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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Thursday, August 25, 2016 - Vol. 44 N° 137

Special consultations and public hearings on Bill 98, An Act to amend various legislation mainly with respect to admission to professions and the governance of the professional system


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Table des matières

Auditions (suite)

Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (Ordre des CRHA)

Ordre des comptables professionnels agréés du Québec (Ordre des CPA du Québec)

Commission des partenaires du marché du travail (CPMT)

Ordre des dentistes du Québec (ODQ)

Ordre des optométristes du Québec (OOQ)

Ordre professionnel des diététistes du Québec (OPDQ)

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

Ordre des évaluateurs agréés du Québec (OEAQ)

Intervenants

M. Guy Ouellette, président

Mme Stéphanie Vallée

Mme Mireille Jean

M. Simon Jolin-Barrette

Mme Diane Lamarre  

*          M. Richard Blain, Ordre des CRHA

*          Mme Manon Poirier, idem

*          Mme Édith Rondeau, idem

*          M. André Dugal, Ordre des CPA du Québec

*          Mme Christiane Brizard, idem

*          M. Florent Francoeur, CPMT

*          M. Barry Dolman, ODQ

*          Mme Caroline Daoust, idem

*          M. Langis Michaud, OOQ

*          M. Marco Laverdière, idem

*          Mme Paule Bernier, OPDQ

*          Mme Ann Payne, idem

*          Mme Sarah Thibodeau, idem

*          M. Gérard Guay, CNQ

*          Mme Nancy Chamberland, idem

*          M. Raphaël Amabili-Rivet, idem

*          M. Richard Lahaye, OEAQ

*          Mme Céline Viau, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Dix heures dix-huit minutes)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des institutions ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Boucher (Ungava) est remplacé par M. Giguère (Saint-Maurice); M. Merlini (La Prairie) est remplacé par M. Auger (Champlain); M. Leclair (Beauharnois) est remplacé par Mme Lamarre (Taillon); et Mme Maltais (Taschereau) est remplacée par Mme Jean (Chicoutimi).

Auditions (suite)

Le Président (M. Ouellette) : Nous entendrons cet avant-midi les organismes suivants : l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec et la Commission des partenaires du marché du travail.

Dans un premier temps, je souhaite la bienvenue aux collègues, le député de Beauharnois, Mme la députée de Taillon, Mme la députée de Chicoutimi. C'est toujours agréable de voir des petits nouveaux à notre commission aussi, qu'on ne voit pas souvent.

Une voix : ...

Le Président (M. Ouellette) : Pardon? Je le sais, que ce n'est pas Beauharnois. Ça fait que c'est toujours très agréable. Mme la ministre, toujours un plaisir de vous retrouver.

Nous recevons maintenant l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés. M. Richard Blain, qui est le président du conseil d'administration, vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Et par la suite il y aura une période de questions avec Mme la ministre et les critiques de... c'est-à-dire les personnes responsables des dossiers aux deux oppositions. M. Blain, à vous la parole.

Ordre des conseillers en ressources humaines
agréés (Ordre des CRHA)

M. Blain (Richard) : Merci beaucoup, M. le Président. Mme la ministre, chers députés, mesdames et messieurs. Je remercie la commission de nous donner l'opportunité de présenter le point de vue de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés sur le projet de loi n° 98.

Alors, je suis Richard Blain, CRHA, président du conseil d'administration. Je suis accompagné, ici, à ma droite, de Me Manon Poirier, CRHA, directrice générale de l'ordre, et, à ma gauche, Me Édith Rondeau, secrétaire de l'ordre et directrice des affaires juridiques.

• (10 h 20) •

Créé en 1973, lors de l'adoption du Code des professions, l'ordre constitue la référence au Québec en matière de gestion des ressources humaines et des relations industrielles. L'ordre est le seul organisme au Québec à décerner les titres de conseillers en ressources humaines agréés, CRHA, et de conseillers en relations industrielles agréés, CRIA, qui attestent de la compétence des membres. Comme corollaire et pour assurer la protection du public, qui est sa mission première, l'ordre contrôle l'exercice de la profession et veille constamment à l'amélioration de la qualité de la pratique de ses membres.

Le projet de loi n° 98 interpelle doublement l'ordre. D'une part, il touche le fonctionnement des ordres professionnels, et, d'autre part, puisque... les CRHA et les CRIA sont régulièrement appelés à mettre à profit leurs compétences et leur expertise sur des questions portant sur la gouvernance. En effet, la mise en oeuvre des politiques, procédures, processus, contrôles liés à la gouvernance, à la stratégie et à la gestion des risques et les conseils y afférents constitue un champ d'intervention au coeur de la fonction des ressources humaines. Les CRHA et les CRIA interviennent stratégiquement au niveau du design organisationnel, notamment dans la définition des rôles et responsabilités et dans le processus décisionnel, ainsi qu'au niveau des mécanismes de collaboration et de coordination des organisations dans le but d'en assurer le meilleur fonctionnement.

L'ordre salue toute mesure visant à améliorer la gouvernance du système professionnel, et le projet de loi n° 98 s'inscrit dans ce sens. Une saine gouvernance est nécessaire, à plus forte raison considérant la mission fondamentale du système professionnel, soit d'assurer la protection du public. Nous sommes d'avis que plusieurs modifications vont en effet contribuer à l'amélioration du système professionnel québécois. Nous avons cependant quelques réserves sur certaines d'entre elles. Le but principal de notre mémoire est de partager notre position, notamment en proposant certains amendements. Je limiterai mon intervention d'aujourd'hui à vous présenter le point de vue de l'ordre sur les dispositions concernant la gouvernance des ordres professionnels ainsi que la réussite d'une formation en éthique et en déontologie.

Alors, concernant la gouvernance des ordres professionnels, l'ordre approuve le droit de surveillance générale du président sur les affaires du conseil d'administration afin d'en assurer la meilleure performance. Le projet de loi détaille aussi les règlements applicables au conseil d'administration lui-même. À cet égard, l'ordre approuve plusieurs des modifications proposées. Nous sommes d'accord avec la surveillance générale des affaires de l'ordre par le conseil d'administration, puisqu'il s'agit d'une saine pratique de gouvernance. Également, l'ordre ne peut que saluer l'ajout d'une formation en matière de gouvernance pour les membres du conseil d'administration et l'adoption d'un code d'éthique à leur égard. En effet, en raison de la mission particulière des ordres professionnels, il est encore plus important que les administrateurs soient assujettis aux plus hautes normes de conduite. D'ailleurs, l'ordre a déjà implanté un code d'éthique à l'usage des membres du conseil d'administration, ce qui permet de prévenir des situations potentiellement problématiques et, au président, d'intervenir, le cas échéant.

Nos réserves sont plutôt en rapport avec la composition du conseil d'administration. Ainsi, le projet de loi prévoit la possibilité que le conseil d'administration soit composé d'un nombre pair d'administrateurs, si on y inclut le président. Nous pensons qu'un nombre impair serait préférable, de manière à éviter de recourir au vote prépondérant du président en cas d'égalité.

Nous aimerions souligner un oubli qui nous semble d'importance dans le projet de loi. En effet, nulle part il n'est fait mention de la présence des femmes et des personnes des groupes minoritaires au sein des conseils d'administration. Or, les conseils d'administration doivent refléter une réelle diversité des perspectives, laquelle ne se limite pas à la représentativité des jeunes professionnels, mais inclut également les femmes et les personnes issues de groupes minoritaires. Nous pensons qu'il faudrait établir des mesures incitatives pour assurer la présence de ces groupes au sein des conseils d'administration des ordres.

Quant aux administrateurs nommés par l'Office des professions, nous sommes favorables à l'augmentation du seuil minimum, et ce, même au-delà du 25 % proposé par le projet de loi. Toutefois, nous aimerions qu'il soit précisé que la nomination des administrateurs soit faite en fonction de leurs compétences spécifiques et de la nécessité d'avoir une diversité et une complémentarité des compétences au sein des conseils d'administration. En effet, puisque les administrateurs élus sont issus de professions homogènes, une plus grande variété de compétences des administrateurs nommés viendrait bonifier l'expertise du conseil d'administration dans le but de mieux réaliser sa mission.

Également, l'ordre approuve l'ajout du directeur général au Code des professions. Nous sommes d'avis que, peu importe la taille de l'ordre, ce poste est un incontournable. Chaque ordre professionnel doit nommer un directeur général. Celui-ci doit s'assurer de l'administration générale et courante des affaires de l'ordre et du suivi des décisions du conseil d'administration. Il voit aussi à la bonne planification et organisation des ressources humaines, financières, matérielles et informationnelles de l'ordre. Notre seule réserve est en rapport avec sa destitution. Le projet de loi prévoit qu'un vote des deux tiers des membres du conseil d'administration est requis pour destituer le directeur général de ses fonctions. L'ordre désapprouve cette modification. Nous sommes d'avis que la destitution du directeur général doit se décider à la majorité simple des membres du conseil d'administration.

Concernant la réussite d'une formation en éthique et en déontologie par les membres, l'ordre salue l'insertion de cette mesure. La protection du public requiert la maîtrise par les membres de leurs responsabilités et obligations professionnelles et déontologiques. Nous considérons toutefois qu'une telle formation doit être suivie sur une base régulière par les membres. À cet effet, l'ordre a déjà mis en place plusieurs mécanismes, dont une formation obligatoire en déontologie à tous les trois ans.

En terminant, je vous ai présenté nos recommandations concernant la gouvernance d'un conseil d'administration, mais, au total, l'ordre formule 11 recommandations, que vous retrouvez à la page 17 de notre mémoire. Ces recommandations portent sur la gouvernance, la réussite d'une formation en éthique et en déontologie ainsi que sur certains mécanismes disciplinaires. Selon nous, ces changements favoriseront une saine gouvernance du système professionnel et participeront à la protection du public.

Alors, je vous remercie de votre attention, et c'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup. Merci, M. Blain, de votre participation aux travaux de la commission. On a eu la chance d'échanger un peu plus tôt cet été sur votre perception du projet de loi.

J'aimerais, dans un premier temps, vous entendre concernant... disons, si on aborde la question de la gouvernance, vous amenez une recommandation différente. On a eu des échanges avec de nombreux groupes depuis le début de la semaine, et, pour vous, les administrateurs nommés doivent avoir un champ de compétence complémentaire au reste des membres du conseil d'administration qui ont été élus. On a des groupes qui nous ont approchés cette semaine et nous ont abordés en disant : Bien, vous savez, les membres du public sont là pour représenter le public, sont là pour protéger le public et, en conséquence, ils ne devraient pas être choisis en raison d'une compétence professionnelle, mais plutôt en raison du fait qu'ils sont des représentants du public, donc, en ce sens, plus à même d'assurer la protection du public. Et un groupe est allé jusqu'à nous proposer qu'à l'intérieur des administrateurs nommés il y ait un tiers issu du public et même un tiers issu d'associations de consommateurs.

Donc, je voulais avoir votre perception de cette proposition qui nous a été formulée. Je comprends que, pour vous... Puis, au sein de votre ordre, vous avez des professionnels issus de divers milieux, donc probablement qu'au sein de votre ordre vous avez un choix de compétences déjà assez variées, ce qui n'est pas le fait de tous les ordres, mais qu'est-ce que vous pensez de cette proposition-là puis comment vous la percevez?

• (10 h 30) •

M. Blain (Richard) : Bien, je dirais ma réponse en différents volets. Le premier élément sur lequel j'aimerais intervenir, c'est que je ne vois pas le rôle de protection du public comme étant le seul apanage des membres du public. Au contraire, la protection du public, c'est la responsabilité de l'ensemble des membres du conseil d'administration. Donc, à partir de ce point de vue là, si l'ensemble des membres du conseil d'administration sont responsables de la protection du public, alors quel est le rôle spécifique qu'on va faire jouer aux membres, justement, qui viennent du public?

Mais, même si, comme vous l'avez dit, chez les CRHA et CRIA, on a quand même une certaine diversité de compétences, on ne couvre pas tous les champs de compétence non plus. Alors, dans ce sens-là, puisque nos postes, évidemment comme la plupart des ordres, sont électifs, ça serait une bonne chose de pallier à la diversité ou au manque de compétences justement par la nomination des membres du public.

En ce qui a trait à la... sur le tiers des membres qui pourraient être venus du public, dans notre recommandation, on est d'accord avec le 25 %, mais je veux aussi mentionner qu'on serait tout à fait en faveur d'augmenter ce chiffre-là au tiers, aucune objection à ça.

Mme Vallée : Pour votre proposition qui... votre suggestion de bonification de mesures... d'ajout de mesures incitatives pour assurer la représentation de la diversité au sein des conseils d'administration, de la parité hommes-femmes, la présence des jeunes, comment les mesures incitatives auxquelles vous avez fait référence pourraient, dans... pourraient être mises en oeuvre? De quel genre de mesures incitatives il devrait être question? Qu'est-ce qui devrait être prévu dans le code en tant que tel? Parce qu'on s'entend que des mesures incitatives, ce n'est pas nécessairement prévu à une disposition du code. Vous l'aviez vu de quelle façon, cette recommandation?

M. Blain (Richard) : En fait, la raison pour laquelle l'ordre des CRHA et CRIA est sensible à la diversité, c'est que nous, notre profession, on intervient beaucoup dans la diversité des entreprises, hein? Alors, je vois un peu ça... C'est un peu le même parallèle, parce que les entreprises vont être les plus efficaces, vont être les plus innovantes et vont être à même de se renouveler davantage s'il y a une plus grande diversité de points de vue et de compétences en leur sein.

Maintenant, de la même façon qu'on le fait au sein des entreprises pour assurer la diversité, on va inciter, on va... puis on va établir certains critères aussi de compétence puis on va inciter nos membres à prendre en considération, par exemple, lorsqu'ils vont faire leurs votes, certains critères de diversité. Alors, ça, ça peut être une des mesures qui seraient incitatives.

Mme Vallée : Donc, vous ne voyez pas nécessaire que des postes électifs soient ouverts en fonction d'une qualité ou d'une qualification x ou y. Parce que, parmi les groupes qui se sont succédé, une des suggestions était d'avoir... soit de l'inclure à l'intérieur du collège électoral ou d'identifier des postes au conseil d'administration, avoir un poste qui doit nécessairement être comblé par un membre ayant une qualification x ou y. Alors, vous ne le voyez pas nécessairement comme ça, vous le voyez d'une façon moins contraignante, plus ouverte?

M. Blain (Richard) : Oui. Dans un premier temps, je pense qu'on pourrait avoir des mesures davantage incitatives. Dans certains cas, peut-être qu'il vaudrait la peine d'avoir certains postes réservés. C'est le cas dans notre ordre professionnel, où on a un poste, par exemple, réservé pour les membres du milieu syndical, parce qu'ils étaient sous-représentés, et aussi un membre du milieu universitaire, parce qu'ils étaient aussi sous-représentés. Mais je pense qu'il faut y aller en fonction de chaque cas particulier. Je pense que, dans un premier temps, des mesures incitatives pourraient contribuer à avoir une plus large complémentarité des compétences.

Mme Vallée : O.K. Vous savez, le projet de loi n° 98, ça a été le fruit de maintes consultations, il y a quand même beaucoup de travail qui s'est fait en amont par l'office auprès des ordres, auprès du CIQ, auprès de différents organismes. Et je sais que... Bon, j'ai pris connaissance de votre mémoire, qui mentionne peu de choses, là, au sujet du commissaire aux admissions puis du pôle, outre le fait que vous indiquez que vous n'êtes pas convaincus que la création du commissaire à l'admission va être la solution. Mais, en novembre dernier, il y a eu des consultations, votre ordre s'est exprimé en faveur de l'élargissement des compétences du commissaire, puis, à ce moment-là, l'ordre mentionnait que l'élargissement allait permettre d'enquêter, de vérifier de façon un peu plus précise les processus d'admission en regardant les différents mécanismes qui mènent à l'adhésion. Moi, je regarde le texte de 98, c'est un petit peu comme ça que je le constate... que je le considère, c'est-à-dire que les nouvelles responsabilités du commissaire, ils sont dans cette lignée-là des responsabilités qu'il a actuellement, mais on l'élargit à l'ensemble de l'admission. Alors, je voulais comprendre un petit peu le changement de cap dans la position de l'ordre.

Parce que, comme je vous le mentionnais, nous, on n'a pas sorti des idées d'un chapeau. Je sais qu'elles ont fait l'objet de discussion. Parfois, certains avaient d'ores et déjà en novembre inscrit leur désaccord, mais d'autres organismes, dont votre ordre, mentionnaient que ça pouvait être intéressant, là, d'élargir les pouvoirs du commissaire. C'est que je voulais voir en quoi le texte actuel ne correspondait pas à ce que vous aviez formulé à l'époque comme recommandations.

M. Blain (Richard) : En fait, notre principale préoccupation, c'est une préoccupation d'efficacité. Donc, la dimension de l'admission et du commissaire à l'admission, c'est une réalité qui nous touche assez peu parce qu'on n'a pas des grandes... on n'a pas, comme ordre, des grandes problématiques à ce niveau-là. Donc, c'est pour ça que nos recommandations d'aujourd'hui vont plutôt dans le sens à une plus grande efficacité du système pour avoir les meilleurs résultats.

Puis je ne sais pas si, Manon, tu veux ajouter quelque chose à ce sujet-là.

Mme Poirier (Manon) : Oui. Si je peux me permettre, en fait, bien que je n'étais pas là en novembre, je pense que la position de l'ordre ou la compréhension de l'ordre sur l'élargissement des pouvoirs demeurait toujours pour les candidats hors Québec. Je pense que l'élément nouveau pour nous, c'était l'élargissement des pouvoirs du commissaire aux candidats formés au Québec. Et j'ai eu la chance de vous entendre dans les dernières journées, et la compréhension qu'on en a maintenant, c'est l'élargissement du pouvoir pour donner un processus aux gens aussi qui sont formés au Québec.

Sur le principe, c'est sûr que c'est difficile d'être en désaccord avec un principe d'équité d'accès à un mécanisme d'appel, mais il existe déjà. Donc, c'est sûr que, pour les candidats qui sont formés au Québec, donc, bien sûr, les gens qui accèdent directement, étant donné leur formation, ce n'est pas là qu'il y a des enjeux, c'est vraiment pour les parcours qui sont plus atypiques. Donc, il y a le comité des équivalences de l'ordre qui va se pencher sur le dossier et prendre la décision. Si un candidat n'est pas satisfait de la décision de l'ordre, il existe le comité de révision déjà au sein des ordres. Donc, il y a déjà un mécanisme d'appel.

Et, pour nous... Je comprends, j'ai... On a entendu que l'intention, c'était de permettre au commissaire de voir le processus et non le fond. Bien humblement, on pense que c'est un peu utopique de penser qu'un commissaire va se limiter au processus, parce que, si le commissaire se limite à voir si le processus a été respecté, il va simplement voir si effectivement le comité des équivalences a fait son travail et le comité de révision a fait son travail par la suite. Donc, selon nous, dans les faits, très concrètement, le commissaire va devoir se prononcer sur le fond, et un commissaire ne peut pas être un expert et de pouvoir porter un jugement ou une décision pour l'ensemble des professions, donc il devra faire appel à des ressources. Mais, fondamentalement, l'admission des gens aux professions devrait demeurer au sein de l'ordre respectif.

• (10 h 40) •

Mme Vallée : Mais il ne s'agit pas d'un mécanisme d'appel. C'est ça qui semble être l'interprétation qui est incorrecte. C'est vraiment... Le rôle du commissaire, c'est un mécanisme d'analyse, en fait, pas mécanisme d'appel. Puis il a un pouvoir de recommandation qui... par l'institutionnalisation du pôle et la mise autour d'une même table de l'ensemble des acteurs qui ont, d'une façon ou d'une autre, un rôle à jouer dans ce processus-là, à quelque part, dans les étapes, une possibilité d'intervenir. Donc, ce n'est pas un processus d'appel auprès de l'ordre qui est créé, mais bien un processus d'analyse et un pouvoir de recommandation qui permet aux différents acteurs impliqués dans cette démarche d'apporter, le cas échéant, des modifications à certaines réalités qui comportent des enjeux ou des problématiques.

Puis ça interpelle aussi le gouvernement, là, parce qu'il y a, dans tout ce cheminement-là, puis on le sait, de nombreux acteurs, et l'objectif, c'est d'avoir une cohérence, de cesser de se lancer la balle et d'arriver à assurer un parcours qui sera plus fluide, sans pour autant sacrifier, évidemment, la protection du public. Parce que ça, ça demeure l'élément, l'objectif premier, et ce n'est pas de permettre à quelqu'un qui n'a pas les compétences d'accéder à une profession, ce n'est pas du tout l'objectif. Mais quelqu'un qui a les compétences et qui a le bagage nécessaire devrait pouvoir accéder sans trop d'embûches, c'est... Et le commissaire va pouvoir porter un regard sur ça et s'assurer que, peu importe la provenance du candidat, les processus vont être objectifs et vont permettre aux candidats qualifiés d'aller... d'accéder aux ordres, évidemment dans la mesure où ils respectent les paramètres, là. Il n'est pas question d'assouplir pour assouplir et il n'est pas question d'en appeler, ce n'est pas un appel, c'est vraiment un processus, comment améliorer et bonifier tout ça.

Et puis, pour ce qui est des compétences, je vous dirais, on a fait un parallèle avec la Protectrice du citoyen. On a un bel exemple. La Protectrice du citoyen regarde l'ensemble de l'action gouvernementale, et il n'y a personne qui questionne sa capacité de le faire. Alors, je pense qu'avec... lorsque l'objectif est d'analyser un processus, ça... je pense qu'on a... Et le processus fait déjà l'objet d'une analyse pour les candidats venant de l'extérieur. Donc, les connaissances du commissaire sont déjà là.

Mme Poirier (Manon) : Je pense que... juste, en fait, de préciser, je pense que la mécompréhension ou l'inquiétude qui provient des ordres, c'est quand un... Nous, on regarde strictement la portion qui nous concerne, parce que vous parlez de l'ensemble des acteurs, mais, la portion qui nous concerne, pour les candidats qui viennent du Québec, le processus est relativement simple. Donc, on s'interroge vraiment sur la valeur ajoutée de regarder un processus qui est plus simple vraiment que les gens qui viennent hors du Québec. Puis on était tous d'accord avec la création de ce poste-là à l'époque.

Mme Vallée : Si le processus est simple puis ne pose pas de problème, vous ne devriez pas vous préoccuper, il ne sera pas... il ne fera pas l'objet de recommandations de la part du commissaire.

Mme Poirier (Manon) : Probablement, si vraiment il s'en tient au processus, mais je pense que vous avez entendu plusieurs ordres qui craignent qu'on doive aller sur le fond plutôt que sur la forme.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Poirier. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bienvenue à vous tous, M. Blain, Mme Poirier et Mme Rondeau. Merci d'être ici ce matin pour nous exprimer votre vision sur le projet de loi n° 98.

Dans votre document, vous abordez le sujet de l'immunité pour la dénonciation. Naturellement, le projet de loi, ce qu'on en comprend, c'est pour pouvoir favoriser justement la dénonciation d'actes répréhensibles, pour être capable après ça de pouvoir porter les gestes que l'ordre doit porter. La loi propose une immunité à ceux qui dénonceraient justement de tels agissements répréhensibles. Ce que j'ai compris, c'est que vous, vous n'êtes pas contre le fait de faire une immunité, mais vous demandez à ce que... garder le droit à l'ordre de poursuivre ou non la personne qui aurait dénoncé. Est-ce que j'ai bien compris votre... c'est vraiment la réserve que vous désirez faire, et, si oui, pourquoi vous désirez conserver cette réserve-là?

M. Blain (Richard) : Mais, en fait, oui, effectivement, vous avez bien saisi l'essence de notre proposition. Bien, c'est déjà une disposition qui existe actuellement. Donc, je pense que le fait de systématiser ou de... l'aspect de l'immunité nous semblait un peu inapproprié, compte tenu que la possibilité de le faire est existante aujourd'hui. Alors, ce qu'on préférait, c'est que ça puisse... que la pratique actuelle puisse se poursuivre aujourd'hui, dans des cas exceptionnels, mais que chacun ait à faire face à ses obligations s'il y a eu des actes répréhensibles ou quoi que ce soit. Est-ce que ça répond bien à votre question?

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi. Vous comprenez que, ce matin, nous avons de la compagnie. On est en construction. Ça fait que... Est-ce que la réponse de M. Blain vous satisfait, Mme la députée de Chicoutimi?

Mme Jean : J'irais peut-être un peu plus loin sur le sujet. Je ne suis pas familière avec le processus actuel. Je comprends qu'on veut permettre l'immunité des personnes sans pouvoir se faire poursuivre eux-mêmes. Donc, vous, vous dites : Oui, ça serait possible, mais on aimerait pouvoir garder le droit de pouvoir poursuivre. Dans quelles conditions, par exemple?

Le Président (M. Ouellette) : M. Blain.

M. Blain (Richard) : Bien, s'il n'y a pas de... Ça serait dans des cas exceptionnels où on pourrait garder l'immunité. Ce serait toujours une possibilité. Mais je n'en ferais pas une règle générale, là.

Mme Jean : Donc, l'immunité serait dans les cas exceptionnels. C'est ça que vous voulez dire. À ce moment-là, comment une personne se sentirait à l'aise de dénoncer s'il ne sait pas qu'il peut être poursuivi ou non par l'ordre ou par d'autres personnes? Donc, il demeure une incertitude par rapport à celui qui veut dénoncer, parce qu'il ne le sait pas. Donc, vu que l'objectif, c'est de le rassurer : Viens dénoncer, il y a pas de danger, en empêchant de le mettre automatiquement, bien, vous ne pensez pas qu'on risque de décourager certaines personnes qui sont au fait d'actes répréhensibles et qu'ils ne le diraient pas?

M. Blain (Richard) : En fait, selon le code de déontologie, toute personne qui est témoin d'un acte répréhensible devrait avoir à... devrait le dénoncer. Donc, dans ce sens-là, je pense que les gens devraient faire face à la musique puis prendre leurs responsabilités, là.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : D'accord. Vous avez un commentaire intéressant... Il me reste?

Une voix : Six minutes.

Mme Jean : O.K. Vous avez un commentaire intéressant concernant la représentativité. Oui, vous êtes ouverts au fait qu'on puisse caractériser des postes ou qu'on puisse donner des préférences aux jeunes, aux jeunes arrivés dans la profession, et vous incluez ça aussi au niveau des femmes et peut-être d'autres groupes. Très sensible à votre proposition. Dans la formulation, avez-vous déjà pensé à des méthodes qui favoriseraient ça? La question a déjà peut-être été posée, mais j'aimerais ça avoir du détail de comment vous verriez ça. Parce que, la difficulté, souvent des gens disent : Oui, mais, vu que c'est des postes électifs, comment on peut le faire? Avez-vous une petite idée là-dessus, de comment on pourrait faire?

M. Blain (Richard) : Bien, écoutez, par des mesures incitatives dont peut-être j'ai brossé un portrait tantôt, soit en incitant... en sensibilisant les membres votant sur les profils recherchés, sur les compétences recherchées, sur l'ensemble de la diversité de nos membres et aussi la population qui est desservie. Ça, ça peut être une façon. En allant sensibiliser certains groupes en particulier, aussi. Évidemment, si on n'a qu'un certain type de représentativité sur la liste électorale, c'est dans ce groupe-là que les gens vont être amenés à voter. Mais il y a peut-être du travail en amont à faire auprès de certains groupes qui ne se présentent pas suffisamment comme candidats. Alors, c'est sûr que, s'ils ne se présentent pas, ils ne peuvent pas être élus non plus. Donc, ça, ça fait partie des mesures, là, incitatives qui pourraient être mises en place par chacun des ordres.

Mme Jean : Est-ce que vous pensez qu'une mesure du type le conseil ou les... du conseil d'administration qui n'est pas en renouvellement pourrait se permettre ou pourrait faire des sollicitations ciblées justement pour certains groupes qui sont sous-représentés à un conseil d'administration?

M. Blain (Richard) : Bien, des sollicitations, des incitations, tout à fait, oui.

Mme Jean : Parfait. Une autre question d'un autre ordre d'idées. Vous parlez de la formation, donc vous êtes d'accord avec la formation en éthique et en déontologie, et vous l'avez déjà appliquée vous-mêmes. Et vous dites, vous allez plus loin : Ça devrait être récurrent. Et vous, vous le faites aux trois ans. J'imagine que vous avez évalué pourquoi le trois ans. Et ma question est : Est-ce que, selon vous, il faut que la formation soit suivie ou on demande à ce que la formation soit réussie? Faites-vous une distinction à ces deux critères-là?

• (10 h 50) •

M. Blain (Richard) : Oui. Bien, de un, oui, la formation, il faut qu'elle soit récurrente, parce que l'éthique, ça évolue, d'une part, et on est souvent soumis à des situations avec lesquelles on peut s'habituer. Donc, c'est important de se rappeler les règles d'éthique, dans ce cas-ci, et de déontologie. Donc, d'où l'importance de la récurrence. Alors, on a choisi trois ans. Il n'est pas dit que, dans les prochaines années, on n'ira pas vers une fréquence plus régulière que trois ans.

Il y a aussi le type de formation qu'il faut regarder. Il y a la durée de la formation, etc. Donc, il y a plusieurs critères. Pour nous, c'est une formation obligatoire pour maintenir son titre professionnel.

Mme Jean : Mais je ne me souviens pas... Je n'ai pas compris si elle doit être réussie ou juste suivie.

M. Blain (Richard) : Elle doit être réussie, si ma mémoire est bonne.

Mme Poirier (Manon) : Elle doit être suivie, puis il y a des questions, mais il n'y a pas nécessairement un barème où on doit atteindre... Donc, techniquement, elle doit être suivie.

Mme Jean : Suivie, ça se limite à être suivie, donc...

M. Blain (Richard) : Mais, comme il y a des questions, et tout ça, lorsque les questions sont moins réussies, évidemment, il y a un support à la formation tutoriel pour ramener certains concepts, et tout ça. Donc, on pense que, même si... lorsque la formation est suivie, à la fin de la formation, les gens vont avoir retenu les concepts importants.

Mme Jean : Merci. C'est plus clair comme ça. Merci. Dernière question, il nous reste une minute et des poussières. Concernant le dossier ou le sujet du commissaire à l'admission et le pôle de coordination, ce que je comprends dans votre mémoire ou dans votre commentaire, c'est que vous êtes... vous vous référez ou vous êtes d'accord avec la proposition du CIQ, qui proposerait un pôle... un comité multisectoriel qui étudierait la situation, justement, au niveau de l'admissibilité ou des problématiques au niveau de l'admissibilité. Est-ce que je comprends bien?

M. Blain (Richard) : Oui, exact. On pense que ça pourrait être... c'est un mécanisme qui existe déjà, qui pourrait être plus adapté à l'objectif poursuivi.

Mme Jean : Plus adapté...

M. Blain (Richard) : Maintenant, l'objectif, nous sommes tout à fait en accord avec l'objectif. C'est plutôt sur les moyens, de rendre les moyens les plus... prendre les moyens les plus efficaces et les moins lourds administrativement pour y arriver.

Mme Jean : Donc, moi, je comprends qu'un comité comme ça, multisectoriel, qui implique l'ensemble des acteurs, que... on comprend que ce n'est pas quelque chose de simple. On nous a expliqué depuis quelques jours comment on peut se lancer la balle d'un ministère à l'autre ou d'une institution à l'autre sur la problématique en question, et une table de concertation et de coordination pourrait avoir son mot à dire ou son utilité. Je me disais : Est-ce que d'avoir une personne comme le commissaire à l'admission qui, lui, irait un peu plus loin pour amasser de l'information sur la vue d'ensemble et d'amener justement à la table de concertation ou de coordination cette analyse-là sur le terrain, ce qu'une table ne peut pas faire... est-ce que c'est quelque chose quand même auquel vous êtes ouvert ou auquel vous trouvez une certaine pertinence?

M. Blain (Richard) : En fait, dans notre mémoire, on n'a pas dit qu'on était contre l'idée. L'objectif poursuivi — on est tout à fait d'accord avec cet objectif-là — c'est principalement de trouver le meilleur moyen pour y arriver. Si, à la suite de tous les mémoires que vous aurez entendus ici, en commission parlementaire, les parlementaires trouveront que c'est la meilleure façon d'y arriver, l'ordre ne s'opposera pas à ça, au contraire.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bon matin. M. Blain, Mme Poirier, Me Rondeau, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre contribution aux travaux.

D'entrée de jeu, j'aimerais qu'on revienne sur la question de l'immunité. Vous en avez discuté avec les collègues. Pages 12 et 13 de votre mémoire, donc, vous dites : On souhaite que le pouvoir, dans le fond, qui est introduit à 123.9 soit retiré. Quand on lit la disposition, on voit que le syndic, la disposition qui est proposée, là, par le projet de loi, on voit que le syndic aurait certains critères à respecter avant d'accorder l'immunité. Vous trouvez que ce n'est pas assez balisé, ces pouvoirs-là?

M. Blain (Richard) : Manon, est-ce que tu veux formuler une réponse à...

Mme Poirier (Manon) : Oui. Bien, en fait, la recommandation qu'on faisait, c'est, donc, pour nous : on devrait retirer... Je comprends l'intention, l'objectif qu'on puisse dénoncer, mais ça semble beaucoup, de renoncer au processus disciplinaire, pour les gens qui sont concernés. On était aussi préoccupés par le fait que le syndic, suivant les mesures, puisse prendre sa décision. Et notre recommandation, c'est, si on doit le maintenir, ça devrait être le conseil de discipline qui prenne cette décision-là et non pas le syndic, un individu, on préférerait que ce soit un comité de personnes qui prenne la décision.

M. Jolin-Barrette : Puis, dans ce processus-là, au niveau du conseil de discipline, au niveau de la mécanique, comment vous voyez ça? Parce que, bon, le syndic, c'est au moment où il évalue s'il dépose une plainte, et là le conseil de discipline, lui, est uniquement saisi à partir du moment où il y a une plainte qui est déposée. Donc, vous laisseriez l'appréciation, à la fin de l'audition, au conseil de discipline de dire : On vous accorde l'immunité en fonction de votre collaboration ou, au niveau de la peine, dans le fond, on vous déclare coupable puis...

Mme Poirier (Manon) : Oui, c'est ça. Donc, encore une fois, on comprend bien l'intention puis, si on avait une suggestion pour permettre la dénonciation, et tout ça, autre que celle qui est proposée, on le ferait avec plaisir. Ça fait qu'on comprend que c'est une question complexe, mais effectivement le syndic devrait aviser la personne plaignante qu'il n'est pas de son ressort de lui donner l'immunité. Il ferait enquête, et, s'il y a lieu de déposer une plainte, à ce moment-là le conseil pourra décider si, oui ou non, il y aura des mesures face à l'individu.

M. Jolin-Barrette : O.K. Parce que moi, je le vois dans une perspective, au niveau du syndic, de lui donner une certaine liberté pour dire, bon, afin de... dans le processus, dans le cheminement afin de s'assurer que, dans le fond, les autres membres de la profession ne puissent pas reproduire puis dénoncer la situation, ça, c'est une chose. Le fait d'accorder au Directeur des poursuites criminelles et pénales le pouvoir de dire : Mais, écoutez, il ne sera pas poursuivi en discipline, puis le syndic n'aura pas son mot à dire, c'est deux choses. Mais je trouve votre proposition intéressante, de venir baliser puis de peut-être donner à une autre instance que la décision du syndic soit validée. Ceci étant dit, il va falloir s'assurer aussi qu'il y ait des garanties d'indépendance là-dessus.

Peut-être au niveau également de la suspension temporaire, la radiation temporaire, si je peux dire, qui est introduite aussi, vous, ce que vous proposez, à la recommandation 11, là, c'est d'avoir... que le professionnel soit suspendu si l'infraction punissable de cinq ans d'emprisonnement a un lien avec l'infraction. Est-ce que vous pouvez nous expliquer un petit peu votre position sur ce point-là?

M. Blain (Richard) : Manon, veux-tu continuer?

Mme Poirier (Manon) : Oui. En fait, on estime... Parce que ce qui est soulevé, c'est quand même un droit fondamental, donc, à la base, et on a entendu nos collègues du Barreau qui avaient une autre optique sur la chose, mais c'est quand même un droit fondamental, la présomption d'innocence. Mais, si on doit permettre de suspendre, il faudrait que l'infraction ait un lien avec l'exercice de la profession. Donc, par exemple, une fraude majeure d'un niveau fiscal, par exemple, qui serait passible d'emprisonnement, pour un dentiste, est-ce qu'il y a un lien? Est-ce que la personne a vraiment... perd sa compétence ou la capacité... un lien de confiance avec le public, comme dentiste — je prends l'exemple d'un dentiste — si c'est une fraude de nature autre, qui n'a pas de lien avec l'exercice de la profession?

On comprendra que, pour toutes les professions de la santé ou encore même tous les crimes contre la personne, il y aurait certainement un lien avec la profession. Donc, on suggère de rajouter cet élément-là pour bien circonscrire, parce qu'à la base on vient quand même d'aller à l'encontre d'un droit quand même fondamental, qui est la présomption d'innocence.

M. Jolin-Barrette : Sur la question du délai de suspension temporaire ou de suspension provisoire, dans le fond, c'est un premier trois mois puis un deuxième trois mois qui peut être renouvelé, est-ce que vous êtes à l'aise avec ces délais-là, si on limite uniquement avec les activités ayant un lien avec la profession ou les crimes ayant un lien avec l'activité de la profession, sur le délai de six mois que le syndic aurait pour mener son enquête?

M. Blain (Richard) : ...pas sur le délai tant que sur le respect du droit fondamental par rapport aux liens de la faute avec l'exercice de la profession.

M. Jolin-Barrette : Sur la question du commissaire aux plaintes, on élargit son champ d'action, est-ce que vous avez déjà eu, à l'ordre, des cas de candidats qui ont étudié au Québec qui n'ont pas pu accéder à la profession, des cas qui seraient désormais couverts par le commissaire aux plaintes? Est-ce que c'est arrivé dans l'historique de l'ordre?

Mme Poirier (Manon) : Je vais laisser ma collègue répondre. Me Rondeau.

Mme Rondeau(Édith) : En fait, dans la nature de la profession, il y a beaucoup de gens qui sont formés au Québec qui ont une formation différente. Donc, depuis plusieurs années, on a développé des outils pour les évaluer. Donc, comme on l'a mentionné, ce n'est pas nécessairement une problématique pour nous, si les gens ont un certain minimum, on a un comité qui évalue ces personnes-là, effectivement, elles vont pouvoir être admises à l'ordre, suivant certaines conditions.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que c'est arrivé que certaines personnes soient refusées par l'ordre? Est-ce qu'ils ont fait appel au mécanisme déjà en place, d'aller soit au conseil d'administration? Est-ce que ça arrive souvent que les gens ne puissent pas obtenir le permis de pratique?

Mme Rondeau (Édith) : Ce n'est pas nécessairement fréquent. Lorsque les gens ne l'obtiendront pas, c'est qu'ils ne respectent pas les conditions. Puis c'est vraiment... c'est vu par un comité d'équivalence, puis il y a la possibilité que la personne demande la révision de ces décisions-là par un comité qui est formé par le conseil d'administration.

• (11 heures) •

M. Jolin-Barrette : Puis est-ce que vous...

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas. C'est tout le temps que nous avons ce matin. Merci, Me Rondeau, Me Poirier et M. Richard Blain, président du conseil d'administration de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés, d'être venus nous visiter ce matin.

