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Commission permanente des institutions
financières,
compagnies et coopératives
Etude du projet de loi no 26
Loi des agents de recouvrement
Séance du mercredi 2 octobre 1974
(Dix heures quatorze minutes)
M. CORNELLIER (président de la commission permanente des
institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre,
messieurs!
La commission des institutions financières, compagnies et
coopératives poursuit ses travaux ce matin pour l'étude de
mémoires en relation avec le projet de loi no 26. Les membres de la
commission pour la présente séance seront M. Boudreault
(Bourget); M. Bonnier (Taschereau); M. Bédard (Chicoutimi); M. Lachance
(Mille-Iles); M. Harvey (Charlesbourg); M. Dionne (Compton); M. Léger
(Lafontaine); M. Mercier (Bellechasse); M. Faucher (Nicolet-Yamaska); M. Samson
(Rouyn-Noranda); M. Tetley (Notre-Dame-de-Grâce) et M. Tremblay
(Iberville).
Le premier groupe invité ce matin à se faire entendre et
à présenter son mémoire est la Conférence des
factors et financement commercial du Canada, Inc.
M. LEGER: M. le Président, je veux simplement poser une question.
Qu'est-ce qui décide précisément de l'ordre? Est-ce le
ministre ou le secrétariat? Sous quels critères?
M. TETLEY: Ce n'est certainement pas, cette fois, le ministre. Durant
mes commissions, je n'ai jamais insisté ou même demandé ou
même posé une question.
M. LEGER: De quelle autorité relève le choix de l'ordre
des personnes? Juste une question.
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est le président qui le
suggère habituellement.
M. LEGER: C'est le président qui le suggère.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): La commission prépare l'ordre du
jour, pour autant que je suis concerné personnellement. Ce matin, le
secrétaire de la commission m'a demandé, parce que, sur l'ordre
du jour qui nous avait été soumis le nom de cette
conférence des factors ne paraissait pas, que ce groupe passe le
premier.
M. LEGER: Bon. Parce que je vois qu'on avait déjà la
Fédération des ACEF; il y avait trois personnes. Je ne vois pas
pour quelle raison une quatrième arrive en premier.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Précédemment, j'ai
rencontré le...
M. LEGER: Le dernier sera le premier servi.
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est cela, les premiers seront les
derniers.
LE PRESIDENT (M. Cornellier) Avant l'ouverture de la séance, j'ai
rencontré le représentant des ACEF; il m'a dit qu'il n'avait pas
d'objection.
M. LEGER: Quel sera l'ordre de la journée en ce cas?
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le deuxième groupe sera la
Fédération des ACEF, le troisième groupe sera à
titre personnel, M. Ehrlich, et, enfin, la National Apparel Bureau
(Québec), Ltd.
M. LEGER: D'accord.
M. SAMSON: Comment l'appelez-vous déjà?
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Celui qu'on passe, c'est la
Conférence des factors ou des facteurs, si vous voulez. C'est parce
qu'en français c'est inscrit comme factors; on nous expliquera
tantôt ce que le mot signifie. La Conférence des factors et
financement commercial du Canada, Inc. Je cède la parole au
représentant de la conférence, en lui demandant de s'identifier
et de nous présenter ses collaborateurs.
Conférence des factors
et financement commercial
du Canada Incorporée
M. GOLDSTEIN: M. le Président, M. le ministre, MM. les
députés, je m'appelle Yoine Goldstein; je suis le conseiller
juridique de la Conférence des factors et financement commercial du
Canada. A ma droite, il y a M. Shalom Sebag, qui est vice-président d'un
des membres, en l'occurrence l'Association de financement canadien
affiliée et, à ma gauche, il y a Me Harry Rosenfeld, qui est
président de l'association ou de la Conférence des factors et
financement commercial du Canada Incorporée.
La conférence regroupe onze compagnies de "factoring" et de
financement commercial à travers le Canada. Il s'agit, en l'occurrence,
de toutes les compagnies sans exception qui s'engagent ou qui se
livrent, au point de vue commercial, au financement du "factoring". Je vous
signale tout d'abord que toutes ces compagnies, sauf une, se trouveraient
à avoir leur siège social dans la province de Québec et
qu'une bonne partie des membres sont des filiales des banques à charte.
A titre d'exemple seulement,
vous avez sur la liste qui est devant vous, qui est rattachée au
mémoire, la Société de factorage BNE Limitée, qui
est une filiale de la Banque de la Nouvelle-Ecosse. Aetna Factors, qui est la
première, est une filiale de la Banque Royale.
Je vous signale ceci parce qu'il s'agit, lorsque nous parlons des
compagnies de "factoring" des compagnies de financement qu'on appelle
communément, en anglais, des "near banks", des quasi-banques. Ceci
décrit un peu les activités commerciales des "factors". Il s'agit
également d'une industrie dont le chiffre d'affaires se rapproche de $1
milliard par année, dont la plupart, la grosse majorité, dans la
province de Québec.
Pour répondre à la question sous-entendue du
président, qu'est-ce que c'est qu'un "factor"? Je me suis permis dans le
mémoire qui vous a été présenté de vous
fournir quelques définitions.
Vous trouverez, surtout dans l'annexe II, une définition qui est
tirée à la page 2 d'un bouquin qui a
été publié par M. Blondeau, Le financement de
l'entreprise, qui décrit la société de "factoring" comme
suit: "La société de "factoring" achète à un prix
ferme c'est nous qui le soulignons des créances d'une
entreprise sur ses clients et se charge elle-même de la perception. Elle
dégage, par le fait même, l'entreprise qui les lui a vendues du
risque de non-paiement du client, lui épargnant du même coût
l'odieux et le coût des relances ainsi que des poursuites en justice.
L'entreprise qui finance ses ventes par l'entremise d'une société
de "factoring" se trouve dans une situation financière enviable du point
de vue liquidité et trésorerie, son encaisse étant
élevée et ses emprunts de banque négligeables".
Il s'agit là d'une description d'un aspect de l'activité
de "factor", c'est-à-dire l'aspect assurance-crédit, l'aspect
d'achat sans recours des comptes à recevoir de l'entreprise commerciale,
dont la société de factoring se charge de la perception et assume
les risques, les cas échéants, de non-paiement ou de
crédit.
M. TETLEY: ... les notes ou les comptes...
M. GOLDSTEIN: ... les billets promissoires, les lettres de change?
Non.
M. TETLEY: II n'y a pas d'endossement du tout?
M. GOLDSTEIN: Non. Il ne s'agit pas... Il y a une distinction importante
à faire, M. le ministre, entre le "factoring" et ce que vous
décrivez, ce qui serait l'achat des lettres de change ou des effets
négociables ou l'escompte des effets négociables. Nous ne faisons
pas cela du tout.
M. TETLEY: Vous ne faites pas de transfert de créance?
M. GOLDSTEIN: Oui. Sous un premier aspect, il y a une session de
créance. Lorsque, évidemment, le "factor" assume le risque de
non-paiement ou assure la collection et la perception du compte, il va sans
dire que, par suite de certaines procédures légales, le "factor"
bénéficie d'une cession de ces créances; étant
propriétaire, le "factor" en assume les risques de non-paiement.
Mais il y a un deuxième aspect de "factoring". L'aspect que je
viens de vous décrire est l'aspect traditionnel, historique de
"factoring". A cause de plusieurs raisons économiques, plusieurs forces
économiques, le "factor", dans le contexte québécois et
canadien, a été obligé d'élargir, dans une bonne
mesure, la gamme de ses activités.
A titre d'exemple seulement, vous avez plusieurs entreprises qui ne
veulent pas se charger elles-mêmes de la perception de leurs comptes,
à cause du fardeau de comptabilité que cela leur impose et pour
d'autres raisons, mais qui, par contre, n'ont pas besoin
d'assurance-crédit non plus, parce que l'entreprise est convaincue et
satisfaite que les ventes qu'elle fait à ses clients sont telles que les
acheteurs sont suffisamment solvables pour qu'ils ne prennent aucun risque
quant à la perception.
Alors il s'agit, sous un deuxième aspect, d'une activité
commerciale de "factor" qui n'entre plus dans la forme, si vous voulez, usuelle
ou traditionnelle des activités de "factor", mais il s'agit quand
même de la perception des comptes.
Or, sous cet aspect, il y a une perception de comptes pour le compte
d'autrui. On devient, pour ainsi dire, mandataire ou, si vous voulez, agent de
perception, afin de percevoir ces comptes.
M. TETLEY: Toujours une procédure commerciale.
M. GOLDSTEIN: Sans exception, commerciale. J'y arriverai tout à
l'heure, M. le ministre. Il s'agit toujours d'une procédure commerciale.
Le "factor" ne fait jamais affaires à cause de la nature même de
l'institution de "factoring". Le "factor" ne traite jamais, sans exception,
avec le consommateur. Il s'agit toujours des rapports entre deux
commerçants ou plusieurs commerçants qui n'impliquent aucunement
le consommateur, qui n'impliquent aucunement l'acheteur éventuel des
produits.
M. LEGER: Est-ce que vous me permettez une question, pour bien
comprendre ce que vous avez dit jusqu'à maintenant? Juste une simple
question.
M. GOLDSTEIN: Je vous en prie.
M. LEGER: Vous avez deux sortes de modes de fonctionnement. Vous avez
celui de la
perception de comptes pour un client, que vous lui remettez
régulièrement, à mesure que les sommes sont entrées
et vous avez aussi l'achat complet de la créance, dont vous devenez le
propriétaire et, après cela, c'est votre problème de la
recueillir et vous ne remettez rien au propriétaire, puisque vous l'avez
déjà payé.
M. GOLDSTEIN: Voilà.
M. LEGER: C'est ça. Maintenant, est-ce que vous pouvez me dire
quel est le pourcentage que vous donnez comme mauvaise créance, pour
vous assurer quand même une certaine marge de fonctionnement et de profit
aussi, du fait qu'il y aurait des comptes que vous ne percevriez pas? Autrement
dit, si vous avez un compte de $1,000 je donne un chiffre symbolique
à percevoir, vous les achetez à quel montant, ce $1,000 de
créances?
M. GOLDSTEIN: Cela dépendrait de la nature des comptes. Il s'agit
d'une question d'opération commerciale et avec votre permission, je vais
passer votre question à M. Sebag qui pourrait vous répondre.
M. SEBAG: La charge qui sera débitée pour un montant de
$1,000 va être en fonction, premièrement, du volume d'affaires de
ce client et non pas en fonction du montant lui-même de $1,000 parce que
nous traiterons l'opération sur une base annuelle avec un client et non
pas sur une transaction isolée, facture par facture. Donc, cela va
dépendre du volume d'affaires, cela va dépendre du genre de
risque et de l'industrie dans laquelle il va opérer. Mais disons, pour
vous donner une idée, que le coût va varier entre 3/4 de 1 p.c.
jusqu'au maximum de 1 1/2 de 1 p.c.
M. LEGER: De la somme.
M. SEBAG: De la somme, c'est cela. Alors, c'est en fonction du volume,
c'est en fonction de pas mal d'autres critères.
M. LEGER: Ce n'est jamais auprès d'un consommateur, c'est
seulement de la collection ou du recouvrement commercial.
M. SEBAG: C'est cela. C'est toujours une transaction qui a lieu entre
les sociétés "factoring" qui font partie de cette association,
entre ces sociétés et les compagnies industrielles, des
distributeurs, des importateurs qui font affaires avec des détaillants,
uniquement avec des magasins ou des entreprises. Ce sont toujours des
transactions commerciales.
M. GOLDSTEIN: Avec votre permission, messieurs, sous ce deuxième
aspect que je viens de vous décrire, c'est-à-dire l'aspect
où la perception des comptes n'est pas nécessairement
assurée, il y a toute une gamme de possibilités ou de variations
d'activités auxquelles le "factor" pourrait se livrer. A titre
d'exemple, le "factor" fonctionne très souvent avec une autre
institution, que ce soit une institution bancaire ou une institution
gouvernementale, comme par exemple la Banque d'expansion industrielle et
autres, pour offrir aux clients une gamme complète de services qui lui
permettront de fonctionner et d'améliorer son commerce, d'augmenter son
chiffre d'affaires, etc.
Sous ce deuxième aspect, c'est-à-dire la collection ou la
perception, sans garantie, où il peut arriver et il arrive très
souvent que le "factor" fasse la perception des comptes pour son client sans
pour autant se conformer aux exigences de la cession de comptes à
recevoir qui est prévue au code civil, et ceci pour plusieurs
raisons.
Il se peut que le compte ait déjà été
cédé à la banque ou à une autre institution
financière, ou encore, il se peut que pour des raisons d'achalandage, le
client ne veuille pas que ses acheteurs sachent qu'il se fait financer par une
compagnie de "factoring", ou plusieurs autres raisons encore. Il y a des
exemples d'exportateurs européens qui ne veulent pas se charger de la
perception de certains comptes au Canada; ils préfèrent que la
perception soit faite par d'autres associations spécialisées. Je
tiens à vous faire remarquer, à titre d'exemple, que plusieurs
des membres de la conférence des "factors" ont des procédures
comptables très poussées, très avancées; ils
disposent d'ordinateurs qui permettent aux "factors" de faire la
comptabilité des clients pour le client sur une base beaucoup plus
profitable, rentable, et pour le client et pour le "factor".
Là où le projet de loi pourrait nous affecter, je vous
cite tout simplement à titre d'exemple l'article 11 qui prévoit
que "le nom d'une corporation ou société qui sollicite un permis
doit comprendre l'expression "agence de recouvrement." A toutes fins pratiques,
ce serait faux, parce qu'il ne s'agit pas, en l'occurrence, lorsque nous
parlons des "factors", des agents de recouvrement, ce n'est pas le cas, ce
serait induire le public en erreur. Il y a également certaines exigences
dans la loi, entre autres, à l'article 26, qui demandent une
procédure spéciale pour les dépôts des montants qui
sont perçus dans des comptes spéciaux fidéicommis, ce qui
ne représente pas et ne pourrait pas représenter la pratique
courante, parce qu'à part l'activité des "factors" à faire
la perception des comptes, le "factor" prête également de l'argent
à ses clients sur la garantie, soit tout simplement de crédit
général de l'entreprise, soit sur la garantie de l'inventaire ou
des immobilisations ou plusieurs autres garanties possibles d'un nantissement
commercial, par exemple.
Il doit tenir compte du montant qui est perçu de temps à
autre par le "factor" pour le compte du client, garanti par le client au
"factor", comme garantie collatérale subsidiaire
pour les avances qui sont faites de temps à autre au client, de
sorte qu'il est obligé de comptabiliser de façon spéciale
et surtout, est obligé de déposer dans des comptes
spéciaux les montants qui sont perçus pour un client.
M. TETLEY: Permettez-moi une insertion. M. GOLDSTEIN: M. le
ministre.
M. TETLEY: Pour couper la discussion, pour ma part, sans trop viser le
gouvernement, après le débat ici, je ne vois pas la
nécessité de vous couvrir par la loi, avec ces réserves.
Je crois que vous êtes venus demander une exemption à la loi.
M. GOLDSTEIN: Oui.
M. TETLEY: Je crois que si c'est vrai que vous ne touchez pas les
consommateurs, peut-être la solution que je vois pour les exemptions et
les exceptions à l'article 2 de la loi, c'est d'exempter les personnes
qui transigent avec des non-consommateurs.
M. GOLDSTEIN: Cela pourrait résoudre le problème.
D'ailleurs, j'étais pour y arriver. J'avais trois solutions à
proposer, qui sont d'ailleurs proposées dans le mémoire. La
première solution possible était justement d'exempter... Je vous
ai dit tout à l'heure que la Conférence des factors regroupe tous
les "factors" qui font le "factorage", sans exception, et dans la province de
Québec et ailleurs au Canada, de sorte que ma première suggestion
aurait été d'exempter les "factors" membres de la
Conférence des factors.
La deuxième possibilité, pour arriver, à toutes
fins pratiques, à la même conclusion, était de
définir le débiteur comme étant une personne physique
endettée pour un achat au détail. Après tout, c'est le
consommateur... Si je comprends bien l'esprit de la loi, vous voulez
à très bon titre d'ailleurs, parce que c'est le but poursuivi
protéger le consommateur contre certaines procédures
auxquelles peuvent se livrer des agences de perception ou de collection.
Si le débiteur, la personne qui est visée et
protégée par la loi, était définie comme
étant une personne physique endettée par l'achat au
détail, cela éviterait évidemment tout problème au
point de vue "factor", parce que nous ne traitons jamais avec ceux qui sont
endettés pour un achat au détail.
Et la troisième possibilité, puisqu'il s'agit toujours,
lorsqu'on parle de l'activité des "factors", et sans exception des
transactions qui se font entre commerçants et uniquement
commerçants, jamais de consommateurs, la troisième
possibilité que nous avons envisagée, c'était d'exempter
les transactions qui constituent des opérations commerciales pour toutes
les parties en cause.
Evidemment, pour autant qu'il y a un consommateur là-dedans, il
faudrait protéger le consommateur. Mais pour autant que nous sommes
concernés, les transactions que nous faisons sont toujours, et sans
exception, commerciales. Les personnes en question sont toujours des
commerçants et jamais des consommateurs, de sorte qu'en indiquant qu'il
y a une exception pour les transactions qui constituent des opérations
commerciales pour chaque partie, cela éviterait le problème.
M. TETLEY: Parfait. J'aimerais avoir l'opinion des députés
de Lafontaine, de Rouyn-Noranda et de Taschereau.
M. BONNIER: Je voudrais seulement poser une question. Je voudrais
seulement savoir, M. le ministre, si ces compagnies sont couvertes par
l'article 88 de la Loi des banques, étant donné que ce sont des
extensions de certaines banques.
M. GOLDSTEIN: Non, nous le sommes pas, ce ne sont que les banques
à charte définies par la Loi des banques qui sont couvertes. Nous
ne le sommes pas.
M. TETLEY: J'aimerais connaître votre opinion.
M. LEGER: J'ai deux questions à vous poser. La première,
c'est que votre déclaration d'il y a quelques minutes disait que vous
étiez pratiquement convaincu, avec quelques réserves...
M. TETLEY: Non, pas pratiquement, mais j'ai l'esprit ouvert. Je veux
connaître votre opinion.
M. LEGER: ... aux choses nouvelles. Vous avez dit tantôt que vous
pensiez probablement que ces groupes devraient être exclus de la loi. Le
rapport de la Chambre de commerce disait, entre autres, par exemple... C'est
là que je trouve que vous semblez prendre position immédiatement
sur le rapport qui disait qu'on devrait éliminer du permis
nécessaire et obligatoire certains groupes, mais que tous devraient
être soumis à la loi. C'était le principe qui semblait se
dégager du Barreau et de la Chambre de commerce. Même la Chambre
de commerce ajoutait un groupe qui devrait être inclus parmi ceux qui
n'ont pas besoin de permis mais qui sont soumis à la loi et on parlait
des personnes qui ne recouvrent que des comptes dus par des commerçants.
Est-ce que ce n'est pas le cas aujourd'hui?
A ce moment, je comprends que les transactions...
M. TETLEY: Vous vous basez sur le mémoire de la Chambre de
commerce.
M. LEGER: C'est-à-dire que j'ai été
sensibilisé, j'ai été sensibilisé par bien des
choses. Mais ce que je voulais ajouter, c'est que je suis d'accord sur le fait
qu'en général, je pense que le fonctionnement des groupes
"factors" ne rejoint que des commerçants qui sont capables de se
défendre entre eux. Quand même, je pense qu'il y a un groupe de
commerçants qu'on pourrait qualifier peut-être de consommateurs
dans le sens large du mot. Exemple: un petit épicier qui,
peut-être, achète directement d'une compagnie comme Proctor &
Gamble ou par un gros distributeur et que Proctor & Gamble ou une compagnie
de cette envergure, ou d'autre envergure, vous donnerait ses créances
quotidiennes.
Ce petit épicier est quand même une personne qui aurait des
difficultés à se défendre, contrairement à un gros
magasin ou une autre industrie qui a déjà son système; il
reçoit une facturation de "factor", et il envoie son chèque. Mais
le petit épicier peut avoir des problèmes. Pour quelle raison
dire, immédiatement, qu'il peut être exclu, malgré que, moi
aussi, je pense qu'en général vous avec des relations
plutôt commerciales que des relations individuelles avec des personnes
démunies comme le sont trop souvent les consommateurs. C'est ma
première réaction. Je ne voudrais pas qu'on l'accepte tout de
suite et dire que c'est officiel.
M. TETLEY: Avez-vous des clients parmi les petits épiciers, par
exemple dans la ville...
M. LEGER: Ou un autre commerçant du même style?
M. GOLDSTEIN: Voici ce qu'il arrive dans l'industrie. D'abord, les
"factors" se dirigent dans cette sorte d'industrie. L'industrie textile est
très bien représentée comme client des "factors".
C'était et c'est, d'ailleurs, le client classique de "factors" depuis
l'institution des "factors" au 18e siècle, en Angleterre. Mais le petit
épicier, dont M. le député a parlé tout à
l'heure, serait plutôt un monsieur qui fait ses achats non pas de Proctor
& Gamble, mais des distributeurs de Proctor & Gamble. Sauf de
très rares exceptions, dont aucune ne me vient à l'esprit, ce
serait plutôt Proctor & Gamble qui serait financé par les
"factors", et non pas les distributeurs de Proctor & Gamble. Ce sont
surtout des manufacturiers avec lesquels nous traitons, de sorte que, sans
exception, nous ne faisons pas affaires avec ces messieurs. Qu'ils soient
commerçants sous une certaine optique, ils sont, à toutes fins
pratiques, des consommateurs dans le sens d'être obligés de se
faire protéger un peu par la loi. Nous ne traitons quasiment pas avec
ces messieurs, pour la très bonne raison, vous savez, que les
facturations qui sont faites par les distributeurs au prix commerçant se
trouvent à être des factures de $100, $200, $300. Financer des
factures semblables, des comptes semblables, ce n'est pas rentable, ni pour les
clients, ni pour les "factors", de sorte que l'industrie de "factoring"
même ne se prête pas au financement de ces petites factures pour
lesquelles le petit commerçant, consommateur, si vous voulez, serait
endetté. Ce n'est pas le genre de l'industrie.
M. LEGER: Comment cela fonctionne exactement, autant dans le domaine de
la facturation que dans le domaine d'une créance que vous avez
achetée vis-à-vis d'un client qui a acheté un appareil
quelconque, mettons An-sonics, un genre de téléphone et qui ne
fonctionne pas, mais il ne paie pas ses paiements en trois ans. Vous savez, les
machines qu'on loue pendant trois ans, et au bout de trois ans, on peut
l'acheter. Celui qui l'a vendu ou loué se fait assurer par une autre
compagnie qui pourrait être une des vôtres. Comment cela
fonc-tionne-t-il vis-à-vis de ce client? Est-ce que vous avez la
responsabilité du service qu'il faut donner pendant les trois ans? Et
s'il y a des défauts et si le client ne veut pas faire son prochain
paiement parce qu'il y a un défaut, quelle réaction avez-vous
avec l'autre compagnie si vous faites uniquement la facturation et si vous avec
acheté à créance?
M. GOLDSTEIN: Vous parlez déjà d'un quatrième
niveau, niveau auquel nous ne nous rendons jamais comme "factor". Enfin, si
vous permettez, je vais vous dire qu'il y a tout d'abord, le "factor". Ensuite,
il y a son client, le manufacturier. Ensuite, il y a le détaillant.
Finalement, il y a le consommateur.
Les comptes qui sont financés, qui sont "factorés", sont
les comptes entre le fournisseur, le manufacturier, et le détaillant. Le
détaillant est obligé de payer son fournisseur,
c'est-à-dire en autant que les comptes sont financés il paie le
"factor". Le détaillant, lui, par la suite, peut revendre au
détail au consommateur et c'est à ce niveau qu'il y a d'autres
compagnies de finance qui financent, à titre d'exemple, l'appareil haute
fidélité ou l'appareil de télévision.
M. LEGER: Excusez-moi, je pense vous avoir envoyé dans la
mauvaise direction, ce n'est pas ce que je voulais savoir.
M. GOLDSTEIN: Ah! bon.
M. LEGER: Mon exemple était boiteux là, ç'avait
l'air de l'achat d'un individu.
M. GOLDSTEIN: Oui.
M. LEGER: Je parle du petit commerçant qui vend du linge et qui
l'a acheté directement de la compagnie et qui est facturé par une
compagnie comme la vôtre. A ce moment-là, s'il a des
problèmes avec toute la quantité de linge, dans les pointures,
etc., et qu'il est facturé par
vous, dans le cas où c'est une facturation, quelle est votre
responsabilité vis-à-vis de cela; dans le cas où c'est un
achat de créance, quelle est votre responsabilité
là-dessus?
M. GOLDSTEIN: Bon, je vais vous donner la réponse à cela.
J'ai mal compris votre première question, je m'excuse. La réponse
est celle-ci: Tous nos contrats, sans exception, disent que s'il y a un
différend qui se soulève entre l'acheteur éventuel et le
fournisseur, à ce moment-là le compte qu'il nous a
cédé est retransporté ou retransféré,
recédé, rétrocédé, si vous voulez, au client
et lui s'occupe des problèmes. Nous ne sommes pas en mesure et nous ne
voulons pas non plus être en mesure de nous battre au sujet de la
qualité ou la quantité ou des défectuosités qui
peuvent se trouver dans le produit en question. Alors tous nos contrats disent
que chaque compte qui nous est cédé est automatiquement
retransféré, recédé,
rétrocédé, si l'acheteur éventuel qui serait
peut-être le détaillant soulève une question
que ce soit bien fondé ou mal fondé, cela ne nous regarde pas
quant à la quantité, la qualité, les
défectuosités ou quoi que ce soit.
Alors, même à ce niveau-là, si l'acheteur
éventuel veut se plaindre et je ne parle pas du consommateur, je
parle du détaillant si le détaillant a des plaintes
à faire, nous ne percevons plus le compte. C'est notre client qui doit
percevoir le compte et faire le nécessaire pour donner satisfaction
à son acheteur.
M. LEGER: Quelles sont les méthodes de perception d'un
détaillant, parce qu'il y en a beaucoup de détaillants qui sont
de petits détaillants, de petits commerçants qui ont de la
misère à joindre les deux bouts, quelle est votre méthode
de perception d'un détaillant qui est récalcitrant parce qu'il a
des difficultés financières? Comment cela fonctionne-t-il pour
des ententes afin d'échelonner cela, si vous êtes le
représentant ou le mandataire ou le nouveau créancier? Comment
cela fonctionne-t-il?
M. GOLDSTEIN: J'ai deux réponses à cette question.
D'abord, il arrive extrêmement rarement s'il arrive jamais
que nous avons des comptes dus par de petits détaillants. Je vous ai
indiqué tout à l'heure qu'il s'agit là déjà
d'un quatrième niveau d'achat, de circulation du bien en question et ce
n'est que rarement que le compte nous est remis et que nous l'avons. Parce que
nous, en principe, on a les comptes des manufacturiers. Les manufacturiers, au
lieu de vendre directement au détaillant, vont le plus souvent à
leurs distributeurs qui, eux, s'occupent de vendre aux détaillants. De
sorte que nous avons très rarement, même jamais, des comptes
à percevoir directement des détaillants.
Il y a certaines exceptions, je ne veux pas vous induire en erreur. A
titre d'exemple, il y a plusieurs comptes dus par Simpson Sears qui est bel et
bien détaillant, ou Eaton's et Dupuis qui sont bel et bien
détaillants.
Mais, à ces messieurs, les manufacturiers vont directement, sans
passer par l'entremise d'un distributeur, parce que, évidemment,
étant donné le volume de leurs achats, ils peuvent traiter
directement avec le fournisseur, avec le manufacturier, de sorte que nous avons
quand même des comptes aux détaillants, mais il ne s'agit pas de
comptes aux détaillants, comme l'épicier du coin dont vous avez
parlé tout à l'heure ou le pharmacien du coin. Nous ne traitons
pas avec lui, à toutes fins pratiques.
M. LEGER: Une dernière question pour m'éclairer. Est-ce
que vos méthodes de contact avec les personnes sont, la plupart du
temps, par écrit, c'est-à-dire une facturation et, quelquefois,
par téléphone pour un rappel quelconque ou si c'est plus souvent
un contact personnel par téléphone?
M. GOLDSTEIN: Ce sont surtout des contacts personnels par
téléphone, parce que vous savez que les personnes avec lesquelles
on traite le plus souvent, on traite avec elles pour le compte de plusieurs de
nos clients. A titre d'exemple, si nous traitons avec Simpsons-Sears c'est pour
le compte d'une douzaine ou d'une trentaine de manufacturiers. Alors, les
problèmes qui surgissent ne sont pas tellement des problèmes de
perception. Ce sont surtout des problèmes de comptabilité
où il y a des erreurs qui se sont glissées, soit dans la
comptabilité de notre client, soit dans l'ordinateur, soit dans la
comptabilité de celui qui nous a cédé les comptes ou
encore de Simpsons-Sears, parce qu'ils font des erreurs également.
Alors, si vous me posez la question à savoir si nos contacts se
font par écrit ou oralement, c'est plutôt oralement. Cela ne veut
pas dire nécessairement qu'on n'a pas de difficultés de
perception. De temps à autre, on en a. A ce moment, on commence,
évidemment, avec des appels téléphoniques au gérant
de crédit de la compagnie débitrice, qui nous doit le compte. Le
cas échéant, il nous arrive, pas très souvent, mais
parfois, d'être obligés d'écrire des lettres de demande,
des mises en demeure et éventuellement, de prendre des actions pour
recouvrement, mais ceci est très rare, plutôt rare.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Si je comprends bien, c'est du financement surtout que vous
faites de la vente en gros.
M. GOLDSTEIN: C'est cela.
M. SAMSON: "Wholesale finance". C'est ce que vous faites.
M. GOLDSTEIN: Ce n'est pas dans le sens de "wholesale financing".
M. SAMSON: Ce n'est pas dans le même sens.
M. GOLDSTEIN: Non. Aucunement. Parce que "wholesale financing", à
titre d'exemple, s'applique plutôt au financement, éventuellement,
des consommateurs, mais d'abord, au financement du détaillant. A titre
d'exemple...
M. SAMSON: Le financement...
M. GOLDSTEIN: ... le détaillant d'automobiles est financé
très souvent par le "wholesale financing". Nous ne faisons pas cela.
Nous financerions plutôt ce n'est pas le cas, c'est pour cela que
je l'ai dit au conditionnel dans l'exemple que vous donnez, General
Motors et non pas l'agence.
M. SAMSON: Ah bon!
M. GOLDSTEIN: On ne finance jamais l'agence parce qu'on commencerait
à traiter avec le consommateur, ce que nous ne faisons pas.
M. SAMSON: D'accord. Compte tenu de cette réponse, le ministre
nous a demandé notre opinion. Mon opinion est qu'on devrait les exempter
en les nommant.
M. TETLEY: Parfait.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Charlesbourg.
M. HARVEY (Charlesbourg): Dans le même ordre d'idées, je
pense que le sujet de la Conférence des factors et financement
commercial du Canada Inc., prévaut lorsqu'on regarde également
à l'ordre du jour on a eu le temps, je pense, de voir un peu les
autres mémoires qui doivent être présentés
c'est un cas identique qui se produit dans le cas de National Apparel Bureau,
à Québec. Evidemment, ce n'est peut-être pas le temps de
discuter le cas de National Apparel Bureau puisque nous avons des gens qui
viennent pour les fins de leur compagnie, mais je pense qu'à ce titre
nous devrions peut-être je pense que cela s'adresse davantage au
ministre définir davantage le mot débiteur dans notre
projet de loi, à l'article 2, pour faire en sorte que le débiteur
soit une personne physique qui achète au détail.
