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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Wednesday, February 27, 1974 - Vol. 15 N° 5

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Consultation particulière sur les projets de loi 23 et 24


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives

Projets de loi nos 23 et 24

Séance du mercredi 27 février 1974

(Dix heures sept minutes)

M. PILOTE (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

Avant que ne commence la séance, je voudrais vous mentionner les changements suivants à l'intérieur des membres de la commission. M. Ghislain Harvey, de Dubuc, remplace M. André Harvey, de Charlesbourg; M. Gilles Houde, de Fabre, remplace M. Lalonde, de Marguerite-Bourgeoys. Il y a également des changements qui seront effectués. Je n'ai pas la liste des membres de la commission. Je les signalerai, si vous me le permettez, entre deux mémoires.

Nous avons entendu, il y a quinze jours, chacun des partis et je pense que, ce matin, on peut procéder immédiatement à l'audition des mémoires qui sont présentés ici. Nous entendrons au courant de la journée...

M. TETLEY: Pardon. Pourriez-vous nommer un rapporteur, peut-être, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Pilote): On n'en a pas besoin pour la présentation des mémoires.

M. TETLEY: Même pour la commission, pour faire rapport à la Chambre.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Non. On n'en a pas besoin.

UNE VOIX: Oui.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui? D'accord, on va en nommer un. M. Ghislain Harvey, député de Dubuc, est rapporteur pour cette commission.

Nous entendrons le premier rapport, celui de la Fédération des caisses populaires Desjardins, de la Fédération de Montréal des caisses Desjardins et de la Fédération des caisses d'économie du Québec. Le deuxième, celui de la Fédération des caisses d'établissement du Québec. Le troisième rapport, est celui de la Fédération des caisses d'entraide économique du Québec. J'inviterais M. Charles Cimon, ainsi que ceux qui l'accompagnent, représentant la Fédération des caisses populaires de Québec, de Montréal et la Fédération des caisses d'économie du Québec à présenter leur mémoire.

M. Cimon, si vous voulez nommer ceux qui vous accompagnent.

Fédérations des caisses populaires et des caisses d'économie

M. CIMON: M. le Président, c'est pour moi un très grand honneur de représenter les trois fédérations que vous venez de mentionner, dans un mémoire conjoint. Je voudrais vous présenter à ma gauche, M. Yvon Daneau, de la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins; M. Paul-Emile Charron, secrétaire général et adjoint au président de la fédération; M. René Croteau, directeur général de la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins également et, derrière, M. Yves Tétreault, directeur général de la Fédération de Montréal des caisses populaires Desjardins; M. Soupras, directeur général de la Fédération des caisses d'économie du Québec, et M. Cloutier, président de la Fédération des caisses d'économie de Québec.

M. le Président, le 5 avril 1973, les trois fédérations que je représente remettaient au ministère des Institutions financières, compagnies et coopératives un mémoire faisant état de leur point de vue, à l'effet que les caisses d'entraide économique devaient faire l'objet d'une législation complètement autonome de celle des Caisses d'épargne et de crédit.

Il me paraît important de souligner ici qu'aucune des fédérations que je représente ne s'oppose aux objectifs régionaux de développement économique, tant industriel que commercial, poursuivis par les caisses d'entraide économique.

Toutefois, mes clients croient que les caisses d'entraide économique devraient être régies par une loi spécifique qui préciserait leur nature, définirait leur mode de fonctionnement, établirait les normes auxquelles devrait être soumise leur méthode de sollicitation des épargnes, leur constitution de réserve et les garanties qu'elles devraient offrir. Il faut — les fédérations que je représente le soumettent — éviter toute confusion dans l'esprit du public en évitant de lui faire croire que les caisses d'entraide économique présentent intégralement les mêmes caractéristiques que les caisses d'épargne et de crédit.

Tout dernièrement, suite à des représentations faites par mes clients, le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives concluait que le projet de loi 23 constituait une simple annexe à la loi-cadre des caisses d'épargne et de crédit. Il nous parait inconcevable que cette annexe soit adoptée avant que les amendements à la loi-cadre, que mes clientes ont manifesté l'intention de présenter au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, aient été définitivement établis. Nous voulons éviter par là une loi qui pourrait comporter des contradictions et des ambiguïtés préjudiciables à tous les intéressés.

Si le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives persistait dans son attitude de faire en sorte que le projet de loi 23

demeure une simple annexe à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, les fédérations que je représente vous demandent instamment de recommander l'ajournement de l'adoption de ce projet jusqu'à ce qu'elles aient l'occasion de se mettre d'accord avec le ministère sur les amendements qui doivent être apportés à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, amendements que nous avons l'intention de vous soumettre dans les prochains mois.

Nous aimerions enfin vous faire part de notre inquiétude en face du projet de loi 24, Loi ' modifiant la loi de l'assurance-dépôts du Québec, et plus spécialement à l'article 3 de ce projet. La simple lecture du texte de cet article nous oblige à conclure qu'advenant l'adoption de cet amendement, chacune des caisses d'épargne et de crédit peut devenir l'objet de décisions arbitraires, sans égard à la fédération à laquelle elle est affiliée. Il faudrait prévoir un mécanisme qui obligerait la régie à obtenir le consentement préalable de la fédération concernée avant d'adopter toute mesure suivant les dispositions de cet article.

Le tout respectueusement soumis, le 12 février 1974.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

M. TETLEY: Me Cimon, messieurs des trois fédérations, je vous remercie, au nom du gouvernement, de votre présence et de votre mémoire que je trouve très important. Je vous remercie de m'avoir envoyé une copie, il y a longtemps. Si vous me permettez, je vais répondre avec un document que j'ai préparé d'avance, parce que je trouve que vos objections, qui sont peut-être plutôt des inquiétudes — comme vous venez de le dire, Me Cimon — sont très importantes. Je veux montrer que le gouvernement est très conscient de votre mémoire et de l'importance de vos observations.

La première objection était la suivante: que les caisses d'entraide économique devraient être assujetties à une législation spécifique ne faisant aucune référence à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, de manière à empêcher dans l'esprit des épargnants toute confusion entre les caisses d'entraide économique, les caisses populaires et les caisses d'économie. Tenir compte de cette objection implique qu'une loi organique spécifique soit adoptée pour les caisses d'entraide économique et que les caisses d'entraide économique cessent d'être des caisses d'épargne et de crédit. Le ministère a étudié toutes les hypothèses possibles, mais a dû — et je donne trois raisons: 1) à cause des droits acquis; 2) à cause des répercussions fiscales d'un changement de statut, et 3) à cause du danger de la désaffection des épargnants — en l'occurrence, opter pour la solution proposée dans les projets de loi à l'étude.

Ces projets de loi ne constituent cependant qu'une première étape. Il est possible, à moyen terme, que le législateur doive préciser ou modifier la loi organique s'appliquant aux caisses d'entraide économique.

Deuxième objection: Le projet de loi actuel préjuge des décisions de la Législature sur les demandes éventuelles de modifications à la Loi des caisses d'épargne et de crédit à être présentées par les trois fédérations.

Le projet de loi sur les caisses d'entraide économique précise les modalités particulières des opérations des caisses d'entraide économique et n'affecte aucunement la Loi des caisses d'épargne et de crédit, qui demeure la loi organique de la très grande majorité des caisses d'épargne et de crédit qui a la presque totalité des actifs du mouvement coopératif du crédit. Il s'ensuit que toute modification à la Loi des caisses d'épargne et de crédit doit être effectuée à la lumière des besoins de l'ensemble du secteur. Par voie de conséquence, si des modifications à la Loi des caisses d'épargne et de crédit affectent supplétivement la Loi des caisses d'entraide économique, il y aura alors lieu de déterminer quelles modifications devraient être apportées à cette dernière loi.

Je tiens à déclarer que la loi accessoire des caisses d'entraide économique ne constitue pas un précédent quant aux modifications à la loi générale s'appliquant aux caisses d'épargne et de crédit. J'attends, évidemment, depuis quelque temps et toujours vos recommandations relativement aux amendements à la Loi des caisses d'épargne et de crédit.

La troisième objection, ou observation ou souci, est tout aussi importante: L'article 3 de la Loi modifiant la loi de la Régie de l'assuran-ce-dépôts donne ouverture à l'arbitraire de la Régie de l'assurance-dépôts. C'est votre opinion. Il permettrait même à la régie de réglementer les activités des caisses particulières.

Les trois fédérations demandent qu'un mécanisme légal soit établi afin que le consentement préalable de chaque fédération intéressée soit obtenu en vue de l'application des pouvoirs de réglementation prévus à l'article 3.

Je suis prêt à considérer des modifications à l'article 3 pour que les règles ou normes établies en vertu de cet article ne puissent s'appliquer qu'à un groupe de caisses affiliées à une même fédération. Dans le système législatif de la province, il est malheureusement impossible de conférer à un organisme extérieur un droit de veto sur les pouvoirs de législation directs ou délégués du gouvernement. En effet, c'est le Parlement qui est suprême.

D'ailleurs, l'expérience passée révèle qu'il est impérieux de donner à la régie des pouvoirs de réglementer la liquidité des caisses selon la nature et les échéances de leur passif, de même que les pouvoirs d'établir certaines limites aux prêts individuels ou à l'ensemble des prêts consentis par la caisse. Ceci devient d'autant

plus nécessaire à cause de l'évolution du secteur et, notamment, de l'augmentation des actifs des caisses individuelles.

De plus, la responsabilité financière assumée par la régie justifie, à elle seule, l'établissement de ces règles. En d'autres mots, perhaps I can say it in English. In other words, we find your recommendations important, constructive and adjustments can be made in the law, either now or in the future.

Je vous remercie pour votre mémoire, mais j'attends les remarques de mes collègues, ici, de l'Opposition et aussi — parce que j'en vois plusieurs — des membres des caisses d'entraide économique, des caisses d'économie, des caisses d'établissement et même des caisses populaires. J'attends aussi leurs observations.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je remercie également la Fédération des caisses populaires Desjardins, les trois fédérations, de leur mémoire. Nous avons déjà fait connaître notre position sur un point particulier, à savoir l'opposition catégorique que nous avons à l'article 3 du projet de loi no 24, parce que nous croyons que ceci équivaudrait, en fait, sous des dehors anodins, à la mainmise du gouvernement sur l'ensemble des caisses populaires et des caisses d'économie.

Nous réitérons notre conviction que cet article va complètement à l'encontre de l'autonomie des caisses d'épargne et de crédit. Nous espérons que le gouvernement retranchera cet article qui, d'ailleurs, n'est pas nécessaire à la reconnaissance des caisses d'entraide économique.

Si le gouvernement devait persister dans son idée de garder cet amendement, auquel nous nous opposons, je crois — si on se réfère à votre mémoire — que ce qui est proposé est le minimum de garantie, à savoir qu'il faudrait prévoir un mécanisme qui obligerait la régie à obtenir le consentement préalable de la fédération qui serait concernée, avant d'adopter toute mesure, suivant les dispositions de cet article.

Dans votre mémoire, vous faites état également de la différence que vous voyez entre les caisses d'entraide économique et les caisses d'épargne et de crédit. Vous parlez à un moment donné de la nécessité d'éviter toute confusion dans l'esprit du public en évitant de lui faire croire que les caisses d'entraide économique présentent intégralement les mêmes caractéristiques que les caisses d'épargne et de crédit.

Sur ce point on aura l'occasion de revenir, mais j'aimerais bien, si les caisses d'entraide économique ont présenté un mémoire comme elles doivent le faire, que, peut-être par l'intermédiaire de leur président ou de leur représentant, elles puissent faire connaître à la commis- sion leurs vues sur cet aspect du mémoire, quitte à revenir par après.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Beauce.

M. ROY: M. le Président, je veux remercier à mon tour les dirigeants des trois fédérations pour la présentation de leur mémoire, et je veux en profiter également pour saluer les nombreux représentants du monde de la coopération qui sont ici ce matin à l'occasion de cette audience pour étudier le projet de loi des caisses d'entraide économique et étudier également les modifications à la Loi de l'assurance-dépôts.

J'ai une observation à l'endroit du ministre. Tout à l'heure, il a parlé de l'article 3, et j'aurai quelques questions à poser par la suite. Lorsque le ministre disait qu'il fallait garder au Parlement le pouvoir au niveau de la législation comme autorité suprême en ce qui peut regarder le protection du public, concernant naturellement la Loi de l'assurance-dépôts, c'est justement ce que je voudrais souligner au ministre que le Parlement ne garde pas son pouvoir suprême. En vertu de l'article 3 —article sur lequel nous nous opposons formellement et catégoriquement — le Parlement délègue ses pouvoirs en autorisant le lieutenant-gouverneur en conseil à établir une réglementation.

On sait très bien que la réglementation établie par le lieutenant-gouverneur en conseil n'est pas soumise à la Chambre. Or, les députés, les membres de la Chambre n'ont pas un mot à dire, sinon poser des questions lorsque l'occasion se présente et lorsqu'ils sont informés; mais ils ne sont pas consultés comme tels.

C'est justement le point sur lequel...

M. TETLEY: Pardon, vous me permettrez de noter que j'ai promis de vous consulter.

M. ROY: Oui, vous avez promis de nous consulter, mais c'est un engagement personnel de l'honorable ministre actuel qui, d'ailleurs, nous consulte. Mais je n'ai pas de garantie, moi, que le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives sera éternel.

M. TETLEY: Peut-être. Vous allez adopter une autre loi.

M. ROY: Oui, ça fera l'objet d'une autre loi. Mais je pense...

M. LESSARD: ... les plus mauvais administrateurs.

M. TETLEY: Ajoutez un autre paragraphe dans la loi pour dire que je suis nommé à vie.

M. ROY: Je m'y opposerais, M. le Président.

M. LESSARD: Là, vous deviendriez un mauvais ministre.

M. ROY: Ce sur quoi je veux tout simplement attirer l'attention du ministre — non seulement son attention mais également celle des membres de tout le secteur de la coopération qui sont ici — c'est que, si on accorde trop de pouvoirs de réglementation, on risque de se retrouver dans des situations assez pénibles. On sait qu'il y a une tendance manifeste actuellement à l'effet que le Parlement délègue de plus en plus de pouvoirs au Conseil exécutif. Moi, je considère que c'est extrêmement mauvais; ça peut être extrêmement dangereux à moyen et à long terme. C'est pourquoi la législation devrait être la plus complète possible pour tâcher de limiter et de définir très clairement les limites dans lesquelles on pourra procéder par voie de réglementation. Parce que la réglementation a la même force et entrafne les mêmes obligations que la loi.

Alors, concernant l'article 3, je dis et je répète que nous nous opposons catégoriquement à donner au lieutenant-gouverneur en conseil la suprématie législative réglementaire à ce niveau.

Il y a des questions maintenant que j'aurais à poser aux représentants des trois fédérations. On a souligné dans le mémoire conjoint qui vient d'être lu par Me Cimon...

LE PRESIDENT (M. Pilote): Est-ce que l'honorable député de Beauce-Sud me permettrait, avant de procéder aux questions aux organismes? Le député de Saint-Jean m'a demandé la parole, quitte ensuite... L'honorable député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: Non.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Non?

M. VEILLEUX: Je voudrais poser des questions au représentant de la Fédération des caisses. Alors, si le député de Beauce-Sud a des questions, je passerai après lui. Je suis respectueux, M. le Président, des oppositions soit officielles ou officieuses, mais nous, considérez que nous sommes l'opposition circonstancielle.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: Je veux rassurer le député de Saint-Jean et lui dire que je ne suis pas affilié à ce genre de position. Alors, M. le Président...

M. VEILLEUX: M. le Président...

M. TETLEY: Les cinq membres de l'Opposition officielle, circonstancielle, d'autres fois ont perdu leurs élections. Cinq sur cinq.

M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai simplement dit que même si nous sommes assis de ce côté-ci de la table — et je ne voudrais quand même pas qu'il y ait confusion dans l'esprit des gens, qu'ils pensent que nous sommes de l'Opposition — nous sommes bien des députés du parti au pouvoir.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: La question que je voulais poser à Me Cimon, c'est qu'on parle de la nécessité de recommander, en somme, qu'il y ait une législation complètement autonome de celle des caisses d'épargne et de crédit. Et dans le premier paragraphe de la page 2 de votre mémoire, vous dites: "II faut, les fédérations que je représente le soumettent, éviter toute confusion dans l'esprit du public en évitant de lui faire croire que les caisses d'entraide économique présentent intégralement..." Le mot "intégralement".

Alors, disons que ça se rattache un peu à l'esprit de votre mémoire. J'aimerais que vous nous donniez plus de détails, nous donner des faits, par exemple, ou être plus explicite, de façon que tous les membres de la commission comprennent très bien le sens et la portée de cette argumentation.

M. CIMON: M. le Président, M. le député de Beauce-Sud, j'aimerais vous donner, peut-être en forme stéréotypée, quatre caractéristiques qui nous paraissent, à toute première vue, les caractéristiques fondamentales qui font cette différence au niveau pratique entre les caisses d'épargne et de crédit et les caisses d'entraide économique.

Toutefois, avant de vous les fournir, M. le Président, j'aimerais souligner que ce n'était pas l'intention des fédérations que je représente de s'étendre longuement sur ce point de vue pour la raison suivante: Des représentations avaient déjà été faites au niveau du ministère des Institutions financières, où nous avons manifesté, dans un mémoire élaboré, ces caractéristiques en date du 5 avril 1973, si ma mémoire est bonne, et ce n'était pas l'intention de mes clients d'élaborer d'une façon très ample là-dessus aujourd'hui, mais je suis quand même prêt à répondre aux questions du député de Beauce-Sud.

Disons qu'en forme stéréotypée il s'agit, pat exemple, de la vente à commission qui est une caractéristique propre des caisses d'entraide économique. Le deuxième point, c'est l'exigence de frais d'administration. Troisième point, les épargnes sont recueillies principalement ou totalement au niveau du capital social. Quatrième point, les placements qui sont effectués se font dans le commerce et l'industrie. A notre avis — et je pense que c'est de notoriété connue — ces investissements «ont de nature beaucoup plus risquée évidemment.

Alors, en fait, disons qu'en forme stéréotypée, ce sont les quatre caractéristiques qui, au niveau du fonctionnement, différencient les caisses d'entraide économique des caisses d'épargne et de crédit...

M. ROY: En guise de deuxième question, en quoi voyez-vous...

M. CIMON: ... à savoir qu'elles sont recueillies au niveau du capital social principalement.

M. ROY: En guise de deuxième question, pourquoi voyez-vous dans ces quatre caractéristiques un obstacle en quelque sorte?

Vous apportez une nuance à l'effet que le mouvement des caisses populaires Desjardins ainsi que les caisses d'économie veulent, autrement dit, être complètement séparés de ce genre d'activités, de ce genre d'opérations. En quoi, croyez-vous, cela peut-il léser le mouvement ou les fédérations que vous représentez? En somme, il y a quand même un autre principe coopératif, si je comprends bien, il y a quand même des possibilités, pour un groupe de personnes, de s'unir en vue d'objectifs déterminés pour se donner des services communs. Les services peuvent être individuels, ils peuvent être des services de promotion ou de développement économique du milieu qui, par voie de conséquence indirecte, si vous voulez, peuvent contribuer au développement de la communauté et de ses membres.

Si la Fédération des caisses d'entraide économique, étant donné la nature particulière de leurs opérations, travaille de cette façon parce qu'elle n'a pas le choix des moyens — il faut qu'elle prenne ces moyens-là —j'aimerais savoir en quoi cela peut entrer en contradiction ou si ça peut léser l'esprit que vous semblez vouloir défendre concernant, par exemple, tout ce qui touche le mouvement des caisses populaires et des caisses d'économie.

M. CIMON: Le problème, nous l'avons souligné dans notre mémoire et ceci répond, disons, tout au moins essentiellement à votre question, M. le député. Nous demandions que les caisses d'entraide économique aient une loi-cadre qui soit parfaitement adaptée à leurs opérations et à leurs objectifs propres, auxquels on n'a aucune objection parce que c'est une question de développement économique régional. Notre mémoire est positif là-dessus, en ce sens qu'on ne s'oppose pas à un développement économique. A toutes fins pratiques, le ministère semblait être d'accord avec nous, ce qui nous a pris un peu par surprise lorsqu'on a vu la première lecture du projet de loi, lorsqu'on a constaté qu'il s'agissait d'une loi annexe.

Le fait est que cela nous a pris par surprise. On n'a pas d'objection. On se dit: Le ministère, c'est quand même lui qui légifère, qui offre la législation à l'Assemblée nationale. Mais étant pris par surprise par ce fait nouveau, on lui demande, si c'est une annexe de quelque 23 ou 24 articles par rapport aux 124 articles de la loi-cadre, tout au moins d'attendre que les amendements que les trois fédérations que je représente ont l'intention de présenter au gouvernement, au niveau de la loi-cadre, soient présentés afin d'établir un équilibre entre les deux lois, à toutes fins pratiques, vu qu'il s'agit d'une annexe à la Loi des caisses d'épargne et de crédit.

En fait, c'est la raison de notre mémoire. On ne veut pas aller plus loin. On dit: Nous sommes pris par surprise parce qu'on s'attendait à ce qu'il y ait véritablement une loi-cadre, c'est ce qu'on nous avait laissé entendre. On vient dire au ministère, par l'intermédiaire de la commission ce matin, qu'on lui demande tout au moins d'attendre les amendements essentiels pour éviter toute ambiguïté et éviter tout préjudice dans l'intérêt du public en général, dans l'intérêt des caisses d'entraide économique et dans l'intérêt de l'ensemble des caisses d'épargne et de crédit.

M. ROY: Nous sommes tous au courant que les caisses d'entraide économique demandent, depuis fort longtemps, des amendements, des addititons ou demandent une législation un peu particulière, parce que la Loi des caisses d'épargne et de crédit n'était pas la loi idéale. La loi ne leur convenait pas totalement. Je pense que c'est reconnu et admis de tout le monde. Maintenant, le fait d'adopter les articles du projet de loi no 23, qui constituent en quelque sorte une addition à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, est-ce que cela peut empêcher vos fédérations, les groupements que vous représentez de demander des amendements, comme vous le stipulez dans votre mémoire, à la Loi des caisses d'épargne et de crédit? Est-ce que cela peut être en contradiction: Vous parlez d'ambiguïté; la question d'ambiguïté, cela peut être bien discutable. Moi, j'aimerais savoir si ça peut en quelque sorte vous empêcher de présenter les amendements à la loi que vous avez l'intention de demander. Je me réfère au bas de la page 2 de votre mémoire: "Si le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives persistait dans son attitude de faire en sorte que le projet de loi 23 demeure une simple annexe à la Loi des caisses d'épargne et de crédit, les fédérations que je représente vous demandent instamment de recommander l'ajournement de l'adoption de ce projet de loi jusqu'à ce qu'elles aient l'opportunité de se mettre d'accord avec le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives sur les amandements qui doivent être apportés à 4a Loi des caisses d'épargne et de crédit, amendements que nous avons l'intention de vous soumettre dans les prochains mois." Il faut quand même examiner, à ce moment, toutes les difficultés, tous les embêtements que cela pourra créer à l'autre fédération, la Fédération des caisses d'épargne et de crédit. J'aimerais savoir si le fait d'adopter cette loi, la loi qui nous est soumise actuellement, peut vous empêcher, dans quelques mois, de présenter vos amendements.

M. CIMON: On ne peut pas prétendre que cela peut nous empêcher de présenter nos

amendements. Mais une fois que cette loi est adoptée, qui est une annexe à laquelle on se réfère constamment pour ce qui est de la loi-cadre des caisses d'épargne et de crédit, si les amendements essentiels présentés par les caisses d'épargne et de crédit vont à l'encontre des principes exposés en première lecture dans le projet de loi des caisses d'entraide économique, on va faire un travail qui sera presque inutile, parce qu'il va falloir toujours que le législateur se réfère, dans nos demandes d'amendements, à la Loi des caisses d'entraide économique pour dire: Est-ce que cela entre dans le cadre des caisses d'entraide économique? Est-ce que cela va contredire certains pouvoirs qu'on leur a accordés, ou certaines restrictions qui sont imposées? Nous croyons que le danger, c'est qu'on puisse, à un moment donné, nous refuser des amendements qui nous paraissent, à nous, au niveau de l'ensemble des caisses d'épargne et de crédit, extrêmement importants, sous le prétexte que cela peut nécessiter un autre amendement immédiat à la Loi des caisses d'entraide économique. Alors on dit: Plutôt que de demander un amendement à la Loi des caisses d'entraide économique, attendez quelques semaines ou quelques mois, et on va s'empresser de vous présenter les amendements essentiels au niveau de la loi-cadre.

M. ROY: Oui, mais vous ne pensez pas qu'il y a encore possibilité de convoquer la commission parlementaire, comme elle est convoquée ce matin, et de présenter votre mémoire, présenter vos doléances. S'il est nécessaire d'amender la loi qui nous est actuellement présentée, pour tâcher de donner satisfaction à tout le monde, je pense qu'il y a lieu de voir quels sont les correctifs ou les modifications qui pourraient être apportés. Je ne sache pas, en ce qui me concerne en tant que membre de la commission parlementaire, que le fait d'accorder des privilèges à un puisse léser les droits des autres. C'est justement dans cet esprit que je pose ces questions ce matin, de façon à être bien éclairé sur les conséquences que le fait d'adopter la loi 23 — les conséquences et les préjudices — pourrait causer aux caisses populaires et aux caisses d'économie.

C'est pour cette raison que je voudrais avoir de bonnes précisions là-dessus de façon à être bien au fait pour pouvoir faire au ministre les recommandations qui s'imposent par la suite.

M. CIMON: M. le député de Beauce, si vous me permettez un autre commentaire, en fait, c'est la préoccupation principale des trois fédérations que je représente, à compter du moment où on a l'assurance que nous ne serons pas lésés dans nos possibilités d'amender — et même en profondeur — la Loi des caisses d'épargne et de crédit. En fait, c'est la préoccupation des trois fédérations et c'est la raison pour laquelle on vous disait: Si cela faisait plusieurs années que les caisses d'entraide économique existent, on ne verrait pas tellement d'objections...

M. TETLEY: M. Cimon, pour arrêter cette discussion, vous avez cette assurance, et vous l'aviez depuis longtemps. Je note votre droit de venir le demander encore publiquement, mais vous avez cette assurance.

M. VEILLEUX: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saint-Jean.

M. ROY: S'il y avait changement quant à cette assurance, vous pourrez toujours en informer l'Opposition.

M. VEILLEUX: J'ai l'impression, M. le Président, que tant que nous serons là comme gouvernement, il n'y a aucun danger. Il y aurait peut-être danger si cela était un gouvernement séparatiste.

M. BEDARD (Chicoutimi): Merci de nous placer là, pas plus loin que vous ne le dites. Vous nous voyez déjà au gouvernement, merci !

M. VEILLEUX: Je regrette, d'abord, aujourd'hui l'absence de M. Rouleau, de la Fédération des caisses, qui était ici à la dernière réunion et qui était pressé de répondre à des questions que je posais à la Ligue des caisses. Je remarque qu'il n'est pas ici aujourd'hui. J'aurais aimé qu'il y soit pour qu'il puisse nous donner les réponses à nos questions.

Compte tenu des discussions que nous avions eues à cette séance de la commission parlementaire et en regardant aujourd'hui votre mémoire, je suis réellement déçu, parce qu'à cette réunion, la Fédération des caisses semblait intéressée à discuter du contenu des projets de loi 23 et 24. Je remarque que, dans votre mémoire d'aujourd'hui, vous ne discutez aucunement des suggestions d'amendements, sauf pour dire que cela devrait être mis sur le coin de la table ou sur les tablettes pour oubli tant et aussi longtemps qu'on n'a pas terminé nos discussions avec le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

En lisant les deux pages et demie de votre mémoire, je peux vous dire que je ne suis réellement pas convaincu, à l'heure où je vous parle, de l'opportunité de laisser cela sur le coin de la table en attendant que vos discussions soient terminées.

