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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Wednesday, April 22, 2015 - Vol. 44 N° 32

Ministère du Conseil exécutif


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Table des matières

Conseil exécutif

Remarques préliminaires

M. Philippe Couillard

M. Stéphane Bédard

Documents déposés

Discussion générale

Document déposé

Document déposé

Adoption des crédits des programmes 1 et 2

Autres intervenants

M. Gilles Ouimet, président

M. Serge Simard

M. François Legault

M. François Bonnardel

Mme Caroline Simard

Mme Françoise David

M. David Birnbaum

M. Stéphane Bergeron

M. Luc Fortin

M. Guy Ouellette

M. Richard Merlini 

Note de l'éditeur : Les crédits du volet Jeunesse du ministère du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des relations avec les citoyens le 23 avril 2015.

Les crédits du volet Implantation de la stratégie maritime du ministère du Conseil exécutif ont été étudiés à la Commission des transports et de l'environnement le 30 avril 2015.

Journal des débats

(Quinze heures sept minutes)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Prenez place, s'il vous plaît! Je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Bon après-midi à tous. Veuillez, s'il vous plaît, vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux afin de ne pas perturber nos travaux.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré) remplace M. Boucher (Ungava); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) remplace M. Rousselle (Vimont); M. Simard (Dubuc) remplace M. Tanguay (LaFontaine); M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Bérubé (Matane-Matapédia); Mme Léger (Pointe-aux-Trembles) remplace M. Cloutier (Lac-Saint-Jean); M. Bergeron (Verchères) remplace M. Lisée (Rosemont); M. Turcotte (Saint-Jean) remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); M. Bonnardel (Granby) remplace M. Martel (Nicolet-Bécancour); et M. Legault (L'Assomption) remplace Mme Roy (Montarville).

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Alors, bienvenue aux membres qui se joignent à nous ou qui remplacent des collègues.

Conseil exécutif

La Commission des institutions est réunie afin de procéder à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2015‑2016. Nous recevons avec plaisir M. le premier ministre, M. le chef de l'opposition officielle et le chef du deuxième groupe d'opposition ainsi que les personnes qui les accompagnent. Bienvenue à tous à la Commission des institutions.

L'étude des crédits se déroulera par des échanges divisés en blocs d'environ 20 minutes en alternance entre les groupes parlementaires. Compte tenu des règles et des ententes intervenues, les députés du gouvernement disposeront d'une période totale de trois heures; ceux de l'opposition officielle, d'une période de 1 h 38 min; ceux du deuxième groupe d'opposition, de 1 h 3 min; et les députés de Québec solidaire, d'une période de 18 minutes. La mise aux voix des crédits sera effectuée à la fin du temps qui est alloué à l'étude de ce volet.

Remarques préliminaires

Nous allons débuter par les remarques préliminaires. M. le premier ministre, vous disposez d'une période de 20 minutes. À vous la parole.

M. Philippe Couillard

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord saluer vous-même, le président, de même que le personnel de la commission, les personnes de la fonction publique qui nous accompagnent, présenter également les personnes qui sont immédiatement assises à côté de moi : à ma gauche, M. Roberto Iglesias, qui est le secrétaire général du gouvernement; à ma droite, M. Jean-Louis Dufresne, qui est directeur de mon cabinet. Bonjour également aux collègues parlementaires bien sûr de notre groupe ministériel mais également des partis d'opposition.

• (15 h 10) •

L'étude des crédits constitue un important exercice de notre vie parlementaire et démocratique. Pour chacun des responsables d'un ministère, l'exercice constitue le moment de rendre compte de l'utilisation qui a été faite des crédits budgétaires parce qu'on a été élus par les citoyens pour bien gérer les deniers publics, pour les utiliser en fonction des priorités que nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre. On doit donc agir en pleine transparence dans leur utilisation et nous sommes imputables de notre action. C'est à la base même de notre démocratie. C'est un exercice parlementaire important qui fournit à chaque membre du gouvernement l'occasion de dresser un bilan de ce qui a été réalisé et de présenter la vision gouvernementale de l'action à venir.

Dans le cas du ministère du Conseil exécutif, l'étude des crédits permet d'avoir une vue d'ensemble des réalisations du gouvernement et des projets que nous souhaitons mettre en oeuvre pour le progrès du Québec. Ces réalisations, ces ambitions, je les ai réitérées aux Québécoises et aux Québécois le 7 avril dernier à l'occasion du premier anniversaire de l'élection de notre gouvernement. Accompagné de l'équipe ministérielle, j'ai livré notre vision pour bâtir un Québec plus prospère et plus juste, celle qu'ensemble nous développions notre économie afin de retrouver la liberté de nos choix. Je suis donc très fier de rendre compte aujourd'hui de l'action du gouvernement, que je dirige depuis plus de 12 mois, et de vous faire part de la direction de nos prochaines actions.

Le rétablissement des finances publiques et la nécessaire relance de l'économie mobilisent depuis le premier jour le gouvernement. Nous avons su rapidement que nous devions agir de façon décisive pour mettre en oeuvre des vraies réformes trop longtemps repoussées. Depuis des années, le Québec dépense plus que ses revenus le lui permettent. Concrètement, 22 des 30 derniers budgets du Québec ont été déficitaires. Pendant tout ce temps, donc, nous avons systématiquement dépensé plus que ce que nous avons gagné, et, en avril 2014, si rien n'avait été fait, nous nous serions dirigés, on le sait maintenant, vers une impasse financière de près de 7,3 milliards de dollars. Pour inverser la tendance, un sérieux coup de barre devait être donné parce que la situation ne pouvait plus durer. Il aurait été bien plus facile, bien sûr, de continuer à dépenser sans compter ou de remettre encore à demain ce qui devait être fait aujourd'hui. On a opté pour l'action décisive et on a fait le choix du courage. Le courage, c'est proposer des changements exigeants pour tous mais nécessaires, c'est conserver cet engagement avant, pendant et après une élection parce que l'on sait et on comprend pourquoi on le fait.

Dès les premiers jours de notre mandat, nous nous sommes mis au travail, un travail que nous poursuivons, et depuis nous travaillons à diminuer le nombre de structures administratives tout en préservant les missions essentielles de l'État. Selon le principe du cran d'arrêt, chaque nouvelle dépense de programmes doit être compensée par une réduction équivalente ailleurs. En 2014‑2015, la croissance des dépenses de programmes s'est établie à 2,1 %. Pour 2015‑2016, celle-ci est limitée à 1,2 %. Un plan de réduction d'un minimum de 2 % des effectifs pour les ministères et les organismes est en vigueur à compter du présent exercice financier. Et, après six années consécutives de déficit qui ont alourdi la dette de près de 16 milliards de dollars, la prochaine année marque le retour à l'équilibre budgétaire. On a commencé à dégager des marges de manoeuvre qui nous permettent de réduire notre dette et notre fardeau fiscal. Au dernier budget, on a annoncé l'élimination graduelle de la taxe santé en épargnant d'abord les plus démunis. Grâce à nos efforts et au Fonds des générations, nous gardons le cap sur une réduction de notre endettement. Ce cap nous permettra, en 2025, que la dette ne représente plus que 45 % de notre richesse collective, près de 10 % de moins que c'est le cas actuellement. Continuer de s'endetter aurait menotté la prochaine génération, et des décisions prises au cours de la dernière année pour celles à venir donneront aux Québécois les moyens de faire leur choix, de mieux contrôler leur destinée collective.

Notre objectif est clair : continuer à dépenser moins que la somme de nos revenus, installer un environnement favorable à la croissance de l'économie et ainsi pouvoir soutenir les missions essentielles de l'État. Ça impliquera de lancer trois grands chantiers de rénovation de l'État : une révision des programmes gouvernementaux, qui s'empilent depuis des années; un contrôle de la rémunération gouvernementale, qui représente 60 % des dépenses de programmes; la réorganisation, la fusion, voire l'abolition de structures souvent dédoublées, moins utiles compte tenu de l'évolution de la société et peu efficientes. L'équilibre budgétaire n'est pas un fil d'arrivée, mais une nouvelle ligne de départ pour le Québec. Il sera durable, car basé sur une remise en question profonde de nos façons de faire. C'est le cadre que se donne le Québec pour assurer son développement.

La solidité financière retrouvée, combinée aux efforts de stimulation économique, redonne un nouvel élan au Québec. Depuis avril 2014, 57 000 emplois ont été créés au Québec. Jamais autant de Québécois n'ont été sur le marché du travail. On a renversé la tendance alors qu'il s'est créé, au Québec, 38 100 nouveaux emplois en ce début de 2015. On sait que la création d'emplois passe d'abord par nos entrepreneurs dans toutes les régions. Et, depuis notre arrivée en poste, nous y avons annoncé, dans ces régions, au moins 10 projets majeurs et ententes permettant 5 milliards d'investissement et la création, le maintien de plus de 5 000 emplois directs ou indirects. Ainsi, plus de 225 millions ont été également consacrés aux infrastructures et à l'aide au développement régional. Nous modernisons notre partenariat avec le niveau municipal de gouvernance pour reconnaître celui-ci comme un gouvernement de proximité. Là encore, le principe est le même : moins de structures, plus d'action.

La priorité, c'est le retour de la prospérité chez nous. C'est pourquoi nous avons déposé au budget notre plan économique pour le Québec en trois axes : d'abord, alléger le fardeau fiscal des particuliers et des entreprises afin d'encourager le travail et l'investissement; favoriser l'investissement privé en stimulant le développement des secteurs clés de l'économie du Québec et assurer une meilleure adéquation entre la formation et l'emploi pour favoriser la pleine participation de tous au marché du travail.

Le Plan économique du Québec, c'est une injection de 3,4 milliards de dollars sur cinq ans dans l'économie, dont 2,5 milliards en allègements fiscaux. Ces actions entraîneront des investissements additionnels de 13 milliards de dollars et la création de 20 000 emplois en moyenne par année, d'ici 2020, et, bien sûr, on espère plus. Il nous était prioritaire de proposer une fiscalité plus favorable à l'investissement, c'est pourquoi les entreprises verront leur fardeau fiscal progressivement allégé de plus de 500 millions de dollars d'ici 2020. Ces allègements sont majeurs pour les entrepreneurs et travailleurs dans les PME. Elles sont au coeur du développement de nos régions, ces PME, elles y créent plus de 75 % des nouveaux emplois. On doit assurer leur compétitivité et encourager leur créativité. Nous étendrons les réductions de taux d'imposition sur le revenu applicable aux PME manufacturières à celles du secteur primaire. Des allègements de la taxe sur la masse salariale similaires à ceux déjà offerts aux PME des secteurs primaire et manufacturier seront appliqués aux 210 000 PME du secteur des services. La fiscalité des sociétés sera aussi, dorénavant, plus favorable à l'investissement. Le taux général d'imposition des sociétés du Québec sera ainsi graduellement réduit de manière à ce qu'à terme il soit équivalent à celui de l'Ontario.

Des allègements fiscaux profiteront aussi aux particuliers. Les Québécois verront leur fardeau fiscal réduit de 2 milliards de dollars principalement au moyen de l'abolition graduelle de la contribution santé, par laquelle 4,5 millions de contribuables récupéreront à terme 744 millions de dollars annuellement; la mise en place d'un bouclier fiscal pour éviter à 400 000 ménages québécois d'être pénalisés pour leurs efforts additionnels sur le marché du travail. Le pouvoir d'achat accru résultant de ces allègements permettra de stimuler la consommation des ménages, l'investissement des entreprises et la création d'emplois, qui surviennent dans un contexte économique favorable pour le Québec. Les exportations profitent de la reprise américaine et du dollar faible. La baisse du prix de l'essence réduit les coûts de transport de nos entreprises, donne une marge de manoeuvre aux consommateurs.

On a une autre raison d'être optimistes pour la compétitivité de nos entreprises, on arrive avec les bons projets au bon moment. Ces projets majeurs, auxquels je crois profondément, vous les connaissez. Ce sont avant tout le Plan Nord et la stratégie maritime. Ces projets, nos partenaires à New York, en Chine, au Royaume-Uni, à Davos et en France les connaissent grâce aux efforts déployés lors des missions économiques. Ce sont sur ces projets majeurs que se fonde notre plan économique pour favoriser des décisions d'investir. Avec la stratégie maritime, nous allons profiter du nouvel accord économique et commercial global entre le Canada et l'Europe pour mieux mettre en valeur le potentiel maritime du Québec. Les... les investissements, pardon, associés au projet atteindront 1,5 milliard de dollars sur cinq ans, notamment afin d'attirer les investissements privés avec nos infrastructures portuaires, touristiques et pour assurer l'implantation de pôles logistiques. Ce sera donc un formidable outil de développement économique de nos régions, en plus de favoriser la création de milliers d'emplois de qualité.

Avec le Plan Nord, nous proposons un projet intégrant économie, développement durable et des communautés, sciences et qualité de vie qui fait envie partout à travers le monde, et l'intérêt des investisseurs, heureusement, est toujours très présent. Le Plan Nord à l'horizon 2035 et son plan d'action quinquennal permettront des interventions sur le territoire par les ministères et organismes et leurs partenaires de près de 2 milliards de dollars sur cinq ans. S'ajouteront des investissements substantiels du secteur privé. Des contributions du gouvernement fédéral pourront aussi venir bonifier les enveloppes. Avec des investissements totaux de plus de 50 milliards de dollars à l'horizon 2035, les retombées, bien sûr, de ce plan concernent l'ensemble du Québec.

D'autres projets favoriseront l'investissement privé pour bâtir l'économie de demain : l'utilisation de l'hydroélectricité à prix compétitif; le développement de secteurs clés de l'économie — l'aérospatiale, l'industrie du jeu vidéo, la filière de l'aluminium, le déploiement d'une économie numérique dans l'espace francophone, l'émergence d'une économie verte dans le contexte de la fixation d'un prix sur le carbone et des défis associés aux changements climatiques.

Ainsi, nous reprenons notre place dans le monde. Nous renforçons nos alliances avec les pays francophones de la planète, dont, notre ami et partenaire de toujours, la France. Nous rebâtissons nos relations avec nos partenaires provinciaux, notamment avec l'Ontario, et jouons notre rôle de leader dans la fédération canadienne.

On a exercé ce leadership de façon tangible en tenant à Québec récemment le sommet sur les changements climatiques, le 14 avril dernier, auquel se sont joints des conférenciers de très haut calibre. Parmi ces derniers, on a eu l'honneur d'accueillir Mme Figueres, secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, qui a pris l'engagement de travailler avec le gouvernement français afin qu'une journée soit réservée aux États fédérés et aux régions dans le cadre du sommet de Paris. Soulignons également la présence remarquée de Mark Kenber, qui est à la tête du Climate Group, un organisme international issu de l'ONU, avec lequel j'ai le plaisir de travailler à titre de coprésident de l'Alliance des États fédérés et des régions. L'événement a permis au Québec de partager ses expertises en changements climatiques avec les représentants des provinces et territoires du Canada, on l'a vu, avec des situations variées et des modes d'action variés également. Dans sa foulée, la première ministre Wynne a pris la décision d'instaurer, comme nous, un système de plafonnement et d'échange des droits d'émission de gaz à effet de serre en Ontario et fait part de son intention de le lier à celui de la Western Climate Initiative, dont font partie le Québec et la Californie. La décision confirme le leadership du Québec dans ce domaine et solidifie ainsi le plus vaste marché du carbone en Amérique du Nord.

• (15 h 20) •

Rappelons également la déclaration très importante et historique faite par les premiers ministres des provinces présents lors de ce sommet où nous nous sommes engagés à mettre en oeuvre des programmes et des mesures visant l'adaptation aux changements climatiques; à renforcer la collaboration pancanadienne en matière de lutte contre les changements climatiques par l'échange d'information et d'expertise de bonnes pratiques afin de réduire les émissions et renforcer nos initiatives en adaptation pour accroître la résilience des populations, des infrastructures et des économies à l'égard des risques climatiques; assurer une transition vers une économie plus sobre en carbone au moyen d'initiatives appropriées; mieux coordonner les systèmes de déclaration des émissions de GES entre les gouvernements; favoriser les investissements dans le développement d'infrastructures et des réseaux énergétiques résilients en vue de réduire les émissions de gaz à effet de serre associées à la production et à la consommation d'énergie.

Tous ces efforts pavent la voie vers la conférence de Paris en décembre 2015, un événement crucial, les pays devant aboutir à un accord international sur le climat qui permettra de contenir le réchauffement global en deçà de 2 °C.

Pour que nos entrepreneurs puissent compter sur un plus grand nombre de travailleurs qualifiés, nous mettrons l'accent sur l'Adéquation formation-emploi. Avec 725 000 emplois à pourvoir d'ici 2017, c'est une opportunité unique à saisir. C'est pour cette raison que j'ai demandé à mon adjoint parlementaire, le député de D'Arcy-McGee, d'assumer la responsabilité de faire converger les actions des différents ministères. On agit afin d'augmenter la part de la population active en mesure de répondre efficacement aux besoins de main-d'oeuvre des entreprises, en soutenant la formation afin qu'elle corresponde aux besoins de celle-ci. Le nombre de travailleurs disponibles également doit augmenter au moyen de la bonification du crédit d'impôt pour travailleurs d'expérience et une meilleure intégration des personnes immigrantes au marché du travail.

Ensemble, nous avons pris les moyens de mieux financer nos services publics et d'assurer la pérennité de programmes sociaux qui nous sont chers. En éducation, nous poursuivons nos échanges avec les intervenants du milieu. On veut dégager une vision ambitieuse qui place enfin les élèves, les étudiants, les parents et l'école au centre des décisions. On va rehausser les exigences pour que nos jeunes maîtrisent mieux notre langue française, qui est si belle et si riche. Dans le réseau de la santé et des services sociaux, on poursuit les changements, bien sûr. Les objectifs sont simples : un meilleur accès aux soins, un meilleur soutien aux personnes vulnérables, et notre défi réside dans l'arrimage de l'ensemble des interventions pour que le système soit efficace pour les patients en attente de soins. Je ne voudrais pas passer sous silence les efforts de la ministre déléguée aux Services sociaux et à la Santé publique, qui joue un rôle majeur pour la protection des services aux jeunes et en réadaptation. Dans le réseau des services de garde, nous avons rétabli l'équilibre entre la part payée par les parents et celle assumée par l'ensemble des contribuables, qui demeure largement la plus importante. Notre régime demeure de loin le plus généreux au Canada. Il est même plus équitable que la hausse de tarifs qui était proposée auparavant, puisqu'on a choisi d'épargner les familles à revenus modestes.

Et, comme nous nous y étions engagés, nous avons fait de la lutte contre l'intimidation une priorité parce que ces comportements sont inacceptables, sont discriminatoires et doivent cesser. Pour en discuter, nous avons tenu un forum que j'ai présidé mais avec ma collègue la ministre de la Famille, avec également la députée de Charlevoix... de porter une attention particulière à cet enjeu important pour notre société. Je voudrais ici remercier les porte-parole des autres groupes parlementaires pour leur participation à ce forum. Je crois que ce genre de débat outrepasse les débats partisans et nous devons faire front commun pour prévenir ces pratiques. On déposera donc cet automne un plan d'action concerté et non partisan dont les orientations... rejoindront, pardon, les préoccupations de la population.

Collectivement, notre responsabilité est de soutenir les plus vulnérables de notre société. Pour nos aînés, nous avons imposé l'installation de systèmes de gicleurs automatiques dans les résidences privées pour aînés afin d'éviter le plus possible qu'une tragédie comme celle de L'Isle-Verte ne se reproduise. Pour les plus démunis, nous allons améliorer les conditions de logement. Pour les enfants vulnérables aux prises avec des problématiques liées à leurs conditions de vie, nous soutenons la Fondation du Dr Julien dans l'expansion de ses centres de pédiatrie sociale.

Nous avons également soutenu notre culture par la bonification de certaines aides fiscales apportées aux entreprises du secteur culturel. On a pris plusieurs initiatives de nature budgétaire en faveur de la culture afin de répondre à certains besoins prioritaires. C'est pourquoi des sommes de 24 millions de dollars supplémentaires seront affectées au cours des deux prochaines années au ministère de la Culture et des Communications afin d'apporter un soutien accru aux sociétés d'État du secteur culturel, comme les conservatoires, soutenir les ententes de développement culturel avec les régions. Et, bien sûr, ces sommes bénéficieront directement aux créateurs culturels et à la diffusion de la culture en région. Ces initiatives sont en continuité avec le soutien indéfectible apporté au secteur culturel par les gouvernements libéraux qui se sont succédé, même pendant les périodes les plus difficiles de redressement budgétaire. Notre culture nous permet d'affirmer notre identité, notre caractère distinct et de faire rayonner le Québec partout sur la planète.

Ces sujets évoqués illustrent tout ce que nous devons encore accomplir au cours des prochains mois et des prochaines années. Notre équipe est déterminée à réussir là où d'autres ont baissé les bras. Même si nous formons un gouvernement encore jeune, cette équipe est compétente et travaillante. Nous connaissons notre destination. Ensemble, nous voulons un Québec plus prospère, plus juste et libre de ses choix. Notre responsabilité envers les Québécoises et les Québécois est de prendre les décisions qui nous donneront réellement les moyens de mieux soutenir les personnes les plus vulnérables, de permettre aux entrepreneurs de réaliser leurs projets et leurs rêves, mieux former nos travailleurs dans une économie du XXIe siècle, permettre à chacune de nos régions de se développer et de prospérer, réduire votre fardeau fiscal et notre dette. Pour y arriver, nous avons un plan économique pour le Québec.

Ensemble, nous récolterons le fruit de nos efforts, ensemble faisons avancer le Québec sur la voie de la prospérité. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le premier ministre. J'invite maintenant le chef de l'opposition officielle à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez d'une période maximale de 12 minutes.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard : Merci, M. le Président. Donc, je remercie le premier ministre. Je suis très content qu'on soit ici pour une étude importante, ces crédits, pour lesquels nous avons beaucoup de questionnement, effectivement, pour aller au fond des choses face aux coupures qui seront distribuées un peu partout, principalement dans des secteurs névralgiques de l'égalité des chances, la santé et l'éducation. Donc, nous espérons avoir des réponses du premier ministre. Évidemment, je salue M. Iglesias, le chef de cabinet du premier ministre, les collègues députés, mes collègues à moi ainsi que le chef de la deuxième opposition — je pense que ça fait le tour — ainsi que tout le personnel qui accompagne le premier ministre.

Donc, oui, effectivement, le premier ministre le disait dans ses mots. Je pense qu'il voulait dire : Le Québec, est riche. Effectivement, comme province ou comme pays, ça reste un pays qui est riche, et il faut s'enorgueillir de cette richesse. L'idée, c'est qu'on est face à des réalités avec lesquelles nous devons composer et qui reposent sur des choix qui ont été pris à un certain moment donné, et il faut les assumer, ces choix. Entre autres, le premier ministre nous parle de la lourdeur de la dette. C'est sûr que je me permets de lui rappeler que son gouvernement, le gouvernement libéral, à l'époque où il était là, est responsable du tiers de cette dette. Entre 2003 et 2012, ils ont endetté le Québec de 55 milliards. Et, à partir de 2008, ils ont refait connaissance avec les déficits, ce qui ne s'était pas produit, souvenez-vous, depuis 1998... ou 1999, je crois, et pour une raison bien justifiée : à l'époque, effectivement, il y avait une crise économique, et nous devions favoriser cette croissance. Mais il reste que, dans le plan de rééquilibre budgétaire, il n'a pas été suivi... déposé par le Parti libéral à l'époque, et il a entraîné des hausses de tarification pour les citoyens du Québec, pour la classe moyenne qui ont eu des impacts sur la consommation et qui ont même eu un impact particulièrement sur la taxation. Souvenons-nous que le point de TVQ qui a été ajouté par le gouvernement libéral en 2012 n'a pas récolté les sommes qui étaient prévues, parce que justement on était allé piger un peu trop dans les poches des contribuables et en le faisant de toutes les façons possibles. Près de 6 milliards de tarifs avaient été augmentés... de taxes, impôts, qui ont mené à cette situation.

Donc, nous sommes face à ça, à une situation qui a été creusée par le Parti libéral et pour laquelle nous devons y apporter des solutions. Nous l'avons fait par un contrôle des dépenses rigoureux mais surtout par un plan économique, aussi, ambitieux pour le Québec. Et nous y avons ajouté, souvenez-vous, par exemple, l'électrification des transports, qui était un élément central de cette politique, plan qui a, malheureusement, été abandonné.

Actuellement, le gouvernement nous parle de baisses possibles dans les années à venir. Or, la classe moyenne, et les familles du Québec, et particulièrement les régions sont prises avec des augmentations de tarifs particulièrement, près de 700 millions seulement cette année, et plusieurs de ces familles auront la surprise lors de leurs rapports d'impôt l'an prochain. Et ça sera des revenus de moins dans notre économie, malheureusement, et qui auront un impact, encore une fois, sur notre croissance. Et que dit le premier ministre pour ceux qui sont moroses? Parce qu'il y a de la morosité au Québec. On le sent. Il dit : J'ai le Plan Nord. À une certaine époque, ça pouvait encore être crédible. Quand le prix des matières premières était bas... était haut, plutôt, et faisait en sorte qu'il y avait un intérêt pour les compagnies minières de développer de nouvelles possibilités, ça pouvait avoir encore un impact. À court terme et à moyen terme, le Nord du Québec n'est pas la solution aux problèmes économiques du Québec, c'est évident. Or, le premier ministre réitère cette phrase comme une vieille toune qu'on est tannés d'entendre et, malheureusement, dont l'air fausse, actuellement.

Et je tiens à lui dire comme signal : S'il veut être sûr... Il donne l'impression que tout va bien, et je lui donne seulement un petit signal, là, qui devrait l'éveiller, là, à la perte de confiance des gens : dans les mises en chantier, ce mois-ci, nous avons atteint un sommet de médiocrité. Il faut revenir à 2001, où on a vu des chiffres si bas en matière de mises en chantier. Ça, c'est un signal où le premier ministre devrait dire : Ça ne va pas bien. La classe moyenne, ceux qui doivent dépenser, bien ils ne le croient pas, le premier ministre, ou soit ils vivent dans une autre réalité que lui. Eux, ils pensent que, malheureusement, ce n'est pas le temps d'investir, qu'ils n'ont pas... ou ils n'ont pas les moyens de dépenser, et ce signal-là devrait amener un plan vigoureux. Or, on n'a pas ça.

• (15 h 30) •

Ce qu'on a devant nous dans les crédits qui ont été posés par le gouvernement, c'est un plan purement comptable qui repose sur un monde imaginaire où la croissance économique, l'emploi, les régions, la famille puis même le fonctionnement de notre fédération fonctionnent normalement, le meilleur va arriver, si on ne bouge pas, il devrait arriver le mieux. Et, malheureusement, ce n'est pas comme ça. On ne peut pas attendre à la fenêtre, là, quand on est premier ministre du Québec, et on doit assumer un rôle dans le développement économique du Québec en pensant qu'un jour il y a un effet qui va arriver. À l'époque, en campagne, il avait été appelé l'effet libéral, qui devait contribuer de façon magique à l'augmentation de la croissance, à de la création d'emplois, et cette pensée magique, évidemment, elle ne s'est pas matérialisée, et, l'effet libéral, tout le monde l'attend encore, sauf évidemment les gens des régions et les familles. Eux en ont subi les contrecoups assez rapidement.

Même chose pour les investissements étrangers. Le premier ministre doit être actif dans le développement économique, et on va faire des démonstrations plus tard, où on doit assumer ce leadership nécessaire, conclure des ententes, développer des marchés, s'assurer que des partenaires financiers se joignent au gouvernement et à d'autres partenaires pour investir au Québec. Mais on n'est pas là. On est dans l'attentisme et on présente un plan budgétaire comme un plan de développement économique du Québec, ce qui est faux, ce qui va mener exactement au contraire.

Et l'exemple du fédéralisme le plus patent, sur lequel le premier ministre, malheureusement, je trouve, manque de tonus : le pont Champlain. S'il voulait nous imposer un péage parce qu'on était souverainistes — on ne sait jamais, le fédéral, des fois, a des idées saugrenues — ça aurait pu arriver. C'est un gouvernement souverainiste à Québec, on ne les écoute pas, on met un péage. C'est des méchants péquistes et indépendantistes, donc on va leur imposer le péage. Eh bien... et Dieu reconnaîtra les siens à la fin, parce qu'évidemment tout le monde le paie, le péage, incluant le fédéraliste. Peut-être qu'ils vont trouver une façon de faire seulement payer les souverainistes. Mais là on a un gouvernement fédéraliste puis pleinement assumé comme ce n'est jamais arrivé dans l'histoire, là, on a quelqu'un qui se définit comme d'une loyauté, à tous les matins, au Canada, mais le résultat est le même. C'est assez incroyable, hein? Le péage, il va avoir lieu. Et il n'y a aucune avancée. Puis, le dernier budget est venu nous le démontrer, on aura à le faire... on aura à faire la démonstration un peu plus tard, et ce qu'on s'attend à ce moment-là, c'est que le premier ministre constate l'échec et dise : Bien, la méthode ami-ami, là, ça ne fonctionne pas, donc on va en prendre une autre. Mais je sens du premier ministre une volonté du porc-épic, M. le Président. On le voit aller, là, sur les routes, sur les rebuffades qu'il a eues du fédéral dans les dernières années. Honnêtement, là, j'attends seulement le camion qui va passer, parce que je ne vois pas cette volonté de réunir même des souverainistes. À l'époque, M. Bourassa réunissait des souverainistes, d'ailleurs, il s'en servait bien, il avait toujours sa petite carte «Je suis peut-être un indépendantiste», hein? Vous vous souvenez, à l'époque, jamais personne n'a été vraiment sûr. Il disait : Oui, j'aime le Canada mais... Le premier ministre ne fait pas ça.

Le premier ministre lui-même fait en sorte que notre société est divisée, ne crée pas les consensus nécessaires. Et l'exemple des armes à feu... je lui ai offert plusieurs fois, il a douté de ma sincérité, ce que je lui reproche encore, mais il aurait dû saisir cette possibilité qu'il avait pour montrer au gouvernement d'Ottawa, à qui on envoie nos impôts : Nous nous tenons debout et ensemble malgré nos divisions. J'aurais souhaité qu'il le fasse. Malheureusement, il ne l'a pas fait. Autre élément que je lui reproche particulièrement, c'est... À la même époque, l'an passé, on s'était dit : Il va y avoir un ton différent, des façons différentes. Et le dernier bâillon a été la pire des illustrations, depuis des années, dans ce Parlement, de ce qu'on ne devait pas faire. Malheureusement, et je lui dis et je pense que je ne suis pas le seul à lui avoir dit, c'est un mauvais exemple. On prendra le ton qu'on voudra, si, dans l'action, on fait exactement le contraire de ce qu'on s'était engagé à faire, eh bien, tout le monde est perdant.

Sur l'emploi, le premier ministre a l'air satisfait. Dans les faits, depuis un an, il ne s'est créé pas d'emploi à temps plein au Québec et, pendant ce temps-là, il s'en est créé à peu près 110 000 au Canada. C'est sûr qu'on peut être satisfait de ça, mais honnêtement c'est symptomatique de quelque chose qui est dangereux pour l'économie québécoise, et ça devrait éveiller une volonté du premier ministre de développer l'emploi, mais on ne la sent pas. Et, avec la dernière réponse du fédéral, c'est sûr que les infrastructures ne sont pas la solution à nos problèmes. Ça va prendre de l'imagination, de la créativité. Puis ce n'est pas le Plan Nord qui va nous sauver, et ça, au Québec, tout le monde en est convaincu maintenant.

Ce qu'on s'attend aussi du premier ministre, c'est que, dans les choix qu'il va avoir à faire, il y a des choix pour l'avenir, et il ne peut pas, d'une façon, dire : Moi, je travaille pour la jeunesse et l'avenir, et, en même temps, couper dans l'éducation. Et c'est peut-être la pire erreur qu'il fait dans le contexte des crédits actuels. Couper au primaire et au secondaire, couper dans les services de garde, c'est une erreur pour l'avenir, pour nos jeunes et c'est ce qui va faire qu'on va moins performer, que moins de jeunes vont réussir. Alors, de le dire dans la même phrase, qu'on le fait pour les générations futures, c'est faux. C'est faux, et je pense que le premier ministre aurait dû manifester son cran d'arrêt justement sur l'également des chances et principalement en éducation, de dire qu'en éducation on ne peut plus imposer de coupures au primaire et au secondaire. C'est inadmissible parce que ça va avoir des impacts négatifs à court, moyen et long terme pour les générations à venir.

Il vient nous annoncer aujourd'hui... Il n'était pas présent, et je lui reproche honnêtement, amicalement. Il est ministre de la jeunesse. Quand on a des mauvaises nouvelles, le devoir d'un ministre et même du premier ministre, c'est d'aller en avant des coups. Moi, je le faisais au Trésor puis je le fais comme chef intérimaire, je l'ai fait comme leader. C'est quand ça va mal qu'il faut être là. On annonçait la fin des forums jeunesse, qui incarnent notre avenir pour la jeunesse, et j'ai même vu Mme la présidente du Conseil du statut de la femme dire qu'en plus il y avait 61 % de femmes dans les conseils d'administration. On annonce aujourd'hui par un autre ministre qu'ils seront abolis et que la somme sera diminuée cette année puis, l'an prochain, on va remettre une somme qui devrait ressembler à... moins évidemment bien des millions, à ce qui était auparavant. C'est une mauvaise nouvelle, c'est des mauvaises indications, c'est des mauvaises orientations.

Donc, ce que je demande au premier ministre, ce que je souhaite, c'est essayer aujourd'hui, dans le temps qui nous est imparti, de lui faire prendre conscience de ses choix, de lui dire qu'à certains égards ce n'est pas terminé. Je sais comment fonctionne le gouvernement. Je sais que des mauvaises décisions sont à venir, parce qu'au moment où on a réparti les crédits — vous savez comment ça fonctionne — les ministres ont eu tous leurs lots de mauvaises nouvelles. Alors, comment on va les annoncer? Bien, moi, je lui dis : Son cran d'arrêt, qu'il le fasse en éducation. On va revenir là-dessus particulièrement. Et il aurait notre appui pour ça, pour s'assurer justement de la protection de l'avenir de nos jeunes partout sur le territoire du Québec, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le chef de l'opposition officielle. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, vous ne souhaitez pas faire de remarques préliminaires, alors le temps va être réparti sur vos blocs d'intervention.

Documents déposés

Avant de débuter la période d'échange, je vais déposer les réponses aux demandes de renseignements.

Et nous allons maintenant entreprendre la période d'échange. Simplement pour rappeler les règles, puisque je suis convaincu que nous aurons des échanges constructifs dans cette étude des crédits : la présidence n'a pas pour but de contrôler à la seconde près... ce n'est pas une règle mathématique entre les questions et les réponses dans la période d'échange. Ceci dit, il est apprécié, pour avoir des échanges constructifs, à ce qu'il y ait une proportionnalité entre la question, les thèmes abordés dans la question, la durée de la question et les réponses qui sont fournies. Voilà.

Discussion générale

Sur ce, nous allons maintenant entreprendre le premier bloc d'échange, et je cède la parole à M. le chef de l'opposition officielle pour le premier bloc.

M. Bédard : Merci, M. le Président. Dans un contexte de restrictions budgétaires, on s'attend parfois à des stimulations de l'économie qui peuvent venir d'ailleurs, entre autres de l'étranger. Il peut arriver qu'il y ait des partenariats intéressants.

J'aimerais savoir du premier ministre, tout simplement... Il a fait plusieurs missions à travers le monde dans la dernière année. J'aimerais simplement savoir de sa part combien d'emplois sont reliés à ces missions, quelles ont été les retombées en termes d'investissement dans la dernière année.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. D'abord, je dirais que, lors de ces missions, ce qui m'a frappé, c'est à quel degré il fallait rassurer les investisseurs, qui avaient, et je n'en fais pas un reproche personnel à mon collègue, là, décodé une attitude pas très accueillante envers l'investissement au cours des mois qui ont précédé, de façon répétée, de plusieurs façons, que ce soit dans la fiscalité, que ce soit dans les politiques comme justement le Plan Nord, sur lequel on échangera, et ils se demandaient comment ça se faisait que, depuis quelques mois, on n'entendait plus parler du Plan Nord au Québec : Est-ce que c'est encore, le Québec, un endroit où on veut qu'on investisse ou il faut qu'on aille voir ailleurs? Alors, j'ai passé beaucoup de temps à faire ça.

Maintenant, effectivement, à chaque endroit, il y a eu des rencontres très intéressantes et très importantes. Je n'ai pas les chiffres immédiatement sous les yeux, mais on pourra les reprendre plus tard dans les crédits. Et le nombre des entreprises qui étaient avec nous était impressionnant. En Chine, il y avait près de 140 entreprises; en France, une soixantaine, si je me souviens bien; à Davos, de nombreuses rencontres. Et ce qu'il faut savoir, c'est que, oui, à Paris, il y a eu des annonces pour, je crois, une trentaine de millions d'investissement et plusieurs centaines d'emplois, mais souvent les résultats de ces missions se font plus tard, notamment à Davos, où il y a eu plusieurs rencontres qui vont donner lieu à des annonces au cours des prochaines semaines. Alors, il y aura des retombées. Il y a toujours des retombées. Je ne sais pas si mon collègue a participé déjà à ces missions économiques. Il sait également comment ça se produit. On va là pour ouvrir des portes, pour faire avancer des dossiers.

Ce n'est pas nécessairement au moment de la mission même que la conclusion se fait. On va voir des exemples, au cours des prochaines semaines, je le répète, autant pour Davos que pour les autres missions, de résultats très concrets.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition officielle.

• (15 h 40) •

M. Bédard : Je dois comprendre effectivement que, donc, on n'en a pas pour l'instant, il en souhaite. Mais je vais lui donner... effectivement, le climat était tellement morose. J'ai comme une liste des... je vous dirais, des projets qui ont été annoncés soit dans le cadre de ces missions ou dans le cadre des représentations de la part du Parti québécois à l'époque où nous étions au gouvernement, Mme Marois occupait cette fonction.

Le 6 septembre — là, je suis en 2013 — Danone, 40 millions; parc éolien Kruger, 300 millions; Lockheed Martin, 31 millions; Technicolor Canada, souvenons-nous, 7 millions, 200 emplois créés en trois ans; Aerolia, 82 millions; Ubisoft, 373 millions. C'est vrai que le climat était morose, mais on a quand même été pas pires. Imaginez-vous si le climat avait été bon. Le 4 octobre, Warner Bros., 63 millions; 11 octobre, Neptune Technologies & Bioressources, 43 millions; 18 octobre, Bridgestone, 40 millions; 28 octobre, Pratt & Whitney, 275 millions; Sural, 45 millions; 2 décembre, Aliments O'Sole Mio, 55 millions. Et, en 2014, je vous en fais... Groupe Aldo, 363 millions;  Cinesite 6,7 millions; FerroAtlantica — une chance qu'on est allés le chercher, ce projet-là, il y avait eu des démarches auparavant, mais c'est nous qui l'avons attaché et... parce que, malheureusement, les investisseurs s'étaient perdus dans les méandres — 375 millions; Ubisoft; Ciment McInnis — et là évidemment ce n'est pas à l'extérieur, mais ici, une chance qu'effectivement on l'a annoncée et on a scellé cette entente — 1 milliard pour la création de 2 300 emplois; Gameloft, 38 millions; AddÉnergie, et j'en passe parce que ça serait trop long. J'en ai d'autres ici, j'en ai une autre série.

Ce que je veux dire au premier ministre, c'est que de dire : C'est dans l'avenir, ce n'est pas suffisant. Ces missions-là doivent donner des résultats très concrets sur lesquels ils doivent être bien préparés, et on doit cibler les investissements ou les investisseurs dans lesquels on veut trouver des ententes. FerroAtlantica, d'ailleurs, c'était à Davos, si je me souviens bien, qu'on a rencontré les représentants pour sceller cette entente. Et je pense que c'est fondamental. Maintenant...

Une voix : ...

M. Bédard : Ah oui! Bien, on me parle même... oui, à Londres, Framestore, 300 emplois qu'on avait réglés. Évidemment, White Star Capital, Cinesite, 200 emplois, Ubisoft et FerroAtlantica.

Donc, c'est directement lié. Et, jusqu'à maintenant, je dois dire, la présence du premier ministre à l'international n'a pas eu que des bons résultats, et je lui dis amicalement, là. Entre autres, en Chine, disons que ça n'a pas été une visite particulièrement bien réussie. Je le dis, ça peut arriver, on est au début, on peut manquer, là, mais l'aventure sur le porc ne nous a pas beaucoup aidés. Il reste quand même que la personne qui est en contact avec le premier ministre représente tout près de 100 millions de personnes. C'est une province de 100 millions, c'est quand même plus de deux fois le Canada. Donc, ça reste quelqu'un de très intéressant. Il a fait une ouverture sur, par exemple, le boeuf. Il a dit : Le porc, je n'en veux pas. On a essayé de le convaincre. Je pense que c'est à partir de là qu'on s'est mis un peu le pied dans la bouche. Mais il a dit : Moi, je souhaiterais développer le créneau du boeuf et de l'agneau.

J'aimerais savoir du premier ministre, maintenant, où en est ce créneau. Est-ce qu'on a fait les démarches nécessaires pour faire en sorte que nos agriculteurs du Québec puissent exporter dans ces deux créneaux?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, je vais répondre avec plaisir à la question précise du collègue, mais je voudrais quand même lui faire remarquer pour son préambule que ça doit être pour ça qu'il s'est perdu 68 000 emplois en 2013 puis que la croissance économique a atteint un bas historique de 1 %.

Comme d'habitude, il fait une longue liste, puis, moi aussi, on m'a remis une longue liste d'annonces, mais je ne le ferai pas, je ne ferai pas de concours de catalogue avec lui. Mais ce que je note, c'est que je parierais que la grande majorité de ce qu'il a mentionné ont été des contacts qui ont été démarrés par le gouvernement qui a précédé. Il est même possible que ce qu'on va réussir a été débuté par son gouvernement. Alors, je l'amènerais à un peu plus de retenue dans ses commentaires, notamment sur FerroAtlantica, franchement, qui est un exemple classique et patent de ce que je viens de dire, qui est une transaction presque entièrement due aux efforts de l'équipe de M. Charest avant l'élection de 2012. Maintenant, en Chine, parce qu'il parle de la Chine, il y a eu 45 annonces et partenariats qui ont été conclus, 25 projets et ententes économiques avec des entreprises... québécoises et chinoises. Eux seuls, 12 projets sur les 25, représentent près de 1 milliard de dollars, et il y a plusieurs créations d'emplois qui sont associées à ça. Et il faut faire un suivi, il faut retourner en Chine plusieurs fois.

Maintenant, il me parle de la situation des exportations agricoles. Je veux lui rappeler cependant une partie de ce qu'on doit faire, c'est d'aider nos entrepreneurs et nos secteurs dans la représentation internationale. Et j'avais avec moi le président de la Fédération des producteurs de porcs, qui bien sûr tenait beaucoup à ce qu'on mentionne la disponibilité de porc québécois pour l'exportation. Et, en passant, l'exportation de porc québécois continue à augmenter au moment où on se parle, il n'y a jamais eu de ralentissement de l'exportation. Maintenant, effectivement, je me souviens de la réponse du gouverneur au sujet du boeuf et de l'agneau. On a fait des suivis à travers mon collègue de l'agriculture, et les réponses des secteurs concernés, c'est que ce n'était pas le moment de commencer ça parce que la production au Québec n'a tout simplement pas le volume nécessaire actuellement pour répondre aux besoins de l'importateur chinois. Alors, la pire chose qu'on pourrait faire, c'est de débuter une poussée d'exportation sans avoir une production en arrière pour l'assurer. Ça aurait été certainement une erreur assez terrible.

Puis, je tiens à le préciser, dans ces missions internationales, je me fais toujours accompagner du secteur culturel, de nos créateurs. Il y a eu 20 projets et ententes dans des institutions culturelles, établissements d'enseignement, des centres de recherche québécois et chinois. On a fait la promotion des grands projets économiques qui, je le répète... et je sais qu'il aime les tourner en dérision, mais c'est un peu normal dans le jeu politique, mais je peux vous dire que, notamment en Chine et ailleurs, les projets comme le développement du Nord québécois suscitent énormément, énormément d'intérêt. Il y a plusieurs industriels chinois qui sont déjà présents chez nous, d'autres qui veulent venir dans plusieurs domaines, y compris dans le domaine du minerai de fer malgré la baisse récente des taux, des cours, parce que les Chinois voient à long terme : ils voient pour les 30, 40 prochaines années. Et il y a d'autres ressources que le fer dans le Grand Nord. Il y a des diamants, il y a du graphite, il y a du lithium, il y a des quantités de terres rares. D'ailleurs, quand on parle de la Chine, des terres rares, qui sont à 95 % fournies par les Chinois, les gens du monde entier cherchent une diversification de leurs sources d'approvisionnement, et le Québec est très bien placé de ce côté-là. D'ailleurs, on a commencé à faire la promotion de ce secteur et à annoncer un site de transformation dans la région de Bécancour.

Alors, je pense que quand même les résultats sont très bons. Il me parle de Framestore, que j'ai également rencontré à Londres. Il y aura, et ils l'ont annoncée déjà, une deuxième phase d'investissement, qui d'ailleurs a suivi une rencontre personnelle qu'on a faite là-bas. Mais je veux juste l'amener à considérer, encore une fois, lorsqu'il fait ses énumérations... Moi, je parie que je pourrais les prendre et les faire tous remonter à un contact précédent d'Investissement Québec ou du gouvernement qui a précédé. Il est possible que les annonces que je ferais ou que mes collègues feront au cours des prochains mois viennent de contact qui aura été fait par le gouvernement auquel il a participé. C'est la nature même des choses. Il faut résister à la tentation — et on sait que ça a déjà été fait — d'accélérer les annonces, et de tenter d'accélérer les annonces pour les faire coïncider à une mission à l'étranger, c'est souvent la plus sûre façon d'endommager un dossier et d'arrêter sa progression.

