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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Tuesday, October 1, 1974 - Vol. 15 N° 152

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 26 — Loi des agents de recouvrement


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières,

compagnies et coopératives

Etude du projet de loi no 26

Loi des agents de recouvrement

Séance du mardi 1er octobre 1974

(Dix heures onze minutes)

M. CORNELLIER (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

La commission des institutions financières, compagnies et coopératives se réunit, ce matin, pour l'étude du projet de loi 26, Loi des agents de recouvrement. Nous aurons l'occasion d'entendre des mémoires; mais auparavant, je voudrais lire la liste des membres de la commission pour aujourd'hui. M. Boudreault (Bourget); M. Bonnier (Taschereau); M. Lachance (Mille-Iles); M. Harvey (Charlesbourg); M. Tardif (Anjou); M. Léger (Lafontaine); M. Lacroix (Iles-de-la-Madeleine); M. Picotte (Maskinongé); M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Tetley (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Tremblay (Iberville).

Je cède maintenant la parole au ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

Remarques préliminaires

M. TETLEY: M. le Président, il me fait plaisir de vous recevoir aujourd'hui, mesdames, mesdemoiselles et messieurs, afin d'entendre vos commentaires concernant le projet de loi 26 sur les agents de recouvrement. L'Opposition ainsi que les députés ministériels noteront que j'ai distribué un cahier explicatif; c'est le même cahier que mes conseillers m'ont donné. Donc, l'intention n'est pas de cacher le bill ni les problèmes, mais de les résoudre ensemble, si c'est possible — si ce n'est pas possible, en Chambre durant un débat démocratique — ici, durant un débat démocratique.

Vous avez aussi mes notes préliminaires. Ce nouveau projet de loi s'ajoute à bien d'autres afin d'assurer et d'améliorer le plus possible la protection du consommateur. Comme je l'ai souligné tout récemment, ce secteur est relativement nouveau au Québec. L'intérêt que le gouvernement et le ministère y ont porté depuis maintenant quatre ans, par les diverses prises de position, les multiples actions et une législation pour le moins substantielle, ont sans aucun doute contribué à combler les lacunes les plus criantes.

Néanmoins, l'intervention du gouvernement, en particulier, dans un secteur nouveau, ne peut parvenir à résoudre tous les problèmes, d'un seul coup.

C'est ainsi que ce nouveau projet constitue un jalon de plus, mais essentiel autant pour la protection du consommateur que pour le respect des droits individuels.

Dans un système de crédit à la consommation aussi libéral que le nôtre, il importe que le consommateur n'abuse pas des facilités qui lui sont accordées mais également que les activités des créanciers ou de leurs représentants, dans l'utilisation de méthodes de recouvrement de créances, soient sujettes à une réglementation stricte.

Aussi ce projet de loi a-t-il pour objet la réglementation des activités des représentants des créanciers. Trois objectifs sont poursuivis: mettre fin aux méthodes abusives souvent utilisées par des agents de recouvrement envers les débiteurs; éliminer le harcèlement dont ceux-ci peuvent être l'objet; donner des garanties juridiques additionnelles aux créanciers et reconnaître, par l'établissement d'un système de permis, les agents de recouvrement en qui le public peut avoir confiance.

De plus, sous peine d'amende dont le montant peut atteindre $25,000 dans le cas d'une corporation et $2,000 dans le cas d'un individu, ce projet de loi interdit aux agents de recouvrement d'utiliser certaines pratiques de recouvrement dont j'ai fait une liste de a) à n). Il est très important de connaître qu'il y a des pratiques qui, dans l'avenir, ne seront pas acceptables.

Par exemple: Recouvrer ou réclamer d'un débiteur pour le compte d'un créancier une somme d'argent supérieure à celle qui est due.

Un autre exemple: Recevoir ou tenter de recevoir d'un débiteur une somme d'argent en plus de celle qui est due.

Un autre: Réclamer de son mandat une rémunération supérieure à celle prévue au mandat.

Ou communiquer avec le débiteur ou sa caution ou un membre de leur famille par téléphone ou autrement sauf de 8 heures à 20 heures les jours juridiques, ou omettre de s'identifier de la façon prescrite.

Ou communiquer avec le débiteur lorsque ce dernier l'a avisé par écrit de communiquer avec son conseiller juridique.

En plus des pratiques interdites énumérées dans le projet de loi et du système de permis obligatoire qui y est prévu, l'agent de recouvrement devrait déposer dans un compte en fiducie les sommes d'argent recouvrées au nom des créanciers. En tout temps, il sera sujet à l'inspection des représentants du ministère et, enfin, il devra déposer un cautionnement dont le montant pourra être utilisé au cas où il ne transmettrait pas aux créanciers les sommes qui leur seront dues.

This project has been requested by many groups: the Association of Credit Bureaus of Québec, the Bar of Montréal, I really think, the Chambre de Commerce and our Consumers' Protection Council. It is with pleasure that I therefore present it.

Je tiens à souligner que j'ai toujours tenu à

ce que les différents projets de loi de mon ministère soient soumis à la commission parlementaire, si possible, favorisant ainsi la participation des députés ministériels, de ceux de l'Opposition et, enfin, la participation de l'opinion publique. L'intervention de celle-ci par le biais des commissions parlementaires permet aux représentants des divers groupes concernés de s'exprimer, mais également accroît l'influence de l'opinion publique dans le processus législatif. Donc, M. le Président, voilà mes remarques préliminaires.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, M. le ministre.

Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Avant de faire un court commentaire qui précédera l'audition des personnes directement concernées par cette loi, je voulais simplement demander d'ajouter à la liste des membres de cette commission le député de Saguenay.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): En effet, le député de Saguenay, M. Lessard, est membre de la commission ce matin, ainsi que M. Assad, de Papineau. Sont considérés comme substituts M. Pagé, de Portneuf, et M. Ostiguy, de Verchères.

M. le député de Lafontaine.

M. LEGER: Alors, M. le Président, j'écoutais le rapport du ministre sur le projet de loi et je vois qu'il essaie de trouver un juste milieu entre la défense du consommateur et les droits des institutions financières. C'est un dilemme, cette ambivalence continuelle qu'il a à son ministère, des deux groupes qui ont souvent des intérêts ou des objectifs différents qui doivent être conciliés par le même ministre. Je crois quand même que le projet de loi qui nous est soumis est important et qu'il faut le considérer peut-être avec un peu plus de profondeur. On peut dire que, même si le Québec possède une loi sur les agents de recouvrement, c'était quand même la seule province où ce genre d'activités n'étaient pas réglementées par un organisme de surveillance.

Il était donc grand temps de rattraper le temps perdu. La discussion du projet de loi 26, que nous avons devant nous, devrait être l'occasion d'examiner, en profondeur, le recouvrement des dettes.

Quel est le rôle des agents de recouvrement? Quelle est leur utilité sociale? Je vais répéter cela, parce que je sais que le ministre va être bien intéressé par ce que je vais dire. Quel est réellement le rôle social des agents de recouvrement? Il faut aller jusque-là. Quelle est leur utilité sociale? Servent-ils d'abord à retracer des débiteurs dont on aurait perdu la trace, ou à évaluer la solvabilité des personnes, ou, tout simplement, comme on le leur reproche quelquefois, à mettre de la pression sur les débiteurs récalcitrants. Autrement dit, ils auraient la réputation, à bien des endroits, de remplacer ce qu'un débiteur, ce qu'une compagnie a de la difficulté à obtenir, c'est-à-dire obliger son client à payer. Alors, on remet ça à une compagnie qui est spécialisée là-dedans, qui va mettre de la pression et qui, elle, va l'obtenir.

Il ne faut pas oublier que des lois récentes, celle des petites créances, l'autre, de l'aide juridique, par le même gouvernement, ont considérablement changé le contexte juridique qui existe entre certains créanciers et certains débiteurs. Est-ce que, dans un tel contexte — je pense que c'est une question qu'on peut se poser aujourd'hui — les agents de recouvrement ont encore leur place?

Il faut y penser, c'est une dynamique. Bien sûr, quand le gouvernement est arrivé au pouvoir, il y a quelques années déjà, il s'est dit: II faudrait corriger ceci et cela. Mais il n'a peut-être pas pensé qu'il y a une dynamique, qu'il y a une évolution dans la société et que certaines lois changent peut-être cette dynamique et cette évolution, ce qui fait qu'aujourd'hui on peut se poser nécessairement la question. La commission doit donc se poser la question: Est-ce que, dans un tel contexte, les agents de recouvrement ont encore leur place?

Il ne faut pas craindre de se poser la question. L'Opposition croit que le rôle de cette commission doit aller jusque-là.

Quant au texte même du projet de loi 26, il suit généralement le modèle de ce qui existe pour le reste du Canada. Nous avons été heureux de constater, cependant, que le secteur no 7, qui traite des pratiques interdites, est plus élaboré et plus précis que les dispositions correspondantes que l'on trouve dans les lois des autres provinces. Je vois que sur ma première affirmation, le ministre n'était pas d'accord, mais, sur la deuxième, il est d'accord. Il est d'accord sur les louanges, mais pas trop...

M. LESSARD: Une opposition positive.

M. LEGER: Une opposition positive. Nous croyons qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction. M. le Président, c'est un pas dans la bonne direction. Il y a un autre pas que le ministre fait — que j'ai remarqué — depuis l'adoption du bill 22, c'est de donner des petits passages en anglais. Je suis moins sûr que c'est un pas dans la bonne direction.

M. TETLEY: J'invoque le règlement. J'ai toujours parlé, depuis cinq ans et demi, dans tout discours, en anglais et en français et je vais continuer. Ce droit existe toujours dans le bill 22 et dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique à l'article 133.

M. LEGER: Le ministre ne s'est peut-être pas aperçu au moment où je lui faisais des louanges comme étant un ministre qui n'hésitait même pas à se défendre en Chambre, avec la

langue de Molière, d'une façon régulière et même dans les moments les plus difficiles où il y avait des discussions ardues et même des attaques virulentes de l'Opposition, il continuait d'une façon que j'ai toujours admirée — et je l'ai félicité — à se défendre en français. C'est pour cela que quand je le félicitais, il devait être perdu dans ces louanges, il ne remarquait pas justement qu'il ne parlait que français. De toute façon, je voulais simplement faire remarquer qu'après le bill 22 on commence déjà à parler... D'ailleurs le député de Gatineau a déjà affirmé hier que le bill 22 permettait justement, de rendre légaux les projets, les privilèges que les anglophones avaient au Québec — le député de Gatineau a affirmé cela hier — et que cela permettait encore le libre choix des parents à la langue d'enseignement. On le sait fort bien, M. le Président, et on l'expérimente tous les jours.

M. BONNIER: M. le Président, le député de Lafontaine...

M. LEGER: Alors, M. le Président, c'est absolument légal ce que je dis là puisque c'est pour illustrer...

M. BONNIER: Ce n'est pas illégal, c'est antiréglementaire.

M. LEGER: ... le discours du député de Notre-Dame-de-Grâce. Nous disions, M. le Président, que nous croyons, pour ramener le député au bon sourire, que c'est un pas dans la bonne direction et nous nous demandons même s'il n'y aurait pas lieu d'aller plus loin et d'exiger que toutes les communications entre une agence et un débiteur se fassent par écrit sur des formules approuvées par le directeur, ce qui éviterait peut-être des pressions difficiles, des harcèlements, de l'intimidation possible. Cela se ferait d'une façon un peu plus professionnelle et on pourrait voir l'importance et la valeur du rôle social que les agents de recouvrement auraient à jouer comme complément au manque, pour les créanciers, de leurs possibilités de recueillir les montants qui leur sont dus. Sur chacun de ces sujets, et sur les autres aspects du projet de loi, nous serons évidemment désireux de recevoir des représentations de tous les intéressés. C'est donc avec beaucoup d'attention que nous les entendrons.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je commencerai par dire que je suis sûrement heureux d'entendre les gens qui ont des choses à nous dire en ce qui concerne la loi 26.

Je ne retiendrai donc que quelques passages de ce qu'a dit le ministre ce matin et que je trouve, quand même, très importants, c'est-à-dire cette possibilité qu'il y a, dans le bill 26, d'interdire certaines pratiques.

Par contre, je n'irais pas dans le même sens que celui qui m'a précédé, en disant qu'on se pose la question à savoir si on doit ou non continuer à avoir des agences de recouvrement. Je pense, M. le Président, que c'est inévitable dans le contexte actuel, où j'ai l'impression que, du côté des avocats par exemple, on n'a pas tellement le temps de s'occuper de recouvrement de créances, sauf peut-être pour des créances extraordinaires. J'ai l'impression, en tout cas, que les agences de recouvrement ont leur place, sauf qu'il faut que cela se fasse d'une façon normale, sans intimidation contre le débiteur.

Je trouve qu'elles ont leur place, M. le Président, parce qu'il s'agit là de permettre aux commerces de continuer à vivre. Aujourd'hui, comme vous le savez, le commerce se fait en très grande partie par des méthodes de crédit; si des commerces se permettaient de ne pas recouvrer leur crédit, bien entendu ceci risquerait, dans plusieurs cas, d'acculer certains commerces à la faillite.

Alors, il est important — et c'est absolument normal — qu'un commerçant puisse recouvrer ses créances. Maintenant, un débiteur doit aussi s'attendre à les payer. Cela, c'est normal. Sauf que dans plusieurs cas, évidemment — et je trouve que le ministre a eu de bons conseillers pour énumérer toute cette série de pratiques de recouvrement — par exemple on laisse croire qu'à défaut de paiement des poursuites judiciaires seront intentées et que cela pourrait grandement, dans plusieurs cas, défavoriser le débiteur par un mauvais dossier. Ou des choses qui peuvent être publiées ou des choses que le bureau du crédit pourrait soumettre à plusieurs commerçants, des choses comme cela; c'est évident que c'est l'absolue vérité. Cela s'est passé comme cela dans plusieurs cas. Nous avons eu plusieurs plaintes. Ou encore, cette autre façon d'appeler un débiteur par le moyen d'une agence de recouvrement, faire un appel interurbain, de Montréal, par exemple, vers n'importe quelle région du Québec et appeler le débiteur à frais virés.

Si le débiteur refuse les frais, on lui dit: On va les porter à votre compte et cela va augmenter votre compte, etc. Ce sont des méthodes d'intimidation qui sont utilisées; il y en a d'autres aussi, M. le Président, dont celle d'envoyer des lettres de quasi-menaces avec des en-têtes qui font que la personne qui reçoit ces lettres ne sait pas trop si cela provient d'un bureau d'avocat ou d'un bureau de crédit. En fait, ce n'est pas toujours clair, ce qui amène les gens à avoir une sainte peur de tout cela. Evidemment, on ne trompera personne, ce genre d'intimidation réussit dans les cas où les débiteurs sont de bonne foi, veulent bien payer leurs dettes.

Dans les cas où ce sont des durs de durs, comme on dit, on ne réussit pas plus par ces méthodes. Donc, je considère que ces méthodes ne font qu'intimider les gens de bonne foi, dans le fond.

M. le Président, ceci dit, je considère qu'il y

a un pas à faire, il y a des choses à corriger, mais il ne faut quand même pas mettre en cause le système des agents de recouvrement. J'écoute avec plaisir les invités que nous avons ce matin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Auparavant, M. le ministre aimerait ajouter quelques mots.

M. TETLEY: Permettez-moi, M. le Président, quelques commentaires. D'abord, je vous remercie pour les éloges et je nie les critiques. Je crois que c'est la loi la plus avancée au Canada et je me base sur les avis de mes conseillers. Il est vrai qu'il faut équilibrer les droits des consommateurs, les droits des commerçants: c'est mon but. C'est la même chose qu'on fait au ministère du Travail entre les ouvriers et les patrons, au ministère de 1' Education entre les enseignants et les commissaires d'écoles, etc.

Notre rôle, ici au ministère, est de protéger le public sans nuire au commerce. Mais mon troisième commentaire, c'est que notre rôle est surtout de représenter le public; je crois que c'était plutôt l'idée du député de Rouyn-Noranda et j'attends le grand public avec plaisir.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'inviterais maintenant le Barreau du Québec à nous présenter son mémoire en demandant tout de même au porte-parole de bien vouloir s'identifier et de nous présenter ses collaborateurs.

Barreau du Québec

MME AUDETTE-FILION: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, mon nom est Micheline Audette-Filion, recherchiste au Barreau du Québec. J'ai l'honneur d'être accompagnée ce matin par M. le Bâtonnier de Québec et vice-président du Barreau, Me Henri Grondin.

Au moment où le législateur pense protection du consommateur, où il réglemente dans une loi-cadre 20 professions qui dispensent leurs services au public, où, avec ce même souci et dans ce même esprit, il réglemente la fonction d'huissier et bientôt l'occupation de courtier en valeurs immobilières, il n'est que normal qu'il veuille réglementer efficacement l'occupation d'agent de recouvrement ou d'agences de perception.

Depuis une dizaine d'années, d'ailleurs, la plupart des provinces du Canada avaient adopté une législation efficace sur le sujet, alors que notre loi se retrouvait déjà dans les Statuts refondus de 1941 et que de nombreuses pratiques abusives étaient à déplorer. Le Barreau avait, d'ailleurs, à quelques reprises, attiré l'attention du gouvernement sur la nécessité d'une loi pertinente dans ce domaine et c'est donc avec grand plaisir qu'il accueille le dépôt du projet de loi 26 qui a été déposé devant l'Assemblée nationale avant les vacances parlementaires.

Le Barreau voit généralement dans le projet une législation moderne, efficace et de nature à protéger le public, à prévenir et à corriger les pratiques abusives qu'il avait eu à déplorer dans le passé de la part des agents de recouvrement. Il se déclare satisfait de la formule de réglementation de l'occupation adoptée, à savoir subordonner la possibilité d'agir à titre d'agent de recouvrement à l'obtention d'un permis qu'on obtiendrait moyennant fourniture d'un cautionnement et en remplissant certaines conditions. Ce permis serait délivré par le directeur qui est indépendant du ministre — ce que nous approuvons — et tout refus ou non-renouvellement est "appelable" à la cour Provinciale.

La réglementation n'est pas très précise, mais elle nous permet de voir qu'on subordonnera cette occupation à l'obligation de déposer l'argent perçu dans un compte en fiducie, qu'une procédure d'inspection, de saisie et même de séquestre est prévue et surtout que les pratiques interdites sont définies, strictement réglementées et également sanctionnées.

Donc, comme je le disais tantôt, nous sommes extrêmement heureux de la présentation de ce projet de loi. Nous pensons qu'il répond à une nécessité. Nous n'avons que quelques remarques à faire sur des articles en particulier. Quant au cautionnement, le projet de loi ne nous permet pas de voir quel sera le montant qui sera fixé par la réglementation. La loi actuelle prévoit $5,000. Nous pensons qu'il est évident que dans certains cas ce montant est insuffisant, tandis qu'il serait suffisant dans d'autres cas. Nous suggérons au ministre de prévoir dans sa réglementation une échelle de cautionnements variant suivant le chiffre d'affaires de l'agent de perception qui sera apprécié à la lumière du rapport que l'article 20 impose à l'agent de fournir au directeur. Nous suggérons également que la personne qui sollicite un permis ait une place d'affaires dans la province de Québec. On a vu des cas dans le passé où, le montant du cautionnement étant dépassé, certains agents sont disparus de la circulation emportant avec eux le surplus au détriment, évidemment, du consommateur.

La discrétion qui est laissée au paragraphe f ) de l'article 10 nous semble un peu vaste. Nous suggérons qu'elle soit subordonnée aux normes qui seront prévues par les règlements et à la loi.

A l'article 19, nous notons que les lois des provinces d'Ontario, de Saskatchewan et de Colombie-Britannique, entre autres, imposent à l'agent, et cela sans demande ni mise en demeure, l'obligation de rendre compte, dans les 30 jours du mois de calendrier au cours duquel une somme est perçue, à la personne pour qui il l'a perçue et également de faire remise dans le même délai. Il y a des exceptions qui varient avec les provinces quant au montant minimum; si la somme est inférieure à $10 ou $5 ou un montant fixe, le délai peut être

prolongé. Nous comprenons que cette obligation de rendre compte et faire remise est déjà contenue dans le code civil au chapitre général du mandat. Nous pensons quand même que cette obligation pourrait être reproduite de façon statutaire, dans le cas particulier des agents de recouvrement.

A l'article 26, nous notons l'obligation de l'agent de recouvrement de faire rapport à son mandant ou au créancier des informations obtenues de la part du débiteur. Nous pensons que cet article 26 f) pourrait être élargi pour prévoir le cas où le débiteur informe l'agent de recouvrement ou qu'il y a erreur sur la personne ou que la dette a déjà été payée, de façon à éviter et les frais et les inconvénients inutiles.

A l'article 33, nous soulignons simplement qu'il y aurait lieu d'assurer la concordance avec le bill 22 et de prévoir la règle d'interprétation dans le cas où le contrat qui doit certainement être considéré comme un contrat d'adhésion est rédigé dans les deux langues.

A l'article 44, on pourrait sans doute ajouter la question du non-renouvellement pour prévoir le droit d'appel de la décision du directeur pour l'émission d'un permis.

A l'article 48, on se demande pourquoi amener un nouveau délai d'audition de sept jours alors que le délai uniforme contenu au code de procédure et dans la plupart des lois statutaires est de dix jours. Nous suggérons que l'on adopte la concordance avec le code de procédure civile.

L'article 50 c) nous semble contraire à l'article 2. En effet, dans l'article 2, on mentionne qu'une certaine catégorie d'individus, dont les avocats, les notaires, les huissiers, les fiduciaires, etc., ne sont pas soumis à l'application de la loi. Par ailleurs, on prévoit à l'article 50 c) les modalités particulières de la délivrance d'un permis à ces individus. J'imagine que telle n'était pas l'intention du législateur et que le législateur avait sans doute plutôt l'intention de soustraire de l'obligation d'obtenir un permis, ce groupe de personnes, mais peut-être pas de les soustraire aux autres articles de la loi, par exemple, en ce qui concerne les pratiques abusives, les infractions et les peines.

Maintenant, en terminant, j'aurais trois remarques sur lesquelles j'aimerais insister. On prévoit, dans le projet de loi, la procédure en cas d'appel devant la cour Provinciale. On prévoit les modalités de cette procédure et le Barreau déplore, encore une fois, que l'on doive se passer d'un code de procédure administrative. A chaque fois qu'une loi statutaire confie à la cour Provinciale une juridiction particulière, le problème se pose devant les cours. Depuis longtemps, nous réclamons qu'un code uniforme de procédure administrative soit adopté, qui s'applique dans tous les domaines où une juridiction, qui n'est pas celle du code civil ou du code de procédure civile, est confiée aux tribunaux ordinaires.

M. TETLEY: Je vous demande pardon. Vous approuvez évidemment le droit d'appel.

MME AUDETTE-FILION: Certainement.

M. TETLEY: Mais c'est la question de la procédure. Vous voulez un code de procédure administrative...

MME AUDETTE-FILION: C'est ça. M. TETLEY: ... ou d'appel.

MME AUDETTE-FILION: C'est ça. Qu'il s'applique dans toutes les matières et qu'il vienne préciser si, effectivement, le code de procédure s'applique devant cette cour lorsqu'il s'agit de l'application d'une loi statutaire ou s'il faut se fier simplement à ce qui est défini dans la loi, qui est quand même assez limité, comme procédure.

M. TETLEY: Oui. Il y a, par exemple, des effets de la Commission des valeurs mobilières à la cour Provinciale et vous voulez la même procédure dans ces appels que dans un appel d'une décision.

MME AUDETTE-FILION: Oui, oui. C'est une recommandation générale que nous avons faite. Disons que nous avons commencé à faire ce genre de représentations devant le comité Dussault qui a étudié toute la question des tribunaux administratifs. Très souvent, nous avons à déplorer cette question. Nous demandons au législateur, depuis longtemps, qu'un code de procédure administrative s'applique en matière administrative et dans les lois statutaires qui viennent devant les tribunaux ordinaires, pour régler le problème.

L'article 50 h)...

M. TETLEY: Pardon, est-ce qu'il y a des jugements, ou est-ce qu'on a soulevé en cour cette question de savoir par quelle procédure il faut procéder?

MME AUDETTE-FILION: Oui, c'est une question qui se pose très souvent devant les tribunaux. On prend le droit supplétif. En général, on suit les règles du code de procédure, mais ce n'est pas clair. Souvent, quand il y a déjà quelque chose dans la loi, il n'y en a pas suffisamment. Alors, il faut recourir, pour d'autres mesures, au code de procédure.

Maintenant, à l'article 50 h), on mentionne que les règlements, en vertu du projet de loi, seront publiés après leur adoption dans la Gazette officielle. Il s'agit d'une autre représentation importante du Barreau qui a d'ailleurs présenté aux leaders parlementaires, aux chefs de parti et au président de l'Assemblée nationale, au mois de juin dernier, je crois, un mémoire très complet sur le contrôle de la législation

déléguée dans la province de Québec. Nous croyons que dans la plupart des matières de législation d'une certaine importance, une prépublication devrait intervenir de façon à ce que tous les intéressés aient l'occasion de faire des représentations sur la réglementation avant son adoption. C'est une pratique qui a été adoptée d'ailleurs dans le cas du code des professions, je crois, dans le cas de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, à l'occasion d'un certain nombre de lois particulières. Nous croyons que c'est une pratique heureuse qui devrait être généralisée.

En particulier, dans ce projet de loi-ci, la réglementation qu'on laisse entrevoir semble extrêmement pertinente, extrêmement stricte mais nous aimerions pouvoir en prendre connaissance avant qu'elle soit adoptée. Nous suggérons qu'elle soit prépubliée dans la Gazette officielle avec avis de 90 jours, permettant aux intéressés de faire les recommandations voulues. Nous insistons d'ailleurs, dans notre mémoire sur le contrôle de la législation déléguée, sur la nécessité d'un contrôle parlementaire de la réglementation, contrôle qui aurait effet tant au niveau prénatal qu'au niveau postnatal, c'est-à-dire autant avant l'adoption des règlements qu'après leur adoption.

Je vous passe les recommandations particulières que nous faisons sur le sujet. Nous avons suggéré un système bien structuré de contrôle parlementaire de la législation déléguée et nous désirons attirer l'attention du ministre et de tous les ministres sur ce problème très délicat. Je vous remercie et nous serons heureux de répondre à vos questions.

M. TETLEY: Je n'ai pas de question, M. le Président, sauf un seul commentaire. C'est de vous remercier et nous prenons au sérieux vos remarques très importantes. En effet une commission parlementaire est l'endroit idéal, l'endroit par excellence pour discuter un avant-projet. C'est un avant-projet, c'est un document de travail et je n'ai aucune hésitation à tout modifier le bill.

MME AUDETTE-FILION: Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Je voudrais féliciter le Barreau de son intéressante contribution à ce projet de loi. Je pense que ça nous ouvre des avenues que, souvent, on peut oublier parce que vous avez cette préoccupation particulière qui est de votre domaine et qui doit nous ouvrir l'esprit à des aspects qui peuvent nous échapper comme législateurs. Entre autres, justement, le projet de loi à l'article 10, comme vous le mentionnez si bien, n'indique pas le montant de cautionnement et, selon vous, étant donné que le montant de $5,000 existe depuis assez longtemps, de quel ordre de grandeur voyez-vous le cautionnement pour justement donner un sérieux et une proportion, dans la vie d'aujourd'hui, à cette responsabilité sociale de ces agents de recouvrement?

MME AUDETTE-FILION: Le but du cautionnement est d'assurer, en fait, la solvabilité d'un agent de recouvrement quant aux créances qu'il perçoit. Il est difficile, pour moi, de donner un pourcentage dans le moment; je pense que c'est plutôt du domaine des actuaires de savoir quel est le montant, en général, qui a réussi à garantir une solvabilité. Je pense que ce cautionnement-là devrait être basé sur une échelle et être proportionné au chiffre d'affaires d'un agent de recouvrement, parce qu'on sait bien qu'il y a des agences de recouvrement qui sont considérables et qui ont un chiffre d'affaires phénoménal, qui ont des clients prestigieux, tandis que d'autres sont une personne physique, tout simplement, qui agit dans un petit bureau. Je pense que les deux doivent garantir leur solvabilité dans le but de protéger le consommateur.

M. LEGER: L'ordre de grandeur, le voyez-vous dans les chiffres de $25,000 à $30,000 ou si c'est simplement l'augmenter un peu?

MME AUDETTE-FILION: ... aller jusque-là, dans le cas des agences qui ont un chiffre d'affaires considérable. Vraiment, le souci est d'assurer la solvabilité; c'est la raison du cautionnement. La recommandation supplémentaire que nous avons faite, c'était justement que l'agent de perception ait une place d'affaires dans la province. C'est prévu dans le cas des corporations, je crois, mais pas dans le cas des représentants ou des agents qui sont des personnes physiques. Je pense que c'est très important.

M. LEGER: J'appuie, à 100 p.c, la recommandation du Barreau sur ce point-là: une place d'affaires dans la province de Québec. Etant donné que ces compagnies peuvent faire affaires avec des Québécois, il faut qu'elles se soumettent aux lois québécoises, et la façon de le faire, c'est d'avoir une place d'affaires au Québec. Cela va renforcer, je pense bien, les affaires au Québec.

Je vois que le ministre me dit oui, de la tête, deux ou trois fois; il semble être intéressé.

M. TETLEY: Oui.

M. LEGER: Maintenant, pouvez-vous nous expliquer ce que vous entendez par le rôle du comité consultatif dont vous parlez?

MME AUDETTE-FILION: Oui, c'est quelque chose que j'ai omis, je le gardais pour la fin. En fait, dans ce paragraphe, nous offrons au ministre nos services dans le domaine des agents de recouvrement. Evidemment, personne

n'ignore que nous sommes très familiers avec la perception des créances et avec tout ce domaine de collection, de saisie, etc.

Dans le cas des sténographes officiels, à Montréal en particulier, depuis un grand nombre d'années le Barreau collabore à la préparation des sténographes en faisant passer les examens, etc. De même, dans la Loi des huissiers, qui vient d'être adoptée au cours de la dernière session, on prévoit un comité consultatif composé de huissiers, de membres du Barreau et de représentants de groupes socio-économiques, comité consultatif qui conseille le ministre sur l'application de la loi et des règlements. C'est dans le même sens que nous pensons que c'est peut-être un domaine où nous pourrions être utiles. Il nous fait plaisir d'offrir au ministre de collaborer à un comité consultatif qui pourrait exister dans ce domaine-là; en particulier, pour préparer, peut-être, la réglementation.

M. LEGER: M. le Président, je pense que c'est une bonne explication de cette préoccupation, parce que dans le monde où l'on vit aujourd'hui, il faut penser qu'il y a des affaires à faire. Il y a l'aspect très social de ce domaine et, trop souvent, quand on est préoccupé par un aspect très commercial, on oublie l'aspect humain. Les groupes socio-économiques mentionnés pourraient apporter cet aspect humain de relations entre les personnes qui ont des dettes ou des engagements et la façon dont cela est perçu. Le Barreau, dans l'aspect de son expérience dans les perceptions, pourrait apporter aussi son expérience.

Concernant cet aspect, comment, avec votre expérience, jusqu'à maintenant, percevez-vous le rôle de l'agent de recouvrement, spécialement avec l'affirmation que je faisais au début en disant que le contexte actuel a changé pas mal avec la loi des petites créances, avec l'aide juridique? Avec l'expérience que vous avez, comment concevez-vous le rôle des agents de recouvrement? Est-ce qu'il est encore essentiel ou s'il est uniquement utile dans le contexte social d'aujourd'hui?

MME AUDETTE-FILION: II est certain qu'avec l'avènement de l'assurance-maladie, il y a beaucoup de créances, autrefois perçues par les agents de recouvrement, qui disparaissent. Il est certain également que les individus peuvent maintenant s'adresser à la cour des petites créances pour réclamer de leur débiteur leurs créances. Il reste cependant — et je pense tout de suite à elles — toutes les corporations qui ont des créances à percevoir, en particulier les corporations municipales, scolaires, etc., qui ne peuvent s'adresser à la cour des petites créances. Je pense qu'il doit y avoir encore matière à perception. Je pense que le représentant des agents de recouvrement est ici ce matin et il a peut-être des chiffres à vous mentionner. Quant à moi, je ne sais pas du tout quelle peut être l'amplitude des créances qui peuvent rester de ce domaine, mais ce que je peux affirmer, c'est que, s'il y a encore matière à perception de créances, je pense que cette loi est éminemment nécessaire. Si on doit continuer d'avoir des personnes qui perçoivent des créances et qui ne sont pas régies par une loi professionnelle — par la Loi du Barreau, par exemple — si elles ne sont pas soumises à un code d'éthique, il faut absolument une réglementation qui les encadre et qui les empêche d'abuser du public.

M. LEGER: Vous parlez, à l'article 19, de l'obligation de rendre compte dans les 30 jours, parce qu'il peut y avoir de grosses sommes. Les gros dangers que vous voyez là, par l'expérience passée, est-ce que vous pourriez m'en donner quelques exemples, du fait qu'il y aurait eu un nombre important d'agents de recouvrement qui, parce qu'il n'y avait pas de date de calendrier pour le remboursement, n'avaient pas de responsabilité mensuelle ou autre? Est-ce que vous avez vu des cas importants de gens qui n'ont pas remis les sommes qu'ils avaient recueillies et qui sont disparues? Est-ce qu'il y a eu des problèmes de ce côté que vous avez pu percevoir?

MME AUDETTE-FILION: Encore là, je ne peux pas vous donner de chiffres ni de proportions, mais je pense que tout avocat qui a été dans la pratique a rencontré des cas où un client est venu le voir en lui disant: J'ai confié ma perception à un agent de recouvrement ou autrement et je n'ai pas de nouvelle, ou je n'ai pas de rapport, ou il a perçu et je ne l'ai jamais su. C'est certain que ce sont des abus qui sont fréquents.

M. LEGER: Ma dernière question était pour souligner votre affirmation, vers la fin, pour le ministre. On sait qu'il y a eu des revendications, au début de la session, sur l'importance du rôle de la réglementation qui doit être soumise et non pas diluée devant le Parlement.

Est-ce que le ministre, d'abord pour ce cas en particulier...

M. TETLEY: Votre question hebdomadaire...

M. LEGER: C'est-à-dire régulière.

M. TETLEY: ... ou mensuelle, ou régulière.

M. LEGER: Régulière. D'abord, est-ce que le ministre a l'intention de présenter un projet de réglementation à la commission parlementaire avant l'adoption du règlement?

M. TETLEY: Oui, M. le Président.

M. LEGER: Bon. Je sais que vous êtes un des ministres — et vous pouvez vous "accoter"

un peu en vous disant cela — qui le font régulièrement.

M. TETLEY: Tout le monde.

M. LEGER: Non. Malheureusement non. Mais vous êtes un des ministres qui le font et je vous félicite là-dessus. Je veux savoir jusqu'à quel point vous avez de l'influence pour convaincre le gouvernement et le conseil des ministres de le faire d'une façon automatique pour tout projet de loi de la moindre importance.

Est-ce que vous êtes de cet avis, que cela devrait être une chose absolument régulière et pratiquement automatique?

M. TETLEY: Non, M. le Président. Pour ma part, je m'occupe de mon propre ministère et j'en ai jusqu'ici. C'est difficile de m'occuper d'un deuxième, troisième ou... Evidemment, j'assiste au conseil des ministres, mais...

M. LEGER: De temps en temps, vous devez y aller!

M. TETLEY: Je ne manque jamais. Mais les séances sont à huis clos et je n'ai pas l'intention de divulguer ce qui s'y passe. En tout cas, j'ai assez d'être ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives sans prendre d'autres "jobs".

M. LEGER: Mais sur votre perception générale des lois du Québec, vous avez votre mot à dire au conseil des ministres.

M. TETLEY: Ah oui!

M. LEGER: Alors, je présume...

M TETLEY: A huis clos.

M. LEGER: Est-ce que c'est possible — on est un peu plus que huit ici — de nous dire si vous pensez que cela devrait être régulièrement soumis au Parlement?

M. TETLEY: Je n'ai pas l'intention de répondre à cette question, parce que c'est un moyen indirect de me poser une question à laquelle j'ai déjà refusé de répondre.

M. LEGER: D'accord. M. le Président, je n'ai pas d'autres questions. Je ne sais pas si le député de...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Taschereau m'avait demandé la parole.

M. SAMSON: M. le Président, on a l'habitude de toujours...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je crois que la tradition veut que, dans les remarques préliminaires, à l'occasion d'une commission celle celle-ci...

M. SAMSON: Non, non, non.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... les partis politiques, à tour de rôle...

M. SAMSON: Non, non. Ce n'est pas la tradition, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Lorsque les débats s'engagent, je crois que tous les membres de la commission sont sur un pied d'égalité...

M. SAMSON: Non, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... et ont le droit de parole.

M. SAMSON: Non, M. le Président. Ce n'est pas comme cela.

M. LEGER: On n'est pas d'accord là-dessus.

M. SAMSON: M. le Président, nous allons vous demander...

LE PRESIDENT (M. Comellier): J'ai respecté cette entente...

M. SAMSON: ... de faire comme d'habitude.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... au début de la commission lorsque...

M. SAMSON: Non, ce n'est pas de même.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... il y a eu les commentaires préliminaires et cela ne prive aucun député, aucun membre de la commission de son droit de parole.

J'avais signalé au député de Taschereau...

M. SAMSON: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... que je lui accordais la parole et...

M. SAMSON: M. le Président, je soulève un point de règlement.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... vous ne serez pas privé par la suite.