En fait, dans le but de recouvrement sur des achats effectués
chez un commerçant ou chez un détaillant ou encore lorsque la
transaction, dans le cadre d'une explication peut-être beaucoup
plus vulgarisée qui donne lieu à une perception de comptes
est strictement commerciale et est faite entre les deux parties,
c'est-à-dire entre deux parties commerciales. Je pense qu'à ce
moment-là cela clarifie votre situation et également la situation
de ceux qui sont représentés aujourd'hui par Me Lazarovitz,
National Apparel Bureau, qui auront probablement la chance, eux aussi, de se
faire entendre mais c'est exactement le même cas qui se produit.
Je pense qu'en terminant il serait peut-être bon de
suggérer au ministre, par voie de ses conseillers juridiques,
d'inventorier, peut-être, les compagnies qui font affaires entre elles,
qui ne visent pas une personne physique en particulier, dans le cadre d'un
commerce de détail entre détaillant et consommateur, et, à
ce titre, "lister" ces compagnies qui ne sont pas, dans les faits, couvertes
par la présente loi.
Je pense qu'il s'agit là, d'une part, d'accepter ce que vous nous
proposez ce matin comme étant quelque chose d'acceptable et devant
être exclu de la loi, et la même chose prévaut
également pour National Apparel Bureau. Je pense que, à cet
égard, le député de Lafontaine, qui lui-même, je
pense, dans sa grande sagesse, a dû prendre connaissance hier du
mémoire qui doit être présenté aujourd'hui par
National Apparel Bureau, serait d'accord sur ce que je fais comme proposition
au ministre responsable.
Est-ce que vous pourriez ajouter quelque chose? D'après vous,
est-ce que cela semble...
M. LEGER: Je vais attendre que National Apparel Bureau vienne expliquer
son dossier avant.
M. HARVEY (Charlesbourg): Vous préférez attendre pour
donner votre opinion National Apparel Bureau, qui, pourtant, a une copie
conforme du mémoire dont vient de nous faire cette firme, la
Conférence des factors du Canada? C'est ça?
M. LEGER: Oui.
M. HARVEY (Charlesbourg): Alors, d'accord.
M. TETLEY: Personne n'est visé par leur opinion. Nous allons
voter en deuxième lecture, et en troisième lecture. Je suis
prêt à changer mon opinion deux ou trois fois, afin d'arriver
à la meilleure solution.
M. SAMSON: M. le Président, c'est un peu dans le même sens.
Quand j'ai dit tantôt que nous devrions les exempter en les nommant, ce
n'est pas nécessaire de nommer la Conférence des factors. On peut
nommer le type d'opérations.
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est cela. Dans la définition de la
loi, les transactions qui sont faites...
M. SAMSON: C'est ce que nous visons, dans le fond.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... entre deux commerces qui ne touchent pas
le consommateur.
M. SAMSON: Si le type d'opérations est le même. En passant,
je ne le sais pas. Le
mémoire, nous ne l'avons pas eu, hier. Nous l'avons eu ce matin
en arrivant.
M. HARVEY (Charlesbourg): Je l'ai eu à mon bureau la semaine
dernière.
M. SAMSON: Je ne l'ai pas eu. Nous autres, nous ne l'avons pas eu. Vous
avez peut-être eu des choses...
M. HARVEY (Charlesbourg): Ah! vous voyez!
M. SAMSON: II y a des fuites, des contacts.
M. HARVEY (Charlesbourg): Etiez-vous ici?
M. SAMSON: Je suis toujours à mon devoir, M. le Président.
Je ne sais pas pourquoi mais on ne l'a pas eu.
M. HARVEY (Charlesbourg): II y a des compagnies qui vont peut-être
se vanter d'avoir des procureurs qui font leur travail.
M. SAMSON: Le mémoire dont parle l'honorable député
de Charlesbourg, concernant...
M. TETLEY: Cela a été distribué par le
secrétaire.
M. HARVEY (Charlesbourg): Cela a été distribué par
le secrétariat.
M. LEGER: C'est vendredi que nous l'avons eu.
M. HARVEY (Charlesbourg): Certainement.
M. LEGER: Si vous l'avez eu de la compagnie directement, ce n'est pas
pareil.
M. HARVEY (Charlesbourg): II s'agit d'un envoi en bonne et due forme
venant du secrétariat des commissions, vendredi dernier.
M. SAMSON: Je le souligne, M. le Président, parce que nous
l'avons eu quand même ce matin.
M. HARVEY (Charlesbourg): Alors, vendredi dernier.
M. TETLEY: Mais nous sommes au bureau, le vendredi. C'est ça la
différence.
M. SAMSON: Nous y sommes nous aussi, au bureau, M. le Président.
Mais il faudrait peut-être dire au ministre que nos bureaux sont dans le
passage, de ce temps-là.
M. TETLEY: Vous êtes avec le peuple, au moins.
M. SAMSON: On est toujours avec le peuple.
UNE VOIX: Vous êtes dans la rue, comme on dit!
M. TETLEY: Je vous remercie beaucoup, messieurs, et j'apprécie
beaucoup le fait que vous êtes si bien munis d'arguments. C'est
très important pour la bonne préparation de...
M. GOLDSTEIN: Merci, M. le ministre, M. le Président, messieurs
les députés.
Fédération des ACEF du Québec
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, messieurs. J'inviterais
maintenant les représentants de la Fédération des ACEF du
Québec.
Vous pouvez procéder.
M. DORE: D'accord. M. le Président, M. le ministre, messieurs les
membres de la commission, mon nom est Jean Doré. Je suis directeur de la
Fédération des ACEF du Québec.
A la table, ce matin, m'accompagnant, à ma droite, Me Alain
Ferland, avocat au service juridique de la fédération et,
à ma gauche, Patrick Frawley, également permanent au service
juridique de la Fédération des ACEF.
Je voudrais, comme introduction à la présentation de notre
mémoire ce matin, M. le Président, me permettre de faire quelques
réflexions d'ordre général sur ce qui, pour nous,
constitue en quelque sorte la toile de fond sur laquelle se greffent le
problème des agences de collection ou des agences de recouvrement ou des
agents de recouvrement et le projet de loi 26 lui-même et qui situe un
peu, quant à nous à tout le moins, l'importance que nous
accordons à ce projet de loi. La Fédération des ACEF est
sur le point de rendre publique une longue recherche j'ai ici le
document sur mon bureau qui a porté sur le problème de
l'endettement des Québécois depuis trois ans, recherche
financée en partie par le ministère des Affaires sociales et qui
sera rendu publique dans deux semaines, le document vient à peine de
sortir des presses.
Ce qui ressort essentiellement de cette recherche et ce qui est quand
même assez fondamental dans les circonstances, c'est que, bien sûr,
les problèmes qui découlent actuellement de la façon dont
le Québec vit le système économique actuel et
particulièrement la société de consommation de masse sont
particulièrement aigus. Les conclusions essentielles montrent que, par
exemple, 56.7 p.c. des Québécois sont endettés, que, sur
ces Québécois endettés, 25 p.c. vivent à un niveau
d'endettement qu'on qualifie, nous, de problématique,
c'est-à-dire où les revenus sont largement et trop souvent
insuffisants pour compenser les créances et leur situation
d'endettement. Or, ce qu'on constate, c'est que ces gens sont également
des gens qui sont en deça ou à peine au-delà du seuil de
pauvreté, seuil de pauvreté calculé, entre autres, dans
cette recherche, à partir des critères
déterminés par la commission Croll du Sénat
canadien en 1971.
Cette situation est explicable, dans leur cas et c'est une
situation assez tragique, selon nous entre autres parce que ces
Québécois, qui vivent dans une situation de marginalité
sur le plan économique, doivent s'endetter non pas pour satisfaire des
besoins du type de l'acquisition de biens durables qui sont normalement
l'utilisation pour laquelle on peut faire du crédit, mais souvent pour
satisfaire des besoins essentiels qui vont du logement, même pour se
nourrir dans certains cas, à l'habitation. Pour nous, ces
problèmes sont des problèmes fondamentaux. Ces problèmes
sont des problèmes qui, à notre point de vue, à tout le
moins, devraient concerner et devraient coller à une véritable
politique de protection des consommateurs au Québec, lorsqu'on parle
d'une politique qui va dans le sens de la protection du citoyen. C'est à
ces problèmes fondamentaux qu'on devrait s'attaquer. Dans ce sens, il
est évident que, pour nous, un projet de loi sur les agences de
recouvrement qui, en quelque sorte, sont trop souvent des parasites sociaux,
quant à nous, qui vont profiter de cette situation d'endettement qui
fait que des Québécois ont de la difficulté à
rembourser leurs dettes, qui vont donc profiter de cette situation et vivre de
cette situation. C'est bien sûr que ce n'est pour nous qu'un
épiphénomène de problèmes beaucoup plus
profonds.
Je ne voudrais pas m'étendre trop longuement là-dessus,
mais, quant à nous, le sens de l'intervention que je vais faire ce
matin, c'est que j'ai remarqué hier, en particulier en lisant les
journaux ce matin, que la Chambre de commerce a fait référence
à l'augmentation effarante des dettes à la consommation, parlant
de 250 p.c. depuis 1961, et, comme solution à cette situation, proposait
aux membres de la commission parlementaire et au gouvernement, au sens large,
la nécessité d'informer les québécois et
d'éduquer les Québécois sur l'utilisation du
crédit. Quant à nous, les solutions vont beaucoup plus dans le
sens d'une réglementation des taux d'intérêt,
particulièrement de la part d'institutions financières qui,
précisément, sont celles qui prêtent aux gens qui sont les
plus mal pris, les plus endettés. On pense aux compagnies de finance,
par exemple. Les solutions vont beaucoup plus dans le sens de contrôler
ces marchands de rêve et d'illusion que sont devenues les institutions
financières, après les producteurs, par le biais de la
publicité. Pour nous, ce sont là les problèmes auxquels un
gouvernement qui pense s'occuper de la protection du consommateur doit
s'attaquer de façon urgente. De toute façon, nous aurons
l'occasion d'y revenir. Je ne veux pas accaparer le temps de la commission trop
longuement là-dessus, mais cela m'apparaft important de situer ce
contexte. On pourra y revenir lorsqu'on rendra publique cette recherche et
qu'on aura l'occasion d'en discuter.
Si on revient au présent projet de loi, je voudrais d'abord vous
dire que les ACEF ont un peu la prétention, par leur action quotidienne
auprès des consommateurs, de connaître un peu ce problème
que posent les agents de recouvrement. Pour ceux qui ne le savent pas, il
existe au Québec treize associations des coopératives
d'économie familiale, en fait, onze qui sont actuellement
accréditées, deux qui sont sur le point de demander leur
accréditation au ministère des Institutions
financières.
La seule région actuellement où les ACEF ne sont pas
présentes, en tant que telles, est la région du Bas Saint-Laurent
et de la Gaspésie. C'est une priorité du mouvement de tenter
d'implanter et de fournir l'occasion à la communauté de cette
région de pouvoir se doter d'un instrument qu'on appelle les ACEF. 545
organismes sont membres de l'une ou l'autre des ACEF dans tout le
Québec. Le travail que l'on fait, le contact quotidien que l'on a avec
les consommateurs, les nombreux dossiers que l'on a pu accumuler avec le temps,
auprès des gens mal pris, nous permettent, nous pensons à tout le
moins, de nous prononcer sur cette question en toute connaissance de cause.
Le mémoire que nous vous avons présenté, que vous
avez en main, se divise essentiellement en deux parties. Dans un premier temps,
on analyse la situation générale qui est celle des agents de
recouvrement au Québec: Leur situation juridique, leurs méthodes
d'action et même, on esquisse quelque peu, à la fin, la situation
générale de l'industrie.
Dans un deuxième temps, on analyse les solutions qu'on voit
à ce problème. Rapidement, si vous me le permettez, j'aimerais
revenir sur ces aspects et vous souligner, d'une part, que la situation des
agents de recouvrement est assez particulière dans notre système,
puisque, finalement, ces gens ne sont pas propriétaires des
créances qu'ils sont chargés de percevoir. En ce sens, aucune des
contraintes légales, normales du système judiciaire qui nous
régit ne leur sont accessibles. Les agents n'ayant pas la
capacité juridique nécessaire pour poursuivre, puisqu'ils ne sont
pas propriétaires et n'ont pas d'intérêt juridique, doivent
donc nécessairement recourir à d'autres méthodes.
Quelles sont ces méthodes? Trop souvent, ces méthodes sont
les menaces, l'intimidation, le harcèlement systématique des
gens. Car il faut bien se rendre compte que le système juridique
québécois, tel qu'il existe actuellement, permet et offre des
mécanismes à des créanciers, qui veulent
récupérer des créances auprès de leur
débiteur, et un certain nombre de possibilités réelles.
L'adoption récente, par exemple, de la division des petites
créances à la cour Provinciale permet à une personne
physique, pour une dette de moins de $300, à un coût
extrêmement minime, de récupérer une créance. Dans
le cas d'une personne morale, le recours est évidemment, pour un montant
de moins de $3,000, à la cour Provinciale.
Dans le cas d'organismes qui font la vente ou qui achètent des
créances, les articles 1571 et 1570 du code civil, qui ont
été amendés récemment, qui ont assoupli les
mécanismes d'acquisition les rendant moins onéreux,
prévoient également la possibilité pour des
créanciers de se départir de leurs créances et de les
vendre à des gens qui, eux, en étant propriétaires, vont
se charger de les recouvrer. Les pratiques des agents de collection qui ne sont
pas propriétaires, je l'ai dit tantôt, sont trop souvent
l'intimidation et le harcèlement. Les moyens: Le
téléphone, la lettre; enfin, des moyens qui sont, à toutes
fins pratiques, extrêmement difficiles à contrôler et
où il est extrêmement difficile d'identifier, trop souvent, les
gens qui utilisent ces moyens. Dans le mémoire, on donne un exemple
d'une pratique relativement courante de la façon dont fonctionnent les
agents de recouvrement. Si vous me le permettez, je vous ferais peut-être
lecture de ce cas type qui, pour nous, illustre assez bien le genre de
problèmes qui se posent au niveau concret et qui vont se poser au niveau
concret si le projet de loi qui est présenté, qu'on étudie
actuellement, était adopté.
S'identifiant comme médecin ici, on parle d'un agent
collecteur, en page 4 du mémoire le collecteur rejoint au
téléphone la femme du débiteur et lui annonce qu'on vient
à l'instant d'entrer son mari, accidenté, à la salle
d'urgence d'un hôpital. Affolée, la dame s'informe. Se faisant
rassurant, le nouveau toubib insiste pour la convaincre que tout sera fait pour
soigner son mari et qu'avant tout, la fiche d'admission doit être
remplie. Suit alors toute une série de questions sur l'emploi de son
mari, son revenu, l'état de son budget.
Apprenant que la situation financière du monsieur est quand
même assez catastrophique, il raccroche et rejoint le mari au travail. Et
là, le langage vient de changer. Ce n'est plus un médecin qui
parle, c'est un avocat. Il annonce au mari qu'il a reçu le mandat
d'entreprendre contre lui un action sur compte de $325. Il faut bien se rendre
compte que c'est un agent de collection qui n'est pas propriétaire, qui
n'a pas le droit de prétendre être un avocat, qui agit.
Récitant au mari les informations budgétaires qu'il vient
d'apprendre de sa femme, il menace de poursuivre en prenant bien soin,
évidemment, de lui mentionner qu'au compte initial, viendront s'ajouter
tous les frais de procédures judiciaires. Ebranlé, le mari offre
de faire paiement, de faire parvenir une série de chèques
postdatés. En réponse, il se voit informé par son
collecteur que la cause est déjà inscrite, que c'est une question
de temps, qu'elle sera entendue dans les trois jours plus tard, à moins,
que la somme complète ne parvienne chez le créancier à
l'heure dite, le jour même.
Ce type de fonctionnement et ce type d'exemple que nous citons ici, qui
est tiré d'un de nos dossiers qui a été rendu public lors
de la publication d'un article dans Québec Presse et qui avait
été repris dans une série publiée par la Presse
à Montréal sur les agents de recouvrement, ce type d'exemple
n'est pas isolé. C'est le système, de la façon dont il
fonctionne.
D'autre part, on souligne également dans le mémoire que
l'industrie d'agents de recouvrement du moins si on se fie à
certains indices et, entre autres, au rapport de la plus grosse des agences de
recouvrement qui existent, la Financial Collection Agencies, qui rendait, en
septembre 1974, public le rapport de son dernier exercice financier on
se rend compte que pour toutes sortes de raison, qui vont de l'existence, dans
certains cas, de la Loi des petites créances, en passant et c'est
très important par l'application de la Loi de l'assurance-maladie
qui enlève à l'industrie bon nombre de créances de
médecins, entre autres, qui constituaient, dans bien des cas,
l'essentiel du volume de ces agences. Pour toutes ces raisons-là, il y a
une perte, une baisse très nette du volume, des profits, des montants et
du nombre d'agences de recouvrement actuellement au Québec.
Dans ce contexte, dans un contexte où finalement, les moyens
d'action d'agents de recouvrement qui n'ont aucune existence légale, ces
moyens d'action sont ceux qu'on a décrits tantôt. Dans la mesure
où on a affaire à des agents, à des organismes, à
des institutions financières, qui, de toute façon, compte tenu
des dispositions législatives adoptées récemment, ont de
plus en plus de difficultés à survivre sur le plan financier, la
question qu'on doit normalement se poser, c'est: Est-ce qu'il faut tenter de
réglementer ces gens, leur donner des lettres de noblesse au moment
où elles sont de plus en plus moribondes ou est-ce qu'il faut
peut-être plutôt songer à les abolir?
La position de la Fédération des ACEF, position d'ailleurs
adoptée lors d'un congrès l'année dernière, en
novembre 1973, par l'ensemble des organismes réunis ici à
Québec, à Cap-Rouge, était et est toujours que, quant
à nous, ce n'est pas la réglementation des agents de recouvrement
qu'il faut faire, mais l'abolition des agents de recouvrement.
Et ce pour diverses raisons: La première, la plus importante,
c'est que quant à nous, le système juridique
québécois, tel qu'il existe, est capable et parfaitement capable
et offre les mécanismes qu'il faut à un créancier pour
être capable de récupérer sa créance et que
consé-quemment, les agents de recouvrement jouent un rôle par
rapport au système juridique, un rôle parallèle et
parasitaire.
La deuxième, c'est que, compte tenu du fait qu'ils n'ont aucun
pouvoir légal, les agents n'ont d'autres moyens d'action que ceux qu'on
a décrit, c'est-à-dire la lettre, le téléphone,
même les visites à domicile, les menaces, l'intimidation, le
harcellement systématique et ce, toujours il faut bien le
remarquer auprès, trop souvent, des gens les plus démunis
de notre
société, parce que ce sont les gens les plus
endettés.
Et troisièmement, quant à nous, pour la bonne raison que
l'application de la loi qui vous est présentée, enfin, que vous
étudiez actuellement, pour nous, compte tenu de ce qu'on vient de dire,
compte tenu de la façon dont ces gens-là fonctionnent, est
à peu près inapplicable.
Comment pouvez-vous être capable d'identifier le nom ou une
personne qui appelle par téléphone un consommateur et qui le
harcèle? Comment pouvez-vous faire la preuve de ce harcèlement
systématique qui est interdit par la loi? A toutes fins pratiques, la
loi, si elle était appliquée, je dis bien si elle était
appliquée, parce que la difficulté d'application de cette loi est
énorme et nécessiterait une machine administrative telle que trop
souvent, on ne retrouve pas, de toute façon lorsqu'on adopte des lois...
On a trop souvent des organismes qui n'ont pas ni les ressources
financières ni les ressources humaines pour pouvoir appliquer ces
lois.
Mais dans le contexte, si la loi était appliquée, quant
à nous, elle enlèverait systématiquement les armes
essentielles qui rendent, de toute façon, efficaces les agents de
recouvrement et qui justifient, en fait qui leur permettent de continuer
d'exister.
Alors, quant à produire cet effet-là, si l'on compte bel
et bien appliquer la loi et donner les instruments nécessaires aux
fonctionnaires qui sont chargés de son application, pourquoi ne pas
passer à une étape plus loin et tout simplement abolir les agents
de recouvrement, au même titre et de la même façon qu'on a
décidé d'abolir les entreprises à caractère
pyramidal au Québec, parce qu'on considérait, dans le bill 45,
que c'étaient des organismes qui exploitaient, de façon honteuse,
non seulement la situation, mais la dignité même des
consommateurs, de la façon dont cela fonctionnait.
Dans le projet, on souligne, à la toute fin, le mécanisme
par lequel on verrait très bien l'abolition des agents de recouvrement.
Pour nous, cela pourrait être un article supplémentaire à
ajouter à la loi 45, au même titre qu'on a aboli les ventes
pyramidales et, au même titre, on pourrait abolir les agences de
recouvrement. Cette mesure prohibitive ne pourra pas être, à notre
avis, jugée ultra vires, en dehors de la compétence provinciale,
parce qu'une telle réglementation ne serait qu'incidente au pouvoir
provincial sur la propriété des droits civils.
On s'est même donné la peine de rédiger ce que
pourrait être très simplement un article de ce type-là.
C'est un exemple, ce n'est pas une rédaction. C'est une rédaction
qu'on suggère; elle pourrait être facilement revisée.
D'autre part, on suggère également, une fois cet article
adopté, une autre chose qui nous paraît, dans le contexte,
extrêmement importante. C'est que si le gouvernement décidait que
les mécanismes juridiques existants sont suffisants pour que des
créanciers puissent récupérer des créances et
abolissait les agents de recouvrement et adoptait comme tel un article
prohibant leurs activités au Québec à l'intérieur
de la Loi de la protection du consommateur, ce qui serait important, c'est
qu'effectivement dans les faits de telles activités cessent et que des
gens cessent donc de poursuivre ces pratiques.
Dans le contexte, cela voudrait dire qu'il faudrait donc voir à
ce que cet article soit appliqué. Pour nous on revient sur cette
question encore une fois il serait important que des consommateurs, et
non pas uniquement le gouvernement par le biais du procureur
général, soient capables d'assurer le respect de la loi s'ils
étaient l'objet justement ou s'ils avaient la preuve que des agents de
recouvrement... Une fois une fois, je dis bien cet article
adopté, donc leur existence à toutes fins pratiques mise en cause
ou abolie, il serait important que des consommateurs puissent eux-mêmes
assurer, au même titre que le procureur général, le respect
de cette loi.
En ce sens, on revient sur une suggestion que l'on a déjà
faite au gouvernement dans d'autres lois et qui nous semble importante, c'est
d'inclure la possibilité pour des consommateurs de poursuivre. Je ferais
remarquer aux députés qui pourraient peut-être l'ignorer
qu'une loi québécoise existe; la Loi des actions pénales,
à l'article 12, prévoit qu'à moins de dispositions
restrictives, qu'à moins de dispositions, donc, contraires dans une loi,
tout individu peut intenter une poursuite pénale privée à
l'endroit d'un contrevenant à une loi statutaire provinciale, à
moins évidemment, je le dis bien, de dispositions contraires.
Or, on sait très bien que la plupart des lois prévoient
précisément ces dispositions contraires, c'est-à-dire
qu'on dira que les poursuites seront intentées par le procureur
général ou par quelqu'un désigné par lui.
Quant à nous, il serait important, si le gouvernement
décidait d'abolir les agents de recouvrement et d'inclure cet article
dans la Loi de la protection du consommateur, par exemple, que le gouvernement,
dans le même souffle, permette au consommateur, au même titre, je
dis bien, que le procureur général, de le faire, et cela pour
bien des raisons. D'abord, parce que trop souvent les lois et la
réglementation, qui sont légion de plus en plus de façon
à réglementer la société dans laquelle on vit, sont
trop souvent inappliquées parce que le procureur général
n'a ni les moyens, ni les ressources financières, trop souvent, pour
faire appliquer ces lois. Donc, c'est un service à rendre au
gouvernement.
D'autre part, c'est une façon extrêmement valable d'assurer
l'efficacité d'une loi. Qu'on se rappelle l'expérience encore
récente de l'ancienne loi et non pas de la nouvelle des
produits agricoles où, entre autres, un article prévoyait que
l'étiquetage des produits vendus dans les marchés d'alimentation
devait être en français, à tout le moins en français
ou, au
moins, donner une égale importance au français et à
l'anglais. Cette réglementation et cette loi étaient en vigueur
depuis 1967. En 1971 ou 1972, on retrouvait encore dans tous les marchés
d'alimentation au Québec, bon nombre de produits qui ne respectaient pas
cette loi, malgré le fait qu'un fonctionnaire était chargé
de surveiller l'ensemble du secteur de l'alimentation et de suggérer, de
façon incitative, aux organismes de distribution dans le domaine
alimentaire et aux producteurs de bien vouloir assurer le respect de cette
loi.
Il a suffi qu'un certain nombre de personnes se rendent compte qu'elles
pouvaient, elles, intenter des poursuites à des grandes chaînes
d'alimentation pour assurer le respect de la loi, pour qu'automatiquement, en
l'espace de six mois, toutes les tablettes se vident et qu'à toutes fins
pratiques le problème soit, en grande partie, réglé.
Evidemment, cela a donné lieu à des abus. En fait,
certains prétendent que cela a donné lieu à des abus.
C'est possible, parce qu'une des choses qui étaient prévues dans
cette loi, c'est, entre autres, le fait que le poursuivant
récupère la moitié de l'amende qui est versée par
le contrevenant.
Si c'est cela l'argumentation fondamentale qu'ont opposée
certains éditorialistes et même, en fait, certains membres du
gouvernement au fait de maintenir cette chose, si finalement ce n'est pas le
bien commun que les gens poursuivent, mais uniquement la
récupération, à des fins de pure vénalité,
d'une amende, nous, on dit: Faisons sauter cette prohibition et arrangeons-nous
pour que le poursuivant n'ait droit que de récupérer les frais
normaux qu'il encourra pour intenter sa poursuite, c'est-à-dire les
frais que normalement une personne a lorsqu'elle se présente devant un
tribunal à titre de témoin ou autrement. Donc, l'incitation ou la
compensation financière d'un consommateur poursuivant un contrevenant au
plan pénal, ce ne serait pas de récupérer la moitié
de l'amende, mais uniquement d'obtenir la compensation des frais qu'il encourt
pour engager la poursuite et uniquement cela, si bien que sa motivation
profonde serait donc, à ce moment, non pas la vénalité de
l'opération, mais bel et bien le bien commun et le respect de la
loi.
Pour toutes ces raisons, nous, on considère que les citoyens, en
plus de cela, doivent être responsabilisés par rapport aux lois
qui les concernent et doivent avoir la possibilité d'assurer qu'elles
sont respectées. Voilà un rapide résumé.
Je serais prêt, évidemment, à partir de maintenant,
à répondre à des questions ou engager le dialogue avec des
membres de la commission. Voilà rapidement résumée la
position de la Fédération des ACEF. Je rappelle en
résumé que, pour nous, les agents de recouvrement sont à
toutes fins pratiques socialement parasitaires, économiquement peu
importants et globalement incapables de continuer d'agir par l'application de
cette loi. Ils utilisent des méthodes qui sont inqualifiables et
inacceptables. Les mécanismes juridiques existants étant,
à notre point de vue, capables de remplir les besoins pour lesquels ces
gens existent, il nous faudrait, non pas songer à réglementer
mais à abolir, et en incluant entre autres cette disposition qui nous
paraît fondamentale, de permettre au consommateur d'aider, à
toutes fins pratiques, les pouvoirs publics, parce que c'est de cela qu'il
s'agit en l'occurrence, à faire respecter la loi.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, M. Doré. Le ministre
des Institutions financières.
M. TETLEY: M. Doré, vous avez présenté une
proposition intéressante et importante. Vous avez fait une
démonstration assez logique de votre proposition, qui est pas mal
révolutionnaire, où je vois certaines choses de neuf; quoi de
neuf, c'est pas mal neuf. Ma première question: Est-ce qu'il y a une
juridiction que vous connaissez soit au Canada, soit aux Etats-Unis ou en
Europe où on a aboli les agents de recouvrement?
M. DORE: Non, à ma connaissance, je ne connais pas d'endroit
où on ait aboli, au sens strict, les agents de recouvrement, tout comme
je ne connais pas d'endroit où il n'existerait pas d'agent de
recouvrement, parce qu'un gouvernement n'aurait pas toléré qu'ils
existent. Enfin, je ne connais pas la situation, ni dans le reste des provinces
du Canada. Je ne connais pas de réglementation qui les interdisent, ni
dans le reste du Canada, ni aux Etats-Unis, à l'état actuel.
Cependant, vous avez qualifié cette suggestion au gouvernement de
passablement révolutionnaire. Je ferai remarquer au ministre qu'elle
n'est pas tellement plus révolutionnaire que la décision du
ministre lui-même lorsqu'il a décidé d'accepter l'article
75 dans la loi et d'interdire les ventes pyramidales. C'est du même type
de préoccupation, quant à nous.
M. TETLEY: Je suis exactement de votre avis. C'est le Québec qui
a adopté des règlements au sujet de la publicité
destinée aux enfants pour presque la première fois au monde.
Est-ce que c'est révolutionnaire ou "évolutionnaire"? c'est un
grand changement. A moins que ce ne soit une révolution tranquille, je
serais très content.
M. LEGER: Tranquille mais efficace.
M. TETLEY: Efficace, c'est cela. Le président Tito, de la
Yougoslavie, a aboli après la guerre les avocats. C'est une des choses
qu'il voulait faire...
M. DORE: J'ai bien compris les avocats?
M. TETLEY: Pardon? M. DORE: Les avocats?
M. TETLEY: Les avocats, complètement. Quelques années
après, il voyait qu'il y avait des 10 p.c, des 15 p.c, des 5 p.c, des 25
p.c. de plus; il y avait plus d'agents ou d'avocats, mais sans Barreau, sans
contrôle, qu'il y avait avant. Ces gens existaient quand même.
Finalement, il a réinstitué le Barreau en Yougoslavie et je
connais plusieurs membres personnellement, qui sont venus me voir lorsque
j'étais avocat. Il y a une grande liberté pour les avocats. Donc,
ma deuxième question est la suivante: En abolissant les agents de
recouvrement, qui, à l'heure actuelle, sont couverts par une loi du
ministère de la Justice, mais que nous voulons contrôler par une
loi plus sévère de notre ministère, qu'est-ce qui va
remplacer? Il y aurait un vide, n'est-ce pas?
M. DORE: Ecoutez, là-dessus, deux choses, si vous voulez, que je
peux vous dire. La première, je peux peut-être vous faire lecture
du texte que l'on dit être uniquement une espèce de suggestion,
mais qui, quant à nous, est dans le sens de concrétiser la
position qu'on présente devant vous. Le texte qu'on suggérait,
par exemple, d'inclure dans la loi 45 était libellé de la
façon suivante. Cela vous permet de comprendre l'esprit dans lequel on
envisage cette situation. Nulle personne ne peut directement ou indirectement
récupérer ou tenter de récupérer une créance
dont elle n'est pas propriétaire. Toutefois, cet article ne s'applique
pas a) à un notaire ou à un avocat en exercice; b) à un
liquidateur, séquestre, syndic, shérif, huissier, dans l'exercice
de ses fonctions; c) à un tuteur, curateur, curateur public,
exécuteur testamentaire, fiduciaire au fidéicommissaire, dans
l'exercice de ses fonctions.