Alors, M. le Président, je pense que ces missions internationales sont nécessaires, elles vont bien sûr continuer, elles sont absolument essentielles, oui, pour l'économie, pour le rayonnement du Québec, pour notre secteur culturel, et on va le faire avec plaisir.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bédard : Ce que je veux dire au premier ministre, c'est que ce n'est pas de la nature même des choses quand les projets se bouclent. Puis, quand le premier ministre se déplace, c'est comme quand un chef d'entreprise se déplace quand il est à l'extérieur, il est là pour «closer», qu'on appelle en bon langage juridique. Vous connaissez ça, les «closings»?

En général, il va profiter de ces moments-là pour voir où sont les opportunités et les «closer». Et je vais lui dire que, si Pauline Marois n'avait pas été première ministre du Québec, il n'y aurait pas eu Ciment McInnis et ces projets... Jamais. Et, si Pauline Marois n'avait pas été première ministre, on n'aurait pas investi avec la compagnie Aldo pour faire son centre de distribution ici. Et là je pourrais vous en citer plusieurs. Ce n'est pas comme une clientèle, ça. Quand tu es premier ministre ou que tu es entrepreneur ou tu as la responsabilité de développer et tu attends, c'est qu'il ne se passe rien. Le reste, tu as assez chaud pour t'occuper. Vous savez, quand on a à gérer 72 milliards, notre journée, elle peut se remplir très facilement. Il y a du monde qui demande des rencontres. L'idée, c'est : Où on met notre priorité, où on met notre temps?

Et, quand le premier ministre nous dit : C'est dans la nature des choses, c'est là que je lui dis qu'il fait une profonde erreur et il ne devrait pas faire cette erreur. C'est sa première année, mais je peux lui dire que, s'il continue dans ces orientations, c'est sûr que son impact va être nul. C'est comme un général qui refuse d'être au front, là, il ne sait pas ce qui se passe dans cette réalité. Il devrait, je pense, prendre une part personnelle du développement économique. Quand nous avons dit : Nous avons fait une priorité d'emploi, je peux vous dire que tout le monde était mobilisé. C'est le secrétaire général... tout le monde était derrière les possibilités, et on les creusait rapidement puis on donnait une réponse. Est-ce que c'est oui, c'est non? «Go-no-go», comme on dit. Alors, je l'invite à le faire.

Je reviens très rapidement... je ne veux pas m'étendre là-dessus, mais, sur l'agneau et sur le boeuf, c'est symptomatique de quelque chose. Parce qu'il est quand même premier ministre du Québec, il va à l'extérieur, il y a des gens qui montrent un intérêt. Il me donne une réponse qui est intelligible et qui, intellectuellement, se défend.

• (15 h 50) •

Or, dans les faits, ce que je constate, c'est qu'après sa visite, sa mission au mois de décembre, cinq mois plus tard, la Fédération des producteurs bovins n'en avait jamais entendu parler, les gens de l'agneau non plus. Ils ont même dit à la journaliste à l'époque : Vous me l'apprenez, cinq mois plus tard. Je pourrais dire : C'est la faute du premier ministre, mais il y a quelque chose qui ne fonctionne pas, là. M. Paradis nous a dit... Le ministre de l'Agriculture a dit, pardon... a tenu à préciser qu'il avait reçu un appel téléphonique du chef de cabinet du premier ministre, et c'est tout ce qu'on sait dans l'intérêt du boeuf et de l'agneau. On est tombés dans une mauvaise conjoncture, a-t-il toutefois ajouté. Le problème, c'est que c'est le journaliste qui fait le suivi, et ça devrait être le premier ministre et les gens auprès de lui pour saisir cette opportunité. La réponse de ne pas le faire... Il y a toujours des bonnes raisons de ne pas faire les choses, mais, s'il y a une opportunité là, produire de l'agneau, produire plus d'agneau, produire plus de boeuf, c'est chimiquement possible, et on a assez de terres pour le faire. Je vous dirais qu'il y a assez de possibilités. Donc, est-ce qu'on garde la fenêtre ouverte? Y a-tu encore une porte ouverte? Y a-tu du court terme, moyen terme?

Est-ce que cette opportunité-là pour nos producteurs, qui trouvent ça dur... Malgré l'augmentation du prix du boeuf, il y a une belle opportunité. Est-ce que le premier ministre compte faire un suivi serré de ces opportunités, alors que, dans le porc, je pense qu'on a compris qu'il n'y avait pas d'autre possibilité en Chine, je vous parle, dans la province du représentant... du gouverneur, plutôt, de la province chinoise.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, en soulignant qu'il reste six minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : En fait, c'est inexact. Les exportations de porc en Chine continuent d'augmenter. Effectivement, le ministre de l'Agriculture a contacté les deux secteurs dont il fait mention.

Et là je pense qu'il faut réviser ces notions en termes de la réalité de l'agriculture et de l'élevage au Québec, parce qu'il faut savoir que, dans le domaine de l'agneau, le Québec est un importateur net d'agneau. On importe plus d'agneau de la Nouvelle-Zélande que ce qu'on produit chez nous. Alors, la pire chose à faire, ce serait de lancer ce secteur dans une exportation dans un pays qui a d'énormes besoins et de rapidement constater qu'on n'est pas en mesure d'arriver au niveau de ces besoins en termes de production. Et c'est la même chose pour le boeuf. Alors, oui, le suivi va se faire à travers le ministre de l'Agriculture, mais je crois que, sur le plan de la quantité d'exportations et des revenus pour le Québec et les emplois, le secteur du porc, dans le domaine de l'élevage animal, demeure de loin, de loin le plus prometteur.

Je voudrais quand même faire part de certaines bonnes nouvelles, là, parce qu'évidemment on parle d'emploi, on parle de croissance économique. Les rapports qu'on vient tout juste de recevoir sur la croissance économique du Québec confirment que la tendance continue de s'inverser, que l'économie se reprend, redémarre au Québec : en janvier par rapport à janvier précédent, au cours du mois... par rapport au mois précédent... Et il me parle d'emploi. Au cours des six derniers mois, M. le Président, 40 000 emplois sont créés, puis je ne parle pas des 57 000 depuis mai, là. Les six derniers mois, 40 000 emplois ont été créés au Québec. De ces 40 000, il y en a 36 000 qui sont des emplois à temps plein. Alors, effectivement il y a un impact concret et mesurable, il y a eu une inversion de tendance. Personne ne peut nier qu'il y a eu une inversion de tendance. Est-ce qu'on souhaiterait qu'elle ait été encore plus importante? Bien sûr. Mais, quand on regarde les chiffres de l'emploi, quand on regarde les chiffres de croissance économique, ce qu'on observe, c'est que, dans les semaines qui ont suivi le printemps 2014, il y a nettement une inversion de la direction des tendances dans tous les secteurs. Et ce n'est pas, encore une fois, suffisant, il faut que ce soit beaucoup mieux et beaucoup plus, mais je dois lui dire qu'effectivement les signes sont très encourageants, et on doit faire mieux parce qu'on a un grand potentiel au Québec, et là-dessus lui et moi, on est tout à fait d'accord.

Alors, les signes sont encourageants, la création d'emplois se fait, mais, pour que le développement économique s'accomplisse — et c'est un thème que je n'entends pas laisser aller au cours des trois prochaines années — pour que le développement économique s'accomplisse, il ne faut pas qu'il y ait d'incertitude politique, M. le Président. Et ça a l'air d'un thème théorique pour nos collègues. Parfois, ils disent : Non, ce n'est pas vrai, les entreprises, ça ne les dérange pas. Ça les dérange. L'investisseur, l'argent de l'investissement, c'est excessivement nerveux. Alors, les autres sujets dont on va parler dans les conversations, bien c'est : Est-ce qu'il va encore y avoir des référendums sur la séparation? Qu'est-ce que c'est que cette histoire? Est-ce que ça va encore revenir sur le plancher? Deuxièmement, la question de la charte : Est-ce que vous êtes rendus à faire de la discrimination, au Québec, quand on va venir s'installer chez vous? Toutes ces questions ont été soulevées. Ce n'est pas agréable pour moi de le dire, là, mais elles ont été soulevées, puis chaque fois j'ai été obligé de donner des explications.

Alors, oui, on reprend les conversations, puis je pense que les gens voient que les directions ne sont pas les mêmes, mais on ne peut pas nier ces phénomènes-là, on ne peut pas nier ces réalités-là, et de faire croire au Québec que ces phénomènes-là n'ont pas d'influence ou d'impact, c'est, malheureusement, ne pas dire la vérité aux gens.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. Trois minutes, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Bédard : Écoutez, je ne sais pas si ça, ça nuit, mais je vous dirais que les questions qu'on a eues sur la corruption étaient pas mal plus dures à répondre, je vous dirais, M. le Président, et, par chance, ça ne nous a pas empêchés de conclure toutes ces ententes-là. Et, je le répète au premier ministre, il y a toujours une justification intellectuelle à ne pas faire les choses, tout le monde est assez intelligent pour trouver une raison.

L'idée, c'est les résultats. Et, moi, ce que je demanderais au premier ministre : d'ici la fin des crédits, de nous transmettre la liste des emplois qui ont été créés à partir des missions qu'il a faites et des investissements jusqu'à ce jour — je peux comprendre qu'il peut y en avoir d'autres dans l'avenir — mais jusqu'à ce jour. Et d'ailleurs certaines missions datent de plusieurs mois, il a dû y avoir des résultats très concrets, et je suis convaincu que les gens du Conseil exécutif sont capables de réunir ça. Avec les gens que je vois ici, je suis convaincu qu'on est capables d'avoir ces chiffres-là, et là on parlera des impacts et des résultats concrets et réels. Ce que je veux dire sur le point... je vais revenir un peu plus tard sur un autre sujet, mais, quand il parle de reprise, je ne vois pas, dans les chiffres qui ont été dévoilés, de grande reprise, hein? Les chiffres sur les mises en chantier devraient plutôt l'appeler... Je lui ai dit tantôt : C'est les chiffres les plus bas depuis 2001. Et ça, c'est la classe moyenne qui dit que, là, ça ne marche plus. Alors, quand je vous parle de morosité, là, quand la classe moyenne n'investit plus, le pays va mal. Puis ce n'est pas les 0,1 % qui vont stimuler notre économie, M. le Président. Donc, il y a un problème, puis les signaux qui sont envoyés par le gouvernement, c'est que ça va leur coûter plus cher, entre autres, aux familles.

Mais l'autre élément, c'est qu'il dit : Je vois des signes de reprise. On est dans un contexte où les États-Unis sont en reprise, le dollar est très bas, donc on devrait y voir un avantage. Or, on constate qu'au niveau de l'augmentation du PIB réel, M. le Président, nous serons à 1,7 % cette année et à 1,5 % l'an prochain. C'est les prévisions de Desjardins. Par rapport au reste du Canada, c'est anémique. Où voit-il dans ces chiffres le signal positif pour les travailleurs, les familles du Québec?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, il reste moins d'une minute pour un début de réponse.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. C'est un grand plaisir pour moi de le faire, parce que, je répète, là, de mai à mai, 57 000 emplois créés au Québec; six derniers mois, 40 000 emplois, dont 36 000 à temps plein. En janvier 2015, il y a une augmentation du PIB du Québec plus importante que les augmentations dans le reste du Canada, et le secteur de la construction en particulier a augmenté de 0,8 %. Ce qu'on note dans le secteur de la construction, c'est qu'il y a eu moins de mises en chantier de maisons neuves, effectivement, mais beaucoup plus de rénovations. Donc, les consommateurs investissent dans leurs logements mais de façon différente, et c'est l'activité qui reprend.

Alors, que ce soient les chiffres de croissance économique — nous, on prévoit 2 %, c'est conservateur par rapport à d'autres banques, comme la CIBC, et d'autres qui prévoient plus de croissance économique — que ce soit pour l'emploi, que ce soit pour les investissements privés, on peut faire encore beaucoup mieux, mais la tendance est nettement inversée, et on va continuer nos efforts, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça met un terme à ce premier bloc d'échange. Je me tourne maintenant vers M. le député de Dubuc. À vous la parole.

M. Simard : Merci, M. le Président. M. le premier ministre, comme vous en avez parlé dans vos remarques préliminaires, M. le premier ministre, je vais vous poser des questions concernant le Plan Nord, un projet, je vous dirais, d'une génération, un projet important pour le Québec.

Le 8 avril dernier, vous annonciez, avec plusieurs de vos ministres, le lancement du Plan Nord, un nouveau jalon important pour la relance de l'économie du Québec et celle des régions bien sûr, dont ma région, le Saguenay—Lac-Saint-Jean. Tel qu'annoncé, le Plan Nord devrait, d'ici 2035, avoir permis la mise en valeur du potentiel diversifié du territoire au bénéfice de ses populations et de tout le Québec, et ce, dans le cadre du développement durable exemplaire. Dans la même foulée, vous avez annoncé que c'est la Société du Plan Nord, appuyée par l'Assemblée des partenaires, dont les membres représentent les membres des communautés du territoire, qui constitue l'instance clé du déploiement de ce grand chantier et qu'une somme de l'ordre de 425 millions de dollars y sera consacrée d'ici 2020.

Ma question, M. le premier ministre : Pouvez-vous nous dresser un portrait de ce qui a été annoncé lors du lancement du Plan Nord au début de mois d'avril et quelques détails sur la vision du gouvernement concernant ce projet rassembleur?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (16 heures) •

M. Couillard : Merci. Merci, cher collègue, M. le député de Dubuc. Effectivement, le 8 avril 2015, le Plan Nord a été relancé à l'horizon 2035 avec un plan d'action 2015‑2020 : plusieurs annonces économiques, sociales et culturelles liées au développement nordique. C'est des gestes concrets pour soutenir le développement du Nord québécois et, malgré ce qu'on pense ailleurs, dans d'autres partis politiques, un facteur clé de la croissance économique du Québec au cours des prochaines années, 1,2 million de kilomètres carrés avec des richesses phénoménales qui sont les nôtres et qu'on doit exploiter, exploiter de façon durable. Il y a une vision à long terme mais également une série d'actions à mettre en place au cours des cinq prochaines années, 90 actions, M. le Président.

À l'horizon 2035, le Plan Nord aura permis la mise en valeur du potentiel du territoire au bénéfice de ses populations et de tout le Québec — j'ai rencontré des entreprises partout au Québec qui bénéficient de l'activité dans le nord de notre État — dans le cadre d'un développement durable exemplaire, une approche qui est globale, intégrée, et cohérente, et responsable. Le plan d'action 2015-2020 présente les principes fondamentaux qui baliseront les actions du gouvernement, les trois grandes orientations stratégiques qui encadrent les actions prioritaires, le cadre de mise en oeuvre avec la Société du Plan Nord et le cadre financier.

Les annonces du 8 avril concernaient les relations essentielles avec les peuples autochtones; le vaste potentiel énergétique du territoire nordique; l'évaluation des impacts du développement sur la santé et le bien-être des communautés nordiques; les mesures relatives à l'exploration minière; le soutien à l'investissement minier avec le renouvellement du mandat de la Société d'investissement et de diversification de l'exploration, SIDEX, jusqu'en 2025 et la reconduction du programme Action-Terrain pour 2015; le plan de développement des infrastructures de transport, incluant une approche de partage des infrastructures nordiques avec les partenaires utilisateurs de ces infrastructures; les aéroports; la poursuite de la mise à niveau entreprise en 2009 de 17 des 20 aéroports situés sur le territoire — l'amélioration et la réfection des aéroports, on le sait, sont les enjeux prioritaires en matière de transport, de sécurité et de développement. Des investissements de 153 millions de dollars sont inscrits au Plan québécois des infrastructures 2014-2024 à cet effet. À titre d'exemple, le gouvernement a annoncé la construction d'une nouvelle aérogare et d'un nouveau garage qui remplaceront les installations actuelles d'Inukjuak, au Nunavik, et les travaux s'échelonneront sur les deux prochaines années, et tout ça, c'est des occasions pour nos PME, notamment chez nous, au Lac-Saint-Jean, d'avoir des contrats, et de l'activité, et des emplois. La route 389 entre Baie-Comeau et la limite du Labrador, c'est la plus longue route secondaire du Québec, avec 570 kilomètres, et la seule route provinciale à se rendre au-delà du 51e parallèle, un rôle stratégique — on est déjà engagés dans ce projet. Le prolongement de la route 138 entre Kegaska et Blanc-Sablon est un autre projet de développement de 400 kilomètres sur un territoire où les conditions géographiques et physiques sont difficiles. La route de la Baie-James fera l'objet de travaux de réfection importants au cours des cinq prochaines années.

Donc, au total, plus de 1 milliard de dollars seront investis au cours des 10 prochaines années par le ministère des Transports et le Secrétariat du Plan Nord dans les infrastructures de transport.

La mise en valeur du patrimoine culturel nordique par différentes mesures, comme le maintien et la bonification des ententes de développement culturel, parce qu'on veut bonifier ces ententes-là pour reconnaître la force des cultures des Premières Nations, leur permettre de les exprimer et de les transmettre à leurs jeunes générations; le soutien au développement au gaz naturel, un approvisionnement majeur de source d'énergie; les investissements en éducation : si on veut que les Premières Nations, les occupants du Nord tirent parti du développement de ce territoire, il faut que l'éducation suive. La commission scolaire crie construira une école primaire à Wemindji pour répondre à la croissance de l'effectif et à un espace pour consolider et améliorer l'offre de formation; 20 logements répartis à Mistissini et les autres communautés afin d'offrir un hébergement au personnel enseignant. Deux projets d'envergure, donc, qui concrétisent un soutien financier de plus de 29 millions des gouvernements québécois et canadien. Près de 7,4 millions de dollars seront versés par le gouvernement du Québec, dont 2,9 proviennent du Fonds du Plan Nord. Des nouvelles places en service de garde à contribution réduite : sur le Plan Nord, 20 projets de services de garde qui totalisent plus de 800 nouvelles places à contribution réduite seront réalisés entre 2015 et 2021.

La protection de l'environnement et de la biodiversité, avec notamment la protection de la rivière Kovik ainsi qu'une immense partie de son bassin versant; la création du parc national Ulittaniujoulek, quelque chose comme ça... je m'excuse, je recommence; Ulittaniujalik — voilà, là, je l'ai eu — au Nunavik et la valorisation de la biomasse forestière.

La stratégie touristique québécoise au nord du 49e parallèle; c'est important, le tourisme, très intéressant, le tourisme, l'écotourisme et le tourisme d'aventure dans le Nord.

La construction de 90 logements au Nunavik; la dotation de 200 millions au volet Plan Nord du Programme d'infrastructures Québec-Municipalités.

Il y a eu, ce même jour, des investissements miniers privés de 225 millions de dollars qui ont été annoncés avec les représentants de Focus Graphite, Redevances aurifères Osisko, Glencore et de COREM. Ces travaux consistent en le prélude à des investissements beaucoup plus importants qui pourraient se concrétiser au cours des prochaines années, et je voudrais en profiter pour saluer la contribution, le travail de mon collègue adjoint parlementaire, qui s'occupe avec moi de développement régional dans notre région, du sommet régional qui se tiendra en juin et qui, bien sûr, est étroitement lié au plan de développement du Nord.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le premier ministre. Étant donné qu'on est dans le Plan Nord, je vais continuer dans ce sens-là.

Il s'agit d'un très vaste chantier, comme vous l'avez dit, M. le premier ministre : développement minier et touristique, protection des milieux naturels, et bien d'autres. C'est donc un projet extrêmement important pour l'ensemble des Québécois et en particulier pour les populations de ce vaste territoire qu'est le Nord du Québec. Déjà, on peut imaginer l'importance des impacts que ce projet de société aura pour l'ensemble du Québec, autant au Nord qu'au Sud. Vous l'avez dit souvent, M. le premier ministre, le Plan Nord, c'est autant pour le Sud. Déjà, on peut imaginer toute l'importance au niveau économique pour l'ensemble de nos régions et, bien sûr, autant pour la capitale que pour la métropole. Il faut comprendre que l'ensemble des Québécois vont y être gagnants.

J'ai lu, par exemple, une présentation de la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik qui a été présentée à la Commission de la santé et des services sociaux en 2011, que ce qui distingue notamment le Nunavik du Sud est que la population est très jeune et que la croissance démographique y est élevée. Ça m'a sauté aux yeux, M. le premier ministre, c'est très important. En effet, on dit qu'entre 1996 et 2006 la population a augmenté de 26 % — on ne peut pas dire la même chose ici, au Sud, mais, dans le Nord, c'est une augmentation extrêmement importante — et que 13 % de la population inuite est âgée de moins de quatre ans. Ça, c'est très important. J'ai aussi pu lire dans cette présentation que l'état de la santé général de la population au Nunavik, tel que mesuré par les indicateurs généralement utilisés à cette fin, est beaucoup inférieur à celui du reste du Québec et du Canada. Il s'avère également que la fréquence de plusieurs problèmes psychosociaux est à la hausse sur le territoire. On peut d'ailleurs croire que ces problèmes — je pense, entre autres, à la consommation de drogue ou d'alcool, à la violence conjugale — sont reliés un avec l'autre.

Toutefois, il est possible de croire qu'avec la relance du Plan Nord c'est une nouvelle dynamique sur le plan économique et social qui va s'installer pour les populations du Nord. Parce que moi, dans une autre vie, voilà quelques années, j'ai visité le Nord et j'ai vu des jeunes justement qui se cherchaient du travail. J'en ai rencontré énormément. Et il y avait une préoccupation qui est encore là aujourd'hui, mais le fait d'avoir un projet va les amener, j'imagine, vers d'autres cieux, de nouveaux emplois, de nouvelles possibilités de formation et d'ouverture sur le territoire. La majorité de ces impacts pourront être positifs, mais il faut également prendre en considération le potentiel effet négatif sur les populations du Nord québécois.

Ma question, M. le premier ministre, M. le Président : Pouvez-vous nous informer des mesures qui sont mises en place dans le cadre de la relance du Plan Nord afin de tenir compte des impacts sociaux tant positifs que négatifs? Merci, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, merci, M. le Président. Des choses à dire d'abord, en introduction, c'est qu'il est évident, je crois, pour tout le monde ici que le Nord du Québec ne pourra être développé sans la pleine participation et le bénéfice également des populations qui y résident. Ça comprend bien sûr les Premières Nations mais également des populations non autochtones, les Jamésiens, les citoyens de la Côte-Nord qui habitent sur le territoire du nord du 49e parallèle et qui doivent également y retrouver leur compte en matière économique, en matière d'emploi mais également en matière de développement social, sachant fort bien que les impacts, parfois, du développement rapide dans certains secteurs, certaines régions doivent être mesurés avec beaucoup d'attention.

Alors, le contexte géographique du Nord du Québec présente des défis spécifiques à relever pour les communautés qui y habitent, notamment en matière de santé, comme on vient de le souligner avec justesse. Il y a quatre principes fondamentaux à respecter : d'abord, il faut que ce soit un projet planifié et coordonné qui mise sur le partenariat, l'investissement du secteur privé et l'accompagnement des communautés; une perspective de développement durable véritable intégrant les trois dimensions — économique, sociale et environnementale; une intervention gouvernementale adaptée aux réalités des communautés locales et autochtones à l'ensemble du territoire nordique; un développement harmonieux, éthique et respectueux des populations autochtones et non autochtones et, bien sûr, soucieux de l'égalité entre les femmes et les hommes. En ce sens, nous souhaitons mettre en place des mesures pour nous assurer que tout se fait dans le respect des habitants du Nord et que ça se fasse en harmonie avec les besoins de la population en matière de santé et de mieux-être. Et, bien sûr, une des mesures, une des façons d'effectuer cet examen, c'est l'évaluation d'impact sur la santé. L'évaluation d'impact sur la santé, c'est une démarche d'évaluation des répercussions positives et des risques potentiels d'un projet sur la santé de la population et la distribution sociale de ses effets. Il s'agit ainsi de favoriser une prise de décision éclairée dès l'étape de la planification pour minimiser les impacts négatifs, maximiser bien sûr ceux qui sont positifs quant à la santé et au bien-être des populations nordiques.

• (16 h 10) •

L'approche d'évaluation des impacts que le gouvernement met en place est basée sur l'expérience du ministère de la Santé et des Services sociaux depuis la mise en oeuvre de l'article 54 de la Loi sur la santé publique ainsi que sur un ensemble de meilleures pratiques semblables à celles qui sont utilisées à différents endroits dans le monde.

Au cours des dernières années, des travaux et diverses consultations ont mené à l'élaboration d'un guide d'évaluation et de matériel de formation permettant l'identification des enjeux de santé prioritaires. Celui-ci inclut non seulement les impacts biologiques, physiques et chimiques, mais il intègre aussi tous les autres enjeux de santé et psychosociaux. L'évaluation d'impact sur la santé pour les projets de développement du Nord s'arrimera à l'actuelle procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, et ce, afin de ne pas dédoubler les mécanismes de consultation existants.

Il y a d'autres enjeux qui sont moins bien documentés, notamment les déterminants sociaux de la santé. Il faut donc maintenant nous assurer que les évaluations incluent l'ensemble des déterminants de la santé en mettant l'accent sur les enjeux prioritaires en regard de ces problématiques pour les populations du Nord, qui sont plus préoccupantes qu'ailleurs au Québec. L'évaluation d'impact sur la santé sera sous la responsabilité des promoteurs de projet. Le réseau de la santé et des services sociaux fournira une expertise en accompagnement aux promoteurs. Ce sera mis en place graduellement d'abord grâce à un projet pilote en collaboration avec quelques entreprises déjà actives sur le territoire du Plan Nord. Ces mesures pourront varier selon le contexte, les projets mais devront concerner autant des déterminants environnementaux, comme la qualité de l'air, les nuisances, la salubrité alimentaire, que des déterminants sociaux, comme la prévention auprès des toxicomanes, la sécurité routière, l'emploi, l'éducation et la formation.

La responsabilité sociale des entreprises doit également être encouragée afin qu'elles puissent adopter, par exemple, des mesures de bon voisinage respectueuses des communautés hôtes, des politiques strictes relatives au contrôle des drogues ou des pratiques en vue de favoriser la conciliation travail-famille. D'ailleurs, pour les familles du Québec, notre gouvernement a annoncé 800 nouvelles places à contribution réduite pour les régions de la Côte-Nord et du Nord-du-Québec. Ces places s'ajoutent aux 4 900 déjà offertes sur le territoire du Plan Nord, ce qui devrait permettre, d'ici 2021, à porter ce nombre total à plus de 5 700.

L'objectif du projet pilote est également de soutenir les intervenants du réseau de la santé et les aider à travailler le plus en amont possible avec les promoteurs dès l'étape de la planification. Enfin, il est prévu d'évaluer la procédure d'évaluation d'impact sur la santé à différents moments, et ce, bien sûr, pour améliorer constamment les façons de faire et assurer une reddition de comptes quant aux leçons apprises pour favoriser le transfert des connaissances.

Donc, tout ça pour dire, M. le Président, comme je le disais au départ, que ce plan de développement ne saurait exister et ne saura exister en dehors d'un partenariat étroit avec les communautés qui habitent le territoire et le respect des priorités de développement qu'elles se sont données. La poursuite du dialogue avec les partenaires des territoires nordiques témoigne de la volonté ferme du gouvernement de maintenir et de renforcer la relation privilégiée et dynamique qu'il a établie avec le milieu. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le député de Dubuc, en soulignant qu'il reste cinq minutes à ce bloc d'échange.

M. Simard : Merci, M. le Président. D'abord, M. le Président, pour continuer dans le Plan Nord, vous comprendrez que c'est un projet extrêmement important, on en entend parler énormément.

Les opportunités de croissance économique et de création d'emplois dans le Nord québécois sont nombreuses et diversifiées. Les occasions d'affaires qui découlent du Plan Nord bénéficient à l'ensemble des régions du Québec. Au cours des dernières années, le gouvernement a rendu disponibles à partir du Fonds du Plan Nord près de 75 millions afin de contribuer à la concrétisation d'initiatives porteuses et stratégiques pour le développement et l'accès au territoire, dont la réalisation de la première phase d'une étude concernant le nouveau lien ferroviaire pour améliorer l'accès à la fosse du Labrador, le prolongement de la route 167 vers les monts Otish, la réfection de la route de la Baie-James. Le maintien des interventions en appui au développement du Plan Nord s'est avéré, à ce jour, un choix judicieux et porteur de prospérité pour l'ensemble du Québec. En effet, le Plan Nord est, selon une récente enquête de l'Institut Fraser, l'un des facteurs ayant contribué à faire passer le Québec du 18e rang au sixième rang mondial pour son attrait auprès des investisseurs miniers — le premier ministre l'a dit, M. le Président — alors que le précédent gouvernement nous avait amenés au 22e rang.

Suivant le dépôt du projet de loi sur la Société du Plan Nord, le 30 septembre 2014, et de sa sanction, le 5 décembre dernier, la Société du Plan Nord est entrée en fonction le 1er avril 2015. Cette nouvelle société d'État a notamment pour mandats de coordonner la réalisation d'infrastructures et, le cas échéant, de les implanter et de les exploiter seule ou en partenariat, d'accompagner les communautés locales et autochtones dans leurs projets de développement, de contribuer à la mise en place de mécanismes permettant de consacrer, d'ici 2035, 50 % du territoire du Plan Nord à des fins autres qu'institutionnelles, à la protection de l'environnement et à la sauvegarde de la biodiversité. Elle mettra également en place le bureau de commercialisation afin de maximiser les retombées économiques du Plan Nord pour tout le Québec.

Au cours de la dernière année, le Secrétariat du Plan Nord a ainsi travaillé de concert avec les ministères et organismes et a consulté les partenaires afin d'identifier les axes d'intervention prioritaires qui soutiendront à court terme le développement du Nord.

M. le premier ministre, pouvez-vous nous expliquer brièvement quelques grands axes qui indiquent comment le gouvernement entend mettre de la valeur à nos ressources naturelles?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, ce, brièvement, devra se faire en deux minutes, M. le premier ministre.

M. Couillard : Parfait, M. le Président. Je vous remercie de me préciser la chose.

Alors, effectivement, il faut mettre en valeur nos ressources naturelles. C'est la base même de ce qu'on doit réaliser dans le Nord. Il y a des mesures effectivement qui ont été annoncées et surtout la Société du Plan Nord, qui est l'organisme qui va être là comme étant le premier site de contact des partenaires, notamment les entreprises mais également les populations locales, pour non seulement participer au développement, mais questionner le développement et l'orienter suivant les priorités de la région.

Le Fonds du Plan Nord, donc, géré par la société, dispose maintenant d'une enveloppe de 425 millions pour les cinq prochaines années, et la Société du Plan Nord, on sait, est entrée en fonction le 1er avril dernier. Le conseil d'administration est en train d'être formé afin de s'assurer que les régions impliquées soient représentées, notamment notre région, du Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui sera représentée au conseil d'administration. On doit bien sûr favoriser l'appui à l'exploration minière, bien sûr, pour l'exploitation elle-même, mais également pour accélérer la caractérisation du territoire, qui nous permettra, d'ici à 2035, de réserver 50 % du territoire à des fins autres qu'industrielles. Alors, on a annoncé le report d'un an de la hausse de tarification des titres miniers; la réduction pour deux ans du coût minimum des travaux à effectuer sur une concession; le renouvellement du mandat de SIDEX, comme je l'ai dit tantôt, et la prolongation de son programme Action-Terrain; l'amélioration des connaissances géoscientifiques sur le territoire du Plan Nord; un appui accru à la recherche sur la valorisation des résidus miniers et au développement responsable de l'industrie minière; l'élargissement de la définition des frais d'exploration pour inclure certaines dépenses liées aux études environnementales et aux consultations des communautés.

Il faut également prévoir l'évaluation des ressources en énergie, notamment en énergie renouvelable, l'extension du réseau de distribution du gaz naturel, et on a prévu déjà une déduction pour amortissement accéléré pour les biens utilisés dans le procédé de liquéfaction du gaz naturel. Uniquement faire le transfert du diesel, du mazout vers le gaz naturel liquéfié, ça entraîne des économies d'émissions très importantes. Ce nouveau, bien sûr, tarif également qui va être mis en place, de développement économique pour l'électricité, on l'a annoncé il y a quelque temps, sera offert aux entreprises qui voudront s'installer et développer leurs projets dans le Nord du Québec. On mettra bien sûr en place de nouvelles normes pour obliger les sociétés minières à divulguer leurs paiements effectués à des gouvernements locaux et étrangers, et la législation intégrera les obligations de divulgation de la Loi sur les mines. L'administration de cette loi sera confiée à l'Autorité des marchés financiers.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Ça complète ce temps que nous avions. Merci pour ces questions et ces réponses. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, à vous la parole pour votre premier bloc d'échange.

M. Legault : Merci. Je voudrais d'abord vous saluer, M. le Président, saluer le premier ministre, le chef de l'opposition officielle, mes collègues, tous les fonctionnaires qui sont ici aujourd'hui pour aider à répondre à nos questions.

Le premier ministre ne sera pas surpris que mes questions portent sur l'économie. J'ai, il y a trois ans et demi, fondé un nouveau parti politique parce que je considérais qu'il n'y a aucun parti politique qui a des objectifs ambitieux, concrets pour réduire l'écart de richesse inquiétant, l'écart de richesse énorme que le Québec a avec ses voisins. M. le Président, le Québec a un écart de richesse de 15 % avec l'Ontario. L'objectif concret qui est proposé par la CAQ, c'est, en deux mandats, d'éliminer cet écart de 15 % avec l'Ontario. Par contre, c'est juste un début, M. le Président, parce qu'on sait que le Québec a un écart de 26 % avec le reste du Canada, 47 % avec les États-Unis. Je pense que vous commencez à savoir qu'on est 57es sur 61 États en Amérique du Nord. Je sais que le premier ministre rit de ça à chaque fois. Moi, je ne trouve pas ça drôle. Et c'est ma principale motivation à chaque matin que je me lève puis c'est ma principale motivation aussi pour avoir fondé la CAQ.

Donc, ma question est simple. Je voudrais savoir est-ce que le premier ministre s'est donné un objectif concret de réduction de l'écart de richesse du Québec pour son mandat de quatre ans.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (16 h 20) •

M. Couillard : Bien, M. le Président, bien sûr, comme lui, on veut réduire cet écart, puis je salue sa préoccupation pour les questions économiques. C'est également au coeur de notre action quotidienne, le développement de l'économie, la création d'emplois, qu'on mesure de plusieurs façons, entre autres, par le niveau de vie, entre autres, par les écarts de richesse, de revenus disponibles. Il a souvent mentionné ces statistiques, qui différencient le Québec des autres juridictions, que ce soient nos voisins ontariens, et les autres.

Alors, je ne veux pas, M. le Président, nier ces différences, elles existent, mais il faut quand même les replacer dans leur perspective, parce que, lorsqu'on parle de revenus disponibles, on a une croissance, entre 2008 et 2013, qui est très près de celle de l'Ontario. Il y a une accélération pas suffisante, mais il y a un changement en termes de tendance, certainement. Il y a également le fait que, compte tenu des services publics disponibles à bas prix au Québec par rapport à l'Ontario, jusqu'à 125 000 $ de revenu familial, il y a plus d'argent dans les poches d'une famille au Québec que dans une famille ontarienne. Et c'est un graphique que je lui ai déjà déposé et que je lui demande de reconsulter. Puis le but que je poursuis ici n'est pas de dire que ça va bien, là, que c'est suffisant, je veux juste l'amener à relativiser un peu ses propos. Si on regarde la situation en termes de rythme de croissance du PIB réel par habitant — et, s'il veut, je pourrais le redéposer aujourd'hui, mais je pense que je lui avais déjà transmis ce document-là — on voit que, depuis 2007, par rapport au Canada, entre le Québec et l'Ontario, c'est le Québec qui a fait croître plus rapidement son PIB par habitant. Maintenant, qu'est-ce qui détermine ce PIB? Et, je suis d'accord avec lui, il faut l'augmenter, mais ça ne se fait pas avec une baguette magique, il faut y aller avec des actions qui portent sur les enjeux réels et les déterminants.

Alors, on sait que ce qui détermine le PIB par habitant, c'est trois éléments : d'abord, le taux d'emploi global, combien de personnes qui travaillent dans la société; l'intensité au travail, combien d'heures de travail par travailleur; et la productivité.

Si on regarde le taux d'emploi global, évidemment on a un grand défi démographique au Québec en termes de nombre de personnes au travail. Je veux quand même ramener ça à son attention, parce qu'on ne peut pas faire abstraction de cet enjeu-là, et il faut adapter nos politiques à cet enjeu, c'est le fait que le Québec est la seule grande province canadienne dont la population active en âge de travailler baisse d'année en année, depuis 2013, par rapport à nos voisins. L'Institut de la statistique du Québec prévoit que, si rien n'était changé, en 2030, cette population active aura augmenté d'environ 9 % ou 10 % en Ontario, alors qu'elle se réduirait de 4 % au Québec, ce qui en soi est un problème majeur. Premièrement, taux d'emploi global.

Deuxièmement, intensité au travail.

M. Bonnardel : ...une petite question, s'il vous plaît.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est un rappel au règlement?

M. Bonnardel : Oui. Je vous ai demandé de faire respecter le temps, s'il vous plaît, parce qu'on a seulement un bloc de 22 minutes. Mon chef a posé une question qui a pris 1 min 45 s. Je vous demande, s'il vous plaît, d'être respectueux du temps que mon chef va prendre et du premier ministre. Je ne voudrais pas que ce soit plus de temps, là, que le client en demande, là.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En fait, j'ai déjà indiqué, je l'avais indiqué l'an passé, je le réindique encore, je ne suis pas le chronométreur officiel, je suis ici pour assurer des échanges constructifs. En fait, c'est plus le contenu des échanges, la question et la réponse qui déterminent la pertinence et la qualité des échanges.

Ceci dit, effectivement, je m'assure qu'il y ait une certaine proportionnalité, mais, à date, je ne pense pas qu'on soit dans une disproportion qui justifie... dans la mesure où la présidence ne doit pas intervenir dans la qualité des réponses. À ce moment-ci, je pense que le point est souligné. Maintenant, je pense que la réponse est encore pertinente et instructive.

M. Legault : ...peut-être juste pour aider le premier ministre. Ma question était claire : Quel est l'objectif concret de réduction de l'écart de richesse pendant la durée du mandat? Je ne veux pas la définition de PIB, je veux savoir son objectif concret d'ici 2018.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, à vous la parole.

M. Couillard : L'objectif est simple — je lui ai dit l'an dernier — continuer à réduire l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario. Ce serait très hasardeux de fixer... C'est facile, quand on est dans l'opposition ou la deuxième opposition, dire : C'est tant de pour cent, mais, quand on a des décisions gouvernementales à prendre sur la réalité de l'économie, c'est différent, et il faut le faire de façon documentée.

Je veux quand même lui rappeler que le PIB réel par habitant, je le répète, là, et je reviendrai sur les composantes du PIB par habitant, a crû plus rapidement au Québec qu'en Ontario depuis 2007. Le revenu des ménages par habitant a crû plus rapidement au Québec qu'en Ontario depuis 2007. Le revenu disponible par habitant a crû plus rapidement au Québec qu'en Ontario depuis 2007. Et, comme je lui ai expliqué tantôt, le taux de croissance de ce PIB par habitant s'est également amélioré. Alors, monsieur...

M. Legault : M. le Président?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce que c'est un rappel au règlement?

M. Legault : Bien oui.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Quel est-il?

M. Legault : C'est parce que ça ne répond pas à ma question. Je ne parle pas du passé depuis la récession, je lui parle d'à partir de maintenant jusqu'en 2018. Il me semble que c'est clair.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : La question est claire, le premier ministre a la parole, puis, la réponse, je pense que...

M. Couillard : M. le Président, ça se peut que mon collègue ne soit pas satisfait de ma réponse, mais c'est ma réponse, je ne la changerai pas. On va continuer de diminuer l'écart de richesse selon tous les indicateurs disponibles, incluant le PIB par habitant, le revenu disponible entre le Québec et l'Ontario. Je pense qu'on peut faire encore beaucoup mieux, mais je voudrais encore lui rappeler amicalement que cet écart tend à diminuer au cours des dernières années, et on va continuer à l'améliorer. C'est la réponse que je vais lui donner pendant six heures s'il veut, qu'on va continuer à réduire cet écart-là, parce qu'on est conscients, nous, que ça ne se fait pas de façon magique, par une déclaration ou par un discours. Ça se fait en agissant spécifiquement sur les enjeux réels.

J'ai parlé du taux d'emploi global, j'allais commencer à parler de l'intensité au travail lorsqu'on a été interrompus. L'intensité au travail, c'est le nombre d'heures travaillées par travailleur. Alors là, il y a, au Québec, il faut le dire, un peu moins d'heures travaillées qu'ailleurs, mais il faut se garder de porter un jugement négatif sur la population parce qu'il y a des exemples, ailleurs dans le monde, de pays qui ont des intensités au travail similaires au Québec ou même moindres et qui ont des croissances économiques plus élevées.

Le troisième élément, c'est celui sur lequel on doit travailler, c'est la productivité. Là où tous les indicateurs pointent qu'il faut agir, c'est sur la productivité, et, là encore, il faut voir qu'est-ce qu'il faut faire pour améliorer la productivité d'une nation, d'un pays, d'un État. Il faut travailler sur le capital humain, en quantité bien sûr. Ça veut dire qu'il faut être accueillants pour les immigrants, ne pas leur dire qu'on va leur faire passer un examen puis qu'ils vont retourner chez eux au bout de trois ans si le résultat n'est pas bon. Il faut leur dire : Venez chez nous, on va vous aider, on va vous former, on va vous franciser, si nécessaire, et on va vous faire intégrer rapidement le marché du travail. Pour ceux qui sont déjà chez nous, nos Québécois qui ne sont pas de l'immigration mais qui sont sans emploi, bien il faut les mettre au travail. Il faut que ce soit toujours plus incitatif pour eux de travailler que de ne pas travailler, de faire un effort que de ne pas faire des efforts; d'être mieux formés, également. C'est pour ça que, dans ce budget, on a mis beaucoup d'emphase sur l'Adéquation formation-emploi, pour s'assurer que les entreprises trouvent des employés qualifiés pour répondre à leurs besoins. Quand je me promène dans les régions du Québec, ce que je fais souvent, les employeurs me disent : Vous savez, on n'a plus vraiment un problème de chômage dans le coin, on a un problème d'employés : trouver des employés qualifiés pour notre entreprise. Donc, capital humain.

Capital matériel. L'investissement en machinerie doit continuer. Avec un dollar canadien bas, paradoxalement, c'est le contraire des bénéfices pour l'exportation, ça rend la chose plus difficile. Donc, il faut s'assurer que les conditions d'amortissement, par exemple, demeurent très compétitives.

Et les autres circonstances qui rendent le milieu d'affaires ou l'ambiance d'affaires...

M. Bonnardel : M. le Président, ça fait 10 minutes, là. Le gouvernement a tout le temps pour faire sa propre promotion. Je vous demande de faire respecter un règlement qu'on applique à la Commission des finances publiques. Mon chef a parlé pendant deux minutes, on est rendus à la dixième minute. S'il vous plaît, là, un peu de respect pour le temps que l'opposition a.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : En fait — je prends bonne note de vos commentaires — ça ne fait pas, selon le...

M. Bonnardel : 9 min 30 s. Je vous demande d'être respectueux du temps que nous avons, monsieur...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, le point a été noté. La réponse me semble se rapporter au sujet. Maintenant, le commentaire. Je ne sais pas si, M. le premier ministre, vous voulez compléter rapidement?

M. Couillard : Bien, je pourrais le clore, là. Mais, je regrette, là, ça se peut qu'on ne soit pas content de ma réponse, mais c'est ma réponse puis ça va demeurer ma réponse.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Parfait.

M. Couillard : Et puis, plutôt que de nous crier après, je suggérerais qu'on écoute la réponse puis qu'on échange sur les différentes composantes d'action que je note.

Alors, j'ai parlé de capital humain, j'ai parlé de capital matériel, la fiscalité — il parle souvent de fiscalité, notre collègue, on peut avoir un bel échange sur la fiscalité — l'Adéquation formation-emploi, le soutien aux PME — il y a plein de mesures mises en place — la simplification administrative, la productivité en général, et la stabilité politique; important pour l'ambiance d'affaires dans un État.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Nous allons aborder tous ces sujets, j'en suis certain. M. le chef de la deuxième opposition, à vous la parole.

M. Legault : Bien, M. le Président, je pense que tout le monde qui écoute le premier ministre voit bien qu'il ne répond pas à la question.

La question est pourtant simple. Quel est l'objectif de réduction d'écart de richesse du premier ministre pour les quatre prochaines années? Il n'y en a pas. Puis il nous dit qu'il aimerait ça réduire l'écart, sauf que, lorsque je regarde les prévisions du ministre des Finances, il prévoit une croissance du PIB par habitant — par habitant, je dis bien — inférieure, au Québec, que ce qui est prévu en Ontario. Donc, il va falloir que le premier ministre m'explique comment il va réduire l'écart avec l'Ontario dans les quatre prochaines années, alors que son ministre des Finances prévoit une croissance de la richesse plus faible au Québec à chaque année, pour les quatre prochaines années, que celle de l'Ontario. Comment il fait ça, là? C'est quoi, la magie?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (16 h 30) •

M. Couillard : La magie, M. le Président, c'est de laisser croire aux gens qu'on prend une baguette magique puis qu'on règle le problème.