M. SAMSON: M. le Président, non, je soulève un point de règlement. Je dois le faire parce que je n'accepterai pas que nous établissions un précédent aujourd'hui.

A toutes les commissions parlementaires auxquelles il nous a été donné d'assister, M. le Président, toujours nous avons procédé de la même façon. Le ministre a le premier droit de parole et l'Opposition, à la suite, dans l'ordre.

Cela compte pour le début d'une commission parlementaire, cela compte pour les auditions des mémoires qui nous sont présentés et pour les questions que nous avons à poser concernant ces mémoires.

Cela a toujours été comme cela, M. le Président, et je vous demande de respecter cette règle, parce que vous savez que notre règlement, en plus d'être basé sur le petit livre vert dont vous avez sûrement copie devant vous, est basé également sur les précédents et sur les habitudes que nous avons en cette Chambre.

C'est pourquoi je vous demande de le faire respecter tel que nous l'avons toujours fait dans le passé. Cela ne privera pas, M. le Président, les autres députés de leur droit de parole, mais vous savez que, si on laisse passer un précédent aujourd'hui, vous l'utiliserez par la suite pour dire: II y a déjà eu un précédent. Donc, un précédent, nous n'en voulons pas. Je vous demande de m'accorder ce droit de parole.

M. LESSARD: M. le Président, sur le point de règlement.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Oui. Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, il ne faudrait pas, je pense, que, chaque fois qu'on change de substitut au président de l'Assemblée nationale, on change en même temps les traditions.

Je pense, M. le Président, que cela a été une coutume établie depuis 1970. Que non seulement nous soyons reconnus comme membres de l'Opposition, comme représentants de l'Opposition à la suite des commentaires du ministre, mais aussi, lorsqu'un mémoire a été présenté, il a toujours été entendu que le premier qui avait la possibilité de poser des questions — je crois que c'est absolument normal — soit d'abord le ministre. Mais si c'est ainsi, M. le Président, si vous reconnaissez immédiatement le ministre après la présentation d'un mémoire, il est aussi normal — selon une entente qui remonte à 1970 et je pense que tous les présidents de commission l'ont acceptée — que ce soit le représentant de l'Opposition officielle qui ait l'occasion de poser les premières questions et, par la suite, un représentant d'un autre parti reconnu, en l'occurrence le député de Rouyn-Noranda.

Je pense, M. le Président, que...

M. SAMSON: M. le Président...

M. LESSARD: Non, M. le Président...

M. SAMSON: ... on n'est pas pour commencer un débat là-dessus, ce matin. Si les libéraux veulent en faire un, un débat, on va leur en faire un.

M. LESSARD: Les libéraux devraient lire l'amendement qui a été accepté par la commission de l'Assemblée nationale.

M. SAMSON: Je reconnais votre sens de la démocratie; vous vous en foutez comme de l'an quarante, M. le Président.

M. LESSARD: Je pense, M. le Président, sur cela...

M. SAMSON: On vous connaît.

M. LESSARD: Sur cela, M. le Président, nous allons certainement faire une bataille, parce que je regrette, mais on ne changera pas...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!

M. LESSARD: Je regrette, M. le Président, mais on ne commencera pas, à chaque fois, à faire des luttes sur cela. Cela va être reconnu par chacun des présidents de commissions parlementaires ou bien, on va être obligé de faire une bataille sur cela. Même le président de l'Assemblée nationale le reconnaît, lorsqu'il s'agit, par exemple, d'y faire des commentaires sur une déclaration ministérielle; nous exigeons que ce soit aussi reconnu au niveau de la commission parlementaire. Nous ne devrions même plus l'exiger, cela a toujours été reconnu par les autres présidents auparavant.

Je pense que le député de Rouyn-Noranda a complètement raison. D'ailleurs, étant donné ce fait reconnu, les députés de l'Opposition ne demandent pas d'habitude la parole, car c'est reconnu par le président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs, je n'ai pas l'intention qu'on engage un débat sur cette question-là, par respect aussi pour nos visiteurs, ce matin. Je mentionnais tantôt que, quel que soit l'ordre dans lequel les députés s'exprimaient, personne ne serait privé de son droit de parole.

Cependant, sans changer l'optique ou l'opinion que j'émettais tantôt concernant l'ordre dans lequel les membres de la commission doivent avoir le droit de parole, pour simplifier le débat et pour le bon ordre de la commission — je le répète, pour le respect que nous devons avoir envers nos visiteurs — j'accepterai d'accorder le droit de parole au député de Rouyn-Noranda, et, par la suite, le député de Taschereau aura la parole.

M. SAMSON: Merci, M. le Président. J'ai également beaucoup de respect pour les visiteurs qui sont devant nous, ce matin. Je les remercie pour le mémoire qu'ils ont présenté. Je les assure que, dans ce mémoire, des choses nous intéressent énormément, notamment, en ce qui concerne cette question du cautionnement et aussi de la place d'affaires, place d'affaires que vous suggérez, dans la province de Québec.

Est-ce que, selon l'expérience du Barreau, il est arrivé souvent que vous ayez eu des plaintes à l'effet que quelqu'un, qui aurait exploité une agence de recouvrement dont la place d'affaires

étant à l'extérieur du Québec, n'aurait justement pas remboursé les gens qu'il représentait?

MME AUDETTE-FILION: Je crois qu'il y a une expérience au Québec que tout le monde connaît, soit celle des orangeraies. Evidemment, ce n'est pas la même matière; il s'agit de transactions immobilières. Je pense d'ailleurs que M. le ministre est en train de nous préparer un projet de loi sur le sujet qui va pallier ces inconvénients. Tout le monde connaît l'incident, qui s'est renouvelé d'ailleurs à plusieurs reprises, où des intérêts étrangers ont obtenu des investissements des Québécois et, à toutes fins pratiques, sont disparus avec, ou enfin, ont vendu des valeurs non existantes contre bon argent québécois.

M. SAMSON: Mais cela, c'est...

MME AUDETTE-FILION: Disons que c'est un exemple. Il y a également un problème qui s'est posé dans le cas des cartes de crédit où les places d'affaires étaient à l'extérieur du Québec et il était difficile de réglementer cette question.

M. SAMSON: Par contre, si la place d'affaires est à l'extérieur du Québec et si on établit une place d'affaires au Québec, cela peut se faire selon différentes méthodes, j'imagine.

MME AUDETTE-FILION: C'est la solution.

M. SAMSON: Est-ce que cela réglerait réellement notre problème que de demander une place d'affaires au Québec? Je vous pose la question, parce que je n'ai réellement pas la réponse.

MME AUDETTE-FILION: C'est la solution, de façon à avoir quelque chose de matériel, une place d'affaires, une équité quelconque...

M. SAMSON: Ce que je veux dire c'est si cela ne pourrait pas...

MME AUDETTE-FILION: ... au Québec et un endroit où on peut intenter les procédures à l'intérieur de la province sans devoir pour poursuivre à l'étranger, recourir à des procédures qui sont beaucoup plus compliquées. Au niveau de l'exécution, également, lorsqu'on obtient un jugement contre une corporation ou une personne qui a une place d'affaires, qui a des biens au Québec, c'est beaucoup plus facile d'exécuter évidemment. Cela garantit la créance.

M. SAMSON: Si c'était seulement une place d'affaires au Québec qui est une espèce de succursale d'une autre place d'affaires à l'extérieur du Québec et qu'à toutes fins pratiques la place d'affaires québécoise soit composée d'un gérant et d'une secrétaire, à ce moment, cela ne règle pas trop le problème, si je comprends bien.

MME AUDETTE-FILION: C'est assez difficile d'en demander plus.

M. SAMSON: Ce serait difficile.

MME AUDETTE-FILION: C'est pour cela que le cautionnement est prévu également pour donner une garantie additionnelle.

M. SAMSON: Mais la question de la place d'affaires ne peut pas régler tout le problème.

MME AUDETTE-FILION: Elle est importante pour l'équité.

M. SAMSON: Elle est importante.

MME AUDETTE-FILION: Elle est importante également pour qu'il y ait un endroit où poursuivre dans la province au point de vue juridique.

M. SAMSON: Est-ce que vous iriez jusqu'à recommander que le cautionnement, dans les cas d'une place d'affaires québécoise mitigée, soit beaucoup plus élevé? Je dis mitigée parce que justement cela peut être une place d'affaires au Québec, mais, dans le fond, les affaires se font à l'extérieur. C'est une espèce de succursale qui donnerait l'apparence d'une place d'affaires au Québec. Est-ce que vous iriez jusqu'à suggérer que, dans des cas comme cela, le cautionnement soit plus élevé?

MME AUDETTE-FILION: Je pense que le critère de l'évaluation du cautionnement doit être le degré d'affaires de l'agent au Québec. Le volume de ses affaires, c'est le volume de sa responsabilité et c'est cela qu'il doit garantir. Je pense que c'est le critère.

M. SAMSON: Des cautionnements à pourcentage, le pourcentage des affaires.

MME AUDETTE-FILION: Un cautionnement proportionnel à l'investissement, au montant que l'agent transporte, perçoit.

M SAMSON: Si je comprends bien, cela va pour les agences qui existent. On peut évaluer quel est leur chiffre d'affaires, mais pour une nouvelle agence, on ne sait pas quel sera le chiffre d'affaires. Sur quoi pourrait-on se baser?

MME AUDETTE-FILION: II y a un rapport annuel qui est prévu à l'article 20, je crois, une obligation de l'agent de faire rapport au directeur tous les ans. Le permis est également renouvelable tous les ans. Il peut être ajusté à ce moment.

M. SAMSON: D'accord. Cela va pour une agence existante, mais dans le cas d'une agence nouvelle?

MME AUDETTE-FILION: II faut nécessairement un minimum.

M. SAMSON: Cela prend un minimum, d'accord.

MME AUDETTE-FILION: Nécessairement.

M. SAMSON: Cela va. Il y a seulement une chose. Plusieurs des questions que je voulais poser l'ont été et j'ai eu les réponses. Je voudrais peut-être insister sur votre suggestion, la dernière, au sujet de la loi déléguée. Je trouve cela important. Je vous invite à revenir souvent nous le dire. Il y a un ministre...

MME AUDETTE-FILION: Nous vous promettons d'y revenir toutes les fois que l'occasion sera possible. C'est bien notre intention.

M. SAMSON: Vous avez fait cela l'été passé. La Chambre de commerce à également préparé un excellent mémoire là-dessus concernant l'érosion du pouvoir. Elle sera là bientôt, après vous autres. On va l'inviter à revenir souvent nous le dire parce que cela a fait du bien. L'an passé, on a dit, au mois de juin, on a déjà un ministre qui a compris. C'est beaucoup. Les autres comprendront peut-être.

M. TETLEY: Ce n'est pas une question de comprendre, c'est une innovation que j'ai faite beaucoup avant vos commentaires. Je l'ai fait...

M. SAMSON: M. le Président... M. TETLEY: ... il y a longtemps.

M. SAMSON: ... c'est malicieux de la part du ministre. Un ministre qui n'était pas là quand le mémoire de la Chambre de commerce était présenté... Vous n'étiez pas là, à ce moment, c'est un compliment. Il est allergique aux compliments.

M. TETLEY: Cela fait quatre ans que je dépose les règlements.

M. SAMSON: On va arrêter de faire des compliments au ministre, il semble allergique à nos compliments. Pour une fois qu'on en a un qui l'applique.

M. TETLEY: J'accepte votre...

M. SAMSON: Vous acceptez mon compliment?

M. TETLEY: Votre nuance. UNE VOIX: Non pas les critiques.

M. TETLEY: Je suis "touché" ces jours-ci.

M. SAMSON: Continuez, dites-le-nous souvent, cela va finir par s'appliquer et, je l'espère, dans les plus brefs délais possibles.

MME AUDETTE-FILION: C'est notre intention.

M. SAMSON: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, je voudrais poser une question bien directe aux représentants du Barreau. Le député de Lafontaine vous a demandé quelle était l'incidence des cours de petites créances sur le montant des affaires qu'auraient à transiger les agents de recouvrement; est-ce que cela a eu une certaine influence? Vous dites que oui, sans doute que cela a eu une influence. Cependant, il reste des affaires plus importantes, des recouvrements beaucoup plus importants, et les agents de recouvrement sont essentiels de ce point de vue. J'aimerais savoir: Est-ce que vous pensez que, si ce travail était fait par des avocats, par des membres du Barreau, cela serait mieux fait?

MME AUDETTE-FILION: C'est une question pernicieuse.

M. BONNIER: Pas du tout pernicieuse. C'est une question très objective. Je ne veux pas du tout compromettre votre point de vue, que je sais, évidemment, biaisé dans le bon sens. Je veux simplement savoir si cela ne serait pas plus efficace, très honnêtement.

M. GRONDIN: Je peux peut-être répondre à cela, M. le Président. D'abord, je voudrais juste rectifier. Me Filion n'a pas dit que seulement les grosses affaires revenaient aux agents de recouvrement. Elle a dit qu'il y avait des petites corporations qui, elles, n'ont pas accès à la Cour des petites créances directement. Ces petites corporations, je pense à un épicier du coin qui est incorporé. Il ne peut pas aller directement à la Cour des petites créances. Donc, il doit nécessairement poursuivre par l'entremise d'un avocat, même si ce n'est pas une grosse corporation. Evidemment, il y a parfois des montants assez minimes qui, jusqu'à présent, ont fait l'objet des affaires des agents de recouvrement. Est-ce que ce serait mieux fait par des avocats? Ecoutez, il faut faire une distinction. Il y a, dans le cours des choses, un tas de petites réclamations qui, je pense, sont assez facilement réglées au simple niveau d'un rappel. Comme ce sont des petites choses, il arrive bien souvent que les agents de recouvrement peuvent s'en acquitter très bien. Cela ne veut pas dire que les avocats sont absents, parce que, lorsque le client refuse de payer, il faut prendre des

procédures; là cela vient à l'avocat. On ne veut pas, nous autres, dire carrément que cela ne nous intéresse pas les recouvrements; loin de là. D'ailleurs, on a déjà présenté des mémoires au gouvernement pour dire qu'on voulait quand même continuer à exercer la profession qu'on exerçait.

Il reste que, je pense, les agents de recouvrement peuvent encore jouer un rôle dans la société, sans qu'on puisse dire qu'ils empiètent nécessairement dans le domaine des avocats.

M. BONNIER: Très bien. Vous soulignez, dans votre mémoire, l'importance d'avoir des examens très sérieux pour les agents de recouvrement. Je pense que c'est un point très important. Au niveau de l'éthique, ce n'est pas simplement un examen qui va faire en sorte que les agents de recouvrement vont avoir beaucoup d'éthique d'une façon quotidienne. Voici ce qu'on leur reproche d'une façon générale; quand on demande aux personnes sur la rue ce qu'elles pensent des agents de recouvrement, l'opinion est assez négative, concernant l'éthique. Une éthique, c'est continuel. Ces agents de recouvrement, est-ce que vous trouvez qu'ils devraient être formés en corporation comme d'autres, avoir une éthique très stricte et être soumis, non seulement à une espèce de permis de la part du gouvernement, mais être reconnus par une corporation et le reste?

MME AUDETTE-FILION: D'abord, dans beaucoup de cas, il s'agit de corporations qui, évidemment, doivent avoir à leur service ce qu'on appelle, dans la loi, un représentant qui, lui, doit détenir un permis de représentant.

M. BONNIER: Est-ce que cela devrait être une corporation professionnelle comme d'autres?

MME AUDETTE-FILION: Je m'excuse. D'autre part, je pense qu'ils ont plutôt une occupation de nature commerciale qui ne remplit pas les critères du code des professions nécessairement. Je pense qu'ils se rapprochent plutôt des courtiers d'assurances, des courtiers en valeurs mobilières, des courtiers en valeurs immobilières, de cette catégorie d'individus qui peuvent exercer leur occupation moyennant un permis et un cautionnement, et une réglementation. Je ne pense pas qu'on puisse, du moins pour le moment, aller aussi loin que les inclure au code des professions, parce qu'ils ne répondent pas à toutes les conditions qui sont prévues aux critères des professions.

M. BONNIER: Est-ce que vous trouvez que le public serait mieux servi si, éventuellement, il y avait une corporation professionnelle pour ces gens-là?

MME AUDETTE-FILION: Cela suggère qu'ils s'autodisciplinent eux-mêmes. Par ailleurs, dans ce cas-ci, comme dans les cas que je viens de mentionner, il s'agit plutôt d'une surveillance de la part du directeur ou enfin du ministre. Evidemment, il y a beaucoup de conditions pour qu'ils puissent s'autodiscipli-ner. Il faut qu'ils soient déjà très bien structurés.

M. BONNIER: Oui, mais comme vous dites, actuellement, c'est une espèce de commerce, cette chose-là. Ils font même pression auprès de certains commerçants pour acheter, à toutes fins pratiques, leurs créances et, pour eux, par après, faire pression sur les débiteurs. Est-ce que c'est une bonne procédure ou est-ce que vous trouvez qu'il serait préférable, en longue période, que ce soit plutôt les institutions de crédit spécialisées dans le domaine qui s'occupent de ce côté-là?

MME AUDETTE-FILION: Bien, c'est un intermédiaire qualifié, je pense, pour autant qu'ils feront leur travail conformément à la réglementation.

M. GRONDIN: Je pense qu'il faut faire une distinction, là. Il ne faudrait pas penser qu'ils font, je pens en tout cas, un travail de professionnels comme tel, au sens où on l'entend dans le code des professions. Ils font un acte commercial. Ils essaient de récupérer des sommes d'argent qui sont dues. Ce sont des intermédiaires. Je ne voudrais quand même pas qu'on les assimile à des gens qui exercent une profession et qui rendent des services grâce aux études qu'ils ont faites, aux connaissances qu'ils ont acquises dans un domaine bien particulier. C'est la distinction que je fais quand même entre le rôle des agents de perception, d'une part, et d'autre part, le rôle des avocats lorsqu'il s'agit d'aller chercher de l'argent qui est dû à leurs clients.

M. BONNIER: Mais est-ce que le public est bien servi par le fait qu'ils ne sont que des intermédiaires?

M. GRONDIN: II y a eu, évidemment, des lacunes. C'est pour ça qu'une loi, je pense, va sûrement améliorer les choses. Cela nous paraît, en tout cas, que cette loi, pour l'instant, réglerait la situation...

M. BONNIER: Merci.

M. GRONDIN: ... avec les amendements qu'on suggère.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Portneuf.

M. PAGE: Me Audette-Filion, lorsque vous avez élaboré votre mémoire, vous vous êtes certainement penchée, de façon bien particulière, sur toutes les transactions qui étaient faites. Est-ce que vous savez ou que vous êtes capable de déterminer ou d'évaluer le pourcentage des

réclamations des comptes qui sont réclamés par les agences qui, face à l'incapacité par elles d'obtenir le parfait paiement, sont ensuite référées dans les bureaux d'avocats?

MME AUDETTE-FILION: Non, je n'ai aucune statistique sur ce sujet.

M. PAGE: Vous n'avez aucune statistique.

Ma question serait peut-être adressée au ministre et je vous demanderais ce que vous en pensez. D'une part, l'agence n'a pas de pouvoir juridique; en fait, ce sont presque seulement des pouvoirs incitatifs qu'elle a. Bien souvent, on va voir — ce n'est peut-être pas pratique courante de la part des maisons qui sont fiables — une pratique, surtout souvent en milieu rural où une agence va arriver et dire à un commerçant: On a le moyen infaillible de recouvrer tes comptes. Dans un cas comme le tien, on a réussi, on a une moyenne, une fréquence de 75 p.c. des montants qui sont réclamés. La chanson est bien souvent très belle. Alors, le type va donner un montant en collection. Le commerçant, qui donne sa créance, ne sait peut-être pas ou ne fait peut-être pas le partage, ne connaît peut-être pas les vrais pouvoirs d'une agence comme telle et bien souvent, je pense, que celui-ci va leur donner différents mandats pour des montants à réclamer en étant certain ou en croyant que l'agence en question a des pouvoirs juridiques.

Cette agence va demander le paiement au débiteur: Des conversations téléphoniques, des échanges de lettres tant et si bien que le compte augmente et augmente. Parfois, on va dire au créancier, après un an: Bien, ton compte, on n'a pas été capables de le collecter. On te prierais d'aller voir un avocat avec ça.

Qu'est-ce que vous pensez de l'opinion suivante, à savoir que l'agence devrait d'après le texte de loi ou les règlements informer le créancier que ses pouvoirs sont des pouvoirs limités, des pouvoirs incitatifs seulement à l'égard du débiteur?

MME AUDETTE-FILION: Je pense que c'est une excellente suggestion qui pourrait sans doute être transportée au moment des formules parce que la loi parle que la réglementation acceptera des formules préétablies qui devront seules être utilisées par les agents de perception. Je pense qu'on devrait peut-être penser, au ministère, à incorporer dans les formules, dans les contrats entre créanciers et agents de recouvrement, une telle mesure d'information.

M. PAGE: Le ministre en pense quoi?

MME AUDETTE-FILION: Je pense que cela protégerait cette fois-ci le créancier.

M. TETLEY: Evidemment, le directeur a ce pouvoir dans les règlements, l'article 50.

MME AUDETTE-FILION: Oui.

M. PAGE: Ne pensez-vous pas qu'il serait peut-être bon, là, d'écrire en noir sur blanc, sur papier, dans le règlement comme tel, que l'agence est obligée d'informer le créancier que ses pouvoirs sont limités purement et simplement pour une plus grande sécurité du public?

M. TETLEY: Oui, je crois que c'est...

M. PAGE: Par exemple, quelqu'un a un compte à recouvrer, il y a une créance de $200 et il laisse ça entre les mains d'une agence. Il constate après un an et demi que le montant est alors rendu à $400, et qu'il n'y a rien eu de fait et il n'est pas capable de réclamer. Alors, ça cause préjudice et au créancier et au débiteur.

M. TETLEY: Oui.

M. PAGE: C'est une proposition que je vous soumets respectueusement.

M. TETLEY: C'est une suggestion intéressante; j'en remercie le député de Portneuf.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Charlesbourg.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, dans le même ordre d'idées, c'est beaucoup plus un avis juridique qu'autre chose que je désire obtenir soit de Mme Filion ou de Me Grondin. Vous avez couvert, je pense, l'ensemble du projet et de loi et vous avez peut-être volontairement négligé de vous pencher sur l'article 40, qui ne paraît peut-être pas sorcier du tout, mais peut-être que vous pourriez me donner un avis juridique relativement au fait que le directeur a les pouvoirs de poursuite. Ne pensez-vous pas que — peut-être que la question s'adresse aussi au ministre — les raisons en fait qui peuvent être invoquées par le directeur, les raisons de poursuite, en étant à la fois administrateur de la présente loi, ça ne crée pas justement ce problème qui, normalement, devrait être laissé entièrement aux personnes de loi?

MME AUDETTE-FILION: J'imagine que c'est une question d'efficacité administrative. Il serait sans doute préférable que ce soit le procureur général ou une personne autorisée par lui qui intente les poursuites.

M. HARVEY (Charlesbourg): Parce que le directeur devient juge et partie ici.

MME AUDETTE-FILION: Dans certains cas, le Barreau, je pense, peut intenter des poursuites de cette nature dans le cas de pratique illégale.

M. HARVEY (Charlesbourg): Oui.

MME AUDETTE-FILION: En vertu de la Loi du Barreau et non en vertu de cette loi-ci.

M. GRONDIN: A ce propos, je pense que nous serions d'accord sur votre suggestion, d'enlever au directeur le droit de poursuite.

M. HARVEY (Charlesbourg): Quant à cette question, c'est un avis juridique que vous m'avez donné gratuitement. C'est au ministre maintenant que revient...

M. GRONDIN: Ce n'est pas vraiment un avis; vous nous demandez vraiment notre opinion...

M. HARVEY (Charlesbourg): D'accord.

M. GRONDIN: ... là-dessus. Je pense qu'il serait normal que ce ne soit pas le directeur directement qui, lui-même, poursuive. Il devrait faire rapport au ministre qui, lui, décidera, oui ou non, de porter plainte en vertu, évidemment, du principe de séparation des pouvoirs.

M. HARVEY (Charlesbourg): Maintenant, dans le cas de votre proposition que je trouve alléchante, selon laquelle les compagnies qui sollicitent ont leur place d'affaires au Québec, j'achète cette suggestion. Mais je voudrais savoir si vous avez des statistiques à cet égard. Est-ce qu'il y a 25, 30 ou 40 compagnies...

MME AUDETTE-FILION: Encore une fois, nous n'avons aucune statistique sur ce sujet.

M. HARVEY (Charlesbourg): Parce que nous avons, dans un cahier vert qui est confidentiel, M. le ministre...

M. TETLEY: Ce n'est pas confidentiel, il a été envoyé aux membres de l'Opposition comme aux députés ministériels.

M. HARVEY (Charlesbourg): Ah bon! De toute façon, l'Opposition peut obtenir passablement de documents dits confidentiels du gouvernement. Alors, c'est heureux que vous les ayez ainsi, libéralement.

M. SAMSON: Vous pensez que le gouvernement peut se fier à l'Opposition, il le sait.

UNE VOIX: II ne peut pas se fier à ses députés.

M. HARVEY (Charlesbourg): Le nombre de compagnies, en fait, qui sont de l'extérieur du Québec, est très marginal à l'intérieur de ce cahier qui donne, en noir sur blanc, la liste de toutes les compagnies qui perçoivent. Alors, je pense que même la suggestion est bonne; déjà dans les faits, le gouvernement du Québec a fait un effort dans ce sens, pour que les agences de recouvrement soient québécoises et dûment reconnues. Je pense que la suggestion est déjà achetée. Je vous remercie beaucoup.

M. TETLEY: Permettez-moi tout simple- ment d'ajouter, parce que la question a été posée un peu au ministre, que ce n'est pas tout simplement une question d'agence de recouvrement; c'est une question de toute corporation au Québec. Nous avons déjà, c'est-à-dire, notre ministère a déjà émis un document à cet effet qui est le résultat d'une conférence interprovinciale qui a eu lieu il y a plus d'un an dans cette salle-ci, et nous avons publié un document à ce sujet.

C'est mon intention, dans les modifications de notre Loi des compagnies, de prendre note de cette suggestion que vous faites et que le député de Charlesbourg fait aussi.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député d'Anjou.

M. TARDIF: M. le Président, je veux féliciter Mme Filion et Me Grondin pour les commentaires qu'ils ont apporté relativement au projet de loi 26. Je pense, entre autres, aux commentaires qui se rapportent à l'article 48 et qui font état de la nécessité de maintenir une certaine uniformisation des délais qu'on rencontre, entre autres, au code de procédure civile.

Je pense qu'il ne serait peut-être pas sage de créer de nouveaux délais parce que, lorsqu'on a refondu le code de procédure civile en 1966, on a mis fin à tous les délais de trois, six, huit et dix jours qui existaient pour faire un délai uniforme qui est le délai de dix jours.

Ma question se rapporte à votre commentaire qui se rattache à l'article 19. Dans cet article, vous faites état des lois qui existent en Ontario, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique qui exigent la remise du montant dans un délai prévu. Vous faites exception pour des montants minimes de $5 ou $10. L'article 19 du projet de loi no 26 ne prévoit pas une telle obligation à laquelle doit se soumettre l'agence de recouvrement.

Me Grondin, je pense est assez au courant de cela. Supposons qu'un avocat perçoive un compte de $500 pour un client et que le débiteur lui remette dix chèques postdatés de $50, c'est-à-dire un chèque à chaque mois; bien souvent, ce que l'avocat va faire, à moins que son client ne l'exige, il va déposer ces chèques dans son compte en fidéicommis et, à la fin, il remettra les $500 moins ses honoraires de perception, disons, de 15 p.c. Vous ne pensez pas que votre suggestion ne ferait qu'établir un mécanisme lourd qui ajouterait peut-être des frais à ceux que l'agence de recouvrement exige actuellement.

En somme, ce dont il s'agit — et je pense que l'article 19 atteint bien ce but — c'est de protéger le créancier en forçant l'agence de recouvrement à déposer les montants perçus dans un compte en fidéicommis. Si vous ajoutez une obligation additionnelle, qui est de faire une remise mensuelle ou hebdomadaire, vous allez peut-être avoir des frais administratifs plus élevés que le créancier, en fin de compte, va devoir payer.

M. GRONDIN: Je pense que les agences, maintenant, sont équipées de certaines machines qui peuvent faire des rapports assez facilement.

M. TARDIF: II ne s'agit pas d'un rapport; il s'agit d'une remise. Il y a une différence entre un rapport et une remise.

M. GRONDIN: D'accord, il y a une différence entre un rapport et une remise. Il y a d'abord le rapport qu'il faudrait faire et, quant à la remise, nous pensons que, lorsqu'un marchand quelconque donne tous ses comptes en recouvrement, il arrive qu'à la fin de chaque mois, par exemple, il a quand même des montants assez substantiels qui viennent de diverses sources. Donc, on pense que ce serait normal qu'il fasse remise à ce moment-là. C'est dans ce sens-là qu'on le propose: "obligation de rendre compte".

MME AUDETTE-FILION: Mais le délai peut être prolongé. C'est la modalité, je pense, qui est importante et qui a été adoptée dans les autres provinces. Sur le montant, il peut y avoir des variantes. Ce qu'il y a dans les autres lois, c'est qu'en bas de $10 le délai est prolongé. Il peut s'agir de 90 jours, à ce moment-là.

M. TARDIF: La raison pour laquelle j'ai posé cette question, c'est que si une agence de recouvrement a 25 comptes pour, supposons, un épicier, elle va devoir faire un rapport de chacun des comptes ou des montants perçus des créanciers et faire une remise en conséquence, tandis que, lorsqu'on compte est terminé ou lorsqu'un créancier a fait une remise complète, à ce moment-là — comme bien souvent font les avocats — la remise pourra être effectuée quant au montant complet qui a été perçu vis-à-vis d'un créancier en particulier.

MME AUDETTE-FILION: Je pense que c'est la pratique normale des affaires en matière commerciale de rendre compte mensuellement. Si on pense aux compagnies de finance, aux grands magasins, aux cartes de crédit, enfin, à tous ceux qui perçoivent ou administrent des sommes d'argent pour autrui ou qui avancent des sommes d'argent à autrui, c'est la façon à peu près régulière de procéder, je crois.

M. GRONDIN: Si vous permettez, ici, un représentant, justement, des agents de recouvrement me dit que, dans la pratique, il paie tous les mois. Je pense que ça règle le problème; tout ce qu'il s'agirait de faire, c'est de confirmer dans la loi une pratique déjà existante.

M. HARVEY (Charlesbourg): L'article 20. Cela implique des inspections.

MME AUDETTE-FILION: L'inspection est prévue par la loi, d'ailleurs.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs, pas d'autres questions ou commentaires?

M. LEGER: Oui, je veux juste poser une question au ministre.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: Dans l'esprit du ministre, l'article 26 e), entre autres, veut-il dire que l'agent de recouvrement, en aucun cas, ne peut, dans ses tentatives de perception écrites ou autres, dire au créancer qu'il va être poursuivi par lui ou par son débiteur? Est-ce exact? Par le créancier...

M. GRONDIN: Le Barreau...

M. TETLEY: C'est déjà une exigence dans la Loi du Barreau. J'ai même plaidé une cause que j'ai perdue quand même. Donc, la jurisprudence est aussi faible que l'exigence dont je vous parle. C'est pourquoi c'est plus clair. La seule personne qui peut dire qu'elle va intenter une action ou qui intentera une action, c'est un avocat. Je crois que la jurisprudence est à l'effet que le créancier peut dire: Je vais engager un avocat pour prendre des procédures, mais que vous, comme agent... Je présume que le député de Lafontaine est agent de réclamation...

M. LEGER: Ce n'est même pas hypothétique.

M. TETLEY: C'est vous qui réclamez l'argent pour votre parti. Vous percevez... En tout cas, vous n'avez pas le droit de dire aux gens qui ne veulent pas payer au parti que vous allez procéder à la cour, parce que vous n'êtes pas avocat.

M. LEGER: L'argent arrive avant cela.

M. SAMSON: Non, parce qu'il est assujetti à la Cour des petites créances.

M. TETLEY: Non, les sommes sont trop élevées.

M. LEGER: Le total est très élevé, en effet, mais pas les sommes individuelles.

M. HARVEY (Charlesbourg): II y a beaucoup d'intérêt là-dedans.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je remercie Me Audette-Filion et Me Grondin de leur présentation.

M. TETLEY: Je vous remercie, surtout Mme Audette-Filion et M. le bâtonnier Grondin, de l'objectivité de votre mémoire. J'espère que le mémoire de la semaine prochaine du Barreau à la commission Gauvin sera aussi objectif.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien. J'invite maintenant la Chambre de commerce de la province de Québec et je salue avec plaisir M. Létourneau et Me Champagne.

Chambre de commerce de la province de Québec

M. LETOURNEAU: Mon nom est Jean-Paul Létourneau. Je suis le vice-président exécutif de la Chambre de commerce de la province de Québec. Je voudrais tout d'abord, M. le Président, vous présenter les personnes qui m'accompagnent pour la présentation de notre mémoire à votre commission. J'ai ici, à ma gauche, M Pierre Morin, directeur général aux affaires publiques de la Chambre de commerce et, à ma droite, Me Gilles Champagne, directeur pour la législation et la recherche dans notre organisme. Nous accompagnent également les personnes suivantes, qui pourront peut-être se lever pour que les membres de la commission puissent les identifier à mesure que je les mentionne.

M. Yves Drainville, de Sorel, du bureau de crédit de Sorel et de Saint-Hyacinthe; M. Clément Goudreau, de Granby, président de l'Association des bureaux de crédit de la province de Québec; M. Guy Poirier, de Montréal, de l'Association canadienne des sociétés de prêts aux consommateurs; M. Paul Croteau, de Québec, directeur du crédit pour la compagnie Paquet Inc.; M. Lilian Beaulieu, de Québec, président de l'Association des directeurs de crédit de la province de Québec.

M. LEGER: Beaulieu ou Beaulé? M. LETOURNEAU: Beaulieu.

M. LEGER: Parce que sur le rapport, c'est Beaulé. C'est une erreur.

M. LETOURNEAU: C'est une erreur de copiste.

M. Jacques Gauthier, de Québec, président de l'Association des directeurs de crédit de la ville de Québec; M. Jean-Claude Chartrand, de Montréal, président de l'Association des directeurs de crédit de la ville de Montréal; M. Gilles Lachance, de Montréal, du Bureau de crédit de Montréal; M. Jean Biron, de Montréal, représentant la Fédération des sociétés de financement, et M. Roland Gingras, de Québec, représentant le Bureau de crédit de la ville de Québec. Toutes ces personnes, M. le Président, ont été consultées dans la préparation de notre mémoire et certaines d'entre elles ont contribué avec nous à la préparation de ce document.

Nous voudrions tout d'abord vous remercier, M. le Président, MM. les membres de la commission, M. le ministre, de nous recevoir et d'entendre notre point de vue sur le projet de loi qui a été déposé.

Le préambule que vous voyez au début de notre mémoire situe notre organisme, sa date de fondation, le nombre de chambres de commerce qui y sont affiliées ainsi que le nombre de membres que nous regroupons par nos chambres locales, de même que, au paragraphe 1.1, le nombre d'entreprises commerciales, industrielles et professionnelles, au nombre de 2,500, de toutes tailles et faisant affaires au Québec, qui sont regroupées par notre fédération.

Pour la Chambre, la préparation du présent mémoire devait nécessairement s'inspirer de ses politiques d'action adoptées annuellement en assemblée générale des membres, de ses prises de position antérieures, particulièrement au mémoire sur l'érosion du pouvoir législatif soumis en mai dernier aux membres de l'Assemblée nationale et des délibérations sur l'Etat et l'entreprise, thème du récent congrès annuel de notre organisme.

Appréciation générale du projet de loi no 26. Dans ce contexte, la Chambre fait siens les objectifs poursuivis dans le projet de loi sur les agents de recouvrement, soit d'établir des règles du jeu équitables ou une sorte de code d'éthique relativement au recouvrement de créances.

Nous avons cependant peine à comprendre comme le législateur peut restreindre aux seules personnes agissant pour autrui et contre rémunération l'application des règles de pratique dans l'activité commerciale que constitue le recouvrement des créances.

Nous faisons par là référence, M. le Président, aux exceptions prévues, ce qui veut dire que nous serions en somme favorables à ce que la loi s'applique à toutes les personnes, même celles qui sont prévues comme étant exemptées de la détention d'un permis. Nous sommes même prêts à augmenter le nombre de personnes qui pourraient ne pas avoir de permis.

Ce faisant, cette suggestion amènerait, à notre avis, peut-être un changement dans le titre de la loi, où on pourrait l'appeler Loi sur le recouvrement des créances.

Je ne sais pas s'il y a à ce moment, M. le Président, des commentaires par rapport à cette suggestion.

M. TETLEY: Evidemment, M. le vice-président exécutif de la Chambre de commerce, nous avons étudié ce problème ou cette suggestion à fond et dans d'autres juridictions aussi. C'est peut-être une question de marcher avant de courir. D'imposer au grand public aujourd'hui, à tout le monde, toutes ces règles est peut-être difficile. Mais d'autre part, évidemment, sur le plan public et moral, j'approuve tout ce que vous dites. Mais n'oubliez pas que, dans vos mémoires que nous recevons tous les ans, vous insistez sur le fait que l'Etat s'ingère dans votre vie privée et surtout la vie privée des commerçants et des citoyens.

Ici, vous demandez l'ingérence complète et directe dans toute collection de dettes et c'est un problème, c'est un dilemme.

