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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Friday, January 16, 2015 - Vol. 44 N° 23

Special consultations and public hearings on Bill 26, An Act to ensure mainly the recovery of amounts obtained as a result of fraud or fraudulent tactics in connection with public contracts


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Table des matières

Auditions (suite)

Vérificateur général

Ville de Gatineau

Directeur général des élections

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Intervenants

M. Gilles Ouimet, président

Mme Stéphanie Vallée

M. Alexandre Cloutier

Mme Nathalie Roy

M. Richard Merlini

Mme Véronique Hivon

M. Jean Rousselle

*          M. Michel Samson, Vérificateur général par intérim

*          M. Maxime Pedneaud-Jobin, ville de Gatineau

*          M. Claude Alain, idem

*          Mme Lucie Fiset, Directrice générale des élections

*          Mme Suzanne Roy, UMQ

*          Mme Diane Simard, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trois minutes)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il vous plaît. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux pour ne pas déranger nos travaux.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 26, Loi visant principalement la récupération de sommes obtenues à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le cadre de contrats publics.

Mme la secrétaire, bonjour. Y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Bourgeois (Abitibi-Est) remplace M. Ouellette (Chomedey) et Mme Hivon (Joliette) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve).

Auditions (suite)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, bonjour à tous, bon matin. Nous reprenons nos travaux. Et, sans plus tarder, nous recevons ce matin le Vérificateur général du Québec et les membres de son équipe. Alors, bonjour à vous, bienvenue à la Commission des institutions. Vous disposez d'une période de 10 minutes pour la présentation de votre mémoire, et tout d'abord je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent, M. le Vérificateur général. La parole est à vous.

Vérificateur général

M. Samson (Michel) : Merci, M. le Président. Alors, bon matin à tous. Ça nous fait plaisir d'être ici ce matin. Je suis accompagné de M. Serge Giguère, qui est vérificateur général adjoint au Vérificateur général, évidemment, et de M. Alain Fortin, qui est directeur principal au vérificateur. Derrière moi, en cas de besoin, deuxième niveau de réponse, si on peut dire, M. Denis Lacroix, qui est directeur de vérification, et Mme Lucie Roy, que plusieurs d'entre vous connaissent, qui est la directrice du cabinet au Vérificateur général.

Alors, M. le Président, Mme la ministre de la Justice, Mmes, MM. les membres de cette commission, c'est avec plaisir qu'à la suite de la demande de la commission je participe aux auditions publiques concernant le projet de loi n° 26. Depuis 1996, le Vérificateur général a réalisé plus d'une vingtaine de missions touchant directement les contrats publics dans les différents domaines de l'activité gouvernementale, notamment la santé, l'éducation, le transport et les ressources informationnelles, par exemple mentionnons la vigie relative au projet de modernisation des centres hospitaliers universitaires de Montréal, la vérification de la gestion des contrats présentant des situations à risque au ministère des Transports et celle portant sur les contrats de services professionnels liés au traitement de l'information. Mon intervention ne constitue pas une prise de position quant à la pertinence de ce projet de loi, elle vise plutôt à alimenter la réflexion des parlementaires en soulevant des points qui, à mon avis, méritent d'être considérés afin d'atteindre certains objectifs inhérents à ce projet de loi. Parmi ces objectifs, nommons les suivants : améliorer la confiance des citoyens envers le processus d'attribution des contrats publics, récupérer les fonds publics dépensés injustement pour des contrats publics, favoriser la réhabilitation des entreprises qui ont posé des gestes répréhensibles. Pour atteindre de tels objectifs, certains principes tels que la rigueur, l'équité et la transparence doivent servir de base aux actions gouvernementales à accomplir. Ces principes ont guidé ma lecture du projet de loi, et j'y référerai au cours de ma présentation.

À l'égard du programme de remboursement. Le chapitre II du projet de loi porte sur le programme de remboursement volontaire. Une entreprise ou une personne physique pourra ainsi rembourser certaines sommes obtenues à la suite d'une fraude ou de manoeuvres dolosives. Un principe de gestion fondamental doit soutenir un tel programme, soit l'équité par rapport à son application. En effet, les citoyens doivent avoir l'assurance que chaque cas est traité de façon rigoureuse et que les entreprises obtiennent une quittance à l'égard des contrats visés à la suite du versement d'une somme jugée raisonnable dans les circonstances. À cet égard, le statut et le rôle de l'administrateur décrits à l'article 6 sont de première importance. Il faut que celui-ci ait accès à toutes les ressources et à tous les outils nécessaires afin de juger adéquatement du caractère raisonnable du projet d'entente. Cet administrateur, tout en maintenant son indépendance, doit donc posséder des mécanismes de vérification et d'investigation requis et pouvoir échanger de l'information avec certaines entités telles que l'UPAC, l'Autorité des marchés financiers et l'Agence du revenu du Québec.

La détermination du montant correspondant au préjudice est un élément de risque important auquel l'administrateur devra faire face. Les modalités d'application du programme joueront un rôle essentiel pour orienter le jugement de l'administrateur et assurer l'équité du processus. Selon l'article 4 du projet de loi, je comprends que ces modalités feront l'objet d'une publication ultérieure. Si ces modalités ne sont pas incluses dans le projet de loi, il est nécessaire qu'elles soient bien définies et comprises avant l'entrée en vigueur du programme. Par exemple, il serait souhaitable que, dans les modalités d'application, on précise que les sommes faisant l'objet du remboursement porteront intérêt à compter du dernier paiement fait par l'organisme public pour le contrat visé et qu'un montant forfaitaire sera exigé pour récupérer les frais engagés, au même titre que pour un recours judiciaire. La durée du programme est une autre modalité importante à établir.

Les recours judiciaires. Le chapitre III du projet de loi contient des règles particulières applicables aux recours judiciaires. Afin d'inciter les entreprises et les personnes physiques à utiliser le programme de déclaration volontaire, il faut envoyer un message clair : toutes les ressources financières, humaines et techniques nécessaires seront prévues afin de s'assurer que les actions seront mises en oeuvre pour récupérer les sommes payées en trop. En pratique, l'efficacité du programme de remboursement volontaire sera tributaire de l'évaluation que feront les différents acteurs de la possibilité d'être reconnu coupable lors d'un recours judiciaire ultérieur. Selon moi, certaines mesures doivent contribuer à l'efficacité du programme de remboursement volontaire et faciliter l'application des recours judiciaires à ceux qui n'utiliseront pas le programme.

L'article 10 du projet de loi précise que toute entreprise ou toute personne physique est visée. Il est essentiel de définir clairement la portée de «personne physique». Par exemple, dans quelle mesure les employés des organismes publics qui ont participé à de telles manoeuvres sont-ils concernés par le projet de loi? Pour rebâtir la confiance des citoyens, il est tout aussi, sinon plus important de sanctionner les personnes corrompues responsables de la gestion des fonds publics que les corrupteurs eux-mêmes. D'autre part, je vous invite à évaluer s'il serait pertinent que les sous-traitants soient aussi mis en cause.

La durée des mesures instaurées par le projet de loi a aussi une influence sur l'évaluation que feront les entreprises ou les personnes visées du risque d'être prises en défaut. Selon l'article 16, il ne peut y avoir prescription pour les actions intentées dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur de la loi. De plus, selon l'article 37, les dispositions du chapitre III, lequel est relatif aux recours judiciaires, cessent d'avoir effet cinq ans après leur entrée en vigueur. Or, étant donné la complexité des dossiers portant sur les situations de fraude et la possibilité que de tels cas se répètent dans l'avenir, nous nous interrogeons sur le bien-fondé de cette date d'échéance. Il serait avantageux que les entreprises ou les personnes ayant réalisé des actes répréhensibles sentent l'épée de Damoclès suspendue au-dessus d'elles pour une période plus longue.

L'article 10 mentionne aussi que les entreprises et les personnes physiques qui ont fraudé sont solidairement responsables du préjudice causé. Il serait utile de prévoir explicitement une présomption de responsabilité de l'entreprise dès qu'il est reconnu que des gestes répréhensibles ont été commis par un ou des employés. En l'absence d'une telle présomption, il y a un risque que l'entreprise prenne trop facilement ses distances par rapport aux employés concernés, ce qui pourrait diminuer les possibilités de récupérer les sommes injustement versées.

Pour terminer, je vous présente quelques éléments de nature générale qui sont, d'après moi, tout aussi importants pour assurer l'efficacité de la démarche.

D'abord, la détermination des règles de répartition des sommes recouvrées entre le gouvernement du Québec et les organismes publics, telles les municipalités, représente une étape majeure de la démarche. Il sera donc nécessaire de définir rapidement ces règles de répartition afin que chacun puisse évaluer clairement les avantages qu'il peut retirer de l'application du projet de loi. Si des organismes publics ont subi un préjudice à la suite d'actes frauduleux commis dans le cadre de la gestion des contrats publics, c'est aussi le cas pour le gouvernement par l'intermédiaire de ses programmes de subvention.

Ensuite, la transparence doit être au rendez-vous, c'est un principe essentiel pour assurer la crédibilité associée à ce projet de loi. Même si l'on a le souci de préserver les renseignements de nature confidentielle, le processus ne doit pas être perçu comme étant mené en vase clos. D'une part, il serait nécessaire que le ministère de la Justice ait la responsabilité de rendre compte sur une base périodique de l'ensemble des résultats obtenus par rapport à l'application du projet de loi. D'autre part, il serait pertinent de prévoir de façon explicite que je pourrai avoir accès, dans le cadre de mes travaux, à l'ensemble de la documentation. Cela permettra aux parlementaires de mieux évaluer dans quelle mesure cette loi est appliquée en conformité avec les règles qui seront établies et dans un souci de saine gestion des fonds publics.

Voilà pour l'essentiel des constatations qui découlent de ma lecture de ce projet de loi. Je suis maintenant à votre disposition, ainsi que mon équipe, pour répondre à vos questions. Merci de votre attention.

(9 h 10)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je vous remercie pour cette présentation. Nous allons maintenant procéder à un premier bloc d'échange avec, du côté gouvernemental, Mme la ministre de la Justice. La parole est à vous.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, merci beaucoup, M. Samson. Merci à votre équipe de participer aux travaux de la commission, participer à la réflexion qui entoure la mise en place du projet de loi.

J'aimerais, dans un premier temps, vous entendre... Vous avez soulevé un élément qui est quand même assez important, c'est la responsabilité présumée des employés d'une entreprise. Alors, si je vous comprends bien, vous souhaitez que nous élargissions la portée de l'article 10 pour qu'une entreprise soit tenue solidairement responsable du seul fait de l'acte d'un employé, et non pas d'un dirigeant, non pas d'un administrateur, non pas d'un dirigeant parce que ça, c'est déjà prévu, puis vous voulez aller plus loin. Donc, si un employé a posé des gestes, a commis des manoeuvres dolosives ou a fraudé, vous proposez d'étendre la responsabilité à l'ensemble de l'entreprise. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Samson (Michel) : Oui. En fait, oui, effectivement, vous avez bien compris. Il y a peut-être deux volets, lorsqu'on parle, oui, de personnes physiques, évidemment, on parle des employés d'une entreprise, pour éviter un petit peu, comme je le mentionnais précédemment, qu'une entreprise, si un employé était poursuivi suite à des manoeuvres dolosives ou une fraude... pour éviter que l'entreprise automatiquement ne prenne ses distances vis-à-vis ces employés-là, cet employé-là en disant : Moi, je n'étais pas au courant. Donc, il y a ce lien-là. Et ça déborde un petit peu votre question, mais il y a aussi tout l'aspect, lorsqu'on parle de personnes physiques dans le projet de loi, pour être bien certain que «personne physique»... Lorsqu'on regarde la définition à l'article 2, je crois, d'«entreprise», on parle de personnes physiques qui détiennent une entreprise à titre individuel, mais, dans le projet de loi, je pense que ce serait important de comprendre que, lorsqu'on parle de personnes physiques, c'est l'intention du législateur, on vise aussi que ce soient des fonctionnaires ou des gens dans l'appareil public qui pourraient avoir commis des fraudes. À notre première lecture — et nous ne sommes pas juristes, ici, je vous le dis tout de suite — on avait l'impression que ce n'était pas si clair que ça si ces gens-là étaient inclus, étaient concernés par le projet de loi. Donc, il y a ces deux volets-là.

Mme Vallée : Bien, merci. Puis en fait c'est justement la beauté des consultations, c'est de permettre... Parfois, lorsqu'on a le nez collé sur un projet de loi, on n'a pas nécessairement la même lecture. Et on connaît nos intentions. Alors, c'est intéressant et c'est toujours enrichissant d'entendre ceux et celles qui en ont fait une première lecture et en ont tiré certaines conclusions, alors merci pour vos observations.

Je suis aussi curieuse de vous entendre... Parce que vous avez parlé du programme de remboursement volontaire, puis évidemment c'est une mesure-phare du projet de loi. Évidemment, on souhaite que le programme puisse permettre d'éviter des recours fastidieux, mais en même temps il faut que ce programme-là puisse être administré et orchestré de façon rigoureuse. Alors, dans ce sens-là, je me demandais quelle pouvait être la contribution du Vérificateur général, quels étaient les éléments, les outils qui pourraient peut-être être mis à contribution du responsable du programme, de l'administrateur du programme de remboursement volontaire. Je comprends que, pour vous, il est important, essentiel qu'il y ait une fluidité de transmission de renseignements entre les plus importants acteurs du domaine, notamment l'UPAC, l'AMF, mais qu'est-ce que le Vérificateur général... Parce que vous avez aussi, dans le cadre de votre mandat, fait des vérifications, vous vous êtes penchés sur certains dossiers problématiques, vous avez déjà soulevé ou allumé... soulevé des drapeaux. Alors, quelles pourraient être votre collaboration et votre contribution aux travaux du bureau de remboursement volontaire?

M. Samson (Michel) : Oui. M. le Président, effectivement, dans le cadre de nos travaux, premièrement, je pense que c'est important de préciser que le mandat du Vérificateur général, lorsqu'on réalise des travaux, n'est pas de découvrir la fraude. Évidemment, vous comprenez, on a une équipe chez nous quand même de... une bonne équipe, mais on n'a pas les moyens d'écoute électronique, on n'a pas les pouvoirs et on ne les veut pas non plus.

Mais il n'en demeure pas moins que, dans le cadre de nos travaux, on va parfois avoir des indices ou, comme vous l'avez mentionné, Mme la ministre, allumer une lumière parce qu'on a des préoccupations à certains égards. On a déjà, avec notre organisation, des mécanismes d'échange, je dirais, ou de collaboration avec d'autres organisations comme l'UPAC, entre autres, assez... je ne dirais pas régulièrement, mais assez souvent il y a des échanges sur des vérifications qu'on peut avoir faites ou qu'on réalise, on va avoir des échanges pour être sûrs, dans le fond, qu'on coordonne nos travaux et que nous, par une vérification, on ne nuirait pas à une enquête de l'UPAC. Mais aussi, après une vérification, ça va plus loin. Souvent, l'UPAC nous rencontre, nous demande des échanges... on échange certaines informations avec eux pour les aider, eux, dans leur travail, puis ensuite ils font leur travail.

Donc, je ferais le parallèle. Un mécanisme de la sorte pourrait possiblement, dépendamment de l'administrateur et de son indépendance... Je pense que, les travaux qu'on réalise au Vérificateur général, à certaines occasions on pourrait avoir des échanges avec l'administrateur responsable de ce programme-là pour l'alimenter, si besoin était. Évidemment, son mandat est très large, lorsqu'on parle de couvrir tous les contrats des 20 dernières années. Bon, il y a peut-être, par contre, certaines occasions où on pourrait être mis à contribution, puis, à ce moment-là, écoutez, le Vérificateur général est au service de l'Assemblée nationale, et on travaille tous pour une saine gestion des fonds publics, alors c'est certain qu'on collaborerait, dans le respect chacun de nos rôles et responsabilités, mais on collaborerait avec l'administrateur en question.

Mme Vallée : On a, hier, reçu des commentaires notamment de la Fédération des chambres de commerce du Québec et de différents organismes, regroupement d'administrateurs de sociétés d'État, l'Association des ingénieurs-conseils. Une des préoccupations quant au programme de remboursement volontaire était d'avoir une certaine assurance, pour une entreprise qui se prévaut du programme de remboursement volontaire, que cette démarche-là ne va pas susciter ou ne va pas enclencher une série d'autres enquêtes ou d'autres actions. Évidemment, il est clair que la quittance donnée n'est pas une quittance à l'égard des infractions de nature criminelle ou des infractions de nature pénale, c'est clair, mais il y avait une crainte que le passage au programme de remboursement volontaire pouvait éventuellement susciter l'attention de certaines escouades.

Vous mentionnez l'importance d'échanger — et à l'intérieur de vos travaux vous le faites — d'échanger avec l'UPAC, d'échanger avec l'AMF. Alors, comment pouvons-nous assurer que l'entreprise sera intéressée? Parce que ce que j'ai ressenti hier, c'est que certaines corporations avaient une crainte d'encourager leurs membres à participer au programme de remboursement volontaire malgré la quittance, malgré l'absence... malgré le fait que la loi aura des dents quand même et va venir modifier les règles du droit commun justement pour permettre d'aller récupérer les sommes. Mais, si cette collaboration-là avec les entités, elle est connue, elle est clairement identifiée, croyez-vous que ça pourrait peut-être susciter des craintes ou susciter une... oui, c'est ça, une crainte ou peut-être une aversion envers le programme de remboursement volontaire?

M. Samson (Michel) : M. le Président, je vous dirai que possiblement ça pourrait peut-être susciter une crainte vis-à-vis le processus de remboursement volontaire, mais, si je le prends un petit peu, je dirais, a contrario, plus le processus pour le recours judiciaire va être fort, structuré, plus je pense qu'on a des chances, permettez-moi l'expression, mais que le programme de remboursement volontaire fonctionne. En tout cas, à notre point de vue, il faut que les entreprises qui ont commis des gestes frauduleux ou... sentent vraiment qu'il va arriver de quoi, il va y avoir un recours judiciaire, puis les sanctions sont importantes, sont lourdes. Alors, l'autre possibilité que tu as, c'est qu'il y a un programme de remboursement volontaire vers lequel tu peux te tourner et qui permet à tout le monde de diminuer les coûts, de diminuer les coûts pour l'État puis pour l'entreprise. Il y a un équilibre à trouver entre les deux, tu sais. C'est une grande question, mais...

Il y a tout l'aspect aussi qui est très important de l'équité, de l'équité et de la transparence du processus. Le programme de remboursement volontaire ne doit pas, puis je l'ai mentionné un petit peu... ne doit pas devenir une boîte noire où personne ne sait ce qui se passe là-dedans, sinon, écoutez, il y en a qui peuvent prendre la chance de dire : Écoute, je suis aussi bien d'aller au programme de remboursement volontaire, ça va tout régler, personne ne saura rien. Il faut que les entreprises et la population, les contribuables sentent qu'il y a une équité avec ce programme-là; que, oui, même s'il y a eu un remboursement volontaire sans recours judiciaire, l'entreprise a dû, pour se réhabiliter, payer des sommes importantes ou... ça s'est fait dans un cadre bien défini et correct.

Mais il y a un équilibre à trouver entre les deux, puis j'en conviens, que ce n'est pas nécessairement facile à trouver, là. Mais plus le programme de recours judiciaire est fort, plus nous pensons que le programme de remboursement volontaire peut fonctionner.

(9 h 20)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la ministre, permettez-moi de vous souligner qu'il reste quatre minutes à votre bloc de questions.

Mme Vallée : Merci. Justement, le programme, les mesures exceptionnelles sont costaudes, comme l'ont souligné certains groupes, même trop selon l'avis de certains, pas assez selon l'avis d'autres groupes, dont les municipalités, qui demandent notamment une présomption de dommage plus importante.

J'aimerais vous entendre, justement, sur la question de la présomption de dommage qui est établie jusqu'à un maximum de 15 % dans le projet de loi. Parce qu'évidemment, lorsque le dommage est connu comme étant de 5 %, 6 %, on ne réclamera pas au-delà du dommage connu, mais la présomption est établie jusqu'à concurrence de 15 %. Certains... Les municipalités, notamment la ville de Montréal, et je sais que... la ville de Gatineau, qui vous succédera, ont demandé que la présomption de dommage soit plutôt établie à 20 %, puisque c'était plus près de ce qui... c'était plus représentatif de leur réalité notamment. J'aimerais vous entendre sur cette question-là.

M. Samson (Michel) : Oui. M. le Président, je pense que le problème... Bien, je pense, premièrement, que c'est très important qu'il y ait un montant, un pourcentage qui soit fixé, je pense que c'est la base. Bon, est-ce que ça doit être 15 %, ou 20 %, ou 25 %? La problématique qu'on a, et vous le savez tous, c'est qu'on est dans le domaine de la fraude, et à ce jour je n'ai pas nécessairement... On a beaucoup de suppositions, on nous dit que... Le coût des contrats, par exemple, on a beaucoup entendu qu'au gouvernement le coût des contrats avait diminué de 25 % à 30 % depuis la commission Charbonneau, etc., mais est-ce qu'on est appuyé puis fondé sur quelque chose de très solide avec ça? Moi, je n'ai pas vu d'étude à cet égard-là.

Je pense que le... Le 15 %, pour moi, est un minimum que l'on doit mettre. Si d'autres intervenants pensent que ça doit être 20 % ou 25 %, j'aimerais voir, ça serait possiblement intéressant pour les parlementaires de savoir, bien, ce 20 % là, est-ce qu'il est appuyé... est-ce qu'il repose sur quelque chose de solide ou c'est, excusez l'expression, un feeling qu'on a que c'est plus du 20 % puis 25 %. Peut-être que c'est 20 % ou 25 %, mais certainement pas en bas de 15 %. La mesure doit être assez forte pour sentir que le pourcentage est sérieux vis-à-vis les entreprises.

Mme Vallée : Vous précisez justement que la limite de cinq ans, la clause crépusculaire qui est prévue au projet de loi, n'est pas suffisante. Est-ce que, selon vous... vous allez jusqu'à dire que les règles de droit commun, lorsqu'il est question de fraude ou de manoeuvre dolosive, devraient être modifiées de façon permanente? Est-ce que c'est ce qu'on doit déduire de votre observation?

M. Samson (Michel) : Ça pourrait être une possibilité, mais notre réflexion était plus à l'effet, je vous dirais, que... lorsqu'on voyait que l'on pouvait retourner en arrière sur 20 ans, couvrir tous les types de contrats qui ont été alloués, que ce soit construction, ressources informationnelles, etc. Ça donne un panier de contrats, en tout cas, un nombre de contrats incroyable, et vous savez le temps et les efforts qui sont nécessaires pour monter une preuve, pour faire des recours. Compte tenu du 20 ans en arrière, on se disait : Cinq ans en avant, on trouve que ce n'est pas beaucoup. Si on regarde... Puis ce n'est peut-être pas un bon exemple, mais les travaux de la commission Charbonneau auront duré quand même un certain nombre d'années. Nous, on se disait : Cinq ans, là, c'est très, très court. Nous, on pense plus à 10 ans. Sans être peut-être permanent, on aurait dit 10 ans. Et aussi, avec le 10 ans, ça fait en sorte que les entreprises... puis là probablement que les associations vont avoir un discours contraire au nôtre, là, mais ça fait aussi que les entreprises sentent qu'il y a une pression qui est là pour durer, ce n'est pas juste un programme passager, on se dit : Juste cinq ans, et après c'est fini. Donc, 10 ans, c'est beaucoup plus long, et ça donnera, à ce moment-là, que ce soit l'administrateur ou aux autres intervenants, un laps de temps beaucoup plus grand pour justement peut-être monter la preuve, s'il y a lieu, faire les représentations qu'il faut et poser des gestes vis-à-vis ces actes répréhensibles là. Donc, si on avait une suggestion à vous faire, on ne l'a pas écrit dans les discours, mais on irait plus à 10 ans que cinq ans.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça complète ce premier bloc. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle. M. le représentant de l'opposition officielle, porte-parole en matière de justice, député de Lac-Saint-Jean, la parole est à vous.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de vous souhaiter la bienvenue. Bon matin à tous mes collègues.

Vous abordez l'enjeu de la transparence puis vous dites : C'est important que le processus soit transparent, que les Québécois sentent qu'il se passe quelque chose, finalement, avec le programme de remboursement volontaire, mais en même temps hier il y a des groupes puis des associations qui sont venus nous rencontrer puis qui nous ont exprimé la crainte que, si le processus, justement, était trop transparent, ça pourrait avoir l'effet inverse, c'est-à-dire que ça pourrait être un incitatif, pour eux, d'y penser à deux fois avant de participer au programme parce que ça pourrait avoir d'autres effets dans d'autres juridictions. Et c'est un argument qui mérite quand même une attention particulière parce que, si effectivement à prime abord ça peut sembler intéressant, mais du même souffle, là, il faut se rappeler ce que la loi dit, là : pour participer au programme de remboursement, c'est parce qu'il pourrait y avoir eu une situation de fraude. Alors, c'est l'entreprise elle-même qui admet qu'il pourrait y avoir eu une situation de fraude, elle s'entend avec le gouvernement, son nom est public. Ça peut amener d'autres types de procédure.

