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Version finale

30th Legislature, 4th Session
(March 16, 1976 au October 18, 1976)

Thursday, April 8, 1976 - Vol. 17 N° 20

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi 22 - Loi modifiant la Loi concernant l'établissement par SIDBEC d'un complexe sidérurgique intégré


Journal des débats

 

Commission permanente

de l'industrie et du commerce,

du tourisme, de la chasse et de la pêche

Etude du projet de loi no 22

Loi modifiant la Loi concernant

rétablissement par SIDBEC d'un

complexe sidérurgique intégré.

Séance du jeudi 8 avril 1976 (Dix-sept heures onze minutes)

M. Lafrance (président de la commission permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche): A l'ordre, messieurs!

La commission de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche se réunit pour entendre les représentants de la Société SIDBEC et pour étudier le projet de loi no 22, article par article.

Avant de commencer, M. Lapointe, de Laurentides-Labelle, a été choisi à l'unanimité par ses collègues de la commission comme rapporteur de la commission. M. Gignac, nous vous invitons à présenter vos collègues et aussi à faire votre présentation aux membres de la commission parlementaire.

M. Gignac: Merci, M. le Président. Cela me fait extrêmement plaisir d'être de nouveau parmi vous, aujourd'hui, afin de répondre à vos questions sur les activités, les développements ainsi que les principales perspectives d'avenir du groupe SIDBEC, notamment à la lumière du projet de loi 22, Loi modifiant la Loi concernant rétablissement par SIDBEC d'un complexe sidérurgique intégré, et qui fut déposé à l'Assemblée nationale pour sa première et sa deuxième lecture par l'honorable Guy Saint-Pierre, qui est l'actionnaire principal de SIDBEC.

Le Président (M. Lafrance): M. Gignac, si vous me permettez, j'ai oublié de mentionner les changements. Je m'excuse. Si vous me permettez, voici les modifications aux membres de la commission: M. Tardif remplace M. Cadieux; M. Bonnier remplace M. Déom; M. Massicotte remplace M. Denis; M. Kennedy remplace M. Lacroix. Je m'excuse auprès de M. Gignac et je le prie de continuer.

M. Gignac: Merci. Je vais aussi faire mes présentations. Vous avez, à mon extrême droite, M. Michel Pelletier qui est adjoint du président, mon adjoint; M. Jean-Pierre Howison, vice-président des finances, Terence E. Dancy, vice-président, études techniques et développements; M. Cyrille Dufresne, vice-président et administrateur délégué dans le projet Fire Lake-Port-Cartier; à l'arrière, M. John Ellis, vice-président senior, et M. Pierre Sauvé, le secrétaire de la compagnie et aussi notre conseiller juridique.

M. le Président, avant de vous faire un premier exposé sur l'évolution de SIDBEC, et avec votre permission, j'aimerais vous inviter à regarder deux courts films qui ont été préparés spécialement pour cette Assemblée et qui présentent les principales caractéristiques du complexe minier de Fire Lake et Port-Cartier, et aussi de l'expansion qui est en cours, l'usine de Contrecoeur.

Si vous permettez, M. le Président, je pense que cela mettrait l'assemblée dans une atmosphère plus réelle, plus compréhensive.

Le Président (M. Lafrance): On demanderait de fermer les volets en haut et en bas.

Maintenant que nous sommes revenus, on peut continuer.

Exposé du président-directeur général de SIDBEC

M. Gignac: M. le Président, peut-être mes propos paraîtront-ils un peu arides comparativement à ce que vous venez de voir. C'est toujours plus facile d'expliquer par film ou même sur place que par des lectures de textes ou même des explications verbales.

De toute façon, avant de passer à certains détails concernant le projet de loi 22 qui a été soumis à l'Assemblée nationale du Québec, j'aimerais revenir un peu en arrière, même si cela a déjà été fait quelques fois, pour réexaminer quels sont les objectifs de SIDBEC, de quelle façon elle a évolué et quels sont ses réalisations, ses problèmes et son avenir.

C'est réellement en 1960 que le gouvernement du Québec, après avoir mis sur pied le Conseil d'orientation économique, confia à celui-ci l'étude sur la possibilité d'établir une aciérie intégrée au Québec.

Vers la fin de 1961, le Conseil d'orientation économique présenta son rapport au gouvernement dont les conclusions se résument comme suit et je cite: "L'établissement d'une sidérurgie intégrée dans la province de Québec présente non pas tellement l'avantage d'offrir un grand nombre d'emplois — effectivement, la main-d'oeuvre de l'aciérie décrite ci-dessus... — au moment où l'étude a été faite —...serait assez restreinte — mais de polariser un complexe industriel qui permettrait d'élargir la base de l'industrie secondaire dans la province de Québec. "Alors que plusieurs secteurs manufacturiers sont aux prises avec des difficultés qui atténuent leur rythme de croissance, il est essentiel que de nouveaux secteurs soient ouverts à une exploitation économique soutenue. A partir du minerai de fer et de l'énergie hydroélectrique disponibles, une industrie sidérurgique devrait pouvoir se développer, ce qui entraînerait à son tour une modification majeure de la structure économique de la province".

A la suite de la déposition de ce rapport au gouvernement, un comité de sidérurgie fut formé en 1962 en vue d'aller plus à fond dans l'étude de rétablissement d'une sidérurgie intégrée au Québec. Le rapport du comité de sidérurgie fut remis

au gouvernement en 1964 et recommandait la création d'une sidérurgie intégrée au Québec.

Il est aussi mentionné dans ce rapport, que parallèlement à l'établissement d'une sidérurgie intégrée, le gouvernement devra considérer comme priorité le développement de l'industrie secondaire au Québec, afin d'aider à créer des marchés, plus particulièrement pour les tôles fines, laminées à chaud et à froid.

A la suite des recommandations du comité de sidérurgie, SIDBEC est formée en vertu des lettres patentes accordées le 24 novembre 1964.

De 1964 à 1968, SIDBEC a eu à effectuer de nombreuses études et superétudes pour aboutir à la conclusion que le meilleur moyen de doter le Québec d'une sidérurgie était d'acheter les installations de Dominion Steel and Coal Corporation, Limited au Québec, même si nous savions, à ce moment, qu'il y avait des problèmes sérieux de production et de qualité aux laminoirs à tôles de Contrecoeur.

Cette proposition fut d'ailleurs discutée à une commission parlementaire qui s'est tenue pendant quatre jours, à la fin de mai, début juin 1968 et c'est à l'unanimité que cette suggestion fut retenue par le parti au pouvoir et l'Opposition. La charte de SIDBEC fut amendée et le gouvernement s'engagea à souscrire 6 000 000 d'actions à dividende différé à $10 l'action. Un premier versement de $12 millions fut fait et le solde des montants fut versé à raison de $1 million de dollars par mois, jusqu'à extinction de la dette ou enfin, du paiement. A la fin de 1968, SIDBEC faisait une offre d'achat à tous les détenteurs d'actions de Dominion Steel and Coal Corporation, Limited et recueillait dès le 17 décembre suivant, au-delà de 90% des actions. Le 28 décembre suivant, SIDBEC prenait effectivement le contrôle de Dominion Steel and Coal Corporation, Limited tout en revendant à Hawker Sideley, qui détenait le contrôle de Dominion Steel and Coal Corporation, les actifs qu'elle ne voulait pas garder.

SIDBEC est donc passée brutalement du rêve à la réalité le 1er janvier 1969, avec la responsabilité d'administrer quatre usines, soit une à Contrecoeur, une autre à Ville-Emard, qu'on appelle l'usine de Montréal, une autre à LaSalle, qu'on appelle Etobicoke et, la dernière, à Etobicoke de la province d'Ontario.

Depuis 1969, SIDBEC a passé à travers une première phase d'expansion qui a nécessité une demande additionnelle d'équité de $36 millions. Cette phase 1 de l'expansion prévoyait principalement une nouvelle aciérie à Contrecoeur, une usine de réduction de boulettes d'oxyde de fer, un troisième four d'une capacité de 50 tonnes à l'usine de Montréal. Par la suite, la phase 2 de l'expansion de SIDBEC fit l'objet d'un débat parlementaire, le 18 juillet 1974, et le projet de loi no 44 fut adopté par l'Assemblée nationale du Québec. Ce projet de loi portait de $200 millions à $400 millions le capital action autorisé de SIDBEC et le gouvernement s'engageait à souscrire et payer 10 000 000 d'actions — il y a une erreur dans le texte — à $10 l'action, ainsi qu'à garantir jusqu'à concurrence de $120 millions les emprunts à long terme effectués par SIDBEC Le projet de loi no 44, adopté à l'unanimité, moins un membre de l'Opposition, couvrait un projet qui fut présenté au gouvernement un an auparavant, soit au mois d'août 1973. L'inflation très forte ayant fait son oeuvre, nous fûmes forcés de tronquer des parties importantes de cette deuxième phase d'expansion afin de rester en-deçà de ce que je qualifie de budget financier soumis en 1973 et qui s'élevait alors à $273 millions.

Comme question de fait, nous avons dû radier complètement le doublage de notre laminoir à fil et barres ainsi que l'expansion de notre tréfilerie de Montréal. Il serait bon de noter que ces deux centres de production sont parmi les plus rentables sinon les plus rentables de SIDBEC-DOSCO Nous avons donc dû faire un choix en 1974 et décider de développer en priorité des installations de l'aciérie en allant vers l'amont, soit ajouter deux fours électriques qui auront pour effet de doubler la capacité de notre aciérie électrique et un autre module de réduction qui aura pour efftet de presque tripler la production de boulettes de fer.

C'est d'ailleurs à cause du succès de cette innovation ou, si vous aimez mieux, de cette nouvelle façon de faire de l'acier — je dois dire que cette nouvelle façon de faire de l'acier est maintenant reconnue à l'échelle mondiale — que nous avons recommandé au gouvernement d'aller encore plus vers l'amont, afin de nous assurer de nos matières premières par le biais d'une participation dans une mine, en l'occurrence Fire Lake, et dans une usine de bouletage dont la construction est déjà en marche à Port-Cartier comme vous avez pu le voir.

Si on y regarde de plus près, on pourra observer que, depuis 1969, SIDBEC n'a à peu près pas investi d'argent dans ses laminoirs, dans ses usines de parachèvement, dont la capacité de production globale actuelle de produits finis est d'environ 800 000 tonnes par an. Si elle avait fait le contraire, en investissant à fond dans ses laminoirs et dans ses usines de parachèvement, elle aurait souffert de façon tragique d'un manque à gagner dans l'acier primaire. C'eût été mettre la charrue devant les boeufs.

Cependant, en investissant dans une mine, dans une usine de bouletage, dans des usines de réduction et dans des fours électriques, elle peut, pour autant que le gouvernement la supporte, établir d'ici deux ou trois ans une infrastructure très solide qui lui permettra de produire de l'acier en fusion sur une base compétitive. Et c'est, à notre avis, un des objectifs les plus importants à atteindre pour une sidérurgie intégrée. Quand nous atteindrons cet objectif, il nous sera permis à ce moment de penser beaucoup plus loin. Nous aurons alors mis SIDBEC en position de produire de l'acier en ayant investi le minimum d'argent, par le biais de son procédé de réduction, et cela, sans polluer l'atmosphère, contrairement aux sidérurgies conventionnelles, non plus que l'eau. Ce sera, à mon sens, un événement unique dans l'histoire de la sidérurgie.

Cet acier en fusion, dont la quantité s'élèvera, lorsque tout sera en marche, à environ 1 500 000 tonnes d'acier primaire, dont 900 000 tonnes de billettes coulées en continu et 600 000 tonnes de brames coulées en continu, permettra, d'une part, de faire marcher à pleine capacité des laminoirs à chaud et à froid que nous avons à Contrecoeur et d'autre part à assurer tous nos laminoirs de Contrecoeur et de l'usine de Montréal d'un approvisionnement adéquat.

De plus, nous aurons un surplus d'environ 100 000 à 150 000 tonnes de billettes pour les deux ou trois prochaines années. Ces billettes seront écoulées sur le marché mondial de l'acier.

Il serait peut-être bon d'étaler d'une façon séquentielle la liste des principaux équipements que nous avons mis en place dans SIDBEC depuis 1969. Vous avez la liste.

En 1970, démarrage d'un four à arc de 50 tonnes à l'usine de Montréal; 1971, démarrage de deux fours à arc d'une capacité totale de 600 000 tonnes à Contrecoeur; 1972, mise en marche de l'usine de nettoyage au laminoir à froid, laminoir à plat; 1973,formation de SIDBEC-FERUNI, qui s'occupe maintenant de nous assurer notre approvisionnement en ferraille et, de plus, de convertir à peu près 150 000 tonnes de carcasses d'automobiles en ferraille de première qualité à Contrecoeur même; 1973, encore, doublage des installations de recuit au laminoir à froid à Contrecoeur; 1973, le 11 avril, démarrage de l'usine de réduction à Contrecoeur.

De 1973 à 1976, période que nous vivons présentement, il n'y a pas eu d'investissements majeurs. En 1976, ce sera, vers la fin de l'année, comme il a été mentionné, le démarrage de deux fours de 150 tonnes, d'une capacité totale de 600 000 tonnes annuellement.

En 1976 encore, mise en marche du second module de réduction, d'une capacité d'environ 700 000 tonnes; 1977, mise en opération de la mine de Fire Lake. La boucle sera terminée en 1977 avec la mise en marche de l'usine de bouletage à Port-Cartier, si les échéanciers sont respectés, évidemment.

De plus, tout au long de ces années, nous avons dépensé près de $15 millions, ce qui est un strict minimum, je dois vous dire, pour améliorer certaines lignes de production qui risquaient de devenir désuètes.

En examinant de près cette liste d'investissements, on peut constater, comme je l'ai déjà dit, que notre grande préoccupation, depuis le tout début des opérations, c'est-à-dire 1969, a été d'établir une base solide en vue de pouvoir éventuellement investir à des coûts minimaux dans de nouveaux laminoirs à plat ou d'autres installations situées en aval de l'aciérie.

Cette prise de position de SIDBEC, recommandée par le conseil d'administration et approuvée par notre actionnaire principal, est sûrement la voie la plus facile pour en arriver à une sidérur- gie intégrée, mais, en même temps, la voie la plus difficile pour établir la rentabilité de SIDBEC. Les principaux problèmes sont de deux ordres, bien différents, soit le problème financier et celui de la compétence ou du "know how" nécessaire pour être en mesure de contrôler, de gérer et de produire d'une façon rentable.

Si nous considérons le problème financier face à l'expansion en cours, il me semble évident que le choix que nous avons fait de participer à la mine de Fire Lake et à l'usine de bouletage de Port-Cartier marque un point tournant pour l'avenir de SIDBEC.

En fait, SIDBEC, avec l'appui de son actionnaire principal, a démontré un leadership indiscutable dans les négociations en cours, avec les participants probables de cette entreprise. En effet, il est prévu qu'une nouvelle société minière prendra bientôt en charge la réalisation du projet Fire Lake-Port-Cartier. Les négociations en cours prévoient une participation pour SIDBEC de pas moins de 50,1% des actions, tandis que British Steel Corporation International Ltd. et la compagnie minière Québec Cartier détiendront respectivement 41,67% et 8,23% des actions.

Le projet Fire Lake-Port-Cartier a été élaboré dans le but de produire annuellement six millions de tonnes de boulettes de minerai de ter dans une nouvelle usine de bouletage déjà en construction à Port-Cartier, 40 milles à l'ouest de Sept-lles.

Les boulettes seront fabriquées avec des concentrés obtenus à partir de minerai brut, extrait du gisement de Fire Lake, situé à 55 milles au nord-est de Gagnon et, enrichies au concentrateur du lac Jeannine, près de Gagnon, situé à 190 milles au nord de Port-Cartier.

Les trois partenaires achèteront proportionnellement à leur participation toute la production de boulettes de la nouvelle société minière, la part de SIDBEC, soit 3 millions de tonnes par an, lui étant fournie sous forme de boulettes à basse teneur en silice, requises pour ses usines de réduction à Contrecoeur

L'intérêt de SIDBEC à ce projet remonte à 1972, alors que la compagnie minière Québec Cartier lui offrait, ainsi qu'à d'autres une participation à la mise en exploitation du gisement de Fire Lake. Pour SIDBEC, une telle participation lui permettait d'obtenir au Québec, non seulement les quantités, mais aussi la haute qualité de minerai nécessaire pour ses usines de réduction qui alimentent en fer son aciérie à Contrecoeur. Par ailleurs, l'extraction du minerai de ce gisement et son traitement au concentrateur du Lac Jeannine, devant remplacer le minerai local qui sera épuisé en 1977, assuraient une continuité d'emploi à la population de Gagnon pour une période additonnelle d'une tran-taine d'années.

Le projet prit forme en 1974, alors que SIDBEC décida d'une participation au niveau de 3 millions de tonnes par an, tandis que BSCI formula son désir de participation durant 1975, celle de la compagnie minière Québec Cartier, étant déjà acquise.

SIDBEC, supportée dans sa décision, par le

gouvernement du Québec, réalisait enfin son objectif d'une sidérurgie intégrée, basée sur la fabrication d'acier à partir de minerai du Québec; de plus, SIDBEC comblait son besoin actuel de 1,5 million de tonnes de minerai; l'excédent assurait en même temps l'approvisionnement pour le développement de SIDBEC à la taille d'une grande sidérurgie moderne au cours de la prochaine décennie. D'ici là, SIDBEC pourra disposer d'un excédent d'approvisionnement à profit, compte tenu de la demande mondiale pour des boulettes de haute qualité.

Les travaux de dégagement du gisement de Fire Lake ont commencé à l'automne de 1974 sous la direction de la compagnie minière Québec Cartier et la mise en place des diverses installations sera complétée en 1977.