La réalité, c'est d'aller à chaque déterminant de cet écart de richesse et d'agir. Alors, je vais lui faire une petite liste des mesures qui sont dans le Plan économique du Québec qu'il pourra consulter et qui ont toutes rapport avec sa question et la croissance économique, donc la réduction de l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario : alléger le fardeau fiscal des particuliers, 2 milliards de nouvelles initiatives, 2,5 milliards d'investissement soutenu; alléger le fardeau fiscal des sociétés, 500 millions de nouvelles initiatives, 1,1 milliard d'investissement soutenu; favoriser la performance du marché du travail, 166 millions de nouvelles initiatives, 175 d'investissement soutenu; la stratégie maritime, 171 millions de nouvelles initiatives, 2,9 milliards d'investissement soutenu; le développement de l'aluminium, bientôt annoncé, 33 millions de nouvelles initiatives, 150 millions d'investissement soutenu; le plan d'action gouvernemental en économie sociale — ça aussi ça fait travailler les gens et ça fait générer des revenus — 27 millions de nouvelles initiatives, 103 millions d'investissement soutenu; le congé fiscal bonifié pour les grands projets d'investissement — c'est important notamment dans nos régions — 10 millions de nouvelles initiatives, 4 milliards d'investissement soutenu; les autres mesures de soutien à l'investissement, 166 millions de nouvelles initiatives, 1 milliard d'investissement soutenu; la mise en place de nouvelles initiatives pour les collectivités et la culture, 309 millions de nouvelles initiatives et 540 millions d'investissement soutenu.

Donc, au total, 3,4 milliards, M. le Président, de nouvelles initiatives, 12,6 milliards d'investissement soutenu. Voici l'exemple d'un plan intelligent parce que c'est un plan qui ne dit pas aux gens : Regardez, tout va se régler, là, d'ici tant d'années, ce sera tant de pour cent de moins d'écart. Non, le plan dit à la population, en respectant bien sûr leur intelligence, il dit : On sait pourquoi on a des problèmes au Québec, on a identifié spécifiquement les enjeux, les verrous de croissance qui font qu'on croît moins vite au Québec qu'en Ontario et ailleurs. On a développé et on développe des actions pour chacun de ces éléments-là. Alors, c'est le contraire de l'illusion, c'est la réalité et c'est surtout une action qui est très, très concrète. Il fallait bien sûr, comme lui l'a dit... parce que la clé de tout de ça, ça commence par l'équilibre des finances publiques. Il y a quand même des sujets sur lesquels lui et moi, on est d'accord. J'ai bien compris que lui et moi, on était d'accord sur l'importance d'éliminer le déficit budgétaire, ce qui a été accompli, de contrôler la dette. Ça aussi, ça explique l'écart de richesse entre le Québec et l'Ontario, des finances publiques chroniquement déséquilibrées puis une dette qui s'alourdit continuellement.

Alors, c'est ce qu'on fa fait. Il fallait rebâtir ces bases-là et surtout, je le répète, agir de façon un peu différente de peut-être ce qu'il propose, parce que moi, à part le plan Saint-Laurent, je n'ai rien entendu de sa part pour favoriser la croissance économique. J'aime bien le plan Saint-Laurent, c'est intéressant, mais c'est beaucoup moins complet que ce que je viens de présenter.

Alors, ce que je voudrais dire en terminant, c'est qu'au 1er janvier 2020 — c'est dans quelques années — on devrait avoir un taux d'imposition sur le revenu des sociétés identique à l'Ontario. Ça, également, ça fait partie de l'explication de l'écart de richesse. Mais, au-delà de ça, là, je veux encore une fois attirer l'attention de la population qui nous écoute sur l'importance de la démographie, pas la démographie comme on en parlait il y a quelques années, quand j'étais ministre de la Santé, en termes d'impact sur les coûts de santé, la démographie en termes d'obstacle à notre productivité et de chute de la population active. C'est là-dessus qu'il faut faire porter beaucoup nos efforts en nombre et en qualité.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Oui. M. le Président, je trouve ça malheureux, parce que le premier ministre avait promis de faire de la politique autrement puis, plutôt que d'avoir un échange, il lit un catalogue de mesures, alors que moi, je suis un homme de résultats, je lui parle d'objectifs concrets.

M. le Président, ce que je comprends de la non-réponse du premier ministre, c'est que, pour les quatre prochaines années, avec la faible croissance qu'il prévoit, il ne réduira pas de 1/10 de 1 % l'écart de richesse du Québec avec tous nos voisins. C'est ça que les prévisions montrent. Puis sa non-réponse vient confirmer qu'il n'y a aucun objectif ambitieux, concret pour mobiliser les acteurs, parce qu'il faut mobiliser les acteurs.

Donc, je vais passer à la prochaine question, M. le Président. Le premier ministre prévoit, pour les quatre prochaines années, une croissance du PIB de 2 % ou moins par année. C'est impossible mathématiquement d'assumer les coûts de système en santé puis en éducation, que le Parti libéral lui-même évalue à 3,5 %, à 4 % pour les deux plus gros budgets, et réduire les impôts, les taxes de la classe moyenne. La preuve : depuis un an, le gouvernement a augmenté de 1 300 $, via les taxes et les tarifs, le fardeau fiscal de la classe moyenne. Donc, je voudrais que le premier ministre nous explique comment, avec une... Bien, d'abord, avant de dire comment, est-ce qu'il peut nous confirmer que lui pense qu'avec une croissance économique de 2 % il peut à la fois bien financer les services et réduire de façon substantielle le fardeau fiscal?

Est-ce que, oui ou non, il pense que c'est possible de faire les deux, les services et une baisse de taxes, avec 2 % de croissance?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, la parole est à vous.

M. Couillard : Bien, tout à fait. De nombreux États dans le monde l'ont démontré d'ailleurs, et on espère avoir moins... excusez-moi, plus que 2 % de croissance. C'est une cible très conservatrice et volontairement très conservatrice. C'est toujours mieux de se sous-engager puis de mieux réussir. Et les économistes qui regardent la perspective à long terme pour le Québec identifient tous et toutes, encore une fois, la question de la démographie comme étant la principale raison de cet état de fait. Mais on ne veut pas baisser les bras. On a, nous aussi, de l'ambition pour le Québec, on va réduire cet écart de richesse et on va le faire de façon déterminée, en agissant précisément sur les facteurs importants : d'abord, le contexte de la croissance, finances publiques, endettement; également, des mesures spécifiques qui portent sur les verrous réels de la croissance pour le Québec, incluant la démographie, incluant la productivité, incluant la fiscalité. Et ça, je pense qu'il doit être d'accord avec nous.

Maintenant, moi, je lui ai demandé en Chambre à plusieurs reprises — il parle de questions et de réponses — de nous nommer une action que lui mettrait en place avec la situation budgétaire qu'on a retrouvée à notre arrivée, avec ce qu'on a fait pour rétablir l'équilibre budgétaire, une action que lui poserait maintenant pour accélérer la croissance économique. Comme je l'ai fait dans plusieurs domaines, je me fais toujours un plaisir d'accueillir et d'appliquer ses idées, M. le Président. Alors, qu'il nous en suggère quelques-unes, mais ça ne peut pas être juste le plan Saint-Laurent, parce que c'est la seule affaire qu'on a entendue. Il faut que ce soit beaucoup plus profond, beaucoup plus documenté et beaucoup plus adapté aux véritables défis du Québec. Alors, je lui fais cette demande, je lui tends la main, M. le Président, je lui tends la main aujourd'hui afin qu'il nous présente des idées sur les enjeux de développement économique qu'il nous fera plaisir de mettre en place. Et je m'engage devant tous et toutes à lui donner le crédit. D'ailleurs, je l'ai déjà fait à quelques reprises, de dire : Cette idée-là, vous savez, c'est notre collègue de la deuxième opposition qui nous l'a proposée, nous allons la mettre en place. Alors, on parle de politique différente. Il faut avouer que c'est de la politique différente de dire ça. Ce n'est pas la mode, en politique, de faire des choses comme ça, et moi, je suis plutôt content de le faire parce que je veux profiter de son expérience. Le chef de la deuxième opposition est un entrepreneur, il a fondé une entreprise. Il est revenu en politique, comme il dit — et je ne dispute pas ça du tout, c'est tout à fait vrai — en disant qu'il fallait s'occuper de la croissance de l'économie.

Alors, je l'appelle à contribuer à nos idées. Puis je répète que notre intention, c'est de baisser l'écart de richesse et que, deuxièmement, oui, on va à la fois faire croître l'économie et réduire le fardeau fiscal des Québécois avec l'abolition de la taxe santé.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, cinq minutes.

M. Legault : Oui. D'abord, je dirais au premier ministre qu'effectivement on a proposé des zones d'innovation, on a proposé de changer le ministre du Développement économique parce qu'on a besoin d'un Investissement Québec qui est mené par des gens qui veulent développer. Le premier ministre veut garder son ministre du Développement économique, c'est ses choix. On en donne, des pistes. Investissement Québec, c'est une piste.

D'ailleurs, M. le Président, parlant d'Investissement Québec, Investissement Québec est responsable d'attirer des investissements privés. Il nous manque d'investissement privé au Québec. Donc, j'aimerais ça que le premier ministre nous parle un peu d'investissements privés au Québec. Combien il y a actuellement, par année, d'investissement privé au Québec? Est-ce qu'il a une idée? Je pense qu'il n'a même pas d'idée de combien il y en a actuellement. Combien il y en a qui sont amenés par Investissement Québec? Puis c'est quoi, ses objectifs d'investissement privé? Il est-u capable de nous donner, pour une fois, des réponses concrètes ou s'il va nous vaser n'importe quoi comme tantôt?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Ce n'est pas très généreux de la part de mon collègue d'utiliser ces verbes-là...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je pense que vous avez raison.

M. Couillard : ...mais je lui dirais — puis je n'ai pas fait d'appel au règlement, M. le Président — qu'il aura, et son équipe, tout le loisir de questionner le ministre du Développement économique là-dessus, sur cette question, puis avec le P.D.G. d'Investissement Québec. D'ailleurs, ça me permet de faire une remarque très positive sur le travail d'Investissement Québec à l'étranger. Dans la plupart des délégations du Québec, il y a des représentants d'Investissement Québec qui travaillent très fort et de façon très efficace pour attirer l'investissement.

Mais qu'est-ce qu'un investisseur recherche? Il recherche d'abord la stabilité et la prévisibilité politiques, sociales et financières. Il recherche des grands projets comme ceux qu'on a présentés. Il recherche de la main-d'oeuvre qualifiée. On a ça au Québec avec nos institutions d'enseignement, nos jeunes entrepreneurs. Donc, on les a, les outils, pour attirer l'investissement privé chez nous. Il est clair que l'investissement privé doit augmenter et qu'on va continuer de le faire augmenter.

Quant aux éléments plus précis de sa question, je lui suggère de s'adresser au collègue du Développement économique.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef du deuxième groupe d'opposition, pour une question. Il vous reste un peu plus de deux minutes.

M. Legault : Oui. M. le Président, je vais essayer d'aider le premier ministre. Il y a 30 milliards, par année, d'investissement privé au Québec. Il nous en manque 10 milliards. Il faudrait en avoir 40 milliards. Et il y a une partie de cette augmentation de 10 milliards qui devrait venir d'Investissement Québec. Donc, moi, si j'étais premier ministre, je donnerais une commande à Investissement Québec.

Donc, qu'est-ce que le premier ministre veut faire pour aller chercher le 10 milliards d'investissement privé qui manque au Québec? Je sais que je viens de lui apprendre le chiffre, là, mais qu'est-ce qu'il veut faire pour aller chercher les 10 milliards d'investissement privé qui manquent au Québec?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, il reste deux minutes à ce bloc d'échange.

• (16 h 40) •

M. Couillard : M. le Président, je viens de lui répondre. On va continuer à faire la promotion du Québec comme terre d'accueil et d'investissement. D'ailleurs, on voit que, pour 2015, on prévoit une augmentation des investissements non résidentiels — les entreprises — de 2,8 %; machines et matériel, de 4,8 %; les produits de propriété intellectuelle, de 4,4 %, ce qui est intéressant.

Mais, au-delà de ça, là, ce que les gens veulent savoir quand ils veulent investir chez nous, que ce soient nos entrepreneurs ou les entrepreneurs, les investisseurs d'ailleurs : Est-ce que j'investis dans un endroit, une juridiction qui est stable politiquement, financièrement, économiquement? Est-ce que j'investis dans un endroit où le gouvernement a une priorité sur l'économie et la création d'emplois? Est-ce que j'investis dans un endroit où la fiscalité est compétitive? Est-ce que j'investis dans un endroit où il y a des grands projets auxquels je peux m'attacher? C'est ça, les questions qui se posent dans les décisions d'investissement. C'est le climat économique qui nous amène à prendre ces décisions-là, qui les amène à prendre ces décisions-là, et c'est notre rôle de leur offrir le terrain d'accueil le plus favorable possible, M. le Président. Alors, c'est clair qu'il faut continuer à agir là-dessus. Il faut agir également sur la demande intérieure, il faut agir sur les autres composantes du produit intérieur brut, et on va continuer à le faire. Maintenant, on prévoit des mesures dans le budget 2015‑2016 qui permettront de stimuler les investissements dans plusieurs domaines, et il faut parler des secteurs clés de notre économie. Voilà ce qu'il faut faire pour parler d'investissement. Qu'est-ce que le Québec offre de mieux qu'ailleurs? On connaît, bien sûr, l'aéronautique, l'aluminium, l'aérospatiale, le jeu vidéo, les nouvelles technologies, le secteur maritime, qu'on va développer, les ressources minières, gazières et forestières et, bien sûr, le développement du Plan Nord.

Alors, il y a un impact financier, il y a des mesures pour cibler l'investissement privé qui est disponible dans tous ces domaines-là, et ça totalise plus de 400 millions de dollars, M. le Président, au cours des prochaines années. Et ça ne parle même pas d'outils d'Investissement Québec comme le fonds mines capital hydrocarbures, où il y a 1 milliard de dollars disponibles pour prendre des participations dans les sociétés.

En conclusion, M. le Président, on est conscients de l'importance de générer plus d'investissements privés, on est conscients surtout des déterminants qui font que les gens décident d'investir et on pose les gestes en conséquence, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce bloc d'échange. Je me tourne vers la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré pour un prochain bloc.

Mme Simard : Merci, M. le Président. Le premier ministre vient tout juste de mentionner la stratégie maritime, alors j'aimerais m'entretenir de la stratégie maritime, d'autant qu'il s'agit d'un projet d'envergure, d'un projet qui m'interpelle, puisque je suis originaire de Baie-Saint-Paul, donc, que j'ai grandi à proximité du Saint-Laurent et que j'y voue un attachement particulier.

Alors, la stratégie maritime représente un volet majeur du Plan économique du Québec reposant sur la vision du Québec, tirant pleinement parti de sa situation géographique et de son savoir-faire, devant une... devenir une plaque tournante du trafic maritime — pardon. C'est également un engagement électoral fort de notre gouvernement. La stratégie maritime constitue l'un des piliers sur lesquels nous bâtirons la croissance économique de l'ensemble des régions du Québec. Celle-ci sera rendue publique prochainement.

Le Plan économique du Québec prévoit 171 millions d'ici cinq ans pour cette stratégie. Notre plan économique prévoit également des investissements importants, de même que le Plan québécois des infrastructures, pour soutenir cette importante stratégie. Le plan économique de notre gouvernement prévoit plusieurs initiatives pour doter la stratégie maritime d'importants leviers fiscaux et financiers pour stimuler les investissements de partenaires privés, publics et institutionnels nécessaires au développement des régions et la création d'emplois. De plus, le plan économique 2015‑2016 prévoit de nouvelles initiatives qui seront au coeur du premier plan d'action quinquennal de la stratégie : la prolongation du crédit d'impôt pour la Gaspésie et certaines régions maritimes; la bonification de ce crédit afin de rendre accessible le secteur récréotouristique des Îles-de-la-Madeleine; la mise en oeuvre, dès 2015‑2016, d'un nouveau programme d'investissement dans les infrastructures portuaires commerciales avec une dotation initiale de 200 millions; une enveloppe de 400 millions pour soutenir les meilleurs projets permettant l'implantation de pôles logistiques au Québec, avec l'appui, dès cette année, d'un partenaire majeur, soit le Fonds de solidarité FTQ; une nouvelle enveloppe de 400 millions sur cinq ans pour attirer les investissements privés en misant sur les infrastructures portuaires et logistiques du Québec; l'engagement de contribuer, avec des partenaires, au financement de projets d'infrastructure touristique, notamment des projets majeurs à Montréal et à Québec; des enveloppes pour la recherche et l'innovation dans les domaines maritimes et pour soutenir des initiatives clés qui se déploieront au cours des cinq prochaines années, notamment en matière de développement de la main-d'oeuvre, pour les exportations et pour assurer l'essor des pêches et de l'aquaculture commerciales.

L'ensemble de ces initiatives représentent une enveloppe d'intervention de plus de 1,5 milliard sur la période 2015‑2020. Le gouvernement consacre ainsi les ressources nécessaires et adaptées au déploiement de la stratégie maritime et dans le respect des finances publiques.

M. le premier ministre, est-ce que vous pouvez nous dire comment se concrétise cette stratégie jusqu'à maintenant pour les régions maritimes, dont celle du Bas-Saint-Laurent?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Merci à la collègue de soulever cette question, particulièrement pour sa circonscription, qui est très impliquée sur les questions maritimes.

Vous savez, c'est quand j'ai fait la tournée du Québec, des régions, que j'ai visité nos régions littorales, que ce soit le Bas-Saint-Laurent, mais également la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, que j'ai pris conscience de l'importance économique, d'abord, de ce secteur-là dans les régions, mais également pour Montréal quand j'ai visité, il y a quelques semaines, le port de Montréal, avec son récent projet d'addition de capacité de conteneurs et le formidable outil de développement que ça représente. Et on parlait tantôt du plan Saint-Laurent. C'est un peu différent. À mon avis, c'est plus large puis c'est plus profond que le plan Saint-Laurent, qui est surtout un projet d'innovation, si je ne m'abuse, le long du corridor du Saint-Laurent. Là, on parle véritablement du domaine économique qu'est le secteur maritime.

Alors, on va pouvoir, de cette façon, tirer avantage des occasions qui se présentent devant nous. Par exemple, l'accord de libre-échange entre l'Europe et le Canada, qui va fortement augmenter et qui a déjà commencé... déjà, par anticipation, le trafic maritime augmente dans le Saint-Laurent; l'ouverture et l'élargissement des écluses du canal de Panamá puis, à plus long terme, le passage du Nord-Ouest, tout ça devrait faire en sorte d'augmenter le transport maritime, qui demeure, il faut toujours le dire, la façon la plus sécuritaire, la moins coûteuse, la plus respectueuse de l'environnement d'acheminer des marchandises de l'Europe au coeur de l'Amérique du Nord. Alors, c'est un plan pour tout le Québec mais particulièrement pour les régions littorales, comme par exemple les Îles-de-la-Madeleine, où on a reconnu de façon répétée, à plusieurs reprises, de façon formelle, et ça va aller plus loin, le caractère insulaire et maritime des Îles-de-la-Madeleine, parce que, là également, il y a des emplois de qualité à créer, et ça a été créé notamment, cette occasion de développement, avec des outils fiscaux. On a donc énoncé, dans le budget 2015‑2016, la prolongation de cinq ans du crédit d'impôt remboursable pour la Gaspésie et certaines régions maritimes du Québec, qui vient notamment appuyer le secteur de la transformation des produits de la mer, l'admissibilité au crédit d'impôt, et ça, c'est nouveau et très bien accueilli aux îles, des entreprises du secteur récréotouristique aux Îles-de-la-Madeleine dès l'année civile 2015. Il y a un ajustement des modalités d'application qui les rend plus avantageuses.

Dans le but de réitérer son appui au développement économique des régions, on prévoit le maintien et la prolongation pour cinq ans du crédit d'impôt à l'investissement relatif au matériel de fabrication et de transformation, et ça, jusqu'en 2022 et, bien sûr, on a ajouté les déductions pour transport de marchandises des PME manufacturières avec des déductions plus importantes à mesure qu'on s'éloigne des grands centres. Et les Îles-de-la-Madeleine, encore une fois, ont vu leur caractère reconnu de façon très formelle, de même que les autres régions du Québec, comme le Saguenay—Lac-Saint-Jean, d'ailleurs, qui bénéficie de cette déduction.

Alors, on a également prévu d'autres mesures pour les régions maritimes telles que le Bas-Saint-Laurent, 9 millions pour la recherche appliquée et l'innovation dans le secteur maritime. On a récemment annoncé près de 1 million à deux institutions reconnues dans le domaine des biotechnologies marines : l'Institut des sciences de la mer de Rimouski, le Centre de recherche sur les biotechs marines de Rimouski. Et, avec la mission en France, on a vu la mise sur pied d'un observatoire... pas d'un observatoire, pardon, d'un institut franco-québécois sur les sciences de la mer qui suscite beaucoup, beaucoup d'enthousiasme de part et d'autre de l'Atlantique. Et il faut bien sûr continuer à aider nos municipalités côtières aux prises, par exemple, avec des enjeux comme l'érosion des berges.

Alors, voilà donc un exemple très concret de ce qui est déjà mis en place, et on va bientôt annoncer, d'ici le mois de juin, l'ensemble de la stratégie maritime, et il y aura d'autres bonnes nouvelles pour les régions du Québec, bien sûr toutes nos régions littorales, mais également les régions plus centrales comme Montréal, qui font partie intégrale, M. le Président, de cette stratégie.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré.

• (16 h 50) •

Mme Simard : J'aimerais poursuivre avec la stratégie au niveau du tourisme. Alors, bientôt, le ministre délégué aux Transports et à l'Implantation de la stratégie maritime dévoilera les détails de cette stratégie d'envergure, qui se déploiera au cours des 15 prochaines années. Le gouvernement mettra en oeuvre trois plans d'action quinquennaux sur l'horizon de la stratégie maritime.

Afin d'assurer une mise en oeuvre rapide et concrète de la stratégie maritime, le plan économique prévoit de nouvelles initiatives qui seront au coeur du premier plan d'action quinquennal 2015‑2020 de la stratégie. Ces initiatives visent à accélérer les investissements dans les infrastructures portuaires commerciales au Québec; favoriser l'implantation de pôles logistiques avec l'appui de partenaires; attirer les investissements privés en misant sur les infrastructures logistiques et portuaires; favoriser l'essor du tourisme maritime notamment en développant les infrastructures de croisière à Montréal et à Québec; prolonger le crédit d'impôt remboursable pour la Gaspésie et certaines régions maritimes du Québec et le bonifier pour les Îles-de-la-Madeleine; soutenir la recherche et l'innovation pour une mise en valeur durable du potentiel maritime du Québec; appuyer le secteur maritime par des initiatives clés, notamment par la formation de la main-d'oeuvre et le soutien aux exportations; coordonner l'action gouvernementale dans une démarche favorisant les retombées économiques pour le Québec.

Avec ces nouvelles initiatives et les gestes posés au cours des derniers mois, dont la mise en place d'incitatifs fiscaux pour la construction et la rénovation de navires, le plan économique prévoit une enveloppe d'intervention de plus de 1,5 milliard de dollars pour la période 2015‑2020. Le gouvernement dote ainsi la stratégie maritime du Québec de leviers fiscaux et financiers importants pour stimuler les investissements de partenaires privés, publics et institutionnels nécessaires au développement des régions et à la création d'emplois.

D'ailleurs, permettez-moi de brosser un portrait de quelques mesures annoncées au plan économique et qui visent à stimuler l'investissement privé, pour nous mettre en contexte. Le plan économique de notre gouvernement prévoit des mesures qui permettront de stimuler les investissements, de l'entreprise d'économie sociale jusqu'à la grande entreprise, et ce, dans plusieurs secteurs d'activité stratégiques de l'économie québécoise. De nouvelles initiatives totalisant plus de 400 millions de dollars sont prévues au cours des cinq prochaines années. Ces sommes permettront de favoriser le développement des secteurs clés de l'économie, notamment l'aluminium, l'économie sociale, l'aérospatiale, le jeu vidéo et les nouvelles technologies, lancer la stratégie maritime grâce notamment à des investissements dans des infrastructures portuaires, des pôles logistiques et des zones industrielles portuaires ainsi que des infrastructures touristiques. Avec ces nouvelles initiatives et les gestes posés au cours des derniers mois, le plan économique prévoit une enveloppe d'intervention de plus de 1,5 milliard; favoriser la relève entrepreneuriale, notamment dans les secteurs primaires et manufacturiers; mettre en valeur nos ressources minières, gazières et forestières; plus particulièrement, le gouvernement entend poursuivre les efforts entrepris pour le développement du Plan Nord. Le budget annonce une initiative pour favoriser les meilleurs projets permettant l'implantation de pôles logistiques. Elles ont aussi démontré la possibilité de développer plusieurs sites complémentaires permettant de répondre à différents types d'entreprise et de marché.

Comme plusieurs sites présentent des avantages spécifiques, le gouvernement s'engage, avec le Fonds de solidarité FTQ, dans une démarche ouverte qui permettra aux investisseurs du secteur privé de faire connaître leurs projets. Les projets seront analysés par un comité de sélection formé de représentants du gouvernement et du Fonds de solidarité FTQ, notamment sur la base du rendement anticipé, de l'effet de levier généré par l'investissement, du potentiel de création de richesse au Québec, de l'augmentation de l'efficience de la logistique et du développement du secteur maritime du Québec. La proximité et le soutien à l'implantation d'activités manufacturières seront également privilégiés. Le plan économique réserve une enveloppe de 100 millions de dollars au cours des cinq prochaines années pour des aménagements en infrastructure publique liés à l'implantation de pôles maritimes.

De toute évidence, pour une région comme celle de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, cette stratégie ambitieuse constitue effectivement un levier économique substantiel et ouvre la porte à une multitude de projets. Ma circonscription constitue une destination touristique par excellence, et la stratégie maritime proposée par notre gouvernement permet de stimuler cette stratégie à la hauteur de ce qu'elle peut générer. Déjà, plusieurs intervenants et partenaires de la région se concertent pour réaliser des projets en lien avec la stratégie. Depuis septembre dernier, des organismes et des municipalités de chez nous, par exemple, ont rencontré le ministre délégué aux Transports et à l'Implantation de la stratégie maritime. Pour n'en nommer que quelques-uns, plusieurs projets sont déjà en cours de discussion, notamment celui du traversier de Saint-Siméon—Rivière-du-Loup; le projet de croisières et de promenades fluviales à La Malbaie ainsi que celui du Parc des navigateurs du musée maritime. D'autres projets, comme ceux des croisières fluviales à Baie-Saint-Paul, de l'agrandissement du parc maritime de Saint-Laurent sur l'île d'Orléans, du parc riverain de L'Ange-Gardien, de la revitalisation du quai de Sainte-Anne-de-Beaupré, de la marina pour les petites embarcations de L'Isle-aux-Coudres, constituent tous une démonstration du potentiel important de la stratégie maritime sur notre territoire.

M. le premier ministre, nous constatons effectivement que le plan économique de notre gouvernement donne des moyens importants à la stratégie maritime pour stimuler notre économie. Pourriez-vous nous donner des exemples concrets de projets touristiques qui seront appuyés par la stratégie?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, merci, M. le Président. Pour la députée, qui représente une région magnifique du Québec et qui également m'assiste dans le dossier jeunesse — on aura l'occasion demain de travailler ensemble sur ces dossiers — parlons de tourisme, effectivement, par rapport à la stratégie maritime. Ça m'apparaît tout à fait approprié.

Il faut rappeler, hein, que le secteur du tourisme, c'est un secteur économique majeur au Québec. C'est 340 000 emplois, le tourisme, au Québec. C'est 9 % de tous les emplois au Québec, et on veut bien sûr soutenir ce secteur partout. On parlait du Plan Nord tantôt, mais, de façon plus spécifique, dans la stratégie maritime, c'est des investissements de plus de 76 millions qui sont prévus d'ici cinq ans, par exemple, pour certains projets, comme la gare maritime et la  jetée Alexandra à Montréal, qui a fortement besoin d'être rehaussée, le terminal Ross-Gaudreault à Québec, le réaménagement du site Dalhousie ici, à Québec, également et plusieurs attraits naturels au travers du réseau de la SEPAQ.

On sait que la vocation touristique du Saint-Laurent, elle est importante, c'est un aspect important de la stratégie maritime, et on n'a pas attendu le dépôt de la stratégie maritime, puisqu'on a récemment posé un premier geste par la mise en oeuvre du programme de stratégie maritime, volet Tourisme, avec une enveloppe de 30 millions de dollars et également, et on aura plus de détails très prochainement, par la confirmation de notre soutien au projet Dalhousie à Québec.

Ainsi, on prévoit un appui au tourisme de croisière à Montréal et à Québec, une enveloppe pour la mise en valeur de certains attraits naturels du Saint-Laurent et poursuivre bien sûr l'amélioration des infrastructures d'accueil pour les croisières internationales, entre autres les débarcadères. Les structures d'accueil, c'est très important. Il faut gagner cette clientèle de croisiéristes. Et elle est exigeante, cette clientèle, donc il faut prévoir les activités qui les intéressent et maintenir ces activités. On va donc prévoir une enveloppe additionnelle d'investissement pouvant atteindre 55 millions d'ici cinq ans pour contribuer au financement des deux projets majeurs, à Montréal et à Québec, dont les coûts totaux sont estimés à près de 168 millions de dollars. Dans le cadre des célébrations du 375e anniversaire de Montréal, c'est là qu'on veut faire arriver à destination le projet de gare maritime la jetée Alexandra, et on a déjà prévu des sommes qui comprendront la construction d'une tour d'observation, d'un centre d'interprétation et de terrasses au port de Montréal. On va également, bien sûr, comme je l'ai dit il y a quelques instants, agrandir le terminal Ross-Gaudreault à Québec avec une enveloppe budgétaire appropriée pour aménager un deuxième terminal, agrandir le terminal existant, ce qui permettra de résoudre des problèmes actuels quant à l'accueil des passagers et soutenir ce qu'on veut avoir au cours des prochaines années, c'est une croissance de l'achalandage.

Par ailleurs, et enfin, certains et plusieurs établissements de la SEPAQ sont bien positionnés pour permettre l'utilisation du Saint-Laurent aux fins de développement touristique et la création d'emplois dans plusieurs régions, dont certainement la région de Charlevoix. On a donc prévu des investissements de plus de 21 millions de dollars pour développer des établissements qui possèdent le potentiel de présenter une offre originale de produits touristiques et des partenariats avec de nombreux partenaires, comme la Société des traversiers du Québec, et ceci fera l'objet d'annonces plus précises lors du dévoilement de la stratégie maritime, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Mme la députée de Charlevoix—Côte-de-Beaupré, en soulignant qu'il reste cinq minutes à ce bloc d'échange.

Mme Simard : Merci, M. le Président. Alors, M. le premier ministre, vous vous êtes engagé à remettre le Québec sur la voie de la prospérité pour que les générations futures, celles de nos enfants et de nos petits-enfants, soient libres de leur choix. Cela passe bien sûr par le redressement des finances publiques.

Chaque année, 11 milliards de dollars doivent être assignés au service de la dette. Comme vous l'expliquiez si bien tout récemment, cela signifie que chaque jour, avant de mettre un seul dollar dans notre système de santé ou dans nos écoles, nous devons sortir 30 millions de dollars de nos coffres pour la dette : 30 millions hier, 30 millions aujourd'hui, 30 millions demain. Il était urgent d'intervenir. Ainsi, le 26 mars dernier, le ministre des Finances présentait un budget équilibré, une grande réussite en soi quand on sait que seulement huit budgets l'ont été au cours des 30 dernières années.

Cela dit, le second fer de lance pour la prospérité du Québec doit être la relance de l'économie. Avec des recettes de 12 milliards de dollars, l'industrie touristique constitue un puissant levier économique pour le Québec. Ce sont plus de 30 000 entreprises qui y contribuent et qui génèrent plus de 365 000 emplois. Beaucoup de ces emplois sont en région, car, vous le savez, l'industrie touristique est un moteur de plusieurs régions du Québec et fait la fierté de ceux qui l'habitent.

L'industrie touristique revêt effectivement une grande importance dans la circonscription de Charlevoix—Côte-de-Beaupré et bien sûr à L'Île-d'Orléans également. Par exemple, ma circonscription compte deux îles, dont le berceau de l'Amérique française; deux parcs nationaux, soit les Grands-Jardins et les Hautes-Gorges-de-la-rivière-Malbaie; trois montagnes de ski, soit le mont Sainte-Anne, Le Massif de la Petite-Rivière-Saint-François ainsi que le Mont-Grand-Fonds; une réserve de biodiversité projetée; une réserve mondiale de la biosphère; une réserve nationale de faune; la route de la Nouvelle-France, et j'en passe.

M. le premier ministre, que comptez-vous faire pour soutenir et stimuler encore davantage cette industrie lucrative?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, 3 min 20 s.

M. Couillard : Oh! merci, M. le Président. Bien, on a bien fait de commencer l'intervention de la députée par la question de la dette publique et de l'équilibre budgétaire. Puis c'est important de rappeler, hein, que, pendant la campagne électorale — depuis, je ne sais pas nécessairement pour l'opposition officielle, mais je crois que la deuxième opposition, elle n'a jamais varié d'opinion là-dessus — les deux principaux partis d'opposition étaient d'accord pour le rétablissement de l'équilibre budgétaire. Il faut le rappeler. C'était même, chacun, un engagement formel de rétablir l'équilibre en 2015‑2016. Alors, oui, ça donne l'arrière-fond ou le contexte nécessaires à la croissance économique.

Et le tourisme, vous avez raison de le dire, c'est un levier économique très intéressant pour le Québec. On a bien sûr parlé plus tôt du Plan Nord avec la stratégie spécifique pour le nord du 49e parallèle, ADN49. Alors, il y a 10 millions qui ont déjà été investis, et ça a généré des investissements de plus de 70 millions après seulement quatre ans de mise en oeuvre. Donc, pour chaque dollar investi par Québec, c'est 7 $ d'investissement dans les communautés locales et autochtones au nord du 49e, et on prévoit donc des investissements importants sur les 10 prochaines années, environ 30 millions de dollars.

Le tourisme d'affaires, il ne faut pas l'oublier, c'est un domaine important chez nous. Autant le Palais des congrès que le Centre des congrès de Québec ont des activités qui sont majeures sur le plan des retombées économiques sur les municipalités ou les villes dont ils font partie. Le Palais des congrès de Montréal, par exemple, a généré, en moyenne, des retombées de plus de 188 millions de dollars au cours des neuf dernières années. C'est 500 millions de dollars de retombées économiques pour la métropole et le Québec. L'agrandissement du Palais des congrès de Montréal est un des six nouveaux projets qui ont été inscrits dans l'enveloppe de mise à l'étude du plan quinquennal d'investissement. On sait que c'est la première étape qui mène à la réalisation

Les croisières internationales, il faut le répéter, amènent des retombées intéressantes. En décidant d'investir 50 millions pour les escales du Québec, et on veut continuer de le faire, le gouvernement, dès 2008, y avait vu une opportunité de rayonnement hors du commun, et avec raison. De mai à octobre 2014 seulement, les retombées des escales québécoises de croisière s'élevaient à 145 millions, 1 600 emplois à temps plein, 355 000 passagers et membres d'équipage à travers les neuf escales du Québec, 20 % de croisiéristes de plus en 2014 par rapport à 2013, 27 navires qui ont fait 348 escales sur le fleuve Saint-Laurent. Et on va continuer à développer ce secteur, M. le Président.

• (17 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Il reste à peine un peu moins d'une minute. En fait, on peut le reporter à un prochain bloc. Ça vous va? Je me tourne maintenant vers Mme la députée de Gouin. Pour votre bloc d'échange, vous disposez de 18 minutes. À vous la parole.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Et, si le premier ministre veut me consentir la minute additionnelle qu'il n'a pas prise, évidemment ça me fera vraiment plaisir.

M. le Président, j'interviens aujourd'hui et je suis heureuse de le faire avec le temps dont je dispose... aujourd'hui, particulièrement, commémoration du 75e anniversaire de l'obtention par les femmes de leur droit de vote. Le premier ministre donc ne sera sans doute pas surpris que, durant les minutes où nous allons échanger, nous allons parler des femmes.

Je vous rappelle que le combat des suffragettes avait deux objectifs : premièrement, bien sûr, participer à l'espace démocratique et à la vie démocratique au Québec, mais, deuxièmement, s'assurer que des femmes puissent un jour être à l'Assemblée nationale et batailler pour l'amélioration de leurs conditions de vie et de travail, ce qui m'amène à la situation actuelle. On part évidemment d'un budget de cette année, 2015‑2016, budget que nous, dans ma formation politique, nous qualifions d'austère ou d'austéritaire. Enfin, bref, on est dans l'austérité, on limite la croissance des dépenses. On fait de la relance surtout avec des infrastructures, avec le Plan Nord, avec l'exploitation des ressources naturelles et on met 1,6 milliard dans le Fonds des générations. Et, pendant ce temps, pendant ce temps, eh bien, nous sommes loin de la parité, nous sommes loin de l'égalité, dans les faits, sur le plan économique, entre les femmes et les hommes. Il y a même, malheureusement, une légère tendance à la hausse de ces écarts économiques entre les femmes et les hommes. Par exemple, les revenus d'emploi des femmes travaillant à temps plein sont à 75 % de ceux des hommes, une baisse par rapport à 2007. Près de 61 % des personnes au salaire minimum sont des femmes, et là on assiste à une augmentation du nombre de femmes au salaire minimum.

Une étude de l'IRIS, Institut de recherche et d'informations socioéconomiques, a évalué les impacts des mesures d'austérité depuis 2008, et il est clair que les femmes récoltent moins de bénéfices des mesures de relance économique que les hommes. J'aimerais d'ailleurs, avec votre permission, M. le Président, déposer un document ici avec des extraits de cette étude, montrant, graphiques à l'appui, ces différences dans les mesures prises, à la fois d'austérité et de relance.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Si c'est possible de le faire parvenir au président et...

Mme David (Gouin) : Donc — je vais y aller bien sûr très rapidement — pourquoi est-ce que les femmes récoltent moins que les hommes, beaucoup moins, la moitié moins des mesures de relance? Ce n'est pas très compliqué.

C'est que, depuis 2008, l'essentiel des mesures de relance va aux infrastructures, va dans le plan québécois d'investissement, va dans le Plan Nord et, donc, va dans la construction. Loin de moi l'idée de ne pas vouloir qu'il y ait des emplois dans la construction, mais le problème, c'est que, pendant que tellement d'argent... ou pendant que le gouvernement investit tellement dans les infrastructures il met tellement peu d'argent dans les secteurs où oeuvrent, travaillent majoritairement les femmes. Un seul exemple : cette année, 2,3 milliards dans le réseau routier, 68 millions dans l'économie sociale, et ça, c'est vraiment en additionnant tous les montants. Et donc les retombées profitent aux travailleurs masculins, mais il y a aussi des effets pervers, dans certaines régions, au développement tous azimuts et très rapide de grandes infrastructures et de mines, par exemple hausse substantielle du prix du logement et des denrées; augmentation des cas d'agression sexuelle à l'égard des femmes; montée du décrochage scolaire — ça touche surtout les garçons — mais aussi, et ça, on n'en parle pas assez souvent, difficultés de conciliation travail-famille. Pour dire les choses en termes simples et familiers, pendant que les gars sont au Nord et travaillent, les femmes restent au Sud et s'occupent des enfants.

Allons maintenant sur le terrain des programmes sociaux. C'est important, le terrain des programmes sociaux et des services publics, parce que c'est là où travaillent un très grand nombre de femmes, et les services sociaux et les services publics compensent souvent la différence qu'il y a dans les revenus entre les femmes et les hommes. Les services publics, lorsqu'ils sont accessibles à tout le monde, viennent pallier à certaines injustices sociales et fiscales, mais le problème, c'est qu'on coupe dans les services publics. Tout le monde le sait, quand on a une croissance de 1,2 dans la santé, là, ça s'appelle une coupe, en réalité. Et, si on perd des emplois, eh bien, là, ça touche particulièrement les femmes : les éducatrices en service de garde, tout ce qu'on a dit, là, depuis des mois, par exemple, sur l'aide aux devoirs, sur le maintien à domicile, la santé mentale, tous ces emplois occupés, ma foi, à 75 %, quand ce n'est pas plus, par des femmes. Mais il y a un problème, c'est que, si on fragilise ces emplois, si on se met à faire des coupes, eh bien, là, il y a deux conséquences : pertes d'emploi pour les femmes, difficultés en région — ce sont souvent les seuls emplois dans la famille, dans certains cas — mais aussi la charge sur les épaules des femmes. Parce que, si l'État ne s'occupe plus des gens en difficulté, qui prend le relais? Ça, ça fait longtemps que je le sais, puisque je viens du secteur communautaire et des groupes de femmes. Bien, ce sont les femmes : les femmes dans les secteurs communautaires sous-payés et les femmes dans la famille qui aident gratuitement des personnes.

Alors, quand on regarde tout ça, M. le Président, je soumets respectueusement que de verser 1,6 milliard dans le Fonds des générations plutôt que de le mettre dans les services publics, eh bien, ça a un impact sur les femmes.

La question que je pose donc au premier ministre, c'est : Est-ce qu'il serait prêt à ralentir le rythme des versements au Fonds des générations pour hausser la croissance des dépenses dans les secteurs occupés majoritairement par des femmes et qui ont un impact majeur dans la vie des femmes? Alors, je parle, par exemple, de la santé, de l'éducation, etc.

Document déposé

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, avant de céder la parole, le document sera déposé. Il n'y aura pas de copie. Si les membres souhaitent en prendre connaissance, on pourra le transmettre par la suite. Alors, M. le premier ministre, la parole est à vous.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je vais souhaiter la bienvenue à notre consoeur de Gouin à cette séance de crédits puis lui dire l'appréciation que j'ai pour son travail. J'en profite pour le dire publiquement. La qualité de ses interventions, la retenue dans les débats également et la solidité de son argumentaire, comme elle vient de le démontrer, impressionnent tout le monde, et je suis de ceux-là. On a eu l'occasion, ce matin, de parler de l'implication politique des femmes, mais c'est un autre sujet. Ce n'est pas le sujet de sa question, on pourra en discuter à une autre reprise, mais j'ai apprécié son commentaire, en fin d'allocution, sur la question du recrutement des femmes en politique. On l'a dit ce matin, c'est difficile. Elle a dit qu'elle avait des pistes de solution mais qu'il fallait y mettre le temps, à ce que j'ai bien compris le sens de sa question.

Alors, sur les éléments divers de son intervention, j'ai quelques observations à faire qui sont probablement des différences d'opinions entre elle et moi sur ces questions-là. C'est savoir où ça commence, le problème, et où ça se termine. Moi, je suis profondément convaincu qu'un discours de solidarité et de générosité, de services sociaux développés qui s'appuie sur l'endettement puis les finances déséquilibrées, c'est du vent, c'est de l'illusion. On ne peut pas développer et maintenir des programmes sociaux avec des finances publiques chroniquement déséquilibrées. C'est vrai qu'on est dans encore une année que j'ai qualifiée d'exigeante. Moi, j'aime mieux parler de rigueur budgétaire, elle le sait, parce que ce qui est en cours actuellement n'a rien à voir avec les coupes massives des années 1997-1998, notamment en santé et en éducation. On fait une légère augmentation des dépenses du gouvernement, mais on ne les diminue pas. Est-ce qu'il y a des besoins supplémentaires? Certainement. Mais ça nous amène à faire ces choix-là puis à établir ces principes-là.

• (17 h 10) •

Je veux également parler de l'impact sur les femmes qu'elle a mentionné puis je veux être certain de ne pas oublier de le faire dans mon intervention, mais je vais aller directement sur la question du Fonds des générations, et c'est probablement une différence d'opinions, je crois, entre elle et moi. Moi, je suis profondément convaincu... et c'est notre devoir de notre génération actuelle de corriger le surendettement du Québec, qui est un surendettement relatif à 54 % de dette brute du PIB. Si on était en Scandinavie ou en Europe, ce ne serait pas catastrophique. Il y a même, quand je vais en Europe dans mes délégations, dans mes visites... il y a certains chefs d'État qui me disent qu'ils aimeraient bien avoir 54 % de dette par rapport au PIB. Mais, dans le contexte nord-américain, avec nos compétiteurs voisins, qui sont avec nous en compétition pour la croissance économique, l'attrait d'entreprises, on ne peut pas se permettre de garder cette dette à un niveau aussi élevé, de sorte qu'on a un plan déterminé, rigoureux, régulier, avec le versement au Fonds des générations, pour le baisser à environ 45 % d'ici 2025, ce qui est encore élevé mais qui devrait nous amener à peu près au niveau de l'Ontario. Pourquoi on s'est rendus là? C'est ça qu'il faut répéter, parce que c'est également une source d'enseignement.

Elle nous parle, notre collègue, des dépenses d'infrastructures, qui sont de l'endettement, elle le sait. Mais il n'y a pas que les dépenses d'infrastructures qui expliquent l'importance de notre dette. En fait, on n'a pas beaucoup dépensé plus en infrastructures au Québec que dans d'autres provinces canadiennes. Par contre, on a fait beaucoup plus de déficits. C'est environ 35 % du PIB qui est constitué par une dette uniquement attribuée à des déficits répétés. Alors, autant le contrôle des finances publiques et l'équilibre budgétaire, même si c'est difficile. Puis on voit que même des gouvernements de gauche, comme en France actuellement le gouvernement socialiste, qui est aux prises avec le même enjeu et qui désire également équilibrer ses finances publiques et contrôler sa dette... c'est pour les mêmes raisons que je viens d'expliquer.