M. LETOURNEAU: Si vous me permettez, M. le Président, l'aspect qui nous frappe là-

dedans, c'est que la loi a pour objectif d'établir une espèce de code d'éthique, de défendre certaines pratiques dans la perception ou le recouvrement des créances.

Cependant, on exempte de l'application de la loi certaines personnes: les avocats, les syndics, etc. Ce qui veut dire que ces pratiques qu'on veut défendre — l'intimidation, etc. — ou certaines pratiques bien spécifiques mentionnées dans la loi, ces autres personnes pourront continuer de les faire ou les faire peut-être par exception, mais pourront les faire.

M. TETLEY: En tout cas, dans votre prochain mémoire au conseil des ministres, n'oubliez pas de dire que nous avons assisté, ici, à plus d'ingérence de l'Etat et du ministre des Institutions financières, parce qu'à chaque année, au conseil des ministres, vous arrivez avec vos platitudes.

Donc, à la page 1 de votre mémoire, vous insistez sur l'ingérence totale et complète...

M. CHAMPAGNE M. le ministre, je pense que vous nous poussez un peu en disant que nous écrirons cela dans notre prochain mémoire. On va vous prendre comme rédacteur. Sur le plan pratique, la position qu'on mentionne est la suivante: comme législateurs, vous faites des règles de procédure, vous donnez des règles de jeu à un nombre de personnes qui, actuellement sont les agents de recouvrement. Vous dites: Un tel, un tel ne sont pas soumis à cela. Nous, nous disons: Si vous voulez être logiques avec la base de la loi, si vous demandez à des gens de faire des choses, plus particulièrement à ceux qui font un acte commercial, demandez aux autres de faire la même chose. Autrement, ne les mettez pas dedans.

Nous, c'est une question de règle générale. Vous faites une loi qui dit : Le recouvrement se fera de telle façon. Nous disons: Très bien, appliquez-le maintenant à d'autres.

Pourquoi, par exemple, un syndic, un exécuteur testamentaire auraient le droit de faire des pressions indues sur la personne en ne dépassant pas les limites du code criminel et qu'un agent de recouvrement, lui, n'aurait pas le droit, parce qu'il fait cela comme travail coutumier?

Nous, on dit: La base de la loi demande de faire des recouvrements de créances, très bien; à ce moment-là, exigez le permis pour les gens qui sont agents de recouvrement et les autres personnes, qu'elles soient soumises aux règles générales de la loi, comme cela peut se faire facilement. Après cela, quand vous nous dites que c'est de l'ingérence de l'Etat dans la vie privée, ce n'est pas cela qu'on dit. On dit: Si l'Etat fait une loi et des règles générales, qu'elle les mette pour tout le monde. C'est ce qu'on dit, ce n'est pas ce que vous dites, l'ingérence indue; ce n'est pas ce sens-là, parce qu'on va répéter cela encore.

M. LESSARD: Je souhaiterais que la Cham- bre de commerce puisse présenter complètement son mémoire, que nous allons annoter. Par la suite, le ministre pourra poser des questions et nous aussi, nous pourrons en poser. Autrement, cela va devenir un dialogue entre le ministre et les représentants de la Chambre de commerce. Quant à nous, je pense qu'il serait normal de faire exactement comme le Barreau, c'est-à-dire de soumettre votre mémoire; nous allons l'annoter et, par la suite, nous poserons des questions que nous jugerons nécessaires.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je crois, en effet, que ce serait un ordre plus facile à suivre et j'inviterais M. Létourneau à continuer la présentation. Les membres qui auraient des questions à poser en cours de route voudront bien prendre des notes et, selon l'ordre établi, j'accorderai le droit de parole à tous les membres de la commission qui voudront bien poser des questions ou émettre des commentaires.

M. LETOURNEAU: Merci, M. le Président. Nous allons procéder selon votre bon désir. Ce n'était pas notre intention de créer ici des précédents dangereux. Nous avons déjà, devant d'autres commissions, eu l'occasion de dialoguer de cette façon. Je ne croyais pas qu'il y avait là précédent. A tout événement, nous procéderons selon votre bon plaisir. Recommandation de principe.

La Chambre recommande donc au législateur de réviser le projet de loi 26 afin d'assujettir toute personne, sans exception, aux règles de pratique et aux sanctions élaborées particulièrement aux sections VII et IX du projet. A notre avis, ce devrait être là l'objet même de la loi.

Une fois l'objet de la loi ainsi défini, il nous apparaît plus logique alors d'arrêter un cadre particulier pour les personnes agissant pour autrui moyennant rémunération qui, lui, pourrait prévoir des exceptions quant aux personnes assujetties à l'obtention du permis. Recommandations générales.

De 1960 à 1972, le volume de crédit à la consommation du Canada s'est accru de plus de 250 p.c. C'est là une démonstration que le consommateur canadien et québécois a accepté d'emblée l'usage du crédit dans sa vie quotidienne et dans l'administration du budget familial.

Si le crédit est accepté de façon générale, il n'en demeure pas moins que les circonstances qui donnent lieu à l'activité de recouvrement des créances découlent de la réticence d'une minorité de débiteurs à respecter leurs engagements. Cette réticence peut avoir plusieurs causes. La Chambre croit qu'une des principales causes est le peu de préparation, pour ne pas dire l'inexistence de cette préparation, qu'offre le système d'éducation du Québec à la vie

économique du citoyen. Fait partie de la vie économique l'utilisation judicieuse du crédit.

A maintes reprises et depuis plusieurs années, la Chambre s'est élevée contre les déficiences marquantes dans l'élaboration de programmes scolaires de cours en économique et dans la préparation "académique" des enseignants.

Sous cet aspect, la Chambre peut donner l'impression de prêcher dans le désert — j'espère que non — mais elle trouve néanmoins absurde que l'Etat s'empresse d'imposer toutes sortes de fardeaux et de contraintes à ceux qui traitent avec le consommateur alors qu'il démontre si peu de volonté à exercer ses propres responsabilités à éduquer le consommateur. Le coût de ces fardeaux et contraintes doit être acquitté et c'est presque toujours ce même consommateur qui fait les frais des bonnes intentions de l'Etat à son endroit.

De plus, nous recommandons au législateur de rechercher une plus grande harmonie dans le contenu du présent projet de loi et celui adopté par la Législature des autres provinces sans quoi les sociétés nationales se verront bientôt submergées par une foule de lois disparates avec toute la confusion qu'une telle situation comporte.

Considérations particulières. Les considérations particulières qui suivent s'inspirent de nos recommandations de principe et générales élaborées ci-devant.

L'article 2 a trait aux personnes qui ne seraient pas soumises à cette loi. Il y a lieu de modifier cet article, à notre avis, de façon qu'il définisse les personnes qui sont exemptées de l'obtention du permis d'agent de recouvrement ou de représentant tout en étant soumis à la loi.

Nous croyons que les personnes physiques ou morales additionnelles devraient être exemptées de l'obtention du permis prévu à l'article 8. Ces personnes seraient : 1— les personnes qui ne recouvrent que des comptes dus par des commerçants; 2— une personne possédant un permis de courtier immobilier ou un des vendeurs agissant pour un détenteur de permis; 3— une personne possédant un permis de courtier en valeurs mobilières ou son employé; 4— une compagnie de crédit qui recouvre ses propres créances ou une créance dont elle est cessionnaire; 5— une personne qui sollicite le recouvrement d'un compte de façon isolée et qui n'en fait pas un commerce comme agent de recouvrement.

Plusieurs de ces exceptions se retrouvent dans les lois sur les agents de recouvrement adoptées par d'autres provinces canadiennes.

Nous soulignons à nouveau au législateur qu'encore une fois, à l'article 5, il suspend les recours extraordinaires prévus aux articles 834 à 850 du code de procédure civile lorsqu'il s'agit de l'application de ses propres lois. Rappelons spécifiquement l'alinéa 3 de l'article 844 du code de procédure civile prévoyant des sanctions: "lorsqu'un fonctionnaire public ou une personne occupant une charge dans une corporation, un groupement visé par l'article 60, un corps public ou un tribunal soumis au pouvoir de surveillance, sous le contrôle de la Cour supérieure, omet, néglige ou refuse d'accomplir un devoir rattaché à sa charge ou un acte auquel la loi l'oblige". Cette disposition du code de procédure civile pourrait être avantageuse à certaines occasions pour forcer certains fonctionnaires à agir dans le cadre de la loi.

L'article lOf) confère au directeur le pouvoir d'examiner les connaissances des requérants de permis. Comme il ne s'agit pas d'une profession, mais bien d'une activité commerciale, comme l'ont d'ailleurs confirmé tantôt les représentants du Barreau, nous nous interrogeons sur l'opportunité d'une telle mesure. Après tout, l'épicier détenteur d'un permis de la Société des alcools n'a pas à prouver de connaissance et il en va de même pour le président des magasins à succursales multiples. Pourquoi faudrait-il faire une démonstration détaillée de ses connaissances pour devenir agent de recouvrement alors qu'on ne requiert encore aucune démonstration de connaissance spécifique pour légiférer à l'Assemblée nationale?

N'allez pas croire, M. le Président, que nous voulons dire par là qu'il devrait y en avoir une pour siéger à l'Assemblée nationale. C'est tout simplement que...

M. LESSARD: II appartient à la population de choisir ses représentants.

M. BONNIER: C'est bien sûr.

M. LESSARD: Je pense que c'est la reconnaissance de la démocratie.

M. BONNIER: C'est une qualification.

M. SAMSON: A moins que vous ne vouliez faire élire les présidents des bureaux de crédit. Il y en a qui seraient difficiles à élire, vous savez.

M. BONNIER: C'est une remarque méchante.

M. TETLEY: Est-ce que vous étiez élu, M. Létourneau, comme directeur général, vice-président exécutif?

M. LETOURNEAU: M. le Président, je suis jugé par mes supérieurs annuellement...

M. LESSARD: Qui sont élus à tous les quatre ans par...

M. LETOURNEAU: ... qui sont des élus. M. LESSARD: ... leurs commettants.

M. LETOURNEAU: II n'y avait rien de malicieux dans cette remarque.

C'était tout simplement pour présenter un exemple, peut-être plus frappant, peut-être trop frappant. Je m'en excuse, si c'est la perception qu'on a eu.

M. HARVEY (Charlesbourg): Si on admet le principe que tout exemple est boiteux...

M. LETOURNEAU: II est bien garni. L'alinéa g (iii) du même article 10 devrait être modifié pour tenir compte de ces sociétés ou corporations où seulement quelques officiers s'occupent de recouvrement des créances.

De plus, l'ensemble de cet article pourrait, sur interprétation sommaire, laisser croire que le législateur veut introduire des critères quant à l'origine nationale de la propriété de l'entreprise. Ayant pris connaissance d'autres déclarations du législateur, nous ne croyons pas qu'il s'agisse là d'une interprétation valable. Cet article devrait donc bénéficier d'une meilleure explicitation.

Notre examen de l'article nous laisse un peu... M. Chartrand a peut-être des commentaires sur ce point de vue, M. le Président.

M. CHARTRAND: M. le Président, voici le point sur lequel on voudrait avoir une explication ou une clarification. L'article 10 g (iii) dit: "Etablir à la satisfaction du directeur que tous les associés, administrateurs ou officiers ainsi que toute personne autre qu'un représentant qui agissent au Québec pour la corporation ou société, possèdent les qualités prescrites." Est-ce l'idée du législateur de dire que les associés, administrateurs ou officiers qui sont à l'extérieur du Québec, ou à l'extérieur du Canada, mais qui n'agissent pas pour le compte de la corporation au Québec, sont effectivement exclus de la loi? On aurait justement besoin que M. le ministre explicite ce point.

M. TETLEY: On m'a imposé le silence.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): En effet, afin de maintenir le protocole que nous avons établi tantôt, j'ai demandé au ministre de prendre note et de répondre...

M. LETOURNEAU: Alors, nous y reviendrons donc plus tard, si vous le permettez.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Et vous aurez le privilège, si le ministre ou un membre de la commission ne revenait pas sur des questions que vous voulez approfondir, d'y revenir vous-mêmes.

M. LETOURNEAU: Merci, M. le Président. A l'article 11, nous soulignons qu'il existe au Canada une association de bureaux de crédit, qui s'appelle effectivement l'Association des bureaux de crédit du Canada — dont fait partie d'ailleurs l'Association des bureaux de crédit du Québec, Inc. — association qui fournit de l'information aux différentes corporations qui offrent du crédit à des consommateurs. Ces mêmes corporations agissent aussi à titre d'agent de recouvrement pour plusieurs entreprises au Québec.

Cette obligation de changer le nom de bureau de crédit en y ajoutant l'autre nom, créerait certainement des problèmes au niveau de l'Association canadienne. Cette association met à la disposition de ses membres les ressources des autres bureaux situés à travers tout le pays et tout le continent même. Nous ne croyons pas que c'est le changement de nom qui permettra d'améliorer la protection du consommateur, mais bien plus l'obligation, comme le projet de loi le mentionne dans plusieurs dispositions, imposée aux agents de recouvrement afin qu'ils se comportent conformément aux exigences de ces amendements à la loi.

La Chambre de commerce provinciale avait déjà mentionné au gouvernement... Je m'excuse, M. le Président, peut-être que M. Goudreau aurait sur ce paragraphe quelques commentaires. Est-ce que vous nous permettez d'ajouter de notre part des commentaires au fur et à mesure...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Oui, au fur et à mesure, et les membres de la commission pourront être mieux éclairés ainsi leurs questions seront plus conformes par la suite.

M. LETOURNEAU: Je demande à M. Goudreau s'il a des commentaires à ce moment-ci.

M. GOUDREAU: Tel qu'il a déjà été mentionné, l'Association des bureaux de crédit du Québec, Ltée sera affiliée à l'Association des bureaux de crédit du Canada, Inc. De ce fait, nous avons certaines obligations dans les points d'affiliation aux différents bureaux de crédit qui vont de Halifax à Vancouver.

Le fait de changer de nom serait une contrainte assez dispendieuse étant donné que la plupart des bureaux sont incorporés limités et, de ce fait, nous sommes reconnus — la majorité de nous — comme faisant et de la perception et surtout des investigations de crédit. C'est le point que je voulais apporter et j'apprécierais, lorsque le rapport sera complété, s'il y a des questions, qu'on me les dirige.

M. LETOURNEAU: Alors, nous poursuivons, M. le Président. Paragraphe 5.8): La Chambre provinciale avait déjà mentionné au gouvernement, lors de la présentation de son mémoire sur l'érosion du pouvoir législatif, au printemps 1974, qu'il était impérieux que l'Assemblée nationale maintienne dans les lois les principales dispositions qu'elle veut y inclure et ne délègue pas le pouvoir de légiférer par règlement au lieutenant-gouverneur en conseil.

Dans cette optique, nous rappelons au législateur que les dispositions pour l'obtention d'un permis, définies à l'article 13, devraient être spécifiquement inscrites dans le projet de loi et ne laisser aucune porte ouverte à l'adoption de règlements pour prévoir les conditions.

A cet effet, M. le Président, il y a déjà à l'article 10 des conditions de prévues et nous nous posons des questions à savoir quelles sont les intentions du législateur concernant la réglementation qui pourrait être afférente à l'article 13. Qu'est-ce, en supplément, à part peut-être les honoraires qui pourraient venir et peut-être les permis?

Puisque le dialogue ne nous est pas permis à ce moment, nous continuons, M. le Président. Nous retenons cette question pour le moment opportun. Nous constatons, à l'article 45, que le législateur accorde un droit d'appel sur les décisions du directeur. Mais encore faut-il que celles-ci soient rendues pour que le requérant d'un permis puisse avoir des recours. Dans le cas où le législateur ne voudrait pas modifier cet article, nous croyons qu'il serait opportun d'ajouter une autre disposition prévoyant un délai maximum accordé au directeur pour rendre sa décision.

Je me réfère encore à l'article 13, M. le Président, où le directeur doit rendre une décision sur une demande de permis mais il pourrait arriver qu'il ne la rende pas. Alors, il n'y a pas à ce moment-là de recours parce qu'il n'y a pas de décision. Et des personnes pourraient être lésées dans ce domaine. Nous rappelons au législateur qu'il a déjà reconnu l'obligation de rendre des décisions dans des délais maximums par des services gouvernementaux et plus particulièrement lors de l'adoption du projet de loi 34, Loi du développement de la région de la baie James, sanctionnée le 14 juillet 1971. En effet, le législateur mentionne à l'article 41 de cette loi, deuxième paragraphe, que — et je cite: "la concession peut être valablement accordée si la société n'a pas fait parvenir son avis dans les deux mois de la demande d'avis".

En adoptant cet amendement, le législateur demanderait ainsi à ses fonctionnaires une certaine diligence dans les décisions qu'ils doivent prendre.

A l'article 14, la Chambre s'interroge sur les intentions réelles du législateur lorsqu'il veut limiter les transports de permis et nous croyons que ces intentions devraient être inscrites dans la loi. Le législateur prévoit à cet article que les droits conférés au permis ne peuvent être transportés à une autre personne, sauf dans le cas de décès ou de faillite du détenteur du permis. Nous ajoutons qu'il serait opportun de prévoir que d'autres détenteurs de permis puissent vendre dans les cas où ils sont obligés de cesser leurs opérations pour maladie ou pour d'autres raisons importantes. Comme, par exemple, quelqu'un qui arrive à l'âge de la retraite, 60 ans, et qui désire se départir de ses affaires; il pourrait vendre peut-être à un autre détenteur.

A ce sujet, M. le Président, je crois que M. Guy Poirier aurait quelques commentaires à ajouter.

M. POIRIER: M. le Président, nous avons étudié l'article 14, nous avons tenté de comprendre les intentions du législateur, ce que nous n'avons pas réussi à faire. Alors, nous demandons au ministre de nous expliquer pourquoi il veut limiter cet échange ou cette vente de permis. C'est à peu près tout ce que je veux ajouter sur cela.

M. LETOURNEAU: Merci, M. Poirier. M. le Président, l'article 20 demande la production de rapports détaillés au directeur. A notre avis, le cautionnement exigé aux articles 10a) et 50a) satisfait la garantie normale que peut exiger le gouvernement d'un détenteur de permis. De plus, il serait peut-être plus opportun d'exiger un état financier certifié du compte en fiducie plutôt que l'état financier de toutes les opérations du détenteur d'un permis.

Nous recommandons, de plus, que le montant du cautionnement soit fonction du chiffre d'affaires. M. Jean Biron, ici, pourrait peut-être commenter brièvement ce paragraphe.

M. BIRON: M. le Président, permettez-moi de lire l'article 20 du projet de loi 26, "Un détenteur de permis doit, à la manière et aux périodes prescrites, fournir au directeur un rapport détaillé de ses affaires accompagné d'états financiers certifiés — je souligne "certifiés" — par une personne ayant droit d'exercer comme comptable agréé."

Premièrement, l'exigence d'un état financier certifié peut représenter, pour le petit commerçant, une charge onéreuse telle qu'aujourd'hui le vrai bilan certifié, ou le CA certifiant l'authenticité de tous les postes comptables, n'est pas d'usage courant pour le petit commerçant et je dirais aussi pour le moyen commerçant. En plus, nous croyons que le projet de loi 26 comporte déjà suffisamment de mesures de protection qu'un état financier n'a pas, à notre opinion, sa raison d'être.

Nous croyons que la pensée du législateur est, à prime abord, de protéger les fonds perçus par l'agent de recouvrement, c'est pourquoi nos articles 10a) et 50a) exigent un cautionnement pour l'obtention d'un permis. L'article 18 exige la tenue de registres, comptes et dossiers; l'article 19, la prescription des conditions de dépôt et de retrait des fonds dans un compte en fiducie, etc. Ceci, en plus des sanctions prévues pour toute infraction aux articles 37 et 38, devrait représenter suffisamment de mesures de protection pour éliminer l'obligation d'états financiers de la part des agents de recouvrement.

M. LETOURNEAU: Merci, M. Biron. M. le

Président, par l'article 23, le législateur permet que le directeur, ou une personne qu'il autorise par écrit, puisse saisir les livres et autres documents des détenteurs d'un permis d'agent de recouvrement. Il est sans doute souhaitable que le législateur accorde cette autorisation au directeur afin qu'il puisse vraiment faire respecter les dispositions de la loi. Cependant, nous croyons nécessaire de demander qu'un délai soit prévu pour la remise de ces documents à ceux qui en auront été ainsi départis afin de ne pas les pénaliser injustement.

En effet, le fait que cet individu ou cette corporation ne possède plus les livres et documents nécessaires à ses opérations pourrait l'obliger à suspendre indéfiniment ses activités. Nous croyons, d'une part, qu'il s'agit là d'une action punitive sans procès et le projet de loi ne prévoit aucun recours devant les tribunaux. D'autre part, nous croyons qu'il serait plus raisonnable de faire une photocopie des documents, d'exiger l'autorisation d'un juge, possiblement a posteriori mais en-deça de 72 heures de la sasie, et de permettre un recours devant les tribunaux pour la levée de la saisie.

Avec l'article 26, nous croyons que le législateur protège vraiment les intérêts des consommateurs québécois en empêchant ceux qui doivent recouvrer des créances d'utiliser des moyens malhonnêtes et des pressions indues sur les débiteurs. Cependant, il paraît important de laisser le pouvoir à ceux qui doivent percevoir les dus pour des créanciers d'informer les débiteurs qu'ils sont susceptibles d'être poursuivis devant les tribunaux ordinaires pour la perception d'une créance et que des inscriptions défavorables peuvent être faites si les paiements ne sont pas effectués tel que requis. En fait, informer les consommateurs des suites logiques découlant du non-paiement d'une créance est-il vraiment fautif et doit-il entrafner une interdiction de la part du législateur? De fait, comment procède le ministère du Revenu dans la perception de ses créances? Je ne crois pas que ce soit autrement.

A notre avis, c'est dans une perspective qui favorise...

M. TETLEY: Est-ce qu'on a procédé contre vous, M. Létourneau?

M. LETOURNEAU: Pas à ma connaissance encore, M. le Président.

M. TETLEY: C'est pourquoi vous posez la question. M. le Président, je retire mon interruption.

M. LETOURNEAU: A notre avis, c'est dans une perspective qui favorise le recouvrement des créances que le législateur doit considérer la divulgation au débiteur ou l'expression de ces informations qui sont vraies.

Nous ajoutons que le législateur, en empêchant les agents de recouvrement de procéder en vertu de la Loi des petites créances, contrairement à ce qui existe dans d'autres provinces, a créé une situation très difficile pour la perception des comptes qui sont d'une valeur inférieure à $300. Sur ce point, M. le Président, M. Lilian Beaulieu aurait une remarque à ajouter concernant les paragraphes 5.12 à 5.12.3

M. BEAULIEU: M. le Président, le paragraphe en question concerne l'article 26. Quoique nous soyons d'accord sur l'ensemble de cet article, nous croyons que le paragraphe e) auquel vous avez fait allusion tout à l'heure n'est pas tellement clair. Si réellement nous voulons être honnêtes avec les consommateurs, nous ne voyons pas pourquoi nous n'aurions pas le droit de dire ce qui est réellement vrai, ce que nous avons le droit de faire. Ce n'est pas tellement clair. Il ne faut pas laisser croire au débiteur qu'il peut être passible de poursuites judiciaires par l'entremise d'un avocat, mais il reste que, dans la pratique, nous le faisons si le compte n'est pas payé ou si le consommateur néglige ou refuse de le payer. C'est une conséquence logique d'un non-paiement de compte. Pourquoi ne pas faire un peu l'éducation du consommateur? Sans recourir aux menaces ou à l'intimidation, ne doit-on pas lui dire: Si vous continuez à refuser de payer tel compte que vous devez, notre avocat se chargera de prendre des procédures judiciaires contre vous et vous savez ce que cela entraîne, à part les frais. C'est dans ce sens qu'on se demande pourquoi le législateur ne permettrait pas que nous fassions un peu l'éducation du client ou du public dans ce sens. Dans le même article, vous dites également qu'on n'a pas le droit de dire qu'une mauvaise information pourrait être ajoutée à son dossier de crédit par l'entremise du Bureau de crédit auquel sont affiliés tous les marchands. Encore là, c'est une politique qui se fait régulièrement et on attaque, à ce moment-là, le rouage normal d'un bureau de crédit qui recueille les informations des marchands. Si on le fait, pourquoi ne pas le dire? Nos propos vont dans ce sens et nous croyons que c'est au nom du principe d'honnêteté envers nos clients qu'on devrait le dire, lorsque nous sommes en droit de le faire.

M. LETOURNEAU: Merci, M. Beaulieu. M. le Président, article 5.13 de notre mémoire. La Chambre s'élève contre la discrimination du législateur envers les corporations aux articles 37 et 38. Il faut rappeler au législateur que beaucoup de corporations sont de petites et de moyennes corporations — en fait, la très vaste majorité — ne regroupant que quelques personnes afin de les protéger, comme le prévoit la Loi des compagnies du Québec. Pourquoi les amendes prévues pour la contravention aux dispositions de cette loi et aux dispositions de beaucoup d'autres lois sont-elles différentes parce qu'il s'agit d'un individu ou d'une corporation? Nous suggérons au législateur de prévoir dans ce

projet de loi que l'amende peut aller jusqu'à un maximum de $25,000, laissant ainsi au juge une latitude nécessaire pour bien administrer la justice et éliminer toute discrimination. En fait, il pourrait arriver, M. le Président, que pour certains individus le maximum de $2,000 ne soit pas suffisamment élevé et que, pour certaines petites corporations, le minimum de $500 pour certaines offenses soit trop élevé. C'est pourquoi nous croyons que d'une façon générale il devrait y avoir simplement un maximum et peut-être un minimum très bas, de telle sorte que le juge puisse, selon le cas, appliquer la sanction appropriée.

A l'article 40, le législateur accorde au directeur du service qui administrera la loi des agents de recouvrement le droit de poursuivre en vertu de la présente loi. Nous croyons que ce pouvoir devrait être réservé au procureur général qui, lui, peut évaluer objectivement les motifs de la poursuite. En d'autres mots, il nous apparaît difficile pour le directeur qui est déjà impliqué dans l'administration de la loi de prendre des poursuites contre ceux qui enfreignent la loi. Je pense que nous concordons sur ce point avec les remarques précédentes qui ont été faites par les représentants du Barreau à la suite d'une question d'un membre de la commission.

Encore une fois, la Chambre de commerce s'élève contre les dispositions incluses dans ce projet de loi, à l'article 45, qui empêchent un appel devant la cour d'Appel du Québec ou devant la cour Suprême. Depuis plusieurs années, le législateur tend à ramener le droit d'appel à la cour Provinciale. Nous lui rappelons que l'exercice du droit d'appel est fondamental si on veut permettre une justice complète aux citoyens. En effet, il est connu que la cour d'Appel et la cour Suprême peuvent donner des directions importantes à l'interprétation des lois, et ce au bénéfice de toute la société.

Nous rappelons au législateur que nous nous opposons à ce que les requérants pour les permis d'agent de recouvrement subissent des examens qui soient déterminés par règlement, comme prévu à l'article 50 a).

En ce qui a trait au cautionnement, dont les modalités seront prévues par règlement, nous recommandons au législateur la formule employée en Ontario, où le cautionnement est d'un minimum de $5,000 pour des créances perçues de $50,000, et de $25,000 pour des créances perçues de $250,000 ou plus. Il nous paraît que cette formule protège vraiment les intérêts de ceux qui font affaires avec les agents de recouvrement et n'exige plus du directeur du service qu'il requière de grandes précisions sur la situation financière de la corporation ou de l'individu. Cependant, nous croyons que le compte en fiducie devrait être vérifié par un comptable agréé et le rapport remis annuellement à ce service.

Le législateur devrait être plus précis dans les dispositions prévues à l'article 50 f). En effet, lorsqu'il prévoit déterminer par règlement les occupations que peut exercer un agent de recouvrement, il laisse présager certaines incompatibilités de fonctions. Plusieurs sociétés, agents de recouvrement, sont aussi agents de documentation sur la situation financière des consommateurs. Ces deux fonctions sont intimement liées dans ce genre d'activités commerciales. Il y a lieu de préciser ici l'intention du législateur.

M. le Président, M. Jean-Claude Chartrand aurait un commentaire à ajouter à ce paragraphe.

M. CHARTRAND: M. le Président, dans cet article 50 f), qui dit déterminer les occupations ou professions que peut exercer une personne qui détient un permis, nous trouvons que l'article, en soi, est beaucoup trop vague et qu'on devrait quand même apporter certaines précisions. Et si on veut inclure l'article 50 f ) et également l'article 50 j), on sait que depuis plusieurs années le législateur ainsi que les différents groupements ont voulu prendre des mesures, justement pour éviter l'endettement du consommateur, et nous pensons que toutes les mesures qui ont été prises, en général, ont été bonnes.

On a accusé les compagnies, les commerçants, les compagnies prêteuses de l'industrie ou, en fait, ceux qui sont mêlés à l'industrie du crédit à la consommation de surcharger le consommateur.

M. LETOURNEAU: Merci, M. Chartrand.

M. le Président, article 5.18 de notre mémoire. L'alinéa h) de l'article 50 traite d'information, de documents et l'alinéa j) traite de la publicité. Auparavant, l'article 11 traitait du nom de la corporation détentrice d'un permis. Qu'il nous soit permis de rappeler au législateur que ces dispositions, d'apparence anodine, peuvent créer des contraintes démesurées par rapport à l'objectif de la loi. Je pense que nous avons déjà eu des commentaires sur ce point.

Il existe une association canadienne de bureaux de crédit dont les membres exercent les fonctions d'information et de recouvrement. L'expression "bureau de crédit" est acceptée à travers le Canada et les Etats-Unis. Il y a lieu à la fois d'assouplir et de préciser la portée de ces dispositions.

Le législateur, en voulant prévoir l'établissement d'un tarif d'honoraires exigibles, à l'article 50 k), aura de grandes difficultés à le déterminer pour ce genre d'opérations commerciales. En effet, le calcul du taux dans les contrats avec les détenteurs de créances est basé sur plusieurs critères tels que la nature du dossier, la mobilité du débiteur, la localisation, l'âge du compte et plusieurs autres facteurs.

D'autre part, nous rappelons que plusieurs créanciers organisent souvent leurs ententes avec les agents de recouvrement en incluant des comptes plus difficiles avec des comptes plus

faciles à percevoir, afin d'en arriver à un taux qui leur convient de part et d'autre. Une intrusion dans ce domaine créera encore une fois beaucoup de difficultés aux parties. Nous soulignons de plus qu'il s'agit presque exclusivement de corporations commerciales versus des corporations de recouvrement et que celles-ci sont bien au fait de ce genre d'affaires.

M. le Président, je pense que M. le ministre remarquera que nous sommes fidèles avec nous-mêmes et que nous revenons en disant que le législateur doit laisser de plus en plus libre cours aux parties.

Sur ce point, M. Roland Gingras aurait des commentaires à faire.

M. GINGRAS: M. le Président, permettez-nous de nous poser certainement des questions concernant l'utilité de légiférer relativement aux tarifs d'honosaires exigés par une agence de recouvrement. Nous préférerions de beaucoup qu'on laisse à l'entreprise privée le champ de la concurrence et nous avons l'impression que la libre concurrence est bénéfique aux commerçants comme aux consommateurs.

D'abord, qui fixera les tarifs d'honoraires? Nous croyons que, si les tarifs sont fixés trop bas, il y aura encore plus d'abus qu'il y en a aujourd'hui par le fait que les agences de recouvrement feront des pressions excessives pour récupérer les dus ou, encore, ne travailleront que sur les cas faciles en délaissant les autres qui demandent un peu plus d'efforts. Ceci occasionnera une perte de plus au commerçants et, effectivement, une augmentation de ses coûts d'exploitation.

Nos tarifs varient d'un client à l'autre tout en tenant compte de la concurrence. Les raisons de cette variation sont que nous scrutons bien notre client avant d'accepter ses comptes. Nous considérons la nature de son commerce, ses procédures de vente, son organisation interne de service de crédit et la qualité de ses comptes.

Tous ces facteurs sont pris en considération et jugés à leur mérite. Alors, pourquoi priver un commerçant de services en fixant des tarifs? En somme, nous concluons que, si la procédure d'émission d'un permis est adéquate, il est devenu superflu de légiférer sur les tarifs. Merci.

M. LETOURNEAU: Merci, M. Gingras. M. le Président, à l'article 50 n), le législateur prévoit, par réglementation, un contrôle des rapports ou des états financiers des personnes qui détiennent des permis. Nous soulignons au législateur que nous sommes d'avis qu'un cautionnement assez élevé permettrait d'éliminer les exigences nombreuses en ce qui a trait au rapport financier personnel des individus.

En conclusion, la Chambre de commerce de la province de Québec croit que les amendements qu'elle recommande au projet de loi 26 sur les agents de recouvrement s'inscrivent dans le contexte de l'égalité pour tous devant la loi et surtout dans un souci de protéger efficace- ment le consommateur sans pour autant imposer un fardeau impossible et indu à ceux qui sont visés par la loi.

M. le Président, MM. les membres de la commission, nous vous remercions de nous avoir écoutés avec autant de patience, compte tenu de la formule qui vous a été imposée sur la façon de nous écouter. Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous passerons maintenant à la deuxième phase de la présentation du mémoire de la Chambre de commerce de la province de Québec, qui sera justement le dialogue tant souhaité. M. le ministre.

M. TETLEY: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord vous remercier, messieurs, je trouve que votre mémoire est précieux et très important. Je me demande si je peux commenter toutes vos suggestions; je crois que certaines sont très bonnes et méritent des amendements à la loi.

Je voudrais faire quelques commentaires et laisser aux autres députés l'occasion de vous poser des questions. A la page 2, article 5.1 de votre mémoire, vous voulez élargir le nombre de personnes couvertes par la loi. L'Ontario ne l'a pas fait. Je ne connais pas d'autres juridictions qui l'ont fait. D'autre part, je suis très, très sympathique à l'idée; mais je préfère marcher avant de courir. C'est exactement ce que tout mémoire avait dit au sujet de la protection du consommateur. C'est notre expérience.

Nous avons, par exemple, légiféré au sujet des permis, mais cela nous a pris des centaines et des milliers et des centaines de milliers de dollars de publicité et d'éducation du public.

Ici, c'est le même problème; éduquer les commerçants, ne pas tout simplement éduquer Eaton et Paquet mais tous les créanciers. C'est un travail énorme que vous imposez, n'oubliez pas.

D'autre part, comme je vous ai dit, vous voulez plus de réglementation de l'Etat dans le commerce. Moi-même j'ai une certaine réticence mais je note votre demande. Moi, je préfère procéder par étapes.

A la page 3, à l'article de votre mémoire numéro (5.3), vous parlez de règlements. Encore une fois, je crois qu'il faut marcher avant de courir. Au sujet de la Loi de la protection du consommateur, la fameuse loi 45, nous avons émis des règlements, après adoption, au Conseil de la protection du consommateur et après qu'il ait été déposé ici à la commission parlementaire. Je suis prêt, après deux ou trois ans, à mettre ces règlements dans la loi, et vous allez trouver, après la refonte de la loi 45, ces règlements qui ont passé le test d'une période expérimentale de plusieurs années, dans une loi amendée, évidemment.

Je préfère procéder par une loi qu'on adopte, une nouvelle loi. Certaines de vos propositions n'existent pas ailleurs au monde. Je préfère

passer par une loi qui donne les grandes lignes des règlements qui subissent l'expérience des années avant de les mettre dans la loi.

N'oubliez pas que le code civil, qui est très cher, qui a été adopté en 1866, était une refonte de deux ans ou trois ans d'expérience. Il n'y avait pas de neuf, il n'y avait rien de neuf dans le code civil dans le temps. Ce n'était pas une loi nouvelle. C'était tout simplement le code Napoléon avec son expérience.

Ici, nous passons à l'attaque. C'est complètement neuf dans certains cas. C'est pourquoi je préfère procéder par ce moyen.

D'autre part, je connais, autant que vous, le problème du législateur qui légifère par règlement. Je ne l'aime pas du tout, mais il y a le pour et le contre. C'est pourquoi je préfère de grands principes dans la loi et des règlements flexibles que je pourrai changer. N'oubliez pas que vous êtes venus aux règlements de la loi 45 ainsi que vos membres. Les compagnies de finance, les compagnies de fiducie, l'ACEF, l'APA sont venues nous voir pour la préparation de ces règlements. Après cela, j'ai passé les règlements au Conseil de la protection du consommateur et à la commission parlementaire.

Donc, je favorise la préparation de règlements et de lois démocratiquement, mais je veux un peu de flexibilité. Autrement, je le regrette, je devrai venir tous les deux jours devant le Parlement.

Je connais une autre loi — non pas de mon ministère — qui a été amendée une semaine après. C'était dans l'autre Parlement. C'est vers 1972. La loi a été amendée parce qu'il y avait un grand trou ou une lacune énorme. C'était très difficile.

C'est difficile d'adopter une loi ici. Aujourd'hui, on ne peut pas, le Parlement ne siège pas. Donc, il faut de la flexibilité pour votre commerce et aussi pour les droits des citoyens. C'est pourquoi je préfère procéder par ce moyen. C'est ma réponse en tout cas.

M. LETOURNEAU: Est-ce qu'il est important, M. le Président, d'engager le dialogue à ce moment-ci...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Certainement.

M. LETOURNEAU: ... ou si nous devons attendre à un autre jour?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Non, à cette période-ci, je l'ai bien indiqué tantôt, nous avons la période du dialogue.

M. LETOURNEAU: Mes collègues, M. Morin et M. Lachance, je crois, sur le paragraphe (5.2) auraient peut-être des commentaires à ajouter aux propos de M. le ministre.