Jusqu'ici, SIDBEC a financé et dirigé seule la construction des usines de bouletage à Port-Cartier dont la construction a débuté en juin 1975. Elle y a dépensé plus de $50 millions — à la fin du mois de mars, ce sera $70 millions — de ses fonds, tandis qu'elle s'est engagée à partager avec Québec Cartier les frais de la mise en exploitation du gisement de Fire Lake. Il s'agit là bien sûr d'ententes temporaires. British Steel Corporation, pour sa part, engagera ses fonds lorsque la nouvelle société sera définitivement formée.

Pour réaliser le projet, la nouvelle société investira un montant d'environ $545 millions, budget de janvier 1976, aux divers postes suivants:

Achat de Québec Cartier pour la somme de $45 millions du concentrateur du lac Jeannine, du matériel d'exploitation minière et diverses installations connexes ainsi que des propriétés et installations à Gagnon.

Equipements et installations à la mine de Fire Lake, ligne de transmission, changements au concentrateur de Gagnon, achat de wagons pour le transport du minerai brut et des concentrés, fonds de roulement, intérêts durant la construction et frais divers pour une somme de $186 millions.

Implantation à Port-Cartier de l'usine de bouletage, d'une usine d'enrichissement pour obtenir des concentrés à basse teneur en silice, d'installations de manutention, fonds de roulement et intérêts durant la construction pour une somme de $314 millions.

La compagnie minière Québec Cartier dépensera, pour sa part, quelque $56 millions pour l'amélioration de son système ferroviaire et des installations portuaires à Port-Cartier pour le transport du minerai et des concentrés et pour l'expédition des boulettes.

Par ailleurs, la réalisation du projet a incité le gouvernement du Québec à poursuivre son programme de développement de l'infrastructure de la région. Ainsi le ministère des Transports a mis en chantier la construction d'une route de 45 milles qui reliera, en 1977, la ville de Gagnon à la mine de Fire Lake. Cette route, qui dans l'immédiat, facilitera les communications et le transport des travailleurs entre Gagnon et la mine, est un segment important de la route qui donnera éventuellement accès à la ville de Gagnon, à partir de Manic 5 et, plus tard, à d'autres villes situées plus au nord, par exemple, Fermont.

Le Président (M. Lafrance): M. Gignac, je regrette infiniment d'interrompre votre exposé, mais des impératifs nous obligent à suspendre la commission jusqu'à 8 h 15. Nous reprendrons votre exposé à 8 h 15, si vous le permettez.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 8 h 15.

Suspension de la séance à 18 h 5.

Reprise de la séance à 20 h 22

M. Lafrance (président de la commission permanente de l'industrie et du commerce, du tourisme, de la chasse et de la pêche): A l'ordre, messieurs!

Après ce rafraîchissement, on demanderait à M. Gignac de continuer son exposé, s'il vous plaît.

M. Gignac: Je vous remercie, M. le Président. Je vais continuer la lecture du texte que je vais livrer à la commission. On en est toujours au projet Fire Lake-Port-Cartier

La réalisation du projet exige aussi des investissements importants pour l'amélioration des services sociaux dans les domaines scolaire, hospitalier et de l'habitation.

La société Dravo Corporation, de Pittsburgh, de renommée mondiale dans le domaine du boule-tage, a la responsabilité de l'ingénierie et de la construction de l'usine de bouletage tandis que les consultants canadiens Met-Chem Ltée sont responsables à Port-Cartier de l'ordonnancement sur le chantier, ainsi que de l'ingénierie des installations de manutention et autres services connexes. Un contrat important a été octroyé récemment à la Comstock (Québec) Ltée pour l'implantation d'un important concasseur giratoire à la mine de Fire Lake. La compagnie Les Constructions du Saint-Laurent Ltée, la Dominion Bridge, Marshall-Central Steel et plusieurs entrepreneurs locaux participent à la mise en place des fondations, charpentes et autres travaux de génie civil. D'importants contrats restent encore à être adjugés pour compléter les travaux. Il est intéressant de souligner que la gérance de tous ces projets est assumée par un représentant de SIDBEC qui agit au nom d'un comité de gérance formé d'un représentant de chacun des participants. Le président de ce comité est M. Cyrille Dufresne, qui est ici à ma gauche, vice-président de SIDBEC et administrateur délégué pour le Projet Fire Lake-Port-Cartier.

Le gisement de Fire Lake, situé sur une colline à 225 milles au nord de Port-Cartier près du chemin de fer qui relie Port-Cartier à Mont Wright, couvre une superficie d'environ un mille carré et contient quelque 400 millions de tonnes de minerai à teneur en fer de 33,5%.

La mine sera exploitée à ciel ouvert et après extraction et concassage du minerai, il sera acheminé par chemin de fer jusqu'à l'atelier actuel du lac Jeannine situé à 61,5 milles au sud-est de la mine où il sera concentré jusqu'à concurrence de 65% de teneur en fer et abaissement de la teneur en silice à 5%. On devra extraire annuellement de la mine quelque 14 millions de tonnes de minerai brut pour produire 6 millions de tonnes de concentrés.

Les concentrés transportés à Port-Cartier par chemin de fer y seront transportés en boulettes dans l'usine de bouletage. Au préalable, cependant, une partie de ces concentrés, soit 3 millions de tonnes par an, subira une concentration additionnelle pour augmenter la teneur en fer à 68% et réduire à 2% la teneur en silice.

C'est ce superconcentré qui sera dévolu à SIDBEC. Au niveau de 6 millions de tonnes de boulettes par année, l'usine opérera à 85% de sa capacité maximale.

L'Hydro-Québec fournira l'énergie électrique à partir du réseau des Chutes Churchill pour la mine de Fire Lake et les installations de bouletage à Port-Cartier. L'énergie électrique pour la ville de Gagnon et le concentrateur au lac Jeannine est fournie à partir d'une centrale hydroélectrique sur la rivière Jaune, exploitée à proximité de Gagnon par une filiale de la Québec Cartier.

L'exploitation de la mine de Fire Lake et de l'usine de bouletage à Port-Cartier a été conçue en conformité avec les règlements existants et les exigences connues du Service de la Protection et de l'Environnement. Plus de $12 millions émargent au budget, à ce poste.

La mise en place de la nouvelle société qui regroupe SIDBEC, British Steel Corporation (International) et la Compagnie minière Québec Cartier exigera, outre son incorporation, la signature de plusieurs conventions et contrats qui établissent les obligations réciproques des participants vis-à-vis de la nouvelle société et régiront son administration.

Ainsi les partenaires définiront leurs intérêts respectifs dans une convention d'actionnaires prévoyant principalement que chacun des actionnaires conviendra de souscrire des actions de la nouvelle société jusqu'à concurrence de $227 millions selon leur quote-part respective (SIDBEC: 50,1%; British Steel: 42,67% et la Québec Cartier, 8,23%). Ce montant de $227 millions représente 35% des coûts estimés du projet, soit $545 millions plus un coussin pour des coûts excédentaires. Il fut établit en tenant compte que 65% des coûts du projet, jusqu'à un maximum de $599 500 000, seraient financés par des emprunts à long terme; de plus, la British Steel se réserve le droit de se retirer du projet si le financement espéré ne peut être obtenu. SIDBEC serait alors obligée d'acheter la participation de la British Steel, tandis que la Québec Cartier aurait le droit d'acquérir 40% de cette participation. Enfin, les décisions importantes nécessiteront l'accord des actionnaires détenant au moins les deux tiers des actions émises et en cours ou encore l'unanimité dans certains cas.

Par ailleurs, tel que mentionné, les partenaires devront acheter, chaque année, toute la production de boulettes de la nouvelle société, en proportion de leur quote-part des actions et s'y engageront par contrat, définissant les termes et conditions de la vente par la nouvelle société aux acheteurs.

A Port-Cartier, la nouvelle société complétera la construction déjà commencée par SIDBEC de l'usine de bouletage et installations connexes et, par la suite, en assumera elle-même l'exploitation.

Cependant, pour la mise en place de certaines installations et services ainsi que pour leur exploitation subséquente, la nouvelle société sera appelée à signer plusieurs contrats avec la Québec Cartier ou des filiales de cette dernière. Ces contrats sont les suivants:

a)Contrat pour l'achat de la mine de Fire Lake pour une somme nominale de $1 plus une redevance par tonne de concentré, payable au fur et à mesure de l'exploitation de la mine. Ce contrat donnera aussi à la nouvelle société un droit de premier refus pour l'achat et l'exploitation des daims miniers situés dans les environs de la mine de Fire Lake; b) Contrat pour l'achat de l'équipement d'exploitation minière du lac Jeannine, du concentrateur et de ses installations auxiliaires ainsi que des propriétés et installations de la ville de Gagnon moyennant un prix de $45 millions;

Soit dit en passant, ce prix de $45 millions est la valeur résiduelle aux livres de ces installations. c) Contrat aux termes duquel la Québec Cartier fournira les services de gérance pour la construction des installations requises à la mine, au concentrateur du lac Jeannine et à la ville de Gagnon; d) Contrat pour l'achat des terrains requis à Port-Cartier pour l'installation de l'usine de boule-tage et la disposition des résidus; e) Contrat de gérance aux termes duquel la Québec Cartier fournira les services de gérance pour l'exploitation de la mine, du concentrateur du lac Jeannine et des installations de la ville de Gagnon; f) Contrat de transport ferroviaire aux termes duquel la Québec Cartier et sa filiale, Cartier Railway Company, assumeront le transport par chemin de fer du minerai de la mine Fire Lake au concentrateur du lac Jeannine et le transport par chemin de fer du concentré du lac Jeannine à l'usine de bouletage à Port-Cartier. C'est la nouvelle société qui fournira les wagons requis à cette fin, mais leur entretien sera fait par la Québec Cartier et sa filiale; g) Contrat aux termes duquel la Québec Cartier fournira les services de manutention du concentré et des boulettes à Port-Cartier. Ce contrat stipulera aussi que la Québec Cartier vendra à la nouvelle société du concentré en provenance de Mont Wright pour, d'une part, compenser les pertes du procédé de concentration secondaire (jusqu'à 200 000 tonnes par année) et, d'autre part, tout éventuel manque de capacité du concentrateur du lac Jeannine (jusqu'à concurrence de 1 500 000 tonnes par année). En plus, la nouvelle société sera considérée comme client privilégié pour tout tonnage de Mont Wright qui pourrait être requis si l'usine de bouletage avait une capacité excédentaire à 6 millions de tonnes par année; h) Contrat avec la Québec Cartier et sa filiale, Hart Jaune Power Company, pour la fourniture d'énergie électrique requise pour le secteur lac Jeannine, ce contrat devant être soumis à la Régie de l'électricité et du gaz du Québec.

Le projet Fire Lake-Port-Cartier permet à SID-BEC de compléter son intégration pour la production d'aciers finis en remontant jusqu'au minerai de fer, sa matière première principale. Déjà, sur le plan énergétique, SIDBEC utilise l'énergie électrique fournie par l'Hydro-Québec pour la fusion du fer brut et sa transformation en acier primaire ainsi que pour le laminage de cet acier en produits finis. Elle continuera de s'alimenter en gaz naturel en provenance de l'Ouest canadien pour la réduction des boulettes d'oxyde de fer en boulettes de fer. Ces investissements, d'une part, permettront à SIDBEC de diminuer le coût de son minerai qu'elle devait jusqu'ici, pour une bonne partie, importer de l'étranger pour des raisons de qualité; d'autre part, la haute qualité du minerai de Fire Lake lui permettra d'augmenter appréciablement le rendement de ses usines de réduction à Contrecoeur.

Par ailleurs, la participation de SIDBEC au projet amène sur la Côte-Nord l'implantation d'un quatrième grand complexe minier. Il s'ensuit d'importantes retombées économiques et un apport sensible au développement de la région.

Durant la période de construction, les installations de bouletage fourniront à Port-Cartier de l'emploi à quelque 1500 ouvriers et cadres tandis que les installations à la mine de Fire Lake emploieront quelque 350 ouvriers et cadres.

Après la mise en marche, le projet assurera un emploi à quelque 1500 personnes, dont 1100 à la mine de Fire Lake et au concentrateur de Gagnon et 400 à l'usine de Port-Cartier. On estime par ailleurs à 600 le nombre d'employés additionnels requis localement pour les services et industries connexes.

La majorité de ces emplois demandent une main-d'oeuvre compétente et bien entraînée. Les travailleurs qui collaboreront à l'entreprise devront cependant trouver dans cette région outre une certaine indépendance et un défi valable, les services et une infrastructure comparables à ceux des autres régions de la province. La nouvelle société, de concert avec les autorités compétentes, entend mettre tout en oeuvre pour qu'il en soit ainsi.

A Gagnon, dont la population se maintiendra à son niveau actuel de 5000 habitants, il est indispensable de moderniser le secteur scolaire et hospitalier, l'accès à l'extérieur, les communications par radio et le système de télévision. Le gouvernement fédéral a déjà pris en main la modernisation de l'aéroport et le gouvernement du Québec a mis en chantier une route pour relier Gagnon à la mine de Fire Lake. Il est essentiel que cette route soit complétée le plus tôt possible, depuis Manic 5, au moins, jusqu'à Gagnon, afin de permettre en tout temps pour la population de la région un accès facile au monde extérieur.

Port-Cartier a des besoins des plus urgents. Cette ville, conçue initialement pour 4000 habitants, abrite maintenant une population de 7500 habitants et passera à 10 000 en 1978, après la mise en marche d'une usine de bouletage. Le ministère de l'Education y a récemment autorisé la construction d'une grande école polyvalente jointe à un centre socio-culturel qui devrait être complété en 1977. Le Projet, une nouvelle société, supporte la municipalité pour l'amélioration de son système d'aqueduc qui est inadéquat. Dans le domaine hospitalier, l'hôpital actuel ne répond

plus aux besoins locaux depuis plusieurs années et la population dépend presque entièrement de l'hôpital de Sept-lles, à 40 milles à l'est de Port-Cartier. Dans le domaine de l'habitation, quelque 400 à 500 logis sont nécessaires pour loger les employés de la nouvelle usine. Ce problème est prioritaire et urgent. C'est pourquoi SIDBEC collabore avec la municipalité dans ses démarches auprès des autorités gouvernementales responsables pour l'obtention des subventions nécessaires au développement des infrastructures requises, comme aqueduc, égouts, etc., dans le secteur sud-ouest de la ville. La nouvelle société a déjà prévu la disponibilité de lots à bâtir et assistera les travailleurs qui le désirent à acquérir leurs maisons, selon des pratiques déjà établies par d'autres compagnies de la région.

Les centres de main-d'oeuvre fédéral et provincial seront mis à très forte contribution pour le recrutement et la mise en place de programmes de formation du personnel.

Comme vous pouvez le constater, ce projet minier est de bien grande envergure. Il nous faudra trouver et utiliser au maximum les ressources humaines du Québec pour en assurer son succès. Mais c'est à des conditions de cette nature qu'il faut se soumettre pour en arriver à l'élaboration d'une sidérurgie intégrée.

Il ne faut pas se leurrer, toutes ces parties essentielles d'une sidérurgie intégrée, telles la mine, le bouletage, la réduction, l'aciérie, les laminoirs et les équipements de parachèvement, coûtent au bas mot trois fois et même quatre fois plus cher aujourd'hui qu'il y a dix ans.

En l'occurence, le gouvernement et SIDBEC, compte tenu des contraintes financières, ont réussi à mettre en place les composantes principales d'une sidérurgie intégrée. De plus, SIDBEC a cerné ses problèmes de production et de qualité. D'une façon générale, à quelques exceptions près, on peut dire que les usines de parachèvement comme celle de Montréal, Truscon et d'Etobicoke peuvent produire à des coûts compétitifs si, d'une part, leur matière première, qui leur est fournie par Contrecoeur, l'est à un coût compétitif et si, d'autre part, l'économie du pays est à un niveau normal d'activités. Le vrai problème concernant la production et conséquemment la rentabilité se situe à Contrecoeur. Tous les nouveaux équipements de Contrecoeur fonctionnent très bien et certains d'entre eux même produisent au-delà de nos espérances. Je dois souligner l'excellente performance de l'usine de réduction qui, je l'avoue sans fausse pudeur, est une innovation à l'échelle mondiale.

D'ailleurs, au cours de la dernière année, des représentants de grandes sidérurgies d'une vingtaine de pays ont tenu à visiter cette usine. Entre parenthèses, la dernière délégation importante était en provenance de Russie et il y avait vingt délégués, techniciens, ingénieurs qui faisaient partie de cette délégation, au mois de février.

A l'aciérie, nous avons réussi à développer et à produire à peu près toutes les nuances d'acier nécessaires à la fabrication de nos produits; là aussi, nous avons innové mondialement, puisque nous avons été les premiers à faire toutes ces nuances d'acier dans des fours électriques, à partir d'un mélange de boulettes réduites et de ferraille. Il va s'en dire que cette technique et ce "know-how" vont aller en s'améliorant avec les années et que cet état de choses sera de nature à nous aider grandement à l'avenir.

Le laminoir à fil et barres qui a été installé par Dominion Steel and Coal Corporation, en 1963, fonctionne très bien et fabrique des produits de haute qualité. C'est une partie importante et très rentable de nos installations de Contrecoeur, et qui fonctionne aussi au-delà de nos prévisions.

Le principal problème se situe aux laminoirs à tôles de Contrecoeur, comme d'ailleurs nous l'avions perçu en 1968.

Le laminoir à chaud est une très vieille pièce d'équipement qui, à cause de son faible volume et de ses coûts d'entretien élevés, nous a coûté très cher par le passé. Il en va de même du laminoir à froid, où nous éprouvons beaucoup de difficulté à avoir une production fiable et à respecter les délais normaux de livraison aux clients.