Je relève ceci comme raison fondamentale que vous soulevez pour laisser cela sur la tablette: "Nous voulons éviter par là une loi qui pourrait comporter des contradictions et des ambiguïtés préjudiciables à tous les intéressés".

J'ai l'occasion de rencontrer fréquemment des électeurs du comté de Saint-Jean. Il y a une caisse d'entraide économique à Saint-Jean et il y a de nombreuses caisses populaires qui jouent un rôle extrêmement important à Saint-Jean, de part et d'autre. Je n'ai jamais vu quelqu'un de la population, en général, confondre, parce que c'est la confusion qui pourrait exister dans

l'esprit des gens qui pousse les fédérations à demander qu'on oublie cela pour le moment. Je n'ai jamais décelé dans la population une confusion entre une caisse populaire et une caisse d'entraide économique.

Est-ce qu'il y aurait d'autres raisons qui pourraient être plus fondamentales? Est-ce que vous pourriez expliciter davantage les contradictions, les "ambiguïtés préjudiciables à tous les intéressés"? Peut-être réussiriez-vous à me convaincre, mais, à l'heure actuelle, je ne suis réellement pas convaincu.

M. CIMON: Si vous me le permettez. M. le Président, M. le député, je voudrais laisser la parole à M. Yvon Daneau qui est plus en mesure que moi de répondre à ce commentaire.

M. DANEAU: J'ai le sentiment que M. le député vient justement de nous dire qu'il y a des différences fondamentales. Il vient d'affirmer que, dans la tête des gens, il n'y a aucune ambiguité possible entre les deux sortes d'institutions. Cela nous convainc qu'elles sont à ce point différentes, qu'elles nécessiteraient, je pense, des lois différentes.

M. VEILLEUX: Vous me faites penser un peu à quelqu'un qui veut comprendre ce qu'il veut bien comprendre.

Ce que j'ai dit — et je vais le redire — c'est que, dans l'esprit de la population, une caisse populaire, c'est une caisse populaire et une caisse d'entraide économique, c'est une caisse d'entraide économique et, pour elle, ce n'est pas la même chose.

M. DANEAU: Pour nous aussi. C'est également ce qu'on dit ce matin.

M. VEILLEUX: Alors si, dans l'esprit de la population, ce n'est pas la même chose, pourquoi retarder des amendements à une loi qui est attendue par les caisses d'entraide économique, pour une raison bien simple? C'est attendu par les caisses d'entraide économique pour mieux protéger les gens qui font partie des caisses d'entraide économique.

M. DANEAU: A ceci, nous souscrivons. Tout ce que nous disons, nous —vous confirmez notre point de vue — c'est que les gens considèrent, dans leur esprit, dans leur vision des choses, qu'il y a des différences, que c'est différent. En conséquence, pourquoi donner une même loi à des choses qui recouvrent des réalités différentes?

Quant à nous, il nous semble qu'il y a deux réalités distinctes. La première a trait aux opérations. Je pense que Me Cimon en a parlé tantôt. Au niveau des épargnes vendues, par exemple, je pense qu'il y a des distinctions; au niveau du droit d'entrée élevé aussi. Si nous parlons de ceci, c'est que je présume que le ministère des Institutions financières pourrait plus longuement en parler que nous, puisqu'il a fait une étude exhaustive de la Fédération des caisses d'entraide économique. Nous n'avons pas eu, d'ailleurs, le rapport. Ensuite, les institutions qui recueillent le capital social au lieu de l'épargne. Je pense qu'on ne traite pas de la même façon, nécessairement, le capital social et l'épargne. Alors ça, c'est sur le plan des opérations.

Au niveau du risque, je pense que la nature des placements est totalement différente. Ceci, Me Cimon l'a dit, notre mémoire le dit, nous voudrions être très clairement compris. Nous n'avons rien contre les caisses d'entraide économique. Nous souscrivons à leur préoccupation de favoriser le développement économique régional, mais nous disons que, dans leurs opérations et dans leur nature, il y a des différences qui font que ce n'est pas la même chose que nous et que, si on leur donne la même loi que nous, on va se retrouver tantôt dans des ambiguïtés.

Je ne prends, comme exemple, que la nature des placements des caisses d'entraide économique et je vous pose la question, messieurs: Est-ce que vous estimez que d'acheter des obligations des commissions scolaires, que d'acheter des obligations des municipalités représente le même caractère de risque que d'investir dans l'industrie? Financer le gouvernement, est-ce que cela représente le même caractère de risque que de placer dans l'industrie? Si vous nous dites oui, ce serait important pour nous de le savoir. C'est qu'au terme de nos placements on voudra s'interroger, à un moment donné.

M. VEILLEUX: Ecoutez, je ne suis pas un spécialiste des caisses d'entraide économique et des caisses populaires. Je ne me fais pas d'illusions là-dessus. Mais le principe de base des deux — vous me direz si je fais erreur — n'est-ce pas l'épargne et le crédit? Lorsque le ministre arrive avec le projet de loi no 23, ce sont des amendements —à moins que j'aie mal compris — à la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Donc, le principe de base —l'épargne et le crédit — est identique, sauf que les modalités sont différentes. D'ailleurs, vous l'avez mentionné, vente à commission, etc., ce qu'une caisse populaire ne fait pas. Les placements des caisses d'entraide économique sont différents des placements des caisses populaires. Cela, je l'admets. Mais est-ce que le principe de base n'est pas l'épargne et le crédit? C'est ce que je ne comprends pas. Dans votre esprit, est-ce que le gouvernement doit faire des lois pour chacune des choses qui peuvent exister, sous prétexte que les modalités d'application d'un principe de base sont différentes d'un organisme à l'autre?

M. DANEAU: C'est une excellente question.

M. VEILLEUX: Est-ce que c'est ça, dans votre esprit, qui devrait exister?

M. DANEAU: Quant à nous, je pense que le législateur reconnaît lui-même les différences de risque. On a mentionné tantôt, dans le projet de loi no 24, l'article 3. Comment se fait-il qu'on introduise soudainement un tel pouvoir au niveau de la Régie de l'assurance-dépôts et qu'autrefois on ne semblait pas en avoir besoin? Est-ce que c'est pour couvrir des risques qui sont différents ou non différents? C'est une première question.

Une deuxième remarque, pour me permettre de répondre plus précisément à votre question. Je voudrais bien être clair parce qu'en fait, pour nous, ce matin, il ne s'agit pas — et je pense que c'est le cas des trois fédérations — de donner l'image que nous sommes opposés aux objectifs poursuivis par les caisses d'entraide économique. Je pense que les caisses d'entraide économique veulent faire la mobilisation régionale des épargnes locales d'un grand nombre d'épargnants pour financer, sur le plan régional, un petit nombre d'emprunteurs. Je ne voudrais pas tomber dans la théorie mais, quant à cette relation qui existe entre celui qui est le propriétaire de l'épargne et celui qui va être l'usager de l'épargne, j'ai le sentiment qu'il y a une distinction fondamentale entre les deux.

Il s'agit de recueillir, à commission, dans la population, des épargnes populaires auprès du plus grand nombre possible de personnes pour les affecter en pratique au niveau de l'industrie à un petit nombre d'emprunteurs. Et là, j'ai le sentiment quand même qu'il y a des distinctions fondamentales qu'il faudrait établir à partir de ce moment sur le plan des opérations et sur le plan de la nature du risque, comme je le disais précédemment.

M. VEILLEUX: Est-ce que, dans votre esprit, vous verriez que le ministère des Institutions financières procède un peu comme, aux affaires sociales, on a procédé pour le code des professions, c'est-à-dire qu'il y a une loi générale qui s'applique à toutes les professions avec des modalités d'application dans des lois différentes pour chacune des professions?

Est-ce qu'à un niveau comme celui-là des institutions financières d'épargne et de crédit, en d'autres mots, c'est le genre de suggestion que vous faites au ministère des Institutions financières, ou si je me trompe?

M. DANEAU: Là, vous êtes beaucoup plus familier que moi avec le code des professions, avez-vous dit? Je ne pourrais pas vous répondre par analogie parce que je ne vois pas les implications, pas parce que je ne veux pas vous répondre, parce que je ne suis pas suffisamment familier avec ça.

Si vous nous disiez qu'une loi-cadre et des annexes sont spécifiques à chacune des fédérations en fonction de leurs opérations, mais qu'advenant le cas où des modifications sont apportées dans l'une des lois, ça n'affecte pas l'opération des autres, peut-être qu'alors ce serait une façon d'envisager une solution possi- ble, mais je ne vous réponds pas comme tel parce que je ne suis pas suffisamment familier avec la loi à laquelle vous vous référez.

M. VEILLEUX: Le code des professions, on en a quand même discuté pendant deux ans ou deux ans et demi.

M. DANEAU: Pour vous.

M. VEILLEUX: J'admets que vous n'avez pas suivi les débats au jour le jour, et je vous comprends parce qu'à certains moments ça devenait fastidieux, sauf qu'il y a une loi-cadre qui s'appelle la Loi des professions, et après ça il y a une loi pour chacune des professions concernées ou qui ont une reconnaissance légale dans la province de Québec.

Je ne vois pas que le gouvernement éventuellement puisse en arriver à une formule semblable à celle-là dans l'épargne et le crédit, sauf que — et je pense qu'il y a quand même une urgence essentielle et qu'il faut souligner dans le projet de loi 23 — les caisses d'entraide économique fonctionnent présentement sous l'empire de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Il fallait bien qu'elles partent sur quelque chose au début. Sous prétexte qu'il n'y a pas une loi spéciale pour les caisses d'entraide, on ne pouvait quand même pas, en tant que gouvernement, les empêcher de fonctionner.

Vous l'admettez avec moi, le public qui place ses épargnes dans les caisses d'entraide économique avait besoin d'une protection. Et si on regarde les amendements au projet de loi 23, ce sont des protections supplémentaires que le gouvernement place dans la loi existante, Loi de l'épargne et du crédit, pour protéger la population, parce que c'est quand même un phénomène relativement nouveau, les caisses d'entraide économique.

On pourrait peut-être faire la suggestion au ministre de dire ça à ses gens du ministère — et j'embarquerais dans une suggestion comme ça — de leur dire: Envisagez donc la possibilité d'une loi-cadre pour l'épargne et le crédit avec des lois spéciales, soit pour les caisses populaires parce que ça existe, soit pour les caisses d'entraide économique parce que ça existe. Et si dans deux ans il y a une autre formule d'épargne et de crédit qui existe, il y aura une troisième loi spéciale subordonnée à la loi-cadre pour un troisième organisme.

Et je verrais très mal le ministre accepter la suggestion que vous proposez — à moins que le ministre me convainque qu'il faut le faire — dans votre mémoire, pour la simple raison que les caisses d'entraide économique existent, qu'on doit donner la meilleure protection à ceux qui investissent leurs épargnes dans les caisses d'entraide économique. Si on retarde de six mois ou un an des amendements à cette loi générale, on ne donne pas la protection voulue à ceux qui investissent leurs épargnes dans les caisses d'entraide économique.

Je pense que c'est dans cet esprit qu'il faut

voir, de la part du ministre, le projet de loi 23. Il n'apporte pas ça pour emmerder les caisses populaires et tout le monde. C'est pour protéger ceux qui... Parce que, il faut vous le dire aussi, il y en a plusieurs qui placent leurs épargnes dans les caisses populaires, et ces mêmes individus les placent aussi dans les caisses d'entraide économique. Et si on regarde autour de la table, en tout cas mon collègue de Rimouski et moi, c'est notre cas.

Peut-être pas de grosses épargnes parce qu'on n'a pas les revenus nécessaires mais, quand même, on en a un peu dans les deux, vous savez. C'est dans cet esprit que les fédérations devraient voir les amendements à la Loi des caisses d'épargne et de crédit qu'apporte le ministre. Je connais trop bien le ministre pour qu'il puisse vouloir faire ça par déplaisir.

M. DANEAU: Je pense que les trois fédérations de caisses d'épargne et de crédit qui sont ici représentées ce matin, ont souscrit entièrement dans le passé à la préoccupation que vous exprimez d'une plus grande protection de l'utilisateur des caisses d'épargne et de crédit. Je ne voudrais pas faire de l'histoire, mais nous avons, à maintes reprises, signifié au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, notre préoccupation à l'égard de certaines institutions qui n'ont pas trait, nécessairement, aux caisses d'entraide économique.

Vous remarquerez qu'en vertu de la loi actuelle des caisses d'épargne et de crédit — et je ne dis pas que c'est bien ou mal — une fédération peut s'incorporer sans que les autres fédérations en soient informées, ou des gens et des groupes peuvent utiliser la Loi des caisses d'épargne et de crédit sans que les fédérations existantes soient consultées. C'est alors la préoccupation du ministère et du gouvernement.

Nous avons, quant à nous, dans certains cas, fait connaître au gouvernement notre appréhension de voir des groupes utiliser la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Vous comprendrez certes que, pour nous, cette loi est notre loi constituante et je pense que, graduellement, à travers le temps, nos institutions ont acquis une certaine crédibilité auprès de la population. On sait — et je pense bien ne pas faire d'impair ici — on se rappelle très bien que tout dernièrement les journaux faisaient allusion à des institutions qui ramassaient de l'épargne auprès de la population en vue de constituer des bourses universitaires et que certaines d'entre elles ont déjà été incorporées en vertu de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Si vous nous demandez si nous étions très heureux de ça, je vous dirai que non. Et, dans certains cas, si nous n'avons pas toujours fait le tapage public que nous aurions dû faire, c'était justement dans le but de protéger le petit épargnant. Parce que, n'oubliez pas que dans le domaine de l'épargne et du crédit, dès le moment où vous faites une manoeuvre publique, vous venez de créer tout un impact dans la population et vous venez de créer la panique. Et, à ce moment-là, vous faites mal au petit épargnant.

J'ai le sentiment qu'une bonne partie de nos relations avec nos sociétaires reposent précisément sur la confiance. La nature de nos relations s'est toujours voulue discrète justement pour respecter les sociétaires qui avaient de l'épargne et qui avaient investi. En ceci, je pense qu'il faudrait enfin au moins corriger cette impression que vous pourriez peut-être avoir que nous ne sommes pas préoccupés par la crédibilité de nos institutions et surtout par la protection du public.

Quant à la suggestion que vous faites, je pense que c'est une chose qui peut être discutée et négociable. Je ne vois pas toutes les implications que ça peut avoir ce matin; on n'est pas devant un nouveau projet, on est devant le projet qui est devant nous ce matin et c'est contre celui-là qu'on en a jusqu'à un certain point.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de...

M. VEILLEUX: Une dernière intervention, M. le Président. Je suis parfaitement d'accord sur ce que vous mentionnez, quand vous donnez l'exemple des fonds pour les bourses. Parfois il y a des caisses... Je sais, j'en ai créé une à l'époque où j'étais président d'une association d'enseignants, pour créer un fonds de grève; au cas où on ferait la grève, on va épargner de l'argent chaque mois et on va avoir plus de $15 par semaine si on fait la grève... Je suis d'accord avec vous que, pour les caisses populaires, c'est peut-être déplaisant.

Compte tenu des remarques que vous faites, vous pouvez avoir la certitude que personnellement, dans les réunions du caucus du Parti libéral, on rappellera au ministre qu'il ne serait peut-être pas mauvais d'arriver avec une loi-cadre, avec des lois spéciales genre — ce que je mentionnais tout à l'heure — code des professions pour différentes professions, compte tenu des remarques que vous faites. Mais je termine en vous disant qu'il faut quand même que les trois fédérations soient conscientes de l'urgence d'apporter ces changements, compte tenu du fait que les caisses d'entraide économique existent, en attendant, parce que quand on discute dans le sens que vous voulez, c'est quand même une transformation en profondeur qui peut s'échelonner sur plusieurs mois et même peut-être plusieurs années. On ne peut quand même pas permettre, pendant cette discussion, que des épargnants risquent des épargnes sans la protection voulue.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Rimouski.

M. TETLEY: Sur un point d'ordre. LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui.

M. TETLEY: Je veux tout simplement noter que je n'ai pas incité le député de Saint-Jean ou de Rimouski ou de Taschereau, qui que ce soit à faire des commentaires. Je n'ai même pas discuté le projet de loi avec ces gens.

M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce que vous vous défendez?

M. TETLEY: Non, non depuis deux, trois mois, le point...

M. BUNRS: La scission commence à paraître!

M. TETLEY: Le point...

M. BEDARD (Chicoutimi): Je croyais que les ministres parlaient avec leurs députés!

M. TETLEY: Les deux lois ont été présentées au caucus, ce qui est mon habitude, et je voudrais tout simplement dire que tout le monde est libre de s'exprimer comme il le veut.

M. VEILLEUX: D'ailleurs, nos collègues du parti séparatiste, il faut bien qu'ils se mettent dans la tête qu'avant que le ministre discute avec eux il discute avec nous. Cela, le ministre l'a toujours fait, puis il continue à le faire. Alors, soyez assurés...

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela ne veut pas dire que ça améliore les lois, cependant.

M. VEILLEUX: ... qu'on les améliore, à ce moment-là.

M. LESSARD: Cela ne parait pas, parce que vous semblez très peu informé.

UNE VOIX: Vous avez un député qui est très bien réveillé.

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai très bien noté votre expression tout à l'heure que vous étiez d'accord sur ce que vous disiez, en laissant supposer: A moins que le ministre ne vous dise de le dire autrement.

LE PRESIDENT (M. Pilote): A l'ordre! Le député de Rimouski.

M. SAINT-HILAIRE: A ce que je sache, c'est à moi que vous avez donné la parole et non au député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): L'Opposition n'abuse pas ce matin.

M. SAINT-HILAIRE: Vous me permettrez, messieurs des fédérations, d'être un peu déçu du mémoire que nous avons entre les mains. Pour vous rassurer et pour rassurer tout le monde, je n'étais pas au caucus lorsque le ministre Tetley en a parlé, c'est-à-dire que je vais m'exprimer extrêmement librement, indépendamment des idées, peut-être, de mon ministre. Vous me permettrez d'être extrêmement déçu du mémoire que vous me présentez ici ce matin, parce que, premièrement, il y a déjà une couple d'années et même plus qu'une couple d'années que les caisses d'entraide économique existent; vous saviez qu'elles existaient et vous saviez de quelle façon elles fonctionnaient. De plus, si je ne fais pas erreur, le projet de loi a été présenté au mois de décembre pour être approuvé par la Chambre uniquement en première lecture et revenir en commission parlementaire.

Vous nous arrivez avec un mémoire aujourd'hui où vous demandez d'attendre quelques mois pour vous permettre de soumettre vos remarques à notre bonne attention. Je pense que, depuis le mois de décembre, depuis la présentation du projet de loi, vous avez eu amplement le temps de préparer votre défense. Vous avez eu amplement le temps de préparer le mémoire et les corrections à apporter à cette loi et je me demande ce matin pourquoi vous nous arrivez avec un mémoire si peu consistant et pourquoi vous nous demandez, encore là, de retarder cette loi, alors qu'une multitude de gens dans la province de Québec, avec un capital probablement, à l'heure actuelle, souscrit d'au-dessus ou de près de $50 millions, attendent après cette loi.

Je vous écoutais parler tout à l'heure, suite justement au paragraphe dont plusieurs ont fait mention donnant les caractéristiques des caisses d'épargne et de crédit et celles des caisses d'entraide économique. Il existe certainement des différences et je pense que le point sur lequel vous vous attardez le plus, c'est peut-être le point le plus important qui puisse exister, c'est la question du risque du placement que font les caisses d'entraide économique, d'après vous, comparativement au risque de placement de vos caisses populaires, etc.

Je pense que vous êtes parfaitement au courant qu'à ce point de vue là, au point de vue du crédit, les deux organismes procèdent un peu de la même façon, en ce sens qu'il existe des bureaux de crédit, des commissions de crédit pour enquêter avant de faire les prêts, que ce soit à l'industrie ou au commerce. Ces gens qui conseillent et vos caisses populaires et les caisses d'entraide économique sont des gens du milieu, toujours du milieu. En effet, si vous prenez une ville, choisissons ma ville à moi, de l'envergure de Rimouski, vos caisses populaires ont des bureaux de direction formés par les gens de Rimouski, ont des gens au bureau de crédit formés par des gens de Rimouski, la même chose que les caisses d'entraide économique.

Alors, il ne faudrait pas penser, à ce moment-là, qu'uniquement les caisses populaires ont des têtes assez fortes pour aller choisir des personnes intelligentes et des personnes superintelligentes pour pouvoir approuver ou choisir

uniquement ceux qui vont faire attention aux risques de l'entreprise. Je pense que l'autre organisme, aussi conscient du rôle qu'il a à jouer, peut, lui aussi, choisir des gens sérieux qui peuvent administrer sérieusement les crédits dont il dispose. A cet effet, je pense que — et ça, peut-être que vos caisses ou vos fédérations pourront le vérifier, étant donné vos relations peut-être un peu étroites avec la Société de fiducie, qui certaines fois prête de l'argent sur des propriétés — vos caisses populaires, elles aussi, se lancent dans le risque assez fort, par le truchement des prêts temporaires et, quelquefois même, sans aucune garantie. J'inviterais peut-être le ministre des Institutions financières à faire des enquêtes sérieuses sur l'administration de certaines caisses populaires.

Personnellement — je pourrai peut-être en souffler un mot au ministre — j'ai en tête une de vos institutions financières qui a alloué un prêt de $300,000, prêt temporaire, alors que le prêt, aujourd'hui, est rendu à $800,000 sans aucune garantie quelle qu'elle soit. Quant aux garanties, on essaie, à l'heure actuelle, de "patcher" les erreurs qui ont pu être commises. A ce moment-là, M. le ministre, cela me fera grand plaisir de vous le dire. C'est pour prouver que si, à un moment donné, il n'y a pas de loi par laquelle le gouvernement peut intervenir directement, que ce soit avec vos caisses ou que ce soit avec les caisses d'entraide économique, je pense qu'on se dirige assurément vers autant de mauvais risques chez vous que chez nous, que dans les caisses d'entraide économique.

Je dis "chez-nous", je le dis volontairement. J'ai été, tout à l'heure, et vous pourrez vérifier...

M. BURNS: J'aimerais qu'on note cette admission du député.

M. SAINT-HILAIRE: Non, non.

M. LESSARD : II est directement impliqué dans le projet de loi.

M. SAINT-HILAIRE: Je me corrige. Je dis "chez nous"; je parlerais de la caisse populaire et je pourrais dire chez nous aussi. Je fais justement la distinction à l'effet que je parle uniquement du capital de risques dont vous avez parlé tout à l'heure. Je pense que la façon d'agir des caisses populaires dans l'attribution des prêts est à peu près la même que les caisses d'entraide économique, à ce stade-ci de la discussion.

Je ne verrais pas pourquoi, à ce moment-là, le gouvernement laisserait aller les caisses d'entraide économique sans donner des garanties quelconques à tous les gens qui ont investi là-dedans de la même façon que les gens qui investissent chez vous doivent avoir des garanties. Je pense qu'il y aurait peut-être eu lieu que vos oppositions à la Loi des caisses d'épargne et de crédit nous aient été soumises bien avant parce que je considère que les caisses d'entraide économique, à l'heure actuelle, remplissent peut-être un objectif que vos caisses ne remplissent pas. Elles ont leur place dans notre société et, étant donné qu'elles ont leur place dans notre société, je crois qu'elles se doivent d'être régies par une loi qui sera contrôlée par les administrateurs du peuple. Je pense que cela fait assez longtemps que ça dure, je ne verrais pas pourquoi nous, du gouvernement, laisserions de côté cette loi pour satisfaire vos fédérations et attendre encore indûment.

Même si on vous donnait plusieurs mois, vous avez déjà eu deux ans pour y penser, vous avez déjà eu deux mois et demi depuis la présentation du bill pour y penser et vous n'avez pas encore eu le temps d'y penser. Je me demande à quel moment vous allez y penser si vous n'avez pas eu le temps d'y penser encore.

M. DANEAU: M. le Président, je pense qu'on recommence à déplacer un peu le débat.

UNE VOIX: Assurément.

M. DANEAU: On est d'accord, totalement d'accord sur le fait que les épargnants obtiennent des garanties et nous ne mettons pas cela en doute en aucune façon. Nous avons dit dans notre mémoire que nous étions d'accord sur les préoccupations des caisses d'entraide économique pour contribuer au développement économique régional. Nous avons dit que nous souscrivions à cette préoccupation. Le fond du débat, M. le Président, c'est de savoir si ces caisses d'entraide doivent être sous la même loi que nous; voilà le fond du débat.

Quant au député, maintenant, je pense qu'il devra probablement se rappeler que le 5 avril nous avons fait parvenir un mémoire au ministre à la suite d'une rencontre que nous avions eue avec lui. Chacun des députés a reçu une copie de notre mémoire. Ce problème, nous le discutons avec le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives depuis au moins un an. Quant à l'exemple que nous sert le député de risques qui, dans l'une ou l'autre de nos institutions, auraient pu être assumés, si on veut discuter ce matin de cas d'espèce, je pense qu'on n'en sortira pas, et avec l'une ou l'autre des institutions. Nous sommes dans un marché financier, il y a des gens qui sont en cause, il y a des compétences qui sont en cause. Il y a sûrement, chez nous, des préoccupations comme il y en a partout ailleurs. Je présume que la nature de nos gens n'est pas différente de celle des députés et, en conséquence, bien sûr nous avons sûrement des problèmes de ce côté-là.

Cette préoccupation qu'il a, lui, d'obtenir une meilleure garantie et une meilleure efficacité de nos entreprises nous rejoint fondamentalement; c'est ce que nous cherchons à faire depuis des années au niveau de notre fédération et au niveau des trois fédérations qui sont ici présen-

tes. Il reste des problèmes, M. le Président, c'est indéniable mais ce n'est pas à partir d'un cas d'espèce qu'on va être capable de discuter fondamentalement ce pourquoi nous sommes ici ce matin.

M. SAINT-HILAIRE: Mais, à ce moment-là, je me demande...

LE PRESIDENT (M. Pilote): J'inviterais les membres de la commission à s'en tenir à la pertinence du débat et éviter de faire des thèses autour de ce débat.

Qu'ils posent plutôt des questions pour obtenir des réponses des personnes intéressées qui sont ici pour répondre aux questions.

UNE VOIX: C'est le bâillon.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Laviolette m'a demandé la parole. Ensuite le député de Saint-Jean.

M. SAINT-HILAIRE: Cela ne répond toujours pas à ma question, même si j'ai été peut-être un peu long, cela ne répond pas à ma question. Pourquoi les caisses populaires ou les fédérations concernées n'ont-elles pas eu le temps depuis la présentation du projet de loi de présenter les amendements à la loi dont elles parlent dans leur mémoire?

M. CIMON: M. le Président, me permettez-vous de répondre à cette question?

LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui.

M. CIMON: Comme je le mentionnais, tout à l'heure, et comme M. Daneau l'a mentionné, nous avons été en contact avec le ministère à plusieurs reprises et depuis plus d'un an, concernant le problème des caisses d'entraide économique. Ce que je mentionnais tout à l'heure, c'est que, lors de l'adoption, lors de la présentation de la première lecture de la Loi des caisses d'entraide économique, nous avons été surpris de ce qu'il s'agissait d'une simple loi annexe. Evidemment, la nature de notre mémoire, ce matin, est de demander à la commission parlementaire de recommander la suspension de la Loi des caisses d'entraide économique pour nous permettre de présenter des amendements. Evidemment, des amendements à une loi-cadre de 125 articles, c'est certainement plus difficile à faire, au niveau de trois fédérations concernées, que la présentation d'une loi de 24 articles comme celle de la Loi des caisses d'entraide économique. Et à ma connaissance, ça fait déjà plusieurs mois que le ministère étudie ces 24 articles à présenter à la Législature. Alors, je pense que lorsqu'il s'agit de modifier sérieusement 125 articles d'une loi-cadre, on doit prendre toutes les précautions voulues et même si ça prend quelques semaines de plus, je pense que ça vaut la peine, lorsque c'est dans l'intérêt public, de réfléchir sur chacun des amendements demandés.