M. MORIN: M. le Président, je voudrais d'abord commenter le paragraphe (5.1) que le ministre a soulevé. Le problème qui se pose — et M. le ministre le dit bien — il ne s'agit pas de faire l'éducation de Eaton ou de Paquet, mais si...

M. TETLEY: Si ces gens ont besoin d'éducation au sujet du bill 45...

M. MORIN (Pierre): Fort probablement. M. TETLEY: Très probablement.

M. MORIN (Pierre): Le point important, c'est que, si le créancier peut lui-même percevoir ses propres créances sans respecter un code d'éthique qui est imposé aux tierces parties, avec qui il va transiger, à ce moment, pourquoi requérir les soins ou les besoins, ou les services d'une tierce partie? Si le créancier, si le commerçant peut, lui, se permettre d'appeler à frais virés, d'appeler après 8 heures, de faire de l'intimidation, de parler, en fait, tout ce qui est proscrit dans la section des pratiques interdites, si lui peut se permettre de le faire, pourquoi à ce moment, irait-il rechercher les services d'un agent de recouvrement qui, lui, n'a pas ces moyens?

M. TETLEY: Vous avez très bien présenté le problème. Je ne dis pas que je suis contre votre proposition.

M. LETOURNEAU: M. le Président, mon collègue, Me Champagne, voudrait parler sur les réponses de M. le ministre, à notre paragraphe 5.2.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, M. le ministre a mentionné tantôt qu'évidemment, l'expérimentation des lois pendant une période d'année ou des règlements qui seront inclus éventuellement dans les lois, est une meilleure approche à la loi actuelle. Il mentionne comme exemple une loi qui a été amendée une semaine après, ce qui prouve que ce n'est pas dur d'amender des lois. Donc, une semaine après, le projet de loi était amendé par une autre loi devant l'Assemblée nationale. Je prends l'exemple du ministre.

M. TETLEY: Vous n'étiez pas présent.

M. CHAMPAGNE: J'ai pris l'exemple du ministre pour montrer la rapidité. C'est plus vite que le conseil des ministres. Je me suis seulement permis de mentionner au ministre son exemple pour le lui retourner dans le même sens qu'on le mentionnait.

M. TETLEY: Une fois dans cinq ans et demi...

M. CHAMPAGNE: M. le ministre, les précé-

dents créent toujours des habitudes. L'exemple que je voulais apporter est le suivant: Nous avons demandé d'exclure des personnes, et je vais traiter du point no 1 : Les personnes qui ne recouvrent des comptes que par des commerçants. Le législateur, lorsqu'il étudie une loi, comme une commission parlementaire...

M. TETLEY: M. Champagne, je vous ai écouté, j'ai écouté les autres et je ne suis pas contre. Il ne faut pas me convaincre.

M. CHAMPAGNE: On avait l'impression que si.

M. TETLEY: Mais il y a un dilemme. Vous avez présenté le problème. Je le comprends très bien.

M. CHAMPAGNE: Vous l'avez bien saisi.

M. TETLEY: Je l'ai soulevé il y a un an lors de la préparation de la loi.

M. CHAMPAGNE: Si on vous comprend bien, M. le ministre, sans vous interpréter, ce qu'on n'oserait jamais, c'est que vous mentionnez que vous êtes d'accord de mettre des exceptions dans la loi dans un délai raisonnable. Nous allons un peu plus loin; on dit: Pourquoi ne pas le faire immédiatement? Spécialement, si vous me permettez, M. le ministre, de vous convaincre davantage, et surtout les membres de la commission, que, lorsque ce sont des commerçants qui opèrent entre eux, entre deux commerçants, nous disons qu'il n'y a pas de raison de mettre des règles de jeu lorsque ce sont deux commerçants, il y a actuellement des maisons spécialisées qui font de la perception de comptes seulement contre d'autres commerçants. Alors, ces maisons ont été exemptées par la Loi du consommateur dans vos règlements. Je cite, je m'excuse, c'est l'article 218 de vos règlements de la protection du consommateur qui exempte certaines corporations qui traitent avec d'autres corporations. Nous vous demandons, puisque vous l'avez déjà admis dans les règlements, pourquoi ne pas le dire dans une loi? C'est aussi simple que cela, c'est ce qu'on vous demande, M. le ministre.

M. TETLEY: D'accord. Je passe vite à la page 4, paragraphe 5.7.1...

M. LETOURNEAU: Est-ce que vous me permettriez, M. le Président, de demander à M. Lachance, sur le paragraphe 5.3, d'ajouter un commentaire?

M. TETLEY: Mais j'ai commenté un des articles sur cette page.

M. LACHANCE: M. le Président, c'est une toute petite information. Je voulais porter à la connaissance de la commission qu'au moins dans deux autres provinces, soit la Saskatchewan et l'Ontario, les compagnies de crédit sont aussi exemptes de cette loi, au même titre que les banques, les compagnies de fiducie, les caisses populaires, alors qu'ici, on ne prévoit pas, dans cette loi, de les exclure, alors qu'ils font du recouvrement.

M. TETLEY: Vous voulez l'exclusion ou non?

M. LACHANCE: Non, je parle de compagnies de financement, de compagnies de prêts personnels qui recouvrent leurs propres créances au même titre que les banques ou les caisses populaires ou les compagnies de fiducie dans certains cas.

M. TETLEY: Vous devez parler à M. Létour-neau, ou bien vous ne demanderez aucune...

M. CHAMPAGNE: ... permis, M. le Président. Je pense qu'il faut faire une nuance. C'est l'exclusion du permis qu'on demande et non pas l'application de la loi. Je pense qu'il y a une grande nuance à apporter lorsqu'on est dans les exceptions.

C'est pour le permis que l'on dit que ces gens-là ne devraient pas en avoir et l'incitation de M. Lachance se rapporte aux courtiers en valeurs mobilières, de même qu'aux personnes qui sollicitent dans des cas isolés, qui sont déjà inclus dans les lois des autres provinces. Alors, l'inspiration des autres provinces devrait aller jusque-là pour peut-être ajouter ces articles d'exception.

M. TETLEY: Mais c'est exactement une des raisons pour lesquelles nous avons exclu certaines personnes, y compris les avocats et autres, parce qu'ils sont régis par une autre loi. Mais passons à votre paragraphe 5.7.1; je trouve que votre observation est très importante, surtout qu'il faut garder les droits acquis et peut-être, pour l'avenir, qu'il faut soumettre toute nouvelle institution ou entreprise à la loi. Mais n'oubliez pas — c'est une réponse que je vais donner à un autre de vos articles — qu'il y a certains bureaux qui sont des bureaux d'information et bureaux de perception. Et ils me téléphonent, parce que je dois de l'argent, et posent des questions comme bureaux d'information et vice versa. Et ils disent: Nous sommes ici tout simplement pour une question de crédit. Donc, ils posent toutes les questions interdites en vertu d'une loi et en vertu de l'article d'une autre loi. C'est pourquoi nous voulons avertir le public du vrai titre et de la raison d'être de la compagnie. S'il y a une erreur dans les autres provinces, si on peut laisser n'importe quel nom, peut-être que c'est aux autres provinces d'amender leur loi, pas à nous. Peut-être que c'est à la Chambre de Commerce d'aller dans les autres provinces, la Chambre de commerce du Canada, et d'insister

— comme vous avez insisté ici afin que les lois soient uniformes — pour que la loi soit uniforme à celle du Québec.

M. LETOURNEAU: M. le ministre, peut-être que M. Chartrand a une suggestion concrète à faire sur ce point.

M. CHARTRAND: Ce que vous dites, M. le ministre, évidemment, est très vrai. Par contre, il faudrait quand même se rappeler que les commerçants ou les institutions prêteuses, quand on a parlé tout à l'heure de surchargement ou de l'endettement du consommateur, doivent être en mesure d'aller recueillir ou d'obtenir des informations qui leur permettent de faire une évaluation qui soit judicieuse du risque que le consommateur comporte.

Evidemment, tout en respectant le fait que l'agent d'information fasse à ce moment-là un travail d'agent d'information et que l'agent de perception fasse à ce moment-là un travail d'agent de perception comme tel, de recouvrement de créances, il reste que l'information qui sert à l'un et à l'autre est tellement nécessaire aux commerçants ou aux institutions prêteuses pour, encore une fois, leur permettre de faire une évaluation judicieuse du cas en question ou du consommateur en question.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, je voudrais demander au ministre si vraiment, dans son idée, il veut mentionner que l'agence d'information, d'une part, et l'agence de recouvrement doivent être dissociées. Est-ce que c'est ce qu'il veut dire?

M. TETLEY: Mais je vous pose la question: Est-ce parce que vous voulez laisser les mêmes gens agir sous un seul nom?

M. CHARTRAND: Là, on voudrait peut-être, M. le ministre, justement garder le nom du Bureau de crédit, en incluant, à ce moment-là, division de la perception, dans le nom comme tel.

M. LETOURNEAU: C'est ça, c'est le changement de raison sociale qui inquiète, M. le ministre, ces personnes. Peut-être que la loi pourrait créer l'obligation d'ajouter, en dessous de la raison sociale, la nature de l'opération de la compagnie, par l'expression "agence de recouvrement". Alors, chaque fois que la raison sociale de la société paraît, elle est obligée d'ajouter la nature de son opération décrite par l'expression "agence de recouvrement". A ce moment-là, il n'y aurait pas obligation de modifier la raison sociale qui, elle, entraîne des frais; il faut aller dans tous les bureaux d'enregistrement et faire un nombre considérable de démarches qui sont longues et coûteuses et qui pourraient être évitées si on ne faisait qu'ajouter obligatoirement la description de l'opération que fait la compagnie.

M. TETLEY: Oui.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Oui, Me Champagne.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, je pense qu'il est important d'ajouter que les deux opérations d'information et de recouvrement sont intimement liées. D'une part, vous avez la perception du compte pour les gens; vous avez l'information, d'autre part, qui sert à donner du crédit. Si, au Québec, vous faites la distinction entre les deux, vous êtes la seule province à le faire dans toute l'Amérique du Nord. Je suis bien d'accord qu'on doit être positif et les premiers, mais les bureaux de crédit, les grosses corporations — on pourrait mentionner plusieurs noms — fonctionnent à travers les Etats-Unis et le Canada avec les deux activités, soit l'information, d'une part, et la perception d'autre part. Aller jusqu'à diviser les deux, ce serait encore une fois, créer une situation particulière au Québec.

M. TETLEY: Mais vous dites que vous pouvez mentionner des noms de compagnies. Mentionnez-les, M. Champagne.

M. CHAMPAGNE: Vous avez des maisons connues au Québec, M. le Président. Le bureau de crédit, aussi, dont M. Chartrand est l'un des vice-présidents, il travaille à travers le Canada et les Etats-Unis. Vous avez Dun & Bradstreet, vous avez un tas d'autres compagnies comme ça qui font ces deux opérations ensemble. Vous avez, d'autre part, les agents de recouvrement qui vont vous présenter un mémoire après et qui font seulement du recouvrement, mais les grosses maisons spécialisées dans le domaine font les deux genres d'activités, c'est bien évident. C'est ça?

M. LACHANCE: Oui. M. le ministre, ce que je veux ajouter aussi, c'est qu'il se peut fort bien qu'en même temps une agence de recouvrement ou un bureau de crédit ait un compte à percevoir d'un débiteur et, tout à la fois, reçoive d'une autre maison une demande de renseignement. Ils doivent se renseigner. Je ne vous dis pas qu'en même temps on ne prend pas des renseignements pour recouvrer sa créance, mais les deux opérations peuvent être menées la même journée.

M. TETLEY: II y a un problème... M. LACHANCE: Oui.

M. TETLEY: ... pour le public, quand même. Vous voulez protéger plutôt le commerçant, les grosses compagnies, que le public. C'est la conclusion que je tire.

M. LACHANCE: On a souvent des accusations de superrendettement des consommateurs

et je pense que cet outil est l'outil par excellence pour empêcher un endettement qui est au-delà des forces financières du consommateur.

M. CHARTRAND: Surtout si on accepte le fait, justement, que le bureau de crédit, normalement, est un dépositaire d'information; c'est un centre de références où la majorité des commerçants — en fait, on veut que tous les commerçants fassent affaires avec le bureau de crédit — vont aller chercher ou recueillir les informatio'ns qui vont leur permettre, encore une fois, de faire une évaluation. Cela, on le fait aussi bien dans l'intérêt du commerçant que dans l'intérêt du consommateur. Si cela n'existait pas, si le bureau de crédit n'agissait pas comme centre de références, étant donné que les informations seraient dispersées peut-être un peu partout, le commerçant, lui, ou l'institution prêteuse ne pourrait pas recueillir l'information et ne serait pas en mesure de faire une évaluation juste. Ce qui pourrait justement créer, à la longue, un surchargement ou un endettement du consommateur.

M. TETLEY: Je n'ai pas compris du tout. M. LETOURNEAU: M. le Président...

M. TETLEY: J'ai compris, mais je ne partage pas nécessairement votre opinion. Toutes les informations ne sont pas dispersées, elles sont toutes à Atlanta, Georgia, ou aux Etats-Unis. Ce n'est pas un problème.

M. CHARTRAND: M. le ministre, en fait, je voudrais vous faire remarquer que l'information des bureaux de crédit est gardée dans les bureaux de crédit mêmes, dans la localité où ils se trouvent. Il n'y a aucune information gardée en dehors de la province, ni surtout en dehors du pays. Cela, c'est sûr.

M. TETLEY: II n'y a pas d'ordinateur? M. CHARTRAND: Sûrement pas. M. TETLEY: Pas...

M. CHARTRAND: II n'y a aucun bureau de crédit...

M. TETLEY: Je parle d'un bureau d'information.

M. CHARTRAND: Aussi bien pour l'agent d'information que pour l'agent de perception, il n'y a aucune information, premièrement, qui est sur ordinateur, présentement, et il n'y a aucune information en dehors du bureau dans lequel l'information est tenue ou est gardée. Aucune information n'est transportée à l'extérieur. D'ailleurs, aucun bureau ou agent d'information travaillant présentement au Canada n'est présentement relié à un système d'ordinateur.

M. TETLEY: Bon.

M. LETOURNEAU: M. le Président, si vous me permettez de résumer, la disponibilité de cette information, nous le croyons, dans la majorité des cas, permet à des marchands d'éviter à des consommateurs de s'endetter bien au-delà de leurs moyens. Sachant qu'ils le sont déjà, ils pourront être beaucoup plus prudents dans le crédit qu'ils doivent leur accorder ou ne pas leur en accorder.

M. TETLEY: Nous sommes pour les agents d'information, nous avons même légiféré sur ça, dans notre Loi de la protection du consommateur, mais qu'une personne agisse en même temps en vertu des deux lois, avec des droits différents, c'est une autre question. En tout cas, nous voyons, tous les deux, le dilemme et le problème.

M. CHAMPAGNE: M. le ministre, on ne voit pas le dilemme de la même façon que vous, c'est important de bien le dire. Nous disons que les deux opérations sont concurrentes et utiles pour les procédés, disons, de crédit et de perception des comptes. Les deux sont utiles. Ce qu'on veut mentionner, c'est d'ajouter, en-dessous des noms, de la raison sociale; division perception, division information. C'est ce qu'on a dit tantôt. On n'a jamais dit qu'on était dans un dilemme; on vous a dit clairement que c'était important que ce soit fait ensemble. C'est la position qu'on a prise.

M. TETLEY: Mais si la maison qui perçoit une dette a les deux droits en vertu de la loi et qu'elle décide de trouver des informations comme bureau ou agent d'information, donc, elle agit jusqu'au moment de la perception sur l'autre moyen et vous avez détourné la loi.

M. LETOURNEAU: II pourra peut-être y avoir harmonisation de ces lois, M. le Président, mais, cependant, je tiens à signaler que la position que nous prenons nous apparaît très compatible avec la protection du consommateur. C'est certainement notre avis.

Les gens qui vont transgresser les lois, il y en aura toujours et il ne faudrait pas qu'une loi impose des obligations à l'ensemble ou la majorité des gens qui font des affaires d'une façon raisonnable, dans le but de prendre des gens qui, de toute façon, l'encre n'étant pas sèche sur un projet de loi, ont déjà trouvé des moyens de la contourner. Il y en a dans tous les secteurs d'activité. Ce n'est pas parce qu'on va adopter une loi qu'on va empêcher certaines gens de faire de l'intimidation parce que les lois sont là et ils vont continuer d'en faire de toute façon. Il s'agit de prendre des moyens plus efficaces.

M. TETLEY: A la page 6, paragraphe 5.12, c'est un droit demandé par le Barreau, un droit déjà existant, du Barreau. Je note tout simplement cela. Le Barreau est venu ce matin demander d'exiger le droit d'être toujours le seul à pouvoir faire des menaces ou intenter des procédures.

M. LETOURNEAU: Je regrette, M. le Président, je n'ai pas saisi à quel paragraphe M. le ministre fait allusion. A 5.12? Tout le secteur 5.12.

M. TETLEY: Oui. Tout simplement le bout où un avocat a le droit de dire: Je vais prendre des procédures au nom de mon client. Vous avez demandé ce droit pour les agents de perception.

M. LETOURNEAU: Ce que nous...

M. TETLEY: Vous ne l'avez pas demandé? Vous avez demandé le droit de donner cette information au débiteur.

M. LETOURNEAU: De donner cet avis qu'il est possible que cela arrive parce que...

M. TETLEY: Je vous dis tout simplement, M. Létourneau, que le Barreau, ce matin, est encore venu exiger ce droit.

M. LETOURNEAU: Je crois, M. le Président, si j'ai bien compris l'intention des membres du Barreau, qu'ils ont reconnu que c'était un avertissement qui pourrait être donné par un agent de recouvrement, non membre du Barreau, que c'est possible que de telles poursuites puissent être faites par un avocat. Je pense que c'est tout simplement dire la vérité au client.

M. TETLEY: Je vais vérifier en tout cas. Si le Barreau accepte un avertissement, que vous ayez le droit de dire que nos avocats vont prendre des actions...

M. LETOURNEAU: C'est cela qui a été convenu.

M. BEAULIEU: C'est permis actuellement, il y a plusieurs avocats ici qui pourront le comprendre, on n'a pas le droit de dire: Nous allons prendre action contre vous. Seul le Barreau se réserve ce droit, mais nous pouvons dire: Nous allons confier votre dossier à un avocat ou à un procureur qui se chargera de prendre les procédures judiciaires. C'est la façon de procéder actuellement. Le Barreau l'accepte.

M. TETLEY: Sans doute vous avez raison, mais je me demande si la Loi du Barreau est à cet effet. Je crois que vous pouvez dire: Je vais donner le dossier à mon avocat.

M. LETOURNEAU: Justement, c'est ce que semble vouloir défendre la loi, M. le Président.

M. TETLEY: Vous ne pouvez pas dire: Je vais le conférer à mon avocat qui va prendre action contre vous.

M. LETOURNEAU: C'est parce que c'est la suite logique de la non-réceptivité du débiteur au message que lui envoie le percepteur. S'il refuse de payer sa dette, c'est la suite logique. Nous nous demandons pourquoi il serait défendu d'aviser, de dire la vérité, de dire les faits, de mettre le débiteur devant les conséquences de sa non-action.

M. TETLEY: En tout cas, je veux tout simplement soulever le problème que le Barreau, j'en suis presque certain, ne veut pas votre amendement.

M. LETOURNEAU: Nous comprenons le souci du législateur. Nous comprenons que le législateur pense à l'intimidation qui est faite auprès de certaines personnes par certains types de percepteurs avec cet argument. Nous comprenons cela. Cependant, il faut aussi, comme je l'ai mentionné tantôt, reconnaître que la grande majorité des affaires se font d'une façon raisonnable et que cela, c'est un argument, c'est une information qui dit à certaines personnes qui pourraient, disons, ne pas penser que la démarche irait aussi loin: Bien voici, si vous ne répondez pas après le troisième appel, par exemple, si vous ne le faites pas, nous devrons faire cette démarche.

Cela, c'est logique. Il s'agit d'informer une personne, à un moment donné, qu'il faut qu'elle acquitte sa dette.

UNE VOIX: D'accord.

M. CROTEAU: Je crois, M. le Président, qu'il y a deux choix dans cette affaire à savoir, la possibilité de recours à l'avocat et la possibilité d'informer le débiteur que son mauvais dossier de crédit, s'il y a lieu, sera inclus au dossier du bureau de crédit.

Pour le débiteur, à mon sens, c'est plus important pour lui d'avoir un bon dossier de crédit, que son compte soit remis à un avocat. Parce qu'à un moment donné, s'il demande un renseignement, n'importe où ailleurs, dans le dossier, tout est compris; tandis que si la créance est remise à un avocat en particulier, cela reste au bureau de l'avocat. Si cela va au bureau de crédit, c'est l'ensemble qui sort. Alors, cela nuit automatiquement à l'individu, sous bien des rapports, soit pour l'achat d'une automobile, d'une maison, de n'importe quoi, parce que tout est centralisé, c'est le tout de l'affaire qui est là, à ce moment-là.

M. LETOURNEAU: Encore une fois, M. le Président, nous reconnaissons le souci du législateur et, peut-être, là-dedans seulement le ton sur lequel cet avis est donné peut constituer soit un avis, soit une menace. On comprend cette situation. Seulement, il ne faudrait pas que,

pour essayer, encore une fois, de prendre des gens qui, de toute façon, vont continuer de fonctionner en dehors de la loi, même des lois déjà existantes... en plus de ce projet... on crée un handicap et une situation difficile et des moyens à des gens qui travaillent raisonnablement.

M. TETLEY: Les agents de recouvrement ne sont pas handicapés. Ils ont un tarif trois ou quatre fois plus élevé que celui des avocats.

M. LACHANCE: Ils sont handicapés par rapport à la concurrence qui pourrait exister avec les avocats, M. le ministre, si je peux me permettre.

M. TETLEY: Ils ne sont pas membres du Barreau, apparemment.

M. LACHANCE: Ah non, absolument pas. M. CHAMPAGNE: Mais, M. le ministre...

M. TETLEY: Ils n'ont pas à passer les examens du Barreau qui sont de plus en plus difficiles.

Mais moi, je ne suis pas ici pour défendre le Barreau, ni la Chambre de commerce, ni les agents de recouvrement. Je suis ici pour défendre le public.

M. CHAMPAGNE: Ce n'est pas du public, cela, M. le ministre? Ils ne sont pas du public.

M. TETLEY: Un instant, Me Champagne. C'est tout simplement demain qu'un groupe, qui représente les consommateurs, va répondre, et, devant un groupe comme vous, il faut que je parle non pas tout simplement... Quelqu'un doit parler pour les non-commerçants...

M. CHAMPAGNE: ... nous autres.

M. TETLEY: Lorsque les non-commerçants arriveront, je vais parler pour vous.

M. CHAMPAGNE: Vous faites cela habituellement, M. le ministre?

M. TETLEY: ... mais, à l'heure actuelle, j'ai le droit de vous poser des questions et de soulever un point. Les avocats, ce matin, je suis certain, n'aiment pas votre amendement.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, je voudrais simplement demander ceci au ministre; comme avocat, je n'ai pas autant d'expérience que lui dans la perception de comptes, mais je voudrais lui demander si les tarifs ne sont pas un minimum et si on ne peut pas faire n'importe quelle entente, pour autant que c'est signé par les parties et qu'elles sont avisées.

M. TETLEY: Très difficile. J'ai fait de la perception et des réclamations pour un bureau d'avocats pendant deux ans à plein temps, sauf pour les causes d'automobiles, et c'est très difficile. Durant cette période-là, avec une centaine de clients, nous avons toujours imposé le tarif qui était de 3 p.c. après $300, malgré qu'il y avait des gens de perception qui chargeaient 33 p.c, 50 p.c...

M. CHAMPAGNE: Mais est-ce que ce ne serait pas la réponse que les avocats ne donnaient peut-être pas le service qu'ils auraient dû donner et que les maisons de recouvrement le donnaient, à ce moment-là? Cela doit faire longtemps que vous avez fait cela, vous?

M. TETLEY: Oui, c'est vrai.

M. CHAMPAGNE: Vous êtes ministre quand même depuis cinq ans, alors...

M. TETLEY: Je n'ai pas fait cela depuis longtemps, c'est vrai. Mais je sais que les avocats ont fait cela pour garder les clients. Il y a 20 ans que j'ai fait cela. En tout cas, c'est un problème et je crois que j'ai le droit de le soulever.

M.CHAMPAGNE M. le Président, M. le ministre donne l'impression qu'on lui enlève des droits alors qu'il les a tous, les droits. Deuxièmement, M. le ministre, quand on a mentionné qu'on était contre les pressions indues, c'était clair qu'on était contre; mais nous sommes pour que la vérité soit dite, par exemple. C'est la différence. Que le consommateur sache bien où il s'en va quand il ne paie pas.

M. TETLEY: Oui, mais il y a un règlement à cet effet-là. En tout cas, à la page 6, article 5.14, c'est vrai que le droit est accordé au directeur du service, mais toutes les procédures du gouvernement sont prises par le procureur général. Ce n'est pas moi. Je n'intente jamais une poursuite.

M. CHAMPAGNE: Mais pourquoi l'inscrire dans la loi, M. le ministre?

M. TETLEY: Parce que c'est pris au nom du directeur, mais par le procureur général.

M. CHAMPAGNE: Auparavant, est-ce que ce n'était pas toujours le procureur général qu'on mentionnait, jamais on ne mentionnait un directeur de service?

M. TETLEY: Je crois que, dans la législation la plus récente, on le mentionne dans d'autres lois, je vais vérifier; mais, dans tous les cas, c'est le procureur général qui prend l'action. Je n'ai pas d'avocat dans mon ministère. Ils sont tous employés fonctionnaires du ministre de la Justice; ils font rapport au ministre, reçoivent leurs instructions et passent leur procédure au ministre avant de les prendre.

M. LETOURNEAU: M. le Président, M. le ministre a bien dit: Dans la législation récente. C'est ce que nous avons remarqué aussi. Est-ce qu'on veut créer une situation nouvelle, même si on a dit que ce n'était pas dans les...

M. TETLEY: C'est très peu important, parce que toujours, au Québec, il n'y a qu'un seul avocat, c'est l'honorable ministre de la Justice et ses avocats adjoints.

M. LETOURNEAU: On a vu dans d'autres lois, dans la législation du travail par exemple, que le pouvoir était donné au niveau du ministère du Travail et non au procureur général. Il y avait un conflit parce que l'un ne prenait pas action, l'autre ne le faisait pas. C'est ce genre de confusion qui est introduite par le fait qu'on donne le pouvoir au directeur de poursuivre qui nous inquiète.

M. TETLEY: En tout cas, nous allons...

M. CHAMPAGNE: Le projet de loi 24 déposé devant l'Assemblée nationale mentionnait que c'était le commissaire-enquêteur qui intentait une action et, maintenant, ce sera le procureur général, parce que le procureur général ne pouvait pas agir dans ces cas.

Donc, cela veut dire que, lorsqu'on mentionnait une personne dans la loi, c'est donc elle qui entreprenait les procédures, c'est elle qui demandait l'autorisation d'entreprendre des procédures. Dans ce cas, c'était le commissaire-enquêteur. Nous, ce qu'on dit, c'est de ne jamais laisser un fonctionnaire qui administre demander l'autorisation d'entreprendre des procédures, mais de laisser au procureur général le choix de décider s'il fait les procédures après que le dossier lui est soumis. Il y a une grande différence entre les deux.

M. TETLEY: Je vais m'informer. Je vous remercie de votre intervention.

Je demande pardon à mes collègues, aux députés des deux côtés de la table. Je n'ai pas voulu prendre autant de temps. Je termine par 5.19, à la page 8.

Peut-être que vous êtes contre un tarif maximum. Vous pouvez quand même en bas du maximum faire la concurrence. Le raisonnement pour lequel vous étiez contre un tarif était qu'un tarif veut dire qu'il n'y a pas de concurrence, mais avec un maximum il y a quand même de la concurrence. Vous pouvez imposer un...

M. GINGRAS: M. le Président, M. le ministre, je me pose la question, encore une fois, à savoir s'il y a une raison bien précise à vouloir déterminer un tarif d'honoraires par le fait qu'il y a toujours la compétition qui existe entre les différentes agences de recouvrement. Je crois que la compétition établit un tarif juste et raisonnable. Si on parle de tarifs, je crois que si on donne un meilleur service, évidemment on doit en retirer les profits, les bénéfices. Si la compétition existe entre des maisons d'affaires, comme on doit concurrencer également les bureaux d'avocats, qui sont réellement nos compétiteurs jusqu'à un certain point, je crois qu'au niveau des tarifs, il y a un barème qui s'est établi, il y a une moyenne qui s'est établie et je crois que les maisons sérieuses doivent se conformer à ce barème.

M. TETLEY: Croyez-vous que les avocats devraient avoir un tarif maximum?

M. GINGRAS: Pourquoi?

M. CHARTRAND: Je pense, M. le ministre, qu'il est extrêmement difficile de fixer un tarif, que ce soit aux avocats, que ce soit aux agents de recouvrement, à cause justement de l'essence ou de la nature de la créance en question. En fait, ce que cela peut amener, le danger que cela peut avoir si vous fixez un plafonnement, c'est que soit les avocats ou les agents de recouvrement, étant donné une certaine créance ou une autre, vont refuser de l'accepter. Ils vont refuser justement d'exercer le recouvrement de la créance, étant donné qu'ils savent déjà à l'avance que ce ne serait possiblement pas payant.

On parle de transfert de créances où deux ou trois autres agents de recouvrement ont déjà essayé de recouvrer la créance en question; ensuite on se tourne vers un quatrième agent de recouvrement.

C'est sûr que s'il y a un plafonnement dans le pourcentage qui est dû à l'agent de recouvrement, cela peut inciter l'agent de recouvrement à refuser ce compte. Cela n'améliore rien. Il faut mentionner que les bureaux de crédit, dans la grande majorité des cas, font du recouvrement pour des corporations et non pas pour des individus, pour des compagnies et non pas pour des individus. Ces compagnies sont déjà très au courant quand même de la situation comme telle.

M. TETLEY: Quel est le pourcentage ordinaire?

M. CHARTRAND: Dépendant encore une fois de la nature de la créance. Cela peut aller de 12 p.c. jusqu'à 33 1/3 p.c. ou 35 p.c. Cela peut même aller jusqu'à 40 p.c. dans certains cas. Evidemment, il faut regarder la créance qui nous est présentée. Selon l'âge et la difficulté qu'il y a déjà eu dans le passé, essayer de recouvrer cette créance, cela va évidemment affecter aussi bien de 10 p.c. à 30 p.c. ou 35 p.c. le pourcentage du recouvrement en cause. Alors c'est pour cela que je dis qu'il est bien difficile, à mon sens, de fixer un pourcentage dans le recouvrement de créances.

M. LETOURNEAU: M. le Président, je peux indiquer une opinion? Si on mentionnait un

maximum, peut-être que cela inciterait plusieurs à s'en rapprocher le plus possible. De toute façon, ces ententes sont faites entre des commerces, entre des commerçants, entre des gens en affaires.

M. TETLEY: S'il y a la vraie concurrence dont vous parlez là, il n'y a aucune chance que les gens soient incités à imposer le maximum.

M. LETOURNEAU: Non, peut-être pas, cela dépendra de la situation de concurrence qui existe à l'endroit où la négociation se passe. De toute façon, cette négociation, je le signale encore une fois, se passe presque exclusivement entre entreprises, corporations, personnes en affaires. Ce n'est pas le genre de négociations qui se passe avec le consommateur.

M. TETLEY: Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Etant donné que nous avons beaucoup de questions à poser, je pense qu'il serait peut-être bon de suspendre jusqu'à 3 heures. On est déjà rendu à 1 heure. De toute façon, il faut revenir demain quand même, alors je suggérerais 3 heures, une heure normale."

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors la commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 58)

Reprise de la séance à 15 h 10

M. CORNELLIER (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

La commission reprend ses travaux et la parole est à l'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais d'abord dire que ça me surpend un peu de voir que les personnes qui défendent si éloquem-ment les intérêts de l'organisme, la Chambre de commerce, aient amené aujourd'hui, contrairement aux habitudes, des personnes qui défendent précisément le sujet qui nous touche. Autrement dit, votre organisme semble endosser les domaines du Bureau de crédit comme tel, alors que, je pense, ils auraient pu eux-mêmes présenter leur propre mémoire pour défendre leurs intérêts, et nous, avoir les interprétations autonomes de la Chambre de commerce comme telle.

Tantôt j'avais l'impression d'assister à une partie de hockey où chacun se passait la rondelle pour savoir lequel peut le mieux compter dans chacun des articles qui les concernent. J'avais même l'impression d'avoir la description d'une partie de hockey: A toi, Jean-Maurice! pour tel et tel sujet. Je me demandais jusqu'à quel point il n'aurait pas été préférable que vous défendiez vous-même le point de vue de la Chambre de commerce comme telle parce que pour nous, quel est le vrai visage de la Chambre de commerce à ce moment-là? Est-ce celui qui défend des organismes généraux ou est-ce particulièrement cette classe, ce groupe de la société qui a ses propres intérêts à défendre et qui est très habile pour le faire et qui a les moyens de le faire?

Cela me surpend et me déçoit. Cependant, dans le mémoire que vous présentez, il y a des choses intéressantes. Je pense qu'il y a des remarques très pertinentes dont le ministre pourra certainement tenir compte. Dans votre esprit, quelles sont les vraies responsabilités d'un bureau de crédit? Est-ce que le travail d'agent de recouvrement et le travail d'agent d'information, ce n'est pas deux choses complètement séparées? Est-ce que vous avez des statistiques dans ce domaine, autant dans le domaine de la perception que dans le domaine de l'information? Autrement dit, vous semblez épouser leur cause et vous êtes leurs meilleurs défenseurs — d'ailleurs, je vous dirai cela — mais il y a des articles où vous m'avez convaincu du contraire, et je vais vous donner l'occasion de vous expliquer là-dessus. Avez-vous des statistiques qui justifieraient vos prises de position?

Entre autres, est-ce que vous auriez un pourcentage de créanciers qui ne respectent pas, dans la moyenne, leurs engagements? Est-ce que vous avez fait des statistiques là-dessus afin de savoir si, parmi les gens qui empruntent à crédit, après un certain temps, on s'aperçoit que

tel pourcentage de gens ne respectent pas leurs engagements? Ce qui justifierait des mesures qu'il faut prendre d'une façon régulière et même d'une façon quasi automatique parce qu'on sait que, sur tant de personnes qui demandent du crédit, il y a un pourcentage X qui vont se révéler des personnes qui ne respecteront pas leurs engagements.

Avez-vous aussi des pourcentages concernant ce qui est dû aux agents? Quelle est la proportion des revenus, au bureau de crédit, provenant des informations et ceux venant des réclamations? Est-ce que vous avez des statistiques là-dessus? Ce sont les deux premières questions que je voulais vous poser, au départ.

M. LETOURNEAU: M. le Président, en réponse aux observations et questions de l'honorable député de Lafontaine, je voudrais tout d'abord rétablir certains faits concernant ce que représente ici la Chambre de commerce. Notre mémoire, nous l'avons préparé en nous informant partout, parmi nos membres, chez ceux qui sont dans le domaine et chez ceux qui sont des clients ou des débiteurs des créanciers qui font affaires avec des agents de recouvrement. Nous avons préparé notre mémoire nous-mêmes.

Je suis d'accord avec le député de Lafontaine que c'est une situation qui n'est pas tout à fait courante, que nous soyons ici accompagnés d'organismes directement touchés par la loi que nous débattons. Cette situation s'est produite de la façon suivante: après avoir préparé notre mémoire, ces personnes qui sont directement concernées étant au fait que nous préparions un mémoire, nous ayant demandé d'en prendre connaissance, se sont montrées d'accord sur ce que nous disions, en général, ou intéressées par ce que nous allions dire, suffisamment d'accord, en tout cas, et intéressées pour nous accompagner, ce à quoi nous n'avions pas d'objection parce que ce sont des gens qui son intimement mêlés aux activités dont il est question dans cette loi.

Ces gens-là constituent aussi une partie de nos membres; c'est la raison pour laquelle ces personnes nous accompagnent.

Leur connaissance profonde du domaine nous paraissait être d'un secours lorsque nous émettions nos principes et que des questions pouvaient être posées — comme c'est le cas présentement, de membres de la commission — sur des points techniques particuliers lesquels ne nous sont pas familiers parce que ce n'est pas notre activité courante de nous occuper de ce secteur en particulier. Donc, c'est le mémoire de la Chambre de commerce, adopté par le conseil d'administration de la Chambre de commerce, auquel des personnes intéressées sont venues, soit pour le supporter, soit pour être témoins observateurs ou répondre à des questions spécifiques sur des points techniques de présentation qui ne nous étaient pas familiers. Cela ne signifie pas nécessairement que les personnes qui sont ici supportent à 100 p.c. ce que nous allons dire, cela ne signifie pas qu'elles n'ont rien à dire d'elles-mêmes, mais cela veut probablement signifier que ce que nous avons dit leur convient en général.

Nos principes de base demeurent, nous représentons l'intérêt général de nos membres compatible avec l'intérêt des consommateurs et l'ensemble de la population. Ce sont les critères que nous tentons de respecter au mieux de notre compétence.