De 1969 à 1976 nous avons eu une variation défavorable d'à peu près $70 millions à ces deux laminoirs, comparativement à ce que nous avions établi dans nos prévisions, tandis qu'au laminoir à fil et barres, nous avons eu une variance favorable d'environ $10 millions pour la même période de temps. Il est donc clair que notre problème de rentabilité se situe au niveau des laminoirs à tôles. La question qui se pose est la suivante: Est-ce que nous pouvons y remédier? Jusqu'à un certain point, je serais porté à dire: Oui, nous pouvons y remédier. Avec les équipements actuels, cependant, il nous sera toujours très difficile, ne bénéficiant pas d'économies d'échelle, de pouvoir produire à des prix concurrentiels. D'autre part, ce ne sera pas avant 1978, alors que nous aurons eu le plein impact positif des boulettes en provenance de Port-Cartier, du nouveau module de réduction, des nouveaux fours électriques et de la coulée continue en brames, que nous pourrons réellement savoir à quoi nous en tenir concernant ces deux laminoirs. II est concevable de penser que nous pouvons faire des tôles minces, à une échelle plus petite, mais pas nécessairement par le même procédé. Il peut donc se poser deux choix, peut-être plus, en 1978, soit transformer complètement nos laminoirs à tôles, à chaud et à froid, seuls ou avec des partenaires. Cependant, si nous choisissons le procédé conventionnel, il faut penser à un laminoir à chaud en continu, d'une capacité annuelle de 2 à 3 millions de tonnes et, je puis vous dire, d'une dépense additionnelle totale d'environ $400 millions de dollars.

Nous avons peut-être le choix aussi d'utiliser un autre procédé. Je suis en mesure de vous dire que, depuis deux ans, SIDBEC a tenu des discussions détaillées avec une importante compagnie étrangère, qui fait plus de $1 milliard de ventes par année, concernant un projet majeur qui serait basé sur une nouvelle technologie pour la fabrication de produits d'acier plat.

Dans le cas où cette technologie pourrait être mise au point, cette compagnie envisage un investissement de $100 millions au Québec, plus précisément à Contrecoeur. Si cet investissement se fait, le projet demandera un approvisionnement en acier liquide de 250 000 à 500 000 tonnes par an. C'est bien 250 000 à 500 000 tonnes par an. La raison qui a amené cette compagnie à discuter avec nous est que SIDBEC, avec son procédé de réduction, peut fournir la qualité d'acier demandée, qualité qui ne peut être fournie par le procédé conventionnel des hauts fourneaux et convertisseurs à l'oxygène. De plus, cette même compagnie a demandé si elle pouvait éventuellement investir dans les actions de SIDBEC afin de mieux assurer ses besoins en acier. SIDBEC aurait en retour, semble-t-il, l'occasion d'investir dans ce projet ci-haut mentionné.

Je ne puis évidemment, pour le moment, identifier cette compagnie et je pense que je suis rendu à la limite de tout ce que je peux vous dire à ce sujet. Je peux ajouter toutefois que la compagnie en question en est une qui fait d'excellents profits.

Sans exclure d'autres possibilités, c'est à ce genre de possibilités auxquelles il faut penser pour les laminoirs à tôles. Je suis persuadé qu'au cours des trois prochaines années, même si elles ne nous apportent pas la rentabilité ou la profitabilité que nous tous, à SIDBEC, aimerions inscrire en gros caractères dans nos états financiers, nous saurons trouver des moyens pour palier à ce qui dans le moment nous empêche de déclarer des profits.

Je dois vous dire, entre parenthèses, que nous avons à nos laminoirs à tôles, une qualité excellente. Ce n'est donc pas à la qualité qu'il faut s'attaquer, c'est à la production et aussi au marketing qui sera mis à contribution, comme il l'est dans le moment et qui sera mis, encore plus, à contribution dans les mois et les années qui viennent.

Mon conseil d'administration, tous mes collègues et moi-même sommes d'accord pour reconnaître que les laminoirs à tôle représentent une partie importante de nos déficits.

Je voudrais que le gouvernement et les membres des partis d'Opposition le reconnaissent aussi, de telle façon que l'ayant identifié comme tel, nous pensions maintenant à y faire face et chercher la vraie solution. S'il est vrai que nous voulons une sidérurgie intégrée au Québec pour polariser l'industrie secondaire de l'acier, il faut absolument produire de la tôle de qualité, ce que nous faisons, à des prix compétitifs, ce que nous ne faisons pas. Si cet objectif est changé, il faudrait que ce soit par un large accord de l'Assemblée nationale. Personnellement, je crois que l'on doit persister dans la production de la tôle, même si, à ce jour, les résultats on été très négatifs, et risquent de l'être pour les deux ou trois prochaines années.

Un autre élément qui nuit considérablement à la profitabilité de SIDBEC est la charge d'intérêt démesurée que la compagnie doit débourser à cause de ses dettes à court, moyen et long termes.

Comparativement à nos compétiteurs, notre ratio d'intérêt par dollars de vente et notre ratio d'intérêt à long terme, par rapport à l'avoir des actionnaires est d'environ 7 à 1.

Entre 1969 et 1976, nous avons déboursé $52 millions d'intérêt et nous avons enregistré une perte cumulative nette de $51 millions. En temps et lieu, je crois que cette situation devra être corrigée.

A SIDBEC, nous croyons en l'avenir de notre sidérurgie, nous sommes conscients que nous dépensons des deniers publics pour la construire et les efforts que nous y mettons, tant mes collègues que l'ensemble des employés de SIDBEC, ne peuvent que déboucher sur des résultats positifs éventuellement.

Cependant, en plus de l'effort, il faut y mettre beaucoup de patience, beaucoup d'imagination et beaucoup de persévérance et aussi, comme vous le savez sans doute, beaucoup d'argent.

Pour ceux qui connaissent un peu la sidérurgie dans le contexte des centaines de millions, pour ne pas dire des quelque milliards de dollars qu'on peut y engloutir aisément, je pense que ce que nous avons fait à SIDBEC, jusqu'à maintenant, est extraordinaire, tant sur le plan des équipements que sur celui du développement de la compétence dans toutes nos usines. Il nous restera, d'ici quelques années, avec l'aide du gouvernement et de tous les partis, à prouver que nous pouvons faire un profit avec notre sidérurgie intégrée. Nous pourrons alors dire que nous aurons rempli une partie importante de notre mandat qui était de faire de SIDBEC une sidérurgie intégrée et aussi rentable.

Merci, M. le Président.

Le Président (M. Lafrance): Merci bien de votre présentation, M. Gignac. Le ministre de l'Industrie et du Commerce.

Travaux de la commission

M. Saint-Pierre: Je voudrais remercier M. Gignac de ce document de présentation. Je pense qu'il résume à la fois l'expansion envisagée pour le projet de Fire Lake et, en même temps, certains des problèmes et des défis qui se posent à l'entreprise dans ses opérations courantes. Bien sûr, au cours des derniers mois, le gouvernement, tant au niveau du Conseil exécutif qu'au niveau de ceux qui sont chargés directement des opérations de SIDBEC, a pu avoir de nombreuses discussions qui nous ont permis de nous rendre raisonnablement familiers avec plusieurs des points qui pourraient intéresser la commission.

Mais je voudrais qu'on prenne tout le temps requis pour tenter d'explorer à fond certains des éléments du dossier. Je pense que je vais me permettre plutôt, M. le Président, de donner la parole à d'autres et, s'il y a des points, j'en ai l'impression, qui pourraient éclairer l'opinion publique ou les membres de cette commission en général, je n'hésiterais pas à intervenir.

Je n'aurais, avant de céder la parole à d'au-

tres, qu'une seule suggestion à faire. Pour donner une certaine cohérence à nos démarches, puis-je suggérer qu'on puisse peut-être diviser en deux parties les questions à poser, s'attaquer, dans un premier temps, à tout ce qui peut toucher le projet lui-même de Fire Lake, toutes ses implications, les partenaires, le financement et, une fois qu'on aura réglé tout ça, s'attaquer à un deuxième problème qui est un peu relié au premier, mais qui suit le premier, à savoir les opérations courantes de la compagnie SIDBEC.

Pour les fins de la commission, sans en faire un dépôt formel, je rappelle qu'en plus de la présentation de M. Gignac, chaque membre a reçu quelques documents qui nous aident à comprendre davantage le complexe sidérurgique de Contrecoeur et, en particulier, les états financiers consolidés au 31 décembre 1975 de SIDBEC et de ses filiales que chaque membre de la commission a pu avoir.

Le Président (M. Lafrance): Le chef de l'Opposition officielle.

Entente entre SIDBEC et Québec Cartier Mining

M. Morin: M. le Président, il me faut également remercier le président de SIDBEC qui, dans son exposé, a déjà apporté plusieurs réponses à des questions que nous nous posions.

Je veux également le remercier de nous avoir fait parvenir tout récemment les états financiers pour l'année 1965 qui, également, contenaient un certain nombre de chiffres qui vont être très utiles pour les travaux de cette commission.

J'accepte l'ordre du jour proposé par le ministre. Il me semble, en effet, qu'il serait utile de commencer par le projet, le grand projet de Fire Lake et de Port-Cartier, de sorte qu'avant d'aborder la situation financière générale de SIDBEC, avant d'étudier les autres aspects de l'entreprise, j'aimerais, avec votre permission, me pencher sur l'entente — commençons par cela, si vous le voulez bien — intervenue entre SIDBEC et Québec Cartier Mining.

Vous nous avez dit, M. le président de SIDBEC, à la page 6 de votre exposé, que c'est QCM — je me permettrai d'utiliser les initiales, ce sera plus rapide — qui a offert sa participation, qui a offert à d'autres sociétés une participation à la mise en exploitation de Fire Lake.

Puis-je vous demander, tout d'abord, s'il est exact, comme cela est parvenu à nos oreilles, que QCM aurait exigé, à un certain moment, peut-être au moment où les premières offres vous ont été communiquées, un contrôle majoritaire sur le projet.

M. Gignac: Je dois vous répondre que non. A ma connaissance, il n'a pas été question de contrôle majoritaire au tout début des négociations. En fait, ce n'est pas un secret, les premiers participants dans le projet Fire Lake étaient QCM, STELCO, SYSCO et nous-mêmes.

SYSCO et STELCO ont décliné pour diverses raisons et les deux seuls qui sont restés, qui ont continué à discuter, étaient QCM et nous-mêmes. A ce moment-là, pendant un certain temps — je pense que cela a duré à peu près un an — le partage dont on avait parlé était 60% SIDBEC et 40% QCM.

Il n'a jamais été question que QCM prenne le contrôle de cette mine.

M. Morin: Est-ce que c'est QCM qui a délibérément choisi de réduire sa participation à 8,23%? Ou est-ce que je dois en croire le ministre qui nous a dit récemment qu'on aurait laissé seulement 8% à QCM, parce que le gouvernement refusait d'accorder une part plus importante à un partenaire qui ne voulait pas pousser la transformation jusqu'au bouletage?

M. Gignac: Je pense que les circonstances qui ont amené la participation de la British Steel Corporation à 40% et la diminution de la participation de la QCM dans le projet sont assez complexes. Je ne veux pas interpréter les politiques de la QCM, mais c'est plutôt le fait que la British Steel Corporation, qui est un client important de QCM, à Mont Wright, a fait, à la demande de la QCM, pour des raisons qui ne sont pas de notre ressort, un "trading-off", c'est-à-dire qu'elle a fait un échange de concentré primaire, qu'elle devait acheter à Mont Wright, pour une participation dans un projet de boulettes pour des hauts fourneaux.

Nous ne sommes pas intervenus dans cette discussion. Cependant, je dois dire que, lorsqu'à la demande du gouvernement, on nous a demandé de trouver un autre partenaire et qu'il en a été question avec la QCM, le partenaire en question a été choisi par la QCM et non par nous.

M. Morin: L'association avec British Steel Corporation, c'est cela dont vous parlez?

M. Gignac: Oui.

M. Morin: Elle a été choisie par la QCM.

M. Gignac: Oui, évidemment, parce que c'était pour elle la façon la plus facile de trouver un partenaire. Elle l'avait déjà comme client à la mine de Mont Wright.

M. Morin: Oui.

M. Gignac: D'autre part, d'après les nouvelles politiques de la British Steel Corporation, peut-être pour d'autres raisons aussi, la British Steel Corporation veut, de plus en plus, investir, semble-t-il, dans des projets de cette nature, pour être en mesure de contrôler ses matières premières, ce qu'elle ne fait pas actuellement.

M. Morin: Je vois.

M. Gignac: Je vous dis cela. Ce n'est pas officiel. C'est ce que je crois comprendre.

M. Morin: Bon. L'exploitation minière à Fire Lake et le concentrateur au lac Jeannine vont être achetés, si j'ai bien compris, par la nouvelle société...

M. Gignac: C'est cela.

M. Morin: ...composée de SIDBEC, QCM et British Steel Corporation. En voyant cela, je me suis demandé, quoique que j'aie pu trouver des bribes d'explications dans le dossier, mais j'aimerais vous entendre dire pourquoi on a choisi de confier la gérance exclusive du projet au vendeur, la QCM. J'avoue qu'à la première vue, cela m'a un peu étonné.

M. Gignac: II y a deux raisons à cela, je pense. Premièrement, la QCM l'a demandé et cela semblait assez naturel, étant donné qu'elle exploitait et faisait le management ou la gérance de la mine du lac Jeannine, depuis déjà 1960 ou 1961, d'une part, et, d'autre part, je dois vous dire qu'elle a sûrement la compétence nécessaire pour assumer un tel mandat. Du même coup, je vais vous dire que nous n'avons sûrement pas la même compétence qu'elle dans ce domaine; on commence.

M. Morin: Oui.

M. Gignac: C'est sûrement une façon pour nous, si vous voulez, de nous instruire aussi et de ramasser du "know-how" sur une période d'années.

M. Morin: C'est ce que j'aurais pensé, parce que, si on parle d'intégration de tout le processus, de l'amont, de la mine, si vous préférez, jusqu'au laminoir, j'imagine qu'on pense aussi en termes d'intégration du "know-how", n'est-ce pas? Ce n'est pas seulement l'approvisionnement qui est intéressant. Un jour, j'imagine, dans vos projets en tout cas, vos projets à long terme, un jour viendra où l'intégration signifiera que vous vous occupez du processus de la mine au laminoir. Il me semble, en tout cas, que c'est dans cette ligne que se situe l'avenir.

C'est pour cela que j'étais un peu étonné au départ de voir que la gérance était confiée exclusivement à la QCM. Comment allez-vous acquérir le "know-how" pour SIDBEC?

M. Gignac: Tout d'abord, je vais vous dire que c'est une pratique assez courante qu'un groupe de compagnies se réunissent ensemble et engagent un gérant pour administrer une mine. Cela se fait dans le cas de IOC, de Wabush, etc. Il y a des compagnies qui se spécialisent dans cela. Comment s'appellent-elles? Cleveland Clift, entre autres, et il y en a une autre, Pickands Mather. Ce sont des compagnies spécialisées dans ce domaine, la gérance de mines. Je dois vous dire que cela a l'air facile de faire un peu ce que vous avez vu dans le film, faire sauter de la dynamite, mais il y a une logistique dans cela qui est extrêmement complexe. Comme je vous dis, ce ne sont pas des choses qu'on peut absorber facilement et rapidement sans risquer, si on s'y lance, de faire de faux pas qui peuvent être extrêmement coûteux. D'autre part, la nouvelle société qui n'a pas de nom encore, j'espère qu'elle va en avoir un, un de ces jours, assume, si vous avez bien remarqué, la gérance de l'usine de bouletage. Seulement cette petite gérance va demander un effort extraordinaire de la part de la nouvelle société. On a cru que, dans le moment, du moins, ce serait préférable de séparer un peu ou de partager les responsabilités et de ne pas assumer la responsabilité à partir de la mine jusqu'à l'usine de bouletage et la mine de...

M. Morin: Cela se comprend facilement. Vous ne pouvez pas absorber tout d'un coup...

M. Gignac: D'autre part, je dois vous dire, après avoir visité ces chantiers et d'autres, ceux de Fermont, en particulier, que la très grande majorité du personnel, des employés de la QCM sont des Canadiens français très compétents, mais qui travaillent pour QCM. Qu'est-ce qui va arriver dans l'avenir? Je ne peux pas vous le dire. Il y a sûrement là un noyau extrêmement important d'hommes compétents qui sont en train de se former et qui travaillent pour QCM. Il y en a peut-être d'autres qui travaillent pour Iron Ore Company of Canada et qui vont, éventuellement, travailler pour la nouvelle société à Port-Cartier. Peut-être que dans cinq ou dix ans, on sera beaucoup plus en mesure de voir les choses d'un autre côté, de la façon peut-être que vous venez de mentionner.

M. Morin: Cela me suffit pour l'instant. Je n'entendais certainement pas dire que vous pourrez tout absorber d'un seul coup. Vous avez déjà énormément de choses, de fer au feu, si je peux m'exprimer ainsi. Donc, il n'est pas à exclure, si j'ai bien compris vos propos, qu'éventuellement, on en vienne à s'occuper également d'extraction proprement dite.

M. Gignac: II n'est pas exclu qu'on en vienne à cela.

M. Morin: Est-ce que je pourrais vous demander de m'expliquer un peu le système selon lequel vous allez payer à QCM une redevance à la tonne plutôt que d'acheter les droits sur le gisement et de payer les redevances que paie normalement un exploitant au gouvernement? Une question accessoire, je vous la pose tout de suite, en même temps. Qui a dicté, ou qui a suggéré, a proposé la solution qui me paraît un peu bizarre de ce double système de redevance?

M. Gignac: Si je comprends bien votre question, il s'agit de savoir pourquoi payer une redevance plutôt que d'acheter la mine? Est-ce cela?

M. Morin: C'est un peu cela. Si je comprends bien...

M. Gignac: Je vous dis tout de suite qu'on peut acheter la mine à un prix qui serait probablement le nombre de tonnes, qu'on projette, à 180 millions de tonnes multipliées par la redevance par tonne, à la valeur présente, c'est-à-dire établie à la valeur présente. Ce serait le montant qu'il faudrait payer pour la mine. Je pense qu'on n'a pas fait le calcul, on peut le faire.

