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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, December 14, 1982 - Vol. 26 N° 223

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude de la directive no 3 du gouvernement à la Société générale de financement


Journal des débats

 

(Onze heures trente minutes)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme est réunie ce matin pour étudier la directive no 3 de la Société générale de financement qui a été déposée à l'Assemblée nationale du Québec le 17 novembre 1982.

Les membres de la commission aujourd'hui sont les suivants: M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Biron (Lotbinière), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Fortier (Outremont), M. Dussault (Châteauguay), Mme Harel (Maisonneuve), M. Lavigne (Beauharnois), M. Lincoln (Nelligan), M. Maciocia (Viger), M. Paré (Shefford) et M. Paquette (Rosemont).

Les intervenants sont: M. Beaumier (Nicolet), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Blais (Terrebonne), M. Champagne (Mille-Îles), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Grégoire (Frontenac), M. Mailloux (Charlevoix), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Payne (Vachon).

J'aimerais que vous me proposiez un rapporteur pour la commission.

M. Dussault: C'est le député de Shefford qui sera là dans quelques minutes.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Châteauguay propose le député de Shefford pour agir comme rapporteur de la commission. Est-ce adopté?

M. Ciaccia: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. M. le ministre, quelques commentaires d'introduction.

Remarques préliminaires M. Rodrigue Biron

M. Biron: M. le Président, je vais d'abord souhaiter la bienvenue et remercier les gens de la Société générale de financement d'être ici ce matin pour discuter avec les membres de la commission parlementaire de cette directive no 3 du gouvernement à la Société générale de financement concernant son implication dans la biotechnologie.

Je vous rappelle que c'est lors de sa séance du 22 septembre dernier que le Conseil des ministres a approuvé la directive no 3, directive que j'émettais à titre de ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme à la Société générale de financement du Québec. Tel que prévu à l'article 15 de la Loi sur la Société générale de financement du Québec, j'ai déposé cette directive ainsi que les documents pertinents à l'Assemblée nationale et nous nous présentons aujourd'hui devant cette commission pour en discuter. Le but de cette directive est de permettre à la SGF, à ses filiales ou à ses sociétés affiliées d'investir directement ou de conclure éventuellement et à certaines conditions des ententes finales avec des partenaires dans le secteur des procédés et des produits de la biotechnologie. Le virage technologique consacre un chapitre complet aux nouvelles technologies et identifie la biotechnologie comme secteur de pointe à développer en priorité afin d'assurer au Québec une participation à la révolution technologique des prochaines années.

Le programme d'action énoncé à cet effet dans Le virage technologique vise les trois objectifs prioritaires suivants: premièrement, le développement d'une infrastructure de recherche et de formation des ressources humaines dans les domaines reliés à la biotechnologie; deuxièmement, la mise en place d'une dynamique de transfert technologique pour accélérer le développement de bioindustries proprement québécoises et, troisièmement, la réalisation de projets industriels et commerciaux spécifiques. Le développement d'une infrastructure de recherche et la formation des ressources humaines relèvent de mon collègue, le ministre délégué à la Science et à la Technologie. Je partage avec lui la responsabilité de la mise en place d'une dynamique de transfert des biotechnologies entre la recherche et l'industrie. Quant à la réalisation des projets industriels et commerciaux, ceci relève de mon ministère en collaboration avec les sociétés d'État.

Permettez-moi tout d'abord de présenter la biotechnologie et son intérêt pour le développement industriel. La biotechnologie consiste à mettre en application les nombreuses possibilités d'exploitation des micro-organismes et des cellules vivantes à des fins industrielles. On utilise depuis longtemps les micro-organismes pour améliorer l'alimentation humaine. Depuis quelques décennies, on comprend mieux leur

mode d'action, on en maîtrise mieux les processus, on crée de nouvelles applications: dépollution des eaux, production d'antibiotiques, produits de la santé, fertilisants, etc. De nombreux indices convergents laissent prévoir une mutation rapide de la biotechnologie et l'émergence dans les 20 prochaines années de nouvelles activités économiques fondées sur la domestication de la matière vivante au bénéfice de l'homme et de son environnement. Les prévisions sont difficiles à cerner, mais qu'il suffise de se rappeler le développement de l'informatique qui a dépassé toutes les prévisions les plus optimistes. Il faut donc se préparer à cette mutation dans les secteurs chimique, alimentaire, forestier, énergétique et dans le secteur des produits de la santé. En d'autres termes, il ne faut pas manquer le rendez-vous des bioindustries.

L'orientation du gouvernement du Québec dans le domaine de la biotechnologie vise des activités à haute valeur ajoutée et à fort contenu d'innovations technologiques. Cette approche privilégie l'utilisation des matières premières renouvelables dont dispose le Québec plutôt que de se limiter à l'utilisation de matières premières non renouvelables. En outre, l'implication du Québec en biotechnologie devrait nous permettre d'apporter des réponses nouvelles aux principaux besoins de notre temps: la santé, la nutrition et l'énergie. Certes, nous ne sommes pas les premiers à choisir cette orientation, nous avons même pris un retard initial sensible, tel qu'on l'explique dans le document "À l'heure des biotechnologies" du Secrétariat à la science et à la technologie. Mais, comme le Québec a su le faire dans d'autres domaines, nous sommes en mesure de combler ce retard si nous agissons maintenant en coordonnant les efforts des secteurs privé et public. Il s'agit, somme toute, d'organiser nos ressources matérielles et humaines pour en tirer le meilleur profit, à court terme, dans le cadre d'une planification à long terme.

Quelle est, dans son contexte, l'implication de la SGF dans le secteur des biotechnologies? Le document "À l'heure des biotechnologies" déjà cité, présente la biotechnologie comme une réalité multidisciplinaire qui fait intervenir une multiplicité de technologies bien distinctes. En amont, on retrouve la manipulation des micro-organismes, c'est là qu'intervient le génie génétique. En aval, l'extraction et la purification des produits obtenus par voie biotechnologique entraînera la création d'une industrie de fabrication nouvelle, d'abord, à laquelle se greffera ensuite une autre industrie d'appareils et de machines spécialisés. Comme vous l'expliqueront de façon plus détaillée les représentants de la SGF ici présents, plusieurs secteurs sont susceptibles de constituer des débouchés pour la biotechnologie: la santé, l'agriculture, l'agro-alimentaire, la foresterie, l'énergie, le traitement des pollutions, la chimie et l'extraction des minerais. Actuellement, la Société générale de financement a identifié comme premier créneau biotechnologique le domaine de la santé. En effet, une partie importante de l'arsenal des produits reliés à la santé fait appel à la biotechnologie. Ces produits sont à très forte valeur ajoutée et nous avons au Québec un marché potentiel ainsi que des experts de réputation mondiale dans ce domaine.

Tel que prévu dans Le virage technologique, le gouvernement du Québec a approuvé la directive d'investissements en biotechnologie que j'ai émise à la SGF. Vous me permettrez de vous la lire: "Conformément aux articles 4.1 et 15 de la Loi sur la Société générale de financement du Québec, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme émet la directive suivante: "Premièrement, la Société générale de financement du Québec investira dorénavant directement ou par l'intermédiaire de ses filiales ou sociétés affiliées dans le secteur des procédés et produits de la biotechnologie. "Deuxièmement, cette directive vise à permettre à la société, ses filiales ou sociétés affiliées d'investir directement ou de conclure éventuellement et à certaines conditions des ententes finales avec des partenaires en vue de canaliser une part des bénéfices de la société à des fins de recherches et de développement au Québec, en vue d'applications industrielles; d'avoir accès aux découvertes et développements qui se produiront dans les prochaines années et collaborer à des activités de recherche dans le secteur des procédés et produits de la biotechnologie; de contribuer aux transferts technologiques des efforts de recherche et de développement universitaire à des fins industrielles au Québec et de fabriquer ou commercialiser les procédés et produits issus d'applications biotechnologiques mises au point au Québec. "Troisièmement, le secteur des procédés et produits de la biotechnologie devient ainsi un des secteurs jugés prioritaires au sens de l'article 4, paragraphe a), de la Loi sur la Société générale de financement du Québec."

Cette directive prévoit donc un cadre général d'intervention de la SGF dans le domaine de la biotechnologie, de façon plus concrète, à la foulée du virage technologique et, à la suite de la décision du Conseil des ministres de septembre dernier, la SGF a déjà commencé à aménager les conditions de base pour une première intervention dans l'industrie des biotechnologies. Ainsi, la SGF a créé une société d'investissements en biotechnologie appelée Bio-Méga. C'est dans le domaine de la santé que Bio-Méga

concrétisera son premier investissement. Puisque c'est dans ce domaine que la recherche de nature biotechnologique est la plus intense et a donné lieu jusqu'ici, aux découvertes les plus nombreuses et les plus intéressantes, il était normal qu'un premier investissement se fasse dans le domaine de la santé, d'autant plus que le Québec a déjà une excellente réputation quant à la qualité de ses équipes de recherche en science biomédicale. ùepuis qu'au Canada une disposition de la Loi sur les brevets force les entreprises à accorder des licences sur leurs inventions brevetées destinées à des médicaments ou à la préparation ou la production de médicaments, les grandes entreprises pharmaceutiques se sont désintéressées du Canada pour ce qui est de la localisation de leurs activités de recherche et de développement. La plupart des grands centres de recherche étant situés au Québec, le contrecoup s'y est fait sentir de façon plus importante qu'ailleurs au Canada. Les équipes de chercheurs québécois ont donc eu tendance à se regrouper autour des laboratoires spécialisés, des hôpitaux et des universités, là où la conjoncture les affectait moins et leur permettait de poursuivre leurs recherches fondamentales. C'est le cas de chercheurs de l'Université Laval à Québec qui ont mis au point le matériel nécessaire à la fabrication de trousses immunologiques pour le dosage d'hormones dans le sang. Ces trousses seront fabriquées à partir d'anticorps raffinés de type monoclonal dont la reproduction se fait par une technique cellulaire plus efficace et moins coûteuse.

La SGF s'est associée avec ces chercheurs dans le cadre de son premier projet d'investissement en biotechnologie. Ce premier projet dans le domaine de la santé consiste dans la mise sur pied d'une entreprise de fabrication et de commercialisation de trousses immunologiques développées par l'intermédiaire d'une entreprise de recherche.

Pour la commercialisation et la fabrication, Bio-Endo Inc., une filiale de Bio-Méga Inc. a récemment fait l'acquisition de l'Institut de bio-endocrinologie Inc., une entreprise qui fabrique déjà plus d'une quinzaine de trousses radio-immunologiques pour le diagnostic de certaines anomalies hormonales et qui constituera une base pour la fabrication des nouveaux produits qui seront développés. Il s'agit d'une entreprise profitable qui réalise un chiffre d'affaires d'environ 3 800 000 $, qui emploie 70 personnes et dont les installations de production sont à Montréal.

Les équipements et installations existants de l'Institut de bio-endocrinologie Inc. sont considérés comme satisfaisants et aptes à être utilisés dans le cadre des nouvelles activités. Par ailleurs, cette entreprise possède déjà un réseau de ventes, s'étendant même aux États-Unis et ailleurs à l'étranger, qui pourra servir de base à la commercialisation des produits fabriqués par Bio-Endo Inc.

Parallèlement, la société Biocel a été créée à l'instigation de la SGF et des chercheurs de l'Université Laval. Biocel aura comme fonction de confier des mandats de recherche pour le compte de Bio-Endo à des chercheurs ou centres de recherche qui seront le plus souvent affiliés à des universités. Biocel doit d'ailleurs conclure sous peu une entente à cet effet avec l'unité de recherche en endocrinologie moléculaire du Centre hospitalier de l'Université Laval.

Les études de marché consultées par la SGF indiquent que la demande de produits immunodiagnostiques devrait connaître une croissance rapide durant les années quatre-vingt, variant entre 16% et 45% par année, selon les hypothèses.

Au Canada, le marché des produits immunodiagnostiques incluant le dosage d'hormones et de certains médicaments est évalué à 30 000 000 $ en 1982; le marché américain équivalent est d'environ 350 000 000 $ dont 50 000 000 $ pour le diagnostic du cancer. Les taux de croissance historique de ces marchés sont de l'ordre de 15% à 20% par an; il est fort probable que la tendance se poursuive. Quant aux produits diagnostiques du cancer, ils connaîtront vraisemblablement des croissances encore plus élevées.

Compte tenu du potentiel de marché, de l'aspect innovateur des produits et de leur qualité, Bio-Endo projette des ventes qui pourraient atteindre près de 25 000 000 $ dans cinq ans. Ces ventes seraient effectuées à la fois au Canada, aux États-Unis et en Europe.

Il est déjà possible d'identifier deux retombées intéressantes de ce premier projet biotechnologique dans le domaine de la santé. Premièrement, un arrêt de la fuite des cerveaux et, deuxièmement, une ouverture à des entreprises ou organismes qui verraient un intérêt à une entente du type de celle qui lie Biocel et Bio-Endo.

Un tel projet, et d'autres du même type qui pourraient survenir, permettront de ralentir, voire arrêter, l'émigration du Québec des chercheurs ou encore du produit de leur recherche. Certaines lois et réglementations fédérales, on le sait, de même d'ailleurs que le manque de débouchés industriels pour la recherche ont fait en sorte de forcer des chercheurs à trouver du travail ailleurs ou à vendre le fruit de leur travail à l'étranger. Il s'agit d'un phénomène anormal et très coûteux, surtout si l'on tient compte de l'investissement consenti par le Québec pour former des chercheurs et leur donner une infrastructure de recherche.

De plus, la SGF ouvre une porte à des

entreprises privées ou organismes de recherche qui voudraient s'associer à Bio-Méga pour réaliser des projets semblables en santé ou dans d'autres domaines liés à la biotechnologie. La formule retenue offre des avantages qui ne sont pas négligeables tant pour des chercheurs que pour des fabricants de produits à fort contenu technologique. L'exemple de l'Institut Armand-Frappier, qui a déjà d'importantes activités de recherche en biotechnologie, est en cela très intéressant.

Voilà donc le cadre général des premières interventions que le gouvernement entend réaliser par l'intermédiaire de la Société générale de financement du Québec dans le domaine de la biotechnologie.

Et nous sommes ici pour étudier cette orientation qui concrétise la volonté du gouvernement du Québec à mettre en place un autre jalon important du virage technologique de la société québécoise.

Le Président (M. Rochefort): Merci M. le ministre. M. le député de Mont-Royal. (11 h 45)

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, sur les objectifs que se donne le gouvernement d'encourager et de donner une sorte de priorité au développement de la biotechnologie, je pense qu'on peut être d'accord. Les questions que nous devons nous poser sont: Comment allons-nous atteindre ces objectifs? Combien allons-nous allouer de nos ressources dans ce secteur? Est-ce que les montants que le gouvernement se propose d'allouer présentement, selon les informations que nous a fournies la SGF, et qu'elle continuera à nous fournir durant la commission parlementaire, sont suffisants? Je pense qu'en termes simples, la façon dont on comprend la biotechnologie, c'est l'utilisation d'un processus biologique pour fournir des biens et des services. Cela a des conséquences assez importantes à long terme.

Même si nous sommes d'accord avec les objectifs du gouvernement qui dit: Nous allons encourager et aider le développement de la biotechnologie, nous devons nous poser de sérieuses questions sur les façons dont le gouvernement semble vouloir atteindre ces objectifs et se demander s'il les atteindra en procédant de la façon dont il le fait. La première question que je veux poser est: Quel est le but de cette commission parlementaire? Je sais que, selon notre mandat, il est d'étudier la directive no 3. Mais, quand je regarde les débats antérieurs et que je regarde la loi sur la SGF, il me semble qu'on ne respecte pas tout à fait l'esprit de la loi. L'esprit de la loi veut qu'une directive autorisant la société à investir dans les domaines visés, ainsi que les documents pertinents doivent faire l'objet d'un débat à la commission élue de l'industrie, du commerce et du tourisme convoquée à cet effet dans les 30 jours de leur dépôt.

Si je comprends bien, l'investissement a déjà été fait. Il me semble que l'intention -quand on lit le journal des Débats - c'est qu'avant que le gouvernement ait donné une directive, avant de se lancer dans un certain domaine, il devrait y avoir débat à l'Assemblée nationale par l'entremise de la commission parlementaire et, seulement après ce débat, la SGF ou le gouvernement devrait continuer dans ce secteur particulier. On nous informe maintenant que l'achat a déjà été fait - il y a deux ou trois semaines que cela a été fait - nous n'avons vraiment pas les documents pertinents. Nous avons un mémoire de la SGF mais le gouvernement ne nous a pas fourni les documents nécessaires quant à l'achat de l'Institut de bio-endocrinologie, au prix qu'on a payé, aux actifs. On nous donne un prix global, on nous informe qu'il y a des ventes qui indiquent un profit. Je crois qu'on aurait eu droit à plus de détails que cela: le bilan de la compagnie, connaître exactement la structure, les capitaux nécessaires, dans quoi nous nous embarquons. Est-ce que les sommes que nous mettons dans cette compagnie sont suffisantes? Même si on approuve la nouvelle orientation, par quel moyen devrons-nous procéder à cette orientation? Il semble que le gouvernement a déjà pris la décision. On va procéder en achetant la compagnie, on l'a déjà achetée. Cela nous coûtera 3 000 000 $ grosso modo. On n'a pas vraiment l'occasion de débattre cette orientation et les moyens d'y arriver.

On pourrait poser la question: Est-ce que l'achat de cette compagnie est nécessaire pour développer le secteur biotechnologique? J'ai lu le document du ministre délégué à la Science et à la Technologie dans lequel il donne certains objectifs du gouvernement. À la page 8 de ce document, il dit que les ministères et organismes à vocation économique doivent par leurs actions susciter l'émergence des bioindustries québécoises. La question que je me pose: Est-ce que le geste que le gouvernement a posé en achetant la compagnie va à l'encontre de cet objectif? Est-ce qu'on va susciter l'émergence de bioindustries en achetant les bioindustries ou en les encourageant, en allant dans le domaine de la recherche, en s'assurant que l'infrastructure est là, que la main-d'oeuvre est là, que les ressources humaines sont là. Suivant l'expérience, lorsque le gouvernement se lance dans une industrie, il a quelquefois tendance à écarter d'autres investissements dans le même secteur. Voici ma première question: Est-ce ie moyen d'y arriver? Va-ton en contradiction avec les objectifs du

gouvernement?

Il y a une autre question qu'on pourrait poser: Cette compagnie - la SGF pourrait peut-être nous répondre - est-ce une compagnie qui est vraiment dans le domaine de la biotechnologie ou est-elle dans le domaine de la biochimie? Il semble y avoir une sorte de distinction entre les deux. Sommes-nous vraiment lancés dans la biotechnologie par l'achat de cette compagnie? Il y a eu certains problèmes au sujet de cette compagnie dans le passé et peut-être que la SGF pourrait nous faire un petit historique de cette compagnie et de sa performance.

Je le mentionne, mais ma collègue, la députée de Jacques-Cartier, va parler un peu plus en détail du Centre international de génie génétique et de biotechnologie. Je crois que si on peut attirer ce centre au Québec, cela aidera au développement de ce secteur, mais il ne faut pas oublier ici qu'on entre dans la question de la main-d'oeuvre et des ressources humaines. Premièrement, un certain nombre d'emplois seraient créés pour les Québécois et les Canadiens. Cependant, ce centre étant avant tout international, le personnel serait en majeure partie international. Deuxièmement, on se lance dans un secteur où il faut absolument attirer des ressources non seulement du Québec, mais du monde entier. La question qu'on doit poser au gouvernement est la suivante: Le gouvernement est-il prêt à s'assurer que le climat et les conditions pour attirer le personnel nécessaire seront favorisés par le gouvernement?

Je me réfère ici à une affirmation faite par M. De Coster devant cette commission parlementaire au sujet de SIDBEC, quand il nous affirmait qu'il ne pouvait attirer le personnel nécessaire et qualifié pour SIÛBEC, et il donnait une série de raisons. Alors, dans un domaine où il y a déjà un surplus de main-d'oeuvre au niveau international, le domaine de l'aciérie, des sidérurgies, si le gouvernement ne peut pas attirer les ressources pour des raisons de climat, pour des raisons fiscales, pour des raisons de réglementation et de lois particulières au Québec, imaginez-vous quels seront les problèmes dans un domaine comme la biotechnologie où ces ressources sont beaucoup plus rares et où nous devons faire concurrence au niveau mondial pour les attirer. La question qu'on se pose c'est: Le gouvernement est-il prêt à changer ses attitudes et à favoriser un climat différent pour attirer ces ressources?

L'autre question que je voudrais poser est la suivante: Les sommes que le gouvernement nous demande aujourd'hui sont-elles suffisantes ou a-t-on demandé un montant si minime qu'on se dirige vers un autre échec? Je crois que l'expérience qu'on a eue avec d'autres sociétés d'État, dont la plus récente est celle de SIDBEC... On a acheté un plan existant et, à cette époque, l'Opposition disait: Vous ne financez pas assez cette industrie, vous allez avoir besoin de plus. Recommencez à neuf, installez un nouveau plan, ayez tous les moyens nécessaires. Cela a pris beaucoup plus de financement qu'il n'était prévu, à tel point que maintenant on se réveille et on a un déficit de 150 000 000 $.

Alors, quelles sont les analyses du gouvernement? Les montants que vous nous demandez aujourd'hui sont-ils suffisants? Faudrait-il en mettre plus? S'il faut en mettre plus, sur quoi vous êtes-vous basés?

Je lisais le document du ministre délégué à la Science et à la Technologie, lequel se basait sur les prévisions du gouvernement fédéral. Il disait: On va mettre 500 000 000 $ dans les dix prochaines années et la partie que le Québec va allouer sera de 63 000 000 $; c'est proportionnel à ce que le gouvernement fédéral mettra. Eh! bien, il y a d'autres intervenants dans le domaine. Je cite un monsieur nommé Ronald Cape, de Montréal, qui a implanté cette industrie aux États-Unis et, d'après lui, ces sommes sont clairement insuffisantes. Il dit: C'est un domaine où vous aurez besoin de beaucoup d'investissements, des sommes énormes, il faut que vous concurrenciez avec le monde entier pour attirer toutes les ressources possibles. Son opinion était que c'était mieux de ne pas dépenser ces sommes plutôt que d'allouer seulement un montant si minime. Alors, si tel est le cas, sur quoi vous basez-vous pour les 3 000 000 $? Est-ce que c'est parce qu'on a pris strictement ce que le gouvernement fédéral a dit qu'il était pour faire? Je ne pense pas qu'il ait commencé à le faire non plus? C'est une estimation basée sur quoi? Avez-vous fait des analyses? Dans quel domaine allez-vous vous lancer?

On peut demander, comme autre question, quelle est la vocation de la SGF? On était sous l'impression que c'était une question de rentabilité. Les sociétés d'État, il faut qu'elles soient rentables. Est-ce que le moyen d'encourager la biotechnologie, c'est par l'entremise de la SGF? Est-ce que, à un moment donné, la SGF va pouvoir dire: II y a la question de la recherche, il faut mettre beaucoup d'argent dans la recherche? C'est un domaine où cela prend de la recherche. Cela prend des sommes énormes. Comment conciliera-t-on ces objectifs de dépenser de l'argent pour la recherche que le gouvernement, normalement, peut faire par l'entremise des universités, par l'entremise d'autres organismes à but non lucratif? Comment allez-vous concilier la rentabilité de la SGF et le domaine de la recherche qui nécessitera des sommes d'argent?

Une fois qu'on s'embarque dans une compagnie, c'est presque impossible de la

lâcher. Un gouvernement ne peut pas déclarer faillite. Alors vous achetez une compagnie aujourd'hui, qu'est-ce qui arrivera si demain vous avez besoin de 2 000 000 $, 5 000 000 $, 10 000 000 $, 15 000 000 $? Cela ira toujours en augmentant. Quelles garanties avons-nous que vous n'aurez pas besoin de sommes additionnelles? Je pense que c'est une erreur de dire que pour encourager les entreprises québécoises, il faut les acheter. Je pense que c'est une contradiction. Si vous voulez faire du financement ou les encourager avec des conditions, je pense que cela aurait été beaucoup plus logique de dire: Bon! II y a une compagnie qui a besoin d'aide. On va mettre des conditions, on va aider cette compagnie, mais elle continuera à oeuvrer dans le domaine privé et ce seront des Québécois, c'est eux qui l'ont, ils vont continuer à la gérer. Alors l'implication du gouvernement est limitée, la compagnie est encouragée, elle a les ressources. Le gouvernement peut, par d'autres ressources, fournir la recherche nécessaire.

Vous parlez de Biocel. Il va falloir donner des fonds à Biocel. Alors plutôt que de vous embarquer dans l'opérationnel, parce que l'opérationnel est toujours un problème pour le gouvernement, vous allez toujours avoir des problèmes, parce qu'on ne peut pas prendre les mêmes mesures que l'industrie privée peut prendre. Si vous aviez seulement dit: On va financer la recherche. On va attacher des conditions à ce financement. Biocel, très bien, on va former cela. Le transfert de cette technologie, le gouvernement va le faire aux industries avec certaines conditions et avec certains financements si c'est nécessaire. À ce moment-là, vous auriez atteint les objectifs que vous vouliez atteindre, mais vous l'auriez fait d'une façon plus logique, sans affecter la rentabilité de la SGF, sans embarquer encore dans une autre entreprise opérationnelle pour une société d'État.

On continue à dire à l'Assemblée nationale: II faut réexaminer le rôle des sociétés d'État. Voici, vous nous arrivez aujourd'hui en disant: On a acheté cette compagnie et on s'en va dans le domaine de la biotechnologie. Une autre question qu'on pourrait poser est la suivante: Est-ce que la loi fédérale sur les brevets ou les produits pharmaceutiques affectera les produits qui vont être manufacturés par cette nouvelle compagnie ou les recherches de Biocel? Je pense qu'il faut se poser cette question. Quelles seront les conséquences? (12 heures)

On voit aujourd'hui des compagnies qui quittent le Canada parce que cette loi, ils la trouvent un peu trop onéreuse. Ayerst McKenna s'en va au New Jersey, en disant: On va faire nos recherches aux États-Unis parce qu'on est mieux protégé. Que va-t-il arriver? Avant de s'embarquer avec des millions, est-ce que ce ne serait pas mieux d'éclaircir un peu la situation quant à la Loi sur les brevets, de faire des pressions si nécessaires, faire des changements? Je pense que ces changements s'imposent. Mais non, on dépense des millions et après cela, on va être pris et on va commencer à faire la lutte au fédéral parce que sa loi ne nous permet pas de nous protéger dans les entreprises où on s'est lancé sans vraiment examiner tous les aspects. Ce sont les points principaux. C'est la question des montants. Est-ce que vous pouvez nous justifier que les montants que vous avez aujourd'hui, c'est assez pour vous lancer dans ce secteur?