Concernant la question, à savoir si les agences de recouvrement et les agences d'information sont des choses compatibles, nous en sommes venus à la conclusion que la réponse à cette question est oui. Non seulement compatible, mais désirable. Nous avons, je pense, longuement expliqué, dans un débat avec le ministre responsable, les raisons pour lesquelles nous croyons que les deux activités sont compatibles et désirables. Nous avons expliqué qu'à notre avis elles sont compatibles et désirables parce qu'elles fournissent une occasion pour les gens qui opèrent raisonnablement, d'établir une certaine protection du consommateur en empêchant des abus d'endettement. Parce que des gens qui font le crédit et qui sont bien informés sur la situation de crédit de ceux avec qui ils ont affaire peuvent prévenir des endettements exagérés et peuvent retenir de tels endettements.

Concernant les statistiques, à savoir, quel est le pourcentage des créanciers qui ne respectent pas leurs engagements, c'est la question que le député de Lafontaine a posée. M. le Président, malheureusement, à la Chambre de commerce, nous n'avons pas de réponse à cette question. Peut-être, parmi les personnes qui nous accompagnent y en a-t-il qui pourraient donner des précisions à ce sujet. On m'informe que M. Goudreau serait en mesure d'informer les membres de la commission sur ce point.

M. GOUDREAU: M. le Président, pour répondre à la question de M. Morin, de M. Léger, pardon.

M. TETLEY: Vous ne lisez pas le Jour!

M. GOUDREAU: Pardon. Si je me réfère particulièrement au bureau de crédit de Granby que je possède et aux actions que j'ai également dans Saint-Hyacinthe et Sorel, et en me référant à M. Drainville ici, on peut dire que les revenus qu'on retire de l'investigation représentent, du moins l'année dernière, environ 70 p.c. de nos revenus et les revenus que nous avons retiré pour la commission sur perception, environ 30 p.c. de nos revenus, si cela peut répondre à vos questions.

M. LEGER: C'est un renseignement intéressant, mais la question était: Avez-vous des études sur la quantité ou le pourcentage de personnes qui se servent du crédit, qui ne

respectent pas leurs engagements? Y a-t-il des statistiques qui disent combien sur 100 personnes — qui achètent à crédit et qui devront échelonner les paiements ou qui ne paient pas comptant — par la suite, se feront poursuivre parce qu'elles ne respectent pas leur engagement? Est-ce 25 p.c. 20 p.c. 30 p.c?

M. GOUDREAU: Les comptes que nous recevons à percevoir, ce sont tous de mauvais comptes, bien entendu, qui ont déjà été travaillés par la compagnie qui nous les remets. Probablement qu'une compagnie qui est dans le détail, qui elle-même fait de la perception, pourrait vous répondre, à savoir, si elle a 100 comptes à percevoir, elle a un certain pourcentage...

M. CROTEAU: Environ, disons, sur 100 clients, 90 p.c. vont payer au premier compte, 10 p.c. vont prendre quelques mois. Lorsque c'est rendu au bureau de crédit, à peu près 2 p.c. au maximum.

M. LEGER: Cela revient à dire à peu près 20 p.c. des gens qui achètent à crédit. 2 p.c. des 10 p.c...

M. CROTEAU: ... vont au bureau de crédit.

M. LEGER: Moi, je parle... Les 90 p.c. ce sont ceux qui paient comptant, vous dites.

M. CROTEAU: Qui paient comptant du premier coup, disons.

M. LEGER: Alors, il reste 10 p.c. ceux qui ne paient pas comptant.

M. CROTEAU: Non. Sur 100 clients qui achètent à crédit, sur le premier état de compte, à peu près 90 p.c. vont payer du premier coup. Les 10 p.c. qui demeurent vont traîner quelques mois et, rendus délinquants, au maximum, pour remettre cela entre les mains des bureaux de crédit, à peu près 2 p.c, selon notre expérience, nous, au magasin que je représente.

M. LEGER: 2 p.c, comme ça, de ceux qui ont acheté à crédit, sont des mauvais clients.

M. CROTEAU: Réellement délinquants, parce qu'il faut penser qu'à l'intérieur de l'organisation, il y a un travail qui se fait, de perception, avant de remettre le compte aux bureaux de crédit ou aux avocats.

M. LEGER: Vous recevez le marché... Peut-être que monsieur a quelque chose à ajouter.

M. LETOURNEAU: Suite aux remarques de M. Croteau, M. Chartrand aurait d'autres commentaires, je pense, à ajouter.

M. LEGER: Juste avant, je veux comprendre ce qui a été dit. Je pensais que vous vouliez ajouter quelque chose.

Cela veut donc dire que le service des agents de recouvrement se situe à 2 p.c. de citoyens, d'organismes ou plutôt de personnes qui ne paient pas. Il y a à peu près 2 p.c. du commerce, c'est là-dessus qu'est la clientèle avec qui vous avez à travailler, à essayer de percevoir les sommes en retard?

M. CROTEAU: Ce sont les statistiques de la maison que je représente; je ne peux pas dire que c'est la même chose ailleurs.

M. LETOURNEAU: La maison Paquet.

M. CHARTRAND: Je pense, M. le Président, si on fait le rapprochement avec le bureau de crédit, comme tel, on pourrait à toutes fins pratiques employer les mêmes pourcentages, ce qui veut dire qu'il y a à peu près 10 p.c. des personnes qui apparaissent aux dossiers du bureau de crédit, qui deviennent possiblement lents à payer leurs comptes, sans être pour autant délinquants et qu'à peu près 2 p.c. ou 3 p.c. deviennent effectivement des mauvaises créances.

Je pense que dans l'ensemble, on pourrait dire que les agents de recouvrement font affaire avec environ 3 p.c. du crédit en consommation qui devient effectivement mauvaise créance. Il faut quand même ajouter qu'il n'y a pas de statistiques établies et c'est peut-être là, justement, qu'étant donné que le crédit à la consommation est dispersé, il n'y a pas d'organisme qui agit comme centre de référence, à ce moment-là et qui pourrait tenir des informations comme telles.

M. LEGER: L'argument qui vient d'être mentionné et les arguments, qui ont été mentionnés ce matin, me convainquent davantage que si le ministre persiste dans son projet de loi, je suis d'accord que c'est de moins en moins une nécessité, les agents de recouvrement. Je donne comme preuve le fait que vous tenez absolument, la Chambre de commerce, à l'article 5.12, page 6, vous voudriez laisser entre les mains des agents de recouvrement la réelle arme qu'ils ont, qui est l'intimidation, parce que s'ils n'ont pas cette arme, de pouvoir poursuivre, comme vous le demandez dans 5.12 3) — ce que j'ai trouvé assez candide tantôt — de dire la vérité, c'est tout simplement dire aux gens: Si vous ne payez pas, on va vous poursuivre.

On ne veut pas qu'il y ait cette intimidation dans la loi. C'est un avocat seul qui peut le faire. A ce moment-là, vous demandez: II apparaît important de laisser le pouvoir à ceux qui doivent percevoir les dus pour des créanciers, d'informer les débiteurs — je trouve cela très bien dit — qu'ils sont susceptibles d'être poursuivis.

Autrement dit, si la loi persiste telle quelle et qu'on enlève cette possibilité d'intimidation

— puisqu'un individu lui-même peut poursuivre pour l'argent qui lui est dû — si on veut empêcher cette intimidation, ils n'ont plus d'arme, ils n'ont plus de raison d'être, puisque cela ne fait que de la comptabilité, envoyer une lettre, etc.

C'est pour cela que ce matin je disais qu'on devrait même limiter les relations entre l'agent de perception par des écrits peut-être de façon que les pressions et les intimidations comme on a vues... On a des cas qui nous sont communiqués régulièrement dans les bureaux de comté, des méthodes de renseignements qui ont pu être mises de l'avant. Des cas avaient été spécialisés; on disait: Votre mari est à l'hôpital, est-ce qu'on peut avoir des renseignements? C'est un moyen très habile d'un agent. Peut-être qu'il a donné une mauvaise image à l'ensemble de l'industrie ou du commerce, mais ce sont quand même des cas qui permettaient à des gens, par des moyens détournés, de faire de l'intimidation, pour recouvrer quoi? Deux pour cent des gens ne paient pas leurs comptes.

Je voyais tantôt qu'on disait que c'est justement pour la protection du consommateur; je trouvais cela merveilleux. Je disais: Cela y est, les voilà rendus de l'autre bord. Ils veulent réellement défendre le consommateur. C'est un argument qui était juste et de poids, mais il faut quand même mettre les choses à la bonne place. Est-ce que ce n'est pas tout simplement dans le but de protéger vos clients, pour qu'eux, les clients, n'aient pas de mauvais crédit? Cela n'est pas mauvais en soi, mais se servir de l'argument de la protection du consommateur, je trouvais cela un peu pousser loin. C'est candide de croire que c'est l'argument de base. C'est un argument de poids, mais ce n'est pas l'argument de base.

Je pense que, surtout à l'article 5.12, comme il y a des avocats pour faire des poursuites, comme un individu a le droit de poursuivre soit par la Loi des petites créances ou soit par la loi normale, la seule force des agents était justement l'intimidation. J'aimerais qu'on m'explique si ce n'est pas cela; si je me trompe, qu'on me prouve l'importance, la nécessité et le besoin social de cette agence, si on enlève le moyen de pression qu'elle a. Ce sont quand même uniquement des intermédiaires entre celui qui a une créance et le débiteur. Vous avez les moyens légaux. Les avocats peuvent le faire. Si on vous enlève cette possibilité et même de poursuivre vous-mêmes parce que l'article 5.12.3, on le verra tantôt, je pense que c'est la seule arme qu'il vous reste, je dirais même que c'est tout simplement une question d'intimidation, parce que les agents de recouvrement n'ont pas de pouvoirs pour le faire.

Je sais bien qu'ils vont pouvoir s'exprimer tantôt et qu'ils vont certainement prendre des notes, parce qu'ils disent: Où va-t-il, celui-là? Je trouve cela malheureux de voir que vous vous servez de ces arguments par la Chambre de commerce.

Je vous laisse expliquer réellement comment cela fonctionne et quelles vont être leurs armes de travail s'ils n'ont pas les possibilités de faire des pressions inutiles sur des gens pour recouvrer des comptes.

M. LETOURNEAU: M. le Président, tout d'abord la question de protection du consommateur. Pour nous, l'intérêt de nos membres, qui sont en majorité des hommes d'affaires, passe par l'intérêt de leurs clients. Aujourd'hui, une entreprise qui ne sait pas reconnaître le mouvement de "consommateurisme" comme on l'appelle, ou l'intérêt de ses clients, ou le consommateur, ne peut pas être en affaires pour longtemps. Les entreprises qui progressent, qui sont dans le marché depuis longtemps et qui vont y rester, sont celles qui savent reconnaître l'intérêt de leurs clients et le protéger. Les entreprises les plus prospères dans le domaine du commerce de détail sont en général celles qui adoptent de telles politiques. Lorsque nous représentons les intérêts de nos membres, nous faisons les tests avant de faire la version finale de notre mémoire, nous nous posons la question: Est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans qui est contre l'intérêt des consommateurs? Nous faisons ce test à chaque fois que nous présentons un mémoire ici ou ailleurs, où que ce soit. Nous croyons que l'intérêt de nos membres qui sont dans les affaires, passe d'abord par l'intérêt de leurs clients. Si leurs intérêts sont contraires à ceux de leurs clients, ils ne peuvent pas être en affaires pour longtemps. Voilà notre raisonnement lorsque nous présentons un mémoire et voici pourquoi nous essayons de nous mettre en accord sur les intérêts de nos membres et les intérêts de leurs clients et des consommateurs. Voilà notre raisonnement sur ce plan.

Concernant l'intimidation. L'intimidation est une notion assez subtile, parce qu'il peut arriver devant un débiteur, devant une pauvre veuve, si vous voulez, qui a acquis une créance importante et qui est rendue au point de la perception par un agent de recouvrement, il peut arriver que se présente à sa porte, à 2 heures le matin, un individu qui est fait comme une armoire à glace et qui lui dit seulement; du haut de ses six pieds et quatre pouces: Madame, allez-vous payer votre compte? Seulement ces mots vont être suffisants pour constituer une intimidation très importante. Pourtant, il n'a pas dit: On va mettre votre compte dans les mains d'un avocat, vous allez avoir un mauvais crédit, ou des choses du genre. Il a seulement dit: Allez-vous payer votre compte? Et il va peut-être ajouter trois ou quatre bons sacres. C'est vraiment de l'intimidation. Pourtant, il n'a rien dit de contraire à la loi, et il a fait de l'intimidation.

C'est une notion qui est subtile, l'intimidation. Je reviens au point que nous voulons conserver comme étant des arguments qui peuvent être invoqués ou des informations qui

peuvent être transmises par les agents de recouvrement aux personnes qui ne paient pas leurs comptes.

Supposons que nous suivons la loi et qu'un agent de recouvrement ne dit pas, après le troisième ou quatrième avis, à la personne dont il veut percevoir une créance: Nous allons éventuellement remettre votre compte dans les mains d'un avocat, vous pouvez être poursuivie et, si ça continue, vous aurez une mauvaise note dans votre dossier de crédit. Supposons qu'il ne le dit pas, qu'il ne transmet pas cette information mais qu'il fait le geste, c'est-à-dire qu'il remet effectivement l'affaire à l'avocat et qu'on engage la poursuite, la personne qui a la créance à payer pourrait, à ce moment-là, et avec raison, reprocher à l'agent de recouvrement de ne pas lui avoir dit que c'était le dernier avis qu'on lui faisait et d'avoir engagé des frais avec l'entrée en action d'un avocat.

Alors, pour ce qui est de la question d'intimidation, c'est sûr qu'on peut intimider en disant cela. Tout dépend de la façon dont on le fait. Nous prétendons que pour les gens qui font les affaires d'une manière raisonnable, et ce sont ces gens-là que nous voulons représenter ici, c'est une information qu'il est nécessaire de transmettre au débiteur à un moment donné parce que c'est le geste qu'on va effectivement poser. C'est effectivement ce qui va arriver au client.

Alors, qu'on appelle ça une intimidation... Ecoutez, des gens vont percevoir cela comme une intimidation, d'autres vont dire que c'est une menace, d'autres vont dire que c'est du chantage et d'autres vont dire: Bien, une chance qu'il me l'a dit avant de le faire parce qu'autrement j'aurais été obligé de payer des frais et j'aurais eu une mauvaise note dans mon dossier. Alors, tout dépend de la façon dont on envisage l'affaire.

Nous essayons de l'envisager d'une manière objective et en fonction des personnes qui font du recouvrement d'une manière raisonnable et honnête et qui s'acquittent de leur métier au meilleur de leur connaissance. C'est le but de notre intervention.

M. LEGER: A ce moment-là, est-ce qu'il y a quelqu'un dans votre groupe qui pourrait me répondre? Etant donné que l'intérêt immédiat de l'agent de recouvrement pour satisfaire son client qui est créancier, c'est de recouvrer le plus possible de comptes, si ce n'est pas par des méthodes de pressions, je dirais pour être poli, morales ou autres, quels sont les moyens, les techniques si habiles qui pourraient être autres que celle des pressions? Quelles sont ces techniques?

M. LETOURNEAU: Ecoutez...

M. LEGER: Vous disiez tantôt qu'à un moment donné il faut que le client sache qu'il va être poursuivi; le rôle de l'avocat est d'envoyer une mise en demeure.

M. LETOURNEAU: Alors, M. le Président...

M. LEGER: Vous, on va vous envoyer une mise en demeure si vous ne payez pas. Alors, L'avocat a ce rôle. Quelles sont les autres méthodes ou moyens que vous auriez, les agents de recouvrement? Est-ce qu'il y en a parmi le groupe qui connaissent d'autres méthodes que celle de faire peur à la personne? L'avocat le fait déjà.

M. LETOURNEAU: M. le Président, il ne faut pas oublier que lorsqu'un compte est rendu dans les mains d'un agent de recouvrement, c'est parce que, habituellement, la personne qui le doit est déjà d'une certaine façon en délinquance vis-à-vis de ce compte. Mais pour poursuivre la réponse à cette question, je demanderai à M. Lachance de faire des précisions.

M. LACHANCE (Gilles): Alors, M. le Président, pour répondre à certaines des questions de M. Léger, je voudrais mentionner deux ou trois points. Premièrement, lorsque le compte arrive pour recouvrement à l'agence de recouvrement, au bureau de crédit, le premier avis qui est envoyé à cette personne, au débiteur, ce n'est rien qui l'assomme.

En fait, tout ce qu'on lui dit, c'est que tel client nous a confié tel compte pour tel montant en recouvrement. On lui en demande le paiement et on lui dit; Si vous ne pouvez l'envoyer immédiatement, veuillez communiquer avec notre bureau. Il n'y a aucune intimidation qui se fait dans ces cas-là. Il y a des gens pour qui le fait que ce soit transféré à une tierce-partie vont nous payer immédiatement, sur réception de ce premier avis.

M. LEGER: Comme vous n'avez pas le droit de les poursuivre, ça donne quoi?

M. LACHANCE (Gilles): S'ils savent qu'on n'a pas le droit de les poursuivre...

M. LEGER: C'est une étape, il en reste encore une ou deux.

M. LACHANCE (Gilles): Oui. Comme vous dites, le grand public n'a pas toute la même notion au sujet de sa responsabilité sur le plan social. Lorsque, ensuite, on communique avec le débiteur, habituellement, les interviews de recouvrement de compte sont construits de telle façon qu'on fait reconnaître au débiteur qu'il a obtenu des services ou de la marchandise et on lui fait reconnaître qu'il doit ce montant-là. Une fois qu'il doit le montant, vous n'avez pas besoin de poser beaucoup de questions, vous dites: Alors, qu'est-ce que vous faites pour le payer? Si vous reconnaissez le devoir, pourquoi ne le payez-vous pas?

Souvent, le type nous dit: Je ne travaille pas, je n'ai pas d'argent, je suis trop endetté, etc. A partir de là, l'interview se continue. Il y a des gens à qui, même s'ils ont ça d'épais de

jugement contre eux, même les poursuites d'avocat ne font aucunement peur; il n'y a rien qui les intimide. Lorsque vous parlez de laisser aux avocats seuls le pouvoir de recouvrement et que vous parlez, encore une fois, de protéger le consommateur, disons que les avocats — on l'a dit tout à l'heure, on ne s'en cache pas — on est un peu en concurrence avec eux mais il ne faut pas oublier que lorsque nous effectuons le recouvrement, c'est le créancier qui nous paie notre commission et il n'y a aucun frais au débiteur, alors que lorsque c'est un avocat, il y a des frais payés à l'avocat, ce qui est la loi, mais ça grève encore un peu plus le budget du débiteur, dans ces cas-là.

Je dirais que si nos frais sont payés par le créancier, ça grève moins le budget du débiteur. Maintenant, M. Léger disait qu'il y a seulement 2p.c. des comptes du crédit au détail qui sont envoyés aux agences de recouvrement. Je veux bien reconnaître ça, mais si, M. Léger, vous enlevez aux directeurs de crédit qui se renseignent, la possibilité d'obtenir tous les renseignements qu'on tient à leur disposition dans nos dossiers, qu'est-ce qui nous dit que ces 2 p.c. ou 3p.c. ne monteront pas à 10 p.c. ou 15 p.c. puisque, déjà, on a au moins 10 p.c. de nos dossiers qui indiquent une certaine lenteur à payer leur compte? Si on le tient à 2 p.c. ou 3 p.c. présentement, dans certains cas, c'est que, justement, ces gens-là administrent bien leur crédit et savent se protéger en ayant recours aux renseignements qu'on met à leur disposition. Si vous leur enlevez ce moyen-là, rien ne dit que le pourcentage de mauvaises créances n'augmentera pas et le coût pour supporter ces pertes-là en mauvaises créances, sera, encore une fois, réparti sur les prix à la consommation. Je ne vois pas comment ça pourrait protéger le débiteur en enlevant aux directeurs de crédit qui font du crédit les moyens de se renseigner adéquatement.

M. LEGER: Quand même, le rôle que vous semblez vouloir donner aux agents de recouvrement, c'est une partie du rôle d'une personne à qui on doit de l'argent qui informe son client: Cela fait trois factures que je t'envoies, paie-moi. Vous autres, vous continuez à lui dire: Je t'envoie un premier avis, un deuxième avis et un troisième avis d'une autre couleur afin de savoir à quelle étape il est rendu. Si vous n'avez pas de droit de poursuite, vous ne pouvez pas exiger ça. En réalité, vous êtes un organisme — peut-être pas vous mais... — qui fait tout simplement un surplus de travail entre celui qui est le créancier et l'avocat qui poursuit. C'est sûrement un surplus de travail qui peut être fait autant par le premier que par le troisième, qui remplacerait le deuxième, jusqu'à ce que... Vous avez quelque chose à ajouter là-dessus, peut-être?

M. LACHANCE (Gilles): M. Léger, ce que je voudrais dire là-dessus c'est que si un créancier a $10,000 de comptes à remettre à un avocat et que, à côté de ça, il a eu un accident d'automobile et qu'il a une cause de $10,000 à remettre à l'avocat, je suis sûr — et si j'étais avocat, je ferais exactement la même chose — que je prendrais la cause d'accident d'automobile, en fait, qui est plus payante et moins onéreuse au point de vue du travail que d'essayer de recouvrer 300 comptes qui constituent $10,000 et qui vont lui apporter une commission. Si nous avons pu obtenir de nos clients des commissions de 35 p.c. ou 40 p.c. dans le passé, alors que les avocats demandent, comme vous le disiez ce matin, 10 p.c. ou 15 p.c, c'est parce que, effectivement, nous avons pu donner de meilleurs résultats, parce que nous nous en sommes mieux occupés, nous avons de meilleures façons de dépister. Les débiteurs qui déménagent, c'est un des grands fléaux du directeur de crédit. Les avocats ne sont pas toujours bien placés pour faire ce travail-là.

Si on reçoit des comptes à percevoir d'une compagnie comme The Book of the Month ou des choses comme ça, ce sont des comptes de $8. Il y a plusieurs avocats dans la salle, et je me demande combien sont intéressés à s'occuper du recouvrement de ces créances-là. Même à 35 p.c. ou 40 p.c, ce n'est pas payant, même pour nous, dans ces cas-là.

M. LEGER: De toute façon, dans la logique de votre mémoire, c'est bien indiqué que tous les groupes de la société seraient soumis à la loi, incluant les avocats. C'est donc dire que les avocats n'auraient pas le droit d'exiger du débiteur une somme supplémentaire. C'est seulement le créancier qui paierait.

M. LACHANCE (Gilles): On ne voulait, en aucun cas, venir en contradiction avec la Loi du Barreau et restreindre les pouvoirs des avocats. Ce n'était pas du tout l'esprit de la recommandation au départ. C'était que toute personne qui s'occupait de perception de compte était sujette aux mêmes lois par rapport aux manières qui sont astreignantes ou qui sont de l'intimidation ou des choses comme cela. Mais, nulle part, dans notre esprit, n'est venue l'idée de restreindre les pouvoirs des membres du barreau.

M. LEGER: Dans l'article 26, oui.

M. LACHANCE (Gilles): Pardon?

M. LEGER: Par l'article 26, oui. Si les avocats sont soumis à l'article 26, oui.

M. LACHANCE (Gilles): Je pense bien que ce n'était pas dans l'esprit...

M. LETOURNEAU: M. le Président, M. Chartrand aurait quelques remarques à ajouter, je crois.

M. CHARTRAND: M. le Président, pour renchérir sur ce que M. Lachance vient de mentionner et pour répondre à M. Léger, je pense que, quand même, on a expliqué tout à l'heure le rôle social d'un bureau de crédit. Il est sûr que l'on accomplit ou on répond à deux besoins lorsqu'on parle du problème des agents de recouvrement de créance. Premièrement, aux bureaux de crédit, nous avons mentionné que nous voulions agir comme centre de référence et on voulait que les informations contenues aux bureaux de crédit soient les meilleures possible pour que les clients qui viennent aux bureaux de crédit pour obtenir des renseignements sur les consommateurs obtiennent des renseignements qui soient vraiment valables, pour leur permettre de faire une évaluation qui soit judicieuse. Quand on dit que l'on travaille vraiment dans l'intérêt du consommateur — le deuxième but — on peut le confirmer en disant qu'il y a 90 p.c. des personnes qui passent aux bureaux de crédit qui sont effectivement de bons risques et qui ne causent pas de problème, et qu'il y a seulement 2 p.c. qui deviennent de mauvaises créances. Ce faisant, en s'occupant des 2 p.c. ou des 3 p.c, on assure quand même l'intérêt de 90 p.c. ou 95 p.c. ou 97 p.c. des autres consommateurs. Je pense que, jusqu'à un certain point, dans ce sens, on travaille dans l'intérêt du consommateur. Dans ce sens, le bureau de crédit est également conscient du rôle social qu'il a à remplir. Quand on a dit tout à l'heure qu'on ne devait pas mentionner que des poursuites judiciaires seraient entreprises et ainsi de suite, il est sûr qu'à la base, lorsqu'on fait affaires avec une mauvaise créance, c'est une personne qui a refusé, malgré les nombreux avis, de faire le paiement de ses créances. Est-ce qu'on ne manque pas d'honnêteté effectivement en ne mentionnant pas au débiteur ce qui peut lui arriver s'il ne paie pas ses comptes? Est-ce qu'on est vraiment malhonnête ou vraiment pas honnête en ne disant pas qu'il pourrait y avoir des poursuites judiciaires ou que cela pourrait affecter son dossier de crédit à l'avenir? Je pense que, si l'on a un souci d'honnêteté et je pense que, si l'on remplit notre rôle social en tant que bureau de crédit, on devrait mentionner ces choses et le débiteur devrait sûrement être au courant.

M. LEGER: Sur ce point, il faut quand même que vous admettiez, M. Chartrand, qu'un client qui ne paie pas sait bien qu'un jour ou l'autre, s'il ne paie pas, il va avoir les avocats après lui. Quand même vous les avertiriez de cela, ce n'est pas comme mesure sociale, c'est seulement pour faire une pression morale pour qu'ils paient avant.

M. LACHANCE (Gilles): M. le Président...

M. LEGER: Dans le fond, tôt ou tard, un client qui ne paie pas... Il n'y a pas une personne qui ne sait pas qu'à un moment donné, si elle ne paie pas, elle va se faire poursuivre, à moins qu'elle espère que le vendeur qui lui a vendu tel produit va l'oublier.

M. LACHANCE (Gilles): M. le Président, ce qu'on essaie d'expliquer, cela confirme peut-être ce que vous mentionnez. Pourquoi ne le ferait-on pas, justement si le débiteur s'attend à une chose comme celle-là, si normalement il le sait? En assumant que la plupart des débiteurs savent qu'ils s'exposent à des actions légales, à des procédures judiciaires, est-ce qu'il y a vraiment du mal à le mentionner au débiteur qui s'expose effectivement à des procédures judiciaires à l'avenir et que cela pourrait affecter son dossier de crédit? Je voulais mentionner tout à l'heure que l'avocat comme tel qui obtient une mauvaise créance pour fins de recouvrement, agit, au début du moins, comme agent de recouvrement, purement et simplement. Il agit comme agent de recouvrement. Par la suite, il devient un avocat lorsque les choses se corsent et qu'il doit prendre des procédures judiciaires. Dans un certain sens, il remplit le double rôle.

M. LEGER: Son intérêt personnel, en réalité, l'agent de recouvrement, le vrai, le plus gros, le plus efficace, c'est de percevoir avant que l'avocat ne perçoive, parce que son revenu va être là. Alors utiliser l'arme que l'avocat a légalement en disant: Si vous ne payez pas en dedans de tant de jours, on va percevoir, ou on va vous poursuivre, l'avocat fait cela.

Autrement dit, ce n'est pas dans l'intérêt de la personne qui ne paie pas que vous faites cela, c'est dans l'intérêt de percevoir les sommes avant l'autre, parce que votre intérêt, c'est que vous êtes payés à même les comptes que vous allez percevoir. Il ne faut pas se conter d'histoires.

M. LETOURNEAU: M. le Président, je répète ce que j'ai dit tantôt à M. Léger. Si l'agent de perception ne le dit pas à son client, son client pourrait être en droit de le lui reprocher au moment où il aurait remis, effectivement, le compte entre les mains d'un avocat: Pourquoi ne pas m'avoir prévenu que cela m'arriverait? Pourquoi ne pas me l'avoir dit avant de le mettre entre les mains d'un avocat? Parce que là, il est trop tard. Les frais sont engagés. Si vous me l'aviez dit avant de le mettre entre les mains d'un avocat, cela aurait peut-être été la dernière chose. Là j'aurais senti que j'étais au bout de la ligne, qu'il fallait vraiment que je fasse quelque chose et j'aurais évité les frais légaux, justement. Là, il y a des frais additionnels pour la personne qui est en mauvaise position.

Alors cela peut être utilisé dans les deux sens. Vous l'utilisez dans un sens, on peut l'utiliser dans l'autre sens. Pour ceux qui font des affaires raisonnables, j'ai l'impression qu'il faut absolument prévenir le client que c'est la

dernière étape et que l'étape suivante, ce sont des frais additionnels. Si on ne le fait pas, c'est une information qu'on ne transmet pas au débiteur qui pourrait reprocher, avec raison, à celui qui a pour mandat de percevoir sans additionner ces frais juridiques.

M. LEGER: Alors, écoutez là...

M. LETOURNEAU: M. Goudreau voudrait ajouter à ce...

M. GOUDREAU: M. le Président, M. Léger semble très surpris par le fait que les agences de recouvrement peuvent subsister malgré que certains avocats fassent de la perception. On peut facilement constater que justement, on peut subsister.

M. LEGER: Excusez-moi, je crois que vous interprétez mal mes paroles. J'ai dit que si vous n'avez pas les moyens de pression, de menace et d'intimidation possibles, verbaux ou autres, vous n'avez plus les moyens de faire de la réelle perception. C'est ce que j'ai dit.

M. GOUDREAU: C'est votre affirmation. Quant aux 2 p.c. dont on parlait tantôt, il reste que ces 2 p.c. représentent, pour un petit bureau comme celui de Granby, par exemple, 30 p.c. de nos revenus. Alors c'est un facteur qui est assez important.

M. LEGER: Ce n'est pas un facteur social, comme vous l'avez dit tantôt.

M. GOUDREAU: Si vous parliez, tout à l'heure, du fait que 2 p.c., ce n'était pas important, pour nous, c'est important.

M. LEGER: C'est cela que je veux dire. C'est un facteur économique pour votre genre d'entreprises.

M. GOUDREAU: Vous vous interrogiez, tantôt, sur le fait que nous représentions seulement 2 p.c. et que 2 p.c, cela n'avait pas d'importance. Je voudrais quand même spécifier que nous ne poursuivons pas nous-mêmes. C'est entendu et cela a toujours été. Jamais on ne s'est prétendu capable de poursuivre et on n'a jamais fait de publicité en ce sens. Egalement, nous ne faisons pas d'intimidation. Cela n'a jamais été dans nos habitudes.

Personnellement, dans le cas de Granby, on fonctionne depuis treize ans. Si on avait fait de l'intimidation, dans un petit village, cela fait longtemps qu'on aurait fermé nos portes.

Il y a un fait sur lequel vous pouvez vous questionner, savoir qu'on fait de la perception; c'est qu'on ne travaille pas de la même façon que les avocats, en ce sens que nous autres, on fait des remises mensuelles des sommes perçues. C'est un facteur qui est assez important. Bien de nos petits clients viennent nous voir juste- ment afin d'avoir ces sommes de façon mensuelle.

Lorsqu'il s'agit d'un montant assez appréciable, ils apprécient, eux, certainement le fait qu'on puisse leur donner mensuellement les $20 qu'on a perçus de notre client. Egalement, ils viennent nous voir, tel que cela avait été mentionné par M. Lachance, tantôt, à cause du fait qu'on n'exige aucun frais. C'est un facteur très important. Vous n'avez qu'à penser, lorsque vous étiez dans la pratique privée, à certains clients que vous avez perdus parce que, justement, vous leur avez réclamé des frais. Certaines fois, cela n'a pas représenté un gros montant, mais il reste qu'une fois que le gars a perdu son compte de $100, s'il faut qu'il ajoute $25 en plus de cela pour vous rembourser à la suite de votre démarche, ce qui est probablement normal dans votre domaine, il reste que pour certains clients, c'est un facteur important. C'est une raison supplémentaire pour laquelle les gens viennent nous voir.

M. LEGER: Quelle est la relation, pour une compagnie qui fait et de l'information et du recouvrement? Supposons qu'on vous donne des comptes qu'on juge difficiles à recouvrer et que vous avez ces comptes-là: est-ce que ces renseignements s'en vont directement à votre département de l'information pour juger immédiatement, dans vos dossiers que ce mauvais débiteur peut avoir une mauvaise note de crédit? Quelle est la relation qu'il y a avec ces renseignements et votre bureau d'information qui, par la suite, va placer cet individu ou cette personne, qui ne paie pas, sur la liste noire?

M. GOUDREAU: M. le Président, pour répondre à M. Léger, lorsque les clients nous téléphonent pour savoir le crédit de M. Untel, demeurant à telle adresse, ils veulent autant que possible avoir le plus d'informations leur permettant d'avancer un certain montant selon certains critères. Que ce soit le salaire, que ce soit le mode de remboursement du client, ce sont habituellement les critères les plus reconnus pour accepter un certain crédit plutôt qu'un autre.

Nous ne sommes pas là pour dire: Voici, on a un compte de X dollars de la part de tel client. De ce fait, cela le rend un client indésirable. Vous êtes certainement au courant, bien entendu, que chaque compagnie a ses propres critères de crédit. Des compagnies, à certains moments de leurs opérations, se sentent plus libérales ou plus conservatrices — dans le terme propre du mot — afin d'avancer ou de refuser du crédit.

De ce fait, ce n'est pas nous qui disons: M. Untel, vous devez l'accepter ou vous devez le refuser pour tel ou tel montant, vous devez faire un essai pour telle période. C'est la compagnie de crédit qui nous téléphone, qui juge, selon ses politiques de crédit, si c'est un client qui fait son affaire.

Bien entendu, elles ne nous disent pas toutes les protections qu'elles ont lorsqu'elles avancent ou elles refusent leur crédit. C'est libre à elles, selon les dossiers qu'on leur fournit, d'accepter ou refuser le crédit. Est-ce que cela peut répondre à votre façon de dire quelle est la relation entre notre département de perception et notre département d'investigation?

M. LEGER: A l'article 5.12 3), alors que vous demandez encore un pouvoir supplémentaire aux agents de recouvrement, qui serait de pouvoir poursuivre en vertu de la Loi des petites créances. A ce moment-là, vous n'avez pas raison de demander cela — c'est ma perception, vous me corrigerez tantôt — puisque le client, habituellement, peut le faire, soit par la loi générale et le débiteur peut faire déférer à la cour des petites créances le recouvrement du montant qui lui est dû. A ce moment-là, il peut se défendre là. Mais que vous, vous alliez là, je pense que c'est un danger et je vais vous dire pourquoi. C'est qu'il se peut fort bien —je donne un exemple de jeu qui peut se faire là-dedans — qu'une personne puisse acheter un réfrigérateur, admettons pour $200 — je ne sais pas si je suis dans la valeur mais en tout cas, acheter un petit réfrigérateur, les anciens Astral — et peut-être un poêle pour $280 et une autre chose pour $225. A un moment son compte est rendu à $700 et là, vous pourriez tout simplement ne réclamer qu'un des achats, qui a été fait à une date précise, de $200, puisque l'autre de $280 a été fait un mois après ou deux semaines après et celui de $225, l'autre semaine après.

Vous pourriez toujours prendre le montant de $700, le diviser en petites sommes et essayer, en vertu de la Loi des petites créances, de les percevoir. De la sorte, vous remplacez directement ce que la personne peut faire elle-même, par la loi normale. Comment pouvez-vous me répondre à cela?

M. LETOURNEAU: M. le Président, Me Champagne va répondre à cette question.

M. CHAMPAGNE: M. le Président, lorsque j'endendais M. Léger qui nous disait qu'on voulait "scorer", si je prends la parole, ce n'est pas pour "scorer", je n'ai pas de point à faire cet après-midi, la Russie et le Canada sont à le faire actuellement.

M. LEGER: Oui, ils l'ont fait pour nous autres.

M. CHAMPAGNE: Cela va bien à part cela? Alors, M. le Président, ce que je voulais mentionner, c'est que M. Léger, pour reprendre un peu les points qu'il vient de mentionner rapidement, dit: Si on enlève les moyens... et n'aime pas tellement le mot intimidation ou menace ou pression, mais plutôt dire que ce sont des informations. Tantôt il a dit qu'on disait des vérités angéliques, peut-être, un terme semblable — je pense que ce sont des faits qu'on veut qui soient dits aux clients ou aux débiteurs, les faits exacts de la situation.

Quant au recours des petites créances, M. Léger sait très bien que la loi ne permet pas aux petites corporations, moyennes ou grandes, de percevoir leurs comptes devant ces tribunaux et qu'on doit procéder par l'entremise d'un avocat pour aller devant la cour Provinciale, et ensuite être transféré à la cour des petites créances pour souvent être pris avec des frais plus élevés que ceux qui sont déjà accordés par la loi.

Dans ce sens, nous disons que, si le législateur enlève, d'une part, l'affirmation des faits vrais qu'on a mentionnés au paragraphe e) de l'article 26, et, d'autre part, ne permet pas actuellement, avec la Loi des petites créances, de percevoir les comptes, vous mettez le débiteur dans une situation bien favorable et le créancier pris devant cela. Quand on disait que cela affectait le consommateur d'une certaine façon, c'est que, si vous êtes un créancier et si vous savez que vous allez avoir toutes les difficultés du monde à percevoir une somme inférieure à $300, vous allez sûrement vous poser des questions et vous allez avoir peut-être de la difficulté à admettre facilement ce qui est dit là.