Quant à nous, le principe est le suivant: pour
récupérer une créance, il faut en être le
créancier, il faut en être le propriétaire; une
créance auprès d'un consommateur, dis-je. Et là-dessus, je
me rends à l'argumentation qui a été servie tantôt
par les représentants de l'industrie du "factoring". J'exclus tout le
problème de la récupération des créances à
caractère commercial et je me concentre uniquement sur les
créances à caractère privé dans le domaine de la
consommation.
La deuxième chose que j'ai à vous dire là-dessus,
M. le ministre, pour répondre à votre question, c'est que dans
les mécanismes actuellement existants, si on est en présence
d'une personne physique je le répète encore et que
la créance est moins de $300, la Loi des petites créances, enfin
la division des petites créances de la cour Provinciale prévoit,
pour un montant que vous connaissez, la possibilité de
récupérer rapidement cette créance. Pour un montant
supérieur, recours à la cour Provinciale par le biais d'un
avocat. Personne morale, pour tout montant, recours à la cour
Provinciale par le biais d'un avocat. Dans notre esprit, les avocats du
Québec sont parfaitement capables, par les mécanismes judiciaires
prévus par le législateur, de faire la récupération
efficace des créances et on ne voit pas... Evidemment, ça suppose
des frais judiciaires. Il y a des gens qui vont dire: Cela impose des frais, il
vaut peut-être mieux laisser l'agent de recouvrement, ça va
coûter moins cher pour des gens de récupérer leurs
créances. De toute façon, c'est plus ou moins vrai puisqu'on sait
que les tarifs normalement exigés par les agences de recouvrement vont
de 15 p.c. à 35 p.c. et que, deuxièmement, les tarifs des
avocats, normalement, pour la récupération sont à peu
près du même ordre, sauf que de cette façon on est
sûr de passer par un mécanisme qui est prévu par le
législateur et qui est fortement réglementé.
Une dernière remarque, peut-être, là-dessus. Vous
avez souligné que les agents de recouvrement sont actuellement
régis par une loi qui relève du ministère de la Justice,
une loi qui tient en huit articles et dont une des prescriptions, entre autres,
est l'obligation pour les agents de verser caution, de verser un montant de
$5,000 au greffe pour pouvoir pratiquer. Or, on sait les journalistes
l'ont publié, ont fait des nouvelles à cet effet, ont
vérifié auprès des greffes que cette disposition,
cette unique disposition contraignante, à toutes fins pratiques, de la
loi du ministère de la Justice n'était pas observée dans
plus d'à peu près 80 p.c. des cas, environ. La question qu'on
s'est posée à partir de là, c'est: Faudrait-il
peut-être présumer ou est-ce que c'est présumer de penser
qu'un projet de loi de l'ampleur de celui que vous présentez pour
réglementer, parce que compte tenu du caractère caché et
extrêmement difficile à observer des activités de ces gens,
vous êtes obligé d'adopter un projet de loi qui va dans les
détails, enfin, et qui prévoit même que les gens ne peuvent
pas y aller entre huit heures du soir et huit heures du matin, et ainsi de
suite... Nous, ce que nous vous disons, c'est: Est-ce que vous croyez à
ce moment-là, vraiment, compte tenu de l'expérience
passée, compte tenu des ressources dont le ministère dispose,
compte tenu des ressources humaines que ça prend pour faire observer une
telle loi et compte tenu de la difficulté de faire la preuve que des
agences ne se conforment pas à la loi, compte tenu des méthodes
utilisées, que cette loi peut être applicable? Ne serait-ce que de
ce strict point de vue de l'efficacité administrative, nous
considérons que cette loi est à peu près inapplicable de
la façon dont elle est faite.
Alors, à ce moment-là, si socialement ces gens sont
inutiles, si la loi est à peu près inapplicable sur le plan
administratif et qu'en plus de ça les recours juridiques existent de par
le système juridique qui nous régit au Québec, à
quoi bon adopter une loi qui va réglementer ces gens-là? Pourquoi
ne pas passer à l'étape de l'abolition pure et simple puisqu'ils
ne remplis-
sent aucune fonction? C'est le raisonnement que nous tenons, M. le
ministre.
M. TETLEY: Bon, un instant. Vous avez parlé d'abord des pyramides
et de l'article 75 de la Loi 45. N'oubliez pas que nous avons aboli ce que je
considère un crime, les pyramides. L'Ontario je vous donne un exemple
pour aider votre argumentation permet les pyramides. Nous avons aboli Holiday
Magic qui a reçu un permis de l'Ontario, imaginez! Finalement, nous
avons, après des efforts énormes par bien des personnes, des
jugements contre Holiday Magic. Mais c'est un crime! Ce n'est pas, à mon
avis, un crime de récupérer une dette. Evidemment, vous ne le
croyez pas non plus parce que vous avez une alternative: ce sont les avocats et
les notaires. Donc, au début, votre image est peut-être
discutable.
Deuxième chose. Vous avez dit que la loi est difficile à
mettre en vigueur. D'accord ! Comme ministre, je ne peux que seconder ou
appuyer cette remarque, je le sais.
C'est beaucoup plus difficile que vous ne le pensez. Administrer est
difficile. Légiférer est facile, très facile; être
dans l'Opposition, c'est rien. C'est même plus facile que d'être
dans le gouvernement, mais administrer...
M. LEGER: C'est tout une étape!
M. TETLEY: ... cela est difficile. Mais je crois quand même que
nous avons administré certaines parties de la Loi de la protection du
consommateur, et je crois qu'on peut insister. Nous avons insisté sur
les cautionnements. Nous avons exigé des permis dans la plupart des cas
et je crois que c'est essentiel. N'oubliez pas que, si notre ministère
ou si le gouvernement ne légifère pas dans le domaine de la
perception de dettes, vous allez laisser cela aux avocats et notaires et c'est
ma troisième remarque. J'ai eu l'expérience comme avocat, pour un
très grand bureau, de faire toute la perception pendant deux ans. Il y a
longtemps, c'est vrai, mais je ne crois pas que la chose ait changé. Et,
dans ce temps-là, il y avait de vrais bureaux d'avocats qui faisaient la
perception de dettes ou le recouvrement de dettes Lacoste & Lacoste
est un exemple pour tous les hôpitaux, les médecins et
d'autres. Je sais que ces bureaux avaient des employés qui
n'étaient pas avocats, mais qui, en fait, avaient un bureau de
perception "upstairs and downstairs", mais c'était, en fait, un bureau
d'avocats ici et, en bas, il y avait tout un service ou une compagnie de
recouvrement et un agent de recouvrement. Et ces gens ne seront pas couverts
par la loi. Vous n'aurez aucun contrôle. Vous allez abolir la loi, abolir
la profession et ces gens vont envoyer leurs lettres, vont faire
exactement...
Je crois que votre proposition est d'adopter auprès des avocats,
je présume, et les notaires et les syndics, les lois qui se trouvent
ici, peut-être. Autrement, ils vont tout faire. Cela sera la même
chose qu'en Yougoslavie parce qu'il y a des dettes, qu'il faut le recouvrement
des dettes et que quelqu'un doit le faire. Je suis avocat, mais les avocats ont
des défauts comme tout le monde, pas autant peut-être que les
autres, mais il faut aussi les contrôler autant que les autres, et je
crois que vous déplacez le problème plutôt que de le
régler, à mon avis.
M. DORE: M. le ministre, là-dessus, je vous rappellerai quelque
chose qui m'apparaît fort important. Le gouvernement vient d'adopter et
vient de mettre en oeuvre l'ensemble d'une législation et d'une
réglementation extrêmement poussé sur les professions au
Québec, y inclus la profession d'avocat et de notaire par le biais de la
Chambre de notariat et du Barreau.
M. TETLEY: Cela, c'est vrai.
M. DORE : Ces lois vont beaucoup plus dans le sens de la protection des
intérêts du public qu'elles n'y allaient auparavant et,
conséquemment, on pourra vérifier à l'expérience si
ces nouvelles lois qui vont régir ces professions vont aller dans le
sens où je le disais tantôt, dans le sens de
l'intérêt public, mais, compte tenu des critiques qui ont
déjà été faites sur l'ancienne Loi du Barreau et
d'après la façon dont cela fonctionnait, je vous ferai remarquer
que, si jamais des avocats et des notaires utilisaient des moyens qui ne sont
pas les moyens judiciaires normaux et permis et des moyens qui ressemblent plus
à ceux actuellement utilisés par les agents de recouvrement, je
pense que l'organisme professionnel qui les régit, compte tenu, entre
autres, de cette nouvelle loi, va assurer, va être capable de
sévir au même titre et de façon peut-être beaucoup
plus efficace que ne pourrait le faire le responsable de l'application de la
loi 26 quant aux agents de recouvrement, compte tenu du fait qu'un avocat a un
serment d'office qu'il a prêté et qui, évidemment, peut
être remis en cause par une décision de son ordre professionnel.
Il peut, entre autres, être suspendu de sa pratique et, pour un avocat,
être suspendu de sa pratique, vous savez que cela a des
conséquences énormes.
Conséquemment, c'est beaucoup plus facile de surveiller quelques
bureaux d'avocats ou quelques avocats qui sont identifiés, d'ailleurs,
très rapidement, généralement. Ce n'est pas difficile de
cerner ces gens dans leur action. Ils peuvent avoir, éventuellement, une
pratique discutable, qui serait même contraire à l'esprit
qu'apporterait l'abolition des agents de recouvrement. Il est beaucoup plus
facile de les contrôler par le biais de la Loi du code des professions
que de les contrôler par une loi comme celle-là.
De toute façon, l'autre chose que je pourrais vous faire
remarquer également est que, peut-être, pour éviter un
engorgement inutile des bureaux d'avocats qui pourraient faire le commerce,
comme vous le dites, systématique de la
récupération, le gouvernement pourrait-il songer et
je ne pense pas que les avocats, pour éviter justement qu'ils soient
encombrés par des petites causes qui ne les intéressent pas
à augmenter la limite permise actuellement à la division
des petites créances.
La Fédération des ACEF a déjà
suggéré de porter progressivement la limite permise, à un
montant qui atteindrait $1,000, en passant, par étapes, à $500,
$750 et $1,000, compte tenu, entre autres, du très grand succès
que connaît la cour des petites créances, de l'efficacité
de ce système, de la rapidité des décisions, de
l'importance et de la quantité des décisions qui ont
été rendues?
Le nombre qu'on obtenait récemment était de 80,000 en
l'espace d'un an, depuis l'application de cette loi. C'est quand même
important. Il y avait un besoin social important quant à l'existence de
cette chose. Nous disons: Augmentez la limite à la cour des petites
créances. On va éviter l'engorgement des bureaux d'avocats pour
les créances moins importantes et pour les créances plus
importantes, les avocats utiliseront les mécanismes juridiques
prévus par le code de procédure civile et, par le code civil,
pour assurer la récupération des créances.
M. TETLEY: Une dernière remarque. Puis-je terminer, M. le
Président? Vous êtes très gentil.
Vous voulez tout donner aux avocats ou transférer aux avocats...
n'oubliez pas...
M. DORE: Je m'excuse, M. le ministre. Je... M. TETLEY: La Loi des
petites créances.
M. DORE: Ou au créancier lui-même de régler sa
propre affaire.
M. TETLEY: Mais n'oubliez pas qu'à l'heure actuelle... ou,
autrefois, la plupart des bureaux d'avocats qui avaient un vrai bureau de
recouvrement dans mon temps, j'ai fait cela à grande perte pour
notre bureau c'était, tout simplement, pour les gros clients,
parce que c'est une perte. Mais les avocats qui ont perçu pour les
hôpitaux et pour les médecins ont agi contre et hors la loi,
c'est-à-dire que c'étaient des secrétaires ou des
sténographes qui ont même signé les lettres, qui ont fait
les appels. Ce n'était pas le travail d'un avocat par un avocat.
C'était le travail d'un agent de recouvrement avec la papeterie d'un
bureau d'avocat.
Il est impossible de transférer, suivant la loi actuelle, le
travail d'un agent de recouvrement à un avocat et payer les salaires
d'un avocat qui sort de l'université, à l'heure actuelle,
à $10,000. C'est impossible. Il faut qu'il y ait un système de
secrétaires et tout un bureau, en bas, qui fasse le travail. Un avocat
ne peut pas faire les visites à la maison, si c'est possible, ou les
téléphones, faire les recherches, ou ce qu'on appelle, en mauvais
français, le "tracing", etc.
Il est clair qu'il y a un vrai problème ici. Je le vois. Je vois
qu'il faut amender la loi quant à savoir qui est couvert par la loi. Je
crois que c'est le commentaire d'hier, du député de Lafontaine et
de bien des députés, dont ceux de Rouyn-Noranda, de Taschereau et
de Charlesbourg. C'est vrai. Il faut étendre la portée de la loi,
surtout sur la question des règles, le harcèlement et tout. Mais
tout transférer à un autre groupement qui n'est pas couvert,
je...
M. FRAWLEY: M. le ministre, si vous me permettez, vous soulignez un
problème qui pourrait peut-être, effectivement, se produire, mais
je pense que vous déplacez le problème en disant qu'il faudrait
finalement surveiller les avocats.
M. Doré soulignait tantôt que, premièrement, les
avocats sont régis par le code des professions. Ils prêtent un
serment d'office, ils sont membres d'une corporation professionnelle qui a des
obligations envers le public de surveiller ses membres.
Deuxièmement, un avocat qui a une créance à
percevoir, vous admettez avec moi que cet avocat n'emploie par les mêmes
moyens qu'un agent de perception. Un agent de perception et cela, c'est
fondamental dans notre mémoire et dans notre présentation
n'a aucune capacité juridique d'agir. Un avocat, lui, peut agir. Alors
l'avocat n'a pas intérêt à menacer systématiquement
le client de qui on tente de récupérer la créance. Il peut
déposer son action devant le tribunal, il peut la signifier et le
processus judiciaire normal suit son cours.
Alors, à ce moment-là, je pense que votre argument,
voulant qu'il faille surveiller les avocats, ne peut absolument pas tenir.
M. TETLEY: Je vous remercie pour le compliment, mais je connais ma
profession peut-être mieux que vous.
M. FRAWLEY: Sûrement, M. le ministre.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, ayant écouté, hier, les
représentations de la Chambre de commerce, celles de l'Association des
agents de recouvrement, celles du Barreau, et ce matin aussi, en
écoutant les représentants des ACEF, on ne peut pas faire
autrement que de réaliser que si le marché de la collection est
à la baisse la preuve, hier on nous a dit qu'il n'y avait que 2
p.c. et si les seules méthodes de fonctionnement
légalisées que ces gens avaient auparavant, étaient des
méthodes de harcèlement, des méthodes d'intimidation et de
pression, parce qu'ils n'avaient pas les pouvoirs légaux de poursuivre,
on s'aperçoit aujourd'hui et je pense que ce n'est pas aller trop loin
de dire que les agents de recouvrement ont joué quasi un rôle de
"Shylock" légalisé dans un système et que devant cela, il
faut nécessaire-
ment non pas uniquement s'occuper de régulariser ou corriger un
palier de ce système dont parlait hier le député de
Taschereau, mais penser peut-être que ce groupe n'a pas sa raison
d'être, comme je vous le disais hier.
Ma question fondamentale est celle-ci: Supposons que cela demeurerait
encore dans la loi et si le ministre acceptait que les avocats inclus, ainsi
que les autres groupes, tout en n'ayant pas de permis, devraient être
soumis à la loi, si les agents de recouvrement n'avaient que la
possibilité de contacter les personnes par écrit, autrement dit
qu'on sache bien s'ils ont transgressé la loi par écrit, qu'il
n'y ait pas de contact oral, verbal, téléphonique ou personnel ou
de visite... J'ai posé la question hier, aujourd'hui je la pose aux gens
de l'association. Ils m'ont dit: Cela nous nuirait un peu, mais on pourrait
quand même continuer à fonctionner. Selon votre
interprétation, est-ce que vous pensez qu'ils pourraient continuer
à fonctionner quand même?
M. FRAWLEY: M. le député, je pense que, si on leur
enlève le moyen du téléphone, la lettre peut très
bien être envoyée par les créanciers eux-mêmes, par
les compagnies elles-mêmes. Cela ne demande pas un personnel
épouvantable pour adresser des lettres de recouvrement. Ce qui demande
un personnel plus gros, une organisation plus importante, ce sont les
techniques et la mise en place du système de harcèlement et
d'intimidation. Si vous me dites: On va permettre l'envoi de lettres. Il n'y a
rien qui empêche le créancier lui-même de correspondre avec
son débiteur. Là, vous en arrivez à la même
conclusion que nous, c'est-à-dire à l'inutilité,
finalement, des agences de collection.
M. DORE: Aux quels cas il faut ajouter le fait que la loi peut bien
prévoir qu'uniquement des lettres peuvent être
expédiées aux consommateurs, si l'agent de recouvrement utilise
d'autres moyens, entre autres, la possibilité, l'instrument
privilégié qu'est le téléphone comme tactique de
harcèlement, comment est-ce qu'un fonctionnaire ou comment est-ce qu'on
va pouvoir vérifier, ne serait-ce, entre autres, que l'origine du coup
de téléphone, être capable d'assurer le respect de cette
disposition qui voudrait qu'on utilise uniquement la lettre. C'est dans ce sens
que nous disons: La loi n'est à peu près pas applicable, compte
tenu des moyens qui sont utilisés par ces gens, concrètement,
dans le quotidien des choses, d'une part, et je comprends très bien que
les agents de recouvrement puissent dire, que leur association puisse dire:
Cela va nous causer des problèmes. Je comprends très bien qu'ils
disent qu'ils vont pouvoir continuer à fonctionner parce qu'ils vont
pouvoir être capables d'utiliser d'autres moyens que la lettre sans pour
autant, en contournant la loi concrètement, avoir de chance de se faire
traduire devant les tribunaux pour contrevenir à la loi.
Donc, cela ne leur cause pas trop de difficultés et c'est
à mon point de vue un argument de plus qui justifie la très
grande difficulté d'application de cette loi. Mais je reviens quand
même à l'argumentation et il ne faudrait quand même pas
l'oublier, qui est fondamentale. Le ministre a souligné tout à
l'heure l'abolition des ventes pyramidales, qui étaient, quant à
lui, une activité criminelle. On ne peut peut-être pas dire que
les agents de recouvrement qui utilisent l'intimidation, le harcèlement,
la menace, cette espèce de viol des consciences... Parce que cela finit
par être cela trop souvent, ce ne sont pas des activités
criminelles au sens strict du terme, mais c'est pratiquement cela. C'est une
atteinte fondamentale à la dignité des individus lorsqu'une
personne n'est plus capable d'être chez elle sans entendre le
téléhone sonner dix ou douze fois par jour pour se faire harceler
par des gens qui veulent percevoir. A mon point de vue, cette intrusion abusive
dans la vie privée, c'est tout aussi criminel que les activités
que pouvaient faire les gens qui fonctionnaient à l'intérieur
d'un système de type pyramidal. De toute façon, il y a des
dispositions du code criminel qui prévoient ces choses.
Alors, de toute façon, dans ce contexte, quant à nous, si,
je reviens encore à ça, les mécanismes législatifs
et judiciaires existants sont satisfaisants; d'autre part, cette loi
enlève tellement de moyens, à toutes fins pratiques, si elle
était appliquée, que ça rend leur travail relativement peu
efficace. De toutes façons, elle serait extrêmement difficile
d'application. Enfin, on peut considérer qu'il faut mettre un terme
à ces pratiques abusives de façon définitive. Il s'agit,
à notre point de vue, encore une fois, de l'abolir et de donner la
possibilité au consommateur de veiller à ce que ce soit une
abolition définitive. C'est-à-dire de voir à ce que, si
les gens continuent la poursuite de ça, non seulement ce soit le
procureur général qui ait le loisir de poursuivre mais que,
éventuellement, des consommateurs puissent le faire en vertu de la Loi
des actions pénales, loi qui existe actuellement. Il suffirait
simplement d'ouvrir quelque peu pour qu'elle s'applique à des lois dans
le domaine de la protection du consommateur.
M. LEGER: Si les agents de recouvrement étaient obligés,
pour pouvoir recueillir ou récupérer des sommes, d'être les
propriétaires de la créance, autrement dit, non pas être
intermédiaires mais simplement acheter du créancier la somme qui
est due et qu'ils soient propriétaires, est-ce que vous pensez que ce
serait une meilleure solution?
M. DORE: A toutes fins pratiques, si c'était ça, ça
devient des créanciers. Ils ne deviennent plus des agents de
recouvrement, ils achètent une créance et deviennent des
créanciers au même titre qu'on prévoit à l'article
1571 du code civil, la vente d'une universalité de créance, ou
à l'article 1570, la vente d'une créance.
C'est prévu par la loi. Le législateur, comme c'est un
moyen, souvent, de financement qu'utilisent des individus, des commerces, des
artisans, la vente de l'universalité de créance, a prévu
des mécanismes permettant et facilitant cette vente pour faciliter les
échanges commerciaux en rendant moins onéreux et compliqué
ce processus juridique. C'est déjà prévu, de toutes
façons. Evidemment, l'intérêt juridique de l'acheteur de
créance est bien réel; il est propriétaire de la
créance, il peut donc évidemment ester en justice et
réclamer son dû. Mais il le fait en tant que propriétaire,
en tant que créancier et à l'intérieur d'un
mécanisme parfaitement bien établi qui est prévu, encore
une fois, au code civil et au code de procédures civiles.
M. LEGER: Autrement dit, les agents de recouvrement ont, comme
intermédiaires, un rôle de facturation qui est celui du
propriétaire de la créance, et un rôle qui se rapproche, je
parle avant la loi, de la menace de poursuite judiciaire, ce qu'on veut
enlever. Dans les deux cas, l'avocat peut poursuivre sans que l'agent de
recouvrement ait à faire des menaces ni à s'occuper de
prévenir le client de cela. D'un autre côté, si
c'était uniquement l'autre aspect qui est la facturation, parce que le
créancier n'a pas le temps ou les moyens, les possibilités de le
faire, il peut le donner à une compagnie de facturation qui ne fait pas
de harcèlement. En réalité, les deux rôles, soit
celui de se rapprocher de ce que le créancier peut faire, ou se
rapprocher de ce que l'avocat peut faire, ça peut être fait par
d'autres personnes que les agents de recouvrement.
M. DORE: Ils sont parfaitement remplis par d'autres et donc, rendent
inutile leur maintien. Exactement.
M. FRAWLEY: Juste une petite précision, M. Léger, si vous
le permettez, je pense que c'est un élément important que vous
soulignez. Il y a des compagnies qui achètent des créances, si
les agences de recouvrement ne le font pas. Il faut se poser la question. Une
des réponses possibles est que, peut-être, elles ne sont
même pas assez solides financièrement pour le faire. Parce qu'une
compagnie qui achète des créances, comme M. Doré le
soulignait tantôt, peut ester en justice, elle est propriétaire de
sa créance. L'agent de recouvrement, parce qu'il n'a pas les moyens de
le faire, ne peut pas se présenter devant les tribunaux, il n'a aucune
capacité juridique pour ça. A ce moment-là, c'est le
brutal bras du créancier.
M. LEGER: D'accord. Si la loi 26 n'était pas appliquée,
autrement dit, si on n'utilisait pas la loi 26 actuellement, si c'était
tout simplement l'abolition d'une autre façon des agences de
recouvrement, et si la loi 45 était amendée selon votre
disposition, est-ce que, d'après vous, ça règlerait le
problème tel qu'on le perçoit aujourd'hui? Disparition des agents
de recouvrement et amendement à la loi 45 permettant à des
individus de poursuivre eux-mêmes...
M. DORE: Mais obligation ou nécessité, c'est la
deuxième recommandation que l'on fait, tant pour les pouvoirs publics,
par le biais du procureur général, que les individus comme
consommateurs, par le biais de la Loi de l'action pénale qui le permet
actuellement, d'assurer le respect de la loi en intentant des poursuites
pénales privées, parce que, évidemment, il y a un pendant
à une prohibition.
Vous le savez, vous êtes députés, donc,
forcément, vous êtes pris quotidiennement avec ces
choses-là. A partir du moment où on prohibe, il faut qu'il y ait
une sanction pour le non-respect de la prohibition: c'est l'amende dans le cas
présent et, dans certains cas, l'emprisonnement.
Alors, pour assurer que les contrevenants soient poursuivis et cessent
leurs activités et respectent donc cette prohibition, cela prend, encore
une fois, une certaine forme de mécanisme de contrôle,
c'est-à-dire les contrôles administratifs. C'est le cas lorsque le
procureur général décide de poursuivre.
Nous, on dit: Ajoutons, pour assurer l'efficacité de
l'application de cette prohibition, la possibilité pour des
consommateurs d'intenter, en vertu de la Loi des actions pénales, des
poursuites devant les tribunaux pour des gens qui contreviendraient à la
prohibition qui serait celle de ne plus permettre ce type d'activités,
parce que, encore une fois, d'autres sont mieux placés. Les
mécanismes qui les régissent sont plus efficaces et vont plus,
finalement, dans le sens d'une véritable protection des citoyens que ce
qui est prévu dans ce projet de loi là par le maintien des
agences de recouvrement.
M. LEGER: Vous avez parlé tout à l'heure de la
vénalité de la loi actuelle qui donnait un appétit au
consommateur de poursuivre et qu'il y aurait pu y avoir des abus de ce
côté-là. Mais, si on l'enlevait complètement,
puisqu'on ne peut pas faire ce qu'on appelle communément la "class
action" c'est un groupe qui se dédie à une cause et qui va
défendre les droits collectifs et les droits individuels
étant donné que ce n'est pas encore de l'avant, la "class
action", comment pensez-vous qu'une personne pourrait avoir cette
préoccupation continuelle, idéale, de défendre les
intérêts collectifs en poursuivant? Il faut penser à une
chose. Les gens agissent toujours pour deux motifs: le motif primaire
idéal et le motif secondaire, qui est souvent ce qui fait bouger les
gens, un certain profit personnel. Le fait de poursuivre avec seulement la
récupération des sommes engagées, c'est quand même
de son temps, des préoccupations qui ne lui rapportent rien à ce
citoyen, sauf le fait qu'il est tellement un bon citoyen qui s'occupe de se
défendre et de protéger la vertu, etc.
Est-ce que vous ne pensez pas que les motifs
secondaires sont quand même assez importants?
M. DORE: Si vous le permettez, M. Léger, je pense qu'il y a une
distinction importante à faire. Comme c'est présentement et que
cela va devenir de plus en plus un de nos chevaux de bataille, la "class
action", il faut faire une distinction importante.
Ici, on parle d'assurer le respect d'une loi pénale, d'une
disposition pénale d'une loi. Dans notre esprit à nous, en tout
cas, à ce stade-ci de nos recherches, il n'est pas question de proposer
une "class action" pour ce faire. Donc, il faut, dans notre esprit, faire une
distinction importante. La "class action", dans le cas qui nous occupe ici
aujourd'hui, ce n'est pas une solution probable ou applicable.
Vous vous posez la question à savoir si l'abolition
complète de l'article 12 de la Loi des actions pénales, tel qu'il
existe actuellement, n'empêcherait pas finalement la surveillance. Nous,
on dit: Oui, cela empêcherait la surveillance dans la mesure où
une telle abolition ne permettrait qu'à des gens qui sont en moyen
financièrement et qui décident de défendre une cause, de
poursuivre une cause, de le faire. La proposition qu'on fait, ce n'est pas
l'abolition complète et totale, mais bien la réduction des frais
récupérables.
Plutôt que de donner la moitié d'une amende de $2,000 ou de
$5,000 à un consommateur, on dira: Le consommateur qui poursuit et qui
se donne le trouble de faire appliquer une loi ce qui est son devoir de
citoyen on lui permettra de récupérer les frais qu'un
témoin reçoit quand il va témoigner, les frais qu'il a
encourus pour faire signifier ses procédures, peut-être ses frais
de procureur, etc.
Donc, distinction importante à faire. Il n'est pas question
d'abolir complètement dans notre esprit la récupération
financière d'un individu qui poursuivrait, mais bien de lui laisser la
possibilité de récupérer certaines sommes pour le
dédommager finalement.
M. LEGER: M. le Président, ma dernière question, ma
dernière réflexion, c'est que, depuis deux jours qu'on est ici,
je m'aperçois que le mérite que le ministre aura eu en
présentant un projet de loi comme ceci, c'est d'amener au grand jour les
vrais visages de toutes les personnes qui sont concernées par
cela...
M. TETLEY: Y compris vous-même.
M. LEGER: Bien oui. Cela va de soi... et amener comme
conséquence, si le ministre veut être logique jusqu'au bout, que,
devant les arguments apportés, les seuls moyens de fonctionnement
efficace de ce groupe intermédiaire qu'on appelle les agents de
recouvrement, en voyant qu'ils n'auraient plus les moyens de le faire, ou on
veut réellement priver le consom- mateur pour lui enlever, ce qui est
absolument inacceptable dans le fonctionnement actuel et on s'aperçoit
que, si on lui enlève ces moyens, il ne pourra pas fonctionner, et que
le marché est même à la baisse, de ce
côté.
Si on corrige d'autres aspects de la loi 45 ainsi que d'autres aspects
qui ont été soulignés par les ACEF, on en conclut, moi du
moins j'en conclus que c'est maintenant clair et net, c'est mis à jour
qu'ils n'ont aucune raison sociale d'être là. Ils ont maintenant
des moyens diminués au point qu'ils ne seront pas capables de
fonctionner et, à toutes fins pratiques, leur existence, maintenant,
dans le contexte d'une société qui a évolué et du
dynamisme de l'avenir, n'a plus sa raison d'être. Ils doivent, donc
disparaître.
M. HARVEY (Charlesbourg): Une volte-face.
M. LEGER: Non, tout ce que j'ai dit hier... Il m'a posé la
question hier au début.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, c'est une question
de...
M. LEGER: II n'y a pas de question ni de privilège ni de
cela.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... règlement. M. LEGER: Vous ne l'avez
pas.
M. HARVEY (Charlesbourg): Est-ce qu'on peut rétablir des faits,
M. le Président?
M. LEGER: Hier, j'ai posé simplement la question: Est-ce qu'on
doit se poser la question sur leur existence même?
M. HARVEY (Charlesbourg): On aura le droit de parole tout à
l'heure.
M. LEGER: Après avoir écouté tous ceux qui ont
parlé pour et contre d'ailleurs, plus ils parlaient pour, plus
ils se calaient hier j'en ai conclu que ces agents de recouvrement n'ont
plus leur utilité.