Alors, je vais être quand même précis dans ma réponse. J'ai l'intention de continuer les versements prévus au Fonds des générations. Et je dois vous dire que, lorsqu'on rencontre les agences de notation qui évaluent les finances publiques du Québec, et qui, malheureusement, compte tenu de notre état d'endettement et de nos déficits, ont un impact profond sur notre capacité de générer des marges pour justement les programmes sociaux... il s'agit de perdre une cote de crédit pour être encore dans une situation pire que celle qu'on est actuellement et de façon très importante. À chaque fois qu'on parle à ces agences de crédit, outre l'équilibre des finances publiques et les politiques fiscales, l'existence d'un plan rigoureux de contrôle de la dette et du Fonds des générations est qualifiée comme étant absolument incontournable et essentielle au Québec pour garder sa crédibilité et, notamment, sa cote de crédit, qui, je dois lui dire, était fortement menacée il y a quelques mois. On a réussi à rassurer les milieux financiers — on le sait — et on va continuer ces versements.

Maintenant je voudrais terminer mon intervention pour aller sur la question qu'elle a soulevée, qui est tout à fait judicieuse, et je veux affirmer que je suis d'accord avec elle, qu'il y a certains types de développement qui affectent les femmes plus que les hommes, notamment les grands projets de ressources naturelles dans le Nord. Il y a eu un rapport que j'ai lu du Conseil du statut de la femme sur cette question, sur les impacts, sur les femmes, entre autres, des développements nordiques. C'est la raison pour laquelle moi, j'ai insisté que, sur le Comité ministériel du Plan Nord, il y ait la ministre responsable de la Condition féminine qui soit là, et qu'il y ait, dans notre annonce d'il y a quelques jours, des mesures spécifiques pour étudier l'impact social et de santé des mesures, également nous assurer qu'on a également des solutions à apporter à mesure que les problèmes se présentent, et qu'on présente, pour la question du «fly-in/fly-out», ou de la conciliation travail-famille, des options, en développant, par exemple, des places de service de garde dans le territoire nordique.

Pour le reste, M. le Président, bien on veut continuer à soutenir le réseau Femmessor, qu'elle connaît très bien. On a lancé, avec la Commission de la construction, un programme d'accès à l'égalité pour les femmes dans l'industrie de la construction — c'est les métiers non traditionnels dans lesquels elles excellent souvent — et on veut permettre au Secrétariat à la condition féminine de poursuivre son soutien.

Elle a parlé d'agressions sexuelles. Elle le sait, il y a des travaux en cours, il y a un plan d'action qui va suivre. Et je vais juste lui répéter que, même si on est en désaccord sur des éléments de gestion de finances publiques, comme, pour moi, la nature incontournable de l'équilibre budgétaire et du contrôle de la dette, je suis conscient des impacts différents selon qu'on parle d'hommes et de femmes dans les différentes régions et je fais en sorte, nous faisons en sorte que ces impacts soient mesurés, prévenus et, si possible, rapidement corrigés lorsqu'on les constate. Et voilà, je crois, l'essentiel de ce qui nous réunit et, à la fois, qui nous éloigne sur les choix d'un gouvernement.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Mme la députée de Gouin, en soulignant qu'il reste un peu plus de cinq minutes.

Mme David (Gouin) : Alors, j'aurais tant de choses à dire, mais je vais aller à l'essentiel, M. le Président. Il me reste deux questions, je vais les poser rapidement. J'apprécierais avoir des réponses rapides aussi.

M. le premier ministre dit : Oui, je suis prêt à considérer l'impact qu'un certain nombre de politiques et de mesures ont sur les femmes. Je lui fais donc la demande suivante, extrêmement précise : Est-ce que, dans le prochain plan d'action en condition féminine, celui qui doit commencer en 2015 et se terminer en 2020, est-il prêt à respecter son obligation, qui doit être incluse dans ce plan, de procéder à une analyse différenciée selon les sexes chaque fois qu'une nouvelle politique ou mesure doit être mise en place par le gouvernement?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Première question. M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je comprends la question, je vais m'assurer d'en discuter avec ma collègue de la Condition féminine et l'ensemble du cabinet lorsqu'on fera le renouveau du plan d'action. Est-ce que ça sera dans chaque politique? Ça reste à déterminer. Mais qu'on l'intègre dans la décision publique de grands programmes, certainement, oui, mais est-ce que c'est universel, automatique pour chaque décision de gouvernement? Ça, ça reste à déterminer. Mais je l'engage à poursuivre le dialogue avec la ministre de la Condition féminine, qui aura sa période de crédits également.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Mme la députée de Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Je voudrais, pour ma dernière intervention, sensibiliser le premier ministre à la situation particulière des travailleuses du secteur public et lui dire la chose suivante : Votre gouvernement ne fait pas d'offre aux travailleuses du secteur public, il est en demande, et ce qu'il demande à 75 % des employés, qui sont des femmes, c'est de s'appauvrir dans les prochaines années, clairement. D'un côté, on a une admiration sans borne pour toutes ces enseignantes, infirmières, travailleuses sociales, préposées aux bénéficiaires, etc., qui oeuvrent auprès de jeunes, de malades, d'aînés, etc. Je pense qu'on les admire, je pense qu'on les aime, au Québec, ces gens-là, ces femmes-là, mais, quand c'est le temps de les rémunérer comme il se doit, c'est comme si, tout d'un coup, on était gênés. Et j'aimerais ça que le premier ministre y réfléchisse.

Je voudrais savoir s'il va envoyer comme message au président du Conseil du trésor de s'assurer que les travailleuses du secteur public non seulement ne s'appauvrissent pas dans leur prochain contrat de travail, mais qu'elles puissent quand même participer à l'enrichissement collectif du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre. Trois minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : Alors, M. le Président, effectivement, les offres déposées sont exigeantes, et c'est le début d'une négociation, on verra comment elles se termineront. On ne peut tout simplement pas distribuer l'argent qui est inexistant dans les coffres de l'État, et il faut être réaliste.

Je vous rappelle également qu'en parallèle de ces offres une bonne partie des employés dont elle parle vont bénéficier des augmentations d'échelon automatiques, qui n'existent pas pour les gens qui nous écoutent. La plupart des gens qui nous écoutent n'ont pas d'augmentation d'échelon automatique dans les entreprises où ces personnes travaillent. Alors, on aura, je suis sûr, des négociations importantes à mener avec... qui ont commencé, d'ailleurs, avec les syndicats du secteur public. En fait, le message, moi, que je veux lancer, il est simple : Il faut être prêts à entrer en partenariat avec eux sur des nouvelles façons de faire. On peut peut-être dégager des sommes pour améliorer les offres de rémunération en faisant les choses différemment, mieux, en diminuant le nombre de personnes dans certaines parties du gouvernement et en modifiant les façons de faire, et c'est là qu'on est en demande, effectivement, pour avoir plus de flexibilité dans l'organisation du travail. Et on a une fenêtre qui s'ouvre avec le départ d'environ 15 000 personnes à la retraite chaque année.

Il y a là une occasion d'avoir un véritable dialogue sur ça. Moi, je m'engage à ce que ce dialogue ait lieu. Mais il va falloir dégager des sommes supplémentaires à même ces changements de façon de faire, et c'est le mandat que le président du Conseil du trésor a actuellement avec les syndicats du secteur public.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. 1 min 30 s. Mme la députée Gouin.

Mme David (Gouin) : Merci, M. le Président. Alors, si tout ça est une question de finances publiques, une question de répondre aux attentes des agences de notation, ce qui, entre vous et moi, est, en fait, inconcevable quand on regarde à l'échelle du monde qui sont ces agences de notation et comment elles ont elles-mêmes appauvri un bon nombre de pays, mais, puisque c'est ça, la situation, et qu'il faut donc remettre de l'argent dans les coffres de l'État, je vais dire la même chose au premier ministre que ce que j'ai dit ce matin sur un autre sujet : S'il a besoin de suggestions pour aller chercher de l'argent et en mettre dans les coffres de l'État, ma formation politique en a plusieurs, et ces suggestions-là, qui sont de l'ordre de la taxation du capital des banques, de l'imposition accrue des contribuables à revenus très élevés, de cesser le gaspillage dans la négociation sur les médicaments, etc., ce sont des méthodes qui peuvent rapporter de l'argent à l'État et qui n'appauvriront pas les femmes qui oeuvrent dans les services publics.

Je rappelle, en terminant, qu'une enseignante au primaire, lorsqu'elle commence à enseigner, a 38 000 $ par année; le travailleur qui s'en va travailler dans une mine qui a un secondaire V commence à 80 000 $ par année. Il me semble, M. le Président, qu'il y a quelque chose là à regarder.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. 10 secondes, M. le premier ministre.

M. Couillard : On est toujours prêts à étudier les suggestions. Je le fais avec mes collègues de la deuxième opposition, comme vous le savez, à de nombreuses reprises. Mais je vous dirais juste que, sur le plan de la fiscalité, il faut être prudents. On n'a pas tant de gens riches que ça à taxer au Québec, puis il arrive un moment que l'impôt tue l'impôt. Elle sait de quoi je parle. Alors, nous, on milite plutôt pour une réduction du fardeau fiscal des Québécois en commençant, en passant, par les gens les moins fortunés.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce bloc d'échange avec Mme la députée de Gouin. M. le député de D'Arcy-McGee, je pense que vous souhaitez prendre la parole.

• (17 h 20) •

M. Birnbaum : Merci, M. le Président, M. le premier ministre, les collègues du côté ministériel, collègues de l'opposition, de la deuxième opposition, membres de la haute fonction publique.

J'aimerais aborder le sujet de l'économie sociale et, si le temps dans ce bloc de 20 minutes nous le permet, parler de Montréal aussi.

L'économie sociale, bon, on parle d'un enjeu très complexe dont je crois que les gens qui nous écoutent vont comprendre que peut-être ces enjeux invitent des réponses vigoureuses et, bon, peut-être un petit peu plus longues souhaitées par quelqu'un. Mais il me semble que le sujet mérite ce genre de traitement. Pour avoir travaillé depuis quelque 25 ans, avant de venir à l'Assemblée nationale, au sein des regroupements communautaires, je suis très sensible à l'importance de l'économie sociale dans tous ses aspects. Et, dans ma circonscription de D'Arcy-McGee, je tiens à noter qu'il y a une tradition de longue date et d'une ampleur énorme d'implication, de bénévolat, d'implication dans l'économie sociale, dans tous ses aspects touchant aux services d'entraide aux aînés, aux services d'entraide aux nouveaux arrivants, les immigrants et aux plus démunis, avec des résultats — et ça se voit partout au Québec — des résultats qui apportent tout un appui à notre économie traditionnelle, un appui qui peut être même chiffré quand il faut, mais un appui à ne pas ignorer. M. le premier ministre, on sait que vous avez à coeur tous ces aspects de l'économie québécoise ainsi que l'économie sociale aussi. D'ailleurs, vous avez rencontré M. Muhammad Yunus lors de votre participation au Forum économique mondial de Davos, en Suisse, en janvier dernier. M. Yunus, c'est un homme qui est connu pour son expertise en ce qui a trait à l'économie sociale, notamment un économiste et un gagnant du prix Nobel de la paix en 2006 pour avoir fondé la première institution du microcrédit. M. Yunus est un des fondateurs de Grameen Creative Lab, qui a pour mission d'accélérer le mouvement de l'entrepreneuriat social en collaboration avec un réseau d'acteurs internationaux d'entrepreneurs, entreprises, ONG, gouvernements et universités. Ces organismes ont déjà favorisé l'émergence de diverses idées d'entreprise à caractère social un peu partout sur la planète.

J'aimerais donc aborder le sujet de l'économie sociale en dressant d'abord un bref contexte. Au cours des 15 dernières années, le gouvernement du Québec a mis en oeuvre une stratégie et des plans d'action successifs en faveur du développement de l'économie sociale. Le dernier en liste, le Plan d'action gouvernemental pour l'entrepreneuriat collectif, a couvert la période 2008 à 2014. Ce plan d'action a mobilisé une dizaine de ministères et organismes et permis la réalisation de quelque 22 mesures pour un investissement public totalisant quelque 16,7 millions de dollars. Ils ont mis l'adoption d'un plan d'action gouvernemental en économie sociale sur cinq ans et doivent présenter les actions qui seront posées par le gouvernement afin de donner suite à la loi et de poursuivre le soutien au développement de l'économie sociale. La loi impose des mesures de suivi, de reddition de comptes et d'évaluation du plan d'action afin de mesurer l'efficacité de ces mesures, leur efficience et leurs réponses aux besoins des entreprises et des organismes de soutien à l'économie sociale.

Donc, comme vous vous y êtes engagé au sommet en octobre dernier, M. le premier ministre, nous avons hâte que le plan d'action de 2015‑2020 soit lancé au printemps. Il y a un processus d'élaboration du plan d'action. Il faut en parler peut-être avant de poser la question. Au bénéfice des gens de la maison, laissez-moi décrire brièvement le processus.

Le plan d'action est le fruit d'un travail de concertation et de coconstruction entre le ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations et ses partenaires qui s'est échelonné sur une période de deux ans. D'abord, le groupe prospectif était constitué des membres suivants : Chantier de l'économie sociale; Conseil québécois de la coopération et de la mutualité; Association des centres locaux de développement du Québec; trois chercheurs; l'Union des municipalités du Québec; la Fédération québécoise des municipalités; Investissement Québec; et les trois ministères, le MESS, le MEIE et le MAMOT. Avant la création de la Table des partenaires en économie sociale, ce groupe occupait un rôle similaire dans le cadre du renouvellement du plan d'action. Entre novembre 2012 et juin 2013, il s'est réuni à plusieurs reprises afin de formuler un diagnostic sur l'état de l'économie sociale québécoise, ses besoins et ses enjeux de développement. Cette table, la Table des partenaires en économie sociale, est enchâssée dans la Loi sur l'économie sociale. Elle rassemble les principales organisations nationales et régionales impliquées dans le domaine. Depuis sa création par le ministre de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations et responsable du dossier de l'économie sociale en août 2014, elle a été consultée sur le contenu du plan d'action. Les membres de la table ont recommandé de nouvelles mesures et formulé des commentaires sur celles proposées par le gouvernement.

Au cours des deux dernières années, une vingtaine de ministères et organismes ont été consultés sur le contenu du plan d'action lors des réunions du Comité interministériel en économie sociale ou de rencontres bilatérales afin de cibler leurs contributions potentielles. Tout cela qui m'amène à poser la question, M. le premier ministre : Sans tout dévoiler, pouvez-vous nous indiquer de manière générale quelle est votre vision de l'économie sociale et les grands axes de ce plan d'action 2015‑2020 en économie sociale?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Alors, j'en profite pour saluer mon collègue de D'Arcy-McGee, qui nous assiste pour la coordination des efforts pour l'adéquation entre la main-d'oeuvre puis les compétences, et c'est un travail excessivement important et très structurant pour l'économie du Québec.

Alors, effectivement, j'ai eu l'occasion, et ça a été marquant comme rencontre, de rencontrer Muhammad Yunus, M. Yunus, à Davos, certainement un grand homme, quelqu'un d'impressionnant, quelqu'un qui a effectivement créé le microcrédit au Bangladesh avec un succès absolument phénoménal. Et moi, j'ignorais qu'on avait également, depuis, au Québec, commencé des expériences de microcrédit — je l'ai appris, ça existe au Québec — par Desjardins notamment, mais également ailleurs. Il existe du microcrédit au Québec, et c'est tout à fait intéressant de voir ça. D'ailleurs, il a annoncé, M. Yunus, lors du dernier sommet de Mexico que C2 Montréal sera la principale plateforme nord-américaine qui accueillera le forum des entreprises sociales, le Social Business Forum, pour les sept prochaines années. Alors, c'est une reconnaissance très importante du talent québécois, et on va appeler ça apparemment le Davos de la créativité. Il y a des Davos de tout maintenant, mais certainement un de la créativité, C2 Montréal. Ce sera donc intégré à la programmation de C2 Montréal. Il y aura 3 000 leaders les plus avant-gardistes du domaine, et l'édition 2015 aura lieu au mois de mai, très bientôt, à Montréal. M. Yunus sera d'ailleurs présent parmi nous.

Alors, l'économie sociale, M. le Président, occupe une place très importante au sein de notre économie, c'est 7 000 entreprises collectives dans divers champs d'activité procurant de l'emploi à plus de 150 000 personnes, il faut le redire. C'est une activité réelle et significative. Le gouvernement reconnaît sa contribution au développement socioéconomique du Québec par la Loi sur l'économie sociale, et on a profité du budget 2015‑2016 pour lancer les grandes orientations du nouveau Plan d'action gouvernemental en économie sociale. Le gouvernement vise, de cette façon, à favoriser la création et le maintien de 30 000 emplois d'ici 2020. Les interventions ont pour objectifs d'outiller les entreprises dans leur développement, de répondre collectivement au défi du vieillissement démographique, d'encourager l'entrepreneuriat collectif, de développer les marchés et d'innover, de contribuer au développement des entreprises d'économie sociale dans tous les territoires.

C'est le fruit d'un travail de concertation entre le gouvernement et ses partenaires à travers le groupe prospectif d'économie sociale au Québec et la Table des partenaires en économie sociale. On a prévu, dans le budget 2015‑2016, des interventions de plus de 100 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

C'est certain qu'à cause de leurs missions particulières et de leurs structures ces entreprises requièrent un accompagnement et un financement adaptés, et les programmes réguliers ne sont pas toujours les meilleurs pour répondre à leurs besoins. Donc, le plan d'action favorisera la croissance de ces entreprises aux différents stades de leur développement — démarrage, consolidation, expansion — en prévoyant des outils financiers qui permettront de soutenir des interventions totalisant 60 millions de dollars, soit 30 millions de dollars pour la relance du programme favorisant la capitalisation des entreprises d'économie sociale par Investissement Québec; une recapitalisation à hauteur de 10 millions du Réseau d'investissement social du Québec, qui offre des prêts de plus petite taille, de moins de 100 000 $, aux entreprises d'économie sociale; une bonification de 20 millions de dollars du Programme d'infrastructures en entrepreneuriat collectif, qui vise à soutenir l'acquisition, la construction et la rénovation d'immeubles qui abritent ces entreprises.

Alors prenons quelques enjeux. D'abord, la question de la démographie. On sait que le changement démographique de notre population, j'en ai parlé abondamment tantôt, c'est un enjeu de taille pour notre société. De plus en plus de personnes nécessiteront une assistance quotidienne adaptée à leur situation, et les entreprises d'économie sociale participent déjà à cette mission et le feront encore mieux au cours des prochaines années.

• (17 h 30) •

Le plan d'action proposera différentes mesures à l'égard des services aux personnes âgées ou en perte d'autonomie, représentant des interventions de près de 10 millions de dollars sur cinq ans. Plus particulièrement, 6,5 millions de dollars seront consacrés au soutien et à la formation des préposés des entreprises d'économie sociale en aide à domicile.

Deuxièmement, on veut encourager l'entrepreneuriat collectif, donc favoriser le rachat d'une entreprise par les travailleurs ou les collectivités qui assurent la pérennité de l'entreprise et encouragent la relève. Le plan d'action prévoira 1 million de dollars sur cinq ans pour soutenir les travailleurs dans leur démarche d'implantation d'une coop de travail dans un contexte de reprise d'entreprise. Il faut développer les marchés et innover. C'est des sources importantes d'innovation, ces entreprises, qu'elles soient organisationnelles, technologiques ou liées au développement de marché. Le Québec est d'ailleurs reconnu sur la scène internationale en cette matière. Des investissements de 3,5 millions de dollars sont prévus sur cinq ans afin de faciliter le développement de marché et la commercialisation de ces innovations. À titre d'exemple, il y a 3 millions de dollars qui seront consacrés à l'organisme Territoires innovants en économie sociale et solidaire. À titre d'organisme de liaison et de transfert, cet organisme vise à inventorier et éclairer les innovations expérimentées par ces entreprises.

Et enfin on veut contribuer au développement dans tous les territoires. Les acteurs régionaux, on le sait, qui agissent auprès des entrepreneurs collectifs nécessitent un appui. On va donc prévoir de soutenir différents acteurs du secteur, comme le Chantier de l'économie sociale, les pôles régionaux d'économie sociale, les coops de développement régional, par l'entremise d'une entente de partenariat entre le gouvernement et le Conseil québécois de la coopération et de la mutualité. Au total, dans ce domaine, c'est 29 millions de dollars sur cinq ans qui seront alloués aux différents organismes qui oeuvrent sur le terrain pour soutenir le développement des entreprises d'économie sociale, notamment en région.

Et je terminerais en racontant une expérience qui m'avait marqué à l'époque ici, à Québec, où j'ai visité une entreprise collective qui favorisait l'insertion de personnes vivant avec des handicaps au marché du travail. Alors, je me souviens d'être allé visiter cette entreprise, et, à l'arrivée, la personne m'a dit : Venez, je vais vous faire visiter notre mine, parce qu'il voyait qu'on était intéressés au Plan Nord puis aux projets miniers. Alors, il s'agissait, en fait, d'une entreprise qui récupérait les fils électriques des appareils ménagers, qui récupérait le cuivre des fils électriques et qui vendait le cuivre, avec profit, sur le marché des métaux. J'ai toujours retenu cette analogie qui m'avait été présentée, donc je suis personnellement très sensible à ce secteur-là. Quand j'étais ministre de la Santé, je me suis assuré de bien les soutenir. La rencontre avec M. Yunus m'a fortement marqué, comme vous le savez, et je suis content qu'on accueille, ce printemps, le forum à Montréal. Puis ça permet de mettre en évidence le Québec, Montréal et C2 Montréal également.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le premier ministre. M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. Peut-être, on peut aborder la question de Montréal et, si nécessaire, compléter nos échanges lors du prochain bloc ministériel.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste sept minutes à ce bloc d'échange.

M. Birnbaum : D'accord. On parle de Montréal, notre métropole principale, le moteur de notre économie, le partenaire essentiel pour le développement de nos régions. On sent qu'il faut toujours comprendre qu'on ne parle pas d'une dichotomie. Le sort de Montréal et le sort de nos régions, les deux sont tellement interreliés, et c'est à notre gouvernement de mettre en place les conditions gagnantes pour assurer cet arrimage entre les deux.

Bon. Pour parler du contexte, on arrive bientôt à un anniversaire très intéressant pour Montréal, qui va célébrer son 375e anniversaire de fondation en 2017. Pour la collectivité montréalaise et pour le gouvernement du Québec, cette commémoration se veut la pierre d'assise de la relance et de l'affirmation du Montréal de demain, plaque tournante de l'économie québécoise et vitrine du Québec à l'international. 2017 marquera aussi le 50e anniversaire d'Expo 67. Pour certains de mon âge, on va se souvenir de cet événement, qui nous a ouverts sur le monde. À l'aube de la Révolution tranquille, on voyait le monde à nos pieds ici, à Montréal. En même temps, il y a des défis nombreux. Malgré certaines difficultés, Montréal et la région métropolitaine bénéficient d'une économie diversifiée reposant sur des créneaux d'excellence à forte valeur ajoutée. Tablant sur ses forces et sa capacité de résilience, Montréal, appuyée par le gouvernement, travaille à renforcer son positionnement concurrentiel sur la scène internationale comme place d'affaires et son attractivité à l'endroit des talents stratégiques et des investisseurs.

Tout ça, les gens de ma circonscription de D'Arcy-McGee le tiennent au coeur. Ils veulent savoir que notre gouvernement est à l'oeuvre pour maximiser l'impact de Montréal pour faciliter que ça joue son plein rôle dans toutes sortes de secteurs, dans l'entrepreneuriat. Le nouveau président du conseil d'administration du Cirque du Soleil est né dans ma circonscription et il, comme ses concitoyens, veut savoir qu'on va outiller Montréal avec tous ses atouts pour jouer son plein rôle.

It matters to us that the residents of my riding have the opportunity to use Montréal as a lever to help them further master their French so they can fully participate in Québec's economy. The residents of my riding, to the greatest extent, perhaps in Québec, are «issus de l'immigration». Ils veulent savoir aussi qu'on va outiller Montréal pour jouer son plein rôle dans l'intégration des immigrants.

Donc, le contexte est favorable à la mobilisation des forces vives en faveur de la métropole. Les leaders montréalais de toutes les sphères d'activité se mobilisent également pour la relance de Montréal. C'est ce que confirment des initiatives telles que le Comité de pilotage Montréal, métropole culturelle, fédérant divers acteurs en vue de faire de la culture un vecteur fort du développement de Montréal, et le déploiement du mouvement Je vois Montréal, initié par M. Jacques Ménard, président de BMO Groupe financier, en collaboration avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. La mobilisation des leaders de la métropole et de la collectivité démontre leur volonté à contribuer à l'essor de la métropole.

Ce qui m'amène à la question, M. le premier ministre : Pouvez-vous nous expliquer ce que va faire notre gouvernement, ce que fait notre gouvernement actuellement pour permettre à Montréal de continuer à jouer pleinement son rôle de métropole et de rayonner?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, vous disposez de trois minutes pour cette importante question.

M. Couillard : Ce sera très rapide, M. le Président, donc, mais je vais faire de mon mieux. Alors, de plusieurs façons, M. le Président.

D'abord, effectivement, on a confirmé qu'on voulait donner à Montréal les outils pour mettre fin, d'une part, à une compétition qui n'est pas la bonne et commencer la véritable compétition. Celle qui n'est pas la bonne, c'est entre Montréal et les régions. Les régions ont besoin de Montréal, et Montréal a besoin des régions. La bonne compétition, c'est avec les autres grandes villes du monde et les autres grandes villes à vocation globale comme l'est Montréal, et on travaille actuellement sur une disposition législative qui reconnaîtra, comme ça a été le cas à Toronto, un statut spécifique pour Montréal et on le fera également pour notre capitale. Il y a les nombreux projets actuellement en infrastructure, dans plusieurs secteurs, qui sont en cours, les grappes industrielles, aéronautiques, les ententes sectorielles, comme l'immigration, et, bien sûr, les questions d'organisation.

Nous travaillons actuellement avec la Communauté métropolitaine de Montréal sur plusieurs questions, notamment le développement du transport collectif et la gouverne du transport collectif dans la métropole, qui, pour le dire simplement, est assez compliqué et assez enchevêtré. Alors, on travaille là-dessus, et ça devrait faire l'objet d'une annonce prochainement, lorsque le ministre des Transports aura terminé ses travaux de consultation, parce qu'il faut faire plus, mais il faut aussi faire beaucoup mieux. Alors, plus, c'est augmenter le financement du transport collectif de façon imaginative. Et je voudrais souligner l'entente commerciale que le gouvernement a signée avec la Caisse de dépôt et placement du Québec. Et j'enjoins mes collègues des partis d'opposition à favoriser l'adoption de ce projet de loi. Les gens de la région montréalaise ont hâte d'avoir le train rapide sur le pont Champlain, ont hâte d'avoir le Train de l'Ouest et la navette vers l'aéroport de Dorval, et j'espère qu'on pourra adopter ensemble ce projet de loi le plus rapidement possible.

Pour le 375e, bien c'est un grand jalon qui s'approche, il y a huit legs, pour 160 millions, qui sont prévus : le Musée des beaux-arts de Montréal; la Trame verte et bleue du Grand Montréal; l'oratoire Saint-Joseph; le projet Cité Mémoire, une oeuvre d'art publique qui marquera l'entrée de la ville; la réhabilitation de la gare maritime et de la jetée Alexandra, comme on en a parlé tantôt; le recouvrement progressif de l'autoroute Ville-Marie; et 35 millions pour le parc Jean-Drapeau.

Et je termine en rappelant une coïncidence qui va émouvoir mes collègues de l'opposition officielle, c'est que le 375e anniversaire de Montréal va coïncider — imaginez, M. le Président — avec le 150e anniversaire de la Confédération canadienne. Et je ne doute pas que, ce jour-là, nous fêterons, tous partis confondus, ces heureux événements, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition officielle, vous avez le privilège de terminer cette première demi-journée de travaux. À vous la parole.

• (17 h 40) •

M. Bédard : Merci, M. le Président. Donc, ce que je comprends du premier ministre, sur le projet de loi sur la Caisse de dépôt et sur les infrastructures, je comprends qu'il va peut-être innover encore, avec un bon ton, comme il le fait aujourd'hui. Il va nous passer peut-être le bâillon avant les consultations, ça, en disant : Il faut se presser, là, hein, on a le pont Champlain à construire, passons... attendons, hein? Maintenant qu'on sait où vous logez et que les autres se logent puis où les agences de crédit se logent, allons-y, passons un bâillon. J'aime bien la logique du premier ministre, c'est étonnant.

Un petit rappel : simplement lui dire... La première chose, c'est qu'il évoque les années 90 comme étant des années budgétaires difficiles. Je vais toujours le dire. Parce qu'il parlait de l'économie sociale tantôt. Toute la structuration de l'économie sociale s'est faite lors du grand rendez-vous qu'a fait Lucien Bouchard, et, de se comparer à Lucien Bouchard dans ce qu'il fait actuellement, je pense que c'est une comparaison qui est totalement boiteuse. M. Lucien Bouchard, que j'ai bien connu et que je connais encore, a pris la peine de rencontrer tous les partenaires, tant au niveau du travail, les syndicats, qu'au niveau des chambres de commerce, des entreprises pour arriver à des grands consensus et qui a permis, en même temps, oui, de... il a été obligé de rattraper une mauvaise gestion, mais de créer l'assurance médicaments, de créer, avec ses autres collègues, dont Pauline Marois, la politique familiale, de structurer l'économie sociale — c'est là où c'est arrivé, là — d'instaurer la Loi sur l'équité salariale. Et même, M. le Président, à l'époque, il l'a fait sans augmenter les taxes, impôts et tarifs, imaginez-vous, mais il l'a fait avec une pensée de développement à long terme, ce qu'on n'a pas actuellement et ce qui manque cruellement au gouvernement.

Lors du dernier bâillon, une des dispositions... évidemment, avec l'augmentation à 20 $ pour certains parents... entre 20 $ et... bon, maintenant, on saura, lors de notre rapport d'impôt, combien on va payer, plusieurs auront la surprise, à ce moment-là, combien ils vont payer. La loi prévoyait, à l'article 103.1, la disposition suivante : «Est constitué le Fonds des services de garde éducatifs à l'enfance, affecté exclusivement au financement des services de garde éducatifs subventionnés.» Donc, ça veut dire que ce qui va être collecté à travers le rapport d'impôt va aller exclusivement aux services de garde.

Est-ce que le premier ministre est d'accord avec le fait que ça devrait aller exclusivement aux services de garde?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, le nom l'indique. Maintenant, je voudrais quand même revenir sur certaines interventions précédentes de notre collègue.

Je ne blâme pas M. Bouchard puis son gouvernement d'avoir pris les décisions qu'ils ont prises. Je voudrais juste que, quand ils parlent des efforts qu'on fait actuellement, notre collègue et son parti, les efforts qu'on fait pour rétablir l'équilibre budgétaire, ils les mettent en relation avec cette époque-là. Ce n'est pas la première fois qu'on fait ce genre d'effort là. Il y a quand même des différences, M. le Président. À l'époque, on avait d'abord proposé une baisse générale de rémunération de 6 % à tout le monde. Ça s'est terminé par des incitatifs très forts à la retraite pour les employés du secteur public. Moi, je l'ai connu dans le secteur de la santé, mais on l'a connu dans d'autres secteurs. Mais la situation, à l'époque, des finances publiques du Québec était très grave, et, comme ça a été le cas au mois d'avril, mai, quand on est arrivés, la cote de crédit du Québec était fortement menacée.

Je veux juste quand même remettre les chiffres en perspective puis je ne le fais pas, je le répète, pour blâmer le gouvernement de M. Bouchard. Ils ont eu à prendre des décisions difficiles, et Dieu sait qu'on préférerait en prendre des différentes. Mais, lorsqu'on nous dit, par exemple, qu'on fait de l'austérité massive — et je ne veux pas utiliser l'autre adjectif qui est utilisé en période de questions, je vais laisser la collègue le répéter, si elle le veut, tantôt — si je regarde les domaines cruciaux de santé et d'éducation, alors on va prendre deux groupes de deux années : 1996‑1997, 1997‑1998 puis ensuite 2015‑2016 et 2016‑2017. Alors, en santé, à l'époque, c'était moins 1,3 %, moins 1,8 % pour les deux années; nous, c'est plus 1,4 %, plus 1,9 %. Ce n'est pas le pactole, hein, mais on ne parle pas de réduction de l'enveloppe, on parle d'une croissance très lente de l'enveloppe. En éducation, le contraste est encore plus grand, c'est moins 3,9 % — imaginez, si on avait annoncé moins 3,9 % en éducation, le genre de crédits qu'on aurait actuellement, d'ailleurs les crédits ont dû être vigoureux, à l'époque, j'en suis persuadé — moins 1,2 %, puis chez nous c'est plus 0,2 %, plus 1,6 %. Alors, ce n'est pas du tout le même univers. Et on sait d'ailleurs qu'il y aura des transferts en éducation — on pourra en reparler avec le ministre de l'Éducation dans ses crédits — qui vont un peu augmenter l'enveloppe, mais je ne discute pas que l'enveloppe est très faible en termes de croissance, mais au moins elle croît.

Maintenant, pour les tarifs de services de garde, je vais répéter ce que j'ai dit à plusieurs reprises en Chambre, la formule qui est devant nous, elle est avantageuse quand même et équitable. Je vais le répéter, là, la proposition précédente, d'augmenter de 6 $ à 9 $ pour tout le monde, y compris les familles à bas revenus, ce n'est pas équitable. On pourrait même dire qu'un tarif bas pour tout le monde, ce n'est pas équitable, parce que c'est un transfert objectif de richesse des moins fortunés aux plus fortunés, qui bénéficient davantage de ces politiques-là. Et les chiffres exacts comportent également l'utilisation... parce que nous, on est allés récupérer l'argent fédéral, environ 24, 25 millions, l'argent du fédéral qui était là-bas et qui n'était pas éligible pour le Québec en vertu du type de régime qu'on avait créé. Et la réalité des chiffres — la contribution nette quotidienne, elle doit être rappelée aux parents qui nous écoutent : avec 50 000 $ de revenus de travail... brut, pardon, c'est 6,02 $ par jour; 75 000 $, c'est 6,84 $ par jour; 85 000 $, c'est 7,83 $; et on atteint 9 $, ce qui était prévu dans ce qui avait été annoncé précédemment, seulement à partir de 100 000 $ de revenu familial. On nous a parlé tantôt de 20 $. 20 $, c'est la contribution brute à 200 000 $ de revenu familial. Avec l'application des crédits d'impôt, c'est, en fait, 15,66 $.

Alors, ce n'est pas tout à fait le tableau qui nous a été brossé tantôt. Et ce que j'ai constaté, lorsqu'on a eu à prendre une décision compte tenu de l'état des finances publiques, ce qu'on a eu à constater...

Une voix : ...

M. Couillard : Oui?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Est-ce que c'est un rappel au règlement?

M. Bergeron : Oui, M. le Président. Je ne veux pas manquer de respect au premier ministre, d'autant qu'il s'agit d'une réponse tout à fait convenable, mais, dans un souci de partage équitable du temps, je vous fais remarquer qu'il s'agissait d'une réponse relativement... d'une question, dis-je, relativement brève du chef de l'opposition. Sans vouloir limiter le temps de parole du premier ministre — loin de là — est-ce qu'on peut s'assurer qu'on puisse avoir un échange qui soit bien partagé, bien balancé, M. le Président?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Verchères, vous avez entendu les remarques que j'ai faites lorsque le député de Granby et leader de la deuxième opposition a voulu intervenir. Je pense, j'ai bien écouté la question, qui a abordé plusieurs aspects, et, à date, la réponse me semblait aborder les mêmes sujets. Et, quand je regarde le temps, parce que, n'ayez crainte, j'ai souci de garder cette proportionnalité... et je pense que le premier ministre allait bientôt terminer les éléments de réponses, je pense. Donc, voilà. Merci pour ce rappel. M. le premier ministre, si vous voulez...

M. Couillard : ...puis je veux assurer mon collègue que je ne veux pas faire plus que de toucher chaque point. Il pourra convenir avec moi que chacun des éléments que j'ai mentionnés était contenu dans la question du collègue.

Je reviens encore une fois sur la question précise, parce qu'on a fait des vérifications pour être bien certain que la réponse était la bonne. Elle est la bonne. C'est l'argent des contributions des parents qui va servir à financer les services de garde dans le fonds dont il est question.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...vous remercie. M. le leader de l'opposition.

M. Bédard : Alors, je lui pose la question : Est-ce que ça peut financer autre chose que les services de garde?

M. Couillard : Non.

M. Bédard : Non? Vous êtes sûr de ça, M. le premier ministre?

M. Couillard : Bien, c'est ce qu'on m'indique. Vous pourrez vérifier avec la ministre de la Famille. J'ai le secrétaire général du gouvernement avec moi, les gens du ministère des Finances en arrière.

M. Bédard : Vous êtes sûr, sûr, sûr?

M. Couillard : Bien, moi, je dis ce qu'on m'indique, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : O.K. Alors, comme vous en êtes sûr, dans le bâillon — je vais peut-être l'apprendre au premier ministre — il y a un papillon qui est tombé tout d'un coup, le premier ministre n'a pas été informé, et nous non plus, ça a l'air, et on l'a su évidemment tard dans la soirée.

Alors, l'article a été modifié dans le cadre du bâillon, un papillon, donc un amendement qui a été présenté, et il dit la chose suivante. À l'article, on a créé... évidemment, on a ajouté, à la fin de l'article 103.2 de la loi des services de garde à l'enfance proposé par l'article 160 du projet de loi, l'alinéa suivant, et je lui lis : «Toutefois, les sommes que le ministre engage pour la perception de la contribution additionnelle sont portées au débit du compte en fidéicommis du fonds.» Qu'est-ce qu'il entendait par cette disposition?

M. Couillard : Bien, je suppose, M. le Président...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Je suppose qu'on parle des coûts administratifs reliés au traitement fiscal. Ça fait partie des services de garde, la perception des tarifs.

M. Bédard : Ah! O.K. Est-ce que vous pensez qu'auparavant le ministère du Revenu avait la possibilité, à partir du 7 $, d'utiliser le 7 $ à des fins administratives? Est-ce que vous pensez ça?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Alors, M. le Président, je lis le communiqué du ministère de la Famille qui a suivi l'adoption du projet de loi : «L'adoption du projet de loi n° 28 permet de créer le Fonds des services de garde éducatifs à l'enfance, fonds dans lequel seront versées toutes les contributions additionnelles des parents. Le fonds servira exclusivement à financer les services de garde et aura pour objectif premier d'offrir aux enfants des services de garde accessibles et de qualité.»

Puis je voudrais quand même rajouter, M. le Président, que je sais que c'est une discussion difficile entre nous, mais je suis personnellement profondément convaincu que ce qu'on a devant nous actuellement non seulement nous permet d'espérer la pérennité de ce service important, mais également le rend beaucoup plus équitable socialement, M. le Président, beaucoup plus équitable. D'ailleurs, un de mes constats lorsque j'ai étudié les différentes hypothèses qui étaient devant nous, c'est de voir qu'on était les seuls dans les pays avancés à faire cette tarification unique, quel que soit le revenu. Les pays européens, comme l'Angleterre, la France, les pays scandinaves, ont tous une modulation de perception selon le revenu. Alors, je pense que c'est une bonne pratique, c'est une pratique équitable et qui maintient la politique familiale du Québec à long terme pour les familles de l'avenir, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le chef de l'opposition.

• (17 h 50) •

M. Bédard : Je pense qu'on s'égare, là. On n'est pas dans la rhétorique. Ce que je lui dis, c'est que, par amendement, il a permis qu'on utilise ce fonds à d'autres fins. Pourquoi?

Alors, je veux savoir combien on va aller chercher dans ce qu'on paie pour les services de garde qu'ils vont utiliser à l'administration. Parce qu'évidemment le premier ministre il a créé un système complexe où, là, ça va être prélevé à partir du ministère du Revenu. Si on a un revenu, parents séparés, il y aura des vérifications. Alors, j'aimerais le savoir, et j'imagine qu'il l'a. Au Trésor, on l'avait. Quand j'ai fait la loi n° 1, je savais il y avait combien de fonctionnaires à la... publique, combien il y en avait au Conseil du trésor, combien il y en avait dans chacun des ministères, à l'AMF, et, chacun des emplois, je le connaissais.

Alors, j'aimerais savoir combien d'emplois vont être demandés au ministère du Revenu pour appliquer la nouvelle tarification et combien ça va coûter aux parents du Québec, cette nouvelle gestion.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, on est dans l'optique de diminuer le nombre d'employés à la fonction publique, certainement pas les augmenter. On peut faire toujours beaucoup mieux avec non seulement les effectifs qu'on a, mais, dans beaucoup de cas, moins d'effectifs, et on l'a démontré déjà dans plusieurs domaines. Mais, M. le Président, je répète — notre collègue pourra les consulter après notre séance, là — j'ai avec moi le secrétaire général du gouvernement, le ministère des Finances, le ministère de la Famille, ils nous indiquent, tous et toutes, à l'unanimité, que le fonds sert exclusivement à financer les services de garde.

Alors, je ne comprends pas la discussion qu'on a, mais on pourra avoir un éclaircissement technique comme on voit que, de toute évidence, on n'est pas d'accord là-dessus, là, mais il faut que je vérifie techniquement avec mes collègues qui sont à l'arrière. On pourra revenir là-dessus s'il le veut.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Ce que je veux dire au premier ministre, c'est qu'on a beau vérifier, le problème, c'est que la loi est adoptée, O.K.? Et, on vérifiera autant qu'on voudra, le résultat, il est simple, il est inscrit, et je crois qu'il n'a pas été informé, et c'est ça qui est malheureux. Et le texte, il dit très clairement que maintenant ce fonds peut maintenant servir pour la perception des contributions additionnelles. Donc, ce qu'il a créé, la taxe famille, on peut, à partir du fonds, de ce que les parents paient, demander... le ministère du Revenu va facturer ce fonds.

Alors, moi, j'aimerais savoir — et il le sait sûrement — combien de fonctionnaires vont être nécessaires pour administrer cette nouvelle taxe famille. Et je suis convaincu que le premier ministre est capable de le savoir d'ici... S'il ne le sait pas là, ce qui est étonnant — on aurait adopté le projet de loi sans savoir combien de personnes ça prend de plus — il peut sûrement nous le livrer ce soir. Puis après ça on discutera de combien d'argent va être retiré dans ce fonds à des fins purement administratives, donc pour payer du monde qui vont taxer les familles du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le premier ministre, simplement souligner que nous allons suspendre nos travaux dans environ huit minutes, à 18 heures. M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, je peine à saisir la pertinence de cette discussion, là. La cible de réduction des effectifs est la même pour tous les secteurs du gouvernement, y compris les ministères financiers. Il y a déjà moins d'employés dans le secteur public qu'il y en avait il y a quelques mois.

Maintenant, je m'objecte fondamentalement au fait d'appeler ce programme qui a été créé taxe. Ce n'est pas une taxe santé. Franchement, soyons un peu raisonnables, là. Ce sont des contributions qui varient selon le revenu qui sont très basses par rapport au coût réel du service. Il faut rappeler à tout le monde que ça coûte 60 $ par jour, 60 $ par jour, M. le Président, pour une place de garde en contribution réduite. Ça, c'est le coût réel de la place. Alors, même à 200 000 $ de revenus familiaux, quand on paie 15 $ nets après crédits d'impôt, ça demeure très avantageux. Et on voit que la grande majorité du service est financée par les impôts généraux de la population. Alors, ce n'est pas du tout une taxe. Je ne vais jamais accepter qu'on accepte ça comme ça.

C'est un tarif modulé selon le revenu comme le font les démocraties les plus avancées du monde, et ça va nous permettre de maintenir un programme accessible non seulement pour les familles d'aujourd'hui, mais les familles de demain. Et, avec le congé parental, avec la prime de Soutien aux enfants, ça maintient non seulement en place mais encore plus solide... l'essentiel de la politique familiale du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Je vais déposer l'article pour qu'on sache... Il a été déposé évidemment pendant la soirée. Je vais laisser le temps au premier ministre de le lire, là, pour qu'on sache exactement où est-ce qu'on en est. C'est l'amendement qui a été adopté lors de l'étude détaillée lors du bâillon.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...qui a été adopté. Très bien.

M. Bédard : Vous pouvez le remettre pour qu'on puisse le lire, là.

Document déposé

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Ah! si vous voulez que... je peux le remettre, là.

M. Bédard : Cet article, est-ce que le premier ministre peut le lire?

M. Couillard : M. le Président, j'ai quand même acquis la capacité de lecture, mais, ce que je voulais lui dire, je le lui ai dit tantôt : Ça ne sert à rien de prolonger cette discussion, on peut changer de canal, parce que je vais faire la vérification technique. Déjà, on m'indique partout ici que ça sert à financer les services de garde. Je répète que les effectifs de la fonction publique vont diminuer, pas augmenter. Je ne vois pas ce qu'il y a de plus à ajouter, là.

Puis, si on parle de coûts administratifs, il y a des coûts administratifs importants dans les services de garde, on le sait, puis on peut même les diminuer. Ça fait partie du projet d'optimisation des services de garde que la ministre de la Famille a déposé.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, M. le chef de...

M. Couillard : Alors, on m'informe...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Pardon.

M. Couillard : ...une nouvelle. Exclusif, M. le Président, exclusif : on vient de me dire : Aucun effectif de plus. Voilà la réponse.