Dans le contexte, les personnes qui font du recouvrement doivent avoir certains moyens pratiques pour être capables de percevoir les comptes. Autrement, à l'extrême, il ne reste quasiment plus rien, comme vous le mentionniez tantôt, sauf d'envoyer des lettres et de demander aux gens ou de dépister les gens qui sont des débiteurs. Encore une fois, on a demandé au législateur d'amender l'article 26 e) pour permettre ces faits et nous avons demandé, dans une autre politique d'action de la Chambre, de permettre aux corporations, petites, moyennes et grandes de percevoir par elles-mêmes, directement devant la cour des petites créances, les sommes inférieures à $300.

M. LEGER: A ce moment, vous deviendriez des avocats impopulaires.

M. CHAMPAGNE: Non, on n'est pas ici pour défendre les avocats, on est ici pour défendre les hommes d'affaires.

M. LEGER: Non, mais je veux dire qu'il v a des avocats populaires qui défendent des citoyens et si vous alliez attaquer les personnes par la Loi des petites créances, c'est là que je dis que vous deviendriez des avocats impopulaires. C'est l'inverse. D'ailleurs, le client, le créancier, le débiteur qui voit que cela va dans une agence de perception est aussi choqué contre son créancier, en lui disant: Tu m'as mis en perception, je n'achèterai plus chez vous. C'est parce que, à ce moment, en perception, il avait tous les périples et les intimidations que je mentionnais tantôt.

De toute façon, vous m'avez éclairé sur ce point. J'avais d'autres questions à vous poser. Je vais d'abord, au depart, vous féliciter. Quand même, il y a des choses dans votre document qui sont bonnes, que j'accepte très bien. C'est le fait que vous dites que tout le monde devrait être soumis à la loi, je suis d'accord là-dessus, et que même les autres devraient être soumis à la loi, de façon que la loi serve pour tous les groupes qui sont en concurrence dans le domaine de la récupération ou du recouvrement. C'est sûr que c'est normal. Les gens doivent être égaux de ce côté.

Un peu plus loin, le bureau de crédit, qui fait pour 70 p.c, dans un exemple qu'on a donné tantôt, d'information et pour 30 p.c. de recouvrement... C'est cela qu'on m'a dit tantôt?

M. LETOURNEAU: Quel article?

M. LEGER: Je suis rendu à l'article 5.18. D'ailleurs, vous l'avez dit en résumé au départ, mais on est rendu à l'article précis. A l'article 5.18, vous demandez que le bureau de crédit n'ait pas le nom d'agent de recouvrement. Est-ce qu'il n'a pas, pour 30 p.c, la fonction précise d'être un agent de recouvrement? C'est pour cela que je suis d'accord sur l'article du projet de loi du ministre qui dit qu'il faut qu'il s'appelle agent de recouvrement. Autrement, sous des prétextes d'information, il va se servir de recouvrement, et, vice versa, sous prétexte de recouvrement, d'information. Pour quelle raison ne serait-ce pas typiquement indiqué qu'un agent de recouvrement, peut faire aussi de l'information, ceci dans le but de protéger le citoyen, pour qu'il sache bien que la personne qui lui écrit est une personne qui a aussi comme fonction d'être agent de recouvrement et qu'on ne se serve pas d'un papier ou d'un en-tête de lettre qui montre que c'est seulement de l'information pour réellement se servir de moyens, d'informations qui vont avec un agent de recouvrement. C'est pour cela que je serais d'accord pour que le nom d'agent de recouvrement soit inclus.

L'argument que vous donniez tantôt, à savoir que dans tout le Canada, c'est comme cela, cela ne veut pas dire que c'est bien puisque chaque province a cru bon de changer, d'avoir des lois spéciales, personnelles pour cela. Si le Québec juge que c'est bon pour lui, quand même cela se fait comme cela ailleurs, ce qui compte c'est le client ou le citoyen. Vous pouvez me répondre sur le fait que sa fonction, s'il y en a une partie à 30 p.c. ou autre qui est une fonction de recouvrement, il doit avoir sur son papier, son en-tête le nom d'agent de recouvrement.

M. LETOURNEAU: M. le Président, nous avons débattu ce point ce matin. Je répète que nous sommes d'accord sur l'intention du législateur dans cet article, mais ce que nous demandons, c'est qu'au lieu d'être inscrit dans la raison sociale, ce soit ajouté à l'extérieur de la raison sociale.

L'objectif est d'éviter un nombre considérable d'embarras administratifs en obligeant les sociétés qui font ce genre de commerce à modifier leur raison sociale. En plus de cela, je ne pense pas qu'on puisse imposer cette chose à l'extérieur. Comme l'expression française peut être utilisée aussi à l'extérieur, est-ce qu'on est capable de l'imposer à l'extérieur? Qu'on impose à l'intérieur du Québec qu'une société qui est dans ce genre de commerce ajoute à sa raison sociale, lorsqu'elle fait de la perception, "agence de recouvrement" et, lorsqu'elle fait de l'information, "agence d'information", nous sommes parfaitement d'accord. Mais la modification de la raison sociale, à notre avis, amène des embarras et des coûts additionnels qui ne sont pas nécessaires si on procède par l'autre façon que nous suggérons, c'est-à-dire d'ajouter l'appellation à la raison sociale, mais sans l'inclure dans la raison sociale.

M. LEGER: Est-ce que vous étiez d'accord, je ne me souviens pas, dans votre projet — j'avais pris des notes ce matin — qu'il y ait une maison ou un genre de siège social, mais un bureau dans la province de Québec ou si vous étiez opposé à cette idée?

M. LETOURNEAU: Nous n'avons pas émis d'opinion sur la question de concentration d'information de cette nature. Nous laissons aux gens qui sont dans ce genre d'industrie le soin de déterminer les avantages et inconvénients, si, oui ou non, cela devrait exister, et de vous donner directement eux-mêmes ce point de vue. Sur ce point, la Chambre de commerce ne s'est pas prononcée.

M. LEGER: M. le Président, j'ai terminé mes questions.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, j'ai également quelques remarques à faire. J'ai bien noté l'exemple que nous a donné M. Létourneau, tantôt, quant à la notion d'intimidation. L'exemple donne, la fameuse armoire à glace qui peut se présenter à 2 heures du matin, c'est une façon subtile de faire de l'intimidation en n'étant pas contre la loi. Je ne suis pas tout à fait d'accord sur cela, parce que justement dans la loi qui nous est présentée, si jamais un cas comme cela se présentait, cela serait à l'encon-tre de la loi, parce qu'on dit bien de 8 heures à 20 heures.

M. LETOURNEAU: Vous voulez dire qu'on n'aura pas droit d'engager comme percepteur de comptes n'importe qui de plus de six pieds?

M. SAMSON: Je conteste l'exemple que

vous avez donné; c'est surtout le "2 heures du matin" qui m'a frappé, pas le gars de plus de six pieds, parce que les gars de plus de six pieds, il faut les laisser vivre aussi.

M. LETOURNEAU: J'espère.

M. SAMSON: C'est que, dans le projet de loi qui vous est présenté, on limite à des heures le moyen de communiquer. C'est à l'article 26, paragraphe i).

M. LETOURNEAU: M. le Président, cela pourrait tout aussi bien être 2 heures de l'après-midi, remarquez.

M. SAMSON: Non, vous avez dit 2 heures du matin, tantôt.

M. LETOURNEAU: D'accord.

M. SAMSON: J'ai bien remarqué cela. Je voulais vous "retrousser"; c'est pour cela que je l'ai remarqué. Ne vous en faites pas, je n'ai pas seulement à contester ce que vous avez dit; je trouve qu'il y a des choses qui ont du bon sens dans votre mémoire. Il faut retenir que la notion d'intimidation, c'est une notion qui peut être quand même assez contestable, parce que, pour d'aucuns, cela peut être de l'intimidation de dire: Si vous ne payez pas votre compte, nous pourrons envisager d'utiliser des recours légaux. Cela peut être pour d'aucuns de l'intimidation. Pour moi, cela n'en est pas, parce que tous savent qu'un compte qui est dû peut être perçu en utilisant les moyens légaux. Tout le monde sait cela. Que que soit dit par l'agence de recouvrement ou que ce soit dit par la personne qui a avancé les fonds elle-même, je pense que ce n'est pas de l'intimidation, selon moi. Ce qui pourrait être de l'intimidation, c'est peut-être la méthode utilisée. Quand on est un bureau de crédit en même temps qu'une agence de recouvrement, bien sûr, on a plus de possibilités et plus de moyens de pression qu'une seule agence de recouvrement. A titre d'exemple, si quelqu'un d'un bureau de crédit quelconque appelle un débiteur en lui disant: Ecoute, mon vieux, si tu ne paies pas, tu sais qu'on peut noircir ton dossier. On va te "barrer" pour un bon bout de temps. C'est le genre d'arguments qui ont déjà été utilisés. Je pense que tout le monde le sait. Ce genre de choses, j'appelle cela de l'intimidation. Ou peut aussi fournir des renseignements.

Moi, je n'ai rien contre ça, que les agences de recouvrement ou les bureaux de crédit disent la vérité. La vérité, c'est que si le compte n'est pas payé, si la personne retarde trop à vouloir payer son compte, pour une raison ou pour une autre, quand le compte est dû, qu'on lui dise qu'on envisage d'autres recours, même devant la loi. Cela, je pense que c'est la vérité.

Mais il y a d'autres moyens qui ont déjà été utilisés. J'espère que ceux qui sont devant nous ne les ont jamais utilisés. C'est peut-être arrivé sans que le patron en ait eu connaissance, mais on dit souvent aux gens: Vous savez, nous autres, au bureau de crédit, tous les hommes d'affaires font affaires chez nous; tous les commerces de la ville font affaires chez nous et si vous ne payez pas ça, il y a un rapport qui va aller à tout ce monde; vous allez être barré indéfiniment. C'est le genre de choses que je considère comme de l'intimidation pure et simple. C'est le genre de situations qui devraient être évitées.

Evidemment, un bureau de crédit ou une agence de recouvrement doit avoir des moyens. Bien sûr, je suis d'accord et je ne conteste pas; au contraire, il faut que les hommes d'affaires puissent quand même recouvrer les sommes qu'ils ont avancées. Quand on achète à moins d'avoir fait un mauvais achat, à moins d'avoir été victime, ce sont aussi des cas qui se présentent... Quand une personne est victime de quelqu'un qui a fait une vente sous pression ou des choses comme ça, la Loi de la protection du consommateur prévoit ce qu'il faut faire dans ces cas-là. Une personne peut avoir de très bonnes raisons de ne pas vouloir payer un compte, par principe ou pour toute autre raison.

Evidemment, dans des cas comme ça, c'est plus difficile de percevoir un compte. Mais si, même dans ces cas, on va jusqu'au bout et on menace de toutes les façons, je pense que ce n'est pas normal.

Il y a aussi une chose qui est discutée dans le projet de loi, c'est justement lorsqu'une compagnie quelconque demande à l'agence de recouvrement de cesser les procédures. Cela doit normalement se faire. Il y a des incidents qui peuvent se produire, c'est que des clients ayant peur de la tierce partie — ça arrive aussi — communiquent directement avec les gens concernés et disent: Ecoutez, voici ce qui est arrivé, il y a telle et telle chose dont vous n'avez peut-être pas pris connaissance, et, après la discussion, on dit: Bien, on va attendre, il y a d'autres motifs qui entrent en ligne de compte. Notamment dans les comptes que vous percevez pour les hôpitaux, par exemple. Il y a souvent des comptes qui sont discutables.

Alors, quand l'agence de collection l'a, elle ne discute pas: On a eu le compte, on le recouvre. Par contre, s'il y a d'autres possibilités que ce compte soit payé autrement ou que le compte ne doive pas être recouvré, quand on demande... J'ai eu connaissance qu'il y a des employés d'hôpitaux à un moment donné qui ont dit à des gens: On va demander que ce soit suspendu pour nous donner le temps de regarder cela. Cela ne s'est pas toujours fait. Evidemment, c'est important que les agences de recouvrement ou les bureaux de crédit prennent ça en considération.

En ce qui concerne l'identification, M. le Président, ce n'est pas facile. A travers le Canada, bien sûr, on s'identifie comme bureau

de crédit généralement et le moyen de pression qui — nous devons le reconnaître — est important pour ces organismes, c'est de pouvoir être affiliés à un organisme qui fait affaires ailleurs aussi. Qu'on appelle ça uniquement agence de recouvrement, pour changer le nom, je suis d'accord là-dessus. On ne devrait pas changer le nom de ceux qui existent, mais qu'on ajoute agence de recouvrement, cela m'irait. Mais il y a peut-être une chose à laquelle il faudrait penser aussi et je la dis à l'intention du ministre. Il serait peut-être important que, dans la loi, on prévoie que lorsqu'une agence — soit un bureau de crédit, une agence de recouvrement ou les deux — un organisme est les deux à la fois, on l'oblige, lorsqu'il s'adresse à quelqu'un pour faire de la collection à s'identifier comme tel. Autrement dit, pas de fausse représentation.

Si je veux percevoir une somme, si je fais partie d'un bureau de crédit, que je ne dise pas: Je vous appelle parce que j'ai besoin de renseignement. C'est le bureau de crédit qui vous appelle. C'est le bureau de crédit et l'agence de recouvrement, parce que vous avez un compte en souffrance. C'est direct, ça, et je pense que dans la loi on devrait le prévoir, soit l'identification. C'est la vérité, qu'on veut, vous l'avez dit tantôt. Je pense que c'est un élément d'importance qui permettrait, à celui qui doit un compte, de savoir avec qui il parle. Parle-t-il avec le bureau de crédit ou s'il parle avec l'agence de recouvrement? Ce peut être le même organisme. C'est une suggestion que je fais.

M. TETLEY: Cela est aussi dans la loi, je crois, à l'article 26 i), mais c'est par règlement. Je crois que le député de Rouyn-Noranda a absolument raison de soulever cette question.

M. SAMSON: Oui, parce que, justement, c'est écrit "de s'identifier de la façon prescrite". Alors, ça viendra avec la réglementation.

M. TETLEY: Oui, mais vous voulez une bonne prescription, une bonne...

M. SAMSON: Là-dessus — c'est ma suggestion, en tout cas— qu'on ne permette à personne de recouvrer un compte en s'identi-fiant comme bureau de crédit; qu'on s'identifie comme agence de recouvrement. Ce peut être en même temps un bureau de crédit. Je n'ai rien contre le fait qu'on puisse faire comprendre à un client qu'il a tout avantage à conserver son crédit; je pense que c'est un avis qui peut être très utile pour un client, mais il y a une différence entre lui faire comprendre qu'il peut avoir des difficultés avec son crédit, qu'il a avantage à le conserver, et lui dire, d'autorité, — parce que c'est déjà arrivé et je le regrette, j'espère que ça n'arrivera plus —: On va te barrer indéfiniment; c'est nous autres qui menons, dans la ville. Ce sont des choses qu'il ne faut pas accepter.

En ce qui concerne le bureau de crédit ou l'agence de recouvrement qui perçoit les frais du commerce avec qui ils font affaires plutôt que de faire une surcharge de frais, ça, évidemment... Est-ce qu'on pourrait me dire si, dans les cas, où, à la toute dernière limite, l'agence, étant obligée de transférer le compte à un avocat, en plus des frais de l'avocat — ce qui, évidemment, n'apporte aucun frais supplémentaire que ceux de l'avocat au client — recouvre quand même son pourcentage du commerce intéressé?

UNE VOIX: Oui.

M. SAMSON: Quand même. Cela veut dire que le moyen de pression, que vous avez pour faire comprendre à un client que vous pouvez envoyer ce compte-là chez un avocat, c'est un moyen de pression en même temps qu'une réalité. Cela se fait. Ce que je voulais déterminer, c'est qu'à un moment donné, il n'aurait pas pu y avoir un moyen de pression n'existant pas, à savoir que l'agent de recouvrement n'aurait eu aucun intérêt à l'envoyer chez l'avocat, au cas où il ne pourrait pas le percevoir, et que ce moyen d'explication au client ne devienne, en fait, qu'un moyen d'intimidation ou de menace. Cela veut dire que c'est un fait réel. L'agence de recouvrement ne perd pas sa commission même si elle doit passer par un avocat. C'est ça que je dois comprendre.

UNE VOIX: Oui.

M. SAMSON: Cela va. M. le Président, j'avais pris passablement de notes, mais on a répondu à plusieurs des questions que je me posais. Oui, il y a une chose qu'il est peut-être bon de faire remarquer. Les agences de recouvrement ou bureaux de crédit ne fonctionnent pas — je m'excuse si je n'ai pas, là-dessus, la même opinion que mon collègue de Lafontaine — contrairement...

M. HARVEY (Charlesbourg): Vous n'avez pas à vous excuser.

M. SAMSON: Cela peut arriver que je n'aie pas la même opinion que vous autres, non plus.

M. HARVEY (Charlesbourg): Peut-être, mais vous n'avez pas à vous excuser non plus.

M. SAMSON: Je ne m'en excuserai pas non plus.

M. HARVEY (Charlesbourg): Exactement.

M. SAMSON: Cela va. Je considère que les agences de recouvrement ou les bureaux de crédit, en fait, n'ont pas seulement des méthodes d'intimidation comme armes pour percevoir. C'est mon opinion et je voudrais bien savoir si je comprends bien la situation.

Aussi, l'arme qui est valable, c'est que l'organisme de recouvrement est très bien structuré, spécialisé, avec des méthodes. Il ne fait que ce genre de travail, alors que le commerçant, qui peut avoir un bon chiffre d'affaires, n'a pas tellement de comptes à recouvrer, parce qu'il peut être chanceux, et n'a pas l'équipe et l'organisation qu'il faut pour faire ce recouvrement. Cela diffère peut-être un peu des grands magasins qui ont leur propre service de crédit et de recouvrement. Ce service qui est donné justifie, à mon sens, l'existence d'agences de recouvrement ou de bureaux de crédit. Cela la justifie, parce que pour les petits commerçants, le petit et le moyen homme d'affaires, cela coûterait beaucoup trop cher d'installer chez eux ce système dont ils peuvent bénéficier par un organisme spécialisé qui ramasse l'ensemble des comptes à recouvrer dans une ville pour en faire un commerce qui lui permet de vivre.

M. le Président, il y a aussi la question des commissions. Tantôt, on a mentionné l'éventualité d'un maximum fixé. Là-dessus, si j'ai bien compris la Chambre de commerce et les personnes qui sont présentes, préfèrent que ce soit laissé à la libre négociation. Malgré que je sois d'accord avec vous que la libre négociation, c'est ce qui fait la concurrence et que la libre concurrence, c'est toujours un régulateur valable, cela ne vous rendrait-il pas service d'envisager un minimum et un maximum dans une fourchette qui permettrait quand même cette libre négociation dans une forte proportion? C'est une question que je pose.

M. LETOURNEAU: On revient au maximum encore. Dès que c'est plafonné, il y a des cas... Pensez au "factoring", par exemple.

M. SAMSON: Vous n'avez rien contre le minimum.

M. LACHANCE (Gilles): Est-ce que je peux intervenir?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Oui, je vous en prie.

M. LACHANCE (Gilles): M. le Président, je voudrais dire à M. Samson que dans certains cas, justement parce qu'on est en association provinciale, fédérale et même internationale, si on a un débiteur du Québec qui est déménagé dans la banlieue de Los Angeles par exemple, et qu'on veut transférer notre compte à notre bureau-membre à Los Angeles, on est obligé de payer à l'agence américaine jusqu'à 40 p.c. et même 50 p.c. de commission sur le montant du compte. Dans ce temps-là, comment voulez-vous qu'on négocie si on nous met un plafond ici de 40 p.c. ou 45 p.c? Rendu là, on est mieux de jeter le compte au panier. Nos clients savent cela. Ils savent fort bien que, si on doit transférer un compte d'un bureau à un autre, les frais sont plus élevés parce que le bureau qui travaille à la perception du compte veut avoir une commission. Celui qui a travaillé dessus ici et qui a retracé le débiteur à l'autre adresse croit qu'il a droit aussi à une rémunération. Dans ce temps-là, comment légiférer pour mettre un plafond là-dessus? Nous ne le savons pas. Il y a des clients qui vont nous donner des séries de tout petits comptes que personne ne veut prendre, parce qu'il y a beaucoup de dépistage à faire dans le recouvrement des comptes et c'est une grosse partie de nos dépenses. On évalue les comptes. Lorsqu'on va voir un client pour solliciter ses affaires, on évalue ce que va nous coûter la perception et c'est à la lumière de ces faits qu'on détermine le pourcentage de recouvrement. C'est pour cela qu'on ne peut pas évaluer avant d'avoir vu les comptes et de savoir combien on peut leur faire payer. Si on reçoit 1,000 comptes à $8 — on veut quand même les prendre; pour certains petits bureaux, cela représente un apport important — vous comprenez qu'à $8, si vous fixez le maximum à 40 p.c, cela fait $3.20. S'il faut dépister ces gens, il ne nous reste rien, à toutes fins pratiques. C'est pour cela que je dis que c'est presque impossible de légiférer en plafonnant nos commissions dans ce cas.

M. SAMSON: De toute façon, vos honoraires ne sont pas payés par le consommateur.

M. CHARTRAND: Le débiteur n'en est jamais affecté.

M. SAMSON: C'est négocié entre vous autres et le commerçant.

M. CHARTRAND: Uniquement entre le commerçant et l'agent de recouvrement.

M. SAMSON: D'accord. D'un côté, vous suggérez qu'à l'article 2 on enlève les exceptions. Il y a beaucoup d'exceptions à l'article 2.

M. LETOURNEAU: M. le Président, nous ne suggérons d'enlever les exceptions que pour l'application de la loi, mais non pour le permis. Excusez-moi, c'est le contraire.

M. SAMSON: C'est le contraire.

M. LETOURNEAU: Ajouter des exceptions pour le permis, mais rendre tout le monde sujet à l'application, excusez-moi.

M. SAMSON: Par contre, vous suggérez des exemptions pour l'obtention du permis.

M. LETOURNEAU: Oui. M. SAMSON: ... alors que...

M. LETOURNEAU: Cela ne veut pas dire que ces gens ne sont pas assujettis à la loi.

M. SAMSON: C'est peut-être moi qui suis à l'envers, là.

M. LETOURNEAU: Mais cela veut dire qu'ils ont déjà d'autres contrôles exercés sur eux, d'autres façons.

M. SAMSON: Alors pour l'obtention du permis...

M. LETOURNEAU: II y a des exceptions.

M. SAMSON: ... il y a des exceptions et, pour l'application de la loi, vous ne voulez pas d'exceptions.

Pourquoi suggérez-vous, comme exception, à l'article 5.2, 5e, une personne qui sollicite le recouvrement d'un compte de façon isolée, qui n'en fait pas un commerce comme agent de recouvrement? Y a-t-il une raison spéciale?

M. MORIN (Pierre): Si on prenait l'exemple, M. le Président, de M. le député de Rouyn-Noranda. Il pourrait, à l'occasion — disons que son frère est malade — tenter de récupérer un compte qui lui est dû, ce qui est tout à fait normal. A ce moment-là, il agit pour un tiers, il agit pour autrui, peut-être avec ou sans rémunération — cela est autre chose — mais il agit pour un tiers et il tente de récupérer, d'une façon tout à fait occasionnelle, une créance qui est due soit à un parent ou à un frère. A ce moment-là, on ne voit pas pourquoi cette personne devrait devoir obtenir un permis. Par contre, on ne voit aucune raison non plus pour laquelle cette personne ne devrait pas agir selon un code d'éthique qui serait dressé par la loi.

M. SAMSON: Ne trouvez-vous pas que c'est dangereux un peu cela?

M. CHAMPAGNE: C'est inclus dans une loi d'une autre province.

M. SAMSON: C'est dans les lois des autres provinces?

M. CHAMPAGNE: Oui.

M. SAMSON: Mais même si c'est déjà inclus dans des lois des autres provinces, moi je me pose la question. Je me demande si ce n'est pas un peu dangereux. Il est difficile d'établir la ligne de démarcation entre quelqu'un qui fait cela de façon considérée comme isolée et quelqu'un qui fait cela de façon isolée mais qui en fait autant que quelqu'un d'autre qui le fait professionnellement; cela pourrait se trouver aussi.

M. CHAMPAGNE: Le directeur du service a le droit de vérifier toute personne qui agirait à titre d'agent de recouvrement, selon un article de la loi. A ce moment-là, il pourrait vérifier cette personne et dire: Vous faites un commer- ce de cela. Mais ici cette exception a été mise pour éviter que des gens demandent des permis dans des cas très isolés.

M. SAMSON: D'accord, mais...

M. CHAMPAGNE: La jurisprudence a sûrement été établie là-dedans.

M. SAMSON: D'accord, mais je me demande si, justement, l'exemption no 5 ne permettrait pas, à un moment donné, à un agent de recouvrement ayant un permis d'utiliser de façon isolée une armoire à glace.

M. LETOURNEAU: M. le Président...

M. SAMSON: Ecoutez, c'est peut-être exagéré ce que je vous dis là mais j'essaie de savoir pourquoi on veut exempter quelqu'un qui, de façon isolée, pourrait en faire. Est-ce qu'avec cet article, à un moment donné, on ne pourrait pas utiliser, de façon isolée, quelqu'un qui, avec une force physique, pourrait en imposer tout en n'intimidant pas au sens de la loi?

M. LETOURNEAU: M. le Président, au fur et à mesure qu'on avance dans le débat et qu'on traite de la question d'intimidation, je pense qu'on se rend compte que c'est une notion extrêmement difficile à cerner, l'intimidation. C'est surtout dans l'esprit de la personne qui reçoit le message. Une personne peut être intimidée avec un message et une autre personne, avec le même message, ne pas l'être du tout et même réagir d'une manière provocatrice.

Nous sommes conscients qu'il y a de l'intimidation et même de la terrorisation, dans certains cas, des personnes qui doivent des créances. Cela existe. On n'ignore pas cette situation. Mais quand, à travers une loi, on tente de cerner la notion d'intimidation, cela devient extrêmement difficile.

Ecoutez, il y a des gens qui vont être impressionnés par une lettre qui dit: Vous allez avoir une agence de recouvrement. Ils vont s'apercevoir qu'une agence de recouvrement leur écrit, ils sont intimidés par cela. Mais d'autres ne le seront pas du tout. Ils vont déchirer la lettre et la jeter au panier. Quand une personne est-elle intimidée ou ne l'est-elle pas? Quand y a-t-il intimidation ou n'y en a-t-il pas? C'est extrêmement subtil, cette chose-là.

On peut faire de l'intimidation par toutes sortes de façons, sans jamais parler de mettre le compte entre les mais d'un avocat ou sans jamais parler du dossier de crédit. On peut utiliser une foule considérable de moyens d'intimidation où il va être extrêmement difficile pour le législateur de faire la preuve de l'intimidation.

Des personnes vont être intimidées parce qu'elles sont faibles physiquement, parce qu'elles sont malades. D'autres vont être intimidées pour toutes sortes de raisons qu'on ne peut pas

imaginer. C'est une notion extrêmement difficile et, dès qu'on parle d'intimidation, on entre dans une chose qui n'est presque pas définissable avec une règle ou un critère applicable à tout le monde.

C'est pourquoi l'information concernant la possibilité de recours aux services d'un avocat ou la possibilité d'un dossier qui va être entaché sur le plan crédit, on peut le faire et intimider, et on peut le faire et ne pas intimider. C'est tout simplement, à notre avis, une information. L'intimidation est quelque chose de différent.

M. SAMSON: M. le Président, lorsqu'on donne une information qui est réelle, je ne la considère pas comme de l'intimidation. C'est mon point de vue. Mais quand on dit qu'on veut exempter d'un permis une personne, cela peut être n'importe qui, qui sollicite le recouvrement d'un compte de façon isolée. Isolée c'est quand et comment? C'est difficile cela aussi. C'est aussi difficile établir cela que votre notion d'intimidation, vous savez. Il n'en fait pas un commerce comme agent de recouvrement. Est-ce que cela vous est déjà arrivé d'entendre parler d'un représentant d'une compagnie de finance, par exemple, qui décide d'aller faire le "repossess" d'une voiture automobile parce que les paiements sont en retard depuis trois ou quatre mois? Il se doit d'aller voir le client. Il ne veut pas passer par un avocat, la compagnie de finance ne veut pas payer de frais, il ne veut pas passer par un avocat, là, il s'en va voir son client et, comme par hasard, il s'amène un chauffeur, au cas où le client déciderait de laisser sa voiture, mais il amène toujours un gars de sept pieds huit pouces. Ce n'est pas de l'intimidation au sens de la loi, mais je vous jure que cela fait peur à pas mal de monde.

M. LETOURNEAU: Peut-être que devant une cour, cela pourrait être identifié comme intimidation, mais...

M. SAMSON: C'est dans ce sens-là. Ecoutez, on essaie de trouver quelque chose qui va rendre service. Si on laisse dans la loi une chose comme cela, mon impression est que cela va laisser des ouvertures à des abus. Ce qu'on veut dans la loi, selon mon opinion, ce que je voudrais voir là-dedans, c'est une possibilité que les agences de recouvrement puissent agir normalement, de même que les bureaux de crédit, et que cessent — parce que si on se retrouve devant une loi, c'est qu'il y a eu des abus quelque part — les abus qu'on a déjà connus.

L'article 5.2, cinquièmement, à mon sens — et je ne dis pas que vous voulez que ce soit cela, au contraire, je vous laisse toute la bonne foi que je vous connais — cela peut laisser une porte ouverte à des abus.

M. LETOURNEAU: M. le Président, à l'article ld), dans la définition de la rémunération on dit: "Une commission ou un bénéfice de quelque nature, direct ou indirect, une promesse de rémunération ou l'intention d'en obtenir une". Supposons quelqu'un qui, occasionnellement, pour un parent, pour un ami, décide de percevoir un compte. Quelqu'un qui est pointilleux, qui veut jouer avec la loi, pourrait l'accuser d'agir comme agent de recouvrement; c'est relativement facile, compte tenu de la définition qu'on rencontre à ld), parce qu'on va jusqu'à parler d'intention d'obtenir une rémunération.

On peut toujours accuser quelqu'un en disant: Tu avais l'intention d'en avoir une. C'est pour cela que nous croyons qu'il est utile de permettre ce genre d'exception dans la loi de telle sorte qu'on ne puisse pas faire un procès à une personne pour avoir tout simplement essayé de rendre service à un ami, à un parent ou à un collègue.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est difficile à prouver...

M. LETOURNEAU: C'est difficile, c'est certain, mais c'est dans la loi quand même.

M. SAMSON: Si quelqu'un est à l'emploi d'un commerçant quelconque et a comme fonction ordinaire de travailler dans le bureau, par exemple, et qu'à un moment donné son patron lui demande d'aller faire de la "collection" — cela se voit fréquemment — à ce moment-là, il est à l'emploi, de façon régulière, de son employeur. Mais quand on dit qu'on veut exempter du permis une personne qui sollicite, ce n'est plus la même chose. Cela peut être n'importe qui. Je pense que c'est valable lorsque vous dites un parent ou un ami, mais cela va laisser une porte ouverte à beaucoup d'autres choses.

M. LETOURNEAU: Remarquez que cette personne n'est exemptée que du permis. Elle n'est pas exemptée des autres obligations de la loi, dans notre esprit.

M. SAMSON: Oui, absolument. M. LETOURNEAU: Alors?

M. SAMSON: Mais, je pense qu'au point de vue pratique, on doit reconnaître que les agences de recouvrement ou les bureaux de crédit qui sont assujettis à la loi, évidemment, auront intérêt, en tout cas, à la connaître, à avoir toute l'information voulue pour se plier à la loi. Une personne isolée, il y a un certain danger. Une personne isolée, ce ne sera pas un spécialiste qui va connaître la loi.

Cela équivaut presque à dire que, par l'article 5.2, cinquièmement, on permet à une personne isolée d'aller occasionnellement faire du recouvrement. Si c'est une personne isolée, ce n'est pas quelqu'un qui va se spécialiser. D'avan-

ce, c'est presque permettre qu'on contourne la loi en envoyant quelqu'un qui ne le connaît pas. Vous savez, si vous ne connaissez pas cette loi, cela va être bien facile de ne pas vous y conformer.

M. LETOURNEAU: M. le Président, dans ce domaine comme en beaucoup d'autres, il pourra y avoir des abus et nous laissons au législateur le soin de préciser dans la loi plutôt que dans les règlements les dispositions qui feront que ces abus pourront être corrigés.

M. SAMSON: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, je ne sais pas à quelle heure vous avez l'intention de terminer ce dialogue qui est fort intéressant. Je ne voudrais pas reprendre...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous avions prévu entendre une autre association par la suite.

M. BONNIER: C'est pour cela que je n'ai pas l'intention de...

LE PRESIDENT (M. Cornellier) II ne nous sera pas possible de siéger ce soir.

M. BONNIER: Je n'ai pas l'intention d'être long. Mon voisin, le député d'Anjou me dit: C'est très bien. Je le remercie de cet encouragement.

M. le Président, il nie semble, à la lecture, à l'écoute du rapport de la Chambre de commerce, qu'on nage un peu dans l'ambiguité. Il me semble que le point de vue que la Chambre de commerce a adopté, c'est celui évidemment des gens qui sont impliqués dans le domaine du recouvrement et dans le domaine du crédit, plutôt dans le domaine du recouvrement, qui disent: II ne faut quand même pas changer trop de choses. Nos affaires vont bien. Si vous faites telle chose, cela va nous compliquer l'existence. Je vois les exemples de cela quand on dit: II ne faut quand même pas être trop exigeant dans l'examen. Pourquoi un examen, alors qu'on n'en exige pas, par exemple, du petit épicier du coin qui, lui, doit recouvrer certaines créances? Quand on mélange information et perception dans une même agence, quand on s'oppose un peu aux méthodes de contrôle qui sont absolument essentielles; quand on s'oppose aussi à certaines normes, à l'imposition de certaines normes de tarifs, j'ai l'impression qu'on regarde cette institution de recouvrement comme si c'était quelque chose qui, de soi, allait très bien et comme si l'Etat comme tel n'avait pas à réagir.

Moi, je pense que l'Etat, qui est responsable du bien commun, doit, à un moment donné, faire un constat que les agences de recouvrement se sont développées dans notre système de crédit. On permet qu'elles se développent, mais on pourrait fort bien ne pas permettre qu'elles se développent aussi. Je pense bien que cela serait pensable dans le système économique actuel.

Il faut bien se rendre compte que les agences de recouvrement deviennent à toutes fins pratiques, à l'heure actuelle — et c'est pour cela qu'il y a un peu d'ambiguïté — un des rouages du système financier. De ce point de vue, de même que l'Etat doit contrôler, doit régir le fonctionnement des agents de recouvrement.

Un agent de recouvrement, contrairement à ce qu'on peut croire parfois, n'est pas simplement un intermédiaire, comme on se l'est fait dire ce matin. Cela devient vraiment une institution en soi, un rouage dans l'ensemble du système financier qui doit être régi selon certaines normes. J'ai l'impression, de ce point de vue, qu'un certain nombre de recommandations de la Chambre de commerce vont diamétralement contre l'esprit et l'économie de la loi.

Je pense bien que cela a été fait d'une façon intellectuellement très honnête. Je connais les objectifs de la Chambre de commerce et j'en suis sûr, mais je pense qu'elle s'est méprise probablement à la lecture de ce projet de loi. Elle a négligé de le regarder dans une perspective fort différente.

Si on tient pour acquis que les agents de recouvrement sont un rouage dans le système financier et qu'ils sont importants, donc, l'Etat doit agir, doit établir une certaine norme de gestion, une certaine norme de fonctionnement, une certaine norme même quant à la qualité des personnes et à l'éthique qu'elles doivent observer, de façon que le bien public en général soit sauvegardé. Si le tout était envisagé dans cette perspective, je pense que beaucoup des suggestions du mémoire de la Chambre de commerce, beaucoup de restrictions tomberaient d'elles-mêmes. Je ne veux pas aller plus loin.

M. LETOURNEAU: Je ferai remarquer au député de Taschereau, si vous me permettez, le paragraphe 3.1 de notre mémoire où nous disons que nous sommes d'accord avec les objectifs du gouvernement dans le projet de loi concernant l'établissement de règles du jeu équitables et d'un code d'éthique. D'une façon générale, nous n'avons critiqué que des modalités et des moyens d'action et non pas le fond de la loi. Je ferai remarquer ce point à l'honorable député.

Le député a également dit que nous agissions comme si l'Etat n'avait pas à réagir et que nous semblions intervenir pour un secteur très spécifique.

M. le Président, je profite de l'occasion pour indiquer aux membres de cette commission que c'est dorénavant ce que nous allons faire de plus en plus. A la suite de notre dernière assemblée annuelle, il a été convenu d'un commun accord,

à la suite de l'examen du problème des relations entre le monde des affaires et l'Etat, que trop souvent l'intervention de l'Etat allait trop loin. Nous nous sommes donné comme mandat d'intervenir à chaque fois que, dans notre jugement et en toute bonne foi, nous croirons que l'intervention de l'Etat va trop loin. Nous nous sommes aussi donné comme mandat d'intervenir pour des groupes particuliers et nous allons le faire pour autant que notre intervention est conforme au bien de l'ensemble de nos membres et de la population. Nous allons le faire parce que trop souvent, lorsque des groupes particuliers sont visés par le gouvernement dans leurs activités, ils sont laissés seuls à se défendre. Il n'y a personne d'autre qui s'intéresse à leurs problèmes. On les laisse seuls se défendre. Là, il y a des précédents qui sont créés par voie de législation et qui font que, le lendemain, c'est un autre groupe qui subit l'assaut et on laisse encore une fois l'autre groupe se défendre seul et personne n'est intéressé.