Regardez ce que l'Ontario a fait. L'Ontario est arrivé au même objectif. Il a les mêmes objectifs d'encourager la biotechnologie, mais ce n'est pas à coup de 3 000 000 $, c'est à coup de 50 000 000 $. Il y a quelque chose qui ne marche pas. Si la province voisine décide que cela prend 50 000 000 $ pour commencer et s'est associée avec l'entreprise privée, avec Labatt, quelle est notre justification aujourd'hui, de mettre 3 000 000 $ et de dire qu'on va réussir à être compétitif dans ce secteur? Il me semble qu'il y a quelque chose qui manque. Si on a besoin de plus, disons-le et faisons-le maintenant. N'entrons pas dans un secteur à reculons, car quand on va se réveiller l'année prochaine, on va venir à l'Assemblée nationale et on va nous dire: Écoutez, on a besoin de 10 000 000 $; et on a besoin de X millions. On doit le savoir maintenant, c'est cela la planification. Et si on en a besoin, qu'on l'étudié.

On n'est pas contre l'idée qu'on a besoin de plus, mais faisons-le de la façon qui va être la plus rentable, qui va protéger le plus les investissements. Parce que si on a pas assez d'investissements, c'est de l'argent jeté à l'eau. C'est cela le point de ce type, Ronald Cape. Si vous ne mettez pas l'argent nécessaire, vous êtes mieux de ne pas en mettre du tout. Et vous allez causer des problèmes à la SGF, vous allez causer des problèmes à l'industrie, et pour la compagnie que vous venez d'acheter, je ne sais pas quel sera l'avenir. Elle a été rentable jusqu'à maintenant. SIDBEC-Dosco était très rentable jusqu'à ce que le gouvernement l'achète, et après que le gouvernement l'eut achetée, c'est là qu'elle a commencé à perdre de l'argent.

On ne semble pas apprendre de nos leçons. On ne regarde pas le passé, ce qu'on a fait. Évitons donc les erreurs du passé. Je suis pour l'encouragement de la biotechnologie. Je suis pour qu'on y investisse. C'est un secteur, comme on dit en anglais, "mind boggling". Les conséquences, les possibilités sont illimitées. Vous dites: On va mettre un microbe à l'oeuvre, c'est le microbe qui va travailler

pour nous. C'est fantastique, c'est dangereux et alarmant aussi. Mais c'est simplement cela que vous faites. Ce n'est pas de la chimie, la réaction d'un produit sur l'autre, c'est le microbe qui va faire quelque chose. Pour donner un exemple extrême, le microbe va changer la porte en fenêtre. Je prends un exemple pour illustrer. Mais c'est vraiment cela qu'on fait. On va faire un processus biologique et ce petit microbe va aller à cette porte et il va mettre une fenêtre dedans. C'est fantastique! Faisons-le. Mais comment allons-nous le faire? Allons-nous avoir les ressources nécessaires?

Je pense qu'on devrait - il faut revenir à cela - maintenir les relations entre le gouvernement, les universités et le secteur privé, ne pas tout mélanger. Le gouvernement a des ressources que d'autres n'ont pas. Il peut encourager, fournir des sommes aux universités. Vous voulez former Biocel, fournissez-lui de l'argent pour faire de la recherche, très bien. Société à but non lucratif avec l'Université Laval, 100%. Là, vous savez dans quoi vous vous embarquez. Vous encouragez la recherche et les résultats c'est vous qui pouvez les transférer à l'industrie, aux conditions que vous voulez, aux conditions que Biocel et les personnes qui sont dans le milieu peuvent décider. Il y a la question de savoir si c'est assez d'argent. Je voudrais avoir plus de détails sur la compagnie que vous avez achetée et les ressources humaines.

Je ne peux pas comprendre que le président d'une société d'État vienne nous dire: Je ne suis pas capable d'attirer les ressources humaines adéquates ici au Québec. Il ne nous dit pas et je ne vous dis pas, M. le ministre, que les Québécois ne sont pas intelligents, qu'on n'a pas du monde intelligent et qu'on n'est pas qualifiés. Ce n'est pas ce que je vous dis. Je vous dis qu'on est dans un secteur où la concurrence s'exerce à l'échelle mondiale. Il faut avoir les meilleurs cerveaux ici. Il faut les attirer, mais, pour les attirer, allez-vous pouvoir le faire avec vos lois fiscales? Vos lois linguistiques? Vos réglementations? Votre atmosphère de chicane avec Ottawa?

Une voix: La loi des brevets.

M. Ciaccia: ... et avec la loi des brevets? Tout cela, est-ce que vous pourrez... La loi des brevets est un autre problème. Cela, vous ne le contrôlez pas, on en parlera après. Allez-vous pouvoir attirer tous ces gens ici, les meilleurs cerveaux au monde avec premièrement les 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ que vous mettez dans ce secteur-là - parce que ce n'est pas beaucoup - avec toutes les lois que vous contrôlez vous-mêmes et l'atmosphère et les chicanes avec Ottawa? Tout cela crée une atmosphère, un harcèlement qui ne sont pas vivables. Quand les gens vont vivre à un endroit, ils veulent être en paix. C'est assez difficile de passer l'hiver canadien sans avoir à passer par les chicanes des différents gouvernements. Si vous pouviez nous assurer que tous ces facteurs seront pris en considération, que vous allez prendre les mesures nécessaires, que vous allez nous les expliquer, nous donner les chiffres et nous démontrer les analyses, je pense qu'on appuiera entièrement cette démarche. Dans le moment, nous trouvons que vous ne prenez pas les bons moyens. Vous semblez répéter les erreurs du passé. On n'a pas encore assez d'information. La SGF pourrait peut-être nous en fournir.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre délégué à la Science et à la Technologie.

M. Gilbert Paquette

M. Paquette: M. le Président, je ne répondrai pas à toutes les questions du député de Mont-Royal qui, manifestement, s'en pose beaucoup et certaines très profondes. Je pense que la SGF pourra répondre à une bonne partie des questions. Cependant, en plaçant l'initiative et les projets de la Société générale de financement dans le domaine des biotechnologies dans le contexte des récentes décisions du Conseil des ministres quant aux biotechnologies et bioindustries, on pourra répondre à une bonne partie des questions du député de Mont-Royal.

Au mois de septembre dernier, le Conseil des ministres a adopté un programme d'intervention pour le développement de la recherche en biotechnologie. Il a adopté également les recommandations d'un groupe de travail interministériel sur le développement des bioindustries au Québec. Le développement des biotechnologies et des bioindustries devenait ainsi une priorité pour le développement technologique du Québec. Il ne faudrait pas croire cependant que l'identification de cette priorité soit une concession à la mode du jour. Là-dessus, je pense qu'on est d'accord avec l'Opposition. Elle repose plutôt sur le constat de l'intérêt vital des biotechnologies pour l'avenir de la recherche au Québec et surtout pour l'avenir de son développement économique. À cet égard, elle se place dans la foulée de notre énoncé de politique scientifique, un projet collectif, publié en 1980 et dans celle de notre énoncé de politique économique des quatre prochaines années, publié en juin dernier, Le virage technologique.

À l'heure des biotechnologies, notre programme d'intervention pour le développement de la recherche en biotechnologie énonçait trois objectifs, premièrement, développer nos ressources

humaines de façon à former des spécialistes québécois qui viendront combler le manque important de main-d'oeuvre spécialisée dans ce secteur; deuxièmement, organiser et faciliter le transfert des connaissances et la transformation des découvertes scientifiques en innovation industrielle; troisièmement, mobiliser les moyens financiers suffisants pour atteindre nos objectifs - et là on rejoint l'une des questions du député de Mont-Royal.

Parallèlement à ces objectifs, le gouvernement mettait sur pied un comité interministériel chargé de déterminer les potentiels de développement des bioindustries. À cet égard, le Québec possède de nombreux secteurs prioritaires de développement: l'agro-alimentaire, la forêt, la biomasse, l'énergie, les produits de la chimie et la santé. Tous ces secteurs seront affectés à plus ou moins long terme par les biotechnologies. Il faut donc mobiliser nos principaux leviers économiques, et j'ajouterais au fur et à mesure que les projets sont identifiés, on ne peut pas tout faire en même temps. Je pense que cela répond à certaines questions du député de Mont-Royal. On a préféré agir dans les domaines où il y avait une certaine évidence et d'autres projets, d'autres activités s'ajouteront au fur et à mesure que nous progressons dans le développement des biotechnologies et des bioindustries.

Parmi ces leviers économiques d'importance dont dispose le Québec - ce ne sont pas les seuls - il y a les sociétés d'État. Le groupe de travail sur les bioindustries le reconnaissait clairement dans la première recommandation de son rapport. Je cite: "Que la Société générale de financement du Québec, la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestier du Québec - c'est-à-dire REXFOR - et la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires - SOQUIA -assument le rôle de leader des développements bioindustriels dans leurs secteurs d'intérêt respectifs, sous réserve d'éviter tout dédoublement des interventions dans un secteur donné - pour le moment, ce n'est pas tellement le problème puisqu'on a devant nous la première initiative dans le domaine des bioindustries - et que leurs plans de développement comportent des engagements explicites en ce sens."

La Société générale de financement du Québec est la première de nos sociétés d'État à s'impliquer directement dans ce nouveau domaine. La SGF se présente devant cette commission parlementaire pour exposer ses projets dans ce domaine en accord avec la directive qui lui a été adressée par le gouvernement sur proposition de mon collègue, le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme. En proposant des investissements dans le secteur des produits de la santé, la SGF s'engage dans un des créneaux biotechnologiques les plus prometteurs. Cette initiative de la SGF permettra de poursuivre nos efforts collectifs dans le but de valoriser notre recherche faite ici au Québec, créera des emplois pour nos jeunes scientifiques et contribuera à notre développement économique dans un domaine de pointe. Nous souhaitons, quant à nous, que le geste de la SGF soit imité par nos autres sociétés d'État. Nous souhaitons également que l'entreprise privée emboîte le pas. Nous nous y employons d'ailleurs activement.

Le plan d'action à l'heure des biotechnologies assure la société québécoise d'un minimum - et j'insiste là-dessus - d'un minimum de 63 000 000 $ d'investissement pour les cinq prochaines années dans la recherche et le développement. Ce plan, qualifié de modeste par certains, équivaut tout de même, à l'échelle du Québec, aux recommandations du rapport Brossard - non pas des chiffres élaborés par le fédéral, mais des chiffres élaborés par un comité présidé par un Québécois, M. Maurice Brossard, dont j'ai le plaisir de souligner la présence dans cette salle - qui était déposé à Ottawa il y a deux ans et qui attend toujours un début de réalisation. Ce rapport recommandait des investissements de l'ordre de 500 000 000 $ pour l'ensemble du Canada sur une période de dix ans. Alors, sur cinq ans, à l'échelle du Québec, cela fait environ 63 000 000 $, qui est le montant que j'ai annoncé au mois d'octobre dans notre plan d'action à l'heure des biotechnologies.

Je mentionnais, à l'occasion de la présentation de ce plan le 7 octobre dernier, que ces 63 000 000 $ sur cinq ans constituaient un minimum vital. Les investissements de la SGF dans le secteur industriel constituent une première réalisation qui s'ajoute à ces fonds qui proviennent de diverses sources, pas uniquement du gouvernement du Québec, mais également des contrats de recherche des universités et des subventions fédérales aux universités. Ces fonds s'ajoutent aux 63 000 000 $ que nous avons l'intention d'investir dans les biotechnologies comme minimum vital, je le répète.

Au début de 1983, nous disposerons des recommandations de quatre groupes de travail qui sont à l'oeuvre depuis six mois sur des questions importantes comme la biosécurité. Le député de Mont-Royal avait raison de dire: C'est inquiétant, on joue avec des micro-organismes dont certains peuvent être virulents. Il y a des problèmes à considérer. Il y a un groupe de travail qui va remettre ses recommandations au début de 1983, dans quelques semaines. Il y a également toute la question de la propriété industrielle, du développement des technologies de fermentation, le plus vieux

domaine d'application des biotechnologies, et le projet d'une banque de souches, auquel tient beaucoup, notamment, le professeur Fortin de l'Université Laval, et avec raison.

Plus tard, en 1983, notre mission sur les programmes universitaires remettra ses recommandations au Conseil des universités dans le domaine si important de la formation des ressources humaines, lesquelles sont à la base de tout développement d'envergure en biotechnologie.

D'autre part, notre mission de concertation, formée de seize personnes des milieux universitaires, industriels, privés et gouvernementaux, et présidée par M. Pierre Coulombe, du Secrétariat de la science et de la technologie, a commencé ses travaux depuis le 5 novembre. Elle travaille activement à la réalisation de deux mesures importantes: premièrement, l'identification des unités de formation techniques et méthodologiques dans le but de donner des moyens supplémentaires aux équipes de recherche oeuvrant en biotechnologie, et, deuxièmement la mise sur pied d'une société de recherche et de développement en biotechnologie chargée d'assurer une valorisation industrielle des recherches dans ce domaine faites au Québec. (12 h 15)

Le gouvernement du Québec est actuellement le seul au Canada à s'être donné un programme intégré de développement des biotechnologies et des bioindustries. Le gouvernement fédéral étudie toujours un plan de développement canadien, privant, en attendant, le Québec d'une juste part d'investissements dans ce secteur. Quant aux autres provinces, leurs actions ont été jusqu'ici ponctuelles. On pense ici à la mise sur pied de la compagnie Allelix à Toronto, évoquée par le député de Mont-Royal, financée à 50% par la Corporation de développement du Canada, société d'État fédéral qui est un peu le pendant de notre SGF ici et qui a souscrit 50% des 50 000 000 $ qui seront investis sur dix ans; c'est environ 5 000 000 $ par année...

M. Ciaccia: J'avais dit 50 000 000 $, mais c'est 105 000 000 $, je me suis trompé.

M. Paquette: C'est 105 000 000 $, je m'excuse. Il me semblait que le chiffre n'était pas exact. Je suis tout à fait d'accord. L'Ontario investira 20% du capital-actions de cette compagnie et la compagnie Labatt investira 30%. De plus, il ne faudrait pas en conclure que l'Ontario a une avance sur le Québec à cause de cela puisque cette année, en 1982-1983, le gouvernement de l'Ontario ne dépense que 500 000 $. Au moment où on se parle, il n'y a pas de personnel à la compagnie Allelix; il n'y a que des laboratoires et encore moins d'activités industrielles. En ce sens, je pense qu'il est faux de dire que, malgré l'aide fédérale accordée à Allelix, le Québec soit en retard sur l'Ontario dans ce domaine. Voilà pourquoi il faut nous activer.

Vous avez raison de dire, M. le député de Mont-Royal, que nous sommes en compétition avec d'autres sociétés, y compris la société ontarienne. L'implication de la Société générale de financement par sa filiale Bio-Méga, l'achat de Bio-Endo et son association à Biocel... C'est là l'élément nouveau. Il ne s'agit pas seulement de prendre une entreprise et de dire: On va faire ce qu'elle faisait avant. On va faire quelque chose de neuf avec Bio-Endo, en mettant en contact cette entreprise de commercialisation avec des chercheurs de l'Université Laval, avec l'équipe renommée du Dr Labrie. Cette association à Biocel est un excellent exemple des liens qui peuvent s'établir entre la recherche universitaire et son application en milieu industriel. -

Le développement économique du Québec exige de toute urgence que nos programmes spécifiques d'interventions s'inscrivent dans un vaste effort de rattrapage en matière de recherche et de développement. Cela saute aux yeux dès que l'on consulte certaines statistiques internationales en matière de recherche et de développement. Ainsi, alors que le Québec et le Canada consacrent environ 1% de leurs richesses collectives et de leur produit national brut à la recherche et au développement, l'Allemagne fédérale en consacre 2,28%; les États-Unis, 2,25%; le Royaume-Uni, 2,05%; le Japon, 1,92% et la France, 1,8%. Notons, en passant, qu'en France on s'est donné par voie législative l'obligation d'accroître cette proportion à 2,5% d'ici à 1985. Ces statistiques nous font saisir toute l'importance et l'urgence du redressement à accomplir en ce domaine. En quelques années, il faudra doubler l'effort de recherche et de développement au Québec. Cet effort, qui est absolument essentiel, ne saurait être un but en soi. Il n'a de sens que dans la mesure où il crée les conditions d'un développement économique, social et culturel accru de notre société. Cela signifie, en d'autres mots, que la recherche doit féconder l'activité économique dans le but de créer de nouveaux procédés techniques et de nouveaux produits.

Il incombe à tous les acteurs engagés dans le processus de recherche et de développement de faire sauter les cloisonnements qui les séparent et qui, en fin de compte, stérilisent l'effort que consent la collectivité en ce domaine. Cela est vrai des chercheurs qui se désintéressent trop souvent des conséquences et des applications industrielles de leurs recherches; cela est vrai des entreprises qui, trop préoccupées par le court terme, n'accordent qu'une place

exiguë à la recherche; cela est vrai aussi de l'État qui, dans le passé, n'a pas su jeter les passerelles adéquates entre le chercheur et l'entrepreneur, entre le laboratoire et l'industrie. Chacun doit donc réfléchir à ses responsabilités et, surtout, aux moyens de lever les blocages qui ont trop longtemps isolé la recherche du développement.

Pour sa part, le gouvernement québécois s'apprête à prendre les moyens nécessaires afin de favoriser le transfert de la recherche et sa valorisation au sein de l'industrie. L'initiative de la Société générale de financement que nous discutons aujourd'hui nous montre la voie à suivre. D'autres moyens et d'autres intervenants devront être mobilisés. C'est ma conviction, en regardant d'autres sociétés qui se tirent mieux que nous de la crise actuelle, que l'avenir du Québec passe par la concertation. Rompre nos habitudes sociales, c'est d'abord abattre les cloisonnements stérilisants entre patrons et employés, secteur privé et secteur public, et, en ce qui me concerne, entre chercheurs et entrepreneurs. Nous ne sommes pas en compétition entre nous, mais avec les autres sociétés. Pour réussir pleinement un virage technologique absolument nécessaire, il nous faut miser à fond sur cette solidarité dont notre peuple a toujours su faire preuve dans les temps difficiles.

M. le Président, en terminant, je m'en voudrais de ne pas relever une des questions qui n'est pas touchée par cet exposé que j'avais préparé à l'avance et que m'a glissée le député de Mont-Royal en parlant du Centre de biotechnologies de l'ONUDI, mais, en fait, en parlant de l'ensemble des ressources dont la société québécoise a besoin dans ce domaine extrêmement vital des biotechnologies. Il se disait: Est-ce que vous allez changer votre attitude concernant le climat, concernant les chicanes avec Ottawa, concernant la loi 101, concernant les lois fiscales, la loi S-31, etc.?

M. Fortier: ... sur la loi S-31.

M. Paquette: M. le Président, je voudrais simplement dire une chose. Depuis un an, nous travaillons à amener au Québec le Centre de biotechnologies de l'ONUDI. La Chambre de commerce de Montréal, le Comité de promotion économique de Montréal, le COPEM, se sont impliqués très activement dans ce dossier. Ils ont déposé un volumineux dossier - que je n'ai pas apporté ici, parce que je ne pensais pas qu'on allait discuter particulièrement de ce dossier - où ils mettent en évidence les avantages comparatifs de Montréal. Je vous assure que ce dossier est extrêmement convaincant. Il souligne, entre autres, cette particularité qu'a Montréal d'être une grande métropole de réputation internationale où sont utilisées deux des principales langues de l'activité scientifique et économique: le français et l'anglais. Je pense qu'on est peut-être le peuple le plus bilingue. Le sens de la loi 101 est de faire du français la langue officielle, ce n'est pas d'interdire aux Québécois et aux Québécoises d'apprendre d'autres langues, au contraire.

Je pense que, quand vous nous demandez de changer nos attitudes, vous nous demandez de changer l'image néfaste que vous avez vous-mêmes créée et qui a nui considérablement à l'économie du Québec et non pas nos attitudes; nos attitudes ont toujours été les mêmes. Nous voulons un Québec français et nous souhaitons également que les Québécois et les Québécoises aient le plus possible, dans la mesure du possible, la maîtrise, notamment, de l'anglais. On a d'ailleurs abaissé l'âge de l'apprentissage de l'anglais de la cinquième à la quatrième année. C'est sous notre gouvernement. Personnellement, je déplore qu'on accorde beaucoup trop de temps à ces questions linguistiques. On devrait attacher plus d'importance à l'enseignement des sciences. Cela dit, je pense que ce ne sont pas nos attitudes qu'il faut nous demander de changer, c'est l'espèce d'image négative que, pour des raisons politiques, votre parti et d'autres ont utilisée. J'étais heureux de voir que la Chambre de commerce de Montréal et le COPEM avaient, eux, changé d'attitude et mettaient l'accent sur les avantages du Québec qui sont nombreux par rapport à d'autres pays pour attirer ici le supplément de ressources dont nous avons besoin.

Je vous soulignerai en terminant que nous avons cependant un potentiel scientifique et technologique dans le domaine des biotechnologies qui se compare très bien avec celui des autres provinces. On a d'excellentes équipes à l'Institut Armand-Frappier, à l'Université Laval notamment. C'est notre intention, à la fois de travailler à amener ici de l'extérieur des ressources qui peuvent nous manquer, mais surtout de travailler au développement des équipes qui oeuvrent déjà dans le domaine de la recherche et du développement en biotechnologie.

Une autre question que vous avez soulevée: Est-ce que les sommes sont suffisantes? Je pense que la SGF pourra nous faire état de ses projets. J'y ai répondu partiellement tout à l'heure. Je voudrais simplement mettre en évidence que c'est une question qu'on pourra nous poser dans un an ou deux. Vous savez, on n'a pas de baguette magique pour faire jaillir des projets à gauche et à droite dans la société québécoise. La SGF en a identifié un. Nous sommes en train de discuter avec REXFOR pour des applications dans le domaine de la forêt. Il y aura d'autres initiatives; au fur et à mesure que nous les découvrons, nous les appuyons. Ces initiatives viennent parfois du

côté de la recherche. Des chercheurs disent: On est arrivé au point où ce serait intéressant de commercialiser tel produit ou tel procédé. Dans d'autres cas, si ce sont des entreprises déjà à l'oeuvre, encore faut-il les créer, encore a-t-il fallu les développer, qu'elles nous disent, dans le domaine de la fermentation, par exemple, où il y a déjà une infrastructure industrielle: Voici où on pourrait aller. Je pense que c'est en mettant ensemble chercheurs et entrepreneurs, en appuyant les projets quand ils se présentent qu'on va finir par avoir quelque chose d'intéressant au lieu de se dire qu'on va attendre d'avoir un plan de 500 000 000 $ pour agir. À ce compte-là, on va attendre longtemps. Nous privilégions l'attitude pragmatique. Je pense que c'est comme cela que le Québec pourra prendre le virage biotechnologique.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre.

Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Joan Dougherty

Mme Dougherty: Merci. J'ai quelques commentaires. D'abord, j'appuie à 100% les remarques de mon collègue, le député de Mont-Royal. J'aimerais souligner deux choses. J'ai lu tous les documents que j'ai reçus du ministre délégué à la Science et à la Technologie. On parle de tout. La biotechnologie, c'est beaucoup de choses. C'est très très vaste. Je me demande quels sont d'abord les champs prioritaires choisis par le gouvernement pour son intervention. Je ne les vois pas encore. Deuxièmement, quel est la meilleure stratégie du gouvernement pour maximiser les investissements, qui sont faibles? Je ne critique pas le gouvernement, mais, comme le député de Mont-Royal l'a souligné, tout ce que nous avons lu, toutes les expériences ailleurs au Canada ou dans d'autres pays révèlent que, même pour amorcer un projet très modeste, il faut un investissement énorme. J'aimerais vous lire quelque chose de M. Cape, qui est chairman of the California based Cetus Corporation. Il parle du rôle du gouvernement. He says that the government does have a role to play but the best role of government is to support fundamental research in universities and not try to change the fundamental way in which universities, industry and government relay to each other. Government should support centers of excellence, with ample funding but leave them alone and let the natural market phenomenon take over from there. Universities and government should combine their efforts to create industrial or development parks around universities and let nature take its course. Government can also stimulate industry by providing taxe incentives.

Je crois qu'il faut apprendre quelque chose des expériences des autres. Aussi, dans un article du Financial Post Magazine de septembre 1982, M. Bender, l'ancien président de Bio Logicals, a dit: The start up costs in a field as risky as biotechnology are enormous. Pour chaque dollar investi en recherche, dit-il, il faut cinq ou cinquante dollars pour la production, le développement de la production. If the product is a medical one that requires safety testings, the cost can run as high as ten to thirty millions per product. Je crois qu'il y a des avertissements ici et j'aimerais savoir le montant que le gouvernement peut trouver dans la SGF ou dans d'autres sociétés. Quelle est la meilleure stratégie pour maximiser les investissements du gouvernement? Je ne sais pas si M. Ciaccia a parlé d'Ayerst par exemple. Il y a d'autres compagnies, d'autres exemples. Il y a vraiment une contradiction. Si les industries pharmaceutiques ont des problèmes - elles ont des problèmes réels ici ce n'est pas uniquement la faute du Québec. Il y a des problèmes sur le plan canadien, il n'y a pas de doute là-dessus, mais pourquoi ne pas attaquer ces problèmes pour au moins garder les recherchistes que nous avons déjà? Je crois qu'il faut avoir une stratégie complète, un tout, avec un plan 1, un plan 2, des étapes 1, 2, 3 et 4, en ordre, pour maximiser nos investissements. (12 h 30)

Vous avez parlé du COPEM. Il est vrai que le COPEM, en justifiant ses demandes au gouvernement fédéral, a trouvé certaines conditions ici qu'il considère favorables à l'implantation du centre international. Mais, le COPEM est aussi très conscient qu'il y a des conditions défavorables. Si vous lisez quelques documents que j'ai ici et que j'ai obtenus d'Ottawa, ils définissent les conditions minimales requises pour l'implantation des effectifs du centre international. Je me demande si vraiment le gouvernement a considéré la réalité de ces conditions, de ces demandes. Je ne vais pas les lire, mais je crois qu'ils sont très importants, il y a une espèce d'immunité exigée, j'ai noté les salaires. J'ai un document ici qui parle des salaires prévus pour tous les recherchistes et les techniciens et je me demande si, dans l'infrastructure financière - les taxes par exemple, les taxes, personnelles - Montréal est l'environnement favorable pour les recherchistes et tous les techniciens qui viendront ici de partout.

