocratique dans notre municipalité.

Notre constat. Concernant le financement des activités politiques municipales, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités permet aux partis politiques municipaux d'obtenir du financement par la contribution des électeurs ou par des activités de financement. De plus, en campagne électorale, ceux-ci se voient rembourser la moitié des dépenses électorales pour tout candidat ayant obtenu au moins 15 % des votes exprimés. Pour un parti politique, il est beaucoup plus facile de solliciter les citoyens pour une contribution en période électorale. Mais, comme les élections n'ont lieu qu'à tous les quatre ans, entre les périodes électorales les ressources financières se font très rares pour supporter l'administration courante d'un parti, la diffusion de son programme et la coordination des actions politiques de ses membres.

C'est sans doute pour ces motifs que le législateur a introduit l'article 474.0.4 dans la Loi des cités et villes, pour permettre une allocation annuelle de 0,35 $ par électeur aux partis politiques municipaux autorisés. Malheureusement, ces dispositions de cet article ne s'appliquent qu'aux villes de Québec et Montréal. Elles ne s'appliquent pas aux villes dans les régions comme la nôtre, ce qui nous laisse pour compte, nous, les partis politiques municipaux en région. Si cet article s'appliquait à notre ville, les partis politiques existants pourraient se partager une somme d'environ 40 000 $. Cette somme, peu élevée pour une ville comme la nôtre, contribuerait à une meilleure démocratie en permettant à notre parti de mieux s'organiser et de mieux se structurer pour impliquer davantage les citoyens et les citoyennes dans les affaires municipales.

À ville Saguenay, un financement de base annuel des partis politiques permettrait surtout de compenser la disproportion des moyens financiers dont disposent les élus municipaux actuellement en place pour promouvoir leurs intérêts politiques. En effet, sous le couvert de travaux publics et d'aide aux organismes communautaires, ceux-ci disposent d'une enveloppe discrétionnaire annuelle de 65 000 $ par conseiller -- il y en a 19 dans notre coin, O.K. -- et de plus de 100 000 $ pour le maire. En plus, le maire de Saguenay s'est doté d'un cabinet politique au coût annuel estimé d'environ un demi-million de dollars. Ce cabinet politique veille non seulement aux intérêts politiques du maire, mais aussi de tous les conseillers qui constituent actuellement le conseil de ville.

Enfin, ne reculant devant rien, le maire et son chef de cabinet ont créé un organisme dont ils ont appelé Promotion Saguenay, un organisme de développement économique où ils occupent respectivement la présidence et la direction générale. Cet organisme, qui subventionne toutes sortes de projets, possède un budget annuel d'environ 5 millions de dollars provenant de fonds publics qu'ils gèrent comme ils veulent parce qu'ils ne rendent pas de comptes au conseil de ville. En somme, à ville Saguenay, quand vous vous lancez en politique, vous avez une équipe qui possède plusieurs millions de dollars pour réassurer sa réélection, tandis que, nous, parti politique, on doit, grosso modo, quêter, chercher les dons à travers nos membres pour essayer de battre ça dans une campagne politique. Très difficile.

Second constat. Notre second constat découle du projet de loi n° 78, qui propose d'abolir les dons anonymes à tous les partis politiques. Tous les partis politiques, tant au provincial qu'au municipal. En abolissant les dons anonymes que nous sollicitons uniquement en passant le chapeau pour défrayer les coûts des salles ou les autres dépenses telles que le café, bouteilles d'eau ou équipement de projection lors des assemblées politiques, on nous prive de l'une de nos peu nombreuses sources de financement. Ainsi recueillis, ces dons anonymes contribuent, par ailleurs, à renforcer l'engagement politique des citoyens et des citoyennes. Plutôt qu'abolir ces dons, n'aurait-il pas lieu d'en abaisser simplement la limite permise ou mieux les réglementer?

Pour compenser l'abolition de cette source de financement, le projet de loi n° 78 propose que la base de financement annuel des partis politiques provinciaux passe de 0,50 $ à 0,82 $ par électeur. On trouve ça très bien, mais pourquoi seulement pour les partis politiques provinciaux? Pourquoi pas pour les partis politiques municipaux? Est-ce dire que, pour l'Assemblée nationale, la démocratie provinciale est plus importante que la démocratie municipale? Nous, on se demande pourquoi ce régime différent, d'où nos recommandations.

Compte tenu des états énoncés, nous recommandons à votre commission que le projet n° 78 favorise une meilleure équité de financement entre les partis politiques municipaux et, à cet effet, que l'article 474.0.4 de la Loi des cités et villes, qui pourvoit à une allocation annuelle aux partis politiques de Québec et de Montréal, soit amendé pour s'appliquer à tous les partis politiques des villes de 100 000 habitants et plus. Pourquoi 100 000? C'est très arbitraire, puis on a remarqué qu'il y avait souvent dans les textes une évaluation des villes de 100 000 habitants et plus pour application de toutes sortes de projets. Ça aurait pu être 50 000 $, comme ça pourrait être 100 000 $. On laisse au législateur le choix de décider.

Nous recommandons aussi à votre commission que le projet n° 78 traite sur un même pied tous les partis politiques visés par l'abolition des dons anonymes et, à cet effet, que l'article 474.0.4 de la Loi des cités et villes soit amendé pour rehausser le montant de 0,35 $ à 0,57 $ par électeur. Dans le fond, on demande que vous nous financiez directement, comme on finance les partis politiques provinciaux, et que l'augmentation, ça soit la même que celle que vous pensez appliquer actuellement aux partis provinciaux.

En conclusion, notre parti, Vision nouvelle, croit sincèrement que les recommandations que nous vous présentons aujourd'hui contribueront à rehausser la qualité de notre démocratie municipale, qui ne doit pas rester en marge des efforts faits en ce sens au niveau provincial.

En terminant, nous désirons vous faire part de notre disponibilité pour répondre à vos questions et on vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): C'est nous qui vous remercions, M. Bindley. Merci beaucoup. M. le ministre.

M. Dutil: Merci, M. le Président. Alors, merci de votre présentation. Effectivement, on connaît moins les partis politiques de plus petites municipalités. Je dis petites municipalités, j'ai déjà été maire d'une municipalité, elle avait 12 000 habitants. Donc, pour moi, 150 000, c'est gros. Mais, effectivement, vous mentionnez plusieurs éléments concernant le financement des partis politiques, est-ce que... J'ai quelques questions sur la situation particulière de votre ville. Est-ce que tous les conseillers municipaux sont du même parti politique? Est-ce qu'il y a de l'opposition actuellement à l'Hôtel de Ville, ou non?

M. Bindley (Daniel): Actuellement, il n'y a aucune opposition, même si... Il n'y a aucun parti actuellement, il y a le maire et ses 19 conseillers. Et je vous dirais que, de façon générale, en tant que citoyens, ce qu'on voit au niveau du conseil municipal, c'est 19 personnes qui disent oui en même temps, de façon générale, aux cinq ou 10 minutes que dure le conseil de ville parce que toutes les décisions sont prises derrière des portes closes par un comité, et, quand les conseillers se présentent, bien ils disent: Oui, M. le maire, on est d'accord avec votre idée, on passe à la prochaine idée.

M. Dutil: Il n'y a pas de parti politique officiel à l'Hôtel de Ville de ville de Saguenay?

M. Bindley (Daniel): Aucun parti politique officiel.

M. Dutil: O.K. À l'époque, là, la fusion, ça n'avait pas été une fusion volontaire, ça avait été une fusion qui avait été décidée?

M. Bindley (Daniel): Imposée par la loi, effectivement.

M. Dutil: Imposée par la loi. Pourquoi 0,57 $? Pourquoi pas 0,82$? C'est parce que vous montez de la même façon... Si j'ai compris votre calcul, vous montez du même pourcentage de 0,37 $ vers 0,57 $ que, nous, on passe de 0,50 $ à 0,82 $.

M. Bindley (Daniel): Effectivement.

M. Dutil: O.K. Ça fait un montant... Ce qui est étonnant, c'est que 0,35 $, ça fait 40 000 $, 0,57 $, ça fait 60 000 $, ou à peu près. Ça ne fait pas des gros montants.