Nous qui regroupons, à cause de la représentation horizontale que nous avons dans l'ensemble de notre "membership", à peu près toutes les activités du monde des affaires, nous avons d'un commun accord décidé d'intervenir de plus en plus dans des cas spécifiques comme celui dont nous venons de parler. D'autre part, lorsqu'on parle de l'activité des agents de recrouvrement, je fais remarquer à nouveau à l'honorable député de Taschereau que notre objectif est de parler non pas spécifiquement de l'activité des agents de recouvrement, mais de l'activité qui s'appelle recouvrement des créances. J'ai même mentionné au début de mon intervention ce matin que nous aimerions que la loi puisse s'intituler : Loi sur le recouvrement des créances. Ce qui étend nos remarques à l'ensemble de toutes les personnes qui font des activités commerciales parce que le recouvrement des créances n'est rien de neuf. C'est quelque chose qui a toujours existé. Ce qui est nouveau, c'est l'existence de sociétés spécialisées dans le regroupement des créances. Cela existe, là comme ailleurs, en fonction d'un développement technologique, le développement des affaires qui fait que les emplois, les fonctions se spécialisent de plus en plus, se fractionnent et qu'il y a des sociétés qui se créent pour faire des travaux très spécifiques. A un moment donné, quelqu'un qui est en affaires décide qu'il ne veut pas avoir de département de crédit et dit que tous ses comptes, il les confie à la perception. Automatiquement, il n'y a même pas de service qui s'occupe de perception dans son entreprise. C'est pour cela qu'on voit des institutions qui s'appellent des agences de recouvrement qui deviennent de plus en plus nombreuses, actives et spécialisées.

Encore une fois, nous ne voulons parler que pour celles qui font un travail honnête et raisonnable. C'est dans ce sens que notre intervention se plaçait.

M. TETLEY: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Charlesbourg.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, cela fait quand même depuis 11 h 35 ce matin qu'on discute de tous les aspects, sauf que je ne voudrais pas, à l'instar de mon collègue de Lafontaine, faire une projection, extrapoler et parler des documents qu'on discutera demain, à savoir s'il y a un bien-fondé des agences ou s'il y a un bien réel de les éliminer complètement.

Je ne me pose pas du tout la question, surtout en voyant une table aussi garnie de gens sérieux qui consentent et qui représentent également les gens qui oeuvrent dans cette profession, mais qui, en même temps, acceptent une législation en matière de, n'appelons pas cela de contrôle, mais pour le moins en matière de réglementation de la profession.

Cependant, je reviens à l'article 3.2. Si vous voulez bien être plus explicite lorsque vous indiquez que, pour éviter que vous fassiez un pléonasme où, par exemple, vous vous montrez sceptique du fait que le législateur puisse considérer qu'un certain groupe de personnes, qui agissent au nom d'autres, soit considéré comme étant à l'extérieur ou exclu du présent projet de loi et, en revanche, vous proposez qu'une autre catégorie qui est ici présente soit également, elle, exclue. En revanche, vous dites: Cependant, on voudrait que les règles de pratique, les règles d'éthique soient appliquées à tout le monde, même à ceux qui n'ont pas, au sens de la loi, des bureaux de perception, que ce soit, par exemple, un mandaté, disons, par une firme exploitant un commerce quelconque — on a donné tout à l'heure l'exemple du Syndicat, on peut garder ce même exemple, c'est une compagnie canadienne-française qu'on connaît... Pouvez-vous m'expliquer un peu ce pléonasme? Si, d'une part, vous dites que vous n'excluez pas tout le monde, donc vous excluez une certaine catégorie comme les avocats, et ci et ça, et pourtant on voudrait, nous autres, que vous excluiez une autre partie qui est une catégorie de professionnels qui prêtent et qui perçoivent. En revanche, vous demandez aussi que tout le monde soit assujetti au code d'éthique que la loi propose.

C'est un peu embrouillé, vous allez l'admettre avec moi. En tout cas, dans mon esprit. Voulez-vous m'éclairer, s'il vous plaît?

M. LETOURNEAU: M. le Président, c'est difficile de faire passer tous nos messages. Peut-être que le nôtre n'est pas suffisamment clair, notre mode d'expression n'est pas suffisamment clair. Mais je ne voudrais pas être obligé de faire de l'intimidation pour passer notre message.

Je pense tout simplement que ce qu'on veut faire, c'est faire respecter par tous ceux qui

vont poser l'acte de recouvrement de créances un code d'éthique et des normes raisonnables. Mais nous ne voyons pas l'obligation d'imposer à tous le permis parce que plusieurs de ceux qui posent l'acte sont déjà contrôlés par d'autres réglementations, législations ou professions. C'est la façon la plus synthétique et simple que je peux vous donner comme réponse.

M. HARVEY (Charlesbourg): D'accord, je vous remercie infiniment.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Très bien.

M. TETLEY: Merci, messieurs. Je trouve votre mémoire formidable. Je crois qu'il faut passer aux autres. Si vous voulez continuer peut-être à la fin demain, vous pourrez venir parce que vous avez déjà passé quatre heures ici, trois heures, et je crois que c'est simple politesse de laisser un autre groupement qui est censé passer aujourd'hui. Vous pourrez passer après.

M. LETOURNEAU: Merci, M. le Président. Avant de nous retirer, cependant, si vous nous permettez, les personnes qui nous ont accompagnés et que nous ne représentons pas officiellement à leur titre de représentants d'associations aimeraient vous dire, celles qui le désirent, si elles supportent ce que nous, comme Chambre de commerce, nous avons présenté aujourd'hui.

LE PRESIDENT (M. Cornellier) Très bien, en faisant vite, s'il vous plaît.

M. LETOURNEAU: Oui.

M. GOUDREAU: Alors, Clément Goudreau, président de l'Association des bureaux de crédit du Québec, Limitée. J'appuie le projet du mémoire qui a été présenté par la Chambre de commerce.

M. BEAULIEU: Lilian Beaulieu, président provincial de l'Association des directeurs de crédit. D'abord, je dois remercier la commission parlementaire, M. le ministre et tous les membres de nous avoir écoutés sagement et d'avoir, je pense, bien compris l'esprit des discussions qui ont eu lieu ici depuis ce matin. Au nom de l'Association des directeurs de crédit de la province de Québec, j'appuie le mémoire qui a été présenté par la Chambre de commerce.

M. POIRIER: Guy Poirier, représentant de l'Association canadienne des sociétés de prêts aux consommateurs. J'aimerais prendre une seconde pour dire au député de Rouyn-Noranda que, malheureusement, les sept pieds et huit deviennent de plus en plus rares dans notre industrie. On appuie, nous aussi, le mémoire présenté par la Chambre de commerce.

M. CHARTRAND: M. le Président, Jean-Claude Chartrand, je suis le président de l'Asso- ciation des directeurs de crédit de la ville de Montréal et, également, comme tous les autres, les 1,300 membres de l'association appuient le mémoire qui a été présenté par la Chambre de commerce de la province de Québec.

M. BIRON: Jean Biron, représentant de la Fédération des sociétés de financement. Quoique dans notre association nous ne sommes pas touchés directement par ce projet de loi, nous avons quand même l'intention d'appuyer le mémoire tel que présenté par la Chambre de commerce provinciale.

M. LETOURNEAU: Merci beaucoup, M. le Président; merci, MM. les membres de la commission. Nous avons énormément apprécié l'occasion de dialoguer aussi longuement avec vous et d'expliciter, autant que nous l'avons désiré, nos points de vue. Merci de votre compréhension.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, messieurs.

J'inviterais maintenant les représentants, les porte-parole de l'Association professionnelle des agents de recouvrement du Québec Inc.

Association professionnelle des agents de recouvrement du Québec Inc.

M. HEBERT: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la commission, mon nom est Gilles Hébert, avocat, de Montréal. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Guy Lefort, président de l'Association professionnelle des agents de recouvrement du Québec Inc., et de certains membres du conseil d'administration, MM. Pierre Rivard, Edouard Duguay, André Brière, Paul Roberts et Alex Shaw.

Tout d'abord, je crois que nous devons préciser ce qu'est l'association. Cette association regroupe les plus importantes agences de recouvrement au Québec. Elle compte dix-neuf membres. On retrouve annexée à la cédule I du présent mémoire la liste actuelle des membres. L'association regroupe environ 90 p.c. des agents de recouvrement du Québec; certains membres de l'association ont des places d'affaires dans plusieurs capitales du monde. Nous devons préciser d'abord que l'agence de recouvrement fait la perception de dettes, elle ne fait aucunement l'analyse de crédit, comme c'était le cas de ceux qui nous ont précédés. Dans le livre vert qui est à votre disposition, vous voyez qu'il apparaît 150 agences; on les nomme des agences de recouvrement mais, de fait, dix-neuf seulement, actuellement, font exclusivement du recouvrement de créance, les autres sont, généralement, des bureaux de crédit.

Nous voulons également souligner que toutes les agences que nous représentons étaient soumises à l'ancienne loi concernant les agents de recouvrement, le chapitre 43 de 1964, c'est-à-

dire qu'en vertu de l'article 2 de cette loi, chacune de ces agences — et c'était une exigence de l'association — avait un cautionnement et devait se conformer à cette loi pour faire partie de l'association. L'ensemble des agences, notre association, avait un code d'éthique que vous retrouvez aux pages 37, 38, 39, 40 et 41 du mémoire. Nous sommes très heureux que le gouvernement du Québec ait soumis cette loi. Nous l'avons nous-mêmes demandée lors de l'étude du projet de loi 45, soit la Loi de la protection du consommateur, devant la commission parlementaire. Nous disions, à ce moment-là: Suivant l'esprit de la loi projetée, visant à la protection des consommateurs et du public en général, il est recommandé qu'une loi soit envisagée et qu'une loi soit promulguée qui pourrait s'intituler Loi des agences de recouvrement.

Actuellement, toutes les provinces canadiennes et la plupart des Etats-Unis d'Amérique ont déjà en vigueur une telle loi dans le but de réglementer les agences de recouvrement faisant affaires dans leurs limites territoriales.

Le Québec n'a pas de loi adéquate se rapportant spécifiquement aux agences de recouvrement. Les compagnies dont les noms apparaissent ci-dessous s'engagent à apporter leur appui et leur collaboration, si requise, à la préparation d'une telle loi. Nous faisions cette demande il y a déjà quelques années. Nous constations nous-mêmes que des abus existaient dans la profession et l'association déplorait continuellement ces abus. Elle n'avait pas, cependant, les moyens légaux, avant la venue de cette loi, pour faire les enquêtes nécessaires et imposer les pénalités à l'agence qui pouvait avoir commis un tel abus. Les agences de bonne foi souffraient d'ailleurs de ces abus. Leur réputation en était considérablement affectée. Les cas dont vous avez entendu parler, soit par les journaux ou autrement, ce sont justement de ces cas d'agences qui ne font pas partie de l'association, qu'il nous était impossible de policer, si on peut employer le mot, et qui rendaient un mauvais service à la population et au commerce de l'agent de recouvrement en général.

Nous voulons donc être bien clair en disant que nous favorisons l'adoption d'une telle loi, nous la réclamions. Les modifications que nous allons élaborer devant vous n'ont pour seul but de faciliter la mise en application de cette loi sans entraver le commerce de façon générale. On a aussi beaucoup parlé du droit des débiteurs; il ne faut pas oublier que les créanciers ont également le droit d'être payés.

Nous voulons souligner que le mécanisme de la soumission de mémoires à la commission parlementaire nécessite, dans une période de temps assez limitée, la dissection de textes de loi, le plus souvent forts complexes pour des personnes dont les préoccupations journalières se situent en dehors d'un tel contexte. Le présent mémoire est le résultat des discussions et des consultations qu'ont eues les membres de l'association et qu'ils désirent vous soumettre. Nous allons d'abord passer aux recommandations et nous serons très heureux de répondre à vos questions après la lecture de ces recommandations.

Tout d'abord, le projet de loi 26 exclut de l'application de la loi un notaire, un avocat, etc. On en a parlé longuement au cours de la journée. L'association reconnaît le bien-fondé de ces exclusions puisque ces personnes sont ou déjà régies par des dispositions législatives déjà existantes ou exécutent des fonctions qui nécessitent le recouvrement des créances dans des conditions autres que celles dans lesquelles les agents de recouvrement exécutent les mandats qui leur sont confiés. La première recommandation est la suivante: L'association souhaiterait que le projet de loi énonce spécifiquement que toutes les personnes exclues de l'application de la loi, soit par l'émission d'un permis, par exemple, ne puissent en aucune façon laisser croire, par quelque moyen que ce soit, qu'elles sont des agents de recouvrement au sens de la loi.

On contribuera de la sorte à préserver l'image qu'entendent avoir et désirent conserver les membres de l'association, image qui devra également être, suivant le projet de loi, celle de tout agent de recouvrement exerçant ses fonctions au Québec.

L'émission des permis, section IV. Cet article vise la protection du public et c'est également une des fins envisagées par l'association depuis sa création. Je vous réfère à ce moment-ci à son code d'éthique. Au chapitre III du présent mémoire, nous auront l'occasion d'analyser plus à fond les objectifs que s'est fixés l'association. L'association croit toutefois que, dans son ensemble, l'article 10 du projet de loi accorde au directeur un pouvoir discrétionnaire trop important pour assurer la protection du public.

En effet, il faut bien voir que le public est représenté d'une part, par le débiteur d'une dette, mais encore, d'autre part, par le créancier et par tout individu qui, se croyant compétent pour exercer la fonction d'agent de recouvrement ou de représentant d'un agent de recouvrement, sollicite du directeur l'autorisation de le faire.

On remarque, à la lecture de cet article 10, qu'une personne qui sollicite un permis d'agent de recouvrement ou de représentant doit répondre à deux types d'exigences: 1. Celles prescrites par la loi ou un règlement du lieutenant-gouverneur en conseil. 2. Celles qui peuvent être fixées de temps à autre, à sa discrétion, par le directeur.

Nous désirons examiner sommairement ces deux types d'exigences et les problèmes d'application qu'ils soulèvent.

Exigences prescrites par la loi ou par règlement du lieutenant-gouverneur en conseil.

En pratique, il n'y a pas de problème en ce qui concerne les normes prévues à la loi. Celui

qui sollicite un permis peut s'y référer et constater très facilement s'il peut s'y conformer.

En principe, celles édictées par règlement du lieutenant-gouverneur en conseil ne sauraient soulever de difficulté pratique, sous réserve cependant de ce qui suit.

L'association, à cet égard, désire porter à l'attention du comité les deux points suivants:

Nécessité de l'adoption des règlements. Au moment où une loi entre en vigueur, il arrive souvent que tous ou partie des règlements du lieutenant-gouverneur en conseil ne soient pas promulgués. Nous avons été heureux de constater ce matin que le ministre a pris la décision de soumettre les règlements avant l'entrée en vigueur de cette loi. C'était une des recommandations et nous désirons participer de façon active à la rédaction de ces règlements ou au moins pouvoir y apporter nos commentaires sous forme de mémoire.

Parlons maintenant des exigences qui peuvent être fixées de temps à autre par le directeur, à sa discrétion.

M. TETLEY: J'ai dit que j'avais l'intention de soumettre les règlements à la commission parlementaire ou aux députés. Mais j'ai souvent consulté l'industrie et les groupes de consommateurs, aussi.

M. HEBERT: Oui.

M. TETLEY: Mais je n'ai pas fait de promesse auprès de vous.

M. HEBERT: Auprès de nous, non. Je disais que, ce matin, il avait été mentionné que les règlements seraient apportés avant que la loi soit adoptée. C'est une bonne façon de procéder, comme l'a souligné le Barreau ce matin.

Exigences qui peuvent être fixées de temps à autre par le directeur, à sa discrétion.

Ici, l'association se réfère plus particulièrement aux dispositions suivantes de l'article 10, par exemple 10 d), f) et g). 10 d): Etablir à la satisfaction du directeur sa probité, sa compétence... Il faudra évidemment attendre les règlements pour savoir exactement quelles seront les normes pour l'établissement d'une telle compétence, par exemple. 10 f): Avoir une connaissance jugée suffisante par le directeur de la présente loi et des règlements, ainsi que des lois connexes et des usages reconnus en matière de recouvrement de créances; 10 g): Etablir à la satisfaction du directeur que tous les associés, administrateurs ou officiers, ainsi que toute personne autre qu'un représentant qui agissent au Québec pour la corporation ou société possèdent les qualités prescrites.

La fin visée par ces dispositions est encore ici très louable. Néanmoins, il paraît qu'en autant que les alinéas précités de l'article 10 sont concernés les moyens permettant d'arriver à cette fin devraient être révisés.

En définitive, il semble que les pouvoirs accordés au directeur sont très étendus et ne sauraient être appliqués sans soulever des difficultés considérables.

Il paraîtrait très souhaitable, sinon essentiel, que la loi elle-même et les règlements fixent les critères ou conditions nécessaires à l'obtention d'un permis.

En accordant au directeur les compétences qui viennent d'être énoncées, on se trouve à lui donner un pouvoir quasi judiciaire considérable qui semble cadrer assez mal dans une législation bien faite.

L'association représente à cet égard que c'est au législateur qu'il appartient d'imposer ou d'édicter des normes et non à l'un de ses officiers; à ce dernier, le législateur doit fournir tous les outils nécessaires pour lui permettre d'agir à l'intérieur d'un cadre établi par le législateur.

En conséquence, l'association recommande l'abrogation de ces dispositions, en autant qu'elles accordent au directeur un pouvoir purement discrétionnaire.

Bien sûr, pourrait-on opposer à l'objection qui vient d'être formulée que le pouvoir judiciaire continue toujours d'exister comme organisme de contrôle des actes de l'administration. Toutefois, l'on doit bien admettre qu'au point de vue strictement pratique, les recours aux tribunaux impliquent des déboursés et des délais que le justiciable n'a souvent pas la possibilité d'assumer.

C'est pourquoi l'Association soumet qu'il est préférable que, dans son contenu, une législation soit rédigée de telle sorte que la nécessité de recours devant les tribunaux soit minimisée.

L'Association a déjà souligné son désir de participer à la rédaction des règlements permettant l'application de la loi. Elle renouvelle son voeu. L'article 10, par exemple, traite de probité, de compétence, de qualification et de connaissance suffisante. Ces termes ont une signification extrêmement vaste. Ainsi, l'Association voit-elle la nécessité d'en préciser le sens au moyen de règlements à la préparation desquels elle désire participer.

Comment définir la compétence d'une personne de 20 ans qui en est à son premier emploi, par rapport à une personne de 40 ans qui en est à son troisième emploi?

M. TETLEY: ... des membres dans votre association, et pas tout le monde est membre, hein? Vous pouvez refuser une personne?

M. HEBERT: Actuellement? M. TETLEY: Oui.

M. HEBERT: Dans l'association elle-même? M. TETLEY: Vous avez des normes?

M. HEBERT: Oui.

M. TETLEY: Quelles normes? Probité, compétence, connaissance suffisante?

M. HEBERT: Oui, dans le code d'éthique...

M. TETLEY: Tout le monde a des normes, c'est regrettable, mais continuez.

M. HEBERT: Comment évaluer la situation financière d'une personne de 25 ans et d'une personne de 40 ans? La situation financière prescrite devrait-elle être la même pour un agent que pour un représentant? Tous ces domaines-là devraient être étudiés à fond avant que des règlements soient faits.

M. TETLEY: C'est difficile, mais il faut le faire. C'est le problème.

M. HEBERT: Dans la question, par exemple...

M. TETLEY: Et c'est dans tout club, association, comté, parti politique, n'importe où, il faut que quelqu'un prenne la décision. Avant d'entrer dans la Société de Jésus ou n'importe quelle institution, importante ou non importante, il y a une décision subjective.

M. HEBERT: Oui, mais en autant qu'il existe certaines normes, par exemple. Dans le cas de probité, on peut dire: une personne qui n'a pas fait faillite, il faut être assez précis. La probité, qu'est-ce que c'est? Cela varie d'une personne à l'autre, suivant l'ouverture d'esprit ou non.

M. TETLEY: J'aimerais voir votre constitution et les normes de votre association, l'Association professionnelle des agents de recouvrement du Québec Inc.

M. HEBERT: Oui, nous pouvons vous fournir, sur l'association, exactement...

M. TETLEY: Est-ce que ces normes-là sont très précises?

M. HEBERT: ... quels étaient les critères appliqués à ce moment-là.

M. TETLEY: Peut-être allons-nous adopter ces critères.

M. HEBERT: Excellent.

M. TETLEY: J'ai dit: Peut-être, attention.

M. HEBERT: Evidemment, comme la question de la solvabilité, vous pouvez y pourvoir facilement par un cautionnement. Il s'agit de ne pas faire de règlements très larges qui donnent au directeur... Par exemple, le surintendant des assurances a des pouvoirs limités; il a des normes à remplir. Il n'a pas des pouvoirs complètement illimités.

M. TETLEY: Je ne partage pas votre opinion.

UNE VOIX: C'est un avocat.

M. HEBERT: A votre avis, ses pouvoirs sont illimités?

M. TETLEY: Mon opinion, je n'ai jamais eu, depuis quatre ans, de cas où il a outrepassé ses droits, où il a agi avec injustice. Quatre ans.

M. HEBERT: Mais, quand même, ce que nous voulons faire ressortir — et c'est le problème non pas seulement ici, mais dans toutes les lois qui sont adoptées, où on fait des règlements — c'est de remettre à l'autorité d'une personne non élue un pouvoir discrétionnaire très large quant à l'octroi de permis. C'est surtout cela qu'on veut faire reconnaître. Il peut s'exercer de la discrimination si on fait des normes très larges. Il s'agit de faire des normes au moins minimales pour qu'une personne puisse se guider. Je ne vois pas qu'un directeur puisse appliquer une loi s'il n'a pas certaines normes quant à l'étude de la probité d'une personne. Est-ce qu'il devra faire enquête à la Sûreté du Québec pour savoir si elle a un casier judiciaire ou quelque chose semblable? Il faudra peut-être lui donner certaines normes...

M. TETLEY: Parfait.

M. HEBERT: ... pour l'application du sous-paragraphe iii) du paragraphe g) de l'article 10 aux associés et administrateurs ou officiers actifs d'une corporation ou société.

On doit bien considérer que les personnes liées au processus corporatif n'y sont pas toujours directement intéressées.

Par exemple, si monsieur "X" désire donner à l'entreprise dont il est propriétaire un statut corporatif, il se peut très bien qu'il demande à son épouse et à son fils d'être actionnaires et administrateurs de cette corporation.

En définitive, seul monsieur "X" sera un élément actif dans la compagnie. C'est pourquoi il apparaît à l'association que seul ce dernier devrait répondre aux exigences de la loi et être responsable personnellement de toutes les activités de la corporation ou société. "Des permis," section IV, article 11. Cet article énonce que "Le nom d'une corporation ou société qui sollicite un permis doit comporter l'expression "agence de recouvrement".

En somme, ici nous insistons pour que les mots "agence de recouvrement" se retrouvent, mais qu'on ne soit pas obligé, à cause du processus long et coûteux, de faire des amendements à toutes les chartes présentement en existence pour que le nom d'agence de recou-

vrement soit inclus. Nous croyons qu'il est préférable que les mots "agence de recouvrement" se retrouvent au début ou à la fin de chacun des noms. Vous avez eu des recommandations dans ce sens tantôt.

Je dois mentionner ici que nous n'avons eu, soit avec le Barreau ou avec les gens de la Chambre de commerce et leur co-rédacteur du mémoire, aucune rencontre préalable pour discuter des points qui sont soulevés. On a appris ce matin qu'on avait plusieurs points qui étaient semblables.

Le troisième alinéa de l'article 12 du projet de loi impose à l'agent de recouvrement l'obligation de communiquer, sans délai, au directeur la cause de cessation de l'emploi d'un représentant qui a été à son service.

Dans le cas où une telle cessation d'emploi résulte d'une non-observance flagrante de la loi ou des règlements, il serait souhaitable que le directeur en soit informé. Dans le cas de mésentente entre un employeur et son employé, l'on considère que la situation est différente.

L'association fait donc une proposition comportant l'alternative suivante:

Que les mots "ainsi que la cause de la cessation de l'emploi "soient rayés et que cette obligation ne soit imposée que dans le cas d'inobservance flagrante de la loi des agents de recouvrement ou des règlements adoptés sous son empire. "Des permis", article 13. L'association a déjà soumis son point de vue quant aux pouvoirs discrétionnaires du directeur.

Elle réfère donc à ces commentaires et suggère que les mots "s'il juge que", employés à la deuxième ligne, soient remplacés par le mot "si".

Elle recommande de plus qu'à la quatrième ligne le mot "requises" soit remplacé par le mot "prescrites".

Toujours à la section "Des permis", article 16.

Pour les mêmes raisons que celles énoncées au paragraphe 2.5 du présent mémoire, il est recommandé qu'à la deuxième ligne du mémoire on fasse les modifications qui apparaissent à la page 17. "Tenue des livres et comptes". En français, le mot "compte" peut avoir diverses significations.

Aussi, l'association jugerait-elle bon de définir le mot "compte" au sens de la loi que nous étudions présentement.

Cette remarque s'applique également à l'alinéa d) de l'article 50 du projet de loi. "Rapport et inspection". Le but de cet article semble être d'obliger un détenteur de permis à fournir au directeur un rapport détaillé de ses affaires comme agent de recouvrement.

Il serait donc souhaitable que cet article soit rédigé en faisant directement référence aux détenteurs de permis relativement à l'exécution de leurs fonctions.

Plus précisément, cet article pourrait impo- ser à un détenteur de permis l'obligation de fournir, en la manière et aux périodes prescrites, un rapport détaillé des créances qui lui ont été confiées pour perception et des sommes qu'il a effectivement perçues ainsi qu'un relevé de son compte de banque en fiducie. "Rapport et inspection", article 23. Cet article accorde, d'une part, au directeur le droit de saisir les livres, registres, comptes, dossiers et autres documents d'une personne dont les affaires font l'objet d'une enquête et précise, d'autre part, les motifs qui peuvent justifier une telle saisie.

Il importerait tout d'abord de préciser que tous les documents saisis doivent être reliés aux affaires d'un détenteur de permis agissant comme agent de recouvrement.

Ceci aura pour effet d'éviter que des abus ne soient commis.

En second lieu, nous proposons à la page 20 du mémoire, ce que l'on retrouve dans The Collection Agencies Act de l'Ontario, à savoir qu'une photocopie soit prise de tous les documents quels qu'ils soient, mais que l'agent de recouvrement demeure en possession de ces dossiers. L'article se lit comme suit, par exemple: "Upon an inspection under section, etc., person inspecting may, upon giving a receipt therefore, remove any material referred to in clause a) that relates to the purpose of the inspection for the purpose of making a copy thereof provided that such copying is carried out with reasonable dispatch and the material in question in promptly thereafter returned to the person being inspected".

Alors, on peut arriver aux mêmes fins en prenant une photocopie des dossiers rapidement et en retournant les documents à l'agent de réclamation pour qu'il puisse continuer ses affaires pendant l'inspection, à moins qu'on ne veuille y mettre un séquestre, ce qui est autre chose.

L'insertion de telles dispositions dans la loi, sans nuire au pouvoir administratif relativement à l'exécution de ses fonctions, permettra de minimiser le préjudice qui peut être causé par le fait d'une saisie à une personne qui a droit à la présomption d'innocence jusqu'au prononcé d'un jugement reconnaissant sa culpabilité.

Motifs justifiant une saisie:

La saisie prévue à l'article 23 du projet de loi est une saisie préventive. Elle pourra être valablement pratiquée sans qu'un individu fasse nécessairement l'objet par la suite d'une seule accusation. Aussi, ceci justifie-t-il qu'on n'utilise cette procédure qu'avec la plus grande précaution. Les dispositions de la loi à cet égard devraient être rédigées de telle sorte que cette mesure ne soit utilisée qu'in extremis. Qu'il suffise de considérer la confidentialité de certains documents qui peuvent être saisis. Dans cette optique, il y aurait lieu à tout le moins de remplacer, à la dixième ligne de l'article 23, le mot "peut" par les mots "est sur le point de".

Des pratiques interdites:

La préparation du projet de loi 26 constitue

la preuve tangible que le gouvernement du Québec reconnaît la nécessité de la fonction d'agent de recouvrement ou de représentant. Au cours des années, l'association a, à maintes reprises, éprouvé certaines difficultés à définir les fonctions exactes de ses membres, compte tenu de l'ensemble de la législation québécoise en matière de recouvrement de créances. Ces difficultés ont résulté de la généralité et de l'imprécision de certains textes de loi. A titre d'exemple, on pourrait citer la Loi du Barreau du Québec.

Si le législateur reconnaît expressément par le projet de loi no 26 la tâche que peuvent accomplir des agents de recouvrement, il importe que la loi qui la régira soit assez précise et spécifique pour qu'on permette aux agents de recouvrement d'exercer, d'une part, leur profession et de pouvoir, d'autre part, en toutes occasions, définir si leurs activités se situent dans le cadre des droits, obligations et contraintes que la loi fixe.

L'association retient que le texte des articles 26 e) et 27 a) contribuera à maintenir cette insécurité devant laquelle se retrouvent depuis nombre d'années les membres de l'association. Elle recommande en conséquence le remplacement des articles 26 e) et 27 a) par des dispositions plus précises permettant de définir l'activité que peuvent exercer les agents de recouvrement ou leurs représentants. Un examen sommaire des dispositions précitées permettra de se convaincre de la nécessité qu'il y a de donner lieu à la recommandation de l'association.

Cet article énonce qu'un agent de recouvrement ou son représentant ne peuvent "laisser croire qu'à défaut de paiement, des poursuites judiciaires seront intentées ou que ce fait sera publié pour l'information de commerçants ou du public en général ou qu'une inscription défavorable sera faite sur des registres, etc".

Les mots "laisser croire" donnent ouverture à plusieurs interprétations. S'il leur est donné un sens trop large, on risque de priver totalement l'agent de recouvrement ou son représentant du droit que leur reconnaît la loi d'exécuter les mandats qui leur sont confiés par leurs clients. L'association soumet que le texte de loi devrait permettre à un agent ou à un représentant d'indiquer au débiteur:

Premièrement, qu'à défaut de paiement de sa dette son client pourra retenir les services de procureurs pour en assurer le recouvrement. Deuxièmement, que le défaut d'honorer ses obligations peut affecter le crédit d'une personne. Priver un agent ou représentant du pouvoir d'insérer dans un avis les représentations susmentionnées risque de lui retirer le droit d'exercice que lui reconnaît par ailleurs la loi. Cet article, l'article 27 a), d'autre part, précise qu'un agent de recouvrement ou un représentant ne peut faire des menaces ou de l'intimidation pour le recouvrement d'une créance. Les mots "menaces" et "intimidation" ont une connotation trop large pour être susceptibles d'application courante.

M. TETLEY: Vous me permettez une question brève? Est-ce que la loi de l'Ontario permet les menaces dont vous parlez?

M. HEBERT: Est-ce que...

M. TETLEY: Ou les stipulations?

M. HEBERT: Dans le texte de l'Ontario, je crois qu'on peut mentionner ces deux choses.

M. TETLEY: En tout cas, je vais vérifier.

M. HEBERT: Je vais faire la vérification, je vous donnerai exactement le texte.

M. TETLEY: Nous avons lu votre mémoire, n'oubliez pas, et mes conseillers l'ont étudié. Mais continuez !

M. HEBERT: Alors, il faudrait préciser ce qu'on entend par des menaces — c'est très subjectif — et de l'intimidation. On a fait évidemment, depuis le matin, beaucoup de relevés de cas; nous-mêmes, nous nous plaignons de ce qui a été fait par certains agents ou bureaux de crédit à travers la province et qui a donné un mauvais nom à l'association sans aucun doute. Cependant, il ne faudrait pas que la loi soit tellement ambiguë qu'il soit impossible de faire quoi que ce soit ou au moins d'aviser, comme l'ont mentionné certaines personnes ce matin, qu'éventuellement, si le type ne paie pas, ce sera référé à un avocat. Je pense qu'il n'y a absolument rien d'anormal là-dedans et on sait très bien que, si on se réfère à un avocat, ce n'est pas pour lui faire plaisir mais ce sera pour qu'il effectue le recouvrement du compte. Il s'agit de dire les choses telles qu'elles sont.

Quant à l'affectation du crédit, il est évident que, si vous êtes consulté et que ça fait 50 comptes que vous percevez de cette personne, vous ne pouvez pas dire que son crédit est excellent. Il faudra lui dire que, si elle ne paie pas, son crédit est affecté. Sans l'aide de la menace, il faut voir et dire les choses telles qu'elles sont.

Dans le même esprit, on devrait prévoir qu'un agent de recouvrement ou un représentant puisse communiquer avec le conjoint du débiteur. Le président pourra vous dire dans quel cas, par exemple, ça se présente. L'association recommande également de modifier l'article 27 d) comme suit: "de communiquer avec le débiteur lorsque l'agent de recouvrement a été avisé par écrit par le conseiller juridique du débiteur". Nous renversons le cas. Souvent les personnes peuvent vous dire dans un écrit de communiquer avec le conseiller juridique Me Untel; vous communiquez avec Me Untel et Me Untel n'a jamais entendu parler de monsieur. Il est préférable d'avoir la lettre du conseiller juridique disant: Monsieur, je m'occupe du cas, veuillez communiquer avec moi. C'est facile à

ce moment-là de le connaître de façon spécifique.

Les contrats et documents: Cet article, qui prévoit l'obligation qu'une convention écrite intervienne chaque fois qu'un créancier confie à une autre personne le recouvrement d'une créance, constitue une règle qui s'écarte de la pratique souvent appliquée en matière de recouvrement de créances par des agents de recouvrement.

Il est en effet fréquent qu'un agent de recouvrement puisse agir en vertu d'un mandat général qui lui a été confié par son client. Il faudrait, dans chaque cas, recevoir une lettre avant de commencer à procéder.

L'association considère qu'il est souhaitable qu'une telle pratique puisse continuer puisqu'elle simplifie la procédure administrative dans les bureaux de recouvrement.

C'est pourquoi l'association suggère que l'article 31 ne reçoive application que lorsqu'un créancier, un agent ou un représentant le demande, ou lorsqu'un mandat général n'a pas déjà été confié à un agent ou un représentant. Alors, losqu'un créancier a des formules imprimées, même dans les règlements à cette fin, lorsqu'un créancier désire signer avec une agence de recouvrement une entente, qu'une formule soit prête et que ce soit la formule qui soit utilisée couramment. Nous n'avons pas d'objection à cela mais dans la pratique, en fait — et ceci ne se fait pas seulement dans les agences de recouvrement — aujourd'hui ça se fait par téléphone. Les contacts, les mandats sont confiés au comptable ou à l'ingénieur ou à l'avocat par téléphone; c'est très rare qu'on utilise de façon régulière les écrits pour confier des mandats.

On pourrait même prévoir l'obligation pour un agent ou son représentant d'informer son client de l'existence d'une telle disposition à l'effet qu'il y a une formule et que c'est cette formule, s'il désire qu'une entente intervienne.

Les infractions et des peines: Nous voulons, ici, recommander qu'il n'y ait pas de minimum imposé. Nous vous apportons, dans nos remarques, un exemple. On peut facilement imaginer une situation où une corporation se rendrait coupable d'une première infraction qui ne serait que technique et dont la portée serait peu considérable, par exemple, la compagnie qui ne tiendrait pas le registre exactement dans la forme prescrite par le directeur. Si c'est une petite compagnie, on devra lui imposer une pénalité d'au moins $500. C'est peut-être disproportionné quant à l'offense commise.

Suspension et révocation. Les pouvoirs accordés en vertu de l'article 42 soulèvent encore le problème de la discrétion accordée au directeur. Nous nous sommes déjà exprimés à ce sujet. Quant à la réglementation, nous réitérons notre désir de participer à la rédaction, d'y apporter tous nos commentaires. Nous sommes heureux de l'annonce qu'a fait le ministre ce matin à ce sujet.

M. TETLEY: Avec...

M. HEBERT: Avec réserve.

M. TETLEY: Ce n'est pas avec réserve. J'avais fait une déclaration assez précise que je vais consulter certaines personnes.

M. HEBERT: D'accord! Quelques recommandations, à la fin, sur la suspension faite par le directeur. Nous croyons que les décisions du directeur devraient être publiées. Nous sommes d'accord sur ça, mais elles ne devraient l'être qu'après l'expiration, évidemment, des délais d'appel ou après un jugement de dernière instance.

L'établissement d'un tarif d'honoraires ne nous paraît pas souhaitable; les raisons sont les mêmes puisqu'il est parfois difficile d'établir a priori, et sans avoir apprécié chaque cas comme un cas d'espèce, le tarif applicable à chacun. Il s'agit du nombre et de l'âge des comptes, de travail de dépistage qu'il faudra effectuer, de la région où se fera ce dépistage et de la région où les comptes devront être perçus. Il y a tellement d'éléments qui entrent dans l'évaluation d'un tarif qu'il est pratiquement impossible d'en fixer un, à notre avis.

De plus, il faut bien l'admettre, les honoraires que charge l'agent de recouvrement ne sont pas payés par le débiteur consommateur mais par le créancier lui-même. Ce qu'on vous a souligné comme situation, c'est que rien n'est chargé au débiteur lors de la perception d'un compte. C'est le créancier qui assume tous les frais de la perception. Nous avons une autre recommandation.