Je vais suspendre quelques minutes. Je vais demander à l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec de bien vouloir s'avancer.

(Suspension de la séance à 11 h 1)

(Reprise à 11 h 4)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec. M. André Dugal, qui est le président du conseil d'administration, c'est vous qui allez faire la présentation, M. Dugal? Et vous avez 10 minutes, et après il va y avoir une période d'échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. À vous la parole.

Ordre des comptables professionnels agréés
du Québec (Ordre des CPA du Québec)

M. Dugal (André) : Alors, M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les membres de la commission, bonjour. Je suis accompagné ce matin de Me Christiane Brizard, qui est secrétaire et vice-présidente à l'ordre et s'occupe des affaires juridiques à l'Ordre des CPA du Québec.

Alors, au nom de l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec, je tiens tout d'abord à vous remercier de nous donner l'occasion de partager avec vous les résultats de nos réflexions. C'est l'occasion pour nous de contribuer à sa bonification, du projet de loi n° 98, dans un esprit, là, d'ouverture et de collaboration.

Dans la foulée de l'unification de la profession de comptable, qui regroupe aujourd'hui 38 000 membres, l'Ordre des CPA a mis en place, il y a quatre ans, de nouvelles façons de faire et une nouvelle gouvernance, et nous avons d'ailleurs travaillé étroitement avec l'Office des professions et le gouvernement. Je me réjouis donc de constater que l'approche proposée par le projet à l'étude s'inscrit en droite ligne avec les règles que nous avons nous-mêmes instaurées. Je pourrai revenir en détail, lors de la période de questions, sur le cadre de gouvernance que nous avons adopté, mais, mis à part quelques bonifications que nous proposons dans notre mémoire, cette modification ou modernisation nous apparaît comme vraiment un bon coup.

Je souligne tout particulièrement notre accord avec l'obligation des membres des conseils d'administration des ordres d'adhérer à des normes d'éthique et de déontologie, sous réserve, par contre, que les ordres doivent avoir l'agilité pour leur permettre de répondre aux besoins particuliers des ordres en adoptant des normes d'éthique et de déontologie par résolution du conseil d'administration, plutôt que par règlement, leur permettant évidemment d'avoir beaucoup plus d'agilité. Nous appuyons également la modification visant à confier au conseil d'administration le rôle de surveillance générale des affaires de l'ordre. Et bien sûr nous sommes plus que favorables à l'obligation qui serait faite à tous les professionnels de suivre une formation minimale en éthique et en déontologie.

Je me dois maintenant d'aborder certains points qui constituent, selon nous, les plus sérieuses lacunes du projet de loi ou du moins les interrogations que nous avons à cet égard. Parlons d'abord de l'élargissement du rôle du commissaire aux plaintes. Le commissaire soutient que l'élargissement de ses pouvoirs à l'ensemble du processus d'admission est nécessaire. Comme l'a fait valoir mardi la présidente du Conseil interprofessionnel, nous sommes d'avis que cette proposition ne répond à aucune problématique documentée et qu'elle n'est soutenue par aucune donnée probante ni argumentaire tangible nous ayant été communiqué. Ça a été pour nous comme une surprise lorsque cette section est arrivée dans le projet de loi. Je dois ajouter que cette proposition fait double emploi avec les processus existants en ce qu'il la rend inutile et inefficace, surtout dans un contexte de rareté des ressources.

L'admission aux professions, autant en ce qui concerne le contenu que le processus d'admission, est un pouvoir délégué par l'État aux ordres professionnels depuis 40 ans, et c'est l'un des outils dont ils disposent pour s'acquitter de leur mission de protection du public. Les tribunaux ont même reconnu aux ordres le statut d'instance spécialisée détenant une compétence d'attribution exclusive en matière d'admission. À défaut d'intention claire énoncée, on peut se demander pourquoi l'admission aux professions, dans un sens large, devrait être soumise à un contrôle supplémentaire. Déjà, les règlements des ordres doivent avoir l'approbation de l'office et du gouvernement, à certains égards, après consultation des ministères et des organismes impliqués. De plus, leurs décisions sont sujettes au contrôle des tribunaux de droit commun et à d'autres organismes.

L'Ordre des CPA ne remet pas du tout en question l'objectif visé par la proposition, dans la mesure où il s'agit bien de favoriser l'intégration des personnes ayant été formées à l'étranger. Mais le projet va plus loin en englobant le processus d'admission dans son ensemble, qui, lui, vise une tout autre cible, soit les personnes formées au Québec. Autrement dit, les nouveaux pouvoirs du commissaire chevaucheraient ceux du gouvernement et de l'office, du ministère de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur de même que d'autres ministères associés de près ou de loin à la problématique d'intégration. Si le commissaire estime que des obstacles systémiques compromettent l'accès des personnes formées à l'étranger à certaines professions, nous sommes, pour notre part, convaincus qu'il dispose déjà des leviers nécessaires pour faire un diagnostic, faire les recommandations et suivre l'application de ses recommandations.

• (11 h 10) •

Nous croyons fermement que l'heure est à l'action, et non pas à une vigie bureaucratique supplémentaire. C'est une vision qui s'inscrit parfaitement dans la volonté du gouvernement d'en arriver à un meilleur arrimage entre les besoins du Québec en matière de main-d'oeuvre et la contribution des nouveaux arrivants. Par conséquent, au lieu d'institutionnaliser le pôle de coordination, nous misons bien davantage sur le comité interministériel sur les reconnaissances des compétences des personnes immigrantes, relevant du MIDI, qui devrait avoir un statut permanent. L'accent doit être mis sur les mécanismes qui permettent de faire connaître et d'encourager le partage des meilleures pratiques entre les différents intervenants et entre les ordres. Comme d'autres, la profession comptable a fait des avancées concrètes en faveur d'une intégration des professionnels formés à l'étranger, et je vais être heureux de vous expliquer les avantages et l'expérience que nous avons à cet égard-là lors de la période de questions.

L'ordre appuie la proposition qui autoriserait des échanges de renseignements entre syndics. Il est cependant évident que le Code des professions devrait prévoir une exception au secret professionnel dans ce contexte, sans quoi une telle disposition serait vide de sens, puisque pratiquement tout ce qui fait l'objet d'une enquête du syndic est protégé par le secret professionnel. Nous soutenons également que la communication entre syndics devrait être autorisée, nonobstant le secret professionnel, et ce, sans exception. En effet, si deux des principaux joueurs que sont les avocats et les notaires ne participent pas à l'échange d'information, la disposition législative proposée ne sera qu'une façade et sans effet réel.

Quelques mots maintenant sur notre opposition au principe même de suspension ou d'une limitation provisoire en cas de poursuite pour une infraction grave. À sa face même, ce mécanisme semble en fait bafouer certains droits fondamentaux, principalement la présomption d'innocence et le droit à une défense pleine et entière. De plus, l'article 38 du projet de loi n° 107, déposé en juin, propose de faire en sorte qu'un professionnel témoin dans une affaire qui est entre les mains du DPCP pourra, si l'intérêt de la justice le requiert, signer une entente de collaboration et ainsi se soustraire de la plainte portée contre lui devant le conseil de discipline de son ordre professionnel.

Si je résume, d'un côté, le simple dépôt d'une poursuite contre un professionnel le priverait automatiquement d'exercer sa profession pendant 120 jours, alors que, de l'autre côté, son confrère témoin, collaborateur et complice d'un acte criminel verrait la plainte déposée contre lui devant le conseil de discipline retirée, l'habilitant ainsi à continuer d'exercer sa profession. Ces deux mesures sont à nos yeux inconciliables, et c'est la raison pour laquelle nous avons demandé le retrait de l'article 61 du projet de loi. Dans la mesure où le lien entre l'infraction criminelle et l'exercice de la profession est fait et établi, l'ordre estime disposer actuellement des outils nécessaires pour empêcher le professionnel d'exercer ses activités professionnelles lorsque la protection du public l'exige.

Enfin, nous pensons que cette réforme du Code des professions devrait faire une plus grande place aux mécanismes de reddition de comptes des ordres, et en conséquence la nécessité pour l'Office des professions de se doter de meilleurs indicateurs de performance pour réaliser ses objectifs de protection du public. Dans le contexte de l'actualité des derniers mois dans l'univers professionnel, la mise en place d'indicateurs nous semble urgente pour permettre à l'office de suivre la performance des ordres et mesurer l'efficacité de leurs processus pour assurer la protection du public.

Alors, je vous remercie du temps que vous nous avez donné pour vous présenter les principaux points de notre mémoire, et nous sommes évidemment disponibles à répondre à vos questions et discuter avec vous.

Le Président (M. Ouellette) : Je suis sûr que vous avez pratiqué parce que tomber plus pile que ça, ce n'est pas arrivé encore depuis le début. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup. Merci, M. Dugal. Merci, Me Brizard, de votre présence aux travaux de la commission.

Plusieurs questions. Dans un premier temps, vous... on va aborder plutôt la question de la gouvernance des ordres. L'une de vos recommandations est à l'effet que la destitution du directeur général ne soit pas assujettie au vote des deux tiers des membres du C.A., et l'objectif de l'article, c'est de maintenir une certaine stabilité, là, au sein de l'organisation puis assurer aussi le bon fonctionnement, là, de l'aspect administratif, du volet administratif d'une organisation. Pour vous, quelles seraient les règles qui devraient régir la destitution d'un directeur général, d'une directrice générale? Comment... si vous n'êtes pas d'accord avec ce qui est proposé, quelles seraient les règles qui devraient être clairement définies pour éviter qu'il y ait une façon de fonctionner, un fonctionnement différent d'un ordre à l'autre et qu'on laisse la discrétion au conseil?

M. Dugal (André) : Alors, selon nous, il y a deux postes, dans l'ordre, qui demandent une protection supplémentaire de protection du public, il y a le syndic et le secrétaire de l'ordre. Alors, ces deux postes-là, nous sommes d'avis que, pour destituer les gens qui ont ces fonctions-là, il doit y avoir un mécanisme beaucoup plus rigoureux, comme par exemple d'avoir le vote du conseil d'administration aux deux tiers. Par contre, le poste de directeur général ou de chef des opérations n'a pas ce statut-là de protection du public aussi fort que le syndic et le secrétaire. Lui est responsable des opérations de l'ordre. Il s'assure qu'il y a un lien entre les orientations stratégiques qui sont définies au conseil d'administration et l'exécution par l'ordre. Alors, lui n'a pas cette protection ou ne doit pas nécessairement avoir cette protection supplémentaire que le syndic et la secrétaire doivent avoir.

Mme Vallée : Mais il existe dans certains ordres des cumuls de postes de directeur général et de secrétaire, vous en convenez?

M. Dugal (André) : Dans ce contexte-là, nous, ce qu'on propose, dans le fond, c'est que la destitution du directeur général puisse se faire au vote du conseil d'administration à 50 % plus un, et, dans la situation où le directeur général est aussi secrétaire, bien, à ce moment-là, on prend le plus haut des deux, qui est le deux tiers.

Mme Vallée : On a eu, hier, comme recommandation, notamment... bien, en fait, de la Fédération des chambres de commerce du Québec, une recommandation à l'effet de modifier l'article 23 du code pour prévoir que l'unique mission des ordres professionnels est la protection du public. J'aimerais vous entendre sur cette recommandation.

M. Dugal (André) : Bien, la question à se poser, c'est : Est-ce que le changement de mots dans la loi va changer effectivement ce qui est fait dans la réalité? C'est bien défini dans le Code des professions que l'objectif des ordres, c'est la protection du public. Et toutes les actions qui sont faites sont liées à ça.

Par contre, il ne faut pas oublier que, dans le cadre de cet objectif de protection du public, il y a des activités limitrophes qui contribuent à protéger le public et qui doivent être faites et qui sont faites par les différents ordres professionnels. Alors, maintenant, de limiter strictement et uniquement... de changer le mot strictement à la protection du public, ce qui risque d'arriver, c'est qu'il y ait d'autres organismes alentour qui vont rendre des services soit aux membres ou qui vont adresser des problématiques particulières qui ne sont pas directement liées à la protection du public... dans le sens que les ordres professionnels font beaucoup d'activités qui contribuent à la protection du public, et le principal objectif, c'est la protection du public. Mais il y a quand même une nuance. Des fois, il y a des choses qui contribuent à la protection du public indirectement.

Mme Vallée : Mais je vous posais la question parce que, dans la réponse à ma question précédente, vous disiez : Le directeur général intervient dans plusieurs champs... a plusieurs champs d'intervention, alors que le syndic et le secrétaire sont principalement dédiés à la protection du public. Alors, c'est pour ça, c'est ce qui m'a amenée à vous poser la question. Parce qu'on a eu cette recommandation qui était de modifier le terme «principalement» par «exclusif».

Également, il y a, dans... Vous avez abordé la question de la reddition de comptes. Qu'est-ce que vous croyez de cette proposition de rendre publics, que ce soit à travers le rapport annuel d'un ordre, les salaires des dirigeants de l'ordre?

• (11 h 20) •

M. Dugal (André) : Bien, la question à se poser, c'est : Qu'est-ce que ça va apporter de plus à la protection du public? On sait que, les sociétés publiques au Canada ou au Québec, les hauts dirigeants des sociétés publiques, il y a une obligation de divulgation si la société, elle est cotée. On n'a pas particulièrement d'objection à le faire dans la mesure où on met un barème, c'est-à-dire qu'on met une fourchette, plutôt que d'indiquer spécifiquement les salaires des individus.

Mme Vallée : Vous avez apporté une vision qui est un petit peu différente sur la question de l'augmentation des seuils des amendes. C'est-à-dire qu'il y a dans le projet de loi une augmentation des seuils des amendes en matière de pratique illégale. Certains ont salué cette mesure-là, parce que les amendes n'étaient pas représentatives et n'étaient pas dissuasives dans certains domaines où la pratique illégale était quand même constatée. Vous mentionnez qu'il y a peut-être d'autres moyens, d'autres outils d'intervention en matière de pratique illégale. Est-ce que vous avez... Est-ce que vous pourriez partager avec nous un petit peu plus de détails sur les moyens qui sont discutés? Je sais notamment qu'il existe au sein du CIQ un comité qui se penche sur la pratique illégale. Est-ce qu'il y a d'autres pistes de solution ou d'autres méthodes qui pourraient être enchâssées au sein de notre Code des professions et qui pourraient peut-être amener à dissuader ceux et celles qui se lancent dans la pratique illégale?

M. Dugal (André) : Je vais répondre à la première partie de la question. Je vais demander à Me Brizard de compléter.

Ce qu'on trouve, c'est... Il faut que l'amende soit suffisamment dissuasive. Si on donne une fourchette d'amendes entre un montant qui est très bas, disons 5 000 $, et 60 000 $ ou 65 000 $, ce qu'on a observé en pratique, c'est : habituellement, les gens qui ont à prendre des décisions pour fixer le montant, ils prennent le bas de la fourchette. Ça fait que, dans le fond, ce n'est pas vraiment dissuasif. Même si la fourchette est plus grande, en pratique c'est très rare que les décisions vont être prises où est-ce que la personne qui prend la décision va donner le montant maximum. Alors, dans ce sens-là, on dit : Bien, ce n'est peut-être pas tout à fait assez dissuasif. Si on rétrécit la fourchette puis on la monte, peut-être que ça va être plus dissuasif.

Christiane, est-ce que tu avais d'autres choses à...

Mme Brizard (Christiane) : Oui. En fait, j'ai fait longtemps des dossiers de pratique illégale, je dirais que, oui, le premier problème, c'est que l'amende minimale... habituellement, le juge donne toujours l'amende minimale. Puis, en matière de récidive, la règle est très, très, très stricte. Ici, on n'entre pas dans le cadre de la récidive au sens de la loi. Même si, par exemple, on a quelqu'un qui a commis des infractions il y a cinq ans puis qui commet à nouveau des infractions, on n'est pas capable d'aller chercher une amende additionnelle, parce qu'on n'est pas dans une situation de récidive. Donc, il y a cette difficulté-là.

Il y a la difficulté aussi que... Écoutez, il y a des gens qui ont pignon sur rue et qui offrent des services qui sont des services réservés. Par exemple, au CPA, on va parler de l'avis au lecteur. Ils font beaucoup d'argent dans leur année, puis payer 5 000 $ d'amende, ça ne change absolument rien, c'est comme un passeport pour continuer. Pour réussir à les arrêter, ça nous prend une injonction. Pour réussir à avoir une injonction, il faut aller chercher une série d'autorisations au sens du Code des professions. Donc, il n'y a pas d'agilité pour agir rapidement. C'est la même chose au niveau du mandat de perquisition, c'est très compliqué d'aller chercher un mandat de perquisition. Donc, on doit trouver des façons autres, on doit alléger autre chose au sens du code pour être capables d'avoir les moyens d'agir rapidement.

Par ailleurs, il y a aussi toute... On devrait avoir la possibilité d'être capable d'avoir des engagements formalisés. Ça serait probablement plus intéressant que d'aller tout simplement en poursuite en pratique illégale, parce qu'il y a nécessairement des coûts associés à aller devant les tribunaux. Donc, il y a des moyens autres sur lesquels on doit travailler, et l'amende comme telle n'est peut-être pas la solution.

Finalement, j'ajouterais que l'autre difficulté, c'est que, quand il s'agit de percevoir l'amende, on a perdu le contrôle de ça. C'est transféré au gouvernement, au niveau de l'appareil gouvernemental, et donc, quand on fait un suivi à savoir si l'amende est perçue, c'est compliqué d'avoir l'information. Je ne suis pas nécessairement toujours convaincue qu'on agit rapidement pour aller chercher ces sous-là. On a vite tendance à offrir à la personne de faire des travaux communautaires, et je ne sais pas dans quelle mesure on surveille que ces travaux communautaires ont, de fait, été exécutés.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Donc... parce que j'essaie de revenir... Bon. L'une de vos recommandations, c'est de réduire la fourchette des amendes, parce que... pour éviter de se retrouver dans des situations où l'amende n'a pas son volet dissuasif. Lorsque vous parlez d'engagement formalisé, pourriez-vous développer davantage sur ça et sur d'autres moyens, parce que vous dites qu'il y a d'autres moyens? Est-ce qu'on peut élaborer sur ces autres moyens? Parce que la pratique illégale, elle est... elle va à l'encontre de la protection du public. Dans certains domaines, elle peut causer de grands torts, et, une fois le tort causé, bien, parfois ça devient difficile de remettre la pâte à dents dans le tube. Et il y a plusieurs autres professionnels, notamment dans le domaine de la santé, qui souhaitent des modifications apportées au code afin de les rendre plus en lien avec notre réalité, et de les ajuster en fonction des problématiques qui ont été vécues au cours des 40 dernières années.

Donc, c'est pour ça que je vous questionnais. Parce qu'on en a très peu parlé lors de nos travaux. On a parlé beaucoup de l'élargissement des pouvoirs du commissaire, mais ça, pour moi, je pense que, lorsqu'il est question de protection du public, c'est un enjeu dont il est important de discuter ici.

M. Dugal (André) : D'ailleurs, si vous me permettez de rajouter, il faut que ça soit assez dissuasif pour que, les personnes qui font, par exemple, de la pratique illégale, ça ne soit pas toujours les mêmes personnes qui se retrouvent au syndic puis qu'on... On a une population de gens qu'on voit souvent. Donc, c'est une indication que les amendes ne sont probablement pas assez élevées ou on n'a pas assez de moyens pour les empêcher de le faire.

Mme Brizard (Christiane) : Mais, pour répondre à votre question, au niveau de comment on pourrait aller chercher des engagements, ce qu'on devrait retrouver dans le code, c'est la possibilité... puis est-ce qu'il faudra regarder si c'est la Loi sur les actions pénales qu'il faut changer, je ne sais pas, je n'ai pas fait cette réflexion-là, mais la possibilité qu'une fois qu'une plainte est déposée on prévoie dans le code comment on peut aller chercher l'engagement de la personne à l'effet qu'elle ne pratiquera plus, l'engagement de la personne que, si elle continue à exercer la pratique illégale, peu importe quand, on a droit immédiatement à une injonction. Donc, ça serait prévu dans la loi que, dès qu'il y a eu une nouvelle infraction, peu importe si elle est similaire ou elle n'est pas similaire, il y a un automatisme à avoir droit à avoir une injonction puis, à ce moment-là, à interdire cette personne-là de pratiquer. Et l'injonction nous permet ensuite d'aller la citer à comparaître, si effectivement on fait fi de l'ordonnance d'injonction.

Donc, il faut qu'on ait des mécanismes qui permettent des automatismes, ce que l'on n'a pas à l'heure actuelle. Puis, même en matière d'injonction, c'est ce que je vous dis, le code, à l'heure actuelle, est très lourd. Quand est-ce qu'on peut aller chercher une injonction? Ça nous prend une récidive. Et quelles sont les autorisations qu'il faut aller chercher?

Et je sais qu'au niveau du CIQ il y a un comité qui réfléchit à ça et qui est après élaboré d'autres solutions. Il y a une avocate de chez nous qui est sur ce comité-là. Donc, il y a déjà des réflexions qui sont faites par un groupe d'ordres professionnels. Le Barreau, les comptables, les médecins, je pense, font également partie de ça. Donc, il y a une réflexion, il y a une concertation des ordres. Mais ça fait longtemps qu'on demande ces pouvoirs-là. Ça fait très longtemps.

Le Président (M. Ouellette) : Commentaire, Mme la ministre?

Mme Vallée : Merci. J'avais plein d'autres questions, mais c'est le temps qui nous manque.

Le Président (M. Ouellette) : O.K. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bonjour, M. Dugal et Mme Brizard. Bienvenue ici, à l'Assemblée nationale, et merci pour votre mémoire et les interventions que vous faites.

On a parlé du commissaire aux plaintes, qui deviendrait un commissaire à l'admission, et le pôle de coordination versus un comité multisectoriel qui serait proposé par le CIQ. Dans votre commentaire tout à l'heure, vous parliez que c'est l'idée de pouvoir trouver des obstacles... l'idée de base du projet de loi, c'est de pouvoir trouver des obstacles systémiques à l'admissibilité qui pourraient exister quelque part dans le système. Et vous avez mentionné qu'il existait déjà des... ça existe déjà, les procédures pour les identifier. J'aimerais ça que vous précisiez quels sont, selon vous, les organismes ou les procédures qui existent déjà pour pouvoir identifier les obstacles systémiques.

M. Dugal (André) : Bien, préciser la question au niveau des obstacles pour les problèmes systémiques?

Mme Jean : Pour l'admissibilité. Admissibilité.

• (11 h 30) •

M. Dugal (André) : Pour l'admissibilité. Bien, pour nous, l'accès à la profession pour des gens qui ont un profil atypique ou des immigrants, par exemple, c'est un processus qui est très important pour l'ordre pour la raison suivante : si on regarde la démographie au Québec et l'Ordre des CPA, c'est sûr que, dans quelques années, on va avoir un problème pour avoir suffisamment de CPA dans la profession si la source des CPA n'est que locale. Alors, on doit absolument intégrer dans le processus les personnes qui ont une expertise ou qui ont été formées à l'étranger puis qui viennent.

Alors, pour nous, c'est une réalité. On se doit de s'assurer que, les personnes qui ont la formation ou qui veulent entrer dans la profession et qui ont un parcours atypique, qui viennent de l'étranger, on ait un mécanisme pour le faire. Et l'Ordre des CPA, avec CPA Canada, on a, au cours des dernières années, en fait depuis les 20 ou les 30 dernières années, signé des accords de réciprocité avec 15 pays. Alors, quelqu'un qui a son titre de CPA ou l'équivalent dans un autre pays et qui fait partie des 15 pays pour lesquels on a signé un accord, il y a un accès à la profession beaucoup plus rapide qui est fait, et ça, c'est la réalité, ça fonctionne bien.

L'autre chose qu'on fait, c'est : lorsqu'un étranger veut venir au Québec et pratiquer l'exercice de la profession de CPA, on a des mécanismes qui leur permettent de rentrer dans le processus et de leur donner des outils pour qu'ils puissent exercer la profession assez rapidement. On a des processus, ce qu'on appelle des processus modulaires, où les gens qui ont une formation à l'étranger puis qui respectent certains critères peuvent suivre certains modules qui leur permettent d'accélérer le processus à l'admission, et, ces modules-là, certains d'entre eux peuvent être faits à distance. Donc, la personne qui est à l'étranger peut commencer à se préparer avant son arrivée au Québec.

Donc, ce qu'on dit, c'est qu'il y a beaucoup de bonnes pratiques qui sont faites dans les différentes professions. Le nombre de parcours atypiques ou d'immigrants va tenter à croître dans l'avenir, parce qu'on n'a pas le choix. Alors, il faut qu'on mette en place des mécanismes pour l'accélérer, ce processus-là. Alors, notre intervention, c'est de dire : Au lieu d'avoir quelqu'un qui va se mettre à... pour l'instant, qui aurait un rôle de vérification de ce qui se passe, regardons les problématiques actuelles, identifions les meilleures pratiques à travers les différents ordres et mettons-les en place le plus rapidement possible.

Mme Lamarre : M. le Président.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la députée de Taillon.

Mme Lamarre : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue, M. Dugal, Me Brizard. Oui, vous avez dans votre mémoire une position très ferme, très claire par rapport au rôle élargi, là, du commissaire à l'admission, et je vous avoue que, depuis deux jours et demi, là, on entend des gens... Il y a un principe en droit qui dit : Le législateur ne parle pas pour ne rien dire. Puis, avec beaucoup de respect pour la ministre, moi, je regarde... La ministre nous parle beaucoup qu'on va agir juste sur les processus. Or, ce que le projet de loi dit, il ne parle pas juste de processus, il parle de vérification, par ce nouveau, potentiel commissaire à l'admission, d'activité. Alors, le deuxième alinéa de l'article 16.10, qui décrit les activités de ce commissaire à l'admission : «Vérifier le fonctionnement de tout processus ou activité relatif à l'admission à une profession.» C'est très, très, très généreux, là, c'est très large. On retrouve ce même élément là à la page 8 du projet de loi, où on a encore : «Tout processus ou activité d'un ordre professionnel» et, à la page suivante, à la page 10 : «Le commissaire peut désigner toute personne pour effectuer l'enquête». Donc, on n'est pas juste dans une analyse de processus.

Moi, j'ai entendu aussi que la plupart des problèmes semblent graviter... Et je pense que le commissaire, actuellement, a une idée très précise des endroits... des obstacles systémiques ou des biais systémiques, et ça semble être souvent autour des stages. Vous, est-ce qu'il y a un problème de stages? Et, s'il y en avait un pour les comptables, comment ça se réglerait? Qu'est-ce que vous voyez comme options? Parce qu'il semble y avoir d'autres voies que cet élargissement du rôle au commissaire à l'admission.

Le Président (M. Ouellette) : M. Dugal.

M. Dugal (André) : Donc, en prévision de la problématique qu'on a, comme profession, de l'élargissement et de l'intégration des gens qui viennent de l'extérieur, on a mis en place au cours des dernières années différentes choses pour justement accélérer l'accès à la profession par les stages. Par exemple, dans le passé, pour avoir son titre de CPA, il fallait absolument faire un stage dans un cabinet comptable, il fallait faire de l'audit. La réalité, c'est que ce n'est pas tout le monde qui a le profil ou qui veut faire de l'audit. Et la profession comptable s'est élargie, surtout avec l'unification de la profession qu'on a faite il y a quatre ans, où maintenant on recherche des gens qui ont un profil différent, qui ont un profil en finance, qui ont un profil en fiscalité, et qui ne veulent pas faire de stage dans une firme comptable. Donc, on a ouvert la possibilité d'avoir des stages en entreprise pour justement permettre aux gens qui ne veulent pas aller vers l'autoroute de l'audit d'avoir leur titre professionnel et d'exercer dans leur champ d'expertise qu'ils veulent. Alors, ça fonctionne.

Il y a plus de... Combien qu'on a de maîtres de stage? On en a au moins une centaine. Il y a une centaine d'entreprises au Québec qui sont accréditées par l'ordre comme maîtres de stage. Et l'ordre met des efforts justement pour agrandir cette masse-là, pour permettre une meilleure intégration dans la profession.

Mme Lamarre : Et vous avez eu l'initiative de développer ça. Mais mettons que vous ne l'auriez pas, cette initiative-là, est-ce que vous recommandez, vous, que ce soit un comité interministériel qui aurait ce pouvoir de vous faire ces recommandations?

M. Dugal (André) : Bien, quelle que soit la personne qui a le pouvoir de nous le recommander, ce qu'il faut regarder, c'est quels sont les problèmes puis de quelle façon on peut agir pour régler ces problèmes-là le plus rapidement possible. Alors, nous, ce qu'on propose : Plutôt que d'avoir un commissaire ou quelqu'un qui va nous faire une recommandation, pourquoi on n'a pas un mécanisme qui nous permet de partager les meilleures pratiques, les bons coups qui sont faits dans différents ordres professionnels, pour justement arriver à une solution plus rapidement que d'attendre que quelqu'un vienne, vérifie, fasse constatation, donne des recommandations puis fasse le suivi?

Je pense que, si on regarde la quantité de gens qui sont touchés par, par exemple, les parcours atypiques des gens, on n'a pas une masse suffisamment critique pour prendre des mesures trop larges pour toucher ou chambarder tout le processus, par exemple, d'admission. Allons-y d'une façon chirurgicale. On sait où il y a des problèmes. Prenons action, échangeons les meilleures pratiques, puis après le commissaire ou l'office pourront venir vérifier et faire des recommandations sur les actions qui sont mises.

Mme Lamarre : Vous avez une réaction par rapport au pôle de coordination. Vous voulez retirer, là, cette recommandation du projet de loi. Qu'est-ce que vous reprochez au pôle de coordination? Ou qu'est-ce qu'il devrait avoir pour avoir plus d'impact sur un accès accéléré à la pratique?

M. Dugal (André) : Bien, ça dépend de l'objectif qu'on a. Si l'objectif qu'on a, c'est d'accumuler de l'information, d'aller chercher de l'information et de faire des recommandations, bien, ce qu'on comprend, c'est que c'est ce que le pôle fait. Si on a comme objectif de dire : Non, bien, il y a ce qu'on appelle en anglais des «quick fix», qu'on peut faire tout de suite, il y a des actions qu'on peut prendre tout de suite pour régler le problème tout de suite, à ce moment-là, on se pose la question : Qui est le meilleur intervenant pour agir rapidement, tout de suite? En faisant ça, peut-être qu'on va régler 80 % des problèmes, je ne sais pas. Mais notre proposition, c'est d'aller d'une façon beaucoup plus chirurgicale.

Le Président (M. Ouellette) : ...M. Dugal. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. Dugal, Me Brizard, bonjour. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission. J'aimerais qu'on revienne sur toute la notion de pratique dérogatoire, pratique illégale, au niveau de la récidive. Dans le fond, vous nous dites, Me Brizard, vous nous dites : C'est compliqué à partir du moment où on poursuit une première fois. Bon, les règles pour la récidive, c'est deux ans de la dernière déclaration de culpabilité. Si vous n'êtes pas dans ce délai-là, puis on veut aller chercher une injonction, c'est compliqué. C'est quoi, le fardeau à remplir, là, dans le cas... les règles pour l'injonction? C'est un long processus pour vous?

Mme Brizard (Christiane) : Bien, l'injonction... d'une part, ça nous prend une récidive pour aller chercher une injonction. Si on n'est pas dans une situation... On peut arriver dans une situation où on sait très bien que quelqu'un a pignon sur rue depuis plusieurs années. On ne peut pas prendre une injonction pour lui interdire de pratiquer. On doit aller à la cour, réussir à le condamner. Est-ce que vous pouvez vous imaginer le temps que ça prend, là? Ça prend du temps, tout ça. Parce qu'il y a quelqu'un qui va faire valoir qu'il n'est pas prêt à procéder la première journée, on va avoir une nouvelle date de procès, etc. Pendant ce temps-là... Il y a deux ans, et, pendant ce temps-là, cette personne continue à pratiquer, et on n'est pas capable d'aller chercher une injonction. Parce qu'on va aller chercher une injonction uniquement quand on va être capable de retrouver une récidive. Donc, il y a des coûts associés à ça. Il faudra envoyer un autre enquêteur une deuxième fois, réussir à avoir l'information à la fois qu'il est dans une récidive et prendre une injonction. Donc, ce délai-là... si on veut agir rapidement et retirer quelqu'un qui pratique illégalement, il faut avoir les moyens.

• (11 h 40) •

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, ce que vous nous dites, c'est qu'il faut que le professionnel soit condamné au niveau du conseil de discipline avant...

Mme Brizard (Christiane) : Non, qu'il soit condamné au pénal, une première fois dans une infraction pénale pour que je puisse aller chercher une injonction. Je veux pouvoir, dans certains cas, à ma première infraction pénale, être capable de l'assortir d'une injonction.

M. Jolin-Barrette : Au niveau de l'engagement de la personne, vous dites : On veut avoir un engagement de sa part au moment, supposons, où il est condamné. Ça enlève un peu son droit à une défense aussi, ce que vous proposez, parce que peut-être qu'il a des motifs de défense à faire valoir. Ça fait que c'est toujours la question du pendule, là : jusqu'où on va puis... Comment vous voyez ça?

Mme Brizard (Christiane) : En fait, peut-être que je n'ai pas été trop dans le détail puis j'aurais dû. Dans une situation où la personne est prête à plaider coupable, donc on est rendu dans le processus où il plaidera coupable, j'aurais aimé que, dans le Code des professions, on formalise le fait qu'on peut aller chercher un engagement de cette personne-là et, à partir du moment où il y a une récidive, peu importe quand, on puisse automatiquement avoir le droit à une injonction d'application immédiate. Donc, je retourne à la cour, mon fardeau de preuve, là, il est facile : voici l'engagement. Il y a un automatisme à une injonction, et je vais chercher mon injonction.

M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question de l'immunité, vous proposez dans le mémoire la mise en place d'une loi-cadre. Dans le fond, vous dites : On devrait retirer les dispositions des différents projets de loi, celui-ci, le n° 107, le n° 87, je crois, et avoir une loi-cadre. Pourquoi?

Mme Brizard (Christiane) : Parce que, là, on légifère à la pièce puis on n'a pas une vue d'ensemble à l'égard de l'immunité, qui est beaucoup plus large que l'immunité disciplinaire. En fait, si on veut favoriser les lanceurs d'alerte, il faut qu'ils puissent avoir une immunité beaucoup plus large, mais on doit tenir compte aussi du secret professionnel. À l'heure actuelle, ce qu'on voit dans les différents projets de loi, c'est qu'on va amener certains professionnels à faire de la dénonciation, mais on va traiter différemment un professionnel selon qu'il est avocat ou notaire et selon qu'il est membre des 44 autres ordres professionnels. Si on pense qu'au niveau de la société on doit favoriser des lanceurs d'alerte, on veut éviter... C'est ce qui s'est passé devant la commission Charbonneau, ou les affaires Norbourg, ou toute autre affaire qui amène de voir qu'il y a une corruption ou une collusion qui s'applique à l'ensemble des professionnels ou qui implique des professionnels. On devrait, à ce moment-là, faire en sorte que cet encadrement du lanceur d'alerte s'applique à tous.

M. Jolin-Barrette : Sur la question que le syndic pourrait demander une radiation temporaire d'une période... d'un premier trois mois, ensuite d'un deuxième trois mois, dans le mémoire, vous dites que vous êtes contre cette possibilité-là. Pour la confiance du public, vous ne pensez pas qu'il y aurait un aménagement à faire à ce niveau-là? Tout à l'heure, il y a un groupe qui vous a précédé qui disait : On pourrait peut-être le lier à la pratique professionnelle.

Mme Brizard (Christiane) : Un de nos commentaires, je pense qu'il faut absolument que le syndic soit capable de faire un lien avec l'exercice de la profession et pas de demander au conseil de discipline d'avoir comme une des conditions d'en tenir compte. Il faut nécessairement qu'il y ait un lien.

M. Jolin-Barrette : Sur cette question-là, au niveau de la mécanique, là, le syndic, lui, quand il va se présenter devant le conseil de discipline puis il va avoir sa requête, là, il n'aura probablement pas eu accès à la preuve du DPCP. Comment vous voyez ça?

Mme Brizard (Christiane) : Mais c'est ça qui nous pose problème, c'est que... Est-ce que c'est le bon forum? Parce que le DDCP, il l'a déjà, sa preuve. Puis, dans bien des cas, il est possible qu'au niveau criminel on mette... on demande que le procureur de la couronne fasse des ordonnances, demande que, dans certains cas, celui qui est accusé ne puisse pas poser certains gestes. Est-ce que ce n'est pas via le DDCP qu'on serait capable d'aller chercher l'information puis qu'on serait capable aussi de faire... de mettre en place des balises, mais en matière criminelle, dans le procès au criminel, pas dans le procès disciplinaire qui n'a même pas encore commencé, parce qu'on n'est même pas rendu à une plainte, on est dans une requête préliminaire à une plainte?

L'autre élément... Puis j'ai compris que le Barreau tente de nous rassurer en faisant une analogie avec la radiation provisoire, mais il faut comprendre que ce dossier-là va se plaider devant des conseils de discipline où, les gens qui font partie de ces conseils-là, il y a un avocat, et les autres, c'est des pairs. Donc, quand on va plaider la présomption d'innocence et toutes sortes de concepts de droit criminel, on va plaider ça devant des non-juristes, sauf si on parle des avocats et des notaires. C'est un lourd fardeau à imposer à ces gens-là.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Brizard, M. Dugal, représentant l'Ordre des comptables professionnels agréés du Québec, pour votre participation à la commission.

Je suspends quelques minutes et je demanderais à la Commission des partenaires du marché du travail de s'avancer, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 11 h 46)

(Reprise à 11 h 47)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant la Commission des partenaires du marché du travail et son président, M. Florent Francoeur. Vous avez 10 minutes pour nous entretenir de votre présentation, et après il y aura une période d'échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Francoeur, à vous la parole.

Commission des partenaires du marché du travail (CPMT)

M. Francoeur (Florent) : Alors, merci, M. le Président. Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, alors, merci de l'opportunité que vous nous donnez de vous présenter, je dirais, les premiers commentaires de la Commission des partenaires du marché du travail sur le projet de loi n° 98. Je dis «premiers commentaires» parce qu'on est un peu pressés par le temps, et soyez assurés que, d'ici la fin des auditions, nous pourrons vous envoyer un mémoire plus détaillé.

D'entrée de jeu, je vous présente la commission. Alors, c'est une instance nationale de concertation qui regroupe des représentants et représentantes des employeurs, de la main-d'oeuvre, du milieu de l'enseignement, des organismes communautaires et des organismes gouvernementaux préoccupés par l'emploi et le fonctionnement du marché du travail, en d'autres termes, la société civile composée des acteurs patronaux, syndicaux, communautaires, du milieu de l'enseignement secondaire, collégial, bientôt universitaire, tous unis pour travailler sur les questions de... toutes les questions d'emploi. Elle peut également compter sur un vaste réseau de différents partenaires pour accomplir ses actions. Et, il faut le rappeler, la commission, c'est aussi 17 conseils régionaux des partenaires du marché du travail, 29 comités sectoriels de main-d'oeuvre, cinq comités consultatifs représentant des clientèles particulières, et le Conseil Emploi Métropole, qui représente bien sûr la région métropolitaine de Montréal.