M. SAINT-HILAIRE: Dire qu'il faut amender 125 articles, c'est charroyer un peu. Ils n'ont pas tous besoin d'être amendés.

LE PRESIDENT (M. Pilote): La parole est au député... Je considère la réponse de M. Cimon... Il a très bien répondu à la question. M. le député de Laviolette.

M. CARPENTIER: Quelles sont les raisons qui vous motivent à ne pas accepter les réalisations des caisses d'entraide économique?

UNE VOIX: Hors d'ordre.

M. CARPENTIER: Comment hors d'ordre?

LE PRESIDENT (M. Pilote): II y a une question qui a été posée par le député de Laviolette.

M. CARPENTIER: Est-ce que je pourrais avoir une réponse du représentant des caisses populaires, s'il vous plaît? Je crois que ce n'est pas au député à répondre. Je pose une question à ce monsieur.

M. ROY: Si c'est hors d'ordre, qu'il ne réponde pas.

M. DANEAU: C'est-à-dire que je pense, M. le député, que là il y a ambiguïté sur le thème. C'est qu'en fait nous n'avons absolument rien contre les objectifs poursuivis par les caisses d'entraide économique et par les réalisations qu'elles tentent d'implanter dans les régions économiques où elles travaillent. Nous n'avons aucune objection, nous n'avons aucun problème sur ce plan.

M. CARPENTIER: Est-ce que vous pourriez nous dire quelles sont les politiques qui incitent les grandes différences entre les caisses populaires et les caisses d'entraide économique? Quelles sont ces grandes politiques et ces différences qui ne vous situent pas au même niveau?

M. DANEAU: Nous en avons mentionné quatre, je pense, précédemment. Deux d'abord au niveau des opérations d'une part et au niveau de la nature du risque, d'autre part. Au niveau des opérations, nous pensons qu'il y a des différences assez substantielles dans la façon de percevoir l'épargne. Et en ceci, on ne les chicane pas, mais on dit que c'est différent. Deuxièmement, je pense qu'elles traitent généralement avec du capital social plutôt qu'avec de l'épargne. Troisième élément, c'est qu'il y a un droit d'entrée élevé qui, peut-être, conditionne une partie du taux d'intérêt qu'elles remettent à leurs membres. Enfin, au niveau de la nature, je pense que nous avons mentionné

que la nature des risques était assez différente. En ceci, on dit: Nous assumons nous aussi des risques, mais, en général, nous nous sommes donné des institutions spécialisées pour assumer ces risques, parce que nous estimions que le fonctionnement d'une caisse incorporée en vertu de la Loi des caisses d'épargne et de crédit ne devait pas représenter au niveau des risques la même nature de risques que celle que représente l'investissement dans l'industrie et dans le commerce. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes donné des institutions spécialisées pour répondre à cela.

Lorsqu'on nous dit maintenant qu'on veut, par la fédération des caisses d'entraide économique, les introduire dans la même loi, on se dit: Je pense qu'il y a quand même des différences assez fondamentales. Je crois que ceci devrait être respecté au niveau du fonctionnement et au niveau de la nature des risques.

M. CARPENTIER: Depuis quelle année êtes-vous en activité dans la province de Québec?

M. DANEAU: Pardon?

M. CARPENTIER: Depuis quelle année êtes-vous en activité dans la province de Québec?

M. CIMON: Les caisses populaires, sous l'égide de la Fédération de Québec des caisses populaires Desjardins, sont en activité depuis 1906, si ma mémoire est bonne... 1900, le début du siècle... Alphonse Desjardins.

M. CARPENTIER: Quels étaient vos concurrents à ce moment?

M. CIMON: Les institutions financières en général, les banques.

M. CARPENTIER: Est-ce que les caisses d'entraide économique existaient à ce moment?

M. CIMON: Non, sûrement pas.

M. CARPENTIER: Pour quelle raison refusez-vous la venue des caisses d'entraide économique dans le système actuellement?

M. CIMON: Nous désirons répéter une fois de plus que dans notre mémoire écrit — "les paroles s'envolent mais les écrits demeurent" — il y a un paragraphe où il est parfaitement clair que nous n'avons aucune objection à ce que les caisses d'entraide économique se développent, prennent de l'expansion, aillent recueillir du capital-social pour investir régionalement. Cela a été le point principal du mémoire que nous avons voulu porter à l'attention de la commission parlementaire. Nous n'avons aucune objection. Au contraire.

M. CARPENTIER: Vous semblez attacher beaucoup d'importance au mode de récupération de souscripteurs de la part des caisses d'entraide économique, à la façon dont elles procèdent, les 4 p.c. qu'elles donnent. Quel est votre point de vue là-dessus? Qu'est-ce qui identifie votre mode de souscription comparativement à celui des caisses d'entraide économique?

M. CIMON: Le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives a fait des recherches énormes là-dessus pour voir, d'abord, ces différences. La première qui semble apparente est celle que des personnes rémunérées vont chercher, dans le public, des investissements de personnes, leur versant un intérêt élevé, en vertu desquels ces personnes s'engagent à payer, à plus ou moins longue échéance, le capital-social qu'elles s'engagent par contrat à souscrire. Et au niveau des caisses d'épargne et de crédit, il n'y a pas de personne rémunérée sur la route pour aller chercher, suivant des versements, du capital-social.

M. CARPENTIER: Est-ce que vous payez le même taux d'intérêt par la suite? Evidemment, les caisses d'entraide économique peuvent payer un certain montant — je ne sais pas exactement les taux — 1 1/2 p.c. ou 2 p.c. pour un agent qui fait de la sollicitation et les autres 2 p.c. sont pour les frais d'administration. Mais, par contre, elles paient un intérêt plus élevé aux souscripteurs. Payez-vous le même intérêt comparativement aux caisses d'entraide économique?

M. CIMON: Je pense qu'on sort du problème qui a été présenté. On ne veut pas discuter, en somme, de tous les détails. Ce qu'on veut mentionner à la commission parlementaire...

M. CARPENTIER: Mais est-ce que cela n'est pas un détail très important auquel vous attachez beaucoup d'importance?

M. CIMON: Nous avons énuméré ces détails au niveau de cette différenciation entre les caisses d'épargne et de crédit et les caisses d'entraide économique dans le seul but de mentionner à la commission parlementaire qu'on aurait préféré qu'il y ait, à cause de ces distinctions fondamentales au niveau des opérations, une loi qui encadre bien les objectifs sociaux et économiques des caisses d'entraide économique.

M. CARPENTIER: Vous avez également mentionné tantôt que vous aviez acquis une certaine crédibilité auprès de la population depuis 1900 ou 1906 avec toutes les formules que vous avez mises à la disposition des gens. Est-ce que vous ne croyez pas que les caisses d'entraide économique sont capables de se procurer la même crédibilité avec les mêmes possibilités, surtout avec la loi qu'on propose présentement?

M. CIMON: Nous n'avons pas discuté au niveau de la crédibilité. Tout ce que nous avons mentionné est que le législateur, avec une loi, comme il l'a mentionné tout à l'heure, comme certains députés l'ont mentionné, justement veut adopter cette loi rapidement pour protéger le public, en fait.

Alors il n'est pas question de crédibilité. On ne veut pas juger de la crédibilité mais on dit que lorsqu'un organisme a des opérations différentes de celles des caisses populaires qui existent depuis de nombreuses années, on ne veut pas, quand même, qu'il y ait une identification totale au niveau des opérations et de leur politique.

M. CARPENTIER: Est-ce que vous n'aimeriez pas voir le public aussi bien protégé du côté des caisses d'entraide économique que du côté des caisses populaires?

M. CIMON: Incontestablement. On n'a absolument aucune objection là-dessus. Ce serait impensable qu'on ait des objections là-dessus, M. le député.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je suis l'ordre.

M. BONNIER: Merci, M. le Président. Vous êtes un homme juste.

Il est évident, M. le Président, si on se reporte aux questions qui sont posées ainsi qu'aux mémoires qui sont présentés, qu'au-delà de la question qui nous intéresse primordiale-ment, soit des modifications au bill 8, en rapport avec les caisses d'entraide économique, c'est tout le débat, dans le fond, du secteur coopératif, de ce qu'est une coopérative. Je pense que c'est cela qu'il y a lieu de bien se rappeler, dans nos discussions.

Je pense bien qu'au niveau des opérations strictement financières, on pourrait opter pour cette formule-ci ou pour cette formule-là, mais je crois déceler, dans le mémoire présenté par les trois fédérations, certaines objections de principe. C'est peut-être là-dessus qu'il y aurait lieu de poser des questions. Moi, j'en ai, en tout cas, à poser.

Mais partons du fait établi par le ministre des Institutions financières à l'effet qu'il n'est pas contre le fait qu'il y ait de la cohérence dans les lois coopératives, tout au contraire. Si on se reporte aux débats de 1963, dans le temps, on a voulu une refonte de l'ensemble des lois coopératives parce qu'elles étaient dispersées dans une foule de syndicats coopératifs, et faire une seule loi. On a eu, en fait, dans le domaine de l'épargne et du crédit, le bill 8.

Maintenant, il arrive qu'en cours de route, évidemment, on a besoin d'ajustements. Il s'agit là d'un ajustement. Or, le ministre a très bien expliqué — moi, en tout cas, cela me satisfait, je dois le dire publiquement — que dans l'ordre pratique des choses, il est opportun, il est peut-être avantageux, à ce moment-ci, d'avoir une loi pour les caisses d'entraide économique mais qu'il n'est pas contre... Personnellement, je ne suis pas contre, au contraire. Je suis pour le fait qu'on n'introduise pas de l'incohérence dans les lois coopératives et que la loi 8, si elle doit être un peu détournée par cette loi spéciale qu'on apporte, les modifications ou les suggestions de modifications qui soient apportées par les autres fédérations rétablissent une cohérence.

Dans cet esprit, M. le Président, je voudrais demander à M. Cimon ou à quelqu'un d'autre si, par hypothèse, les caisses d'entraide économique modifiaient leur mode de recrutement... Je pense qu'ils ont beaucoup de difficulté, parce que leurs vendeurs sont soumis à la loi qui régit la commission des valeurs mobilières. Il y a un détail, en particulier. C'est que des vendeurs itinérants comme ceux-là ne sont pas censés faire de sollicitation à domicile, ce qui doit drôlement compliquer leur existence, parce qu'ils sont très soumis à la loi, je suppose. Si, dans l'esprit coopératif, il n'est pas contre le fait que des gens puissent faire de l'éducation coopérative, que des gens soient employés pour recruter du monde — cela existe dans les mouvements coopératifs. Il y a eu des propagantistes, appelez-les recruteurs — si, par hypothèse, les caisses d'entraide économique acceptaient qu'au lieu que ce soient des vendeurs itinérants, ce soient des gens à salaire et qu'ils s'appellent recruteurs, est-ce qu'à ce moment-là, les autres fédérations auraient un peu moins d'objections à considérer les caisses d'entraide économique comme un organisme coopératif régulier?

Deuxièmement, si, au lieu de limiter en grande partie leurs prêts à des entreprises commerciales ou industrielles — je ne dis pas de ne pas le faire — elles élargissaient leur champ de prêts de façon à correspondre davantage à certains besoins de l'ensemble de leurs membres, est-ce qu'également, à ce moment-là, les autres fédérations ne seraient pas prêtes à concéder que les caisses d'entraide appartiennent de plain-pied à la loi 8 qui régit les caisses d'épargne et de crédit.

M. CIMON: En d'autres termes, si je comprends bien le député de Taschereau, il demande: Si les caisses d'entraide économique arrivent à faire les mêmes opérations que les caisses d'épargne et de crédit actuelles, les caisses populaires, est-ce qu'on a des objections à ce qu'elles restent dans la loi? Je pense que la réponse est affirmative. Evidemment, on n'a aucune espèce d'objection à ce qu'elles demeurent dans la loi, si leurs opérations sont les mêmes que les nôtres.

C'est incontestable, mais en fait la nature ou l'objet de notre mémoire, c'est que l'état actuel

des choses est à l'effet que, pour atteindre leurs objectifs —je ne veux pas présumer de leurs objectifs — d'investissement économique, il semblerait qu'elles aient trouvé une formule qui semble adéquate. C'est la raison pour laquelle notre mémoire a pour objet de dire qu'on aurait de beaucoup préféré que les caisses d'entraide économique aient, si vous me le permettez, une paire de culottes dans laquelle elles puissent circuler d'une façon allègre, au lieu d'être dans une loi-cadre où il y a ambiguïté. C'est uniquement, en quelques mots, l'objet de notre mémoire.

M. BONNIER: Juste une autre question relativement au bill 24. Je comprends bien par le mémoire que les trois fédérations seraient satisfaites et seraient d'accord si un amendement était apporté à l'article 3, qui pourrait se lire comme ceci: Déterminer les règles et normes non pas relativement à chacune des caisses, mais faire des recommandations aux fédérations plutôt qu'aux caisses concernées.

M. CIMON: Je crois qu'en fait l'objet du mémoire vis-à-vis du projet de loi 24 ne vise pas seulement à consulter. Je crois que cet amendement est extrêmement important — il a été soulevé à plusieurs reprises, même dans les journaux — au niveau des conséquences possibles du fait qu'en dehors du législateur on ait un pouvoir aussi fort non seulement au niveau d'une catégorie de caisses, mais au niveau d'une caisse en particulier, laissé à l'interprétation d'une réglementation qui ne soit pas sous le contrôle du législateur, à toutes fins pratiques, au niveau de la ventilation des actifs et du passif.

En d'autres termes, ce qui est un peu surprenant dans cet article 3 du projet de loi 24, c'est que le législateur ne se fait même pas confiance en lui-même, parce qu'il accorde dans la Loi des caisses d'épargne et de crédit un pouvoir de placement donné aux caisses et il n'a pas confiance au pouvoir qu'il accorde par la Loi des caisses d'épargne et de crédit, en établissant une autre loi où il permet à des personnes autres que le législateur de décider, d'une façon qui pourrait être arbitraire, des placements d'une caisse d'épargne et de crédit en particulier, et non d'un groupe de caisses.

C'est pourquoi on demande, tout au moins, au ministère, à cause de la gravité des pouvoirs qu'il semble mettre dans ce projet, qu'il y ait consentement des fédérations concernées. C'est l'objet de notre mémoire bien écrit, qu'il y ait consentement des fédérations concernées.

Je crois que la crédibilité des fédérations des caisses populaires est suffisamment forte au niveau du contrôle de ces caisses, sauf exception — l'exception confirme toujours la règle — pour que les fonctionnaires qui auront à appliquer le règlement puissent consulter et obtenir une ventilation qui soit adéquate à l'ensemble des caisses affiliées à des fédérations.

M. TETLEY: J'ai déjà noté que je suis prêt à considérer un amendement au projet de loi au paragraphe r) dans ce sens, c'est-à-dire que nous allons appliquer les articles plutôt aux fédérations qu'à une caisse. Mais, à la fin, je vais peut-être lire un mémoire que j'ai reçu ce matin, à ma demande, au sujet de toutes les fédérations et toutes les ligues où il y avait des lacunes et des faillites, pour montrer la responsabilité que le gouvernement accepte avec l'assurance-dépôts. C'est l'étatisation de l'assurance, si ça peut faire plaisir à certaines gens.

M. BEDARD (Chicoutimi): Et déplaire à d'autres.

M. TETLEY: Et, avec cette étatisation, il y a une jolie responsabilité pour le ministre, parce qu'il assure des sommes énormes.

Avant de me lancer dans une telle aventure, il me faut des pouvoirs importants parce que c'est l'assurance obligatoire, n'oubliez pas. Vous avez le droit de la demander et l'Etat ne peut pas refuser, sauf pour des raisons valables. En conséquence, j'ai une jolie responsabilité, non pas simplement auprès de vous, mais des cinq ou six autres caisses et fédérations.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, à écouter les interventions du député de Taschereau, j'ai toujours l'impression qu'il s'est trompé de parti depuis le 29 octobre 1973. Le député de Taschereau, je pense, a très bien situé le débat qui est au niveau du principe coopératif. Je ne pense pas que ce soit au niveau de l'épargne qu'on doive identifier les différentes institutions financières puisque les banques sont des institutions d'épargne, les fonds mutuels sont des institutions d'épargne, comme les caisses populaires, mais ce n'est pas du tout le même principe.

Je pense que c'est au niveau du principe coopératif que nous avons à situer le débat aujourd'hui, et ma question s'adresse à M. Daneau, malgré certaines modalités, qu'il a soulignées tout à l'heure, différentes entre les caisses d'entraide économique et les caisses populaires. Est-ce que vous avez quand même remarqué, dans le fonctionnement des caisses d'entraide économique, des différences au niveau du principe coopératif même? Est-ce qu'il y a des différences entre les caisses populaires, au niveau de ce principe, et les caisses d'entraide économique? C'est à ce niveau — je crois — qu'il s'agit d'identifier un certain nombre, que ce soient les caisses d'établissement, les caisses d'entraide économique ou les caisses populaires. Est-ce que vous avez des différences ou des objections?

D'accord, il a donné des différences de fonctionnement dans les modalités. Mais, au niveau du principe même, parce que c'est au

niveau du principe qu'on discute ce matin, est-ce que, par exemple, les caisses d'entraide économique, comme les caisses populaires, doivent avoir un statut coopératif ou de coopération, ou est-ce que vous avez certaines objections?

M. DANEAU: M. le Président, je dois dire au départ qu'au niveau des trois fédérations ici représentées, on n'a aucun statut de papauté pour dire ce qui est coopératif et ce qui ne l'est pas. Nous n'avons que l'expérience, en général, de 60 ou 70 ans d'opérations et, pour nous, une coopérative authentique réalise l'identification du propriétaire, de l'usager et du bénéficiaire de l'entreprise. En d'autres mots, les usagers de la coopérative en sont à la fois les propriétaires et les bénéficiaires. Il y a toujours communauté d'intérêts entre des membres qui ont une communauté de besoins.

Sur ce plan, évidemment, une des questions qu'on pourrait peut-être se poser est celle-ci: Sur les membres épargnants dans les caisses d'entraide économique, combien y en a-t-il qui sont en même temps emprunteurs?

M. LESSARD: Qui sont en même temps... excusez.

M. DANEAU: Est-ce que, dans le fond, on ne retrouve pas la situation...

M. LESSARD: Ah! d'accord.

M. DANEAU: ... où le membre épargnant est traité comme un investisseur capitaliste? Il n'y a pas de sens péjoratif à mes termes, c'est pour faire la distinction entre la coopérative, le capitalisme et on pourrait parler d'entreprises d'Etat, si vous préférez, tantôt.

Dans une caisse populaire, généralement, le propriétaire est forcément, ou tout au moins théoriquement, celui qui apporte l'épargne et celui qui a la possibilité d'emprunter. Dans une caisse d'entraide économique, telle qu'on nous l'a définie jusqu'à ce jour — et ça, il n'y a pas de jugement de valeur dans ça, toujours— c'est qu'un groupe d'épargnants apporte de l'épargne qui sera, semble-t-il, utilisée par un petit groupe d'emprunteurs pour favoriser le développement économique régional. Est-ce qu'il y a homogénéité d'intérêts? Est-ce qu'il y a identité d'intérêts?

En ceci, quant à nous, il y a une différence fondamentale entre la coopérative, telle qu'on l'a vécue chez nous depuis 70 ans, et le mode qu'on nous propose présentement.

Et à partir de ce moment-là, pour nous, il y a donc des différences d'opération. La nature des risques n'est pas la même dans une caisse populaire que dans une caisse d'entraide économique. Lorsqu'on le dit, dans notre tête, on ne préjuge pas du bien-fondé de la caisse d'entraide économique. Je m'excuse si je reviens sur cela souvent, mais il ne s'agit pas d'avoir un débat qui déblatérerait sur ces institutions-là, pas le moins du monde. Mais on se dit, à partir de ce moment-là, lorsque le législateur veut recouvrir deux entités d'opérations différentes dans une même loi, on a le sentiment que dans six mois, même si le ministre nous donne beaucoup de garanties, on arrive avec notre "pattern" et qu'il va entrer en conflit avec le leur. C'est dans ces termes-là qu'on dit, à un moment donné: Est-ce que, pour le bien de toutes les parties en cause, il ne serait pas préférable d'avoir des distinctions fondamentales dans les lois? Nous n'avons rien contre les caisses d'entraide économique, mais nous protégeons nos propres intérêts. Je pense que personne ne peut nous blâmer sur ce plan-là.

M. VEILLEUX: M. le Président, si vous le permettez, la question du député de Saguenay m'amène à poser au représentant des fédérations un peu le même genre de question que je posais il y a quinze jours à la Ligue des caisses, et M. Rouleau aurait voulu répondre à ce moment-là. Probablement que M. Daneau va pouvoir répondre. Pour avoir droit à un prêt, à une caisse populaire, est-ce que la personne qui va demander un prêt doit être membre depuis un certain temps de la caisse populaire concernée, ou si n'importe qui peut se présenter à une caisse populaire et dire: Moi, j'aimerais avoir un prêt personnel. Le gérant dit: Achète une part sociale à $5 et on va étudier ton affaire. Ou si la personne doit avoir sa part depuis un certain temps. Règle générale, je ne dis pas...

M. CHARRON (Paul-Emile): Non. Règle générale, il n'y a aucun problème. Dans la loi, la seule restriction est sur le droit de vote où il est prévu 90 jours; et dans les règlements de nos caisses populaires, aucune période de restriction n'est prévue. Vous faites votre demande, si vous n'êtes pas sociétaire, évidemment il faut que vous deveniez membre. Vous prenez votre part sociale, vous devenez membre, vous faites votre demande d'emprunt, elle est soumise à la commission de crédit qui en décide et vous avez votre prêt. Il n'y a aucune restriction.

M. VEILLEUX: II faut qu'il soit membre de la caisse où il va emprunter parce que la caisse où il va emprunter a un caractère d'autonomie vis-à-vis des autres caisses.

M. CHARRON (Paul-Emile): C'est cela. Un sociétaire a la qualité de déposant et il a la qualité d'emprunteur, en fait ou virtuellement, au moins. Il faut bien regarder la réalité des choses. Les principes sont les principes. Les principes ne sont pas traduits dans les lois. Cela se lit. C'est une espèce d'architecture en arrière, mais une loi, c'est pour des opérations.

M. VEILLEUX: Je vous pose la question... M. CHARRON (Paul-Emile): Vous pouvez

avoir, dans une coopérative d'épargne et de crédit, une institution d'épargne qui nourrit une coopérative de crédit. Les coopératives de crédit existaient en Europe avant la fondation de la première caisse populaire en 1900. Qu'est-ce qu'a fait Desjardins? Il a marié, dans la même institution coopérative, l'épargne et le crédit, c'est-à-dire que le gars qui devient membre, devient membre déposant et virtuellement membre emprunteur, s'il a besoin d'argent. Les institutions coopératives de crédit avant Desjardins, c'étaient des institutions où seuls ceux qui devenaient membres empruntaient, et l'institution empruntait des banques ou des autres institutions.

M. VEILLEUX: D'accord.

M. CHARRON (Paul-Emile): On a pu introduire, à l'intérieur de notre patente, ce qu'on a, en somme, dans les caisses d'entraide économique, une institution d'épargne qui sollicite des épargnes pour nourrir une coopérative de crédit. Cela, c'est substantiellement vrai. Il faut regarder la réalité telle qu'elle est. Qu'est-ce que c'est une caisse populaire d'épargne, qu'est-ce que c'est une coopérative d'épargne et de crédit? C'est une association de personnes qui mettent en commun leurs épargnes pour s'en-traider au moyen de prêts. Donc, le gars qui entre dans la coopérative, c'est pour déposer et aussi pour emprunter quand il en aura besoin. Heureusement que tout le monde n'en a pas besoin en même temps parce que cela ne marcherait pas. Heureusement qu'il y en a qui sont plus riches que les autres. C'est cela qu'on appelle la coopération. Ceux qui ont plus d'argent le mettent à la disposition de ceux qui n'en ont pas, qui n'en ont pas assez ou qui en ont besoin. C'est cela la coopérative d'épargne et de crédit. Vous pouvez avoir, si vous regardez cela de l'extérieur, une institution où l'on sollicite des épargnes, des gars qui deviennent déposants mais qui ne sont pas emprunteurs, et d'autres qui sont emprunteurs mais qui ne sont pas déposants. C'est là que cela commence à changer la substance de la réalité coopérative. Cela ne se traduit pas dans la loi, cela ne se voit pas dans la loi.

M. VEILLEUX: Ecoutez, c'est exactement pour cela que j'ai posé des questions à la Ligue des caisses.

M. CHARRON (Paul-Emile): Je parle fort parce que je veux être bien entendu; ce n'est pas parce que je suis fâché.

M. VEILLEUX: Non, non. Comme je le disais à M. Rouleau, il y a quinze jours, je pose les questions à la Ligue des caisses et je vais vous les poser quand vous viendrez déposer.

M. CHARRON (Paul-Emile): Certainement. M. VEILLEUX: Cet après-midi, j'espère être présent quand les autres vont venir parce que j'ai l'intention de leur poser les mêmes questions. Je leur demande de prendre note des questions parce que, si je ne suis pas ici, j'aimerais qu'ils donnent la réponse; je vais relire le journal des Débats.

M. CHARRON (Paul-Emile): Est-ce que je peux compléter?

M. VEILLEUX: Disons que cela me satisfait en gros. Dans les prêts que vous faites à celui qui a une part sociale —d'accord? —j'aimerais que vous me donniez, peut-être pas complètement, un éventail du genre de prêts que celui qui a une part sociale peut avoir. Je m'explique pour être bien compris. Quel pourcentage, environ, des épargnes vont pour un prêt strictement personnel? Quelqu'un qui veut s'acheter une automobile ou quelque chose comme cela. Quel pourcentage du prêt va pour la première hypothèque sur une maison d'un type qui a une épargne?

Pourriez-vous me donner, si c'était possible, un genre d'éventail pour qu'on puisse bien voir les distinctions qui existent entre la Ligue des caisses, la Fédération des caisses populaires et les caisses d'entraide économique? J'espère que l'UPA va venir; on va lui poser les mêmes questions pour en arriver à ce que vous demandez, des lois autonomes pour chacun des groupes.

M. CIMON: M. le Président, comme on savait que cette question-là viendrait, parce que M. le député nous en avait avertis la dernière fois, je pense bien qu'on a un de nos collègues qui peut lui répondre adéquatement. Je demanderais à M. André Morin de répondre à cette question-là.

M. MORIN (André): Vous avez toutes les réponses à vos questions dans la brochure...

LE PRESIDENT (M. Pilote): Voulez-vous parler dans le micro, s'il vous plaît?

M. MORIN (André): ... Statistiques financières 1971, publiée par le Bureau de la statistique de Québec, division des finances. Cela touche les caisses d'épargne et de crédit et vous avez une ventilation pour chacune des fédérations. Vous avez des chiffres là-dessus. Votre question était typiquement sur le prêt à l'automobile. Je prends la Fédération des caisses populaires de Québec, parce que...