Je crois que c'est tout pour le moment. J'ai beaucoup de doutes que cette première étape suggérée par l'intervention de la SGF soit vraiment productive en regard de nos plans pour développer la biotechnologie à Québec.

Le Président (M. Rochefort): M. le

député de Châteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Je ne reprendrai pas tout ce qui a été dit jusqu'à maintenant. Je vais plutôt reprendre une question bien précise que j'aimerais voir approfondir davantage. C'est la question d'Ayerst. La compagnie Ayerst a quitté le Québec. Je pense avoir été un des premiers députés à l'apprendre, puisqu'un travailleur de cette compagnie qui est dans mon comté, le soir même où les employés l'ont appris, m'a appelé pour me dire qu'il y avait ce problème. La question a été fouillée de long en large et en profondeur et il a été établi que le problème de base était la non-protection des brevets dans le domaine de la recherche pharmaceutique.

Je pense qu'il faut que cela soit très clair, sinon, on se perd en conjectures. Si Ayerst a quitté, c'est donc parce qu'il n'y avait pas de protection pour elle dans ce domaine-là et qu'elle l'a aux États-Unis. Ce n'est pas dans une autre province du Canada qu'elle a déménagé, c'est aux États-Unis. Elle a en fait consolidé ses investissements aux États-Unis dans le domaine qui la préoccupe. La question qui se pose à ce moment-là, c'est: Est-ce que cette réalité vient nous empêcher complètement de nous développer le mieux possible dans le domaine de la biotechnologie? L'autre question qui vient nécessairement, c'est: Est-ce que ce que l'on vise couvre la question pharmaceutique? J'aimerais que l'on clarifie cette question tout à l'heure. Est-ce que ce que l'on cherche à développer inclut le pharmaceutique? Si cela n'inclut pas le pharmaceutique, est-ce qu'à ce moment-là la question des brevets, cette non-protection des brevets, joue encore dans le dossier? Est-ce qu'elle devient un empêchement à développer d'autres secteurs de la biotechnologie au Québec?

Je pense que c'est comme cela qu'on doit l'envisager. Autrement, on nous met dans le visage toute la question d'Ayerst et c'est comme si, à un moment donné, tout devenait impossible par la suite. Je pense qu'il y a ces distinctions à faire et j'aimerais, tout à l'heure, que ces messieurs et mesdames de la SGF puissent répondre à cette question. Sinon, on essaiera de trouver la réponse autrement.

Une deuxième question à laquelle j'aimerais entendre une réponse assez approfondie c'est sur Bio-Endo. Je voudrais savoir s'il y avait seulement ce choix-là. Y avait-il d'autres choix? Est-ce qu'on a eu suffisamment d'éclairage sur tout cela pour se dire que ce qu'on a fait était le meilleur choix? Ce sont les deux questions que j'aimerais voir approfondir tout à l'heure, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le député d'Outremont.

M. Pierre-C. Fortier

M. Fortier: M. le Président, je ferai quelques brèves remarques. Comme de raison, le député de Châteauguay a semblé poser des questions sur Ayerst à la Société générale de financement. J'aurais cru qu'en tant qu'adjoint parlementaire, il aurait pu avoir les réponses de son ministre. De toute évidence, c'est un dossier...

M. Oussault: Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Question de règlement, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, si la commission parlementaire a été convoquée, c'est pour que tous les députés, qu'ils soient d'une formation politique ou d'une autre, aient l'occasion de clarifier des choses et d'en faire profiter la population par le biais des médias dont on dispose. Alors, M. le Président, il est tout à fait normal que je pose des questions ici, même si je suis adjoint parlementaire, et d'autant plus que je le suis, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, le député enfreignait le règlement. Il ne m'a pas laissé terminer ma phrase. Ce que je voulais lui dire, c'est que, de toute évidence, comme le député de Mont-Royal l'a souligné, il y a des problèmes à régler dans le domaine de la protection des brevets. Le problème d'Ayerst est un cas très explicite et, à juste titre, le collègue de Mont-Royal a demandé: Mais pourquoi se lancer dans un autre domaine où de toute évidence toute la question des brevets acquiert toute son importance?

Je ne veux pas m'éterniser là-dessus, ce n'était pas le but de mon propos. Je voudrais dire que nous avons offert au ministre, au mois de juillet dernier, alors que j'étais porte-parole du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, nous avons proposé qu'il y ait une commission parlementaire pour revoir l'ensemble du dossier. S'il y avait des choses que la province de Québec devait faire, qu'elle les fasse et, s'il y avait des choses que, collectivement, des deux côtés de la Chambre, nous devions étudier pour faire des représentations au gouvernement fédéral, j'avais offert que nous le fassions. Je dois constater que peu de choses ont été faites à ma connaissance sur ce dossier pour faire les représentations qui s'imposaient.

Néammoins, les propos que j'aimerais

tenir, M. le Président, s'adressent à la Société générale de financement puisque je crois que le but de l'article de la loi demande que, lorsque le gouvernement approuve une nouvelle orientation de la SGF, cela oblige le gouvernement à appeler la commission parlementaire. Je crois que le but de cet article, c'est de nous permettre d'évaluer ensemble, des deux côtés de la Chambre, si les nouveaux secteurs qui sont approuvés sont réellement les secteurs prioritaires pour la Société générale de financement.

On se souviendra, et mon collègue de Mont-Royal faisait allusion au débat qu'il y avait eu en 1978 à ce sujet-là, qu'on avait souligné à ce moment-là que peut-être dans le passé la Société générale de financement s'était lancée dans des aventures qu'on avait regrettées par la suite. Loin de moi de vouloir laisser entendre que le secteur qui nous est proposé pourrait nous amener dans des problèmes semblables. Il reste qu'on doit quand même se poser la question pour que la Société générale de financement nous convainque que c'est réellement un secteur prioritaire qui s'ajoute à ceux qui avaient déjà été approuvés.

En lisant le libellé de la raison de cette commission parlementaire, on dit que c'est uniquement pour étudier la directive no 3, mais j'oserais espérer qu'on puisse faire déborder légèrement ce mandat puisqu'en décembre 1980, la Société générale de financement nous avait présenté, par la voix de son président, le sommaire d'un plan de cinq ans dans lequel on faisait justement état des priorités et également d'une enveloppe budgétaire assez importante qui définissait les priorités de la Société générale de financement.

Autrement dit, je crois qu'on peut faire un débat comme on l'a fait jusqu'à maintenant sur la nécessité ou non de s'orienter dans le domaine de la biotechnologie, mais je crois qu'il est important de rattacher ce débat à la Société générale de financement comme telle puisque c'est elle qui s'engage dans ce dossier.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, je pense qu'il est temps d'intervenir parce que le député d'Outremont est en train de nous faire déraper en voulant élargir le mandat de la commission à d'autres choses que ce pourquoi on est ici ensemble.

Le mandat est très clair, c'est de discuter de la directive no 3 émise par la Société générale de financement du Québec. Je voudrais qu'on s'en tienne à cela et, personnellement, je ne donnerai pas mon consentement pour qu'on élargisse parce qu'on ne fera pas vraiment le travail - on a peu de temps pour le faire - pour lequel on nous a réunis aujourd'hui.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Rochefort): Sur la question de règlement, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Si on assure le député de Châteauguay qu'on ne sera pas ici jusqu'à 2 h 15 du matin, est-ce qu'on peut continuer? Vous ne serez pas obligé de vous enfuir dans le milieu de la nuit cette fois-ci.

M. Dussault: Je ne suis plus capable de leur faire confiance, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

Sur la question de règlement du député de Châteauguay, je souhaiterais que tous les membres de la commission s'en tiennent au mandat qui nous a été confié par l'Assemblée nationale quant à l'étude de la directive no 3 de la SGF dont nous avons copie dans nos dossiers. Je souhaiterais que nous en venions à cette question. J'adresse d'ailleurs ce commentaire à tous les membres de la commission.

M. Fortier: Vous verrez que mon sujet est tout à fait pertinent puisqu'on ne peut pas dissocier ce que la Société générale de financement nous a dit, en 1981, de ce qu'elle fait maintenant. Ce que j'essaie de faire... J'ose espérer et je suis sûr que le président, d'ailleurs, contrairement à ce que le député de Châteauguay veut laisser croire, peut répondre aux questions que nous avons à ce sujet-là.

On nous avait fait, à ce moment-là, état d'une orientation, de budgets qui étaient requis, et on nous avait dit - et c'est là que vous verrez que mon propos est tout à fait pertinent par rapport à la mission de cette commission parlementaire - qu'il fallait investir dans des domaines d'innovation. Je vois d'ailleurs un chiffre ici, à la page 20, où on dit: Les investissements d'innovation seront, sur une période de cinq ans, de 180 000 000 $. C'était une prévision, sans nous donner, bien sûr, des précisions à ce sujet-là, ce qui est tout à fait normal lorsqu'on fait un plan à long terme puisqu'on définit uniquement des orientations.

On nous avait dit également que ceci se ferait par une société à capital de risque qui a été formée depuis ce temps puisqu'une société à capital de risque a été formée par la Banque Nationale, la Caisse de dépôt et placement du Québec et le groupe, Laurentienne et ce qui me surprend aujourd'hui, c'est qu'alors qu'on s'engage de toute évidence dans un domaine d'innovation et qu'on s'engage dans un domaine qui met

en cause du capital de risque, je suis surpris que ce qui est proposé, et ceci rejoint plusieurs questions que mon collègue de Mont-Royal a posées, je suis surpris que ce nouvel investissement n'ait pas été fait par le véhicule qui nous avait été proposé lors de la discussion que nous avions eue sur la loi 14 qui, justement, fournissait de nouveaux capitaux à la Société générale de financement, ce nouveau véhicule qui nous avait été proposé pour faire des investissements dans des sociétés où il y aura besoin de capital de risque.

J'aimerais que, lorsque le président fera sa présentation, il nous donne des explications à ce sujet puisque, bien sûr, la raison qui nous avait été donnée... Lorsqu'on fait une société à capital de risque avec deux, trois ou quatre partenaires, c'est pour minimiser les risques et pour faire en sorte que, s'il y a risques, les risques seront partagés entre différents partenaires. (12 h 45)

Deuxièmement, dans ce document qu'on nous avait proposé, à la page 20, on faisait allusion à la recherche et au développement. On disait que ces investissements concerneront la conception et l'implantation d'immobilisations et d'équipements de recherche. Encore là, je crois que ce qui nous est proposé aujourd'hui rejoint ces propositions que nous faisait la Société générale de financement, mais celle-ci semble nous proposer cette action aujourd'hui comme étant la seule - quoique je n'en sois pas tout à fait certain - et, même si on veut limiter le débat à la biotechnologie, je crois qu'il est difficile de ne pas demander à la Société générale de financement de nous dire ceci. En ce qui concerne l'objectif qu'elle s'était fixé de favoriser la recherche et le développement à l'intérieur du groupe de la SGF, et ceci s'appliquait à toutes les filiales de la SGF, est-ce que cette action est la seule qui a été posée depuis que vous avez proposé ce plan d'orientation ou est-ce qu'il y en a eu d'autres? Je sais, en particulier, qu'il y a eu des études en ce qui concerne Marine Industrie où on voulait également favoriser la recherche et le développement. Autrement dit, M. le Président, je suis tout à fait d'accord avec vous pour limiter, dans une très grande mesure, le débat à la biotechnologie, mais je crois qu'il serait malsain et contre l'intention du législateur de ne pas poser certaines questions ayant trait au fait que cette nouvelle priorité s'ajoute à d'autres priorités de la SGF. Pour nous permettre de poser la question: Est-ce que cette nouvelle orientation va enlever des fonds ou va éloigner la SGF des priorités qu'elle avait précédemment et du plan d'action qu'elle s'était fixé, en 1981, pour la période de cinq ans allant jusqu'à 1985?

C'était, M. le Président, les quelques commentaires que j'avais et j'oserais espérer que le président de la SGF pourra, en nous présentant cette nouvelle orientation, cette nouvelle priorité de la SGF, la définir comme étant une priorité qui s'inscrit à l'intérieur du plan de développement proposé par la SGF en 1981. D'ailleurs, je fais la remarque que, pour ma part, j'ai été un peu déçu de voir qu'en nous proposant ce document, on ne faisait aucunement référence au plan de développement à moyen terme de la SGF. J'oserais penser, comme c'est tout à fait normal dans toutes les sociétés qui ont un plan de développement à long terme, qu'on inscrira une nouvelle orientation à l'intérieur du plan de développement que la société s'était fixé au préalable. J'aimerais, lorsque le président nous donnera les raisons de cette nouvelle orientation, qu'il tente d'inscrire cette nouvelle orientation à l'intérieur du plan de développement à long terme de la SGF.

Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le ministre délégué à la Science et à la technologie.

M. Paquette: M. le Président, cela sera très bref, parce que je pense que, comme les autres membres de cette commission parlementaire et les principaux intéressés, il serait temps qu'on écoute la société et qu'elle réponde aux multiples questions qu'on lui a déjà adressées. C'est simplement sur la question de l'industrie pharmaceutique et de la loi sur les brevets à Ottawa. Il y a un aspect de cette question qui peut nous concerner, c'est-à-dire dans quelle mesure cela affecte le développement des biotechnologies qu'envisage la société. Sur le problème plus général de la loi sur les brevets et sur le problème de l'industrie pharmaceutique, en particulier, de la compagnie Ayerst, nous avons mis sur pied un comité interministériel qui est présidé par quelqu'un du secrétariat de la science et de la technologie et qui regroupe un représentant du ministère de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, et un des Affaires sociales également. Nous attendons d'ici à quelques jours le rapport de ce comité interministériel qui a évalué les solutions possibles pour maintenir notre potentiel de recherche dans ce domaine. Il est évident que la loi sur les brevets - et cela, tous les intervenants le disent - a été faite dans le but de réduire le coût des médicaments au Canada, mais on a été tout à fait insensible au fait que 82% de la recherche se faisait au Québec, il y a deux ans de cela. Cette loi sur les brevets a provoqué le départ de compagnies pharmaceutiques et risque d'en provoquer d'autres. C'est un sujet de préoccupation du gouvernement. Je tiens à rassurer le député d'Outremont, nous aurons l'occasion d'en reparler très certainement.

Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Biron: M. le Président, il est 12 heures 50, je me demande si on ne devrait pas demander tout simplement de suspendre nos travaux jusqu'à 15 heures afin de permettre à la Société générale de financement de faire toute sa présentation. Avant, je voudrais seulement répondre à une question du député d'Outremont. C'est un nouveau créneau, la biotechnologie, et il n'était pas permis à la SGF d'intervenir dans ce créneau économique. C'est pour cela qu'on a émis une directive pour permettre à la SGF d'ajouter un créneau de plus à ses autres mandats. Quant au plan de développement à long terme, nous sommes à travailler présentement sur le plan retouché pour les cinq prochaines années et je pense que vous avez raison: un plan à long terme mérite d'être retouché de temps à autre. Vous devriez être convoqué pour en discuter au cours des prochains mois.

Le Président (M. Rochefort): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: Je pense que le ministre a compris mon intervention. C'est que, lorsque la SGF s'était présentée en commission parlementaire pour obtenir des nouveaux fonds, elle nous avait présenté un plan ou, du moins, le résumé du plan à moyen terme de cinq ans. Et il est tout à fait normal qu'à un moment donné, on vienne ici pour demander des explications sur une orientation légèrement différente et qu'on nous dise dans quelle mesure ceci s'inscrit à l'intérieur du plan qui avait été approuvé et qui nous avait été proposé. À ma connaissance, dans toute société qui se respecte, tant qu'un plan de développement n'est pas modifié, celui qui avait été approuvé au préalable existe toujours et doit, dans une certaine mesure, commander les actions déterminées par le conseil d'administration de cette société. Et c'est dans ce sens que, contrairement aux allégations du député de Châteauguay, je disais: Bien sûr, parlons de biotechnologie, mais tentons d'obtenir de la Société générale de financement les explications pour dire dans quelle mesure ce nouvel ajout s'inscrit dans les priorités globales de la SGF et s'inscrit dans les objectifs qu'elle nous avait donnés, pas uniquement en termes d'actions, mais aussi en termes de rentabilité. J'ai posé la question en ce qui concerne la société à capital de risque puisqu'on nous avait dit que cette société à capital de risque était le véhicule tout à fait normal pour aller dans un nouvel investissement comme celui qui nous est proposé aujourd'hui.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Biron: C'est ce que je viens de vous répondre, M. le député, c'est-à-dire qu'on est en train de préparer un plan de développement réajusté en fonction de l'évolution et vous aurez l'occasion d'en discuter au cours des prochains mois.

Le Président (M. Rochefort): Sur ce, la commission suspend ses travaux.

(Suspension de la séance à 12 h 52)

(Reprise de la séance à 15 h 08)

Le Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mesdames, messieurs, la commission permanente de l'industrie, du commerce et du tourisme reprend ses travaux. Nous en étions rendus au point d'entendre le président de la Société générale de financement, M. Jean-Claude Lebel. Nous sommes prêts à vous entendre.

Audition des administrateurs de la SGF

M. Lebel (Jean-Claude): M. le Président, messieurs, mesdames, membres de la commission, vous me permettrez d'abord de présenter la délégation de la SGF qui m'accompagne. En commençant par mon extrême gauche, M. Alain Desfossés, secrétaire de la SGF et adjoint au président; le Dr Fernand Labrie, directeur du Centre de recherche du CHUL; M. Jacques Lefebvre, vice-président principal et responsable de la planification et du développement à la SGF; à mon extrême droite, M. Louis-Gilles Gagnon, vice-président aux affaires juridiques; M. Jacques Nepveu, directeur de la planification et, finalement, c'est le hasard qui l'amène là, Mme Rita Dionne-Marsolais, toujours officiellement vice-présidente de la biotechnologie à la SGF, mais aussi candidate pressentie pour assumer la direction de Bio-Endo, cette acquisition dont nous allons parler cet après-midi.

Nous avions préparé une présentation que nous allons devoir modifier légèrement compte tenu de ce qui a été dit cet avant-midi devant la commission. D'une part, les deux ministres parlant au nom du gouvernement ont couvert une bonne partie de la présentation que nous aurions aimé soumettre à la commission et ils l'ont bien couverte. Nous allons donc tenter d'éviter le plus possible les répétitions. D'autre part, les représentants de l'Opposition et des membres du gouvernement ont posé un certain nombre de questions spécifiques sur lesquelles, sans doute, ils leur tardent d'amorcer les discussions et les échanges. Je leur

demanderais cependant une certaine patience et, avec votre permission, M. le Président, tout en modifiant la présentation que nous avions préparée initialement, j'aimerais que, dans un premier temps, nous procédions à la lecture des chapitres 1 et 4 du mémoire que nous avons présenté à la commission parlementaire. Ces deux chapitres situent en quelque sorte le cadre général permettant d'aborder la réponse aux questions qui ont été soulevées par les membres de la commission. Immédiatement après cette lecture, je reprendrai la parole, avec votre accord, et j'amorcerai une réponse un peu plus spécifique à un certain nombre de questions dont nous avons pris note et qui ont été soulevées au cours de la matinée.

Si vous êtes d'accord, M. Jacques Nepveu va procéder à la lecture des chapitres 1 et 4. Les chapitres 2 et 3 sont des chapitres de support qui définissent ce qu'est la biotechnologie, les marchés potentiels, les préoccupations des divers pays qui s'y sont intéressés jusqu'à maintenant. Il ne nous semble pas utile de répéter ces choses que la plupart des membres de la commission, de toute manière, ont lues.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. M. Nepveu, nous sommes prêts à vous entendre.

M. Nepveu (Jacques): Alors, le chapitre 1, sur l'intervention de la SGF en biotechnologie.

L'innovation et le progrès technologique étant à la base du développement des grands groupes industriels, la SGF doit leur consacrer une part de plus en plus importante de ses efforts. C'est en ce sens qu'elle s'est fixé comme objectif, dans son plan de développement, de privilégier les investissements en innovation. Cet objectif donne lieu à deux stratégies particulières: d'une part, la participation à de nouvelles entreprises offrant un fort potentiel de croissance dans des industries de pointe et, d'autre part, la mise sur pied de projets de développement de nouveaux produits ou de nouvelles technologies dans les entreprises existantes du groupe ou dans de nouveaux secteurs.

La présence de la SGF en biotechnologie s'inscrit donc dans la mise en oeuvre de ces stratégies: non seulement constitue-t-elle un investissement en innovation, mais encore elle permet de créer un nouveau secteur prioritaire dans un domaine qui présente des occasions de développement industriel à long terme, tant pour le groupe que pour l'ensemble de l'économie québécoise.

La SGF a déjà des activités dans trois secteurs prioritaires qui sont associés à la forêt, à l'énergie et à la pétrochimie. Dans ces domaines de transformation des ressources naturelles, l'évolution technologique tend vers une modification des modes conventionnels de transformation. Or, en plus de la santé et de l'industrie agro-alimentaire, ce sont aussi des domaines où il est déjà possible d'entrevoir des applications de type biotechnologique. La présence de la SGF en biotechnologie lui permettra donc d'avoir une meilleure connaissance des changements technologiques à venir, d'y participer grâce à des projets spécifiques et de les appliquer, dans la mesure du possible, à ses entreprises afin qu'elles demeurent compétitives et poursuivent leur développement à long terme.

Le gouvernement du Québec a reconnu la biotechnologie comme une priorité scientifique et industrielle dans Le virage technologique et À l'heure des biotechnologies. Plus spécifiquement dans ce dernier document, préparé par le secrétariat à la science et à la technologie, on énonce trois objectifs prioritaires pour une première phase quinquennale du développement des biotechnologies au Québec.

Ce sont le développement des ressources humaines, la formation et le perfectionnement des compétences biotechnologiques; l'organisation et la facilitation du transfert et de la transformation des découvertes des laboratoires en innovations industrielles; la mobilisation des moyens financiers requis pour soutenir le développement de ce programme d'intervention.

L'intervention de la SGF en biotechnologie répond en quelque sorte aux trois objectifs énoncés par le secrétariat. En créant Bio-Méga Inc., une société d'investissement en biotechnologie, la SGF consent de ce fait à mobiliser des moyens financiers, les siens et ceux de ses partenaires éventuels. De plus, elle suscitera nécessairement des efforts importants de recherche dans les domaines particuliers où elle voudra investir, encourageant par le fait même la mobilisation de ressources humaines de recherche, leur formation et leur perfectionnement. Enfin - c'est d'ailleurs la caractéristique fondamentale des projets dans lesquels elle cherchera à s'engager - elle investira s'il est possible d'assurer le transfert des fruits de la recherche à la fabrication industrielle et à la commercialisation des produits mis au point.

L'objectif énoncé d'organiser et de faciliter le transfert du laboratoire à l'industrie est à coup sûr fondamental pour l'avancement de la biotechnologie.

Cependant, pour ce qui est de l'identification des possibilités de mise au point de produits spécifiques destinés au marché et auxquels devraient se subordonner les activités de recherche, la responsabilité en revient, avant tout, à des compétences industrielles et commerciales.

Le gouvernement l'a d'ailleurs reconnu lorsque, dans le but de valoriser les efforts de la recherche québécoise et de canaliser des capitaux de risque vers le développement de cette nouvelle branche industrielle, il a confié à diverses sociétés d'État le mandat d'identifier les possibilités d'action dans les domaine des bioindustries.

Reconnaissant cela, la SGF s'est donné le rôle, avec Bio-Méga, de procéder à des investissements dans des projets où il existe un lien étroit entre recherche, production et commercialisation. La recherche au Québec se réalise en grande partie surtout à l'intérieur du réseau universitaire et elle est financée, de façon générale, par l'État. La SGF, qui est une société d'Etat possédant peu d'activités propres de recherche, a donc avantage à utiliser l'infrastructure universitaire et à assurer un transfert technologique vers l'industrie au bénéfice de l'expansion économique de l'ensemble du Québec.

Consciente que la biotechnologie est un domaine dont le potentiel généralement reconnu comme immense demeure pour la plus grande part inconnu; consciente tout de même qu'il s'agit d'un domaine d'intérêt vital pour le Québec comme pour toutes les économies; consciente enfin que son intervention doit se situer dans une perspective d'expansion et de rentabilité à long terme, la SGF se fixe donc comme objectifs en biotechnologie: de canaliser une part des fonds de la société à des fins de recherche et d'expansion au Québec en vue d'applications industrielles; d'avoir accès aux découvertes et perfectionnements qui se produiront dans les prochaines années et collaborer à des activités de recherche dans le secteur des procédés et produits de la biotechnologie; de contribuer au transfert technologique des efforts de recherche et de perfectionnement universitaire à des fins industrielles au Québec; de favoriser la formation des chercheurs nécessaires pour le développement des biotechnologies, tout en s'assurant qu'ils pourront demeurer au Québec; de favoriser le développement et la fabrication d'équipements de même que l'utilisation de matières premières nécessaires pour le développement des biotechnologies; de fabriquer ou de commercialiser les procédés et produits issus d'applications biotechnologiques mises au point au Québec.

Le chapitre 4, page 37: Le plan d'action stratégique de la SGF en biotechnologie. La biotechnologie, on l'a vu, est un domaine où l'inconnu domine encore et ou de véritables applications industrielles et commerciales ne sont prévues, dans la plupart des secteurs, qu'à la fin des années quatre-vingt. En ce moment, c'est la recherche, le plus souvent la recherche fondamentale, qui caractérise la biotechnologie. La SGF en est consciente et s'est quand même donné des objectifs d'intervention dans ce domaine considéré comme vital. Ces objectifs sont cohérents avec sa mission propre. La SGF cherchera à stimuler un effort de recherche et d'innovation, bien entendu, mais dans le but que cet effort serve le plus rapidement possible au développement du groupe dans des activités de production industrielle.