Ces décideurs mettent en commun leur expertise et leurs idées novatrices, notamment pour favoriser le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d'oeuvre en emploi. De plus, au cours des prochaines années, notamment avec le projet de loi n° 70 qui est actuellement en discussion à l'Assemblée nationale, la commission sera appelée à jouer un rôle stratégique majeur en matière d'adéquation formation-compétences-emploi au Québec. Et d'abord, je dirais, pour commencer, elle élabore actuellement un plan d'action triennal en la matière en concertation avec ses partenaires.

Permettez-moi d'abord de dresser un portrait global de la situation de l'emploi au Québec. Alors, lorsqu'on parle de l'emploi au Québec, on parle d'environ 4 millions de travailleurs, on parle d'à peu près, grosso modo, 400 000 professionnels, soit à peu près 10 % de la population de travailleurs. Alors, ce n'est pas rien.

• (11 h 50) •

C'est aussi une situation démographique qui est particulièrement préoccupante parce que, d'ici les sept prochaines années, on parle de 1,4 million de postes à combler, dont 1 million va être comblé par... est le résultat de départs à la retraite. Alors, 1 million de travailleurs, ça veut dire que, d'ici... dans les sept prochaines années, un travailleur sur quatre au Québec va quitter le marché du travail pour prendre sa retraite.

C'est aussi une démographie qui est préoccupante, il faut quand même le rappeler, depuis 2014, quelque part en 2014, il y a eu plus de... il y a maintenant plus de gens qui quittent le marché du travail au Québec que des gens qui arrivent sur le marché du travail. C'est notamment pourquoi on peut constater que, je dirais, sans une création d'emplois, je dirais, qui est particulièrement dynamique, on se retrouve quand même avec une diminution graduelle du taux de chômage. Et il faut le rappeler, sur le 1,4 million de postes à combler, on souhaite en fait que 20 % de ces postes-là à combler soient... proviennent de la clientèle immigrante. Alors, c'est pourquoi la question de l'accès aux professions réglementées interpelle tout particulièrement la commission et, bien sûr, notamment en ce qui concerne la reconnaissance des acquis et des compétences des personnes immigrantes.

D'entrée de jeu, la commission est favorable au projet de loi n° 98. En effet, ce projet s'inscrit dans l'objectif de renforcer la gouvernance et l'éthique au sein du système professionnel québécois. Elle cherche également à répondre à des demandes issues des ordres professionnels et du Conseil interprofessionnel afin d'améliorer les façons de faire, et on pense notamment à améliorer l'accès à la formation et aux stages et à réfléchir sur les mécanismes d'admission et de reconnaissance des compétences professionnelles. Mentionnons que, dans le cadre de la mise en oeuvre des arrangements de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, le projet de loi simplifierait la procédure relative à la mise à jour des compétences professionnelles.

Dans son rôle de contribuer au développement de l'emploi et au bon fonctionnement du marché du travail québécois, tout en poursuivant l'objectif de favoriser l'adéquation formation-compétences-emploi, la commission est particulièrement préoccupée par la performance des mécanismes de reconnaissance des acquis et des compétences. Ceux-ci ont, entre autres, une incidence régulière sur les personnes immigrantes formées à l'étranger.

Il importe de rappeler la situation québécoise actuelle et globale. Au Québec, le taux de chômage chez les personnes nées au Canada, ce qu'on appelle notamment les natifs, est de 7 %. Il est de 11 % chez l'ensemble des immigrants reçus et de 18 % chez les immigrants de moins de cinq ans. Si on se compare avec l'Ontario... Alors, je vais répéter mes chiffres, au Québec, les natifs ont un taux de chômage de 7 %, les immigrants, total, 11 %. En Ontario, le taux de chômage des natifs est de 6,7 % et le taux de chômage des immigrants est de 6,8 %. Autrement dit, pas de différence significative entre les immigrants et les natifs chez la province voisine. Alors, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans notre royaume, et loin de nous — j'insiste beaucoup — loin de nous l'idée de cibler les ordres professionnels à cet égard. Il s'agit, pour nous, d'une responsabilité collective qui amène des solutions collectives. Ainsi, cette semaine, dans le cadre d'une autre audition, dans le cadre des auditions sur le niveau de l'immigration, nous avons, la commission, questionné la grille utilisée par le ministère de l'Immigration pour la sélection des immigrants.

Le projet de loi propose d'accentuer le rôle du commissaire aux plaintes et officialiser un pôle de coordination pour l'accès à la formation. Ces deux propositions, de l'avis de la commission, on les trouve intéressantes, mais nous aimerions surtout souligner ici l'idée du besoin de cohérence dans la législation. Il faut rappeler que le projet de loi n° 70 actuellement à l'étude confie à la Commission des partenaires du marché du travail la responsabilité globale de l'adéquation formation-emploi au Québec. Nous aurons donc un pouvoir de recommandation, mais aussi, par exemple, contrairement au commissaire, un pouvoir de reddition de comptes, et c'est ainsi que, pour nous, le besoin de cohérence législative prend sa place.

Concernant la question des immigrants, on aura donc, dans ce contexte, les ordres professionnels, le commissaire, le ministère de l'Immigration, la CPMT, et j'en passe, qui vont être impliqués dans ces dossiers. Concernant le pôle de coordination, l'objectif est d'assurer la collaboration entre tous les acteurs concernés dans la recherche de solutions. C'est aussi, mais de façon plus globale, l'objectif de la Commission des partenaires dans son objectif d'adéquation formation-emploi. Nous nous invitons donc — et je dis bien «nous nous invitons donc» — collectivement à une réflexion sur les façons de faire... sur une façon de faire qui serait peut-être plus simple, plus efficace et surtout plus cohérente. Au minimum, la Commission des partenaires souhaite être impliquée dans les travaux du pôle et souhaite aussi pouvoir travailler de concert avec le commissaire sur les problèmes récurrents en matière de reconnaissance des acquis.

Finalement, il y a lieu de réfléchir collectivement, toujours en gardant en tête le taux de chômage des immigrants, sur le besoin d'adéquation entre la formation et l'offre d'emploi. Après avoir franchi la grille d'analyse du ministère de l'Immigration puis, dans ce cas-ci, avoir franchi les mécanismes d'admission des ordres, un immigrant peut quand même arriver au Québec et se retrouver sans emploi tout simplement parce qu'il n'y a pas d'emploi disponible dans son domaine d'activité. Et c'est ainsi qu'un immigrant sur quatre ne réside plus au Québec après 10 ans. Il faut le rappeler, c'est l'emploi qui est le plus grand facteur d'intégration d'un immigrant dans son pays. Alors, il importe donc de bien informer, selon nous, les candidats sur ce qui les attend, surtout dans une perspective d'évolution du marché du travail. Et, sur cela, on pense qu'il y a encore beaucoup de travail à faire. Je vous remercie.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup. Merci, M. Francoeur, de votre présentation. Je suis bien d'accord avec vous, c'est important qu'il y ait une cohérence non seulement dans la législation, mais dans l'action gouvernementale. Comment voyez-vous... Parce que vous souhaitez que la commission puisse travailler... En fait, ce que je comprends de votre présentation, c'est que vous souhaitez que la commission puisse participer, d'une certaine façon, aux différents travaux, qu'elle puisse être en lien avec le pôle. Comment le voyez-vous concrètement? Comment voyez-vous concrètement la participation de la commission dans le contexte du mandat qui vous est confié et le travail qui est celui du commissaire? Comment pouvez-vous voir ce partenariat s'imbriquer?

M. Francoeur (Florent) : Bien, en fait, quand on parle de partenariat, on est là. Je dirais, on le souhaite, mais, avant tout, je dirais, on s'invite mutuellement à une réflexion collective sur est-ce que c'est la bonne façon de faire.

Et je le souligne, par exemple, si on regarde dans le projet de loi, on dit, par exemple : «Le commissaire peut donner à tout ordre professionnel, ministère, organisme, établissement d'enseignement [...] des recommandations sur toute question relative à l'admission à une profession.» Si vous regardez un peu dans le projet de loi n° 70... et là j'y vais très, très grossièrement, mais on dit... on peut remplacer «le commissaire» par «la Commission des partenaires peut donner à tout ministère concerné — par exemple — des recommandations sur toute question relative à la situation de l'adéquation formation-emploi». On est dans les mots et on se dit : Bien, peut-être qu'il faudrait asseoir tous ces intervenants-là d'abord autour de la table et dire : Y a-tu... Est-ce que c'est la... Je dirais, il y a le pôle, il y a les ordres professionnels, il y a un paquet... le MIDI, évidemment. Et on dit : Est-ce que... On pense qu'il y a d'abord une réflexion à faire sur savoir : Y a-tu moyen de, je dirais... Au-delà, de créer le pôle, y a-tu des façons de faire qui seraient plus efficaces avant?

Mme Vallée : Le pôle existe déjà, là.

M. Francoeur (Florent) : Le pôle existe déjà.

Mme Vallée : On l'institutionnalise, mais il existe déjà.

M. Francoeur (Florent) : Oui, tout à fait, mais le pôle, de ce qu'on en comprend, le pôle est surtout là pour faire des diagnostics, et nous, on souhaite qu'on aille plus loin. Quand on regarde dans les pouvoirs qui sont accordés, notamment avec... Si on fait un parallèle avec ce qui se fait au niveau de l'adéquation formation-emploi avec la Commission des partenaires, ce qu'on a constaté essentiellement, c'est qu'historiquement la commission avait un rôle, elle aussi, d'établir des diagnostics, mais les résultats ont été très, très mitigés. Pour pouvoir aller plus loin, pour pouvoir trouver des solutions, on a donné un pouvoir de reddition de comptes ou on va donner... je dirais, avec l'accord, évidemment, des parlementaires, on donnerait à la commission un pouvoir de reddition de comptes pour faire en sorte que les choses bougent.

Alors, on dit : Oui, le pôle existe. On constate que son rôle, lui aussi, c'est un rôle, à ce moment-ci, de diagnostic, mais on pense qu'au niveau diagnostic, je dirais, il y a pas mal de choses qui ont été faites, là... Il ne faut pas... Je dirais, il faut aller à une étape ultérieure. Et c'est dans ce sens-là qu'on dit : Il faut qu'on travaille ensemble.

Mme Vallée : Comment voyez-vous cette intervention-là plus musclée dans un contexte où... Et, depuis trois jours, on entend beaucoup de préoccupations quant à l'importance de préserver quand même l'autonomie des ordres. On a le Bureau de coopération interuniversitaire qui nous a aussi parlé de l'indépendance des institutions d'enseignement. Comment on concilie tous ces paramètres-là?

• (12 heures) •

M. Francoeur (Florent) : Bien, en fait, je vais prendre... je vais reprendre l'exemple de la Commission des partenaires. Alors, quand je vous ai indiqué au départ... Alors, la Commission des partenaires, ce sont tous les chefs syndicaux, tous les chefs patronaux, tous les représentants, je dirais, de tous les niveaux d'enseignement, le monde communautaire. Et on s'assit autour d'une même table, et on identifie un problème, on trouve des solutions, et on s'engage mutuellement, je dirais, à contribuer. Et c'est un peu dans ce style-là, là, je dirais, la Commission des partenaires... Je dirais, le mot «partenaires» n'est pas gratuit. C'est que ça implique, je dirais, d'abord une table de discussion, une table de réflexion, une table de discussion, mais surtout une table où, je dirais, on met les partenaires en action. Alors, on dit... Tantôt, vous avez parlé... vous avez mentionné le mot «musclé», bien, c'est un terme qui, pour nous, est un peu trop fort, là, on n'est pas à cette étape-là. On se dit : Il faut être capable de pouvoir, je dirais, au-delà de ce pôle-là, sortir du volet diagnostic et aller beaucoup plus loin en disant, bien, c'est quoi, les solutions, puis comment les partenaires autour de cette table-là peuvent trouver des solutions.

Mme Vallée : Mais c'est un peu les fonctions que le pôle aurait, dans le sens que le pôle va pouvoir dresser un état de situation, va pouvoir identifier les problèmes puis les enjeux qui sont en lien avec la formation ou aux stages qui sont prescrits, parce qu'on est dans ces eaux-là, qui sont prescrits par un ordre, va pouvoir identifier les besoins de documentation, de cueillettes de données, va pouvoir également assurer la collaboration des ordres, des établissements d'enseignement — dans le fond, c'est ce que la table des partenaires fait, c'est d'avoir les gens autour d'une même table, d'assurer leur collaboration pour en arriver à obtenir cette information-là — puis va pouvoir aussi assurer les suivis des recommandations du commissaire. Parce que le commissaire a un pouvoir de recommandation, et le pôle sera le trait d'union pour assurer que ces recommandations-là ne tombent pas dans les limbes des rapports qui sont émis et qu'elles puissent être mises en oeuvre, idéalement. Et donc il y aurait aussi... Bien, évidemment, le pôle va pouvoir aussi formuler des recommandations pour l'accès à la formation. Donc, est-ce qu'il y aurait lieu de bonifier le mandat du pôle? Est-ce qu'il y aurait lieu de le définir de façon plus précise?

M. Francoeur (Florent) : C'est un peu ce qu'on vous propose, c'est-à-dire que, quand, en fait, on dit «s'inviter à une réflexion collective», c'est de dire... On comprend l'idée. Je dirais, globalement, on est d'accord avec l'idée. C'est sur, je dirais, la mise en action où on a un peu plus, je dirais, de problèmes, parce qu'on le voit moins. Quand on regarde, en fait, les responsabilités et on se dit... C'est pour ça qu'on est toujours... on insiste beaucoup pour dire : Est-ce qu'on peut un peu faire, je dirais, un pas en arrière et regarder d'abord, je dirais, tous les intervenants, je dirais, la somme des tables qui sont déjà mises en place. Il y a des tables gouvernementales qui sont mises en place en matière d'adéquation formation-emploi, notamment. Il faut être capable d'arrimer les travaux de tout ce monde-là. Alors, qui fait quoi, c'est un peu, je dirais, cette réflexion-là, d'une part.

D'autre part, on dit... Sur ce pôle-là, tantôt, quand je vous parlais de la situation de l'emploi, il faut être capable de pouvoir trouver une façon d'impliquer les employeurs. Il faut être capable d'employer les syndicats. Il faut être capable d'employer, je dirais, la société civile au sens large. La Commission des partenaires, c'est la société civile, et ça fonctionne. Ça fonctionne, encore une fois, parce que, je le dis, ce sont des décisions qui sont prises collectivement. On n'est pas... Tantôt, je vous disais que «musclé» était peut-être trop fort, «assurer la collaboration», c'est peut-être un petit peu... un peu faible pour, je dirais, se mettre en action. Quand on est tous autour de la même table et que chacun prend des engagements et repart avec des travaux à faire, force est de constater que, dans certains dossiers, ça fonctionne.

Mme Vallée : Est-ce que la commission aimerait ou souhaite s'impliquer directement au sein du pôle?

M. Francoeur (Florent) : Absolument, absolument, oui. On disait : On ne peut pas... je dirais, ces deux organismes... je dirais, si vous maintenez cette possibilité-là, alors on se dit : On ne peut pas travailler en parallèle. Il y a des choses qu'on... si on fait ça, il y a clairement des choses où on va refaire. Je dirais, lorsqu'on va regarder les diagnostics, dans bien des cas, on va refaire les diagnostics. D'un autre côté, il y a aussi, tantôt, quand j'ai insisté sur la nécessité de l'adéquation formation-emploi, alors on se dit : Il faut aussi être capable de pouvoir réfléchir là-dessus, sur, en quelque sorte, comment le marché du travail évolue. Et c'est pour ça qu'il faut trouver une façon de pouvoir réfléchir ensemble, là, sur les différents changements.

Quand vous parlez... lorsqu'on parle, par exemple, de reconnaissance des acquis, quand on parle d'équivalences d'admission, le marché du travail évolue, le marché du travail évolue rapidement, et il faut être capable de pouvoir, je dirais, aussi bouger, bouger très, très rapidement, là. Deux tiers des jeunes qui sont actuellement au primaire vont occuper un emploi qui n'existe pas actuellement. Alors, ça, je dirais, ça semble banal à dire, mais ça dit quand même que, lorsqu'on regarde... si on prend un programme universitaire et on dit : Ça prend cinq ans pour modifier un programme universitaire, ça prend une couple d'années après pour pouvoir, je dirais, établir le mécanisme d'équivalence par rapport à ça, on a déjà une moitié de génération de perdue, en quelque sorte, là, et on dit : Il faut qu'on soit capable de bouger en cohérence, d'où notre message de pouvoir travailler ensemble pour le faire.

Mme Vallée : C'est ça. Justement, on aborde la question de la reconnaissance des compétences puis les besoins de formation. On a eu les membres du BCI qui se sont présentés cette semaine, une certaine réserve quant à l'élargissement des pouvoirs du commissaire, une certaine réserve quant à ce qui est proposé dans le projet de loi. Mais, vous, là, la situation qui est vécue à l'intérieur de la commission, elle s'exprime comment? Qu'est-ce que vous avez... Est-ce qu'il y a une ouverture... moi, je m'interroge, là, est-ce qu'il y a une ouverture des milieux d'enseignement pour arriver à dispenser à l'intérieur d'un délai raisonnable les compétences, les formations qui sont requises par le marché du travail?

M. Francoeur (Florent) : La réponse est en plusieurs pans. Si vous me posiez la question au niveau du collégial, je vous dirais oui, très, très rapidement. Au niveau universitaire, on est ailleurs, là, effectivement, je dirais. Les mécanismes sont beaucoup plus lourds, l'indépendance universitaire est beaucoup plus rigide, la compétition est plus féroce, en quelque sorte. Mais en même temps, je dirais, la... je dirais, ça, c'est un problème, mais, d'un autre côté, aussi, ça prend la collaboration du monde du travail. Je dirais, l'université a beau vouloir offrir un programme de stages, si les entreprises n'embarquent pas, je dirais, on n'avance à rien. Alors, c'est pour ça que, quand on parle de... Je dirais, le problème ou la... le problème n'est pas... je dirais, on ne peut pas juste le cibler, là, sur un groupe en particulier, et c'est pour ça qu'on parle, je dirais, de solutions qui sont collectives, là. On dit : Il faut travailler avec le monde du travail, il faut être capable de comprendre comment le marché du travail va évoluer, il faut être capable de pouvoir sensibiliser le milieu de l'enseignement, je dirais, aux nouvelles réalités du travail, ce qui n'est pas toujours le cas et pas toujours facile, là, je dirais, de part et d'autre. Il faut être capable de convaincre le monde du travail de participer à la formation des futurs travailleurs. Alors, il y a beaucoup de... je dirais, il y a beaucoup de choses à faire pour que ça fonctionne.

Mme Vallée : Et est-ce que vous avez, dans le cadre des travaux de la commission, eu une interaction avec les ordres professionnels?

M. Francoeur (Florent) : Oui, en partie, parce que, là, actuellement, je dirais, là, ce qu'on a travaillé, et, je dirais, ça fonctionne actuellement, c'est au niveau du secondaire et du collégial. Alors là, je dirais, là-dessus, j'aurais une collaboration que je qualifierais d'exceptionnelle, c'est-à-dire que, l'arrimage entre les besoins du marché du travail et, je dirais, l'offre de formation au niveau secondaire et collégial, je dirais, on y est, ça avance, je dirais, et ça fonctionne de mieux en mieux.

Dans le milieu universitaire, bien, premièrement, nous-mêmes, on a des devoirs à faire, parce que, je dirais, les... Je suis capable de vous dire de façon très, très précise les métiers qui sont en rareté, en pénurie au Québec, là, au... je dirais, dans le monde, aux niveaux secondaire et collégial. Je ne suis pas encore capable de vous le dire au niveau universitaire. On va y arriver, mais il y a encore beaucoup de travail à faire à ce niveau-là, et ce qui veut dire que, là, pour pouvoir travailler, je dirais, de façon collective là-dessus, on n'y est pas encore.

Mme Vallée : Croyez-vous, justement, que votre participation... l'ajout, par exemple, de la commission à l'intérieur des instances comme le pôle pourrait permettre justement d'améliorer cette fluidité d'échange et de... d'échange de besoins, de préoccupations aussi? Parce qu'il y a cette dualité-là, il y a les préoccupations, les préoccupations des institutions universitaires, préoccupations des ordres de ne pas venir porter atteinte à leur autonomie, il y a cette préoccupation première qui est celle de la protection du public. Oui, il y a des besoins, mais il faut s'assurer aussi que ces besoins-là seront comblés sans sacrifier la protection du public. Alors, le rôle de la commission pourrait-il permettre d'améliorer les échanges entre les partenaires?

• (12 h 10) •

M. Francoeur (Florent) : On pense que oui, et c'est d'ailleurs la proposition qu'on vous fait. Mais en même temps, encore une fois, dans la mesure où on se dit qu'on va... bien, d'abord, que, dans ce pôle-là, on ait... qu'on puisse en... créer un lieu où il y a vraiment un lieu de concertation, et ça, un lieu de concertation, ça veut dire que tous les joueurs autour de la table... Et, encore une fois, je les mentionne : il faut que les patrons soient là, il faut que les employés... il faut que les syndicats soient là, je dirais, il faut que le monde de l'enseignement soit là, alors, que tous ces... il faut que les ordres professionnels soient là. Alors, ça, je dirais, il y a une question de représentativité, en quelque sorte, du pôle. Deuxièmement, qu'on puisse aller un petit peu plus loin, comme je le mentionnais, que le diagnostic. Et le troisième, c'est que je pense que c'est là qu'on intervient un peu plus, c'est-à-dire, là, on est, je dirais, dans notre rôle de partenaire. Je dirais, c'est là qu'on peut mettre... faire en sorte, je dirais, que les gens s'impliquent et, d'abord, prennent des décisions, mais en même temps prennent des responsabilités qui vont avec, pour livrer.

On peut faire un parallèle avec la Commission des partenaires. Tantôt, on parlait du milieu universitaire. Notre réponse a été de... Dans le projet de loi n° 70, là, on va inclure un poste votant pour le bureau de coopération, l'idée étant qu'on veut aller plus loin, on veut pouvoir travailler avec eux. Mais on veut aussi... et ils le savent, on veut aussi qu'ils puissent prendre des engagements. Et la commission elle-même va faire des suivis sur ces engagements-là. Alors, c'est ce qui nous permet d'avancer.

Mme Vallée : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Bonjour, M. Francoeur. Bienvenue à cette commission et à l'Assemblée nationale. Vous arrivez avec un point de vue différent de ce qu'on a entendu jusqu'à maintenant. Vous positionnez bien qu'il y a des problématiques que le projet de loi tente de solutionner, puis, ce que vous dites, il y a deux solutions principales qui sont annoncées, c'est-à-dire la création du pôle de coordination et l'élargissement du pouvoir du commissaire aux plaintes. Selon vous, ces solutions-là sont compliquées ou, en tout cas, peu applicables et devraient être plus simples et plus concertées avec des organismes de la société civile, que vous représentez. Ma compréhension, jusque-là, est bonne?

M. Francoeur (Florent) : Oui, oui, tout à fait. En fait, concernant, je dirais, l'actuel commissaire aux plaintes, ce qu'on constate... en fait, ce qu'on constate actuellement, c'est que, je dirais, le travail pour lequel nous, on a des attentes, et qui concerne surtout l'immigration, c'est fait. Alors, je dirais, on serait en désaccord avec le fait, je dirais, par exemple, d'abolir le commissaire aux plaintes parce qu'on se dit : Il y a une question, je dirais, de service aux citoyens ou aux futurs citoyens qui peut être rendu. Et ça, là-dessus, je dirais, on y est. Pour ce qui est, je dirais, d'augmenter son pouvoir, je dirais, dans la partie responsabilité à l'intérieur même des frontières québécoises, là, on n'est pas là, nous, parce qu'on dit : Ça ne nous concerne pas vraiment. Vous allez entendre plein d'intervenants qui vont être capables de mieux éclairer votre lanterne là-dessus. Mais, nous, dans la partie immigration, on dit : Le commissaire aux plaintes, il est là, il est utile et il fait le travail.

Concernant le pôle, vous m'avez entendu exprimer, je dirais, en quelque sorte, à la fois mes réticences et à la fois l'espoir qu'on peut travailler ensemble pour pouvoir faire en sorte que le pôle... ou, je dirais, quel que soit le modèle qui va émerger de cette consultation-là, mais qu'on puisse créer un lieu de concertation pour pouvoir, encore une fois, aller au-delà du diagnostic et trouver des solutions.

Mme Jean : Lorsqu'on parle de trouver des solutions, selon votre présentation... Vous abordez beaucoup la problématique de disponibilité de main-d'oeuvre versus disponibilité d'emploi. Des fois, il y a des secteurs où on manque de main-d'oeuvre et d'autres fois où on en a trop. Bien, il y a comme un équilibre qui serait à chercher au niveau d'au moins l'immigration pour que ce soit cohérent. Donc, c'est ce que je comprends de votre discours, qu'il y ait une problématique à ce niveau-là.

Ce que je comprends aussi, c'est que le pôle de coordination qui est proposé actuellement est un pôle dédié à une problématique d'équité d'admissibilité. Donc, moi, c'est... puis vous me direz si je me trompe, moi, je vois deux problématiques différentes : la problématique d'équilibrer, justement, l'emploi, ou la demande, ou l'offre de la main-d'oeuvre, et la problématique, qui est, à mon avis, un peu indépendante, ou ce que je comprends indépendante, de l'admissibilité d'un individu à un ordre professionnel.

La solution proposée par le projet de loi n° 98 est le pôle en question, puis ce que je comprends, quand vous me... selon votre propos, est : ce pôle-là pourrait devenir une plateforme de concertation où la société civile, par exemple que vous pourriez représenter, viendrait donner des informations sur le marché et le besoin ou la surabondance de main-d'oeuvre. À ce moment-là, le pôle, ce que je comprends, deviendrait avec une vocation plus large que de s'assurer de l'admissibilité ou l'équité dans l'admissibilité. Il irait dans... peut-être même influencer sur le type de main-d'oeuvre qu'on va permettre ou le type de personnes qui pourraient ou qui seraient invitées à venir nous rejoindre au Québec, donc les personnes immigrantes. Est-ce que c'est un peu ce que vous avez proposé, si j'ai bien compris?

M. Francoeur (Florent) : Bien, en fait, ce qu'on dit, c'est qu'on ne peut pas regarder ça en vase clos. Là, actuellement, de la façon qu'on... Ce qu'on observe, c'est que tout se fait un peu de façon linéaire. Je dirais, que ce soient les ordres professionnels, que ce soient tous les... je dirais, que ce soit le ministère de l'Immigration, et ainsi de suite, on dit : Il y a des besoins de main-d'oeuvre à combler au Québec et d'abord... Et, je dirais, l'emploi, comme je disais, est quand même, je dirais, un facteur d'intégration important. Et là il faut amener de la main-d'oeuvre au Québec.

Ce qu'on dit aussi, c'est que c'est vrai, mais ça, quand on le regarde dans la réalité, il y a certains types de... il y a de la main-d'oeuvre dont le Québec n'a pas besoin, on est en surplus. Alors, on dit : Il faut être capable de pouvoir avoir... Je dirais, il faut que la main gauche puisse parler à la main droite. On ne dit pas que... On n'est pas en train de dire qu'il faut absolument avoir, je dirais, l'arrimage parfait. Et on n'a pas besoin de le faire, parce que, quand, tantôt... Quand on parle, disons, d'à peu près 50 000 immigrants par année au Québec, il y en a 25 000 qui sont des immigrants à caractère économique, donc ils sont... pour lesquels, je dirais, ils sont admis sur la base de leurs connaissances et de leurs expériences professionnelles. Les 25 000 autres, ce sont en général ce qu'on pourrait... on pourrait parler de la catégorie des réfugiés. Alors, on est ailleurs.

Alors, on dit : Il faut simplement s'assurer que, dans les 25 000 qu'on accueille, à tout le moins, ils ont... qui sont des gens qui nous arrivent, qui ont été choisis parce qu'ils ont des compétences et des expériences particulières, mais il faut s'assurer que ces gens-là arrivent avec une chance raisonnable d'emploi au Québec, ce qui n'est pas toujours le cas. Et non seulement on dit : Ce n'est pas toujours le cas, mais tantôt, quand je vous dis, quand je vous parle de huit à 15 ans dans un processus, bien, je vous dis aussi : Il y a des métiers qui disparaissent, il y a des métiers qui apparaissent. Il y a des professions pour lesquelles, il y a cinq ans, on était en pénurie, on est devenu en surplus. Et il faut être capable au moins d'avoir cette vision globale là de la société en disant : Si on est en surplus actuellement et qu'on le sait, qu'on va être en surplus à long terme, est-ce qu'on a vraiment besoin d'amener des gens pour lesquels les perspectives de travail sont à peu près nulles, même si ce sont des gens qui sont très, très qualifiés, qui ont les compétences, qui ont l'expérience, mais qui arrivent dans un marché du travail qui est saturé?

Mme Jean : Est-ce qu'à ce moment-là je comprendrais qu'au niveau du rôle du commissaire aux plaintes... bon, on s'entend qu'il y a des plaintes qui peuvent arriver de personnes immigrantes qui se disent lésées par l'iniquité de leur évaluation de dossier, mais que ce ne serait peut-être pas la meilleure formule de penser que ce serait le commissaire, qui s'appellerait maintenant à l'admissibilité, qui aurait les pouvoirs d'agir? Mais est-ce qu'on pourrait penser qu'à ce moment-là, vu qu'on englobe, justement, comment on présente à l'étranger nos besoins en immigration, ça serait peut-être le MIDI, le ministère de l'Immigration, qui pourrait peut-être passer à l'action ou avoir le pouvoir de mettre en oeuvre les recommandations qui pourraient sortir des discussions qui se sont faites au comité ou au pôle de concertation?

M. Francoeur (Florent) : En fait, ce qu'on a dit, c'est que le commissaire aux plaintes, je dirais, comme on le connaît aujourd'hui, il joue un rôle utile, en tout cas lorsqu'on regarde dans nos dossiers d'immigration, il joue un rôle utile, ne serait-ce que, je dirais, dans un objectif, je dirais, de perception. Alors, je dirais, la personne qui se sent lésée a un mécanisme à tout le moins pour porter plainte et... Alors, ça, on dit : Ça, c'est... pour nous, toujours dans le domaine de l'immigration, ça fait le travail. On est satisfaits et on aurait, je dirais... on trouverait ça dommage si la question se posait pour l'enlever, alors, pour ce travail-là.

Pour le reste, on dit : Là, ça vous appartient, je dirais, on n'a pas choisi, là, de réfléchir là-dessus, sur, je dirais, son impact au Québec. Parce qu'il y a quand même un équilibre, je dirais, qui est atteint et, à quelque part, là, je dirais, ça vous appartient, comme je vous disais, là, de pouvoir aller plus loin là-dessus.

Mme Jean : Vous avez mentionné qu'à votre commission vous fonctionnez déjà comme ça, parce que vous avez vraiment beaucoup de représentants, et que ça fonctionne, c'est-à-dire que la commission se réunit, on discute des problématiques et on part avec des devoirs à faire. Donc, vous avez de l'expérience là-dedans. Vous pensez que ça pourrait se transférer dans un pôle de coordination comme on l'entend dans ce projet?

• (12 h 20) •

M. Francoeur (Florent) : Absolument. Tous les gens, je dirais, sont de bonne foi, tous les gens sont préoccupés par... Encore une fois, lorsqu'on arrive et on dit : La problématique qu'on a ici, c'est de faire en sorte que, je dirais, le plus de gens au Québec travaille, je dirais, c'est tributaire de la prospérité du Québec, et là-dessus, je dirais, encore une fois l'exemple de la commission, c'est qu'on est capables de dire : Bien, on a établi un bon diagnostic, on s'entend sur le diagnostic. Il y a des solutions. Les solutions n'impliquent pas simplement, dans les cas... ils n'impliquent pas simplement... Parfois, c'est la faute du syndicat, parfois c'est la faute du patron, parfois la solution passe par le syndicat ou par les patrons, parfois... Alors, on est tous ensemble et on se dit : Bien, on fait, je dirais, la somme des problèmes, on identifie les solutions, on s'entend sur quel partenaire va pouvoir, je dirais... est probablement capable de porter le dossier, on le laisse aller et on fait une reddition de comptes sur sa capacité à livrer le problème.

Alors, je ne vois pas pourquoi... Je dirais, on est tous de bonne foi, il n'y a pas de raison pour laquelle ça ne fonctionne pas, dans la mesure où tous les partenaires, je dirais, sont réunis autour d'une même table à réfléchir sur les enjeux communs.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour, M. Francoeur. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission. Vous avez dit, dans le cadre d'un échange, que c'est parfois difficile de discuter avec les universités pour qu'ils puissent adapter leurs programmes à la réalité du marché du travail, en raison de l'indépendance académique, en raison de l'autonomie. Bien, en fait, ma question, c'est plus : Est-ce qu'on a un problème de culture au Québec entre, comment je pourrais dire ça, la commercialisation ou la plus-value qu'on accorde, dans le fond, avec la recherche, avec les programmes? Comment on peut faire pour réussir à faire des gains collectifs avec ça, dans le fond de lier les universités, supposons, avec le marché du travail, avec les entreprises? Est-ce que c'est dans cette perspective-là?

M. Francoeur (Florent) : Oui. En fait, si on compare, par exemple, le collégial et l'universitaire, exemple, là, on est capables, et on le fait, là, de s'asseoir, disons, avec la Fédération des cégeps, pour le mentionner, et on est capables de s'entendre en disant : On a cinq métiers qu'on a identifiés, cinq métiers, je dirais, de niveau collégial, pour lesquels on a des difficultés d'attraction ou de formation. Comment vous pouvez faire, je dirais, comment vous pouvez faire pour nous aider? Quelles sont vos solutions? Et, quand je parlais tantôt, je dirais, de repartir, alors la fédération peut nous revenir en disant : Au nom des cégeps, voici les solutions qu'on vous propose, et là ça peut être quatre, cinq, 11 cégeps de Montréal, deux cégeps de Gaspésie, et ainsi de suite, mais voici les solutions. Vous nous avez confié une responsabilité, on vous arrive avec des solutions et on la met en place.

Au niveau universitaire, là, je dirais, il y a bien sûr, je dirais, la sacro-sainte indépendance universitaire, mais il y a aussi le fait que, je dirais, le fonctionnement du BCI, mettons, par exemple, versus l'ancienne Conférence des recteurs, ce n'est pas pareil, là, hein, je dirais, le bureau de coopération, il s'appelle bien un bureau de coopération, on n'est pas dans la partie prise de décision collective. Et c'est pour ça que, là, c'est un peu plus difficile, il faut qu'on travaille avec chacun des intervenants, ce qui nous amène, dans certains cas, à avoir des problèmes de cohérence, dans ce cas. Il faut travailler avec chacune des universités, dans certains cas il faut travailler avec chacun des départements, alors qu'avec, disons, une instance comme la Fédération des commissions scolaires ou des cégeps c'est un intervenant qui prend des engagements et qui s'engage à livrer. On n'est pas dans le même monde.

M. Jolin-Barrette : Dans l'éventualité où le pôle serait créé par le projet de loi n° 98, vous dites : Oui au comité, mais on veut que ce soit efficace puis on veut avoir des résultats. Puis là vous me dites en même temps : On a certaines difficultés avec le BCI, le bureau des recteurs, avec les universités. Est-ce que vous croyez que, dans la loi, on devrait venir spécifier certaines obligations pour le pôle, certaines obligations de résultat? Parce que, là, il y a de la discussion, mais, si on ne veut pas avoir un pôle que ce soit Parle, parle, jase, jase..., puis qu'il y ait vraiment des résultats, est-ce que vous pensez qu'on devrait légiférer pour dire : Bien, c'est ça, les objectifs, puis on s'attend à avoir les résultats?

M. Francoeur (Florent) : Légiférer, je n'irai pas jusque-là, je dirais, ça vous appartient. Ce que je dis simplement, c'est qu'il faut s'assurer que les gens qui sont autour de la table, qui sont intéressés... Tantôt, votre collègue a mentionné : Est-ce que ça peut fonctionner? Alors, il faut avoir un intérêt pour y participer. Alors, les gens qui viennent autour de la table et qui se disent : On a intérêt à y participer, bien, comprennent aussi qu'il y a un engagement qui vient avec. Et, à mon avis, c'est là que ça se joue, je dirais.

Pour la Commission des partenaires, avec le projet de loi n° 70... je fais toujours des blagues avec ça, mais je disais : Bien, on est actuellement en commission, et, si on avait accepté tous les gens qui nous ont fait une demande pour joindre la commission, ça aurait fait une commission de 500 personnes, là. Mais ce que ça soulève simplement, c'est que les gens disent : On veut contribuer, on a des problèmes, on veut pouvoir les partager avec les autres, mais on fait aussi partie de la solution. Quand, dans le projet de loi, on inclut le BCI comme membre votant de la commission, ce n'est pas rien, hein? Ça veut dire : tu es un membre votant, bien, tu viens prendre des décisions et tu viens prendre des engagements. Ils le comprennent comme ça. Et on se dit : Il faut trouver une façon, quelle qu'elle soit, elle vous appartient, mais il faut trouver une façon à ce que les gens qui participent au pôle soient un peu redevables de leurs engagements, et de leurs actions, et de leurs résultats.

M. Jolin-Barrette : Vous avez abordé la question de la grille de sélection, dans le fond, peut-être la modification de la grille de sélection. Nous, on avait proposé, là, d'augmenter le pointage relativement aux offres d'emploi validées en région, particulièrement. Quelles seraient les suggestions au niveau de la modification de la grille de sélection?

M. Francoeur (Florent) : Nous, ce qu'on a proposé, c'était un peu, je dirais, deux choses, c'est que... Ce qui est un peu l'équivalent de la grille d'emploi validée, c'est l'identification par la Commission des partenaires du marché du travail des métiers qui sont en pénurie, en rareté au Québec. Alors, ce qui veut dire que, lorsqu'on... et des perspectives d'emploi. Alors, ce qui veut dire qu'on est capables de dire que, dans un métier donné, le Québec a ou va avoir bientôt un problème de rareté de main-d'oeuvre pour un métier particulier. Et ça, actuellement, avec la nouvelle politique de l'immigration, le MIDI s'engage à tenir compte de cette liste-là dans la sélection des candidats. Alors, ça, pour nous, ça fait le travail. Ce qui correspond un peu... Je dirais, que ce soit une offre d'emploi validée ou d'excellentes perspectives d'emploi, on n'est pas très loin du résultat.

Nous, ce qu'on a questionné de façon plus large cette semaine en commission parlementaire, c'était en disant : La grille, un dentiste de 35 ans, je dirais, a de très, très fortes chances de passer facilement à travers... je dirais, avec la grille, et un biologiste moléculaire a autant de chances, alors qu'un diplômé, je dirais, quelqu'un qui aurait une équivalence de niveau collégial, un diplôme terminal de niveau collégial, de 25 ans, a beaucoup moins de points. Et on dit : La capacité pour le Québec, en quelque sorte, je dirais, de donner un emploi à cette personne-là est beaucoup plus grande, chez ma dernière personne, parce qu'on se dit : Le dentiste qui arrive, il arrive de son pays avec un statut de dentiste, et, lorsqu'on lui dit : Il faut embarquer dans un programme de stage, là, je dirais, il y a plusieurs adaptations à faire, là. La personne qui a un diplôme terminal — on insiste beaucoup sur un diplôme terminal — à qui ont dit : Il n'y a pas un emploi dans ton secteur d'activité, mais pas très loin il y a des très bonnes perspectives d'emploi, on pense être capables de l'intégrer plus rapidement.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Francoeur, représentant la Commission des partenaires du marché du travail. C'est tout le temps que nous avons, M. le député de Borduas. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux jusqu'à 14 heures. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président (M. Ouellette) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des institutions reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 98, Loi modifiant diverses lois concernant principalement l'admission aux professions et la gouvernance du système professionnel.