M. VEILLEUX: D'accord.

M. MORIN (André): ... s'il fallait faire un sommaire des trois, ce serait plus compliqué. 17.8 p.c. des prêts des caisses populaires étaient pour l'automobile, tandis qu'il y en avait 1.4 p.c. par la Fédération des caisses d'entraide économique; 25.8 p.c. des prêts de la Fédération des caisses populaires allaient au budget fami-

lial. Du côté de l'entraide économique, on voit 12.3 p.c. des prêts totaux effectués durant l'année. Education et épargne, pour acheter des certificats d'épargne, par exemple, 3.4 p.c. du côté des caisses populaires; il n'y en a pas du côté des caisses d'entraide économique. Réparation et modernisation de maisons, de logements ou d'autres immeubles, 8.4 p.c. chez nous; 14.3 p.c. chez les caisses d'épargne et d'entraide économique. Acquisition de biens immobiliers, 31.1 p.c. chez nous; 56.8 p.c. chez vous, si vous voulez, oui.

M. VEILLEUX: Pourquoi chez nous? Je vous ai dit que j'étais membre et de la caisse populaire et de la caisse d'entraide.

M. MORIN (André): En tout cas, vous avez une ventilation ici.

M. VEILLEUX: Ne prenez pas de chance.

M. SAINT-HILAIRE: C'est chez nous aux deux places.

M. MORIN (André): Bon. Un autre chiffre qui peut vous intéresser, si vous regardez les prêts hypothécaires consentis aux commerçants et aux industriels dans la même publication, page 27, vous avez une ventilation: 6.4 p.c. des prêts des caisses populaires affiliées à la fédération du Québec ont été consentis à des commerçants et industriels. Du côté des caisses d'entraide économique, c'est 57.5 p.c. de leurs prêts effectués. Si vous regardez les petits prêts en comparaison avec les gros prêts et que vous allez du côté des prêts sur reconnaissance de dette, par exemple, les caisses populaires ont effectué 5.3 p.c. de leurs prêts dans des prêts d'un montant de $5,000 ou plus, 5.3 p.c. seulement, tandis que les caisses d'entraide économique en ont 40 p.c. à cet article-là, du côté des reconnaissances de dettes.

Du côté hypothécaire, le montant est aussi frappant. Les caisses d'entraide économique ont fait 55 p.c. de leurs prêts dans des montants de $25,000 et plus, tandis que les caisses populaires n'en ont fait que 6.3 p.c.

M. VEILLEUX: Disons que cela me donne la réponse.

M. MORIN (André): Je pense que cela vous donne une idée, un éventail des deux organismes qui ont des buts différents...

M. VEILLEUX: C'est cela.

M. MORIN (André): ... une activité différente.

M. VEILLEUX: Oui, d'accord. Maintenant, j'avais posé, il y a quinze jours, à la Ligue des caisses, deux autres questions que je vais vous poser.

Est-ce qu'une caisse populaire — parce que cela arrive dans les caisses d'entraide économique et je voudrais savoir si la même chose peut se produire chez les caisses populaires — de la paroisse Saint-Alphonse peut prêter des fonds à une caisse de la paroisse voisine, compte tenu, par exemple, qu'à un certain moment surtout une caisse qui commence n'a peut-être pas toutes les épargnes voulues pour pouvoir répondre aux besoins des gens ou si c'est la fédération qui prête à ces caisses?

M. MORIN (André): Ce sont les unions régionales, c'est le rôle propre des unions régionales précisément d'aider les caisses naissantes et d'aider les caisses populaires qui ont des besoins de liquidités.

M. VEILLEUX: D'accord. Là, j'ai dit que je reposerais les mêmes questions pour qu'on ait un tableau. Maintenant, ce serait, sur le taux d'intérêt, ma dernière question qui avait été la première, il y a quinze jours, à la Ligue des caisses. Quel est, en général, le taux d'intérêt? Quelle différence peut-il y avoir entre votre taux d'intérêt et celui des compagnies de finance qu'on rencontre, les mauvaises compagnies de finance, paraît-il?

UNE VOIX: C'est en dehors du sujet.

M. VEILLEUX: On n'est pas en dehors du sujet, M. le Président; ce sont des questions qu'on a jugées pertinentes il y a quinze jours. J'ai dit que je les reposerais à chacun des groupes qui viendraient ici pour justement avoir une idée des différences qui peuvent exister et peut-être finalement réussir à répondre à la demande de la Fédération des caisses qui aimerait avoir une loi à elle et une loi pour les autres.

M. BEDARD (Chicoutimi): Les compagnies de finance n'ont pas d'affaire là-dedans; on le sait que c'est très différent de tous les autres.

M. VEILLEUX: Le député de Chicoutimi n'était pas...

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, j'étais ici; j'étais le porte-parole officiel.

M. VEILLEUX: II était ici, mais il devrait relire le journal des Débats.

M. BEDARD (Chicoutimi): Puis j'offrirais aux députés libéraux de leur passer notre plaquette sur le coopératisme; peut-être qu'ils poseraient moins de questions.

M. MORIN (André): Voulez-vous que je réponde à la question, M. le Président?

LE PRESIDENT (M. Pilote): Oui, allez. M. VEILLEUX: J'ai posé la question.

M. MORIN (André): Alors, au sujet des taux d'intérêt, je peux vous donner les taux d'intérêt en vigueur dans les caisses populaires au 31 décembre 1973. Le taux d'intérêt qui s'appliquait sur les prêts sur reconnaissance de dette était, selon une moyenne pondérée, de 11.8 p.c. Il y a différents taux dans différentes caisses, mais en tenant compte des montants prêtés, on arrive avec une moyenne pondérée de 11.8 p.c. Cette moyenne pondérée inclut une assurance-vie-prêt dans 75 p.c. des cas. Du côté du prêt hypothécaire, le taux était de 10 p.c, moyenne pondérée, avec, là aussi, une assurance-vie-prêt dans 75 p.c. des cas. Du côté de l'épargne, si la chose vous préoccupe, l'épargne avec opération rapportait un taux moyen d'intérêt de 3.3 p.c, l'épargne stable de 6.5 p.c. et le capital social rapportait un taux de 7.3 p.c Tenant compte des liquidités et des caractéristiques de ces formes d'épargnes, les taux sont différents.

M. VEILLEUX: D'accord, merci.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: J'aimerais savoir si vous avez fait cette ventilation avec non seulement la Fédération des caisses d'entraide économique, mais si vous l'avez faite également en rapport avec les autres caisses d'épargne, les autres secteurs de caisses d'épargne et de crédit. Exemple: les caisses d'économie, les caisses d'établissement. Est-ce que vous avez fait cette étude jusqu'à ce niveau?

M. MORIN (André): Oui, c'est-à-dire que la ventilation est faite; je répète qu'il ne s'agit pas d'une ventilation qui a été faite par nous, mais simplement d'un travail effectué par le Bureau de la statistique du Québec, division des finances.

M. ROY: Moi, je pense, M. le Président — à ce niveau-ci, ça fait plus d'une heure que nous faisons un débat philosophique — qu'il faut regarder à un palier plus élevé que le débat philosophique dans lequel nous nous sommes engagés, ce matin. Si nous regardons à un niveau plus élevé, on constate que les quatre secteurs, les quatre groupes, caisses d'économie et de crédit, sont des institutions qui se complètent, qui sont complémentaires. Je pense que c'est dans cet esprit qu'on devrait plutôt les examiner en regard de la loi. Alors, il y a une loi de base qu'on appelle le bill 8, la Loi des caisses d'épargne et de crédit, et il y a des annexes, à un moment donné, comme il y a eu un amendement, à un certain moment, qui a été apporté pour permettre aux caisses d'établissement de jouer leur rôle. Les gens qui font partie d'une caisse populaire en font partie pour des services bien déterminés et, lorsqu'ils font partie d'une caisse d'entraide économique, ils le font pour d'autres objectifs. Je pense qu'il n'y a pas de contradiction là-dedans; c'est simplement une complémentarité. Je pense qu'on est peut-être chanceux au Québec d'avoir cette diversité au niveau de nos caisses d'épargne et de crédit.

M. le Président, en ce qui me concerne, je serais prêt à écouter d'autres mémoires et je veux remercier les gens du mouvement Desjardins et les autres.

M. MORIN (André): Me permettez-vous un commentaire sur l'intervention du député de Beauce-Sud?

Cela touche aussi quelques interventions; tantôt, je vous écoutais, puis j'avais des chiffres en main et cela me préoccupait. Vous dites qu'on ne reconnaît pas les caisses d'épargne et d'entraide économique. Je pense que c'est une réalité. Il n'est pas question de les reconnaître ou de ne pas les reconnaître. La réalité est là et, d'ailleurs, au mois de septembre 1973, il y avait $120 millions d'actifs dans ce groupement de caisses d'épargne et de crédit. Ce qui nous préoccupe et ce qu'on reconnaît aussi, c'est qu'il n'y avait pas uniquement ça comme caisses d'épargne et de crédit dans la province de Québec; il y avait quelque chose comme $4.1 milliards dans d'autres institutions qui ne fonctionnent pas de la même façon. Les caisses d'épargne et d'entraide économique ont une importance relative; à l'intérieur de tout ce monde des caisses d'épargne et de crédit au Québec, c'est quelque chose comme 3 p.c. des actifs totaux. Il faudrait quand même en être conscients. Le grand enjeu du débat, je ne pense pas qu'il s'agisse de prendre un détail ou un autre, mais qu'est-ce que c'est une caisse d'entraide économique? Il ne faut sûrement pas que le public ressorte avec l'idée qu'une caisse d'entraide économique, c'est une caisse populaire mieux administrée que les autres, qui donne 10 p.c de rendement. Ne nous racontons pas de blagues. Au plan économique, quand il y a un rendement supérieur, habituellement, il y a un peu plus de risques.

Je ne dis pas que c'est mauvais. Il nous faut courir des risques et il nous faut développer notre pays. Mais on parle d'améliorer des lois, on parle de préciser des institutions, il faudrait peut-être en profiter pour donner au public exactement l'image de ce qu'est chaque institution. Vous arrivez avec un projet de loi 23 qui précise un peu ce qu'est une caisse d'entraide économique, mais cela n'est pas complet. Vous les référez... Sur des plans, c'est encore une caisse d'épargne et de crédit. Alors, c'est la même chose tout en n'étant pas la même chose. On est pris dans cette oscillation. Vous voulez mesurer les risques. Vous dites dans votre projet de loi 24: "La Régie de l'assurance-dêpôts pourra préciser les normes de liquidité..." D'accord, il y a une question de risques et il faut préciser quelque chose. Mais n'oubliez pas qu'il y a quand même 97 p.c des caisses d'épargne et de crédit qui fonctionnent déjà, qui fonction-

nent depuis longtemps, qui ont une expérience là-dessus et qui auront quelque chose à dire la journée où vous voudrez préciser ces normes.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie M. Cimon et ceux qui l'accompagnent de nous avoir présenté leur mémoire.

M. PAGE: Un dernier commentaire, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Portneuf.

M. PAGE: Je parlerai en toute objectivité, étant membre des deux mouvements. Je considère que ce matin, avec tout le respect que j'ai pour mes collègues, on est peut-être allé un peu hors du sujet. On a peut-être été à 60 p.c. hors d'ordre. Je crois qu'on est à discuter du principe du système coopératif et on doit, à l'intérieur de ce débat, déterminer si les caisses d'entraide économique peuvent entrer sous l'égide de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Je ne crois pas que nous soyons ici pour discuter de taux d'intérêt et de pourcentage de frais consentis pour les automobiles, les prêts hypothécaires, etc.

M. LESSARD: Un autre député qui s'est trompé...

LE PRESIDENT (M. Pilote): A l'ordre! M. VEILLEUX: Cela arrive très...

M. PAGE : On peut parler en toute objectivité. Ce que je trouve dommageable, c'est que le débat aurait dû porter sur le mémoire présenté le 5 avril 1973, parce que c'est à ce moment que vous déterminiez ce en quoi les caisses d'entraide économique ne possédaient pas les critères pour être sous l'égide de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Pendant toute la matinée, le débat a porté sur le mémoire présenté ce matin, qui se contente de faire état sommairement du mémoire du 5 avril. J'aurais une question à poser à M. Cimon. Est-ce que le mémoire présenté le 5 avril au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives est le seul qui faisait état des distinctions entre le mouvement coopératif, vos fédérations et les caisses d'entraide économique? Est-ce que c'est le seul? Est-ce qu'il y en a eu d'autres antérieurement ou postérieurement?

M. CIMON: Malheureusement, je ne suis pas en mesure de répondre d'une façon précise à la question du député. Je demanderais à M. Charron de le faire. Il pourrait répondre plus adéquatement. A ma connaissance, il y avait le document du 5 avril présenté et distribué à chacun des députés de l'Assemblée nationale...

M. PAGE: Dans le même ordre d'idées, cela a été distribué aux députés de l'époque et je vais vous dire bien humblement que, malheureusement, je n'ai eu ni le privilège ni le plaisir d'analyser vos commentaires parce que je ne l'ai pas reçu.

M. DANEAU: M. le Président, on peut peut-être dire ceci. Lorsque nous nous sommes présentés le 5 avril devant le ministère, notre mémoire comprenait deux parties: la première, que les députés ont reçue, et la deuxième qui se voulait une interrogation sur les opérations des caisses d'entraide économique. Nous n'avons pas cru utile de rendre cette partie publique parce qu'elle aurait pu prêter à confusion dans l'esprit du public et, peut-être à tort, jeter le discrédit sur les caisses d'entraide économique. Nous interrogions le ministère. Nous ne formulions pas des affirmations. Je pense que ceci aurait pu être de nature à nuire à cette institution et nous ne l'avons pas fait.

M. PAGE: Une question additionnelle, M. le Président. Connaissant le haut souci d'objectivité de vos fédérations, connaissant la haute conscience professionnelle que vous avez, est-ce que cela serait trop vous demander de déposer les deux parties du mémoire?

M. DANEAU: Je pense qu'à ce moment-ci nous avons toujours la même attitude que nous avions à l'époque. Je pense que ceci ne serait pas nécessairement d'intérêt public. C'étaient des questions que nous posions au ministère. Nous escomptions que le ministère, qui avait fait une étude sur le dossier des caisses d'entraide économique, pourrait non pas nécessairement nous répondre à nous, mais pourrait, à partir des questions qu'on lui formulait, apporter des précisions au besoin. Je ne crois pas qu'il soit utile, quant à nous, de rendre publique cette partie du mémoire.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie M. Cimon ainsi que ceux qui l'accompagnent de la façon dont ils ont présenté leur mémoire. Soyez assurés que les membres de la commission vont en prendre bonne note.

M. TETLEY: Au nom du gouvernement, je vous remercie sincèrement.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Avant de passer à l'autre mémoire, j'aimerais souligner que le député Lessard (Saguenay), remplace le député Léger (Lafontaine), le député Veilleux (Saint-Jean), remplace le député Marchand (Laurier) et le député Pagé (Portneuf), remplace le député Mme Bacon (Bourassa).

J'inviterais, à présent, M. Yves Gonthier, ainsi que ceux qui l'accompagnent, de la Fédération des caisses d'établissement du Québec, à présenter le mémoire et à bien vouloir identifier ceux qui l'accompagnent.

Fédération des caisses d'établissement du Québec

M. GONTHIER: M. le Président, il me fait plaisir de vous soumettre la position adoptée par la Fédération des caisses d'établissement du Québec vis-à-vis du projet de loi no 24. D'abord, je tiens à vous présenter les personnes qui m'accompagnent. A ma droite, le président de la Fédération des caisses d'établissement du Québec, M. Paul-Emile Doré, et à ma gauche le directeur général de la Fédération des caisses d'établissement du Québec, M. André Fecteau.

Si vous le permettez, M. le Président, j'aimerais, avant d'aborder le corps du sujet, dessiner en quelques mots ce que sont les caisses d'établissement du Québec, à peine une minute, si vous le permettez.

Les caisses d'établissement sont de jeunes coopératives puisque la première caisse a été fondée en 1950 par M. Paul Villeneuve, qui, par la suite, se fit l'ardent promoteur du mouvement.

Depuis cette date, onze autres caisses ont été reconnues par le ministère.

Les caisses d'établissement se distinguent des autres coopératives par trois caractéristiques particulières: 1.Ce sont des institutions à caractère régional, le territoire de chaque caisse correspondant aux régions économiques déterminées par le ministère de l'Industrie et du Commerce. 2.Les caisses d'établissement mettent l'accent, dans leurs opérations, sur la souscription de plans d'épargne dont la durée s'étend jusqu'à 35 ans, selon le désir et le besoin de chaque membre souscripteur. 3.Les réservoirs de capitaux des caisses, alimentés par les épargnants de chaque région, servent à consentir des prêts hypothécaires favorisant prioritairement l'établissement des membres. Au 31 décembre 1973, 85 p.c. des prêts en vigueur avaient été consentis sur hypothèque de premier rang.

L'actif des caisses d'établissement atteindra $44 millions au 31 mars 1974. Si l'on se base sur le taux annuel de progression que l'on connaît depuis 1970, l'actif global dépassera $125 millions d'ici quelques années.

Le nombre des membres était de 44,000 au 31 décembre dernier. Quant à la valeur des plans d'épargne souscrits, elle s'élevait à $75 millions à la même date. Avec la fondation de trois nouvelles caisses d'établissement dans un avenir rapproché, il est réaliste d'affirmer qu'en 1980 les plans d'épargne en vigueur dépasseront $150 millions.

Ces opérations ont obligé les caisses d'établissement à structurer des services qui se conforment à leurs caractéristiques principales, soit le prêt hypothécaire et la dimension régionale. C'est pourquoi l'on retrouve au sein de chacune des caisses différents services: — le service de courtage immobilier — le service d'évaluation foncière — le service de gestion de propriétés — le service d'aménagement.

La plupart de ces services impliquent qu'une reconnaissance officielle a été accordée par différents ministères, notamment; — le ministère provincial de l'Agriculture — le ministère des Affaires municipales — le ministère provincial du Revenu — le ministère fédéral du Revenu — le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives. — le ministère fédéral de l'Agriculture — le ministère de l'Education.

A l'origine, les caisses d'établissement faisaient affaires surtout dans le milieu rural. Le déplacement d'une partie de la population rurale vers les centres urbains a exigé des caisses d'établissement qu'elles continuent à assurer leurs services à leurs membres qui étaient devenus des urbains. Malgré ce facteur de migration, la majorité des membres des caisses d'établissement résident encore dans le milieu rural.

En 1954, trois caisses d'établissement ont fondé la Fédération des caisses d'établissement du Québec. C'est pourquoi, au nom de toutes les caisses d'établissement, la fédération vous soumet ses commentaires sur le projet de loi no 24 intitulé Loi modifiant la loi de l'assurance-dépôts du Québec.

Comme coopératives existant sous le couvert de la Loi des caisses d'épargne et de crédit, les caisses d'établissement se distinguent des autres institutions financières par les principes de fonctionnement qui en sont à la base.

Le plus important de ces principes se manifeste dans les structures qui sont établies et, en vertu de celles-ci, chaque personne qui est membre de la caisse détient le même droit de vote. Le pouvoir de participation aux décisions n'est pas dévolu en fonction du nombre de parts sociales détenues par chacun ou en fonction de l'importance des dépôts qui sont faits.

Cette égalité de droit est d'ailleurs reconnue aux articles 4 b) et 36 de la Loi des caisses d'épargne et de crédit.

L'application de ce principe de démocratie prend toute sa signification dans le fait que l'administration de la coopérative est dévolue à des représentants élus par les membres en assemblée générale, lesquels sont responsables des actes posés à titre d'administrateurs devant ceux qui les ont élus.

Comme corollaire du principe de la démocratie, le remplacement de la notion de profit par celle de service est l'autre principe qui caractérise le plus les institutions coopératives dont font partie les caisses d'établissement. Tel qu'il a été mentionné au début de ce mémoire, la création et la progression des caisses d'établissement se fondent sur le désir de fournir des services aux membres et ce, dans le but unique de les aider.

L'application de ces principes, dans la disposition de services correspondant à des besoins réels des gens et en tenant compte des particularités régionales, a permis aux Caisses d'établissement de maintenir depuis quelques années un taux de croissance élevé et de fournir au fur et à mesure de leur évolution des services plus diversifiés.

Ces principes d'organisation et d'opération ne semblent pas avoir été considérés lors de la rédaction du projet de loi 24 qui amende la Loi de l'assurance-dépôt du Québec. C'est pourquoi nous désirons manifester notre opposition à ces amendements et ce, pour les raisons suivantes.

Une des conditions essentielles à remplir pour devenir membre d'une caisse d'établissement, c'est la souscription de parts sociales. Cette souscription constitue la responsabilité financière, individuelle et sociale du membre dans l'institution. L'article 1 a) du projet de loi no 24, en proposant que les sommes versées par les membres sur leurs parts sociales soient réputées être des dépôts d'argent qui seront assurés par la Régie de l'assurance-dépôt, n'est-il pas contraire aux notions fondamentales dont l'application assure le dynamisme de coopératives comme les Caisses d'établissement et d'autres?

Celles-ci naissent d'une association de personnes qui désirent contribuer ensemble à la création d'une entreprise visant à favoriser l'accès de leurs membres à des services pour favoriser leur établissement. Mais qui dit association, dit engagement de personnes. Et qui dit entreprise, dit participation financière. Ce sont là des éléments essentiels en coopération. La souscription du capital social est la concrétisation de ce désir d'association dans la participation du membre à la naissance et à l'expansion d'une entreprise. Assurer le remboursement de la somme et des intérêts, selon une échéance déterminée au moment de l'encaissement par l'institution fait du capital social un simple dépôt à terme fixe ou variable ou à demande.

Nous croyons qu'enlever toute responsabilité sociale à la part souscrite par l'individu qui devient membre d'une coopérative, c'est altérer l'esprit et la plilosophie de base d'un mouvement qui doit être dynamique et aussi démocratique. Dans l'alternative d'une garantie totale des parts sociales, quelle initiative pourraient prendre les membres devant un Etat trop envahisseur qui voudrait imposer ses vues même si celles-ci devaient aller à l'encontre des intérêts bien compris du mouvement? L'amendement proposé par l'article 1 a) est donc inadmissible.

Pour ce qui est de la protection du droit de contrôle de la Commission des valeurs mobilières sur les activités des Caisses d'établissement dans la souscription des parts sociales, laquelle protection est prévue à l'article 1 b) du projet de loi 24, la question a déjà été tranchée par la commission elle-même. Celle-ci a déclaré que les parts sociales des Caisses d'établissement remplissaient toutes les conditions exigées par l'arrêté en conseil 731 du 25 février 1971, lequel mentionne les transactions qui doivent être soustraites à l'enregistrement requis à l'article 16 de la Loi des valeurs mobilières.

Cette décision de la commission a été transmise au ministère des Institutions financières par lettre du commissaire Paul Chouinard le 15 juin 1973.

Enfin, nous croyons que le pouvoir accordé à la Régie de l'assurance-dépôts, par l'article 3 r) du projet de loi 24, de réglementer sur la composition et la ventilation de l'actif et du passif des caisses d'épargne et de crédit et sur la liquidité de leur actif est discrétionnaire et court-circuite le rôle de la Fédération des caisses d'établissement dans ses fonctions de contrôle et de surveillance. Le fait de permettre à un agent extérieur d'intervenir directement dans les affaires de celles-ci pourrait nuire à leur bon fonctionnement. Les représentants élus sont issus du milieu où agissent les caisses et ils sont sûrement en mesure de mieux apprécier les besoins des membres qu'une personne qui est étrangère au mouvement et qui, le plus souvent, ignore les particularités régionales des problèmes.

M. TETLEY: En théorie, oui, mais pas nécessairement en pratique. Des fois, on est trop près de soi-même pour se connaître. Comme Socrate a dit: C'est très difficile de se connaître.

M. GONTHIER : Cette intervention n'est pas garantie par une seule personne au sein des conseils d'administration, il y a plusieurs personnes. Si vous permettez...

M. TETLEY : D'accord.

M. GONTHIER: ... je vais continuer.

Dans les caisses d'établissement, l'administration locale est un besoin essentiel et le pouvoir accordé à la régie par l'article 3 r) du projet de loi 24 tend à rendre illusoires les responsabilités attribuées par la Loi des caisses d'épargne et de crédit aux administrateurs, de quelque niveau qu'ils soient.

En vertu de la Loi des caisses d'épargne et de crédit, plusieurs contrôles sont déjà existants. Les articles 92 et 92 j) prévoient que le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives peut, de son propre chef, ordonner une inspection des opérations d'une caisse s'il croit qu'il y a eu mauvaise administration et que la sécurité des économies des membres est mise en danger. Egalement, chaque année, les opérations des caisses doivent être inspectées par la Fédération des caisses d'établissement, qui, sur réception du rapport d'inspection, a les pouvoirs de convoquer une assemblée générale spéciale de la caisse concernée ou de demander au ministre de faire enquête. Enfin, une des principales responsabilités des conseils d'admi-

nistration des caisses d'établissement et de la fédération est d'orienter le mouvement et, par conséquent, de réglementer sur la composition et la ventilation de l'actif et du passif des caisses et sur la liquidité de leur actif, conformément aux besoins des membres qui s'expriment en assemblée générale. Le contrôle des opérations effectuées par les caisses d'établissement est donc assuré par le mouvement.

Si, en plus des arguments précédents, on tient compte du fait que l'article 40 de la Loi de l'assurance-dépôts du Québec permet à la régie de procéder, aux conditions qu'elle détermine, à l'examen des affaires de toute institution inscrite et que 85 p.c. des prêts consentis par la caisse d'établissement le sont sur première hypothèque, nous croyons que les amendements contenus au projet de loi 24 n'ont aucune raison d'être. En plus d'affecter la philosophie coopérative à la base du mouvement, ce projet de loi alourdit le processus de contrôle gouvernemental déjà existant et amène à la longue un désintéressement des membres.

La Fédération des caisses d'établissement du Québec recommande donc le retrait du projet de loi 24.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable ministre des Institutions financières.

M. TETLEY: M. le Président, je remercie la Fédération des caisses d'établissement du Québec pour son mémoire, son intérêt et sa présence.

La fédération avait deux objections à la loi. Tout d'abord, au principe de l'assurance des parts sociales, et certaines objections à l'article 3 r). J'ai déjà commenté l'article 3 r) et je ne vais pas soulever de nouveau le débat.

Permettez-moi, M. le Président, de donner mon opinion — qui est, je crois, l'opinion du ministère et du gouvernement — qui est très près de votre mouvement, qui est très près de la Fédération des caisses d'établissement du Québec.

Vous vous opposez au principe de l'assurance des parts sociales. Mais, au cours des dernières années certaines de vos caisses ont présenté des problèmes sérieux. L'expérience a démontré, dans ces cas particuliers, que le capital social des caisses d'établissement participait plus de la nature de l'épargne que d'un capital de risques. Certaines de ces caisses se sont vues dans l'obligation de rembourser à sa pleine valeur le capital social alors qu'il était déjà entamé.

Contrairement aux autres fédérations, les caisses d'établissement historiquement ont assimilé leur capital social au capital social des associations coopératives. En ceci elles constituaient une exemption. Je crois que les faits ont d'ailleurs démenti cette conception de capital social de caisses d'épargne et de crédit.

Je crois sincèrement, que peut-être vos caisses et votre fédération — je suis prêt à discuter cela avec vous— ont besoin de l'assurance-dépôts comme tout le monde. N'oubliez pas que c'est la seule province qui ait sa Régie de l'assurance-dépôts. En Ontario, il n'y a pas d'assurance dans vos institutions coopératives ni dans vos caisses. Je suis prêt à discuter avec vous vos problèmes, dans mon bureau ou publiquement, n'importe où, mais je suis surpris et je suis surtout intéressé par votre mémoire. Je crois qu'il est vrai que le ministère, depuis trois, quatre ans ou cinq ans, a aidé énormément votre fédération.