Cela coûterait à peu près entre $70 millions et $100 millions, si on faisait des chiffres. Ce serait $100 millions de plus qu'il faudrait demander pour acheter la mine. C'est une chose à laquelle nous avons pensé, parce que je dois vous dire que la redevance n'est pas à un taux fixe. C'est à un taux variable et il varie suivant l'économie, ce qui se fait dans le milieu minier, etc. Il y a des avantages certains à acheter la mine. La seule chose, c'est qu'il faut y mettre le paquet d'argent pour l'acheter.

M. Morin: Oui, mais je me demandais, devant ce système, combien pourraient rapporter à QCM ces montants que vous allez lui verser, chaque année, par rapport à ce qu'elle aura à payer au gouvernement, à titre de droits miniers, à titre de redevances.

Si j'ai bien compris le système, cette compagnie est l'exploitant officiel et c'est elle qui fait la redevance au gouvernement. Et, à votre tour, vous allez lui payer des montants. Ce que vous allez lui payer correspond-il à la redevance qu'elle va payer au gouvernement?

M. Gignac: Elle ne paie pas de redevance au gouvernement. La QCM est taxée sur ses profits par le gouvernement, alors que nous payons une redevance de tant par tonne. En l'occurrence, je pense que c'est actuellement $1.35 la tonne.

M. Morin: On ne peut pas vraiment établir la différence entre les deux.

M. Gignac: Cette compagnie est taxée sur ses profits.

M. Morin: Parce que cela dépend de ses profits. Cela peut se solder par des pertes certaines années, par des profits d'autres années.

M. Gignac: Elle n'a pas l'habitude de perdre trop d'argent!

M. Morin: Non, j'ai bien compris. Ce que j'entends par cela, c'est qu'on ne peut pas vraiment calculer la différence et dire: Cela va lui rapporter tant. Cela dépendra de chaque année.

M. Gignac: Je pense que le gouvernement pourrait le faire, s'il prenait le montant global en impôt qui est versé et le divisait par le nombre de tonnes qui est extrait de la mine.

M. Morin: Pour l'instant, ce qui a été convenu, si j'ai bien compris, c'est $0.70 la tonne. En tout cas, c'est ce que le ministre nous a dit.

M. Gignac: Pour la redevance? C'est $1.35.

M. Morin: C'est $1.35.

M. Gignac: Ce qui est à peu près l'équivalent de ce qui se paie dans les mines de la Côte-Nord.

M. Morin: En juillet 1976, j'ai cru voir quelque part...

M. Saint-Pierre: En juillet 1976? C'est à venir!

M. Morin: En juillet 1974, je m'excuse. C'est lors de votre dernière comparution, je crois, au moment du projet de loi 22, il me semble qu'on avait mentionné $0.70 la tonne. Je vais essayer de trouver la référence.

M. Gignac: En 1970, $0.80, ce qui était le cas, à ce moment. Depuis ce temps, c'est monté à $1.35. Une minute, je pense que j'ai les chiffres exacts ici. La base est de $0.75 et c'est escaladé suivant les prix de vente du concentré. Si le prix de vente du concentré a monté de 35% ou de 40%, vous partez d'une base de $0.75 et vous ajoutez par-dessus.

M. Morin: A ce moment, vous nous disiez: Nous paierons une redevance qui, je dirais, est au-dessous de la moyenne normale: $0.70 la tonne. Maintenant, est-ce que cela se situe davantage dans la moyenne?

M. Gignac: C'est encore dans la moyenne. La moyenne de tout le monde a remonté. Cela semble évident que nous devrions acheter la mine. C'est strictement une question financière.

M. Morin: Oui. Combien cela va-t-il vous coûter? Cela veut dire $1.35, multiplié par le nombre de tonnes qui est prévu, c'est-à-dire $6 millions?

M. Gignac: C'est 180 millions de tonnes, multipliées par $1.35, en dollars d'aujourd'hui, cela fait à peu près $200 millions, ce qui veut dire, probablement, que, dans vingt ou quinze ans d'ici, ce sera peut-être $2.35.

M. Morin: Oui, mais cela est pour toute la période, mais, pour une année d'exploitation, ce serait donc $1.35 par 6 millions de tonnes.

M. Gignac: C'est cela. Cela veut dire $8 millions.

M. Morin: $8 millions. Vous nous dites que $1.35 peut être réajusté avec le temps.

M. Gignac: Avec le prix du concentré... Si le prix de vente du concentré remonte, au prix de base on rajoute proportionnellement... On relève le coût de la redevance.

M. Morin: Peut-être devrais-je vous poser une ou deux questions pour bien comprendre les accords avec British Steel. Dans votre exposé, à la page 9, vous semblez nous... vous nous avez entretenus de la participation de British Steel dans des termes qui m'ont paru très prudents. La

convention signée donnerait le droit à British Steel de se retirer du projet, si le financement espéré ne peut être obtenu, ce qui, si j'ai toujours bien compris votre exposé, vous forcerait à racheter 60%, puisque vous avez indiqué que 40% seraient acquis par QCM, donc vous seriez peut-être du jour au lendemain forcés de racheter 60% de la participation de British Steel.

M. Gignac: Oui, cela veut dire deux choses: Si QCM décide ou choisit de ne pas racheter les 40% des actions de British Steel, cela veut dire que SIDBEC pourrait se retrouver avec 92% ou presque des actions de la société. Maintenant, je dois vous dire, d'autre part, qu'au moment où je vous parle, toutes les ententes que j'ai énumérées dans le document ne sont pas signées, mais les négociations sont en cours. Il y a certaines ententes sur lesquelles nous sommes d'accord, il y en a d'autres sur lesquelles il y a encore des points qui sont litigieux. On négocie là-dessus depuis maintenant six mois de façon extrêmement intense. J'espère que, d'ici quelques semaines, on va pouvoir s'entendre. Mais, à partir du moment où... si la compagnie British Steel signe une convention d'actionnaires, c'est parce que nous sommes en mesure de leur dire, nous et nos conseillers financiers, devrais-je dire, que nous pouvons les assurer, d'une façon raisonnable, qu'un financement est possible. Si, à ce moment-là, British Steel, une preuve lui ayant été donnée par des conseillers financiers qu'elle a acceptés, qu'elle a choisis, d'ailleurs, avec nous, signe des contrats et qu'au bout de six mois, il n'y a pas de financement qui est fait, ou avant six mois, elle a le choix de se retirer. Après six mois, si elle veut se retirer, les punitions ou la pénalité qui est imposée est tellement sévère que c'est à peu près impossible de se retirer. Mais je pense que non seulement SIDBEC, mais tout le monde est d'accord pour dire que, quand une convention des actionnaires sera signée, il est à toutes fins pratiques, virtuellement impossible de penser que qui que ce soit des actionnaires puisse se retirer de cette entente. Peut-être que non au plan juridique, mais à toutes fins pratiques.

M. Morin: D'autre part, j'ai cru voir dans les journaux que British Steel a obtenu, pour les fins justement du grand projet de Fire Lake, un financement de quelques dizaines de millions de dollars de la CEE ou de la CECA, je ne sais plus...

M. Gignac: De la CEE, $78 millions.

M. Morin: $78 millions, c'est cela. Donc, si je comprends bien...

M. Gignac: C'est leur équité.

M. Morin: ...c'est plutôt encourageant pour vous.

M. Gignac: En ce moment, oui.

M. Morin: Cela signifie que les difficultés que connaît la British Steel ne seront pas un empêchement à la poursuite de vos projets, parce que la British Steel, on le sait, est en difficulté financière.

M. Gignac: Oui, cette année n'a pas été leur meilleure année. Elle a perd u environ 300 millions de livres. Evidemment, le taux de la livre baissant à un rythme accéléré de ce temps-ci, je ne sais pas ce que cela veut dire.

M. Morin: Là, vous utiliseriez des moyens comme le gouvernement en utilise ici pourdiminuer les déficits.

M. Kennedy: Est-ce que c'est votre recherchiste ou si c'est vous qui avez trouvé cela?

M. Morin: Ne mêlons pas les cartes. Je ne voulais pas lancer un débat, M. le Président. Mais c'est bien certain que la dévaluation de la livre ne diminue pas, hélas, pour la British Steel, son déficit, sauf si elle a à le payer à l'étranger, évidemment. Ah! mais non, ce serait pire si elle a à le payera... Je n'entre pasdans les détails.

M. Saint-Pierre: Ne parlez pas de monnaie parce qu'on va avoir de la difficulté de votre côté.

M. Morin:Vous pourriez peut-être nous éclairer, M. le ministre...

M. Saint-Pierre: Non.

M. Morin: ... chaque fois que vous traitez de ces questions, c'est tellement lucide et transparent! Est-ce que je dois comprendre que vous pourriez être appelé éventuellement à assumer, dans des délais relativement brefs, un pourcentage considérable de la participation de la British Steel advenant que cela ne puisse pas se matérialiser?

M. Gignac: Théoriquement, oui. Pratiquement, oui aussi; seulement, je pense qu'à ce moment-là, on a déjà indiqué à l'actionnaire principal quelle serait notre intention. Je pense qu'à ce moment-là, il faudrait, tout en maintenant l'allure du projet, se retourner rapidement et trouver d'autres partenaires. Il y en a.

M. Morin: Oui. Cela ne voudrait pas nécessairement dire que vous seriez appelé, vous, à faire face à une augmentation...

M. Gignac: Cela créerait un problème financier temporaire parce qu'il faudrait continuer les travaux à la mine et...

M. Morin: Et à Port-Cartier. M. Gignac: C'est cela.

M. Morin: Oui, d'accord. Pourriez-vous nous indiquer comment sera remboursée à SIDBEC une partie des $50 millions que vous avez déjà investis seul, si je vous ai bien compris — à la page 10 de votre

exposé — dans l'usine de Port-Cartier? Si j'ai bien compris, la nouvelle société, appelons-la le consortium, si vous voulez, va assumer l'exploitation de l'usine de Port-Cartier; donc, il va probablement y avoir une redistribution du coût entre les membres du consortium.

M. Gignac: Non seulement il va assumer l'exploitation de l'usine de Port-Cartier, mais le consortium va aussi être responsable de la mine, va avoir dans son bilan la mine de Fire Lake.

Dès le moment qu'une convention d'actionnaires est signée, supposons que la convention soit signée suivant les termes qui ont été décrits dans le document que je vous ai lu, chacun met son argent au prorata de sa participation et, à ce moment-là, les sommes se déplacent, c'est-à-dire qu'en fait, ce qui arrive dans le moment, c'est que SIDBEC prête de l'argent à un consortium qui n'existe pas, ni plus ni moins. Quand le consortium va être formé, chacun va prendre sa part et ce qu'on a fourni en trop va nous être remis et c'est la même chose pour la QCM. Parce que la QCM aussi a dépensé pas mal d'argent à la mine de Fire Lake. Alors, tout cela va se régler quand la convention des actionnaires va être signée, que chacun aura mis sa part; à ce moment-là, chacun assumant sa part, les dettes ou les avances — j'appellerais cela les avances — disparaissent et se transforment en actions.

M. Morin: Bien, je comprends. Vous nous avez dit, dans le passé, que ce projet de Fire Lake-Port-Cartier était intéressant pour SIDBEC surtout sur la base d'une réduction et d'une stabilité plus grande des coûts des approvisionnements.

Est-ce que vous pourriez vous donner une idée à tout le moins générale de l'ampleur de la réduction de ces coûts annuellement?

M. Gignac: Si on prend l'année courante, on peut dire que c'est à peu près $0.10 par unité de fer, une différence de $6 la tonne, si vous voulez, entre le prix que ça nous coûterait via Fire Lake-Port-Cartier et le prix qu'on paie sur te marché. Maintenant...

M. Morin: Cela, c'est en comparaison avec...

M. Gignac: C'est aujourd'hui.

M. Morin: ... les prix du marché cette année.

M. Gignac: Maintenant, cette année.

M. Morin: Oui.

M. Gignac: Maintenant, il peut arriver, comme c'est arrivé dans le passé, qu'on paie beaucoup pi us cher que cela, pas nécessairement à cause du coût des boulettes en soi, mais à cause des coûts de transport. Je pense que c'est en 1974 que les coûts de transport ont quadruplé. Evidemment, ça change énormément le coût de la boulette rend ue à destination, d'une part. D'autre part, quand on parle de stabilité, je pense que vous allez comprendre assez facilement que si on décidait ou que si on avait suggéréd'une façon intense à l'actionnaire principal d'aller investir de l'argent au Brésil, par exemple, qui a des minerais bien meilleurs que le nôtre, d'une qualité supérieure au nôtre, il peut survenir, à un moment donné, des incidents politiques qui pourraient être désastreux et qui pourraient nous rendre la vie absolument intenable, tant sur le plan de l'approvisionnement que sur le plan des sommes d'argent qu'on pourrait y engouffrer.

M. Morin: Les aventures des Etats-Unis en Amérique latine sont la pour le montrer.

M. Gignac: C'est cela. En fait, on avait le choix. On aurait pu, théoriquement, investir au Brésil à un coût infiniment inférieur à ce qu'on vous présente aujourd'hui, mais je pense que, quand on a le minerai à la porte, c'est assez difficile à expliquer.

M. Morin: Oui, surtout dans une politique qui se veut...

M. Gignac: A long terme.

M. Morin:... à long terme qui se veut une politique d'exploitation des richesses du pays par les Québécois.

M. Gignac: C'est ça.

Electricité requise

M. Morin: Pourriez-vous nous donner des indications sur les quantités d'électricité qui vont être requises par l'usine de Port-Cartier,en mégawatts ou autrement, peu importe?

M. Gignac: C'est à peu près 60 mégawatts, 60 000 kilowatts, à Port-Cartier. A Fire Lake, c'est beaucoup moins, c'est 20 000 kilowatts alors qu'à Port-Cartier, c'est à peu près 60 000 kilowatts. C'est beaucoup moins qu'à Contrecoeur, évidemment, mais Contrecoeur est un des gros clients de l'Hydro-Québec, je dois dire, c'est notre demande tout près de 200 000 kilowatts. En tout et pour tout, cela veut dire qu'on doit approcher 300 000 kilowatts.

M. Morin: Mais, à Contrecoeur, vous avez négocié depuis longtemps avec l'Hydro-Québec pour l'électricité que vous utilisez à cet endroit. Est-ce que les tarifs négociés à l'origine sont encore applicables à Contrecoeur? Commençons par Contrecoeur par exemple.

M. Gignac: Quand on a démarré nos fours à Contrecoeur, on a passé un contrat avec l'Hydro-Québec pour une période de dix ans, qui s'étend jusqu'en 1982. On est actuellement en négociation pour le contrat d'énergie additionnelle qu'on va requérir pour les deux nouvelles fournaises.

M. Morin: Dans vos négociations concernant soit vos nouvelles fournaises de Contrecoeur, soit l'électricité dont vous allez avoir besoin à Port-

Cartier, est-ce que l'Hydro vous applique ce qu'elle appelle sa grille officielle? Ou bien si vous négociez des tarifs spéciaux?

M. Gignac: Dans le cas de Contrecoeur, on négocie un tarif spécial. Dans le cas de Fire Lake, les mêmes principes s'appliquent. D'abord, comme je vous l'ai dit, l'électricité est fournie par une compagnie d'électricité qui est la propriété de Québec Cartier et elle applique les mêmes tarifs que l'Hydro-Québec.

Pour ce qui est de Port-Cartier, c'est le tarif de la région pour la grosse industrie.

M. Morin: Les tarifs qui vous sont chargés à Port-Cartier correspondent donc à la grille normale de l'Hydro-Québec?

M. Gignac: Oui. En d'autres mots, on est sur le même pied que QCM à Port-Cartier ou que ITT-Rayonier ou d'autres.

M. Morin: Mais est-ce que c'est bien l'Hydro à Port-Cartier?

M. Gignac: Oui.

M. Morin: C'est encore l'Hydro?

M. Gignac: Oui.

M. Morin: Tandis qu'à Fire Lake, c'est une compagnie...

M. Gignac: C'est l'Hydro aussi. M. Morin: Oui.

M. Gignac: Mais, à la ville de Gagnon, c'est Hart Jaune Power et à Fire Lake, c'est l'Hydro-Québec venant du poste Normand, si je me souviens bien.

M. Morin: Je vous posais la question parce qu'il n'y a pas si longtemps, le ministre avait proposé un tarif... Si je vous pose la question, c'est que je voudrais voir quelle est la politique générale du ministère devant ces fournitures d'électricité en grande quantité.

Il n'y a pas si longtemps, il y avait un projet qui s'appelait la National South Wire, une aluminerie non loin d'ici. Je ne sais plus où elle en est rendue maintenant. Je ne sais pas même si elle traîne encore dans le paysage, le ministre pourrait peut-être nous le dire, mais elle avait obtenu — ce serait peut-être intéressant que vous le sachiez, je suis sûr que vous le savez déjà...

M. Gignac: Je suis au courant.

M. Morin: ... un certain tarif préférentiel qui représentait, échelonné sur une dizaine d'années, si ma mémoire est bonne, un montant de $217 millions. C'est un tarif subventionné fort intéressant.

C'est la raison pour laquelle je vous posais la question.

M. Saint-Pierre: M. le Président...

M. Morin: Je vais poser la question au ministre, parce que peut-être nous aurons une réponse plus directe. Est-ce que le ministre a déjà étudié la possibilité que QCM, pardon, que le nouveau consortium puisse, à Port-Cartier, avoir les mêmes avantages que ceux qu'il entendait accorder à National South Wire à Saint-Augustin?