Alors, dans votre souci de transparence, que je partage, bien évidement, est-ce que, pour vous, ça pourrait être suffisant, là, qu'il y ait une espèce d'annexe dans laquelle, je ne sais pas, moi, à chaque mois, par thèmes ou par groupes, on énonce les sommes qui ont été récupérées mais sans du même souffle donner le détail de l'entreprise et des contrats en jeu?

M. Samson (Michel) : Écoutez, vous avez une question fort intéressante. Lorsqu'on parle de transparence, vous savez, le Vérificateur général est une institution qui prône la transparence et une reddition de comptes la plus complète possible. Lorsqu'on regarde les différents enjeux de ce projet de loi... Et je comprends bien les propos que vous avez mentionnés par rapport à des intervenants qui sont venus ici hier, mais, encore là, ce qui va faire le sérieux... bien, «sérieux», je ne veux pas exagérer en disant ce mot-là, mais la crédibilité de ce programme-là vis-à-vis la population, c'est la transparence qu'il va y avoir avec. Vous comprenez que, si le programme de remboursement volontaire est mis de l'avant et on ne sait pas trop, trop qui a réglé quoi, pour quel montant, très, très peu d'informations, je crois que la crédibilité du programme auprès de la population — et je ne vous parle pas auprès des entrepreneurs, évidemment — auprès de la population va être beaucoup moindre. Je pense qu'il y a moyen de rendre les choses publiques de façon transparente sans nuire, évidemment, à tout.

Mais encore là je reviens à ce que je mentionnais précédemment : Il y a toujours l'équilibre entre le programme volontaire et les recours judiciaires. Il faut que les intervenants qui ont fraudé sentent que le recours judiciaire est fort sérieux et que le choix qui s'offre à eux, c'est d'aller vers le programme de déclaration volontaire.

Donc, de rendre public avec qui on a conclu une entente, quel a été le montant, c'est là-dessus que le programme va être jugé, et je pense que vous le savez fort bien, c'est là-dessus que la population va juger le programme. Si on n'est pas capable de savoir qui a réglé quoi, puis pour combien on a réglé, puis ça représente combien par rapport à l'ensemble des contrats qui avaient été octroyés... Écoutez, pour nous, de la façon qu'on le voit, c'est un peu la crédibilité du programme vis-à-vis la population.

M. Cloutier : Mais la crédibilité du programme, c'est aussi les sommes qui vont être recouvrées, là.

M. Samson (Michel) : Tout à fait, tout à fait.

(9 h 30)

M. Cloutier : Alors, si l'entreprise est d'avis que... participe au programme, bénéficie de l'article 3, se retrouve dans une situation, effectivement, où il pourrait y avoir eu une fraude, l'admet, s'entend, puis, de l'autre côté, tu as le DPCP qui, lui, décide que peut-être que ça mérite une enquête, peut-être que ça mérite d'être approfondi mais sur le plan criminel, l'enjeu, c'est, si la transparence est complète, jusqu'où les entreprises vont «gambler» puis aller de l'avant en mettant le doigt sur la... en mettant la proposition sur la table puis en disant : On va s'entendre avec le gouvernement malgré le risque de poursuite qui pourrait s'ensuivre. C'est ça, l'enjeu qui a été exprimé hier. Je ne prétends pas que j'ai une solution puis que ma réflexion, elle est complétée, mais ce qui est certain, c'est que, si on met en place une mesure, en vigueur, puis qu'en bout de ligne on rend ça transparent, c'est extraordinaire, on a un super processus transparent, on a une entreprise qui s'en prévaut parce qu'elle se retrouve dans une situation un peu mitoyenne, puis elle, elle est convaincue que ce n'est pas une situation criminelle, mais c'est une situation civile, puis elle va s'en sortir, mais que ça reste un processus d'exception, bien on va avoir une loi hypertransparente, les gens vont être contents de ça, mais elle n'aura pas de résultat. Alors, c'est cet équilibre qu'on doit trouver, qui n'est, à mon point de vue, pas simple.

Mais c'est là-dessus peut-être que j'aimerais vous entendre. Puis je comprends ce que vous dites, tu sais, que, si la loi, elle est stricte, elle est forte, dans le fond, si le bâton est puissant, les gens vont avoir avantage à se tourner vers le programme de remboursement volontaire, mais du même souffle encore faut-il que lui aussi soit attrayant pour que ça aussi fonctionne. Alors, votre souci de transparence est plus que louable et certainement nécessaire, mais jusqu'où on va? C'est vraiment ça, je pense, l'enjeu. Mais peut-être que ma crainte n'est pas fondée. Peut-être que la ministre va pouvoir nous rassurer à cet effet-là, la distinction entre la fraude criminelle puis la fraude civile puis les écarts qu'il y a entre les deux. Je comprends que, le libellé, on ne doit pas prouver qu'il y a une fraude, il est plutôt au conditionnel, mais je trouve qu'on est dans des zones fragiles, je vais le dire comme ça.

M. Samson (Michel) : Oui, bien je pense que vous l'avez bien mentionné. Le défi, c'est de trouver un équilibre.

Lorsqu'on parle de transparence, écoutez, s'il y a un recours judiciaire... Et, je le répète, je ne suis pas juriste, et la plupart d'entre vous êtes mieux placés que moi pour parler de ces choses-là, mais c'est sûr que, que ce soit le corps policier ou les procureurs, ils vont devoir monter une preuve au criminel. Donc, il y a tout un travail qui va devoir être fait, même s'il y a un programme de remboursement volontaire. Donc, il faut qu'ils sentent qu'il y a vraiment de quoi de fort à cet égard-là, au niveau du recours judiciaire.

Écoutez, la transparence, je pense qu'il y a moyen de trouver un équilibre. Qu'est-ce que nous pensons qui devrait être rendu public lorsqu'il y a une entente en vertu du programme de remboursement volontaire? Comme je l'ai mentionné, bon, le nom, le montant qui a été remboursé, le pourcentage des contrats que ça représente, parce que c'est là-dessus aussi que l'administrateur... le défi de l'administrateur va être là-dessus. Oui, on peut avoir un programme de remboursement volontaire, mais, si j'avais un contrat de 300 millions, et il y a une négociation qui s'effectue, bon, bien, c'est-u pour 1 million? C'est-u pour 10 millions? C'est-u pour 20 millions? Comment on réussit à concilier tout ça?

Moi, je pense qu'encore une fois la crédibilité du programme de remboursement volontaire repose sur la transparence. Je comprends que ça peut heurter ceux qui vont avoir commis un geste, mais rappelons-nous à la base que ces gens-là ont commis un geste illégal, tu sais, on ne veut pas leur donner une voie... en tout cas j'ose croire qu'on ne veut pas leur donner une voie d'évitement. Ces gens-là ont commis un geste répréhensible, illégal. Ce qu'on veut, c'est de trouver une façon pour éviter le recours judiciaire, bon, parfait, oui, tout le monde pourra en bénéficier, mais en même temps je pense qu'on doit rendre public, et il doit y avoir... la transparence doit en faire partie pour justement qu'on voit qu'est-ce que ça donne au bout de la ligne.

M. Cloutier : Oui, évidemment. Et vous faites beaucoup référence, le succès du programme, à son caractère transparent, j'en suis, mais le succès du programme, c'est aussi le nombre de personnes qui vont s'en prévaloir puis les montants qui vont être perçus. Puis un ne va pas sans l'autre, puis c'est l'ensemble de l'oeuvre qui va faire qu'en bout de course, au bout d'un an, on va dire : Bien, finalement, ça a marché.

Je veux vous entendre sur... Vous écrivez que les personnes corrompues responsables de la gestion des fonds publics ainsi que les corrupteurs eux-mêmes devraient être dans le collimateur. Mais là-dessus c'est peut-être l'objet d'un autre forum, mais vous mentionnez quand même que ceux et celles qui avaient la responsabilité des fonds publics devraient être tenus responsables. Est-ce que vous avez des propositions en ce sens? Est-ce que votre réflexion a fait l'objet peut-être d'un autre mémoire dans un autre forum, mais vous l'écrivez quand même dans votre mémoire? Je suis curieux de savoir qu'est-ce que vous aviez en tête.

M. Samson (Michel) : Oui. M. le Président, non, ça n'a pas fait l'objet d'un mémoire dans d'autres forums, mais, écoutez, si des gens, si on parle... à l'intérieur de l'appareil gouvernemental ou d'une municipalité ont participé de façon frauduleuse à un processus quelconque, je pense qu'il doit y avoir des sanctions qui sont prises contre ces personnes-là, là, sinon on évacue une partie importante du problème. Si les personnes corrompues demeurent en place sans aucune sanction, est-ce que le phénomène va se reproduire dans deux ans, dans trois ans, dans cinq ans? Je pense qu'on doit couvrir l'ensemble du processus.

M. Cloutier : C'est intéressant, votre... Évidemment, vous avez tout à fait raison. Là, ce qui est... Là, le projet de loi vise les entreprises qui, elles, ont fraudé dans le cadre d'un contrat public, mais là, vous, ce que vous dites, c'est : Ceux et celles qui avaient la responsabilité de la gestion des contrats, s'il y en a qui ont participé, dans le fond, à cette manoeuvre dolosive, comment ces gens-là pourraient être inclus?

Est-ce que vous suggérez qu'on devrait traiter de cet enjeu-là dans le projet de loi actuel? Si oui, de quelle manière? Je suis curieux de vous entendre.

M. Samson (Michel) : De quelle manière? Écoutez, honnêtement, cette question-là m'embête un peu, de quelle manière. Mais est-ce que ça devrait être couvert? Oui. D'emblée, on vous dirait que, oui, ça devrait être inclus dans le projet, que les gens qui ont participé à un stratagème ou à une fraude et qui font partie... qui sont à l'intérieur d'une municipalité ou peu importe, comme je le mentionnais, sont couverts par ce projet de loi là et sont sujets à être poursuivis et à sanction.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Lac-Saint-Jean, quatre minutes à votre bloc.

M. Cloutier : On a des échanges informels du côté gouvernemental, puis ce sera intéressant peut-être d'approfondir cet enjeu-là. On me dit que c'est déjà couvert. Maintenant, il faudra voir de quelle façon, dans quelles conditions des directeurs, par exemple, de municipalité ou carrément des fonctionnaires du gouvernement pourraient se retrouver dans ce processus. Sérieusement, moi, je ne le saisis pas. Je serais curieux peut-être de vous entendre là-dessus éventuellement, puis ça va éclairer aussi nos travaux, parce que c'est la première fois que l'enjeu est soulevé, jusqu'à maintenant. Et ça va certainement mériter d'être approfondi, de quelle façon, effectivement, parce que, vous avez tout à fait raison, là on vise les entreprises qui sont fautives, mais ce n'est pas impossible qu'il y ait d'autres... qu'il y ait des responsables, des gestionnaires de portefeuille qui ont peut-être outrepassé leur mandat ou carrément agi de manière frauduleuse ou...

M. Samson (Michel) : Souhaitons que non, mais c'est possible.

• (9 h 40) •

M. Cloutier : Souhaitons que non, mais pensons que ça peut être probable. Même c'est probable.

M. Samson (Michel) : Bien, avec la discussion sur un projet de loi, c'est peut-être une occasion pour vous d'en débattre et de voir si ça devrait être inclus.

M. Cloutier : La ministre me fait signe que peut-être ça mérite d'être clarifié. Alors, tant mieux, puis ça sera peut-être plus clair.

Présomption envers l'entreprise lorsque c'est un employé, on a eu tout à l'heure cette discussion-là du côté gouvernemental, mais, vous, ce que vous dites, c'est que non seulement un dirigeant, si c'est un employé qui aurait manoeuvré, l'entreprise devrait... il devrait y avoir une présomption de culpabilité, en quelque sorte, ou de responsabilité, plutôt, envers l'entreprise également. Donc, vous élargissez le champ de la présomption. C'est ça?

M. Samson (Michel) : Oui, on est conscients qu'on élargit le... effectivement. Et, à ce moment-là, de ce que je comprends, c'est que le fardeau de la preuve est transposé du côté de l'entreprise, dans le fond, pour éviter des situations où on aurait une fraude commise par un ou deux employés où... peu importe le niveau dans cette organisation-là, et que l'entreprise s'en lave les mains, si on peut dire, mette à pied, congédie cette personne-là en disant : Moi, je n'étais pas au courant, puis ça finit là, l'entreprise n'est pas touchée du tout, et c'est l'employé qui est poursuivi ou qui en subit seul les conséquences. Bon, je sais que c'est un changement, quand même, qui pourrait être important, mais à tout le moins c'est un point qu'on voulait vous mentionner puis soulever pour éviter, justement, que l'entreprise se dégage trop facilement, qu'une entreprise se dégage trop facilement de ses responsabilités suite à des actes frauduleux qui auraient été commis en disant simplement : Non, non, je n'étais pas au courant; je les ai congédiés, donc on a réglé la situation chez nous.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il ne reste qu'une minute à ce bloc d'échange.

M. Cloutier : Oui. Peut-être rapidement, là, parler de la présomption à l'article 10. Vous, ce que vous dites, c'est que peut-être que le renversement de la présomption devrait se faire de façon intemporelle puis que la loi... on devrait donner un caractère permanent, finalement, à la disposition. Est-ce que c'est bien ça que j'ai compris? Vous avez... En fait, votre suggestion, c'est de l'étendre à 10 ans?

M. Samson (Michel) : À 10 ans, oui. Oui.

M. Cloutier : Mais rendu à... Oui, ça, c'est pour les actes...

Une voix : Ça, c'est pour la réatroactivité.

M. Cloutier : Exactement, c'est pour la rétroactivité. Est-ce que ça...

M. Samson (Michel) : Non, la rétroactivité est fixée, je crois... est proposée à 20 ans.

M. Cloutier : Est à 20 ans.

M. Samson (Michel) : Ça, oui, O.K., mais c'est justement parce qu'elle est fixée à 20 ans et que ça couvre l'ensemble des contrats, peu importe le type de contrat. Ça donne une masse de contrats, un nombre de contrats incroyable, et le temps que l'administrateur ou... si le programme fonctionne, qu'on puisse mettre en place tout ça, et commencer des analyses, et que l'administrateur joue son rôle, on se dit... Ça nous apparaît, nous, cinq ans, court comme délai. On suggère que 10 ans serait beaucoup mieux, compte tenu de l'importance des contrats en jeu et du nombre.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, c'est malheureusement tout le temps... à moins que vous ayez une question à cinq secondes et une réponse de trois. Je me tourne maintenant vers la deuxième opposition. Mme la députée de Montarville, à vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. M. Samson, bonjour. Messieurs madame, bonjour. Merci pour le mémoire, merci d'être là.

Vous nous amenez des précisions qui sont très intéressantes, certaines, d'ailleurs, qui nous étaient venues à l'esprit. Alors, j'aime beaucoup aussi la durée de cette loi exceptionnelle, qu'elle soit applicable un petit peu plus longtemps, qu'elle soit en vigueur un petit peu plus longtemps. Votre préoccupation rejoint une préoccupation que nous avions, de notre côté.

Cela dit, je vous amène tout de suite à la page 3. Vous soulevez deux autres préoccupations à l'égard des intérêts et également des sommes forfaitaires. Comme le projet de loi n° 26 est à deux volets, un programme de remboursement ou la poursuite judiciaire, il y a une différence entre les intérêts et il y a une différence entre les sommes forfaitaires. Alors, je reprends ce que vous nous écrivez fin de la page 3 : «Par exemple, il serait souhaitable que, dans les modalités d'application, on précise que les sommes faisant l'objet du remboursement porteront intérêt à compter du dernier paiement fait par l'organisme public pour le contrat visé...» Tout comme c'est le cas pour les recours judiciaires. Et vous poursuivez en disant : «...et qu'un montant forfaitaire sera exigé pour récupérer les frais engagés, au même titre que pour [les recours judiciaires].»

Pour ce qui est du recours judiciaire, la somme forfaitaire pour couvrir les procédures est de 20 %, c'est écrit dans la loi. Cependant, pour ce qui est du remboursement volontaire, du programme de remboursement volontaire, ce n'est pas écrit dans la loi. On nous a informés, lors d'une séance d'information, que ce serait autour de 10 %.

J'ai deux questions à cet égard-là. Pour ce qui est des intérêts, considérez-vous que ça devrait être les... Pardon, non, pas les intérêts. Je reprends : En ce qui a trait aux sommes forfaitaires, donc, on nous a dit 10 % pour le programme de remboursement volontaire, 20 % pour la voie judiciaire. Pensez-vous que ça devrait être la même chose, égal, 20 % dans les deux cas, toujours dans le souci d'équité et de transparence? Pourquoi cette différence? Qu'en pensez-vous?

M. Samson (Michel) : Écoutez, je pense que l'écart entre le 10 % et le 20 % peut se justifier dans le sens que les recours judiciaires vont coûter beaucoup plus cher que le programme de remboursement volontaire à faire fonctionner. Donc, le 20 % qu'on va ajouter dans le recours judiciaire va couvrir beaucoup de frais liés au recours judiciaire, évidemment, alors que dans l'autre, normalement, si le programme fonctionne bien, ça devrait se faire plus rapidement, à un coût, espérons-le, moindre. Donc, à ce moment-là, si c'est 10 %, ou 15 %, ou 12 %, peu importe, si on parle de 10 %, je trouve qu'il y aurait une logique, à cet égard-là, que le montant soit différent de celui du recours judiciaire, oui.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Chose certaine, il faudrait toutefois s'assurer que ce ne soit pas le contribuable qui aurait à défrayer les frais du programme, là, il faudrait que ce soit suffisant pour le couvrir. Vous pensez que 10 % le ferait?

M. Samson (Michel) : Je pense. Et c'est là aussi... Comme on le mentionne, les modalités d'application vont être connues plus tard, donc ça va faire partie des modalités d'application. Je pense qu'on pourrait avoir le souci d'établir des modalités d'application de la sorte, comme par exemple avec un 10 %, et aussi de donner en même temps une certaine latitude à l'administrateur, parce que c'est lui, finalement, l'administrateur, qui va négocier, si on peut dire, entre les deux parties pour établir le montant. Donc, l'administrateur aura à rendre des comptes par rapport au règlement qu'il va proposer, mais il doit quand même... pour assurer son travail, je pense qu'il doit disposer quand même d'une certaine latitude, d'une certaine indépendance pour réaliser son travail, et à ce moment-là il justifiera les décisions qu'il va prendre.

Mme Roy (Montarville) : Donc, cette différence-là, de un, refléterait le travail accompli, un petit peu moins pour le remboursement volontaire, et serait aussi un incitatif pour les entreprises en partant.

M. Samson (Michel) : Aussi.

Mme Roy (Montarville) : Par ailleurs, pour ce qui est de l'intérêt, on fait courir les intérêts à partir de la signature du contrat initiale pour ce qui est du recours judiciaire mais non pour ce qui est du paiement volontaire. Vous en pensez quoi? Et vous faites une distinction et vous dites qu'il ne devrait pas y avoir cette distinction-là.

M. Samson (Michel) : Oui. En fait, ce qu'on dit, c'est que les sommes devraient porter... on suggère que les sommes devraient porter intérêt à compter du dernier paiement fait par l'organisme public, donc...

Mme Roy (Montarville) : Dans les deux cas?

M. Samson (Michel) : Dans les deux cas, oui. Puis, comme je l'ai mentionné précédemment, encore là, dans le cadre d'une négociation, bien l'administrateur pourrait avoir une certaine latitude pour régler les dossiers, en étayant et en justifiant pourquoi il a pris cette décision-là, mais d'emblée il y a un 10 %, il y a des intérêts, et l'administrateur aura une latitude dans son application. Je pense qu'on doit lui donner une latitude à cet égard-là.

Mme Roy (Montarville) : Je vais changer de sujet, je vais passer à la page 5. On parle du fameux article dans lequel on définit une personne, l'article 10. Selon notre compréhension, «personne physique» avait un sens très, très large et couvrait également les élus, les fonctionnaires, les sous-contractants, toute personne qui aurait touché, participé à ces contrats frauduleux, ces manoeuvres frauduleuses. Vous nous dites que ce serait bon de le spécifier pour une raison, entre autres, de rebâtir la confiance des citoyens, c'est un argument que nous avons entendu. Je me demandais si... Que penseriez-vous du fait que nous puissions rajouter, justement, pour réconforter le citoyen... Parce que, selon notre compréhension, «toute personne physique» incluait tout le monde. Mais, si nous mettions quelque chose à l'effet... on ajoutait «notamment», les personnes physiques notamment, et en décrire quelques-unes, par exemple les élus, les fonctionnaires, les sous-contractants, sans réduire la portée de ce qui suit, est-ce que ça pourrait être une façon qui serait, selon vous, suffisante ou devrions-nous faire différemment pour que les citoyens aient confiance en l'application de cette loi et que les personnes visées de tous les milieux et les milieux politiques soient au premier chef visées ou possiblement...

• (9 h 50) •

M. Samson (Michel) : Oui, ce serait une façon de le faire, une option possible, de venir rajouter : Notamment telle personne, de tel type, tel type, tel type. Et là l'autre volet aussi au niveau de l'article 2, lorsqu'on vient donner certaines définitions, je le reprends, là, au niveau de l'entreprise, par contre, là, comme je l'ai mentionné, puis c'est peut-être ça qui nous a, dans notre lecture, je dirais... peut-être pas induits en erreur mais qui pourrait créer une confusion, c'est qu'on vient dire «ou une personne physique qui exploite une entreprise individuelle», une personne physique qui exploite une entreprise. Donc, quand on arrive dans le projet de loi et on parlait de personne physique, nous, on s'est dit : Attention! La personne physique, de quelle personne physique parle-t-on? Est-on bien sûr qu'on parle de la vraie personne physique et non pas du détenteur unique d'une entreprise individuelle? Donc, ça pourrait être précisé aussi à l'article 2 par une définition à cet égard-là, mais ça, le moyen...

Mme Roy (Montarville) : Chose certaine, pour ce qui est...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Permettez-moi, Mme la députée, de souligner qu'il reste un peu plus de deux minutes à votre bloc d'intervention.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Pour ce qui est de, du moins, réconforter et informer la population, je pense qu'à juste titre ça pourrait être des informations ou des définitions qui pourraient éclairer le citoyen, que nous pourrions effectivement rajouter lors de l'étude article par article.

Écoutez, moi, ça répond à mes questions. J'avais beaucoup de préoccupations à l'égard du cinq ans pour l'application parce que tout comme vous je me disais : Mais c'est beaucoup plus long, ce sera beaucoup plus long. Donc, le fait que vous vouliez allonger la durée de vie de cette loi exceptionnelle, j'y souscris totalement, et c'est quelque chose dont nous pourrions discuter ultérieurement. Alors, merci infiniment pour votre mémoire.

M. Samson (Michel) : Merci, ça fait plaisir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : On vous remercie. Je me retourne du côté du gouvernement. Et, je pense, le député de La Prairie souhaite prendre la parole. À vous la parole, M. le député.

M. Merlini : M. le Président, merci beaucoup. M. Samson, membres de l'équipe du Vérificateur général, je reconnais la qualité du travail qui est fait dans votre mémoire et reconnaît l'expertise que vous voulez apporter sur un projet de loi, ce qui est assez inusité parce que normalement on vous voit à la Commission de l'administration publique, et c'est toujours dans l'esprit de la saine gestion des fonds publics qu'on obtient vos points de vue, vos rapports, vos recommandations et vos analyses.

Vous soulevez plusieurs points auxquels j'ai des questions, en commençant par la quittance. Vous parlez que vous souhaitez que les entreprises obtiennent une quittance à l'égard des contrats visés. On a entendu différents groupes nous dire : Il faudrait que la quittance soit une fois et pour toutes, on efface l'ardoise. Par contre, la ministre, hier, a très bien dit que l'objectif du projet de loi n'était pas d'acheter, de se refaire une... de se réhabiliter d'une façon... en s'achetant la quittance. Et d'autres ont dit : Bien, si on y va contrat par contrat, ça risque d'être long et fastidieux, d'où l'importance que vous soulignez de peut-être ne pas avoir une portée crépusculaire de cinq ans mais de 10 ans, pour la loi, parce qu'on recule 20 ans en arrière.

Vous-mêmes, dans votre travail de vérification, vous l'avez soulevé dans votre mémoire, que vous regardez plusieurs contrats. La Commission de l'administration publique examine tous les contrats, incluant les subventions, et je vais y revenir tantôt.

La quittance, comment la voyez-vous? Voyez-vous vraiment contrat par contrat ou, lorsque l'administrateur s'entend avec les entreprises ou les entrepreneurs visés, est-ce qu'on irait plus pour une quittance globale et dire : O.K., la compagnie a décidé de mettre cartes sur table, on arrive, on établit un montant, la quittance est donnée, et voilà, c'est réglé? Comment voyez-vous ça?