Encore une fois, je vous remercie de votre mémoire, que je trouve très intéressant et important.

M. GONTHIER: Si vous le permettez, M. le Président, je laisserai répondre le président de la fédération.

M. DORE: Je pense qu'il y a deux questions fondamentales. Cela se résume à deux choses. Je pense que M. le ministre vient de le dire. Il y a d'abord l'affaire de l'assurance du capital social et il y a aussi l'article 3 r). Pour revenir à ce que vient de dire M. le ministre concernant les problèmes sérieux des caisses d'établissement, je voudrais tout de même soulever deux points qui sont extrêmement importants. Il y a une question d'âge. Je pense que si certaines institutions ou d'autres institutions avaient été suivies aussi assidûment il y a 45 ou 50 ans, on aurait peut-être trouvé des problèmes analogues. L'âge entre en ligne de compte dans cette question-là et il y a aussi la comptabilisation de certains actifs. Je pense qu'on peut dire que, dans l'ensemble, le mouvement ne rencontrait pas de problèmes sérieux. Je ne le crois pas. De toute façon, au moment où je vous parle, à la fin de la dernière année d'opérations — je ne voudrais pas qu'on laisse planer que les caisses d'établissement sont en faillite — il y avait environ $40 millions d'actif, il y avait environ $400,000 de profits ou d'excédent ou de trop perçu ou de surplus. C'est vraiment quelque chose qui...

M. TETLEY: Vous parlez dans l'ensemble de toute...

M. DORE: Je parle du mouvement des caisses d'établissement. Qu'il y ait eu une caisse qui ait eu un accident de parcours, on s'est efforcé de régler le problème en collaboration avec d'autres ministères, mais je pense que notre fédération ne fait pas exception à ce moment-ci. A ce sujet-là il y a d'autres fédérations qui ont eu une assistance identique du ministère concernant des accidents de parcours. Je pense qu'on a eu l'excellente collaboration du ministère. Je pense surtout que le mouvement des caisses d'établissement a fait un effort très considérable et même au-delà de ses propres moyens pour régler ses problèmes.

Ceci étant dit, je voudrais tout de même

ramener le débat à sa véritable dimension. La dimension du débat, à mon point de vue, pour autant que le capital social est concerné, c'est qu'on change la nature du capital social et qu'on change la philosophie de la société coopérative ou de l'entreprise coopérative. L'Etat en devient un partenaire. Je n'ai pas d'objection. D'une certaine façon, on devient des entreprises à caractère mixte et je me demande si, à ce moment-ci, ce n'est pas toute la question du capital social qui est posée dans tout le mouvement coopératif. Je pense que c'est une question fondamentale. C'est vraiment la question fondamentale.

On me dira que c'est une compagnie d'assurance qui — c'est la Régie de l'assurance-dépôts — protège. Je pense qu'on ne peut pas comparer la Régie de l'assurance-dépôts à une simple compagnie d'assurance privée, on ne peut pas se retirer de la Régie de l'assurance-dépôts demain matin, je pense, sans perdre un certain permis d'opération, alors qu'on pourrait très bien se retirer d'une compagnie d'assurance privée.

Je pense que la question est vraiment fondamentale. L'Etat, en garantissant le capital social, prend une part du risque dans l'entreprise, il n'y a aucun doute là-dessus, mais si, demain matin, je transpose cette attitude de l'Etat au niveau d'une coopérative de consommation, au niveau d'une coopérative agricole, au niveau d'une coopérative d'habitation, au niveau de tout autre genre de coopératives qui seront fondées dans l'avenir, je pense que là, on vient de poser tout de même un problème. Pourquoi d'autres personnes ou d'autres secteurs coopératifs ne manifesteraient-ils pas les mêmes désirs que les caisses d'épargne et de crédit? Je pense qu'on pose une question fondamentale, en autant que le capital est concerné. On en fait une coopérative mixte dans laquelle il y a les membres et il y a l'Etat qui couvrent le capital social, le capital qui sert à mettre l'entreprise sur pied et à assurer son administration par ceux qui y ont investi.

Pour nous autres, c'est une question fondamentale. Je voudrais aussi soulever, étant donné que vous m'avez piqué un peu au vif au début, le fait que pour $44 millions d'actif il y a $4 millions de capital social dans les caisses d'établissement; donc, cela fait moins de $100 par membre. Il ne faut pas non plus exagérer les craintes. Vous savez, quelqu'un qui a souscrit $100 ou qui a $100 en capital social d'une entreprise, son risque n'est tout de même pas tellement considérable. Disons que pour l'ensemble du mouvement... Je pense que c'est ce qui lui donne son droit de propriété, c'est tout de même une propriété privée, la coopérative, une propriété privée collective. Je pense qu'on en change un peu la nature et peut-être pas mal si on reçoit cette protection de l'Etat au niveau du capital social.

M. TETLEY: Est-ce que chaque caisse garan- tit ses collègues, ses caisses consoeurs ou confrères? En effet, non. Tout simplement par la fédération.

M. DORE: Oui, mais...

M. TETLEY: Mais un déficit énorme dans une caisse n'est pas garanti par les autres caisses, tout simplement par la fédération, en vertu de ses moyens, n'est-ce pas?

M. DORE: Je réponds oui à votre question mais, en même temps, je mets une nuance. C'est qu'il y a une responsabilité morale aussi considérable que la responsabilité légale.

M. TETLEY: Si c'est moral...

M. DORE: Je pense que l'histoire, depuis les dernières années, vous l'a prouvé, M. le ministre.

M. TETLEY: J'aimerais que cette responsabilité morale soit écrite dans un contrat, je serais plus convaincu. Moi, je suis plutôt avocat que prêtre ou ministre du culte.

M. ROY: Elle devient légale, à ce moment-là, si elle est écrite dans un contrat.

M. TETLEY: Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): La garantie morale ne s'inscrit pas dans un contrat.

M. DORE: Je pense qu'au niveau de la fédération, depuis deux ans, cela aurait été écrit que ça n'aurait pas été plus obligatoire. Je le pense bien. Dans les faits, il est prouvé que la Fédération des caisses d'établissement a aidé, d'une façon substantielle et particulière, une caisse qui était en difficulté. Je pense que même si elle n'avait pas la responsabilité légale, comme vous le dites, elle a tout de même assumé l'entière responsabilité de la sortir de sa situation.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: Pour poursuivre dans la veine du ministre, est-ce que vous croyez, si on assure les parts sociales, que vous allez avoir moins de participants ou si vous allez en avoir plus?

M. DORE: Disons que c'est une question de principe. Quand on arrive dans ces questions-là, est-ce qu'on va assister à un désintéressement des membres? On change la nature, de toute façon. Si on va voir quelqu'un et qu'on lui dise: Tu souscris dans la coopérative, tu ne prends aucun risque, le ministre garantit le remboursement de ton capital social, je pense qu'on vient de changer, à ce moment-là, la nature de l'entreprise.

M. VEILLEUX: II s'est produit une chose dernièrement, vous avez eu des petits épargnants qui ont perdu énormément d'argent. Je pense que ceux qui sont sous d'autres formes de coopérative le savent aussi. Venez dans le comté de Saint-Jean; quelqu'un qui ménage $1,000 toute sa vie et les dépose comme part sociale, s'il se ramasse avec rien ou $5 dans les $1,000 d'investissement, il vient se lamenter après ça.

Si quelqu'un investit, que ce soit en parts sociales ou en épargne, c'est pour retirer un certain revenu; il faut qu'il ait au moins des garanties. Cela peut très bien fonctionner, n'importe quelle caisse peut très bien fonctionner pendant 25 ans, pendant 30 ans, mais des erreurs qui ne sont pas sous le contrôle des gens qui administrent une caisse peuvent arriver des fois, des malchances. Un tremblement de terre, ça arrive des fois, cela peut arriver dans une caisse. Si ça empêchait la venue de capitaux ou de parts sociales dans une fédération ou dans une caisse, je dirais: On n'a peut-être pas avantage à assurer ça, mais est-ce que, d'après vous cela va diminuer ou augmenter?

M. DORE: Le problème ne se pose pas comme ça du tout. Pour répondre à votre première observation, je pense que dans les caisses d'établissement toutes les personnes qui ont souscrit, jusqu'à maintenant, n'ont pas perdu un cent. Alors, je ne sais pas à quoi vous faites allusion, mais je pense que cela je dois l'affirmer. C'est la vérité, je ne crois vraiment pas qu'ils en perdent non plus. Evidemment, si c'était...

M. VEILLEUX: Je ne dis pas qu'il s'en est perdu, mais il y a bien des gens...

M. DORE : Si vous faites allusion à une autre société qu'on ne connaît pas bien, c'est possible.

M. VEILLEUX: ... ce ne sont pas des coopératives du tout, mais cela peut arriver dans le secteur coopératif, une malchance comme ça. Ecoutez on n'est pas...

M. DORE : Ce que je veux soulever, le point véritable, c'est: Quand on fonde une société coopérative ou une coopérative d'épargne et de crédit, appelons-la comme on voudra, est-ce qu'on est en voie, petit à petit, de changer la nature du mouvement coopératif ou la nature de la coopérative au Québec, ou si on essaie de régler un problème de façon opportuniste? Dans le fond, le problème est qu'on arrivera peut-être à changer la nature de la coopérative d'ici dix ans, parce qu'on aura essayé de régler un problème qui se pose actuellement. Alors je pense que la question peut se poser comme ça: Est-ce qu'on ne serait pas mieux de s'asseoir et de discuter toute la question du capital social avant de prendre...

M. VEILLEUX: Je respecte votre opinion, remarquez bien.

M. SAINT-HILAIRE: De quelle façon est faite votre perception? Est-ce par pourcentage aux types qui perçoivent l'argent? Le type qui va faire la perception c'est encore par pourcentage?

M. DORE: Vous voulez savoir de quelle façon on recueille nos capitaux? On rend notre service à domicile, on y tient et on va y tenir longtemps

M. SAINT-HILAIRE: Mais non, je veux dire à pourcentage.

M. DORE: Oui, c'est évident. On ne parle pas du capital social parce que, nous, on ne vend pas de capital social, on vend uniquement du plan d'épargne.

M. SAINT-HILAIRE: Je le sais. Je pourrais dire nous, parce que mon épouse fait partie de votre société. Etant donné que la famille est représentée dans les trois sociétés, je suis plus à l'aise pour parler.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député...

M. SAINT-HILAIRE: Effectivement, vous a-vez aussi un pourcentage accordé aux représentants qui vendent...

M. DORE: Le représentant est à commission.

M. VEILLEUX: Pour moi, le député de Rimouski a un meilleur revenu que moi.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: J'ai terminé.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Pardon, de Saguenay.

M. DORE: M. le Président, est-ce que je pourrais rectifier? Je ne sais pas, je ne voudrais pas laisser l'impression que le capital social dans les caisses d'établissement se vend à commission. Le représentant des caisses d'établissement ne reçoit aucune commission pour vendre du capital social. Ce n'est pas du capital social qu'on vend, c'est un plan d'épargne.

M. SAINT-HILAERE: A partir de ce moment quel est votre pourcentage exigé du capital souscrit par rapport au capital social? Vous avez seulement besoin d'une part puis il peut souscrire au capital...

M. DORE: Non, autant que possible, la masse de capital social représente 10 p.c. de l'actif.

M. SAINT-HILAIRE: A 10 p.c. de l'actif, cela veut dire...

M. DORE: Environ.

M. SAINT-HILAIRE: ... qu'une personne qui souscrit $10,000 doit avoir ipso facto à peu près $1,000 de parts sociales.

M. DORE: Ce n'est pas comme ça que ça marche. La personne devient membre, elle peut devenir membre avec $5 et elle peut souscrire jusqu'au maximum de $2,000. Le capital social est limité. C'est $400 dans certaines caisses d'établissement, alors cela veut dire que la personne peut souscrire de $5 à $2,000. Ensuite souscrire à un plan d'épargne qui est payable à tant par mois.

M. VEILLEUX: Il faut acheter au moins une part pour acheter un plan d'épargne.

M. DORE: En plus de cela, on reçoit des dépôts à terme.

M. SAINT-HILAIRE: Ce qui vous fatigue dans le projet de loi, c'est le fait que, si une personne a seulement $100 de capital ou représente $10 du capital, il faut une surveillance. La garantie de capital-actions ipso facto surveille le reste du capital souscrit.

M. DORE: C'est sûr qu'il est là pour garantir le capital.

M. SAINT-HILAIRE: Alors le reste du capital souscrit, un moment donné, par un mauvais placement ou par un mauvais financement d'une caisse en particulier peut mettre cette caisse en danger. Puis si la caisse est en danger pour un montant assez appréciable — moralement la fédération n'intervient pas — les épargnants sont, à partir de ce moment, pénalisés. Ils perdent, si la fédération ne paye pas.

Supposons que vous avez une caisse qui est en mauvaise posture...

M. DORE: Oui.

M. SAINT-HILAIRE: ... pour une raison ou une autre et que la fédération dit: Moralement, j'ai bien pensé aider, mais je ne peux pas aider. Cela veut dire que ses épargnants perdent. Mais par le truchement de la loi, je pense que si le gouvernement fait une surveillance étroite et si la régie fait une surveillance étroite du capital souscrit par la garantie qu'il lui donne, il va surveiller la balance des placements. C'est ce que vous ne voulez pas.

M. DORE: Je pense que le mémoire fait mention de tout un tas de surveillances qui existent présentement. Il y a des caisses d'établissement qui reçoivent quatre équipes de vérificateurs dans une année et il y en a probablement d'autres qui en reçoivent autant. A ce moment, on entre dans un système de dédoublement où cela devient très onéreux de...

M. SAINT-HILAIRE: Je suis parfaitement d'accord, mais vous avez toujours le principe que ce sont des gens choisis, des gens dont ce n'est pas leur vie de faire cette surveillance, comme les bureaux de crédit. Ce sont des gens qui font cela un peu bénévolement pour tout le monde, autant de la caisse d'entraide économique que vous autres et ces gens arrivent et siègent et ils ont un autre travail et ils n'ont pas le temps de suivre exactement l'évolution. Alors, cette surveillance est faite par des cadres supérieurs. On en a eu des exemples dans le passé. On peut prendre l'exemple de la Caisse de dépôt et placement du Québec où des fonctionnaires ont fait des chèques assez appréciables et qui les ont emportés. Cela peut arriver autant chez vous que cela peut arriver ailleurs. A partir de ce moment, je pense qu'il est intéressant que le gouvernement, pour les gens qui ont un actif chez vous, donne une certaine garantie à vos gens.

M. DORE: II faut distinguer entre le capital social et le dépôt à terme et le plan d'épargne. Je pense qu'il faut vraiment faire une distinction. Dans un cas, on a le capital de base qui est souscrit par des individus qui veulent avoir une institution qui leur appartient.

M. SAINT-HILAIRE: C'est clair dans mon esprit.

M. DORE: C'est correct?

M. SAINT-HILAIRE: C'est très clair.

M. DORE: Et il y a l'autre partie qui donne à l'individu le droit d'avoir des services avec le capital qu'il a souscrit. Ce qu'on ne veut pas, c'est que l'Etat devienne un partenaire. Point. C'est tout simplement ce qu'on ne veut pas.

M. SAINT-HILAIRE: Dans l'Etat, il n'y a pas directement un partenaire.

M. DORE: Bien...

M. SAINT-HILAIRE: Poussons l'affaire un peu plus loin. Si j'étais dans un autre secteur, peut-être que, dans un an ou deux, je me retournerais de bord et dirais: Voici, messieurs, vous avez garanti le capital social des coopératives d'épargne et de crédit, pour quelle raison ne garantiriez-vous pas le capital social des coopératives de consommation? Pour quelle raison ne garantiriez-vous pas le capital social des coopératives agricoles? Pour quelle raison ne

garantiriez-vous pas le capital social des cooperatives d'habitation et de toutes les coopératives de télévision, etc., qui sont à venir? Personnellement, je n'y ai peut-être pas d'objection mais si c'est cela qu'on veut faire, qu'on le dise tout de suite et à ce moment, nous prendrons des positions en tenant compte de cela.

M. TETLEY: Ce ne sont pas les épargnes. M. DORE: Ce n'est pas le même but du tout.

M. SAINT-HILAIRE: Lorsque vous prenez une coopérative d'habitation et une coopérative d'épargne, cela n'est pas du tout la même chose.

M. DORE: Ce sont deux coopératives?

M. SAINT-HILAIRE: Non. Mais vous avez une manipulation d'argent à un endroit qui est extrêmement fantastique.

M. DORE: C'est peut-être vrai ce que vous dites, mais ce que j'économise, c'est peut-être seulement 5 p.c. de mon salaire et ce que je consomme, c'est peut-être 95 p.c. Alors, cela aurait peut-être une conséquence encore beaucoup plus considérable dans un autre secteur que celui de l'épargne et du crédit.

M. SAINT-HILAIRE: Peu importe. Le gouvernement devient partenaire uniquement à ce moment dans la surveillance des 10 p.c. de la part de capital parce que vous admettez que c'est à peu près à 10 p.c. de votre capital en montant. Le gouvernement n'a juridiction, en réalité, que sur le capital souscrit mais en ayant cette juridiction, il a un oeil sur le reste parce qu'il voit vos bilans, il voit tout. C'est un peu comme les banques. Tous les mois, les banques sont obligées de fournir un bilan à la caisse centrale — au gouvernement fédéral — et si, à un certain moment, quelque chose ne va pas, le gouvernement va intervenir immédiatement. Je pense que c'est une bonne chose pour les épargnants autant que pour les banques.

M. DORE: Ce qu'il serait bon de noter, c'est que le reste est assuré, M. le député de Rimouski. Il y a uniquement le capital social qui n'est pas assuré et pour les raisons qu'on vient de donner, on pense qu'il ne doit pas être assuré, parce que cela assure la responsabilité et la propriété à ceux qui ont bien voulu faire naître une entreprise et lui donner de l'expansion. C'est ce que nous ne voulons pas.

M. SAINT-HILAIRE: Pour exprimer l'expression que j'avais tantôt, pour nous, étant donné que ma femme fait partie de la caisse, on aimerait mieux les voir assurés, soyez-en sûrs.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, je pense que la Fédération des caisses d'établissement du Québec soulève une hypothèse, en tout cas, qui me parait assez intéressante et un point de vue qui est assez différent des autres points de vue, parce que, pour ma part, je ne l'avais pas vu du tout comme cela. Je me dis, en tout cas, comme participant à des coopératives, que le fait que les parts sociales soient assurées par le gouvernement qui, je l'espère, ne deviendra pas trop envahisseur, assure, je pense bien...

M. SAINT-HILAIRE: Ce n'est pas le PQ qui est au pouvoir !

M. LESSARD: M. le Président, si le député de Rimouski avait lu notre plaquette, justement, sur le coopératisme...

M. SAINT-HILAIRE: Que Dieu nous préserve de ce malheur!

M. LESSARD: Et je pense que le député de Taschereau l'a lue, parce qu'il intervient très souvent sur le développement du coopératisme et il comprendrait, justement, dans quel sens le Parti québécois appuie le mouvement.

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela dépend par qui...

M.LESSARD: Mais je ne suis pas encore convaincu, cependant, que le fait d'assurer le capital social va faire perdre du dynamisme à l'organisme, au contraire. Je comprends que cela donne un droit de propriété qui est quand même relatif, dans le sens qu'on ne peut pas accepter la multiplication, sans aucun contrôle, de différentes coopératives. Il faut que le gouvernement ait un certain contrôle sur les coopératives, non pas un contrôle absolu. Mais pour ma part, je ne suis pas convaincu. Même si, là, vous m'avez apporté un volet nouveau, dans la discussion de ce matin, je ne suis pas complètement convaincu que cela n'assurera pas un meilleur développement des coopératives, au Québec, justement par l'assurance du capital social.

Je comprends votre crainte, cependant. Vous avez peur que cela devienne une association du gouvernement, c'est-à-dire que cela devienne une société mixte, c'est-à-dire propriété des membres et propriété du gouvernement, par le fait qu'il y ait une surveillance. Je ne pense pas que le fait que le gouvernement surveille, par exemple, par suite du fait qu'il assure le capital social, que cela lui donne un droit de propriété sur l'entreprise.

M. DORE: M. le député, je pense que, depuis quelques années, on a vraiment collaboré avec le ministère des Institutions financières. On n'a aucune peur de la surveillance. Je pense qu'on reconnaît que l'épargne des gens a besoin d'être protégée. Il n'y a aucun doute là-dessus. La prise de position là-dessus, on l'accepte à 200 p.c. Mais quand on touche au capital social,

on touche au droit de propriété. Cela, c'est une autre paire de manches. Est-ce qu'on va aller assurer le capital-actions d'une compagnie?

UNE VOIX: ...propriété.

M. DORE: Je pose la question: Est-ce qu'on va aller assurer le capital-actions d'une compagnie...

M. LESSARD: M. le Président... M. DORE: ... en cas de perte?

M.LESSARD: M. le Président, je soumets que c'est là une hypothèse qui me paraît assez juste, mais est-ce que vous avez un maximum que chaque membre doit souscrire, par exemple, au niveau du capital social, dans les caisses d'établissement?

M. DORE: Pardon?

M.LESSARD: Est-ce que vous avez un maximum? Vous parlez de $44 millions de souscrits par rapport à $4 millions de capital social. Est-ce que vous avez un montant maximum?

M. DORE: Je pense que le minimum qu'une personne doit souscrire, c'est $5, selon la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Le maximum, dans les caisses d'établissement, pas dans toutes les caisses mais dans certaines caisses, va jusqu'à $2,000. Alors disons que la moyenne, c'est $4 millions. Cela vous donne moins de $100.

Mais encore une fois, je tiens à vous dire que la question du capital social, dans les caisses d'établissement, est à l'étude. Ce n'est pas impossible que des changements soient apportés, en tenant compte, véritablement, que le capital social a un rôle bien particulier à jouer dans l'entreprise.

Je voudrais aussi faire remarquer qu'assurer le capital social des caisses d'établissement n'ajoute rien à la surveillance et au contrôle que peut et que doit avoir la Régie de l'assurance-dépôts, par exemple, ou le ministère des Institutions financières. Cela n'ajoute absolument rien.

M. LESSARD: Mais ne pensez-vous pas que cela protège quand même les membres? Parce que, comme on le disait tout à l'heure, il peut arriver des accidents de parcours. Vous avez parlé d'accidents de parcours. Il peut arriver des accidents de parcours et par l'assurance-dépôts, les membres se trouvent au moins assurés de leur mise de fonds initiale.

M. DORE: Dans l'optique des caisses d'établissement, c'est-à-dire moyenne de moins de $100, il faut se poser tout de même des questions. Est-ce qu'on va sacrifier cela? On a deux options, à ce moment-là: cette importance pécuniaire, d'une part, et deuxièmement, le droit de s'autodiriger et de conserver entièrement la propriété de ses affaires. C'est ce qu'il faut soupeser, dans le fond.

Mais si on veut régler un problème actuel qui ne nous concerne pas, nous — on est concerné par des conséquences d'autres institutions — ou encore si on veut changer la façon de procéder des coopératives au Québec, là c'est une autre question. Je pense qu'à ce moment il faut vraiment soulever tout le débat et dire à l'ensemble des coopératives au Québec: Le gouvernement est intéressé à ce que le secteur de la consommation se développe, parce qu'on sait que c'est un des secteurs les plus importants; on est intéressé à ce qu'il se mette sur le marché, qu'il se mette au monde et on va garantir le capital social parce que c'est extrêmement important, la consommation.

On peut bien poser le problème de cette façon.

LE PRESIDENT (M. Pilote): A l'ordre, messieurs! L'honorable...

M. VEILLEUX: Pour faire suite au député de Saguenay, la réponse que M. Doré avait donnée, je trouve ça curieux. Il dit que la part sociale est la propriété du gars, qu'on ne s'immisce pas dans la propriété. Moi, j'ai un plan d'épargne, je vais à une caisse populaire et je dépose $100, c'est à moi ça. A ce moment, est-ce que ça veut dire que la caisse de dépôt... Pas la caisse de dépôt...

M. DORE: La caisse d'établissement. Il y en a qui mélangent ça, la caisse de dépôt et la caisse d'établissement.

M. VEILLEUX: La Régie de l'assurance-dépôts, parce que c'est ma propriété, ça n'a pas d'affaire là-dedans, parce que si la Régie de l'assurance-dépôts assure mes $100 ou $150, elle vient dans ma propriété exactement comme la part sociale. Je ne comprends pas votre affaire, moi.

M. DORE: C'est très facile à comprendre. D'abord, le gars est propriétaire de sa part sociale, mais sa part sociale lui donne un droit de propriété dans la coopérative. D'accord? Il n'y a pas de problème jusque là?

M. VEILLEUX: Non, continuez.

M. DORE: Après ça, toutes les autres opérations d'épargne de la caisse d'établissement sont assurées par la Régie de l'assurance-dépôts.

M. VEILLEUX: Vous me dites...

M. DORE: A part ça, du point de vue du contrôle et de la surveillance, ça n'ajoute absolument rien.

M. VEILLEUX: Dans votre mémoire, vous

dites qu'il ne faudrait pas assurer la part sociale parce que ça va enlever l'envie du gars qui achetait la part sociale de participer activement à la caisse d'établissement, ça va mener au désintéressement des membres. Vous ne croyez pas que le gars va dire: Là, ma part sociale est bien assurée, par contre je vais regarder pour que le reste, je puisse en retirer le maximum. Il va continuer à assister aux assemblées.

D'après vous, si demain matin la Régie de l'assurance-dépôts du Québec assurait les parts sociales, quel serait le pourcentage en moins de fréquentation à vos assemblées? Est-ce qu'il y en aurait?

M. DORE: Je pense vraiment qu'on ne peut pas poser le problème comme ça.

M. VEILLEUX: Quel est, à l'heure actuelle, le pourcentage de présence approximativement?

M. DORE: C'est assez bon. Dans les caisses d'établissement, le pourcentage de présence est assez bon. Si on assurait — faisons un parallèle — le capital-actions d'une entreprise à caractère capitaliste, si l'Etat se donnait la peine d'organiser quelque chose et d'assurer à cause des fluctuations, etc., vous n'avez pas l'impression que ça pourrait changer un peu la nature de cette entreprise?

M. VEILLEUX: M. Doré, le gars qui participe à l'intérieur d'une coopérative — il y en a des gens qui ont de l'argent qui participent à l'intérieur de ça, je suis d'accord, mais quand même, d'abord, les coopératives de M. Desjardins étaient beaucoup plus pour les petits, les ouvriers qui n'avaient pas l'occasion de pouvoir sortir...

M. DORE: C'est encore ça chez nous à part ça.

M. VEILLEUX: Le gars qui va acheter pour $100 de parts sociales d'une caisse d'établissement ou d'une caisse populaire, etc., pour lui, perdre $100 c'est peut-être pire que pour le gars qui investit $500,000 dans un commerce.

M. DORE: C'est parce que vous avez l'optique de la perte ou de la fermeture. L'entreprise coopérative n'est pas née pour fermer; elle est née pour vivre.

M. VEILLEUX: Oui, mais elle peut fermer accidentellement..

M. DORE: Alors, c'est une hypothèse. Ecoutez, je pense qu'il faut se sortir cela de la tête, à un moment donné.

M. VEILLEUX: Cela peut arriver. M. DORE: Oui, ça peut arriver.

M. SAINT-HILAIRE : Est-ce que vos souscripteurs ont le droit de retirer leurs parts à n'importe quel moment?

M. DORE: Oui, oui.

M. SAINT-HILAIRE: Sans aucune restriction?

M. DORE: Ils sont libres de sortir.

M. SAINT-HILAIRE: A ce moment-là, je ne comprends pas votre argument. Le fait d'assurer votre capital souscrit, c'est-à-dire le capital en parts, vous permettrait d'augmenter les parts, ce qui veut dire que ça augmentait votre liquidité à partir de ce moment-là.