Nous entendrons cet après-midi les organismes suivants : l'Ordre des dentistes du Québec, l'Ordre des optométristes du Québec, l'Ordre professionnel des diététistes du Québec, la Chambre des notaires du Québec et l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec. Donc, nous avons un très bon après-midi.

Nous commençons par l'Ordre des dentistes. Nous recevons son président, le Dr Barry Dolman. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, il y aura échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Vous allez nous présenter la personne qui vous accompagne, docteur. À vous la parole.

Ordre des dentistes du Québec (ODQ)

M. Dolman (Barry) : Merci beaucoup. Chers membres de la commission, je tiens d'abord à vous remercier de l'invitation et je vous présente sans tarder Me Caroline Daoust, directrice générale et secrétaire de l'Ordre des dentistes du Québec, à ma gauche.

L'Ordre des dentistes se réjouit du dépôt du projet de la loi n° 98, qui améliorerait la protection du public. D'ailleurs, il est évident que le code allait être modifié sous peu. L'ordre n'a pas attendu le projet de la loi pour faire une réflexion profonde sur la gouvernance. En passant par la nécessité d'impliquer plus de membres dans l'affaire de l'ordre et le besoin de connaître l'opinion des jeunes, l'ordre a déjà insufflé une philosophie plus moderne à ses instances. Nous sommes d'accord pour réduire la taille de notre conseil d'administration, qui passera de 25 administrateurs à 16. L'ordre a déjà constitué un comité de gouvernance et un comité des ressources humaines. Le comité de vérification existe depuis longtemps, et une transition se fera pour abolir éventuellement le comité exécutif. On a adopté un code d'éthique et une conduite des membres de conseils d'administration et des comités en 2007 et un code de conduite des candidats à l'élection des postes de président et administrateurs en 2014.

L'ordre salue la modernité proposée et croit que tout doit être mis en place pour que les citoyens soient rassurés sur le fait que leur protection est la mission première du système.

L'Ordre comprend 16 comités et emploie plus que 45 personnes. Le poste de directeur général et secrétaire fait partie de sa structure administrative.

On est convaincus que certaines modifications législatives en matière de gouvernance sont souhaitables et nous demandons d'ailleurs depuis quelque temps des changements législatifs à notre loi particulière. Ces changements vous sont présentés dans le cadre du présent mémoire, en réponse au projet de la loi n° 98, qui touche la Loi sur les dentistes.

Par contre, et de façon plus globale, l'Ordre des dentistes invite les parlementaires à la prudence en évitant de juger de l'ensemble en fonction des difficultés ponctuelles. Des moyens sont déjà prévus dans la loi pour résoudre plusieurs problèmes.

Les instances politiques doivent soutenir les efforts des ordres dans l'accomplissement de leur mission et porter attention aux difficultés quotidiennes que chacun rencontre selon sa propre finalité.

Nos commentaires visent certains aspects des modifications proposées auxquels une attention particulière est nécessaire.

Notre premier commentaire général porte sur la gouvernance à plus haut niveau, une formule à repenser. L'Ordre des dentistes invite les élus à amener une réflexion poussée sur la façon dont ils devraient envisager l'encadrement général des ordres afin de tenir compte des défis qui leur sont propres. La présence du ministre de Santé et des Services sociaux, dans le cas de l'Ordre des dentistes, est essentielle à la cohésion du système de la santé, dont les membres de l'ordre font partie. Les défis d'accès aux soins sont son ressort. Or, il est absent des débats lorsque vient le temps de légiférer sur les champs d'exercice des professionnels de la santé. Associées à la résolution du même problème, les autorités responsables de l'éducation doivent être impliquées dans un développement coordonné des ressources.

Ensuite, nous tenons à insister sur le bien-fondé des pouvoirs de l'Office des professions et l'article 4 du projet de la loi. L'Ordre des dentistes du Québec est en accord avec le renforcement du pouvoir de surveillance de l'office. Il tient à assurer que ce pouvoir serait exercé afin de permettre également à l'office d'intervenir dans tout comportement des ordres qui viserait le développement d'une profession sans égard de la protection du public. Pour exercer une surveillance adéquate, l'Office des professions doit disposer des ressources qualifiées en vue d'intervenir rapidement auprès de tout ordre qui, tenté ou poussé par ses membres à mener des campagnes publicitaires et des propagandes sur les services fournis par les membres, induit malheureusement parfois le public en erreur. En d'autres mots, l'office devrait intervenir sur les positions ou des déclarations publiques qui sont contraires à la loi et qui peuvent mettre la population en danger.

Troisièmement, deux règlements pour se doter d'un code d'éthique. Quant au code d'éthique, l'Ordre des dentistes privilégie un mode d'application souple pour l'adoption des règlements relatifs au code d'éthique. Tous les administrateurs des ordres devraient être soumis aux mêmes règles minimales d'éthique. Il est inutile d'alourdir le processus par une double réglementation.

Le conseil d'administration de l'ODQ a adopté en 2007 un code d'éthique pour ses membres, lequel a fait l'objet de divers ajustements au cours des années et une refonte en profondeur en mai 2016 pour y prévoir des mécanismes d'enquête et des sanctions. Ce code s'applique aux administrateurs et à tous les membres des comités. En fait, l'ordre croit qu'il est essentiel que ce code d'éthique s'applique à tous les membres de comité d'un ordre, puisque leurs fonctions visent le même but. Le Code des professions devrait pourvoir.

Quatrièmement, le commissaire à l'admission. L'ordre croit que le commissaire aux plaintes est essentiel. Toutefois, il est inutile d'élargir les pouvoirs actuels du commissaire afin de les étendre à tous les processus d'admission. En effet, l'admission à une profession est un mécanisme mis en place au sein d'un ordre dans le but de protéger le public. L'Office des professions peut en vérifier le fonctionnement. Il revoit d'ailleurs toute la réglementation qui s'y rattache et en approuve le contenu.

L'Ordre des dentistes, plus particulièrement, fait appel à de nombreuses ressources spécialisées afin que les patients aient droit à des professionnels compétents et dont les connaissances sont ajustées à l'évolution de la science. La multiplication des pouvoirs et des compétences par l'ajout d'un commissaire à l'admission rend plus complexes des situations qui sont manifestement du ressort des ordres professionnels et qui ne posent pas de problème actuel justifiant une telle structure ou une telle mesure.

Cinquièmement, l'article 25 du projet de la loi qui modifie l'article 46.1 du Code des professions. Pour être réellement utile et faciliter les communications des ordres, cette proposition devrait comprendre une disposition qui permet à des ordres d'utiliser l'adresse électronique fournie par le membre pour communiquer avec ce dernier.

• (14 h 10) •

Sixièmement, les pouvoirs de président d'un ordre professionnel et du directeur. Réduire la surveillance des affaires au conseil d'administration et en faire un porte-parole apparaît incomplet et certainement contraire à l'imputabilité dont le président doit faire preuve. Le président est élu, il doit, en vertu même de la proposition, poser des questions et être porte-parole. Son rôle va clairement au-delà de seul président d'un conseil d'administration. La balance des rôles est ainsi équilibrée.

Septièmement, règles de conduite applicables à tous les candidats aux postes des administrateurs. Un chapitre, également, de l'ordre... prend de la souplesse et croit que l'adoption de ces règles devrait être obligatoire pour tous les ordres. Le contenu minimal d'un tel code devrait inclure des valeurs et des préceptes régissant la conduite des candidats, la pratique interdite, le financement de la campagne électorale et la procédure d'examen et d'enquête concernant les comportements. L'Ordre des dentistes recommande que l'adoption d'un règlement soit obligatoire pour tous les ordres professionnels, et non optionnelle.

Enfin, l'ordre demande des modifications à la Loi des dentistes. Les demandes sont essentielles à une gouvernance modernisée et améliorée qui tient compte des principes soutenus par le projet de la loi et la réalité propre à l'Ordre des dentistes. Plusieurs sont inspirés de la Loi sur le Barreau, en permettant une application rapide et une nouvelle gouvernance. L'ordre des dentistes demande notamment : l'ajout à la Loi sur les dentistes... afin de prévoir les conditions additionnelles d'éligibilité au poste de président et administrateur et d'allonger d'une année le mandat d'un membre nommé de 10 ans et moins; que le mandat d'un président soit de quatre ans et ne puisse être renouvelé qu'une fois; que l'assemblée générale reste souveraine sur le choix d'un mode d'élection du président, et ce choix est visé à légitimer le rôle de l'assemblée générale. Enfin, nous demandons une clarification sur les droits d'un président de participer aux travaux de tous les comités.

Je vous remercie pour votre attention aujourd'hui et je suis prêt à répondre, avec Me Daoust, à vos questions. Tout complément nécessaire, d'information, pourra vous être fourni. Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Dr Dolman. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, Dr Dolman, ça a été un plaisir de vous revoir. Merci de participer à notre grande réflexion et merci aussi pour votre mémoire.

D'abord, sur la question de la gouvernance, vous avez fait une présentation et, dans votre mémoire, vous présentez le président d'un ordre comme vraiment la figure de proue, celui qui est élu, celui qui, d'une certaine façon, est imputable et doit... est imputable d'assurer la surveillance des affaires de l'ordre. Dans le projet de loi, on vient indiquer que le rôle de surveillance de l'ordre au conseil d'administration est au conseil d'administration parce que c'est le conseil, ce n'est pas seulement le président, mais c'est le conseil qui est garant de la bonne gouvernance.

J'aimerais vous entendre, parce que vous avez parlé de la fonction de la présidence, puis j'aimerais vous entendre sur la répartition qui serait souhaitable, à l'intérieur d'un ordre, des rôles que devraient jouer, par exemple, le président et le conseil d'administration. Selon vous, là, quels sont les rôles? Parce que vous semblez accorder au président un rôle... Comme il est élu, vous lui accordez un rôle quand même important et vous semblez faire une distinction entre le rôle du président et du conseil, et j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Dolman (Barry) : Je vais vous donner un exemple : c'est peut-être comme le maire d'une ville, qui est élu. Le conseil d'administration autour, c'est le mot final. Comme président de l'Ordre des dentistes du Québec, même si je suis élu, je ne peux rien faire sans l'approbation du conseil d'administration, quand même j'ai un vote sur, présentement, 24. Mais, vis-à-vis une articulation sur la gouvernance, sur la structure, le travail que j'ai été obligé de faire avec ma collègue à gauche, Me Daoust, qui est le directeur général, c'est une question... je peux utiliser le terme, anglicisme, «checks and balances». C'est un petit peu dans cette zone que je trouve que, si je suis juste là pour être le porte-parole à la télévision ou le porte-parole du conseil d'administration, il y a quelque chose qui... on va se trouver avec une lacune à l'intérieur de la présente gouvernance de notre ordre.

Je trouve que... Depuis que l'Ordre des dentistes est en fonction, on n'a jamais eu, comme par exemple, un P.D.G., c'était toujours un président et un directeur général. Et je pense que, pour nous, c'est une façon d'articuler une bonne gouvernance. Mais je vois mal la façon que le président peut avoir la vision. Parce que ce n'est pas juste une question de poser des questions, il faut avoir, par exemple, une imputabilité de regarder à travers... à l'intérieur de la boîte comment ça fonctionne. Sinon, j'ai l'impression que l'ordre va devenir de plus en plus saisi par un genre de bureaucratie.

Et, si je veux utiliser encore un autre exemple... Parce que, souvent, quand on parle avec les autres agents de règlement, par exemple, à l'extérieur de la province de Québec, où on n'a pas, par exemple, un office, on n'a pas un ordre, où, par exemple, le président est mandaté pour un an, il y a une tendance, par exemple — je ne veux pas être méchant avec mes collègues à l'extérieur de la province de Québec — que le président était managé à travers l'année d'élection ou deux ans d'élection par les personnes qui sont là en poste permanent. Alors, pour moi, je pense que la balance qu'on a présentement à Québec, à l'intérieur des ordres professionnels, c'est une bonne balance qui marche très, très bien.

Le Président (M. Ouellette) : Mme la ministre.

Mme Vallée : Justement sur la question de la limitation des mandats, ça a été abordé avec quelques ordres professionnels, vous ne l'avez pas abordée directement, mais quelle est la position de l'ordre sur la question de la limitation des mandats? Certains nous ont dit : La limitation des mandats devrait se compter non pas en nombre de mandats mais en années, qu'il était opportun après un certain temps de faire place à la relève, mais qu'il était aussi important d'assurer une certaine continuité et donc de ne pas limiter de façon trop restreinte, parce que l'ordre, dans sa mission de protection du public, a besoin d'avoir une mémoire corporative aussi, et qu'avant de maîtriser l'ensemble des enjeux touchant l'ordre ça prend un certain temps, là, pour être complètement à l'aise. Donc, on a eu... surtout avant-hier, on a abordé cette question-là, très peu aujourd'hui. J'aimerais vous entendre sur cette question.

M. Dolman (Barry) : Ma passion, depuis que je suis professionnel... et j'ai présidé comme président de l'ordre ici, ailleurs je préside sur la présidence d'une réglementation internationale, je pense que c'est très important d'avoir un mouvement de toutes les personnes qui sont élues dans le contexte des ordres professionnels, pour la protection du public.

Chez nous, on a déjà convenu, à notre conseil d'administration, deux mandats de quatre ans. Ça, ça veut dire : pour nous, tout le monde a accepté que tu ne peux pas rester comme président. Et on regarde à la frontière, le pays le plus grand du monde, dans un certain contexte, le président ne peut pas rester. Chaque président va amener quelque chose à l'organisation. C'est sûr qu'on a besoin d'une mémoire institutionnelle, mais, pour moi, la mémoire institutionnelle, c'est les cadres, c'est le directeur général, c'est les personnes autour du conseil d'administration. Même autour du conseil d'administration, on a eu ce même débat, mais, comme je l'ai dit, officiellement la position de l'ordre, c'est deux mandats. Et, si tu veux être impliqué à l'intérieur de cette organisation, vous êtes bienvenu sur les comités à n'importe quel moment, mais, pour être capable, comme dans la loi... L'importance d'avoir les jeunes... Dans notre profession, il y a aussi un grand changement, il y a beaucoup plus de femmes dans la profession, la démographie, dans notre profession, a changé. C'est difficile d'avoir la sensation qu'est-ce qu'il se passe vis-à-vis les patients, les nouveautés pour la prescription des patients si, par exemple, les mêmes personnes restent en place.

• (14 h 20) •

Mme Vallée : D'accord. Justement, vous m'amenez sur la question des comités. Vous allez encore plus loin que le prévoit le projet de loi, vous proposez que le code d'éthique et de déontologie s'applique non seulement aux administrateurs, mais à tous les membres des comités d'un ordre en plus des administrateurs. Et il y a quand même des fonctions qui sont distinctes entre les administrateurs et les membres, les membres qui s'impliquent au sein des différents comités d'un ordre, qui ne relèvent pas nécessairement de la gouvernance d'un ordre. Donc, est-ce qu'il n'y aurait pas... Est-ce qu'il pourrait y avoir des difficultés d'application? Puis j'aimerais que vous élaboriez un petit peu davantage là-dessus.

M. Dolman (Barry) : Dans le principe, à l'intérieur de votre profession, comme avocat, comme ministre, c'est sûr que, pour l'Ordre des dentistes, on a monté la barre légèrement pour englober tout le monde. Mais, si, par exemple, on pense... L'éthique, c'est comme vous êtes enceinte ou vous n'êtes pas enceinte, ou tu suis des règles ou tu ne suis pas des règles. Et je ne vois pas, par exemple, que, par exemple, il y a une règle de jeu pour le président de l'ordre et une autre pour un membre d'un comité, sur ce chemin spécifiquement. Je pense que, qu'est-ce qu'on va écrire dans la législation, dans le code, nous autres, on a déjà fait certaines modifications chez nous, par exemple pendant la campagne électorale pour le président, on a fait beaucoup de commentaires là-dessus, et tout le monde est très satisfait à l'intérieur, les membres et le conseil d'administration. Je pense que c'est un petit peu bizarre d'avoir une règle d'éthique, par exemple, pour nous et une autre pour un autre ordre.

Mme Daoust(Caroline) : Si vous me permettez de compléter là-dessus, la finalité poursuivie, c'est la protection du public. Et, en ce sens, les membres de comités sont nommés par le conseil d'administration pour agir en vue de protéger le public, peu importe le mandat qui leur est confié. Alors, puisqu'il y a des pouvoirs comme ça qui existent aussi en vertu du Code des professions, qui sont donnés soit à des membres soit à des personnes extérieures de l'ordre, bien, l'imputabilité devrait être la même, et l'éthique devrait être la même. C'est la façon que notre code avait été rédigé en 2007. Et l'allégeance au code a été bien reçue.

Mme Vallée : Donc, ça n'a pas posé de problème au sein de l'ordre.

Une voix : Non.

Mme Vallée : D'accord. Justement, vous proposez aussi à l'égard des comités une disposition, à l'intérieur de la Loi sur les dentistes, qui prévoit que le président fait partie de droit de tous les comités de l'ordre, sauf ceux chargés de la discipline, de l'inspection professionnelle et de l'admission. Compte tenu des responsabilités de président du conseil d'administration qu'occupe le président, est-ce qu'il ne pourrait pas y avoir une confusion des rôles si le président prend part aux décisions du C.A. et prend part aux échanges des comités?

M. Dolman (Barry) : Normalement, expérience personnelle, le président était vraiment bienvenu. Souvent, il y a des comités avec un ou deux membres d'un conseil d'administration. Souvent, c'est des membres à part qui ne sont pas tellement au courant nécessairement des enjeux globaux. Alors, c'est dans le même sens qu'on a parlé de... le pouvoir du président, je pense qu'il y a une obligation du président d'informer les comités, pas nécessairement de rentrer sur le comité comme président. Souvent, on est là comme observateur, on fait des commentaires, on est dans la salle. On n'est pas nécessairement dans un comité... de remplacer le président du comité, ça, je suis complètement d'accord, mais d'être capable de faire ce genre d'observation et des fois, de temps en temps, de guider un comité vis-à-vis une aventure d'un autre comité où, par exemple, l'enjeu est... On a besoin d'avoir une certaine concordance entre les deux.

Mme Vallée : Et cette participation-là, elle ne teinte pas les travaux des comités, elle ne teinte pas l'esprit ou la dynamique à l'intérieur des comités?

M. Dolman (Barry) : De mon expérience, pas du tout, pas du tout.

Mme Daoust (Caroline) : Cette disposition-là se retrouve également dans la Loi sur le Barreau. Et justement le but de l'intégrer dans la Loi sur les dentistes est de légitimer, encore là, la présence du président sur des comités autres, comme on le sait, là, que l'inspection et la discipline et d'être une courroie de transmission pour une cohésion des activités de l'ordre.

Mme Vallée : Parfait. J'ai vu également que vous avez formulé, là, des recommandations, vous nous avez fourni un texte, Amender la Loi sur les dentistes, de sorte à apporter une concordance et... Alors, je vous en remercie.

On m'informe que le temps file un peu. J'aimerais aborder la question de l'admission. Vous travaillez... vous avez mentionné dans votre mémoire qu'il y a quand même plusieurs entités, en dehors du système professionnel, qui interagissent avec vous ou avec qui vous avez délégué, là, des fonctions, des fonctions d'évaluation des candidatures. J'aimerais vous entendre sur les mesures que vous prenez avec ces tierces parties là pour prendre compte de trois enjeux : savoir comment vous assurer de conserver la maîtrise des normes applicables au Québec; une reddition de comptes qui est efficace, des tierces parties aux institutions du système professionnel, et du système professionnel québécois; et un traitement des recours équitable et efficace des dossiers des personnes qui se destinent au permis québécois. Alors, j'aimerais vous entendre sur cette dynamique-là.

M. Dolman (Barry) : Peut-être que je vais déléguer à Me Daoust pour les précisions, parce que c'est un petit peu plus, des fois, légal à l'intérieur.

Le Président (M. Ouellette) : Me Daoust.

Mme Daoust (Caroline) : Merci. Comme vous savez, avec l'arrivée du commissaire aux plaintes, entre autres, certaines vérifications ont été faites avec les ordres professionnels qui, justement, confient à des tiers certains aspects de l'admission, dont, généralement, la confection d'examen, parce que la confection d'examen requiert une expertise qui n'est pas à l'intérieur des ordres professionnels. Dans ce cadre-là, et bien avant que le commissaire aux plaintes soit institué, au Québec, nous avons toujours eu des contrats avec les tiers fournisseurs, particulièrement le Bureau national d'examen dentaire du Canada et le collège royal, qui fournit les examens de spécialistes. Des Québécois, professeurs d'université ou délégués mandatés par l'Ordre des dentistes, participent à toutes les étapes de confection des examens, entre autres au niveau scientifique, pour s'assurer de la concordance avec les programmes, mais aussi pour s'assurer de la légitimité au niveau de la langue, parce que c'est... pour ne pas avoir de problème, là, avec le français versus l'anglais. Ils participent également au processus de correction et de révision, et les processus de révision sont faits avec des personnes autres que ceux qui ont corrigé dans un premier temps. Et de ça, on s'en est assurés avec nos deux partenaires principaux, le bureau national et le collège royal.

Soit dit en passant, le processus d'équivalence qui a été repris par le national au Canada a été fait au Québec et il date du début des années 2000. Et les autres provinces, avec les accords de mobilité, ont adhéré à notre façon de faire au niveau des équivalences, ce qui fait qu'on a une mobilité parfaite maintenant au Canada. Et évidemment c'est pour ça qu'on a dit aussi tout à l'heure qu'on était d'accord qu'il y ait un commissaire aux plaintes, justement pour s'assurer de l'équité de tous ces organismes, mais notre présence, par la nomination de personnes pour ça, l'assure, quant à nous.

Le Président (M. Ouellette) : C'est terminé. Ça a tombé juste à point. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bienvenue, M. Dolman et Mme Daoust. Merci pour votre introduction et la présentation.

Concernant l'admissibilité, je comprends que vous êtes pour le commissaire aux plaintes mais que vous n'êtes pas nécessairement d'accord avec... d'étendre son pouvoir. Vous considérez que l'ordre des professions a tout ce qu'il faut actuellement pour pouvoir exécuter le travail de diligence sur l'équité et les processus qui sont implantés pour assurer l'équité dans l'admissibilité. Est-ce que c'est bien ça que je comprends?

Mme Daoust (Caroline) : Oui.

Mme Jean : Vous êtes pour aussi l'augmentation, si j'ai bien compris, des pouvoirs qui sont donnés à l'ordre des professions à ce niveau-là.

Mme Daoust (Caroline) : À l'Office des professions.

Mme Jean : À l'Office des professions, excusez-moi.

Mme Daoust (Caroline) : Oui.

Mme Jean : À ce moment-là, êtes-vous capable de m'expliquer rapidement comment, justement, l'office est capable de faire... ou a les outils qu'il lui faut pour faire ce travail-là de s'assurer que le processus général dans les ordres est équitable, quel qu'il soit, pour l'admissibilité?

• (14 h 30) •

Mme Daoust (Caroline) : Bien, je vais simplement vous dire que tous les processus sont rédigés à l'intérieur de règlements qui font l'objet de vérification par l'Office des professions, d'approbation, puis finalement d'approbation gouvernementale. Pour les dentistes, le fait d'avoir un diplôme accepté par le gouvernement est suffisant pour devenir membre de l'Ordre de dentistes du Québec, associé à un examen, et cet examen est prévu à la loi. Comme je vous disais tout à l'heure à tous, nous avons aussi, avec nos tiers, des contrats, et le commissaire aux plaintes s'est assuré que nous avions ces contrats-là. Donc, en général, et parce qu'on n'a pas d'exemple à donner, là, on ne voit pas pourquoi le commissaire aurait des pouvoirs supplémentaires sur les processus d'admission. Parce que l'article 12 du Code des professions permet déjà à l'Office des professions d'intervenir dans la réglementation.

Un exemple plus contemporain pour nous, c'est l'accord France-Québec où, grâce à l'office, nous avons obtenu une réglementation qui respectait justement tous les principes d'équité. En ayant une étude, de part et d'autre, détaillée de notre processus, nous n'avons pas eu besoin de l'intervention du commissaire dans ce dossier-là pour aboutir à une réglementation.

Mme Jean : Merci. Vous avez parlé... O.K. L'environnement ou la composition des dentistes au Québec change, l'âge, dans... peut-être en région, peut-être aussi hommes-femmes. Est-ce qu'au niveau de la composition du conseil d'administration... ou comment, au niveau de la composition du conseil d'administration, vous tentez de représenter cette réalité-là de vos membres, au niveau de la représentativité?

M. Dolman (Barry) : Nous autres, ça, c'est encore quelque chose que j'ai essayé de pousser depuis que j'ai arrivé à l'Ordre des dentistes du Québec, on encourage, dans les sociétés dentaires à travers la province de Québec, de se renouveler. Et c'est toute cette mentalité d'avoir des limites sur les mandats, des limites sur les termes, pour donner la chance à des personnes de céder leurs places à d'autres.

On a fait une expérimentation il y a cinq ans, où, par exemple, sur notre exécutif, on a mandaté que tu peux servir trois ans sur l'exécutif seulement. Ça veut dire de donner une chance à tout le monde autour de la table de rentrer, de passer deux ans, d'être vice-président, et de céder votre place pour envoyer une autre personne à la place.

Et, dans le même esprit, on cherche des nouveaux administrateurs. C'est sûr que c'est des élections, alors on ne peut pas nécessairement décider qui va se présenter. Mais, à travers... avec des discours, dans des sociétés à travers la province... Et, à date, maintenant, on a plus de femmes autour de la table. On a des femmes sur notre «exec», et j'encourage toujours de pousser cette notion d'équilibration. Je pense que la seule façon de le faire, entre guillemets, c'est de peut-être par... Nous autres, on l'a fait avec un accord entre les administrateurs, mais, pour pousser plus loin, la seule façon de le faire, c'est de limiter les mandats, même sur les comités.

Mme Jean : Donc, en misant sur le renouvellement rapide, donc de limiter le nombre d'années, là, de...

M. Dolman (Barry) : Mais, si tu... je m'excuse d'interrompre. Si, par exemple, tu limites les mandats, étant donné que... par exemple, quand j'ai donné des permis à Laval il y a plusieurs mois, plus que la moitié sont des femmes, éventuellement, tu vas voir, le démographique va changer normalement, avec aucune autre pression.

Mme Jean : Est-ce que je peux savoir le pourcentage des femmes qui sont sur votre conseil d'administration aujourd'hui?

(Consultation)

Mme Daoust (Caroline) : 40 %.

Mme Jean : Environ 40 %.

Mme Daoust (Caroline) : Oui. Je peux les compter, là, mais...

Mme Jean : D'accord. Vous avez soulevé un sujet qui m'intéresse particulièrement, qui est celui de la publicité. Vous mentionnez qu'il y a une problématique de publicité lorsque l'ordre commence à faire des publicités pour valoriser la profession, et, selon vous, ça dessert en fait le public. Est-ce que vous pouvez m'en dire un peu plus là-dessus?

M. Dolman (Barry) : La technologie a changé depuis que la législation a été écrite, il y a plusieurs années. On est en train de réviser, par exemple, dans le dossier d'harmonisation, qui date depuis 20 ans, des échanges. Mais la technologie a changé, alors souvent, par exemple, avec les nouvelles technologies et la capacité de toutes les professions, pas juste les dentistes, de monter des campagnes Web... Ce n'est pas juste une question, par exemple, d'acheter une pub dans La Presse, mais on peut lancer de la pub sur Facebook, on peut lancer sur Twitter, on peut lancer toutes sortes des idées, et souvent ça prend un autre niveau d'intervention par l'office, des autres mesures d'essayer de raconter de... quel genre de message on envoie vis-à-vis le public. Et le problème aujourd'hui : souvent, deux personnes peuvent regarder la même écriture dans une législation écrite dans le passé et penser d'autre chose, tu sais. Je ne veux pas rentrer dans des détails plus que ça, mais, par exemple, dans le passé, un appareil amovible, c'est une prothèse que tu enlèves de la bouche. Aujourd'hui, il y a des personnes qui pensent qu'un amovible, c'est quelque chose que tu dévisses. C'est le langage qui a changé. Alors, il faut avoir une façon de clarifier le langage, tu sais : une radiographie numérique vis-à-vis une radiographie avec papier; même chose en droit : de signer un document par un fax, de signer un document sur un site. Je pense que c'est le temps de regarder.

Et je suis vraiment inquiet de voir, par exemple, dans des salons de coiffure des techniciens en blanchissement. O.K., je sais que c'est loin de cette discussion aujourd'hui. C'est une personne qui a inventé une profession par un beau mot. Mais, pour le public, bon, oh! technicien, il y a une apparence en arrière que c'est un professionnel. Mais, à cause que le blanchissement, dans le passé, n'existe... n'était pas en existence, et c'est dans un aspect cosmétique, la loi empêche nous, et l'Office des professions, et même le législateur de faire quelque chose présentement, sauf si on engage des autres mesures. C'est un problème pour le public.

Mme Jean : Une dernière petite question. Vous semblez rejeter, si j'ai bien compris, le fait que le président du conseil d'administration ne peut pas être un administrateur non-membre. Est-ce que c'est bien le cas? Et, si c'est bien le cas, pourquoi?

Mme Daoust (Caroline) : Non, le président est un administrateur.

Mme Jean : Est un administrateur, mais il peut être élu... membre ou non-membre? Membre de l'ordre. Est-ce qu'il peut être l'un ou l'autre?

M. Dolman (Barry) : Bien, il doit être membre de l'ordre.

Mme Jean : Il doit être membre de l'ordre. O.K., il y a seulement des membres de l'ordre qui sont... O.K.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci. Dr Dolman, Me Daoust, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. Peut-être pour faire du pouce sur la question de ma collègue, dans le fond, vous souhaitez que le président de l'ordre soit membre de l'Ordre des dentistes également puis que ça ne soit pas un administrateur nommé qui puisse devenir président de l'ordre?

Mme Daoust (Caroline) : Si vous avez pensé ça en lisant notre mémoire, ce n'est pas ça qu'on voulait. C'est sûr et certain, on veut que le président soit membre de l'ordre.

M. Jolin-Barrette : Parfait. À la page 15 de votre mémoire, dans les dispositions sur la Loi sur les dentistes, dans les suggestions que vous nous faites, vous souhaitez l'insertion de l'article 6.1, donc que les administrateurs n'aient pas été, au cours des deux dernières années, un administrateur du conseil d'une association dentaire vouée à la défense des intérêts économiques des membres au cours des deux années précédentes. Je comprends que vous venez spécifier les associations qui seraient bénéfiques... en fait, la défense des intérêts des membres, mais vous n'excluez pas quelqu'un qui serait administrateur d'une association reliée au monde de la dentisterie, mais qui serait dans un but non lucratif, ou quelque chose comme ça. C'est ce que vous recherchez par cette proposition-là?

Mme Daoust (Caroline) : C'est ce qu'on recherche.

M. Jolin-Barrette : O.K. Même chose à la page 17, on constate que vous voulez de la flexibilité, notamment au niveau du directeur général de l'ordre. Vous ne souhaitez pas nécessairement qu'il soit... que la disposition du code s'applique à vous, mais que vous ayez la liberté de choisir, dans le fond, si vous le jumelez avec le secrétaire de l'ordre?

Mme Daoust (Caroline) : Et ma compréhension du code est également que le directeur général peut aussi être secrétaire de l'ordre. Encore là, on s'est inspirés de la Loi sur le Barreau pour permettre que le directeur puisse être aussi assisté de d'autres personnes. C'était le but de la modification spécifique.

M. Jolin-Barrette : À la page 10, vous traitez du pôle de coordination et puis vous dites qu'il doit y avoir un réel dialogue qui doit exister, et «tout système envisagé doit éviter des aberrations évidentes comme la formation de personnes pour des activités dont l'exercice leur est par ailleurs interdit par la loi». Pouvez-vous expliquer ce que vous voulez dire par là?

• (14 h 40) •

M. Dolman (Barry) : Présentement, par exemple, il n'y aucune concordance — c'est triste à dire — entre, par exemple, pour nous, en santé, le ministre de l'Éducation, le ministre de la Santé et nous. Si, par exemple, un autre ordre décide de faire un cursus dans un cégep, de faire un avancement sur une technologie ou une technique, il peut le faire sans nécessairement qu'à la fin... d'avoir un certificat que l'acte est légal, parce que n'importe quelle personne pourrait éduquer. Mais ça cause beaucoup de confusion à l'intérieur des ordres, entre les ordres et aussi vis-à-vis le public.

M. Jolin-Barrette : Donc, il y a un problème d'arrimage entre le milieu de la formation puis les ordres. Est-ce que vous pensez que le pôle permettrait de résoudre ça?

Mme Daoust (Caroline) : De la façon que je comprends les références aux pouvoirs concernant le pôle, je n'ai pas l'impression qu'il aurait le pouvoir de faire ça, parce qu'on parle plutôt d'un pôle pour régler des problématiques au niveau des équivalences, des permis spéciaux ou des permis restrictifs. Mais, de faire une concertation des cursus pour s'assurer qu'on ne va pas former des personnes pour des choses qu'ils ne peuvent pas faire parce que... puis c'est, par ailleurs, réservé à quelqu'un d'autre dans la loi, ce n'est pas ma compréhension de ce que le pôle pourra faire. Si c'est ça, tant mieux, puis c'est pour ça qu'on a insisté dans notre mémoire pour dire qu'il faut aussi que ça soit ça.

M. Jolin-Barrette : O.K.

M. Dolman (Barry) : ...beaucoup de respect pour le ministre de la Justice ou n'importe quel ministre de la Justice. À part de Québec, le lien entre les ordres et les règlements de santé, c'était toujours le ministre de la Santé, ce n'était jamais de l'autre côté, de Justice, qui cause des fois des procédures plus lentes pour accomplir des tâches pour la protection du public.

M. Jolin-Barrette : À titre d'exemple, si vous voulez communiquer avec le ministre de la Santé, il faut que l'ordre s'enregistre au registre de lobbyisme.

Mme Daoust (Caroline) : Exactement. Ça devient une activité de lobby, de parler au ministre de la Santé, alors que nous sommes dans le domaine de la santé. Ça devrait être naturel de pouvoir le faire.

M. Jolin-Barrette : ...investi d'un pouvoir de réglementation.

Mme Daoust (Caroline) : Pardon?

M. Jolin-Barrette : Que vous êtes investis d'un pouvoir de réglementation aussi.

Mme Daoust (Caroline) : C'est ça. Je m'excuse, on a de la compétition dans le bruit.

M. Jolin-Barrette : Je vais vous poser une autre question. Bon, on vise à élargir le mandat du commissaire aux plaintes. Est-ce que c'est arrivé à l'ordre, au cours des dernières années, que vous ayez eu des cas où l'élargissement du mandat du commissaire aurait été applicable? Dans le sens, est-ce que vous avez eu des demandes de candidats québécois qui auraient été couvertes par les nouveaux pouvoirs du commissaire?

Mme Daoust (Caroline) : Il y a des plaintes... pas «des», il y a une plainte qui, en ce moment, est entre les mains du commissaire et entre nos mains également, c'est tout.

M. Jolin-Barrette : ...un candidat étranger... candidat ayant été formé au Québec?

Mme Daoust (Caroline) : Non. Jamais.

M. Jolin-Barrette : Et puis, dans toute l'histoire de l'Ordre des dentistes, ce n'est pas arrivé, dans le fond. Et je me demandais le nombre de candidats québécois qui contestent, supposons, le refus d'être admis à l'ordre, est-ce qu'il y en a beaucoup qui vont au comité de révision?

Mme Daoust (Caroline) : Les motifs pour lesquels on pourrait refuser des candidats sont, par ailleurs, prévus dans le code. Par exemple, quelqu'un qui aurait un dossier disciplinaire provenant d'une autre profession ou d'une autre province, quelqu'un qui aurait un casier criminel, ce qui n'entrerait pas, de ce que je comprends, dans les pouvoirs d'un futur commissaire à l'admission, ça, c'est arrivé. Mais basé sur le fait qu'un candidat aurait échoué à l'examen, ce n'est jamais arrivé, ce n'est jamais, jamais arrivé.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Me Daoust, Dr Dolman, représentant l'Ordre des dentistes du Québec, merci de votre participation à cette commission.

Je vais suspendre quelques minutes, j'inviterais l'Ordre des optométristes du Québec à bien vouloir s'avancer.

(Suspension de la séance à 14 h 44)

(Reprise à 14 h 49)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des optométristes du Québec et son président, le Dr Langis Michaud. Vous allez avoir 10 minutes pour faire votre présentation. Après, il y aura un échange avec Mme la ministre ainsi que les porte-parole des deux oppositions. Donc, vous allez nous présenter la personne qui vous accompagne, Dr Michaud. À vous la parole.

Ordre des optométristes du Québec (OOQ)

M. Michaud (Langis) : Oui. Alors, ça me fait plaisir d'être ici aujourd'hui. Je suis accompagné du directeur général et secrétaire de l'ordre, Me Marco Laverdière.

Alors, Mme la ministre, MM. les députés, membres de la commission, M. le Président, ça me fait très plaisir d'être ici pour défendre le mémoire et la contribution de l'Ordre des optométristes au projet de loi qui est devant nous.

• (14 h 50) •

Je tiens d'abord à souligner que moi, je suis fier d'être membre d'un ordre professionnel, je suis fier d'être président d'un ordre professionnel. Je pense qu'au Québec on a un très bon système, et, pour me promener ailleurs au Canada et partout en Amérique du Nord, il fait l'envie de beaucoup d'autres professionnels en termes de conception et de structures. Ceci étant dit, on est tous ici pour l'améliorer, et c'est dans ce but-là qu'on est devant vous aujourd'hui.

Je vais m'attarder pas sur les points sur lesquels on est en accord avec le projet de loi, mais évidemment sur les points qui sont dans notre mémoire et qu'on a voulu souligner. Le premier point, c'est sur les normes d'éthique et de déontologie applicables aux administrateurs. Le projet de loi prévoit que l'office adopte un règlement qui définirait un certain code d'éthique pour les administrateurs mais obligerait également les ordres à s'en doter un propre à l'ordre lui-même. On y voit un danger de duplication, on y voit un danger de contradiction, jusqu'à un certain point, des fois. Les 40 ordres vivent des réalités différentes, et il devrait y avoir un petit peu d'adaptabilité, là, dans le système, qui soit prévue pour ça. On est très d'accord que l'office établisse un cadre, mais nous laisse peinturer le canevas à l'intérieur, qu'il donne donc la structure, qu'il oblige les ordres à se doter d'un code d'éthique, qu'il intervienne au besoin, si l'ordre est négligeant dans cette façon de faire, mais que le contenu soit déterminé par l'ordre selon les principes de bonne gouvernance, et non pas par l'office, puisque chaque réalité étant différente, et évidemment, encore une fois, pour éviter la duplication.

Il y a un autre élément, c'est qu'à chaque fois qu'on en met sur le dos de l'office on ne rajoute pas de personnel, on ne rajoute pas de budget, à ma connaissance, et ça implique une lourdeur administrative importante. C'est un des problèmes du système professionnel au Québec. C'est lourd, c'est long. On parlait de mandat de président, on parlait de mandat d'administrateur, si je veux commencer un programme, le terminer avant la fin de mon mandat, il faut que je planifie un mandat de cinq ans, parce que les projets de loi, les règlements, ça n'avance pas vite. Pourquoi? Pas par mauvaise volonté. Tout le monde est super de bonne volonté. Des fois, il y a plein de consensus. Mais il manque de ressources. L'office n'a pas les ressources. Nous, on manque de ressources. Il n'y a pas assez de ressources dans le système, et les petits ordres, en particulier, sont pénalisés par ça. Donc, les gros ordres peuvent y arriver plus facilement peut-être que d'autres. Et je pense que, quand on met de l'avant certains principes avec lesquels on est d'accord, il faut se donner les moyens de faire atterrir l'avion et que tout ça se passe évidemment dans les plus brefs délais.