M. Samson (Michel) : En fait, de notre point de vue, la quittance devrait porter sur les contrats concernés et non pas sur l'ensemble des contrats qui peuvent avoir été octroyés à la firme XYZ au cours des deux ou trois dernières années, sinon, écoutez, ça pourrait... Puis je ne prête pas de mauvaises intentions à personne, mais ça pourrait être facile, plus facile pour une organisation de se présenter devant l'administrateur puis de dire : Écoute, voici quatre, cinq contrats que j'ai obtenus, puis là-dedans il y a peut-être des montants qui ne sont pas tout à fait corrects, et de s'entendre là-dessus, alors qu'à côté les plus gros contrats, si on peut dire, n'en font pas partie, et on donne une quittance complète. Il me semble que ça doit vraiment porter... Et là, encore là, ça va reposer sur tout le sérieux de l'analyse, du travail qui va avoir été fait par l'administrateur. C'est pour ça qu'on parle qu'il doit avoir les moyens, que ce soient des moyens de vérification ou peu importe, mais il doit disposer de moyens, lui, puis d'échange d'information pour s'assurer qu'il n'y a pas, entre guillemets, de gros morceau qui y échappe. Lorsqu'on entreprend une négociation avec une entreprise, bien il doit savoir l'ensemble, si possible, des contrats qui auront été octroyés à cette occasion-là pour pouvoir justement peut-être ramener le tir ou corriger le tir un peu, mais c'est sûr que la quittance devrait porter sur uniquement les contrats concernés et non pas l'ensemble.

M. Merlini : Dans votre mémoire vous parlez que «la détermination du montant correspondant au préjudice est un élément de risque important auquel l'administrateur devra faire face». Est-ce là que votre bureau du Vérificateur général pourrait être utile, dans la détermination du montant du préjudice? Parce que seul, un administrateur, à regarder quelques contrats ou plusieurs contrats, de tenter d'évaluer la portée du préjudice est assez... doit être assez difficile. Est-ce là que vous pourriez apporter votre contribution à titre de Vérificateur général?

M. Samson (Michel) : Ma réponse, oui, va peut-être vous surprendre, mais, oui, comme je l'ai mentionné précédemment, c'est sûr, on pourrait collaborer.

M. Merlini : Vous seriez disposés à le faire, oui, c'est ça?

M. Samson (Michel) : Oui, on pourrait collaborer. Mais je vais aller plus loin, puis personne n'a posé la question, mais vous diriez, quelqu'un : Est-ce que ça pourrait être une suggestion que cet administrateur-là — puis je vais le dire clairement — soit à l'intérieur du bureau du Vérificateur général?, tout de suite je vous dis non, je pense que ce ne serait pas une bonne idée. La réponse peut vous surprendre, mais j'aime mieux la dire pour que ce soit bien clair. Non, je pense qu'on doit garder une distance. On peut collaborer et alimenter cette personne-là, puis soyez assurez qu'on le ferait, s'il y avait lieu, mais notre rôle s'arrêterait là.

M. Merlini : Dans la détermination des règles de répartition des sommes recouvrées, on a entendu hier la ville de Montréal répéter, et ainsi que la ville de Laval... de dire : On veut être à la table, on veut savoir ce qui se passe parce que des fois il y a une entreprise, une compagnie qui aurait pu faire affaire avec plusieurs entités, plusieurs organismes publics. Alors là, comment qu'on divise la tarte des sommes recouvrées? Et vous dites que ça représente une étape majeure de la démarche. Alors, comment voyez-vous déterminées ces règles de répartition là? Parce qu'effectivement ça va être quelque chose qui va être assez important. On parlait d'équilibre tantôt. Est-ce que ça fait partie de ça? Et comment y en arriver, à ça, selon votre expérience comme Vérificateur général?

M. Samson (Michel) : En fait, la... je ne dirais pas la lumière, mais le point qu'on veut souligner avec cet aspect-là, c'est de vous mentionner, de mentionner aux parlementaires : N'oubliez pas que, oui, une ville pourrait avoir eu des contrats frauduleux dans la ville X, mais n'oubliez pas que le gouvernement, par ses programmes de subvention, pourrait avoir contribué grandement à ces sommes-là, que ce soit au niveau de réfections d'aqueduc, peu importe. Donc, s'il y a une entente qui est conclue sur ces contrats-là avec la ville, faites attention, le gouvernement, à notre avis, a aussi une portion qui le concerne parce qu'il a mis en place des programmes de subvention, il a versé des sommes à cette ville-là.

Donc, s'il y a des sommes qui sont récupérées, il me semble qu'il serait normal que le gouvernement en récupère, lui aussi, une partie. Bon, quel sera le pourcentage? Ça pourrait être en proportion des contrats puis des subventions versées, là, effectivement, mais notre point était : N'oublions pas cet aspect-là que l'administrateur devra se préoccuper.

M. Merlini : C'est là que ça m'amène à la question, justement, des subventions. Est-ce qu'à ce moment-là on devrait explicitement inclure les programmes de subvention à l'intérieur de ce projet de loi là? Parce que vous dites effectivement : S'il y a un contrat qui a été octroyé, par exemple, pour la réfection de l'aqueduc, et la municipalité a bénéficié d'une subvention, est-ce que le gouvernement serait en droit de vouloir récupérer cette subvention-là ou est-ce que ces argents-là retourneraient à la ville pour qu'elle puisse récupérer ses travaux avec une firme honnête, là, on va le dire comme çà, là? Ou est-ce qu'on parle aussi de d'autres subventions dans d'autres... un peu comme on fait quand on vérifie les subventions à la Commission de l'administration publique? Est-ce que vous souhaitez qu'on inclue ça ici, dans le projet de loi?

M. Samson (Michel) : Bien, on pourrait faire référence aux subventions versées par le gouvernement à toute organisation ou peu importe, là, parce que ça peut être dans... c'est ça, oui, ça peut être les municipalités, ça pourrait être des universités, ça pourrait être autres organisations. Donc, il pourrait y avoir une référence que, s'il y a une subvention qui a été versée et qu'il y a des contrats frauduleux en lien avec cette subvention-là qui a été versée ou ce programme-là, bien le gouvernement a le droit de récupérer sa part du montant.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Nous en sommes à la dernière minute de jeu, M. le député.

M. Merlini : Merci. Merci beaucoup. Dernier point que je voudrais aborder, et ça tombe bien, c'est... vous demandez de prévoir de façon explicite que vous pourriez voir de faire une analyse comme on l'a fait en Commission de l'administration publique, de revoir l'application de la loi plus tard dans le temps, voir si elle a obtenu des résultats. Parce qu'on a parlé beaucoup hier qu'il faut que ça marche, il faut arriver à des résultats. Le but, c'est de récupérer des sommes. Alors, comment qu'on fait, ça, pour l'inclure? Est-ce qu'on ajoute l'article dans le projet de loi, et là vous ferez un travail de vérification comme vous l'aviez fait par le passé?

M. Samson (Michel) : Bien, nous, on vous suggérerait d'ajouter effectivement dans le projet de loi qu'après, je ne sais pas, trois ans ou cinq ans il y a une évaluation qui va être faite. Puis cette évaluation-là peut être faite par une organisation autre que le Vérificateur général. Nous, ce qui est important aussi, c'est qu'on ait le pouvoir de vérification des travaux qui vont avoir été faits. Mais, comme c'est une nouvelle loi et on cherche un équilibre, plusieurs intervenants l'ont mentionné, qui n'est pas toujours facile, qui n'est pas facile à trouver, je pense, ce serait bien qu'après trois ans ou cinq ans on procède à une évaluation de la loi pour voir qu'est-ce que ça donne.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie infiniment. Alors, merci au nom de la commission de vous être déplacés, de vos représentations fort utiles.

Sur ce, nous allons suspendre quelques instants, le temps de permettre à nos prochains invités, la ville de Gatineau, de s'avancer. Nous suspendons.

(Suspension de la séance à 10 heures)

(Reprise à 10 h 2)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, la commission reprend ses travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir les représentants de la ville de Gatineau, le maire de la ville étant avec nous. Alors, bonjour, M. le maire. Vous bénéficierez d'une période de 10 minutes pour faire la présentation de votre mémoire. Et, dans un premier temps, je vous demanderais, pour le bénéfice des membres de la commission et ceux qui nous écoutent, de présenter les gens qui vous accompagnent. À vous la parole.

Ville de Gatineau

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bonjour. Donc, je m'appelle Maxime Pedneaud-Jobin, maire de Gatineau. Je suis accompagné de Me Claude Alain, qui est directeur des services juridiques de la ville, et de Patrick Robert-Meunier, qui est responsable du dossier à mon bureau.

Donc, Mme la ministre, MM. et Mmes les membres de la commission, c'est un plaisir et un honneur d'être présents pour exprimer la position de la ville de Gatineau sur le projet de loi n° 26. Un merci spécial à la ministre Vallée, ministre que nous connaissons bien dans l'Outaouais, de nous donner la chance de participer à vos travaux importants.

On a fait plusieurs interventions auprès du gouvernement du Québec et auprès de l'UMQ pour demander le dépôt d'un projet de loi comme celui-ci. Gatineau tient donc à féliciter le gouvernement pour sa décision. On est globalement satisfaits du projet de loi. Il offre des outils créatifs, originaux pour nous aider à agir dans l'intérêt des citoyens et des contribuables.

Au cours des années, la ville de Gatineau a adopté diverses mesures pour améliorer sa gestion des appels d'offres et lutter contre la collusion. Ces mesures sont en annexe de notre mémoire.

Je tiens aussi à souligner que Gatineau, contrairement à d'autres villes, a été épargnée par le phénomène de la corruption elle-même. À ce jour, aucun de nos fonctionnaires n'a été associé à de la malversation comme on l'a parfois vu ailleurs. On reste vigilants, évidemment, mais on est fiers de cet état de fait, d'autant plus que notre fonction publique a souvent été instigatrice de mesures éthiques novatrices.

Par ailleurs, le 3 septembre 2013, à la commission Charbonneau, un témoignage révélait avec force détails l'existence d'une fraude à grande échelle à Gatineau par des firmes de génie. Nous avons immédiatement mandaté nos services de procéder à une analyse des soumissions reçues pour les services professionnels d'ingénierie de 2003 à 2009, c'est-à-dire au moment où le système dénoncé était en place, et on a comparé les mêmes données dans ce même domaine pour la période 2010‑2013, période que nous croyons exempte de collusion dans ce domaine-là. Le but de l'exercice était de déterminer l'impact de la fin du système de la collusion.

Le rapport a été déposé devant le conseil municipal le 30 septembre 2013. J'en ai une copie ici que je peux laisser à la commission, mais, pour les personnes qui voudraient le consulter, le rapport est sur le site de la ville de Gatineau. Dans cette analyse, vous trouverez une description détaillée du cadre de gestion de nos appels d'offres, une description du stratagème utilisé à Gatineau par les collusionnaires, les impacts chiffrés de la fin de la bulle collusionnaire ainsi que l'ensemble des mesures adoptées par Gatineau pour améliorer ces processus. On croit que les résultats de ces analyses sont d'un grand intérêt pour la commission, et ils expliquent en partie notre présence ici. Je vous les présente brièvement.

Entre 2003 et 2009, il y a 131 contrats qui ont été octroyés à l'une ou l'autre des quatre firmes qui ont fait partie du système de collusion. Ici, je dis «qui ont fait partie», c'est des déclarations à la commission Charbonneau, ce n'est pas jugé, donc il faut prendre toutes les... avoir toutes les réserves possibles, mais il reste que c'est un témoignage qui était très clair.

Pour les contrats de 25 000 $ à 500 000 $ où la collusion était révélée, c'est un ensemble de 17,7 millions de dollars, la valeur de l'ensemble des contrats. On s'est donné un indicateur dans le temps avec les barèmes de l'AICQ, là, de l'agence des ingénieurs-conseils du Québec, sur les prix qui... C'est un barème qui est utilisé pour évaluer ce qu'on devrait payer. Il y a un écart de 22,5 % entre ce qu'on a payé... entre le plus bas soumissionnaire conforme et le barème, entre les deux périodes. L'écart entre la moyenne des soumissions conformes et le barème entre les deux périodes, lui, a varié de 13 %. La part de marché des entreprises concernées a varié de 16 % entre les deux périodes. Et un détail qui n'est pas négligeable : le nombre de fournisseurs est passé de sept à 11 entre les deux périodes, donc le marché s'est ouvert de façon considérable.

Pour les contrats de plus de 500 000 $, qui représentent 4 millions qui ont été octroyés par Gatineau à ce moment-là, la réduction entre le plus bas soumissionnaire conforme et le barème de l'AICQ, c'est 33,4 %, donc c'est une variation importante. L'écart entre la moyenne des soumissions conformes et le barème, lui, a varié, encore une fois, pour les contrats de plus de 500 000 $, de 20,1 %.

Pour nous, le constat principal de ça, c'est que la collusion a eu un coût pour Gatineau. Dans le rapport qu'on vous dépose, tous les détails sont là, les noms, les prix, tout est très documenté.

Une autre conclusion, c'est que la clause de présomption de dommage est nécessaire mais trop basse, selon nous. La clause est nécessaire pour inciter tous les acteurs à une résolution rapide des recours qui vont être institués par les organismes publics, ça va nous permettre d'éviter des débats considérables avec les entreprises délinquantes à la fois sur l'existence et sur les montants des dommages. Sans cette clause, on est convaincus qu'on pourrait faire la preuve de la collusion, on pourrait faire la preuve des dommages mais en retirer moins pour les contribuables parce que dans le processus on va investir une partie des sommes qui pourrait être importante pour faire les démonstrations nécessaires.

On croit toutefois que le montant des dommages accordé devrait être relevé à 20 %. On l'a vu dans le cas de la collusion des firmes de génie chez nous, il est tout à fait possible de penser que le dommage dépasse les 20 %. On a eu malheureusement un autre cas à Gatineau en 2003 où on a fait une autre analyse, la ville de Gatineau, dans le dossier de l'asphalte, où on s'est aperçus qu'on payait entre 20 % et 75 % plus cher pour l'asphalte que les villes d'Ottawa, Montréal, Québec et Laval. À ce moment-là, il y a eu une demande d'enquête au Bureau de la concurrence, demande qui n'a pas eu de suite, mais le dossier a fait parler de lui, on a procédé à un nouvel appel d'offres, et immédiatement après l'incident du Bureau de la concurrence les prix ont chuté de 30 %. Ce projet de loi là va nous permettre de refouiller ce dossier-là et d'aller au bout de l'affaire, mais il confirme selon nous aussi que le 15 % est trop bas. Vous le savez, lors de la commission Charbonneau plusieurs personnes ont parlé de majoration de prix de 20 % à 30 %.

Et finalement on croit qu'à cette majoration il est probable que la collusion ait causé... qu'on doive ajouter des dommages supplémentaires. Par exemple, notre analyse nous indique que le nombre de soumissionnaires était moins élevé durant la bulle collusionnaire qu'après celle-ci. Il faut se demander s'il y a des fournisseurs qui, sentant l'absence d'ouverture du marché, s'abstenaient de participer aux appels d'offres. Cette réalité aurait pu causer, selon nous, des dommages qui s'ajouteraient ainsi à la majoration de 20 % ou 30 % des contrats par les firmes malhonnêtes.

• (10 h 10) •

La période de prescription prolongée, pour nous, est une bonne chose, qu'elle soit prolongée à 20 ans pour les cas admissibles. Chez nous, on sait qu'on a un cas avéré entre 2003 et 2009, on a une piste sérieuse dans le domaine de l'asphalte en 2003 aussi. On est aussi en train de faire une analyse pour le projet Rapibus, dont la construction s'est échelonnée plus récemment, entre 2011 et 2013, mais c'était un projet de 255 millions, à l'époque c'était le plus gros projet de transport en commun au Québec, et c'est un projet pour lequel on a aussi demandé à l'UPAC de faire des vérifications. Alors, il est donc, selon nous, nécessaire de nous permettre de retourner au strict minimum 10 ans, même c'est 11 ans quand on va à 2003, mais on pense que 20 ans est une période tout à fait raisonnable. On comprend que c'est une mesure exceptionnelle mais qui répond à une situation exceptionnelle. Pour nous, le simple passage du temps ne doit pas permettre aux voleurs d'avoir les moyens de s'en sortir.

Le caractère public des ententes de recouvrement, pour nous, est essentiel. La transparence s'impose. Les actes collusionnaires ont été des actes occultes, et c'est par la transparence qu'on doit leur répondre. Les contribuables ont été attaqués par les firmes dans le sens qu'on leur a volé ce qui leur appartenait, on doit corriger ça, mais les citoyens ont aussi vu ces mêmes firmes attaquer l'intégrité des institutions publiques, et on doit réparer ça aussi. Donc, les citoyens doivent être mis au courant des conséquences qui ont eu lieu des actes des firmes délinquantes.

On souhaite que la ministre maintienne les principes du projet de loi et les principaux mécanismes qui s'y retrouvent mais qu'elle hausse à 20 % les présomptions de dommage. On croit également qu'il est nécessaire, en fait incontournable de prévoir explicitement au projet de loi l'obligation pour le gouvernement de consulter et d'impliquer les municipalités dans les contrats visés qui les touchent directement tout au long du processus. On a une expertise à partager, on a subi des dommages importants et surtout on doit à nos contribuables et à nos citoyens de jouer notre rôle dans la défense de notre ville. Finalement, il nous apparaît important que les municipalités aient la possibilité d'exercer un recours judiciaire si elles le jugent approprié.

En conclusion, le projet de loi n° 26 déposé par le gouvernement envoie un message fort : La société rejette la fraude et le vol érigés en système. Les mesures proposées sont exceptionnelles mais sont nécessaires pour répondre à une situation exceptionnelle. L'immense majorité des entreprises sont honnêtes; c'est également pour les protéger qu'on doit être intraitables avec celles qui ne le sont pas. Ce projet de loi va nous aider à protéger les institutions publiques, à redonner aux citoyens confiance dans les mécanismes en place pour s'assurer que chaque dollar perçu en taxes et impôts soit dépensé avec rigueur. Nous offrons donc au gouvernement notre entière collaboration dans tout le processus qui suit d'élaboration du projet de loi. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le maire, pour vos représentations. Je cède immédiatement la parole à la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, M. le maire, Me Alain, M. Meunier, merci de votre participation aux travaux de la commission. Très heureuse de pouvoir compter sur vos observations parce que je sais que vous avez depuis déjà quelques mois, même quelques années, toujours été très à l'avant-plan lorsqu'il est question de transparence et je sais que c'est un enjeu qui vous préoccupe grandement.

J'aimerais tout de suite aborder la question de la présomption de dommage. Vous luttez, tout comme votre collègue de la ville de Montréal, pour une hausse de la présomption de dommage jusqu'à concurrence de 20 %. Il faut expliquer peut-être, pour les gens qui nous écoutent, qu'il n'est pas impossible de demander des dommages au-delà du 15 %, il ne serait pas impossible... une municipalité, un organisme public aurait la possibilité, tout en en faisant la démonstration, d'aller chercher des dommages au-delà du 15 % s'il s'avérait que dans un dossier, effectivement, les dommages sont supérieurs.

J'aimerais que vous nous indiquiez ce que ça peut représenter pour vous, de devoir... la différence, la présomption de dommage, entre le 15 % et le 20 %. Qu'est-ce que ça peut représenter pour la ville de Gatineau dans un contexte où vous nous indiquez que, dans certains dossiers, on parle de 30 % de chute de prix et même, dans un autre dossier, on parle de jusqu'à 75 %? Alors, qu'est-ce que cette bonification de 5 % là à la présomption de dommage pourrait apporter de plus à la ville de Gatineau dans le cadre de l'adoption éventuelle de ce projet de loi là?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, pour nous, c'est que ça va être plus près du dommage réel, d'abord. On se comprend tous que, dans ce dossier-là, c'est difficile d'être extrêmement précis, là, ça prend des analyses. On en a fait un bout, on en est fiers, mais il va falloir aller plus loin dans le cadre d'un cadre judiciaire. Mais on est convaincus que le dommage dépasse largement, dans certains cas, le 15 %, c'est un plancher. Ça fait que d'abord le dommage réel.

De l'autre côté, le message politique, moi, je pense que les citoyens sont choqués, nous, on est choqués, nos fonctionnaires sont choqués de ce qui s'est passé, et on doit sentir que l'amende ou en tout cas que la conséquence, elle a du sens et elle fait mal. Et, pour nous, 15 %, on pourrait dire que c'est un strict minimum, mais, pour moi, le minimum, ce serait 20 %. Et on peut poursuivre pour en avoir plus, on peut poursuivre la démarche, mais les entreprises aussi, dans le projet de loi, corrigez-moi si je me trompe, mais peuvent aussi essayer de démontrer que c'est moins. Pour moi, le 20%, il y a un équilibre là.

Mme Vallée : Bien, en fait, le projet de loi propose deux choses distinctes.

La présomption de dommage, donc, ça, c'est pour récupérer ce qu'on n'aurait pas dû payer. En fait, là, ce n'est pas une punition, c'est tout simplement récupérer ce que les contribuables ont payé en trop.

Il y a dans le projet de loi un montant de 20 % qui est prévu, 20 % du montant global qui est prévu et qui serait imposé à l'entreprise une fois les procédures terminées, dans le cadre d'un processus judiciaire, on s'entend, là. Qu'est-ce que vous pensez de ce 20 % là? Parce qu'hier on a entendu, évidemment, des groupes qui nous disaient : Bien là, c'est 15 %, et on a le 20 %, et on a les intérêts, puis c'est épouvantable, c'est beaucoup. On s'entend, c'est 15 % de présomption de faute... de dommages sur l'ensemble de la valeur du contrat. C'est 20 % du 15 % ou du montant, là, ce n'est pas 15 % plus 20 %. Mais qu'est-ce que vous pensez de cet ajout-là qui est quand même exceptionnel, on fait exception aux règles de droit commun en ajoutant ce 20 % à ce que devront rembourser les entreprises qui se sont livrées à de la fraude ou à des manoeuvres dolosives?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, pour nous, c'est un des incitatifs originaux qu'on trouve intéressant pour justement s'assurer qu'on fasse... qu'on ait des règlements hors cours. Nous, on est inquiets par la complexité de ces dossiers-là. Il y a des choses qu'on est convaincus d'être capables de démontrer, mais, un incitatif comme ça, c'est plus facile pour celui qui a posé le geste de l'avouer puis de venir l'expliquer que, la victime, d'essayer de comprendre comment ça s'est produit. Puis d'ailleurs, dans notre rapport, c'est assez original, les stratagèmes qui étaient en place à Gatineau. Donc, ce 20 % là qui s'ajoute, pour nous, c'est un message, là, c'est : Venez nous voir, on va régler hors cour, sinon ça va vous coûter encore plus cher. Pour moi, c'est intéressant comme outil, de notre point de vue.

Mme Vallée : Juste à tire informatif, comment ça a coûté à la ville de Gatineau de produire un rapport? Parce que c'est quand même... vous avez fait un travail fastidieux où vous êtes remontés dans le temps. Ça a représenté quel montant? Puis vous vous y êtes pris comment pour, justement, élaborer, mettre en place ce rapport-là?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : J'aurais malheureusement dû me préparer pour répondre à cette question-là, mais on l'a fait à l'interne, ce n'est pas comme si on avait... Donc, il y a eu beaucoup de temps consacré à ça et, je dirais, des fonctionnaires, des élus. On a eu des présentations publiques, il y a eu quelques discussions, des débats. C'est un domaine complexe. Oui, ça a coûté cher. Je dirais que ça s'est établi sur un an, à peu près. Donc, il y a du temps.

Quand vous parliez précédemment du cinq ans, là, on n'en a pas parlé dans notre mémoire, mais cinq ans, c'est assez court, parce que ça, c'est un dossier. La ville de Gatineau, c'est une grande ville, mais il reste que c'est un petit service qui travaille là-dessus, là. Ils travaillent sur ce dossier-là pendant un certain nombre de mois, ils vont travailler sur un autre pendant un certain nombre de mois, puis pendant ce temps-là ils doivent gérer la ville.

Donc, il y a des coûts, il y a du temps de fonctionnaires, mais malheureusement... à moins que Me Alain soit capable de m'aider, mais je ne pense pas qu'on pourrait vous donner un chiffre fiable, là. Mais ça...

Mme Vallée : Je ne voulais pas vous poser une colle, là. En fait, dans le fond, je voulais avoir une idée puisque, lorsqu'on parle du 20 %, lorsqu'on parle de la présomption de dommage, c'est un peu l'objectif, c'est de venir compenser pour les coûts que les contribuables ont à assumer pour apporter un dossier devant les tribunaux, parce que, pour mener à bien un dossier contre les entreprises qui se sont livrées à ce type de manoeuvre là, ça ne se fait pas gratuitement. Non seulement il y a les frais d'avocat, mais il y a également tous les coûts de la préparation du dossier — qui se font pour un objectif qui est tout à fait noble, mais ce n'est pas à coût nul.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Tout à fait. Je vais demander à nos services d'essayer de l'estimer, parce qu'en plus, dans le cas de Gatineau, c'est relativement facile parce qu'on a une date de début, une date de fin, quatre noms d'entreprise, un stratagème très clair, ça fait que, pour nous, on savait où aller chercher, mais il y a des villes qui vont savoir qu'il y a un problème, savoir qu'il y a quelque chose qui ne sent pas bon, mais elles ne sauront pas très précisément où poser des questions. Ça fait que notre estimé pourrait vous être utile, là, on va s'assurer de le faire.

• (10 h 20) •

M. Alain (Claude) : Et, si je peux me permettre, pour tenter de répondre à votre question, Mme la ministre, ce n'est qu'une des analyses qui sera nécessaire dans le cadre de recours judiciaires. C'est une analyse factuelle de ce qui s'est passé, l'analyse des coûts, mais après ça il va falloir faire des analyses de juricomptabilité, en plus des autres contrats et des autres domaines. Donc, c'est une tâche qui est à la fois un travail de moine puis une tâche titanesque de collecte de données, de centralisation des données, d'analyse des données et aussi d'analyse des autres facteurs qui auraient pu influer sur les prix. Donc, cette présomption est un incitatif important, qui peut nécessairement aussi être renversée par les entreprises qui auraient à faire une preuve contraire.