M. HARVEY (Charlesbourg): II faut quand même faire une distinction
entre parler pour les agences et parler pour la loi. Je pense que nos critiques
étaient positives à l'endroit du projet de loi 26, nonobstant des
agences de recouvrement qui sont directement concernées par le projet de
loi. De toute façon, on va se reparler tout à l'heure.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'attention les représentants des ACEF. Il y a des choses que
j'ai retenues qui m'intéressent particulièrement, notamment
lorsque vous avez mentionné les taux d'intérêt
abusifs. Je pense que de ce côté il y a un gros travail à
faire, mais cela n'empêche pas que dans le recouvrement des
créances on doit considérer que cela n'inclut pas toujours des
questions de taux d'intérêt. Je vous donne un exemple. Vous me
corrigerez si vous pensez que je suis dans l'erreur, mais le recouvrement des
créances faites par les agences de recouvrement peut concerner des
créances qui ont été données à l'agence par
un commerçant, un petit commerçant, par exemple, qui n'a pas les
moyens de faire sa perception, qui n'est pas organisé pour la faire et
dont la créance constitue une vente qui n'est pas une vente à
tempérament. Donc, il n'y a aucun taux d'intérêt
impliqué. Evidemment, cela m'amène à dire que, à ce
moment, on ne peut pas spéculer tellement sur le taux
d'intérêt et sur la question des compagnies de finance, parce que
les agences de recouvrement, en pratique, je vous parle de la pratique,
parce que j'ai vu fonctionner cela. Cela adonne comme cela. Je les ai vues
fonctionner pour avoir été dans le commerce aussi et elles ne
font pas nécessairement de la perception pour les compagnies de finance.
Au contraire, les compagnies de finance sont très bien organisées
pour recouvrer leurs créances elles-mêmes. De ce
côté, elles n'ont rien à apprendre des agences de
recouvrement. Je pense qu'elles ont leurs propres méthodes qui
s'avèrent, à la pratique, très efficaces pour elles en
tout cas.
Mais cela m'amène à dire ceci: Là où je ne
vous suis pas, c'est lorsqu'on parle d'abolition. Je ne marche pas du tout.
Même si je conteste les méthodes que vous avez
dénoncées, c'est-à-dire que je conteste les
méthodes utilisées que vous avez vous-même
dénoncées, si je les conteste, évidemment, je pense que la
loi est là pour corriger ces mauvaises méthodes. Jamais je
n'accepterai le genre de méthodes que vous mentionnez par exemple
à la page 4 de votre mémoire. Je n'accepte pas ce genre de
méthodes. Je vais encore plus loin que vous autres là-dessus,
parce que je n'accepte pas des méthodes qui sont encore moins pures que
celles-là. Je pense que ma position qui est aussi la même qu'hier,
pour faire comme le député de Lafontaine, n'a pas changé
de ce côté. Elle n'a pas changé non plus, M. le
Président, parce que c'est bien beau de sortir de beaux grands
mémoires, mais il faut être pratique.
Dans la vie, pour être pratique, il faut faire des choses
pratiques. Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire: Qui va percevoir, si
on abolit les agences de recouvrement. Qui va le faire? D'abord, le petit
commerçant a besoin de quelqu'un. C'est un besoin réel. Il a
besoin de quelqu'un. Quand quelqu'un s'endette, avec tout le respect que j'ai
pour tous les consommateurs du Québec, du Canada et de tous les autres
pays, si vous voulez, quand quelqu'un achète quelque chose, il faut
qu'il s'attende à payer. Si on lui refile quelque chose à un prix
abusif, si on lui demande un taux d'intérêt abusif, à ce
moment, il doit le contester. Je suis d'accord sur cela et je suis prêt
à l'aider n'importe quand. Mais s'il achète quelque chose dont il
a besoin, avec toute la sympathie que j'ai dans d'autres domaines... Quand on
parle de changer le système pour permettre au petit consommateur de
pouvoir mieux vivre, je suis d'accord, mais ce n'est pas la question, on en est
à une autre étape. L'étape où nous sommes, c'est
que lorsqu'une chose est due, et non contestée comme étant due,
à ce moment, c'est normal que le consommateur s'attende à payer.
C'est normal aussi que quelqu'un puisse s'occuper de cela. Les avocats, avec
tout le respect que je vous dois et que je dois aux avocats, ne sont justement
pas intéressés à faire cela. Ils ont trop d'autres choses
en main.
M. le Président, le ministre lui-même a pris cette tangente
tantôt, parce qu'il a eu la pratique. Je ne dirai pas qu'ils ne sont pas
intéressés du tout à ne pas en avoir. Il faut servir la
clientèle, mais il faut les comprendre aussi. Ce n'est pas
intéressant pour eux de faire cela. C'est ce que je veux dire. Justement
hier, dans un souci de vouloir mieux me renseigner, j'ai discuté avec le
député de Chicoutimi, qui est avocat, qui me disait justement: On
n'est pas intéressé à faire cela.
M. HARVEY (Charlesbourg): Encore de la dissidence.
M. SAMSON: Je ne parle pas du Barreau. Les gens du Barreau sont venus
hier. Ils n'ont jamais dit qu'ils voulaient faire abolir les agences de
recouvrement. Ils n'ont pas dit cela. Ils sont venus ici hier, les gens du
Barreau. S'ils avaient voulu faire abolir ces agences, ils auraient dit: On
demande l'abolition. Ils n'ont jamais demandé cela. Alors, on peut
facilement en déduire, si on est le moindrement intelligent, que cela ne
les intéresse pas plus qu'il faut de faire cela eux-mêmes.
Maintenant, il y a une autre chose. Quand un consommateur doit payer une
créance, si elle passe par l'entremise d'une agence de recouvrement, il
ne paie pas plus cher que le montant dû. Alors que si cette
créance passe par un avocat, évidemment, les frais s'ajoutent.
Encore là, tout le monde comprend cela. Personne n'est
intéressé à voir s'ajouter des frais. Si l'agence de
recouvrement peut faire un bon travail, peut rendre des services aux
commerçants en n'augmentant pas la créance, je pense qu'à
ce moment, c'est quand même mieux que de voir augmenter la
créance. S'ils prennent 35 p.c, on a dit tantôt qu'un avocat peut
peut-être prendre 35 p.c., je pense qu'ils ne prennent pas cela, eux. En
tout cas, là-dessus, je ne ferai pas de débat sur les tarifs,
mais que ce soit 10 p.c. ou 15 p.c. de plus, c'est plus que l'agence de
recouvrement.
A mon sens, c'est illusoire de penser abolir cela. Par contre, là
je vous rejoins ce n'est pas toujours pour nous autres, vous savez
il faut les encadrer pour empêcher les abus. Là-dessus
je pense que cela mérite un débat qu'on les
place dans un cadre pour éviter ce genre d'intimidation et de
harcèlement dont sont victimes les consommateurs, je ne suis absolument
pas d'accord sur cela. Je suis un petit peu d'accord avec vous, cependant,
lorsque vous dites que la loi serait difficile d'application. Par contre, il y
a d'autres lois aussi qui seront difficiles d'application, et elles sont
nécessaires. C'est difficile d'application. On n'a pas le droit de tuer
son voisin, vous savez, mais si on n'est pas vu, c'est difficile d'appliquer la
loi. Je pense qu'on est d'accord là-dessus. Cela prend la loi quand
même. Il ne faut quand même pas dire qu'on ne fait pas de loi au
cas où le gars ne serait pas vu. Cela va être difficile
d'application, mais il y a des méthodes qui peuvent être
utilisées pour qu'elle soit applicable, cette loi. Je n'ai pas besoin de
faire de dessin au ministre, il sait quoi faire. Il a des possibilités,
en tout cas, de faire des vérifications. On dit qu'au
téléphone il n'est pas facile de savoir avec qui on parle.
D'accord, ce n'est pas facile pour le consommateur de savoir qui
l'appelle au téléphone. Par contre, le représentant d'une
agence de recouvrement qui appelle quelqu'un, ce n'est pas toujours facile pour
lui de savoir s'il a le bon gars au bout de la ligne non plus. C'est le genre
de vérification qui peut se faire. Ces abus, non seulement nous les
déplorons, mais il faut les arrêter. Mais s'il fallait abolir,
parce qu'il y a abus à titre de comparaison, tout le monde sait
qu'il y a des abus de dénoncés dans le domaine syndical
s'il fallait abolir le syndicat, je pense que ça crierait pas mal fort.
Ce n'est pas parce qu'il y a des abus qu'il faut abolir. Mais je dis:
Abolissons les abus, par exemple. C'est ma position.
M. DORE: Non, nous n'abolirons pas les syndicats parce qu'ils sont
utiles, du moins je le pense. Mais dans le cas des agents de recouvrement, je
pense qu'ils ne le sont pas.
M.SAMSON: Bien moi...
M. DORE: Vous dites qu'il faut être pratique...
M. SAMSON: ... je ne suis pas d'accord avec vous.
M. DORE: Essayons d'être pratiques, M. le député, en
examinant la situation que vous nous posez.
M. TETLEY: A l'ordre! Le député de...
M. SAMSON: Je ne suis pas d'accord avec vous là-dessus...
M. TETELY: ... Rouyn-Noranda a la parole.
M. SAMSON: ... lorsque vous dites qu'ils ne sont pas utiles. D'abord,
ils sont utiles à quoi?
Ils sont utiles à celui qui veut recouvrer sa créance.
Demandons à ces gens-là s'ils sont utiles. S'ils n'étaient
pas utiles, ces gens-là n'utiliseraient pas leurs services. Or, les
services des agences de recouvrement sont utilisés par les
commerçants. Je vous parle en connaissance de cause, j'ai
été dans le domaine. Mais je vous dis que les méthodes
utilisées sont mauvaises; là-dessus, je suis absolument d'accord
avec vous, et, à l'adresse du ministre, je dis qu'il faut même
aller plus loin qu'on est allé à cet égard. Mais cela ne
les empêchera pas de continuer à travailler. Le "repossess",
ça va avec l'armoire à glace d'hier, je ne sais pas si vous
étiez là, hier. Alors, ce sont des méthodes... vous avez
de bons exemples, mais il y a d'autres exemples aussi que nous avons vus, que
nous avons même vécus. Il faut abolir ça; sur ce point,
nous sommes d'accord.
M. LEGER: M. le Président...
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Charlesbourg.
M. LEGER: ... j'invoque le règlement. Les propositions, les
affirmations , les quelques questions que le député de
Rouyn-Noranda a posées, c'est pour les personnes qui sont ici, qui
viennent présenter un mémoire. Alors, n'est-ce pas normal
qu'après les questions qu'il a posées...
M. SAMSON: M. le Président...
M. LEGER: ... les gens puissent répondre?
M.SAMSON: ... je regrette, M. le Président. Je n'ai pas
posé de questions, j'ai fait des remarques.
M. LEGER: Ah! bon, si vous n'avez pas de questions.
UNE VOIX: ... émis des opinions.
M. SAMSON: J'ai émis des opinions et je n'ai pas besoin de poser
de questions. Ma position reste la même.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'ai bien compris cette situation. Le
député de Charlesbourg.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, depuis 10 h 30, ce
matin, ces bonnes gens collaborent avec nous dans cette discussion. Il serait
de bonne guerre, avant qu'à mon tour je donne quelques commentaires et
pose quelques questions, il serait de bon aloi qu'on permette à Me
Doré de tenter, en tout cas, d'ébaucher une réponse, ou
enfin, une contre-attaque à ce qu'il
croit devoir être corrigé dans les affirmations de
l'interlocuteur qui m'a précédé. Ensuite, j'irai
moi-même. Je pense que c'est de bonne guerre.
M. VEILLEUX: On est d'accord, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Oui, M. Doré, vous pouvez...
M. DORE: Merci. Je m'excuse tantôt si j'ai...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Vous avez tenté tantôt...
M. DORE: ... interrompu le député; j'avais cru comprendre
que le député avait terminé et j'avais cru
interpréter ses remarques comme étant interrogatives d'une
certaine façon, donc appelant une certaine réponse de ma part.
Cela dit, avec tout...
M. SAMSON: Ce n'est pas grave.
M. DORE: ... le respect que je porte à M. le
député.
M. SAMSON: Ce n'est pas grave. Ce n'était pas interrogatif
et...
M. DORE: Là je vais répondre.
M. SAMSON: ... réaffirmez votre position; je me
réserve le droit de réaffirmer la mienne aussi.
M. TETLEY: Vous allez trouver que c'est difficile de répondre au
député de Rouyn-Noranda. Vous êtes mieux de vous taire.
M. DORE: J'ai retenu de l'intervention du député de
Rouyn-Noranda un mot, une idée maîtresse, qui semblait le
préoccuper, savoir qu'il fallait être pratique. Il fallait voir
concrètement comment un commerçant dont il a
été peut récupérer une créance qui
lui est due pour un bien de consommation qu'il a bel et bien vendu dans une
vente au comptant. Prenons l'exemple d'un téléviseur qui est
vendu par un commerçant honnête ou d'une automobile qui est vendue
par un commerçant honnête et dont le débiteur ne rembourse
pas les montants qui sont dus. La réponse à cette question:
comment peut-il se faire rembourser?
D'abord, le commerçant lui-même peut faire une
première opération, mais peut-être que le mécanisme
le plus efficace dans ce contexte est qu'au lieu de confier ce travail à
une agence de recouvrement, il peut vendre sa créance, bel et bien, de
façon à récupérer immédiatement les montants
qui lui sont nécessaires parce qu'il en a besoin. Il veut, en fait,
récupérer ces montants de la part du débiteur et, d'autre
part, le nouvel acquéreur de la créance, étant
propriétaire de la créance, peut très bien ester en
justice pour assurer la poursuite du débiteur récalcitrant et
obtenir à ce moment, paiement de sa créance.
D'autre part, je ferai remarquer également au
député que lorsqu'on est aux prises avec des commerçants
qui ne sont pas, au sens de la loi, des personnes morales, mais des personnes
physiques, ils ont toujours le loisir d'utiliser le mécanisme de la
division des petites créances. Et dans la mesure où le
gouvernement retiendrait la suggestion déjà faite par les ACEF
d'augmenter progressivement, par étapes mais rapidement, le montant de
la division des petites créances à $500, $750 et $1,000,
déjà bon nombre des cas que vous visez à ce moment, sur le
strict plan, très pratique, seraient couverts ou par ce biais ou par le
biais de la vente ou encore par le biais du recours au mécanisme
légal normal, si le commerçant ne vend pas sa créance,
c'est-à-dire l'utilisation d'un avocat qui va faire le travail.
D'autre part, vous avez noté et vous avez acquiescé
à une affirmation que j'avais faite de la difficulté
d'application de la loi 26, compte tenu du type de pratiques qui sont
normalement utilisées par les agents de recouvrement.
La question est de savoir s'il serait envisageable, si le projet de loi
26 était maintenu tel quel par le gouvernement, que ce dernier veuille
au moins y inclure la disposition permettant aux consommateurs, comme tels,
d'aider le gouvernement à appliquer cette loi malgré ses
difficultés en y incluant la possibilité pour les consommateurs
de poursuivre les récalcitrants. Ce serait peut-être, à
tout le moins, un moindre mal que si la loi était maintenue. Quant
à nous quant à nous, je dis bien nous
considérons que, pour toutes les raisons que j'ai données
tantôt, les agences de recouvrement devraient être abolies. Les
mécanismes existants sont parfaitement bien adaptés aux
nécessités du commerce et aux nécessités de
l'industrie pour être capable de faire le recouvrement normal des
créances. Et si le gouvernement décidait de maintenir son projet
de loi, jugeant la situation de façon différente, à tout
le moins, est-ce qu'il serait possible d'envisager que, pour rendre
l'application de la loi plus efficace, les consommateurs soient au moins
invités ou associés, ou qu'il soit possible pour les
consommateurs d'aider le gouvernement à appliquer cette loi.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: Sur le dernier point à l'effet que le consommateur
soit appelé à pouvoir poursuivre ou à surveiller, quelle
est la meilleure méthode? Je ne le sais pas exactement, mais que le
consommateur ait un certain pouvoir de surveillance, là-dessus, je me
rendrais facilement à cela parce que je considère que la loi sera
difficile d'application. Je disais au ministre tantôt que je lui faisais
confiance là-dessus pour trouver des moyens pour surveiller l'appli-
cation, mais que ces moyens passent par l'aide aux consommateurs, je
n'ai pas d'objection.
Je réitère quand même l'importance des agences de
recouvrement mais, comme vous autres, je parle de celles qui sont correctes.
Celles qui ne sont pas correctes, je ne veux pas en entendre parler. Mais vous
disiez tantôt que le commerçant peut vendre sa créance.
Quelle est la différence, au point de vue pratique, si le
commerçant qui peut vendre sa créance décide de vendre sa
créance à quelqu'un qui agissait auparavant comme agent de
recouvrement et qui maintenant agit comme acheteur de créances? Quelle
sera la différence? Cela pourra être le même agent...
M. DORE: II a le droit...
M. SAMSON: II a le droit. Oui, d'accord, mais qu'est-ce que cela donne
en pratique? Le commerçant qui va vouloir vendre sa créance...
Vous savez qu'on ne prend pas acheteur facilement pour une créance. Non.
On ne prend pas acheteur facilement pour une créance. Je sais cela. Et
ce n'est pas le même prix non plus. Alors, on ne récupère
pas autant son capital quand on est obligé de vendre sa créance.
Si on est obligé de vendre sa créance à 20 p.c. de sa
valeur, si on est un commerçant, si on a le libre choix, on va opter
pour quoi? Probablement pour un recouvrement plutôt qu'une vente de
créance parce qu'avec un recouvrement, on peut recouvrer de 60 p.c.
à 65 p.c. de sa créance alors que par la méthode de vente
de créance, cela peut parce que c'est alors négociable
être 20 p.c, le recouvrement, au lieu de 65 p.c.
Alors le commerçant, je pense qu'il doit être libre de
choisir. S'il veut vendre sa créance, même s'il y a des agences de
recouvrement, il n'y a rien qui l'empêche de la vendre, mais il va
être libre de choisir cela. En même temps, il faut continuer
à permettre aux petits commerçants... C'est ceux-là que je
vise le plus dans cela parce que les gros, ils n'ont pas de problème.
Ils ne se servent pas trop des agences de recouvrement. Ce sont les petits qui
ne sont pas organisés. Il faut leur permettre... Même si c'est une
personne physique qui avait la possibilité d'utiliser la cour des
petites créances, même là, si le gars est en affaires,
pensez-vous qu'il a le temps d'aller passer des demi-journées et des
journées à la cour des petites créances? S'il a plusieurs
créances, il va préférer pouvoir utiliser les services
d'un agent de recouvrement. Les commerçants ne passent pas leurs
journées dans leurs livres de comptes. Ils ont d'autres choses à
faire que cela pour faire marcher le commerce.
Une journée par mois ou à une période
donnée, on vérifie les comptes et on dit: Là, il faut
faire le nettoyage de nos comptes. Cela, ça ne paie plus, ça ne
paie pas. On sort cela, on prend le paquet et on le donne à son agence
de recouvrement, qui est spécialisée et qui s'en occupe.
C'est un domaine où les commerçants ont besoin de ce genre
de service et, s'il n'existait pas, on ne serait pas là pour adopter une
loi pour le réglementer. S'il n'existait pas, les commerçants
inventeraient ce genre de service. Moi, je vous dis que c'est
inévitable. Il faut l'accepter. Mais maintenant qu'il existe, il faut
s'assurer qu'il opère normalement, sans intimidation. Là-dessus,
j'y reviens encore une fois, je suis absolument d'accord avec vous. Il faut
trouver un moyen pour éviter cela. Je me range à votre
idée d'intéresser le consommateur à la surveillance de
cette loi.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Charlesbourg.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, je pense que les
quelques remarques qui ont été ajoutées au mémoire
dont j'avais pris connaissance, présenté par les ACEF, les
quelques remarques évoquées par le procureur, Me Doré,
méritent d'être relevées à la pièce, je
pense.
De toute façon, on va s'en tenir, peut-être, à
l'ensemble du projet de loi puisque je pense que, pour une fois, une
fois de plus peut-être, je l'ignore l'ACEF a donné un coup
d'épée dans l'eau. En fait, vous n'avez pas du tout parlé
du sujet dont on discute en commission parlementaire.
Pour autant que vous êtes concernés, vous dites: Ecoutez,
on vient vous dire tout simplement que le projet de loi no 26 n'a pas sa raison
d'être et qu'on doit abolir tout simplement les agences de
recouvrement.
Je ne suis pas d'accord là-dessus. Si vous évoquez le
fait, par exemple, qu'à l'intérieur de la loi 45, à
l'article 75, on a mis fin aux ventes pyramidales; on sait que les ventes
pyramidales étaient des opérations qui étaient
illégales. En plus d'être illégales, dans certains cas,
elles étaient frauduleuses. C'était le devoir du gouvernement de
mettre un terme, de freiner, d'arrêter complètement et d'abolir,
finalement, les pertes d'argent des consommateurs. Il y avit des pertes
d'argent.
Mais je ne vois pas dans l'existence des agences de recouvrement, qu'il
y ait ou que cela implique des pertes d'argent du consommateur qui refuse de
payer le bien qu'il a acheté.
Je pense que les ACEF on n'a pas à se poser la question
jouent un rôle de premier plan et essentiel, je pense, dans
l'information du public et dans la formation du public en matière de
crédit, en matière d'éducation, en matière de
budget familial. Je suis assez bien placé, au moins, pour ne pas avoir
oublié ce que j'ai appris moi-même, ayant déjà
oeuvré à l'intérieur des ACEF. Je tiens à ce que le
procureur le sache.
De toute façon, la loi 45 mettait donc un frein à une
perte d'argent réelle des consommateurs naifs qui se faisaient poigner,
comme on dit en bon français. Alors, si on compare le fait que la loi 26
doit elle-même, au même titre que
l'article 75 du bill 45, être introduite à
l'intérieur de cette loi, on compare des pommes avec des oranges.
Je voudrais que, si on établit une comparaison, les pommes, on
les compare avec des pommes et que les oranges, on les compare avec des oranges
puisque, à ce que je sache, je ne vois pas comment le consommateur
lui-même pourrait faire des pertes d'argent réelles lorsqu'il est
lui-même poursuivi pour un achat dont il a profité et qu'il n'a
pas payé.
Là, on discute du cas des agents de recouvrement. C'est la
volonté du gouvernement, c'est la volonté du ministère des
Institutions financières, Compagnies et Coopératives. C'est
à la recommandation même des ACEF que le ministre des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives introduit à
l'intérieur du chapeau qui recouvre tout l'ensemble de la protection du
consommateur une loi qui régit finalement les agents de recouvrement. Je
pense que ces agents de perception sont, comme vous l'avez bien dit
vous-même tout à l'heure, discutables pour certaines pratiques
qu'ils utilisent. Là, je suis d'accord, mais, en revanche, lorsque vous
proposez comme soupape que les avocats seuls ou qu'un nouvel article de la loi
45 vienne abolir carrément les agences de recouvrement, vous ouvrez
encore la porte à d'autres irrégularités, à
d'autres pratiques discutables, parce que vous-même vous avouez que les
avocats dans certains cas... Vous avez dit que même vous en connaissiez
ou que très rapidement vous pouviez identifier ceux qui font ce genre de
pratiques discutables. Si vous dites que le créancier doit être
laissé à lui-même au même titre que la Loi des
petites créances, je me demande où on va aller avec cela. Je
pense que le rôle réel des ACEF, c'est de procéder à
de l'information et à la formation du public. Dans cette formation,
cette éducation du public, ne reste-t-il pas, dans le système qui
est le nôtre, le libre choix d'acheter où on veut, quand on veut,
comme on veut, au taux qu'on le désire aussi? Je pense que ce coup
d'épée dans l'eau, en fait, qui vient tout simplement dire...
Cela fait, hélas, deux heures qu'on vous retient et on le regrette
infiniment, mais vous venez nous dire qu'on doit abolir cela. Alors, vous ne
discutez pas du projet de loi 26.
Evidemment, les vendeurs itinérants étaient aussi des gens
qui, jusqu'à un certain point, allaient exploiter l'acheteur naif. Vous
admettrez que le fait d'avoir régi à l'intérieur de la loi
45 les vendeurs itinérants en leur imposant un permis, en ayant des
critères spéciaux pour leur permettre d'exploiter le commerce
dont ils sont eux-mêmes les vendeurs, je pense que cela a
éliminé les vendeurs malhonnêtes jusqu'à un certain
point. Il en existe encore. Dieu sait s'il en existe encore et il en existera
toujours. Chaque jour, le ministère des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives prend action contre ces gens qui vont
exploiter les ignorants d'un commerce quelconque. Je pense que le fait d'exiger
un permis et le fait aussi d'exiger un cautionnement et d'autres
modalités, cela causera certainement, à l'avenir, la disparition
des agences ou des agents de perception qui utilisent ces méthodes ou
ces pratiques discutables ou d'intimidation jusqu'à un certain
point.
Mais là où je ne vous suis pas du tout, c'est que si tout
ce qui s'achète, en principe, doit se payer, par qui cela doit-il se
payer? Cela doit se payer par le consommateur. Que le consommateur, comme vous
l'avez dit ce matin, achète des choses qui ne sont pas
nécessaires, de là l'utilité des ACEF pour faire de
l'éducation. Actuellement, je pense que la plupart des maisons
établissent une restriction de crédit. Nous sommes dans un
contexte où le crédit est de plus en plus restreint, mais le
crédit est ouvert maintenant aux personnes qui sont susceptibles
d'apporter une preuve de leur bonne conduite, c'est-à-dire de leur
capacité de remboursement. Il s'agit pour eux de discuter au meilleur
taux.
J'entendais tout à l'heure le député de Lafontaine,
dans une volte-face de moins de 24 heures par rapport à ce qu'il a dit
hier dans le Journal de Québec, dans un article intitulé: "Le
recouvrement: on prépare une loi au boutte". C'est bien à la mode
comme titre et c'est écrit par Normand Delisle. Je pense que c'est un
journaliste très sérieux qui rapporte toujours fidèlement
ce qui est dit de sérieux à cette table: "Pour sa part, le
porte-parole de l'Opposition officielle, le député
péquiste de Lafontaine, M. Léger, a félicité le
ministre pour la présentation d'un projet de loi sur le recouvrement des
dettes. Un tel texte législatif s'imposait, selon M. Léger. Ce
dernier a cependant souligné il va de soi que le
Québec est encore la dernière province canadienne à
légiférer en ce domaine". Mais, en revanche, le ministre a
répondu qu'on avait quand même une loi qui allait beaucoup plus
loin que la loi qui est actuellement en vigueur dans les autres provinces et
l'exemple de la loi 45 est un autre de ceux-là.
Je regrette infiniment que vous ayez vous-même ou votre groupe
perdu une couple d'heures à venir nous convaincre que c'est une loi qui
n'a aucune raison d'être présentée et qui peut être
vide de sens, selon ce que vous croyez. Lorsqu'on regarde la conclusion de
votre mémoire, on voit: "II faut abolir la pratique de la collection".
Alors, on abolit cela, on ne collecte plus. Achetez, mais on ne collecte plus.
"Pré-tendra-t-on que notre proposition est génératrice de
chômage en ce qu'elle vise à détruire un secteur de notre
économie, nous répondrons que nous préférons voir
le PNB c'est-à-dire le produit national brut diminuer
vous préférez cela que de le voir artificiellement
engraissé par des pratiques visqueuses aussi humainement
détestables que socialement catastrophiques".
Pour ma part, je pense que nous sommes un
gouvernement qui, à l'intérieur d'un ministère
difficile à administrer, s'occupe de trouver l'équilibre entre
les deux formules. Par définition, le ministère des Institutions
financières, Compagnies et Coopératives, qui s'occupe de la
protection du consommateur, a cette responsabilité mais a aussi la
responsabilité de sauvegarder l'économie. Je pense que, si on
continue à conserver le raisonnement que ce qui s'achète doit se
payer, c'est davantage vers l'éducation du public qu'on doit axer nos
efforts. Précisément en apportant des restrictions au chapitre
des agences de recouvrement, par des critères qui vont limiter certaines
influences indues qui s'exerçaient antérieurement, je pense qu'on
va bonifier au moins le système de recouvrement tout en conservant
l'aspect juridique qui doit poursuivre son cours. Je pense que la solution que
vous proposez est nettement en dehors du sujet aujourd'hui puisqu'on discute
d'un projet de loi dont on voudrait améliorer le contenu mais non pas,
du revers de la main, le retourner comme vous en faites une proposition dans la
résolution globale de votre mémoire.
LE PRESIDENT (M. Cornellier) Le député de Lafontaine, sur
une question de règlement.
M. LEGER: M. le Président, le règlement nous dit qu'il
faut attendre la fin d'une intervention d'un député pour
rétablir les faits qui auraient été faussement
interprétés. Alors, j'ai attendu pour voir s'il n'y aurait pas
d'autres anomalies dans l'intervention du député de Charlesbourg.
Je dois dire qu'il a affirmé tantôt que j'avais fait volte-face.
Il s'est basé sur un article de journal. Moi, je me dis: ou le
député était présent hier physiquement et
intellectuellement ou il était absent.
M. HARVEY (Charlesbourg): Oui. Les deux.
M. LEGER: II sait fort bien que se baser sur un article de journal, il
en manque des choses dans le journal, parce qu'il n'y a pas tout l'espace pour
tout écrire ce qu'on a dit. Ou, s'il était présent
physiquement et absent intellectuellement, il aurait dû lire la
transcription et non pas seulement le journal. Je veux rétablir les
faits; il disait que j'ai fait volte-face. C'est exactement le contraire que
j'ai fait, puisque j'ai dit hier que la loi était un pas en avant, mais
qu'il fallait aller jusqu'à penser à l'importance ou la
nécessité de ce groupement. Par la suite, j'ai dit, c'est la
logique, normalement, quand on suit la logique, c'est comme quand on
écoute des gens, c'est pour savoir, pas parce qu'on a une idée
faite d'avance mais on les écoute parce qu'ils peuvent influencer notre
décision. J'étais dans une dynamique de réflexion
spécialement sur le fait que j'avais posé au préalable le
principe qu'il fallait peut-être reconsidérer la
nécessité de ces agences de recouvrement. Quand le
député dit que l'organisme mélange les oranges et les
pommes, le bill 45 et le bill 26, je pourrais dire que, puisque le
député dit qu'il a déjà été dans les
ACEF, quand on s'éloigne d'un milieu, on oublie vite...
M. HARVEY (Charlesbourg): Je parle des ventes pyramidales
comparativement aux agents de recouvrement.
M. LEGER: Excusez-moi, j'ai la parole. J'ai écouté
respectueusement et intellectuellement le député...
M. HARVEY (Charlesbourg): J'y reviendrai. M. LEGER: C'était
difficile mais en tout cas.
M. HARVEY (Charlesbourg): Mais vous êtes mêlé un
peu.
M. LEGER: Quand on s'éloigne de plus en plus d'un milieu, on
oublie vite ce milieu, on se coupe des réalités quotidiennes et
on n'a plus les réflexions qu'on avait eues. J'espère que le
député de Taschereau, qui va parler tantôt et qui a
vécu dans ce milieu, continuera, comme je l'ai vu jusqu'à
maintenant, de se référer à un milieu où il
était quotidiennement, et ça se voit dans ses réflexions.
Entre le bill 45 et le bill 26, le député de Charlesbourg ne voit
pas la liaison directe. Ce que le groupe a dit tantôt, c'est
qu'actuellement moi-même, je vous dis on est après
la première lecture, on n'est pas après la deuxième. C'est
donc dire que le projet qu'on a devant nous est quasi un document de travail
qu'il faut évaluer. A ce moment-là, la conclusion, c'est que
c'est pour régler un problème, le bill 26. Si, en écoutant
les gens concernés, comme j'ai dit tout à l'heure, on a mis
à jour le vrai visage de ces choses, si le bill 26 ne correspond pas
à la solution du problème, même si c'était un pas en
avant et qu'on s'aperçoit que c'est non seulement un pas avant, il faut
aller plus loin que ça. Les réflexions qu'on a eues depuis deux
jours le ministre disait hier qu'il faut marcher avant de courir
après ces réflexions il faut peut-être courir à la
solution finale qui est que, dans le contexte total, l'agent de recouvrement a
un rôle intermédiaire. Si ce rôle intermédiaire, il
faut le garder, l'encadrer comme disait le député de
Rouyn-Noranda tantôt, s'il faut l'encadrer, on continue dans le bill
26.