M. Bédard : Ah! là, moi, là, moi, me faire dire ça, là, honnêtement, je n'en reviens pas. Là, il vient de me dire, là, qu'il ne vérifiait plus. Là, il dit : On va administrer une nouvelle taxe, il y a une nouvelle ligne en bas, puis ça, ça ne prend pas plus de fonctionnaires. Tout le monde sait ici, dans cette salle, que c'est faux. Tout le monde sait ça. Quand j'ai fait la loi n° 1, je savais que chaque ministère... Tout le monde sait que ça n'arrive pas dans la réalité, M. le Président. Voilà.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition, ça va bien, on a un bon échange...

M. Bédard : ...mais me faire dire ça...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Non, mais je vous demanderais... Vous connaissez mieux que quiconque, sans doute, le règlement. D'affirmer qu'un commentaire...

M. Bédard : ...M. le Président. Alors, ce que je dis tout simplement...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Vous retirez votre affirmation?

M. Bédard : Oh oui! effectivement. Ce n'est pas faux, sauf que c'est contraire à tout ce que j'ai vécu et ce que l'humanité a vécu et que la fonction publique vit à tous les jours. C'est simplement ça que je veux dire.

Et je tiens à lui répéter que, chaque projet de loi, chaque disposition, il y a une évaluation. Quand on marque, dans un projet de loi... on prend la peine, dans un papillon, de dire que maintenant on va pouvoir tarifer ce fonds-là à cause de la perception que ça va entraîner... Le premier ministre me dit qu'il n'y en a pas, de perception, il y a personne qui va maintenant s'assurer de cette tarification. Je lui dis que, dans les faits, ça ne peut arriver et qu'il y aura cette tarification. Alors, j'aimerais le savoir. Il a sûrement une évaluation du ministère du Revenu. En tout cas, moi, ils m'en fournissaient dès qu'on mettait un petit caractère ou une possibilité. Dans le cadre de la loi n° 1, ils nous disaient combien de fonctionnaires de plus que ça prend. Là, on leur disait : Bon, O.K., si ça vous prend ça, avez-vous des gains d'économie à faire? Vous n'aurez pas plus de... on pouvait leur dire ça : Vous n'aurez pas plus de monde. Par contre, eux disaient : Maintenant, il y a tant de personnes qui vont maintenant être destinées à cette fonction-là. Alors, dans le cas des services de garde, avec la complexité qu'on a, il va y en avoir. Et maintenant, la possibilité qui est introduite dans le projet de loi, c'est que le ministère du Revenu pourra envoyer une facture à ce fonds-là et dire : Écoutez, j'ai tant de fonctionnaires.

Alors, ce que je demande à M. le premier ministre, c'est tout simplement : Combien de fonctionnaires seront rendus disponibles? Est-ce qu'il a une évaluation, tant en termes de... je vous dirais, de personnel, d'ETC réguliers, combien ça va coûter à ce fonds, cette gestion administrative complexe qu'il a instaurée?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, écoutez, là, je suis entouré des hauts fonctionnaires des deux ministères. Il les connaît, il a travaillé avec eux comme président du Conseil du trésor. Et, à sa question : Combien d'effectifs supplémentaires?, réponse : pas un seul effectif supplémentaire. Et non seulement ça, on a des objectifs de réduction d'effectif pour la fonction publique. Alors, je pense qu'on est dans des méandres, là, qui ne nous amènent nulle part.

Alors, le Fonds de services de garde sert à financer les services de garde. Je répète que ce qui est sur la table actuellement, c'est beaucoup plus équitable que ce qui était le cas auparavant, beaucoup plus équitable pour les familles du Québec parce que tout le monde comprend qu'il faut contribuer selon son état de richesse. Tout le monde comprend qu'à 60 $ de coût réel chacun contribue selon ses moyens. Tout le monde comprend qu'on est allés rechercher l'argent du fédéral qui n'avait pas été recherché dans la version initiale du service de garde et tout le monde comprend...

Une voix : ...

M. Couillard : Et on vient de me répéter pour une troisième fois qu'il n'y a pas de fonctionnaire de plus qui est nécessaire pour gérer cette... et que ça n'enlève aucun autre service que l'Agence du revenu ou le ministère des Finances effectuent.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Il reste deux minutes à cet échange avant la pause du souper.

M. Bédard : ...que je veux dire au premier ministre. Ça m'étonne encore d'avoir cette discussion-là à ce moment-ci. Ce n'est pas le nombre additionnel de fonctionnaires au ministre du Revenu qui va être facturé, c'est les ETC qu'on a besoin pour l'administrer qui vont pouvoir facturer le fonds, tout simplement. Alors, c'est ça que je lui dis. Alors, il a beau me dire que le ministère du Revenu n'en aura pas plus, l'article qui a été déposé en papillon, il a un but, c'est de permettre au ministère du Revenu de facturer... pas le nombre d'employés additionnels qu'il va avoir besoin, le nombre d'employés actuels affectés à cette fonction, qui va être effectivement assez complexe.

Alors, ce que j'aimerais avoir, c'est combien de fonctionnaires vont être affectés. Il doit y avoir sûrement une évaluation du ministère du Revenu qui dit : Voici le nombre de personnes. Puis le président du Conseil du trésor, le ministre des Finances peut dire : Oui, mais on n'augmentera pas vos ETC. C'est bien correct, ça, sauf qu'il y en a qui vont être affectés. Et il a sûrement l'évaluation entre les mains. Combien vont être affectés? C'est quoi, l'évaluation qu'il a entre les mains sur la facturation possible? Ou qu'il prenne l'engagement aujourd'hui qu'il va retirer l'amendement et qu'il n'y aura aucune facturation transmise au fonds qu'il a créé, donc le fonds visant à financer les services de garde subventionnés.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je ne veux pas me mêler des échanges, mais il me semble un peu difficile de prendre un engagement de retirer un projet de loi déjà adopté. M. le premier ministre, il nous reste 40 secondes.

M. Couillard : M. le Président, le projet de loi ne sera pas retiré, bien sûr. Le fonds va être créé, il va servir à financer les services de garde. On vient d'entendre : Il n'y a pas d'effectif supplémentaire requis. Ça ne diminue pas du tout les missions accomplies par les ministères des Finances et non pas le ministère, mais l'Agence du revenu. Il aura l'occasion de questionner le ministre des Finances à cet effet au cours de ses crédits.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie.

Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux jusqu'à 19 h 30. Je vous demanderais d'être ici à 19 h 30 pour la suite. Merci, et bon appétit.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 36)

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Alors, prenez place, s'il vous plaît! Bonne soirée à tous. La commission reprend ses travaux. Encore une fois, veuillez vous assurer que vos appareils électroniques sont en mode silencieux, afin de ne pas perturber nos travaux.

Je vous rappelle que la commission est réunie afin de procéder à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif pour l'exercice financier 2015‑2016. Alors, avant de poursuivre nos travaux, je vous informe du temps approximatif qu'il reste à chacun des groupes parlementaires pour l'étude de ce programme : du côté gouvernemental, 1 h 40 min; du côté de l'opposition officielle, 43 minutes; et, de la deuxième opposition, 41 minutes.

Nous avions complété le bloc d'échange avec l'opposition officielle. Je me tourne maintenant vers le député de Sherbrooke, qui prend la parole. À vous la parole, M. le député.

M. Fortin (Sherbrooke) : Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord, mes premiers mots seront pour vous saluer et pour saluer le premier ministre, saluer le chef de l'opposition officielle, le député de Granby ainsi que tous les collègues parlementaires, les gens de la fonction publique également qui accompagnent notre premier ministre ce soir.

Je sais, M. le Président, que vous êtes, disons, toujours très préoccupé par les cotes d'écoute de nos travaux dans la Commission des institutions, mais disons que, ce soir, la compétition est féroce alors que le Québec tout entier vibre au match du Canadien contre les Sénateurs. Et, même si on est ici, à Québec, on souhaite que nos Canadiens l'emportent ce soir, pour deux raisons : parce qu'on veut finir cette série-là, mais on veut aussi que notre premier ministre remporte son pari contre la première ministre de l'Ontario et que Mme Wynne soit obligée d'aller à Queen's Park avec son chandail du Canadien dès demain. Alors, c'est ce qu'on...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Si vous me permettez — je ne veux pas vous couper la parole — mais simplement rassurer : Ceux qui seraient déchirés entre écouter nos travaux et écouter le hockey pourront se reprendre sur Internet.

M. Fortin (Sherbrooke) : Mais, de toute façon, je vais tenter de vous aider un petit peu, M. le Président, en allant chercher d'autres parts de marché. Je n'ai pas l'intention de parler de sport et de hockey, mais je vais plutôt parler de culture, parce que vous savez que c'est un sujet d'intérêt pour moi, étant adjoint parlementaire de la ministre de la Culture et des Communications depuis maintenant bientôt un an. En fait, ça va faire un an demain que notre gouvernement a été assermenté, un an demain que le premier ministre m'a confié cette fonction parlementaire. Je lui en suis très reconnaissant. J'ai la chance de travailler avec une ministre qui est exceptionnelle, et qui est très appréciée dans son milieu, et qui incarne bien son ministère.

Dans ses remarques d'introduction, le premier ministre a fait état justement de différentes annonces qui ont été faites, dans le dernier budget, en matière de culture. J'aurai l'occasion d'y revenir dans une question ultérieure, mais je voudrais tout d'abord l'entretenir sur une annonce qui a été faite dans le premier budget que notre gouvernement a fait deux mois après son arrivée au pouvoir, le 4 juin 2014, c'est-à-dire celle sur le Plan culturel numérique, alors que notre ministre des Finances avait annoncé à ce moment-là que, pour le déploiement du Plan culturel numérique, nous allions investir, sur sept ans, 110 millions de dollars, qui est quand même une somme considérable. Le 27 septembre dernier, notre premier ministre, accompagné de la ministre de la Culture et des Communications, a fait l'annonce de ce Plan culturel numérique, qui inclut 51 mesures et, pour la mise en oeuvre, pour les deux premières années, va disposer d'une enveloppe de 36 millions de dollars.

Pour faire un petit peu d'historique, pour dire d'où ça vient, cette idée d'avoir un plan culturel numérique, bien l'idée, elle est venue en 2010, lorsque notre collègue qui est l'actuelle ministre des Relations internationales et qui était ministre de la Culture et des Communications à l'époque a fait une vaste consultation du milieu culturel, et à ce moment-là c'est une idée qui est ressortie de ces consultations-là. Les suites de ces consultations ont été annoncées par le gouvernement qui nous a précédés, mais, comme pour beaucoup d'autres dossiers, le financement adéquat pour le déploiement du Plan culturel numérique n'était pas présent. Hein, on l'a vu dans la situation du déploiement des places en CPE.

Alors, ça a été la même chose pour le Plan culturel numérique. Alors, probablement que le ministre de la Culture de l'époque n'a pas réussi à convaincre son président du Conseil du trésor du bien-fondé du Plan culturel numérique, mais nous, on était convaincus du bien-fondé de cette mesure-là, alors la ministre de la Culture et des Communications a fait des pieds et des mains pour trouver, dès 2014‑2015, les premiers 6,3 millions pour la première mise en application du Plan culturel.

Et il fallait le faire, M. le Président, c'est très important. Et, comme vous le savez, au cours des dernières années, le monde culturel a beaucoup évolué, le numérique a fait son entrée, a bouleversé nos vies. Où est-ce que c'est le plus apparent? Certainement, le meilleur exemple qu'on peut souvent citer, c'est celui de la musique. On le sait, auparavant... et probablement vous, M. le Président, qui avez une expérience de vie, disons, plus longue que la mienne, avez certainement laissé bercer votre jeunesse sur des 78 tours, ce qui n'est pas mon cas, soit dit en passant, mais vous avez pu voir que les supports...

• (19 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...aux parlementaires comme...

M. Fortin (Sherbrooke) : ...que les supports pour la diffusion de la musique, par exemple, ont beaucoup évolué au fil des années, et le numérique a fait son entrée. Maintenant, les gens qui téléchargent de la musique sur Internet l'écoutent sur leur lecteur MP3. Alors, tout ça est venu bouleverser la façon dont on achetait les produits culturels et la façon dont on les consommait aussi, également.

J'ai parlé de la musique, mais je m'en voudrais de ne pas vous parler du livre aussi, qui est un grand sujet d'intérêt pour moi étant donné le mandat que la ministre de la Culture et des Communications m'a confié l'été dernier, c'est-à-dire de lui suggérer des pistes d'action pour l'avenir des librairies agréées partout au Québec, on sait, qui connaît des difficultés. Et on sait également l'importance de maintenir notre réseau de librairies à travers le Québec pour assurer une diffusion de la culture dans toutes les régions du Québec. Et, lorsqu'elle m'a confié le mandat, la ministre, évidemment la dimension numérique était très importante, ça faisait partie des critères que je devais rencontrer, pour plusieurs raisons, parce que — j'ai parlé de la musique — mais le livre numérique également gagne en popularité; la façon numérique de se procurer des livres papier aussi. Et il y a un élément qui est très important, c'est que, il faut le dire, le livre numérique aujourd'hui, au moment où on se parle, n'est pas réglementé au Québec, puisque la loi 51, qui date du début des années 80 et qui a été adoptée par Denis Vaugeois, qui est un chic type que j'ai eu l'occasion de rencontrer à plusieurs reprises au cours de mes travaux, la loi qu'il a adoptée, évidemment, à l'époque, définissait le livre comme étant un livre papier, et c'est toujours la loi qui est en application aujourd'hui.

Suite au moment où la ministre m'a confié son mandat, j'ai entamé plusieurs consultations, qui ont duré une bonne partie de l'été et tout l'automne, j'ai déposé des recommandations à la ministre tout juste avant les fêtes. Et, suite à ce dépôt de recommandations, la ministre aura l'occasion très, très prochainement de présenter son plan d'action pour le livre au Québec, et évidemment il y aura une dimension numérique importante comme il m'était demandé de le faire en début de mandat.

Alors, évidemment, sans le Plan culturel numérique, il n'aurait pas été possible pour nous de pouvoir présenter de telles mesures très prochainement. Alors, j'aimerais donner maintenant l'occasion à notre premier ministre de nous entretenir sur le Plan culturel numérique et nous dire en quoi le domaine du numérique est un vecteur pour l'économie du Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je voudrais saluer la contribution de notre collègue député de Sherbrooke avec la ministre de la Culture pour les éléments qu'il a introduits dans son intervention.

Je commencerais par dire à quel point je suis heureux et fier du fait que notre gouvernement, comme on l'avait fait d'ailleurs, je me souviens, dans le précédent gouvernement libéral, en 2003‑2004, alors que les circonstances budgétaires étaient également très difficiles... a quand même trouvé les moyens et l'espace pour soutenir le milieu culturel de façon déterminante. Alors, ça s'est fait au cours de la première année avec le Plan culturel numérique, dont nous allons parler quelque peu maintenant, et ça s'est fait avec le budget qui vient d'être déposé, où des crédits additionnels ont été dégagés pour le secteur culturel. Parce qu'il faut toujours se souvenir que le secteur culturel, oui, exprime notre identité, notre fierté, permet au Québec de rayonner avec des créateurs extraordinaires, mais c'est également un secteur économique important. Il faut rappeler que c'est un secteur dont la contribution au PIB est évaluée à 10 milliards de dollars, ce qui représente environ 4 % et 130 000 emplois et partout au Québec, et c'est un secteur donc, dans l'économie, qui joue un rôle important.

Alors, on a eu quelques, bien sûr, surprises et, parmi celles-ci, le fait que le plan numérique devait être accompagné de crédits budgétaires. Et on y tenait. On l'a donc introduit dans le discours du budget du 4 juin 2014. Et ce Plan culturel numérique a été fort bien accueilli. Je me souviens encore de l'annonce qu'on a faite au musée national du Québec, le milieu culturel était présent, et la réaction a été enthousiaste. Et déjà le plan transcende la sphère culturelle, rejoint d'autres secteurs du gouvernement, tels que l'éducation, le tourisme, évidemment le développement économique.

On veut également permettre de rendre l'offre culturelle plus accessible à tous les Québécois puis aux consommateurs du monde entier, et ça, encore une fois, dans une perspective de rayonnement pour le Québec et de développement économique. Il est donc capital de permettre que le Québec soit dans le peloton de tête, ce qui permet d'assurer la compétitivité des produits culturels québécois sur les marchés et le rayonnement tant au Québec qu'à l'étranger. Alors, il y a des exemples plus concrets que je voudrais citer. Je pense à deux exemples; d'abord, l'annonce récente du projet du Diamant à Québec, qui a été bonifié par notre collègue la ministre de la Culture, et, grâce au plan numérique, le projet a désormais une portée dans toutes les régions du Québec, parce qu'en collaboration avec la Société des arts technologiques de Montréal, le partenaire RIDEAU on va équiper, dès cette année, une vingtaine de salles de diffusion, partout au Québec, d'équipement numérique spécialisé, ce qui va permettre à certaines représentations présentées au Diamant d'être diffusées en direct ou en différé dans ce réseau de salles partout sur le territoire. C'est quand même un investissement de plus de 10 millions de dollars qui seront injectés cette année.

Deuxième exemple, qui implique toujours la Société des arts technologiques de Montréal. Lorsque le président de la République française est venu, on l'a invité à visiter les locaux de la SAT à Montréal et on a assisté ensemble à une projection immersive — c'est une projection dans un espace hémisphérique dans lequel on a l'impression de se retrouver véritablement au milieu de la scène qui est présentée — et on a eu l'idée, tout de suite en sortant de cette salle, parce que M. Hollande était très enthousiaste devant cette démonstration, qu'à l'occasion de la conférence de Paris sur les changements climatiques on essaierait de mettre sur pied un projet commun de production d'une projection semblable mais autour de la thématique des changements climatiques. Et on a eu l'occasion de signer ce partenariat avec la France récemment; c'est entre la Société des arts technologiques et Géode. Donc, on prépare actuellement une projection immersive numérique autour de la conférence de Paris sur les changements climatiques.

Alors, c'est une façon de moderniser la culture, et je dirais que c'est une façon surtout de lui donner tout son potentiel économique et d'assurer que tous les Québécois et, même ceux d'ailleurs, les personnes qui vivent dans d'autres pays, dans d'autres continents aient accès à la formidable qualité de nos produits culturels, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de Sherbrooke.

• (19 h 50) •

M. Fortin (Sherbrooke) : Je voudrais aller maintenant au niveau de nos annonces en matière de culture mais de manière plus générale. Je l'ai dit tantôt, le premier ministre a fait référence, dans ses remarques d'introduction, à notre dernier budget en matière de culture et qui, je pense, démontrait clairement l'importance qu'accorde notre gouvernement au secteur culturel, qui est un levier économique important. Le premier ministre y faisait référence, hein? C'est quand même 10 milliards dans l'économie, 4,1 % du PIB, c'est 130 000 emplois partout au Québec, dans toutes les régions du Québec, donc c'est un secteur économique important, mais aussi la culture, c'est un jalon de notre identité, un des fondements de notre identité, alors c'est pourquoi on l'adresse également correctement.

Alors, notre gouvernement soutient les diverses institutions, les diverses initiatives dans le domaine de la culture, et ça, ça s'inscrit dans une longue tradition de gouvernements libéraux à travers le temps. Je pense, par exemple, à Jean Lesage, M. le Président, qui a fondé... ou qui a créé, plutôt, le ministère des Affaires culturelles; à Georges-Émile Lapalme, qui a jeté les premiers jalons d'une première politique culturelle au Québec; à Adélard Godbout, qui a créé le Conservatoire de musique et d'art dramatique; à Mme Lise Bacon, que j'ai eu la chance de croiser tout à l'heure dans les corridors du parlement, qui a fait adopter la Loi sur le statut professionnel des artistes; à Liza Frulla, qui a lancé la toute première politique culturelle de l'histoire du Québec et qui a également créé la SODEC, qui est un levier de développement pour nos entreprises culturelles partout au Québec; à Line Beauchamp, qui a créé le mécénat Placements Culture; et à notre collègue ministre des Relations internationales qui, alors qu'elle était ministre de la Culture et des Communications, a lancé le plan d'action en faveur de la culture et du développement durable au Québec, l'Agenda 21.

Alors, je faisais référence tantôt à notre budget déposé par notre collègue ministre des Finances et qui a été, M. le Président, extrêmement bien accueilli par le milieu culturel au Québec.

Je vous donnerais tout simplement trois exemples. Il y a tout d'abord le Bureau du cinéma et de la télévision du Québec qui disait que le budget du ministre des Finances, puisque je ne peux pas citer son nom, est un «exercice réfléchi». Il y a également l'Association nationale des éditeurs de livres, l'ANEL, qui se réjouissait de nos mesures concernant le crédit d'impôt à l'édition du livre. Il y a l'Union des artistes qui a titré son communiqué de la manière suivante : Un budget en faveur de la culture. Et je voudrais tout simplement vous citer un passage du communiqué, en fait la conclusion du communiqué, qui se lit comme suit : «Les annonces positives d'aujourd'hui sont le fruit d'efforts importants de l'UDA, de ses partenaires et de tous ceux et celles qui ont la culture et la création à coeur, y compris la ministre de la Culture et des Communications, [qui est] à l'écoute et sensible à notre réalité.»

Alors, je n'aurais pas mieux dit, M. le Président, et c'est pourquoi je peux vous dire que je suis très fier du travail qu'elle a effectué dans le dernier budget, très fier d'être son adjoint parlementaire. Et je voudrais maintenant laisser la chance justement au premier ministre de nous parler des mesures qui ont été annoncées, dans le dernier budget, en matière de culture au Québec.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le premier ministre, il reste un peu plus de cinq minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : Ça devrait, M. le Président, être suffisant. On vient de parler du Plan culturel numérique. Et il faut dire que le ministère de la Culture et des Communications est un des seuls qui a vu son budget augmenter de façon plus significative cette année. On parle d'une augmentation de 2,8 %. À cet égard, le budget 2015‑2016 prévoit des crédits additionnels de 12 millions de dollars en 2015‑2016 et en 2016‑2017, donc deux années successives pendant lesquelles ces sommes pourront être déployées.

On a également entendu les représentations du milieu culturel. On avait dit qu'on les recevrait. Autant le ministre des Finances que la ministre de la Culture que moi-même avons rencontré les représentants des milieux culturels au sujet des crédits d'impôt pour le secteur culturel québécois et on a pu ainsi rétablir, je dirais, la presque totalité d'entre eux pour compenser les réductions qui avaient été mises en place en 2014‑2015. Alors, il y en a sept, actuellement, de ces crédits remboursables, dans le domaine culturel. Dans le domaine audiovisuel, c'est les productions cinématographiques et télévisuelles québécoises, le doublage pour les films en salle, la production télévisuelle, la production pour DVD, les services audiovisuels, l'enregistrement sonore, les spectacles, l'édition et les événements et environnements multimédias, comme Moment Factory par exemple. Il faut également mentionner la stabilisation de la situation du Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec. Ça représente quand même plus de 29 millions de dollars pour l'année 2015‑2016. On voulait à tout prix conserver la mission d'excellence, la présence régionale, la gratuité de cet enseignement. On a pu donc octroyer une hausse du budget afin de résorber le déficit d'opération en 2015‑2016. Il s'agit d'institutions qui sont excessivement importantes, qui sont des vecteurs culturels identitaires, économiques et touristiques importants pour toutes les régions du Québec.

Il y a d'autres annonces récurrentes, M. le Président, qui viennent du budget 2014‑2015 mais qui auront encore de l'application cette année : 5 millions pour le fonds avenir culture, un outil formidable et un levier majeur pour le financement privé en culture; 2,3 millions à la SODEC pour la promotion de la chanson et de la musique au Québec et à l'étranger; 1,3 million au CALQ pour la création et la diffusion; 315 000 $ pour aider la Société des arts technologiques, dont on a parlé tantôt; 100 000 $ à l'Association des cinémas parallèles, également à la Cinémathèque québécoise; 80 000 $ pour Wapikoni mobile, cette formidable initiative qui, on le sait, rejoint les communautés autochtones. Et, on vient de l'entendre dans l'intervention de notre collègue le député de Sherbrooke, il y a de nombreuses initiatives qui seront annoncées, au cours de l'année, dans le domaine culturel, dont, assez prochainement, la politique sur le livre, qui sera détaillée par notre ministre de la Culture et des Communications dans un avenir très proche et qui, je crois, devrait recevoir l'assentiment et le soutien de tout ce milieu, qui est très important, notamment en région.

Quand on parle de livres, on parle de librairies, on parle beaucoup de nos librairies en région et on veut absolument qu'elles puissent continuer à jouer leur rôle, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Je pense qu'il nous reste deux petites minutes.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oh! il reste 2 min 30 s.

M. Ouellette : Mais, effectivement, on pourrait les garder pour un prochain bloc, M. le Président, parce que je pense que la prochaine question était trop importante pour qu'on la...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui, absolument. On peut les reporter à un autre bloc. Très bien. Alors, on va répartir le temps sur les blocs qui restent. M. le chef du deuxième groupe d'opposition, la parole est à vous pour votre bloc d'échange.

M. Legault : Oui. Merci, M. le Président. Peut-être pour résumer les échanges qu'on a eus depuis le début de la journée, bon, d'abord je dirais que gouverner, c'est se fixer des objectifs et les moyens pour les atteindre. Or, ce que le premier ministre nous a dit... ou ne nous a pas dit... c'est que, concernant l'écart de richesse du Québec avec nos voisins, il n'a pas d'objectif concret de réduction pour la durée de son mandat.

Comme je l'ai expliqué, une des raisons, selon moi, les plus importantes pourquoi on a un écart de richesse, c'est la faiblesse des investissements privés, dont les investissements des entreprises. On a 30 milliards par année. Pour bien se comparer avec le reste du Canada, ça en prendrait 40 milliards. Donc, il en manque 10 milliards par année. J'ai demandé au premier ministre s'il y avait des objectifs. J'ai compris qu'il n'y avait aucun objectif concernant les investissements privés. Il m'a dit : Allez poser ça à un de mes ministres, là, moi, je suis premier ministre, je ne suis pas au courant de ça. Je lui ai demandé s'il y avait des objectifs concrets concernant Investissement Québec, qui est quand même un élément important, là, pour aller chercher des nouveaux investissements privés. Il m'a répondu qu'il n'y avait pas d'objectif concret concernant Investissement Québec.

M. le Président, les conséquences de cette faible croissance économique que le premier ministre puis son ministre des Finances prévoient, pour les quatre prochaines années, d'un maximum de 2 % par année, selon moi, là, moi, ce que je prédis, c'est que c'est mathématiquement impossible, avec une croissance de 2 %, de financer ce qu'on appelle les coûts de système pour maintenir les mêmes services en santé puis en éducation et réduire les impôts, les taxes de la classe moyenne. Selon moi, c'est mathématiquement impossible. Le premier ministre dit que, selon lui, c'est possible. Il n'a pas réussi à me convaincre, en tout cas, de la façon de le faire. Par contre, ce qu'on sait, c'est qu'on a une année de faite et, quand on regarde le bilan concernant le fardeau fiscal des familles depuis un an, le premier ministre a rompu plein de promesses électorales. D'abord, il avait dit que les taxes scolaires n'augmenteraient pas de plus que l'inflation. Elles ont augmenté en moyenne de 10 %. Il avait dit que les taxes municipales n'augmenteraient pas de plus que l'inflation. Elles ont augmenté, à beaucoup d'endroits, de 4 %, 5 %. Il avait promis durant la campagne électorale que les tarifs de garderie n'augmenteraient pas de plus que l'inflation. Il vient de découvrir, il nous a dit ça tantôt, là, que la plupart des pays dans le monde n'ont pas un tarif unique. Donc, changer d'idée par rapport à la campagne électorale : il a augmenté, de façon importante, les tarifs de garderie. Et il a augmenté les tarifs d'électricité. On se rappelle tous, au mois de février ou mars l'année dernière, le premier ministre dénonçait le PQ puis il disait : Ça n'a pas de bon sens que les tarifs d'électricité augmentent de plus que l'inflation. Or, il les a augmentés de plus que l'inflation en avril 2014 puis il a récidivé le 1er avril 2015, il y a quelques jours : il a augmenté les tarifs d'électricité de plus que l'inflation.

On a fait un petit calcul, à la CAQ, et on arrive qu'en moyenne chaque famille du Québec a vu son fardeau, là, le fardeau étant les impôts, les taxes et les tarifs, augmenter de 1 300 $ en moyenne, par famille. Donc, on est mal partis, là. Le premier ministre nous dit : Ça va baisser avec la taxe santé, 2017, 2018, 2019. Bon, il oublie que 2019, ce n'est plus dans son mandat, là, on espère qu'il ne sera plus là; c'est en tout respect. Mais moi, je voudrais savoir... le premier ministre a peut-être d'autres chiffres, mais je voudrais savoir, là, depuis un an, quel calcul il fait du fardeau fiscal des familles. Est-ce qu'il est d'accord avec notre chiffre, que le fardeau fiscal des familles a augmenté en moyenne de 1 300 $ depuis qu'il est premier ministre du Québec?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (20 heures) •

M. Couillard : Alors, M. le Président, je vais répéter encore une fois qu'on n'a augmenté ni les impôts ni les taxes. À l'exception de la taxe sur les primes d'assurance, il n'y a pas eu d'augmentation d'impôt et de taxes pour les Québécois. Et on prévoit toujours faire une réduction importante du fardeau fiscal des particuliers d'ici la fin du mandat et après. Et, si on peut le faire, on le fera plus rapidement. Et il faut rappeler que cet allègement du fardeau fiscal pour les particuliers, ça dépasse les 2 milliards de dollars puis il y en a 500 millions également pour nos entreprises. Mais je dois également faire des remarques sur ses remarques, à lui, préliminaires : Quant aux résultats à la prochaine élection, comme il a dit à une certaine époque, on verra.

Oui, il y a des objectifs. L'objectif, d'abord, c'est de maintenir l'équilibre des finances publiques, réduire la dette par rapport à notre économie, avec un plan précis qui nous amène à 45 %; oui, continuer à réduire l'écart de richesse entre le Québec et ses voisins, surtout l'Ontario. Je suis content de voir qu'il abandonne la comparaison avec les États américains, parce que l'environnement social des programmes publics est quand même très différent. Oui, soutenir l'investissement privé des entreprises par un climat favorable à l'investissement, par une fiscalité attractive puis également des grands projets qui sont mobilisateurs pour l'entreprise privée.

Puis, oui, utiliser la force d'Investissement Québec avec une approche qui est celle d'un État, le plus souvent possible, partenaire avec les entreprises pour qu'on ait vraiment des intérêts communs, avoir des entreprises investir et rester chez nous. Mais, lorsqu'on a ce genre de conversation, on ne peut quand même pas faire abstraction... et je trouve qu'il fait très rapidement abstraction, de la situation financière réelle du Québec à l'arrivée en avril 2014. Et lui et moi avons présenté des cadres financiers basés sur les chiffres gouvernementaux de l'époque, qui n'avaient pas de crédit, pas de budget de dépenses. Il sait très bien qu'il y a eu deux examens indépendants de l'état des finances publiques, d'abord par des experts indépendants, M. Godbout et M. Montmarquette, puis par le Vérificateur général, qui arrivent, coïncidence troublante, au même résultat, c'est ce fameux chiffre de 7 274 000 000 $, qu'encore récemment l'opposition officielle s'efforce de nier. Mais je les amène à la page 6 du document budgétaire, M. le Président — et c'est important parce que ça explique le reste — où le 7 274 000 000 $ est complètement rétabli, reconstitué sur les deux années fiscales financières successives, et ça explique les opérations de compression de dépenses qu'on a dû réaliser. Comment peut-on, d'un côté, nous accuser d'austérité toxique, selon le thème de la députée de Pointe-aux-Trembles, et en même temps nier l'existence de l'impasse de 7 274 000 000 $? Si elle n'était pas là, cette impasse, on serait en surplus de plusieurs milliards de dollars, ce qui, bien sûr, n'est pas le cas.

Alors, pour les taxes municipales, il y a fait allusion, très peu nombreuses sont les municipalités qui, après le pacte fiscal transitoire, ont augmenté leurs taxes à un niveau plus élevé que l'inflation. On l'a vu. En fait, je pense qu'il y avait sept municipalités, dont finalement cinq sont restées, une fois l'examen sur l'ensemble des municipalités du Québec... Quant aux tarifs d'hydroélectricité, j'aurais préféré bien sûr qu'ils soient plus bas. Une augmentation de 2,9 %, c'est plus élevé que l'inflation, clairement. C'est moins élevé que l'augmentation précédente. Mais je rappelle que j'ai pris la décision, et je l'ai annoncé puis je le répète, qu'il serait inapproprié et même risqué pour le Québec et pour Hydro-Québec qu'il y ait une intervention politique dans la fixation des tarifs. Ce que nous allons faire, cependant, à la lueur de la rédaction du plan stratégique d'Hydro-Québec — il y a une nouvelle direction qui va être nommée au cours des prochaines semaines — c'est de vérifier avec eux la méthode de calcul des augmentations de tarifs réclamées par Hydro-Québec. Notre collègue de la deuxième opposition aime beaucoup critiquer l'éolien, et effectivement, quand on voit les rapports, on constate qu'il y a une part de l'augmentation qui est attribuée à l'éolien, ce qui est assez particulier compte tenu de la part de l'éolien dans la capacité totale d'Hydro-Québec. Alors, on va vouloir s'asseoir avec eux et voir comment ces calculs sont faits et s'assurer qu'on est d'accord sur la méthodologie. Et on veut vraiment donner l'indication... comme on l'a fait avec le décret de préoccupation, on va donner l'indication qu'on veut que les tarifs soient le plus près possible de l'inflation et que les dirigeants d'Hydro-Québec soient évalués par rapport à leur capacité de maintenir les demandes d'augmentation le plus près possible, M. le Président, de l'inflation.

Alors, il y a des efforts, comme il voit, qui sont constants. Je partage avec lui le constat que notre fiscalité est trop lourde et qu'il faut l'alléger, on a un plan précis en la matière, mais je lui demande amicalement de cesser de faire abstraction de l'impasse massive devant laquelle on a été présentés. Si je me souviens bien, lui aussi était pour l'équilibre budgétaire, donc, lui aussi aurait eu à faire face à plus de 7,2 milliards, 7 274 000 000 $, d'impasse à résorber. S'il avait voulu garder son engagement d'équilibre pour 2015‑2016, je pense qu'il aurait gardé son engament d'équilibre pour 2015‑2016. Alors, on a fait le plus d'efforts possible du côté des dépenses, de la réduction des effectifs, de la révision des façons de faire, et je crois que, dans l'ensemble, les décisions ont été difficiles, mais les décisions ont été les bonnes. Et je pense qu'il faudrait qu'il nous dise, lui, ce qu'il aurait fait pour rétablir l'équilibre budgétaire avec la même impasse, la même situation, compte tenu du fait qu'il aurait dû, lui aussi, complètement revoir son cadre financier comme nous, on l'a fait compte tenu du rapport du Vérificateur général et des experts indépendants. Alors, je trouve qu'on a tendance à passer par-dessus rapidement, parce que, bien sûr, ça diminue un peu la valeur de son argument par la suite, mais je ne pense pas qu'il devrait faire abstraction de cette réalité, de ce fait-là, que ce n'est pas arrivé souvent au Québec qu'on ait à résorber une telle impasse budgétaire, qu'on a, comme lui, pris l'engagement de rétablir l'équilibre pour 2015‑2016, qu'on a tenu cet engagement, qu'il y a une année exigeante devant nous encore mais que le maintien de l'équilibre budgétaire est essentiel pour la croissance du Québec et la réduction de l'écart de richesse, dont il nous parle si souvent, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Oui. Je pense que le premier ministre, là, mélange un petit peu les concepts.

Supposons que le gouvernement atteigne l'équilibre budgétaire en 2015‑2016, donc il ne pourra plus dire : C'est la faute du PQ, il va partir de zéro, O.K.? Comment peut-il, à partir de 2016‑2017, prévoir une croissance économique de 2 %, dire qu'il veut maintenir l'équilibre budgétaire et promettre des baisses de taxes? C'est im-pos-si-ble, M. le Président, à moins de couper dans les services, là. Il ne semble pas non plus vouloir couper dans les services.

Mon inquiétude, c'est un peu la réponse que le premier ministre a donnée tantôt sur ce qui s'est passé cette année. Il nous dit : Cette année, il n'y a pas eu d'augmentation d'impôt et de taxes. Donc, pour lui, quand on augmente les taxes municipales de plus que l'inflation, ce n'est pas une augmentation de taxes; quand on augmente les taxes scolaires de plus que l'inflation, ce n'est pas une augmentation de taxes; quand on augmente les tarifs de garderie de plus que l'inflation, ce n'est pas une augmentation de taxes; quand on augmente les tarifs d'électricité de plus que l'inflation, ce n'est pas une augmentation de taxes. Donc, les Québécois qui nous écoutent actuellement, là, ceux qui n'écoutent pas la game de hockey, doivent se dire : At-ten-tion! At-ten-tion! Ce que le premier ministre vient de nous dire ce soir, c'est qu'à partir de l'année prochaine on va continuer à augmenter les tarifs d'électricité de plus que l'inflation, on va continuer d'augmenter les tarifs de garderie de plus que l'inflation, même chose avec les taxes scolaires, même chose avec les taxes municipales. J'espère que j'ai mal compris, là. Puis j'aimerais ça que le premier ministre prenne un engagement ce soir qu'à l'avenir, étant donné qu'on va avoir atteint l'équilibre budgétaire, donc ça ne sera plus la faute du PQ... qu'il assure les Québécois qu'à l'avenir il n'y aura pas d'augmentation de taxe scolaire, taxes municipales, tarifs de plus que l'inflation, parce que ça vient diminuer le pouvoir d'achat des familles de la classe moyenne, qui sont déjà étouffées.

Donc, est-ce qu'il peut nous donner cette garantie que, maintenant qu'il va avoir atteint l'équilibre budgétaire, il n'y aura plus de hausse de taxes et de tarifs excédant l'inflation?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, en soulignant qu'il reste sept minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : Oui. Merci, M. le Président. Alors, à la question qui a été posée — parce qu'il y a eu plusieurs questions posées au cours de l'intervention du collègue : Est-ce que c'est possible, avec des taux de croissance, on espère, de 2 % au moins et plus, de faire à la fois les initiatives de relance économique, soutenir les programmes et alléger le fardeau fiscal?, bien sûr. D'ailleurs, le cadre fiscal, le cadre financier est là. Puis, quand il se plaint que ça prend plus de temps qu'il aurait voulu pour abolir la taxe santé, bien ça reflète la situation budgétaire fragile du gouvernement. J'espère que lui n'aurait pas pris la décision d'amputer massivement les revenus de l'État, alors que l'équilibre fiscal est encore si rapide... si fragile, pardon.

Alors, ça nous annonce, M. le Président, une réduction de la charge fiscale de plus de 2 milliards de dollars. C'est sans précédent. Ça fait très longtemps qu'on n'a pas vu une réduction de la charge fiscale semblable, en commençant par la taxe santé et en commençant auprès des familles à revenus plus modestes. Et, si on peut faire plus rapidement, on le fera, à la faveur de la croissance économique et des revenus disponibles. Il faut également penser à l'effet de la fiscalité sur la croissance, l'ajustement de la taille de l'État. Comme lui, je pense que la taille de l'État doit être réduite par rapport au PIB. Alors, les prédictions mécaniques des prochaines années ne prennent pas ça en cause, et on a déjà commencé à agir, comme il le sait.

Maintenant, parlons un peu des tarifs d'électricité, et il faut quand même se comparer. Et je vais répéter ce que j'ai dit : 2,9 %, c'est un peu plus que ce qu'on aurait voulu, mais comparons, maintenant. D'abord, combien ça coûte, l'électricité, au Québec, comparé à ailleurs, pour les personnes qui nous écoutent? Alors, à Montréal, 7,06 $ le kilowatt; à Halifax, 16,03 $; à Moncton, 12,06 $; à Charlottetown, 15 $; à St. John's, Terre-Neuve, 11 $; à Ottawa, 13,45 $; même chose à Toronto. Il n'y a que le Manitoba qui a des tarifs voisins du nôtre, plus élevés : 7,89 $ par rapport à 7,06 $. Partout ailleurs, les tarifs sont très, très importants. Et, si on regarde maintenant les taux d'augmentation, les taux d'augmentation des tarifs pour 2015, la Colombie-Britannique a annoncé une augmentation de 6 %; l'Ontario, de 4,6 %; le Manitoba, de 3,95 %; et le Québec, à 2,9 %. Donc, bien sûr, on aurait aimé faire mieux, mais, autant sur le coût actuel de l'électricité pour les ménages, pour ce qui est des rythmes d'augmentation, c'est encore très avantageux de résider au Québec pour les coûts d'énergie domiciliaire par rapport aux autres provinces canadiennes, et on veut s'assurer que ça demeure le cas pour les particuliers mais également pour les entreprises parce qu'on veut utiliser ce que certains appellent les surplus d'électricité. Moi, je préfère utiliser la formule de M. Bourassa, on m'en a parlé récemment, de parler d'énergie disponible, l'énergie disponible pour attirer l'investissement chez nous. Et on parlait d'investissement privé. C'est certain qu'une entreprise qui vient investir au Québec bénéficie de congés fiscaux à l'investissement et bénéficie, si elle est un peu énergivore, des tarifs d'énergie parmi les plus avantageux au monde. Et ça, c'est important.

Donc, on va utiliser l'électricité pour attirer l'investissement et créer l'emploi et également exporter. On le fait, en passant, dans les périodes de pointe. On vient d'annoncer une entente avec l'Ontario. On a d'autres ententes en négociation actuellement. Et ça, c'est une source importante de prospérité pour le Québec. Mais on va s'assurer, M. le Président, non seulement de minimiser, mais d'abaisser la charge fiscale des Québécois, je le répète, de plus de 2 milliards de dollars et de conserver le plus possible les augmentations qui sont annoncées au niveau de l'inflation.

• (20 h 10) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Legault : Oui. M. le Président, je pense que le premier ministre actuellement joue avec la définition de «charge fiscale».

Ce qu'il nous dit, c'est : Au Québec, on paie moins cher l'électricité, mais il oublie de dire qu'on paie beaucoup plus d'impôt que chez nos voisins. Ce qui est important, c'est le pouvoir d'achat. Puis, moi, ce que je lui dis, c'est que, depuis un an, le pouvoir d'achat des Québécois a diminué. Puis moi, je voudrais, là, au moins qu'il me dise s'il réalise ça, là. Parce qu'il est peut-être dans une bulle, mais c'est important, comme premier ministre, qu'il revienne sur le plancher des vaches, là. Les gens, au Québec, de la classe moyenne ont vu leur pouvoir d'achat diminuer. Donc, le premier ministre peut bien dire : Oui, mais je pourrais doubler les tarifs d'électricité puis je serais encore plus bas que certains.

Écoutez, là, est-ce que, oui on non, le pouvoir d'achat des Québécois a diminué depuis un an, selon lui?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Je ne crois pas, M. le Président, parce qu'il y a beaucoup plus de Québécois au travail. Il n'y a jamais eu autant de Québécois au travail maintenant qu'auparavant, donc les gens ont des revenus qu'ils n'avaient pas auparavant. Et on va continuer à baisser les impôts des Québécois. Il n'aime pas ça quand je dis ça, mais je veux lui redire : On va continuer à baisser les impôts des Québécois, on va le faire, et on va le faire avec beaucoup de détermination, M. le Président, et on va continuer à ajuster également l'État pour qu'on ne soit pas constamment dans des cycles de déficit puis de compression : ajuster la taille de l'État à notre richesse collective réelle, continuer à déployer des politiques de développement économique et s'assurer que le niveau de vie des Québécois augmente. Le niveau de vie des Québécois, c'est, bien sûr, le PIB par habitant, mais c'est le revenu disponible.

Et, je répète, là, il oublie des choses importantes dans sa démonstration. Si vous prenez une famille québécoise puis une famille ontarienne, la famille québécoise, jusqu'à 125 000 $ de revenus, a plus d'argent dans ses poches que la famille ontarienne aujourd'hui, au moment où on se parle, parce qu'elle paie beaucoup moins cher plusieurs éléments. Même avec les impôts : moins cher l'électricité, moins cher les services de garde, moins cher les frais de scolarité pour les enfants à l'université. L'assurance automobile, quelle différence massive entre le Québec et les autres!

Alors, M. le Président, on a plusieurs atouts qu'on va conserver. On va continuer avec détermination, malgré les messages négatifs, qui parlent toujours de déclin, du côté de la deuxième opposition. Malheureusement, notre collègue, il n'a que ce mot-là à la bouche, le «déclin», mais moi, je vois beaucoup d'espoir pour le Québec, beaucoup d'enrichissement collectif et individuel pour les Québécois, et on va s'assurer, M. le Québécois... M. le Président, de faire en sorte que ça se produise. Merci.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...

M. Couillard : Vous l'êtes aussi. Je vous le concède.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. Dernière minute de jeu, M. le chef de la deuxième opposition.

M. Legault : Je suis sans voix, M. le Président. Je demande au premier ministre du Québec si le pouvoir d'achat des Québécois a diminué, puis il me dit : Bien non, il y a plus de gens qui travaillent. Comme dirait un de mes gars, ça n'a pas rap. Ça n'a pas rap pantoute, C'est quand même inquiétant, là. On a un premier ministre du Québec qui ne sait pas si le pouvoir d'achat a augmenté ou diminué, au Québec, chez les gens de la classe moyenne. Les Québécois qui nous écoutent, là, ils savent que, quand on augmente les tarifs d'électricité de plus que l'inflation, on pige dans leur poche. C'est toujours la même poche qui paie, là. Donc...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...