Mme Vallée : On étend, dans le projet de loi, l'effet de la loi non seulement au domaine de la construction, mais à l'ensemble des contrats publics. Est-ce qu'à la ville de Gatineau vous avez peut-être eu vent ou savez déjà que cette étendue du projet de loi, cet élargissement de la portée du projet de loi pourra être utile à la ville de Gatineau?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Si je ne m'abuse, un dossier comme le dossier du Rapibus, ça reste essentiellement de la construction, ça fait que c'était peut-être couvert dans la première version, là. Nous, du point de vue de l'intérêt du contribuable, on trouve ça très intéressant de l'élargir, mais, dans les cas qu'on a, que nous avons, là, je crois que c'est à peu près strictement le domaine de la construction.

Mais là peut-être que ma définition du domaine n'est pas la bonne, mais nous, on a asphalte, on a génie-conseil où, là, on a des raisons de faire des analyses, et il y a l'ensemble du dossier Rapibus, qui est un dossier de transport en commun assez complexe, qui touche beaucoup de domaines, où, là, les analyses vont être en profondeur.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...reste cinq minutes à ce bloc d'échange.

Mme Vallée : Pour ce qui est de la clause crépusculaire, c'est-à-dire la durée de vie du projet de loi qui est de cinq ans, vous avez abordé la question, mais vous l'avez effleurée. Le Vérificateur général, tout à l'heure, semblait être plus ouvert à une portée de 10 ans. On a entendu des groupes qui nous disaient : Vous venez modifier le droit commun, on ne devrait pas modifier le droit commun. J'aimerais vous entendre davantage sur la durée du projet de cinq ans.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Pour nous, ça nous apparaît court parce qu'on a des ressources limitées à... Évidemment, on s'y est investis puis on va continuer de le faire, mais il reste que le temps, ça va vite. Pendant qu'on fait ça, il faut qu'on continue de gérer la ville, c'est souvent les mêmes équipes. Donc, pour nous, cinq ans... Disons qu'en écoutant le Vérificateur général je trouvais que ce qu'il disait avait bien du bon sens, parce que, pour nous, cinq ans, on est dans le minimum à cause des ressources qu'on doit consacrer à ça. Puis là on a des pistes d'action. Si en cours d'enquête, disons, on s'aperçoit qu'il y a d'autres domaines, on reçoit des appels, cinq ans, ça pourrait être serré, là. Mais je ne peux pas m'avancer plus parce que... avec ce qu'on a, là, on sait qu'on a pas mal de travail, mais je me fierais au Vérificateur général.

Mme Vallée : Hier, la ville de Montréal soulignait son intérêt à s'investir notamment dans le programme de remboursement volontaire, d'avoir un mot à dire sur les règlements qui pourraient intervenir, l'UMQ viendra un petit peu plus tard et a une vision similaire. Il était question, lors de la présentation de la ville de Montréal, de peut-être s'inspirer du seuil de matérialité qui a été mis en place à l'AMF pour déterminer... pour obtenir l'adhésion et le son de cloche, finalement, d'une municipalité. Le seuil de matérialité de la ville de Montréal avait été établi à 100 000 $. Pour les autres municipalités, il s'agit d'un pourcentage.

J'aimerais vous entendre sur cet aspect-là de la participation notamment de la ville de Gatineau ou des municipalités dans le processus du programme de remboursement volontaire.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Nous, on est tout à fait mal à l'aise avec un seuil. Le monde municipal est complexe, l'UMQ va élaborer là-dessus. Il y a des grandes villes, il y a des petites villes, il y a des très petites villes. Il y a une question de principe à ce que la ville puisse donner son accord.

Pour nous, la piste à explorer est moins la piste du seuil qu'une piste de comment on fait pour que les villes puissent s'exprimer mais sans que vous, vous soyez devant 75 partenaires différents qui disent, tu sais... Il y a des mécanismes qui existent dans le cas d'un recours collectif. Est-ce qu'on peut s'inspirer de ça? Est-ce qu'on peut remettre une certaine responsabilité dans les mains des villes pour dire : Bien, parlez-vous, mais nous, on a besoin d'un nombre d'interlocuteurs limité? Nous, c'est plus cette avenue-là qui nous intéresserait à cause du principe.

D'abord, pour une ville, un petit contrat, qu'est-ce que ça veut dire, un petit contrat, pour Gatineau, pour Chelsea, pour Notre-Dame-de-la-Paix, là, ça varie beaucoup, et le maire et les élus doivent se rapporter à leurs citoyens en disant : Bien, on a défendu les intérêts de notre ville dans ce contrat-là, même s'il était très petit. C'est dans ce sens-là où moi, je pense qu'on devrait donner une responsabilité aux villes de vous faciliter la vie, mais que ce soient les villes qui décident de leur implication, là, entre elles. Moi, je suis prêt à ce qu'on se donne nous-mêmes du trouble pour vous en éviter, mais j'ai beaucoup de difficultés à accepter qu'on ne soit pas à la table du tout, qu'on n'ait pas un accès direct.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Une minute, Mme la ministre.

Mme Vallée : Pour le programme de remboursement volontaire, est-ce que vous avez d'autres observations?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Outre ce qu'on a dit, je ne crois pas, non.

Mme Vallée : Au niveau de la... Bon, je comprends que, pour vous, il est important d'avoir voix au chapitre, de pouvoir donner votre appréciation d'un potentiel règlement. Je comprends puis je suis très consciente qu'un petit contrat pour Montréal n'est peut-être pas petit pour Egan-Sud ou pour Montcerf, on s'entend, là, et il faut aussi regarder l'impact que ça peut avoir pour une petite municipalité de recouvrer ne serait-ce que 20 000 $. Ça, j'en suis consciente.

Est-ce que l'UMQ pourrait désigner des représentants pour... dans le cadre de ces négociations-là?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je vous dirais que c'est le genre d'avenue qui, pour nous, est plus intéressante parce que, là, à ce moment-là, moi, je peux parler à mon union puis dire : Écoutez, dans cette affaire-là, là, il y a une question de principe, il s'est passé telle chose, on a une expertise particulière, on est capables de vous en parler pendant des heures; ce n'est pas vrai qu'on ne sera pas à la table. C'est plus cette piste-là qui, pour moi, est intéressante qu'un seuil où, là, on sort du... La bonne foi se présume, puis je sais que le gouvernement travaille bien, mais, si on n'est pas là du tout ou bien si vous ne nous appelez pas, dans certains cas, il y a peut-être quelque chose qui aurait dû être fait qui ne sera pas fait, alors que, si on est là, bien on aura la responsabilité de lever le doigt, là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, ça complète ce premier bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers l'opposition officielle pour votre bloc. M. le député de Lac-Saint-Jean, à vous la parole.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous. Je souhaite reprendre, là, votre quatrième recommandation en ce qui a trait à la capacité d'agir, là, pour les municipalités, j'essaie de voir comment vous, vous voyez l'application de la loi. Est-ce que, dans votre esprit, c'est davantage la municipalité qui va intenter des poursuites contre les entreprises ou c'est davantage la ministre de la Justice?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est difficile de répondre parce que chacun des cas peut être assez complexe, là. Il y a des firmes qui sont très grandes qui ont été actives sur tout le territoire du Québec, donc il y a des fois où ce ne serait même pas dans notre intérêt de dire : On va poursuivre nous-mêmes. On serait prêts à travailler avec le gouvernement pour que le gouvernement ou en tout cas qu'une autre instance le fasse, en mettant en commun... Il y a d'autres cas où moi, je n'aimerais pas une situation où le gouvernement décide de ne pas y aller et que nous, on n'ait pas le droit d'y aller. Nous, on est déterminés à aller au fond des choses dans un certain nombre de dossiers. Que cette possibilité ne soit pas là, moi, me heurte.

M. Cloutier : Bien, moi, je comprends de l'article 12 que la possibilité, elle est là, c'est-à-dire qu'avant d'intenter une action le gouvernement doit informer la municipalité pour qu'elle puisse agir, elle ait le délai suffisant pour pouvoir intenter une action. Mais ça, vous trouvez que ce n'est pas suffisamment clair, c'est ça?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui. Il y a deux articles dans le projet de loi qui parlent de la possibilité, pour une municipalité, d'intenter un recours. Il y a l'article 34 qui essentiellement dit que, si une municipalité veut intenter un recours durant la période du programme de remboursement volontaire, elle doit demander la permission au ministre. L'autre article, c'est l'article 12, qui dit que le ministre peut intenter le recours mais après avoir informé l'organisme de son intention et lui avoir accordé un délai raisonnable pour qu'il intente lui-même une action.

À notre avis, il y a une confusion ici, à savoir, bon : Est-ce que, dans le cas de l'article 12, le gouvernement doit autoriser l'organisme public à prendre le recours ou pas? Et l'article 12 ne parle pas du programme de remboursement. Donc, la question qui se pose, c'est : Est-ce que la permission du ministre est nécessaire après la fin du programme de remboursement volontaire? On pense que non, mais ça mériterait une précision.

• (10 h 30) •

M. Cloutier : Bien, je vous avoue que, moi, ce que je comprends, c'est que non, parce que l'article 34 le rend conditionnel à l'autorisation de la ministre pour ne pas nuire aux négociations dans la première année, ce qui m'apparaît logique, honnêtement.

M. Alain (Claude) : C'est tout à fait logique, on est d'accord avec ça.

M. Cloutier : O.K. Je fais la même interprétation. Il y a une période de grâce où on donne la chance au coureur, hein, c'est un peu ça.

M. Alain (Claude) : C'est souhaitable, pour le gouvernement et les organismes publics, qu'il y ait une centralisation et une compréhension globale des processus qui pourraient avoir lieu avec l'ensemble des organismes puis des entreprises. Mais, après ce programme de remboursement, est-ce qu'un organisme public doit demander l'autorisation? La question se pose.

M. Cloutier : Et, honnêtement, moi, je suis assez de votre avis. Ce serait plus simple d'en faire un nouvel article qui justement donne ce pouvoir-là aux municipalités plutôt qu'une lecture a contrario de l'article 34 puis de l'article 12 pour finalement comprendre qu'effectivement on peut le faire, d'autant plus que ça amène le genre de discussion que nous avons. Alors, de toute évidence, ça m'apparaît nécessaire.

Alors, ce n'est pas la première fois qu'on la voit, cette proposition-là. Je crois que nous l'avons eue d'autres municipalités, là, il faudrait revoir. Mais de toute évidence il y a lieu de préciser.

Est-ce que le seuil de 20 % est, selon vous, le seuil le plus juste dans les circonstances? Parce que ce que d'autres groupes nous ont dit, c'est que peut-être que c'est un peu différent pour les municipalités eu égard aux types de contrat qu'elles contractent, mais dans une perspective plus large, plus générale, les montants en cause pouvaient être inférieurs. Alors, je ne sais pas si c'est un argument qui est valable, honnêtement, ça fait partie de nos réflexions, mais, pour la municipalité de Gatineau, ça vous apparaît évident que, pour vous, 15 %, c'est inférieur au coût réel?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est inférieur aux dommages réels. Pour nous, tout ce qu'on a, là, nous indique que c'est inférieur aux dommages réels. Encore une fois, c'est difficile, là, on n'est pas dans de la science exacte, là, mais on a assez d'indices dans notre analyse sur le génie-conseil et dans notre analyse sur l'asphalte que 15 %, c'est trop bas, là.

Un plancher à 20 %, pour moi, est intéressant. Puis, encore une fois, le projet de loi permet de contester vers le haut ou vers le bas, mais 20 % est plus intéressant pour nous et plus près de la réalité, selon nous.

M. Cloutier : Puis est-ce qu'avant d'avoir un accord avec une entreprise qui serait négocié par le ministère de la Justice... Est-ce que vous êtes d'avis que la municipalité de Gatineau devrait pouvoir donner son aval avant l'accord final?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Tout à fait, tout à fait. Moi, je pense qu'il y a un historique, il y a... On a travaillé avec ces gens-là, on a un avis qui, pour moi, est important à donner. Pour moi, il y a des cas où on voudrait peut-être aller plus loin, on voudrait être plus sévères, pour toutes sortes de raisons que le gouvernement ne connaît pas nécessairement en lisant le dossier, là. Donc, de consulter la ville, à ce moment-là, ce serait, pour moi, incontournable.

M. Cloutier : Mais est-ce qu'on ne devrait pas ajouter un article dans lequel on explique qu'il y aura nécessairement une collaboration avec ceux et celles qui ont été directement impliqués au dossier si le ministère de la Justice prend en charge la responsabilité des poursuites? Est-ce que ça, ça apparaît dans le projet de loi suffisamment clairement, à votre point de vue?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Le mémoire de l'UMQ porte beaucoup sur cette question-là, vous allez leur parler aujourd'hui, mais, pour moi, c'est clair que ce n'est pas suffisant, ça apparaît mais pas suffisamment, là. Pour nous, bien, comme Montréal l'a dit assez clairement aussi, là, il ne devrait pas y avoir de décision qui se prenne dans des enjeux où Gatineau a été impliquée de façon importante sans que Gatineau en fasse partie.

M. Cloutier : Puis je dirais même dans la préparation aussi des dossiers, dans l'approfondissement de la cause.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui.

M. Cloutier : Des intervenants qui peut-être sont encore à la municipalité... d'autres auront sans doute quitté, mais il arrivera des moments où de toute évidence l'expertise sera davantage soit au sein des municipalités ou des organismes publics. Il faudra que la coordination, la collaboration, elles soient là.

Maintenant, est-ce que le projet de loi pourrait être davantage... pourrait être plus clair pour assurer la bonne collaboration, pour ne pas que, dans le fond, on reparte à zéro puis qu'on dérape ou on essaie de comprendre un dossier que, si en bout de course on avait la bonne personne assise autour de la table, ça irait nettement...

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Exactement. Puis j'ajouterais un élément peut-être moins solide, mais, dans un cas de programme de remboursement volontaire, là, il y a un élément de communication là-dedans, là. Nous, on est préoccupés par ça, en disant : On envoie le message, là, que, la ville de Gatineau, il y a des choses qu'on ne tolérera pas et qu'on va prendre acte, on va poser des gestes, on va s'assurer d'essayer de tout faire pour retrouver l'argent qui a été volé aux contribuables. Mais envoyer ce message-là puis... ça fait qu'il y en a peut-être qui vont dire : Bien, étant donné qu'ils sont sérieux, on devrait peut-être en profiter, de ce programme-là, parce qu'on va les avoir dans les pattes de toute façon. Donc, si le gouvernement fait des gestes ou se prépare à en faire, si nous, dès le départ, on est là, il y a aussi cet aspect-là qu'on peut gérer ensemble qui, pour moi, ne me semble pas négligeable dans un contexte où il y a une partie de ça qui est volontaire. Bien, pour que ce soit volontaire, il faut qu'on se sente interpellé, puis nous, on est bien placés pour interpeller, là, on est près de la réalité, là, qui a été vécue par les gens.

M. Cloutier : Vous avez fait référence tout à l'heure aux ressources qui sont nécessaires, pour la ville de Gatineau, pour approfondir, documenter, puis que vous avez fait ça à l'interne, tout à l'heure. Mais est-ce que... Eu égard à la charge de travail et à l'ampleur des dossiers, avez-vous l'impression que vous avez les ressources nécessaires pour mener de front, éventuellement, les poursuites, vous allez être contents d'avoir l'appui du gouvernement? Puis, inversement, est-ce que le gouvernement, lui, aura les ressources nécessaires pour venir compenser la prise en charge de ces dossiers-là, qui normalement ne serait pas de sa responsabilité?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Encore une fois, je pense qu'il faut accorder les ressources nécessaires à ça. Le traumatisme qui a été vécu par les citoyens, par la collectivité, dans le cas de Charbonneau, pour moi, ça en vaut la chandelle, là, il faut qu'on se donne les outils.

On n'est pas mal à l'aise à mettre des choses en commun avec le gouvernement, à partager de l'expertise, parce que c'est complexe, c'est lourd, puis on ne veut pas que le contribuable, au bout du compte, n'ait rien gagné, là, ça fait que c'est dans notre intérêt de travailler ensemble. Mais, pour moi, il faut qu'on se les donne, les ressources. Nous, on le sait déjà, en fait, M. Alain est préoccupé par ça parce qu'il a déjà une grande charge de travail, mais le mandat qu'on leur donne, nous, à nos services, c'est de dire : Il faut faire ça, c'est une priorité, là. Il faut que les citoyens sentent qu'on défend les institutions publiques, puis qu'il y a des affaires qu'on ne tolérera pas, puis qu'il doit y avoir des conséquences aux actes illégaux. Pour moi, c'est important d'envoyer ce message-là du point de vue du respect de la chose publique, là. L'État est attaqué de toutes parts, de toute façon. Dans un dossier comme celui-là, il faut qu'on démontre que l'État se défend puis qu'il y a des choses qu'on n'accepte pas, ça fait que ça vaut la peine d'investir les ressources.

Évidemment, on est prêts à travailler intelligemment avec le gouvernement pour voir, il y a peut-être des cas où le gouvernement devrait porter le dossier, mais il ne faut pas laisser passer ces choses-là au nom du coût, là, de la démarche, là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous souligne qu'il nous reste cinq minutes à ce bloc d'échange.

M. Cloutier : Je vous remercie, M. le Président. Peut-être pour être encore plus précis, ça ressemble à quoi, l'ampleur de la tâche? Mettons que la ville de Gatineau dirait au gouvernement : Inquiétez-vous pas, nous, on va prendre en charge l'ensemble des dossiers, ça peut être quoi, une dizaine de poursuites? Il y a trois dossiers qui sont pendants? Est-ce que vous pouvez nous donner une idée de l'ampleur de la tâche ou de poursuites qu'il pourrait y avoir?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est... Je vais...

M. Cloutier : C'est difficile à ce stade-ci?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Il y a celui-là qui... où c'est un dossier assez clair. Je ne dirai pas facile, mais le cadre est très précis. Le dossier de l'asphalte dont je vous parlais, encore une fois c'est assez précis. Donc, c'est deux démarches qui, pour moi, on est capables de gérer ça à Gatineau.

Là où il y a un point d'interrogation, c'est un projet comme le projet Rapibus, qui est un projet de transport en commun important, 255 millions. Là, ce n'est qu'un grand point d'interrogation. Il n'y a peut-être rien qui s'est passé de pas correct, mais, s'il y a quelque chose, c'est un projet d'une ampleur très grande où, là, pour la ville, à un moment donné, il pourrait y avoir un problème. Je ne sais pas si Me Alain veut rajouter un élément.

M. Alain (Claude) : En fait, on en est au début des analyses qui seront nécessaires pour mener à terme des recours judiciaires, s'il y a lieu, et cette analyse a requis beaucoup de temps et d'énergie en termes de ressources humaines et ressources financières, les prochaines le seront tout aussi. Il va falloir s'adjoindre des experts aussi à l'externe, des juricomptables entre autres. Et, à ce moment-ci, on a déjà des pistes d'intervention où on veut aller enquêter, si vous me permettez l'expression, mais on va peut-être en découvrir d'autres aussi.

Donc, le fait que le gouvernement soit impliqué, c'est nécessaire, mais la tâche, pour répondre spécifiquement à votre question, elle est titanesque. Il va falloir obtenir l'information. Et, comme vous le savez, les corps publics procèdent à la destruction de documents à partir, je crois, de sept ans, dans la plupart des cas, alors le défi est également, pour les corps publics, de retrouver les informations pertinentes, les témoignages qui vont nous permettre également de bâtir nos dossiers. Donc, plus on recule en arrière, plus le défi est important, tout comme, d'ailleurs, pour les entreprises.

• (10 h 40) •

M. Cloutier : J'essaie d'imaginer l'ampleur de la tâche que ça peut représenter. Ça doit être... Je pense que le mot «titanesque» doit être le meilleur qualificatif qu'on peut trouver.

Mais, moi, ce qui m'inquiète, c'est : D'un point de vue gouvernemental, est-ce qu'on va avoir le soutien et l'équipe de recherche, les experts nécessaires pour s'assurer que la job va être faite? Puis combien de dossiers de front à travers tout le Québec on va être capable de mener en même temps? J'imagine que vous avez réfléchi à ça, mais, dans le contexte budgétaire que nous connaissons, ça suscite des questions qu'on aura la chance ultérieurement de discuter, nous. Mais ce qu'il faut être certain, c'est que des municipalités comme la municipalité de Gatineau, si vous décidez de mener de front, par exemple, trois dossiers, mais qu'il en reste cinq pendants, bien, que les cinq pendants qui sont transférés au gouvernement, là... Après ça, comment on va hiérarchiser les dossiers? Quels vont être les dossiers qui vont être prioritaires? À qui on va transférer cette responsabilité-là? Puis est-ce que l'équipe qui va être en place va avoir toute la structure? Je soulève des questions, mais votre témoignage ce matin m'amène à réaliser... ou me fait réfléchir davantage sur la nécessité de s'assurer que les ressources vont suivre, là.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Tout à fait. Puis la question va se poser à moindre niveau chez nous aussi, là, jusqu'à quel point on s'investit, jusqu'où on va, combien de ressources on alloue à ça. Nous, on augmente considérablement nos programmes d'infrastructure, on investit beaucoup dans le rattrapage qu'on a à faire, notre charge de travail augmente, ça a un impact sur nos services juridiques. Donc, pour nous aussi, c'est une décision, mais, pour moi, il ne faut pas que... on doit en tenir compte, évidemment, parce qu'on gère les fonds publics, mais il ne faut pas que le seul critère, ce soit le rapport coût-bénéfice, là, il y a une question de justice là-dedans aussi.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : 40 secondes, M. le député. Oh! Mme la députée de Joliette.

Mme Hivon : Oui. Alors, bonjour. Petite question rapide. Hier, évidemment, les gens qui représentent l'industrie de la construction, les ingénieurs, tout ça, chambres de commerce nous disaient : Vous savez, toute la question, là, de la transparence, pour que les organisations, pour que les compagnies viennent, il faut vraiment qu'il y ait un incitatif pour eux. Vous, vous semblez vraiment convaincus. Évidemment, c'est une question d'équilibre avec les risques de poursuite, de mettre assez de pression pour qu'ils disent : J'y ai un avantage, mais comment vous sentez que ça va marcher, cette loi-là? Vous semblez très convaincus que ça va marcher. Pourquoi ils vont venir? Pourquoi vos entreprises vont venir?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Rapidement.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, entre autres parce qu'ils veulent continuer à travailler, puis, s'ils ne font pas ça... Nous, là, on est déterminés. Puis on sait qu'un enjeu de transparence, là, ça peut leur faire peur un peu, mais il y a ce processus-là qui les protège un peu, mais il y a un autre processus qui ne les protège pas du tout, c'est le processus judiciaire, puis nous, on va y aller. Donc, s'ils ont peur de la transparence de ce projet de loi là, ils devraient aussi avoir peur de la transparence d'un processus judiciaire un peu plus... moins encadré, disons, pour les aider. C'est dans ce sens-là où, nous, l'obligation de transparence, ça ne nous dérange pas du tout, parce que l'alternative, dans notre cas, c'est qu'on s'en va en cour parce qu'on ne laissera pas passer ça. Puis, en cour, bien ils se débrouilleront avec la transparence, la totalité...

C'est pour ça que, pour moi, l'incitatif est quand même important, du projet de loi. Dans le cas du génie-conseil, c'est un certain nombre fini d'entreprises, là, justement c'est un problème, une grande concentration. Ces entreprises-là veulent tourner la page. Il me semble que, dans le projet de loi, on a une occasion de le faire.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Je me tourne maintenant vers la deuxième opposition. Mme la députée de Montarville, à vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. M. le maire, bonjour. Messieurs, bonjour. Merci pour votre mémoire.

Et je vais poursuivre dans la même veine parce que, dans votre mémoire, vous nous dites d'entrée de jeu : De 2003 à 2009, la ville a octroyé 131 contrats à quatre firmes collusionnaires. Alors, elles sont bien identifiées, on sait à qui on a affaire.

Vous nous disiez précédemment dans une réponse qu'actuellement il n'y a pas de poursuite en cour, mais on fait l'analyse des dossiers. C'est ce que je comprends, il n'y a pas de poursuites qui ont été intentées contre aucune de ces quatre firmes jusqu'à présent?

M. Alain (Claude) : Aucune poursuite à ce jour.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. On est en train de travailler sur l'analyse des dossiers. Ces firmes-là, ils ne sont pas fous, ces dirigeants-là, ils savent que cette loi, elle avait été annoncée, qu'elle s'en venait. Est-ce que vous avez des contacts avec elles? Est-ce qu'elles manifestent l'intérêt de régler? À cet égard-là, est-ce qu'on sent une bonne foi pour un règlement ou pas du tout, il n'y a pas eu de contact à cet égard?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, Me Alain me corrigera si je me trompe, mais, présentement, à cause de l'étude du projet de loi, tout le monde est un peu en attente. Et nous, on pourrait intenter des poursuites, on pourrait faire des choses, mais, si le projet de loi nous donne un cadre qui est complètement nouveau, et les firmes et nous, en fait, on n'a pas intérêt à se parler tout de suite, là, on va attendre de voir qu'est-ce qui est adopté en bout de ligne. Et, à ce moment-là, j'imagine que leur attitude va être... qu'on va recevoir des appels.