Je veux également souligner le mandat élargi pour le commissaire à l'admission aux professions. Un peu à l'image de nos collègues dentistes qui nous ont précédés, nous sommes parfaitement d'accord à ce que le commissaire soit là. Il est essentiel, je pense qu'il a prouvé son rôle. Il a un rôle très utile pour favoriser l'accessibilité des candidats étrangers. Ceci étant dit, on n'a jamais eu de problème, de notre côté, de ce côté-là, là. Au niveau des optométristes, ça ne cause pas de problème. Et on n'a jamais eu, jusqu'à ce jour, de plaintes formelles de la part du commissaire.

Mais, ceci étant dit, on a également un souci face à son implication quant à la formation régulière. Je pense qu'on a déjà en place des éléments qui pourraient nous aider. L'office, oui, est déjà partie prenante de ça. Le pôle de coordination qu'on souhaite créer ou renforcer est certainement une avenue à explorer. Dans ce sens-là, le pôle de coordination pourrait jouer un rôle majeur et fondamental, dans le sens que les dentistes vous décrivaient, de faciliter la formation initiale et la formation d'appoint, puisque c'est souvent là que le bât blesse. Ce n'est pas la reconnaissance des diplômes qui est le problème, et les ordres ont fait d'énormes travaux et d'énormes progrès là-dessus dans les dernières années. C'est lorsqu'il faut avoir les stages de perfectionnement, de mise à niveau, de trouver les places, de trouver les budgets. Encore une fois, c'est souvent une question de budgets et de ressources.

Nous, on a une seule école en optométrie, à Montréal, la seule école francophone au monde qui donne un diplôme en optométrie, mais ils ont deux places par année pour les candidats étrangers pour la formation d'appoint, alors ce n'est pas énormément. Alors, même si on... Par la limite, ils ont déjà 42 étudiants réguliers, six stagiaires qui nous viennent de France, qui sont déjà des candidats étrangers, dont une certaine partie reste ici après, et on a deux candidats supplémentaires qui viennent. Donc, à un moment donné, il y a des limites aux murs de l'école et aux capacités de l'école. Alors, si on ne donne pas plus de ressources à l'école, il n'y a pas de capacité d'encadrement, et c'est là... c'est le maillon faible de la chaîne, si vous voulez. Et le pôle de coordination pourrait aider dans ce sens-là, le ministère de l'Éducation, le ministère de la Santé et le ministère de la Justice.

Les comités de formation, on ne les a pas mentionnés, mais ils sont à peu près à géométrie très variable dans les ordres. L'office a déjà un regard là-dessus via nos rapports annuels. Je pense qu'il faudrait les réactiver, les uniformiser, leur donner des moyens aussi, les comités de formation, pour qu'ils interviennent à ce niveau-là et qu'ils s'assurent d'une équité autant dans la formation initiale que de ce qu'on demande de nos candidats étrangers.

Donc, oui, pour le commissaire, des pouvoirs plus grands en matière de candidats étrangers, mais une grande réserve quant à la formation initiale. Il y a d'autres mécanismes, d'autres avenues, encore une fois pour ne pas alourdir le système, ne pas rajouter une couche supplémentaire à l'étage bureaucratique avec lequel on fait affaire.

Troisième point, je pense qu'on a été un des seuls à le souligner, je n'ai pas entendu d'autres ordres le faire, peut-être par notre situation particulière : l'interdiction pour un administrateur d'être membre du conseil d'administration d'un organisme affilié à l'ordre et du domaine de la profession. Les dentistes vous ont mentionné, le Dr Dolman étant membre de comités nord-américains et canadiens... Nous sommes aussi membres. En tout cas, en termes de santé... je ne peux pas parler pour les 46 autres ordres, là, mais, en termes de santé, il faut qu'on soit membres à cause de la mobilité de la main-d'oeuvre et à cause des respects au niveau des champs de pratique dans différentes provinces, qui peuvent varier, donc s'assurer qu'il y a un standard uniforme partout. Mais on est des membres votants. Donc, moi, comme président de l'ordre et comme administrateur de l'ordre, j'aime beaucoup que ce soit un administrateur élu qui siège à notre conseil qui soit représentant dans ces organismes-là, et qui nous fasse rapport, et qui reçoive le mandat d'agir à ce niveau-là. Si c'est un membre externe, ça complique encore plus, là, l'interaction, si vous voulez, avec nos collègues canadiens.

Donc, déjà, il y a un premier volet qui nous pose problème si on interdit... si l'article de loi est passé comme tel. On ne pourra plus avoir un administrateur qui siège sur ces comités nationaux là. Ça, c'est un gros problème parce que, souvent, c'est le président, et, entre présidents, il y a des choses qu'on règle peut-être plus facilement. «Ah! bien là, je n'ai pas le mandat de négocier ça, je n'ai pas reçu le mandat, je n'étais pas au courant de. Je vais faire rapport, je vais te revenir après.» «Oui, mais là c'est à Charlottetown, on se réunit "now" et on va se revoir dans six mois. On peut-u régler le dossier?» Et souvent, entre présidents, on peut le faire beaucoup plus facilement.

On a aussi, je le disais, un organisme... puis on est à peu près uniques, je pense, dans les ordres. On a décidé il y a plus de 20 ans d'arrêter de faire de la compétition sur la formation continue des professionnels. On s'est fondé un organisme sans but lucratif qui est un peu indépendant, qui est même très indépendant, où il y a deux administrateurs de l'ordre nommés, mais qui sont des administrateurs qui siègent au conseil et qui nous font rapport, deux administrateurs qui viennent de l'association professionnelle, qui avaient aussi des activités de formation continue, et deux administrateurs qui viennent de l'École d'optométrie, notre seule école de formation. Donc, eux, c'est un conseil de six personnes, qui doivent offrir le programme de formation continue, l'administrer et, évidemment, de façon impartiale, non biaisée, étanche aux pressions commerciales. Alors, ça nous assure l'indépendance au niveau de la formation continue.

Nous, comme ordre, on exige d'avoir une formation continue obligatoire jusqu'à hauteur de 45 crédits sur trois ans. On accrédite les cours que cet organisme-là nous présente. Donc, c'est des mécanismes qui vont bien. À partir du moment où cet article de loi là est adopté tel quel, mes deux administrateurs, je suis obligé de les rappeler et je perds l'efficacité de ce système qui a fait le succès de notre formation continue, à l'extérieur de toute pression commerciale, depuis les 20 dernières années. Je pense qu'on perdrait un gros bijou qu'on s'est doté en termes de formation continue, et c'est un des mandats. Et c'est pour ça que notre proposition, c'est qu'il faudrait que l'article s'applique, à moins que l'ordre soit membre votant au sein de l'organisme en question et que les activités de ce dernier visent exclusivement à compléter ou à soutenir les activités de protection du public exercées par l'ordre, dont la formation continue. On ne veut pas en faire un centre de profits, là. On veut s'assurer que c'est en adéquation avec les requis qu'on a besoin en termes d'optométristes et pour le futur, et surtout que ce soit non biaisé et indépendant.

Sur la présence des jeunes, nous, on est d'accord, sans problème. Le seul problème, c'est qu'on ne spécifie pas la durée du mandat du jeune qu'on va nommer, si on est obligés d'en nommer un. Mettons qu'on n'en a pas. Mais on dit : Le jeune doit être nommé pour un mandat d'un an. Si tous nos autres administrateurs sont là pour quatre ans, il faut le renommer à chaque année. Il faudrait minimalement que le jeune qui est nommé ait un mandat égal aux autres administrateurs en termes de durée, en termes de concordance.

L'immunité disciplinaire pour les professionnels lanceurs d'alerte. Bravo! Bravo, c'est génial comme avancée. Il manque juste un élément. C'est que, là, on couvre le côté disciplinaire. Le syndic pourrait protéger le lanceur d'alerte, mais la loi du travail continue à s'appliquer, et l'employeur, l'organisation dans laquelle ce professionnel-là oeuvre pourrait avoir des représailles. Et, à ce moment-là, donc, il faudrait y avoir une adéquation entre les deux lois.

Je termine rapidement sur notre dernier point, qui n'est pas dans le projet de loi mais qui a fait la manchette la dernière fois qu'on est venus en commission parlementaire, sur la RAMQ : c'est les activités de nos partenaires commerciaux, les tiers, qui ont énormément d'influence maintenant dans le domaine et sur lesquels on n'a pas juridiction. Il faudrait qu'on ait juridiction. Et je sais que le gouvernement a un chantier là-dessus. Il faudrait éventuellement, évidemment, s'y pencher, mais pas juste les activités commerciales ici, pensons à la télémédecine, pensons à la télésanté, et donc les professionnels qui font des actes basés à l'extérieur mais qui sont offerts à des patients québécois et/ou qui offrent des services et des produits qui sont réglementés ici mais qui deviennent tout à coup déréglementés si le site Internet est basé à Plattsburgh, parce qu'ils sont disponibles aux Québécois sans absolument aucun contrôle et sur lequel, nous, comme ordre, on n'a aucune juridiction.       Donc, on assiste passivement à l'ubérisation de la télémédecine, ça ne se peut pas, là, il faut protéger le public mieux que ça.

• (15 heures) •

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Dr Michaud. Sûrement que ça va susciter certains questionnements de la part de Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Alors, M. Michaud, M. Laverdière, merci de votre présence en commission parlementaire. Vous avez fait une présentation succincte, mais très claire, très directe. J'aimerais vous entendre sur les mesures qui sont prévues au projet de loi, qui vont venir un petit peu apporter des modifications en matière de gouvernance, surtout quant à la répartition entre le rôle du C.A. et le rôle du président, le rôle du directeur général, puis sur la question de la réduction de la taille du conseil d'administration. On a différents commentaires qui nous ont été formulés depuis le début de la semaine, et quelle est la position de votre ordre sur cet enjeu-là? Puis est-ce qu'il y aurait des impacts à prévoir au sein du modèle de gouvernance de votre ordre?

M. Michaud (Langis) : Merci de la question, Mme la ministre. Évidemment, vous avez eu des avis partagés parce que, comme je le disais, 46 ordres, c'est 46 réalités différentes, puis chacun voit à travers le prisme de sa réalité comme telle. Chez nous, on ne voit pas de problème fondamental à départager le rôle... à dégager un peu le président du rôle qu'il a actuellement de surveillance générale des affaires de l'ordre. Je pense que c'est une façon intéressante de responsabiliser les administrateurs qui sont à l'intérieur. Le fait de réduire le nombre, on est déjà dans ce processus-là en termes d'administrateur. Donc, de leur donner plus de responsabilités va également leur donner un peu plus de travail, un peu plus de rôle, d'un rôle significatif à jouer. Alors, il faudra s'assurer que les bonnes personnes avec la bonne compétence soient là.

Un des grands enjeux qu'on a, c'est de faire comprendre à nos gens qu'ils ne représentent pas une région, qu'ils ne représentent pas une pratique, ils ne représentent pas une organisation. Ils apportent leur bagage professionnel et doivent, au meilleur de leurs connaissances, débattre des enjeux qui touchent notre profession. Ça, c'est un changement dans le schème de réflexion des administrateurs, et il faut y revenir constamment. Et, peu importe la façon qu'on représente... la façon dans laquelle le collège électoral est fait, je pense que ce souci-là doit demeurer, qu'on n'est pas là pour représenter des intérêts particuliers, que ce soit régional, ou de groupes de spécialités particuliers, ou de groupes commerciaux, mais bien d'amener une expérience. Et c'est à la profession, mais au conseil présent, en assurant sa relève — et je suis bien d'accord — à limiter les mandats en termes d'années et non pas en termes de nombre de mandats. Parce que, sinon, je pourrais dire : Ah! j'ai un mandat de 10 ans et renouvelable deux fois. Ce serait très correct, là. L'autre ordre dirait : Deux ans, renouvelable deux fois. Non, ça ne marche pas. Donc, il faut vraiment assurer ce renouvellement-là.

On parlait de la présence hommes-femmes, même chose, ça favorise ces choses-là. Chez nous, on est à 50-50, ou à peu près, là, on est neuf sur 20, femmes, même si on est une majorité de femmes dans la profession. Conciliation famille-travail existe, hein? Quand on parle de féminisation des professions, oui, on a des jeunes professionnels hommes qui s'impliquent beaucoup auprès de leurs familles, et tant mieux, mais c'est encore, malgré tout, beaucoup le rôle... pas le rôle, mais, je veux dire, la réalité des femmes de travailler un peu plus à temps partiel puis un peu plus s'occuper de la famille. Malheureusement ou heureusement, bref, ça se passe comme ça. Donc, de s'impliquer dans un conseil d'administration réduit, où on leur donne plus de responsabilités, il y a un moment de la vie, entre zéro et 10 ans de pratique, là, qui est peut-être moins favorable à ce genre d'implication là.

Mais, tout ça étant dit, c'est le mariage des expériences qui fait qu'on a une bonne chimie à l'intérieur du C.A. et c'est aux administrateurs présents de prévoir leur relève. Moi, je sais déjà qui va me succéder dans deux ans, deux ans et demi, et il faut le préparer. C'est sans présumer du vote du conseil, mais il faut intéresser des gens minimalement, autant sur le terrain que parmi les administrateurs, pour assurer cette relève-là.

Donc, que le président ait moins de rôle de surveillance au jour le jour, que ce soit plus le C.A., d'accord, moi, je n'ai aucun problème avec ça. En bout de ligne, on partage tous la même responsabilité et on travaille tous dans le même sens.

Sur le directeur général, je pense que c'est une bonne chose. De notre côté, on a toujours eu un directeur général. Jusqu'à ce jour, on les garde longtemps, et ils travaillent bien. Tu sais, on met juste une pancarte en avant de son bureau : «Dont feed the animal!» Et donc, à ce moment-là, ça va bien. Mais le directeur général, qu'il ne soit pas présent... Encore une fois, ça dépend des organisations, ça dépend des ordres. Fondamentalement, en termes de bonne gouvernance, je pense qu'il faut que ce soit partagé, comme rôle. Pour les plus petits ordres qui auraient de la difficulté à le faire, là l'office peut jouer un rôle. Il peut y avoir un partage des ressources, un directeur général à temps partiel pour des petits ordres.

Et, à ce niveau-là, je pense que l'office, un jour dans une restructuration, pourrait peut-être avoir avantage à se positionner en secteur. Par exemple, en santé, on a des réalités qui sont peut-être différentes du génie, qui sont peut-être différentes d'ailleurs. Mais d'essayer d'administrer les 46 ordres d'un coup, c'est prendre la bouchée un peu grosse, alors que de développer une expertise interne par secteur pourrait peut-être faciliter l'avancée de certains dossiers et tout en maintenant une coordination latérale à ce niveau-là.

Alors, règle générale... Je ne sais pas si je réponds à votre question, là. J'ai été peut-être plus long que prévu, mais...

Mme Vallée : Non, mais, en fait, en fait, vous avez abordé un enjeu qui est intéressant, parce que, lorsque vous dites : Nous, notre défi, c'est que les administrateurs comprennent qu'ils ne sont pas là pour représenter une région, pour représenter un champ de pratique, mais bien pour les fins de voir à la protection du public, ça m'amène à la question... On a eu comme recommandation, hier, de la part de la Fédération des chambres de commerce de modifier le texte actuel de l'article 23 pour spécifier que l'unique mission des ordres, et non la principale mission des ordres, est la protection du public, parce qu'il semble... Et, encore là, c'est très variable d'un ordre à l'autre. Certains ordres nous ont dit : Nous, il n'y a pas cette préoccupation-là. Mais cette préoccupation de représentation régionale ou représentation de certains champs de pratique, on l'a vécue et on l'a vue lorsque des amendements ont été apportés à la Loi sur le Barreau, il y a deux ans. Il y avait eu des petits grincements de dents à l'interne, parce que des membres disaient : Bien là, nous, on n'est plus représentés, alors que le Barreau est là pour représenter le public et non pour représenter les membres au sein de leur ordre. Et je ne sais pas... Ce n'est pas quelque chose qui a été abordé, mais, compte tenu de la réflexion que vous avez faite, j'aimerais ça vous entendre sur cette proposition. Est-ce que vous croyez que c'est une proposition qui est intéressante?

M. Michaud (Langis) : Je pense que c'est fondamental que les administrateurs comprennent. Je n'ai pas étudié à fond leur proposition. Puis, que ce soit l'unique mission au lieu de la principale, bon, encore une fois, le diable étant dans les détails, je peux me draper de la protection du public pour toutes sortes de choses. Et on a vu certains ordres professionnels le faire et agir en termes d'association professionnelle pour défendre leurs membres tout en disant : Ah! c'est pour la protection du public que je le fais. Je ne pense pas que c'est ça qu'on veut. Ça existe probablement dans des situations où il n'y a pas une association professionnelle forte. On est chanceux, nous, dans notre cas, on a une association professionnelle forte qui remplit son mandat, et qui le remplit très bien, de défendre ses membres. On en est victimes même, parfois, mais ils jouent leur rôle.

Alors, dans certaines provinces, je sais qu'ils ont obligé les ordres à se séparer en deux, c'est-à-dire : on va établir de façon obligatoire une association professionnelle et on va établir de façon obligatoire un «college» ou un ordre professionnel, et on va séparer le rôle des deux. Est-ce qu'il faut aller là? Encore une fois, c'est une question de moyens, une question de budget, c'est une question que, si vous avez 500 membres dans une profession, ils ne pourront pas financer les deux, c'est clair. Est-ce que l'office peut aider de ce côté-là? Est-ce qu'il peut y avoir des regroupements? Mais il faut qu'il y ait une chose qui soit claire : un ordre n'est pas une association, n'est pas là pour défendre ses membres. C'est là pour défendre le public, et, s'il faut l'écrire plus gros, plus large, je n'ai aucun problème avec ça. Et il faut se doter des moyens pour y arriver aussi.

Mme Vallée : Pour ce qui est de l'augmentation du nombre d'administrateurs nommés, d'administrateurs nommés en provenance du public, est-ce que vous avez des observations particulières? Parce qu'on a fait certaines représentations quant au pourcentage idéal. C'est assez variable. Est-ce que, pour vous, il y a un enjeu particulier?

• (15 h 10) •

M. Michaud (Langis) : Le principal enjeu, encore une fois c'est une question de ressources de notre part et de la part de l'office. Plus on va rajouter des gens du public — je n'ai aucun problème là-dessus — mais plus il va falloir faire de la pédagogie. Donc, plus il va falloir s'assurer également que les gens qui viennent siéger sur nos ordres soient intéressés, compétents et soient prêts, puisqu'on réduit le nombre d'administrateurs, à mettre plus l'épaule à la roue aussi. Alors, ça vient, tout ça, ensemble.

Et l'office devra leur fournir les moyens de jouer leur rôle d'administrateurs nommés, comme nous, on devra leur donner les moyens, comme tous les autres administrateurs. Ça, c'est le deuxième principe qui heurte les gens qui sont là, dans le système, depuis un certain nombre d'années. C'est que les administrateurs nommés et les administrateurs élus sont tous sur un pied d'égalité devant Dieu et devant tout le monde, doivent avoir la même responsabilité et les mêmes rôles. Et ça, c'est une nouvelle réalité, même pour les administrateurs nommés, qui se découvrent : Tiens! Ah! tiens, je suis comme un administrateur élu maintenant. Oui. Oui, parce que c'est une voix comme une autre.

Mais, pour votre question, je pense que ce qui est suggéré dans le projet de loi, si ce n'est pas dans le code, correspond à une belle réalité. Comme un tiers, à peu près, là, je pense que ça, c'est jouable, c'est gérable. Il faudrait aussi voir à ce que le mandat des administrateurs nommés soit équivalent à celui des administrateurs élus et... Parce qu'il faut les former à notre réalité propre. Il y a des termes techniques, il y a des actes techniques, il y a des choses que moi, si j'arrive demain matin, là, en ingénierie... là, j'ai de la misère à faire tenir deux cure-dents un sur l'autre, ça fait qu'il va falloir qu'ils m'expliquent longtemps comment ça marche leur affaire. Alors, évidemment, le temps qu'on passe en pédagogie, on ne le passe pas à autre chose et, comme les ressources sont limitées, plus on aura de gens du public, bien, à ce moment-là... ou ils sont formés avant avec des champs d'intérêt particuliers, puis ils nous arrivent pratiquement presque formés, puis on a juste un petit peu de formation d'appoint à faire. Mais, je vous dirais un peu, c'est comme les candidats étrangers, là : si leurs diplômes sont reconnus puis qu'on a juste une formation d'appoint à faire, ça va. Mais, s'il faut les former à partir de la base, plus on va en avoir, plus ça va prendre des ressources qu'on n'aura pas pour assumer notre rôle autrement.

Mme Vallée : Vous avez abordé la question du rôle que pouvaient jouer les membres du conseil d'administration au sein d'autres organisations. Pour vous, vous soulevez un drapeau en disant : Attention au sein des ordres qui oeuvrent dans le milieu médical, la présence au sein d'autres organisations contribue à la protection du public, permet des échanges, permet des échanges avec des collègues à l'intérieur du Canada, à l'international, et donc on ne voudrait pas perdre cette expertise qui permet à l'ordre de maintenir sa protection du public. Et vous avez également donné l'exemple de votre organisation.

Donc, quelles seraient les balises qui pourraient être utiles pour les critères d'indépendance? Je pense que vous comprenez ce qui est sous-jacent à cette modification législative là, c'est qu'on ne voudrait pas... membre d'un syndicat ou d'une association qui va venir faire valoir les représentations parce que ce n'est pas le forum approprié.

Maintenant, l'objectif, ce n'est pas de priver les ordres d'une connaissance et d'une capacité aussi d'échange de bonnes pratiques avec d'autres membres de leurs professions.

M. Michaud (Langis) : Je vais laisser Me Laverdière répondre plus précisément à celle-là.

M. Laverdière (Marco) : Oui. Alors, comme vous le soulignez, effectivement on est favorables à l'orientation générale de la mesure. La seule chose qui pose problème, et c'est pour nous, mais c'est aussi, je pense, pour la plupart des ordres, là, c'est vraiment le lien qu'on peut avoir avec ce qu'on appelle les fédérations canadiennes des ordres dans différents secteurs, dans différentes professions. Et effectivement ces organisations-là, bien souvent, soutiennent l'activité des ordres sur différents... au plan de l'harmonisation réglementaire, au plan de la mobilité. Donc, c'est un peu, jusqu'à un certain point, une forme de prolongement de l'activité de l'ordre mais à l'échelle canadienne, ou à l'échelle nord-américaine, ou, dans certains cas, même internationale. Donc, on ne voit pas de difficulté à ce qu'il y a ait, là, la possibilité d'administrateurs, le président, entre autres, qu'il puisse siéger sur les conseils d'administration de ces instances-là.

Ce qui pourrait être au plan plus technique, ce qui pourrait être prévu au code, en termes de... Si on veut faire la part des choses entre les organisations sur lesquelles on ne voudrait pas qu'il y ait d'administrateurs qui siègent et les organisations pour lesquelles on accepterait que ça soit le cas, c'est quand l'ordre est membre d'une organisation, membre institutionnel. Par exemple, on est membre institutionnel du CIQ, évidemment. Alors, on a le président ou un autre administrateur qui peut siéger au CIQ. Quand c'est la même chose au sein d'une organisation comme une fédération canadienne ou nord-américaine, bien, il devrait y avoir la même logique, en quelque sorte, on devrait pouvoir avoir un administrateur qui est là.

Évidemment, le deuxième critère, c'est l'idée de la compatibilité de la mission ou de l'incompatibilité de la mission, là. A priori, un ordre ne devrait pas être membre institutionnel d'une organisation qui a une mission ou une activité incompatible avec sa propre mission. Donc, dès le départ, il y a déjà cette barrière-là, mais, si jamais ça arrivait, évidemment, le cumul des fonctions ne devrait pas être permis.

Donc, l'orientation de la proposition qu'on fait, c'est vraiment dans ce sens-là, pour ne pas écarter, donc, ces liens organiques ou organisationnels là qui, à notre expérience, et je pense que nos collègues pourraient en témoigner aussi, ont été, la plupart du temps, très fructueux, surtout dans les dossiers qui ont occupé beaucoup, comment dire, d'espace ces dernières années, le dossier de mobilité, entre autres. Ces forums de discussion là sont extrêmement importants. Si on envoie des gens là-bas qui ne sont pas branchés très directement sur le conseil d'administration à l'ordre, ça va compliquer les choses. Ce n'est pas impossible de le faire, mais ça va compliquer les choses.

Mme Vallée : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Me Laverdière. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci, M. le Président. Alors, bonjour à vous deux, M. Michaud, Me Laverdière. Merci pour vos commentaires jusqu'à maintenant. Ma première question portera sur votre opinion sur l'immunité, où vous êtes entièrement d'accord par rapport à ce que quelqu'un pourrait venir dénoncer une pratique non permise, ou illégale, ou déviante, et que vous allez... vous demandez même d'aller plus loin, c'est-à-dire protéger contre des représailles. Effectivement, il y a, j'imagine, certaines personnes qui sont employées ou qui ne sont pas dans des postes de pouvoir qui ont un environnement administratif qui pourraient se retrouver : oui, je vais avoir l'immunité, mais je vais perdre ma job. Et avez-vous une idée de comment ça pourrait s'appliquer, de protéger, justement, à ce niveau-là, là, quelqu'un qui dénoncerait une situation inacceptable?

M. Michaud (Langis) : Je pense qu'il y a déjà des exemples dans l'administration publique, là, dans la réglementation des marchés publics, du secteur municipal, selon la Loi des normes du travail, ou celles prévues par le projet de loi n° 87 qui arrime justement les lois du travail avec d'autres prérogatives. Alors, je pense qu'il faudrait regarder de ce côté-là. Je ne sais pas si Me Laverdière veut compléter là-dessus.

M. Laverdière (Marco) : Oui. Au plan strictement technique, ça m'apparaît, entre guillemets, relativement simple, parce qu'effectivement la Loi sur les normes du travail intègre déjà des dispositions qui protègent les lanceurs d'alerte dans certains contextes, les marchés publics, le secteur municipal, le secteur gouvernemental. Alors, pour le volet, donc, des salariés qui sont assujettis à la Loi sur les normes du travail, ça me semble relativement facile, enfin, en termes, si on veut, d'intervention législative.

Ce qui est peut-être un peu plus compliqué, et ça, ça rejoint les optométristes, mais ça rejoint aussi d'autres professionnels, c'est ceux qui sont travailleurs autonomes et qui sont dans des organisations où, bon, ils ont un certain lien, comment dire, de dépendance de l'organisation en question sans nécessairement être salariés, et là c'est clair que ce n'est pas par la Loi sur les normes du travail qu'il faudrait procéder, c'est probablement par une autre forme de protection législative. S'il y a besoin d'un complément d'étude, moi, je... on n'a pas exploré la question, là, de façon très approfondie à ce stade-ci, mais certainement qu'il y aurait moyen, je pense, de prévoir une forme de protection pour couvrir également les travailleurs autonomes, et je suis sûr qu'avec nos collègues on pourrait faire des propositions au plan technique là-dessus.

M. Michaud (Langis) : De façon très concrète, pour comprendre, je suis un optométriste qui travaille comme travailleur autonome dans le cadre d'un groupe commercial XYZ. Je suis témoin, dans le cadre de mes activités professionnelles, d'un certain nombre de manques soit au code de déontologie, ou même à de la pratique illégale pour des raisons commerciales x, y, z. C'est établi en système dans cette entreprise-là. Mon ordre n'a toujours pas, «by the way», le droit de regarder... d'intervenir auprès de cet organisme-là qui est un tiers. Mais, si je dénonce et que je suis en contrat avec cette organisation-là, soit qu'ils mettent fin à mon contrat et qu'ils me mettent à pied. Ils ont 20 succursales dans la région où j'habite, c'est clair que je ne pourrai pas travailler dans aucune de ces 20 succursales là. Et le mot va se passer que je suis un faiseur de trouble, il n'y a pas aucune autre organisation qui va m'employer, il va falloir que je m'exile un peu ailleurs. Si je ne le fais pas, je contreviens à mon code de déontologie qui dit que je dois dénoncer toute situation qui me semblerait illégale au plan déontologique ou au plan de la pratique. Arbre et écorce, là.

Alors, il faut protéger ces gens-là de représailles, entre guillemets, potentielles de la part notamment des groupes qui pourraient être non professionnels ou des tiers qui détiennent, là, le contrat d'employabilité avec le professionnel.

Mme Jean : Merci. Vous parlez justement de la possibilité d'aller plus loin lorsqu'on pourrait s'apercevoir que c'est un système, c'est systématisé dans une organisation. Et je comprends qu'actuellement l'office ou l'ordre n'a pas le pouvoir ou la possibilité d'agir à ce niveau-là. Donc, vous avez la possibilité d'agir sur des individus membres et non pas sur un cabinet ou une firme. Je comprends que, dans le projet de loi, il y a une ouverture à ce niveau-là et je comprends, avec votre commentaire, et vous me le confirmerez, que c'est quelque chose que vous pensez qu'il serait utile, pour la protection du public, de pouvoir en arriver là.

• (15 h 20) •

M. Michaud (Langis) : Très utile. Et, comme on le disait en discussion interne, demain matin, un groupe en particulier a des comportements qui nous semblent inquiétants, on demande leur collaboration pour regarder, il dit : Moi, je ne suis pas un optométriste, je suis un groupe commercial, je n'ai pas d'affaire à te répondre. Si, demain matin, comme office ou comme ordre, j'avais la possibilité de dire : Bien, écoute, moyennant telle procédure, je pourrais mettre fin à tes activités jusqu'à tant que tu collabores avec moi, oh! ça vient de changer la donne. Évidemment, je n'aurai pas les millions de ces gens-là pour aller jusqu'en Cour suprême à chaque fois qu'ils vont faire quelque chose qui me semble croche, mais, au moins, si j'ai une action directe par certains niveaux, un pouvoir d'enquête, un pouvoir de réquisition de documents, un pouvoir de dire simplement : Montrez-moi vos contrats que vous passez avec l'industrie pour savoir qui est le vrai signataire, qui est le vrai vendeur, qui est le vrai intervenant, là, là je pourrais remplir mon rôle, en termes de public.

Et c'est vrai pour les entreprises commerciales qui sont basées ici, qui sont de plus en plus présentes. On vit, dans notre domaine, comme dans bien d'autres en santé, une intégration verticale, où les grands joueurs qui sont mondiaux se regroupent ensemble, et là, quand il n'y a plus de petits poissons à manger, parce qu'ils sont rendus, tout le monde, trop gros, ils regardent vers le bas, puis ils disent : On va aller directement au consommateur et on va éliminer, «by the way», les professionnels. On leur attache les mains avec des contrats à gauche, à droite, l'arbre et l'écorce encore une fois. Donc, ça, ça se fait, et on est passifs devant ça.

L'autre volet, c'est que ces mêmes groupes là deviennent extrêmement présents sur le Net. On a un groupe qui est, entre guillemets, propriétaire d'une chaîne d'optique, qui n'est ni opto ni opticien, et ni l'Ordre des opticiens ni l'Ordre des optos a juridiction sur lui. Il vient d'acheter — ça a été publicisé — Beyond the Rack, qui est en faillite, qui est un site Internet transactionnel. Ce n'est certainement pas pour vendre des robes, hein, on s'entend. Je ne peux rien faire contre lui. Je ne peux rien faire contre lui. Si je fais... si jamais je fais quelque chose, il va déménager le siège social à Plattsburgh. Je peux encore moins faire quelque chose contre lui.

Les lois, malheureusement, sont faites en se basant sur là où le vendeur se situe. Il va falloir commencer à raisonner à un moment donné que tout le monde est impacté dans les moyens de communication. Il va falloir faire des lois où on dit : Non, non, la transaction, là, elle doit prendre effet là où le client est, pas où le vendeur situe son siège social. Que le vendeur soit à Hong Kong, aux États-Unis, à Toronto ou au Québec, si c'est un Québécois qui achète, il faudrait que ce soient les lois du Québec qui s'appliquent. Et ça, c'est fondamental. Ne fut-ce que ça, ça vient d'ouvrir toute une porte aux ordres professionnels d'agir. Parce qu'actuellement, là, ils se réfugient dans... juste l'autre bord de la frontière, puis les tribunaux, jusqu'à maintenant, ils ont dit : Bien, il est de l'autre bord de la frontière, vous n'avez pas juridiction. Et ça, je ne peux pas aller trop loin, malheureusement, parce qu'on est en Cour suprême là-dessus contre un groupe, mais disons que ça nous donnerait, déjà ça, une certaine ouverture à remplir notre rôle de protection.

Mme Jean : Merci. Bien, il nous reste une minute et des poussières avant que vous nous laissiez. Vous avez mentionné que vous aviez sur votre conseil d'administration 50 % de la parité hommes-femmes. Ce n'est pas quelque chose d'évident. Est-ce que je peux savoir comment vous y êtes arrivés? Est-ce qu'il a des mesures particulières que vous avez mises en oeuvre pour arriver à ça ou c'est tombé par magie?

M. Michaud (Langis) : Les planètes se sont bien alignées. On est 60 % de femmes, 40 % d'hommes en optométrie. L'homme est pratiquement en voie d'extinction, là, dans les cohortes qui ont gradué dans les 10 dernières années, là, à moins de 20 %. Donc, par la force des choses, par l'attrition, ça se fait, le renouvellement des mandats.

Et, comme je vous dis, je pense que c'est le rôle de chacun des administrateurs d'intéresser d'autres membres à venir partager cette expérience enrichissante de protéger le public, et d'appointer des gens qui nous semblent intéressants à gauche et à droite, et de faire attention à ce ratio, qui est idéal, de 50-50. Je pense que ça tombe sous le sens. Il faut juste être un peu attentif à ce genre de choses là et mettre en place les incitatifs qu'il faut pour y arriver.

Mme Jean : Merci. Il reste encore 30 secondes. J'en avais une à poser, mon Dieu! c'était quoi?

Le Président (M. Ouellette) : Ah! mais M. le député de Borduas va sûrement la poser pour vous.

Mme Jean : Non, non, j'en avais... Bien, il reste 20 secondes.

Le Président (M. Ouellette) : Bien, vous avez un commentaire?

Mme Jean : Je voulais... Vous parliez de lourdeur administrative pour l'uniformité des normes ou du code. Moi, j'aurais pensé le contraire, c'est-à-dire que, si on pouvait uniformiser, bien, ça devient moins lourd et moins compliqué d'implanter des nouvelles normes, parce que l'expérience de l'un peut se transférer à l'autre.

M. Michaud (Langis) : Oui et non, ce n'est pas notre expérience. Je vous dirais que... En tout cas, ce qu'on en perçoit, je pense que c'est beaucoup un manque de ressources à l'intérieur de l'office, à l'intérieur de certains ordres aussi. Il n'y a pas de mauvaise volonté là-dedans du tout, là, c'est juste le volume d'activité qui fait qu'à un moment donné, là, vous êtes en bas de la pile, vous êtes en haut de la pile, puis, quand ça crie un petit peu trop fort à quelque part, bien là, vous remontez dans la pile. Mais, tu sais, entre le... Mettons que tout le monde s'entend, là, il y a un consensus avec tous les partenaires possibles et impossibles autour d'un projet. On dépose ça à l'office demain matin. C'est étudié au niveau juridique. Ça va passer la consultation. Ça s'en va au cabinet du ministre. Ça va être adopté après soit par décret... une loi, là, c'est encore pire, mais mettons que c'est un règlement : rien en bas de deux à trois ans. On ne peut pas réagir comme ça, parce que les entreprises sur le terrain, là, ils réagissent pas mal plus vite que ça.

Alors donc, d'avoir... Par secteur, je pense que c'est une première chose. Si l'office pourrait se doter de moyens d'analyse par secteur, c'est une chose. Mais d'avoir... Arrêtons de rajouter des couches, là, enlevons des couches, puis allons plus rapidement au fond des choses, puis on va pouvoir mieux servir le public.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Dr Michaud. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Dr Michaud, Me Laverdière, bonjour. Bienvenue à l'Assemblée. Merci pour votre contribution aux travaux de la commission.

Deux à trois ans, ça, c'est quand ça va bien.

M. Michaud (Langis) : Quand ça va bien. J'ai dit que tout le monde s'entendait, c'est consensus.

M. Jolin-Barrette : Tout le monde s'entend.

M. Michaud (Langis) : Dès qu'il y en a un qui lève un drapeau, bien là, vous êtes partis pour quatre, cinq ans.

M. Jolin-Barrette : C'est ça. Je voudrais qu'on revienne sur... Vous parliez de la télémédecine lors de votre intervention. Donc, j'imagine, ça va avec le concept, dans le fond, des chaînes qui s'établissent à l'extérieur puis la consultation. Mais c'est quoi, l'impact pour la protection du public, la télémédecine, dans le fond, par rapport au fait qu'ils ne voient plus un professionnel, les gens?

M. Michaud (Langis) : Je vais commenter rapidement, je vais laisser Me Laverdière compléter là-dessus, parce qu'il siège sur un groupe qui s'est intéressé particulièrement à ces aspects-là.

Je vous dirais, c'est une relation d'abord de responsabilité professionnelle. Quelqu'un qui est basé à l'extérieur du Québec mais qui rend un service professionnel via Internet à un patient du Québec, la responsabilité professionnelle... Est-ce que, un, il a le droit de pratique? Est-ce qu'il a le même droit de pratique dans cet endroit-là qu'ici? Si jamais ça va mal, est-ce qu'il y a un recours? Puis on pense à de la médecine, mais on pense à de la psychologie, on pense au notariat, on pense à des avocats, on pense... Tous les services professionnels, demain matin... Nous, dans notre domaine, d'ici cinq ans, il va y avoir des examens possibles, bons ou pas bons, là, par Internet, au niveau de l'examen de la vue, faits par quelqu'un de Chicago, automatisés. Le recours du patient, il est lequel? C'est là qu'il peut être lésé, si jamais il y a un problème. Parce que le professionnel, il n'est pas enregistré ici. Encore une fois, moi, je n'ai pas juridiction sur lui, comme ordre professionnel. Je ne sais même pas s'il a les qualifications pour rendre le service sur lequel il prétend avoir des compétences.

Alors donc, qualifications, qualités du service et recours, sans mentionner tout le reste qui découle par la suite.

M. Laverdière (Marco) : Dr Michaud a mis la table, là, je vais essayer d'être assez succinct là-dessus, mais, pour vous donner l'idée de ce que c'est en ce moment, en fait, depuis les années 30, où il commençait à y avoir des litiges sur, par exemple, la vente de médicaments par catalogue — hein, à l'époque on ne parlait pas de télésanté ou de télémédecine, là, mais ça existait quand même, cette idée-là qu'on puisse vendre des biens réglementés à distance — les tribunaux québécois ont eu une approche assez civiliste là-dessus, en cherchant, dans le fond, le lieu de formation du contrat pour déterminer quelles lois sont applicables. Et, le lieu de formation du contrat, ils l'ont, de façon constante, au plan de la jurisprudence, trouvé là où se trouvait celui qui proposait le service ou le bien.