M. DORE: Ouais.

M. SAINT-HILAIRE: Ce serait une bonne raison. En effet si, demain matin, alors que votre argent est investi sur le marché, 25 p.c. de vos souscripteurs se virent de bord et disent : On veut ravoir notre argent, là, vous êtes obligés d'embarquer dans des emprunts; vous n'avez pas assez de capital-actions pour le garantir. Il n'y a rien qui nous garantit ici que, demain matin, vous n'augmenterez pas votre taux pour permettre du capital souscrit plus haut. En un mot, cela vous permettrait d'arriver et de dire: Si un gars veut prendre $100, $1,000 de parts, il sera assuré et vous pourrez augmenter votre fonds de roulement qui, assurément, est de beaucoup supérieur parce qu'à partir de ce moment-là le gars va être intéressé à son capital et à surveiller le reste de son argent.

M. DORE: C'est un problème qui ne se pose pas parce qu'on a la liquidité et on a tout ce qu'il faut.

M. SAINT-HILAIRE: Vous l'avez parce que les gens ne demandent pas le retour de leur argent.

M. DORE: Ouais, mais...

M. SAINT-HILAIRE: Parce que votre argent, je présuppose que si vous voulez faire de l'argent avec, vous le remplacez.

M. VEILLEUX: J'espère..

LE PRESIDENT (M. Pilote): Mes amis, avant de donner la parole au député de Beauce-Sud, comme il est une heure moins vingt, est-ce qu'on ne suspendrait pas jusqu'à deux heures trente cet après-midi?

M. ROY: Oui.

M. TETLEY: Vous préférez cela?

M. ROY: On en pourra pas finir pour une heure, de toute façon.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Est-ce qu'on pourrait aller jusqu'à une heure trente?

M.GAGNON: M. le Président, nous n'aurions aucune objection à siéger sans suspension parce que nos membres viennent de partout au Québec et ça pourrait les libérer trop tard. Nous n'en aurons pas pour longtemps dans la présentation de notre mémoire.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Est-ce qu'on pourrait continuer jusqu'à une heure trente? D'accord?

UNE VOIX: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, avant de poser des questions à M. Doré, je pense qu'il serait peut-être bon de faire le point à cette étape de nos discussions. Nous avons deux projets de loi devant nous. Le projet de loi no 23 est la Loi des caisses d'entraide économique. Nous savons que l'argent qui est souscrit dans les caisses d'entraide économique est uniquement du capital social.

M. TETLEY: Presque.

M. ROY: Presque, et c'est la raison pour laquelle vous apportez des modifications à la Loi de l'assurance-dépôts pour pouvoir couvrir les sommes déposées dans les caisses d'entraide économique. De ce fait, après avoir entendu M. Doré, on remet en cause le principe même du droit de propriété du capital social d'un participant à une institution coopérative.

Il est évident que, quand les gens se donnent une coopérative, on forme une association ou une entreprise, il y a des risques. Si on veut assurer les risques, il y a des contrôles gouvernementaux qui deviennent inévitables. Il y a danger, peut-être pas dans l'immédiat, mais personne n'ignore qu'à moyen et à long terme, il y a des dangers que ces contrôles s'étendent et si j'ai bien compris M. Doré, qu'on aille même jusqu'à réglementer ou régir, ou s'ingérer dans la propriété du capital social d'un individu qui l'a souscrit pour faire partie d'une coopérative, d'une association coopérative ou d'une caisse d'épargne et de crédit.

Or, si la Loi de l'assurance-dépôts n'est pas amendée dans le sens de la loi, cela veut dire que les caisses d'entraide économique ne peuvent pas assurer les capitaux qui leur sont confiés. M. Doré, est-ce que c'est ça?

M. DORE: Oui, justement, c'est ce qu'on pense.

A ce moment-là on se trouve à nous toucher en essayant de régler le problème d'une autre institution. Je pense que c'est probablement cela qui est en dessous. Est-ce que l'autre institution concernée ne pourrait pas changer la dénomination de ces épargnes? Je ne sais pas, mais le problème se pose. Je suis bien convaincu que l'on porte atteinte, présentement et probablement pour l'avenir, à la philosophie coopérative et, ensuite, à certains principes coopératifs. Si on veut en faire des sociétés mixtes, encore une fois, qu'on le dise, on va s'asseoir et on va étudier la question. Je suis bien convaincu par contre que cela ne se limitera pas aux caisses d'épargne et le crédit, mais je ne pense pas que les coopérateurs au Québec soient prêts à ce genre de participation. Je ne le crois pas.

M. ROY: Alors, vous estimez qu'il est essentiel, primordial; pour sauvegarder le principe coopératif, le droit de propriété, le droit de participation dans une entreprise coopérative, de garder un élément risque.

M. DORE: Si on veut appeler cela ainsi.

M. ROY: Parce que le capital social ou le capital-actions d'une entreprise est toujours la partie, le coussin, parce qu'advenant la liquidation d'une caisse d'épargne et de crédit quelle qu'elle soit, il est évident qu'on commencerait par rembourser les épargnes avant de rembourser le capital social. Alors, le capital social, c'est quand même le coussin qui permet à une coopérative, avant que la Loi de l'assurance-dépôts existe, de garantir davantage par l'équité qu'une caisse d'épargne peut avoir en main, les épargnes qui lui sont confiées. Etant donné la situation dans laquelle le ministère des Institutions financières et le gouvernement se trouvent, face aux demandes des caisses d'entraide économique — je vous demande ici une opinion — est-ce que vous estimez que le capital social pourrait être assuré, sauf un montant minimal qui pourrait constituer un élément de risque? Est-ce que cela vous apparaîtrait comme une solution qui pourrait permettre de donner les garanties sur lesquelles vous avez exigé...

M. DORE: Si nous ne sommes pas touchés de quelque façon par la loi 24, nous n'avons pas objection. Bien sûr, quant au capital social, nous y attachons de l'importance ; il représente 10 p.c. de notre actif; c'est ce qui assure le droit de propriété aux membres et on veut qu'il soit protégé intégralement.

M. ROY: Des gens ont déposé dans les caisses populaires, ou dans certaines caisses populaires — on pourra me reprendre si ce n'est pas exact — jusqu'à $3,000 même $4,000 de capital social. Je sais que $2,000 existe, en tout cas. Il y a des gens qui peuvent déposer dans certaines autres caisses jusqu'à concurrence de $2,000 de capital social. $10,000 de capital social dans les caisses populaires, je sais qu'il y a eu des règlements... Je suis membre des caisses populaires mais je n'ai pas le temps de suivre toutes les activités.

M. CHARRON: II y a des caisses de $20 millions, $25 millions, $30 millions, alors le capital social monte. Il ne faut pas oublier que le capital social, c'est un titre de propriété pour garantir l'épargne qui, elle, est une créance par rapport à celui qui la met là, dans une institution financière.

M. ROY: Pour garantir l'autonomie maximale des caisses d'épargne et de crédit, pour garantir les droits des sociétaires, quel serait, selon vous, le montant minimal? Il pourrait y avoir un montant déductible. Nous avons quand même des montants déductibles dans l'assurance, cela existe dans différents domaines. C'est une question que je pose. Cela peut paraître curieux, mais ce serait peut-être une question qu'on pourrait examiner sous cet angle-là. S'il y a jusqu'à $10,000 de capital social de souscrit par des sociétaires dans des institutions coopératives des caisses d'épargne et de crédit, il y a quand même des personnes qui n'ont que $5. C'est normal que la personne qui a souscrit seulement $5 ait un risque de $5 seulement, comparativement à l'autre qui aura souscrit $10,000 et aura un risque de $10,000. Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité d'établir une ligne de démarcation pour, d'un côté, protéger le plus grand nombre de sociétaires et protéger les capitaux des sociétaires et, d'un autre côté, protéger le caractère coopératif et le caractère de propriété des parts sociales?

M. DORE: Ecoutez, c'est difficile de répondre à une question comme celle-là. Je pense vraiment que le bill 24 a un objectif précis. On y est impliqué par accident, peut-être. Je ne sais pas si, à ce moment-là, on ne devrait pas trouver une autre dénomination ou un autre nom à l'épargne qu'on fait souscrire dans les caisses d'entraide plutôt que de nous demander, à nous autres, de... Je pense qu'à ce moment-là on attaque, on nous touche par voie de conséquence et je trouve que ce n'est pas tout à fait correct. Je n'oserais pas me prononcer sur une question comme celle-là.

Je répète qu'on a 10 p.c. de notre actif en capital social. Ce n'est pas une règle inchangea-ble et cela peut être diminué ou augmenté.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, j'aurais une seule question. Vous avez essayé, M. Doré, de nous démontrer que le fait d'assurer du capital social en change l'essence ou la nature. On comprend que le capital social, dans une coopérative, c'est un droit de propriété, mais le fait qu'il soit assuré, jusqu'à quel point cela en change-t-il la nature, moi, vous ne m'avez pas convaincu. Je dois vous soumettre cela.

Deuxièmement, je dois dire qu'il y a quand même une différence fondamentale entre une coopérative d'épargne et de crédit qui, à toutes fins pratiques, ramasse de l'épargne et est responsable de cette épargne-là, qui est assez importante, par rapport à une coopérative de consommation; votre capital social ne garantit pas la même chose.

Troisièmement, je crois que votre capital social, quand vous le faites souscrire, vous ne le mettez pas de côté au cas où le souscripteur ou le membre en aurait besoin demain; il fait partie de votre actif et vous jouez avec jusqu'à un certain point. A partir de ce moment-là je pense que cela ne change pas, premièrement, la nature du capital social, le fait de l'assurer, et, deuxièmement, je pense que l'Etat, qui est responsable du bien commun, doit faire attention pour que ce capital-là aussi soit bien garanti.

M. DORE: Ecoutez, il n'est pas assuré par n'importe qui, il est assuré par la Régie de l'assurance-dépôts; qui est un organisme gouvernemental. A partir de ce moment-là, il est assuré par l'Etat; cela veut dire qu'il y a vraiment une participation de l'Etat. On ne peut pas nier cela; en fait, il y a quelque chose qui s'établit entre la caisse...

M. BONNIER: C'est là qu'on diffère. Je ne vois pas...

M. DORE: Ecoutez, si le membre souscrit et qu'il n'y a plus aucun risque dans une coopérative, je pense vraiment que son droit de propriété est altéré, est diminué à ce moment-là, il n'y a aucun doute là-dessus. Les directives qui peuvent venir, je ne dis pas que c'est cela dans le contexte actuel...

M. BONNIER: Son risque est altéré mais non pas son droit. Son risque est altéré, peut-être, il est moins fort mais il a toujours son droit de propriété.

M. DORE: Oui, mais même s'il est toujours propriétaire de sa part sociale et s'il demeure propriétaire de l'entreprise dans laquelle il a souscrit du capital social, il ne demeure pas moins qu'il y a quelqu'un, qu'une autre personne morale est intervenue pour faire fonctionner son entreprise. Je pense qu'à ce moment-là, si c'était une entreprise...

M. BONNIER: Je m'excuse, c'est là l'erreur. Vous bifurquez justement quand vous introduisez ce mode-là, cette perception, elle entre dans le fonctionnement. Cela ne rentre pas du tout dans le fonctionnement, c'est seulement dans des cas exceptionnels, où le capital social, qui est un droit de propriété, serait en mauvaise posture, pour garantir justement à vos membres mais simplement dans ce cas-là... Comme vous, l'avez très bien dit, cela n'empêche aucune coopérative d'avoir des normes de rentabilité et de gestion pécuniaire qui soient efficaces.

Je pense bien que cela est la première condition.

Et à mon avis l'assurance-dépôts n'intervient que dans des cas très exceptionnels, devrait en tout cas, mais ils ne sont pas participants â la propriété pour autant, pas du tout.

M. DORE: De toute façon on assure ou on n'assure pas.

M. BONNIER: Oui, mais...

M. DORE: Si on assure le capital social, évidemment, il faudrait peut-être là refaire un historique et cela n'a quasiment pas de bon sens, mais disons qu'on retourne aux sources un peu. On commence par aller solliciter les gens pour entrer dans la première coopérative qu'on a mise sur pied au Québec, peut-être les caisses populaires, on va solliciter les gens et on leur dit: Vous entrez dans la caisse populaire, vous n'avez aucun risque, l'Etat est en arrière de nous, etc., ça fonctionne. Moi je me demande si on rencontrerait le même intérêt, le même dynamisme, le même engagement. Est-ce que le gars se sentirait autant chez lui, etc.? Avec tout ce que cela entraîne de directives, de diktats, etc. et tout ce qui peut se produire par la suite. Je pense qu'on peut, dans des programmes généraux, des grands plans, aller jusqu'à donner, à mon point de vue, des directives assez précises, des indications en tout cas, des incitations assez précises qu'on ne puisse pas faire quasiment autre chose que d'embarquer. On ne peut pas nier, en tout cas, moi, c'est mon opinion personnelle, je respecte l'opinion des autres, qu'on altère vraiment le droit de propriété du membre à ce moment-là.

M. ROY: M. le Président, quand vous parlez du droit de propriété, M. Doré, qui est altéré, c'est dans le sens du droit d'en disposer, parce qu'un droit de propriété comporte également le droit d'en disposer. S'il y a des restrictions au niveau du gouvernement ou une réglementation qui deviendrait, avec le temps, un peu trop paternaliste, si vous voulez, le membre perd la liberté de pouvoir disposer de son capital social comme bon lui semble, pour donner à sa coopérative ou à sa caisse d'épargne et de crédit l'orientation ou des services nouveaux qui peuvent quand même comporter certains éléments de risque. Est-ce que j'ai bien compris? C'est dans le sens du droit d'en disposer que vous dites que le droit de propriété se trouve altéré?

M. DORE: Je pense que quand on assure, on contrôle. On établit des règlements, des directives, on peut faire n'importe quoi. On contrôle, si on prend un risque. C'est le bon sens, c'est la logique qui veut cela, ou on n'assure pas. Mais quand on assure, on établit des conditions et on contrôle.

M. ROY: Autrement dit, la liberté des membres en assemblée générale de décider de l'orientation...

M. DORE: Cela peut se rendre jusque-là de façon subtile.

M. ROY: Pardon?

M. DORE: Subtilement, ça peut se rendre jusque-là, il n'y a aucun doute là-dessus.

M. ROY: Subtilement, ça peut se rendre jusque-là.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Portneuf et le député de Saguenay ensuite.

M. PAGE: M. Doré vous avez parlé, au début, de contrôle et de pouvoir moral. Ma question est la suivante: Quel est le contrôle effectif que la fédération peut exercer sur les caisses mêmes, jusqu'où peut aller ce contrôle et comment est-il exercé? Est-il tellement difficile et serré que vous puissiez prétendre vous soustraire de l'application...

M. DORE: Je pense que la Loi des caisses d'épargne et de crédit donne des pouvoirs très considérables à la Fédération des caisses d'établissement comme à d'autres fédérations de caisses d'épargne et de crédit. Je pense qu'on peut partir de là. La fédération peut même convoquer une assemblée générale des membres d'une caisse. Alors, je pense qu'on peut aller jusque-là, donc on peut aller assez loin. Quant à nous, la Fédération des caisses d'établissement, on n'a peut-être pas des milliards et des millions à mettre dans une situation difficile, mais on a peut-être, par contre, la souplesse du jeune âge. Et cela est très important aussi. On a peut-être connu certaines difficultés, mais dans l'espace de quelques mois — je peux dire quelques mois, parce que la période a été relativement courte — on a redressé une situation qui paraissait, à bien du monde, quelque chose d'épouvantable.

Elle était peut-être terrible, mais on l'a redressée quand même. Cela me prouve ceci: que les pouvoirs moraux qu'on peut avoir dans des situations difficiles sont très considérables au niveau de la fédération. Souventefois, on n'a pas besoin de millions pour régler des problèmes de ce genre. On a tout simplement besoin d'un peu plus d'unité, d'un peu plus d'efforts et d'un peu plus de solidarité et les problèmes se règlent. On l'a prouvé véritablement depuis une couple d'années dans le milieu des caisses d'établissement.

M. PAGE: On peut donc dire que les pouvoirs moraux et que la souplesse du jeune âge sont tels que, pour l'intérêt de vos clients, on pourrait soustraire complètement votre fédération au projet de loi 24.

M. DORE: C'est ce que nous demandons.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saguenay.

M EESSARD: M. Doré, est-ce que le fait que 90 p.c. de vos montants ou plus particulièrement des dépôts soient assurés par la Loi de l'assurance-dépôts a diminué la croissance des caisses d'établissement? Deuxième point, est-ce que la Loi de l'assurance-dépôts a apporté auprès des caisses d'établissement des contrôles très rigides du gouvernement jusqu'à limiter l'activité des caisses, jusqu'à leur nuire, en fait jusqu'à causer des tracasseries administratives?

M. DORE: Nous souscrivons entièrement aux objectifs généraux du ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives et, ensuite, de la Régie de l'assurance-dépôts. Je pense que c'est absolument nécessaire au Québec. Là-dessus, on ne discutera pas. Pour ce qui est des tracasseries administratives, nous en avons connu, mais je pense que d'autres fédérations de caisses d'épargne et de crédit en ont connu aussi il a fallu apporter des changements de comptabilité. Il y à eu des choses comme cela. Cela nous a peut-être créé des petits problèmes, mais c'est temporaire et je pense que c'est pour le mieux-être des institutions.

Mais, quand on entre dans le capital social, je pense qu'on va pas mal plus loin. On va beaucoup plus loin et, à ce moment, cela n'ajoute rien.

M. LESSARD: Est-ce que le fait, par exemple, que, par la Régie de l'assurance-dépôts, le gouvernement ait assuré les dépôts, a permis une croissance des caisses?

M. DORE : Depuis trois ans, l'actif s'est multiplié par trois. Qu'est-ce qui a favorisé la croissance? Est-ce que c'est nous, les gens des caisses d'établissement, ou est-ce cela? Il peut y avoir les deux. Est-ce que cela peut être une coïncidence? C'est possible. De toute façon, cela ne peut sûrement pas nuire. Il n'y a aucun doute là-dessus. Il y a vraiment des entreprises, des caisses qui ne parlent pas du tout de cette question, et leur solvabilité est excellente. Personne ne pose de questions. Mais c'est évident que si, sur 1,500 caisses d'épargne et de crédit il y en a une qui est assurée et qui est chancelante, cela peut, pour elle, être une chose importante.

M. LESSARD: Tout à l'heure, vous affirmiez au député de Beauce-Sud que ces contrôles pouvaient aller jusqu'au niveau de l'assemblée générale des membres. Vous y croyez vraiment?

M DORE: On ne parle pas de cela actuellement. Disons que tout le monde est de bonne foi, mais qu'est-ce que cela sera dans quelques années?

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie M. Gonthier, M. Doré, ainsi que tous ceux qui l'accompagnent de leur mémoire et soyez assurés que nous allons le prendre en considération.

M. TETLEY: Au nom du gouvernement ainsi qu'en celui de mes collègues —j'en suis certain — des deux côtés de la table, je vous remercie, messieurs, de votre présence, de votre mémoire et de vos observations importantes.

M. LESSARD: M. le Président, je voudrais dire au nom de l'Opposition, quand même, que le mémoire de la Fédération des caisses d'établissement du Québec apporte, au niveau de cette commission parlementaire, une autre facette d'un problème qui me paraît assez important. Je les remercie d'avoir apporté cette facette, qui nous permettra, de notre côté, de nous interroger sur les différents points qu'on a soulevés.

Cependant, j'avoue qu'on ne m'a pas encore vraiment convaincu que c'était un danger réel pour les caisses.

M. SAINT-HILAIRE: ... une réponse, oui ou non. Est-ce qu'on peut avoir la certitude de votre part, à l'heure actuelle, supposons, que vous ne pourriez pas, à un moment donné, exiger que le capital souscrit soit supérieur à celui que vous exigez maintenant? Il n'y a rien qui vous empêche, à un moment donné, d'exiger que le capital souscrit soit supérieur à celui exigé aujourd'hui, dans deux ans, dans trois ans, dû à une demande ou à un besoin.

M. DORE: Si vous parlez de la masse, oui, parce que le mouvement est en expansion.

M. SAINT-HILAIRE: II n'y a pas que la masse, mais individuellement.

M. DORE: Si vous parlez de l'individu, cela peut être moindre.

M. SAINT-HILAIRE: Mais cela peut être oui aussi.

M. ROY: A mon tour, je veux ajouter mes remerciements à ceux de mes collègues pour féliciter la Fédération des caisses d'établissement pour avoir préparé ce mémoire et de nous avoir fait connaître leur point de vue à ce sujet.

Quant à leurs remarques et à leurs demandes, nous allons certainement les noter pour que, lorsqu'il y aura discussion, en deuxième lecture, et lorsque les projets de loi seront soumis devant la Chambre et devant la commission plénière...

M. GONTHIER: Sur l'intervention du député de Rimouski, je tiendrais juste à préciser que la nature même des caisses d'établissement n'est pas, disons, de faire souscrire du capital social pour retourner aux menbres un profit d'intérêt. La majorité des opérations, pour ne pas dire la quasi-totalité des opérations des caisses d'établissement, est de faire souscrire aux gens des plans d'épargne méthodiques, autrement dit, pour permettre aux gens de faire de l'épargne et, par la suite, leur prêter de nouveau l'argent sous forme d'hypothèques.

C'est pour cela, je crois bien, que le danger que vous avez soulevé, de pouvoir autoriser la souscription d'un capital social supérieur à 10 p.c. ou d'une façon illimité... Ce problème ne peut pas se poser dans le cas des caisses d'établissement parce que ce n'est pas de leur nature.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je vous remercie, messieurs. J'inviterais M. Jacques Gagnon, de la Fédération des caisses d'entraide économique, à bien vouloir nous présenter son mémoire.

Caisse d'entraide économique

M. GAGNON: M. le Président, je suis accompagné par M. Eric Forest, directeur adjoint de notre fédération, Me Paul Bélanger, directeur du développement et des relations extérieurs et dans l'assistance, vous y verrez également de nombreux représentants de nos caisses affiliées.

M. le Président, nous avons étudié attentivement le projet de loi no 23 concernant les caisses d'entraide économique déposé à l'Assemblée nationale le 20 décembre 1973. Nous tenons à féliciter le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives pour ce projet de loi de nature à assurer une très grande sécurité à nos caisses affiliées, un progrès rapide du mouvement et à aider les caisses d'entraide économique à jouer un véritable rôle d'instrument coopératif de développement régional.

Nous voulons également féliciter le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives pour avoir fait de ce projet un amendement à la Loi des caisses d'épargne et de crédit.

Il est évident que les caisses d'entraide économique ne désirent pas une loi spéciale, tel que l'entend le mémoire des trois fédérations, et que nous appuyons dans ce domaine la position prise par le ministère. Nos caisses sont de véritables caisses d'épargne et de crédit, tant par leur nature que par leur mode de fonctionnement.

Les caisses d'entraide économique ont été fondées afin de recueillir l'épargne des membres et consentir des prêts à ces mêmes membres. Ce sont là les activités essentielles et uniques de nos caisses affiliées.

Depuis 13 ans, les caisses d'entraide économique se sont conformées tout d'abord à la Loi des syndicats coopératifs puis, à partir de 1964, à la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Toutes les structures de nos caisses d'entraide économique ont été mises en place à l'intérieur de la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Toutes ces structures sont parfaitement adoptées et fonctionnent bien à l'intérieur de cette loi.

Les quelques amendements proposes par le projet de loi 23 ne modifient aucunement le mode de fonctionnement ou la nature même d'une caisse d'épargne et de crédit. Ces amendements sont mineurs et ne touchent que des modalités d'opération. Il est évident que les fédérations des caisses d'épargne et de crédit ne sont pas identiques, mais que chacune a ses caractéristiques propres, ses raisons d'exister et son rôle à jouer dans la société québécoise.

Cependant, toutes doivent avoir les caractéristiques essentielles d'une caisse d'épargne et de crédit. Les caisses d'entraide économique instituées sous l'empire de cette loi ont des caractéristiques communes à toutes les fédérations ici présentes.

La Loi des compagnies, par exemple, regroupe une multitude de compagnies qui sont toutes des compagnies, même si elles ont chacune des rôles différents; toutes sont soumises à un même cadre juridique et personne ne s'en plaint. Il n'est pas impossible que d'autres fédérations demandent certains amendements particuliers, propres à un certain rôle plus particulier aux milieux où elles oeuvrent.

Ceci n'empêche pas qu'une loi commune régisse toutes les caisses d'épargne et de crédit. Si d'autres fédérations désirent des modifications qui leur sont propres, il appartiendra au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives de présenter une loi comme ils le font présentement.

Le mode de recrutement des caisses d'entraide économique ne modifie pas non plus le caractère fondamental des caisses d'épargne et de crédit. Les caisses d'entraide économique ont choisi de recruter leurs nouveaux membres par l'intermédiaire de personnes rémunérées. D'autres institutions avaient choisi de le faire par une publicité intensive dans les journaux, à la radio, à la télévision et par toutes sortes de media d'information.

Il est à noter que les recruteurs des caisses d'entraide économique sont régis par la Commission des valeurs mobilières du Québec.

S'il fallait inclure des normes supplémentaires dans la Loi des caisses d'épargne et de crédit, ou dans des amendements spéciaux aux caisses d'entraide économique, il faudrait également inclure des normes relativement à la publicité et à la sollicitation par la voie des media d'information dont se servent d'autres caisses d'épargne et de crédit.

Nous voulons assurer les distingués membres de cette commission parlementaire que les caisses d'entraide économique ont l'intention de continuer à être de véritables caisses d'épargne et de crédit et oeuvrer au sein des diverses régions en observance de cette loi qui les encadre bien. Nous croyons qu'il est possible que plusieurs institutions, avec des rôles différents à jouer, réunissent quand même des caractère essentiels qui sont similaires et nous croyons que toutes les caisses d'épargne et de crédit, actuellement identifiées comme telles dans toute la province, ont des rôles complémentaires à jouer tout en ayant ces caractéris-

tiques essentielles, identiques aux caisses d'épargne et de crédit. Merci.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable ministre des Institutions financières.

M. TETLEY: M. le Président, évidemment je suis d'accord sur le mémoire dans lequel vous envoyez des fleurs et des bouquets à notre ministère. Pour le reste, je prends bonne note et je laisse la discussion ouverte à mes collègues.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saint-Jean.

M. VEILLEUX: Je comprends pourquoi la Fédération des caisses populaires est venue ce matin. Je remarque deux positions complètement différentes l'une de l'autre; je serais porté à demander aux caisses d'entraide économique de négocier avec les caisses populaires pour savoir exactement ce qu'on aurait à faire au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

Ce matin, j'ai posé une question à la Fédération des caisses populaires et je vous pose exactement la même question: Comment ver-riez-vous une loi-cadre qui régirait l'épargne et le crédit, à laquelle s'attacheraient des lois spéciales pour chacun des organismes qui décideraient oeuvrer dans l'épargne.et le crédit dans le genre de ce qu'on retrouve un peu dans le code des professions, les différentes professions?

M. GAGNON: J'ai l'impression que c'est ce qu'on fait actuellement. Ce n'est pas la première fois que le ministère présente des lois pour amender la Loi des caisses d'épargne et de crédit, des lois particulières. Par exemple, les caisses d'établissement ont déjà eu leur loi, la Loi des caisses d'établissement, et sont actuellement des caisses d'épargne et de crédit quand même.

Aujourd'hui, c'est la seconde fois; le ministère propose la Loi des caisses d'entraide économique qui demeure affiliée à la loi-cadre dont vous parlez. Peut-être qu'avant longtemps, ce seront les caisses populaires qui viendront vous voir ou les caisses d'économie qui, chacune ont leurs besoins propres.