M. Bindley (Daniel): Ça ne fait pas des gros montants qui seraient partagés entre les partis politiques futurs qui se présenteraient -- lorsqu'il va s'en présenter -- mais ça fait la différence entre l'effervescence de la création d'un nouveau parti où tout le monde est prêt à y aller, à travailler, puis à ne pas compter ses heures, puis... Suite à une élection, bien on a quatre ans de travail à faire, puis là, tout d'un coup, le bénévolat commence à être plus difficile à trouver, on commence à avoir plus de difficultés à rallier les gens puis à leur demander du travail constant. Donc, cette somme-là nous servirait à structurer, organiser, monter les dossiers, qui nous permettrait d'avoir une vie politique active entre les élections.

**(19 h 50)**

M. Dutil: O.K. Vous n'êtes pas intervenus sur la question du découpage électoral, je ne vous poserai pas de question là-dessus, mais j'aimerais vous poser quelques questions sur le financement des partis politiques provinciaux. Il y a quelques mesures dans le rapport, et je voudrais connaître votre opinion. Est-ce que vous estimez que 3 000 $, c'est un montant trop élevé comme plafond des contributions possibles pour les électeurs au Québec pour le provincial?

M. Bindley (Daniel): Je vais transférer la question à M. Thibault.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, M. Thibault.

M. Thibault (Louis-Philippe): Alors, dans le fond, on ne s'est pas véritablement positionnés par rapport à cette question-là, on s'est intéressés, nous, à ce qui touchait le financement des partis politiques municipaux. Et, pour ce qui est des normes qui régissent les partis politiques provinciaux, on n'a pas véritablement arrêté de pensée là-dessus. Alors, la seule opinion que je pourrais vous émettre, malheureusement, c'est une opinion personnelle.

M. Dutil: Oui. Bien, c'est ce que je veux, une opinion personnelle me conviendra dans les circonstances.

M. Thibault (Louis-Philippe): Ah! bien, moi, personnellement, je pense qu'une contribution de 3 000 $ est un montant suffisant dans le contexte actuel où on essaie d'assurer un financement le plus transparent possible. Et, de toute façon, je dirais, le citoyen moyen, là, je suis sûr qu'il ne finance pas pour 3 000 $.

M. Dutil: Non, c'est sûr. Mais la question, c'est: Est-ce que c'est trop? Parce que le débat est en général sur le fait que 3 000 $, même si ça a été décidé en 1977, c'est trop. Le Parti québécois recommande 500 $ comme plafond, d'autres recommandent 1 000 $.

M. Thibault (Louis-Philippe): Le trop n'étant, de toute façon, certainement pas... Je dirais, c'est un montant qui ne peut pas rejoindre la bourse des citoyens moyens. Donc, il est inutile d'avoir une norme aussi élevée quand on sait que... Si on cherche du financement populaire à travers cette mesure-là, bien on va s'ajuster au financement populaire qui est réaliste.

M. Dutil: O.K. Une autre question sur laquelle je vais vous demander votre opinion personnelle parce que vous ne l'avez sûrement pas regardée, c'est... Le crédit d'impôt pour le financement des partis politiques, au niveau provincial, n'est pas remboursable. Conséquence, c'est que les gens qui ne paient pas d'impôt -- la catégorie de taxes, impôts, là -- ne peuvent pas bénéficier de ce crédit d'impôt là. C'est 43 % de la population. Parce qu'on sait que les revenus du gouvernement s'en vont vers les taxes, moins vers les impôts, la question, c'est: Est-ce qu'il y aurait lieu de rendre ce crédit d'impôt là remboursable pour permettre à ces gens-là de contribuer et bénéficier d'un crédit d'impôt? Quelle est votre opinion?

M. Thibault (Louis-Philippe): Bien, moi, personnellement, je pense, c'est une question d'équité entre les citoyens. La réponse, c'est oui, sauf qu'il y a un petit problème technique, là. Je ne sais pas si c'est faisable techniquement, tu sais, de rembourser des montants, surtout que, les contributions provenant de cette catégorie de citoyens là, ce ne sera pas des grosses contributions, hein?

M. Dutil: O.K. Ça répond...

M. Thibault (Louis-Philippe): Est-ce que l'appareil technocratique qu'il faudra mettre en marche pour assurer le respect du principe d'équité vaut la peine, là? En tout cas, s'il y a des moyens techniques de faire facilement, moi, je dirais, pour une question d'équité, et un principe d'universalité à travers le financement des partis, et surtout l'égalité des citoyens, oui à votre question.

M. Dutil: Sur le principe, vous êtes d'accord. M. le Président, ça va.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va. Est-ce qu'il y a d'autres questions du côté ministériel? Pas d'autre question. M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Alors, bonjour, MM. Bindley, Thibault et Leblond. Merci d'être là. Je veux revenir sur la question dont a parlé M. le ministre, mais dans le cadre municipal, là. Il y a un plafond aux partis politiques municipaux de 1 000 $. Est-ce que vous trouvez que 1 000 $, c'est approprié? Est-ce que ça pourrait être baissé? Est-ce que vous croyez qu'à 1 000 $ c'est encore trop élevé? Est-ce qu'à 500 $, par exemple, ce serait plus approprié?

M. Thibault (Louis-Philippe): On va demander ça à notre... Étant donné que c'est une opinion personnelle qu'on va émettre sur cette question-là...

M. Marceau: Oui, c'est ça...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, M. Leblond.

M. Leblond (André): Je pourrais peut-être y répondre. Je pense que, bon, c'est un montant qui n'a pas été indexé depuis un bout de temps, donc ça existe depuis plusieurs années. Moi, je pense que, pour un parti, là, vraiment populaire au niveau municipal... Mais le 1 000 $, ce n'est pas quelque chose qu'on va collecter tous les jours, là. En général, pour un parti comme nous autres, les gens vont contribuer autour de 100 $, 140 $ et 200 $. Donc, c'est sûr que ça ne va pas vite dans le financement, mais c'est beaucoup de travail. Mais le 1 000 $, c'est exceptionnel.

Et, lors de nos élections en 2005, par exemple, des 1 000 $, on en a collecté, mais auprès de nos candidats, c'est les candidats qui fournissaient 1 000 $. Moi, comme représentant officiel puis agent officiel, j'exigeais que mes candidats fournissent le maximum parce que... comme engagement, là, politique, mais, en général, le citoyen normal, là, lui, il ne contribuera pas à 1 000 $, là, facilement. Donc, c'est une limite qui est quand même assez élevée, là. On n'a pas à l'augmenter, en tout cas.

M. Marceau: Donc, vous convenez qu'à 1 000 $ ce n'est pas du financement populaire, c'est encore un financement exceptionnel de gens qui ont les moyens ou bien qui sont très, très impliqués en politique.

M. Leblond (André): Qui s'impliquent beaucoup, oui.

M. Marceau: C'est ça. O.K.

M. Leblond (André): Au cours de la dernière élection, par exemple, les gens qui ont donné... J'étais agent officiel pour un candidat à la mairie, et il fallait... Donc, ce sont les gens proches du candidat ou le candidat lui-même, les gens qui s'engagent beaucoup qui vont fournir ça. Mais les gens qui ont le moyen, normalement, de fournir 1 000 $, il n'y en a pas beaucoup, là. Normalement.

M. Marceau: Et j'ai une autre question. Vous proposez donc de mettre en place un financement public des partis politiques, là, que... et vous suggérez que ça passe, par exemple, de 0,35 $ à 0,57 $, par exemple, pour des villes de plus de 100 000 habitants. Dans le cas de villes comme la vôtre où il n'y a pas de parti politique, est-ce que vous avez réfléchi à la façon dont les sommes en question pourraient être redistribuées? Parce que, là, il n'y a pas de structure pour recevoir les sommes.

M. Bindley (Daniel): Il y a déjà notre parti...

M. Marceau: Oui, mais...

M. Bindley (Daniel): ...qui est un parti là.

Une voix: Ça nous ferait plaisir de le recevoir.

M. Marceau: Oui, mais juste qu'on s'entende, de la façon dont c'est distribué, c'est que c'est distribué... Enfin, il y a des gens qui ont obtenu des voix qui n'étaient pas dans des partis politiques, là. Donc, ma question, c'est: Comment est-ce qu'on organise ça?