Ce qui veut donc dire que quelqu'un qui, aujourd'hui, rend des services ou vend des produits réglementés à des Québécois, à des résidents québécois, lorsque cette personne-là se trouve à l'extérieur du Québec et, donc, offre ces services ou ces produits-là, elle n'est pas soumise aux lois québécoises, et ça pose donc un certain nombre de problèmes d'accès au recours pour les patients ou les clients dans les cas où il y a des difficultés avec ces fournisseurs de services ou de produits là. Et, en ce moment donc, il y a peu de chances que, le recours, ils le trouvent au Québec. S'ils veulent l'exercer, le recours, ils vont devoir l'exercer au lieu où se trouve ce fournisseur-là. Et évidemment ça complique beaucoup les choses pour ces personnes-là.

Donc, au Québec, on a une forme... — et je m'intéresse à ça, là, au plan académique aussi — on a un certain vide juridique sur cette question-là. Il y a une disposition, dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux, qui concerne la télésanté mais qui ne s'applique qu'aux services rendus par les établissements, mais, dès qu'on sort des établissements, il n'y a pas de règle très claire là-dessus. Certains ordres ont pris des positions de principe, je dirais, mais évidemment ça ne crée pas du droit et ça ne donne pas nécessairement accès au recours tant que la jurisprudence actuelle des tribunaux est ce qu'elle est.

• (15 h 30) •

Donc, ce qu'on vous soumet aujourd'hui... en fait, évidemment, ce n'est pas l'objet du projet de loi n° 98, on comprend bien, mais ce qu'on soumet aujourd'hui, c'est que, dans la réflexion qu'il faut avoir à la suite de la recommandation de la commission Charbonneau sur la possibilité pour les ordres d'assujettir des firmes de services professionnels, bien, il faudra aussi, peut-être, se demander lesquelles firmes de services professionnels : uniquement celles qui sont au Québec ou également celles qui seraient à l'extérieur du Québec et qui offriraient des services à des Québécois, dans un cadre de télémédecine, par exemple? Alors, ça, évidemment, ce n'est pas un dossier qui est facile, on le comprend bien, il y a sûrement une question d'harmonisation des lois avec les autres juridictions canadiennes, ne serait-ce que ça. Mais il y a sûrement une réflexion à avoir. Parce que, là, nous, le Dr Michaud l'a évoqué, on a un dossier judiciaire en cour, on débat de ces questions-là dans un contexte où il y a peu de paramètres. Les tribunaux s'attachent à la jurisprudence traditionnelle là-dessus, qui a été développée à une autre époque, et ça donne un résultat qui n'est peut-être pas à la hauteur, finalement, de l'époque actuelle, finalement, sur ces questions-là.

M. Jolin-Barrette : Sur la question de l'immunité, vous liez ça avec la protection du travailleur, de ne pas perdre son emploi dans... supposons qu'il travaille pour une grande entreprise. Ça s'applique bien quand c'est un salarié. Quand on est en matière de travailleur autonome, est-ce que vous avez une proposition pour protéger cet individu-là? Parce que, s'il est travailleur autonome et qu'il a son cabinet à l'intérieur de la chaîne, puis qu'ils disent : On fait la résolution de ton contrat... En fait, je cherche un moyen d'assurer sa protection. Est-ce que vous avez des pistes de solution là-dessus?

M. Laverdière (Marco) : Je serais d'accord qu'au plan technique, là, ce n'est pas quelque chose d'évident, parce qu'on n'a pas le même encadrement juridique qu'on a pour les salariés. C'est un encadrement pour les salariés, là, qui est assez bien connu, il y a une loi-cadre, là, si on veut, la Loi sur les normes du travail. Pour les travailleurs autonomes, on n'a pas de proposition technique aujourd'hui à vous soumettre. On pourrait la faire suivre, par ailleurs, là. Moi, je m'en... je peux en discuter avec les collègues. Je pense intuitivement qu'une disposition comme celle-là devrait se trouver dans le Code des professions pour ce qui est des travailleurs autonomes. Et je pense que ça devrait être une disposition pénale. Maintenant, le libellé, là, je ne peux pas vous donner ça aujourd'hui, là. Nos travaux ne nous ont pas conduits, là, à rédiger ce genre de libellé.

M. Jolin-Barrette : Sur la question de l'élargissement du champ de compétence du commissaire, j'ai posé la question à plusieurs groupes, est-ce que, pour un candidat formé au Québec... Vous avez uniquement... une seule institution d'enseignement. Est-ce qu'il y a déjà eu des cas d'une personne, qui aurait fait sa scolarité en partie ailleurs puis une partie à l'institution d'enseignement, qui aurait été admissible au nouveau champ de compétence du commissaire?

M. Michaud (Langis) : À ma connaissance, non. En fait, il y a quelque chose comme 24 écoles d'optométrie en Amérique du Nord, qui sont toutes reconnues par le Council on Optometric Education, qui est un organisme réglementaire émanant du ministère de l'Éducation des États-Unis d'Amérique. Et notre école fait partie... elle vient d'ailleurs d'être renouvelée pour huit ans sans condition, là, par cet organisme-là. Donc, nos diplômés, comme tous les autres diplômés, sont reconnus au même niveau. Donc, nos diplômés peuvent aller faire les «boards» américains, peuvent aller pratiquer, une fois que ces «boards» là sont acquis, partout en Amérique du Nord.

Et on applique le même principe de permis sur permis. Alors, n'importe qui qui a été formé en Amérique du Nord, dans une école accréditée, qui demande... Parce qu'il y a quand même 250 ou 300 Canadiens qui étudient dans les écoles américaines, dont un certain nombre reviennent au Québec pratiquer. Alors, s'ils ont un diplôme optométrique équivalent à celui de Montréal, par une école accréditée, il n'y a pas de question, on le reconnaît et on donne un permis de pratique. Évidemment, il faut qu'ils satisfassent les requis de la loi sur la langue française.

M. Jolin-Barrette : Mais avez-vous eu des demandes de révision...

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas.

M. Michaud (Langis) : Non.

Le Président (M. Ouellette) : On a commencé à prendre des habitudes de Mme la députée de Chicoutimi, M. le député de Borduas?

Donc, merci, Dr Michaud, Me Laverdière — vous êtes bien placé pour renégocier vos conditions de directeur général, avec les bons commentaires que j'ai entendus — représentant l'Ordre des optométristes du Québec. Merci de votre participation.

Une voix : On a dit qu'il ne fallait pas nourrir l'animal.

Le Président (M. Ouellette) : Oui... Non, non, mais je pense que vous vous en êtes chargé tout seul.

Je suspends quelques minutes, le temps de recevoir l'Ordre professionnel des diététistes du Québec, à qui je demanderais de s'avancer. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 34)

(Reprise à 15 h 36)

Le Président (M. Ouellette) : Nous recevons maintenant l'Ordre professionnel des diététistes du Québec, par le biais de sa présidente, Mme Paule Bernier, qui va nous présenter les gens qui l'accompagnent. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation — je pense que vous étiez présente lors des présentations précédentes — et après il y aura un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. Donc, Mme Bernier, à vous la parole.

Ordre professionnel des diététistes du Québec (OPDQ)

Mme Bernier (Paule) : Merci. M. le Président, Mme la ministre, Mmes, MM. les députés, M. le président de l'office, au nom des administrateurs de l'Ordre professionnel des diététistes du Québec de même que ses quelque 3 000 membres et en mon nom personnel, je vous remercie de nous recevoir dans le cadre des audiences sur le projet de loi n° 98. À cette fin, je suis accompagnée aujourd'hui de Mme Ann Payne, première vice-présidente de l'ordre; de Mme Lucie Desrochers, administratrice nommée par l'Office des professions et présidente du comité d'éthique et de déontologie des administrateurs; et de Me Sarah Thibodeau, conseillère principale aux affaires juridiques, celle qui a eu la lourde responsabilité de retranscrire sous forme de mémoire le positionnement opéré par le comité sur la gouvernance ainsi que par les instances décisionnelles de l'OPDQ. Nous accompagne également, bien entendu, Me Annie Chapados, notre directrice générale et secrétaire de l'ordre. Vous avez donc devant vous les représentants d'une gouvernance saine et efficiente.

Messieurs mesdames, vous avez reçu copie de notre mémoire, comprenant un résumé exécutif de même qu'en annexe une liste de nos recommandations. Donc, plutôt que d'en faire une lecture intégrale, je me limiterai à commenter succinctement trois de ses volets, qui ne vous surprendront pas : la gouvernance des ordres, le commissaire aux plaintes et, de façon plus générale, l'alourdissement structurel et réglementaire généré par plusieurs dispositions.

• (15 h 40) •

Je disais donc «gouvernance saine et efficiente» parce que son modèle, en place depuis plusieurs années, répond de façon spécifique aux besoins de notre organisation, de notre ordre. Car, s'il est primordial que les principes de saine gouvernance doivent être la base du fonctionnement d'une organisation, le modèle structurel privilégié par un ordre se doit aussi d'être réaliste et viable et donc répondre à sa spécificité. Un ordre comptant quelques centaines de membres et trois employés, à titre d'exemple, ne se gère pas de la même façon que celui qui regroupe des dizaines de milliers de membres et compte des centaines d'employés.

C'est la raison pour laquelle nous sommes d'avis que la reconnaissance ou non à même le Code des professions de la fonction de direction générale — et nous parlons bien ici de la reconnaissance d'une réalité qui existe dans la majorité des ordres, et non de la création d'une fonction — donc cette reconnaissance n'est pas une problématique en soi, c'est bien plutôt l'obligation faite aux ordres d'adopter ce modèle qui est susceptible d'être non viable pour certains.

L'OPDQ recommande que le Code des professions n'oblige pas les ordres à se doter d'une structure organisationnelle qui inclue nécessairement la fonction de direction générale, interdise ou permette le cumul de fonctions et prévoie de quelle façon il peut être mis fin à son engagement. Le Code des professions devrait plutôt prévoir que les ordres se dotent d'un cadre de gouvernance et d'une structure organisationnelle qui répondent à leurs besoins tout en leur permettant d'assurer la protection du public.

La spécificité des ordres, leurs cultures respectives, leur capacité financière, tout comme les trois grands fondements du système que sont l'autogestion, l'autoréglementation et l'autofinancement, seraient bien davantage servis par un encadrement déterminé par objectifs, laissant le soin aux ordres, sous l'égide de l'office, bien entendu, d'en préciser les modalités, car ultimement, et au-delà des grands principes, la protection du public ne pourra s'opérationnaliser efficacement que si le modèle de gouvernance choisi par un ordre est fonctionnel, et il nous semble illusoire de penser que le seul modèle qui est nôtre puisse répondre aux besoins de chacun à chaque période de son évolution.

Pour ce qui a trait du commissaire aux plaintes, qui serait dorénavant un commissaire à l'admission, nous avons pour le moins été surpris de l'ampleur de ses nouveaux rôle et attributions. Outre les questions relatives aux demandes d'équivalence par des personnes formées à l'étranger, nous comprenons donc qu'il aurait également sous sa juridiction toute question relative à l'admission, la norme initiale de formation, donc les étudiants réguliers inscrits à un programme reconnu comme donnant ouverture aux permis, le permis sur permis ou les reconnaissances interprovinciales dans le cadre du chapitre VIII de l'Accord sur le commerce intérieur et traitant de mobilité professionnelle, les arrangements de reconnaissance mutuelle ou reconnaissance internationale négociés avec certains pays, les normes supplémentaires de formation, le cas échéant, par exemple les examens d'entrée à un ordre, la formation professionnelle et les stages, pour ne nommer que quelques exemples.

Or, nous questionnons ici ce déploiement impromptu de la fonction. En fait, l'institution d'un commissaire aux plaintes était, dès le départ, une excellente idée. Nous avons d'ailleurs fait l'objet de deux plaintes eu égard à notre processus de reconnaissance des compétences en vue de la délivrance du permis de l'ordre, le fameux processus de reconnaissance de l'équivalence. Faute de lacune dans le processus que nous gérons, donc le processus géré par l'ordre, les dossiers ont tout simplement été fermés. Cette expérience nous a toutefois permis de conclure à l'insuffisance, pour le commissaire, de pouvoir réel et contraignant à l'égard de tous les maillons de la chaîne menant à l'intégration des candidats étrangers au marché du travail, donc non seulement les ordres, mais les institutions d'enseignement, les employeurs, l'Office de la langue française. Et c'est ce qui nous a amenés à être favorables non pas à un élargissement, mais bien à un approfondissement de la juridiction du commissaire. En d'autres mots, nous aurions misé davantage sur le fait de lui donner des dents plutôt que d'agrandir son jardin.

Qui plus est, et j'en viens au troisième volet de mon intervention, pareil élargissement de rôle et d'attributions aura immanquablement pour conséquence un alourdissement structurel. Comment, en effet, le commissaire pourrait-il développer l'expertise nécessaire à l'examen, par exemple, de la norme initiale de plus de 50 professions à l'égard desquelles, en application des critères mentionnés à l'article 25 du code, on a jugé que le niveau de connaissance nécessaire à leur exercice rendait difficile de porter un jugement sur la qualité de l'acte? 50 professions reconnues précisément comme nécessitant la préservation des principes d'autogestion et d'autoréglementation.

Et, parlant alourdissement, en quoi la reconnaissance du pôle de coordination à même le Code des professions est-il nécessaire? Pourquoi venir cristalliser ici un modèle qui pourrait très bien devenir inefficace ou désuet? Et, parlant toujours d'alourdissement, cette fois réglementaire, bien que nous soyons plus que favorables à une formation adéquate de nos administrateurs et de nos membres en éthique et en déontologie, pourquoi avoir choisi la voie réglementaire, et deux fois plutôt qu'une, puisque nous devons concilier un règlement de l'office en plus d'un règlement de l'ordre? Ce qui m'amène à rappeler que, si toute amélioration nécessite un changement, tout changement n'est pas nécessairement une amélioration.

Ce qui nous apparaît d'autant plus désolant, et je conclurai là-dessus, est que les ordres professionnels ont en effet travaillé ces dernières années à ce qui devait se traduire par le dépôt d'un projet de loi omnibus. Le ministère responsable de l'application de lois professionnelles a préféré une approche parcellaire destinée à répondre essentiellement aux recommandations faites par la commission Charbonneau de même qu'à des préoccupations relatives à l'immigration et à l'intégration au marché du travail. Si l'OPDQ est certes favorable à ces deux objectifs, de même qu'à toute mesure propre à soutenir la crédibilité du système, nous souhaitons également que cet omnibus que nous espérions tant ne sera pas relégué aux oubliettes, car lui seul donnera aux ordres les outils nécessaires pour relever les défis qui nous interpellent depuis de trop nombreuses années, telles l'interdisciplinarité et la caducité du concept de l'ordre à titre réservé. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Bernier. Mme la ministre.

Mme Vallée : Merci beaucoup. Alors, Mme Bernier, merci pour votre présentation. Écoutez, vous avez abordé énormément d'enjeux, énormément d'éléments, là, de la gouvernance et des modifications qui sont apportées au code. Sachez que, oui, nous avons adopté une vision qui est d'aller par une mise à niveau du code, une mise à jour du code par étapes. Et ça ne veut pas dire qu'on ne travaille pas sur les autres enjeux, mais il y a des enjeux, oui, qui méritaient qu'on s'y attaque en raison de différentes problématiques qui ont été soulevées. Répondre à des problématiques soulevées récemment, ça ne veut pas dire ne pas s'occuper des autres enjeux, des autres défis. Puis on en a beaucoup. On en a beaucoup.

Vous faites les vôtres les... Un peu comme le CIQ et d'autres organismes, là, vous considérez que le projet de loi, c'est un peu comme un manque de confiance auprès des ordres. Et ce n'est pas du tout l'état d'esprit dans lequel on est, au contraire, au contraire. Pour nous, les ordres ont un rôle très important, une autonomie importante à préserver, un rôle de protection du public qui est extrêmement important, qui est le rôle premier des ordres professionnels, puis il faut le valoriser, il faut le mettre en valeur.

Par contre, les ordres se sont quand même fait déléguer des fonctions importantes. Cette autonomie-là, c'est une délégation de pouvoirs en matière de réglementation professionnelle. Et, parmi cette délégation de pouvoirs là, bien, il y a les normes d'admission, il y a l'évaluation des dossiers des candidats. Il y a la décision de délivrer... ultimement, la décision de délivrer un permis. Et, lorsqu'on délègue un pouvoir, c'est parce qu'on fait confiance. Mais ça ne veut pas dire que l'État va se dégager complètement et ne va pas mettre à la disposition... ne va pas tenter de mettre en place des mécanismes pour s'assurer que cette délégation-là et que cette autonomie-là se déroule... va bien et se met en oeuvre de façon correcte.

Puis il y a des défis qui... Il y a des problématiques qui ont été soulevées, d'où la création, il y a six ans, du commissaire aux plaintes pour permettre aux étudiants étrangers d'avoir une oreille, d'avoir une écoute, mais il y a aussi d'autres enjeux, d'autres défis. Et il faut s'assurer que cette entrée-là dans le système professionnel, elle se fait de la même façon, c'est-à-dire que le processus est le même tant pour un étudiant étranger qui a fait sa formation au Québec que pour l'étudiant québécois, que pour l'étudiant de l'étranger, parce qu'ultimement l'objectif, c'est de s'assurer que l'individu a les compétences requises, saura assurer la protection du public dans le cadre de l'exercice de sa profession.

Puis, dans votre mémoire, vous écrivez : «...le réel problème en matière d'accès aux professions réglementées, pour certaines d'entre elles, dont les diététistes-nutritionnistes, réside dans la rareté des places de stage disponibles tant pour les étudiants inscrits à un programme donnant ouverture aux permis que pour les diplômés étrangers, de même que dans l'absence de programme d'appoint pour ces derniers.»

• (15 h 50) •

Donc, vous confirmez, dans le fond, par cette affirmation-là, vous confirmez que les personnes qui sont... les étudiants qui sont formés à l'étranger et ceux formés au Québec vivent parfois les mêmes réalités, ont des enjeux, ont des difficultés qui, ultimement, deviennent les mêmes. Et il faut résoudre ces problèmes-là, donc, notamment par la disponibilité du... manque de places de stage. Est-ce que vous ne croyez pas que c'est justement... En tout cas, moi, c'est comme ça que je le vois, le rôle élargi du commissaire aux plaintes. Il va nous permettre, d'une part, par son nouveau rôle de commissaire aux admissions, d'émettre des recommandations, de regarder le processus, par la suite de faire des recommandations au pôle, qui, dans sa structure qui est maintenant établie et élargie, aura comme rôle de trouver les pistes de solution pour éviter que ne se reproduise une situation qui a mené à la plainte au commissaire. Vous ne voyez pas que... Parce que, votre affirmation, moi, quand je l'ai lue, je me suis dit : Bien, justement, là... Vous démontrez que, parfois, là, les étudiants étrangers et les étudiants formés au Québec sont confrontés à des obstacles, et c'est ces obstacles-là, dans le fond, sur lesquels on doit plancher tous ensemble.

Mme Bernier (Paule) : Alors, la problématique des stages, elle est partout dans les universités ou les programmes qui requièrent un stage lors de formation. Pour nous, les stages sont intégrés, n'arrivent pas à la fin du baccalauréat. Par contre — je veux juste faire une parenthèse — j'ai mentionné que nous avons eu deux plaintes et que les plaintes ont été fermées parce que les échanges avaient lieu avec les universités, et ça avait trait justement à la formation d'appoint. Alors, ça, c'est une chose.

Pour ce qui est de la problématique de stage et de la formation en général, nous avons deux grands chantiers, à l'ordre. Le principal est celui sur la problématique de stage, en partenariat avec les trois universités qui dispensent le cours, le ministère de l'Éducation, le ministère de la Santé et, bien sûr, l'ordre, et nous avons analysé l'ensemble de l'environnement qui est propre à la nutrition et la diététique, et nous sommes arrivés, en bout de piste, à une liste d'actions, de pistes d'action, et nous en sommes à déployer un calendrier. Et peut-être que je pourrais laisser Mme Payne continuer, puisqu'elle a activement participé aussi à ces travaux.

Mme Payne(Ann) : Merci. D'accord. Alors, avant d'aller davantage sur ce grand chantier là, je suis, moi, responsable depuis maintenant 25 ans du volet pédagogique et administratif des stages en nutrition à l'École de nutrition de l'Université Laval, et je profite de l'occasion peut-être pour vous donner certains éléments d'information qui sont contextuels à la sollicitation des places de stage, qui, je l'espère, pourront peut-être nourrir la suite de vos réflexions quant aux barrières à l'admission en général des candidats québécois, mais en particulier des candidats étrangers.

Alors, Mme la présidente le disait très bien, au Québec, il y a trois universités qui dispensent le programme de nutrition, alors c'est l'Université Laval, Montréal et McGill. Ce sont des programmes qui sont contingentés en raison des places de stage. Alors, ceci veut dire qu'on refuse d'excellents candidats québécois, faute de places de stage. Les stages, comme Mme la présidente le dit, sont intégrés au programme de formation, donc il y a une alternance théorie-pratique, et se font majoritairement dans les établissements du réseau de la santé et des services sociaux, dont les CHU et maintenant les CISSS et les CIUSSS affiliés à nos universités respectives, en raison, évidemment, de la spécificité de nos activités professionnelles. Et ces stages-là sont supervisés par nos diététistes qui sont membres de l'ordre.

Donc, quand un candidat, notamment étranger, arrive dans mon bureau pour solliciter une place de stage, suite aux recommandations du comité sur les équivalences, la seule façon pour moi de lui trouver une place de stage, c'est d'attendre qu'une place se libère. Parce qu'évidemment il y a de l'attrition au programme, puis, quand une place se libère, on peut l'attribuer au candidat étranger et, à ce moment-là, suite aux recommandations du comité des équivalences, lui faire un programme de cours théoriques et de courts stages qui sont appropriés à ses besoins de formation.

Je veux profiter de cette opportunité-là pour vous dire aussi l'importance des recommandations du comité... du travail du comité des équivalences, parce que c'est grâce à leurs recommandations que, dans les universités, on peut leur faire le programme qui répond le mieux à leurs besoins. Et je dois vous dire que ce travail-là... Je lève mon chapeau aux gens de ces comités-là parce que ça nécessite de leur part une connaissance très approfondie du contenu des cours et des stages de nos programmes de formation québécois, et aussi pour leur permettre de faire une lecture et une analyse approfondies des dossiers de ces candidats étrangers là. Étant membre d'un comité d'admission au bac en nutrition, j'étudie des dossiers d'admission de candidats étrangers, et c'est particulièrement difficile. Et ils doivent connaître aussi en profondeur les différents secteurs de pratique professionnelle et les responsabilités qui incombent aux nutritionnistes pour pouvoir bien apprécier leurs expériences professionnelles, si on veut leur donner une équivalence de formation.

En dépit de ces recommandations-là, qui sont très pertinentes, moi, je vais vous dire que la barrière la plus importante — et je le vis depuis trois, quatre années, j'ai six étudiants qui sont des candidats étrangers — c'est la barrière de la langue. C'est extrêmement difficile. On leur donne des notions théoriques. On leur trouve les milieux de stage. Ce sont les mêmes milieux de stage, les mêmes cours que reçoivent nos candidats. Ils ont un bon traitement. Et, en dépit de la réussite de ces cours-là, une fois arrivés en stage, l'immersion ne se fait pas. Et j'ai eu à maintes occasions l'obligation de retirer ces candidats-là, sinon je les plaçais en échec, pas faute de connaissances préalables au stage, mais par l'incapacité... la barrière de la langue. Alors, ça, je trouvais ça très important de vous en faire mention.

Et, même si on a exigé de leur part qu'ils suivent des cours et qu'ils réussissent ces cours de français là, évidemment ils ne deviennent pas... ils n'ont pas une parfaite maîtrise. On les ramène puis on essaie de leur trouver des activités sociales pour qu'ils puissent parler la langue et même connaître notre culture alimentaire et québécoise. Alors, ça, c'est un défi pour les universités.

Alors, on parle de difficultés au niveau des places de stage, il y a une problématique. Puis, comme Mme la présidente vous l'a dit, on a fait un grand chantier. Les raisons principales qui peuvent expliquer ces difficultés-là, et c'est pour toutes les... nos trois universités et aussi pour d'autres professionnels de la santé, c'est essentiellement des problématiques de main-d'oeuvre et de conditions de travail. Dans les établissements du réseau de la santé et des services sociaux, il y a un manque d'effectif professionnel dans le milieu, clairement, un manque important. Et, de plus, la charge de travail de nos nutritionnistes qui doivent assurer l'encadrement de ces stagiaires-là n'est pas toujours optimale. Elle est très lourde. Ils ne sont pas dégagés de leurs fonctions. Donc, ils doivent accueillir des stagiaires réguliers et des candidats étrangers. Le mode d'encadrement n'est pas du tout le même, ils font face à des individus fort différents. Leurs congés ne sont pas remplacés.

Alors, vous voyez là tous les défis que nous avons pour assurer, l'ordre et les universités, une formation qui va rencontrer les besoins des candidats étrangers. Alors, c'est avec le ministère de l'Enseignement supérieur, le ministère de la Santé et des Services sociaux que l'ordre a entrepris de faire ce travail-là, et avec les trois universités, et, comme disait Mme la présidente, des pistes d'action ont été identifiées. Mais ce qui est encore plus important, c'est que ça a donné l'occasion aux intervenants concernés non seulement de se parler, mais de se comprendre. Parce que, souvent, on peut parler de nos réalités sans comprendre les réalités respectives. Et ce sont ces personnes-là qui doivent poser des actions. On ne peut pas le faire à leur place. Je parle ici de l'ordre, des universités, je parle du ministère de la Santé, mais je parle des établissements. Et, dans les établissements, on parle des directeurs généraux, des directeurs de l'enseignement universitaire, de directeurs de services multi, de gestionnaires qui doivent être interpellés pour ouvrir des places de stage.

Alors, je dois vous dire que ces travaux-là sont excellents. Ils sont en cours, mais je pense que c'est une belle table et c'est une belle initiative de l'ordre d'avoir demandé l'aide et l'appui de ces ministères-là concernés pour qu'on puisse aller en avant dans cette action-là, mais...

Une voix : Donc, vous dites...

Le Président (M. Ouellette) : Deux minutes. Je le sais que... c'est pour ça. Mais c'est correct.

Mme Vallée : C'est justement, est-ce que vous ne croyez pas que d'institutionnaliser le pôle, qui met autour de la table bon nombre de ministères, bon nombre d'intervenants, un peu comme votre expérience le démontre, pourrait servir non seulement à votre ordre, mais à d'autres ordres pour arriver à trouver des pistes de solution, mettre en place des processus ou mettre... arriver à changer un petit peu les façons de faire? Et ne croyez-vous pas qu'il est opportun d'avoir aussi une vision, quelqu'un qui, d'une façon détachée, peut poser un regard neutre, émettre des pistes de recommandation puis amener tout le monde, comme vous l'avez fait, à échanger, à trouver ensemble les alternatives qui vont permettre de résoudre un certain nombre de problèmes? On parle de places de stage, mais il peut y avoir d'autres problématiques qui seront soulevées dans un contexte d'admission à la profession.

• (16 heures) •

Mme Bernier (Paule) : Donc, effectivement, nous, on a privilégié cette voie-là. Le pôle n'est qu'une façon de regarder les choses. Ce qu'on dit : Pourquoi le cristalliser dans un projet de loi? Les choses, les moyens, les pensées évoluent, les façons de faire évoluent. Pourquoi le mettre dans un projet de loi, quitte à ce que... ça va devenir désuet ou on n'aura pas eu les résultats attendus? Ça va être beaucoup plus difficile de transformer le système s'il faut changer la loi pour avoir l'outil nécessaire pour régler une problématique aiguë de stage. C'est ça qu'on dit. On n'est pas contre le pôle en soi, on est contre l'inclusion dans le Code des professions, qui cristallise cette structure-là aux dépens de d'autres structures qui pourraient être utiles.

J'aimerais céder deux secondes la parole à Me Thibodeau.

Mme Thibodeau(Sarah) : En fait, c'était simplement pour dire que ce qui peut apparaître peut-être dans le mémoire comme une contradiction à l'effet qu'autant les diplômés au Québec que les diplômés étrangers vivent des problématiques... En fait, ce qu'on voulait dire par là, c'est que c'est des problèmes très réels, très concrets. Je pense qu'il y a d'autres organismes aussi qui sont venus dire qu'il y avait un problème structurel parfois de places de stage, et ce n'est pas nécessairement en créant des structures qu'on va les régler, c'est peut-être en trouvant d'autres moyens.

Et, au niveau justement de la problématique, j'ai entendu beaucoup les questions par rapport aux profils atypiques. Je trouve intéressant de quand même se rappeler l'historique, la raison d'être du commissaire aux plaintes en 2009 était vraiment pour s'adresser à la problématique des diplômés à l'extérieur du Québec. Et notre propos, dans le mémoire, c'est de dire : Il n'y a pas de... accessoirement, parce que c'était le règlement sur les équivalences qui s'adresse à la fois à des diplômés hors du Québec et des diplômés québécois, accessoirement le commissaire voudrait regarder l'ensemble des problématiques, mais simplement vous rappeler que, chez nous, et je pense que d'autres ordres l'ont mentionné également, la quasi-totalité, 99,9 %, des gens qui deviennent membres de l'ordre sont des gens qui ont un des diplômes qui donnent un accès direct à l'ordre. Donc, le processus par équivalence, que moi, je comprends... Quand je vous ai entendue dans les dernières journées parler de profils atypiques, il n'y en a pratiquement aucun. Dans les dernières années, on a calculé... dans les cinq dernières années, il y en a eu six, et ils ont tous été acceptés à l'ordre avec les moyens qui sont... que nous avons d'évaluer leur correspondance aux normes de compétence. Donc, le propos par rapport à ces questions-là est peut-être juste de voir... s'il y a des informations dans les rapports annuels des différents ordres professionnels, juste de voir... en voulant inclure le droit de regard du commissaire à l'ensemble des admissions pour aller chercher les admissions atypiques, juste simplement de voir combien de candidats ça peut représenter effectivement. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Me Thibodeau. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bonjour, Mmes Bernier, Payne, Desrochers et Thibodeau. Bienvenue à l'Assemblée nationale et merci pour votre rapport pour l'étude de ce projet de loi.

Je vais continuer dans la même règle, en fait, peut-être pour vous permettre de terminer votre explication par rapport à votre perception du pôle en question. Vous avez apporté une vision qui disait... Vous êtes favorables au commissaire, le pôle et le commissaire, pas mal liés...

Une voix : Le commissaire aux plaintes.

Mme Jean : Le commissaire aux plaintes, le commissaire aux plaintes. Et de le voir élargir son plan d'action vous déplaît, mais vous aimeriez de voir augmenter son pouvoir. J'aimerais que vous approfondissiez votre pensée là-dessus : Quel genre de pouvoir de plus vous verriez au commissaire aux plaintes?

Mme Bernier (Paule) : Son pouvoir à l'intérieur de son champ qui serait celui du domaine des formations atypiques ou des demandeurs d'équivalence, et non pas de l'admission des candidats provenant des programmes universitaires québécois ayant fait un parcours régulier.

Quand on a fermé les deux plaintes, les discussions étaient bien engagées entre les universités et l'ordre. Et c'est un dialogue constant et un mode de recherche de solution pour favoriser l'accès à la formation d'appoint de ces demandeurs d'équivalence là, de ces candidats-là. Ça a été quand même ardu avec les universités qui sont les dispensateurs de cette formation d'appoint là, que ce soit le cours théorique ou par le truchement de stages pratiques. Donc, ils s'organisent pour qu'ils aient une place de stage. C'est quand même ardu. Et, s'il y avait eu un pouvoir de contrainte ou... quelconque, mais on sentait qu'il n'y avait pas nécessairement tous les outils nécessaires à une résolution rapide de ces situations-là.

Mme Jean : Merci. Je comprends que vous avez des plaintes et vous avez fait un processus pour pouvoir solutionner les problématiques auxquelles vous avez fait face.

Mme Bernier (Paule) : C'est des gens qui n'étaient pas satisfaits de l'évolution de leurs dossiers, mais le commissaire aux plaintes a bien réalisé que nous, on avait tout fait. Les équivalences avaient été accordées, il restait à avoir une formation d'appoint. On s'entend qu'en nutrition la nutrition peut être la même en Afrique ou ici. Mais tout l'environnement socioculturel relié à l'alimentation, à la nutrition, plus tout le système des soins... Nous-mêmes, on commence à peine à se remettre du projet de loi n° 10, la restructuration, imaginez quelqu'un qui arrive de l'étranger. Ça, ça fait partie des stages, d'orienter la personne dans le système québécois et de pouvoir échanger et servir les patients en français, dans un français correct. Et tout ça, ça fait partie de l'intégration des nouveaux arrivants.

Mme Jean : Je comprends effectivement qu'il y a une grande problématique au niveau de disponibilité de places pour les stages, problématique d'intégration au niveau de la langue. On a beau être bon en diététiste, on n'est pas nécessairement capable d'oeuvrer, parce qu'on a une barrière de la langue. C'est un problème qui me semble assez complexe.

Et éclairez-moi sur votre résistance à avoir le pôle. Parce que, le pôle, on le voit comme une plateforme, une plateforme où justement... multisectoriel ou multipersonnel, multisectoriel, oui, où il y a des présences des universités, où il y a des présences des ministères, où il y a des présences de personnes qui peuvent, lorsqu'ils font face à une problématique comme la vôtre, faciliter l'identification de la solution, et, s'il, possiblement, avait un genre de pouvoir de mettre en action des solutions étudiées, ce ne serait pas quelque chose qui vous serait utile?

Mme Bernier (Paule) : La problématique, ce n'est pas la création ou la présence d'un pôle, c'est son intégration dans la loi. Si, dans 18 mois, on réalise que, finalement, les objectifs que poursuivait le pôle ne sont pas atteints et qu'on voudrait avoir une autre structure, une autre organisation, on est contraint de continuer avec le pôle parce que c'est ce qui est inscrit à la loi. Tout ce qu'on vous propose, c'est de ne pas l'inscrire dans la loi, c'est tout simplement ça. On ne voit pas pourquoi une façon de fonctionner, une façon de vouloir faire une amélioration d'une situation devrait être figée dans le temps et figée par une structure. C'est là, la problématique. Déjà que c'est long, les processus pour changer une loi en règlement, imaginez changer juste un organisme à l'intérieur d'une loi professionnelle. C'est ça.

Mme Jean : Vous avez parlé de la gouvernance unique qui pourrait être imposée ou fortement recommandée par l'office et vous êtes contre cette idée-là, pour permettre, j'imagine... ce que je comprends, qui augmenterait les coûts, peut-être la lourdeur d'organisation. Est-ce que ce ne serait pas, pour les plus petits ordres, comme peut-être le vôtre et d'autres aussi, quelque chose qui serait plutôt avantageux d'avoir des cadres déjà assez définis sur les codes de gouvernance, premièrement, ils seraient déjà faits, ou peut-être aussi l'économie d'énergie pour les rédiger, les concevoir, les adapter... Ça ne ferait pas économiser du temps et de l'énergie aux ordres, surtout les plus petits, que d'avoir ce cadre-là?

Et une autre chose aussi, d'avoir... Puis je veux avoir votre avis là-dessus, est-ce que d'avoir un code assez généralisé à l'ensemble des ordres ne permettrait pas cette uniformisation-là, ne permettrait pas d'avoir des indicateurs de performance, de pouvoir effectivement évaluer est-ce que la gouvernance est bien appliquée dans les différents ordres?

• (16 h 10) •

Mme Bernier (Paule) : C'est parce que, là, vous m'avez parlé du D.G. en entrée de matière et de l'imposition de la structure, puis après ça vous m'avez parlé d'un cadre qui s'imposerait à chacun. Il est important de voir que chaque organisation... Puis je comprends qu'il y a des personnes qui ont présenté des mémoires plus tôt cette semaine, qui proviennent d'un environnement complètement différent et dont le nombre de membres est complètement différent, qui peuvent avoir une vision différente. C'est sûr que les grands principes de gouvernance s'appliquent, sauf que ça ne veut pas dire qu'une structure x, à un moment donné, est toujours la plus appropriée pour une organisation suivant son évolution dans le temps. C'est ça, l'idée. S'il y a une souplesse qui est permise, à ce moment-là l'organisation choisit ce qui est mieux adapté, et toujours avec l'obligation de rencontrer les objectifs que le conseil d'administration doit avoir et que l'ordre, dans son ensemble, doit avoir. Mais un cadre, comme tel, n'est pas garant de l'atteinte des objectifs. C'est un moyen qui peut être facilitant, mais c'est un artifice au point de vue de... si on pense que c'est ça qui va régler les problèmes de gouvernance ou les problèmes qu'on a vus récemment.

Le Président (M. Ouellette) : Une minute, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Juste pour terminer, je comprends que vous attendez après la réforme du Code des professions depuis longtemps, puis là on présente aujourd'hui une approche parcellaire, par morceaux, et, même si vous accueillez bien l'idée, vous auriez préféré que, bon, rapidement, on puisse avoir une réforme du Code de professions.

Mme Bernier (Paule) : Bien, on a hâte à certaines... Il y a différents chantiers qui sont sur la table. On a hâte... En ce qui a trait à nous, oui, il y a des demandes de modification réglementaire qui sont là et qu'on a bien hâte de voir aboutir.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Bonjour, mesdames, merci de contribuer aux travaux de la commission. D'entrée de jeu, je voudrais discuter avec vous de votre recommandation 10, par rapport aux administrateurs nommés par l'office sur votre conseil d'administration. Vous dites : On veut être consultés, on veut que le dialogue entre l'office et l'ordre ait lieu. Dans...

Mme Bernier (Paule) : Dans quel but?

M. Jolin-Barrette : Oui, dans quel but?

Mme Bernier (Paule) : Le but est que... Il est important que les membres du C.A. soient utiles au C.A. et qu'on aille chercher des gens qui ont des compétences ou des forces dans certains domaines qui soient utiles à l'organisation à un moment donné de son évolution. Et c'est dans ce sens-là, dans le sens d'avoir une représentation, oui, du public, mais du public aussi qui peut nous apporter, qui peut apporter au conseil d'administration une expérience vécue ailleurs, et la partager dont on peut se nourrir.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que vous trouvez qu'on devrait formaliser davantage le processus pour s'assurer que les administrateurs nommés qui sont envoyés dans les ordres correspondent véritablement au profil de compétence dont vous avez besoin?

Mme Bernier (Paule) : Bien, il y a certainement un discours... De le formaliser, on a hésité à le mettre en recommandation en lien avec le projet de loi, là, pour... Mais c'est sûr qu'une consultation est absolument souhaitable. Ce serait même bien que ce soit inscrit au code, s'il y a moyen de le faire, effectivement. Ce que je ne voudrais pas voir, c'est la formalisation ou la recherche à outrance d'un administrateur nommé ayant une formation donnée. Ça nous priverait énormément d'un bassin de compétences, et Mme Desrochers est ici pour en témoigner, qui a oeuvré depuis de nombreuses années à titre d'administrateur nommé par l'office. Ce n'est pas nécessairement un administrateur ayant obtenu un diplôme x qui va venir combler nos besoins.

M. Jolin-Barrette : Vous voulez vraiment, dans le fond, que l'office dialogue avec vous de façon systématique.

Mme Bernier (Paule) : De façon systématique, ce serait une bonne idée.