Mme Roy (Montarville) : Depuis les révélations qu'on a entendues à la commission, depuis les changements de pratique, est-ce qu'il est plus facile, du côté des appels d'offres, de faire les appels d'offres? Y a-t-il de nouveaux joueurs? Quelle est la dynamique à Gatineau au niveau, justement, des contrats qui sont octroyés par la ville? Est-ce que ça a changé les joueurs et est-ce que ça a modifié les prix, est-ce qu'on a senti une diminution des prix? La ville de Montréal nous disait hier qu'on a senti des fluctuations. De votre côté, ça ressemble à quoi depuis les dernières années?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est toujours un peu périlleux de dire ça, là. Comme quelqu'un disait, il y a une question de perception. Nous, dans notre attitude... dans notre analyse, c'est clair qu'il y a plus de joueurs entre... puis on a pris deux périodes qui... il y a plus de joueurs, et les prix sont plus bas. En tout cas, on a pris un barème qu'on trouve intéressant parce que c'est un barème qui est analysé chaque année. Ça fait qu'on regarde l'écart avec ce barème-là, et c'est clair qu'il y a eu une chute des prix, en fait une chute de l'écart avec le barème. Et donc, pour nous, l'effet commission Charbonneau est tout à fait réel, est tout à fait clair. Le fait qu'il y ait plus de joueurs qui soumissionnent, c'est majeur, parce que ça fait un marché beaucoup plus sain. Donc, pour nous, il y a une espèce d'effet secondaire important, positif de la commission Charbonneau chez nous aussi.

Mme Roy (Montarville) : Un effet d'économie, donc, sur les coûts des contrats.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui.

Mme Roy (Montarville) : Vous l'évaluez à quel pourcentage?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je ne pourrais pas vous... C'est difficile parce que, dans certains domaines, c'est le marché qui a évolué parce que, je ne sais pas, la matière première, le prix a baissé, donc on ne peut pas faire de lien trop direct avec la collusion. Dans d'autres domaines, il y a un nouveau joueur qui n'est pas nécessairement arrivé à cause de ces événements-là.

Ça fait que c'est délicat de vous dire : On a économisé tant. C'est pour ça que, notre analyse, on la trouve intéressante, parce que sur ces années-là on a des chiffres précis. C'est 131 contrats, comme vous le disiez, c'est 17 millions. 17 millions, ça nous donne le goût de faire des calculs, là. Si le projet de loi s'applique puis on réussit à tout démontrer combien... c'est quoi, le gain pour la ville, on peut arriver à des chiffres intéressants.

Mme Roy (Montarville) : On parle de 131 contrats pour une période de six ans. On sait que le projet de loi, s'il est adopté tel quel, pourrait permettre de remonter 20 ans à l'arrière. Mon collègue de la première opposition nous disait : C'est une tâche colossale dans la mesure où c'est un contentieux, la ville a un contentieux... Vous avez combien d'employés au contentieux? Combien d'avocats travaillent avec vous?

M. Alain (Claude) : Il y a quatre avocats dans la section civile et quatre autres dans la section pénale.

Mme Roy (Montarville) : Et donc ça fait huit personnes au total. Mais, si on exclut la section pénale et... Oui, c'est ça, juste pour le civil, là.

M. Alain (Claude) : Oui, mais, en temps et lieu, il y aurait des discussions qu'on aurait également avec d'autres organismes publics pour... Et c'est une réflexion qui n'est pas encore faite mais qui devra être faite, à savoir de quelle façon... Est-ce qu'il y a lieu d'avoir une représentation commune? Alors, ça, c'est une réflexion qui n'est pas encore faite. Pour le moment, ce qui est important, c'est de débuter et continuer les analyses que l'on fait à l'interne.

Mme Roy (Montarville) : Je vais vous amener sur le témoignage d'hier de vos collègues le maire de Laval et les gens de Laval, le contentieux de Laval, qui nous sont arrivés avec des propositions pour le moins intéressantes à l'égard de la transparence et aussi pour rassurer la population, parce que ce projet de loi n° 26 est naturellement dans la foulée de toute cette corruption et collusion dont les citoyens ont été victimes. J'aimerais savoir ce que vous pensez d'une recommandation ou d'un ajout que suggère la ville de Laval, entre autres que les sommes qui auraient été payées à des élus ou des fonctionnaires collusionnaires fassent également partie d'ententes de remboursement ou soient remboursées. On parle de primes de départ, etc.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Nous, c'est un aspect du projet de loi qu'on n'a pas analysé... ou en fait on a écouté ce que d'autres en disaient, mais je serais mal à l'aise de vous donner un avis formel de la ville parce qu'on n'a pas fait cette réflexion-là, entre autres parce que, je croise les doigts, en tout cas on espère que ça va continuer comme ça puis on s'assure que ça continue comme ça, mais on n'a pas eu de corruption avérée à Gatineau. Et, quand je dis qu'on n'en a pas eu, on a fait des démarches, on a été prudents, on a notre vérificateur général qui a fait toutes sortes de choses, on a été diligents, mais on n'a pas de cas devant nous, là.

Nous, au contraire, je dirais que... Je parlais du cas de l'asphalte. C'est nos fonctionnaires qui ont sonné la sonnette d'alarme en disant : Il y a quelque chose qui se passe dans le marché, et c'est nous qui avons fait appel au Bureau de la concurrence. Donc, l'équipe qui aurait pu être corrompue est l'équipe qui a mis de l'avant le fait qu'il y avait des problèmes. Ça fait que les indications, en fait, à Gatineau sont inverses, on a une fonction publique qui est engagée et qui ne laisse rien passer. Je ne peux pas prévoir l'avenir, là, mais c'est pour ça qu'on ne s'est pas attaqués à cet aspect-là du projet de loi.

• (10 h 50) •

Mme Roy (Montarville) : ...vous n'en faites pas mention, mais je me demandais ce que vous pensiez de cette idée-là, toujours dans l'optique du remboursement des sommes volées.

M. Alain (Claude) : Bien, l'objectif du projet de loi, c'est d'aller récupérer des sommes payées à la suite... des sommes payées qui n'auraient pas dû être payées. Alors, dans cet objectif, c'est tout à fait logique que d'étendre ça à des fonctionnaires et à des élus qui auraient fait partie de ces stratagèmes-là.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie infiniment pour vos précisions. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour la deuxième opposition? Je vous remercie. Je me tourne du côté du gouvernement. M. le député de Vimont, à vous la parole.

M. Rousselle : Merci. M. le maire, en passant, je vois que vous prenez ça vraiment à coeur puis vous avez fait un bon travail. Félicitations!

Je regarde, vous savez que la loi n° 26 va plus loin que la précédente, la 61. Et vous avez fait, justement, une recherche au niveau des contrats, Rapibus, construction, asphaltage et tout, là. Vous, le fait qu'on élargit, justement, à tous les contrats publics, vous, sur votre côté, est-ce que vous avez fait une analyse là-dessus? Est-ce que c'est bon pour vous? Est-ce que vous avez regardé cet aspect-là?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Non, sinon un élément de principe, c'est-à-dire, élargir, moi, je ne vois pas beaucoup d'effets négatifs, là. Si ça fait peur à des gens, tant mieux. Puis je vois des éléments positifs parce qu'il y a des choses qu'on va certainement découvrir dans ces processus-là. Donc, que ça soit plus large, pour moi, il y a beaucoup de gains puis il n'y a pas tellement d'inconvénients.

M. Rousselle : Mais vous n'avez pas fait de recherche, vous n'avez pas regardé...

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Non, on n'a pas encore... On en avait beaucoup sur nos épaules dans les cas qu'on connaissait, donc on n'est pas allés... On n'est pas sortis de ce cadre-là, pas encore.

M. Rousselle : Le maire de Montréal nous disait qu'ils se sont rendu compte à partir de 2010 que les coûts avaient baissé vraiment. Vous, est-ce que c'est à cette date-là que vous avez remarqué aussi? Est-ce que ça a eu le même impact chez vous ou...

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : C'est clair que les prix ont baissé, c'est clair qu'il y a des domaines où les choses se sont améliorées. Puis ça, c'est au moment de Charbonneau entre autres, là. C'est pour ça que, nous, il y avait certaines voix qui disaient : Bon, bien, il n'y en a pas chez nous, mais les prix baissaient chez nous aussi, là, donc il y a quelque chose qui se passait à l'ouest du Québec aussi.

Donc, on a constaté ça. C'est pour ça que le projet de loi, pour moi, est intéressant. Dans la mesure... À partir du moment où les prix ont baissé, il y a des choses qu'on devrait regarder qu'on ne regardait pas avant, là.

M. Rousselle : ...à partir de 2010.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je dirais peut-être même...

M. Rousselle : Avez-vous regardé le temps? Parce qu'il y a l'UPAC aussi qui a sorti avant la commission Charbonneau, vous savez.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Je dirais 2009, là, je dirais 2009.

M. Rousselle : 2009, oui?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui.

M. Rousselle : O.K. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour vous, M. le député de Vimont? Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : J'aimerais revenir... Dans le cadre du programme de remboursement volontaire, tout à l'heure, on parlait de l'implication des municipalités qui pourraient être intéressées ou interpellées par le fait qu'une entreprise choisisse de se soumettre au programme de remboursement volontaire. Comment on arrive à... Comment éviter, dans le cadre d'un règlement... Parce que, vous savez, les entreprises nous ont dit haut et fort que l'objectif de se prévaloir du programme de remboursement volontaire, pour elles, c'était d'obtenir des quittances, la plupart, soit des quittances totales. Donc, elles ne veulent pas éventuellement être poursuivies après la période de suspension des procédures, elles ne voudraient pas être poursuivies par des tiers ou par des organismes publics, et donc elles vont rechercher un programme global, c'est-à-dire elles vont mettre cartes sur table. Évidemment, de notre côté, il faudra aussi obtenir l'information de la part des différents organismes publics, de la part des municipalités, mais, une fois qu'on aura déterminé un certain nombre de contrats, une période visée, un montant qui apparaît raisonnable comme règlement complet, total, final, comment on pourrait empêcher qu'une municipalité fasse obstacle? Parce que, si on implique tous les intervenants, peu importe l'étendue ou la valeur du contrat... Parce qu'on se disait tout à l'heure : Un petit contrat pour Montréal n'est pas nécessairement un petit contrat en région, et ça, on le comprend. Donc, peu importe la valeur matérielle du contrat, comment empêcher, à ce moment-là, si tout le monde a droit au chapitre, qu'une municipalité, pour des raisons x ou y, s'objecte au règlement et fasse échec à cette démarche-là?

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Moi, au risque... je ne sais pas si l'UMQ va vouloir me contredire, mais, pour moi, l'important, c'est qu'on soit à la table, c'est qu'on soit impliqués à tous les moments. Est-ce que, dans certains cas, le gouvernement pourrait se substituer? Étant donné la complexité de ce qu'on vit là, moi, je ne suis pas sûr que je me chicanerais pour que systématiquement partout tout le temps on soit là. À un moment donné, il y a peut-être des moments où le gouvernement va dire : Bon, bien on y va. Mais qu'on ne soit jamais là, ça, c'est là où... ou qu'on ne soit pas là du tout... Mais vous avez raison, il y a certainement des cas, là, où ça pourrait poser problème, mais il faut au moins que la ville ait l'occasion de l'exprimer, il faut au moins que la municipalité puisse dire : Bien, moi, voici ce que j'en pense.

Mme Vallée : Parce que c'est certain que, par exemple, l'article 20 prévoit que l'organisme public est tenu de collaborer avec le ministre dans le cadre de l'application de la loi, donc non seulement dans le cadre de poursuites judiciaires, mais aussi dans le cadre du programme de remboursement volontaire. C'est certain que, dans ce contexte-là, il est possible qu'une firme XYZ qui fait affaire un peu partout sur le territoire souhaite effacer l'ardoise, se dirige vers le bureau, et là fasse état d'un certain nombre de contrats. Donc, il est fort probable que la personne désignée par le ministre ou par la ministre pour administrer le programme se tourne vers les municipalités et leur demande : Bon, bien voici, nous avons l'entreprise XYZ. Pouvez-vous nous fournir l'information que vous avez et qui est en lien avec les dossiers? Donc, il y aura cette collaboration-là qui sera de toute façon nécessaire. Je vois difficilement comment on pourrait penser avoir un programme de remboursement volontaire efficace sans la collaboration des municipalités.

Maintenant, ce que je comprends de votre intervention, c'est que vous souhaitez que, dans le cadre de l'appréciation d'un règlement, les municipalités soient consultées et puissent faire valoir des observations.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Oui. Et...

Mme Vallée : ...sans nécessairement avoir un droit de veto.

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, pas dans tous les cas. Tu sais, le maire de Montréal disait : Ou c'est la métropole ou ce ne l'est pas; moi, je vous dirais : On est un gouvernement de proximité ou on ne l'est pas. Quand on travaille avec un gouvernement partenaire, il doit avoir son mot à dire, on doit être capable de parler des choses qui ont affecté notre propre monde, là, puis qui relèvent de notre juridiction puis de nos responsabilités, de notre légitimité politique, je dirais.

De là à, dans tous les cas, systématiquement nous donner un droit de veto, moi, c'est là où je suis parlable, parce que sinon il y a des dossiers qui ne pourraient ne pas avancer, étant donné la complexité de l'ensemble de la chose, là, et de la diversité du monde municipal.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste un peu moins de deux minutes, Mme la ministre.

Mme Vallée : Bon, il a été question beaucoup de transparence, il a été question de... Dans le cadre du programme de remboursement volontaire, beaucoup d'entreprises ou de représentants d'entreprise étaient préoccupés de la nature de l'information qui pourrait être divulguée à la suite du recours au programme de remboursement volontaire. Qu'est-ce que vous pensez? Comment voyez-vous cette préoccupation de la part des entreprises? Je comprends que l'objectif n'est pas de cacher sous la couverte, mais en même temps, pour certaines, la divulgation d'information... Moi, je le voyais comme étant un élément positif pour l'entreprise parce que je me disais : Bien, on divulgue que nous avons réglé les dossiers et maintenant on est prêts à un nouveau départ, à tourner la page puis à repartir en neuf avec des bases éthiques différentes et avec un esprit différent, mais, a contrario, on semble ne pas le voir de cette façon-là au niveau de certains regroupements. Comment vous le voyez, vous, le... Quel type d'information devrait être divulgué? Quel type d'information pourrait ne pas l'être?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En 30 secondes, s'il vous plaît.

• (11 heures) •

M. Pedneaud-Jobin (Maxime) : Bien, je dirais qu'ils font une erreur stratégique. Je vous dirais que les politiciens, par exemple, n'ont pas bonne presse. Des farces d'enveloppe brune, on en entend. La réponse à ça, pour moi, c'est la transparence totale. Il faut être plus catholique que le pape, il faut aller plus loin que ce que le bon sens, des fois, exigerait. Moi, je pense que, dans ce dossier-là, il faut faire ça. Des farces d'ingénieur, les ingénieurs doivent être tannés d'en entendre. Et ces firmes-là doivent, pour moi, mettre le plus de choses sur la table, puis il y a plus de risques à avoir moins de transparence que d'en avoir trop, dans ce cas-là, j'en suis profondément convaincu.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le maire et les personnes qui vous accompagnent. Merci de vous être déplacés pour faire ces représentations.

La commission va suspendre ses travaux le temps d'accueillir les prochains invités, le Directeur général des élections. Nous suspendons.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 4)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, la commission reprend ses travaux. Nous accueillons maintenant avec plaisir les représentants du Directeur général des élections. Je vais confesser immédiatement ma difficulté avec les titres, puisque c'est Me Lucie Fiset qui est la Directrice générale des élections... ou le Directeur général des élections si on ne féminise pas le titre. Donc, bonjour. Bienvenue. Et vous disposez de 10 minutes pour votre présentation, et en vous demandant, dans un premier temps, de présenter les personnes qui vous accompagnent. À vous la parole, Mme la directrice.

Directeur général des élections

Mme Fiset (Lucie) : Bien, merci beaucoup. Merci, M. le Président, Mme la ministre puis Mmes et MM. les députés. Alors, je tiens d'abord à vous remercier de nous avoir accueillis parmi vous, auprès de cette commission, suite à une demande en ce sens. Je suis accompagnée aujourd'hui par Me Benoît Coulombe, directeur des affaires juridiques par intérim, mon adjoint et directeur du financement des partis politiques, M. Denis Lafond, et également mon adjointe à titre de présidente de la Commission de la représentation électorale et secrétaire générale de l'institution, Mme Catherine Lagacé.

Je précise en débutant que mon intervention n'a pas pour objectif de discuter, je dirais, des dispositions du projet de loi n° 26, si ce n'est de celles qui concernent les modifications proposées... — vous me permettrez, je vais mettre mes petites béquilles, merci — de celles proposées relativement aux modifications à la Loi sur les contrats des organismes publics, particulièrement aux articles 26 à 29 du projet de loi. Donc, mon propos a davantage pour but d'éclairer la commission quant à l'application de ces dispositions au regard des lois électorales, qui, comme vous le savez, prévoient un cadre législatif distinct quant à l'interdiction de conclure un contrat public lors de la commission de certaines infractions énoncées aux lois électorales, donc la Loi électorale provinciale, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités et la Loi sur les élections scolaires.

Donc, en décembre 2010, la Loi anti-prête-noms en matière de contributions électorales a été adoptée. Cette loi s'inscrivait dans la foulée de l'adoption de différents projets de loi — il y en avait cinq en particulier dans le cadre de la réforme des lois électorales en matière de financement politique — visant à renforcer la confiance de la population envers notre système démocratique. Donc, les lois électorales ont été modifiées afin d'y ajouter des dispositions qui prévoyaient une interdiction de conclure un contrat public avec soit une personne physique ou une personne morale qui aurait été reconnue coupable d'une infraction pénale visant le versement de contributions politiques illégales en vertu des lois électorales. Au même moment, le législateur prévoyait dans ces lois que le Directeur général des élections devait tenir un registre des personnes non admissibles à l'obtention d'un contrat public en vertu de ces dispositions.

Maintenant, la Loi sur les contrats des organismes publics adoptée en 2006 a été modifiée, elle également, ultérieurement aux lois électorales, donc en 2011 et en 2012, afin d'y ajouter des dispositions qui encadraient l'octroi de certains contrats publics et qui énonçaient également des interdictions quant à la conclusion de contrats publics. Le chapitre VI du projet de loi n° 26 prévoit des modifications législatives à cette loi et vise principalement la suppression de l'interdiction automatique à contracter d'une entreprise qui aura été reconnue coupable de l'une des infractions mentionnées à l'annexe I de la loi. Aucune modification législative n'est prévue au regard des lois électorales dans le projet de loi n° 26. Vous comprendrez ainsi le pourquoi de notre intervention aujourd'hui, compte tenu que, pour nous, la cohérence législative se doit d'être privilégiée au bénéfice des différents administrés.

Donc, la Loi sur les contrats des organismes publics prévoit expressément, pour l'instant, deux registres, alors le Registre des entreprises non admissibles aux contrats publics et le registre des entreprises autorisées. Le Registre des entreprises non admissibles indique la liste des entreprises qui ont été déclarées coupables en vertu d'un jugement définitif d'une infraction énoncée à l'annexe I de cette loi. Les infractions proviennent de différentes lois mais non pas de celles des lois électorales puisque, comme je vous l'ai mentionné, nous avons un cadre législatif distinct qui concerne l'application des dispositions pénales des lois électorales. Le registre qui est tenu par le Directeur général des élections, soit le Registre des personnes non admissibles aux contrats publics, possède une vocation similaire au RENA, mais il est tout à fait distinct. Donc, on doit vérifier chacun des registres aux fins de déterminer si une entreprise a effectivement la capacité de conclure des contrats avec un organisme public.

• (11 h 10) •

Il importe de souligner que la Loi sur les contrats des organismes publics énonce des critères qui sont différents de ceux stipulés aux lois électorales, nous en convenons. Nous avons cru opportun de vous souligner les deux principaux, les autres étant d'une moindre importance. Donc, les deux principaux : d'une part, l'interdiction de conclure un contrat public prévue aux lois électorales vise toute personne physique ou personne morale ayant commis une infraction concernant le versement d'une contribution politique illégale; au niveau de la Loi sur les contrats des organismes publics, les contrevenants visés par l'interdiction de contrat public sont les personnes morales de droit privé, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite, les sociétés en participation et les personnes physiques mais uniquement lorsqu'elles exploitent une entreprise individuelle. Donc, on constate déjà qu'il y a une distinction quant à l'identification des contractants qui sont visés par chacune des lois.

Précisons toutefois que, lorsqu'un dirigeant qui est toujours à l'emploi d'un contractant a été déclaré coupable d'une infraction visée à l'annexe I de la Loi sur les contrats des organismes publics, ce contractant est présentement visé par une infraction de conclure un contrat public. Évidemment, on comprendra a contrario que, si un dirigeant, à titre d'exemple, ne serait plus à l'emploi d'un contractant, à ce moment-là, la Loi sur les contrats des organismes publics ne viserait pas une interdiction de conclure un contrat public, tandis que, pour les lois électorales, une personne physique serait inscrite sur le registre du Directeur général des élections et ne pourrait conclure en soi un contrat public.

D'autre part, nous constatons une distinction quant aux contrats visés par les interdictions : les lois électorales prévoient une interdiction pour tout contrat public, peu importe sa nature et peu importe son montant, alors que la Loi sur les contrats des organismes publics spécifie les types de contrat qui sont visés à son article 3.

Maintenant, le registre des entreprises autorisées prévoit qu'une entreprise qui désire conclure un contrat, avec un organisme public, d'une valeur égale ou supérieure, maintenant, à 5 millions de dollars doit détenir une autorisation de l'Autorité des marchés financiers et être inscrite sur de registre. Selon l'article 21.26 de cette même loi, cette autorisation ne peut être accordée notamment si l'entreprise a été déclarée coupable d'une infraction prévue à l'annexe I ou d'une infraction prévue aux lois électorales. Donc, le législateur a prévu spécifiquement dans cette loi que, lorsqu'un contractant est reconnu coupable en vertu soit d'une infraction à l'annexe I ou d'une infraction aux lois électorales, automatiquement il y a interdiction de conclure un contrat public. Mais nous constatons que, par le projet de loi n° 26, les modifications législatives proposées visent à accorder une plus grande latitude à l'Autorité des marchés financiers et a pour but principalement d'éliminer cette interdiction automatique et ainsi accorder, ce que nous comprenons, une prédominance au processus d'habilitation de l'Autorité des marchés financiers. Nous vous soumettons que l'objectif poursuivi par le législateur par ces dispositions pourrait être compromis si les lois électorales ne sont pas, elles aussi, modifiées selon ce que je proposerai un peu plus loin.

Nous notons à cet effet que l'Assemblée nationale s'est prononcée positivement sur l'opportunité d'éliminer le registre des entreprises non autorisées par le biais de l'article 9 de la Loi sur l'intégrité en matière de contrats publics qui a été adoptée en décembre 2012, et nous constatons également que le projet de loi n° 26 propose maintenant de modifier la Loi sur les contrats des organismes publics afin d'accorder le pouvoir à l'Autorité des marchés financiers de délivrer une autorisation ou de la maintenir malgré qu'une infraction ait déjà été commise, que l'entreprise soit inscrite au registre des entreprises non autorisées, malgré qu'une infraction soit commise en cours de processus ou que l'infraction soit commise après l'obtention de l'autorisation. Évidemment, l'entreprise devra répondre des critères d'intégrité qui sont énoncés à la loi et apporter, le cas échéant, les correctifs nécessaires pouvant être requis par l'Autorité des marchés financiers. L'orientation qui semble donc se dessiner par les propositions faites par le biais du projet de loi n° 26 serait de permettre à une firme de poursuivre ses activités auprès des organismes publics à la suite de l'obtention d'une autorisation par l'Autorité des marchés financiers malgré qu'elle puisse faire l'objet d'une déclaration de culpabilité pour une infraction visée à l'annexe I.

Donc, au Directeur général des élections, suite au dépôt de ce projet de loi, nous avons analysé l'ensemble des dispositions, et cette analyse, pour nous, a révélé une incohérence législative que nous nous devions de vous souligner. Nous avons notamment constaté que, l'obtention d'une autorisation par l'Autorité des marchés financiers et l'inscription au registre des entreprises autorisées d'une entreprise, un seul jugement de culpabilité suite à une poursuite entreprise par le Directeur général des élections ferait obstacle à l'inscription à ce registre et à la possibilité pour cette entreprise de poursuivre ses activités dans le cadre de contrats conclus avec des organismes publics. Donc, pour nous, compte tenu du processus d'habilitation de l'Autorité des marchés financiers qui prend une plus grande importance, compte tenu des pouvoirs qui sont accordés à l'Autorité des marchés financiers pour délivrer une autorisation, il nous apparaît opportun de proposer des modifications législatives afin que les contraventions qui sont visées aux lois électorales reçoivent le même traitement que celles qui sont visées à l'annexe I de la Loi sur les contrats des organismes publics.