M. Bindley (Daniel): Nous, on croit...

M. Leblond (André): C'est tant par électeur.

M. Bindley (Daniel): Oui, c'est tant par électeur, mais, nous, on croit fortement qu'à cause de la complexité des dossiers qui sont menés dans les villes un peu comme les nôtres -- comme ailleurs, mais surtout comme la nôtre -- à un certain moment, on ne peut plus faire cavalier seul, ça prend une équipe, que ce soient les recherchistes, que ce soient des spécialistes qu'on engage pour se faire des opinions, etc. Donc, en tant qu'individu seul, tu ne peux pas tout faire, puis d'où l'idée d'un regroupement sous forme d'un parti, qui est un groupe qui se met ensemble pour défendre des idées, mais aussi se donner les moyens de se défendre, c'est-à-dire d'aller chercher l'information puis d'être capable de la communiquer sur la place publique. Donc, notre tendance à nous est beaucoup plus de penser que, dans le futur, ça va aller... comme les villes sont appelées à grossir, bien, que ça va être plutôt une tendance vers les partis politiques, regroupements de gens, peu importe qu'on les appelle Équipe Labeaume à Québec ou parti politique à gauche ou à droite, plutôt que d'avoir des gens individuels, tout seuls.

M. Leblond (André): Peut-être pour rajouter, pour répondre à votre question, notre expérience, ce qu'on a vécu, c'est qu'entre les élections c'est très difficile de collecter de l'argent. C'est pour ça qu'on voudrait être financés entre les élections, avoir un financement de base. Ce n'est pas seulement pour avoir des recherchistes, mais c'est aussi pour avoir un local, c'est pour avoir un secrétariat permanent, être capables de mettre nos dossiers quelque part. Actuellement, beaucoup de nos dossiers sont dans mes bureaux, moi, à l'université, Louis-Philippe, chez lui. On fonctionne à la bonne franquette, là. C'est vraiment... on n'a aucun local, comment s'organiser, on a... La seule chose qui est permanente présentement, c'est notre téléphone cellulaire du parti, donc...

M. Bindley (Daniel): Et le site Web.

M. Leblond (André): Et le site Web. Donc, ça prend plus que ça, là. Et donc je pense que, si on veut que la démocratie s'exprime dans nos municipalités, il faut permettre aux partis politiques de s'organiser.

Voyez, chez nous, par exemple, à l'élection de 2005 -- c'est sûr qu'on avait le maire contre nous, là, puis ça n'a pas lâché -- on a essayé d'avoir des locaux pour faire des réunions politiques. Il nous a défendu les réunions dans les locaux de la municipalité, alors on s'est retournés vers les commissions scolaires. Là, on a réussi à les avoir, mais on a essayé de nous bloquer dans plusieurs coins. Mais les locaux publics ne sont même pas accessibles pour un parti politique municipal, donc, y compris ceux de la municipalité.

M. Bindley (Daniel): Ce qui fait que -- pour renchérir -- ce qui fait qu'on se ramasse dans les hôtels ou dans les lieux qu'on doit payer plutôt que de pouvoir profiter d'infrastructures publiques pour être capables de faire des activités publiques.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Oui, M. le député.

M. Marceau: Une dernière question. Le projet de loi prévoit des sanctions plus sévères. Nous, au Parti québécois, on a suggéré d'accroître les pouvoirs d'enquête du Directeur général des élections pour constater plus fréquemment, s'il y en a, des infractions à la loi. On a aussi proposé une passerelle entre le Directeur général des élections et Revenu Québec pour que les enquêtes du Directeur général puissent aboutir, là, pour qu'on puisse avoir plus d'information. Est-ce que vous êtes favorables à ce resserrement, donc à plus de pouvoirs d'enquête pour le Directeur général, des sanctions plus sévères pour les contrevenants à la loi?

M. Leblond (André): Absolument. C'est que les enquêtes sont longues, sont lentes à s'instaurer, et on se demande s'ils vont aboutir. Bien, on en a fait une, nous autres, pour l'élection de novembre...

Une voix: ...

M. Leblond (André): ... -- oui -- puis concernant les sondages qu'il s'est fait par des contributeurs anonymes, et on attend l'enquêteur, on a... Il va venir, là, mais je pense qu'il faudrait qu'il ait plus de moyens, c'est certain, là. Et, nous, on n'est pas contre ça comme parti. On veut jouer transparence, on veut jouer démocratie, donc on est contre les organisations qui ne le sont pas.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Merci, M. le député de Rousseau. M. le député de Chicoutimi.

**(20 heures)**

M. Bédard: Merci. Alors, je tiens à saluer les citoyens de mon comté, MM. Bindley, Leblond et Thibault. Donc, merci de votre présentation. Ce que vous faites ressortir, c'est que clairement, bon, entre les élections, un parti politique, à part les cartes de membre que vous avez de votre parti politique, il n'y a pas d'autre moyen de vous financer que celui à partir de vos cartes de membre, donc il n'y a pas de financement de base.

M. Leblond (André): Il y a les contributions, on peut... Les contributions, on peut en avoir à chaque année.

M. Bédard: Volontaires, voilà.

M. Leblond (André): Volontaires.

M. Bédard: À part les cartes de membre ou les contributions...

M. Leblond (André): Mais c'est très difficile, entre les deux élections, d'obtenir du financement.

M. Bédard: Pourquoi?

M. Leblond (André): Parce qu'il n'y a pas le même entrain. Lorsqu'il y a des candidats à une élection, les gens vont embarquer plus facilement, alors qu'entre les élections c'est plus difficile, là, de mobiliser les gens.

M. Bédard: Et, si j'ajoutais comme motif au fait, comme dans votre cas particulier, que... Si l'establishment ou le pouvoir politique municipal n'est pas celui de votre parti politique, j'aurais tendance à croire que c'est encore plus dur à ce moment-là.

M. Leblond (André): Absolument.

M. Bindley (Daniel): ...même dans l'impossibilité souvent...

M. Bédard: Mais pouvez-vous l'expliquer, parce qu'il y a une réalité concrète à ça, là, pourquoi vous pensez que c'est plus dur?

M. Leblond (André): Bien, c'est parce que, dans notre ville, l'information est contrôlée, tout est contrôlé. Alors, on ne peut pas avoir de locaux, les médias ne nous couvrent pas nécessairement tout le temps. Là, c'est moins pire depuis la dernière élection, il y a un peu de couverture. Mais c'est très difficile, tout est concentré vers Montréal. À la radio, maintenant, il y a beaucoup de choses qui se concentrent à l'extérieur. Les journaux, bien, ils sont centralisés aussi, les propriétaires des différents journaux sont à Montréal. Donc, c'est difficile de faire valoir nos idées.

M. Bédard: Vos idées. Mais même le fait de vous financer entre deux élections, est-ce que ça peut, à la limite, avoir une conséquence pour quelqu'un de démontrer un appui à un parti politique qui n'est pas celui du pouvoir actuel? Est-ce qu'il peut y avoir des conséquences pour un entrepreneur ou un individu?

M. Thibault (Louis-Philippe): Bien, bien sûr. Bien sûr, parce qu'entre les élections c'est peut-être à ce moment-là qu'il faut déployer aussi beaucoup d'énergie pour garder la flamme vivante, faire connaître davantage notre programme. On comprend que la période électorale est une période privilégiée pour faire connaître ses grandes idées, mais il reste que les choses évoluent entre les élections, et il faut constamment être en communication avec notre membership puis faire connaître nos points de vue. Et, pour ça, bien ça prend une organisation minimale pour pouvoir fonctionner comme organisation politique, d'autant plus que, de l'autre côté, présentement, quand les gens sont élus, ils disposent de pouvoirs économiques beaucoup plus importants que les partis d'opposition. Au moins, en période électorale, on se rapproche. On n'en a pas beaucoup, mais ils en ont moins. Mais, une fois qu'ils sont élus, ils en ont tellement que, là, l'écart devient scandaleux.

M. Bédard: La situation existe dans d'autres villes que... Évidemment, il y a Montréal, Québec, mais, bon, il y a les autres grandes villes du Québec qui n'ont pas réclamé cela pour des raisons, sûrement, que vous pourriez expliciter un peu plus, mais est-ce que vous avez contacté d'autres partis politiques qui existent, par exemple, en Mauricie, en Estrie...

M. Thibault (Louis-Philippe): Bien, c'est justement, il n'y en a pas beaucoup, de partis politiques structurés, dans les autres villes, hein? Alors, on a été surpris parce qu'on s'est rendu compte quand on a fait... D'ailleurs, cette demande-là qu'on fait aujourd'hui à la commission, on l'a demandée au ministère des Affaires municipales et des Régions, il y a deux ans ou trois ans, et on a constaté, à ce moment-là, qu'il y avait très peu de partis politiques vraiment structurés. Il y a des gens qui se sont présentés en équipes mais qui n'étaient pas nécessairement des partis politiques reconnus, et donc c'est probablement que même ces partis-là, en dehors de la période électorale, ils sont peut-être moins actifs aussi, là.