Mais si nos conclusions, après avoir entendu ces gens, c'est non
pas de les encadrer, mais de les enlever, c'est absolument logique et
après ce que j'ai dit hier, ce n'est pas une volte-face, c'est
exactement la suite logique de ma première préoccupation qui
était: Est-ce qu'elles ont encore leur place? Et je l'ai bien dit hier.
Si le député avait lu d'autres journaux, il l'aurait vu dans
d'autres journaux aussi.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, toujours sur la
question de règlement, si le député de Lafontaine veut
être conséquent avec
lui-même, il n'a qu'à vivre au jour le jour. Hier, lors des
discussions, il parlait beaucoup plus dans le sens du mémoire qui est
présenté ce matin, qui est celui de la Fédération
des ACEF, dont il a fait siennes les idées maîtresses et
aujourd'hui, il pose des questions concernant la Chambre de commerce.
Je pense que pour autant que je suis concerné, il ne vaut pas la
peine de donner plus de détails ou plus de réponses à son
interrogation qui n'a rétabli aucun autre fait que celui que j'avais
évoqué tout à l'heure.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Taschereau.
M. BONNIER: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'intérêt les propos des ACEF et le ministre, son premier
réflexe a été que c'était une proposition
révolutionnaire que d'abandonner les agents de recouvrement ou cette
idée-là. Ce qu'il voulait dire, c'est que c'était quelque
chose, peut-être, qui était installé dans un système
et que ce n'était pas facile d'en faire le tour en un tour de main.
Je pense que moi, si j'avais été dans les ACEF, j'aurais
peut-être été plus loin, en ce sens que je pense qu'il va
falloir un bon jour examiner l'ensemble du circuit financier. Il y a un certain
désordre dans le circuit financier, c'est là le fond du
problème. Actuellement, au lieu que ce soit des institutions
financières spécialisées dans le domaine du crédit,
des institutions bancaires je ne parle pas des coopératives, on
dirait que j'ai des préjugés qui devraient normalement
faire le crédit aux gens, institutions auxquelles les gens devraient
s'adresser avant d'aller acheter des meubles ou autres biens durables ou
non-durables, ce qui existe, par tradition depuis un certain nombre
d'années ou de décades, c'est que les commerçants font et
vendent à toutes fins pratiques du crédit. C'est tellement vrai
qu'il y a des entreprises qui font beaucoup plus d'argent à vendre du
crédit qu'à vendre des meubles.
Je dis qu'au point de vue économique, c'est un peu le monde
à l'envers. Quand on veut parler d'inflation et essayer de la
contrôler, un des facteurs ce n'est pas simple, l'inflation
de l'inflation, c'est l'accent qu'on met à forcer les gens à
acheter des choses dont il n'ont pas besoin, justement parce que ce n'est pas
tellement le profit qu'on fait quelquefois sur tel et tel article, mais aussi
le profit qu'on fait sur le crédit.
Je ne parle pas simplement du Québec, parce que dans l'ensemble
de l'Amérique du Nord et en Europe, c'est une mode qui s'installe avec
beaucoup de rapidité. Je pense qu'il faudrait, au niveau des
gouvernements, d'une façon générale, réexaminer le
système financier et réexaminer le rôle de chacun.
Cependant, étant donné la situation actuelle parce
que ce n'est pas facile de changer cela du jour au lendemain, j'en suis bien
conscient il arrive que beaucoup de commerçants n'ont pas les
instruments nécessaires pour récupérer leurs mauvaises
créances, surtout leurs mauvaises créances.
On a dit hier qu'il y a à peu près 2 p.c. de
délinquants réels qui sont difficiles à rejoindre au
niveau des consommateurs. Je pense que cela équivaut aux statistiques
d'ensemble dans ce domaine, mais c'est peut-être dû au fait
justement que ces gens-là, on a fait un peu de pression sur eux pour
qu'ils achètent. Ils n'étaient pas en mesure d'acheter, et c'est
très difficile. J'ai cru comprendre qu'un certain nombre de
commerçants n'ont pas les gens voulus pour récupérer ces
sommes-là.
J'ai cru comprendre également que certains bureaux d'avocat n'ont
pas non plus les instruments voulus. Parce qu'il ne s'agit pas simplement de
l'aide, comme vous l'avez dit. Si c'était simplement demandé sous
forme M. le Président, vous m'arrêterez si je parle trop
longtemps...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'étais sur le point de vous
demander de résumer ...
M. BONNIER: ... de courrier, parce qu'à ce moment-là, je
pense bien que les bureaux d'avocat vont devenir, comme le disait le ministre
ce que j'ai à dire c'est très important.
M. LEGER: II ne faut jamais arrêter un député qui
parle bien, M. le Président.
M. BONNIER: Ce qui va arriver, c'est que les bureaux d'avocats vont
employer un certain nombre de gens qui ne seront pas des avocats et qui vont,
à toutes fins pratiques, devenir des agents de recouvrement. Il y a un
danger de ce côté.
Je pense que si les bureaux d'avocats... hier, le député
de Rouyn-Noranda, malheureusement il n'est pas ici, mais je dois quand
même lui rendre le témoignage qu'il est exact que le Barreau...
parce que c'est moi qui ai posé cette question au Barreau. Est-ce que
vous préféreriez que ce soient les avocats? Ils ont dit: Non,
nous ne le préférons pas, parce que, pour toutes sortes de
raisons, c'est un commerce.
Je pense que c'est plus qu'un commerce, c'est un rouage du circuit
financier qu'il faudrait vraiment contrôler; mais tout de même,
eux, ils prétendent que c'est tout simplement un commerce. Ils n'ont pas
l'air d'être plus intéressés que cela. Certains le sont,
certains ne le sont pas.
Pour ma part, je laisserais, jusqu'à un certain point... Je pense
que l'attitude actuelle du gouvernement est correcte, en ce sens qu'il faut
réglementer ce système puisqu'il existe, et si les avocats
décident de s'en occuper eux-mêmes, si les commerçants
croient que c'est préférable de faire affaires avec les avocats,
tant mieux. On verra d'ici un an ou deux si la tangente va dans
ce sens, alors, peut-être que ce ne sera plus essentiel; mais
actuellement, il serait illusoire de penser, simplement pour le
législateur, de décider que ce n'est plus essentiel. C'est
malheureusement essentiel. Je dis malheureusement parce que c'est vrai, il y a
beaucoup d'abus.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, je veux simplement résumer la
situation précise que nous avons, à laquelle nous devons trouver
des solutions. Vous avez quatre paliers entre le créancier et le
débiteur actuellement. Vous avez d'abord le créancier, à
qui on doit de l'argent pour un objet qui a été vendu, ou pour
autres choses dans le même style. Vous avez, comme quatrième
palier, le débiteur, celui qui le doit. Entre cela, il y a deux paliers
intermédiaires qui sont, d'une part, ce que les agents de recouvrement
font actuellement, facturation et menace de poursuite, et, d'autre part, le
troisième palier, qui est l'avocat, ou celui qui poursuit au nom du
client.
Au deuxième palier, celui qui nous intéresse se trouve
celui qui s'occupe actuellement de la facturation et de méthodes pour
essayer de percevoir pour son intérêt personnel d'abord, avec des
moyens dangereux. Les deux activités que ce groupe utilise actuellement,
c'est la facturation vis-à-vis des clients, et des menaces, pour
être capable de récupérer avant qu'on s'adresse à
l'avocat.
Le domaine de la facturation touche 90 p.c. des gens qui paient du
premier coup on nous l'a dit hier 8 p.c. des gens qui paient
après une ou deux demandes et 2 p.c. ne sont que des
récalcitrants et avec lesquels on a des difficultés à
récupérer les sommes dues. Donc, la facturation peut être
faite par un autre groupe que les agents de recouvrement. Il y a des compagnies
qui se spécialisent dans la facturation, qui aideraient le petit
épicier qui n'a pas le temps et les moyens de le faire. Cela peut
être par une compagnie de facturation. Vous avez ceux qui font de la
menace, ce devrait être laissé aux avocats, qui ont le pouvoir
légal de faire une menace, mais c'est pour les 2 p.c. Une menace veut
dire qu'on va poursuivre en dedans de dix jours si on ne paie pas.
La créance qui est l'objet central de toute cette discussion,
c'est un nouveau bien que possède le créancier. S'il a vendu un
réfrigérateur, ou s'il a vendu n'importe quel objet de
consommation, c'était un objet pour lequel la personne n'a pas
payé. Il n'a plus l'objet, il l'a vendu, il lui reste maintenant le bien
qui est la valeur pécuniaire de cet objet. Cela devient un nouveau bien.
Ce nouveau bien, le créancier, il faut qu'il le récupère,
il faut qu'il évalue ce que vaut maintenant ce bien pour lui. Est-ce
difficile ou facile de le percevoir? Est-ce que ce bien va prendre trop de son
temps? Ce qui vaut de l'argent pour lui, est-ce que cela va prendre trop de son
temps pour recouvrer les $400 que le débiteur lui doit? Pour lui, cela
lui vaut quelque chose. Est-ce qu'il est prêt à payer pour le
récupérer?
S'il calcule qu'il peut le faire, il peut soit vendre sa créance
au prix que cela vaut, ce nouveau bien. Ou bien il va le confier à une
compagnie de facturation, parce que cela lui vaut cela pour ne pas courir
après. Il n'a pas le temps, il faut qu'il s'occupe de vendre et de son
commerce. Il peut le donner à une compagnie de facturation qui n'est pas
une agence de recouvrement ou bien il va le donner à un avocat pour une
somme quelconque. A ce moment-là, il ne perd pas puisque cela vaut cela
pour le collecter, ce bien.
M. HARVEY (Charlesbourg): II faudrait la régir.
M. LEGER: Les lois actuelles, amendées selon ce que les ACEF nous
proposent, permettent de le réaliser. C'est la raison pour laquelle je
dis que la fonction intermédiaire no 2 qui est, et la facturation et des
menaces et de harcèlement qu'utilisent les agents de recouvrement n'a
plus sa raison d'être puisque cela peut être fait par d'autres
personnes sans trop de pertes pour le créancier, puisque cette valeur en
argent évolue selon la qualité du débiteur. Il y a tous
les mécanismes qu'il faut, avec des amendements proposés à
la loi 45, à la Loi des actions pénales. A ce moment, il a les
moyens de le récupérer. C'est pour cela qu'en voyant les
difficultés que les agents de recouvrement auraient à fonctionner
s'ils n'ont pas les pouvoirs qu'ils utilisent actuellement, qui sont des
pouvoirs inacceptables de coercition, de menaces et d'intimidation, etc...
S'ils n'ont pas cela, ils ne peuvent pratiquement pas fonctionner. Leur raison
d'être n'est plus là. C'est donc dire qu'il y a d'autres
mécanismes qui peuvent le faire et que le projet de loi 26 qui est
maintenant un document de travail, puisqu'on n'est pas à la
deuxième lecture, peut être changé si on accepte, comme le
disait le député de Taschereau... Il n'est pas allé au
bout de sa logique; je comprends que sa logique était là et qu'il
ne faut pas qu'il s'éloigne trop du milieu dans lequel il était
avant.
Nous avons eu deux libéraux qui se sont exprimés
là-dessus à part le ministre. On voit la différence entre
les députés libéraux. Il y a des députés
libéraux partisans, comme le député de Charlesbourg, et il
y a le député libéral avec l'esprit ouvert,
c'est-à-dire un libéralisme ouvert, qui est encore conscient des
problèmes.
M. TETLEY: Je crois que le député de Charlesbourg a
l'esprit assez libre.
M. LEGER: C'est pour cela que je pense qu'il faut tenir compte de la
différence entre un libéral pensant et un libéral
suivant.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président, c'est facile pour un
député de mentionner le nom d'un autre député qui a
dû s'absenter momentanément.
M. LEGER: II aurait pu être là. Il m'a attaqué, il
aurait pu attendre.
M. VEILLEUX: Je sais que le député de Lafontaine est un
agent spécialiste de recouvrement pour les églises. J'aurais une
question à poser au député de Lafontaine.
M. LEGER: Je vais aller m'asseoir là-bas.
M. VEILLEUX: Est-ce que, d'après lui, on devrait intercaler dans
la loi les agents de recouvrement pour les partis politiques?
M. TETLEY: Peut-être que le député de
Lafontaine...
M. LEGER: C'est une question. Je pense que cela n'existe pas. Je ne vois
pas ce que cela vient faire dans le débat. Ce n'est ni dans le bill 26,
ni dans la loi 45. C'est peut-être dans la loi 22, mais c'est encore
resté dans cet esprit-là.
M. VEILLEUX: C'est une question que je pose au député' de
Lafontaine et, comme d'habitude, il n'a pas répondu.
M. LACHANCE: Agence de recouvrement pour les fabriques.
M. TETLEY: Merci. Messieurs, je vous remercie. Vous avez, en passant,
soulevé une question que je me pose et je vais la poser à tous
les députés, mais je ne demande pas de réponse. On peut
transférer des créances et les vendre à une personne qui
en devient le propriétaire, ensuite qui peut procéder hors les
exigences et prohibitions de notre loi. Il y a vingt ans, lorsque j'ai fait un
peu de perception pour un bureau d'avocat, c'était le moyen par lequel
les agents de recouvrement dans le temps ont dépassé la Loi du
Barreau, qui était dans le temps très stricte, je ne sais pas
pourquoi. Ils achetaient tous les mois toutes les dettes sans payer, avec un
titre en bonne et due forme. A la fin du mois, ils payaient un pourcentage
suivant le contrat. C'était une lacune de la loi ou de l'avant-projet
26, à laquelle il faut tous penser. Je passe ce problème à
mes conseillers juridiques. Au nom de tous, je remercie la
Fédération des ACEF du Québec. Encore une fois, vous avez
présenté un mémoire fort intéressant. Il faut vous
féliciter; vous avez touché pas simplement un article ici et un
article là, mais une bonne partie de la question. Malgré tout, je
trouve les commentaires du député de Taschereau assez
intéressants, parce que, comme vous, il croit que c'est une question
même plus grande; c'est une question du crédit.
Les deux lois du fédéral, la Loi des intérêts
et la Loi des petites créances, petits prêts, sont inacceptables
et je l'ai toujours dit, vous l'avez dit.
Je vous remercie; nous allons considérer vos revendications avec
un très grand intérêt.
M. DORE: M. le Président, est-ce que vous me permettez de
remercier le ministre des propos qu'il vient de tenir, d'une part...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Certainement, M. Doré.
M. DORE: ... d'autre part, de faire peut-être remarquer, entre
autres, compte tenu peut-être de l'intervention du député
de Charlesbourg, que le projet de loi 26, c'est d'abord et avant tout parce
que, fondamentalement, on considère que les agents de recouvrement sont,
socialement, injustes; leur existence pose des problèmes sociaux
importants; on propose leur abolition et, conséquemment,
évidemment, on en a contre le projet de loi lui-même qui, lui,
propose de les réglementer. Mais ce n'est pas par esprit négatif;
c'est à partir d'une analyse de la situation telle que la vivent les
consommateurs, qu'on en arrive à cette conclusion.
Je fais remarquer aux députés que si on partait d'un point
de vue différent, considérant que ces gens-là sont utiles,
alors le projet de loi, tel qu'il est conçu, nous paraîtrait un
excellent projet de loi. Mais notre prémisse de départ, c'est
qu'ils sont socialement inutiles. Au même titre que et là,
je voudrais conclure là-dessus lorsque le ministre Tetley, il y a
deux ans, présentait en première lecture le projet de loi no 32
sur les activités immobilières, la Fédération des
ACEF, dans les deux jours qui ont suivi, a applaudi à tout rompre
à ce projet de loi parce qu'on considérait qu'il était
temps que le gouvernement légifère dans ce secteur fort important
où des centaines de consommateurs se faisaient frauder. Malheureusement,
le projet de loi n'a pas vu le jour, il est mort de sa belle mort. Le ministre
nous a annoncé récemment qu'il y en avait un autre, en
préparation, qui viendrait incessamment. Nous disons que si le projet de
loi qui viendra est de la même teneur que celui qu'il nous avait
présenté il y a deux ans, il est sûr que la
fédération sera d'accord sur le projet de loi et viendra ici
discuter des modalités pour parfaire son application parce que, d'abord
et avant tout, on considère qu'il est urgent et indispensable de
légiférer dans ce secteur. C'est un exemple.
En ce qui concerne les agences de recouvrement j'y reviens
on considère qu'étant socialement inutiles, ce n'est donc pas
leur réglementation qu'il faut, mais leur abolition. C'est le sens de
l'intervention qu'on a faite ce matin, pas plus et pas moins. On ne veut
surtout pas remettre en cause l'économie du Québec par le sens
des interventions qu'on a faites, ce matin. Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député...
M. HARVEY (Charlesbourg): Je n'ai pas de commentaire, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Alors, suspension des travaux de la
commission jusqu'à quinze heures.
(Suspension de la séance à 12 h 43)
Reprise de la séance à 15 h 15
M. CORNELLIER (président de la commission permanente des
institutions financières, compagnies et coopératives) A l'ordre,
messieurs!
La commission reprend ses travaux et j'invite M. Willian W. Ehrlich qui
vient ici à titre personnel.
M. TETLEY: M. le Président, permettez-moi une intervention. Tout
d'abord, pour répondre à une question du député de
Lafontaine, mardi et mercredi de la semaine prochaine, la même commission
siégera au sujet du rapport Gauvin. c'est-à-dire les 8 et 9
octobre ainsi que les 15 et 16 octobre et les 22 et 23 octobre. Cela a
été entendu entre les partis et j'ai envoyé une lettre au
député de Rouyn-Noranda, au député Burns, du
comté de Maisonneuve, et même au député de Johnson,
à l'effet que la première journée, M. Gauvin et compagnie
seront présents afin de répondre aux questions des
députés et répondre à nos questions.
Durant les autres journées, nous entendrons les mémoires
et les représentations du Barreau ou des compagnies d'assurances, les
courtiers, etc.
En même temps, il a été entendu que M. Gauvin et ses
collègues pourraient demeurer avec nous afin peut-être de
répondre aux questions, à notre demande, des
députés, etc.
Donc, je voulais vous avertir, et j'espère que le
secrétaire nous enverra des avis officiels.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Charlesbourg,
sur une question de règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur une question de règlement. Au
départ, je pense que je n'ai pas à faire l'éloge de votre
compétence, M. le Président, et de la façon dont vous
dirigez ces débats, sauf que, par inadvertance, sans doute, hier, nous
avons omis de nommer un rapporteur à cette commission. Et si c'est le
consentement unanime de la commission, même si nous avons
excédé de 24 heures ce délai qui est obligatoire en vertu
des règlements, on pourrait peut-être aujourd'hui...
M. TETLEY: Le député de...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... accepter qu'on fasse cette nomination.
M. SAMSON: Avec les pouvoirs qui nous sont conférés, on
peut même nommer un rapporteur rétroactivement...
M. HARVEY (Charlesbourg): Voilà.
M. SAMSON: ... et le député de Charlesbourg me semble tout
disposé à accepter.
M. LEGER: Je ne voudrais pas faire un
débat là-dessus, mais j'aimerais que ce soit quelqu'un qui
a suivi à fond les procédures pour faire un rapport
complet...
M. SAMSON: Au même salaire que la dernière fois?
M. LEGER: Je ne voudrais pas en proposer un autre. Mais je voudrais
être certain qu'il a suivi la discussion à fond. Je ne suis pas
sûr, d'après ses remarques, qu'il a bien suivi, comme
rapporteur...
M. SAMSON: De toute façon, cela ne changerait rien. Même
s'il avait suivi, je ne suis pas sûr qu'il aurait compris.
M. TETLEY: ... le nomme...
M. LEGER: A moins qu'on propose un député libéral
ouvert comme le député de Taschereau.
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur la question de règlement, M. le
Président. Je remercie le député, M. Samson, ainsi que mon
autre éminent collègue de Lafontaine d'appuyer la proposition
qui, maintenant, fait partie intégrante du journal des
Débats.
C'est avec plaisir que j'accepte d'être rapporteur.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): D'ailleurs, avant le lunch, si on s'en
souvient bien, devant une interrogation du député de Lafontaine
à savoir si le député de Charlesbourg avait
été présent physiquement et intellectuellement, le
député de Charlesbourg, avec l'approbation de ses
collègues, avait affirmé, en effet, qu'il avait été
ici, qu'il avait suivi physiquement et intellectuellement tous les
débats.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, sur une question de
règlement.
M. SAMSON: M. le Président, sur un point de règlement.
Est-ce que je dois comprendre que, pour suivre intellectuellement, cela lui
prenait l'approbation de ses collègues?
LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'ai dit qu'il a fait cette affirmation et
qu'il a eu l'approbation à son affirmation et non pas au fait qu'il a
assisté intellectuellement.
M. VEILLEUX: M. le Président, je tiens à vous dire que le
député de Rouyn-Noranda ne peut pas comment dirais-je bien
cela ne pas accepter la parole d'un député. Quand le
député de Charlesbourg dit qu'il a suivi physiquement et
intellectuellement les débats, on doit croire le député de
Charlesbourg.
M. SAMSON: M. le Président, le règlement m'oblige à
prendre sa parole et je prends sa parole, mais cela ne m'oblige pas à
comprendre de quelle distance il suivait.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, avant...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): D'ailleurs, messieurs, je voudrais ajouter
que, lorsque je mentionne qu'il a eu l'approbation de ses collègues,
c'est celle de tous les collègues autour de la table.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, question de
règlement.
M. SAMSON: Les bons de votre gauche comme les autres.
M. HARVEY (Charlesbourg): Question de règlement. Si mon silence a
été une approbation aux énoncés du
député de Lafontaine, je tiens à vous
réitérer que, ce matin, je n'ai fait qu'un signe de tête et
que je n'ai pas mot dit, je n'ai dit mot. Merci.
M. TETLEY: M. le Président, une intervention avant que William-H.
Ehrlich ne débute, je dois vous dire que M. Ehrlich est venu à
mon bureau. C'est un citoyen que je ne connaissais pas, avant son entrée
dans mon bureau. Il a dit: Vous avez un bill 26. J'aimerais vous conseiller.
J'ai été un peu surpris, mais j'ai été très
content. J'avais engagé M. Ehrlich. Il est étudiant et
prépare un doctorat à l'Université de Montréal. Il
a été fonctionnaire, quelque part, dans une agence de
recouvrement dont je ne connais pas le nom. Il m'a expliqué ses
connaissances personnelles, qui sont très importantes. Je voyais que
c'était le seul intime des agents qui voulait venir.
Vu que c'était un étudiant je l'ai engagé pour une
somme dont je ne connais pas le chiffre. En tout cas, je crois que c'est $400.
Il a préparé un mémoire que j'ai trouvé très
bon. Je l'ai trouvé si bon que j'ai dit: Au lieu de cacher cela dans le
ministère quelque part, je voudrais le présenter. Pourquoi ne pas
venir le présenter? Donc, il est ici aujourd'hui.
M. BOSSE: Bilingual.
M. TETLEY: II est bilingue et tout. Bilingual. Mr Ehrlich, I am very
glad you have come.
M. William-H. Ehrlich à titre personnel
M. EHRLICH: M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, ce que concerne ce mémoire, c'est surtout ce
qu'on peut appeler la méthodologie ou les mécanismes de
recouvrement. Ce que j'ai essayé de faire dans ce mémoire, c'est
de trouver un équilibre entre le monde des affaires et les consommateurs
et
surtout d'essayer de protéger les consommateurs un peu plus que
ce que j'ai trouvé dans le projet de loi.
Premièrement, je vais vous présenter des
considérations d'ordre général ou une philosophie des
affaires sur laquelle, je pense, n'importe quel projet de recouvrement doit
être basé. J'ai écrit à la page 7: "Une politique
saine de crédit ne nécessite qu'un effort normal de recouvrement.
Il faut insister pour que le créancier fasse preuve de prudence et
évalue le risque avec justesse, et non pas sur les méthodes de
recouvrement."
Les entreprises doivent, dans certaines limites, accepter les
conséquences des risques qu'elles assument. Alors, il me semble qu'il y
a des moyens pour corriger beaucoup de pratiques qui existent
présentement dans cette industrie, mais, en même temps,
prévoir la continuité de cette industrie.
A la page 9, j'ai fait la recommandation que la loi doit exiger un
adjoint spécial au directeur pour protéger les débiteurs
consommateurs, surtout que ce soit quelqu'un capable d'écouter et de
traiter tous les problèmes que les consommateurs peuvent avoir dans
l'application de cette loi. Je pense que les consommateurs n'ont pas acquis des
biens ou des services comme une compagnie et ils ont beaucoup de misère
à se protéger. Les arrangements négociés par le
consommateur entraînent plus souvent des résultats inattendus et
décevants du point de vue du consommateur.
A l'article 10, paragraphe f), une autre chose importante. Je crois que
cette disposition est trop générale, les agences de perception
doivent avoir cette information du crédit et je trouve que ça
doit être quelque chose de plus utile pour éliminer certaines
manières d'opérer qu'on trouve dégoûtantes. Je pense
aussi qu'il faut avoir un système de comptabilité beaucoup plus
sévère que ce qu'on trouve maintenant. Je pense, par exemple,
qu'un reçu doit être donné immédiatement pour tout
paiement en espèces, un relevé de compte doit suivre par la
poste, consignant par écrit le paiement et le total de la dette
exigée. Le relevé de compte doit être préparé
sur des formules approuvées par le ministère; ces formules
doivent indiquer clairement le nom et le numéro de permis de l'agence de
recouvrement. Aucuns frais pour ces relevés de compte ne doivent
être perçus du débiteur. Quand le paiement final sur une
dette est reçu, l'agent de recouvrement doit faire parvenir au
créancier et au débiteur un relevé final indiquant
l'acquittement total de la créance.
Le débiteur peut demander en tout temps, sans frais, un
relevé par écrit de son compte. Il y a beaucoup de choses qu'on
trouve dégoûtantes, car les agences de perception utilisent
beaucoup le téléphone. Aux Etats-Unis, il y avait une proposition
pour éliminer l'utilisation du téléphone. A la page 11, au
numéro 26, j'ai écrit: "L'agent de recouvrement ne peut pas
téléphoner au débiteur consommateur à son
lieu de travail".
Une autre chose très importante... l'agence de recouvrement ne
peut pas recommander au débiteur de tâcher d'obtenir un emprunt
pour acquitter sa dette ni référer le débiteur à
une société de crédit quelconque comme une agence de
financement ou une banque.
Je pense qu'une demande bien remplie est l'assurance qu'on
possède suffisamment de renseignements sur le débiteur. Toutes
les demandes de renseignements, ce qu'on appelle le "tracing", sur l'adresse du
débiteur, doivent être faites sous forme de lettre et jamais par
téléphone. Le numéro de permis de l'agence de recouvrement
doit être indiqué sur ce genre de lettre.
L'agent de recouvrement ne doit jamais avoir recours à une ruse
ni à une fausse identité pour obtenir l'adresse et le
numéro d'une personne ou tout autre renseignement à son
sujet.
Je pense aussi et j'ai écrit en page 12 les
recommandations supplémentaires que lorsqu'on négocie un
régime de remboursement, on doit essayer de préparer un
mémoire par écrit, indiquant en détail ce qu'il entend par
le régime de remboursement et l'expédier par la poste au
débiteur.
L'agent de recouvrement ne peut pas exiger de façon arbitraire un
premier paiement ou un paiement final substantiel lorsqu'il négocie le
régime de remboursement. Nul agent de recouvrement ne peut recevoir des
intérêts ni des frais de service. Tous les régimes de
remboursements négociés doivent inclure des dispositions qui
permettent au débiteur d'ajuster le régime. Tout paiement
à terme durant les périodes où le revenu dudit
débiteur est suspendu ou changé pour des causes comme le
chômage ou la maladie.
Aux questions finales, la question des tarifs, ou des commissions des
agents de recouvrement, il y a beaucoup de parallèles. Les agences de
collection, ce sont des courtiers et même, par exemple, les autres
courtiers ont des tarifs qui sont établis par le gouvernement. Il me
semble que ce serait très utile de concevoir une échelle de
tarifs pour ces gens qui sont des courtiers. Je pense que le tarif maintenant,
qui est de 20 p.c. à 25 p.c, est trop élevé. Cela
encourage les agences de recouvrement à des pratiques qui ne sont pas
humaines.
Mais si on réduisait ces commissions jusqu'à 15 p.c, je
pense que ce serait en bonne relation avec les prêts d'argent et aussi
cela les encouragerait à mettre l'accent sur les dettes les plus
importantes et éviter les petites dettes des consommateurs pour les
vêtements, pour les meubles et les choses plus familiales.
Je veux vraiment encourager des dialogues et je vais maintenant essayer
de répondre aux questions que vous voulez me poser.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des Institutions
financières.
M. TETLEY: M. Ehrlich, je pense que j'ai
déjà lu votre mémoire et je vais vous poser deux
questions.
A la page 13, à la fin. Je vais lire votre rapport.
Peut-être, pour le bénéfice de la discussion, pourriez-vous
lire vous-même votre dernière recommandation.
M. EHRLICH : Je recommande que le projet de loi no 26 établisse
un régime des tarifs que les agents de recouvrement peuvent demander aux
créanciers. Le régime actuel, qui varie de 20 p.c. jusqu'à
25 p.c. c'est ce que j'ai retrouvé dans mon
échantillonnage du montant selon l'importance de la
créance, est élevé. Je recommande que la commission sur
les dettes des consommateurs soit réduite à 15 p.c. au maximum.
Toutefois, je crois que ce point, doit être étudié
davantage et qu'il devrait encourager l'établissement de tarifs
contrôlés de commission.
M. TETLEY: Fin de la citation. Quelle est votre expérience en
effet dans une agence de recouvrement?
M. EHRLICH: J'ai travaillé comme un "collectionneur", je suppose,
pour une agence de collection.
M. TETLEY: Oui, comme un agent de recouvrement.
M. EHRLICH: Oui. M. TETLEY: Pour quelle maison? M. EHRLICH: Financial
Collection. M. TETLEY: En quelle année? M. EHRLICH: Cet
été.
M. TETLEY: Cet été. Votre recommandation est importante.
Vous voulez établir un tarif. La Chambre de commerce, hier, n'a
suggéré aucun tarif. Pourquoi un tarif, M. Ehrlich?
M. EHRLICH: Premièrement, je pense que dans n'importe quelle
industrie le tarif peut être un moyen pour le gouvernement de
régler ce qui se passe dans une industrie. Deuxièmement, je pense
que plus le tarif est haut, plus cela encourage ces agences à utiliser
des moyens qui ne sont pas humains. Par exemple, quand le profit est
très élevé, cela encourage les gens à mettre
l'accent sur le recouvrement. Quand la commission est plus normale et 15
p.c. me semble assez normal en relation avec le coût de l'argent
aujourd'hui je pense que cela va encourager les agences de recouvrement
à mettre l'accent sur les comptes les plus importants et encourager les
magasins ou les autres organisations qui vendent aux consommateurs à
régler les problèmes entre eux et leurs clients et à ne
pas envoyer leurs comptes aux agences de recouvrement. Seulement les dettes les
plus importantes vont être envoyées car un tarif de 15 p.c. va
encourager ces agences à être plus efficaces et à
éviter les montants plus petits.