M. Legault : Bien, en conclusion, je suis un peu découragé du premier ministre. Disons que l'économie, ce n'était pas sa matière forte, je pense, à l'école.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. M. le député de La Prairie, à vous la parole.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Vous savez, le premier ministre en a fait allusion tantôt, lorsque nous sommes arrivés au gouvernement, et l'analyse des économistes Godbout et Montmarquette et le Vérificateur général ont constaté un déficit considérable, un déficit structurel qui était une réalité, un fait vérifié. Et ce que nous avons décidé de faire, comme gouvernement, c'est de s'y attaquer promptement et mettre de l'avant plusieurs mesures de redressement des finances publiques, notamment au niveau des aides fiscales aux entreprises.

Et ici, M. le Président, je vais vous dire que je ne partage pas du tout la morosité du député de Chicoutimi et encore moins la pensée pessimiste et, je dirais même, défaitiste du député de L'Assomption, parce que, lorsqu'on crée un environnement favorable à la croissance économique, lorsqu'on crée ça, ça donne des résultats. Et, dans le comté de La Prairie, suite au premier anniversaire de notre élection en tant que gouvernement, bien il y en a eu, des annonces d'investissement, et je vais vous en faire part parce que je veux les partager avec les gens qui nous écoutent.

L'entrepreneur immobilier Devenco a annoncé un investissement de 50 millions dans la construction d'un centre commercial. Et, un centre commercial, qu'est-ce que ça fait? Ça crée de l'emploi. Le groupe Cascades, la compagnie Cascades, a annoncé, vendredi dernier, un investissement de près de 25 millions à son usine de Candiac, dans une technologie de pointe qui va augmenter sa capacité de production, qui va non seulement consolider des emplois, mais augmenter de 5 % le nombre d'employés à son usine. Dans la même journée, le groupe Quintcap — on a fait une pelletée de terre symbolique — qui a inauguré un nouveau développement résidentiel à La Prairie qui comprend un parc de conservation de 87,7 hectares et qui représente un investissement de 300 millions de dollars. Alors, si vous faites les mathématiques, ça fait 375 millions de dollars d'investissement privé. Alors, vous comprenez pourquoi je ne partage pas la pensée pessimiste du député de L'Assomption à cet effet-là.

Notre gouvernement a également entrepris une réforme de la fiscalité, parce que l'idée, c'est de contribuer à une croissance économique solide et durable. Ça, M. le Président, ça récompense l'effort, le travail et l'investissement comme les exemples que je vous ai mentionnés, qui sont arrivés la semaine passée. Alors, notre gouvernement a rempli son objectif, son engagement électoral qui visait à procéder à une réforme en profondeur de la fiscalité. On s'est engagés en campagne électorale de mettre sur pied une commission et on l'a faite dès les premières semaines suivant notre élection.

Nous avons également rempli cet engagement en lançant les travaux de la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise, qui a été présidée par M. Luc Godbout. La commission avait comme mandat de formuler des recommandations — et le mot est très important — des recommandations au gouvernement sur la fiscalité des particuliers et des entreprises, et l'idée derrière ça, c'était de stimuler la croissance économique et la création de richesse pour favoriser une contribution et une redistribution de la richesse qui soient équitables pour tous les Québécois et les Québécoises, évidemment d'assurer un financement adéquat des services publics. Comme nous le savons, le but d'un régime fiscal a comme principal objectif de générer un niveau de revenus adéquat qui permet au gouvernement de financer ses activités, et donc les services à la population. Étant donné son importance, il est essentiel que le régime fiscal québécois soit optimisé.

Alors, quel était exactement le mandat de la commission? Bien, d'abord, examiner l'ensemble des mesures fiscales, à savoir leur pertinence, leur efficacité, dans le but d'identifier les mesures permettant de réduire l'ensemble des dépenses fiscales afin de respecter nos cibles fixées au budget de 2014‑2015. Il fallait accroître l'efficacité, l'équité et la compétitivité du régime fiscal tout en assurant le financement des services publics. Évidemment, la commission aussi a comparé les tendances mondiales en matière de fiscalité — on n'est pas une bulle isolée, là, à l'extérieur de la planète — notamment aussi avec l'égard de ce que font nos voisins géographiques, entre autres les États-Unis et les autres provinces canadiennes. Il fallait aussi que la commission examine la possibilité de revoir l'équilibre entre les différents modes de taxation, ce que le ministre des Finances appelait avec affection le fameux «tax mix». Réviser le régime fiscal des entreprises était aussi un des mandats de la commission afin de proposer des pistes qui permettront de mieux soutenir la croissance économique. Et, en fin de compte, il fallait aussi que la commission analyse le régime fiscal des particuliers afin d'encourager le travail et l'épargne et évidemment d'optimiser la tarification des services tout en assurant une redistribution équitable de la richesse collective par le maintien d'un soutien adéquat pour les plus démunis. Et, le premier ministre le dit si souvent, une vraie justice sociale sur la carte de crédit, c'est illusoire, c'est une illusion.

• (20 h 20) •

La commission devait également évaluer la possibilité de fiscaliser certaines tarifications afin évidemment de tenir compte de la capacité de payer des utilisateurs des services publics, en tenant compte des impacts évidemment sur les taux marginaux implicites de taxation.

Comme je l'ai dit plus tôt, la commission a été présidée par M. Luc Godbout, le directeur du Département de la fiscalité à l'Université de Sherbrooke, mais lui-même avait une équipe entourée pour accomplir ce mandat, et j'aimerais mentionner les noms de ces personnes-là, qui ont participé aux travaux extraordinaires de cette commission : d'abord, Mme Dana Ades-Landy, qui est vice-présidente de la Banque de Nouvelle-Écosse; M. Pierre-Carl Michaud, professeur du Département des sciences économiques de l'Université du Québec à Montréal; Mme Danièle Milette, fiscaliste; M. Yves St-Maurice, économiste; M. Jean-Pierre Vidal, professeur en fiscalité aux HEC Montréal; M. Luc Villeneuve, président de Deloitte Québec; et Mme Carole Vincent, économiste, consultante et chercheuse en études économiques. Les efforts importants ont été consacrés évidemment, dans les travaux de la commission, au redressement des finances publiques. L'atteinte de l'équilibre budgétaire et son maintien permettront... nous permettront, pardon, de retrouver la liberté de nos choix.

On en parle souvent, le premier ministre le répète, pour les générations à venir, on veut remettre une maison en ordre et redonner les libertés de choix que nous avons eues, que nos générations passées ont eues pour bâtir le Québec moderne d'aujourd'hui. À cet égard, une fois l'équilibre atteint, notre gouvernement a pris l'engagement aussi de réduire le fardeau fiscal des contribuables.

Déjà, le gouvernement a posé des gestes dans le dernier budget qui allègent le fardeau fiscal des Québécois. Et, encore une fois, dans ma circonscription, non seulement les investissements sont importants, mais la qualité de vie des familles, c'est une préoccupation de voir ce fardeau fiscal allégé, et je suis très fier que notre gouvernement prend les mesures appropriées dans le budget 2015‑2016 pour alléger le fardeau fiscal des Québécois. Entre autres, dans le budget, on a introduit une des recommandations de la commission, qui est le bouclier fiscal. J'aimerais entendre, M. le Président, le premier ministre à ce sujet pour nous expliquer à qui va profiter le bouclier fiscal et qu'est-ce que c'est, un bouclier fiscal.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, je vois de mon collègue de la deuxième opposition qu'il est très heureux parce qu'il vient d'entendre parler d'une mesure qui met plus d'argent dans les poches du monde, exactement ce dont on discutait avant qu'on change d'interlocuteur il y a quelques instants.

M. le Président, cette question du bouclier fiscal, bien sûr, vient de la commission Godbout, mais de ce qu'on m'a dit sur le terrain, dans les entreprises du Québec, où je me souviendrai toujours qu'un entrepreneur de Repentigny m'a dit : Écoute, comment ça se fait que j'offre —Repentigny, un coin que connaît bien notre collègue — une augmentation de salaire à une employée et qu'elle me dit non parce qu'elle va avoir moins d'argent dans les poches? Et le malheur, c'est qu'elle a raison, parce que, quand on augmente, par exemple, de 40 000 $ à 45 000 $ par année, bien on perd des prestations gouvernementales, on paie de l'impôt. Résultat : on a moins d'argent dans nos poches.

Alors, c'est un exemple de mesure qui vise à encourager l'effort puis le travail puis surtout protéger les ménages contre une hausse importante de la taxation liée à un accroissement de leurs revenus de travail. Ce n'est quand même pas logique, ce n'est quand même pas désirable pour une société qu'on soit pénalisé parce qu'on augmente de salaire ou parce qu'on reçoit une prime. Alors, cette mesure, qui va commencer le 1er janvier 2016, va bénéficier à près de 400 000 ménages, pour une compensation totale de 52 millions de dollars, surtout pour les revenus les plus modestes. En fait, 96 % de cette mesure fiscale sera versée aux ménages dont le revenu familial n'excède pas 75 000 $. Donc, c'est près du revenu médian des ménages du Québec, exactement la classe moyenne, dont on parle souvent. Ce sont les personnes qui vont bénéficier d'une augmentation de leur pouvoir d'achat et de leurs revenus disponibles grâce à la mise en place de cette mesure. Par exemple, un couple ayant un enfant et dont les revenus de travail passent de 40 000 $ à 45 000 $, au lieu d'être pénalisé, recevra une prestation de 570 $, et ça, c'est un changement assez important, dans la perspective économique des ménages, qui va les amener à vouloir non seulement travailler et travailler davantage, progresser dans leur travail pour augmenter leurs revenus et non pas être démotivés par rapport à une augmentation de revenus.

Alors, ces primes varient selon le revenu familial : c'est 259 $ pour un revenu familial de 20 000 $; 375 $ pour un revenu familial de 30 000 $; 570 $ pour un revenu familial de 40 000 $, ainsi de suite. Donc, c'est une prestation qui est ciblée pour les travailleurs à faibles ou moyens revenus, ciblée pour les empêcher d'être pénalisés par une augmentation de salaire, ciblée pour favoriser, ce qui était un des mandats de la commission Godbout, le travail et l'effort. C'est plus intéressant de travailler que de ne pas travailler, naturellement. Il faut que ce le soit. C'est plus intéressant de travailler davantage que de moins travailler et c'est plus intéressant de progresser dans son revenu que de ne pas progresser. Tout ça semblait évident, mais, malheureusement, avant la mise en place de cette mesure, ce n'était pas toujours le cas.

Alors, c'est effectivement, M. le Président, une mesure qui vise les familles de la classe moyenne du Québec. Il y a plusieurs exemples qui sont contenus dans les documents budgétaires, et je suis vraiment très fier qu'on ait mis en place cette mesure-là. Il faut dire que M. Godbout, dans son rapport, et ses collègues recommandaient un bouclier fiscal encore plus vigoureux. La valeur pour l'année 2015-2016 est de 52 millions, M. Godbout recommandait une valeur de près de 90 millions, si ma mémoire est exacte, donc encore plus de force à cet outil. Parce que, quand on parle de réforme fiscale, les gens pensent toujours que c'est pour s'occuper des gens à revenus très élevés. En fait, si on veut avoir un impact sur l'économie, c'est les gens à l'entrée du marché du travail qui progressent dans le milieu du travail qui doivent être l'objet de la plus grande partie de nos attentions. C'est eux et elles qui ont besoin d'être amenés à l'emploi et amenés à progresser à l'emploi.

Alors, il y a cet élément. Il y en aura d'autres également au cours des prochains budgets. Il y a plusieurs recommandations très intéressantes dans le rapport Godbout à cet effet-là, ce qui l'amène à dire que finalement, avec ces recommandations et, si elles sont bien choisies et bien mises en place... il y a des discussions à avoir notamment sur la question des impôts personnels et de la TVQ, mais ça a le potentiel d'augmenter notre PIB, d'augmenter le nombre de personnes au travail et également d'augmenter le revenu disponible des Québécois. Donc, le pouvoir d'achat des Québécois, encore une fois, va s'améliorer, M. le Président, et, encore une fois, surtout des ménages à revenus moyen et bas.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de La Prairie, en mentionnant qu'il reste un peu plus de sept minutes à ce bloc d'échange.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. Parmi les recommandations de la commission Godbout, il y avait celle qui visait à inciter davantage les Québécois à hausser leur offre de travail.

On connaît très bien — c'est un autre fait vérifié — le besoin de main-d'oeuvre que nous aurons en 2017 au Québec, mais aussi nous avons besoin de main-d'oeuvre avec de l'expérience pour transmettre l'expertise avec les nouveaux employés qui viennent travailler mais de garder cette expérience au service de la société québécoise et au niveau de l'économie québécoise. Et le gouvernement a accueilli favorablement la recommandation de baisser la charge fiscale des particuliers pour permettre à accroître l'incitation au travail et à favoriser la croissance de l'économie.

D'ailleurs, le Plan économique du Québec, déposé par le ministre des Finances, prévoit la mise en place de mesures à cet égard qui se sont inspirées des travaux de la commission — alors, le premier ministre vient d'expliquer la mesure du bouclier fiscal : l'abolition de la contribution santé, qui va se faire progressivement; la bonification du crédit d'impôt pour les travailleurs d'expérience et la hausse graduelle de 65 ans à 70 de l'âge d'admissibilité au crédit d'impôt en raison de l'âge. Comme je disais, c'est intéressant, car nous avions promis d'appuyer les aînés durant la campagne électorale, et il y a ici une mesure qui va exactement dans ce sens-là. On a besoin de tous nos travailleurs : de jeune âge; d'âge vigoureux; et d'âge d'expérience.

Alors, j'aimerais entendre, M. le Président, le premier ministre nous parler de cette mesure, qui aidera nos aînés, soit la bonification du crédit d'impôt pour ces travailleurs d'expérience.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : M. le Président, c'est une mesure qui est directement en lien avec la nécessité d'améliorer la productivité et la croissance économique de notre société. Je l'ai expliqué déjà à quelques reprises, la population active du Québec diminue d'année en année, il faut donc, bien sûr, attirer plus de gens de l'extérieur, mais surtout utiliser pleinement les personnes disponibles au Québec pour occuper des emplois à toutes les extrémités du marché du travail. Alors, ça comprend les jeunes. On va parler des jeunes demain. Il y a à peu près 200 000 jeunes de 16 à 29 ans qui ne sont ni au travail ni aux études et qui ont besoin d'être orientés vers l'emploi le plus rapidement possible. Et il y a, à l'autre extrémité, les travailleurs plus âgés. Malheureusement, en 2013‑2014, il avait été décidé, alors, de réduire l'aide fiscale aux travailleurs d'expérience, qui, malheureusement, dans la démographie actuelle, je crois, est l'opposé de ce qu'il faut faire.

Alors, on a décidé de mettre en place une aide fiscale additionnelle de 83 millions de dollars à l'égard des travailleurs d'expérience. 130 000 travailleurs... de bénéficier d'une aide fiscale additionnelle. Plus d'argent dans leurs poches, plus de pouvoir d'achat et plus de revenus disponibles. Par exemple, à terme, un travailleur âgé de 63 ans pourra se prévaloir d'un nouvel avantage fiscal pouvant atteindre 902 $ qui va l'inciter, plutôt que de prendre une retraite précoce, à demeurer sur le marché du travail. Et, bien sûr, c'est gradué selon le revenu, mais le montant admissible de revenus sera bonifié graduellement pour atteindre 10 000 $ pour les travailleurs de 65 ans ou plus. On met l'âge d'éligibilité plus bas, à 63 ans, puis, pour les gens de 65 ans et plus, on augmente le revenu admissible pour le crédit.

Et c'est la combinaison de ces deux mesures-là qui va nous permettre d'agir sur les personnes plus âgées, plus expérimentées — comme j'arrive bientôt à ces âges-là, il faut que je sois prudent dans mes propos — de façon à ce que ces personnes-là aient le goût de continuer à travailler. Et, pour avoir le goût de continuer à travailler, bien sûr, un, il faut aimer son travail, mais il faut aussi avoir un intérêt financier et surtout pas être pénalisé parce qu'on décide de travailler.

Alors, je pense que c'est une mesure importante pour la croissance économique du Québec de même que pour le revenu disponible des Québécois, M. le Président.

• (20 h 30) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le député de La Prairie, un peu moins de quatre minutes.

M. Merlini : Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais aborder un autre aspect dans la réduction du fardeau fiscal des contribuables, M. le Président, et il s'agit de la réduction graduelle et l'abolition... l'élimination, je devrais dire, graduelle de la taxe santé.

Cette mesure, lorsqu'elle sera arrivée à terme, représentera un allégement de 744 millions pour les contribuables québécois. On parle d'une pleine exemption pour 2,1 millions de contribuables additionnels dès 2017, une réduction progressive pour 2,3 millions de contribuables en 2017 et en 2018, l'abolition complète en 2019 pour 4,5 millions de contribuables. Alors, à compter de 2017, tous les contribuables ayant un revenu net — et c'est important de le souligner, M. le Président — un revenu net n'excédant pas 42 235 $ seront pleinement exemptés de payer une contribution santé.

Alors, la question est fort simple pour le premier ministre : Pour quelle raison avez-vous choisi d'abolir cette contribution santé?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, 2 min 30 s.

M. Couillard : Bien, M. le Président, ça s'inscrit dans notre volonté, qui est ferme, de réduire le fardeau fiscal des Québécois, de mettre plus d'argent dans les poches du monde, plus de revenus disponibles, plus de pouvoir d'achat pour les Québécois, et on a choisi de porter notre attention sur l'impôt sur le revenu et particulièrement l'impôt sur le revenu qui est attaché à la, d'abord, contribution santé, qui est devenue la taxe santé, par la suite, progressive selon le revenu, donc une forme différente d'impôt sur le revenu. Alors, ça représente un allégement très important, comme vous l'avez mentionné, et ça nous permettait de cibler un enjeu fiscal qui nous permet de réduire de façon très notable... Et tous les gens qui nous écoutent sont en train de signer leurs impôts, d'ailleurs, et c'est bientôt la date limite, et ils vont voir sur leur déclaration d'impôt la ligne pour la taxe santé, la contribution santé, et chaque ménage, chaque personne qui écoute pourra faire le calcul du résultat sur son revenu disponible et son pouvoir d'achat lors de l'abolition totale de cette disposition-là, qu'on commence à appliquer pour les revenus les plus bas pour progressivement augmenter vers les revenus les plus élevés. Et ça me semble naturel de procéder de cette façon, M. le Président, de commencer par les revenus les plus bas.

Si on peut faire plus rapidement, je l'ai déjà dit, on le fera plus rapidement. On veut être prudents dans nos prévisions, compte tenu de l'ambiance économique nord-américaine, de l'ambiance mondiale, de la croissance de notre économie et de la réalité démographique. On veut être certains que nos prévisions sont solides. C'est pour ça que je disais à notre collègue, tantôt, de la deuxième opposition qu'il n'y a aucun doute dans mon esprit qu'avec ce qu'on prévoit comme rythme de croissance on va être en mesure de soutenir les programmes publics, de recadrer l'État et également d'abaisser le fardeau fiscal des Québécois.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Je me tourne maintenant vers le chef de l'opposition officielle.

M. Bédard : Oui. Il y aurait tellement de choses à dire, M. le Président. Des fois, il m'arrive d'écouter le premier ministre, et, quand je l'entends parler de la taxe santé, je me dis : Je pense qu'il ne se souvient plus que cette taxe-là a été instaurée par le Parti libéral.

Une voix : ...

M. Bédard : Bon, il s'en souvient. C'est au moins ça. On a gagné un point, M. le Président. La deuxième, peut-être qu'il se souvient effectivement qu'il y a des Québécois qui n'en paient plus, les plus bas revenus, parce qu'on l'a modifiée, effectivement, et que, malheureusement, l'opposition officielle voulait nous renverser si on l'éliminait totalement. Mais je vous avouerais que c'est une cohérence que... je ne veux pas forcer le premier ministre de rentrer dans cette logique-là.

Parlons des grands équilibres. Un des secteurs névralgiques de notre réussite collective, c'est l'éducation, et actuellement le premier ministre a prévu à travers les crédits une diminution de l'investissement en éducation. C'est une diminution, parce qu'évidemment ça ne tient pas compte des coûts de système, 0,2 % moins... Ils vont me trouver une logique, je suis convaincu qu'ils vont me dire : Finalement, c'est une grande augmentation. Mais la réalité concrète, c'est qu'à 0,17 %, me dit-on, au primaire, secondaire on est en pleine diminution, d'autant plus qu'il faut considérer qu'on a permis à des commissions scolaires de faire des déficits, donc de ce montant-là il faudrait soustraire l'augmentation de la dette payée. Alors, dans les faits, on est en dessous de zéro, de 0 %.

Est-ce que le premier ministre pense réaliser cet objectif? Et quels seront, selon lui, les impacts sur les services à l'élève?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, moi, je reconnais tout à fait la paternité politique de cette disposition fiscale, je n'ai pas de problème avec ça, mais je vais reconnaître également la paternité politique de son abolition et son impact également sur le portefeuille des Québécois et leur fardeau fiscal. Maintenant, je ne veux pas insister, et il n'a pas trop insisté sur le passé, je ne vais pas faire la même chose avec lui, mais je veux quand même répéter ce qu'on a dit tantôt, là : La croissance, en éducation, qui est prévue est faible. C'est une croissance, pas une coupure. La croissance est faible, elle est très faible. Mais, cependant, ça n'a rien à voir avec la réduction objective à l'éducation. Je vais revenir encore une fois sur cette époque où on a réduit l'enveloppe de l'éducation de moins 4 %.

Alors, je suis d'accord que ce n'est pas beaucoup, 0,2 %, mais, par rapport à moins 4 % dans une ambiance budgétaire similaire en termes de défis, c'est quand même quelque chose qu'il faut souligner. Maintenant, si on disait : Bien, ça va être de même indéfiniment, je serais effectivement inquiet pour notre système d'éducation. C'est ce qu'il y a de plus important pour l'avenir du Québec, l'éducation. Mais je suis persuadé que les gens du réseau, avec notre ministre, avec les organisations, les écoles, vont être capables de prendre cette situation en main, non seulement de maintenir les services pendant l'année, mais, pour certains d'entre eux au moins, de continuer à les améliorer. D'ailleurs, il y a de nombreux exemples devant nous, là. Chaque fois qu'on dit : Ah! ce n'est pas possible, puis on est à l'os, on n'est plus capables de rien faire, je n'ai jamais vu que c'était vrai. Il y a toujours moyen de faire mieux avec les budgets. Et, naturellement, on ne veut pas conserver ces enveloppes à croissance très faible très longtemps, on veut rétablir, conserver l'équilibre puis reprendre un rythme d'accroissement plus important, notamment avec l'éducation, qui est pour nous très prioritaire. Regardez le rapport sur la commission scolaire de Montréal qui vient d'être publié. On entendait : Bien, on n'est pas capables de faire l'équilibre budgétaire, ça va mettre en jeu les services aux élèves. Un rapport qui est sérieux, qui est bien fouillé, qui est bien documenté dit : Non, c'est possible de faire l'équilibre sans toucher les services aux élèves.

Maintenant, je veux être bien clair, là. Ce n'est pas facile. On aurait pu faire le choix, M. le Président, de tout balayer sous le tapis comme certains, encore aujourd'hui... D'ailleurs, je ne sais plus, au Parti québécois, quelle va être la politique, maintenant, sur l'équilibre budgétaire, parce qu'on a vu un mariage intéressant aujourd'hui, puis il y a un qui disait : On veut faire l'équilibre maintenant, l'autre qui dit : On peut le reporter d'un an. Il va falloir se mettre d'accord là-dessus. Mais je suppose qu'on gérera cet enjeu-là. Mais, sur la question de l'équilibre budgétaire, on aurait pu faire le choix de dire...

Une voix : ...

M. Couillard : Bien, l'éducation, ça fait partie de l'équilibre budgétaire. On aurait pu faire le choix de dire : Bien, c'est trop sérieux, les déficits, c'est trop difficile, on va prétendre qu'il n'y a pas de déficit, on va envoyer sur la dette, puis on va faire semblant qu'il n'y a pas de problème, puis on va continuer comme ça. Ça explique pourquoi, sur 30 budgets au Québec, il n'y en a que huit qui ont été équilibrés au cours des 30 dernières années.

Alors, nous, on a fait le choix, que d'ailleurs un gouvernement du Parti québécois a déjà fait dans des circonstances similaires, celui de M. Bouchard, de prendre le taureau par les cornes puis de rétablir l'équilibre budgétaire en sachant que ça serait difficile, qu'il y aurait des efforts à faire, mais, toutes proportion gardées, les efforts qui sont demandés autant au réseau de santé qu'au réseau de l'éducation sont moins importants que ceux qui ont été demandés à l'époque aux deux réseaux. Et ça se combine avec des changements de façon de faire, notamment en santé, et il y aura également des changements en éducation qui nous permettent non seulement de faire plus, mais de faire mieux et de faire nouveau. Et on n'a pas le choix, parce que c'est l'ambiance dans laquelle les économies se trouvent maintenant.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Je vais demander au premier ministre d'essayer de rester sur le sujet, l'éducation, parce que je considère qu'il est assez important pour qu'on s'y tienne. Et moi, je lui dirais que c'est le principal facteur d'égalité des chances dans le monde, à travers le monde, M. le Président, et que, quand on touche à l'éducation primaire, secondaire, bien on touche à l'égalité des chances. Et, quand on dit que ça n'aura pas d'impact sur les services, je pense qu'on est dans un autre monde.

Ceci dit, est-ce que le premier ministre prend l'engagement qu'il n'y aura aucune coupure de services ou diminution des services auprès des clientèles, qu'elles soient, peu importe, en trouble d'apprentissage... de nos étudiants au Québec? Est-ce qu'il prend cet engagement formel ici lors de l'étude des crédits? Parce qu'il dit qu'il y a de l'argent qu'on peut trouver ailleurs. Donc, est-ce qu'il prend cet engagement formel?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (20 h 40) •

M. Couillard : Bien, on prend l'engagement de tout faire pour qu'il n'y ait pas d'atteinte pour les services, bien sûr, sur les services.

Est-ce que vous pensez qu'il y a eu un impact sur les services lorsqu'on a diminué l'enveloppe de 4 % en éducation en 1997‑1998? Je pense qu'il y en a eu une, importante. Par la suite, le réseau a pu se reprendre en main puis récupérer. Il a traversé d'autres périodes. Et il traverse actuellement une période budgétaire difficile puis il doit faire sa part comme les autres éléments du gouvernement.

Mais il faut agir, M. le Président. On ne peut pas dire : On va laisser ça de même, on va rétablir l'équilibre puis on va recommencer le déficit dans trois ans. Et on sera toujours dans cette ambiance continuelle. Alors, on veut avoir une démarche qui s'appuie sur trois leviers : les structures, la gouvernance puis la fiscalité scolaire. On sait que le réseau scolaire actuel des commissions, c'est en place depuis 1998, le nombre n'a jamais changé. Il y a plusieurs études qui montrent qu'on peut faire des gains d'efficience variés, variables en faisant des regroupements, des regroupements qui, le plus souvent possible, seront volontaires, de commissions scolaires dans différentes régions. La technologie a changé, la démographie a changé. Il existe d'énormes différences d'efficience entre les commissions scolaires actuellement, même lorsque les facteurs sociodémographiques sont pris en compte.

Alors, on veut augmenter l'efficience du réseau, et on va profiter de cette période exigeante de la prochaine année pour le faire, et on veut...

Une voix : ...

M. Couillard : Avec les structures, oui. Les structures, c'est important, parce qu'on économise de l'argent avec les structures.

Regardez, en santé, en abolissant le niveau intermédiaire de gestion, on génère plus de 200 millions d'économies. On va faire la même chose avec l'éducation, on va essayer de diminuer les structures, d'avoir plus de fonctions, plus de missions. Et notre ministre de l'Éducation est très confiant de la situation, il est conscient de la difficulté de l'année qui est devant nous, mais il travaille avec le réseau de l'éducation et il va présenter, d'ici l'été 2016, une réforme importante de la gouvernance des commissions scolaires et notamment sur la question... Il s'est exprimé déjà sur la question des élections scolaires. Et, pour ce qui a trait à la fiscalité scolaire, c'est clair qu'il y a des limites au système actuel de taxation basé sur l'impôt foncier, qui est inéquitable, en pratique, entre les enfants. Il faut que ça soit équitable entre les enfants du Québec, selon les régions.

Alors, moi, j'ai confiance, M. le Président, comme pour le reste, j'ai confiance, mais je veux surtout dire aux Québécois que je suis conscient que les efforts sont difficiles et exigeants, je suis conscient que ce n'est pas facile, notamment en santé et en éducation, mais, quand vous avez des ministères de cette ampleur-là, comment voulez-vous rétablir un équilibre avec une impasse de l'ampleur de celle qu'on a connue, 7 274 000 000 $, sans aller directement sur les missions de l'État, dont les plus grandes missions de l'État? Mais moi, j'ai confiance dans le talent du réseau de l'éducation pour faire face aux exigences de cette année, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : Le premier ministre est long. On dirait que plus le sujet est difficile... il décide de répondre à côté, là. Là, je lui pose des questions relativement simples. Et je lui dis : Quand il fait ça, il donne l'impression de ne pas savoir ce qu'il fait. C'est la seule chose, moi, qui m'inquiète. Quand il dit que les budgets, ils vont augmenter de moins de 0,2 %, puis ça n'aura pas d'impact, alors...

Une voix : ...

M. Bédard : Non, non. Je lui ai demandé de prendre un engagement qu'il n'y aurait pas d'impact sur les services. Alors, il a refusé de le prendre. Je comprends qu'il va y avoir un impact sur les services, qu'il peut y en avoir un. Ça, je comprends ça assez clairement.

Ce qu'il nous dit, c'est qu'il va y avoir des révisions de structure. Or, ces révisions de structure sont annoncées pour 2016, quand même. Ça veut dire qu'on n'aura pas d'économie avant 2017. Ça, c'est la réalité concrète. Alors, dans les coupures de services, est-ce qu'il considère qu'il est correct, par exemple, de demander de toucher au ratio maître-élèves dans les écoles spécialisées ou de revoir le recours aux techniciens en éducation spécialisée, de diminuer les postes dans ces domaines-là? Est-ce que ce sont des mesures qui, selon lui, dans les commissions scolaires, là... est-ce que ces mesures peuvent avoir un impact sur la qualité de l'éducation, de notre réseau d'éducation?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien, M. le Président, je vais être obligé de dire que, selon ce que j'entends, c'est clair que le PQ maintenant veut reporter l'équilibre budgétaire. Ça m'apparaît évident. Ils veulent tout faire puis ne rien faire, ils veulent aller au ciel, mais ne pas mourir, ils veulent être malades, mais ne pas prendre de pilule.

C'est certain qu'il faut rétablir l'équilibre budgétaire. C'est certain que ce qu'on fait est important, et difficile, et exigeant, mais moi, je suis plein d'espoir pour le Québec, je suis plein d'espoir pour nos réseaux de santé et d'éducation particulièrement parce que les gens qui sont là sont créatifs puis ils sauront faire preuve d'imagination puis passer à travers cette année exigeante pour, par la suite, reprendre un rythme de croissance d'investissement qui sera régulier puis compatible avec la nécessaire addition de services qu'on doit faire notamment pour les élèves en difficulté.

Je ne peux pas m'empêcher cependant, M. le Président, de remarquer que je trouve ça un peu facile de la part de l'opposition officielle de faire ces discussions sur les finances publiques, alors qu'ils ont quitté le gouvernement — le savaient-ils ou non?, je leur laisse le bénéfice du doute — sur cette impasse de 7 274 000 000 $. Mais ce qui est clair, c'est qu'il n'y a pas eu...

Une voix : ...

M. Couillard : Bien, M. le Président, voilà. Alors, j'attendais que ce soit dit; ça vient d'être dit. Alors, on va tous ouvrir le grand livre du budget à la page 6.

Alors, à la page 6, ce qu'on remarque, c'est qu'il y avait un solde budgétaire, avant mesures, de 7 274 000 000 $. Vous avez entendu comme moi ce qu'a dit la députée, je dois répondre, hein? Alors, maintenant, M. le Président, je vais faire la reconstruction du 7 274 000 000 $.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : S'il vous plaît! S'il vous plaît! Si je peux me permettre. En fait, effectivement, on a entendu du bruit du côté de l'opposition officielle, c'est malheureux. Ce serait bien si on respectait le silence. On écoute la question, on écoute la réponse. M. le premier ministre, je vous demanderais, dans la mesure du possible... La question a été posée par le chef de l'opposition officielle. Les commentaires venant des autres députés étaient hors d'ordre, et je vais vous demander d'en faire abstraction. Pour les fins de cette question précise, s'il vous plaît, poursuivre votre réponse.

M. Couillard : ...mais nécessairement audibles, M. le Président. Puis quand même il faut avoir une certaine témérité pour remettre en cause l'évidence. Le 7 274 000 000 $, s'il n'existait pas, est-ce que les mesures de compression qu'on a mises en place seraient là? Pourquoi on nous critique pour les compressions depuis notre arrivée au gouvernement si ça n'existe pas? Si ça n'existait pas, on serait en surplus massif. Alors, ça ne tient pas, leur affaire. Ils savaient donc très bien, probablement, qu'il y avait cette impasse-là, et il n'y a pas eu de crédit déposé.

Maintenant, je reviens maintenant sur les dépenses d'éducation, puis on va finir par la question précise de notre collègue. À l'époque, en 1996‑1997, M. le Président, l'inflation était de 6 % à 7 %, alors imaginez l'ampleur de la réduction réelle avec une baisse de 4 % dans le domaine de l'éducation. On parle, là, d'austérité massive. Je pense que, là, on peut en utiliser le terme. On ne parle pas de rigueur, mais d'austérité massive. Alors, le document qu'a entre les mains notre collègue est probablement issu des conversations à la table de négociation, c'est un enjeu de négociation, mais on est tous très conscients du fait que le ratio maître-élèves puis la charge de travail, c'est majeur dans l'organisation de l'enseignement, mais on est tous conscients du fait que les études montrent que, dans les secteurs socioéconomiques favorisés, ça n'a pas d'impact aussi important que pour les secteurs socioéconomiques défavorisés. Alors, moi, quand j'étais à l'école, on n'a jamais été moins que 35 dans ma classe, 35. Je ne me souviens pas d'avoir été heurté par ça. Pourquoi? Parce que j'avais un milieu social, un milieu familial, un milieu qui m'environnaient qui favorisaient l'étude. Ce n'est pas le cas pour tous les enfants du Québec. Alors, il est clair que, pour les difficultés d'apprentissage, il faut garder des ratios très bas, c'est évident, et on aura des conversations avec les syndicats là-dessus.

Tantôt, j'expliquais que, pour qu'on réussisse à faire une négociation intéressante et qu'il y ait des bons résultats, pour qu'on réussisse à avoir plus d'augmentation pour nos employés, il faut trouver une nouvelle façon de faire, sinon on va rester enfermés dans des rythmes d'augmentation très bas. Alors, comment cette négociation se terminera? Elle ne se fera pas ici, à cette table, c'est clair. Elle se fera avec les syndicats, et j'espère qu'on aura de leur part une conversation éclairée là-dessus. Et je suggère qu'on reprenne cette conversation avec le ministre de l'Éducation quand il sera aux crédits.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. M. le chef de l'opposition, il reste un peu plus de six minutes. J'apprécierais, du côté de l'opposition officielle, des commentaires moins bruyants.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : C'est l'idéal. M. le chef de l'opposition.

• (20 h 50) •

M. Bédard : Écoutez, à la lueur de ce que dit le premier ministre, je peux vous dire qu'effectivement... qu'on garde notre calme, c'est déjà très bon, M. le Président, parce que d'invoquer que, dans son temps, il y en avait 35 par classe puis que... moi, ça me dépasse entendre ça, je peux vous dire, et je retiens effectivement mon souffle, M. le Président. Il y a des gens qui ont besoin de plus de soutien, puis, quand le premier ministre invoque sa réalité, je pense qu'il fait exactement la démonstration qu'il vit dans un monde imaginaire... c'est qu'il fait démonstration qu'il ne sait pas ce qu'il fait. Et ce n'est pas qu'une coupure. Quand il fait un choix budgétaire, il y a une coupure qui vient avec puis il y a des gens qui sont au bout de tout ça. Il en a fait la parfaite démonstration, actuellement.

Et, oui, je garde mon calme. On pourrait, je vous dirais, lui dire qu'il fait fausse route, mais ce que je cherche à avoir, c'est des engagements du premier ministre et d'avoir de la clarté dans son discours. Puis, des fois, c'est dur à avoir de la clarté, parce que, quand c'est dur, c'est dur de prendre des décisions. Tu sais, c'est facile de dire : Cran d'arrêt sur les dépenses. Ah! ça, hein, cran d'arrêt sur les dépenses... Dire «telle clientèle va être touchée, puis je ne leur donnerai plus de services», c'est une autre affaire. Quand j'ai fait des choix, j'en connaissais toute l'application, et ça, je peux le dire, puis il aura seulement à questionner des gens du Trésor pour savoir à quel point je le savais, ce que je faisais.

Là, ce que je veux savoir du premier ministre, c'est... Bon, il nous dit : Ratio maître-élèves, ça, c'est des questions de négociation collective. Je comprends, puis, lui, ça ne touche pas la qualité, même quand on parle... dans des écoles spéciales ou des techniciens en éducation spécialisée, pour lui, ce n'est pas... Bien, peut-être qu'il aura l'occasion de corriger. S'il me dit qu'en aucun temps — il pourrait le dire, ça —  en aucun temps une commission scolaire ne pourra faire ce choix... ça, j'aimerais ça qu'il le dise. Mais il pourrait dire aussi, par exemple : Les préposés aux handicapés. Est-ce que c'est une bonne façon de faire, d'enlever des services aux préposés aux handicapés?

Ce que je veux savoir du premier ministre, qui semble aussi clair... on parle de cran d'arrêt. Moi, en éducation, je lui demande d'avoir un cran d'arrêt, de dire : Ça, c'est une limite à ne pas dépasser. Puis, s'il y a une facture à payer, bien ça ne sera pas aux étudiants à la payer. Alors, est-ce qu'il pense que les exemples que je lui ai donnés — et, je le réitère, il ne semble pas d'accord avec ça, il m'a dit finalement qu'il n'était pas d'accord — de couper, par exemple, dans les techniciens en éducation, de couper dans le ratio maître-élèves pour les écoles spécialisées, ceux qui ont soit des troubles d'apprentissage... est-ce qu'il pense que c'est une façon acceptable de gérer le budget qu'il a donné aux commissions scolaires?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, en soulignant qu'il reste un peu moins de quatre minutes.

M. Couillard : Alors, M. le Président, je vais demander à notre collègue de déposer le document qu'il vient de lire, qu'on voie d'où ça vient, parce qu'on n'a aucune intention d'aller dans ces directions-là. Mais je veux qu'il dépose le document, je veux qu'il dépose le document. Il a un document devant lui. Ce n'est pas des notes personnelles, c'est un document. Je voudrais qu'il le dépose.

Et je vais lui répéter ce que j'ai dit tantôt, parce que les études scientifiques sont là pour le démontrer : Le ratio maître-élèves, ce n'est pas une valeur absolue, ça dépend de l'environnement social, de l'environnement économique de l'enfant et de la caractéristique personnelle de l'enfant. C'est tout simplement faux que c'est la même chose pour tous les enfants dans tous les milieux. Il n'y a aucun pays qui ne sait pas ça, il n'y a aucun système d'éducation qui ne sait pas ça. Alors, ce qu'on veut avoir avec le milieu de l'éducation, c'est une conversation qui est ouverte sur plusieurs plans, avec, comme premier élément à notre esprit, la réussite des enfants puis l'équité entre les enfants. Alors, de commencer de prêter des intentions pour une fin de négociation qui commence à peine, ça m'apparaît assez téméraire. Je vais regarder avec intérêt le document que notre collègue lisait.

Mais il parle de faire des choix. Je suis quand même obligé de lui rappeler que, si on n'a pas pu déposer de crédits au départ du gouvernement, c'est qu'il y avait une sapristi de bonne raison, c'est qu'on s'est rendu compte que ça ne balançait plus du tout, que ça ne marchait plus pantoute. Ce n'est pas pour rien qu'il y avait 7 274 000 000 $ d'impasse vérifiée indépendamment, vérifiée...

Des voix : ...

M. Couillard : ... — ah! j'entends encore des bruits audibles, M. le Président — vérifiée indépendamment à deux reprises, à deux reprises : d'abord, par les experts indépendants et ensuite par le Vérificateur général du Québec.

D'ailleurs, si elle n'avait pas été là, cette impasse, je soumets l'hypothèse qu'il y aurait eu des crédits de déposés. Je soumets cette hypothèse. Alors, il n'y a pas eu de crédit. Il y a eu ensuite, clairement, on le voit, beaucoup, beaucoup de dépenses préélectorales, il y a eu une explosion de dépenses préélectorales. On s'est probablement dit : Bien, on va gagner l'élection, on réglera ça après, au référendum, ça pourra marcher. Mais, malheureusement, ça ne s'est pas passé comme ça, puis, malheureusement, nous, on est pris avec le problème puis on va le régler.

Alors, je vais le dire à la population : On va le régler, le problème, on va le faire, l'équilibre budgétaire, on est en train de le réaliser. On va la maintenir puis on va ajuster la taille de l'État à l'économie et à nos moyens réels. Puis c'est fini de dépenser plus qu'on gagne, on va dépenser moins qu'on gagne, à chaque année. Et, je vais le dire de façon très claire, on va dépenser moins qu'on gagne, à chaque année, puis on va utiliser la marge de manoeuvre pour la dette en continuant de mettre de l'argent dans le Fonds des générations puis pour diminuer l'impôt des Québécois, diminuer leurs charge fiscales. Et ça, on va le faire malgré toutes les bonnes idées qu'on voudra nous donner pour dépenser d'avance ces marges de manoeuvre. Maintenant, on veut quand même retrouver une santé financière plus stable. Une fois qu'on aura atteint et maintenu cet équilibre, une fois qu'on l'aura consolidé, qu'on aura adopté des actions structurantes — je parle toujours d'éducation — il sera possible, par la suite, de reprendre un rythme de croissance plus régulier pour le secteur de l'éducation. Mais, si on ne fait pas ça, M. le Président, si on ne fait pas le retour à l'équilibre, si on ne revient pas à l'équilibre de façon durable, ça va être l'effondrement dans le réseau de l'éducation, on ne pourra pas le maintenir au cours des prochaines années, et sans parler du réseau de santé.

Alors, M. le Président, je répète encore une fois que c'est la réussite de l'élève qui est au coeur de nos préoccupations, on va travailler avec le réseau de l'éducation pour traverser cette période difficile. Oui, c'est exigeant, mais ce n'est pas parce que c'est exigeant qu'on ne va pas y arriver, puis on va y arriver.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète...

M. Bédard : ...commentaire, il me reste quelques secondes...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Il reste quelques secondes.

M. Bédard : ...de lui dire, au premier ministre, que j'aurais beaucoup de choses à lui dire, mais je vais lui en dire une seule : que le ratio élève n'a rien à voir avec strictement une question de convention collective et que, s'il relisait l'ancienne ministre de l'Éducation, Mme Courchesne, qui avait fait de la lutte au décrochage puis de l'augmentation du taux de diplomation de...

Une voix : ...

M. Bédard : Oui. La meilleure façon de lutter contre le décrochage et de favoriser la réussite scolaire, c'était — et ça, c'était en 2009, c'est ça, ça fait trop longtemps — c'était de diminuer le ratio, par classe, de 28 à 26. Donc...

Une voix : ...

M. Bédard : Non, non. Et je comprends que, pour le premier ministre, on est dans un monde différent.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie. Ça complète ce bloc d'échange. Je vous remercie, M. le chef de l'opposition.

Je me tourne maintenant vers le député de Chomedey pour un nouveau bloc d'échange.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. À mon tour de souhaiter la bienvenue à mes collègues, mes estimés collègues de l'opposition, de l'opposition officielle puis de la deuxième opposition, M. le premier ministre, les collègues ministériels. Je veux remercier aussi tous les gens des ministères qui sont ici ce soir pour leur professionnalisme, qu'ils nous démontrent jour après jour, et particulièrement pour leur patience, parce que, le député de Sherbrooke l'a mentionné, probablement qu'il y en aurait plusieurs qui seraient à un autre endroit ce soir. C'est 0-0 après la deuxième période, qu'on m'a dit, M. le Président, si...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Combien?

M. Ouellette : 0-0 après la deuxième période, qu'on m'a dit, M. le Président, si je suis factuel, parce que je regarde le chef de la deuxième opposition et son... je veux dire, son non-verbal nous parle que c'est 0-0.

Dans le prochain bloc, M. le Président, si vous êtes d'accord, j'irais faire un tour particulièrement au niveau des changements climatiques. Et je voudrais aborder avec le premier ministre trois aspects des changements climatiques : le premier étant le marché du carbone, le deuxième étant la place du Québec à l'échelle nationale et internationale, et la plus grande part de mon intervention, M. le Président, va porter particulièrement sur le sommet sur les changements climatiques qui vient de se tenir à Québec, qui a été, je pense, une réussite extraordinaire à tous les niveaux.