M. Bindley (Daniel): ...beaucoup de téléphones qui ne répondent pas ou de lettres qui ne reviennent pas. Sur la longue liste de partis qu'on peut avoir...

Une voix: ...on avait communiqué avec tous ceux qui étaient enregistrés, là...

M. Bédard: Qui étaient enregistrés, oui.

Une voix: ...enregistrés, puis...

M. Bédard: Finalement, il n'y a pas de numéro, il n'y a plus rien. Ce que je conclus, c'est que finalement, au niveau municipal, il est très dur, à part à Montréal et à Québec, dans les villes où il y a un système qui permet le financement des organisations, d'avoir une opposition ou un système de... pas un système, mais une voix différente que le pouvoir en place.

M. Bindley (Daniel): Oui, mais c'est surtout que c'est très difficile de créer une permanence, dans le sens que les gens qui travaillent dans les partis ont aussi... À moins d'être retraité puis n'avoir rien à faire de sa vie, c'est-à-dire de ne pas être pris par ses enfants puis d'avoir de la disponibilité à ne plus savoir quoi en faire, ce qui est très rare chez la plupart des retraités qu'on connaît, O.K., il n'y a personne qui est vraiment... Il faut vraiment mettre beaucoup de son temps là-dedans, puis on n'est pas toujours capable de mettre autant de temps qu'on veut toutes les semaines pendant les quatre années qu'il reste entre les deux élections, d'où l'idée de structurer une permanence qui peut être à temps partiel, mais quand même permanence. C'est toute la différence entre quelqu'un... Quand vous dites: On organise une assemblée, d'avoir quelqu'un qui conserve les bases de données des membres à jour, qui s'assure de contacter tout le monde, de faire sortir les membres, leur dire que c'est important qu'ils viennent ce soir puis... que de le faire à temps partiel, quand on a une chance de le faire, s'il n'y a pas quelque chose dans notre environnement qui nous dérange. La permanence nous permet de faire ça.

M. Bédard: Ça, c'est très bon en termes plus prosaïques, mais, en termes plus philosophiques, là, quel est l'intérêt démocratique d'avoir une voix comme la vôtre, d'un parti politique, au niveau municipal, qui s'organise?

M. Thibault (Louis-Philippe): Bien, je vais vous donner un exemple bien concret. Quand le parti Vision nouvelle est arrivé sur la scène politique, en 2005, c'était la première fois, là, qu'on se présentait à ville Saguenay en parti politique, et on a été décriés par le maire en disant: Il n'y a pas de place pour un parti politique sur la scène municipale, bon, et on nous a... un peu essayé de nous disqualifier par rapport à ça. Mais, malgré tout, dans la première élection, à six mois d'avis, on s'est organisés puis on est allés chercher près de 30 % du vote. C'est quand même significatif, hein, dans un contexte où tu n'avais pas une culture de partis politiques à l'échelle municipale.

À l'échelle municipale, je vous rappelle qu'une caractéristique bien différente du fédéral et du provincial, c'est que les gens votent deux fois: ils votent tantôt pour le conseiller, tantôt pour le maire. La notion de parti qui rallie le plus, c'est qu'il forme le gouvernement. Ça n'existe pas, ça. Tu peux faire élire les 19 conseillers à Saguenay, mais, si tu ne fais pas élire le maire, là, tu es dans l'opposition. Même à 19, tu es dans l'opposition parce que les pouvoirs de la ville Saguenay sont concentrés à 95 % dans les mains du comité exécutif, qui, lui, est formé par le maire. Bon. Alors, dans le contexte de la première élection, on est allés chercher ça.

Ô surprise! à l'élection de 2009, le maire, il ne s'est pas présenté en parti politique, il s'est présenté en équipe. Puis ça donnait exactement l'image d'un parti politique, et il a même fait son lancement officiel en présentant son équipe puis en disant: Il faut voter pour tous les conseillers sortants, on forme une équipe, hein? Alors, il est en train, dans les faits, sans s'appeler parti politique, de jouer la carte du parti politique. Donc, ça veut dire que, dans l'entendement populaire, de plus en plus les électeurs, en tout cas à Saguenay, sont sensibles à la notion d'équipe.

J'ai été personnellement candidat dans un district électoral lors des dernières élections, et, quand le maire est sorti à la télévision avec sa publicité «on présente une équipe», on me posait de plus en plus souvent la question: Vous faites partie de quelle équipe? Donc, on voit que les gens cheminent. Puis la force d'un parti politique, ce n'est pas juste de regrouper des gens, c'est aussi de rendre des gens imputables à l'endroit de la population, qu'ils s'impliquent davantage.

M. Bédard: Ce que vous souhaitez, finalement, c'est d'avoir les moyens de faire entre les deux élections ce que vous avez fait pendant la campagne électorale.

M. Thibault (Louis-Philippe): D'avoir les mêmes moyens que ceux qui sont élus.

M. Bédard: Bien, les mêmes... Vous n'aurez pas les mêmes moyens, à l'évidence, là.

M. Thibault (Louis-Philippe): Bien, les mêmes... de même nature.

M. Bédard: À moins que vous passiez de 0,57 $ à...

M. Thibault (Louis-Philippe): De même nature. De même nature. Puis, à la question de dire, tout à l'heure, que... 40 000 $, là, ce n'est pas énorme pour une ville comme Saguenay, hein? D'ailleurs, même si on augmentait à 0,57 $, là, ça reste que ce n'est pas des montants énormes, surtout si... Là, il y a un parti politique reconnu. Mais je suis sûr qu'aux prochaines élections, s'il y a un financement, il va y en avoir plus qu'un.

M. Bédard: Et ça, ça ajoute à la démocratie municipale.

M. Thibault (Louis-Philippe): Oui. Oui, oui. Bien, je pense que c'est dans le débat des idées que... la lumière, comme on dit. Alors, sur la scène politique, je pense qu'il est sain d'avoir des débats. Puis ce n'est pas en se cachant derrière des portes closes puis qu'on prétend de faire des débats qu'on fait vivre la démocratie.

M. Bédard: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? Merci, M. le député de Chicoutimi. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Oui, M. le Président. Moi, j'aurais une petite question. Je vois que ça vous agace que, dans le projet de loi n° 78, on enlève les dons anonymes. Présentement, je perçois que vous vous financez à peu près juste avec des dons anonymes, non?

**(20 h 10)**

M. Leblond (André): C'est très minime, mais c'est parce que ça nous permet de financer nos réunions. Quand on fait une réunion, on loue une salle qui coûte 350 $, plus un peu... quelques autres frais, ça va nous coûter pas loin de 500 $. Alors, ce qu'on essaie de faire avec les dons anonymes, en passant le chapeau, c'est de payer la salle. Donc, ce n'est pas un financement énorme. Jamais on ne va atteindre 20 %, nous autres, des contributions, là.

Une voix: C'est ça. Puis, comme on n'a pas de...

M. Leblond (André): Ce facteur-là est très élevé, là, puis on... C'est sûr que, dans d'autres contextes, on peut comprendre que les dons anonymes peuvent être un problème parce que c'est un moyen de camoufler de l'argent noir, là, hein, alors que, nous, ce n'est pas ça, là. Les petits partis, là, on collecte, on passe le chapeau, ce n'est pas de l'argent qui vient d'un contracteur, là.

M. Grondin: C'est un peu comme la politique de Réal Caouette, tu en mets dans le chapeau si tu en as. Puis, si tu n'en as pas, tu en prends dans le chapeau.

M. Leblond (André): Mais, nous, on ne tient pas absolument à garder les dons anonymes, on serait... Si vous les conservez, on serait d'accord à ce qu'ils soient contrôlés. J'ai remarqué, cette année, là, que le DGE contrôlait un peu mieux les dons anonymes de chapeau dont on parle en nous faisant remplir, les agents officiels, un formulaire. Ça pourrait aller un petit peu plus loin que ça au niveau du contrôle, et on pense aussi que ça pourrait être... le 20 % pourrait être diminué, là, si on veut le contrôler un peu mieux. Mais, nous, on n'y tient pas. On ne tient pas à ça, là, on veut être compensés. C'est ça, notre recommandation, on veut avoir un financement comme parti régional, parti municipal en région, puis on veut avoir le 0,57 $ par électeur, là, pour nous financer minimalement.