En créant Bio-Méga, une société d'investissement en biotechnologie, la SGF a voulu que cette filiale entreprenne un premier projet présentant les caractéristiques qu'elle recherche et lui permettant de mettre à l'épreuve la stratégie qu'elle privilégie. Le succès de ce projet sera donc déterminant: d'une part, quant à la possibilité de faire le lien entre le résultat d'une recherche effectuée le plus souvent en milieu universitaire et son application en milieu industriel et, d'autre part, quant à la capacité de Bio-Méga d'attirer des partenaires et d'entreprendre d'autres projets. C'est dans le domaine de la santé que Bio-Méga réalise son premier projet.

Un premier investissement en santé. Puisque c'est en santé que la recherche de nature biotechnologique est la plus intense et a donné lieu jusqu'ici aux découvertes les plus nombreuses et les plus intéressantes, il était normal qu'un premier investissement se fasse dans ce domaine, d'autant plus que le Québec a déjà une excellente réputation quant à la qualité de ses équipes de recherche en sciences biomédicales.

Depuis qu'au Canada, une disposition de la loi sur les brevets force les entreprises à accorder des licences sur leurs inventions brevetées destinées à des médicaments ou à la préparation ou à la production de médicaments, les grandes entreprises pharmaceutiques se sont désintéressées du Canada pour ce qui est de la localisation de leurs activités de recherche et de développement. La plupart des grands centres de recherche étant situés au Québec, le contrecoup s'y est fait sentir de façon plus importante qu'ailleurs au Canada. De fait, cette disposition de la loi dite de "la licence obligatoire", de même d'ailleurs que les réglementations de plusieurs provinces canadiennes qui favorisent la consommation de produits génériques, compromettent la rentabilité des investissements en recherche des entreprises pharmaceutiques. Les équipes de chercheurs québécois ont donc eu tendance à se regrouper autour de laboratoires spécialisés, des hôpitaux et des universités, là où la conjoncture les affectait moins et leur permettait de poursuivre leurs recherches fondamentales.

Quelques équipes plus dynamiques ont pu mettre à profit l'utilisation de biotechnologies et, ayant entrevu les possibilités commerciales de leur recherche, sont passées à l'étape du développement

appliqué. Certaines ont des produits qui sont prêts pour une fabrication industrielle et cherchent à les commercialiser. C'est le cas de chercheurs de l'Université Laval qui ont mis au point le matériel nécessaire à la fabrication de trousses immunologiques pour le dosage d'hormones dans le sang. Ces trousses seraient fabriquées à partir d'anticorps raffinés de type monoclonaux dont la reproduction se fait par une technique cellulaire plus efficace et moins coûteuse. La SGF s'est associée avec ces chercheurs dans le cadre de son premier projet d'investissement en biotechnologie.

Ce premier projet dans le domaine de la santé consiste dans la mise sur pied d'une entreprise de fabrication et de commercialisation de trousses immunologiques développées par l'intermédiaire d'une entreprise de recherche.

Commercialisation et fabrication: Bio-Endo. Bio-Endo, une filiale de Bio-Méga, a récemment fait l'acquisition de l'Institut de Bio-endocrinologie, une entreprise qui fabrique déjà plus d'une quinzaine de trousses radio-immunologiques pour le diagnostic de certaines anomalies hormonales et qui constituera une base pour la fabrication des nouveaux produits qui seront développés. Il s'agit d'une entreprise profitable qui réalise un chiffre d'affaires d'environ 3 800 000 $, qui emploie 70 personnes et dont les installations de production sont à Montréal.

Présentement, ses principales activités sont concentrées dans deux domaines: les analyses chimiques, biochimiques et bactériologiques, qui continueront d'être des activités importantes pour Bio-Endo, et la fabrication de trousses immunologiques.

Les équipements et installations existants de l'institut de bio-endocrinologie sont considérés comme satisfaisants et aptes à être utilisés dans le cadre des nouvelles activités. Par ailleurs, cette entreprise possède déjà un réseau de ventes, s'étendant même aux États-Unis et ailleurs à l'étranger, qui pourra servir de base à la commercialisation des produits fabriqués par Bio-Endo.

Recherche: Biocel. Parallèlement, la société Biocel a été créée à l'instigation de la SGF et des chercheurs de l'Université Laval. Les membres de cette société seront désignés, d'une part par Bio-Endo et d'autre part, par l'Unité de recherche en endocrinologie moléculaire du Centre hospitalier de l'Université Laval. Biocel aura comme fonction de confier des mandats de recherche pour le compte de Bio-Endo à des chercheurs ou centres de recherche qui seront le plus souvent affiliés à des universités. Biocel doit d'ailleurs conclure sous peu une entente à cet effet avec l'Unité de recherche en endocrinologie moléculaire du Centre hospitalier de l'Université Laval.

Biocel est une société sans but lucratif, ce qui lui facilitera l'accès à l'infrastructure universitaire de recherche. Elle est dirigée par un conseil d'administration composé de personnes affiliées à Bio-Endo, à l'Université Laval, à l'Université McGill et à l'Université de Sherbrooke.

Biocel détient une part de 30% du capital-actions de Bio-Endo et les deux sociétés sont liées par une entente d'exclusivité réciproque. C'est ainsi que Biocel verra à l'exécution de mandats de recherche dont les résultats seront exclusifs à Bio-Endo et qu'en retour Bio-Endo ne confiera de mandat de recherche que par l'intermédiaire de Biocel.

Dans le cadre de cette entente, non seulement Biocel a une participation de 30% à l'équité de Bio-Endo, mais elle est en outre assurée que cette dernière lui versera sur une base annuelle au moins 10% de son chiffre d'affaires pour de la recherche et du développement. La SGF reconnaît qu'il s'agit d'un engagement considérable, mais qui est tout de même fondamental pour susciter les efforts de recherche requis et pour réaliser le lien étroit souhaitable entre, d'une part, la recherche et, d'autre part, l'application industrielle et commerciale. De fait, l'entente assure Biocel d'une disponibilité de fonds à la fois importante et durable qui lui permettra un programme de recherche efficace et intéressant pour les chercheurs comme pour les fabricants.

Enfin, la SGF est consciente qu'elle devra faire face à des exigences similaires si elle s'engage de nouveau dans des projets de ce genre, que ce soit en santé ou dans d'autres champs d'application de la biotechnologie.

Le marché. Les études de marché consultées par la SGF indiquent que la demande de produits immunodiagnostiques devrait connaître une croissance rapide durant les années quatre-vingt, variant entre 16% et 45% par année selon les hypothèses. Les facteurs justifiant de telles croissances sont essentiellement les suivants:

Le vieillissement de la population,

La mise en place de programmes de santé publics,

La découverte de nouveaux produits plus spécifiques et plus simples à utiliser,

La meilleure compréhension et la lutte contre les différentes formes de cancer,

La mise au point d'anticorps plus raffinés (monoclonaux) et leur reproduction par des techniques cellulaires moins coûteuses.

Au Canada, le marché des produits immunodiagnostiques, incluant le dosage d'hormones et de certains médicaments, est évalué à 30 000 000 $ en 1982. Le marché américain équivalent est de quelque 350 000 000 $ US dont 50 000 000 $ US pour le diagnostic du cancer. Les taux de

croissance historique de ces marchés sont de l'ordre de 15% à 20% par an, et il est fort probable que la tendance se poursuive. Quant aux produits diagnostiques du cancer, ils connaîtront vraisemblablement des croissances encore plus élevées.

Compte tenu du potentiel de marché, de l'aspect innovateur des produits et de leur qualité, Bio-Endo projette des ventes qui pourraient atteindre près de 25 000 000 $ dans cinq ans. Ces ventes seraient effectuées à la fois au Canada, aux États-Unis et en Europe.

Les retombées du projet. Il est déjà possible d'identifier deux retombées intéressantes de ce premier projet biotechnologique dans le domaine de la santé: un arrêt de la fuite des cerveaux et une ouverture à des entreprises ou organismes qui verraient un intérêt à une entente du type de celle qui lie Biocel et Bio-Endo.

Un tel projet et d'autres du même type qui pourront survenir permettront de ralentir, voire arrêter, l'émigration du Québec des chercheurs ou encore du produit de leur recherche. Certaines lois et réglementations, on le sait, de même d'ailleurs que le manque de débouchés industriels pour la recherche ont fait en sorte de forcer des chercheurs à trouver du travail ailleurs ou à vendre le fruit de leur travail à l'étranger. Il s'agit d'un phénomène anormal et très coûteux, surtout si l'on tient compte de l'investissement consenti par le Québec pour former des chercheurs et leur donner une infrastructure de recherche.

De plus, la SGF ouvre une porte à des entreprises ou organismes de recherche qui voudraient s'associer à Bio-Méga pour réaliser des projets semblables en santé ou dans d'autres domaines liés à la biotechnologie. La formule retenue offre des avantages qui ne sont pas négligeables, tant pour les chercheurs que pour les fabricants de produits à fort contenu technologique. L'exemple de l'Institut Armand-Frappier qui a déjà d'importantes activités de recherche en biotechnologie est en cela très intéressant.

La stratégie subséquente. La mission de la société Bio-Méga est d'investir dans des activités industrielles et rentables de recherche, développement, fabrication et commercialisation de produits et procédés issus de la biotechnologie. Sur le modèle du projet Biocel - Bio-Endo, ou encore selon d'autres formules, les deux principales activités de Bio-Méga seront: la commandite de programmes de recherche conjoints avec des universités et leurs chercheurs qui auront des produits prêts à être commercialisés ou développés en vue d'applications industrielles spécifiques; des investissements de fabrication et de commercialisation des produits et procédés mis au point dans le cadre des programmes de recherche commandités.

Compte tenu de l'avancement de la recherche, de la composition sectorielle du groupe SGF et des caractéristiques de l'économie québécoise, on peut s'attendre que les prochains projets entrepris par Bio-Méga le soient à nouveau en santé, dans le domaine de l'alimentation ou encore dans le cadre de la filière forêt-énergie-pétrochimie. En alimentation, des expériences ont déjà été tentées au Québec comme, par exemple, la fabrication de lactose et de certaines protéines à partir du lactosérum, un sous-produit de la production industrielle du fromage. Par ailleurs, l'ampleur du secteur des produits forestiers au Québec devrait favoriser le développement des processus de transformation de la cellulose en éthanol soit comme source d'énergie soit comme matière première dans la production d'éthylène.

Dans la mesure où des projets pourraient être identifiés présentant les caractéristiques recherchées, de nouvelles filiales seraient mises sur pied et Bio-Méga pourrait s'associer à des partenaires qui y contribueraient tant par leurs ressources financières que par leur expertise sectorielle.

La stratégie adoptée assure Bio-Méga de l'accès à une main-d'oeuvre qualifiée existante en recherche et lui permet de constituer graduellement une masse critique de capitaux diversifiés. Une telle stratégie qui se situe parmi les premières tentatives de concerter des efforts de recherche et de développement universitaires à des fins industrielles devrait avoir un impact sur l'ensemble du développement économique québécois. En ce sens, elle devrait favoriser l'obtention de fonds gouvernementaux destinés au développement des biotechnologies tant au Canada qu'au Québec.

Par ailleurs, il apparaît aussi souhaitable que Bio-Méga s'associe à des sociétés d'État québécoises à vocation industrielle ou à des sociétés privées. Jusqu'ici, la SGF a sollicité un certain nombre de sociétés qui se sont montrées intéressées à participer avec elle en biotechnologie. Elle a de plus discuté avec le secrétariat à la science et à la technologie pour s'assurer de la conformité des objectifs poursuivis par l'un et l'autre. Il va sans dire que les activités de Bio-Méga et celles de la société de recherche et de développement en biotechnologie que veut mettre sur pied le secrétariat devront faire l'objet d'une coordination continue, particulièrement pour ce qui est du transfert technologique vers l'industrie.

M. Lebel: Je vais tenter de formuler une première série de réponses aux questions qui ont été soulevées cet avant-midi. Pour la plupart de ces questions, nous nous les étions posées à un stade ou à un autre de la préparation du projet. Dans certains cas,

nous avons des réponses précises. Dans certains autres, il s'agit en quelque sorte de faire des choix et, quand nous faisons des choix, nous ne pouvons que faire état des raisons pour lesquelles nous avons choisi une option plutôt qu'une autre. J'ai regroupé les questions qui ont été posées cet avant-midi en trois groupes. Un premier groupe de questions portait essentiellement sur la stratégie de la SGF: qu'est-ce que la SGF va faire en biotechnologie? Pourquoi s'intéresse-t-elle à ce secteur? Pourquoi les choix qu'elle a faits et qu'elle se propose de faire? (15 h 30)

Le deuxième groupe de questions portait, de façon un peu plus large, sur la stratégie gouvernementale. Je ne prétends pas pouvoir parler au nom du gouvernement et défendre la stratégie gouvernementale. Le gouvernement, à la commission, a des ministres qui peuvent répondre de la stratégie gouvernementale. Il y a cependant certaines des questions qui ont été soulevées sous cette question générale et qui demandent, eu égard à notre projet, un certain nombre d'éclaircissements. J'essaierai de les communiquer le plus clairement possible à la commission.

Le troisième groupe de questions sont des questions spécifiques auxquelles je demanderai à certains de mes collaborateurs de répondre.

Stratégie de la SGF en biothechnologie

Alors, revenons-en, si vous le permettez, à ce premier groupe de questions qui portent sur la stratégie de la SGF elle-même. Une des questions qui ont été soulevées concerne la décision de la SGF d'aller en biotechnologie. On se demandait si cette décision était conforme au plan de développement de 1980, présenté ici en commission parlementaire et discuté. Nous rattachons cette proposition, que nous avons mise de l'avant, l'acquisition de Bio-Endo et le projet subséquent, par le biais de Bio-Méga, de procéder à d'autres investissements en biotechnologie, nous rattachons, dis-je, cette décision de la SGF à la poursuite de l'objectif qu'on retrouve dans le plan de 1980 de la SGF, celui de favoriser l'innovation et le développement de nouvelles technologies.

Au moment où la SGF vous a présenté son plan en 1980, déjà, elle invoquait deux exemples de réalisation qu'elle se proposait d'entreprendre pour réaliser cet objectif du plan. Elle mettait de l'avant, à ce moment-là, et ce sont des projets qui ont été réalisés depuis, le projet de Novacap et le projet de Nouveler. Novacap a été créée avec des partenaires du privé et Nouveler a été réalisée avec des partenaires du public. Les deux entreprises sont maintenant opérationnelles et, dans toute la mesure du possible - les partenaires en sont d'ailleurs tout à fait d'accord - elles vont continuer à favoriser l'innovation technologique. Nous en attendons un certain nombre de retombées à moyen terme qui peuvent être intéressantes pour le développement économique du Québec.

On mettait aussi à l'époque l'accent sur la recherche et le développement, objectifs auxquels on inviterait nos filiales à consacrer une part significative de leur chiffre d'affaires ou de leurs revenus. Mais nous ne limitions pas la réalisation de cet objectif à ces trois seules actions, soit création d'une société à capital de risque, création d'une société de conservation d'énergie et d'énergie nouvelle et un effort un petit peu plus accentué de la part de nos filiales et de nos sociétés affiliées en recherche et développement.

Un projet comme celui de la biotechnologie n'était pas au stade des projets à ce moment-là, c'est pour cela qu'il n'en a pas été question en commission parlementaire, mais le personnel de la SGF et la SGF ont commencé à en discuter dans les mois qui ont suivi la présentation en commission parlementaire. Il s'agit d'un domaine, d'un secteur, de techniques ou d'un ensemble de processus dont on peut dire, en effet, qu'ils sont de l'ordre de l'innovation et qu'ils portent, au moins potentiellement, des changements technologiques considérables. Il nous paraît donc tout à fait justifié, pour la SGF, de se préoccuper de ce nouveau domaine, de ce nouveau secteur de la fabrication. Dans le cadre de l'objectif qu'elle poursuit - ce n'est pas l'ensemble des objectifs de la SGF - cet objectif de faire servir une partie de ses ressources, qu'elles soient financières ou qu'elles soient humaines, à favoriser l'innovation et le développement technologique, il nous semble que c'est un secteur dans lequel la SGF peut se diriger. Cela nous amène cependant à souligner qu'il ne s'agit pas pour le moment et peut-être pas potentiellement - comme vous l'avez sans doute noté à la lecture du document qu'on vous a fourni - il ne s'agit pas d'un secteur aussi vaste, ayant autant d'ampleur et autant d'applications immédiates que le secteur des équipements hydroélectriques, ni que le secteur de la pétrochimie, ni que le secteur des produits forestiers qui constituent les trois secteurs de base de la SGF.

Il s'agit d'un domaine dans lequel nous pensons pouvoir contribuer à un effort d'innovation et de développement technologique au Québec. Il y avait peut-être une question ancillaire à celle-ci. On a suggéré que peut-être Novacap aurait pu entreprendre ce développement, autrement dit Novacap aurait pu créer Bio-Méga ou aurait pu se porter acquéreur de Bio-Endo. Il aurait été possible que cela se fasse et, en

ce sens-là, nous aurions dû convaincre nos associés actuels de Novacap que c'était l'orientation stratégique, que cette société à capital de risque devait prendre et nous nous serions probablement privés de sources additionnelles de capitaux. Novacap a ses ressources pour favoriser des développements dans le domaine du capital de risque. Nous pensons, par le biais des investissements de la SGF et en attirant dans le cadre de Bio-Méga des partenaires privés et des partenaires publics, décupler les efforts que les deux, Novacap et Bio-Méga, pourront faire en termes d'innovation et en termes de développement biotechnologique au Québec.

On nous a demandé également pourquoi procéder par une acquisition. Il y avait une entreprise privée qui existait et qui fonctionnait, qui aurait pu continuer à fonctionner. Pourquoi avez-vous choisi d'acquérir cette société par opposition, par exemple, à une stratégie qui aurait pu consister à lancer une société de but en blanc ou encore, par opposition - et cela a été suggéré par un membre de la commission, ce matin - à ne faire qu'un effort en recherche. Cette question, nous nous la sommes posée assez longuement et le choix pour nous se posait dans les termes suivants: est-il souhaitable d'acquérir une entreprise ou d'en lancer une?

Il nous est apparu que lancer une entreprise de fabrication et de commercialisation dans le domaine de la biotechnologie serait un processus très lent, comportant dans l'immédiat des risques beaucoup plus considérables que l'option que nous avons suivie. Par ailleurs, l'inventaire des entreprises qui offraient ce que nous cherchions se limitait à peu de chose. Il y avait l'Institut Armand-Frappier qui avait un service de fabrication-usine et il y avait cette entreprise que nous avons acquise et qui s'appelle maintenant Bio-Endo.

Elle était à vendre et nous étions un des acheteurs potentiels de cette entreprise. Le choix s'est porté sur cette acquisition parce que cette entreprise semblait répondre aux conditions de départ que nous posions: ampleur des investissements, qualité des immobilisations, des installations, personnel en place, etc., et l'entreprise était à vendre. Le processus aurait été beaucoup plus long de bâtir à neuf et beaucoup plus risqué. Quant à l'option de consacrer des sommes uniquement à la recherche, c'est pour nous une question fondamentale. Il ne nous apparaît pas être le rôle de la SGF de consentir des sommes pour fins de recherches, quitte à ce que le développement soit entrepris par n'importe qui.

La mission générale de la SGF et son rôle principal, c'est de constituer un groupe industriel le plus solide possible, le plus étoffé possible et qui, à ce titre, est d'abord et avant tout intéressé par la fabrication et la commercialisation. Ce n'est que comme moyen pour s'intéresser à un secteur de fabrication et de commercialisation particulier que nous allons faire, en l'occurrence, un effort en recherche. L'alternative donc, de favoriser de la recherche ou de subventionner de la recherche, pour nous, se présentait comme nous interdisant, en quelque sorte, l'accès à ce domaine ou l'accès à ce secteur.

Une autre question concernait l'ampleur de notre investissement. On nous a demandé si cet investissement de 1 000 000 $ par année, disons-nous dans le document, 1 000 000 $ par année pendant trois ans, c'était suffisant pour produire des résultats significatifs. J'aimerais préciser qu'il s'agit d'un investissement de 1 000 000 $ par année pendant trois ans. L'engagement que la SGF ou que le conseil d'administration de la SGF a pris au moment où il a discuté de cette question-là, c'est de mettre 1 000 000 $ par année pendant cinq ans. Ce qui fait potentiellement un engagement financier de 5 000 000 $ de la part de la SGF.

Il nous apparaît que, pour le moment, c'est tout à fait suffisant comme engagement de la part de la SGF pour mener à bien le projet que nous avons devant nous. Nous pensons pouvoir amener l'entreprise Bio-Endo et sa relation avec Biocel à un chiffre d'affaires de l'ordre de 20 000 000 $ à 25 000 000 $ dans quatre ou cinq ans d'ici. Nous pensons pouvoir le faire avec cette ampleur d'engagement de la part de la SGF. Nous ne pensons pas devoir mettre dans cette entreprise-là plus d'argent que ce qui est déjà accepté par le conseil d'administration de la SGF comme engagement potentiel sur cinq ans.

Nous voudrions, cependant, faire autre chose que Bio-Endo. Éventuellement, nous allons étudier d'autres projets d'investissement. Mais la proposition que nous mettons de l'avant, c'est que, dans la mesure où nous trouverons d'autres projets d'investissement, nous essaierons de trouver des partenaires, des partenaires dans le privé et dans le public, pour les associer à Bio-Méga. Si nous avons la chance - parce que cela prend de la chance - de trouver en qualité et en quantité les projets requis, il nous semble qu'avec quatre ou cinq partenaires du privé et du public, le groupe SGF pourrait, d'ici quatre ou cinq ans, investir directement en biotechnologie entre 20 000 000 $ et 25 000 000 $.

Cela n'a peut-être pas l'air gros, quand on pense aux 100 000 000 $ que d'autres provinces se sont engagées à consacrer à ce secteur pendant une dizaine d'années. Cela n'a peut-être par l'air gros, mais c'est réaliste, compte tenu du potentiel immédiat de développement en biotechnologie. On vous l'a dit dans le document et je pense qu'il

faut en tenir compte quand on discute de cette question. (15 h 45)

Dans le secteur de la santé, il y a des possibilités immédiates d'investissement. Dans les autres secteurs, cela n'apparaît pas aussi clair immédiatement, de sorte qu'il faudrait peut-être faire un effort de recherche de projets, un effort d'identification de groupes de recherches qui ont des choses qui peuvent être commercialisâmes et fabricables, pendant un certain temps, avant de passer à la réalisation de projets qui s'additionneraient à Bio-Endo. Mais, l'ampleur des choses que nous suggérons, c'est un engagement d'environ 5 000 000 $ pour la SGF pendant cinq ans et c'est d'essayer de tirer du secteur privé et du secteur public environ 20 000 000 $ additionnels. Ces groupes s'associeraient avec nous à l'intérieur de Bio-Méga.

Cela va-t-il être rentable? C'est une autre question qui a été soulevée. Les examens que nous avons faits nous démontrent que le projet que nous avons mis de l'avant, que le projet de Bio-Endo peut être rentable. Les autres projets vont-ils être rentables? Il faudra d'abord les identifier, les étudier, en étudier la rentabilité et les conditions de rentabilité. À part Bio-Endo, sur cette question spécifique, nous n'avons pas de réponse immédiate.

Le cadre général dans lequel cela se situe est le suivant: il s'agit pour la SGF non pas de se convertir en grande société de biotechnologie, mais de consacrer un certain nombre de ressources a la réalisation d'un objectif d'innovation et de développement technologique. Si on appuie cela au cadre de cet objectif, il faut bien réaliser que la SGF n'a jamais dit qu'elle cherchait une rentabilité immédiate; cela serait d'ailleurs contradictoire. Si on favorise des projets favorisant l'innovation et le développement technologique, on admet au départ que ces projets n'auront pas nécessairement la rentabilité immédiate des investissements que nous ferons, par ailleurs, dans nos grands secteurs industriels. Mais, ce qui a été présenté à la commission parlementaire et ce que nous continuons de soutenir, c'est que la SGF peut, dans l'ordre de grandeur qu'on vous a mentionné, consacrer une partie de ses ressources pour favoriser un effort d'innovation et de développement technologique sans compromettre son objectif de rentabilité générale.

Finalement, c'est la dernière question que je voudrais aborder et que je relie à la stratégie générale de la SGF. On nous a aussi dit que la biotechnologie semble être un peu un fourre-tout. La biotechnologie semble être un "secteur" par lequel on peut en aborder plusieurs autres, un secteur par le biais duquel, par conséquent, la SGF pourrait être présente dans un certain nombre de secteurs dans lesquels elle n'est pas présente en vertu de sa vocation ou de son mandat général. L'autorisation que nous sommes venus demander au gouvernement n'est pas une autorisation de nous ouvrir six ou sept secteurs additionnels, sous le couvert que nous voulons nous intéresser à la biotechnologie. L'autorisation que nous sommes venus demander au gouvernement, c'est de nous permettre, quel que soit le secteur, d'identifier des projets qui vont utiliser des procédés biotechnologiques et qui vont nous permettre de favoriser l'avancement de cette discipline en matière industrielle.

Il s'adonne que le premier secteur dans lequel la biotechnologie peut être utilisée à des fins commerciales est celui de la santé. Il semble, d'ailleurs, d'après les chiffres et les études que nous avons examinés, que c'est le secteur le plus prometteur pour les quatre, cinq, six ou sept prochaines années. Ce que je vous dis, c'est qu'il ne s'agit pas de se faire ouvrir des secteurs pour être présents dans n'importe quoi; il s'agit de nous permettre de faire, dans le cadre que nous avons proposé, un certain nombre d'investissements qui nous amèneraient à utiliser des procédés de fabrication biotechnologiques et à commercialiser des produits qui seraient fabriqués en vertu de ces procédés. La limitation que nous demandons, c'est le cadre général dans lequel nous nous situons, bien sûr, mais l'autre limitation vient de l'utilisation d'un procédé biotechnologique.