Advenant le maintien des dispositions actuelles aux lois électorales suite à l'adoption des modifications législatives, nous ferions face à la situation suivante : seules, les infractions énoncées à la Loi électorale, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités ou à la Loi sur les élections scolaires constitueraient un obstacle absolu et incontournable à l'obtention d'une autorisation de l'Autorité des marchés financiers, sans oublier une interdiction totale de conclure tout contrat public, peu importe le montant, peu importe le type de contrat, et ce, pour une période de trois ans. Alors que le législateur a cru important de confier à un organisme particulier, soit l'AMF, le pouvoir d'évaluer l'intégrité — ce qui n'a pas été accordé au Directeur général des élections — le pouvoir également d'avoir les moyens pour faire les démarches nécessaires afin de s'assurer de l'intégrité d'une entreprise, et qu'il lui a confié également la responsabilité de voir à délivrer une autorisation aux seules entreprises qui rencontraient ses exigences, la discrétion du poursuivant public qu'est le Directeur général des élections mettrait en péril tout ce processus d'habilitation et affecterait, à notre avis, les pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers et en conséquence les objectifs recherchés par le projet de loi n° 26.

Nous notons également que, dans le cadre de notre réflexion, on ne peut écarter le fait que les emplois d'un nombre important de travailleurs québécois pourraient être mis en péril par les agissements d'une ou de quelques personnes qui oeuvrent au sein d'une entreprise, d'autant que l'Autorité des marchés financiers peut notamment exiger le départ de ces dirigeants afin de délivrer l'autorisation qui pourrait être requise auprès de l'autorité.

Donc, nous souscrivons entièrement à l'idée que la réhabilitation d'une entreprise est une orientation qui doit être privilégiée plutôt que celle de sanctionner des comportements antérieurs de certains dirigeants d'une firme. Les modifications législatives à la Loi sur les contrats des organismes publics apportées par le projet de loi n° 26 sont une démonstration de cette orientation.

Il ne fait cependant aucun doute pour nous que le maintien des dispositions actuelles des lois électorales ne permettrait pas, encore une fois, de l'atteindre. Donc, nos recommandations seraient d'apporter des modifications législatives autant à la Loi sur les contrats des organismes publics qu'aux lois électorales afin que les dispositions pénales soient visées par l'annexe I de cette loi et que le traitement qui puisse être accordé soit uniforme à celui qui existe présentement dans cette loi.

Je tiens à vous préciser, en terminant, que le comité consultatif a été informé des propositions que nous entendions vous faire aujourd'hui. Et je terminerai ma présentation en vous assurant, évidemment, notre collaboration et en vous remerciant, et je suis disponible pour répondre à toutes vos questions ou vos commentaires.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, Mme la directrice. Mme la ministre de la Justice, la parole est à vous pour ce premier bloc d'échange.

• (11 h 20) •

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, Mme Fiset, M. Coulombe, M. Lafond, merci, bienvenue. Bienvenue et surtout merci de contribuer à la réflexion, à notre réflexion dans le cadre du projet de loi n° 26.

Évidemment, je me souviens bien des débats, en 2010, lorsqu'avaient été adoptées les dispositions dont vous nous faites part aujourd'hui, et des enjeux. Alors, à l'époque, l'objectif visé, évidemment, c'était d'assurer que quelqu'un qui contrevenait à la Loi électorale était sanctionné lourdement, et l'objectif était vraiment de démontrer que les lois électorales étaient des lois que nous devions respecter et qu'il y avait des conséquences graves à ne pas le faire. Et ce que je comprends aujourd'hui, je comprends de votre mémoire, votre objectif, c'est... parce que depuis 2010 beaucoup d'eau a coulé sous les ponts et que d'autres lois ont été adoptées, l'objectif de votre intervention n'est pas de réduire l'importance et le... mais bien d'assurer une cohérence dans l'ensemble des lois qui régissent les entreprises, puis, bon, vous souhaitez éviter des dédoublements, évidemment.

Mais, en abolissant le registre, est-ce que vous croyez que le régime d'autorisation de l'AMF va quand même assurer et va quand même permettre d'atteindre les mêmes objectifs que ceux qui étaient prévus lorsque les lois électorales ont été modifiées? Est-ce que vous ne croyez pas qu'on va... Et c'est une question parce qu'il y a peut-être une perception que, de modifier et d'abolir le registre, on dilue la portée et on s'écarte des objectifs qui étaient visés auparavant.

Mme Fiset (Lucie) : Vous parlez du registre tenu pas le Directeur général des élections?

Mme Vallée : Oui.

Mme Fiset (Lucie) : D'accord. Pour moi, je répondrais par la négative, je ne crois pas, parce que notre objectif, justement, n'est pas de retrancher l'interdiction des contrats publics, là n'est pas notre point. Nous devons maintenir cette conséquence, je dirais, d'une déclaration de culpabilité, des dispositions pénales en matière de financement politique, donc, de contribution illégale versée. Nous devons maintenir cette conséquence légale automatique, je dirais, d'interdiction de contrat public.

Toutefois, compte tenu que le législateur, je dirais, dans sa grande sagesse, a cru opportun, en 2014, justement, de retrancher cette interdiction pour l'ensemble des contrats publics, outre ce qui concerne les lois électorales, on s'est posé la question du pourquoi. Et c'est pour ça qu'on parle de cohérence législative, parce que, pour nous, effectivement, la seule difficulté qu'on y voit, c'est que nous serions les seuls qui, une fois qu'il y aurait une déclaration de culpabilité, il y aurait une interdiction automatique. Nous serions les seuls. Donc, dans la grande sagesse du législateur, nous nous sommes dit : Bien, soit qu'il nous a oubliés, soit qu'il y a autre chose derrière cela.

Mais, pour nous, si on a prévu dans la Loi sur les contrats des organismes publics cette possibilité, justement, que, malgré des contraventions à des lois aussi importantes que le Code criminel, là, qui sont prévues dans l'annexe I, les conséquences devraient être les mêmes également pour les lois électorales, parce que les firmes qui sont visées, on le sait, comme vous le dites, il y a bien de l'eau qui a coulé en dessous des ponts, on le voit, ces firmes-là veulent faire en sorte que ce que nous avons vécu ne se reproduise plus. Donc, évidemment, nous pouvons agir pour un cinq ans, hein, la prescription est de cinq ans, nous pouvons agir pour des événements qui ont eu lieu également dans les années antérieures, et on se dit qu'en 2014, alors que le législateur veut permettre, à quelque part, à ces firmes de poursuivre leurs activités au Québec mais à certaines conditions, qu'on maintiendrait quand même une interdiction automatique pour des infractions prévues aux lois électorales, pour nous, il y a là une difficulté. Je ne crois pas que ça enlèverait du mordant à nos lois électorales, au contraire, parce que l'interdiction de contrat public demeurerait. Cependant, le traitement qui serait accordé serait le même que pour toute infraction aux lois du Québec.

Donc, ma réponse, ce serait... En tout cas, à mon avis, je ne crois pas, parce qu'au contraire les firmes veulent, veulent agir de sorte, justement... On le voit, ils adoptent des codes de conduite, ils adoptent des règlements internes, ils mettent fin aux emplois des dirigeants qui étaient impliqués à l'époque. Ils veulent, ils veulent pouvoir poursuivre leurs activités au Québec, ils veulent démontrer qu'ils sont capables de mettre en place des mesures qui leur permettraient de conclure des contrats publics en toute transparence. Donc, pour moi, cet objectif-là demeurerait. Et la conséquence de l'interdiction de contrat public doit être maintenue, évidemment, mais avoir un traitement similaire.

Mme Vallée : Donc, permettre, dans le fond, de considérer les changements organisationnels, les changements apportés au sein de l'entreprise qui pourraient avoir complètement évacué les éléments perturbateurs qui étaient à l'origine des infractions commises, donc considérer ce ménage-là fait à l'interne, considérer possiblement d'éventuels règlements de dossier au point de vue financier, et donc d'avoir cette considération qui est plus large et qui ne serait... et donc permettre aux entreprises de véritablement effacer l'ardoise et recommencer.

Mais, pour l'avenir... On comprend, actuellement, on regarde une dynamique qui a été mise en lumière lors des travaux de la commission Charbonneau, alors, bon, on a beaucoup d'acteurs qui ont pu être visés, qui ont pu faire l'objet d'une couverture médiatique quand même assez importante. Mais, pour l'avenir, comment assurer que le message aux entreprises sera aussi fort? Parce que, là, actuellement, le message est très clair : il n'y en a pas, de contrat public, pour une période de trois ans. Mais, dans cinq ans, dans 10 ans, est-ce que le message sera tout aussi porteur si on va de l'avant avec les recommandations que vous nous formulez?

Mme Fiset (Lucie) : Bien, encore une fois, je reviendrais avec mon propos antérieur à l'effet de dire : Pourquoi est-ce que le législateur prévoirait un encadrement distinct pour les lois électorales versus toutes les autres lois, qui, selon moi — ce sont les lois, les dispositions pénales applicables dans la province de Québec — ont une importance similaire?

Donc, n'oublions pas que maintenant, également, le législateur a ajouté à cette interdiction, je dirais, mais a ajouté par sa réforme en matière de financement des partis politiques en 2010, vous l'avez bien dit, avec fermeté, a ajouté d'autres éléments qui permettent d'avoir cet effet dissuasif, je dirais, vis-à-vis les firmes pour qu'on ne revive plus ce que nous avons vécu. Donc, tant les dispositions pénales que l'ajout, effectivement, d'une autre conséquence légale, les manoeuvres électorales frauduleuses, ont été ajoutés. Nous avons obtenu des pouvoirs supplémentaires qui nous permettent davantage de détecter, d'être davantage actifs dans ce domaine-là. Donc, pour moi, l'aspect dissuasif serait le même, même si on imposerait, finalement, un encadrement similaire quant à l'octroi des contrats publics, que ce soit une infraction à une disposition en matière électorale, ou domaine criminel, ou d'autres domaines prévus à l'annexe I.

Mme Vallée : Donc, dans le fond, de vos propos je comprends que, si votre registre n'est pas aboli, on aurait une réhabilitation à deux vitesses, si je comprends bien, on aurait une réhabilitation pour tous les autres domaines mais qui n'aurait pas plein effet, puisque votre registre demeure. Et, malgré tous les efforts consentis, il n'en demeure pas moins que les entreprises ne peuvent tout simplement pas contracter avec les organismes publics, et donc...

Mme Fiset (Lucie) : Exactement. Une impossibilité.

Mme Vallée : Et malgré toute la bonne volonté. Puis on comprend, là, quand même, l'évaluation qui est faite par l'AMF est quand même une évaluation rigoureuse et soumise à certains critères, mais, peu importe ce qu'on pourrait faire, notamment avec notre programme de remboursement volontaire, ça demeurerait un élément qui pourrait peut-être être un obstacle à la participation d'une entreprise au programme de remboursement volontaire.

Mme Fiset (Lucie) : C'est possible, parce que, tel que je vous l'ai mentionné, on a donné... on a accordé à l'AMF tous les pouvoirs nécessaires, justement, pour leur permettre d'établir, d'exiger auprès des firmes certaines actions, ce que nous n'avons pas. Les lois électorales, il n'y a aucun pouvoir qui est accordé au Directeur général des élections. C'est une conséquence légale, tout simplement, comme la manoeuvre électorale frauduleuse, c'est automatique comme la manoeuvre électorale frauduleuse. Dès le moment où une personne est reconnue coupable des infractions que le législateur a prévues sous cette rubrique, automatiquement la personne se voit visée par une manoeuvre électorale frauduleuse, donc ne peut se présenter pour une période de cinq ans, ne peut voter. Donc, l'interdiction de contrat public, c'est la même chose, il n'y a aucun pouvoir qui est dévolu au Directeur général des élections.

Donc, pour moi, si dans sa grande sagesse, encore une fois, il a prévu que l'Autorité des marchés financiers était l'organisme compétent pour déterminer si une autorisation devait être délivrée et voir, justement, quelles sont les exigences de l'autorité, quelles sont les contraintes que la firme devra respecter en cette matière, pour moi, il va de soi que la cohérence exige que les dispositions des lois électorales puissent subir le même sort.

• (11 h 30) •

Mme Vallée : La cohérence et, je vous dirais... C'est parce qu'on se posait des questions, hier, à savoir c'est beau, avoir une loi, mais encore faut-il que notre loi et notamment le programme de remboursement volontaire puissent aller chercher une certaine adhésion, parce qu'on peut mettre en place un beau programme, mais encore faut-il qu'il soit intéressant pour les entreprises. Alors, si je vous comprends bien, ça pourrait permettre... cette modification législative là pourrait enlever un obstacle potentiel et paver la voie pour une plus grande adhésion des entreprises, parce que, d'une façon ou d'une autre, la participation, on l'a dit et on l'a redit, on ne peut s'acheter une réhabilitation via le programme de remboursement volontaire, mais par contre le programme de remboursement volontaire, et la participation au programme, et le remboursement des sommes aux contribuables est un élément qui pourra être considéré, parmi bien d'autres, parce qu'évidemment le fait d'avoir fait le ménage, comme on mentionnait tout à l'heure, est aussi un élément important, mais pourra être considéré, et ce, sans avoir l'enclume du registre, de votre registre, finalement, qui plane.

Mme Fiset (Lucie) : Exactement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète ce bloc d'échange. Je me tourne vers le député de Lac-Saint-Jean. À vous la parole.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Nous avons des échanges fort intéressants, peut-être qu'on peut poursuivre dans la même voie. J'essaie de comprendre les pouvoirs que vous avez présentement. Ce que je comprends, c'est que vous autres, vous appliquez la loi, il n'y a pas de dialogue comme tel avec les entreprises pour les mesures qu'elles pourraient avoir mises en place pour corriger la situation. C'est ça?

Mme Fiset (Lucie) : Exactement. Quand on dit : Il n'y a pas de dialogue avec les entreprises, je vous dirais que, les entreprises, ils sont inquiets, justement, lorsque le DGE entre chez eux, frappe à la porte. Ils sont très inquiets compte tenu de l'Autorité des marchés financiers, du fait que les entreprises tentent d'avoir des autorisations, justement, pour pouvoir conclure des contrats publics.

Donc, pour nous, comme je le répète, c'est une conséquence automatique, c'est une conséquence législative, donc nous ne pouvons pas exiger d'une firme, d'une entreprise d'agir de telle, ou telle, ou telle façon pour éviter qu'une infraction pénale ou qu'un constat d'infraction, donc, soit porté contre cette personne-là. Dès le moment... Nous, on fait des enquêtes, tout simplement, on constate est-ce qu'il y a infraction à la loi ou pas. C'est sûr que le DGE a une discrétion de poursuivre en public, lorsqu'il décide d'émettre ou non des constats d'infraction, mais, dès le moment où nous avons la commission d'une infraction claire, avec une preuve à l'appui, il y a possibilité d'émettre un constat d'infraction. Et, une fois que le constat est émis, qu'il y a un jugement de déclaration de culpabilité, c'est automatique, on n'a pas de discrétion quant à l'application d'une interdiction de contrat public.

M. Cloutier : Mais, juste pour que je comprenne bien, là, je n'ai pas plongé là-dedans depuis un bout, mais la contribution, c'est une contribution individuelle, ce n'est pas une contribution de l'entreprise à des partis politiques. L'application de la Loi électorale, c'est donc un individu qui est condamné.

Dois-je comprendre que c'est à la fois l'individu et l'entreprise? C'est dans un contexte de prête-noms, probablement, de...

Mme Fiset (Lucie) : Oui, exactement, il y a possibilité... Ce ne sont pas que les donateurs qui sont visés par des contraventions aux lois, il y a également les personnes qui procèdent au remboursement. Donc, vous l'avez bien ciblé, c'est dans le cadre des dossiers de prête-noms particulièrement où des entrepreneurs, des firmes, des employeurs ont procédé au remboursement de leurs employés qui, eux-mêmes, avaient versé des contributions politiques à des entités dûment autorisées. Donc, on peut poursuivre le donateur, on peut poursuivre le dirigeant qui a procédé de facto au remboursement et on peut également poursuivre la firme qui aura... dont les sommes, les fonds auront été utilisés pour rembourser le donateur.

M. Cloutier : Donc, au moment où on se parle, il y a des firmes, entre autres, d'ingénierie au Québec qui se sont vu retirer leur possibilité d'avoir des contrats publics. C'est ça?

Mme Fiset (Lucie) : Présentement, il y a quelques entreprises qui sont poursuivies par le Directeur général des élections. Il n'y a pas encore de jugement, n'oublions pas qu'il faut qu'il y ait un jugement de culpabilité qui soit rendu. Il y a plusieurs dirigeants de firme qui ont été poursuivis par le Directeur général des élections, mais, pour l'instant, il n'y a pas de firmes de génie-conseil — c'est ce que vous me demandez, là — qui sont présentement inscrites sur notre registre.

M. Cloutier : Pourquoi? On fait la distinction entre les dirigeants et la firme, c'est ça?

Mme Fiset (Lucie) : Oui, parce que, tel que je vous l'ai mentionné, on peut poursuivre une personne physique ou une personne morale. Alors, dépendant... Présentement, plusieurs dirigeants sont poursuivis par le Directeur général des élections, certaines entreprises le sont également, mais nous n'avons pas de jugement de culpabilité d'obtenu.

M. Cloutier : Au moment où on se parle, il n'y a aucune entreprise québécoise qui est sur votre registre?

Mme Fiset (Lucie) : Il y a certaines personnes morales qui sont sur notre registre, nous en avons six, présentement, mais qui ne sont pas des firmes de génie-conseil. C'était votre question.

M. Cloutier : O.K., mais... Oui, en fait, c'était ma question initiale, effectivement, mais j'essaie de comprendre. Là, il y en a six sur votre registre. Donc, pour reprendre le questionnement de la ministre à l'effet de l'effet dissuasif du programme de remboursement, puisqu'il y a juste six entreprises qui se retrouvent sur le registre, ça ne me semble pas être... c'est donc peu d'entreprises qui se retrouvent prises, dans le fond, dans un registre alors qu'elles pourraient se retrouver absolues — je ne sais pas si on peut le dire comme ça — par l'AMF.

Mme Fiset (Lucie) : Bien, comme je vous ai mentionné, actuellement, parce qu'il n'y a pas encore de jugement de culpabilité d'obtenu, les gens ont plaidé non coupable, les firmes ont plaidé non coupable dans certains dossiers pour lesquels nous avons entrepris des procédures judiciaires... Et, dans d'autres, la possibilité demeure toujours, évidemment. Et, comme je vous ai mentionné, il y a d'autres cas où ce sont les dirigeants. Nous avons privilégié la poursuite pénale contre les dirigeants des entreprises qui ont oeuvré à mettre en place, justement, des stratagèmes de prête-noms, aux fins de sanctionner les véritables responsables et non pas, justement, de sanctionner une entreprise complète qui emploie plusieurs personnes qui, en définitive, sont victimes de ce qu'une, deux ou trois personnes, hauts dirigeants, ont pu faire. Donc, c'est des choix que nous avons faits présentement. Et, pour certains, il y a eu des plaidoyers de culpabilité, ils se retrouvent sur notre registre. Pour d'autres, on attend les jugements.

M. Cloutier : Mais, de ce que je comprends, puisque tout ça est relativement nouveau, la liste va s'allonger. Et on pourrait se retrouver dans un scénario où une entreprise importante pourrait se retrouver sur votre liste et qui pourrait aussi vouloir se prévaloir du programme qu'on est en train de mettre en place, et vous souhaiteriez, à ce moment-là, donner davantage de pouvoirs à l'AMF pour qu'ils puissent regarder l'ensemble du portrait, incluant le comportement eu égard à la Loi électorale. C'est bien ça?

Mme Fiset (Lucie) : Exactement. Je vais être claire, je le répète, je ne demande pas à ce qu'on retranche complètement l'interdiction de contrat public, au contraire. Les dispositions des lois électorales devraient être transférées, disons ça comme ça, être transférées à l'annexe I, finalement, de la Loi sur les contrats des organismes publics pour avoir un traitement similaire, et les entreprises qui sont inscrites sur notre registre, finalement, seraient inscrites également sur le registre de l'Autorité des marchés financiers.

Donc, il n'y aurait que les personnes physiques, en définitive, qui sont présentement sur notre registre qui ne seraient pas transférables, disons ça comme ça, sur le registre de l'Autorité des marchés financiers, compte tenu que les personnes visées sont différentes, je vous l'ai mentionné tout à l'heure, les contractants identifiés à la Loi sur les contrats des organismes publics sont différents, puisque nous, aux lois électorales, les personnes physiques sont visées. Mais, encore une fois, je vous dirais, n'oublions pas que, lorsque nous avons eu les modifications pour les lois électorales, en 2010, le contexte de l'époque et l'orientation à l'époque, c'était vraiment de sanctionner, et c'étaient beaucoup de révélations, d'allégations, utilisation de prête-noms, financement par des personnes morales, on se doit d'agir, d'agir avec fermeté. Donc, à l'époque, en 2010, le législateur a cru opportun, justement, de prévoir ce canevas, je dirais, mais, dès 2011‑2012, il a modifié une loi qui vise spécifiquement l'octroi des contrats publics, est venu prévoir des interdictions et est venu encadrer ces interdictions en excluant les personnes physiques. Et on peut le comprendre parce que rares sont les personnes physiques, en soi, qui concluent des contrats publics avec un organisme public.

M. Cloutier : Je comprends donc, à ce moment-là, que ce serait la même chose pour le DGE. Vous souhaitez que le registre pour les personnes physiques, lui, reste actif, mais que, pour le registre des personnes morales, ce soit transféré à l'AMF. C'est ça?

Mme Fiset (Lucie) : Non. Moi, je vous dirais que, par cohérence législative, si on fait effectivement la modification législative tel que proposé, c'est donc dire que les personnes physiques ne seraient pas visées par une interdiction de contrat public, ce seraient les mêmes contractants qui sont identifiés dans la Loi sur les contrats des organismes publics qui seraient visés.

M. Cloutier : Mais, au moment où on se parle, les personnes physiques sont aussi exclues de la participation à l'octroi de contrats publics. C'est-u ça?

Mme Fiset (Lucie) : Présentement, oui.

M. Cloutier : Oui? Puis ça, c'est une sanction à la Loi électorale.

Mme Fiset (Lucie) : Loi électorale exclusivement, effectivement. Mais je vous dirais encore là que le législateur, dans sa grande sagesse, s'il avait voulu inclure les personnes physiques dans l'interdiction de contrat public, il l'aurait également prévu lors de ses modifications législatives, en 2011 et 2012, dans la Loi sur les contrats des organismes publics. Donc, il y avait une motivation derrière le fait de ne pas prévoir les personnes physiques au sein de cette loi.

M. Cloutier : Mais, dans le fond, ce que vous dites, c'est... vous vous questionnez de comment ça se fait que, pour la Loi électorale, on ait maintenu cette interdiction-là pour les personnes physiques.

• (11 h 40) •

Mme Fiset (Lucie) : Je ne me questionne pas. Je sais, à l'époque, en 2010, quelle était l'intention du législateur. Le législateur...

M. Cloutier : Mais les modifications se sont faites de façon subséquente.

Mme Fiset (Lucie) : À la Loi sur les contrats des organismes publics. Et évidemment nous n'avons pas participé aux modifications législatives à cette loi, mais, compte tenu qu'il s'agit d'une loi qui traite spécifiquement de l'octroi des contrats publics, et que le législateur a décidé d'exclure les personnes physiques, nous supposons justement que c'est parce que les personnes physiques n'étaient pas intéressantes, à exclure de cette loi.

M. Cloutier : Très bien. Je vous remercie pour les précisions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour l'opposition officielle? Merci. Mme la députée de Montarville, à vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci beaucoup, M. le Président. Madame messieurs, merci. Merci, mesdames.

C'est complexe, je vais être bien honnête avec vous, là, c'est complexe, mais, à la lumière de ce que vous nous dites... Vous nous dites, bon : Avec le p.l. n° 26, vous créez des incohérences législatives. Vous arrivez à la page 10 et vous nous dites : Voici une liste de modifications qu'il faudrait apporter si nous ne voulons pas être incohérents avec nous-mêmes, la problématique remonte peut-être à quelques années antérieures avec la liste et l'annexe I. Je vous écoute parler, vous semblez être en faveur du maintien du refus automatique, d'une certaine façon. Alors, ma question va porter dans cet angle-là : Est-ce que le refus automatique... est-ce qu'il devrait être maintenu pour toute infraction pénale, sauf celles pouvant spécifiquement faire l'objet d'un recours en vertu du p.l. n° 26? On veut justement que les entreprises puissent continuer puis rembourser.

Mme Fiset (Lucie) : Je vous dirais que je ne suis pas en accord avec le refus automatique, au contraire, je suis en accord avec la réhabilitation. Donc, pour moi, effectivement, qu'on puisse permettre à... une entreprise qui a vécu les années que nous connaissons et pour laquelle certains dirigeants ont agi contrairement notamment aux lois électorales mais auraient pu agir également contre d'autres lois ne devrait pas stigmatiser, finalement, cette firme pour l'ensemble des années ultérieures. Et, le législateur ayant adopté... pas adopté, mais ayant dans l'idée d'adopter des dispositions, justement, pour permettre cette réhabilitation, ce que je souhaite, c'est que cette réhabilitation-là soit également possible s'il y a une infraction qui est commise en vertu de la Loi électorale.