M. TETLEY: Parfois, vous ajoutez des intérêts.

M. HEBERT: Lorsque c'est sur des billets ou des chèques, non pas sur des comptes, à moins qu'il y ait un contrat à l'effet que des intérêts seront perçus. Non pas sur des factures courantes, là où on indique en bas: 7 p.c. après trente jours. Dans ces cas-là, on sait très bien qu'aucun intérêt ne peut être chargé.

M. TETLEY: Même l'intérêt légal... M. HEBERT: Même...

M. TETLEY: ... établi par le gouvernement du Canada?

M. LEFORT: En fait, M. le Président, si c'est un billet bancaire...

M. TETLEY: Je comprends, un billet bancaire.

M. LEFORT: Nous, jamais nous ajoutons des intérêts à une créance pour nos clients, un intérêt qui n'est pas légal, qui n'est pas reconnu.

M. HEBERT: Nous profitons de l'occasion pour demander que l'agent de recouvrement

puisse représenter son client à l'occasion de poursuites intentées en vertu de la loi qu'on appelle la Loi des petites créances. Depuis l'entrée en vigueur de ces dispositions, les membres de l'association ont, à maintes reprises, pu constater que plusieurs créanciers ne pouvaient se prévaloir de ces dispositions parce que, matériellement, ils sont dans l'impossibilité de le faire. On pense, à titre d'exemple, au petit commerçant — on vous l'a cité ce matin — qui ne peut se permettre de quitter son lieu de travail pendant une demi-journée ou même une journée pour aller faire valoir ses prétentions devant le tribunal.

Un tel commerçant se trouve, souvent pour des montants très minimes, dans la situation où il doit renoncer au recouvrement de ses créances parce qu'il ne peut abandonner son commerce durant le temps nécessaire pour déposer une demande en justice et pour présenter ses prétentions au tribunal. Nous n'insistons pas davantage, mais plusieurs clients nous font cette représentation qu'ils aimeraient que l'agent de recouvrement puisse se présenter devant la cour des petites créances pour faire valoir leurs prétentions. Voilà, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Très bien.

M. TETLEY: Messieurs, je vous remercie de votre mémoire et de votre présence. Je crois que le mémoire est très important. Je l'ai lu, mes conseilleurs l'ont lu. Il contient de la matière très importante et de bonnes suggestions. Je ne peux que répéter que notre texte est un avant-projet. Je me souviens très bien du cas, lorsque le regretté premier ministre Bertrand a présenté un bill, il a dit que c'était un avant-projet: Procédez, messieurs, faites vos commentaires. Il s'adressait à l'Opposition autant qu'au public. Je répète ses paroles. Je vous remercie de vos observations. Je n'ai pas d'autres questions ni d'autres commentaires, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, il y a beaucoup de choses que j'ai dites à l'organisme qui vous a précédés. J'ai remarqué par votre réaction que vous aviez saisi les questions que j'avais posées. Je ne voudrais pas tellement y revenir à moins que vous ayez des réponses plus précises. Je voudrais quand même, d'une façon générale, poser la question: Est-ce que la proposition du Barreau, qui disait que tous devaient être soumis à la loi avec quelques noms de plus qu'on a ajoutés, incluant les avocats, les syndics, etc., sans nécessairement qu'ils aient besoin de permis, est-ce que vous souscrivez à cette recommandation?

M. HEBERT: Certainement, nous sommes d'accord que toute personne, que ce soit un syndic, que ce soit un fiduciaire qui fait du recouvrement, comme l'agent de recouvrement lui-même, sans l'obligation d'obtenir un permis, soit soumis à cette loi, oui.

M. LEGER: Je vois à la page 7 que vous parlez de pouvoirs discrétionnaires du directeur. Je n'ai pas vu cela. Je ne sais pas si le ministre a vu cela, mais je n'ai pas vu qu'il avait de pouvoirs discrétionnaires puisque le directeur vérifie si les normes présentées dans les règlements sont respectés. C'est son travail. Cela ne peut pas être discrétionnaire puisque c'est selon les normes. C'est une question d'appréciation. Je pense que c'est une vérification plutôt de l'application des règlements et de la loi que le directeur a à faire et non pas un pouvoir discrétionnaire de faire des choix personnels ou des choix d'évaluation en dehors des règlements. Je ne sais pas si le ministre peut me contredire là-dessus, mais il me semble que ce n'est pas cela.

M. TETLEY: Non, mais j'ai déjà parlé un peu dans ce sens.

M. HEBERT: J'aimerais apporter quelques commentaires sur vos remarques précédentes, devant l'organisme précédent. Toutes les agences que nous représentons ont une place d'affaires dans la province de Québec et nous croyons que toutes les agences de recouvrement doivent avoir une place.

M. LEGER: Vous en avez combien, déjà dans l'association?

M. HEBERT: Actuellement nous en avons 19 et nous percevons à peu près 90 p.c. des créances qui se perçoivent par les agences de recouvrement.

M. LEGER: D'accord.

M. HEBERT: Nous avons des chiffres qui peuvent répondre aussi à certaines autres questions. Par exemple, il est confié environ $75 millions à percevoir chaque année aux agences que nous représentons.

Vous dites: Oui, mais vous pouvez utiliser des moyens. En fait, si vous n'utilisez pas les moyens de pression, vous ne pouvez pas percevoir. Il est perçu à peu près $30 millions sur les $75 millions qui nous sont confiés, ce qui veut dire que l'excédent est, soit abandonné ou remis en perception à l'avocat ou à la justice.

M. LEGER: Sur $75 millions, vous en avez perçu, par votre agence, $30 millions.

M. HEBERT: Par les agences, $30 millions. M. LEGER: Un peu moins que la moitié. M. HEBERT: Oui.

M. LEGER: Avec les moyens... M. HEBERT: Avec les moyens du bord. M. LEGER: Avec les moyens actuels. M. HEBERT: Oui.

M. LEGER: Les moyens qu'actuellement la loi va changer.

M. HEBERT: Oui, et avec les moyens restreints que nous avions aussi.

M. LEGER: Maintenant, est-ce que c'est possible encore, pour vos clients, pour les membres de votre association — les agences de recouvrement — de continuer à être efficaces si le projet de loi est adopté tel quel, spécialement en empêchant — à quelle page avez-vous cela? — d'utiliser les arguments de poursuite possible et les arguments d'une mauvaise note de crédit? Est-ce que, vous autres, vous allez être encore capables de fonctionner sans cela?

M. LEFORT: Si vous me permettez, M. le Président, je vais répondre. C'est évident que si la loi reste telle quelle, j'admets avec vous, M. Léger, que vous nous enlevez un pourcentage d'efficacité. C'est sûr et certain. Il ne faut pas se leurrer. On pourrait continuer, évidemment, tout simplement par la répétition de la demande, parce que dans le fond, le recouvrement, ce n'est rien de plus, pour des personnes un peu indifférentes, que répéter à plusieurs reprises. La plupart du temps, on a des promesses de paiement parce que le genre de recouvrement que nous faisons, ce sont des comptes qui sont difficiles. C'est des gens qu'on a été obligé de retracer. Une fois que nous les avons retracés, nous leur demandons. Ils sont d'accord, la plupart du temps. Ils oublient de nous l'envoyer. Nous leur rappelons la chose deux, trois ou quatre fois avant d'avoir le paiement.

M. LEGER: Est-ce que vous dites qu'il est d'accord ou est-ce qu'il vous a dit qu'il était pour payer?

M. LEFORT: Oui.

M. LEGER: Ce n'est pas la même chose.

M. LEFORT: Premièrement, il reconnaît sa dette.

M. LEGER: Oui.

M. LEFORT: Le gars était parti, mais en fin de compte, il voit bien que... Bon! Alors, je vais vous envoyer tant de chèques, payables tant par mois. Acceptez-vous cela? Certainement. Bon! Mais cela ne veut pas dire qu'il les envoie. C'est là qu'est le travail d'un agent de recouvrement. C'est de revenir à la charge. Vous nous avez oubliés. On lui envoie un mot. Finalement, avec beaucoup, beaucoup de demandes, des répétitions de demandes...

Parce qu'il ne faut pas se leurrer. Vous savez, on parle d'intimidation. Moi, je vais vous dire franchement que, même avec de l'intimidation, si vous le permettiez, ce n'est même pas efficace. C'est aussi simple que cela. Alors, dans le fond, ce qui est important, c'est de faire comprendre au gars... Parce que les gens ne sont pas tous des peureux. Imaginez-vous un appel téléphonique où il y aurait de l'intimidation. Ils savent fort bien qu'on n'est pas dans la jungle, ici. Alors, dans le fond, ce n'est pas important, l'intimidation. On n'y tient pas, on n'en veut pas. On ne l'a jamais pratiquée, nous.

C'est pour cela que la plupart des bureaux exigent un code d'éthique professionnelle. En fait, c'est pour cela qu'il y a seulement trois bureaux dans le district judiciaire de Montréal qui ne font pas partie de notre association parce qu'ils ont un bon cautionnement à la cour et nous avons tous les autres.

Quant à tous les autres bureaux qu'on ne connaît pas, c'est parce qu'on a trouvé qu'ils n'étaient pas réglementaires. C'est aussi simple que cela.

M. LEGER: A la page 16 de votre document, vous dites, à un moment donné: "Dans le cas où une telle cessation d'emploi résulte d'une non-observance flagrante de la loi et des règlements, il serait souhaitable que le directeur en soit informé. Mais dans le cas de mésentente entre un employeur et son employé, l'on considérera que la situation est différente". Pourquoi?

M. LEFORT Incompatibilité de caractère. Pourquoi nuire au type? D'accord, si le type n'en vient jamais à bout, on lui fait comprendre que ce n'est pas une façon de fonctionner. Je le lui dis deux ou trois fois et il continue toujours à harceler les débiteurs, à ce moment-là, on le congédie et on veut que le directeur soit averti.

Mais c'est tout simplement une incompatibilité de caractère. Pourquoi nuire à ce type au niveau d'un autre bureau? A ce moment-là on dira: II n'a pas fait l'affaire, cela ne doit pas être trop bon. Pas nécessairement.

M. LEGER: Alors, la raison n'était pas parce qu'il aurait été trop persuasif?

M. LEFORT: A ce moment-là, il...

M. LEGER: C'est plutôt incompatibilité de caractère?

M. HEBERT A ce moment-là, nous ferions un rapport au directeur et il serait probablement difficile pour cette personne de se placer dans une des autres agences. Il y a du personnel: il y a au moins 400 ou 500 personnes qui son concernées directement, et indirectement jusqu'à 1200 personnes peuvent être impliquées dans cela.

M. LEGER: Vous considérez que même avec les moyens que vous aviez et que vous n'auriez plus, par la loi telle qu'elle est présentée, vous pourriez continuer à fonctionner?

M. LEFORT: Oui, mais je le répète, avec beaucoup moins d'efficacité, c'est sûr.

M. LEGER: D'accord.

M. LEFORT A ce moment-là, posez-vous la question. Combien de millions de recouvrement cela enlève-t-il? Cela pourrait même aller... Dans une loi où il y aurait élimination complète des bureaux de recouvrement qui paierait le coût des $30 millions que nous recouvrons dans le moment? Ce serait réparti au niveau de tous les consommateurs, c'est aussi simple que cela.

Dans le fond, le nombre est très restreint de ceux qui attendent d'être mis en recouvrement pour payer leurs comptes. Vous feriez subir à 90 p.c. des consommateurs le coût des 10 p.c. qui, en définitive, ne paieraient plus leurs comptes. C'est le service, dans le fond, que nous rendons.

M. LEGER: Autrement dit, les méthodes que vous pouvez avoir, c'est un peu avant que l'avocat arrive et que la poursuite soit faite. C'est peut-être une petite torture morale échelonnée, plutôt qu'un avis direct de l'avocat qui dit: Tu paies et cela finit là. C'est une possibilité de pression continuelle que vous avez et...

M. LEFORT: Si vous appelez cela des pressions.. D'ailleurs, ne vous imaginez pas qu'à chaque fois qu'on communique avec un débiteur, cela intervient. Au contraire, c'est le petit nombre de fois. La plupart du temps, soit dit en passant, on règle avec le débiteur d'une façon assez facile. Il va arriver des cas où, après avoir demandé à plusieurs reprises, on sera obligé de dire: Ecoute, pauvre vieux, tu sais très bien que mon client va donner cela à son avocat. Et jamais plus loin que cela, parce qu'on a toujours été assez scrupuleux sur le fait de savoir — et je parle au nom des membres de l'association — que nous n'avons jamais eu le droit, même en vertu de l'ancienne loi ou de la Loi du Barreau, de menacer, de parler de procédures judiciaires.

Encore une fois, on sait fort bien que cela peut aller à l'avocat. Mais qu'est-ce que l'avocat fera avec cela? Ce n'est pas à nous de savoir si ce sera nécessairement des procédures judiciaires, parce que l'avocat peut fort bien faire le recouvrement tout simplement par une mise en demeure. Le plus loin que nous allions et ce qu'on veut encore faire, c'est de dire: Ecoute, tu affectes ton crédit et, nécessairement, mon client donnera cela à son avocat. Un point c'est tout. Il serait important qu'on puisse continuer à le dire. Ni plus, ni moins.

M. HEBERT: Actuellement, avec la Loi du Barreau telle qu'elle existe, c'est tout ce qu'on peut dire. Le Barreau vérifie — j'en suis membre moi-même — ces choses-là et donne suite aux plaintes qui pourraient être faites contre les agences, quelles qu'elles soient. Mais elles ont pu fonctionner, même avec la Loi du Barreau actuelle, qui est très sévère à ce sujet-là.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais simplement donner une opinion générale, en terminant.

S'il y avait des corrections à apporter, spécialement à l'article 26 e) où on voudrait que l'agent de recouvrement puisse — ce qu'on disait tantôt — leur dire la vérité, c'est-à-dire les possibilités de recours à la justice et d'inscription défavorable, etc., et, un peu plus loin, la même chose, je pense, M. le Président, que ce serait une ouverture à des subtilités de fonctionnement si on acceptait ces amendements. Le député de Taschereau le disait tantôt. C'est devenu érigé en système et il est grand-temps que l'Etat s'ouvre les yeux sur la protection du consommateur. Il y a ouverture à l'intimidation. C'est sûr qu'il y a de la difficulté à avoir un contrôle de l'intimidation. Tout à l'heure, on parlait de "terrorisation"; ce n'est même pas trop fort.

J'ai eu des cas qui m'ont été référés. Je parlais ce matin d'une personne qui devait un montant et on s'est permis d'appeler son épouse pendant son absence pour dire: Votre mari est entré à l'hôpital et on veut avoir quelques informations. Est-ce qu'il a des revenus pour payer cela? Par des moyens détournés, on avait réussi à obtenir des renseignements et, par cette façon, on a terrorisé l'épouse.

Il y a des cas précis qui ont été donnés encore à mon bureau de député où on est allé voir l'employeur pour dire: Ton employé ne paie pas son compte, enlève-lui cela sur sa paie. Il faut être payé, nous autres. L'intérêt immédiat, c'est d'être payé.

A ce moment, cela donne une mauvaise note auprès de l'employeur pour cet employé. Il y a une ouverture tellement grande que les subtilités qu'on laisse possibles par l'article 26 amènent à conclure que, si vous êtes capables de fonctionner sans ces moyens coercitifs... Vous n'avez pas sorti le mot jungle tantôt? Souvent, la jungle, ce n'est pas nécessaire qu'il y ait des arbres. On en a de moins en moins, de toute façon. "The asphalt jungle", cela existe. Je pense qu'il est préférable que le ministre pense peut-être à aller plus loin dans sa loi. Puisqu'on est capable de récupérer des sommes — on serait capable, on l'a affirmé tantôt — pourvu qu'on n'aie pas des moyens aussi durs que ceux qui pourraient être utilisés avec les amendements qu'on nous propose, j'irais jusqu'à dire qu'il ne devrait y avoir avec les débiteurs et les agents de recouvrement que des relations par écrit, de façon qu'on soit bien sûr que ce que les citoyens reçoivent comme avis est conforme à la loi, puisque cela sera écrit.

Autrement, les téléphones ou les visites, ce

sont des choses qui sont difficilement contrôlables. Justement, c'est la couche de la société qui est la moins munie pour se défendre devant des pressions faites par des gens qui connaissent leurs droits, la façon de les présenter. Ils sont démunis justement puisqu'ils sont rendus à un point où ils perdent leurs possibilités de crédit. Je pense qu'il faut penser à l'aspect social de la situation. Si c'était uniquement par des relations écrites, on saurait ce qui est indiqué. Le citoyen saurait si la demande qu'il a eue est légale ou non parce que c'est écrit. Ce qui compte dans la loi, c'est ce qui est écrit et le oui-dire ou le témoin, on n'est pas toujours sûr que le citoyen est capable de se défendre de cette façon. Je pense qu'il faut tenir compte de cela. Je pense que des avis suivis, premier, deuxième, troisième avertissements, peuvent créer quand même, chez la personne, la connaissance de l'étape où elle est rendue dans la colère de celui à qui elle doit de l'argent.

Justement, il y en a même un qui avait dit une fois: Ecoutez, vous m'avez dit que c'était le dernier avis, je ne pensais pas vour revoir. C'était le contraire, c'était le dernier avis, mais le citoyen ne voulait nécessairement pas payer, on le comprend.

M. TETLEY: II était content!

M. LEGER: C'était le dernier avis, je ne serai plus achalé! C'est pour cela, je pense, que, pour l'éviter, tout ce qui peut se passer par téléphone, par des visites et des contacts personnels qui ne sont pas écrits, devrait peut-être être enlevé, de façon que ce soit un travail uniquement de complément à ce qu'un employeur ne peut pas faire. C'est la seule façon. Si on dit qu'on est capable de se limiter à cela, je n'ai pas d'objection, mais si ce commerce, cette industrie ne peut pas fonctionner sans cela, c'est donc dire qu'il n'a pas sa raison d'être.

M. TETLEY: Quels sont vos commentaires?

M. HEBERT: Justement, nous devons très souvent retracer les gens. Avec des lettres, vous comprendrez bien que c'est impossible de les retracer. Deuxièmement, nous sommes conscients qu'il y a eu des abus et nous espérons que le directeur va sévir contre chacune des agences qui sera fautive. On est d'accord sur cela. D'autre part, nous sommes aussi conscients qu'on joue beaucoup, le débiteur joue beaucoup sur l'agent de recouvrement. On me citait tantôt un article d'un journal qui disait qu'une dame avait reçu quatre appels dans une journée d'une agence de recouvrement. Ce qu'on a oublié de vérifier et nous, nous avons fait la vérification, c'est que ce sont quatre agences différentes qui l'ont appelée pour quatre comptes différents. Cela n'a jamais été mentionné dans le journal, évidemment. Ce sont des choses qu'il ne faut pas oublier non plus. Nous avons un rôle à remplir. Nous avons de l'argent à percevoir. Ce sont des achats qui ont été faits. Le créancier a droit lui-même à être payé. Le débiteur, je suis d'accord, n'a pas le droit d'être harcelé, mais il a aussi lui-même l'obligation morale de payer ses dettes. Je pense qu'il ne faut pas oublier cela, non plus. Je paie les miennes, vous payez les vôtres.

M. LEGER: L'avocat peut aussi bien le faire quand c'est le temps, et il a une mise en demeure de tant de jours. La personne qui est réellement en retard...

M. HEBERT: Maintenant, vous avez posé la question ce matin au Barreau, à savoir s'il était possible aux avocats de percevoir toutes ces créances si elles leur étaient confiées immédiatement. Je ne sais pas la réponse qui vous a été donnée. Il faudrait peut-être relire ce qui a été dit ce matin. On a bien vu qu'en fait, l'agence de recouvrement joue encore son rôle et que l'avocat joue le sien après.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Charlesbourg.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, nous sommes évidemment dans un contexte où on ne peut pas établir le parallèle entre l'endettement et la difficulté qu'éprouvent les firmes de recouvrement à être payées. Parce que même le mal qui est touché du doigt par les ACEF notamment qui, incidemment, étaient, il y a quelques secondes, citées en exemple dans un cas qui a été énoncé dans un journal qui porte le nom de Québec Presse, au mois de mai 1971... A ce moment, je pense que ce n'est pas tellement d'actualité quant à l'exemple. C'est vrai que ce sont des choses qui se produisent probablement quotidiennement. Quant à moi, je ne vois pas quelle objection il peut y avoir. C'est mon opinion très personnelle, remarquez, qui n'implique en rien la pensée du ministre là-dessus. Je ne vois pas pourquoi le directeur général, responsable de l'application de cette dite loi, adopterait une formule qui serait une formule écrite, adoptée également par l'ensemble des firmes qui procèdent dans le domaine du recouvrement et qui indiquerait justement dans quelle direction, peut se rendre dramatiquement, la situation de l'individu au sujet duquel on tente de récupérer les montants qui sont dus pour, comme vous le disiez tout à l'heure, des biens qui ont été achetés.

Je ne vois rien de sorcier là-dedans, personnellement en tout cas. Quelqu'un qui ne paie pas, après des efforts multiples, des efforts soutenus également pour récupérer un compte, qu'on lui fasse voir un formulaire qui serait identique. Il se peut là, maintenant qu'en dernier recours, que ce soient d'autres procédures qui peut-être seraient beaucoup plus sévères, qui seraient adoptées en laissant planer que ce serait peut-être remis entre les mains d'un

procureur. Je ne vois pas pourquoi ça pourrait entraver et ça pourrait être même un contrepoids à l'endettement parce que ce sont toujours les mêmes gens, je pense, qui sont confrontés dans différentes firmes de perception. Là-dessus, je pense que c'est une arme qui est très précieuse pour vous autres, au moins verbalement, de faire brandir l'hypothèse de remettre cela entre les mains d'un avocat. Je verrais même que ce serait souhaitable qu'un formulaire écrit, — comme le suggérait mon collègue de Lafontaine tout à l'heure — en revanche, au moins les prévenir du danger qui les menace, c'est-à-dire le danger d'une procédure judiciaire. C'est mon opinion.

M. LEFORT: M. le Président, vous ne voulez pas dire que vous voudriez éliminer complètement toutes les approches par téléphone?

M. HARVEY (Charlesbourg): C'est à la suite de multiples efforts que vous faites...

M. LEPORT: Que cette partie...

M. HARVEY (Charlesbourg): ...et dont vous avez fait état que...

M. LEFORT: ... soit écrite...

M. HARVEY (Charlesbourg): Absolument.

M. LEFORT: ... au lieu d'être verbale.

M. HARVEY (Charlesbourg): Absolument.

M. LEGER: Est-ce que le député de...

M. HARVEY (Charlesbourg): C'est mon opinion, remarquez.

M. LEGER: ... me permettrait une question? Si, dans la loi, il y a aussi le fait qu'ils peuvent utiliser l'argument de la poursuite judiciaire par écrit et que, en même temps, ils peuvent avoir des contacts par téléphone ou visites, comment voulez-vous contrôler s'ils n'ont pas parlé avant, de poursuites judiciaires? Et là, l'intimidation revient.

M. HARVEY (Charlesbourg): Encore là, c'est une question d'éthique professionnelle. Je pense qu'à un moment donné il faut quand même compter sur le sérieux des gens qui oeuvrent dans une profession donnée.

M. LEGER: C'est...

M. HARVEY (Charlesbourg): Je sais bien, je pense bien que je n'ai pas de leçon à donner à qui que ce soit sur la façon dont il joue son rôle de député, je n'ai pas de jugement à porter sur la façon dont vous jouez le vôtre, mais chacun à sa façon peut porter un jugement. Je disais bien que c'était mon opinion personnelle. Je verrais même d'un bon oeil et d'un avantage certain pour quelqu'un qui, par négligence... et ces habitués d'être très négligents et de devenir forcément des gens qui se ramassent à tout moment dans des bureaux de recouvrement, de leur brandir un peu cette menace. Je ne vois pas en quoi, par exemple, ça puisse nuire et intimider des gens; bien au contraire, je pense que parfois cet argument — et celui-là seul — peut faire bouger certaines personnes qui sont toujours des personnes qui doivent et qui attendent justement la dernière minute pour payer les biens pour lesquels ils ont déjà assuré une consommation. C'est mon opinion.

M. HEBERT: M. le Président, en fait, ce qu'il s'agit de faire pour le législateur, c'est de trouver un équilibre entre l'obligation pour le débiteur de payer ses dettes, ce qui est très normal, — il les a encourues, il faut qu'il les paie — et les abus que peut entraîner le recouvrement. Ces abus ne sont pas généralisés, j'imagine. Il y a eu des abus, nous en sommes conscients nous-mêmes; ça nous a pénalisés également parce qu'on essaie de se discipliner, je parle de l'association. Mais c'est un équilibre qu'il faut garder. Il ne faudrait pas faire pencher la balance à ce point qu'il soit pratiquement impossible pour le créancier de recouvrer ses dettes.

Aujourd'hui vous parlez de ne communiquer avec le débiteur que par écrit. Tout se fait par téléphone aujourd'hui; on commande à l'épicerie par téléphone, en chantant n'importe quoi. On appelle chez Eaton ou chez Dupuis pour faire venir des articles.

Quand viendra le temps de payer sa dette, on va dire: Bien non, moi, j'ai commandé par téléphone, écrivez-moi maintenant. Ne m'achalez pas, écrivez-moi. Ne m'appelez pas. C'est un juste milieu qu'il s'agit de trouver.

M. HARVEY (Charlesbourg) Dans le même ordre d'idées, si vous le permettez, une petite question supplémentaire. Le danger, en fait, de ne pas établir de contrôle par écrit, c'est le fait qu'une agence de recouvrement puisse elle-même dire qu'on a fait beaucoup d'efforts. A ce moment-là, elle remplace purement et simplement l'homme de loi ou l'avocat qui, normalement, procéderait par une lettre qui est une première lettre, effectivement, une lettre venant d'un bureau mais qui, au fond, est beaucoup plus une menace certaine, écrite sur papier.

Je pense que cette lettre-là ou ce document-là devrait être quasi obligatoire après moult efforts à percevoir verbalement. Ce devrait être une obligation, à mon point de vue.

M. HOUDE (Fabre): M. le Président, vous me permettrez une observation ou une suggestion au ministre. C'est peut-être mon instinct d'éducateur qui me pousse à dire ça, mais depuis environ neuf ans que je suis député, j'ai eu l'impression, qu'il était beaucoup plus facile

de faire des dettes que de les percevoir. C'est beaucoup plus facile dans nos bureaux aussi, quant au nombre de gens qui viennent nous voir. Ce n'est peut-être pas le même cas pour le député de Lafontaine, mais chez nous, j'ai énormément de gens qui viennent et pour qui le problème est justement de rapatrier des sommes ou des montants d'argent qu'ils ont prêtés, qu'ils ont avancés ou à la suite de matériel vendu.

Je suis bien d'accord, et loin de moi le soupçon de pensée de ne pas vouloir aider le consommateur. Peu importe les modalités ou les amendements qui seront apportés à la loi, ma suggestion est que je pense que, le ministre devrait profiter d'une telle loi pour faire vraiment de l'éducation populaire. Je pense qu'il est temps, au Québec, que la population, en général, connaisse les règles du jeu, qu'elle sache exactement ce qu'est une agence de recouvrement. Je pense que ça fait partie de votre mandat. Qu'elle sache exactement ce que sont les petites créances. Qu'elle sache exactement la différence entre un agent de recouvrement et un avocat. C'est peut-être stupide à dire, mais il y a beaucoup de gens qui ne le savent pas.

Une fois que les règles du jeu seront connues, il faudra aussi, tout en protégeant le consommateur — je veux bien — que ceux qui ont la manie d'emprunter et de ne pas payer, que ceux qui ont la manie d'acheter et de ne pas payer sachent qu'à un moment donné ils auront des problèmes. On a dit tantôt qu'il y avait $30 millions sur $75 millions, à peu près, qui avaient été perçus ou remboursés; cela veut dire qu'il en reste un "moses" de bon paquet qui n'a pas été recouvré. Je veux bien, moi, qu'on aide les pauvres, je veux bien qu'on aide les consommateurs.

Il est temps aussi que certaines personnes deviennent membres de la PPC: "Paie! paie! câline! " Ce sont toujours les mêmes, à un moment donné, qui donnent l'impression que tout le monde peut faire des dettes, que tout le monde peut acheter, et que payer passe au second plan. Tandis qu'il y en a d'autres qui travaillent comme des forcenés pour arriver à joindre les deux bouts et eux, très souvent, sont pénalisés. C'est mon impression générale. Je suis arrivé peut-être un peu tard cet après-midi, mais mon impression générale c'est qu'on doit donner des moyens à des organismes qui sont reconnus par la loi, pour pouvoir réussir dans la perception de paiements qui sont dus à leurs clients, et on doit en même temps protéger le consommateur. Mais je pense qu'on doit surtout, devant toutes ces nouvelles lois, ces nouveaux organismes, essayer d'en profiter pour faire énormément de publicité pour que les règles du jeu soient connues une fois pour toutes dans des termes extrêmement clairs, nets et précis de sorte que tout le monde puisse en profiter et être protégé par les textes de loi.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau a demandé la parole.

M. BONNIER: J'ai une question à poser au délégué. D'un côté, vous trouvez peut-être que le directeur aurait des pouvoirs discrétionnaires; d'un autre côté, vous groupez à peu près 19 personnes, qui sont des agents de recouvrement. Pouvez-vous me dire combien il y a de personnes? Sans doute votre association établit-elle une espèce de discipline à l'intérieur de ses 19 agents, ne serait-ce que par leur engagement à l'association comme membre. Mais il y en a combien de personnes ou d'organismes qui recouvrent et ne font pas partie de votre association? J'ai l'impression que, quels que soient les pouvoirs du directeur, qu'ils soient discrétionnaires ou non, il aura beaucoup de difficulté à moins que les gens ne se disciplinent eux-mêmes. Est-ce que vous avez une suggestion à faire quant à une discipline?

M. LEFORT: M. le Président, pour répondre à la première question, quand vous parlez de notre crainte de l'autorité du directeur, c'est que nous ne sommes pas des législateurs. A la lecture du texte de loi, quand c'est écrit "doit", "peut", on s'est dit ceci: Si le directeur, du revers de la main, peut, parce qu'il n'aime pas la figure d'un des détenteurs de permis, tout simplement lui enlever son permis, cela est un peu discrétionnaire. Il est évident qu'on est d'accord, s'il y a des normes bien précises, qu'il les fasse observer.

Deuxième question. Chez nous, dans notre association, vous allez dire: Où sont-ils les autres? Eh bien c'est aussi simple que cela: actuellement, dans la province de Québec, je vous dirai que la plupart des petites firmes de recouvrement de comptes n'ont pas ce que la loi déjà existante, le chapitre 43, exigeait, soit un bon de cautionnement déposé à la cour.

Actuellement, dans la province de Québec, il n'y a pas de permis qui existe. C'est aussi simple que cela. N'importe qui peut, demain matin, ouvrir chez lui un bureau de recouvrement de comptes avec son épouse, et c'est un agent de recouvrement. Personne ne le sait. Il n'y a pas de directives, il n'y a pas de permis à accorder. Donc, le gouvernement, actuellement, ne sait pas ce qui se passe.

C'est pour cela que quand vous nous retrouvez, nous sommes 19 membres. Après enquête dans le district judiciaire de Montréal, il y a seulement trois compagnies que nous pourrions avoir, qui ne sont pas membres, pour des raisons personnelles, je ne sais pas. C'est tout ce qui nous manque dans le district judiciaire de Montréal, comme membres ayant effectivement un bon de garantie déposé à la cour.

Vous avez toute une série de bureaux de recouvrement à travers la province de Québec que nous ne connaissons même pas, dont on n'a jamais entendu parler, qui font un petit peu de recouvrement et c'est eux qui, malheureusement, ont tellement terni notre image. Parce que sur eux, on n'a pas de contrôle. On ne les veut pas dans l'association, on sait qu'ils ne

répondent pas, actuellement, au peu que la loi exige. Alors nous ne les avons pas dans notre association.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais faire remarquer que la loi actuelle tombe sous l'autorité du ministère de la Justice. Si vous commencez vos commentaires ou vos critiques...

M. HEBERT: Est-ce qu'il y a eu des poursuites?

M. TETLEY: C'est un changement dans la loi.

M. HEBERT: D'accord.

M. LEFORT: Le ministère de la Justice ne peut pas contrôler cela parce qu'il n'existe pas, dans le chapitre 43, de permis. Or, qui peut dire...

M. TETLEY: Mais ne critiquez pas mes fonctionnaires.

M. HEBERT: Absolument pas. Ce n'est pas notre intention. Parce que cela ne relevait pas de votre ministère. C'est exact, M. le ministre.

M. BONNIER: Est-ce que je pourrais aller plus loin avec ma question?

UNE VOIX: Oui, oui.

M. BONNIER: Est-ce que vous seriez d'accord que le législateur inclue, dans la loi, un article à l'effet que ceux qui auront obtenu un permis devraient également appartenir à une association reconnue...

M. LEFORT: Evidemment.

M. BONNIER: ... qui, elle, verrait à une certaine discipline?

M. LEFORT: Evidemment. Ce serait beaucoup plus facile de s'autodiscipliner si tous ceux qui ont un permis faisaient partie de l'association. Nous serions les premiers à intervenir pour les remettre à l'ordre, pour en aviser le directeur s'il le fallait. Mais pour ce faire, il faut qu'ils soient obligatoirement membres de l'association.

M. LEGER: M. le Président, juste une réponse à l'affirmation du député de Fabre, tantôt. Il faut quand même réaliser que les personnes qui viennent voir leur député, parce qu'ils disent qu'ils ne sont pas capables de récupérer des montants qu'ils ont prêtés ou des sommes qui leur sont dues parce qu'elles ont vendu quelque chose, il faut réaliser qu'eux ont quand même des moyens légaux.

En plus de cela, même s'ils perdent de l'argent, ils ont la possibilité, dans leurs rapports d'impôt, d'inclure une clause de réserve pour mauvaise créance. C'est déjà prévu.

C'est souvent inclus, la possibilité de perte dans les intérêts que les compagnies de finance vont facturer. C'est aussi inclus, cette possibilité de perte dans les prix d'achat. Les gens paient un peu plus cher à cause des gens qui ne peuvent payer, de qui on a de la misère à récupérer des sommes. Comme c'est prévu dans le prix d'achat, c'est la raison pour laquelle je me dis: Les gens les plus mal pris ne sont pas les gens qui courent après les sommes qui leur sont dues; ils ont des moyens, eux, habituellement, avec lesquels ils sont habitués à se défendre, c'est la loi.

Celui qui est poursuivi n'est souvent pas en mesure de le faire. C'est pour cela que je disais qu'il faut éviter, si on a une conscience sociale, de recouvrer des sommes par des méthodes qui pourraient donner ouverture à des intimidations. C'est pour cela que je disais tantôt qu'il est possible, si c'était des facturations écrites — je connais des bons juifs de la rue Saint-Laurent qui recouvrent régulièrement leurs sommes sans faire de menaces parce qu'il y a la constance dans la demande.

Alors, une constance par la demande écrite, c'est réellement une façon de percevoir le problème et d'être réellement social-démocrate.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, dans le même ordre d'idées, je pense que je rejoins davantage mon collègue de Fabre, qui incitait à la vulgarisation et aussi à de l'information sur les dangers de l'endettement. Je pense que là-dessus les mêmes raisons prévalent dans le cas de l'assurance-automobile, qui coûte très cher parce qu'il y a des accidents. S'il n'y avait pas d'accidents, ce serait... Une automobile coûte très cher parce qu'elle a des risques de dépréciation. Je pense que, sur cela, je rejoins entièrement son idée sur l'importance de donner de l'information au public sur l'endettement. C'est précisément cela que le ministre des Institutions financières a visé en allant chercher au ministère de la Justice une loi qui n'était en quelque sorte à peu près pas appliquée et qui est maintenant dans un ministère qui a la responsabilité de protéger le consommateur. Il faut se le dire pour que ce soit le principe de base.

C'est cela qu'on vise: protéger le consommateur. Ce sera de bien informer que cette loi 26 régit en même temps vos organismes qui s'appellent des institutions de perception ou de recouvrement d'argent. Je pense que là-dessus le gouvernement est peut-être sévère dans sa loi, mais, à mon point de vue, c'est une bonne loi qui mérite d'être discutée et peut-être amendée.

M. LEFORT: C'est ce que nous tentons.

M. HARVEY (Charlesbourg): A mon point de vue, le principe...

M. HEBERT: M. le Président, j'aurais seulement une remarque à faire à la suite de la remarque de M. le député de Lafontaine, c'est qu'il ne faut pas croire que l'agent de recouvrement ne perçoit des sommes que pour de très grosses compagnies. Il agit comme percepteur de milliers de petits épiciers, marchands de meubles, etc., qui n'ont pas les moyens de se partir des services de recouvrement comme les grosses compagnies peuvent le faire. C'est un des rôles que joue l'agent de recouvrement actuellement. Ce sont des milliers de petits commerçants dans toute la province qui ont recours aux services de l'agence. Ils n'ont pas les moyens de s'atteler au téléphone et de régler tous leurs problèmes. Ils n'ont pas de service spécialement affecté à la perception de leurs comptes.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le mot de la fin, M. le ministre.

M. TETLEY: Merci, messieurs. Je voudrais faire un commentaire au sujet d'une remarque du député de Lafontaine qui a certainement dépassé sa pensée au sujet des bons Juifs du boulevard Saint-Laurent. La loi s'appliquera, et avec raison, à tout Québécois, canadien-français, anglais, écossais, juif, etc.

M. LEGER: Je l'espère.

M. TETLEY: Je l'espère, et c'est l'intention de la loi. Je vous remercie tous de votre mémoire que je trouve important et précieux.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, messieurs.

La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)

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