M. Grondin: Écoutez, à moins que je me trompe, je ne pense pas que le projet de loi vise nécessairement ce genre de dons là, il essayait... Le projet de loi essaie de viser ce qu'on entend parler beaucoup, c'est les fameuses enveloppes brunes qui se passent un peu partout. Je pense que c'était pas mal le but du projet de loi.

M. Thibault (Louis-Philippe): Il ne vise pas ça, mais il atteint ça pareil.

M. Bindley (Daniel): Ça fait partie des dommages collatéraux.

M. Grondin: Ça fait qu'on va retenir votre remarque.

Une voix: Merci.

M. Grondin: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, je veux vous remercier...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Pardon? Oui.

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): À votre temps? Il vous reste quatre minutes.

M. Bédard: Quatre minutes?

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Mais j'aurais besoin du consentement si vous voulez revenir...

Une voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): O.K. Oui.

M. Bédard: Bien, simplement vous dire: À la lumière de vos remarques, effectivement, je discutais avec mon collègue, au niveau de la démocratie municipale, je tiens à vous assurer qu'effectivement on va faire le suivi lors de la prochaine étape, qui est celle de l'étude détaillée, pour qu'il y ait, je vous dirais... que vos représentations soient prises en compte dans les modifications et de s'assurer d'une meilleure démocratie au niveau municipal. Je tiens à vous le dire.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? M. Bindley, M. Leblond et M. Thibault, merci infiniment de vous être présentés à notre commission.

Une voix: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Je vous souhaite un bon retour chez vous, dans votre belle région.

Des voix: ...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): On pourrait toujours... (panne de son) ...dans quelques instants, le temps que Culture Montréal prenne place, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 20 h 13)

 

(Reprise à 20 h 14)

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Donc, nous allons reprendre nos travaux. Mme Anne-Marie Jean, vous êtes directrice générale de Culture Montréal. Bienvenue chez nous. Vous venez de loin, vous, Montréal.

Mme Jean (Anne-Marie): De Montréal, oui.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça s'est bien fait, oui?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui, très bien, je vous remercie.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ah! bien, vous êtes bienvenue à notre commission.

Je vous rappelle les règles, qui sont fort simples. C'est 10 minutes pour votre présentation, puis il va y avoir une période d'échange d'à peu près 25 minutes, là, pour mieux comprendre peut-être, là, le sens même de vos propos. Donc, à vous la parole, madame.

Culture Montréal

Mme Jean (Anne-Marie): Très bien, merci. Mmes et MM. les députés, M. le ministre, au nom du conseil d'administration de Culture Montréal, je vous remercie de me recevoir ce soir.

Culture Montréal, d'abord, c'est un mouvement citoyen indépendant et sans but lucratif qui oeuvre à la promotion de la culture comme élément essentiel du développement de Montréal. Par ses travaux d'analyse, de réflexion et de concertation et par son action soutenue, Culture Montréal contribue au positionnement de Montréal comme métropole culturelle tant sur le plan national qu'international. C'est pourquoi Culture Montréal a souhaité intervenir sur un des aspects précis du projet de loi n° 78, soit le redécoupage envisagé de la carte électorale.

Culture Montréal reconnaît que la représentativité des électeurs et de leurs circonscriptions respectives ne saurait être tributaire d'une seule et stricte formule mathématique. Notre système électoral repose a priori sur la réalité démographique, mais il doit également prendre en compte des critères qualitatifs pour assurer l'expression des diverses voix citoyennes qui composent le Québec.

D'après le projet de loi n° 78, l'éloignement et l'hétérogénéité des communautés occupant un territoire étendu justifient le maintien des sièges électoraux, et ce, en dépit d'une baisse démographique, tout comme elles justifient la création de nouvelles circonscriptions d'exception. Si nous ne renions aucunement cette logique, nous sommes inquiets du fait que les modifications apportées à la méthode de délimitation des circonscriptions électorales viennent diminuer le poids relatif de Montréal sur l'échiquier politique du Québec.

Nous avons par ailleurs été surpris de constater que les régions de la Montérégie, de Lanaudière et de Laval n'ont pas vu leur nombre de comtés révisé à la hausse, alors que ces régions bénéficient d'une croissance démographique qui le justifierait. En effet, certains comtés de cette région présentent des écarts qui vont au-delà de la norme de 25 %. Les citoyens de ces localités situées dans la région métropolitaine de Montréal sont en échange constant avec la métropole, que ce soit pour leurs activités professionnelles, familiales, culturelles ou récréatives.

Nous sommes convaincus qu'à titre de centre névralgique de l'économie, de la créativité, de l'innovation, de la diversité culturelle, du savoir et des échanges internationaux du Québec Montréal doit se voir dotée des moyens tant économiques, fiscaux, infrastructurels que démocratiques lui permettant de continuer à jouer son rôle et ainsi servir l'ensemble des Québécois. À l'heure où les métropoles du monde sont devenues les plaques tournantes de l'activité économique de leurs nations respectives et les principaux territoires d'accueil d'individus et d'organisations en provenance de l'étranger, Montréal doit absolument être entendue à l'Assemblée nationale, notamment en matière de développement culturel, mais aussi en ce qui a trait à la diversité culturelle, au patrimoine, à l'activité du secteur créatif et aux activités de recherche et de formation supérieure, au logement, aux infrastructures, à la lutte contre la pauvreté et aux autres enjeux propres aux métropoles. Par sa nature même et à cause du rôle qu'elle joue au sein de la dynamique économique québécoise, Montréal doit occuper sa juste place et voir ses intérêts défendus équitablement à l'Assemblée nationale.

Selon notre compréhension, l'abolition du nombre maximum de circonscriptions ouvre peut-être la porte toute grande à une diminution du poids relatif de Montréal à l'Assemblée nationale. Si Montréal compte 28 comtés sur 125, le projet de loi permet de créer des circonscriptions d'exception et de multiplier les régions. Ainsi, la proportion des sièges alloués au territoire montréalais pourrait facilement se voir diminuée. De plus, l'alignement du découpage des comtés sur les régions administratives peut sembler une avenue logique, mais elle n'est pas nécessairement conforme au principe de représentation électorale effective, qui comprend la prise en compte des communautés naturelles et des écarts acceptables.

Les changements proposés créent des écarts qui vont bien au-delà des normes. En ramenant la proportion relative à la région et non à la norme nationale, on crée des inégalités dans la représentation. En effet, certaines circonscriptions en région comptent un peu moins de 30 000 électeurs, et les plus populeuses dans la région de Montréal, au-delà de 60 000 électeurs. Ça représente... En fait, pour nous, un électeur montréalais pèserait donc deux fois moins qu'un électeur d'une autre région du Québec. C'est pourquoi nous requérons que la proportion des sièges alloués au territoire montréalais par rapport à l'ensemble de la députation provinciale demeure inchangée dans le cadre de la refonte de la Loi électorale.

Pour ce qui est du financement des partis politiques, Culture Montréal encourage le gouvernement à initier une démarche de révision en profondeur des mécanismes de financement, des mesures de contrôle et de reddition de comptes des partis politiques, démarche qui devrait se dérouler selon un échéancier qui permette une véritable consultation et réflexion publique inhérente au processus démocratique. Je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci infiniment, Mme Jean. M. le ministre.

**(20 h 20)**

M. Dutil: M. le Président, je pense que ça va plutôt être une remarque qu'une question. Parce que je comprends bien la position que vous avez sur la représentation et sur l'égalité des électeurs face au vote, mais je veux réitérer ce qui s'est déjà dit ici, dans cette commission-là, et ce que nous, les députés de région... Je suis un député de région qui vit durement cette situation-là d'attirance des grands centres urbains versus nous autres et, suite à la baisse de la natalité, donc, de la dévitalisation -- il faut l'appeler ainsi -- la dévitalisation de nos régions. C'est inégal, c'est plus vrai dans les régions les plus éloignées, c'est moins vrai dans les régions les plus proches des grands centres, mais c'est un phénomène qu'on sent, qui s'en vient.