M. Saint-Pierre: Je pense qu'on a vu que, dans le cas de Gagnon et de Fire Lake, les consommations d'électricité sont marginales pour le projet. Sachant la date où le contrat de Contrecoeur a été négocié avec l'Hydro-Québec, je ne voudrais pas le faire révéler publiquement, mais je pense que les gens de l'aluminerie — et c'est très hypothétique, ce dont on parle, parce que le projet a été négocié dans de toutes autres conditions — accepteraient demain matin, exactement les mêmes conditions que l'Hydro-Québec a à Contrecoeur.

M. Morin: Négociées pour...

M. Saint-Pierre: Non, non. Exactement les mêmes conditions. Je ne blâme pas l'Hydro-Québec, évidemment, parce qu'elle y a un contrat. C'est vous qui avez abordé le sujet. On peut aller au fond des choses, mais, c'est évident, j'imagine que, dans le moment, vous ne payez pas 7.5 mills.

Lorsque vous avez négocié en 1972, c'était l'époque où l'Hydro-Québec a commencé à escalader ses coûts à peu près tous les deux ans.

M. Gignac: Je m'excuse, mais, dans le contrat qu'on a passé avec l'Hydro-Québec, il y a une clause escalatoire. Sur une période de dix ans, chaque année, on paie un peu plus. Je ne pourrais pas vous dire exactement, par coeur, quelle est cette clause, mais...

M. Saint-Pierre: Mais je pense que pour le bénéfice du chef de l'Opposition, cela le renseignerait en matière de tarifs d'électricité, vous pourriez dire le taux moyen que vous payiez en 1975, disons, et je pense que si j'avais le droit de gager, je gagerais que c'est moins que 7.5 mills.

M. Morin: Je veux bien que le président de SIDBEC nous le dise, mais ce n'est pas tellement Contrecoeur qui m'intéresse, parce que cela a été négociée en 1972. Ce qui m'intéresse, c'est Port-Cartier. Et vous m'avez dit, si je vous ai bien compris, que c'est la grille officielle.

M. Gignac: On n'a pas de traitement de faveur à Port-Cartier. On paie le taux industriel et tout le monde est sur le même pied. C'est un taux qui se situe aux environs de 9 à 10 mills.

M. Morin: Mais c'est la raison pour laquelle je posais la question au ministre. Je saisis mal la logique.

Pourquoi, dans le cas de la National South Wire, c'est un tarif spécial.

M. Saint-Pierre: Je ne sais pas pourquoi vous parlez de cela. Ce n'est pas un tarif; ce n'est pas la réalité; cela a été mentionné où il n'y avait aucun engagement contractuel. Vous revenez à cela comme un dada dans d'autres choses. Si vous voulez, on va parler à nouveau de SIDBEC, sans cela on va parler de l'aluminerie. Là, on ne fera pas venir à nouveau les gens ici.

M. Morin: Je ne veux pas non plus que nous revenions sur de vieilles querelles. Je voulais simplement que vous nous disiez, même s'il n'y avait pas engagement, il n'y avait pas de contrat signé, c'est un fait.

M. Saint-Pierre: Même pas d'engagement contractuel, même pas de...

M. Morin: II y avait un décret ministériel, n'est-ce pas?

M. Saint-Pierre: Non, monsieur, vous lirez à nouveau...

M. Morin: II y avait quoi exactement?

M. Saint-Pierre:... le dernier paragraphe. L'arrêté ministériel ne prévoyait un engagement uniquement pour l'étude de rentabilité. Vous lirez à nouveau le dernier paragraphe.

M. Morin: Un engagement pour les fins de l'étude de rentabilité.

M. Saint-Pierre: Mais aucun autre engagement de toute autre espèce. Vous aimez parler de choses hypothétiques mais, moi, j'aime parler de choses réelles. Je pense qu'on a devant nous quelque chose de très concret, de très réel, peut-être qu'on pourrait revenir à cela.

M. Morin: D'accord, revenons-y. Est-ce que le ministre a songé à appliquer un traitement semblable au consortium qui va créer cette usine à Port-Cartier?

M. Saint-Pierre: Je répète de nouveau que, si je comprends bien, par les explications qui ont été données tantôt, sur les ventes prévues annuellement dans l'usine de Fire Lake qui sont quand même d'un ordre de grandeur de $185 millions... ai-je raison de le dire? Les ventes annuelles sont-elles de $200 millions?

M. Gignac: Oui, de $200 millions.

M. Saint-Pierre: De $200 millions. Le coût de l'électricité, compte tenu des chiffres qu'on a mentionnés, de 25 mégawatts et 65 mégawatts, est, somme toute, marginal par rapport au projet. Je n'ai pas eu de demande.

M. Gignac: Vous parlez des ventes de SIDBEC ou de Fire Lake?

M. Saint-Pierre: Je parle des ventes de Fire Lake pour l'ensemble du projet.

M. Gignac: Ah! très bien. $200 millions. M. Saint-Pierre: $200 millions.

M. Morin: Pour vider cette question, vous n'avez pas demandé de tarif spécial pour Port-Cartier et vous vous attendez à payer le prix de la grille.

M. Gignac: On a négocié, mais on s'est rendu compte qu'il fallait se soumettre aux lois de l'Hy-dro dans la région de Port-Cartier. C'est ce qu'on a fait, comme de bons garçons.

M. Morin: Oui.

M. Gignac: Pour ce qui concerne Contrecoeur, je ne peux rien vous dire, parce que le contrat n'est pas négocié encore.

M. Morin: Non, je comprends bien.

M. Gignac: On est en train de le négocier.

M. Morin: Je comprends bien celui de Contrecoeur. Je voulais connaître la situation pour Port-Cartier. L'entente est-elle déjà conclue avec l'Hydro ou est-elle en négociation?

M. Gignac: Non, mais, en principe, on sait à peu près à quoi s'en tenir.

M. Morin: Bon. Pour l'usine de bouletage et de concentration secondaire à Port-Cartier, est-ce que vous avez demandé ou obtenu une subvention du ministère fédéral de l'Expansion économique régionale?

M. Gignac: Non.

M. Morin: Ni demandé, ni obtenu?

M. Gignac: Pour autant que je sache, dans la loi du ministère de l'Expansion économique régionale avec lequel j'ai déjà eu des démêlés laborieux, la loi prévoit que tout ce qui se rattache au développement minier n'est pas sujet à des subventions.

M. Morin: Pourtant, est-ce que le processus en question ne se rattache pas déjà à ce qu'on pourrait appeler l'aspect manufacturier?

M. Gignac: C'est un aspect manufacturier, mais il rattache cela au domaine minier. C'est leur...

M. Saint-Pierre: Pour être un peu familier avec la loi, c'est qu'on exclut également la première transformation d'une richesse. Vous avez le même phénomène qui peut jouer dans le cas de

scieries qui ne peuvent bénéficier des dispositions de la loi, car il s'agit d'une première transformation de la richesse.

M. Morin: Est-ce que vous savez si I'lron Ore, à Sept-lles, pour son usine de bouletage, avait obtenu ou demandé de l'aide, une subvention du même ministère?

M. Gignac: Je ne suis pas en mesure de répondre à cette question, mais je suis convaincu qu'elle n'a eu aucune aide du gouvernement fédéral ou du MEER. Elle en a peut-être eu du gouvernement fédéral, mais sûrement pas du MEER.

Projet de route

M. Morin: Bien. Peut-être quelques petites questions encore sur le projet ou sur des aspects secondaires de votre grand projet. Vous avez évoqué les problèmes que vont rencontrer les villes de Gagnon et de Port-Cartier avec l'afflux des travailleurs, la nécessité de loger tous ces gens qui vont être attirés par le développement de votre projet.

Pour ce qui est de Gagnon, dont vous nous avez parlé, je crois, à la page 12 de votre exposé, vous nous avez dit que les principaux problèmes sont l'accès au monde extérieur. Effectivement, quand j'ai eu à m'y rendre, il n'y a pas si longtemps, en tournée, je me suis rendu compte que c'est un endroit extrêmement isolé et où le sentiment d'isolement est très accentué, très fort. J'imagine que cela doit constituer pour les employeurs un obstacle psychologique considérable, parce que beaucoup de travailleurs répugnent à s'isoler de la sorte au milieu de nulle part, comme me disait l'un des travailleurs. Est-ce que, dans vos tractations avec le gouvernement, vous avez obtenu des garanties au sujet de la construction de la route, au sujet aussi de la modernisation du secteur scolaire ou du secteur hospitalier? Où en êtes-vous dans vos tractations avec le gouvernement dans chacun de ces trois secteurs? Parce que je dois vous dire qu'il semble que nous soyons au bord de difficultés financières considérables et justement les secteurs qui en souffrent, à part le développement économique, à part la mission économique, ce sont le secteur scolaire, le secteur hospitalier, la construction des routes. Il semble bien que beaucoup de projets aient dû être abandonnés. J'aimerais connaître, à la lumière de ces nouvelles restrictions, l'état de vos négociations avec le gouvernement.

M. Gignac: Je dois dire qu'on n'a pas eu de négociations tellement intenses jusqu'à maintenant avec le gouvernement concernant ce que vous venez de mentionner. Personnellement, la seule chose sur laquelle je me suis attardé à discuter avec certains membres, je ne me souviens pas si j'en ai parlé à M. Saint-Pierre, mais j'en ai sûrement parlé à M. Garneau qui était, jusqu'à il y a quelques mois, l'actionnaire principal, et aussi à M. Bourassa... J'ai fortement insisté pour que le tronçon de route qui reste à faire entre Gagnon et Manic 5, qui est à peu près de 60 milles, soit terminé le plus rapidement possible, parce que, si vous y êtes allé, vous le savez, l'éloignement, c'est un phénomène antisocial en soi. De fait, ne pas être capable d'atteindre la civilisation, même si les distances sont énormes, le fait de ne pas être en mesure de pouvoir atteindre la civilisation par ses propres moyens a réellement un impact très négatif...

M. Morin: Oui, remarquez, M. le Président...

M. Gignac: ... sur quelque travailleur que ce soit, du gérant de la mine jusqu'au dernier des balayeurs.

M. Morin: Oui.

M. Gignac: A mon sens, c'est sûrement, de loin, ma plus grande préoccupation en ce qui concerne toutes nos installations de Gagnon et de Fire Lake. Pour ce qui est du domaine hospitalier et scolaire, il y a quand même là une infrastructure. Il s'agit de l'améliorer. Cela va coûter beaucoup moins cher que la route que je viens de vous mentionner. La société, en soi, peut aussi aider un peu de ce côté.

M. Saint-Pierre: Pour répondre à la question, M. le Président, au début de janvier, alors qu'on examinait l'ensemble du dossier, c'est une des facettes du dossier qui nous avait frappés, l'absence de coordination sur le plan des implications que le projet pouvait avoir dans l'ensemble des autres activités des ministères du gouvernement provincial. Le secrétariat du Conseil exécutif a confié le mandat à l'Office de planification et de développement de faire les tables rondes nécessaires entre les Affaires municipales, l'Education et les Affaires sociales, pour tout regarder les implications, et à Port-Cartier et à Gagnon, pour le projet.

M. Morin: Ce n'est pas que les travailleurs ne puissent pas sortir. Ils peuvent mettre leurs voitures sur le train, mais cela coûte une fortune. L'un d'eux m'expliquait qu'aller en ville, comme il disait, cela lui coûte $200 de transport en partant, ce qui, évidemment, ne contribue pas à donner à ces gens le sentiment qu'ils habitent vraiment le Québec. Ils se sentent très isolés. Cette route d'une soixantaine de milles qu'il reste à construire il faudra aussi sans doute paver de Manic 5 en descendant, est-ce que vous avez une idée du coût que cela peut représenter? Est-ce que les travaux ont débuté le moindrement? Est-ce que vous avez une idée du calendrier de la construction de cette route? Ce n'est peut-être pas à vous que je devrais poser la question, c'est peut-être au ministre, mais pour le cas où vous auriez des réponses.

M. Gignac: Je n'ai aucune réponse à apporter là-dessus. J'ai tout simplement mentionné cette demande plusieurs fois et j'espère que ce sera fait le plus rapidement possible. Au point de vue des

dépenses, si on parle d'une route de 60 milles, on peut parler d'à peu près $300 000 à $400 000 du mille.

M. Saint-Pierre: Au moins cela.

M. Gignac: En tout cas, c'est une affaire d'à peu près $35 millions à $36 millions.

M. Morin: Ce n'est pas peu d'argent, dans la situation financière actuelle du Québec! J'aimerais demander au ministre où en est ce dossier.

M. Saint-Pierre: Evidemment, c'est avec le ministère des Transports pour l'ensemble des besoins au plan routier de la province. Il s'agit d'établir des priorités, si c'est $35 millions à cet endroit ou si c'est $35 millions dans d'autres endroits de la province qui ont aussi des besoins d'argent.

M. Morin: Bien sûr, mais je voulais vous demander d'être un peu plus précis, parce que cela fait plusieurs années qu'on promet cette route et elle ne vient pas.

M. Saint-Pierre: Qui a promis cette route?

M. Morin: Chaque fois qu'on va dans cette région, on nous dit: Le gouvernement nous a dit que cela s'en venait et qu'il allait la construire. Et effectivement, cela ne se fait pas. Je crois que cela peut devenir — je ne le souhaite pas — un facteur négatif dans vos opérations. Je souhaiterais, pour ma part, que le gouvernement en fasse une priorité. Etant donné que cette région va connaître un nouveau développement, il me semble que cela devrait être parmi les priorités.

Pour ce qui est de Port-Cartier, maintenant, j'ai eu l'occasion de visiter une école il n'y a pas longtemps. C'était au printemps dernier, il y a un an à peu près, et c'était la fonte des neiges. On avait dû faire évacuer la plupart des salles de cours, parce que l'eau coulait dans les salles de classe. C'était un spectacle assez affligeant. Cette nouvelle grande école dont vous nous parlez, qui a été autorisée, avec-vous une idée du calendrier de sa construction?

M. Gignac: C'est en 1977, me dit-on.

M. Morin: Ce n'est pas plus précis que cela.

M. Gignac: Nous sommes allés en soumissions publiques. Je pense que les soumissions ont été reçues. Maintenant, je ne crois pas que le contrat ait été accordé jusqu'à présent. Il n'est pas accordé, mais les soumissions sont entrées. D'après l'échéancier tel qu'on le connaît aujourd'hui, cela devrait être terminé dans le cours de l'année 1977.

M. Morin: Et cet hôpital dont vous nous avez parlé et qui ne répond plus aux besoins, avez-vous une idée du coût des transformations?

M. Gignac: Pour avoir les services normaux hospitaliers qu'une ville éventuelle de 10 000 habitants peut requérir, je pense qu'il faudrait quasiment songer à abandonner l'hôpital actuel et en construire un nouveau. En tout cas, c'est probablement un des points majeurs qu'il va falloir regarder, parce que, actuellement, à toutes fins pratiques, il n'y a pas de médecins, techniciens, ou infirmières ou qui que ce soit qui puisse être attiré par un hangar comme cela!

M. Morin: C'est un fait. Et quand vous ajoutez la situation scolaire, cette espèce d'abri temporaire qui sert d'école, la situation hospitalière, quand vous ajoutez à cela le manque de logements chronique à Port-Cartier, cela ne vous fait pas des conditions idéales pour attirer là-bas une main-d'oeuvre qualifiée, une main-d'oeuvre exigeante aussi. Si je vous en parle, c'est parce que j'ai l'impression qu'une bonne partie du succès de votre projet va tenir à ces questions qui peuvent paraître secondaires mais qui, pour les travailleurs, deviennent de très gros obstacles.

M. Gignac: Oui. Je suis d'accord avec vous. C'est pour cela, d'ailleurs, que je les ai mentionnées dans mon document. Cependant, il faut bien comprendre. On parle toujours de projections. C'est-à-dire qu'on dit qu'en 1978, il va y avoir 10 000 personnes à Port-Cartier. Il va y avoir 10 000 personnes à Port-Cartier s'il y a une usine de bouletage qui fonctionne et s'il y a une mine qui fonctionne. Avant qu'un gouvernement, ou même qui que ce soit puisse réellement prendre des décisions définitives, sur des choses comme cela, il faut qu'il soit à peu près assuré que tout va fonctionner.

Il y a certaines urgences: vous parlez des logis, cela est une question à laquelle il va falloir s'attaquer très rapidement, dès que nous serons virtuellement sûrs que tout va fonctionner. Actuellement, nous prenons pour acquis que tout va fonctionner et nous avons mis en marche, avec les autorités de la ville, un mécanisme pour faire des demandes au gouvernement. Dans cela, nous avons établi certaines priorités et, certains services du gouvernement vont être obligés de prendre des décisions très prochainement.

M. Morin: Je ne veux pas vous mettre dans une situation difficile, M. Gignac, mais jusqu'ici, avez-vous rencontré toute la compréhension que vous auriez souhaité? Parce que, je dois vous dire que l'expérience que j'en ai, lors de mes deux passages à Port-Cartier, c'est une série de plaintes de la part des autorités scolaires, municipales, hospitalières, une litanie de plaintes, qu'on ne s'occupe pas d'eux, qu'on ne saurait... Ils ont l'impression, vraiment, que tout cela est laissé un peu à se développer comme cela peut. Si c'est vraiment le cas, si ces gens avaient raison de se plaindre, j'ai l'impression que c'est de nature à compromettre votre... au moins certains aspects de vos projets.

M. Gignac: C'est sûr que c'est un problème sérieux. Nous essayons d'aider ces gens, spécia-

lement les maires, les échevins, les commissions scolaires. Nous essayons de les supporter dans leurs demandes et de les diriger aux bons endroits. Evidemment, ce n'est pas nous qui prenons les décisions.

M. Morin: Non, l'Opposition est également payée pour le savoir. M. Gignac, une dernière question sur Port-Cartier. Vous nous avez parlé de 400 ou 500 logis qui vont être requis pour faire face à l'accroissement de la population, une fois que vos opérations seront en route, seront en marche. S'agit-il de maisons mobiles ou de maisons permanentes? Je vous expliquerai ensuite pourquoi je vous pose la question.