Je pense enfin qu'un magasin peut régler les petits comptes avec
ses clients d'une manière beaucoup plus humaine qu'une organisation qui
a un but trop spécialisé.
M. TETLEY: Très bien. Ma deuxième question est au sujet de
votre mémoire, à la page 8.
M. EHRLICH: Je veux ajouter que j'ai fait la recommandation à 15
p.c. Peut-être qu'il faut faire une "cross-benefit analysis" ou quelque
chose comme cela pour établir quelque chose, mais je pense que cela doit
être réduit, le montant qui existe aujourd'hui.
M.,TETLEY: Parfait. A la page 8, il y a une autre citation. Vous n'avez
pas lu votre mémoire. Hier, un groupement a lu presque le mémoire
en entier. Malgré qu'il y ait un compliment ou une opinion affirmative
au sujet du projet de loi no 26, j'aimerais quand même que vous lisiez
tout le paragraphe, parce qu'il y a deux pensées dans le paragraphe que
je trouve importantes, sans dire que je les partage.
M. EHRLICH: Je vais commencer avec la dernière phrase, à
la page 7: "II faut insister pour que le créancier fasse preuve de
prudence et évalue le risque avec justesse, et non pas sur les
méthodes de recouvrement. Les entreprises doivent, dans certaines
limites, accepter les conséquences des risques qu'elles assument. En
outre, je crois que le projet de loi no 26 est positif en ce qui concerne la
protection des consommateurs et qu'il n'est pas susceptible de modifier
sensiblement l'accessibilité au crédit dont jouissent
actuellement tous les groupes de consommateurs, même les gens à
faible revenu. En outre, il n'est pas de nature à compromettre la
stabilité financière des commerçants de détail, ni
des autres organisations de vente aux consommateurs".
M. TETLEY: M. Ehrlich, vous dites: "Les entreprises doivent, dans
certaines limites, accepter les conséquences des risques qu'elles
assument". Cela veut dire quoi? Dans quelle limite? Un pourcentage?
M. EHRLICH: Je pense qu'on peut dire qu'il y a une relation. Je l'ai
écrit ici à la page 5: "En règle générale,
le recouvrement des créances et l'octroi des prêts sont des
fonctions inextricablement enlacées". Alors, il y a tous les risques
qu'une entreprise doit accepter. Si elle veut donner beaucoup de crédit
pour des raisons de promotion, elle doit accepter d'avoir beaucoup plus de
problèmes avec le recouvrement que dans un autre cas où elle va
faire des investigations ou être beaucoup plus stricte.
Alors, je pense qu'il y a une relation entre donner crédit au
client et recouvrer l'argent. Si une entreprise veut être très
libérale, elle doit accepter ce qu'elle a fait, car elle ne peut pas
mettre tout l'accent sur le recouvrement; elle doit faire donner une certaine
importance à étudier chaque cas et prendre des risques en
fonction de chaque client.
M. TETLEY: Je vous remercie. Au sujet de vos recommandations et surtout
vos observations concernant chaque article, je trouve ces observations
précieuses. Pour ma part, j'en prends bonne note.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, je remercie M. Ehrlich de nous avoir
présenté ce rapport. Je remarque j'ai quelques petites
questions à vous poser, mais juste une remarque tout d'abord que le bill
22 commence à prendre effet; on vient de nous distribuer la copie
anglaise. Et même plus que ça, on est rendu avec les
conséquences plus lointaines du bill 22, le prochain groupe...
M. HARVEY (Charlesbourg): Question de règlement, M. le
Président.
M. LEGER: ... c'est le rapport anglais qui est...
M. HARVEY (Charlesbourg): Un instant, un instant !
M. LEGER: ... sur le dessus du rapport français...
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
M. LEGER: Alors...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... question de règlement.
M. LEGER: ... c'est exactement dans la commission parlementaire...
M. HARVEY (Charlesbourg): On discute, M. le Président...
M. LEGER: ... et j'ai le droit d'exprimer, justement, que la copie
anglaise est par-dessus la copie française.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
M. LEGER: Le bill 22 prend effet...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... est-ce que vous pourriez...
M. LEGER: ... après...
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur une question de règlement.
M. TETLEY: Pourquoi avez-vous voté contre le bill 22?
M. LEGER: M. le Président...
M. VEILLEUX: M. le Président, sur la question de
règlement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Charlesbourg,
sur une question de règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur une question de règlement. Je pense
que, de tout temps, selon le parlementarisme québécois,
s'inspirant du parlementarisme britannique, la liberté d'expression au
Québec, le libre choix de s'exprimer dans sa langue, tant dans les cours
de justice qu'à l'Assemblée nationale, doit être maintenu
nonobstant le bill 22.
M. LEGER: M. le Président, ce n'est pas une question de
règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): Et je pense que le député de
Lafontaine...
M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.
J'invoque le règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... devrait être conséquent.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est une question de règlement.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
M. LEGER: Je voudrais savoir dans les déclarations du
député de Charlesbourg quelles sont les parties du
règlement ou quel article, sur quel point du règlement...
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur la question de règlement, M. le
Président.
M. LEGER: ... vous êtes en train de parler du contenu.
M. HARVEY (Charlesbourg): Je voudrais demander au député
de Lafontaine...
M. LEGER: Alors, M. le Président, je dois rappeler le
député de...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... M. le Président, s'il a devant lui
la copie...
M. LEGER: ... Charlesbourg à l'ordre... M. HARVEY (Charlesbourg):
... française.
M. LEGER: Je rappelle le député de "Gra-velbourg" à
l'ordre...
M. HARVEY (Charlesbourg): "Gravel-bourg"?
M. LEGER: Oui, le défenseur des anglophones.
M. HARVEY (Charlesbourg): Ah! vous êtes vraiment...
M. LEGER: Le député défenseur des anglophones.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... en désordre. Non, pas à
l'ordre.
M. LEGER: Alors, remarquez que vous êtes...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!
M. LEGER: ... en dehors du règlement parce que vous n'avez pas
soulevé le point qui était irrégulier.
M. VEILLEUX: M. le Président, sur la question de
règlement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. HARVEY (Charlesbourg): J'évoque le fait qu'il s'agit
là...
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... de la loi 26.
M. LEGER: Le député n'a absolument pas
touché...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... le projet de loi 26.
M. LEGER: ... le point de règlement qui a été
violé. J'ai encore le droit de parole.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, sur la question de
règlement. Le député de Lafontaine vient de violer, pour
le moins en tout cas, la liberté d'expression au Québec et
évoque le fait que la loi 22 qui n'a rien à voir...
M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... qui n'a absolument rien à
voir...
M. LEGER: Vous n'avez absolument pas touché le point de
règlement que j'ai violé.
M. HARVEY (Charlesbourg): Immédiatement après.
M. LEGER: Non, vous devez dire quel point de règlement j'ai
violé.
M. HARVEY (Charlesbourg): Soyez poli, s'il vous plaît.
M. LEGER: Quel est le point de règlement que j'ai
violé?
M. HARVEY (Charlesbourg): Je suis à venir...
M. LEGER: Non. Vous êtes en train de faire un discours.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!
M. LEGER: Quel point de règlement ai-je violé?
M. TETLEY: L'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique.
M. LEGER: C'est le...
M. TETLEY: Monsieur a le droit de parole...
M. LEGER: Ah oui! Justement! Là-dessus, il n'y a aucun
problème. M. Ehrlich parle très bien le français...
M. TETLEY: Bon.
M. LEGER: II fait un bon travail. Il s'est bien exprimé. Je n'ai
rien a lui reprocher là-dessus, mais si vous n'avez pas de point de
règlement, j'ai encore le droit de parole.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Un instant. Je demanderais au
député de Charlesbourg de bien expliciter son point de
règlement sans une préface ou une élaboration trop
longue.
M. HARVEY (Charlesbourg): En vertu de
l'article 133 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique...
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. HARVEY (Charlesbourg): Le député de Lafontaine...
M. LEGER: L'article 133 n'est pas dans la procédure parlementaire
et je regrette, M. le Président, vous devez rappeler le
député de Charlesbourg à l'ordre. Il n'a pas cité
d'article de règlement de la procédure parlementaire. Donc, il
n'avait absolument pas le droit d'intervenir à ce moment-ci.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... un feu qui est éteint puisque le
bill 22...
M. LEGER: Si vous êtes éteint, assoyez-vous et laissez-nous
parler entre personnes qui parlent...
M. HARVEY (Charlesbourg): Vous avez devant vous, M. le Président
et le député de Lafontaine a devant lui la copie française
et la version anglaise du point de vue de M. Ehrlich. Il peut répondre
très bien, soit en français, soit en anglais.
M. LEGER: Quel est le point de règlement que vous avez
soulevé?
M. HARVEY (Charlesbourg): ... de ce qui est présenté
devant vous et arrêtez donc de niaiser.
M. LEGER: II n'y a rien de soulevé.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! La parole est au
député...
M. VEILLEUX: Question de règlement, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... de Saint-Jean sur un point de
règlement.
M. LEGER: A quel article?
M. VEILLEUX: Sur les propos tenus par le député de
Lafontaine, je voudrais rétablir certains faits.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
député de Saint-Jean ne peut pas rétablir certains faits.
Il n'a pas parlé. Le règlement dit qu'un député
peut rétablir les faits que lui a cités.
M. VEILLEUX: M. le Président, cela fait mal.
M. LEGER: M. le Président, rappelez le député de
Saint-Jean à l'ordre.
M. VEILLEUX: Le député de Lafontaine... M. LEGER: II est
en dehors du règlement.
M. VEILLEUX: ... sait ce que je vais dire. Cela fait mal...
M. LEGER: II n'a pas parlé tantôt.
M. VEILLEUX: ... mais je vais le dire quand même.
M. LEGER: Le point de règlement que vous avez à
soulever...
M. VEILLEUX: Le député de Lafontaine reproche...
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. VEILLEUX: ... à des employés...
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. VEILLEUX: ... de la commission parlementaire...
M. LEGER: Vous devez trancher la question, il n'y a pas de point de
règlement là-dessus.
M. VEILLEUX: Demandez-lui donc qu'il se taise. Va te faire couper la
barbe et laisse-nous parler.
M. LEGER: Ah! Ah!
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Un instant, s'il vous plaît.
Procédons dans l'ordre. Le député de Saint-Jean a
soulevé un point de règlement et avant de porter jugement, je
voudrais bien savoir sur quel point de règlement il demande la
parole.
M. VEILLEUX: Le député de Lafontaine a mentionné la
loi 22. Le député de Lafontaine a mentionné qu'il avait
sur le dessus la version anglaise du mémoire. Je veux tout simplement
dire quelques mots sur ces propos tenus par le député de
Lafontaine...
M. LEGER: Ce n'est pas une question de règlement.
M. VEILLEUX: ... et lui dire d'aller voir dans la politique linguistique
du Parti québécois...
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. VEILLEUX: ... où on retrouve exactement...
M. LEGER: Le député de Saint-Jean est hors d'ordre.
M. VEILLEUX: ... dans la loi 22, la version anglaise du document
présenté...
M. LEGER: Le député de Saint-Jean est hors d'ordre.
M. VEILLEUX: ... en commission parlementaire.
M. LEGER: Le député de Saint-Jean est hors d'ordre.
M. VEILLEUX: ... se retrouve dans la politique linguistique...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, messieurs!
M. VEILLEUX: Ils ont menti à la population. Ils n'ont pas voulu
le dire...
M. LEGER: Le député de Saint-Jean, pour la
cinquième fois, est hors d'ordre.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Si vous me laissiez parler, j'aurais le
temps de rappeler le député de Saint-Jean à l'ordre.
Le député de Lafontaine.
M. HARVEY (Charlesbourg): Moi, je donnerais la parole à M.
Ehrlich.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le débat est clos et je remets la
parole au député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement pour
rétablir l'affirmation du député...
M. VEILLEUX: Que le député de Lafontaine dise en vertu de
quel article...
M. LEGER: J'ai la parole.
M. VEILLEUX: ... du règlement.
M. LEGER: M. le Président, le député de Saint-Jean
a fait des affirmations...
M. VEILLEUX: Que le député de Lafontaine...
M. LEGER: ... qui sont fausses.
M. VEILLEUX: ... mentionne l'article du règlement qu'il veut
soulever.
M. LEGER: L'article 81.
M. VEILLEUX: Qu'il le lise...
M. LEGER: Je sais par coeur l'article 81.
M. VEILLEUX: Je vous demanderais de lire l'article 81.
M. LEGER: L'article 81 et les suivants. LE PRESIDENT (M. Cornellier): A
l'ordre! M. VEILLEUX: Lisez l'article 81. M. LEGER: Vous avez
interprété...
M. VEILLEUX: Question de règlement, M. le Président.
M. LEGER: ... et il ne les avait même pas comprises.
M. VEILLEUX: Une question de règlement.
M. LEGER: Le député de Saint-Jean a dit que la version
anglaise...
M. VEILLEUX: Lisez donc l'article 81, M. le Président.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président...
M. LEGER: ... du document était par-dessus...
M. VEILLEUX: Article 81, M. le Président.
M. LEGER: ... la version française du document en question. Ce
n'est pas ce que j'ai dit.
M. VEILLEUX: L'article 81, M. le Président.
M. LEGER: J'ai dit qu'on avait distribué et là, je
suis en train de rétablir les faits, ce que le règlement me
permet, et j'agis à l'intérieur du règlement...
M. HARVEY (Charlesbourg): En français, c'est...
M. LEGER: J'ai dit simplement que le texte que j'ai de M. Ehrlich, j'ai
la copie française devant moi, et qu'on venait de me distribuer la copie
anglaise. J'ai fait rapport que c'est une des dispositions du bill 22, entre
autres, que de permettre la bilinguisation, même au niveau de la
commission parlementaire. C'est le bill 22 qui permet cela.
Mais j'ai aussi dit que le prochain mémoire avait sa version
anglaise brochée par-dessus...
M. HARVEY (Charlesbourg): Mr. Président...
M. LEGER: ... la version française.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... would you please ask to the
representative...
M. LEGER: Cela, c'est une des conséquences lointaines du bill
22.
M. HARVEY (Charlesbourg): Mr. President, would you please ask to the
representative of Lafontaine circumscription...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs!
M. LEGER: ... complètement en règle puisqu'on parle de
documents qui se discutent actuellement...
M. HARVEY (Charlesbourg): ... to hear about some words...
M. LEGER: ... à la commission parlementaire.
M. HARVEY (Charlesbourg): Mr. Président...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mersieurs, à l'ordre, s'il vous
plaît! Revenons-en...
M. HARVEY (Charlesbourg): Order, Mr. President! I would like to ask to
the member of Lafontaine...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plait!
M. HARVEY (Charlesbourg): Thank you, Mr. President.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Revenons-en à notre visiteur, qui
est ici devant nous pour répondre à nos questions sur un
mémoire qu'il a présenté et tenons-nous-en au projet de
loi qui nous intéresse, le projet de loi no 26, et au témoin qui
est ici pour répondre à nos questions.
M. HARVEY (Charlesbourg): Thank you, Mr. Chairman.
M. LEGER: D'ailleurs, M. le Président, je vois qu'il est tout
disposé à nous répondre. Il a hâte que les questions
arrivent! Les questions s'en viennent.
Vous avez travaillé pour une compagnie qui se spécialise
dans le recouvrement de comptes, je pense, et on vous a donné comme
travail, entre autres, d'aller voir des débiteurs pour
récupérer des comptes. Est-ce exact?
M. EHRLICH: Oui, c'est ça.
M. LEGER: Oui. Est-ce que les comptes qu'on vous donnait à
percevoir étaient des comptes dans un territoire précis
autrement dit, vous aviez la responsabilité de tous les comptes de ce
territoire ou si c'étaient des comptes choisis?
M. EHRLICH: Oui, c'étaient des comptes groupés. Ils
étaient groupés, premièrement, par compagnies. Par
exemple, il y avait des gens qui travaillaient à un compte, qui peut
venir d'une grande maison de pétrole ou d'un grand magasin, et ces
comptes étaient groupés par territoire, ce qui veut dire que tous
les comptes étaient dans la région métropolitaine de
Montréal. S'il y avait d'autres problèmes, par exemple si
quelqu'un ne demeurait plus à Montréal, la compagnie envoyait ses
comptes dans un autre territoire ou à un autre bureau.
M. LEGER: La question derrière celle que je posais était
de savoir si, étant donné que les gens savaient que vous
travailliez pour le gouvernement, il était possible qu'on ne vous ait
donné que des comptes choisis, triés et que vous n'auriez pas eu
des comptes précis qu'un agent de perception ordinaire aurait eus?
M. TETLEY: II ne travaillait pas pour le gouvernement, lui.
M. LEGER: N'avez-vous pas dit tantôt... M. TETLEY: Oh non!
M. LEGER: ... qu'il avait une somme du gouvernement pour aller faire un
travail ou connaître le milieu?
M. TETLEY: Non, non, au contraire. Il travaillait pour la compagnie. Il
a quitté la compagnie. Quelques semaines ou quelques mois après,
il a appris que j'avais un bill et il est venu me voir. Il m'a dit: J'ai une
certaine connaissance et je veux vous renseigner. J'ai dit : Tant mieux! Mais
au moment où il travaillait pour la compagnie, cet été, je
crois, je ne le connaissais pas du tout.
M. LEGER: Ah bon! Je m'excuse. C'est parce que j'ai...
M. TETLEY: Vous êtes venu me voir en septembre ou...
M. EHRLICH: Oui. Au moment où j'ai écrit ce
mémoire, je ne travaillais plus pour la compagnie.
M. TETLEY: II l'avait quittée depuis quelque temps.
M. LEGER: Ah bon! Alors, cela répond à ma question.
Cependant, lorsque vous avez dit que le gouvernement avait payé
$400...
M. TETLEY: Non, non.
M. LEGER: Les $400, c'était quoi?
M. TETLEY: Pour préparer le mémoire et venir ici.
M. LEGER: Alors, c'est ça. Alors monsieur a
été payé $400 pour préparer un
mémoire sur son expérience dans ce domaine.
M. TETLEY: Oui.
M. LEGER: D'accord. Alors, ma question c'était pour voir si vous
aviez réellement eu une expérience concrète,
précise. Donc, c'est le cas puisque vous étiez là à
titre d'employé régulier, et cette expérience vous l'avez
eue comme employé régulier et non comme représentant du
gouvernement. D'accord. Cela répond à ma question.
M. EHRLICH: Oui, c'est cela.
M. LEGER: Etant donné que vous avez l'expérience de ce
milieu, est-ce que vous pourriez me donner un exemple d'un cas type difficile?
Quelle était la réaction du débiteur quand vous alliez le
voir? Est-ce que vous avez eu des expériences difficiles devant les
débiteurs qui ne voulaient pas être importunés, qui ne
voulaient pas payer? Avez-vous un exemple type de cela? Comment cela
fonctionnait-il?
M. EHRLICH: Oui. J'ai essayé de grouper ces problèmes dans
mes recommandations mais, en général, je pense qu'on peut
caractériser le consommateur comme naiF. Il ne connaît pas
vraiment les droits qu'il a. Premièrement, les agents peuvent
téléphoner frais virés dans les banlieues de
Montréal. Deuxièmement, ils disent, par exemple, qu'ils vont
prendre des mesures contre le débiteur. Troisièmement, ils
encouragent le débiteur à payer dans un mois ou dans une
période qui n'est pas très généreuse.
Quatrièmement, on peut dire qu'en général les
débiteurs ont peur de ces appels téléphoniques. En
général, ils sont très coopératifs, car ils ne
savent pas ce qu'ils peuvent faire, ils ne savent pas qu'ils ont d'autres
choix. Le seul problème c'est quand ils n'ont pas d'argent, sont
chômeurs ou sont malades. Ce sont surtout les plus grands
problèmes. En général, quand ils travaillent ils essaient
de payer un certain pourcentage de la dette.
M. LEGER: Combien d'appels téléphoniques par semaine ou
par mois ou par jour êtes-vous obligé de faire avant que le client
récalcitrant puisse payer?
M. EHRLICH: Je ne sais pas combien d'appels, mais tout le bureau utilise
le téléphone continuellement, sans cesse.
M. LEGER: Je parle de vous, votre expérience personnelle. Vous
avez un client de qui vous devez récupérer des sommes. Combien
est-ce que cela vous prend d'appels téléphoniques avant que la
personne se remette à faire ses paiements ou versements ou commence
à payer ses dettes?
M. EHRLICH: Je n'étais pas un type qui aimait vraiment
téléphoner plusieurs fois à quelqu'un. Il me semble que de
temps en temps un appel téléphonique marchait assez bien, mais je
suis certain que des voisins, près de moi, téléphonaient
jour après jour jusqu'à ce que le client commence à payer
de nouveau sa dette.
M. LEGER: Alors, c'est un peu un harcèlement?
M. EHRLICH: Oui, je suis d'accord.
M. LEGER: A la page 5 de votre mémoire, vous soulignez: En
règle générale le recouvrement des créances et
l'octroi des prêts sont des fonctions inextricablement enlacées.
Qu'est-ce que vous voulez dire par là exactement?
M. EHRLICH: Ce que je voulais dire c'est, par exemple, que si on donne
beaucoup de crédit à des gens et si on donne un montant de
crédit bien supérieur à leur revenu, il sera presque
impossible que ces gens paient leur dette. Alors, cela devient un
problème de recouvrement. D'un autre côté, si on
crée un système de recouvrement qui devient très
difficile, je suis certain que les grandes compagnies de crédit vont
être très sévères en donnant accès au
crédit.
Ce que je veux dire, c'est qu'il y a une relation très forte
entre crédit et recouvrement.
M. LEGER: D'après votre expérience très pratique
dans le milieu de l'agence de recouvrement, arriveriez-vous à au moins
une des conclusions des ACEF que nous avons entendues ce matin, à savoir
que le recouvrement est à l'intérieur d'un système dans
lequel on voit que ceux qui empruntent et qui sont démunis et qui
empruntent plus fort que leurs possibilités sont des gens qui ne peuvent
même pas se défendre de ce côté? Le problème
est beaucoup plus global que le problème de récupérer
l'argent. Il y a un problème d'ordre social pour ces gens qui
s'endettent et au sujet desquels personne ne peut se préoccuper de cette
quantité de dettes maximum qu'ils peuvent se permettre pour être
capable de récupérer. Est-ce que vous arrivez à une de ces
conclusions, comme les ACEF le disaient ce matin?
M. EHRLICH: Je suis d'accord avec vous que le problème des dettes
et du crédit est un problème social. Je pense que c'est beaucoup
plus global que ce que l'ACEF a dit. Je pense que maintenant ça commence
à entrer dans les classes moyennes et ce n'est pas seulement aujourd'hui
un problème des gens de classe inférieure. C'est un
problème global et...
M. TETLEY: Vous voulez dire, classe ouvrière?
M. EHRLICH: Oui.
M. LEGER: Ce ne sont pas tous les ouvriers qui ont des bons revenus.
M. TETLEY: Vous parlez de revenus inférieurs. C'est tout
simplement une précision pour le journal des Débats.
M. LEGER: A la page 11, avant de parler de cette page, j'ai une
question; est-ce que vous faisiez...
M. EHRLICH: Quel numéro?
M. LEGER: J'ai une question avant et on parlera de la page 11
après. Est-ce que les gens appellent le jour pour rejoindre
l'épouse plutôt que le mari? Et qu'ils font des pressions?
M. EHRLICH: Ils vont téléphoner à la maison et ils
vont toujours demander l'homme ; si le mari n'est pas chez lui, ils vont
essayer d'obtenir le numéro de l'endroit où il travaille et ils
vont essayer de lui téléphoner où il travaille. C'est
pourquoi j'ai fait la recommandation que ce ne soit pas permis de
téléphoner à quelqu'un au travail.
M. LEGER: Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'ils appellent
leurs épouses?
M. EHRLICH: Pour être pratique, il me semble que j'ai fait un
choix. C'est un choix difficile. Le raisonnement que j'ai utilisé, c'est
que c'est trop difficile de faire un travail et de recevoir des appels
téléphoniques d'une compagnie de recouvrement. J'ai fait un choix
mais c'est un choix entre deux choses qui ne sont pas bonnes; je suis d'accord
avec vous mais c'est simplement un choix.
M. LEGER: Ma question était la suivante: Pensez-vous que c'est
l'individu qui a contracté la dette et qui est responsable de la dette
qu'il faut appeler et non pas l'épouse? C'est pour ça que je
posais cette question, est-ce que c'est la personne qui a contracté la
dette ou si c'est l'épouse? Si vous dites qu'il ne faut pas appeler
l'épouse...
M. HARVEY (Charlesbourg): Vous prenez un contrat de mariage, si on
achète un bien, c'est en communauté de biens...
M. LEGER: Je voudrais terminer.
Quand vous dites qu'ils ne doivent pas téléphoner au
ministre du Travail, je suis d'accord. Mais le problème, c'est que dans
la loi, il ne faut pas appeler le soir, ou du moins après 8 heures, ou
quelque chose comme cela.
M. EHRLICH: En principe, je serais d'accord avec vous. Je suppose qu'il
faut établir un régime des heures. La meilleure chose serait
d'établir un régime. Si on fait premièrement un choix, on
va laisser ces compagnies utiliser le téléphone; il me semble que
la meilleure façon, est d'établir un horaire bien défini
durant lequel l'agent peut utiliser le téléphone, et non pas le
laisser téléphoner quand il veut.
M. LEGER: Si on accepte le principe qu'il serait interdit pour les
agents de recouvrement, par la loi, d'utiliser les menaces de l'application de
la loi, ou même la menacer que son crédit va être
affecté, est-ce que vous pensez vous qui avez été
dans ce milieu que les agents de recouvrement auront encore les moyens
d'être efficaces dans leur travail?
M. EHRLICH: Oui, je pense qu'ils peuvent continuer à travailler
parce qu'une grande partie des dettes, dans certains milieux, sont temporaires.
Par exemple, quelqu'un est présentement malade, ou en chômage, et
il va rembourser sa dette dans quelques mois ou dans une année. C'est le
type de travail qu'on doit encourager et non pas les abus des gens qui ont de
petites dettes et qui ne peuvent jamais être capables de les
rembourser.
M. LEGER: Je vous remercie M. Ehrlich.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, à la page 10: "L'agence de
recouvrement doit aussi communiquer sans délai le nom des agents qui ne
sont plus à son service". Alors, dans votre esprit, le renseignement
doit être communiqué à qui, et de quelle façon?
M. EHRLICH: Je m'excuse de ne pas l'avoir précisé. Je
suppose, par lettre, au ministère. Selon le projet de loi numéro
26, c'est simplement l'agent lui-même qui doit communiquer son nom au
ministère. Je ne vois pas pourquoi l'agence de recouvrement, comme
organisation, ne devrait pas communiquer le nom sans délai. Je pense que
c'est la tâche de l'agent et l'agence de recouvrement.
M. SAMSON: M. le Président, je considère cette suggestion
comme valable. Je me demande dans quelle proportion il ne serait pas utile
c'est une question que je me pose que l'agence soit tenue de
faire part, non seulement au ministère, qu'un de ses agents n'est plus
à son service, mais dans quelle proportion cela ne serait-il pas utile
de donner le nom directement au débiteur. Voici, à titre
d'exemple. Quelqu'un a reçu quelques appels téléphoniques
d'un certain agent; ce dernier, par la suite peut continuer à faire des
appels peut-être pour d'autres sortes de comptes, mais ce type-là
ne saurait pas que tel agent n'est plus au service de l'agence de recouvrement
avec laquelle il avait l'habitude de faire affaires. Est-ce qu'il ne serait pas
important de songer à ce que ce renseignement soit communiqué,
pour la protection de l'agence de recouvrement et la protection du consommateur
dans ces cas-là? Est-ce que votre raisonnement va aussi loin que de
penser que ce serait utile de le faire?
M. EHRLICH: Oui, je pense que ce serait
utile; le principe me paraît très important. Plus le
consommateur a de renseignements, plus il a de droits à utiliser. Le
fait de lui donner ces renseignements va éviter l'utilisation de ruses
ou n'importe quelle autre identité qu'un agent peut utiliser quand il ne
travaille plus pour cette agence, ou une autre compagnie.
M. SAMSON: Justement, parce qu'à titre d'exemple, M. le
Président, il se pourrait peut-être qu'un agent, à un
moment donné, cesse de travailler pour une agence de recouvrement et
connaissant son client, puisse faire du recouvrement pour un commerce
quelconque. A l'emploi d'un commerce, ne s'identifiant pas... Evidemment, dans
la loi, il est bien spécifié qu'il faut bien s'identifier, mais
on peut peut-être présumer qu'il y en aura qui tenteront de passer
à côté.
A ce moment, ne s'identifiant pas comme étant au service de
quelqu'un d'autre, ils auraient évidemment un pouvoir accru de pression.
Ce serait en fait de la fausse représentation. Je pense que le
raisonnement que vous affichez en disant qu'on doit communiquer sans
délai ce fait devrait peut-être aller jusqu'à l'obligation
de la communiquer au client.
M. EHRLICH: Je suis d'accord avec cela.
M. SAMSON: Merci. A la page 11. L'agent de recouvrement c'est une
question qui a été posée par le député de
Lafontaine ne peut pas téléphoner au débiteur
consommateur à son lieu de travail. C'est peut-être un peu
difficile, étant donné qu'il y aura des horaires fixés
dans la loi, de huit heures du matin à huit heures du soir, de ne pas
téléphoner au lieu de travail, parce qu'il se pourrait que les
heures de travail d'une personne soient à peu près les
mêmes c'est assez rare aujourd'hui, mais il se pourrait que cela
arrive que les heures ouvrables. Cela deviendrait difficile à ce
moment pour l'agence.
M. EHRLICH: Cela deviendrait difficile, mais ce que je peux dire, c'est
que c'est simplement un choix. Par exemple, quelqu'un qui travaille dans une
usine ou dans un bureau ne peut pas vraiment s'occuper de ses tâches
personnelles en faisant à la fois son travail. Cela devient très
difficile de mélanger les deux. Pour cette raison, il faut faire un
choix. Si quelqu'un veut travailler, je pense qu'il a le droit de ne pas
recevoir d'appels téléphoniques pour des raisons personnelles. Ce
serait un cas d'urgence et je pense que les dettes ne sont pas vraiment un cas
d'urgence. Je pense que quelqu'un qui travaille dans une usine, par exemple, a
ce droit au travail; il faut le protéger et ne pas laisser n'importe qui
téléphoner à son bureau, à son usine, etc.
M. SAMSON: Je suis absolument d'accord avec vous là-dessus, parce
que c'est évident que c'est un moyen de pression extraordinaire sur un
débiteur que de recevoir un appel téléphonique à
son lieu de travail. C'est peut-être un moyen de pression qui, une fois
enlevé, priverait peut-être les agences de recouvrement, de
certaines possibilités, comme le disait le député de
Lafontaine.
Par contre, je me demande si on a, en voulant enlever cela, ce que je ne
trouve pas bête du tout... Cela entraîne certains problèmes.
Quand l'employeur en a connaissance, c'est un moyen de pression extraordinaire
sur le débiteur. Si on doit enlever cela, qu'est-ce qu'on peut
suggérer comme moyen qui permette quand même à l'agence de
recouvrement de communiquer? Mon point de vue est qu'il ne faut pas
éliminer toute possibilité de communication, il faut quand
même que...