Et le débat au niveau de la représentativité, à mon sens, est beaucoup plus un débat où on se dit: On a besoin d'une ressource pour nous représenter auprès du gouvernement et non pas pour aller légiférer auprès du gouvernement pour toutes sortes de choses qui vous apparaissent bien banales en ville, là. Je vais juste vous en mentionner une, la fibre optique dans nos régions. À Montréal, je pense, c'est un fait assez bien acquis. Internet haute vitesse, ça fait partie de la vie, puis, si vous le demandez, vous l'obtenez pas mal plus vite que nous. Dans nos régions, il ne faut pas sortir beaucoup des petites villes pour se retrouver avec des débits qui sont tout à fait, à mon sens, inacceptables aujourd'hui pour diverses raisons et, entre autres, le maintien de nos gens dans les régions.

Alors, le débat, le combat de nos députés se fait beaucoup plus, si on considère le temps qu'ils passent à travailler, dans leurs comtés à bâtir des dossiers, à essayer de trouver des façons d'éviter cette dévitalisation-là qu'à l'Assemblée nationale. On est présents à l'Assemblée nationale puis on fait des votes à l'Assemblée nationale, mais, si on répartissait le temps, on s'apercevrait que le temps passé à voter est pas mal plus court que le temps qu'on passe dans chacune de nos régions. Puis tous les députés qui ont plusieurs municipalités, qui sont dans une région vous diraient la même chose.

Je vous fais la remarque, je n'ai pas de solution créée d'avance. On comprend qu'il faut que les voix soient égales, mais les régions disent: On a besoin de quelqu'un qui nous représente à l'Assemblée nationale pas juste pour nos intérêts législatifs, aussi pour faire affaire avec le gouvernement sur une multitude de dossiers qui les concernent.

Quant au financement, vous avez été pour le moins brève sur cette question-là, mais est-ce que je peux vous poser deux questions? Est-ce que vous trouvez...

Mme Jean (Anne-Marie): Je vais voir si, comme mes prédécesseurs, là, si je pourrai formuler une position d'organisme ou si je devrai m'en remettre à ma position personnelle.

M. Dutil: Oui, c'est... Vous allez voir, vous êtes probablement déjà préparée parce que ce sont les mêmes questions. Est-ce que vous estimez que 3 000 $, c'est un plafond trop élevé pour des dons à un parti politique?

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, effectivement, je pense que, comme ils l'ont mentionné tantôt, ce sont des contributions qui sont assez rares. Il y a peu de citoyens... Le citoyen moyen peut difficilement contribuer ce genre de somme, et, effectivement, probablement que le plafond est trop élevé par rapport à la réalité.

Maintenant, toute la question, pour nous, repose sur la transparence. J'ai mentionné la reddition de comptes, ce sont des mécanismes à mettre en place pour que... En fait, on a vécu différentes expériences, là, dans la dernière année, différentes situations dans les dernières années qui nous permettent, en fait, de... qui nous portent à croire qu'il y a un exercice en profondeur qui doit être fait par rapport à la transparence et à la reddition de comptes. Donc, que les plafonds soient à 3 000 $, s'ils ne sont pas atteints, si ça tourne plus autour de 150 $, 200 $, 300 $, 500 $, moi, je n'ai pas une...

M. Dutil: Une opinion arrêtée.

Mme Jean (Anne-Marie): Je n'ai pas une opinion si arrêtée que ça. Je pense qu'on a besoin... Et c'est pour ça qu'on vous a mentionné dans notre mémoire qu'on avait besoin d'entreprendre une réflexion approfondie sur le sujet, parce que c'est clair que les partis politiques et le financement des partis politiques vivent une crise présentement. J'entendais le Directeur général des élections qui disait: C'est sûr que c'est difficile, même que les entreprises ne participent pas. Mais, en même temps, je pense que c'est un débat de société, on doit y réfléchir tous ensemble. Les gens doivent réaliser que la démocratie, ça coûte de l'argent, les partis politiques doivent trouver des moyens de se financer, et qu'une augmentation de la contribution par électeur, par le gouvernement, c'est une chose, les contributions des individus, c'en est une autre, et, sur cette portion-là, il faudrait qu'on réfléchisse tous ensemble.

M. Dutil: D'accord. Deuxième question: Le crédit d'impôt devrait-il être remboursable pour permettre aux citoyens qui ne paient pas d'impôt de bénéficier du crédit d'impôt, ne fût-ce que pour ces montants relativement petits?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui. Ce qui m'inquiétait aussi, c'était justement le mécanisme à mettre en place. C'est une énorme bureaucratie, je crois, pour être en mesure de rembourser. Quand ça passe dans le rapport d'impôt, c'est une chose. Si vous êtes obligé, de l'autre côté, de mettre tout un système de remboursement à des gens qui ne paient pas déjà d'impôt, enfin quel est le gain? Est-ce que ça nous coûte deux fois plus cher pour financer les partis politiques? Est-ce qu'on ne doit pas, à ce moment-là, rehausser la contribution par citoyen, par électeur?

M. Dutil: O.K. Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va? D'autres questions? M. le député de Rousseau.

M. Marceau: Bonjour, Mme Jean.

Mme Jean (Anne-Marie): Bonsoir.

M. Marceau: Bonsoir. Écoutez, aujourd'hui, le Directeur général des élections... en fait, la Commission de la représentation électorale a déposé devant nous la deuxième mouture de la carte électorale, là, sa deuxième version. En fait, il y avait eu une première version sur laquelle différentes personnes étaient intervenues, et ma première question, c'est: À l'époque, étiez-vous intervenue auprès de la Commission de la représentation électorale pour faire valoir le point de vue que vous nous faites valoir aujourd'hui?

Mme Jean (Anne-Marie): Non. En fait, on est intervenus dans le cadre de ces audiences-ci.

M. Marceau: O.K. O.K. Je vous donne simplement quelques chiffres. Et ça, ce n'est pas tiré de la carte qui nous a été déposée aujourd'hui, là, mais du mémoire de la Commission de la représentation électorale qui est présenté dans le cadre de nos travaux, et, simplement dans la carte électorale actuelle, Montréal a 22,4 % des sièges, O.K.? Donc, des 125 comtés, il y en a 22,4 % qui vont à Montréal. Dans la nouvelle version, dans la nouvelle carte qui a été déposée aujourd'hui, Montréal conserverait ce même pourcentage de 22,4 %. Cependant, si on mettait en oeuvre le projet de loi n° 78 tel qu'il est aujourd'hui rédigé, en 2000... enfin, maintenant, là, aujourd'hui, la part des sièges de Montréal baisserait à 21,1 % et, en 2020, elle baisserait à 20,4 %. Alors, je vous dis ça... Bon, écoutez, j'aimerais bien entendre vos commentaires là-dessus, est-ce que vous, à la lumière de ce que je vous dis, est-ce que vous ne croyez pas qu'il serait judicieux, minimalement, que nous étudiions le projet réformé, la deuxième mouture de la carte électorale du Directeur général plutôt que de se pencher sur un projet de loi, là, qui change les règles sans qu'on ait vu, là, au préalable le projet de loi... la deuxième mouture, là?

Mme Jean (Anne-Marie): Oui. Bien, pour moi, c'est difficile de me prononcer sur un document que je n'ai pas vu. Mais, sur des principes, je pense que... En fait, quand on entend des chiffres comme ça et quand on... La grande région métropolitaine de Montréal correspond à un pourcentage beaucoup plus élevé que ça de la population, donc il y a déjà là -- la population nationale -- un déséquilibre en matière de représentation et qu'on va voir s'accentuer. Je comprends qu'il y a des mouvements démographiques, là, mais il reste que, sur l'île de Montréal, on comprend très bien qu'il n'y a pas eu d'énormes changements. Mais on sait que, bon, que ça continue de baisser si on augmente ailleurs.

M. le ministre, tantôt, parlait des représentations de certaines régions plus éloignées ou moins populeuses. Nous, on n'a rien contre ça et on n'a rien contre, justement, l'application de critères qualitatifs, justement, pour permettre aux régions d'avoir une voix, même si leur démographie diminue ou... mais qu'ils soient bien représentés et que les députés puissent bien faire leur travail. Mais il ne faudrait pas que ça se fasse au détriment de la représentation de Montréal, qui est quand même un moteur économique au Québec, et on sent, pour travailler dans une organisation qui fait la promotion de Montréal et qui travaille beaucoup avec les différentes institutions de la société civile et des élus, on sent toujours que Montréal a de la difficulté à faire valoir ses besoins. C'est toujours difficile pour Montréal. D'annoncer quelque chose à Montréal, on a toujours l'impression qu'on... Les régions nous renvoient toujours une image comme quoi on obtient tout, alors qu'on a l'impression qu'il faut tellement se battre pour tout obtenir.