M. Gignac: Oui, de maisons permanentes.

M. Morin: De maisons permanentes. Je n'ai pas de conseils à donner à une société comme SIDBEC, mais dans toute la mesure où vous pouvez éviter les maisons mobiles, j'attirerais votre attention sur l'intérêt qu'il y aurait à construire des maisons permanentes, effectivement. Parce qu'il y a, du côté des maisons mobiles, des difficultés considérables. On fait payer la taxe de vente de 8%, non seulement sur les matériaux, mais sur la main-d'oeuvre qui entre dans les maisons mobiles. Cela représente des montants considérables. Je vous signale que dans ces régions, il y a un véritable problème social qui est en train de se créer, parce que les travailleurs sont pris à la gorge par les vendeurs de maisons mobiles. Avant qu'elles deviennent des immeubles par destination, et vous savez qu'elles ne le deviennent pas à moins d'être installées sur un terrain qui appartient au même propriétaire que la maison mobile, il arrive que la maison change plusieurs fois de mains et que chaque fois on doive repayer la fameuse taxe de 8%. Je vous le signale parce qu'à notre connaissance, cela a donné naissance à beaucoup de difficultés chez les travailleurs de Port-Cartier et de certaines autres agglomérations de la Côte-Nord. C'est une solution à éviter, quand on peut l'éviter.

M. le Président, j'en ai terminé pour le grand projet. Avant d'aborder la situation financière, je voudrais donner l'occasion à mes collègues de la commission de poser des questions.

M. Côté: Vous êtes bien aimable.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Laurier.

M. Marchand: M. le Président, tout d'abord, vous allez me permettre de féliciter le président de SIDBEC et ses collaborateurs, pour le travail déjà fait depuis quelques années, à cause de la jeunesse de la société. Naturellement, nous ne pouvons faire des miracles avec une société aussi jeune, surtout lorsqu'on concurrence des compagnies vieilles de 50 et 100 ans et qui sont peut-être mieux équipées, c'est-à-dire c'est une Ford qui fait concurrence à une Cadillac.

Mais avec le coût de base gigantesque que la société est en train de vous donner, avec l'aide du gouvernement, nous espérons que, l'an prochain, vous nous présenterez un budget qui, même s'il ne montre pas de profit, sera au moins sans déficit, ce qui serait déjà une grande satisfaction pour tous les citoyens du Québec.

Maintenant, M. le Président, je voudrais vous demander, au sujet des boulettes, vous avez une réserve de boulettes actuellement, je pense que c'est à Port-Cartier. Est-ce que je peux savoir la quantité de boulettes qui est en réserve actuellement?

M. Gignac: C'est à Contrecoeur, je pense, que vous voulez dire.

M. Marchand: A Contrecoeur. Vous avez une réserve.

M. Gignac: Entre 300 000 et 400 000 tonnes.

M. Marchand: Est-ce que c'est une réserve normale ou si c'est un peu...

M. Gignac: On parlait tout à l'heure de la stabilité, etc. Quand on fait des achats de boulettes dans le monde, dans notre cas, on fait affaires avec à peu près sept pays, c'est assez difficile de toujours contrôler les arrivages de bateaux. Or, il est arrivé qu'au mois d'octobre et novembre, il est arrivé plusieurs bateaux et on a accumulé beaucoup plus de boulettes qu'on en avait besoin réellement. Par contre, cette situation devrait se redresser d'ici la fin de l'année.

Marketing

M. Marchand: M. le Président, à cause de cette augmentation de ce que vous avez besoin en réserve, est-ce que votre système de marketing est adéquat, s'il doit être amélioré ou si vous envisagez, dans les prochaines années, ou dans un bref délai, d'améliorer ce système de marketing afin, peut-être, d'augmenter le marché? Est-ce que vous avez un système de marketing actuellement?

M. Gignac: Ah! oui.

M. Marchand: Est-ce que vous calculez...

M. Gignac: Cela n'a rien à faire avec le marketing. Vous parlez des boulettes?

M. Marchand: Des boulettes et de...

M. Gignac: Les boulettes, ce sont des achats.

M. Marchand: Des achats, mais quand même, si vous produisez plus, vous avez moins de boulettes. Est-ce que le fait d'avoir un meilleur marketing... Vous ne pouvez pas produire plus.

M. Gignac: C'est évident. Si on avait un marketing extraordinaire et qu'on allait contre la tendance mondiale, non seulement mondiale,

mais canadienne et nord-américaine, qui est à peu près 20% en bas des prévisions même pour l'année 1976, on pourrait effectivement vendre plus de produit, donc utiliser plus de boulettes et en avoir moins en inventaire. Malheureusement, actuellement, notre marketing n'est pas bon pour contrer l'économie qui n'est pas tellement forte encore.

M. Marchand: Est-ce que vous avez l'intention d'augmenter, justement, votre qualité de marketing?

M. Gignac: Oui, c'est en marche.

M. Marchand: C'est en marche. Je vous remercie, M. le Président.

M. Lapointe: M. le Président, une autre question.

Le Président (M. Lafrance): Sur le même su-jet?

M. Lapointe: Oui, sur le même sujet.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député de Laurentides-Labelle.

M. Lapointe: Dans le rapport, M. le Président, que vous avez fait au début, il est dit que 50%, si je comprends bien, de la production des six millions de tonnes seront achetés par SIDBEC. C'est proportionnel à la participation des actionnaires. Est-ce que ces trois millions de tonnes vont être utlisées à Contrecoeur, ou de quelle façon vont-elles être écoulées?

M. Gignac: Dans l'immédiat, on va utiliser un million et demi de tonnes de boulettes à Contrecoeur et on va vendre sur les marchés mondiaux un million et demi de tonnes. Eventuellement, j'ai mentionné ici d'ici quelques années, cela dépendra de l'évolution de SIDBEC, nous rapatrierons les boulettes que nous avons l'intention de vendre pour les utiliser à Contrecoeur, dans d'autres modules de réduction.

M. Lapointe: Selon vos prévisions, quels sont les marchés importants, mondiaux dont vous parlez pour écouler un million de tonnes?

M. Gignac: Le produit qu'on a à vendre ou les boulettes qu'on a à vendre sont des boulettes très spéciales parce qu'elles ont une basse teneur en silice et, évidemment, c'est un produit qui est attrayant pour tous ceux qui, comme nous, sont en train de mettre en place des modules de réduction pour réduire des boulettes. Alors, je vais vous donner un exemple assez rapide. La British Steel Corporation, qui est un de nos participants dans la nouvelle société, est intéressée à acheter plusieurs centaines de milliers de tonnes de boulettes à basse teneur en silice parce qu'elle est en train, justement, de s'installer deux unités de réduction en Angleterre.

M. Lapointe: En plus, cela, de... M. Gignac: En plus de ce qui... M. Lapointe: ... leur proportion.

M. Gignac: C'est cela. C'est un contrat à part, c'est une entente qui ne fait pas partie du...

M. Lapointe: Vous avez prévu dans combien de temps rapatrier, si on peut utiliser le terme, 1 500 000 ou une partie de ce million et demi de tonnes dans les usines de Contrecoeur?

M. Gignac: Si on installait un laminoir de 2 millions de tonnes, cela ne prendrait pas beaucoup de temps. Cela se ferait d'une façon presque instantanée. Un laminoir à plat, je veux dire. Cela va dépendre des installations ou de révolution de la demande à Contrecoeur, des installations à Contrecoeur. Si on installe deux fours ou trois fours électriques d'ici quatre, cinq ou six ans, ça veut dire que le million et demi qu'on met en vente, il va falloir le rapatrier à peu près à 100%.

M. Saint-Pierre: M. le Président, ce serait pour confirmer alors que vous n'anticipez aucune difficulté à vendre les trois millions de tonnes dont vous serez responsables à profit au cours des prochaines années.

M. Gignac: Ce qu'on a l'intention de faire, on est déjà en contact avec plusieurs pays, on parle de pays, et évidemment, il va y avoir des négociations. On essaie de faire un profit adéquat, mais je ne crois pas qu'on ait tellement de problèmes à écouler ces boulettes. C'est parce que ce sont des boulettes de grande qualité.

Le Président (M. Lafrance): Le député de Matane.

M. Côté: M. le Président, est-il exact de dire que, dès le moment où la compagnie fera des profits, avec le type de société que vous avez: vous aurez à payer 40% des profits en impôt fédéral.

M. Gignac: Vous voulez dire... vous parlez de la nouvelle compagnie...

M. Côté: Oui. M. Gignac: Oui.

M. Côté: Si vous étiez demeurés une société d'Etat, est-ce que vous auriez été assujettis à ces 40% d'impôt fédéral, au moment où vous auriez fait des profits?

M. Gignac: Non.

Le choix du type de société

M. Côté: Qu'est-ce qui vous a fait opter pour ce choix, une société comme celle-là?

M. Gignac: Tout d'abord, disons qu'au début, on parlait d'une société à partenaires et nous avons été obligés de faire... quand on a commencé des négociations avec particulièrement... une société à partenaires ne répugnait pas à QCM, mais la société British Steel s'opposait à une société à partenaires pour des questions fiscales ou autres. Alors, nous avons été obligés de faire une concession et d'y aller dans une société à actions. Si cela avait été une société à partenaires, évidemment, on n'aurait pas payé d'impôts, pour notre partie de 50%.

Deuxièmement, si on a aussi été un peu forcé d'aller dans une société à actions, c'est pour des raisons de financement. A ce moment-là, on a été obligé de faire deux fois la courbette et de se soumettre à ça.

M. Saint-Pierre: Cette fois, M. le Président, pour que ce soit bien clair, tantôt vous avez mentionné que le prix de revient pourrait représenter une épargne de $6 à $8 la tonne par rapport à vos approvisionnements actuels sur le prix des grands lacs. Mais si je comprends, l'entente avec les actionnaires prévoit que la nouvelle compagnie est un centre de décision par elle-même et son prix de vente n'est pas un prix coûtant, le prix de transfert n'est pas un prix coûtant, mais en particulier le prix du marché des Grands Lacs. Ce qui veut dire que, dans les opérations de Fire Lake même, les profits resteraient...

M. Gignac: Eventuellement, à un moment donné, si on suivait le profil des prévisions qu'on a faites, la compagnie pourrait à un moment donné verser des dividendes aux participants.

M. Saint-Pierre: Des actionnaires, mais dans la nouvelle société.

M. Gignac: C'est ça.

Le Président (M. Lafrance): Le député d'Anjou et, à la suite, le député de Taschereau.

M. Bonnier: C'est une question en relation avec la question posée par le ministre.

Le Président (M. Lafrance): D'accord, le député de Taschereau.

M. Bonnier: Lorsque vous parlez de cette économie de $6 à $8 la tonne, est-ce que vous tenez compte des coûts d'investissements que vous avez faits dans la compagnie ou si c'est simplement par rapport au coût réel d'achat des boulettes que vous faites à l'heure actuelle?

M. Gignac: C'est la différence entre le coût d'achat des boulettes actuelles et le coût que nous allons payer à la nouvelle compagnie pour nous procurer des boulettes.

M. Bonnier: Ce n'est pas un coût net.

M. Gignac: En fait, la nouvelle compagnie se finance en soi. Actuellement, on est en train de négocier un financement. J'espère que cela va fonctionner. SIDBEC met une équité dans la nouvelle compagnie. L'équité étant mise, la dette à long terme étant mise, il y a un prix pour les boulettes qui est déterminé.

Pour des raisons fiscales, on doit fixer un prix. On ne pourrait pas, par exemple, vendre des boulettes au prix coûtant. Au plan fiscal, ce serait inacceptable par le gouvernement fédéral. Il faut que ce soit un prix qui se rapproche, un prix connu, et le prix connu qui est le mieux connu et qui est ie seul en fait qui est un prix de cartel, à toutes fins pratiques, c'est le prix des Grands Lacs.

Le Président (M. Lafrance): L'honorable député d'Anjou.

M. Tardif: M. le Président, si la compagnie British Steel devait changer d'idée et ne pas joindre la nouvelle compagnie à être formée, SIDBEC pourrait être appelée à contribuer jusqu'à 92% de la mise de fonds, si je comprends bien. Est-ce que c'est exact?

M. Gignac: Au maximum, oui.

M. Tardif: Au maximum. Est-ce que cela signifie, à ce moment-là, que SIDBEC devrait recevoir ou prendre possession, si vous préférez, de 92% des six millions de tonnes de concentré?

M. Gignac: A toutes fins pratiques, oui. M. Tardif: Oui.

M. Gignac: C'est-à-dire qu'à ce moment-là, au lieu d'avoir un million et demi de tonnes à vendre, on en aurait quatre.

M. Tardif: Quatre millions, en plus du million et demi dont SIDBEC se servirait à Contrecoeur. C'est cela?

M. Gignac: C'est cela.

M. Tardif: Est-ce que vous avez prévu de quelle façon vous pourriez écouler les deux millions et demi de tonnes additionnelles?

M. Gignac: Probablement qu'on pourrait les revendre à British Steel. Si elle est intéressée à participer à l'aventure de Port-Cartier et Fire Lake, ce doit être parce qu'elle a besoin de minerai. Probablement que le premier client qu'on irait voir, ce serait elle.

Je dois dire que, si on avait les moyens de faire cela, ce serait sûrement la façon la plus payante de régler le problème. A ce moment-là, ce ne serait pas une compagnie-actions qu'on ferait, ce serait une "joint venture" et on ne paierait pas d'impôt.

M. Tardif: D'accord. Vous avez dit tout à

l'heure que vous aviez fait des études de marché sur les possibilités de vendre le concentré dont vous ne vous servirez pas au cours des premières années. Sur une période de cinq ans, est-ce que vous êtes en mesure de dire ce que vous prévoyez vendre à l'extérieur?

M. Gignac: Un million et demi de tonnes par année. Donc, cela fait sept millions et demi de tonnes.

M. Tardif: Est-ce que c'est un maximum?

M. Gignac: Oui.

M. Tardif: Donc, si vous deviez avoir...

M. Gignac: Si notre usine de bouletage fonctionnait à sept millions de tonnes plutôt qu'à six, à ce moment-là, les trois partenaires ensemble auraient un million de tonnes de plus à disposer.

M. Tardif: Est-ce qu'à ce moment-là, vous seriez en mesure de vendre le surplus?

M. Gignac: A ce moment-là, ce serait extrêmement rentable, parce que ce serait du "gravy". L'usine a été faite en fonction de six millions de tonnes. Si on peut produire sept millions de tonnes, cela veut dire que le million de tonnes additionnel ne coûte presque rien.

M. Tardif: Je le comprends, mais à la condition qu'on réussisse à le vendre.

M. Gignac: Cela peut se vendre, je pense bien.

M. Tardif: A la page 8, si je ne me trompe, vous mentionnez que vous avez fait appel à la société Dravo Corporation de Pittsburgh pour l'ingénierie et la construction de l'usine. Est-ce que vous n'avez pas pensé, lorsque vous avez été confronté à cette décision, d'associer une compagnie canadienne ou une compagnie québécoise à la société américaine, afin que celle-ci puisse profiter du "know-how" de la compagnie américaine qui a la gérance, qui a la responsabilité de l'ingénierie, de la construction de l'usine de bouletage?

M. Gignac: Je pense que j'ai mentionné, en réponse à une question, que le troisième partenaire nous a été imposé par QCM.

M. Tardif: Voulez-vous répéter? Le troisième partenaire?

M. Gignac: J'ai mal compris votre question, je m'excuse.

M. Tardif: A la page 8 de votre texte, vous écrivez: "La société Dravo Corporation de Pittsburgh, de renommée mondiale dans le domaine du bouletage, a la responsabilité de l'ingénierie et de la construction de l'usine de bouletage", troisième paragraphe, les trois premières lignes.

M. Gignac: Oui. La question que vous me posez, c'est...

M. Tardif: Savoir si vous avez pensé associer une compagnie canadienne à la compagnie Dravo, afin que celle-ci, la compagnie canadienne, la compagnie québécoise, puisse profiter du savoir-faire ou du "know-how" de la compagnie Dravo?

M. Gignac: Cela s'est fait d'une façon indirecte par voie de sous-contrats. La compagnie Dravo a donné plusieurs sous-contrats. Pour le "know-how", au total, il y a deux procédés, en fait, dans le monde, qui peuvent faire ce genre de travaux. Il y a Dravo et Allis Chalmers. Ce sont des travaux extrêmement spécialisés. Je pense bien que, pour une usine de la consistance de celle qu'on a à Port-Cartier, des choses comme cela, au Canada, cela ne se fait pas tous les ans. C'est pour cela qu'à l'échelle mondiale il y a deux ou trois constructeurs seulement pour ce genre d'usines.

Par voie de sous-contrats, évidemment, certaines compagnies comme FENCO, entre autres, qui a eu un sous-contrat de Dravo, peuvent acquérir du "know-how" chaque fois qu'elles ont des sous-contrats de compagnies comme Dravo, mais, avant d'être en mesure d'avoir le "know-how" que ces gens ont, cela peut prendre des dizaines et des vingtaines d'années.

M. Kennedy: M. Gignac...

M. Gignac: C'est un domaine extrêmement difficile. Dans le monde, actuellement, il y a trois compagnies qui ont des commandes, une qui s'appelle Lurgie, qui travaille avec Dravo. Les deux ont ensemble pour 58 millions de tonnes d'installations à faire pour l'année. L'autre, qui est Allis Chalmers, en a pour 43 millions de tonnes. Il n'y en a pas d'autres.

M. Tardif: D'accord.

M. Kennedy: M. Gignac, les $6 que vous mentionnez comme économie, dans le coût d'achat des boulettes de Port-Cartier par rapport au marché qui vous approvisionne actuellement, cela veut dire quoi, traduit dans les états financiers du 31 décembre 1975? De combien cela réduirait-il la perte ou est-ce que cela traduirait la perte en un profit?