M. VEILLEUX: Si j'ai bien compris ce matin la position de la Fédération des caisses populaires c'est qu'on retrouve dans une même loi des articles ou des parties d'articles qui touchent l'ensemble de l'épargne et du crédit, et on retrouve des articles, à l'intérieur de la même loi, ou des parties d'articles qui peuvent s'appliquer uniquement à un organisme dans l'épargne et le crédit.

Vous voyez ça exactement dans la même loi, au complet, parce que le projet de loi 23, si je comprends bien, ce sont des annexes qu'on inclut à l'intérieur d'une loi qui s'appelle la Loi d'épargne et de crédit.

M.GAGNON: Le projet de loi 23 précise certains points.

M. VEILLEUX: Qui s'appliquent aux caisses d'entraide économique.

M. GAGNON: Qui s'appliquent aux caisses d'entraide économique en particulier, mais ce n'est pas dans l'essentiel; c'est dans les modalités.

J'écoutais tantôt le procureur des trois fédérations qui donnait quatre raisons pour lesquelles nous n'étions pas semblables. Ce n'étaient pas des raisons essentielles dans le principe de la coopération. Il disait: Vente à commission. Vendre à commission dans le domaine de la télévision, c'est de la vente quand même. Les caisses d'établissement vendent à commission également. J'ai bien l'impression que c'est un mouvement coopératif qui joue également un grand rôle dans le milieu. La deuxième raison, c'est: L'existence des frais d'administration. J'ai bien l'impression que nous ne les avons pas inventés. Allez prendre $2,000 de parts dans les caisses populaires et vous allez aussi payer des frais. Ils appellent cela des frais d'entrée, mais ce sont des frais d'acquisition quand même. Nous ne l'avons pas inventé, sauf qu'à la place d'avoir mis 2, on a mis 4 1/2. Nous sommes plus généreux un peu.

M. VEILLEUX: C'est de la publicité gratuite.

M. BEDARD (Chicoutimi): II y aurait peut-être lieu de...

M.GAGNON: Troisièmement, on parle de capital social ou on parle d'épargne. Dans une coopérative, les économies que le membre place, que ce soit du capital social, que ce soit du dépôt à terme, que ce soit de l'épargne, ce sont toujours des économies. La Régie de l'assurance-dépôts, à l'article 25a), dit: Elle assure les économies que le membre dépose dans une caisse d'épargne et de crédit dans le but de les faire fructifier — c'est vrai que, chez nous, elles fructifient pas mal — et de consentir des prêts. Alors, c'est exactement cela. Nous ne sommes pas différents. Placement, commerce et industrie, je leur ai déjà dit: II ne faut pas s'en faire avec le placement du commerce ou de l'industrie. C'est évident que l'on en fait, mais on fait le prêt personnel et on vise à ce que 20 p.c. de nos membres soient emprunteurs. Dans certaines coopératives, on l'a actuellement. Alors, ils ne prêtent pas plus à leurs membres que nous, nous pouvons prêter à nos membres.

M. VEILLEUX: Pour avoir droit à un prêt chez vous...

M. GAGNON: II faut être membre.

M. VEILLEUX: Est-ce que cela prend un certain temps ou si on dit: Si on veut examiner votre dossier, il faut que vous soyez membre?

M.GAGNON: Oui. Il faut être membre. Lorsque vous êtes membre, on vous prête le plus vite possible parce qu'on a de l'argent en masse.

M. VEILLEUX: S'il y a une corporation, un organisme avec une charte, en vertu de la Loi des compagnies, qui va demander un prêt chez vous, par exemple une industrie qui est membre de la caisse d'entraide, est-ce l'industrie ou chaque actionnaire de l'industrie qui...

M.GAGNON: Généralement, c'est l'industrie et les actionnaires qui sont membres.

M. VEILLEUX: Tout le monde.

M.GAGNON: Evidemment, un prêt industriel prend beaucoup plus de temps qu'un prêt personnel. Un prêt industriel, il faut l'étudier. Chez nous, c'est même prévu dans la loi, il passe par deux comités, un comité de crédit et le conseil d'administration.

M. VEILLEUX: Dans une caisse populaire, pour être membre, avoir une part sociale, c'est-$5 si je ne me trompe pas. Chez vous, c'est combien?

M. GAGNON: Nous n'avons pas de membre à $5. Nous avons des membres qui vont déposer... Le minimum est $10 par mois, mais lorsqu'un membre a $5 payés dans son compte, il est emprunteur. Chez nous, nous travaillons suivant l'épargne méthodique et obligatoire autant que possible. Nous faisons souscrire nos membres sur une période de cinq ans.

M. VEILLEUX: Dans les caisses d'entraide, est-ce que la part sociale de la personne est proportionnelle à la demande de prêt qu'elle fait ou si...

M. GAGNON: Non. Chez nous, nous prêtons à un membre ce qu'il peut nous garantir.

Comme on dit par fois, il y a deux choses qu'il peut nous garantir.

M. VEILLEUX: Je vais vous donner un exemple. J'ai des noms dans la tête mais j'aime autant ne pas les donner. Il y a un groupe d'individus qui décide de construire quelque chose, que ce soit une industrie ou un commerce. Ils se rendent à une caisse d'entraide. A ce moment-là, l'investissement que vous leur demandez pour la part sociale — je repose la question comme il faut — est-ce qu'il est identique, quel que soit le montant emprunté, ou si cela peut varier selon le montant de la somme à emprunter?

M. GAGNON: Non, la part sociale de la somme est la même.

M. VEILLEUX: Vous êtes sûr de cela?

M. GAGNON: Bien oui, je suis certain de cela.

M. VEILLEUX: Dans toutes les caisses?

M. GAGNON: Dans toutes les caisses. Cela ne veut pas dire que le montant que quelqu'un a dans la caisse ne peut être plus gros. Dans le cas d'une corporation, il peut être plus élevé mais pour avoir droit à un emprunt, il faut être membre chez nous, que ce soit un petit emprunteur ou un gros. Ce qui peut varier, ce sont les garanties que l'individu a à nous offrir pour emprunter.

M. VEILLEUX: Pour l'acceptation du prêt ou le refus, c'est sûr.

M. GAGNON : Pour l'acceptation, oui.

M. VEILLEUX: J'ai dit ce matin qu'on se ferait, nous, l'Opposition circonstancielle, c'est pour cela qu'on pose des questions.

M. SAINT-HILAIRE: Vous n'allez pas parler contre moi, toujours.

M. VEILLEUX: Par exemple, moi, advenant le cas où je serais membre de la caisse d'entraide économique de Saint-Jean, si je voulais obtenir un prêt dans une autre caisse d'entraide, est-ce que je devrais être membre de l'autre caisse d'entraide ou si le fait d'être membre chez moi est suffisant?

M.GAGNON: Généralement, il faut que le membre — la loi le dit également — fasse un emprunt à sa caisse. Nos caisses sont limitées, chez nous, par un district électoral, à peu près.

M. VEILLEUX: Est-ce qu'une caisse a le droit de prêter à une autre?

M.GAGNON: On l'avait; parfois, on se payait la traite un peu mais dans la nouvelle loi, on n'aura plus ce droit.

M. VEILLEUX: Vous n'en aurez plus le droit?

M. GAGNON: Non. Vous savez, à force de prêcher la coopération, on s'aidait l'une l'autre.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, j'ai remarqué que M. Gagnon parle de la loi no 23 mais qu'il n'a aucunement fait allusion "au projet de loi no 24. Je serais tenté, à ce moment-ci, de lui poser une seule question sur le projet de loi no 24, une

question qui va comporter deux volets parce qu'il y a quand même deux principes dans ce projet de loi. Premièrement, êtes-vous en faveur de l'assurance-dépôts sur tout le capital social des caisses? Deuxièmement, êtes-vous d'accord sur l'article 3 r)?

M. GAGNON: Pour la première question, évidemment, nous sommes en faveur de l'assurance-dépôts pour les parts sociales. D'ailleurs, aux Etats-Unis, on a également l'assurance-dépôts pour les parts sociales. Pour le deuxième point, nous ne sommes pas d'accord sur l'article 3 r). Sur cela, nous sommes avec les autres fédérations; on pense que ce qui a été consenti actuellement, et qui a été suggéré, c'est avec le consentement des fédérations concernées. Le ministre nous a donné l'assurance qu'il allait apporter des modifications à l'article 3r) également, je pense. N'est-ce pas?

M. TETLEY: Oui. Mes modifications.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saguenay.

M. ROY: Je n'ai pas fini, M. le Président, j'avais une question à poser concernant le bill 23; je vais revenir sur le projet de loi no 24 maintenant.

M. SAINT-HILAIRE: Vous avez bien dit une question.

M. ROY: Une question sur le projet de loi 23, mais les autres sur le projet de loi 24.

Sur le projet de loi 24, vous n'avez souligné aucun article et je peux présumer que vous êtes entièrement d'accord sur toutes les dispositions et tous les articles qu'il y a à l'intérieur du projet de loi.

M. GAGNON: J'ai dit sur l'article 3, là. M. ROY: De la loi 23?

M. GAGNON: Sur l'article 3. Pour la loi 23, nous sommes d'accord sur tous les articles.

M. ROY: Même sur l'article 11 qui dit ceci: "Une caisse ne peut payer un intérêt sur les parts sociales qu'à même les trop-perçus annuels ou le compte de surplus visé à l'article 14".

M. GAGNON: Ah! surtout sur celui-là, oui. M. ROY: Surtout sur celui-là? M. GAGNON: Surtout.

M. ROY: Maintenant, ma question est la suivante: Comment, à ce moment-là, pouvez-vous, au moment de la souscription de vos contrats, au moment de la vente de vos contrats, garantir des intérêts?

M. GAGNON: On ne garantit jamais les intérêts sur les parts sociales. Dans une caisse d'entraide économique, on dit que, dans le passé, on a toujours payé 10 p.c, puis, dans le futur, on paiera simplement 10 p.c, plus ou moins. On a confiance de payer plus. C'est évident qu'on ne restera pas à 10 p.c., mais on ne le garantit pas, puis on n'en parle pas.

M. ROY: Autrement dit, il n'y a aucune garantie, aucune certitude donnée à ce moment?

M. GAGNON: Non, non. Sur tous nos prospectus, c'est clairement établi que le 10 p.c. n'est pas garanti. On peut payer moins, puis on peut payer plus. J'ai bien confiance qu'on va payer plus.

M. ROY: Quelle proportion de tout l'actif de votre mouvement avez-vous en capital social et en dépôts?

M. GAGNON: Nous sommes pratiquement à 95 p.c. en capital social. D'abord, on n'avait pas l'assurance-dépôts, c'était déjà une bonne raison pour ne pas en prendre, puis, lorsque les règlements de la régie sont sortis — je pense que c'est en 1970 — ils n'assuraient pas les parts sociales. Il y a beaucoup de fédérations qui se sont transformées, qui ont pris leurs parts sociales et en ont fait des dépôts. Nous, on a refusé de se transformer, pour la bonne raison qu'on ne pouvait pas faire des prêts à long terme avec du capital à court terme. Comme on se spécialise surtout dans le prêt à long terme, où les sommes les plus considérables sont des prêts de cinq ans à dix ans et de quinze ans, ça nous prenait un capital qui n'est pas à demande, alors que le dépôt est à demande, à sept jours. Pour les parts sociales, l'article 31 dit: Les sommes versées sur leurs parts sociales par les membres démissionnaires sont remises au fur et à mesure des entrées de fonds disponibles.

M. ROY: Maintenant, à ce niveau, étant donné que vous avez du capital social, je comprends le sens et les raisons profondes pour lesquelles vous vous limitez au capital social, mais n'y a-t-il pas danger qu'un ou dix sociétaires des caisses d'entraide économique se présentent au bureau — parce que j'imagine qu'un sociétaire, ça ne causera pas de problèmes — un bon matin et qu'ils disent: Voici, nous voulons retirer nos parts sociales. Qu'est-ce qui se produit, à ce moment-là?

M.GAGNON: Lorsqu'ils viennent, on les paie. On les paie toujours comptant. Sauf que c'est prévu, même dans la loi 23, que nos parts sociales assurées sont quand même assujetties à l'article 31 de la Loi des caisses d'épargne et de crédit.

M. ROY: A ce moment, elles sont à demande, en quelque sorte.

M. GAGNON: Elles ne sont pas plus à demande.

M. ROY: Cela veut dire que vous pouvez, si vous le voulez, ne pas les payer.

M. GAGNON: M. Jobin répondrait mieux à la question. Je pense que c'est prévu dans la loi qu'elles demeurent assujetties à l'article 31. On peut, si on veut, ne pas les payer.

M. ROY: Bon. A partir de ce moment, vous êtes couverts par l'assurance-dépôts...

M. GAGNON: Oui.

M. ROY: ... et vous refusez de payer certaines personnes, de rembourser le capital social et ces gens décident d'écrire au gouvernement et à la Régie de l'assurance-dépôts, je dis que c'est une des possibilités. L'assurance-dépôts existe quand même pour quelque chose. Supposons qu'un bon matin il y a dix sociétaires d'une de vos caisses d'épargne et de crédit qui vont retirer leur capital social qui totalise — disons un chiffre parfaitement arbitraire — $20,000 et que, pour des raisons de disponibilité, vous ne les avez pas en main et que les gens s'adressent à l'assurance-dépôts du Québec...

M. GAGNON: Pour vous répondre, il faudrait peut-être que je consulte la loi deux minutes. Je n'ai pas eu le temps de l'apprendre par coeur. Je pense que M. Jobin pourrait confirmer mieux...

M. ROY : Oui. M. Jobin est venu me montrer des articles de loi que je connais, mais je veux quand même savoir...

M. GAGNON: De quel article de la loi s'agit-il?

M. TETLEY: Dans la loi 24, c'est l'article 2.

M. GAGNON: "Pour les fins du présent article, un dépôt d'argent constitué par les sommes versées sur ses parts sociales par un membre d'une caisse d'épargne et de crédit vient à échéance lorsque cette caisse est tenue à le rembourser conformément aux articles 31 et 32 de la Loi..." Il est vrai que si quelqu'un arrive pour retirer son argent, on peut le retenir. Cela va être pareil pour tout le monde. C'est écrit. On ne peut plus prêter après. Il faut rembourser au fur et à mesure que...

M. ROY: Est-ce que vos contrats de souscription de capital social comportent quand même un terme?

M. GAGNON: Oui. C'est très bien expliqué dans chacun des contrats, sur chaque formule d'adhésion qu'on fait signer aux membres.

M. ROY: ... qui comporte un terme de cinq ans, de dix ans, généralement, ou...

M. GAGNON: On n'a pas de terme. Au fur et à mesure des entrées d'argent, tel que décrit dans la loi.

M.ROY: ... pas en parts sociales, mais le contrat. Supposons qu'ils s'engagent à souscrire pendant un certain nombre d'années. Ils s'engagent quand même à souscrire $10 pendant un certain nombre d'années.

M. GAGNON: Oui.

M. SAINT-HILAIRE: Cela dépend.

M. GAGNON: Mais ils peuvent arrêter n'importe quand de souscrire. Quelqu'un peut s'engager de souscrire pour cinq ans, mais il peut arrêter après 24 mois.

M. ROY: Oui. J'ai vu cela...

M. GAGNON: II s'accorde le plaisir d'avoir perdu...

M. ROY: ... on peut l'obliger, mais le contrat original, le contrat nominal...

M. GAGNON: Oui.

M. ROY: ... lorsque la personne signe ce contrat...

M. GAGNON: Oui.

M. ROY: ... pour combien d'années s'engage-t-elle généralement?

M. GAGNON: C'est cinq ans, mais cela peut être moins. Cela peut être au comptant.

M. ROY: C'est déterminé selon le bon vouloir de la personne. Cela peut être dix ans.

M. GAGNON: Le bon vouloir de la personne.

M. ROY: Cela peut être dix ans.

M. GAGNON: Non. Cela pourrait l'être, mais on ne veut pas.

M. ROY: Ah bon!

M. GAGNON: Cinq ans, maximum.

M. ROY: C'est un bon vouloir de la personne. Maintenant, étant donné que cela ressemble à un contrat d'épargne à terme, j'aimerais savoir pourquoi vous insistez pour que ce soit du capital social plutôt que de l'épargne à terme.

M. GAGNON: On n'avait pas le dépôt. Deuxièmement on voulait avoir un capital qui ne peut pas s'effriter du jour au lendemain. On ne voulait pas faire du prêt à long terme avec des emprunts à court terme. C'est pour cela qu'on tient à l'article 31 de la loi.

M. ROY: Sur ce point, je vais prendre en parallèle les caisses d'établissement. Les caisses d'établissement ont des certificats d'épargne à termes — elles l'ont mentionné tout à l'heure dans leur mémoire— pouvant aller jusqu'à 35 ans. Alors ce n'est pas de l'épargne à demande, à ce moment-là. C'est de l'épargne à termes qui est exigible à partir...

M. GAGNON: Oui mais avec les caisses d'établissement, si le sociétaire veut être payé, elles sont tenues de le payer.

M. ROY: La même chose.

M. GAGNON: Non. Pour les caisses d'établissement, si j'ai bien compris, c'est du dépôt à termes. C'est du dépôt ou c'est de l'épargne tout court. Elles sont obligés de le rembourser. Chez nous, ce sont des parts sociales. Nous ne sommes pas obligés de les rembourser.

M. ROY: Oui mais si vous n'êtes pas obligés de les rembourser —je voudrais que vous m'éclairiez, ce matin — l'assurance-dépôts va faire quoi là-dedans? Parce qu'il y a, en somme, deux lois sur lesquelles nous devrons nous prononcer, à l'Assemblée nationale. Alors si vous décidez, un bon matin, de ne pas les rembourser, que peut faire l'assurance-dépôts?

M. GAGNON: L'échéance de remboursement n'est pas la même. Que peut faire l'assurance-dépôts, à ce moment-là? Evidemment qu'on va marcher suivant l'article 31, sauf que le membre aura la garantie qu'il ne perdra pas son argent et ses intérêts mais on remboursera toujours selon l'article 31 de la Loi des caisses d'épargne et de crédit, au fur et à mesure des entrées de fonds.

C'est certain, tous ceux qui arrivent chez nous pour retirer leur capital, qu'on le leur remet comptant. On parle d'un cas extrême, par exemple, d'une panique. Nous, on ne peut avoir de panique, les caisses d'entraide économique. On ne peut pas en avoir parce qu'il faut rembourser nos parts sociales au fur et à mesure des entrées de fonds.

M. VEILLEUX: Vous êtes différents des...

UNE VOIX: Tu charries un petit peu, toi aussi!

M. GAGNON: Je me suis peut-être mal expliqué. Ils ne peuvent pas nous vider du jour au lendemain parce que ce sont des parts sociales. On peut avoir une panique. On a le moyen de les faire refroidir.

LE PRESIDENT (M Pilote): L'honorable député...

M. ROY: Je n'ai pas fini, M. le Président. Je n'ai pas abusé de mon droit de parole ce matin, je pense. J'aurais une autre question à poser. Est-ce que vos recruteurs, ceux qui font la cueillette de vos fonds, sont soumis à l'article 16 de la Loi des valeurs mobilières ou s'ils en sont exemptés?

M. GAGNON: Je ne connais pas l'article 16.

M. ROY: Est-ce qu'ils doivent détenir un permis de la Commission des valeurs mobilières?

M. GAGNON: Oui, ils détiennent un permis de la Commission des valeurs mobilières.

M. LESSARD: Comme les agents d'assurances.

M. ROY: Ils sont obligés de détenir un permis.

M. GAGNON: Les agents d'assurances n'en détiennent pas.

M. ROY: II n'y a pas de difficulté de ce côté. Qu'est-ce que ça pourrait représenter pour les caisses d'entraide économique de modifier un peu, pas leurs opérations, mais leurs structures de fonctionnement, de changer par exemple le. nom de capital social pour appeler ça un dépôt à terme ou à moyen terme ou à long terme.

M. GAGNON: On n'a pas d'objection à ça.

M, ROY: Cela ne peut pas causer de difficulté?

M. GAGNON: Non.

M. ROY: Parce que, si je me réfère à ce que M. Doré disait tout à l'heure, il y a quand même tout un principe coopératif qui est remis en cause à partir de ce moment, en vertu du fait que tout le capital social des caisses d'épargne et de crédit serait couvert par l'assurance-dépôts, et lorsqu'il y a assurance pour le gouvernement, il est obligé d'établir une réglementation parce qu'il n'a pas le droit de dilapider les fonds publics — et je dis bien de dilapider les fonds publics — s'il était obligé à un moment donné de débourser $1 million, $1.5 million ou $2 millions, il est obligé de prendre les précaution nécessaires pour ne pas avoir à débourser ces sommes.

Parce que présentement, je pense que le fonds de l'assurance-dépôts n'est pas tellement élevé, advenant le cas d'un risque. Il y aurait certainement des problèmes de ce côté. Qui dit assurance, dit réglementation, qui dit réglementation dit contrôle. Si on va pour contrôler les caisses d'épargne et de crédit jusqu'à la sous-

cription du premier $5 de capital social afin de satisfaire les exigences et les besoins de votre fédération, et pour donner les garanties nécessaires à vos souscripteurs, vos sociétaires, vos membres, qui sont tous des Québécois... D'ailleurs il y en a plusieurs autour de la table, et je me sens même un peu en minorité.

M. SAINT-HILAIRE: ... faisait partir. M. ROY: On ne m'a pas sollicité encore.

M. SAINT-HILAIRE: Les trois, allez le solliciter, il va embarquer.

M. ROY: Pour éviter l'obligation au gouvernement d'assurer tout le capital-social des caisses, est-ce que vous seriez prêt à une concession en ce sens, de transformer un peu dans vos livres la nature de vos opérations?

M. GAGNON: Je n'ai pas vu le danger dans le sens que M. Doré l'a vu ici, tantôt. Les institutions existantes actuellement sont déjà à 90 p.c. garanties par le gouvernement. Si le gouvernement, si la régie voulaient s'ingérer réellement dans l'administration des caisses d'épargne et de crédit, ils ont ce qu'il faut, ils en garantissent 90 p.c.

M. ROY: Mais il y a quand même les 10 p.c, qui sont un bon coussin qui protègent, en quelque sorte, la Régie de l'assurance-dépôts avant ses déboursés. Mais s'ils assurent la totalité, c'est un peu comme dans le cas des caisses d'entraide économique. Si vous faites un prêt à 100 p.c. le risque n'est pas le même, même sur la même propriété, que si vous faites un prêt à 90 p.c

M. GAGNON: On a d'autres protections aussi. On a un fonds de stabilisation qui en a autant que le fonds de la Régie de l'assurance-dépôts.

M. ROY: En somme, l'assurance-dépôts, pour la Fédération des caisses d'entraide économique, n'est pas une priorité absolue?

M. GAGNON: Ce n'était pas une priorité absolue, l'assurance-dépôts. Cela va aller mieux, cela va aller beaucoup mieux si nos parts sociales sont assurées. Nous n'avons pas de priorités absolues.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Saguenay a demandé la parole depuis un bon bout de temps.

M. LESSARD: Simplement une petite question, M. Gagnon. En vertu des règlements de la caisse d'entraide économique, est-ce que les membres qui sont à la commission de crédit ont le droit de se prêter, à eux?

M. GAGNON : Ils n'ont le droit ni d'emprunter, ni de garantir. La commission de crédit et la commission de surveillance.

M. LESSARD: Exactement comme dans le cas de la caisse populaire?

M. GAGNON: Oui, c'est dans la loi.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Roberval a demandé la parole depuis un bout de temps.

M. LAMONTAGNE: M. Gagnon, j'aurais aimé pour ma part connaître l'historique des caisses d'entraide économique, je pense pour le bénéfice des députés d'autres régions. Personnellement, je le connais mais je pense qu'il y a de petites questions. L'actif actuel des caisses d'entraide économique?

M. GAGNON : Nous avons un actif actuellement de $140 millions.

M. LAMONTAGNE: Le nombre de caisses? M.GAGNON: Quarante caisses.

M. LAMONTAGNE: II y a une question également qui a été soulevée par plusieurs députés à la suite d'une déclaration que vous avez faite dans le cadre d'un développement économique régional. Compte tenu du fait que l'essence même des caisses d'épargne et de crédit est de prêter aux membres, comment pouvez-vous concilier cela avec une décision que vous pourriez avoir de participer à des projets régionaux?

M. GAGNON: II ne faut pas oublier que nous sommes d'abord des régionaux. On pense que les régionaux devront de plus en plus songer à financer leur infrastructure...

M. LAMONTAGNE: Mais, est-ce que vos règlements ou ceux qui pourraient être édictés par le ministère pourraient prévoir, par exemple, que la Fédération des caisses d'entraide économique participe à la construction d'une route?

M. GAGNON: On pense qu'on pourrait participer par la fédération et, deuxièmement, on a le droit, dans nos caisses, d'acheter des obligations garanties par le gouvernement.

M. LAMONTAGNE: A l'heure actuelle, est-ce que vos règlements vous permettent d'envisager...?

M. GAGNON: Oui, actuellement, ils nous le permettent.

M. LAMONTAGNE: Avec le consentement...

M. GAGNON: C'est la loi qui nous le permet également, la Loi des caisses d'épargne et de crédit. Vous faites allusion à une déclaration que j'ai déjà faite. On aimerait que les gens comprennent que, par le truchement des caisses d'épargne et de crédit, ils pourraient également financer leurs propres structures régionales.

C'est autant pour les caisses populaires — je ne parle pas en leur nom — que pour les caisses d'économie ou pour n'importe quel mouvement.

M. LAMONTAGNE: Mais est-ce que vous envisagez très sérieusement des projets de cette nature, que ce soit une route ou autre chose? Compte tenu de votre déclaration, c'est marqué: Les activités essentielles et uniques de nos caisses sont l'épargne de nos membres et consentir des prêts à ces mêmes membres.

M. GAGNON : Oui. Nous serions prêts quand même. Dans notre portefeuille nous avons 12 p.c. de liquidité actuellement. Nous pensons que nos membres et nos besoins régionaux sont deux choses aussi qui se ressemblent pas mal. Nous nous sommes unis à la coopérative, c'est évident qu'on se prête entre membres, mais le développement, cela regarde la collectivité également. Je ne pense pas qu'on pèche contre la coopérative en préconisant le développement régional sous toutes ses formes. On n'a pas commencé à faire du développement régional.

M. LAMONTAGNE: Quelle est votre progression actuellement?

M. GAGNON: Nous progressons environ de $1 million par semaine. Cette année, nous nous attendons à prêter environ $75 millions.

M. LAMONTAGNE: Est-ce que vous touchez actuellement à peu près à toutes les régions du Québec?

M. GAGNON: Non. Nous aurions encore de la place au Québec pour environ 30 régions, 30 caisses.

M. LAMONTAGNE: Tantôt vous avez dit que vous essayez d'identifier une caisse à un district électoral. Est-ce que vous voulez...

M. GAGNON: Oui. Certains districts par rapport à leur distance des pôles. Dans le comté de Roberval, nous avons deux caisses, mais il arrive que dans certains comtés, par rapport à leur organisation, une caisse va couvrir deux comtés, mais on essaie de couvrir des intérêts communs assez rapprochés.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Chicoutimi.

M BEDARD (Chicoutimi): Qu'elle est votre idée de fonctionner par district électoral?