M. EHRLICH: Cela n'élimine pas toute possibilité. Il y a
des heures après le travail où l'agence peut
téléphoner et on peut aussi ajouter que l'agence de recouvrement
peut surtout écrire par lettre. Le seul droit qu'il faut
protéger, je pense, c'est le droit de travailler en "privacy". Si
quelqu'un veut travailler, c'est impossible de recevoir appel après
appel pour des problèmes personnels et à la fois être
capable de travailler d'une manière efficace.
M.SAMSON: Suivant l'hypothèse que j'ai soulevée
tantôt selon laquelle les heures de travail d'une personne peuvent
probablement ou à certains moments être les mêmes que les
heures ouvrables prévues dans la loi, est-ce que la suggestion ne serait
pas, à ce moment, d'élargir cette possibilité des heures
ouvrables? C'est une question que je pose, mon idée n'est pas faite.
M. EHRLICH: Oui, je pense que c'est une question bien pratique; je pense
que c'est un principe très important. L'agence de recouvrement a la
possibilité de téléphoner à la maison. L'agent peut
parler avec un autre membre de la famille. Il peut téléphoner
après les heures de travail. Il y a beaucoup de possibilités.
Mais je pense que le choix de téléphoner à son lieu de
travail n'est pas quelque chose qu'on doit encourager.
M. SAMSON: Qu'est-ce qui arriverait, selon vous, dans les cas où
le lieu de travail de la personne concernée soit le même que son
lieu de résidence? Cela peut arriver.
M. EHRLICH: Oui, mais, en général, ce n'est pas le cas. Si
cela arrive, alors il y a un pourcentage de cas où cela va arriver.
Règle générale, il y a une séparation entre le lieu
de travail et la maison.
M. SAMSON: Oui, évidemment, mais si nous prescrivons dans la loi
que nous enlevons cette possibilité, nous interdisons à une
agence de
recouvrement ou à un agent d'appeler quelqu'un à son lieu
de travail. S'il arrive que le débiteur concerné a comme lieu de
travail le même lieu que sa résidence, à ce moment, la loi
interdirait en quelque sorte à l'agence de recouvrement d'appeler le
monsieur à son lieu de travail qui, en même temps, est sa
résidence. Vous savez, j'essaie de prévoir pour que nous
n'arrivions pas... Même si ce sont des cas peut-être isolés,
je vous avoue bien franchement que tout le monde ne travaille pas à sa
résidence, mais cela peut arriver. Il faut que ce soit aussi
prévu dans la loi.
M. EHRLICH: Oui, je suis d'accord avec vous, mais il y a d'autres choses
qu'on peut ajouter. Par exemple, si quelqu'un a un numéro de
téléphone pour les affaires et un numéro de
téléphone pour la maison, cela peut régler le
problème, mais il me semble que, dans ces cas, il faut protéger
la grande majorité des gens, et pas vraiment mettre l'accent sur les cas
qui sont minoritaires.
M. SAMSON: Protéger la majorité, oui, j'en suis, mais il
faut toujours protéger les minorités aussi. Il ne faut pas
seulement protéger les majorités. Vous savez, on a
été longtemps autour de cette table pour discuter des droits des
minorités. Il ne faudrait pas reprendre le débat. Est-ce que,
pour résoudre ce problème qui pourrait se poser j'essaie
de trouver une solution et je pense qu'on va la trouver ensemble on ne
pourrait pas dire que l'agent de recouvrement ne peut pas
téléphoner au débiteur consommateur à son lieu de
travail, à moins que ce lieu soit le même que son lieu de
résidence?
M. EHRLICH: Oui, je pense que c'est un moyen de régler ce
cas.
M. SAMSON: Est-ce que cela ne réglerait pas le problème?
Cela va. Ce n'est peut-être pas en termes juridiques connus, mais je me
comprends.
M. VEILLEUX: C'est très légal.
M. SAMSON: Toujours à la page 11, toutes les demandes de
renseignements sur l'adresse du débiteur doivent être faites sous
forme de lettres et jamais par téléphone. J'aimerais savoir
pourquoi vous suggérez ce mode plutôt que le mode par
téléphone?
M. EHRLICH: Pour beaucoup de raisons. Premièrement, beaucoup
d'agences de recouvrement emploient des "russes" ou des fausses
identités pour obtenir l'adresse. Elles téléphonent aux
voisins, aux employeurs...
M. BOSSE: Pas des "russes", des ruses.
M. EHRLICH: ... et je suis contre cela.
Alors, le seul moyen que je prévoie pour régler cela,
c'est d'encourager les agences et utiliser les lettres.
M. SAMSON: Oui, maitenant, selon votre expérience, est-ce qu'il y
a réellement, de ce côté, un abus d'utilisation du
téléphone, en utilisant la fausse identité, suivant votre
expérience?
M. EHRLICH: Oui, certainement, il y a abus.
M. SAMSON: Puisque nous parlons de votre expérience, vous
étiez, suivant ce que vous nous avez dit tantôt, à l'emploi
d'une agence de recouvrement. Est-ce que vous pourriez nous dire pendant
combien de temps vous avez été à l'emploi de cette agence
de recouvrement?
M. EHRLICH: Je pense, à peu près un mois, cet
été.
M. SAMSON: Est-ce qu'auparavant, vous avez déjà
été à l'emploi d'une autre agence de recouvrement?
M. EHRLICH: Non, j'étais étudiant.
M. SAMSON: Est-ce qu'il se pourrait c'est peut-être une
question qui peut vous paraître superflue que certaines
méthodes soient employées dans les agences de recouvrement
plutôt à une certaine période de l'année qu'à
une autre période de l'année, en raison, je ne sais pas, des
fêtes, de surabondance d'achats pour les fêtes, ou des choses comme
cela?
M. EHRLICH: Non, il me semble que c'est une pratique assez
constante.
M. SAMSON: Est-ce qu'il se pourrait qu'il y ait des différences
de méthodes utilisées en tenant compte, à la faveur de
l'été, de la période des vacances, en tenant compte du
fait qu'un employé pourra recevoir, s'il est un employé de la
construction, une somme d'argent, pour des vacances, qui est accumulée
à son nom pendant la période d'un an et que l'on table sur cette
possibilité d'une entrée d'argent? Ou encore la période
où les retours d'impôt peuvent arriver? Est-ce que cela ne
pourrait pas changer les méthodes ou amplifier certaines méthodes
dans certaines circonstances?
M. EHRLICH: Certainement, il y a des relations avec le climat
économique de chaque communauté, mais en général je
pense que cette recommandation peut éviter beaucoup de problèmes.
Je ne prévois pas de complications pour les agences de recouvrement. Je
pense que ça va protéger les consommateurs et les agences de
recouvrement.
M. SAMSON: Dans quels termes avez-vous quitté votre agence de
recouvrement?
M. EHRLICH: Cela veut dire quoi?
M. SAMSON: Cela veut dire: Est-ce que vous avez quitté votre
emploi parce que vous deviez retourner à autre chose ou si on vous a
renvoyé? Je m'excuse si je pose la question, mais ça me semble
important.
M. EHRLICH: Je retourne à l'école.
M. SAMSON: Mais vous avez quoi comme vacances, l'été? Vous
avez quoi comme période de vacances?
M. HARVEY (Charlesbourg): II étudie actuellement.
M. SAMSON: Oui, je comprends, mais on n'étudie pas douze mois par
année. Vous avez travaillé un mois. Cela m'amène à
poser la question: Si on a deux mois de vacances, on travaille un mois;
pourquoi est-ce qu'on travaille seulement un mois? Pourquoi est-ce qu'on ne
travaille pas un mois et demi ou deux?
M. EHRLICH: Je...
M. SAMSON: C'est pourquoi je pose la question.
M. EHRLICH: Vraiment, je n'aimais pas le travail; alors, je ne voulais
certainement pas travailler beaucoup plus que cette période.
M. SAMSON: Ah! c'est vous qui avez laissé; ce ne sont pas eux qui
vous ont renvoyé?
M. ENRLICH: Je ne pense pas avoir gagné beaucoup d'argent pour
eux et je n'aimais pas le travail. Alors, j'ai décidé de
partir.
M. SAMSON: Non, cela ne répond pas à ma question. Je veux
une réponse précise. Est-ce que vous avez laissé
vous-même ou si vous avez été renvoyé de
l'agence?
M. EHRLICH: Non, je pense qu'on était... M. SAMSON: Un instant,
là. Pardon?
M. EHRLICH: ... d'accord que je parte. Je n'ai pas été
renvoyé.
M. SAMSON: Vous n'étiez pas renvoyé, bon! D'accord, c'est
ce que je veux savoir. Vous allez comprendre, M. le Président, que
ça pourrait faire la différence. Quand quelqu'un vient nous
parler d'une agence de recouvrement, s'il avait été
renvoyé de l'agence, il pourrait trouver toutes sortes de
méthodes pour s'en prendre à l'agence. Alors, si monsieur n'a pas
été renvoyé, son témoignage, pour moi, a beaucoup
plus de valeur. C'est pourquoi j'ai posé cette question. Page 13...
M. TETLEY: Mais, vous êtes un vrai avocat!
M. SAMSON: M. le Président...
M. TETLEY: Vous allez tomber dans...
M. HARVEY (Charlesbourg): II va sûrement accepter les fleurs.
M. SAMSON: M. le Président, les bons avocats ne se trouvent pas
toujours dans les diplômes, ça se trouve dans le coeur.
M. TETLEY: Mais le Barreau va vous critiquer parce que vous pratiquez le
droit sans diplôme.
M. SAMSON: M. le Président, je conviens que, si j'exigeais le
même prix que les autres, le Barreau me critiquerait sûrement.
A la page 13: "Tous les régimes de remboursement
négociés doivent inclure des dispositions qui permettent au
débiteur d'ajuster le régime de paiements à termes durant
les périodes où le revenu dudit débiteur est suspendu ou
changé pour des causes comme le chômage ou la maladie". Est-ce que
vous voulez dire par là que ces contrats négociés de
remboursement devraient faire paraître ces clauses automatiquement sans
qu'on ait à les écrire sur le contrat?
M. ENRLICH: Oui, c'est ça que je veux dire.
M. SAMSON: C'est ce que vous voulez dire, bon! En ce qui concerne les
tarifs, vous nous parlez de 15 p.c. ou de 20 p.c. à 25 p.c, ce qui
serait le tarif moyen actuel, selon vous. Hier, on nous a donné comme
réponse à ces questions qu'il était important que l'agence
de recouvrement puisse négocier le tarif avec le commerçant,
l'homme d'affaires en question, compte tenu du risque et de la valeur des
créances.
Est-ce que vous ne suggéreriez pas plutôt que de proposer
un tarif fixe... Je considère que le tarif fixe a peut-être des
désavantages dans ces circonstances parce que ce sont des hommes
d'affaires qui discutent entre eux et que cela n'affecte pas le montant
à être remboursé par le consommateur. Donc, que le tarif
soit de 15 p.c, 20 p.c, 25 p.c. ou 30 p.c, le consommateur paiera le même
prix, cela ne l'affectera pas. Donc, comme nous en sommes réduits
à des négociations entre hommes d'affaires, je pense qu'il est
préférable de leur laisser une certaine liberté. Dans la
recherche d'un montant fixé qui permettrait, toujours selon vous,
suivant ce que j'ai compris, de réduire peut-être certaines
méthodes de crédit qui font que, en bon langage, on embarque trop
le client, ne vaudrait-il pas mieux, pour rejoindre un peu ce
que vous voulez et quand même permettre cette négociation
entre hommes d'affaires, un tarif minimum et maximum fixé à
l'intérieur d'une fourchette qui permettrait quand même le jeu des
négociations?
M. EHRLICH: II y a beaucoup de choix sur ces questions et c'est une
question à laquelle il est assez difficile de répondre. Si j'ai
choisi 15 p.c, c'est pour encourager les agences de recouvrement à tout
simplement prendre les cas les plus importants où elles peuvent gagner
le plus et non pas les encourager à prendre les petites dettes et
téléphoner sans cesse, car elles peuvent gagner jusqu'à 20
p.c. ou 25 p.c. Je pense que cela serait plus efficace pour les agences,
surtout pour les consommateurs et les petits commerçants, car cela les
encouragera à régler les dettes avec leurs clients d'une
manière plus personnelle et ne pas introduire une agence dans cette
question.
M. SAMSON: Merci beaucoup.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député d'Argenteuil.
M. SAINDON: Merci, M. le Président, M. Ehrlich, après
avoir lu votre mémoire, je retiens qu'il semble que vous donnez tout le
risque, alentour d'une transaction quelconque, au créancier. Vous avez
peut-être dans l'esprit le principe que, si le créancier accepte
certains profits, il doit en même temps accepter certaines pertes
possibles. C'est un principe. Mais on sait que souvent un consommateur s'engage
vis-à-vis d'un créancier à la légère, se
disant: Si je peux, je rembourserai; si je ne peux pas, bien, que le bon Dieu
le bénisse. Le créancier peut accepter cette transaction, d'autre
part, sans connaître l'état d'esprit du débiteur, sans
connaître tous les éléments qui peuvent entourer la
transaction.
Je me demande pourquoi, dans ces conditions, il faudrait donner tous les
risques au créancier. Si le débiteur reçoit un service, je
crois qu'il doit être tenu, non seulement de payer pour le service rendu,
mais, s'il y a perte, il devrait être tenu de payer au moins une partie
des pertes. A ce moment, si on veut continuer le même raisonnement, on se
dit: S'il y a des déboursés nécessaires pour rembourser le
créancier, chose certaine, le débiteur devrait au moins
être tenu de payer une partie des sommes d'argent nécessaires pour
payer le percepteur ou l'agence de perception.
Je me demande sur quel principe vous vous basez pour dire: Tous les
déboursés ou les pertes, s'il y a perte, doivent être
absorbés par le créancier. Je me demande pourquoi. Si le
débiteur reçoit un service, il devrait, au moins, être
tenu, s'il y a perte, d'en payer une partie parce qu'à ce moment je
crois que c'est un "one way ticket". Alors, sur quoi vous basez-vous?
M. EHRLICH: C'est une question très très pratique. Si le
débiteur a beaucoup de difficultés à payer la dette,
comment voulez-vous qu'il paie aussi un tarif?
M. SAINDON: S'il n'est pas capable de rembourser son créancier,
c'est sûr qu'il y a perte. C'est le créancier qui perd. Mais
lorsqu'une agence de recouvrement perçoit un compte, à ce moment,
très souvent d'ailleurs, si les agences de perception n'étaient
pas capables de recouvrer les sommes d'argent de leurs clients, il est
sûr que les agences de perception n'existeraient pas. Ceci veut dire que
ces agences recouvrent au moins un très fort pourcentage des comptes
qu'ils ont à recouvrer.
Alors, le débiteur a été capable d'honorer sa
dette. S'il a été capable, petit à petit, d'honorer sa
dette, il a reçu un service pour lequel il devrait au moins payer, et
non pas le faire absorber par le créancier.
M. EHRLICH: Oui, je veux seulement répéter ce que j'ai dit
avant. Cela devient une question très très pratique. Si ce client
n'est pas tellement capable de payer sa dette, et même s'il va un jour
réussir à payer sa dette, avec beaucoup de difficulté, il
ne semble pas très pratique de mettre une autre dette dans un compte car
ce serait presque impossible de faire le recouvrement de toutes ses dettes.
C'est simplement mettre un homme dans plus de dettes qu'il en a
déjà.
M. SAINDON: Je suis d'accord là-dessus. C'est une question de
principe. Il y a des cas où c'est impossible de recouvrer une dette. Il
y a énormément de cas où c'est possible. Dans les cas
où c'est possible, cela devient une question de principe.
Est-ce que les pertes subies doivent être unilatéralement
acceptées ou être la responsabilité du créancier?
C'est ce que je me demande.
M. EHRLICH: Je peux répéter encore une fois. C'est ce que
j'ai écrit à la page 7. Il faut insister pour que le
créancier fasse preuve de prudence et évalue le risque avec
justesse et non pas sur les méthodes de recouvrement.
M. SAINDON: Non, ce n'est pas cela le principe. Le principe, c'est que
vous le mettez dans votre mémoire il ne doit pas exiger de
frais de récupération, il ne doit pas essayer de réclamer
d'intérêt.
Alors, il y a une perte réelle qui est subie par le
créancier pour un service rendu à un débiteur quelconque
et les pertes sont unilatérales parce que c'est le créancier qui
les absorbe.
Alors je trouve, moi, qu'il y a là quelque chose. Il y a
là un déséquilibre.
M. EHRLICH: Oui. Je suis d'accord avec vous que c'est une question
très très sérieuse mais, si on prend des positions
très pratiques, combien est-ce qu'on peut recouvrer, il me semble que
c'est un choix qu'on a fait.
M. SAINDON: Ce n'est pas la question de savoir combien on peut
recouvrer, c'est la question de ne pas mettre dans votre mémoire, de ne
pas recommander, par exemple, que des intérêts ne puissent pas
être réclamés, que les frais de recouvrement ne puissent
pas être réclamés.
A mon idée, cela ne devrait pas être là-dedans. Je
vous demande donc pour quelle raison vous les mettez.
M. EHRLICH: Je répète que c'est parce que je pense que
c'est une question pratique. Si le débiteur a beaucoup de
difficultés à payer sa dette, il serait presque impossible de
recouvrer tous les autres frais.
M. SAINDON: Vous parlez de question pratique et moi, je parle de
principe.
M. EHRLICH: Mais le principe j'insiste c'est que le
créancier fasse preuve de prudence.
M. SAINDON: D'accord. On n'est pas d'accord mais cela ne fait rien.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Charlesbourg.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, je serai très
bref dans mes commentaires. J'ai lu avec intérêt, moi aussi, votre
mémoire et je vous en félicite. Le fait, je pense bien, d'avoir
oeuvré dans le domaine vous a permis de coucher sur papier des
recommandations que je considère très réalistes.
Cependant, si on se réfère à la première
recommandation que vous faites, je pense qu'il est déjà
prévu, à l'intérieur de la loi, qu'il y aura
nécessairement, dans les exigences ou les prérequis des agents de
recouvrement, l'obligation de déposer en fiducie. Alors le
dépôt d'argent en fiducie n'implique pas nécessairement de
créer un organigramme où on devrait voir automatiquement un
adjoint au directeur; je pense que cela va de soi. A l'intérieur de
différents mécanismes où il y a une direction
générale, il y a nécessairement un adjoint.
Je pense plutôt que, dans votre pensée, vous voulez
insister pour que ce soit une personne connaissant le droit,
c'est-à-dire un avocat de préférence. C'est
peut-être cela. Sinon, vous pouvez peut-être me le dire mais je
crois que dans votre pensée...
M. EHRLICH: Pas nécessairement un avocat mais quelqu'un qui
s'intéresse aux problèmes des consommateurs et pas simplement aux
intérêts des agences de recouvrement ou de la profession.
Quelqu'un qui, dans son travail quotidien, va mettre l'accent, sur les
consommateurs.
M. HARVEY (Charlesbourg): Leur profession, à l'intérieur
du chapeau du code des professions, les avocats, maintenant, sont assu- jettis
à un code d'éthique où le consommateur, en premier, doit
être la raison d'être de leur profession.
De toute façon, je passe outre à cette remarque et je vais
tout de suite à la 7e recommandation que vous faites: En ce qui concerne
les créances des consommateurs, les tarifs applicables au recouvrement
de ces créances devraient être réduits à un maximum
de 15 p.c. de la créance.
Evidemment, il y a plusieurs écoles de pensée
là-dessus. On en a discuté déjà. Hier, cependant,
la chambre de commerce ne s'est pas tellement prononcée
là-dessus, si ce n'est qu'elle était accompagnée de
plusieurs représentants de fédérations, d'associations de
recouvrement.
A cet égard, le ministre avait suggéré, pour le
moins d'une façon informelle, une proposition quant à un
pourcentage qui serait un pourcentage maximal parce qu'il y a tout de
même la liberté de choix dans le cas d'un marchand, par exemple,
vis-à-vis des agences de recouvrement. Je pense que c'est beaucoup plus
sur la qualité du service et sur l'éventail du service qui est
offert et aussi sur la rentabilité. Je pense que c'est très
difficile, d'une façon discriminatoire, d'établir que le
pourcentage devrait être de X parce que, même les avocats, à
l'intérieur de leur bureau de pratique, ont quand même un taux de
base qu'on appelle... Ils ont également une échelle croissante ou
décroissante selon le montant d'argent à recouvrer ou encore ils
ont cette même échelle de valeurs d'évaluation qui
s'établit aussi sur la longueur du délai à rembourser
comparativement au délai le plus court à rembourser. Je pense que
c'est difficile d'arriver comme cela et d'avoir un pourcentage, que ce soit 15
p.c, 20 p.c. ou 25 p.c. Ce n'est pas tellement là-dessus qu'on s'en
prend puisqu'on sait que c'est très marginal, ce qu'en
général les compagnies de recouvrement ont comme compte à
percevoir. Si c'est très marginal, les montants sont minimes et je pense
que 25 p.c. ou 30 p.c. sur $10 récupérés par une agence
avec tout le système qu'on leur implique, cela ne m'apparaft pas
extravagant. En revanche, peut-être que 15 p.c. sur un montant de $1,000,
cela m'apparaft extravagant. C'est très difficile. C'est pourquoi je
vous demande de quelle façon prévoyez-vous le système
idéal. Dans le cas d'un pourcentage, est-ce que vous opteriez vous aussi
pour un maximum?
M. EHRLICH: Je suis d'accord avec vous qu'il y a beaucoup de
problèmes quand on essaie d'établir des tarifs, mais il faut
souligner qu'il y a beaucoup d'autres courtiers qui ont maintenant des tarifs
bien établis. Alors, ce ne serait pas quelque chose de vraiment nouveau.
Il me semble que les tarifs qu'on utilise maintenant encouragent beaucoup de
ces pratiques, car c'est très lucratif de 20 p.c. à 25 p.c.
Alors, pour moi, ce serait idéal de mettre un maximum peut-être de
15 p.c. à 20 p.c, mais jamais plus de 20 p.c. Il me semble que c'est
quelque
chose à négocier et à établir vraiment,
quels sont les coûts dans chaque industrie. C'est la façon qu'on
peut établir des tarifs.
M. HARVEY (Charlesbourg): Sur les recommandations 2 et 3, 2 d'abord. Les
agents de recouvrement devraient suivre un cours de gestion de crédit.
Je pense que là-dessus, je suis à 100 p.c. d'accord
puisqu'à chacun des mémoires présentés depuis le
début, la plupart des représentants des divers partis et du parti
ministériel se sont dits favorables à une éducation qui
serait amplifiée même en commençant par l'enseignement, au
niveau des écoles, sur une formation ou une éducation en
matière d'emprunt ou de crédit.
La troisième recommandation, c'est un ensemble qui traite de la
nécessité de poster régulièrement au
débiteur et au créancier un relevé de compte. Cela
relève précisément de la réglementation. Autant le
député de Rouyn-Noranda avait des réserves quant au fait
de procéder par téléphone, autant moi, j'ai des
réserves aussi quant à cet échange ou ce remplacement
uniquement par le service d'avis par écrit. De toute façon, Mr
Ehrlich, I would like to thank you very much for your personal effort in regard
of your study and recommendation concerning bill 26. Thank you.
M. LEGER: Le député de Gravelbourg.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Dorion.
M. LEGER: Un vrai bilingue, parfait. Le bill 22 avance.
M. HARVEY (Charlesbourg): You are right. M. BOSSE: J'ai noté
que... UNE VOIX: Plus fort.
M. BOSSE: Je m'excuse, c'est à cause de ma timidité, M. le
Président. Sur la question qu'avait soulevée le
député de Lafontaine en ce qui a trait aux appels
téléphoniques faits soit à la maison ou au travail, je
pense qu'entre deux maux vous avez voulu choisir le moindre parce que les deux
m'apparaissent des moyens d'intimidation. Je pense qu'au départ nous
allons reconnaître que lorsqu'une dette est rendue entre les mains d'un
agent de recouvrement, c'est que les créanciers ont tout
essayé.
On en est rendu à la limite à ce moment-là. Lorsque
vous recommandez qu'il n'y ait pas d'appels de faits au travail, vous voulez
sans doute protéger le travailleur contre le fait que son employeur peut
exercer sur lui certaines pressions ou, enfin, laisser l'impression à
l'employeur que cet employé est un mauvais débiteur, ou risque de
lui faire perdre son emploi, ou de lui nuire dans son emploi; est-ce que
c'était le sens de votre recommandation?
M. EHRLICH: Oui, certainement. Une autre chose que je peux ajouter,
c'est simplement une question d'efficacité. Une personne ne peut pas
travailler et recevoir beaucoup d'appels téléphoniques, surtout
quand elle travaille dans une usine.
M. BOSSE: Cela peut diminuer son rendement...
M. EHRLICH: C'est ça.
M. BOSSE: ... s'il est avisé qu'il a à payer un certain
montant. Je pense que vous allez convenir avec moi que vos recommandations et
la loi vont nuire énormément au "shylock"; ça va
l'embêter un peu, si je ne fais pas erreur.
M. EHRLICH: Oui, c'est ça.
M. BOSSE: D'autre part, à la page 3, à l'article 7, you
have noticed a maximum of 15 p.c. Je reconnais que c'est là un
pourcentage souvent faussé par les agences, certaines agences de
recouvrement. Ici, je ne généraliserai pas parce que certaines
agences ont quand même une réputation, même si le type de
travail qu'elles font n'est sûrement pas le plus agréable dans la
société. Ces 15 p.c, ou que ce soit 25 p.c, chez les
débiteurs qui sont souvent ignorants, craintifs ou peureux, plus
particulièrement ignorants de la loi... je pense que
généralement pour utiliser le téléphone ou les
contacts personnels, les agences de recouvrement utilisent des gens qui sont,
à la fois très habiles, très intelligents et très
astucieux. C'est-à-dire que la forme d'intimidation qui peut être
exercée, je n'irai pas jusqu'à dire qu'il n'y a que de
l'intimidation, il arrive qu'il y en ait, mais à votre connaissance,
lorsque vous avez été employé à vos travaux,
n'avez-vous pas constaté qu'il y avait aussi des frais cachés, en
plus, exigés du débiteur?
M. EHRLICH: Non, je n'ai pas remarqué ces choses.
M. BOSSE: En plus des 15 p.c. ou des 25 p.c?
M. EHRLICH: Le débiteur ne paie pas pour ces frais, en
général. La compagnie ou le magasin qui donne un compte à
l'agence de recouvrement, si l'agence peut régler le compte, le magasin
ou la compagnie va payer à l'agence de recouvrement un certain
tarif.
M. BOSSE: Selon votre expérience et vos recherches, il n'y a pas
ce type de frais cachés qui est additionné pour des frais de
contacts ou des démarches ou des lettres envoyées, etc?
M. EHRLICH: J'ai dit dans toutes mes recommandations, d'ajouter que le
relevé de compte serait sans frais. Cela veut dire que le
débiteur peut demander en tout temps, sans frais, par écrit, un
relevé de son compte et l'agence de recouvrement est tenue de lui faire
parvenir, sans frais.
M. BOSSE: Dans vos recommandations, vous l'indiquez...
M. EHRLICH: ... sans frais cachés.
M. BOSSE: Dans la loi, il n'en est pas question, je parle de certaines
expériences vécues, je ne généralise pas cependant,
où on peut être appelé à abuser de l'ignorance de
certains consommateurs. Ici, c'est du consommateur mal pris, vraiment, dont je
parle.
Vous avez soulevé, à juste titre, un problème qui,
au fond, enlèverait beaucoup de valeur à cette loi de
recouvrement, le problème social qui, à l'origine, est beaucoup
plus un problème d'endettement où les créanciers
eux-mêmes ne sont pas plus prudents qu'il ne le faut sur la valeur, la
capacité monétaire des acheteurs ou des utilisateurs de
services.
Parce que je crois comme le disait tout à l'heure mon
confrère, le docteur Saindon ces choses se produisant, qu'ils ont
eu à utiliser énormément les agences de recouvrement,
avant la loi que nous avons présentement.
Vous avez soulevé le problème, mais je pense que c'est
à juste titre. J'ai des félicitations à vous faire sur le
genre de recherches que vous avez faites, pour lesquelles vous avez
été, je crois, un boursier du ministre. Je vous remercie, ce sont
les quelques remarques que j'avais à faire.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Saint-Jean.
M. VEILLEUX: M. le Président, je tiens d'abord à dire
à M. Ehrlich qu'il s'est prévalu d'un droit individuel, qui est
reconnu effectivement par la loi 22, de déposer un mémoire en
anglais et qu'il a même le droit de s'exprimer en anglais devant une
commission parlementaire. Je dois dire, au bénéfice de M.
Ehrlich, que le Parti québécois dans sa politique, lorsqu'il a,
avec grand déploiement, mis à la face du grand public sa
politique linguistique, reconnaissait lui aussi aux anglophones ce même
droit individuel qu'a reconnu la loi 22.
M. HARVEY (Charlesbourg): Très bien.
M. VEILLEUX: D'ailleurs, j'ai la très nette impression que ces
gens du Parti québécois vont se faire rappeler à
l'ordre...
M. LEGER: Comme le député de Saint-Jean...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!
M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. VEILLEUX: M. le Président...
M. LEGER: Est-ce que le député de Saint-Jean pourrait
parler du sujet qui nous préoccupe...
M. VEILLEUX: ... que le député de Lafontaine mentionne en
vertu de quel article du règlement.
M. LEGER: ... et ne pas parler du Parti québécois
puisqu'il est en train de questionner un distingué invité qui
vient nous donner le fruit de son expérience? Moi, je n'ai fait que
parler d'un projet que j'avais devant moi, qui était en deux langues. Le
projet est anglais en premier et français en deuxième, c'est tout
ce que j'ai dit. Je parlais du projet; alors, le député de
Saint-Jean doit se limiter au projet et ne pas parler d'autre chose.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): En effet, tantôt, le
député de Lafontaine, pour ne pas priver le député
de Saint-Jean de son droit de parole, a souligné le bilinguisme, mais
comme il a cité de même le bill 22, ayant ouvert la porte, je suis
mal placé pour empêcher le député de Saint-Jean de
faire aussi ses commentaires au sujet du bilinguisme sur le sujet qui nous
intéresse présentement.
M. VEILLEUX: Le mémoire.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Sur le mémoire.
M. VEILLEUX: M. le Président, j'ai voulu faire cette mise au
point tout simplement pour mettre bien à l'aise ceux qui viendront
devant la commission parlementaire afin qu'ils ne se laissent pas intimider par
un député d'un parti politique membre de cette commission
parlementaire.
Je sais fort bien que le député de Lafontaine est un grand
connaisseur en intimidation. D'ailleurs, tout à l'heure, une question
que je vous poserai concrétisera exactement les propos que je viens de
tenir.
A la page 11, à 26 k), vous dites que l'agent de recouvrement ne
peut pas téléphoner au débiteur consommateur à son
lieu de travail, et vous avez donné comme raison principale qu'on ne
doit pas préoccuper un travailleur par des questions personnelles,
compte tenu qu'il travaille, etc. Est-ce qu'à votre connaissance, dans
le mois où vous avez travaillé pour une agence de recouvrement,
des débiteurs vous ont mentionné de ne pas leur
téléphoner parce qu'éventuellement, s'ils étaient
trop dérangés à leur travail, ils pourtaient être
mis à pied?