M. Gignac: En 1975?

M. Kennedy: Oui, au 31 décembre 1975.

M. Gignac: C'est-à-dire qu'on a seulement des boulettes de Port-Cartier. A peu près $4 millions.

M. Bonnier: Cela diminue votre déficit de $4 millions.

M. Kennedy: Cela diminuerait votre déficit de $4 millions. Il vous reste encore...

M. Gignac: Si on parle seulement des boulettes, mais il y a d'autres avantages qu'on ne chiffe pas. Mais, seulement pour les boulettes...

M. Kennedy: Vous parlez seulement des boulettes.

M. Gignac: $4 millions.

M. Kennedy: $4 millions. Cela vous laisse encore un déficit d'opération de $18 millions.

M. Gignac: Oui.

M. Bonnier: II y a aussi le coût de l'investissement qu'il faut calculer évidemment là-dedans. Est-ce que cela ne diminuerait pas quand même? Ce profit de $4 millions ne serait-il pas diminué par le fait que, si vous prenez une partie de vos réserves pour les investir là, évidemment, il n'y a pas de rentrée de fonds; vous n'avez pas de revenus sur les réserves, ou le gouvernement vous prête-t-il de l'argent ou vous en passe-t-il? Lui, cela lui coûte, évidemment, un manque à gagner. Evidemment, cela n'est pas calculé là-dedans.

M. Gignac: Je n'ai pas le chiffre en main. Normalement, une mine de fer qui fonctionne bien, avec une usine de bouletage, le "pay-back " de l'équité devrait se faire entre cinq, sept ou huit ans. Cela exclut la dette à long terme. La dette à long terme se paie sur une période de 15, 18 ou 19 ans. Quand je dis le "pay-back", cela veut dire qu'on prend soin de l'intérêt de la dette à long terme et aussi des remboursements sur la dette à long terme. Le "pay-back" de l'équité se fait entre cinq et huit ans.

M. Bonnier: L'espérance de vie de cette mine, est-ce à peu près d'une trentaine d'années?

M. Gignac: Cela dépend.

M. Marchand: Est-ce que le reste du déficit ne serait pas causé par vos laminoirs à tôles, à chaud et à froid avec 70 millions de... Je ne sais pas si c'est une perte ou un coût, les $10 millions?

M. Saint-Pierre: C'est simplement... Je m'excuse d'interrompre le député de Laurier, on avait parlé au début de régler la question de Fire Lake, et après, d'aborder les questions d'opération. Je crois comprendre que les membres de la commission...

M. Marchand: C'est seulement une question de déficit.

M. Saint-Pierre: Non, c'était pour... Sur le premier point, donc, étant fini, on passerait au deuxième point. Là, peut-être que le député de Laurier peut soulever de nouveau son point sur la question...

M. Marchand: Je continuais sur le déficit tout simplement. Je demandais si le reste du déficit ne serait pas causé par les laminoirs à tôles, à chaud et à froid. Je ne sais pas si c'est une perte ou un coût trop fort de $70 millions pour les laminoires à tôles à chaud, et $10 millions pour les laminoirs à froid. Est-ce une perte? Qu'est-ce que c'est?

M. Gignac: On n'avait pas prévu une perte de $70 millions, et on n'avait pas prévu un profit de $10 millions dans nos laminoirs à...

M. Marchand: C'est un profit de $10 millions ici et une perte de $70 millions là.

M. Gignac: C'est cela. Non prévue.

M. Marchand: Ah! Alors, c'est dû aux laminoirs à tôles...

M. Gignac: Dû à tout ce que j'ai dit pendant trois pages.

M. Marchand:... à chaud qui sont trop usagés et qui devraient être renouvelés. Cela prendrait encore du foin, du fric.

Le Président (M. Brisson): Pour l'affaire de Fire Lake, une dernière question de la part du chef de l'Opposition.

M. Morin: M. le Président, avant de passer à la situation financière...

M. Bonnier: Est-ce que je peux finir? Je m'excuse, M. le chef de l'Opposition...

M. Morin: Sur Fire Lake toujours?

M. Bonnier: Oui. J'ai encore un petit point d'interrogation sur l'importance de cette entreprise. D'une part, vous dites qu'actuellement, les aciéries fabriquent à peu près 26% de leur production, de leur possibilité de production, et qu'elles réussissent à vendre leur production au moins de 25% ou de 26%, en 1975?

M. Gignac: A peu près, oui. Cela dépend des pays...

M. Bonnier: A peu près 26% de leur capacité?

M. Gignac: Au Canada, c'est à peu près...

M. Bonnier: Comment peut-on... They are able to sell 75% of their production.

M. Gignac: L'an dernier, cela a été 22%.

M. Bonnier: Ils vendent 75% de leur production.

M. Gignac: C'est cela.

M. Bonnier: Donc, ils accumulent des stocks d'une façon générale. Comment peut-on penser que si vous avez des surplus de production de boulettes, vous allez être capable quand même de

les écouler facilement sur le marché mondial? Je me demandais comment on pouvait concilier les deux. Vous attendez une expectative de remonter la demande d'acier dans les cinq ou six années prochaines?

M. Gignac: Oui, avant cela, je crois. On attend une remontée assez forte de la demande d'acier vers 1978, au plus tard 1979, très forte.

M. Bonnier: Mondiale.

M. Gignac: C'est un problème mondial.

Le Président (M. Brisson): Le chef de l'Opposition.

Le nom suggéré

M. Morin: Merci, M. le Président. Avant de passer à la situation financière, j'aurais une dernière question sur le grand projet. C'est une question symbolique, mais qui n'est peut-être pas sans importance. Quel sera le nom du nouveau consortium que vous allez créer avec QCM et British Steel? Je voudrais y revenir parce que...

M. Gignac: Ce serait faire une grande restriction mentale que de dire qu'on n'y a pas pensé. Je dois vous dire que, dans les trois, nous avons été les seuls à faire une étude à ce sujet. On se croyait compétent pour la faire. Il y a une foule de noms qui ont été suggérés, à la suite de l'étude très sérieuse que nous avons faite. Nous avons retenu un nom. Disons que cela s'est fait d'une façon un peu arbitraire; pour ne pas mêler les négociations, j'ai décidé que la décision se prendrait au niveau des présidents de compagnies participantes. J'ai fait ma suggestion à nos deux partenaires pour un nom pour la nouvelle société. C'est une suggestion que j'ai faite. Ils ne l'ont pas refusée, ils ne l'ont pas acceptée. Je ne sais pas si M. Dufresne a des objections à ce que je dise le nom.

Etant donné le leadership incontestable que SIDBEC a pris dans ce projet, étant donné qu'il faut que le nom ait, à notre sens, sûrement une saveur québécoise, étant donné ce qui va se passer à l'avenir, le développement, nous avons cru qu'il fallait absolument que le mot SIDBEC apparaisse dans le nom. Nous avons suggéré le nom SIDBEC NORMINE. C'est une suggestion que nous avons faite. Nous espérons que nos associés vont être d'accord.

M. Morin: Nord May, c'est une allusion...

M. Gignac: NORMINE.

M. Morin: SIDBEC NORMINE.

M. Morin: Je souhaite que ce soit accepté par vos partenaires. Quelle a été leur réaction préliminaire?

M. Gignac: Je n'en ai pas eu encore.

Situation financière

M. Morin: Bien. Nous pouvons passer à la situation financière. La première question que j'aurais à poser dans ce domaine, après avoir pris connaissance des états financiers, est celle-ci: Qu'est-ce qui a causé, selon vous, le déficit de $21 948 000 en 1975? Cela me paraît quelque peu préoccupant, surtout si on compare la colonne de 1975 avec la voisine, celle de 1974, où l'on voyait apparaître un profit de quelque $10 millions. Il y a là, semble-t-il, un recul plus prononcé que les résultats qui ont été obtenus, par exemple, par les grandes aciéries ontariennes. Nous avons tout le temps.

M. Gignac: D'abord, pour répondre à votre question, qui a plusieurs facettes, parlons du profit de l'année 1974. Si vous lisez avec un peu d'attention le message que j'ai livré lorsqu'on a publié nos états de 1974, j'ai qualifié, jusqu'à un certain point, le profit de $10 millions d'être dans le fond, un profit un peu artificiel, en ce sens que, tout d'abord, il y a une partie du profit, peut-être $2 millions ou $3 millions, qui était due à une réévaluation à la hausse des inventaires à la fin de l'année.

De plus, durant l'année 1974, à cause du manque à gagner ou de la pénurie d'acier qui existait à ce moment et à cause aussi de la pénurie et des coûts extraordinairement élevés de la ferraille, nous avons appliqué une surcharge qui couvrait complètement les coûts qu'on avait budgétisés pour la ferraille, pour le budget de l'année 1974. Etant donné que les coûts avaient été faits en... le budget évidemment est fait à peu près vers le mois de septembre, en 1973, et à partir de 1973 jusqu'à la fin de 1974, les coûts de la ferraille ont monté en flèche. Le prix qu'on a chargés — pas seulement nous, mais tout le monde — aux clients a été le coût du budget, moins le prix payé. C'est ce qui explique en partie le profit qu'on a fait en 1974. En fait, on a refait l'état des pertes et profits de 1974, on a éliminé cette surcharge et, en éliminant la surcharge, si on considère que c'est un profit anormal, on arrive à peu près avec un profit de $200 000 ou $300 000 pour 1974. Cela explique les profits de 1974. En fait, en 1974, je pense qu'on a perdu $9 millions au laminoir à plat.

M. Morin: Donc, le recul est moins considérable qu'il n'y paraît à première vue, quand on compare les deux colonnes.

M. Gignac: Maintenant, si on revient à 1975, on va parler un peu de ce qui s'est passé vis-à-vis de ce qu'on avait budgétisé. On avait budgétisé une perte de $2 600 000. On a eu une perte de $21 900 000. Où sont allées les variances? Je vais vous les donner séquentiellement. Il y a un montant d'environ $6 millions et quelques cents mille qui doit s'attribuer à la baisse ou au volume inférieur de ventes. Par contre, il y a une variance favorable... La première que je vous ai donnée, $7 200 000, c'est une variance défavorable évidemment. Par contre, il y a une variance favorable

dans les prix de vente d'environ $5 900 000. La baisse de production de 18%, qui entraîne des frais fixes non absorbés, a provoqué une variance défavorable de $3 900 000.

M. Morin: Quand vous parlez de variance ou de variation favorable ou défavorable, est-ce une sorte d'euphémisme pour dire perte ou si vous voulez dire différence avec l'année précédente?

M. Gignac: Non, différence avec le budget.

M. Morin: Différence avec le budget. J'ai compris. Mais, monsieur, il n'a pas terminé sa réponse.

M. Gignac: Nous avons la différence, baisse de production: 18%, donc, les frais fixes non absorbés entraînent une variance, une variation défavorable de $3 900 000. Nous avons fait des dépenses non budgétisées qui ont été chargées aux états de pertes et profits, de $5 300 000 au-dessus de ce que nous avions budgétisé.

M. Saint-Pierre: Grosso modo, cela me semble un montant élevé.

M. Gignac: C'est un laminoir à chaud, l'entretien au laminoir à chaud.

M. Saint-Pierre: Ce ne sont pas des dépenses d'immobilisation?

M. Gignac: Non. Ce sont des dépenses faites de façon non planifiée, je dois dire, ou mal planifiée.

M. Saint-Pierre: Vous dites que ce sont des dépenses de main-d'oeuvre?

M. Gignac: D'entretien. Lors des fermetures pour les vacances.

Nous avons eu un rendement et une efficacité défavorable de $1,4 million. Le rendement est le rendement métallique. C'est à dire que, par exemple, vous prenez une brame et vous la mettez sur un laminoir, elle peut vous donner 85%, 87% ou 90% de rendement métallique. C'est une chose extrêmement importante dans l'opération des laminoirs. Le prix d'achat, par contre, de certains matériaux, ferraille, boulettes réfractaires, a été favorable pour un montant de $4 millions, $4,2 millions. Les ajustements d'inventaire, surtout ceux qui sont reliés au produit plat, ont été dévalués à la fin de l'année de $5,8 millions. On a fait certaines provisions, à la fin de l'année aussi, de $500 000 sur les inventaires de boulettes, des choses comme cela qui sont assez difficiles à évaluer, qui sont évaluées par photos aériennes. Alors, on ne prend pas de chance. Si on croit qu'on doit prendre une perte ou radier, on le fait.

On a eu à SIDBEC-FERUNI une variance défavorable. Je dois dire que SIDBEC-FERUNI était dans sa première année d'exploitation. En fait, elle a opéré six mois, de $3,8 millions. Par contre, au bureau administratif, c'est-à-dire au bureau de Montréal, ce qui couvre le marketing, entre autres, etc., il y a eu une variance favorable de près de $1 million et les intérêts qu'on a payés ont été de $2,4 millions supérieurs à ceux qu'on avait prévus. C'est ce qui fait le total de variation de $19 344 000, plus ce qu'on avait prévu en déficit de $2 500 000, pour un total de $21 940 000.

M. Morin: Bien. Je vous remercie. Voulez-vous nous allons revenir brièvement aux ventes dont le volume a été inférieur à vos prévisions? Est-ce que vous pourriez nous donner des indications, nous expliquer la baisse relativement importante des ventes en 1975? Elles sont passées, si ma mémoire est bonne, de $210 millions à $180 millions. C'est une baisse qui me paraît relativement prononcée puisque, si on se tourne du côté des aciéries onta-riennes, leurs ventes, en tout cas, la valeur de leurs ventes — c'est peut-être là — a augmenté. Est-ce que ce serait explicable, en partie, du moins, par le fait qu'en 1974, qui a été une période de rareté dans l'acier, SIDBEC s'était trouvée de nouveaux clients, de nombreux nouveaux clients et qu'en 1975, étant donné qu'il y a eu peut-être moins de pénurie, ces clients seraient retournés à leurs fournisseurs habituels, sans que SIDBEC ait pu les retenir comme client habituel. Est-ce que ce serait une partie de l'explication?

M. Gignac: Dans les ventes de tôles surtout, ce que vous dites est assez vrai. On est le quatrième de quatre fournisseurs. Evidemment, dans un marché qui est déprimé comme le marché de 1975 a été déprimé, non seulement pour nous, mais déprimé pour nos compétiteurs aussi, en tonnes, pas nécessairement en...

M. Morin: En ventes.

M. Gignac: Oui. Alors, comme la plupart de nos compétiteurs, comme STELCO, DOFASCO, ALGOMA, qui sont nos principaux compétiteurs, et qui ont des ventes assez prononcées dans des produits plats, par exemple.

Ils se sont moins ressentis, en dollars, de la récession, mais en tonnes, cela a baissé d'à peu près...

En pourcentage d'expédition de tonnes, nos compétiteurs se sont retrouvés à peu près, l'an dernier, à 15%, alors qu'on s'est retrouvé à 20% ou 22%. Dans les tonnes, j'entends. Dans un autre domaine qui est le domaine le plus rentable pour nous, c'est celui des produits de la construction. Evidemment, là, le marché a réellement baissé d'une façon extrême et, dans notre rentabilité, cela s'est fait sentir. On a reçu un choc beaucoup plus dur que nos compétiteurs qui sont, jusqu'à un certain point, moins impliqués, mutatis mutandis, qu'on peut l'être. Cela peut expliquer la raison pour laquelle notre performance est aussi mauvaise. Mais, par contre, je reviens à ce que j'ai déjà dit. c'est qu'on ne peut pas... Evidemment, 1975 a été la pire année depuis... semble-t-il, pire que la dépression dans le domaine des aciéries, pas seulement nord-américaines mais mondiales.

Je crois bien qu'en 1973-1974, l'acier a atteint des sommets jamais vus comme, en 1975, on a atteint des bas-fonds jamais vus. Je crois que le pire est passé. On sent une certaine récupération du marché actuellement, mais au Québec, de façon particulière, je dois vous dire que, dans le domaine des produits de la construction, actuellement, le marché est extrêmement déprimé. C'est presque aussi pire, sinon pire qu'en 1975, du moins pour les deux premiers mois. Evidemment, le domaine de la construction, ça commence surtout avec les mois de mars et d'avril. On espère qu'il va y avoir reprise, mais ça ne sera pas facile non plus en 1976.

M. Morin: J'imagine que si, de surcroît, certains gros contrats de construction au Québec amènent des achats d'acier en Ontario plutôt qu'au Québec, ça ne doit pas vous aider non plus. J'ai fait allusion à cette difficulté en deuxième lecture, peut-être conviendrait-il qu'on s'y attarde un peu. Est-ce qu'à votre connaissance, il existe, dans des contrats donnés par la Société d'énergie de la baie James, par exemple — on va prendre celle-là pour commencer — aux divers entrepreneurs qui participent à la construction là-haut, des clauses préférentielles d'achat auprès de la seule aciérie qui soit là, c'est-à-dire SIDBEC?

Est-ce que ça existe, à votre connaissance?

M. Gignac: A la Société d'énergie, M. Morin, je ne serais pas en mesure de vous le dire. Je pense qu'à l'Hydro-Québec, la politique d'achat que j'ai eu l'honneur d'installer existe encore.

M. Morin: C'est exact, elle existe toujours puisqu'on en a parlé...

M. Gignac: Mais avec la Société d'énergie de la baie James, je pense que nos relations sont excellentes. Maintenant, est-ce qu'il y a réellement un contrôle sur les achats préférentiels au Québec? Je ne suis pas en mesure de vous le dire. Seulement, cela me semble, pour les matériaux de construction comme les profilés, les fils à hauban, l'acier d'armature, je pense qu'on a notre juste part; je pense. Mais je ne serais pas en mesure de vous dire si elle a une politique d'achat, je ne suis pas au courant du tout.

M. Morin: Mais quand vous dites votre juste part, vous voulez dire que, quand on met ensemble toutes les aciéries ontariennes et québécoises, vous avez une part du marché conforme à votre importance.