Donc, je pense qu'il y a un équilibre dans tout ça qui doit être respecté et je pense que, pour donner aux uns, il n'est pas nécessaire d'enlever aux autres. En fait, je pense qu'il y a vraiment une... J'allais utiliser une expression, il ne faut pas déshabiller Pierre pour habiller Jacques, là, mais c'est un peu ça, et c'est l'impression que ça nous laisse comme organisation qui travaille vraiment au quotidien avec les milieux politiques.

M. Marceau: O.K. Merci. Mais je pense que c'est plus sur le processus, dans le fond, que je voulais vous entendre. Dans le fond, la Commission de la représentation électorale a fait un travail, est partie d'une première version de la carte, en a... à la suite de rencontres puis d'interventions de différentes personnes, en est arrivée à un deuxième projet déposé aujourd'hui, mais qu'en principe nous n'utiliserons pas ici, en... Et ce que je vous demande: Est-ce que vous ne croyez pas qu'il serait judicieux que nous examinions aussi le projet révisé du Directeur général, en particulier puisqu'il vous donne raison, là, en tout cas en termes de pouvoir politique de Montréal? Tout simplement, est-ce que vous croyez que ce serait judicieux qu'on regarde ou est-ce que vous croyez que ce n'est pas utile?

**(20 h 30)**

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, je pense que, s'il a été mandaté pour faire le travail, ce serait intéressant que ce soit étudié. Je pense que votre travail, effectivement, c'est d'assurer qu'au bout de l'exercice on se retrouve avec les meilleurs mécanismes possible pour la révision de la carte électorale aujourd'hui, mais pour l'avenir.

M. Marceau: Et, dans le mémoire... sur le processus toujours, là, le projet de loi n° 78, comme vous le savez, comporte une partie qui porte sur la carte électorale puis une partie qui porte sur le financement. Vous abordez essentiellement la question de la carte, mais à la fin vous parlez du financement. Plusieurs groupes ont demandé que le projet de loi soit scindé. Nous aussi, nous demandons ça. Est-ce que vous croyez que ce serait judicieux de le scinder pour que, justement, on ne mélange pas les pommes et les oranges, là, pour qu'on puisse travailler sur la partie financement, qui est intéressante, puis travailler par ailleurs, là, sur les questions de représentation, qui sont importantes aussi? Mais ce qu'on ne voudrait pas, c'est que des objections à une partie fassent en sorte que l'autre partie prenne le bord, là.

Mme Jean (Anne-Marie): En fait, je ne sais pas si le projet de loi peut être scindé, mais il est clair, pour moi, que, considérant la récente histoire, en fait, on sent qu'il y a une crise de financement des partis politiques. On ne pense pas qu'on puisse, en fait, sauter d'étape là-dedans. Je pense qu'il y a une discussion démocratique, en fait une consultation publique, qui pourrait être tenue là-dessus pour que les gens puissent s'exprimer et bien comprendre ce que ça représente. Et je ne suis pas sûre, je ne suis pas certaine que tous les citoyens soient aussi conscients des difficultés, par exemple, qui étaient énoncées tout à l'heure, de financement des partis politiques, que ce soit sur la scène provinciale que municipale. Je pense que ça pourrait être... j'allais dire thérapeutique, mais éducatif, pédagogique de faire cet exercice-là et qu'on se comprenne bien qu'est-ce que ça coûte, la démocratie, au Québec et puis quels sont les meilleurs mécanismes à mettre en place pour que les partis politiques puissent faire leur travail correctement et que la démocratie s'exerce correctement. Donc, je pense que ce serait intéressant.

Donc, de là à vous dire est-ce que ça doit être scindé dans le projet de loi, je ne peux pas me prononcer, mais, en tout cas, l'exercice, lui, doit être fait en profondeur avec l'ensemble de la population.

M. Marceau: Juste pour être plus précis, vous avez des inquiétudes sur la première partie du projet de loi, qui porte sur la carte. Par ailleurs, vous nous invitez à travailler sur le financement. Donc, d'une certaine façon, vous dites: Il est possible que, dans un même projet de loi, il y ait des portions qui soient intéressantes puis d'autres qui le soient moins. Nous, on pense que ça vaut la peine de séparer parce qu'effectivement il y a une partie qui nous convient mieux, qui est celle du financement. Celle de la carte, on a des inquiétudes, qui ne sont pas nécessairement les mêmes que les vôtres, mais on a des inquiétudes, nous aussi. Est-ce que vous ne croyez pas, donc, que scinder, ça pourrait justement permettre de faire l'examen de la partie financement, qui nous préoccupe, là, très immédiatement, là, à l'Assemblée nationale?

Mme Jean (Anne-Marie): C'est peut-être une avenue, mais, comme je vous dis, je n'ai pas... Tout dépendant du temps avec lequel il faut procéder pour la révision de la carte, est-ce qu'on peut effectivement prendre le temps de faire ça et de conserver ensemble ou scinder pour accélérer les choses? C'est une décision qui ne me revient pas.

M. Marceau: Parfait. O.K. Merci. Autre sujet, je veux revenir sur le 3 000 $, donc. Une famille de la classe moyenne peut, on va s'entendre assez rapidement là-dessus, là... typiquement, ne va pas contribuer 3 000 $ à un parti politique. C'est un montant qui est élevé. Est-ce que vous ne croyez pas que, dans l'objectif qu'on a d'avoir un financement véritablement populaire dans lequel chaque citoyen a un poids égal dans le système démocratique... est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de baisser ce plafond-là de manière à ne pas permettre que des personnes plus fortunées aient plus de poids dans le processus politique? Est-ce que de le baisser, ce ne serait pas une bonne chose? Nous, on a suggéré 500 $. Peut-être que ce n'est pas le montant qui vous conviendrait, mais est-ce que vous ne croyez pas qu'on pourrait le baisser pour en arriver à un financement qui soit véritablement populaire?

Mme Jean (Anne-Marie): Encore une fois, ce n'est pas une réflexion qui a été faite à l'intérieur de l'organisation, donc je vais y aller plus personnellement. Mais, en fait, je reviens à la transparence de tout à l'heure. Parce qu'on parlait d'engagement politique, tout à... il y a des gens qui ne sont pas nécessairement très fortunés, mais pour qui c'est extrêmement important et qui sont très, très engagés en politique, qui pourraient décider que tout l'argent qu'ils vont donner en philanthropie, ça va être pour la démocratie, pour un parti politique ou pour des partis politiques, et que, s'ils veulent donner 3 000 $, même si ce ne sont pas des gens très fortunés, la loi pourrait leur permettre. Tout est une question, pour moi, de transparence.

Donc, ce n'est pas une question, nécessairement, de montant, mais qu'on sache qui donne quoi. Et on se comprendra, je ne pense pas, personnellement, qu'un gouvernement ou un député se ferait acheter pour 3 000 $. Ça fait que c'est... En fait, c'est ça, la crainte des gens, mais... Et donc c'est pour ça, c'est qu'on sache d'abord qui a donné quoi. C'est, je pense, ce qui est important, et qu'il y ait des plafonds, bien entendu, pour ne pas qu'il y ait des grandes entreprises qui contrôlent les partis politiques, ou les syndicats, ou etc. Mais qu'un citoyen veuille donner une somme de 3 000 $, ça, pour moi, en tout cas, il y a des gens qui peuvent aller jusque-là.

M. Marceau: De la même optique, dans ce cas-là, est-ce qu'on devrait dévoiler le nom des donateurs pour des montants inférieurs? Actuellement, c'est à 200 $, là, le montant à partir duquel on doit révéler les dons. Est-ce que ça devrait être baissé? Est-ce que ça devrait être à zéro? Est-ce que ça devrait être à 100 $? Est-ce que...