Mme Roy (Montarville) : Bien, voilà. En vertu de la Loi électorale, vous auriez aimé maintenir, justement, cette interdiction.

Mme Fiset (Lucie) : Non, qu'il y ait réhabilitation, qu'il y ait une possibilité de réhabilitation. Donc, si on veut qu'il y ait une possibilité de réhabilitation, il ne faut pas qu'il y ait une interdiction automatique. Parce que l'interdiction automatique, c'est une conséquence, tout simplement, nous n'avons aucune discrétion.

Mme Roy (Montarville) : Je vous remercie beaucoup.

Mme Fiset (Lucie) : Ça me fait plaisir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour la deuxième opposition également? Du côté du gouvernement, y a-t-il d'autres questions? Mme la ministre de la Justice.

Mme Vallée : Bien, juste une petite question. Suite à l'adoption de la... ou dans le cadre des travaux de la loi n° 1, est-ce que vous êtes intervenus? Est-ce que vous aviez demandé... Voyant un peu comment les choses se dessinaient, est-ce que vous êtes intervenus pour, justement, souligner cette incohérence-là, là, ce manque de cohésion entre les différentes dispositions?

Mme Fiset (Lucie) : Alors, je me suis référée à mon légiste qui m'a dit que non, nous ne sommes pas intervenus dans le cadre de l'adoption du projet de loi n° 1, considérant que l'adoption des dispositions concernant les lois électorales était très récente, l'entrée en vigueur. Donc, probablement qu'à cette époque... je n'étais pas Directrice générale des élections, mais à cette époque il n'y avait pas intérêt, là, nous n'avions pas assez de matière pour pouvoir valablement, je dirais, nous prononcer sur les modifications proposées par le projet de loi n° 1.

Mme Vallée : Et j'essaie de comprendre. Là, comme c'est là, ce que vous souhaitez touche les personnes morales, vous ne souhaitez pas... vous ne parlez pas des personnes physiques qui sont en affaires. Parce que les personnes physiques en affaires doivent aussi obtenir leur autorisation de l'AMF.

Mme Fiset (Lucie) : Non.

Mme Vallée : Non?

Mme Fiset (Lucie) : Non.

Mme Vallée : Mais les personnes physiques en affaires, oui.

Mme Fiset (Lucie) : Les personnes physiques qui exploitent une entreprise individuelle sont les seules visées.

Mme Vallée : Alors donc, la personne physique, donc, théoriquement, si vous aviez une personne physique sur votre liste et que cette personne exploite une entreprise, elle est aussi visée. Donc, on ne parle pas seulement que des personnes morales, là, ici.

Mme Fiset (Lucie) : Exactement. La seule particularité, pour la Loi sur les contrats des organismes publics, qui vise les personnes physiques, c'est celle qu'on vient de mentionner. Mais, de notre côté, c'est toute personne physique, peu importe.

Mme Vallée : En effet, mais ces personnes physiques là... Parce que je comprends que, pour ce qui est des personnes morales, je comprends qu'abolir votre registre et tout diriger vers l'AMF, ça permet à l'AMF d'exiger que ceux et celles qui ont posé des gestes illégaux, des gestes de nature pénale, ne fassent plus partie de l'organisation, ne fassent plus partie de l'entreprise, mais on fait quoi avec la personne morale... La personne physique en affaires, ça, ça demeure. Celle qui a commis une entorse à la Loi électorale, si elle est en affaires, elle demeure la même personne, là, il n'y a pas de possibilité pour la personne physique en affaires de changer qui elle est ou qui elle...

Mme Fiset (Lucie) : Pour nous, dans le fond, ce que je demanderais, c'est que l'ensemble des contractants visés par la Loi sur les contrats des organismes publics soient les mêmes qui soient visés par les dispositions des lois électorales. Donc, si on vient inclure les dispositions des lois électorales à l'annexe I de la Loi sur les contrats des organismes publics, évidemment, les cocontractants... les contractants, excusez, visés par cette loi-là seront les mêmes, peu importe le type d'infraction qui serait commise. Donc, la personne physique exploitant une entreprise individuelle serait effectivement visée par la Loi sur les contrats des organismes publics, ce qui éliminerait cependant toute personne physique qui n'exploite pas une entreprise individuelle. Donc, toute personne physique que nous avons poursuivie pour une contribution illégalement versée, contribution politique illégalement versée qui se retrouve présentement sur notre registre ne serait pas visée d'aucune façon par la Loi sur les contrats des organismes publics.

Mais là la question se pose, bon : Est-ce qu'il y a un malaise à cela? Moi, ce que je vous réponds, c'est que, dans le cadre de la loi spécifique qui traite, justement, de l'encadrement de l'octroi des contrats publics, le législateur n'a pas cru opportun de prévoir, justement, la personne physique pure, je dirais. Donc, pour moi, le traitement devrait être similaire, on devrait exclure également une personne physique qui aurait versé une contribution illégale de l'encadrement de l'interdiction des contrats publics.

Mme Vallée : Merci.

Mme Fiset (Lucie) : Ça me fait plaisir.

Mme Vallée : M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, pardon.

Mme Vallée : Ça va pour moi, ça complète. Je ne sais pas si mes collègues ont des questions.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça va? Alors, les membres, on a complété, du côté des membres? Parce qu'il nous reste un peu de temps. Alors, parfait. Je vous remercie, Mme la Directrice générale des élections. Merci à votre équipe pour cette présentation.

Nous allons suspendre le temps de permettre à nos prochains invités, les représentants de l'Union des municipalités du Québec, de s'avancer. Nous suspendons.

(Suspension de la séance à 11 h 48)

(Reprise à 11  h 50)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, la commission reprend ses travaux. Et nous accueillons avec plaisir les représentantes de l'Union des municipalités du Québec. Mme la mairesse, bonjour. Vous disposez d'une période de 10 minutes pour faire votre présentation, et je vous demanderais, pour le bénéfice des parlementaires et ceux qui nous suivent, suivent nos travaux, de présenter la personne qui vous accompagne. À vous la parole.

Union des municipalités du Québec (UMQ)

Mme Roy (Suzanne) : Alors, merci beaucoup. Mme la ministre, M. le président de la commission, Mmes, MM. les députés. À titre de présidente de l'Union des municipalités du Québec, je remercie la commission de nous entendre aujourd'hui sur le projet de loi n° 26. Alors, tout d'abord, la personne qui m'accompagne est Me Diane Simard, directrice des affaires juridiques à l'Union des municipalités du Québec et secrétaire de la corporation.

Alors, avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de vous rappeler que l'Union des municipalités représente depuis plus de 90 ans les municipalités de toutes tailles dans toutes les régions du Québec. Sa mission est d'exercer à l'échelle nationale un leadership pour les gouvernements de proximité efficaces, autonomes et valoriser le rôle fondamental des élus municipaux. Les membres de l'Union des municipalités représentent 80 % de la population du Québec et du territoire du Québec.

Depuis plusieurs années, la confiance du public à l'endroit des institutions démocratiques du Québec est au coeur des réflexions de l'Union des municipalités du Québec. En mars 2011, nous avons mis de l'avant une initiative sans précédent pour le milieu municipal en lançant une vaste réflexion sur l'avenir des municipalités et en y associant 4 200 citoyens, les élus municipaux de toutes les régions du Québec, de toutes les grandeurs de municipalité, des universitaires, des experts, un comité de sages ainsi que plusieurs organisations socioéconomiques. Les résultats de ces consultations se sont traduits, en novembre 2012, par la publication du livre blanc municipal, qui présente notamment des propositions pour renforcer la démocratie municipale et rapprocher la décision du citoyen par une charte des municipalités.

L'UMQ juge primordial de préserver la confiance du public envers les institutions et appuie les actions qui visent cet objectif, et ce projet de loi, le projet de loi n° 26, pour nous, est justement une de ces actions qui permettra de préserver la confiance du public envers les institutions.

L'UMQ réclame depuis plusieurs années des outils pour récupérer les sommes qui ont été injustement payées par des municipalités suite à des fraudes ou de la collusion, c'est d'ailleurs une des recommandations formulées par l'UMQ dans son mémoire déposé à la commission Charbonneau en octobre dernier. Le projet de loi n° 26 répond à cette demande. Dans ce contexte, l'UMQ salue la présentation du projet de loi qui donnera au gouvernement et aux municipalités des moyens exceptionnels pour faciliter le recouvrement des sommes payées injustement à la suite de fraudes ou de manoeuvres dolosives dans le processus d'octroi de contrats publics. C'est une excellente nouvelle pour l'Union des municipalités mais surtout, surtout pour les citoyens, les citoyennes de toutes nos municipalités.

De plus, par la mise en place d'un programme de remboursement volontaire, les municipalités pourront récupérer des sommes importantes sans qu'elles aient besoin d'entreprendre de longues et coûteuses procédures, une bonne nouvelle aussi pour les citoyens. L'UMQ se réjouit également que le projet de loi prévoie une présomption de dommage pour les entreprises fautives.

Nous croyons qu'il est très intéressant que le projet de loi propose que dorénavant les cas de condamnation d'une entreprise soient des éléments considérés à l'Autorité des marchés financiers dans l'éventualité de son intégrité au lieu d'être un automatisme. En effet, nous considérons que les entreprises qui satisferont aux exigences d'intégrité au moment d'une nouvelle demande d'autorisation ne doivent pas systématiquement être punies pour des actes fautifs antérieurs, d'autant plus que, si elles sont en affaires, elles pourront plus facilement payer les sommes dues, le cas échéant.

Une autre considération que j'aimerais mettre en lumière aujourd'hui est celle du partenariat. Je vous ai parlé en début du livre blanc, et le livre blanc base justement l'importance des relations avec le gouvernement du Québec et les municipalités sur une relation de partenariat, et nous souhaitons que, dans la mise en oeuvre du projet de loi, nous appliquions aussi le partenariat. Nous considérons que les municipalités, à titre de gouvernement de proximité, doivent être considérées comme des partenaires privilégiés. D'ailleurs, le programme de remboursement volontaire sera plus efficace si les municipalités sont davantage associées aussi dans les processus de négociation.

De façon plus concrète, l'article 5 du projet de loi laisse à la totale discrétion du ministre la part d'implication qu'il accordera aux municipalités concernées dans le processus de remboursement volontaire, même si c'est de leur argent dont il est question. Pourtant, l'implication des municipalités concernées est cruciale pour maximiser les résultats. Ce sont elles, les municipalités, qui possèdent l'information et qui permettront à l'administrateur du programme d'être plus efficace dans ses négociations. Par conséquent, nous croyons que les municipalités doivent être étroitement associées au processus de l'administration du programme.

Il est fréquent que... Il sera probablement fréquent qu'un entrepreneur doive des sommes à plusieurs municipalités. Si cet entrepreneur s'inscrit au programme de remboursement volontaire, la loi devrait prévoir des mécanismes d'approbation des offres et des règles de partage entre les municipalités. Ainsi, l'Union des municipalités du Québec demande que l'article 5 du projet de loi soit bonifié dans ce sens.

En ce qui a trait aux procédures judiciaires, l'UMQ souhaite recevoir la confirmation qu'à l'expiration du programme de remboursement les municipalités pourront elles-mêmes intenter une action contre toute entreprise ou personne physique qui a fraudé ou qui s'est livrée à une manoeuvre dolosive lors de l'octroi d'un contrat municipal, et ce, sans l'autorisation du ministre. Il s'avère important pour les municipalités de pouvoir ester en justice de façon indépendante et autonome du pouvoir du ministre lorsqu'elles souhaitent prendre action contre une entreprise dans le cadre du projet de loi n° 26.

D'autre part, l'article 14 indique que le tribunal qui accueille une action doit ajouter à la somme qu'il accorde en réparation d'un préjudice un montant forfaitaire égal à 20 % de cette somme à titre de frais engagés pour l'application de la loi. Dans le même ordre d'idées, l'UMQ souhaite s'assurer que cette somme revienne aussi à la municipalité qui prend action.

• (12 heures) •

De plus, nous sommes d'avis que la présomption de dommage fixée à 15 % du montant total du contrat visé devrait être augmentée à 20 % comme seuil minimum. Cette présomption de dommage est un incitatif pour l'entreprise à s'inscrire au programme de remboursement. À notre avis, plus la présomption de dommage sera élevée, plus l'incitatif sera efficace.

Le projet de loi prévoit que le gouvernement peut déterminer des règles de répartition de toute somme recouvrée entre le ministre et l'organisme public en tenant compte des pertes subies par ce dernier, et ce, tant dans le cadre du programme de remboursement que dans une procédure judiciaire. Nous considérons d'emblée que, lorsque la municipalité poursuit elle-même une entreprise, la totalité des sommes qu'elle récupérera devrait lui appartenir. Les règles de partage s'appliquent donc uniquement lorsque le ministre poursuit au nom d'une municipalité ou lorsqu'un entrepreneur participe au programme de remboursement pour des sommes dues à une ou des municipalités.

À ce sujet, l'UMQ rappelle que le partage des sommes récupérées doit être juste, doit être équitable pour les municipalités concernées. Pour ce faire, il s'avère primordial que le ministre détermine en collaboration avec le monde municipal le mécanisme approprié à cette fin, dans un esprit de partenariat entre gouvernements de proximité et le gouvernement du Québec, en accord avec les principes du livre blanc. Nous réitérons que les municipalités doivent être considérées comme des partenaires. En ce sens, l'article 19 devrait prévoir que le gouvernement consultera l'Union des municipalités du Québec et les municipalités pour déterminer les règles de répartition qui s'appliqueront.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...conclure rapidement, madame...

Mme Roy (Suzanne) : J'arrive à la conclusion. Alors, en conclusion, le projet de loi n° 26 répond aux principales préoccupations du monde municipal. Les neuf amendements proposés par l'Union des municipalités du Québec visent justement à apporter certaines précisions au niveau de certains flous juridiques et s'assurer le rôle que doivent jouer les municipalités. Avec les bonifications proposées par l'UMQ, nous sommes d'avis que le projet de loi n° 26 sera plus respectueux envers les municipalités qui ont des créances à faire valoir auprès des entreprises et rendra les mécanismes de récupération de ces sommes dues encore plus efficaces.

M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, voilà l'essentiel de notre réflexion sur ce projet de loi, et je vous remercie de votre attention.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie pour cette présentation. Je me tourne maintenant vers la ministre de la Justice pour un premier bloc d'échange. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Vallée : Mme Roy, Me Simard, merci beaucoup de votre participation. Je sais que vous étiez hier en Outaouais, donc vous avez une semaine chargée.

Écoutez, on a eu la chance d'échanger; la ville de Montréal était ici, la ville de Laval, la ville de Gatineau un peu plus tôt ce matin. Pour ce qui est de la présomption de dommage, vous semblez pas mal tous avoir un point commun, c'est-à-dire la demande pour hausser la présomption de dommage à un montant de 20 %. On entendait hier d'autres organismes qui considéraient déjà que le 15 % était substantiel, compte tenu que la loi prévoit aussi la rétroactivité des intérêts, prévoit également une somme additionnelle de 20 % des sommes totales pour venir un peu compenser pour les coûts engendrés par la prise des procédures, ce qui déroge un peu... ce qui déroge en fait pas mal du droit commun.

Donc, j'aimerais vous entendre sur les sommes de 20 % que vous réclamez. C'est-à-dire que, la présomption de dommage, la ville de Gatineau nous a expliqué, quant à elle, pourquoi, elle se base sur des études puis des cas, des données bien précises, la ville de Montréal aussi, mais, quant à vos autres membres — parce que, j'imagine, Gatineau et Montréal ont fait leurs représentations — est-ce que vos autres membres vous ont fait état également de situations similaires?

Mme Roy (Suzanne) : Oui, effectivement. Et ce qu'on constate, en tout cas, et on l'a vu même après qu'il y a eu tous les travaux : la différenciation dans les prix, on parle de différence qui tourne autour de 30 % dans certains cas.

Puis un autre élément aussi qui est important, on pense que le fait de le mettre à 20 % en partant va être un incitatif, pour les entreprises, pour participer volontairement, déjà à la base, à la négociation. Si on part à 15 % au niveau de la négociation, alors... Et, si on part à 20 %, on va être incité à dire : Ah! on va aller tout de suite vers un remboursement pour éviter d'aller automatiquement au 20 %. Alors, il nous semblait que le 15 %, là-dessus, n'était pas suffisant.

Et au niveau des dommages, bien sûr, vous parliez d'intérêts, et tout ça, mais je veux juste vous rappeler que, dans la grande majorité des cas, dans les grands travaux d'infrastructure dans les municipalités, on le fait et on est souvent, en grand pourcentage... on le fait par règlement d'emprunt. Alors, ces sommes-là que nous avons payées en trop, nous aussi, on paie de l'intérêt là-dessus depuis des années, de façon cumulative. Alors, ça aussi... Je comprends qu'il y avait d'autres arguments qui disaient... bon, ça s'ajoute à d'autres éléments, mais ces éléments-là, pour les citoyens et les citoyennes de nos municipalités, ils les ont absorbés, ils les absorbent encore et continuent de les payer, et souvent avec intérêts.

Donc, il nous semble que, cette présomption, en le mettant à 20 %... On est même convaincus que ce n'est pas ça, c'est plus que ça dans la réalité, mais ce serait au moins un incitatif à aller vers la formule volontaire dans un premier temps.

Mme Vallée : On a élargi, à l'intérieur du projet de loi, la portée de la loi à l'ensemble des contrats conclus avec des organismes publics. Donc, on ne se limite pas à l'industrie de la construction, on ratisse beaucoup plus large.

Est-ce qu'au sein de vos membres on vous a fait état de la nécessité, justement, d'ouvrir la portée de la loi pour couvrir d'autres domaines que le domaine de la construction?

Mme Roy (Suzanne) : Oui, et je pense que c'est important aussi pour les municipalités. Bien sûr, on parlait de construction parce que c'est une grande partie des investissements au niveau municipal, mais on peut penser à l'informatique, on peut penser à d'autres domaines où effectivement les municipalités ont été appelées à travailler avec des fournisseurs, où il a pu y avoir des processus de collusion. Alors, on pense qu'on ne doit pas exclure... il ne doit pas y avoir qu'une seule catégorie qui est redevable d'intervention quand il y a eu de la collusion, pour les municipalités. Alors, que ce soit dans un domaine ou dans un autre, effectivement, les municipalités souhaitent que ça reste élargi.

Mme Vallée : On entendait évidemment, et vous en faites état dans votre mémoire, la volonté d'être partie prenante non seulement aux poursuites judiciaires, mais également au programme de remboursement volontaire. La difficulté que ça pose, c'est que, dans certains cas, on a des entreprises qui étaient présentes sur l'ensemble du territoire et qui ont pu faire affaire avec bon nombre d'organismes publics, de municipalités, et d'inclure le droit de veto de tous et chacun pouvait être un peu complexe. La ville de Montréal nous disait : Nous, on s'inspire un peu de ce qui se fait à l'AMF, on pense qu'il y a un certain seuil de matérialité qui pourrait être mis en place, et donc, bon, pour la ville de Montréal, l'AMF va nous consulter à partir d'une somme de 100 000 $; pour les autres municipalités, à partir d'un montant équivalent à 5 % de la mise. Le maire de Gatineau nous disait : Le seuil n'est pas nécessairement l'élément important puisque, dans certaines petites municipalités, un contrat de 20 000 $ peut avoir une importance assez... sur un budget, peut avoir incidence budgétaire quand même assez importante.

Mais comment on peut arriver... Avez-vous des idées pour éviter de se retrouver dans une situation où on alourdit beaucoup un processus qui se veut plus souple, qui se veut facilitant? On veut l'éviter. On reconnaît que les municipalités, d'une façon ou d'une autre, seront appelées à collaborer puisque, pour l'administrateur du programme, lorsqu'on aura porté à son attention des contrats qui concernent des organismes publics ou des municipalités, il va d'une façon tout à fait naturelle entrer en communication avec ces organismes-là pour le partage d'information, pour assurer d'avoir tout ce qu'il faut, mais en même temps comment on peut s'assurer de venir rejoindre votre objectif, vos attentes sans pour autant alourdir indûment le processus?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, d'abord, concernant le seuil, effectivement, pour la ville de Montréal, un seuil de 100 000 $, pour certaines municipalités, c'est une grande partie de leur budget annuel, alors il faut, là-dessus, je pense, rester souple. Mais on est capables de travailler en amont, de s'entendre sur des critères de répartition — donc, effectivement, une entreprise pourrait avoir travaillé dans plusieurs municipalités au Québec, avec des grandeurs de contrats différentes d'une municipalité à l'autre — donc d'élaborer avec le ministère des critères pour qu'on puisse après répartir de façon équitable les sommes qui seront encourues. Il y a des modèles qu'on pourrait mettre en place préalablement pour ne pas refaire au cas à cas, et on vous offre toute notre collaboration pour travailler, justement, avec le ministère pour élaborer à la base les différents modèles qui pourraient être utilisés pour la répartition selon les différents cas qui pourraient se présenter.

Mme Vallée : Est-ce que les unions municipales... parce que je sais que ce n'est pas toutes les municipalités du Québec, toutes les municipalités qui sont membres de l'UMQ, mais est-ce que les unions municipales pourraient... Est-ce qu'il pourrait être envisageable qu'elles puissent être une espèce de courroie de transmission dans ce processus-là de programme de remboursement volontaire?

• (12 h 10) •

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait, tout à fait. Avec la Fédération québécoise des municipalités et l'Union des municipalités du Québec, je pense qu'en ayant particulièrement travaillé en amont sur les critères applicables, donc, nous pouvons agir à ce titre-là d'intermédiaire. Mais il faut avoir d'abord avoir travaillé ensemble en amont pour s'entendre sur la répartition.

Mme Vallée : Parce qu'une autre avenue qui pourrait être aussi envisagée serait de s'inspirer de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, qui prévoit que les ententes seront convenues à la majorité, en nombre et en valeur. Et donc c'est une avenue aussi qui pourrait peut-être... Je ne sais pas si ce type de processus là pourrait être acceptable pour éviter... En fait, l'objectif, c'est d'éviter que, pour des raisons complètement autres, on ait une municipalité qui fasse obstacle à un règlement qui pourrait s'avérer fort intéressant pour d'autres municipalités et fasse obstacle aussi à la réhabilitation éventuelle d'une entreprise, évidemment, si l'offre est jugée acceptable. Parce que c'est certain que l'administrateur du programme devra aussi s'enquérir... sera accompagné d'une équipe pour établir ce qui est un règlement équitable. Il n'est pas question... On l'a mentionné, on ne le dira pas assez, l'objectif du projet de loi, ce n'est pas d'aller chercher une réhabilitation à rabais, ce n'est pas de se magasiner une réhabilitation, là, on s'entend très bien. Mais en même temps il peut y avoir des éléments propres à la nature humaine, simplement, qui pourraient faire obstacle à un règlement, et ça, évidemment, on ne voudrait que ça survienne parce que, là, ça viendrait un peu à l'encontre de l'objectif du programme de remboursement volontaire, puis on est conscients aussi des coûts de la judiciarisation.

Mme Roy (Suzanne) : Exact. Bien, ça peut faire partie des discussions. On le citait dans notre mémoire, d'ailleurs, comme exemple pour voir un mode de répartition, sur lequel il faut envisager... Ce qui est important, c'est que les municipalités soient vraiment partie prenante, soient informées aussi, hein, pour ne pas arriver en bout de ligne, puis voici les 0,02 $ du sac desquels tu hérites, de ce remboursement volontaire, là. Alors, ça aussi, c'est important au niveau de l'information, de la communication avec les municipalités en amont, pendant les négociations et à la fin. Je ne sais pas, Me Simard...

Mme Simard (Diane) : Oui, merci. Bonjour. Bien, tout à fait, on partage cet objectif-là, en fait, qui n'est pas de bloquer les règlements hors cours dans le cadre du programme de remboursement. Et puis on sait très bien que, lorsqu'il y a plusieurs municipalités qui sont concernées par des contrats, la question va se poser, c'est pour ça qu'on n'est pas allés jusqu'à proposer un droit de veto à certaines municipalités. Puis, comme disait notre présidente, bien il y a tellement une diversité dans le monde municipal qu'un petit contrat, c'est quoi, puis un gros contrat, c'est quoi? Donc, ça dépend toujours du budget de la municipalité. C'est pour ça que le seuil, ce n'est pas quelque chose non plus qu'on a retenu comme étant possible et favorable à l'ensemble des municipalités.

Et, dans le mémoire qu'on a présenté, justement, on amenait comme piste de solution les mécanismes qui sont prévus à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. On n'a pas eu le temps suffisamment d'analyser en détail quels mécanismes pourraient être transférés, mais on pense qu'il y a là-dedans des choses... Lorsqu'il y a plusieurs créanciers, lors d'une faillite, il y a déjà des mécanismes, alors je pense qu'on pourrait, oui, s'en inspirer puis travailler ensemble avec vos légistes au ministère pour voir de quelle façon ça pourrait être transféré dans le cadre du projet de loi n° 26. Ça pourrait être très intéressant.