Aujourd'hui, je ne vous apprendrai pas, M. le Président, qu'on fête le 75e anniversaire du vote des femmes puis de l'éligibilité, mais on fête aussi le Jour de la Terre. Et notre collègue de l'Environnement et du Développement durable, d'ailleurs, a souligné... je pense qu'il vient d'émettre un communiqué pour souligner cette journée très spéciale, qui nous amène à développer de bonnes habitudes dans les changements climatiques. Et même, à l'intérieur de son communiqué, notre collègue nous faisait part des initiatives du Fonds vert, parce que, quand on parle de changements climatiques, sûrement que le premier ministre va nous entretenir sur le Fonds vert. Vous savez, M. le Président, le premier ministre le dit sur toutes les tribunes, au XXIe siècle, je ne pense pas qu'il n'y ait aucun pays, aucune province, aucun État qui ne saurait se développer de façon durable sans être partie prenante de la lutte contre les changements climatiques. Le Québec est actif sur plusieurs fronts, M. le Président. Et, dans ma deuxième partie d'intervention, on reparlera de la scène nationale et internationale, mais, déjà... je pense, c'est en 2006, quand le Canada a signé le Protocole de Kyoto, le Québec s'était doté d'une cible de réduction des gaz à effet de serre de 6 % sous le niveau de 1990 pour l'année 2012. J'écoutais avec beaucoup d'intérêt le ministre de l'Environnement ce matin répondre à une question de la deuxième opposition. Et je pense que cette cible-là a été atteinte, et le premier ministre pourra sûrement nous préciser où on en est rendus par rapport à Kyoto et vers où on s'en va.

Il y a plusieurs mesures qui ont été atteintes ou qui ont été élaborées pour atteindre cet objectif, je pense au Plan d'action 2006‑2012. Et, encore dans l'intervention du ministre de l'Environnement de ce matin, il parlait du Plan d'action, aussi, 2013‑2020. Et le Québec a comme objectif, pour 2020, de réduction de gaz à effet de serre... de 20 %.

Pour atteindre ces objectifs-là, M. le Président, un des outils principaux que le Québec s'est doté, c'est le marché du carbone, et on a beaucoup entendu parler, je suis très conscient, de tout le domaine environnemental, ayant développé au cours des années... Mon collègue de Sherbrooke faisait état de sa jeunesse tantôt, et je pense qu'à l'opposé vous pourriez être entre moi et lui dans la strate d'âge dont il faisait référence. Et je pense que le marché du carbone, M. le Président, est au coeur de l'action gouvernementale pour les émissions de GES.

Déjà, on s'est fait connaître avec la Californie, on a mis en place le système de plafonnement, d'échange des droits d'émission. Ça s'insère dans le marché nord-américain. J'aimerais savoir, dans le premier volet du segment qu'on va couvrir sur les changements climatiques, pourquoi... j'aimerais savoir de la part du premier ministre pourquoi le Québec a choisi d'instaurer un marché du carbone.

• (21 heures) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Chomedey. M. le premier ministre.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, écoutez, il faut reconstruire cette histoire-là, qui est importante.

Effectivement, le Québec, c'est un leader maintenant certainement reconnu au niveau canadien, et ailleurs, à la lutte aux changements climatiques. On a dépassé les cibles de Kyoto, on le sait maintenant, en 2012 avec 8 % de réduction par rapport aux 6 % qui étaient demandés et on a devant nous l'outil nécessaire pour aller plus loin et arriver à notre objectif de moins 20 % pour 2020 en sachant que, pour Paris 2015, il faut se présenter avec des objectifs pour après 2020, donc 2025, et même certains vont même jusqu'à 2030. Et c'est ce qu'on va faire, et on va s'exprimer là-bas, à Paris, à la conférence, avec les autres États fédérés, les autres régions, et Mme Figueres, des Nations unies, nous disait qu'il y aurait une journée spécifique pour ce type de manifestation, parce que c'est souvent à notre niveau que se gèrent les conséquences des changements climatiques et que se mettent en place les correctifs.

Maintenant, pourquoi un marché du carbone? La première question, c'est : Bon, il faut croire aux changements climatiques, et je crois que, dans cette salle, tout le monde y croit, mais on voit de temps en temps qu'il y a encore des gens qui ne sont pas sûrs que c'est vrai. Deuxièmement, il faut croire que c'est le carbone produit par l'activité humaine qui est responsable non pas de la totalité, mais d'une bonne majorité du phénomène des changements climatiques. Et il faut enfin, logiquement, dire que, si le carbone est important, de façon à en contrôler l'émission, il faut lui donner un prix. Alors, on a commencé dès 2007 à fixer un prix au carbone au Québec, on s'en souvient, et, par la suite, il y a une décision à prendre entre deux outils principaux — il y en a d'autres, on en a entendu parler au Sommet de Québec : il y a la taxe sur le carbone et il y a le marché du carbone.

Alors, pourquoi choisir un marché du carbone plus que la taxe? La taxe, c'est un outil diffus qui n'est pas spécifique. Tout le monde paie la taxe, pas plus les émetteurs que les consommateurs. Donc, c'est un peu comme si les émetteurs disaient : Bien, ce n'est pas plus ma responsabilité que les autres, tout le monde va payer ça, et surtout — surtout — dans une époque où les prix du pétrole sont à la baisse, on peut douter de l'impact réel d'une taxe au carbone pour diminuer l'utilisation des combustibles fossiles. Mais c'est un bon outil. On aurait pu choisir cet outil-là. Il y a des avantages de simplicité relative par rapport au marché du carbone, mais, à mon avis, son défaut relatif par rapport au marché, c'est qu'il est moins spécifique, tandis que le marché du carbone... et pour expliquer brièvement de quoi il s'agit, chaque entreprise qui va émettre des gaz à effet de serre, du CO2, plus de 25 000 tonnes par année, doit détenir des permis d'émission pour chacune des tonnes qui sera émise. Donc, cette entreprise aura le choix : elle peut utiliser ses revenus pour payer les permis d'émission ou elle peut faire le choix, ce que beaucoup font — plusieurs exemples déjà ici et ailleurs — d'investir dans des technologies plus efficientes, plus vertes, diminuer ses émissions, soit payer moins d'émissions, acheter moins d'émissions, moins dépenser pour les émissions, soit même en vendre aux autres entreprises sur le marché du carbone.

Alors, c'est là toute la puissance de l'outil, c'est son aspect spécifique et le fait que ça fait reposer le fardeau sur les épaules des émetteurs et que ça les responsabilise également dans les décisions qu'ils ont à prendre.

Ça a été ambitieux de se joindre, pour le Québec, d'abord à la Western Climate Initiative, la WCI, de commencer le marché du carbone avec la Californie, un continent entre nous, beaucoup de communautés de vues, mais, quand même, la distance... déjà que des encans communs menés avec grand succès — au-dessus du prix minimum toutes les unités vendues — et cette formidable annonce de l'Ontario, et on a d'autres partenaires intéressés maintenant parce que c'est un mouvement en chaîne qui s'établit où l'Ontario se joint au Québec et à la Californie progressivement pour intégrer le marché du carbone. Et l'importance de ce qu'il vient d'arriver, elle est manifeste, c'est que, si on prend... encore une fois, les deux outils sont de bon niveau, là, soit la taxe sur le carbone et le marché du carbone, si on prend taxe et marché, si on prend la situation du Canada, si vous prenez la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Québec, c'est plus de 70 % de la population canadienne maintenant qui vit dans un environnement où le carbone est tarifé de façon majeure soit par une taxe soit par un marché de carbone.

Alors, c'est une tendance qui est irréversible. On peut bien dire : Bien, ça va arrêter, ça ne marchera pas. Ça marche. On a regardé la façon dont le marché européen fonctionnait et avait des difficultés, on a appris des leçons de ça et on a ajusté le marché du carbone québécois, californien, bientôt ontarien, pour ne pas reproduire les mêmes enjeux.

Et la beauté du marché du carbone également, c'est qu'il permet de dégager des revenus qui sont spécifiquement attachés à la lutte aux changements climatiques. Alors, le Fonds vert va recueillir environ 3,3 milliards d'ici 2020 : 2,4 viennent du marché du carbone; les autres, des différents types de redevances qui sont prélevés et qui alimentent le Fonds vert, ce qui nous permet, comme on l'a fait en décembre dernier, d'annoncer 350 millions de mesures de soutien aux entreprises pour des changements, par exemple, de sources d'énergie, et on a des beaux exemples déjà devant nous.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci. M. le député de Chomedey.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Avant qu'on termine notre bloc sur le Sommet de Québec, je voudrais regarder avec le premier ministre, M. le Président, si vous êtes d'accord, la place du Québec sur la scène nationale et internationale.

Lors de l'élection, en avril 2014, le premier ministre avait pris l'engagement de redonner au Québec son rôle de leader dans la lutte aux GES, et cet engagement-là incluait la convocation, dans les 100 premiers jours du mandat du gouvernement, d'un comité aviseur en changements climatiques afin de faire état des sommes engagées par le gouvernement puis d'élaborer un plan d'action pour atteindre l'objectif de moins 20 % de GES d'ici 2020. Il y a beaucoup de belles initiatives au niveau provincial pour la lutte contre les changements climatiques. Au plan canadien, M. le premier ministre a mobilisé les autres provinces et partenaires pour que la lutte soit à l'agenda du Conseil canadien des ministres de l'Environnement. En novembre, M. le premier ministre a signé un protocole d'entente avec l'Ontario.

Et, avant qu'on revienne sur ma dernière partie, qui va traiter du sommet qui s'est tenu à Québec dernièrement, j'aimerais savoir du premier ministre, M. le Président, comment il voit la place du Québec, le rôle du Québec sur la scène nationale et internationale relativement à la lutte contre les changements climatiques. Et est-ce que le premier ministre considère avoir tenu son engagement électoral pour redonner le rôle de leader au Québec dans la lutte contre les GES?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de Chomedey. M. le premier ministre, il reste sept minutes à ce bloc. À vous, la parole.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Bien, effectivement, je pense que tout le monde le constate ici et ailleurs, le Québec est souvent montré en exemple maintenant, et c'est le leadership du Québec qui a permis d'entraîner les autres provinces canadiennes à la suite de ce que nous faisons. Il faut dire que la Colombie-Britannique également est très active depuis plusieurs années, ayant choisi, de leur côté, la taxe sur le carbone.

Ça a commencé dès le Conseil de la fédération d'août dernier à Charlottetown alors que, sur la question de la discussion d'une politique canadienne de l'énergie, c'est le Québec, avec l'Ontario, qui a insisté pour que la politique canadienne de l'énergie soit liée à la question des changements climatiques et qu'il y a un lien très net qui soit établi de façon à ce que tout soit cohérent.  C'est par la suite le Québec — on connaît l'histoire de l'Ontario, que j'ai racontée tantôt — qui a convié les provinces et territoires à Québec pour le sommet, qui s'est déroulé il y a quelques semaines... quelques jours, pardon. On va y revenir dans quelques instants. Et, bien sûr, son rôle national, canadien est maintenant bien connu, mais il y a également un rôle international qui existe depuis plusieurs années, et au cours des derniers mois, particulièrement. Par exemple, on a participé à la Climate Week de New York en septembre dernier, on a adhéré à la déclaration Putting a Price on Carbon, de la Banque mondiale, qui regroupe 74 pays, 22 gouvernements infranationaux, plus de 1 000 entreprises. Le ministre du Développement durable a participé à la 20e Conférence, à Lima, des Nations unies sur les changements climatiques. Il a signé le Pacte des États et régions, un engagement à adopter un objectif de réduction des émissions à moyen terme et à en faire le suivi sur une base annuelle. Il a également profité de cette présence à Lima pour publier une déclaration commune avec la Californie et ses homologues de l'Ontario et de la Colombie-Britannique dans laquelle ils ont réaffirmé leur engagement commun.

• (21 h 10) •

Il faut savoir que le Québec copréside, avec deux autres États fédérés, le groupe des États et des régions du Climate Group, des Nations unies, avec le Pays basque espagnol et l'État méridional d'Australie. Et c'est à cet effet et c'est selon cette mission qu'on sera appelés à parler au nom des États fédérés et des régions à la conférence de Paris de décembre prochain. On a signé le Pacte des États et régions, Compact of States and Regions. On a établi des liens également avec la Nouvelle-Angleterre, et il faut savoir, M. le Président, qu'il y a un système d'échange de carbone en Nouvelle-Angleterre qui s'appelle la RGGI, Regional Greenhouse Gas Initiative, qui implique les centrales énergétiques mais qui veulent avoir des liens également avec le marché de carbone du Québec.

On s'est bien sûr liés à la COP20, un événement qui est consacré à l'électrification des transports, dans lequel le Québec, depuis 2011, est très actif, parce qu'on détient, des fois, déjà plus de 50 % des ventes de véhicules électriques au Canada. Certainement, le Québec a maintenu, depuis le premier plan annoncé en 2011, celui de nos successeurs par la suite et celui qu'on poursuit maintenant, une position de leadership dans le domaine. On a d'ailleurs signé une lettre d'intention avec la Californie concernant une collaboration plus soutenue en matière d'électrification des transports. On est membres de l'International Carbon Action Partnership depuis 2008 et on en assume la coprésidence. Et, lors de la mission en France, ça a été un thème très important. Le président Hollande a insisté pour qu'on parle, lui et moi, de ce thème lors de nos conférences de presse conjointes, et vous savez l'importance que le gouvernement français accorde à la conférence de Paris, puisque la France en est l'hôte et qu'elle se sent même, bien sûr, la responsabilité d'en assurer le succès. Alors, je peux vous dire que M. le président Hollande était très content de compter sur l'action, l'énergie et le leadership du Québec pour montrer que le message canadien sur les changements climatiques, il n'est pas monochrome, il n'est pas identique, il varie.

Je rappelle ce que j'ai dit tantôt, 72 % des Canadiens vivent maintenant dans une économie qui tarife le carbone soit par une taxe soit par un marché de carbone, et on fait la démonstration et on va continuer de faire la démonstration qu'il est possible de conjuguer la lutte aux changements climatiques avec la croissance économique. En fait, au niveau global, ce qu'on a retrouvé pour la première fois, je crois, l'an dernier, c'est qu'alors que le PIB global a augmenté de 3 % les émissions sont demeurées stables, ce qui montre que c'est faux de dire qu'il y a lien toujours direct entre la croissance économique et les émissions d'un côté ou de l'autre. Et, avec le Fonds vert, on montre qu'on est capables de recycler l'argent du Fonds vert dans nos entreprises, dans l'économie pour créer une économie tout aussi vigoureuse que celle qui existait auparavant, et c'est une condition de succès qui est absolument essentielle, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...M. le député de Chomedey, deux minutes.

M. Ouellette : ...j'invoquerais votre indulgence pour reporter mes deux minutes au prochain bloc, parce que la dernière partie, qui touchait le sommet du 14 avril sur les changements climatiques, est trop importante pour que je la traite en seulement deux minutes. Ça fait que, si je peux invoquer votre indulgence, M. le Président, je les reporterais pour ouvrir le prochain bloc ministériel avec le sommet sur les changements climatiques.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Avec ce préambule, on va reporter une minute. Alors, M. le chef du deuxième groupe d'opposition, pour votre dernier bloc d'intervention.

M. Legault : M. le président, étant donné que c'est mon dernier bloc, je veux faire une suggestion très constructive au premier ministre. Je ne suis pas venu en politique pour seulement... ou pour critiquer, mais aussi pour, de façon constructive, proposer des moyens de faire avancer le Québec. Donc, je vais lui expliquer en quelques mots, là, comment, en tout cas, pour moi, le geste le plus important à poser en économie, ça serait le suivant.

Actuellement, Investissement Québec investit... L'année dernière, ils ont investi 2,1 milliards. Ça a donné des investissements privés de... au total, incluant le 2 milliards, des investissements totaux de 9,9 milliards, donc, disons, 10 milliards. Donc, si avec 2 milliards d'argent public on est capables d'avoir 10 milliards d'investissement privé, si on était capables de doubler ces investissements... Bon, je sais qu'actuellement il y a des dossiers qui sont refusés à Investissement Québec. Si on était aussi plus proactifs, c'est possible d'aller chercher beaucoup plus de dossiers, puis, selon moi, là, la solution passe par ça. Donc, si demain matin, au lieu d'investir 2 milliards dans Investissement Québec, on mettait 4 milliards, on pourrait aller chercher, si on fait une règle de trois, 20 milliards. Donc, on irait chercher le 10 milliards qu'il nous manque d'investissement privé.

Évidemment, la question, c'est : Où prend-on le 2 milliards? Deux suggestions. D'abord, il y a des crédits d'impôt aux entreprises, entre autres, en recherche et développement qui ne donnent pas des bons résultats. Donc, il y a une partie de cet argent qui pourrait venir de certains crédits d'impôt aux entreprises qui sont moins efficaces. Mais il y a une partie aussi qui pourrait venir du Fonds des générations. Actuellement, c'est permis, sans passer de loi, que le Fonds des générations soit investi ailleurs qu'à la Caisse de dépôt.

Donc, la proposition que je fais au premier ministre, puis j'aimerais savoir ce qu'il en pense, c'est d'ajouter 2 milliards chez Investissement Québec avec l'intention d'aller chercher 10 milliards de plus d'investissement privé. Et, selon moi, ça viendrait stimuler l'économie, augmenter la productivité chez certaines entreprises qui pourraient en profiter pour faire des investissements en matériel et outillage. Donc, je lui fais cette suggestion puis j'aimerais avoir ses commentaires.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : ...moi, j'apprécie la participation de mon collègue et sa suggestion. On va certainement en discuter. On va commencer la discussion puis on pourra la poursuivre également, parce qu'il nous met, et je suis content qu'il le fasse, sur une piste concrète.

Ma réaction à chaud, là, puis on va y réfléchir ensemble, puis on pourra échanger. Bon. D'abord, les crédits d'impôt Rx&D, vous avez raison, ils sont imparfaits. Est-ce qu'ils sont mauvais? Il faut faire attention. Il y a beaucoup d'entreprises qui nous disent qu'ils ont besoin... surtout les grandes entreprises. Les petites entreprises, souvent, m'ont dit que c'est inefficace, c'est trop lourd, c'est trop long d'avoir l'argent et c'est trop complexe. Alors, c'est pour ça qu'on a créé Créativité Québec, qui est de l'aide directe pour les projets des PME.

Maintenant, ma réaction pour la question du Fonds des générations, c'est qu'il faudrait changer la loi d'abord. Et il y a une chose qui m'inquiète sur laquelle je vous demanderais de réfléchir, c'est que, quand on discute avec les firmes de notation, les firmes de crédit, ce qui, à chaque fois... je ne dirais pas «nous sauve la mise», mais nous solidifie dans nos échanges, c'est notre plan fiable et reconnu de contrôle de la dette et l'existence du Fonds des générations. Alors, la question que j'aurais — on peut échanger tous les deux, là — la question que j'aurais, c'est : À partir du moment où on soumet ce fonds à un profil de risque totalement différent que le profil actuel, je ne suis pas certain que les agences de crédit conserveraient le même niveau de crédibilité envers notre plan de contrôle de la dette, je ne crois pas, parce qu'ils verraient là d'abord la possibilité d'intervention politique dans les décisions d'investissement. Et, les choix d'investissement à risque variable, il sait très bien comme moi qu'en général, quand Investissement Québec intervient, c'est souvent que d'autres institutions financières, pour plusieurs raisons, ont décidé de ne pas intervenir. Donc, souvent, on se place dans un créneau de risque qui est un peu différent.

Alors, voilà la question que j'aurais, puis j'aimerais qu'on ait cet échange : Est-ce qu'il ne pense pas — il a été dans le milieu des affaires, il connaît très bien ces questions — que de soumettre le Fonds des générations à un pattern de... patron de risque, pardon, différent, un, nécessiterait un changement de la loi et, deuxièmement, pourrait faire perdre de la crédibilité au Québec pour son plan de contrôle de la dette, et pourrait donc mettre en danger la cote de crédit du Québec, du moins, en théorie?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de la deuxième opposition.

• (21 h 20) •

M. Legault : ...des générations. Actuellement, on prévoit, cette année, finir à 8,6 milliards. Donc, ça serait une partie du fonds. Même quand on fait une projection, votre projection jusqu'en 2019‑2020, on monte à 20 milliards dans le Fonds des générations.

L'autre chose que je notais : dans les engagements du Parti libéral, à la page 31, on disait ce qui suit : «Le plan libéral prévoit l'utilisation d'une partie du Fonds des générations pour réaliser l'acquisition jusqu'à hauteur de 10 % du capital-actions d'une entreprise inscrite en bourse qui fait l'objet d'une OPA hostile qui menace le maintien — en tout cas, si on a du temps, on pourra revenir aussi sur ce sujet-là — de son siège social au Québec. Pour ce faire, le ministre des Finances modifiera la politique de placement du Fonds des générations pour permettre l'utilisation jusqu'à hauteur de 20 % de ses avoirs pour combattre [les] OPA hostiles.»

Moi, je me dis que, si c'est bon pour les OPA hostiles, donc pour une mesure défensive, d'aller dire aux firmes de notation que vous estimez des investissements privés additionnels de 10 milliards — évidemment, on ne ferait pas ça tout sur une année, ça pourrait s'étendre sur un certain nombre d'années — pour être calculées, les retombées économiques du 10 milliards d'investissement privé, évaluer combien ça amène de revenus additionnels pour le gouvernement du Québec... mais je peux vous dire qu'à vue d'oeil, là, avec un levier deux pour 10, bien l'intérêt qu'on perd ou le risque qu'on prend sur une partie du 2 milliards, quand on calcule les retombées sur le 10 milliards d'investissement des entreprises, à vue d'oeil, ça serait un bon placement pour les citoyens québécois puis même pour la firme de notation.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : ...ministre.

M. Couillard : Alors, brièvement, puis je vais continuer la discussion. Pour ce qui est de la firme de notation, sans aller dans les détails, je veux lui dire que la situation était extrêmement sérieuse, extrêmement sérieuse. On a été obligés d'expliquer l'impasse actuelle, on a été obligés d'expliquer les mesures, donner de la crédibilité aux engagements du gouvernement sur le contrôle des dépenses, et je peux vous dire que ça a été des discussions excessivement serrées. Vous vous souvenez que Fitch, une des agences, a placé le Québec sous perspective négative, et je peux vous dire que l'ambiance des premières conversations n'était pas très positive.

Ceci étant dit, je me souviens très bien de ça, je me souviens même de la discussion qui a donné lieu à l'inscription de ça dans le cadre. Cependant, arrivant au gouvernement, la même discussion a eu lieu, et on nous a recommandé, au ministère des Finances et ailleurs, pour les mêmes raisons que je viens de mentionner, de ne pas aller dans cette direction-là, que ça enlèverait, selon les gens qu'on a consultés dans le gouvernement, la crédibilité au Fonds des générations et ça pourrait nuire à la crédibilité de cet instrument-là.

Mais je ne voudrais pas fermer la porte à son idée. Il y a quand même des milliards, puis, pour les citoyens qui nous écoutent, ils se rendent compte qu'on va accumuler jusqu'à 20 milliards, il a dit le chiffre, mais il faut se souvenir, puis il le sait très bien, notre collègue, que, le 20 milliards, il faut qu'il reste 20 milliards, c'est-à-dire que le 20 milliards, il est là pour, parler comme en québécois, accoter notre dette pour que, quand notre dette est mesurée par les agences de crédit, ils soustraient la valeur du Fonds de générations pour ramener le pourcentage de PIB plus bas. Donc, si on n'avait pas le Fonds de générations, surtout actuellement, on serait en fort mauvaise posture. Et c'est là la question des patterns de risque, ou de patrons de risque, des investissements. Mais je ne veux pas fermer la porte à son idée, parce que, si on a eu l'idée pour les OPA, clairement on était dans la même direction.

Alors, moi, ce que je peux lui dire, c'est que je vais en parler aux gens du gouvernement autour de nous, puis je suis prêt à avoir une conversation avec lui sur ça, avec les ministres concernés, qu'on ait une discussion ouverte, là, sur cette possibilité-là. J'apprécie son offre de collaboration.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de deuxième opposition.

M. Legault : Oui. Peut-être juste pour aider le premier ministre. Quand on rencontre les gens des finances, il faut être prudents, parce qu'en finances il y a deux sortes de personnes : il y a le profil un peu plus banquier, hein, qui va tout de suite demander quelles sont les garanties, qui ne veut pas prendre de risque, hein, la ceinture, les bretelles — même, il y a certains ministres qui sont des anciens banquiers, qui pensent comme ça, hein? — mais, il faut aussi regarder, il y a des gens en finances qui sont plus des entrepreneurs, plus des développeurs.

Moi, ce que je soumets, là, en tout respect, au premier ministre, c'est que le Québec a besoin d'une équipe de développeurs, parce qu'actuellement, si le Québec continue à avoir une croissance économique plus faible que ses le fardeau fiscal de la classe moyenne. Donc, on est comme un peu condamnés à prendre certains risques pour développer le Québec. On ne pourra jamais sortir de la cave, là — je reviens à mon 57e rang — avec un 10 milliards qu'il nous manque d'investissement privé. C'est pour ça que la clé, c'est vraiment Investissement Québec. Et je vous soumets ou je soumets au premier ministre, là, que c'est urgent de rendre Investissement Québec beaucoup plus proactive. Puis, dans certaines ententes, il pourrait compléter des financements avec la Caisse de dépôt, la Caisse de dépôt pourrait prendre la partie moins risquée, mais il faut qu'on ait un Investissement Québec qui soit beaucoup plus dynamique pour aller chercher des investissements privés. Et je veux peut-être, là, avec le temps... je ne sais pas combien de temps qu'il nous reste, là, mais...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Plus de huit minutes.

M. Legault : Plus de huit minutes. J'aimerais revenir sur la question des sièges sociaux, parce qu'on a eu une discussion en Chambre la semaine dernière, là, on n'est vraiment pas sur la même longueur d'onde de ce côté-là.

Moi, je suis inquiet. Quand j'entends dire que, par exemple, une compagnie manufacturière, qui est peut-être la plus belle compagnie manufacturière qu'on a au Québec, Bombardier, ils pourraient vendre la division Transport, je me dis, là : Il faut tout faire pour éviter que la division Transport de Bombardier quitte. Donc, il faut être capables de mieux utiliser Investissement Québec. Puis je pense qu'actuellement ce que les gens d'affaires me disent, là, entre autres, à Montréal, c'est qu'Investissement Québec n'a pas assez de fonds disponibles, Investissement Québec n'est pas assez dynamique actuellement auprès des entrepreneurs. Il y a des entrepreneurs qui auraient des beaux projets mais qui auraient besoin d'une partie un peu plus risquée, puis Investissement Québec n'est pas là. Puis le Fonds de solidarité, bien là, surtout qu'ils perdent le crédit d'impôt fédéral, ils veulent prendre moins de risques.

Donc, il manque de capital de risque actuellement. Puis, sur le 2 milliards que met à chaque année Investissement Québec, il y en a un, milliard, c'est dans le fonds de capital de risque, puis il nous manque de fonds de ce côté-là. Moi, en tout cas, je considérerais de façon importante d'utiliser le Fonds des générations.

Puis la suggestion qui a été faite par le Parti libéral d'utiliser jusqu'à 20 % du Fonds des générations pour contrer les OPA hostiles... Moi, je vous dirais : Quand une OPA est sur la table, souvent il est trop tard. Il faut faire de la prévention. Moi, ce que je souhaiterais, là, c'est qu'Investissement Québec prenne les 25 sièges sociaux les plus importants au Québec puis s'assure avec la Caisse de dépôt qu'il y a comme un plan B. Puis, si jamais le propriétaire ou les propriétaires veulent vendre, il faut qu'on ait un plan sur la table qui pourrait utiliser une partie du Fonds des générations pour arrêter de perdre des sièges sociaux. Parce qu'une des raisons pourquoi le Québec a un écart de richesse aussi grand, c'est qu'on n'a pas assez d'emplois de qualité. Des emplois payants, c'est souvent dans les sièges sociaux. Les postes de vice-président, de directeur, de gérant, c'est souvent proche des sièges sociaux. Donc, ça fait mal de perdre Alcan. Alcan a coupé 250 postes dans son siège social depuis que le siège social d'Alcan est rendu chez Rio Tinto. Donc, il faut arrêter ça, cette saignée des sièges sociaux. Puis ce n'est pas de l'interventionnisme, là. Je reviens avec l'exemple d'Electrolux. Dans mon comté : 1 300 emplois à 25 $ de l'heure. C'est des emplois payants. Ils ne sont pas allés en Chine, les emplois, ils ne sont pas partis au Mexique, ils sont partis à Memphis, Tennessee, parce qu'il y a un Investissement Québec là-bas, au Tennessee, qui est beaucoup plus agressif que notre Investissement Québec, qui est très pépère. Quand vous regardez le volume qui est fait actuellement par Investissement Québec puis vous regardez le volume il y a 10 ans, vous allez voir, là, il n'y a pas eu de variation; même, il y a eu une petite baisse.

Donc, il faut absolument — je vous donne un «hint», là — que vous convainquiez votre ministre du Développement économique — à moins d'en mettre un autre, là — mais que c'est la priorité de doubler... Moi, je vous donne un objectif, M. le premier ministre, de doubler les interventions d'Investissement Québec. Ce n'est pas 2 milliards que devrait mettre Investissement Québec à chaque année dans l'économie, c'est le double. Il faut être ambitieux, puis je trouve actuellement qu'on n'est pas ambitieux. On joue juste du côté des dépenses, on joue juste du côté de contrôler la croissance alors que ce qu'on a besoin, c'est d'aller chercher beaucoup plus d'investissement privé. Il faut retrouver, avec nos entrepreneurs, le goût de développer notre économie.

Donc, je vous fais cette suggestion-là, là, de bonne foi, en disant : Si on était capables, avec le Fonds des générations puis avec une partie des crédits d'impôt aux entreprises, de donner un peu d'air à Investissement Québec, qui actuellement est à court de fonds, je pense que ça pourrait aider à accélérer la croissance au Québec, à nous donner des marges de de l'économie.

Donc, actuellement, on le voit avec les prévisions de Desjardins, une des choses qui nous font mal dans la croissance économique, c'est que la consommation des ménages n'est pas au rendez-vous, parce qu'ils n'ont pas de marge de manoeuvre. Puis je vous invite, M. le premier ministre, à aller demander aux Finances l'évolution du pouvoir d'achat des gens de la classe moyenne depuis que vous êtes au pouvoir, et moi, je suis convaincu qu'il y a eu une baisse du pouvoir d'achat depuis un an au Québec, puis ça nuit à l'économie du Québec.

Tout ça pour dire que je pense qu'une des clés, si on veut se sortir de la cave, du 57e rang, bien cette clé-là, elle s'appelle Investissement Québec, et il faut qu'ils se réveillent, chez Investissement Québec, mais il faut peut-être que vous les aidiez un peu à se réveiller.

• (21 h 30) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, monsieur. Il reste un peu plus de deux minutes, mais on peut emprunter sur le bloc du gouvernement.

M. Couillard : Je pense qu'avec deux minutes... Bon, écoutez, je suis prêt à discuter de ces questions, mais il y a des éléments quand même que je voudrais souligner, dont certains qui m'inquiètent un peu dans la présentation.

D'abord, pour Bombardier, brièvement, autant moi que le ministre, on a exprimé notre préoccupation. Le ministre de l'Économie a contacté Bombardier, qui lui ont dit que ce n'était absolument pas dans leur intention de vendre leur division ferroviaire. Mais on reste sur nos gardes, il sait comme moi que des décisions se prennent rapidement, des fois, pour se défaire d'une partie d'actions ou une partie d'entreprise.

Maintenant, sur la question de l'utilisation d'Investissement Québec ou du Fonds des générations, je ne suis pas sûr d'avoir suivi, là, jusqu'au bout, parce qu'il y a deux aspects qui m'inquiètent un peu. Oui, je veux qu'on garde nos entreprises clés, c'est bien important, mais on veut également que nos entreprises clés fassent des acquisitions ailleurs, puis on ne serait pas trop contents, nous autres, que, quand Couche-Tard s'en va en Europe, il y ait un gouvernement qui rembarque là-dedans pour empêcher que Couche-Tard prenne le contrôle comme ils ont fait. On veut que nos entrepreneurs rayonnent, puis soient présents, puis soient agressifs à l'étranger. Ça, c'est un élément qui peut donner le signal du Québec comme étant une économie fermée. Ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas agir, mais il faut agir avec circonspection.

L'autre élément qui... là, je ne suis pas sûr que c'est vraiment ça qu'il voulait dire, je n'ai quand même pas compris, je crois, que son intention, c'était d'utiliser le Fonds des générations comme capital de risque, parce que, là, ça ne marchera plus, là, on ne pourra pas tenir le coup, là. Pour le capital de risque, c'est différent, là. Entre une OPA puis du capital de risque, c'est... «venture capital», là, c'est autre chose que ça, là. C'est ce que j'ai compris. Ça, je ne suis pas certain. Mais, écoutez, si on a présenté cette idée, c'est parce qu'elle était dans le rapport du groupe d'experts, là, qui a eu lieu sur les sièges sociaux. On nous a présenté des arguments qui sont similaires à ceux que je lui ai donnés au début de notre échange. Moi, je dis : On va... «revisiter», c'est un anglicisme, on va revoir cette question, la discuter encore, puis je l'inviterais même à une conversation avec moi là-dessus, puis on pourrait échanger.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui. Quelques secondes pour un commentaire.

M. Legault : Bien, juste vous dire, là, ma petite expérience, là. Quand j'étais chez Transat, on a essayé d'acheter une compagnie qui s'appelle Thomas Cook, en Grande-Bretagne. Il y avait des blocs d'actions qui n'étaient pas à vendre parce qu'ils étaient détenus par des intérêts proches du gouvernement. On a essayé en Allemagne, c'était la même chose. On a essayé en France, c'est la même chose. Sarkozy a dit que, si c'était à refaire, jamais Pechiney serait vendue à Alcan. Quand, à Boston, aux États-Unis, les Chinois ont essayé d'acheter des ports, p-o-r-t-s, le président a dit : Il n'en est pas question. Quand des Chinois ont essayé d'acheter Rio Tinto en Australie, le gouvernement australien a dit : Il n'en est pas question, Rio Tinto n'est pas à vendre. Donc, il ne faut pas être trop naïfs non plus. Il faut protéger, nous autres aussi, nos sièges sociaux.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le chef de la deuxième opposition, pour ce bloc d'échange très intéressant. M. le député de Chomedey, à vous la parole.

M. Ouellette : Merci, M. le Président. Notre collègue de L'Assomption nous a parlé qu'il ne faudrait pas être trop sur la défensive. Le Canadien aurait besoin d'offensive, parce qu'on perd 1-0 puis on va manquer de temps, effectivement.

Donc, M. le Président, comme je vous l'ai mentionné, je voudrais entamer ce bloc avec le Sommet de Québec sur les changements climatiques, qui était la troisième partie de l'intervention que je voulais faire en changements climatiques. On se souviendra, M. le Président, que, le 14 avril, donc il y a quelques jours, a eu lieu à Québec le sommet sur les changements climatiques. Ça avait été à l'initiative du premier ministre d'organiser un sommet où tous les premiers ministres des provinces et territoires se réuniraient pour discuter du phénomène planétaire très important des changements climatiques. D'ailleurs, tous les premiers ministres, et tous les ministres présents, des provinces et territoires ont profité de l'occasion pour saluer le leadership du premier ministre du Québec dans cette initiative du Sommet de Québec.

Vous conviendrez, M. le Président, que, dans le déroulement des activités, le Sommet de Québec est en droite ligne avec le sommet qui va se dérouler à Paris, la 21e conférence des Nations unies sur les changements climatiques, qui va avoir lieu du 30 novembre au 15 décembre de cette année. On se souviendra que, lors de la visite du président Hollande en novembre dernier ici, au salon bleu, il en avait été question, et je pense que le président Hollande nous avait incités à participer pleinement à cette conférence et fondait beaucoup d'espoir sur la présence du Québec à cette conférence des Nations unies. C'est sûr que l'objectif de la 21e conférence va être l'adoption d'un nouvel accord international, d'où l'importance de faire le point où on est rendus en 2015 et savoir où on veut aller pour atteindre les objectifs de réduction de gaz à effet de serre pour 2020.

Présentement, ce qui se passe à Paris... ce qui va se passer à Paris, je pense que tous les pays du monde sont mobilisés, et les États fédérés, les régions, tout le monde sont mobilisés, et on en a eu un très bel exemple lors du Sommet de Québec. Je rappellerais aux quelques spectateurs qui nous écoutent et qui pourront nous écouter en reprise quels étaient les objectifs du sommet. C'était de soutenir le dialogue au plus haut niveau décisionnel entre les provinces et territoires concernant les changements climatiques, c'était de promouvoir la mise en place de mécanismes de fixation d'un prix carbone dans les économies des provinces et territoires, déterminer des éléments de vision communs et des pistes de collaboration pour favoriser la compétitivité à long terme des provinces et territoires dans un contexte de transition vers une économie sobre en carbone, et le dernier objectif, c'était de transmettre un message fort, de la part des provinces et territoires, sur l'importance du rôle des États fédérés dans la lutte contre les changements climatiques, notamment en préparation de la conférence de Paris, communément appelée CDP21.

M. le premier ministre a parlé de la présence de Mme Figueres, qui est la secrétaire exécutive des Nations unies, et le premier ministre avait déjà rencontré Mme Figueres lors de son passage au forum mondial de Davos en janvier, puis c'est une personnalité qui est très importante, au niveau international, lorsqu'il est question de changements climatiques. La présence à Québec de la secrétaire exécutive donnait encore plus d'importance au Sommet de Québec. Il y a aussi eu, au Sommet de Québec, M. le Président, une conférence de M. Alain Bourque et de M. Paul Kovacs qui s'intitulait Les changements climatiques : à quoi le Canada peut-il s'attendre?, qui nous traçait un portrait factuel de la situation. On a aussi eu la présence de M. Mark Kenber, qui était le président-directeur général du Climate Group. Là aussi, je pense que, dans le débriefing du sommet, sûrement que le premier ministre nous parlera de cette personne, parce que je pense qu'elle a eu une reconnaissance importante de la part du Québec. Et les délibérations des présidents, des premiers ministres et des responsables des provinces et territoires ont amené à une déclaration des premiers ministres.

C'est important de souligner aussi, M. le Président, que plusieurs groupes ont appuyé l'initiative et puis qu'ils se sont positionnés en appui au Sommet de Québec, et je me permettrai d'en souligner deux parce que je pense qu'ils font un travail assez important et qui mérite d'être souligné.

Il y a une initiative qui s'appelle Dialogues pour un Canada vert. C'est une soixantaine de chercheurs. On ne parlera jamais assez, M. le Président, du rôle des chercheurs à l'intérieur de notre société. Et c'est une soixante de chercheurs de l'ensemble du Canada qui ont divulgué un plan d'action en changements climatiques pour le Canada, que j'ai eu l'opportunité de lire, qui s'appelle Agir sur les changements climatiques — Les solutions d'universitaires canadiens et canadiennes, un document intéressant qui nous positionne très bien. Une autre organisation, qui s'appelle Switch... je n'ai pas la traduction française de cette organisation, mais je pense que tout le monde a compris, c'est une table ronde qui s'est faite, une table ronde canadienne qui s'est faite sur l'économie verte, et on parle d'environ 200 décideurs des milieux économique, associatif, financier et environnemental au Canada qui, la veille du sommet, le lundi, ont fait une table ronde et ont discuté des enjeux. Ce sont tous des éléments qui sont importants et qui ont fait partie du sommet historique de Québec.

M. le Président, j'aimerais demander au premier ministre quelles sont ou quelles seront les retombées du sommet, d'après lui et d'après les ministres du gouvernement qui étaient présents avec lui à ce sommet. Et je pense que je pourrais aussi demander au premier ministre, dans la Déclaration des premiers ministres, les engagements qui ont été pris en préparation de la conférence mondiale de Paris de décembre prochain.

• (21 h 40) •

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Sans doute que nos cotes d'écoute ont augmenté depuis la fin du match de hockey, en prévision du match qui aura lieu vendredi.

M. Couillard : On a perdu, 1-0.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Et voilà. Je ne voulais pas annoncer la mauvaise nouvelle.

M. Couillard : Ce n'est pas ce soir ou demain que Mme Wynne va mettre le chandail des Canadiens, mais on a encore une chance. Une autre fois.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Vendredi. Alors, M. le premier ministre, pour la réponse à la question du député de Chomedey.

M. Couillard : Alors, parler d'abord du sommet lui-même. Moi, je suis convaincu, puis on le voit, qu'on ne peut plus faire de politique maintenant, certainement en Amérique du Nord, en Europe, dans beaucoup d'autres régions, sans parler des changements climatiques ou en prétendant que le sujet n'existe pas. La population, on le voit partout — on voit le président Obama sur le thème depuis plusieurs mois et récemment — la population demande des décideurs publics des actions et un plan, un plan qui ne met pas en danger, et c'est important, l'économie, et la croissance économique, et la création d'emplois.

Alors, ce sommet nous a permis également d'accueillir les deux personnes dont notre collègue le député de Chomedey nous a parlé, Mme Figueres puis M. Kenber. Je voudrais parler plus précisément de M. Kenber. Mme Figueres est une personne très importante des Nations unies qui connaît bien maintenant le Québec, qui connaît bien l'engagement du Québec dans la lutte aux changements climatiques, mais on a également profité de l'occasion pour avoir une intervention et des conversations de groupe, de toutes les provinces et territoires, avec M. Kenber et, et je voudrais le souligner, de lui remettre l'insigne de chevalier de l'Ordre national du Québec parce que c'est une des figures marquantes du développement durable sur la scène internationale et il a établi des liens de confiance et d'accueil envers le Québec qui sont très, très notables. C'est quelqu'un qui s'est engagé très tôt dans le dossier, que ce soit à la tête du Climate Group et de l'Alliance des États fédérés et des régions. Ça a toujours été, pour nous, un allié de taille.

Alors, pour ce qui est de la Déclaration des premiers ministres des provinces et des territoires du Canada, je voudrais dire d'abord que l'exercice a permis de voir les différences, hein? Ce n'est pas monolithique, la réalité canadienne, elle change. Oui, Québec, Colombie-Britannique, Ontario, je pense, le Manitoba de plus en plus engagés dans cette direction : fixation de prix au carbone, une action vigoureuse. D'autres provinces, compte tenu de leurs réalités économiques spécifiques, sont plus craintives. C'est compréhensible. On a entendu parler d'initiatives intéressantes également, comme la captation de carbone et l'innovation technologique, qui peuvent jouer un rôle dans la lutte aux changements climatiques, mais la mesure centrale, fondatrice demeure la fixation de prix soit par une taxe soit par un marché de carbone.

Alors, les engagements qui ont été pris consistent à adopter une vision à long terme pour faciliter l'atteinte des cibles de réduction; soutenir l'innovation de même que le développement et l'utilisation des technologies nécessaires à la transition vers une économie plus sobre en carbone; mettre de l'avant des mesures qui favorisent la concertation intergouvernementale et intersectorielle dans tous les secteurs de l'économie; mettre en oeuvre des programmes et des mesures visant l'adaptation aux changements climatiques et à la réduction des émissions; renforcer la collaboration pancanadienne en matière de lutte; assurer la transition vers l'économie sobre en carbone au moyen d'initiatives appropriées pouvant inclure l'instauration d'un prix carbone, captage et stockage du carbone et autres innovations technologiques; mieux coordonner les systèmes de déclaration des émissions de GES entre les gouvernements; favoriser les investissements dans le développement d'infrastructures et des réseaux énergétiques résilients; mettre en oeuvre des politiques visant à réduire les émissions, bien sûr, et l'approfondissement des connaissances; agir en partenariat, et c'est important.

On a lancé un appel au gouvernement fédéral. J'ai été un peu surpris qu'on reçoive la lettre de la ministre fédérale de l'Environnement, qui nous demandait, à brève échéance, d'envoyer nos cibles, alors que le processus au Québec est bien encadré, et, dans la loi sur le contrôle de l'environnement, ça consiste à la réunion du groupe-conseil dont on a parlé tantôt, l'élaboration des cibles post-2020 pour les présenter à Paris, une commission parlementaire pour les... il y aura débat sur le niveau de ces cibles-là, et, par la suite, on sera prêts à envoyer des cibles, bien sûr, à Ottawa mais également pour la conférence de Paris. Alors, je pense que cet appel à la concertation au gouvernement fédéral, compte tenu du fait qu'il y a une conférence des ministres de l'Environnement en juin, très prochainement, devrait nous permettre d'avoir dès maintenant des travaux techniques, parce qu'on voit qu'il y a des différences sur le calcul des émissions. Il faut commencer par la méthodologie, de la façon dont on obtient les chiffres, pour avoir une conférence de juin où les ministres de l'Environnement auront un accord sur les cibles, parce que, si le gouvernement canadien présente des cibles au nom de tout le pays, il doit forcément impliquer les provinces et territoires dans le calcul de ces cibles, dans leur détermination puis dans le fardeau qui repose sur les différentes régions du Canada, et ça, on l'a exprimé de façon très claire. Et, bien sûr, on va diffuser cette déclaration auprès de différentes instances et continuer à promouvoir nos actions aux niveaux provincial et territorial.

Alors, ça a été un exercice qui était un peu risqué au début, parce qu'on a lancé cette invitation en ne sachant pas si elle aurait des suites. Elle a eu des suites, je dirais, bon, d'une part, par le fait qu'on a eu cette initiative mais également par le fait que l'enjeu a pris de l'ampleur au cours de l'année. Et l'approche de la conférence de Paris lui donne encore plus d'ampleur. Et ce n'est pas vrai, encore une fois, qu'on peut exercer le gouvernement, faire de la politique active maintenant sans s'engager de façon claire sur cet enjeu-là, et je suis très fier que le Québec l'ait fait maintenant, mais également depuis plusieurs années, M. le Président.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de Dubuc.

M. Simard : Merci, M. le Président. M. le Président, je vais parler un petit peu de ma région étant donné que c'est une région que j'aime énormément, j'y ai toujours demeuré et je suis toujours préoccupé par ma région, et puis j'ai le bonheur, bien sûr, de la représenter ici avec le premier ministre.