M. EHRLICH: Oui, je suis d'accord. Je pense que cela arrive très
souvent. Aussi, il est très
difficile pour quelqu'un qui travaille dans une usine de venir parler au
téléphone cinq ou dix minutes; c'est très difficile pour
quelqu'un dans une usine. C'est aussi assez difficile pour quelqu'un dans un
bureau.
M. VEILLEUX: J'appuierais votre recommandation, sachant que certains
employeurs n'acceptent pas que leurs employés reçoivent des
appels téléphoniques parce que cela retarde le travail, surtout
si c'est un travail à la chaîne. Si un agent de recouvrement
téléphonait trop souvent, non seulement il ne pourrait pas
récupérer l'argent, mais il ferait en plus perdre son emploi
à l'employé ou débiteur.
Maintenant, ceux, d'après vous et je reviens pour
concrétiser le point que je mentionnais tout à l'heure, M. le
Président qui donnaient à l'agence de recouvrement pour
laquelle vous travailliez leurs comptes à percevoir, en pourcentage,
environ, est-ce que c'étaient de gros commerçants ou de petits
commerçants?
M. EHRLICH: Selon ce que j'ai remarqué, cela vient des plus
grandes compagnies canadiennes.
M. VEILLEUX: Des grandes compagnies. M. EHRLICH: Des plus grandes.
M. VEILLEUX: Les petits commerçants ne font pas appel à
cela, d'après vous?
M. EHRLICH: Selon ce que j'ai remarqué, c'étaient toujours
les plus grandes sociétés.
M. VEILLEUX: Est-ce qu'il y a des professionnels qui font,
d'après vous, appel à ces choses?
M. EHRLICH: Je vais mettre le mot "professionnel" entre guillemets.
Quelqu'un qui fait ce travail quotidiennement devient professionnel.
M. VEILLEUX: Non, ce n'est pas cela que je veux dire. Est-ce que, par
exemple, des avocats, des dentistes, des ingénieurs y font appel?
M. EHRLICH: Ce n'est pas ce que j'ai remarqué. En
général, c'était les plus grandes maisons ou
compagnies.
M. VEILLEUX: Vous savez fort bien, qu'à un certain moment il y en
a qui se sont spécialisés pour percevoir de l'argent pour des
églises, pour des fabriques. Ils faisaient signer des billets et ils
recevaient un pourcentage sur la signature du montant que la personne indiquait
sur son billet, mais, en fait la personne ne donnait que la moitié de la
somme qu'elle avait promis de donner. Est-ce qu'il y a des fabriques qui ont
fait appel à vous pour recouvrer des sommes qui n'avaient pas
été perçues, parce que ces gens avaient signé des
billets sous pression, exactement comme certaines agences de recouvrement
peuvent le faire vis-à-vis des gens pour percevoir de l'argent? Est-ce
que, d'après vous, il y en a des fabriques qui faisaient appel à
vous? Non, d'accord.
M. LEGER: Est-ce que le député de Saint-Jean voulait faire
allusion aux bâtisses que les investissements Seigle vendaient ou
louaient au gouvernement?
M. VEILLEUX: M. le Président, je voulais tout simplement...
M. LEGER: C'est de cela que le député de Saint-Jean
voulait parler?
M. VEILLEUX: ... mentionner au député de Lafontaine
lui connaît cela la pression pour faire signer des billets aux
gens pour qu'ils donnent de l'argent aux fabriques. Comme les gens ne donnaient
pas beaucoup d'argent aux fabriques, je voulais savoir si les fabriques
pourraient...
M. LEGER: J'ai l'impression que le député de Saint-Jean
n'est pas tellement au courant du sujet dont on parle actuellement. Il est
toujours à côté de la "track" et il essaie de piquer tout
simplement. Il ne parle jamais du sujet. Il est toujours en train d'essayer de
trouver des choses en dehors du sujet dont on parle.
M. VEILLEUX: Je pense que le député de Lafontaine, en
parlant des investissements Seigle, était beaucoup plus en dehors de la
"track" que le député de Saint-Jean.
M. LEGER: Vous pouvez parlez, vous vous calez davantage.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît !
Le député de Saint-Jean a posé une question
à notre visiteur qui n'est pas obligé de répondre à
cette question.
M. VEILLEUX: II a répondu; il a dit non, M. le
Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): II a dit non, c'est très bien.
Est-ce que vous avez d'autres questions, M. le député de
Saint-Jean?
M. VEILLEUX: Non, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau.
M. BONNIER: M. le Président, simplement une question. Je voudrais
savoir, d'après l'expérience de notre invité, s'il croit
que cela aurait pour effet de bonifier le système si on exigeait que les
agents de recouvrement achètent les
créances et qu'ils ne soient pas simplement les
intermédiaires? Est-ce que cela n'aurait pas comme effet, d'abord, qu'on
aurait des gens beaucoup plus sérieux? Deuxièmement, la question
des tarifs serait réglée jusqu'à un certain point.
Troisièmement, cela empêcherait peut-être certaines
pressions indues sur des petits débiteurs ou des débiteurs de
petites créances.
M. EHRLICH: Je suis contre la première suggestion, qu'on
encourage ces courtiers à acheter ces papiers de dettes. Je pense que
c'est suffisant qu'ils travaillent comme courtiers. Il faut essayer de
régler leur pratique en ayant une bureaucratie au gouvernement qui
puisse la régler, mais je ne suis pas d'accord...
M. BONNIER: Je m'excuse, mais le courtier en question serait
obligé d'acheter. Si moi, en tant que commerçant, par exemple, je
vous engage pour récupérer certaines de mes créances,
à ce moment, vous seriez obligé d'acheter mes créances.
Alors, ce ne sont plus mes problèmes.
M. EHRLICH: Cela devient une question de "factoring".
M. BONNIER: Pardon?
M. EHRLICH: II me semble que cela devient une question de "factoring",
qui a été traitée ce matin.
M. BONNIER: Non, pas dans le même sens. "Factoring",
c'était par rapport à un manufacturier et à des
commerçants. Ce n'est pas du tout cela dont je parle.
M. EHRLICH: Oui.
M. BONNIER: Je parle pour le commerce au détail.
M. EHRLICH: Cela devient comme une banque ou une quasi-banque?
M. BONNIER: Non, ce n'est pas une banque, c'est simplement une exigence
pour que ce commerce se fasse d'une meilleure façon, c'est tout.
M. EHRLICH: C'est la meilleure façon que je peux répondre
à ces questions, je ne suis pas expert dans le monde financer. Alors
c'est une question assez globale, et c'est très difficile d'y
répondre.
M. TETLEY: Ce n'est pas dans votre expérience.
M. EHRLICH: Non.
M. BONNIER: D'accord.
M. TETLEY: Vous étiez un percepteur et non pas un exécutif
de...
M. EHRLICH: En principe, je suis contre votre suggestion, même si
je ne suis pas expert dans ce domaine.
M. BONNIER: Merci.
M. TETLEY: I would like to thank Mr. Ehrlich for having come here and I
would, if you allow me, Mr. Chairman make une mise au point. I want to, because
it is very rare that a minister has somebody actually come to testify whom he
has already employed. I would like to say, first of all, that you came to me;
secondly, you came after you had returned to school; thirdly, originally you
were to advise me alone and I fixed your fee before I saw your document. And it
was my idea that you come here, that was not your intention, which was just to
advise me. It was my idea that you should come and testify. Fourthly, I might
say that it could be a dangerous, general practice for a minister to have
witnesses come such as this. Although, in your case, I thought it was useful
because you have experience that I do not have, that no one on the list of
witnesses had and no one volunteered to give in the first place. Fifthly I note
that I did not change one word of your brief and I repeat again that this was
an experience not to be considered as a general rule for the future. Lastly, I
do not necessarily adopt in any way your report. You presented it and I
appreciated particularily, Mr. Ehrlich, that you did come.
Au nom de tous les députés ici présents,
ministériels et de l'Opposition, je vous remercie de votre
présence et de votre mémoire.
National Apparel Bureau (Quebec) Ltd
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, M. Ehrlich. J'inviterais
maintenant les représentants de National Apparel Bureau.
M. GLISERMAN: M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, permettez-moi de vous présenter ce petit
comité, auparavant. A ma gauche, il y a M. le bâtonnier Sydney
Lazarovitz, avocat, qui agissait pour le bureau depuis longtemps à
Québec; à ma droite, mon associé, Me Cutler; et M. Levee,
président de National Apparel Bureau. Je suis M. Gliserman, avocat de
Montréal.
Maintenant, au lieu de lire le mémoire, je vais faire assez
brièvement un résumé de ce mémoire et attirer votre
attention sur les points saillants dans le mémoire. J'ai l'impression
que le but principal de cette loi, c'est la protection du consommateur. Comme
représentants de...
M. TETLEY: D'abord que le commerce peut procéder d'une
manière efficace.
M. GLISERMAN: Oui, je comprends. Je veux souligner simplement que, comme
représentants des manufacturiers, nous nous occupons des
règlements des créances entre manufacturiers et
détaillants. Nous ne nous occupons pas de règlements de
créances directement avec les consommateurs.
Mais, nous voulons expliquer notre position pour la raison que le projet
de loi n'est pas si clair. Nous voulons recommander à cette commission
que nous soyons exclus en vertu de la section II du projet de loi.
Le National Apparel Bureau est une association industrielle. En anglais,
ce genre d'association est connu par les mots "Trade Association". Le bureau
est une association à but non lucratif dont les membres
représentent les manufacturiers de l'industrie du vêtement dans le
Québec et tout le Canada. Le bureau désire recommander, par le
truchement de ce mémoire, que ce genre d'association soit
spécifiquement exclu de l'application du projet de loi 26 et que
l'association industrielle soit ajoutée à la liste de personnes
et organisations exclues en vertu de l'article 2, en raison de circonstances
particulières touchant au fonctionnement de ce genre d'association
industrielle, tel qu'indiqué dans le mémoire.
Nous représentons aujourd'hui à peu près 600
membres, des manufacturiers dans cette industrie qui, aussi, représente
des billions de dollars en volume de ventes réalisées chaque
année par tout le Canada.
L'association industrielle, surtout le bureau, a été
fondée et existe depuis longtemps pour le bénéfice de
certaines industries. On les trouve parmi l'industrie du bois, par exemple,
l'industrie de la chaussure, l'industrie des vêtements, ainsi de suite.
Le bureau est un bon exemple d'une telle association. Le bureau est, en effet,
la même association industrielle qui existe au Québec depuis 41
ans, ayant été incorporé en 1933 en vertu de la
troisième partie de la Loi des compagnies de Québec, sous le nom,
au début, de National Associated Women's Wear Bureau. Cette association
a récemment changé son nom afin de se conformer au nombre
croissant de ses membres qui représentent les manufacturiers dans
l'industrie du vêtement pour hommes, femmes et enfants.
Le sociétariat du bureau, ainsi que le conseil d'administration,
est composé strictement des manufacturiers dans l'industrie du
vêtement et le bureau retient les services d'un personnel essentiel pour
s'acquitter des tâches de l'association, tout en tenant compte de ses
objectifs.
En ce qui concerne les activités générales du
bureau en tant qu'association industrielle, j'ai mentionné ces
activités aux pages 2 et 3 de notre mémoire. En résumant,
c'est pour coordonner et unifier les fonctions de l'industrie ayant trait aux
affaires et à la gestion des activités de crédit;
établir des politiques d'affaires équitables; établir un
système standard et uniforme de recherche et de renseignements de
crédit, lequel serait en même temps juste et équitable et
conforme aux exigences particulières de l'industrie du vêtement;
s'occuper des problèmes touchant les manufacturiers dans leurs relations
avec l'industrie au détail; faire des représentations aux
institutions gouvernementales, comme aujourd'hui, et surtout agir en tant que
liaison accréditée et représentant des membres de cette
industrie dans ses rapports avec le détaillant, y compris les
problèmes financiers, de façon à éviter des
délais, des formalités, des difficultés et des
dépenses pour résoudre des problèmes qui, s'ils ne sont
pas résolus entre les parties intéressées, pourraient
avoir des répercussions sur toute l'industrie en
général.
Le mémoire, en particulier, touche les activités du bureau
concernant le règlement de comptes et problèmes financiers,
surtout des détaillants. En plus des activités
générales du bureau, mais en faisant partie intégrante,
s'ajoute la représentation et les activités du bureau en relation
avec les difficultés financières des détaillants:
insolvabilité, faillite, propositions et règlements de
créances.
L'important est que cela soit fait, non pas par des parties
étrangères qui ne seraient pas suffisamment au courant des
problèmes de notre industrie, mais par une organisation à but non
lucratif telle que le bureau, dont les membres sont directement engagés
dans l'industrie et dont les objectifs sont dans l'intérêt de
l'industrie tout entière.
Le bureau, en particulier, a su réaliser, par exemple, des
milliers de règlements à titre non officiel et recouvrer sans
frais aux membres et sans frais aux détaillants des comptes qui,
autrement, seraient tombés entre les mains des agences de recouvrement
ou avocats qui, ne comprenant pas certaines difficultés toutes
particulières à l'industrie et aux ramifications de
procédures hâtives ou rigoureuses, auraient pu causer des
problèmes très graves à l'industrie en
général. Parce qu'une procédure, par exemple, fort
rigoureuse, fort active, peut avoir ce qu'on appelle en anglais un effet
"domino", on touche un petit bloc et tous les autres tombent.
Le bureau, naturellement n'a aucune intention de remplacer les avocats
ou les agences de recouvrement, mais au nom de l'industrie, il faut prendre en
considération la marge de profit très restreinte des
manufacturiers dans l'industrie du vêtement.
Pour ces raisons, avec l'appui enthousiaste non seulement de nos membres
qui sont les manufacturiers, mais également des détaillants qui
apprécient la compréhension d'une association industrielle, le
bureau a au cours des années, tout en maintenant pour ses membres
des dossiers de crédit sur les détaillants qui leur fournissent
des millions de dollars de marchandise offert ses services, sans frais
additionnels, pour le recouvrement de comptes en souffrance.
Ceci permet deux choses: premièrement, au
manufacturier d'éviter, à moins d'une
nécessité absolue, des frais d'une agence de recouvrement comme
telle ou des honoraires d'avocats pour recouvrement, frais que les
manufacturiers moyens ne peuvent se permettre, dans la plupart des cas, en
raison d'une marge de profit étroite; et deuxièmement, au
détaillant de traiter avec une association versée dans ce genre
d'industrie et grâce à laquelle il peut régler son compte
d'affaires de façon raisonnable, selon les circonstances, sans frais, ni
coût additionnels et sans publicité défavorable.
Jusqu'à ce jour, le système en question a
été, bien entendu, employé avec succès non
seulement au profit des manufacturiers et détaillants, mais
inévitablement au profit du consommateur.
Notre exposé a été donné afin de
démontrer la nature spéciale et particulière de cet aspect
d'activité de notre association industrielle.
Tout, comme un manufacturier recouvre ou règle ses propres
comptes avec le détaillant, sans les frais qu'impliquerait une agence de
recouvrement étrangère, ou, tout comme une caisse
d'épargne et de crédit agit pour ses membres, le bureau, lui
aussi, est en mesure d'agir et agit, sans but lucratif, pour ses propres
membres et, d'autre part, peut agir comme une force pour l'unité et la
standardisation qui est essentielle pour la survie proprement dite de cette
industrie.
De plus, tout manufacturier qui devient membre de notre association
consent à se conformer aux politiques établies au cours des
années et résolues par le conseil d'administration, lequel est
lui-même formé de représentants des membres dûment
élus.
La procédure employée par le bureau en ce qui concerne ce
qu'on appelle le recouvrement ou le règlement des créances, c'est
simplement d'envoyer des lettres, par exemple, au détaillant en
expliquant qu'il faut ou que le détaillant règle un certain
compte ou que le détaillant donne les explications au bureau pour que
celui-ci, à son tour, puisse expliquer les circonstances
spéciales aux membres du bureau.
Parce que vous savez, messieurs, que souvent c'est très difficile
pour un détaillant qui se trouve dans une situation financière
difficile de communiquer avec une cinquantaine ou une centaine de fournisseurs
et d'expliquer proprement sa situation. Mais, avec l'intervention du bureau, il
trouve une organisation avec laquelle il peut communiquer. Le bureau
représente des membres qui doivent se conformer aux suggestions du
bureau; par ce moyen, un détaillant peut facilement régler ses
comptes et éviter des procédures beaucoup plus rigoureuses comme
des requêtes en faillite, ainsi de suite.
Je veux souligner surtout que les fonctions de recouvrement du bureau
n'ont pas simplement pour but de recouvrer des créances à titre
particulier, comme une agence de recouvrement ordinaire, mais sont plutôt
une partie essentielle des fonctions intégrales du bureau. Tout travail
de recouvrement est fait essentiellement aux fins suivantes: a)se maintenir au
courant, au nom de l'industrie et des fournisseurs en général, de
la capacité financière des détaillants de jour en jour;
b)éviter la nécessité de devoir remettre des comptes
à des agences de recouvrement étrangères à
l'industrie et d'encourir ainsi des frais de recouvrement qu'on ne peut se
permettre en raison de la marge de profit très restreinte dans
l'industrie; c)conclure des règlements à titre non officiel
lorsque les dossiers de crédit et de recouvrement indiquent qu'un
détaillant connaît des difficultés financières afin
de : i) éviter des problèmes plus graves tels qu'une faillite;
ii) faire des recommandations au besoin, c'est-à-dire, par exemple,
propositions à titre non officiel, etc. en tenant compte de tous les
créanciers du détaillant; iii) prendre les mesures
nécessaires, sous contrôle spécial, pour que la marchandise
continue à être fournie, par exemple à un
détaillant.
Il me semble qu'il est très important, pour ce qui est de
l'industrie tout entière, que le bureau maintienne son image et sa
position en tant que représentant de l'industrie et en tant que liaison
entre le manufacturier et le détaillant, et non pas en tant qu'agence de
recouvrement pour le recouvrement de comptes donnés.
La nature du travail du National Apparel Bureau est analogue à
celle des caisses d'épargne et de crédit, des compagnies de
fiducie ou même à celle des banques, sous certains rapports, et
ces organisations sont spécifiquement exclues en vertu de l'article 2 du
projet de loi.
Pour conclure, messieurs les députés, nous recommandons
que l'organisation reconnue comme une association industrielle, qui agit pour
certaines industries, composée de membres d'une industrie telle que la
nôtre, soit insérée, en vertu de l'article 2 du projet de
loi, en tant qu'exclue au même titre que les autres organisations
mentionnées en vertu de l'article 2.
Maintenant, j'ai essayé de vous faire un bref
résumé du mémoire et nous sommes prêts à
répondre à vos questions.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, M. Gliserman. L'honorable
député de Charlesbourg prendra la parole immédiatement, le
ministre lui ayant cédé son droit de parole.
M. LEGER: C'est l'adjoint.
M. HARVEY (Charlesbourg): II faudrait amener une
élasticité. Nous avons, M. Gliserman, beaucoup
apprécié l'éclairage que vous avez apporté à
cette commission parlementaire puisque, ce matin, nous avions, d'une
façon identique, je crois, la société centrale de
"factoring" qui, pour les mêmes raisons, je
pense, évoquait une exclusion à l'application de cette loi
puisqu'elle-même, je crois, fait affaires beaucoup plus avec ses membres
et ne se réfère jamais directement au consommateur ou à
celui qui est le créancier acheteur. Comme le projet de loi no 26 vise
particulièrement le public en général, je crois que cet
éclairage qui a été apporté par vous-même et,
en silence, par ceux qui supportent ce que vous avez avancé, nous incite
tout de suite à vous dire qu'il n'y a aucune espèce
d'hésitation, pour autant que nous sommes concernés, à
considérer d'une façon très positive votre suggestion et,
compte tenu aussi du but non lucratif qui anime votre corporation et du service
qui ne vise pas le consommateur comme tel, je crois qu'à l'article 2 du
présent projet de loi, il ne se présente aucune espèce
d'objection. Nous sommes favorables à y apporter la correction
nécessaire.
Je réitère cependant qu'il serait opportun pour le
ministère d'inventorier pour voir s'il n'existerait pas d'autres
organismes similaires au vôtre qui, peut-être par occupation, ont
laissé passer ou ont laissé échapper ce présent
projet de loi ou cette présente commission parlementaire, même si
cela a paru dans la Gazette officielle. Il reste que l'inventaire que nous
aurons à faire dans ce sens, sans vous forcer à déposer
votre charte, puisqu'il y a une référence très certaine
que nous pouvons faire en vertu de la déclaration écrite que vous
faites concernant la date ou les références de cette compagnie
sans but lucratif, je pense qu'il serait aussi bon pour nous que nous puissions
penser à l'appliquer à d'autres compagnies similaires. Nous
sommes heureux de vous avoir reçus. Nous nous excusons du délai
qui a été causé par l'audition d'autres mémoires
et, aux gens de Montréal, nous souhaitons un bon voyage de retour.
M. GLISERMAN: Merci.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de...
M. LAZAROVITZ: ...la fin et, comme fin, c'est très bien, c'est
avec plaisir que nous avons attendu.
M. HARVEY (Charlesbourg): Merci, M. Lazarovitz.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, je voulais simplement, au
départ, demander ce que cela veut dire "Apparel", National Apparel
Bureau.
M. GLISERMAN: Apparel veut dire vêtement.
M. LEGER: Vêtement. Est-ce que vous avez envisagé d'avoir
bientôt la version française du nom de votre association?
M. GLISERMAN: Oui. Franchement, je pense que c'est fort possible que le
National Apparel Bureau ait un nom français. Je n'ai pas encore
incorporé cette compagnie et on va déterminer si, vraiment, il
existe un nom français. Sinon, je vous assure que la compagnie va porter
le nom français aussi bien que l'anglais.
M. LEGER: Parfait. D'ailleurs, je pense que c'est une des
préoccupations du ministre de voir à franciser toutes les...
M. TETLEY: Un instant.
M. HARVEY (Charlesbourg): ... qui est accordé...
M. LEGER: Ce n'est pas la préoccupation du ministre?
M. TETLEY: J'ai cédé la parole au député de
Charlesbourg, pas au député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, voici la question que je voulais poser
à notre invité. Est-ce que je comprends bien la façon dont
vous fonctionnez? En me fiant à la page 4 de votre mémoire, vers
la fin, avant l'alinéa a), où vous dites "offert ses services
sans frais additionnels, pour le recouvrement des comptes en souffrance",
est-ce que ça veut dire, en gros, que l'association s'occupe d'envoyer
une facturation au détaillant provenant des comptes que certains ou
plusieurs manufacturiers ont, soit en souffrance ou en fonctionnement normal,
et que vous les percevez pour eux? Je prends l'exemple d'un détaillant
qui achète de trois ou quatre manufacturiers et reçoit une
facture de vous, vous vous occupez de remettre aux manufacturiers les sommes
qui leur reviennent?
M. GLISERMAN: Pas du tout. Ce que nous recevons au bureau, c'est plus
souvent une lettre du manufacturier qui dit simplement qu'un certain
détaillant, M. X, ou magasin X a un compte en souffrance. Avant que le
manufacturier donne ce compte à un avocat ou à une agence de
recouvrement, le manufacturier suggère simplement que le bureau
écrive à ce détaillant en demandant un règlement de
ce compte, ou les raisons particulières pour lesquelles le
détaillant ne peut ou ne pouvait pas payer ce compte.
Cela donne deux choses. Au bureau et au manufacturier, un certain
contrôle avant qu'un établissement commence des procédures
trop rigoureuses contre un détaillant qui peut impliquer d'autres
fournisseurs dans la même industrie; et aussi, ça donne l'occasion
au bureau d'avoir des raisons ou des explications de ce détaillant pour
que le bureau puisse expliquer, si nécessaire, à tous les
fournisseurs de ce détaillant, les raisons pour lesquelles ce
détaillant ne pouvait pas payer ses comptes. Si
nécessaire, après, le bureau donne certaines suggestions
à ce détaillant pour régler le compte, peut-être que
ce sera nécessaire de faire une proposition non officielle ou autre
sorte de règlement. Parfois, le bureau reçoit des paiements ou
des chèques d'un détaillant que le bureau envoie
immédiatement au membre ou, plus souvent, le détaillant, s'il
veut régler son compte dans ce temps, il envoie directement au membre ou
au manufacturier un chèque en paiement de ce compte. Alors, le membre ou
le manufacturier dit au bureau: M. X a payé son compte, et c'est inscrit
au dossier.
M. LEGER: Autrement dit, vous êtes un peu le conciliateur entre
les deux?
M. GLISERMAN: C'est ça, exactement.
M. LEGER: A première vue, je suis d'accord sur ce que vous dites
parce que je pense que vous avez quand même l'expérience voulue
dans ce domaine, connaissant autant les préoccupations ou les
problèmes des manufacturiers comme ceux des détaillants, vous
êtes mieux placé pour faire ce geste, ce rôle de
conciliateur ou même d'agent de recouvrement pour eux. Est-ce que vous
avez des objections majeures, ou quels sont les obstacles que vous voyez, si,
comme on l'a dit hier et ce matin, vous étiez exclu du permis
nécessaire à l'agent de recouvrement? Quelles objections
auriez-vous d'être soumis à la loi comme les autres, étant
donné que vous rejoignez les petits détaillants, puisque vous
avez les bonnes méthodes pour recueillir, qu'est-ce qui vous
empêche ou quels obstacles auriez-vous à ne pas être comme
les autres, soumis à une loi normale de recouvrement ?
M. GLISERMAN: Si nous sommes exclus après la sollicitation d'un
permis, ça va nous éviter d'établir un département
séparé, incluant des dépenses pour un tel
département de recouvrement.
Quant à l'autre aspect que vous avez mentionné, il y a
surtout un point sur lequel je désire attirer votre attention. Une des
raisons principales pour laquelle nous sommes entrés dans ce domaine de
recouvrement ou de règlement des créances, c'est pour nous mettre
au courant de jour en jour de la capacité financière d'un
détaillant et de faire un reportage à l'industrie en
général, à tous les fournisseurs.
Nous voulons éviter que certains détaillants
n'achètent trop de marchandises, par exemple, ou reçoivent trop
de crédit, ce qui mettrait en danger leur position financière,
avec des conséquences pour plusieurs fournisseurs dans notre
industrie.
Dans le projet de loi, par exemple, en vertu de la section 26 e) comme
une des pratiques interdites, il y a la pratique de laisser croire qu'à
défaut de paiement je ne parle pas des poursuites judiciaires,
parce que nous ne som- mes pas intéressés par des poursuites
judiciaires ce fait sera publié pour l'information de
commerçants ou du public en général, par exemple.
Maintenant, les activités du bureau sont dirigées vers le
reportage aux fournisseurs en général, à l'industrie du
vêtement. La question de recouvrement ou de règlement de
créances, c'est simplement une partie intégrante de cette
activité en général. Nous voulons informer l'industrie
qu'un certain détaillant a une capacité financière
d'acheter la marchandise ou d'acquitter ses dettes, qu'il est en défaut
ou qu'il n'est pas en défaut, ainsi de suite.
Cela va nous affecter beaucoup, évidemment, si on est sujet, par
exemple, à cette pratique que la loi décrit comme une pratique
interdite.
M. LEGER: Je vous remercie, cela me renseigne.
M. LAZAROVITZ: Je veux dire un mot. L'association est reconnue plus
comme un agent conciliateur que comme un agent de recouvrement. Pourquoi est-ce
important? N'importe quel marchand, à un moment donné, a un
problème avec un certain manufacturier qui ne peut pas payer ses
comptes. En allant à l'association, il explique son cas. Il y a une note
qui est envoyée dans leur bulletin et les ordres sont donnés de
ne pas poursuivre, de ne rien faire contre cette personne, de transmettre la
réclamation à l'association. Avec cela, le marchand peut vivre,
une note de paiement se fait et la personne, au lieu de faire faillite ou de
recevoir dix ou quinze actions, a simplement affaire à une personne. Ce
qui est très important, c'est que cela ne coûte rien à
personne.
M. HARVEY (Charlesbourg): Une simple petite question
supplémentaire. Est-ce que les frais encourus pour votre bureau sont
payés par les membres?
M. LAZAROVITZ: Les membres paient chaque année un
"membership".
M, HARVEY (Charlesbourg): Les manufacturiers.
M. LAZAROVITZ: Le coût varie suivant les productions. Une personne
qui va produire pour $500,000 paie un montant; celui de $1 million...
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est un service.
M. LAZAROVITZ: Oui, un service. Mais ce qui est important, c'est que
cela ne coûte rien au marchand, ni au manufacturier, avec le
résultat, je le sais... J'ai déjà fait beaucoup de
faillites et, avant que le bureau entre dans le portrait, c'était
terrible, les fraudes, etc.
A ce stade-ci, même dans les faillites, tout
est contrôlé par l'association. S'il y a une proposition,
au lieu de courir tous et chacun des créanciers, le marchand va voir
l'association et, là, l'association prend une ligne de conduite
après avoir étudié le problème. Le problème
est de "sauver" de l'argent à leurs membres.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Maintenant, le ministre va prendre la
parole. Je ne sais pas s'il parlera au nom du député de
Rouyn-Noranda. Je tiens à le souligner, c'est peut-être un
précédent, mais, au moment de son absence, le
député de Rouyn-Noranda m'a informé qu'il cédait
son droit de parole au ministre.
M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, c'est une question de
règlement. Le député de Rouyn-Noranda, je pensais que vous
alliez dire qu'il vous avait donné son accord, mais il me l'a
donné avant de partir. Je pense qu'en son nom j'ai le droit de le dire,
il est d'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Comme le député de
Rouyn-Noranda avait cédé son droit de parole au ministre,
laissons le ministre s'exprimer.
M. LEGER: Je me pose une question, M. le ministre. C'est que,
devant...
M. HARVEY (Charlesbourg): Coalition.
M. LEGER: ... cette défense du projet de National Apparel Bureau,
même avant qu'il soit présenté, je me demande ce qu'il a de
tellement intéressant, ce projet, pour que vous le défendiez
même avant qu'il soit présenté et même en son
absence?
M. HARVEY (Charlesbourg): C'est une évidence même.
M. TETLEY: M. le Président, c'est vrai que le
député de Rouyn-Noranda devait s'absenter mais, avant de partir,
il m'a cédé son droit de parole. Il a noté que, dans les
grandes lignes, il approuve votre rapport. Pour ma part aussi j'approuve votre
suggestion, dans les grandes lignes, sans faire de promesses.
Thank you very much for coming Mr Gliser-man, Mr Cutler and Mr
"Bâtonnier" Lazarovitz and Mr Levee in the background. I do not know how
you translate "bâtonnier" in English, Mr Lazarovitz...
M. LAZAROVITZ: It is not supposed to be translated, I believe.
M. TETLEY: ... but I appreciate that you were here.
Je trouve vos recommandations intéressantes et importantes.
Encore au nom des députés ministériels ainsi que des
députés de l'Opposition, je vous remercie de votre indulgence
parce que vous étiez les derniers reçus.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, messieurs. La commission ajourne
ses travaux sine die.
M. TETLEY: Au sujet de cette loi-ci, c'est terminé.
M. HARVEY (Charlesbourg): Sine die.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Sine die, alors cela prendra une nouvelle
convocation.
M. HARVEY (Charlesbourg): Un ordre de la Chambre.
(Fin de la séance à 17 h 25)