Mme Vallée : Dans le projet de loi, on ne voit nulle part, là, de disposition qui prévoit qu'une municipalité qui fait le choix de poursuivre devra partager le reliquat, là. Évidemment, la municipalité qui fait le choix d'entreprendre elle-même ses procédures judiciaires pour des contrats dont elle a assumé les coûts va récupérer les sommes, va assumer les frais et va récupérer les sommes. Par contre, évidemment, si nous devons... si le ministère de la Justice, la Procureur général doit entreprendre au nom d'une municipalité qui refuse d'entreprendre des poursuites, à ce moment-là, là, au niveau du partage, il y a des chances que l'objectif soit que les coûts de la procédure puissent être remboursés, là, évidemment. Parce que, dans certaines situations, il est possible qu'une municipalité ne souhaite pas aller de l'avant, n'ait pas les moyens, ne souhaite pas aller de l'avant pour... Et ça aussi, il faut éviter que, lorsqu'on a la preuve, lorsqu'on a l'information à l'effet qu'une entreprise a commis une manoeuvre dolosive, a commis une fraude, s'est livrée à de tels actes... bien, qu'on puisse aller récupérer les sommes versées en trop. Puis on peut comprendre, il peut y avoir toutes sortes de raisons qui vont faire en sorte qu'une municipalité, politiquement, décide de ne pas aller de l'avant ou se dise : Bien, je n'ai pas les moyens financiers pour assumer les poursuites, mais, à ce moment-là, il sera possible pour la ministre d'entreprendre les poursuites au nom de la municipalité, évidemment après avoir donné un préavis.

Pour vous, qu'est-ce qui pourrait être un préavis raisonnable? Parce qu'on est à l'intérieur d'une loi qui a une portée limitée dans le temps, et il faut permettre à tout le monde de pouvoir préparer le dossier, monter le dossier. Qu'est-ce qui pourrait être un délai de préavis raisonnable donné à la municipalité pour déterminer si, oui ou non, on va de l'avant?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Moi, je vous donne un préavis qu'on achève ce bloc, et donc il faudrait une réponse courte.

Mme Vallée : Est-ce qu'on peut prendre le temps sur le prochain échange? Je peux réduire...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, oui, oui, je vais faire ça. Mais si c'était possible de garder ça pour respecter le cadre qu'on s'est fixé. Merci.

Mme Vallée : Parfait, merci. Désolée.

Mme Roy (Suzanne) : On n'a pas consulté nos membres sur un préavis, mais, souvent, j'imagine que dans la plus grande... le plus souvent ça va être effectivement le manque de ressources financières pour poursuivre elles-mêmes ou donc pour prendre action elles-mêmes où les municipalités ne voudraient pas prendre action, parce qu'à partir du moment où elles peuvent récupérer de l'argent pour leurs citoyens je pense qu'il n'y a là que des avantages, donc. Mais, en termes de préavis, on n'a pas regardé avec nos membres quel serait le préavis. Mais, au-delà du préavis, je pense, ce qui est intéressant, c'est qu'il y ait une discussion avec les municipalités. Et, à partir du moment où la raison, c'est : On n'a pas les moyens, nous, de faire des démarches, là, la ministre va le faire pour nous, mais, s'il y a d'autres raisons, je pense qu'il doit y avoir une discussion avec la municipalité.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Et je me tourne maintenant vers le porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, le député de Lac-Saint-Jean, pour votre bloc d'intervention.

M. Cloutier : Merci, M. le Président. Alors, bonjour et bienvenue. Vous avez plusieurs modifications qui portent sur la collaboration, l'importance de travailler avec le gouvernement, et vous souhaitez que ça soit davantage présent dans le texte législatif pour vous assurer, dans le fond, qu'il y aura cette collaboration. Est-ce que, selon vous, ça doit se faire par amendement législatif? Puis vous souhaitez que cet encadrement-là soit davantage obligatoire, c'est bien ça?

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait, je pense, pour nous assurer, au niveau des municipalités, que les règles seront claires, qu'on y aura contribué, que la relation sera vraiment une relation de partenariat et que surtout, pour les citoyens de chacune de nos municipalités, il y aura vraiment une équité. C'est vraiment la question, oui, de partenariat mais aussi d'équité entre les différentes municipalités qui nous préoccupe particulièrement, parce qu'on est foncièrement convaincus qu'on va retrouver des entreprises qui auront agi de la même façon envers différentes municipalités. Donc, il faut s'assurer, à ce niveau-là, que les citoyens de chacune de ces municipalités-là puissent retrouver ce qu'ils paient probablement encore.

M. Cloutier : Je ne suis pas certain que je saisis bien l'angle de l'équité. Vous souhaitez quoi exactement?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, l'angle de l'équité quand je dis qu'on veut travailler ensemble avec le législateur pour mettre en amont des règles, parce que, souvent, dans plusieurs cas où il y aura des municipalités d'impliquées, plusieurs municipalités d'impliquées, on veut s'assurer que tout le monde puisse obtenir le maximum pour ses citoyens, donc, en définissant d'avance — on parlait tantôt de la loi sur les faillites où chacun des créanciers obtient sa juste part — en travaillant en amont à s'assurer que les critères soient corrects pour l'ensemble des municipalités, parce que ce projet de loi là, bien sûr, c'est très important pour toutes les villes, les grandes, bien sûr, mais aussi pour les moyennes puis les plus petites municipalités, parce que ça a aussi eu de l'impact sur leurs citoyens puis sur leur taxation.

M. Cloutier : Donc, l'angle de l'équité, c'est que vous avez peur que parfois il pourrait y avoir des règlements qui ne seraient pas à la hauteur pour des municipalités qui n'auraient pas eu la chance, dans le fond, d'exprimer leurs...

• (12 h 20) •

Mme Roy (Suzanne) : Non, je le prends dans l'autre angle, c'est-à-dire plus on va travailler ensemble à élaborer des critères à la base, plus on va s'assurer que tout le monde va se sentir à l'aise. Donc, oui, de l'inscrire en modification dans le projet de loi est quelque chose d'important pour nous.

M. Cloutier : Donc... Puis, avant qu'il y ait un accord avec une entreprise ou une municipalité directement concernée, vous êtes d'avis que la municipalité devrait pouvoir s'exprimer, avant que l'accord soit conclu?

Mme Roy (Suzanne) : Oui. On n'est pas allés jusqu'au droit de veto, on l'a exprimé, Me Simard l'a bien exprimé tout à l'heure, mais on est d'avis qu'il doit y avoir aussi des discussions avant d'arriver à un règlement final.

M. Cloutier : Puis vous partagez les mêmes préoccupations que les autres municipalités à l'effet que le plafond devrait être bonifié, de ce...

Mme Roy (Suzanne) : Oui, tout à fait. Et bonifier le 20 %, je ne l'ai peut-être pas exprimé assez clairement, devrait, pour nous, être un seuil minimum, parce que certaines municipalités se sont bien outillées — vous avez reçu Gatineau ce matin — où ils peuvent démontrer, dans certains cas, que ce n'est pas 20 %, mais que c'est 30 % dans tel cas. Alors, pour nous, le seuil de 20 % est le seuil minimum, où on présume du 20 % sans avoir besoin... Mais, du moment où on a des preuves que c'est plus de 20 %, il ne devrait pas être limitatif, ça devrait être un seuil minimum.

M. Cloutier : Est-ce qu'à votre point de vue les petites municipalités ont ce qu'il faut pour entamer les procédures judiciaires nécessaires ou vous avez plutôt l'impression qu'ils vont se tourner vers le gouvernement?

Mme Roy (Suzanne) : J'ai l'impression que, dans plusieurs cas, étant donné les ressources financières, les ressources humaines en termes de juristes aussi — et souvent ils ne voudront pas aller à l'externe pour occasionner d'autres frais — ils vont se tourner vers le gouvernement.

M. Cloutier : J'imagine que le gouvernement, lui, n'a pas l'intention de se tourner à l'externe pour aller chercher des ressources supplémentaires, mais ça fera partie, j'imagine, de notre réflexion plus globale. Mais ça pose... encore une fois, ça soulève l'enjeu des ressources. Ça m'apparaît... Je vous pose la question, mais, je pense, je connaissais bien la réponse. La réalité des petites municipalités, c'est qu'elles sont déjà complètement débordées. Si en plus il fallait leur demander de... La collaboration, elle est nécessaire, mais en même temps je pense que l'aide gouvernementale, elle est plus qu'appréciée, j'en suis convaincu.

Mme Roy (Suzanne) : C'est pour ça qu'un projet de loi comme celui-là nous permet d'aller plus loin pour la récupération. Alors que ça aurait peut-être été possible juste auprès des plus grandes municipalités, là ça offre une possibilité pour l'ensemble des municipalités du Québec, et c'est le côté intéressant aussi que nous apprécions du projet de loi.

M. Cloutier : Très bien. Je vous remercie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le député de Lac-Saint-Jean. Est-ce qu'il y a d'autres membres de l'opposition officielle qui ont des questions? Non, ça va? Mme la députée de Montarville, à vous la parole.

Mme Roy (Montarville) : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, Mme Roy, Mme la mairesse et également présidente de l'UMQ.

On a eu une suggestion ce matin que je n'ai pas trouvée inintéressante, loin de là. Vous savez que cette loi, c'est une loi d'exception qui a une durée de vie de cinq ans; le Vérificateur général nous a fait la suggestion de l'étendre à 10 ans, compte tenu de la complexité des dossiers, du temps. Et c'est toujours long, les procédures judiciaires, même si elles sont abrégées par ce projet de loi spécial... projet de loi d'exception, pardon.

Qu'est-ce que vous pensez de cette suggestion-là et qu'en penseraient vos membres? Est-ce que c'est une préoccupation qui a été soulevée par les membres de l'UMQ?

Mme Roy (Suzanne) : Ça n'a pas nécessairement été soulevé par les membres, mais c'est sûr que plus on ouvre l'éventail, donc, les possibilités pour récupérer de l'argent pour nos citoyens, donc, par exemple, le fait d'allonger la durée de vie de cette loi de cinq à 10 ans, ça ne peut être que positif pour nos membres. Alors, ça nous donne une avenue supplémentaire ou du temps, parce qu'on le sait, au niveau du système de justice ça peut être long quelquefois, et des fois ne serait-ce que pour rassembler tout ça. Alors, effectivement, le 10 ans n'est pas inintéressant pour nous.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Par ailleurs, on parle de l'UMQ. Vous représentez 80 % des élus de la province, mais il y a combien de municipalités? Combien de municipalités, de villes sont membres de l'UMQ?

Mme Roy (Suzanne) : Un peu plus de 300.

Mme Roy (Montarville) : Un peu plus de 300. Sur ces municipalités de toutes tailles, parce qu'on en parle, c'est une préoccupation pour le recouvrement des sommes et justement faire le travail, tout le travail d'enquête juridique qu'il y aura autour pour arriver avec de la preuve également pour demander à ces entreprises de nous rembourser, selon vous, sur ces 300 municipalités, quel est le pourcentage... Je ne vous demanderai pas un chiffre, là, c'est trop... ce ne serait pas approprié, mais, selon vous, le pourcentage qui auraient de la difficulté à remplir elles-mêmes les objectifs du projet de loi n° 26, qui n'auraient pas les effectifs, qui n'auraient pas de contentieux suffisant, on parle de quel type de municipalité puis d'un pourcentage, peut-être, là...

Mme Roy (Suzanne) : Je n'irai pas en pourcentage, mais je dirais que toutes les municipalités de moins de 25 000 de population, souvent, ne vont pas avoir de contentieux ou très peu, seulement au niveau du service du greffe. Donc, c'est beaucoup de municipalités, là. Alors, en pourcentage, les municipalités de moins de 25 000, je ne sais pas si Me Simard a ça en mémoire comme ça.

Mme Simard (Diane) : Je ne voudrais pas avancer de chiffre.

Mme Roy (Montarville) : ...ça nous donne une idée, les municipalités de moins de 25 000.

Mme Roy (Suzanne) : ...moins de 25 000, c'est clair que ça devient beaucoup plus difficile...

Mme Roy (Montarville) : Dans l'application.

Mme Roy (Suzanne) : ...dans l'application, dans les ressources qu'elles possèdent pour pouvoir intervenir.

Mme Roy (Montarville) : D'où, justement, l'implication de la ministre, du ministère pour...

Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait.

Mme Roy (Montarville) : Parfait. Et ça ne veut pas dire non plus qu'il n'y a pas eu de contrat frauduleux dans ces petites villes, ces villes de plus petite taille.

Mme Roy (Suzanne) : Non, non, tout à fait, là.

Mme Roy (Montarville) : Autre commentaire. Hier, c'était un commentaire de la ville de Laval que nous avons trouvé fort intéressant, c'est un ajout qu'ils voulaient faire, et je me demandais si vos membres en avaient parlé entre eux ou si vous avez eu écho de ça, parce que, tout comme vous, le mémoire de la ville de Laval avait été déposé aussi devant la commission Charbonneau. Donc, vous êtes au fait et vous voyez où je m'en vais. Le fait d'ajouter au projet de loi n° 26 des articles qui permettraient à la ville de récupérer les sommes qui auraient été payées à des élus, ou des fonctionnaires, ou des employés qui auraient participé à des manoeuvres dolosives, frauduleuses, qu'est-ce que vous en pensez? Qu'est-ce que vos membres en pensent?

Mme Roy (Suzanne) : En fait, on n'a pas fait la discussion face au projet de loi n° 26 sur cet aspect-là.

Mme Roy (Montarville) : ...c'est un ajout, mais je voulais savoir si vous avez eu des échos de ça.

Mme Roy (Suzanne) : Oui, c'est ça. Et on n'en a pas discuté avec nos membres. Laval est effectivement dans une situation particulière où c'est très d'actualité, je dirais, donc a présenté ce point de vue là, mais ça nécessiterait définitivement plus d'analyse. En tout cas, je pense que le législateur sera à même de soupeser le pour ou le contre d'aller dans cette orientation, mais nous ne sommes pas allés plus loin, nous, dans notre analyse à ce niveau-là.

Mme Roy (Montarville) : Je me demandais si ça avait suscité de l'intérêt ou des discussions, du moins auprès d'autres élus de d'autres municipalités.

Par ailleurs, pour ce qui est des sommes, vous demandez, tout comme la ville de Montréal et d'autres villes, que la présomption soit de 20 %. Dans quelle mesure ce fameux 20 %... Parce qu'il faut penser que c'est quand même un chiffre arbitraire, qu'on s'est basé, entre autres, sur le fait... les témoignages qui ont été entendus, que certains contrats auraient été gonflés de 13 % à 30 %. Pourquoi le 20 % est-il si important pour vos membres?

Mme Roy (Suzanne) : Il est important parce qu'on pense que c'est plus de 15 %. On l'a vu, hein? Même si on n'a pas toute la documentation, plusieurs municipalités témoignaient des changements de prix à la baisse après qu'on ait commencé, qu'il y ait des démarches qui se fassent partout au Québec au niveau de la collusion. Donc, il y avait là cet élément-là.

Et l'élément aussi qui est extrêmement important, on pense qu'en mettant cette présomption à 20 % on va inciter plus d'entreprises à aller vers la contribution volontaire de façon préalable. Parce que c'est comme si la barre de négociation est à 15 %, à partir du moment où on dit qu'on présume que c'est 15 %. Alors, si on la met à 20 %, ça peut être un incitatif de dire, pour les entreprises : Bien, on va aller vers la déclaration volontaire et on va discuter avec le ministère pour une entente. Et, si on part à 15 %, on risque de finir à 10 %. Si on part à 20 %, on a plus de chances d'arriver autour de 15 %.

Mme Roy (Montarville) : Le 15 % étant un minimum. C'est une présomption, le 15 %.

Mme Roy (Suzanne) : Oui, on parle vraiment d'un minimum, je l'ai spécifié. Je disais que, bon, Gatineau, entre autres, a beaucoup de documentation qu'ils sont, de façon générale, au-delà du 20 %. Donc, quand on peut démontrer que c'est plus de 20 %, effectivement, que l'on puisse aller chercher plus de 20 %. C'est vraiment le seuil minimal.

Mme Roy (Montarville) : Bien, je vous remercie infiniment de vos précisions. Très clair. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le député de La Prairie, je pense que vous avez des questions pour nos témoins.

M. Merlini : Merci, M. le Président. D'abord, merci pour le mémoire, Mme Roy, de votre corporation.

J'ai quelques questions concernant certains points en particulier, en commençant par la quittance, que vous dites, pour les contrats visés sans l'autorisation de la municipalité concernée. J'ai posé cette question à d'autres, et il y a eu des réponses différentes, que ce soient des associations d'entrepreneurs ou de constructeurs.

Est-ce que vos membres souhaiteraient une quittance globale ou une quittance par contrat? Parce qu'on parlait tantôt du partage, comment je pourrais dire, des sommes à recouvrer, mais là, à ce moment-là... Comme la ministre le dit, on ne s'achète pas une quittance, on ne s'achète pas une réhabilitation par la quittance. Alors, à ce moment-là, est-ce qu'une quittance globale satisferait les membres de l'UMQ ou vraiment il faudrait y aller contrat par contrat, surtout dans le cas d'une entreprise qui a eu des contrats avec plusieurs de vos membres?

• (12 h 30) •

Mme Simard (Diane) : Merci. En fait, on n'a pas analysé cette question-là, mais, pour avoir entendu, hier, les discussions là-dessus, parce que je les ai entendues sur le Web, en voiture, je dirais que chaque cas est tellement différent... Parce que, là, je sais que ce qu'on a discuté ici, c'est à savoir un entrepreneur qui se présente dans le cadre du programme de remboursement, il se présente pour trois contrats, mais en fait il y en a d'autres, hein, c'est sûr qu'il ne peut pas donner une quittance pour les contrats sur lesquels il n'y aura pas de discussion. Donc, il peut cacher des contrats. Donc, je pense que ça mérite d'être analysé plus longuement, les quittances, parce qu'il faut voir qu'il y aura tellement de cas différents que c'est difficile, je pense, de donner une réponse globale pour l'ensemble des situations.

M. Merlini : Est-ce qu'à ce moment-là vous ne voyez pas ça comme un découragement, pour l'entrepreneur qui souhaite régler ces enjeux-là, de dire : Bien, avec une municipalité... Si on donne l'autorisation à la municipalité concernée de donner la quittance, et une autre dit non, l'entrepreneur va-t-il se décourager puis dire : Bien, je vais laisser faire, dans ce cas-là, puis je vais prendre mes chances de régler hors cour possiblement?

Mme Simard (Diane) : Bien, je répondrais, là-dessus, qu'avec les mécanismes qu'on voudrait voir inscrire à la loi concernant, justement, les règles de partage, cette question-là va être réglée aussi par rapport aux quittances, parce que l'entrepreneur qui se présente dans le cadre du programme de remboursement pour éviter des procédures judiciaires a tout intérêt à présenter l'ensemble des contrats dans lesquels il a fait des manoeuvres dolosives, et ce sera dans l'intérêt aussi de l'administrateur du programme de régler l'ensemble des dossiers pour ne pas, justement, que l'entrepreneur se fasse poursuivre par la suite pour un contrat qu'il n'aura pas dévoilé. Je pense que c'est dans son intérêt de régler l'ensemble des contrats et puis que la quittance ait lieu sur l'ensemble des contrats.

Nous, on veut que ces gens-là continuent de faire des affaires puis on veut que le programme de remboursement, il fonctionne. Donc, c'est ça, le but, hein, c'est qu'il n'y ait pas de poursuite par la suite. Ça fait que je pense que ce serait de s'entendre sur une forme de quittance qui va faire en sorte que tous les dossiers seraient réglés à la satisfaction des municipalités, puis les mécanismes qui seront mis en place dans le partage de l'équité devraient aussi régler cette question-là.

M. Merlini : Dans le but avoué du projet de loi de recouvrer ces sommes-là, vous voulez que la présomption de dommage soit augmentée à 20 %. Vous dites que plus la présomption de dommage sera élevée, plus l'incitatif sera efficace.

Voyez-vous d'autres mesures, d'autres incitatifs qui rendraient le remboursement volontaire encore plus intéressant et qui rempliraient les objectifs du projet de loi n° 26, qui est, dans le fond, le recouvrement des sommes qui ont été payées indûment, là?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, il y avait cet élément-là qu'on a sorti dans le mémoire, puis il y avait aussi le fait qu'après ça ne soit pas systématiquement regardé au niveau de l'AMF, là, que les gens puissent continuer d'avoir de l'argent pour pouvoir rembourser et faire des affaires. On n'est pas allés plus loin au niveau de d'autres critères ou d'autres incitatifs pour que les entreprises contribuent volontairement.

Mme Simard (Diane) : Si je peux compléter, sur le 20 %, oui, on pense que c'est une mesure incitative importante, mais il y a aussi le fait, comme ça a été démontré par la ville de Laval, et de Gatineau, et de Montréal, que c'est très difficile de faire la preuve, hein, de manoeuvres dolosives. Donc, c'est pour ça que, le 20 %, on tient à avoir le 20 %, parce que, bien que devant la commission Charbonneau beaucoup de témoignages ont démontré que ça pouvait aller jusqu'à 30 %, les sommes injustement payées, c'est très difficile, pour une ville, d'en faire la preuve. C'est une première, en fait, au Québec, on n'a jamais eu vraiment de dossier là-dessus en cour. Donc, c'est pour ça qu'on y tient aussi, au 20 %, que ce soit augmenté de 15 % à 20 %, la présomption de dommage, parce que ce n'est pas facile de faire ce genre de preuve là. Puis je pense que les villes aussi qui sont concernées vous l'ont mentionné.

M. Merlini : Est-ce que vos membres souhaiteraient également — la ville de Montréal le souhaitait, l'a présenté dans son mémoire — y inclure aussi les avantages qui étaient non pécuniers, dans les manoeuvres dolosives et de fraude, les choses qu'on ne peut pas identifier clairement dans un contrat mais, disons, le maire Coderre le disait, des rénovations de maisons, des pavages d'entrée? Est-ce que c'est quelque chose que vos membres aussi souhaiteraient que ça soit pris en considération? Surtout quand vous parlez «en fonction des pertes subies par ce dernier», est-ce que ça rentrerait dans cette chose-là?

Puis j'aimerais rajouter, en plus de ça : Est-ce que, dans la... «En fonction des pertes subies», vous avez fait mention tantôt, Mme Roy, des règlements d'emprunt, les intérêts encourus depuis le temps que vous avez fait le règlement d'emprunt. Est-ce que ça se limite, les pertes subies, non seulement aux montants du contrat, mais les surcharges, les montants d'emprunt et les avantages qui ne sont pas nécessairement pécuniers?

Mme Roy (Suzanne) : Bien, c'est pour ça que, quand on parle du 20 %, on dit à quel point c'est difficile et complexe de démontrer ça. Vous venez de citer plein d'exemples qui font partie du 20 % et des impacts qu'ont eus ces contrats-là ou ces montants-là qui étaient supérieurs au juste prix qu'auraient dû payer les citoyens et les citoyennes. Pour nous, il n'y a pas de limitation à juste le contrat. Si on a des éléments démontrant qu'il y a plus de 20 %, oui, il faut aller au-delà de ça. Mais c'est complexe. C'est pour ça que ce seuil-là, pour nous, est l'élément...

Et, du moment où on a plus d'éléments — vous en mentionnez quelques-uns — qui vont démontrer plus de 20 %, alors il ne faut pas inscrire, au niveau législatif, 20 %, mais «seuil minimum de 20 %». Peut-être qu'on n'aura pas beaucoup de cas où on va pouvoir aller au-delà de ça, mais cette possibilité-là, elle est là. Il faut pouvoir la prendre, il faut que le ministre puisse la prendre.

M. Merlini : Alors, c'est de là l'importance...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous souligne qu'il nous reste environ deux minutes à ce bloc d'échange.

M. Merlini : O.K., merci. D'où l'importance de bien évaluer ces pertes subies là et l'importance que vous accordez, l'Union des municipalités, à être à la table, à être en partenariat dans tout ce qui a trait aux négociations, là, par rapport aux sommes à recouvrer, et tout ça.

Mme Roy (Suzanne) : Tout à fait, parce qu'au-delà du montant supérieur qu'on présume, bien, il y a les impacts que ça a eus sur la municipalité et que ça a encore, là, sur les décisions qui ont été prises.

M. Merlini : Et le niveau de l'impact, comme la ministre le disait tantôt, un contrat de 20 000 $ pour Saint-Philippe, la municipalité de Saint-Philippe, ce n'est pas la même chose qu'un contrat de 20 000 $ pour Sainte-Julie puis ce n'est pas la même chose qu'un contrat de 20 000 $ pour la ville de Montréal.

Mme Roy (Suzanne) : Et, toutes proportions gardées, ça a la même importance pour les citoyens dans chacune des municipalités.

M. Merlini : C'est ça. Exactement, exactement. Merci, Mme Roy.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ça complète pour M. le député de La Prairie?

M. Merlini : Oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste environ une minute du côté gouvernemental.

Mme Roy (Suzanne) : Bien, merci beaucoup de nous avoir entendus. Et on est bien heureux, on le réitère, de voir ce projet de loi là, qui va être à l'avantage des citoyens et des citoyennes dans chacune des municipalités.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, je vous remercie à mon tour, Mme la mairesse, Me Simard, d'avoir présenté le point de vue de l'Union des municipalités du Québec.

Sur ce, nous avons bien travaillé, et la Commission des institutions ajourne ses travaux au 10 février, à 10 heures, afin de terminer les consultations particulières et auditions sur le projet de loi n° 26. Merci et bon week-end.

(Fin de la séance à 12 h 37)

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