Stratégie gouvernementale en biotechnologie

Le deuxième groupe de questions se référait davantage à la stratégie gouvernementale. Par exemple, on a suggéré qu'il serait peut-être plus approprié de favoriser un effort de recherche sans se préoccuper, en tant que gouvernement, des retombées de fabrication et de commercialisation de cet effort de recherche. C'est une des questions que je situe dans ce groupe de questions qui mettaient en quelque sorte en cause la stratégie gouvernementale. J'aimerais préciser, à l'égard de l'ensemble de ces questions, les trois points suivants. Premièrement, nous nous situons dans le cadre de la stratégie énoncée par le gouvernement et notre document le souligne, je pense, abondamment. Cette stratégie est de développer des compétences en recherche, d'assurer ou de favoriser des transferts technologiques et de mobiliser des moyens financiers à cet effet. Notre projet se situe dans le cadre de cette stratégie.

Deuxièmement, nous ne demandons pas, cependant, l'exclusivité en matière de développement biotechnologique. Nous ne

nous présentons pas, ni devant le gouvernement, ni devant la commission parlementaire, pour dire: dorénavant, la biotechnologie, c'est nous. Non, nous pensons et nous souhaitons qu'une série d'autres entreprises privées et publiques se préoccupent aussi de ce secteur d'innovation de ce secteur dont on nous dit qu'il nous menace, dans une certaine mesure, si nous ne faisons pas l'effort nécessaire pour voir venir les coups. Ce que nous disons, c'est que c'est un champ ouvert où d'autres entreprises du secteur public et du secteur privé peuvent intervenir selon les projets qui les concernent davantage. Ce que je souligne, c'est que nous n'avons, en tant que SGF, aucune objection, au contraire, à nous associer avec d'autres selon les projets que nous identifierons avec eux. Quand je dis avec d'autres, je dis avec d'autres du secteur privé comme du secteur public, parce que nous avons également l'intention de solliciter des participations de la part du secteur privé. Nous ne serons absolument pas jaloux ni offusqués que d'autres sociétés d'État partent leurs propres projets en biotechnologie ou que des entreprises privées partent les leurs. Il nous semble, dans le fond, après avoir fait le tour de cette question, ce que nous risquons le plus n'est pas ce foisonnement de projets et d'entreprises désireuses d'investir et de proposer de nouvelles choses en biotechnologie. Il nous semble que nous serions davantage menacés par le risque d'une disette, soit de projets, soit d'idées, soit de groupes de recherche disponibles, soit d'investissements disponibles, soit d'entreprises désireuses de faire l'effort nécessaire pour se préparer à ce changement technologique qu'on nous annonce pour les années quatre-vingt-dix.

Finalement, j'aimerais souligner, dans cette deuxième catégorie de questions, que la formule que nous mettons de l'avant a quand même une certaine originalité, dans la mesure où elle permet, sans procéder à des investissements considérables en équipement, sans constituer un nouveau groupe de recherche, sans faire l'effort de recruter du nouveau monde d'un peu partout, de mettre en relation des gens qui font de la recherche, qui vont continuer à en faire et dont les découvertes pourraient donner lieu à de la fabrication et à de la commercialisation. Il se peut que cette liaison que je présente comme originale soit utilisable à nouveau, soit modifiée, soit adaptée, soit dans sa forme actuelle dans d'autres entreprises du secteur de la santé ou dans d'autres entreprises d'autres secteurs, mais des entreprises utilisant des procédés biotechnologiques. En ce sens, c'est une nouveauté qui est susceptible de favoriser l'effort de recherche qui est consenti par nos groupes de recherche au

Québec et c'est une formule qui est susceptible de donner à ces groupes de recherche une certaine fierté à l'égard des résultats de leurs recherches.

Questions spécifiques sur Bio-Endo

Finalement, il y a un groupe de questions un peu plus spécifiques et je pense que nous devons les prendre dans la forme spécifique dans laquelle elles ont été posées. Les deux premières concernent la société Bio-Endo et je vais demander à Mme Rita Marsolais d'y répondre. La première de ces questions est à peu près la suivante, je le dis dans mes mots: Bio-Endo est-elle vraiment en biotechnologie? Ce que j'ai compris, c'est qu'on se demandait si présentement, à Bio-Endo, on faisait à 100% de la biotechnologie. La deuxième question concerne également Bio-Endo et elle fait état de certaines contestations passées à l'égard de l'entreprise que nous avons achetée. Alors, avec votre permission, je demanderais à Mme Marsolais de répondre à ces deux questions.

Mme Dionne-Marsolais (Rita): Tout d'abord, à la question de savoir si Bio-Endo était et est actuellement dans le domaine de la biotechnologie, je pense que la réponse est assez claire. Elle n'est pas dans le domaine de la biotechnologie en ce moment. C'est une entreprise qui est dans le domaine du diagnostic en général. Elle vend des services d'analyse biologique, biochimique, chimique et elle vend et produit des trousses de diagnostic, spécifiquement des trousses radio-immunologiques. Cependant, l'entreprise possède une expertise dans le domaine des procédés de fabrication de ces trousses de diagnostic dont l'évolution technologique s'oriente vers l'utilisation de matières premières qui se regroupent avec les techniques biotechnologiques, c'est-à-dire les anticorps monoclonaux. Les anticorps constituent notre matière première dans la fabrication de nos trousses. Dans ces conditions, c'est une entreprise qui présente toutes les caractéristiques pour évoluer dans le cadre normal de l'évolution technologique de son industrie, dans la sphère de la biotechnologie, dans le domaine de la santé, en particulier en immunodiagnostic.

Pour ce qui est de la deuxième question sur les contestations qu'a subies l'entreprise, je n'ai pas trop compris les contestations auxquelles on se réfère, mais je pense que je sais ce à quoi on se réfère. J'ai retrouvé, dans les dossiers à étudier, les dossiers de la société, une lettre qui avait été envoyée à différents membres de l'Assemblée nationale, en septembre 1980, concernant une représentation de certains des voisins de l'entreprise. En effet, l'entreprise

est située dans un quartier mi-résidentiel mi-commercial. Certains propriétaires de la rue limitant la propriété de l'entreprise du côté ouest ont adressé un certain nombre de plaintes, depuis 1977, à différents organismes de la Communauté urbaine de Montréal et du ministère de l'Environnement, concernant une possibilité de contamination radioactive ou d'odeurs désagréables. (16 heures)

Après vérification des dossiers, je me suis rendu compte que, dans tous les cas où une plainte est adressée à une communauté urbaine ou à un ministère, il y a une enquête, il y a un rapport d'un commissaire-enquêteur qui conclut sur le bien-fondé ou l'absence de bien-fondé d'une plainte. Depuis septembre 1980 qui marque la date de la dernière plainte officielle qui avait été adressée, cette fois-là, à différents membres de l'Assemblée nationale, un représentant de la Direction générale de l'amélioration et de la restauration des milieux atmosphérique et terrestre, au ministère de l'Environnement du Québec, nous a adressé une lettre, à la société, pour conclure qu'il n'y avait pas de contamination ni de possibilité de contamination, que la société respectait les normes et recevait, de façon conforme et régulière, à la suite de visites sans avis de la Commission de contrôle de l'énergie atomique du Canada, des autorisations tous les ans ou selon la période normale où ces autorisations sont émises.

D'autre part, depuis septembre 1980 et la réponse du 26 novembre 1980, il n'y a pas eu d'autres plaintes portant sur notre société. Dans le dossier, j'ai remarqué qu'il y avait des coupures de presse, parce que les propriétaires n'étaient pas satisfaits de ces réponses, mais, sur le plan de l'évaluation des plaintes, il n'y a eu aucun fondement à toutes ces représentations qui ont été faites. Depuis, on n'en a plus entendu parler.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que les membres ont terminé leurs exposés?

M. Lebel: M. le Président, il y a également deux autres questions que l'on pourrait aborder tout de suite, je pense. La première concernait la loi fédérale des brevets. On nous a demandé, dans le fond, si les découvertes de Biocel, enfin les découvertes des chercheurs et les produits de Bio-Endo seraient soumis à la loi fédérale des brevets. La seconde et dernière question avait trait au cas Ayerst. On nous a demandé s'il y avait un lien entre ce que nous faisions et la disparition de certaines sociétés pharmaceutiques. En tout cas, cela m'a semblé dans l'intention de la question. La directive que nous avions nous permettait d'intervenir dans ce secteur.

M. Jacques Lefebvre va se charger de répondre à ces deux questions.

M. Lefebvre (Jacques): En ce qui concerne les brevets, d'abord, il faut dire que oui, les trousses que l'on produit tombent sous la loi des brevets. Par contre, il y a un article particulier dans la loi, l'article 41, qui s'applique particulièrement aux produits pharmaceutiques, c'est-à-dire aux médicaments et à l'alimentation. Cet article, dit l'article des licences obligatoires, ne s'applique pas aux produits qui seront fabriqués par Bio-Endo. Donc, dans le domaine de l'immunodiagnostic, étant donné que ce sont des produits dits in vitro et non pour la consommation humaine, ils peuvent être brevetés dès aujourd'hui. D'autant plus que, dans le domaine de la biotechnologie, il y a une chose qu'il faut retenir, je crois: c'est un domaine qui est en évolution très rapide et, dans bien des cas, on ne se préoccupe pas des brevets comme tels.

En ce qui concerne la pharmacologie, on ne vous demande pas spécifiquement d'entrer dans le domaine de la santé et de toucher la production de médicaments. Par contre, si la biotechnologie nous menait aux médicaments, il est clair que, selon la directive que nous recevons, nous pourrions nous préoccuper du domaine pharmaceutique et de la production de médicaments. Je crois qu'on a fait référence à la question Ayerst en particulier. Nous ne tentons pas ici de nous engager dans la recherche d'une solution au problème Ayerst. C'est un problème qui, à notre connaissance, est considérable et qui ne pourrait pas être réglé dans le cadre de la formation de la société Bio-Endo ou de la société Biocel.

Le Président (M. Brouillet): C'est terminé? Nous allons maintenant passer à une période de questions de la part des membres de la commission.

Période de questions

M. Ciaccia: Si le ministre n'a pas de questions, je vais en poser quelques-unes. C'est juste pour clarifier afin que les questions que j'ai posées et que les remarques que j'ai faites ne soient pas mal interprétées. M. Lebel, vous avez mentionné avoir pensé que ce n'était pas une bonne idée pour la SGF de s'occuper strictement de la recherche. Ce n'est pas cela qu'on avait suggéré, ce matin. L'option que j'avais soulevée était que le gouvernement devrait prévoir des fonds pour la recherche. J'avais même suggéré que, si la SGF était obligée de fournir des fonds pour la recherche, cela affecterait sa rentabilité. Votre mission, votre mandat est d'être une société rentable. Les fonds que vous donnerez pour la recherche vont vous affecter. Je suggérais cela comme stratégie du gouvernement plutôt que comme stratégie de la SGF.

Revenons, un instant, à l'achat de la

compagnie. Est-ce qu'on peut avoir des détails sur cet achat? Est-ce que vous avez acheté les parts des actionnaires ou si vous avez acheté les actifs? Vous avez mentionné les ventes; est-ce qu'il y avait un profit? Quel était le profit net de la compagnie? Quel est le prix que vous avez payé pour la compagnie et comment ce prix est-il payable? On aimerait avoir les détails sur ces aspects de la transaction.

M. Lebel: Je ne voudrais pas avoir l'air de me défiler, mais il y une certaine partie de ces questions à laquelle on peut répondre, bien sûr, et nous allons y répondre. Cependant, il faut convenir, entre nous, qu'il s'agit d'une transaction privée et que, dans une transaction privée, il y a un certain nombre de choses qu'on ne dévoile pas nécessairement. Prenons-les dans l'ordre. Je pense que M. Louis-Gilles Gagnon pourrait répondre à la première question, à savoir ce que nous avons acheté et à quel prix.

M. Gagnon (Louis-Gilles): M. le Président, nous avons effectivement acheté certains actifs par opposition à des actions. Vous m'entendez bien? Cela va?

M. Ciaccia: Non.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Alors, il y avait quand même dans l'entreprise certains actifs que nous ne voulions pas acquérir parce que nous n'en voyions aucune utilité. Après examen, il a été décidé, justement, de ne pas procéder par voie d'acquisition d'actions. C'était plus simple d'y aller par voie d'acquisition d'actifs. Vous-même étant avocat, M. Ciaccia, vous savez la distinction entre les deux et ce que cela comporte. Il s'agissait d'une vente en bloc d'un fonds de commerce, etc.

Inclus dans cela, évidemment, il y avait les immeubles qui servaient à l'exploitation de l'entreprise. Il y a, effectivement, un acte de vente enregistré qui est public. Sur les immeubles, je crois qu'on peut mentionner que nous avons payé un prix qui représente la valeur du marché. Ce prix se situe, si ma mémoire est fidèle, autour de 1 100 000 $. Le prix, comme il s'agit d'achat d'actifs et que certaines fluctuations sont susceptibles de survenir dans le temps... Par exemple, les comptes à recevoir, est-ce que nous allons les percevoir tous? Les inventaires, lorsque nous avons acheté, est-ce qu'ils étaient tous là? Alors, il y a des vérifications à faire. Nous avons échelonné le prix dans le temps, jusqu'à six mois, je crois, après la date d'acquisition, ce qui nous mène vers le milieu de 1983.

M. Ciaccia: Vous dites que vous avez acheté les comptes à recevoir. Vous n'avez pas seulement acheté l'immeuble, l'équipement. Je comprends que vous n'ayez pas acheté les actions, mais cela me porte à croire que vous avez acheté plus que seulement les actifs, tels l'immeuble ou les équipements. Vous avez acheté l'entreprise.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Nous avons pratiquement acheté l'entreprise à l'exclusion de certains actifs qui représentent quand même une part minime de l'avoir de l'entreprise même.

M. Ciaccia: Quand vous dites à l'exclusion de certains actifs, quels actifs avez-vous exclus?

M. Gagnon (Louis-Gilles): Nous avons exclu certains placements que l'entreprise avait.

M. Ciaccia: Quand vous dites, M. Lebel, que c'est une transaction privée, j'ai de la difficulté à vous suivre parce que ce sont des fonds publics et nous sommes ici pour nous assurer que les fonds publics sont utilisés à leur mieux. À moins qu'il n'y ait une raison spéciale pour ne pas divulguer certaines informations, c'est difficile pour moi d'accepter cette approche parce que ce n'est pas votre argent personnel que vous avez mis là-dedans, c'est l'argent des contribuables. Je pense que je manquerais à mon devoir et à ma responsabilité si j'acceptais de ne plus questionner parce que votre affirmation, ce sont les fonds publics. Quant à moi, d'un autre côté, les gens que je représente verraient mal que j'accepte une telle approche. Je voudrais savoir quel était le profit de la compagnie.

M. Lebel: Ce n'est pas...

M. Ciaccia: Vous avez acheté une entreprise...

M. Lebel: Ce n'est pas dans ce cadre-là, M. le Président.

M. Ciaccia: Excusez! peut-être que j'ai mal interprété.

M. Lebel: Oui, effectivement, la commission parlementaire peut poser des questions sur cette transaction-là. C'est tout à fait normal. Il faut, cependant, à mon point de vue, le faire dans le cadre de ce qu'est la SGF et des divers niveaux de responsabilité qui s'exercent à l'égard de la SGF. Quand nous procédons à une acquisition, il y a un examen de cette acquisition-là, il y a une évaluation de cette acquisition-là, il y a un conseil d'administration qui se prononce sur l'opportunité d'acquérir, sur le prix que l'on paie, etc. C'est pleinement la responsabilité des représentants de l'actionnaire de se prononcer sur ces

questions-là et de prendre leurs responsabilités à l'égard de l'actionnaire. (16 h 15)

II est possible que nous procédions, dans deux ou trois mois - je ne dirai pas la semaine prochaine parce que cela serait totalement irréaliste - il est possible que, dans le cadre de la directive que nous avons du gouvernement, nous procédions, dans deux ou trois mois, à une autre acquisition dans le cadre des responsabilités de la SGF et de son mandat. Pourtant, le prix de cette acquisition et ses conditions ne seront pas discutés en commission parlementaire. C'est un peu par hasard que l'acquisition dont il est question présentement peut être discutée devant la commission parlementaire. Par hasard, parce qu'on vient de la faire. Si nous étions venus en commission parlementaire trois semaines avant de procéder à l'acquisition, ces questions n'auraient pas été soulevées et les gestes que nous allons poser dans le cadre de cette directive, dans le cadre du mandat que la SGF a et dans le cadre de la responsabilité qui est définie à la SGF, ne seront pas nécessairement discutés en commission parlementaire. C'est un peu l'arrière-plan de ma remarque.

Cela dit, cependant, puisque l'occasion se présente, je peux vous donner plus d'informations sur cette transaction. Par exemple, vous avez demandé le chiffre d'affaires et je pense que nous l'avons dit, c'est 3 800 000 $; le chiffre de profits de la société était de 200 000 $. Elle a maintenu un rythme de profits d'environ 10% de son chiffre d'affaires au cours des dernières années, de sorte que, si nous avions pris ce facteur pour évaluer la société, cela aurait été un facteur favorable à la société en question. Par ailleurs, j'aimerais souligner que nous avons procédé à cette acquisition après des évaluations de la société que nous avons fait faire et que nous sommes largement entrés à l'intérieur des balises que nous fixaient ces évaluations de la société. Autrement dit, nous considérons avoir fait une bonne affaire en acquérant cette société.

M. Ciaccia: Tout à l'heure, vous avez mentionné la valeur au marché que vous avez payée pour l'immeuble, 1 100 000 $. Je ne sais pas si c'était inclus, je ne me souviens pas l'avoir lu: Est-ce possible d'obtenir le prix global que vous avez payé pour l'entreprise?

M. Lebel: M. Louis-Gilles Gagnon va répondre à cette question.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Le prix global pour l'entreprise, d'après les explications que le président vous a données tout à l'heure, nous croyons qu'il n'est pas de l'avantage... Il semblerait que...

M. Ciaccia: La commission ne peut pas savoir le prix global que la SGF a payé pour cette entreprise; est-ce ce que vous me dites?

M. Gagnon (Louis-Gilles): Nous avons effectivement... Je ne dis pas que ce n'est pas cela. En fait, nous disions tout à l'heure qu'ayant transigé privément avec une partie qui n'est pas ici, cela n'est pas dans les habitudes et dans la tradition de la SGF de divulguer les prix de tout ce qu'elle achète ou de tout ce qu'elle vend. Tout ce que je dis, c'est qu'effectivement nous nous posons des questions à savoir s'il est utile pour la commission de savoir une chose comme celle-là.

M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, vous mettez en doute le jugement de ceux qui sont élus à la commission parlementaire, qui veulent avoir certaines informations sur l'utilisation des fonds publics. Votre opinion est que nous n'avons pas ce droit à cette information.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Cela n'est pas une question de savoir si vous avez le droit ou non. Effectivement, nous disions tout à l'heure que nous avons fait faire une évaluation indépendante du prix d'acquisition d'une telle entreprise, que nous avons payé un prix qui se situe en deçà de cette évaluation.

Le Président (M. Brouillet): Sur cette question, M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme aurait peut-être quelques mots à dire.

M. Biron: Oui, sur cette question en particulier, je comprends les réticences des gens de la SGF, dans le fond, à dévoiler une transaction avec un partenaire privé, ce qui ferait en sorte qu'éventuellement, peut-être, il n'y a personne qui voudrait en faire avec des sociétés d'État, des sociétés gouvernementales. Mais, quand même, je comprends aussi l'attitude des membres de l'Opposition, car, un bon jour, j'ai été moi aussi à leur place de l'autre côté de la table. J'avais demandé qu'on ait des commissions parlementaires à huis clos où nous pourrions, de la part des sociétés d'État, répondre beaucoup plus ouvertement à des membres de l'Assemblée nationale sans crainte que cela soit reproduit dans les médias d'information et, finalement, sans crainte de nuire éventuellement à des transactions entre des sociétés privées et des sociétés d'État. Dans ce sens, je pourrais faire la suggestion au député de Mont-Royal et à ses collègues que, s'ils veulent des informations additionnelles, particulièrement les coûts de transaction entre une société privée qui ne s'attend pas de voir dévoiler

de tels montants en public et la Société générale de financement, je suggère que nous puissions avoir une réunion ou une rencontre à huis clos avec les dirigeants de la SGF qui pourraient répondre à toutes vos demandes concernant les différents chiffres que vous avez besoin d'avoir pour vous faire une idée sur la gestion des fonds publics.

M. Ciaccia: C'est une approche; je remercie le ministre pour, au moins, avoir un peu cette ouverture. Mais c'est difficile pour moi d'accepter qu'on ne puisse pas avoir les chiffres après que la transaction a été conclue. Je pourrais comprendre, si vous étiez en négociation. Supposons que nous serions ici aujourd'hui pour examiner strictement la directive et que vous n'auriez pas encore conclu votre transaction soit pour Bio-Endo ou une autre, je serais alors très prudent, parce que je ne voudrais pas, à la suite de mes questions, forcer le gouvernement à payer plus cher pour l'acquisition. Même - je vais vous donner un exemple très patent - quand le gouvernement a déposé le projet de loi pour exproprier la société Asbestos, on suppliait le ministre de l'Énergie, à ce moment-là, on disait: Arrêtez de dire comment c'est fantastique, comment c'est bon. Chaque fois que vous ouvrez la bouche, le prix monte dans les millions. On l'avait averti et, finalement, c'était vrai; au lieu de payer 50 000 000 $, ils ont payé 150 000 000 $. On a agi d'une façon très responsable. Mais cela, c'était avant le fait. Maintenant, aujourd'hui, on vous dit: Vous avez dépensé des fonds publics. Je trouve impossible à accepter qu'on ne puisse pas avoir d'information, qu'une société d'État, que le ministre puisse prendre la position de dire: Écoutez, c'était une transaction privée et on ne peut pas donner de telles informations, pour une raison ou une autre. Cela ne peut pas affecter cette transaction, quand elle est finie. Mais cela nous laisse beaucoup de questions à l'esprit. Pour le moment, si la SGF refuse de donner ces informations, on va accepter la suggestion du ministre d'examiner et d'avoir ces informations en privé; autrement, je vais vous le demander à l'Assemblée nationale.

M. Biron: M. le Président...

M. Ciaccia: ...durant une période de questions.

M. Biron: ... je répète l'offre que je viens de faire au député de Mont-Royal et je pense bien que les gens de la Société générale de financement seraient heureux et même désireux de pouvoir répondre aux questions du député, considérant que les membres de l'Assemblée nationale doivent être informés. Bien sûr, du côté gouvernemental, nous sommes quand même liés par le secret du Conseil des ministres. Je comprends aussi que les députés de l'Opposition sont des gens responsables qui ont le droit, de temps à autre, de savoir des choses qui ne sont pas publiées pour le grand public mais pour leur information et aussi pour qu'ils puissent porter un jugement sur la qualité de la gestion des fonds publics à la fois par les gestionnaires gouvernementaux et par les gestionnaires des sociétés d'État. À ce point de vue, je répète la suggestion que j'ai faite tout à l'heure. En faisant cette suggestion, je suis fidèle à l'attitude que j'avais ici même dans cette commission parlementaire, alors que je siégeais du côté de l'Opposition et que j'avais suggéré des rencontres à huis clos pour pouvoir questionner les représentants des sociétés d'État.

M. Ciaccia: Oui, je peux comprendre le huis clos pour des informations privilégiées, qui ne sont pas d'ordre public, mais je ne vois pas comment les fonds qui ont été dépensés pour la SGF ne sont pas des informations publiques. Si j'étais un actionnaire de la compagnie, un actionnaire a droit à cette information et, à titre de représentant des contribuables, ceux-ci ont le droit de savoir, le public a le droit de savoir comment on a dépensé l'argent dans cette société. Cela n'a presque pas de sens. Avez-vous des ententes avec la compagnie que vous avez achetée, qui a vendu ses actifs? Est-ce que vous avez une entente avec elle, en termes de rouvrir une autre...

M. Lebel: Une entente en vertu de laquelle elle s'engagerait à ne pas partir une autre Bio-Endo, de non-concurrence?

M. Ciaccia: De non-concurrence. M. Gagnon (Louis-Gilles): II y en a une. M. Ciaccia: Pour combien de temps? M. Gagnon (Louis-Gilles): Cinq ans. M. Ciaccia: Est-ce que...

M. Gagnon (Louis-Gilles): Les deux notions sont là.

M. Ciaccia: L'étendue...

M. Gagnon (Louis-Gilles): Québec.

M. Ciaccia: Tout le Québec.

Le Président (M. Brouillet): Permettez-vous, pour cette fois-ci, qu'on retienne la suggestion du ministre. Pour la question fondamentale à venir, il pourrait y avoir une discussion à savoir est-ce que systématiquement, ces informations doivent

passer par le huis clos ou s'il y a lieu de... est-ce que c'est sur ce point, M. le député de Nelligan?