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, pour refléter des réalités comme celles qui ont été énoncées tout à l'heure, là, quand on passe le chapeau... Pour le vivre dans un organisme qui n'est pas un parti politique, mais... on fait appel, nous aussi, à des donateurs privés. Et, quand on passe le chapeau, on fait vérifier le montant et puis on peut signer des documents. Donc, il y a des mécanismes de reddition de comptes qui font que, sans savoir qui a donné quel 5 $, il y a au moins un mécanisme qui permet de vérifier que, ce soir-là, ça a été recueilli, puis les vérificateurs peuvent en témoigner et signer que ça a été recueilli dans un espace public, dans un événement public, etc. Donc, je pense qu'il y a... Encore une fois, c'est une question de reddition de comptes et de... il n'y a pas de montant précis à mettre.

M. Marceau: Oui, mais ce que je vous suggère, c'est que, si on le baissait à 100 $, il y aurait plus de reddition de comptes parce qu'il y aurait plus de dons à propos desquels on saurait l'initiateur, donc on saurait qui a donné.

Mme Jean (Anne-Marie): Oui. Oui, mais je ne suis pas sûre d'avoir bien saisi votre question.

M. Marceau: O.K. Présentement, les noms des donateurs sont révélés au-delà d'un certain montant, 200 $. Alors, si on le baissait, on pourrait avoir encore plus l'heure juste sur qui a donné de l'argent.

Mme Jean (Anne-Marie): Tout à fait, oui.

M. Marceau: Dernière chose, sur les sanctions, le projet de loi prévoit des sanctions plus sévères. Nous, au Parti québécois, on a proposé aussi que le Directeur général ait plus de moyens, plus d'enquêteurs, qu'il y ait des passerelles entre Revenu Québec et le Directeur général des élections pour que, justement, les enquêtes puissent permettre de faire des liens avec les fichiers d'impôt, là, puis qu'on puisse savoir... en avoir le coeur net. Est-ce que vous êtes favorables à ce genre de mesure?

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, je pense que oui, qu'il y ait des mécanismes de contrôle et... En fait, pour pouvoir remonter les dossiers, et tout ça, je pense qu'effectivement, dans nos sociétés, c'est essentiel de se doter des moyens de vérifier l'information.

M. Marceau: Merci.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. le député de Rousseau. M. le député de Beauce-Nord.

M. Grondin: Merci, M. le Président. Moi, j'ai... On se pose toujours la question. J'ai vécu à Montréal quand même un bon bout de temps, et puis comment qu'on fait pour intéresser les gens à la politique dans une ville comme Montréal? Ma fille demeure là présentement puis, aux dernières élections, m'appelait pour savoir dans quel comté elle était, puis c'étaient qui, ses candidats. Alors, comment est-ce qu'on fait pour intéresser les gens de la ville à la politique?

Mme Jean (Anne-Marie): Vous me posez cette question?

M. Grondin: Oui.

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, je pense que les Montréalais s'intéressent à la politique, mais ils le font d'une autre façon. Et le député a un rôle différent à jouer, étant donné qu'il y a beaucoup de bureaux gouvernementaux qui sont situés à Montréal, et tout ça. Les gens ont un accès plus facile, peut-être, à certains services, et donc le député a un autre rôle, effectivement, que celui qu'il pourrait avoir dans une autre région. Mais c'est par la qualité des débats, je pense, qu'on intéresse les citoyens à la politique.

M. Grondin: La politique se fait à peu près juste par les journaux, par la télévision, par... alors c'est complètement différent des régions. Nous, dans une région comme la mienne ou comme bien d'autres ici, le lendemain des élections, là, je vous dirais que, s'il y a 40 000 électeurs, ils savent tous notre nom puis ils savent où est le bureau, puis ils viennent nous voir. Ils ne viennent pas tous nous voir, les 40 000, la même journée, mais ils nous connaissent et nous... Et, dans une ville... dans la ville comme Montréal, écoutez, je n'ai jamais su c'était qui, mon député, moi, le temps que j'ai été là. Mais disons que je ne m'intéressais pas à la chose politique non plus.

Mme Jean (Anne-Marie): Bien, c'est ça. Et, moi, c'est mon quotidien de m'occuper de la chose politique, en fait d'organiser des rencontres avec les députés, les maires d'arrondissement, les... Alors, je peux vous dire que les gens sont intéressés parce que les événements qu'on organise sont courus par les citoyens. Donc, je pense qu'il faut aussi multiplier les occasions de rencontrer les citoyens à Montréal. Et c'est sûr qu'il faut y aller quartier par quartier, ça se travaille autrement. Mais, je comprends, c'est beaucoup plus difficile parce que, sur le plan médiatique, il y a une plus grande compétition, bien entendu, pour être couvert par les médias nationaux sur le territoire montréalais.

**(20 h 40)**

M. Grondin: Lors des travaux du DGE, là, qui est venu nous voir tout à l'heure, on avait sorti, nous... Parce que mon comté, moi, était censé être éliminé. Alors, on a sorti plusieurs... on a fait plusieurs calculs, et, dans la ville de Montréal, si on prenait tous les comtés de la ville de Montréal, il n'y a pas de comté qui était à 60 000 votes et plus, ils étaient tous sur le bord de la ligne. Ils n'étaient pas à plus 15 % ou moins ou... mais ils étaient quand même des comtés assez bien balancés. Là où il y avait un problème, c'était dans la Montérégie, là où il y avait des comtés qui étaient rendus... Dans le coin de Terrebonne, Masson, ces comtés-là étaient rendus à 60 000. C'est sûr que, là, il y avait un débalancement. Mais, dans la ville de Montréal elle-même, les comtés... je ne sais pas si ça a changé beaucoup, mais les comtés semblaient quand même être assez bien balancés, alors il n'y avait pas de mouvement, là, de comtés, je pense, sur l'île de Montréal.

Mme Jean (Anne-Marie): Je suis d'accord avec vous, c'est ce qu'on a constaté aussi. Mais, la région métropolitaine de Montréal, à laquelle vous faites référence, là il y a des variations importantes, et on voit qu'il n'y a pas de modification de la carte électorale dans ce coin-là. C'est ce qui a suscité chez nous des questions en nous disant: Pourquoi est-ce qu'on n'aborde pas cette région-là de la même façon qu'on aborde d'autres régions? Et donc ça pourrait toucher éventuellement Montréal, là. C'est le principe sur lequel on se questionne.

M. Grondin: Disons que, quand on parle un citoyen, un vote, c'est sûr que, là, vous avez raison. Mais, si on parle un député face à son électorat, si je prends la ville de Montréal, il peut faire son comté dans peut-être 15 minutes à pied. Si on prend un comté en région, des fois ça lui prend deux heures, 2 h 30 min en auto pour le faire. On n'a pas la même... ce n'est pas le même travail, là, de représentation. Alors, c'est pour ça que peut-être que... Remarquez que peut-être qu'on pourrait aller dans une dimension autre, quand on est dans des grands centres, que dans des régions.

Mme Jean (Anne-Marie): Et c'est pour ça qu'on se disait qu'on n'est pas contre l'application de critères qualitatifs. Je vous concède que le travail d'un député en région puis celui de Montréal est fort différent, mais les défis sont différents. Et je ne pense pas qu'un citoyen montréalais doive compter pour la moitié d'un citoyen d'un autre comté, je pense que les défis sont différents. Mais l'enjeu de la représentation demeure celui qui doit primer pour nous.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Ça va, M. le député de Beauce-Nord?

M. Grondin: Juste une autre petite remarque...

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Très rapidement.

M. Grondin: ...très courte. Mais vous avez raison. Mais, d'un autre côté, si je prends un comté de région, il n'y a pas de transport en commun, il n'y a rien, il n'y a pas de... On a de la misère à avoir Internet, on l'a... Alors, vous dites: Un citoyen de Montréal, un citoyen d'une autre région, il doit avoir le même poids, mais ça devrait être partout pareil, là, ça devrait être pour tous les services pareil.

Mme Jean (Anne-Marie): Ah! ça, je suis d'accord. C'est des batailles qui doivent être faites, ça, je suis d'accord avec vous. Moi, je n'en suis pas sur nécessairement ces points-là, c'est sur la représentation, c'est... Mais, je vous l'ai dit, pour moi, les défis que vous avez en région sont différents, et ils ne sont pas moins grands à Montréal, par contre.

Le Président (M. Bachand, Arthabaska): Merci, M. le député de Beauce-Nord. Merci, Mme Jean. Bon retour chez vous, à Montréal.

Et, sur ce, je lève la séance, et la commission ajourne ses travaux jusqu'à demain, mercredi 10 mars, après les affaires courantes. Bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 20 h 44)

Document(s) related to the sitting