M. Jolin-Barrette : La recommandation 12, vous suggérez de laisser à l'assemblée des membres le pouvoir de déterminer la cotisation. Ça va un peu à l'encontre de beaucoup d'ordres qui sont venus nous rencontrer depuis le début des travaux. Pouvez-vous expliquer pourquoi?

Mme Bernier (Paule) : Un ordre professionnel vit par ses membres qui forment les comités, qui siègent sur les différents comités. Il y a besoin d'avoir un sentiment d'appartenance. La cotisation, la détermination de la cotisation, c'est à peu près la seule chose que les membres réunis en assemblée font, et nommer les vérificateurs. Donc, pour une profession comme la nôtre, qui n'est qu'à titre réservé, et je parlais tout à l'heure dans mon allocution que c'est un type de profession dont on pense que le concept est caduc, d'enlever un certain pouvoir aux membres réunis en assemblée générale, ça risque de créer une démobilisation et de les éloigner encore plus de l'ordre.

En plus, ces membres-là peuvent décider de ne plus porter le titre de diététiste ou nutritionniste, qui sont des titres équivalents, en passant, mais bien de dire : O.K., je ne suis plus membre de l'ordre, puis leur cotisation coûte trop cher, mais moi, je vais quand même ouvrir mon cabinet, parce qu'il n'y a rien qui oblige... Ces gens-là ne seraient pas des charlatans, parce qu'ils sont formés, mais ils ne sont plus encadrés, puis il n'y a plus de formation continue obligatoire, puis il n'y a plus d'inspection professionnelle. Et ça, c'est sans parler de la myriade de charlatans — je suis certaine que vous êtes au courant — dans le domaine de la nutrition, qui envahissent notre champ. Ce n'est pas une question de corporatisme, on pense à la protection du public, qui, déjà, est à risque.

M. Jolin-Barrette : Donc, concrètement, ça va susciter l'adhésion davantage s'il y a un sentiment d'appartenance, mais si on sent que les membres sont écoutés et entendus au niveau de l'assemblée.

Mme Bernier (Paule) : Chez nous, c'est une réalité, les membres aiment ça se prononcer sur le montant de la cotisation. C'est sûr que, s'il faut... Mais on a toujours augmenté la cotisation. Elle est plus haute qu'ailleurs. Mais il faut quand même penser que ces membres-là... On est peut-être une faune à part, là, mais définitivement, dans notre organisation, parmi notre culture, c'est un aspect qui vraiment serait un irritant.

M. Jolin-Barrette : Vous nous invitez également, sur la question de l'immunité, sur la question également de la suspension temporaire, là, dans l'attente de la constitution d'un dossier d'enquête pour le dépôt d'une plainte du syndic, à plus de réflexion. Dans quel sens?

Mme Bernier (Paule) : Sur deux aspects, puis je vais passer la parole à Me Thibodeau : la protection du public et la protection du lanceur d'alerte, ou autres, là.

Mme Thibodeau (Sarah) : Bien, effectivement...

Le Président (M. Ouellette) : En 30 secondes, Me Thibodeau.

Mme Thibodeau (Sarah) : En 30 secondes. Oui, bien, en fait, ce qu'on aurait souhaité ou ce qu'on souhaite pour ces éléments-là... C'est qu'il y a plusieurs projets de loi qui traitent de la question de la dénonciation puis de la protection qui est accordée aux lanceurs d'alerte, et ce qu'on mentionne, c'est que ça serait important de tenir compte de ça, parce que, dans le projet de loi, tel qu'il est rédigé, il y a comme une espèce d'incohérence, dans le sens où le dénonciateur ou le lanceur d'alerte, qui est lui-même partie à l'infraction, donc, entre guillemets, coupable, va bénéficier d'une protection, alors que le professionnel qui dénonce parfois un collègue, un supérieur pour des manquements déontologiques, lui, ne fera pas l'objet d'une protection. Donc, ça, c'était le sens de nos commentaires par rapport à la question de l'immunité et de son corollaire, là, la dénonciation.

Mme Bernier (Paule) : Et il y a la question aussi du professionnel qui aurait eu un manquement dans sa pratique professionnelle, et qui aurait l'immunité, et qui pourrait continuer à pratiquer, donc à risque de causer un préjudice chez un autre patient ou chez un autre client.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Paule Bernier, Mme Ann Payne, Mme Lucie Desrochers et Me Sarah Thibodeau, représentant l'Ordre professionnel des diététistes du Québec, d'être venues déposer en commission parlementaire.

Je vais suspendre quelques minutes, je vais demander à la Chambre des notaires du Québec de bien vouloir s'avancer.

(Suspension de la séance à 16 h 18)

(Reprise à 16 h 20)

Le Président (M. Ouellette) : Nous recevons maintenant la Chambre des notaires du Québec. La présentation sera faite par son président, Me Gérard Guay. Vous avez 10 minutes, je pense que vous savez comment fonctionne la commission, 10 minutes pour votre présentation, après il y aura un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Guay, vous allez nous présenter les gens qui vous accompagnent. À vous la parole.

Chambre des notaires du Québec (CNQ)

M. Guay (Gérard) : Alors, permettez-moi, effectivement, de me présenter, de même que les personnes qui m'accompagnent : Me Nancy Chamberland, qui est ici à ma droite, qui est notaire, et membre du conseil d'administration de la Chambre des notaires, et présidente du Comité de réglementation; ainsi qu'à ma gauche Me Raphaël Amabili-Rivet, qui est notaire à la Direction des services juridiques de la Chambre des notaires du Québec; et moi-même, Gérard Guay, président de la Chambre des notaires du Québec.

Alors donc, M. le Président, Mme la ministre et notaire général du Québec, ainsi que Mmes et MM. les députés, au nom de la Chambre des notaires du Québec, je vous remercie de votre invitation à cette consultation particulière. Notre participation nous donnera d'abord l'occasion de faire des parallèles intéressants avec les pratiques qui ont cours à la chambre et les mesures portant sur la gouvernance qui sont prévues au projet de loi n° 98. À l'instar du mémoire que nous vous avons remis, ces mesures seront commentées très brièvement. Nous vous référons d'ailleurs aux pages 7 et 8 de notre mémoire, lesquelles contiennent quelques recommandations visant à bonifier les éléments du projet de loi n° 98. Nous pourrons donc concentrer notre intervention plus spécifiquement sur les mesures particulières du projet de loi qui visent la signature officielle du notaire. Comme nous le verrons, même si les mesures précises peuvent paraître étrangères à la gouvernance des ordres professionnels, elles sont, pour nous, essentielles pour assurer la protection du public.

Nous tenons, d'entrée de jeu, à saluer le travail de réforme proposé par le projet de loi n° 98. Ce dernier était très attendu par la chambre, mais aussi par l'ensemble du système professionnel. Nous accueillons favorablement la majeure partie des modifications qui y sont proposées, qu'elles visent les fonctions de l'Office des professions ou l'organisation et la gouvernance des ordres professionnels. Nous croyons que le public qui bénéficie des services professionnels sera mieux protégé par les mesures proposées. En effet, nous soutenons, tout comme le CIQ l'a fait il y a quelques jours, qu'un ordre professionnel ne peut réellement s'acquitter de sa mission de protection du public sans d'abord disposer d'une saine gouvernance. La chambre épouse donc les objectifs liés à cette réforme, laquelle répond à un besoin évident, urgent et nécessaire.

D'ailleurs, nous tenons à vous dire que, depuis quelques années, en amont de ce projet de loi, nous avons entrepris un exercice de réflexion visant à assurer l'efficacité, l'efficience et la transparence de nos processus. Le but consiste à maximiser nos pratiques en matière de saine gouvernance. Je mentionne, à titre d'exemple du travail accompli jusqu'ici, la constitution d'un comité de gouvernance et d'éthique, ça fait déjà près de six ans, l'élaboration et l'adoption d'un code d'éthique et de déontologie des administrateurs, ainsi que d'autres politiques visant à assurer la performance optimale du modèle de gouvernance de l'ordre, ainsi que la limitation du mandat à la présidence depuis déjà quelques années.

Nous souhaitons également porter à votre attention qu'une révision sur les modalités d'élection au conseil d'administration et au comité exécutif de la chambre est prévue pour l'automne 2016, conformément à l'esprit de cette réforme du Code des professions. En effet, dans le cadre de la révision de ce règlement, la chambre a formellement résolu d'abaisser de moitié le nombre d'administrateurs élus en prévision des prochaines élections. C'est donc dire que, dès le printemps 2017, le conseil d'administration de la chambre sera composé du président, de 10 administrateurs élus ainsi que de quatre administrateurs nommés. Finalement, toujours dans cet esprit, vous trouverez dans notre mémoire une recommandation afin que le nombre minimal de membres du comité exécutif de la chambre passe de six à quatre, puisque le comité exécutif de la chambre est prévu à notre propre loi constitutive, et non pas selon les règles du Code de professions.

Quelques mots maintenant sur les modifications apportées à la Loi sur le notariat en lien avec la signature officielle des notaires. Nous tenons d'abord à remercier chaleureusement la ministre de la Justice d'avoir consigné ces propositions de modification au projet de loi n° 98. Nous saluons également l'exercice ayant mené à ce résultat, qui s'est déroulé en collaboration avec les représentants de l'Office des professions, du ministère de la Justice, du Registre foncier et du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles. La bonification proposée des articles 20 à 24 de la Loi sur le notariat constitue des mesures d'actualisation permettant d'améliorer la qualité des services offerts par les notaires du Québec. Augmenter la qualité de la pratique revient, par le fait même, à protéger le public de façon préventive.

Je m'explique. L'importance de la signature officielle du notaire dans le cadre de l'exercice de sa profession est indéniable. En effet, en sa qualité d'officier public délégataire d'une parcelle des pouvoirs de l'État, le notaire reçoit des actes auxquels les parties doivent ou veulent donner le caractère d'authenticité. Une fois clos par la signature du notaire, l'acte est inaltérable et fait preuve de son contenu à l'égard de tous. C'est un acte authentique, comme on dit. On comprend aussi, ainsi, que la signature officielle du notaire n'échappe pas au respect d'exigences très formelles.

Qu'elle soit écrite ou apposée au moyen d'un procédé technologique, c'est suivant cette signature officielle que le notaire est appelé à conférer l'authenticité à un acte notarié ou à s'identifier dans l'exercice de ses fonctions. Ce qui prouve que c'est un acte notarié, c'est que c'est signé... à la dernière signature, c'est celle d'un notaire en exercice.

Le devoir d'encadrement de la signature officielle des notaires revêt donc une importance primordiale, tant sur le plan national qu'international, puisqu'ils reçoivent des actes dont l'impact pour le public est crucial. Il faut donner aux tiers la preuve que l'acte qui est signé électroniquement, dorénavant, fut effectivement reçu devant un notaire en exercice. C'est aussi important que pour la signature manuscrite, et pour cause : le contrôle de la signature par la chambre est le moyen privilégié afin de prévenir toute forme de dérive que ce soit. Nous sommes vraisemblablement le seul ordre qui... Dès l'inscription à l'ordre, le nouveau notaire doit inscrire, doit déposer sa signature à la Chambre des notaires, et, si au fil de la vie elle change, il doit la redéposer, parce que, pour la chambre, pour contrôler et certifier que c'est vraiment un notaire en exercice, c'est par la signature, et, comme de plus en plus de documents sont signés par voie électronique, bien, il est important aussi de contrôler cette signature électronique.

Dans l'univers numérique, ce contrôle professionnel apparaît tout aussi nécessaire et fondamental. Ainsi, au début de la dernière décennie, le législateur a prévu à la Loi sur le notariat certaines dispositions pour adapter l'apposition de la signature officielle du notaire à des documents qui font appel aux technologies de l'information. À l'époque, peut-être était-il impossible d'anticiper valablement l'état et l'évolution des technologies disponibles à l'heure actuelle. Résultat, certains pourraient aujourd'hui mettre en doute l'habilitation de la chambre d'attribuer aux notaires la seule signature officielle apposée à l'aide d'un procédé technologique et au moyen de laquelle ils sont appelés à signer un acte notarié ou à s'identifier dans le cadre de leurs fonctions. Pourtant, la chambre doit pouvoir continuer de s'assurer que la signature officielle apposée au moyen d'un procédé technologique demeure unique, comme c'est le cas pour sa signature officielle manuscrite, qu'on sait bien que c'est bien lui qui l'a signé électroniquement.

• (16 h 30) •

Évidemment, la chambre ne peut exercer adéquatement ses fonctions de contrôle de l'exercice de la profession si l'ensemble des notaires fait usage de différents procédés technologiques tenant lieu de leur signature officielle dans le cadre de leur profession. Les opérations de vérification par l'ordre deviendraient alors tout simplement ingérables, ce qui pourrait compromettre notre mission de protection... d'assurer la protection du public. Le projet de loi n° 98 vient donc resserrer les règles actuelles afin, entre autres, de réaffirmer clairement l'unicité de la signature officielle apposée au moyen d'un procédé technologique, qu'il n'y a qu'une seule signature apposée par moyen technologique, au même titre qu'il y a une seule signature manuscrite; le pouvoir exclusif de la chambre d'autoriser l'utilisation d'une signature officielle apposée au moyen d'un procédé technologique; le pouvoir exclusif également de la chambre de déterminer le procédé technologique devant être utilisé pour apposer la signature officielle, ainsi que les conditions minimales qu'un prestataire de services de certification doit respecter. À cet égard, il est important de souligner que ce procédé technologique devra être prévu par règlement. Il sera donc sujet à une consultation de l'Office des professions et à une approbation du Conseil des ministres sur recommandation du ministère de la Justice et du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles. Sur ce point, je vous réitère d'ailleurs toute notre collaboration pour l'élaboration de cette disposition réglementaire. Nous continuerons à travailler activement avec tous les acteurs à ce dossier.

En terminant, vous me permettrez de présenter mes remerciements au représentant de l'office dans la salle. Je tiens à remercier tout particulièrement son président, Me Jean Paul Dutrisac, et son équipe pour l'ensemble du travail emmené au projet de loi n° 98 et aux modifications relatives à la Loi sur le notariat. La preuve de leur disponibilité et de leur professionnalisme n'est effectivement plus à faire. Je vous remercie de votre attention. Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Guay. J'espère que vos remerciements à Me Dutrisac, ce n'est pas parce qu'il est notaire, là?

M. Guay (Gérard) : Non, c'est parce qu'il a fait un très beau travail, comme tous les notaires, puis il est très consciencieux.

Le Président (M. Ouellette) : Bon, O.K. Je voulais sentir l'objectivité dans vos propos. Mme la ministre.

M. Guay (Gérard) : Soyez assuré de l'objectivité.

Mme Vallée : Merci, M. le Président. Me Guay, bonjour. Merci de votre présentation et merci de partager avec nous vos observations sur le projet de loi n° 98. D'entrée de jeu, avant d'aborder les dispositions qui ont fait l'objet de commentaires plus particuliers, j'aimerais ça... Bon, on a parlé de la signature, parce qu'il y a... de la signature numérique, il y a quand même cette réalité technologique qui est importante de considérer concernant la signature officielle du notaire. Pour les gens qui nous écoutent qui... et pour les membres de la commission, est-ce que vous pourriez nous préciser ce que ça signifie pour la Chambre des notaires, pour le public en général, une signature officielle du notaire, officier public, nous préciser ce que c'est sur le plan juridique pour que les gens saisissent bien, là, la portée de la disposition et des dispositions qui sont amenées à l'intérieur du projet de loi n° 98?

M. Guay (Gérard) : Je vous remercie de me permettre de l'expliquer. Effectivement, il faut... Comme je le disais tantôt, de tout temps, depuis le début de la Nouvelle-France, le notaire est ici, au Québec, et il y a la signature manuscrite du notaire. Alors, le notaire appose sa signature manuscrite à la fin d'un acte. Vous allez voir pour l'achat d'une maison puis un acte de vente ou vous allez pour un testament, et les parties signent, et le notaire signe après, et ça clôt l'acte, qu'on appelle, et ça devient un acte authentique. C'est quoi, un acte authentique? C'est un acte qui fait preuve devant les tribunaux, au même titre... Donc, l'acte notarié fait preuve devant les tribunaux au même titre qu'un certificat de naissance ou de décès émis par le Directeur de l'état civil. Donc, c'est un document officiel en droit civil, comme c'est le cas ici, au Québec.

Mais, pour ce faire, il faut que le notaire soit en exercice. C'est évident que, pour que ce soit valide, il faut que ce soit reçu devant le notaire, donc il faut que ce soit un notaire qui soit en exercice. Et, pour nous, c'est important pour assurer la protection du public qu'on puisse certifier que c'est vraiment un notaire qui l'a signé. Alors, pour une signature manuscrite, bien, ça va, on l'a, sa signature manuscrite, on l'a depuis toujours. Mais, de plus en plus, les actes sont signés de façon électronique. Je vous donne un exemple. Depuis une dizaine d'années, le Registre foncier a fait une énorme... une révolution, et d'ailleurs qui fait, d'ailleurs, l'envie de bien d'autres juridictions à travers le monde, à savoir que les actes, tous les actes sont numérisés, et l'inscription en ligne est maintenant la norme, hein? Presque tous les actes, presque 100 % des actes immobiliers et tous les autres actes qui doivent être soumis à la publicité des droits sont soumis au Registre foncier par voie électronique. Mais l'hypothèque soumise par voie électronique doit nécessairement être soumise par un notaire. Or, le notaire utilise sa signature, apposée au moyen d'un procédé électronique. Alors donc, ça vient garantir que c'est vraiment une signature vraiment signée par un notaire.

Donc, vous comprenez que le... Ce pourquoi c'est si important, c'est que, dans bien des... On parle du Registre foncier, on parle de bien d'autres registres, de bien d'autres façons. Le notaire, de plus en plus, évidemment, on est à la page des moyens technologiques, on doit transmettre des documents de façon électronique, mais ça ne demeure pas moins que, si on veut que ça conserve sa voie... son authenticité, il faut que le notaire puisse y apposer une signature électronique qui fait en sorte... mais une signature électronique contrôlée par l'ordre, qui fait en sorte qu'on peut, nous, comme Chambre des notaires, certifier que le notaire est en exercice, et que ce système électronique de certification est en lien avec le tableau de l'ordre, et que, dès qu'un notaire est radié, par exemple, comme c'est le cas actuellement, sa signature électronique, elle est désactivée. Ce qui veut dire qu'à ce moment-là on ne peut plus signer d'acte. Donc, c'est très important de pouvoir avoir cette signature officielle du notaire, électronique, de l'avoir réglementée pour que nous, on puisse s'assurer que la personne qui signe à titre de notaire le soit réellement.

Mme Vallée : La signature va être apposée à partir d'un moyen technologique qui doit être déterminé, et le projet de loi... C'est parce que, là, je vous pose la question parce que je sais que je vais avoir la question en article par article. Je commence à connaître la dynamique de mes collègues. Alors, il y a un règlement qui va venir compléter ça, et ce règlement-là, évidemment, c'est... Vous allez proposer le règlement. Donc, est-ce que vous avez... Est-ce que vous êtes à même de nous dire aujourd'hui, là, les grandes lignes, ce que va comprendre ce règlement-là qui va accompagner les articles... qui va éventuellement accompagner les articles proposés au projet de loi n° 98?

M. Guay (Gérard) : Ce que je vais dire d'abord, et je passerai la parole à mon collègue, c'est que nous avons convenu, et c'est dans le projet de loi n° 98, que ça va être par règlement. C'est donc dire qu'à la fois l'Office des professions, le ministère de la Justice et le ministère des Ressources naturelles devront approuver ces procédés technologiques. Car on veut travailler en partenariat avec le gouvernement. Parce qu'évidemment les registres, ce n'est pas des registres... c'est des registres publics. Donc, c'est pourquoi c'est un partenariat, pour s'assurer que le règlement corresponde aux besoins également et aux demandes des ministères. Et on les remercie à cet effet-là. Maître...

Mme Chamberland(Nancy) : Si vous me permettez de compléter.

Le Président (M. Ouellette) : Me Chamberland... Mme Chamberland.

Mme Chamberland (Nancy) : Chamberland. Alors, en fait, ce règlement-là va édicter les conditions minimales qu'un prestataire de services devra rencontrer pour avoir l'aval de l'ordre. Donc, c'est des balises strictes pour donner à cette signature, au moyen d'un procédé technologique, la même valeur que, depuis l'existence du notariat, la signature manuscrite a. Alors, ça ne sera pas un règlement de trois pages, mais ça va être un règlement très précis, très clair. Et donc tout prestataire de services ou tout prestataire de certification qui va rencontrer les conditions minimales de l'ordre pourrait recevoir l'aval de l'ordre pour ce faire.

Mme Vallée : D'accord. Donc, vous allez établir les paramètres qui vont permettre à un de vos membres d'utiliser la signature électronique et les paramètres qui vont venir encadrer le retrait de...

Mme Chamberland (Nancy) : C'est ça.

Mme Vallée : ...l'autorisation de l'utilisation.

Mme Chamberland (Nancy) : Et l'unicité de la signature est très importante pour nous. On peut avoir un autre type de signature au moyen d'un procédé technologique dont un notaire pourra se servir, par exemple, pour faire des dépôts bancaires, pour faire... s'il veut en avoir plusieurs. Mais, pour conserver l'authenticité de l'acte notarié qui fait preuve de son contenu, qui est l'épine dorsale, dans le fond, de la plus-value notariale dans la province, c'est l'authenticité de l'acte notarié qui fait foi de son contenu. Alors donc, ce règlement-là va venir déterminer certaines balises.

• (16 h 40) •

Mme Vallée : Merci. J'aimerais vous entendre aussi élaborer sur votre vision du rôle du président au sein d'un ordre dans le cadre de notre nouveau... du nouveau modèle de gouvernance qui est prévu au projet de loi n° 98. Alors, comment percevez-vous cette nouvelle façon d'encadrer la gouvernance?

M. Guay (Gérard) : Je vous dirai que le... On voit bien du projet de loi n° 98 que l'on veut que le président soit un président de l'ordre, et non pas simplement un président du conseil. C'est pourquoi nous suggérons et nous recommandons peut-être de modifier, peut-être, le libellé pour s'assurer que le président puisse vraiment avoir... toujours conserver son rôle au niveau de l'ordre. Nous saluons que le conseil d'administration ait un rôle général de surveillance de l'ordre, c'est évident. Mais par contre je crois que le président se doit aussi de pouvoir, afin d'assurer sa mission de protection du public, il est le premier répondant de la mission de protection du public, parler au personnel, entre autres, dans les ordres. Il est important que le président puisse avoir vraiment... que son mandat et son pouvoir ne se limitent pas aux affaires du conseil d'administration, mais à celles de l'ordre, et je pense que, dans ce sens-là, je pense, il y a moyen de raffiner les textes, en ce sens-là.

Mme Vallée : Vous avez également abordé, un peu comme d'autres ordres l'ont fait, une proposition pour permettre de rendre applicables tant aux membres de comités qu'aux membres du C.A. les codes d'éthique et de déontologie qui sont applicables aux administrateurs. Comment vous fonctionnez actuellement au sein de la chambre? Parce que certains ordres nous disent : Nous, c'est déjà... c'est comme ça que l'on fonctionne à l'interne. On recommande d'amender les dispositions du projet de loi n° 98 afin d'étendre ce principe-là à l'ensemble des ordres. On le retrouve au sein d'autres lois constitutives. Et donc, pour vous, comment ça se vit à l'intérieur du Barreau... de la Chambre des notaires? Pardonnez-moi ce petit lapsus!

M. Guay (Gérard) : On le fait souvent, hein? Alors donc, toujours est-il — on les aime bien — que nous avons... Déjà, les membres des comités sont aussi soumis à un code d'éthique. Alors donc, il nous est même arrivé... l'an dernier, il y avait une situation où on avait dû sanctionner un administrateur et des membres de comités pour quelque chose.

Mme Vallée : Et le code d'éthique est le même pour les administrateurs et les membres des comités?

M. Guay (Gérard) : Exact, exact, exact. Nous croyons que nous devons assurer... les membres des comités doivent avoir la même probité que les membres du conseil d'administration. Parce qu'évidemment les comités sont quoi? Ils sont un prolongement de l'action du conseil d'administration. C'est évident que le conseil ne peut pas tout faire, hein? Alors donc, c'est un prolongement, et nous croyons qu'ils doivent avoir les mêmes qualités d'intégrité, de probité, et c'est pourquoi nous leur appliquons le même code.

Mme Vallée : Donc, toutes les valeurs, tous les principes d'équité, probité que l'on exige des membres du conseil sont étendus à tous ceux et celles qui s'impliquent au sein des comités de l'ordre.

M. Guay (Gérard) : Effectivement.

Mme Vallée : O.K. Puis ça n'a pas posé d'enjeu? Ça n'a pas suscité un manque d'intérêt de la part de certains membres?

M. Guay (Gérard) : Non. Non, non, non. Je pense que les gens comprennent le principe. Peut-être, maître...

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : Bonjour. Je me présente, je suis juriste à la Direction des services juridiques. Je suis personne-ressource également du comité de gouvernance de la Chambre des notaires.

Et ce qu'on peut dire aussi, c'est que le code d'éthique et de déontologie, actuellement, est en cours de révision justement pour s'assurer, là... c'est sûr qu'il y a une application aux membres de comités, mais pour s'assurer, là, de rencontrer toutes les valeurs et tous les principes, là, directeurs de saine gouvernance.

Mme Vallée : D'accord. Vous avez aussi proposé — j'y vais un peu en rafale — d'harmoniser le mandat du jeune administrateur avec celui des autres administrateurs élus, parce que l'objectif... bien, évidemment, tout ça dans le contexte de la réduction du nombre d'administrateurs, parce que, pour vous, ça va avoir un impact, et que cette présence, la présence du jeune, serait comblée par une vacance.

M. Guay (Gérard) : Bon, je vais laisser mon collègue compléter, mais déjà, d'entrée de jeu, je mentionne que, déjà à notre ordre, il y a 40 % d'administrateurs qui ont moins de 10 ans de pratique. Donc, ce n'est pas, pour nous, quelque chose de nouveau qu'il y ait des jeunes au conseil d'administration. Et ils apportent une belle contribution. On est très heureux que les jeunes puissent y être et on espère qu'ils pourront être élus par les voies normales. Mais on comprend qu'il puisse y avoir besoin d'une disposition pour s'assurer qu'ils le soient, si tant est qu'ils ne seraient pas élus au suffrage lors d'élection.

Mais c'est évident que, pour nous, il faut que cet administrateur-là, ce jeune administrateur là, soit un administrateur comme les autres et aussi longtemps que les autres, parce que si... Exemple, nous, c'est des mandats de trois ans. Alors, au bout d'un an, on lui dirait : Bien, bonjour, merci, puis là tu t'en vas parce que... Ça prend généralement un an pour devenir vraiment efficace. Alors, si, au bout d'un an, il s'en va, évidemment sa contribution sera plutôt limitée. Alors, c'est peut-être dans les deux puis troisième années qu'il sera plus efficace.

Alors donc, pour nous, c'est évident qu'il serait important que ce jeune administrateur qui serait élu par ce processus ait le même terme que les autres administrateurs élus lors de l'élection. Et je vais laisser Me Amabili-Rivet compléter.

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : Merci. Bien, en fait, juste pour ajouter, là, la recommandation directe du mémoire sur cet aspect-là, c'est de dire que, si un jeune administrateur est nommé pour une raison spécifique, advenant qu'au sein du reste du conseil d'administration il y ait une vacance et qu'elle soit comblée par une autre personne qui a moins de 10 ans de pratique, la raison même de la nomination du premier administrateur perd son sens. C'est un peu dans ce sens-là. Il n'y avait pas un terme équivalent aux autres administrateurs, on justifie en disant : Ce n'est pas un observateur, ce n'est pas un spectateur, donc il faudrait reconnaître un statut équivalent aux autres. S'il y a un statut de jeune administrateur, advenant qu'il y ait un autre jeune administrateur qui, lui, ait l'entièreté du terme du conseil d'administration, donc la nomination du jeune administrateur perd un peu son sens, c'est dans cette optique-là qu'on faisait la recommandation.

Une voix : Merci.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bonjour à vous trois, Me Guay, Me Chamberland et Me Amabili. Bienvenue ici, à l'Assemblée nationale. Merci pour l'éclairage que vous apportez, pour moi, qui est quand même assez nouveau. En parcourant votre mémoire et en vous écoutant, j'ai pris conscience de l'importance de la signature. Au début, quand je l'ai vu, j'ai dit : 50 % du mémoire est sur une signature, pourquoi faire? Je comprends l'importance maintenant de ce que vous avez dit. À peu près 50 %.

Ma question est... Je comprends qu'on entre ça dans le projet de loi, il va y avoir un règlement que vous allez proposer pour encadrer, pour assurer que l'authenticité soit bonne, que la garantie d'authenticité soit là et que le métier de notaire puisse encore être reconnu. Parce que je comprends que c'est vraiment la base...

M. Guay (Gérard) : C'est ça, c'est la base, c'est qu'on veut s'assurer...

Mme Jean : On fait confiance.

M. Guay (Gérard) : C'est ça.

Mme Jean : Maintenant, on parle de signature électronique. Donc, si on parle de signature électronique, on parle de technologie. Si on parle de technologie, on parle d'avancement de la technologie qui va à une vitesse foudroyante. Si on parle dans les années 80 et 90, on parlait à peu près aux 10 ans. De 1990 à 2000, on est tombé aux cinq ans. Maintenant, on est, quoi, aux trois, quatre ans. Est-ce que dans votre approche pour baliser la signature électronique il y a une prise de conscience qu'il est possible que, dans trois ans, les balises ne fonctionnent pas parce que, pouf! il y a une nouvelle technologie, une nouvelle façon de faire qui arrive? Est-ce que vous avez envisagé ce côté-là?

M. Guay (Gérard) : Oui, évidemment, on l'a envisagé, puisqu'évidemment ça évolue. Et c'est pour ça qu'on va surtout, dans le règlement, se baser sur des grandes normes reconnues internationalement pour la certification. Et je vais laisser Me Rivet continuer.

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : Si vous me permettez d'ajouter, la raison, aussi, du règlement, c'est qu'il n'y ait pas de cristallisation législative, je ne sais pas si c'est une expression qui existe, mais c'est pour expliquer du fait qu'un règlement se modifie plus facilement qu'une loi, mais le règlement lui-même est aussi encadré, là, avec d'autres acteurs. Donc, c'était le juste milieu, là, à notre avis.

Mme Jean : Merci. Dans un autre ordre d'idées, je comprends que vous avez revu en prévision la méthodologie ou le nombre de membres d'administrateurs sur le conseil d'administration. Vous avez fait l'exercice, et prochainement ça va se revoir. Dans cet exercice-là, vous avez considéré, on vient d'en parler, d'une place pour pouvoir assurer la présence d'un administrateur ou d'une administratrice qui est jeune. Est-ce que vous avez fait le même exercice pour la représentativité des femmes sur votre conseil d'administration?

M. Guay (Gérard) : On n'a pas fait de décompte, mais, à notre conseil d'administration, j'ai l'impression qu'il y a peut-être une majorité de femmes...

Mme Chamberland (Nancy) : Dans la profession, en tout cas, il y a plus de femmes que d'hommes, ça, c'est certain. Depuis 1980, on est à parité, puis après ça les femmes ont augmenté. Autour du conseil, il y a autant de femmes. Mais c'est une question d'habilitation législative, là, le Code des professions ne nous permettrait pas... Moi, je voulais... j'avais même songé, à un moment donné, parce que ce n'est pas la première fois, là... On a réussi cette fois-là, mais, lors de la révision précédente du règlement sur les modalités d'élection, où nous avions limité les termes des mandats de président, on avait voulu aussi réduire, on avait semé la graine de la réduction du nombre de membres autour et de la réduction des mandats des membres au conseil d'administration. Et on avait commencé à regarder est-ce qu'au-delà des jeunes... Est-ce qu'on ne pourrait pas aussi avoir des allophones? Tu sais, il fut un temps où, à Montréal, par exemple, il y avait beaucoup de Juifs anglophones qui étaient notaires. Là, autour du conseil d'administration, nous avons une jeune Asiatique. Il y a des notaires d'Amérique du Sud qui pratiquent maintenant, qui ont passé leurs examens et qui pratiquent. Mais on ne peut pas aller par... avec ces critères-là, mais un jour peut-être.

• (16 h 50) •

Mme Jean : Expliquez-moi : on ne peut pas aller avec ces critères-là...

Mme Chamberland (Nancy) : C'est-à-dire, c'est que, présentement, en tout cas dans le Code des professions, on ne pourrait pas dire : Dans nos compétences, on veut avoir tant de femmes, on veut avoir tant d'allophones, on veut avoir... La représentativité ne s'exprime pas comme ça.

Mme Jean : Est-ce que vous pouvez m'expliquer à ce moment-là — peut-être, vous — comment on fait pour pouvoir inclure le fait qu'on impose un administrateur de moins de 40 ans ou 35 ans? Est-ce que ça ne va pas non plus... C'est permis pour ça, mais ça ne serait pas permis pour d'autres critères?

Mme Chamberland (Nancy) : ...de l'âge physique, là, on parle des années de pratique pour avoir quand même une certaine expertise. Mais, comme je vous disais, nous, vraiment l'implication au sein de l'ordre, tant sur les comités que dans les... au niveau... dans les élections, on n'a pas de problème. Au contraire, je veux dire, il faut qu'on refuse des gens sur nos comités, parce que, quand on fait un appel à tous, on a énormément de demandes de gens qui veulent s'impliquer au sein de notre ordre.

Mme Jean : C'est le contraire de ce qu'on a entendu ce matin.

Mme Chamberland (Nancy) : Oui.

M. Guay (Gérard) : Oui, effectivement, c'est ça.

Mme Jean : C'est bon. Il nous reste encore un peu de temps. Dans un autre ordre d'idées, concernant le pôle de coordination et le commissaire à l'admission, vous avez des questionnements sur la collaboration entre les ordres et les établissements d'enseignement. Il y a déjà un pôle qui existe actuellement, le pôle multiministériel. Le pôle, actuellement, ne conviendrait pas. En connaissez-vous la raison ou est-ce que, ce pôle-là, vous avez une opinion là-dessus? Puis, s'il ne fonctionne pas, quelles en seraient les raisons?

Mme Chamberland (Nancy) : Bien, une des raisons de nos questionnements, c'est que, nous, à la chambre, ce problème-là n'existe pas, premièrement. De tout temps, la chambre a toujours été extrêmement proactive, même avant 1974 puis l'imposition du Code des professions à avoir différents comités en termes de protection du public. Et, si on regarde nos statistiques, on vient de terminer, de compléter une réforme complète de l'accession à la profession, et ce travail-là s'est fait vraiment de concert avec l'office, de concert avec les universités, et on se disait : Nous, là, on ne le voit pas, le problème. En tout cas, les problématiques systémiques qui sont soulevées n'existent pas. Puis, dans les cinq dernières années, il y a eu à peu près une trentaine de demandes d'équivalence annuellement. Il y a eu zéro demande de refus. Je pense qu'il y a eu une ou deux demandes de révision. Alors, on a, contrairement, probablement, à d'autres ordres... J'entendais les diététistes dire qu'il y avait eu deux plaintes. Nous, on a eu zéro plainte de traitée. Alors, on est dans un aspect beaucoup plus théorique, là, de la question où on pose les questions, et en se disant : Bien, la façon dont cela fonctionne avec le pôle, bien, est-ce que ce n'est pas adéquat? Mais on n'a pas l'expérience d'avoir eu des demandes de la part de l'office, là, de la part du commissaire. Faisons la distinction.

Le Président (M. Ouellette) : Dernière minute, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Juste pour être sûre que je comprenne bien, vous avez travaillé en concertation avec les autres paliers, que ce soient les institutions d'enseignement... vous l'avez fait. Vous l'avez fait en dehors du pôle, donc vous n'avez pas eu besoin d'une plateforme déjà existante pour pouvoir collaborer avec les autres instances. Donc, est-ce que j'en conclus que, pour vous, d'avoir une instance comme ça, c'est un peu inutile?

Mme Chamberland (Nancy) : Bien, on a posé diverses questions, en se disant... En tout cas, à tout le moins, il faudrait préciser certaines choses. Puis, tu sais, je veux dire, la chambre a par ailleurs des mécanismes, tant à l'égard de l'admission que des reprises d'exercice, où les décideurs doivent évaluer, par exemple, les moeurs d'un candidat, respecter des règles d'équité procédurales, le droit d'être entendu et de faire valoir son point de vue. Au niveau des demandes d'admission aussi, il y a des mécanismes de demande de révision et d'appel. Alors, on ne dit pas qu'on est contre ou qu'on est pour dans le mémoire, on a soulevé, à juste titre, quelques questions en disant : Ça mériterait des précisions.

Mme Jean : Merci beaucoup.

Le Président (M. Ouellette) : Merci. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Me Guay, Me Chamberland, Me Amabili, bonjour, bienvenue à l'Assemblée nationale. Merci pour votre contribution aux travaux.

D'entrée de jeu, je voudrais qu'on se concentre sur la signature électronique du notaire, juste dans une optique de compréhension. Jusqu'à aujourd'hui, 2016... Les notaires, actuellement, inscrivent des actes notariés au registre de la publicité des droits par voie électronique, par voie technologique. Il y a déjà un cadre actuellement qui est en place.

M. Guay (Gérard) : Bien, effectivement, ça s'inscrit par voie électronique. La différence, c'est qu'actuellement il n'y a pas de... la chambre n'a pas de contrôle sur l'inscription d'un acte notarié par voie électronique. Alors donc, il pourrait y arriver même que quelqu'un publie sans... alors qu'il n'est plus notaire. Alors, on pourrait même envisager ça. Donc, il est important que cette signature soit bien contrôlée par la chambre. C'est ça qui est l'objectif.

M. Jolin-Barrette : Et là, actuellement, à 22 de la Loi sur le notariat actuelle, là, quand on dit : C'est prévu par règlement du conseil d'administration, est-ce qu'il y a un règlement de la chambre sur la signature électronique des notaires présentement?

M. Guay (Gérard) : ...la signature électronique, je ne crois pas. Mais je vais laisser Me Amabili parler.

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : Bien, en fait, ce qu'il faut comprendre, c'est que les dispositions de la Loi sur le notariat ont été adoptées dans la foulée de l'adoption de la Loi sur le cadre juridique des technologies de l'information, donc c'est un peu pour arrimer la Loi sur le notariat avec cette loi-cadre-là. Ce qu'on a réalisé, c'est que cette habilitation-là pourrait laisser sous-entendre qu'elle n'était pas suffisante pour garantir l'unicité de la signature officielle. Donc, c'est vraiment sur la signature officielle, le notaire peut avoir d'autres signatures, mais sur l'aspect officiel de la signature. Donc, c'est pour ça qu'il n'y a donc pas de règlement actuellement, là, sur cet aspect-là.

M. Jolin-Barrette : Mais actuellement le processus technologique utilisé... Je comprends le fond de la question pour dire, bon : La signature pourrait être attaquée, mais le processus que la chambre avait développé, est-ce qu'il va changer? Je pense que vous passiez par Notarius, notamment. Est-ce que ça va changer ou vous allez continuer avec ça?

M. Guay (Gérard) : On va devoir... On va s'appliquer au règlement qui va être adopté, évidemment, et les fournisseurs, évidemment, ça va être des fournisseurs qui vont être accrédités selon les normes.