M. Lincoln: Oui, c'est sur ce point.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Lincoln: Moi, je pense qu'avant d'accepter cette suggestion du ministre, je pense qu'on devrait se poser la question fondamentale. Il y a trois choses. Si demain matin, on avait deux sociétés privées qui transigent ensemble, cela nous sommes tout à fait d'accord. Il y a deux sociétés privées qui transigent ensemble, ce n'est pas l'affaire de personne. Si demain matin, vous avez une compagnie publique qui est inscrite à la Bourse, elle achète une compagnie privée, c'est d'ordre tout à fait public. N'importe quel actionnaire, n'importe quelle personne a le droit de demander des renseignements. Alors, est-ce que le ministre peut nous dire qu'une compagnie, une société d'État qui, à plus forte raison, est plus qu'une compagnie d'ordre public parce que c'est une compagnie qui appartient à tous les citoyens, même pas à des actionnaires qui ont acheté des actions, cela dépasse les actionnaires qui ont acheté des actions. Cela va de façon beaucoup plus large ce qui appartient à chaque citoyen du Québec qui à ce moment elle aurait des règles d'information qui seraient plus restreintes qu'une compagnie publique et qui est inscrite à la Bourse. Moi, je trouve cela tout à fait inconcevable. C'est en fait toute l'argumentation que nous avons eue récemment en Chambre à propos de Québécair. Nous pensons que nous devons savoir cela pour être éclairés et faire notre travail comme députés. Il me semble que c'est fondamental pour nous de savoir si on va venir ici examiner la question d'investissements de la SGF. La question financière est donc capitale parce que si demain matin on avait fait un investissement qui était trop élevé et qui demandait d'autres fonds et après, dans cinq ou six mois, quelque chose n'allait pas bien, est-ce qu'on n'a pas le droit de nous demander -est-ce que vous avez fait votre travail? Est-ce que vous n'avez même pas su combien avait été investi dans cette firme? Moi, je trouve que c'est tout à fait fondamental, lorsqu'une compagnie appartient à l'État, aux citoyens, au public, que nous ayons les mêmes droits que les membres du gouvernement de savoir combien a été investi. Il me semble qu'avoir cela à huis clos, cela nous met une espèce de bâillon automatique. Si demain matin, M. le ministre, vous nous donnez cette information à huis clos, cela veut dire par le fait même qu'on ne peut pas aller en parler, qu'on ne peut pas poser officiellement des questions sur ce sujet. Les journalistes ne le savent pas, mais pourquoi ne le sauraient-ils pas? Pourquoi, cela n'est-il pas de nature publique? Après tout, je comprends les transactions des affaires. J'étais en affaires moi-même, mais en même temps, là on dépasse les cadres d'une société privée. Elle devient une société d'État. À tort ou à raison, c'est comme cela. Marine Industries ou n'importe quelle société qui devient une société d'État, il me semble que toutes ces informations sont d'ordre public. Je comprends, je conçois tout à fait ce que dit mon collègue, qu'avant la transaction c'est de façon tout à fait pragmatique, on serait un peu stupide de nous dire - combien allez-vous payer pour que le prix ne monte pas -cela me semble tout à fait compréhensible. Alors, nous ne sommes pas devant ce fait. Nous sommes devant un fait déjà accompli. La transaction a été faite mais là la transaction est un fait. On nous dit qu'on ne peut pas nous dire cela, à moins que ce soit à huis clos. Alors, si c'est à huis clos, à ce moment, on est bloqué, on ne peut pas poser de questions. Moi, je trouve que c'est l'idée même de cette commission parlementaire de connaître ces faits. C'est un principe, c'est un fait capital. (16 h 30)

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre, avez-vous d'autres points à apporter dans le débat? Peut-être que M. Lebel pourra, avant coup ou après coup...

M. Lebel: J'aurais une autre intervention, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. Lebel.

M. Lebel: Notre gêne ne vient pas du fait que nous voulons cacher quelque chose à la commission parlementaire. Il s'adonne cependant que dans les discussions avec M. DuRuisseau, qui est le propriétaire des actifs que nous avons achetés, nous nous sommes commis à garder le montant de la transaction confidentiel. Nous n'avons pas acheté une entreprise publique cotée en Bourse, etc. Nous avons acheté les actifs d'une entreprise appartenant à un individu. Dans les négociations avec lui, il nous a demandé, à un moment donné, de garder la transaction privée. Nous avions tellement peu d'opposition à publier le prix que, dans un projet de communiqué de presse, nous l'avions mis. M. DuRuisseau nous a rappelé notre entente à cet égard et il nous a demandé, dans toute la mesure du possible, de ne pas communiquer publiquement ce prix.

Cela nous rend un peu mal à l'aise d'être pris dans ce dilemme. Si nous avions pu dire, au début des discussions avec la personne concernée: Vous faites affaires avec une société d'État, il est possible que toute la transaction soit révélée en commission

parlementaire et c'est une condition que vous devez accepter au départ pour faire affaires avec nous, la situation serait différente. Mais nous n'avons pas procédé de cette manière et, dans le cours de la négociation, il nous a demandé explicitement de garder secret le chiffre de cette transaction, le plus possible. Il y a certains individus qui ont cette réaction, quand ils vendent ou achètent certaines choses, de vouloir garder le montant de la transaction secret.

M. Ciaccia: Je pourrais vous suggérer, M. Lebel, que c'est peut-être un genre d'engagement qui devrait être très difficile à prendre pour un directeur d'une société d'État qui engage les fonds publics. Je ne veux pas savoir pourquoi M. DuRuisseau aurait demandé un tel engagement. Mais ce sont des engagements dangereux à prendre, quant à moi, comme représentant de l'Assemblée nationale, de dire qu'on ne dévoilera pas le prix qu'on a payé. Qu'est-ce qu'on a à cacher? Ce sont des fonds publics. Je ne pense pas qu'on ait le droit. Même, je dirais que le ministre n'a pas le droit. Le ministre n'aurait jamais le droit de dire à quelqu'un: On va acquérir certains biens, certains actifs et on ne dévoilera pas le montant. Cela ne peut pas se faire. Dès que vous utilisez des fonds publics, cela devient public. Car des engagements de ce genre -je ne veux pas vous faire de reproche, mais il va vous sembler que j'en fais un - je pense que c'est un précédent dangereux. Je ne voudrais pas voir ce genre de précédent se perpétuer.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre.

M. Biron: Sur ce sujet, je voudrais dire qu'il y a simplement quelques questions auxquelles on ne peut pas répondre publiquement aujourd'hui, à cause de l'engagement vis-à-vis d'un individu, propriétaire d'une entreprise privée, qui a fait une transaction avec une société d'État. Je réinvite les députés de l'Opposition à rencontrer les gens de la SGF, en présence ou non du ministre, si vous voulez. Je mets toute ma confiance dans les gens de la Société générale de financement. Ils pourront au moins répondre aux quelques questions auxquelles ils ne peuvent pas apporter de réponses publiquement aujourd'hui. Ceci dit, pour l'avenir, on pourrait s'asseoir aussi avec les membres de l'Opposition pour essayer d'établir ensemble une façon de travailler.

J'avais suggéré, il y a déjà plusieurs années, une commission parlementaire qui ne serait pas publique, qui serait sous le sceau de la confidentialité. Cela faisait en sorte que, de part et d'autre de l'Assemblée nationale, nous étions pris à avoir une attitude beaucoup plus responsable, de gestionnaire en tout cas, vis-à-vis des représentants des sociétés d'État. Mais je suis réceptif à toute suggestion venant de l'Opposition, sur des façons de procéder qui feraient en sorte que nous pourrions dévoiler au grand public ce qui est essentiel de dévoiler et qui ferait en sorte aussi d'en dévoiler davantage aux gens de l'Opposition en tenant compte d'une responsabilité de leur part, puisqu'ils représentent aussi une partie importante de la collectivité québécoise. Pour le cas d'aujourd'hui, s'il y a quelques questions auxquelles on ne peut pas apporter de réponse, les gens de la SGF seraient bien heureux de vous rencontrer après la commission parlementaire. À l'avenir, il faudra peut-être s'entendre sur une façon de procéder.

Le Président (M. Brouillet): Sur la question...

M. Fortier: Je vais continuer sur la question et je déborderai un petit peu.

Le Président (M. Brouillet): C'est que le ministre délégué à la Science et à la Technologie a demandé...

M. Fortier: C'était là-dessus pertinemment...

Le Président (M. Brouillet): Sur cela, on va terminer.

M. Fortier: Le premier commentaire est que, avec toute l'expérience que le ministre a eue dans l'Opposition, j'aurais cru au lieu de mettre le fardeau sur nous, il pourrait préparer un document et nous le soumettre et il nous ferait plaisir d'en discuter. Cela pourrait être des "guide-lines" qui pourraient régir la divulgation de l'information. D'une façon plus précise, étant donné que je pense que mes deux collègues ont fait le point de notre opinion sur le fait que ces informations devraient être publiques, j'aimerais continuer pour - sans aller peut-être jusqu'à vous demander, encore une fois, de divulguer le prix, puisque cette chose-là a été débattue -avoir des précisions sur le genre de transaction que vous avez faite. Si je comprends bien, vous avez acheté les actifs et le personnel a été transféré à une nouvelle compagnie que vous avez incorporée. Pourriez-vous me dire - et là j'ai quelques questions très brèves - de quelle façon ce personnel a été transféré? Est-ce qu'il a été transféré au même salaire, aux mêmes conditions, avec les mêmes avantages sociaux, avec un nouveau régime de retraite? Autrement dit, est-ce que ce qui a assuré la profitabilité de l'entreprise, dans le passé, continuera ou si vous avez changé les conditions de fonctionnement en ce qui concerne les coûts de fonctionnement?

M. Gagnon (Louis-Gilles): Tout te personnel, sauf M. DuRuisseau, lui-même, qui désirait, de toute façon, ne pas continuer, a été transféré, a continué sans aucune espèce d'interruption aux mêmes conditions, aux mêmes termes, avec la reconnaissance d'un nombre d'années de service correspondant au nombre d'années de service qu'il y avait avant la transaction. Il n'y a eu aucun changement. Effectivement, la nouvelle société qui a fait l'acquisition a acquis, si on peut dire, les obligations de l'ancienne vis-à-vis son personnel.

M. Fortier: Est-ce que l'ancien propriétaire avait exigé une entente selon laquelle même s'il n'est plus actif dans la compagnie, il va continuer à être sur la feuille de paie de la nouvelle compagnie? Est-ce qu'il sera sur la feuille de paie de la nouvelle compagnie?

M. Gagnon (Louis-Gilles): II n'y a aucune entente à cet égard. Absolument rien.

M. Fortier: Maintenant, ce qui m'a surpris dans ce que vous avez dit - j'ai été habitué dans des achats d'actifs comme ceux-là où, au lieu de prendre sous la responsabilité de la nouvelle compagnie l'achat des comptes à recevoir, la nouvelle compagnie s'engageait à utiliser le personnel pour percevoir les comptes au nom de l'ancienne compagnie. Quelle protection avez-vous et quel est le volume des comptes à recevoir? Quel danger y-a-t-il que, dans les comptes à recevoir, il y ait de mauvaises créances?

M. Gagnon (Louis-Gilles): D'accord. Je comprends bien votre question. Nous avons -d'ailleurs, c'est un sujet qui a fait l'objet de nombreuses discussions avant que la transaction ne soit conclue - bénéficié des services d'avocats chevronnés en la matière. La meilleure façon qui a pu être imaginée pour protéger tout le monde dans cette transaction, c'est d'en arriver pour les fins d'une signature d'un acte de vente à déterminer un montant forfaitaire pour déterminer nos calculs, tout cela étant sujet à des ajustements en fonction de ce que serait la réalité au cours des six mois qui suivraient la fin de la transaction. C'est-à-dire que si, à la fin des six mois, les comptes à recevoir dont on nous avait donné des montants bien précis n'étaient pas encaissés, ces comptes seraient effectivement remis au vendeur et le prix serait ajusté en conséquence.

M. Fortier: Une autre question en ce qui concerne l'achat des actifs...

M. Gagnon (Louis-Gilles): Tout cela -excusez-moi, M. Fortier - a été fait dans le cadre d'une vente en bloc avec ce que cela comporte au point de vue exigences du Code civil, affidavits sous serment, etc.

M. Fortier: Maintenant, il est bien évident par les explications que M. Lebel nous a données, que la transaction que la SGF a faite, qui a amené un centre de recherche à participer, il est bien certain que le volume d'affaires devra augmenter dans l'avenir. Mais le volume d'affaires augmentera dans l'avenir surtout grâce à la nouvelle disposition, si j'ai bien compris, qui associera Biocel à cette société Bio-Endo Inc., qui est la nouvelle société qui continue...

M. Gagnon (Louis-Gilles): Je peux laisser Mme Dionne-Marsolais répondre à cette...

M. Fortier: Non, ma question s'adresse à vous. Autrement dit, le développement du volume des affaires va surtout être le fait de nouvelles initiatives de la SGF. Autrement dit, le développement du "goodwill" de la compagnie va surtout être le fait de la SGF. Dans ces conditions, est-ce vous vous pouvez me dire si la SGF a payé un "goodwill", soit la différence entre les valeurs réelles de la compagnie et la valeur hypothétique ou espérée du rendement de la compagnie dans l'avenir? Est-ce que vous avez payé un "goodwill" à l'ancien propriétaire?

M. Gagnon (Louis-Gilles): Tout le développement futur sera le fait de la SGF. En fait, je pense, que c'est une affirmation que je ne suis pas prêt à partager à 100%. Je comprends que les gens qui étaient dans l'entreprise et qui y demeurent vont, effectivement, collaborer au développement de l'entreprise, aussi bien que les efforts que la SGF pourrait y faire. Si je comprends bien votre question c'est, effectivement: Y a-t-il eu un paiement d'inclus dans le prix qui tienne compte ou qui s'appelle "goodwill" ou achalandage? Il y en a eu un, comme c'est normal dans l'acquisition d'une entreprise de cette nature. Il est relativement minime.

M. Fortier: J'aurais une autre question. Le président nous a dit qu'une raison pour laquelle vous n'avez pas associé la société Novacap à cette transaction... Je crois que M. le président a dit que vous auriez pu consulter et j'en ai conclu que, si vous le mettiez au conditionnel, c'est que, de fait, vous aviez éliminé cette hypothèse sans en avoir parlé et que, par conséquent, vous préfériez garder l'initiative à la SGF pour pouvoir, éventuellement, associer d'autres actionnaires dans l'avenir. Puisqu'il s'agit d'une nouvelle technologie, il se pourrait qu'il y ait des initiatives qui appellent d'autres groupes ou d'autres individus, enfin,

d'autres compagnies à s'associer à cette entreprise que vous formez maintenant.

Est-ce que je pourrais poser la question suivante? Étant donné que Biocel va posséder 30% des actions, et j'imagine que vous avez une entente entre actionnaires qui vous lie à Biocel... Je comprends bien la raison pour laquelle vous avez voulu associer Biocel. Je pense que c'est pour assurer sa motivation et son intérêt au développement de la compagnie, mais dans quelle mesure serait-il utile ou nécessaire d'appeler d'autres actionnaires dans l'avenir? Dans quelle mesure Biocel pourrait-elle s'y opposer? Autrement dit, est-ce que les actionnaires qui sont là, présentement, qui seraient la SGF et Biocel Inc., ou l'un des actionnaires qui pourrait être Biocel, pourraient s'opposer à la venue d'un autre actionnaire du fait que ce nouvel actionnaire pourrait diluer les actions de Biocel elle-même?

M. Lebel: Quand j'ai parlé d'attirer d'autres actionnaires, j'ai parlé d'attirer d'autres actionnaires dans Bio-Mega et non pas dans Bio-Endo. Il n'est pas de notre intention, dans l'immédiat, et il ne me semble pas prévisible non plus qu'à l'intérieur de Bio-Endo nous cherchions à avoir d'autres actionnaires. Là où nous voudrions avoir des partenaires, c'est à l'intérieur de Bio-Mega. Ce serait pour les associer à d'autres projets de nature biotechnologique. Mais je ne vois pas la nécessité, je ne prévois pas qu'il puisse être utile de vouloir introduire à l'intérieur même de Bio-Endo d'autres actionnaires que les actionnaires actuels, c'est-à-dire 30% de Biocel et 70% de la SGF.

M. Fortier: Mais si je comprends bien...

M. Lebel: Mais nous verserions, dans cette hypothèse que je développe, les 70% de Bio-Endo à l'intérieur de Bio-Mega. Cela pourrait constituer notre propre souscription à Bio-Méga, s'il n'y a rien qui nous empêche de le faire. (16 h 45)

M. Fortier: Si je comprends bien, Bio-Méga n'est pas une compagnie opérationnelle, c'est seulement une compagnie de papier à l'intérieur de la SGF qui vous permet de devenir actionnaire de Bio-Endo. La compagnie opérationnelle sur le plan du développement technologique, tel qu'on en a parlé ce matin, est réellement Bio-Endo Inc. Je crois que lancer une nouvelle entreprise comme celle-là avec des possibilités de développement qui sont très considérables... D'ailleurs, dans votre document, vous en faites état. Vous vous lancez dans le domaine de la santé. Il se pourrait que, si c'était réellement un succès, Bio-Endo puisse, doive ou désire aller dans d'autres domaines technologiques associés à celui qui est la première rampe de lancement. À ce moment, il se pourrait que ceci ne puisse se faire qu'en achetant d'autres compagnies ou en s'associant à elles. J'aurais pensé qu'à ce moment, au lieu de le faire comme vous venez de le dire, comme étant un associé dans Bio-Méga qui ne le serait qu'en tant qu'actionnaire corporatif, la venue d'une nouvelle associée se ferait dans la compagnie opérationnelle qui est plutôt Bio-Endo Inc. C'est la raison pour laquelle je posais la question à savoir si le développement technologique de Bio-Endo ne serait pas handicapé par une entente avec Biocel, puisque peut-être que Biocel n'aurait pas les ressources financières ou pourrait s'opposer à la venue d'un autre actionnaire qui pourrait assurer le développement de Bio-Endo Inc.

M. Lebel: Louis-Gilles Gagnon pourra ajouter quelque chose, s'il le veut. Techniquement, ceci est couvert de la manière suivante: S'il y a besoin de levées de fonds additionnelles dans Bio-Endo, quelle que soit la source, Biocel a son droit de premier refus, mais advenant qu'elle ne suive pas, elle est diluée en conséquence. Ce qu'on a consenti par contrat, par entente avec Biocel, c'est de lui reconnaître 30% de la mise de fonds initiale et non des mises de fonds subséquentes. Par ailleurs, en termes de stratégie, je répète que nous essaierons d'obtenir les nouveaux partenaires à l'intérieur de Bio-Méga qui est une société à portefeuille. Pour le moment, c'est une société de papier, bien sûr, mais potentiellement, c'est un petit "holding" qui pourrait avoir d'autres filiales. C'est à l'occasion de la création d'autres filiales de Bio-Méga que nous aimerions essayer d'attirer d'autres actionnaires à l'intérieur de Bio-Méga.

M. Fortier: C'est tout pour le moment. Une voix: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Une minute! M. le ministre avait depuis longtemps demandé la parole; vous pourrez parler après.

M. Paquette: Je ne voudrais pas priver mon collègue de son droit de parole. C'est seulement pour faire préciser à la SGF un certain nombre d'éléments, pour les fins d'information de la commission, qui m'apparaissent importants. On se retrouve devant une espèce d'entité Biocel, Bio-Endo, qui est plus grande que la somme des parties, c'est-à-dire qu'on prend une entreprise existante qui fonctionnait dans un autre domaine et qui fournit les possibilités de fabrication et de commercialisation et d'un autre côté, une équipe de chercheurs en biotechnologie qui n'avait pas les capacités de commercialiser et de fabriquer le résultat

de ses découvertes. On les met ensemble de façon à créer une nouvelle entité qui va bénéficier à la fois de la part des deux composantes. L'avantage pour le groupe de chercheurs du CHUL est évidemment des possibilités de retombées sur le plan de la recherche. On mentionne dans votre document que Bio-Endo versera à Biocel sur une base annuelle au moins 10% de son chiffre d'affaires pour la recherche et le développement. Si je comprends bien le sens du document, c'est un minimum. Cela veut dire que si le chiffre d'affaires est de 3 400 000 $, cela veut dire 340 000 $ qui vont aller dans Biocel pour des fins de recherche et si le chiffre d'affaires passe à 25 000 000 $, cela veut dire au moins 2 500 000 $ pour la recherche. Dans Biocel, va-t-il y avoir d'autres contributions que celle-là à l'effort de recherche?

M. Lebel: Est-ce qu'on peut demander au Dr Fernand Labrie d'amorcer une réponse à cette question?

M. Labrie (Fernand): En fait, les premiers membres de Biocel, c'est le groupe d'endocrinologie du CHUL, mais cela est ouvert à tous les groupes de recherche de la province de Québec dans toutes les universités, dans tous les centres. Donc, les contrats ont été trouvés par Biocel aux centres de recherche qui sont les plus aptes à respecter le contrat dont a besoin Bio-Endo. Donc, le laboratoire du CHUL est le premier, mais c'est également ouvert à tous les autres.

M. Paquette: Donc, Biocel vous servira, en quelque sorte, à canaliser l'argent vers des équipes de recherche qui, elles, sont situées dans des universités.

M. Lebel: Ce peut être Sherbrooke, ce peut être McGill, ce peut être n'importe quelle autre université.

M. Labrie: Biocel, c'est l'organisme, en fait, qui distribue les subventions et les contrats, qui les analyse, qui les juge, qui les offre aux différents groupes de chercheurs. C'est l'organisme médiateur de la distribution des subventions.

M. Paquette: La question que je voulais vous faire préciser est la suivante: On mentionne aussi que Biocel verra à l'exécution d'un mandat de recherche dont les résultats seront exclusifs à Bio-Endo. On ne doit pas interpréter cela comme une entente d'exclusivité absolue? C'est uniquement dans le cas...

M. Labrie: ... dans le domaine du contrat bien spécifique donné par Bio-Endo à Biocel qui, lui, le distribue à un autre centre de recherche. Donc, dans ce domaine, il y a de l'exclusivité, mais cela ne se limite qu'à cela uniquement. En d'autres termes, les chercheurs peuvent travailler sur autre chose indépendamment de ce contrat.

M. Paquette: Dernière question: Est-ce qu'il y avait du personnel scientifique et technique dans Bio-Endo au moment de la transaction? Si oui, qu'est-ce qui leur arrive dans la nouvelle organisation?

Mme Dionne-Marsolais: II y avait effectivement du personnel scientifique et technique à Bio-Endo et il va continuer à assurer l'application et le transfert de technologies qui proviendraient de Biocel, parce que, pour absorber les résultats de la recherche, dans bien des cas, il y a le développement industriel qui implique la définition de l'apprentissage, de la mise en production et toute cette étape de développement sera maintenue à Bio-Endo.

M. Paquette: Donc, avec l'accroissement du chiffre d'affaires prévu de Bio-Endo, on peut penser que ce personnel scientifique et technique augmentera en conséquence, lui aussi?

Mme Dionne-Marsolais: Cela serait probablement la chose qui devrait arriver, selon les résultats que nous pourrons acquérir par Biocel. J'aimerais quand même mentionner que Bio-Endo réalisait des efforts de recherche à la mesure de ses capacités; elle réalisait, depuis les cinq dernières années, entre 3% et 5% de ses ventes totales comme effort de recherche. Cela n'était pas tout fait dans la maison, cela était fait, également, de façon dispersée, sporadique, à différents groupes, à différents chercheurs. C'était très difficile, pour eux, de faire réaliser des contrats et de le faire en collaboration avec l'industrie. La part de Biocel pour cette équipe, c'est très stimulant, parce que, là, on assure une interface entre un milieu universitaire hautement qualifié et un besoin industriel où l'expertise est au niveau de la mise en production. Le mariage est très intéressant et favorable pour les deux parties.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Merci, M. le Président. Je voudrais poser une couple de questions à M. Lebel. J'aimerais connaître les critères qui vont vous amener à acheter? D'abord, vous avez fait largement état et vous avez même invité les différents organismes, les différentes sociétés, qu'elles soient d'État ou privées, à se joindre à vous pour autant que, bien sûr, cela touche le monde de l'expertise biotechnologique. Est-ce que, à ce moment-

là, les critères qui vont faire que vous allez vous associer ou accepter de vous associer avec de telles compagnies sont d'abord des critères d'expertise? J'imagine qu'il faut que l'organisme en question, la société en question ait déjà fait un travail, ait déjà fait ses preuves dans le monde la biotechnologie. Mais, est-ce qu'il faut nécessairement que cette entreprise ait démontré sa rentabilité sur le plan financier? Comme dans le cas de Bio-Endo, elle avait démontré qu'elle avait déjà une expertise assez intéressante, elle avait déjà même un produit mis sur le marché. Mais si elle n'avait pas pu arriver à démontrer sa rentabilité, auriez-vous quand même été intéressés à vous joindre à eux, de l'acheter?

M. Lebel: II n'y aurait pas eu d'intérêt à acquérir Bio-Endo si Bio-Endo n'avait pas eu une base d'activités rentable, qui permettait justement d'avoir un noyau de base de 70 personnes, qui permettait d'avoir des installations, qui permettait d'avoir des équipements. À mon point de vue, cela aurait posé le problème dans une tout autre perspective. Il aurait probablement fallu penser davantage à une solution plus longue, c'est-à-dire à bâtir quelque chose de toutes pièces. Le fait que l'entreprise existait, qu'elle avait une base, qu'elle était déjà en activité et qu'elle connaissait le domaine de très près, qu'elle avait déjà un réseau de commercialisation, qu'elle était déjà capable de fabriquer, pour nous, c'était évidemment un acquis.

Quant à la question plus hypothétique de savoir si dans l'avenir ou dans d'autres projets on pourra rencontrer les mêmes conditions, là, je serais un peu moins catégorique dans ma réponse. Il pourrait arriver, par exemple, qu'un associé apporte de la technologie dans un projet hypothétique que l'on peut s'imaginer. Il pourrait arriver qu'un associé apporte de la technologie et que les preuves ne soient pas tout à fait aussi flagrantes qu'elles ne le sont dans le cas de Bio-Endo et, par conséquent, le risque pourrait être plus grand. On a mentionné, dans le document qu'on a présenté en commission parlementaire, un projet qui est dans le domaine de la biotechnologie et qui a connu des difficultés, qui est quand même arrêté au moment où on se parle. Si vous prenez ce projet et que vous essayez de tracer le profil d'un autre projet possible en biotechnologie, là, il y a des éléments du profil qui diffèrent totalement. Il y avait une technologie, mais il n'y avait pas de fabricant qui avait, au départ, l'expérience de cette fabrication. Il pourrait arriver dans l'avenir, dans les deux ans ou les trois ans qui viennent, qu'on lance, avec un partenaire apportant une technologie nouvelle et importante, un projet plus risqué que celui qu'on lance à l'heure actuelle.

De façon générale, il nous semble intéressant de continuer, dans l'examen des projets qu'on va faire, à chercher à identifier un groupe de recherche qui peut nous apporter des éléments de découverte et, donc, de permettre le transfert technologique et de trouver un partenaire, un associé qui, lui, est déjà dans la fabrication, dans la commercialisation. Prendre un projet totalement neuf, quel que soit le secteur dans lequel il se situe, que ce soit en santé, en alimentation, en énergie ou dans n'importe quel autre secteur où la biotechnologie peut avoir des implications, le prendre complètement neuf, ce serait dire qu'on aurait probablement des ressources plus considérables, mais le risque serait sûrement plus grand que celui que nous courons avec le projet dont nous parlons présentement.

Mais cela ne veut pas dire qu'on devrait renoncer, en principe, à ces possibilités plus risquées. Parfois, plus le risque est grand, plus les rendements sont élevés. C'est un peu ce qu'on cherche dans le capital de risque. Plus le risque est grand parfois, plus le saut technologique que nous réussissons à accomplir est grand. À mon point de vue, en réponse à votre question, on peut avoir à examiner des situations un peu plus risquées que celles que nous avons à examiner jusqu'à présent.