M. le premier ministre, à titre de ministre responsable de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, vous êtes responsable d'une région extraordinaire que j'ai la chance de bien connaître, car j'y demeure depuis toujours. Étant moi-même député du comté de Dubuc, je peux témoigner de l'importance qu'occupe le Saguenay—Lac-Saint-Jean dans l'ensemble de l'économie du Québec, non seulement à travers les secteurs de la forêt, de l'aluminium, mais aussi dans l'agriculture, l'agroalimentaire et le tourisme. Il y a maintenant un peu plus d'un an, j'étais élu député à l'Assemblée nationale pour représenter les gens de la circonscription de Dubuc. C'est d'ailleurs un grand honneur pour moi d'être votre adjoint parlementaire pour la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, M. le premier ministre, et je vous en remercie. Notre région, comme toutes les autres régions du Québec, est bien sûr confrontée à un certain nombre de défis mais dispose également d'atouts indéniables dans plusieurs secteurs qui assurent la vitalité économique de notre région.

Vous êtes un premier ministre qui représente les régions. Depuis votre élection, vous avez démontré à plusieurs reprises votre sensibilité et l'intérêt que vous portez et que notre gouvernement porte à l'endroit des régions du Québec, et notamment la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean.

M. le Président, j'ai deux questions. Après un an à titre de premier ministre et ministre responsable de la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, pourriez-vous nous parler de quelques actions structurantes que vous avez posées afin de favoriser l'emploi et l'économie dans la région? Et une deuxième question, M. le Président, que je donne d'emblée : À quoi peut-on s'attendre au cours des prochains mois?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre, il reste quatre minutes à ce bloc d'échange.

M. Couillard : Merci, M. le Président. Je remercie mon collègue pour sa question puis j'en profite également pour m'associer à ses propos quant à la région, son importance, puis saluer mon collègue le chef de l'opposition officielle, le député de Chicoutimi, qui partage les mêmes préoccupations, et je crois qu'on a bien établi la collaboration entre nous, là, sur les dossiers régionaux.

Ce matin, j'étais à un événement, le Cercle d'affaires des Bleuets. Je ne sais pas si notre collègue de Chicoutimi connaît ce...

Une voix : ...

• (21 h 50) •

M. Couillard : Oui. Moi, je suis allé ce matin. Puis on m'a expliqué que, quand on était quelqu'un qui habite au Saguenay—Lac-Saint-Jean mais qu'on n'est pas né au Saguenay—Lac-Saint-Jean, on n'a donc pas le titre plein de «Bleuet», parce qu'on l'est par alliance. Moi, je l'ai fait parce que j'ai épousé une femme du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Alors, on m'a dit que j'avais le droit...

Une voix : ...

M. Couillard : Non, mais on m'a dit... Parce que j'ai posé la question. Ça me préoccupait. On m'a dit que j'avais le droit de m'appeler un «Bleuet blanc». C'est ça qui est le terme — je ne sais pas si vous étiez au courant du terme officiel, bien, ça y est — un «Bleuet blanc».

M. Bédard : Non, non, c'est la première fois que je l'entends. Ça doit être dans le nord du lac, ça.

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Couillard : Oui. Ils sont blancs parce qu'il y a moins de soleil. Alors, effectivement, on a posé un certain nombre de gestes en continuité, là, avec plusieurs dossiers qui évoluent et continuent d'évoluer. Il y a plusieurs secteurs majeurs de notre économie, vous le savez.

D'abord, en forêt, il y a eu l'annonce, pour les prochaines années, de budget pour les travaux sylvicoles. C'est 55 millions dans la région. On sait que ce secteur-là est fragilisé depuis quelques années, il y a eu plusieurs crises successives, hein, la crise du bois d'oeuvre, suivie de la crise économique. Maintenant, on a les enjeux autour des papeteries puis les enjeux autour de la certification. Alors, c'est un secteur qui est constamment, constamment sous pression. Ce qui est encourageant, c'est qu'il y a la reprise des mises en chantier aux États-Unis. On approche du million de mises en chantier. On voit que les exportations de produits du bois augmentent. Chez nous, on voit plus passer de camions de bois qu'avant, mais ça, ce n'est pas scientifique comme indice, mais c'est assez fiable. Et, de ce côté-là, donc, les choses évoluent bien, mais on reste avec les autres défis que je mentionnais. Puis il y a eu le dossier qui est probablement le dossier forestier le plus important dans notre région, à part la certification, c'est la question de Louisiana-Pacifique à Chambord. Vous savez qu'il y a quelques années il y a eu une fermeture avec plusieurs centaines de pertes d'emploi. Il y a 329 500 mètres cubes de bois qui restaient inoccupés... ou non utilisés depuis novembre 2008. Alors, on a envoyé plusieurs signaux à l'entreprise pour leur dire de nous présenter un projet et de nous fixer sur leurs intentions et on a fini par reprendre le bois, former un bureau de projet qui d'ailleurs est à Saint-Félicien, qui commence à analyser des projets pour utiliser ce bois-là soit en totalité par une entreprise soit en le fragmentant pour plusieurs projets intéressants.

L'autre secteur majeur, c'est l'aluminium. Il y aura une stratégie de l'aluminium qui va être déposée, là, autour du mois de juin, et qui sera annoncée dans notre région, et qui bénéficiera d'outils pour améliorer encore plus l'effort de transformation de l'aluminium dans la région. Et, dans notre région, ce n'est pas moins de 6 000 personnes qui travaillent dans la production primaire d'aluminium, et on ajoute 2 500 personnes dans les activités de transformation, les équipementiers. Il y a énormément de monde et des très bons salaires, un très bon secteur économique. C'est un secteur mondial qui est soumis à des défis. Les prix ne sont pas à la baisse mais ne sont pas à la hausse non plus. Ils sont dans une période un peu de... je dirais, de stabilité à des niveaux moyens, ce qui amène des retards dans les décisions de certaines entreprises d'investir davantage. On sait que, donc, cette stratégie sera déposée, mais j'étais très heureux d'être avec tous mes collègues à Arvida lorsqu'on a confirmé que le Centre d'électrolyse Ouest d'Arvida, à Saguenay, pourrait continuer ses activités jusqu'en 2020. C'est quand même 1 000 emplois de qualité dans notre région qui sont préservés.

Il reste beaucoup de choses à faire puis il reste surtout beaucoup de concertation à faire dans la région, et c'est là que M. le député de Dubuc joue un rôle important, c'est pour le sommet économique régional, mais j'invite mes collègues du Parti québécois à jouer un rôle important dans ce sommet-là également. On l'a annoncé pour le 18 juin, ce sera à Alma, et on vise trois objectifs : établir un constat commun sur les défis de développement, définir des champs d'intervention stratégiques pour les 10 prochaines années puis surtout de mettre en synergie les acteurs régionaux. On a eu un succès, franchement, qui a dépassé nos attentes. Vous le savez, vous avez mis beaucoup d'heures de travail dans le comité d'organisation, le comité consultatif. On a reçu pas moins de 94 mémoires de la part d'individus et d'organismes et on a tenu des sommets sous-régionaux dans les différentes MRC. Il y en a eu un, je crois, vous m'avez dit... hier à la MRC du Domaine-du-Roy, il y en a un autre demain soir, et les gens participent très, très activement à ces sommets-là. Alors, il faut, je crois, qu'on soit très actifs, là, pour bien sûr faire avancer quelques projets, mais surtout nous projeter pour l'avenir et fixer les grandes priorités de développement.

Il faut mentionner le Plan Nord, qui aura un impact. Il y aura une antenne de la Société du Plan Nord à Roberval, comme vous le savez, et il y aura bien sûr des représentants de la région au conseil d'administration de la Société du Plan Nord. Il y en a également à la Table des partenaires. On continue d'appuyer le projet d'Arianne Phosphate. On a investi, par l'entremise de Ressources Québec, 2 millions sous forme de capital-actions. Le BAPE est commencé, et on va suivre ce dossier-là attentivement.

Et je voudrais quand même mentionner quelques autres réalisations. On a tous les deux des réalisations dans nos circonscriptions respectives : on a réussi à rouvrir le foyer de groupe pour les jeunes, L'Intervalle; il y a le bloc opératoire de Roberval, puis, dans le programme routier, c'est la route d'Obedjiwan qui lie les villes du lac à la communauté attikamek d'Obedjiwan. On s'est commis pour environ 55 millions de travaux pour les prochaines années pour maintenir ce lien-là économique important puis désenclaver la communauté autochtone.

Alors, beaucoup de travaux, mais le sommet, c'est le prochain grand rendez-vous en juin prochain à Alma.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le premier ministre. Ça complète ce bloc d'information, même qu'on a dépassé d'une minute. On le retranchera du prochain bloc.

Je me tourne maintenant vers le chef de l'opposition officielle pour le dernier bloc d'échange. À vous la parole.

M. Bédard : Ça adonne bien, M. le Président. Effectivement, on va parler des régions. Et, à travers ça, on va essayer de bien comprendre la sémantique du premier ministre, parce que c'est quand même important pour la suite des choses. Et il nous a dit qu'il n'y a pas de coupure dans les régions, n'est-ce pas?

M. Couillard : Dans le développement économique.

M. Bédard : Il n'y a pas de coupure dans le développement économique. Il y en a dans les régions, mais pas dans le développement économique. O.K.

Donc, je veux savoir simplement est-ce qu'il considère que... Couper 750 000 $ à la Solidarité rurale, ça rentre dans quelle catégorie? Ça, j'aimerais le savoir. Est-ce que le fait de faire passer les budgets consacrés au développement local et régional — puis ça, c'est dans le budget, là — de 177 millions à 100 millions, ça, c'est une coupure? Est-ce que le fait de ramener les crédits à l'investissement de 16 % à 8 % pour les PME... est-ce que ça, il considère ça comme une coupure? Est-ce que, le fait d'abolir les CRE, les CLD, il considère que c'est une coupure? Est-ce que le fait que, par exemple, le Conseil du statut de la femme ferme des antennes dans notre région et dans d'autres régions, comme le ministère de... le ministère, plutôt, de l'Immigration, est-ce qu'il considère ça comme une coupure? Ou, le fait, comme il vient de l'annoncer aujourd'hui, de fermer les forums jeunesse, les conseils d'administration, ceux et celles qui s'activent autour de la participation citoyenne dans toutes les régions du Québec, est-ce qu'il considère que c'est une coupure?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

M. Couillard : Bien sûr, on peut les présenter comme ça. Moi, je parlerais plutôt de «décisions importantes» qui sont toutes sous la même catégorie, qui est de donner le plus de priorité à la mission des organismes plutôt qu'aux structures. Et, quand je dis qu'il n'y a pas eu de coupure en développement régional dans nos régions, incluant la nôtre, c'est rigoureusement exact. Le Fonds local d'investissement, qui demeure administré dans les régions, dans les MRC, n'a pas vu son budget retranché d'un seul dollar, donc il a autant d'outils. Et d'ailleurs les gens sont à l'oeuvre. Chez nous, à la MRC de Maria-Chapdelaine, ça n'a pas pris quatre jours que Jean-Pierre Boivin était à l'oeuvre avec son équipe pour prendre la relève puis investir dans les entreprises. Et c'est là que ça doit se faire. On n'a pas besoin de trois, quatre organisations avec des budgets de fonctionnement pour continuer dans cette direction-là.

Pour les CLD, puis je ne veux pas bien sûr nier que dans certains cas ils aient été utiles, mais le portrait est quand même très mitigé, hein? Il faut voir le rapport du Vérificateur général pour constater qu'on avait une organisation qui dépensait les 70 millions en question comme frais de fonctionnement pour gérer un budget de 25 millions. Et puis le VG nous apprend que, dans 51 % des cas, on prenait de l'argent du fonds d'investissement pour mettre dans les frais de fonctionnement. Alors, c'est le genre de choses qu'au Québec on ne peut pas se permettre de continuer de faire. On ne peut pas continuer comme ça. Alors, il y a des régions ou des MRC qui choisissent de continuer de travailler avec un CLD, c'est leur choix, les budgets de fonctionnement sont là, ou ils forment des bureaux de développement économique à même la MRC, et parfois c'est un autre choix. Ça dépend des circonstances locales. Mais ce qu'il est important de répéter, c'est qu'il n'y a pas un sou de retiré des enveloppes de fonds locaux d'investissement, et, pour les entreprises, c'est ce qui compte, parce que c'est quand même sous-utilisé. L'autre constat, depuis des années, c'est que le Fonds local d'investissement est sous-investi, sous-utilisé. Je pense qu'il est utilisé à peu près à 50 %, et ça, ça me préoccupe, qu'on ait une organisation qui ait gonflé ses frais de fonctionnement et qui n'ait pas assez, à mon avis, investi dans les initiatives économiques régionales.

Alors, c'est la même chose sous plusieurs plans. On aura l'occasion, demain, dans la discussion sur la jeunesse, de parler des forums jeunesse. C'est le même raisonnement : oui à la mission, avant tout la mission, moins de structures. On n'a pas besoin de deux, trois organisations qui font le même travail dans une région quand on peut le faire avec moins de dépenses de fonctionnement et surtout un résultat final qui est exactement le même. Il parle d'organisations régionales. Dès le début de notre gouvernement, on a aboli les directions régionales du ministère de l'Éducation. À ce que je sache, il n'y a eu aucun impact dans le réseau scolaire, là. Ça ne veut pas dire que les gens ne faisaient pas du travail utile, mais le travail a été fait ailleurs : soit dans les commissions scolaires, dans les écoles ou au ministère de l'Éducation. Le Conseil du statut de la femme, c'est un exemple très intéressant. À l'époque où le conseil a été créé, il y a eu des antennes régionales. Mais le conseil, de toute façon, a pris l'habitude de travailler avec les tables de concertation des différentes régions, et c'est là que continuent à se déployer leurs actions.

Alors, il faudrait éviter chez nous de rester figés dans les façons de faire puis de dire que, parce que ça a toujours été de même, il faut continuer à ce que ça soit de même, même quand on voit de façon claire qu'il n'y a pas d'avantage à maintenir des structures, en autant que la fonction est préservée. Et il faut définir la fonction. Le rôle du Fonds local d'investissement, c'est d'investir dans des petites entreprises, favoriser le développement économique — c'est ça qu'il faut préserver à tout prix — et que la décision soit prise en région, pas à Québec dans les bureaux, en région, le plus près possible des gens.

• (22 heures) •

Alors, moi, je suis heureux qu'on ait pu prendre des décisions malgré la difficulté budgétaire, parce que tout ça, tout ça, c'est dans le cadre de l'impasse qu'il fallait résorber, là. Je vais quand même lui rappeler, à notre collègue, que j'aimerais ça qu'il nous dise, lui, comment il aurait fait pour résorber 7 274 000 000 $ d'impasse budgétaire. Il y a des choix à faire. Mais les choix qu'on fait autant en santé, autant en éducation, autant qu'en développement régional, c'est de favoriser, M. le Président, la fonction qu'on vise, ce qu'on veut obtenir comme résultat plutôt que les structures. Et il faut qu'on apprenne à faire ça, au Québec. Ce n'est pas parce qu'on fait quelque chose de nouveau qu'on est obligés de créer une autre structure. Puis, quand on évalue les choses, il faut constamment évaluer ce qu'on fait. Si on constate qu'il y a deux ou trois organisations qui ont essentiellement les mêmes missions, il faut faire quelque chose. Il y a une jeune femme dans ma région qui m'a montré un tableau qu'elle a fait. Elle a regardé tous les organismes de développement économique qui existaient, y compris les CLD, et autres, et toutes les activités, alors comment rédiger un plan d'affaires, comment faire la mise en marché, comment demander de l'aide pour l'exportation, et elle s'est rendu compte que le même cours était donné par tout le monde, alors que, clairement, ce n'est pas nécessaire d'avoir autant d'organisations pour faire ce travail-là.

Alors, moi, je peux vous dire que c'est quelque chose qu'on va continuer à faire, pas couper, mieux dépenser, faire mieux, M. le Président, avec moins de dépenses de fonctionnement autant d'argent et même des fois plus d'argent pour la fonction qui est visée. Et je voudrais rappeler, là, que, les CLD, c'est au choix des MRC de les garder ou de ne pas les garder. Il y a des MRC qui les gardent. C'est bien. C'est pour de bonnes raisons, j'en suis certain, mais sinon ils peuvent très bien faire le travail directement. Alors, on va confier aux territoires près des gens la responsabilité principale du développement régional, aux municipalités régionales de comté, les élus locaux, les élus régionaux, qui sont pleinement imputables, qui vont prendre des décisions concertées avec les gens du milieu. Puis ça, c'est de la véritable gouvernance de proximité. C'est ça que les régions réclament depuis des années. Depuis des années, ils nous demandent de les laisser décider, de les laisser faire les choix. On a choisi de le faire. On a choisi de le faire avec les gens élus, les gens imputables, et j'invite les citoyens et les acteurs de développement des régions à se mettre en lien.

Déjà, je peux vous dire que le milieu municipal... C'est certain que, quand on change les choses, ça crée toujours un petit peu de grincement, mais la vaste majorité des milieux sont déjà en fonction, ils sont déjà à table actuellement pour le pacte fiscal définitif. Cet épisode est terminé, on a tourné la page, on avance vers autre chose maintenant. Et il faut apprendre, encore une fois, au Québec, à oser remettre les choses en question, oser les remettre en question en préservant la fonction, le but visé et en essayant de diminuer et d'alléger les structures.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le premier ministre. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : C'est long, mais ça nous en apprend beaucoup sur la sémantique, effectivement, du premier ministre. Je veux seulement faire un commentaire : Couper un emploi en région, ce n'est pas une coupure — ça, je veux bien comprendre ça — c'est un choix, une décision, que le premier ministre me dit. Donc, je vais le savoir dorénavant. Un jour, si Alcan m'annonce 500 emplois, je vous dirai : Ce n'est pas une coupure, c'est un choix. Mais c'est ça qu'il doit comprendre. Quand on coupe des emplois comme ça dans le secteur de la santé, de l'éducation, dans le secteur de l'égalité... du Conseil du statut de la femme, mais, pour lui, ce n'est pas une coupure. Solidarité rurale, ce n'est pas une coupure non plus, c'est un choix. Et c'est correct, on en apprend. Et ça, pourquoi? Pourquoi on fait ça? On fait ça pour le 7 milliards dont nous parle le premier ministre, 7 274 000 000 $ — je l'ai au total. Et là, comme il va dans les virgules, on va parler plutôt des gros chiffres. À la fin, on finira avec des dizaines de millions.

On va commencer avec les gros chiffres. On a demandé au premier ministre et au ministre des Finances de nous dire : Bon, 7 milliards, vous le décortiquez comment? Tu sais, on va arriver à l'équilibre, donc... Alors là, on a deux gros chiffres, puis je suis sûr que le premier ministre va nous permettre d'aller dans le détail jusqu'aux 74 millions, comme il le dit. On nous dit que, dans les contributions des ministères et organismes, il y aura 2,4 millions?

Une voix : Milliards.

M. Bédard : Milliards. Milliards. 2 408 millions. Il y aura aussi un effort du budget dans les dépenses — tu sais, c'est une section un peu légère — qui dit qu'à ce niveau-là on va demander aux ministères 1 milliard... et là je vais aller... le premier ministre aime les détails, 1 187 000 000 $. Alors, oublions les dizaines de millions, commençons au moins par les centaines de millions. Alors, moi, ça me fait 3,6 milliards à détailler.

Est-ce que le premier ministre peut me donner la liste des programmes qui ont été coupés et qui représentent 3,6 milliards de dollars... ou un aperçu, au moins?

M. Couillard : Il faudra poser, M. le Président, cette question aux différents ministres au cours des crédits, mais je vais reconstruire avec lui le... Puis, je suis content, il semble accepter enfin la réalité du 7 274 000 000 $.

Alors, je le ramène à la page 6 du document du budget. Mesures au budget 2014‑2015 : contrôle des dépenses du gouvernement pour 3 078 000 000 $; réduction des dépenses fiscales — crédits d'impôt — 348 millions; utilisation de la provision pour éventualités, 200 millions; total de 3 626 000 000 $, soit 50 % de l'effort dans le budget 2014‑2015. En décembre 2014 : réduction du coût des services publics, 1 125 000 000 $; mesures portant sur la révision des programmes, 736 millions; 1 861 000 000 $; on ajoute une autre réduction de dépenses fiscales pour un deuxième total : 2 461 000 000 $; des mesures, en 2015‑2016, de contrôle des dépenses qu'il a fort bien identifiées, à 1 187 000 000 $. Pour un grand total de 7 274 000 000 $. Alors, si le 7 274 000 000 $ n'existait pas... Parce que, chaque fois que je mentionne ça en Chambre, j'entends la même voix que celle qu'on a entendue tantôt, qui dit : C'est faux. Bien, si c'était faux, on serait en surplus de 7 milliards, parce qu'après avoir fait tout ça on serait dans les surplus, une situation de surplus massive puis on aurait déjà pu baisser les impôts de façon massive. C'est dommage qu'on n'ait pas pu le faire.

Alors, il y a des mesures. Elles sont toutes détaillées, ces mesures-là, dans tous les ministères. Il y a plein de ministères qui vont se présenter aux crédits. Ce n'est pas ici qu'on va répondre à ça. Qu'il aille parler à nos collègues des différents ministères, ils lui donneront tous les détails requis. L'important, c'est qu'on atteint l'équilibre budgétaire. L'important, c'est qu'on va maintenir l'équilibre budgétaire puis qu'on a réussi, chose assez rare, à rattraper une impasse de plus de 7 milliards de dollars, 7 274 000 000 $, avec beaucoup d'efforts puis beaucoup de collaboration de tout le monde. Et il y a une année exigeante devant nous, parce qu'on a annoncé l'équilibre pour l'année. Il faut réaliser l'équilibre pour l'année, et c'est pour ça que le contrôle des dépenses pour l'année qui s'en vient est particulièrement important. Puis on ne s'engagera pas ici, là, dans une analyse microscopique des crédits des différents ministères. Je l'invite à le faire avec ses collègues dans chacune des tables d'examen des crédits.

En passant, le sujet d'aujourd'hui, c'était supposé être des crédits du ministère du Conseil exécutif. On n'a pas parlé d'un seul dollar des crédits du ministère du Conseil exécutif. Au moins, demain, on va le faire avec le Secrétariat à la jeunesse.

Une voix : ...

M. Couillard : Au moins. Tant mieux. Mais il y avait également des intéressants crédits du ministère du Conseil exécutif qui étaient le sujet de notre discussion, puis je ne me souviens pas qu'on en ait parlé du tout. Alors, je suis certain que ses collègues, avec les différents ministres, Santé, Éducation, etc., vont se faire un plaisir d'échanger sur les façons dont on a réussi à résorber les choses.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Peut-être. M. le chef de l'opposition.

M. Bédard : J'espère que tout le monde a remarqué que je n'ai pas eu de réponse. C'est quand même assez incroyable, là. Je pose une question de 3,6 milliards. Le premier ministre, il nous parle de ça depuis le début. Même, je lui pose une question en éducation, il me dit : 7,3 milliards. Je lui pose une question à 10 millions, il me répond : 7,3 milliards... me dit-il, 274 millions, excusez-moi. Et là je lui pose une question de 3,6 milliards puis je n'ai pas de réponse. C'est assez incroyable. Puis on me dit : Bien non, il faudrait regarder ça au microscope. Bien, à 3,6, ça ne prend pas un gros microscope. De la lune, on pourrait le voir, M. le Président, je tiens à vous l'assurer, là. Alors, 3,6, je ne peux pas croire que c'est caché quelque part, là. On a au moins un exemple de 500 millions, là. Après ça, on ira dans le détail.

Moi, je veux des exemples, là, quelque chose de clair. C'est quoi, un programme qui a été coupé, qui représente... au moins un ordre de grandeur entre 100 et 1 milliard, 100 millions et 1 milliard. Est-ce qu'il peut nommer un seul programme entre 100 millions et 1 milliard qui a été coupé et qui représente soit l'effort comparé des budgets de dépenses 2015‑2016 ou soit la contribution des ministères et organismes? Je lui laisse une dernière chance. J'aimerais un seul exemple entre 100 millions et 1 milliard.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le premier ministre.

• (22 h 10) •

M. Couillard : Bien, l'abolition des agences régionales, c'est 220 millions, voilà, et ça ne touche pas du tout les services à la population.

Mais, au-delà de ça, M. le Président, on réduit l'effectif, on passe de 65 372 à 64 000 postes, déjà. C'est important de le dire. Si on réduit la taille de l'État par rapport à notre richesse réelle, notre capacité de payer, on va assurer l'équilibre à long terme. Et chaque programme a fait l'objet de révisions, de décisions, de réductions. On est allés voir où on pouvait agir pour améliorer le fonctionnement, améliorer le fonctionnement du secteur d'activité, le moins nuire possible, bien sûr, aux services directs à la population, alléger le système et en profiter pour le rendre plus viable à long terme. Alors, ce n'est pas le modèle québécois qui est en cause, c'est sa viabilité. Et, si on continuait sur notre erre d'aller, comme on dit chez nous, on serait arrivés rapidement dans une impasse très importante.

Alors, malheureusement, on n'aura pas l'occasion de discuter des crédits du ministère du Conseil exécutif, qui sont ceux dont on devait discuter ici, mais l'ensemble des ministres vont être entièrement disponibles. Je pense que le ministre de la Santé doit faire quelque chose comme une vingtaine d'heures de crédits. Ils pourront regarder avec lui chacun des programmes, chacun des éléments. Il expliquera comment, par exemple, il a réussi à économiser de l'argent avec les médicaments en empêchant ou en annulant la question de la règle «ne pas substituer», qui, à elle seule, représente plusieurs dizaines de millions d'économies, et d'autres mesures dans le domaine du médicament, l'étalement de la rémunération des médecins. Il y a plein de mesures semblables qui, additionnées une à une... C'est un travail patient et difficile. Il a été président du Conseil du trésor, il sait très bien que ça prend un ensemble de mesures pour arriver aux résultats, quoique, et heureusement pour lui, lui, il n'a pas eu à vivre ce que nous avons eu à vivre avec la résorption de l'écart de 7 274 000 000 $.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : M. le chef de l'opposition, il reste un peu moins de cinq minutes.

M. Bédard : Alors, je vais dire au premier ministre en tout respect que nous avons effectivement transmis cette demande à tous les ministres, et lui inclus, et la réponse qu'on nous a donnée, c'est celle qui apparaît à A.48 au niveau du plan budgétaire, et c'est la même réponse que tout le monde a donnée. Puis là je ne vais pas dans les détails, parce qu'on pourrait rire ensemble. À un moment donné, il y a des postes qui ont changé, parce qu'on avait de la misère à balancer, on a... Mais la même réponse a été donnée sur le 7 milliards, c'est incroyable, hein, puis on n'a pas de réponse pour 3,6 milliards. Là, le premier ministre, il me dit : Ah! non, j'ai une réponse. Au niveau de la santé, ça fait partie du 3,6 milliards. Donc, moi, j'étais parti, j'avais pris 3,6 milliards, j'ai dit : 3,6 milliards moins 200 millions. Mettons que c'est 200 millions, parce que moi, je n'y crois pas. J'ai été au Trésor, effectivement, puis quiconque qui aurait été au Trésor ou dans un ministère plus que deux semaines aurait conclu que ça ne peut pas être 200 millions. Mais je le prends au mot, donc je modifie, je suis rendu à 3,4. Mais non! je ne peux même pas faire ça. Dans le document, je constate qu'en dehors du 3,6 milliards on a mis un montant qui est «Modifications à l'organisation et [...] la gouvernance du réseau de la santé et des services sociaux et adoption des meilleures pratiques» : 200 millions. Donc, on revient à 3,6 milliards, finalement. Mauvaise réponse. S'il y avait eu un buzzer, il aurait eu «mauvaise réponse».

Et là je tiens à montrer au premier ministre qu'on a posé une question relativement simple. On rit, mais ce n'est pas toujours drôle, mais, rendus à cette heure-là, on peut en rire, effectivement. «Pour tous les programmes [des ministères], donner le détail des crédits existant en [2014] qui n'ont pas été reconduits en 2015‑2016, en incluant les programmes qui ont été abolis.» Et regardez la réponse qu'on a eue de tout le monde — je le montre parce que c'est comme ça partout : c'est une page blanche, il n'y a rien. Alors, il ne devait pas y en avoir, j'imagine. Donc là, je pose la question au premier ministre, donc : Qu'est-ce qui représente 3,6 milliards? Là, je n'ai pas de réponse. Alors, moi, je peux tirer plusieurs conclusions de la réponse du premier ministre. C'est que son 7 274 000 000 $, c'est de la poudre aux yeux, c'est de la poudre aux yeux, et, par son absence de réponse, il l'a démontré aujourd'hui, parce qu'on ne peut pas avoir le détail de 3,6 milliards de dollars, M. le Président. Je n'ai eu aucun exemple. Et le seul qu'il m'a donné était inclus dans ceux qui étaient détaillés. Et je pourrais lui dire, M. le Président, que son 200 millions, il est contestable. Je pourrais même lui dire en plus que, quand il parlait d'un trou budgétaire de 7 274 000 000 $, il y avait évidemment sa nouvelle contribution en santé, en oubliant de dire que nous, on avait budgété, M. le Président, finalement une augmentation de tarifs, parce que nous, on avait dit aux gens qu'il allait y avoir une augmentation de 1 $ la première année dans les garderies. On l'avait dit aux gens. Mais là il l'a oublié, hein? Donc, dans son 7,2 milliards, ça ne tient plus non plus, mais, vous savez, c'est seulement 125 millions. Dans les faits, c'est un tout petit chiffre.

Moi, je lui ai donné l'occasion... et il nous dit ça à satiété : Il y a 7,2 milliards. Je lui ai posé une question à 3,6 milliards et je n'ai pas eu de réponse. Alors, je vais demander au premier ministre : Quelle crédibilité aura-t-il après ça de parler de 7,2 milliards? Peut-être que son objectif, M. le Président... et je l'entends beaucoup, il répète à satiété : Nous devons diminuer la taille de l'État. Ça, ça m'étonne toujours. D'ailleurs, le Conseil du trésor avait à l'époque, il y a un an, après que je sois parti, comme objectif de nous ramener à la moyenne canadienne, phrase qui ne se retrouve plus dans les documents du Conseil du trésor. Au moins, nos derniers crédits ont eu cet effet-là. Ce n'était pas très vendeur de nous ramener sur la moyenne canadienne. Mais je le mets en garde. Avoir comme objectif de diminuer la taille de l'État, M. le Président, c'est tout un débat. Est-ce qu'on devrait grossir ou diminuer la taille de l'État? Beau débat. Débat stérile.

L'idée est de savoir qu'est-ce qu'on fait des impôts, quels services on se donne, quels sont les impacts des services qu'on se donne sur l'égalité des chances, sur notre réussite collective? Ça, c'est des vraies questions, et j'invite le premier ministre à les poser et de poser les questions à son président du Conseil du trésor peut-être pour demain en Chambre : 3,6 milliards, peux-tu me le détailler au moins... pas à la cent près, au moins à la centaine de millions?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Je vous remercie, M. le chef de l'opposition. Ça met un terme à ce bloc d'échange. Il y a du temps si les collègues du côté gouvernemental acceptent du céder du temps pour une réponse au premier ministre, et je pense que la réponse est unanimement oui.

M. Couillard : Merci. Alors, M. le Président, il y a eu des gens qui ont dit pendant des siècles que la terre était plate, que la terre était le centre de l'univers, que le soleil tournait autour de la terre. Il y a des gens aujourd'hui qui disent que les changements climatiques, ça n'existe pas puis l'évolution n'est pas sûre. Alors, quand il dit que le 7 274 000 000 $, c'est de la poudre aux yeux, il vient dire au Vérificateur général du Québec qu'il a envoyé de la poudre aux yeux et il vient dire à Godbout, Montmarquette que c'est des amateurs puis qu'ils ne savent pas compter.

Le problème, c'est que les chiffres balancent, M. le Président, et je vais l'inviter à lire la page A.48 du document budgétaire. Alors, on va tous les prendre un par un.

Des voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : S'il vous plaît!

M. Couillard : 7 274 000 000 $ : contribution des ministères et organismes, qui seront détaillées dans les différents crédits, 2 406 000 000 $; contribution des sociétés d'État et organismes publics, 172 millions; contrôle de la rémunération par le gel global des effectifs, 500; limiter les facteurs liés aux dépenses de rémunération, 689; étalement de la rémunération des médecins, 194; suspension des bonis au personnel de direction et d'encadrement, 42; suspension de la réserve pour besoins additionnels, malheureusement, 200 millions; modifications à l'organisation de la gouvernance du réseau de la santé et adoption des meilleures pratiques, 205 millions; pacte fiscal transitoire avec les municipalités, 300 millions; utilisation de la provision pour éventualités, 200 millions; efforts incorporés au budget de dépenses 2015‑2016, 1 187 000 000 $. On est rendus à 84 %.

Maintenant, «mesures relatives aux entreprises» : abolition ou suspension de mesures fiscales annoncées depuis septembre 2012, 56 millions; réduction de 20 % du taux des crédits d'impôt, 270 millions; introduction de seuils de dépenses minimales admissibles aux crédits d'impôt R&D, 58 millions; abolition du taux réduit de la taxe sur le capital des sociétés d'assurance applicable aux primes d'assurance de personnes, 128 millions; surtaxe temporaire pour les institutions financières, 125 millions; autres mesures relatives aux entreprises, 49 millions. Sous-total : 686 millions. On a rajouté un 9 %, on est rendus à 93 %.

Mais continuons. Révision du financement des services de garde, 193 millions; réduction de 20 % à 10 % du taux de conversion des crédits d'impôt pour cotisations syndicales et professionnelles, 112 millions; abolition du taux réduit de la taxe sur les primes d'assurance automobile, 116 millions; autres mesures relatives aux particuliers, 72. Vous remarquez que les particuliers, c'est 7 % de l'effort; 93 %, dans le domaine des dépenses de l'État et des dépenses fiscales, ce qui arrive, M. le Président, à 7 274 000 000 $. Quod erat demonstrandum : Ce qu'il fallait démontrer. Voilà.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre. M. le député de D'Arcy-McGee, à vous la parole.

• (22 h 20) •

M. Birnbaum : Merci, M. le Président. On dit souvent, et à juste titre, à mon avis, que la meilleure façon d'évaluer la qualité et l'intégrité d'un gouvernement est par la façon qu'il veille aux besoins des plus vulnérables de notre société.

Nous avons parlé beaucoup, et à juste titre aussi, de l'équilibre budgétaire, de la relance économique. Il me semble que c'est de mise de nous rappeler que la raison pourquoi on parle de tout ça, c'est pour avoir en main des outils pour veiller à nos plus vulnérables. Alors, si on est en train de remettre, comme ça a l'air du côté de l'opposition, la pertinence même de garder nos promesses en ce qui a trait à l'atteinte du budget équilibré, il me faut poser la question : Comment l'opposition proposerait de sauvegarder les services aux plus démunis de notre société? Dans ce contexte, j'aimerais nous inviter de parler un petit peu des mesures de Plan d'action interministériel en itinérance de 2015‑2020. L'itinérance se caractérise par l'absence ou l'impossibilité d'avoir un chez-soi, un lieu où on se sent bien et protégé, un lieu où soit on est chez soi, reconnu par les autres, où l'on retourne pour se reposer, pour se retrouver dans l'intimité. Ce lieu, c'est le domicile. Ne pas avoir de domicile, être sans adresse fixe ou dans les conditions de logement très instables, c'est être sans lieu à soi, sans chez-soi. Personne ne mérite d'être exclu.

L'itinérance peut être situationnelle, cyclique ou chronique, mais elle est surtout la résultante de plusieurs phénomènes complexes dont les conséquences sont bien réelles pour ceux et celles qui la vivent. Souvent, lorsqu'on pense au phénomène de l'itinérance au Québec, on associe plus facilement cette réalité aux hommes.

Toutefois, j'ai lu moi-même dans le Premier portrait sur l'itinérance, qui a été rendu public en décembre dernier, que le visage de l'itinérance semble changer. En effet, on remarque un nouveau phénomène qui prend de l'ampleur : on dénombre davantage de femmes et d'autochtones qui vivent en situation d'itinérance ou qui sont à risque de le devenir. Toutefois, dans ce même document, on constate également que l'itinérance n'est plus seulement l'affaire des grandes métropoles telles que Montréal mais qu'il s'agit d'un phénomène qui se vit également dans certaines régions du Québec, à titre d'exemple en Mauricie et au Centre-du-Québec, dont le taux d'occupation des lits d'urgence en 2013‑2014 était de 91,3 %, comparativement à 68,8 % pour l'ensemble du Québec. En 2013‑2014, la maison d'hébergement pour femmes de cette région présentait un taux d'occupation de 124,7 %, comparativement à 82,6 % pour l'ensemble du Québec. Pour la même année, en Abitibi-Témiscamingue, les ressources en hébergement d'urgence présentaient un taux d'occupation de 45,5 %.

À la lumière de ces données, on remarque toute l'importance de la mise en place de services adaptés dans nos régions. En effet, pour combattre l'itinérance, il faut bâtir des partenariats encore plus solides afin de répondre adéquatement aux besoins des gens les plus vulnérables de notre société. L'État québécois, ses partenaires et tous les citoyens ont leur rôle à jouer. Nous partageons donc une responsabilité collective, soit celle de prévenir l'itinérance et de démontrer qu'il est possible de s'en sortir. Et, pour y arriver, il est important d'unir nos forces, ce qui m'amène à poser une question au premier ministre là-dessus.

Le Plan d'action interministériel en itinérance 2015‑2020 est très complet et comprend énormément de mesures. Est-il possible de nous expliquer celles-ci de façon plus concrète, notamment en regard des nouveaux problèmes vécus?

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. M. le premier ministre, à vous la parole.

M. Couillard : Alors, M. le Président, merci pour la question. Notre collègue est toujours préoccupé par les questions sociales, questions des personnes vulnérables, et on reconnaît la pertinence de son intervention.

Alors, effectivement, le Plan d'action interministériel en itinérance 2015‑2020 s'inscrit dans la continuité, il faut le dire, dans la continuité des nombreux efforts déployés au fil des ans au Québec en matière de lutte à l'itinérance. On se souvient qu'en 2009 la Commission de la santé et des services sociaux s'était penchée sur le sujet et avait émis 33 recommandations. Il y a eu le plan d'action interministériel 2010‑2013, qui a été reconduit en 2013‑2014 et en 2014‑2015, puis la politique de lutte à l'itinérance en février 2014, et on vient de rendre public le plan d'action interministériel 2015‑2020, dans lequel le gouvernement s'engage à poursuivre les investissements annuels de plus de 8,1 millions de dollars. À cela se sont ajoutés 4,6 millions récurrents provenant de sommes réaménagées dans le réseau de la santé et des services sociaux. De plus, 2,1 millions non récurrents ont été prévus pour le financement particulier des projets spéciaux : développement d'un outil de repérage, élaboration de guides de bonnes pratiques, formation, etc.

Notre gouvernement a également confirmé dans le dernier budget 2014‑2015 que 500 des 3 000 nouveaux logements sociaux seront réservés pour la clientèle itinérante ou celle à risque de le devenir. Il s'agit d'un investissement de 42 millions. Donc, c'est un effort important dans le contexte budgétaire actuel, et ça démontre la volonté du gouvernement de soutenir les personnes les plus vulnérables de la société.

Le plan a été élaboré en collaboration avec plusieurs ministères et organismes, dont la Société d'habitation du Québec, les ministères des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire, de la Justice, Sécurité publique, Emploi et Solidarité sociale, l'Éducation, l'Immigration et les Communautés culturelles, les secrétariats à la jeunesse, aux affaires autochtones, le ministre de la Santé et des Services sociaux. Il y a des grands enjeux comme le logement, les services de santé et de services sociaux, le revenu, l'éducation, l'insertion sociale, la cohabitation sociale, les enjeux liés à la judiciarisation, la recherche et la formation. Il y a également, M. le Président, une forte approche préventive en proposant des mesures à mettre en place dès l'enfance, et celui-ci suit le cheminement de la vie. À titre d'exemple, le plan d'action prévoit des mesures spécifiques pour les jeunes afin d'aider les élèves des milieux défavorisés vers la réussite scolaire, pour offrir des méthodes alternatives de formation, de raccrochage et d'insertion en emploi pour les jeunes en difficulté et pour assurer une bonne transition après le passage en centre jeunesse; pour les femmes, un rehaussement du financement des refuges pour femmes à Montréal de 300 000 $ récurrents, notamment pour le Pavillon Patricia Mackenzie, Le Chaînon, La Rue des femmes, et 105 000 $ récurrents pour le refuge de jour Chez Doris, ce centre de jour offrant des services notamment aux femmes autochtones, qui a annoncé sa réouverture les fins de semaine le 6 février dernier. Ainsi, les femmes auront accès à six lits de répit, à des douches, des vêtements d'urgence, des produits d'hygiène et des sacs de nourriture d'urgence.

Pour les villes comme Montréal, où le phénomène d'itinérance est plus important, des mesures particulières se retrouvent dans le plan d'action. Pour les régions, ce sont 82 000 $ qui sont alloués pour la bonification et la consolidation du financement de la ressource d'hébergement d'urgence La Piaule, de Val-d'Or; 150 500 $ pour l'organisme Transit Sept-Îles; 178 300 $ pour l'Équipe Itinérance Trois-Rivières.

On a tendance souvent à penser que les problèmes sont exclusivement concentrés dans les villes, mais ceci est une réalité régionale qui évolue, comme on le sait. On constate que certaines de nos régions vivent maintenant ce phénomène, et l'implication des villes et des municipalités est importante dans la lutte à l'itinérance. C'est pourquoi des services de proximité doivent être également mis en place dans les régions du Québec. L'objectif est de faciliter l'accessibilité à des services adaptés aux besoins des personnes, et ce, dans leurs régions. On le sait, tous les acteurs impliqués dans la lutte à l'itinérance doivent se mobiliser autour d'un objectif commun. Cela est également le cas pour la ville de Montréal, qui est confrontée, bien sûr, à un volume plus important. Je salue d'ailleurs la mobilisation de la ville de Montréal dans le dossier. On partage les mêmes préoccupations. Des discussions pourront avoir lieu dans le cadre des travaux de la table Québec-Montréal sur le statut particulier, d'ailleurs, de la métropole. Des travaux sont en cours. Le plan d'action prévoit des mesures ciblées pour les problématiques récentes dont il a été question un peu plus tôt.

Comme vous pouvez le constater, M. le Président, les différentes mesures ont pour objectif de nous donner collectivement, grâce à la mobilisation de tous, les moyens d'agir pour prévenir et sortir de la rue ceux qui s'y trouvent. On propose une approche globale, cohérente et durable qui est centrée sur le parcours de vie des personnes. C'est un problème, l'itinérance, qui fait partie de nos priorités, et je souhaite que tous les acteurs concernés travaillent de concert autour d'une même vision, et ce, afin de réduire et de prévenir l'itinérance.

Je pensais passer aux remerciements, M. le Président. Est-ce que le temps me le permet ou...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Oui. Peut-être, on peut aller aux remerciements, parce qu'on va manquer de temps pour compléter le bloc du côté du gouvernement. Et j'ai compris qu'il y avait unanimité pour refuser de prolonger nos travaux au-delà de l'heure. Donc, ça va mettre un terme au bloc de questions du gouvernement, si j'ai bien compris. Alors, oui, M. le premier ministre, vous pouvez.

M. Couillard : Bien, je vais, de la même façon que j'ai débuté, commencer par vous remercier, M. le Président, pour la direction de nos travaux, le personnel de la commission, le personnel de la fonction publique, qui a patiemment entendu nos délibérations pendant les dernières heures, et, bien sûr, mes collègues députés ministériels mais également les collègues de l'opposition et de la deuxième opposition, la députée de Gouin, qui est également venue participer à nos discussions.

J'ai trouvé que le ton, M. le Président, vous en conviendrez, a été correct. Il y a eu bien sûr, parfois, un peu de tension partisane, mais on a gardé ça, je pense, à un niveau tout à fait correct, et les échanges ont été de qualité. Je regrette cependant qu'on n'ait pas pu étudier en détail les crédits du ministère du Conseil exécutif. Ils auraient été fort intéressants à discuter, mais on pourra, demain, prendre la relève avec peut-être un peu de Conseil exécutif, mais surtout le Secrétariat à la jeunesse, où je retrouve mon collègue qu'on va retrouver demain pour parler du Secrétariat à la jeunesse avec beaucoup d'intérêt.

Donc, encore une fois, un exercice important qui se complète dans tous les ministères du gouvernement au cours des prochains jours, des prochaines semaines. Je remercie les collègues de leur temps. Et, malheureusement, le Canadien a perdu, mais ils auront l'occasion de se reprendre. Merci, M. le Président.

Adoption des crédits des programmes 1 et 2

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Merci, M. le premier ministre.

Alors, étape importante. Le temps alloué à l'étude du volet Conseil exécutif des crédits budgétaires du portefeuille Conseil exécutif étant écoulé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix des crédits.

Le programme 1, Cabinet du lieutenant-gouverneur, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Une voix : Sur division.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Adopté sur division.

Le programme 2, Service de soutien auprès du premier ministre et du Conseil exécutif, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Une voix : Sur division.

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Adopté sur division.

Alors, en terminant, vu l'heure, je remercie, moi aussi, M. le premier ministre, M. le chef de la deuxième opposition, M. le chef de l'opposition officielle. Merci aux membres de la commission, merci...

Une voix : ...

Le Président (M. Ouimet, Fabre) : Pardon? Non, il n'y avait que deux programmes ce soir. Les autres, c'est demain. Voilà. Alors, merci à tout le monde. Je vous remercie. Effectivement, à la Commission des institutions, on a quand même une réputation à préserver.

Sur ce, je lève la séance, et les travaux de la commission sont ajournés au jeudi 23 avril 2015, après les affaires courantes. Merci, et bonne fin de soirée à tous.

(Fin de la séance à 22 h 30)

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