M. GAGNON: Dans le fond, c'est peut-être parce qu'on ne partage pas exactement le Québec en dix régions administratives. Nous pensons qu'il faut arriver à la participation de la base si on veut véritablement un développement régional. C'est pour cela, pour répondre au député de Chicoutimi, que les régions, chez nous c'est divisé en sept parce qu'on veut que les gens de Dolbeau s'occupent de leurs problèmes économiques, Roberval, Alma, Chibougamau, Chicoutimi. C'est avec ce concept qu'on arrive à peu près à une division électorale. Nous ne sommes pas contre l'idée que des régions s'unissent pour assurer un meilleur développement. Nous prenons le capital où nous le trouvons.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant vos exigences en fonction des frais d'administration, des droits d'entrée qui sont quand même assez élevés, est-ce qu'à l'heure actuelle, la politique de votre caisse est de les exiger dans un tout?

Est-ce que vous avez l'idée d'échelonner, peut-être, ces frais d'entrée sur la période d'investissement ou du plan d'épargne, si on peut employer l'expression?

M. GAGNON: II y a deux points. Premièrement, 4 1/2 p.c. de frais d'entrée, de frais d'acquisition, c'est loin d'être cher.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, disons que c'est par comparaison.

M. GAGNON: Je pense que c'est 50 p.c...

M. BEDARD (Chicoutimi): On parle toujours par comparaison.

M. GAGNON: Oui, ils sont bon marché. Deuxièmement, on n'a pas l'intention de les mettre sur une période de cinq ans parce que nous en avons besoin pour notre administration. Lorsqu'une caisse est jeune, on en a encore plus besoin pour s'administrer parce que si on veut avoir de bons hommes, il faut avoir des revenus pour les payer. C'est pour cela, c'est à cause de nos frais d'administration, cela nous aide à engager un personnel compétent, à mieux nous organiser au départ, également.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, mais par rapport à la protection des membres de vos caisses, il peut y en avoir plus qu'on pense qui entrent avec une bonne volonté de placement durant un certain temps et qui peuvent avoir des accidents de parcours. Est-ce que vous ne trouvez pas qu'ils sont pénalisés, à ce moment-là?

M. GAGNON: Pour nos frais, vous savez, nos

membres sont entrés dans leur montant dans les 24 premiers mois. Ce qu'on voulait surtout éviter c'est que quelqu'un entre dans la coopérative et en sorte le lendemain. Au début, on n'avait pas de frais, mais...

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, je comprends que cela peut être une motivation à y demeurer.

M. GAGNON: Mais ça entrait et ça sortait et on ne construisait rien. Tandis qu'en chargeant 4 1/2 p.c. lorsque le membre se retire, il y pense deux fois avant de se retirer parce que s'il veut y rentrer il va payer encore 4 1/2 p.c.

M. LESSARD: C'est pire que cela dans les fonds mutuels et dans certaines compagnies d'assurance.

M. GAGNON: Le fonds mutuel, c'était 8 1/2 p.c. et l'argent ne rapportait pas 10 p.c.

M. LESSARD: C'est 8 1/2 p.c. pour autant que c'est un versement global. Si c'est mensuellement, c'est beaucoup plus fort que cela.

M. GAGNON: Vous allez me poser des questions tantôt: Pourquoi 9 p.c, 10 p.c? C'est parce que c'est plus dur à faire comprendre aux gens qu'investir chez nous, c'est difficile. C'est pour cela que notre taux d'intérêt est symbolique, 10 p.c. Autrement, les gens vont aller acheter des obligations. On n'est pas contre, excepté qu'on veut bien, nous autres, avoir notre part.

M. BEDARD (Chicoutimi): Le 5 avril 1973, vous avez dû prendre connaissance d'un mémoire qui avait été présenté par les trois fédérations; elles y expliquaient, en fait, jusqu'à quel point elles pouvaient être différentes de vous, des caisses d'entraide économique, jusqu'à un point tel qu'on pouvait se demander jusqu'à quel point c'était du coopératisme, les caisses d'entraide économique.

Je comprends que vous avez touché peut-être quelques-uns des points, les quatre points tout à l'heure qui ont été apportés par M. Bonneau, je crois, est-ce qu'il y a autre chose que...

M. GAGNON: A la suite du mémoire du 5 avril, nous avons écrit un mémoire que nous avons adressé également au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives, puis nous avons rencontré les trois fédérations. Je pense que de leur part, il y avait de l'ignorance. Elles ne savaient pas ce que c'était une caisse d'entraide économique. Donc, on la leur a offert. M. Daneau était là également, mais il a eu peur de venir on lui a dit: M. Daneau, venez chez nous étudier une caisse. Amenez deux gars des caisses populaires; si on n'est pas des coopératives, on va débarquer de la coopération, si on en est, on va rester.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ils ne sont pas venus?

M. GAGNON: Ils ne sont pas venus.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si on prend votre raisonnement qu'en 1971, ils étaient plus ou moins au courant de ce qu'étaient les caisses d'entraide économique, il reste qu'on peut présumer qu'en 1974, ils ont eu le temps de se renseigner?

M. GAGNON: Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): Et qu'ils arrivent quand même, selon leur mémoire, un peu à la même conclusion?

M. GAGNON: Je pense que c'est pas mal corrigé, parce que, dans le mémoire présenté actuellement, il n'est question nulle part que nous ne sommes pas des coopératives. Donc les caisses populaires ne discutent pas ce point. Tantôt, je ne disais cela que pour envoyer une invitation à M. Daneau.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous croyez qu'ils vous reconnaissent un statut de coopérative, selon votre perception.

M. GAGNON: M. Daneau a dit tantôt qu'il ne se prononçait plus sur cette question.

M. BEDARD (Chicoutimi): Chacun son opinion là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Rimouski.

M. SAINT-HILAIRE: M. Daneau a dit qu'il n'avait pas de droit de papauté, j'ai aimé le mot, un bout de temps j'ai cru...

M. BEDARD (Chicoutimi): II a peut-être le droit d'aînesse.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Le député de Rimouski.

M. SAINT-HILAIRE: Le capital souscrit, est-ce qu'à l'heure actuelle, vous avez de...

M.GAGNON: Nous avons huit caisses qui ont l'assurance-dépôts.

M. SAINT-HILAIRE: Nous avons l'idée du pourcentage que cela représente à travers vos caisses.

M. GAGNON: Cela ne peut pas représenter grand-chose.

M. SAINT-HILAIRE: Lorsque vous vous regroupez pour faire un prêt, est-ce que le prêt est fait par la fédération et que chacune des caisses souscrit à la fédération ou si chacune des caisses

est complètement autonome quand même dans le prêt que vous faites?

M.GAGNON: Nos caisses sont autonomes dans leur prêt.

M. SAINT-HILAIRE: Comment faites-vous pour diviser les garanties à travers les caisses?

M. GAGNON: Sauf les gros prêts, peut-être, mais on n'en a pas encore fait tellement. Il y a des fois où deux ou trois caisses se sont unies pour faire un prêt.

M. SAINT-HILAIRE: Je pense qu'il y a un projet, entre autres, ou vous avez demandé la contribution de quatre ou cinq caisses.

M. GAGNON : Ce sont les caisses qui se sont unies.

M. SAINT-HILAIRE: C'est la fédération qui prend les garanties, à ce moment-là?

M. GAGNON: Ce sera une caisse, en particulier.

M. SAINT-HILAIRE: Vous ne trouvez pas qu'il y a une complication énorme au sujet des garanties, surtout dans les prêts à long terme?

M. GAGNON: Oui, cela va changer. M. SAINT-HILAIRE: De quelle façon?

M. GAGNON: Cela va se faire par la fédération et les obligations vont être revendues aux caisses. Cela va être mieux.

M. SAINT-HILAIRE: Parce que je pense qu'il y avait un danger énorme dans la façon dont vous procédiez. Il y a peut-être aussi un autre danger dans la façon dont vous procédez.

Il manque peut-être un peu de classification de prêts. J'admets que vous êtes là pour aider le régional mais, à un certain moment, est-ce que vous avez les experts pour vous lancer dans toutes sortes de prêts, autant maritimes qu'industriels?

M. GAGNON: La loi prévoit que nous allons avoir une commission de crédit, à la fédération, qui va être formée de spécialistes.

M. SAINT-HILAIRE: Lorsqu'on se lance dans les prêts maritimes, par exemple, ça crée des complications énormes et les garanties deviennent extrêmement fragmentaires.

M. GAGNON: Mais on consulte des experts à ce moment-là.

M. SAINT-HILAIRE: Vous savez de quoi je veux parler?

M. GAGNON: Oui. Nous avons consulté des experts, mais je pense que le meilleur expert en droit maritime sera M. Tetley; alors, nous allons lui demander une consultation.

M. SAINT-HILAIRE: Je pense qu'à ce moment-là les risques deviennent extrêmement énormes et les garanties du gouvernement deviennent restreintes à ce point.

M. GAGNON: On a parlé de risque aussi tantôt.

M. SAINT-HILAIRE: II y aurait peut-être des limitations qui devraient exister quant au genre de prêts. Les caisses d'entraide économique devraient être exclues des prêts maritimes.

M. GAGNON: Qui va prêter si on ne prête pas?

M. SAINT-HILAIRE: II y a des spécialistes pour ça. Disons que c'est une opinion personnelle.

M. TETLEY: Vous n'avez pas de prêts maritimes?

M. GAGNON: II y en a un qui s'en vient, mais on a un expert au ministère qu'on va consulter.

M. TETLEY: Blague à part, vous n'en avez pas, M. Gagnon?

M. GAGNON : II y en a un qui s'en vient, M. le ministre.

M. SAINT-HILAIRE: De l'ordre d'au-dessus d'un million.

M. GAGNON: $1,400,000.

M. SAINT-HILAIRE: Alors je pense que c'est extrêmement important que le gouvernement soit parfaitement au courant de cette situation. Si on garantit les parts souscrites, c'est extrêmement important à ce point de vue.

M. GAGNON: Une des conditions...

M. SAINT-HILAIRE: Comme je l'ai dit tantôt, je continue à dire nous. Autant j'étais dans la caisse populaire, autant je suis...

M. GAGNON: C'est un bon coopérateur.

M. SAINT-HILAIRE: ... garantir mes intérêts dans les deux. Je pense qu'en tant que gouvernement on devrait... Je ne sais pas ce qu'en pense la caisse, c'est une opinion que je veux de vous. Si, à un moment donné, l'éventail s'élargit à un tel point qu'on peut se lancer uniquement dans le prêt des avions commerciaux, disons un jet...

M. GAGNON: II y a une clause qui dit que le

prêt ou l'argent déboursé devra être complètement vérifié et accepté par un expert en droit maritime. C'est dans les dispositions du prêt.

M. SAINT-HILAIRE: Cela arrive souvent, lors de procès en cours, qu'on a des experts qui vont témoigner et les deux experts ne seront pas du même avis sur la même cause.

M. GAGNON: Cela arrive dans tout.

M. SAINT-HILAIRE: Cela arrive partout. Dépendant du choix de l'expert, ça peut influencer énormément la décision pour un prêt semblable.

M. GAGNON: C'est un prêt qui aura passé par cinq caisses, c'est-à-dire qu'au-dessus de 50 personnes auront passé dessus.

M. SAINT-HILAIRE: Est-ce que vous avez des objections à ce qu'il y ait des limitations de la part du ministère?

M. GAGNON: C'est évident, oui. C'est évident.

M. SAINT-HILAIRE: Ce n'est pas pire un prêt maritime qu'un autre prêt. C'est l'hypothèque maritime, excepté que...

UNE VOIX: Cela dépend des opinions.

M. TETLEY: Je crois que les remarques du député de Rimouski sont assez importantes. Un risque peut être aussi fort qu'un autre, sauf qu'il faut que vous soyez experts dans le risque en question.

M. GAGNON: M. le ministre, c'est une des conditions du prêt, savoir qu'il soit accepté par des experts. C'est une des conditions du prêt.

M. SAINT-HILAIRE: L'idée où je veux en venir, c'est que lorsqu'on sort du prêt conventionnel de l'industrie, de bâtisses, de prêts personnels, de maisons, toutes ces choses, ça va. Vous avez toujours, dans des régions données, des experts, des évaluateurs qui peuvent aller. Mais lorsqu'on tombe dans le domaine maritime, c'est un domaine extrêmement compliqué, où les experts sont de plus en plus rares. Je pense que suivant des mises de fonds originelles — je devrais dire originales, mais je dirai originelles parce qu'il y a le péché originel — c'est extrêmement important.

Nous ici du gouvernement, avons à penser que nous avons à garantir, parce que je pense que 90 p.c. du capital souscrit dans les caisses d'entraide économique est un capital que nous allons garantir. D'après la loi, on devrait au moins limiter la somme des prêts ou, lorsqu'il y a regroupement de caisses, je ne sais pas si on ne devrait pas mettre un article, dans la loi, indiquant que le gouvernement, par le truche- ment du ministère des Institutions financières, aurait son mot à dire dans le prêt, pour voir à ce que, lorsqu'il y a un regroupement, c'est justement dû au fait qu'il y a un prêt énorme qui entre en ligne de compte.

M. GAGNON: Est-ce que vous désirez qu'on donne notre actif au gouvernement?

M. SAINT-HILAIRE: Non, mais sans donner votre actif, je pense que... En tout cas, je pense que vous avez mon idée là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Taschereau m'a demandé la parole.

M. BONNIER: M. Gagnon, je me rends bien compte que le temps avance et que tout le monde est un peu épuisé, mais il y a quand même une question fondamentale à laquelle, à mon avis, on répond d'une façon trop brève.

Un des premiers principes, dans la coopération, c'est la liberté d'entrée et de sortie des membres, comme vous le savez très bien. La liberté de sortie, on l'a, d'une façon générale, assez souvent, quoique c'est très important. Et dans les réponses que vous avez données, j'ai compris que la liberté de sortie n'existe pas toujours parce que l'individu qui veut ravoir son capital social est parfois obligé d'attendre assez longtemps, hypothétiquement, en tout cas.

Mais c'est la liberté d'entrée aussi qui me préoccupe drôlement avec le système de vendeurs, et le fait de comptabiliser, deuxièmement, dans votre système de vendeurs, les frais d'acquisition, c'est-à-dire les commissions qui sont versées aux vendeurs chaque année. Or, j'ai cru percevoir, en discutant avec quelques personnes, que ce qui arrive, parfois, c'est qu'il peut y avoir des vendeurs à pression. On finit l'année, et c'est important que je finisse avec un bon revenu et c'est important que ma caisse aussi ait un bon revenu.

Je pense que, de ce point de vue, il serait préférable, pour faire suite à la question du député de Chicoutimi, que vos frais d'acquisition, dans les cas où cette acquisition se fait à terme, soient comptabilisés tout le long du terme, de façon qu'il n'y ait pas une pression indue, soit de la part de l'organisme de la caisse ou du vendeur lui-même pour faire souscrire avant la fin de l'année sociale.

Mais il y a quelque chose qui me préoccupe davantage. Je me demande si vous auriez objection, en principe, à ce que vos vendeurs, vos représentants ou vos recruteurs, au lieu d'être payés à commission, soient des gens à salaire. Vous insistez beaucoup sur le fait que vous êtes un organisme coopératif et, à partir de ce moment, vous dites que ces recruteurs font de l'éducation. Moi, je pense que les gens qui font de l'éducation dans le secteur coopératif, d'une façon traditionnelle, sont rémunérés à salaire.

Est-ce que ça n'aurait pas une chance, à ce moment, de rendre à votre organisme son image un peu plus coopérative?

M.GAGNON: Sur le premier point, c'est possible que nos -recruteurs de temps à autre fassent de la pression, sauf que c'est prévu dans nos règlements, et même dans la loi, que tout membre a 30 jours de dédit. Donc, un membre peut se retirer dans les 30 jours après sa souscription et ça ne lui coûte aucuns frais.

M. BONNIER: Mais ça n'enlève pas la pression.

M. GAGNON: Cela aide la pression un peu, excepté que le membre a 30 jours pour réfléchir après.

M. BONNIER: Cela n'enlève pas, à mon avis, le sens d'une pression possible. C'est ça. Cela ressemble aux ventes à tempérament.

M. LESSARD: Ils ont cinq jours dans les ventes à tempérament.

M. BONNIER: Je sais, eux autres, ils ont trente jours.

M. GAGNON: Bien oui. Alors, on veut être certain...

M. BONNIER: C'est le même genre de vente.

M.GAGNON: ... qu'un membre qui entre chez nous est convaincu. On se méfie d'une certaine façon de l'ouvrage de nos recruteurs. Deuxièmement, à salaire, les vendeurs n'auraient pas la même motivation également.

Chez nous, recruteurs, vous savez, c'est pratiquement quinze heures par jour.

M. BONNIER: Je ne vois pas pourquoi ils ne travailleraient pas quinze heures par jour, même s'ils sont à salaire.

M. GAGNON: Il faut les mener dur un peu.

M. BONNIER: Vous, vous travaillez au moins quinze heures par jour.

M. GAGNON: Ouais j'ai un bon salaire, moi.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Deux dernières interventions. Si vous permettez messieurs, il est deux heures moins quart.

M. BONNIER: II y a une autre question, M. le Président, si vous me permettez. Je l'ai posée à la fédération, je voudrais aussi...: Au sujet de l'éventail des services, est-ce que c'est possible, dans votre philosophie d'approche, de gestion, d'avoir un éventail de services qui soit mieux distribué, c'est-à-dire qui corresponde à l'ensem- ble des besoins de vos membres et non pas surtout à un secteur, disons commercial ou industriel?

M. GAGNON: Oui, c'est possible.

LE PRESIDENT (M. Pilote): L'honorable député de Laviolette.

M CARPENTIER: M. le Président, merci. M. Gagnon, c'est un peu dans le même genre d'idée, mais il semble y avoir une question qui préoccupe d'une façon assez marquée les caisses populaires, à savoir le mode de recrutement, à savoir le pourcentage que vous payez. Est-ce que vous entrevoyez peut-être ou est-ce que vous seriez capable d'expliquer plus longuement, pour le bénéfice de la commission, quelle est la différence que vous entrevoyez et pour quelle raison vous avez accepté ce mode de recrutement comparativement aux caisses populaires, à savoir les commissions que vous payez? Prévoyez-vous un changement éventuel?

M. GAGNON : On ne prévoit pas de changement sur nos parts sociales. On prévoit des changements sur les dépôts à terme où c'est évident qu'on n'aura pas de commission. Maintenant, pourquoi est-ce qu'on a pris le mode de rémunération par commission et par recruteur? C'est qu'on a voulu se servir des mêmes moyens que beaucoup d'institutions étrangères prenaient pour venir vider nos poches, par exemple si on remonte à 1960 où nous étions bourrés de fonds mutuels, partout. On n'a jamais eu l'intention de faire concurrence aux caisses populaires ou à un autre mouvement coopératif. On travaille toujours pour l'augmentation du chiffre d'affaires régional et, dans celle-ci, chaque partie y trouve son intérêt.

Alors, c'était surtout pour faire concurrence aux gens de l'extérieur qui venaient chercher nos capitaux, chez nous, et qui s'en allaient bien souvent à la bourse de New York ou en dehors du Québec. C'est pour ça qu'on a dit: On va aller convaincre les gens.

M. CARPENTIER: Comment se fait-il que les membres des organismes et des caisses populaires ne semblent pas comprendre cela et quel est leur mode de souscription? Quelle est la différence entre vos deux organismes? Pour-riez-vous en dire davantage pour le bénéfice de la commission?

M. GAGNON: Bien, nos recruteurs, dans le fond, sont un peu agaçants pour tout le monde parce qu'ils font de la sollicitation à domicile. Je ne peux pas dire que les caisses populaires ne comprennent pas cela; elles le comprennent et elles, elles prennent la télévision, d'autres moyens d'information; elles ont moins besoin de sollicitation que nous, elles ont un actif de $4 milliards.

M. CARPENTIER: C'est payé par qui, de quelle façon, cette sollicitation-là?

M. GAGNON: Chez nous?

M. CARPENTIER: A la caisse populaire?

M. GAGNON: Je ne sais pas.

M. CARPENTIER: S'ils paient des abonnements à la télévision ou dans les journaux, ou un mode de souscription, quelqu'un doit payer cela. Vous, vous le payez d'une telle façon et les caisses populaires... J'aimerais vous l'entendre dire.

M. GAGNON: Franchement, je ne le sais pas.

M. CARPENTIER: Vous ne pouvez pas déceler de quelle façon ils peuvent faire cela?

M. GAGNON : On disait tantôt que les caisses populaires existent depuis 1900. Evidemment, elles n'ont pas eu le problème que nous avons eu au point de vue de la souscription des capitaux dans nos caisses.

M. CARPENTIER: Est-ce que cela pourrait se traduire par un paiement de moindre intérêt échelonné?

M. GAGNON: Chez nous?

M. CARPENTIER: Non. Aux caisses populaires.

M. GAGNON: Je ne sais pas.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Une dernière intervention avant que nous ajournions. L'honorable député de Roberval. On pourra ajourner ensuite.

M. LAMONTAGNE: Je voudrais revenir sur le rôle des caisses d'entraide économique pour le développement régional à la suite de la question du député de Rimouski. Tantôt j'ai parlé de construction de routes, on pourrait parler de bateaux, on pourrait parler d'avions, d'aéroports ou de tout autre projet susceptible d'améliorer un climat économique régional. Là, on s'aperçoit que votre actif monte d'une façon assez extraordinaire, vous disiez tout à l'heure $1 million par semaine. Vous allez avoir des capitaux à votre disposition, d'ici une couple d'années, qui dépassent les cadres d'une industrie, d'un commerce ou d'une maison. Est-ce que vous avez, de concert avec le ministère des Institutions financières, une espèce de réglementation sur ces sortes de prêts-là en même temps que les normes? Tantôt on va dire: Si c'est un bateau, cela va prendre un spécialiste en navigation, si c'est un avion, un spécialiste aérien, de routes, etc. Il me semble qu'il serait salutaire, vu l'actif grandissant à un rythme vraiment colossal, qu'il y ait une politique globale vis-à-vis de cela. On a vu récemment au Québec, du côté des caisses populaires, à l'occasion de l'achat du Soleil, que cette situation n'était pas tout à fait envisagée et que les membres des caisses, normalement, devraient être consultés. Est-ce que vous avez une formule pouvant prévoir que, s'il se présentait quelque chose dans une région donnée, un bateau, par exemple, à Rimouski, qui peut jouer un rôle important dans un développement régional, les caisses aient ce mécanisme-là à portée de la main?

M. GAGNON: C'est une de nos grandes préoccupations et je pense que la loi va nous permettre d'avoir le mécanisme dont vous parlez.

En ayant, à la fédération, des équipes d'experts qui vont s'adjoindre d'autres experts, parce que les caisses vont être limitées à 3 p.c. de leur actif pour chacun des prêts. Avec la nouvelle loi, nous allons avoir des spécialistes qui vont compléter l'étude.

M. LAMONTAGNE: Autrement dit, M. Gagnon — on sait que le député de Rimouski a parlé de question de bateau — les caisses d'entraide, vous envisagez tout ce secteur d'activité économique quelle que soit la région au Québec?

M. GAGNON: Oui, on envisage tout cela. Je ne vois pas pourquoi on mettrait des restrictions. J'ai aimé que M. Saint-Hilaire parle de bateau. Ce n'est pas pire, prendre de l'expérience dans un bateau.

M. LAMONTAGNE: II y a plusieurs compagnies déjà qui prêtent sur les avions.

M. GAGNON: Après cela, on en a plusieurs qui prêtent sur les avions. On en a plusieurs...

M. SAINT-HILAIRE: Je voudrais bien que mon intervention soit bien interprétée. Mon intervention est à l'effet que le gouvernement, au stade de la discussion, aujourd'hui, a à intervenir pour garantir des souscriptions. En un mot, dans le plan actuel, je pense que le gouvernement garantit $150 millions ou à peu près, s'il y a $150 millions d'actif, de capital souscrit. Je pense bien qu'à partir de ces garanties, il faut définitivement qu'il y ait un contrôle quasi parfait. Comme c'est une institution qui est très jeune, je pense que, définitivement, elle n'a pas tous les experts, comme je vous le disais tout à l'heure, pour oeuvrer dans différents secteurs. C'est là où je me demande quel mécanisme doit être mis en jeu pour, justement, qu'au moins le gouvernement contrôle les garanties qu'il va avoir. C'est bien beau de dire que demain matin, je prête $1,500,000, mais le $1,500,000 peut être sur des droits

maritimes etc., etc. Si on prend un bateau et si on met $1 million de réparations dessus et qu'à la fin, à cause de l'inflation, etc., lorsque le million est dépensé, cela prend $250,000 ou $300,000 additionnels pour remettre le bateau en état, le prêt part de $1,400,000 et va monter à $1,600,000 ou à $1,700,000, cela ne veut pas dire qu'à ce moment les études de rentabilité sont bonnes.

C'est le point qui m'inquiète à partir de ce moment.

M. GAGNON: C'est un travail qu'on peut faire à partir de la fédération sans que ce soit contrôlé par le gouvernement.

M. SAINT-HILAIRE : Remarquez bien que je le dis bien sincèrement, parce qu'au moment où un regroupement a été demandé par les caisses, j'étais un de ceux qui s'inquiétaient. Je me suis opposé à certains regroupements dans la question des bateaux. Je continue ma ligne de pensée là-dedans.

M. BEDARD (Chicoutimi): Une dernière question. Concernant l'article 3 du projet de loi 24, vous nous avez dit également que vous étiez contre, étant en ceci solidaire avec les autres organismes qui ont présenté des mémoires. Est-ce que, selon vous, selon votre appréciation, l'insertion de cet article, de cet amendement est due à votre nouvelle entrée dans le monde de l'épargne et du crédit...

M. GAGNON: Moi, j'ai cru que c'était...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... tenant compte du fait que vous opérez en termes de prêts, à savoir industriels et commercials, qui présentent plus de risques.

M. TETLEY: C'est une question hypothétique. H ne le sait pas; c'est moi qui dois répondre.

M. GAGNON: J'ai cru que c'était cela, mais pour les autres...

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous me le permettez, cela peut être hypothétique, ça peut ne pas l'être aussi; tout dépend de la réponse de M. Gagnon.

M. TETLEY: La réponse, c'est que...

M. BEDARD (Chicoutimi): Je sais que, quelle que soit sa réponse, M. le ministre aura l'occasion de la corriger si elle n'est pas correcte.

M. GAGNON: Personnellement, lorsque j'ai vu l'article 3, j'ai cru qu'il mettait cela pour les autres fédérations, excepté que j'étais prêt à l'accepter quand même. Je voudrais dire un dernier mot. Ne pensez pas que les caisses d'entraide économique prêtent, si vous voulez, avec risque. Même si on fait du prêt commercial et industriel on ne risque pas les épargnes des gens. La preuve, c'est qu'on a fait faire des études par l'Université du Québec, à Montréal et nos pertes sont à 1/10 de 1 p.c. Alors, trouvez des institutions qui ont aussi peu de pertes que les caisses d'entraide économique. On a voulu prouver que c'était possible, pour les Québécois, pour les Canadiens français, d'y aller dans ce domaine, sans risque. On ne pense pas que l'assurance-dépôts va avoir à débourser des montants parce qu'elle assure les caisses d'épargne et de crédit.

LE PRESIDENT (M. Pilote): Je remercie M. Gagnon, représentant des caisses d'entraide, ainsi que tous ceux qui l'accompagnent. Je demande au rapporteur de la commission, le député de Dubuc, de faire rapport des délibérations en Chambre. Je peux assurer les trois représentants de la Fédération des caisses populaires, des caisses d'entraide et des caisses d'établissement rural que nous allons prendre bonne note de leurs recommandations. Je vous remercie.

M. TETLEY: Une seconde, je voudrais tout simplement noter la présence, avec plaisir, d'un ancien collègue, député de Portneuf de 1966 à 1970, Marcel Plamondon, et encore je vous remercie tous d'être venus.

LE PRESIDENT (M. Pilote): La commission est ajournée sine die.

(Fin de la séance à 14 h 1 )

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