M. Lavigne: Les portes ne sont pas fermées?

M. Lebel: Les portes ne sont pas fermées.

M. Lavigne: Une autre question, M. Lebel. Il a été fait mention, à cette commission parlementaire, d'un montant de 5 000 000 $ à injecter sur une période de trois ou de cinq ans.

M. Lebel: Cinq ans. (17 heures)

M. Lavigne: Cinq ans. Est-ce qu'en avoir plus, ça irait plus vite, vous pourriez faire de plus grands pas? Est-ce la conjoncture économique qui vous a suggéré le chiffre de 5 000 000 $ plutôt que 10 000 000 $ ou si c'est parce que en avoir plus, ce serait peut-être mettre un peu la charrue devant les boeufs, peut-être parce que vous n'êtes pas prêts à en assumer plus ou à en dépenser d'une façon rentable et efficace. Est-ce que c'est là une bonne question? Essentiellement, c'est cela la question.

M. Lebel: Dans la conjoncture actuelle, si nous avions sur la table quatre projets réalisables, nous manquerions peut-être de ressources, non seulement comme SGF, mais il se pourrait que nous ne trouvions pas, dans la conjoncture actuelle, des entreprises

disposant des ressources pour investir, même si les projets en soi avaient des chances de succès sérieuses. Ce serait donc la quantité, l'abondance des projets. Maintenant, ce que je peux vous garantir, c'est que cela ne semble pas être le problème. D'abord, l'abondance des projets, c'est loin d'être évident et il va falloir chercher et y consacrer des efforts en termes de ressources humaines pour découvrir des projets intéressants. Dans l'immédiat, on n'est aucunement menacé par l'abondance de projets. D'ailleurs, les chapitres centraux du document qu'on vous a présenté insistent assez, je l'espère, sur le fait que tous les experts mondiaux qui ont étudié cette question, Sheets, en particulier, et c'est confirmé par le Stanford Research Institute.

On dit que c'est d'un immense potentiel. Toutes les commissions gouvernementales qui ont étudié cette question recommandent à leurs gouvernements de faire, dès maintenant des investissements, de faire, dès maintenant, leur entrée dans le secteur. Mais toutes en arrivent à la même conclusion. Pour le moment, nous connaissons des applications précises dans le secteur de la santé. Deuxièmement, il semble que c'est le secteur où l'utilisation de procédés biotechnologiques va croître le plus parce que les chiffres que l'on cite disent que, vers les années quatre-vingt-dix, pour un certain nombre de procédés, nous serons passés à 90% biotechnologiques en santé. Pour un certain nombre de procédés, pas tous les procédés reliés au secteur de la santé. Pour un certain nombre de procédés.

Quant aux autres secteurs d'application: alimentation, énergie, forêts, mines, etc., la plupart des spécialistes mondiaux et les conclusions des commissions gouvernementales qui ont étudié cette question, c'est à compter des années quatre-vingt-dix que cela pourrait commencer à avoir des effets importants. Là, je vous cite cela de mémoire, je pense que l'on dit, par exemple, qu'en alimentation, nous aurons atteint 10% de produits fabriqués selon des procédés biotechnologiques en 1990, mais que l'effort ou la majeure partie de l'impact en termes de développement produira après cela. Il y a donc deux situations qui doivent nous arrêter de rêver en couleur quand on discute de cette question. Le premier, c'est que pour les projets, nous avons essayé... Mme Marsolais travaille presque à temps plein sur cette question depuis une quinzaine de mois, elle a quand même été assistée par un certain nombre d'autres personnes à temps partiel sur cette question, elle va s'en aller en Bio-Endo, nous allons la remplacer par un vice-président à la biotechnologie, nous allons continuer à consacrer à l'examen de projets l'équivalent d'un homme-année, un homme et demi ou deux hommes-année, tout dépendant si on ajoute le coût des études que nous ferons ou pas.

Quant aux dangers d'avoir une abondance de projets qui feraient en sorte que l'absence de ressources nous empêchera de suivre, je pense que ce sont les moins grands. Le danger le plus grand, c'est que, malgré nos efforts, malgré les efforts du secrétariat à la science et à la technologie, malgré, je l'espère, l'intérêt que manifesteront certaines entreprises privées dans le domaine de l'alimentation, dans le domaine de la bière, par exemple, malgré certains efforts que manifesteront l'entreprise privée et certaines autres entreprises publiques comme la Société des alcools, malgré ces efforts, les chances que nous ayons trop de projets m'apparaissent relativement minces. Il va falloir tous ces efforts pour au moins être au pas avec le changement technologique qui va éventuellement se produire sinon - c'est notre espoir - le devancer légèrement et avoir par rapport aux autres - c'est toujours ce qu'on vise - un certain avantage. On a besoin de tous ces efforts. En résumé, le danger d'être noyé de projets et de renoncer à faire certaines choses par manque de ressources financières, personnellement, cela m'apparaît relativement mince.

M. Lavigne: Une dernière question, très brièvement. Justement, vous avez failli y répondre. Par rapport aux autres provinces canadiennes, par exemple, par rapport aux États-Unis ou même à l'Europe, le Québec tire-t-il de la patte de ce côté? Est-on vraiment en arrière ou si on est à peu près, dans le temps, au même niveau ou en avant des autres? C'est peut-être difficile de répondre, mais...

M. Lebel: Peut-être que Fernand Labrie pourrait mieux répondre que moi à cette question.

M. Labrie: Vous n'avez pas le droit de poser des questions aussi difficiles que cela. Cela dépend des domaines. Il y a des domaines au Québec qui sont assez avancés et qui sont concurrentiels, mais, dans l'ensemble, il faut admettre que la recherche au Québec n'est pas aussi avancée qu'elle devrait l'être. Je pense qu'on l'a dit tout à l'heure. On dit: 1% d'investissement du produit national brut, alors que dans les pays les plus développés, comme la France, l'Allemagne, le Japon et le reste, c'est 2,5%. Notre effort de recherche est encore immense. Le Québec par rapport au Canada et le Canada par rapport aux États-Unis, le facteur est assez important. Donc, tous les efforts qu'on peut faire pour appuyer la recherche, c'est un peu à la base de l'économie. Cela a été dit par M. Paquette et partout. On a un effort important à faire.

Dans certains domaines, on peut être satisfait de ce qui a été fait, mais, dans l'ensemble, on a beaucoup à faire. Je ne sais pas si cela répond bien à la question. C'est une question très difficile.

M. Paquette: Dr Labrie, si vous me le permettez, dans le domaine des biotechnologies, il serait peut-être intéressant que vous nous disiez dans quels secteurs on peut espérer être concurrentiels dans le domaine de la recherche actuellement, notamment un domaine où vous travaillez.

Des voix: Ah! Ah!

M. Labrie: Cela devient de plus en plus difficile. Cela touche mes confrères aussi, mes collègues. Je peux très bien me tromper. Il faudrait demander la même protection que M. Lebel exigeait tout à l'heure. Je pense que dans le domaine où on veut s'implanter, le domaine du diagnostic, on peut faire aussi bien que les autres. Il y a le domaine du génie génétique où il y a beaucoup de groupes qui sont bien développés. Il y a le domaine du diagnostic, des vaccins, par exemple, où l'Institut Armand-Frappier est très bien développé. Je pense que ce sont des secteurs qui sont forts en biologie. Il y a plusieurs secteurs qui sont forts, qui se comparent bien aux autres, donc, à l'étranger, mais ma restriction porte sur l'ensemble, sur le volume global de ce qu'on fait. C'est quand même assez limité. Je peux me tromper, mais je le pense le plus honnêtement possible.

M. Lefebvre: M. le Président, j'aimerais ajouter...

Le Président (M. Brouillet): Un complément de réponse?

M. Lefebvre: ... qu'au niveau de la commercialisation, il ne semblerait pas que les autres provinces soient tellement plus avancées que le Québec à l'heure actuelle. On dénombre deux compagnies, je crois, qui sont identifiées comme étant dans le domaine de la biotechnologie présentement. Donc, au niveau de la recherche, il est peut-être vrai qu'on ne donne pas l'effort qu'on devrait donner. Par contre, au niveau de la commercialisation, selon nos recherches, on est, à certains égards, à l'avant-garde.

Le Président (M. Brouillet): Merci. Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: Mme Marsolais nous a expliqué que l'institut n'est pas dans le domaine de la biotechnologie à l'heure actuelle, mais elle a dit que l'institut a la capacité d'entrer dans ce domaine. J'ai un petit livre ici qui décrit le programme, l'instrumentation de l'institut. Je vois l'instrumentation disponible pour l'analyse médicale. Vous avez des instruments pour la chromatographie, la spectroscopie, les "guider counters", la radio-ionisation, pour les trousses immunologiques. Peut-être que j'ai tort, mais il me semble que pour entrer dans le domaine de la biotechnologie, il faut une autre espèce d'instrumentation. Par exemple, pour une isomérisation en génie génétique et la fermentation, quels seront les techniques et les instruments que vous envisagez? Quels seront les coûts pour transformer l'institut pour lui donner la capacité d'entrer dans le domaine de la biotechnologie? Il me semble que ces instruments coûtent très cher, sur le plan de l'équipement seulement. Je ne parle pas des effectifs. Il me semble qu'il faut un investissement énorme, même pour entrer dans ce domaine.

M. Labrie: Je serais peut-être tenté de répondre à votre question, Mme Dougherty. La biotechnologie, évidemment, comprend un champ qui est très vaste, mais celui qui est visé immédiatement, c'est le diagnostic. Dans le diagnostic, la base, ce sont les anticorps qui servent à reconnaître les molécules qu'on veut mesurer. Jusqu'à maintenant, c'était fait avec des anticorps qu'on appelle polyclonaux chez des animaux où la spécificité était moins grande. Maintenant, ce qui touche la biotechnologie, c'est le développement d'anticorps monoclonaux. On prend une cellule, on la fuse avec une cellule cancéreuse - une cellule qui fait un anticorps est fusionnée avec une cellule cancéreuse - qui elle, a la propriété de se diviser de façon éternelle, si on veut. On peut avoir la même cellule, la même souche pendant tous les besoins qu'on peut avoir. C'est là que la biotechnologie entre dans l'utilisation de Bio-Endo. Donc, ce qui change, c'est la matière première que ces gens utilisent pour faire leurs trousses, qui va être fournie par Biocel. Pour eux, sans présager de rien, cela ne devrait pas inclure, à court terme du moins, des changements d'instrumentation, à l'intérieur de Bio-Endo. Ce sont les anticorps, la matière première qui, au lieu d'être formée de façon traditionnelle, sera formée avec des anticorps monoclonaux, à l'aide de la biotechnologie.

Mme Dougherty: Est-ce que les laboratoires d'université visés par ce projet ont la capacité technologique en génie génétique, par exemple?

M. Labrie: Les anticorps monoclonaux, c'est devenu une technique de recherche standard, maintenant, qui est utilisée dans plusieurs laboratoires au Québec. Cela fait partie de l'instrumentation moderne, sinon la recherche est en arrière. Il y a plusieurs laboratoires au Québec qui ont ces

installations sur place. On va demander à ces gens, sous contrat, de fabriquer certains anticorps monoclonaux qui, par la suite, vont être transférés à Bio-Endo pour la vente. C'est la commercialisation et les dernières étapes du développement. Cela n'implique pas pour Bio-Endo des modifications importantes de l'instrumentation.

Quant au génie génétique, c'est une étape ultérieure qui n'est pas touchée par Bio-Endo actuellement. Bio-Endo actuellement, c'est une compagnie de diagnostic pour les hormones, pour les médicaments ou aussi comme détection du cancer, pour laquelle on a besoin d'anticorps spécifiques qui vont être fournis par les anticorps monoclonaux, par Biocel. Donc, cela n'implique pas des modifications à Bio-Endo. C'est l'avantage de cette installation où Bio-Endo n'a pas besoin maintenant d'investir en chercheurs et en instrumentation mais se sert, grâce à la collaboration des laboratoires universitaires, des installations sur place qui lui fournissent le matériel dont elle a besoin.

Mme Dionne-Marsolais: J'aimerais peut-être compléter cette réponse en ajoutant ceci: La base de notre association et le concept de Biocel visaient justement à éviter d'investir de façon importante dans des équipements qui, finalement pour une entreprise, sont difficiles à amortir sur une courte période, parce que les efforts de recherches nécessaires pour ces produits ne sont pas toujours échelonnés sur une longue période, avec ce type d'équipement. D'où l'association avec des chercheurs universitaires qui eux, dans le cadre de leur recherche fondamentale, courante, régulière, subventionnée ou autre, ont acquis des équipements, s'en servent de façon régulière, dans le cadre de leur programme de recherche courant. Sur le plan sporadique, sur des mandats spécifiques de la société, on peut avoir accès à cette expertise à la fois humaine et d'équipement physique.

Le Président (M. Brouillet): Est-ce que cela va?

Mme Dougherty: Oui, merci. Je comprends le rôle des laboratoires, mais le coût vient quand on essaie de commercialiser des choses. Je comprends mal comment l'Institut biotechnologique peut s'adapter aussi facilement à la commercialisation d'un produit tout à fait différent. (17 h 15)

Mme Dionne-Marsolais: Le produit que nous vendons, la trousse, n'est pas en soi différente. La matière première qui entre dans la fabrication de cette trousse est différente. Elle est plus spécifique, elle a des caractéristiques plus raffinées et elle fera de notre trousse un produit plus raffiné.

Mais le produit final de diagnostic n'est pas différent. Ce qui va être affecté par l'utilisation d'anticorps monoclonaux, c'est probablement l'accès à ces anticorps, leur mise en production au niveau des trousses et, éventuellement, la technique de marquage de ces anticorps. Toutes ces choses vont être affectées dans le temps, mais, sur le plan immédiat de l'impact biotechnologique, pour le fabricant de trousses radio- immunologiques, c'est au niveau de sa matière première, qui est l'anticorps et qui sert de base pour le diagnostic de l'hormone ou, enfin, de la réaction que l'on veut mesurer.

Le Président (M. Brouillet): Un complément de réponse aussi? Dr Labrie.

M. Labrie: Pour moi, cela va. Je pense que c'est difficile à expliquer. Peut-être qu'au bout, ce que Mme Marsolais a voulu dire, c'est que, pour ce qui est de Bio-Endo, l'instrumentation demeure la même. On mesurera la même chose, sauf que le matériel qui va servir à mesurer va être plus sophistiqué. Il va être produit de façon différente. Pour autant que Bio-Endo est concernée quant à la commercialisation, ce sont les mêmes clients. On mesurera la même chose, mais de meilleure façon. Pour eux, cela n'implique pas de modifications au point de vue matériel ou d'instruments sur place. C'est Biocel qui va faire cela.

Le Président (M. Brouillet): Un complément de réponse?

M. Lefebvre: Ce qui fait la beauté de notre projet... On ne dit pas que ce sera le cas dans tous les projets de biotechnologie. Par exemple, vous avez raison: Si vous entrez dans les fermenteurs, là, on parle de grosses sommes d'argent. D'ailleurs, si mon information est correcte, il reste effectivement beaucoup de recherches à faire du côté des fermenteurs. Donc, dans ce domaine, on devrait consacrer plus d'efforts à la recherche et beaucoup plus d'argent à l'équipement, mais ce n'est pas le cas de notre projet, ce qui en fait la beauté.

M. Ciaccia: Sur le même sujet, vous semblez dire que votre équipement pourrait être utilisé pour le projet que vous avez. Vous n'aurez pas besoin d'investir de grosses sommes d'argent pour le nouvel équipement quant aux produits de biotechnologie; l'institut que vous avez acheté, ce n'est pas de la biotechnologie. La question de Mme la députée de Jacques-Cartier semble être dans le sens qu'il va falloir investir beaucoup plus pour évoluer. Mme Dionne-Marsolais a dit que l'institut que vous avez acheté ne fait pas de biotechnologie, mais qu'il a les caractéristiques pour évoluer dans le domaine

de la biotechnologie.

Comment pourrez-vous concilier cela avec... Je ne sais pas si c'est une opinion, mais une affirmation à été faite par un dénommé Robert Bender, qui était président de Bio Logicals, qui a dit que pour chaque dollar investi dans la recherche, de 5 $ à 50 $ doivent être investis dans le développement du produit. Autrement dit, si vous dépensez 10% de votre chiffre d'affaires - mettons que c'est 3 000 000 $, 3 900 000 $ - vous allez dépenser 400 000 $ dans la recherche. Il faudra mettre de 5 $ à 50 $ pour le développement d'un produit biotechnologique. Comment conciliez ces deux affirmations?

M. Labrie: C'est le rapport classique qui existe dans les médicaments et le pharmaceutique. Le prix de vente, c'est 20 fois ce que cela coûte pour la recherche. Entre la vente et la recherche, il y a un facteur 20. Lorsqu'on prend un produit au départ qui n'est pas connu, il faut le développer complètement avec tous les tests de toxicité chez l'humain, chez l'animal et tout. Donc, il y a un facteur 20 entre les deux. C'est classique en pharmacie, dans les. compagnies pharmaceutiques. Cela va être classique aussi en biotechnologie pour les nouveaux produits, pour remplacer, par exemple, l'insuline. La première application de la biotechnologie, les peptides, l'insuline. Ce n'est pas notre domaine, mais je pense que c'est important de le mentionner - ainsi que l'hormone de croissance, qui sont en vente, actuellement. Mais entre la fabrication, la recherche qui a conduit à cela et la vente en pharmacie, il y a un facteur 20 entre les deux. Ce n'est pas le cas de l'entreprise Bio-Endo qui, elle, avec les moyens qui étaient disponibles - et c'est à long terme, si on parle du facteur 20, c'est pour des produits plus tard, avec beaucoup plus long terme... À court terme, on a une entreprise qui, elle, a déjà des trousses qu'elle vend sur le marché et qui sont utilisées. La modification qui est faite, c'est de modifier à l'intérieur de cette trousse la matière première, donc, la rendre plus moderne, en d'autres termes, en utilisant des anticorps monoclonaux. Je ne sais pas si c'est... Au point de vue Bio-Endo, au point de vue de la commercialisation, de la production et du contrôle de la qualité, pour eux, cela ne change strictement rien. Ce sont les mêmes paramètres. Tout ce qu'ils faisaient auparavant, ils vont le faire encore, sauf que le matériel qui va entrer dans la trousse va être différent. Ce seront des produits faits par des anticorps monoclonaux. Donc, ce qui...

M. Ciaccia: Seulement pour comprendre...

M. Labrie: Oui.

M. Ciaccia: ... nous dites-vous que le produit qui est maintenant biochimique va devenir le même produit, que la même trousse va devenir biotechnologique? Est-ce que c'est ce que vous dites?

M. Labrie: Oui, c'est une façon résumée de le dire.

M. Ciaccia: Abracadabra et cela va changer.

M. Labrie: Ce n'est pas faux. Il y a beaucoup de. vrai. Auparavant, dans une trousse... Peut-être pour expliquer encore un peu plus les anticorps, parce que c'est important, c'est la première application de la biotechnologie, auparavant, on prélevait des anticorps chez l'animal. Donc, autant il y a de cellules dans la rate d'un animal, autant il faisait des anticorps différents. La rate, c'est l'organe qui est à gauche ici, pas celle qui a quatre pattes. Donc, c'était très non spécifique. En d'autres termes, cela reconnaissait ce qu'on voulait mesurer et d'autre chose aussi. Donc, il peut y avoir plus de faux positif. Avec des anticorps monoclonaux, on prend une cellule parmi ces milliers de cellules dans la rate, on la fuse et on la fait se diviser in vitro. Donc, on a un produit qui est beaucoup plus pur, qui est chimiquement pur et qui reconnaît une chose. Donc, on augmente de beaucoup la précision du test qui, maintenant, au point de vue moderne, donne des résultats plus précis. Cela devient quelque chose qui est requis. Donc, c'est la transformation qui se fait au niveau de Bio-Endo, mais qui se fait en arrière dans les matières premières fournies ou à une différence près. Mais cela ne change pas leur façon de procéder, leur façon de vendre. On peut seulement dire que le produit qu'ils vendent est plus précis qu'il ne l'était auparavant.

M. Fortier: Seulement une petite question.

Le Président (M. Brouillet): Une petite question sur ce sujet? Oui, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: À la suite des commentaires qu'on vient de donner, la question que j'ai est complémentaire au sujet dont on est en train de discuter. Si je comprends bien, Biocel, c'est elle qui va innover - d'une façon simpliste, je simplifie, bien sûr - et Bio-Endo va faire la commercialisation.

M. Labrie: Les dernières... M. Fortier: La question...

M. Labrie: Oui.

M. Fortier: ... qui me vient à l'esprit, c'est "who leads who"? Qui dirige l'entreprise? Est-ce Biocel qui dirige Bio-Endo ou c'est Bio-Endo qui dirige Biocel dans le sens suivant: Biocel détenant l'expertise technologique, c'est elle qui va innover et Bio-Endo va avoir l'expertise de la commercialisation, mais, normalement, ces deux entités se retrouvent à l'intérieur de la même organisation et la commercialisation doit se faire à partir de produits et l'expertise se retrouvant au sein de la même organisation, il y a un arbitrage à faire pour trouver des marchés pour de nouveaux produits. N'y a-t-il pas là un danger? Autrement dit, je me méfie beaucoup des organisations bicéphales, parce que, finalement, il faut bien qu'il y ait quelqu'un qui prenne les décisions, soit sur le plan commercial ou sur le plan de la recherche et du développement. Est-ce Biocel qui va diriger l'entreprise?

Mme Dionne-Marsolais: Je vais répondre à cela. La première chose, c'est que c'est le marché qui dirige l'orientation du développement de nouveaux produits, sauf que, dans le domaine du diagnostic, le marché est dirigé par l'évolution et l'innovation technologiques. Dans le cas du développement de l'entreprise, c'est le marché et l'entreprise qui vont diriger l'orientation, ses choix au niveau des produits qu'elle peut vendre, parce que c'est elle qui connaît son marché, sauf que, au niveau des produits dont elle a besoin, elle a besoin d'un apport technique au niveau - comme on le précisait tout à l'heure - des nouveaux intrans, de l'évolution technologique des produits ou des façons de produire son produit. C'est cette association qui est à la base d'une cession importante du capital-actions de Bio-Endo à une compagnie de recherche dans ce domaine. C'est la compagnie qui va donner les mandats et Biocel va les exécuter en trouvant les personnes-ressources et les meilleurs laboratoires pour faire exécuter la recherche que nous allons avoir définie, mais quand nous allons établir nos programmes de recherche et de développement, ils vont être faits de concert avec Biocel qui va - on l'espère - nous tenir au fait de leur orientation et de leur innovation technologique. Est-ce clair?

M. Fortier: Oui, c'est clair, quoique, bien sûr, il y a quelqu'un de Bio-Endo qui devrait pouvoir mesurer l'impact de nouvelles recherches et de nouveaux programmes d'action, sinon, une frustration va se créer entre Biocel et Bio-Endo. Ce qui a fait le succès, j'imagine, de Bio-Endo ou de cette compagnie qui existait jusqu'à maintenant, c'est qu'au sein de la même organisation... Je ne connais pas l'organisation, mais j'imagine que M. DuRuisseau, le propriétaire, assumait le leadership sur le plan du développement technologique et sur le plan commercial. Maintenant, cela va se retrouver dans deux organisations et je me demande... L'explication que vous venez de donner est peut-être valable, mais cela ne me satisfait pas complètement.

M. Lefebvre: Au niveau organisationnel, c'est Bio-Endo qui a l'autorité de donner les mandats à Biocel. C'est à Biocel de voir à ce que ces mandats soient exécutés selon les conditions déterminées à l'avance par Bio-Endo. Maintenant, pour assurer l'harmonie, on a, au sein du conseil d'administration de Bio-Endo, des membres de Biocel. Le conseil d'administration sera composé de sept membres dont cinq seront délégués par Bio-Méga et deux par Biocel.

En ce qui concerne le conseil de Biocel, étant donné que c'est un organisme qui se veut surtout orienté vers la recherche, on a huit membres au niveau du conseil, dont quatre sont nommés par l'unité de recherche du CHUL et deux seront nommés par Bio-Méga; les deux autres viendront de McGill et de Sherbrooke. On aura donc une coordination qui va se faire, mais c'est assurément Bio-Endo qui aura le dernier mot sur les mandats. Cela répondra aux besoins du marché.

M. Fortier! Remarquez bien que ma question ne portait pas sur le plan légal. Vous me dites que, légalement parlant, Bio-Endo aura l'autorité. Je ne pose pas la question sur le plan légal parce que c'est bien légal. Je posais la question sur le plan du leadership. Peut-être que j'ai eu de mauvaises expériences, mais je n'ai jamais vu un conseil d'administration assurer le leadership d'une entreprise.

Ma question est celle-ci: Qui assure le leadership? Finalement, cela se retrouve au sein des individus qui sont là au jour le jour et non pas au niveau des conseils d'administration qui viennent donner leur avis sagement. Je peux voir le leadership sur le plan de la recherche chez Biocel. Ma question est pour savoir s'il n'y aura pas une difficulté de fonctionnement puisqu'on se retrouve avec deux leaderships divisés.

M. Labrie: C'est très clair, si on veut être réaliste quant à cette approche. Tout ce qui regarde le marché, les besoins du marché, nous, de Biocel, voulons nous y intéresser, mais ce n'est pas nous qui sommes au courant de cela; nous n'avons pas le temps de le faire et nous ne voulons pas le faire non plus. Cela revient entièrement à Bio-Endo. L'inverse, pour ce qui est du côté de la recherche, c'est de notre

responsabilité. Il faut que les deux se marient. Le besoin, la priorité provient de

Bio-Endo avec les besoins du marché sur lequel nous allons nous fier entièrement.

M. Fortier: Merci.

Une voix: On aurait des choses à ajouter.

Le Président (M. Brouillet): Un complément de réponse sur cette question? Oui?