Mme Chamberland (Nancy) : Mais, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, tout prestataire de ce type de service là qui respecterait les conditions minimales édictées pourrait venir demander à la chambre... Mais ce qu'il est important de comprendre, c'est que, présentement, c'est la secrétaire de l'ordre qui dit... Tu sais, moi, quand j'ai déposé... Mais j'ai dû la redéposer, ma signature manuscrite, parce qu'avec les années elle avait changé. Mais c'est son autorisation qui fait foi de ma signature puis qu'après je puisse conférer maintenant... quand j'étais en pratique privée, là je ne le suis plus, mais conférer l'authenticité aux actes notariés que je recevais. Bien là, ce qu'on veut, c'est édicter des normes minimales pour un prestataire de services.

M. Jolin-Barrette : Et là, maintenant, dans le processus, le secrétaire de l'Ordre des arpenteurs-géomètres aussi va être impliqué — à 108 du projet de loi, c'est ce qu'on voit — aussi relativement à la signature par rapport au registre. C'est bien ça?

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : En fait, si je peux me permettre, la modification, c'est vraiment pour harmoniser la loi sur le bureau de la publicité des droits avec les modifications proposées à la Loi sur le notariat. Donc, à notre connaissance, ça ne touche pas du tout le secrétaire de l'Ordre des arpenteurs, mais c'est vraiment juste pour harmoniser, donc, l'habilitation du secrétaire prévue à la Loi sur le notariat, avec la loi sur le bureau de la publicité des droits.

M. Jolin-Barrette : Voyez-vous une difficulté d'application éventuellement, là, quand vous allez... si le projet de loi était adopté avec ces dispositions-là, au niveau de l'application? Parce que, bon, vous allez avoir besoin d'une autorisation multiministérielle, si je peux dire, bon, du ministre des Ressources naturelles, du ministre de la Justice. Voyez-vous des difficultés au fait que ceux qui inscrivent, dans le fond, au registre, c'est des notaires relevant de la ministre de la Justice, et on peut dire que c'est le contenu, puis, supposons, le contenant, c'est le ministre des Ressources naturelles qui s'occupe de la structure du registre foncier? Est-ce que vous voyez une problématique à avoir deux intervenants là-dedans?

Mme Chamberland (Nancy) : Non. D'ailleurs, comme on vous l'a mentionné, le règlement va être établi de concert avec les représentants tant de Justice que du ministère de l'Énergie et des Ressources naturelles, que l'office, que la chambre. Non.

M. Jolin-Barrette : Et, dans le règlement, tout à l'heure vous me disiez : Tout organisme pourra être accrédité, dans le fond, s'il remplit les critères. Est-ce que vous croyez pertinent que ça soit donné, supposons, au privé ou que ça devrait être l'État qui développe cet outil-là de signature? Parce que, dans le fond, vous, vous êtes des officiers publics, et les gens qui inscrivent, généralement, c'est des officiers publics. Est-ce qu'il y a un intérêt à ce que ça reste dans le domaine professionnel, ou que vraiment on donne ça du côté privé, ou que ça soit le gouvernement qui développe son propre outil?

• (17 heures) •

Mme Chamberland (Nancy) : Ça va faire partie des travaux de réflexion du Comité de réglementation et des orientations du conseil d'administration. Mais, présentement, c'est... Aujourd'hui, moi, comme présidente du Comité de réglementation, c'est prématuré comme question.

M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau du commissaire aux plaintes, vous avez émis certaines réserves par rapport à son élargissement. Vous avez joint également, là, le cheminement pour être notaire au Québec, bien détaillé. Est-ce que vous avez eu des cas, au cours des dernières années, où l'élargissement ou la compétence du commissaire aux plaintes aurait eu pour effet de venir vous faire des recommandations, là, par rapport à votre processus par rapport à des candidats québécois?

Mme Chamberland (Nancy) : Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris le sens de votre question. La réforme a été implantée l'an passé. Ça commence... Oui?

M. Jolin-Barrette : En fait, pour... Oui, bien, pour simplifier la question, là, ce que je veux savoir, là, c'est... On dit : Le commissaire aux plaintes, on élargit son champ d'application pour les candidats québécois, les candidats ayant fait des études au Québec ou ayant fait une partie de leurs études à l'étranger. Est-ce que vous avez déjà eu des cas, à la chambre, au niveau de l'admission, qui ont été contestés et sur lesquels maintenant le commissaire aurait pu se pencher?

Mme Chamberland (Nancy) : Non. Non.

M. Jolin-Barrette : Vous n'en avez jamais eu?

Mme Chamberland (Nancy) : Non.

M. Jolin-Barrette : O.K. Au niveau de la question de la limitation provisoire du droit d'exercice, vous émettez certaines réserves, là, par rapport à ça.

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : On émet certaines réserves. On sait que le Barreau a été peut-être plus dans le détail que nous. On se questionne sur la possibilité que la présomption d'innocence soit entachée. Le Barreau, je pense, dans ses arguments, fait valoir que ce n'est pas touché, en fait. Nous, l'aspect... C'est sûr qu'en tant que notaires on est peut-être moins habiles dans tout ce qui est criminel, mais l'aspect qu'on questionne, c'est vraiment la perception du public sur le professionnel qui aurait une suspension ou une limitation pour une accusation qui serait portée contre lui. Donc, c'est vraiment dans cette optique-là qu'on pose les questions à cette section-là du mémoire.

M. Jolin-Barrette : Et puis, à votre recommandation 7, vous dites... Bon, il y a peut-être une problématique au niveau du syndic et du Comité d'inspection professionnelle. Vous dites : Attention, là, sur la compétence! C'est l'apanage du Comité d'inspection professionnelle. Pouvez-vous nous expliquer quel serait le danger, là, pour vous?

M. Guay (Gérard) : D'entrée de jeu, je vous dirai que c'est un peu, des fois, difficile pour un praticien d'évaluer la compétence d'un collègue, hein? On peut dire : Oui, il n'est pas compétent, alors que parler des compétences, ce n'est pas évident, là. Alors, c'est sûr que, si on voit un acte dérogatoire, bien, on va dire : Oui, il est décrété. Il est facile à évaluer. Mais évaluer la compétence d'un collègue, ce n'est pas évident. Ceci dit, il y a des raisons que Me Rivet a mentionnées.

M. Amabili-Rivet (Raphaël) : On fait simplement référence à la disposition du Code des professions qui mentionne, là, clairement que, le Comité d'inspection professionnelle, c'est une de ses prérogatives. Donc, on s'est limités à là, sans pousser l'analyse plus loin.

M. Jolin-Barrette : Et, sur la recommandation 10, au niveau des organismes affiliés à l'ordre... Tout à l'heure, l'ordre — j'ai un petit blanc, attendez — des optométristes — pardon, je cherchais, désolé, M. le Président — nous a dit : Écoutez, nous, on a un organisme qui fait la formation continue pour nous, et ce serait problématique si cette disposition-là était adoptée telle que telle. Est-ce que, pour vous, c'est un peu la même chose?

Le Président (M. Ouellette) : Par oui ou par non.

M. Guay (Gérard) : Par oui ou par non, je dirais que non. Et je vous dirais... la mesure où... L'important, c'est que la mission protection du public soit assurée. Je pense que... Et, pour le reste, il s'agit d'avoir des balises pour éviter que les activités commerciales viennent interférer avec cette mission-là.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Gérard Guay, président de la Chambre des notaires du Québec, Me Chamberland et Me Amabili. Merci pour les bons commentaires à l'intention de Me Dutrisac.

Et je suspends quelques minutes, le temps de demander à l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec de venir nous rejoindre.

(Suspension de la séance à 17 h 4)

(Reprise à 17 h 8)

Le Président (M. Ouellette) : Nous reprenons nos travaux. Nous recevons maintenant l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec. M. Richard Lahaye, qui est le président de l'ordre, vous allez nous présenter la personne qui vous accompagne. Vous avez 10 minutes pour faire votre présentation, après il y aura un échange avec Mme la ministre et les porte-parole des deux oppositions. M. Lahaye, à vous la parole.

Ordre des évaluateurs agréés du Québec (OEAQ)

M. Lahaye (Richard) : Alors, merci, Mme la ministre, M. le Président, Mmes, MM. les députés membres de la commission, M. le président de l'office. Dans un premier temps, merci de nous accueillir.

Je suis accompagné de Céline Viau, secrétaire générale de l'ordre. Et je vous prie d'excuser l'absence de la vice-présidente responsable de l'éthique professionnelle, qui devait être avec nous aujourd'hui mais qui a dû s'absenter pour des motifs professionnels.

• (17 h 10) •

Alors, l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec compte plus de 1 000 membres évaluateurs agréés à travers le Québec. Ces spécialistes de l'évaluation et de la gestion immobilière sont impliqués dans tous les secteurs de l'immobilier : privé, public et parapublic. Ce qui distingue l'évaluateur agréé est qu'on le consulte pour obtenir une opinion impartiale et motivée de la valeur des biens ou des droits immobiliers qui font l'objet d'une transaction. Précisons, et c'est important, que l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec est un ordre à titre réservé. Ce qui implique que, pour se présenter comme évaluateur agréé, un professionnel doit être membre en règle de l'ordre. Cependant, n'importe qui peut se prétendre évaluateur, entre parenthèses, professionnel et agir à ce titre sans fournir au public les garanties du système professionnel. Une situation qui devrait se rétablir éventuellement, l'ordre et l'Office des professions poursuivant les travaux menant à la réserve d'actes d'évaluation immobilière aux seuls détenteurs du permis d'évaluateur agréé.

Je peux vous dire au départ que l'ordre est en accord avec les objectifs et l'esprit du projet de loi et donc avec la plupart des propositions qui y sont contenues, et en particulier celles-ci :

L'ordre souscrit entièrement aux propositions législatives visant à doter l'office des pouvoirs accrus pour lui permettre de mieux jouer son rôle de surveillance. L'ordre est convaincu que l'office doit avoir les leviers juridiques nécessaires pour exercer pleinement son pouvoir de surveillance lorsque des faits sont portés à sa connaissance et que, de façon manifeste et documentée, un ordre ne remplit pas son mandat de protection du public. Notre intérêt à soutenir ces modifications réside, donc, dans le fait que l'office ait toute la latitude pour agir. Toutefois, dans la mesure où ces dispositions trouveront application dans le cadre d'un règlement, nous nous réservons le droit de commenter ultérieurement les moyens qui seront mis en place pour ce faire.

Nous sommes d'accord avec l'idée d'obliger l'office et les ordres à déterminer par règlement les normes d'éthique et de déontologie applicables aux administrateurs des ordres professionnels. Nous pensons toutefois qu'un seul règlement de l'office suffirait, quitte à ce que certains éléments soient modulés par chacun des ordres, par résolution ou autrement. Il y aurait lieu cependant de s'attarder aux modalités d'enquête, de sanction et de règlement des différends, et nous suggérons en page 11 de notre mémoire quelques alternatives plus pédagogiques.

Nous sommes d'accord également avec l'obligation de formation sur le rôle d'un conseil d'administration, en précisant toutefois qu'il faut distinguer le contenu d'une formation s'adressant à tous les membres et celle plus ciblée qui s'adresserait à des candidats ou à des administrateurs du conseil d'administration. Les administrateurs nommés devraient également faire l'objet d'une sélection, d'un encadrement et d'une formation accrue. Nous sommes d'accord avec l'objectif de distinguer les fonctions politiques du conseil d'administration et du président du rôle de la direction générale. Cet équilibre est nécessaire, et nous apporterons quelques nuances à cet égard.

Nous exprimons certaines réserves, notamment sur le rôle de la présidence d'un ordre, nous sommes d'avis que le président joue un rôle essentiellement politique, et il ne devrait pas être assimilé à un administrateur comme les autres; les modifications suggérées quant au rôle du conseil d'administration, dont le rôle ne doit pas être perçu comme diminué. Le mandat de la formation sur le rôle d'un conseil d'administration ne devrait pas être dévolu aux institutions d'enseignement, mais plutôt relever des ordres, du CIQ ou de l'Office des professions. Le nombre maximum de mandats à la présidence et des administrateurs nommés devrait être modulé en fonction de la durée des mandats.

Par contre, l'ordre est toutefois en désaccord avec les éléments suivants : la proposition de confier exclusivement au conseil d'administration d'un ordre le pouvoir de déterminer par résolution le mode de l'élection du président. Nous avons déjà exprimé l'avis, et nous le réitérons, qu'il serait plutôt pertinent de porter cette réflexion sur l'opportunité de permettre l'élection d'un président au suffrage universel. Nous regrettons vivement que la proposition d'imposer une condition d'éligibilité aux candidats à la présidence, soit d'avoir déjà été administrateur sur le conseil d'un ordre pendant au moins un mandat, ait été retirée du projet de loi. Il s'agit pourtant d'une précaution minimum. En effet, un mandat n'est pas de trop pour comprendre le contexte dans lequel s'exerce la mission d'un ordre professionnel, les véhicules d'intervention, les enjeux systémiques, les structures complémentaires à celles de l'ordre, les subtilités de l'application de la réglementation, et autres.

Finalement, concernant l'élargissement des compétences du commissaire aux plaintes concernant les mécanismes de reconnaissance des compétences professionnelles et la création du pôle de coordination pour l'accès à la formation, l'ordre se positionne vivement contre la création d'une structure dont le mandat serait, à toutes fins pratiques, de se substituer aux ordres professionnels dans un aspect hautement spécifique de la mission d'un ordre professionnel : la formation et les conditions d'admission de ses membres.

Nous ne sommes pas convaincus de la nécessité de cette mesure. Au contraire, nous avons de sérieuses réserves quant à l'ampleur du mandat octroyé au commissaire à l'admission, aux ressources qui devront être consenties par les ordres et aux chances de succès de rencontrer les objectifs visés, en fait même quant à l'opportunité de développer une telle artillerie. On parle ici, en effet, d'artillerie, car il ressort du dernier rapport annuel du commissaire qu'en cinq ans 85 plaintes ont été traitées, dont 73 relevant de la compétence du commissaire. Cinq ordres seulement semblent être particulièrement concernés.

Cet aspect du projet de loi constitue un désaveu public du travail des ordres professionnels en matière d'admission, un jugement qui, avalisé par les parlementaires, risque de faire plus de tort que de bien. En effet, plutôt que de désamorcer les situations particulières, on met le projecteur sur tout le système, ajoutant ainsi aux préjugés populaires à l'effet que les ordres protègent leurs chasses gardées.

L'ordre s'inquiète du mandat dévolu au commissaire à l'admission, trop flou, trop vaste. Il fait appel à un éventail de connaissances et de compétences qui sont essentiellement du ressort des ordres professionnels, chacun dans leurs domaines d'expertise. Or, en matière d'équivalence, le propre d'une démarche d'admission est de faire l'analyse d'un dossier spécifique en fonction de paramètres généraux établis par un ordre professionnel, où logent, est-il utile de le rappeler, les connaissances et compétences propres à une profession, le tout via un règlement approuvé par l'office. C'est là que les conditions et les processus sont décidés en bout de ligne.

Le mieux est l'ennemi du bien. En voulant démontrer avec un projet de loi le désaveu du gouvernement quant à la façon dont les ordres gèrent l'admission à la profession, on invente un supermandat qui va forcément engendrer des coûts à la hausse de façon récurrente, dont on sait à l'avance qu'il est voué à l'échec, parce qu'il ne pourra pas satisfaire les besoins légitimes des plaignants, parce que l'admission à un ordre fait appel à des compétences et des connaissances spécifiques que seuls les membres de la profession connaissent et parce qu'ils mettent en scène des acteurs externes aux ordres, dont les organisations sont indépendantes et dont le pouvoir décisionnel est souverain.

À notre avis, un ombudsman chargé de s'assurer que les demandes ont été traitées dans les règles suffirait, quitte à lui donner un pouvoir accru d'intervention auprès des instances politiques concernées. Après tout, les autres plaintes qui concernent le travail des ordres n'ont pas droit au même traitement royal. Pourquoi l'admission serait-elle une fonction traitée différemment?

Le système professionnel québécois est unique. Il se distingue par sa capacité d'autogestion, d'autoréglementation et d'autofinancement. Il représente près de 400 000 professionnels qui acceptent de se voir policer par ceux-là mêmes qu'ils financent à même leurs cotisations. Ils représentent aussi des centaines de milliers de bénévoles et d'employés qui contribuent activement à l'amélioration des pratiques professionnelles au Québec. Le message que nous souhaitons vous livrer est qu'il ne faut pas sacrifier les vertus du système en réaction à quelques événements plus médiatisés que documentés.

Je vous remercie de votre attention et je tiens à vous assurer de l'entière collaboration de l'Ordre des évaluateurs agréés du Québec dans la démarche.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. Lahaye. Mme la ministre.

• (17 h 20) •

Mme Vallée : Merci. Alors, merci beaucoup pour votre présentation. Je pense que c'est encore une fois, peut-être, important de revenir sur certains mots très forts que vous utilisez.

D'abord, le commissaire, il existe déjà. Donc, on n'invente pas, on ne sort pas quelque chose du chapeau. Le commissaire est là, il a des pouvoirs. Il a déjà un pouvoir de recommandation dans certains domaines, dans le domaine de l'admission des candidats formés à l'étranger. Lorsqu'il a été créé, ce n'était pas un désaveu à l'égard des ordres, pas du tout. Puis le fait d'élargir son mandat, le fait d'institutionnaliser un pôle qui existe déjà aussi, par ailleurs, ce n'est pas du tout un désaveu, c'est plutôt... Et puis je pense qu'il y a... d'autres ordres l'ont mentionné, l'importance de travailler en collaboration parce que les défis auxquels on est confrontés par moment ne sont pas que les défis qui sont propres aux ordres, ce n'est pas que des enjeux qui touchent les ordres, ce n'est pas dirigé vers les ordres. Au contraire, ça démontre que la démarche interpelle plusieurs acteurs.

D'ailleurs, puis je ne sais pas si vous étiez au courant, mais il est arrivé par le passé que le commissaire, dans le cadre de dossiers dont il avait été saisi, a amené les ordres, a amené l'office à apporter des modifications réglementaires parce qu'il y avait des incohérences. Et la plainte, en fait, elle existait en raison de ces incohérences-là dans les textes législatifs. Ce n'était pas un désaveu au niveau de l'ordre. C'est que le commissaire a ce pouvoir... pas «ce pouvoir», mais a ce détachement, cette vision beaucoup plus large qui l'amène à voir, à regarder l'ensemble de ce qui est en place et d'identifier les problématiques dans le but de les résoudre, pas dans le but de porter atteinte à l'autonomie des ordres. Alors, ça, là-dessus, je pense qu'il faut que ce soit bien clair.

Et l'objectif... Et je l'ai mentionné un petit peu plus tôt à une autre de vos collègues, le fait d'instaurer un mécanisme comme celui du commissaire, ça n'a rien à voir avec un désaveu. Lorsque l'État délègue des fonctions à un organisme, des fonctions qui sont importantes, qui est l'admission à une profession, des normes d'admission, la mise en place d'évaluation de dossiers, tout ça, bien, l'État fait confiance à l'organisme. Et c'est normal qu'il y ait une évaluation de tout ça, qui ne porte pas atteinte pour autant à l'autonomie de l'organisme et qui n'équivaut pas pour autant à un désaveu, ce n'est pas du tout...

Et d'ailleurs l'objectif d'avoir autour du pôle plusieurs acteurs, c'est justement d'éviter que l'on ne pointe du doigt qu'un seul acteur. Et vous avez... Lorsque vous dites : On a trop souvent... les ordres sont pointés du doigt, les ordres parfois sont considérés de façon tout à fait incorrecte de la part des tiers, c'est souvent en raison d'une incompréhension. Et souvent on lance la balle quant à qui est responsable, qui est responsable ultimement du médecin qui conduit un taxi, hein, parce que c'est l'image que l'on voit plus, c'est la difficulté qu'ont certains nouveaux arrivants à pouvoir, malgré une formation professionnelle, intégrer notre système professionnel. Et, dans ces difficultés-là, il y a plein de facteurs, il y a plein d'éléments, il n'y a pas que le rôle des ordres, il y a une série d'enjeux, et puis on se lance la balle, malheureusement. Et c'est important d'avoir... plutôt que de travailler en silo, de travailler ensemble, parce que c'est un objectif collectif que nous avons d'assurer la protection du public puis d'assurer que les mécanismes sont équitables pour tout le monde.

Alors, c'est ça, l'objectif. De façon très, très simplifiée, c'est l'objectif du projet de loi. Ce n'est pas de porter atteinte à l'autonomie des ordres. Bien au contraire, on est tout à fait conscients du rôle qu'ont les ordres, de la connaissance fine qu'ont les conseils d'administration, les membres d'un ordre de l'exercice de leur profession, de l'utilité de certains règlements, de certaines mesures pour assurer la protection du public, la connaissance fine aussi, par exemple, des conséquences d'une pratique illégale. Donc, ce n'est pas... Et donc, lorsque j'entends des mots aussi forts, je ne peux pas faire autrement que de réagir, parce que ce n'est pas l'objectif du projet de loi, au contraire, je l'ai dit d'entrée de jeu, lorsque nous avons présenté le projet de loi.

C'est certain qu'on souhaite redonner aux ordres leurs lettres de noblesse, parce que, malheureusement, des incidents qui sont survenus au cours des dernières années ont eu un effet... ont eu un impact sur notre système professionnel. Puis c'est faux de prétendre... Il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier, puis il faut certainement mettre en valeur tout ce qui se fait de bien à l'intérieur de notre système professionnel, puis Dieu sait qu'il s'en fait, des bonnes choses! On a entendu au cours des trois dernières journées bon nombre d'ordres qui nous ont fait part des bonnes pratiques qui ont été instaurées, qui sont venues bonifier... Puis vous aussi, vous le faites, vous proposez différentes avenues, sur lesquelles je vais aussi vous questionner.

Mais, pour moi, c'est important de faire le point parce que ce n'est pas une atteinte à l'autonomie des ordres. Le commissaire, dans le cadre de ses fonctions précédentes, a été à même parfois d'identifier des enjeux qui n'étaient pas si complexes à solutionner, mais qui, pour toutes sortes de raisons... chacun étant à l'intérieur de son propre champ de compétence, travaille sur ses propres enjeux, n'avait pas nécessairement interprété la problématique de la même façon. Ce regard externe là, qui est doté d'un pouvoir de recommandation, ce n'est pas un pouvoir d'appel, ce n'est pas un tribunal d'appel, là, on s'entend, là, c'est un pouvoir de recommandation qui peut faire l'objet de discussion autour du pôle. En tout cas, moi, je le vois personnellement comme un plus pour notre système, puis même ça peut devenir, à la limite, un allié des ordres.

Mme Viau (Céline) : Oui, écoutez, vous avez dit beaucoup de choses, je ne doute pas de vos bonnes intentions, je les écoute depuis deux jours dans les retransmissions de la commission. Malheureusement, les mots parlent. J'aurais envie de vous dire : Si c'était à ce point facile, pourquoi élargir à ce point le mandat du commissaire? De ce que j'ai entendu depuis deux jours, on s'entend qu'il semble que ce soit relativement marginal. Ce que j'entends, c'est qu'il y a déjà des processus, par exemple toute la question de la réglementation qui est approuvée par l'office, qui permet de jeter un regard externe sur nos processus, nos modalités d'admission, etc. Mais, quand on lit les mots qui sont écrits... Et on relisait encore la présentation qui a été faite aux ordres professionnels en juin dernier, et c'est très large. Et, nous, notre réaction, c'est de dire... Vous vous rappelez l'annonce : Faites quelque chose là où ça fait mal. Alors, au contraire, il y aurait lieu qu'il y ait peut-être des pouvoirs accrus mais qu'on n'étende pas à 46 ordres, qu'on n'étende pas largement... C'est un chèque en blanc, excusez l'expression, mais ce qui est donné comme mandat, par les mots qu'on a lus, par la présentation qu'on a eue, c'est un chèque en blanc.

Je comprends qu'on ne crée pas de nouvelle structure, mais moi, je suis pas mal prête à vous gager l'équivalent d'une cotisation qu'on va l'élargir, par exemple, parce qu'avec un tel mandat aussi large c'est clair que ce qui va suivre dans pas longtemps, c'est : on n'a pas nécessairement les ressources, il faut plus de ressources. Or, puis ça a été dit, je pense que les gens de l'Office des professions travaillent très fort, n'ont pas nécessairement beaucoup de ressources. Il y a beaucoup d'autres priorités, il y a beaucoup d'autres priorités dans le système professionnel.

Et j'écoutais... Plusieurs d'entre vous l'ont demandé à des intervenants des ordres : Est-ce que vous en avez eu, des problèmes sur telle affaire? Est-ce que vous en avez eu, des problèmes? Et la réponse, dans presque tous les cas, c'est non, ou, enfin, ça reste marginal. Alors, la question qui se pose, c'est de dire : Si c'est à ce point marginal, bien, ma foi, pourquoi... J'ai l'impression qu'on prend, comme on dit, un canon pour tirer une mouche, puis en plus il tire à blanc parce qu'il y a juste un pouvoir de recommandation. Je veux dire, c'est...

• (17 h 30) •

Mme Vallée : A contrario, je vous dirais : Si c'est marginal, bien, ça ne pose pas de problème pour personne, mais par contre le cas, le cas qui a besoin d'une oreille, parce que c'est ce que le commissaire est, peut... ça peut changer toute une dynamique, alors... pas dans la forme actuelle, ce n'est pas la même chose, ce qui existe actuellement n'est pas le pouvoir qui est accordé. Et le fait de l'étendre ne va pas créer l'hécatombe auquel certains ont fait référence, parce que, justement, il n'y en a pas ou il y en a très peu, de cas. Parce que, lorsqu'on pose les questions aux ordres... Lorsqu'on me voit, on me dit : C'est marginal. Il y en a peut-être un, il y en a peut-être deux. Donc, ça ne nécessitera pas ces ressources-là.

Puis moi, je vous dirais qu'il s'agit d'une priorité. Vous dites : Il y a des priorités. Bien, pour le gouvernement, c'en est une, priorité. Alors, oui, c'est important.

Et ce n'est certes pas un désaveu envers les ordres. Et d'ailleurs je pense que cette volonté d'encadrer, de revoir la gouvernance, la volonté de revoir aussi, de donner... d'augmenter les pénalités en cas de pratique illégale... Il y a plein de mesures, dans le projet de loi, qui vont permettre de revaloriser le rôle des ordres et de redorer le blason des ordres. D'ailleurs, il y a... C'est déjà... Déjà?

Le Président (M. Ouellette) : Mais c'est votre commentaire, je vous laisse finir votre commentaire, Mme la ministre. Ça va bien.

Mme Vallée : Non, mais, en fait, non, parce que ça susciterait d'autres échanges. J'avais d'autres questions qui auraient suscité d'autres échanges.

Une voix : ...toutes les réponses.

Mme Vallée : Parfait.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jean : Merci. Alors, bonjour à vous deux. Merci d'être ici. Bienvenue à l'Assemblée nationale, M. Lahaye et Mme Viau. Nous sommes heureux de vous accueillir.

Dans votre rapport, vous reconnaissez clairement l'importance de séparer... Au niveau du poste du président, vous reconnaissez l'importance de séparer le poste politique du poste opérationnel, que c'est important de le séparer. En même temps, vous avez des réserves quant à l'obligation de nommer un directeur général, qu'il devrait être discrétionnaire au conseil d'en nommer un ou pas. Est-ce que vous pouvez m'éclairer là-dessus? Parce que, quand j'en fais la lecture, je vois ça un petit peu incompatible.

Mme Viau (Céline) : En fait, ce que ça dit, c'est qu'on est d'accord avec le principe. C'est très important de distinguer ce qui est la mise en opération des orientations d'un conseil d'administration, ce qui est le rôle d'un président aussi, au niveau public, au niveau politique de l'opérationnalisation. Donc, l'esprit de la proposition, on est tout à fait en accord avec ça. C'est une question d'équilibre. Je pense que la gestion d'un ordre professionnel, c'est l'équilibre d'un ensemble de facteurs déséquilibrants, que ça soit les intérêts divergents, les... Bon. Par contre, la raison, tout simplement, pour laquelle on suggère ça, c'est qu'en ce qui nous concerne, pour prendre notre exemple, c'est un poste de secrétaire général. Ça ne s'appelle pas un directeur général, et, à notre avis, ça correspond tout à fait aux fonctions qui sont requises dans le Code des professions, et ça correspond à la réalité. Alors, c'est tout simplement ça, mais on est d'accord avec l'esprit de la proposition.

M. Lahaye (Richard) : Je voudrais aussi... Peut-être que c'est une spécificité de notre ordre professionnel, qui est un ordre relativement restreint, là, on parlait tantôt de 1 000 membres : les fonctions qui sont celles du président puis du conseil d'administration bien, sont des postes à peu près bénévoles, donc évidemment qu'il y a certaines implications qu'on peut avoir dans la vie quotidienne, lorsqu'on travaille à tous les jours dans le domaine, qui ne sont pas les mêmes que dans certains autres ordres où ce seraient des postes qui seraient beaucoup plus permanents de nature.

Mme Jean : Et ce que je comprends... Parce qu'à l'Ordre des évaluateurs agréés vous avez un poste de secrétaire général, si je comprends bien, et c'est un peu l'équivalent d'un directeur général. Est-ce que c'est tout simplement une problématique de dire : Est-ce qu'on devrait se faire imposer un titre, et vous seriez, dans le fond, plus enclins à dire : Pouvez-vous nous décrire la responsabilité d'une personne plutôt que le titre en question?

Mme Viau (Céline) : Je peux vous dire, la nuance qu'on y voit chez nous... On ne déchirera pas notre chemise avec cette résolution-là, là, on vivrait autant avec «directeur général», mais de la façon dont on voit le poste, c'est que le secrétaire général met en opération les décisions du conseil d'administration. Le décideur, l'orienteur, celui qui développe les stratégies, c'est le conseil d'administration, donc, un peu comme à l'ONU, un peu comme... On va se comparer avec d'autres structures. Ça correspond bien à la tâche. Mais, ceci étant...

Mme Jean : Vous avez montré que vous êtes d'accord avec l'idée... au niveau de la gouvernance, vous êtes d'accord avec l'idée d'avoir un code d'éthique et de déontologie commun, égal à tous. J'aimerais savoir les avantages que vous y voyez, et peut-être aussi les inconvénients, qui ont été soulevés par d'autres groupes au niveau de... qui résistaient ou qui avaient des réserves à cette approche-là, pour la flexibilité ou les coûts, les problématiques que ça pouvait engendrer. Quelle est votre opinion là-dessus?

Mme Viau (Céline) : Bien, quand on lit l'objectif du code d'éthique, qu'on a d'ailleurs, chez nous, depuis 20 ans, ce qu'on dit dans... le règlement de l'office prévoit d'identifier des valeurs, des principes communs, les devoirs, obligations des administrateurs, les pratiques liées à la rémunération, on pense que ce sont des éléments qui sont systémiques, qui sont communs à tous les ordres professionnels — j'espère qu'on adhère tous aux mêmes valeurs. Là où il peut y avoir certaines nuances, c'est dans l'identification précise de situations de conflit d'intérêts ou dans des mesures de prévention qui peuvent être peut-être différentes. Alors, notre propos, c'est de dire : Pourquoi on n'aurait pas un règlement de l'office, puis qui trouverait application soit par... Plutôt qu'avoir deux règlements, le règlement de l'office et le règlement de l'ordre, l'ordre pourrait compléter soit par un guide d'application ou par résolution pour ce qui lui est spécifique. C'est un peu ça, l'idée.

Mme Jean : C'est votre proposition.

Mme Viau (Céline) : Mais, au moins, ça nous assure d'un corpus général respectueux de ce qui est commun à tous les ordres.

Mme Jean : Merci. Concernant le commissaire à l'admissibilité ou à l'admission et le pôle de coordination, je comprends que vous avez de grandes réserves, parce que, selon l'énumération, la plus grande réserve ou résistance, si on peut qualifier ça ainsi, est à ce niveau-là. Est-ce que vous y voyez quand même des avantages? Ça existe déjà, un pôle de concertation, et le fait que l'institution existe ou une plateforme existe, où on se retrouve avec des intervenants multisectoriels, donc du ministère, les institutions d'enseignement, il pourrait, à la limite, parce qu'il y avait des suggestions, y avoir des représentations de la société civile... Est-ce que, selon vous, malgré vos réserves, une plateforme comme ça pourrait s'avérer d'une certaine utilité pour des problématiques d'admissibilité en général?

Mme Viau (Céline) : Bien, un peu comme ont dit plusieurs collègues d'autres ordres, on n'est pas contre... il n'y a personne qui est contre la vertu, donc on n'est pas contre la concertation ou des mécanismes qui assoiraient des décideurs, parce que ça, c'est important, des gens qui sont investis d'un pouvoir de décision, autour de considérations communes. Donc, ça, ça ne pose pas de problème.

Ce sur quoi on a des réserves, c'est que les attentes sont grandes, encore une fois. C'est un peu difficile d'imaginer qu'une table de concertation va réussir à concerter les intérêts de 46 ordres professionnels et de je ne sais pas combien de ministères, en se réunissant quatre fois par année, là, alors même qu'on a des comités de la formation où c'est loin d'être évident puis où on adresse des points très précis reliés aux ordres.

Ceci étant, on n'est pas contre. Est-ce que c'est le meilleur moyen? Est-ce qu'à l'usage on ne se rendra pas compte qu'il y a d'autres meilleurs moyens? Évidemment, à partir du moment où c'est consacré dans une loi, c'est plus statique. Mais on n'est pas contre l'idée que les gens se concertent puis ne travaillent pas en silo, là, on va s'entendre là-dessus, et qu'il y a peut-être des considérations communes, mais je vous dirais que les problèmes, par exemple, de stage des évaluateurs agréés ne sont pas ceux du réseau de la santé. Et ce n'est pas le pôle de coordination, par exemple, qui va pouvoir régler le fait que des cabinets privés ne puissent pas engager des stagiaires.

Donc, tu sais, il y a vraiment beaucoup... on l'a dit, vous l'avez entendu puis, je pense, vous l'avez compris, il y a beaucoup de différences entre les ordres, les milieux des affaires, le milieu de la santé, le milieu du droit. Les problématiques sont différentes. Il y a beaucoup d'attentes, en tout cas, par rapport à ce que pourrait être ce pôle de coordination là.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, Mme Viau. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. Lahaye, Mme Viau, bonjour. Ça me fait plaisir de vous retrouver. Au niveau de votre recommandation 12, les frais de l'ordre engagés pour faire enquête, vous dites, dans le fond : On devrait peut-être venir spécifier et élargir le concept, si on veut, puis inclure les frais d'audition.

• (17 h 40) •

Mme Viau (Céline) : Oui, ça coûte cher, les frais d'audition pour... Les gros ordres ont souvent des salles, et tout ça, mais, pour nous, les frais d'audition, pour un plus petit ordre, c'est des frais qui sont importants, donc il faudrait peut-être le préciser. On a toujours avantage à préciser dans ce genre de modification là, là, préciser le plus possible parce que, sinon, ça porte à interprétation, là.

M. Jolin-Barrette : Et je comprends que le désir de l'ordre, pour vous, c'est d'avoir le volet le plus étendu possible au niveau des frais qui vont être couverts par cette disposition-là.

Mme Viau (Céline) : Oui. Il faut comprendre que ça coûte de l'argent poursuivre des gens en discipline, qu'on ne récupère jamais l'équivalent. Donc, ce qu'on peut récupérer comme frais au maximum.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que vous pouvez nous donner un aperçu dans votre budget? En chiffres absolus, est-ce que vous avez une idée?

Mme Viau (Céline) : Bien, ça dépend des années, ça dépend du nombre. Tu sais, si, une année, il y a cinq plaintes, ce n'est pas comme si, une année, il y en a deux. J'aurais de la difficulté à vous...

M. Jolin-Barrette : Mais vous avez combien de plaintes par année, environ, en moyenne?

Mme Viau (Céline) : En moyenne, quatre... trois, quatre par année.

M. Jolin-Barrette : O.K. Trois, quatre par année. La recommandation 11, vous dites que vous êtes d'accord pour confier exclusivement au conseil d'administration le pouvoir de fixer la cotisation. Chez vous, ça ne pose pas de problème avec les membres?

M. Lahaye (Richard) : Je dirais que, la dernière fois que ça a été soumis à l'assemblée générale des membres, il y avait eu une proposition qui s'est faite, il y a à peu près sept ou huit ans, d'indexer les cotisations à l'indice des prix à la consommation. On n'est pas revenus devant l'assemblée des membres depuis, mais je ne pense pas que ça poserait problème, là, que de passer une résolution à l'effet que ce soit le conseil d'administration qui fixe les cotisations des membres.

Mme Viau (Céline) : Contrairement à ce que disaient nos collègues tantôt, je ne crois pas que la cotisation soit un vecteur d'appartenance ou que l'assemblée annuelle soit vraiment... On va se le dire, là, il n'y a pas grand monde dans les assemblées annuelles. Ce n'est pas là que ça se passe. Je pense que le vecteur d'appartenance, ça se passe plus dans les comités de travail, et, dans ce sens-là, bien, c'est sûr que les gens qui sont impliqués, dont, au premier chef, le conseil d'administration, connaissent plus les besoins, les coûts puis ce que ça représente. Mais ça ne poserait pas de problème à nos membres.

M. Lahaye (Richard) : Je ne pense pas.

M. Jolin-Barrette : Pour la question du mode d'élection du président, vous souhaitez que ça soit conféré à l'assemblée des membres.

Mme Viau (Céline) : C'est-à-dire que ce qu'on dit, c'est que, s'il y a un changement à apporter dans le mode d'élection du président, c'est quelque chose de très important, ça, dans une organisation, alors ça doit être soumis à l'attention de l'ensemble des membres.

Ceci étant, on a aussi, nous, une position, que je ne crois pas avoir entendue ailleurs, mais de dire : Il y aurait lieu d'y avoir, au plan philosophique, une réflexion sur l'opportunité de permettre l'élection au suffrage universel des membres. On l'a vu — vous avez lu les journaux, comme on peut le faire — toutes les problématiques que ça entraîne. Il suffit que quelqu'un fasse cabale en réduisant la cotisation de moitié que, tout à coup, il se retrouve président, alors qu'il n'aurait jamais fait de mandat à l'ordre, alors qu'il ne connaîtrait pas les enjeux, la mission. Il faudrait adresser cette réflexion-là. Je comprends que ça risque de créer un tsunami dans certains ordres, mais il faudrait avoir le courage de l'adresser, cette question-là, si on veut vraiment parler de réforme.

M. Jolin-Barrette : Mais est-ce qu'en ce sens-là vous croyez qu'on devrait exiger de façon... pour l'ensemble des ordres, le fait d'avoir de l'expérience, d'avoir siégé à titre d'administrateur sur le conseil d'administration, supposons, une année?

Mme Viau (Céline) : Oui, tout à fait.

M. Lahaye (Richard) : C'est une recommandation qu'on a faite, qu'effectivement la personne ait siégé au moins pour un terme en tant qu'administrateur avant de pouvoir se présenter en tant que président de l'ordre, là.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que votre proposition suggère que cet exercice-là de ce terme-là doit avoir été fait dans un délai contemporain?

M. Lahaye (Richard) : Pas nécessairement.

Le Président (M. Ouellette) : Merci, M. le député de Borduas. M. Richard Lahaye, président de l'Ordre des évaluateurs agrées du Québec, Mme Céline Viau, merci d'être venus déposer en commission parlementaire.

La commission ajourne ses travaux au mardi 13 septembre, à 9 h 30, où elle poursuivra son mandat. Bonne fin de semaine à tous.

(Fin de la séance à 17 h 45)

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