C'est peut-être plus que cela qu'il faut, non?

M. Saint-Pierre: Beaucoup plus que cela en réalité.

M. Gignac: Si je pense à l'Hydro-Québec, on a une pénétration d'à peu près 75%. Si c'était la même chose à la baie James. Mais il ne faut pas oublier que les produits d'acier qu'on peut vendre à la baie James sont plutôt limités, parce que le gros des travaux, à la baie James, concerne des travaux d'excavation, de remplissage et cela prend des tracteurs. S'il y avait une fabrique de tracteurs au Québec, elle serait en affaires pour longtemps. Il y a à peu près 1000 tracteurs qui sont sur le chantier.

M. Morin: Le ministre de l'Industrie et du Commerce a noté cela.

M. Saint-Pierre: Cela fait longtemps.

M. Morin: Est-ce que je pourrais vous demander maintenant ce qui en est sur les chantiers reliés aux Jeux olympiques ou encore au métro?

M. Gignac: Je dois dire que non seulement on a eu une bonne fourniture d'acier, on les a sauvés du désastre, parce qu'on a dû leur fournir de l'acier à un moment où cet acier était très rare. Je pense bien que dans certains cas, si on n'avait pas été présent sur la scène des Jeux olympiques, c'est vrai qu'ils n'auraient pas eu lieu au Québec.

Je pourrais vous citer d'autres cas. D'ailleurs, j'en ai parlé avec M. Saint-Pierre, hier soir. Je peux les citer si vous le voulez. Le même phénomène s'est produit pour l'usine de filtration qui était absolument à court d'acier en 1973, début 1974. On est venu à sa rescousse.

On est venu, à ma connaissance, également deux ou trois fois à la rescousse de l'Hydro-Québec qui demandait des soumissions publiques et pour lesquelles personne ne soumissionnait. Elle nous demandait de soumissionner.

M. Morin: J'admire beaucoup votre rôle de bon samaritain, mais je serais plus intéressé à savoir s'il y a des clauses préférentielles qui, systématiquement, vous donnent la priorité. Venir à la rescousse, vous ne pouvez pas faire que cela...

M. Gignac: A l'Hydro-Québec, définitivement, il y a des clauses préférentielles. A la ville de Montréal, je ne suis pas en mesure de vous le dire, mais je sais qu'on a vendu beaucoup d'acier pour le métro et pour le COJO également.

M. Saint-Pierre: Un des points importants, M. le Président, il faut bien le dire, c'est le succès de SIDBEC dans les années à venir, dans son habilité à déborder les frontières de la province. Je pense que si on veut limiter SIDBEC en une espèce d'exclusivité à l'intérieur du marché québécois, on risque de plafonner son potentiel de croissance.

Autant personnellement je m'élèverais si, non seulement dans des organismes gouvernementaux, mais même dans le secteur privé québécois, et j'ai eu l'occasion de parler d'intégration et d'autres facteurs...

M. Morin: Justement.

M. Saint-Pierre: S'il y avait un préjugé défavorable ou des pratiques qui feraient en sorte que SIDBEC ne serait pas capable de faire une

concurrence loyale à ses compétiteurs, je pense que je n'hésiterais pas moi-même à intervenir.

Mais ce qui me préoccupe davantage, c'est de m'assurer que SIDBEC sera capable, sur le marché à l'extérieur du Québec, d'aller pénétrer. Je pense qu'il faut être un peu prudent, nous avons eu l'occasion de le mentionner, vous-même, vous me l'avez dit. Sur tous les grands projets publics au Québec, que ce soit à la ville de Montréal, dans les grandes municipalités, au gouvernement, il y a sûrement un jugement favorable vis-à-vis de SIDBEC lorsque les produits sont là. Votre production représente à peu près 8% de la production canadienne et, sur ces marchés-là, vous avez sûrement... je n'ai pas les pourcentages, mais on sait que cela dépasse 50%, je vais me risquer à dire cela. Donc, vous avez votre large part. Crier sur les toits qu'il y a une espèce de clause d'exclusivité pour SIDBEC risque simplement — ce jeu se joue à deux sens — de provoquer inutilement nombre d'organismes du côté de l'Ontario qui ont un marché relativement important. Ils pourraient là vous fermer les portes.

M. Morin: Je ne voudrais pas que le ministre joue sur les mots. Je ne lui ai jamais parlé d'exclusivité. Nous avons parlé de clause préférentielle; ce n'est pas du tout la même chose.

C'est très beau de déborder les frontières du Québec et je suis sûr que SIDBEC ambitionne de le faire éventuellement. Mais, il faut d'abord avoir une solide base ici.

Justement, j'enchaîne sur autre chose. Depuis quelque temps, le ministre de l'Industrie et du Commerce se pourfend à démontrer qu'il faut intégrer les multinationales à l'économie québécoise. Outre sa dernière suggestion révolutionnaire visant à avoir, à chaque conseil d'administration une personne qui pourra lire sans traduction le Jour, le Devoir, la Presse, le ministre a également suggéré d'établir...

M. Kennedy:... s'il ne lit que le Jour? M. Saint-Pierre:...

M. Kennedy: II ne lira pas longtemps s'il ne lit que le Jour.

M. Morin: Si je peux me permettre de terminer ma question, M. le Président, le ministre a également suggéré d'établir des normes volontaires dont la suivante est l'utilisation accentuée de la sous-traitance et des fournisseurs locaux. Nous sommes de retour au même problème. Ce n'est pas moi qui ai prononcé ce discours. D'après les dirigeants de SIDBEC, un des marchés les plus difficiles et les moins rentables, dans la gamme de ses produits, c'est celui des tôles fines, dont on a parlé tout à l'heure. SIDBEC accuserait donc dans ce domaine des déficits d'opération substantiels. C'est le type de produit qui représente une part substantielle de sa production.

Or, seulement quelques industries sont consommatrices de ces tôles au Québec et no- tamment dans l'industrie de l'automobile, ce qui explique assez bien, je pense, une partie de l'avantage de l'industrie ontarienne de l'acier qui trouve, ici, au Québec, un important débouché pour ses tôles. Il semblerait — j'aimerais vous poser la question, M. le président de SIDBEC — que la seule entreprise automobile au Québec, qui est la General Motors de Sainte-Thérèse, n'achète pas de SIDBEC. Nous sommes de retour au même problème. Si SIDBEC ne peut pas d'abord s'implanter sur le marché québécois, ma foi, je serais bien surpris qu'elle réussisse à partir à la conquête des provinces voisines ou des pays voisins. Voulez-vous me donner votre sentiment là-dessus?

M. Gignac: Tout d'abord, pour apporter quelques précisions sur le partage de nos ventes au Canada, pour prendre soin de ce point, ne prenons pas l'année 1975, ni l'année 1974, mettons-les de côté, parce qu'elles ont été des années spéciales, si on prend l'année 1973, nos expéditions totales de produits au Québec ont été de 417 000 tonnes, surtout en Ontario, mais aussi à l'extérieur, peut-être de 90% à l'Ontario, pour qui cela a été de 287 600 tonnes. C'est à peu près le même "pattern" qu'on prévoit pour 1976 et la même chose qu'on prévoit aussi pour 1977 et 1978.

Pour ce qui est des tôles, c'est un marché en soi très différent. Comme je le mentionnais à M. Saint-Pierre, le marché de la tôle fine, dans le monde nord-américain de l'acier, représente 40% de la production, donc, c'est, de loin, l'article le plus important et, deuxièmement, c'est celui qui évolue le plus rapidement.

L'industrie automobile, évidemment, est une partie importante de la tôle, mais il y a aussi d'autres industries, comme les appareils ménagers, etc., qui prennent une part extrêmement importante de ce marché.

Pour être en mesure de fournir, vous parlez de l'usine de Sainte-Thérèse, j'imagine, je crois que c'est plutôt une usine d'assemblage qu'autre chose. Elle importe d'un peu partout, pas souvent d'Ontario, probablement des Etats-Unis, des pièces qui ont été estampillées ou des châssis de voitures qui ont été faits peut-être en Ontario, peut-être ailleurs. Au Québec, ce qu'il nous manque, c'est une industrie secondaire de la tôle, c'est évident. Mais, avant de faire une industrie secondaire de la tôle, je pense qu'il faut s'assurer qu'il y a au moins un bon producteur pas loin de l'usine pour être en mesure de fournir l'industrie en question. Est-ce qu'on peut dire en ce moment que SIDBEC a d'abord la qualité nécessaire pour fournir une usine qui ferait de l'estampillage? Je pense qu'on a la qualité nécessaire, mais, sur le plan de la dimension physique de la tôle, non. On fait des tôles de 48 pouces, alors qu'on peut avoir besoin de tôles de 60 ou de 66 pouces, ce qui représente à peu près 90% du marché.

D'autre part, les faits sont qu'actuellement, sur un marché Québec-Ontario, prenons 1973, de 3 400 000 tonnes de tôles...

M. Morin: Je m'excuse, oui.

M. Gignac: ... la consommation apparente, ce qu'on appelle la consommation apparente, c'est réellement ce qui est consommé au Québec, est de l'ordre de 329 000 tonnes et, en Ontario, c'est de 3 057 000 tonnes.

M. Morin: C'est cela, avoir une infrastructure industrielle et une politique industrielle.

M. Gignac: Je n'ai pas besoin de vous faire de dessin, je pense.

M. Morin: Oui.

M. Saint-Pierre: M. le Président, je pense que c'est...

M. Gignac: Maintenant, d'autre part... est-ce que je peux continuer mon...

M. Saint-Pierre: Je voudrais seulement un peu, parce qu'on veut me provoquer inutilement, mais je suis très calme ce soir.

M. Morin: Non, on veut vous provoquer à des fins utiles. Ce n'est pas la même chose.

M. Saint-Pierre: On va vous citer à nouveau le rapport de l'OCDE qui va vous expliquer pourquoi, dans le domaine des tôles et d'autres secteurs industriels, on a eu pendant certaines périodes moins d'investissements au Québec que dans d'autres périodes.

Vous savez, c'est à la page 37, je vais vous la redonner une autre fois. Deuxièmement, pour en venir à des choses plus sérieuses, c'est le départ même de SIDBEC. On nous l'a donné cet après-midi, je suis surpris qu'on l'ait oublié en cours de route en parlant des hôpitaux et des écoles. C'était pour briser ce cercle vicieux. On comprendra que, du jour au lendemain, il y a un cercle vicieux et que, pour avoir l'industrie secondaire, on a besoin du producteur d'acier. C'était le but même du rapport du 1961, tenter de briser ce cercle vicieux. Cela a été la mission même de SIDBEC. Maintenant, comme... Un instant, je vous ai écouté...

M. Morin: Oui, mais pour rentabiliser l'acier, il faut l'industrie secondaire.

M. Saint-Pierre: Oui, je sais. Comme M. Gignac l'a dit, nous avons fait énormément, en termes d'investissements en amont; je rappelle au chef de l'Opposition qu'en 1968, Dieu sait qui conseillait la province à l'époque, on avait $12 millions d'investissements pour SIDBEC, alors que, cette année, nous y mettrons $53 millions, et, l'an prochain, $53 millions. Cela donne un peu notre volonté de donner à SIDBEC sur le plan financier les ressources nécessaires pour jouer son rôle.

Je vais emprunter les termes de M. Gignac: c'est évident qu'il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs! Il fallait remonter en amont, il fallait améliorer au niveau de l'industrie secondaire. Cela ne nous empêche pas de poursuivre des ef- forts pour tenter de développer toute une gamme d'entreprises, au niveau de l'industrie secondaire. D'ailleurs, à ce sujet, si le chef de l'Opposition veut me donner un préavis à une question, il me fera plaisir de lui obtenir les montants de la croissance des achats des produits de toute nature de la compagnie General Motors, au Québec, depuis 1970. Cette même société a participé avec nous, dans un de nos programmes Expo-profits, l'automne dernier, alors que plus de 250 entreprises québécoises sont allées voir les produits en pièces, les tendances du marché. Je pourrai lui donner la liste des entreprises qui fournissent actuellement General Motors. Il y en a qui, en amont, elles aussi, vont s'approvisionner chez SIDBEC.

M. Morin: Je voudrais vous poser une dernière question avant de laisser ce domaine. Peut-être avez-vous quelque chose à dire, à la suite de l'intervention du ministre. Sur l'ensemble de la politique d'achat, auriez-vous des choses à nous dire?

M. Gignac: Sur la politique d'achat?

M. Morin: Oui.

M. Gignac: Non. Pas tellement. La seule chose, je l'ai dite publiquement d'ailleurs — j'étais beaucoup plus libéral quand j'étais à l'Hydro que je le suis à SIDBEC — c'est qu'il ne faut pas être naïf au point de penser que les institutions publiques de l'Ontario n'ont pas de politique d'achat préférentielle.

M. Morin: Elles en ont sûrement.

M. Gignac: Nous n'avons jamais été capables de vendre un morceau d'acier d'armature à l'Hydro-Ontario. Cela ne me surprend pas du tout. D'ailleurs, STELCO a beaucoup de difficultés à vendre de l'acier d'armature à l'Hydro-Québec. Donc, de ce côté, ne nous faisons pas d'illusions.

D'autre part, il y a un principe que j'ai développé personnellement et je pense bien qu'au cours de mes quelques années d'expérience dans le domaine de l'industrie, particulièrement de l'industrie de l'acier, au cours de conversations que j'ai eues avec toutes sortes de gens, c'est évident, et en cela, j'appuie complètement M. Saint-Pierre, il faut que la sidérurgie précède l'industrie secondaire, si on veut réellement être en mesure de mousser ou de pousser le développement de l'industrie secondaire de l'acier. Je pense que le principe qui a été émis, ou plutôt la déclaration qui a été faite et que j'ai citée au début de mon exposé, à l'effet que le gouvernement devrait mousser l'installation de l'industrie secondaire d'acier au Québec, disons que l'intention était bonne, mais je pense, sur le plan pratique des choses, que c'est assez difficile — je parle pour les industries d'importance — de venir s'installer au Québec sans être absolument sûres d'avoir une infrastructure — dans le cas de l'acier, c'est SIDBEC — qui peut approvisionner les industries en question. Je parle d'industries qui prennent 20 000, 30 000 ou 40 000 tonnes d'acier par année.

Je peux vous citer un exemple évident. Une compagnie qui s'appelle Bud Auto Motor, qui est située à Kitchener, Ontario et qui consomme annuellement environ 400 000 tonnes d'acier, cette société était venue s'installer au Québec, il y aurait eu de petits problèmes.

Je pense que l'industrie de la sidérurgie, les laminoirs à plat, cela doit réellement précéder l'éclosion de l'industrie secondaire de l'acier. C'est pour cela que je mentionne un peu que c'est très dur de faire ce qu'on fait actuellement; c'est dur pour ceux qui financent, parce qu'il y a une période d'incertitude...

M. Morin: ... de rodage.

M. Gignac:... de rodage et d'incertitude aussi, de clients éventuels qui vont attendre pour surveiller ce qui se fait et, à un certain moment, d'accord, on est sûr que cela va marcher; donc, on va y aller.

M. Morin: II reste qu'une politique d'achat serait de nature à vous aider, à rentabiliser toutes vos opérations, peut-être un peu plus rapidement. Je ne peux m'empêcher de penser, en tout cas, que, si le gouvernement du Québec veillait d'aussi près à ces choses que le gouvernement de l'Ontario le fait, cela produirait peut-être des résultats. Je pense qu'effectivement, il était probablement essentiel qu'on instaure d'abord l'aciérie et que son existence soit connue pour attirer des fabricants. On est dans un cercle vicieux. Aujourd'hui, nous avons l'aciérie, mais les clients devraient peut-être être plus nombreux. Dites-moi, pour revenir à un problème peut-être plus technique, qu'est-ce que c'est, exactement, le problème dans vos laminoirs à plat? Pourriez-vous nous expliquer cela en des termes que des non-spécialistes pourraient comprendre?

M. Gignac: Par le fait que — je demanderais à M. Dancy de compléter s'il y a lieu — la dimension d'échelle entre ce qu'on produit, nous, dans notre laminoir à chaud, qui va être éventuellement de 500 000 tonnes par année, possiblement l'an prochain, et ce que produisent nos compétiteurs qui ont des laminoirs de 1 500 000 à 2 000 000 de tonnes par année, ce simple fait, fait une différence dans le prix de conversion qui est assez appréciable. C'est un point.

Le deuxième point, c'est que les laminoirs que nous avons, à chaud et à froid, sont des laminoirs usagés qui ont un certain âge et on a beaucoup de difficultés à maintenir nos coûts d'entretien à un prix normal comparativement à celui de nos compétiteurs. Là aussi, évidemment, les frais fixes qu'on est obligé d'appliquer à chaque tonne qui passe à travers ces laminoirs sont à peu près les mêmes frais fixes, mutatis mutandis, que ceux de nos compétiteurs qui ont des laminoirs qui produisent trois ou quatre fois plus que le nôtre. C'est évident que le prix de conversion, à partir d'une brame à aller à une tôle, est beaucoup supérieur à celui de nos compétiteurs. Tout cela, accouplé de façon générale à des charges d'intérêts qui sont réellement démesurées, écrasantes, fait qu'on peut difficilement s'en sortir, mais je ne suis pas...

M. Morin: M. le Président, on peut peut-être ajourner pour l'instant et reprendre cela demain matin parce que nous sommes appelés pour un vote. Je m'en excuse, mais je pense que l'heure, de toute façon, était sur le point de survenir où on aurait dû ajourner, M. le Président.

M. Saint-Pierre: On reprendrait, M. le Président, demain, après la période des questions, si je crois comprendre, ici.

M. Morin: Oui, je pense que cela conviendrait, de part et d'autre, c'est-à-dire vers onze heures.

M. Saint-Pierre: Vers onze heures, demain.

Le Président (M. Lafrance): Alors, la commission de l'industrie et du commerce ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 22 h 57)

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