Mme Dionne-Marsolais: Oui. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le programme de recherche de Bio-Endo va être établi par Bio-Endo. Il y aura, comme en ce moment, une personne ressource responsable du programme de recherche de Bio-Endo. Cette personne fait partie de la direction opérationnelle de Bio-Endo avec les autres cadres supérieurs de la compagnie. Il y aura une personne d'attitrée, qui va s'occuper de notre programme de recherche, qui va s'occuper de le concevoir, de le marier aux besoins de la mise en marché, de le répartir en mandats qui, éventuellement, seront transmis à Biocel pour fins de réalisation dans les cas où cela impliquera des mandats dispersés. Il y a vraiment une personne, un cadre supérieur dans l'entreprise qui aura cette responsabilité, comme c'est le cas actuellement. Il y a une personne ressource qui, depuis cinq ou six ans, s'occupe des activités de recherche et de développement à la compagnie. (17 h 30)

M. Lefebvre: Maintenant, on doit réaliser aussi que du côté des chercheurs Biocel ne fait qu'ajouter des fonds à ce qu'ils ont maintenant à l'extérieur de Biocel. Donc, je peux voir à un moment donné qu'il pourrait y avoir une certaine frustration. Par contre, ce n'est pas simplement l'unique source de revenus qu'ils ont pour faire de la recherche. Donc, le problème que vous mentionnez devrait être de beaucoup amoindri.

M. Ciaccia: Qui prend la décision finale, dans le projet de recherche, sur tel ou tel projet? C'est Bio-Endo ou c'est Biocel?

M. Lefebvre: C'est Bio-Endo.

Mme Dionne-Marsolais: C'est Bio-Endo et même si on avait une structure des plus raffinées pour essayer de répondre à toutes les préoccupations, je pense que c'est une chose qui est dommage. Cela dépend des personnes en place, de leur capacité à réaliser du leadership au niveau des différentes fonctions qu'elles vont accomplir. La décision, c'est Bio-Endo qui la prend parce que c'est son argent.

M. Ciaccia: Si c'est Bio-Endo, est-ce que vous n'allez pas vraiment limiter les champs de recherche pour Biocel? Quand c'est une université qui fait la recherche, est-ce que les mandats ne sont pas plus élargis? Bio-Endo aujourd'hui n'est même pas dans la biotechnologie. Est-ce qu'il y a un danger que cela soit vraiment restreint?

M. Labrie: Évidemment, c'est une bonne question parce qu'il s'agit de donner des contrats sur des projets bien spécifiques. Il ne s'agit pas de faire une recherche à très long terme. Je pense que ce n'est pas le but de Bio-Endo, ni de la SGF. C'est de répondre à des besoins bien précis du marché, sachant que dans telle université, tel groupe peut répondre à ce besoin.

M. Ciaccia: Est-ce que la vice-présidente de Bio-Endo devient la présidente de Biocel?

Mme Dionne-Marsolais: Vous voulez dire que le vice-président de la recherche et du développement de Bio-Endo, devient président de Biocel? Non. Pas pour l'instant.

M. Fortier: C'est cela que j'avais cru, d'après la réponse. C'est pour cela que là...

Mme Dionne-Marsolais: C'est peut-être une évolution normale, mais pas pour l'instant.

M. Lebel: Si vous me permettez, nous avons essayé de répondre le plus clairement possible à cette question. Vous avez sans doute réalisé que nous n'avons pas convaincu tout le monde. Malgré l'assurance avec laquelle nous y avons répondu, nous avons nous aussi, quelque part derrière notre tête, des questions qui ressemblent à celles-là. Cela paraît évident que l'on peut faire l'hypothèse que Biocel représentant surtout un groupe de recherche très dynamique pourrait, juste par la force de son dynamisme, drainer fortement les orientations de Bio-Endo. C'est dans le quotidien, la nature des activités, que nous verrons si chacune des deux parties tient son bout. Je disais à Mme Dionne-Marsolais que c'était à la fois une bonne question et une excellente mise en garde.

Le Président (M. Brouillet): Le député de Nelligan.

M. Lincoln: J'ai une question d'ordre pratique. Je pense que c'est à M. Gagnon que je dois la poser. Vous m'excuserez si mes connaissances d'ordre technique ont l'air un petit peu trop simplistes, mais enfin, d'après ce que je comprends de votre

produit, c'est un produit nouveau qui transige dans les hormones, dans le domaine des allergies, etc. et les trousses sont très spécialisées.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Je m'excuse, je ne suis pas certain que c'est à moi que la question doit s'adresser.

M. Lincoln: Oui, je pense que c'est à vous.

M. Gagnon (Louis-Gilles): Ah! bon. Nous verrons.

M. Lincoln: Je la transférerai. Non, je parle...

M. Gagnon (Louis-Gilles): Votre orientation me fait peur.

M. Lincoln: Je parle de toute la question de responsabilité légale, "malpractice liability", responsabilité professionnelle. Dans ce domaine, c'est quelque chose de capital pour n'importe quel produit qui est commercialisé aux États-Unis. On peut penser à des exemples multiples qui réellement ont presque sapé de grosses, immenses firmes par leurs implications et leurs conséquences. Ce que je voulais vous demander, c'était en deux volets: Premièrement, y a-t-il des produits qui avaient déjà été vendus par le Dr Du-Ruisseau du temps qu'il avait la société et qui vont avoir des conséquences à long terme parce que toutes ces choses, la responsabilité professionnelle, la "malpractice liability", cela s'en va pour toujours? Cela reste là. Il n'y a pas de limite à cela. Il n'y a pas de limite dans le temps. Est-ce que selon votre contrat avec le Dr DuRuisseau, il est tout à fait responsable jusqu'au moment du changement? Est-ce que cela est clair dans votre contrat?

M. Gagnon (Louis-Gilles): La décision d'acquérir les actifs et non les actions répond effectivement à cette question en ce sens que l'Institut de bio-endocrinologie Inc., dont nous avons acheté les actifs, continue d'exister et maintient tous ses droits et ses obligations tels qu'ils existaient au moment de la vente. C'est-à-dire si des produits vendus par l'institut avant que nous achetions étaient susceptibles de causer des problèmes, entraîner une responsabilité quelconque, cela demeure la responsabilité de l'institut. L'acheteur ou l'acquéreur des actifs, des éléments d'actifs n'a pas, par le fait même, acquis cette responsabilité-là. Je ne sais pas si je réponds bien à votre question. C'est la distinction entre un achat d'actions qui comporte effectivement l'achat de toute la compagnie avec ses droits et ses obligations et, dans ce cas-ci, l'achat de biens physiques qui eux n'entraînent pas de problème de responsabilité.

M. Lincoln: Je suis très conscient de cela mais en même temps il y a des circonstances - ce sont des lignes très, très fines et bien souvent dans les contrats il est stipulé quelle que soit la forme d'achat d'une compagnie soit par actions ou actifs - où toutes les responsabilités antérieures sont la responsabilité du vendeur. Est-ce qu'il y a eu ce genre de...

M. Gagnon (Louis-Gilles): II n'y avait pas besoin d'avoir une telle représentation garantie dans ce cas-ci puisque automatiquement et légalement toutes les responsabilités attachées à l'aspect "malpractice", comme vous dites, demeurent la responsabilité du vendeur qui n'a pas vendu son entreprise, mais qui n'a vendu que quelques actifs ou que des actifs. L'entreprise Institut bio-endocrinologie Inc. qui était le vendeur, continue à exister, garde ses obligations et ses responsabilités.

M. Lincoln: Pouvez-vous me dire si cette question de "malpractice" aux États-Unis par le fait même du droit de la responsabilité stricte, "strict liability", qui est tout à fait différent du droit canadien qui impose presque une responsabilité automatique au vendeur, est-ce que cela a été étudié? Est-ce que le potentiel de cette affaire-là a été examiné?

M. Gagnon (Louis-Gilles): Ici, il faut faire une distinction, je pense, qui est très importante, c'est que les produits qui sont vendus ou qui seront vendus par Bio-Endo ne sont pas des produits pour la consommation. Ce sont des produits qui servent à faire des tests, qui servent à... Comme on le disait tout à l'heure ce sont des produits pour consommation in vitro et non pas in vivo. Donc ils ne sont pas susceptibles de causer des lésions, des maladies ou des choses comme cela par le simple fait qu'ils sont consommés ou ingérés par les humains.

M. Lincoln: Je ne pense pas que cela change les choses si le produit est une partie, même si ce n'est pas consommé comme tel, d'un test je pense...

M. Gagnon (Louis-Gilles): À ce moment-là c'est l'aspect responsabilité, c'est l'aspect assurance générale pour n'importe quel produit qui est vendu par un fabricant à un vendeur qui s'attend que le produit fasse telle chose bien précise ou puisse accomplir telle tâche bien précise.

M. Lincoln: Tout ce que je voulais souligner c'est que dans le cas de produits de santé aux États-Unis c'est un problème

qui peut être catastrophique, qui a sûrement des dimensions spéciales...

M. Gagnon (Louis-Gilles): II ne s'agit pas de produits pharmaceutiques.

Habituellement lorsqu'on parle de santé on peut avoir l'impression ou la perception d'une consommation de médicaments ou de produits de cette nature-là. Ce n'est pas le cas ici. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Lincoln: J'ai quelques petits doutes mais enfin je vais accepter cela pour le moment parce qu'on n'en sait pas assez. 11 faudra laisser cela là.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Dans votre mémoire, vous avez mentionné que le nouveau secteur dans lequel vous vous dirigez permet de créer un nouveau secteur prioritaire dans un domaine qui présente des occasions de développement industriel à long terme. Dans quel sens est-ce prioritaire pour la SGF?

M. Lebel: II faut en référer, je pense, à la directive du ministre. Nous utilisons à ce moment-là les mêmes termes que la directive du ministre. On pourrait se poser des questions sur la notion de secteur. À proprement parler, la biotechnologie n'est pas un secteur. Ce que nous avons voulu faire, de concert avec le gouvernement, en formulant les choses de cette manière, c'est de transmettre à la SGF le désir du gouvernement que la SGF considère cet effort en innovation et en développement technologique comme s'il s'agissait d'un secteur prioritaire pour elle. Mais si nous commencions à faire l'analyse des mots, nous trouverions que la notion de secteur est peu claire. Il ne s'agit effectivement pas d'un secteur dans le sens de la statistique du terme, il ne s'agit pas d'un secteur au sens où nous l'entendons quand nous parlons des produits forestiers, il ne s'agit pas d'un secteur dans le sens où nous l'entendons quand nous parlons des équipements hydroélectriques ou de la pétrochimie, qui correspondent - ces trois secteurs - à la définition traditionnelle de secteur. Il ne s'agit pas d'un secteur dans ce sens. Il s'agit cependant de projets d'études, d'investissements, de recherche auxquels nous devons, dans le cadre de notre objectif de favoriser l'innovation et le développement technologique, accorder une priorité. C'est la manière dont j'interprète - ce n'est pas une interprétation juridique - c'est la manière dont j'interprète la directive gouvernementale.

M. Ciaccia: Ce n'est certainement pas prioritaire dans le sens des sommes d'argent que la SGF va y investir.

M. Lebel: Non, non.

M. Ciaccia: Vous parlez de 1 000 000 $ par année dans ce projet.

M. Lebel: Non.

M. Paquette: C'est un projet.

M. Ciaccia: Oui, mais c'est de cela qu'on discute aujourd'hui, ce sont les chiffres qu'on nous a donnés. Je parle de la SGF, je ne parle pas des priorités du gouvernement. Le gouvernement, lui, parle de 63 000 000 $, etc. Je parle de la SGF qui va donner 1 000 000 $ par année pendant deux ans. C'est ce qu'on vient de nous dire. Comment pouvez-vous expliquer cela? Vous venez ici et vous nous dites: On a acheté une compagnie. Ce n'est pas de la biotechnologie, c'est de la biochimie. On va donner encore 1 000 000 $ par année et cela va permettre de la transformer en biotechnologie. En Ontario, on nous fait part d'un projet de biotechnologie de 105 000 000 $ avec des partenaires de l'entreprise privée. Comment pouvons-nous juger de la rentabilité, de l'avenir ou de la compétitivité, ou même comment savoir s'il est approprié de prendre 1 000 000 $ par année? Comment fait-on cette comparaison? Comment peut-on juger de cela?

Voici un autre gouvernement qui va dans le même domaine, qui annonce que ce projet va coûter 105 000 000 $, le projet Allelix. On lit les commentaires des autres experts dans ce domaine et ils nous disent: Si vous n'êtes pas prêts à débourser de grosses sommes d'argent, n'y pensez pas. Les petites compagnies vont prendre le bord. Ils donnent des exemples du passé et des exemples de compagnies existantes. En Ontario, on nous informe que pour appuyer la recherche, il y aura un "cash flow" d'à peu près 8 000 000 $ juste pour cette année, pour 1981-1982; 8 000 000 $ par année pour appuyer la recherche sur la possibilité de manufacturer les produits. Comment vous situez-vous par rapport à toutes les données qui nous viennent d'autres experts et d'autres juridictions? (17 h 45)

M. Lebel: Si vous me le permettez, je vais revenir à la question antérieure à celle-là, la première posée par M. Ciaccia. Je pense que pour la notion de secteur, il s'agit de prendre la directive et de lire parallèlement le paragraphe 3 de la directive qui réfère à la notion du secteur en question et qui réfère à l'article 4a de la loi de la SGF qui dit: "D'assumer la gestion d'un groupe industriel dans le but d'exploiter des entreprises de taille significative dans

certains secteurs jugés prioritaires pour le développement économique du Québec afin d'assurer la planification et la coordination des entreprises qu'elle contrôle et de favoriser seule ou de préférence avec des partenaires leur exploitation et leur développement conformément à des conditions de rentabilité normales." Je pense que c'est la référence de la directive à ce paragraphe de la loi qui fait que l'on utilise la notion de secteurs dans le contexte dans lequel nous en avons parlé dans notre mémoire devant la commission.

Quant à la deuxième question, j'ai, à quelques reprises, pris le soin de souligner, qu'en autant que la SGF était concernée, son intervention en biotechnologie devait se définir dans le cadre de la réalisation d'un objectif de son plan de développement qui est de favoriser l'innovation et le développement technologique. On ne peut pas, du jour au lendemain, transférer toutes les ressources de la SGF en biotechnologie. On ne peut pas, du jour au lendemain, dire: Tous les secteurs perdent de leur importance. Celui-là devient tellement important que nous allons y consacrer toutes les sommes que la SGF pourrait ramasser pour favoriser le développement de la biotechnologie. Je pense que c'est une première contrainte à laquelle la SGF doit répondre. Nous ne venons pas ici devant la commission parlementaire pour demander de réviser le plan de la SGF, pour transformer les secteurs prioritaires dans lesquels elle était engagée, mais nous venons devant la commission parlementaire pour nous expliquer sur un nombre d'investissements particuliers que nous voulons faire dans le secteur de la biotechnologie et qui visent à réaliser un des objectifs du plan de la SGF. Ce que votre question laisse entendre, cependant, c'est que ce ne serait pas suffisant et que d'autres semblent faire des investissements et des efforts plus considérables. Il est possible que, comme société, comme Québec, l'ensemble du gouvernement, des entreprises privées et des entreprises publiques doivent faire beaucoup plus d'efforts que la SGF ne propose d'en faire elle-même dans le cadre de sa loi ou de son orientation. Je ne nie pas cela, mais il ne serait pas, à mon point de vue, souhaitable qu'à la SGF, dis-je, nous accaparions ce domaine et quelles que soient les chances de succès à court, moyen et long terme, nous y mettions beaucoup plus de ressources que ce qu'on pourrait décemment consacrer à la réalisation d'un objectif de participer à l'innovation et au développement technologique. Une fois que j'ai dit cela, j'ai regardé comme vous et comme beaucoup d'autres autour de la table, en examinant ce dossier, nous avons quand même pris connaissance de tout ce qui se faisait dans les autres provinces. Nous avons pris connaissance de ce qui se faisait dans les autres pays. Nous avons pris connaissance de ce qui était recommandé par d'autres commissions gouvernementales. Je peux vous faire part de ma conviction profonde - je le disais tout à l'heure - que dans l'immédiat, annoncer à grands renforts de publicité de gros investissements, ce serait peut-être aussi créer de faux espoirs et créer des illusions. Personnellement, je ne voudrais pas que nous nous lancions, à la SGF, dans cette création de faux espoirs et de fausses illusions. Il y a quelqu'un - je pense que c'est le ministre Paquette - qui a mentionné que le budget de fonctionnement de la compagnie ontarienne était de 500 000 $. Nous nous sommes engagés à confier des mandats de recherche à Biocel pour 500 000 $. Dans les 10%, il y a cette particularité qu'on garantit la première année 500 000 $. C'est déjà en soi aussi gros que le budget opérationnel de la société ontarienne. Il est possible que, regardant ce domaine et continuant à regarder - c'est ma dernière remarque - comme SGF, dans le cadre dans lequel on s'est placé, on découvre aussi que les efforts en termes industriels peuvent être beaucoup plus considérables et devraient être plus considérables. À ce moment, à mon point de vue, cela supposerait que nous revenions, si c'est la biotechnologie qui est en cause et si cela suppose des investissements de la nature de ceux que vous suggérez, il serait normal que nous revenions, dans le cadre d'une révision de notre plan et que nous nous expliquions sur la stratégie générale de la SGF. Ce que nous avons fait jusqu'à maintenant en biotechnologie ne remet pas en cause, selon nous, ce cadre général qui a été présenté et discuté en commission parlementaire en 1980; il le précise.

Le Président (M. Brouiilet): Je crois que le ministre, sur cette question, aurait un complément de réponse.

M. Paquette: C'est exactement dans le même sens. D'une part, dans la question du député de Mont-Royal, il y a une comparaison de deux stratégies complètement différentes. En fait, au Québec, on a décidé de miser sur les équipes existantes, de leur donner des ressources supplémentaires. On peut discuter du niveau de ces ressources et dire: Est-ce suffisant? Je suis bien prêt à regarder cela avec n'importe quelle personne intéressée. On continue à y travailler. On a préféré annoncer des choses qu'on pouvait faire immédiatement pour appuyer les équipes existantes.

Du point de vue de la commercialisation, ce que j'ai mentionné à propos d'Allelix, c'est que le gouvernement ontarien avait mis jusqu'à maintenant 500 000 $ dans Allelix cette année, qu'il n'y avait encore personne au travail dans la

compagnie. On vient de construire en quelque sorte des laboratoires neufs. Comme il n'y a personne au travail, évidemment, il y a encore moins d'activités de commercialisation. Il n'y a pas du tout de commercialisation. C'est un projet de nature totalement différente de celui qu'on examine. Cependant, la question du député de Mont-Royal m'en amène une concernant une remarque que vous avez faite. Vous avez dit: Est-ce qu'on devrait...

M. Ciaccia: Est-ce que je pourrais juste finir?

M. Paquette: Je voudrais que vous reformuliez votre question d'une autre façon parce qu'elle m'intéresse beaucoup. Vous avez dit: Je craindrais de divertir trop vite de l'argent qui est investi dans d'autres secteurs vers un secteur qui est en émergence comme celui-là. Je vais vous poser la question autrement, la même que celle du député de Mont-Royal: Si demain matin, des gens vous arrivaient avec des projets possiblement rentables sur le plan de la commercialisation et que vous vous aperceviez que cela vaut la peine d'y investir 50 000 000 $, est-ce que la SGF -c'est purement hypothétique, j'espère que vous ne répondrez pas en politicien, mais plutôt en termes d'attitude - s'y engagerait? Ou, est-ce qu'elle se dirait: Je vais divertir de l'argent dans d'autres secteurs, je ne peux pas faire cela et par conséquent, je laisse cela à d'autres?

M. Lebel: Si tous vos "si" se réalisaient, si toutes vos hypothèses se réalisaient, c'est au minimum une question que nous poserions au gouvernement.

M. Ciaccia: Dans la réalité, les projets ne se présentent pas de cette façon: 50 000 000 $ et tout va bien fonctionner, spécialement dans ce domaine où il faut investir de l'argent, faire de la recherche, trouver les produits d'après ce qu'on peut trouver. C'est vrai que vous seriez obligés de dépenser 50 000 000 $ avant de savoir si cela va être rentable ou non. La question que je pose, ce n'est pas dans le but de changer les objectifs ou le plan quinquennal de la SGF. La question que je pose, c'est que je voudrais bien que les investissements qu'on va faire portent profit et, si c'est nécessaire d'investir plus que 1 000 000 $, qu'on le fasse. Tout ce que je peux voir, c'est que le ministre a dit: On investit dans un équipement existant. L'équipement existant n'est pas dans la biotechnologie, je regrette, c'est dans la biochimie, vous espérez faire quelque chose avec cela. Aujourd'hui, ce n'est pas ce qu'on a. La question que je pose c'est: Est-ce que le gouvernement sait dans quoi il s'embarque?

Est-ce qu'il veut nous donner l'impression que c'est populaire de dire que c'est de la biotechnologie? On annonce la biotechnologie, on n'a pas une compagnie de biotechnologie et ce n'est pas 1 000 000 $ par année, d'après ce qu'on peut lire, qui vont nous produire la biotechnologie. Ce sont les conclusions que je tire de cette affaire. Il est malheureux que la SGF soit obligée -vous venez sous les directives du gouvernement - de se conformer. On se reparlera dans un an pour voir où on sera. Mais en attendant, on n'est pas beaucoup plus informé qu'on ne l'était ce matin. On a appris que ce n'était pas de la biotechnologie. On en doutait que c'était de la biotechnologie la compagnie que vous avez achetée. On ne sait pas combien vous avez payé pour cela. On refuse de nous le dire. On ne connaît pas toutes les données. Vous ne savez pas, vous, l'année prochaine..

M. Paquette: ... naturel.

M. Ciaccia: On ne sait même pas entre Biocel et Bio-Endo qui va faire quoi, comment les recherches vont se faire. Le gouvernement aurait dû avoir un rôle dans la recherche, il aurait dû le faire autrement, par l'entremise des universités et même former des sociétés à but non lucratif s'il veut vraiment donner une priorité. On dirait que le gouvernement se dégage de sa responsabilité, mais il voudrait avoir tous les avantages publicitaires. C'est ce que je tire de cette commission.

Le Président (M. Brouillet): Je crois que M. le ministre aurait... Excusez.

M. Ciaccia: Avant de terminer, je voulais vous remercier pour les discussions.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre aurait un mot à dire. Il ne reste que quelques minutes avant 18 heures.

Conclusion

M. Biron: M. le Président, maintenant que le député de Mont-Royal a fait le petit bout politique qu'il doit faire comme membre de l'Opposition, je veux lui dire quand même que je pense que les membres de l'Opposition ainsi que les membres de ce côté-ci de cette table ont, durant toute la journée, fait un travail constructif.

Il restera maintenant pour nos collègues de l'Opposition qui comprennent vite mais il faut prendre le temps de leur expliquer, il faudrait donc pour eux prendre le temps de lire les documents, de se redocumenter sur les investissements de la SGF, en particulier dans le secteur de la biotechnologie.

M. Ciaccia: On les a lus les documents.

M. Biron: II reste aussi, je pense bien, une ou deux questions ou quelques questions additionnelles pour lesquelles je me suis engagé à apporter une réponse sous le sceau de la confidentialité à nos amis de l'Opposition. J'invite les députés de l'Opposition, s'ils veulent avoir leurs réponses, à rencontrer le président de la Société générale de financement avec l'assentiment du gouvernement, vous pouvez être assurés. Vous aurez les réponses nécessaires.

Cela dit, je veux aussi, d'une façon particulière, remercier les gens de la Société générale de financement qui, d'une façon très rapide et efficace, ont réussi à mettre en application un volet important du virage technologique. Lorsqu'on commence à jouer dans la haute technologie, on sait comment c'est long, on sait comment c'est souvent difficile et ardu. Je pense qu'il y a une étape importante de franchie. Bien sûr, ce n'est qu'un premier pas. Au cours des années à venir, il faudrait franchir d'autres étapes, si on veut répondre à la collectivité québécoise et pouvoir collectivement s'enrichir un peu. J'apprécie les efforts qui ont été faits par la Société générale de financement. Je remercie ses administrateurs des renseignements qu'ils ont donnés à cette commission.

M. Paquette: Deux mots, si vous me permettez, M. le Président.

M. Ciaccia: M. le Président, si vous me permettez, à la suite des propos du ministre. Le ministre nous invite à prendre connaissance sous le sceau de la confidentialité de certains renseignements sur l'achat. On pourrait prendre sous le sceau de la confidentialité des renseignements, des brevets, des renseignements internes, mais je ne pense pas que je puisse accepter de prendre sous le sceau de la confidentialité le prix d'achat d'une compagnie, même si c'était dans le domaine privé, par une société d'État. Je maintiens que c'est public, ce sont des renseignements publics et une fois que l'achat a été fait, je pense que tout le monde a le droit à cette information.

M. Biron: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le ministre. (18 heures)

M. Paquette: Tout simplement pour conclure brièvement et répondre au député de Mont-Royal que nous n'abdiquons pas nos responsabilités; au contraire, nous connaissons l'excellence de l'équipe du Dr Labrie. Nous connaissons la compétence de la SGF. Nous pensons et nous sommes convaincus que la SGF a trouvé un créneau intéressant pour amorcer le développement des biotechnologies au Québec. Nous allons nous employer à stimuler d'autres initiatives du même genre. Nous allons également continuer à préciser dans différents domaines nos interventions pour appuyer la recherche et le développement en biotechnologie et nous avons l'intention de faire rapport régulièrement à la population, à chaque année, des progrès dans ce domaine comme dans les autres du virage technologique, dans un souci de transparence. Je pense qu'il y a là un enjeu tellement important pour notre société, que non seulement l'ensemble des députés de cette Chambre, mais l'ensemble de la population doit être tenu au courant et nous répondons des résultats, comme c'est le rôle d'un gouvernement.

M. Ciaccia: La transparence, il faut qu'elle soit complète et si vous ne voulez pas donner le prix d'achat d'une compagnie par une société d'État, je n'appelle pas cela de la transparence. Je pense que la population a droit à ces informations. Je ne sais pas ce que vous avez à cacher.

M. Biron: M. le Président, je pense que j'ai transmis une invitation à mon collègue de Mont-Royal. J'espère qu'il l'acceptera.

Le Président (M. Brouillet): Très bien; alors, je demande au rapporteur désigné de faire rapport à l'Assemblée nationale dans les plus brefs délais. Les travaux sont ajournés sine die. La commission a accompli le mandat qui lui avait été confié. Merci à tous.

(Fin de la séance à 18 h 02)

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